:
Merci, monsieur le président.
Je suis accompagné aujourd'hui de la lieutenante-générale Christine Whitecross qui est commandante du Commandement du personnel militaire au sein des Forces armées canadiennes. M. Greg Smolynec est pour sa part l'un de nos scientifiques en matière de défense. Il travaille dans tous les dossiers liés à l'analyse comparative entre les sexes et contribue aux efforts que nous déployons pour faire progresser ces enjeux au sein des forces.
Si vous le permettez, je vais maintenant vous présenter mes observations.
[Français]
Bonjour, monsieur le président. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'être ici aujourd'hui et de participer à cette importante discussion.
Il y a 15 ans, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté sa première résolution sur les femmes, la paix et la sécurité. Même alors, le Canada était au premier plan en ce qui concerne l'intégration des femmes dans les Forces armées canadiennes. Depuis, nous avons réalisé d'autres progrès. Aujourd'hui, j'aimerais vous faire part avec exactitude de ce que font les Forces armées canadiennes pour mettre en oeuvre la présente résolution.
Au cours de ma carrière en tant que militaire et maintenant en tant que chef d'état-major de la Défense, j'ai vu de mes propres yeux comment les guerres, les conflits et les crises touchent les femmes, les hommes, les filles et les garçons de différentes façons.
En Afghanistan, j'ai été témoin de l'impact de la guerre surtout sur les femmes et les filles afghanes.
[Traduction]
C'est aussi en Afghanistan que j'ai constaté que le fait d'avoir des femmes dans nos rangs peut vraiment améliorer l'efficacité opérationnelle des Forces armées canadiennes.
Afin de bien cerner les diverses préoccupations, nous avons dû interagir avec différentes tranches de la population afghane, y compris les femmes et les enfants. En plus d'accomplir leur rôle occupationnel, nos femmes militaires nous ont fourni une perspective essentielle. Le fait d'avoir des femmes dans nos rangs nous a ouvert des portes et nous a permis d'interagir avec cette tranche de la population, ce qui était primordial pour la planification et la réussite de nos opérations. Leur travail a été indispensable à notre compréhension des dangers et des inquiétudes qui revêtaient de l'importance pour ces gens-là.
L'été dernier, peu de temps après avoir été nommé chef d'état-major de la Défense, je me suis rendu compte que nous pouvions en faire plus pour mettre en oeuvre de façon systématique les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU sur les femmes, la paix et la sécurité. Il est important de le faire pour plusieurs raisons, et notamment parce que cette initiative améliorera l'efficacité opérationnelle des forces. Voilà pourquoi j'ai ordonné l'élaboration d'un plan en vue de l'intégration complète des perspectives liées à l'égalité des sexes dans la planification et les opérations des Forces armées canadiennes, dans notre système d'instruction et d'éducation, et dans notre doctrine.
C'est aussi pourquoi j'ai ordonné la création d'une équipe de conseillers en égalité entre les sexes pour me guider relativement aux questions touchant les femmes, la paix et la sécurité. Enfin, c'est également pour cette raison que j'ai demandé la création de postes de conseillers en égalité entre les sexes au Commandement des opérations interarmées du Canada (COIC) et au Commandement - Forces d'opérations spéciales du Canada (COMFOSCAN). J'intégrerai en outre ces conseillers aux équipes d'intervention qui seront déployées dans un proche avenir.
[Français]
Assurer l'entière mise en place des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, les RCSNU, sur les femmes, la paix et la sécurité est, pour moi, une priorité.
Le 29 janvier de cette année, j'ai émis une directive pour l'intégration de la RCSNU 1325 et des résolutions connexes dans les opérations et la planification des Forces armées canadiennes. J'ai apporté des copies de cette directive pour les membres du comité, aujourd'hui.
Notre mission est d'intégrer pleinement ces exigences et les directives du gouvernement du Canada portant sur l’Analyse comparative entre les sexes plus, l'ACS+, dans la planification et les opérations des Forces armées canadiennes d'ici le 31 août 2017 et dans l'institution au sens large d'ici le 31 mars 2019.
La directive communique, de façon formelle, les tâches à accomplir, selon un échéancier ferme, aux commandants et aux états-majors des Forces armées canadiennes.
Je suis heureux d'annoncer que le progrès relatif à ces tâches respecte le calendrier fixé.
[Traduction]
Mes conseillers militaires en égalité entre les sexes ainsi que ceux du COIC et du COMFOSCAN seront en poste cet été comme prévu. J'envisage en outre de créer au sein de mon bureau au cours des semaines à venir un poste de conseiller principal en égalité entre les sexes pour l'ensemble des Forces armées canadiennes. Un processus de dotation pour des conseillers civils en égalité entre les sexes se poursuit en respectant le calendrier prévu, parallèlement à d'autres activités comme la révision et l'élaboration de programmes de formation et d'études militaires professionnelles.
Alors que nous planifions de nouvelles opérations pour les Forces armées canadiennes, nous nous assurons que l'analyse comparative entre les sexes plus est effectuée pour améliorer notre efficacité opérationnelle et notre compréhension de la situation.
Nous sommes aussi actifs sur ce plan à l'échelle internationale. Pendant l'exercice d'envergure tenu par l'OTAN l'année dernière, Trident Juncture 2015, les Forces armées canadiennes ont assigné un conseiller en égalité entre les sexes au commandant canadien. Nous songeons actuellement à faire de même à l'occasion du grand exercice qui se tiendra cette année sur la côte du Pacifique sous la direction des États-Unis.
Nous avons développé, et cherchons à renforcer, notre relation avec le Centre nordique pour l'égalité entre les sexes dans le cadre d'opérations militaires qui est situé en Suède. C'est le centre d'excellence de l'OTAN pour les questions d'égalité entre les sexes .
En plus de notre travail sur les femmes, la paix et la sécurité, il y a plusieurs efforts complémentaires qui contribuent à une culture de respect, d'excellence opérationnelle et de diversité au sein des Forces armées canadiennes.
Peu de temps après avoir été nommé chef d'état-major de la Défense l'été dernier, j'ai émis la directive lançant l'opération HONNEUR qui vise à éliminer l'inconduite sexuelle au sein des Forces. Étant donné que l'inconduite sexuelle de n'importe quelle nature n'est pas et ne sera jamais tolérée dans notre organisation, j'ai aussi récemment donné la directive à mon personnel de recourir à des mesures de maintien en poste et de recrutement pour augmenter le nombre de femmes dans les Forces armées canadiennes. Mes instructions à l'intention des Forces armées et de la générale Whitecross plus particulièrement visent à augmenter la proportion de femmes dans nos rangs d'un point de pourcentage par année jusqu'à ce que nous atteignions notre objectif de 25 %.
Parallèlement à cela, nous élaborons une stratégie en vue d'aborder les enjeux plus généraux liés à la diversité au sein des Forces. Cette stratégie visera à créer une institution qui sera un reflet plus fidèle de notre population canadienne en faisant en sorte que différents groupes ciblés soient mieux au fait des possibilités qui s'offrent à eux dans notre organisation. Dans l'état actuel des choses, nous devons effectivement miser sur la pleine intégration.
[Français]
Monsieur le président, comme vous le voyez, bien qu'il reste du travail à faire, nous réalisons de vrais progrès en ce qui concerne les femmes, la paix et la sécurité. Il s'agit d'une nouvelle manière de voir l'environnement opérationnel qui se traduira en une situation opérationnelle améliorée pour les Forces canadiennes. C'est un élément dont nous pouvons tous tirer parti.
[Traduction]
Je conclus ainsi mon exposé en vous remerciant de votre attention.
Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.
[Français]
Je vous remercie de m'offrir cette occasion de vous parler des initiatives de la GRC en vue de mettre en oeuvre les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies sur les femmes, la paix et la sécurité.
[Traduction]
Tout d'abord, j'aimerais prendre le temps de vous exposer le contexte dans lequel se déroulent les activités de la GRC en rapport avec les femmes, la paix et la sécurité.
La GRC administre et met en oeuvre le Programme de missions internationales des policiers affectés au maintien de la paix du Canada, en partenariat avec Sécurité publique Canada et Affaires mondiales Canada. Les policiers détachés dans le cadre du programme sont issus de la GRC et de services de police municipaux et provinciaux de partout au pays. À l'heure actuelle, les membres proviennent d'environ 25 corps de police en sus de la GRC. Depuis 1989, plus de 3 800 agents canadiens ont été affectés à plus de 60 missions de maintien de la paix dans le monde, en partenariat notamment avec les Nations unies.
Participant de longue date à ces missions, le Canada est reconnu comme un leader mondial pour son professionnalisme en matière de services de police, affectant des agents hautement compétents et bilingues, voire multilingues, aux missions menées avec ses partenaires de la communauté internationale afin de renforcer les capacités et d'assurer la paix et la sécurité.
En 2000, lors de l'annonce de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations unies, la GRC a intégré un volet sur les femmes, la paix et la sécurité à ses opérations de maintien de la paix. Ainsi, en décembre 2000, elle s'est penchée sur les moyens à prendre pour favoriser la participation des femmes à ces opérations. Depuis l'adoption du plan d'action canadien pour la mise en oeuvre des résolutions des Nations unies sur les femmes, la paix et la sécurité en 2010, la GRC a intensifié ses initiatives pour intégrer de tels volets à ses activités. Aujourd'hui, ces volets font partie intégrante de nos opérations de maintien de la paix, notamment pour ce qui est de décider des missions et des projets auxquels nous souhaitons prendre part.
J'aimerais profiter de l'occasion pour souligner quelques secteurs clés dans lesquels la GRC met en oeuvre les résolutions du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité.
D'abord, la GRC s'est efforcée d'affecter un plus grand nombre de policières aux missions de paix, conformément à la constatation des Nations unies à l'effet que les membres féminins rehaussent l'efficacité des missions, aident à établir une relation de confiance avec les populations et constituent un exemple à suivre.
À cet égard, la GRC, de concert avec ses partenaires policiers canadiens, a lancé des initiatives en vue d'accroître la proportion de membres féminins affectés aux opérations canadiennes de maintien de la paix. Ainsi, dans tous les bulletins de possibilités d'emploi publiés pour ces opérations, on invite les femmes à poser leur candidature, et des candidates ont été sélectionnées dans tous les cas où des candidats des deux sexes également compétents se présentaient.
De plus, on a encouragé la participation des femmes en misant sur divers outils de communication et en prenant part à des événements comme les conférences de l'International Association of Women Police.
Je suis heureuse de pouvoir vous dire qu'en 2014-2015, le Canada a été le premier État à surpasser l'exigence des Nations unies quant au déploiement de 20 % de membres féminins dans les opérations de maintien de la paix. À l'heure actuelle, les femmes comptent pour environ 25 % des policiers canadiens déployés dans le cadre du Programme de missions internationales des policiers affectés au maintien de la paix.
En plus de voir à rehausser la proportion de membres féminins déployés, la GRC reconnaît l'importance de faire en sorte que les femmes assument tous les genres de fonctions et de rôles au sein des missions de paix, en particulier dans des postes de niveau supérieur et de commande. Le Canada a déployé des membres féminins dans des postes de niveau supérieur dans différentes missions ces dernières années, notamment en Haïti, en Afghanistan, en Ukraine, en Cisjordanie et au quartier général des Nations unies. C'est d'ailleurs une femme qui commande actuellement le contingent en Haïti où elle supervise les effectifs canadiens.
Un deuxième domaine où nous avons concentré nos efforts est l'investissement dans une formation exhaustive. La GRC reconnaît le rôle vital de la formation pour faire progresser tous les éléments de la démarche sur les femmes, la paix et la sécurité.
De concert avec le Réseau canadien du savoir policier, la GRC a élaboré des modules de formation en ligne que tous les membres déployés dans les opérations de paix des Nations unies doivent suivre avant la formation préparatoire à Ottawa. Ces modules portent, entre autres, sur les femmes, la paix et la sécurité ainsi que sur l'exploitation et la violence sexuelles.
Lors de la formation préparatoire offerte ici à Ottawa, la GRC tient également une séance où l'on traite, dans le contexte de la mission à venir, des incidences différentes d'un conflit sur les femmes et les jeunes filles, de violence sexuelle et fondée sur le sexe, ainsi que de sensibilisation culturelle, de déontologie et d'éthique. En plus de concrétiser l'engagement pris par le Canada d'appliquer les normes les plus élevées qui soient en matière de conduite policière pour ces missions, cette formation permet au Canada de donner suite à son engagement de transparence et de responsabilisation à l'égard des actes des policiers déployés. Cet effort de formation démontre également que le Canada prend extrêmement au sérieux toutes les allégations d'exploitation et de violence sexuelles, entre autres inconduites commises dans les missions de paix.
La GRC cherche constamment à améliorer les éléments de sa formation sur les femmes, la paix et la sécurité. À cet égard, elle a récemment travaillé avec la société civile canadienne en vue de développer et mettre en place un atelier d'un jour sur les femmes, la paix et la sécurité pour les policiers canadiens déployés en Haïti. L'atelier, assorti d'exercices pratiques, portait sur divers sujets, dont la compréhension des principes d'égalité entre les sexes dans le contexte de la paix et de la sécurité, et les cadres normatifs et juridiques. Ce partenariat en matière de formation représente un jalon important en vue d'établir une relation soutenue et efficace entre la GRC et la société civile canadienne.
Enfin, j'aimerais souligner la contribution des policiers canadiens aux démarches sur les femmes, la paix et la sécurité dans les missions de paix.
Les policiers canadiens sont tenus en haute estime pour leurs efforts en faveur des droits des femmes et de l'égalité entre les sexes. Plusieurs d'entre eux ont travaillé directement dans des rôles liés aux femmes, à la paix et à la sécurité, en agissant comme conseillers en matière d'égalité entre les sexes ou comme mentors sur les droits de la personne, notamment en Haïti, en Afghanistan et en Ukraine.
Les policiers canadiens ont aussi pris part directement aux initiatives visant à prévenir les actes de violence sexuelle ou fondée sur le sexe, à intervenir ou à faire enquête en la matière. Ainsi, depuis 2011, ils travaillent de concert avec la Norvège en vue d'offrir une formation pour améliorer la capacité d'enquête de la Police nationale d'Haïti dans les cas de violence sexuelle ou fondée sur le sexe. De même, en 2015, trois policières canadiennes formées expressément pour faire enquête sur les cas de violence sexuelle ou fondée sur le sexe, ont été déployées auprès des chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens. Elles ont apporté leur concours à l'enquête sur les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et les génocides qui auraient été commis entre 1975 et 1979 sous le régime des Khmers rouges, et ont contribué de façon très utile aux enquêtes sur les cas de violence sexuelle ou fondée sur le sexe.
Le Canada est aussi l'un des rares pays pouvant se targuer d'avoir contribué à toutes les initiatives de la Division de la police des Nations unies sur les femmes, la paix et la sécurité ces dernières années. Ainsi, depuis 2014, nous travaillons avec les Nations unies dans plusieurs pays en développement, notamment au Rwanda, au Burkina Faso, au Cameroun, au Bénin, au Niger et au Togo, pour mettre de l'avant un projet de formation en vue d'accroître le nombre de policières déployées dans des missions de paix par d'autres pays. Le Canada a également participé au lancement de la mallette pédagogique sur l'égalité entre les sexes de la Division de la police de l'ONU.
Après ce survol des moyens mis en oeuvre par la GRC et les policiers canadiens pour intégrer les éléments du programme des femmes, de la paix et de la sécurité aux missions de paix, j'aimerais vous parler de la façon dont nous prévoyons poursuivre nos efforts en ce sens.
Pour que les femmes puissent continuer à jouer un rôle essentiel aux fins du maintien de la paix et de la sécurité, notamment via le déploiement de policières dans les missions de paix, il va falloir une attention et un soutien continus de la part des Nations unies et des pays qui affectent des policiers à ces missions, dont le Canada.
La GRC prévoit poursuivre les initiatives en la matière, notamment au moyen d'un sondage national auprès des policières afin de déterminer les obstacles éventuels à la participation des femmes aux missions de paix. La GRC entend aussi faire en sorte qu'un nombre accru de femmes assument des fonctions de commande au sein des missions.
[Français]
Les membres des forces militaires des deux sexes déployées lors de missions de paix vont continuer de jouer un rôle essentiel dans la mise en oeuvre du programme des femmes, de la paix et de la sécurité. Elles le feront en contribuant au développement d'institutions d'application de loi efficaces et professionnelles qui respectent les droits des femmes et des jeunes filles, protègent celles-ci contre la violence, notamment sexuelle, et répondent aux besoins de la population locale en général.
La révision et le renouvellement du Plan d'action du Canada pour la mise en oeuvre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité constituent une autre étape de notre démarche. Ce plan relève d'Affaires mondiales Canada. Il s'agit d'établir un cadre solide pour orienter la mise en oeuvre de ces résolutions et d'un outil pour mesurer concrètement les progrès et la responsabilisation en la matière. La GRC entend travailler étroitement de concert avec Affaires mondiales Canada et le ministère de la Défense nationale, pour faire en sorte que le plan d'action révisé incorpore les leçons apprises et les priorités actuelles et à venir sur les femmes, la paix et la sécurité, tout en tenant compte de la perspective de la société civile canadienne.
[Traduction]
Merci pour le temps que vous m'avez consacré. Je me ferai un plaisir de répondre à toutes les questions des membres du comité.
Pour ce qui est de la recommandation de Mme Deschamps, le chef d'état-major vient de vous parler du centre et du travail accompli pour y donner suite.
En rencontrant nos homologues australiens et américains, nous avons pu constater que les victimes peuvent choisir dans ces pays entre un signalement restreint et un signalement non restreint. Comme l'indiquait le général, une victime qui s'adresse au centre sans avoir parlé de l'inconduite à quelqu'un d'autre peut obtenir le soutien dont elle a besoin, car elle n'est pas nécessairement liée par les dispositions de la Loi sur la défense nationale en vertu desquelles toute personne au fait d'une inconduite doit faire quelque chose à ce sujet.
C'est notre cadre législatif. Il n'est pas nécessairement chose facile de créer un environnement qui permettra aux victimes de se manifester et d'obtenir le soutien nécessaire sans qu'une enquête officielle ne soit déclenchée.
Les Américains et les Australiens y sont parvenus en permettant les signalements restreints et non restreints. C'est une avenue que nous envisageons. On parle de signalement restreint lorsque la présumée victime indique qu'elle veut seulement obtenir l'aide dont elle a besoin pour se sentir mieux et qu'elle ne veut pas pousser l'affaire plus loin. On s'assure alors de lui procurer le soutien voulu.
Parallèlement à cela, on fait tout de même le nécessaire pour monter la preuve requise, notamment au moyen d'interrogatoires ou de la trousse de prélèvement en cas de viol. On conserve cette preuve pour le cas où il y aurait des suites à donner.
Les Américains ont pu constater qu'environ le quart, soit près de 25 %, des victimes qui peuvent ainsi se manifester et simplement demander le soutien dont elles ont besoin finissent par passer du signalement restreint au signalement non restreint, c'est-à-dire qu'elles permettent ultérieurement qu'une enquête soit déclenchée.
Nous espérons pouvoir faire un peu la même chose au Canada. Il nous faut donc recueillir tous les éléments de preuve, et nous collaborons pour ce faire avec nos collègues de la police militaire.
:
Je vous remercie de votre question.
C'est une immense somme de données et de travail, mais je vais essayer de tout résumer.
Chaque fois que nous envisageons une opération, que nous envisageons d'intervenir dans une zone d'opérations, quelle qu'elle soit, des objectifs militaires sont en jeu. L'analyse comparative entre les sexes plus garantit en quelque sorte que tous les éléments vulnérables de la population seront pris en considération dans ce contexte.
Autrement dit, si notre évaluation du défi militaire qui nous attend ne tient pas compte des éléments de la population qui sont souvent dissimulés, en particulier dans un environnement de contre-insurrection ou dans un environnement où nous essayons d'instaurer les conditions nécessaires au rétablissement de la gouvernance, les chances qu'une évolution se produise... Essentiellement, nous tentons d'instaurer les conditions qui permettront le rétablissement du tissu social, politique et économique. C'est l'une des principales tâches des militaires. Si l'on néglige cet aspect, on risque non seulement de causer du tort à la population vulnérable, mais également de ne pas résoudre certains des facteurs qui sont à l'origine même du déchirement de la société ou de l'insurrection.
Nous l'avons appris en Afghanistan. Dans des pays comme celui-là, on n'interagit habituellement qu'avec une partie de la population, soit les hommes, et souvent un petit groupe d'hommes qui parlent anglais. Si vous allez dans un pays déchiré par une crise nationale, qui est en guerre depuis 30 ans, qui souffre terriblement et qui arrive en pied de liste pour tous les indices de développement humain de l'ONU, et que vos seuls interlocuteurs sont des hommes qui parlent anglais, vous n'avez probablement pas affaire au groupe le plus vertueux ou démuni de la société.
Nous avons appris très vite que pour être un facteur positif dans la résolution de la crise militaire en situation de contre-insurrection ou dans toute situation impliquant la population, il faut prendre en considération la société civile et les enjeux qui sont incarnés par ses éléments vulnérables.
Pour ce qui est de l'avenir, je vais vous donner un exemple concret.
Pensons à ce qui arrivera en Irak dans les mois et les années à venir maintenant que la coalition se concentre sur les opérations nécessaires pour libérer Mossoul du groupe État islamique, qui contrôle cette ville de 750 000 habitants depuis 14 ou 17 mois. Sa reconquête par les forces de sécurité irakiennes s'annonce très ardue.
J'estime que le rôle d'assistance qui nous est confié dans le cadre de notre mission visant à fournir de la formation, des conseils et de l'assistance devrait comprendre l'aide humanitaire. Nous ne savons pas tout et c'est l'une des raisons pour lesquelles les forces locales devraient faire le travail elles-mêmes. Elles doivent analyser la situation, déterminer comment libérer cette ville et, ultimement, comment l'aider à subsister, y compris les éléments vulnérables de sa population. Cela va s'avérer crucial. Nous en verrons la manifestation concrète dans les opérations militaires de la coalition lorsqu'elle sera confrontée à l'exode des non-combattants et des réfugiés.
Quel sera le meilleur moyen d'intervenir? Comment anticiper le sort de la population entre les mains du groupe État islamique lorsqu'elle voudra s'en aller, lorsque les boucliers humains essayeront de fuir? Comment préparer notre intervention, étant donné que la population vulnérable risque d'être victime de l'utilisation abondante d'armes chimiques tant que la dernière bataille n'aura pas été livrée? J'essaie de vous donner une idée de ce qui pourrait arriver.
Tout cela pour dire que nous comprenons mieux désormais — nous avons beaucoup appris de notre expérience avec l'ONU en Afghanistan et maintenant en Irak. Ces conflits ne se terminent pas comme ceux où deux forces militaires s'affrontent, l'une ressort victorieuse et il ne reste plus qu'à reconstruire. Ce n'est plus comme ça. Maintenant, tout se passe dans la population, elle court un réel danger.
Enfin, la participation future du Canada pourrait comprendre, comme c'est le cas en Irak, des mesures destinées à aider les pays à retrouver ou à maintenir la stabilité, qu'il y ait ou non une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU. Si l'on fait appel à notre aide, nous avons des outils habilitants, à commencer bien sûr par les Canadiens qui saisissent non seulement la notion de conflit, mais également celle de pratiques exemplaires.
L'équipement, c'est bien, mais les gens, ils sont indispensables. Nous obtiendrons de meilleurs résultats si les membres des Forces armées canadiennes sont convenablement équipés, que ce soit pour intervenir aux côtés de l'ONU ou dans le cadre d'une opération de sécurité ou même d'une opération comme celles menées par les forces de sécurité irakiennes — nous leur offrons du soutien dans ce domaine et les aidons à prendre en compte la population vulnérable dans le contexte de leurs opérations. L'idée, ce n'est pas nécessairement de rendre la solution militaire rapide et facile; c'est difficile, et d'ailleurs ce qui compte le plus, c'est ce que nous laissons derrière nous. L'opération militaire doit améliorer les choses. Cette politique est l'un des moyens d'y arriver.
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Je vous remercie de votre question, et je vous remercie de votre service, d'avoir entraîné ce peloton. C'est très bien. Je vais voir comment vous vous êtes débrouillé et je vous en informerai.
Le taux actuel est de 15 %. Notre objectif, comme officiers supérieurs des forces armées, c'est une hausse de 1 % par année pour les dix prochaines années. Je pense que nous étions déjà en avance sur beaucoup de nos alliés lorsqu'on a commencé à s'intéresser au pourcentage de femmes dans les forces armées.
Nous avons pris des mesures pour attirer et retenir les femmes, mais ce n'est peut-être pas assez. Comme je l'ai dit, j'ai ordonné une hausse de 1 % par année pour les dix prochaines années, l'objectif étant d'atteindre 25 %.
En soi, c'est assez draconien si l'on considère ce qu'il faudra faire pour y arriver. Je pense que les forces armées devront recruter plus de 1 400 femmes.
Je ne doute pas que les candidates viendront. La question est plutôt de savoir comment nous allons valoriser les recrues potentielles. À mesure que passeront les années et les décennies, que la guerre se transformera, ainsi que le genre de travail nécessaire, la proposition de valeur va s'effacer graduellement. Le contexte parlera de lui-même.
Vous avez évoqué un objectif de 50 %. Je ne sais pas si c'est ce que vous avez compris, mais nous visons 25 %. Et ce n'est pas un plafond. Si l'on dépasse 25 %, tant mieux.
Je crois que c'est ambitieux. Ma commandante du personnel militaire a beaucoup de pain sur la planche, compte tenu du chemin parcouru et du fait que nous souhaitons évoluer à un rythme beaucoup plus rapide qu'auparavant tout en apprenant de nos erreurs pour mieux réussir.
La pire chose que nous pourrions faire serait de piloter cette évolution de telle sorte que les 25 % deviennent difficiles à atteindre. Certains m'ont conseillé de réduire mon objectif à 15 % pour qu'on soit plus près de la cible. Il n'en est pas question. J'ai toujours visé 25 % et je ne démords pas de mon objectif.
Cependant, cela demandera beaucoup d'efforts. Nous aurons besoin de ressources et il faudra changer la manière dont nous recrutons. Nous devrons nous doter d'une stratégie de rétention qui admet les diverses formes que peut prendre le service et les divers cheminements de carrière possibles. Il faudra aussi reconnaître que les modèles que nous avons utilisés et intégrés — dont certains remontent aux années 1950 et 1960 — ne seront plus adéquats. Ils reposent sur des politiques qui sous-tendent beaucoup des politiques qui ont un impact sur les ressources et sur la manière de rémunérer les gens, et ainsi de suite.
Beaucoup dépendra de moi, et certaines choses dépendront de mes collègues au gouvernement. Cependant, je vous assure que nous allons essayer et je crois bien que nous réussirons.
Vous me demandiez dans votre première question si je croyais que nous en faisions assez, et vous avez fait allusion dans votre préambule aux agressions sexuelles et au harcèlement. Je pense que vous avez dit que—
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La responsabilité revient au commandant, à moi, au bout du compte, peu importe le secteur de l'opération que nous entreprenons. L'une des parties les plus fortes de notre culture, c'est l'idée selon laquelle les commandants doivent être responsables de chaque décision qu'ils prennent et les résultats des opérations.
Notre mentalité est axée sur la planification. C'est au centre de notre ADN. Nous planifions, et nous exécutons les opérations avec les mêmes personnes avec lesquelles nous faisons la planification. Alors que nous intégrons l'analyse comparative entre les sexes plus dans le processus, nous traiterons ce volet de la même façon que nous traitons la gestion des incendies, les manoeuvres et la protection contre tous les dangers. Cela deviendra une fonction de combat, une action, l'un des facteurs principaux.
Lorsque nous examinons le tableau général du renseignement d'un endroit dans lequel nous interviendrons, nous examinons le terrain, la topographie, l'infrastructure, et nous connaissons l'ennemi. En Afghanistan, nous avons appris à connaître un plus grand ensemble de personnes, les civils, de sorte que nous ne connaissions pas que le côté problématique de la situation; nous avons commencé à connaître d'autres acteurs dans cet espace. Il s'agit de forces amies qui ne sont pas les nôtres, qui proviennent d'un autre pays: civils, société civile, ONG, etc. Le commandant, et j'avais ce rôle en Afghanistan, doit prendre tout cela en considération lorsqu'il envisage de mener une opération. On ne se concentre pas que sur l'ennemi; il faut bien comprendre ce qu'on va faire à la suite d'une action militaire, et ce qui en résultera. Qu'a-t-on essayé d'améliorer? S'il ne s'agit que de détruire une partie, du côté de l'ennemi, c'est bien, mais on ne peut pas le faire d'une façon irresponsable qui se traduirait en quelque sorte par des pertes civiles ou qui empêcherait la population civile de se relever par la suite, de sorte que nous tenons nos commandants responsables des tâches que nous leur avons données dans le cadre des opérations. Nous sommes très bons sur le plan de l'évaluation, parce que nous planifions et exécutons le travail, et nous avons aussi une solide fonction d'évaluation; avez-vous accompli ce que nous vous avons demandé d'accomplir?
Il y a un autre ensemble de tâches concernant le fait de diriger les forces comme une institution. En étant une institution au Canada, qui est respectée, les responsabilités relèvent de gens comme la générale Whitecross et moi, les dirigeants des forces armées, pour non seulement mener les opérations de la bonne façon dans cette chaîne de commandement, mais aussi diriger l'institution de façon judicieuse et correcte, et tenir compte de tous les aspects de l'analyse comparative entre les sexes et du but visé par le plan d'action en matière de paix et de sécurité afin que notre institution soit un bon milieu de travail pour tout le monde. À mon avis, être responsable et être tenu responsable à cet égard se situe, et doit se situer, au même niveau que tous les autres objectifs que nous atteindrons dans cette institution, de sorte que cela ne puisse pas être enterré. Cela ne peut être considéré comme distinct de ce que nous faisons. Il faut que ce soit un élément fondamental de nos responsabilités.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de nous avoir invitées à témoigner devant vous aujourd'hui.
Mon exposé repose sur mon rôle de chef adjointe du secrétariat de l'étude mondiale sur la mise en oeuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité, qui a été entreprise l'an dernier à l'occasion du 15e anniversaire de la résolution 1325. Il repose également mon rôle actuel de chef adjointe de la Section de la paix et de la sécurité d'ONU Femmes.
Je veux dire tout d'abord qu'en tant que Canadienne et dirigeante d'ONU Femmes relativement aux travaux du Conseil de sécurité, j'ai été extrêmement fière de faire partie du public, il y a quelques semaines, lorsque le premier ministre a annoncé devant la Commission de la condition de la femme que le Canada présenterait sa candidature pour obtenir un siège au Conseil de sécurité des Nations unies dans cinq ans.
Bien entendu, le Canada était membre du Conseil de sécurité lorsque la résolution a été adoptée en 2000. À l'époque, c'était la première fois dans l'histoire que l'organisme de paix et de sécurité le plus important au monde reconnaissait non seulement le rôle essentiel des femmes, mais aussi l'égalité des sexes en ce qui concerne la paix et la sécurité internationales.
Au cours des 16 dernières années, le Canada a présidé le Groupe des amis des femmes, de la paix et de la sécurité à New York, dans sa mission, et depuis deux ans, à notre demande, il préside le Groupe des amis de l'Étude mondiale sur la résolution 1325, et j'en suis extrêmement reconnaissante.
L'ONU a entrepris trois études sur la paix et la sécurité l'an dernier portant respectivement sur les opérations de paix, l'architecture de la consolidation de la paix et l'examen des 15 ans de l'enjeu des femmes, de la paix et de la sécurité. La nôtre est la seule des trois pour laquelle il n'y avait pas de personnel ni de ressources, ce qui veut dire que le soutien des États membres et le leadership exercé par le Canada avaient une importance particulière.
Pour l'examen du plan d'action national actuel et ce qui est prévu dans le prochain qui sera entrepris, ces consultations et l'annonce du Canada ne pouvaient pas tomber dans un moment plus opportun. À l'échelle internationale, nous faisons face à des difficultés profondes et complexes qui sont uniques dans l'histoire mondiale récente sur le plan de la paix et de la sécurité.
Au cours des 10 dernières années seulement, le nombre de guerres civiles a triplé. Le nombre de personnes déplacées dans le monde n'a jamais été aussi élevé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Une grande partie des besoins humanitaires son causés ou exacerbés par des conflits et ils ont atteints 20 milliards de dollars. Tous ces facteurs sont exacerbés par le changement climatique, la montée de l'extrémisme violent et les pandémies mondiales qui ont des aspects liés à la sécurité.
Comme je l'ai mentionné, ce n'est pas une coïncidence si, l'an dernier, l'ONU a entrepris trois études sur la paix et la sécurité, dont celle portant sur les 15 ans années de l'enjeu des femmes, de la paix et de la sécurité. On sent clairement que nos institutions et les solutions traditionnelles ne sont pas conçues pour le contexte actuel, mais le moment est également opportun, puisque le Canada est une figure de proue concernant un programme de plus en plus reconnu comme un outil crédible pour renforcer nos efforts de paix et de sécurité.
L'an dernier, pour guider l'étude, nous avons rassemblé l'équivalent de plus d'une décennie de recherches et de pratiques et y avons ajouté des consultations et de nouveaux travaux de recherche commandés. Le message qui est clairement ressorti du processus d'examen, c'est que nous avons des données qui montrent hors de tout doute qu'il est essentiel que les femmes participent de façon importante afin que nous améliorions notre efficacité opérationnelle dans le cadre de l'édification d'une paix durable et d'une sécurité inclusive.
Nous savons que lorsque le nombre de femmes au sein des effectifs de maintien de la paix dans les troupes de l'ONU est élevé, cela accroît la crédibilité de nos missions de maintien de la paix sur le terrain. Il en résulte une augmentation du nombre de signalements de crimes sexuels et à caractère sexiste. Cela augmente notre capacité d'accéder aux collectivités que nous voulons protéger et, en fait, entraîne une diminution du nombre de cas d'exploitation et de violence sexuelles au sein des Casques bleus.
Lorsque nous mettons la priorité sur l'égalité des sexes dans notre aide humanitaire, cela accroît l'efficacité de cette aide, non seulement pour les femmes et les filles, mais aussi pour les hommes et les garçons, pour toutes les communautés. Lorsque nous ciblons des femmes pour le redressement économique après conflit, nous constatons qu'il y a des répercussions sur les familles et les communautés, que la croissance économique s'accélère et que la situation se stabilise plus rapidement.
Nous avons maintenant des données probantes, quantitatives et qualitatives, en ce qui a trait à une participation véritable des femmes aux processus de paix et à la transition. Sur le plan quantitatif, nous savons maintenant qu'une participation importante des femmes à ces processus accroît la durabilité de la paix de 30 % sur 15 ans. Parmi les 40 processus qui ont été examinés, nous constatons que la participation importante des femmes se traduit par des discussions, la mise en oeuvre d'ententes et une paix durable.
Nous avons cherché à comprendre les raisons qui pourraient expliquer cette situation. Lorsque nous avons commencé à examiner différentes études de cas, elles sont devenues assez évidentes. Dans l'exemple du Soudan du Sud, nous avons surtout deux intervenants assis à une table pour discuter de questions liées au cessez-le-feu immédiat, aux arrangements en matière de sécurité, au territoire, à l'accès à la richesse créée par le pétrole et aux positions du gouvernement, et nous obtenons un accord qui répond aux besoins de ces deux intervenants principaux. Ce qu'on ne retrouve pas à la table, c'est l’ensemble des groupes concernés, les communautés qui ont été touchées par le conflit et qui ont besoin de protéger les accords de paix à long terme.
Encourager la participation active des femmes dans ces processus permet de représenter plus de personnes concernées, de changer la dynamique à la table de négociations de paix et d'assurer, comme je l'ai mentionné, la conclusion des pourparlers et la mise en oeuvre des accords.
Toutefois, 15 ans après l'adoption de la résolution 1325, nous savons que les femmes ne représentent toujours que 3 % du personnel de l'ONU chargé du maintien de la paix. De plus, des recherches menées par l'OCDE pour l'étude mondiale révèlent que moins de 2 % des fonds attribués aux contextes fragiles servent à promouvoir les droits des femmes et à répondre à leurs besoins. Seulement une fraction de ces 2 % est remise aux organisations de femmes qui oeuvrent aux premières lignes d'intervention dans ces pays.
Malgré l'écart entre ce que nous savons et ce que nous semblons pratiquer, le 15e anniversaire de la résolution 1325, l'an dernier, nous a fourni des outils importants pour commencer à combler cet écart. Un grand nombre d'entre eux ont été mentionnés dans la résolution 2242 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui constitue la huitième résolution sur les femmes, la paix et la sécurité à être adoptée.
En ce qui concerne les sources de financement — je vais seulement mentionner quelques-unes —, nous avons maintenant l'instrument d'accélération mondial pour les femmes, la paix, la sécurité et l'engagement humanitaire. Il s'agit d'un fonds d’affectation spéciale de l’ONU établi avec l'aide de donateurs, de l'ONU et de la société civile en particulier, afin d'acheminer des fonds aux contextes en situation de crise et directement aux organisations de femmes sur le terrain.
Le Conseil de sécurité a maintenant un nouveau mécanisme, à savoir le groupe informel d'experts sur les femmes, la paix et la sécurité. La première réunion de ce groupe s'est tenue en février et se concentrait sur le Mali. Le représentant spécial adjoint du Secrétaire général à Bamako s'est joint à nous par vidéoconférence pendant 90 minutes pour parler au Conseil de la situation des femmes à Bamako, de la mise en oeuvre de l'accord de paix, de l'analyse concrète sur le conflit entre les sexes et de ce que faisait la mission pour accroître la participation des femmes et les protéger contre les crimes sexuels violents.
La résolution 2242 se concentre également sur les moyens concrets de lutter contre l'extrémisme violent et de le prévenir, et formule quelques recommandations concrètes à cet égard. L'une de ces recommandations, qui se fait l'écho du rapport sur les femmes, la paix et la sécurité publié par le secrétaire général en octobre, demande l'augmentation du financement pour les initiatives liées à l'égalité entre les sexes et à l'émancipation des femmes dans le cadre de nos efforts de lutte contre le terrorisme. Plus précisément, le rapport du secrétaire général demande un objectif de 15 % pour le système de l'ONU; ONU Femmes fait maintenant la promotion de cette mesure et encourage les États membres à l'adopter.
Dans le cadre de l'examen du plan d'action national, j'aimerais encourager le Canada à examiner les pratiques exemplaires et les leçons décrites dans le chapitre sur les plans d'action nationaux dans l'étude mondiale. On parle notamment de l'importance de mener des consultations à grande échelle, du rôle de la société civile, du financement réservé et de l'inclusion de mesures de surveillance et d'évaluation appropriées dès la conception.
Il est important que le nouveau plan d'action national reflète la situation actuelle à l'échelle mondiale. À cet égard, j'aimerais encourager le Canada à devenir un chef de file, surtout en ce qui concerne la prévention de l'extrémisme violent, comme le mentionne la résolution 2242.
La montée de l'extrémisme violent à laquelle nous assistons indique peut-être plus clairement que toute autre forme de conflit la façon dont l'insécurité et la violence varient en fonction du sexe. Ces groupes extrémistes ciblent les droits fondamentaux des femmes et des filles d'exister, d'être en santé, d'avoir accès à l'éducation et de participer à la vie publique, ainsi que leurs droits relatifs à leur corps. Mais ces groupes utilisent également les stéréotypes sexuels dans leurs efforts de radicalisation et de recrutement et se servent de jeunes filles pour mener des attentats-suicides à la bombe, comme le fait de plus en plus Boko Haram.
Notre bureau du Mali a récemment obtenu des preuves qui démontrent qu'on se sert des médias sociaux pour envoyer aux jeunes vivant dans des villes du Nord des messages contre l'égalité des sexes et contre les droits des femmes, afin de préparer le terrain aux efforts de radicalisation et de recrutement, une situation qui a été communiquée au Conseil de sécurité pendant la première réunion du groupe informel d'experts, qui portait sur le Mali.
En prévision des cinq prochaines années, j'aimerais encourager le Canada à mettre la question des femmes, de la paix et de la sécurité au centre de sa campagne pour le Conseil de sécurité. Une résolution qui a été acceptée de justesse par le Conseil il y a 16 ans a dépassé sa fonction initiale de programme sur les droits pour devenir peut-être l'un des outils les plus importants dont nous disposons pour relever les défis liés à la paix et à la sécurité qui se posent aujourd'hui. Le Canada, en sa qualité de membre fondateur de ce programme, est bien placé pour diriger la réalisation de son plein potentiel.
Merci.
Je peux seulement me faire l'écho de ma collègue pour vous dire à quel point je vous suis reconnaissante de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. J'aimerais également mentionner à quel point c'était agréable d'avoir le ici, car il fait preuve d'un grand leadership à l'égard de cet enjeu. Nous sommes toutes les deux des Canadiennes devant vous, et nous avons donc une double allégeance dans ce cas-ci.
Permettez-moi de vous donner un peu de contexte sur les travaux du PNUD, car mon exposé portera sur le type de travail que nous accomplissons. Je vous donnerai un aperçu de ce que nous voyons sur le terrain.
Le PNUD est l'organisme principal de développement des Nations unies. Nous travaillons dans presque 170 pays et territoires partout dans le monde. Notre mandat vise toute la gamme des défis liés au développement, des défis liés à la croissance et au développement durable à ceux liés à la gouvernance et au maintien de la paix, en passant par les défis liés au climat et à la résilience en cas de catastrophe. Nous sommes également l'organisme principal des Nations unies en ce qui concerne les efforts de rétablissement après un conflit ou une catastrophe.
Nous aidons, partout dans le monde, des pays à mener des élections libres et justes, à entreprendre des processus politiques constitutionnels et des réformes juridiques, et nous collaborons activement avec d'autres organismes de l'ONU, notamment ONU Femmes, pour renforcer la primauté du droit et bâtir des institutions judiciaires dans les pays en crise et dans les pays qui ne sont pas en crise.
Pour vous donner un peu de contexte, nos efforts liés à la question de l'égalité entre les sexes et de l'émancipation des femmes sont au coeur de tous nos travaux. Dans l'ensemble, l'élément le plus important de nos travaux liés aux femmes, à la paix et à la sécurité, c'est le pilier du programme caractérisé par la participation, et surtout les efforts pour promouvoir la participation des femmes dans les processus de gouvernance suivant les crises et dans les processus de gouvernance provisoire. Cela signifie veiller à ce que les femmes participent à l'élaboration de la constitution, aux élections et à l'administration publique.
Nous savons que les périodes de transition suivant les conflits offrent des occasions uniques d'accélérer les progrès des femmes sur le plan de la participation à la vie politique. Nous avons vu cela se produire dans plusieurs pays. Un examen du programme de la résolution 1325 révèle qu'il s'agit d'un domaine dans lequel quelques progrès ont été réalisés — ce n'est pas suffisant, mais des progrès ont été accomplis.
Malheureusement, comme Nahla l'a souligné, les progrès sont moins importants en ce qui concerne le rôle des femmes dans les processus de paix officiels. Je ne vous donnerai pas de statistiques à cet égard, car nous les avons déjà entendues. Nous observons que de modestes progrès ont été réalisés dans les récents processus de paix en Colombie et aux Philippines, mais à mon avis, c'est un domaine sur lequel l'attention mondiale devra être dirigée à l'avenir.
Le Canada, avec d'autres États membres, peut utiliser plusieurs voies diplomatiques, notamment les voies bilatérales et multilatérales, et il joue un rôle important lorsqu'il s'agit d'exhorter les parties aux négociations à inclure les femmes dans leurs délégations, à trouver et à appuyer les femmes leaders, et à exiger que les négociations parrainées à l’échelle internationale créent et financent des processus favorisant la participation des femmes.
J'aimerais aborder la question de la violence sexuelle en temps de conflit. Aujourd'hui, nous disposons d'un cadre juridique international et normatif beaucoup plus complet pour traiter les questions liées à la violence sexuelle. Des organismes comme les Nations unies s'efforcent certainement davantage de fournir des services complets aux victimes et de bâtir les structures dont nous avons besoin pour mettre fin à l'impunité, notamment la formation offerte aux agents de police et aux militaires dans ces pays, et l'appui aux enquêtes et aux mécanismes de justice transitionnelle. Toutefois, malgré l'attention mondiale accrue à cet égard, le nombre d'infractions dépasse largement les condamnations. La justice ne prend pas des années, mais des décennies pour s'installer.
Ce que je demande vraiment, c'est que nous redoublions d'efforts et que nous investissions davantage dans les mesures préventives. Même si un programme de prévention exige des investissements plus importants dans les systèmes de détection précoce et dans la diplomatie préventive, il faut surtout augmenter les investissements dans les efforts visant à éliminer les inégalités structurelles et sous-jacentes qui sont à la base des conflits. Cela signifie qu'il faut augmenter les investissements dans les programmes de base visant l'égalité entre les sexes non seulement dans des contextes fragiles et touchés par des conflits, mais également dans des contextes plus stables.
Nous savons que lorsque les femmes sont instruites, qu'elles ont accès à des ressources et à des possibilités et que leurs droits politiques, économiques et sociaux sont assurés, elles sont moins vulnérables à la violence sous toutes ses formes.
Il y a un nombre croissant d'études qui démontrent que la sécurité des femmes est l'un des indicateurs les plus fiables de la paix qui règne dans un État. Nous l'avons vu notamment dans l'étude mondiale. Par conséquent, il est essentiel d'investir dans l'autonomisation des femmes et des filles dans le cadre de la prévention des conflits.
Ce sont les secteurs dans lesquels le Canada a l'une des meilleures expertises à offrir, compte tenu de son travail fondamental en matière d'égalité entre les sexes partout dans le monde et de ses efforts dans les domaines de la santé génésique et des droits connexes, de l'éducation et l'autonomisation économique et politique. N'empêche que ce type de soutien demeure sous-financé. Quel que soit le secteur, on n'investit pas suffisamment dans l'habilitation des femmes.
J'aimerais maintenant m'attarder aux nouveaux défis contextuels, dont ma collègue a parlé, qui ont été mis à l'avant-plan ces dernières années.
Tout d'abord, sachez que les crises, qu'elles découlent de conflits ou de phénomènes météorologiques, causent des déplacements profonds et durables et des tendances migratoires qui constituent des obstacles à l'avancement des femmes et des filles dans les collectivités. Si on prend l'exemple de la crise en Syrie, on a observé une augmentation de 12 % du nombre de mariages précoces et forcés de fillettes syriennes. En 2011, si je ne me trompe pas, on avait prévu que ce taux passerait à 32 % en 2014. Chose certaine, on peut affirmer sans se tromper que ce taux a augmenté et qu'on l'a probablement sous-estimé.
Nous savons que plus de deux millions d'enfants syriens ne fréquentent pas l'école et que, dans de nombreux pays hôtes, les femmes et les filles syriennes n'ont pas les papiers nécessaires pour accéder aux services ou même travailler. Il faut à tout prix s'assurer que ces femmes et ces filles sont instruites, occupent un emploi et participent aux décisions qui ont une incidence sur leur vie quotidienne, de manière à renforcer leur résilience et à réduire leur vulnérabilité à la violence.
Nous devons examiner la violence non seulement dans le but d'intervenir et de protéger les femmes, mais aussi de réduire leur vulnérabilité. Il est également vital d'investir dans l'autonomisation de ces femmes et de ces filles pour qu'elles puissent devenir les leaders de demain ou faire partie de la société à partir de laquelle nous bâtirons une nouvelle Syrie. Si nous voulons concilier le développement et l'aide humanitaire, ce qui retiendra particulièrement l'attention mondiale lors du premier Sommet humanitaire mondial, nous devons investir dans ce que j'appelle le développement dans les contextes humanitaires. Ce n'est pas ce que l'on voit à l'heure actuelle. Parmi les autres défis à surmonter, mentionnons la montée et la propagation de l'extrémisme violent, qui a été évoqué plus tôt; le nombre toujours croissant d'acteurs non étatiques engagés dans le conflit syrien; et la nature prolongée du conflit et de la reconstruction.
Nous devons reconnaître que les groupes tels que l'EIIS et Boko Haram se servent de la violence sexuelle comme tactique délibérée et centrale pour réprimer les populations et détruire les fondements sociaux nécessaires à tout redressement. Il est difficile de savoir combien de temps dureront ces conflits, malgré l'arrêt des actes de violence. La progression du conflit vers la cessation des hostilités puis la consolidation de la paix n'est certes pas linéaire. Il faut reconnaître que la prévention de la violence sexuelle est un élément fondamental et prioritaire de la lutte contre l'extrémisme violent et de la prévention des conflits.
Que peut faire le Canada? Le Canada peut certainement se servir de l'élaboration de son prochain plan d'action national pour réfléchir à la prévention des conflits dans ce nouveau contexte et placer l'égalité entre les sexes au coeur des stratégies. Le programme global en matière de prévention des conflits doit être axé sur la façon dont on peut édifier des sociétés inclusives en fonction des droits sociaux, politiques, économiques et culturels. Le Canada est un bon exemple d'une société inclusive.
Lorsque j'ai demandé aux intervenants sur le terrain ce qu'ils souhaitaient que je vous dise aujourd'hui, ils n'ont cessé de me répéter que le Canada doit, plus que jamais, exercer son leadership afin de proposer des solutions pacifiques à ce qui est principalement des interventions militaires. Les gens s'attendent à ce que le Canada intervienne et s'engage dans des initiatives bilatérales et multilatérales en matière de diplomatie, par les voies officielles et officieuses, afin de promouvoir la sécurité et la dignité humaines grâce à des investissements liés à l'ensemble des droits de la personne. On se tourne vers des pays comme le Canada pour trouver un moyen de freiner la tendance alarmante des violations perpétrées à l'endroit des défendeurs des droits de la personne, qui sont réduits au silence par la violence ou les menaces.
On a beaucoup parlé dans les médias des meurtres qui ont été commis récemment en Libye et au Honduras. Sachez que les femmes font face à la violence tous les jours lorsqu'elles essaient de se faire élire ou de dénoncer la corruption au sein de leurs collectivités. Il s'agit d'un véritable problème qui réduit la capacité des acteurs locaux d'amener des changements dans leurs collectivités.
Enfin, j'aimerais souligner que pour faire bouger les choses, il est nécessaire d'établir des partenariats avec les organisations de la société civile qui travaillent sur le terrain. Ces organisations sont en première ligne pour contrer la radicalisation et offrir des solutions de rechange aux jeunes et aux personnes vulnérables en identifiant et en habilitant les leaders que nous voulons voir prendre des décisions.
Chaque fois que nous avons vu des femmes participer efficacement aux processus démocratiques, c'était grâce à ces groupes de la société civile. Toutefois, comme on la dit plus tôt, leur financement est insuffisant pour leur permettre de mener à bien leurs activités et d'avoir véritablement une incidence.
Pour conclure, je ne suis pas sûre si, à Ottawa, vous pouvez voir tout l'impact que l'annonce d'un nouveau gouvernement paritaire, avec la participation du à la CCF, a eu partout dans le monde. Le monde entier a les yeux tournés vers le Canada. On s'attend à ce que notre pays joue un rôle de leadership dans les domaines de l'autonomisation des femmes, de la paix, de la sécurité et de l'égalité entre les sexes.
Je pense que ce nouveau plan d'action donne au Canada une occasion formidable de répondre à ces attentes, c'est-à-dire de passer de la parole aux actes, mais il doit intégrer une approche à l'appui des femmes, de la paix et de la sécurité qui s'aligne sur le programme en matière de développement et de politique étrangère du gouvernement.
Merci beaucoup.
Merci à nos témoins d'être ici aujourd'hui. J'ai quelques questions à vous poser.
Tout d'abord, je tiens à dire que j'ai apprécié lorsque Mme Valji a parlé de l'importance de notre candidature au Conseil de sécurité, et je crois que nous aimerions tous que le Canada y occupe un siège. Toutefois, nous espérons que le Canada ne sacrifiera pas nos valeurs pour atteindre son objectif et qu'il n'en fera pas trop pour plaire à des régimes qui ne respectent pas nos valeurs ou les droits de la personne.
J'aimerais poser à Mme Valji une question qui m'intéresse vivement.
En Occident, lorsqu'on parle des femmes dans les zones de conflit, on a tendance à tout de suite penser à leur détresse et à leur impuissance. On croit souvent à tort qu'elles sont complètement démunies et qu'elles n'attendent que notre aide. Toutefois, il faut savoir que dans bien des zones de conflit, il existe des réseaux de femmes fortes qui résistent à l'oppression; ce sont peut-être des réseaux clandestins, mais il s'agit d'identifier ces réseaux et de collaborer avec eux.
Je lisais récemment ce qu'a écrit Elaheh Rostami-Povey au sujet de la situation qui sévit en Afghanistan. J'aimerais lire cette citation, que je trouve intéressante:
Comme nous l'avons vu, un grand nombre d'enseignantes et de professeures d'université ont enseigné aux filles, aux jeunes femmes et à certains garçons dans leurs quartiers.
Cela décrit bien la situation sous le régime des talibans.
Les résidences de ces femmes possédant des compétences particulières sont devenues des maisons communautaires, financées et gérées entièrement par des femmes, qui s'adressaient surtout aux filles et aux femmes, mais aussi aux garçons. De bouche à oreille, les femmes ont répandu la nouvelle au sujet de ces écoles secrètes. Elles cachaient donc leurs livres, leurs cahiers et leurs crayons sous leur burka. Elles ont risqué leur vie, mais elles ont pu aller à l'école tous les jours.
J'ai trouvé cette description très intéressante. En Occident, on croit à tort que toutes ces femmes sont impuissantes face au régime des talibans. J'aimerais donc que vous me disiez comment nous pourrions identifier ces réseaux de femmes, qui sont souvent très opprimées, et collaborer avec elles pour nous assurer qu'elles tirent parti de toutes les ressources à leur disposition.
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Je vais commencer en parlant de la candidature du Canada au Conseil de sécurité. Encore une fois, je crois que si le thème des femmes, de la paix et de la sécurité est au coeur de la demande du Canada, il sera extrêmement important de joindre le geste à la parole en ce qui a trait à ces valeurs, car cela va donner le ton. Nous sommes rendus à un point où nous en avons assez d'entendre des belles paroles; il est maintenant temps de passer aux actes.
En octobre dernier, lors du 15e anniversaire de la résolution du Conseil de sécurité, on a tenu le plus grand débat ouvert de l'histoire du Conseil de sécurité, non seulement sur les questions des femmes, de la paix et de la sécurité, mais aussi en général. Il y avait 112 conférenciers inscrits. Tout le monde a souligné l'importance de ce programme, mais très peu d'entre eux avaient pris des mesures concrètes. Voilà donc l'occasion de bien établir ce programme et de fixer la norme.
Pour ce qui est du rôle des femmes, je suis tout à fait d'accord avec vous. À ONU Femmes, nous nous sommes beaucoup concentrés sur la participation et le leadership des femmes et la façon dont nous pouvons les appuyer en reconnaissant qu'il y a d'importants éléments de protection dont il faut tenir compte. L'insécurité et la violence auxquelles les femmes sont confrontées, que ce soit pendant le conflit ou après, minent leur capacité de prendre part au redressement économique de leur pays, aux élections post-conflit, etc., comme Randi l'a mentionné. Par conséquent, il y a d'importants éléments de protection qui sous-tendent la participation, et l'ensemble du programme doit en tenir compte.
Cependant, j'estime qu'il faut accorder une plus grande attention au rôle que les femmes peuvent jouer dans le maintien de la paix et de la sécurité. Pour revenir au Mali, lors de la réunion informelle du groupe d'experts sur les femmes, la paix et la sécurité du Conseil de la sécurité, on a notamment évoqué une récente étude qui a été réalisée dans le nord du Mali sur l'influence du genre sur la démobilisation et la réintégration d'ex-combattants. L'étude a révélé qu'il y avait une grande différence entre les hommes et les femmes. On leur a demandé ce qui les avait incités à prendre les armes, à se battre et à finalement revenir pour réintégrer la société. Parmi ces jeunes qui ont réintégré la société, 40 % ont dit avoir été influencés par leur mère. On oublie souvent le rôle que les femmes peuvent jouer dans ce type de sociétés.
On oublie aussi le fait que les femmes sont les premières à déceler les signes de radicalisation dans leur famille et sont aux premières lignes de la prévention des conflits. Il faut donc appuyer leur rôle.
J'aimerais vous donner un dernier exemple. Au Burundi, ONU Femmes et le fonds de consolidation de la paix appuient un réseau de plus de 500 médiatrices dans les collectivités du Burundi. Étant donné les tensions actuelles, ces femmes ont réussi, au cours des 18 derniers mois, à régler plus de 3 000 conflits à l'échelle des collectivités. Il s'agissait de conflits sociaux, familiaux et politiques. Elles ont empêché que ces conflits dégénèrent et se répercutent sur toute la population. Elles ont apaisé les tensions. Elles ont négocié la libération de prisonniers avec le gouvernement. On parle d'un groupe de 500 femmes qui réussissent à gérer les tensions au sein de bon nombre de leurs collectivités, alors j'estime que nous devons en faire beaucoup plus pour appuyer ces organisations de femmes sur le terrain.
C'est quelque chose que nous essayons de faire au moyen du nouveau mécanisme de financement commun. L'Instrument mondial d'accélération de l'action en faveur des femmes, de la paix, de la sécurité et de l'aide humanitaire est un mécanisme de financement permettant à la communauté internationale de diriger les fonds là où c'est nécessaire. En fait, cet instrument aide justement les femmes du Burundi à intensifier leurs efforts.
Je vais vous en donner quelques-uns, puis je vais ensuite céder la parole à Randi, parce que le PNUD se concentre davantage sur cet aspect de la justice.
Au cours des dernières années, le système des Nations Unies a pris un arrangement institutionnel en vue de réunir le PNUD et le DOMP au sein de ce qu'on appelle le centre de liaison mondiale en ce qui concerne la police, la justice et l'administration pénitentiaire. Ces organisations sont donc les personnes-ressources en matière de justice dans les situations de conflit.
ONU Femmes a affecté une personne à cette équipe afin de s'assurer qu'on tient compte du genre dans toutes les activités relatives à la primauté du droit de l'ONU à la suite d'un conflit. On veut notamment s'assurer que les femmes ont accès à la justice, s'attaquer aux crimes fondés sur le sexe et idéalement réserver un minimum de 15 % du financement aux initiatives qui appuient l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes. C'est une façon dont nous offrons du soutien. Nous avons également un programme mondial de justice transitoire dans le cadre duquel nous appuyons des commissions de vérité et des programmes de réparation, que ce soit au Mali, au Soudan du Sud ou en Colombie, alors qu'ils mettent en oeuvre leur processus.
Selon moi, l'une des initiatives les plus importantes pour ONU Femmes ces dernières années est sans doute sa collaboration avec le Canada, plus précisément avec Intervention rapide au service de la justice, un mécanisme de justice intergouvernemental qui a été créé par le Canada et la communauté internationale. Au cours des cinq dernières années, ONU Femmes s'est associée à cette initiative afin de mettre sur pied un sous-groupe d'enquêteurs sur les crimes sexuels et les crimes fondés sur le genre. Ce groupe a été très important, parce qu'il a permis à ONU Femmes d'affecter des experts à toutes les commissions d'enquête de l'ONU ainsi qu'à toutes les missions d'enquête qu'elle entreprend.
Toute la documentation au sujet des crimes qui sont survenus en Syrie résulte de cette initiative. Tout ce que nous savons à propos des crimes commis par le groupe Boko Haram en Libye et en Irak provient de nos missions d'enquête et de notre partenariat avec Intervention rapide au service de la justice.
L'an dernier, nous avons appuyé la Cour pénale internationale, ce qui a donné lieu à la première confirmation de toutes les accusations de violence sexuelle dans l'affaire Ntaganda. Le procureur en chef a indiqué que c'était directement attribuable au fait d'avoir un enquêteur sur place. Ce partenariat a été extrêmement important. Ce partenariat, qui est le fruit d'une initiative canadienne, nous a permis de travailler, en particulier, dans la région du Moyen-Orient, en Jordanie et en Irak, afin d'appuyer les premiers intervenants et de leur servir de mentor pour identifier les crimes sexuels et intervenir.
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Certainement. Je vous remercie pour votre question.
Il faut d'abord mentionner la relation entre l'égalité des sexes et l'extrémisme violent. Ces groupes ont une chose en commun, à savoir qu'ils s'opposent aux droits des femmes et à l'égalité des sexes. Nous avons observé que l'extrémisme violent, par conséquent, semble prendre racine plus facilement dans les communautés où il n'y a pas d'égalité entre les sexes.
Il est beaucoup plus facile de radicaliser et de recruter lorsque le principal objectif est de faire reculer les droits des femmes. Il est plus facile de radicaliser et de recruter dans un contexte où il n'existe aucun modèle féminin parmi la classe dirigeante politique, aucune mère ou soeur instruite, aucune dirigeante communautaire, etc. Il est important d'examiner le lien direct qui existe entre l'inégalité des sexes, la radicalisation et le recrutement.
Il faut également examiner le fait que, lorsque ces groupes prennent de l'ampleur, leurs premières cibles sont souvent les femmes et les filles. Lorsqu'ils s'opposent à l'habillement des femmes, à leurs déplacements, à leur éducation, à leurs soins de santé, etc., il s'agit s'un signal d'alarme auquel il faut porter attention.
Il y a aussi bien sûr la prévention. Cela dit, il faut faire très attention de ne pas faire de la femme une institution sécurisée; il faut plutôt protéger son milieu de vie et la protéger elle-même. Il y a eu des cas où les signaux d'alarme ont mené directement à l'intervention du système de justice pénale. Ce n'est peut-être pas une bonne chose de demander aux femmes de mettre leurs fils entre les mains du système de justice pénale parce qu'elles ont observé une radicalisation. Nous devons également protéger les femmes. Nous ne pouvons pas criminaliser ni sécuriser leurs milieux.
C'est pour cette raison qu'il est important de mettre en oeuvre la résolution sur les femmes, la paix et la sécurité en vue de contrer et de prévenir l'extrémisme violent. Cette résolution est axée sur les droits, l'égalité, la démilitarisation et la prévention. Ce sont sur ces aspects que nous devons travailler lorsque nous nous employons à prévenir l'extrémisme violent.
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De quelle façon est-ce organisé?
ONU Femmes préside le comité permanent de l'ONU sur les femmes, la paix et la sécurité. Le PNUD, le DOMP et le HCDH, les principales entités, siègent tous au comité permanent. Nous coordonnons tous nos efforts. Nous travaillons en étroite collaboration avec le DOMP en particulier, dans le cadre de deux initiatives.
La formation des Casques bleus en matière de prévention de la violence sexuelle est une initiative que nous avons entamée il y a quelques années et que nous avons lancée à titre de projet pilote dans 18 pays. Le DOMP est en train de donner la formation préalable au déploiement, et cela se passe très bien.
Nous avons entrepris une nouvelle initiative, qui consiste à former des femmes militaires. Nous avons mené un projet pilote dans trois pays et nous avons formé 120 femmes. Le DOMP nous a informés la semaine dernière que 75 % d'entre elles seront déployées très bientôt. Cela signifie que nous sommes en mesure d'accroître le nombre de Casques bleus féminins au sein des Nations Unies.
Le contexte est différent dans chaque pays. Dans les pays où nous avons des missions de maintien de la paix, la relation qui existe entre l'équipe des Nations Unies du pays et l'équipe de mission varie dans chaque cas. Dans certains contextes, elle est très positive, et dans d'autres, il peut y avoir des tensions et des difficultés à cause des mandats à exécuter, mais je crois que c'est aussi pour des raisons de capacité.
Le mandat en ce qui concerne les femmes, la paix et la sécurité et celui des missions de maintien de la paix sont complémentaires. Nous travaillons en étroite collaboration avec le DOMP sur le terrain également.
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J'ajouterais deux ou trois choses.
L'une des choses très importantes à faire, c'est utiliser la voix du Canada pour modifier le discours. Dans le passé, on prétextait qu'il n'y avait pas assez de femmes compétentes ou qu'il n'y avait pas de femmes prêtes à s'asseoir à la table des négociations. Nous pouvons vous donner de nombreux exemples de cela.
Je vais vous en donner un. Au Mali, lorsque la violence a éclaté dans le nord en 2012, la mairesse adjointe de Gao négociait avec les rebelles armés pour acheminer de l'aide humanitaire dans les camps. Lorsque la communauté internationale a proposé qu'elle s'assoie à la table des négociations, elle n'a pas été choisie, même si elle était une dirigeante politique, qu'elle avait participé directement à des négociations et qu'elle était respectée au sein de sa communauté. Ainsi, seuls des hommes ont pris part aux négociations. Nous avons observé ce genre de situation à maintes reprises.
Nous l'avons vu en Syrie également. Ce sont les femmes dans les localités qui négociaient avec les acteurs armés pour que l'aide humanitaire se rende à leurs familles et à leurs collectivités. Ce n'est que depuis quelques mois que nous avons réussi à obtenir un rôle pour les femmes dans le processus en Syrie, et nous voyons de quelle façon on y porte attention.
Un envoyé spécial, M. de Mistura, a commencé la plus récente série de pourparlers il y a quelques semaines. Lors de la première conférence de presse qu'il a donnée à Genève, j'ai trouvé très intéressant qu'il déclare aux journalistes que c'était sa première réunion et qu'il rencontrerait des représentants du gouvernement 45 minutes plus tard. Ensuite, il s'est interrompu pour dire « En fait, ce n'était pas la première réunion. La première réunion s'est déroulée avec le conseil consultatif des femmes, comme ce devait être le cas. Je les ai rencontrées hier après-midi. Elles m'ont fourni des renseignements et m'ont fait part des conditions sur le terrain et dans les camps puis elles m'ont expliqué ce qui motiverait et inciterait les gens à retourner en Syrie, etc. »
Lorsque nous obtenons l'attention et que la voix des femmes se fait entendre lors de ces processus, il y a automatiquement un renforcement de notre message.
Nous devons aussi appuyer les processus informels, et ne pas nous concentrer uniquement sur les processus officiels. Je le répète, nous devons continuer d'appuyer la société civile, les organisations féminines dans les localités et faire en sorte qu'elles puissent participer aux processus officiels.
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Comme je le soulignais, je crois que c'est très important.
Hier, Radio-Canada a présenté un reportage intéressant. Cela se passait dans la région de London. Les gens, les Canadiens, ont dit qu'ils aimeraient mieux comprendre l'ensemble de ce dossier.
Ce sous-comité pourrait étudier les grandes tendances, les processus et, au besoin, des dossiers spécifiques. Ce sous-comité pourrait aussi s'occuper du travail législatif sur la ratification du Traité sur le commerce des armes.
L'on devrait voir un ou des projets de loi être présentés au Parlement pour que le Canada puisse ratifier ce traité. Le comité pourrait même étudier la question de ce traité dans son ensemble. Je crois donc que c'est extrêmement important.
Par ailleurs, certaines personnes ont suggéré que cette question soit référée au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Je ne suis absolument pas de cet avis. Tout d'abord, l'enjeu dépasse de loin la seule question des droits de la personne. Certains aspects concernent l'industrie, la défense, les affaires étrangères et même le développement international. C'est vraiment beaucoup plus large que cela. Il ne faut pas oublier que le Sous-comité des droits internationaux de la personne décide lui-même de son ordre du jour.
En ce moment, le texte de la motion que nous avons devant nous a pour but de créer un sous-comité sur le contrôle des armes. Je crains fort que toute tentative de référer plutôt le dossier au Comité permanent de la justice et des droits de la personne soit, en réalité, un effort pour enterrer le dossier. Le premier ministre nous a promis plus d'ouverture et de transparence à l'avenir. J'apprécie beaucoup cet engagement.
[Traduction]
J'espère que les députés d'en face en particulier vont joindre l'acte à la parole.
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Cette motion comporte deux aspects: la forme et le fond.
Abordons d'abord ce qui est moins important, c'est-à-dire la forme. L'idée d'un sous-comité implique bien des choses, notamment l'établissement d'un comité, évidemment. Cela demande qu'on respecte les horaires chargés des gens responsables d'étudier le dossier. Il y a aussi l'idée de tout assigner à des sous-comités qui sont importants quant à notre politique étrangère. On peut donc ne pas être d'accord, pour diverses raisons, sur la nécessité d'un sous-comité.
Toujours en ce qui concerne la forme, à ce jour, notre comité a fonctionné selon un modèle de consensus et de collaboration, qui semble malheureusement prendre fin aujourd'hui. Notons d'abord que votre motion sur les femmes, la paix et la sécurité concerne la première étude que nous avons entérinée. C'est une étude fort intéressante et importante pour l'avenir du Canada, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale.
Nous avons pris en compte et puis entériné la motion de M. Allison sur une des études qui vont suivre. J'aimeras que ce comité continue dans la même voie. Malheureusement, il y a eu un certain manque de courtoisie dans la façon dont cette motion a été présentée, d'abord dans les médias. Je pense que vous avez consacré plus de temps à en discuter dans les médias qu'avec nous, individuellement. J'ai reçu un courriel qui n'était pas très personnel. Nous n'en avions pas discuté beaucoup avec vous, et j'aurais aimé qu'on le fasse d'avantage.
Quoi qu'il en soit, cette motion est trop importante pour que nous nous arrêtions sur la forme. Il faut vraiment accorder la priorité au fond. Les droits de la personne et la vente d'armes sont des questions très importantes qui préoccupent tous les États développés et sous-développés. En ce sens, je n'ai aucune objection.
J'aimerais vous lire un extrait de la lettre de mandat du ministre Dion, qui va comme suit:
Donner un souffle nouveau à la diplomatie et au leadership du Canada relativement à d’importants enjeux internationaux et au sein d’institutions multilatérales. L’atteinte de cet objectif passera notamment par l’accomplissement des tâches suivantes :
En collaboration avec la ministre du Développement international et de la Francophonie, faire la promotion des valeurs que sont la gouvernance inclusive et responsable, le pluralisme pacifique ainsi que le respect de la diversité et des droits de la personne, dont les droits des femmes et des réfugiés;
Devenir signataire du Traité sur le commerce des armes.
Pour ma part, j'aimerais laisser sa chance au coureur. Je pense qu'il est trop tôt pour penser à un comité, voire à un sous-comité. Même pour ce qui est du fond, c'est un peu trop tôt. Donnons la chance au et au de faire ce qu'ils ont à faire, quitte à revoir la motion ou à lui donner une forme différente au mois d'août ou au printemps prochain.
Je siège au Sous-comité des droits internationaux de la personne, et j'accueillerais la motion dans ce cadre. Nous l'attendons avec impatience. Pour l'instant, malheureusement, malgré tout le respect que j'ai pour vous et pour votre motion, je vais voter contre celle-ci.