Passer au contenu
;

SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 055 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 29 octobre 2012

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bonjour à tous.
    Il s'agit de la 55e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale du lundi 29 octobre 2012. Cet après-midi, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada.
    Dans notre premier groupe de témoins, nous allons entendre, représentant le gouvernement du Yukon et par vidéoconférence, de Whitehorse, M. Thomas Ullyett, sous-ministre adjoint des Services juridiques.
    Bienvenue. Vous nous entendez bien?
    Oui, monsieur le président, nous vous entendons très bien.
    Merci.
    Nous avons aussi le plaisir d'accueillir aujourd'hui, dans la salle, représentant l'Association professionnelle de la police montée du Canada, M. Patrick Mehain, président, et M. Rob Creasser, relationniste de presse, de la section de la Colombie-Britannique de l'Association.
    Je suis prêt pour les déclarations préliminaires des deux groupes.
    Pour commencer, pourquoi ne pas nous rendre à Whitehorse et demander à M. Ullyett de présenter sa déclaration préliminaire?
    Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité.
    Nous sommes fiers d'être parmi vous. Nous le sommes particulièrement parce que notre député, Ryan Leef, est un membre du comité.
    Cet après-midi, je parle au nom de Mike Nixon, ministre de la Justice et procureur général du Yukon. Le ministre Nixon m'a demandé de dire ce qui suit.
    Je vais commencer par deux précisions.
    Premièrement, nos commentaires, aujourd'hui, sont de nature plutôt générale. Il ne s'agit pas de commentaires techniques sur le projet de loi modificatif en tant que tel, le projet de loi C-42. Nous n'avons pas vraiment de problème précis concernant les dispositions modificatrices qui figurent dans le projet de loi C-42.
    Deuxièmement, nous n'avons pas nécessairement beaucoup de choses à dire, mais, si vous le voulez bien, monsieur le président, je vais présenter une brève déclaration préliminaire.
    Le gouvernement du Yukon appuie de tout cœur les modifications qui figurent dans le projet de loi C-42. Nous y sommes favorables en grande partie parce que nous partageons, au Yukon, les préoccupations entendues partout au pays au sujet de la GRC.
    Il y a deux ans, en décembre 2010, nous avons réalisé notre propre évaluation des services de police et produit un rapport, intitulé Terrain d'entente. Bon nombre des constatations qui figurent dans ce rapport et des recommandations qui y sont formulées rejoignent les modifications du projet de loi C-42, alors nous appuyons fortement les efforts déployés par le Parlement à cet égard.
    Monsieur le président, je m'arrête pour vous demander quel est le temps dont je dispose pour présenter ma déclaration préliminaire.
    En général, nous prévoyons environ 10 minutes. Actuellement, vous êtes rendu à deux minutes et demie.
    Si vous voulez arrêter avant, il n'y a pas de problème. Sinon, au bout de 10 minutes, je vais probablement vous demander de conclure.
    Les membres du comité aimeraient bien vous poser des questions, d'ailleurs, après votre déclaration.
    Dans ce cas-là, monsieur le président, je vais poursuivre.
     Comme beaucoup d'autres endroits du pays, le Yukon a conclu un nouvel accord sur les services de police. Comme vous le savez, la durée de vie de l'accord est de 20 ans. Ces changements arrivent à un très bon moment. En fait, durant la négociation des nouveaux accords que nous avons conclus, le gouvernement du Yukon et d'autres partenaires contractuels ont mentionné le besoin d'apporter une bonne partie des réformes qui figurent dans le projet de loi C-42, y compris le système de plaintes du public contre la GRC et le système disciplinaire interne de la Gendarmerie. Assurément, en ce qui a trait aux discussions que nous avons eues avec nos homologues de Sécurité publique Canada, nous nous attendions à une modification du régime législatif de la GRC. C'est ce que nous avions cru comprendre. Nous sommes donc heureux de voir que c'est bel et bien le cas. Nous connaissons aussi le travail du Conseil de mise en œuvre de la réforme et les recommandations qu'il a formulées à ce sujet.
    Nous reconnaissons bien sûr qu'il est difficile, pour une organisation et encore davantage pour une organisation policière, de se renouveler et d'aller de l'avant au XXIe siècle en s'appuyant sur une législation archaïque. C'est une autre raison pour laquelle nous appuyons les changements. Comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, monsieur le président, le Yukon a réalisé d'importantes consultations publiques en 2010 sur les services de police dans le cadre d'une évaluation à ce sujet. L'évaluation des services de police a été mise sur pied à la suite du décès sous garde, en 2008, de Raymond Silverfox, dans la cellule d'un service de police. L'événement a poussé la GRC, le gouvernement du Yukon et le Conseil des Premières nations du Yukon à travailler en collaboration pour réaliser une importante évaluation des services de police, qui s'est conclue par la production d'un rapport intitulé Terrain d'entente, il y a deux ans.
    Dans le cadre de l'évaluation, des membres du public nous ont parlé du système de discipline interne et du fait qu'ils considéraient qu'il s'agissait d'un système mystérieux et très opaque, système qu'ils qualifiaient en général d'éloigné et d'inaccessible. C'est ce que nous ont dit les Yukonnais au sujet du processus de plainte. En outre, le système ne semblait pas tenir compte des caractéristiques culturelles et des réalités liées à la prestation de services de police dans une région éloignée du nord du Canada.
    Monsieur le président, bon nombre des 33 recommandations qui figurent dans le rapport Terrain d'entente sont liées directement aux modifications prévues dans le projet de loi C-42, comme celles liées au système de discipline interne et au régime de plaintes du public. Comme je l'ai mentionné, nous sommes favorables aux modifications parce que les Yukonnais nous ont demandé ces changements, et nous savons qu'ils relèvent de la compétence fédérale. Nous espérons évidemment que la nouvelle Commission civile d'examen et de traitement des plaintes permettra de combler ce qui est considéré actuellement comme des lacunes du système de gestion des plaintes et des plaignants.
    Au Yukon, nous avons pris des arrangements avec l'Alberta pour établir un régime d'enquêtes liées aux incidents graves qui impliquent des membres de la GRC, qui mise sur la Serious Incident Response Team de l'Alberta — ASIRT, c'est son nom. Il est évident que le projet de loi C-42 va dans le même sens, car il prévoit la tenue d'enquêtes indépendantes en cas d'incidents graves et transforme la politique en loi.
(1540)
     En conclusion, monsieur le président, nous espérons que l'application de ces modifications législatives renforcera notre lien contractuel avec la GRC, et que les pratiques concrètes sur le terrain seront le reflet des très bonnes intentions définies dans le projet de loi C-42.
    Voilà qui conclut ma déclaration préliminaire. Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Ullyett.
    Nous allons passer à nos prochains invités, M. Mehain et M. Creasser, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité d'avoir reconnu le besoin d'entendre les points de vue des membres subalternes sur le projet de loi C-42.
    Je m'appelle Rob Creasser, et je suis le porte-parole national de l'Association professionnelle de la police montée du Canada. J'ai servi dans la GRC pendant 28 ans et je suis maintenant à la retraite. Je suis accompagné du caporal Patrick Mehain, qui est un membre actuel de la GRC à Coquitlam, en Colombie-Britannique, et qui a 15 ans d'ancienneté.
    L'un des principaux problèmes actuels au sein de la GRC, c'est les énormes déséquilibres de pouvoir au sein de l'organisation. Le projet de loi C-42, plutôt que d'atténuer ces problèmes, les accentue de façon exponentielle.
    Lorsqu'on a demandé au sergent d'état-major Abe Townsend si les représentants des relations fonctionnelles avaient été consultés durant l'ébauche du projet de loi C-42 , il a déclaré que de telles consultations n'avaient pas encore eu lieu. Cependant, lorsqu'il a témoigné devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale du Sénat, à Ottawa, le 21 juin 2012, le commissaire a déclaré que le Programme des RRF était essentiel au sein de la GRC.
    Cette contradiction ne nous surprend pas, parce que c'est ainsi que fonctionne le processus de consultation au sein de la GRC. La direction procède à des consultations uniquement lorsqu'elle veut transmettre ses directives aux membres subalternes. Et pendant ce temps-là, les représentants des relations fonctionnelles continuent d'espérer la tenue de consultations en bonne et due forme. Pour l'instant, les membres de la Gendarmerie continuent d'être victimes d'intimidation et de harcèlement et d'essuyer des retards non fondés dans le cadre des processus de règlement de griefs.
    Même si nous sommes préoccupés par de nombreuses dispositions du projet de loi, nous nous en tiendrons aux quatre rubriques principales suivantes: les violations de la Charte, l'indépendance de la GRC de toute ingérence politique, les pouvoirs extrêmes accordés au commissaire et les enjeux touchant les femmes et le harcèlement. Nous allons aussi vous mentionner trois mesures simples qui permettraient de régler les principaux problèmes de harcèlement et d'intimidation au sein de la GRC tout en responsabilisant davantage celle-ci.
    En ce qui a trait aux violations de la Charte, touchant les déclarations obligatoires et les paragraphes 40(1) et 40(2) proposés, l'exigence selon laquelle un membre doit produire une déclaration même s'il s'incrimine par le fait même est contraire aux droits prévus dans la Charte et doit être retirée.
    Les mandats ex parte liés au processus disciplinaire aux termes du paragraphe 40.2(1) proposé constituent, eux aussi, une violation des droits des membres prévus dans la Charte relativement aux fouilles et aux saisies abusives. C'est surprenant, parce que dans son témoignage, le commissaire Paulson a dit que les agents de police ont joué un rôle crucial dans le cadre de l'ébauche du projet de loi. Cependant, de très évidentes violations de la Charte, que les membres de la GRC ne peuvent pas commettre dans le cadre d'enquêtes criminelles, deviennent, pour je ne sais quelle raison, acceptables lorsqu'il s'agit des agents de police, qui sont aussi des citoyens.
    En ce qui a trait à l'indépendance de toute ingérence politique, la nomination du commissaire et des sous-commissaires à titre amovible dans le paragraphe 5(3) proposé fait en sorte que la fonction de commissaire s'expose à des problèmes d'ingérence politique en matière d'application de la loi. Le commissaire et les sous-commissaires de la GRC devraient être nommés à titre amovible par un comité parlementaire bipartisan indépendant et avoir des comptes à lui rendre afin de s'assurer qu'elle ne devient pas l'instrument de visées politiques.
     Le surintendant principal Craig MacMillan a mentionné divers problèmes au sein de la GRC dans sa thèse de doctorat A Modern Star Chamber: An Analysis of Ordered Statements int the Royal Canadian Mounted Police. Cependant, il a fait totalement fi de sa recherche sur la culture de la GRC lorsqu'il a participé à la rédaction du projet de loi C-42.
     Cela met en lumière un autre problème important que le projet de loi C-42 ne règle pas: le fait que le système de promotion actuel a été utilisé très efficacement pour réduire au silence les membres mécontents en leur promettant, dans un premier temps, des promotions, puis, si cela ne fonctionne pas, en les menaçant sur le plan professionnel en leur refusant des occasions professionnelles et de l'avancement.
    En ce qui a trait à la sécurité nationale, les paragraphes 31(1.3) et 31(1.4) proposés permettent au ministre de la Sécurité publique de demander à la GRC d'intervenir sous prétexte d'assurer la sécurité nationale, sans avoir à lui fournir de preuve d'une menace. On a obligé la GRC à enfreindre certaines lois canadiennes sur l'utilisation de renseignements obtenus sous la torture. En tant qu'agents de police, nous jurons non seulement de protéger la vie et la propriété, mais aussi de traduire en justice ceux qui violent nos lois.
(1545)
    Le terrorisme est certes une préoccupation, mais nous pouvons apprendre de l'expérience de nos compatriotes transatlantiques du Royaume-Uni, qui ont créé un comité sur la sécurité nationale qui inclut des membres de tous les partis politiques du Parlement. Un tel comité inclurait aussi les chefs de la GRC, du SCRS, de l'ASFC et du CSTC ainsi que des juges spéciaux qui entendraient la preuve du gouvernement et rendraient une décision finale. De cette façon, on fait participer les intervenants responsables de la sécurité nationale et ceux qui ont fait le serment de faire appliquer les décisions canadiennes et internationales en matière de droit.
    En ce qui a trait aux pouvoirs accordés au commissaire, nous vous renvoyons aux alinéas 20.2(1)c), 20.2(1)e), 20.2(1)g), 20.2(1)i) et 20.2(1)k) et aux paragraphes 20.2(3) et 20.2(4) proposés. Le commissaire de la GRC a toujours eu le pouvoir de congédier des membres qui n'ont pas tenu leur promesse de faire respecter la loi. Nous reconnaissons qu'il faut rationaliser ce processus, mais le projet de loi C-42 accorde beaucoup trop de pouvoirs à la fonction de commissaire. La GRC a déjà eu des problèmes parce que des commissaires ont abusé de ce pouvoir.
    Nous sommes aussi préoccupés par le fait que les membres doivent consulter le médecin désigné par la direction.
    En ce qui a trait au fait de congédier des gens pour des raisons économiques, la Gendarmerie dépense des dizaines de milliers de dollars pour recruter, former et équiper les membres, puis elle les congédie, ce qui revient, en fait, à jeter à la poubelle l'argent dépensé et l'expérience que les membres ont acquise dans le cadre d'enquêtes. Quand la situation s'améliorera, il faudra encore dépenser l'argent des contribuables pour reprendre le processus. Cette disposition fait aussi en sorte que l'emploi des membres peut devenir un autre outil de harcèlement et d'intimidation pour les gestionnaires.
    Le pouvoir du commissaire de la GRC, aux termes du paragraphe 20.2(4) proposé, de déléguer le pouvoir de congédiement à des subalternes est aussi problématique. La GRC est principalement composée de petits lieux de travail — des détachements —, ce qui fait en sorte que des membres de très bas niveau pourraient prendre des décisions ayant un impact sur l'ensemble de la Gendarmerie, malgré le manque criant de formation.
    Enfin, en ce qui a trait aux enjeux touchant les femmes et au harcèlement, le paragraphe 31(1.2) interdit de déposer des griefs concernant le droit à l'équité salariale. La discrimination liée au sexe et le harcèlement sont deux des plus gros problèmes au sein de la GRC. Cette disposition du projet de loi permet en fait de légitimiser le traitement inégal des femmes et des membres de minorités visibles au sein de la GRC.
    Aux termes du projet de loi C-42, il n'y a aucune disposition de protection des dénonciateurs au sein de la Gendarmerie. Le projet de loi interdit expressément à un membre de parler en public des enjeux touchant la Gendarmerie et définit les sanctions auxquelles un membre récalcitrant s'expose.
    Si le projet de loi C-42 est adopté tel quel, y compris les violations de la Charte et les moyens qui permettent aux gestionnaires de continuer à abuser de leurs pouvoirs, plutôt que de corriger les problèmes qui ont miné la GRC, notre Parlement fait la promotion de comportements répréhensibles et du copinage en légitimisant ce type de comportement.
    Dans sa thèse de doctorat, le surintendant principal MacMillan a déclaré ce qui suit:
Une des constatations de la recherche, c'est que le type de représentation des employés au sein de la GRC, qui a été créée, payée et gérée par la direction, contribue à la vulnérabilité réelle ou perçue des membres. Les employés d’autres corps de police bénéficient d'une certaine protection grâce à leur appartenance à une association d'employés. Ce n'est pas le cas au sein de la GRC. Les membres n'ont tout simplement pas le soutien nécessaire, moral ou financier, pour contester les mesures inappropriées de la direction. Le fait de refuser aux membres le choix du type de représentation dont ils bénéficient mine les nouvelles philosophies d'habilitation et de gestion autoproclamées par la GRC.
    Si le Parlement veut vraiment tâcher de régler les problèmes qui minent actuellement la GRC, il peut prendre trois mesures à la fois simples et efficaces.
(1550)
    La première mesure consiste à créer un processus de négociation collective pour gérer les relations patronales-syndicales au sein de la GRC.
    La deuxième mesure consiste à créer un processus d'arbitrage indépendant exécutoire pour régler les griefs que la direction et les employés n'arrivent pas à régler. Il faut s'assurer que l'arbitre est indépendant du gouvernement, du Conseil du Trésor, de la direction de la GRC et des représentants syndicaux de la Gendarmerie. Au sein du service de police de Vancouver, par exemple, les griefs se règlent, en moyenne, en un maximum de 28 jours. Le processus de la GRC est beaucoup plus long; certains griefs ont déjà duré plus de sept ans.
    Enfin, la troisième mesure consiste à adopter une loi qui abroge l'article 96 de la Loi sur la GRC, ce qui permettrait aux membres de pouvoir organiser un vote libre et réellement démocratique pour élire des représentants syndicaux indépendants à leurs frais.
    Les membres subalternes de la GRC sont fiers d'être au service des citoyens du pays à tous les niveaux, du municipal à l'international. Nous demandons simplement d'être traités avec la même dignité et d'avoir les mêmes droits que tous les autres citoyens canadiens.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Creasser.
    Nous allons passer à M. Leef pour la première série de questions. Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins en présence.
    Bonjour, monsieur Ullyett et monsieur Ford, à Whitehorse.
    Monsieur Ullyett, j'ai entre les mains le sommaire du rapport Terrain d'entente auquel vous avez fait référence dans votre déclaration préliminaire. Je vais en lire rapidement un extrait pour mettre certains éléments en contexte.
    On peut lire ce qui suit sur la première page du sommaire:

