Passer au contenu

INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 070 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 27 septembre 2017

[Enregistrement électronique]

(0805)

[Traduction]

     Bonjour. J’ouvre la séance, et je reconnais que nous sommes sur un territoire visé par le Traité no 1 et sur la terre natale des Métis.
    Bienvenu à toutes les personnes présentes. Nous sommes membres du comité permanent du Parlement qui s’occupe des affaires autochtones et du Nord. Soyez les bienvenus à la séance qui vise à étudier les revendications territoriales. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous procédons à l’étude des revendications particulières et des ententes sur les revendications territoriales globales.
    Ceci est la deuxième halte de la tournée pancanadienne que nous avons entreprise pour entendre nos concitoyens parler de leurs revendications territoriales. Nous nous sommes arrêtés à Vancouver et, aujourd’hui, nous nous rendrons à Québec. Nous aurons l’occasion d’entendre d’autres délégations à Ottawa à la fin du mois de septembre.
    Si vous souhaitez présenter des rapports, veuillez nous les faire parvenir d’ici la mi-octobre. Nous vous encourageons à le faire, car ils figureront dans le compte rendu officiel. Nous utiliserons l’information fournie pour mettre au point le rapport dans lequel nous formulerons des recommandations à l’intention du gouvernement du Canada.
    Le premier groupe d’experts est composé de la grande chef de la MKO, Sheila North Wilson, et du chef Nelson Genaille qui représente le Treaty Land Entitlement Committee of Manitoba. Le grand chef Dumas n’est pas ici, mais il se peut qu’il se joigne à nous sous peu. Je vous remercie de votre présence.
    Chacun de vous dispose de 10 minutes pour présenter ses observations officielles. Ensuite, les députés auront l'occasion de poser des questions.
    [Le témoin s’exprime en cri.]
    J’aimerais, s’il vous plaît, que vos interprètes traduisent mes paroles.
    Des voix : Oh, oh!
    Grande chef Sheila North Wilson: Je m’appelle Sheila North Wilson, et je suis membre de la Première Nation des Cris de Bunibonibee. Certains membres de ma famille appartiennent à la Première Nation des Cris de Pimicikamak. Je suis la grande chef de la Manitoba Keewatinowi Okimakanak Inc., et je suis ravie d’être ici. Je vous remercie de m’avoir invitée. Soyez les bienvenus sur le territoire visé par le Traité no 1.
    Je salue mes collègues, chef Nelson Genaille de la Première Nation des Cris de Sapotaweyak, chef Jim Bear, qui sera ici sous peu, grand chef Arlen Dumas, qui représente l’Assemblée des chefs du Manitoba, ainsi que chacun d’entre vous. C’est un plaisir de vous voir tous.
    Je vous souhaite de nouveau une bonne journée. Au nom de la Manitoba Keewatinowi Okimakanak, je souhaite la bienvenue aux membres du comité qui représentent Winnipeg ainsi que les trois partis fédéraux qui ont participé aux négociations du Traité no 1 et du territoire qu’il vise. Bien entendu, Winnipeg est l’emplacement du sous-bureau de la MKO et le lieu de résidence de nombreux membres de la MKO qui vivent hors des réserves.
    Comme je l’ai indiqué en cri, je m’appelle Sheila North Wilson. Je vous remercie encore une fois de m’avoir invitée à vous présenter le point de vue de la MKO à l’égard des politiques du gouvernement fédéral en matière de revendications particulières et d’ententes sur les revendications territoriales globales. Grand chef Dumas vous donnera une perspective globale, tandis que chef Genaille vous parlera plus précisément du Comité sur les droits fonciers issus de traités au Manitoba (TLEC). Enfin, je vous communiquerai un peu le point de vue du Nord, en particulier en ce qui concerne la Convention sur l’inondation des terres du Nord.
    Pour vous fournir un peu plus de contexte sur la Manitoba Keewatinowi Okimakanak, je précise que notre siège social se trouve au cœur de la partie septentrionale du Manitoba, sur les terres de la Première Nation des Cris de Tataskweyak et sur le territoire visé par le Traité no 5, c’est-à-dire juste au nord de Thompson, dans le Nord du Manitoba. MKO Inc. est le secrétariat de 30 Premières Nations du Nord du Manitoba dont la population totale s’élève à environ 73 000 personnes d’origine oji-crie, crie et dénée.
    En ma qualité de grande chef, j’ai été élue pour défendre les intérêts et les priorités des détenteurs de droits de la MKO dans tous les secteurs socioéconomiques et politiques, y compris la santé, l’éducation et les droits issus de traités, ainsi que pour plaider la cause des dirigeants du Nord du Manitoba auprès de tous les ordres de gouvernement. Les chefs et l’assemblée de la MKO ont pour priorité de protéger les droits des femmes et des enfants afin d’assurer la viabilité de leurs collectivités, de transmettre les connaissances et les pratiques autochtones, et de veiller à ce que nos collectivités restent le fondement de nos identités et les bastions des langues et des cultures autochtones du Nord du Manitoba.
    Ma comparution devant le Comité a pour but d’appuyer mes collègues et nos techniciens en délivrant au Comité un message commun à propos des revendications particulières et globales, tel que la politique s’applique au Manitoba.
    Comme vous l’avez entendu dire et l’entendrez dire de nouveau, le Comité sur les droits fonciers issus de traités au Manitoba s’est vu confier le mandat d’agir au nom de 21 Premières Nations titulaires de tels droits, dont plusieurs se trouvent sur le territoire de la MKO. La MKO englobe près des deux tiers du Manitoba.
    En ce qui concerne les négociations avec le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, il s’agit d’une table qui a découlé de l’entente-cadre sur les droits fonciers issus de traités au Manitoba, laquelle a été signée en 1997. Par conséquent, ce processus est propre au Manitoba et parallèle aux politiques en matière de revendications particulières et d’ententes sur les revendications territoriales globales. Nos traités ont contribué à définir les collectivités et les membres de la MKO. Le TLEC et son bureau administratif travaillent donc en partenariat étroit avec trois des OPT du Manitoba, soit la KO, l’Organisation des chefs du Sud et l’Assemblée des chefs du Manitoba, pour tenter collectivement de faire respecter les droits issus de traités des premières nations du Manitoba.
    La première chose que j’aimerais faire valoir, c’est qu’en dépit du Comité sur les droits fonciers issus de traités au Manitoba, du processus lié aux revendications particulières et du fait que ce processus a entraîné la création de zones urbaines de développement économique dans certaines collectivités de la MKO, je ne crois pas que, dans sa forme actuelle, le processus puisse nous permettre d’accroître de façon significative la superficie de la totalité des terres de réserve des Premières Nations du Manitoba ou de l’ensemble du pays.
    Nos terres au sud du 60e parallèle, telles qu’elles sont décrites à l’article 91 de la Loi de 1867 sur l’Amérique du Nord britannique, représentent approximativement 2 % de la superficie totale du Canada. Cela signifie que 99,8 % de la superficie du Canada reposent entre les mains de la Couronne du chef du Canada — c’est-à-dire qu’ils appartiennent aux provinces, aux territoires et à des intérêts privés. Au Manitoba, les terres publiques et privées qui sont actuellement mises à la disposition des Premières Nations détentrices de droits totalisent approximativement 1,1 million d’acres. Cette superficie est réellement négligeable et, une fois que ces terres auront été complètement transférées, elles ne modifieront pas beaucoup le tableau d’ensemble des terres distribuées aux Premières Nations.
    Même après la mise en oeuvre de l’entente-cadre sur les droits fonciers issus de traités et le transfert de toutes les terres désignées, un processus qui, comme vous l’avez entendu dire, est long et ardu, le Canada et des particuliers seront toujours propriétaires de 99 % des terres ancestrales des peuples autochtones, indépendamment des revendications globales, de l’autonomie gouvernementale et des traités modernes.
    En ce qui concerne la Convention sur l’inondation des terres du Nord de 1977, j’aimerais attirer l’attention du Comité sur les promesses brisées ou non satisfaites qui sont encore à l’origine des problèmes économiques et sociaux qui sévissent dans quelques-unes des collectivités plus importantes de la MKO 40 ans après la signature de la convention.
    Le passage suivant est extrait du rapport de l’enquête sur la justice autochtone (EJA) :
La Convention sur l’inondation des terres du Nord a été signée par le Canada, le Manitoba, Hydro Manitoba et le Northern Flood Committee qui représentait cinq Premières Nations (Nelson House, Norway House, Cross Lake, Split Lake et York Factory) dont les terres de réserve allaient être inondées par les grands projets hydroélectriques planifiés. La Convention prévoyait l’attribution de quatre acres pour chaque acre inondée, l’élargissement et la protection des droits d’exploitation des ressources fauniques, un investissement de 5 millions de dollars sur cinq ans pour appuyer des projets de développement économique dans les réserves et la promesse de perspectives d’emploi. La Convention devait aussi gérer tout effet néfaste sur « les terres, les entreprises, les activités et les modes de vie des résidents des réserves ». On avait garanti aux cinq Premières Nations qu’elles joueraient un rôle dans la mise en valeur future des ressources, la gestion de la faune et la protection environnementale. Les Premières Nations ont reçu certaines garanties concernant les niveaux d’eau et, en général, Hydro Manitoba a assumé la responsabilité pour toute conséquence négative qui pourrait découler de l’inondation. En retour, Hydro Manitoba a obtenu le droit d’inonder des terres de réserve dans le cadre du projet de dérivation de la rivière Churchill. Les différends concernant tout effet néfaste devaient être réglés par arbitrage…
Hydro Manitoba a obtenu ce qu’elle souhaitait et a entrepris l’immense projet. En revanche, la réaction des Autochtones a été loin d’être positive.
    Cela est tiré de l’EJA, et j’aimerais encore une fois rappeler à tous que près de 80 % de l’énergie que produit Hydro Manitoba provient de cette région, du territoire de la MKO. À l’époque, les commissaires de l’EJA ont recommandé que les gouvernements du Manitoba et du Canada reconnaissent la Convention comme un traité, qu’ils respectent les modalités de la convention et les mettent adéquatement en oeuvre, et qu’ils prennent les mesures qui s’imposent pour accorder, dans le cadre de la convention, des droits équivalents aux autres Autochtones touchés par l’inondation. Les commissaires de l’EJA ont également recommandé l’imposition d’un moratorium sur l’exécution de projets majeurs de développement des ressources naturelles, tant que des ententes ou des traités n’ont pas été négociés avec les Autochtones de la région qui pourraient être touchés de manière négative par ces projets, et ce, afin de respecter les droits issus de traités des Autochtones du territoire concerné.
    Le 15 décembre 2000, le ministre des Affaires autochtones et du Nord de l’époque, l’honorable Eric Robinson, a fait une déclaration ministérielle à l’Assemblée législative au sujet de la Convention sur l’inondation des terres du Nord. Il a indiqué qu’il était d’une importance primordiale que le gouvernement s’occupe des conséquences dévastatrices qu’a eues l’inondation des terres des Premières Nations à des fins de développement hydroélectrique. Au cours d’une déclaration, il a également affirmé que le gouvernement du Manitoba reconnaissait que la convention était un traité des temps modernes, et il a annoncé que le gouvernement s’engageait à respecter et à mettre adéquatement en oeuvre les modalités de la convention, comme les commissaires de l’enquête sur la justice autochtone l’avaient recommandé en 1991. Le ministre a ajouté par la suite que le gouvernement reconnaissait que des accords généraux d’application avaient été signés avec quatre des cinq Premières Nations parties à la convention, en tant que moyen de respecter et de mettre en oeuvre les modalités de la convention.
    Le Canada a des obligations légales en vertu de la Convention sur l’inondation des terres du Nord, et il a, par exemple, annoncé dans le passé la conversion de 10 281 acres de terres provinciales en terres de réserve au profit de la Première Nation des Cris de Nisichawayasihk, en vertu de l’accord global de mise en oeuvre de la Convention sur l’inondation des terres du Nord, conclu en 1996.
    Toutefois, le Canada, le Manitoba et Hydro Manitoba n’ont pas terminé d’indemniser les Autochtones pour l’inondation de leurs terres de réserve, en vertu des accords globaux de mise en oeuvre de la Convention sur l’inondation des terres du Nord, qui ont été négociés avec les Premières Nations touchées et qui sont actuellement en vigueur. Nos collectivités touchées par le développement hydroélectrique sont toujours quelques-unes des collectivités autochtones les plus pauvres du Canada. Cet état de choses est inacceptable compte tenu de l’existence de traités historiques et de traités des temps modernes, comme la Convention sur l’inondation des terres du Nord.
(0810)
    Il vous reste 20 secondes.
    Je pense que je vais en rester là et simplement mentionner que, dans le discours du premier ministre à l’ONU, nous l’avons entendu parler de l’importance de la relation avec les Autochtones. Il a mentionné les problèmes qui touchent directement les peuples autochtones, et nous allons le tenir responsable des paroles qu’il a prononcées. Même si nous lui savons gré de ses propos, il y a encore beaucoup de travail à accomplir pour mettre en oeuvre ne serait-ce que la Convention sur l’inondation des terres du Nord, par exemple.
    Merci.
(0815)
    Merci.
    Le prochain intervenant est le grand chef Arlen Dumas.
    Je m’appelle Arlen Dumas, et je suis le grand chef de l’Assemblée des chefs du Manitoba.
    Il est important de reconnaître que le territoire, que l’on qualifie en ce moment de province du Manitoba, englobe les terres ancestrales des Premières Nations anishinabes, cries, dakotas, dénées et oji-cries, et que ces nations exercent un pouvoir souverain sur ces terres.
    Je tiens à signaler que nous avons disposé d’une période très restreinte pour nous préparer adéquatement à une étude aussi importante. Nous n’avons reçu aucun financement ni appui à la recherche pour nous aider à témoigner aujourd’hui.
    Toutes les Premières Nations canadiennes devraient intervenir directement dans les dossiers comme celui-ci qui sont essentiels à nos droits fonciers. Les autres intervenants parleront précisément des problèmes liés aux droits fonciers issus de traités au Manitoba et mettront l’accent sur les revendications particulières et sur les politiques en matière de revendications territoriales globales.
    Les politiques actuelles sont en conflit avec les lois nationales, internationales et des Premières Nations. En ce qui concerne la question des terres des Premières Nations, le Canada n’agit pas de bonne foi. Ses politiques ne peuvent être rectifiées au moyen de modifications mineures. Il faudra les réformer en profondeur ou les remplacer.
    Les politiques canadiennes en matière de revendications particulières et globales sont problématiques parce qu’elles reposent sur le postulat de la souveraineté et du titre de la Couronne. Les lois et les politiques canadiennes partent du principe de la souveraineté du Canada sur nos territoires. Cela oblige les Premières Nations à présenter des revendications au Canada, alors que les rôles devraient être inversés.
    Nous contestons d’emblée la prétention du Canada quant à sa souveraineté sur nos terres. Nous affirmons que notre souveraineté est toujours intacte et que les traités reconnaissent la nationalité et la souveraineté des peuples autochtones.
    Deuxièmement, ni l’une ni l’autre des politiques n’est fondée sur l’appartenance autochtone des titres fonciers. Les dossiers historiques indiquent sans l’ombre d’un doute que ces terres appartiennent aux Premières Nations. Le Canada l’a reconnu à de nombreuses reprises à l’aide de divers moyens de reconnaissance foncière. Les politiques fédérales ne tiennent pas compte de l’évolution des propres causes du gouvernement canadien, qui ont confirmé que les titres appartenaient aux Autochtones. En outre, avant ou pendant les négociations, les terres et les ressources des Premières Nations ne sont protégées par aucun processus.
    Troisièmement, un conflit inhérent existe dans le processus d’examen et de décision. Les processus actuels reposent sur les lois, les politiques, les avocats, les juges, les tribunaux et les mécanismes d’application du Canada, ce qui crée un profond déséquilibre. Le Tribunal des revendications particulières, qui est présenté comme indépendant, utilise encore les lois, les juges et les tribunaux canadiens, sans examiner ou tenir compte également des lois et des processus des Premières Nations dans sa prise de décisions.
    Quatrièmement, la restitution des terres n’est pas un pilier de l’un ou l’autre des processus. Notre territoire est au coeur de notre identité, de notre culture, de notre autosuffisance, de notre prospérité économique et de l’édification de notre nation. Toutes les terres du Canada appartiennent de plein droit aux Premières Nations et aux Inuits. L’une des lacunes fondamentales des politiques est qu’elles ne sont pas axées sur les terres.
    Cinquièmement, il est présumé que les terres visées par les traités ont été cédées par les Premières Nations. Les traités conclus partout au Canada sont très significatifs. En effet, les traités numérotés sont considérés incorrectement comme des ententes de cession des terres, ce qui ne cadre pas avec les lois et l’interprétation des Premières Nations. Le Canada impose sa propre interprétation des traités numérotés, ce qui limite considérablement les négociations.
    Sixièmement, l’extinction des droits est présentée sous l’apparence d’une certitude, ce qui viole les lois nationales, internationales, normales et des Premières Nations. L’extinction des droits ne cadre pas avec les lois, les compétences ou les processus décisionnels des Premières Nations qui protègent les droits des générations passées, présentes et futures. La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et les autres lois, déclarations, conventions et traités internationaux se concentrent sur la protection et l’observation des droits des Autochtones sur les terres et les ressources, et non sur leur extinction. L’offre de fonds en échange de l’extinction des droits est une tactique d’intimidation qui vise à forcer les Premières Nations démunies à accepter des règlements préjudiciables.
    Septièmement, les politiques mettent l’accent sur les objectifs du Canada sans tenir compte des objectifs des Premières Nations. Les politiques en vigueur sont axées sur le désir du Canada de voir nos droits abolis, la protection des utilisations historiques de nos terres et de nos ressources par les colons, indépendamment de leur légalité ou de leur incidence sur les Premières Nations, et le désir de diverses industries, dont la majorité des grandes entreprises sont extractives, de profiter de nos terres et de nos ressources. Les politiques ne mentionnent nulle part la protection et l’application des droits des Premières Nations sur les terres et les ressources, la primauté de nos droits ou notre droit à l’autodétermination et à l’autosuffisance sur nos territoires.
    Huitièmement, les politiques ne tiennent pas compte du pouvoir de négociation profondément inégal de chaque partie. Les négociations peuvent exiger de nombreuses années, voire des décennies, et, dans l’intérim, seuls le Canada et des industries privées profitent de nos terres et de nos ressources.
(0820)
    Les intérêts des tierces parties priment les droits fonciers préexistants des Premières Nations et qui sont protégés par la Constitution. Le financement restreint sous forme de prêts compromet le processus, car une partie se trouve en dette avec l'autre partie et se sent pressée de conclure un accord, même injuste. Le Canada ne négocie pas de bonne foi les revendications territoriales. Au Manitoba, dans le cadre du processus de négociation des droits fonciers issus de traités, le gouvernement fédéral nuit aux négociations des ajouts aux réserves en faisant intervenir d'autres groupes autochtones, à savoir les Métis, pour restreindre les droits fonciers des Premières Nations. Le Canada fait primer les profits des sociétés et de l'industrie sur les droits constitutionnels des Premières Nations. Le Canada se sert de ses politiques, de sa puissance et de sa force militaire pour imposer sa volonté aux Premières Nations sur la propriété et l'utilisation des terres. Les mandats et les positions du Canada sont fermes.
    De plus, bon nombre de Premières Nations n'ont pas accès aux mécanismes de règlement des différends. Face à un processus de négociations préjudiciable et inéquitable, leurs seuls recours sont les tribunaux, mais les tribunaux ont très fortement tendance à privilégier les lois, les points de vue et les intérêts canadiens. Les recours judiciaires sont longs — jusqu'à 25 ans — et coûteux — des millions de dollars — et protègent mal nos terres et nos ressources pendant ce temps. Si on tente d'utiliser nos terres, ce sont souvent les arrestations ou les sanctions qui nous attendent.
    Voici quelques recommandations préliminaires.
    Premièrement, il faut qu'un nouveau mécanisme de règlement des différends conjoint soit négocié directement entre le Canada et les détenteurs de droits, les Premières Nations, pour qu'elles choisissent d'être représentées par leurs dirigeants, des experts ou des groupes représentatifs.
    Deuxièmement, il faut mettre en place une nouvelle politique basée sur la reconnaissance et la protection des titres ancestraux et faire de la restitution des terres et des ressources un élément central.
    Troisièmement, les nouveaux mécanismes doivent être des mécanismes conjoints et tenir compte des pouvoirs, lois, politiques, et processus de décision, d'appel et de règlement des différends des Premières Nations.
    Quatrièmement, les limites de temps imposées par le gouvernement fédéral aux négociations doivent être éliminées, notamment celles portant sur les transferts de terre et les compensations pour perte d'usage, passée et présente.
    Cinquièmement, les nouvelles politiques doivent respecter les lois internationales, notamment la DNUDPA, et prévoir expressément le respect du principe juridique du consentement préalable, libre et éclairé pour toute activité sur les terres des Premières Nations avant, pendant et après les négociations.
    Sixièmement, il faut procéder à un examen conjoint global et approfondi des lois, politiques, règlements, arrêtés et autres mécanismes fédéraux, provinciaux, territoriaux et municipaux pour vérifier leur conformité aux processus d'élaboration des lois internationales et des Premières Nations qui touchent à leurs droits sur les terres et ressources. Il faut notamment procéder à un examen global des processus des droits fonciers issus de traités pour corriger les préjudices subis actuellement par les Premières Nations dans les ajouts aux réserves.
    Septièmement, les Premières Nations doivent pouvoir compter sur un financement et du soutien solides pour procéder à des recherches, examens juridiques et consultations sur leurs intérêts dans les terres et les ressources.
    Il vous reste deux minutes.
    Merci beaucoup.
    Il est très important de ne pas oublier l'intention des politiques en place et le fait qu'elles n'ont pas permis de parvenir à des solutions constructives ou concertées qui sont essentielles à une relation où les partenaires y trouvent chacun leur compte. Il y a eu quelques exemples de négociations fructueuses, mais elles sont malheureusement trop rares. Il faut donc procéder à un examen global afin d'améliorer la situation. Il ne faut pas oublier que la relation est censée évoluer dans une direction donnée et qu'elle doit profiter à tous les intervenants.
    Il est très important, en outre, que le gouvernement cesse de nuire au processus en faisant intervenir d'autres groupes. Il doit cesser de s'allier à l'industrie et doit commencer à s'occuper des intérêts des Canadiens et des Premières Nations afin de voir grandir le pays que nous connaissons.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous passons aux questions.
    Ah, désolée.
    Nous allons entendre auparavant le chef Nelson Genaille.
    Toutes mes excuses.
(0825)
    [Le témoin s'exprime en cri.]
    En langage clair et simple, je vous souhaite la bienvenue en territoire traditionnel cri. Ce territoire fait partie de notre histoire, celle des Anishinabeks. Ils ont sillonné la région, comme les Ojibways par la suite. Nous n'avons jamais vu de Métis ici. Quand nous traversons l'île de la Tortue... Vous savez, en tant que chef, qu'on appelait sous-chef à l'époque de mon grand-père lorsque les traités ont été signés, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux petits-enfants des pionniers. Je salue tout un chacun.
    Je trouve cela très amusant d'avoir à vous expliquer les revendications globales, les négociations que je dois mener, et les traités, quand je ne sais pas à quel titre vous vous faites élire au départ? Comme Canadien ou comme pionnier? Le pionnier est venu ici uniquement pour cultiver, avec la charrue et la poussière. Et comme mon grand-père le disait un jour à ma mère, on lui a même donné le filet, les mollusques et le boeuf pour se bâtir une nouvelle vie.
    Parlons des revendications particulières et du centre de recherches sur les droits ancestraux et issus de traités, une organisation chargée d'effectuer des recherches sur ce qui a été signé à l'origine. Les accords sur les droits fonciers issus de traités nous ouvraient la porte au développement économique, mais cela nous a été refusé. Pourquoi? Qu'a-t-on tant à craindre pour refuser aux Premières Nations la possibilité de se développer économiquement?
    Je ne peux plus vendre mes fourrures pour gagner ma vie et il faut que je m'adapte. La fin de semaine dernière, nous sommes allés chasser l'orignal dans la forêt avec les enfants. En 2012 et 2013, j'ai dû poursuivre une société, et le gouvernement du Manitoba, devant les tribunaux pour faire respecter ce qui avait été promis dans les traités. Ce que je comprends, c'est que je peux jouir des terres de la Couronne, mais si le gouvernement les donne à une société, comme Manitoba Hydro, que se passe-t-il?
    Ma mère et mon grand-père m'ont appris que lorsqu'on va prier, il ne faut pas baisser la tête et fermer les yeux. Il faut apprendre de ce qui est arrivé, car quand on a ouvert les yeux, nos terres avaient disparu. Je garde ces messages importants à l'esprit pour ce qu'il me reste à comprendre. Au sujet des négociations et des revendications particulières, le processus des droits fonciers issus de traités compte 1,1 million d'acres en suspens. J'ai une propriété de 0,114 acre dans la ville de Swan River. Les revenus bruts sont de 6 millions de dollars. C'est l'économie de Swan River. J'ai 10 % de cela. Je ne peux pas fournir 275 maisons à ma communauté. Rien n'a bougé pendant huit ans. Six fois huit égale 48 millions de dollars. Êtes-vous prêts à me donner 48 millions de dollars pour que je puisse loger adéquatement les membres de ma communauté? Je ne pense pas.
    Êtes-vous prêts à négocier l'extraction sur notre territoire du gravier, du calcaire ou de l'or? À l'heure actuelle, combien de terres possède le Canada? C'est ma première question. Vous n'en avez pas. Qu'a fait le Canada en 1930? Il a tout donné aux provinces. M'avez-vous demandé à moi, petit-fils d'un sous-chef, de le faire? Non, bien sûr.
(0830)
    Par conséquent, je trouve cela très difficile de vous expliquer ce que vous devez savoir. Que voulez-vous savoir exactement? Voulez-vous que je vous dise la vérité ou que je formule quelque chose dans vos mots, que vous allez comprendre? Premièrement, il y a la reddition de comptes. Nous avons rendu des comptes à notre peuple. Dès que nous ne sommes plus redevables envers notre peuple, on se fait renvoyer. Avant la mise en oeuvre de la Loi sur les Indiens, mon grand-père était sous-chef, et ce, jusqu'à son décès. C'était notre histoire. On nous avait confié la tâche de diriger notre communauté et de subvenir aux besoins de ses membres. Au sein de ma communauté, ce sont les gens spirituels qui étaient au pouvoir parce qu'ils veillaient au bien-être des membres de leur communauté.
    Ensuite, lorsqu'il s'agit des revendications particulières, je peux vous donner des exemples précis, comme le plan d'action « La justice, enfin ». L'a-t-on mis en oeuvre? Aucunement. Lorsque l'État établit une entente avec les peuples autochtones, il n'y a aucune transparence. Ce n'est même pas un processus transparent; c'est plutôt une arène de boxe. Si on veut boxer, je dois organiser une manifestation pour vous arrêter. C'est ce que nous devons faire.
    En vertu de « La justice, enfin », l'arbitre ultime choisit d'accepter ou de rejeter la revendication, puis on négocie, mais aux conditions du Canada. Au terme de l'examen quinquennal, on n'a pas donné suite aux recommandations qui ont été formulées, parce qu'on a tout simplement choisi de fermer les yeux. Il y a un projet de loi d'initiative parlementaire que j'appuie entièrement, mais je n'ai pas ce pouvoir. Vous avez ce pouvoir. Pourquoi ne l'appuyez-vous pas? C'est la question que vous devriez vous poser. Obtiendra-t-on réellement justice à ce moment-là?
    À l'heure actuelle, il y a une interdiction de chasser l'orignal en vigueur dans mon territoire, mais je ne m'empêche pas de chasser, car que je dois subvenir aux besoins des membres de ma communauté, de mon peuple, et parce que cela était promis dans les traités. Lorsque nous avons demandé un processus conjoint — détenteurs de droits, nationaux, internationaux —, vous avez omis de demander aux véritables détenteurs de droits si vous pouviez venir sur notre territoire et y mener des activités. C'est ce que vos ancêtres ont demandé lorsqu'ils sont arrivés la première fois. Aussitôt que les traités ont été signés, qu'en a-t-on fait? Vous devez vous poser cette question. Je comprends mes droits issus de traités, mais je comprends également mes droits territoriaux. Nous, les peuples autochtones, sommes attachés à la terre. Nous vivons de la terre et nous en avons besoin, mais de nos jours, c'est davantage pour les possibilités économiques. Je viens tout juste d'acheter une autre propriété à la ville de Swan River. Il s'agit d'un vieil édifice abandonné. Devinez qui a dû tout nettoyer? C'est nous. Nous avons dû faire appel à une entreprise pour tout nettoyer et enlever le vieux bâtiment. Nous avons signé une entente de prestation de services pour le développement municipal; nous avons conclu un accord en vue de mettre sur pied une entreprise. Cette entreprise devrait rapporter à ma communauté des revenus bruts de 13 millions de dollars. On parle donc de 19 millions de dollars pour ces deux propriétés qui ne représentent même pas une acre. Lorsqu'on regarde le Canada dans son ensemble, à combien se chiffre l'extraction des ressources partout au pays? Quelle est la somme qui est due aux Premières Nations, lorsqu'on sait qu'une terre, dont la superficie est inférieure à une acre, permettra possiblement à ma communauté de toucher 20 millions de dollars?
    Il y a ensuite ce grand livre vert. Cette entente de principe a été signée le 29 mai 1997. Pourtant, 20 ans après la signature de l'entente, à peine la moitié de la superficie promise a été transférée. Le gouvernement libéral s'est donné 10 ans pour y remédier.
(0835)
    Comment est-ce possible que, 140 ans plus tard, nous soyons toujours en train de convertir les terres désignées dans le cadre de ces traités? J'arrive de mon territoire visé par le Traité no 4, où nous nous rencontrons chaque année pour célébrer ce traité. Mon peuple continue d'aller sur les terres visées par le Traité no 4 à Fort Qu'Appelle, parce que c'est là d'où nous venons. Nous sommes les Cris des Plaines. On nous a dit: « C'est là où vous allez vivre. Nous allons mettre de côté 100 acres pour vous ». Toutefois, mon grand-père avait compris que nous devions nous établir sur tout le territoire visé par le Traité no 4.
    Merci.
    Nous allons maintenant enchaîner avec la période de questions. C'est le député Gary Anandasangaree qui ouvre le bal.
    Merci, madame la présidente. Je remercie tous les chefs d'être ici aujourd'hui. Je reconnais également le territoire sur lequel nous sommes réunis en ce moment.
    J'aimerais revenir aux propositions du grand chef concernant l'établissement d'un nouveau modèle de règlement des différends. Pourriez-vous nous donner une idée de ce à quoi devrait ressembler ce mécanisme de règlement des différends conjoint? Vous pourriez peut-être nous décrire quelle serait, selon vous, la meilleure façon de régler les problèmes de structure que vous avez soulevés.
    Je pense que si vous faisiez une évaluation objective de ce qui s'est passé au fil du temps... Dans ma déclaration, j'ai dit que ces processus étaient mal interprétés et ne correspondaient pas aux décisions rendues par les tribunaux au cours des 20 dernières années. Il y a de nombreux exemples. Mon honorable collègue vous a parlé d'une entente, qu'il vous a présentée, pour laquelle il y a en fait un contrat, un cadre juridique pour nous permettre d'aller de l'avant. Cependant, la bureaucratie et le système judiciaire prennent des libertés et s'ingèrent dans le processus, ce qui ne permet pas de réaliser des progrès significatifs. Comme je l'ai dit dans ma déclaration, il faut avoir une réelle collaboration entre les Premières Nations et les autres dirigeants pour s'assurer que les mécanismes sont conformes à la loi, si on veut respecter la primauté du droit et le principe de consentement préalable donné librement en connaissance de cause, ainsi qu'à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
    Je ne peux pas vraiment vous donner plus de détails, parce que nous devons effectuer ce travail. N'empêche que nous pouvons tirer des leçons des échecs du passé, les garder à l'esprit pour ne pas les perpétuer puis prendre des mesures significatives. Mon honorable collègue a indiqué plus tôt que, grâce aux moyens financiers dont il dispose et à la capacité de sa communauté, il peut fournir des ressources additionnelles afin de subvenir à ses besoins et à ceux de sa communauté. C'est ce que nous voulons tous.
    Grand chef Wilson, pourriez-vous nous parler des revendications particulières et nous dire à quoi pourrait ressembler un cadre davantage axé sur la prise de décisions conjointe?
    Je crois qu'il faut amorcer et intensifier les discussions avec les Premières Nations et les représentants de façon plus équitable en ce qui a trait au partage ou au transfert des terres. En fait, selon moi, le plus important, ce sont les principes qui figurent dans la DNUDPA. En fait, si la DNUDPA avait été mise en oeuvre, nous serions déjà mieux à même de créer un processus juste et équitable.
    Le chef Genaille parle au nom de sa communauté, mais sachez que nous représentons les détenteurs de droits. Nous ne sommes pas les détenteurs de droits, en tant qu'organisation ou grands chefs — ce processus doit relever directement des Premières Nations et des détenteurs de droits. Même si nous sommes ici pour les aider à cet égard et pour transmettre le message, il est important que les nations souveraines participent au processus et commencent à envisager des moyens pratiques de transférer les terres.
    Par exemple, comme le chef Genaille l'a indiqué, il a acheté des terres et des propriétés à Swan River, et il est en mesure de le faire, mais il a fallu des années et beaucoup de négociation pour y arriver. C'est la même chose pour la Nation crie de Nisichawayasihk à Nelson House. La Nation crie a maintenant quelques propriétés à Thompson.
    Nous devons profiter davantage de ces possibilités. Nous en avons assez d'entendre que nous dépendons du gouvernement, parce que nous ne sommes pas de cet avis. Lorsque nous observons la situation dans son ensemble, nous n'avons pas l'impression d'être dépendants, mais nous avons besoin de meilleurs partenaires avec qui collaborer pour prendre soin des nôtres. C'est là l'essentiel.
(0840)
    Grand chef Genaille, pourriez-vous me décrire quelques-unes des difficultés auxquelles vous êtes confrontés ence qui a trait à l'acquisition des terres et aux négociations avec le gouvernement?
    Au fond, le problème réside dans le changement de garde. J'ai rencontré de nombreux ministres différents, lorsque le gouvernement conservateur était au pouvoir, de même que des maires, des conseillers et des fonctionnaires d'AANC. Les personnes responsables des dossiers ne savaient rien à propos des politiques en place, et il a fallu reprendre depuis le début. J'ai dû leur enseigner. D'ailleurs, on devrait me remettre un doctorat pour le nombre de personnes à qui j'ai enseigné. Cela comprend les ministres, et même le maire et ses conseillers.
    Tout est une question de mise en oeuvre. Lorsqu'une première nation sélectionne une terre, cela se fait au moyen d'une carte photographique. Lorsque nous nous entendons sur les intérêts des tiers, nous signons un plan régional d'arpentage. Une fois que c'est signé, les terres sont arpentées. Par la suite, en vertu d'un décret, le Manitoba cède les terres au Canada qui, aux termes d'un autre décret, nous les transfère pour que nous puissions les exploiter. Même après cela, à qui revient cette terre? À la Reine. Toutefois, lorsqu'on examine les aspects juridiques, c'est toujours mon territoire. Au fond, si on a signé les traités, c'était pour permettre aux pionniers d'utiliser le territoire visé par le Traité no 4, d'où je viens.
    Vous soulevez un bon point.
    Je cède maintenant la parole à la députée Cathy McLeod.
    Merci à tous nos témoins.
    Merci, madame la présidente.
    Une question a été soulevée dans l'une de nos réunions à Vancouver, et j'ai pris connaissance d'une situation dans ma circonscription. Cela concerne les revendications territoriales globales et particulières ainsi que les politiques du gouvernement sur la cession de ses terres. À Kamloops, il y avait un centre agricole dont le gouvernement fédéral n'avait plus besoin. Je me suis renseignée sur le processus de cession auprès du Conseil du Trésor. Même si les Premières Nations avaient des droits sur cette terre, j'ai été surprise de voir qu'elles n'occupaient pas une plus grande place dans le cadre du processus. Avez-vous quelque chose à dire sur la façon dont le processus de cession du gouvernement fédéral devrait fonctionner?
    Je ne connais pas très bien la politique du gouvernement. Cependant, j'ai une compréhension globale, et je crois que cela montre à quel point il faut déployer davantage d'efforts pour en arriver à une décision éclairée.
    Tout d'abord, lorsque nous avons des possibilités comme celles-ci, il ne faudrait ménager aucun effort pour s'assurer que tout le monde est conscient du potentiel de ces acquisitions. Je crois savoir que, dans le sud du Manitoba, certains de nos membres essaient d'acquérir des casernes de l'armée canadienne. Pour quelque raison que ce soit, on nous met des bâtons dans les roues pour bloquer à tout prix cette transaction, alors que si vous regardez ailleurs au pays, en Saskatchewan... Même ici à Winnipeg, avec la Première Nation de Long Plain, le transfert de la réserve urbaine a permis de relancer l'économie d'une partie de la ville qui n'aurait pas fait long feu autrement. La ville entière a redirigé la circulation, et maintenant, si je ne me trompe pas, il s'agit de la station d'essence la plus achalandée ou la deuxième plus achalandée de la ville, mais il a fallu beaucoup d'efforts pour y arriver. Pourquoi ne pas en faire autant dans l'autre cas ou celui dont vous avez parlé?
    Il faut accroître nos efforts pour que ces choses se concrétisent. Il faut limiter les interventions des bureaucrates et des gens qui ont d'autres buts, car lorsque des terres sont disponibles, le gouvernement fédéral est tenu de faire des transactions avec les Premières Nations, quelles qu'elles soient.
(0845)
    En ce qui concerne le cas dont j'ai parlé, cela se trouvait sur le territoire traditionnel, et il y avait une revendication territoriale particulière. La revendication ne visait pas cette région en particulier, n'empêche que, selon moi, cet endroit offrait une foule de possibilités. J'estime que le Conseil du Trésor devrait établir des lignes directrices plus appropriées dans cette optique.
    Avez-vous quelque chose à ajouter concernant cette proposition?
    Je suis désolé, mais j'aimerais revenir sur votre dernière déclaration. Comme je l'ai dit, je crois qu'il ne faut ménager aucun effort. Ce n'est pas parce que quelque chose n'appartient pas à la bonne catégorie... Ces négociations reposent sur une série de paramètres, mais s'il existe une possibilité que nous soyons d'importants partenaires, pourquoi ne pas privilégier ce qui pourrait être avantageux pour tout le monde?
    Selon moi, il faudrait revoir cette politique pour voir si nous pourrions offrir de meilleures perspectives.
    Merci.
    Vous avez eu l'occasion, grand chef North Wilson, de parler de la Convention de 1977 sur l'inondation des terres du Nord, dont je ne suis pas parfaitement au fait. Pourriez-vous préciser quels aspects de l'accord ont été respectés, selon vous, et quels aspects n'ont pas été pris en considération?
    Je pense qu'il faudrait y aller ligne par ligne, mais dans l'ensemble, sachez qu'il y a des lacunes. Bien entendu, cet accord a été avantageux pour certaines communautés. Par exemple, lorsqu'on se rend à Nisichawayasihk, on y trouve un centre d'interprétation assez récent. Lorsqu'on entre, on peut observer un musée magnifique de style nordique. C'est très moderne et très instructif.
    Outre ce centre, on trouve des cuisines communautaires, où les chasseurs de la communauté apportent ce qu'ils ont chassé et pêché et le partagent avec les autres membres de la communauté ou les personnes qui en veulent.
    De nos jours, lorsque nos membres, nos dirigeants et nos techniciens trouvent un moyen de mettre en oeuvre ces types d'initiatives, ils maximisent les possibilités. Toutefois, une partie de l'accord consiste, par exemple, à établir un centre jeunesse au sein de chaque communauté visée par l'Entente-cadre du Manitoba, mais nous n'avons pas de telles installations.
    Tout le monde a entendu parler de la vague de suicides qui affligeait la Nation crie Pimicikamak, ce qui a permis d'amorcer un dialogue pancanadien sur la prévention du suicide. L'une des choses les plus fondamentales qu'on a demandées était d'avoir des installations où les jeunes pourraient se retrouver et faire des activités. Cela faisait partie de l'entente-cadre qui avait été signée, et cette mesure n'a toujours pas été mise en oeuvre.
    Il faudrait donc passer en revue tous les éléments de l'accord qui ont été promis et qui n'ont pas été respectés, mais de toute évidence, cela n'inclut pas toutes les autres mesures qui ne font pas partie de l'Entente-cadre du Manitoba. Par exemple, à Shamattawa, l'éducation pose problème, car on a du mal à recruter des enseignants. Je pense que s'il y avait un plus grand respect de leurs droits issus des traités, la situation serait différente.
    Je conviens que c'est un exemple parmi les plus extrêmes, mais sachez que nos 30 autres communautés ont différentes perspectives et des droits territoriaux qu'ils se font constamment refuser.
    D'accord.
(0850)
    Je suis désolée, Cathy.
    Je cède maintenant la parole au député Romeo Saganash.
    [Le député s'exprime en cri.]
    Je pense que vous avez tous parlé des politiques et du fait qu'elles ne permettent pas nécessairement de remédier aux difficultés que nous éprouvons, que ce soit par la mise en oeuvre des traités ou d'autres questions auxquelles nous sommes confrontés en tant que Premières Nations.
    Tout d'abord, Nelson, sachez que lorsque vous avez souhaité la bienvenue aux petits-enfants des pionniers, je ne me suis pas senti bien accueilli du tout.
    Sheila, lorsque vous avez parlé des promesses qui n'ont pas été tenues, je pourrais vous dire: « Bienvenue dans le club », mais ce serait une mauvaise blague.
    Dans un premier temps, j'aimerais reconnaître deux choses.
    Je vais poser la même question que Gary, mais sous un autre angle.
    Vous avez tous parlé de la DNUDPA et de l'importance d'avoir cette Déclaration des Nations unies comme cadre pour aller de l'avant au pays. Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus, et je vous remercie d'appuyer mon projet de loi d'initiative parlementaire. C'est exactement ce que vise le projet loi C-262. Peu importe ce sur quoi nous travaillerons à l'avenir, que ce soit la mise en oeuvre des traités, la reconnaissance des terres ou des droits et ainsi de suite, il faut que ce soit les normes minimales sur lesquelles nous nous appuierons.
    Je vais donc poser ma question, mais d'un point de vue opposé à celui de Gary.
    Avons-nous besoin d'une politique pour tout ce dont nous avons discuté aujourd'hui, ou serait-il plus simple d'avoir recours à un instrument comme la Déclaration des Nations unies ou à la jurisprudence de la Cour suprême du Canada?
    Beaucoup de décisions donnent suite à de nombreux problèmes dont nous parlons ici. Par conséquent, est-il nécessaire d'avoir une politique? C'est peut-être la première question que je veux poser à vous trois.
    Je vais commencer.
    [La témoin s'exprime en cri.]
    J'ai pu entendre et comprendre votre dialecte distinct — j'en étais très enthousiasmée —, car j'écoutais très attentivement. C'est un autre moment éducatif: le cri comporte différents dialectes. Nous parlons tous les quatre cri, mais nous avons tous un dialecte distinct, et je dois écouter d'autant plus attentivement quand Romeo Saganash parle.
    Merci de l'accueil, et merci d'être ici et de représenter les Cris devant le Comité.
    Votre projet de loi, le projet de loi C-262, est nécessaire, car si c'est ce dont le gouvernement a besoin pour trouver un moyen d'assurer la mise en pratique des traités, alors soit. Je pense que c'est de cela qu'il est question pour beaucoup d'entre nous. Lorsque les traités sont trop vastes, trop élémentaires ou trop vagues, il convient alors d'avoir un outil comme la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones pour établir le processus. Cet outil me donne de l'espoir. Je pense que nous devons le mettre en branle pour commencer à régler ces problèmes plus profonds et non résolus, et pour que nos gens finissent par vivre à l'image d'une civilisation moderne en étant autonomes. Je vous remercie de vos démarches. Je crois que c'est la voie dans laquelle nous devons nous engager pour atteindre cette prochaine étape.
    À l'époque, nous avions besoin d'un processus du genre. Nos gens disent que pendant le processus de négociation des traités, et que même récemment dans les années 1970 lors de la conclusion de l'Accord-cadre sur les droits fonciers issus de traités du Manitoba, ils n'étaient pas disposés à négocier ce genre de détails, et on misait largement sur la bonne foi. Le grand chef Dumas parle constamment de notre gentillesse, et c'est essentiellement ce à quoi nos ancêtres se fiaient, à savoir la capacité humaine de base à dire la vérité, à être gentil, à tenir parole. Nos ancêtres comptaient là-dessus, mais nous savons maintenant jusqu'où cela nous a menés, et cette relation brisée doit être rétablie. Nous ne pouvons continuer de compter sur les qualités humaines de base. Il nous faut un outil comme la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones pour nous faire passer à la prochaine étape.
(0855)
    Il vous reste environ une minute.
    Pour répondre à la question, à la veille des célébrations du 150e anniversaire du Canada, 143 ans après la signature du Traité no 4, le Canada s'est retiré du processus de règlement des revendications particulières et a cessé de se présenter comme l'entité chargée de l'améliorer. Nous devrions le recommander conjointement aux Nations unies à des fins de mise en oeuvre, car le Canada en a fait profiter ses petits-enfants.
    Ma nation et mes enfants, soit la génération qui suit la mienne, n'en ont pas encore tiré parti.
    Je veux faire des observations à ce sujet, chers collègues...
    Il peut utiliser une partie de mon temps.
    Veuillez répondre aussi longuement que vous le souhaitez.
    Merci beaucoup.
    Je vous en suis reconnaissant, car c'est important. C'est une question très importante. Je crois qu'elle est essentiellement politique. Aucune politique ou aucune loi ne devrait être nécessaire pour faire la bonne chose ou faire les choses de façon honorable, mais malheureusement, si c'est nécessaire pour le gouvernement du Canada, je crois alors qu'il faut modifier sans réserve le processus et mettre au point une approche qui facilitera les choses ou les forcera à prendre une direction qui profitera à tout le monde.
    Très bien.
    C'est maintenant au tour du député Mike Bossio de poser des questions.
    J'aimerais approfondir un peu la question, car je regarde l'un des accords réussis — Romeo et moi en avons parlé et nous en avons également discuté en Colombie-Britannique —, à savoir l'accord de Québec qui a été conclu en 1975 et la vingtaine de versions qui a suivie.
    De quelle façon la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones peut-elle orienter le processus? Comme vous l'avez dit, il est toujours formidable de pouvoir faire la bonne chose. Négocier est la bonne chose à faire, et nous savons en réalité que chaque fois que nous négocions, cela nous explose en plein visage, car le groupe de politiciens d'aujourd'hui peut se dire d'accord et vouloir aller de l'avant, mais à la suite d'élections, un autre groupe le remplace et voit les choses autrement. Il est donc nécessaire d'officialiser le processus dans une certaine mesure.
    Lorsqu'on prend la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et l'exemple de l'accord des Cris du Nord au Québec, que pouvons-nous rendre officiel même lorsqu'il y a un changement de gouvernement, que ce soit à l'échelle provinciale ou fédérale, pour être certains de trouver une fois pour toutes une solution satisfaisante à ces problèmes? Nous savons qu'une législature ne suffit pas.
    Il ne vous reste qu'une seule minute.
    Oh, zut. Allez-y, s'il vous plaît.
    Je pense que si les parties sont motivées, si les gens sont disposés à déployer de réels efforts, la magie est possible. Je crois que nous devrions tous regarder les réussites des 30 dernières années concernant le Nunavut.
    Je pense que mes parents au Québec ont essentiellement donné un excellent exemple d'efforts concrets... Ils ont eu recours à la force, mais ils ont obtenu des résultats concrets. Il faut amener les gens à adopter une certaine vision et mettre en place les mécanismes nécessaires pour y parvenir.
    Malheureusement, je ne crois pas que cela viendra du système juridique, car le système juridique se ralliera toujours au Canada avant qui que ce soit d'autre. Nous devons nous engager dans une autre voie, car malheureusement, le Canada défendra l'industrie avant les droits des Canadiens.
(0900)
    C'est la raison pour laquelle je crois que nous devons officialiser le processus.
    En effet.
    Nous allons terminer par les observations du chef Genaille.
    Pour conclure, après 20 ans, nous avons fait la moitié du travail.
     Au départ, lorsque le document a été signé dans ma communauté, nous nous sommes rendus dans la ville de Swan River. Nous avons tenu une réunion à portes ouvertes avec des agriculteurs, des propriétaires privés. Ils ont augmenté le prix que nous avions négocié dans le livre. Et au fil du temps, 10 ans après la signature... Je vais raconter l'histoire d'un agriculteur polonais qui est venu sur le territoire d'une communauté pour vendre 100 acres de terres. On parle d'environ un million de dollars. Nous ne pouvions pas nous le permettre, car le prix négocié était de 197 $ l'acre, mais les membres de la communauté ont décidé de l'acheter à une condition.
    Ils ont donc demandé à l'agriculteur s'il acceptait la condition de vente.
    Il a répondu qu'il y réfléchirait et a posé des questions sur la condition.
    Ils ont dit qu'ils achèteraient sa terre et qu'il retournerait chez lui.
    Il a baissé la tête, y a réfléchi et a ensuite demandé à quel endroit il devait signer.
    Êtes-vous prêts à en faire autant? Le cas échéant, nous n'aurons pas de problèmes.
    Très bien. C'est une chose à envisager.
    Des voix: Oh, oh!
    La présidente: Personne n'a dit que la situation au Manitoba serait facile à régler.
    Merci beaucoup. C'était notre premier groupe de témoins. Vous nous avez donné amplement matière à réflexion.
    Hier soir, le commissaire aux traités nous a fait faire un tour. Nous sommes passés par Kapyong, par la rue principale, et nous avons vu certaines des difficultés auxquelles notre peuple autochtone fait face quotidiennement: faire la file pour être nourris, pour avoir des vêtements convenables. Il manque de logement. Les députés et le personnel du Comité ne l'ont observé que brièvement, mais nous savons que les relations doivent être revues et rétablies. Nous vous sommes très reconnaissants d'être venus témoigner de nouveau devant notre comité. Je suis certaine que vous avez déjà témoigné à maintes reprises. Comme vous le dites, avec de la bonne volonté, le changement est possible, et c'est la raison pour laquelle nous sommes de retour, pour apprendre et écouter, et pour apporter, espérons-le, un changement important.
    Meegwetch. Merci beaucoup d'avoir participé à cette séance.
(0900)

(0915)
    Bonjour tout le monde. Nous commençons un peu tard, et nous allons donc raccourcir notre prochaine pause pour être certains de consacrer une heure entière à la séance.
    Je tiens d'abord à saluer nos témoins et à les remercier d'être venus nous parler de la question des revendications territoriales, dans une perspective d'ensemble et de manière détaillée.
    Nous aurons l'occasion de vous entendre au cours de la séance — le représentant de la nation de Brokenhead et celui de la nation de Sandy Bay auront chacun 10 minutes à leur disposition. Libre à vous de vous partager le temps comme bon vous semble. Les députés pourront ensuite poser des questions.
    Je vous donne la parole. Vous pouvez décider qui sera le premier à intervenir.
    Merci beaucoup, et bienvenue sur le territoire du Traité no 1. J'aurais préféré que le forum ait lieu sur le territoire de la nation ojibwée de Brokenhead ou même de la nation de Sandy Bay. Je suis un des signataires de l'Accord-cadre sur les droits fonciers issus de traités qui a été conclu en 1997, et j'ai également siégé à titre de premier président pour les droits fonciers issus des traités en 1977. Je suis très fier de porter cet anneau, mais je me sentirais beaucoup mieux si nous parvenions bientôt à une résolution un de ces jours.
    De toute évidence, notre identité nationale repose sur notre souveraineté et notre autodétermination, ce qui renvoie à notre territoire et à nos frontières, à nos citoyens, à notre identité culturelle, à nos organismes dirigeants, à nos lois, à notre système judiciaire et à notre assise économique. Le processus de règlement des revendications met surtout l'accent sur la perte de nos terres, et il ne tient pas compte de la perte de notre gouvernance, de nos lois, de notre capacité, de notre langue, de notre identité, de notre culture, de notre spiritualité et de notre assise économique, c'est-à-dire la chasse, la pêche, le trappage et la cueillette. Le modèle retenu aurait dû être celui du traité de Selkirk de 1817, lequel est conforme à l'esprit de la Proclamation royale de 1763, qui a établi le cadre constitutionnel pour les droits fonciers des Autochtones et qu'on a qualifié de grande charte des Indiens du Canada.
    La Couronne doit rendre hommage au leadership visionnaire et à l'amitié, comme pour le chef Peguis et lord Selkirk, qui ont mené à la signature du traité de 1817. Les communautés de colons ont omis de respecter entièrement l'esprit et l'objectif des traités subséquents. En s'entendant sur les modalités du traité, le chef Peguis et lord Selkirk ont promu la paix, l'ordre ainsi qu'un esprit d'entraide et de coopération, ce qui constitue le fondement de l'histoire unique du Manitoba. Au moment de la signature, le chef Peguis a prévu un certain territoire pour les colons; le reste était à nous, et nos lois devaient continuer de prévaloir.
    Toutefois, au mois d'août 1871, notre nation est devenue signataire du Traité no 1. À la signature du document, on a promis de donner suite au consensus et d'attribuer au prorata les terres à notre nation, soit 160 acres par famille de cinq. Notre nation n'est qu'à 40 minutes de Fort Garry, où nos ancêtres ont signé le Traité no 1. Lors de l'attribution initiale des terres, notre nation a reçu 13 184 acres, et il manquait plus du double du territoire auquel notre nation avait droit.
    Aujourd'hui, seuls 30 % de ces terres peuvent être facilement habitées, et le reste est marécageux. Notre nation, comme la moitié des bandes indiennes au Manitoba, est devenue signataire de l'Accord-cadre sur les droits fonciers issus de traités de 1997 en septembre 1998. Grâce à cet accord-cadre, la nation de Brokenhead est devenue admissible à 14 481 acres supplémentaires pour combler l'attribution initiale insuffisante qui remonte à 127 années. Plus de 13 000 acres n'ont pas encore obtenu le statut de réserve, et pendant que nous tâchions de régler la question de l'attribution insuffisante de terres, d'autres parties de notre territoire ont été saisies pour une voie ferrée, l'autoroute provinciale 59 et une ligne de transport d'hydroélectricité, ce qui constitue des dossiers que nous essayons encore de régler. La nation de Brokenhead a actuellement recours au processus de règlement des revendications particulières pour régler ces dossiers, qui portent actuellement sur 111,7 acres de notre territoire. Sur d'autres parties de nos terres, il y avait ou il y a encore des églises et la Compagnie de la Baie d'Hudson.
    Nous vivons aussi dans une région où nous sommes forcés de créer des réserves satellites et de jouer le jeu interminable de la création de réserves, ce qui continue de remettre à plus tard l'utilisation de nos terres et les profits que nous pouvons en tirer.
(0920)
    Notre nation travaille fort pour donner suite aux répercussions de notre traité et pour résoudre les questions qui y sont liées, soit l'attribution insuffisante de terres par personne, la sélection des terres, les acquisitions, les intérêts des tiers, les relations municipales, la création de réserves au moyen de la politique sur les ajouts aux réserves ainsi que la perte de l'usage et de possibilités sur nos terres. En 1985, nous avons réglé une revendication au moyen du processus de règlement des revendications préalable à l'audience devant le tribunal. Nous nous sommes entendus sur 210 acres, et le règlement n'a pas tenu compte de la perte d'usage ou de possibilités, ni d'autres pertes. L'exercice de quantification des pertes est long et coûteux, et il ne tient pas compte des autres pertes que j'ai énumérées précédemment.
    Lorsque nous avons tenu dans notre nation une audience sur la preuve issue de l'histoire orale, l'atmosphère était très conflictuelle. Les connaissances historiques orales d'un aîné ont été remises en question par un représentant de la Couronne qui s'est appuyé sur la position technique et scientifique traditionnelle en matière de chronologie. Un aîné a ensuite dit en privé que la Couronne s'est vraiment donné beaucoup de mal pour le couvrir de ridicule. Je me suis senti très mal à l'aise de l'avoir mis dans cette position. J'avais presque envie de dire que c'était de ma faute.
    Le processus de financement ne tient pas compte de façon réaliste des efforts qu'une nation doit déployer pour participer équitablement au processus de règlement des revendications particulières. Le temps que le personnel et les dirigeants de nos communautés consacrent à se réunir pour déterminer si des preuves peuvent être mises au jour au sein de notre nation coûte cher. Lorsque notre nation participe à ce genre de processus de règlement des revendications, nous avons besoin de temps et de ressources supplémentaires pour rassurer nos citoyens en leur disant que nous ne perdons pas ou n'abandonnons pas d'autres terres à cause de problèmes historiques entre la Couronne et la nation.
    Conformément au processus actuel, notre nation doit présenter au Canada un projet de budget qui indique avec précision le total des coûts réels du processus, ce qui ne tient pas compte du processus communautaire enclenché pour tenter de fournir nos preuves historiques.
    La priorité est accordée aux processus légaux et à la représentation juridique plutôt qu'aux contributions potentielles de notre nation. De plus, lorsque le personnel du Canada change, le traitement de notre dossier est retardé davantage compte tenu du manque de communication. Il ne semble pas y avoir de planification de la relève pour que se poursuive le traitement de notre dossier.
    Il est très préoccupant que la majorité des plaintes n'ait pas encore été réglée devant le tribunal. À mesure que le délai s'allonge, il y a des occasions manquées, une perte d'usage ainsi qu'une croissance potentielle ratée, et le mieux-être de la nation en souffre.
    La nation ojibwée de Brokenhead continue de subir les répercussions négatives de la saisie historique de ses terres pour, par exemple, le transport ferroviaire et l'hydroélectricité. La nation travaille très fort pour rattraper les progrès réalisés par l'autre partie signataire au cours des 146 dernières années. Comme vous l'avez entendu, c'est ce que nous essayons de faire, au moyen essentiellement de la même assise territoriale que nous avons obtenue en 1871.
(0925)
    Vous avez une minute.
    Alors qu'il y a encore des occupants tiers et des revendications particulières qui doivent être réglées pour notre nation, nous aimerions offrir des solutions. Le tribunal des revendications devrait être totalement indépendant, car le processus n'est pas équitable lorsque le Canada procède lui-même à l'examen, à la recherche et à la prise de décisions. Le Canada devrait nommer un ministre des traités et des revendications territoriales des Autochtones, ou le processus de règlement devrait être simplifié de manière à le rendre plus rapide dans le but de réduire les délais.
    Nous continuons de subir des pertes. Les membres de cette assemblée qui se penchent sur ces dossiers devraient être sensibilisés à la question autochtone afin de posséder des connaissances sur les Autochtones et une compréhension du protocole. Nous aimerions que ce soit ainsi pour toutes les personnes saisies de nos dossiers.
    De plus, les problèmes relatifs aux dossiers devraient avoir préséance sur le processus électoral, peu importe le parti porté au pouvoir. C'est ce que nous essayons de faire dans ma communauté, où le processus électoral n'est qu'une anomalie passagère et où le travail se poursuit pour en venir à bout, mais ce n'est pas ainsi dans le système courant.
    Meegwetch.
    Merci.
    Nous allons passer au chef Roulette.
    Je suis Lance Roulette de la Première Nation Ojibway de Sandy Bay.
    Je ne sais pas exactement quels sont les renseignements que devait fournir la nation Ojibway de Sandy Bay. En 2007, la revendication de Sandy Bay a été rejetée en raison d'une mauvaise communication entre les avocats sur le fonctionnement du processus de revendication. Sandy Bay a ensuite attendu les cinq années requises avant de pouvoir présenter une nouvelle demande en vertu du processus de règlement des revendications particulières. À l'heure actuelle, nous attendons de pouvoir présenter notre demande dans le cadre des revendications territoriales et des revendications particulières.
    Tout au long du processus, nous avons constaté qu'il était difficile d'avoir accès aux bons outils pour permettre de faire avancer plus rapidement le dossier de la Première Nation de Sandy Bay. C'était difficile non seulement parce qu'il fallait surmonter les obstacles pour avoir accès aux bonnes ressources et aller de l'avant, mais aussi parce que les Premières Nations se demandaient si la revendication allait même être entendue, puisqu'on nous demandait de présenter nos observations au même groupe qui allait décider de notre sort.
    Souvent, les négociations ont une incidence réelle sur la nation touchée et sur son avenir. J'aimerais parler des manquements et des interventions au sein des Premières Nations. Il est évident que les Premières Nations ont subi des interventions et qu'elles doivent s'acquitter de la dette émanant de leurs accords de contribution. La plupart du temps, les conditions de ces accords ne sont pas négociées, ce qui représente un élément clé, puisque pour assurer le fonctionnement adéquat de nos systèmes, il faut négocier les accords de contribution afin qu'ils répondent aux besoins de chaque nation, plutôt que d'appliquer la même formule à toutes les Premières Nations du Canada.
    Ensuite, il faut se demander ce que signifie le mot « intervention ». Il s'agit d'une action ou d'un processus visant à améliorer une situation. Aujourd'hui, lorsqu'elles entendent le mot « intervention », de nombreuses Premières Nations ont froid dans le dos, parce qu'il y a une certaine stigmatisation connexe. C'est le signe indirect qu'on juge la gouvernance des Premières Nations déficiente, ce qui contribue aux limites du modèle de financement des programmes d'intervention qui, selon leur forme actuelle, ne permettent pas de répondre aux besoins des Premières Nations. Les modèles de financement sont difficiles à mettre en oeuvre pour améliorer notre qualité de vie. C'est pour cela qu'il y a tant de suicides et de problèmes de santé, surtout dans notre région.
    À Sandy Bay, le problème réside dans l'absence de financement supplémentaire pour répondre à nos besoins particuliers. On répond plutôt aux besoins généraux de toutes les Premières Nations, selon ce qu'on perçoit et ce qui a été désigné dans le cadre du processus actuel.
    De plus, le mécanisme de transfert de fonds doit être plus efficace. Certains projets d'infrastructure dépassent les délais prévus parce que le financement est retardé. Ces retards entraînent une dette pour les Premières Nations; les fonds de fin d'exercice sont réduits. Il faudrait transférer l'argent automatiquement année après année.
(0930)
    Selon les lignes directrices d'AANC, le bénéficiaire n'a pas respecté ses obligations en vertu de l'accord de financement. Ces obligations sont clairement exprimées, mais elles n'abordent pas les besoins de bon nombre des Premières Nations en vue de combler le fossé économique et social.
    Certains changements, qu'ils se fassent à l'échelle fédérale ou provinciale... Si l'on pense à l'augmentation des salaires, par exemple, il s'agit d'un enjeu unique parce que nous prenons part à la convention collective du syndicat du gouvernement du Manitoba. Les salaires augmentent d'année en année, mais la Première Nation ne reçoit pas de fonds supplémentaires pour répondre à ce besoin particulier. L'augmentation du coût de la vie pose également un grave problème, qui soulève la question de l'intervention.
    Certains des problèmes émanant du processus de revendications particulières pourraient être utilisés à titre de levier pour compenser les coûts lorsque les Premières Nations obtiennent un règlement. Les deux systèmes s'influent mutuellement, ce qui donne lieu à un certain niveau d'intervention ou de rancune, puisque nous ne pouvons pas avancer aussi rapidement que l'exige le processus en 23 étapes.
    Pour conclure, je vais parler des éléments précis à désigner dans le cadre du processus d'autosuffisance. De façon générale, on a mis en place des paramètres pour régir la prestation de services en fonction des besoins perçus de l'actuel modèle d'intervention et du modèle de promotion de la pauvreté.
    Que vous soyez politicien, porte-parole ou fournisseur de services, une chose demeure: les décisions prises aujourd'hui amélioreront l'accès aux services et programmes qui reflètent réellement les besoins de nombreuses collectivités des Premières Nations selon le niveau d'intervention. Il faut aussi favoriser le progrès par l'entremise des partenariats, du dialogue et des relations saines.
    Pour qu'une intervention fonctionne parfaitement, il faut établir des délais clairs pour le transfert des ensembles de connaissances et pour le développement d'une stratégie de sortie dans les collectivités des Premières Nations. Je crois que certaines collectivités souhaitent qu'on établisse un réel processus plutôt que de se faire dire, par exemple: « Votre financement dépasse le remboursement de votre dette de 23 %. Un comité d'intervention régional se penchera sur votre cas et vous allez subir une intervention.  »
    Il faut que les Premières Nations comprennent les délais associés à tous les niveaux d'intervention. Certaines d'entre elles ont des DFIT, mais sont tout de même gérées par un tiers. Quelles sont les mesures prises pour les aider à devenir autosuffisantes? J'insiste sur la question de l'intervention et sur son incidence sur les Premières Nations, parce que nous passons par ce processus.
    En ce qui a trait aux revendications, je crois que Sandy Bay a encore beaucoup à apprendre. C'est encore relativement nouveau pour nous et nous avons eu de la difficulté à tenir un dialogue, à avoir cette dernière interaction.
    Merci.
(0935)
    Merci.
    Nous passons maintenant à la période de questions.
    Le premier intervenant est Mike Bossio. Allez-y, monsieur.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie tous de votre présence ici aujourd'hui et de prendre part à cette importante discussion dans le but de trouver des solutions qui perdureront au-delà des élections, ce qui est essentiel à mon avis.
    Avant de commencer, je sais que plusieurs témoins du groupe précédent sont toujours dans la salle. Nous n'avons que très peu de temps pour poser des questions. Je vous encourage à nous transmettre tous les renseignements que vous jugez pertinents. Je sais que nous avons parlé après coup des mesures à prendre et de ce qu'il faut comprendre.
    D'un point de vue législatif, nous croyons vraiment que la DNUDPA est la voie à suivre, si l'on se fie à nombre des propositions faites en Colombie-Britannique et ici aujourd'hui, dans une certaine mesure. Comment pouvons-nous intégrer cela au processus législatif pour éviter les changements d'une élection à l'autre, si c'est la voie à suivre selon nous? Nous voulons faire la bonne chose, mais si on n'officialise rien, il sera trop facile pour les gens de forger leur propre définition.
    [Le témoin s'exprime en cri.]
    Bonjour. Je m'appelle Lorie Thompson. Je suis ici pour aider la nation Ojibway de Brokenhead avec sa présentation.
    Ma réponse à votre question sera très simple et brève: il faut renouveler les voeux associés aux traités.
(0940)
    Le problème à mon avis, c'est que trop souvent, les gouvernements des 200 dernières années ont défini ces voeux à leur façon. Encore une fois, j'aimerais croire que nous sommes tous de bonne foi et que nous voulons tous apporter des changements positifs pour améliorer la vie de tout le monde. Malheureusement, nous savons que la réalité est tout autre. Vous l'avez vécu.
    Je me demande comment nous pouvons respecter l'esprit de ces voeux, les engagements, les traités et les relations si aucune loi ne l'exige. Du point de vue législatif, s'il y avait des mécanismes... Je sais que vous ne pourrez pas répondre à cette question en quelques minutes seulement, alors je vous encourage une fois de plus à... Je crois qu'il faut établir des mécanismes et veiller à ce que les témoignages orientent le rapport à la fin de cette étape.
    Je reviens à l'exemple du Québec. Si vous pouviez faire pour nous ce que vous faites pour le Québec... Nous étions même là avant le Québec.
    Vous soulevez un excellent point. Je parle souvent de l'entente avec le Québec, mais nous savons tous qu'elle a été négociée et renégociée. Comment pouvons-nous officialiser le processus et l'utiliser à titre de gabarit? Je sais aussi que chaque nation est différente, que la réalité de chacune d'elles est différente. Comment pouvons-nous utiliser les mécanismes fondamentaux sous-jacents qui nous ont permis de réussir et les intégrer à un cadre législatif afin d'éviter les changements dans l'interprétation qui surviennent après chaque élection et de veiller à ce que les négociations se fondent sur la bonne foi?
    Je sais que certains d'entre vous ont recommandé d'établir des processus conjoints en vue d'assurer la représentation des Premières Nations et du gouvernement du Canada au sein de tribunaux indépendants, tant à l'étape préalable aux négociations qui mènent à la présentation d'une revendication territoriale qu'à l'étape postérieure à la négociation des revendications, et de confier le travail à des organismes indépendants. À votre avis, s'agit-il du mécanisme clé qu'il faut mettre en place?
    On peut certainement explorer cette voie, mais les traités ne font pas une nation. Nous avons signé les traités à titre de nation. Nous avions nos propres lois et tout. Le Canada a toujours sous-estimé cela.
    Ce qu'on dit, c'est que le processus — qui fait partie de la solution — doit permettre de comprendre les Autochtones, mais aussi de comprendre le traité. Ensuite, nous voulons des fonds. Nous avons besoin du Canada. Tout ce que nous voulons, c'est que le gouvernement nous donne notre juste part des ressources naturelles, que nous demandons depuis toujours.
    Nous avons nos propres lois. On m'a demandé d'adopter la loi sur la santé mentale. Les systèmes judiciaires... au fédéral et au provincial. Je ne peux pas adopter des lois brisées. Je crois que les nôtres permettraient de réaliser des économies. Elles sont intégrées, holistiques et visent la réconciliation. Les lois générales ne sont pas comme cela.
    Tout ce que nous demandons, c'est qu'on cesse de nous imposer des choses et qu'on respecte la relation entre l'État et la nation.
    Merci.
    La parole est maintenant à Kevin Waugh.
    Je vous souhaite la bienvenue sur le territoire du Traité no 1, la terre des Métis.
    Je vois ici qu'en 1997 — et vous en avez parlé — vous avez signé l'Entente-cadre sur les droits fonciers issus des traités du Manitoba. On vous a accordé des droits sur plus de 14 000 acres de terre, mais jusqu'en 2015, vous n'avec obtenu que 680 acres.
    Qu'est-ce qui s'est passé?
    Vous avez présenté d'autres revendications particulières qui ont donné divers résultats. Pouvez-vous nous expliquer la situation? En 1997, on vous a donné 14 481 acres de terre — et vous en avez parlé tout à l'heure —, mais en mars 2015, seulement 680 acres avaient été converties en réserves. Pouvez-vous nous parler de ce processus qui date de 1997?
(0945)
    Tout d'abord, dans le cadre du processus relatif aux droits fonciers issus des traités, le Manitoba ne voulait pas conclure de règlement, alors nous avons relevé le défi. La province ne voulait pas nous donner la part qui nous revenait, alors nous avons parlé aux gens du Manitoba. Nous avons fait toutes les tribunes et toutes les villes comme Brandon, Dauphin, Thompson, Winnipeg et d'autres.
    Ils ont fait leurs présentations. Nous avons dit aux Manitobains que jamais nous ne les traiterions comme on nous a traités. Par la suite, notre demande a été approuvée. Or, même dans le cadre des droits fonciers issus des traités — je ne parle pas d'une revendication en particulier, mais du processus général —, nous rencontrons toutes sortes de difficultés, même lorsqu'il s'agit de conclure un simple accord avec la municipalité.
    La présidente, la ministre Mihychuk, est très au fait de la situation. Quelle est la différence entre une petite mesure comme celle-là et une revendication particulière? Les revendications particulières devraient être plus complexes que les DFIT, mais les deux sont difficiles.
    Aussi, j'espère que vous garderez l'esprit ouvert. Vous pouvez nous souhaiter la bienvenue sur la terre des Métis, mais à titre informatif, ce sont nous, les Premières Nations, qui étions ici en premier; c'est notre terre. Nous ne sommes pas arrivés neuf mois après tous les autres, même si le contact s'est fait plus tard.
    Est-ce que la situation des Métis est un enjeu?
    En ce qui a trait aux intérêts des tiers, vous avez un problème avec cela. C'est vous qui avez jugé bon d'intégrer tous ces processus en matière de droits fonciers issus des traités.
    Est-ce que la situation est différente à Sandy Bay? Vous pourriez nous parler de cela, si vous le voulez bien.
    Chef Roulette, vous êtes un passionné. Vous avez plus parlé des enjeux provinciaux que des enjeux fédéraux, mais vous pourriez peut-être nous parler des revendications territoriales actuelles. Tout le monde parle des problèmes de financement. Nous revenons de la Colombie-Britannique. C'est la question qui préoccupe tout le monde et je crois que c'est la question qui vous préoccupe le plus parce qu'il est très difficile d'atteindre vos objectifs en matière de revendications particulières si vous n'avez pas les fonds nécessaires.
    En effet, les obstacles posent problème à de nombreuses collectivités des Premières Nations, en particulier dans les domaines comme l'éducation, un exemple probant. À l'échelle provinciale, vous offrez un financement de 15 000 $ par élève, voire plus. À Sandy Bay, nous recevons environ 5 300 $ par élève. Nous avons une école qui compte 1 100 élèves. Le budget de l'école est déficitaire d'entrée de jeu; on parle d'un déficit de 1,3 million de dollars, épongé à même nos programmes de revenus autonomes. Un des obstacles auxquels nous sommes confrontés, actuellement, découle du rejet de la revendication qui a été rejetée en 2007 parce que les Premières Nations qui avaient réclamé un des... Quelques membres étaient visés par le certificat de la bande White Mud. Comme vous le savez, avant de se séparer, les bandes de Sandy Bay, de Long Plain et de Swan Lake faisaient partie de la bande White Mud. Les bandes de Long Plain et de Swan Lake ont déjà reçu un accord sur les DFIT. La bande de Sandy Bay n'est pas très différente des bandes de Swan Lake et de Long Plain, mais le fait qu'elle n'est pas incluse dans ce processus ou que sa demande n'ait pas été validée est un obstacle en soi. Le problème, encore une fois, c'est que vous nous demandez de présenter une revendication, mais c'est vous qui êtes chargés de sa validation.
    Les gouvernements antérieurs qui ont présenté des revendications étaient de cet avis. Quelle est l'utilité de présenter une revendication, si les demandes en ce sens proviennent du comité et que les décisions à cet égard sont également prises par le comité? Un processus différent doit être établi.
    Tous les dirigeants de notre collectivité des Premières Nations sont déterminés à obtenir les meilleurs résultats, et ce, pas seulement pour la population; ils veulent également tenter d'établir des partenariats pour combler les écarts économiques. Beaucoup de Premières Nations ont cette détermination et je pense que les dirigeants et la population de Sandy Bay tirent des leçons du processus des revendications particulières.
(0950)
    Merci.
    Le temps du député Waugh est écoulé. Nous passons maintenant au député Romeo Saganash.
    [Le député s'exprime en cri.]
    Étant donné que le Québec a été mentionné deux ou trois fois aujourd'hui, je tiens à apporter une précision, aux fins de compte rendu, pour que ce soit clair pour tout le monde ici présent. Lorsque nous avons signé la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, le gouvernement fédéral a été absent pendant deux ou trois ans. Personne au gouvernement du Québec ne s'est réveillé un matin pour nous dire: « J'aime vos grands yeux bruns. Je veux signer un traité avec vous. » Cela ne s'est jamais produit ainsi, pas même pour les ententes subséquentes. Cela a été rendu possible grâce aux efforts des Cris sur les plans politique et juridique, et il en sera toujours ainsi.
    Cela m'amène à ma question, une question que j'ai posée à beaucoup de gens qui ont précédé les témoins d'aujourd'hui, et même aux gens des groupes de témoins précédents. Une politique, ce n'est qu'une politique. Il ne s'agit pas nécessairement d'un document juridique. Il s'agit d'une politique, tandis que nos relations avec la Couronne et avec les peuples autochtones sont de nature constitutionnelle. À mon sens, ces deux notions sont incompatibles.
    Je tiens à tout le moins à poser la question. Beaucoup de ces problèmes sont liés à la mise en oeuvre de nos divers accords et traités. C'est un thème récurrent depuis que nous avons commencé nos audiences, à Vancouver.
    La question s'adresse à vous trois. Pensez-vous qu'une politique soit représentative de la nature que devrait avoir une relation de nation à nation?
    Merci, Romeo Saganash.
    Non, surtout en ce qui concerne la notion selon laquelle une politique n'est rien d'autre qu'une politique. À mon avis, dans une perspective historique, les problèmes et la stigmatisation touchent aussi les politiques. Nous devons veiller à ce que le processus soit juste et équitable, comme nous le faisons pour certaines mesures législatives à venir au Canada, principalement par rapport à la DNUDPA.
    Vous savez pertinemment que dans le passé, tout au long de l'histoire, les politiques comme la Loi sur les Indiens, notamment, ne visaient essentiellement qu'à nous maintenir dans un état d'infériorité, à tout le moins, tandis que nous cherchons à progresser dans des dossiers liés à d'autres possibilités de développement économique qui font partie intégrante d'aspects précis des revendications territoriales. Pour de nombreuses collectivités des Premières Nations, il s'est avéré difficile de considérer cela comme un indicateur prometteur. Le processus d'inclusion et de consultation lié à l'élaboration d'une politique devrait être mû par les deux côtés. L'élaboration d'une politique avantageuse pour tous passe obligatoirement par un processus de rétroaction, d'inclusion et de consultation à l'échelle du pays.
(0955)
    Je dirais, en ce qui concerne la politique, que cela pose problème. De mon point de vue, par exemple, la Loi sur la transparence est totalement illégale et dégradante. Nous sommes tous assujettis à une politique générale et, en tant que membres d'une nation, je m'oppose personnellement à ce genre de choses.
    En ce qui concerne les finances, nous avons eu récemment une réunion avec notre vérificateur. Il a été convenu à la fin de la réunion de tenir une séance collective le 16 octobre. Nous faisons preuve d'une grande transparence en matière de finances. Seules les Premières Nations ou les personnes qui ne s'acquitteraient pas de leurs responsabilités devraient faire l'objet de mesures. Plutôt que d'établir un processus équitable, le gouvernement a décidé, par l'intermédiaire de ses bureaucrates, ou peu importe, d'établir une politique applicable à tous alors que cela devrait fonctionner au cas par cas.
    Je pense que dans bien des cas, beaucoup trop d'éléments sont laissés à l'interprétation. Nous en avons fait l'expérience à certains égards. Par conséquent, nous avons dû insister sur la gouvernance pour veiller à dissiper toute ambiguïté. Il y a les liens hiérarchiques, les rôles et les responsabilités, etc.
    Je vais en rester là.
    Il me reste environ 45 secondes, je crois. J'ai seulement le temps de poser une question.
    L'article 40 de la DNUDPA indique ce qui suit: « Les peuples autochtones ont le droit d'avoir accès à des procédures justes et équitables [...] ». Je pense que nous avons affaire à une politique qui n'est pas conforme à cette disposition. On a laissé entendre que les politiques, quelles qu'elles soient, ne peuvent être simplement corrigées par des changements mineurs; cela doit être conforme à nos obligations constitutionnelles et à nos obligations internationales. Êtes-vous d'accord là-dessus?
    Je dirais que c'est juste.
    Quelqu'un souhaite répondre? Vous avez seulement 10 secondes.
    Ils peuvent prendre une partie de mon temps pour répondre.
    Quiconque veut répondre peut le faire.
     Il y a manifestement un manque de cohérence, et c'est pour cela que nous sommes tous ici. En ce qui concerne la DNUDPA, en fin de compte, l'enjeu central à tous les égards est le droit à l'autodétermination. Ce droit n'a jamais été cédé et il englobe tous les aspects de notre mode de vie, de façon holistique, mais pas seulement les terres. Le territoire, c'est notre origine, c'est ce qui nous définit, c'est ce qui détermine la façon dont nous parlons, la façon dont nous nous traitons les uns les autres, la façon dont nous nous gouvernons et la façon dont nous interagissons, de nation à nation ou avec le monde extérieur. En ce qui concerne la mise en oeuvre de la DNUDPA, oui, je suis tout à fait d'accord. Toutefois, nous avons acquis beaucoup de ressources et de renseignements au fil des ans. Nous avons la CRPA, la SJA et le rapport de la CVR. Toutes les informations s'y trouvent. À cela s'ajoute l'enquête en cours sur les femmes autochtones disparues ou assassinées.
    Quant au droit à l'autodétermination, empêcher une nation d'exercer son droit à l'autodétermination est un génocide. Cela revient à dépouiller un être humain de toutes ses caractéristiques intrinsèques pour essayer de le transformer en quelque chose qu'il n'est pas. Le processus actuel ainsi que les processus de revendications territoriales doivent également comprendre un important aspect de guérison, et c'est un aspect sur lequel on doit porter une très grande attention.
    Meegwetch.
(1000)
    Merci.
    C'est maintenant au tour du député T.J. Harvey.
    Merci, madame la présidente.
    Premièrement, je tiens à remercier chacun d'entre vous d'avoir pris le temps, malgré votre horaire chargé, de comparaître au Comité. Je sais que vous êtes tous très occupés. Nous vous sommes vraiment reconnaissants de vous être libérés afin de nous permettre de discuter avec vous. Je pense que c'est une discussion importante. Je reconnais que nous avons longtemps omis de reconnaître l'importance de relations mutuellement avantageuses entre les peuples autochtones et le Canada dans son ensemble, et d'agir en ce sens. À mon avis, c'est là une observation juste.
    Compte tenu de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et du thème central de cette étude, les revendications particulières, notamment ce qui concerne le financement du processus ou du cadre général, l'un de vous pourrait-il nous présenter des observations sur ce qui serait, à votre avis, les meilleures étapes pour renouveler le processus, à l'avenir, pour le simplifier et favoriser les progrès?
    Je crois savoir que nous avons recommandé que vous suiviez une formation sur le savoir autochtone, sur notre interprétation du rapport à la terre, sur les avantages qu'elle nous procure, et sur les pertes que nous avons subies. Toute personne appelée à jouer un rôle dans la question autochtone devrait avoir une véritable compréhension du contexte général. Il convient aussi d'intégrer des facteurs qui nous assureront une réponse adéquate quelconque.
    Considérant les efforts que nous avons consentis, ce qu'on nous propose est honteux. Je ne ferais pas cela à mon pire ennemi. Je ne sais pas si je fais office d'ennemi juré, il est certainement honteux de recevoir une telle proposition. Nous devons simplement nous y opposer. Cela dit, ce ne serait pas nécessaire s'ils comprenaient véritablement notre point de vue par rapport aux pertes que nous avons subies. On nous présenterait alors une offre raisonnable et non une offre embarrassante.
    Je dirais simplement, encore une fois, qu'il faut définir les paramètres d'une solution fonctionnelle. Je pense que les participants ont déjà indiqué clairement qu'il faut un processus fondé sur la justice, l'équité, l'honnêteté et l'inclusion.
    Vous avez deux minutes.
    Une question à suivre...
    Allez-y.
     J'aimerais simplement ajouter quelques observations.
    Évidemment, comme on l'a déjà indiqué, il faut en fin de compte que des efforts concertés soient mis en oeuvre de bonne foi, mais il faut également chercher à établir un processus axé sur les priorités, conjointement ou collectivement, peu importe, et vous devez consentir un compromis afin de respecter et d'harmoniser les processus en place. En ce moment même, nous sommes dans un processus qui se compte en minutes, mais lorsque nous nous assoyons en cercle avec nos aînés, cela se calcule en jours. Il s'agit d'une occasion d'écouter et de discuter des enjeux. Nous avons besoin de cette tribune pour avoir une véritable discussion, au lieu d'être toujours à court de temps. Il faut prendre le temps nécessaire pour régler ces problèmes.
(1005)
    Parfait.
    Ma question complémentaire porte sur ce contexte et sur certaines observations formulées plus tôt, notamment sur la portée générale des politiques et leur possible incidence négative sur le processus propre à chacune des Premières Nations, surtout dans l'optique des importantes différences de leur situation économique, selon leur emplacement géographique et leur proximité à des régions plus densément peuplées. Comment pouvons-nous veiller à tenir des discussions justes et équitables avec chacune des collectivités, en reconnaissance de la nécessité de discussions distinctes, mais sans pour autant nous engager dans un processus de longue haleine parce que nous refusons d'adopter une approche plus générale? L'utilisation d'une approche individualisée entraîne inévitablement une multiplication des embûches. Comment pouvons-nous garantir la mise en oeuvre d'un processus à la fois fluide et rapide?
    C'est une excellente question qu'il faudra garder pour plus tard, puisque le temps est écoulé.
    Nous passons maintenant à Mme Cathy McLeod.
    Merci, madame la présidente. Je tiens encore une fois à remercier les témoins d'être venus aujourd'hui pour discuter de cet important enjeu.
    Chef Jim Bear, vous avez présenté des recommandations, et vous avez aussi évoqué le cas d'une revendication territoriale particulière très difficile, je crois, un dossier dans lequel un de vos aînés était trop bouleversé pour témoigner. Pouvez-vous nous parler davantage de cette revendication et nous décrire le déroulement du processus, pour que nous ayons une idée précise de ce qui s'est passé sur le terrain?
    Je demanderais à Lorie de m'aider.
    Nous avions fait une présentation. C'était à Vancouver, je crois.
     En effet.
    Dans la foulée de ces séances, il a été recommandé de trouver un lieu agréable, dans la réserve, pour faire la présentation. Il a donc été décidé d'organiser un forum dans notre communauté pour que nous puissions faire notre présentation. Des aînés devaient faire des exposés. Je crois qu'ils étaient trois. Je demanderai encore une fois à Lorie de vous expliquer comment cela fonctionnait. Elle est avocate, donc elle connaît le juge, ou peu importe. Je ne vais pas en cour très souvent.
    Revenons aux aînés. La personne — le représentant de la Couronne, je crois — était très hostile. À entendre les questions, on avait presque l'impression qu'on prenait l'aîné pour un assassin. Voilà pourquoi j'ai indiqué plus tôt, avec ironie, que j'avais envie de me déclarer coupable. On a fait preuve d'un manque de respect flagrant à l'égard des aînés. Même sur le plan scientifique... Si vous occupez une terre assez longtemps, vous savez ce qui va arriver. Les gens qui ont une compréhension du savoir autochtone, ce sont les agriculteurs, des gens qui ont un rapport avec la terre et qui comprennent ce genre de choses. Cela dit, le ton était très conflictuel, et j'étais franchement désolé d'avoir placé les aînés dans une telle situation.
     J'ajouterais simplement quelques points sur les aspects techniques et juridiques. Je dirais qu'il a fallu un bon moment pour les convaincre que la présentation de preuve par récits oraux était un aspect important qui devrait figurer au compte rendu pour ce genre de revendication. On nous a répondu que ce n'était pas la procédure habituelle. Eh bien, nous avons toujours vécu ainsi, alors qu'importe la procédure habituelle.
    Voilà donc quel était le contexte; convaincre était difficile. Même si la Première Nation de Brokenhead était représentée par des avocats spécialisés, j'ai dû intervenir personnellement pour les convaincre que nos récits oraux étaient importants. En outre, la prise en compte de ce que nous apportons à la table, de nos contributions et de notre contexte historique reste à améliorer. Comme je viens de l'indiquer, ils doivent faire des compromis sur ces enjeux en tenant compte des arguments que nous présentons en fonction du point de vue, de la gouvernance culturelle et des perspectives judiciaires et juridiques que nous avons depuis toujours. Nous les avons toujours et nous les appliquons encore tous les jours dans les diverses Premières Nations, malgré la Loi sur les Indiens et tout ce qui vient avec.
    Dans le cadre de ces processus, en particulier lorsque nous tentons de rectifier les faits sur les répercussions historiques... Encore une fois, aucun financement n'a été offert pour recueillir ces renseignements et discuter avec les aînés. Je souligne en outre que nous avons perdu des aînés pendant ce processus. Je tiens à les nommer aujourd'hui; il s'agit des regrettés Carol Jones, Clarence Kent et Lawrence (Happy) Smith. Ils devaient témoigner ou fournir des renseignements dans le cadre de ce processus s'étirant sur deux ou trois ans, mais ils nous ont quittés pour poursuivre leur voyage spirituel. Donc, le temps est un facteur important; il est urgent d'agir.
(1010)
    Merci.
    C'est la série de questions de cinq minutes, maintenant; le temps est donc encore plus serré.
    Le prochain intervenant est le député Gary Anandasangaree.
    Merci beaucoup de votre présence. Je reconnais aussi que nous nous trouvons sur le territoire du Traité no 1.
    Pouvez-vous nous parler de l'incidence directe que la DNUDPA pourrait avoir sur la restructuration des processus de règlement des revendications particulières et globales, ainsi que de votre vision du futur processus d'arbitrage? Je sais que vous avez mentionné, chef Bear, que le processus d'arbitrage devrait être modifié de façon à incorporer de nombreuses pratiques et traditions des communautés autochtones.
    Certainement. Encore une fois, tout ce qu'il faut, c'est dialoguer, et nous sommes prêts à le faire. Nous ne voulons pas répéter le désastre de la Loi de 1982 sur le Canada. Même à l'époque, j'aurais aimé qu'il y ait des principes et j'aurais voulu avoir la possibilité de travailler à ces principes dans une relation équitable basée sur la confiance, où toutes les parties auraient été gagnantes. Ce n'est jamais arrivé.
    Pour ce qui touche le processus de règlement des revendications, nous avons émis des recommandations, et le plus tôt que le processus d'arbitrage... Je le répète, nous sommes une nation. Je sais qu'on ne nous traite pas comme une nation, mais nous en sommes une.
    Si vous me permettez d'approfondir la question, dans votre déclaration préliminaire, vous avez suggéré, entre autres, de créer un tribunal indépendant. J'essaie de comprendre quelle en serait la forme. Selon vous, quels éléments seraient nécessaires pour que le tribunal soit véritablement indépendant?
    En résumé, il devrait s'agir d'un tribunal indépendant non créé par le gouvernement fédéral. Si c'est le gouvernement fédéral qui le crée, il doit incorporer nos coutumes; ainsi, nous saurons que nous avons au moins un recours une fois qu'il aura décidé comment répondre à nos demandes.
    Actuellement, tout est du ressort du gouvernement, et les coutumes de la Première Nation sont presque entièrement absentes. Je pense que nous avons tous dit, et vous l'avez probablement entendu partout au Canada, qu'il n'y a tout simplement pas de fonds même pour préparer la demande et comprendre l'ampleur de notre perte. Il y a les traditions orales de notre peuple et notre vision du territoire; il faut faire énormément de recherches et mener des consultations. Puis, on nous retire le dossier, et il est examiné par des gens qui, selon moi, ont une obligation, mais le processus n'est pas juste pour la Première Nation parce qu'elle ne participe aucunement à la décision.
(1015)
    Il nous reste quelques minutes puisque nous avons commencé un peu en retard. Je donne donc la parole à M. Saganash, député.
    Quelle surprise, merci. Je croyais avoir terminé.
    Beaucoup des questions qui ont été soulevées au cours des deux derniers jours, ici et à Vancouver, sont liées à la mise en oeuvre de nos ententes. Il existe une notion, du moins dans notre milieu, qu'il faut respecter la primauté du droit. Respecter la primauté du droit veut dire respecter la Constitution, et la Constitution du Canada comprend des droits ancestraux et issus de traités. Voilà ce que signifie respecter la primauté du droit, et c'est le thème qui a été soulevé par chaque groupe de témoins que nous avons reçu depuis le début.
    J'aimerais savoir ce que vous considérez comme une relation de nation à nation. Selon vous, la façon dont les choses fonctionnent aujourd'hui au Canada constitue-t-elle une relation de nation à nation?
    C'est une question d'ordre très général.
    Pour ce qui concerne la mise en oeuvre de cette relation à l'extérieur de la primauté du droit, c'est simplement une question de respect de la personne, une question de respecter la dignité de la condition humaine afin que tous puissent atteindre la bonne vie, mino-bimaadiziwin, et de respecter les processus établis par les différentes nations.
    Pour régler les questions en suspens, la nation Brokenhead a créé, de sa propre initiative, un groupe de règlement des différends formé d'aînés. Ce groupe examine les faits et conçoit des solutions, en se fondant sur le respect et l'équité, et il formule des recommandations par rapport aux processus de gouvernance et d'administration, tout en tenant compte du bien-être de l'ensemble de la communauté en accomplissant ce travail bénévolement.
    Merci.
    La dernière intervention conclut cette partie de la séance. Merci beaucoup d'avoir laissé le travail important que vous accomplissez dans vos communautés pour vous joindre à nous. Ce fut un plaisir de vous accueillir.
    Meegwetch. Merci de votre collaboration.
    Nous allons faire une courte pause. La séance reprendra dans environ 10 minutes.
(1020)

(1030)
    Bienvenue. Vous êtes notre dernier groupe de témoins à Winnipeg, en notre deuxième journée. Le Comité souhaite recevoir vos avis sur les revendications territoriales particulières et globales.
    Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous présenter vos points de vue.
    Nous accueillons des représentants de la Manitoba Metis Federation, des Dénésulines d'Athabaska et des Dénés du Ghotelnene K'odtineh.
    Chaque groupe a droit à 10 minutes pour présenter un exposé, après quoi nous passerons à la période de questions.
    Nous allons commencer par Jason, de la Manitoba Metis Federation.
    Je m'appelle Jason Madden. Je suis un avocat métis et un citoyen de la nation métisse. Je suis également conseiller juridique pour la Manitoba Metis Federation dans le contexte des négociations concernant ses revendications territoriales et son autonomie gouvernementale.
    Je vais d'abord présenter quelques faits historiques, car selon moi, dire la vérité au sujet de notre histoire fait partie de la réconciliation. L'histoire des Métis est souvent racontée à coup de petites phrases. Toutefois, tous ne comprennent pas que le Canada ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui sans l'entente constitutionnelle qui a été nouée ici en 1869 et 1870 entre le gouvernement provisoire des Métis et le gouvernement du Canada.
    Je vous ai remis un document. D'après moi, les Métis cherchent depuis toujours à trouver leur place au sein de la Confédération et à conserver leur place sur la carte. J'aimerais vous présenter deux citations, une de Louis Riel et une de Sir John A. Macdonald, qui révèlent la dynamique ou la divergence de vues par rapport à ce qui s'est réellement passé ou à l'entente qui a été nouée.
    Voici ce que Louis Riel a écrit en 1885 au sujet de la relation:
Quand la Puissance [le gouvernement du Canada] se présenta à nos portes, elle nous trouva donc dans le calme. Elle trouva dans le Nord-Ouest non seulement le peuple métis en bonne condition de vivre sans elle [...], mais le peuple métis avec un gouvernement à lui, libre, en paix, fonctionnant et faisant à son compte l'oeuvre de la civilisation que la Compagnie de l'Angleterre n'eût pu faire sans des milliers d'hommes de troupe: un gouvernement de constitution définie et dont la juridiction était d'autant plus légitime et à respecter qu'elle s'exerçait sur un sol qui lui appartenait.
    Voilà comment Louis Riel voyait l'entente qui a été négociée, entente qu'il a appelée plus tard un traité entre les Métis et le Canada.
    Voici ce que Sir John A. Macdonald a écrit dans son journal intime, probablement à l'intention d'un de ses copains de beuverie:
[...] il faudra très bien gérer la situation pour que ces sauvages restent tranquilles. D'ici une autre année, les résidents actuels seront tous submergés par l'afflux massif d'étrangers, qui arriveront avec l'idée de devenir des colons vaillants et paisibles.
    Voilà ce que Sir John A. Macdonald a écrit en 1869. C'était la vision: oui, bien sûr, faites la promesse, faites tout ce qu'il faut pour que nous obtenions tout ce que nous voulons, ensuite nous les submergerons. Voilà les assises de la relation entre le Canada et la nation métisse. Pour qu'il y ait réconciliation, il faut dire la vérité.
    Louis Riel est à la mode en ce moment. On le voit sur des chandails et dans les médias sociaux, mais il faut se rappeler la cause qu'il défendait. Il ne se battait pas pour l'aliénation de l'Ouest ni strictement pour les droits linguistiques des francophones. Il se battait pour son peuple, le peuple métis. Pour rendre honneur à Louis Riel, il faudra donc que vous vous réconciliiez avec les Métis. Nous attendons ce moment depuis longtemps et nous pensons que nous accomplissons des progrès. Nous allons en parler dans le contexte de l'autonomie gouvernementale et des processus de règlement des ententes modernes sur les revendications territoriales. Or, je crois qu'il est important de se rappeler notre histoire et de l'assumer.
    Personne ne peut voyager dans le temps pour récrire l'histoire ou la modifier, mais nous ne pouvons pas non plus l'esquiver.
    La réconciliation et ce que vous appelez des revendications — je déteste le terme « revendication ». Défaites-vous-en. Dire que nous revendiquons quelque chose est tellement condescendant. Il y a des griefs historiques. Il y a des affaires en suspens. Or, vous présumez que le titre sous-jacent vous appartient, ce qui est faux selon le droit international. Ainsi, l'idée que nous revendiquons, que nous quémandons, et non que nous essayons de dire la vérité au sujet de la façon dont le Canada a été formé et de régler les affaires en suspens de la Confédération ou les griefs historiques... Vous voulez une recommandation? Éliminez ce terme du système, car il est péjoratif et aussi incorrect, et il est imprégné de préjugés qui, selon moi, sont dépassés.
    Cet accord est l'entente originale qui a intégré l'Ouest du Canada à la Confédération. Je pense qu'on peut dire que la relation des Métis a passé par plusieurs étapes. Après 1870, c'est une histoire de dépossession, de déni et de discrimination, que les Premières Nations et d'autres connaissent bien.
(1035)
    Après 1870, ils ne vont pas seulement nous submerger par l'afflux de colons; ils vont exercer un règne de la terreur. Ils vont violer, battre et tuer les Métis, et c'est ainsi qu'ils vont acquérir le territoire. Ce n'est pas seulement avec l'arrivée de colons vaillants. C'est en raison de tout cela que les Métis ont perdu une grande partie de leurs terres traditionnelles et qu'ils se sont dispersés dans diverses régions de la province, ainsi que de l'Ouest du Canada.
    Après la Deuxième Guerre mondiale, des vétérans métis sont revenus et ils ont commencé à rebâtir et à réorganiser la communauté métisse du Manitoba. Ils étaient allés se battre pour le Canada et pour les droits internationaux de la personne, et l'idée qu'ils ne jouissaient pas de ces droits sur leur propre territoire était profondément offensante. À partir de 1967, la Manitoba Metis Federation est fondée et des groupes métis commencent à s'organiser dans les Prairies.
    J'appelle la période de 1982 à 2016 « négociations interrompues » et « à la recherche de la justice dans les tribunaux ». En 1982, les Métis croyaient que tout allait changer et que les négociations commenceraient. Ils ont vite compris que l'article 35 ne faisait que donner aux Métis le droit de faire appel aux tribunaux. C'est ce qu'ils ont fait, et ils ont continué à le faire durant les 15 dernières années. J'ai fait appel aux tribunaux cinq fois et j'ai gagné chacune de mes causes.
    Dans une trilogie d'affaires, soit l'affaire Powley en 2003, l'affaire Manitoba Metis Federation en 2013 et l'affaire Daniels en 2016, on a posé les questions juridiques constitutionnelles et fondamentales liées aux Métis et on y a répondu. Dans ces affaires, il a été décidé que les Métis ont compétence, qu'ils ont les mêmes droits que les Premières Nations et les Inuits, et qu'ils ont des revendications territoriales en suspens. Nous espérons que nous entrons dans une nouvelle ère de réconciliation, de réparation et de respect.
    J'aimerais parler de ce qu'on appelle la revendication territoriale de la MMF. Par rapport à l'article 35 de la Loi constitutionnelle, on pense parfois qu'une revendication territoriale doit porter sur un territoire précis. Or, selon le paragraphe 35(3), sont compris parmi les droits issus de traités les droits existants issus d'accords sur des revendications territoriales ou ceux susceptibles d'être ainsi acquis. D'après la MMF, l'article 35 doit être interprété de manière progressive, ce qui veut dire que les droits ancestraux peuvent être transformés en droits issus de traités au moyen de négociations.
    Le problème pour les Métis, c'est qu'en 1981, ils ont présenté leur revendication territoriale au Canada, et d'éminents avocats du ministère de la Justice l'ont examinée et ont décidé qu'elle n'était pas fondée. En fait, nous avons inclus la lettre; voici ce qui y est écrit:
Vous trouverez ci-joint la réponse du gouvernement à votre revendication territoriale. Elle a été préparée par nos conseillers juridiques, qui sont d'avis que la revendication déposée n'est pas juridiquement valide et qu'il n'est pas justifié de poursuivre les recherches.
    Cette lettre a été envoyée à la MMF en 1981. Six mois plus tard, la MMF a fait ce que tous les groupes autochtones font: elle a engagé Tom Berger. C'est ainsi qu'a commencé un litige qui a duré 32 ans. La beauté des avocats du ministère de la Justice, c'est qu'ils ont toujours tort dans les affaires de ce genre. Trente-deux ans plus tard, la Cour suprême du Canada a reconnu qu'il y avait bel et bien une revendication en suspens, qu'il s'agissait d'une promesse ou d'une entente fondamentale du Canada, et que la Couronne n'avait pas mis en oeuvre de façon honorable l'article 31, ou la concession de terres. Il a fallu 32 ans, des millions de dollars, ainsi qu'énormément de temps et d'énergie, mais les Métis ont réussi à démontrer qu'ils devraient être inclus après avoir été exclus historiquement pendant des années. Depuis 2013, un protocole d'entente et une entente-cadre ont été signés, et les Métis commencent enfin à participer aux négociations.
    Je recommande à toutes et à tous de lire le rapport sur les droits des Métis de Tom Isaac, représentant spécial de la ministre. Ce rapport bref, bien écrit et très utile résume — beaucoup mieux que je ne peux le faire en 10 minutes — l'histoire des droits des Métis et les modifications qui doivent être apportées à vos politiques actuelles sur les revendications territoriales et les ententes d'autonomie gouvernementale afin d'inclure les Métis. En gros, il affirme que les Métis n'ont pas leur place, que vos politiques sont conçues pour les Premières Nations et les Inuits, et que ces politiques excluent les Métis par leur nature même. C'est absurde que nous devions soutenir d'autres causes partout au Manitoba et dans d'autres régions des Prairies plutôt que de participer aux négociations.
    Un autre gros problème pour nous, c'est la politique. Actuellement, dans mon rôle de conseiller juridique de la MMF, j'ai l'impression que je suis Charlie Brown et que Lucy tient le ballon de football, car il pourrait être retiré à tout moment puisqu'il n'y a pas de cadre stratégique pour les négociations des Métis. Il n'y a pas de fondement législatif.
(1040)
     Je crois que c'est l'un des messages clés que nous souhaitons faire entendre aujourd'hui. Les négociations avec les Métis doivent disposer d'une certaine forme de cadre afin d'empêcher que le ballon soit retiré ultérieurement.
    Merci.
    Je suis navrée que les choses soient si rigides. Le Comité fonctionne selon un processus qui a l'approbation de tous les partis politiques. Ce processus nous donne la possibilité de vous poser des questions tout en veillant à ce que les choses soient équitables, ce qui, effectivement, peut sembler très rigide. Je m'en excuse.
    Nous allons maintenant passer à notre deuxième présentation.
     Ronald, nous vous écoutons.
     Bonjour. Je m'appelle Ronald Robillard, et je suis négociateur en chef des Dénésulines Athabasca de la Saskatchewan. Je suis accompagné de Barry Hunter, qui est conseiller en négociation.
    J'ai une présentation à vous lire. Il s'agit d'un mémoire que nous présentons au nom des chefs dénés d'Athabasca et des membres de Fond du Lac, de Black Lake et de Hatchet Lake.
    Au nom des Dénésulines Athabasca de la Saskatchewan, nous tenons à remercier le Comité pour l'occasion qu'il nous donne. Après sept ans de poursuites, les Dénésulines d'Athabasca se sont mis à travailler pour l'obtention d'un règlement négocié, ce qui dure depuis 18 ans. À titre informatif, les Dénésulines d'Athabasca comprennent les Premières Nations de Black Lake, Fond Du Lac et Hatchet Lake.
    Notre histoire, notre culture et notre mode de vie s'étendent sur des milliers d'années et se fondent sur les déplacements des troupeaux de caribous de Beverly et de Qamanirjuag. Notre territoire ancestral suit l'itinéraire de ces troupeaux, et certaines parties se trouvent au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest, comme on les appelle maintenant. Vous trouverez une carte de cela dans notre mémoire.
    Les frontières politiques récentes ont mis à mal notre mode de vie ancestral, si bien que nous peinons maintenant à l'exercer. Nous sommes aux prises avec les réglementations de multiples administrations. D'autres changements sociaux ont eu une incidence négative sur notre culture, nos économies et notre mode de vie ancestral. Nous avons l'impression qu'il y a un manque de respect et un mépris à l'égard de nos droits ancestraux.
    Durant les années 1970 et 1980, les Dénésulines d'Athabasca ont commencé à s'inquiéter du fait que le Canada négociait — sans consultation et sans apport des parties concernées — des règlements de revendications territoriales de grande portée avec d'autres groupes autochtones des Territoires du Nord-Ouest, dont la fixation de frontières territoriales traversant le territoire ancestral et actuel des Dénésulines d'Athabasca .
    La position du Canada selon laquelle les Dénésulines d'Athabasca n'ont pas de droits non éteints dans les Territoires du Nord-Ouest se fonde sur la clause d'extinction générale contenue dans les Traités nos 8 et 10 et sur le fait que les Dénésulines d'Athabasca détiennent aussi des droits fonciers issus de traités en Saskatchewan.
    Les tentatives ratées d'amener le gouvernement fédéral et le gouvernement des Territoires à reconnaître nos droits ont incité les Dénésulines d'Athabasca à intenter une poursuite. C'était en 1991. Les Dénésulines voulaient obtenir des déclarations affirmant qu'ils ont des droits issus de traités ou des droits non éteints ainsi que des réparations pour la violation de ces droits.
    En 1995, notre revendication a été reconnue par la Commission des revendications des Indiens, qui a conclu que les Dénésulines d'Athabasca ont des droits de récolte issus de traités au nord du 60e parallèle. La commission a donc recommandé au Canada de reconnaître officiellement l'existence de ces droits et de leur accorder la protection prévue aux termes de l'article 35.
     En 2000, nous avons entrepris la négociation d'un règlement hors cour avec l'intention de mettre fin à la poursuite, de revenir sur les occasions perdues et de faire reconnaître les droits dénés au nord du 60e parallèle. Bien qu'il compte certains éléments d'une revendication plus globale — comme la gestion des terres et des ressources —, ce règlement hors cour reste muet en ce qui concerne les droits concernant l'exploitation du sous-sol, le partage des redevances et l'autonomie gouvernementale, et passe à côté d'autres éléments d'une revendication globale.
    Outre ces limites, nous nous préoccupons du fait que l'ébauche d'entente définitive avec les Dénésulines d'Athabasca continue d'exiger que nous renoncions complètement à toute revendication passée et à venir en matière de droits autochtones.
    Comme nous trouvions ce principe répréhensible — compte tenu de la longueur et des coûts des poursuites ainsi que des conditions que pose le Canada lorsqu'il négocie —, nous avons consulté nos chefs et nos aînés, et nous avons entrepris de négocier un règlement avec le Canada, règlement qui allait porter sur une bonne partie des éléments — mais pas tous — figurant dans une réclamation globale.
    Or, cette négociation s'est avérée extrêmement pénible en raison de la présence de multiples administrations territoriales et du gouvernement provincial, de l'intransigeance d'une bureaucratie figée, incapable de s'adapter au caractère particulier de cette situation, ainsi que de l'existence d'intérêts se chevauchant au sein des groupes autochtones. Malgré cela, nous sommes parvenus à conclure une entente définitive provisoire avec la Couronne fédérale. Pour le reste de notre exposé, nous allons nous pencher sur les principaux problèmes que nous avons dû régler ainsi que sur les solutions auxquelles nous sommes arrivés.
    Premièrement, en ce qui concerne les intérêts se chevauchant au sein des groupes autochtones, un accord historique a pu être conclu, en 2007, entre les Dénésulines d'Athabasca, les Dénés du Ghotelnene K’odtineh et les Inuits. Fruit de compromis et de négociations soutenues, l'accord a reçu l'appui du gouvernement du Canada. On y décrit l'entente à laquelle les différentes parties sont arrivées concernant les territoires des Dénésulines d'Athabasca et des Dénés du Ghotelnene K’odtineh, les droits de gestion des récoltes et des ressources au Nunavut ainsi qu'une énumération des modifications devant être apportées à l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut pour permettre l'application de ces droits.
    Cet accord a mis la table pour parachever la négociation des droits des Dénésulines d'Athabasca et des Dénés du Ghotelnene K’odtineh au Nunavut. Des discussions avec les Dénés d'Akaitcho et les Métis des Territoires du Nord-Ouest sont en cours, mais il a été difficile jusqu'ici de trouver des arrangements qui font l'affaire de tout le monde.
(1045)
     Le Canada a appliqué différents critères pour tenter de fixer les frontières des territoires d'établissement des divers groupes autochtones. Seuls les Dénésulines d'Athabasca et les Dénés du Ghotelnene K’odtineh ont eu à prouver au Canada et au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest le bien-fondé de leur zone d'établissement au moyen de recherches sur l'utilisation et l'occupation des terres.
    Pendant ce temps, les autres groupes autochtones cherchent à négocier des zones d'installation avec le Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, des zones qui couvrent la majeure partie de notre territoire ancestral dans la région de South Slave. Pourtant, on ne leur demande pas de fournir des preuves comme celles qu'on nous demande en matière d'utilisation et d'occupation des terres. Dans son ensemble, la situation est différente de celle du Nunavut, car la région de South Slave ne fait l'objet d'aucun autre accord définitif en matière de revendication territoriale. Les accords provisoires entre les Dénésulines d'Athabasca et les Dénés du Ghotelnene K’odtineh sont rédigés avec des signets pour la gestion des ressources et d'autres dispositions afin d'éviter de nuire aux droits d'autres groupes autochtones.
    L'accord projeté par les Dénésulines d'Athabasca fait actuellement l'objet d'un processus de consultation auprès des autres groupes. En ce qui concerne les questions territoriales, hélas, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest s'oppose à la version provisoire de l'accord avec le Canada en raison des dispositions sur la superficie des zones d'établissement et la gestion des ressources. Cette opposition découle du fait que ce gouvernement désigne à tort les Dénésulines d'Athabasca comme étant des non-résidents qui n'auraient pas les mêmes droits et les mêmes avantages que les autres peuples autochtones du Nord. L'opposition du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest vient couronner ses années de participation timide aux négociations, participation qui a été une grande source de frustration et qui s'est soldée, en fin de comte, par son retrait du processus. À maintes reprises, les Dénésulines d'Athabasca ont engagé des frais considérables pour rencontrer le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et celui du Canada afin de trouver une solution au problème de la superficie des zones d'établissement et, notamment, pour inciter le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest à revenir à la table des négociations.
    Nous avons proposé plusieurs approches possibles, mais elles ont toutes été rejetées. Qui plus est, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest n'est jamais arrivé avec des alternatives claires que nous aurions pu examiner. Pour nous, ce gouvernement ne fait plus partie des négociations ou d'un éventuel règlement. En réaction à l'opposition manifestée par le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, le Canada nous a proposé de conclure un traité bilatéral avec lui. La majorité des problèmes rédactionnels et techniques relatifs à l'utilisation des terres ont été résolus. Le Canada et les Dénésulines d'Athabasca doivent continuer d'appliquer cette approche bilatérale pour trouver des terrains d'entente.
    Jusqu'à tout récemment, le gouvernement du Nunavut était revenu à la table des négociations. Lorsqu'il est revenu, il a commencé à commenter les accords définitifs provisoires et le financement de la mise en oeuvre, et il a insisté pour être inclus au nombre des signataires du traité. Nous ne voyons aucune justification d'ordre constitutionnel qui pourrait cautionner leur participation à notre traité. En permettant aux gouvernements territoriaux de retarder la conclusion du traité sous prétexte qu'ils doivent en faire partie, le Canada donne préséance aux préoccupations locales et étroites de ces gouvernements, et leur permet d'imposer leur veto concernant ses obligations constitutionnelles à l'égard des traités et de nuire à l'atteinte de l'objectif primordial qu'est la réconciliation. Après tout, les traités se concluent de nation à nation.
     Honnêtement, nous sommes d'avis que 7 ans de poursuite et 18 autres de négociations, c'est assez. Au cours de cette période, nous avons eu affaire à 9 gouvernements canadiens, 14 ministres fédéraux, 6 négociateurs fédéraux, 4 représentants ministériels spéciaux et à une pléthore de gouvernements territoriaux. Ces gouvernements venaient de tous les horizons politiques, et nos revendications n'ont jamais eu de connotation partisane. Chaque changement a nécessité une adaptation sur le plan politique et a entraîné des retards considérables. Rappelons que de tels retards ont une incidence sur la crédibilité même des négociations, ainsi que sur l'actualité et la pertinence de l'accord.
    En conclusion, le Canada et les Dénésulines d'Athabasca sont arrivés à un accord bilatéral définitif provisoire qui met fin à un différend qui dure depuis 25 ans. L'accord doit immédiatement passer à l'étape finale. Il ne faut plus permettre aux gouvernements territoriaux de bloquer le processus. L'inclusion des gouvernements territoriaux au titre des parties signataires ne doit pas permettre à ces derniers d'imposer leur veto et d'oblitérer l'obligation constitutionnelle qu'a le Canada de conclure ce traité avec nous, de nation à nation, dans le cadre du processus de réconciliation.
    Les Dénésulines d'Athabasca vous remercient de cette occasion que vous leur avez donnée de faire cette présentation. Nous sommes en négociation depuis les 18 dernières années. C'est un processus de longue haleine au cours duquel nous avons dû composer avec de multiples administrations, avec des enjeux qui se chevauchaient, etc. Bon nombre d'anciens sont venus s'asseoir avec nous à la table des négociations lorsque nous avons amorcé ce processus, en 2000. Beaucoup d'entre eux ont passé l'arme à gauche entretemps. Il y a deux ans, nous avons perdu un négociateur en chef pour le Manitoba; il voulait voir l'accord définitif. Je crois que 18 ans, c'est assez, et j'espère que les gouvernements vont traiter cette question avec tout le sérieux qui s'impose. Leurs politiques doivent s'adapter à la réalité du monde d'aujourd'hui, aux façons de faire actuelles. Tout ce que nous voulons, c'est la reconnaissance de notre territoire ancestral.
(1050)
    Merci.
    C'est très long et très douloureux.
    Je ne sais pas si j'ai donné la reconnaissance qu'il fallait aux Dénés de Northlands, qui font partie de votre groupe.
    Nous sommes deux groupes distincts.
    Vous êtes deux groupes distincts?
     Comme vous allez pouvoir le lire dans les présentations, il y a des ressemblances entre les deux, mais ils sont...
    Je vois. Je m'excuse. Vous auriez dû être présentés dès le début.
    Je vous en prie, commencez. Vous allez faire cinq minutes chacun, c'est bien cela?
     Nous allons prendre nos 10 minutes, puis il y aura du temps pour les questions.
    D'accord.
     En toute déférence, au nom de la Première Nation des Dénés de Sayisi et de la Première Nation des Dénés de Northlands, désignées collectivement comme les Dénés du Ghotelnene K’odtineh, je veux remercier les membres du Comité de nous donner la chance de faire cette présentation.
    Je m'appelle Wayne Wysocki. Je suis partenaire de la société d'experts-conseils Symbion Consultants, et je travaille avec les deux Premières Nations que je viens de nommer afin de trouver une solution négociée au litige Samuel/Thorassie, qui dure depuis 2001.
    Je suis accompagné de Benji Denechezhe, qui est le négociateur en chef actuel de la Première Nation des Dénés de Northlands, et de Geoff Bussidor, le nouveau négociateur en chef de la Première Nation des Dénés de Sayisi.
    Le territoire ancestral de la Première Nation des Dénés de Sayisi et de la Première Nation des Dénés de Northlands s'étend du nord du Manitoba jusqu'à ce qu'on les désigne maintenant comme étant le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest. Les deux ont signé des traités. Les Dénés de Northlands font partie de la bande de Barren Lands. Ils font partie du Traité no 10, qui a été signé en 1907. Les Dénés de Sayisi adhèrent au Traité no 5, qui a été signé en 1910. Dans les années 1970, les Premières Nations ont établi des communautés et des réserves au lac Tadoule et au lac Brochet. Durant les années 1980 et 1990, les deux Premières Nations ont tenté d'obtenir des droits fonciers issus de traités au nord du 60e parallèle, mais le Canada a toujours refusé de répondre favorablement à ces demandes sous prétexte que lesdites Premières Nations avaient signé des traités et qu'ils n'avaient par conséquent pas droit à des terres au nord du 60e parallèle.
    En mars 1993, juste avant la signature de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, les Dénés du Ghotelnene K’odtineh ont intenté une poursuite — Samuel/Thorassie c. Canada — pour faire reconnaître leurs droits au nord du 60e parallèle. Au printemps de 1999, après près de sept ans de poursuite, les Dénés du Ghotelnene K’odtineh ont apporté leurs tambours sur la Colline pour demander une rencontre avec le ministre Stewart et convenir avec lui de la création d'une instance pour négocier leurs droits au nord du 60e parallèle. Depuis ce temps, les deux Premières Nations — avec les trois Premières Nations des Dénésulines d'Athabasca — négocient avec le gouvernement du Canada afin de conclure deux accords de revendications territoriales couvrant des zones d'établissement situées dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Notre mémoire comprend une carte où sont indiquées toutes les zones convenues dans le cadre de ces négociations.
    Aux fins de cohérence, ces accords ont été négociés parallèlement aux modifications qui doivent être apportées à l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. Cela a été rendu possible grâce au soutien des gouvernements conservateurs et libéraux. Le processus n'a jamais été un enjeu de politique partisane, et il ne devrait jamais l'être. Ces questions étaient complexes parce que les revendications touchaient trois administrations distinctes, c'est-à-dire le Canada, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut. Grâce à un travail opiniâtre et une dose raisonnable de compromis, les Dénés du Ghotelnene K’odtineh sont parvenus à un accord presque définitif avec la Couronne fédérale.
    Le problème, c'est que les deux gouvernements territoriaux retardent le parachèvement du traité. Ils ont pourtant eu toute la latitude voulue pour participer à toutes les discussions; on les a consultés raisonnablement et on a tenu compte de leurs intérêts et de leurs préoccupations. Malgré cela, ils retardent le parachèvement du traité. Tout au long de ces 18 années de négociations, les gouvernements territoriaux ont soulevé des préoccupations quant à la teneur du traité, ce qui les a d'ailleurs poussés à quitter la table des négociations ou à adopter des positions qui jetaient le processus dans une impasse.
    Au cours des 11 dernières années, le Canada a nommé trois médiateurs pour venir à bout de la résistance des gouvernements territoriaux. Aucun des trois n'a réussi. À l'heure actuelle, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest n'appuie pas la ratification du traité parce qu'il est d'avis que les Dénés du Ghotelnene K’odtineh devraient accepter le traité qui leur donne des droits de deuxième catégorie aux termes de l'article 35. Le gouvernement du Nunavut, qui s'est mis à formuler des commentaires après cinq ans d'absence, croit que son consentement est nécessaire pour que le traité soit conclu, et que la ratification du traité ne pourra se faire que lorsqu'il aura été adéquatement dédommagé pour les coûts de sa mise en oeuvre. En permettant aux gouvernements territoriaux de retarder la conclusion du traité, le Canada donne préséance aux préoccupations locales et étroites de ces gouvernements et leur permet de nuire à l'atteinte de l'objectif primordial qu'est la réconciliation.
    Le Canada a le pouvoir juridique de ratifier le traité sans les gouvernements territoriaux. En fait, aux termes de la Proclamation royale et de la Loi constitutionnelle, la raison donnée pour justifier les relations Couronne-Autochtones est d’assurer que les intérêts locaux n’empêchent pas la Couronne d’honorer ses obligations envers les peuples autochtones. La Proclamation royale confiait l’entière responsabilité des Indiens et des terres indiennes à la Couronne et au chef du Royaume-Uni. La Proclamation royale reconnaissait aux Indiens des droits sur les terres non cédées leur appartenant et établissait que ces droits ne pouvaient être cédés qu’à la Couronne. L’article 91.24 de la Loi constitutionnelle a transféré cette compétence à la Couronne et au chef du Canada. Les gouvernements territoriaux ne sont pas la Couronne. Le traité ne modifie pas leurs compétences. Par conséquent, il n’y a aucune base juridique pour justifier qu’ils fassent partie de ce traité ou qu’ils soient tenus d’y consentir.
     Après 18 ans de négociations, il est temps que le Canada exerce son autorité en concluant le traité de façon bilatérale. Étant donné l’offre qui a été faite aux Dénés du Ghotelnene K’odtineh et l’existence d’une jurisprudence en la matière, le fait de ne pas conclure le traité de façon bilatérale irait à l’encontre de l’honneur de la Couronne. L’offre du Canada était bilatérale, et nous l’avons acceptée comme base de négociation.
(1055)
    L'offre ne stipule pas que le consentement, voire la coopération, du gouvernement territorial est obligatoire. L'offre prévoyait la participation du gouvernement territorial dans les affaires relevant de sa compétence. Il a non seulement participé pleinement à ces dossiers, mais il a également outrepassé sa compétence dans de nombreux cas. La jurisprudence oblige la Couronne, une fois qu'elle a entamé des négociations avec un groupe autochtone, de régler les revendications en suspens et de négocier de manière honorable et de bonne foi. Des facteurs externes non liés à la conduite des parties autochtones aux négociations n'ont pas préséance sur l'obligation du Canada de négocier de manière honorable. De plus, l'honneur de la Couronne exige du Canada de remplir sa promesse constitutionnelle faite aux Dénés du Ghotelnene K’odtineh d'une manière diligente.
    Outre les obligations juridiques du Canada, il y a des raisons politiques et morales tout aussi importantes de conclure le traité. Le gouvernement actuel a transmis des messages politiques clairs selon lesquels il est inacceptable de suivre des politiques et des pratiques qui ne sont pas conformes à la relation de nation à nation protégée par la Constitution. Conformément à la promesse d'une relation renouvelée, le premier ministre a demandé à sa ministre des Affaires autochtones, dans sa lettre de mandat, que son objectif premier consistera à renouveler la relation entre le Canada et les peuples autochtones. Ce renouvellement doit être une relation de nation à nation axée sur la reconnaissance, les droits, le respect, la coopération et le partenariat.
    Outre les promesses d'une relation renouvelée, le 17 juillet 2017, le gouvernement du Canada a proclamé ses principes concernant la relation du gouvernement avec les peuples autochtones. Ces principes sont d'autres éléments de preuve d'une réinitialisation de la relation entre le Canada et les peuples autochtones. Ce qui est particulièrement important à propos de ces principes, c'est la priorité que l'on accorde à la relation entre la Couronne et les Autochtones dans la négociation de traités, à l'importance des traités dans la réconciliation et au droit de tous les peuples autochtones de conclure des traités avec la Couronne.
    Pour les Dénés du Ghotelnene K’odtineh, la réinitialisation de la relation et l'établissement des fondements constitutionnels de la relation de nation à nation pour la conclusion de traités signifie que les gouvernements territoriaux n'ont pas un droit de veto sur leur traité, et que les gouvernements territoriaux ne sont pas parties à leur traité. Le premier ministre n'a dit nulle part que la nouvelle relation est assujettie au consentement des gouvernements territoriaux ou que la reconnaissance des droits ancestraux et des droits issus de traités est tributaire de l'approbation des gouvernements territoriaux ou que l'appui de la Couronne dépend de l'appui des gouvernements territoriaux. Tout retard supplémentaire indique que le gouvernement actuel n'a aucunement l'intention d'honorer son obligation et les promesses de ses dirigeants.
    L'obligation morale du Canada d'aller de l'avant ne peut pas être passée sous silence. Il y a un coût humain considérable associé au fait que le Canada a permis que ces négociations traînent en longueur depuis près de 18 ans. Une génération complète a surveillé et attendu une reconnaissance juste des droits des Dénés du Ghotelnene K’odtineh au nord du 60e parallèle. Ces gens qui étaient d'âge moyen lorsque cette revendication a été déposée sont maintenant des aînés; ceux qui étaient des enfants d'âge préscolaire sont maintenant de jeunes adultes; et la majorité des aînés qui ont encouragé leur peuple à se tenir debout pour faire reconnaître leurs droits au début des années 1960 sont décédés.
    Les deux négociateurs en chef des Dénés du Ghotelnene K’odtineh sont décédés depuis que les négociations ont commencé. Peter Thorassi, le négociateur en chef pour les Dénés sayisi, nous a quittés la semaine dernière, et Jerome Deneshezhe est décédé en 2015. Outre ces pertes de vie, il y a une perte d'espoir et de confiance dans les négociateurs et les dirigeants communautaires. Leur patience a des limites et le cynisme gagne du terrain. Le fait de faire fi de ces obligations d'aller de l'avant est une forme de colonialisme contemporain. Nous demandons au Comité d'informer le Parlement que tout retard supplémentaire en vue de conclure le traité est inadmissible pour des raisons d'ordre juridique, politique et morale. Conclure le traité est tout simplement la bonne chose à faire. Nous demandons également à chacun de vous, en tant que parlementaires, de transmettre ce message aux caucus de vos partis.
    Merci.
    Si le Comité veut bien nous accorder un instant, j'aimerais que les négociateurs en chef puissent faire quelques remarques en guise de conclusion.
(1100)
    Vous avez une minute.
    Nous avons expliqué ce qui s'est passé, mais je vais vous parler de comment se portent les gens à l'heure actuelle.
    Lorsque le gouvernement est arrivé au pouvoir, on espérait que la réconciliation et l'édification des nations seraient des priorités, et nos peuples avaient de l'espoir, mais cet espoir s'effrite depuis les perpétuels retards des fonctionnaires qui ne sont pas disposés à aller de l'avant. Dans les collectivités, nos membres attendent patiemment. Nous sommes des gens très aimables et très tolérants, en dépit de la façon dont nous avons été traités, et l'histoire est là pour le prouver.
    Je suis ici aujourd'hui. Je parle du fond du coeur au nom de nos peuples. Nous partageons tous un but commun. Nous voudrions un avenir meilleur pour nos enfants. Depuis plus de 100 ans, c'est ce que nous essayons de faire, et nous continuons encore à nous heurter à des difficultés.
    En août dernier, la ministre a pleuré à Tadoule Lake. Elle avait les larmes aux yeux, et j'ai un enregistrement de ce moment, où elle a dit que plus jamais le gouvernement du Canada ne traitera nos peuples... Mais devinez-quoi? Nous livrons toujours la même bataille à l'heure actuelle.
    J'espère que vous pouvez nous aider. Si nous devons vous supplier, nous le ferons. S'il vous plaît, nous vous demandons de nous aider à obtenir les droits qui nous reviennent car nous attendons que justice soit rendue depuis longtemps. Nos gens meurent. Les gens qui ont entamé ces négociations sont tous les deux décédés, et nous avons inhumé l'un d'eux il y a trois jours, qui était mon partenaire et collègue. Comme vous pouvez le constater, c'est éprouvant pour nous à certains moments.
    Ce n'est pas la première fois que je prends la parole, mais quand je le fais, je pense aux gens à la maison. J'espère que vous pouvez entendre nos requêtes. Nous attendons depuis assez longtemps, et il est temps d'aller de l'avant et de mettre en place les mesures qui ont déjà été convenues par le Canada.
    Masi cho.
(1105)
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à la période des questions, et les députés auront l'occasion d'interroger les groupes de témoins. Nous avons entendu les déclarations de trois groupes, alors je vous demanderais de nommer le témoin à qui vous adressez votre question.
    Monsieur Anandasangaree.
    Madame la présidente, je crois que M. Bussidor avait demandé de prendre la parole quelques minutes. Je me demande si nous pourrions accepter de lui accorder quelques minutes pour terminer.
    Avons-nous le consentement des membres?
    Je suis d'accord.
    Je ne sais pas si vous pouvez m'entendre. J'ai une petite voix.
    C'est la première fois que je prends la parole publiquement au nom de notre bande, la Première Nation des Dénés sayisi. Je viens d'hériter du poste de négociateur en chef. Mon prédécesseur est décédé. Nous l'avons inhumé il y a deux jours ici à Winnipeg.
    Selon l'un des travailleurs sociaux qui ont participé à notre réinstallation, la Première Nation des Dénés sayisi est la bande dans tout le Canada qui est la plus mal traitée par le gouvernement. C'est une situation très grave, mais je ne veux pas m'attarder là-dessus. Nous sommes ici pour discuter des problèmes des Territoires du Nord-Ouest.
    Je veux simplement mentionner que si l'on regarde les frontières territoriales dans le passé, à partir du début de la création du Canada, on constate que les limites ont constamment été repoussées vers le haut. Nos traités ont été signés lorsque nous étions toujours à l'intérieur des limites des Territoires du Nord-Ouest, si bien que nous sommes un peuple visé par un traité territorial. Mes grands-parents sont nés dans les territoires. Ma mère est née à Edehon Lake, qui se trouvait dans les Territoires du Nord-Ouest en 1931, mais qui fait maintenant partie du Nunavut. Elle est décédée, mais il y a la question suivante qui se pose: De quel territoire venez-vous? Que répondriez-vous à cette question? Quoi qu'il en soit, ce genre de choses arrivent.
    Je tiens seulement à vous signaler que nos gens ont assez souffert. Nous avons du mal à récupérer nos territoires, et si vous pourriez nous aider en ce sens, nous vous en serions reconnaissants.
    Ma grand-mère est Dogrib, ou avait du sang dogrib, et mon grand-père était Nasiyu, ou avait du sang nasiyu, qui est une tribu qui n'existe plus. Ils étaient des habitants clandestins. Il y a une île nommée en leur honneur à Duck Lake. Elle se nomme l'île Battle. Je ne sais pas pourquoi on l'a nommée l'île Battle, car il n'y avait même pas de bataille là où ils ont été tués. Mais nous l'appelons Nasiyu Nugue, ce qui signifie l'île Nasiyu. C'est là où ils ont vécu clandestinement sur un esker.
    Je voulais simplement vous parler un peu de mon histoire personnelle et de la pertinence des enjeux à l'étude. Merci.
    Merci.
    Gary.
    Madame la présidente, c'est juste une parenthèse. Puisque nous disposons de 21 minutes, serait-il approprié d'avoir une série d'interventions de sept minutes?
    Cela vous va? D'accord.
    Merci.
    Merci beaucoup des exposés. Ils étaient très éloquents. Ils sont un bon rappel pour nous de l'immense travail qui nous attend. Je sais que le processus dure depuis une génération, que les cheveux des intervenants initiaux ont grisonné depuis et que de nombreuses personnes ont consacré toute leur vie à travailler à ce dossier. Je tiens tout d'abord à vous remercier et à reconnaître le travail que vous avez fait pour les générations futures.
    Je veux parler de cette relation pas seulement avec le Canada, mais avec d'autres pays et instances, et je comprends la frustration que vous avez exprimée concernant les territoires. Que pouvons-nous faire pour élaborer un cadre qui peut réunir les différentes instances à une même table? Je pense que le Canada devrait aller de l'avant, peu importe la position des territoires. Mais ce n'est peut-être pas aussi facile à faire en raison du cadre actuellement en place dans les territoires. Je ne suis pas un juriste, mais c'est ce que je ferais de prime abord. Pourriez-vous nous aider en nous suggérant comment nous pouvons élaborer un cadre de manière à ce qu'avant que les négociations ou les discussions commencent, nous aurions un ensemble de principes qui pourraient nous guider?
(1110)
    En ce qui concerne ce dossier, nous avons un cadre. Il commence avec la proclamation royale et se poursuit avec la Constitution. Il a été utilisé dans l'offre qui a été faite. L'offre était bilatérale. Il y avait un cadre clair lorsque nous avons entamé ces négociations. Il y a un cadre juridique en vertu duquel le Canada est tenu par l'honneur de conclure ces négociations.
    Sauf votre respect, M. Saganash a dit, dans la déclaration précédente, que la primauté du droit doit être respectée. La primauté du droit doit s'appliquer ici. Nous avons un cadre. Il est très clair. Le gouvernement du Canada fait fi du cadre. Nous avions une promesse du gouvernement du Canada, le nouveau gouvernement en poste, que ce cadre serait respecté, mis en oeuvre et réinitialisé. La réconciliation signifie qu'il faut respecter, honorer et consolider les cadres que nous avons.
    Avec tout le respect que je vous dois, le cadre relatif à ce dossier est extrêmement clair. Il l'est d'un point de vue constitutionnel. Il l'est d'un point de vue légal. Il l'est d'un point de vue politique. Il est inutile d'essayer de réinventer le cadre qui correspondrait à ce dossier. La seule chose dont nous avons besoin, c'est que le comité formule une recommandation parfaitement claire au Parlement selon laquelle ce traité doit être conclu. Autrement, on fait fi de toute cette notion de réconciliation.
    C'est un point que ce comité ne peut pas négliger.
    J'ai un autre petit point que je veux ajouter. Je suis tout à fait d'accord avec Wayne. Je pense que votre question sous-entend que nous n'avons pas essayé de traiter avec les gouvernements territoriaux. Nous avons essayé pendant la majeure partie des 18 ans. À un moment donné, on arrive à la conclusion... Vous savez, refaire sans cesse la même chose et s'attendre à un résultat différent est la définition de folie. Nous en sommes rendus là.
    Dans le cadre de cette offre bilatérale proposée aux Dénés, le Canada est rendu au point où il est temps d'aller de l'avant. Cela fait 25 ans, et le dernier obstacle restant est celui des territoires. Même s'ils peuvent comprendre que c'est une difficulté truffée d'imbroglios politiques, tous les efforts ont été déployés pour corriger la situation, et ce n'est tout simplement pas arrivé.
    Merci.
    J'ai deux questions. L'une porte sur l'aspect positif, à savoir que les différentes nations font front commun dans cet effort, alors je vous demanderais d'aborder brièvement ce point, si possible.
    Le deuxième — et vous ne serez peut-être pas en mesure de communiquer ces renseignements parce que les discussions sont en cours — a trait à la finalité, à l'autorisation complète et finale. Est-ce une question à l'ordre du jour, ou suivez-vous une approche différente selon laquelle il y aura un dialogue permanent?
    Il y a deux questions. Pour la première, vous avez tout à fait raison. En ce qui concerne les groupes autochtones, y compris les Dénés d'Athabasca et les Dénés du Ghotelnene K'odtineh, et en toute déférence pour les Inuits, qui ne sont pas ici, nous avons consacré énormément de temps, et les accords parallèles que nous avons conclus, qui étaient les documents précurseurs pour aller de l'avant avec ces traités, ont été qualifiés, par l'ancien ministre des Affaires autochtones, de modèles qui devraient être appliqués à l'échelle du Canada.
    Oui, nous avons énormément travaillé pour trouver une solution. Lorsque nous avons trouvé une solution la première fois, la Couronne nous a dit, « Eh bien, nous vous avons demandé de trouver une solution, mais ce n'est pas notre accord; il nous faudra un mandat pour travailler là-dessus ». Il a fallu deux ans. Nous avons ensuite conclu une entente avec les Dénés d'Athabasca, et la Couronne a dit la même chose, « Eh bien, nous vous avons demandé de trouver une solution, mais ce n'est pas notre accord ». Puis il a fallu trois autres années avant que ces accords soient officialisés sous forme d'offres.
    La deuxième partie de votre question porte sur le dilemme auquel nous sommes actuellement confrontés. Le Canada signe maintenant la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et essaie de déterminer comment elle sera mise en oeuvre. Nous sommes sur le point de conclure un accord avec le Canada qui sera, bien honnêtement, un peu désuet. C'est le problème lorsque ces négociations traînent pendant aussi longtemps.
    Ce que nous avons demandé au ministère de la Justice de faire, et nous avons eu des réunions avec le représentant du ministre, c'est d'inclure dans les clauses que le traité peut évoluer à mesure que le Canada va de l'avant avec la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Malgré le fait que nous avons des dispositions assurant la certitude dans notre traité, nous voulons également avoir une vraie relation fondée sur un traité qui est un commencement et non pas un divorce et qui évoluerait avec la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
    Je suis désolé d'avoir dépassé mon temps de parole.
(1115)
    Merci.
    C'est correct. Tout va bien.
    Madame la députée Cathy McLeod.
    Merci, madame la présidente.
    Vous avez abordé un sujet qui m'est venu à l'esprit lorsque j'écoutais les deux déclarations sur Athabasca et Northlands. J'aimerais avoir une carte. Y a-t-il une carte sur laquelle figurent les deux régions?
    Il y a des cartes dans la documentation.
    D'accord. Je ne les ai pas vues car j'écoutais les déclarations.
    Vous réussissez, dans le cadre de votre travail, à régler les problèmes. Vous avez dit avoir réglé les enjeux avec les Inuits. Donc, le problème est avec les gouvernements territoriaux. Est-ce les mêmes...?
    Nous sommes confrontés exactement aux mêmes problèmes. Il y a de légères différences, mais ce sont fondamentalement les mêmes problèmes.
    Je crois que la façon la plus simple de voir les choses en ce qui concerne les DGK et les Dénés d'Athabasca, c'est qu'environ 90 % de leur territoire se trouve au Nunavut et environ 10 % dans les Territoires du Nord-Ouest.
    En ce qui nous concerne, c'est pratiquement l'inverse. Environ 70 % du territoire traditionnel des Dénésulines d'Athabasca se trouve dans les Territoires du Nord-Ouest et environ 30 % au.... Les Dénésulines se trouvaient le long de ce qui est devenu la frontière au 60e parallèle, et c'est là toute l'origine du problème. Comme je l'ai souligné, à l'époque où le traité a été signé, les Dénésulines se trouvaient en fait dans les Territoires du Nord-Ouest.
    Je vais m'adresser à M. Madden. Il n'y a aucun problème en ce qui concerne les Métis du Manitoba. Y a-t-il un autre problème de chevauchement?
    Je crois que l'un des problèmes sera la façon que nous réimaginerons l'autonomie gouvernementale ou que nous éviterons de nous limiter par les définitions actuelles de l'autonomie gouvernementale. À mon avis, le défi le plus important pour les Métis est de faire comprendre qu'ils veulent bâtir. Ils ont mis en place un gouvernement fondé sur la citoyenneté, mais celui-ci n'est pas lié à un territoire précis; il représente tous les Métis du Manitoba. Il s'agit d'une question de territoire différente.
    J'aimerais toutefois soulever un point. La Couronne est tenue de favoriser la réconciliation et tous les ordres de gouvernement font partie de la Couronne. Je trouve scandaleux la façon dont certains dossiers sont traités, comme celui des oléoducs. Les peuples ont la capacité de prendre des décisions difficiles. Le projet Trans Mountain n'est pas un projet populaire. Le gouvernement néo-démocrate est quelque peu en rogne par rapport à la décision sur ce projet.
    Mais, il y a des impératifs constitutionnels sous-jacents à ces décisions. Il n'est pas seulement question d'un oléoduc. Nous pouvons prendre des décisions difficiles — même lorsque 92 gouvernements ne sont pas d'accord avec ces décisions — sur des questions qui n'ont aucune incidence sur la vie, les terres ou l'existence des Autochtones, mais, semble-t-il, nous en sommes incapables lorsqu'il s'agit de questions liées aux peuples autochtones.
    Je trouve cela très insultant. Je crois que c'est ainsi que nous devrions commencer à voir la situation. C'est la raison pour laquelle les tribunaux vous réprimandent continuellement sur ces questions, car ce genre de décisions n'est pas honorable. L'idée selon laquelle nous nous cachons derrière d'autres pouvoirs lorsque la réconciliation pour un autre territoire est un faux problème.
    C'est la même chose en ce qui concerne les Métis. Nous sommes finalement invités à la table. Ce que nous tentons de dire dans l'entente-cadre, c'est que, s'il est impossible pour nous de réaliser d'un seul coup quelque chose qui prend 20 ans à réaliser, il nous faut des secteurs dans lesquels nous pouvons réaliser des progrès. Nous ne pouvons pas retenir les intervenants indéfiniment. De plus, nous perdons notre élan politique lorsque nous ne réalisons pas régulièrement des progrès, contrairement à la réalisation soudaine qui suscite des commentaires comme: « Par le temps que nous réussissons à conclure une entente, celle-ci ne vaut pas grand-chose, car les tribunaux sont déjà allés au-delà du mandat initial du cabinet. »
(1120)
    À la lumière de vos exposés, serait-il juste de dire que votre demande est très simple par rapport à la recommandation que nous devrions formuler?
    Dites-au gouvernement du Canada qu'il fasse les choses correctement. Une entente a été conclue. Non seulement le gouvernement a-t-il le pouvoir légal de mettre en oeuvre cette entente, il y est obligé. L'honneur de la Couronne exige que le gouvernement aille de l'avant avec cette entente.
    Nous y avons travaillé pendant 18 ans. Le gouvernement actuel n'a aucune difficulté à imposer une date butoir aux provinces et territoires pour la légalisation de la marijuana. Aucune difficulté. Il n'a eu aucune difficulté à dire au gouvernement de la Colombie-Britannique qu'il allait construire un oléoduc qui traverserait la province. Comme l'a souligné M. Madden, pourquoi est-ce si difficile lorsqu'il s'agit d'une question liée aux Autochtones de mettre en place un cadre qui permettrait de trouver une solution?
    Le processus décisionnel repose sur des préjudices profonds; il faut le reconnaître et changer la situation. C'est ce que ce gouvernement s'est engagé à faire. Je demande donc aux membres du Comité et aux parlementaires de faire tout en leur pouvoir pour pousser le gouvernement à respecter cet engagement.
    Vous en êtes tous les deux rendus à la même étape: vous êtes prêts à signer au bas de la page. Est-ce exact?
    C'est exact.
    Il vous reste une minute et demie.
    Je vais m'adresser au représentant des Métis du Manitoba.
    Selon vous, où en sommes-nous avec l'arrêt Daniels? Comment réagirez-vous et quelles mesures ressortiront de cet arrêt?
    Ce dossier n'a pas beaucoup évolué. Nous avions espoir qu'un mandat du cabinet élaboré conjointement pour les Métis du Manitoba serait adopté prochainement afin de faire avancer ces dossiers.
    La position des Métis est probablement différente de celle de la part des autres Premières Nations. De nombreuses Premières Nations tentent de s'extirper de la Loi sur les Indiens, mais cela comporte plusieurs obstacles. De leur côté, les Métis n'ont jamais été inclus dans cette loi et ne souhaitent pas y être inclus.
    Étant donné la façon dont le système est établi et le fait qu'AANC maintient ce système, en l'absence d'un cadre permettant aux Métis d'éviter ce que j'appelle le feu de la benne à rebuts des programmes d'AANC, le ministère exercera ce pouvoir.
    Ce que nous souhaitons voir, et nous espérons que le fractionnement du ministère est un pas dans cette direction, c'est une volonté d'investir dans le gouvernement métis. Cessons de créer de nouveaux programmes d'admissibilité ou des programmes qui ne répondent pas nécessairement aux besoins des Métis. Laissons les Métis créer des programmes qui satisfont à leurs besoins uniques plutôt que de maintenir un système défectueux.
    Honnêtement, nous devons faire preuve d'innovation et de vision, prendre un risque et ne pas attendre 18 ans avant de conclure un accord. Ce que nous espérons, c'est qu'il y ait des progrès.
    Merci.
    Ceci met fin à cette série de questions. Nous amorçons maintenant la prochaine série de questions. Monsieur Saganash, vous avez la parole.
    Merci pour ces exposés. Si je ne m'abuse, vous avez tous les trois abordé l'une des questions les plus complexes de la revendication territoriale, soit le chevauchement des intérêts concernant les terres dont il est question dans le cadre de ces négociations.
    J'espère avoir suffisamment de temps pour m'entretenir avec Wayne. J'aimerais d'abord revenir au premier exposé.
    La question des terres est probablement l'une des plus difficiles que vous aborderez dans le cadre de vos discussions. Comme l'a souligné Wayne, et avec raison, les Métis ne figurent pas dans la Proclamation royale. Cette proclamation parle des nations et tribus indiennes et des territoires qui leur appartiennent, précisant qu'elles ne devraient pas être déplacées ou perturbées sur ces territoires. C'est le langage que l'on retrouve dans la Proclamation royale.
    Puis, nous avons les articles 92 et 93 de la Loi constitutionnelle de 1867 qui ne mentionne pas les Métis. Toutefois, je suis au courant du renvoi sur les Esquimaux dans lequel la Cour suprême a statué que le terme Indiens inclut les Inuits.
    Comment proposez-vous de réconcilier la question des terres qui sera probablement la plus difficile à aborder dans le cadre de ces discussions? Je suis d'accord avec vous sur la souveraineté du Canada sur ces terres. Je crois que la Cour suprême a eu raison de préciser qu'en ce qui a trait à la réconciliation, l'objectif est de réconcilier la souveraineté préexistante des peuples autochtones et la souveraineté présumée de l'État. Ce sont les termes qu'a utilisés la Cour suprême du Canada. J'imagine que l'expression « souveraineté présumée de l'État » laisse entendre tout simplement que l'État n'a pas demandé la permission aux peuples autochtones.
    Selon vous, comment iront vos discussions sur le sujet?
(1125)
    L'arrêt Daniels répond à cette question. De façon similaire au renvoi sur les Esquimaux, il confirme que le terme Indiens inclut les Métis au titre de l'article 91.24 de la Loi constitutionnelle de 1887.
    Ils disent: « Regardez la façon dont le terme Indien... » Il n'y a pas d'Indien au pays. On n'aurait jamais dû parler d'Indiens au Canada, pas plus que de blé d'Inde d'ailleurs, n'en déplaise à Colomb. Le terme indien est utilisé pour décrire les peuples haidas, tlichos, gwich'ins. Il n'a rien de magique. Il est question ici des peuples autochtones et les Métis faisaient partie des peuples autochtones reconnus dans la Proclamation royale de 1763, tout comme dans la Loi constitutionnelle de 1867. Cette question a déjà été répondue. Je ne crois pas qu'il y ait un problème à ce sujet.
    Une autre chose qui m'agace, c'est le terme chevauchement. Je me souviens que les aînés tlicho disaient toujours: « Eh bien, vous savez ce que signifie ce terme sur le plan historique? » Il s'agit d'un terme colonial. Il signifie tout simplement que la terre était fertile, que nous la partagions et que c'était un bon endroit où vivre. J'aime ce concept plus que la dichotomie du eux contre nous.
    Je crois qu'il faut également élargir la discussion au Canada. Nous devons voir les terres différemment. Nous ne sommes plus dans un contexte colonial où la discussion binaire tourne autour de qui appartient quoi. Il est possible de partager ces terres et la souveraineté de ces terres et régions. C'est ce que décrit la MMF lorsqu'elle dit: « La nation métisse a ses propres terres, tout comme le Canada et les provinces. Ce que nous tentons de faire avec l'autonomie gouvernementale, c'est d'interrelier ces terres et non de créer un chevauchement ou une situation qui l'emporte sur l'autre. C'est notre approche. » Les Premières Nations doivent également avoir ces discussions, car l'idée selon laquelle les Métis n'ont pas besoin ou ne méritent pas d'accises territoriales ou qu'ils n'en avaient pas, est foncièrement erronée.
    Y a-t-il des discussions avec les autres Premières Nations?
    Je crois que les discussions ont été amorcées.
    Où en sont-elles?
    Je crois que dans le cadre des consultations sur les droits fonciers issus des traités au Manitoba, les Métis doivent être consultés au même titre que d'autres groupes autochtones. L'article 35 ne confère aucun droit de hiérarchie et les discussions sur le sujet ont été amorcées.
    Je crois également qu'en ce qui a trait aux Métis, les terres et la façon dont les choses se dérouleront... Nous savons que toute entente doit tenir compte des terres, mais il faut aussi comprendre que, dans le contexte des Métis, cela pourrait prendre une forme différente. Personne ne considère le système actuel comme étant la panacée.
    Je crois que c'est ce qui se passe actuellement et, comme je l'ai dit, en ce qui a trait à l'autonomie gouvernementale, les choses évoluent à la vitesse de la lumière. En mai 2016, nous avons conclu un protocole d'entente. En novembre 2016, nous avons conclu une entente-cadre et nous avons maintenant un mandat officiel de négociation. Les discussions s'amorcent, mais je crois que nous avons également besoin d'un cadre stratégique.
    J'aimerais souligner une chose au sujet de la Commission royale sur les peuples autochtones. Pour les négociations, nous avons besoin d'un cadre juridique qui favorise le progrès plutôt que des politiques qui peuvent changer selon le gouvernement du jour.
(1130)
    Ma prochaine question s'adresse à Ronald et à Wayne. On a demandé au comité d'examiner la politique sur les revendications globales et particulières. J'aimerais savoir comment, s'il y a lieu, la politique actuelle vous a aidés dans le cadre de vos négociations ou s'il s'agit d'une question distincte de celle que vous avez déjà soulevée.
    On nous a toujours dit qu'il ne s'agissait pas d'une revendication globale, mais bien d'une troisième sorte de revendication.
    Nonobstant le fait que tout ce que le gouvernement du Canada nous demande en ce qui a trait à des précisions et des décharges se retrouve... Si une entente de revendication globale est conclue, nous n'obtiendrons pas la même chose en retour.
    À mon avis, sur le plan politique, deux mots doivent être retirés des politiques relatives aux règlements des revendications au Canada lors de leur révision. Le premier est chevauchement — ce terme ne fonctionne pas — et le second est transfrontalier.
    Les frontières fixées ne sont pas celles des peuples autochtones. C'est là qu'ont commencé les problèmes pour les Dénés. Un litige a d'abord été engagé parce que le peuple n'était pas reconnu, comme si quelqu'un avait tracé une ligne et dit à ce peuple qu'il se trouvait maintenant du mauvais côté.
    Le problème est le même. Après 18 ans de négociations, le problème demeure. Les responsables disent: « Nous ne vous reconnaîtrons pas de ce côté de la ligne, mais nous reconnaissons ceux qui ont une case postale dans cette région. »
    Nous vous demandons de retirer les mots chevauchement et transfrontalier.
    Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter une chose au sujet du terme transfrontalier. Au début des négociations, il était toujours possible de trouver des renseignements sur ces deux revendications sur le site Web d'Affaires autochtones et du Nord Canada sous la section « Revendications globales ». Il y a environ cinq ans, tout cela a changé. Ces informations figurent maintenant sous la section « Transfrontalier ». Je fais écho aux propos de Wayne selon lesquels il ne s'agit pas ici de frontières. Ce ne sont pas les frontières dénées. Ce sont des frontières externes et ce sont elles qui sont à l'origine de tous ces problèmes.
    Le problème des frontières est celui auquel nous sommes maintenant confrontés. Le Canada dit: « Les Dénés n'ont aucun droit au nord du 60e parallèle » simplement parce qu'il a créé le 60e parallèle. C'est ahurissant comme argument et c'est la raison pour laquelle nous avons quitté assez rapidement les tribunaux pour amorcer les négociations, car il n'y avait aucune chance que cet argument soit admis.
    Le temps est venu de passer à autre chose et de dire: « Nous avons essayé, et essayé de nouveau. » Le problème que nous avons actuellement concerne les gouvernements territoriaux. Nous avons réglé, dans la mesure du possible, les différends avec les autres peuples autochtones. Il faut procéder selon un point de vue territorial. Quel avantage le gouvernement territorial aurait-il à signer une entente avec un des groupes dénés? Nous ne votons pas pour lui, il ne nous considère pas comme des résidants. Il pourrait être confronté à des problèmes internes sur la résolution d'une revendication territoriale pour un groupe qui, selon lui, se trouve à l'extérieur de son territoire.
    Nous comprenons tout cela. C'est la raison pour laquelle le Canada doit prendre une position ferme et dire: « C'est nous qui négocions les traités dans le cadre d'une relation de nation à nation. » Les gouvernements territoriaux ne sont pas une nation.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Ceci met fin à la séance. Ce sont des questions complexes et importantes. Nous continuons d'accepter des mémoires. Si vous en avez le temps, continuez à nous faire parvenir des recommandations précises et des recommandations plus larges sur la façon d'approcher la question. Ces recommandations seront ajoutées au rapport que nous présenterons au gouvernement du Canada. J'imagine que cela se fera bientôt, peut-être d'ici la fin novembre, mais certainement avant Noël et la fin de l'année.
    Je tiens à tous vous remercier d'avoir accepté notre invitation et pour ces exposés instructifs et passionnés.
    Meegwetch.
    Merci.
(1135)
    Madame la présidente?
    Oui?
    J'allais ajouter, au sujet des mémoires, que Noël n'est pas l'échéance pour nous les faire parvenir.
    Non, je veux dire la mi-octobre.
    La mi ou la fin octobre, au plus tard.
    C'est exact.
    Merci beaucoup. Au nom de tous les membres du Comité, nous vous remercions pour vos témoignages. Nous les prenons au sérieux.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU