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SINT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON INTERNATIONAL TRADE, TRADE DISPUTES AND INVESTMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

SOUS-COMITÉ DU COMMERCE, DES DIFFÉRENDS COMMERCIAUX ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 11 février 1999

• 1122

[Traduction]

La présidente (Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.)): Mesdames et messieurs, j'aimerais ouvrir la séance.

Nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Ceci est notre première réunion, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, portant sur l'examen des intérêts prioritaires du Canada dans le processus de création d'une ZLÉA. Nous sommes ravis d'accueillir Claude Carrière, qui est le directeur de la Direction des droits de douane et de l'accès aux marchés, et Kathryn McCallion, sous-ministre adjointe, Affaires internationales et affaires consulaires, qui préside également la délégation canadienne auprès de la ZLÉA.

Soyez les bienvenus et merci d'être venus.

Mme Kathryn McCallion (sous-ministre adjointe, Affaires internationales et affaires consulaires, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, madame la présidente.

Bonjour aux membres du comité. J'ai cru comprendre que vous aimeriez que je fasse un exposé court et que le meilleur usage de votre temps précieux serait pour nous de répondre à vos questions. Claude et moi serons ravis de vous répondre.

[Français]

C'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions après une brève introduction.

[Traduction]

Si vous avez rencontré M. Fried et divers autres membres du ministère, vous serez peut-être légèrement déroutés; vous vous demanderez quel est mon rôle, puisque je serais plus susceptible de venir parler des affaires internationales d'Équipe Canada Inc. On ne me voit presque jamais en public traiter des affaires consulaires. J'essaie de travailler dans l'anonymat. Mais ceci est presque pour moi une activité résiduelle, et elle résulte des efforts du ministère d'utiliser efficacement ses ressources sous le régime de ce que nous appelons la gestion de matrice.

J'ai été initialement nommée SMA pour l'Amérique latine juste à temps pour accompagner le premier ministre Chrétien au sommet de Miami en 1994, et c'est là qu'a été lancé tout ce processus de négociation d'une zone de libre-échange des Amériques. Le Canada s'y est engagé politiquement depuis longtemps et, au niveau des fonctionnaires, nous avons abattu beaucoup de travail dans les coulisses. Lorsque le Canada a été élu président des négociations au Costa Rica, j'étais chef d'équipe dans ce domaine depuis déjà pas mal de temps et, bien que j'aie changé de poste au sein du ministère, on a décidé que je conserverais cette activité et serais présidente.

Claude est dans ce que nous appelons la direction E, qui est le groupe de M. Fried. C'est un seul et même groupe qui fait le travail d'élaboration des politiques dans les coulisses. Nous ne voulons pas engendrer la confusion dans vos esprits et vous donner à penser que l'élaboration des politiques est le fait de groupes séparés au sein du ministère des Affaires étrangères. Ce n'est pas le cas. Les choses sont très claires. Nous chantons tous le même air, du moins je l'espère.

• 1125

Je vous ai distribué un petit document. J'ai pensé le passer en revue assez rapidement pour ensuite, comme je l'ai dit, répondre à vos questions.

La Zone de libre-échange des Amériques est l'objet de négociations commerciales exhaustives. Elle recouvre 34 pays démocratiques de l'hémisphère. Ce qualificatif signifie, naturellement, que Cuba, qui est le 35e pays de l'hémisphère, n'est pas actuellement partie prenante au processus.

La Zone de libre-échange des Amériques était le point de mire du sommet de Miami en 1994, le libre-échange et l'intégration économique étant considérés comme un moyen d'assurer le développement durable de l'hémisphère et d'appuyer le récent mouvement vers la démocratisation. Je pense que ceux d'entre vous qui suivez les développements en Amérique latine savent que ce n'est que depuis peu que nous pouvons qualifier les pays d'Amérique latine de plus ou moins démocratiques, après des années de dictatures militaires, de guerres civiles et de troubles.

Par ailleurs, le libre-échange et l'intégration économique étaient perçus également comme un moyen de réduire la dépendance de la région vis à vis de l'aide extérieure. Étant donné que notre budget d'aide est limité, il est très important pour le Canada de collaborer avec certains des pays—en particulier les pays des Caraïbes membres du Commonwealth et ceux d'Amérique centrale—et de les aider à devenir des États plus mûrs et plus économiquement viables. À cette époque, nos crédits d'aide et ceux des États-Unis, en particulier, faisaient l'objet de compressions ou étaient réorientés vers d'autres régions du monde telles que la Russie.

Les négociations officielles ont été lancées par les chefs de gouvernement et d'État, dont le premier ministre Chrétien, au sommet de Santiago en avril 1998. En réalité, c'était l'aboutissement de quatre années de travail. Nous avions commencé notre travail à Miami et avons travaillé quatre ans au sein de groupes de travail et de réunions annuelles des ministres du Commerce.

L'une des meilleures décisions que les dirigeants aient prises à Miami, à mon sens, était de charger leurs ministres du Commerce de se réunir annuellement. Cet engagement des ministres a créé une dynamique qui obligeait les fonctionnaires à avancer. Nous passions les six premiers mois de chaque année à négocier entre nous et les six derniers mois à dire que les ministres attendaient des résultats et qu'il nous fallait réellement progresser. C'était l'une des motivations qui ont fait avancer les choses. Le Canada a toujours participé à ces réunions au niveau du ministre du Commerce, sauf une année où nous étions en période électorale.

Les principes et objectifs de la Zone de libre-échange des Amériques sont les suivants: l'accord doit être équilibré mais global; il doit être conforme à l'OMC et il sera l'objet d'un engagement unique de la part de tous les pays. À un certain stade nous pourrons discuter des souhaits de certains petits pays qui aimeraient avoir certains avantages tout de suite et payer leurs obligations plus tard. Certains aimeraient les avantages mais sans jamais accepter d'obligations. Ce que nous entendons par engagement unique est que, même s'il y a un étalement dans le temps des échéances, en fin de compte tout le monde doit s'engager globalement. Les petites économies comprennent le concept.

Les membres du MERCOSUR vous diront qu'un engagement global signifie pas d'accord ponctuel tant qu'un traité global—pas d'accord ponctuel ni d'accord provisoire dans l'intervalle. Je reviendrai là-dessus plus tard, mais ce n'est pas exactement ce que nous entendons par engagement unique. Cela, c'est l'interprétation donnée par les pays du MERCOSUR pour des raisons politiques qui leur sont propres.

Nous poursuivons deux échéances qui résultent de la décision des dirigeants. La première est que des progrès concrets doivent être réalisés d'ici l'an 2000. Si vous voulez savoir à quel point les fonctionnaires s'amusent lorsque vous ne les surveillez pas, je peux vous dire qu'il y a eu un débat sur la question de savoir si l'an 2000 est le 1er janvier 2000 ou le 1er janvier 2001, car l'accord initial dit: «Avant le tournant du siècle». Le Canada a choisi 2000 pour rendre les choses plus claires.

Initialement, il devait y avoir des accords provisoires d'ici l'an 2000, c'est-à-dire que si nous parvenions à nous entendre sur certains éléments plus faciles, ces accords auraient pu entrer en vigueur en attendant l'accord global. Mais en l'absence de procédure accélérée aux États-Unis, les ministres ont décidé à leur dernière réunion au Brésil, à Belo Horizonte, de ne pas viser d'accord provisoire. Nous recherchons réellement des progrès discernables. Tout doit être fini d'ici 2005.

Pourquoi le Canada est-il tellement engagé dans la ZLÉA? Pourquoi faisons-nous cela? Parce que nous considérons qu'il y a là une perspective énorme de croissance et de création d'emplois pour le Canada et les entreprises canadiennes.

• 1130

D'ici 2000, l'Amérique latine et la région Caraïbe compteront une population de 500 millions d'habitants, avec une moyenne d'âge située entre 17 et 21 ans, soit le début de l'âge de la consommation, et 50 millions de personnes à revenu moyen et élevé, et un PIB de 2 trillions de dollars US.

Évidemment, il faut constamment revoir ces prévisions. Il y a eu un ralentissement économique, mais nous ne pensons pas pour le moment que le potentiel à long terme soit menacé, tout en reconnaissant l'existence d'un choc conjoncturel.

L'Amérique latine représente déjà un débouché majeur pour les biens et les investissements canadiens. Si l'on exclut nos partenaires de l'ALÉNA—les États-Unis et le Mexique—les exportations ont dépassé 5 milliards de dollars et l'investissement a atteint 25,8 milliards de dollars en 1997. Nous pensons qu'un accès sûr et stable à ces marchés est clairement avantageux pour les entreprises canadiennes.

En ce qui concerne la structure des négociations—je ne sais pas dans quelle mesure cela vous intéresse—il y a une conférence ministérielle annuelle. Les ministres sont clairement le négociateur en chef de chaque pays, mais ils ont désigné ce que nous appelons des vice-ministres, des sous-ministres. Dans le cas du Canada, je suis le vice-ministre ou sous-ministre.

En dessous du groupe des vice-ministres, qui se réunissent à intervalles réguliers et ont maintenant pris le nom de Comité des négociations commerciales, nous avons neuf groupes de négociation couvrant des sujets particuliers: accès au marché, agriculture, marchés publics, services, politique de concurrence, subventions, anti-dumping et droits compensateurs, investissement, droits internationaux de propriété intellectuelle et, enfin, règlement des différends.

La seule anomalie, qui est un secteur plutôt qu'un sujet, est l'agriculture, mais je suis sûre que vous savez tous pourquoi et comment cela est arrivé.

Trois groupes spéciaux s'occupent de dossiers intersectoriels, soit le Comité des représentants gouvernementaux pour la participation de la société civile, une initiative canadienne; le Comité mixte d'experts des secteurs public et privé sur le commerce électronique, dont le mandat est de conseiller la conférence ministérielle canadienne sur l'opportunité et les modalités d'une négociation sur le commerce électronique dans le contexte d'une négociation commerciale; et, troisièmement, le Groupe consultatif sur les petites économies, qui a en quelque sorte un rôle de protecteur des petites économies.

Nous sommes tous membres de ce dernier groupe, mais son mandat est d'assurer que les petites économies ne soient pas oubliées dans l'un ou l'autre des neuf groupes de négociation. C'est un comité horizontal.

Les négociations sont articulées selon les recommandations formulées par les ministres à San José, au Costa Rica, l'an dernier. Le ministre Marchi nous y représentait.

Pour ce qui est de la portée des négociations, les points à l'ordre du jour englobent: les barrières traditionnelles; les barrières non tarifaires; la réglementation du commerce des services; la concurrence; le commerce et l'investissement; et, enfin, les marchés publics.

Notre rôle au cours des derniers mois a été de gérer le processus en prévision de la conférence ministérielle sur le commerce qui se tiendra à Toronto en novembre 1999. Nous espérons pouvoir nous entendre sur les grandes lignes de l'accord. L'accent sera mis—en rapport avec les progrès à réaliser d'ici l'an 2000—sur la facilitation du commerce: pouvons-nous trouver des domaines dans lesquels les conditions d'échange dans l'hémisphère peuvent être améliorées, des domaines ne faisant pas l'objet de négociations détaillées? Ensuite, comment améliorer la participation de la société civile, un élément intégrant à nos yeux de tout le processus?

Jusqu'à présent, le processus de consultation à l'intérieur de la structure de la ZLÉA—qui est différent de la tentative canadienne—le Sous-comité de la société civile a lancé «une invitation ouverte à la société civile des pays participant à la ZLÉA» C'est sur le site Web. Il y a deux sites Web, le nôtre et le site Web officiel de la ZLÉA à Washington. Les sociétés civiles ont été invitées à soumettre des interventions, à condition qu'elles soient axées sur les affaires commerciales.

En effet, il faut bien faire passer le message qu'il s'agit là d'une négociation commerciale. Bien que nous soyons ouverts à ce que certains dossiers sociaux soient reliés aux négociations commerciales, la faculté des négociateurs de résoudre des problèmes sociaux est très limitée, et le danger est donc que si l'on entame un débat de très large portée, les participants en sortent déçus parce qu'ils pensaient faire partie d'un processus de concertation. L'incapacité d'offrir des solutions à certains dossiers devient alors très négative.

Ce n'est pas une très forte préoccupation au Canada, mais c'en est une énorme dans la plupart des pays en développement. Ils sont très réticents à ouvrir les vannes au déballage de tous les maux sociaux de leurs sociétés, alors que, selon leur optique, leurs négociateurs s'efforcent surtout d'obtenir accès au marché américain.

• 1135

Le processus de consultation est donc assez sensible. Je dirais qu'il y a presque 34 sensibilités. Il y a 34 pays et chacun d'eux a sa propre conception du mécanisme de consultation.

Pour ce qui est de nos consultations internes, vous en êtes l'un des éléments clés. Il y aura une réunion le 17 février du ministre Marchi avec les ministres du Commerce provinciaux où les modalités du processus seront mieux définies. Il y a aussi les GCSCE par le biais desquels, secteur par secteur, le gouvernement consulte le secteur privé. Ensuite, la question est de savoir comment joindre cette société civile.

La facilitation du commerce, qui sera l'un des principaux points à l'ordre du jour de Toronto, a été abordée au Suriname, lors de la dernière réunion au niveau des vice-ministres. Les participants en sont encore à cerner les possibilités. Les milieux d'affaires nous ont transmis un ensemble d'idées. Les réunions des ministres du Commerce sont généralement accompagnées d'un forum des entreprises. Ces dernières années, ces forums nous ont fait part de leur souhait concernant l'orientation des négociations, mais surtout de leurs idées sur ce que les gouvernements pourraient faire pour faciliter le commerce.

Certains des dossiers qui ne font pas directement l'objet de négociations mais sur lesquels les gouvernements devraient se pencher ont été regroupés sur une liste par le comité tripartite composé de la Banque mondiale, de la Banque de développement inter- américaine de l'OÉA—l'Organisation des États américains—et de la CEPAL, qui est la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes dans la structure des Nations Unies. Ce comité assure tout le travail de secrétariat dans les coulisses. Il a dressé cette liste qui comprend 235 points. Il cherche à la ramener aux éléments réalisables, et le domaine dans lequel se situent le plus grand nombre de possibilités est celui des douanes et des passages de frontières. Ce sera donc le point focal: une meilleure coopération douanière.

Qu'avons-nous réalisé jusqu'à présent?

Les pourparlers durent depuis pas mal de temps. Premièrement, j'ai mentionné le comité tripartite. Ces trois organisations avaient des mandats similaires mais non identiques et ne travaillaient pas exactement de manière concertée. Je suis ravie de dire que leur capacité de collaborer m'a étonnée. Elles cofinancent des projets, elles ont chacune délégué un groupe de personnes qui travaillent collectivement. Seul un bureaucrate peut vous dire que la coopération entre des institutions est une chose positive, mais de fait, ce sont là des institutions qui aident ces pays et qui ont maintenant des objectifs similaires en matière de commerce et de préparation au commerce.

Il y a eu également d'importants travaux préparatoires, avec la collecte de beaucoup de données. Là où nous manquions de données auparavant, nous pouvons maintenant travailler en bien meilleure connaissance de cause.

Ensuite, les réseaux dans la région n'étaient pas aussi développés qu'on aurait pu le penser vu que ces pays sont tous hispanophones. Mais grâce aux réunions que nous avons tenues, si vous êtes un homme d'affaires, par exemple, et que vous avez un problème d'accès au marché en Bolivie, Claude connaît maintenant le prénom de la personne responsable en Bolivie et peut l'appeler. Des quantités d'appels téléphoniques sont échangés. Je reçois sans cesse des appels téléphoniques de mes collègues sur toutes sortes de sujets. Le seul fait de faire connaissance et d'oeuvrer pour un objectif commun représente une très forte incitation à coopérer. Encore une fois, cela se passe dans les coulisses. On n'en parle pas dans les journaux. Mais je pense que cela permet de mieux connaître les autres pays de l'hémisphère et d'aplanir les difficultés.

Enfin, dans tout l'hémisphère, on commence à mieux saisir la politique commerciale et la raison d'être des négociations sur l'ouverture des marchés, tant au niveau subrégional qu'au niveau national. Nous offrons des cours à l'Université Carleton et dans divers autres établissements pour aider les négociateurs commerciaux des Caraïbes et d'Amérique centrale. Ils deviennent ainsi mieux à même de négocier pour leur compte, tant avec nous que dans le contexte de l'Organisation mondiale du commerce. Il faut construire le bâtiment brique à brique.

Pour ce qui est de l'état d'avancement des négociations, nous sommes sur la bonne voie, mais nous n'en sommes réellement qu'au début du processus. La première série de réunions est achevée, la deuxième est en train. De fait, je crois que nous nous réunissons chaque jour jusqu'à la réunion des ministres, sauf les fins de semaine, les fêtes nationales et les festivals religieux, comme Pâques, dont nous parlions à mon arrivée dans la salle. Quelqu'un veut une réunion le lundi de Pâques.

• 1140

La troisième réunion aura lieu en Bolivie pendant l'été. Nous avons suspendu la réunion au Suriname parce que nous n'étions pas parvenus à une entente sur la facilitation du commerce, et c'est pourquoi en avril, à Miami, il y aura une réunion intérimaire au niveau des vice-ministres pour voir si nous pouvons faire avancer les choses.

Des défis très réels nous attendent. Il y a évidemment celui que vous connaissez tous: les négociateurs américains n'ont pas la procédure accélérée et sont peu susceptibles de l'obtenir à court terme.

Nous sommes obligés de réaliser quelques progrès concrets d'ici 2000, ce qui sera un signal pour les milieux d'affaires. Ce ne sont pas des négociations auxquelles les bureaucrates se livrent pour le plaisir. Il s'agit de réellement améliorer la croissance économique dans l'hémisphère et les milieux d'affaires nous observent et demandent: «Va-t-on voir une lumière au bout du tunnel à court terme?»

Il faut également considérer les cycles électoraux. Chaque jour de la semaine un pays déclenche des élections ou sort d'une élection, et les priorités des gouvernements changent. Par exemple, on s'inquiète en ce moment de l'Argentine, qui copréside avec le Canada et organisera la prochaine réunion ministérielle: l'un des candidats au poste de Menem n'est pas très enthousiaste sur le libre-échange. Quels effets cela aura-il? Que pensera le prochain président américain? Etc...

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Nous connaissons ce problème ici.

Mme Kathryn McCallion: Un autre défi réside dans la taille et le niveau de développement économique inégaux des participants. À une extrémité de l'éventail, vous avez les États-Unis, le marché le plus sophistiqué du monde et, à l'autre, vous avez Haïti, où l'on dit: «Le marché? Qu'est-ce que c'est?» Il faut vraiment tenir compte de cela.

Un autre défi encore sont les priorités concurrentes en matière de politique commerciale. Le Mexique court dans tous les sens à négocier avec l'Europe et le MERCOSUR, le MERCOSUR court de négociations avec le Chili en pourparlers avec la Bolivie, le Canada est engagé avec l'AELE, etc. et tout le monde est partie prenante à l'OMC. Il faut décider de son niveau de priorité.

Enfin, comme je l'ai mentionné, la crise financière mondiale a un impact énorme. Si vous lisez les journaux, vous saurez que les problèmes au Brésil retentissent considérablement sur le MERCOSUR—et le MERCOSUR est un joueur majeur dans cet exercice.

Nous restons très confiants dans l'Amérique latine et les possibilités. Nous pensons que le processus sera long et délicat, mais nous pensons que nous sommes bien partis. Le secrétariat à Miami est géré par un Canadien et nous en sommes très fiers. Les choses sont lancées. Je sais que dans l'ordre des choses... Démarrer était considéré comme difficile il y a quelques années, mais les négociations ont été entamées à Miami.

Voilà pour ce qui est de mon exposé. Je serai ravie de répondre à vos questions, de même que M. Carrière.

La présidente: Merci beaucoup.

Monsieur Penson.

M. Charlie Penson: Je veux souhaiter la bienvenue à Mme McCallion. Nous avons entendu M. Carrière plus tôt ce matin. Je veux simplement vous féliciter d'avoir entrepris ce processus. Il me semble que c'est un défi énorme. Je me demande parfois si ces négociations peuvent aboutir, mais je pense néanmoins qu'il vaut la peine d'essayer.

J'ai plusieurs questions, cependant. En ce qui concerne les neuf groupes de négociation, je suppose que le plan est d'aller au- delà de ce qui se fait actuellement à l'Organisation mondiale du commerce. Je suppose que la plupart de ces pays sont membres de l'Organisation mondiale du commerce. Voilà donc ma première question: le but est-il de négocier des ententes allant au-delà du processus actuel de l'OMC, sur le plan de l'accès aux marchés, des marchés publics etc.?

Deuxièmement, je ne saisis pas encore très bien cette notion d'engagement unique et j'aimerais des explications. Est-ce que cela signifie que nous aurions un accord avec 34 pays, mais que certains signeraient pour adhérer à une date ultérieure et devraient répondre pour cela à des critères, tout comme c'est le cas à l'OMC en ce moment? Cela signifie-t-il que les pays ne seraient pas adhérents tout de suite? Vous pourriez peut-être nous expliquer comment cela pourrait fonctionner.

Mme Kathryn McCallion: Votre première question est de savoir en quoi la Zone de libre-échange différerait des obligations prévues dans l'accord de l'OMC? Ce peut être une question de chronologie en ce sens que certains objectifs de démantèlement des barrières douanières ou d'amélioration de l'accès aux marchés seraient réalisés plus rapidement—ou bien les obligations seraient supérieures.

• 1145

À l'origine, lorsque nous envisagions cette négociation, l'objectif du côté américain et canadien était d'avoir un accord de type ALÉNA à la dimension de l'hémisphère. L'ALÉNA impose des obligations très rigoureuses dans certains domaines, davantage que celles de l'OMC. Nous nous sommes laissé convaincre d'aborder cela selon une optique assez différente, celle du MERCOSUR. Si vous vous souvenez, j'ai parlé de la démarche brique à brique—le MERCOSUR étant transformé petit à petit en Zone de libre-échange sud- américaine, si bien que l'on aurait alors l'ALÉNA contre l'ALÉSA qui deviendraient rivaux.

Les négociateurs ont estimé, après réflexion, que cela ne marcherait pas, qu'il fallait viser un accord amélioré, avec des améliorations par rapport à l'OMC, mais néanmoins reposant sur cette assise. Ce n'est pas dirigé contre l'OMC; il s'agit simplement de voir si nous pouvons nous entendre sur des niveaux d'obligations supérieurs ou si nous pouvons obtenir le même niveau d'obligations mais avec une prise d'effet plus rapide. Voilà le concept.

Pour ce qui est de la deuxième question concernant l'engagement unique, nous pourrions probablement, par exemple, nous entendre sur l'investissement en l'espace d'un an. Les réunions de la semaine dernière sur les marchés publics se sont très bien passées. Il n'y a pas d'accord imminent, mais il y a toujours l'espoir que l'on puisse conclure des accords élémentaires dans certains domaines. La probabilité de s'entendre sur l'agriculture dans le même délai est très mince. La notion d'engagement unique signifie que, quelle que soit la rapidité avec laquelle on s'entend sur les éléments individuels, l'accord final représente un tout: «Voici l'accord, et il englobe tous ces éléments».

Là où il y a eu quelques dissensions était sur la question de savoir si ces accords préliminaires pourraient prendre effet à titre d'accords intérimaires. Il a été décidé d'attendre jusqu'à ce que nous ayons l'ensemble des mesures, alors que les petits pays disent qu'ils pourront finir par s'aligner, mais qu'ils aimeraient un délai d'entrée en vigueur différentiel.

Supposons que l'on s'accorde pour réduire les tarifs douaniers sur un produit donné. Ils aimeraient un délai de 28 ans ou 400 ans. Dans le cas des Caraïbes, au moins trois des grandes îles n'ont pas du tout d'impôt sur le revenu, si bien que toutes les recettes publiques proviennent des droits de douane perçus à la frontière. La suppression des tarifs douaniers d'ici 2005 leur pose un dilemme: que font-ils pour remplacer les recettes perdues? Ils vont finir par le faire, nous assurent-ils, mais ils demandent un délai plus long. C'est cela l'argument du traitement différentiel, n'est- ce pas? Une plus grande clarté...

M. Charlie Penson: Je pourrais peut-être intercaler une autre question. Je crois savoir que, pour commencer, certains de ces pays ont du mal à respecter leurs obligations en vertu de l'OMC...

Mme Kathryn McCallion: Certes.

M. Charlie Penson: ...sans même parler d'obligations supérieures.

Mme Kathryn McCallion: Oui.

M. Charlie Penson: Vous parliez de la question de savoir si ce sont des démocraties ou non. Dans certains cas, c'est contestable.

Comment allons-nous faire marcher tout cela s'il n'y a pas de très bons systèmes de droit civil dans certains de ces pays? C'est bien joli de dire qu'il y aura un code des subventions etc., mais comment pourra-t-on le faire respecter dans la pratique? Comment ces normes seront-elles appliquées?

Mme Kathryn McCallion: Pas facilement, mais je pense que l'une des choses que nous visons, presque à titre de facilitation du commerce ou de signe de progrès d'ici l'an 2000, est que tous les pays respectent leurs obligations en vertu de l'OMC. Nous nous sommes heurtés à quelques obstacles, mais ce serait un signe de progrès.

M. Charlie Penson: Oui.

Mme Kathryn McCallion: C'était et cela reste une considération.

Ce sera difficile, cela ne fait aucun doute. L'une des raisons pour lesquelles le Canada, par le biais de l'ACDI, offre ces cours sur la négociation commerciale est pour que les gouvernements comprennent bien qu'il ne suffit pas de signer un accord, qu'il y a une obligation de le mettre en oeuvre au fil du temps, ce qui ne semble pas toujours très bien admis.

On nous demande parfois s'il n'est pas plus facile de négocier avec quelqu'un qui ne sait pas se débrouiller, et on pourrait répondre: «Oui, nous pourrons leur faire signer n'importe quoi», mais la vraie réponse est: «Non, pas du tout», car il ne sert à rien d'avoir un accord sur papier si les signataires ne sont pas prêts à le mettre en oeuvre.

M. Charlie Penson: J'ai une dernière question sur le volet société civile. Sur le plan national, il y aura les consultations que nous entreprenons, mais dites-vous que la ZLÉA a des sites Web encourageant le public dans les autres pays à exprimer des idées, c'est-à-dire que vous ne vous en remettez pas aux gouvernements nationaux pour expliquer de quoi il retourne?

Mme Kathryn McCallion: C'est justement le sujet du débat. Il y a une scission dans l'hémisphère entre ceux qui préconisent l'ouverture et la transparence et ceux qui craignent de susciter des problèmes.

• 1150

Certains pays hésitent beaucoup à faire cela de manière transnationale. Ils disent qu'ils ont leur propre processus national et qu'il leur appartient, en tant que gouvernements, d'arriver aux négociations et de nous assurer qu'il y a eu un débat à l'intérieur de leurs frontières pour expliquer la problématique. D'autres estiment qu'il est sain d'ouvrir le processus et d'encourager un dialogue à travers les frontières entre les éléments de nos sociétés.

Par conséquent, nous avons convenu jusqu'à présent d'accepter des prises de position de divers éléments de la société à l'intérieur de l'hémisphère, positions exprimées sur site Web de la ZLÉA administré par le comité tripartite à Washington.

Nous n'en sommes pas encore au niveau d'un dialogue. Le Canada aimerait répondre à ces interventions, mais il y a plusieurs positions divergentes. Certains pays n'ont pas l'intention de répondre. Ils disent que nous pouvons leur envoyer tout le courrier, mais... le site du MAECI s'adresse aux Canadiens, pour qu'ils puissent nous parler à nous.

Je devrais vous dire que nous nous réunissons dans le cadre du processus de la ZLÉA avec Dick Martin et un groupe élargi, depuis trois ans maintenant, depuis avant Belo Horizonte. Je les rencontre régulièrement avant d'aller à une réunion et je les tiens au courant après chaque réunion. Le groupe n'est pas composé seulement de syndicalistes. Il y a également des représentants de groupes écologistes et divers autres. C'est encore à un stade très préliminaire. Il y a habituellement 14 personnes dans la salle et je fais la même chose que ce que je fais avec vous: je parle et je parle et puis je m'en vais.

Des voix: Oh, oh!

La présidente: Je vous remercie.

Monsieur Sauvageau.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Madame McCallion et monsieur Carrière, je vous remercie de vos explications. J'aimerais vous poser quelques questions, dont la première s'enchaîne à celle que vous posait M. Penson au sujet de la la société civile. On a créé un comité de représentants gouvernementaux. Serait-il inopportun de ma part de m'enquérir de l'état de ce dossier? Serait-il possible, à l'heure actuelle, de connaître son orientation et d'obtenir un rapport préliminaire de l'ensemble des représentants de cette société civile?

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Le comité ne s'est réuni qu'une fois. Il s'est disputé pendant deux jours à Miami. Le mieux que nous avons pu faire—car le Canada est l'un des pays qui poussent le plus pour ouvrir ce processus—est cette invitation.

Lorsque j'ai parlé la dernière fois à la personne chargée de compiler les interventions, il n'y en avait que deux. L'une émanait de notre ami du CCNE, Tom d'Aquino. C'était un discours qu'il avait prononcé en public au Canada. Pour ce qui est de la deuxième, lorsque nous étions au Suriname, j'ai rencontré les artisans et ébénistes du Suriname lors d'un petit déjeuner. Ils ont fait un exposé qu'ils ont maintenant envoyé à Washington.

Est-ce tout, Claude?

M. Claude Carrière (directeur, Direction des droits de douane et de l'accès aux marchés, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Je pense qu'il y en a davantage maintenant.

Mme Kathryn McCallion: Ah oui?

Nous savons que les Américains cherchent à encourager la présentation d'un plus grand nombre de mémoires collectifs. Le mécanisme consiste à en faire une synthèse, à les évaluer et à faire un rapport aux ministres. Les ministres en feront quelque chose ou décideront de faire quelque chose lors de la réunion de Toronto en novembre.

Pour le moment, rien n'a été fait d'autre que de recevoir ces avis. Je serais ravie de vous faire parvenir toutes les communications que nous aurons. Je n'ai aucun problème avec cela. D'autres pays de l'hémisphère ne veulent pas que ces documents soient rendus publics par la ZLÉA, alors que si Tom d'Aquino a prononcé un discours, il est déjà du domaine public de toute façon. Nous—la délégation canadienne—n'avons pas cette réticence et serons ravis de transmettre au comité toutes les communications que nous recevrons. Mais il y aura des sensibilités dans l'hémisphère.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Je vous remercie.

Lequel des neuf groupes de négociation étudierait la question de l'exemption culturelle? Est-ce qu'on en a déjà discuté?

Mme Kathryn McCallion: Non, pas à ce jour.

M. Claude Carrière: Le comité de négociation commerciale, le comité chapeau, traite de toutes les questions, y compris celles qui ne sont pas reprises par les groupes de négociation. Ni le Canada ni quelque autre pays n'ont soulevé la question culturelle, bien qu'on ait peut-être discuté de questions connexes dans un groupe ou un autre. La position canadienne est la même partout, que ce soit dans le cadre de l'ALENA, de l'OMC ou de la Zone de libre-échange. Aucun groupe de négociation ne traite de cette question-là en particulier.

• 1155

M. Benoît Sauvageau: Il faudra un jour s'y pencher.

M. Claude Carrière: Oui.

M. Benoît Sauvageau: D'accord.

Pourriez-vous être plus concret quant à la définition de «progrès concret»?

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Oh, oui. Vous me demandez «d'indiquer plus concrètement en quoi consiste un progrès concret». D'accord.

Premièrement, nous sommes régis par une déclaration émise par les chefs de gouvernement à Miami en décembre 1994, avec un président qui était alors très confiant, avant d'être assailli de problèmes. Il pensait réellement que nous aurions la procédure accélérée et des accords entérinés. Ce président, M. Clinton, promettait que le Chili pourrait entrer à l'ALÉNA, que nous aurions le libre-échange dans l'hémisphère et que nous aurions parcouru la moitié du chemin d'ici l'an 2000.

Tous les autres pays disaient: «Nous pensons que 2000 est trop tôt, mais voyons jusqu'où nous pourrons aller d'ici 2000». Ils n'ont rien dit d'autre sinon «nous réaliserons des progrès concrets» avant le tournant du siècle. Étant chefs de gouvernement, ils sont tous partis en nous laissant nous débrouiller pour parvenir à cela. Nous avons commencé avec leurs objectifs. Nous les réduisons peu à peu. Le Canada, par exemple, clamera victoire si le processus seulement démarre.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Lorsqu'on a entamé les négociations, on comptait 34 pays et nous étions optimistes quant à la conclusion d'une entente. Vous avez parlé des élections en Argentine et du fait qu'un des candidats n'était pas chaud à l'idée d'appuyer cette entente. Nous avons vécu une situation semblable ici, lorsqu'il a été question du libre-échange avec les États-Unis et que les libéraux étaient moins chauds qu'ils ne le sont aujourd'hui à l'idée de toutes ces ententes de libre-échange. Ils se sont depuis réchauffés. Qu'adviendrait-il si dans un, deux ou plusieurs États, des leaders élus avant 2005 avaient la ferme intention d'arrêter ce processus de négociation? Est-ce qu'on pourrait continuer à 30 joueurs ou si le retrait de certains joueurs signifierait la fin du processus?

Mme Kathryn McCallion: Nous pourrions poursuivre les négociations avec moins de 34 pays. Bien qu'il y ait actuellement 34 sièges à la table des négociations, tous les pays ne s'intéressent pas aux mêmes points et ne participent pas de façon aussi active aux négociations. J'imagine toutefois que le progrès serait assez lent. Il est assez clair que tout le monde peut rester proche du processus au lieu de s'en absenter complètement, tout en n'étant pas nécessairement très impliqué.

M. Benoît Sauvageau: Prenons l'exemple d'un joueur majeur comme le Brésil et de sa situation financière et électorale.

Mme Kathryn McCallion: Je dois avouer que si le Brésil se retirait, cela changerait beaucoup de choses.

M. Benoît Sauvageau: C'est cela.

Mme Kathryn McCallion: Par contre, il est clair pour le moment que tout le monde entend rester.

[Traduction]

Voici une façon de jauger cela: il n'est pas facile de se rendre au Suriname, et tous les vice-ministres sont allés au Suriname. Nous avons nos petits jalons. Si quelqu'un ne voulait pas y aller, il ne serait pas venu... Ce que les Brésiliens ont réellement dit est qu'ils devraient avancer plus lentement, parce qu'ils doivent gérer le processus à l'échelle nationale, mais ils n'ont pas dit qu'ils quittaient la table.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Ce serait malheureux, mais il est possible que quelques pays se retirent. À cause de la situation financière internationale, il est possible que certains pays demandent, comme le Brésil l'a fait, qu'on retarde le processus. Bien qu'on n'envisage pas une telle possibilité lorsqu'on entame des négociations et qu'il soit mal vu de le dire publiquement, il y a une porte de sortie à laquelle on peut songer si jamais cela ne fonctionne pas: on peut arrêter de négocier. Pourrait-on retarder les négociations jusqu'en 2010, 2025 ou 2050?

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Oui, c'est possible. Les autres décideraient—s'il en reste suffisamment—de poursuivre. La plus grande possibilité est que le groupe décide d'intégrer les négociations à l'OMC.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Par exemple, si des progrès concrets n'étaient pas réalisés d'ici 2000, est-ce qu'on pourrait y voir un premier indice? Est-ce qu'on serait plus optimiste que cela?

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Non. Tout dépend de la manière dont les ministres s'expliqueront à l'issue de la réunion de Toronto.

M. Benoît Sauvageau: D'accord.

Mme Kathryn McCallion: Réellement, ils pourraient ressortir en disant qu'ils ont fixé la barre trop haut et qu'ils vont simplement viser ici au lieu de là—après s'être congratulés sur le travail abattu.

• 1200

Le progrès depuis 1994, lorsqu'ils ne se parlaient même pas entre eux, est réellement exceptionnel. Rétrospectivement, nous avons beaucoup accompli. Si vous regardez l'avenir, peut-être avons-nous fixé un calendrier trop ambitieux ou bien des objectifs d'obligations trop élevés. Rien n'indique que le processus va s'arrêter pour le moment, mais peut-être ralentir, oui.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Merci.

La présidente: Madame Folco.

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): J'aimerais qu'on revienne aux trois groupes spéciaux chargés des dossiers intersectoriels, et en particulier à la participation de la société privée. Comment voyez-vous l'interface entre ces trois groupes spéciaux et les différents secteurs, dont l'agriculture, axés vers les marchés publics? Comment cela fonctionne-t-il?

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Ces trois groupes ne sont pas des groupes de négociation, mais tous les 34 pays sont représentés au sein de chacun. Chaque groupe est différent.

Le plus facile est celui du commerce électronique, qui a été mis sur pied parce que les Américains ont commencé à se préoccuper l'an dernier de voir que l'on commence à réglementer le commerce électronique sans le comprendre. Ce qu'ils recherchaient réellement était un coup d'arrêt, c'est-à-dire l'engagement de ne pas réglementer le commerce électronique tant que l'on n'en a pas discuté.

Ils ont soulevé cela à l'APEC, à l'OMC et à la ZLÉA. Ils n'ont pas trouvé de consensus, pas de soutien. Ils ont obtenu que la question soit étudiée dans le contexte de cette négociation. Nous devrons y revenir à la fin de cette année, à Toronto. Le but du groupe du commerce électronique est de simplement dire que ceci ne devrait pas être sujet aux négociations ou qu'il vaudrait mieux gérer cela à Genève au sein de l'OMC—ou de dire: «Voici ce que nous recommandons». Il s'agit là d'un groupe assez distinct, avec un mandat à très court terme.

Le groupe consultatif sur les petites économies a le mot «consultatif» dans son titre parce qu'il doit sans cesse consulter. Les petits pays, surtout ceux des Caraïbes, craignent beaucoup un malentendu sur l'effet du libre-échange sur leur société. Ils recherchent un degré de compréhension qui n'est normalement pas réalisé dans une négociation commerciale. Nous avons établi ce groupe où ils peuvent exprimer leurs préoccupations et où on peut tenter d'élaborer des programmes d'aide au développement pour les aider à transformer leur économie, mais ce n'est pas une négociation. Nous en sommes tous membres. Le Canada a participé à un niveau assez élevé durant les quatre premières années du processus.

Ce groupe a également pouvoir de rappeler aux groupes de négociation qu'ils ont omis de réfléchir à l'impact sur les petites économies. Bien que nous fassions valoir que leurs craintes seront prises en compte de toute façon par les neuf groupes de négociation, ces pays ne se sentent pas assurés que tous le feront.

Le groupe sur la société civile, pour parler franchement, est en pleine zizanie. Ce n'est pas un groupe avec lesquels les gens se sentent à l'aise. Les ministres ont simplement accepté d'avoir un comité sur la société civile, puis tous sont remontés dans leur avion au Costa Rica, laissant d'autres se dépatouiller avec cela.

À la première réunion à Buenos Aires, nous devions mettre sur pied le comité. Nous devions établir ses règles de procédure et élire un président. Nous n'avons pas réussi à élire de président, si bien que le Canada fait office de président intérimaire de ce groupe. Nous avons échoué—le doigt capricieux du destin—à adopter des lignes directrices sur ce que nous aimerions faire à long terme. La seule chose sur laquelle nous avons pu nous entendre a été cette annonce disant: «Faites-nous part de vos avis».

Plusieurs tentatives ont été faites pour choisir un président. Un Chilien très éminent a offert ses services, mais plusieurs autres pays ont dit que tant que ces lignes directrices—la mission—ne seraient pas arrêtées, ils n'accepteraient pas un président aussi en vue qui créerait toutes sortes d'activités autour de lui.

• 1205

Il est très clair que les fonctionnaires ne parviendront pas à s'en sortir. Il est très clair que ceci devra être discuté à la réunion ministérielle. Nous gardons le processus en marche. Je suis de nature optimiste, mais sur cette question, je n'ai aucun espoir que nous parvenions à un accord à mon niveau.

Mme Raymonde Folco: Mon impression est que la «société civile» est une de ces expressions à la mode—depuis quelques années maintenant—et qu'ils ont voulu faire un geste mais sans trop savoir lequel, et que ce groupe, avec beaucoup de difficulté, essaie de dégager quelques objectifs. Mon impression est qu'ils voulaient faire quelque chose mais sans trop savoir quoi. Est-ce exact?

Mme Kathryn McCallion: Cela ne va même pas jusque-là.

Une voix: Oh, oh!

Mme Kathryn McCallion: Les Démocrates se sont engagés à un dialogue véritable avec les syndicats et les groupes écologistes, comme nous l'avons vu au sujet des accords auxiliaires de l'ALÉNA, et nous sommes en faveur aussi. Il n'y a pas de difficulté du côté américain. La plupart des pays d'Amérique latine considèrent que leurs syndicats et autres groupes leur ont apporté des révolutions par le passé, et ils ne sont pas si sûrs de vouloir dialoguer avec eux à ce stade. Nous avons différents objectifs nationaux en discussion à l'échelle internationale. C'est très difficile.

Le gouvernement mexicain, par exemple, ne veut pas internationaliser les questions de travail. Il veut que cela reste un sujet national. Il ne veut pas de superstructure dans ce domaine.

Vous avez raison: l'expression «société civile» est très intéressante. Certains groupes sont très fâchés—et il y a deux groupes parallèles—que nous ayons été beaucoup plus ouverts et prévenants à l'égard des milieux d'affaires. Lors de chaque négociation il y a eu un forum des entreprises où les gens d'affaires se bousculent pour parler aux ministres. Les groupes parallèles disent: «Le moins que vous puissiez faire est de nous accorder la même chose». Les Canadiens y sont tout à fait disposés, mais la résistance ailleurs est très forte.

[Français]

Mme Raymonde Folco: Ma prochaine question est peut-être un peu plus délicate puisqu'elle porte sur la perception du Canada par rapport aux États-Unis qu'ont les 33 autres pays. On sait qu'il y a une relation ambiguë entre les pays de l'Amérique latine et les États-Unis: on aime et on déteste. On sait aussi que le Canada jouit d'une excellente réputation, bien que sur la scène internationale, il n'ait jamais été vu comme un pays de première envergure, mais plutôt comme un pays de deuxième envergure. Je me demandais quelle était la perception et quel était le rôle de notre gouvernement par rapport à l'ensemble de ces 34 pays.

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: C'est une excellente question. Je suis heureuse que vous l'ayez posée.

Je m'amuse beaucoup, car pour la première fois les Américains travaillent dans un vide politique. Ils ne jouent pas leur rôle habituel. Aussi, avec ce rôle diminué, si vous considérez le globe terrestre avec sa courbature, pour la première fois les Latino- Américains peuvent voir le Canada sans regarder à travers les États-Unis. Ils nous voient, et ils nous voient exactement comme vous l'avez expliqué, honnêtes, droits, volontaires, mais ils voient que nous sommes différents des Américains bien qu'étant membres de l'ALÉNA. Pour la première fois, ils me voient. Je ne suis pas toujours aussi charmante qu'aujourd'hui...

Des voix: Oh, oh!

Mme Kathryn McCallion: ...et ils me voient rabrouant assez méchamment les Américains et leur disant: Nous ne sommes pas d'accord avec vous». Nous avons assujetti les Américains à ce qu'ils considèrent être la partie la plus humiliante du processus: ils doivent négocier sur un pied d'égalité avec 33 égaux, alors que traditionnellement ils négocient toujours bilatéralement pour ensuite collectiviser l'accord.

La raison pour laquelle je suis si positive au sujet du processus est précisément cela: nous avons exigé une table ronde au cours des quatre dernières années, et chacun a un siège et une voix. C'est très frustrant pour les Américains. Nous parviendrons à un accord par consensus. Ils disent: «Il y a consensus et consensus», et nous disons: «Non».

Ce à quoi nous consacrons beaucoup d'énergie et sur quoi nous avons fait beaucoup de progrès est l'implantation de cette perception du Canada, maintenant, car dès l'instant où les Américains auront la procédure rapide, tout va changer, et nous serons relégués à notre place normale.

Mais je pense que nous leur avons donné l'impression qu'ils peuvent nous parler, qu'ils peuvent dire: «Pouvez-vous nous aider à comprendre les Américains? Pouvez-vous leur rabattre le caquet?» J'y vois quelque chose de très positif.

• 1210

Mme Raymonde Folco: J'étais récemment, il y a quelques mois, au Mexique avec une délégation et cela a certainement été mon impression. Mes interlocuteurs mexicains—ce n'était pas une mission commerciale—étaient très désireux de s'adresser à nous sans passer par les États-Unis et de nous voir jouer un plus grand rôle dans les Amériques, particulièrement au Mexique. C'est tout à fait l'impression que j'ai retirée. Est-ce la vôtre également?

Mme Kathryn McCallion: Oui. D'ailleurs, les Mexicains viennent la semaine prochaine pour une réunion ministérielle conjointe et ils viendront avec une grosse délégation de ministres. Ils tiennent réellement à cela.

Sur le plan commercial, notre relation principale est avec les États-Unis—je suis responsable de nos exportations, dont 83 p. 100 vont aux États-Unis—et mon discours n'est donc pas anti-américain; simplement, nous avons là une occasion en or et nous essayons d'en tirer le meilleur profit, mais pas au détriment des Américains. Nous dialoguons avec ces derniers sans arrêt. Je ne voudrais pas que ma légère coloration anti-américaine...

Des voix: Oh, oh!

La présidente: Je vous remercie.

Avant de passer au deuxième tour, je pourrais peut-être juste revenir sur la participation de la société civile. Nous savons qu'il y aura un forum des gens d'affaires avant la réunion ministérielle. Si nous avons en parallèle un groupe de la société civile séparé, n'y a-t-il pas le risque que ces avis ne soient pas transmis aux ministres, et même un danger que toute l'attention des médias soit focalisée sur les récriminations de la société civile? Comment faire pour la faire participer davantage? C'est presque comme si c'était une manifestation parallèle, comme dans le cas de l'APEC, où les ministres se réunissaient et où les ONG se réunissaient, sans que les deux groupes ne se parlent. Comment résoudre ce problème?

Mme Kathryn McCallion: Si je connaissais la réponse, je serais plus célèbre que je ne le suis.

Des voix: Oh, oh!

Mme Kathryn McCallion: Je crois connaître certaines façons de le faire. Tout d'abord, les gens d'affaires ne veulent rien avoir à faire avec la «société civile» et sont réellement très fâchés que nous les ayons mis dans le même sac que la société civile.

Certains d'entre eux, cependant, lorsqu'on s'entretient avec eux, partagent l'avis que j'ai exprimé tout à l'heure: si nous pouvions amener les ONG à se concentrer de façon constructive sur les questions commerciales ou des problèmes qui peuvent être réglés par des négociations commerciales... Elles sont tellement impatientes d'être entendues qu'elles ont tendance à aborder trop de problèmes et de façon trop radicale, si bien que vous vous heurtez à ce mur de résistance des gens d'affaires qui disent: «Oh, ils veulent que nous apportions remède à tous les maux! Pourquoi ne peuvent-ils pas se concentrer sur le sujet?»

Je dirais que la contribution de la «société civile» bénéficierait de l'existence d'un dialogue tel qu'elle puisse comprendre les enjeux et concentrer ses interventions sur des choses concrètes, au lieu de doléances générales.

L'autre moyen est de ne pas se contenter d'écouter, mais de réagir. Nous avons constaté à plusieurs reprises qu'en leur disant quelque chose du genre: «Le gouvernement canadien ne va jamais négocier cela», on n'obtient pas la réaction négative que l'on pourrait craindre. En effet, on a apporté de la clarté. Vous dites: «Voici le problème, voici comment il va être négocié et voici le sujet et ce que vous nous demandez de faire est «hors de la situation», c'est tellement excessif que nous n'allons pas le faire». Du moment qu'ils comprennent, l'indignation retombe assez rapidement.

Une autre chose que je constate est que nous n'avons pas les ressources voulues pour le faire individuellement. Lorsque les ONG se réunissent, leurs doléances collectives l'emportent largement sur leurs contributions. Ils se retrouvent tous dans une salle et la seule chose qu'ils ont en commun, c'est qu'ils n'aiment pas le gouvernement, ce qui est différent d'un dialogue avec chacune individuellement où nous leur demandons leurs avis.

Deuxièmement, nous nous sommes demandés au sein du ministère comment gérer la réunion de Toronto et nous n'avons pas encore trouvé la façon de les englober suffisamment dans tout le processus afin que les ONG ne deviennent pas le groupe «anti», un «groupe de protestation». Cela reste un des problèmes auxquels nous n'avons pas de solution.

La présidente: Très bien. Permettez-moi alors de vous demander ceci: avez-vous des recommandations à faire à notre comité sur la manière dont nous pourrions amener la société civile, dans nos rapports avec elle, à se concentrer sur le sujet? Voyez-vous un rôle pour notre comité et avez-vous des recommandations à cet égard?

Mme Kathryn McCallion: Je ne sais pas trop ce que le comité a décidé ce matin au sujet des tables rondes et des consultations. Vous m'avez demandé des documents. Nous avons décidé qu'il nous fallait être assez prudents pendant que nous présidons le processus, mais la position du gouvernement canadien est que tous les documents sont disponibles. Nous ne négocions pas en secret. Si moi, en tant que présidente, commence à vous déballer tous les documents, tout l'hémisphère dira: «Mais nous n'avons pas décidé de rendre publics ces documents».

• 1215

Une partie de votre rôle, je pense, serait de montrer que vous acceptez la transparence, que vous avez l'information et que vous êtes prêts à la disséminer pour notre compte. Le nombre de personnes que nous pouvons dépêcher à une discussion est limité, et c'est donc une structure par étage, dans laquelle nous vous disons tout ce que nous savons, afin que vous le répétiez à d'autres.

Cela nous ramène à ce que je disais. Si nous pouvions faire comprendre aux gens la meilleure façon de communiquer avec nous... Peut-être hurler dans la rue et agiter des pancartes attire l'attention des médias, mais cela ne vous met pas en contact avec ceux qui se débattent avec les enjeux. La question est de savoir comment amener les gens à faire une contribution traitant des sujets en discussion.

Claude, d'ailleurs, me rappelle ce que j'avais perdu de vue: tout le processus de la ZLÉA faisait partie du processus du Sommet des Amériques, c'est-à-dire qu'en réalité 24 sujets ont été abordés à Miami. Ce matin je n'ai traité que d'un seul. Des questions comme l'environnement, le rôle de l'éducation, le rôle des mères et les répercussions pour la santé des enfants, tout cela est englobé dans le document général et est abordé dans d'autres forums de l'hémisphère—tel que l'OPAS, l'Organisation panaméricaine de la santé.

Je pense qu'il faut dire aux Canadiens que tout ne doit pas être abordé dans les négociations commerciales, que bon nombre des enjeux sont traités à un niveau plus général dans l'hémisphère dans le cadre du processus du sommet.

La présidente: Merci beaucoup.

Monsieur Penson.

M. Charlie Penson: Je trouve cela réellement intéressant. L'OIT est un forum dans lequel on traite du travail, de certaines de ces questions qui seront débattues également au niveau de la société civile.

J'ai été intéressé d'entendre l'importance que vous accordez au Brésil pour ce qui est d'arriver à une masse critique—et nous connaissons tous l'importance du Brésil—mais il ne faut pas se leurrer et croire que pour la plupart des pays le marché américain n'est pas la préoccupation première. Si les États-Unis ne suivent pas ou n'ont pas la procédure accélérée, jusqu'où pensez-vous que ces négociations peuvent aller avant qu'il faille les suspendre? Je ne pense pas que cela arrive avant les prochaines élections aux États-Unis, vu les difficultés actuelles du président, ce qui nous amène après l'an 2000. Dans quelle mesure votre groupe a-t-il réfléchi à cela ou en a-t-il discuté? Nous ne pouvons négocier éternellement et ensuite recommencer toutes les négociations au Congrès.

Mme Kathryn McCallion: Vous avez mis le doigt sur le véritable problème. Comme vous le savez probablement, il n'y a aucune obligation pour les Américains d'engager la procédure accélérée au début du processus. Ils ont besoin de la procédure accélérée pour conclure l'accord. En fait, ils n'en ont probablement pas besoin du tout pour signer si tout le monde accepte de voir l'accord renégocié trois ou quatre fois au Congrès. Historiquement, presque toutes les négociations de l'OMC ont démarré sans que les Américains aient obtenu la procédure accélérée.

Le niveau de suspicion dans l'hémisphère, le «traitement du Mexique après l'ALÉNA» fait que l'hémisphère dit aux Américains: «Nous n'allons pas passer par ce processus et tout recommencer deux ou trois fois, vous devez donc cette fois-ci amener cette carte à la table». Ce qui est en discussion, c'est le facteur de tolérance, combien de temps nous allons attendre avant de les mettre au pied du mur. La plupart d'entre nous accepterons d'attendre jusqu'au prochain président. Aux alentours de 2001, tout le monde va devoir prendre une décision si les Américains n'apportent pas la procédure accélérée à la table

Mais vous avez aussi le problème de la poule et de l'oeuf. Vous avez les Brésiliens, qui ne sont pas très sûrs de vouloir de cet accord. Après avoir dépêché M. Franco à l'OEA—n'est-il pas l'ambassadeur auprès de l'OEA?—ils ont ouvert unilatéralement leur marché. Ils étaient une économie de substitution des importations. Ils ont ensuite rejoint le MERCOSUR, et maintenant ils sont à l'OMC et dans la ZLÉA. Ils voudraient ralentir un peu. Ils ont dit qu'ils voudraient ralentir, mais ils peuvent blâmer les Américains pour le défaut de la procédure accélérée.

• 1220

Il faut donc réellement une volonté de continuer parce qu'il y a beaucoup de travail à abattre, mais viendra un moment où nous devrons décider catégoriquement si nous voulons poursuivre ou non. Mais les Américains ont besoin de la procédure accélérée pour l'OMC et ils ont besoin de la procédure accélérée pour poursuivre avec l'APEC, si bien...

M. Claude Carrière: Puis-je ajouter quelque chose ?

Mme Kathryn McCallion: Oui, quand vous voulez.

M. Claude Carrière: Il ne faut pas oublier que les négociations sont prévues durer jusqu'en 2005. La date cible pour l'aboutissement des négociations est 2005. Le processus aujourd'hui, et pour les prochains mois, voire les prochaines années, consiste autant à aider maints pays d'Amérique latine à se hisser au niveau des obligations de l'OMC—nous en avons déjà parlé—qu'à enclencher quantité de négociations bilatérales. Parallèlement aux réunions de la ZLÉA, que ce soit au niveau des ministres ou des vice-ministres, il se déroule quantité de négociations bilatérales. Lors d'une réunion de la ZLÉA, le MERCOSUR et le Chili ont conclu leur propre négociation bilatérale.

Le cadre de la ZLÉA autorise toutes sortes de mouvements dans l'hémisphère. Ce sera aussi une incitation pour les Américains à adopter la procédure rapide, de crainte de rester sur la touche. C'est l'autre terme de l'équation.

M. Charlie Penson: J'aimerais revenir à cette notion d'engagement unique. Je ne l'ai toujours pas très bien saisie. J'aimerais utiliser un exemple et voir si vous pouvez m'éclairer.

Disons que le Costa Rica ne puisse pas s'engager sur un ou deux des neuf éléments négociés. Est-ce que le Costa Rica sera autorisé à devenir membre et à assujettir ces secteurs particuliers seulement plus tard? Ou bien sera-t-il empêché d'adhérer jusqu'à ce qu'il remplisse tous les critères établis par les 34 pays?

M. Claude Carrière: Il pourrait y avoir deux réponses à votre question.

M. Charlie Penson: Est-ce tout?

M. Claude Carrière: Oui, seulement deux.

Des voix: Oh, oh!

M. Claude Carrière: En fait, il y a une réponse: «Peut-être». L'engagement unique signifie qu'il n'y a pas d'engagement sélectif; il faut prendre tout ou rien. Cela dit, si le Costa Rica parvient à négocier une exemption ou un échéancier plus long, il disposera de cette marge de manoeuvre. Il aura négocié et payé pour cela sous forme de concessions que les autres lui auront arrachées en échange d'un échéancier plus long, concernant tel ou tel secteur. C'est une affaire de négociation.

M. Charlie Penson: Voyons cet exemple de plus près. S'il ne pouvait pas satisfaire aux critères dans la partie agricole, s'il négociait une exemption de dix ans, mettons, comment cela fonctionnerait-il?

M. Claude Carrière: Cela dépend de s'il veut exempter tout le secteur ou seulement un produit, auquel cas, peut-être, il négocierait un échéancier plus court dans un autre sous-secteur de l'agriculture. C'est toute une affaire de négociation. Sa décision sera celle que tous les autres pays participants devront prendre au stade ultime—à savoir si l'accord est bon pour lui ou non.

M. Charlie Penson: Est-ce que ce ne sera pas un processus très complexe avec 34 pays?

M. Claude Carrière: Oui, très complexe, ce qui est l'une des raisons pour lesquelles ce sera long.

Mme Kathryn McCallion: C'est aussi pourquoi c'est une bonne préparation à l'OMC; c'est plus facile à 34 qu'à 134.

M. Charlie Penson: [Note de la rédaction: Inaudible]... un processus d'apprentissage pour la ZLÉA.

Qu'en est-il d'autres domaines, tels que la préparation de notre société à participer, au moyen d'une formation linguistique et de la familiarisation avec les différences culturelles, avec les conditions de vie et de travail dans ces pays? Comment pouvons-nous être mieux préparés pour le moment où nous aurons un accord auquel notre public devra être en mesure de participer?

• 1225

Mme Kathryn McCallion: C'est davantage une affaire interne, et j'entends pas seulement interne au Canada, mais du ressort de l'autre moitié d'Équipe Canada inc... Une des choses dont nous avons convenu avec Industrie Canada est que la spécialité des délégués commerciaux est justement la connaissance des autres marchés etc. Industrie Canada et les provinces, en raison de la pénurie de ressources, cherchent à travailler collectivement et en collaboration à la formation d'exportateurs canadiens. C'est une formation à l'exportation que chacun doit dispenser chez soi, pour apprendre à commercer avec les autres pays. C'est une activité individuelle, pas collective.

Lorsque nous avons passé en revue la liste des mesures potentielles de facilitation du commerce, il y avait pas mal d'éléments tels que celui-ci, du genre tables rondes ou manuels ou annuaires, mais la Banque en particulier, l'un des principaux bailleurs de fonds de la collectivité, a dit: «Nous serions ravis de faire ces choses. Ce n'est pas très difficile, mais qui va les financer? D'où viendra l'argent?»

Nous reviendrons en avril avec une liste de choses et des recommandations sur ce qu'il convient de faire. C'est une liste d'idées; nous devrons abandonner celles-ci au profit de celles-là, et il nous faudra chiffrer le coût et voir ce que nous avons les moyens de faire et dans quel ordre. C'est à l'étude.

M. Charlie Penson: Est-ce qu'il ne faudrait pas faire participer nos collèges et universités à cette discussion?

Mme Kathryn McCallion: Oui.

Mr. Charlie Penson: Par exemple, elles pourraient mettre en place un programme d'études latino-américaines.

Mme Kathryn McCallion: Je pense que la direction L fait cela avec FOCAL, qui est la principale ONG dans le domaine des relations avec l'Amérique latine.

M. Charlie Penson: Je pense simplement que notre comité devrait se pencher sur la question.

[Français]

La présidente: Monsieur Sauvageau.

M. Benoît Sauvageau: On parle de la société civile depuis tout à l'heure. J'aimerais vous poser une question sur le rôle du groupe des Parlementaires des Amériques. À ce que je sache, ses membres ne se sont réunis qu'une seule fois. Comment ce groupe pourrait-il vous aider à stimuler les débats dans la société civile? Est-ce qu'un lien est possible entre les négociateurs, les tables rondes et tout ça et, d'autre part, les Parlementaires des Amériques?

Mme Kathryn McCallion: Pour le moment, il n'y a pas de lien officiel. Nous avons tenu une séance d'information à l'intention de Mme Hervieux-Payette.

M. Claude Carrière: Oui, je me souviens d'avoir tenu une séance d'information à l'intention de l'équipe parlementaire canadienne qui s'était rendue à Québec.

Mme Kathryn McCallion: En vue de leur participation à cette réunion.

M. Benoît Sauvageau: Après Québec, les Parlementaires des Amériques, qui étaient venus représenter les 34 pays, ont exprimé leur volonté commune de participer à l'élaboration des négociations de la Zone de libre-échange des Amériques. Selon vous, est-il souhaitable de s'associer à ce groupe et de le rendre opérationnel? Leur participation pourrait être une des façons de sensibiliser la société civile dans certains pays. Si oui, comment?

Préférez-vous cette dernière question? Non?

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Non.

C'est toujours possible. Comment? Nous avons des contraintes budgétaires. La démarche que vous proposez est bonne, avec un groupe aidant un groupe plus important à user de son influence, mais même pour aider ce groupe... Je sais, par exemple, que certains pays englobent des parlementaires dans leur délégation aux réunions ministérielles, ce qui règle ce problème. M. Marchi a emmené...

[Français]

M. Claude Carrière: M. Sauvageau.

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Oui, et il a également emmené des parlementaires avec lui au Costa Rica.

[Français]

M. Claude Carrière: Oui.

M. Benoît Sauvageau: Oui, j'étais là avec vous.

Mme Kathryn McCallion: Oui. Si vous faites allusion à un système formel, la réponse est négative. Si vous parlez des possibilités de formaliser le processus, je n'en suis pas sûre.

[Traduction]

Parlez-en au ministre.

Encore une fois, c'est réellement une question d'information, de savoir qui possède l'information et si nous sommes prêts à la partager. Oui, nous avons l'information et, oui, nous sommes prêts à la partager, mais la question est de savoir quelle est la meilleure façon de le faire, sachant que les ressources pour cela sont très limitées.

• 1230

Pour ce qui est du dossier de la ZLÉA, nous sommes quatre à travailler là-dessus. Eh bien, vous nous avez vus; nous étions plus nombreux au Costa Rica, mais normalement il y a juste nous quatre.

M. Benoît Sauvageau: D'accord.

Mme Kathryn McCallion: La question est de savoir comment promouvoir la progression géométrique de l'information disséminée, sans altération. C'est là ma plus grande crainte. C'est comme la publicité pour L'Oréal à la télévision: j'ai aimé, j'en ai parlé à une personne, qui en a parlé à deux, qui en ont parlé à huit, qui en ont parlé à 28... Mais il leur suffisait de dire que c'est un bon shampooing. Ce que je crains, c'est que si l'on utilise l'effet boule de neige, on s'éloigne trop de la réalité des faits.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Si vous cherchez un véhicule de pénétration dans les différents pays, vous pourriez avoir recours à ce groupe qui existe déjà dans différents pays.

Mme Kathryn McCallion: Oui, c'est une excellente idée.

M. Benoît Sauvageau: En principe, les parlementaires sont les représentants de leur peuple. En général, qu'on parle d'accords de libre-échange ou autres, on ignore tout le temps le rôle qu'y jouent les parlementaires. Dans ce cas-ci, les parlementaires ont fait preuve de bonne volonté en créant ce groupe-là et je crois qu'un lien serait souhaitable.

Mme Kathryn McCallion: Oui, oui, c'est excellent.

M. Benoît Sauvageau: D'accord. C'est mon opinion personnelle et je la partage avec vous.

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Oui—comment l'utiliser plus efficacement.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Ma prochaine question porte sur les blocs de négociation. Certains petits pays ne négocient pas individuellement, mais en bloc. Si je ne me trompe pas, il y a entre autres le CARICOM. Pour leur part, le Canada et les États-Unis négocient seuls. Qu'en est-il du MERCOSUR?

Mme Kathryn McCallion: Non, c'est le contraire.

M. Benoît Sauvageau: Pourriez-vous nous expliquer quels blocs mènent des négociations?

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Tout le monde peut négocier en bloc si un porte-parole a été désigné à l'avance. Pour vous laisser négocier en bloc, nous exigeons que les quatre pays du MERCOSUR, ayant négocié en bloc, appliquent l'accord en bloc. Y a-t-il un accord entre les membres de ce bloc à l'effet que tous les pays, ayant négocié en bloc, acceptent exactement ce qui sera négocié?

Pour le moment, le seul qui soit proche de pouvoir le faire est le MERCOSUR. CARICOM vient de choisir un porte-parole. Les pays d'Amérique centrale se rapprochaient avec leurs comités sur le développement durable; deux élections plus tard et ils sont de nouveau fragmentés. Nous disons au Costa Rica qu'il vaudrait beaucoup mieux qu'ils se rassemblent de nouveau. La communauté andine estimait que le MERCOSUR la négligeait, et elle a donc désigné un porte-parole.

Mais pour le moment, on prévoit que les négociations finales seront conduites par chaque pays individuellement. Ce n'est pas réellement encore une négociation bloc par bloc, et nous avons fait savoir très clairement au début du processus qu'il n'y a pas de bloc ALÉNA; ils négocient avec le Canada et avec les États-Unis et avec le Mexique. Bien que nous soyons une zone de libre-échange, nous ne négocions pas en bloc.

C'est une situation qui évolue.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: D'accord.

La présidente: Madame Folco.

Mme Raymonde Folco: Est-ce que je pourrais intervenir, monsieur Sauvageau? Mon intervention est liée à ce que vous venez de dire.

M. Benoît Sauvageau: Ça me ferait même plaisir.

Mme Raymonde Folco: Je ne voulais pas vous couper la parole.

M. Benoît Sauvageau: Mais non, je le sais bien.

Mme Raymonde Folco: Mes commentaires portent justement sur la contribution des parlementaires. Il y a un an et demi, se tenait à Québec une conférence des Parlementaires des Amériques. À cette époque-là, le Canada participait à la conférence, mais j'ai entendu dire tout récemment que le Canada retirait sa participation. Je voulais donc vous transmettre cet élément d'information. Ce groupe aurait pu être un véhicule pour l'idée que vous avez transmise, mais je pense que ce n'est plus possible maintenant, compte tenu du fait que le Canada n'est plus dans le portrait, comme on dit.

M. Benoît Sauvageau: J'aimerais compléter votre intervention et vous dire que le Canada s'est retiré pour créer son propre groupe de parlementaires des Amériques afin de ne pas être à la solde du Québec.

Mme Raymonde Folco: Je n'ai aucun commentaire à faire là-dessus.

M. Benoît Sauvageau: Il s'agit peut-être d'un complément d'information intéressant.

Mme Kathryn McCallion: Ah, peut-être.

M. Benoît Sauvageau: Il faut en parler aux sénateurs.

Mme Raymonde Folco: Quand il a dit «du Québec»...

[Traduction]

La présidente: Monsieur Sauvageau, avez-vous une autre question?

M. Benoît Sauvageau: Oui.

La présidente: La parole ira ensuite à Mme Folco.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: On connaît déjà la position des gens d'affaires américains. Pourriez-vous nous instruire sur celle des représentants américains, des sénateurs et de la population en général? Quelle est leur perception? Les gens d'affaires semblent favorables, mais qu'en pensent les Américains?

• 1235

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Parler pour les Américains ou des Américains est périlleux.

Une voix: Oh, oh!

Mme Kathryn McCallion: Je dirais qu'ils étaient follement enthousiastes à un moment donné et étaient réellement la force motrice. Ils ont proposé Miami comme siège. Mais ensuite, d'autres événements ont pris la vedette. L'une des conversations que nous avons eues au niveau des vice-ministres à Miami portait sur ce que nous pourrions faire pour retrouver cette visibilité. Le sujet est beaucoup moins passionnant que la destitution du président. L'intérêt ira en fluctuant, selon les jalons, et c'est d'ailleurs pourquoi nous avons établi des jalons. Pour ce qui est de l'an 2000, tout le monde va se réveiller et demander: «Que s'est-il passé? Avez-vous réussi?» Ensuite, on se désintéressera de nouveau. Je pense que cela vient par vagues. J'ai l'impression que ce sont les Républicains qui sont en faveur du libre-échange et les Démocrates qui ne le sont pas. C'est cyclique.

Je pense que la réponse la plus sûre est que cela va et vient. Mais il n'y a pas de grosse faction chez les Américains qui soit opposée. Le mieux que l'on puisse dire est qu'ils sont indifférents.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Monsieur Carrière? Non?

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: Vous avez le droit de ne pas être d'accord avec moi.

Des voix: Oh, oh!

La présidente: Merci. Madame Folco.

[Français]

Mme Raymonde Folco: M. Penson a parlé de ce que j'appelle, dans mon jargon, la formation interculturelle. Il s'agit de la façon de discuter de commerce et d'autres choses avec les gens de cultures différentes et de cultures commerciales différentes également.

Lorsque je dirigeais un organisme du gouvernement du Québec, on avait beaucoup travaillé, avec le ministre des Affaires internationales du Québec de l'époque, M. Ciaccia, sur la contribution des Québécois—mais je parle ici des Québécois et des Canadiens—qui sont venus d'ailleurs, qui ont émigré au Canada et qui sont maintenant des citoyens canadiens. M. Ciaccia avait présenté un livre blanc dans lequel il parlait d'une importante contribution concrète de la part de ces personnes; il disait que, d'une part, elles pouvaient offrir des conseils sur la façon de faire dans tel ou tel pays, sur la façon de traiter avec ces personnes-là et que, d'autre part, elles pouvaient aider à construire des réseaux entre un pays et un autre. Est-ce quelque chose qui pourrait être envisagé par le gouvernement canadien?

M. Claude Carrière: Il y a plusieurs aspects à votre question. Je peux vous dire, de par mon expérience personnelle, que nous avons pu bénéficier de l'aide de communautés culturelles ou ethniques. Par exemple, dans le cas de l'Accord Canada-Chili, la communauté chilienne, surtout à Montréal, notamment la Chambre de commerce Canada-Chili, a travaillé de concert avec nous et avec le gouvernement chilien pour soutenir la négociation et ensuite la mise en oeuvre de l'accord. Elle a aussi travaillé à son approfondissement afin que les exportateurs, les gens d'affaires des deux pays puissent en tirer avantage. Donc, c'est un exemple d'une situation où nous avons travaillé avec un groupe ethnique. Il y a sûrement d'autres possibilités. La Zone de libre-échange en est une. Nous sommes très favorables à cela.

[Traduction]

Mme Kathryn McCallion: C'est une bonne idée, mais comment s'y prendre? La plupart des gens passent leurs journées sans jamais penser au libre-échange. Comment traduire le dialogue en des termes que les gens comprennent et peuvent assimiler? D'un côté, vous avez la peur: «Je ne veux pas du libre-échange parce que je vais perdre mon emploi, mon beau-frère va perdre son emploi et nous serons inondés de produits américains». Vous connaissez la liste des frayeurs.

• 1240

Ce que nous ne savons pas bien faire est dresser la liste des bienfaits. Quels seront les avantages pour vous? Aurez-vous davantage d'argent dans votre poche? Aurez-vous un plus grand choix de produits? Lorsque les économistes parlent de croissance économique, cela a toujours l'air grandiose, mais «qu'est-ce que cela m'apporte à moi, vivant à Etobicoke?» «Pas grand-chose».

L'un des problèmes dans l'utilisation d'intermédiaires est celui-ci: comment rendre le message suffisamment clair pour qu'il soit facile à transmettre? La chose la plus facile à transmettre est la frayeur: «Nous sommes contre». Il est beaucoup plus facile d'amener tout le monde à s'opposer qu'à approuver.

J'ai été haut-commissaire du Canada en Jamaïque. Je sais qu'il est très difficile de prendre langue avec les Jamaïquains d'ici, car ils ont laissé la Jamaïque derrière eux. Ils ont des liens familiaux très étroits, mais ils disent qu'ils sont maintenant Canadiens. Je suis revenue une fois de la Jamaïque pour parler à la communauté jamaïquaine des problèmes de drogue et de ce genre de chose, et ils me disaient tous: «Mais c'est le problème de la Jamaïque. Nous sommes Canadiens. Pourquoi nous parlez-vous de cela?» C'est juste un exemple personnel.

Comment combler ce fossé?

Mme Raymonde Folco: Pourrais-je dire une chose? Il se trouve que je connais bien la communauté jamaïquaine, moi aussi. Les Jamaïquains ne sont pas les seuls dans ce cas. De manière générale, si vous parlez d'affaires à des gens d'affaires, c'est une chose. Si vous parlez aux Jamaïquains du Canada des problèmes de drogue en Jamaïque, c'est un dialogue tout à fait différent, pour des raisons évidentes.

Mme Kathryn McCallion: C'est vrai.

Mme Raymonde Folco: Je vois un lien intéressant entre des gens qui ont réussi au Canada—des gens d'affaires—dont certains aimeraient beaucoup renouer des liens avec leur pays d'origine... Mettons les choses ainsi. Ma question est très vague, mais je me demande comment ces liens pourraient faire avancer les discussions que vous menez.

Mme Kathryn McCallion: Il faudra y réfléchir. Nous ne l'avons pas encore fait. On m'a demandée de prononcer des discours là- bas—pas ici—à plusieurs reprises. Peut-être vaudrait-il mieux parler ici et laisser ces gens parler...

Mme Raymonde Folco: Oui. On ne se rend pas compte à quel point il y a un «va-et-vient», non seulement par téléphone et ordinateur, mais aussi de déplacements physiques de personnes, et souvent de marchandises... J'ai travaillé dans ce domaine pendant pas mal d'années. Je ne sais combien j'ai rencontré de gens qui rêvent de retourner dans leur pays d'origine pour établir une sorte de lien commercial.

Mme Kathryn McCallion: Oui, c'est vrai.

Mme Raymonde Folco: C'est un rêve pour beaucoup.

Mme Kathryn McCallion: Oui, nous y jetterons un coup d'oeil.

Mme Raymonde Folco: Je me rends compte que c'est une suggestion assez vague.

Mme Kathryn McCallion: Mais c'est une bonne idée.

[Français]

La présidente: Monsieur Sauvageau, une petite question.

M. Benoît Sauvageau: Est-ce que d'autres sujets ont été traités au Sommet des Amériques à part celui de la Zone de libre-échange des Amériques, entre autres l'éducation, les drogues, etc.? Est-ce que la société civile est aussi consultée sur ces sujets-là?

Mme Kathryn McCallion: Oui, absolument.

M. Benoît Sauvageau: Est-ce que la conclusion souhaitée est un accord ou un traité?

M. Claude Carrière: Cela dépend des sujets.

Mme Kathryn McCallion: Oui, cela dépend des sujets, mais c'est une grande partie de la discussion aux Sommet des Amériques.

M. Benoît Sauvageau: D'accord.

Mme Kathryn McCallion: Le prochain sommet aura lieu ici, au Canada. Le problème repose sur nos épaules. Ce sera vraiment une grande partie des discussions au prochain sommet.

[Traduction]

La présidente: Quand a lieu cette réunion?

Mme Kathryn McCallion: La date est choisie par le premier ministre.

La présidente: Elle n'a donc pas encore été fixée.

Mme Kathryn McCallion: Non.

[Français]

La présidente: Y a-t-il d'autres questions? Non?

[Traduction]

Merci beaucoup de cette discussion très intéressante. Nous vous sommes reconnaissants d'être venus et j'espère que nous pourrons de nouveau faire appel à vous pour nous éclairer tout au long de ce processus.

Mme Kathryn McCallion: Ce sera avec plaisir.

La présidente: D'accord.

La séance est levée.