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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 071 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 28 septembre 2017

[Enregistrement électronique]

(0805)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à une motion que le Comité a adoptée afin de réaliser une étude sur les revendications particulières et les ententes sur les revendications territoriales globales, nous visitons aujourd'hui notre troisième ville dans le cadre d'une tournée pancanadienne effectuée pour parler à des experts, à des membres de la communauté et à des représentants politiques à propos des revendications territoriales particulières et globales.
    Nous reconnaissons normalement les terres ancestrales et les peuples qui étaient ici, car nous sommes au début d'un processus dans le cadre duquel le Canada examine enfin la vérité et la réconciliation à grande échelle. Nous nous trouvons sur la terre ancestrale de la nation Wendat. Je suis originaire des Prairies, une région que bien des peuples ont parcourue en suivant la migration des bisons. Je tenais à souligner qu'il s'agit de leur terre ancestrale.
    Nous allons commencer. Notre premier groupe de témoins comprend Eleanor Bernard, de la nation Mi'kmaq, de la Nouvelle-Écosse, ainsi que le grand chef Constant Awashish.
    Bienvenue. Nous sommes ravis que vous ayez trouvé un moyen de venir, malgré les gros orages d'hier soir, et que vous soyez ici. Merci.
    Vous avez la parole. Vous disposez de 10 minutes pour faire un exposé, après quoi les députés autour de la table vous poseront des questions. Merci.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
    Honorables membres de ce comité, bonjour.
    [Le témoin s'exprime en atikamekw]
     Mon nom est Constant Awashish. Je suis le grand chef de la nation atikamekw.
    Je n'ai reçu cette invitation que vendredi dernier. J'aimerais faire un commentaire, sans animosité. Nous avons déposé un mémoire, mais nous aurions aimé qu'il soit plus long. Nous avons fait ce que nous pouvions malgré ce court délai. Je vais essayer de vous informer le mieux possible pour vous aider dans votre travail.
    La nation atikamekw représente 7 700 membres, dont je suis le grand chef. Notre nation négocie avec les gouvernements depuis 1979, soit depuis bientôt 40 ans. Aujourd'hui, le sujet à l'étude est la négociation globale. Les membres et les politiciens de la nation atikamekw se demandent souvent s'il y a une réelle volonté d'entente avec nous, étant donné que de nouveaux développements surgissent toujours pendant les négociations.
    On exploite nos ressources naturelles et notre territoire, et cela va en augmentant. Il en a toujours été ainsi, et depuis 1979, il n'y a pas eu de ralentissement à cet égard. C'est un fait que nous déplorons.
    Après plusieurs assemblées avec nos membres et plusieurs sondages, nous constatons que la négociation globale est encore d'actualité et très importante aux yeux des communautés de la nation atikamekw.
    Nous croyons que la négociation globale nous donnera les outils pour nous développer en tant que nation et comme premier peuple de ce pays.
    Vous connaissez la situation économique et sociale de la plupart des Premières Nations au Canada. Dans votre travail, vous avez probablement pris connaissance de la réalité autochtone, et la nation atikamekw ne fait pas exception. Dans nos communautés, il y a un haut taux de chômage, beaucoup de gens ont recours à l'aide sociale et il n'y a presque pas d'emplois. Malgré le fait que les ressources naturelles sont exploitées sur notre territoire, les retombées sont très faibles pour nos communautés.
    Lorsqu'on exploite une ressource, il y a une chaîne de valeur ajoutée. Pourtant, il n'y a pas de création d'emplois pour nous, et les profits et les redevances vont souvent au gouvernement. La nation atikamekw n'a rien reçu pendant des siècles. C'est une situation que nous déplorons en tant que membres de ce pays, le Canada. Je ne pense pas que cette situation soit viable à long terme.
    Voilà la vision de la nation atikamekw par rapport à cela, et c'est un message que je livre depuis maintenant trois ans.
(0810)
     Quand je parle de la nation atikamekw, je parle également de toutes les Premières Nations. Je crois que, pour avoir un pays ou une province prospère, les nations autochtones également doivent prospérer.
    Sur le plan économique, nous sommes tous interreliés. Comme je l'ai déjà mentionné, si la Première Nation se développe sur le plan économique, qu'elle a un bon taux de roulement et d'employabilité, qu'elle a beaucoup de travail et qu'elle est en mesure d'exploiter ses ressources naturelles à sa façon, il y aura des retombées économiques dans les régions et les villes avoisinantes, lesquelles entraîneront des retombées économiques pour la province, lesquelles rejailliront sur le Canada. Je pense que c'est la réalité d'aujourd'hui. Il faut investir dans les Premières Nations pour leur donner l'occasion de développer leur économie. Elles doivent avoir l'occasion de se prendre en charge.
    Depuis quelques années, on parle beaucoup de réconciliation. À mon avis, la réconciliation passe par la reconnaissance des erreurs. À l'heure où l'on se parle, c'est pratiquement fait. Maintenant, il doit y avoir une reconnaissance des erreurs qui concernent le développement économique. Qu'allons-nous offrir aux Premières Nations pour qu'elles puissent développer leur économie? Comment allons-nous les faire participer ou contribuer au développement économique de la province ou du pays? C'est le message que je tente de transmettre depuis toujours.
    En tant que grand chef, on me demande souvent ce que je ferai si nous arrivons à une entente ou à un traité et que nous avons notre territoire, notre autonomie gouvernementale et du financement. On me demande comment nous allons développer notre territoire. Une chose est certaine, c'est que nous ne pouvons pas nous sauver avec notre territoire. C'est pourquoi je mentionne toujours l'interrelation entre tous les gens du Canada dans l'optique du développement du territoire. Nous voulons justement développer notre territoire afin de contribuer d'une plus grande façon à l'évolution du pays. Pour arriver à cela, il faut nous en donner les moyens. Pour la nation atikamekw, la meilleure façon d'y parvenir, c'est au moyen d'un traité.
    Pour la nation atikamekw, l'important est d'en arriver à quelque chose de concret. Cela fera bientôt 40 ans que nous négocions. La durée de ces négociations laisse la nation perplexe. C'est un problème qu'il faut régler. À mon avis, pour rectifier le tir, il faut rapprocher les politiciens de la table des négociations. Souvent, nous jouons au chat et à la souris. Nous demandons des choses à nos négociateurs, et ces derniers proposent des objectifs et des recommandations à la table des négociations. Or, quand ils arrivent à la table des négociations, la porte est close et ils se font dire que cela ne fait pas partie du mandat. Où est la négociation là-dedans? Selon moi, les politiciens devraient se rapprocher de la table des négociations, afin de faire bouger les choses plus rapidement.
    C'est l'intention de la nation atikamekw cette année. Notre objectif est de régler cette question d'ici au mois de juin 2018.
(0815)
     Au sein de la nation atikamekw, il y a de plus en plus de désillusion relativement à la durée de la négociation et à la volonté des gouvernements. Le mois de juin 2018 sera très important pour nous, alors que nous allons décider si nous allons continuer la négociation, ou tout simplement utiliser des moyens de pression pour accélérer le processus et poursuivre notre objectif, soit la souveraineté de notre territoire. Comme je l'ai dit, ce serait en dernier recours, et ce que nous voulons, c'est une participation pure et simple du gouvernement. Nous voulons que le gouvernement se donne vraiment à 100 % dans la négociation pour qu'on nous donne les moyens de contribuer à l'évolution et à l'essor du pays qui s'appelle aujourd'hui le Canada.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci,
    Nous entendrons maintenant Eleanor.
    Bienvenue. Nous sommes impatients d'entendre votre exposé. Vous pouvez commencer quand vous êtes prête.
     [Le témoin s'exprime en mi'kmaq.]
    Bonjour. Je m'appelle Eleanor Bernard et je suis directrice exécutive du Mi'kmaw Kina'matnewey depuis 15 ans.
    Le Mi'kmaw Kina'matnewey, ou MK, est une organisation de gestion régionale ayant conclu une entente d'autonomie gouvernementale dans le domaine de l'éducation en Nouvelle-Écosse. Douze des treize bandes mi'kmaques de la province font partie du MK. À ce titre, elles exercent un pouvoir dans le domaine de l'éducation au sein de leurs communautés. La Loi sur l'éducation des Mi'kmaq prévoit la négociation d'une entente de financement. Jusqu'à présent, chacune de ces ententes a été d'une durée de cinq ans.
    Le MK s'est heurté à un large éventail de problèmes lors de la négociation de ces ententes. Ces problèmes sont les suivants. Les nouvelles négociations ne commencent pas à temps et débutent en retard. En outre, les négociateurs fédéraux n'ont pas de mandat de négociation, arrivant à la table sans jamais avoir de mandat ou du moins sans jamais nous en présenter un. Qui plus est, le taux de roulement de ces négociateurs est très élevé au cours des négociations.
     L'entente indique clairement que les négociations doivent commencer à une date permettant de conclure ces négociations avant que l'entente n'arrive à échéance. Au cours des 15 dernières années, l'entente du MK a été prolongée à plusieurs reprises parce que les négociateurs fédéraux n'avaient pas de mandat du gouvernement. À l'heure actuelle, nous négocions une nouvelle entente de financement. L'ancienne a expiré le 31 mars 2016. Nous sommes toujours en négociations. S'il n'y a pas d'entente en place, la Loi échoira le 1er avril 2018.
    En outre, plusieurs négociateurs se sont succédé, ce qui a encore retardé la conclusion des négociations. Au cours de négociations antérieures, le gouvernement fédéral a changé les négociateurs à cinq reprises. Cela a causé tant de retard que nous avons toujours dû repartir à zéro avec le nouveau négociateur.
    C'est également particulièrement problématique quand le gouvernement fédéral accepte, en l'indiquant dans une entente, de fournir au MK sa part proportionnelle du financement bonifié qu'il verse aux autres communautés autochtones, puis ne se conforme pas aux dispositions de l'entente de financement. Le budget de 2016 prévoyait une somme 3,6996 milliards de dollars, mais le MK a appris qu'il n'était admissible qu'à trois des 10 sous-activités. Sa part proportionnelle équivaut donc à moins de 30 % du budget total. Selon nous, notre réussite est punie. Et quand je parle de « réussite », sachez qu'à l'échelle du pays, les bandes du MK affichent un taux de diplomation de 87,6 %, un chiffre qui se maintient depuis un certain nombre d'années.
    Il arrive également que le gouvernement fédéral oublie d'effectuer les versements trimestriels de la subvention. En plusieurs occasions, il a oublié de verser les fonds au MK. La région nous a simplement oubliés. Nous recevons nos paiements en retard et les communautés en pâtissent, car elles doivent se débrouiller pour financer l'éducation jusqu'à ce que le gouvernement nous verse enfin les fonds.
    J'ai inscrit l'adresse de mon site Web à la fin de mon document, et tous ces renseignements s'y trouvent, notamment notre rapport annuel, que nous préparons régulièrement et adoptons toujours à temps.
    Nous recevons également des capitaux dans le cadre de notre entente de financement. Chaque communauté n'aurait pu rebâtir ou bâtir une école à elle seule; les chefs de notre région ont donc entrepris de mettre leurs fonds en commun afin d'édifier, sur une période de cinq ans, au moins une école là où des besoins se font sentir.
(0820)
    Une de nos plus grandes communautés, Eskasoni, d'où je suis originaire, compte 1 100 élèves pour une liste nominative de 2 900 personnes. Son école a été construite dans les années 1970; nous aurons donc besoin de la prochaine entente de financement pour la reconstruire, et nous ne recevrons pas de fonds supplémentaires. Nous avons réussi à réunir quelque 1,6 million de dollars par année sur une période de cinq ans. Si vous effectuez le calcul, cela totalise environ 7 millions de dollars. Cette somme ne permettra pas la construction ou le remplacement d'une école à Eskasoni.
    Nous remportons toutefois des succès. Non seulement nos élèves obtiennent leur diplôme en grands nombres, mais ils le font au niveau approprié à leur âge. Nous colligeons une multitude de graphiques et de données, qui montrent que la situation s'améliore d'une année à l'autre. Nos communautés sont maintenant familières avec la collecte de données et les raisons pour lesquelles nous recueillons ces renseignements, et nous nous en sortons très bien dans ce domaine.
    Nos taux d'alphabétisation et de numératie s'améliorent également, même s'ils ne sont pas aussi élevés que nous le voudrions. Nous avons encore beaucoup de travail à accomplir. Je ne pense pas que le travail se termine jamais dans le domaine de l'éducation; il ne se termine pas pour moi, en tout cas. Ce qui compte pour nous au bout du compte, c'est l'intérêt de nos élèves.
    Il est vraiment approprié que je témoigne à ce moment-ci pour vous dire tout cela, car c'est cette semaine que se tiendra le jour des survivants des pensionnats, la Journée du chandail orange, et chaque enfant compte.
    [Le témoin s'exprime en mi'kmaq.]
    Merci.
(0825)
    Merci.
    Nous allons maintenant entamer la période de questions.
    Nous commencerons par M. Bossio.
    Je vous remercie tous les deux de témoigner aujourd'hui. Je sais que nous vous avons donné un court préavis. Nous vous sommes reconnaissants de prendre le temps de comparaître.
    Il est malheureux que vous ayez été convoqués si peu de temps à l'avance que vous n'avez pu présenter le mémoire que vous auriez voulu nous remettre et qui aurait pu nous être utile.
    Nous l'avons déjà indiqué précédemment: il n'est pas trop tard. Si vous pouvez nous fournir un mémoire, nous pourrions toujours l'inclure dans la documentation du Comité. Ce document nous aiderait lors de la rédaction de notre rapport. Vous avez probablement jusqu'à la moitié ou à la fin d'octobre pour le faire.
    Grand chef Awashish, j'aimerais mieux comprendre le point de vue historique, afin de saisir certaines des injustices observées au cours du processus de négociations. Je présume que vous négociez un traité relatif aux revendications territoriales globales.
    Oui, nos négociations portent sur une revendication territoriale; ce sont

[Français]

des négociations globales.

[Traduction]

    Nous négocions depuis presque quatre ans maintenant. Comme Mme Bernard l'a souligné, ces négociations ont toujours posé un problème, et ce, pour plusieurs raisons, dont les changements de négociateur de part et d'autre. Le gouvernement fédéral ou provincial change toujours de négociateur. Ce dernier doit toujours se familiariser avec le dossier; on repart donc à zéro chaque fois. J'ignore si le gouvernement agit intentionnellement. Je ne veux pas dire que c'est intentionnel. J'espère qu'il fait preuve de bonne foi, mais il y a parfois lieu de se poser des questions.
    Êtes-vous en train de négocier actuellement?
    Depuis combien de temps les négociateurs actuels s'occupent-ils du dernier dossier?
    Ils travaillent au présent dossier depuis plus d'un an.
    Ils y travaillent depuis plus d'un an, et vous commencez à peine à renégocier.
    Au cours de cette année, ils ont simplement pris connaissance du dossier.
    Oui. Je sais que nous négocions depuis 40 ans; une bonne partie du travail est donc déjà faite. L'approche est toutefois parfois différente d'un négociateur à l'autre. À cela s'ajoute le problème de mandat. Le négociateur n'a pas toujours un mandat lui permettant d'en faire davantage.
    À titre d'exemple, nous réclamons des droits de propriété complets dans une région faisant l'objet d'un accord sur les revendications et demandons à notre négociateur de présenter cette demande pour telle ou telle raison. Or, quand il se rend à la table de négociations, l'autre côté lui répond qu'il n'a pas le mandat nécessaire. Que faisons-nous là? Négocions-nous une entente ou sommes-nous simplement en train de conclure un contrat avec Virgin, Bell ou Videotron?
    La situation est la même dans toutes les régions du pays. L'approche est identique, même si les enjeux et les niveaux de développement social varient. Je considère que c'est très important. C'est ce que je tentais d'expliquer plus tôt. Les politiciens doivent s'intéresser de plus près au dossier, car nous ne pouvons pas continuer comme cela encore 15, 20 ou 40 ans. J'ignore combien de temps ces démarches pourraient prendre. La sphère politique doit s'approcher de la table de négociations pour que nous puissions régler la question et ne pas transmettre le problème à la prochaine génération.
(0830)
    Quelle est la superficie de la région visée par la revendication?
    Elle est de 88 kilomètres carrés.
    Où est-elle située?
    Elle se trouve au centre du Québec.
    Est-ce que les activités d'exploitation qui s'y déroulent déjà ou qui pourraient y avoir lieu concernent toutes les ressources naturelles?
    Oui. On y effectue maintenant davantage d'exploitation minière.
    Y fait-on également de l'agriculture?
    On y fait de l'agriculture dans le Sud, mais on y fait surtout de l'exploitation forestière. Disons que notre terre a fait l'objet de coupes au moins une ou deux fois depuis la création de l'industrie.
    Je présume que les négociateurs venaient exclusivement du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
    Il n'y en a jamais eu des ministères des Ressources naturelles, de l'Agriculture ou de...
    Non, les négociateurs indiquent toujours que les négociations concernent tel ou tel ministère. Ils nous disent toujours qu'ils verront ce que le ministère pense et qu'ils reviendront à la table de négociations. C'est toujours ainsi. C'est un long processus.
    Ne conviendriez-vous pas qu'il faut non seulement que les négociateurs aient le mandat de négocier de bonne foi et le pouvoir de négocier, mais que les divers ministères concernés soient présents à la table de négociations pour parler au nom des entités politiques qu'ils représentent?
    Je pense que cela accélérerait le processus. Je représente la jeune génération, et c'est comme cela que nous pensons. Nous voulons régler la question maintenant. Nous voulons commencer à travailler. Nous voulons les outils nécessaires pour nous développer, développer notre pays et participer au développement du pays. Mais pour que nous parvenions à le faire, je pense que le pays doit investir dans les Premières Nations comme nous pour nous donner l'occasion de créer un élan afin de mieux contribuer à son développement. Il doit également nous conférer les outils nécessaires.
    Votre communauté compte 7 500 personnes. De ce nombre, quel pourcentage contribue actuellement à la mise en valeur de votre territoire potentiel?
    Je dirais rapidement que 30 % reçoit des prestations d'assurance-emploi et peut-être un autre 30 % bénéficie de l'aide sociale.
    Ce n'est donc qu'un très faible pourcentage de la population qui profite des projets d'exploitation dans votre territoire traditionnel.
    Oui, et la plupart des travailleurs oeuvrent pour le bureau du conseil de bande, qui constitue l'employeur principal. Il agit à titre de bureau régional d'Affaires indiennes.
    Merci.
    Nous accordons maintenant la parole à Mme Cathy McLeod.
    Je remercie les deux témoins. C'est assurément un plaisir d'être dans la magnifique ville de Québec. Je n'y étais pas venue depuis quelques années.
    Ma question s'adresse aux deux témoins, car elle porte sur une question de plus grande envergure. Vous n'ignorez pas que le gouvernement a scindé le ministère des Affaires autochtones en deux parties, dont une doit s'occuper des relations de la Couronne. Je pense que nous attendrons avant de poser un jugement à cet égard. Le plan de la ministre présente des occasions, mais comporte aussi des défis, car il faut éviter d'instaurer encore une autre bureaucratie.
    Si vous deviez conseiller la ministre à propos de son nouveau ministère et de son mandat afin de faire progresser les dossiers, lesquels concernent les revendications territoriales, l'entente en matière d'éducation et l'entente d'autonomie gouvernementale, quels conseils lui prodigueriez-vous? Elle s'emploie à effectuer ce travail en ce moment même.
(0835)
    Je lui conseillerais d'abord de faire quelque chose et de prendre une décision, car cela fait trop longtemps que nous n'avançons pas et que le gouvernement ne prend pas de décision.
    Je pense que Constant a indiqué que les négociateurs arrivent dépourvus de mandat. Or, c'est la chose la plus importante que nous devons entendre de leur part. Quel est votre mandat? Qui êtes-vous? Qui représentez-vous? Ce sont des questions très importantes qui doivent être posées d'entrée de jeu.
    De notre côté, puisqu'il s'agit là de nouvelles fraîches que nous avons apprises il y a quelques semaines, nous nous sommes demandés ce qu'il allait advenir de cette initiative. Je sais que c'est une nouvelle orientation, une nouvelle étape.
    Je lui conseillerais en premier lieu de collaborer vraiment avec les Premières Nations, car ce sont ces dernières qui bénéficient des services. Ce sont donc elles qui savent exactement ce dont elles ont besoin pour aider la communauté, la nation à améliorer son sort. C'est le premier conseil que je donnerais à la ministre Philpott.
    Le gouvernement a-t-il communiqué avec vous pour vous demander votre avis sur la conception de ces ministères?
    Jusqu'à maintenant, nous n'avons reçu qu'une lettre où il nous signale ses intentions. Il nous a également invités à formuler des commentaires, mais nous sommes encore à analyser notre priorité à ce sujet et les observations que nous ferons sur ce nouveau changement. Nous tentons également d'évaluer nos préoccupations quant à cette nouvelle approche. Comme je l'ai fait remarquer, nous sommes en train d'analyser la situation. Tout cela est frais et nouveau; nous sommes donc encore en train d'évaluer le résultat de cette démarche.
    Est-ce lors de l'annonce que vous avez eu vent pour la première fois de cette initiative? Savez-vous si le gouvernement a tenu un processus de consultation préalable?
    Personnellement, je n'ai pas entendu parler de consultation préalable. Tout le monde a été pris par surprise. L'annonce a suscité l'étonnement parmi les gens avec lesquels je travaille. Nous tentons encore de déterminer si c'est une bonne ou une mauvaise chose. C'est peut-être une bonne chose. Un ministère s'occupera des relations avec les Premières Nations, alors que l'autre se chargera de fournir des services à ces dernières. Il faudra peut-être moins de temps pour que nous obtenions les services que nous voulons.
    Cependant, comme je l'ai indiqué, nous analysons encore le résultat de cette initiative.
    Merci.
    Un processus de négociation de 40 ans est bien trop long. Quels sont les obstacles? Vous avez parlé des négociateurs. Avez-vous pu vous rejoindre vraiment à certains égards? Avez-vous résolu un certain nombre de questions?
    Je comprends que les changements de négociateurs constituent un problème et je sympathise avec vous, mais savez-vous quels sont les véritables obstacles? Existe-t-il un moyen de les surmonter?
    jD'après ma courte expérience — je n'étais même pas né quand les négociations ont commencé —, je pense que de nombreux facteurs entrent en ligne de compte, notamment la bonne foi. Pendant longtemps, on n'a pas négocié de bonne foi. La situation a commencé à s'améliorer il y a peut-être quelques années. Depuis deux ou trois ans, on observe une amélioration lors des négociations. Il y a aussi quelque chose de très particulier dans le cadre des négociations de la nation Atikamekw. Nous négocions...
(0840)

[Français]

une entente de principe.

[Traduction]

    J'ignore comment vous dites cela. Cette entente de principe est très détaillée. Elle comprend beaucoup de détails. Elle tient pratiquement lieu d'entente finale; c'est peut-être la raison pour laquelle le processus est plus long pour la nation Atikamekw. Nous avons remis cette approche en question pendant un certain temps. Dans mon esprit, dans une entente de principe, on indique les chiffres, la teneur de l'entente finale et la superficie du territoire. C'est une vision d'ensemble. Voilà ce qu'est censée comprendre une

[Français]

entente de principe.

[Traduction]

    Dans notre cas, cependant, l'entente de principe est très détaillée et, au bout du compte, elle servira d'entente finale. C'est peut-être une des raisons.
    En outre, comme je l'ai souligné plus tôt, les négociateurs changent toujours. Parfois, c'est le gouvernement fédéral, qui ne fait pas preuve de bonne foi. Parfois, c'est le gouvernement provincial, et il y a absence de bonne foi. Nous sommes coincés entre les deux. Les ressources naturelles relèvent du gouvernement provincial; or, elles constituent parfois un gros problème, et il est difficile d'en arriver à une entente à ce sujet. C'est un ensemble de divers facteurs qui font que le processus prend beaucoup de temps.
    Il n'y a pas de projet d'envergure dans notre territoire. C'est peut-être la raison. Dans certaines régions, le gouvernement souhaitait assurer la réalisation de grands projets, et il a affecté toutes ses ressources et a tout mis en oeuvre pour conclure une entente promptement parce qu'il y avait, sur les terres concernées, un grand projet qu'il voulait réaliser très rapidement. Ce n'est peut-être pas le cas pour nous.
    Nous allons maintenant entendre une personne qui est peut-être intéressée par un de ces projets d'envergure: M. Romeo Saganash.

[Français]

    [Le député s'exprime en cri.]
    Je veux commencer par vous, grand chef Awashish. Je suis ravi de le faire en français, parce que cela fait plusieurs séances que nous tenons uniquement en anglais, et je veux aussi faire travailler les interprètes.
    Vous avez dit plusieurs choses dans votre témoignage qui ont suscité beaucoup d'interrogations chez moi. Vous parliez d'une entente de principe qui a été signée et de l'intensification de l'exploitation des ressources sur le territoire. Je voulais savoir si vous pensez qu'il y a un lien entre les deux, en particulier étant donné que ce comité est appelé à étudier les politiques de revendications globales et de revendications spécifiques et qu'il aura des recommandations à présenter à cet égard.
    Vous parliez de la durée de vos négociations. Croyez-vous qu'il y a un lien entre des politiques existantes, d'une part, et la durée de ces négociations depuis qu'elles ont commencé, d'autre part? Si oui, quels sont les obstacles qui existent actuellement sur le plan fédéral?
    Je suis du même avis que vous. Il y a une situation très injuste relativement au fait que, pendant que vous négociez, l'exploitation de votre territoire traditionnel se poursuit et les ressources continuent d'y être exploitées.
    J'aimerais savoir si vous avez des recommandations à formuler. Doit-on imposer des moratoires, dans ce genre de situation? J'aimerais recueillir votre avis à ce sujet.
(0845)
     En ce qui touche la politique des revendications globales, c'est certain qu'il y a des problèmes.
    Vous parlez de moratoires, mais des moratoires ont déjà été établis au Québec, justement pour faire cesser les développements sur nos territoires pendant la négociation. Cela a fonctionné pendant un bref moment, mais, comme je l'ai dit, cela ne dure pas longtemps. Le développement continue, l'économie doit continuer à rouler, et c'est très désolant. Je ne sais pas si le comité a le pouvoir de changer les choses en ce qui touche le développement de nos territoires et si le comité a le mandat de présenter les recommandations nécessaires. Je ne sais pas si le gouvernement a la volonté de poser des gestes comme cela pour arrêter le développement sur notre territoire. Certainement, cela peut faire mal à l'économie. Je pense que l'économie est peut-être la voix la plus forte dans le monde aujourd'hui.
     En ce qui concerne la politique de revendication globale, selon nous, comme je l'ai mentionné, il faut la rapprocher de l'économie. C'est ce que croient les Atikamekw. Les négociateurs des tables centrales canadiennes suivent un cadre de négociation et ils ne peuvent pas en sortir, ce qui pose souvent problème d'une région à l'autre. Peut-être que certaines approches peuvent faire l'affaire de quelqu'un en Colombie-Britannique, ou dans les Territoires du Nord-Ouest, mais pas ailleurs. L'approche d'un océan à l'autre ne fonctionne pas. Je crois qu'on devrait adopter des approches plus particulières d'une région à l'autre, surtout en ce qui a trait au développement économique.
    Pour votre information, la nation atikamekw participe actuellement à deux tables, sur le plan national, avec 40 autres nations et le gouvernement fédéral. Une de ces tables se penche sur la relation financière avec les Premières Nations, et on semble vouloir élaborer une nouvelle approche en cette matière. L'autre table porte sur l'approche fiscale à adopter lors de négociations globales avec les Premières Nations. Nous avons plusieurs approches, plusieurs questions. Nous avons apporté beaucoup d'eau au moulin. Nous essayons de faire modifier la nouvelle approche. Aujourd'hui, c'est qui est important. Je crois que le développement économique est important pour la nation atikamekw et la nouvelle génération des Atikamekw. Nous essayons de trouver des solutions qui vont profiter à tout le monde, autant à nous qu'aux Québécois et aux Canadiens.
    J'ai parlé plus tôt de l'interrelation entre tous les habitants du Canada. Il faut que les Premières Nations puissent avoir les moyens de se développer, afin de pouvoir contribuer à un meilleur Canada. Pour cela, il faut avoir des approches réalistes. Nous travaillons beaucoup avec des indicateurs pour essayer de trouver une approche particulière d'une nation à l'autre, tout en tenant compte de l'éloignement, du niveau de scolarité et des infrastructures dans les communautés, donc de plusieurs facteurs.
    La nation atikamekw est prête. Si on veut parler d'économie, de développement économique, de rattrapage socioéconomique et de combler l'écart, la nation atikamekw est prête. Jusqu'à présent, autour de ces tables, nous avons été des leaders. Nous avons posé des questions, autant aux représentants des autres Premières Nations qu'à ceux du gouvernement. Quand on demande des chiffres, des indicateurs, les autres nations ne les ont pas. Nous, nous les avons, et nous sommes prêts à faire avancer les choses positivement pour que le projet soit viable à long terme. L'approche d'un océan à l'autre pose souvent problème, puisqu'il y a des particularités d'une région à l'autre.
    Ces indicateurs ne sont pas décidés, ils n'ont pas été choisis. Nous, les Atikamekw, nous sommes prêts.
(0850)
    Comment a été perçue la date butoir que vous avez énoncée tout à l'heure, celle de juin 2018, je crois? Comment cela a-t-il été perçu, et qu'avez-vous envisagé de faire après juin 2018?
     Je ne sais pas pour...

[Traduction]

    Nous devrons attendre à plus tard pour entendre cette réponse.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Anandasangaree.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de comparaître. Sentez-vous libres de répondre en français également.
    Je voudrais vous donner l'occasion de finir de répondre à la question que Romeo vient de vous poser, si vous le voulez bien.
    Merci. Je vais tenter d'y répondre en anglais. J'aime avoir l'occasion de parler anglais. Ma partenaire ne s'exprime qu'en anglais et ne parle pas un mot de français. Je dois lui faire honneur.
    Comme je l'ai indiqué à Romeo plus tôt, en juin 2018, cela fera 40 ans que nous négocions. C'est ce que mon peuple me dit. C'est trop long. Je pense que nous n'allons nulle part. Nous avons une dette de 35 millions de dollars à cause de ces négociations. Nos aînés demandent pourquoi nous devons payer pour négocier quand le gouvernement est censé venir à nous pour négocier à propos de nos terres.
    Nous n'avons jamais vendu, jamais baissé pavillon, jamais échangé nos terres. Nous vivons dans un État de droit, et en vertu de la primauté du droit, ces terres nous appartiennent toujours. Comment allons-nous résoudre la question?
    « Ils sont censés venir négocier avec nous. Pourquoi devons-nous payer pour négocier? » Voilà ce que disent nos aînés.
    Nous avons bien des histoires. Nous consignons les propos de tous nos aînés. Ils nous disent ce qu'il s'est passé lorsque les premiers colons sont arrivés d'outre-mer, il y a 500 ans, expliquant que nous avons lentement reculé à l'intérieur des terres. Nous conservons tous ces propos, ces légendes et ces histoires. Je peux vous raconter la véritable histoire du Canada, si vous voulez l'entendre.
    En juin 2018, nous voulons pouvoir offrir quelque chose de très concret à notre peuple, à nos jeunes. Permettez-moi de vous dire quelque chose: la nation Atikamekw compte actuellement 7 800 personnes, dont 70 % sont âgés de moins de 35 ans et 50 % ont 12 ans et moins.
    Qu'allons-nous faire? Ce sont ces personnes que je vise. Nous devons les aider. Nous devons leur donner des outils. Nous devons les reconnaître.
    Je sais que ce qui nous est arrivé est terrible, mais je pense que nous avons tourné la page. Nous voulons être reconnus à titre de citoyens à part entière. Je veux permettre à mon peuple, à nos jeunes d'être fiers de pratiquer leur culture, de parler leur langue et de participer au développement économique du pays.
    J'ai un certain nombre de questions très pointues.
    D'accord, posez-les. Parfois, je m'emballe, alors...
    Mais non. Une de vos remarques m'a intrigué et je voudrais que vous apportiez peut-être trois précisions. Vous avez affirmé, au début, que vous voulez obtenir des outils pour vous développer à titre de nation. Mais de quoi s'agit-il? Quels sont ces outils?
    Nous avons toujours tiré de l'arrière, regardant le pays se développer et tout le monde s'enrichir. Pendant de nombreuses années, notre peuple n'a pas vraiment profité de cet essor. Si vous remontez dans l'histoire, vous constaterez que mon grand-père a obtenu le droit de vote en 1969. Avant cette année-là, il ne pouvait voter. Voilà pourquoi nous tirons de l'arrière.
    Comment allons-nous rattraper ce retard? Comment allons-nous combler l'écart qui nous sépare? Nous avons beaucoup entendu parler de la question dernièrement. La nation Atikamekw connaît le montant. Si le gouvernement fédéral a besoin du montant dont elle a besoin pour rattraper son retard au chapitre du développement socio-économique, nous pouvons le lui fournir.
(0855)
    Madame Bernard, merci de nous avoir fourni ces chiffres très impressionnants. L'éducation constitue, bien entendu, un sujet très important.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur le genre d'entente qui lie les 12 communautés? S'agit-il d'une entente sectorielle? Qui y adhère? La province fait-elle partie de cette entente? De façon générale, comment le financement fonctionne-t-il? Vient-il directement du gouvernement fédéral ou à la fois des gouvernements fédéral et provincial? Quel contrôle avez-vous sur le programme d'enseignement, particulièrement au chapitre de la langue?
    Nous avons une entente d'autonomie gouvernementale sectorielle avec le gouvernement fédéral. Il me semble que c'est en 1998, au moment de l'adoption de la Loi sur l'éducation des Mi'kmaq, que le gouvernement provincial a également admis notre pouvoir en matière d'éducation.
    Nous recevons du financement du gouvernement provincial, mais très peu. Nous avons avec lui d'excellentes relations de travail. Nous avons conclu avec une entente de service d'éducation avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, qui accueille un certain nombre de nos élèves. En tout, ce sont peut-être 700 de nos élèves qui fréquentent des écoles provinciales. Le gouvernement provincial a accepté de fournir des services de perfectionnement professionnel à nos communautés, auxquelles nous offrons également de tels services.
    Nous sommes sur ses...
    Pouvons-nous traiter de la langue? Je sais que mon temps est presque écoulé, mais...
    Volontiers. En ce qui concerne la langue, la décision relève de nos communautés, car le programme d'enseignement est de leur ressort. La plupart des communautés appliquent le programme de la Nouvelle-Écosse, car elles souhaitent que leurs élèves effectuent des études postsecondaires; elles utilisent donc le programme provincial, mais en le bonifiant. Deux de nos écoles offrent des cours d'immersion. Eskasoni, notre communauté, a une école d'immersion de la maternelle à la cinquième année.
    Merci.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Kevin Waugh.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais poursuivre sur la question de l'éducation, si vous le voulez bien.
    Voici quelques chiffres de ma province, où j'ai été administrateur pendant 10 ans. Ces chiffres ne sont guère brillants. Les taux de diplomation des élèves autochtones des écoles publiques de Regina ont augmenté de 11 %. Ils étaient de 42 %; la province a donc exigé que les 28 commissions scolaires commencent à unir leurs efforts; ces taux sont maintenant de 53 %. À l'échelle provinciale, les taux de diplomation des élèves autochtones sont de 43 %. Ainsi, quand vous avez brandi le chiffre de 87,6 % la semaine dernière, j'ai trouvé que l'écart était considérable.
    Nous savons qu'il existe des problèmes. De la 10e à la 12e année, on obtient un crédit pour les taux de diplomation. À mon avis, il importe peu qu'un élève ait besoin de cinq ans pour obtenir son diplôme, mais les gouvernements provinciaux veulent toujours qu'il le fasse en trois ans. Ils ne tiennent compte que des taux de diplomation sur trois ans, de la 10e à la 12e année. Or, nous savons que la vie de certains élèves est difficile à la maison. Je ne me soucie pas du temps qu'ils mettent à obtenir leur diplôme, tant qu'ils l'obtiennent. Dans notre province, on éprouve de la difficulté à dire que si un élève a besoin de cinq ans pour passer de la 10e à la 12e année, on sera là pour l'épauler. On veut le pousser à terminer ses études dans les temps.
    Je vais examiner ces chiffres, car les données sont d'une importance primordiale dans ce dossier. Vous recueillez des données, et je veux les obtenir, car nous ne communiquons pas nos données. Nous sommes tous habitués à les tenir secrètes, car elles nous embarrassent.
    Fournissez-nous quelques données sur ce taux de diplomation de 87,6 %.
(0900)
    D'accord. Que voulez-vous savoir à ce sujet?
    Commençons ici. Ce chiffre est-il établi pour les trois années allant de la 10e à la 12e année?
    Oui. Nous ne nous intéressons pas qu'au taux de diplomation. Nous établissons nos taux en utilisant le nombre d'élèves qui entrent à l'école en septembre et qui indiquent qu'il s'agit de l'année à la fin de laquelle ils obtiendront leur diplôme. De ceux qui précisent que c'est leur année de diplomation, 87 % obtiennent leur diplôme.
    Je veux mettre l'accent sur une communauté, Eskasoni. J'ai effectué mes études secondaires dans le réseau provincial, et quand j'ai obtenu mon diplôme, il y a quelques années, en 1981, je faisais partie des cinq élèves qui avaient obtenu leur diplôme. Quand j'avais commencé en 10e année, nous étions 160 élèves à fréquenter l'école secondaire provinciale, mais seulement cinq ont obtenu leur diplôme d'études secondaires en trois ans.
    En juin dernier, dans ma communauté d'Eskasoni, 60 élèves ont obtenu leur diplôme d'études secondaires dans leur communauté, un chiffre qui se maintient depuis un certain nombre d'années. Je pense que c'est parce que les élèves fréquentent l'école dans leur communauté, là où leur langue est acceptée. Ils suivent des cours de langue. Ils doivent également suivre le programme provincial, et ils réussissent très bien. J'attribue ce succès à leur sentiment d'appartenance. C'est leur école, et ils sont fiers de leur langue et de leur culture.
    D'accord.
    Je pense que mon temps est écoulé.
    Il l'est, en effet, et pour tout le monde.
    Nous avons eu une discussion fascinante. Comme nous recueillons de l'information, nous vous encourageons à nous présenter un mémoire, d'autant plus que vous n'avez reçu qu'un bref préavis. D'ici le 15 octobre, vous pouvez nous fournir des renseignements supplémentaires et vos réflexions sur divers sujets, comme les revendications territoriales, les négociateurs, les délais ou les coûts, et ces informations pourront encore faire partie du rapport.
    Cathy.
    Madame la présidente, juste avant que nous ne levions la séance, il y a un sujet à propos duquel je n'ai pas eu l'occasion de poser de question, mais qui vaudrait vraiment la peine d'être abordé.
    Vous avez indiqué que vous n'étiez admissibles qu'à trois des dix indicateurs pour recevoir le financement bonifié. Si nous pouvions comprendre, grâce à votre mémoire, quels sont les sept autres indicateurs , cela nous serait utile.
    Essentiellement, nous proposons que vous continuiez d'ajouter des renseignements, car les analystes utiliseront l'information que vous nous fournissez pour préparer leur rapport. Sentez-vous libre de nous communiquer ces renseignements, que ce soit sous forme écrite ou orale.
    Mike.
    Je voulais soulever un point, madame la présidente, en espérant que les témoins pourraient nous éclairer à ce sujet.
    Il existe un tribunal des revendications particulières. Mais en ce qui concerne les revendications territoriales globales, y a-t-il un mécanisme vous permettant de vous adresser à un tribunal ou êtes-vous dépourvus de moyen d'action? Si vous pouviez traiter de cette question dans votre mémoire, nous vous en serions reconnaissants.
    La situation est hors de contrôle.
    Gary.
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement. D'après ce que j'avais compris, nous avions un peu plus de temps avec ce groupe de témoins, n'est-ce pas? Comme la prochaine partie de la séance ne commencera pas avant un petit bout de temps, je me demande si nous pourrions effectuer un autre tour de questions.
    C'est au Comité qu'il revient d'en décider.
    Nous pourrions effectuer un tour de cinq minutes.
    Comme un témoin ne s'est pas présenté, le député de la région et moi avons proposé de tenir une rencontre de 60 minutes, mais si le Comité le désire, nous pouvons prolonger la rencontre. Ce serait bien.
    Certainement, tant que les témoins y consentent.
    De toute évidence, les députés vont continuer de poser des questions.
    Cela ne me pose aucun problème. Je pourrais rester ici toute la journée si vous le voulez.
    Je dois partir vers 11 heures.
    D'accord.
    Kevin, pourquoi ne continuez-vous pas? Il vous restait quelques minutes.
    Oui.
    Permettez-moi de commencer par ce dont nous parlions à l'instant: le fait que vous êtes admissibles à trois des dix sous-activités.
    Vous parlez des programmes de financement bonifié.
    M. Kevin Waugh: Oui.
    Mme Eleanor Bernard: Nous n'avons rien obtenu pour les besoins immédiats. Nous n'avons reçu aucun fonds aux fins de transformation et nous avons conclu que nous ne recevrions rien à cet égard, car nous nous débrouillons déjà fort bien. Parmi les sous-activités figure également l'éducation postsecondaire, bien qu'à ce sujet, nous ayons reçu certaines sommes. Nous n'avons rien obtenu de nouveau au chapitre du capital. Pardonnez-moi, mais je ne me souviens plus des deux autres.
    Ce sont là certains des domaines pour lesquels nous n'avons pas reçu...
(0905)
    C'est ce que Cathy voulait savoir.
    Mme Eleanor Bernard: Oui.
    Vous pouvez fournir l'information ultérieurement, si vous le voulez bien.
    C'est ce que je ferai. J'ai pris des notes.
    Je voulais également faire remarquer que non seulement nos taux de diplomation sont élevés, mais que l'âge auquel les élèves obtiennent leur diplôme est très bon en comparaison avec d'autres régions. Nos élèves obtiennent leur diplôme trois ou quatre ans après leur entrée à l'école secondaire. C'est excellent.
    Très bien.
    Merci, madame la présidente.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Anandasangaree, qui, d'après ce que je comprends, partagera son temps avec M. Bossio.
    Excellent. Merci.
    Je veux continuer dans la même veine. Vous accusez une dette de 35 millions de dollars; le gouvernement vous met donc dans une position dans laquelle vous ne pouvez négocier, car vous vous enfoncez toujours davantage dans l'endettement. Cette situation vous a-t-elle obligés à recourir à la gestion des manquements?
    Non, nous n'avons jamais fait cela.
    Le gouvernement continue donc de vous prêter de l'argent.
    Il continue de nous prêter de l'argent, et nous ne concluons pas d'entente. En outre, je considère que c'est la partie qui finit par quitter la table de négociations de mauvaise foi qui doit payer la note. Cela explique peut-être la situation.
    Dans le cadre du processus de revendications territoriales particulières, vous pouvez vous adresser à un tribunal, un organe indépendant afin d'obtenir la restitution des terres ou obtenir un certain règlement après quelques d'années. Sur le plan de l'entente sur les revendications territoriales globales, il n'existe aucun recours. Vous êtes otages du processus et vous devez continuer, même si vous ne négociiez pas par moment. Vous devez continuer de payer vos experts, car si vous en embauchez de nouveaux, vous repartez à zéro.
    En 1979, notre peuple, nos chefs pensaient que la négociation constituait le meilleur moyen de conclure une entente. Ils croyaient en la bonne foi du gouvernement, au système et à la primauté du droit, et ils ont opté pour la négociation. Nous aurions pu choisir de nous adresser à un tribunal à ce moment-là, mais les chefs n'ont pas cru en cette avenue. Ce tribunal est très cher, tout d'abord, mais au regard de la dette que nous avons accumulée relativement à la revendication territoriale, nous aurions peut-être dû choisir cette voie. Les coûts auraient été pratiquement les mêmes et la question serait probablement réglée aujourd'hui.
    Au cours des 40 dernières années, combien d'années avez-vous passées à négocier? Pendant combien d'années avez-vous négocié au cours de ces 40 années?
    Nous avons négocié pendant 35 ans. Les négociations ont cessé en 2009 pour reprendre en 2013. Le gouvernement du Québec a continué de négocier, mais le gouvernement fédéral a arrêté de la faire de 2009 à 2013. Je n'étais qu'observateur à l'époque. Il y a eu une autre partie quand j'étais plus jeune, et la même chose s'est produite.
    Grand chef, je sais que vous avez mentionné tout à l'heure une entente finale. Parlez-vous en fait de la version finale de toutes les revendications? Est-ce l'aspect légal que vous essayez de finaliser dans cette entente? Une fois l'entente finalisée, est-ce que cela signifie l'extinction de tous les droits futurs? Est-ce votre approche?
    Il y a une formule différente, et je pense qu'il vaut mieux que nous préservions nos droits, notre titre ancestral et nos terres. Nous voulons la reconnaissance générale de nos droits. Permettez-moi d'illustrer cela; disons que le gouvernement reconnaisse tous nos droits et nos titres sur les terres, mais que nous allons inclure dans une entente tous les droits que vous pouvez exercer sur le territoire prévu dans le traité. Tout le reste qui n'est pas mentionné dans le traité — disons que nous mettons cela dans un nuage, dans une boîte, à côté.
    À terme, il se peut que cela revive. À terme, selon l'évolution de la société, l'évolution de la situation économique ou, peut-être l'évolution... Je ne sais pas ce que l'avenir réserve. Je ne veux pas faire de prévisions apocalyptiques, mais je ne le sais pas.
(0910)
    Quand vous regardez autour le contexte géopolitique et ce qui se passe partout dans le monde, c'est parfois plutôt inquiétant pour le Canada — d'après moi, en tout cas. Tous les empires s'effondrent. C'est l'histoire de l'humanité. Nous voulons demeurer là. Nous allons demeurer là. Nous allons toujours pratiquer notre culture et parler notre langue.
    Nous avons parlé de langue, tout à l'heure, et j'ai oublié de mentionner dans ma déclaration liminaire que la langue atikamekw est, de toutes les langues des Premières Nations d'Amérique du Nord, celle qui est la mieux préservée; 98 % de nos gens parlent notre langue, ce qui est très fascinant. On devrait voir cela comme une valeur ajoutée pour le pays. Les gens devraient être aussi fiers que nous de cela. C'est un cadeau à l'humanité. C'est ainsi que les gens doivent voir cela. C'est une partie de l'ancienne langue qu'on parlait sur la terre, et nous parlons encore cette langue. Aujourd'hui, je veux que les Canadiens soient aussi fiers que nous, qu'ils nous aident à préserver notre langue, et qu'ils travaillent avec nous à développer le pays afin que notre prochaine génération ait un meilleur avenir.
    Quand je dis « afin que notre prochaine génération ait un meilleur avenir », je ne parle pas que de mes jeunes. Je parle aussi des vôtres. Qu'allons-nous leur donner? Allons-nous leur passer le problème à l'avenir, sans jamais l'évaluer? Je pense que pour les meilleurs d'entre nous, à voir ce qui se passe partout dans le monde, il faut nous rassembler, travailler ensemble et préserver ce qui est bien au Canada, préserver nos terres, et nous préserver nous-mêmes.
    Je crois — j'en suis sûr, et c'est bien ce que je ferai si je suis toujours en vie — que si quelque chose arrive, nous allons continuer de défendre nos terres à l'avenir, et nous allons défendre tous ceux qui sont sur les terres. Vos enfants, vos petits-enfants et vos arrière-petits-enfants, nous serons là pour les défendre. C'est la façon de penser des Premières Nations. C'est la façon de penser de la nation des Atikamekw. C'est ainsi que vous devez penser aussi. Investissez dans vos jeunes, investissez dans votre développement économique, investissez dans la protection de votre culture et de votre langue, et investissez dans votre fierté. C'est ce que le Canada doit faire — investir dans notre fierté. Nous allons être debout à côté de vous, et ensemble, nous allons bâtir un pays formidable.
    Madame McLeod, c'est à vous.
    Merci.
    C'est vraiment impressionnant, 98 %. Si cela faisait partie de notre étude, je voudrais savoir comment vous y arrivez. Mais j'ai des questions, et nous pourrions peut-être discuter ensemble, en privé, de la façon dont votre communauté réussit cela, car 98 %, pour la langue, c'est incroyable.
    Ce dont j'aimerais parler, c'est de vos propos antérieurs au sujet des possibilités économiques axées sur le partage de ressources. Naturellement, les gens viennent de diverses régions du pays, où des choses différentes se passent. Je reconnais également vos observations sur la façon dont nous devons davantage prêter attention aux régions, concernant ce que nous faisons et où nous le faisons. Je regarde la Colombie-Britannique, par exemple. Certaines personnes négocient des traités très complets, et d'autres ont choisi de ne pas le faire pour le moment. Sans égard à cela, ils négocient tous quand il y a de l'activité sur leurs terres. Par exemple, le gouvernement provincial a maintenant 37 % des redevances d'une mine. Cela s'ajoute à toute la participation au capital ou aux retombées économiques de la société. C'est du partage de redevances.
    Au Québec, est-ce que de telles relations existent, de sorte que tandis que vous négociez, vos collectivités profitent quand même des ressources?
    Oui, bien sûr. Nous adoptons aussi cette approche. Comme je l'ai dit, nos gens croient fermement en la négociation. C'est ainsi que nous le faisons — par la négociation. Ils se propulsent aussi vers la souveraineté. Nous travaillons, nous parlons à des entreprises, nous exerçons les droits que nous avons sur nos terres, et tranquillement, nous préparons nos jeunes et nos gens à être plus actifs et plus fiers, à mieux réussir à l'école et à avoir une meilleure prise sur nos droits et nos terres ainsi que sur toute l'exploitation qui se fait sur nos terres.
    Oui, certaines entreprises avec lesquelles nous discutons essaient d'en arriver à une entente sur les répercussions et les avantages, qu'on appelle ERA, et c'est une autre approche. Cependant, dans l'état du droit actuel, quand j'ai dit tout à l'heure que nous n'avons jamais cédé, vendu ou échangé nos terres, c'est la vérité.
(0915)
    Est-ce qu'il y a des cas où vous partagez des redevances avec la province?
    Nous avons essayé de développer cette approche, mais elle a toujours été renvoyée... Ils disent: « Vous allez vous occuper de cela à la table de négociation des revendications territoriales — des revendications globales.
    Quand nous avons un problème, ils vont toujours renvoyer cela à la table de négociation. Vous allez vous en occuper à la table de négociation. C'est toujours comme ça. C'est toujours la porte de sortie pour tout le monde, alors tout est lancé à la table de négociation des revendications territoriales.
    Dans ce cas, la Colombie-Britannique est très différente du Québec en ce qui concerne l'exploitation des ressources qui s'y fait.
    Il y a une ouverture, cependant. Puis-je dire quelque chose de mal d'eux? Il y a une ouverture, mais comme je l'ai dit, ils vont toujours tout renvoyer à la table de négociation des revendications territoriales.
    Ce que nous disons est différent. Nous disons que ça fait 40 ans. Nous ne voulons pas attendre encore 20, 30 ou 40 ans. Réglons ces choses maintenant. Rassemblons-nous. Concluons une entente bilatérale ensemble sur l'exploitation forestière, ou minière, ou sur l'exploitation de toute ressource sur le territoire. C'est l'approche, avec le gouvernement du Québec, mais c'est l'approche aussi, comme vous l'avez dit, avec les entreprises.
    Comme je l'ai dit, tout est toujours renvoyé à la table de négociation.
    Dans le secteur couvert par vos revendications territoriales, est-ce qu'il y a d'autres villes ou collectivités?
    Voulez-vous dire des villes ou villages non autochtones?
    Oui.
    Oui. Il y en a beaucoup.
    Je connais diverses collectivités où l'on négocie et où l'on dit qu'il est très important de maintenir les relations avec les gens qui vivent à côté d'eux depuis tant d'années. Est-ce que cela se produit régulièrement dans vos relations avec les collectivités? Est-ce que le gouvernement fédéral parle aux collectivités pour leur dire ce qui se passe?
    Répondez brièvement, je vous prie.
    Nous travaillons en étroite collaboration avec les municipalités qui nous entourent. Je sais que la fusion des municipalités au Québec a créé des problèmes en 2003. Cette fusion a causé beaucoup de tension entre les Premières Nations et les municipalités. Encore aujourd'hui, on ressent les effets de cela, mais oui, en tant que Premières Nations, nous agissons toujours de bonne foi et voulons que nos jeunes aient une meilleure vie. Nous parlons toujours avec espoir aux autres personnes, groupes, collectivités, municipalités, villes, villages et comtés.
    M. Saganash sera notre dernier intervenant pour cette série de questions.
    Merci, madame la présidente.

[Français]

    Je veux poursuivre dans la même veine que ma collègue Cathy McLeod.
    Au cours des audiences qui se sont tenues plus tôt cette semaine à Vancouver et à Winnipeg, nous avons entendu dire que le fait de conclure une entente avec une nation autochtone était profitable pour l'économie de cette nation, mais également pour la province et le pays. Je pense qu'il est important de le reconnaître. Vous l'avez souligné également.
    Dans le cadre de l'étude que nous réalisons sur la politique fédérale en matière de revendications globales, plusieurs témoins ont souligné la nécessité d'établir une base adéquate pour ce qui est de nos relations avec les Autochtones. En outre, plusieurs personnes ont mentionné le rôle que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones pourrait jouer.
    J'ai lu rapidement la déclaration de souveraineté que vous avez émise il n'y a pas très longtemps. Or, je n'y vois rien qui soit incompatible avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
    Avez-vous déjà réfléchi à cela également?
(0920)
    Si vous parlez de la possibilité de recourir à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, il est certain que cette option fait toujours l'objet de discussions. Nous faisons confiance au processus actuel mis en oeuvre par le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Cela dit, la mèche est en train de devenir très courte. Le mois de juin 2018 sera un moment décisif pour la nation atikamekw.
     Allons-nous opter pour une autre approche à ce moment-là?
     C'est ce que les gouvernements vont démontrer cette année qui va déterminer le choix de notre prochaine approche.
     Faire confiance à un processus qui ne vous a rien donné en 40 ans, cela s'appelle de la patience ultime.
    Cela fait partie des Premières Nations. Nous sommes très patients, mais comme je l'ai dit, il ne reste pas beaucoup de temps avant que la nouvelle génération fasse des pressions pour qu'on adopte une nouvelle approche.
    Pendant très longtemps, j'ai prôné une approche différente. En assemblée générale, les membres de notre nation croient toujours à cette option. Juin 2018 est la date où l'on saura vers où on s'en va. C'est sûr que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones est extraterritoriale. On connaît les Nations unies. C'est une organisation à laquelle on adhère ou non. Les autres pays voudront-ils s'ingérer dans ce qui se passe dans un autre pays?
    On voit ce qui se passe à l'échelle internationale, notamment en Corée du Nord. Plusieurs pays sont en conflit et ne s'entendent pas nécessairement. Les Nations unies est un organisme de persuasion. L'humanité a pris conscience de l'importance de la culture autochtone et de la reconnaissance des droits autochtones, et du fait que cela constitue un patrimoine pour l'humanité. C'est l'esprit de la Déclaration aux Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
    Je commence à être un peu sceptique, mais je crois tout de même qu'on va arriver à quelque chose bientôt. Comme je l'ai dit, les prochains mois seront très importants pour la suite des choses.
     L'une des pratiques qui a été dénoncée de façon quasiment unanime dans nos réunions est celle qui consiste à accorder des prêts pour les négociations de revendications globales. Vous avez dit plus tôt en anglais:

[Traduction]

    Pourquoi devons-nous payer pour négocier?

[Français]

    C'est une question fondamentale pour moi. On remet souvent cette pratique en question, mais on oublie l'autre partie de cette équation, qui consiste à continuer de payer des négociateurs sans mandat et de les remplacer constamment par d'autres négociateurs, également sans mandat. C'est une pratique que notre comité doit dénoncer. Pendant 40 ans, alors que vous négociez, on continue à prendre la richesse de vos territoires. Pour moi, c'est une situation absolument inacceptable.
    Vous avez parlé de primauté du droit, qui est si importante dans ce dossier. C'est pourquoi je suis retourné voir votre déclaration. Vous dites refuser de prendre la voie du moratoire, quand je vous ai posé une question à ce sujet tantôt. Pourtant, il s'agit de votre territoire et de vos ressources.
    On doit beaucoup réfléchir à la jurisprudence de la Cour suprême en la matière, en particulier la cause de la nation haïda, qui préconise qu'il faut justement réconcilier notre souveraineté préexistante et la souveraineté assumée de la Couronne. Si l'on veut vraiment parler de réconciliation, c'est sur ce principe qu'il faut bâtir, n'est-ce pas?
(0925)
    Je suis tout à fait d'accord là-dessus.
    La réconciliation doit se faire à tous les niveaux. C'est aussi reconnaître les choses qui ont été faites aux Premières Nations au cours de l'histoire, par exemple les tentatives d'assimilation et d'extermination culturelle. Je suis tout à fait d'accord quand vous vous demandez pourquoi il faudrait payer pour la négociation. Cela fait très longtemps que cela dure.
    Je suis tout à fait d'accord sur la question du moratoire. Après un certain temps, le moratoire tombe. On l'a fait à plusieurs reprises sur différents sujets. Il faudrait vraiment une volonté expresse des gouvernements sur la question.
    Il faut comprendre que les gouvernements ont intérêt à régler la question avec les Premières Nations. Ce sera au bénéfice des Premières Nations, mais également de tout le monde. On ne peut pas laisser ce problème persister éternellement.
    Je pense que mon temps de parole est écoulé.
     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Il nous restait du temps dans cette partie de la séance, alors, nous avons été très libéraux. Désolée, c'est une petite blague politique.
    Je tiens à vous remercier d'avoir accepté notre invitation. Comme je l'ai dit plus tôt, n'hésitez pas à nous faire parvenir un mémoire, si vous le désirez.
    Je tiens à vous féliciter pour votre belle réussite dans la région atlantique. Votre peuple profite vraiment de l'excellent travail que vous faites, et nous comprenons vos frustrations par rapport à la mise en oeuvre.
    Nous allons faire une pause et revenir dans environ 15 minutes.
(0925)

(0950)
    Nous reprenons officiellement la séance. Notre deuxième groupe de témoins est arrivé. Nous sommes très heureux que vous soyez ici pour représenter la Première Nation des Innus Essipit.
    Il est question aujourd'hui des revendications particulières et des ententes sur les revendications territoriales globales. Le Comité est chargé d'entendre des témoignages, de préparer un rapport et de formuler des recommandations qui seront présentées au gouvernement du Canada. Nous sommes impatients de vous entendre sur les défis avec lesquels vous devez composer et de recevoir vos conseils. Tout cela sera pris en considération. Je tiens à vous rappeler que vous avez jusqu'au 20 octobre pour nous soumettre des mémoires ou des documents supplémentaires.
    Ceci dit, commençons. Vous disposerez de 15 minutes pour nous présenter votre exposé, après quoi nous passerons aux questions des membres. Vous avez la parole.

[Français]

     Je m'appelle Martin Dufour et je suis le chef de la nation des Innus Essipit. Marc Chaloult, coordonnateur, Traité et affaires publiques, à Essipit, est aussi présent.
    Je vous remercie beaucoup de l'invitation.
    La nation des Innus Essipit a été invitée à comparaître devant le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes pour faire part de son expérience concernant ses revendications particulières et ses revendications territoriales globales. J'ai accepté l'invitation au nom des Essipiunnuat, mais uniquement pour aborder la question des revendications particulières.
    En plus de notre présence devant le Comité, nous avons déposé un mémoire faisant état de l'expérience des Essipiunnuat du processus des revendications particulières ainsi que des commentaires et des recommandations. Aujourd'hui, nous ferons un résumé des points soulevés dans ce mémoire et nous serons disposés à répondre à vos questions.
    En date d'aujourd'hui, la nation a deux revendications particulières actives et soumises au gouvernement fédéral: les provisions territoriales insuffisantes lors de la création de la réserve en 1892 et la cession illégale du chemin du Quai en 1904.
    Débutons par la revendication qui concerne la création de la réserve.
    La faible superficie de la réserve et le fait que nous soyons enclavés dans la municipalité Les Escoumins ont toujours constitué un enjeu très important pour ma communauté. Dans les années 1980, nous avons donc entrepris un agrandissement de la réserve et, à ce moment, nous avons appris que la situation aurait dû être très différente.
    Sur la base des documents obtenus, nous constatons que la communauté a été privée de plus de la moitié des terres de réserve dont elle aurait dû bénéficier depuis plus de 100 ans, et qu'elle aurait dû bénéficier d'un bien meilleur accès au fleuve Saint-Laurent depuis ce temps. La situation historique est bien documentée et le constat est évident.
    En 1881, le Canada s'est engagé par écrit à acquérir approximativement 230 acres pour les besoins de la création d'une réserve à notre bénéfice, mais finalement, il a acquis uniquement 97 acres. De plus, nos recherches ont montré que cette superficie de terre de 97 acres, acquise en 1892 par le Canada, n'a jamais obtenu le statut juridique de réserve. Cette dernière découverte a laissé toute la latitude au Canada, au cours des années 1890, pour régulariser à sa guise la situation controversée du chemin qui traverse notre réserve pour se rendre à un quai de compétence fédérale.
    En effet, en 1903, le maire des Escoumins a entrepris des démarches pour faire construire un chemin qui traversait la réserve afin de permettre l'accès à un nouveau quai fédéral. Alors que tout le monde croyait que les terres bénéficiaient du statut de réserve indienne, les procédures entourant une cession de terre selon la Loi sur les Indiens ont débuté. Or, nous sommes d'avis que cette cession n'a pas été effectuée en respectant les obligations prescrites par la loi ni les obligations fiduciaires applicables.
    Alors que nous étions au coeur du processus d'agrandissement de la réserve, le Canada a exigé de nous par écrit de régulariser la question du chemin du Quai avant qu'il ne confirme le statut officiel de réserve et ne donne son autorisation uniquement au projet d'agrandissement. Nous avons donc dû concéder l'assise du chemin du Quai située au centre de notre réserve et scinder notre communauté en deux. Nous avons finalement obtenu le statut de réserve, mais cela excluait le chemin du Quai. Vous comprendrez que cette cession illégale et ces pressions constituent ici notre deuxième revendication pour laquelle nous n'avons toujours pas été indemnisés.
    Revenons à notre première revendication particulière au sujet de l'insuffisance de la superficie de la réserve, que nous avons déposée auprès du gouvernement du Canada en 1994. Dix ans plus tard, soit en 2004, le Canada a rejeté la revendication particulière d'Essipit. Sa position, réitérée en 2012, a été de tout nier. La table était donc mise pour un long débat juridique initialement porté devant la Commission des revendications particulières des Indiens et, ultimement, devant le Tribunal des revendications particulières.
    C'est le 30 janvier 2017 que le Tribunal des revendications particulières a rendu une décision dans laquelle il concluait que le Canada avait manqué à son obligation de fiduciaire et n'avait pas agi dans le respect de l'honneur de la Couronne. Le Tribunal a reconnu que le Canada avait commis une faute en procédant à l'acquisition de 97 acres de terres alors qu'il avait convenu d'acquérir 230 acres pour la création de la réserve d'Essipit.
    Vingt-quatre années de débats et de procédures judiciaires ont été nécessaires afin d'obtenir la reconnaissance d'une faute qui nous apparaissait des plus évidentes. Dix années se sont écoulées entre le dépôt de la revendication et la première réponse du Canada en 2004.
    En plus des délais considérables dans l'analyse des dossiers des revendications soumises à la Direction générale des revendications particulières, on ne peut faire que le constat suivant: les procédures au Tribunal des revendications particulières sont tout aussi longues et ardues. Au lieu de simplifier et d'alléger la procédure, le Canada contribue à alourdir le fardeau en niant systématiquement tout élément susceptible de lui nuire et en exigeant qu'on lui soumette des milliers de pièces.
    Fort heureusement, notre jugement n'a pas fait l'objet d'une demande de révision judiciaire de la part du Canada, contrairement à ce qu'il avait fait dans plusieurs dossiers où sa responsabilité avait été reconnue par le Tribunal.
    Le combat n'est toutefois pas terminé, puisqu'il nous faut maintenant débattre de l'indemnisation avec le Canada, processus qui est actuellement en cours.
(0955)
    Tel que nous l'avons mentionné un peu plus tôt, nous avons été stupéfaits de lire la réponse de la Direction générale des revendications particulières à notre revendication en 2004 et encore une fois en 2012. Les arguments soulevés par la Couronne étaient vides de sens et offensants.
    À l'audience, nous avons été tout autant consternés d'entendre les prétentions du gouvernement fédéral. En plus de ne faire preuve d'aucune ouverture, le gouvernement fédéral a encore une fois nié toute faute possible à l'égard des Essipiunnuat. Bien que nous ayons déjà entendu quelques-uns de ces arguments, ils nous ont fait aussi mal cette fois-ci.
    Dans l'unique but de se déresponsabiliser, le Canada invoque tout argument susceptible de lui donner gain de cause, au détriment de sa relation fiduciaire envers les Premières Nations et de son obligation de maintenir un comportement honorable. Notamment, le Canada a prétendu que c'était aux Essipiunnuat de demander plus de terres s'ils en avaient besoin, et que de toute façon, ils auraient pu bénéficier de la réserve de Betsiamites créée en 1861, à environ 105 kilomètres de notre réserve actuelle.
     Le Canada est même allé jusqu'à contredire les enseignements de la Cour suprême en niant ainsi ses obligations de fiduciaire ainsi que l'obligation d'agir avec honneur. Le Tribunal a néanmoins corrigé le tir en mentionnant que le fait que la Couronne ait transigé avec un tiers plutôt que de mettre de côté des terres publiques lui appartenant ou de les acquérir de la Couronne provinciale ne diminuait pas pour autant l'obligation de fiduciaire à laquelle elle était tenue envers notre communauté. Le Tribunal a aussi reconnu l'obligation de la Couronne d'agir avec honneur envers les Essipiunnuat.
(1000)
    En bref, sur ce point, bien que le Tribunal nous ait donné raison, nous demeurons bien amers concernant le comportement du gouvernement fédéral. Ainsi, pour nous, la réconciliation est compromise en raison des positions déconcertantes du Canada.
    Au sujet de l'indemnisation à déterminer à la suite de la décision du Tribunal, nous souhaitons aborder ici un autre argument qu'a soulevé le Canada et qui nous déçoit particulièrement. Pour le gouvernement fédéral, le fait que nous ayons ajouté des terres à notre réserve en 1998 répare le manquement et arrête le cumul des dommages. Selon le Canada, la zone d'une superficie de 0,4 kilomètre carré que nous avons ajoutée en 1998 peut compenser les 133 acres qui sont manquants depuis la démarche de création. Il est absurde de croire que tous les dommages et pertes sont effacés par cet agrandissement.
    Il est bien clair pour nous que, si nous avions eu ces terres dès 1892, notre développement, nos projets et notre évolution auraient été différents. Acquérir aujourd'hui ces terres ne change en rien le passé et nous sommes choqués que le Canada utilise ce prétexte pour diminuer le montant de l'indemnisation. Le gouvernement fédéral agit tout simplement comme un assureur: il souhaite par tous les moyens payer le moins possible.
    Nous souhaitons aussi aborder aujourd'hui la question du financement.
    Bien qu'un financement soit offert dans le cadre de la politique sur les revendications particulières, nous avons dû faire face à une diminution de financement considérable au moment où nous avions le plus besoin de fonds en raison de la préparation du procès. Ainsi, en juin 2016, à trois mois de l'audience, nous avons reçu le tiers de la somme que nous avions estimé nécessaire. Entre les deux audiences sur la responsabilité, nous avons dû faire une demande additionnelle de fonds, ayant épuisé rapidement toute la somme allouée. Encore cette année, alors que la responsabilité du Canada est reconnue et que nous entamons la seconde partie du litige nécessitant plusieurs expertises, le gouvernement fédéral a retranché près de 60 000 $ à notre demande de 208 000 $. Outre ces difficultés propres aux Essipiunnuat, dont nous pouvons témoigner, nous avons quelques remarques générales et recommandations à formuler aujourd'hui.
    Tout d'abord, nous croyons que le processus rigide du traitement gouvernemental des revendications particulières ne peut plus cohabiter avec les principes de réconciliation prônés actuellement par le gouvernement fédéral. Ces constatations ont d'ailleurs fait l'objet d'une déclaration des ministres Bennett et Wilson-Raybould au début du mois de septembre.
     Nous dénonçons le fait que cette compensation monétaire ne devrait pas être simplement calculée selon une formule-cadre et mathématique tel que le prétend le Canada. Toutes les pertes de bénéfices, les pertes de possibilités, les dommages collatéraux, les bénéfices obtenus de tiers ou par la Couronne à la suite du manquement devraient être pris en compte dans le calcul de la compensation financière. Les dommages liés à l'absence de délimitation de nos terres ainsi qu'à l'absence de titres clairs et de statuts officiels devraient également faire partie de la compensation, notamment pour toute la frustration et la contrariété vécue par la communauté en raison de ces ambiguïtés territoriales. Se limiter strictement aux principes juridiques ne fait pas honneur à toute l'importance spirituelle et culturelle que nous accordons à nos terres.
    Une fois qu'une entente est conclue avec l'une des Premières Nations ou qu'un Tribunal s'est prononcé sur sa responsabilité, que fait le Canada pour s'excuser de ses torts ou du fait d'avoir versé une somme d'argent négociée ardemment à la baisse?
    Il ne fait rien.
     La réparation n'est pas intégrale, et c'est là que le bât blesse. Le cadre restreint de la politique sur les revendications particulières et de la Loi sur le Tribunal des revendications particulières ne prévoit pas d'autres formes d'indemnisation qu'une somme d'argent. On ne prévoit pas de remède réhabilitant, pas d'excuses, pas de regrets ni même de doutes, et encore moins de garantie que de telles erreurs ne se reproduiront pas. Il n'y a rien pour panser les blessures et réparer l'injustice.
    Il serait honorable d'inclure dans les règlements et les ordonnances du Tribunal des mesures visant à reconnaître et à racheter les torts passés. Par exemple, prononcer des excuses publiques, reconnaître officiellement ses obligations envers les peuples autochtones, publiciser et expliquer publiquement les accords de règlement sont des mesures que le Canada pourrait adopter et qui pourraient accentuer, les unes autant que les autres, le sentiment de réparation.
    Soulignons également que le Tribunal ne peut ordonner des dommages exemplaires ou punitifs ni des dommages pour des pertes culturelles ou spirituelles. Le Tribunal ne dispose d'aucun pouvoir pour sanctionner ou punir la gestion déficiente de la Couronne, qu'il a d'ailleurs reconnue dans notre dossier. Quelle punition reçoit le fautif? Aucune. Le Tribunal ne fait que lui ordonner de remettre ce qu'il a pris, sans aucune mesure dissuasive.
    L'absence de réparations spécifiques des préjudices collatéraux qu'a pu entraîner la faute du Canada dans nos relations avec des tiers est un autre aspect déficient du processus actuel. À titre d'exemple, les manquements de la Couronne ont provoqué des relations houleuses entre la municipalité des Escoumins, ses citoyens et notre communauté, et nous en ressentons encore des répercussions aujourd'hui.
    Des litiges territoriaux ont instauré un climat d'animosité entre les membres de la communauté et les citoyens des Escoumins, comme entre la municipalité et le conseil de la nation, et ont laissé des traces historiques. Pourquoi ne pas accompagner la communauté dans des projets intercommunautaires d'infrastructure conjointe ou d'affirmation biculturelle, ou encore en créant un fonds de développement conjoint? Plusieurs avenues sont possibles.
(1005)
    En résumé, nous n'avons jamais choisi de partager une telle relation avec le gouvernement fédéral. Nous n'avons d'autre choix que de nous en remettre à lui et de lui faire confiance.
     Avons-nous seulement une garantie qu'une telle faute ne se reproduira plus aujourd'hui? Je vous laisse deviner la réponse.
    Le principal changement que nous souhaitons est un changement de mentalité. Au lieu d'aborder les revendications particulières dans un contexte d'adversité où le Canada cherche d'abord à limiter sa responsabilité, nous souhaitons qu'une approche compatible avec la relation distinctive et continue existe entre nos nations. L'approche prônée actuellement est incompatible avec la réconciliation souhaitée.
    Je vais terminer en vous donnant un exemple. Vous confiez les clés de votre maison à un voisin et celui-ci vole plusieurs biens pendant que vous êtes absent. Un tribunal demande simplement au voisin de remettre les biens volés, ce qu'il fait. Cependant, ce tribunal vous demande de lui confier les clés de nouveau, puisqu'il s'est montré digne de confiance en vous remettant les biens volés. Le feriez-vous?
     Tshinashkumitinau.

[Traduction]

    Très bien. Nous comprenons.
    M. Amos sera le premier intervenant de cette première série de questions.

[Français]

    J'aimerais tout d'abord vous remercier de vos témoignages très précis, qui nous ont permis d'en connaître davantage au sujet de l'histoire. Cela nous aide beaucoup.
    L'été passé, j'ai pu bénéficier des services offerts par votre communauté. J'ai visité votre communauté avec ma jeune famille. Le quai sur le fleuve, celui qui sert d'infrastructure à votre service de tourisme, possède un service guidé absolument excellent. Je tiens à dire à mes collègues qu'une visite en vaut le coup. Les paysages étaient extraordinaires. Je ne suis pas certain de son nom de famille, mais Julien Darchal, je crois...
    Il s'agit de Julien Marchal.
     C'est un guide vraiment extraordinaire, qui vantait le professionnalisme de l'organisation touristique des Innus Essipit. Je vous félicite. L'expérience en vaut le coup. On voit ce qu'il peut arriver quand il y a des investissements et des possibilités économiques pour les Autochtones, mais laissons cela de côté.
    Vos commentaires en ce qui a trait à la formule financière m'intéressent beaucoup. Dans ma circonscription, le Pontiac, là où la nation algonquine soumet ses revendications pour obtenir des gains spécifiques depuis longtemps, j'entends souvent les propos du chef Jean-Guy Whiteduck en ce qui concerne la fameuse formule 80/20. Vous avez énuméré d'autres aspects qui vous intéressent en matière non seulement du calcul de la compensation, mais des aspects non-monétaires qui devraient être incorporés.
    Cela risque peut-être de vous mettre dans l'inconfort, mais j'aimerais que vous décriviez davantage quels problèmes sont survenus entre la municipalité, les citoyens des Escoumins et votre communauté. Comment ont-ils empiré à cause de ce manque de potentiel d'indemnisation non monétaire? Comment ce processus pourrait-il améliorer les relations, si on le formulait à nouveau de façon à engendrer une réconciliation communautaire?
(1010)
    Je dois dire qu'actuellement, la relation va de mieux en mieux, parce que nous avons décidé de nous parler. Nous nous sommes dit, justement, qu'il pourrait y avoir des moyens financiers afin de nous aider à établir des projets communs. Nous n'avons pas attendu que cela provienne du gouvernement. Nous avons commencé tout de suite à essayer de mettre en place des projets communs. Il y a d'abord eu de petits projets de 5 000 $ à 6 000 $, par exemple nous avons acheté une surfaceuse. Nous avons commencé à créer un climat de confiance et à vraiment dire la vérité aux gens.
    Nous aimerions aussi que le gouvernement fédéral soit capable de dire les vraies choses et de venir expliquer certaines situations aux Canadiens et aux Québécois qui nous entourent, comme le problème qui s'est présenté lors de la création de la réserve et, qu'au lieu d'obtenir un kilomètre carré de territoire, nous en avons eu 0,4 kilomètre carré. Pourquoi nous sommes-nous fait entourer d'une clôture avec de la broche et pourquoi a-t-on placé une barrière à l'entrée? Nous nous sommes fait mettre là comme du bétail. On nous a dit de cultiver des patates, alors que nous étions des chasseurs et des pêcheurs et que nous aurions dû avoir un accès au fleuve et pouvoir pêcher le saumon. Ce sont tous des éléments qui ont mené à la guerre du saumon, dans les années 1980, où il nous a fallu nous affirmer et dire que nous avions droit à la ressource. C'est ce que nous avons fait. Ce n'était pas rose. J'étais très jeune à cette époque. Des coups de fusil ont été tirés.
    Nous avons acheté une première pourvoirie dans les années 1980. Les gens d'à côté disaient que les Innus allaient vider les lacs et tuer tous les orignaux sur le territoire. Nous avons été les premiers à engager des techniciens en aménagement cynégétique et halieutique pour compter le nombre de poissons qu'il fallait prendre dans certains lacs. Nous avons acheté une deuxième pourvoirie. À présent, nous possédons cinq pourvoiries. C'est pour faire travailler nos gens et développer une fierté dans la communauté.
     On dirait que les gens des municipalités environnantes, à cette époque, étaient un peu jaloux que nous ayons réussi, nous, les Innus. Au lieu de nous apitoyer sur notre sort, nous avons décidé de nous prendre en main. Depuis ce temps, nous n'avons jamais arrêté. Vous êtes venu voir les mistamek, soient les grands poissons, les baleines. Nous possédons une compagnie de croisières aux baleines, nous avons continué à développer les pêches commerciales, etc.
    Je vous dis que si des montants étaient accordés par le gouvernement fédéral, ou n'importe quel gouvernement, pour établir des projets conjoints avec les municipalités environnantes de certaines Premières Nations, cela contribuerait beaucoup à réconcilier les peuples.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Monsieur Waugh, vous avez la parole.
    Merci.
    Je vais m'exprimer en anglais. Je vous remercie pour cet exposé. Il s'est accumulé beaucoup d'amertume au fil des ans. Je peux l'entendre dans vos voix.
    Au début de vos négociations, on vous a promis plus de terres. Vous n'avez reçu que 97 acres, alors que vous auriez dû en recevoir 230. Quelles informations, s'il y a lieu, avez-vous reçues d'Affaires autochtones et du Nord Canada au sujet de la décision concernant les négociations entourant votre revendication particulière?
(1015)

[Français]

     En guise d'explications, on nous a dit que cela avait été fait dans les règles, que nous aurions dû en demander plus et que notre réserve n'aurait jamais dû être créée, puisque les Innus de la Haute-Côte-Nord auraient dû se diriger vers la réserve des Betsiamites, qui avait été créée en 1861. Cette réserve s'appelle maintenant Pessamit. En fin de compte, nous aurions dû être déportés, un peu comme les Acadiens l'ont été en Louisiane.

[Traduction]

    Je vais d'abord vous donner un peu de contexte. Il s'agissait d'une prétendue réserve — le territoire n'était pas reconnu comme une réserve, bien qu'il s'agisse d'une terre fédérale. Il est important de souligner, ce que nous avons fait dans notre mémoire, mais pas dans notre exposé, que pour corriger la situation, plutôt que d'ajouter aux 97 déjà mentionnées pour arriver aux 230 prévues, le gouvernement a demandé une réduction de la somme versée à la personne qui l'avait escroqué. Le gouvernement s'est fait escroquer, et nous aussi.
    C'est l'une des explications qui nous ont été fournies. Lorsque nous sommes revenus avec cette notion, ils nous ont dit que nous aurions dû demander plus de terres, alors, nous voici. Des familles ont été transférées de leurs terres à un marais — soyons francs. Elles vivaient à Pointe-à-la-Croix, un bel endroit, et elles ont été transférées dans un marais. Elles ne peuvent même pas sortir de là. Les habitants nous ont dit qu'ils ne pouvaient même pas traverser les clôtures pour aller cueillir des framboises et des bleuets, car les fruits ne sont pas sur leurs terres.
    Quelques décennies plus tard, ils sont toujours là. On leur a souvent demandé de s'installer à Pessamit, là où ils devraient tous être. Le gouvernement a tenté de déménager tous les Innus à Pessamit, ce qui équivaut à une déportation. Toutefois, la manoeuvre n'a pas fonctionné. Chaque fois qu'ils ont déménagé les Innus à Pessamit, situé à environ 110 ou 150 kilomètres de notre réserve, les Innus sont revenus sur leurs terres d'origine.
    Nous sommes restés là. Puis, les gens ont adopté ce que j'appelle une mentalité de guerre. Il y a eu quatre guerres distinctes. C'est ce qui se produit lorsque des gens sont entassés sur 0,4 kilomètre carré. Une des guerres était la guerre du saumon, comme l'a souligné Martin. Une autre guerre a éclaté lorsque nous avons demandé 0,4 kilomètre carré de terres supplémentaires. Cette guerre s'est réglée à coup de deux par quatre. Ce n'était pas beau à voir. Puis, il y a eu la guerre de l'assurance-emploi, car on nous accusait de procéder à des embauches. Soit dit en passant, les juges ont rejeté ces accusations. Plus récemment, il y a eu ce que nous appelons la guerre « des panneaux jaunes » qui ont été installés partout aux Escoumins. C'est en 2004 que je suis arrivé sur les lieux en tant que gestionnaire de crise. Nous étions au beau milieu d'une crise. On disait qu'il n'y aurait aucune négociation avec les Innus, qu'ils ne recevraient jamais de terres.
    Voilà le contexte. On dit aux gens hors réserve... C'est comme si nous demandions plus que ce que nous méritons ou plus que ce qu'on devrait recevoir, ce qui est faux. Il aurait fallu expliquer aux gens que nous avons été escroqués dès le début. Dès le début, la municipalité disposait de 240 kilomètres carrés. Nous en avons 0,8 et nous avons dû nous battre pour les 0,4 supplémentaire.
    C'est ce que nous voulons dire lorsque nous disons que les relations ont été brisées sous le faux prétexte que nous en demandions trop. On nous a dit que nous ne pouvions pas faire une telle demande, car nous en avions déjà assez. Cela a envenimé les relations.
    Soyons honnêtes. En collaboration avec les nouvelles générations, le conseil des Escoumins a réussi à rétablir la paix nous permettant ainsi de développer de nouvelles relations. Nous tentons de travailler avec eux, mais nous croyons qu'en guise de dédommagement, ils devraient nous aider à corriger cette situation. Il faudrait investir et faire un effort pour travailler en collaboration avec les communautés qui nous entourent.
(1020)
    C'est exactement le genre d'histoires que souhaite entendre le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes. Ce sont sans doute les meilleurs témoignages auxquels nous avons eu droit au cours des trois derniers jours. Vous nous avez dit toutes ces choses de façon très franche et directe, et je tiens à vous en remercier tous les deux.
    Peut-être pourriez-vous nous dire comment vous compter aller de l'avant, si c'est encore chose possible, compte tenu de tous les torts qui vont ont été causés par le passé.
    Vous avez environ 30 secondes.

[Français]

     Comme je le disais plus tôt, nous nous sommes pris en main et nous regardons maintenant vers l'avant plutôt que vers l'arrière.

[Traduction]

    Oui, vous êtes la nouvelle génération. Merci.
    Mais qu'en est-il de vos aînés qui ont connu ces adversités pendant toutes ces années?
    Il y a des blessures à panser.
    Des blessures à panser.
    Je vous remercie.
    Il ne reste que 10 secondes, on peut dire que c'est terminé pour ce tour.
    Nous passons à M. Saganash.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
     Je remercie nos deux témoins. Je suis tout à fait d'accord sur ce que mon collègue vient de dire. C'est un exemple très clair de revendication particulière où les choses n'ont pas avancé.
    Vous avez évoqué des raisons qui sont tout à fait compréhensibles mais pas acceptables. Je ne veux pas critiquer mon ami M. Amos, mais je me suis rendu dans la communauté d'Essipit au moins une dizaine de fois au cours des 20 dernières années. Je suis même allé dans l'une de ses pourvoiries avec Me Sylvain Ross, avec qui j'ai étudié en droit et qui est resté un ami. Je sais qu'il est parti à la chasse, mais j'aimerais que vous le saluiez de ma part.
    Vous avez mentionné le comportement peu honorable du gouvernement fédéral dans ces dossiers. Je trouve ce comportement tout à fait déplorable. Plusieurs personnes ont mentionné, lors de nos audiences précédentes, la nécessité d'établir un processus indépendant relativement à ces revendications particulières. Pour le moment, le gouvernement fédéral demeure juge et partie, ce qui semble tout à fait injuste dans ce genre de cas. J'aimerais beaucoup que que vous m'en disiez davantage à ce sujet. En outre, vous précisez dans vos recommandations qu'il n'y a qu'une compensation monétaire et rien d'autre. Or dans les communautés, ce type de situation crée souvent des tensions entre les Autochtones et les non-Autochtones.
    On pourrait peut-être voir cela comme les réclamations pour dommages exemplaires qui sont parfois soumises au Tribunal. Cette absence de réparation pour les tensions qui ont été causées est pour nous un problème très important. Nous avons souvent été aux prises avec ce problème dans plusieurs régions du Québec, notamment la mienne, dans le Nord de la province. Je trouve votre proposition d'un fonds de développement conjoint absolument généreuse, compte tenu surtout de ce qui s'est passé dans le contexte de ces deux dossiers particuliers. C'est en quelque sorte pour ramener la paix, comme vient de le dire M. Chaloult. J'aimerais que vous m'en parliez davantage. Je trouve important, lorsqu'on parle de réconciliation, de proposer des gestes concrets à cet égard.
     Avez-vous déjà proposé quelque chose de semblable au gouvernement fédéral ou est-ce la première fois que vous le faites, ici devant ce comité?
(1025)
    En ce qui a trait aux revendications territoriales globales, nous avons demandé qu'un fonds de développement commun soit mis sur pied, et il l'a été, mais il ne sera actif qu'à la signature du traité. J'aime bien dire à la blague que la négociation territoriale globale est plus vieille que moi ou que je suis plus jeune qu'elle. Nous ne savons pas quand cela va se régler. Il y avait une échéance, soit le 31 mars 2017. Or nous arrivons à la fin de 2017. Je n'en parlerai pas davantage sauf pour dire que nous avons fait des démarches auprès des deux ordres de gouvernement pour obtenir des sommes dont nous pourrions disposer et que nous pourrions dépenser conjointement avec les municipalités environnantes, voire même les MRC.
     J'aimerais simplement ajouter que ce concept est quand même assez nouveau.
    Alors que la chicane battait solidement son plein, en 2008, nous nous sommes retirés de tout combat où les gens allaient jusqu'à crier.
     Le conseil, qui n'était pas encore celui du chef Dufour, mais qui l'est devenu au cours de ce processus, est allé voir l'entreprise qui embauche dans la région, soit Boisaco. Ses dirigeants savaient que des mètres cubes de territoire devaient nous être attribués au moyen du traité qui n'était pas encore signé. Les travailleurs vont chercher le bois dans le secteur de Manicouagan, en ce moment. Nous avons dit aux dirigeants de l'entreprise que nous pourrions travailler ensemble. De plus, nous leur avons proposé d'investir dans la transformation des résidus ligneux en granule.
    La beauté de tout cela, c'est qu'on irait chercher autant de subventions que possible auprès du gouvernement fédéral. En tant que Première Nation, nous avons accès aux subventions. Une personne pourrait rencontrer un représentant municipal afin de voir ce que nous pourrions faire. D'ailleurs, c'est ce que nous avons fait. La compagnie a annoncé un partenariat avec Essipit et, une semaine après, les affiches disparaissaient.
     Nous avons compris quelque chose. Nous nous sommes rendus compte que c'était une façon de travailler assez innovante. Cela ne fonctionne pas ainsi partout.
    Par la suite, le chef Dufour a continué le travail auprès de plusieurs autres entreprises.
    Je veux seulement ajouter que nous avons signé des protocoles d'entente de respect mutuel et de partenariat avec nos voisins.
     D'abord, nous avons signé un protocole d'entente avec les Bergeronnes. Puis, nous avons poursuivi avec la MRC de La Haute-Côte-Nord. Enfin, dernièrement, nous avons signé une entente de respect mutuel avec Tadoussac, le plus vieux village canadien, où la grande alliance des peuples avec Samuel de Champlain et le grand chef innu Anadabijouhttp a eu lieu, en 1603. Nous trouvions important de le faire. Nous continuons de penser qu'il faut poser de tels gestes dans le but de se réconcilier.

[Traduction]

    Vous n'avez plus de temps; c'est maintenant au tour de M. Bossio.
    Merci à tous les deux d'être venus nous rencontrer aujourd'hui pour nous parler de votre vécu. Je conviens avec mes deux collègues que c'est sans doute l'illustration la plus éloquente et détaillée du niveau d'animosité qui peut régner entre les ordres de gouvernement et les communautés. Nous avons bien compris que tout ce qui était susceptible de mal tourner a effectivement mal tourné, et que la situation ne semble pas vouloir s'améliorer.
    Vous vous êtes prêtés au processus des revendications territoriales globales. Vous vous êtes également retrouvés devant le Tribunal des revendications particulières. Dans les faits, vous n'êtes pourtant pas plus avancés. Je suis un peu stupéfait de constater que vous vous retrouvez pour ainsi dire à la case départ après être passés par tous ces processus au fil d'une période de plus de 30 ans. Comment pouvons-nous rectifier les choses de telle sorte que quelqu'un puisse trancher quelque part afin que vous puissiez reprendre le cours normal de vos existences?
(1030)

[Français]

    En plus de ne pas être plus avancés, nous avons une dette de 12 millions de dollars, qui doit être payée par une population de 450 personnes. Toutefois, grâce au projet de loi C-3, qui fait suite au jugement dans l'affaire McIvor, la communauté compte désormais 751 membres.
     J'ai parlé d'une dette de 12 millions de dollars, mais elle s'approche davantage d'un montant de 13 millions de dollars. Nous ne pensions pas qu'il s'agissait d'une dette, mais plutôt d'un investissement. En plus de ne pas encore avoir de résultats tangibles, nous avons une dette de 13 millions de dollars.

[Traduction]

    Pour ajouter l'insulte à l'injure, vous vous retrouvez avec une dette à l'issue de cet exercice. Cette dette n'a toutefois même pas servi à éponger les coûts des recherches que vous avez dû effectuer, non seulement concernant la revendication elle-même, mais aussi à propos des occasions qui vous ont échappé. Vous avez indiqué que d'autres formes possibles d'indemnisation ne sont même pas envisagées. On se limite à des mesures d'expropriation.
    Avez-vous dû puiser dans vos propres ressources pour effectuer ces recherches? Avez-vous effectivement pu faire ces recherches et vous ont-elles permis d'en arriver à un niveau d'indemnisation que vous jugez approprié?

[Français]

     Il y a deux cas distincts.
    Dans le cas des revendications particulières, dont nous avons parlé tantôt, nous sommes obligés de sortir de l'argent de nos poches. Le montant de 13 millions de dollars de dettes découle des revendications territoriales globales, auxquelles nous participons avec deux autres nations innues.
    Le Regroupement Petapan rassemble les nations innues d'Essipit, de Mashteuiatsh et de Nutashkuan. Plus de la moitié de la population innue du Québec est représentée par ce regroupement. Nous sommes en train de rédiger un mémoire que nous vous ferons parvenir dans les prochaines semaines. Petapan s'est engagé à rédigé un mémoire, mais vu le court délai dans lequel nous avons été convoqués à comparaître devant le Comité, nous n'avons pas eu le temps de préparer une présentation.

[Traduction]

    L'exercice auquel nous nous sommes livrés au cours des derniers jours, et tout particulièrement avec vous aujourd'hui, nous a permis de cerner un certain nombre de problématiques auxquelles nous devons nous attaquer. En vertu de l'entente relative aux revendications territoriales globales, il n'y a pas d'arbitre de dernier recours, pas de tribunal. Même le Tribunal des revendications particulières ne peut pas trancher de façon satisfaisante.
    Il peut effectivement vous donner raison, mais qu'en est-il des réparations auxquelles vous auriez normalement droit?
    Le processus de négociation n'est assorti d'aucun échéancier. Les négociateurs eux-mêmes n'ont pas reçu un mandat leur permettant de prendre les décisions nécessaires à la conclusion d'une entente définitive. De plus, vous n'avez pas les fonds requis pour la négociation, pas plus que pour les recherches à mener sur les différents aspects, à moins bien sûr que vous ne contractiez une dette à cette fin.
    Pouvez-vous nous donner d'autres exemples flagrants d'iniquité ou nous suggérer des outils qu'il conviendrait de rendre disponibles?
    Comme le disait M. Saganash, il est complètement insensé d'avoir à payer pour négocier, d'autant plus que c'est pour récupérer ce qui nous appartient de droit. Pour reprendre l'analogie faite tout à l'heure par le chef Dufour, si quelqu'un part avec tous vos meubles pour vous les rendre par la suite, il ne pourra redevenir votre ami qu'au moment où il aura regagné votre confiance. C'est donc l'un des éléments.
    Pour répondre directement à votre question, il faut aussi considérer le fait que le gouvernement nous a indiqué qu'il était impossible pour nous de négocier pour récupérer nos terres. Nous en sommes bien conscients; nous sommes entourés de territoires municipaux. Nous n'allons pas déclencher une nouvelle guerre. Il y a quelques années, nous avons tenté d'obtenir 0,4 kilomètre carré de plus et un conflit a failli éclater. Nous n'allons pas refaire le même coup. On nous a cependant aussi fait savoir que nous n'aurions pas d'argent non plus, ce qui nous incite à chercher des solutions novatrices, comme ces fonds que nous avons suggérés.
(1035)
    À titre d'exemple, nous avons actuellement un problème d'eau que nous partageons avec Les Escoumins, et nous pourrions peut-être chercher une solution conjointe. Nous avons mentionné des choses simples comme une éventuelle réparation via des excuses: « Nous sommes désolés d'avoir agi ainsi. Peut-être aurions-nous dû plutôt faire ceci ou cela. Y a-t-il quelque chose d'autre que nous puissions faire pour...? »
    Nous disons simplement que tout cela n'a aucun sens. Nous avons dû nous en remettre à un processus qui nous a coûté une fortune — pas des millions de dollars, mais tout de même des centaines de milliers — jusqu'à ce que nous ayons épuisé nos ressources, ce qui nous a obligés à mendier pour continuer. En janvier dernier, nous avons obtenu un jugement qui nous donnait raison, mais voilà maintenant que l'on nous demande à combien se chiffrent exactement nos pertes financières. Nous avons simplement acquiescé. Nous sommes en conflit avec nos voisins. C'est le cas depuis bientôt 100 ans, et vous nous demandez d'investir dans ce processus. C'est loin d'être chose facile pour nous, mais nous essayons tout de même de le faire.
    Si nous avions au moins eu accès au golfe... Nous sommes des pêcheurs et des chasseurs. Nous chassons le phoque. Si nous avions eu accès à la rivière, peut-être aurions-nous pu... Mais il y avait toutes ces falaises qui nous empêchaient d'y accéder. Il y a bien un endroit où la rive est sablonneuse, mais c'est en dehors de la réserve. Comment pouvons-nous chiffrer tout cela? Oui, notre réserve aurait pu être plus grande. Sans doute que certains n'auraient pas quitté pour se rendre à Pessamit avec leur famille. Ils seraient restés avec nous.
    Il y a de nombreux éléments qui sont difficiles à quantifier. C'est la raison pour laquelle nous cherchons des solutions novatrices en faisant valoir qu'il faut changer le système. Nous sommes conscients qu'il y a des exceptions à cette règle, mais je ne crois pas qu'elles s'appliquent dans notre cas. Je ne pense pas que nous pouvons aller voir ces gens-là pour leur dire que nous reprenons possession de leur territoire municipal parce qu'on nous l'a volé. C'est tout simplement impossible.
    Les négociations vont nous permettre de récupérer une partie de nos terres, ce qui est formidable.
    Voilà ce que j'avais à dire à ce sujet.
    Très bien.
    Madame McLeod.
    Merci.
    Je vous remercie de votre témoignage éloquent. Vous avez très bien illustré les difficultés, les frustrations, en donnant des exemples concrets, alors je vous en remercie.
    Comme mon collègue Romeo Saganash l'a dit, vous avez également été très généreux dans vos relations avec vos voisins. Certains témoins ont parlé un peu du fait qu'il fallait sensibiliser le public et prendre des mesures, mais je pense que vous l'avez fait de façon très concrète.
    En fait, c'est le travail du gouvernement fédéral. Il relevait du gouvernement fédéral de collaborer avec les communautés, d'établir des relations afin que vos voisins comprennent bien l'histoire, les raisons pour lesquelles le gouvernement agit ainsi et les obligations légales de chacun. Vous faites les frais de relations très difficiles, et je vous remercie de vos efforts.
    Je trouve très intéressante l'idée de réaliser des projets d'infrastructure conjoints pour permettre aux communautés de se réconcilier et d'aller de l'avant. J'estime que c'est une bonne recommandation. Comme nous le savons, les communautés vivent côte à côte depuis des milliers d'années dans cette région, mais certaines personnes qui vivent au sein de ces communautés aujourd'hui ignorent les fautes commises par le gouvernement au fil des années, alors nous avons ce travail à faire.
    Je n'arrive pas à me souvenir. Je sais que cela fait partie des revendications globales, et nous avons entendu d'autres témoins à ce sujet, mais dans le cadre du processus de revendications particulières, y a-t-il d'importants règlements en espèces ou des transactions de gré à gré entre l'acheteur et le vendeur? Est-ce que cela fait partie de... Supposons qu'une personne possède une propriété stratégique que vous considérez comme un élément important de vos intérêts. Durant le délai transitoire des négociations, y a-t-il eu des possibilités à cet égard ou une reconnaissance de cela?
(1040)

[Français]

     Nous sommes à déterminer, avec le gouvernement, le montant de l'indemnisation. C'est la dernière phase et cela passera également devant le tribunal.
    Nous n'avons pas attendu pour commencer à acheter des terres contiguës à la réserve de la nation à des fins d'agrandissement éventuel, et ce, de façon à ce que ce soit le moins difficile pour nous et à ce qu'il y ait le moins de problèmes possible sur le territoire convoité, qui se trouve juste à côté de la réserve. En somme, c'est le territoire que nous n'avons pas eu. Nous espérons qu'au moment d'être indemnisés, nous récupérerons ces sommes dépensées, puisque nous avons reçu un jugement favorable du tribunal. C'est le territoire qui aurait du être arpenté en 1892.

[Traduction]

    La terre que nous avons achetée se situe dans le territoire municipal. Si nous l'avions eue en vertu de l'accord, cela aurait mis fin à une situation qui perdure. Nous essayons depuis toujours d'avoir accès à la route 138, soit la seule route qui mène à la Côte-Nord. Il n'y en a qu'une seule. Les municipalités nous la refusent depuis toujours. Elles ne veulent pas que les Premières Nations aient pignon sur rue, de peur qu'elles vendent des choses aux touristes et que cela nuise à leurs entreprises, etc.
    Si nous avions eu cette terre, nous aurions eu accès à la route, ce qui serait une très bonne chose, car comme on l'a mentionné, nous sommes un peuple commerçant. Nous aimerions mettre sur pied des entreprises de tourisme et ce genre de choses, mais on ne peut pas voir nos activités de la route. Il faut entrer dans la réserve.
    Comme Martin l'a dit, ces terres, nous les avons achetées. Elles ne font simplement pas partie de la réserve comme telle.
    Merci. Vos cinq minutes sont écoulées.
    Je cède maintenant la parole à M. Amos.

[Français]

     J'aimerais que vous parliez d'un aspect juridique des accords signés relativement à des revendications particulières. On demande à la communauté autochtone d'indemniser le gouvernement fédéral en ce qui a trait à d'autres demandes futures. Dans ma circonscription, la communauté Kitigan Zibi s'oppose à cette notion d'indemnisation contre toute autre demande qui pourrait être faite dans leurs revendications particulières.
    Je ne représente pas cette communauté, mais je crois qu'elle s'oppose à cela parce que d'autres communautés algonquines pourraient faire des demandes au sujet de terrains qui font partie de revendications particulières.
    Avez-vous des commentaires à formuler sur cet aspect du document final des revendications particulières? Est-ce que cela vous concerne?
(1045)
    Dans l'entente de principe de 2004, il n'y a pas vraiment de chevauchements territoriaux entre nos terres ancestrales, que nous appelons nitassinan, et celles des nations innues. Nos voisins sont les Pessamit et les autres nations plus au Nord sont les Mashteuiatsh.
     Depuis l'entente de 2004, nous avons établi des limites territoriales et parlé aux aînés. À l'époque du CAM, il y a eu une grande étude pour savoir qui pratiquait les l'Innu Aitun, l'activité traditionnelle de chasse, de trappe et de pêche qui a lieu dans les secteurs. Nous avons quand même été capables de définir les territoires ancestraux nitassinan de cette façon.
    Sur le thème central de la négociation, j'ajouterais que nous n'avons jamais été en faveur de l'approche consistant à mettre des fonds « juste au cas où », car on ne peut pas prévoir l'avenir. Si je vous ai bien compris, on étoufferait toutes les poursuites potentielles en mettant des montants d'argent sur la table.
    Dans 50 ou 75 ans, on ne peut pas s'attendre à ce que les Premières Nations soient figées dans un modèle et ne bougent plus. Si la société bouge, les Premières Nations bougeront aussi.
    D'abord, comme l'a dit M. Dufour, nous n'avons pas de problèmes avec les Premières Nations qui nous entourent parce que ce sont des Innus avec qui nous avons déjà conclu des ententes. Deuxièmement, la notion de payer à l'avance pour des torts qui pourraient être faits n'a jamais été dans la logique ou la dynamique des négociations jusqu'à maintenant.
    Quant à l'aspect juridique de votre question, je ne peux pas trop me prononcer.
    L'intention est d'éliminer les obligations du passé afin d'instaurer un climat de certitude et d'avancer. Cela pourrait permettre de mener d'autres négociations sur d'autres enjeux.
    Je vous remercie de vos commentaires
    Il n'y a pas d'extinction des obligations, ce n'est pas dans la logique de nos négociations. C'est le même genre de situation, comme l'a dit le grand chef Awashish tout à l'heure. Nous ne suivons pas une logique d'extinction. Les titres aborigènes et les droits ancestraux demeurent au centre de nos négociations actuelles.
    Je comprends.
    Le but des revendications particulières est de régler les différends du passé par rapport à certaines parties de territoire, alors que les revendications globales visent à régler des revendications plus larges.
     Quand le mémoire du regroupement Petapan sera publié, je vous invite à le consulter. Vous allez peut-être y trouver des réponses plus spécifiques.
    Par contre, vous nous avez donné la possibilité d'ajouter des éléments à notre mémoire. C'est le genre de choses que nous allons examiner. Aller au-delà de cela serait s'aventurer sur un territoire juridique que nous ne connaissons pas assez en détail.
    Je suis heureux qu'il y ait ce genre d'interaction entre nous et que vous acceptiez de nous soumettre d'autre matériel.
    Merci.
    Merci.

[Traduction]

    Nous avons une certaine marge de manoeuvre.
    Je cède maintenant la parole à M. Saganash.
    Merci, madame la présidente. Ai-je trois ou cinq minutes?
    Vous avez trois minutes.
    Prenez les cinq minutes.
    Je ne prendrai pas beaucoup de temps.

[Français]

    J'ai posé une question, tout à l'heure, mais nous avons manqué de temps pour la réponse. C'est pourquoi je voulais y revenir à la fin.
    Elle a trait au processus qui se trouve devant nous et qui touche les revendications particulières. Vous avez parlé de la nature antagoniste du processus. Je vous comprends très bien, d'autant plus que, durant ce processus, le comportement démontré par le gouvernement fédéral a été souvent une attitude très cavalière, même lorsqu'il était placé devant ses obligations constitutionnelles. Le gouvernement est supposé agir avec honneur dans le cadre de ce processus.
    J'aimerais avoir votre opinion au sujet de la recommandation qui a été exprimée par plusieurs groupes de témoins, depuis nos audiences à Vancouver et Winnipeg, d'avoir aussi un processus indépendant, d'une part.
    D'autre part, je ne peux m'empêcher de faire la remarque que, malgré le jugement du 30 janvier 2017, alors que le tribunal vous a donné raison et a déclaré que la faute revenait au gouvernement fédéral, il vous faut quand même continuer à porter le fardeau, parce que le seul espoir que vous ayez en ce moment est le règlement de la revendication globale en vue d'obtenir d'autres terres. Il s'agit donc de ce traité dont personne ne sait quand il va se conclure. Vous avez commencé vos négociations avec les Atikamekw il y a très longtemps. Cela fait maintenant 40 ans.
    Malgré ce jugement favorable du tribunal, il n'y a toujours pas de règlement en vue. Vous continuez donc à porter le fardeau de tout cela.
(1050)
    En ce qui concerne le tribunal indépendant, je crois que cela pourrait être une solution, ou on pourrait adopter des critères plus souples, parce que nous avons clairement démontré que la Couronne avait eu tort en ce qui concerne notre dossier. Les preuves étaient flagrantes. Alors, pourquoi cela n'a-t-il pas été accepté lors de notre première demande? Cela reste à définir. Toutefois, le fait d'avoir un tribunal indépendant pourrait être une solution, oui.
    Pour ce qui est des indemnisations liées au jugement favorable à notre cause de revendications particulières, je crois qu'il est impossible pour nous d'obtenir des terres en raison de cela, mais seulement de l'argent. En effet, à l'intérieur de la négociation territoriale globale, il est prévu d'obtenir de nombreuses terres en surplus. On parle de tous les territoires de pourvoiries ainsi que des territoires un peu contigus à l'Innu Assi, qui est le territoire en pleine propriété. En ce qui concerne Essipit, il est question de 345 kilomètres carrés, environ. Toutefois, cela n'est pas encore fait.
    Y a-t-il un plan B? Il y a toujours celui de l'agrandissement de la réserve, que nous avons déjà entamé. Nous avons réussi à agrandir la réserve de moitié. De 0,4 kilomètre carré, nous en sommes à 0,8 kilomètre carré. C'est quand même assez ridicule, quand on y pense. Il serait peut-être envisageable d'agrandir la réserve, mais je ne crois pas que cela sera à la hauteur de 200 ou 300 kilomètres carrés.
    Vous semble-t-il normal que, malgré un jugement favorable du tribunal — je crois que le gouvernement n'a pas jugé bon de porter ce jugement en révision judiciaire —, on soit incapable de vous rendre justice, à la suite d'un processus auquel vous avez participé de bonne foi, si j'ai bien compris?
    Est-ce normal qu'un processus de revendications particulières dépende d'un autre processus qui est celui des revendications territoriales globales?
     Non.

[Traduction]

     M. Bossio nous a demandé de poser une brève question. C'est vous qui allez conclure.
    J'ai quelques petites questions.
    Lorsque j'ai posé mes dernières questions, je vous ai donné un bon aperçu de plusieurs enjeux, et j'aimerais que vous me confirmiez si, selon vous, ces questions doivent être abordées.
    À l'instar du processus des revendications particulières, devrait-on établir un tribunal indépendant dans le cadre du processus des revendications globales afin que les décisions ne relèvent pas uniquement du gouvernement et que les négociations ne soient pas vouées à l'échec?

[Français]

    Oui, nous sommes d'accord là-dessus.

[Traduction]

    Selon vous, si l'on crée un tribunal indépendant pour les revendications globales, comme dans le cas des revendications particulières, devrait-il disposer d'une certaine latitude pour être en mesure de conclure des accords?
(1055)

[Français]

    Oui, si le mandat est très large et sans aucune balise.

[Traduction]

    D'accord.
    En ce qui concerne les délais de négociation, il faut trouver des moyens d'améliorer l'efficacité pour que cela prenne moins de temps.

[Français]

    Oui. Parfois, nous nous demandons si la négociation n'est pas une industrie.

[Traduction]

    Exactement.
    C'est ce qui m'amène à ma prochaine question. Le processus de financement doit être modifié, de façon à ce que les communautés autochtones ne s'endettent pas pour participer aux négociations.

[Français]

    Effectivement, oui.

[Traduction]

    Pas seulement dans les négociations. Il faudrait aussi établir un niveau de financement adéquat. J'ignore comment on pourrait définir les critères pour ce qui est de la recherche entourant ces revendications.
    Je tiens à préciser qu'il fait signe que oui.

[Français]

     Vous avez bien compris.

[Traduction]

    Enfin, l'une des questions qui, selon moi, n'attirent pas suffisamment l'attention, c'est la sensibilisation du public, notamment en ce qui concerne les injustices historiques qui ont été commises, la continuité culturelle qui est si importante pour les communautés. Il faut déployer des efforts au début, pendant et à la fin du processus, afin que les gens comprennent pourquoi il a été entamé au départ, l'importance de finaliser le processus puis les avantages réels que cela procurera à toutes les communautés, de sorte qu'on dissipe les craintes non fondées associées à tout le processus de revendications.

[Français]

    Oui.
    Je ne parlerais pas seulement d'éducation, mais aussi de transparence. J'irais même plus loin que l'éducation. J'aimerais bien que, une fois pour toutes, au Québec et au Canada, on commence à enseigner la vraie histoire. Je suis fier d'être Innu et j'aimerais que les Québécois et les Canadiens qui vont à l'école primaire connaissent la vraie histoire du Québec.

[Traduction]

    Merci.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vous remercie d'avoir été des nôtres aujourd'hui. Je vous remercie de votre présence, de votre franchise et de votre passion. Vous nous avez raconté votre histoire et nous allons en faire part au gouvernement et à tous ceux qui liront notre rapport.
    Encore une fois, vous avez jusqu'à la mi-octobre pour nous présenter vos mémoires.
    Tous les membres du Comité vous remercient sincèrement.
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