Nous sommes au courant de nombreux cas d’excellence policière, comme par exemple le fait que des dizaines de membres de la GRC excèdent les attentes de leur poste. La présente Évaluation vise à améliorer la qualité des services de police pour tous les citoyens du Territoire.
    Un peu plus loin, on formule la recommandation suivante:

l’établissement d’un Conseil des services de police du Yukon qui aura pour mandat de veiller à ce que les politiques et les pratiques des services policiers territoriaux tiennent compte des besoins et des valeurs de la collectivité…
    On précise ensuite la composition de ce genre de conseil. A-t-on la volonté et tente-t-on actuellement au Yukon de créer un conseil des services de police distinct, ou le gouvernement actuel est-il satisfait des processus actuellement en place?
    Merci de poser la question, monsieur Leef.
    À la suite de la recommandation dans le rapport Terrain d'entente concernant la création d'un conseil des services de police, le gouvernement a entrepris de créer un tel conseil indépendant. Le conseil s'est réuni à quelques reprises. Il a procédé à certaines consultations publiques, dans le but de formuler des recommandations à l'intention du ministre de la Justice. Le ministre Mike Nixon vient de recevoir ces recommandations ou est sur le point de les recevoir.
    Je dois dire, monsieur Leef, que j'ai participé à une des séances publiques du Conseil des services de police, au début du mois de septembre, au centre culturel de la Première nation des Kwanlin Dün, à Whitehorse, et j'ai été agréablement surpris par le nombre de groupes et de particuliers qui se sont présentés pour se faire entendre.
    Est-ce que ça répond à votre question?
    Oui, absolument.
    À partir de maintenant, dans le cadre de ces réunions, les gens seront-ils informés des recommandations et des modifications du projet de loi C-42, à part par le truchement de mes efforts dans le territoire?
    Très certainement, et grâce à un certain nombre de mécanismes, principalement le site Web du ministère de la Justice du Yukon, qui compte un certain nombre de pages à ce sujet. Il y a aussi un site Web du Conseil des services de police du Yukon qui y est entièrement consacré. Il y a aussi de la publicité générale, traditionnelle et sur les médias sociaux.
(1555)
    J'ai mentionné à plusieurs reprises durant les travaux du comité que, souvent, dans ce genre de réunions, on s'intéresse aux besoins des membres de la collectivité, ou, du moins, le sujet principal de la conversation n'est pas toujours les membres de première ligne de la GRC.
    Dans ces consultations, avez-vous entendu parler des membres de première ligne de la GRC? Et, en particulier, durant l'évaluation des services de police, des intervenants de première ligne qui assurent la prestation de services de police dans les collectivités du Yukon ont-ils pris la parole? Dans l'affirmative, qu'avaient-ils à dire?
    Durant l'évaluation des services de police, l'un des trois coprésidents était le commandant de la division M, Peter Clark. Dans le cadre de l'évaluation, on a reçu un très grand nombre de commentaires du grand public, mais cela n'a empêché d'aucune façon les membres de première ligne, comme vous les appelez, de la GRC, de participer. Ils ont eu l'occasion de formuler des commentaires, et ils l'ont fait.
    Je ne vois pas pourquoi ça changerait.
    Parfait. Merci beaucoup.
    Monsieur Creasser — ai-je bien prononcé votre nom, monsieur?
    Oui, monsieur.
    Merci.
    Dans votre déclaration, vous avez mentionné les violations de la Charte. Nous pouvons peut-être revenir rapidement sur cet aspect. Dites-vous qu'il y a un article de la loi qui exige des membres qu'ils présentent des déclarations en cas de violation du Code criminel par des membres et que cet article aurait préséance sur les droits fondamentaux prévus dans la Charte des droits et libertés?
    Je crois que c'est à l'article 7.
    Le surintendant principal MacMillan a souligné, dans sa thèse, au sujet des déclarations obligatoires, que, même dans des situations touchant le code de déontologie qui ne sont pas liées directement à une quelconque violation du Code criminel, on peut utiliser ces déclarations dans le cadre de procédures civiles ou d'autres types de procédures subséquentes. Ça nous préoccupe beaucoup.
    Nous comprenons que nous devons être tenus responsables de nos gestes. Dans sa thèse, le surintendant principal MacMillan a examiné d'autres services de police et a constaté que, en toute honnêteté, ces types de déclarations n'étaient pas nécessaires et qu'il était possible d'enquêter efficacement sur le comportement des membres sans exiger de déclaration obligatoire.
    D'accord.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Il vous reste environ 30 secondes.
    Merci.
    Vous aviez abordé cette question, et je voulais des précisions. Je me disais que la Charte continue de s'appliquer même lorsqu'il est question du Code criminel, et je crois que vous avez apporté des précisions concernant la question de savoir si ces articles de la Charte des droits et libertés s'appliqueraient dans les faits.
    Vous avez vraiment mis l'accent sur les aspects que vous trouvez négatifs. Avez-vous trouvé certains aspects positifs au projet de loi?
    Absolument.
    Je crois qu'il faut voir le personnel de première ligne de la GRC comme des intervenants dans le cadre du processus. Il est selon moi alarmant que 24 000 personnes seront clairement touchées par ce projet de loi, mais qui n'ont pas été consultées avant. C'est un document d'environ 120 pages. J'aurais aimé participer dès le départ.
    Merci. Il faut s'arrêter ici.
    Nous allons passer à M. Garrison, s'il vous plaît. Vous avez sept minutes.
    Merci aux deux témoins en présence aujourd'hui.
    Je vais commencer en posant une question rapide à M. Ullyett concernant les services de police au Yukon.
    Y a-t-il des membres de la GRC qui appliquent la loi au Yukon qui ne sont pas visés par le contrat? En d'autres mots, y a-t-il chez vous des agents de la GRC qui s'acquittent de responsabilités fédérales en matière d'application de la loi qui ne sont pas visés par le contrat?
    Oui, monsieur Garrison, c'est évidemment le cas. La grande majorité des agents de police chez nous sont visés par l'entente sur les services de police, mais ce n'est pas toujours le cas.
    Vous avez mentionné votre arrangement avec l'Alberta concernant des enquêtes civiles en cas d'incidents de recours à la force. S'applique-t-il uniquement aux membres sous contrat, ou vise-t-il tous les incidents qui se produisent au Yukon?
    Donnez-moi un instant, monsieur, je veux m'assurer de vous donner une réponse exacte.
    Nous croyons que l'entente avec l'Alberta concerne tous les incidents graves.
(1600)
    C'est-à-dire qu'elle concerne les agents sous contrat et les agents fédéraux?
    C'est ce que nous en comprenons.
    Une des questions que nous avons posées à d'autres témoins qui travaillent à l'échelle nationale consistait à savoir si cela créait des problèmes avec les services de police fédéraux à l'échelle du pays, mais ce n'était pas vraiment une question que je peux vous poser. Merci pour ces précisions.
    J'aimerais maintenant parler à nos autres témoins et leur dire que nous apprécions beaucoup leur présence. Nous n'avons pas souvent eu l'occasion de parler à des membres subalternes de la GRC. Je sais que ça ne doit pas toujours être facile de venir témoigner devant un comité parlementaire, que vous soyez à la retraite ou actifs, alors je vous remercie de tout coeur.
    Selon moi, votre déclaration était très claire. Certaines des choses dont vous avez parlé, en fait, échappent à la portée du projet de loi, malheureusement. Les questions liées aux négociations collectives et à l'annulation de l'article 96, nous en avons convenu au sein du comité, je crois, échappent à la portée du projet de loi, et ce, pour diverses raisons.
    Pour notre part, nous tentons de trouver des façons d'améliorer le projet de loi. Une des préoccupations mentionnées par d'autres intervenants concerne la rationalisation du processus disciplinaire et la question de savoir s'il y aura suffisamment de temps pour régler les conflits et pour que les membres puissent interjeter appel.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet de ce processus rationalisé?
    Selon nous, le problème concernant le projet de loi C-42, c'est que la rationalisation mine l'application régulière de la loi à laquelle tous les membres devraient avoir droit en ce qui a trait à la tenue d'une audience équitable, etc.
    Selon nous, le commissaire et ses représentants peuvent prendre des décisions en fonction du fait qu'un agent a présenté une déclaration ou non. Ils peuvent prendre une décision qui aura un impact sur la carrière de quelqu'un, congédier quelqu'un ou faire ce qu'ils veulent. Par conséquent, il faut témoigner ou, au bout du compte, risquer de perdre son emploi.
    Un des problèmes du système de grief, c'est que, en tant que membre de la GRC, on peut déposer des griefs contre absolument tout. Si je n'aime pas quoi que ce soit, je peux déposer un grief. Je peux le faire pour absolument tout.
    Nous reconnaissons qu'il faut accélérer le processus et qu'il faut définir ce qui peut ou non faire l'objet de griefs. Notre problème, comme vous l'avez dit, échappe à la portée du projet de loi. Il y a trop de choses laissées en suspens ou qui ne sont pas précisées dans notre convention collective pour que nous puissions comprendre. En tant que membre, je peux penser que j'ai le droit de faire telle ou telle chose, et la direction peut voir les choses autrement.
    Un des problèmes que nous avons depuis longtemps, c'est que nous sommes censés relever du Conseil du Trésor. Cependant, il y a des exceptions dans chaque partie de la Loi sur la GRC qui permettent au commandant ou à l'officier responsable de modifier cette décision simplement parce que cela facilite les choses au sein de son secteur d'activité ou en améliore l'efficacité, même si nous sommes supposés être régis par le Conseil du Trésor. Selon nous, le libellé actuel du projet de loi donne beaucoup trop de pouvoirs au commissaire. Comme Rob l'a déclaré plus tôt, le commissaire a toujours eu le pouvoir de congédier des gens. Ça n'a jamais causé de problème.
    Selon vous, serait-ce une amélioration importante si les recommandations du Comité externe d'examen, touchant les mesures disciplinaires qui peuvent mener à un congédiement ou avoir un autre impact important sur la carrière d'un membre, liaient le commissaire?
    Nous tentons toujours d'obtenir un règlement indépendant et exécutoire. On entend trop souvent le commissaire ou des hauts dirigeants ou encore quiconque qui rend ce genre de décisions dire qu'ils apprécient une recommandation qui lui ont été formulée, mais qu'ils ne sont pas nécessairement d'accord. Si elle doit être exécutoire? Absolument. Si elle est exécutoire, juste et indépendante... Notre crainte, c'est qu'il s'agisse d'une recommandation exécutoire formulée par un groupe d'agents ou de personnes qui sont associés d'une façon ou d'une autre à la situation en cause. C'est notre crainte.
    Mais seriez-vous plus heureux si c'était une recommandation du Comité externe d'examen?
    Absolument.
    D'accord.
    Vous avez déjà parlé de l'autre sujet dont je voulais vous entretenir concernant les pouvoirs du commissaire. Vous avez aussi soulevé la question des violations de la Charte. Selon vous, ces deux éléments sont-ils liés? En d'autres mots, croyez-vous que le projet de loi donne trop de pouvoirs au commissaire, de sorte qu'il puisse ordonner certaines choses qui constitueraient des violations des droits? Ces deux éléments sont-ils liés?
    Absolument. Selon la Charte, tous les citoyens doivent bénéficier d'une application régulière de la loi. Le simple fait de porter une tunique rouge ne signifie pas qu'on n'a pas le même droit. Qu'il s'agisse d'un processus interne ou d'un processus lié au Code criminel, cela ne signifie pas que nous ne devrions pas bénéficier des mêmes protections prévues dans la Charte.
    Si vous donnez à un homme un pouvoir suprême de rendre des décisions absolues sans respecter l'application régulière de la loi, sans consultation appropriée, il y aura inévitablement des situations dans lesquelles la Charte et les droits prévus seront violés.
    Pardonnez-moi, mais dites-vous qu'il s'agit de nouveaux pouvoirs qui n'existent pas actuellement?
(1605)
    Le commissaire a déjà le pouvoir de congédier des gens, alors le projet de loi étend son pouvoir en éliminant quelques-unes des politiques en place qui font en sorte qu'il doit prendre certaines mesures pour veiller à une application régulière de la loi.
    Actuellement, il n'a pas le pouvoir de demander des déclarations obligatoires, mais, si vous refusez de lui donner une telle déclaration, il peut tout de même vous congédier?
    Oui, si vous ne produisez pas de déclaration, le commissaire peut quand même prendre une décision qui vous est défavorable.
    Oui, mais, actuellement, techniquement, il ne peut pas demander de déclaration obligatoire.
    Ce n'est pas écrit que...
    Ce n'est pas dans la loi.
    Pouvez-vous nous en dire davantage au sujet des mandats ex parte? Est-il question de fouille et de saisie d'éléments de preuve liés à une plainte ou une accusation de manquement à la discipline portée contre un membre?
    Cap. Patrick Mehain: C'est exact.
    Votre temps est écoulé, mais poursuivez.
    Selon le projet de loi, le commissaire ou l'enquêteur aurait le pouvoir de se présenter devant un tribunal et de dire qu'il y a des éléments de preuve quelconques dans le domicile de l'agent et qu'il faut se rendre dans la résidence pour procéder à une fouille et une saisie en fonction des renseignements obtenus dans le cadre du processus de traitement des plaintes interne de la Loi sur la GRC, tandis que — corrigez-moi si j'ai tort — je ne crois pas que c'est le cas actuellement.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Revenons à M. Norlock, s'il vous plaît. Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président
    Je remercie également les témoins. Merci de comparaître aujourd'hui, que ce soit par vidéoconférence ou en personne.
    Comme je cumule 20 années d'expérience dans les services de police, je pense que je peux comprendre certains points que vous avez soulevés.
    En ce qui concerne la Charte et la présentation de déclarations, la loi sur les services de police de certaines provinces, comme celle de l'Ontario, oblige les représentants des forces de l'ordre à tenir un calepin. Ce calepin est la propriété des citoyens de l'Ontario — pas des policiers —, et ce qui y figure constitue essentiellement un document de travail. Il m'apparaît donc nécessaire de préciser que, parfois, lorsqu'il est question de forcer un agent à fournir des renseignements contre son gré, dans 90 p. 100 des cas, il s'agit d'information contenue dans ce calepin ou de notes liées à l'enquête. Et une enquête, ça doit être consigné dans un document de travail.
    Vous mentionnez la Charte. Quand je prends la parole, j'essaie toujours de me faire comprendre des gens à la maison qui ne maîtrisent pas le sujet. En Ontario, bien entendu, la situation est un peu différente, alors quand vous invoquez la Charte des droits, parlez-vous du cas d'un policier accusé d'avoir enfreint le Code criminel? Est-ce que vous dites que le fait d'obliger ce policier à fournir des renseignements contre son gré constitue une violation de la Charte?
    C'est exact.
    C'est exact, mais vous ne faites pas référence à l'information qu'il a recueillie dans le cadre de son enquête.
    Non.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Je pense qu'il est important de faire cette distinction. Certaines personnes, comme les simples citoyens qui n'évoluent pas dans le milieu policier, ne comprendraient pas cela.
    Revenons au projet de loi C-42. J'aimerais savoir pourquoi vous ne croyez pas que le règlement rapide des problèmes ou des plaintes ne serait pas dans l'intérêt supérieur des agents eux-mêmes. Le comité a entendu les observations d'autres témoins...
    Monsieur Creasser, mes questions sont adressées à M. Mehain, puisqu'il est un membre actif des forces de l'ordre, mais je vous prie d'intervenir si vous en voyez le besoin.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit qu'il a fallu jusqu'à sept ans pour régler certaines plaintes. En vertu du projet de loi C-42, de nombreuses plaintes ou la plupart d'entre elles seraient réglées bien plus rapidement. Je suis curieux de savoir pourquoi ce n'est pas une bonne chose, selon vous.
    Nous pensons vraiment que c'en est une. Ce que nous disons, c'est que le projet de loi C-42, selon l'interprétation que nous en faisons, autorise la tenue d'une enquête précipitée au sujet d'un membre sans qu'il ait la possibilité de se défendre.
    Des plaintes comme celles qu'on traite de nos jours, il y en a depuis 15 ans. Il y en a depuis la création de la GRC. Selon le processus de règlement des griefs, les membres ont 30 jours pour déposer un grief. Ils doivent ensuite se conformer à la procédure dans les délais prescrits.
    La direction n'a aucun délai à respecter. Ce n'est pas à cause des membres que le processus s'étire: c'est parce que la direction est trop occupée, étant donné qu'elle a une foule d'autres dossiers à gérer et que cela lui tombe dessus, ou parce que cela ne l'intéresse pas ou qu'elle est impliquée d'une façon ou d'une autre dans la plainte.
    Si je comprends bien, le projet de loi C-42 encourage aussi la direction à rendre rapidement des décisions. De fait, il l’oblige à le faire. Dans l’affaire que vous avez mentionnée, il est fort possible que le membre soit innocent. Si le processus s’étend sur sept ans, il devra porter le poids de l’accusation tout ce temps-là. Selon mon expérience, la plupart des plaintes ou des griefs — ou, du moins, un grand nombre d’entre eux — débouchent après l’enquête sur une décision favorable à l’agent.
    Un règlement rapide n'est-il pas préférable? Vous dites qu'on règle rapidement les griefs, mais que rien n'oblige la direction à réagir rapidement. Si mon interprétation est juste, le projet de loi obligerait la direction à le faire. Je vous prie de répondre brièvement à ma question, parce que nous souhaitons en poser deux ou trois autres, mais ne trouvez-vous pas qu'il s'agirait d'une amélioration? Au moins, c'est un pas dans la bonne direction
    En d'autres mots, vous ne trouvez peut-être pas que c'est l'idéal, mais c'est mieux que ce que vous avez à l'heure actuelle. Est-ce que c'est exact?
(1610)
    Je pense, monsieur, que vous avez raison, mais seulement pour ce qui est de l'échéancier. Je crois qu'il est avantageux de traiter rapidement les plaintes. Comme j'ai moi-même fait l'objet d'une plainte dont le traitement s'est étiré sur plusieurs années, je peux vous dire que c'est effectivement un fardeau. À mon avis, le projet de loi améliore bel et bien les dispositions relatives à la période de règlement.
    J'aimerais revenir sur certaines observations formulées par Ian McPhail, actuel président par intérim de la Commission des plaintes du public contre la GRC, qui a recommandé que le président bénéficie de la même immunité que celle qui est accordée aux membres de la nouvelle commission dans l'exercice de leurs pouvoirs et de leurs responsabilités.
    Verriez-vous d'un bon œil le fait qu'on accorde une telle immunité au président de la Commission dans l'exercice de ses responsabilités? Cette mesure viserait à éviter que le président subisse une pression indue comme celle que vous avez décrite.
    Je serais d'accord avec cette mesure. Je pense que le président devrait jouir de l'immunité.
    Monsieur Mehain, êtes-vous d'accord?
    Oui.
    Merci.
    Encore une fois, je pose surtout cette question pour les gens qui nous regardent à la maison.
    Les Canadiens ont demandé qu'on prenne des mesures concernant le comportement de certains agents. Je pense qu'il est important que tous les gens qui nous regardent comprennent qu'il s'agit seulement de quelques-uns des milliers d'agents de la GRC. Notre gouvernement essaie de fournir cette assurance à la population.
    Ne croyez-vous pas qu'il serait souhaitable d'apporter immédiatement des modifications au processus disciplinaire tout en poursuivant nos efforts en vue d'améliorer encore davantage ce système dans l'avenir?
    Merci, monsieur Norlock.
    Monsieur Creasser, allez-y.
     Je pense qu’il est important que cela se fasse rapidement, mais, une chose qui me dérange, c’est que les représentants officiels du service des relations de travail de la GRC n’en savaient rien jusque-là. Je peux vous dire que les membres qui étudient la situation de la GRC ou le nouveau projet de loi disent qu’il s’agit d’une « Patriot Act » pour la police. Ils sont inquiets.
    Je crois que les 24 000 employés de la GRC se seraient sentis bien plus à l'aise s'ils avaient été considérés comme des intervenants dans le processus. Comme j'ai moi-même travaillé aux côtés de certaines de ces personnes dont le nom s'est retrouvé dans les médias pour les mauvaises raisons, je tiens à ce qu'on fasse le nécessaire pour éviter que de telles personnes soient mes collègues.
    Merci, monsieur Creasser.
    La parole va maintenant à M. Scarpaleggia. Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Creasser, votre exposé était très intéressant, car vous avez soulevé des points très concrets. Jusqu'ici, nous avons beaucoup parlé d'organigrammes et de processus, et votre déclaration nous a vraiment donné une idée de la situation réelle.
    Vous avez affirmé — corrigez-moi si je me trompe — que les représentants des employés de la GRC ne sont pas au courant de grand-chose. Je ne veux pas vous prêter des propos que vous n'auriez pas tenus et je sais que vous ne vouliez pas vous montrer irrespectueux, mais dites-vous qu'ils ne savent pas ce qui se passe? Je sais que ce n'est pas ce que vous entendiez par là.
    Pour clarifier ma pensée, monsieur, je dirais qu'ils sont peut-être bien au fait du projet de loi, mais que les renseignements à ce sujet n'ont certainement pas été communiqués aux 24 000 employés. Ils sont peut-être bien au courant de ce qui se passe, mais ils n'ont pas transmis d'information concernant le projet de loi au personnel de première ligne.
(1615)
    Pensez-vous que, si vous aviez un véritable syndicat — au sens strict de ce terme —, un tel problème ne surviendrait pas? Si vous étiez représenté par un syndicat au sens strict du terme, je veux dire.
    Oui, je pense qu'il y aurait plus d'engagement de la part de nos membres.
    Je suis d'accord avec M. Norlock. Il existe des problèmes au sein de la GRC, mais nous ne voulons pas entacher la réputation de la vaste majorité de ses agents qui font de l'excellent travail. Ce n'est pas ce que j'essaie de faire, mais nous savons qu'il existe des problèmes, et vous avez dit vous-même qu'il y en a dans la culture actuelle de l'organisation.
    Je ne suis pas tout à fait certain d’avoir compris ce qui constitue pour vous les racines de ces problèmes ou de cette culture imparfaite. Certaines personnes nous ont dit que si la culture de la GRC est de laisser les choses aller, c’est parce que les processus d’arbitrage sont trop longs. Les quelques membres qui ont commis une faute ont l’impression que le processus s’étendra sur plusieurs années et qu’ils ne recevront en réalité aucune sanction, ce qui envoie un message aux autres employés de l’organisation que les plaintes entraînent peut-être peu de conséquences ou qu’elles ne sont pas prises au sérieux pendant longtemps.
    Vous dites que les processus dont nous disposons aujourd'hui visent à assurer l'application régulière de la loi — c'est ainsi que vous les décrivez — et qu'il faudrait peut-être les renforcer. J'essaie seulement de comprendre les raisons qui, selon vous, expliquent la situation actuelle de la GRC.
    D'abord et avant tout, la plupart des affaires très médiatisées sur lesquelles nous nous penchons et qui ont évidemment suscité des préoccupations pour le public et pour nous-mêmes ont trait à des agents de première ligne.
    Je dois vous dire, monsieur, que les deux jours que j'ai passés dans la salle de réunion du Comité des comptes publics — lorsque l'ancien commissaire Zaccardelli et que l'actuelle sous-commissaire, Barbara George, ont témoigné devant ce comité — figurent probablement parmi les pires journées de ma carrière. Je n'ai jamais eu aussi honte d'être un membre de la GRC que durant ces deux journées-là.
    Le commissaire Zaccardelli a menti au comité. La sous-commissaire George a fait tellement de fausses déclarations que, selon moi, elle aurait certainement été déclarée coupable d'outrage au tribunal si elle avait comparu devant un juge d'une cour provinciale. Elle a d'ailleurs été déclarée coupable d'outrage au Parlement.
    Alors, les problèmes à régler ne sont pas seulement ceux qui défraient les manchettes.
    Par ailleurs, pour répondre à votre question concernant la culture, le surintendant principal MacMillan a fait la déclaration suivante dans son étude:
Bien que les membres des forces de l'ordre soient souvent considérés comme étant un groupe professionnel homogène ayant les mêmes intérêts à tous les échelons, la présente thèse montre que ce n'est pas le cas. Vu son histoire, ses traditions et sa structure hiérarchique, la GRC est un exemple parfait d'organisation où deux cultures distinctes sont présentes dans une même structure policière.
    Il y a donc une culture qui est adéquate et bénéfique et une autre qui, je suppose, nuit à la GRC. Est-ce ce que vous voulez dire quand vous affirmez qu'il y a deux cultures?
    Eh bien, ce à quoi je faisais allusion, monsieur, c'est la différence entre la culture de la haute direction et celle du personnel de première ligne.
    D'accord.
    Comment la culture de la haute direction est-elle devenue si négative, d'après vous? Comment cela s'est-il produit?
    À vrai dire, elle n'a jamais eu de comptes à rendre ou, du moins, pas autant que les autres échelons. On dit à l'interne que, plus une personne est haut placée, moins elle est tenue responsable de ses actions. Je suis fermement convaincu de cela.
    Mais si le ministre a le pouvoir de congédier le commissaire...
    L'a-t-il?
    Eh bien, nous parlions du fait que le commissaire est nommé à titre amovible par le gouvernement; c'est pourquoi, à mon avis, le ministre peut le congédier. Cependant, vous n'êtes pas d'accord avec cette affirmation, car vous estimez que cela aggrave le problème d'une façon ou d'une autre, alors je ne saurais dire qui a raison.
    Vous dites qu'un comité parlementaire devrait être chargé d'embaucher le commissaire pour une période déterminée, mais, en pratique, si le parti au pouvoir forme un gouvernement majoritaire, il occupera aussi la majorité des sièges au comité. À bien des égards, c'est simplement le prolongement de la volonté du gouvernement, alors je ne sais pas trop sur quoi repose votre point de vue.
(1620)
    L'association est d'avis qu'il ne faut pas que le gouvernement s'en mêle. Si on veut engager un dirigeant, on crée une liste où figure, disons, le nom de divers chefs de services de police canadiens. Ensuite, on fait une présélection et on choisit le meilleur candidat, sans l'intervention du Parlement.
    Je pense que l'on procède ainsi dans les services de police municipaux.
    Oui.
    J'ai terminé, monsieur le président. Merci.
    Si vous avez quelque chose à ajouter, vous avez le temps de le faire.
    Eh bien, il a raison. C'est effectivement ainsi que l'on procède dans d'autres...
    Tout comme les membres que je représente, je crains une ingérence politique dans les plus hautes sphères de notre organisation.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à la deuxième série de questions. Les députés doivent se limiter à cinq minutes.
    La parole va d'abord à Mme Doré Lefebvre.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais commencer par remercier de leur présence aujourd'hui les témoins qui sont ici, autour de la table, et ceux qui sont à Whitehorse, dans le Nord canadien.
    Si vous me le permettez, je vais poser mes questions à ces messieurs qui sont présents avec nous aujourd'hui, soit MM. Creasser et Mehain.
    Le projet de loi C-42 s'attaquerait censément au harcèlement sexuel et psychologique ou au harcèlement en général au sein de la GRC. Changerait-il vraiment quelque chose en matière de harcèlement sexuel ou de harcèlement psychologique?

