:
Monsieur le Président, je tiens à souligner, avant de commencer, que nous prenons la parole aujourd’hui sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Alors que nous entamons le débat de deuxième lecture sur le projet de loi , Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation, je pense qu’il est important de souligner que, depuis la découverte des tombes anonymes sur les terrains des anciens pensionnats indiens il y a un an et demi, la relation du Canada avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis a évolué, souvent de façon douloureuse. Les survivants, leurs familles, leurs communautés et tous les peuples autochtones du pays se sont exprimés et ont été entendus au sujet de la vérité brutale des pensionnats.
Notre pays et notre peuple ont l’obligation morale de rendre hommage aux survivants et de rechercher la vérité. Il est également de notre responsabilité de soutenir tous ceux qui souffrent de traumatismes intergénérationnels dans leur quête de vérité et dans leur douleur. La prise en compte des effets qui perdurent est au cœur de la réconciliation, de la recherche de la vérité et du renouvellement de la relation avec les peuples autochtones, en particulier ceux qui ont fréquenté ces horribles établissements.
Cet été, après que les Premières Nations, les Inuits et les Métis eurent plaidé leur cause pendant des années, Sa Sainteté le pape François s’est rendu au Canada et a présenté des excuses officielles pour le rôle de l’Église catholique romaine dans les mauvais traitements infligés aux enfants autochtones dans les pensionnats. Bien que ces excuses aient été considérées comme un pas dans la bonne direction par de nombreuses personnes, il est important de reconnaître la nature systémique de ce legs néfaste et les répercussions toujours actuelles des traumatismes subis dans les pensionnats, traumatismes qui ont été à la fois déclenchés et perpétués par le gouvernement du Canada et les institutions religieuses.
[Français]
Il y a quelques semaines, je me suis joint au Centre national pour la vérité et la réconciliation pour hisser le drapeau des survivants sur la Colline du Parlement. Entre autres, ce drapeau rend hommage aux survivants et aux personnes touchées par les pensionnats. Il représente notre responsabilité individuelle et collective ainsi que notre engagement à faire progresser la réconciliation.
Au cours de la cérémonie de la levée du drapeau, le nous a rappelé que la réconciliation est une chose à laquelle chaque personne au Canada, y compris tous les ordres de gouvernement, doit participer et cela inclut chaque député présent à la Chambre aujourd'hui.
À l'approche de la deuxième Journée nationale de la vérité et de la réconciliation qui aura lieu le 30 septembre à la suite de l'adoption du projet de loi l'an dernier, je reconnais qu'il y a encore beaucoup de travail à faire. À juste titre, les Canadiens veulent voir des progrès plus tangibles. Il s'agit notamment de répondre aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation. La journée nationale répond à l'appel à l'action no 80.
À mesure que nous avançons, nous devons pouvoir mesurer nos progrès afin que le gouvernement et le Canada soient tenus responsables de nos engagements envers les peuples autochtones. Comme l'a souligné dans son rapport final la Commission de vérité et réconciliation, les progrès en matière de réconciliation, à tous les ordres de gouvernement et dans la société civile, doivent faire l'objet d'une attention vigilante et être mesurés pour noter les améliorations.
Cependant, comme l'ont souligné de nombreux partenaires et surtout des organisations autochtones, le gouvernement ne peut pas, à lui seul, s'évaluer et se noter en matière de réconciliation. Une surveillance indépendante est nécessaire et de mise. C'est pourquoi, en 2015, la Commission de vérité et réconciliation a demandé au Parlement du Canada de créer un conseil national pour la réconciliation. S'il est adopté, le projet de loi fera exactement cela. Il établira le conseil national pour la réconciliation en tant qu'organisme dirigé par des Autochtones. Il sera indépendant, permanent et apolitique. Le conseil surveillera les progrès à long terme en matière de réconciliation ici au Canada et il évaluerait et rendrait compte de la mise en œuvre des 94 appels à l'action du rapport de la Commission. Cela correspond à ce que de nombreux dirigeants autochtones réclament depuis de nombreuses années: une plus grande responsabilité, une plus grande transparence et un moyen de tenir le gouvernement du Canada responsable de son rôle dans la réconciliation et dans la quête de la vérité.
[Traduction]
S’il est adopté, ce projet de loi permettra de créer le conseil national de réconciliation, ce qui répondrait immédiatement à l’appel à l’action no 53. Il répondrait également aux appels à l’action 54, 55 et 56, qui concernent le financement, les responsabilités et les attentes en matière de transparence envers le conseil et le gouvernement fédéral. Le projet de loi nous garantirait que le Canada réponde officiellement au rapport annuel du conseil.
J’aimerais prendre le temps de rappeler la genèse de ce projet de loi. Le chemin parcouru pour arriver jusqu'ici a nécessité de la collaboration et beaucoup de travail. Le projet de loi est en gestation depuis de nombreuses années.
En 2019, un conseil intérimaire composé de six éminents chefs autochtones, dont Wilton Littlechild, l’un des commissaires de la Commission de vérité et réconciliation, a formulé des recommandations fondées sur les recherches approfondies et l'expérience de dialogue avec le public que possèdent ces chefs. Ces recommandations portaient sur le mandat, la gouvernance et le fonctionnement du conseil. Elles ont constitué la base d'un cadre législatif de consultation. Le conseil intérimaire a également recommandé la nomination d’un comité transitoire pour faire avancer le dossier.
En décembre dernier, j’ai eu le plaisir d’annoncer et de soutenir la création de ce comité de transition. Ses membres ont examiné le projet de cadre, se sont entretenus avec des experts techniques autochtones et non autochtones et ont fourni au gouvernement de nouvelles recommandations qui ont débouché sur le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui.
Le projet de loi est l’aboutissement d’un travail de fond et de nombreuses années de revendications de la part des dirigeants, des experts et des collectivités autochtones en particulier. Par conséquent, l’établissement du conseil national de réconciliation est l’une des meilleures voies à suivre pour nous emmener vers la vérité et la réconciliation au Canada.
Le projet de loi définit le processus d’établissement du conseil, qui comprendrait de neuf à treize membres. Il précise les paramètres à respecter pour nommer les premiers membres du conseil d’administration et en assurer une composition diversifiée. Le projet de loi prévoit qu’au moins les deux tiers du Conseil doivent être autochtones et qu’il doit inclure: des membres des Premières Nations, des Inuits et des Métis; des représentants des organisations autochtones, y compris une personne nommée par l’Assemblée des Premières Nations, une par l’Inuit Tapiriit Kanatami et une par le Ralliement national des Métis; des jeunes, des femmes, des hommes et des personnes ayant diverses identités de genre; des personnes de toutes les régions du Canada, c’est-à-dire des régions urbaines, rurales et éloignées.
[Français]
Le conseil aura pour mandat de faire progresser la réconciliation au Canada, notamment en surveillant et en évaluant les progrès réalisés par le gouvernement en ce qui concerne tous les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
Cela signifie que le conseil doit avoir accès à des renseignements pertinents sur la façon dont les gouvernements respectent leurs engagements propres. Notre gouvernement devra établir un protocole pour la divulgation de l'information du gouvernement du Canada. Ce partage de l'information s'apparente à la divulgation de documents sur les pensionnats au Centre national pour la vérité et réconciliation afin de responsabiliser le gouvernement et de mieux comprendre l'héritage des pensionnats. Il me reviendra de m'assurer que le conseil dispose de l'information dont il a besoin pour effectuer son travail; ceci est impératif.
J'insiste également sur le fait que le conseil serait complètement indépendant du gouvernement et qu'il serait géré comme un organisme sans but lucratif. De cette façon, il ne serait pas lié au gouvernement ou à la Couronne. Le gouvernement du Canada fournirait une dotation et des fonds de démarrage en réponse à l'appel à l'action no 54.
S'il est établi en tant qu'organisme à but non lucratif, le conseil sera tenu de rendre des comptes annuellement au Parlement des progrès réalisés en matière de réconciliation au Canada et de formuler des recommandations pour faire avancer le travail. Il devra notamment fournir des rapports annuels et financiers auxquels le gouvernement devra répondre. Le gouvernement sera alors tenu de répondre à son rapport de façon annuelle. Ces rapports aideraient le gouvernement à fixer des objectifs et à élaborer des plans pour faire progresser la réconciliation sur la base des recommandations du conseil. Ce mécanisme de rapport prévu par le projet de loi garantirait la transparence et la responsabilité à mesure que nous progressons dans les appels à l'action.
[Traduction]
Enfin, le projet de loi décrit la raison d’être et les fonctions du conseil. La mission du conseil serait de demander des comptes au gouvernement responsable sur la réconciliation et les appels à l’action. Le conseil serait chargé d’élaborer et de mettre en œuvre un plan d’action national pluriannuel pour faire progresser les efforts de réconciliation. Il effectuerait également des recherches et consulterait des partenaires sur les progrès réalisés en matière de réconciliation dans tous les secteurs de la société canadienne et, surtout, par tous les gouvernements. Cela comprend le suivi des mesures mettant en œuvre les appels à l’action.
Le projet de loi n’est pas exhaustif. Il vise plutôt à définir un cadre souple. Le conseil aurait le pouvoir de prendre d’autres mesures s'il les juge importantes et nécessaires pour atteindre ses objectifs.
[Français]
Pour conclure, j'insisterai sur un dernier point important: nous devons adopter cette proposition de loi sans délai. Cela fait sept ans que la Commission de vérité et réconciliation du Canada a publié son rapport final et ses appels à l'action. Cela fait 16 mois que les premières sépultures non marquées ont été localisées à Kamloops. Cela fait trois mois que le projet de loi a été déposé à la Chambre.
[Traduction]
Avec le passage du temps, les survivants, les aînés, les gardiens du savoir et les familles vieillissent. De nombreux survivants sont déjà décédés sans avoir vu tous nos efforts se déployer pour favoriser la réconciliation. Je demande aujourd'hui aux députés de presser le pas et d’appuyer la création du Conseil le plus rapidement possible. Nous le devons aux survivants, aux peuples autochtones et à tous nos concitoyens canadiens.
Enfin, je tiens à remercier une fois de plus tous les survivants des pensionnats autochtones de nous avoir fait connaitre leurs vérités et les expériences qu'ils ont vécues. Je veux rendre hommage à ceux qui continuent de souffrir en silence. Sans eux, nous ne serions pas ici aujourd’hui. Nous les voyons. Nous les entendons. Nous les croyons.
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Monsieur le Président,
kwe. Hello.
Bonjour.
Avant de commencer, je tiens à souligner que le Parlement du Canada est situé sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin Anishinabe.
Je suis heureux d’avoir l’occasion de dire quelques mots aujourd’hui alors que nous sommes réunis pour débattre de cet important projet de loi. Une partie de la politique coloniale honteuse et raciste des pensionnats consistait à retirer de force les enfants autochtones, des Premières Nations, Inuits et Métis, de leurs communautés et à les priver de la langue et de la culture de leur famille, tout en leur faisant subir de nombreux sévices. Nous savons maintenant que beaucoup de ces enfants ne sont pas rentrés chez eux.
L’origine de bon nombre des inégalités que nous constatons aujourd’hui remonte à la perte de la culture, de l’identité et des liens familiaux, ainsi qu’aux abus perpétrés dans le cadre du système des pensionnats. L’héritage néfaste de ce système continue encore aujourd'hui d’affecter les survivants, leur famille et les communautés autochtones. Nous le constatons dans les taux élevés de violence, d’incarcération et de suicide, ainsi que dans la forte demande de services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie pour les peuples autochtones du Canada. Nous devons prendre des mesures pour effacer cet héritage.
La création du conseil national de réconciliation prévue dans le projet de loi , serait une étape importante pour favoriser la réconciliation et renforcer la relation entre les peuples autochtones et le gouvernement du Canada, une relation fondée sur le respect et la reconnaissance des droits.
Alors que nous commençons à débattre du projet de loi, j’aimerais prendre du recul et l’inscrire dans une perspective historique plus large. Le Canada a instauré un système de pensionnats autochtones dans les années 1830, système qui a duré jusqu’à la fermeture du dernier pensionnat en 1998. L’objectif de ces pensionnats était de tuer l’Indien dans l’enfant.
Dans les années 2000, les survivants du système ont organisé un recours collectif, jetant la lumière sur les abus subis dans les pensionnats. Lorsque je siégeais au Conseil national des jeunes de l’Assemblée des Premières Nations, j’ai été témoin du leadership des survivants, comme l’ancien chef national Phil Fontaine, l’un des premiers dirigeants à avoir parlé courageusement et publiquement de son expérience dans les pensionnats.
Je me souviens aussi de la regrettée militante micmaque Nora Bernard, dont la quête inlassable de justice a mené à un recours collectif au nom des survivants en Nouvelle-Écosse. C’est grâce à l’action directe et au courage des survivants autochtones des pensionnats qu’on a pu aboutir à un règlement juridique avec les survivants, l’Assemblée des Premières Nations, les représentants inuits, le gouvernement fédéral et les représentants des Églises.
En 2008, la résilience des survivants a amené le Canada à présenter des excuses officielles aux survivants pour le rôle joué par le Canada dans le système des pensionnats. Un élément très important de l’entente de règlement a été la création de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, dont le mandat fondamental était de dire la vérité à la population canadienne sur ce qui s’était passé dans les pensionnats indiens.
L’excellent travail réalisé par la Commission de 2007 à 2015 a permis de révéler la vérité sur les pensionnats indiens et d’amorcer le travail de réconciliation entre les survivants des pensionnats indiens, leurs familles, leurs communautés et, en fait, tout le Canada. Au cours de cette période, les commissaires ont mené des entrevues et des audiences avec les survivants et leurs familles afin de documenter les événements survenus dans les pensionnats. Leur travail a été considérable. Ils ont organisé sept événements nationaux, d’innombrables événements régionaux et communautaires à travers le Canada, et ils ont effectué plus de 6 500 entrevues, et ce travail a débouché sur les 94 appels à l’action dont nous discutons aujourd’hui.
Les 94 appels à l’action ont jeté les bases de la réconciliation future entre la société canadienne et les peuples autochtones. Il est clair que la réconciliation peut avoir des significations différentes selon les personnes, mais la Commission nous a fourni un point de départ. Elle nous a donné un moyen de solidifier un ensemble complexe d’idées, de les intégrer à un plan directeur afin de lutter contre le racisme systémique dans ce pays
Le mandat de la Commission décrit la réconciliation comme étant un processus individuel et collectif de longue haleine qui nécessite l’engagement de tous les intéressés, y compris les anciens pensionnaires des Premières Nations, inuits et métis et leurs familles, les collectivités, les organismes religieux, les anciens employés des écoles, le gouvernement et la population canadienne. Nous sommes tous concernés, et c’est ensemble que nous devons cheminer vers la réconciliation.
En ce qui concerne le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui, les appels à l’action nos 53 à 56 demandent directement au gouvernement de faire ce qu'il compte justement faire avec le projet de loi aujourd’hui, c’est-à-dire établir un conseil national de réconciliation.
Parmi les 94 appels à l’action, notre gouvernement a déjà pris des mesures allant dans ce sens. Nous avons créé la première Loi sur les langues autochtones. Pour la première fois, nous avons un commissaire aux langues autochtones, et nous avons adopté des dispositions législatives afin de mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones dans le cadre du projet de loi . La semaine prochaine, nous célébrerons le premier anniversaire de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation. Même si je suis fier de ces réalisations, je suis conscient que le travail n’est pas terminé, et le travail doit se faire aux paliers fédéral, provincial et municipal. Le projet de loi nous permettra de maintenir notre engagement à l’égard de ce travail important.
Un conseil national indépendant de réconciliation aurait notamment pour fonction d’élaborer et de mettre en œuvre un plan d’action national pluriannuel afin de faire progresser les efforts de réconciliation, d’effectuer des recherches sur les pratiques prometteuses permettant de faire avancer les initiatives de réconciliation, de sensibiliser le public aux réalités et à l’histoire des peuples autochtones, de susciter le dialogue et d’aborder toutes les autres questions que le conseil indépendant estime nécessaires pour faire progresser la réconciliation.
La sensibilisation est un volet important du travail que nous devons accomplir. Lorsque j'étais responsable des activités de sensibilisation sur les traités en Nouvelle-Écosse, j'ai fait de nombreuses présentations sur la réconciliation, et c'est seulement à ce moment-là que j'ai compris que la plupart des Canadiens n'avaient pas été informés de toute l'histoire du Canada. Murray Sinclair, commissaire de la Commission de vérité et réconciliation et ancien sénateur, l'a expliqué à merveille en ces termes: « Pendant que les enfants autochtones étaient maltraités dans les pensionnats autochtones en se faisant traiter de païens, de sauvages et d'êtres inférieurs, le même message était diffusé dans les écoles publiques du pays. »
Les divers ordres de gouvernement et la population canadienne ont la responsabilité de faire connaître notre histoire commune, qui comprend non seulement ce qui nous rend fiers d'être Canadiens, mais aussi les chapitres sombres de notre histoire. Cela suppose notamment de prendre des mesures afin de décoloniser nos structures et le système d'éducation et de mettre l'accent sur les connaissances et les voix autochtones. Nous élaborons de meilleures mesures législatives, des mesures plus inclusives, quand nous collaborons avec nos partenaires autochtones en étant à l'écoute de leurs voix et de leurs connaissances. C'est pourquoi le projet de loi à l'étude a été guidé, à chaque étape, par les voix des Autochtones.
Du conseil provisoire au comité de transition, le projet de loi à l'étude a été guidé par des leaders autochtones, comme M. Wilton Littlechild, l'ancien commissaire qui était un membre essentiel du conseil provisoire. Le travail qu'effectue actuellement M. Littlechild fait suite au travail précieux déjà effectué. Je souligne que ce projet de loi répond aux demandes des dirigeants autochtones qui ont travaillé en étroite collaboration avec les survivants, les familles et les communautés touchés par les pensionnats autochtones. Ils ont dirigé un processus pour créer l'espace et les ressources nécessaires à une éventuelle guérison, ainsi que pour favoriser la compréhension entre les peuples autochtones et les autres Canadiens.
Le gouvernement du Canada a respecté ce processus et a hâte de faire avancer le projet de loi avec l'appui des députés. En agissant ainsi, nous répondons directement aux appels à l'action nos 53 à 56 de la Commission de vérité et réconciliation, ainsi qu'aux recommandations du conseil provisoire et du comité de transition.
Dans cette perspective historique importante, j'invite tous les députés à se joindre à moi pour appuyer ce projet de loi majeur afin de continuer de favoriser la réconciliation.
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Monsieur le Président, c'est toujours un honneur de prendre la parole à la Chambre au nom des gens de Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill. C'est toutefois le cœur lourd que je reviens cette semaine au Parlement, surtout en tant que député du Nord de la Saskatchewan. Tout d'abord, je tiens à souligner aujourd'hui les événements tragiques qui sont survenus récemment dans le Nord de la Saskatchewan, dans les communautés de la nation crie de James Smith et de Weldon. Alors que le processus de guérison s'amorce pour de nombreuses personnes, il est important de ne pas perdre de vue, dans les jours et les semaines à venir, ce qui sera un long et difficile parcours pour bien des personnes. Souvent, lorsque l'attention des médias diminue, l'aide et le soutien diminuent aussi. Ces communautés devront faire preuve de détermination pour porter leur lourd fardeau; elles devront être déterminées à continuer à être là pour les familles, les amis et les voisins. Nous ne devons pas leur permettre de cheminer seuls.
C'est dans cet esprit que je prends la parole au sujet du projet de loi , Loi prévoyant la constitution d'un conseil national de réconciliation. Le travail de vérité et de réconciliation doit être considéré comme un parcours plutôt qu'une destination. Les relations ne sont pas faciles, surtout celles qui sont marquées par une longue histoire de méfiance. Cette méfiance est la raison pour laquelle une mesure législative comme le projet de loi mérite d'être examinée au moyen d'une approche axée sur l'établissement d'un consensus. Cela permettra de créer un meilleur projet de loi. C'est ce qui est nécessaire et, franchement, c'est ce à quoi on est en droit de s'attendre.
Le projet de loi tente de répondre aux appels à l'action 53 à 56 de la Commission de vérité et réconciliation en créant un mécanisme de reddition de comptes sur les progrès de la réconciliation dans tout le pays. Notre parti est favorable à la reddition de comptes. En fait, en tant que parti qui a créé la Commission de vérité et réconciliation, nous nous en félicitons. Nous appuierons le renvoi de ce projet de loi au comité et travaillerons à y apporter des améliorations.
Dans le but d'élaborer un meilleur projet de loi et de favoriser l'avancement de la réconciliation, il y a quelques préoccupations, quelques questions et quelques sujets qui, selon moi, devraient être abordés, et quelques suggestions que nous ferons. J'aimerais prendre les quelques minutes qui suivent pour parler de certaines de ces préoccupations.
Ma première réserve touche le processus de nomination des membres du Conseil national de réconciliation, sa transparence et son indépendance. Afin d’expliquer mon propos, je vais revenir sur les étapes et l’échéancier qui ont mené au dépôt du projet de loi à la Chambre.
En décembre 2017, le avait annoncé qu’il lancerait le processus de mise sur pied d’un conseil national de réconciliation en instaurant un conseil d’administration provisoire. En juin 2018, à peine six mois plus tard, ce dernier présentait son rapport final, qui énonçait 20 recommandations très précises. Il est important de préciser que celles-ci ont jeté les assises de l’ébauche du libellé du cadre législatif — ce qui a été confirmé lors de la séance d’information technique tenue hier soir. Il était notamment recommandé de nommer un comité de transition pour poursuivre les travaux amorcés.
J’aimerais vous lire un passage tiré de ce rapport final, qui dit ceci:
Comme nous l’avons indiqué dans notre rapport provisoire, le comité de transition croit qu’il est important qu’un comité de transition soit mis sur pied afin que les travaux proposés dans les rapports provisoire et final puissent se poursuivre. Au cours de notre mandat, divers organismes et membres des collectivités nous ont indiqué que nous devons rapidement aller de l’avant avec l’établissement du Conseil national de réconciliation et maintenir l’élan pour ce faire.
Toutefois, inexplicablement, il a fallu attendre trois ans et demi, jusqu'en décembre 2021, pour que le ministre nomme enfin les membres du comité de transition. Une fois de plus, soyons clairs. L'élaboration du fondement du cadre juridique du projet de loi était déjà terminée en juin 2018. Pourquoi ce retard?
Le gouvernement actuel ne cesse de faire de grandes annonces, de tenir des conférences de presse et de prendre des photos au sujet de dossiers concernant les Autochtones, sans s'atteler ensuite aux tâches difficiles. En juin 2022, le ministre a finalement déposé le projet de loi , deux jours à peine avant la relâche parlementaire estivale, ajouterai-je. C'était donc quatre ans après les recommandations.
Non seulement un tel retard est inacceptable, mais le manque d'indépendance et de transparence du processus de sélection est préoccupant. Du conseil d'administration provisoire au conseil d'administration final du conseil en passant par le comité de transition, le processus de sélection des membres reste à l'entière discrétion du ministre. En juin, au moment de la présentation du projet de loi , des organismes autochtones ont clamé haut et fort leurs réserves au sujet de ce processus. Ces réserves étaient valables, car selon l'appel à l'action no 53 de la Commission de vérité et réconciliation, le Conseil national de réconciliation est censé être indépendant. J'ai une question toute simple. Comment peut-il être indépendant si, conformément à l'article 8 de ce projet de loi, le premier conseil d'administration doit être composé de personnes « choisies par le ministre »?
Le gouvernement veut-il vraiment nous faire croire, vu son bilan, qu'il mérite de se faire accorder le bénéfice du doute et qu'il n'exercerait jamais une pression indue pour obtenir ce qu'il veut? Enfin, il y a les propres mots du , qui a dit ceci lorsqu'il a expliqué pourquoi un organisme de surveillance est nécessaire: « Il n'appartient pas au Canada de s'évaluer lui-même. »
À mon avis, les préoccupations concernant le processus de sélection exigent que le dise très clairement à la Chambre et, surtout, aux peuples autochtones pourquoi il est à l'aise avec l'idée d'avoir autant de contrôle et d'influence directs sur un organisme qui aura pour tâche de demander des comptes à son propre gouvernement relativement aux progrès dans la réconciliation.
Autre sujet d'inquiétude: le projet de loi ne propose rien de concret pour mesurer les résultats. Certes, il est difficile de quantifier la réconciliation, mais, en lisant attentivement l'appel à l'action numéro 55, on constate qu'il comprend plusieurs éléments qui sont bel et bien mesurables. Voici quelques exemples: le nombre d'enfants autochtones pris en charge par comparaison avec les enfants non autochtones et les motifs de la prise en charge; une comparaison en ce qui touche le financement destiné à l'éducation des enfants des Premières Nations dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci; une comparaison sur les plans des niveaux de scolarisation et du revenu entre les Autochtones et les non-Autochtones; les progrès réalisés pour combler les écarts en ce qui a trait aux indicateurs de la santé; les progrès réalisés pour ce qui est d’éliminer la surreprésentation des jeunes Autochtones dans le régime de garde; les progrès réalisés dans la réduction du taux de la victimisation criminelle des Autochtones, y compris des données sur les homicides, la victimisation liée à la violence familiale et d’autres crimes, et, enfin, les progrès réalisés en ce qui touche la réduction de la surreprésentation dans le système judiciaire et correctionnel.
Le problème, c'est que si l'on veut mesurer la responsabilité, il faut fixer des cibles qui permettent de distinguer la réussite de l'échec. Comme le veut l'adage, ce qui peut être mesuré peut être accompli.
Le directeur parlementaire du budget a publié récemment un rapport en réponse à une demande du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord, où il critique vertement Services aux Autochtones Canada et Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada pour des hausses de dépenses qui ne se sont pas traduites par une amélioration des résultats. Je cite le rapport: « Il ressort de l’analyse réalisée que l’augmentation des dépenses n’a pas entraîné d’amélioration proportionnelle de la capacité de ces organisations à atteindre les objectifs qu’elles s’étaient fixés. » Le paragraphe se termine sur la phrase suivante: « Selon l’examen qualitatif, la capacité à atteindre les objectifs fixés a diminué. »
C'est peut-être ce que craint le gouvernement. En plus de ne pas prévoir de résultats mesurables, le projet de loi emploie des formulations qui semblent délibérément vagues, juste assez vagues pour éviter une possible reddition de comptes. Le chef Wilton Littlechild, qui a siégé au conseil d'administration provisoire et au comité de transition, a dit à CBC News qu'il fallait renforcer le texte du projet de loi.
À titre d'exemple, la section « Mission » contient la formulation « faire progresser les efforts de réconciliation ». Selon M. Littlechild, il faudrait supprimer le mot « efforts »; le projet de loi devrait plutôt dire « faire progresser la réconciliation », puisqu'il s'appuie sur le travail déjà accompli et les bases établies. Par ailleurs, le préambule du projet de loi dit que le gouvernement devrait communiquer des renseignements « pertinents », ce qui, d'après M. Littlechild, laisse au gouvernement la liberté de déterminer ce qui est important ou non. « On aurait pu enlever les mots de ce genre », a-t-il dit.
Lorsqu'on combine tous ces éléments, on a l'impression que le gouvernement cherche à réduire les risques d'une possible reddition de comptes en utilisant certaines formulations et en ne prévoyant pas de résultats mesurables, qui l'obligeraient à donner suite à ses paroles et à ses gestes.
Ma dernière préoccupation concerne la personne qui doit répondre au rapport annuel publié par le conseil national. Le paragraphe 17(3) du projet de loi précise que le doit répondre aux enjeux visés par le rapport du conseil national de réconciliation en « publiant un rapport annuel sur la situation des peuples autochtones qui décrit les plans du gouvernement du Canada pour faire avancer la réconciliation ». Cela ne respecte pas l'appel à l'action numéro 56 de la Commission de vérité et réconciliation, qui demande clairement et sans équivoque au du Canada d'y répondre officiellement.
Le affirme toujours qu'« aucune relation n'est plus importante pour le Canada que celle qu'il entretient avec les peuples autochtones ». Les gestes sont plus éloquents que les paroles, et le premier ministre devrait être celui qui répond directement, sans déléguer cette responsabilité au ministre.
En conclusion, comme je l'ai dit plus tôt, notre parti appuiera le projet de loi et, dans un esprit de collaboration et en réponse à la déclaration du , qui s'est dit disposé à « perfectionner » le projet de loi, notre parti travaillera avec les membres du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord et il proposera certains amendements qui, selon nous, amélioreront ce projet de loi.
Il est maintenant de notre devoir de veiller à ce que le projet de loi fasse véritablement progresser la réconciliation.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , Loi portant sur un conseil national de réconciliation. Avec ce projet de loi, le gouvernement cherche, après six ans et demi, à donner suite aux appels à l'action 53 à 56 de la Commission de vérité et réconciliation. Malgré toutes ses belles paroles au sujet de la réconciliation, depuis 2015, le gouvernement libéral n'a pleinement mis en œuvre que 11 des 94 appels à l'action et que 8 des 76 appels qui relèvent effectivement de sa compétence.
Le projet de loi C‑29 se fait attendre depuis longtemps, mais la précipitation du gouvernement à mettre en œuvre quelque chose a engendré un projet de loi boiteux. Si nous voulons continuer sur la voie de la réconciliation avec les peuples autochtones, il faut une réponse solide et inclusive aux appels à l'action 53 à 56. Malheureusement, le gouvernement n'a pas réussi à produire cette réponse. Le projet de loi fournit un cadre pour la mise en œuvre d'un conseil national de réconciliation, mais il repose sur des assises boiteuses. Il faudra que le comité y remédie si le gouvernement espère créer un conseil viable qui est respecté par l'ensemble des dirigeants, des communautés et des organisations autochtones au Canada.
Dans l'appel à l'action no 53, la Commission de vérité et réconciliation a recommandé au gouvernement d'établir un conseil national pour la réconciliation. Le projet de loi donnerait suite cet appel à l'action en créant une organisation à but non lucratif composée de 9 à 13 membres qui surveillerait les progrès réalisés par le gouvernement dans ses efforts en matière de réconciliation avec les Autochtones et qui ferait des comptes rendus sur ces progrès. Le conseil ne serait pas considéré comme un mandataire de Sa Majesté du chef du Canada et il ne serait pas non plus régi par la Loi sur la gestion des finances publiques. Concrètement, le conseil serait un organisme indépendant, du moins, il devrait l'être.
Cette indépendance présumée est le premier de la série de problèmes que me pose le projet de loi . Le conseil serait-il vraiment indépendant si les membres du conseil d'administration sont choisis par le ministre des Relations Couronne-Autochtones? Le projet de loi prévoit que les personnes qui feront partie du premier conseil d'administration seront « choisies par le ministre en collaboration avec le comité de transition ». Toutefois, n'oublions pas que les membres du comité de transition ont été choisis par le ministre en décembre 2021. Pourquoi est-ce important? D'abord, le conseil aurait la tâche cruciale d'élaborer les statuts constitutifs et d'autres documents fondateurs qui définiraient le mode d'élection des prochains membres du conseil d'administration et qui préciseraient quelles personnes pourraient en devenir membres. Autrement dit, le ministre et les membres du comité de transition qu'il a lui-même choisis détermineraient l'avenir de ce conseil prétendument indépendant, alors que le mandat de ce conseil devrait être notamment de rappeler le ministre à l'ordre quant à son bilan lamentable en matière de réconciliation.
L'appel à l'action no 54 demande au gouvernement de fournir un financement pluriannuel au conseil national. C'est ce que le gouvernement a fait dans son budget de 2019 avec une enveloppe de 126,5 millions de dollars, mais le projet de loi ne prévoit aucune reddition de compte au sujet de l'utilisation de cette somme ni la publication du moindre rapport financier par le conseil.
La Commission de vérité et réconciliation a reconnu qu'il est important que le conseil obtienne des renseignements pertinents et opportuns pour pouvoir faire son travail. C'est indiqué dans l'appel à l'action no 55, qui demande à tous les ordres de gouvernement de fournir des rapports annuels et des données récentes dans de nombreux domaines concernant les Autochtones, incluant, sans toutefois s'y limiter: la garde d'enfants, l'éducation, la santé, les taux d'incarcération, la criminalité et les taux de victimisation. Il serait intéressant d'entendre les autorités provinciales et municipales décrire comment elles parviennent à mettre en œuvre cette exigence. Pour le bien du conseil, j'espère qu'une bonne partie du travail réalisé pour rationaliser ces demandes a déjà été effectué par le ministère des Relations Couronne-Autochtones, y compris Affaires du Nord Canada, et les ministères provinciaux appropriés. J'espère aussi qu'on n'imposera pas de fardeau indu aux administrations municipales déjà lourdement chargées avec ces rapports supplémentaires.
L'appel à l'action no 56 demande au gouvernement, au premier ministre en fait, de répondre officiellement au rapport en publiant un rapport sur la situation des peuples autochtones qui présenterait le plan de réconciliation du gouvernement. Le projet de loi échoue lamentablement à ce chapitre, car il charge le ministre des Relations Couronne-Autochtones, et non le premier ministre, de publier cette réponse.
L’un des problèmes les plus flagrants du projet de loi est le manque de représentation au sein du Conseil national de réconciliation. Le projet de loi prévoit trois sièges pour l’Assemblée des Premières Nations, l’Inuit Tapiriit Kanatami et le Ralliement national des Métis. Ce sont les trois organisations nationales avec lesquelles le gouvernement libéral collabore presque exclusivement en ce qui concerne les questions autochtones, pourtant, elles ne sont pas les seules organisations qui défendent les intérêts des Autochtones à l’échelle du Canada. Dans sa version actuelle, de larges pans des populations urbaines et pauvres seraient tenus à l’écart. De plus, ni les femmes ni les enfants ne seraient représentés au sein du conseil. Il n’y a aucune reconnaissance pour le travail des organismes communautaires qui œuvrent sur le terrain auprès des Autochtones chaque jour.
Les libéraux diront que ces organisations pourraient être élues par le conseil. C’est vrai. La question est de savoir pourquoi certaines organisations ont un siège réservé et pas les autres? Pourquoi certaines organisations nationales essentielles, comme l’Association des femmes autochtones du Canada, le Congrès des peuples autochtones ou l’Association nationale des centres d’amitié ont-elles été reléguées au second rang par le gouvernement? Où sont les autres voix qui s'expriment au nom des Métis et des Autochtones?
Qu’en est-il des organisations qui ont le mandat fondamental de faciliter la réconciliation économique? Il n’est pas rare que dans les réunions avec les dirigeants autochtones, l’importance de la réconciliation économique soit abordée. Les Autochtones ne veulent pas seulement régler leurs problèmes au moyen de leurs propres ressources; ils veulent redevenir financièrement autonomes. Il faut honorer les personnes qui ont été privées de leur autonomie en raison des dispositions paternalistes, archaïques et irrémédiablement désastreuses de la Loi sur les Indiens.
Si le gouvernement du Canada veut véritablement promouvoir la réconciliation, il doit s'attaquer au problème évident dont personne n'ose parler. Je crois que nous devons immédiatement mener, en partenariat avec les dirigeants autochtones, un examen approfondi de la Loi sur les Indiens ayant pour objectif d'éliminer les obstacles législatifs qui nuisent à la participation des Autochtones à l'économie canadienne et de concevoir un plan à long terme pour assurer la transition en vue d'abandonner complètement la Loi sur les Indiens.
Certaines communautés autochtones sont déjà prêtes à participer à ce processus. D'autres ont entrepris des efforts en ce sens, et d'autres encore ne sont pas prêtes à entamer cette conversation. C'est pourquoi nous devons adopter une approche prudente à l'égard de l'abolition de la Loi sur les Indiens, notamment en offrant aux communautés autochtones qui sont prêtes à assumer leur autonomie gouvernementale les outils législatifs qui leur permettront de le faire, tout en veillant à maintenir un dialogue constructif à l'échelle nationale pour planifier les prochaines étapes en incluant à la fois les Autochtones et les non-Autochtones, et en veillant aussi à ce que toute nouvelle loi repose sur des consultations entourant l'autonomie, la fiscalité, la transparence, la reddition de comptes et les droits de propriété.
Par ailleurs, j'estime que nous devons établir un dialogue national avec les dirigeants et les organisations autochtones afin d'éliminer les obstacles bureaucratiques à la prospérité économique dressés par Services aux Autochtones Canada et Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, en vue d'éliminer progressivement ces formalités gouvernementales. Il n'y a pas de raison d'obliger les communautés et les organismes autochtones à consulter les contrôleurs de ces deux ministères avant de traiter directement avec les entités gouvernementales responsables des finances, de la santé ou de tout autre dossier.
Il faut moderniser le système de traités territoriaux pour assurer la prospérité économique des communautés autochtones; fournir les outils aux communautés autochtones qui leur permettront de prendre leur destinée en main tout en préservant l'équilibre entre leurs droits et ceux du Canada; assurer une garantie de certitude et d'irrévocabilité pour ne pas nuire à la gouvernance de l'ensemble du pays; et garantir une certitude future aux gouvernements, à l'industrie et aux personnes autochtones et non autochtones.
Il faut changer le modèle actuel, où des fonctionnaires fédéraux décident qui est ou n'est pas prêt à assumer l'autonomie gouvernementale. La réconciliation doit être axée sur l'avenir des peuples autochtones, et non sur l'intérêt supérieur du gouvernement libéral actuel. En modernisant notre approche à l'égard des partenariats avec les Autochtones au moyen de l'abolition éventuelle de la Loi sur les Indiens, nous modernisons le Canada et nous amorçons une nouvelle ère de prospérité économique et d'égalité des chances.
Le projet de loi , qui fait fi des importants conseils des organismes de défense des peuples autochtones, des questions touchant les femmes et les enfants, des Autochtones urbains et pauvres, ainsi que de l'autosuffisance et l'équité, est le symptôme d'un problème beaucoup plus vaste. Les conservateurs appuient la réconciliation avec les peuples autochtones. Nous sommes prêts à avoir des conversations.
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Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui au nom du Bloc québécois sur le projet de loi qui prévoit la constitution d'un conseil national de réconciliation.
Je suis d'autant touché d'intervenir dans ce débat que je suis personnellement membre de la nation huronne‑wendat; je suis même le premier Huron‑Wendat élu dans l'histoire de la Chambre. J'étais moi aussi, tout comme le ministre, présent à la levée du drapeau des Survivants sur la Colline du Parlement il y a quelques semaines avec ma collègue de , qui est aussi la parole‑parole en matière d'affaires autochtones du Bloc québécois. On n'a toujours pas fini et on est très loin d'avoir terminé d'évaluer toutes les conséquences funestes d'un régime colonial féroce.
Force est d'admettre une évidence historique. La rencontre des deux mondes entre les nations autochtones et les empires européens a été pour le moins à l'origine d'un choc brutal des cultures. Au nom de la volonté de faire goûter à des peuples jugés inférieurs les beautés de la civilisation, des nations ont été expropriées et écrasées. Pour ces dernières, la liberté promise par les Occidentaux aura trop souvent été synonyme d'oppression.
Le projet de loi dont nous parlons aujourd'hui fait suite aux appels à l'action nos 53 à 56 de la Commission de vérité et réconciliation. Cette dernière, rappelons‑le, a été établie dans le cadre d'une entente juridique entre les survivantes et les survivants des pensionnats autochtones, l'Assemblée des Premières Nations, des représentants et représentantes des Inuits et les responsables de la création et de la direction des écoles, c'est‑à‑dire Ottawa et les autorités ecclésiastiques.
Le mandat de la Commission consistait à informer toutes les Canadiennes et tous les Canadiens de ce qui s'est passé dans les pensionnats autochtones. La Commission a documenté et nous a permis de connaître bon nombre de nouvelles informations concernant les survivantes et les survivants, leurs familles, les communautés et toute personne personnellement touchée finalement par la réalité des pensionnats autochtones, notamment des anciens élèves, membres des Premières Nations, qui sont passés par là, qu'ils soient également Inuits ou Métis, des membres des familles, des communautés, des églises, d'anciens membres du personnel des pensionnats, des représentants des gouvernements et d'autres Canadiens et Canadiennes. Cela a représenté un travail d'enquête et de recherche assez poussé.
De 2007 à 2015, rappelons‑le, Ottawa a versé de l'argent, soit 72 millions de dollars, pour appuyer les travaux de la Commission. Les membres de la Commission ont passé six ans aux quatre coins du Canada pour entendre plus de 6 500 témoignages. Ils ont également tenu sept événements nationaux dans différentes régions du pays pour mobiliser la population canadienne, sensibiliser le public à propos de l'histoire et des séquelles des pensionnats et partager et commémorer les expériences d'anciens élèves et de leurs familles.
En juin 2015, la Commission a tenu son événement de clôture à Ottawa, au cours duquel elle a rendu public le sommaire exécutif de son rapport final contenu dans plusieurs volumes. Le sommaire présente 94 appels à l'action et recommandations pour favoriser la réconciliation entre les Canadiens et les peuples autochtones.
Comme c'est le cas dans beaucoup de projets de loi, l'intention est souvent louable, mais le diable peut parfois être dans les détails. Dans le cas qui nous occupe, je le dirai d'emblée, le Bloc québécois va voter en faveur du principe du projet de loi C‑29.
Le Bloc québécois est un ardent défenseur des relations de nation à nation entre le Québec et les Premières Nations. Ce faisant, donner une voix supplémentaire pour permettre aux Autochtones de se faire entendre dans le processus de réconciliation est tout à fait en phase avec notre position. Le Bloc québécois est, rappelons‑le, une formation politique qui est favorable à l'indépendance du Québec. Pour nous, c'est la meilleure manière d'arriver à un nouveau partenariat entre les nations, par le truchement d'un nouveau régime qui n'aura plus rien à voir avec le système raciste qui est celui de la Loi sur les Indiens dont le nom en lui‑même est une insulte. D'ailleurs, sur ma carte, c'est écrit « CERTIFICAT DE STATUT INDIEN ». Ce n'est pas une carte qui remonte aux années 1950. Elle remonte à peine à 2012; c'était hier. Ne nous trompons pas, ce vocable est aussi insultant, irrespectueux et absolument comparable au fameux mot en « n ».
C'est autant une insulte à l'endroit des Premières Nations que de parler d'Indiens. Pour nous, les relations internationales commencent chez nous, sur notre propre territoire. Le Bloc québécois travaille de concert avec les nations autochtones sur la scène fédérale pour renforcer et garantir leurs droits inhérents. Il veille d'ailleurs à ce que le gouvernement fédéral applique intégralement la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones dans les zones de responsabilité propres au fédéral. Le Bloc s'est aussi prononcé pour que les nations autochtones reçoivent leur dû, et nous maintiendrons la pression sur Ottawa pour qu'il réponde aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada.
Le 21 juin 2021, le Bloc a fait adopter à l'unanimité une motion pour que les communautés autochtones disposent de toutes les ressources nécessaires pour lever le voile sur la réalité historique des pensionnats autochtones et pour contraindre les églises à ouvrir leurs archives. On peut dire que ce projet de loi travaille en ce sens et c'est une des raisons pour lesquelles nous l'appuyons.
Nous avons aussi annoncé vouloir assurer la prévisibilité et la pérennité du financement des programmes qui permettent la guérison des victimes des pensionnats tels que le programme de soutien en santé spécialement conçu à cet effet. Le comité que le projet de loi vise à créer permettrait d'assurer un suivi constant dans ce dossier.
Le texte prévoit la constitution d'un conseil national de réconciliation, un organisme indépendant, apolitique et permanent. Le ministre a d'ailleurs insisté là-dessus tout à l'heure. Cet organisme, dont la mission consiste à faire progresser les efforts de réconciliation avec les peuples autochtones, doit être dirigé par des Autochtones. Il répond aux appels à l'action nos 53 à 56 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Je vais me permettre de les lire, car c'est important.
L'appel à l'action no 53 est libellé comme suit:
Nous demandons au Parlement du Canada d'adopter, en consultation et en collaboration avec les peuples autochtones, des dispositions législatives visant à mettre sur pied un conseil national de réconciliation.
C'est la base.
L'appel à l'action no 54 est libellé comme suit:
Nous demandons au gouvernement du Canada de fournir un financement pluriannuel pour les besoins du conseil national de réconciliation qui sera créé afin de s'assurer qu'il dispose des ressources humaines, financières et techniques nécessaires pour mener ses travaux, y compris la dotation d'une fiducie de la réconciliation nationale pour faire avancer le dossier de la réconciliation.
L'appel à l'action no 55 est libellé comme suit:
Nous demandons à tous les ordres de gouvernement de fournir des comptes rendus annuels ou toutes données récentes que demande le conseil national de réconciliation afin de permettre à celui-ci de présenter des rapports sur les progrès réalisés en vue de la réconciliation [...]
L'appel à l'action no 56 est libellé comme suit:
Nous demandons au premier ministre du Canada de répondre officiellement au rapport du conseil national de réconciliation en publiant un rapport annuel sur la « situation des peuples autochtones », dans lequel on pourrait présenter les intentions du gouvernement pour ce qui est de faire avancer le dossier de la réconciliation.
Nous ne pouvons bien sûr qu'être fermement et entièrement en accord avec ces demandes. Nous avons bien compris tout à l'heure, en écoutant le ministre, la mission de l'organisme, son mandat, son mode de gouvernance et son objectif de représentativité au sein du conseil d'administration. Tout cela a été bien expliqué et le projet de loi est assez simple à comprendre. Nous applaudissons aussi cette obligation de produire un rapport qui soit présenté au Parlement et l'obligation du gouvernement d'y répondre. Nous approuvons tout cela et n'y voyons aucun problème.
Certaines questions demeurent cependant entières. J'invite la Chambre à surveiller attentivement ces éléments. Premièrement, il y a le financement. Le budget fédéral de 2019 annonçait un investissement total de 126,5 millions de dollars pour établir le conseil national de réconciliation, dont 1,5 million de dollars pour appuyer la première année de fonctionnement, c'est-à-dire le démarrage. Or, rien n'est actuellement connu quant à la pérennisation du financement ni sur la période pour laquelle l'enveloppe actuelle est prévue. Il manque quand même des détails quant au fonctionnement de la chose.
Une autre des questions qui demeurent ouvertes est celle de la portée. Un des éléments qui reviennent fréquemment dans ce projet de loi est l'ensemble des entités que le comité surveillera afin de faire des recommandations. En effet, on peut voir que le comité a présentement comme mission de « surveille [r] les progrès qui sont réalisés en matière de réconciliation dans tous les secteurs de la société canadienne et par tous les gouvernements au Canada » et de « recommande [r] des mesures pour promouvoir, prioriser et coordonner les efforts de réconciliation déployés dans tous les secteurs de la société canadienne et par tous les gouvernements du Canada ».
En premier lieu, qu'est-ce que cela veut dire? On aimerait bien comprendre ce que veut dire: « tous les secteurs de la société canadienne ». On peut imaginer qu'il y a des sociétés d'État. Il y en a. Il y a des sociétés d'État canadiennes qui risquent d'être, à l'instar des ministères, sous la loupe du comité.
Est-ce que les entreprises privées de compétence fédérale vont aussi être l'objet de surveillance et d'enquête? Est-ce que, par exemple, un transporteur aérien indépendant serait compris dans le mandat de surveillance et de recommandations?
La portée est très grande. C'est peut-être un peu trop vague dans le projet de loi. La portée très grande que donne le projet de loi au comité semble lui permettre une grande latitude dans ses activités. Ce n'est pas un problème en soi, mais cela peut aussi nuire à son efficacité, parce qu'il pourrait davantage porter son attention sur les entités gouvernementales, nous semble-t-il, plutôt que sur les sociétés privées. Cela ne veut pas dire que ce n'est pas légitime de regarder les sociétés privées, mais, s'il y a quelque chose à regarder, c'est avant tout l'État, parce que l'État se doit d'être exemplaire. Il serait donc normal d'y porter une attention toute particulière.
L'autre élément à surveiller est la surveillance de tous les gouvernements du Canada. C'est dit comme tel: « les gouvernements » au pluriel. On voit donc un désir de surveillance des gouvernements provinciaux et territoriaux. Bien que les affaires autochtones soient actuellement de compétence fédérale, les enjeux qui touchent les Premières Nations touchent aussi de nombreuses compétences provinciales, comme la santé et l'éducation. On a donc une volonté de faire fi du respect des champs de compétence et de permettre au comité de jeter un regard sur l'ensemble des activités gouvernementales au Canada, y compris celles des provinces, y compris celles du Québec.
Je dois avouer que, pour nous, c'est un irritant, parce que nous ne pouvons pas soutenir une commission fédérale qui chercherait à mettre le Québec en procès. Nous allons surveiller cet aspect de très près, bien que, je le rappelle, nous soyons en faveur du principe de ce projet de loi. Cela n'affecte pas cela, mais, quand même, il faut pointer du doigt cette dimension.
Au Québec, justement, la Commission d'enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec, qu'on appelle la commission Viens, avait été mise en place pour déterminer les causes sous-jacentes à toutes formes de violence, de discrimination ou de traitement différentiel à l'égard des femmes et des hommes autochtones lors de la prestation de certains services publics au Québec.
Dans son rapport, le commissaire avait adressé au gouvernement du Québec 135 recommandations. Le rapport comporte 142 recommandations, mais il y en a 7 d'entre elles qui ne s'adressent pas au gouvernement du Québec. C'est donc 135 recommandations qui s'adressent directement au gouvernement du Québec. Ces appels à l'action touchent l'ensemble des services que rend l'État aux Autochtones, comme la justice, les services correctionnels et policiers, la santé, les services sociaux et la protection de la jeunesse.
Dans son budget de 2020, le gouvernement du Québec a annoncé une somme de 200 millions de dollars pour entreprendre la mise en œuvre des appels à l'action de la Commission. Depuis octobre 2020, 125 millions de dollars ont été investis dans la bonification, la pérennisation et l'amélioration des services publics ainsi que dans l'implantation de la sécurisation culturelle.
Avec la volonté d'un suivi indépendant impartial, c'est à la protectrice du citoyen du Québec que le mandat de suivi de la mise en œuvre des recommandations de la Commission d'enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec a été confié. D'ailleurs, celle-ci a mis sur pied un comité consultatif auquel prennent part des personnes des Premières Nations et des Inuits dans l'objectif de favoriser la collaboration et de veiller à ce que les appels à l'action de la commission Viens se concrétisent par des actions qui répondent aux besoins des représentants et représentantes issus des Premières Nations et des Inuits.
Un autre comité formé principalement de chercheurs universitaires et de personnes issues de la société civile avait aussi été mis sur pied pour documenter de manière indépendante la mise en œuvre de ces appels à l'action. Il est basé à l'Université du Québec en Abitibi‑Témiscamingue, et son premier rapport a été publié en 2021. Pour nous, c'est un beau modèle à suivre. Nous applaudissons les efforts du Québec en cette matière en tous points.
Pour en revenir à l'actuel projet de loi, on peut dire que, malgré ce que je viens de mentionner sur ce que le Québec fait déjà, on assiste peut-être à la mise en place d'une autre entité de surveillance et de recommandation qui va s'ajouter aux deux qui existent déjà au Québec. On peut donc se demander si on va encore assister à un chevauchement des compétences, à un empiètement des mandats de la part d'Ottawa, ou si le comité va se concentrer uniquement sur les enjeux fédéraux au Québec en analysant seulement ce qui se situe à l'intérieur des compétences fédérales.
Le conseil aura pour mandat d'assurer une surveillance et de fournir des recommandations. Pour y arriver, il aura besoin d'enquêteurs et d'analystes. Pour que le comité puisse s'acquitter de sa tâche convenablement en cette ère de pénurie de main-d'œuvre, il serait aussi intéressant de savoir quelles sont les prévisions actuelles en matière de besoins d'employés au sein de ce conseil. En somme, malgré notre appui, il y a de nombreuses zones d'ombre, que je viens de mentionner.
En conclusion, il est temps de quitter le registre des belles paroles, des larmes en public et des actes symboliques au profit de celui des actions. La devise du Québec, c'est « Je me souviens ». Aujourd'hui, souvenons-nous. Nous le devons aux victimes des actes répugnants, que nous n'avons, à bien des égards, qu'effleurés au chapitre de la mémoire et de la compréhension.
Je vais terminer mon discours en disant tiawenhk, ce qui veut dire merci en langue wendat.
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Uqaqtittiji, je tiens d'abord à remercier mes concitoyens du Nunavut de m'avoir élue et de m'avoir accordé leur confiance. Je continuerai à travailler fort pour que leurs besoins soient satisfaits et qu'ils puissent se faire entendre.
Je souhaite également un bon retour à tous les députés. J'espère qu'ils ont passé un bel été et j'ai bon espoir que nous apporterons des changements qui auront des effets positifs sur les peuples autochtones et le Canada en général.
Je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui au nom des néo-démocrates au sujet du projet de loi , Loi prévoyant la constitution d’un conseil national de réconciliation. À la base, ce projet de loi découle des recommandations importantes formulées par la Commission de vérité et réconciliation dans ses appels à l'action. Je lui rends hommage pour son travail. Je crois sincèrement que la Commission a lancé ses appels à l'action en sachant que des changements systémiques seraient apportés.
Le projet de loi est susceptible de faire avancer les efforts de réconciliation pour le Canada et les personnes qui considèrent le Canada comme leur pays. Cependant, par souci de clarté, il faut apporter des modifications au libellé. Les termes utilisés ne sont pas assez fermes pour le rôle important qu'ils jouent. Il n'y a aucun renvoi aux importantes obligations juridiques définies par la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et la jurisprudence.
Il semble y avoir un décalage entre les recommandations qui sont sous la gouverne des Autochtones et la manière dont le gouvernement mettra en œuvre les changements requis. En l'absence d’un processus clair, la communication et les changements réalisables peuvent être négligés, comme c’est le cas depuis des décennies. Les néo-démocrates proposeront des changements pour que les Autochtones pilotent le dossier de la réconciliation et que le gouvernement mette en œuvre les recommandations formulées par le nouveau conseil. Le gouvernement doit entendre ce que les communautés autochtones ont à dire et apporter les changements à partir des solutions qui lui sont proposées.
Les peuples autochtones savent ce qu'il faut changer. En effet, le gouvernement du Canada a été informé des décalages existants. Le Canada devra dorénavant continuer d'améliorer ses rapports avec les peuples autochtones, tant sur le plan des relations que sur celui des perceptions. Les Autochtones ont fait de nombreux travaux de recherche sur la réconciliation et ils ont beaucoup milité pour elle. La réponse du gouvernement doit en tenir compte, et il faut que celui-ci se laisse désormais guider dans ses interventions. Pour concrétiser, mesurer et pérenniser la réconciliation, la création d'un conseil, étant donné le nombre de domaines visés, est essentielle.
Avant d'aborder certains de ces secteurs, je vais raconter une histoire personnelle. J'ai parlé à la Chambre de l'ingérence du gouvernement dans ma vie. Cet été, on m'a rappelé une partie de cette ingérence. Une ancienne enseignante a communiqué avec moi et m'a envoyé le courriel suivant: « Avez-vous été en 5e et 6e années à l'école Maani Ulujuk de Rankin Inlet pendant une partie de l'année scolaire? J'ai enseigné en 5e et 6e années et j'avais une élève dans ma classe, une adorable petite fille, qui un jour a été soudainement appelée au bureau par les services sociaux et mise dans un avion avec sa mère (et peut-être son frère) et envoyée quelque part, si je me souviens bien, à Pond Inlet. Je n'ai jamais su par la suite ce qui lui était arrivé. Est-ce que c'était vous? Cela s'est passé il y a 35 ans. » Ce qui est triste, en plus, c'est que ce n'était pas la première fois que l'on me retirait d'une classe pour m'envoyer dans une autre communauté.
Ayant raconté cela, je demande aux députés: que signifie la réconciliation? Malheureusement, mon histoire en tant qu'Autochtone n'est pas unique au Canada. Malheureusement, au sein des peuples autochtones, mon histoire n'est que trop courante.
Le gouvernement fédéral continue de s'opposer à une compensation pour les enfants des Premières Nations qui ont été victimes de discrimination en ayant été placés en famille d'accueil. Les changements dans l'accessibilité et l'abordabilité des logements, les occasions d'emplois fondées sur leurs compétences existantes et l'accessibilité linguistique aux services fédéraux sont des sources de grandes préoccupations.
Il faut mettre l'accent sur les services en santé mentale partout au pays. Les processus qui se sont révélés efficaces sont ceux qui respectent les pratiques autochtones. Il faudrait le reconnaître. Ce processus peut tenir compte du soutien en matière de justice sociale pour les victimes de crimes et du financement de ces services. Les besoins des Autochtones sont importants. Il s'agit des besoins qu'ils constatent et dont ils parlent.
Il doit y avoir des mécanismes plus fermes concernant les langues et tenant compte des lois autochtones. Pour de nombreux Canadiens, les deux seules langues officielles du pays sont l'anglais et le français. Comme de nombreux services fédéraux et territoriaux ne sont offerts que dans ces deux langues, bien des gens ne peuvent participer aux discussions qui sont essentielles et qui doivent inclure les personnes qui parlent des langues autochtones, dont l'inuktitut.
Le public devrait en apprendre davantage sur les cultures autochtones du point de vue des Autochtones. C'est essentiel à l'éducation de la prochaine génération afin de prévenir des atrocités comme celles qui ont déjà été perpétrées au Canada. C'est en apprenant l'histoire du point de vue des Autochtones et en tirant des leçons du passé que les Canadiens auront un avenir prometteur.
Nous préconisons l'adoption du projet de loi afin d'appuyer un processus de réconciliation mené par les Autochtones. Le projet de loi nous aiderait à faire face à ce qui s'est produit au Canada. Le Canada ignore les voix des peuples autochtones depuis trop longtemps. Les inégalités en matière de logement sûr et accessible et d'infrastructures véritables durent depuis trop longtemps.
Le gouvernement du Canada doit adopter une approche axée sur les droits pour que les efforts de réconciliation aient des effets positifs sur les peuples autochtones. Durant le débat, nous allons insister sur l'utilisation de tels instruments.
Il y a 94 appels à l'action. Ces appels à l'action doivent servir de cadre à la réconciliation.
Toutes les intentions de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones doivent être concrétisées. De nombreux éléments de la Déclaration sont extrêmement pertinents à la réconciliation au Canada. Je veux souligner en particulier l'accent qui est mis sur l'éducation, la santé et la sécurité sociale et économique. À l'article 21, on peut lire:
Les peuples autochtones ont droit, sans discrimination d’aucune sorte, à l’amélioration de leur situation économique et sociale, notamment dans les domaines [...] du logement, de l’assainissement, de la santé et de la sécurité sociale.
Enfin, un autre instrument sur lequel on devrait s'appuyer est la décision historique de la Cour suprême dans l'affaire concernant la nation haïda. Selon cet arrêt déterminant, la réconciliation doit être mise en place honorablement. Je cite l'arrêt Haïda:
La question décisive dans toutes les situations consiste à déterminer ce qui est nécessaire pour préserver l’honneur de la Couronne et pour concilier les intérêts de la Couronne et ceux des Autochtones.
J'ai essayé de répondre à mon ancienne enseignante qui a communiqué avec moi. J'étais tellement touchée que mon souvenir de l'ingérence du gouvernement, oublié depuis longtemps, soit bel et bien réel. C'était il y a tellement longtemps que je m'étais demandé si ce n'était pas un souvenir que j'avais inventé.
Je prends maintenant la parole devant les députés en tant que représentante élue des gens du Nunavut. En tant que députée autochtone, avec mon expérience et ma voix uniques, je suis ici parmi les députés en tant qu'égale. Je souhaite que nous soyons les parlementaires qui mettront fin à la privation des droits des peuples autochtones, qui les respecteront et les protègeront, et qui gouverneront en fonction des forces des Autochtones.
En créant ce conseil, le gouvernement fédéral doit mettre en œuvre ses recommandations. Avec un plan et un processus clairs, le Canada peut commencer à cheminer dans une nouvelle direction, en reconnaissant les torts du passé et en cherchant à rendre justice pour l'avenir...
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Madame la Présidente, je tiens à remercier ma collègue, la députée de , d'avoir exprimé ce qui me semble être un message très important pour tous les parlementaires.
En ce qui concerne ce dossier, je comprends le gouvernement et même l'opposition officielle. Tenter de comprendre les peuples autochtones, qui sont si peu représentés dans cette enceinte, et la façon de légiférer pour obtenir de meilleurs résultats est un sujet particulièrement difficile. C'est une situation profondément paradoxale.
Lorsque j'ai été élu pour la première fois, je savais, après avoir occupé le poste de directeur national des Métis de l'Alberta, que mon expérience à ce titre influencerait à bien des égards mon travail ici. La conclusion à laquelle je suis parvenu, au moment de décider si ma présence ici serait en fait bénéfique pour les peuples autochtones, je la dois à ce que j'ai appris des sans-abri d'Edmonton Griesbach. Il s'agit du concept de réduction des méfaits, selon lequel pour chaque forme de violence ou d'oppression que cette institution peut commettre et qui peut avoir des répercussions sur les gens, il est également possible de limiter sa capacité de nuire.
D'où je viens, en Alberta, c'est exactement ce qui s'est passé. En un mot, je suis né dans un petit village appelé l'établissement métis de Fishing Lake. C'est un endroit unique au Canada. C'est le seul endroit au Canada où les Métis ont toujours une assise territoriale. Je tiens à souligner, en réponse à un des commentaires du député de l'opposition officielle, que les Autochtones n'ont pas été consultés à ce sujet et qu'il n'est pas prévu qu'ils le soient, ce qui constitue un énorme signal d'alarme.
Cependant, revenons à la question qui nous occupe. Les Autochtones considèrent qu'arriver à réduire l'impact unilatéral que peut avoir le Parlement sur les différentes nations au pays est une bonne chose. Par conséquent, lorsque je suis finalement arrivé à la conclusion que venir ici était la bonne décision, c'était pour comprendre ce message et le communiquer aux autres parlementaires, par votre entremise, madame la Présidente: nous avons un rôle à jouer. Il ne suffit pas d'édicter des lois et de gouverner; nous avons la responsabilité de réduire les méfaits dont nous connaissons l'existence.
Cette mesure législative est importante parce que c'est ce qu'elle cherche à faire. En présentant ce projet de loi, le gouvernement répond à une demande formulée depuis très longtemps par bon nombre de survivants et de nations autochtones, et inscrite dans les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation. Je félicite sincèrement le gouvernement d'avoir présenté le projet de loi. Cependant, à bien des égards, je suis d'accord avec les nombreux intervenants qui ont critiqué le projet de loi, dans sa forme actuelle, et souligné ses lacunes.
Je pense notamment au fait que le gouvernement pourrait unilatéralement, à la discrétion du ministre, nommer deux des membres du conseil parce que c'est ce qu'il juge approprié. C'est extrêmement préoccupant quand on songe à la vaste diversité des peuples autochtones au Canada. Aucun organisme ni aucune personne ne peuvent représenter véritablement les intérêts du grand nombre de nations et de peuples autochtones habitant dans notre pays. C'est là une préoccupation majeure que le gouvernement actuel devrait, à mon avis, être prêt à régler.
Ce que j'ai entendu de la part du gouvernement aujourd'hui, c'est qu'il est disposé, par la voie du comité, à écouter ces éléments très importants présentés par l'opposition officielle et le Nouveau Parti démocratique. Il est important que nous comprenions que la consultation, lorsqu'elle est mal faite, crée une génération de personnes qui se sentent exclues. Je conseille donc vivement au gouvernement de ne pas reproduire les systèmes qui ont exclu les gens pendant si longtemps.
J'invite le ministre à venir en Alberta et à demander la permission aux peuples autochtones de toutes les provinces, à leur demander ce que signifie pour eux un organisme national chargé de la mise en œuvre des appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation, et à le faire d'une manière publique et transparente, afin que les Canadiens puissent se joindre à la conversation. À l'heure actuelle, tout cela se passe à huis clos. Les Canadiens ne savent pas ce qui se passe, à l'instar de nombreux Autochtones.
Je sais que mon temps de parole est limité et que j'aurai plus tard une autre occasion de m'exprimer à ce sujet. Je veux simplement m'assurer que nous pourrons faire ce travail au comité. J'encourage le gouvernement à travailler avec les députés de l'opposition pour y parvenir.