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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 053 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 10 mars 2015

[Enregistrement électronique]

(0850)

[Traduction]

    Je demande aux membres des médias de quitter la salle avec les caméras. Merci beaucoup.
    Soyez les bienvenus, chers collègues, à la 53e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Aujourd'hui, selon l'ordre du jour et conformément à l'ordre de renvoi du lundi 23 février 2015, nous examinons le projet de loi C-51, Loi édictant la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada et la Loi sur la sûreté des déplacements aériens, modifiant le Code criminel, la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois.
    Nos témoins d'aujourd'hui sont l'honorable Steven Blaney, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, et l'honorable Peter Gordon MacKay, ministre de la Justice et procureur général du Canada.
    Nous accueillons également M. William F. Pentney, sous-ministre de la Justice et sous-procureur général du Canada, et M. Donald K. Piragoff, sous-ministre adjoint principal, Secteur des politiques, tous deux du ministère de la Justice.
    Nous avons aussi avec nous M. François Guimont, sous-ministre, ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile; M. Michel Coulombe, directeur, Service canadien du renseignement de sécurité; et M. Bob Paulson, commissaire, Gendarmerie royale du Canada.
    M. Garrison invoque le Règlement.
    Monsieur le président, je remercie les hauts fonctionnaires de leur présence, mais il semble qu'il en manque un ce matin, soit le commissaire à la protection de la vie privée, qui est un haut fonctionnaire du Parlement. Je demande le consentement unanime du comité pour proposer la motion suivante: Que le président demande au greffier de prévoir une séance supplémentaire d'une heure afin que M. Daniel Therrien, commissaire à la protection de la vie privée, puisse comparaître devant le comité.
    Il s'agit d'un rappel au Règlement, et vous avez la parole, mais en général, on ne peut pas présenter de motion dans le cadre d'un rappel au Règlement.
    Monsieur le président, selon moi, je pourrais le faire avec le consentement unanime du comité. Encore une fois, je demande le consentement unanime du comité pour proposer la motion.
    M. Garrison demande le consentement unanime. M. Garrison a-t-il le consentement unanime des membres du comité pour proposer la motion?
    Des voix: D'accord.
    Des voix: Non.
    Le président: Nous allons maintenant entendre nos témoins. Nos ministres feront une brève déclaration, ce qui nous donnera la possibilité de discuter du projet de loi.
    Nous allons commencer par M. Blaney.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président Kramp.
    Je vais faire ma présentation dans les deux langues nationales. J'invite mes collègues qui le souhaitent à utiliser les excellents services de nos interprètes.

[Traduction]

    M. Easter invoque le Règlement.
    Monsieur le président, c'est un rappel au Règlement que j'ai soulevé à plusieurs reprises. Le commissaire Paulson est venu témoigner devant le comité et il a apporté avec lui un document écrit. Les ministres ont accès à l'effectif le plus complet de tous les ministères. Absolument rien ne justifie qu'ils ne puissent fournir, pour un projet de loi aussi important, leurs observations écrites dans les deux langues officielles. Je ne vois aucune raison qui les empêche de le faire. À mon sens, c'est tout à fait inacceptable.
    Madame Ablonczy.
    Monsieur le président, M. Easter a été ministre et, à ce titre, il a comparu devant un comité à cinq reprises, dont une fois devant un comité sénatorial. Je crois que si nous vérifions, nous constaterons que pas une seule fois il n'a présenté une déclaration écrite à un comité. Il manque totalement de crédibilité lorsqu'il soulève cette question, et j'aimerais qu'il cesse de le faire.
    Merci beaucoup. Vous avez tous les deux fait valoir votre point de vue. La présidence considère que les deux arguments pourraient faire l'objet d'un débat, mais nous n'allons pas en discuter davantage à ce moment-ci.
    Monsieur Blaney, vous avez de nouveau la parole.

[Français]

    Monsieur le président, comme vous la savez, je suis très fier de m'exprimer en français, qui est ma langue maternelle. J'aurai le plaisir de faire une partie de mon allocution en anglais.
    Je suis heureux d'être ici ce matin afin de remettre les pendules à l'heure à certains égards. Je suis très fier d'être ici avec mon collègue et ami, l'honorable ministre de la Justice et procureur général du Canada, M. MacKay, pour qui j'ai beaucoup de respect. Nous avons préparé ce projet de loi avec lui. Nous sommes fiers d'être ici pour protéger les droits des Canadiennes et des Canadiens.

[Traduction]

    Permettez-moi de vous parler d'abord de la vidéo produite par le criminel qui a attaqué cet édifice même du Parlement et assassiné le caporal Nathan Cirillo, vidéo que vous avez vue vendredi dernier.

[Français]

     La définition du Petit Larousse est claire et c'est celle qu'utilisent le commissaire Paulson, le secrétaire d'État américain, John Kerry, ou même le président  François Hollande, qui a qualifié l'acte commis ici « d'inspiration terroriste ». C'était un acte de violence, un geste d'éclat animé par une idéologie.
    Évidemment, chaque fois que je comparais ici, je me rappelle que j'étais présent à ce moment-là avec le ministre MacKay et plusieurs collègues du caucus gouvernemental. Nous avons été témoins et victimes de cette attaque. J'ai eu la chance de rencontrer tous les membres du comité pour leur dire que nous devions demeurer vigilants et confiants ainsi que de prendre les mesures nécessaires à cet égard, tout en respectant la Charte canadienne des droits et libertés et la vie privée pour lutter efficacement contre la menace terroriste qui évolue. C'est mon premier devoir comme ministre de la Sécurité publique.
    C'est la raison pour laquelle je suis présent aujourd'hui devant vous, accompagné du ministre MacKay, pour vous présenter le projet de loi C-51. Ce projet de loi comprend des mesures pour lutter contre le terrorisme et va donner des outils additionnels à nos forces de l'ordre, aux services de renseignement ainsi qu'aux organismes qui font le suivi et la surveillance de nos services de renseignement.
(0855)

[Traduction]

    Notre loi antiterroriste, le projet de loi C-51, garantit une meilleure protection de nos droits et de nos libertés. Ce projet de loi fournit davantage d'outils aux organismes chargés de l'application de la loi et de la sécurité pour lutter contre la radicalisation et traquer les terroristes, et il accroît considérablement les mécanismes de contrôle et de révision judiciaires afin de protéger nos droits et libertés, ainsi que la vie privée de tous les Canadiens.
    Monsieur le président, le fait est que le mouvement djihadiste international a déclaré la guerre au Canada et à la plupart des pays du monde. Le Canada et les Canadiens sont ciblés par les terroristes djihadistes simplement parce que ces terroristes détestent notre société et nos valeurs. C'est la raison pour laquelle notre gouvernement présente des mesures visant à protéger les Canadiens contre les terroristes djihadistes qui cherchent à détruire les principes mêmes qui font du Canada le meilleur pays où vivre dans le monde.
    C'est aussi pour cette raison que le Canada ne reste pas les bras croisés, comme certains le voudraient. Nous nous joignons plutôt à nos alliés pour appuyer la coalition internationale dans la lutte contre l'EIIL, l'organisation terroriste qu'est l'État islamique.

[Français]

    Nous l'avons vu à Saint-Jean et ici même à Ottawa. Nous l'avons vu aussi à Paris, à Sydney en Australie et à Copenhague. La menace est complexe et diffuse. Nous avons le devoir de poser les gestes pour protéger les citoyens dans le respect de nos droits et de nos libertés.
     Des groupes d'extrémistes violents mondiaux, comme l'État islamique ainsi qu'Al-Qaïda et ses filiales, présentent une menace sérieuse pour le Canada. C'est la raison pour laquelle nous devons nous adapter et renforcer notre capacité à protéger notre pays et nos concitoyennes et concitoyens.

[Traduction]

    Parce qu'il n'y a pas de liberté sans sécurité.

[Français]

    Pour que la liberté s'épanouisse, la sécurité est essentielle.

[Traduction]

    Ces principes visant à assurer la sécurité tout en préservant la liberté sont au cœur de l'approche de notre gouvernement conservateur en matière de sécurité nationale. Lorsqu'un ministère ou un organisme gouvernemental détient des renseignements laissant croire qu'il existe une menace à la sécurité, les Canadiens s'attendent à ce qu'il puisse les transmettre, afin d'assurer leur protection, aux autres ministères et organismes. On ne parle pas ici de nouveaux renseignements, mais de renseignements déjà recueillis. La Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada, la première partie du projet de loi C-51, constitue une réponse à la commission d'enquête sur l'affaire Air India et à beaucoup d'autres demandes. Monsieur le président, nous le faisons pour mieux protéger les Canadiens. Le projet de loi contient des mesures adéquates pour protéger la vie privée des Canadiens. Nous refusons de privilégier les droits des terroristes au détriment de ceux des Canadiens.

[Français]

     Comme nous l'avons entendu, cette loi donnera la capacité légale à tous les ministères et organismes du gouvernement de communiquer des renseignements entre eux en ce qui concerne les activités qui portent atteinte à la sécurité du Canada, et ce, soit de manière proactive ou en réponse à des demandes d'institutions fédérales désignées ayant un mandat ou des responsabilités liés à la sécurité nationale. Les gens de mon comté me demandent pourquoi nous n'avons pas fait cela avant.
    Par définition, en vertu de la nouvelle loi, une activité portant atteinte à la sécurité du Canada est une activité qui porte atteinte à la souveraineté, à l'intégrité territoriale, à la vie ou à la sécurité de la population. Beaucoup d'observateurs ont commenté cette définition. Ce matin, je tiens à souligner qu'elle se rapporte strictement au partage de l'information déjà existante entre les agences et organismes fédéraux. Évidemment, elle ne se rapporte pas au mandat du Service canadien du renseignement de sécurité.
    La deuxième mesure proposée par le projet de loi touche la Loi sur la sûreté des déplacements aériens. Cette loi procurerait un cadre juridique pour définir les pouvoirs ministériels en vertu du Programme de protection des passagers et élargirait le mandat de ce programme afin de recenser, d'énumérer et d'atténuer les menaces provenant de deux catégories d'individus.
    La première catégorie, qui est constituée de ceux qui sont soupçonnés de présenter une menace pour la sécurité du transport, existe déjà. Quant à la deuxième catégorie, elle n'existe pas encore. Pourtant, nous en avons grandement besoin. Ceux qui tenteraient de se rendre à l'étranger dans le but d'appuyer des activités liées au terrorisme ne sont pas couverts par la loi. Présentement, nous ne pouvons pas les empêcher de monter à bord d'un avion même si nous avons des raisons de croire qu'ils le font dans le but de commettre un acte terroriste.
    Encore une fois, monsieur le président, c'est assez clair.
(0900)

[Traduction]

    Nos organismes de sécurité nationale disposeraient d'un outil supplémentaire pour lutter contre la menace que posent les individus qui voyagent à l'étranger pour prendre part à des activités criminelles. La loi autoriserait l'Agence des services frontaliers du Canada à recueillir de l'information sur les voyageurs aériens qui arrivent au Canada ou quittent le pays, et à les contrôler en fonction de la liste. Si ce sont les responsables de l'application de la loi du gouvernement du Canada et non les employés des compagnies aériennes qui soumettent les passagers à un contrôle en fonction de la liste, cela permettra d'améliorer la sécurité des Canadiens et de mieux protéger leur vie privée.

[Français]

    Le projet de loi permet aussi aux particuliers inscrits à qui l'on a refusé l'embarquement en vertu du programme de présenter une demande afin d'être retirés de la liste. Le projet de loi prévoit un mécanisme d'appel. En effet, toute personne inscrite pourrait interjeter appel à la Cour fédérale.
    La troisième mesure que nous proposons fournira au Service canadien du renseignement de sécurité — le SCRS — un nouveau mandat pour réduire les menaces à la sécurité du Canada. Je dis enfin.

[Traduction]

    Actuellement, le SCRS peut détecter les menaces à la sécurité, mais n'est pas en mesure d'intervenir, comme on le fait dans la plupart des pays alliés. Grâce au nouveau mandat de perturbation des menaces, le SCRS serait autorisé à prendre des mesures concrètes pour contrer les menaces à la sécurité du Canada, au pays et à l'étranger, comme le font la plupart de nos alliés, comme la Suède, la Norvège, la Finlande, le Danemark, la France, les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie. Il est à peu près temps, monsieur le président. Par exemple, le SCRS pourrait perturber les projets de déplacement ou les transactions financières des terroristes, et même intercepter des armes pour empêcher qu'elles soient utilisées dans des activités terroristes.
    Il est important de noter que ce mandat est lié à la définition actuelle de « menaces envers la sécurité du Canada » qui figure à l'article 2 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Cette définition est en vigueur depuis 30 ans; elle sert de fondement au mandat principal du SCRS en matière de collecte de renseignements depuis sa création et elle serait appliquée de la même façon pour le mandat de perturbation des menaces.