[Traduction]

    Nous n'avons constaté aucun changement depuis que le commissaire Paulson est entré en fonction et qu'il a dit qu'il se débarrasserait des gens malveillants. La situation perdure.
    Le commissaire a envoyé un courriel au sergent d'état-major Chad, de la Colombie-Britannique, parce que ce dernier a fait état de ses préoccupations concernant la GRC à la suite d'un message vidéo du commissaire destiné aux membres de l'organisation. Le sergent d'état-major Chad a réagi, et le commissaire a décidé de lui envoyer un courriel pour le rabaisser, disant qu'il lui causait du tort et lui demandant de quel droit il osait parler au commissaire de cette façon.
    Si ce n'est pas du harcèlement que de lui avoir demandé de quel droit il ose s'adresser ainsi au commissaire, je ne sais pas ce que c'est.
    Tout part du haut. Le commissaire n'a rien fait à ce jour, peut-être parce qu'il ne dispose pas du pouvoir et des processus nécessaires. Cela ne contribue vraiment pas à améliorer les choses, mais il n'y a eu aucun changement notable sur ce plan.
    Plusieurs plaintes ont été présentées; chaque fois, on a fait de belles promesses, on a dit qu'on s'occuperait du problème, mais pourtant, rien n'a été fait. La situation perdure. L'organisation continue à faire l'objet de plusieurs plaintes.

[Français]

    Même si le projet de loi C-42 donnait plus de pouvoirs au commissaire, cela ne changerait pas les faits et n'aiderait pas nécessairement à prévenir le harcèlement au sein de la GRC?

[Traduction]

    Peut-être, mais une partie du problème tient au fait que ce sont des membres du personnel de direction qui se livrent à de tels actes, qu'il s'agisse d'un sous-officier, d'un caporal de mon rang ou d'une personne aussi haut gradée que le commissaire. Le plus souvent, c'est nous qui faisons du harcèlement, car nous sommes les superviseurs.
    Les membres de la GRC sont très réticents à dire du mal de leurs supérieurs, de crainte d'être étiquetés comme étant des fauteurs de troubles, des enfants à problèmes, etc. Ces gestionnaires — qu'ils soient caporaux, sergents, sergents d'état-major ou officiers, entre autres — continuent de harceler leurs subordonnés en leur assignant des tâches déplaisantes ou qu'ils n'ont pas vraiment envie de faire, en leur adressant des commentaires dénigrants ou en passant leur travail au peigne fin; bref, ils s'arrangent tout simplement pour leur causer des problèmes au travail. On voit encore de telles situations de nos jours. Le problème perdure. Avant ma comparution ici, certains membres m'ont dit qu'ils ne vont pas porter plainte; ils n'en voient pas l'intérêt, car on ne fait jamais rien.
    En ce qui concerne le projet de loi C-42, si les membres ne sont pas autorisés à parler de ce qui se passe ni à dénoncer la situation, personne ne le fera; alors, vous aurez ainsi muselé les membres de la GRC et évacué le problème en nous réduisant tous au silence, mais vous n'aurez pas réglé la situation.

[Français]

    Je comprends ce que vous dites.
    En lisant le projet de loi C-42, on a vu que le commissaire allait avoir la possibilité de revenir sur les décisions du comité d'examen à la suite de recommandations qui auraient été faites. C'est déjà le cas. Selon moi, c'est comme cela dans la plupart des cas. On avait entendu un témoin qui nous avait dit que plus de la moitié des cas étaient révisés par le commissaire à la suite des recommandations.
    Pensez-vous que quelque chose de cette nature va aider à changer la culture interne? Plusieurs membres nous ont dit qu'il fallait un changement de culture interne. Le projet de loi C-42, ou les moyens qu'il apporte, va-t-il aider à changer la culture interne au sein de la GRC?
(1625)

[Traduction]

    Je suppose que seul le temps le dira.
    Comme vous l'avez mentionné, le commissaire a déjà le pouvoir de se pencher sur les décisions du Comité externe d'examen et de les approuver ou de les rejeter. À vrai dire... je ne sais pas. J'ai bon espoir.
    Nous aimerions que le projet de loi soit adopté pour moderniser la Loi sur la GRC, mais certains aspects nous préoccupent. Nous craignons qu'il confère trop de pouvoir au personnel de direction, plus particulièrement au commissaire. À notre avis, il faudrait réduire son pouvoir au lieu de l'accroître.

[Français]

    J'aimerais revenir brièvement sur les cas de harcèlement sexuel. Malheureusement, je sais qu'il y en a eu beaucoup au sein de la GRC. C'est triste de voir ça. Je sais que, dans d'autres corps policiers, les procédures se déroulent plus rapidement et que les cas de harcèlement sexuel sont largement prévenus. Toutefois, ce n'est pas le cas au sein de la GRC.
    Avez-vous des commentaires à faire à cet égard ou des solutions à suggérer?

[Traduction]

    Les enquêtes se poursuivent. Chaque fois qu'une plainte est déposée — qu'il soit question de harcèlement sexuel ou de harcèlement tout court —, elle est prise relativement au sérieux. C'est ma perception de la situation.
    Vous savez, il faut enquêter sur les enquêtes. Un des problèmes, c'est que certains membres ont renoncé à déposer une plainte de harcèlement ou de harcèlement sexuel parce qu'ils avaient l'impression que ce serait inutile, qu'il ne se passerait rien et que le membre qui a posé le geste ne recevrait pas de sanction juste ou adéquate. Alors, pourquoi risqueraient-ils leur carrière?
    Merci beaucoup.
    Avant de passer au prochain intervenant, j'aimerais moi-même poser une question.
    Vous avez parlé plus tôt de la déclaration obligatoire. Vous craignez qu'elle soit utilisée contre le membre dans le cadre de poursuites civiles ou criminelles subséquentes. Cependant, l'actuelle version de la Loi indique déjà que vous êtes tenus de déposer une déclaration, mais qu'elle ne peut pas être utilisée contre vous. C'est ce qui est énoncé dans la version actuelle de la Loi sur la GRC.
    À votre avis, de quelle façon le projet de loi modifie-t-il cela? Je ne vois rien qui aurait cet effet dans le projet de loi C-42. La version actuelle de la loi indique que vous êtes tenus de fournir une déclaration, mais qu'elle ne peut en aucune circonstance être utilisée dans le cadre de poursuites criminelles ou civiles.
    Cela se produit. Cela se produit couramment. Peu importe ce que dit la Loi, les déclarations des membres sont souvent utilisées contre eux. Nous faisons souvent l'objet d'une enquête.
    Essentiellement, vous dites que le projet de loi C-42 ne changera rien à cela.
    Non, et il faut faire quelque chose à ce sujet. Il faut établir un mécanisme de responsabilisation pour la GRC afin que cela ne se reproduise plus.
    D'accord, merci.
    Monsieur Hiebert, la parole est à vous.
    Monsieur le président, merci d'avoir posé cette question qui figurait dans mes notes. J'apprécie le fait que vous preniez part à la discussion et que vous abordiez ce sujet, car j'ai une question semblable.
    Vous avez déclaré qu'il est inéquitable, malavisé ou inconstitutionnel qu'un membre s'incrimine lui-même. J'essaie d'imaginer une situation où, disons, un geste grave a été commis. Si une personne qui ne fait pas partie de la GRC avait commis un acte criminel, on lui demanderait de faire une déclaration, ou elle prendrait un avocat, mais en pareille situation, comment feriez-vous la lumière sur la plainte si l'intéressé n'est pas tenu de répondre?
    Nous avons toujours été tenus de livrer notre version des faits. Ce qui est énoncé dans le projet de loi, c'est que les gens doivent maintenant faire une déclaration. Il prévoit qu'ils vont s'asseoir avec moi, que je vais les interviewer et qu'ils vont fournir une déclaration.
    Une version des faits, c'est: « J'étais en service; je me suis rendu sur les lieux; voici ce qui est arrivé; voici toutes mes notes; voici mon rapport et voici ce que j'ai fait. Si vous avez d'autres questions, voici les coordonnées de mon avocat; nous répondrons à vos questions. » Voilà.
    Vous avez raison de dire qu'il s'agit des mêmes protections que celles dont bénéficient les citoyens. Si vous commettez un meurtre, je vais vous poser des questions, mais vous avez le droit de garder le silence et de consulter un avocat; et si vous n'avez pas les moyens de prendre un avocat, on vous en procurera un.
    Comme nous l'avons vu dans la GRC, le commissaire mène un examen chaque fois qu'un membre fait l'objet d'une enquête et peut retirer ce soutien. Il peut retirer le financement qui vous est accordé pour retenir les services d'un avocat afin de vous protéger dans le cadre de certaines enquêtes découlant d'une auto-incrimination.
    Alors, vous faites une distinction entre une version des faits et une déclaration?
    Oui, c'est exact.
    Une version de faits décrit vos activités, mais pouvez-vous nous expliquer de nouveau en quoi une déclaration est différente?
    Si vous me demandez de faire une déclaration, nous allons nous asseoir, et vous direz: « Bon, dites-moi ce qui s'est passé », et je vais vous livrer ma version des faits. Puis, vous allez m'interviewer afin d'y détecter des contradictions potentielles ou me poser d'autres questions pour que je vous fournisse des précisions.
(1630)
    C'est comme un contre-interrogatoire.
    Tout à fait, oui.
    Vous ne voyez pas d'objection à me fournir les renseignements figurant dans votre calepin, comme l'a laissé entendre mon collègue, vous êtes plutôt préoccupé par l'enquête additionnelle où on vous demande de répondre à des questions sans que vous soyez représenté par un avocat.
    Oui, absolument. Nous devrions tous être tenus responsables de nos gestes. Comme nous l'avons dit, mes calepins ne sont pas à moi; ils appartiennent à la GRC, et ils sont conservés pendant 100 ans.
    Merci.
    Monsieur Hiebert, je m'excuse, mais notre temps est écoulé. Nous devons amorcer la deuxième heure et la prochaine série de questions. Quand je pose une question en pareille situation, je le fais au nom de tout le comité. Afin de préparer l'étude, il arrive que je questionne les témoins au nom de tous les membres.
    Aux deux témoins qui ont comparu aujourd'hui — l'un en personne, l'autre par vidéoconférence depuis Whitehorse —, nous apprécions beaucoup votre apport à notre discussion, aux débats et à l'étude du projet de loi. Merci.
    Après votre départ, si vous souhaitez changer une réponse que vous avez fournie ou si vous souhaitez répondre plus en détail à une question, je vous invite à le faire en communiquant avec notre greffier. Il s'assurera de nous transmettre vos observations additionnelles. Nous vous en serions reconnaissants.
    Merci à tous. Nous allons faire une pause. Nous invitons nos prochains témoins — qui se joignent à nous par vidéoconférence — à se préparer.
    Merci.
(1630)

(1635)
    Reprenons.
    Un nouveau groupe de témoins se joint à nous pour la deuxième heure de la réunion d'aujourd'hui, où nous poursuivons notre étude du projet de loi C-42.
    Nous allons entendre les observations de l'Association des membres de la police montée du Québec. Gaétan Delisle en est le président; André Girard, le trésorier; et James Duggan, le conseiller juridique.
    Nous allons aussi entendre le témoignage de Tom Stamatakis, président de l'Association canadienne des policiers, qui participe à la réunion par vidéoconférence depuis Vancouver. Il y a également Alok Mukherjee, président de l'Association canadienne des commissions de police, qui se joint à nous depuis Toronto.
    Bienvenue à nous.
    La parole ira d'abord à l'Association des membres de la police montée du Québec. Veuillez faire votre déclaration préliminaire. Nous entendrons ensuite celle des autres témoins, puis nous passerons à une série de questions.
    Monsieur Delisle, c'est à vous.

[Français]

    Je suis retraité de la GRC depuis trois ans. J'avais le rang de sergent d'état-major. J'ai travaillé pendant 40 ans au sein de la GRC. Trente-trois de ces années ont été passées comme représentant divisionnaire, c'est-à-dire que je représentais les membres à l'interne. Au début, vous avez entendu la présentation de M. Townsend. J'ai fait le même type de travail que lui au sein de la GRC. J'ai ainsi représenté des membres de la GRC pendant 33 ans. Je pense être en bonne position pour vous expliquer comment fonctionne le harcèlement, la discipline et toutes ces choses.
    Cependant, j'aimerais attirer l'attention du comité sur le fait que la version actuelle de Loi sur la Gendarmerie royale du Canada a été initiée en 1976 par le fameux rapport Marin, qui émanait de la commission dirigée par le juge René Marin. J'espère que vous pourrez prendre connaissance de ce rapport, car vous y verrez les quelque 200 recommandations qu'il contient. Deux des principales recommandations stipulaient que le Comité externe d'examen des plaintes du public et le Comité externe d'examen des griefs des membres de la GRC soient indépendants. Le rapport recommandait qu'ils soient non seulement indépendants, mais aussi qu'ils rendent des décisions exécutoires. Il a fallu dix ans avant que cela devienne une loi. Elle a été adoptée en 1988. Donc, énormément de travail a été fait à cet égard.
    Par ailleurs, il y a deux ans, le projet de loi C-43 a été déposé à la Chambre des communes. Mon collègue va vous en citer quelques extraits ultérieurement. Cela dit, depuis que la loi a été adoptée, voici quelle est la situation.
    Si je suis ici aujourd'hui, c'est entre autres pour vous souligner une multitude de rapports qui ont été produits: le rapport Brown, le rapport de l'Université de Montréal et les soumissions relatives au groupe de travail. Je les ai tous ici pour que vous puissiez les consulter. Vous verrez exactement quelle est la problématique à la GRC en ce qui a trait au harcèlement, à l'intimidation et à l'incapacité de la haute direction de la GRC d'être responsable à cet égard. Je dis bien « être responsable » parce que, pendant toutes ces années — comme mon confrère l'a mentionné plus tôt —, ces gens n'ont été redevables à personne.
    C'est la raison pour laquelle vous avez toujours cette ambiguïté, en tant que parlementaires, à l'égard de ce qu'il faut faire avec une grosse organisation comme la Gendarmerie royale du Canada. Ces gens ne sont pas officiellement redevables à qui que ce soit.
    À des fins de comparaison, un chef de police est redevable à un comité. Vous avez un ensemble de personnes qui vont réviser ses décisions. Ce sont des décisions indépendantes. Comme vous pourrez le constater, le mémoire qu'on a soumis au comité a été préparé de façon très ordonnée et très concise. Ainsi, vous pourrez comprendre exactement ce qu'on veut dire.
    Je vous donne un exemple de décisions concernant des griefs déposés par les membres. La décision TG-192 — que je vais vous laisser — stipule ce qui suit:
(1640)

[Traduction]

Ce grief contestait aussi une décision de la GRC de ne pas confirmer le bien-fondé d'une plainte de harcèlement présentée par un membre.

[Français]

    Ce n'est qu'un exemple de décision, mais vous allez voir qu'il y en a plusieurs.
    La décision qui a été rendue dit ceci:

[Traduction]

Le commissaire n'était pas d'accord avec la décision du Comité de confirmer le bien-fondé de la plainte de harcèlement relative au premier incident et a rejeté le grief.

[Français]

    C'est toujours ce qu'on voit à la GRC parce que les comités ne sont pas indépendants pour rendre une décision. C'est ce qui arrive quand vous remettez une décision à une personne en situation d'autorité C'est ce qui existe présentement à la GRC et le projet de loi C-42 n'y changera rien. Vous allez vous retrouver avec les mêmes situations, qui sont à la source de toutes les enquêtes qui ont eu lieu et qui auront encore lieu à l'avenir.

[Traduction]

    Vous en êtes à environ cinq minutes. L'ensemble de votre groupe dispose de 10 minutes.

[Français]

    Je pense qu'ils vont me laisser parler.
    Il ne faut pas se leurrer. L'intention du projet de loi C-42 est de donner plus d'autorité au commissaire de la GRC. Or, comme vous le voyez dans notre mémoire, le commissaire a déjà toute cette autorité. Par contre, s'il y avait des tribunaux indépendants pour les relations de travail ou sur d'autres sujets, vous verriez que les choses changeraient énormément en matière de relations de travail.
    Des représentants divisionnaires sont venus témoigner devant vous, dont M. Townsend. Ils vous ont dit directement qu'ils étaient responsables des relations de travail et qu'ils représentaient tous les membres de la GRC. Cependant, ces gens vous ont dit unilatéralement qu'on ne leur avait pas demandé leur opinion sur le projet de loi C-42. Imaginez quelles sortes de relations de travail vous avez dans un organisme qui représente 17 000 policiers et policières à travers le Canada. Il ne faut pas se leurrer. Cet organisme ne représente pas les membres parce qu'ils sont payés. Ces personnes travaillent pour l'organisation et sont promues au sein de l'organisation. Je le sais, j'en faisais partie.
    Par contre, vous ne verrez pas des membres réguliers venir témoigner ici. Je lève d'ailleurs mon chapeau à mes confrères qui se sont présentés précédemment. La raison est bien simple. Mon collègue, André Girard, qui était aussi représentant divisionnaire, et moi avons été l'objet de plaintes de harcèlement. En fait, mon collègue n'a même pas été capable de se représenter. Monsieur Girard avait envoyé une lettre au solliciteur général pour lui dire ce qu'on pensait de certaines façons de faire au sein de la GRC. Il ne faut pas se leurrer. Il faut le faire.
    Me reste-il une minute ou deux?

[Traduction]

    Il vous reste trois minutes.

[Français]

    Monsieur Girard va poursuivre.
    Distingués députés, nous vous remercions infiniment de l'occasion que vous nous donnez de nous présenter devant vous aujourd'hui. Je vais procéder assez rapidement étant donné le temps restreint que nous avons.
    Comme mon collègue l'a mentionné plus tôt, je suis actuellement retraité de la GRC depuis le début juin 2011. J'ai été membre de la GRC pendant 35 ans. J'ai terminé au grade de sergent d'état-major. Pendant plus de 30 ans, dont les 20 années précédant ma retraite, j'ai agi en qualité de représentant divisionnaire élu pour un total de huit mandats quasi consécutifs.
    Je voudrais aborder une question qui sème la confusion chez moi. La présentation du projet de loi C-42 fait suite au dépôt du projet de loi C-43, déposé en deuxième lecture le 13 décembre 2010. Ce projet de loi s'intitule Loi édictant la Loi sur la modernisation des relations de travail dans la Gendarmerie royale du Canada, modifiant la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois.
    À l'époque, ce projet de loi a été déposé par un ministre important du Parti conservateur, M. Stockwell Day. Ce projet de loi visait principalement à instituer tout un régime de relations de travail où un système d'arbitrage indépendant aurait été dirigé par l'entremise de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.
    Lors de sa présentation à la Chambre, le ministre Day faisait référence à la décision d'une cour de l'Ontario. Il a dit ce qui suit: 
    
C'est une loi qui répondrait aux demandes de la cour et qui prévoirait que certaines dispositions soient suivies et que certaines garanties constitutionnelles pour la représentation des membres soient mises en place, mais qui laisserait ce choix aux membres de la GRC. C'est le noeud du problème. 
Ce sont les propos même du ministre.
    Le ministre a aussi dit:
    
La loi sur la modernisation dont nous sommes saisis traite d'un bon nombre d'aspects du processus disciplinaire et de traitement des griefs qui aideraient les membres du public et de la GRC.
    Enfin, il a ajouté ceci:
    
Je crois qu'il y avait déjà un certain appui pour la mise en place de cette loi en attendant la décision du tribunal [étant donné qu'à l'époque la décision était devant la Cour d'appel de l'Ontario] de sorte que, quelle que soit cette décision, les membres de la GRC, ces hommes et ces femmes qui consacrent leur vie à nous protéger et à nous servir de façon si admirable, aient l'assurance qu'un mécanisme sera en place pour veiller à leurs intérêts. J'invite mes collègues à analyser minutieusement la Loi sur la modernisation des relations de travail dans la Gendarmerie royale du Canada. J'espère qu'ils l'appuieront. Elle est le fruit d'une démarche non partisane.
 
    Merci.
(1645)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Il ne vous reste que 10 secondes. Bravo.
    La parole va maintenant à M. Stamatakis, de l'Association canadienne des policiers.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui du projet de loi C-42, Loi visant à accroître la responsabilité de la Gendarmerie royale du Canada.
    Je m'adresse à vous aujourd'hui au nom de l'Association canadienne des policiers, qui représente plus de 50 000 agents de première ligne à l'échelle canadienne — y compris des employés de la GRC — répartis dans plus de 160 associations membres.
    J'ai seulement quelques observations préliminaires à livrer, puis je serai heureux de répondre à toute question que vous pourriez avoir.
    J'aimerais amorcer mon témoignage en disant qu'il est extrêmement important pour nous, en tant que policiers de la GRC ou d'un service de police provincial ou municipal, d'avoir la confiance de la population que nous servons. Bien que des événements récents aient certainement fait en sorte que le comportement de nos collègues à la GRC est maintenant scruté à la loupe, nous ne saurions trop insister sur le fait que les hommes et les femmes qui forment le service de police national du Canada, dans l'ensemble, font honneur à notre pays et aux collectivités qu'ils représentent.
    Le projet de loi C-42 contient plusieurs éléments positifs. Cependant, certaines dispositions sont préoccupantes, et j'aimerais profiter de cette occasion pour les mettre brièvement en relief, surtout du point de vue d'un agent de première ligne.
    Le premier point que je vais aborder, c'est qu'il est certes souhaitable de rationaliser le processus disciplinaire et la procédure de règlement des griefs concernant les membres de la GRC. À cet égard, le projet de loi C-42 accorde au commissaire des pouvoirs extraordinaires qui vont au-delà de ceux qu'on pourrait trouver dans d'autres services de police au Canada.
    Par exemple, en Ontario, un policier qui fait l'objet d'un processus disciplinaire conserve le droit d'interjeter appel de la décision à la Commission civile des services policiers de l'Ontario, organe quasi judiciaire qui mène un examen impartial du processus et qui rend ensuite une décision.
    Je dirais que, sans possibilité additionnelle d'interjeter appel ou — chose encore plus importante — de le faire à un organisme indépendant, il est possible que les membres de la GRC perdent confiance dans l'impartialité du processus auquel ils sont soumis, surtout dans les situations où le commissaire a délégué son pouvoir disciplinaire.
    L'article 40 du projet de loi C-42 est un autre aspect très préoccupant, car il a trait aux enquêtes menées quand un membre de la GRC a enfreint le code de déontologie de l'organisation. Premièrement, il est énoncé dans le projet de loi qu'un agent peut être tenu de témoigner contre lui-même. Deuxièmement, le projet de loi énonce les conditions justifiant l'émission d'un mandat en vertu de la Loi sur la GRC en vue de procéder potentiellement à une fouille dans la résidence d'un membre de la GRC sous la direction du commissaire ou d'un autre agent à qui ce pouvoir a été délégué. C'est particulièrement troublant, car il est question d'un processus administratif visant en grande partie à gérer des problèmes de conduite d'agents de la GRC qui sont survenus dans l'exercice de leurs fonctions.
    Malheureusement, même si ces dispositions législatives — espérons-le — procédaient de bonnes intentions, elles constituent vraisemblablement une violation des droits et libertés fondamentaux qui sont garantis par la Charte à tous les citoyens canadiens et ne devraient pas être bafoués simplement parce qu'une personne est un membre de la GRC. D'ailleurs, je ne peux qu'imaginer l'indignation du public qui s'ensuivrait si nos agents de première ligne menaient leurs enquêtes criminelles en vertu de dispositions semblables à celles que contient le projet de loi C-42.
    Un dernier point que j'aimerais souligner émane du témoignage présenté au comité en ce qui a trait aux voies de recours possibles qui s'offriraient aux membres de la GRC à la suite de la décision de les renvoyer.
    Des responsables du ministère de la Sécurité publique, y compris M. Richard Wex et M. Mark Potter, ont fait valoir qu'un agent qui souhaiterait interjeter appel d'une décision rendue par le commissaire en application des nouvelles dispositions proposées dans le projet de loi pourrait toujours demander un contrôle judiciaire.
    Malheureusement, cette possibilité se heurte à un problème de longue date que l'Association canadienne des policiers essaie de corriger, à savoir le fait que la GRC est le seul service de police au Canada dont les membres continuent à voir leur droit d'association se faire brimer.
    À coup sûr, les contrôles judiciaires constituent un aspect important, mais les membres du comité savent que les procédures judiciaires sont coûteuses et que, s'il n'y a pas d'association pour représenter le membre ou pour l'aider à composer avec les coûts, ce dernier n'aura peut-être pas les moyens d'assurer sa défense s'il s'agit d'un agent qui vient de perdre son emploi à la suite d'une sanction disciplinaire prise dans le cadre d'un processus administratif, dans la majorité des cas.
(1650)
    Certes, ce n'était qu'un bref survol des éléments du projet de loi qui préoccupent l'Association canadienne des policiers. Je serai heureux de fournir plus d'explications ou de précisions en réponse aux questions des membres du comité concernant les points que j'ai abordés ou tout autre aspect pour lequel mes observations pourraient être utiles avant que vous commenciez à débattre en profondeur du projet de loi.
    Pour conclure, il est certain que nos collègues de la GRC font face à des difficultés sans précédent, mais il faut trouver un juste équilibre. Nous ne pouvons pas prendre des mesures visant à restaurer ou à améliorer la confiance du public envers la GRC qui auraient pour effet d'affaiblir la confiance de ses membres envers leur employeur. Le personnel de direction et les agents de première ligne peuvent trouver un terrain d'entente, comme en font foi les conventions collectives signées par divers services de police provinciaux et municipaux de partout au Canada. J'espère que le comité sera en mesure d'amender le projet de loi C-42 à cette étape du processus afin de trouver l'équilibre qui permettrait à la GRC de continuer à bien remplir son rôle de service de police national du Canada.
    Je vous remercie de votre temps, et je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Stamatakis.
    La parole va maintenant à M. Mukherjee, président de l'Association canadienne des commissions de police.
    Mais avant, j'aimerais mentionner qu'il semble y avoir pas mal de bruit dans une de ces salles, et nous avons un peu de difficulté à vous entendre. Si vous pouviez régler le problème, ce serait apprécié.
    Allez-y, monsieur Mukherjee.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de vous présenter nos commentaires sur ce projet de loi qui importe beaucoup à notre organisation, autant qu'à vous et au gouvernement.
    Les commissions de police qui sont nos membres sont responsables de la gouvernance et de la surveillance de plus de 75 p. 100 des services de police municipaux au Canada. Elles gèrent les services de police de leur municipalité, fixent des priorités, établissent des politiques et représentent l'intérêt public en matière de gouvernance et de surveillance civiles. C'est en raison de cet objectif de gouvernance et de surveillance que nous sommes généralement en faveur du projet de loi C-42.
    Il y a plus de cinq ans que des représentants du ministère de la Sécurité publique nous ont consultés — j'étais du nombre — au sujet d'enjeux liés à la gouvernance et à la surveillance de la GRC. Nous croyons que le projet de loi C-42 constitue un pas dans la bonne direction en vue de renforcer la responsabilité, de moderniser les pratiques en matière de ressources humaines de la Gendarmerie et d'accroître la surveillance civile. Il faut espérer que ces mesures accroîtront la confiance du public à l'endroit de la GRC, laquelle, comme l'ont souligné le ministre Toews et d'autres, a été malmenée dernièrement.
    À cette fin, nous applaudissons les objectifs énoncés dans le préambule du projet de loi.
    Plutôt que de parler d'un aspect particulier du projet de loi, je souhaite commenter de façon générale certaines des propositions touchant la gouvernance et la surveillance en ce qui concerne les conséquences de certaines dispositions.
    Notre intérêt pour la gouvernance et la surveillance efficaces de la GRC comporte deux volets. Premièrement, dans la mesure où la GRC offre des services de police par contrat à des collectivités locales, nous croyons qu'elle devrait être dotée d'un système de gouvernance semblable à ceux des services de police municipaux. Deuxièmement, dans la mesure où la GRC participe à des opérations conjointes et dispense des services de police intégrés avec nos services de police municipaux, nous croyons qu'elle devrait faire l'objet d'une surveillance efficace comparable à celle qui vise ses pendants municipaux.
    La gouvernance locale dans des administrations où la GRC offre des services de police par contrat est une question qui nous importe, et il devrait en être de même pour la Gendarmerie et le gouvernement. Environ 65 p. 100 du budget de la GRC — selon ce qu'on nous a dit — provient des services de police à contrat. De plus, outre la prestation de services de police aux provinces et aux territoires, la GRC sert plus de 200 municipalités et 165 collectivités autochtones à l'échelle du Canada.
    Le projet de loi traduit effectivement une tentative de dissiper certaines préoccupations locales. Bien qu'avantageuses, il ne s'agit pas de mesures qui renforcent la gouvernance locale dans les administrations où sont en vigueur des contrats de services de police. Nous vous demandons instamment de tenir compte de cet aspect dans vos délibérations. Voici une observation tirée d'un rapport sur les services de police municipale à contrat offerts par la GRC à l'intention de la Fédération canadienne des municipalités en 2009:
Un certain nombre de caractéristiques sont généralement reconnues comme étant essentielles à la bonne gouvernance, elles dont le fait d'être comptable, transparent, réceptif, efficace et efficient, équitable et inclusif. La plupart des répondants avaient des préoccupations liées à la gouvernance sur ces plans en ce qui concerne des services de police municipale offerts par la GRC.
La responsabilité à l'égard de la collectivité est perçue par nombre de municipalités comme une faible priorité pour la GRC, qui attache davantage d'importance à la responsabilité à l'égard de la Direction générale de la GRC.
    L'attention à la gouvernance en général — et pas seulement à la gouvernance locale — fait largement défaut au projet de loi C-42. Nous — et j'entends par là l'ACCP — avançons qu'une gouvernance solide améliorerait beaucoup la responsabilité et la transparence de la GRC. C'est à nos yeux un enjeu de taille, surtout compte tenu des pouvoirs accrus qu'on propose de conférer au commissaire en vertu du projet de loi C-42. C'est un aspect dont nous avons discuté en profondeur durant nos consultations avec les représentants de la Sécurité publique.
(1655)
    Nous avons remis au du comité une lettre datée du 18 octobre qui traite la question de façon approfondie, alors je n'en dirai pas plus, outre que nous estimons respectueusement que l'adoption d'un système de gouvernance moderne et efficace pour la GRC renforcera la confiance et mènera à une plus grande responsabilité devant les élus, les contribuables et, surtout, les collectivités servies par la GRC.
    J'aimerais maintenant parler de la surveillance efficace envisagée en tant qu'élément distinct de la gouvernance, particulièrement du point de vue des collectivités où un contrat de services de police n'est pas en vigueur, mais dont les services de police participaient néanmoins à des opérations conjointes et offrent des services de police intégrés avec la GRC.
    La situation actuelle est inacceptable, comme je l'ai découvert en ma qualité de président du Conseil de services policiers de Toronto durant le Sommet du G20 à Toronto. Le service de police que nous surveillons — c'est-à-dire le Service de police de Toronto — était soumis à un système de surveillance provinciale et locale, mais la GRC n'était assujettie à rien de semblable alors qu'elle jouait un rôle dans ce projet de services de police intégrés extrêmement délicat ayant d'importantes répercussions sur le plan de la sécurité nationale.
    Le mécanisme de surveillance actuel, la CPP, a été qualifié de gravement inadéquat par plusieurs témoins qui ont comparu devant le comité. Je crois que les dispositions du projet de loi C-42 contribueront beaucoup à rétablir cette lacune. Nous nous réjouissons du fait que la CCETP proposée aura le pouvoir d'entreprendre des examens relatifs aux politiques et aux procédures de la GRC, aura accès à plus de documents que c'est actuellement le cas, pourra exiger la production d'éléments de preuve et traiter plus rapidement les plaintes du public.
    Nous sommes aussi très favorables à la capacité des ministres provinciaux responsables des services de police de déclencher des enquêtes et à celle d'organismes de surveillance provinciaux d'entreprendre des enquêtes indépendantes et conjointes. Ce sont de bonnes mesures qui devraient contribuer à renforcer la confiance du public.
    Toutefois, nous partageons les préoccupations qui vous ont déjà été exposées au sujet de certaines autres dispositions du projet de loi. Nous craignons qu'elles nuisent à une véritable surveillance efficace. En particulier, nous vous demandons instamment d'examiner les dispositions touchant la justification des restrictions concernant les documents auxquels la CCETP pourrait ne pas avoir accès, la capacité du commissaire d'interrompre une enquête en raison de la possibilité d'une enquête criminelle, la capacité du commissaire de refuser d'enquêter sur une plainte alors que le président de la CCETP est d'avis que cela irait dans l'intérêt public, l'absence de normes de service exigeant de la gendarmerie qu'elle prenne des mesures opportunes alors que de telles normes sont envisagées pour la commission, et l'absence de ce que le président intérimaire de la CPP, Ian McPhail, a qualifié de « régime d'examen ferme » dans ses commentaires à votre endroit.
    Nous partageons l'inquiétude du sergent d'état-major Abe Townsend en ce qui concerne la concentration de pouvoirs confiés à un seul service, d'une part, et l'incapacité de la commission de formuler des recommandations contraignantes de l'autre. Ce sont les mots du sergent d'état-major Townsend.
    Enfin, nous sommes en désaccord avec la déclaration du directeur général Mark Potter selon laquelle la responsabilité première de la CCETP consisterait à examiner les plaintes du public et le projet de loi C-42 rendrait les examens conditionnels à la disponibilité des ressources, entre autres. Si ces déséquilibres ne sont pas corrigés, nous craignons que la nouvelle commission, malgré les pouvoirs accrus qui lui sont conférés, soit perçue comme exerçant ses activités contre le gré de l'institution même — et à son chef — qu'elle est censée surveiller. À notre avis, cela ne contribuera pas à la réalisation de l'objectif du projet de loi C-42, à savoir le renforcement de la confiance du public grâce à une responsabilisation accrue.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions, et je vous remercie beaucoup.
(1700)
    Merci à tous de vos témoignages.
    Nous entreprenons notre première série de questions. Nous allons réduire un peu le temps à environ six minutes. Tout le monde aura l'occasion de poser une question.
    Allez-y, monsieur Hiebert, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Dans le cadre des témoignages précédents, nous avons entendu les témoins et certains intervenants s'enquérir de l'utilisation des déclarations et, durant ma dernière et seule question, j'ai parlé du contexte des enquêtes criminelles. J'aimerais revenir sur la question des enquêtes déontologiques.
    On a déclaré qu'il était abusif de forcer un membre à fournir une déclaration dans un tel scénario également. J'aimerais que tout le monde commente le bien-fondé de cela, parce que, selon mon interprétation du contenu du code de déontologie, il s'agit du genre d'information ou de communication qui serait nécessaire pour donner suite à une préoccupation du public, et c'est ce que nous essayons de faire ici.
    Nous avons parlé des comportements impolis ou irrespectueux, des fausses déclarations ou de l'abus d'alcool ou de drogue. Un employé qui afficherait ce genre de comportement serait tenu responsable dans n'importe quel contexte de travail. Je me demande pourquoi un agent de police qui s'adonnerait à ce genre d'activité ne serait pas obligé de fournir une déclaration et de répondre à des questions visant à savoir pourquoi il a fait cela, puisque tout autre employé — ou presque — serait tenu de répondre à de telles questions pour le compte de son employeur.
    Merci, monsieur Hiebert.
    Allez-y, monsieur Duggan.
    Je dois vous contredire, monsieur Hiebert. Presque tous les employés, dont ceux qui travaillent dans la fonction publique, ont le droit de ne pas s'incriminer eux-mêmes et ne sont pas obligés de fournir une déclaration qui pourrait entraîner la prise de mesures disciplinaires à leur endroit ou leur licenciement.
    Je crois que nous serions tous d'accord avec vous pour dire que, lorsque l'intérêt public entre en jeu, il faut qu'il y ait un certain équilibre, et l'équilibre doit refléter les préoccupations exprimées par plusieurs témoins ici, y compris M. Mukherjee, le témoin de l'ACP et M. Townsend, et aussi par M. Scarpaleggia dans sa question.
    La tâche difficile qui vous attend ici est de créer un équilibre entre le droit des membres de la GRC de ne pas être assujettis au pouvoir absolu et arbitraire d'un commissaire qui serait, de fait, juge, juré et bourreau, d'une part, et la défense de l'intérêt public, d'autre part, pour ce qui est de veiller à ce que l'institution...
    La GRC, autrefois une grande source de fierté pour notre pays, a vu sa réputation ternie par les actes de quelques membres, alors il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. C'est ce que vous allez faire si vous conférez plus de pouvoirs à quelqu'un qui détient déjà un pouvoir absolu. Pour moi, votre idée de forcer les membres de la GRC à renoncer à tous leurs droits et à s'incriminer eux-mêmes dans ce contexte, avec tout le respect que je vous dois, trahit une ignorance du fonctionnement réel du système. Selon l'article 5 de la Loi sur la GRC, le commissaire a une autorité et un pouvoir absolus à l'endroit des membres de la GRC. Pouvez-vous me dire pourquoi une personne dans cette position a besoin de plus de pouvoirs?
(1705)
    Peut-être que nous pourrions entendre d'autres témoins aussi. Il ne reste que deux minutes.
    Donnons la parole à M. Stamatakis.
    L'une des préoccupations tient au fait qu'il ne semble pas y avoir de distinction entre les exemples de conduite ou d'inconduite qu'invoque M. Hiebert et les allégations d'inconduite criminelle. C'est une grande préoccupation.
    L'autre chose, c'est que les lois des autres provinces en matière d'inconduite policière prévoient l'obligation de fournir une déclaration. J'aurais tendance à dire aussi que, habituellement, dans un contexte employé-employeur, un employé devrait être obligé de rendre des comptes. Les lois provinciales qui ont été établies pour régir l'inconduite contiennent aussi des dispositions pour protéger les agents au moment du dépôt de déclarations à la suite d'une plainte touchant l'impolitesse ou ce qui pourrait habituellement être perçu comme une inconduite mineure ou moins grave, de façon que ces déclarations ne puissent pas être utilisées dans un autre contexte. Le projet de loi C-42 ne semble pas contenir des mesures de protection de la sorte.
    Il faut comprendre que, dans le cas des policiers, il ne sera pas seulement question d'une enquête sur un cas d'inconduite aux termes d'une loi sur les services de police ou de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada; habituellement, il y a des poursuites civiles. Il y aura probablement une forme d'enquête du coroner. Il peut y avoir une enquête publique. Il peut aussi y avoir une enquête criminelle.
    C'est là où il faut trouver l'équilibre. Vous devez créer le mécanisme qui permettra à un employeur — qu'il s'agisse de la GRC ou d'une autre force policière municipale ou provinciale — d'obtenir l'information dont il a besoin et de répondre aux préoccupations du public, mais, ce faisant, d'offrir une certaine protection pour que l'information ne puisse pas par la suite être utilisée dans le cadre d'un autre processus qui compromet gravement le policier, et même l'organisation, dans le cadre d'un procès civil ou d'un autre processus de gestion du risque.
    Merci beaucoup. Le temps pour cette question est écoulé. Je note ici que M. Mukherjee n'a pas eu l'occasion de répondre à la question. Certes, je lui accorderai du temps durant la prochaine série de questions.
    M. Garrison est le suivant.
    Encore une fois, merci beaucoup à tous ceux qui témoignent aujourd'hui, en personne ou par téléconférence. Nous vous sommes reconnaissants de votre témoignage et estimons qu'il est très intéressant et important. Nous aimerions avoir plus de temps, mais les aléas de l'établissement d'horaires et certaines limites imposées par le gouvernement font que nous avons moins de temps que ce que nous aurions aimé avoir.
    Monsieur Stamatakis, lorsque vous parlez des déclarations obligatoires et des questions de mandat de perquisition, vous demandez-nous aujourd'hui tout simplement de supprimer cet article du projet de loi? Est-ce que cela serait la solution?
(1710)
    À mon avis, oui, cela serait la solution.
    Encore une fois, il faut qu'il y ait une certaine distinction entre les types de problèmes de conduite que vous regardez. Je ne pourrais citer aucun autre exemple de régime législatif ou de processus de surveillance obligatoire conçu pour gérer les questions relatives à l'emploi dans un autre secteur ou dans une autre profession qui prévoirait un si grand pouvoir de fouille. La plupart des policiers — et des citoyens — s'attendraient généralement, dans le cas d'une allégation d'inconduite criminelle, à ce que l'organe d'enquête entreprenne une enquête criminelle. À ce moment-là, il pourrait se prévaloir de toutes les dispositions prévues à l'égard de ce processus de fouille, au besoin.
    Lorsque nous parlons d'un processus administratif visant des questions liées à l'emploi, je ne peux penser à un cas où il conviendrait de fouiller le domicile d'une personne pour obtenir des documents qui, de toute façon, sont habituellement faciles à obtenir dans le lieu de travail. C'est notre avis.
    D'accord.
    Monsieur Mukherjee, j'aimerais revenir sur vos commentaires relatifs aux restrictions de la capacité de la commission de mener des examens indépendants. Le projet de loi soulève la question des ressources. Il prévoit aussi que la chose serait interdite si un incident faisait l'objet d'une enquête par n'importe quelle autre entité gouvernementale. Ces deux restrictions devraient-elles faire l'objet d'un examen ou être retirées de la loi pour assurer une plus grande indépendance?
    Je crois que ce sont les... [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Il importe que la commission soit en mesure de cerner une tendance, puis de lancer une enquête. Je ne crois pas que ces examens devraient être conditionnels à la disponibilité des ressources ou à la tenue d'autres enquêtes.
    Je peux vous donner un exemple. À Toronto, récemment, au sujet du G20, le directeur indépendant de l'examen de la police de l'Ontario a décidé d'entreprendre un examen systémique alors qu'il était saisi de plaintes individuelles. Pendant ce temps, deux ou trois autres études étaient en cours, comme celles de l'ombudsman de l'Ontario et du Conseil des services policiers de Toronto, par l'intermédiaire d'un examinateur indépendant. Nous avons constaté que chacun de ces examens révélait différents renseignements. Ils n'entraient pas en conflit l'un avec l'autre et ils ont généré toute une gamme de conclusions très judicieuses. Je ne crois pas qu'il devrait y avoir de restrictions.
    L'autre de mes préoccupations tient au fait que, parfois, le spectre d'une enquête criminelle peut être brandi pour arrêter un processus d'examen ou en décourager la tenue pour toujours. J'ai été témoin d'une situation, à Toronto, où on a invoqué un argument semblable pour empêcher la tenue d'examens très importants sur le plan de l'intérêt public. Ces enquêtes criminelles ne seront jamais menées à terme, alors ces examens n'auront jamais lieu. Nous devons nous inquiéter de l'incidence de ces restrictions.
    Merci beaucoup, monsieur Mukherjee.
    J'aimerais accorder le peu de temps qu'il me reste à Mme Doré Lefebvre.
    Nous allons nous assurer qu'elle ait son temps.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie beaucoup mon collègue. Mon intervention sera brève.
    Monsieur Girard et monsieur Delisle, je vous remercie beaucoup de votre présence et de faire profiter ce comité de votre grande expérience. Je pense qu'il en a grandement besoin.
     En lisant le projet de loi C-42, on voit que la marche à suivre pour un membre qui voudrait faire appel commencerait et prendrait fin avec le commissaire. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Si vous lisez notre mémoire, vous verrez que nous sommes assez directs à cet égard. Il est évident qu'il faut absolument qu'il y ait un accès qui provienne de l'extérieur de la GRC. Il faut qu'un groupe indépendant puisse rendre une décision parce que, comme l'a dit plus tôt Me Duggan, à l'heure actuelle, le commissaire décide des sanctions à imposer. Il étudie les accusations et porte un jugement à la toute fin.
    Je vais vous donner un exemple typique. Lorsqu'une recommandation relative à un membre est faite, le commissaire n'a qu'à la rejeter du bout des doigts. Il est évident, selon nous, que cela ne peut pas continuer de cette façon.
(1715)
    Vous avez parlé d'indépendance des comités et des tribunaux. Le projet de loi C-42 prévoit que le commissaire peut annuler toutes les décisions. Je sais que vous parlez d'indépendance des comités, mais suggérez-vous d'autres solutions qui seraient nécessaires pour les membres?
    Une commission royale d'enquête l'a mentionné en 1974. J'y avais d'ailleurs participé. J'étais heureux d'apprendre qu'on a demandé il y a cinq ans au mouvement représenté par le représentant de Toronto ce qu'il pensait du contenu du projet de loi C-42. Cela ne vient pas de nous. Le projet de loi C-43 prévoyait que cela soit indépendant. Je pense que je n'ai rien à démontrer à ce sujet, car c'est le gouvernement lui-même qui l'a déposé. À cette fin, c'est évident.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons passer au prochain intervenant.
    Il s'agit de Mme Bergen et de M. Hawn. Allez-y, je vous prie.
    Il va y aller en premier.
    Allez-y, monsieur Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais commencer par M. Mukherjee et lui donner l'occasion d'intervenir dans la discussion suscitée par la question de M. Hiebert. Elle concernait le pouvoir du commissaire.
    Merci pour cela.
    En fait, je suis d'accord avec M. Stamatakis. Il doit y avoir un équilibre, et il faut établir une distinction entre une enquête criminelle et les enquêtes touchant d'autres types d'inconduite.
    Ma préoccupation tient au fait qu'il arrive souvent que ces questions liées à la conduite — qui sont, pour moi, des questions de relations de travail — sont traitées comme s'il s'agissait d'affaires criminelles, et il y a eu de la confusion sur le plan de l'application régulière de la loi. Il faut assurer un équilibre, comme l'a dit Tom. Je ne crois pas que le régime proposé empêche de mener une enquête en bonne et due forme des allégations d'inconduite.
    Merci.
    Toujours en ce qui concerne les pouvoirs du commissaire, on a beaucoup parlé du fait que le commissaire avait trop de pouvoirs, ce genre de choses. Nous avons tenu une discussion générale à ce sujet. Que proposeriez-vous précisément, monsieur Girard ou sergent d'état-major Delisle, pour restreindre les pouvoirs du commissaire?
     Vous nous avez demandé notre opinion à l'égard du projet de loi C-42. Le projet de loi C-42 accroît le pouvoir que la loi confère déjà au commissaire.
    Comment pourrait-on le restreindre? Que feriez-vous pour enlever les pouvoirs en question au commissaire?
    Parlez-vous seulement du projet de loi C-42, ou voulez-vous imposer d'autres mesures? Le comité peut-il faire cela? Je ne le crois pas.
    Je vous demande ce que vous feriez pour restreindre ses pouvoirs si vous étiez chargé de rédiger le projet de loi C-42 ou si vous deviez restreindre les pouvoirs du commissaire? Comment le feriez-vous?
    C'est exactement ce dont nous avons parlé.
    Eh bien, donnez-moi des détails, ne dites pas seulement qu'il a trop de pouvoir. Que feriez-vous précisément pour restreindre son pouvoir?
    D'accord. Il serait question de tout pouvoir d'agir sur l'administration de la gendarmerie. Un membre peut recourir à un processus de règlement des griefs; donnez cette indépendance au Comité consultatif sur les griefs. La situation serait la même qu'avec la Loi sur la GRC actuellement. Faites la même chose pour la discipline. Vous avez un comité d'examen externe; c'est exactement la même chose. Éliminez ce pouvoir.
    Le commissaire a le pouvoir de suspendre quelqu'un. J'ai été suspendu sans solde pour avoir été élu maire de Saint-Blaise-sur-Richelieu. Sans autre forme de procès. Ce genre de situation peut arriver demain à n'importe qui.
    Or, le problème est le suivant: lorsqu'on veut appeler de cette décision, à qui s'adresse-t-on? À l'heure actuelle, on s'adresse au commissaire, alors, si vous voulez un exemple, retirez ce pouvoir décisionnel après l'intervention du comité d'examen externe, comme on le ferait pour n'importe quel type de relation employeur-employé.
    Alors, le commissaire ne fait pas partie du processus d'appel ni du processus d'examen, à votre avis?
    Il est la dernière étape.
    Mais il est toujours là. Vous ne lui retirez pas son pouvoir ultime.
    Pourquoi avez-vous un comité d'examen externe? Pour examiner une situation qui est survenue. Si vous avez des gens qui sont payés pour faire un travail et qu'ils une leur conclusion, cette conclusion devrait être respectée
(1720)
    D'accord, je ne vous contredis pas, mais vous venez tout juste de dire que le commissaire a toujours ce pouvoir en dernier ressort.
    C'est la vérité.
    Et dites-vous que c'est bien ou mal?
    Ce qui arrive, c'est que le commissaire a le dernier mot. Vous avez entendu le témoignage de Mme Ebbs devant le comité. Les membres du comité présents ont à de nombreuses reprises donné l'occasion à Mme Ebbs de dire ce qu'elle aimerait voir dans une Loi sur la GRC parfaite, selon elle. Elle n'a jamais bien répondu à la question.
    Au lieu de demander qu'on confère au commissaire le pouvoir de rendre des décisions qui seraient contraignantes et pas seulement de formuler des recommandations, elle n'a rien dit. Cela me donne à penser que sa seule préoccupation était de protéger son emploi. Malheureusement, il faut aller beaucoup plus loin pour créer l'équilibre entre les membres et l'organisation, et, comme l'a mentionné M. Delisle, le commissaire a le pouvoir ultime à l'heure actuelle.
    Merci.
    Monsieur Stamatakis, je vous pose la question, mais n'importe qui peut ajouter quelque chose.
    Nous parlons beaucoup de la culture de la GRC. Les gens parlent du changement de culture qu'amènera le projet de loi. Je ferais valoir que le projet de loi est au mieux un cadre pour un changement de culture, mais le changement doit venir des gens et pas du projet de loi. Cela commence par la direction.
    Je crois que, au bout du compte, il est question d'une culture réciproque entre la direction et le personnel, chose qui, selon moi, doit émaner de la direction. C'est seulement mon opinion personnelle.
    Êtes-vous de cet avis? Sentez-vous au sein de la direction de la GRC un désir de changer la culture organisationnelle ou avez-vous l'impression qu'il y a chez les membres une volonté d'aller dans cette voie et de finir par trouver un terrain d'entente et changer la culture?
    Je crois que ce sont les gens qui changent la culture. Un livre ne peut pas faire cela.
    Merci, monsieur Hawn.
    Allez-y, monsieur Stamatakis.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis de votre avis. Je vais répondre en abordant la question qu'il vient de poser.
    Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de restreindre l'autorité du commissaire de quelque façon que ce soit. Je crois que le commissaire — comme n'importe quel chef de police dans un environnement municipal ou provincial ou n'importe quel président-directeur général d'une société privée — doit avoir le pouvoir nécessaire pour diriger l'entreprise ou offrir le service.
    Il est nécessaire de donner aux gens qui sont concernés par le différend ou qui s'opposent à la décision du commissaire — surtout dans un cas d'inconduite qui pourrait entraîner le congédiement — la possibilité de s'adresser à un organe indépendant ou à une personne indépendante pour obtenir le règlement du différend et une décision finale et contraignante que tout le monde doit respecter par la suite. C'est exactement ce qui arrive partout au pays dans toute force policière municipale et dans toute force policière provinciale.
    Si on établit un régime qui permet d'obtenir de tels résultats, la relation entre les agents de première ligne et la direction sera renforcée, car celle-ci doit assumer un rôle de leadership pour qu'on en arrive à une relation de travail appropriée qui ne laisse aucune place aux comportements ou aux gestes inappropriés, mais qui est visée des systèmes équitables et appropriés pour que ces questions soient réglées de façon adéquate. Ensuite, on peut obtenir des résultats qui donnent lieu à une relation de travail productive qui finit par contribuer à un meilleur service au public, à une sécurité publique accrue, à un meilleur moral et à une meilleure qualité de vie dans nos collectivités, partout au pays; et c'est ce que veulent tous les policiers, y compris les agents de première ligne et les dirigeants de la GRC.
    Merci, monsieur Stamatakis.
    La prochaine question — qui sera probablement la dernière de la journée — sera posée par M. Scarpaleggia. Vous avez six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présentation.
    Encore une fois, ce fut très intéressant. En effet, c'est la première fois qu'on entend la position des agents qui sont sur le terrain.
    Je comprends que, selon vous, le comité de révision externe manque d'indépendance. Le commissaire peut mettre de côté une recommandation. Cependant, mis à part ce fait, croyez-vous que le système complet de griefs ou d'examen d'une plainte est trop complexe? Comprend-il trop d'étapes en ce moment?
    On entend souvent dire qu'il faut beaucoup de temps pour passer à travers ce système. Si quelqu'un n'est pas satisfait d'une décision à un certain niveau, il peut faire appel à un autre niveau. Rendu à la toute fin, il peut s'adresser au comité externe, mais c'est très long avant qu'on puisse se rendre à ce point.
    Croyez-vous qu'il faudrait peut-être rendre le système un peu plus simple pour qu'on puisse procéder plus rapidement?
(1725)
     Si vous me le permettez, je vais répondre à votre question.
    Vous n'avez pas à réinventer la roue si vous imposez au commissaire de la GRC de prendre des décisions et d'assumer ses responsabilités.
     À titre d'exemple, prenons un cas de congédiement. D'habitude, en relations de travail, un employeur doit assumer la responsabilité de gérer son entreprise. Il prend une décision et il congédie un employé. Celui-ci peut loger un grief ou utiliser le système pour contester le congédiement. C'est un système rapide. L'employé ou l'agent a recours à un tribunal indépendant.
     Normalement, ces cas de congédiement sont décidés dans un laps de temps de six à douze mois. Je pratique en droit du travail. J'ai plaidé lors de centaines de cas de congédiement à la GRC. En moyenne, il faut environ sept ans pour régler un cas de congédiement.
    Si le commissaire agit plus rapidement et congédie la personne au tout début du processus, le cas se rendra-t-il directement au comité externe? Est-ce que ce sera plus rapide? Je ne comprends pas.
    J'y suis peut-être allé de façon trop comprimée. J'ai voulu imposer à un gérant d'entreprise, c'est-à-dire le commissaire, la responsabilité de prendre les décisions qui s'imposent. S'il y a une pomme pourrie, comme on dit, et que quelqu'un représente un problème pour la GRC, il faut que le commissaire prenne sa responsabilité.
     Ce système fonctionne dans tous les autres corps de police au Canada. Le commissaire a le pouvoir absolu de suspendre quelqu'un sans solde et de mettre au rancart l'agent à problème. En même temps, l'agent congédié peut déposer un grief, qui ira devant un tribunal indépendant...
    Au lieu de passer par plusieurs étapes à divers niveaux.
    Oui, les étapes qui sont prévues dans la Loi sur la GRC font en sorte que quand un agent constitue un problème, l'officier commandant a un an, à compter du moment où il connaît l'identité de la personne et la faute qu'il a commise, pour demander de procéder à une enquête.
    Je comprends.
    Après un an, cette recommandation est présentée à trois officiers de la GRC qui convoquent une audience. Il faut donc trois ans avant le début des audiences.
    Je ne veux pas vous interrompre, mais je vais manquer de temps.
    Si je ne m'abuse, l'ancien ministre Stockwell Day avait un point de vue opposé à celui qui est incarné par le projet de loi C-42. Il ne voyait pas les choses de la même façon. D'ailleurs, ce ne serait pas la première fois. En effet, en ce qui concerne le projet de loi C-30 sur la surveillance d'Internet, le ministre de l'époque, M. Day, n'était pas favorable à la position prise par le ministre actuel, M. Toews.
    Vos propos indiquent justement que M. Day voyait les choses différemment.

[Traduction]

    Avec tout le respect que je vous dois, les gens appellent ça de la « romnésie » aux États-Unis. C'est le fait d'avoir accepté certains principes, mais de changer d'idée du jour au lendemain et de faire le contraire.
    Dans le projet de loi C-43, le gouvernement conservateur a voulu prévoir l'accès à la négociation collective et à une approche équilibrée et équitable pour les membres. Après une décision de la Cour d'appel de l'Ontario, le projet de loi C-43 a été complètement mis de côté, et maintenant, nous avons le projet de loi C-42.
(1730)
    La « romnésie ». J'aime ça. C'est bon.
    Me reste-t-il du temps, toutefois, monsieur le président?
    Non, il ne vous en reste plus. Merci beaucoup.
    Je veux remercier tous les témoins d'être venus témoigner devant le comité aujourd'hui.
    À vrai dire, vous avez été... J'ignore si c'est à dessein que nous avons gardé le meilleur pour la fin, mais il s'agit des derniers témoignages qu'entendra le comité sur cette question.
    Chers collègues, je vous rappelle que nous commençons notre étude article par article sur le projet de loi C-42 mercredi.
    J'aimerais aussi rappeler à tous les députés ici présents le libellé original de la motion dont nous avons convenu. Je vais seulement lire la dernière partie de cette motion ou ce dont nous avons convenu:
Que les amendements au projet de loi C-42 soient présentés au greffier dans les deux langues officielles avant 21 heures, le lundi 29 octobre 2012, et que ces amendements soient distribués aux membres dans les deux langues officielles avant la fin de la journée.
    Question de m'assurer que vous comprenez tout à fait ce que cela signifie, cela veut dire que notre greffier va travailler dur. Il a fait appel à du personnel supplémentaire pour travailler ici jusqu'à ce qu'il soit certain que les amendements vous sont distribués et sont dans votre boîte aux lettres demain.
    Nous avons convenu de soumettre ces amendements aujourd'hui. Veuillez respecter cet engagement.
    Sur ce, encore une fois, je remercie tout le monde de son témoignage.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU