Passer au contenu

FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 014 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 26 février 2014

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous entreprenons notre étude de la situation en Ukraine. Nous allons commencer sous peu.
    Madame Nash.
    Monsieur le président, c'est un plaisir de pouvoir me joindre au Comité des affaires étrangères aujourd'hui.
    J'aimerais savoir si nous pourrions nous réserver un peu de temps, vers la fin de la séance, pour examiner des motions.
    La sonnerie d'appel se fera entendre à 17 h 15 pour un vote à 17 h 45. Si nous finissons d'entendre le second groupe à 17 h 15, nous essaierons peut-être de prendre cinq minutes à ce moment-là. Nous devrons le faire à huis clos. Nous allons essayer de faire cela.
    Accueillons maintenant nos témoins d'aujourd'hui. Nous avons avec nous M. Matthew Levin, directeur général, Direction générale de l'Europe et de l'Eurasie. Soyez le bienvenu, monsieur. Je crois que vous serez le premier à prendre la parole.
    Nous avons ensuite M. David Metcalfe, directeur général, Europe, Moyen-Orient et Maghreb, Développement. Soyez le bienvenu, Dave.
    Nous accueillons également Mme Tamara Guttman, directrice générale du Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction. Soyez la bienvenue, Tamara. Comme je l'ai dit, j'ai eu l'occasion de vous rencontrer lorsque vous étiez ambassadrice à Budapest. Je suis heureux de vous revoir ici avec nous.
    Nous avons aussi parmi nous M. Bennett, ambassadeur du Bureau de la liberté de religion. Nous sommes heureux de vous revoir. Vous étiez avec nous il n'y a pas si longtemps, et nous vous remercions d'être ici également. Vous serez le troisième à prendre la parole.
    Nous allons commencer, car nous n'avons pas beaucoup de temps.
    Monsieur Levin, nous allons commencer par vous. La parole est à vous.
    Merci à vous, monsieur le président, et à tous les membres du comité de m'avoir invité aujourd'hui pour parler de la situation qui ne cesse d'évoluer en Ukraine, un pays d'une très grande importance pour le Canada, comme vous le savez tous.
    Comme vous avez déjà présenté les personnes qui vont témoigner, je ne les présenterai pas de nouveau.

[Français]

    Je ferai d'abord une déclaration préliminaire. Par la suite, je céderai la parole à M. Metcalfe et à l'ambassadeur Bennett.

[Traduction]

    Nous sommes également accompagnés aujourd'hui de Mme Tamara Guttman, directrice générale du Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction, ou START, au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, ainsi que de M. Mike MacDonald, directeur général de la gestion opérationnelle et de la coordination à Citoyenneté et Immigration Canada. Mme Guttman et M. MacDonald ne prendront pas la parole, mais ils pourront répondre aux questions des députés après les exposés.
    Le Canada et le peuple de l'Ukraine entretiennent depuis longtemps des liens privilégiés, compte tenu de la place importante qu'occupe la communauté canado-ukrainienne au Canada. Depuis 1991, lorsque les Ukrainiens se sont libérés du joug de l'Union soviétique, ces liens privilégiés ont été déterminants dans le rôle de premier plan qu'a joué le Canada en appuyant la nouvelle Ukraine indépendante. Nous avons été le premier pays de l'Occident à reconnaître l'indépendance de l'Ukraine. Les Canadiens avaient alors bon espoir que l'Ukraine devienne un pays démocratique, stable et prospère.

[Français]

    Afin d'aider le pays à atteindre ces objectifs, le gouvernement du Canada a investi plus de 410 millions de dollars sous forme d'aide au développement. En 2014, nous y consacrerons 20 millions de dollars de plus pour soutenir la démocratie et favoriser la croissance économique.

[Traduction]

    Les parlementaires canadiens déploient aussi des efforts importants pour aider l’Ukraine. Bon nombre de députés et de sénateurs se sont rendus en Ukraine à titre d’observateurs électoraux, dans le cadre de délégations parlementaires, ou encore à titre indépendant. Cette réunion et le débat exploratoire qui se tiennent aujourd’hui témoignent de l’importance que les parlementaires attachent à l’Ukraine.
     La diaspora ukrainienne au Canada apporte aussi un soutien indispensable à la collaboration du Canada avec l’Ukraine. Environ 1,3 million de Canadiens sont de descendance ukrainienne. Leur expertise, leur passion et leur dévouement sans pareil nous aident à adapter nos politiques pour que celles-ci s’avèrent bénéfiques au plus grand nombre possible de personnes.
     Toutefois, malgré tous ces investissements des Canadiens au cours des 22 dernières années, l’Ukraine a connu un parcours tortueux après son indépendance. La déception a pris le pas sur l’enthousiasme suscité par la Révolution orange de 2004. Sous la présidence de Viktor Ianoukovitch, la démocratie a poursuivi son recul en Ukraine. C’est ainsi qu’il a fait emprisonner l’ancienne première ministre, Mme Ioulia Timochenko. Les amendements constitutionnels lui conféraient davantage de pouvoirs, au détriment du premier ministre et du Parlement.
     En novembre dernier, l’Ukraine semblait cependant sur le point d’amorcer un nouveau virage. Le président Ianoukovitch a alors annoncé qu’il signerait un accord d’association et de libre-échange avec l’Union européenne. Le Canada a fortement encouragé l’Ukraine à signer cet accord. Il s’agissait selon nous d’une occasion décisive pour l’Ukraine d’ancrer son identité européenne, de mettre en oeuvre des réformes importantes et de renforcer la démocratie et la primauté du droit.
     Dans le cadre de cet accord, Mme Timochenko aurait été autorisée à se faire soigner en Allemagne. Le gouvernement canadien avait demandé à maintes reprises qu’elle puisse recevoir un traitement médical approprié. Le Canada a envoyé une équipe de médecins canadiens chargés d’examiner son état de santé. Nous avons rencontré sa fille ainsi que son avocat, et un représentant de l’ambassade canadienne a assisté à toutes les journées d’audience. Entre-temps, une délégation de parlementaires canadiens s’est rendue à Kharkiv pour tenter de la rencontrer personnellement en prison.
     Toutefois, une semaine seulement avant la signature de l’accord d'association avec l'Union européenne, le président Ianoukovitch a soudainement changé d’avis; il s'est tourné vers la Russie et a accepté des mesures d'aide financière. Une majorité importante d’Ukrainiens souhaitaient que le président agisse afin que le pays se tourne vers l’Ouest, vers l’Europe.
(1535)

[Français]

    Cette décision a provoqué des manifestations de masse. Dans la ville de Kiev, des centaines de milliers d'Ukrainiens sont descendus dans les rues.

[Traduction]

    Le gouvernement du président Ianoukovitch a riposté par la violence. Il a adopté des lois répressives. Des manifestants ont été menacés, battus, enlevés, voire tués. Des prêtres ont été intimidés. En une seule semaine d’horreur, au moins 82 Ukrainiens ont été tués, et des centaines d’autres ont été blessés.
    Face à ce mépris consternant de la vie humaine, le Canada a agi avec fermeté et détermination. Nous avons plaidé clairement, de manière soutenue et avec force en faveur de la démocratie, de la primauté du droit et du droit de manifester pacifiquement en Ukraine. Nous avons vigoureusement dénoncé le meurtre de manifestants sur la place Maïdan et les autres violations perpétrées par le régime Ianoukovitch.
    En novembre, le ministre Baird s’est rendu personnellement à Kiev afin de démontrer l'appui du Canada aux manifestants. Il y a également dépêché l’ambassadeur du Canada pour la liberté de religion, M. Bennett, qui est ici avec nous aujourd’hui.

[Français]

    Le Canada a aussi pris des mesures concrètes contre les responsables des actes de violence.

[Traduction]

    Après la mort des premiers civils, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration a annoncé, de concert avec le ministre Baird, que les responsables ukrainiens impliqués dans la répression et la violence ne seraient plus les bienvenus au Canada.
    De même, la semaine dernière, après la dernière et horrible vague de violence, le premier ministre Harper a annoncé un élargissement de l’interdiction de voyager afin d’empêcher les hauts fonctionnaires du gouvernement ukrainien et d’autres individus ayant une responsabilité politique dans le recours à la violence d’entrer au Canada. Le premier ministre a également annoncé que le Canada imposerait des sanctions économiques au régime Ianoukovitch et à ses partisans.
    Outre ces mesures punitives, le Canada a consacré des millions de dollars à des projets en Ukraine au profit de la société civile, des militants pour la démocratie et des médias indépendants. Nous avons aidé des organisations religieuses menacées. Nous avons offert des soins médicaux d’urgence et une aide juridique aux manifestants.
     Fort heureusement, la tentative du président Ianoukovitch de mettre fin à la démocratie a échoué. Les citoyens ukrainiens, faisant preuve d’une bravoure et d’une résilience remarquables, ont vaincu l’oppression et ont repris le contrôle de leur destinée. L’autorité du président Ianoukovitch s’est effondrée. Il a fui Kiev et abandonné ses résidences luxueuses en même temps que la présidence du pays.

[Français]

    Au cours de séances extraordinaires tenues en fin de semaine dernière, le Parlement a voté en faveur de la restauration de la Constitution de 2004, de la tenue de nouvelles élections en mai et de la libération de Mme Timochenko. Le Parlement a expulsé les ministres du gouvernement et les dirigeants des services de sécurité, qui étaient responsables de la répression et de la violence. Il a également voté en faveur de la destitution de Viktor Ianoukovitch. Un mandat d'arrestation a été lancé contre lui.

[Traduction]

    Le Canada a eu le privilège de soutenir le peuple ukrainien pendant cette période d’adversité. Nous saluons la nomination d’un gouvernement provisoire et la libération de Mme Ioulia Timochenko.
     Nous collaborerons étroitement avec le nouveau gouvernement, l’opposition et les dirigeants du mouvement de contestation de la Maïdan afin de contribuer à bâtir une Ukraine unie, démocratique et prospère qui recueille les fruits d’une saine gouvernance et de la primauté du droit. Le Canada exhorte toutes les parties à soutenir l’unité nationale ukrainienne et à respecter son intégrité territoriale.
     Nous continuons d’encourager l’Ukraine à signer un accord d’association et de libre-échange avec l’Union européenne. Nous appuyons la mise en oeuvre d’un programme substantiel du FMI, assorti d’une importante réforme. Nous calibrons notre financement de 20 millions de dollars par année dans des programmes de développement afin de soutenir le rétablissement de la démocratie et de favoriser la croissance économique en Ukraine.
     En signe de son engagement personnel et de celui du gouvernement, le ministre Baird sera de nouveau à Kiev demain pour y rencontrer les dirigeants du nouveau gouvernement et de l’opposition et rendre hommage à ceux qui ont donné leur vie pour la démocratie en Ukraine.

[Français]

    J'aimerais maintenant céder la parole au directeur général du développement en Europe et au Moyen-Orient, M. Dave Metcalfe, qui vous parlera plus avant du programme canadien visant à soutenir la démocratie et à favoriser la croissance économique en Ukraine.
(1540)

[Traduction]

    Monsieur le président, je vous remercie de nouveau d'avoir invité les représentants du ministère à cette audience. C'est avec plaisir que mes collègues et moi répondrons à vos questions au terme de nos exposés officiels.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Avant que vous commenciez, monsieur Metcalfe, je tiens à souhaiter officiellement la bienvenue à M. Mike MacDonald. Il travaille au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, comme l'a mentionné M. Levin. Veuillez m'excuser de cet oubli.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Metcalfe.

[Français]

    Monsieur le président et honorables députés, je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée de parler du programme d'aide au développement du Canada et de son rôle face à la situation actuelle.
    Grâce à son programme d'aide au développement, le Canada continue, comme il l'a fait durant les deux dernières décennies, de soutenir la transition économique et démocratique de l'Ukraine. Notre soutien est basé sur une vision à long terme, mais occasionnellement, des actions à court terme sont nécessaires.

[Traduction]

    Matthew a mentionné que notre réponse, dans l’immédiat, a consisté en des soins médicaux d’urgence pour les personnes blessées lors des troubles civils. Le Canada a fourni une aide à la Croix-Rouge ukrainienne afin de former 500 secouristes bénévoles et d’établir des postes de premiers soins pour traiter les blessés. Le Canada n'a pas tardé non plus à fournir de l’aide juridique aux activistes pour la démocratie inculpés par l’ancien gouvernement.
    Pour l’avenir, nous devons continuer de nous concentrer sur les élections présidentielles et les élections municipales de Kiev, toutes deux prévues pour le 25 mai prochain. Après plusieurs élections douteuses au cours des dernières années, les Ukrainiens aujourd’hui exigent, et méritent, des élections propres, avec des règles de jeu équitables, des choix réels et une concurrence réelle. Nous travaillons avec des pays d’optique commune et des partenaires locaux pour soutenir l’Ukraine afin d’aborder des questions importantes concernant le processus électoral, telles que la sécurité du scrutin et la prévention de la fraude.
    Le Canada a toujours été un chef de file quant à la promotion d’élections libres et équitables en Ukraine, entre autres par le soutien de la plus importante mission d’observation d’élections lors des élections parlementaires en 2012, qui comptait 500 observateurs canadiens. En étroite collaboration avec leurs partenaires internationaux, les observateurs canadiens ont joué un rôle crucial pour repérer les cas de fraude électorale et toute mauvaise utilisation des ressources publiques. Nous savons à quoi nous en tenir pour la prochaine fois.
    Des élections libres, un système judiciaire indépendant, une société civile solide et des médias libres: voilà des éléments essentiels à la démocratie, où les prises de décisions responsables et transparentes sont la norme et où les personnes et leurs droits sont respectés et protégés. Tous ces éléments sont pris pour cible en Ukraine, et le Canada a réagi.
    Le Canada déploie beaucoup d’efforts pour apporter une aide aux juges et aux avocats qui sont en faveur de la réforme et pour améliorer l’accès des citoyens ukrainiens ordinaires au système de justice. Avec l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe — l’OSCE —, le Canada formera des juges pour qu’ils appliquent les lois européennes sur les droits de la personne dans leurs salles d’audience. Un nouveau projet aidera l’Ukraine à donner accès à l’aide juridique aux personnes les plus vulnérables, afin qu’elles puissent elles aussi bénéficier du système de justice.
    Comme vous le savez, les bureaux de certains médias indépendants en Ukraine ont été pris pour cible durant les dernières semaines. Dans le cadre d’un projet récemment approuvé, le Canada aidera les journalistes locaux à produire des rapports d’enquête et à les diffuser au moyen des médias sociaux et des postes de télévision régionaux. Nous examinons actuellement d’autres possibilités afin d’appuyer les médias indépendants.
    Pour l’avenir, c’est clair que l’Ukraine aura besoin d’assistance durant la transition économique difficile qui l’attend. Ensemble avec nos partenaires internationaux, nous travaillerons avec le FMI et d’autres institutions financières internationales pour soutenir l’Ukraine au moment où elle s’engagera sur le chemin de la réforme. Grâce au programme d’aide au développement, le Canada finance déjà l’assistance technique du FMI en Ukraine pour la modernisation de la réglementation bancaire et de la politique monétaire.
    J’aimerais terminer en soulignant l’engagement de longue date du Canada à l’égard des Ukrainiens de toutes les régions. Dans le cadre de nos activités de développement, nous collaborons avec des citoyens, des organisations de la société civile, des exploitants agricoles, des entreprises et des fonctionnaires dans toutes des régions de l’Ukraine — à l’est, à l’ouest et au sud. Nous sensibilisons les gens aux approches canadiennes de la gouvernance locale, de la consultation des citoyens, de l’imputabilité, des petites entreprises et de la démocratie. Dans le cadre de nos programmes, nous facilitons la communication et la compréhension entre les gens de ces différentes régions et nous les aidons à établir des règles efficaces, ouvertes, transparentes et responsables.
    Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions au sujet de l'aide au développement que le MAECD fournit à l’Ukraine.
    Merci, monsieur Metcalfe. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Monsieur Bennett, nous sommes heureux de vous revoir. Vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président, messieurs les vice-présidents, distingués membres du comité. C’est un honneur de comparaître à nouveau devant le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
    Aujourd’hui, je vais parler des activités du Bureau de la liberté de religion visant à promouvoir la liberté de religion en Ukraine et des mesures que nous avons prises pour améliorer la situation à cet égard.
    Mes voyages à Kiev au cours du dernier mois m’ont permis de constater directement la situation en Ukraine, particulièrement celle relative à certaines églises. Durant mon bref séjour, deux constats majeurs se sont imposés.
    Les églises jouent un rôle extrêmement important dans la promotion d’un dialogue pacifique et elles agissent comme agents de changement en Ukraine, mais leur capacité d’agir librement est de plus en plus menacée ces derniers mois. Ma rencontre avec Sa Béatitude le patriarche Sviatoslav, chef de l'Église catholique grecque ukrainienne, en a fourni un exemple particulièrement éloquent. Il a décrit en détail les tentatives d’intimidation du gouvernement Ianoukovitch envers l’Église catholique grecque ukrainienne et les menaces que celui-ci a fait planer de retirer à cette église l’autorisation d’exercer ses activités à titre d’organisation religieuse légitime, simplement en raison de sa présence à l’EuroMaïdan.
    Il m’a fait part des menaces répétées que les services secrets ukrainiens brandissent contre les membres de son clergé et les organisations confessionnelles comme l'Université catholique ukrainienne à Lviv, et m'a expliqué jusqu’à quel point le président Ianoukovitch a fait fi de ses tentatives pour initier le dialogue.
    Nous craignons que cette situation ne fasse que s’aggraver si nous ne prenons pas, très bientôt, des mesures. Nous nous inquiétons surtout de la normalisation des relations entre l'Église et l'État en Ukraine, étant donné le rôle des églises et des autres groupes confessionnels dans la société ukrainienne.
     Notre bureau s’est rapidement mobilisé pour rencontrer des intervenants externes et des personnes-ressources du ministère afin de discuter des possibilités d'engagement sur le territoire ukrainien, à l'est et à l'ouest. Nous continuons de participer activement au Groupe de travail sur l’Ukraine, qui est composé des collègues du volet Développement et du volet Affaires étrangères, et nous avons pris des mesures concrètes afin de mettre sur pied des programmes adaptés en fonction des consultations.
    Nous avons également organisé une discussion stratégique fructueuse avec des organisations canado-ukrainiennes dans le but de déterminer comment orienter ces programmes de façon à en maximiser les résultats sur le terrain.
    De plus, nous avons tenu des consultations avec des ONG polonaises qui oeuvrent activement en Ukraine, qui offrent une expertise régionale et qui seront des partenaires précieux durant la mise en oeuvre de nos programmes.
    Sachez que j'ai récemment participé à des réunions à Washington, et nombre d'entre elles portaient sur la situation en Ukraine et les divers efforts réalisés par certains membres des ONG là-bas.
    En terminant, j’aimerais souligner à nouveau l’urgence d’agir. Il faut préserver les droits fondamentaux des citoyens, y compris le droit à la liberté de religion. Je suis cependant convaincu que le ministère et notre bureau peuvent aller de l’avant pour élaborer une stratégie vigoureuse et contribuer à la transition démocratique en Ukraine, dans le cadre de laquelle les églises et autres groupes confessionnels joueront un rôle important.
    Je vous remercie de m'avoir permis de comparaître à nouveau devant le comité, monsieur le président. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
(1545)
    Merci, monsieur.
    Nous allons commencer par Mme Nash. Madame, nous vous souhaitons la bienvenue au comité. Nous entamons la première série de questions. Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à tous les témoins.
    Je sais que le comité demande l'imposition de sanctions depuis un moment. C'est également ce que nous demandons, tout comme d'autres.
    Monsieur Levin, j'aimerais connaître les sanctions économiques imposées par le gouvernement du Canada aux représentants du régime Ianoukovitch qui sont responsables des violations des droits de la personne. Pouvez-vous nous expliquer comment ces sanctions sont appliquées et pourquoi le gouvernement a choisi ces mesures particulières pour l'annonce des premières sanctions imposées?
    Je vous remercie de votre question.
    La première mesure annoncée et mise en place par le gouvernement était une interdiction de voyager qui visait un certain nombre de personnes désignées comme étant responsables des décisions relatives aux actes d'oppression contre les manifestants.
    Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le ministre Baird ont ensuite fait une annonce, alors que la violence sur la place et contre les manifestants s'accentuait.
    Par la suite, le premier ministre a annoncé l'élargissement de l'interdiction de voyager ou des sanctions en vue de restreindre l'accès ou l'entrée d'un plus grand nombre de représentants du régime au Canada.
(1550)
    Excusez-moi, monsieur Levin, mais je voulais connaître les sanctions économiques précises imposées par le Canada aux responsables des violations des droits de la personne. Sont-elles actuellement appliquées? Vous dites dans votre document que le gouvernement déploie des efforts en ce sens. Est-ce bien le cas? Comment s'y prend-il?
    Lorsqu'il a annoncé que les interdictions de voyager seraient élargies, le premier ministre a également signalé que le Canada imposerait un ensemble de sanctions économiques, qui relèvent de la Loi sur les mesures économiques spéciales. Le processus réglementaire visant à invoquer ou à mettre en oeuvre ces sanctions a été achevé au moment où le gouvernement Ianoukovitch tombait. Le processus a vraiment été mis en branle à ce moment précis en raison de l'évolution de la situation en Ukraine.
    Depuis, aucune autre décision n'a été prise quant à l'application de ces sanctions, ce qui a permis au gouvernement de suivre l'évolution de la situation. D'après ce que nous avons pu comprendre, depuis la chute du gouvernement, un nouveau gouvernement a été mis en place et est appuyé par la grande majorité de la population ukrainienne, y compris les manifestants. La question de l'application de ces sanctions est maintenant en suspens ou, du moins, devrait faire l'objet d'une nouvelle décision selon l'évolution de la situation sur le terrain et la pertinence d'aller de l'avant à cette étape-ci.
    Si je comprends bien, ces sanctions ont été annoncées, mais nous n'avons pas eu le temps de les appliquer, étant donné l'évolution rapide des événements, et aucune décision n'a été prise à cet égard.
    C'est exactement ce que j'ai cru comprendre.
    Vous avez raison: on a annoncé les sanctions concernant les voyages avant les sanctions économiques. Pouvez-vous nous dire combien de personnes sont visées par l'interdiction de visa imposée par le gouvernement?
    On a déjà posé une question au sujet de ces chiffres. Excusez-moi, je vais demander à un de mes collègues d'y répondre.
    Je cède la parole à Mike.
    Il faut tenir compte de quelques éléments pour répondre à cette question. D'abord, la communication de ces renseignements soulève des préoccupations relatives à la sécurité des personnes en mission et des agents de CIC et de l'ASFC à l'étranger. Ensuite, et surtout, il faut tenir compte des questions liées à la protection des renseignements personnels. Les noms des personnes visées ne seront donc pas rendus publics.
    Je ne demandais pas leurs noms, monsieur. Je voulais seulement connaître leur nombre.
    Je n'ai pas le chiffre exact en tête.
    Pourrions-nous demander à obtenir ces renseignements par votre entremise, monsieur le président?
    Bien sûr.
    Pourriez-vous également nous parler de l'autorité juridique qui a permis d'établir l'interdiction de voyager?
    Tout à fait. Je vais faire vite, monsieur le président. Commençons par le plus simple. Le gouvernement dispose de divers outils pour imposer l'interdiction de voyager. Nous pouvons signaler dans notre système le nom de certaines personnes, pour sonner l'alarme aux agents des services frontaliers ou aux responsables des demandes de visa temporaire afin qu'ils examinent les dossiers de plus près. Il s'agit d'une façon d'appliquer l'interdiction.
    Nous pouvons également utiliser le point d'entrée à la frontière. Par exemple, toutes les personnes qui veulent entrer au Canada doivent être jugées admissibles au pays, qu'elles détiennent ou non un visa. Divers critères servent à déterminer l'admissibilité au Canada. De façon similaire, des critères servent aussi à déterminer si une personne n'est pas admissible au pays, auquel cas elle sera visée par une mesure de renvoi.
    Bref, nous disposons de divers outils pour imposer une interdiction de voyager.
    Il vous reste 15 secondes.
    J'aimerais simplement remercier le comité de m'avoir donné l'occasion de participer à cette importante discussion. Je vous en suis reconnaissante.
    Merci, madame Nash.
    Monsieur Goldring, vous avez sept minutes.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui.
    De temps à autre, la question des droits linguistiques est soulevée. Selon ce que je comprends, certains changements aux lois linguistiques ont été mis en oeuvre dans le cadre des modifications apportées à la constitution. Étant donné la polarisation entre les ukrainophones à l'ouest et les russophones à l'est, cette question semble poser problème. Au Canada, nous avons plus ou moins les mêmes préoccupations linguistiques d'une région à l'autre du pays, et nous y avons répondu par des lois.
    Étant donné les efforts consacrés à d'autres questions en Ukraine, comme les questions parlementaires et démocratiques, et les tribunaux, est-ce qu'on travaille à la question de l'équilibre linguistique pour rassurer la population? La question semble particulièrement importante en Crimée, qui est principalement russe. A-t-on étudié ou proposé des lois qui pourraient rassurer la population et répondre à certaines préoccupations linguistiques?
    Quelles seraient-elles?
(1555)
    Merci, monsieur Goldring.
    D'après ce que nous avons compris, l'une des premières mesures législatives prises par le nouveau parlement a été l'abrogation d'une loi adoptée plusieurs années auparavant sur le statut et l'utilisation de la langue russe à titre de deuxième langue officielle en Ukraine, ou à peu près. Les responsables de notre ambassade à Kiev ont abordé la question avec divers interlocuteurs, des représentants du nouveau gouvernement et des membres de l'opposition.
    Selon nous, la loi a été abrogée parce que certains se préoccupaient non pas principalement de sa nature, mais plutôt de la façon dont elle avait été adoptée sous l'administration Ianoukovitch, qui ne respectait pas pleinement la pratique législative ukrainienne. Cela étant dit, pour aborder le fond de votre question, le gouvernement canadien a fortement insisté sur l'importance de l'esprit d'inclusion et de l'unité nationale parmi tous les Ukrainiens dans le cadre de ses interactions avec le nouveau gouvernement ukrainien et les divers acteurs politiques en Ukraine. Votre remarque à cet égard est très pertinente. Avec nos collègues, nous pourrions examiner toute la gamme de domaines où nous pourrions offrir une aide technique à nos interlocuteurs ukrainiens au fil de l'établissement de leur nouveau gouvernement avec les autorités ukrainiennes et déterminer si l'expérience canadienne pourrait être applicable et utile pour les Ukrainiens dans ce dossier en particulier.
     Si vous envisagez cette orientation, j'ai l'impression qu'il y a eu moins d'interventions de la part des différents groupes, des hommes et femmes politiques en visite — bref, de la part de n'importe qui. L'attention a surtout porté sur la partie occidentale du pays, où l'on parle l'ukrainien. Je présume que le comité ukrainien va s'emparer de cette question et parcourir le pays — surtout la partie orientale du pays, à Poltava, à Kharkiv, à Donetsk et, assurément, en Crimée —, ce qui donnerait une bonne raison... cela permettra au moins de rassurer les nombreuses personnes qui craignent qu'un nouveau gouvernement ukrainien centralisé ne soit pas particulièrement chaud à l'idée d'exprimer et d'appuyer les inquiétudes quant à l'usage du russe. Autrement dit, j'ai tendance à penser qu'il s'agit là d'une question fondamentale qui doit être résolue et d'une préoccupation qui doit être dissipée avant même de parler de gouvernance.
    Monsieur le président, est-ce que j'ai encore un peu de temps?
    Il vous reste deux minutes.
    J'ai deux minutes. Dans ce cas, je vais aborder un autre sujet, la question économique, dont nous n'avons pas encore parlé.
    D'après ce que je comprends, l'Ukraine produit maintenant le tiers de son propre gaz. En parlant avec des cadres de l'industrie pétrolière, j'ai appris que le pays a d'importantes réserves et qu'il pourrait devenir un exportateur net d'ici sept ans, en plus de répondre à sa propre demande.
    Si l'Ukraine a vraiment cette capacité, a-t-on déjà envisagé de lui demander d'hypothéquer ses réserves en échange des liquidités dont elle a cruellement besoin maintenant? Une approche de la sorte a été adoptée, avec beaucoup de succès, dans des pays riches en ressources comme le Ghana, en Afrique. Les liquidités générées par la mise en hypothèque des ressources ont permis à ces pays de se doter d'une infrastructure et de mettre leur gouvernement sur la bonne voie.
    Les ressources de l'Ukraine ont-elles l'ampleur qu'on leur prête et, le cas échéant, pourquoi n'envisage-t-on pas cette méthode de mise en hypothèque des ressources en échange des liquidités dont le pays a désespérément besoin en ce moment?
(1600)
    Merci, monsieur Goldring.
    En ce qui concerne votre point précédent sur la dualité linguistique, permettez-moi de vous remercier de votre proposition et de vous assurer que nous allons l'examiner de près. Je crois que c'est un point important qui nous permettra de progresser.
    Pour ce qui est des réserves de gaz, je dois vous avouer que ce n'est pas un domaine que je maîtrise particulièrement bien. Les investisseurs du secteur privé, dont les grandes sociétés pétrolières, ont entrepris des projets d'exploration en sol ukrainien, notamment dans la partie occidentale du pays, afin de localiser les réserves, incluant les réserves d'huile de schiste, et il semble effectivement qu'il y ait d'assez importants gisements. Cela dit, je ne serais pas en mesure de vous donner de chiffres quant à la taille de ces réserves.
    Pourrait-on avoir des chiffres là-dessus? Si les réserves sont considérables, c'est une donnée qui peut tout changer. Si elles ne le sont pas, nous devrions au moins le savoir.
    Nous nous pencherons sur la question, monsieur le président, et nous veillerons à communiquer au comité les meilleures évaluations possible quant à la taille présumée de ces réserves. Chose certaine, elles sont assez importantes pour retenir l'attention des acteurs les plus puissants de l'industrie.
    Comme vous le savez, l'Ukraine se trouve dans une situation assez désespérée sur le plan des paiements extérieurs. Alors, des idées comme celle-là... je veux dire, il faudra un financement extérieur énorme, alors j'estime que votre proposition d'utiliser des sources de revenus futurs comme garantie est une idée intéressante que l'on devrait peut-être examiner de plus près.
    Merci, c'est tout le temps que nous avions.
    Nous allons laisser la parole à M. Garneau, pour sept minutes.
     Je vous remercie tous de votre présence. Veuillez ne pas vous offusquer si je vous coupe la parole, mais j'ai beaucoup de questions à poser. La première s'adresse à vous, monsieur Levin.
    Le président Obama a communiqué avec le président Poutine. Notre premier ministre s'est-il entretenu avec le président Poutine au sujet de l'importance de ne pas s'immiscer dans le processus de démocratisation en cours, lequel mènera aux prochaines élections?
    Monsieur Garneau, pour autant que je sache, le premier ministre n'a pas encore parlé à M. Poutine. Le premier ministre a fait une série d'appels de conscientisation à divers partenaires, mais il n'a pas encore parlé à M. Poutine.
    Nous avons eu des entretiens avec les hauts fonctionnaires du gouvernement russe, mais pas encore à l'échelon du premier ministre.
    Merci.
    Vous n'aviez pas l'air de connaître le nombre de personnes qui figuraient sur la liste d’interdiction de voyager, mais je présume qu'il s'agit des mêmes personnes qui ont vu leurs avoirs bloqués en vertu des sanctions économiques. J'ai deux questions à ce sujet.
    Le Canada a-t-il dressé sa propre liste, ou se sert-il plutôt de la liste de quelqu'un d'autre?
    De plus, je dois avouer que je suis un peu surpris que nous n'ayons pas mis en oeuvre les sanctions, car c'est exactement à ce moment-ci que M. Ianoukovitch et ses partisans, son cercle rapproché, pourraient tenter de prendre des dispositions pour retirer ces avoirs de sorte qu'ils ne puissent pas être saisis. Pouvez-vous expliquer la logique de cette décision?
    En ce qui concerne votre première question sur l'élaboration de la liste, monsieur Garneau, la réponse est oui, le Canada a élaboré sa propre liste. Je me dois toutefois de préciser que les listes de ce genre sont élaborées en coopération avec nos principaux alliés et partenaires, et que ces derniers sont tenus au courant. C'est l'idée qui sous-tend les interdictions de voyager. Je vais laisser la deuxième partie...
    Savez-vous combien de personnes figurent sur cette liste? Quelle en est la longueur?
    Monsieur le président, c'est la question à laquelle nous nous sommes engagés à donner suite.
    Vous ne le savez pas non plus. D'accord, merci.
    J'en viens à ma deuxième question: pourquoi avez-vous mis les sanctions en suspens à ce moment précis?
     Je crois, monsieur Garneau, que l'élaboration d'initiatives entourant les sanctions — l'interdiction de voyager et la possibilité de sanctions économiques visant les avoirs — s'est faite en étroite collaboration et en consultation avec nos principaux partenaires, notamment avec les États-Unis et l'Union européenne. Nous cherchions à coordonner étroitement nos efforts avec les leurs, en partie parce que l'expérience sur la scène internationale nous a montré que l'efficacité de telles sanctions est à son apogée lorsqu'elles sont appliquées par un grand nombre de parties. Je ne dis pas que les applications unilatérales n'ont pas leur importance, car elles ont quand même un effet sur le plan politique. Mais pour ce qui est de l'effet économique réel des sanctions économiques — puisque c'est de cela que nous parlons —, une application moins large aura moins d'effet.
    Dans le cas qui nous intéresse, le cadre examiné n'était pas le même que pour les sanctions du Conseil de sécurité des Nations Unies. Nous avons tenu plus de consultations informelles avec nos partenaires. Les discussions avec l'Union européenne et Washington ont porté, d'une part, sur la volonté d'invoquer des sanctions comme moyen d'inciter le gouvernement Ianoukovitch à se conduire de façon responsable et, d'autre part, sur la nécessité de ne pas précipiter les choses au point de tuer dans l'oeuf les possibilités d'ententes, d'accords et d'une résolution pacifique du conflit, sachant que tout cela se déroulait très vite et qu'il était souvent difficile de prendre des décisions.
    Selon moi, c'est ce qui explique les décisions du gouvernement quant au choix du moment de ses interventions.
(1605)
    Merci.
    Monsieur Metcalfe, en parlant des observateurs, vous avez précisé qu'il y en avait eu plus de 500 dans le passé. Le gouvernement a-t-il pris une décision? Le Parti libéral a aussi recommandé qu'il y ait au moins 500 observateurs sous la direction d'un éminent Canadien et, à cet égard, beaucoup de noms me viennent à l'esprit.
     Nous aimerions savoir si le gouvernement a l'intention d'aller de l'avant avec cette mesure et quand il compte le faire, car, de toute évidence, certains observateurs devront partir sous peu. Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet?
    Je vais laisser ma collègue Tamara répondre à cette question, puisque c'est son programme qui est chargé de la surveillance des élections.
    Très bien.
    Le ministère des Affaires étrangères procède actuellement à la définition d'options pour une mission d'observation. La visite attendue cette semaine du ministre des Affaires étrangères nous en dira plus long sur la façon dont les élections se dérouleront, ce qui nous permettra de mettre la touche finale aux options qui guideront le ministre dans le choix définitif de la marche à suivre. Nous nous attendons bien sûr à assurer une présence très forte, et nous examinons quelles seraient les meilleures façons d'y parvenir.
    Merci.
    Monsieur Metcalfe, vous avez fait mention du FMI. De toute évidence, il est absolument essentiel que les pays viennent au secours de l'Ukraine sur le plan économique. Nous sommes tous au courant de la situation financière qui sévit là-bas.
    Le Canada a-t-il l'intention de contribuer financièrement au dépannage de l'Ukraine par l'intermédiaire du FMI? Est-ce son intention, ou cherche-t-il à faire quelque chose d'autre séparément? Quelle sorte de négociation est en cours en ce moment? La négociation est évidemment un élément clé de cette opération de secours. Sans elle, tout risque de tomber en morceaux. Tout ce que vous pourrez nous dire à ce sujet nous sera utile.
    Bien sûr. Je vais confier à Matt le soin de vous répondre.
    Je me contenterai de vous dire que nous travaillons actuellement avec le FMI en ce qui concerne le soutien technique et que nous préparons les réformes qui devront être mises en oeuvre dans l'éventualité d'un recours à un programme de type FMI. Je laisse la parole à Matt, qui pourra vous parler de la situation économique.
    Merci, monsieur Garneau.
    Vous avez tout à fait raison. La situation financière de l'Ukraine est maintenant au coeur des préoccupations de nos partenaires à l'échelle internationale et des discussions avec les autorités ukrainiennes. L'Ukraine est aux prises avec une conjoncture économique très difficile, notamment en ce qui concerne ses besoins de financement extérieur. Elle a clairement besoin d'une aide financière internationale à grande échelle. Selon le Canada — et, à vrai dire, tous nos partenaires abondent dans le même sens —, le FMI doit nécessairement être la pièce centrale de cette réponse. Le recours au FMI s'explique en partie par l'ampleur du financement nécessaire, mais aussi parce que l'aide financière extérieure doit être associée au type de réformes qui assureront la viabilité de l'économie ukrainienne et qui mettront le pays sur la voie d'une robuste croissance pour l'avenir. Sans ces réformes, l'aide financière sera tout simplement perdue.
    En fait, le dossier de l'Ukraine au FMI n'est pas reluisant. Il y a eu des ententes accompagnées de réformes auxquelles l'Ukraine n'a pas su s'astreindre, ce qui s'est soldé, entre autres raisons, par une économie ukrainienne déficiente.
    Le Canada appuie sans réserve l'application d'un programme solide par le FMI. Nous sommes actuellement en pourparlers avec la direction du FMI et d'autres tribunes. Nous discutons régulièrement avec nos principaux partenaires de la façon optimale de faire avancer ce dossier rapidement. Il est convenu que ce type de réponse ne doit pas traîner, et les représentants du FMI ont déjà noué des liens avec le nouveau gouvernement ukrainien afin de discuter des grandes lignes d'un possible programme de soutien.
(1610)
    Merci.
    C'est tout le temps que nous avons. Nous allons commencer notre deuxième série de questions, par tranche de cinq minutes. Je crois que nous aurons juste assez de temps pour cette série, c'est-à-dire pour trois intervenants. Nous commencerons par Mme Brown, suivie de Mme Laverdière, et nous reviendrons, pour finir, aux conservateurs.
    Madame Brown.
    Merci pour vos exposés. Votre présence ici aujourd'hui arrive à point nommé. Nous surveillons tous très attentivement ce qui se passe en Ukraine.
    Je sais que le Canada est présent en Ukraine depuis un bon moment. J'ai d'ailleurs une liste de tous nos projets en cours dans ce pays, et bon nombre d'entre eux portent sur la gouvernance. Vous avez dit qu'une magistrature indépendante était l'une des choses très importantes dont le pays devait se doter, parce qu'une telle entité fait partie des réformes qui doivent être mises en place. J'ai d'ailleurs été très heureuse de vous entendre parler des médias indépendants.
    Monsieur Metcalfe, je pense que c'est vous qui avez dit que nous examinons actuellement d'autres façons d'appuyer les médias libres. Pourriez-vous nous en dire plus long à ce sujet? Je faisais partie de la délégation qui s'est rendue là-bas il y a deux ans. L'un des groupes que nous avons rencontrés représentait les médias indépendants. Les membres du groupe nous ont fait part des grandes difficultés qu'ils avaient à trouver des revenus publicitaires pour leur permettre de rester en ondes. J'ai fourni un appui financier à une station de radio indépendante, car je croyais tout simplement que c'était la bonne chose à faire. Je suis heureuse d'apprendre que certains projets sont envisagés. Je me demandais si vous pouviez dire un mot là-dessus.
    Monsieur Levin, vous avez parlé du FMI et d'une approche coordonnée pour aider l'Ukraine. Les alliés occidentaux ont-ils tous les mêmes objectifs? Avons-nous trouvé un terrain d'entente susceptible d'unifier notre démarche? J'aimerais que vous répondiez tous les deux à ces questions.
    Bien sûr. Comme vous l'avez dit, les médias jouent un grand rôle pour faire avancer la démocratie. Nous avons des projets en cours de réalisation, et nous comptons les mettre en oeuvre sous peu. Nous travaillons aussi avec les journalistes, mais pour ce qui est du futur immédiat, nous nous préoccupons surtout de leur protection. Ils ont été ciblés par le régime ainsi que par des personnes qui cherchent à leur nuire par des cyberattaques et tout le reste. Nous cherchons à assurer la sécurité de l'information qu'ils ont entre leurs mains et à leur donner les moyens dont ils ont besoin pour rapporter les nouvelles, pratiquer le journalisme d'enquête et préparer de vrais reportages, plutôt que de prendre les choses pour argent comptant. Nous souhaitons qu'ils soient en mesure de faire des reportages en se servant des médias sur le Web et qu'ils puissent joindre leurs concitoyens là où les médias sont susceptibles d'être biaisés ou désabusés, si je puis m'exprimer ainsi.
    Notre travail auprès d'eux vise aussi à encourager la population à invoquer les lois sur l'accès à l'information et à promouvoir des normes d'éthique et de professionnalisme. Comme je le disais, une grande partie de ces mesures portent sur la protection des journalistes et la façon de protéger leurs données et leurs renseignements contre les cyberattaques. Ces aspects font aussi partie du tout.
    Ces initiatives sont-elles bien reçues?
    De la part de qui?
    Du pays dans son ensemble et des journalistes en particulier.
    J'étais là-bas en novembre et j'ai organisé une table ronde avec un certain nombre de journalistes. Or, la protection du journalisme était une question centrale à ce moment-là. Comme je le disais, l'une de leurs plus grandes préoccupations était les cyberattaques dont ils étaient la cible. Ils voulaient assurément qu'on leur donne une aide accrue à ce chapitre.
    A-t-on proposé une loi quelconque pour leur donner une certaine forme de protection à cet égard?
    Je ne peux pas vous répondre pour l'instant, mais je tenterai de vous communiquer l'information plus tard.
    Ce serait intéressant de le savoir.
    Monsieur Levin.
    Merci.
    En réponse à la deuxième partie de la question, le consensus qui existe entre les principaux acteurs internationaux est impressionnant. L’Union européenne nous a fait part, ainsi qu’à Washington et aux principaux États de l’UE, de l’importance d’une intervention immédiate du FMI, en reconnaissant bien sûr qu’un gouvernement ukrainien doit être en place pour demander une telle intervention et pour avoir la capacité de s’entendre avec le FMI sur un programme de réformes et de le mettre en oeuvre.
    Je crois qu’un très large consensus rassemble les principaux alliés sur cette question.
    Qui, selon vous, prendra l’initiative? Pensez-vous que ce sera l’Union européenne ou y contribuerons-nous tous à parts égales?
    Dans votre déclaration, vous avez parlé d’environ 20 millions de dollars qui serviront au renforcement des capacités. Quel rôle joue le Canada dans tout cela?
    Vous avez environ 30 secondes pour répondre.
(1615)
    En ce qui concerne l’intervention du FMI, je pense qu’elle est multilatérale par définition. Ceux qui parmi nous sont des membres importants du FMI et qui siègent au conseil d’administration joueront un rôle pour s’assurer que l’intervention soit appropriée et à un rythme convenable.
    Je ne sais pas, Dave, comment cela est relié aux autres programmes d’aide offerts par certains pays, le Canada et d’autres pays qui acceptent et soutiennent l’intervention, qu’il s’agisse du fonds fiduciaire ou des conseils que nous donnons au gouvernement pour l’aider à composer avec…
    Il ne vous reste plus de temps. Vous pouvez y revenir à la deuxième série de questions.
    Madame Laverdière, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup monsieur le président.

[Français]

    Je vous remercie tous d'être ici parmi nous.
    J'aimerais tout d'abord m'excuser d'être un peu en retard. J'ai été retenue à la Chambre.
    Cette question de l'appui financier que le Canada et d'autres pays peuvent fournir à l'Ukraine me préoccupe aussi beaucoup. Vous avez parlé d'une question de timing, comme on dit en bon français, c'est-à-dire qu'il faut attendre qu'il y ait un gouvernement vraiment en place avant que le Fonds monétaire international puisse procéder. Je me demande donc ce qui va se passer au cours des prochaines semaines.
    Merci, madame Laverdière. Je vais répondre en anglais, si vous me le permettez.
    Il n'y a pas de problème.

[Traduction]

    Bien sûr, personne ne sait exactement, mais je crois que ce qui se passera probablement très bientôt et en fait est en train de se passer en ce moment même. Le Parlement a nommé aujourd’hui un nouveau gouvernement. Les membres du nouveau gouvernement, notamment le ministre des Finances, le gouverneur de la banque centrale, devraient entrer officiellement en fonction dès demain.
    C’est une étape essentielle du processus d’officialisation des négociations d’un accord avec le FMI. En fin de compte, l’aide du FMI doit faire suite à un accord préalablement conclu entre un gouvernement et le FMI en tant qu’organisation.
    Cela dit, les discussions sont déjà entamées. Des personnes occupent des postes dans des ministères importants, donc les discussions ont déjà commencé. Personne ne sait à quoi elles aboutiront, mais il est tout à fait plausible de penser qu’elles se termineront incessamment en raison du très large soutien exprimé par la communauté internationale et des premières indications du gouvernement ukrainien signifiant que l’accord est indispensable.

[Français]

    Je vous remercie.
    J'ai une autre question, qui porte sur les visas.
    Vous avez mentionné qu'il n'était pas possible de donner les noms des individus qui sont visés par l'interdiction de voyager au Canada. Cependant, quand on a imposé des sanctions à la Syrie, le nom des gens visés par ces sanctions faisaient même partie des communiqués de presse. J'essaie de comprendre la différence.

[Traduction]

    Je pense que la différence fondamentale au sujet des sanctions… et j’espère que les représentants du MAECD qui sont experts en la matière me corrigeront si je me trompe.
    Les sanctions sont souvent imposées par décret et, par conséquent, les règlements sont publiés, donc rendus publics. Les règles relatives aux déplacements, qui elles ne sont pas rendues publiques, sont mises en oeuvre au niveau opérationnel par des ministères, le CIC, les partenaires et l’ASFC.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je serai brève, car il ne me reste qu'une petite minute. Je suis très heureuse de voir que la directrice générale du Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction est ici.
     On a mentionné l'observation d'élections, mais je me demandais si le Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction avait d'autres engagements envers Ukraine? Pourrait-il jouer un rôle potentiel en Ukraine?
    Je vous remercie.
    Je vous remercie de votre question.
    Le Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction dispose de plusieurs mécanismes pour appuyer la démocratie et la stabilisation. Il y a le Fonds canadien d'initiatives locales, que l'on utilise actuellement en Ukraine pour appuyer l'aide médicale d'urgence, mais les montants sont peu élevés, soit de 5 000 $ à 25, 000 $.
    Pour ce qui est du Fonds pour la paix et la sécurité mondiales, on verra plus tard, probablement après l'élection du président et la formation du gouvernement, quelles sont les possibilités dans les secteurs de la démocratie, de la participation civile et de la sécurité. Cela dépendra des besoins, qui seront mieux définis à ce moment-là.
(1620)

[Traduction]

    aIl existe des possibilités que nous allons certainement explorer. Cependant, pour l’instant nous accordons la priorité aux élections.
    Merci madame Laverdière.
    Nous allons terminer avec M. Anderson. Vous avez cinq minutes.
    Je n’ai que deux ou trois questions.
    Je me demande si vous pourriez nous dire un mot sur la gravité des préoccupations exprimées au sujet de certaines menaces à l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Je voudrais aussi parler un peu des relations qu’entretient actuellement l’Ukraine avec l’OTAN et l’UE. Pouvez-vous nous donner quelques informations sur cette question?
    Vous pouvez commencer par l’intégrité territoriale. Notre gouvernement s’est clairement prononcé en faveur du maintien de l’unité et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Pouvez-vous nous en parler un peu?
    Le gouvernement a dit clairement qu’il est essentiel que toutes les parties, tous les partenaires de l’Ukraine et tous les pays voisins de ce pays respectent et soutiennent l’intégrité territoriale de l’Ukraine. La réouverture des frontières poserait énormément de problèmes et menacerait la stabilité de l’Ukraine... il faudrait profiter de l’occasion pour vraiment renforcer la démocratie et accroître la prospérité de l'Ukraine.
    Nous avons relevé que le ministre russe des Affaires étrangères a réaffirmé hier dans une déclaration publique que la Russie s’était engagée à respecter l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Washington, tous nos proches partenaires de l’Union européenne et notre pays ont souligné l’importance du respect de l’intégrité territoriale, un point de vue qui est largement partagé au sein de la communauté internationale, et nous continuerons à le faire. Nous suivons le développement de la situation, mais nous croyons qu’elle évoluera dans ce sens.
    Je voudrais parler un peu de l’UE et de ses relations avec l’Ukraine. Je pense que l’UE a été également surprise par la décision prise par Ianoukovitch à la fin de l’automne. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est de ces relations et ce qu’elles deviendront à court et moyen terme?
    Après le sommet de Vilnius de la fin novembre au cours duquel le gouvernement de Ianoukovitch a annoncé clairement sa décision de ne pas signer l’accord d’association négocié, l’Union européenne, sans vouloir parler en son nom, a maintenu qu’en dépit de cette décision l’accord d’association restait sur la table. Durant les journées les plus difficiles de la crise et tout au long des derniers jours durant lesquels un nouveau gouvernement était formé, l’UE a confirmé de nouveau sa volonté de reprendre les pourparlers et de négocier pour la ratification d’un accord d’association.
    En ce qui concerne la position de l’Ukraine, des personnalités politiques importantes — pas encore des ministres puisque cela a eu lieu avant que quiconque ne soit nommé —, notamment le président intérimaire, ont exprimé leur volonté de poursuivre les discussions pour une restauration très rapide de l’accord.
    Je pense qu’il est encore vraiment possible de conclure à court terme l’accord d’association et l’accord de libre-échange vaste et exhaustif faisant partie de l’accord global entre l’UE et l’Ukraine. Cela dit, l’Union européenne et l’Ukraine doivent mener ces négociations et nous ne pouvons pas vraiment imposer quoi que ce soit à ce niveau.
    Sachant qui fait partie du nouveau gouvernement, pensez-vous que les membres du gouvernement accepteront d’ouvrir ces discussions?
(1625)
    J'ai vu la composition du nouveau gouvernement, en tout cas, je sais qui est le premier ministre et qui est le ministre des Affaires étrangères. Ce dernier était, durant ses 20 ans de carrière dans les milieux universitaire et politique ukrainiens, un fervent partisan de l’intégration de l’Ukraine dans l’Union européenne. Les autres ministres importants ont des liens avec un mouvement politique qui a défendu les aspirations euro-atlantiques de l’Ukraine. Je m’attends donc à ce que le nouveau gouvernement s’engage fermement dans cette voie.
    Merci, c’était tout le temps dont nous disposions.
    Je tiens à remercier les témoins de leur présence. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir pris le temps de nous présenter un exposé sur l’Ukraine.
     Nous allons faire une pause pour vous permettre de quitter la table. Nous accueillerons les prochains témoins ici et reprendrons nos travaux à 16 h 30 exactement.
    Merci beaucoup.
(1625)

(1630)
    Je souhaite la bienvenue aux deux témoins qui sont de nouveau ici. C’est un plaisir de vous voir.
    De la Chambre de commerce Canada-Ukraine, nous accueillons M. Zenon Potoczny.
    Du Congrès ukrainien canadien, Taras Zalusky, directeur exécutif au Bureau national. Bienvenue.
    Je crois comprendre que vous allez tous les deux faire des déclarations préliminaires. Commençons par vous, monsieur, puis ce sera votre tour, Taras. Nous inviterons ensuite les membres du comité à vous poser des questions. Nous terminerons probablement à 17 h 15. Merci.
    Merci monsieur le président de nous avoir invités à prendre la parole.
    Je voudrais dire quelques mots sur la Chambre de commerce Canada-Ukraine afin que vous en connaissiez l’historique.
    La chambre est une initiative du secteur privé et œuvre à faciliter les relations entre l’Ukraine et le Canada en organisant et en parrainant des missions commerciales, des séminaires et des conférences commerciales, en plus de donner aux milieux des affaires canadiens et ukrainiens accès à des secteurs spécifiques d’expertise opérationnelle et à des services d’experts-conseils.
    Je voudrais dire à M. Goldring que les réserves ukrainiennes de gaz de schiste d’environ 42 billions de pieds cubes, ce qui est considérable, sont les troisièmes plus importantes en Europe. Des compagnies telles que Chevron, Exxon et Shell négocient actuellement des accords commerciaux pour la production, c’est comme si l’on hypothéquait les ressources afin de réaliser des projets.
     Aujourd’hui, je voudrais plus ou moins parler des besoins économiques et financiers des provinces d’Ukraine.
    Premièrement, j’attire votre attention sur les conditions d’adhésion de l’Ukraine au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires en tant qu’État non détenteur d’armes nucléaires. Comme vous le savez, le président Clinton, le président Eltsine et le premier ministre Major ont signé ce traité en décembre 1994 à Budapest. Ce faisant, les trois pays ont garanti, et c’est ce qui est important, la liberté économique de l’Ukraine et la non-ingérence dans ses affaires économiques.
    Comme vous l’avez sans doute appris il y a quelques jours, la Russie a une fois de plus bloqué les importations de porc ukrainien. Beaucoup d’autres importations avaient été déjà prohibées. Le Canada devrait, bien sûr, rappeler aux trois pays, Russie, États-Unis et Royaume-Uni, ce qu’ils ont signé et les garanties qu’ils ont offertes à l’Ukraine. Je souhaite que le Canada exerce des pressions en la matière.
    La Russie est aussi membre de l’OMC maintenant et doit respecter ses engagements. Le Canada doit également adopter une position ferme sur cette question. Les Russes ne peuvent tout simplement pas faire ce que bon leur semble en Ukraine.
     Deuxièmement, l’Ukraine est essentiellement revenue à la case départ et entame le très difficile processus de restructuration de son gouvernement et des organismes gouvernementaux. Le Canada peut jouer un rôle crucial en offrant des conseils à l’Ukraine sur le plan de la rationalisation de ces organismes et du respect des normes occidentales et en envoyant des consultants et des conseillers qui travailleraient avec les ministères et les divers organismes gouvernementaux pour réformer des politiques et en élaborer de nouvelles. L’Ukraine a besoin de l’engagement concret du Canada.
     L’une des raisons de l’échec du gouvernement de Ioutchenko après la révolution orange est que ce gouvernement n’avait ni conseillers ni consultants pour l’aider. N’oublions pas que l’Ukraine a été durant de longues années sous le régime soviétique et qu’elle n’a malheureusement pas autant d’experts dans ces domaines qu’on pourrait le croire.
    Troisièmement, l’Ukraine a absolument besoin d’un plan d’aide financière qui pourrait être calqué sur le plan Marshall. Il est nécessaire que des partenaires occidentaux tels que l’UE, les États-Unis, le Canada et le Fonds monétaire international interviennent immédiatement.
    L’Ukraine a été pratiquement ravagée par le régime de Ianoukovitch et le pays est en faillite. L’économie s’effondre et la monnaie est en chute libre. Par exemple, aujourd’hui, la devise a clôturé à 10,5 hryvnias pour un dollar, alors qu’il y a deux semaines elle était d’environ 8 hryvnias pour un dollar.
     Selon les estimations du nouveau gouvernement, l’Ukraine aura besoin d’une aide financière de 30 à 35 milliards de dollars. Cette aide sera bien sûr liée à des réformes claires et convenues. Par ailleurs, l'économie doit être modernisée pour devenir concurrentielle. L'aide offerte permettra aussi à l’Ukraine de survivre à l’embargo et aux représailles économiques russes, particulièrement dans le secteur énergétique.
     Dans le cadre de ce plan, le Canada doit jouer le rôle d'ambassadeur et de bailleur de fonds visible.
(1635)
    Au cours des deux prochaines années, l’Ukraine va vendre environ 2 milliards de dollars d’obligations. Je crois que la moitié de ce montant sera versée au FMI. Il faut que le FMI restructure le plus tôt possible cette dette.
    Pour ce qui est du soutien à la stratégie économique, dans le cadre des efforts visant à renforcer l’économie de l’Ukraine, nous demandons au gouvernement canadien d’envisager la mise sur pied d’un groupe de réflexion ou d’un conseil consultatif qui conseillerait le gouvernement ukrainien sur les réformes économiques devant être mises en œuvre. Des organisations, telles que l’ACDI, sont actives en Ukraine. Nous croyons toutefois que l’ACDI ne devrait pas se limiter au domaine civique. L’agence devrait aussi s’intéresser au développement des petites et moyennes entreprises, ce qui permettra de promouvoir l’agrandissement de la classe moyenne ukrainienne qui est pratiquement inexistante. Il y a d’un côté des oligarques et de l’autre énormément de pauvres.
     Il y a environ un an ou un an et demi, nous avons parlé à des représentants de l’ACDI et un appel de propositions devait être lancé pour élaborer un programme visant le développement des petites et moyennes entreprises, mais rien n’a encore été fait. J’estime qu’il est temps de lancer un tel appel de propositions et de le faire le plus rapidement possible.
     La Chambre de commerce Canada-Ukraine pourrait y participer. Notre organisation compte plus de 110 spécialistes en affaires dont un tiers travaillent actuellement au Canada et en Ukraine. Ils connaissent donc la situation dans les deux pays et pourraient s’avérer très utiles pour développer ce programme en collaboration avec l’ACDI.
    Enfin et surtout, mesdames et messieurs, je suis allé plusieurs fois à la place Euromaïdan. J’étais aux barricades et j’ai vu les gens qui y étaient. Comme vous le savez, un grand nombre d’entre eux ont perdu la vie pour une Ukraine libre et démocratique.
     Ne permettons pas à la Russie d’acheter une nouvelle fois l’Ukraine pour 15 milliards de dollars comme elle a presque réussi à le faire et de supprimer toutes les personnes de bonne volonté qui luttent pour la liberté.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Zalusky.
    Le peuple ukrainien a payé un prix exorbitant pour sa liberté. Il a protégé ses droits inaliénables au prix de vies humaines. Les nouvelles autorités ont la responsabilité de justifier la confiance que les gens réunis sur la place Maïdan ont placée en elles.
    Le Congrès ukrainien canadien incite fortement les nouvelles autorités d'Ukraine à consulter les dirigeants de la société civile à mesure que la situation évolue. Nous faisons remarquer que le cours de l'histoire de l'Ukraine se décidera dans les jours, les semaines et les mois à venir. L'établissement d'un nouveau gouvernement n'est que le début du processus d'édification d'un pays libre et démocratique, et bien du travail et des défis nous attendent.
    Le Congrès ukrainien canadien et la communauté ukrainienne du Canada sont prêts à accorder leur soutien au peuple d'Ukraine à ce point tournant de son histoire.
    Je crois comprendre que les témoins précédents ont fourni beaucoup d'information; j'aimerais donc me montrer très concret dans mes propos. J'ai une douzaine de recommandations sur ce qui peut être fait pour aider à bâtir l'Ukraine.
    Je crois d'abord qu'il faut créer un gouvernement qui sera inclusif et acceptable pour la vaste majorité des Ukrainiens, ce qui fait suite au point soulevé précédemment par M. Goldring et d'autres intervenants. Il sera nécessaire de stabiliser immédiatement l'agitation politique en Crimée et de normaliser les relations avec la Russie. Les échanges commerciaux de l'Ukraine avec la Russie s'élèvent à 30 milliards de dollars par année, alors que ceux avec l'Union européenne totalisent 40 milliards de dollars, et il n'y a pas à choisir entre les deux. Bien franchement, le fait que le Kremlin ait menacé de fermer ses portes aux exportations de l'Ukraine quand cette dernière a indiqué son souhait de signer un accord avec l'Union européenne est la même chose que si les Américains avaient arrêté à la frontière toutes les exportations venant du Canada quand le premier ministre a signé l'accord commercial avec l'Union européenne. Cela ne tient pas debout.
    Nous considérons que le régime fiscal de l'Ukraine doit être réformé afin de lui conférer une certaine progressivité. À l'heure actuelle, la plupart des investissements financiers directs d'Ukraine viennent de Chypre, un paradis fiscal que les gens utilisent pour acheminer des fonds et siphonner de l'argent de l'État et de leurs propres entreprises pour éviter de payer de l'impôt. En 2012, la dernière année sur laquelle j'ai des statistiques, ce stratagème a atteint 40 milliards de dollars.
    Les nouvelles autorités devront trouver des fonds pour s'assurer que le secteur public continue d'être payé. Nous parlons d'infirmières, de médecins, d'enseignants, de soldats, des forces armées et de la police. C'est une bonne pratique opérationnelle. Tout d'abord, c'est important pour assurer la paix, l'ordre et le bon gouvernement, comme on aime le dire au Canada, mais c'est aussi très important pour mettre fin à la corruption endémique qui fait qu'on ne peut obtenir des soins de santé ou convaincre la police de la route de nous laisser partir à moins de verser un pot-de-vin. C'est certainement une question à laquelle il faut s'attaquer.
    L'Ukraine doit mettre un frein à la corruption tentaculaire, et nous devons l'aider à agir rapidement et stratégiquement. Il faut accorder la priorité au système judiciaire et aux oligarques, mais aussi l'approche descendante où personne n'échappe à la portée de la loi.
    En ce qui concerne la réforme agraire, l'Ukraine impose encore un moratoire sur l'achat de terres agricoles et devra étudier très soigneusement la question pour voir comment elle réglera cette situation dans l'avenir. Nombreux sont ceux qui considèrent ces terres comme des sources possibles de revenus.
    M. Ianoukovitch, lors d'un voyage effectué au cours de la troisième semaine de décembre, a conclu un accord avec les Chinois pour louer 5 % des meilleurs sols noirs du monde pour une très longue période. Or, il faut éviter que les Ukrainiens n'hypothèquent leur avenir en échange de gains économiques immédiats.
(1640)
    Au chapitre de la privatisation, rien ne presse. La dernière initiative de privatisation a donné lieu à de nombreux arrangements entachés de corruption. Particulièrement maintenant, dans une période de difficultés financières, on pourrait avoir tendance à ne pas obtenir la valeur optimale pour des biens stratégiques.
    Nous croyons qu'il faut adopter une approche concrète non seulement pour la signature de l'accord d'association, mais également pour l'adhésion à long terme de l'Ukraine à l'Union européenne une fois qu'elle aura renforcé ses secteurs agricoles et industriels. Il faut également prévoir une période de réconciliation nationale. C'est très difficile, et nous avons tous vu les images de ce qui se passe dans la rue depuis des jours et des mois. Les Ukrainiens devront se serrer les coudes pour concrétiser ce projet national.
    En ce qui concerne enfin l'aide technique, nous avons parlé avec les autorités de transition en Ukraine, qui nous ont indiqué que les besoins étaient immenses. Les échelons supérieurs de la fonction publique du pays sont occupés par des amis du régime et des gens incapables d'accomplir les tâches qui leur ont été confiées. Les employés des ministères à vocation économique ne savent pas ce qu'ils font et ont vraiment besoin d'aide dans un certain nombre de domaines. À mon avis, le Canada pourrait offrir une aide substantielle dans des domaines comme l'élaboration de bonnes politiques monétaires et fiscales, la réforme agraire et la formation des hauts fonctionnaires et de la police. Les berkouts, ces unités spéciales de maintien de l'ordre, ont été dissous et remplacés par une force de police qui partage les valeurs et l'éthique des gens qu'elle protège et qui a pour mandat de représenter et de protéger le peuple.
