INDU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 6 novembre 2013
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Mesdames et messieurs, bonjour à tous. Soyez les bienvenus à la troisième séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
Nous accueillons parmi nous aujourd'hui M. Wayne Edwards, du Réseau anti-contrefaçon canadien; Mme Katalin Molnar, gestionnaire, Protection de la propriété intellectuelle à l'échelle mondiale, Association canadienne de normalisation; Mme Cynthia Rowden, présidente, Sous-comité du projet de loi C-8, et présidente sortante, Institut de la propriété intellectuelle du Canada; ainsi que M. Michael Geist, titulaire de la chaire de recherche du Canada, Droit d'Internet et du commerce électronique, Université d'Ottawa, qui témoignera à titre personnel.
J'ai l'impression que nous allons peut-être manquer de temps. Je sais que vous avez probablement préparé un exposé d'environ 10 minutes, mais s'il vous est possible de l'abréger un peu, afin que nous puissions tirer pleinement profit de cette séance, ce serait parfait.
Nous allons commencer par M. Edwards.
Merci beaucoup, monsieur Sweet.
Je tiens à remercier les membres du comité de me donner l'occasion de témoigner. Je l'ai déjà fait une fois. Je ne suis pas un expert, mais je ne me sens pas aussi intimidé que la première fois. J'y prends plaisir.
Je représente le Réseau anti-contrefaçon canadien et j'ai également fait part de commentaires à l'association qui paie en fait mon salaire, soit Électro-Fédération Canada, ou ÉFC. Nous travaillons beaucoup avec le Réseau anti-contrefaçon canadien et quelques-uns des membres qui sont ici.
Le Réseau anti-contrefaçon canadien, ou RACC, salue la présentation du projet de loi C-8 et est impatient de combattre la contrefaçon de produits avec l'aide de la loi dans l'avenir.
Notre organisation représente une coalition qui regroupe des personnes, des entreprises et des associations qui se sont unies pour lutter contre la contrefaçon de produits et le piratage des droits d'auteur au Canada et à l'échelle internationale. J'ajouterais que nous travaillons beaucoup avec le RACC sur la sécurité relativement aux produits contrefaits qui ne satisfont pas aux critères ou qui n'ont pas été vérifiés par l'Association de normalisation.
Le projet de loi reconnaît la nécessité de s'attaquer au problème du vol de la propriété intellectuelle, et c'est certainement un pas dans la bonne direction. Bien que le RACC appuie le projet de loi, nous vous demandons d'examiner les questions suivantes, qui ont été soulevées par nos membres relativement à la teneur du projet de loi. Nous aimerions formuler quelques recommandations à cet égard. Je pense que vous seriez étonnés si nous n'avions aucun commentaire. Certains d'entre vous ont peut-être déjà vu ces recommandations.
La première porte sur l'application de la loi à la frontière. Y a-t-il suffisamment d'agents pour appliquer les mesures proposées dans le projet de loi?
Nous craignons que les dispositions relatives aux mesures frontalières ne constituent pas un moyen efficace de bloquer les produits contrefaits à la frontière. Même si les dispositions prévoient la détention d'office et les moyens de confirmer la contrefaçon des marchandises suspectes à l'ASFC, aucune disposition ne prévoit la saisie ou la confiscation d'office des produits contrefaits. De plus, les dispositions relatives aux demandes d'aide de la part des titulaires de droits prévoient la saisie et la confiscation seulement si les titulaires de droits déposent des poursuites judiciaires civiles, et nous croyons que cela pose problème.
Il semble que les dispositions prévoient que dans la mesure où une demande d'aide a été présentée et que le titulaire de droits ne dépose pas de poursuites dans un court délai, la mainlevée des marchandises sera accordée à l'importateur ou au propriétaire. Dans la mesure où il n'y a pas eu de demande d'aide relativement aux marchandises, il semble que selon l'application de la Loi sur les douanes, les importateurs auront la possibilité d'exporter ou d'abandonner les marchandises jugées contrefaites.
Cela fait craindre la possibilité que les marchandises jugées contrefaites soient dédouanées au Canada pour exportation ou pour utilisation sur le marché canadien. Il s'agit clairement d'une violation des interdictions et des dispositions criminelles.
Le problème pourrait être corrigé, dans une certaine mesure, en mettant en place un mécanisme permettant la saisie et la confiscation d'office au moyen d'autres procédures prévoyant la confiscation si la nature contrefaite des marchandises retenues n'est pas contestée, comme celles visées à l'article 11 des dispositions types de l'Organisation mondiale des douanes. Cela signifie que le titulaire de droits aurait beaucoup de travail à faire s'il devait intervenir. Si son produit est importé au Canada et est suspect, il semble que le titulaire de droits serait aux prises avec un fardeau démesuré, et c'est lui qui serait lésé.
Il faudrait faire quelque chose à ce sujet, afin de corriger la situation ou du moins d'aider les titulaires de droits à atteindre leur but, qui est de faire cesser l'importation de marchandises contrefaites.
L'application plus rigoureuse de la loi est le prochain élément que nous aimerions porter à votre attention. Même si le projet de loi accorde plus de pouvoirs aux douaniers canadiens qu'auparavant, nous craignons que les ressources soient insuffisantes pour permettre une application efficace de la loi à la frontière.
À l'heure actuelle, seul un faible pourcentage des importations est inspecté. Sans formation, les agents des services frontaliers doivent se débrouiller seuls pour repérer les produits inappropriés qui entrent au pays.
Au RACC, nous consacrons du temps à la formation des agents des services frontaliers et nous collaborons avec la GRC pour former ses agents également. Nous travaillons avec nos membres du secteur de la fabrication afin de déterminer quels sont les produits authentiques, à quoi ils doivent ressembler et à quoi ressemble un produit suspect.
Nous portons une attention particulière à la sécurité. Je pourrai vous donner quelques exemples durant la période des questions. La sécurité est une grande préoccupation. Nous voulons nous assurer que les consommateurs canadiens reçoivent des marchandises qui ne seront pas dangereuses pour eux, qui ne blesseront pas leurs enfants, qui ne feront pas brûler leur maison. Nous y consacrons beaucoup de temps.
Le prochain élément est l'obligation de payer les frais. En vertu du paragraphe 44.07(1), le titulaire du droit d'auteur est tenu de payer les frais d'entreposage, de manutention et de destruction des marchandises retenues. On impose un peu un fardeau aux titulaires de droits qui sont lésés. Nous nous demandons ce qu'il en est des auteurs du crime. Ils semblent s'en tirer à bon compte dans ce genre d'évaluation.
Il y a souvent beaucoup de frais associés à la destruction des produits, en particulier s'ils sont considérés comme des marchandises dangereuses, comme les lampes contenant du mercure, par exemple. S'il s'agit de produits hors normes ou de piles, beaucoup de travail doit être fait pour s'en occuper efficacement et s'assurer qu'ils ne se retrouvent pas sur le marché.
Nous proposons de modifier les dispositions relatives aux frais de rétention et de destruction pour imputer la principale responsabilité aux auteurs du crime, plutôt qu'aux titulaires de droits.
Le prochain élément concerne les infractions et les peines. Le paragraphe 51.01(1) porte sur les situations où les auteurs savent à la fois que les produits sont contrefaits et que la vente ou la distribution des produits serait contraire aux articles 19 et 20.
Il faudrait se demander s'ils s'en soucieraient. ou même s'ils le sauraient. Ils ne mettraient certainement pas tout en oeuvre pour le découvrir et utiliseraient probablement cela à leur avantage. S'ils étaient interrogés, ils diraient qu'ils ne savaient pas que c'était illégal. C'est une question qu'il faudrait également examiner.
Je suis sûr que d'autres personnes parleront davantage de la Loi sur les marques de commerce. Il en sera question ici à la table.
Il faudrait un plus grand éventail d'options. En vertu du projet de loi, pour que les marchandises soient retenues pendant plus de dix jours (ou cinq jours s'il s'agit de produits périssables), les titulaires de droits doivent prouver qu'ils ont engagé une poursuite judiciaire afin d'obtenir réparation en vertu de la loi. Nous recommandons qu'un plus grand éventail d'options soit offert aux titulaires de droits qui ne peuvent intenter de poursuite à temps ou qui n'ont pas suffisamment de fonds pour le faire immédiatement. Il nous faudrait nous pencher là-dessus.
Des procédures simplifiées seraient bien accueillies. Cela nous ramène au fait, pour les titulaires de droits, d'entamer des poursuites. Il faudrait examiner cette question. On en demande trop aux titulaires de droits afin qu'ils agissent par rapport aux marchandises contrefaites.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions tout à l'heure et de vous donner des exemples.
Je vous remercie beaucoup, monsieur Edwards. Je donne maintenant la parole à Mme Molnar, à qui je demanderai d'être aussi brève que possible.
Mesdames et messieurs les membres du comité, monsieur le président, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui au nom de l'Association canadienne de normalisation, que l'on appelle maintenant Groupe CSA. Je travaille dans le domaine de la protection de la PI depuis plus de huit ans. Avant d'occuper mes fonctions au Groupe CSA, j'étais coordonnatrice nationale de la lutte contre le piratage à l'Association de l'industrie canadienne de l'enregistrement, maintenant connue sous le nom de Music Canada.
Je suis ici au nom du Groupe CSA pour vous donner une idée des conséquences de la contrefaçon sur notre organisation.
Le Groupe CSA est une association sans but lucratif vouée à la sécurité et au bien commun. À titre d'organisme de certification, le Groupe CSA met à l'essai et certifie des produits dans des domaines comme les emplacements dangereux et les installations industrielles, la plomberie, la construction, les appareils médicaux, la sécurité, les électroménagers et le gaz. La marque de certification CSA est apposée sur des milliards de produits partout dans le monde, et 88 000 clients utilisent nos services de certification.
La loi sur la propriété intellectuelle et son application sont très importantes pour le Groupe CSA. Ses marques de commerce déposées et ses marques de certification comptent parmi ses actifs les plus importants. Les produits affichant des marques de certification CSA contrefaites sur le marché représentent une menace réelle à la sécurité du public et à l'acceptation des marques légitimes.
De nombreux règlements canadiens exigent que certains produits fonctionnant à l'électricité ou au gaz ou certains produits de plomberie soient certifiés par un organisme de certification comme la CSA. Ces règlements ont été pris pour protéger la population. Les produits affichant des marques de certification contrefaites n'ont pas été soumis au processus de certification, ce qui signifie qu'aucun échantillon de ces produits n'a été analysé afin de vérifier s'ils satisfont aux exigences minimales et qu'aucune vérification n'a été effectuée auprès du fabricant. Les organismes de réglementation se fient à la marque de certification CSA. En conséquence, les produits affichant des marques de certification contrefaites minent l'ensemble du système canadien relatif aux normes, aux essais, à la certification et à la réglementation.
Il y a quelques exemples dans les documents que j'ai apportés, mais j'ai pensé vous parler des expériences les plus récentes du Groupe CSA relativement aux produits affichant des marques CSA contrefaites. Nous constatons qu'ils sont la plupart du temps importés au Canada et non pas fabriqués ici; nous recommandons donc au gouvernement de conférer aux douaniers le pouvoir exprès de cibler, de retenir, de saisir et de détruire les marchandises contrefaites.
Comme la plupart des entreprises privées, le Groupe CSA ne présente pas à des tiers ses statistiques sur la lutte contre les produits contrefaits. Nous menons nos efforts à l'interne; il n'y a aucune exigence en matière de rapports. Le problème de contrefaçon qui transparaît dans les statistiques de la GRC ne donne qu'un bref aperçu du problème que l'on connaît au Canada. C'est pourquoi nous recommandons que le gouvernement adopte un système de publication qui permettrait aux titulaires de droits de PI d'enregistrer leurs droits auprès de l'ASFC.
J'ai inclus dans les documents des photos de divers produits potentiellement dangereux; on a constaté récemment qu'ils avaient des marques de certification CSA contrefaites.
Sur la première, on voit des disjoncteurs affichant des marques de certification et des marques de commerce contrefaites. Ces disjoncteurs ont été trouvés dans un hôpital de Québec; ils assuraient l'alimentation électrique des appareils de survie. Vous trouverez la photo dans votre trousse d'information; c'est la première.
J'invoque le Règlement. Le témoin pourrait peut-être s'arrêter un instant afin que nous puissions trouver le document. Ce serait bien de suivre ses explications.
Je suis désolé, mais nous ne pourrons pas les distribuer. Elles doivent être dans les deux langues officielles; nous devrons nous en passer.
Monsieur Warawa.
Je doute qu'il y ait consentement, monsieur Warawa. Je pense que nous sommes très stricts à cet égard.
Oui, madame Gallant.
Merci, monsieur le président.
Je comprends que selon la procédure habituelle, elles ne peuvent pas être distribuées, mais je pense que nous pourrions en emprunter une copie au témoin si nous le voulons. Y verriez-vous un inconvénient?
Vous pouvez peut-être y jeter un coup d'oeil à notre sortie. Ce pourrait être une solution, et nous allons écouter la déclaration préliminaire.
Je veux être sûr que nous respectons le plus possible les deux langues officielles. Les faire circuler équivaut à les distribuer.
Oui, monsieur Jean.
J'allais seulement dire que je ne suis pas très bon en français, mais je pense que je pourrais traduire le mot photograph, s'ils le veulent, car d'après ce que j'ai vu, c'est le seul mot qui n'est pas en français.
Toutes mes excuses. J'avais fait cinq copies, mais je n'avais pas pensé que je devais les envoyer à l'avance.
Sur la seconde photo, on voit des marques de certification du groupe de la CSA contrefaites que l'on retrouve sur des milliers de fioles de médicaments censées être à l'épreuve des enfants et sur lesquelles aucun test n'a été effectué.
La troisième photo montre des centaines de machines à souder industrielles portant des marques de certification du groupe de la CSA contrefaites. Elles ont été montées à l'aide de matériaux inférieurs aux normes et présentant des espacements électriques non conformes pouvant causer des chocs et des incendies.
Sur la quatrième photo, on peut voir des milliers de lumières de Noël qui ont été retirées des étagères d'un détaillant national. Ce produit importé avait des composantes contrefaites ainsi que des étiquettes de certification du groupe de la CSA contrefaites et aurait pu ainsi présenter un danger.
La cinquième photo montre les marques de certification du groupe de la CSA contrefaites que l'on a trouvées sur des foyers électriques vendus par un détaillant de taille moyenne au Manitoba, en Saskatchewan et en Ontario. Ces produits ne sont pas conformes aux normes, n'ont pas passé les tests de nos laboratoires et mettaient les consommateurs en danger.
La sixième photo présente des chaussures de sécurité portant des marques de certification contrefaites protégeant mal les doigts et n'offrant pas de protection diélectrique adéquate, présentant ainsi un risque de choc électrique.
C'est tout pour les photos.
Je vais vous donner maintenant quelques statistiques sur la contrefaçon. En 2012, le groupe de la CSA a enquêté sur 214 affaires d'infraction à la propriété intellectuelle.
En 2012, les services américains de protection des frontières ont saisi des produits contrefaits d'une valeur de 156 millions de dollars, dont 23 millions pour les seuls appareils électriques. On a signalé au groupe de la CSA que cet équipement portait des marques de certification contrefaites. Ces chiffres sont établis à partir de statistiques provenant du département de la Sécurité intérieure des États-Unis.
Pendant l'année 2011, les services américains de protection des frontières avaient saisi en seulement trois mois des produits électroniques de consommation d'une valeur d'environ 10 millions de dollars et portant des marques de certification contrefaites du groupe de la CSA.
Une seule fois au cours des quatre dernières années, l'Agence des services frontaliers du Canada a pris contact avec la CSA au sujet d'éventuelles contrefaçons.
Le gouvernement a un rôle à jouer dans la lutte contre la contrefaçon. Comme je l'ai expliqué, la prolifération de produits portant des marques de certification de la CSA contrefaites peut faciliter l'entrée généralisée au Canada de produits dangereux ou défectueux. L'exposition à ces produits peut entraîner de graves blessures ou même la mort.
Je vous remercie de votre attention.
[Français]
Bonjour. Cela me fait plaisir d'être ici aujourd'hui au nom de l'Institut de la propriété intellectuelle du Canada, ou l'IPIC. Je vous remercie de nous avoir invités.
[Traduction]
C'est pour nous un honneur de comparaître pour vous faire part de nos observations sur le projet de loi C-8.
L'Institut de la propriété intellectuelle du Canada est l'association professionnelle d'avocats spécialisés dans la propriété intellectuelle. L'Institut compte plus de 1 700 membres représentant des cabinets juridiques, des entreprises, des administrations, des universités et d'autres institutions qui s'intéressent à la propriété intellectuelle, ainsi que les entreprises étrangères qui détiennent des droits de propriété intellectuelle au Canada.
L'Institut est très satisfait des amendements proposés à la Loi sur le droit d'auteur et à la Loi sur les marques de commerce pour mieux lutter contre la contrefaçon et les infractions à la loi et pour mettre à jour la Loi sur les marques de commerce. Nous craignons toutefois qu'ils ne facilitent pas les procédures auxquelles doivent se soumettre les détenteurs de propriété intellectuelle. Par ailleurs, les nombreuses nouvelles dispositions qu'ils prévoient pourraient prendre des années d'interprétation judiciaire avant d'être bien comprises. Je proposerais donc aujourd'hui des changements qui, à notre avis, amélioreront le projet de loi.
Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je m'en tiendrai aux huit changements clés que propose l'Institut.
Il conviendrait premièrement de modifier la demande d'aide adressée aux autorités douanières afin d'avoir une procédure plus simple lorsqu'il ne fait aucun doute que les biens saisis sont des contrefaçons.
Deuxièmement, il ne faudrait pas exclure des contrôles frontaliers les marchandises en transit.
Troisièmement, il faudrait changer le libellé des sanctions pénales en mettant l'accent sur le fait d'utiliser en toute connaissance de cause la marque de commerce de quelqu'un d'autre.
Quatrièmement, il faudrait prévoir des dommages-intérêts d'origine législative pour toute violation des droits liés à une marque de commerce.
Les autres changements ne concernent pas la contrefaçon, mais plutôt les autres amendements à la Loi sur les marques de commerce, qui sont très importants pour ceux qui s'occupent des demandes et de l'enregistrement des marques. Les quatre changements proposés sont les suivants.
Cinquièmement, pour les signes non traditionnels proposés, il faudrait préciser leur mode d'utilisation ainsi que la signification des termes qui ont une portée sur leur enregistrement à titre de marques de commerce.
Sixièmement, il faudrait ajouter les motifs à la liste des renseignements nécessaires pour obtenir une date de dépôt d'une marque de commerce. J'expliquerai les raisons pour lesquelles les dates de dépôt sont très importantes.
Septièmement, il faudrait retarder la destruction des documents relatifs aux demandes et à l'enregistrement des marques de commerce, jusqu'à ce qu'on en ait fait des copies électroniques.
Huitièmement, enfin, il faudrait accorder au registraire une plus grande discrétion pour corriger les erreurs commises par son personnel.
Un objectif essentiel du projet de loi est de mettre sur pied un système grâce auquel les titulaires de propriété intellectuelle, de droits d'auteur et de marques de commerce puissent demander l'aide des autorités douanières en enregistrant leurs droits d'auteur ou leurs marques de commerce. Or il ne s'applique qu'aux titulaires de marques de commerce. Les nombreuses marques contrefaites saisies par les autorités douanières ne sont pas encore enregistrées. L'enregistrement est long. Nous voudrions que le projet de loi soit amendé pour régir les marques de commerce elles-mêmes.
Le projet de loi prévoit en outre l'entreposage des marchandises à la suite d'une notification initiale du titulaire de la propriété intellectuelle, mais seulement si ce dernier entame des poursuites judiciaires. Mais comme tous ceux qui en ont fait le savent pertinemment, cela coûte cher et le règlement final peut être long à venir. En attendant et comme l'a signalé M. Edwards, c'est le titulaire de la propriété intellectuelle qui paie les frais d'entreposage.
L'institut souhaite une procédure beaucoup plus sommaire, comme celle qu'ont instaurée d'autres pays comme le Royaume-Uni, et ceux de l'Union européenne, aux termes de laquelle les marchandises qui sont vraiment contrefaites, selon des preuves irréfutables, et lorsque l'importateur ne donne pas suite à une demande d'information, ces marchandises sont gardées de façon permanente ou détruites.
Le projet de loi exclut les marchandises qui proviennent d'autres pays et qui sont en transit au Canada. Les membres de l'institut ne voient aucune raison d'exclure ces marchandises qui sont certainement ou probablement des contrefaçons. Cette approche ternit l'image du Canada et peut aboutir à la réintroduction de ces marchandises par des ports d'entrée où les contrôles ne sont pas aussi stricts.
Le projet de loi prévoit des sanctions pénales pour la violation d'une marque de commerce. L'institut s'en réjouit, mais craint que le libellé de la disposition décourage la Couronne d'entamer des poursuites et rende plus difficiles les inculpations.
Si vous me le permettez, j'aimerais me reporter au libellé du projet de loi selon lequel quelqu'un commet une infraction — je paraphrase — s'il sait pertinemment qu'une marque de commerce est enregistrée pour certaines marchandises et que la vente ou la distribution de celles-ci contreviendrait aux articles 19 ou 20 de la Loi sur les marques de commerce.
Je peux vous assurer que la plupart des criminels ne savent pas si les marques de commerce sont déjà enregistrées, et qu'ils ne s'en soucient guère d'ailleurs, et qu'ils ne connaissent pas la portée des articles 19 ou 20 de la Loi sur les marques de commerce. Nous souhaiterions plutôt voir les compagnies ou les particuliers utilisant en toute connaissance de cause et de façon impropre une marque de commerce faire l'objet de sanctions pénales.
La Loi sur les marques de commerce ne contient pas de dispositions permettant à un tribunal d'ordonner le paiement de dommages-intérêts en fonction d'une réglementation. Dans toute affaire d'imitation frauduleuse de marque de commerce, le demandeur doit attendre que le tribunal lui accorde le paiement de dommages-intérêts ou bien prouver qu'il a perdu des revenus.
Prouver la perte de revenus prend du temps et coûte cher. La Loi sur le droit d'auteur comporte une disposition en matière de dommages-intérêts et prévoit l'étendue des dommages. Nous pensons qu'un tel régime profiterait beaucoup aux titulaires de marques de commerce et autres demandeurs qui font appel aux tribunaux.
Les prochains commentaires ne concernent pas les dispositions du projet de loi en matière de contrefaçon ou d'infraction. Ils concernent plutôt ma pratique quotidienne, qui consiste à aider les entreprises et particuliers canadiens à choisir une marque de commerce, à établir son mode d'utilisation, à déterminer s'ils peuvent l'enregistrer et à appliquer leurs droits.
La loi sur les marques de commerce autorise actuellement l'enregistrement de mots, de dessins, de symboles et de certaines formes. Prenons l'exemple de la compagnie canadienne McCain. Sa marque de commerce est bien connue. L'un de ses produits est la petite pomme de terre à l'image en forme de sourire, qui est protégée à titre de signe distinctif. Je vous signale d'ailleurs que l'enregistrement de cette marque de commerce a pris sept ans.
Le projet de loi offrira d'autres possibilités d'enregistrement de signes non traditionnels, apparentés par exemple à des odeurs, à des goûts ou à des textures. Mais pour que ces marques de commerce puissent être aujourd'hui enregistrées, il faut que leurs titulaires les utilisent.
Le projet de loi ne contient aucune ligne directrice sur la façon dont les acheteurs utiliseront une odeur. Habituellement, les marques de commerce doivent être présentées au consommateur au moment de l'achat.
Comment un goût va-t-il être utilisé? On ne s'attend certainement pas à devoir goûter quelque chose avant de décider de l'acheter. Le projet de loi ne fournit aucun exemple d'utilisation de ce type de marques de commerce. Or cela est vraiment important.
En outre, le projet de loi exclut l'enregistrement de marques de commerce qui ne possèdent pas de « caractère distinctif inhérent » ou qui ont une « fonction utilitaire ». Ces termes sont réellement importants car ce sont eux qui déterminent la possibilité d'enregistrer ou non une marque de commerce.
L'enregistrement est vraiment important, car il donne au titulaire les droits exclusifs d'utilisation, dans l'ensemble du pays, d'une marque de commerce pour certains biens et services. Si nous ne savons pas ce que signifie « fonction utilitaire » ou « caractère distinctif inhérent », nous ne pourrons pas conseiller convenablement nos clients, ce qui entraînera de l'incertitude et sûrement bien des litiges, ce qui est fantastique pour nous avocats, mais pas tellement bon pour nos clients.
Le projet de loi comporte un nouvel article précisant le moment où le demandeur obtiendra une date de dépôt de la marque de commerce. Les dates sont vraiment importantes dans la Loi sur les marques de commerce. La loi est vraiment tatillonne: la priorité accordée à diverses parties dépend des dates. Actuellement, pour obtenir une date de dépôt, il faut déposer une demande contenant certains renseignements, dont les motifs de la demande, à savoir l'utilisation réelle et projetée, ou bien l'utilisation et l'enregistrement dans un autre endroit.
Le projet de loi stipule que la date de dépôt est fixée en fonction de certains renseignements bien définis. Il n'indique pas si les motifs sont inclus dans la demande.
Sans motifs, quelqu'un d'autre ne pourra pas déterminer si une marque bloque la sienne. Or c'est un renseignement important. Je dois connaître cette information le plus tôt possible pour bien conseiller mes clients. Plus longue est l'attente, moins mon client est sûr de pouvoir choisir une marque de commerce. Les retards peuvent entraîner des changements dans l'entreprise. Il est important que cette information puisse faire partie des motifs.
J'ai deux derniers points à soulever.
Premièrement, le projet de loi autorise le registraire à détruire certains dossiers et documents après six ans. Dans ma profession, j'utilise ces documents pour dire à mes clients si leur marque de commerce sera enregistrée, quelle position le registraire ou d'autres entreprises ont prise par le passé par rapport à la marque. Il est très important de pouvoir disposer de cette information. Ces documents pourraient être sauvegardés sous forme électronique. L'Institut voudrait donc qu'ils ne soient pas détruits avant d'être sauvegardés sous forme électronique.
Enfin, le projet de loi permet au registraire de corriger certaines erreurs qui ont été faites. En effet, il arrive que l'on fasse des erreurs, sous forme d'omission par exemple.
Comme je l'ai mentionné, c'est le registraire qui fixe les droits de la partie demanderesse. Il est important qu'il le fasse correctement. Nous aimerions donc qu'il soit autorisé à corriger ses erreurs pendant une période de temps plus longue.
Je vous remercie et j'attends vos questions.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour, je suis professeur de droit à l'université d'Ottawa où je détiens la chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique. J'ai témoigné à plusieurs reprises devant le comité et, comme d'habitude, je témoigne aujourd'hui à titre personnel.
Je me réjouis de cette occasion qui m'est offerte de parler du projet de loi C-8.Si certains éléments de la législation ne font pas l'unanimité, on conviendra certainement que lorsqu'il y a des contrefaçons dangereuses surtout dans les domaines de la santé et de la sécurité, la loi devrait offrir à toutes les parties concernées les outils nécessaires pour remédier au problème. N'oublions pas que la loi permet de mener régulièrement des raids et des saisies contre les contrefaçons, que les douaniers — et on l'a vu encore lundi dernier — collaborent, dans le cadre de protocoles d'entente, avec la GRC et Santé Canada dans des dossiers qui touchent la santé et la sécurité et que les tribunaux imposent des sanctions de plus en plus lourdes dans les affaires de contrefaçon.
Cela dit, dans tout débat sur la contrefaçon, le contexte est important. C'est facile et plutôt inquiétant — comme nous venons de le voir — de signaler les problèmes manifestes qui concernent la santé et la sécurité et, à partir de là, conclure qu'il faut utiliser toutes les mesures juridiques dont nous disposons pour les régler. Je dirais qu'il est important de reconnaître que l'ampleur du problème reste sujet à maints débats mais, et c'est encore plus important, que certaines des solutions proposées pourraient avoir des conséquences inattendues qui sont nuisibles et qu'il faudrait éviter. Par ailleurs, puisque le ministre Moore a insisté lundi dernier sur le fait que le projet de loi porte sur la protection de la propriété intellectuelle au niveau mondial, il convient de se pencher sur le contexte international, et notamment sur l'Accord commercial anti-contrefaçon ou ACAC et le projet d'accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne ou AÉCG.
Dans cette optique, je limiterai mes observations à deux grandes questions, premièrement les conséquences inattendues, surtout celles qui pourraient découler des propositions d'amendement que l'on vient d'entendre, et deuxièmement, un bref survol du contexte que présentent l'ACAC et l'AÉCG.
J'ajouterai que je n'ai pas l'intention d'aborder la myriade de réformes que prévoit le projet de loi sur les marques de commerce, et dont certaines viennent d'être mentionnées, mais je crois sincèrement qu'elles n'ont pas leur place dans un projet de loi anti-contrefaçon. S'il s'agissait de présenter un projet de loi de style omnibus sur la propriété intellectuelle, celui-ci devrait aussi aborder des sujets d'actualité, dont l'accès accordé aux non-voyants qui a fait l'objet d'un nouveau traité international auquel le Canada a pris une part active et qui a été conclu en juin dernier, de même que la réforme de la Commission du droit d’auteur que réclament les intervenants de toutes tendances
Mais parlons, comme je l'ai dit, des éventuelles conséquences inattendues du projet de loi C-8. Je dirai pour commencer que l'exception accordée aux voyageurs individuels, l'exclusion des brevets et des marchandises en transit, ainsi que la volonté de ne pas toucher aux produits du marché gris — je pense à certains dossiers touchant les importations parallèles — sont des choix stratégiques constructifs qui permettent de cibler les contrevenants tout en évitant que les saisies à la frontière ne fassent augmenter les coûts à la consommation. Cela dit, ces conséquences inattendues suscitent de graves inquiétudes et j'en relèverai quatre.
Premièrement, le projet de loi accorde — on le voit — d'immenses pouvoirs aux responsables des douanes, qui ne sont pas des experts dans les droits d'auteurs et les marques de commerce et qui pourtant seront désormais forcés d'évaluer les contrefaçons, et notamment de déterminer si des exceptions aux droits d'auteur s'appliquent. Le projet de loi ouvre la porte à la saisie d'oeuvres créées sans le consentement du titulaire du droit d'auteur. Or bien des oeuvres sont créées sans ce consentement en se fondant sur des exceptions telles que le caractère équitable de l'acte et qui sont parfaitement légales. Cela entraîne des litiges qu'il vaut mieux laisser les tribunaux trancher et qui d'ailleurs font souvent l'objet de batailles juridiques. Avec ce projet de loi, ce sont désormais les responsables des douanes qui devront trancher et demander au titulaire du droit d'auteur s'il pense qu'il y a infraction.
D'aucuns prétendent que les pouvoirs octroyés en vertu de ce projet de loi sont conformes aux normes internationales, mais en réalité, un certain nombre de pays, dont des alliés tels que l'Australie et le Mexique, ne confèrent pas d'office de tels pouvoirs. Le recours aux tribunaux est encore considéré comme une approche viable et légitime pour lutter contre les contrefaçons. Comme je l'ai mentionné, on a vu lundi comment l'ASFC collabore avec la GRC et Santé Canada sur les questions de sécurité. Octroyer ce genre de pouvoirs à des responsables des douanes qui ne sont pas experts en la matière et les laisser aller encore plus loin pourraient entraîner des conséquences inattendues.
Encore aujourd'hui, certains ont dit vouloir que la loi aille encore plus loin, notamment en faisant assumer les coûts par le public en oubliant que ces coûts sont assumés par des petites entreprises qui pourraient pâtir de ces saisies. En fait, on a même plaidé aujourd'hui en faveur de pouvoirs encore plus larges accordés aux responsables des douanes, dont la destruction ou la confiscation des biens sans surveillance judiciaire. À mon humble avis, ces propositions sont extrêmement problématiques et empêcheraient d'atteindre l'équilibre souhaité en annulant d'importantes garanties, en faisant payer par les contribuables les frais découlant de mesures privées et en faisant finalement augmenter les coûts à la consommation.
En outre, la rétention des produits peut nuire aux petites entreprises canadiennes, car les marchandises qu'elles cherchent à importer pourraient être retenues, souvent par des concurrents. L'absence d'une disposition relative à l'abus dans le projet de loi est particulièrement importante de ce point de vue.
Deuxièmement, le projet de loi comprend une exception pour les voyageurs de loisir. Toutefois, le libellé du projet de loi est assez curieux: il y est question d'« oeuvres » plutôt que de « produits ». L'Accord commercial relatif à la contrefaçon et les versions divulguées du Partenariat transpacifique mettent l'accent sur les biens physiques. En mettant l'accent sur l'oeuvre, cette disposition pourrait également inclure les fouilles visant les iPod et les ordinateurs portatifs. En fait, si on devait supprimer l'exception — et il y a eu quelques propositions en ce sens —, les iPod, les téléphones intelligents et d'autres dispositifs électroniques pourraient faire l'objet de fouilles plus poussées dans le cas des voyageurs de loisir qui traversent les frontières canadiennes.
Troisièmement, comme nous venons de l'entendre, certains groupes préconisent des sanctions accrues. Aux termes du projet de loi, le droit d'auteur et les marques de commerce relèvent déjà des dispositions pénales, et ce, d'une manière qui dépasse de loin ce qui était prévu dans le droit conventionnel de la propriété intellectuelle. Par ailleurs, comme nous venons aussi de l'entendre, certains veulent que des dommages-intérêts soient versés en cas de violation des marques de commerce. Avec respect, les dommages-intérêts pour les marques de commerce ne sont pas nécessaires. Les titulaires de droits citent fréquemment la valeur de leurs produits et les dommages associés à la contrefaçon. Si les demandes d'indemnisation sont exactes, on ne devrait pas avoir de difficulté à démontrer la valeur d'une indemnité. De plus, d'autres pays qui ont adopté une telle approche ont connu de graves problèmes. Par exemple, Taïwan a réduit ses dommages-intérêts pour les marques de commerce, après avoir découvert que les tribunaux accordaient des indemnités disproportionnées. Aux États-Unis, l'utilisation de dommages-intérêts pour les marques de commerce a donné lieu au phénomène des « chasseurs » de marques de commerce, qui s'apparentent aux « chasseurs » de brevets. On s'engagerait alors dans des litiges conçus principalement pour obtenir des règlements coûteux à l'encontre de petites entreprises qui n'ont souvent pas les moyens de se battre en cour.
Quatrièmement, comme on l'a aussi entendu dans certains des débats sur ce qui était alors le projet de loi C-56, il y a l'éventualité de retirer le ciblage des expéditions en transit. Je dirais que le projet de loi exclut de manière judicieuse les expéditions en transit, mais en toute déférence, un tel retrait serait une erreur. La saisie de médicaments génériques en transit risque de menacer le commerce international, le développement international et le bien-être public. À la suite de telles saisies dans l'Union européenne, l'Inde et le Brésil ont tous deux déposé, en 2010, des plaintes auprès de l'Organisation mondiale du commerce. Ils ont signalé plusieurs cas où des médicaments génériques en transit dans l'Union européenne avaient été retenus là-bas.
En fait, selon Médecins sans frontières, en 2008 et en 2009, au moins 19 cargaisons de médicaments génériques en provenance de l'Inde vers d'autres pays ont été saisies pendant leur transport en Europe. Dans un cas particulier, les autorités douanières allemandes ont saisi à tort une cargaison d'amoxicilline, ayant soupçonné que le produit était une contrefaçon de la marque Amoxil. La cargaison a été retenue pendant quatre semaines en vue de faire l'objet d'une enquête et, au bout du compte, on a conclu qu'il n'y avait aucune contrefaçon d'une marque de commerce. Dans un autre cas, les autorités douanières néerlandaises ont saisi un lot de médicaments contre le sida en provenance de l'Inde vers le Nigeria pour un projet de la Fondation Clinton.
En 2011, la Cour de justice de l'Union européenne s'est prononcée contre les saisies en transit en invoquant l'argument qu'il n'y avait aucune infraction dans l'Union européenne. En l'occurrence, il convient d'adopter une approche semblable visant à exclure les saisies en transit, et il faudrait rejeter tout argument soutenant le contraire.
Enfin, du point de vue du contexte international, et malgré certaines affirmations selon lesquelles le projet de loi répond principalement aux préoccupations nationales, une bonne partie de la pression vient de l'extérieur du pays. Lundi, Mme Sgro a posé des questions sur l'Accord commercial relatif à la contrefaçon. En fait, les États-Unis n'ont pas encore ratifié cet accord. Le seul pays à l'avoir fait est le Japon. La vaste majorité des signataires de l'accord, à savoir l'Union européenne au complet — tous les États membres — ainsi que la Suisse, ne l'ont pas ratifié. Ils ont rejeté l'Accord commercial relatif à la contrefaçon à la suite d'un vote au Parlement européen. On doute que cet accord finisse par prendre effet, car il ne pourrait même pas recevoir le nombre requis de ratifications pour assurer son entrée en vigueur. À vrai dire, même s'il entre en vigueur, on le considère maintenant comme une marchandise endommagée qui est loin d'être la norme internationale pertinente, comme l'avaient espéré certains. Cet accord a inspiré un tollé de protestations dans la population, et le Canada ferait mieux de passer à autre chose.
Il y a un accord qui est peut-être plus pertinent: l'AECG, qui contient apparemment des dispositions frontalières qui sont conformes au projet de loi C-8. Le problème, comme beaucoup le savent, c'est que le gouvernement n'a pas encore rendu public le libellé de l'AECG; il n'y a donc aucun moyen de savoir précisément ce qui est requis en vertu du traité et s'il y a lieu d'apporter des changements dans le cadre du projet de loi. C'est peut-être conforme, mais sans le libellé, nous ignorons si les amendements apportés au projet de loi correspondraient toujours aux exigences du traité.
Enfin, il y a aussi la possibilité — et d'aucuns diraient la probabilité — qu'on ajoute des dispositions relatives aux mesures frontalières dans le Partenariat transpacifique, qui fait toujours l'objet d'une négociation.
L'effet net de ces pressions internationales — et je conclurai là-dessus —, c'est que le Canada aurait tout intérêt, selon moi, à attendre la conclusion des traités internationaux, jusqu'à ce que nous comprenions mieux nos obligations à l'égard de ces types de dispositions concernant les mesures frontalières.
Je vais m'arrêter là. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
Je vais voir ce qu'on peut faire. Pour être juste, je vais d'abord céder la parole au Parti conservateur, mais je vous prie de vous en tenir à une seule question, précédée d'un préambule de 30 secondes.
Veuillez répondre brièvement.
Par la suite, je cèderai la parole au NPD.
Merci, monsieur le président.
J'avais plusieurs questions à poser, mais j'aimerais commencer par remercier tous les témoins d'être venus ici aujourd'hui et de nous avoir proposé des amendements. Je sais que vos organisations ont proposé de nombreux amendements que le ministre pourra prendre en considération dans la rédaction finale, et nous vous en sommes reconnaissants.
Monsieur Edwards, comme vous semblez représenter un vaste groupe d'organisations, j'aimerais que vous nous expliquiez les principaux impacts de la contrefaçon et du piratage, d'après votre expérience et celle des membres du vaste groupe que vous représentez ici aujourd'hui.
Ce qui me vient à l'esprit, c'est la question de la sécurité. La CSA vient de parler de la nécessité d'avoir des disjoncteurs. La présence de disjoncteurs dans un système électrique est l'élément clé qui fait la différence entre un système qui fonctionne bien et une situation de surcharge, auquel cas le disjoncteur devrait corriger la défaillance. Faute de quoi, il y a un risque d'incendie ou d'électrocution.
De notre point de vue, le problème de la sécurité est probablement l'enjeu le plus important que l'on évite lorsqu'on essaie d'empêcher l'entrée de produits contrefaits.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à vous tous d'être venus témoigner. J'aurais aimé disposer d'une tribune dans laquelle Mme Rowden et M. Geist pourraient nous parler plus en détail de leurs points de vue. Malheureusement, ce n'est pas le cas.
Un des thèmes communs soulevés dans les observations concerne le ressourcement à l'ASFC pour appliquer cette loi. Franchement, sans mesures coercitives, cette loi ne veut rien dire.
Monsieur Edwards, vous avez parlé de l'insuffisance des ressources et du besoin de formation supplémentaire.
Quant à vous, madame Rowden, vous avez dit que nous devons attribuer plus de responsabilités à l'ASFC en ce qui concerne les marchandises en transit. Oublions pour le moment que M. Geist a une façon différente de voir la question; dans la foulée des compressions budgétaires de 143 millions de dollars dont l'ASFC a fait l'objet l'année dernière, comment faire pour ajouter plus de responsabilités sans accroître le budget? Et en cas d'inaction, ce projet de loi signifiera-t-il réellement quelque chose?
La question s'adresse-t-elle à moi? À mon avis, si le comité adopte certains des amendements que nous avons proposés, le projet de loi aiderait beaucoup à empêcher ces produits de traverser la frontière.
Le Réseau anti-contrefaçon canadien est une organisation sans but lucratif. Nous sommes des bénévoles; nous avons très peu de financement. Une des choses dont nous sommes fiers, c'est que nous essayons de former les gens de l'Agence des services frontaliers du Canada, de la GRC et d'autres forces policières. Nous y travaillons depuis un certain temps.
Toutefois, je suis toujours frustré de voir que nos efforts représentent une goutte d'eau dans l'océan. Si nous formons 50 gardes-frontière au passage frontalier de Niagara Falls, comme nous l'avons fait l'an dernier, puis que nous y retournons après trois mois, 50 % d'entre eux ont déjà changé d'emploi. Résultat: nous devons tout recommencer à zéro. Il est donc très difficile de maintenir le niveau de compréhension requis pour savoir de quoi ont l'air les produits.
Ces gens ont besoin d'un coup de pouce, et nous sommes disposés à les aider, mais nous n'avons pas de financement, nous non plus.
Monsieur Geist, vous avez fait allusion aux importations parallèles, qui ne constituent pas des produits contrefaits, mais risquent d'être ciblées. Pourriez-vous nous expliquer ce que vous entendez par là? Donnez-nous un exemple.
Dans le cas d'un produit qui est légalement fabriqué ou autorisé dans un pays, le problème pourrait se poser lorsqu'une personne essaie d'autoriser la vente d'un produit semblable ou identique dans plusieurs endroits.
À un moment donné, la Cour suprême du Canada a été saisie d'une importante affaire qui portait, croyez-le ou non, sur des tablettes de chocolat, l'une étant autorisée à la vente en Europe et l'autre, d'une marque semblable, nommément Toblerone, autorisée à la vente au Canada.
Ce sont des produits tout à fait légitimes, sauf que le titulaire de droits a peut-être accordé les droits de vendre ce produit au Canada à une personne autre que celle autorisée à le vendre, disons, en Europe.
Lorsque les mêmes produits traversent la frontière, ce sont des produits légitimes qui peuvent, en effet, avoir pour conséquence de réduire les coûts à la consommation. Cela correspond donc aux propos du gouvernement, sans pour autant en faire un élément de différenciation; c'est pourquoi les Canadiens estiment souvent qu'ils paient plus cher que les consommateurs, disons, aux États-Unis ou ailleurs.
Le hic, c'est que nous devons nous assurer qu'aux termes de cette mesure législative, ces types d'importations ne font pas l'objet d'une rétention, parce que ce ne sont pas des produits contrefaits, même si les titulaires de droits risquent de ne pas être particulièrement heureux de voir ce produit légitime être vendu au Canada. En fait, c'est bon pour les consommateurs canadiens, parce qu'ils évitent ainsi de payer plus cher que les consommateurs dans d'autres pays, comme c'est parfois le cas.
Monsieur Geist, dans vos observations préliminaires, vous avez parlé de la santé et de la sécurité, ainsi que de la valeur des lois en vigueur et de la jurisprudence. Vous avez également évoqué le danger que représentent, bien entendu, les conséquences imprévues. Dans ce contexte, pourriez-vous me dire brièvement ce que vous pensez du projet de loi C-8? Aura-t-il des conséquences imprévues, plus précisément pour l'industrie des produits génériques?
Je crois que le gouvernement a essayé d'élaborer certaines mesures dans le but d'exclure certains de ces produits, même si je sais que vous avez soulevé des inquiétudes quant à certains des changements apportés à la définition d'une marque de commerce distinctive. Je crois que ces préoccupations sont légitimes.
Je n'ai pas été en mesure de vérifier s'il y a un grand nombre de cas qui justifieraient ce changement. Je ne pense pas que ce soit le cas.
Ce qui m'inquiète, surtout dans le contexte des produits génériques et de leur distribution, c'est la question des marchandises en transit. Ce n'est pas une hypothèse. En fait, je dirais que ce n'est même pas une conséquence imprévue. D'après l'expérience d'autres pays qui permettent le ciblage d'expéditions en transit, nous savons que des produits génériques pourraient fort bien être inclus dans ces cargaisons, entravant ainsi la capacité de les acheminer vers les patients et les personnes qui en ont le plus besoin.
Ma question s'adresse à la CSA: quels sont les organismes de certification au Canada? Il y a la CSA et UL. En a-t-il d'autres?
Si l'on saisit un produit électronique de marque que l'on soupçonne d'être un produit contrefait et peut-être dangereux, quel rôle jouera la CSA, à supposer que le produit porte une marque contrefaite de cette association? Qui interviendrait: le titulaire de droits, la CSA ou les deux?
Ce serait les deux. La plupart du temps, le propriétaire de la marque est notre client. Nous assumons donc une certaine responsabilité et nous veillons à la protection de notre marque. Alors, dans une telle situation, nous travaillerions ensemble.
Votre question porte-t-elle sur le processus actuel ou futur?
Cela fait trois questions.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Je vais devoir... bon, cela suffit pour porter atteinte à mon intégrité.
D'accord, soyez le plus bref possible.
Je n'y manquerai pas.
Ma collègue, Mme Charlton, a expliqué comment l'ASFC manque actuellement de ressources. Vous nous avez tous dit qu'il faut offrir plus de formation. Ces gens doivent se spécialiser davantage. Madame Rowden, j'aimerais revenir sur votre observation sur les transbordements; étant donné que l'ASFC gruge ses ressources déjà insuffisantes pour s'occuper de plusieurs priorités concurrentes — et ce sera de plus en plus le cas dans la foulée du projet de loi —, le prix à payer pour appliquer la loi à des produits qui ne sont ni en provenance, ni à destination du Canada semble être très lourd.
Pourquoi le Canada devrait-il financer un tel mécanisme de mise en application?
Le projet de loi n'est pas conçu pour être appliqué par l'ASFC. L'ASFC ne fera qu'examiner les produits et repérer les cas de contrefaçon. Si les agents de l'ASFC sont bien formés et s'ils repèrent les produits contrefaits qui entrent au pays, alors il importe peu de savoir si les produits contrefaits sont destinés à rester ici ou s'ils ne sont que de passage. Dans les deux cas, les agents de l'ASFC pourraient en informer le titulaire de droits, lequel pourrait alors décider des mesures à prendre.
Merci beaucoup, madame Rowden.
Chers témoins, seriez-vous disposés à comparaître de nouveau, en cas de rappel? C'est le comité qui en décidera à une date ultérieure.
J'avertis les membres du comité que les autobus ont été appelés.
Merci beaucoup. Je tiens à vous présenter mes excuses. C'est la démocratie à l'oeuvre, mais nous vous sommes reconnaissants d'être venus témoigner.
La séance est levée.
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