[Français]

     S'appuyant sur ce nouveau mandat, le projet de loi C-51 fixe des limites rigoureuses et établit un mécanisme de mandat en ce qui touche la perturbation liée aux menaces. À ma connaissance, nous sommes le seul pays au monde à ajouter cette supervision judiciaire au mécanisme de réduction de la menace. Si les mesures proposées risquaient de porter atteinte à un droit garanti par la Charte ou de contrevenir à une loi canadienne, un juge de la Cour fédérale devrait les autoriser au préalable.
    Le projet de loi C-51 établit aussi de nouvelles exigences en matière de rapport pour le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité en ce qui a trait au SCRS. Nous confions en effet à ce comité de surveillance le mandat légal de suivre les activités du SCRS afin d'accroître la responsabilité, la transparence et le respect des droits des Canadiens et Canadiennes.
    Enfin, la quatrième mesure proposée vise des changements à la Section 9 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Cela permettrait au gouvernement d'utiliser et de protéger l'information classifiée dans le cadre de procédures d'immigration, y compris les certificats de sécurité devant la Cour fédérale et les demandes de non-divulgation saisies par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Ces modifications assureraient une protection rigoureuse de l'information classifiée et feraient en sorte que les procédures soient équitables. Cela nous permettrait également de nous assurer que la discrétion du juge est maintenue dans ce cas et que le rôle de l'avocat spécial — ou amicus curiae — est maintenu afin de protéger les intérêts des non-citoyens lors des séances à huis clos.
(0905)

[Traduction]

    Avant de conclure mon exposé et de céder la parole à mon collègue, j'aimerais parler de trois idées fausses véhiculées par des députés de l'opposition et quelques soi-disant experts.
    Le chef du NPD a prétendu qu'en vertu du projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui, la dissidence et les manifestations légitimes seraient désormais considérées comme des menaces à la sécurité canadienne. Ces allégations sont complètement fausses et franchement ridicules. L'article 2 de la Loi sur le SCRS, qui décrit exactement ce qui est considéré comme une menace envers la sécurité du Canada, n'est aucunement modifié dans la nouvelle loi antiterroriste, qui vise, je le répète, l'échange d'information et la perturbation des menaces.
    Monsieur le président, nous rejetons l'argument selon lequel chaque fois que nous parlons de sécurité, nos libertés sont menacées. En fait, nous croyons le contraire. Les Canadiens comprennent que liberté et sécurité vont de pair. Fondamentalement, nos services de police et nos organismes de sécurité nationale s'emploient à protéger nos droits et nos libertés, et ce sont les terroristes djihadistes qui mettent notre sécurité en danger et qui cherchent à nous enlever nos libertés.
    De plus, le chef du NPD a fait des allégations que je considère, en tant que ministre de la Sécurité publique, comme inacceptables; il a dit que le SCRS enfreint la loi. C'est une insulte aux hommes et aux femmes qui protègent quotidiennement les Canadiens, qui risquent leur vie dans des endroits peu sûrs, monsieur le président. Depuis 30 ans, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité présente un rapport annuel qui a toujours démontré que le SCRS respecte nos lois canadiennes. Je demande au chef du NPD de présenter des arguments cohérents et d'éviter d'insulter ceux qui nous protègent. Je lui demande de leur présenter des excuses et de s'en tenir aux faits, à la vérité et à la réalité.
    Par ailleurs, certains commentateurs ont affirmé que la portée de la définition d'une « activité portant atteinte à la sécurité du Canada » est trop vaste et que les termes utilisés sont trop vagues pour une mesure législative sur la sécurité. Eh bien, cette définition ne devrait pas être interprétée isolément. L'article 5 de la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada restreint davantage l'information qui peut être communiquée en exigeant qu'elle le soit seulement si elle se rapporte à la compétence ou aux attributions du destinataire en matière de sécurité nationale. La définition est censée s'appliquer à toute information se rapportant à la sécurité du Canada.
    Je suis heureux que nous ayons avec nous la chef du Parti vert, qui a dit que les dispositions visant à protéger les activités licites de défense d'une cause, de protestation et de manifestation d'un désaccord sont insuffisantes. J'invite la députée à relire le projet de loi avec attention. La loi indique clairement que la définition d'une « activité portant atteinte à la sécurité du Canada » exclut les activités licites de défense d'une cause, de protestation, de manifestation d'un désaccord ou d'expression artistique.
    Il convient de souligner que l'exclusion constitue une précision et qu'elle vise à mettre en évidence le fait que ces activités ne sont pas censées être visées par cette mesure législative. Encore une fois, monsieur le président, l'information qui est visée par ce projet de loi, uniquement à des fins d'échange, a déjà été recueillie et se rapporte à des activités qui portent atteinte à la sécurité du Canada. Le terme « licite » doit être interprété de façon restrictive et exclure les formes légitimes de protestation qui ne contreviennent pas au Code criminel. Autrement dit, une manifestation pour laquelle on ne possède pas de permis municipal et qui serait autrement licite ne serait pas visée par cette mesure législative.
    De même, certaines personnes ont affirmé qu'en permettant au SCRS de perturber les menaces à la sécurité nationale, on bafouerait les droits des manifestants légitimes. Encore une fois, c'est faux. En vertu du projet de loi que nous avons devant nous aujourd'hui, pour que le SCRS se livre à des activités de perturbation, il faut qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une activité donnée constitue une menace envers la sécurité du Canada. Il s'agit de la même définition qui est utilisée depuis 30 ans. Auparavant, le SCRS ne disposait pas de pouvoirs de perturbation; il pouvait uniquement recueillir et conserver des renseignements dans la mesure où cela était strictement nécessaire.
    La sécurité est essentielle au maintien de nos droits et de nos libertés démocratiques, et c'est précisément le but de la loi antiterroriste. J'espère que tous les députés appuieront ce projet de loi en ayant la certitude que nous prenons les mesures adéquates pour protéger les Canadiens, leurs libertés et leurs droits.
    Personnellement, monsieur le président, je crois qu'il serait irresponsable et immoral de rester les bras croisés devant cette menace en constante évolution. Il est de notre devoir d'empêcher que les silos bureaucratiques causent la perte de vies humaines. Nous pouvons régler ce problème. Les Canadiens ne nous le pardonneraient pas si nous ne corrigions pas les lacunes de ce système dysfonctionnel d'échange d'information. Nous sommes probablement l'un des rares pays qui ne l'a pas encore fait. Mieux protéger les droits et les libertés des Canadiens tout en luttant contre la menace du terrorisme, voilà exactement ce que propose le projet de loi C-51. Pour ce faire, nous travaillons en étroite collaboration avec le ministre de la Justice et le personnel de son ministère. Je vais maintenant lui céder la parole.
    Merci.
(0910)
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons maintenant entendre la déclaration préliminaire du ministre MacKay.
    Monsieur le président, chers collègues, c'est un honneur pour moi d'être ici devant vous. Je tiens à vous remercier du travail important que vous accomplissez. J'ai l'honneur d'être accompagné de mon collègue Steven Blaney, ministre de la Sécurité publique, et des fonctionnaires de nos ministères de la Sécurité publique et de la Justice.
    Comme vous le savez, nous sommes ici pour discuter du projet de loi C-51, la loi antiterroriste. Ce projet de loi est axé sur le problème très réel du terrorisme, qui sème de plus en plus l'inquiétude partout dans le monde. Le gouvernement du Canada prend des mesures — et vous prenez des mesures — pour analyser les outils qui sont à la disposition de nos organismes de renseignement et d'application de la loi et qui sont nécessaires pour répondre efficacement à cette menace.
    Le projet de loi découle de cette analyse et il est d'une importance cruciale. Comme l'a dit le ministre Blaney, mes observations porteront principalement sur les modifications au Code criminel qui figurent à la partie 3 du projet de loi.

[Français]

     Depuis 2001, le Code criminel permet de lutter tout particulièrement contre le terrorisme, notamment au moyen d'infractions relatives à diverses formes de participation et de facilitation d'une activité terroriste et au fait d'accuser une personne de se livrer à une telle activité. Ces mesures ont été renforcées en 2013 par l'ajout de nouvelles infractions relatives au déplacement des terroristes et au terrorisme nucléaire.

[Traduction]

    Monsieur le président, la menace au Canada est un phénomène mondial, imprévisible et en constante évolution. Par conséquent, on devrait mettre à la disposition du système de justice pénale un ensemble proportionnel d'outils d'enquête et d'application de la loi afin de pouvoir trouver, arrêter et poursuivre ceux qui en sont responsables. C'est justement ce que permettraient de faire les modifications au Code criminel proposées dans le projet de loi C-51. Elles constituent un effort pour moderniser les choses, pour suivre l'évolution des menaces. Comme l'a dit le ministre Blaney, il s'agit de donner aux organismes d'application de la loi la capacité de faire face à cette menace constante et de leur permettre de détecter et d'écarter le type de terrorisme que nous connaissons malheureusement au XXIe siècle.
    Je vais maintenant vous parler des parties du projet de loi qui sont directement du ressort du ministère de la Justice.
    D'abord, l'article 83.3 du Code criminel, qui cible les individus pouvant être impliqués, directement ou indirectement, dans une activité terroriste, impose actuellement deux critères à respecter pour qu'un tribunal impose un engagement à un individu. Le projet de loi propose d'abaisser le seuil d'application de ces deux critères. Au lieu d'imposer aux policiers d'avoir des motifs raisonnables de croire qu'une activité terroriste sera — en mettant l'accent sur le mot « sera » — entreprise, on leur impose d'avoir des motifs raisonnables de croire « à la possibilité qu'une activité terroriste soit entreprise ». De même, au lieu de parler de motifs raisonnables de soupçonner que des conditions sont nécessaires pour éviter que l'activité terroriste ne soit entreprise, on parle de motifs raisonnables de soupçonner que des conditions auront « vraisemblablement pour effet d'empêcher que l'activité terroriste ne soit entreprise ».
    En abaissant le seuil d'application, on veut faciliter la tâche aux policiers pour l'obtention de l'engagement assorti de conditions et la comparution de l'individu devant un juge. Il est important de mettre l'accent sur l'aspect du contrôle judiciaire.
    Le projet de loi C-51 ferait également passer la période maximale de détention d'un individu en attente de son audience d'engagement de deux à six jours, la période de 24 heures de mise sous garde par la police restant la même. Autrement dit, la période durant laquelle les enquêtes peuvent avoir lieu et certaines conditions peuvent être mises en place pour protéger le public serait prolongée et pourrait aller jusqu'à sept jours.
    Le projet de loi propose aussi de renforcer les conditions d'engagement de ne pas troubler l'ordre public liées au terrorisme qui figurent actuellement dans le Code criminel. Le projet de loi propose d'abaisser le seuil d'application de l'exigence actuelle selon laquelle une personne doit avoir des motifs raisonnables de craindre qu'une personne « commettra » une infraction de terrorisme; on parlera plutôt de motifs raisonnables de craindre « la possibilité qu'une personne commette » une infraction de terrorisme. Cette modification vise à faciliter l'obtention d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public. Il y a une gradation, ici. Nous abaissons le seuil d'application pour permettre aux policiers, grâce à un contrôle judiciaire, de mettre en place les conditions requises pour protéger le public en fonction des preuves. On prolongerait également la durée maximale de l'engagement de ne pas troubler l'ordre public; il passerait de deux à cinq ans pour ceux qui ont déjà été condamnés pour une infraction de terrorisme.
    De plus, pour l'engagement assorti de conditions et l'engagement de ne pas troubler l'ordre public, le tribunal serait autorisé à imposer des cautions, et les juges auraient l'obligation d'envisager d'imposer des restrictions géographiques et le retrait du passeport, donc de mettre en place des contrôles du comportement, si l'on veut. Le projet de loi ferait également passer de deux à quatre ans la peine maximale pour une infraction à ces ordonnances.
(0915)
    Le projet de loi C-51 propose également de modifier le Code criminel afin d'ériger en infraction le fait de sciemment, par la communication de déclarations, préconiser ou fomenter la perpétration d'infractions de terrorisme en général, et ce, en sachant que la communication entraînera la perpétration de l'une de ces infractions ou sans se soucier du fait que la communication puisse ou non entraîner la perpétration de l'une de ces infractions. Cette nouvelle infraction entraînerait une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement. Elle permettrait de combler ce que nous considérons comme une lacune dans la loi et de répondre à la menace actuelle.
    Actuellement, il est illégal de conseiller à quelqu'un de commettre un crime précis, comme un meurtre. Toutefois, il n'est pas illégal de conseiller à quelqu'un de commettre un large éventail d'activités criminelles, comme le terrorisme, en l'absence de détails précis quant à l'infraction que la personne est encouragée à commettre. Par conséquent, la nouvelle infraction proposée vise à tenir compte des cas où l'incitation active ne comporte pas de détail précis qui permettrait d'établir un lien entre l'encouragement et la commission d'une infraction précise de terrorisme, même si dans les circonstances, il est clair que l'on encourage activement une personne à commettre les infractions de terrorisme prévues dans le Code criminel. Autrement dit, il importerait peu qu'une infraction précise de terrorisme soit préconisée ou fomentée pour que la responsabilité criminelle y soit rattachée. Pour être clair, il ne s'agit pas d'une infraction liée à la glorification du terrorisme.
    Dans le contexte de cette nouvelle infraction, on propose de créer deux nouveaux mandats de saisie relativement à la propagande terroriste. L'un s'applique à la propagande terroriste sous une forme concrète, comme les affiches ou les dépliants, et l'autre vise à éliminer la propagande terroriste diffusée et stockée dans un site Web situé au Canada.
    Il va sans dire que nous travaillons à l'intérieur de nos propres frontières. Nous n'avons pas la possibilité de saisir ce matériel à l'extérieur du pays.
    Des pouvoirs semblables existent déjà pour d'autres comportements que le Parlement juge néfastes, dont la propagande haineuse et la pornographie juvénile. Cela reflète les articles qui existent déjà dans le Code criminel.
    Je pense que la plupart des parents sauront que nous le faisons afin d'éliminer le matériel qui pourrait être utilisé pour radicaliser ou recruter les jeunes. D'ailleurs, en discutant avec les gens de cet article du Code criminel, j'ai constaté que certaines personnes s'inquiètent du fait que nous n'avons pas déjà la capacité de retirer ce matériel offensant.
    Enfin, des modifications sont proposées afin d'améliorer la protection accordée aux personnes qui jouent un rôle dans le cadre des poursuites et des instances liées à la sécurité nationale. Ces modifications permettront notamment d'accroître le pouvoir discrétionnaire des tribunaux pour rendre des ordonnances qui répondent aux besoins des témoins en matière de sécurité. Nous parlons en particulier des intervenants du système de justice qui peuvent se sentir vulnérables par rapport aux individus auxquels nous avons affaire. Cela ressemble un peu à ce que nous avons vu dans les poursuites intentées contre les membres de gangs ou du crime organisé. On tient compte de leur rôle en ce qui concerne les questions de sécurité nationale tout en respectant en tout temps les droits des accusés à un procès juste et équitable.
    Ces propositions législatives et celles de mon collègue, le ministre Blaney, sont raisonnables et constituent une réponse proportionnelle à la menace du terrorisme au Canada. Elles contiennent un certain nombre de mesures de protection: la surveillance judiciaire et un pouvoir discrétionnaire concernant les nombreux outils dont nous avons parlé ici ce matin, l'obligation d'obtenir le consentement du procureur général avant d'engager une procédure, et l'obligation de faire rapport annuellement sur l'imposition d'engagements assortis de conditions. Ces rapports sont déposés au Parlement; je l'ai fait récemment, en décembre. De plus, ces engagements de ne pas troubler l'ordre public et engagements assortis de conditions deviendront caduques; cela veut dire que la loi, qui est entrée en vigueur en 2007, sera révisée en 2017 en ce qui concerne ces engagements.
    Nous proposons ces nouvelles mesures améliorées et approuvées par les tribunaux, qui permettent de réagir au terrorisme au pays et à l'étranger, en conformité avec le cadre juridique global actuel qui respecte la Charte et contient d'importants mécanismes de contrôle.
     En conclusion, je dirais que du point de vue de la justice pénale, le projet de loi permettra de combler les lacunes de la loi, de cibler uniquement les actes extrêmement graves et de définir clairement les éléments d'infraction qui représentent un niveau élevé d'intention criminelle.
    Monsieur le président, je vais conclure en citant un passage de la décision du juge Moldaver, de la Cour d'appel de l'Ontario, dans l'affaire R. c. Khawaja:
Il ne fait aucun doute que le terrorisme est un crime en soi, qu'il n'a pas d'égal et qu'il ne se limite pas à l'absurde carnage et aux dégâts matériels. Ses conséquences sont bien plus insidieuses, en ce qu'il attaque notre mode de vie et vise à miner les valeurs fondamentales auxquelles nous souscrivons — celles qui sont à la base même de notre démocratie constitutionnelle.
(0920)
    Monsieur le président, je remercie le comité de tenir d'importantes délibérations au sujet de ce projet de loi. Nous nous ferons un plaisir de répondre aux questions. Encore une fois, nous tenons à vous remercier sincèrement du travail que vous accomplissez.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur MacKay.
    Chers collègues, nous allons maintenant entamer une première série de questions. Vous disposerez de sept minutes chacun. Commençons par la secrétaire parlementaire, Mme James.
    Messieurs, je vous remercie de votre présence. Merci également aux fonctionnaires qui sont ici.
    Monsieur Blaney, lorsqu'un ministère ou un organisme gouvernemental obtient de l'information concernant la sécurité nationale et la protection des Canadiens, les Canadiens s'attendent à ce que ce ministère ou organisme puisse communiquer librement cette information à un autre organisme, comme la GRC ou le SCRS. Toutefois, ce n'est manifestement pas le cas actuellement. Je dois vous dire que je croyais, probablement comme bon nombre de Canadiens, que cela se faisait déjà. Je considère donc ce projet de loi comme étant tout à fait essentiel en ce qui concerne la communication d'information.
    Monsieur Blaney et monsieur MacKay, dans vos déclarations préliminaires, vous avez tous les deux parlé des lacunes mises de l'avant par nos organismes de sécurité nationale.
    Monsieur Blaney, pourriez-vous nous parler plus en détail de ces lacunes, sur le plan de la communication de l'information, et nous dire pourquoi cette partie du projet de loi est si importante?
    Je pourrais peut-être d'abord vous donner deux exemples qui illustrent la situation actuelle.
    Comme nous l'avons entendu récemment, à Montréal, deux jeunes filles auraient déclaré qu'elles quittaient le pays pour aller commettre des attentats terroristes à l'étranger. Elles se sont présentées à un bureau des passeports et ont demandé le traitement accéléré de leur demande en 48 heures. Elles ont affirmé avoir perdu leur passeport et vouloir se rendre au Moyen-Orient, une région où il y a de nombreux conflits, comme vous le savez. Cette information devrait soulever des préoccupations en ce qui a trait à la sécurité nationale. Le Canada n'est pas et ne veut pas devenir un exportateur de terroristes. À l'heure actuelle, cette information ne peut être communiquée aux autorités compétentes comme la GRC ou l'agence de sécurité, le SCRS. Le projet de loi permettrait au ministère de prendre ce genre de mesure.
    Le deuxième exemple présente le problème sous un autre angle. Prenons un individu blessé qui se rend dans un consulat au Moyen-Orient, qui veut revenir au pays et qui demande de l'information. Puisqu'il est blessé ou qu'il a passé quelques semaines dans le désert, sa situation pourrait soulever des doutes raisonnables, mais encore une fois, cette information ne peut être communiquée ni aux policiers, ni à l'Agence des services frontaliers du Canada, ni à nos services de renseignement. Un individu, un voyageur représentant une menace terroriste possiblement élevée ayant participé à une expérience de combat pourrait revenir dans notre pays, et nous pourrions difficilement l'en empêcher.
    Ces deux exemples démontrent clairement la nécessité de nous assurer que la main gauche du gouvernement sait ce que fait la main droite, mais je tiens aussi à souligner qu'il existe de nombreux mécanismes qui permettent de protéger la vie privée et la Constitution.
    D'abord, je pense avoir indiqué clairement qu'il doit s'agir d'information relative à une activité qui porterait atteinte à la sécurité du Canada. Il doit y avoir un risque avant que l'information ne soit communiquée, et elle doit être communiquée à un organisme compétent. Encore une fois, il ne s'agit pas de nouveaux renseignements; ce sont des renseignements qui ont déjà été recueillis par le gouvernement, mais qui n'ont pas été communiqués.
    Allons-nous laisser les terroristes se servir du cloisonnement pour s'en prendre aux Canadiens? Honnêtement, je crois que ce serait totalement irresponsable. Voilà pourquoi, quand je parle aux gens de ma circonscription ou d'ailleurs, ils me demandent pourquoi nous n'avons pas fait cela plutôt et pourquoi nous ne communiquons pas l'information au moyen d'un processus respectueux et légitime.
    Eh bien, c'est ce que nous faisons. De plus, il est important de préciser — et c'est dans le projet de loi — que la communication d'information doit s'effectuer d'une manière conforme à la Charte canadienne des droits et libertés et à la protection de la vie privée. On le précise dans la partie qui porte sur l'édiction de la loi. C'est déjà dans de nombreuses mesures législatives, mais nous avons estimé qu'il était important de le préciser dans le projet de loi.
    Je pourrais vous en dire davantage, mais je pense que vous avez d'autres questions à poser.
(0925)
    L'opposition et le Parti vert ont soulevé certaines préoccupations relativement à un article du projet de loi portant sur la Loi sur la communication d'information qui indique clairement que la communication d'information ne viserait pas les activités licites de défense d'une cause, de protestation, de manifestation d'un désaccord et d'expression artistique. Il semble que ces préoccupations concernent l'utilisation du mot « licite ».
    J'ai une question très simple à poser. Ne serait-il pas bizarre qu'un gouvernement présente un projet de loi qui inclurait la possibilité de mener des activités illicites de défense d'une cause? Je dois poser cette question, car il y a manifestement une énorme différence entre les mots « licite » et « illicite ».
    Je vous remercie de me donner l'occasion de préciser ce qui se trouve dans le projet de loi et ce qui ne s'y trouve pas.
    Encore une fois, il y a la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada, qui prévoit la communication d'information sur les activités qui pourraient porter atteinte à la sécurité du Canada. Cela n'a rien à voir avec les autres parties de la loi, comme celle qui porte sur l'atténuation des menaces et qui repose sur la définition actuelle d'une activité terroriste. Elle ne concerne pas du tout cet aspect. La seule chose que fait le législateur, c'est d'exiger que l'information concernant les activités qui pourraient porter atteinte à la sécurité du Canada soit communiquée à l'institution destinataire.
    Évidemment, il y a une autre mesure de protection ici, car si l'information est reçue, elle doit se rapporter à la compétence de ce ministère en particulier. C'est une autre mesure de protection, pour ainsi dire.
    Pour revenir à votre définition, il y a des activités licites et il y a des activités illicites. Ce matin, j'ai donné comme exemple une manifestation pour laquelle on n'avait pas obtenu de permis municipal. Cela n'est pas inclus dans ce projet de loi, qui concerne les activités portant atteinte à la sécurité du Canada. Encore une fois, ce pourrait être une activité illégale, mais on ne communiquerait pas nécessairement l'information, puisque l'activité ne porte pas atteinte à la sécurité du Canada.
    Je pense que nous voyons clairement ce matin qu'il y a des activités licites, qu'il pourrait y avoir des activités illicites ne portant pas atteinte à la sécurité du Canada, et qu'il y a des activités qu'il est important de mentionner dans le projet de loi ou pour lesquelles il faut communiquer l'information. On parle par exemple d'espionnage, de sabotage...
    Monsieur Blaney, nous allons devoir vous interrompre. Vous aurez la possibilité de poursuivre un peu plus tard, mais nous avons dépassé le temps alloué.
    C'est maintenant au tour de M. Garrison, pour sept minutes.
(0930)
    Je tiens à remercier tous les témoins qui sont ici aujourd'hui. Je sais qu'il est relativement rare que le ministre de la Justice comparaisse devant le comité; je le remercie donc tout particulièrement de sa présence aujourd'hui. J'ai une question à lui poser pour commencer.
    Des spécialistes du droit, dont d'anciens juges, ont exprimé beaucoup de préoccupations concernant la vaste portée de la nouvelle infraction au Code criminel, les critères moins stricts pour la détention et les engagements de ne pas troubler l'ordre public, ainsi que les changements fondamentaux liés à la communication d'information qui pourraient nuire aux droits relatifs à la vie privée.
    Je suppose que le ministre ne présenterait pas ce projet de loi au Parlement s'il n'était pas convaincu qu'il est constitutionnel et qu'il n'avait pas reçu les avis de ses fonctionnaires quant à la constitutionnalité de ce projet de loi et de ses dispositions.
    Le ministre serait-il prêt à déposer les avis qu'il a reçus au sujet de la constitutionnalité de ce projet de loi? Il serait très utile au comité, pour éviter les entrecroisements juridiques à l'avenir, d'obtenir ces avis afin que nous puissions les utiliser avant l'étape de la présentation des amendements au projet de loi.
    Je vous remercie beaucoup de votre question, monsieur Garrison.
    Chers collègues, je comparais peut-être rarement devant votre comité, mais c’est la 52e fois que je comparais devant un comité depuis que je suis ministre.
    Le député a tout à fait raison de soutenir que nous n’aurions pas présenté un projet de loi sans l’avoir rédigé de manière à ce qu’il respecte la Charte des droits de la personne et la Constitution, et aucun projet de loi n’est présenté au Parlement sans que le ministère de la Justice ne se soit assuré de cela. Le ministère de la Justice examine sous cet angle tous les projets de loi avant leur présentation. Certains des fonctionnaires du ministère de la Justice ont bien entendu des compétences dans ce domaine. En fait, certains d’entre eux étaient déjà au service du ministère à l’époque de la rédaction de la Charte elle-même. Nous donnons des avis juridiques exceptionnels, dont tous les ministères peuvent profiter. Donc, oui, le député a raison. J’aurais rencontré les membres du personnel de mon ministère et travaillé avec eux afin de veiller au respect de la Charte. La Cour suprême du Canada a reconnu bien sûr que la prévention d’actes terroristes était un objectif étatique valable, étant donné les graves dommages qu’ils peuvent occasionner, et c’est ce que disait la citation que je vous ai présentée à la fin de mes observations. Cela ne veut pas dire que la présente mesure législative, voire toutes les mesures législatives, renvoyées à votre comité, ou à n’importe quel autre comité, ne peuvent pas faire l’objet de contestations en vertu de la Charte. Pour en revenir à la question du député, nous envisageons et étudions divers aspects, y compris la protection de la vie privée, afin de nous assurer qu’au bout du compte, les tribunaux jugeront que la loi respecte la Charte. En ce qui concerne les avis juridiques fournis, en ma qualité de ministre de la Justice et de procureur général, je ne suis pas en mesure de les présenter à votre comité ni à aucun autre comité, car le secret professionnel lie le ministère de la Justice au ministère de la Sécurité publique dans le cas présent.
    En tant que bénéficiaire du secret professionnel, vous pourriez renoncer à ce privilège et déposer ces avis au comité.
    Nous n’allons pas faire cela. Le privilège ne relève pas seulement de moi, mais du gouvernement en entier.
    Merci beaucoup. Je continue de croire que la présentation de ces avis nous serait utile.
    Je souhaite maintenant m’adresser à M. Blaney, qui a déclaré qu’il serait heureux de clarifier les choses aujourd’hui. J’ai deux questions à lui poser à propos des nouveaux pouvoirs accordés au SCRS dans le cadre du projet de loi. Le ministre a, à plusieurs reprises, indiqué en public et à la Chambre que, pour pouvoir exercer ses nouveaux pouvoirs de perturbation, le SCRS serait forcé de demander un mandat à un juge. J’aimerais qu’il nous fournisse des précisions parce que, d’après mon interprétation du projet de loi et celle de nombreuses autres personnes, ce n’est pas ce que dit le libellé. Le projet de loi indique que des mesures de perturbation pourraient être prises et que l’obtention d’un mandat ne serait nécessaire que dans certaines circonstances. J’aimerais qu’il clarifie cette question.
    Deuxièmement, il a déclaré que l’obtention du mandat équivalait très souvent à une surveillance judiciaire. Comme le mandat est demandé pour mener des activités secrètes et non des activités qui pourraient donner lieu à des accusations au criminel, comment le juge pourra-t-il constater ce à quoi le mandat a servi? Comment la question de l’utilisation de ce mandat finira-t-elle par être soulevée devant les tribunaux afin qu’ils puissent exercer cette surveillance? Je ne vois aucune disposition dans le projet de loi qui permettra à un juge d’examiner la façon dont le mandat a été employé à la suite de son émission.
    Je dois mentionner très brièvement que, lorsque M. Blaney accuse le NPD de s’en prendre aux policiers et aux membres du SCRS, il se méprend. Nous signalons qu’à l’occasion, les organismes commettent des erreurs et finissent devant les tribunaux. L’affaire Mosley montre clairement que, dans certains cas, le SCRS a fait des erreurs qui constituaient des violations de la loi.
    Ma question est très précise. Est-il toujours nécessaire d’obtenir un mandat pour prendre des mesures de perturbation, et comment l’utilisation du mandat finira-t-elle par être contrôlée par un juge?
(0935)
    Je vous remercie de votre question. Vous m’avez certainement entendu affirmer très clairement ce matin qu’un mandat est nécessaire chaque fois que des considérations juridiques entrent en jeu. Je vais simplement répéter ce que j’ai déclaré ce matin.

[Français]

     Il s'agissait des propos suivants: « S'appuyant sur ce nouveau mandat, le projet de loi C-51 fixe des limites rigoureuses et établit un mécanisme de mandat [...] Si les mesures proposées risquaient de porter atteinte à un droit garanti par la Charte ou de contrevenir à une loi canadienne, un juge de la Cour fédérale devrait les autoriser au préalable. »
    En clair, un mandat est bel et bien requis dans le cadre du projet de loi C-51 chaque fois que la Charte canadienne des droits est concernée.
     J'espère avoir répondu clairement à votre première question.

[Traduction]

    Non, vous n’avez pas clarifié la situation puisque vous venez de prouver ce que je disais. Vous avez déclaré qu’un mandat était requis seulement si la Charte allait être enfreinte. Donc, il est clair que d’autres mesures de perturbation seront autorisées sans mandat.

[Français]

     En effet, cher collègue, certaines activités ne nécessiteront pas l'obtention d'un mandat. Toutefois, les activités de réduction de la menace en fonction de leur impact doivent suivre un processus rigoureux. À titre de ministre de la Sécurité publique, j'aurai, tout comme les personnes qui me succéderont, la possibilité d'autoriser les mandats à un moment donné. Pour ce faire, je m'appuierai sur l'avis du ministère de la Sécurité publique.
    Je vais vous donner l'exemple d'un cas où on n'aurait pas besoin de mandat. Par exemple, les agents du Service canadien du renseignement de sécurité pourraient engager une conversation avec les parents d'un enfant en voie d'être radicalisé. Dans un tel cas, un mandat ne serait pas requis.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Votre temps de parole est écoulé.
    Nous allons passer à M. Norlock. Allez-y, monsieur.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Par votre entremise, j’aimerais également remercier les témoins d’être venus aujourd’hui.
    Je vais adresser ma première question au ministre MacKay.
    Pourriez-vous expliquer les lacunes de la loi que vous tentez de combler? Je fais principalement allusion aux conditions à remplir pour qu’un site Web soit considéré comme faisant l’apologie du terrorisme et pour que son contenu soit retiré. Nous avons entendu des gens dire que cette partie de la mesure législative porte atteinte à notre liberté d’expression. Je ne crois pas que ce soit le cas. Je ne pense pas qu’il soit acceptable de préconiser la perpétration d’actes de terrorisme.
    Pourriez-vous expliquer la mesure législative et la façon dont elle diffère des lois relatives aux propos haineux qui mettent l’accent sur certains groupes?
    Je vous remercie infiniment de votre question, monsieur Norlock.
    Comme vous le savez, dans certains articles du Code criminel actuellement en vigueur auxquels vous avez fait allusion, il est mentionné que certains types de documents, certaines déclarations et certains discours sont considérés comme portant atteinte à d’autres droits protégés par la Charte. Ces articles tentent d’instaurer un équilibre entre les dispositions qui protègent la liberté d’expression et la vie privée et les documents ou les mots qui peuvent être très néfastes. Les gens comprennent bien les exemples de propagande haineuse qui préconisent des génocides ainsi que le problème de la pornographie juvénile ou de la pornographie tout court.
    Lorsqu’il est question de préconiser ou de fomenter le terrorisme, nous croyons que, dans sa forme actuelle, le Code criminel ne nous permet pas de protéger suffisamment le public contre les effets réels et, je dirais, corrosifs du terrorisme et de sa promotion. La présente mesure législative permet à notre système de justice pénale d’intervenir de façon appropriée en faisant en sorte que les documents considérés comme appartenant à cette catégorie puissent être supprimés. Nous savons que, pour les faire supprimer, il faut demander à un juge d’évaluer adéquatement les documents en regard des autres droits et de rendre une décision. Le libellé est rédigé de manière à ce que toute accusation portée prenne en considération des facteurs comme l’insouciance, lequel est un autre critère juridique à appliquer. De plus, comme je l’ai indiqué dans mes observations, l’infraction proposée ne met pas l’accent sur la question de l’apologie, une question qui a fait l’objet d’une certaine controverse dans d’autres pays.
    La norme à appliquer dans ce cas, c’est la question de savoir si l’on préconise ou fomente le terrorisme, si on l’encourage et si des efforts sont déployés pour inciter une personne à commettre des actes terroristes. Certaines personnes ont déclaré que les termes « préconise » et « fomente » étaient très vagues. Une jurisprudence existe déjà dans ce domaine, et elle est instructive à cet égard. Je pourrais vous citer un certain nombre de causes canadiennes. L’affaire Keegstra est une cause portée devant la Cour suprême en 1990 qui est bien connue. Elle aborde la question de la préconisation et parle du soutien actif et de l’instigation. L’affaire Queen et Sharpe entendue par la Cour suprême en 2001 et ayant trait à la possession de pornographie juvénile, parle de fomentation. Le projet de loi C-51 tient compte de la façon dont la Cour suprême a déjà défini des termes comme « fomentation » et « préconisation » à titre d’infractions. On évoque la notion d’orientation et d’incitation, et les documents à consulter contribuent donc à encourager le terrorisme ou à inciter des gens à commettre des actes terroristes.
(0940)
    Merci beaucoup.
    J’adresse ma prochaine question au ministre Blaney.
    Je crois que M. Blaney souhaitait formuler des observations à cet égard.
    Monsieur Norlock, je tiens à louer les mesures que le ministre MacKay vient de décrire, car, comme vous le savez, le gouvernement a déposé une stratégie antiterroriste qui repose sur quatre piliers: empêcher, déceler, priver et intervenir.
    Le fait est que le gouvernement, la société, sera en mesure de fermer les sites Web qui préconisent la haine et la violence. C’est un outil qui nous aidera à ériger le premier pilier lié à la prévention de la radicalisation parce que, comme nous le savons et comme nous l’avons entendu dire, l’Holocauste n’a pas débuté dans les chambres à gaz; il a commencé par des mots. Par conséquent, nous devons être prudents. Voilà pourquoi j’ai le sentiment que cette mesure est très importante.
    De plus, en ma qualité de ministre de la Sécurité publique, je suis déterminé à collaborer avec mes partenaires, comme le ministre français, Bernard Cazeneuve, et nos alliés européens et américains, afin de pouvoir mettre fin à l’exploitation de sites Web hébergés dans d’autres pays quand ils préconisent la haine, des idéologies extrémistes et la violence.
    Je pense que cette mesure prévue par le projet de loi C-51 contribue à renforcer les quatre piliers de notre stratégie antiterroriste.
    Le commissaire Paulson peut répondre à ma prochaine question. Vendredi, nous avons entendu le commissaire Paulson, qui comparaissait devant notre comité, et nous avons bien sûr visionné l’enregistrement de l’assassin du caporal Nathan Cirillo. Au cours de nos séries de questions, il a indiqué avoir été en mesure de recevoir des renseignements liés à son passeport et que, dans ce cas en particulier, l’échange d’information avait été suffisant.
    Pourriez-vous nous indiquer le mécanisme que vous avez utilisé pour vous procurer ces renseignements et décrire certaines des lacunes que la mesure législative comble en matière d’échange de renseignements?
    Monsieur le président, pour en revenir à la discussion de vendredi, je dirais qu’elle portait sur l’indication de M. Garrison, selon laquelle la collecte des preuves, qui m’auraient permis d’étayer l’accusation imaginaire que nous aurions portée contre M. Zehaf-Bibeau, s’il avait vécu, et que j’ai présentée au cours de ma déclaration, reposait sur une cueillette de renseignements préalable aux événements et non sur un véritable échange d’information. Une fois l’acte perpétré, tout le monde était bien sûr disposé à échanger des renseignements et l’information circulait assez bien. Je pense qu’avec un peu de chance, cela clarifie la situation.
    Monsieur Easter.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les ministres et les représentants officiels d’être venus.
    Ministre Blaney, avant d’aborder les enjeux plus fondamentaux, j’ai une question mineure mais importante à vous poser. Vous avez mentionné le processus d’appel lié à la liste d’interdiction de vol. La plupart des députés ont tenté dans le passé de faire radier de la liste d’interdiction de vol le nom de certaines personnes. Vous avez parlé des appels.
    La mesure législative dit: « Si [le ministre] ne rend pas sa décision dans les quatre-vingt-dix jours suivant la réception de la demande » — puis quelques mots suivis de — « le ministre est réputé avoir décidé de ne pas radier de la liste le nom du demandeur. »
    Cela ne constitue pas vraiment un processus d’appel, monsieur le ministre. Vous n’avez même pas besoin de répondre à la demande. Je pense que vous devez envisager d’apporter un amendement à ce sujet qui exigera, au contraire, que le ministre réponde à la demande dans les 90 jours qui suivent.
    Passons maintenant à l’enjeu plus fondamental. Au cours de votre exposé, vous avez affirmé accroître radicalement la surveillance judiciaire. En réponse aux observations de M. Garrison, vous avez déclaré qu’un mandat devait être obtenu chaque fois qu’une autorisation légale était requise. Je soutiens qu’une présentation judiciaire visant à prendre une certaine mesure ne correspond pas à une surveillance judiciaire, quel que soit le sens qu’on donne à ce mot. Ce n’est qu’une autorisation qui précède la prise d’une mesure.
    Vous pourriez peut-être expliquer ce processus. Quand cette surveillance est-elle exercée après l’émission du mandat?
(0945)
    Je vous remercie de votre question. Je pense que vous me donnez encore une occasion de préciser la différence entre une surveillance et un examen.
    Au chapitre de l’atténuation des menaces, nous serons le seul pays qui exigera qu’un juge émette un mandat avant que soient exercées des activités qui pourraient porter atteinte aux droits des Canadiens et à leur vie privée. Le fait que le juge participe… Dans le mandat, l’activité autorisée sera décrite. Le juge pourra même demander que des tiers fournissent d’autres avis. Le Canada est en fait le seul pays… Tous les autres pays maintiennent seulement — comment pourrais-je exprimer cela? — une surveillance administrative. Il s’agit donc d’une surveillance.
    Puis, comme vous le savez, il y a un mécanisme d’examen, mais je le répète: nous exigeons un mandat. Un juge doit être consulté et doit autoriser les activités. Le juge peut également modifier le mandat s’il est préoccupé par sa portée. Il peut refuser d’accorder le mandat ou le modifier. Il peut également consulter un tiers ou demander que des tiers examinent la demande.
    Monsieur le ministre, cela ne constitue pas une surveillance, et votre collègue, le ministre MacKay, le sait.
    Lui et moi avons siégé à un même comité, et nous avons beaucoup voyagé ensemble. Je dois admettre, ministre MacKay, qu’à l’époque, vous étiez probablement l’une des personnes qui prônaient le plus la mise en place d’une surveillance parlementaire semblable à celle exercée par nos alliés du Groupe des cinq.
    Ministre Blaney, vous pouvez déclarer qu’aucun autre pays ne fournit des mandats judiciaires, mais votre explication confirme ce que je soutiens, à savoir qu’il s’agit simplement d’une autorisation pour telle ou telle activité. Vous savez également que la décision du juge Mosley indiquait que les représentants du SCRS n’avaient pas été aussi francs avec lui qu’ils l’avaient prétendu, et il les a corrigés à ce sujet. Il leur a reproché avec colère d’être allés plus loin qu’ils avaient été autorisés à le faire. Ces choses-là se produisent, et cela prouve qu’une autorisation judiciaire n’est pas la même chose qu’une surveillance judiciaire. Une autorisation ne suffit pas. Les Canadiens souhaitent qu’une surveillance soit exercée.
    Je dois demander au ministre MacKay qui, en 2004, était membre du même comité que moi, un comité qui a fini par être saisi du projet de loi C-81... Nous sommes allés au Royaume-Uni, à Washington, etc. Nous avons réclamé une telle surveillance. Pourquoi étiez-vous alors tellement favorable à cette idée, monsieur le ministre? Maintenant que le SCRS, la GRC, le Code criminel, etc. bénéficient de tous ces pouvoirs supplémentaires, vous pensez que le Canada n’a pas besoin de surveiller tous ses organismes de sécurité nationale. Nous avons besoin de cette sécurité, plus que jamais.
    Monsieur Easter, permettez-moi de commencer par dire que je me souviens bien d’avoir fait partie de ce comité en tant que membre de l’opposition. Vous, bien entendu, étiez un député ministériel, et vous n’en avez pas profité pour donner suite à ces recommandations.
    Oui, nous avons donné suite à ces recommandations. Nous avons présenté le projet de loi C-81.
    En fait, vous avez été au pouvoir pendant 14 ans, je crois, et votre gouvernement n’a jamais mis en oeuvre ces recommandations en matière de surveillance que vous appuyez maintenant avec tant d’enthousiasme.
    En 2004...
    En 2004, vous faisiez partie toutefois du gouvernement. Vous étiez donc mandaté d'agir, et vous ne l'avez pas fait. Vous avez échoué.
    En fait, si l'on regarde les divers exemples du monde d'aujourd'hui, la véritable surveillance... Vous, ancien solliciteur général, seriez prêt à reconnaître que la véritable surveillance doit être assurée par des personnes qui ont une expertise dans le domaine de la sécurité, des personnes qui ont de l'expérience sur le terrain, une expérience juridique ou judiciaire, ou une formation pertinente.
    Lorsque l'on regarde certains de ces exemples, y compris celui du Royaume-Uni... j'étais à Londres récemment. Le comité de surveillance parlementaire britannique se fait beaucoup critiquer, car il a été soumis à des pressions politiques. C'est un véritable scandale qui a peut-être nui à l'objectivité de ce comité parlementaire et à sa capacité de faire le travail exigé.
    Dans le domaine de l'expertise, j'ajouterais également que vous-même avez été cité dans un journal, en ce qui concerne l'étude du projet de loi, comme suit: « Nous ne sommes pas les experts, nous sommes là pour écouter et apprendre. »
    Au final, si nous voulons exercer une réelle surveillance, nous devons prévoir non seulement un mandat, mais également des gens pour occuper les postes nécessaires, tels que les membres du CSARS, qui ont la capacité de poser les questions indiquées, de creuser au besoin et de faire rapport...
(0950)
    Monsieur le ministre, qu'en est-il des anciens politiciens membres du CSARS? Voyons, ce sont d'anciens politiciens...
    Le président: Monsieur Easter, nous avons dépassé le temps prévu.
    L'hon. Wayne Easter: Oui, il nous faut de l'expertise. Vous l'avez...
    Merci beaucoup.

[Français]

     Madame Doré Lefebvre, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, le ministre de la Justice ainsi que tous les autres témoins d'être ici parmi nous aujourd'hui pour parler du projet de loi C-51. C'est grandement apprécié.
    Comme on le dit si bien en français, mieux vaut prévenir que guérir. J'ai parcouru le projet de loi C-51 et, selon moi, ce qui manque le plus, c'est une stratégie nationale contre la radicalisation. Le gouvernement américain travaille beaucoup avec les communautés en vue d'établir une bonne stratégie contre la radicalisation. Le maire de Montréal a commencé à plancher sur une stratégie contre la radicalisation en collaboration avec les intervenants sur le terrain, notamment les services de police et les leaders communautaires.
    Messieurs Blaney ou MacKay, vous pouvez peut-être répondre à ma question. En fait, ma question s'adresse davantage au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    J'aimerais savoir ce que vous faites concrètement pour contrer la radicalisation. Vous avez donné certains exemples, mais j'aimerais que vous me donniez une vue d'ensemble de ce que vous faites concrètement, en tant que gouvernement, pour lutter contre la radicalisation. Travaillez-vous avec les leaders communautaires et les services de police? Quelles ressources sont adaptées à cela?
    Je vous remercie de votre question, qui est tout à fait pertinente.
    Je suis un peu déçu que nous n'ayons pas reçu l'appui de votre formation politique. Je vous dirais respectueusement que les néo-démocrates sont en retard dans les nouvelles. En effet, notre stratégie pour lutter contre le terrorisme est en place depuis plus de deux ans et nous n'avions pas obtenu l'appui de votre parti. Je trouve donc un peu étonnant qu'une néo-démocrate se réveille deux ans plus tard et nous demande ce que nous faisons en matière de prévention.
    Nous devons poursuivre nos efforts en matière de prévention. Le ministre MacKay et moi participons à des tables rondes interculturelles. Il est important de faire des efforts de prévention. C'est le premier pilier de notre stratégie. Lors de ma comparution devant vous, l'automne dernier, soit avant les attaques survenues à Ottawa, j'avais eu la chance de vous décrire notre stratégie contre le terrorisme.
    Le commissaire Paulson fait des efforts remarquables. J'ai ici un document sur notre stratégie pour contrer la radicalisation chez les jeunes. Vous pouvez le télécharger sur Internet. Ce document de plus de 20 pages a été publié depuis un bon moment déjà. Il décrit les stratégies que nous mettons en place et les rencontres que nous faisons partout au pays avec les communautés et les leaders dans ce domaine.
    Évidemment, de la formation est offerte aux agents et aux officiers. Notre approche en matière de prévention a trois piliers: l'engagement auprès des communautés, la formation et l'articulation d'un message contre-narratif.
    Il y a quelques semaines, j'étais à Washington. Nous travaillons aussi avec nos partenaires britanniques, qui ont pris des initiatives extrêmement intéressantes, ainsi qu'avec les corps policiers municipaux. La semaine dernière, j'ai rencontré des gens de la police de Toronto. Ils ont créé des groupes tactiques d'intervention pour prévenir la radicalisation. Nous faisons des efforts de prévention à l'échelle de toute la société.
    Le commissaire peut vous fournir des données à cet égard. Je sais que vous n'avez pas beaucoup de temps, mais le commissaire peut vous décrire ce que la GRC fait en matière de prévention de la radicalisation.
(0955)
    Merci, monsieur le ministre.
    Comme je l'ai dit vendredi, notre programme de prévention est assez complexe.

[Traduction]

    Nos stratégies précédentes, c'est-à-dire nos stratégies antiterroristes, ont été fondées sur l'engagement légitime auprès de la communauté. Je vous ai parlé du programme d'agent d'information antiterroriste, qui existe depuis de nombreuses années déjà. Nous avons formé plus de 1 800 agents au pays. Ce ne sont pas seulement les agents de la GRC, mais également des agents d'autres polices. Ces agents ont comme mandat de s'engager, de communiquer l'information et de former les agents afin de reconnaître la radicalisation. Il y a également un volet d'engagement auprès de la communauté.
    Plus récemment, en travaillant avec nos partenaires de la Sécurité publique et avec d'autres forces de police, nous avons également commencé à orienter notre stratégie de prévention de la criminalité vers la prévention du terrorisme. En d'autres termes, nous utilisons les ressources existantes aux échelons fédéral, provincial et local afin de travailler avec les collectivités et tenter de comprendre, et de reconnaître rapidement, les gens à risque. On a recours à des stratégies autres que l'application de la justice pénale avant que des actes criminels aient lieu. Ces stratégies s'avèrent fort efficaces. En fait, comme le ministre l'a expliqué, nous avions un projet pilote avec la police de Toronto et nous travaillons avec les corps de police d'autres villes. Nous agissons de façon proactive et c'est une formule gagnante.
    Merci beaucoup, monsieur le commissaire, monsieur le ministre.
    Nous allons maintenant passer à Mme Ablonczy, qui disposera de cinq minutes.
    Bon nombre de Canadiens se souviendront du débat qui a eu lieu il y a un peu plus de 30 ans, lorsque le gouvernement libéral, dirigé par le premier ministre Trudeau, a adopté la loi qui a créé le SCRS. Certains disaient que la création de cette agence de sécurité civile serait un premier pas vers un État policier. Il y a 30 ans, les opposants affirmaient que... l'Association canadienne des libertés civiles maintenait qu'aucun Canadien ne serait à l'abri. Il y a 30 ans, le gouvernement de l'Ontario craignait que le SCRS ait des pouvoirs illimités, carte blanche de briser toutes les lois canadiennes. Nous savons aujourd'hui que de nombreuses activités qui menacent la sécurité du Canada ne sont pas visées par le Code criminel ou le mandat de la GRC. Nous prisons le SCRS et son travail.
    Monsieur le ministre, prenons par exemple les critiques dirigées contre l'agrandissement du Programme de protection des passagers. Le NPD dit qu'il est déjà illégal de se rendre à l'étranger pour participer à des activités terroristes. Je me demandais si vous seriez prêt à en parler et à indiquer pourquoi vous croyez que la portée du Programme de protection des passagers doit être agrandie.
     Madame Ablonczy, je vous remercie pour votre question. Lorsque des gens entretiennent des discours qui induisent en erreur, nous avons l'impression que l'histoire se répète. C'est la raison pour laquelle je suis fier d'être ici pour vous parler du projet de loi et de ce qu'il prévoit, et non de ce que les gens pensent qu'il pourrait prévoir ou encore voudraient qu'il prévoie.
    Le comité a entrepris une activité fort importante, c'est-à-dire effectuer l'étude du projet de loi au cours du prochain mois. Nous les Canadiens, nous nous attendons à ce que nos conversations soient fondées sur les faits et la réalité. Je suis confiant que les Canadiens comprennent l'objectif du projet de loi, qui vise à protéger les droits et les libertés des Canadiens, ainsi que leur vie privée. Le projet de loi offre des outils à ceux qui sont là pour nous protéger, ainsi qu'à ceux qui surveillent les gens qui nous protègent. C'est l'essentiel du projet de loi C-51.
    Le projet de loi comporte de solides mécanismes de surveillance et d'examen. Je vous en fournis un exemple: nous sommes l'un des rares pays qui prévoira une surveillance judiciaire à l'égard des activités de réduction des menaces. Une fois que toutes les activités auront eu lieu, il y aura une surveillance approfondie.
    Permettez-moi de vous raconter ce que le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité avait à dire sur son travail et la façon dont il perçoit son travail en ce qui concerne l'examen des activités réalisées. Le comité recherche du recul, afin de pouvoir scruter d'un oeil critique les activités de la communauté du renseignement. Il a indiqué que notre modèle, qui prévoit un examen continu et méthodologique, offre un avantage distinct, c'est-à-dire qu'il permet une évaluation entière et impartiale du rendement de l'agence canadienne de sécurité du renseignement, ce qui le laisse en meilleure posture pour détecter des problèmes possibles plus tôt.
    Nous disposons de 30 années d'expertise et de connaissances indépendantes sans ingérence politique ou gouvernementale, car le comité est entièrement autonome. Le comité est constitué de juristes et de chercheurs qui offrent de la continuité. Certains d'entre eux ont oeuvré dans la communauté du renseignement. Vous avez peut-être entendu le directeur lui-même indiquer hier qu'il avait l'effectif nécessaire pour accomplir son travail important.
    Pour revenir à votre question sur la protection des passagers, il est plutôt clair que...
(1000)
    Je vous demanderais d'être très bref, monsieur le ministre.
    D'accord. La loi a été adoptée dans le sillon de l'attentat sur le World Trade Center commis par des gens qui voulaient s'attaquer à notre sécurité au moyen d'un avion. Nous devons pouvoir arrêter ces gens même si nous ne pouvons pas porter de chefs d'accusation contre eux. Si nous avons raison de croire qu'une personne commettra un acte terroriste, nous devons l'empêcher de voyager. C'est la raison pour laquelle nous devons ajouter la catégorie du voyageur à risque élevé à notre liste de personnes interdites de vol.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
     Monsieur Garrison, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

     Vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai déjà évoqué mes préoccupations quant à la rhétorique enflammée qui entoure ce projet de loi. J'ai entendu le ministre plus tôt faire référence à la Shoah. Je vous dis qu'il n'y a rien dans ce dont nous discutons aujourd'hui qui puisse se comparer à la Shoah. Cette référence semble tout au mieux minimiser la Shoah. J'aimerais donner au ministre la possibilité de retirer son observation.

[Français]

    Je vais vous répondre en français.
    La violence commence avec des mots. La haine commence avec des mots. Je peux vous parler du génocide au Rwanda qui a commencé à la radio. Ce fut un génocide horrible. Un de nos anciens sénateurs en a fait les frais et sa santé mentale en a été grandement affectée. Oui, il est important que l'on dise les vraies choses. Si c'est un chat, c'est un chat. Les discours extrémistes, le langage qui va à l'encontre des valeurs canadiennes, bref, le langage haineux n'ont pas leur place au Canada.
    Il est temps que le gouvernement prenne ses responsabilités et ne tolère pas le langage irrespectueux, violent et haineux. C'est simplement ce que la loi permet de faire. Je maintiens donc mes propos et je répète que l'Holocauste n'a pas commencé dans des chambres à gaz. Il a commencé avec des mots. C'est la raison pour laquelle il est important de respecter les droits et les libertés des Canadiens, certes, mais de ne pas tolérer l'incitation à la violence.

[Traduction]

    Monsieur le ministre, pourquoi le gouvernement a-t-il donc retiré le pouvoir à la Commission canadienne des droits de la personne de supprimer le matériel d'incitation à la haine sur Internet? Votre gouvernement a parrainé et a adopté un projet de loi à la Chambre et au Sénat qui retirait à la Commission canadienne des droits de la personne le pouvoir d'ordonner la suppression de matériel incitant à la haine sur Internet. Pourquoi le gouvernement a-t-il agi ainsi, et pourquoi revendiquez-vous le contraire maintenant?

[Français]

    Monsieur Garrison, ce matin, je vous dis que le projet de loi va nous permettre de retirer les sites Internet qui font de la propagande haineuse ou de la propagande de toute forme de terrorisme, peu importe quelle est sa source. Il n'y a pas de place au Canada pour l'incitation à la violence. C'est aussi simple que cela. C'est ce qui se retrouve dans la loi.
     Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi ce matin, mais si un site Internet qui est hébergé au Canada fait la promotion du djihadisme et nous dit de tuer tous les infidèles partout où ils sont dans le monde, je crois que cela va à l'encontre des valeurs canadiennes. C'est la raison pour laquelle je crois que nous, comme politiciens, devons continuer à adopter des mesures pour lutter contre le terrorisme et prévenir la radicalisation. C'est exactement la raison pour laquelle je vous invite à appuyer le projet de loi C-51. C'est la chose à faire pour protéger les droits et libertés des Canadiens et les protéger contre la menace terroriste.
(1005)

[Traduction]

    Monsieur le ministre, j'ai toujours de la difficulté à comprendre quelle est la différence entre les pouvoirs que vous avez enlevés à la Commission canadienne des droits de la personne et les pouvoirs que vous proposez aujourd'hui.
    Permettez-moi d'apporter une clarification.
    Monsieur Garrison, comme vous le savez fort bien, l'incitation à la haine, la propagande et le génocide sont visés par le Code criminel du Canada et toute personne participant à ce type d'activité est passible de poursuites au Canada. Ne laissons pas l'impression, et je sais que ce n'est pas ce que vous essayez de faire, que quelqu'un sera libre de se livrer à ce type d'activité haineuse au Canada sans faire l'objet de chefs d'accusation et de poursuites. Tout cela est prévu dans le Code criminel.
    J'aimerais revenir à la question de la surveillance. Là encore, lorsque j'ai posé ma question au ministre, il a répondu que le mandat autorise l'intervention s'il est question d'une activité illégale ou anticonstitutionnelle, mais il n'a pas eu le temps de répondre à ma question, c'est-à-dire comment le juge peut-il exercer son droit de regard? Une fois le mandat émis, comment en saisir de nouveau le tribunal?
    Vous avez parlé de surveillance judiciaire. Je ne vois aucunement... Par contre, lorsque la GRC fait usage de tactiques d'intervention dans le cadre d'une enquête criminelle, ces tactiques sont examinées par les tribunaux qui jouissent alors d'un droit de regard, mais en l'espèce, il s'agit d'activités secrètes qui ne font pas l'objet de poursuites criminelles et qui ne seront donc pas soumis aux tribunaux.
    Comme vous le savez, le Service canadien du renseignement de sécurité existe depuis plus de 30 ans. En ma capacité de ministre de la Sécurité publique, je sais, tout comme le sait M. Easter de par son expérience, que nous exerçons déjà une surveillance judiciaire en ce qui concerne la collecte de renseignements. Cette activité est soumise à un solide mécanisme de surveillance dans un premier temps.
    Lorsque le SCRS souhaite effectuer la collecte de renseignements qui nécessite un mandat, il doit présenter sa demande au ministère de la Sécurité publique. Plus de 1 000 personnes travaillent au ministère avec des experts qui ont l'expérience nécessaire pour examiner la demande, et ces gens me transmettent la recommandation indiquant si je devrais ou non approuver le mandat de collecte de renseignements. Ces activités...
    Monsieur le ministre, ma question porte sur ce qui se passe après; comment en saisir les tribunaux après l'émission du mandat?
    Eh bien, nous le faisons depuis 30 années déjà. Ce qui se passe après, c'est la surveillance par l'organisme qui en est chargé. Nous avons le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, et je viens de vous expliquer l'importance de son rôle, mais permettez-moi de vous citer un autre document ce matin.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Payne.
    J'aimerais remercier le ministre MacKay et le ministre Blaney ainsi que leurs représentants d'être venus. C'est certainement un projet de loi très important et les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement protège les citoyens et assure la sécurité du territoire canadien.
    Monsieur Blaney, si vous voulez nous donner la citation, je serai ravi de l'entendre.
    Le président est très dur à mon égard ce matin.
    J'aimerais vous dire quelque chose de très important. Notre système est fondé sur la confiance. Nous les politiciens, nous sommes élus parce que les gens nous font confiance. Il est donc important de maintenir ce lien de confiance, la confiance des Canadiens à l'égard de leurs institutions. Sont-elles parfaites? Non, elles ne le sont pas. Les politiciens, sont-ils parfaits? Non plus. C'est la raison pour laquelle nous avons prévu des mécanismes d'examen afin de vérifier s'il y a eu des erreurs commises. Des erreurs ont-elles été commises dans le passé? Oui. Des erreurs seront-elles commises dans l'avenir? Possiblement, mais nous devons faire notre possible pour les éviter.
    Le document que j'aimerais vous citer, et je le ferai tout de suite, concerne le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. C'est le modèle canadien conçu il y a 30 ans pour veiller sur notre communauté du renseignement. Le comité est constitué d'experts. Ils sont indépendants, et ne font pas l'objet de pressions politiques. Ce sont des gens qui ont les connaissances et l'expertise nécessaires à leurs fonctions. Ils comprennent à fond le SCRS. Il suffit de lire le rapport pour savoir à quel point leurs connaissances sont complètes. En fait, c'est le mandat que nous, les parlementaires, leur avons confié. Le CSARS est un appareil du Parlement, c'est-à-dire qu'il fait partie du Parlement. Ce comité agit à notre nom et fait rapport au Parlement. Voilà ce que fait le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité.
    Ce processus d'examen du renseignement de sécurité constitue un exemple du régime juridique canadien qui cherche à trouver un meilleur équilibre entre la protection des renseignements sensibles et les droits procéduraux des particuliers. Qui l'a dit? C'est la Cour suprême du Canada.
(1010)
    C'est une excellente citation. Merci.
    Ma prochaine question est destinée au ministre MacKay.
    Monsieur le ministre, dans votre déclaration, vous avez parlé de la réduction des critères quant à l'engagement assorti de conditions. Je me demandais si vous pourriez nous expliquer pourquoi c'est important. Avez-vous des exemples pour nous montrer comment les forces de l'ordre auraient pu en profiter dans le passé?
    Il reste que les engagements de ne pas troubler l'ordre public et les engagements assortis de conditions sont des outils, si je peux reprendre l'expression de M. Blaney, que la police peut utiliser de façon préventive. Le cas de figure, c'est une personne dont le comportement ressemble à celui d'une personne qui a été radicalisée, qui pourrait constituer une menace. La police pourra à l'avenir demander au juge un engagement assorti de conditions ou un engagement de ne pas troubler l'ordre public, selon les preuves fournies et le comportement. Le juge peut imposer certaines conditions, telles que la saisie du passeport, des obligations de faire rapport, une assignation à domicile, l'interdiction de fréquenter certaines personnes, et l'interdiction de posséder des armes ou des explosifs.
    Vous constatez que ces deux outils, prévus par la loi et émis par un juge, nous permettent de prévoir des contrôles avant qu'un crime ne soit commis. En réduisant les critères, nous pouvons imposer davantage des conditions et des contrôles.
    On l'a dit dans le passé, à bon escient il me semble, que lorsqu'il s'agit de terrorisme, le potentiel de préjudice personnel grave est tellement réel, voire même imminent, que nous voulons réduire les critères afin de disposer plus facilement de ces outils. C'est ce que prévoient certains articles du projet de loi.
    Selon cette même logique, nous sommes persuadés que la réduction des critères à l'égard des engagements assortis de conditions et des engagements de ne pas troubler l'ordre public permettra à la police de prendre des décisions éclairées, avec l'autorisation des tribunaux, afin d'imposer des conditions qui, espérons-le, nous permettront de prévenir et de décourager tout acte terroriste sur le sol canadien.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Madame Doré Lefebvre, vous avez la parole. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Si vous me le permettez, j'aimerais continuer à parler de la surveillance civile du SCRS, car plusieurs questions restent sans réponse à cet égard.
    À l'heure actuelle, l'organisme de surveillance civile du SCRS s'occupe de faire un compte rendu après les faits. Le projet de loi C-51 accorde de nouveaux pouvoirs au SCRS, mais la question que je me pose est la suivante. Qui assurera la surveillance en temps réel? Qui s'assurera que le SCRS respecte les mandats?
    Le projet de loi C-51 accorde plusieurs nouveaux pouvoirs au SCRS. À l'heure actuelle, l'organisme de surveillance civile fait un rapport une fois par année, et ce, après les faits. Saurons-nous ce qui ce sera passé après les faits comme c'est le cas actuellement, ou saurons-nous en temps réel ce qui se passe exactement?
    La réponse est très simple. Le Service canadien du renseignement de sécurité est assujetti à toutes les lois canadiennes, notamment la Charte canadienne des droits et libertés et les lois qui touchent la vie privée.
    Il est important de préciser ceci ce matin. Les activités de réduction de la menace prévues dans la législation ne peuvent en aucun cas porter atteinte à l'intégrité physique ou à la santé d'une personne.
(1015)
    Monsieur le ministre, je veux quand même savoir où en sont les choses par rapport à cela. C'est un aspect extrêmement important et plusieurs experts l'ont soulevé dans les dernières semaines. Qu'en est-il exactement de la surveillance civile? Restera-t-elle la même, c'est-à-dire qu'elle aura lieu après les faits, ou y aura-t-il un autre mécanisme de surveillance? À votre avis, serait-il bon qu'il y ait un mécanisme pour assurer une surveillance en temps réel et ainsi savoir exactement ce qui se passe?
    C'est ce que je suis en train de vous dire. Nous avons les deux, à savoir la ceinture et les bretelles. Nous avons un mécanisme de surveillance en continu. Je vous rappelle que le Service canadien du renseignement de sécurité doit respecter les lois; sa responsabilité intrinsèque est de respecter les lois.
    Je vous ai aussi parlé de certains mécanismes, que ce soit les autorisations accordées au moyen de directives ministérielles ou, dans certains cas, par l'entremise d'un juge.
    La feuille de route du Service canadien du renseignement de sécurité figure dans les rapports annuels des 30 dernières années du comité de surveillance qui a le pouvoir d'intervenir dans différents secteurs.
    Ce matin, vous me donnez l'occasion de rappeler que le projet de loi C-51 accroît les pouvoirs du comité de surveillance et lui donne précisément le mandat de revoir les activités liées à la diminution de la menace.
     Oui, mais cela se passe après coup. Est-ce que des dispositions du projet de loi C-51 permettent de donner plus de pouvoirs au Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité?
    Oui. Il y a les mandats judiciaires pour les cas de réduction de la menace. Comme nous l'avons vu, cela ne touche pas le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Cela touche davantage les arrestations préventives reliées à des mandats. Dans les deux cas, il y a des outils supplémentaires. En outre, permettez-moi de vous rappeler que nous sommes, à ma connaissance, le seul pays qui ne disposent pas de ces outils. Nous avons vérifié ce qu'il en était pour bon nombre de nos pays alliés. Il faut prendre conscience du fait que nous sommes en retard. Présentement, tous les services de renseignement de nos alliés peuvent réduire la menace. Ils sont en mesure de poser des gestes.
     Rappelez-vous que votre première question visait à savoir si nous avions des mesures de prévention contre la radicalisation. Or présentement, les services de renseignement qui sont sur la ligne de feu, là où s'amorce le phénomène de radicalisation, ne sont pas en mesure d'intervenir pour réduire la menace. Pour être cohérent face à une position visant à réduire la radicalisation, il faut être en faveur des mesures de réduction de la menace. Je vous le précise de nouveau: nous sommes le seul pays à inclure une supervision judiciaire et un mandat émis par un juge.
     Dans le cadre de ce mandat, le service doit décrire toutes les activités au juge. Ce dernier peut refuser ou accepter le mandat ou encore faire intervenir une tierce partie pour obtenir un avis critique. C'est le système que nous avons et que nous renforçons au moyen du projet de loi C-51.
    En ce moment, il y a des postes disponibles au Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Allez-vous nommer des gens rapidement pour combler ces postes?
     Il y a déjà entre 15 et 20 personnes qui sont des employés à temps plein. Il y a quatre commissaires et un cinquième poste qui est à combler. Évidemment, nous devons nous assurer de la présence d'experts. Par exemple, la dernière personne à avoir été nommée est M. Holloway, qui est doyen d'une faculté de droit.
     Comme le disait le ministre MacKay, il est important de confier ce mandat à des gens qui possèdent les compétences nécessaires. C'est ce que fait le personnel du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité.
    Merci beaucoup, monsieur Blaney.

[Traduction]

    Monsieur Falk, vous avez cinq minutes.
    J'aimerais remercier les ministres et leurs représentants d'être venus ce matin et de nous avoir fourni leurs observations.
    Dans les années 1920, mes grands-parents ont connu le terrorisme dans la région qui s'appelait autrefois l'Union soviétique. Ils sont venus comme réfugiés au Canada à l'époque. Nous sommes reconnaissants depuis que le gouvernement a permis à mes grands-parents d'immigrer ici en vertu du programme des réfugiés.
    L'une des choses qui m'intéressent, ce sont les modifications apportées à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.
    Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ces modifications sont nécessaires et pourquoi elles sont prévues dans le projet de loi?
(1020)
    Le Canada est une terre d'accueil. Le Canada accueille tous les ans des immigrants de partout au monde. Plus de 200 000 immigrants, des néo-Canadiens, viennent au pays. Ils viennent au Canada et, si je peux m'exprimer ainsi, prennent goût au mode de vie canadien. Mes ancêtres sont venus d'Irlande. C'est probablement la raison pour laquelle je suis tellement maigre, car il n'y avait pas grand chose à se mettre sous la dent à l'époque.
    Pour revenir à votre question concernant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, les dispositions ont été prévues en réponse à une décision de la Cour suprême. Dans l'éventualité de personnes qui viendraient au pays et représenteraient une menace pour notre sécurité, nous voulons être sûrs de disposer de règles claires qui nous permettent de protéger les Canadiens tout en respectant leurs droits.
    C'est la raison pour laquelle nous avons défini les façons dont les renseignements peuvent être traités et également les démarches autorisées pour assurer la sécurité nationale. On prévoit aussi une procédure d'appel clairement décrite et ouverte à toute personne. Là encore, les dispositions visaient à clarifier les processus qui permettraient au Canada, dans l'éventualité d'une personne qui représenterait une menace, de régler le problème.
    Nous avons tenu compte d'une décision antérieure de la Cour suprême qui indiquait que nous devions clarifier certaines dispositions de la loi. D'où cet article dans la loi.
    Monsieur Falk, j'ajouterais seulement que ces dispositions viennent rejoindre ce dont M. Blainey a parlé plus tôt, c'est-à-dire l'importance des renseignements qui sont communiqués par les divers ministères gouvernementaux. Je crois que certains Canadiens seraient étonnés d'apprendre que la communication des renseignements ne se passe pas comme elle devrait dans le contexte très fluide et changeant de l'évaluation des menaces. La communication des renseignements est extrêmement importante, notamment dans le cas d'un ministère chargé de l'immigration. Pour revenir à l'exemple réel de votre famille, effectivement, de nombreuses personnes viennent au Canada pour échapper au terrorisme, pour laisser cette menace derrière eux et profiter de toutes les protections dont nous jouissons dans notre pays, grâce à notre charte, à notre constitution. Ces personnes adoptent rapidement notre mode de vie.
    En ce qui concerne ce projet de loi, je crois que ce sont peut-être les néo-Canadiens qui ont la meilleure perspective quant aux aspects qui font la grandeur de notre pays, et qui sont en mesure d'expliquer pourquoi ils sont venus et ont adopté si rapidement les libertés que nous avons tellement de chance d'avoir. Le projet de loi confirme et protège les libertés de tous les Canadiens.
    Merci, monsieur le ministre. Je suis du même avis que vous, c'est-à-dire que ce projet de loi est un pas vers la protection de nos droits et libertés.
    Pouvez-vous nous expliquer rapidement la procédure d'appel d'une décision d'un juge dans le cadre d'une procédure?
    En ce qui concerne l'immigration?
    Oui, sous le régime des certificats de sécurité.
    Vous devriez consulter l'article 52 du projet de loi, qui définit de manière technique comment un appel peut être interjeté. Le projet de loi décrit bien le processus. Notre procédure d'appel repose essentiellement sur d'autres procédures déjà existantes, ce qui garantit sa constitutionnalité. Je dirais que c'est un modèle qui s'apparente à d'autres qu'on utilise dans des situations semblables.
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons maintenant céder...
    Une voix: Monsieur le président...
    Le président: Oui.
    Monsieur le président, j'aimerais demander la permission au comité de poser une question. Comme vous le savez, plusieurs d'entre nous ont demandé d'avoir...
    Le président: Non.
    Mme Elizabeth May: Monsieur le président, nous n'avons jamais...
    Non, vous n'avez pas la parole. Je suis désolé. Toutefois, ce que je peux faire, à titre de président, c'est de voir si la majorité des témoins acceptent que vous interveniez.
    Ai-je le consentement unanime du comité?
    Une voix: Non.
    Le président: Il n'y a pas consentement unanime.
    Monsieur Norlock, allez-y, je vous prie.
    Monsieur le président, j'aimerais aborder plusieurs sujets, alors je demanderais aux témoins d'être brefs et de ne pas trop s'étendre sur le sujet, à moins que ce ne soit vraiment nécessaire.
    Ma première question s'adresse à M. Coulombe, le directeur du SCRS.
    Monsieur Coulombe, au cours des 30 années d'existence du SCRS, à combien de reprises le CSARS vous a-t-il réprimandés ou reproché, vous et votre organisation, d'avoir enfreint les règles qui vous régissent?
(1025)
    Je ne pourrais vous dire, de mémoire. À une certaine époque, c'était l'inspecteur général qui certifiait le rapport annuel du directeur présenté au ministre. Maintenant, c'est le CSARS. Si ma mémoire est bonne, tous ces rapports annuels indiquaient que nos activités étaient conformes à la Loi sur le SCRS et aux instructions ministérielles et qu'il n'y avait aucun abus de pouvoir de notre part.
    Je peux donc en déduire que c'est zéro?
    Il y a eu des critiques et des recommandations sur notre façon de faire, mais on ne nous a jamais reproché d'avoir enfreint la loi.
    Merci beaucoup.
    Plus tôt, on a fait allusion aux préoccupations du juge Mosley à l'égard des activités du SCRS. Qu'avez-vous fait, monsieur, pour répondre à ces préoccupations?
    À l'automne 2013, lorsque la décision a été rendue, nous avons tout de suite mis fin aux activités critiquées. Il est très difficile pour moi de vous en parler aujourd'hui, car ce sont des questions dont la Cour suprême est toujours saisie. Vous comprendrez donc que je ne peux me prononcer là-dessus pour l'instant.
    Merci beaucoup.
    Si je puis me permettre, monsieur Norlock, comme vous le savez, je suis ici pour répondre à l'invitation de la Cour suprême de définir clairement le mandat du SCRS, qui consiste à agir ici et à l'étranger, à communiquer des renseignements, à offrir un programme de protection des témoins et à protéger la confidentialité de ses membres. Ce projet de loi, qui vise strictement à maintenir les pouvoirs actuels du SCRS, est actuellement examiné par le comité sénatorial, et je suis persuadé qu'il sera adopté.
    Merci beaucoup.
    L'opposition a beaucoup parlé des processus et ainsi de suite, mais elle n'a pas posé de véritables questions au sujet de la loi.
    Ma prochaine question porte sur la surveillance en temps réel. Selon moi, ayant moi-même travaillé dans le domaine de l'application de la loi, la surveillance en temps réel nécessite que quelqu'un vous suive partout et surveille vos faits et gestes.
    Commissaire Paulson, faites-vous l'objet d'une surveillance en temps réel? Y a-t-il quelqu'un qui vous suit partout et qui s'assure que tout ce que font vos membres est vérifié par un autre organisme?
    Parfois, c'est ainsi qu'on se sent.
    Des voix: Oh, oh!
    Oui.
    Savez-vous s'il y a des services de police au Canada qui font l'objet d'une surveillance en temps réel?
    Mis à part les processus internes relatifs à la supervision et au leadership, il n'y a pas d'autres mesures.
    D'accord, seulement des mesures internes.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais revenir à mes amis du SCRS.
    Vous avez été très clair au sujet des graves manquements qui ont été signalés pendant les 30 années d'existence du SCRS. Mme Ablonczy est revenue sur des critiques formulées par certaines personnes qui critiquent également cette mesure législative en affirmant que c'est un pas vers un État policier.
    Pour revenir aux membres du SCRS, considérez-vous qu'on exerce un niveau de surveillance qui correspond à leurs fonctions?
    J'ai affirmé à plusieurs reprises qu'à mon avis, le CSARS est un mécanisme d'examen rigoureux qui a prouvé sa valeur et son impartialité au cours des 30 dernières années. J'ai également dit publiquement qu'il avait fait du SCRS une organisation plus solide.
    Merci beaucoup.
    Lorsque vos membres sont formés et renseignés sur la nature de leurs fonctions, ils sont guidés par les principes de Charte canadienne des droits et libertés, et ils savent où se trouvent les limites de leurs pouvoirs. Serait-il juste de dire que cela constitue un élément important de leur formation?
    Effectivement, cela fait partie de la formation.
    On doit se conformer à la Charte, à la Loi sur le SCRS, aux directives ministérielles, puis aux politiques internes opérationnelles. Elles sont toutes interreliées.
(1030)
    Merci beaucoup, messieurs Norlock et Coulombe.
    Je cède maintenant la parole à M. Garrison.
    M. Norlock a posé des questions intéressantes au sujet de la GRC et de la surveillance interne de ses activités, et j'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idées. À une certaine époque, c'était l'inspecteur général du SCRS qui surveillait les activités du service et qui s'assurait qu'elles étaient conformes à la loi, mais son poste a été aboli par le gouvernement en 2012.
    Monsieur le ministre, compte tenu du vaste élargissement des pouvoirs et des activités envisagé pour le SCRS, pourquoi ne rétablit-on pas le poste d'inspecteur général? L'ancienne inspectrice générale a indiqué clairement qu'il était « ridicule » de penser qu'un comité d'examen comme le CSARS pouvait faire le même travail de surveillance auprès du Service canadien du renseignement de sécurité. Elle a dit:
Ils ne font pas du tout le même type de travail... Ils ne font pas les choses de façon aussi approfondie. Et ce sont essentiellement des employés à temps partiel.
    Plutôt que d'accorder ces pouvoirs au CSARS, qui a pratiquement le même budget depuis 10 ans, pourquoi ne pas confier la surveillance du SCRS à l'ancien Bureau de l'inspecteur général?
    Je vous remercie pour votre question.
    Vous avez raison lorsque vous dites que la fermeture du Bureau de l'inspecteur général a suscité des préoccupations et qu'on craignait que cela ait des répercussions. C'est plutôt le contraire qui s'est produit. Pour cette raison, je vous renvoie au dernier rapport annuel du CSARS, qui se lit comme suit:
Comme l'exige la Loi sur le SCRS, les interactions entre le comité et le ministre sont devenues plus fréquentes. Toutefois, loin de compromettre son indépendance, cette relation a sensiblement renforcé le rôle du CSARS dans le mécanisme de reddition de comptes, et a même amélioré sa capacité à fournir au Parlement et aux Canadiens une assurance sur l'exercice des fonctions du Service.
    Cette mesure a été prise il y a deux ans, et nous pouvons maintenant dire que tous les Canadiens en ont bénéficié puisque leurs droits et libertés sont mieux protégés.
    Permettez-moi de préciser que ce n'est pas seulement le CSARS qui peut examiner les activités du SCRS; le vérificateur général et le commissaire à la protection de la vie privée peuvent en faire autant.
    Vous avez soulevé deux questions intéressantes. Tout d'abord, dans son dernier rapport annuel, le CSARS disait clairement avoir eu de la difficulté à obtenir des renseignements complets en temps utile auprès du SCRS. Le CSARS lui-même a indiqué avoir éprouvé des problèmes en raison d'un manque de collaboration. Qu'en est-il de votre argument selon lequel il s'agit d'une amélioration de la surveillance?
    Je suis heureux de voir que vous appuyez notre excellent Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Sachez que le gouvernement du Canada est l'un des premiers gouvernements démocratiques dans le monde à avoir établi un cadre législatif pour son service de sécurité. Nous sommes donc des pionniers pour ce qui est d'avoir une institution entièrement indépendante. Le CSARS est-il critique parfois à l'égard du travail du SCRS? Absolument. En fait, vous n'avez qu'à lire son rapport. Le comité a mené de nombreuses études sur les enquêtes de contre-espionnage, les activités délicates du SCRS, notamment l'armement du personnel dans un contexte dangereux — cela figure dans le rapport — et, comme vous le savez, il est doté d'un processus de traitement des plaintes. Nous avons donc affaire à un système très rigoureux.
    Ce qui est également important, c'est que chaque année, il me remet un certificat.
    Le SCRS s'est-il conformé aux lois canadiennes? Dans la plupart de ses études, le CSARS s'est dit satisfait, cette année, de la façon dont le SCRS s'est acquitté de son mandat qui est d'enquêter sur les menaces à la sécurité nationale, et il m'a remis un certificat en conséquence. Est-ce que le CSARS présente de bonnes recommandations? Oui. Est-ce qu'il fait du SCRS un meilleur organisme de renseignement de sécurité? Oui, absolument.
    Dans le projet de loi C-51, pour lequel je demande l'appui du comité, il y a des dispositions qui permettront au CSARS de surveiller les activités de réduction de la menace prévues dans la loi. Nous améliorons donc le mandat du CSARS.
(1035)
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Très brièvement, à la fin de votre intervention, vous avez fait mention du commissaire à la protection de la vie privée qui, malheureusement, ne comparaîtra pas devant le comité. A-t-il examiné ce projet de loi avant que vous ne le présentiez? Que faites-vous de ses préoccupations selon lesquelles le projet de loi s'attaque au droit à la vie privée?
    Très brièvement.
    D'accord.
    Oui, nous avons consulté le commissaire à la protection de la vie privée, et j'ai bien l'intention de le rencontrer. Comme vous le savez, le projet de loi vise à protéger les droits et libertés des Canadiens ainsi que leur vie privée. Le projet de loi C-51 contient des mécanismes, dont certains sont déjà en place au sein du gouvernement, comme l'évaluation des répercussions sur la vie privée, qui s'appliqueront aux mesures prévues dans ce projet de loi.
    Merci, monsieur le ministre.
    Je cède maintenant la parole à Mme James pour cinq minutes.
    Je trouve intéressant que nous continuons de parler du fait que le commissaire à la protection de la vie privée n'a pas été invité à comparaître. En fait, le NPD ne l'a même pas inscrit sur sa liste de témoins. Je voulais simplement...
    Ce n'est pas un témoin; c'est un mandataire du Parlement.
    Nous proposons tous des témoins, monsieur le président, et le nom du commissaire de la protection à la vie privée n'a pas été proposé par l'opposition.
    Quoi qu'il en soit, je vais maintenant poser mes questions.
    Monsieur le ministre, j'aimerais revenir à la partie 1 du projet de loi, qui porte sur la communication d'information. Il y a eu des malentendus à cet égard et une certaine confusion avec les amendements à la Loi sur le SCRS en vertu de ce projet de loi en ce qui a trait à la communication d'information. Les dispositions relatives à la communication d'information de ce projet de loi n'équivalent pas à une arrestation ou à des poursuites dans le cas d'accusations de terrorisme. Je tenais à mettre les choses au clair. De plus, pour ce qui est de la capacité de communiquer des renseignements, il faut qu'il y ait une atteinte à « la souveraineté, à la sécurité ou à l'intégrité territoriale du Canada ou à la vie ou à la sécurité de la population du Canada ».
    Cela dit, cette mesure a suscité de vives inquiétudes, étant donné que les manifestants pourraient en quelque sorte être visés par les dispositions de ce projet de loi, ce qui ne devrait pas être le cas.
    Par conséquent, j'aimerais que vous m'indiquiez si oui ou non les manifestants pourraient, dans certaines situations, relever de la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada, comme le prévoit le projet de loi.
    Dans le cas d'une manifestation pacifique, les manifestants seraient-ils assujettis aux dispositions sur la communication d'information?
    Les manifestations légales ne sont pas visées par le projet de loi. Même si ce sont des manifestations illégales, pourvu qu'elles ne portent pas atteinte à la sécurité des Canadiens, elles ne sont pas visées par la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité.
    Dans le cas des manifestants qui pourraient bloquer une route ou un chemin de fer ou même empêcher la construction d'un pipeline, dans la mesure où ils ne menacent pas la sécurité des citoyens, ils ne seraient pas assujettis à ces dispositions.
    C'est exact. Encore une fois, ici, on parle seulement de transférer de l'information qui existe déjà au sein du gouvernement, de façon à ce que la main gauche sache ce que fait la main droite.
    S'il y a lieu de croire qu'une personne va utiliser une bombe tuyau ou faire exploser une infrastructure importante, cette personne serait donc visée par les dispositions sur la communication d'information puisqu'elle constituerait une menace à la sécurité nationale. Est-ce exact?
    Tout à fait.
    En fait, je dirais que même si le fait de perturber gravement ou de paralyser des services, installations ou systèmes essentiels s'inscrit dans la définition d'une activité terroriste, pour revenir à votre question au sujet des manifestations pacifiques, la définition exclut expressément les protestations et les manifestations légales ou illégales d'un désaccord ou d'un arrêt de travail qui n'ont pas pour but de causer des blessures graves, de mettre en danger des vies ou de poser une menace grave à la sécurité publique. Autrement dit, votre description ne correspond pas à cette définition. Les protestations légitimes ne sont pas considérées comme des activités terroristes.
    Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse au commissaire Paulson.
    Il a été question de ce projet de loi par rapport à certaines lacunes décelées par nos organismes de sécurité nationale. Pourriez-vous nous expliquer comment la mise en commun de l’information pourrait être avantageuse pour la GRC? Par exemple, de façon générale, vous surveillez des individus, dont certains figurent peut-être sur la liste à laquelle vous avez fait référence plus tôt. Toutefois, il y a d’autres individus dont vous ignorez peut-être l’existence et qui pourraient, eux aussi, constituer une menace.
    D’abord, ce projet de loi, en tout ou en partie, permet-il de combler certaines des lacunes décelées par la GRC? Ensuite, comment la mise en commun de l’information vous sera-t-elle extrêmement utile?
    Oui, cette mesure permet de combler certaines de ces lacunes, et le ministre Blaney a donné quelques exemples concrets d'échanges de renseignements survenus récemment en Turquie avec des personnes blessées provenant de la Syrie. Des questions de confidentialité ont été soulevées par rapport au partage d'information entre deux composantes du gouvernement. Dans ce genre de situation, ce serait utile.
    Ce serait également très utile en ce qui concerne les individus dont nous ignorons l’existence. Nous proposons d’amorcer un changement de culture afin de passer d’une culture de gestion de l’information au sein du gouvernement du Canada qui reconnaît les situations où les renseignements sont clairement nécessaires et pertinents, surtout pour la sécurité du pays, vers une culture de mise en commun proactive de l’information lorsqu'il y a une menace. Cela nous aiderait beaucoup.
    À mon avis, ce serait également utile pour certaines des mesures dont parlait le ministre MacKay relativement aux ordonnances de bonne conduite et aux arrestations préventives. Selon nous, il serait important de tenir compte de ces éléments dans le cadre de cette application progressive des pouvoirs de la police, car cela nous permettra non seulement d'accroître le nombre d’interventions réussies de la justice pénale, mais aussi d’intervenir dans le cadre d’initiatives de lutte contre la radicalisation lorsque des ordonnances de bonne conduite ont été délivrées. En imposant des conditions, nous pouvons intervenir auprès de ces individus et travailler avec eux afin de les remettre sur le droit chemin.
(1040)
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant amorcer la prochaine série de questions. Les intervenants disposeront de trois minutes. Monsieur Easter, vous avez la parole.
    D’abord, pour revenir à la question de M. Norlock au sujet du juge Mosley, j’ai ici la décision du tribunal. Pour être bien clair, le juge Mosley a déclaré que le SCRS avait manqué à son obligation de franchise à l’égard de la cour en négligeant de divulguer de l’information pertinente pour l’exercice de la compétence de la cour.
    Je crois que le SCRS fait tout en son pouvoir pour respecter les règles de la cour, je l'admets. Toutefois, cette décision vient confirmer que le ministre a tort de dire qu’une ordonnance judiciaire constitue un moyen de surveillance. Parlons un instant de l’élément de surveillance. Le ministre parle du CSARS. Il n’est pas uniquement question ici de la surveillance du SCRS qui serait faite uniquement par le CSARS. Les Canadiens veulent que tous nos organismes de sécurité nationale fassent l’objet d’une surveillance. Dans le cadre de ce projet de loi, 10 autres ministères ou organismes sont concernés sur la question de la circulation de l’information. Essentiellement, ce que les Canadiens demandent — et, bien entendu, le gouvernement, fidèle à son habitude, refuse de les écouter —, c’est que tous ces organismes fassent l’objet d’une surveillance.
    J’aimerais ajouter, monsieur le président, que le ministre MacKay a tenté de me faire dire des choses que je n'ai pas dites. Je ne souscris pas à ses propos. Je vous renvoie au rapport du comité publié en juin 2009, comité présidé par un membre conservateur et auquel siégeait M. Norlock. Dans ce rapport, le comité recommande la création d’un comité parlementaire pour examiner les activités des organismes de sécurité nationale.
    À titre informatif, monsieur MacKay, ce rapport révèle que le projet de loi visant à créer un comité de parlementaire, le projet de loi C-81, a été présenté le 24 novembre 2005. Qui formait le gouvernement à l’époque? C’était, effectivement, les libéraux, mais je vais éviter la partisanerie. De toute façon, c’est sans pertinence. Un fait demeure: les Canadiens croient qu’il est nécessaire — et nous sommes d’accord avec eux — que nos organismes de sécurité nationale fassent l’objet d’une surveillance de la part des parlementaires. Le gouvernement tiendra-t-il compte de cette proposition? Cessera-t-il de dire que c’est le pouvoir judiciaire, le CSARS ou un autre organisme qui s’en charge? C’est faux. Le gouvernement se penchera-t-il sur la question?
    Monsieur le président, il est très révélateur d'entendre un ancien solliciteur général en route vers Damas défendre quelque chose qu’il a fermement rejeté alors qu’il occupait le même poste que M. Blaney. Mais, tout comme M. Easter, je vais éviter la partisanerie.
    La vérité, c’est que la surveillance judiciaire, avec le consentement du procureur général pour l’engagement et les ordonnances de bonne conduite et le CSARS, constitue un mécanisme très robuste qui permet d’examiner les mesures et activités relatives à l’application de nos mesures de sécurité. Ça, c’est de la surveillance. De plus, il y a la reddition de comptes au Parlement. Les citoyens canadiens ont maintenant accès à ce rapport par l’entremise du Parlement. Dans certains cas, comme l’engagement, les activités ont fait l’objet d’un réexamen. Il s’agit d'un processus auquel les parlementaires participent et qui leur permet d’examiner ces activités.
    Le processus auquel nous participons aujourd’hui, comme à l’époque de M. Easter, nous permet de poser des questions officielles, d’entendre le témoignage de spécialistes, de dresser un compte rendu des préoccupations exprimées et d’avoir une discussion très ouverte et transparente sur les activités que propose ce projet de loi. Ce processus nous permet d’examiner, en contexte et en temps réel, des exemples pratiques et les préoccupations exprimées par le commissaire et le directeur du SCRS. C’est exactement ce qu’il faut faire pour avoir la confiance des Canadiens. C’est ce qu’a souligné à maintes reprises le ministre Blaney.
    Les Canadiens doivent avoir confiance que nos organismes de sécurité et d’application de la loi agissent de façon responsable dans l’intérêt fondamental des Canadiens, et ce, en respectant les lois canadiennes. Nous savons que les terroristes ne respectent aucune loi. Cependant, nous devons rendre des comptes au Parlement et aux tribunaux, et nous devons réagir dans le respect du droit canadien.
(1045)
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Avant que le comité ne remercie les témoins de leur présence, nous avons, dans le cadre de cette étude, une longue liste de témoins à inviter et le président doit obtenir l'approbation du comité pour adopter un budget afin de financer le déplacement des témoins. Donc, je demande aux membres du comité d’approuver une demande de budget de 39 000 $ pour couvrir les dépenses des témoins.
    Des voix: D'accord.
    Le président: La demande est approuvée à l’unanimité. Merci beaucoup.
    Je tiens maintenant à remercier les ministres Blaney et MacKay, le commissaire Paulson et tous les hauts fonctionnaires ministériels d’avoir accepté notre invitation. Nous vous en sommes reconnaissants.
    La séance est levée.
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