    Enfin, que peut faire le Canada à long terme? Je serais d'accord avec ce que mon collègue, M. Potoczny a dit sur les mesures d'aide internationale. Le Canada pourrait également signer un accord de libre-échange avec l'Ukraine, parce que je pense que le commerce constitue une des meilleures garanties d'un avenir meilleur pour nos deux pays; libéraliser le régime de visa entre nos pays; et continuer à court terme de fournir de l'aide humanitaire et une aide médicale bien nécessaire.
    Merci.
(1645)
    Merci beaucoup, monsieur Zalusky.
    Nous commencerons par M. Atamanenko, qui dispose de sept minutes.
    Messieurs, merci beaucoup de comparaître et de nous faire part de vos commentaires et de votre savoir.
    Monsieur Potoczny, sachez que Vitaliy Milentyev, votre représentant en Alberta, est mon cousin, et qu'il m'a gardé informé de ce qui se passe. Je tenais simplement à l'en remercier.
    Nous comprenons tous ce qui se passe. Je viens d'apprendre, par exemple, que des députés russes ont été dépêchés en Crimée, où ils parlent à la télévision d'un processus accéléré d'obtention de la citoyenneté russe et s'adonnent à d'autres formes d'ingérence.
    La Russie ne s'en ira pas. Le Canada devrait-il jouer un rôle de médiateur afin de rallier la Russie à l'Union européenne afin de créer, une fois pour toutes, un pays libre et démocratique avec le soutien de la Russie, sans que cela ne constitue une menace pour cette dernière? Autrement dit, dans l'intérêt de tous, faudrait-il faire intervenir la Russie et l'Union européenne afin de créer une fois pour toutes, comme je l'ai dit, un pays libre et démocratique capable de fonctionner dans l'Union européenne tout en gardant des liens de partenaire économique avec un pays comme la Russie? Si c'est le cas, le Canada devrait-il déployer davantage d'efforts pour réunir les diverses parties?
    Nous ne voulons pas que ce conflit tourne en combat géopolitique ou en terrain de bataille entre l'Occident et la Russie. Il ne faut pas que cela arrive. C'est une question que j'ai à l'esprit depuis quelques jours et je suis heureux de pouvoir vous la poser.
    Je dirais que la négociation avec toutes les parties concernées par le problème constitue toujours une bonne solution.
    Je ne suis tout simplement pas certain que la Russie soit prête à négocier, parce qu'elle ne s'en ira pas, comme vous l'avez fait remarquer. Je me réjouis que l'ambassadeur de Russie au Canada ait déclaré à la télévision hier: « L'idée d'entrer en Ukraine ne nous a même pas effleuré l'esprit ». Par contre, comme vous l'avez indiqué, les députés de la Douma sont pour ainsi dire en train de donner des passeports aux Ukrainiens. Comme ils l'ont fait en Georgie, ils ont beau jeu d'affirmer: « Il y a un grand nombre de citoyens russes que nous devons protéger » et « Nous ne sommes intervenus que pour les protéger ».
    Je serais d'accord si vous pouvez convaincre les Russes, mais je doute qu'ils puissent l'être. Vous devriez faire très attention à la manière dont vous négociez avec eux. Si le Canada peut agir à titre d'ambassadeur pour réunir les trois parties, y compris l'Union européenne, alors je serais certainement favorable à l'initiative.
    Je rappellerais simplement à tous, y compris les États-Unis et la Russie, qu'ils ont signé un accord; ils y ont apposé leurs signatures, alors qu'ils l'honorent. Respectez l'accord que vous avez signé, sans entourloupe.
    Merci beaucoup des deux exposés très intéressants que vous avez faits.
    J'espérais vous écouter, et vous demander quel genre d'aide le Canada pourrait offrir et quelle est la situation économique là-bas. Je pense que vous avez couvert beaucoup de matière. Si vous n'avez pu aborder un élément de votre exposé par manque de temps, n'hésitez surtout pas à profiter de l'occasion pour ajouter quelque chose à ce que vous avez dit.
    J'ai été frappée par cette histoire de terres qu'on s'arrache de plus en plus dans le monde, un phénomène qui ne se limite pas aux pays africains. C'est une question importante, et je voulais souligner que j'en avais pris note.
    J'en arrive enfin à ma question, qui concerne l'énergie et les sources d'énergie. Quelles sont les perspectives et les scénarios à cet égard en Ukraine?
(1650)
    L'Ukraine recèle certainement un immense potentiel en énergie. Comme je l'ai indiqué, elle renferme les troisièmes réserves de gaz de schiste en importance d'Europe et a un énorme potentiel au chapitre du gaz naturel sur la mer Noire et la mer d'Azov. Le problème, qui, je l'espère, va maintenant disparaître, c'est qu'on parle depuis 20 ans de ce potentiel immense sans rien faire pour l'exploiter. J'assiste chaque année aux conférences sur l'énergie tenues en Ukraine, au cours desquelles les ministres parlent du potentiel depuis maintenant 20 ans, mais personne ne fait quoi que ce soit. Cette situation est principalement attribuable au fait que tous les ministres, y compris le président Yanukovych, ont toujours voulu obtenir une participation dans chaque projet envisagé; comme ils n'ont pas obtenu ce qu'ils désiraient, rien ne s'est passé.
    Aujourd'hui encore, quand Shell, Chevron et Exxon concluent des accords de coproduction avec l'Ukraine, un examen attentif des accords permet de constater que c'est habituellement le gouvernement ukrainien d'un côté, la société pétrolière de l'autre, toujours avec une participation de 5, 7 ou 8 % pour une petite entreprise entre les deux. Il s'agit habituellement d'entreprises ayant des liens avec Yanukovych, sa famille et ses amis. C'est la principale raison pour laquelle rien ne bouge: ils négocient toujours pour obtenir 10 ou 15 % avant d'autoriser le projet.
    J'espère que maintenant, le nouveau gouvernement prendra enfin au sérieux cette facette des affaires ukrainiennes, parce que si l'Ukraine met réellement en valeur les ressources qu'elle possède, elle ne dépendra plus de la Russie pour régler son principal problème: l'énergie. Ce sera alors la Russie qui dépendra de l'Ukraine, parce qu'elle doit encore passer par ce pays pour expédier ses produits. Pour l'instant, malheureusement, quand on achète 70 % de son énergie d'un seul pays, c'est-à-dire la Russie, comme vous l'avez vu précédemment, ce pays peut fermer le robinet, particulièrement quand cela se produit en hiver, pour une raison quelconque. On n'a alors pas d'autre choix que de faire tout ce qu'il demande.
    Je dirais donc que la principale raison, c'est la corruption et le fait qu'essentiellement, le gouvernement n'autorise pas les entreprises à travailler librement pour exploiter les ressources.
    Merci beaucoup.
    Nous laisserons maintenant la parole à Mme Brown, puis à Mme Grewall pour sept minutes.
    Je céderai la parole à M. Anderson pour un instant.
    J'étais près, mais d'accord.
    Merci, messieurs, de comparaître aujourd'hui.
    J'ai une brève question. Je veux vous parler des conséquences des interdictions de voyager et des sanctions potentielles.
    Notre gouvernement a indiqué qu'il allait calibrer ces mesures en fonction du degré de respect de l'intention et de l'esprit de l'accord. Pourriez-vous nous dire brièvement si vous considérez que ces mesures ont fonctionné? Ont-elles permis d'attirer l'attention des personnes visées?
    Je pense qu'il y a deux questions à prendre en compte. Il y a d'abord les sanctions visant à obliger les mauvais éléments de l'ancien gouvernement de cesser de tuer des gens dans la rue et de violer les droits de la personnes. Les sanctions ont donné des résultats à cet égard.
    Les sanctions économiques visent également à récupérer ensuite les actifs que certains se sont appropriés. Andreas Umland a publié aujourd'hui un article où il indique qu'on pourrait potentiellement recouvrer quelque 12 milliards de dollars en actifs dans la famille Ianoukovitch. Nous considérons donc que ce n'est pas le moment de lever les sanctions économiques. Dans la mesure où ces actifs peuvent être gelés, puis récupérés et retournés au peuple ukrainien, il est absolument nécessaire de le faire, compte tenu de la situation financière de la population.
(1655)
    Je rends la parole à Lois.
    Permettez que je prenne un moment pour communiquer certains renseignements, parce que je suis préoccupée par certains éléments qui viennent d'être mis en relief dans le témoignage.
    Je pense qu'il importe, pour le comité et les Canadiens qui nous écoutent, de savoir que le Canada est très présent en Ukraine depuis un certain nombre d'années. C'est un pays d'action convergente pour l'aide au développement que nous fournissons. Je tiens simplement à souligner certains de nos projets en cours, actuellement, en Ukraine.
    L'Institut de science appliquée et de technologie de la Saskatchewan travaille là-bas avec des microentreprises et des PME, et 14 000 étudiants sont censés en profiter. Une proportion importante de cet argent vise à aider les femmes à faire démarrer leur entreprise.
    Je tiens aussi à souligner un projet des Mennonite Economic Development Associates, qui vise à donner plus de moyens à 5 000 petites exploitations agricoles de Crimée et de la région de Zaporijia.
    Un autre projet du même groupe vise à aider 6 887 petits horticulteurs à améliorer leurs compétences techniques.
    Un autre vise à aider 3 000 producteurs laitiers de deux districts de l'Ukraine à améliorer quantitativement et qualitativement le lait qu'ils produisent.
    Dans un autre projet, 3 234 producteurs laitiers adoptent de nouvelles techniques d'alimentation et de gestion des pâturages, des pratiques exemplaires de stockage et de transformation du lait et d'autres techniques pour les aider à faire croître leurs entreprises.
    Je n'ose imaginer que les Canadiens penseraient que nous n'avons pas été actifs. Je pourrais parler de nombreux projets, pour qu'ils figurent dans le compte rendu, mais je tiens simplement à assurer les Canadiens que nous n'avons pas abandonné l'Ukraine, et qu'il faudrait un grand effort d'imagination pour affirmer le contraire. Ces projets se poursuivent, et il nous tarde d'en entreprendre d'autres dans ce pays avec les partenaires avec qui nous collaborons.
    Je remercie les témoins pour le temps qu'ils nous ont accordé et pour leurs exposés.
    Viktor Ianoukovitch, l'ex-président de l'Ukraine, semble avoir disparu, et les anciens dirigeants du gouvernement peuvent servir de points de ralliement pour combattre la résistance et fomenter des troubles.
    En même temps, beaucoup de pays peuvent poursuivre en justice d'anciens dirigeants pour des crimes qu'ils ont commis pendant qu'ils exerçaient le pouvoir.
    Quels indices l'Ukraine possède-t-elle sur l'endroit où se trouve M. Ianoukovitch, et quels moyens légaux pourrait-elle exercer contre lui?
    Un mandat national a été délivré pour son arrestation. À deux reprises, il a tenté de quitter le territoire et il en a été empêché par des douaniers et des gardes-frontières.
    Pas plus tard qu'aujourd'hui, un dossier sur les crimes contre l'humanité de M. Ianoukovitch et l'ex-ministre de l'Intérieur M. Zakhartchenko a été préparé pour la Cour pénale internationale.
    La brutalité des forces, des services de sécurité a raffermi la résistance antigouvernementale. Sous les ordres du gouvernement ukrainien, ils ont battu et même tué des protestataires ukrainiens. Alors que le Parlement affirme son autorité sur le pays, quelle est la position des services de sécurité? Sont-ils susceptibles de collaborer avec le gouvernement intérimaire? Qu'en pensez-vous?
    Dès le premier jour de la prise du pouvoir par le nouveau gouvernement et la destitution de M. Ianoukovitch, les forces militaires, le ministère de l'Intérieur et la police ont donné un appui sans réserve aux nouvelles autorités, tout comme les ministères de la Justice et des Affaires étrangères.
    Le Parlement ukrainien a affirmé la souveraineté du Parlement en destituant M. Ianoukovitch sans faire appel aux dispositions de la constitution. Les parlements de type britannique possèdent une longue tradition de souveraineté et un grand pouvoir législatif, mais qu'en est-il de ces institutions en Ukraine et quelles difficultés juridiques le Parlement ukrainien doit-il affronter après la destitution de M. Ianoukovitch?
(1700)
    Les difficultés juridiques sont nombreuses. On a révisé la constitution. Essentiellement, l'Ukraine a eu deux constitutions pendant la durée de son indépendance et elle est maintenant revenue à ce qu'on appelle la constitution de 2004, qui prévoit un partage plus grand du pouvoir entre le premier ministre et le président.
    Ensuite, bien sûr, on compte un certain nombre de lois qui ont été soit manipulées, soit modifiées et qu'on a changées pour les rendre conformes à la constitution de 2004. On en a ainsi amendé près d'une quarantaine, notamment la loi électorale.
    Merci.
    Votre temps est écoulé. La première série de questions se terminera par M. Garneau. Ensuite, nous aurons le temps pour quelques séries courtes de questions.
    Merci, messieurs, pour votre témoignage. Nous espérons qu'un nombre considérable d'observateurs canadiens iront en Ukraine pour superviser les élections.
    Quelle est, d'après vous, la meilleure méthode pour les déployer, parce que beaucoup de Canadiens qui pourraient se rendre là-bas, bien sûr, parlent ukrainien et russe. C'est un atout très important. Nous entendons parler de difficultés posées par différentes factions en Crimée.
    Quelle est votre opinion sur la meilleure méthode de déploiement des observateurs canadiens pour les élections à venir.
    Je pense que, depuis la fin de la semaine dernière, les troubles et les conspirations que beaucoup prédisaient avant la chute de Ianoukovitch ne se sont pas matérialisés, sauf en Crimée.
    Ceux qui étaient jusque-là intimidés et qui ne critiquaient pas le gouvernement se sont alors sentis libres de le faire, et on a vu des dizaines de milliers de personnes de partout, même de régions fortement russophones, s'unir aux protestataires.
    Je pense que pour que le travail des observateurs soit crédible, il faudra une bonne couverture, sans parti pris, de tout le pays. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'élections présidentielles. Il y aura vraisemblablement ballottage. Sans entrer dans les détails tactiques du déploiement, je conseillerais néanmoins qu'il couvre la totalité du pays.
    Si vous me permettez d'intervenir, je continue de penser, comme vous, que le fait de parler ukrainien et russe, c'est très important pour l'équipe d'observateurs qui ira là-bas. Je privilégierais le sud et l'est du pays, où se trouvent surtout les forces pro-russes ou autres. J'y enverrais la majorité des observateurs.
    Dans l'ouest de l'Ukraine, Taras, je pense que vous serez d'accord, la situation est assez stable et assez normale, mais l'est de l'Ukraine et la Crimée vont présenter une situation très délicate.
    Merci.
    J'espère que notre premier ministre contactera le président de la Russie, mais je reçois des messages contradictoires. Manifestement, hier, l'ambassadeur Mamedov a dit qu'il n'y avait absolument rien à signaler, et, pourtant, vous avez mentionné que des députés offraient des départs hâtifs de la Crimée. Nous entendons aussi parler d'exercices militaires.
    Quel est votre sentiment au sujet de la situation? Êtes-vous inquiet? Comment décririez-vous vos sentiments?
    Je suis vraiment inquiet, en raison de ces soudains exercices militaires dans la région. C'est très étrange. Cette stratégie est presque une copie conforme de celle qui a été appliquée en Georgie. Elle ne me dit rien qui vaille. On ne distribue pas de passeports pour faciliter des départs, mais pour servir de prétexte, plus tard, à une invasion pour secourir des concitoyens russes. Si c'est pour faciliter leur retour en Russie, je n'y vois pas d'objection. Chacun est libre de choisir l'endroit où il veut vivre et libre d'aller et de venir à sa guise. Mais ce n'est pas le motif de la distribution des passeports. C'est pour servir, ultérieurement, d'excuse à une intervention. C'est très inquiétant.
(1705)
    Que pensez-vous des événements de la dernière journée, de la possibilité que M. Iatseniouk devienne premier ministre et celle d'un vote demain? D'après votre connaissance intime de la situation, êtes-vous optimiste pour le vote de demain qui établira le gouvernement intérimaire et fera prendre un bon départ au processus?
    Je pense que nous devons être optimistes.
    Oui. L'êtes-vous?
    Écoutez! même aujourd'hui, j'ai vu deux listes différentes de la composition à venir du gouvernement d'unité nationale. Je pense qu'il est un peu futile d'essayer de prévoir qui fera partie du cabinet. Je pense que les noms qui circulent sont bien plus crédibles que ceux qui ont circulé ces derniers jours.
    Je n'étais pas trop préoccupé par sa composition, mais a-t-on le sentiment que, si on veut des résultats, chacun est prêt à mettre de l'eau dans son vin?
    Sur tout, sauf la corruption. Si ça dépendait des politiciens — sauf le respect que je dois à tous ceux qui sont ici présents — le peuple ukrainien aurait eu Viktor Ianoukovitch comme président pendant encore 10 mois. Les personnes qui occupaient la place de l'Indépendance ont mis le holà. Elles continueront d'exiger beaucoup plus du gouvernement d'unité nationale que ce à quoi on était habitué en Ukraine. Je pense que c'est très bon signe et que ça nous autorise à être optimistes.
    Enfin, j'aimerais parler de l'économie. Tous les deux, vous avez décrit des obstacles à la consolidation des bases de l'économie. Vous avez souvent parlé de corruption. Ça ne fait aucun doute.
    Quelle est la mesure que le nouveau gouvernement doit prendre, de toute urgence, pour relancer l'économie, à part contracter un prêt du FMI pour la restructuration de la dette?
    En 30 secondes; je suis désolé, mais il reste peu de temps.
    Malheureusement, je dirais que, oui, l'aide de l'Ouest est maintenant essentielle. Je pense que ce gouvernement se conformera avec le plus grand sérieux aux règles à suivre quand on lui confiera ces fonds, mais, sans cet argent, il sera impossible de survivre.
    Je suis né en Pologne. J'ai vu ce pays avant son adhésion à l'Union européenne. Que lui a procuré l'aide de l'Union européenne? La disparition complète de la corruption. Le pays est tout à fait réformé. Les infrastructures sont toutes neuves. Je crois que l'Ukraine peut faire de même. Pourquoi pas? Il faut lui en donner l'occasion. On ne peut pas la laisser à son sort maintenant. Aidez-la, et elle s'en sortira.
    Merci.
    Merci, monsieur Garneau.
    Monsieur Goldring, vous disposez de cinq minutes.
    Messieurs, merci d'être venus témoigner.
    D'abord, je tiens à exprimer ma douleur et mes condoléances les plus sincères pour les patriotes qui ont été tués ou grièvement blessés, à leurs familles et amis. C'était vraiment un exemple que, parfois, la démocratie, malheureusement, exige que des patriotes sacrifient leur vie. Ils sont vraiment les héros de la place de l'Indépendance, et je suis convaincu qu'on les reconnaîtra comme tels pour toujours.
    Il est bon, Taras, de vous entendre encourager l'inclusion linguistique, parce que, quand j'étais à l'Euromaïdan, en décembre, j'ai particulièrement noté, étant allé en Ukraine depuis la révolution Orange et toutes les élections subséquentes, que l'une des difficultés semblait venir de la séparation linguistique. Le dialogue entre Russes et Ukrainiens, à l'Euromaïdan — peut-être pas en nombres égaux, mais ensemble — promet pour l'avenir du pays. Il est agréable de le constater.
    Ma deuxième observation concerne les réserves de gaz. Si j'ai bien compris, et peut-être pourrez-vous y aller de vos observations, elles peuvent être énormes, mais à combien équivalent-elles? Est-ce qu'on en a chiffré la valeur?
    J'ai entendu dire que l'entreprise russe Gazprom finance les écologistes opposés à la mise en valeur du gaz de schiste. Est-ce vrai? Cela peut certainement conduire à un cul-de-sac. Ce financement semble inspiré par la concurrence. S'il permettait d'arrêter la mise en valeur de cette ressource, cela ferait certainement l'affaire de Gazprom.
    Je crois vraiment qu'on pourrait hypothéquer maintenant les actifs ou inviter des pays à fournir un financement temporaire. Il ne s'agirait pas tant de donner de l'argent au pays, que de lui accorder un financement intérimaire, adossé à cette réserve potentielle.
    Pourriez-vous me dire ce que vous en pensez?
    Mais avant, j'ai une observation à formuler. Tout cela se tient, parce que cela concerne les échanges commerciaux et le désir de revenir aux discussions avec le Canada sur le libre-échange. Tout cela, c'est de l'économie. Pendant mon séjour là-bas, j'ai certainement constaté l'absence de volonté de fermer la frontière russe, parce que, comme vous l'avez si bien dit, le tiers des échanges commerciaux du pays se font avec la Russie. L'Ukraine veut continuer à commercer avec l'Europe et le reste du monde. Il ne s'agit donc pas pour elle de tourner le dos à la Russie, mais d'avoir le droit, comme tout autre pays, de commercer avec qui elle veut.
    J'ai probablement exprimé tout cela en deux, trois ou quatre questions, mais si vous pouvez y répondre...
(1710)
    Vous disposez d'environ une minute pour répondre à toutes les questions.
    Rapidement, sur la question du gaz, il y a incontestablement des rumeurs — mais je ne possède aucune preuve — selon lesquelles Gazprom finançait ces écologistes pour causer des problèmes. J'ai remarqué que, dans l'est de l'Ukraine, quand Shell a signé l'accord avec le gouvernement ukrainien, on s'est peu soucié de l'environnement, parce que c'était une région fermement contrôlée par Ianoukovitch et ses acolytes. Au fond, ils ont simplement dit de le signer sans poser de questions.
    Mais dans l'ouest de l'Ukraine, avec Chevron, la signature a été retardée deux ou trois fois de jusqu'à trois mois, et un bon nombre de groupes d'écologistes étaient contre. Manifestement, Ianoukovitch n'avait pas la force ni l'influence, dans cette région, pour imposer la signature de l'accord sans discussion.
    Voilà la rumeur. Je ne peux pas confirmer si Gazprom était derrière le financement des écologistes.
    On peut vraiment chiffrer les réserves de gaz. Les grosses sociétés qui signent ces accords savent dans quoi elles s'engagent. Chacun de ces marchés est de l'ordre de 10 milliards de dollars. C'est beaucoup. Dans ce cas, Chevron a manifestement fait ses recherches, parce qu'il s'engage alors à consacrer ce montant à la mise en valeur du champ gazier, qui sera partagé entre le pays et la société, dans cet accord sur le partage de la production. C'est ce qui le motive.
    Ianoukovitch et ses acolytes ont notamment adopté des lois sur ces accords, ce qui est très impressionnant, parce que, en Ukraine, avant, il y avait des structures bizarres, mais pas d'accords sur le partage de la production. En faisant cela, il pensait peut-être qu'il serait un partenaire dans tous ces projets et il voulait être protégé plus que les autres, et il s'y est très bien pris.
    Merci. C'est tout le temps dont nous disposons.
    Nous allons accorder une question en vitesse à Mme Laverdière, puis nous conclurons nos travaux.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais faire un bref commentaire et, par la suite, poser une question.
    Ma collègue, Mme Brown, a abordé la question de l'appel d'offres. J'aimerais vous dire que cela arrive très fréquemment ces dernières années. Il y a des ONG qui attendent depuis trois ans qu'on lance des appels d'offres dans le cadre du programme de partenariat. Quoi qu'il en soit, nous espérons que vous aurez des nouvelles bientôt au sujet de votre appel d'offres.
    Je vais maintenant vous poser une question. Il y a une délégation qui est partie du Canada avec le ministre Baird et M. Paul Grod.
    J'en fais partie.
    Vous en faites partie. D'accord. Je suis un peu jalouse, car j'aurais bien aimé en faire partie aussi ou, tout au moins, que des députés de l'opposition en fassent partie. On dit aux Ukrainiens que tous les partis doivent travailler ensemble. Il aurait donc été bien que des gens de tous les partis fassent partie de la délégation canadienne.
    Cela dit, que croyez-vous qu'il est important que cette délégation réalise? Qui devrait-elle rencontrer? Selon vous, quel devrait être le principal objectif de cette délégation?
(1715)
    Premièrement, une reconnaissance formelle de la part du gouvernement du Canada du nouveau gouvernement de l'Ukraine est primordiale. Deuxièmement, cette délégation devrait rencontrer les ministres qui seront en place. En ce moment, il y a un président de la Chambre et un président intérimaire. Le Canada devrait continuer à appuyer l'Ukraine. Troisièmement, la délégation devrait rencontrer des gens du secteur civil, du Maïdan et des autres ministères pour voir où le Canada pourrait jouer un rôle de premier plan.
    Honnêtement, je pense qu'il est temps d'agir. On ne peut pas savoir d'avance quels sont les besoins. On devrait les cibler et faire tout en notre possible pour y répondre.

[Traduction]

    Merci beaucoup, messieurs Potoczny et Zalusky. Nous vous sommes reconnaissants de vous être déplacés malgré le très court préavis. Merci beaucoup, encore une fois.
    Il faut le consentement unanime, parce que la sonnerie a débuté. Nous avons mentionné que le comité devait s'occuper d'une petite question. Puis-je avoir le consentement unanime pour que nous poursuivions les travaux à huis clos pendant cinq minutes, parce que nous devons nous hâter.
    Des voix: D'accord.
    Le président: Prévoyons deux minutes pour vider la pièce, puis nous pourrons prendre cinq minutes pour nous occuper de deux ou trois questions. La séance est suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU