SDIR Réunion de comité
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Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 12 mars 2020
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Nous allons commencer.
Merci à tous d'être des nôtres.
Je vous présente M. Beasley et M. Rugholm. Merci d'être venus témoigner devant le Sous-comité des droits internationaux de la personne, qui relève du comité des affaires étrangères.
Le Programme alimentaire mondial est le plus grand partenaire d'aide humanitaire du Canada. En 2019, le Canada a accordé presque 200 millions de dollars au Programme alimentaire mondial, ce qui fait du Canada son septième partenaire en importance.
Permettez-moi de vous présenter M. Beasley, qui a été nommé directeur exécutif du Programme alimentaire mondial en mars 2017. Il a fait son entrée sur la scène politique à 21 ans, lorsqu'il a été élu à la Chambre des représentants de la Caroline du Sud. M. Beasley a été le gouverneur de cet État de 1995 à 1999.
Sans plus tarder, je vous invite, monsieur Beasley, à faire votre déclaration.
Monsieur le président, merci. C'est un honneur de revenir ici.
J'aimerais bien avoir de bonnes nouvelles à vous transmettre. Nous pensions que les choses ne pouvaient s'aggraver, avec la guerre, les conflits et la déstabilisation des pays partout au monde, notamment au Moyen-Orient et dans la région du Sahel, au Soudan, au Soudan du Sud, en Somalie, dans la Corne de l'Afrique et au Yémen, et voilà qu'arrivent les criquets pèlerins. Nous pensions avoir touché le fond. Voilà le coronavirus qui nous tombe dessus. La situation est catastrophique. Je crois que 2020 sera reconnu comme l'un des pires années sur le plan humanitaire depuis la Deuxième Guerre mondiale. Je n'en ai aucun doute.
Permettez-moi de vous donner un aperçu général. J'aimerais commencer par vous remercier. Le peuple canadien a généreusement appuyé le Programme alimentaire mondial. Les contribuables de votre pays comprennent bien le rôle du Programme d'aide alimentaire pour ce qui est de stabiliser des pays partout au monde et ce que cela veut dire pour la sécurité nationale de ces pays et votre rôle en tant que bons citoyens du monde aujourd'hui. Nous vous remercions de tout cœur.
De nombreux organismes ont connu des difficultés pour ce qui est de recueillir des crédits, et ce, à bien des égards. Or, nous n'avons pas éprouvé ces mêmes difficultés au cours des dernières années. Je crois l'avoir dit lorsque je suis venu comparaître il y a un peu plus d'un an, mais lorsque je suis entré en fonction, la plus grande préoccupation, c'était que les États-Unis réduisent leur contribution. En fait, le contraire s'est produit, et même s'il semble que les républicains et les démocrates se disputent pour toutes les raisons possibles à Washington, ils s'entendent sur la sécurité alimentaire et travaillent avec nous. J'entretiens des rapports de longue date avec des sénateurs importants des deux partis, c'est-à-dire des démocrates et des républicains, ainsi qu'avec des représentants. La contribution des États-Unis, qui est extrêmement importante, est passée de 1,9 milliard de dollars à 3,5 milliards en 2019. Les États-Unis m'ont demandé de transmettre des messages à leurs alliés comme le Canada et les pays européens, pour dire qu'ils continueront à répondre à l'appel, et ils vous encouragent à faire de même.
Je crois que la Maison-Blanche, dans sa totalité, constate et comprend le même phénomène que vos dirigeants ici au Canada, c'est-à-dire que la sécurité alimentaire est essentielle pour assurer la stabilité et la sécurité de n'importe quel pays ou région du monde. C'est la raison pour laquelle je puis affirmer aujourd'hui que grâce aux 8,4 milliards de dollars que nous avons reçus en 2019, nous avons pu sauver des vies et nourrir quelque 90 millions d'âmes.
Au cours des trois dernières années, le nombre de personnes qui connaissent la faim a monté en flèche depuis la première fois depuis des décennies, passant de 777 millions à quelque 815 millions de personnes. On peut se demander pourquoi. Pourtant, la réponse est très simple. Ce sont les conflits. C'est le facteur numéro un.
Le deuxième facteur, ce sont les chocs, les extrêmes et les changements climatiques. On peut bien en débattre la cause, mais ce que nous voyons sur le terrain est indéniable. Nous avons vu au Niger, au Mali et à d'autres endroits des gens qui tentent de survivre malgré les sécheresses et les crues éclairs. On ne peut se permettre de tout simplement s'asseoir et d'en débattre la cause. Nous devons être sur les lieux, en train de remettre les terres en état, de travailler aux côtés de ces gens et de les aider à retrouver la paix et la sécurité.
Fait déplorable, des groupes extrémistes comme Al-Qaïda et Daech, ainsi que Boko Haram, tentent de profiter de ces milieux très fragiles. Le taux de faim chronique remonte. Le taux de faim extrême, c'est-à-dire celle connue par les gens qui sont au bord de la famine, est passé de 80 millions à 115 millions de personnes dans le monde au cours des dernières années.
Une nouvelle fort encourageante, c'est que du point de vue historique, 95 % des habitants de la planète vivaient dans la pauvreté il y a 200 ans, dont 85 % qui souffraient d'une pauvreté extrême. C'était à l'époque où le monde comptait 1,1 milliard d'habitants. Nous avons tourné la page de façon remarquable. Le monde compte 7,5 milliards d'habitants, et nous avions réduit le taux de pauvreté extrême à moins de 10 %. Nous avons conçu et mis sur pied des programmes et des systèmes partout au monde qui nous permettent de répartir la richesse d'une façon qui est bien supérieure à celle de toute autre époque dans l'histoire humaine.
Au cours des trois dernières années, cependant, nous avons reculé en raison des conflits humains, des changements climatiques extrêmes et des gouvernements déstabilisés. Ces scénarios affligeants sont maintenant aggravés par le coronavirus. Il y a peu de gens qui se rendent compte que le Programme alimentaire mondial est le centre logistique des Nations unies. Nous sommes le mécanisme de confinement des pandémies comme celle de l'Ebola.
Le coronavirus va changer la donne complètement. Nous sommes inquiets, comme tout le monde, bien évidemment, mais il y a des dossiers plus complexes, comme celui des chaînes d'approvisionnement. Permettez-moi de vous donner un exemple de ce que nous observons en Chine. Le coronavirus avait déjà frappé une région, et soudainement, les chaînes d'approvisionnement ont commencé à s'effondrer. Les aliments pour les poulets ne pouvaient être acheminés aux éleveurs de volailles, tout comme les aliments nécessaires à l'élevage des porcs ne se rendaient pas aux producteurs, ce qui a compliqué une situation qui était déjà extrêmement difficile.
En Afrique, où le système est déjà fragile, le coronavirus commence à se manifester, et les résultats pourraient être dévastateurs. Pire encore sera la pression baissière sur les économies du monde. Monsieur le président, si nous prenons comme exemple votre pays natal, le Liban, la situation économique y est catastrophique, ce qui aggrave le problème en Syrie.
La Syrie est en guerre depuis neuf ans. J'étais dans la région d'Idlib en Syrie il y a quelques jours seulement. On ne peut imaginer pire situation: neuf années de guerre, des enfants sans avenir et une génération qui n'a jamais connu les bancs d'école. Nous offrons désormais des repas de cantine dans les écoles à 780 000 enfants en Syrie grâce à nos programmes, grâce au soutien du peuple canadien.
La situation était déjà grave... La plupart des acteurs se concentrent sur Idlib depuis quelques mois. La situation y est accablante, mais le reste de la Syrie connaît des conditions éprouvantes. À cela s'ajoute l'effondrement économique du Liban, ce qui constitue une catastrophe, car l'économie syrienne est intimement liée à celle du Liban ainsi qu'à son système bancaire. Les Syriens qui avaient un peu d'argent l'avaient placé dans des banques libanaises. Maintenant, ils ne peuvent pas toucher leur argent, ce qui alourdit la situation en Syrie.
Au Yémen, nous donnons à manger à quelque 13 millions de personnes par jour, sur une population totale de 29 millions. C'est déjà un problème en soi.
Il y a deux ans, je ne me serais jamais cru capable de le dire, mais le Soudan est maintenant l'espoir de l'Afrique. Cependant, on ne pourra plus l'affirmer pendant très longtemps si nous ne prenons pas des mesures concrètes et étendues rapidement. Le dirigeant du Soudan s'est entouré d'une équipe qui souhaite réellement faire avancer le pays, mais il faut agir tout de suite pour stabiliser le pays et empêcher les groupes extrémistes d'exploiter ce qui est une économie extrêmement affaiblie.
La région du Sahel est en train de s'effondrer. Des milliers d'écoles ferment leurs portes. Des milliers de civils se font tuer par des groupes extrémistes. Bon nombre d'entre eux ont vu le jour pendant la guerre en Syrie, se sont établis dans la région du Sahel et créent des partenariats novateurs avec Daech, Al-Qaïda et Boko Haram. Ils sont plus agressifs et s'acharnent sur une partie du monde qui est déjà très fragile. À cela s'ajoutent des changements climatiques extrêmes, au fur et à mesure que le Sahara poursuit sa descente et atteint maintenant des pays de l'Afrique occidentale, comme le Togo, le Bénin et la Côte d'Ivoire. Si l'on songe à tous ces problèmes qui affligent la région du Sahel, il faut ensuite penser à la déstabilisation de la Libye. La Libye est la plaque tournante pour le trafic sexuel, le commerce des esclaves, le trafic des armes et la migration des réfugiés économiques vers l'Europe.
Nous sommes le mécanisme de confinement. Bien franchement, nous savons que les gens ne veulent pas se déplacer. Ils ne veulent pas quitter leur foyer. Ils y ont passé toute leur vie et y ont vécu pendant des décennies. Lorsqu'on nourrit 90 millions de personnes par jour, on sait ce qui se passe dans le quartier. Si je donnais à manger à chacune de vos familles dans vos quartiers pendant deux ans, je saurais ce qui s'y passe. Voilà la réalité du Programme alimentaire mondial. Nous voyons des choses. Nous observons. Les gens nous parlent. Ils ne veulent pas quitter leur foyer.
En Syrie, nous pouvons nourrir les habitants au coût de 50 ¢ par personne par jour, ce qui est presque le double du taux normal, mais c'est une zone de guerre, et la logistique fait que cela coûte plus cher. Si ce même Syrien se trouvait à Berlin ou à Bruxelles, le soutien humanitaire se chiffrerait entre 50 à 100 euros par jour. Le Syrien ne veut pas être à Berlin, en toute franchise. Il n'a rien contre Berlin, mais il veut être chez lui. Je n'ai jamais rencontré de mère ou de père, où que ce soit, et je me rends dans plus de pays que quiconque chaque année, mais je n'ai jamais rencontré une famille qui voulait quitter son foyer. Ces gens-là ne veulent pas de l'aide de l'extérieur, ils essayent juste de survivre.
Dans bien des cas, nous sommes la première ligne offensive et défensive face à l'extrémisme. Si une mère ou un père ne peut nourrir son enfant, et son seul espoir est un groupe extrémiste, il ou elle fera probablement ce que chacun d'entre nous ferait pour garder son enfant en vie.
Le soutien qu'accorde le Canada au Programme alimentaire mondial est une arme puissante pour la paix. Nous nous servons de la nourriture comme arme pour la paix, alors que d'autres s'en servent pour recruter ou faire la guerre.
Nous continuerons à risquer nos vies. C'est l'une des choses que j'admire chez les travailleurs humanitaires. Ils risquent leur vie chaque jour, car ils comprennent les enjeux et ils aiment les gens. Peu importe notre sexe, religion ou culture, nous sommes tous des êtres humains et nous faisons partie de la même famille.
Monsieur le président, je répondrai dans la mesure du possible à toute question sur nos divers programmes, qu'il s'agisse de l'égalité des genres ou des cantines scolaires, ou encore ceux qui sont offerts dans les pays en guerre.
Merci.
Merci pour ce témoignage, monsieur Beasley.
Nous passons maintenant à M. Sweet, qui dispose de sept minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Beasley, merci d'être venu aujourd'hui, mais ce qui est encore plus important à mes yeux, ce sont les efforts d'une importance critique que vous-même et votre organisation consentez pour sauver des vies tous les jours. Il m'est impossible de tarir d'éloges à l'égard du bon travail du Programme alimentaire mondial.
Il y a quelques années, un procureur américain a collaboré avec une organisation qui s'appelle l'International Justice Mission pour rédiger un livre intitulé The Locust Effect. Vous avez plus ou moins décrit l'essentiel du livre, c'est-à-dire que l'on peut consacrer autant de fonds que l'on voudra, mais il y a un véritable problème si des organisations comme Al-Shabaab, Daech et Al-Qaïda volent les gens chaque jour après qu'ils reçoivent leurs rations.
Commence-t-on à se rendre compte au sein des groupes de dirigeants, qu'il s'agisse de l'OTAN et du NORAD, ou encore du G8 ou du G20, que la sécurité doit être davantage liée à l'aide?
Oui, monsieur Sweet. En fait, ce qui est remarquable, c'est qu'il y a un an, le Conseil de sécurité des Nations unies a pu adopter pour la première fois une résolution indiquant que la sécurité alimentaire est un élément critique de la sécurité de n'importe quel pays. C'était impensable il y a quelques années.
Même les Russes et les Chinois, qui siègent au Conseil de sécurité et qui ne s'entendent jamais sur quoi que ce soit, un peu comme les républicains et les démocrates, se sont entendus sur cette question particulière.
Lorsqu'on observe les tendances et les déplacements des gens, on peut déjà voir ce qui va se passer. Vous faites de la politique. Vous tâtez le pouls de vos électeurs. Vous êtes à leur écoute. Il y a deux ans et demi, lorsque j'ai commencé à exprimer mes graves inquiétudes sur ce qui commençait à se tramer dans la région du Sahel, bon nombre de personnes m'ont dit que c'était impossible. Maintenant, tout le monde s'est réveillé pour comprendre la réalité sur le terrain. En l'absence de sécurité alimentaire, il n'y a plus de sécurité point barre. Elle constitue un aspect fondamental de toute société.
Les gens à qui on donne de l'aide se moquent pour savoir s'il s'agit d'un dollar humanitaire ou d'un dollar pour le développement, ils essaient juste de survivre. Alors qu'autrefois nous réagissions à court terme aux crises humanitaires, qu'il s'agissait d'un cyclone, d'un séisme, d'une éruption volcanique, nous rentrions et nous partions, quel que soit le sinistre, mais maintenant, nous offrons de l'aide à plus long terme.
De nos jours, il y a des conflits prolongés dans la région du Sahel, en Syrie, et à bien d'autres endroits. Nous prenons l'aide humanitaire et nous l'utilisons pour bâtir des communautés, pour donner de l'espoir aux gens. Les femmes sont les plus remarquables. Elles sont étonnantes. Dans certains endroits, si l'on donne de l'argent aux hommes, parfois on ne sait pas ce à quoi il servira, mais lorsqu'on donne l'argent aux femmes, elles s'assurent que les enfants en bénéficient.
Dans le cadre de notre programme actuel, nous cherchons une stratégie de sortie dans chaque pays. Comment réalisons-nous nos buts et objectifs? Nous voulons pouvoir nous rendre dans le pays et demander aux habitants ce que nous pouvons faire pour les aider collectivement afin qu'ils n'aient plus besoin d'aide de l'extérieur: cela peut prendre la forme de programmes qui offrent de la nourriture contre des biens, des cantines scolaires ou encore des repas faits maison servis dans les écoles. Historiquement, nous faisions livrer des denrées. De nos jours, 2,1 milliards de dollars de notre budget de 8,4 milliards de dollars servent aux transferts monétaires. Nous injectons des liquidités dans les marchés en remettant l'argent aux mères qui le dépensent dans la communauté pour stimuler l'économie, acheter des produits des petits agriculteurs locaux et préparer des repas faits maison pour les écoles. Plutôt que de faire livrer des denrées de l'extérieur, nous rencontrons les enseignants des écoles locales, les mères et les petits agriculteurs locaux. Nous achetons des produits des petits agriculteurs locaux. Les enfants mangent des repas préparés à la maison et nous les aidons à obtenir l'alimentation à grande valeur nutritive dont ils ont besoin. Certaines communautés ont des traditions culinaires qui ne sont pas très saines. Au Guatemala, par exemple, on consomme des calories, mais ce ne sont pas de bonnes calories.
Dans la région du Sahel, nous remettons en état les terres. J'ai vu bien des mères se tenir fièrement sur une colline. Je me souviens d'une femme qui m'a dit: « Monsieur Beasley, nous n'avions aucun espoir auparavant ». Nous avons conçu des tranchées en forme de demi-lune que les femmes peuvent creuser, d'un diamètre de 9 mètres environ etd'une profondeur qui correspond aux précipitations annuelles, car dans le Sahel, il peut y avoir des crues éclairs et de la sécheresse. En période de crue, l'eau est retenue dans ces petites demi-lunes et au bout d'un an, les images sont saisissantes. Les demi-lunes permettent de stabiliser le sol. Une mère m'a déclaré: « Je n'ai plus besoin de l'aide du Programme alimentaire mondial. J'ai maintenant deux hectares de terre, et je vais en acheter encore deux. Non seulement je n'ai plus besoin de votre aide, mais je peux nourrir ma famille et mon village et je vends mes produits au marché. »
Voilà ce que nous visons, même dans les régions les plus pauvres et les plus dangereuses du monde. L'année dernière, nos bénéficiaires ont remis en état environ 202 000 hectares de terres. Nous voulons intensifier les efforts et construire plus de 15 000 kilomètres de routes, des routes qui permettent d'acheminer les produits vers les marchés et les communautés, ce genre de choses. Des canaux d'eau, des milliers de bassins de rétention, des réservoirs d'eau, afin que les gens n'aient plus besoin de dépendre de nous... C'est formidable de voir ce qui est accompli.
Toutefois, si nous ne sommes pas présents pour constituer ces éléments essentiels... Nous demandons aux ministères des divers gouvernements du monde d'assouplir les conditions associées aux contributions, afin que nous puissions réaliser nos objectifs et faire plus avec les fonds dans chaque situation particulière, car auparavant, il y avait toujours le volet développement et le volet humanitaire.
Il me reste 30 secondes.
La contribution des États-Unis est passée de 1,9 milliard de dollars à 3,5 milliards de dollars, soit une hausse de 75 %. Pouvez-vous nous dire rapidement comment vous avez étayé votre demande en vue d'obtenir plus de fonds pour l'aide?
J'ai des relations de longue date à la Maison-Blanche, ainsi qu'au Sénat et à la Chambre des représentants. Comme j'ai déjà été gouverneur aux États-Unis, j'ai travaillé avec bon nombre d'entre eux, républicains et démocrates, et certains sont des amis.
Lorsque M. Trump a été élu, tout le monde craignait qu'il supprime l'aide internationale. J'ai indiqué à mes amis, car ils étaient nombreux à travailler à la Maison-Blanche, que je pouvais rencontrer le président et lui expliquer les conséquences d'une telle décision. À l'époque, il avait M. Mattis à ses côtés. M. Pompeo n'y était pas encore, mais beaucoup de dirigeants appuyaient le Programme alimentaire mondial. Or, M. Mattis avait dit: « Si tu veux acheter plus de balles, il faut couper les vivres au Programme alimentaire mondial », c'est-à-dire qu'il était temps de mettre un terme à l'aide internationale.
Cette année électorale, les conservateurs et le Tea Party avaient le vent en poupe, et je me suis donc précipité pour leur parler et expliquer les conséquences de leurs actions. Moi-même, je ne voulais rien savoir de mon poste actuel. J'y suis allé à contrecœur, car dans ma tête, je n'allais pas travailler pour les Nations unies. Je croyais que cet organisme était inefficace, inutile, incompétent...
... et pourtant, me voilà maintenant, le plus grand défenseur du monde du Programme alimentaire mondial, car lorsqu'il s'agit de la sécurité alimentaire, les libéraux et les conservateurs se retrouvent sur un terrain d'entente.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Beasley, merci d'être des nôtres aujourd'hui et de nous faire part de votre expérience. Je sais que vous êtes bien occupé, mais votre témoignage nous est très utile.
Je viens de me joindre au Comité. La dernière fois que vous étiez venu, c'était en décembre 2018. Vous avez indiqué que les deux domaines qui vous préoccupaient le plus étaient l'absence de la numérisation dans le système onusien et l'égalité des genres. Comment ces deux dossiers ont-ils évolué depuis? Quelles mesures ont été prises? Où en sommes-nous? Pouvez-vous nous en parler?
Bien sûr. Nous avons maintenant numérisé les dossiers de quelque 50 millions de personnes. Nous avons des données biométriques pour environ 18 millions de personnes. Nous sommes le plus grand acteur humanitaire du monde dans ce domaine. Notre capacité d'utiliser la technologie de chaîne de blocs, l'intelligence artificielle et les images satellites est tout à fait remarquable, tout comme la façon dont nous avons recours à ces moyens dans tant de contextes différents. Les petits agriculteurs se servent maintenant de téléphones cellulaires pour accéder aux marchés, de façon à ne pas dépendre d'un seul acheteur et prendre des décisions sur les cultures à semer, le moment des semis, et ainsi de suite. C'est merveilleux.
De plus, les femmes sont opprimées depuis longtemps dans bien des régions dans lesquelles nous œuvrons. Nous effectuons actuellement des transferts monétaires d'une valeur de 2,1 milliards de dollars. Lorsque nous arrivons sur le terrain et nous offrons des transferts monétaires, au moins la moitié des femmes sont responsables de l'argent. La violence familiale diminue, et l'émancipation de la femme dans les communautés est formidable.
En ce qui concerne la parité des genres au Programme alimentaire mondial, nous avons recruté 1 278 femmes depuis mon arrivée en poste. Pour ce qui est de l'embauche nationale, le pourcentage est passé de 30 à 35 %. Vous pouvez comprendre que dans le cas du Yémen et de l'Afghanistan, il n'est pas facile de trouver des employées, car les femmes n'ont pas été présentes sur le marché du travail. Mais nous nous dotons désormais d'une équipe formidable à tous les niveaux de la hiérarchie. Dans mon groupe de direction, les femmes occupaient un poste sur cinq, et maintenant c'est trois postes sur six. Dans le cas de mes directeurs de bureau régional, il y avait une femme pour six postes. Maintenant, les femmes occupent trois postes sur six. Nous avons également embauché 1 278 femmes. Le total a probablement grimpé au cours des 48 dernières heures, mais c'est inouï comme progrès.
Le programme d'alimentation scolaire est l'une des armes les plus puissantes pour l'égalité des genres, notamment dans les régions où les filles n'ont pas la possibilité d'aller à l'école. Nous n'offrirons jamais un programme d'alimentation scolaire sans cette égalité. Nous savons que si les filles bénéficient de la même scolarisation que les garçons, l'économie mondiale grandira de 30 billions de dollars.
Nous avons 10 millions de femmes qui participent au programme d'aide « vivres contre biens » et s'en trouvent émancipées. Les occasions pour les petits agriculteurs sont incroyables. La situation est des plus prometteuses. Je pourrais continuer, mais...
Je vous félicite de toutes ces réalisations.
Compte tenu de la COVID-19 qui nous frappe en ce moment, comment vos efforts de numérisation et les données recueillies vous aideront-ils sur le terrain?
Dans le cas de l'Ebola, par exemple, nous sommes le mécanisme d'endiguement, et nous travaillons avec l'Organisation mondiale de la Santé, ou OMS. Cette fois-ci, il sera beaucoup plus difficile d'endiguer la maladie. J'ignore comment vous pourrez limiter la propagation du virus.
Comme je le disais plus tôt, c'est la chaîne d'approvisionnement qui nous préoccupe. Cela reste à voir. Nos équipes travaillent déjà sur la question pays par pays dans le but de déterminer comment nous allons utiliser nos technologies, nos disponibilités et nos forces, et nous verrons ce qu'il en est.
Une des choses qui nous ont touchées... J'accordais hier une entrevue à une personne dont j'oublie le nom, mais qui demandait comment… Notre siège social est situé à Rome — vous savez, nous touchons tout le monde à partir de là —, et nous sommes partis il y a deux semaines. Je ne veux pas dire que nous avons vu venir la crise, mais… En passant, j'ai depuis subi deux tests de dépistage, alors vous pouvez être tranquilles.
La situation nous a causé un problème très grave, car il est impossible d'interrompre le Programme alimentaire mondial. Nous sommes ici pour des opérations d'urgence. Nous gardons des gens en vie partout dans le monde. Nos équipes ont recours aux technologies, aux données, à la diffusion numérique en continu et à la vidéoconférence. Notre siège social compte quelque 1 900 employés. Il y a 1 500 ou 1 600 d'entre eux qui travaillent à partir de la maison cette semaine — nous essayons de voir comment cela se passe — étant donné que Rome est fermé. Si vous voulez visiter Rome et voir toutes les attractions sans les foules, c'est le moment, si vous arrivez à vous y rendre. Mais c'est un problème complexe.
Quand on commence à s'occuper de la chaîne d'approvisionnement… C'est une chose si nos gens ne peuvent pas assister aux conférences; ce n'est vraiment pas grave. En revanche, nous devons acheminer des fournitures et aller de l'avant avec les programmes et les politiques, sans quoi des gens vont mourir. Nous ne pouvons pas nous contenter de prendre une pause parce que le coronavirus est arrivé. C'est pour cette raison que je n'ai pas ralenti le rythme. Je tenais absolument à trouver des occasions… de venir ici, par exemple. Je crains que le ralentissement économique qui pourrait résulter du coronavirus ait des répercussions non seulement sur les Canadiens, mais aussi sur les régions du monde déjà affligées par la pauvreté, et qui auront besoin de notre soutien constant.
C'est pour cette raison que je continue à sortir, à faire résonner les tambours et à sonner l'alarme: nous avons besoin d'aide, et n'oubliez pas ceux qui meurent de faim. Il y a chaque jour 25 000 personnes qui meurent de la famine — jour après jour. Le coronavirus m'inquiète, mais je continue aussi à me préoccuper de ces 25 000 personnes qui ne devraient pas perdre la vie du fait que nous n'avons pas d'argent et ne pouvons pas nous rendre à eux.
Je vous remercie infiniment de ces réalisations, encore une fois.
Il semble que la numérisation et le travail que vous avez pu accomplir vont au moins contribuer à endiguer une partie de ce qui va se passer au lendemain de la COVID-19. Vous êtes en bonne posture, mais il y a beaucoup de pain sur la planche.
Une partie de la nouvelle technologie que nous employons est un logiciel qui nous permet de faire l'acquisition… Nous avons désormais un système incroyable pour repérer des produits à des endroits auxquels nous n'aurions pas eu accès autrement. Voilà qui nous permet d'économiser temps et argent, et d'acheminer les fournitures beaucoup plus vite.
[Français]
Merci, monsieur le président. Je vous remercie d'avoir pris le temps de le dire en français. Je vous en suis reconnaissant.
Monsieur Beasley, je vous remercie beaucoup de votre témoignage, que j'ai trouvé très touchant. Je salue votre contribution et la démarche intéressante de votre cheminement personnel.
Je retiens l'une des phrases que vous avez dites: l'alimentation est une arme de paix. J'ai trouvé cela particulièrement intéressant, tout comme le rappel de l'importance de l'éducation et de ses répercussions sur l'économie partout dans le monde. C'est effectivement une solution et ce sont des éléments auxquels je crois beaucoup également.
Comme première question, je vous demanderai si vous êtes satisfait de la contribution du Canad. Estimez-vous que le pays pourrait en faire plus?
[Traduction]
Avez-vous déjà entendu parler de l'émission 60 Minutes? Il s'agit probablement de l'émission documentaire la plus percutante de l'Amérique du Nord. Un type du nom de Scott Pelley en est présentateur. M. Pelley m'a interviewé dans le cadre d'un épisode de 30 minutes sur le Yémen seulement.
Je connaissais déjà M. Pelley. Lui aussi m'avait connu à l'époque où j'étais gouverneur aux États-Unis. À la fin de l'entretien, alors que nous retirions nos micros, M. Pelley m'a dit du fond du cœur que j'avais le plus beau métier du monde: sauver des vies. J'ai reconnu que c'est bien ce que je fais. C'est tout à fait remarquable. Ensuite, j'ai dit que j'allais lui avouer une chose à laquelle il n'avait pas songé, et qui allait le bouleverser. Il m'a lancé un regard perplexe, se demandant de quoi il pouvait bien s'agir. Je lui ai dit que lorsque je me couche le soir, je ne pense pas aux enfants que nous avons sauvés. Je me couche plutôt en pleurant pour ceux que nous n'avons pas pu sauver faute d'argent ou d'accès.
Quand on pense qu'il y a aujourd'hui 300 mille milliards de dollars de richesse sur terre, il est inacceptable que même un seul enfant se couche le ventre vide, et encore moins qu'il meure — pourtant, un enfant meurt de faim aux cinq secondes. Lorsque nous n'avons pas assez d'argent, devinez qui doit décider quelles personnes vont manger et lesquelles n'auront pas de nourriture, lesquelles vont vivre ou mourir. J'ai demandé à M. Pelley s'il aimerait faire ce travail. Il m'a regardé et a avoué n'y avoir jamais pensé. Je lui ai dit que nous n'avions pas le choix. Pour notre part, nous devons chaque jour y réfléchir et décider qui mangera ou non.
Je ne veux pas dire qu'il n'y a jamais assez d'argent. Or, nous avons bel et bien besoin d'en avoir plus. Nous sommes ravis de ce que le Canada a fait, mais, compte tenu de la situation critique qui touche actuellement le monde, tous les pays doivent redoubler d'efforts. Dans le cas contraire, je pense que la situation va empirer et que ce sera 100 ou 1 000 fois plus cher pour vous. Je vous remercie de ce que vous faites. Nous avons toutefois encore beaucoup de travail.
Permettez-moi de préciser qu'il ne suffit pas d'en faire plus. Il faut aussi être plus stratégiques et efficaces. Je pense bel et bien que l'aide étrangère et les organisations internationales ont beaucoup appris au cours des 10, 20 ou 30 dernières années sur les programmes inefficaces. Que vous soyez de gauche ou de droite, je pense que nous sommes tous obligés d'évaluer les programmes pour déceler ceux qui sont les plus stratégiques, étant donné nos moyens financiers limités. Où notre argent sera-t-il utilisé le plus efficacement?
Nous serions ravis qu'il y ait plus d'argent. Nous sommes reconnaissants de ce que nous recevons. Je vais m'arrêter ici.
[Français]
[Français]
Il n'y a pas de problème.
Je me demande quel genre de vérification a lieu en lien avec la distribution. En effet, dans le contexte international, on entend parfois parler de détournements, l'argent étant volé par des groupes plus malveillants.
Comment vous assurez-vous que les personnes réellement dans le besoin reçoivent et bénéficient de cet argent et, surtout, des denrées?
Je comprends votre question.
[Traduction]
Le Yémen constitue un exemple classique de catastrophe en matière de surveillance et d'évaluation. Dans les pays où nous avons le pouvoir, l'indépendance et la neutralité nécessaires pour exercer nos activités, nous pouvons pratiquement garantir que la totalité de notre nourriture et de notre aide est acheminée aux bonnes personnes. Si nous utilisons dorénavant la numérisation et la biométrie, c'est notamment pour pouvoir garantir aux contribuables que leur argent sera versé aux bénéficiaires visés. C'est pour cette raison que la surveillance et l'évaluation sont aussi importantes, et que la situation du Yémen est aussi désastreuse.
La collaboration avec les Houthis est catastrophique. La nourriture est détournée, et nous n'avons pas l'accès dont nous avons besoin pour assurer une surveillance et réaliser des évaluations. C'est une des raisons pour lesquelles nous insistons énergiquement pour instaurer la biométrie là-bas. Je ne veux pas dire que nous en sommes au point mort, mais les prochaines semaines seront cruciales alors que nous négocierons pour débloquer la situation. D'après vous, pourquoi refusent-ils de nous donner accès? Pourquoi pensez-vous qu'ils ne veulent pas que nous fassions des évaluations? Pourquoi refusent-ils que nous exercions une surveillance? C'est parce que le pays détourne l'aide alimentaire pour un effort de guerre ou pour l'économie clandestine. Ce qui se passe là-bas est tout simplement regrettable.
Nous alimentons environ 12,8 des 29 millions d'habitants du Yémen. Ce ne sont que des produits de base. Nous injectons de l'argent dans les zones contrôlées par le gouvernement au sud du pays, à l'aide de la biométrie et de la numérisation, mais si nous pouvions faire de même dans les zones sous le contrôle des Houthis... Les 16 autres millions d'habitants achètent leur nourriture sur le marché commercial, qui est très difficile. Ces gens ont très peu d'argent, alors que les prix des produits de base ne cessent d'augmenter. Si nous pouvions injecter de l'argent en sachant qu'il se rend aux bénéficiaires, il y aurait plus de liquidités au sein du marché. Cela ferait baisser le prix des produits de base pour ceux que nous n'aidons pas, ce qui serait profitable pour tout le monde.
Il y a certains Houthis, des tenants de la ligne dure et des Ansarullahs qui ne se soucient aucunement du peuple. Il y a toutefois des dirigeants houthis qui s'en préoccupent. Nous sommes d'ailleurs en train de nous battre sur cette question. En fait, les États-Unis envisagent de suspendre leur aide — pas seulement leur aide alimentaire, mais bien la totalité de leur aide — au Yémen jusqu'à ce que les Houthis acceptent de respecter des principes humanitaires fondamentaux.
Bien franchement, si nous n'arrivons pas à convaincre les Houthis de faire ce qu'il faut, vous pourriez dire que nous sommes complices et que nous encourageons la violation des principes humanitaires les plus fondamentaux.
En septembre dernier, lorsque j'ai suspendu l'aide dans les zones sous le contrôle des Houthis, c'était cruel. Ils ont changé d'avis après une semaine ou deux, mais c'était difficile. Il est loin d'être facile de prendre une décision semblable. C'est ardu.
Merci beaucoup, monsieur Beasley. C'est un plaisir de vous écouter. Je suis une parlementaire nouvellement élue, et je travaillais auparavant dans le secteur de l'aide humanitaire et du développement international. Il y a donc une grande partie du sujet qui m'interpelle.
Je vous invite à répondre en toute franchise. Puisque je suis du côté de l'opposition, j'ai le droit d'être franche, et je suis ravie de maintenant pouvoir faire preuve d'esprit partisan dans mon travail. Ce n'était pas possible lorsque j'étais spécialiste du développement international.
Pouvez-vous nous dire ce que le Programme alimentaire mondial attend du Canada à ce stade-ci? Si vous le voulez bien, vous pourriez aborder non seulement le montant souhaité, mais aussi les mécanismes de financement dont nous disposons, la durée des contrats que vous souhaitez conclure, ainsi que l'initiative que vous aimeriez nous voir prendre dans le cas du coronavirus et des autres défis à relever. Peut-être pourriez-vous établir un lien avec certaines des choses que mon collègue, M. Sweet, a évoquées en matière de sécurité, et nous dire comment cette aide contribuera à la sécurité des différentes régions.
Je vous remercie.
Une des choses qui aident notre planification à long terme est le financement souple pluriannuel. Comme vous pouvez l'imaginer, si vous exécutez un programme quelque part, et que vous avez l'argent pour une année seulement, vous vous demanderez comment faire une planification à long terme. Comment pouvez-vous mettre en place les programmes, les ressources humaines et les systèmes dont vous avez besoin? C'est possible au moyen d'un financement souple à plus long terme. Le Canada a été un grand défenseur de ce mode de financement au sein du système des Nations unies à l'échelle mondiale.
Nous abolissons les cloisonnements, qu'il s'agisse du financement des écoles, des repas à l'école pour les enfants, des programmes de nutrition ou des programmes généraux de distribution d'aliments. Nous serions toujours ravis d'avoir un peu plus d'argent dans chacune de ces catégories. La voix du Canada est fort importante, car le pays est un de nos principaux donateurs, et je pense qu'il est grandement respecté dans le monde.
Le troisième élément est probablement plus important que tout. J'ai l'impression que tout le monde se laisse distraire. Si vous avez écouté les nouvelles au cours des deux dernières années, de quoi parlait-on? Du Brexit, du Brexit, du Brexit et encore du Brexit, puis de Trump, de Trump, de Trump et de Trump. Ce n'est que depuis deux ou trois semaines qu'on parle du coronavirus, du coronavirus et du coronavirus, puis encore de Trump, de Trump et de Trump. Les gens ignorent ce qui se passe dans le monde, et à quel point les calamités les catastrophes sont terribles dans les lieux que j'ai mentionnés — et dont nous parlons.
Je pense que les Canadiens s'en soucient, tout comme les Américains, mais les dirigeants du monde libre sont distraits par tant de choses. J'aimerais dire à tout le monde de ralentir un peu le rythme. Réunissons les dirigeants qui sont au pouvoir afin de résoudre la crise qui frappe le Soudan du Sud. Faisons de même pour le Yémen, puis pour la Syrie. Si nous pouvions régler la crise dans seulement deux ou trois de ces lieux, je crois que nous pourrions mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 — c'est vraiment ce que je pense. Or, nous semblons tous opter pour une démarche fragmentaire.
Permettez-moi d'ajouter ceci. C'est un sujet sur lequel j'ai été assez sévère avec nos amis, y compris les États-Unis et les donateurs. Si vous prenez n'importe quel pays, ou n'importe quelle situation géographique, les États-Unis viendront offrir un petit programme ici; l'Allemagne viendra offrir un petit programme là; le Royaume-Uni en fera un autre là-bas; puis le Canada va… Tout cela est très bien, mais je pense que nous devons réunir nos efforts de façon plus stratégique et exhaustive.
J'ai insisté sur ce point. Les nations doivent unir leurs efforts et réfléchir à fond pour adopter une démarche plus globale. Pour être franc, je pense que certaines des régions en crise ont probablement besoin d'une approche digne du Plan Marshall. J'ai visité certains de ces pays, et un de mes amis — dont je vais taire le nom — qui travaille au sein d'un des organismes m'a dit fièrement qu'ils étaient sur place depuis 30 ans. Je lui ai demandé s'il en était vraiment fier.
Dans certaines situations, il faut bel et bien rester sur place 30 ou 40 ans, mais d'autres fois, comme dans une dynamique humanitaire ou de développement, si vous êtes encore là après 30 ans, vous devriez envisager de faire marche arrière et de vous y prendre un peu différemment. Notre objectif est de fermer boutique pour que les gens n'aient plus besoin de nous. Ce sont là des questions fondamentales qui doivent être posées.
Un des plus grands problèmes que j'observe dans la région du Sahel et dans certains pays de l'Afrique subsaharienne est le manque d'extensibilité. Je pourrais vous montrer des preuves empiriques en provenance du Niger, par exemple. Lorsque nous apportons des rations alimentaires, remettons la terre en état et complétons ces efforts par un programme de repas à l'école, bon sang, nous assistons à une chute exceptionnelle de la migration par nécessité, du taux de mariage des jeunes de 12 ans, des grossesses chez les adolescentes, du recrutement de l'État islamique et des conflits entre les éleveurs et les agriculteurs. Il est possible d'attribuer une valeur économique à chacun de ces éléments, ce qui permet de constater qu'il est beaucoup moins cher de mettre en place un programme complet que de ne pas s'attaquer à la cause première.
Je vais vous présenter une analogie. Je viens de la campagne, et je dirais que c'est comme être dans une vieille maison et avoir quatre ou cinq conduites d'eau au plafond qui fuient. Il y en a une qui coule là-bas, et la moquette est en train de s'abîmer, tout comme les meubles et le fauteuil. Il arrive que nos dirigeants politiques se chicanent tous sur l'emplacement des sceaux. Or, nous devons plutôt nous rendre sur place pour colmater les fuites.
Nous devons agir sur la cause profonde. Il est beaucoup moins cher de s'attaquer à la cause première, et c'est ici que j'interpelle nos alliés et nos amis, puisque le Canada fait un travail formidable. Lorsque je rencontre les dirigeants d'ici, ils écoutent vraiment. Je pense que tout le monde essaie de s'adapter à une nouvelle ère de conflits, de déstabilisation et de situations prolongées, compte tenu de ce qui nous guette, notamment les nouvelles conditions climatiques extrêmes sans précédent, et le conflit prolongé avec l'État islamique, Al-Qaïda, les groupes extrémistes et les forces rebelles non étatiques que nous observons d'un pays à l'autre.
J'ai 30 secondes. Je voudrais simplement conclure en vous remerciant infiniment. Vous avez bel et bien fait allusion au programme d'ici 2030 et aux objectifs de développement durable, et c'est une chose à laquelle j'espère que nous pourrons collaborer. J'espère que nous y arriverons.
Eh bien, nous vous en sommes reconnaissants plus que vous ne le croyez. Je pense que la situation actuelle est très délicate. Je suis très inquiet à propos des six prochains mois.
Merci beaucoup. Il est bon de vous revoir. Je vous remercie de votre dernière comparution devant le Comité.
Avant de faire de la politique, j'ai moi aussi beaucoup travaillé pour le Programme des Nations Unies pour le développement et ONU Femmes. Je pense que vous avez tout à fait raison sur ce qu'il en coûte d'investir dès le départ par rapport à ce qu'il en coûte au bout du compte sans investissement.
J'aimerais m'attarder à ce que vous avez dit sur la deuxième cause d'insécurité alimentaire en importance, à savoir les changements climatiques. Dans quelle mesure les gouvernements comme celui du Canada peuvent-ils aider les pays au moyen de mesures d'atténuation, de mesures d'adaptation et des autres mesures qui seront requises? Je crois avoir vu un chiffre: les changements climatiques pourraient à eux seuls acculer à la famine jusqu'à 3 milliards de personnes. Que pourrions-nous faire pour atténuer cette conséquence?
À vrai dire, plusieurs centaines de millions de personnes pourraient être déplacées au cours des 30 prochaines années. Ces chiffres sont tirés de notre analyse des phénomènes climatiques extrêmes, qui sont beaucoup plus fréquents qu'auparavant.
J'ai expliqué la situation à certains de mes amis qui se posaient des questions sur les changements climatiques. Ils m'ont dit que la température moyenne et les précipitations moyennes n'avaient pas changé dans le pays en question. J'ai répondu qu'il est vrai que ces moyennes n'avaient pas bougé, mais qu'il fallait plutôt s'attarder aux données par saison. En effet, il y a bel et bien eu des changements à l'échelle saisonnière. Les précipitations moyennes étaient fort différentes cette saison-là, et les sécheresses moyennes aussi. Dans certains pays, les températures se situent encore dans la moyenne, alors que ce n'est pas le cas à d'autres endroits.
Nous insistons sur plusieurs points auprès des pays donateurs. D'une part, qu'il s'agisse d'aide humanitaire ou d'aide au développement, l'argent nous donne la souplesse nécessaire pour intervenir et remettre en état les terres afin d'aider les gens à survivre. L'année dernière, les bénéficiaires ont pu remettre en état plus d'un demi-million d'acres de terre. Ces mesures permettent alors aux habitants de survivre. C'est vraiment aussi simple que cela.
Donnez-nous les outils et la souplesse dont nous avons besoin pour ne pas nous contenter de donner de l'argent et des produits de base, mais aussi pour permettre aux habitants de faire plus avec le même dollar, afin d'accroître la sécurité alimentaire, la résilience et la durabilité.
D'autre part, il n'y a pas suffisamment d'argent pour tout faire à l'heure actuelle — la décision sera particulièrement difficile à prendre au cours des 12 à 24 prochains mois. Je pense qu'il va falloir établir des priorités. Bien honnêtement, je ne dis pas cela parce que je représente le Programme alimentaire mondial, mais la sécurité alimentaire est fondamentale pour chaque famille et chaque nation sur terre.
Pour ce qui est de l'aide au développement, nous ne recevons pas beaucoup d'argent à cette fin. Personne n'a autant d'incidence que nous sur le développement axé sur la sécurité alimentaire. Il nous faut donc de l'argent pour le développement puisqu'à mon avis, nous sommes… Nous pouvons stimuler les activités et le développement, mais nous ne construisons pas d'édifices et de choses de ce genre. Nous bâtissons plutôt des réseaux d'aqueduc, des systèmes d'irrigation, des bassins de retenue, des réservoirs et ce genre d'éléments fondamentaux, mais simples, qui stabilisent les collectivités où l'eau constitue un problème.
Permettez-moi de vous donner un exemple de réalisation que nous venons de mener à bien en Afghanistan. Dans la région de Mazar-e-Sharif, nous avions l'habitude de simplement fournir des produits de base. C'est bien; nous pouvions maintenir les gens en vie, mais allions-nous le faire pendant 50 ans? Nous sommes donc allés de l'autre côté et avons demandé à notre bailleur de fonds de nous donner plus de souplesse et d'argent. Nous avons ensuite rencontré des agriculteurs du secteur stable de l'Afghanistan et leur avons dit que nous allions acheter leurs produits, mais à un niveau de qualité donné et dans une quantité donnée. Eh bien, devinez ce qui s'est produit: les agriculteurs ont embauché plus de travailleurs et ont fait venir plus de camions et de matériel. Ensuite, les minoteries ont dû à leur tour acheter plus de matériel et de camions, et embaucher plus de travailleurs. C'était le même dollar. Nous leur avons ensuite acheté les produits de base, que nous avons acheminés à Mazar-e-Sharif, où les sécheresses et les inondations frappent la vallée en raison des montagnes. Si la récolte est bonne, elle se fait anéantir par les inondations ou les sécheresses.
Nous avons rencontré les dirigeants et leur avons dit que nous fournirions cette nourriture aux habitants à une condition: remettre en état le flanc de la montagne. Nous avons alors commencé à réaménager les contreforts, et l'eau a été détournée vers des bassins de retenue et des réservoirs au moyen de canaux déviant le déversement et de petits barrages. L'eau a été redirigée de telle sorte que, lorsqu'il y a eu une crue soudaine, celle-ci n'a pas détruit les récoltes dans la vallée. Plus tard, lorsqu'il y a eu une sécheresse, vous aurez deviné qu'il y avait des rampes d'irrigation provenant des bassins de retenue.
Ce chef de tribu se tenait devant moi et m'a dit fièrement que leurs enfants ne partent plus; leurs enfants ne grossissent plus les rangs des Talibans ou des forces rebelles antigouvernementales. Les jeunes sont fiers de montrer à leurs amis des autres régions tribales ce que cela signifie d'être à nouveau dans un magnifique pays. C'est un exemple de réussite remarquable.
Les gens n'ont plus besoin de nous là-bas, et nous pouvons maintenant passer à autre chose. Nous voulons mener à bien plus de réalisations semblables, parce que cela change vraiment le destin d'une région de façon dynamique et spectaculaire.
J'aimerais revenir sur un point dont vous avez commencé à parler à propos des genres. Vous avez dit que lorsque vous donnez de l'argent aux femmes, celles-ci le réinvestissent dans la collectivité et dans les enfants. Vous avez parlé de « faire plus avec les fonds ». Lorsque les femmes participent à la conception, à l'élaboration et à la mise en œuvre des programmes, et qu'elles n'en sont pas uniquement les bénéficiaires, quelle en est l'incidence par la suite?
C'est extrêmement important. Lorsque je suis arrivé aux Nations unies, l'une des premières réunions de la semaine était une de ces longues réunions interminables; c'était ma première expérience. Je suis sorti après environ six heures et j'ai dit au secrétaire général: « Vous devez me congédier. Je ne vais pas rester assis là à subir ce genre de chose à nouveau. » La réunion s'était résumée à de belles paroles; excusez-moi de le dire.
La fin de la réunion portait sur l'égalité des sexes et l'embauche d'un plus grand nombre de femmes. J'étais renversé. Bien entendu, j'étais nouveau, et on se demandait si j'étais un sympathisant de Trump, si j'allais... « Que va-t-il dire? Que pense-t-il des femmes? » Il y avait toutes sortes de perceptions du genre. Je ne faisais qu'écouter. J'ai été taciturne toute la journée parce que j'étais nouveau à la table, mais j'ai finalement dit que je n'arrivais pas à croire que c'était un sujet de discussion. Les femmes ne savaient plus quoi penser. « Que dira-t-il ensuite? » Je leur ai demandé depuis combien de temps ils en discutent. Vingt ans? Pourquoi ne pas tout simplement passer à l'action? Ce n'est pas compliqué; il faut embaucher un plus grand nombre de femmes. Les femmes se sont alors dit: « Ah, il est notre allié. »
Ce que je veux dire, c'est que les Nations unies et le monde des affaires ne cherchent qu'à embaucher qu'une ou deux femmes au sommet de la hiérarchie et n'ont pas compris l'effet de l'embauche de femmes dans l'ensemble de l'organisation pour diverses raisons. La plus importante, pour répondre à votre question, c'est que lorsque des femmes conçoivent les systèmes, elles ont un point de vue différent, ce qui permet aux hommes et aux femmes de trouver de meilleures solutions, car les femmes voient des choses que les hommes ne voient tout simplement pas. Dans le Programme alimentaire mondial, nous sommes plus productifs et plus efficaces lorsque les femmes participent à la prise de décisions.
Je suis ravi que vous soyez parmi nous aujourd'hui. Je vous remercie de vos observations. Je veux d'abord poser deux questions précises sur certains de vos commentaires.
Tout d'abord, pouvez-vous parler un peu plus de la situation au Soudan? Une formidable transformation politique est en cours. C'est une grande source d'espoir, mais il y aura évidemment beaucoup de défis à relever. Que pensez-vous de ce qui se produit sur place, et quelles sont les prochaines étapes selon vous? L'Occident semble n'y être pour pas grand-chose dans ce changement politique. Que pouvons-nous faire pour appuyer les forces du changement et de la démocratie là-bas?
Je me suis rendu au Soudan et au Soudan du Sud au moins trois fois au cours des derniers mois, et c'est une situation très délicate, mais une occasion remarquable. Je communique avec M. Hamdok via WhatsApp plusieurs fois par semaine pour l'aider ainsi que les dirigeants dans un dédale de problèmes qui aggraveront l'avenir à cause du passé. À mon avis, la question de la liste des États qui soutiennent le terrorisme doit être réglée rapidement, immédiatement.
Beaucoup de personnes partout dans le monde, surtout à Washington, voulaient croire que ce nouveau gouvernement n'est rien d'autre que le vieux gouvernement sous une nouvelle forme. Je peux vous dire très franchement que cela n'a rien à voir avec la réalité. M. Hamdok tient vraiment à assurer l'avenir.
J'ai rencontré Hemeti et M. Burhan à maintes reprises et j'ai eu des discussions très franches et difficiles à huis clos, sans autre personne présente, au sujet du passé, du présent et de l'avenir. Le gouvernement là-bas nous a offert un accès et du soutien partout où nous n'en avions pas. Nous avons donc rassemblé des gens. Nous avons réuni Abdelaziz, le leader du Mouvement populaire de libération du Soudan-Nord et M. Hamdok dans le Sud. Nous avons utilisé pour cela l'équipement et les hélicoptères du programme. Les gens ont dit que c'était tout simplement impossible. J'ai constaté que lorsqu'on ne négocie pas par l'entremise de la presse, mais qu'on opte plutôt pour une discussion à cœur ouvert... C'est une grande tradition qui consiste à discuter à cœur ouvert et face à face, sans aucune autre personne présente; c'est formidable ce qui se produit.
On a réalisé des progrès remarquables, mais les groupes extrémistes attendent. Ils attendent le moment magique pour intervenir, et si l'Occident — je dis l'Occident, mais je parle des donateurs internationaux, qui seront surtout en Occident — ne met aucun filet de sécurité en place... C'est concrètement où nous en sommes, mais il y a des subventions pour le carburant, pour la nourriture, et lorsque le FMI...
Nous devons tout d'abord nous occuper de la liste des États qui soutiennent le terrorisme, et il faut le faire rapidement. Je pourrais en parler longtemps, car j'ai passé beaucoup de temps à Washington où j'ai rencontré des collaborateurs, des sénateurs, des gens à la Maison-Blanche, M. Pompeo et le département d'État pour examiner ces questions. Je crois qu'une grande partie des personnes les plus incrédules quant à la perspective d'un brillant avenir ont fini par comprendre que c'est effectivement une excellente occasion.
Le financement nécessaire sera considérable, car on fait maintenant la file pour faire le plein. La semaine dernière, j'ai abordé le sujet avec M. Mohammed bin Zayed, qui est la tête des Émirats arabes unis. Nous avons parlé un bon moment. Je pense que vous allez voir les pays du Golfe intervenir. Entre autres choses, j'insiste pour que les pays du Golfe en fassent plus, surtout dans leur région, plutôt que de compter uniquement sur l'argent de l'Occident. Il y a beaucoup trop de problèmes pour que l'Occident agisse seul.
Je pourrais continuer d'en parler.
Je veux poser rapidement une dernière question, dans un autre ordre d'idées.
C'est au sujet du rôle de la Chine dans le milieu de l'aide internationale. On craint que ce soit assorti de conditions, une sorte d'aide dans le contexte de l'initiative la Ceinture et la Route qui est utilisée comme un genre de projet quasi colonial, d'espionnage et ainsi de suite.
À quoi ressemble votre dialogue avec le gouvernement chinois et les entités appuyées par le pays? Comment voyez-vous leur influence dans le milieu de l'aide?
C'est une question intéressante. Je dois faire preuve de prudence en répondant.
La Chine nous donne un petit montant. Nous lui faisons valoir que si elle veut sa place parmi les partenaires multilatéraux, elle doit intensifier ses efforts. Nous espérons qu'elle le fera. Je pense qu'elle est consciente d'erreurs commises dans son passé et qu'elle tente de s'engager dans la bonne direction. Nous verrons. En même temps, ce que la Chine a fait au cours des 40 dernières années pour s'attaquer à l'insécurité alimentaire est absolument remarquable. Sa volonté de mettre fin à ce problème... comment a-t-elle procédé?
Le pays a d'autres problèmes comme nous tous, mais il vient tout juste de mener une vaste campagne pour mettre en place le nouveau directeur à la FAO. La FAO est beaucoup plus petite que nous, mais elle se charge des activités spécialisées. La Chine met la main à la pâte pour se positionner ainsi. En effet, lorsque les États-Unis, pour l'Occident, reculent ne serait-ce qu'un peu aux Nations unies, la Chine comble le vide. Elle a adopté une approche très stratégique.
Ce nouveau leader chinois prend la barre de la FAO et tout le monde dit: « Mon Dieu, un Américain au Programme alimentaire mondial et un Chinois à la FAO. » Lui et moi avons travaillé très fort et affirmé que nous devons tirer parti des relations que nous avons dans nos pays respectifs pour tenter de faire notre possible en vue d'éliminer la faim dans d'autres pays. Nous avons beaucoup à apprendre de l'expérience de chacun. Beaucoup d'occasions s'offrent à nous; tâchons donc de ne pas rater celle-ci. Que vous soyez favorable ou non à sa nomination, ce n'est pas ma décision. Elle a été à un échelon supérieur, mais il m'incombe d'essayer de l'aider à être efficace. C'est une personne d'action, quelqu'un qui fait le travail. Nous verrons ce qui se passera.
Laissez-moi vous donner un bon exemple. Je me trouvais au Zimbabwe. J'étais très préoccupé et j'ai rencontré les dirigeants du pays. Vous êtes au courant des problèmes là-bas. La Chine venait tout juste de s'engager à y forer 400 puits. J'en ai entendu parler et je croyais qu'on devait les forer où nous étions, pour que notre présence là ne soit plus nécessaire. Je l'ai appelé. Je lui ai dit que comme il sait à qui s'adresser à Pékin, il pouvait appeler les responsables pour leur demander de s'asseoir avec nous dans le but de chevaucher nos activités, car il était surtout question d'un financement américain et de puits chinois. Nous avons tiré parti de nos relations et nous collaborons maintenant pour tenter de superposer nos activités et de placer stratégiquement les puits où il y a des sécheresses et un besoin pour ce genre de collaboration.
Il y a beaucoup de dossiers. Je pense que c'est difficile pour la Chine. Un nouveau livre qui sera bientôt publié parle du passé de la Chine — c'est-à-dire les 50 dernières années — et des erreurs qu'elle a commises. C'est intéressant. C'est un professeur à l'Université Tsinghua qui l'a écrit. Ma fille y fait un programme de maîtrise.
C'est une des choses que j'ai mentionnées à beaucoup de mes amis.
Nous ferons tout en notre pouvoir pour aider les différents pays, y compris la Chine, à s'engager sur la bonne voie pour devenir de bons partenaires multilatéraux. Je pense que nous pouvons tous nous améliorer et faire mieux.
[Français]
Messieurs Beasley et Rugholm, je vous remercie de vos témoignages.
[Traduction]
Notre comité est très reconnaissant des nombreux renseignements que nous avons obtenus aujourd'hui.
Vous avez parlé du nombre de personnes réduites à la famine qui est passé de 80 à 115 millions. Vous avez dit que c'est à cause de l'instabilité partout dans le monde, que ce soit attribuable à la politique ou à un conflit. Le Programme alimentaire mondial est de plus en plus nécessaire. Nous tenons vraiment à vous remercier, ainsi que votre équipe et M. Rugholm, de tout le travail que vous accomplissez. Nous savons que le Programme alimentaire mondial sera là en cas de crise ou de catastrophe.
Nous allons fournir ces renseignements à nos responsables au Canada et veiller à faire notre possible pour contribuer sans relâche au programme.
Merci beaucoup.
J'ai deux rappels pour le comité. Veuillez soumettre vos sujets d'étude d'ici 16 heures demain, vendredi. De plus, le 24 mars, il y aura une séance d'information en compagnie de Mme Cheryl Hardcastle et de M. Sven Spengemann sur la situation actuelle des Rohingyas.
C'est Mme Rachael Harder.
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