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Monsieur le Président, mes excuses à mon collègue du Bloc pour l'interruption.
Il ne fait aucun doute que l'investissement étranger direct joue un rôle absolument essentiel dans le développement économique au Canada, puisque nous souhaitons encourager la poursuite des activités économiques et que, à bien des égards, c'est grâce à l'investissement étranger que ces dernières se réalisent.
J'aimerais formuler quelques réflexions concernant le rapport visé par la motion d'adoption à l'étude. Premièrement, je vais reprendre là où j'en étais avant l'ajournement du débat. C'est justement très à propos pour faire suite à l'intervention du député du Bloc qui avait la parole juste avant que nous reprenions l'étude de ce rapport.
Mon collègue et ami de a expliqué avec brio le processus et ce qu'on nous demande d'adopter. C'est très intéressant. Par exemple, il a fait remarquer que nous étions censés débattre le projet de loi . Ce qu'a dit le député de Kingston et les Îles rejoint de près ce que j'ai dit à propos de l'étude de ce rapport le 27 avril.
Le 27 avril, j'ai souligné à quel point j'étais déçu. J'ai dit que les conservateurs agissaient comme une force destructrice à la Chambre des communes. La situation ressemblait beaucoup à ce qui s'est passé plus tôt aujourd'hui: lorsque le député de ou moi avons eu l'occasion de prendre la parole, nous avons parlé de force destructrice concernant le déroulement des travaux et les questions qui sont mises aux voix.
L'intervenant qui m'a précédé a affirmé qu'il était honteux que nous tentions de limiter le débat au sujet du projet de loi et d'imposer la clôture. Je voudrais que les députés gardent ces affirmations en tête, parce qu'elles sont à la base de ce qui s'est passé le 27 avril dernier lorsque la motion d'adoption du rapport a été soumise à l'attention de la Chambre, parce que les conservateurs voulaient qu'on débatte d'un sujet autre que les affaires dont le gouvernement aurait voulu que nous débattions.
Il faut bien le comprendre, parce que, s'il devait y avoir des débats sur des motions d'adoption pour tous les rapports qui sont présentés, il ne resterait plus de temps pour les initiatives ministérielles. Il ne resterait pas de temps non plus pour les journées de l'opposition comme celle d'aujourd'hui. Ce ne sont pas les rapports qui manquent. Il suffit d'en choisir un et de proposer une motion d'adoption pour monopoliser trois heures de débat à la Chambre.
Certains pourraient prétendre qu'il s'agit d'une question importante. Regardons sur quoi porte le rapport dont il est question dans la motion débattue. Il parle des importantes ressources du pays. Nous pourrions débattre des ressources naturelles ou du secteur de la santé, ce serait probablement plus utile. Néanmoins, c'est effectivement une question importante.
Cependant, ce dont nous aurions dû débattre ce jour-là, c'était le projet de loi sur la carboneutralité, un projet de loi important que les Canadiens veulent que le gouvernement adopte. Pour des raisons que j'ignore, les conservateurs ont proposé une motion pour dire qu'il fallait débattre des investissements étrangers directs plutôt que du projet de loi sur la carboneutralité. On pourrait dire que c'est arrivé une ou peut-être deux fois, mais c'est arrivé plus souvent que cela.
Le député du Bloc vient de critiquer le Parti libéral et, dans une certaine mesure, mes collègues néo-démocrates en demandant comment il était possible de limiter le débat sur le projet de loi . Le député de a souligné que, en raison de la motion d'adoption du rapport — un peu comme la présente motion d'adoption d'un rapport —, au lieu de débattre du projet de loi , nous avons débattu d'une autre question, qui avait fait l'objet d'un débat d'urgence jeudi dernier.
Les députés devraient examiner ce qui s'est passé le 27 avril dernier, où les conservateurs ont joué à de petits jeux politiques à la Chambre. Étant donné qu'ils détestent permettre au gouvernement d'adopter des mesures législatives, ils ont présenté une autre motion pour empêcher le débat sur une autre mesure législative afin que nous puissions encore nous faire critiquer de ne pas allouer suffisamment de temps au débat, tout comme le député du Bloc vient de le faire au sujet du projet de loi .
Ce que je n'ai pas dit, c'est que nous avons tenté de présenter le projet de loi avant aujourd'hui, mais les conservateurs ont présenté une autre motion d'adoption de rapport à ce moment-là, tout comme aujourd'hui.
Y a-t-il une raison pour expliquer ce comportement répétitif des conservateurs? Ils ajournent les débats. Ils veulent prendre congé. Ils présentent des motions d'adoption. Ils recherchent des moyens de faire en sorte que le gouvernement soit frustré quand il essaie d'accomplir son travail de gouvernement. On ne parle pas de deux ou trois occasions; cette tendance perturbatrice fait des siennes depuis un certain temps déjà. Le coût à payer est élevé.
J'aurais une petite suggestion pour mes amis du Bloc: ils devraient peut-être tenir compte des observations des collègues néo-démocrates et ne pas être aussi rapides à se ranger du côté des conservateurs. Certains pourraient nous dire que soit les conservateurs embobinent les bloquistes pour qu'ils appuient leur abus législatif, soit les bloquistes ne connaissent pas d'autre solution. Peut-être que les bloquistes veulent prendre part à cette force perturbatrice autant que les conservateurs veulent se livrer à des petits jeux politiques.
Faut-il s'étonner de voir ce qui se passe dans cette enceinte, c'est-à-dire que le et les députés libéraux répètent constamment les mêmes choses, par exemple que nous allons continuer de centrer nos efforts sur ce qui est le plus important pour tous les Canadiens, soit la pandémie? Depuis le début, c'est notre message, sous la gouverne du du Canada.
Depuis quelques mois, l'opposition officielle conservatrice — de manière irresponsable à mon humble avis — a une fixation sur les deux éléments que j'ai mentionnés plus tôt aujourd'hui. Encore une fois, elle a proposé une motion d'adoption d'un rapport de comité pour essayer d'empêcher que les projets de loi du gouvernement soient débattus. L'objectif premier du Parti conservateur est de calomnier les députés du parti ministériel, coûte que coûte.
L'autre tactique des conservateurs est de causer le plus de frustrations possible à la Chambre afin que l'opposition puisse prétendre, comme on l'a entendu juste avant le débat sur ce rapport, que le gouvernement libéral ne respecte pas la démocratie parce qu'il a recours à l'attribution de temps.
Je ne suis pas en train de dire que le Parti conservateur doit être d'accord avec nous sur tout ce que nous disons, mais peut-être qu'il pourrait faire preuve d'un peu de collaboration, du moins dans une certaine mesure. L'opposition doit quand même se montrer un tant soit peu responsable par rapport au programme législatif, surtout en situation de gouvernement minoritaire.
Contrairement à l'opposition, le gouvernement n'a pas de temps réservé exclusivement à l'étude de ses projets de loi. Les conservateurs avaient le choix: ils auraient pu adopter ce rapport, et de nombreux autres, sans aucun doute, et ils auraient pu dire que l'investissement direct étranger est un sujet tellement important pour notre pays qu'ils allaient plutôt en faire le sujet d'une journée de l'opposition, qui est l'occasion pour eux de montrer ce en quoi ils croient.
Après tout, on voit bien à la lecture du rapport que les libéraux ont présenté une opinion dissidente. Cependant, au lieu de proposer une motion d'adoption d'un rapport, les conservateurs auraient pu mettre en lumière certaines de leurs préoccupations lors d'une journée de l'opposition et demander l'appui du Bloc et du NPD. Ils auraient très bien pu suivre cette voie, et faire la même chose avec le rapport sur la canalisation 5 plus tôt aujourd'hui.
Contrairement aux projets de loi du gouvernement, au bout du compte...
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Monsieur le Président, cela me fait plaisir de tenter une troisième fois de recommencer mon intervention. Je salue évidemment mon collègue de et je suis heureux qu'il veuille bien entendre cette allocution, d'autant plus que c'est un membre du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie que j'apprécie. Il est toujours là pour défendre les gens de sa circonscription, tout comme le député de ici présent qui, je l'espère, pourra faire une allocution bientôt.
Nous sommes ici dans le contexte non pas du projet de loi , mais de la Loi sur Investissement Canada. Comme je disais, la députée de , qui à l'époque était avec moi vice-présidente du comité de l'industrie, a déposé cette motion pour que nous puissions faire l'étude de la Loi sur Investissement Canada. Dans le contexte de la COVID-19, nous avions une crainte très légitime de voir la dévaluation de nos entreprises canadiennes et québécoises, lesquelles pourraient être menacées d'être acquises par des étrangers à un prix ridiculement bas. Nous avions une crainte légitime et réelle de voir nos sièges sociaux partir du Québec, du Canada, au profit d'investisseurs étrangers.
Évidemment, il y avait la question de la Chine, mais il y avait aussi beaucoup d'autres enjeux tels qu’Air Transat, Air Canada. Ces compagnies aériennes voyaient leur passif augmenter de façon importante et leur clientèle partir de façon importante aussi. Leur vulnérabilité s'établissait. Dans cet esprit-là, le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie s'est réuni et a invité des témoins pour pouvoir réagir à la protection de ces entreprises.
Si je me fie au résumé du rapport, « [l]a Loi sur Investissement Canada (la LIC) permet au gouvernement fédéral de procéder à un examen des investissements étrangers. Elle prévoit deux processus distincts: un examen de l’avantage net et un examen relatif à la sécurité nationale. » Il y a donc deux mots clés.
Pour moi, l'avantage net du Canada doit être démontré constamment. On doit s'attendre à une forme de transparence de la part du gouvernement à cet égard, et particulièrement du ministre de l'Industrie qui va pouvoir imposer des conditions pour une vente.
Évidemment, je peux penser chez nous à l'acquisition de Rona par Lowe's. On n'a jamais su si le gouvernement fédéral avait posé des conditions. Il en a mis évidemment pour permettre l'acquisition de Rona par Lowe's. Le problème, c'est que, comme cela n'a pas été dévoilé publiquement, quelques années plus tard, il a été facile pour la compagnie Lowe's de retirer ses engagements. On ne sent plus d'attachement de Rona au Québec. On a vu des entreprises qui avaient pignon sur rue dans les différentes villes du Québec fermer leurs portes. Il y a surtout la question de l'approvisionnement. Une compagnie comme Rona s'approvisionnait auprès des fournisseurs québécois et canadiens. Maintenant qu'elle est une propriété américaine, elle va favoriser des fournisseurs qui offrent le plus bas prix possible. Pour une compagnie américaine, le plus bas prix possible, c'est aux États-Unis.
Je veux juste refaire cette mise en contexte et dire que, dans son rapport, le Comité a souhaité une approche plus prudente, plus réactive et plus transparente concernant les réglementations des investissements étrangers.
Toutefois, au nom du Bloc québécois, j'ai déposé une opinion complémentaire. Même s'il y avait suffisamment d'éléments dans ce rapport pour dire que nous le trouvions positif, pertinent, constructif, il manquait des éléments importants, notamment la question des examens. Je vais me permettre de lire à mes collègues cette opinion complémentaire du Bloc québécois qui s'intitule simplement « Protégeons mieux nos entreprises », parce que c'est de cela qu'il est question.
Pouvons-nous sortir d'une économie néolibérale pour une économie où nous allons protéger notre marché intérieur, pour une économie québécoise, canadienne, dans laquelle nous pouvons être indépendants, faire affaire avec des fournisseurs de chez nous et où nous faisons rouler notre économie de façon indépendante?
Dans le contexte de la COVID-19, on se rappelle que nous étions dépendants de l'étranger, que ce soit pour des équipements de protection individuels ou pour tout enjeu de santé comme la production de vaccins. Nous avons perdu huit mois à cause de cela.
Je rappelle juste le contexte dans lequel s'est faite notre étude. Pour moi, cela me paraît absolument fondamental. C'est plus que jamais important. Nous devons revenir au principe d'une économie intérieure forte dans laquelle nous protégeons nos intérêts nationaux et nous achetons québécois, nous achetons canadien.
Voici l'opinion complémentaire du Bloc québécois qui s'intitule « Protégeons mieux nos entreprises ».
En matière de contrôle des investissements étrangers, le présent rapport du comité de l’industrie constitue un virage important et salutaire. Après une décennie de laisser-aller, le Bloc Québécois salue ce virage mais aurait souhaité que le comité aille plus loin.
Nous aurions voulu que le rapport propose de ramener à un niveau raisonnable le seuil à partir duquel le gouvernement analyse les projets d’investissements étrangers pour déterminer s’ils sont réellement avantageux. D’où cette opinion complémentaire.
Les politiques du gouvernement fédéral en matière d’investissements étrangers se résument depuis des années à peu de mots: déréglementation et laisser-aller. Il y a bien un resserrement des examens lorsque la sécurité nationale est en jeu et il y a maintenant des contrôles lorsque les investissements proviennent d'un État étranger, prouvant que la peur de la Chine fait son effet.
Cependant, pour le reste, les vannes sont ouvertes. Tout investissement étranger est automatiquement autorisé, sans examen. Les mécanismes d’examen prévus à la loi, que le gouvernement tient pourtant à protéger dans chaque accord commercial qu’il signe, sont rendus essentiellement inopérants.
En 2013, le gouvernement conservateur donnait le ton en annonçant son intention de relever le seuil à partir duquel le gouvernement évalue si les investissements étrangers sont réellement avantageux.
À partir de 2015, le gouvernement libéral a accéléré le pas. Entre 2015 et 2020, le seuil applicable aux investissements aux termes de l’accord commercial conclu avec le secteur privé est passé de 369 millions de dollars à 1,613 milliard de dollars. Le résultat est frappant: entre 2009 et 2019, la proportion des investissements étrangers qui font l’objet d’un examen est passée de 10 % à 1 %. C'est donc dire qu'en vertu des règles actuelles, 99 % des investissements étrangers sont maintenant automatiquement acceptés, sans examen.
Cette dérive arrive à un mauvais moment. Depuis une trentaine d’années, l’investissement étranger a changé de nature dans les pays de l’OCDE. La part des nouveaux investissements tend à diminuer alors que la part des investissements sous forme de fusions et acquisitions d’entreprises existantes tend à augmenter. J'ajoute que cela est encore plus vrai dans un contexte de pandémie de la COVID-19.
Entre 2010 et 2015, les nouveaux établissements n’ont représenté que 54 % de l’investissement étranger au Canada, alors que 46 % de ces investissements étrangers ont plutôt pris la forme de fusions et d'acquisitions, permettant à des investisseurs étrangers de mettre la main, en tout ou en partie, sur des entreprises de chez nous.
En cela, le Canada fait nettement pire que les autres pays industrialisés. Les nouvelles installations représentent 72 % de l’investissement étranger aux États-Unis et 78 % en France, contre seulement 54 % au Canada. Cette tendance se poursuit à ce jour: de 2018 à 2020, les fusions et acquisitions ont représenté 90 milliards de dollars sur les 244 milliards de dollars qui sont entrés au Canada en investissements étrangers.
En termes clairs, en trois ans, des entreprises étrangères ont investi 90 milliards de dollars pour mettre la main, entièrement ou en partie, sur des entreprises canadiennes. Ces 90 milliards de dollars en prise de contrôle ont représenté la disparition de sièges sociaux, désormais transformés en bureaux régionaux ayant peu de pouvoirs.
Depuis la Révolution tranquille, le gouvernement du Québec s’est doté d’importants leviers économiques et financiers. Ces outils lui permettent de poursuivre, avec plus ou moins d’énergie selon les gouvernements, une politique de nationalisme économique visant à donner aux Québécois un meilleur contrôle sur leur économie.
Notre nationalisme économique comporte deux volets. D’une part, nous sommes ouverts à des investissements étrangers, vecteurs de croissance et de développement. D’autre part, nous soutenons nos propres entreprises pour les aider à croître et cherchons à préserver nos entreprises et les importants leviers de décisions que sont nos sièges sociaux.
Il n’est pas question ici de fermer la porte à l’investissement étranger. Le Québec est et demeurera une économie ouverte sur le monde. L’ouverture à des investissements étrangers est essentielle à l’intégration du Québec dans les grands circuits commerciaux, laquelle est indispensable à la prospérité d’une économie ayant une taille relativement petite.
Comme l’écrivait d'ailleurs l'ancien premier ministre du Québec Jacques Parizeau en 2001, avant même l’entrée de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce: « On ne condamne pas les marées. On construit des digues, des jetées, on se protège en somme ». Malheureusement, avec l’affaiblissement de la Loi sur Investissement Canada, ces digues sont tombées.
Il est frappant de constater que l'éviscération de la loi fédérale se produisait alors même que le Québec commençait à s'inquiéter du rachat de nos entreprises par des intérêts étrangers et de la disparition de nos sièges sociaux.
En 2013, l'année où Ottawa annonçait son intention de relever le seuil d'examen prévu à la Loi sur Investissement Canada, le Québec allait dans la direction inverse et mettait sur pied le Groupe de travail sur la protection des entreprises québécoises.
Créée par un gouvernement du Parti québécois, coprésidée par une ancienne ministre libérale des Finances et composée majoritairement de personnes issues du milieu des affaires, la commission reflétait le consensus qui existe au Québec autour de la protection de nos entreprises.
Le Groupe de travail faisait d'abord un constat: les 578 sièges sociaux qu'on retrouve au Québec représentent 50 000 emplois à un salaire deux fois plus élevé que la moyenne québécoise, en plus de 20 000 autres emplois chez des fournisseurs de services spécialisés, comme les services comptables, juridiques, financiers et informatiques. C'est majeur.
De plus, les entreprises québécoises tendent à favoriser les fournisseurs québécois alors que les entreprises étrangères présentes au Québec s'appuient davantage sur des chaînes d'approvisionnement globalisées, avec l'impact qu'on devine sur notre réseau de PME, en particulier en région. On l'a vu avec la pandémie, les chaînes d'approvisionnement globalisées sont fragiles et nous rendent entièrement dépendants de l'étranger.
Ensuite, la présence de ces sièges sociaux est essentielle à la place financière montréalaise, dont l'écosystème est à son tour indispensable à l'accès des PME de tout le Québec aux leviers financiers dont elles ont besoin pour se développer. Au Québec, le secteur financier représente 150 000 emplois et une contribution de 20 milliards de dollars au PIB, soit 6,3 %. N'oublions pas que, selon le classement du Global Financial Centres Index, la place financière montréalaise est la 13e place financière sur la planète, avec presque 100 000 emplois.
Finalement, les entreprises tendent à concentrer leurs activités stratégiques, en particulier leurs activités de recherche scientifique et de développement technologique, là où se trouve leur siège social. Autrement dit, une économie de filiales, c'est une économie moins innovante.
Les recommandations du groupe de travail s'adressaient principalement au gouvernement du Québec: multiplier les prises de participation au capital des entreprises, faciliter la distribution d'actions employés et mieux outiller les conseils d'administration contre les prises de contrôle hostiles.
Or le pouvoir d'encadrer légalement les prises de contrôle étrangères pour s'assurer qu'elles sont avantageuses pour l'économie et pour la société se trouvait à Ottawa. Au moment où le Québec s'inquiétait des prises de contrôle étrangères des fleurons de son économie, le gouvernement fédéral choisissait d'abdiquer son pouvoir de contrôle.
Le Québec et le Canada, ce sont deux économies différentes.
Pendant que le Québec mène une politique de nationalisme économique, le Canada misait sur la dérèglementation, et pour cause: nos économies sont différentes.
Alors que le nationalisme économique québécois vise le développement des entreprises québécoises, l'économie canadienne gravite autour des filiales de grandes entreprises étrangères. Que ce soit dans le secteur automobile — on peut penser, entre autres, à Ford Canada ou à GM Canada — ou dans le secteur du pétrole — on peut penser à Shell Canada ou à Imperial Oil —, le Canada a depuis longtemps une économie de filiales.
Quant aux grandes entreprises canadiennes, que ce soit dans le secteur financier, les chemins de fer ou les télécommunications, elles évoluent dans des secteurs qui sont protégés contre les prises de contrôle étrangères par la loi fédérale. Ainsi, contrairement au Québec, la protection des sièges sociaux est un enjeu relativement peu important pour le Canada. C'est l'intérêt national plutôt que la malveillance qui a amené Ottawa à adopter une politique contraire aux intérêts du Québec.
Un virage est le bienvenu, mais il est incomplet.
L'arrivée d'importants investissements en provenance d'entreprises liées au gouvernement chinois est venue changer la donne. Le Canada commence à réaliser qu'il est nécessaire de mieux contrôler les investissements étrangers et de s'assurer qu'ils sont avantageux avant de les autoriser.
Le présent rapport du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie est le reflet de cette prise de conscience tardive, et le Bloc québécois s'en réjouit.
Il propose de resserrer le contrôle des investissements en provenance de gouvernements étrangers, de mieux contrôler les investissements qui peuvent avoir un impact sur la sécurité nationale, de mieux protéger les secteurs stratégiques de l'économie, de mieux protéger la propriété intellectuelle afin d'éviter le transfert de technologie en Chine et, finalement, de lever le secret qui entoure les analyses du gouvernement lorsqu'il doit décider si un projet d'investissement est avantageux. Autant de propositions auxquelles le Bloc québécois souscrit sans réserve.
En revanche, le Comité n'a pas fait le pas supplémentaire qui aurait été nécessaire pour protéger notre économie, nos entreprises et nos sièges sociaux: abaisser le seuil d'examen. Voilà la raison du présent rapport complémentaire, dans lequel le Bloc québécois se fait le porte-parole d'un large consensus québécois.
Cependant, même si le Comité n'a pas retenu notre proposition, nous espérons que le gouvernement s'en inspirera. Après tout, s'il est une chose que la pandémie de la COVID-19 nous a démontrée, c'est que les chaînes d'approvisionnement sont mondialisées. Elles sont fragiles et il est imprudent d'être complètement tributaires de décisions prises à l'étranger. Voilà une autre bonne raison de protéger nos entreprises.
Je vais rajouter quelques éléments en complément à cette présentation de notre rapport complémentaire, en commençant par l'importance de pouvoir s'assurer de protéger notre propriété intellectuelle. J'aimerais souligner certaines des recommandations. Dans ce que nous avons déposé, on peut lire:
Que le gouvernement du Canada protège les secteurs stratégiques, notamment, mais pas exclusivement: la santé, l’industrie pharmaceutique, l’agroalimentaire, l’industrie manufacturière, les ressources naturelles et les biens incorporels dans les domaines de l’innovation, de la propriété intellectuelle, des données et de l’expertise.
Je crois que le rapport a oublié le secteur de l'aérospatiale, car je suis convaincu que nous avons voté pour cela.
Lorsque le Comité en a parlé, c'était cher et je veux saluer les interventions de M. Jim Balsillie, que je tenais à nommer à la Chambre. On le connaît très bien pour son leadership dans l'économie canadienne et québécoise. Il est intervenu à plusieurs reprises comme témoin devant notre Comité, notamment au sujet de l'importance capitale de pouvoir protéger l'innovation, la propriété intellectuelle, les données et l'expertise. C'est absolument essentiel dans une économie du savoir.
Parmi les recommandations du Bloc québécois, nous voulions nous assurer que le doit justifier sa décision de conclure une transaction si elle est à l'avantage net du Canada. Nous voulions donc un peu plus de transparence et qu'il explique les éléments sur lesquels il s'est basé pour prendre une décision et qu'il rende publiques les conditions qu'il a imposées pour l'acquisition par des éléments étrangers, et ce, pour s'assurer de faire des suivis par la suite. Quand l'information reste secrète, il est facile pour une compagnie d'en faire fi parce qu'elle n'a pas de comptes à rendre à la population. En démocratie, la base, c'est de rendre des comptes à la population.
Pour moi, le cœur des débats que nous avons eus au sein du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie au sujet des recommandations à faire portait sur celle demandant au gouvernement du Canada de ramener le seuil d'examen au niveau de 2015, soit à 300 millions de dollars constants en dollars de 2000. Malheureusement, ce n'est pas ce qui s'est produit.
Je reconnais que, quand les conservateurs ont travaillé sur la Loi sur Investissement Canada, ils voulaient protéger les entreprises québécoises et canadiennes des investissements chinois. À la suite de la demande des conservateurs, les libéraux ont cherché à garder le statu quo sur la Loi sur Investissement Canada. Il faut croire que les esprits n'ont pas beaucoup changé depuis 2000.
La recommandation que j'ai déposée visant le seuil d'examen à 300 millions de dollars en dollars de 2000 n'a pas été retenue. Ce seuil serait révisé chaque année, ce qui serait surprenant, mais cette disposition reconnaît que le mécanisme — que je voulais renforcer — existe déjà. Le seuil serait rajusté annuellement au besoin en fonction de formules basées sur un produit intérieur brut nominal énoncé dans la Loi et calculé conformément aux principes énoncés aux articles 3.1, 3.3 et 3.5 du règlement.
Une autre partie de notre argumentaire visait à se concentrer sur les seuils. Cependant, les formations politiques ne voulaient pas protéger nos entreprises, sauf s'il y avait un risque pour la sécurité nationale. Or, le but est de protéger notre économie en faisant montre d'un nationalisme économique fort qui nous permet d'agir sur notre économie sans être vulnérables à une prise de contrôle par des investisseurs étrangers.
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Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat d'aujourd'hui concernant le rapport. Il s'agit d'un rapport très important. La Loi sur Investissement Canada a fait l'objet de discussions très animées pendant de nombreuses années.
Ce rapport est le résultat d'une motion de la députée de et il y a eu beaucoup de soutien pour le mener à bien. Je tiens à remercier tous les témoins qui ont comparu et ceux qui ont présenté des mémoires. Je tiens également à remercier le personnel. L'équipe législative est excellente. Les recherchistes et les analystes ont toujours fait un bon travail au cours du processus portant sur une question très complexe. Nous disposons d'un rapport assez complet d'environ 60 pages de matériel qui a été synthétisé, qui reflète certaines des préoccupations qui sont ressorties de la vente d'entreprises canadiennes, mais aussi de la perte de souveraineté, à certains égards, dans les investissements perdus.
Dans un premier temps, je me concentrerai toutefois sur une chose qui s'est produite pendant le débat de ce soir et qui concerne le . Je me demande comment les libéraux ajusteront leur position en conséquence. J'ai posé une question à propos de la recommandation 2, qui dit ceci: « Que le gouvernement du Canada dépose un projet de loi pour modifier la Loi sur Investissement Canada afin de revoir les seuils chaque année. » Le secrétaire parlementaire du premier ministre a répondu, ce qui peut sembler significatif, qu'il appuie les recommandations du comité. Les libéraux ont pourtant produit une opinion dissidente. Ils auraient pu présenter une opinion complémentaire, mais ils ont présenté une opinion dissidente qui dit ceci: « Aux termes de la [Loi sur Investissement Canada], les seuils annuels d’examen des avantages nets sont examinés et révisés annuellement par le ministre, ce qui rend inutiles les modifications législatives proposées. »
Comme le représente le , je me demande s'il remet en question ce qu'ont dit les membres du comité, s'il invite à la réflexion le , qui n'a pas parlé de ce point, ou s'il rompt les rangs avec son parti sur ce sujet. Je ne sais pas quel scénario est le bon, mais il serait intéressant de le savoir étant donné ce qui nous a été présenté aujourd'hui.
Dans les faits, les seuils ont remonté au fil des ans, ce qui n'a pas été sans causer une certaine inquiétude chez les Canadiens, surtout parmi les entreprises. Les seuils ont été haussés parce que nous avons perdu plusieurs fleurons, comme Falconbridge et Inco, mais il y en a d'autres, que l'on peut tous reconnaître à leur nom et à leur image de marque. Le problème, au risque de répéter ce que l'intervenant précédent a si éloquemment expliqué, c'est qu'à l'heure où on se parle, il y a des petites entreprises qui sont laissées pour compte parce qu'elles n'atteignent pas le seuil et qui se font gober. Pour tout dire, la hausse est exponentielle.
Il est ressorti des discussions du comité — et c'est notamment ce que dit le rapport — qu'à cause de la COVID-19, beaucoup d'entreprises vulnérables pourraient être achetées par des gouvernements non démocratiques. Loin de moi l'idée de vouloir pointer un pays du doigt, mais il n'en demeure pas moins que certains pays utilisent des fonds publics pour acheter des entreprises canadiennes. La COVID ayant accentué la vulnérabilité des entreprises, énormément de jeunes pousses et de moyennes entreprises risquent de connaître le même sort.
Si on me demande mon avis, ce problème est loin de dater d'hier. La première fois que j'ai parlé des gouvernements non démocratiques qui achètent des entreprises canadiennes au comité de l'industrie, c'était en 2004. Encore là, ce n'était pas la première fois que j'abordais la question, c'est juste qu'à l'époque, le comité tenait des audiences là-dessus. Je me souviens même d'une manchette dans le Globe and Mail qui disait que la Chine faisait pression sur les députés pour qu'ils revoient la loi sur les investissements. Noranda venait d'être achetée par China Minmetals.
À ce moment-là, j'ai demandé s'il était approprié de permettre ce genre d'investissements parce qu'ils provenaient d'un gouvernement non démocratique. Ce n'est pas forcément parce qu'il s'agit de la Chine, étant donné qu'il y a aussi d'autres pays. Après l'an 2000, la Chine s'est lancée dans une frénésie d'acquisitions partout dans le monde, notamment au Canada. Si on examine l'échelle mobile des acquisitions et des investissements, on constate qu'ils sont très importants. Cela soulève beaucoup de questions au sujet de la protection des renseignements personnels et du contrôle de la propriété des différents types de biens. Je dirais que cela s'est joué sur le marché immobilier et au moyen d'approches spéculatives qui ont eu des conséquences importantes pour les Canadiens.
J'ai insisté sur cette question, et elle est revenue au Parlement en 2007. Un article du Toronto Star disait ceci: « La sécurité est peut-être un facteur dans les examens d'opérations de rachat ». Quand j'ai réclamé qu'Industrie Canada examine de nouveau cette question, je parlais d'envisager une disposition sur la sécurité nationale dans les examens, disposition qui en fait maintenant partie parce que de nombreuses entreprises rachetées étaient importantes pour la sécurité nationale.
Si je m'intéresse à ce dossier, c'est parce que je représente Windsor, en Ontario, où le centre manufacturier fait partie de l'ADN de la ville depuis sa fondation au Canada. Lors de la Première et de la Seconde Guerre mondiale, le secteur manufacturier faisait partie de notre patrimoine, et c'est encore le cas aujourd'hui. En fait, lors de la Seconde Guerre mondiale, nous étions un centre de logistique pour la production de matériel servant à lutter contre le fascisme.
J'ai toujours considéré que le secteur manufacturier faisait partie de la structure nationale de la défense et qu'il revêtait aussi une importance nationale, car il donne aux gens des emplois, le sentiment d'être utiles et de l'autodétermination. Si nous n'avions pas cette capacité, nous ne pourrions pas accomplir les choses que nous accomplissons aujourd'hui. À l'époque, il fallait davantage transformer des matières premières en objets qui étaient utilisés, alors que, aujourd'hui, nous n'avons plus cette vision.
Je parle assez souvent d'une visite du à London, en Ontario, que je n'oublierai jamais, où il a déclaré qu'il fallait abandonner progressivement l'industrie manufacturière. C'était assez insultant, car nous ne devrions pas seulement nous concentrer sur l'extraction et l'expédition. L'un des aspects tragiques de la situation de notre industrie pétrolière et gazière est l'insuffisance de notre capacité en matière de raffinage. J'ai vu Oakville, par exemple, perdre Petro-Canada. J'ai vu plusieurs autres raffineries fermer parce qu'on n'y avait pas investi, souvent parce qu'elles n'étaient plus contrôlées par des intérêts canadiens ou parce qu'elles ne présentaient plus d'intérêt pour les investisseurs en raison de divers problèmes. Il y a donc eu perte de capacité.
Le secteur forestier canadien a perdu une partie de sa capacité, car une bonne partie de notre industrie appartient à des intérêts canadiens et américains. Il ne s'agit pas nécessairement de collusion. Il est possible que nous ne souhaitions pas nous concurrencer nous-mêmes et baisser les prix, parce que cela ne nous donnerait rien.
Le Canada vend ses matières premières. J'ai mentionné qu'il fallait accorder la priorité à l'industrie minière parce que nos matières premières sont exportées vers des marchés étrangers pour de la production à valeur ajoutée, que nous devrions abandonner progressivement, d'après le . C'est regrettable, car la fabrication à valeur ajoutée est importante de nos jours, en cette nouvelle ère de l'innovation.
Quand nous parlons d'énergies de remplacement, comme l'énergie solaire et éolienne, et d'innovation, je souligne souvent ce qui se passe à Detroit, qui se trouve essentiellement à deux kilomètres de l'endroit où je suis actuellement. On y investit des milliards de dollars dans la construction de nouveaux véhicules électriques. Ce n'est pas ce que l'on fait ici. Nous sommes en train de réaliser des projets majeurs et emballants, mais nous n'avons pas de stratégie nationale, uniquement une stratégie fragmentaire. Nous n'investissons pas non plus autant d'argent. En effet, à Detroit, on a vu des investissements de plus de 12 milliards de dollars au cours des dernières années, alors que, dans l'ensemble du Canada, on n'a investi qu'environ 6 milliards de dollars au cours des cinq à six dernières années, ce qui nous met bien loin de l'endroit où nous devrions être dans la course.
Le a répondu au rapport. Le gouvernement a apporté quelques légères améliorations au projet de loi, et il a resserré quelque peu les mécanismes d'examen relatif à la sécurité nationale, mais il n'a pas apporté certains des changements plus importants que nous avons réclamés. J'avais travaillé un peu avec Unite, un syndicat de la Colombie-Britannique qui représentait plusieurs entreprises qui étaient essentiellement passées sous le contrôle de l'État chinois. Je n'entrerai pas dans les détails, mais je vais lire cette recommandation à laquelle le gouvernement n'a pas donné suite:
Que le gouvernement du Canada présente immédiatement un projet de loi modifiant la Loi sur Investissement Canada afin de permettre l'établissement d'un examen de la protection de la vie privée et la capacité de faire respecter la vie privée et les droits numériques des Canadiens dans toute acquisition, fusion ou investissement approuvé par la LIC.
C'est la recommandation dont je veux parler. La recommandation qui a été adoptée — et je m'en réjouis — permet aussi d'ordonner le dessaisissement d'entreprises, et le ministre a agi dans ce dossier. C'est important.
Je veux en parler parce que nous examinons en ce moment certaines de nos lois sur la protection des renseignements personnels, et les gens doivent savoir que nous avons un commissaire à la protection de la vie privée au Canada. Les États-Unis n'en ont pas; d'autres endroits n'ont pas de telles protections. Les lois canadiennes sur la protection des renseignements personnels touchent toutes les facettes: notre capacité à nous impliquer en tant que citoyen et notre vie personnelle, mais aussi nos entreprises et notre capacité à échanger de l'information, à travailler en collaboration et à être reliés par des fusions et autres, d'une façon plus modeste.
Nous demandons donc que ce soit inscrit dans la loi, de manière à ce que nous puissions assujettir les données et les renseignements à un processus d'examen. Je donne un exemple précis pour montrer les vulnérabilités. J'ai choisi le recensement du Canada, auquel j'ai d'ailleurs travaillé.
C'est ironique, puisque le recensement est en cours en ce moment. D'ailleurs, j'encourage chacun à y participer. Pour de nombreuses raisons, ma circonscription affiche l'un des taux de conformité les plus faibles. Il faut améliorer cela. C'est souvent une question de langue, mais il y a d'autres raisons. Quoi qu'il en soit, il est important de remplir le formulaire de recensement pour éclairer et justifier les mesures de soutien et les services offerts par le gouvernement, et bien d'autres choses.
À l'époque où je travaillais pour le recensement, celui-ci était en fait confié à Lockheed Martin. Il peut sembler curieux qu'un fabricant d'armes soit saisi du recensement du Canada, mais c'était bel et bien le cas. L'entreprise avait obtenu le contrat, et elle réalisait le recensement de divers pays. Toutefois, en raison de la Patriot Act, elle devait compiler nos données aux États-Unis. Cela aurait exposé toutes nos données de recensement à la Patriot Act.
La façon dont la Patriot Act fonctionne aux États-Unis ferait en sorte que nous n'aurions pas le contrôle sur nos données. Les États-Unis peuvent accéder à ces données et l'entreprise qui les produit aux termes de la loi ne peut même pas nous en avertir. La loi a été adoptée dans la foulée du 11 septembre en compagnie d'autres lois.
Les données allaient être déplacées hors du Canada, mais nous nous sommes battus et nous avons réussi à faire en sorte qu'elles demeurent au pays et qu'elles soient traitées ici, de façon à les protéger.
Ironiquement, Lockheed Martin ne s'occupe plus du recensement canadien. C'est l'un des exemples de tâche envoyée en sous-traitance en espérant un gain d'efficacité qui ne s'est finalement pas réalisé, puisque cela a coûté plus cher. En outre, l'entreprise n'existe plus et nous nous retrouvons à la case départ, alors ce fut plutôt une perte de temps.
Je crois réellement qu'il devrait y avoir une cloison pour protéger les données personnelles en cas de prise de contrôle. Quand on songe aux complications auxquelles ont dû faire face Facebook ou d'autres entreprises qui ont été victimes de fuites de renseignements personnels — voire prises en otage —, il est important de réaliser que nous sommes très vulnérables, mais que le pays n'a toujours pas de lois pour protéger les entreprises.
L'Université de Calgary a été victime d'une fuite de renseignements personnels et elle a dû payer une rançon pour protéger ces renseignements. Nous n'avons pas à l'heure actuelle une idée juste de l'ampleur du problème, parce que, même si un certain nombre d'entreprises ont été attaquées, elles paient les rançons demandées, sous différentes formes, mais elles n'ont pas à le déclarer publiquement. Parfois, l'information est révélée, mais pas toujours; cela dépend de la situation.
À l'aune de la Loi sur Investissement Canada, certaines prises de contrôle par des intérêts étrangers ont eu des impacts sur le quotidien des gens.
Mon collègue a parlé de Lowe's et de Rona, et je l'en remercie. C'est un bon exemple des conséquences que peut entraîner une acquisition. La concurrence en a pris un coup. En gros, deux entreprises concurrentes ont été rayées de l'échiquier, pour ainsi dire, et aujourd'hui, nous sommes très vulnérables. Il n'y a plus de raison de se faire concurrence. De fait, non seulement il y a moins de concurrence, mais en plus, cela a aggravé la situation du logement, il est plus difficile de rénover nos habitations et les petites entreprises sont devenues dépendantes d'un seul fournisseur. Cela a eu des conséquences économiques énormes.
Je me suis opposé à cette fusion et j'ai demandé au gouvernement de la bloquer, mais il a refusé. Je pense que les parties ont signé un accord parallèle pour peut-être garder leur siège social ici et c'est à peu près tout. Les magasins ont quand même fini par fermer. Je ne peux imaginer pire situation, parce qu'il n'y a plus qu'un fournisseur unique. Nous avons perdu ces emplois, mais plus important encore, nous avons perdu l'élément concurrentiel.
Prenons un autre exemple, qui est vrai, même s'il peut paraître moins remarquable: c'est celui de l'achat de Future Shop par Best Buy. En quoi a-t-il été bénéfique aux consommateurs? Nous avons perdu un autre concurrent, l'entreprise canadienne franchisée de Future Shop, et en matière d'électronique, il ne nous reste qu'un seul fournisseur, ce qui nous rend très vulnérables. Nous avons perdu cet élément concurrentiel.
Un des pires exemples de l'histoire est l'achat de Zellers par Target. Zellers était une entreprise rentable à une époque très difficile pour les grandes chaînes de vente au détail. Ses employés étaient syndiqués, gagnaient un salaire légèrement supérieur au salaire minimum et avaient des avantages sociaux. Puis Target a acheté Zellers et a aussitôt fermé les magasins. Ce fut un véritable gâchis. Les emplois sont disparus, les employés ont perdu leurs avantages sociaux et l'industrie a perdu un joueur, tout cela pour rien. Une entreprise américaine bidon est venue ici pour faire ni plus ni moins qu'une expérience sociale. Nous avons perdu une grosse partie de notre marché de la vente au détail. À bien des égards, nous ne nous en sommes pas remis, parce que ce genre de concurrence n'existe plus.
Je pense à London, en Ontario, où Caterpillar a acheté Electro-Motive. C'est un événement majeur, car il s'agissait de bons emplois dans le secteur manufacturier. Si cet achat a eu lieu, c'était purement pour briser le syndicat et faire disparaître un concurrent.
Un des exemples les plus marquants est l'achat de Stelco par la U.S. Steel à Hamilton. Les effets s'en font encore sentir. Nous avons perdu de la capacité de production, ce qui est une facette importante de notre longue histoire de fabrication d'acier dans la région d'Hamilton. Une main-d'œuvre exceptionnellement spécialisée a été sacrifiée parce que la U.S. Steel voulait réduire ses opérations.
Je ne crois pas que la situation actuelle causée par la COVID va perdurer. Par contre, beaucoup de petites entreprises connaissent leur lot de difficultés. Il y a un meilleur moyen de faire les choses.
Mon but n'est pas de faire un discours pessimiste, car l'important, c'est la sensibilisation. Il y a aussi de nombreux exemples où nous avons su combattre et conserver nos entreprises canadiennes. Je pense à la Potash Corporation of Saskatchewan. En 2004, BHP Billiton, une entreprise australienne, avait tenté de faire l'acquisition de la Potash Corporation. Nous avons contesté et nous avons eu gain de cause.
Le deuxième exemple auquel je pense est MacDonald, Dettwiler and Associates et la technologie spatiale et satellitaire canadienne. Nous avons réussi à empêcher en partie la prise de contrôle de cette entreprise, qui développe dans une certaine mesure des innovations canadiennes.
Je tiens à parler d'un sujet qui est souvent oublié. Quand on examine l'impôt sur la recherche-développement, les incitatifs comme le crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, et j'en passe, il faut se rappeler que, alors que nous bâtissons ces entreprises et que nous leur accordons des subventions pour faire de la recherche-développement, nous devrions avoir l'obligation de demeurer canadiens, et elles aussi. C'est l'une des choses qu'il faut reconnaître. Quand nous accordons des incitatifs, que ce soit des subventions directes ou indirectes, c'est la population canadienne qui investit, alors ces fonds devraient s'accompagner d'une obligation. Par conséquent, si nous étions dans une soi-disant économie de libre marché, où le gouvernement reste à l'écart, il n'y aurait pas de crédit d'impôt ou de subvention pour toutes sortes de choses. En tant que démocratie et société novatrice, nous choisissons ces entreprises pour faire des progrès technologiques. Si nous ne récoltons pas les fruits de ces investissements, en définitive, ils n'ont aucun sens.
Nous avons parlé un peu des seuils, mais nous ne voyons pas les mesures qui doivent être prises. Nous avons encore beaucoup de travail à cet égard, et une prise de conscience est nécessaire. C'est un dossier très compliqué, dont l'importance devient sans doute plus évidente lorsqu'un fleuron de l'économie est vendu à des intérêts étrangers. Toutefois, n'oublions pas les PME, qui ne sont pas assujetties à des examens et qui, nous apprend-on, vont fermer leurs portes. C'est un mauvais choix pour le pays, surtout si nous essayons de développer les PME. Ce sont des atouts que nous devons protéger et mieux développer.
Je vais terminer en remerciant une nouvelle fois le personnel et les analystes pour tout le travail accompli dans le cadre du rapport. Je sais que certains ont minimisé l'importance du débat pour différentes raisons, mais je me réjouis qu'il ait lieu, car il est réellement important. Au moins, le rapport est là, et je sais que la Chambre des communes a travaillé très fort pour soumettre des questions au gouvernement et au , pour leur donner matière à réflexion et pour essayer d'améliorer la situation.
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Monsieur le Président, je vais reprendre le passage que le député a peut-être raté.
Au titre de la Loi sur Investissement Canada, le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie est tenu de consulter le ministre de la Sécurité publique et d’obtenir ses recommandations sur les examens qui concernent la sécurité nationale. Tous les organismes d'enquête pertinents doivent être consultés dans le cadre de ce processus.
Le rapport du comité permanent indique que dès qu'un investissement soulève une préoccupation relative à la sécurité nationale, Sécurité publique Canada coordonne un examen faisant appel à 18 ministères et organismes fédéraux, notamment le Service canadien du renseignement de sécurité, le Centre de la sécurité des télécommunications, le ministère de la Défense nationale, la Gendarmerie royale du Canada, Affaires mondiales Canada, Ressources naturelles Canada, l'Agence de la santé publique du Canada et le ministère des Finances.
Le représentant de Sécurité publique Canada a ajouté qu'une telle approche pangouvernementale permet de tirer parti d’une expertise pertinente lors de l’évaluation des risques pour la sécurité nationale que présente chaque transaction.
[Français]
Le gouvernement est favorable aux investissements étrangers, mais pas au détriment de la sécurité nationale.
La Loi sur Investissement Canada est la principale mesure législative du gouvernement en ce qui a trait à l'examen des investissements étrangers au Canada. Le doit examiner et approuver les investissements étrangers importants en fonction de leur avantage net probable avant qu'ils puissent être effectués. De plus, tous les investissements étrangers, quels que soient leur valeur et pays d'origine, sont soumis à un examen dans le cadre du processus d'examen relatif à la sécurité nationale prévu par la Loi.
Lorsqu'un investissement est assujetti à la Loi, les investisseurs doivent fournir des renseignements détaillés importants. Ils sont tenus de fournir des renseignements sur toutes les sources de financement de l'investissement et des détails sur les plans de l'investisseur concernant l'entreprise canadienne acquise. Ces renseignements sont nécessaires pour permettre un examen approfondi de l'investissement en fonction de son avantage économique net probable pour le Canada et pour ne pas porter atteinte à la sécurité nationale du pays. Ces renseignements sont protégés par les dispositions rigoureuses de la Loi en matière de confidentialité.
Pour chaque examen de l'avantage net, le ministre tient compte de six facteurs expressément énoncés dans la Loi. Il s'agit, entre autres, de l'effet de l'investissement sur le niveau et la nature de l'activité économique au Canada, notamment sur l'emploi, et la contribution de l'investissement à la compétitivité canadienne sur les marchés mondiaux. Un investissement est approuvé uniquement si le ministre est convaincu qu'il constituera vraisemblablement un avantage économique global pour le Canada. Chaque décision repose sur une évaluation approfondie et rigoureuse, ainsi que sur un examen minutieux des répercussions économiques que l'investissement pourrait avoir.
Le processus d'examen relatif à la sécurité nationale prévu par la Loi est tout aussi minutieux. Ce processus prend autant en considération la nature des biens en jeu, y compris les biens incorporels, que les activités commerciales visées par l'investissement ou les parties prenantes à celui-ci. Des renseignements pertinents sur chaque investissement sont communiqués au ministère et aux organismes chargés de la sécurité, notamment Sécurité publique Canada et le Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, pour leur permettre d'évaluer les informations et le renseignement se rapportant à l'investissement. Ces organismes peuvent consulter les alliés du Canada afin de déterminer si l'investissement pourrait porter atteinte à la sécurité nationale et si un décret est nécessaire pour répondre aux préoccupations en matière de sécurité nationale.
Je sais que je dispose d'un temps limité, mais il est également important de souligner que la Loi tient compte du fait que les investissements faits par des entreprises d'État étrangères peuvent être motivés par des impératifs non commerciaux qui pourraient nuire aux intérêts liés à l'économie ou à la sécurité nationale du Canada.
Les dispositions de la Loi témoignent de cette attention particulière portée aux investissements des entreprises d'État. Citons notamment un seuil [difficultés techniques] pour les examens de l'avantage net et les lignes directrices visant les entreprises d'État. L'énoncé de politique en lien avec la COVID-19 et les lignes directrices sur la sécurité nationale [difficultés techniques] toutes ces mesures portant sur les entreprises d'État.
Ce ne sont pas seulement tous les investissements étrangers effectués par des investisseurs d'État qui font l'objet d'un examen plus poussé, mais aussi les investisseurs privés considérés comme étroitement liés à des gouvernements étrangers ou soumis à leurs directives.
[Traduction]
Grâce à la Loi sur Investissement Canada, le gouvernement possède déjà des pouvoirs d'examen des investissements étrangers qui comptent parmi les plus vastes du monde. Les pouvoirs existants permettent déjà de traiter les investissements problématiques qui risquent de porter atteinte à notre sécurité nationale tout en laissant le champ libre à la plupart des investissements étrangers. La grande majorité des investissements étrangers au Canada ne posent aucun risque pour la sécurité nationale.
Le gouvernement continue de collaborer avec nos alliés, notamment les membres du Groupe des cinq, en ce qui a trait aux investissements étrangers. La Loi sur Investissement Canada n'est pas le seul outil dont le gouvernement dispose pour protéger notre sécurité nationale contre les activités économiques pouvant présenter une menace.
[Français]
L'étude du comité permanent a soulevé des points importants concernant les investissements étrangers, les entreprises d'État et la protection des intérêts de sécurité nationale du Canada. Qu'il s'agisse d'un examen de l'avantage net ou d'un examen relatif à la sécurité nationale, les évaluations effectuées au titre de la Loi sur Investissement Canada sont toujours exhaustives et minutieuses.
J'aimerais également souligner encore une fois l'engagement du gouvernement à examiner les investissements aux termes de la Loi sous l'angle de leur avantage pour le Canada et les Canadiens. Conformément à la Loi sur Investissement Canada, le gouvernement continuera de veiller à ce que les intérêts économiques du Canada soient pris en compte lors de l'examen des investissements étrangers au Canada.
[Traduction]
Dans le budget de 2019, le gouvernement avait consacré près de 14 millions de dollars par année de façon permanente à la lutte contre les menaces de nature économique à notre sécurité nationale, ce qui a renforcé l'approche déjà solide du Canada à cet égard.
[Français]
Par ailleurs, le gouvernement n'a jamais compromis et ne compromettra jamais la sécurité nationale du Canada, et son excellent bilan à ce sujet en témoigne.