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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le vendredi 21 octobre 1994

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR L'OFFICE DES DROITS DE SURFACE DU YUKON

    Projet de loi C-55. Motion portant deuxième lecture 7021

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

LA SEMAINE DU CANCER DU SEIN

LES PENSIONS

LA REPRISE ÉCONOMIQUE

LA FONDATION CANADIENNE DU CANCER DU SEIN

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 7028

L'ENVIRONNEMENT

    M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso) 7029

L'IMMIGRATION

LE PROJET HIBERNIA

LES INSTITUTS FÉMININS DU CANADA

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. AL HOPKINS

    Mme Brown (Oakville-Milton) 7030

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

L'ÉCONOMIE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 7030

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LA PETITE ENTREPRISE

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

L'EMPLOI

QUESTIONS ORALES

LE CENTRE DE SÉCURITÉ DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

    M. Gauthier (Roberval) 7031
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 7031
    M. Gauthier (Roberval) 7031
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 7031
    M. Gauthier (Roberval) 7032
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 7032

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES SOINS DE SANTÉ

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 7033
    M. Martin (LaSalle-Émard) 7033

LE FORUM CANADIEN SUR LA SANTÉ

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 7034
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 7034

L'ÉCONOMIE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 7034
    M. Martin (LaSalle-Émard) 7035

LES AFFAIRES INDIENNES

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7035
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7035

LA COMMISSION ROYALE SUR LES PEUPLES AUTOCHTONES

LE CODE CRIMINEL

LES ESSAIS NUCLÉAIRES

LA BOSNIE

    M. Harper (Calgary-Ouest) 7037
    M. Harper (Calgary-Ouest) 7037

LE IRVING WHALE

LES INSTITUTIONS FINANCIÈRES

LES ARMES CHIMIQUES

    Mme Stewart (Northumberland) 7038

LE TRANSPORT MARITIME

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

LA RÉFORME DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 7039

AFFAIRES COURANTES

DÉCRETS DE NOMINATION

RÉPONSES DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES COOPÉRATIVES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

AGRICULTURE ET AGROALIMENTAIRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion d'adoption du quarante et unième rapport 7041
    (Adoption de la motion) 7041

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE SUICIDE ASSISTÉ

L'AVORTEMENT

LA FISCALITÉ

LE PORT DE CHURCHILL

    M. Harper (Churchill) 7041

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR L'OFFICE DES DROITS DE SURFACE DU YUKON

    Projet de loi C-55. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture 7042
    M. Harper (Churchill) 7049

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LES PRÊTS D'ÉTUDES

    (Adoption de l'amendement) 7053
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 7058

7021


CHAMBRE DES COMMUNES

Le vendredi 21 octobre 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR L'OFFICE DES DROITS DE SURFACE DU YUKON

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) propose: Que le projet de loi C-55, Loi établissant un organisme ayant compétence pour statuer sur les différends concernant les droits de surface au Yukon, et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, je me lève aujourd'hui pour parler à la Chambre du projet de loi C-55, la Loi sur l'Office des droits de surface au Yukon.

Mes collègues connaissent très bien les questions se rapportant au Yukon, en particulier au reste des peuples autochtones du Yukon. La Chambre a adopté en juin des mesures législatives qui vont influer sur l'avenir politique et économique du territoire. On nous demande à ce stade de veiller à ce que ces efforts n'aient pas été vains et de mettre en place une dernière mesure législative afin de permettre la mise en oeuvre des accords sur le règlement des revendications territoriales au Yukon.

(1005)

Juste avant l'ajournement de la Chambre pour l'été, nous avons examiné deux mesures législatives importantes: la Loi sur le règlement des revendications territoriales des premières nations du Yukon et la Loi sur l'autonomie gouvernementale des premières nations du Yukon.

Les députés se souviendront que, une fois promulguée, la première de ces mesures législatives établira un cadre pour la mise en oeuvre dans tout le territoire des accords sur le règlement des revendications territoriales conclus avec chacune des 14 premières nations du Yukon. Elle mettra en oeuvre quatre accords définitifs.

La deuxième de ces mesures législatives mettra en oeuvre les accords sur l'autonomie gouvernementale des premières nations du Yukon. Des accords sur l'autonomie gouvernementale ont été négociés avec quatre premières nations en vue des accords définitifs sur le règlement des revendications territoriales: les premières nations des Gwitchin Vuntut, des Nacho Nyak Dun, de Champagne et Aishihik, et le conseil des Tlingits de Teslin.

Ces deux mesures législatives ont été adoptées par le Parlement. Elles ont reçu la sanction royale. Elles attendent maintenant d'être promulguées pour entrer en vigueur. Cependant, avant cela, avant que les résidents du Yukon ne puissent commencer à tirer parti de la certitude à laquelle donnera lieu l'accord qu'ils ont conclu sur les revendications territoriales, le gouvernement doit établir un nouveau régime sur les droits de surface, ce que nous sommes en train de faire aujourd'hui dans le territoire. C'est ce que fera le projet de loi C-55.

Par ce nouveau projet de loi sur les droits de surface, le Canada donne suite à l'engagement qu'il a pris dans les accords sur le règlement des revendications territoriales, lesquels, comme le savent les députés, ont été signés en mai 1993 par les gouvernements fédéral et territorial et par le Conseil des Indiens du Yukon. Cela faisait suite à 21 ans de négociations.

L'accord-cadre, comme on l'a appelé, prévoyait l'adoption de lois distinctes sur le nouveau régime des droits de surface, et c'est la raison pour laquelle la Chambre a été saisie du projet de loi C-55. Le Parlement fédéral devra également adopter d'ici deux ans une loi sur l'évaluation du développement du Yukon, qui concernera l'évaluation des effets environnementaux des projets de développement.

Il est important que la Chambre soit attentive aux changements qui surviennent au Yukon afin de bien évaluer la nécessité d'un nouveau régime des droits de surface.

Au cours des mois et des années à venir, à mesure que les accords définitifs seront mis en oeuvre, de vastes étendues territoriales du Yukon seront confirmées comme étant la propriété exclusive des premières nations. Il en résultera un changement important pour le territoire et ses habitants puisque la majeure partie du territoire est actuellement constituée de terres domaniales. À l'avenir, le gouvernement du Canada ne sera plus celui qui prendra les décisions ou qui établira les règles de base régissant l'utilisation des terres au Yukon. De plus en plus de terres domaniales du Yukon deviendront propriété privée, soit des premières nations soit de simples citoyens, comme c'est couramment le cas ailleurs au Canada.

En vertu de l'accord sur les revendications territoriales, les premières nations du Yukon auront la propriété de la surface et du sous-sol de certaines terres désignées de catégorie A. Dans le cas des terres désignées de catégorie B, les premières nations auront la propriété de la surface mais l'État conservera ses intérêts à l'égard des ressources souterraines. Toutefois, pour pouvoir exploiter le sous-sol, les entreprises devront obtenir le droit d'accès à la surface.

Comme nous avons pu nous en rendre compte pendant le débat concernant la Loi sur le règlement des revendications territoriales, nous pouvons nous attendre à ce que les sociétés minières et pétrolières s'empressent d'exploiter le sous-sol du Yukon. En fait, le désir de confirmer la propriété et les droits sur le territoire, afin de permettre l'exploitation des ressources, est l'un des


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facteurs déterminants à l'origine du règlement des revendications territoriales.

Le gouvernement devra faire tout ce qui est en son pouvoir pour favoriser le développement économique tout en respectant et protégeant les droits et intérêts des autochtones et des non-autochtones du Yukon. Il faudra pour cela savoir anticiper, se préparer aux changements et travailler avec les diverses parties afin de leur assurer un traitement juste et raisonnable.

Le règlement des revendications territoriales met un terme à des années d'incertitude concernant les titres de biens-fonds au Yukon. Le projet de loi sur les droits de surface est la dernière d'un ensemble de mesures nécessaires à l'entrée en vigueur de l'accord sur les revendications territoriales.

Aux termes du projet de loi, les parties seront tenues de négocier des ententes avant de soumettre leurs différends à l'office. Il permettra aussi l'établissement d'un processus donnant accès aux terres privées et publiques et prévoyant un mécanisme efficace de règlement des différends entre les propriétaires de droits de surface et les propriétaires des ressources souterraines.

(1010)

C'est une question administrative, mais c'est important parce que, sans ce projet de loi, les deux autres projets de loi ne pourront entrer en vigueur. Nous avons la responsabilité non seulement de mettre en oeuvre les deux premières mesures, mais de nous assurer que toutes les mesures législatives que nous nous sommes engagés à adopter soient bien présentées à la Chambre.

Les discussions sur les revendications territoriales des premières nations du Yukon se poursuivent depuis plus de 21 ans, et il me faudra encore un an pour faire adopter tous ces projets de loi. Le Conseil des Indiens du Yukon a présenté sa revendication en 1973.

Le projet de loi dont nous sommes saisis est le fruit de consultations exhaustives auprès des représentants des premières nations, du gouvernement territorial et de l'industrie minière, y compris la Chambre des mines et la Klondike Placer Mining Association.

J'ai parfois l'impression qu'au Yukon, ils ne font rien d'autre que de discuter de ces projets de loi. Je ne cesse de me reporter aux mêmes personnes. Si elles suivent le débat à la télévision, aujourd'hui, je suis sûr qu'elles doivent sourire en ce moment. Les consultations se poursuivent depuis plus d'un an, et plusieurs des parties intéressées ont participé directement à la rédaction du projet de loi.

En vertu du projet de loi C-55, l'Office des droits de surface sera investi d'un éventail de pouvoirs, y compris les pouvoirs d'établir les conditions d'accès tant aux terres désignées qu'aux terres non désignées ainsi que d'accorder des indemnités pour l'accès aux terres et pour les dommages résultant de cet accès.

Dans un certain nombre de cas, les offices des droits de surface pourraient avoir à régler un différend. Il en est ainsi lorsqu'un nouveau propriétaire de droits miniers et une première nation ou un détenteur de droits de surface n'arrivent pas à négocier une entente donnant accès aux terres et aux ressources minières. Les parties doivent d'abord tenter de négocier, sinon elles ne peuvent être entendues par l'office. Face à l'échec des négociations, l'exploitant peut demander à l'office d'émettre une ordonnance concernant le droit d'accès. L'office peut alors émettre une ordonnance provisoire en attendant que la question des indemnités et d'autres enjeux soient réglés, soit par les parties soit par l'office.

L'office peut aussi adjuger une indemnité partielle quand il émet une ordonnance d'accès provisoire. Il détermine alors le montant des redevances à payer à la première nation du Yukon pour la terre désignée avant d'émettre l'ordonnance relative au droit d'accès. Il n'y a pas de redevances à payer pour l'accès à des terres non désignées.

Le projet de loi C-55 autorisera l'Office des droits de surface à rendre une ordonnance que la Cour suprême du Yukon pourra exécuter. L'office pourra revoir ses propres décisions s'il croit que les faits ou les circonstances ont changé.

Une décision rendue par l'office pourra faire l'objet d'un appel devant la Cour suprême du Yukon pour des motifs précis, soit parce que la décision est fondée sur un préjugé ou un manque d'équité dans la procédure, ou pour tout autre motif généralement contraire à ceux d'un office. Il s'agit d'un appel de procédure dû au fait que l'office a fondé sa décision sur un préjugé, manqué à un principe d'équité ou refusé de permettre le contre-interrogatoire, mais il ne sera pas permis de revenir sur des constatations de fait ou autre chose du genre. Notre objectif consiste à éviter autant que possible que les questions relatives aux droits de surface aboutissent devant les tribunaux, ce qui entraîne ainsi des coûts et une perte de temps pour toutes les parties.

Les députés doivent aussi comprendre que le règlement de différends par l'intermédiaire de l'Office des droits de surface sera un dernier recours. Les gens devront essayer de s'entendre et peut-être de recourir à la médiation avant de porter leur différend devant l'office.

En établissant l'Office des droits de surface, nous ne créons pas un autre palier de gouvernement au Yukon, bien au contraire. Autrement dit, nous n'ajoutons pas un ordre de gouvernement, mais nous améliorons celui qui est en place. Nous voulons faire en sorte qu'au Yukon, les gens de tous les secteurs puissent s'exprimer dans le respect et participer directement au processus décisionnel qui était jusqu'à maintenant l'apanage du gouvernement.

Il y a vraiment une évolution au Yukon, une évolution bien planifiée et gérée. Le projet de loi C-55 fait partie de cette évolution. Je suis certain que l'Office des droits de surface profitera à tous les habitants du Yukon.

Comme nous l'avons souligné dans le livre rouge, il est temps de passer au transfert des compétences. Nous en avons pris l'engagement. Le premier ministre l'a déclaré. Une série d'initiatives seront présentées à la Chambre cet automne, car nous espérons, au cours de notre mandat, conférer au Yukon tous les pouvoirs dont jouit normalement une province.

(1015)

Le leader du Yukon veut aller de l'avant. Je m'entretiens avec lui de façon assez régulière. Il a une bonne idée de l'orientation qu'il veut prendre et il veut être juste avec les employés du MAINC. Il s'efforce d'être juste avec nous, le gouvernement fédéral, même si nous ne sommes pas de la même allégeance politique. C'est un leader très juste. Je crois que d'ici trois ou


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quatre ans, la transition sera terminée et le Yukon sera entièrement responsable de son destin.

Nous entendons beaucoup parler du Yukon, nous lisons beaucoup de choses sur ce territoire, mais en fait, le Yukon est administré depuis Ottawa. Je ne pense pas que ce soit normal et nous ne voulons pas que cette situation perdure. Nous allons franchir une nouvelle étape et nous ferons exactement ce que le premier ministre et le parti ont dit dans le livre rouge: nous laisserons le Yukon évoluer et prendre son destin en main.

Nous consultons régulièrement le gouvernement, les premières nations, la Chambre de commerce et tous les autres intervenants au Yukon.

[Français]

M. André Caron (Jonquière, B.Q.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens, au nom de l'opposition officielle, sur le projet de loi C-55, Loi établissant un organisme ayant compétence pour statuer sur les différends concernant les droits de surface au Yukon, et modifiant certaines lois en conséquence.

La présentation de ce projet de loi fait suite à deux autres lois qui ont été adoptées par cette Chambre en juin dernier, la Loi sur l'autonomie gouvernementale des Indiens du Yukon et la Loi sur les revendications territoriales.

Avant d'exposer mon analyse du projet de loi C-55, je voudrais résumer ces deux lois pour bien montrer l'importance et démontrer que le projet de loi qui est devant nous ce matin leur est lié et qu'il va être aussi important de l'adopter, quitte à faire les modifications qui s'imposent et que nous étudierons en comité.

Tous les projets de loi concernant les Indiens du Yukon sont dans la foulée d'un vaste processus entamé au Canada, notamment au Québec, il y a 20 ans, quand le gouvernement du Québec s'est entendu avec les Cris de la Baie James, ce que l'on a appelé l'Accord de la Baie James. Cet accord avait été signé à cette époque-là suite à une négociation faite de bonne foi. Les Cris étaient satisfaits, le gouvernement du Québec était satisfait, l'Hydro-Québec était satisfait et le Parlement fédéral avait sanctionné la loi qui permettait l'entente de la Baie James.

Je veux que l'on comprenne bien que ce qui se passe au Yukon, ou ce qui s'est passé aussi dans les Territoires du Nord-Ouest, ce qui se passe à différents endroits au Canada en ce qui concerne les négociations avec les populations amérindiennes, n'est pas nouveau. Ce n'est pas quelque chose qu'on doit craindre. Ce n'est pas une nouvelle situation. C'est un processus qui a déjà été entamé. On a vécu un certain nombre d'expériences, notamment au Québec, et je pense que l'expérience du Québec a été heureuse.

En juin, nous avons adopté deux lois concernant les Indiens du Yukon. La première visait à définir certains points reliés à l'autonomie gouvernementale. C'est un accord d'autonomie en matière d'administration publique. Au Yukon, il y a des territoires qui sont, depuis des temps immémoriaux, occupés par des populations autochtones, par des nations autochtones. Ces nations-là, au cours des années, ont vu le développement venant du sud être présent sur leur territoire. Des compagnies minières sont venues; des trappeurs sont venus; des gens de l'étranger sont venus. Les populations amérindiennes ont regardé cela et ont vu des gens venir sur leurs territoires. Avec bon droit, ils ont revendiqué d'être maîtres chez eux, et cela d'une certaine façon. Des négociations sont donc intervenues et parmi ces négociations, il y a l'Accord sur l'autonomie gouvernementale des Premières nations. Je pense que c'est important.

(1020)

C'est que les Premières nations ont une personnalité, ont une existence, ce sont des populations qui ont leur identité propre, leur identité culturelle, et je ne pense pas qu'il y ait personne ici pour mettre en doute le fait qu'il y a une identité autochtone, amérindienne et inuit au Canada et que cette identité est appelée à se développer et à s'affirmer.

Alors, l'accord sur l'autonomie gouvernementale permettait aux populations autochtones de prendre des décisions dans un bon nombre de domaines les concernant. Ils ont eu, par exemple-je vais aller rapidement parce que ce n'est pas nécessairement l'objet du projet de loi sur lequel on discute, mais je pense que c'est important parce que c'est relié à certains pouvoirs législatifs, par exemple dans le domaine des lois de nature locale et privée, dans le domaine des programmes sociaux et services sociaux. Vous savez que c'est très important que les populations autochtones aient les moyens de mettre sur pied des services sociaux qui correspondent à leurs besoins.

Je voyais dans les journaux de ce matin que les Mohawks du Québec ont obtenu la responsabilité de la formation professionnelle. C'est une revendication traditionnelle du Québec. On a toujours dit, nous autres au Québec, en tant que Québécois, en tant que peuple québécois, qu'on voulait développer notre main-d'oeuvre. On voit ce matin, dans les journaux, que le gouvernement fédéral, au moins pour les populations autochtones du Québec, examinera dans quel cadre cela se fera et les objectifs que le gouvernement poursuit, mais il reste que de prime abord, on constate que le gouvernement fédéral a convenu que c'est important qu'une nation, qu'un peuple, contrôle certains aspects de sa main-d'oeuvre, certains aspects de ses programmes sociaux.

Alors, les Mohawks du Québec vont avoir des responsabilités dans ce domaine et on remarque que dans l'accord sur les indiens du Yukon, il y a des choses de ce type qui ont été accordées. Je vais dire accordées, parce que si on regarde ce qui se passe avec les populations autochtones au Canada, je pense que le gouvernement fédéral s'est mis, au cours du siècle dernier et dans la première partie de celui-ci, dans la position d'accorder des choses aux populations. Même la Loi sur les indiens est très claire à ce moment-là.

Alors, on voit que les populations autochtones du Yukon ont quand même obtenu des choses en matière d'autonomie gouvernementale: responsabilité dans les programmes sociaux, services aux citoyens, pouvoir d'imposer des droits, pouvoir aussi de prélever certains impôts. Chacune de ces premières nations, en plus de tout ça, va avoir sa constitution propre et son code de citoyenneté. Ils vont pouvoir avoir des responsabilités dans l'administration de la justice.

Vous voyez un peu le cadre dans lequel ces choses ont été faites des populations, des peuples qui avaient une identité propre se sont vu donner certains moyens d'assurer leur autonomie. C'est tout à l'honneur de cette Chambre, qu'au cours du mois de juin, la loi C-34 a été adoptée. Il est bien louable d'avoir une certaine autonomie gouvernementale, d'avoir des responsabilités, mais il faut aussi avoir un territoire sur lequel on puisse exercer des responsabilités et les indiens du Yukon, au cours des 20 dernières


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années-comme M. le ministre l'a précisé-avaient entamé des négociations pour en arriver à une entente sur les revendications territoriales.

Cette entente a fait l'objet de la loi C-33, que cette Chambre a adoptée au mois de juin dernier. Il s'agissait d'un cadre pour les 14 premières nations du Yukon-parce que quand on parle des indiens du Yukon, il faut bien savoir qu'ils sont regroupés en 14 premières nations regroupant 8 000 à 9 000 personnes. L'entente a défini un certain partage du territoire. Ce territoire est immense, c'est au-delà de 41 000 kilomètres carrés. Sur certains territoires, les peuples autochtones du Yukon se sont vu, j'allais dire accorder, mais se sont vu reconnaître la propriété de la surface et du sous-sol.

Sur d'autres territoires, ils ont des droits de surface seulement. Cela veut dire que les juridictions qu'ils ont obtenues par l'accord sur l'autonomie gouvernementale, ils peuvent les exercer sur certains territoires.

(1025)

Avec le règlement des revendications, les nations autochtones ont eu d'autres avantages. Le Canada a concédé 242 millions de dollars en indemnités, répartis entre les 14 nations et sur un certain nombre d'années. Ils ont aussi obtenu des droits d'exploitation de la faune pour des fins de subsistance sur le territoire. Ils ont également obtenu l'exclusivité du produit, en matière de chasse, sur d'autres territoires.

Alors, cette loi leur permettait d'avoir un territoire et de préciser des droits en surface et de sous-sol. C'est important, parce que le Nord, pendant de nombreuses années, pour des gens du sud comme moi, était une terre où il ne se passait à peu près rien. Il y avait de la neige et rien d'autre. On ignorait que c'était le territoire de populations autochtones qui y vivaient depuis des temps immémoriaux.

Mais le Nord est devenu d'actualité, que ce soit au Québec ou dans le reste du Canada, quand l'exploitation des ressources naturelles a fait que des individus et des compagnies du sud sont intervenus pour exploiter, soit le pétrole ou l'hydroélectricité. À partir de ce moment, il a fallu définir qui avait droit à tel territoire et qui pouvait exercer des activités sur le territoire. Je pense qu'on est en bonne voie de faire ce partage grâce aux deux lois qu'on a définies sur l'autonomie gouvernementale et la revendication territoriale.

Il est important, au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest, comme partout au Canada, qu'on en vienne à une sorte d'entente cordiale entre les différentes populations sur l'occupation du territoire. Il faut que les populations qui ont une identité propre puissent la maintenir et l'affirmer sans brimer pour autant l'identité ou les activités des autres collectivités canadiennes.

Alors, que ce soit au Canada ou au Québec, particulièrement en lien avec la question des autochtones au Canada, je pense que tout le monde est conscient de ça, qu'il y a de la bonne volonté de part et d'autre et qu'on va en venir à une entente qui peut être satisfaisante pour les deux parties.

Je vous ai dit qu'il y avait eu ententes en ce qui a trait à l'autonomie gouvernementale et à l'autonomie administrative. J'ai précisé aussi que les nations autochtones du Yukon avaient obtenu des droits en ce qui regarde la définition du territoire. Mais, une fois qu'on a reconnu des droits, on sait très bien qu'il peut y avoir des contestations et des différends. Il va falloir, à un moment donné, arbitrer des conflits, que ce soit par rapport aux compagnies du Sud qui veulent exploiter le Nord, que ce soit par rapport aux citoyens canadiens qui veulent exercer des activités sur le Territoire du Yukon. Il va falloir que quelqu'un statue sur les droits de chacun. C'est comme partout, il y a des lois et des règlements qui sont adoptés et, à un moment donné, il faut des tribunaux ou des corps constitués pour statuer sur les droits de chacun, sans cela les règlements ne s'appliquent pas.

J'aimerais vous donner un exemple. Le Comité des affaires autochtones et du développement du Nord a étudié, au cours des dernières semaines, ce qui s'est passé au Manitoba lorsque Hydro Manitoba a voulu établir un certain nombre de barrages pour un développement hydroélectrique sur la rivière Churchill et sur le fleuve Nelson. Nous avons constaté qu'on était arrivé a une entente, mais qu'elle n'a pas été appliquée. J'espère que j'aurai l'occasion de présenter un peu plus à la Chambre l'analyse que j'ai faite de cette situation lorsque nous débattrons du projet de loi C-36 sur l'entente de Split Lake, dans le nord du Manitoba. Ce dont je me rends compte, c'est que dans la question du développement hydroélectrique dans le nord du Manitoba, sur la rivière Churchill et sur le fleuve Nelson, on est dans une situation où une entente assez vague a été adoptée. Mais cette entente-là n'a jamais été appliquée et on est obligé, encore presque 20 ans plus tard, de revenir devant le Parlement, de faire d'autres ententes pour appliquer l'entente de 1977.

(1030)

Alors je pense qu'il est important quand on en arrive à des nouvelles définitions de territoire, des nouvelles définitions de droits, qu'il soit clair qu'on établisse des organismes qui ont la compétence pour statuer sur les différends.

C'est exactement ce que vient faire le projet de loi C-55 qui est à l'étude ce matin. Ce projet de loi vient établir un office des droits de surface du Yukon. Comme le titre de l'organisme l'indique, c'est un organisme qui va statuer sur les droits de surface, c'est-à-dire que c'est un organisme qui va être constitué et auquel les personnes morales ou physiques vont pouvoir s'adresser s'il y a débat, s'il y a contestation, s'il y a différend.

Les membres de l'office vont être nommés par le gouvernement fédéral. Il peut y avoir jusqu'à onze membres et la moitié de ces membres seront nommés sur recommandation des Premières nations du Yukon. Je pense que cet aspect-là est important, parce que les objets sur lesquels cet office aura à statuer concernent directement les populations autochtones, les nations amérindiennnes du Yukon.

Alors, je pense qu'il est important que les gens du Yukon, comme les gens du Canada ou les gens du Québec, sachent que lorsque des différends surviendront, il y aura disons parmi les membres du «tribunal»,-ce n'est pas tout à fait un tribunal, c'est un office qui va porter certains jugements-parmi les membres de l'office il y a des personnes qui connaissent bien la réalité autochtone. Je pense que c'est important, parce qu'en matière de justice comme dans d'autres domaines, lorsqu'on porte jugement sur des situations, des faits qui concernent des cultures différentes, des traditions différentes, ceux qui sont en position de porter un jugement doivent bien comprendre le point de vue des différentes personnes de peuples différents qui s'adressent au tribunal.


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Je pense qu'il est heureux que dans la loi il y ait au moins 50 p. 100 des membres qui soient recommandés par les nations autochtones. Le contraire me surprendrait, mais je compte bien que les nations autochtones du Yukon recommandent la nomination de membres issus de leur communauté.

Ce qui me fait dire ça, c'est que j'ai vu dans le projet de loi un article, à un moment donné, où on dit que les membres de l'office ne sont pas nécessairement originaires du Yukon. Est-ce que ça veut dire que quelqu'un qui est de Montréal, d'Ottawa ou de Saskatoon serait nommé sur ce tribunal? En tout cas, je m'interroge. Je suis sûr qu'il y a au Canada des gens qui sont parfaitement compétents pour statuer sur les objets qui seront portés devant cet office. En tout cas, moi de prime abord, je vois plutôt des gens qui viennent du Yukon qui font partie de cet office et qui sont en mesure de porter un jugement sur les faits qui sont présentés devant eux, en tenant compte, et je le rappelle, du point de vue culturel des populations autochtones, des nations autochtones qui s'adresseront à l'office pour trancher.

Comme je le disais, l'essentiel du projet de loi, c'est l'institution de cet office. C'est de dire comment il va être constitué. C'est de statuer sur son fonctionnement. C'est de définir ses responsabilités, sa juridiction. C'est aussi de préciser son mode de financement. Ce sera le gouvernement fédéral qui va en défrayer les coûts du mode de financement.

(1035)

On en discutera peut-être en comité un peu plus parce que lorsqu'il est question de coûts dans le climat actuel, au Canada, les gens deviennent nerveux et on a l'impression que l'objectif premier, l'objectif principal est de couper les dépenses. Pourtant, on sait que, dans le fond, tout ce qui est recueilli au Canada est pour donner des services à la population, pour voir à ce que la population ait des services adéquats. En fin de compte, c'est le bonheur des gens qui prime. Ce n'est pas nécessairement le bonheur des banquiers, le bonheur des créanciers, le bonheur de la haute finance. Il faut regarder, comme homme politique, quel est l'ensemble de l'intérêt général et il faut statuer en fonction de l'intérêt commun des Canadiens. Mais tout ceci n'est qu'un aparté.

Je pense que lorsqu'on va en discuter en comité, peut-être que certains vont faire des réflexions en disant: comment se fait-il que c'est encore le gouvernement qui paye pour cet office? Je pense que c'est normal. C'est normal, comme c'est le gouvernement aussi qui, au Canada, doit défrayer les coûts des tribunaux, qui défraye les coûts d'un grand nombre d'offices qui doivent avoir une certaine indépendance financière pour pouvoir exercer leur juridiction. Je ne pense pas qu'il soit dans l'intérêt du Canada, du Québec ou des Premières nations du Yukon de faire en sorte que l'office qui sera constitué en vertu de la loi C-55 soit inopérant parce que mal financé.

Par la nature de mon intervention, vous voyez que mon parti est favorable à l'adoption de cette loi C-55. Il est évident qu'en comité, nous examinerons un certain nombre d'articles. Dans le fond, c'est très complexe. Face à toutes ces situations, le Canadien moyen qui se penche sur la question veut que justice soit faite. Le Canadien moyen veut bien que les populations autochtones puissent obtenir toutes les garanties nécessaires à leur survie et à leur développement comme peuple. Je pense que c'est important et qu'au Québec on l'a compris.

Vous savez que le gouvernement du Québec a reconnu les nations autochtones en territoire québécois. Cela a été reconnu par une motion à l'Assemblée nationale du Québec. Vous savez que certains développements se font depuis l'élection du Parti québécois. Des propositions ont été faites et je pense que si l'on met de côté certaines prises de position qui sont peut-être des prises de position de négociation, ou pour le moins des prises de position ayant un intérêt plus médiatique qu'autre chose, pour les Premières nations au Québec, un nouveau climat est apparu. Des propositions fermes ont été faites par le gouvernement du Québec et d'autres propositions vont suivre.

Je pense que la population du Québec est sympathique à l'idée de faire des propositions, comme la population canadienne, dans son ensemble, est sympathique à l'idée d'en arriver à un terrain d'entente acceptable pour tous les peuples qui sont au Canada, que ce soit le peuple québécois, les peuples amérindiens, les nations amérindiennes et les autres personnes vivant au Canada.

Il sera important qu'en comité on examine le projet de loi avec attention, de façon à ce que les Canadiens sachent que le Parlement fédéral a bien fait son travail dans ce domaine, que ce qui a été convenu, ce qui a été adopté dans la loi est quelque chose de raisonnable. Sur des questions comme celle de l'autonomie gouvernementale et des revendications territoriales, on peut parfois faire un travail destructeur. On peut en appeler à des passions, à des préjugés; on peut faire de la désinformation.

Depuis mon arrivée au Comité des affaires autochtones, j'ai compris avec beaucoup plus de justesse la situation des peuples autochtones au Canada, quoique, comme beaucoup de Québécois et de Canadiens, j'étais très sympathique et très réceptif à certaines prétentions des peuples autochtones. On nous présentait des recommandations et des demandes qui étaient liées avec la survie de ces peuples, comme le point de vue de l'identité.

(1040)

Parce que moi, en tant que Québécois, je suis particulièrement sensible quand on parle d'autonomie gouvernementale. Quand on parle de peuples, quand on parle de territoires, quand on parle de droits, je me sens de plain-pied dans mon élément, parce que nous, au Québec, depuis que je suis conscient de la situation politique, depuis au moins le début des années 1960, c'est le langage que nous entendons. C'est le langage que je comprends et ce sont des prises de position que j'ai adoptées. Je pense que c'est important que les peuples gardent leur identité, qu'ils survivent, qu'ils se développent.

À mon sens, quand un peuple disparaît, quand une culture disparaît, quand une identité disparaît, il y a un affaiblissement, j'allais dire de la condition humaine, parce qu'il est important dans le monde d'aujourd'hui de bien comprendre que ce n'est pas dans l'uniformité, ce n'est pas dans le nivelage des différences qu'est le salut. L'avenir est dans la reconnaissance de l'autre, l'avenir est dans la prise de conscience que tous les peuples, toutes les langues, toutes les cultures doivent vivre, doivent se développer et doivent s'épanouir.

Je pense que dans l'étude de ces projets de loi, quand on en débat en Chambre, quand on en débat en comité, il est important de bien examiner les objets sur lesquels on porte notre attention. Il est évident que tous les comités, que ce soit le Comité des ressources humaines ou le Comité de la défense, tous les comités


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ont à bien faire leur travail, mais en ce qui concerne toute la question autochtone au Canada, je pense qu'il est particulièrement important que les parlementaires fassent un travail d'analyse pour prendre les bonnes décisions et aussi qu'ils fassent un travail d'information adéquat.

Sur ces questions, il y a énormément de fausses nouvelles, de rumeurs, d'informations biaisées qui circulent. Quand je parlais aux gens de mon comté du fait qu'il y avait une entente territoriale concernant les 14 nations du Yukon, les gens disaient: «Mais qu'est-ce qui se passe? Est-ce que vous êtes en train de fractionner le pays, est-ce que vous êtes en train d'accorder-parce que souvent les gens disent accorder ou donner-le Canada ou des parties de nos taxes aux nations autochtones?» Je leur disais: «Évidemment, non.»

Et quand on explique aux gens, qu'on leur dit: «Voilà ce qui se passe: il y a des peuples autochtones au Canada, ils ont des droits, il y a des territoires, il faut partager ces territoires, il faut vivre ensemble. Alors il faut définir une façon de vivre et une façon de définir cette vie ensemble, et c'est en négociant des ententes. Ce qui se passe au Yukon, c'est une entente qui a été négociée, qui va être ratifiée par le Parlement fédéral.» Ce qui s'est passé à la Baie James, c'est une entente qui a été négociée. Ce qui se passe actuellement dans le nord du Québec et ce qui se passe avec d'autres nations autocthones au Québec, c'est ça, ce sont des négociations.

Dans ma région, il y a une nation montagnaise, les Montagnais du Lac-Saint-Jean, qui sont en train de négocier au sujet des revendications territoriales. Ils en sont venus, l'année dernière, à une entente avec Hydro-Québec sur des redevances concernant le transport de l'électricité. Je pense que peu à peu, on en arrive à une façon de vivre ensemble qui sera acceptable et au profit de tout le monde au Canada.

Mais, je pense qu'il faut informer la population, il faut qu'elle comprenne vraiment ce qui se passe, quels sont les objectifs et dans quel cadre nous allons définir l'avenir. Parce que si ce n'est pas fait, les gens se braquent, les gens s'opposent. Ils formulent des réserves qui deviennent pratiquement une fin de non-recevoir. Je pense que c'est important d'établir un cadre, comme au Québec nous sommes en train d'en établir un, surtout en ce qui concerne la question de la permanence des frontières actuelles du Québec. Je pense que dernièrement, cela a été affirmé par mon parti, le Bloc québécois. Cela a été affirmé aussi par les gens du Parti québécois. La question des négociations avec les peuples autochtones est ouverte, mais il y a une chose qui n'est pas ouverte en ce qui concerne le territoire du Québec, ce sont ses frontières.

(1045)

J'ai confiance que de la même façon qu'il y a eu entente au Yukon, au Nunavut et ailleurs au Canada avec les populations autochtones, à l'intérieur des frontières du Québec, nous allons nous entendre, nous autres Québécois, avec les nations autochtones qui partagent ce territoire. Ce territoire, les Québécois y sont depuis plus de 350 ans. Personnellement, mon ancêtre est arrivé au Canada en 1636. Je ne suis pas de France, je ne suis pas d'ailleurs, je suis du Québec. Je ne conçois pas que je puisse être ailleurs ou que je ne puisse pas vivre sur ce territoire qui est le mien.

Je considère que le territoire du Québec, c'est notre territoire, mais je sais très bien qu'il y a d'autres personnes au Québec qui considèrent que certaines parties du territoire du Québec leur appartient. Comme on est ensemble et qu'on doit vivre ensemble, nous devons nous entendre. Il faut négocier.

J'ai confiance qu'on va arriver, partout au Canada, à des ententes comme celle qui est survenue au Yukon. Et on va faire la même chose au Québec. Mais pour s'entendre, il faut être clairs sur nos objectifs et il faut que les ententes qu'on signe soient bien analysées et bien expliquées. C'est pour cela que nous allons examiner attentivement le projet de loi en comité. J'ai beaucoup de questions et je n'ai quand même pas l'intention de faire ici le débat que nous voulons faire en comité, mais nous voulons nous informer, nous voulons savoir pourquoi, par exemple, tel article stipule, à un endroit particulier, que si des membres de l'Office étaient en conflit d'intérêts majeur, ils ne pourraient statuer sur une question. J'ai l'impression que lorsqu'on est en conflit d'intérêts, on ne doit pas statuer sur quelque question que ce soit.

C'est pour vous dire que, dans le fond, en ce qui concerne le projet de loi, le Bloc québécois est favorable, parce que cela vient créer un organisme qui va faire qu'on n'aura pas de problème ou moins de problèmes dans l'application des ententes qui sont survenues sur l'autonomie gouvernementale et la revendication territoriale. Je pense que c'est important que l'on crée un organisme qui va pouvoir fonctionner dans l'intérêt de tout le monde.

C'est ce que nous examinerons en comité. Nous poserons des questions. Dans un premier temps, d'après ce que je peux voir, nous présenterons des amendements de façon à ce que le comité fonctionne de la meilleure façon possible. Nous ne voulons pas prendre prétexte d'une opposition au projet de loi ou à certains articles du projet de loi pour faire avorter, de façon détournée, les ententes qui sont intervenues au Yukon. Ces ententes doivent être appliquées. C'est absolument important. Nous n'avons pas le droit de décevoir des populations, de décevoir les nations amérindiennes, de décevoir les gens du Yukon qui espéraient cette entente.

Rappelons-nous ce qui s'est passé sur le fleuve Nelson et la rivière Churchill au Manitoba. Je pense que des situations comme celles-là ne doivent pas survenir ailleurs. C'est pour cela qu'il doit y avoir des organismes qui sont en mesure de statuer sur l'application d'ententes. Le projet de loi qui est devant nous vise à définir un organisme comme celui-là.

Soyez assurés que le Bloc québécois va faire tout ce qui est possible et imaginable pour que cet organisme soit le plus fonctionnel possible, le plus efficace possible, de façon à ce que les ententes qui sont intervenues de bonne foi entre le gouvernement du Canada, le gouvernement du Yukon et les nations du Yukon soient mises en oeuvre au bénéfice des populations du Yukon, des nations du Yukon, du peuple canadien et du peuple québécois.

(1050)

[Traduction]

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'entamer le débat de deuxième lecture du projet de loi C-55 au nom du Parti réformiste. Il faut reconnaître l'importance de l'industrie minière pour le Yu-


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kon. Il s'agit de la principale activité non gouvernementale dans un territoire qui dépend à plus de 70 p. 100 des dépenses du gouvernement fédéral.

On pourrait, à certains égards, considérer le débat sur le projet de loi C-55 comme la conclusion de toute la discussion entreprise lors de l'étude des projets de loi C-33 et C-34, et la confirmation des principes qui y étaient contenus.

L'industrie minière est en pleine campagne publicitaire autour du slogan: «Garder l'exploitation minière au Canada». Les gouvernements ont eu tendance à tenir cette industrie pour acquise dans plusieurs provinces ou territoires canadiens, car les activités de l'industrie y sont devenues très difficiles et coûteuses, elles prennent beaucoup de temps et sont empreintes d'incertitude. Nous déplorons en outre un régime fiscal canadien qu'on peut considérer hostile par rapport à ce qui existe ailleurs dans le monde.

Il y a dans ma circonscription plusieurs exploitations minières en activité, dont la BHP Utah Mine, la Westmin Mine, la Texada Mines et la Quinsum Coal. Cette dernière compte d'ailleurs 25 employés qui travaillaient auparavant à la Westray Mine, en Nouvelle-Écosse, où il s'est produit une tragédie, comme nous le savons tous. Les exploitants du secteur minier s'estiment mal traités par les décisions des pouvoirs publics.

Je me rends bien compte qu'il y a des investissements refoulés au Yukon qui attendent pour se réaliser que l'incertitude se dissipe une fois pour toutes autour de cette législation, c'est-à-dire les projets de loi C-33, C-34 et C-55. Je comprends et j'accepte ce fait. Nous nous trouvons dans une situation où la bureaucratie a toujours raison.

À Whitehorse, à mon étonnement, les véhicules du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien portent l'indication «Affaires indiennes et du Nord Canada». On observe en effet au sein de ce ministère un intérêt plus marqué pour les affaires indiennes que pour le développement du Nord. On s'y préoccupait autrefois de répondre aux besoins de l'industrie minière, mais d'autres priorités y retiennent maintenant l'attention. Cela me paraît symbolique. On explique que cela se traduit mieux en français, mais ce n'est pas une raison suffisante. J'ai constaté le même phénomène dans ma carrière antérieure à Parcs Canada, où j'ai toujours pensé que les parcs canadiens étaient établis pour la jouissance des contribuables canadiens.

Au sein de la Direction générale des parcs nationaux, le groupe surtout chargé de servir le public était les Services des gardes de parc. Nous avons été témoins d'une rivalité au sein du ministère entre les gardiens de parc et les naturalistes. C'est le programme d'action de ces derniers qui a fini par l'emporter. Si nous voulons voir progresser ce ministère, nos chances sont beaucoup plus grandes si nous sommes du côté des naturalistes. Cela a maintenant eu des répercussions sur les énoncés de mission de Parcs Canada de bien des façons.

On a passé cela en douce à la population canadienne sans qu'elle s'en rende vraiment compte. Pourquoi, pourrait-on se demander, la ministre des Ressources naturelles est-elle responsable des Métis du Canada et le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien est-il responsable des activités minières au nord du 60e parallèle, en d'autres termes, dans les territoires? Le Nord souffre déjà parce que le gouvernement fédéral et sa bureaucratie y font ce qu'ils veulent. Je recommanderais de ne pas aggraver la situation en laissant un ministre y agir à sa guise.

(1055)

La population du Yukon n'est que de 28 000 habitants. Je suis certain qu'ils réussiront à faire fonctionner de mauvaises règles. Je sais que, l'an dernier, l'économie du Yukon a chuté de 19 p. 100 en raison de la fermeture de l'une des principales mines en exploitation, la mine Faro. Je sais aussi que l'économie des Territoires du Nord-Ouest a connu un ralentissement.

Le projet de loi C-55 vise à honorer l'engagement de mettre en oeuvre l'accord sur le règlement des revendications territoriales qui est protégé par la Constitution et qui correspond au projet de loi C-33. Le projet de loi C-55 confirme peut-être les principes énoncés dans les projets de loi C-33 et C-34, mais il ne règle absolument pas les différends et, en soi, ne résout aucun conflit pouvant survenir.

Les mécanismes ou les offices institués ne pourront pas être meilleurs, plus fiables et mieux intentionnés que les gens qui en feront partie. Ce n'est d'ailleurs qu'un début.

Depuis l'ouverture de l'actuelle législature en janvier 1994, nous avons conclu d'importants règlements des revendications territoriales des Dénés et des Métis du Sahtu, règlements de l'ordre de 197 millions de dollars. À l'égard du Yukon, nous avons par ailleurs conclu un règlement de l'ordre de 163 millions de dollars pour lequel nous tenons ce débat aujourd'hui.

Il ne s'agit pas là du montant total en cause. Les coûts de mise en oeuvre liés à ces revendications représentent encore 263 millions de dollars, ce qui porte le total à 596 millions de dollars selon les comptes publics divulgués cette semaine. D'après ces mêmes comptes publics, il y a des éléments de passif éventuel de 8,3 milliards de dollars liés à des revendications en suspens et à d'éventuels différends.

Même si le ministre des Finances a dit que nous sommes endettés jusqu'au cou, le gouvernement continue de faire fi de la situation financière précaire que nous avons créée et il continue d'appuyer le règlement des revendications territoriales.

Outre les 8,3 milliards de dollars dont je viens de parler, il y a encore 460 poursuites et revendications autochtones particulières auxquelles aucune somme n'est encore accolée et qui ne font pas partie du passif connu.

En fin de compte, personne ne sait à quoi équivaut le montant total. C'est cela qui est inquiétant. Si le ministre des Finances se préoccupe de la situation financière, il devrait peut-être commencer par examiner la politique et le mandat de règlement du ministre de. . .

Le Président: Nous allons poursuivre le débat après la période des questions. Je redonnerai la parole au député à ce moment-là.

7028

Comme il est 11 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Français]

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

M. Martin Cauchon (Outremont, Lib.): Monsieur le Président, il est grand temps que les députés bloquistes en cette Chambre reconnaissent et mettent en valeur les efforts que les deux paliers de gouvernement, ainsi que les Québécoises et Québécois du milieu, ont consacrés pour donner une nouvelle vocation au Collège militaire royal de Saint-Jean.

Le 19 juillet dernier, les deux gouvernements concluaient une entente dans laquelle le fédéral versera 25 millions de dollars sur cinq ans pour un centre d'études universitaires. Le Québec sera maître d'oeuvre des activités du centre à compter de septembre 1995. Tous s'entendent pour dire que cette intervention donnera un nouveau souffle à l'économie locale.

De plus, au début septembre, un comité de travail composé de gens d'affaires, de syndicats, d'institutions financières et d'organismes socio-économiques venaient s'ajouter au partenariat afin d'établir un plan d'action pour l'adaptation de la main-d'oeuvre et la diversification de l'économie des communautés environnantes.

Le collège est toujours en vie, muni d'une nouvelle vocation à long terme, preuve, encore une fois, des mérites de s'associer aux efforts de différents intervenants du milieu.

* * *

LA SEMAINE DU CANCER DU SEIN

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, B.Q.): Monsieur le Président, j'aimerais souligner à la Chambre que la Semaine du cancer du sein se termine. J'espère que cette semaine a donné l'occasion à tous les acteurs politiques et scientifiques de réfléchir sur l'importance de la recherche et du soutien financier aux groupes d'aide aux victimes afin d'enrayer cette maladie qui afflige de plus en plus de femmes.

Cette réflexion est importante parce que, au-delà des grands énoncés en faveur de la recherche médicale dans ce domaine, plusieurs groupes de femmes s'interrogent sur la sincérité des propos de la ministre de la Santé. Par exemple, le gouvernement fédéral va engloutir 12 millions de dollars dans un forum sur la santé qui est voué à l'échec, pendant que la recherche sur le cancer du sein aurait besoin de sommes additionnelles pour effectuer des percées importantes dans ce domaine.

Le gouvernement du Canada doit transmettre maintenant un message clair aux Canadiennes et aux Québécoises.

* * *

[Traduction]

LES PENSIONS

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, en réponse à une demande venant de ma circonscription, Okanagan-Shuswap, je presse la Chambre d'appuyer la Canadian Alliance of British Pensioners dans sa lutte pour faire indexer ici au Canada les pensions versées par le Royaume-Uni. Les pensions britanniques sont déjà indexées au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Europe.

Si ces pensions étaient indexées aux niveaux actuels, les contribuables canadiens seraient soulagés d'une partie de leur responsabilité de soutien d'un grand nombre de ces pensionnés qui touchent, dans certains cas, une maigre pension de 10 dollars par semaine après avoir versé des cotisations obligatoires au régime toute leur vie.

Beaucoup de pensionnés britanniques qui vivent maintenant au Canada ont été nos alliés ou ont servi dans le personnel de soutien durant la Seconde Guerre mondiale, mais aujourd'hui ils vivent dans la pauvreté, malgré tous leurs efforts, à cause de l'inflation mondiale, qui a grignoté la valeur de leur revenu de retraite.

Leur cause est digne de notre appui.

* * *

[Français]

LA REPRISE ÉCONOMIQUE

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount, Lib.): Monsieur le Président, presque un an après l'élection d'un gouvernement libéral, la reprise économique est bien amorcée au pays et les Canadiens et Canadiennes ont repris confiance. Cette reprise rejoint les consommateurs. Statistique Canada nous a appris dernièrement qu'il y a eu une hausse de presque 10 p. 100 dans la consommation au pays cette année. Plus de 240 000 nouveaux emplois ont été créés depuis un an, dont plus de 60 000 au Québec. Les exportations sont en hausse, de même que les profits des compagnies.

Voilà les preuves. Le gouvernement libéral remplit ses engagements électoraux, et la confiance se répandit au pays. J'invite l'ensemble de mes collègues du gouvernement et de l'opposition à unir leurs efforts afin de continuer à offrir aux Canadiennes et aux Canadiens l'intégrité, la compétence et le leadership.

* * *

[Traduction]

LA FONDATION CANADIENNE DU CANCER DU SEIN

M. Dennis J. Mills (Broadview-Greenwood, Lib.): Monsieur le Président, on estime qu'environ 17 000 femmes au Canada auront le cancer du sein en 1994. C'est pour lutter contre cette maladie qu'a été créée la Fondation canadienne du cancer du sein à Toronto, en 1986, sous la présidence de Nancy Paul.

Comme l'incidence du cancer du sein augmente de 15 p. 100 par année, la fondation consacre ses énergies à recueillir des fonds pour la recherche, le traitement et la sensibilisation.

Cette semaine, elle organise, pour la troisième année consécutive, des activités commanditées par Honda dans sept grandes villes canadiennes. Ces activités, dont le thème est «Run for the Cure», se dérouleront dans les villes de Toronto, de Vancouver, de Calgary, de Victoria, d'Edmonton, de Winnipeg et d'Ottawa le dimanche 23 octobre. Nous souhaitons bonne chance à tous les participants et invitons tous les Canadiens à les appuyer dans ces activités.


7029

[Français]

L'ENVIRONNEMENT

M. Francis G. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso, Lib.): Monsieur le Président, la ministre de l'Environnement a annoncé que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale sera proclamée bientôt.

Les quatre principaux règlements qui balisent l'application de la loi ont été modifiés afin de les rendre plus sévères que ceux dévoilés par le gouvernement précédent.

La ministre a également annoncé que trois amendements seront déposés en cette Chambre afin de préciser davantage certaines dispositions importantes dans la loi. Premièrement, le principe de l'aide financière des participants aux commissions d'évaluation sera confirmé.

Deuxièmement, les recommandations des commissions devront être examinées par le Cabinet. Si le Cabinet décide de ne pas suivre ces recommandations, il devra désormais rendre des comptes à la population et expliquer pourquoi.

Troisièmement, le principe d'une seule évaluation par projet, si cher à nos collègues d'en face, sera confirmé dans la loi afin de ne laisser aucune ambiguïté à ce sujet.

Il est donc clair que les engagements contenus dans le livre rouge seront respectés.

* * *

(1105)

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, B.Q.): Monsieur le Président, la communauté portugaise habitant le Québec et le Canada est offusquée par l'attitude du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration qui exige de leurs parents un visa pour venir leur rendre visite. Cette communauté composée de 300 000 personnes, dont 60 000 au Québec, considère comme inacceptable que le Portugal soit le seul pays de la Communauté économique européenne qui soit soumis à une telle exigence.

Le Bloc québécois estime que le maintien de cette mesure est injustifiable, compte tenu que le ministère s'apprête à dispenser les touristes hongrois d'un visa et qu'il a supprimé cette exigence pour les Coréens.

Monsieur le ministre, prenez vos responsabilités et cessez cette discrimination sans aucun fondement!

* * *

[Traduction]

LE PROJET HIBERNIA

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, le 19 octobre, la ministre des Ressources naturelles a garanti, dans cette enceinte, aux députés que son gouvernement prévoyait un taux de rendement raisonnable et juste sur nos investissements dans le projet Hibernia. Cependant, dans une lettre datant de juin 1994, le président de la Société d'exploitation et de développement d'Hibernia a déclaré:

On tirera de ce projet des recettes suffisantes pour couvrir tous les coûts bruts d'investissement et d'exploitation, mais on n'obtiendra aucun rendement sur nos investissements.
Même cette déclaration est sujette à caution. Il suffit de faire des calculs très simples, c'est-à-dire diviser 16 milliards de dollars, le coût total du projet, par 615 millions de barils de réserves récupérables pour obtenir un chiffre de 20,75 $ le baril. Étant donné que le prix du pétrole s'établit actuellement à 17,55 $ le baril, il est non seulement difficile de prévoir un rendement sur l'investissement, mais également pas évident de voir comment le projet pourra couvrir les coûts d'investissement.

Il serait bon que la ministre puisse nous expliquer un jour ces incohérences.

* * *

LES INSTITUTS FÉMININS DU CANADA

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais profiter de cette occasion pour rendre hommage aux Instituts féminins du Canada, tout particulièrement aux membres des instituts féminins du comté de Perth au bureau d'Avonton qui célèbre son 70e anniversaire de service à la collectivité.

Les Instituts féminins du Canada ont été créés pour être une organisation à caractère éducatif axée sur les principes de la saine nutrition, de la salubrité des aliments, de la bonne santé et de l'excellente condition physique, ainsi que sur le droit des femmes d'avoir accès à des renseignements à jour sur des questions qui les touchent, elles et leur famille.

Il y a plus de 16 000 membres en Ontario. Cette organisation contribue à améliorer, dans une certaine mesure, notre qualité de vie.

Monsieur le Président, saviez-vous que ce sont les instituts féminins qui ont lutté pour la pasteurisation du lait, les panneaux de signalisation aux passages à niveau, les indications claires sur les contenants de produits dangereux et les lignes blanches sur nos routes dans une perspective de sécurité. Ce ne sont là que quelques-unes des choses que nous tenons actuellement pour acquises au Canada, mais qui ont amené les instituts féminins à se battre à une certaine époque.

Je félicite tous les membres de cette organisation.

* * *

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, je félicite les agriculteurs de l'Ouest qui, hier, à Regina, ont manifesté leur ferme appui en faveur de la Commission canadienne du blé. Il est grand temps que la majorité silencieuse des agriculteurs de l'Ouest se disent vraiment favorables à ce qu'un dirigeant du secteur agricole a qualifié d'agence de vente de calibre international.

J'ai été grandement préoccupé de constater qu'il y en a quelques-uns qui, partisans d'un système de commercialisation double, se sont dits prêts à violer les lois de ce pays pour arriver à leurs fins. «Essayez de m'attraper», a dit l'un d'eux.


7030

Je signale à la Chambre que notre système de commercialisation à guichet unique pour le blé et l'orge fait actuellement l'objet d'une attaque concertée de la part de quelques-uns de la profession qui espèrent en recueillir des gains au détriment des autres.

Encore une fois, mes félicitations à la majorité des agriculteurs de l'Ouest, qui sont en faveur de la Commission du blé, d'avoir exprimé ouvertement leur opinion. Continuez le combat! Le gouvernement est avec vous.

* * *

M. AL HOPKINS

Mme Bonnie Brown (Oakville-Milton, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais rendre hommage à un dirigeant d'entreprise canadien. M. Al Hopkins, président d'Algoma Steel, a reçu dernièrement, dans le cadre de son contrat de travail, une prime de rendement de 400 000 $, mais il a retourné la somme.

La société Algoma Steel est encore confrontée à des difficultés financières et les employés, qui possèdent 60 p. 100 des actions ordinaires, ont leur salaire gelé. M. Hopkins s'est rendu compte que, en acceptant cette prime, il aurait sapé l'esprit d'équipe qu'il essayait de créer. Comme il le dit lui-même: «L'ingrédient essentiel, c'est la confiance. Une fois la confiance établie, on peut faire un tas de choses.»

M. Hopkins résiste donc au désir de s'enrichir égoïstement, une tendance très répandue ces années-ci. Il comprend la nécessité de l'entraide, de la confiance et de l'esprit d'équipe. M. Hopkins est un dirigeant d'entreprise des années 90 qui s'inscrit dans la plus pure tradition canadienne.

Je vous prie donc de l'applaudir avec moi aujourd'hui.

* * *

(1110)

[Français]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, B.Q.): Monsieur le Président, nous avons appris avec consternation les événements de Port Berry et Brockton High School, où sept personnes, trois policiers et deux enseignants ont été blessés par balle dans la journée d'hier. J'aimerais offrir en mon nom et au nom de mes collègues du Bloc québécois mes sympathies à l'endroit de toute la population ontarienne.

Les Québécois et Québécoises sont sensibles à ce genre d'acte de violence. Ils ont encore frais à la mémoire les tragiques événements de l'École polytechnique et ceux de l'Université Concordia, pour ne nommer que ceux-là. Ces événements resteront gravés dans notre mémoire collective. Nous ne pouvons que réitérer notre appel au ministre de la Justice pour qu'un projet de loi assurant un meilleur contrôle des armes à feu soit déposé en cette Chambre le plus rapidement possible.

[Traduction]

Encore une fois, je tiens à témoigner ma sympathie à toutes les personnes touchées par cet absurde acte de violence.

* * *

L'ÉCONOMIE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'ai toujours dit que le programme d'infrastructure était un programme que les contribuables ne pouvaient pas se permettre, compte tenu du déficit et de la dette.

Puisque le gouvernement est déterminé à dépenser les recettes fiscales, j'ai appuyé un projet d'infrastructure qui était en partie financé par le secteur privé. Si nous devons augmenter la dette que nous allons imposer à nos enfants et à nos petits-enfants, aussi bien en faire profiter tout le monde.

Ce projet avait l'avantage d'être fidèle aux promesses faites dans le livre rouge au sujet de la création de liens entre les transports et les communications, de l'eau et des eaux usées. Il n'est nulle part question, dans le livre rouge, de terrains pour les jeux de boules, de canots, de temples de la renommée ou de centres commerciaux. Voilà qui inspire la méfiance chez les électeurs.

Étant donné que le ministre des Finances vient tout juste de constater que le déficit et la dette sont aussi importants que les réformistes le disaient, il faudrait mettre fin à ce programme immédiatement.

Ce matin, la dette d'élevait à 535 119 203 409 $.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Nelson Riis (Kamloops, N.P.D.): Monsieur le Président, au cours des dernières heures, les Canadiens ont été informés de nouvelles morts liées à des vols à main armée et d'autres cas de mauvaise utilisation des armes à feu. Je dis bien: «de mauvaise utilisation des armes à feu».

Étant donné la mauvaise utilisation qui se fait constamment des armes à feu et l'augmentation des crimes violents mettant en cause l'utilisation d'armes à feu, n'est-il pas temps que le ministre, le Cabinet, le gouvernement et le Parlement du Canada écoutent ce que les Canadiens réclament, lorsqu'ils déclarent que la mauvaise utilisation des armes à feu ne doit absolument pas être tolérée dans notre pays et demandent au ministre de la Justice de proposer une mesure législative modifiant le Code criminel pour préciser que l'on ne tolère absolument pas une telle pratique dans notre pays?

* * *

LA PETITE ENTREPRISE

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, le Comité permanent de l'industrie vient de rendre public son rapport sur les banques et les petites entreprises.

J'espère que le gouvernement donnera suite à ce rapport de façon à instaurer au Canada un climat plus propice aux affaires.

Je remercie toutes les personnes qui ont aidé le comité à produire ce rapport. Je remercie toutes les personnes de ma circonscription, Peterborough, qui ont comparu devant le comité

7031

ou lui ont fait parvenir des mémoires, ainsi que celles qui ont comparu à Peterborough devant le groupe de travail sur les petites entreprises. Je remercie la Chambre de commerce de Peterborough, les banques locales et tous les gens d'affaires pour les bons conseils qu'ils m'ont prodigués durant le processus. Je remercie enfin le président et le personnel du comité permanent ainsi que les députés membres de ce dernier.

Continuons à prendre soin des affaires au Canada.

* * *

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

Mme Elsie Wayne (Saint John, P.C.): Monsieur le Président, j'aimerais vous faire part de mes préoccupations au sujet de la réforme de la TPS. Ce qui m'inquiète surtout, c'est que les gouvernements municipaux risquent de perdre leur droit au remboursement de la TPS.

En tant qu'ancienne mairesse, je connais très bien les avantages de l'exonération dont bénéficient les municipalités. Le fait d'imposer la TPS aux municipalités signifiera un fardeau financier considérable pour les gouvernements locaux et un fardeau encore plus lourd pour les contribuables, voire une augmentation des taux d'imposition.

Dans tout le Canada, les gouvernements municipaux souffrent, comme tous les autres ordres de gouvernement, d'un sérieux manque à gagner. Déjà, les services locaux sont menacés malgré tous les efforts en vue de les rendre plus efficaces.

Je demande instamment au ministre des Finances et au ministre du Revenu national de s'engager à ne pas alourdir le fardeau fiscal des gouvernements municipaux en réformant la TPS et de maintenir le système de remboursement qui avait été négocié avec le gouvernement précédent.

* * *

L'EMPLOI

M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, apparemment, cette semaine, les Canadiens de l'Atlantique ont été encouragés à ramasser leurs affaires et à partir se chercher du travail dans l'Ouest, et le plus vite possible.

J'ai des nouvelles pour le député de Capilano-Howe Sound. Le gouvernement croit que tous les Canadiens méritent de préserver la dignité que confère un emploi. C'est grâce au respect que nous portons aux besoins variables des différentes régions du Canada et au soutien offert aux régions que nous avons bâti notre pays. C'est la clairvoyance de la politique d'immigration de sir Wilfrid Laurier qui a permis le développement de l'Ouest.

(1115)

Je rappelle à tous les députés que, depuis octobre dernier, 275 000 nouveaux emplois ont été créés au Canada, dont 97 000 dans la région de l'Atlantique. C'est un important facteur d'espoir pour notre région. Il est permis d'espérer que notre économie s'améliorera.

Les intérêts du Canada atlantique tiennent à coeur au gouvernement. Les intérêts de toutes les provinces lui tiennent à coeur. Le Canada lui tient à coeur.

_____________________________________________


7031

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE CENTRE DE SÉCURITÉ DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. Michel Gauthier (Roberval, B.Q.): Monsieur le Président, hier, alors qu'elle était interrogée en cette Chambre, la vice-première ministre s'est contentée de rappeler que l'espionnage au Canada se faisait en vertu des lois canadiennes. En aucun temps elle n'a pu nous confirmer qui contrôlait le Centre de sécurité des télécommunications au Canada. Pourtant, rappelons-nous que c'est sous l'existence de lois canadiennes que les agents de la GRC posaient des bombes et volaient des listes de membres du Parti québécois.

Le premier ministre peut-il nous affirmer qu'aucun gouvernement démocratiquement élu au Canada, aucun parti politique, pas plus que le mouvement souverainiste du Québec, n'est espionné à la demande du gouvernement du Canada par des services de renseignement étrangers?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tous les services de sécurité du Canada, qui sont des services nécessaires dans toute démocratie, suivent les règles établies par le Parlement du Canada.

Je peux personnellement affirmer que je n'ai jamais demandé d'espionner quelque parti ou quelque politicien que ce soit au Canada. Je suis un démocrate et je fais le combat, la visière levée. Lorsqu'il s'agit de partis d'opposition, je n'ai pas beaucoup de problèmes, je n'ai pas besoin d'espions. Je ferai la bataille avec les instruments qui sont tout à fait publics et nous allons la gagner, la bataille.

M. Michel Gauthier (Roberval, B.Q.): Monsieur le Président, vous aurez noté que le premier ministre refuse de confirmer ou d'infirmer le fait que le gouvernement du Canada aurait pu demander à des gouvernements étrangers d'espionner des partis politiques au Canada ou des gouvernements démocratiquement élus. Il a simplement dit que lui ne l'avait pas fait personnellement. Ce n'est pas très rassurant.

Hier, la vice-première ministre déclarait à cette Chambre et je la cite:

. . .que les activités du CST sont totalement assujetties aux lois canadiennes, y compris le Code criminel, la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Loi sur la protection de la vie privée et la Charte des droits et libertés, et ils respectent la loi.
C'est ce qu'elle a dit et je voudrais demander au premier ministre s'il peut nous expliquer comment sa vice-première ministre peut être aussi catégorique dans ses affirmations, alors que, de toute évidence, le CST n'est contrôlé par personne et ne rend compte à personne?


7032

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'autorité est bien connue. C'est un organisme qui relève du ministre de la Défense et s'il y a des problèmes particuliers, le ministre de la Défense a accès au premier ministre. C'est la ligne d'autorité.

En bout de ligne, c'est toujours le premier ministre qui est responsable pour ce gouvernement-ci. Ce que la ministre a dit hier, c'est que nous demandons à tous ces organismes de respecter les lois. Il n'y a pas de pays plus démocratique que le Canada. Vous en êtes la preuve. C'est le seul pays où le chef et le parti de l'opposition veulent détruire le pays dans lequel ils se trouvent. Cela n'existe dans aucune démocratie.

Alors, je ne suis pas gêné de me lever ici et de vous dire que le Canada, c'est le pays le plus démocratique qui soit. Je demande à tous les organismes fédéraux de respecter la loi. Le Canada va demeurer le plus grand pays démocratique du monde, le seul pays qui permet d'avoir comme chef de l'opposition quelqu'un qui veut détruire le pays qu'il devrait normalement servir.

M. Michel Gauthier (Roberval, B.Q.): Monsieur le Président, je veux tout simplement rappeler au premier ministre qu'il y a eu une campagne électorale, les enjeux ont été clairs et nous sommes le résultat de cette campagne électorale. Ce n'est pas là la question.

La question est la suivante: Comment le premier ministre peut-il croire que ses réponses évasives sur cette question peuvent rassurer les Québécois, quand on sait très bien que c'est dans le cadre des lois fédérales et sous un gouvernement libéral, dont il faisait partie d'ailleurs, que se sont commis tous les gestes illégaux par la GRC au Québec, notamment le vol de la liste des membres du Parti québécois?

(1120)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la question, l'imaginaire sur l'espionnage existe partout. Je connais un expert en la matière, M. Claude Morin, que peut-être le Parti québécois. . .

Des voix: Oh! Oh!

[Traduction]

Le Président: Je veux demander aux députés d'éviter de se servir d'accessoires quand ils prennent la parole à la Chambre. Cela devient un peu gênant à la longue.

* * *

[Français]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. René Laurin (Joliette, B.Q.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Hier, en Ontario, sept personnes ont été victimes de crimes violents commis avec des armes à feu, l'un dans une école et l'autre lors d'un vol de banque. Ces tragiques événements rappellent l'urgence de mieux contrôler la circulation des armes à feu au Canada, engagement d'ailleurs que l'on retrouve dans le livre rouge et réitéré par le premier ministre lors du Congrès libéral en mai dernier.

Pourquoi le ministre de la Justice retarde-t-il toujours le dépôt de son projet de loi à cet égard?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député a raison de dire que les événements tragiques survenus à Toronto, hier, ne font que nous rappeler l'importance et l'urgence de ce défi. Loin de retarder ses propositions, le ministère de la Justice les prépare avec le plus grand soin.

Je suis rentré cette semaine d'un voyage en Alberta et dans les Territoires du Nord-Ouest, et avant cela j'avais été en Colombie-Britannique et dans le Yukon, dans les Maritimes et le Québec, et au début, en Ontario et dans le centre du Canada. Partout, j'ai parlé avec des groupes intéressés, contribuant à préparer un ensemble de propositions qui sera présenté bientôt à la Chambre et qui portera non seulement sur les armes à feu illégales, mais aussi sur les peines criminelles associées aux utilisations interdites des armes à feu. Ces mesures conduiront à une réglementation prudente, mais nécessaire pour le contrôle des armes à feu de propriété individuelle. C'est notre proposition.

[Français]

M. René Laurin (Joliette, B.Q.): Monsieur le Président, cela fait un an que ce gouvernement est au pouvoir. Depuis un an, on réalise que la moindre mesure législative semble être d'une complexité que l'on ne peut pas comprendre. Tout est prétexte à justifier l'inaction du gouvernement. Or, il s'agit là d'une affaire urgente. Sept personnes ont failli mourir hier.

Le ministre de la Justice admettra-t-il que les délais à déposer son projet de loi sont dus à une opposition très forte au sein même du caucus libéral?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je n'admettrai rien de tel. Le caucus libéral, comme le reste du pays, désire parler de tous les aspects de la question pour être sûr de prendre la bonne décision.

Il y a des points de vue divergents, mais cela ne nous embarrasse pas, nous en sommes fiers. C'est le reflet de la diversité de notre population. Que ce soit au caucus ou au Cabinet, nous parlerons de tous les aspects de cette question, puis nous ferons des propositions réfléchies, auxquelles le pays tout entier aura été sensibilisé du fait de consultations comme celles que j'ai tenues.

* * *

LES SOINS DE SANTÉ

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, hier, le premier ministre a inauguré un cirque médical qui parcourra le Canada pendant quatre ans et qui nous coûtera 12 millions de dollars. Il ne présentera son rapport qu'après les prochaines élections fédérales. Ses recommandations sombreront dans l'oubli parce que les provinces qui, selon la Constitution, sont responsables de la santé ne participent pour ainsi dire pas à ce cirque.


7033

Il nous apparaît clairement que le premier ministre se sert de ce forum pour éviter de s'attaquer aux problèmes du système de soins de santé.

Je demande ceci au premier ministre: Peut-il aujourd'hui proposer une seule mesure concrète pour démontrer que son gouvernement tient vraiment à réformer le système de soins de santé?

(1125)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons lancé le forum hier et nous avons invité des spécialistes de nombreux domaines à nous conseiller. Pendant nos discussions avec eux, nous avons bien entendu précisé qu'ils ont jusqu'à quatre ans et que tous les membres de la commission seraient bénévoles. Personne ne sera payé.

Je leur ai dit que j'aimerais recevoir des rapports au fur et à mesure que divers aspects auraient été couverts de sorte que nous puissions prendre des mesures. Le système de soins de santé canadien est un très bon système, mais il commence à coûter extrêmement cher. Nous tenons absolument à maintenir la gratuité des soins de santé pour tous les Canadiens.

Nous devons consulter les provinces. C'est ce que fait la ministre de la Santé. Je voulais que la population qui n'est pas représentée par des groupes qui ne défendent que leurs propres intérêts ait également son mot à dire. C'est exactement ce qui se passera.

Des rapports seront présentés tous les six mois, ou environ, dès qu'ils seront prêts. Peut-être la commission fera-t-elle quelques suggestions concrètes qui nous aideront à maintenir la gratuité des soins de santé pour tous les Canadiens et nous éviterons d'aboutir à une situation où nous aurions un bon système pour les riches et un mauvais pour les pauvres, comme le souhaiterait le Parti réformiste.

Nous voulons un système pour l'ensemble des Canadiens. Nous voulons que les Canadiens qui se font hospitaliser n'aient rien à payer.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ce ne sont là que des paroles. Il n'y a rien de concret.

Par ailleurs, le ministre des Finances, qui parle beaucoup, qui consulte beaucoup et qui s'est maintenant mis à produire des tableaux en série, admet qu'il faut pratiquer d'urgence de nouvelles compressions dans les dépenses, mais il continue de remettre toute mesure à plus tard.

Je demande ceci au ministre des Finances: Peut-il nous donner aujourd'hui même un exemple de réduction des dépenses pour montrer à la population qu'il tient vraiment à réduire le déficit? Peut-il nous citer une seule mesure concrète aujourd'hui même?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, j'ai peine à concevoir que le Parti réformiste n'arrive pas à comprendre pourquoi les Canadiens veulent avoir leur mot à dire dans le processus de préparation du budget.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le chef de l'opposition ne veut pas collaborer. . .

M. Chrétien (Saint-Maurice): Il n'est pas chef de l'opposition officielle.

M. Martin (LaSalle-Émard): C'est exact. Nous pourrions réduire le budget de recherche de l'opposition.

Nous avons commencé une expérience unique dans l'histoire économique du Canada et elle consiste à rendre le processus d'élaboration du budget plus transparent, moins secret. Pourquoi le Parti réformiste semble-t-il croire que seul le petit cercle restreint de ses dirigeants peut avoir les bonnes idées? Je ne comprends pas.

Nous, au Parti libéral, ne doutons pas de l'intelligence des Canadiens et nous allons en tirer parti.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, aucune mesure concrète n'a été mentionnée.

Le solliciteur général aussi pourrait régler bien des problèmes. Le SCRS et le Centre de la sécurité des télécommunications, deux agences qui ne rendent, pour ainsi dire, de comptes à personne, ont été accusés d'avoir violé des droits de la personne fondamentaux.

Lorsque nous interrogeons le solliciteur général sur ces allégations, nous obtenons toujours les mêmes platitudes: «La question est grave, blablabla. Nous enquêtons, blablabla. Je ne peux rien dire de plus, blablabla.»

Je pose une question au solliciteur général et, s'il a l'intention de me répéter les platitudes habituelles, qu'il ne se donne même pas la peine de se lever. Peut-il nous dire quelles mesures concrètes il a prises pour obliger le SCRS et le Centre de la sécurité des télécommunications à rendre davantage de comptes?

Le Président: Lorsque l'on pose une question sur un sujet précis, les questions complémentaires doivent habituellement porter sur le même sujet. J'accepterai la question du député aujourd'hui, mais j'exhorte tous les députés à poser des questions complémentaires qui se rattachent à leur question principale.

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le Centre de la sécurité des télécommunications relève, non pas de moi, mais du ministre de la Défense nationale. Deuxièmement, pour ce qui est du SCRS, j'ai pris des mesures pour que le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité et l'inspecteur général, qui ont reçu un mandat du Parlement, fassent leur travail.

(1130)

Après cette réponse, je laisserai le blablabla au chef du Parti réformiste.


7034

[Français]

LE FORUM CANADIEN SUR LA SANTÉ

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, B.Q.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le premier ministre déclarait hier, lors du discours d'ouverture du Forum canadien sur la santé, et je cite: «Or, si nous n'adoptons pas une vision globale de la santé, nous ne réussirons pas à réduire les coûts.»

Comment le premier ministre peut-il faire une telle affirmation, alors que ceux qui détiennent l'expertise et la responsabilité de planifier les soins de santé, soit les provinces, n'ont pas été invités à participer pleinement aux débats du Forum sur la santé?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je trouve cela très drôle, parce qu'il s'agit d'un groupe d'experts. Les provinces ont dit qu'elles voulaient être présentes. Alors, la ministre de la Santé leur a dit: «Oui, très bien. Combien de membres voudriez-vous avoir?» Ils ont dit: «Cinq.» Alors, on a dit: «Très bien.»

Ensuite, ils nous ont dit: «Non, ce n'est pas cela qu'on veut. On voudrait coprésider avec le premier ministre.» Or, malheureusement, il n'y a pas deux premiers ministres du Canada, il y en a seulement qu'un.

Des voix: Oh! Oh!

M. Chrétien (Saint-Maurice, Lib.): Oui, oui, et il est là pour longtemps, à part cela. Il n'y a pas de problème.

Des voix: Bravo!

M. Chrétien (Saint-Maurice, Lib.): Ensuite, je me suis dit que j'étais pour être gentil et que si un premier ministre voulait venir ou s'ils voulaient tous venir assister à ces réunions, ils seraient tous bienvenus. Après avoir argumenté sur leur présence durant tout l'été, malgré des offres d'accueil on ne peut plus généreuses, ils ont décidé de ne pas venir. Alors, on est revenu exactement là où on était parti. Seulement, on les a écoutés et ils ont compris, en bout de ligne, que ces experts feront des recommandations qui s'appliqueront à eux comme à nous. C'est leur mandat.

Tous les jours, des décisions sont prises par les ministres de la Santé, et la conférence des ministres de la Santé et de la ministre fédérale, cela se continue. Il n'y a rien de changé de ce côté. On peut travailler ensemble, seulement, pour trouver une solution à long terme, il fallait entreprendre un examen comme celui-là. On ne peut pas se permettre de perdre notre système d'assurance-santé au Canada parce qu'on n'a pas pris le temps de prévoir l'avenir.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, B.Q.): Monsieur le Président, nous reconnaissons que le premier ministre a fait des efforts louables, mais il reste quand même que puisque le premier ministre prétend que ce forum n'est pas décisionnel et que les véritables décisions seront prises lors des conférences des ministres de la Santé, pourquoi alors s'entête-t-il à vouloir gaspiller 12 millions de dollars tirés directement des poches des contribuables du Canada?

[Traduction]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, selon moi, le forum sur la santé est un exercice très utile. Le système canadien de soins de santé doit être réexaminé. Il coûte très cher. Seuls les États-Unis dépensent plus que nous dans ce domaine. À l'heure actuelle, nous consacrons 10 p. 100 de notre PIB aux soins de santé, la proportion la plus élevée depuis 30 ans. Il faut que nous nous penchions sur ce problème, faute de quoi nous serons obligés de faire des choix très difficiles.

Nous avons demandé à des spécialistes d'étudier les problèmes à long et à moyen terme du système national de soins de santé. C'est ce qu'ils sont en train de faire. Je peux assurer à la députée que ce forum est un très, très bon investissement en vue de garantir la gratuité de notre système de soins de santé et d'éviter qu'il y ait un système pour les riches et un pour les pauvres, mais plutôt un système qui accorde les mêmes droits, le même accès et les mêmes garanties à tous les citoyens canadiens.

* * *

L'ÉCONOMIE

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, un professeur d'économie ne renonce pas aisément à ses habitudes. Je me suis récemment surpris à accorder la note de passage au ministre des Finances, mais je dois maintenant coller un échec au premier ministre.

Il est évident qu'il ne comprend pas que des déficits moins élevés engendrent une baisse des taux d'intérêt, la hausse des investissements, l'accroissement de la productivité et, par voie de conséquence, un plus grand nombre d'emplois, des emplois permanents dans le secteur privé. La création directe d'emplois par le gouvernement est dépassée.

Le ministre des Finances pourrait-il faire bénéficier le premier ministre de son bon jugement dans ce domaine et faire en sorte qu'il informe les Canadiens des avantages d'une réduction des dépenses?

(1135)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, il y a des questions, et pas seulement des mots, qui sont antiparlementaires.

Je suis stupéfié et je reste bouche bée. Je rends les armes.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Merci, monsieur le ministre des Finances. Le député de Capilano-Howe Sound.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, je ne m'attendais certes pas à une telle réponse. Le ministre des Finances reste bouche bée.

Cette semaine, des économistes se sont réunis dans ce même édifice pour présenter leurs points de vue au sujet du budget du ministre des Finances. La plupart d'entre eux ont fait valoir que l'objectif de 3 p. 100 en deux ans à compter de maintenant n'est pas suffisant. Il existe une forte probabilité que d'ici là, l'économie connaisse une nouvelle récession. Les déficits et le ratio dette-PIB augmenteront de nouveau, comme cela s'est fait pour les autres gouvernements.


7035

Quand le ministre des Finances va-t-il tenir compte de ces préoccupations et établir un plan de compressions selon un calendrier précis, afin d'éliminer le déficit pendant la période actuelle de prospérité économique?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, nous avons indiqué clairement que nous sommes disposés à établir un calendrier précis de réduction des dépenses. En fait, c'est ce qu'annonçait très clairement le dernier budget et c'est la raison précise de l'objectif de 3 p. 100.

Le premier ministre m'a fait remarquer une chose au cours d'une conversation que j'ai eue initialement avec lui au sujet de la tactique à employer. Dieu merci, je suis maintenant en mesure d'en parler. Le premier ministre m'a fait remarquer que les conservateurs s'étaient trompés lorsqu'ils ont établi des objectifs à moyen terme qu'ils n'ont pas atteints. Il est primordial que le gouvernement se fixe des objectifs à court terme et qu'il les réalise, et c'est exactement ce que nous faisons.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. André Caron (Jonquière, B.Q.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes.

Les journaux font état aujourd'hui d'une entente intervenue entre le gouvernement fédéral et les Mohawks de Kahnawake relativement au programme de formation de la main-d'oeuvre. Par cette entente, le gouvernement fédéral confierait ces responsabilités aux Mohawks, pour une affectation plus efficace des ressources financières de ces programmes.

Le ministre des Affaires indiennes peut-il nous indiquer si l'entente dont il est question prévoit le transfert de tous les pouvoirs fédéraux en matière de programmes d'emploi et de formation de la main-d'oeuvre vers la communauté mohawk?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, ce n'est pas le cas. Il s'agit plutôt d'un des accords qui, au cours des trois ou quatre dernières années, ont été négociés avec diverses bandes indiennes partout au Canada, dans lesquels nous transférons simplement la responsabilité de la planification des programmes de formation en ressources humaines qui s'appliquent à un peuple autochtone en particulier. Les modalités de ces programmes restent inchangées. Nous essayons d'arriver à des partenariats avec les bandes indiennes, pour que ce soit vraiment elles qui déterminent leurs priorités.

Cette démarche est tout à fait conforme à l'esprit qui sous-tend les propositions énoncées dans le livre vert sur la réforme des programmes sociaux. En effet, nous voulons établir un vaste éventail d'arrangements coopératifs et décentraliser de nombreuses responsabilités de programmes pour les confier notamment à divers organismes communautaires ou aux provinces, afin que les gens sur place assument vraiment l'élaboration et le processus décisionnel des importantes initiatives de formation que nous parrainons.

[Français]

M. André Caron (Jonquière, B.Q.): Monsieur le Président, considérant que le gouvernement semble enfin se rendre à l'évidence que les programmes de formation et de main-d'oeuvre sont mieux administrés par des autorités plus sensibles aux vrais besoins des gens, peut-il nous dire pourquoi ces mêmes principes ne sont par retenus par le fédéral lorsqu'il s'agit de répondre au consensus québécois, qui demande de rapatrier au Québec toute la question de la main-d'oeuvre?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est exact. Si le député avait lu le livre vert, il saurait qu'en juin dernier, nous avons fait aux provinces une série de propositions qui comportaient d'importants transferts de responsabilités à leurs gouvernements.

(1140)

[Français]

Par exemple, pour la province de Québec, le fédéral propose aux provinces de planifier la majorité des programmes relatifs au marché du travail. On projette 500 millions au Québec, incluant de gérer l'achat de cours dans les instituts de formation, -encore 140 millions au Québec-, de gérer et de créer des guichets uniques et de gérer un ensemble d'autres programmes de main-d'oeuvre d'une valeur de 12 millions dans la province.

Aussi, pour avoir une nouvelle proposition, un nouvel accord, j'espère que les députés du Bloc québécois vont demander à leurs partenaires du Québec de donner une réponse. Mais à ce moment-ci il n'y a pas de réponse du gouvernement du Québec à cette nouvelle proposition.

* * *

[Traduction]

LA COMMISSION ROYALE SUR LES PEUPLES AUTOCHTONES

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, après avoir considérablement dépassé son budget et prolongé la durée de son mandat, voici que la Commission royale sur les peuples autochtones, créée il y a quatre ans, veut de nouveau prolonger ses travaux. De toute évidence, cette étude qui nous a déjà coûté 58 millions de dollars va à la dérive.

Le ministre des Affaires indiennes ordonnera-t-il à la commission de cesser de tergiverser et de déposer immédiatement son rapport?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, lorsque nous avons été élus, nous avons hérité de deux commissions. Comme il s'agit de commissions indépendantes, il serait inadmissible que le gouvernement leur ordonne de mettre un terme à leurs travaux et de présenter leur rapport immédiatement. On nous accuserait de faire pression sur ces commissions. Nous ne sommes pas disposés à traiter ainsi la Commission royale sur les peuples autochtones.


7036

Je préférerais que la commission dépose son rapport immédiatement. J'en ai besoin tout de suite. La commission a cependant décidé qu'elle avait besoin d'une autre année. Je préférerais, quant à moi, qu'elle présente son rapport immédiatement, mais je n'ai guère le choix; il me faudra patienter une autre année. Nous n'avons pas créé cette commission royale. S'il n'en tenait qu'à moi, j'utiliserais ces 58 millions de dollars pour faire construire un millier de maisons. Mais M. Mulroney en a décidé autrement et nous devons composer avec sa décision.

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, à l'origine, cette étude ne devait coûter que 10 à 12 millions de dollars. Le gouvernement s'est inspiré de certains extraits des documents de la commission royale pour élaborer son énoncé de principes et même sa position sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

Le ministre des Affaires indiennes serait-il celui qui retarde la diffusion du rapport, parce qu'il n'a pas de meilleure option politique à proposer?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, cette question de la part du député me surprend beaucoup. On m'accuse en général de hâter le pas, et non de me traîner les pieds. Je ne sais pas où le député veut en venir, mais nous sommes prêts à nous attaquer aux problèmes dès qu'ils surviennent et dès que nous avons les renseignements nécessaires.

* * *

[Français]

LE CODE CRIMINEL

Mme Maud Debien (Laval-Est, B.Q.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. À une question posée récemment à la vice-première ministre au sujet des mutilations génitales pratiquées au Canada, la vice-première ministre a déclaré que le ministre de la Justice allait voir à l'application des dispositions actuelles du Code criminel qui interdisent les mutilations des enfants.

Le ministre de la Justice confirme-t-il nos informations à l'effet qu'il n'y aurait eu aucune poursuite intentée relative à la pratique des mutilations génitales sur la base des dispositions actuelles du Code criminel?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux pas répondre aujourd'hui à cette question de fait, mais je me ferai un plaisir de bien m'enquérir de la situation et d'en informer la députée.

Ce que je peux dire à la députée sur ce sujet en général, c'est que, lorsque la question a été soulevée à la Chambre, au printemps, j'ai entrepris de me renseigner pendant plusieurs semaines et de voir s'il fallait, comme on le proposait, qu'une autre disposition du Code criminel interdise cette pratique déplorable. Je me suis informé et je me suis entretenu, par exemple, avec des collègues et d'autres ministres dont la compétence couvre aussi cette question, en particulier les procureurs généraux des provinces et des territoires. C'est alors que j'en suis venu à la conclusion et que j'ai informé la Chambre que des dispositions du Code établissent déjà clairement qu'il s'agit là d'un acte criminel. Ce que j'ai dit à l'époque, c'est qu'il nous fallait non seulement une application vigilante de ces dispositions du Code criminel, mais aussi un programme d'information qui fasse comprendre aux immigrants, par exemple, que cette pratique est interdite et donne lieu à des poursuites.

(1145)

Nous continuons à évaluer la situation. En fait, pas plus tard que la semaine dernière, j'ai demandé à ce qu'on me dise où nous en sommes au Canada pour ce qui est de la sensibilisation et de l'application de la loi à l'égard de cette pratique.

Je puis assurer à la députée en terminant-et je serai très bref-que, si cette pratique déplorable résiste aux efforts de sensibilisation et d'application des dispositions actuelles du Code, je n'écarte pas la possibilité d'ajouter une disposition au Code s'il le faut pour y mettre fin.

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, B.Q.): Monsieur le Président, je désire poser une question complémentaire.

Je remercie le ministre des réponses qu'il donne à nos questions. Toutefois, il répète ce qu'il avait dit le 12 avril dernier, et je cite: «Pour le moment, le gouvernement fédéral devrait axer ses efforts sur l'éducation en collaboration avec les provinces et les groupes communautaires.» Il a dit qu'il étudiait, qu'il attendait, qu'il s'informait. Ce sont de bien beaux mots.

Mais ce que j'aimerais savoir, c'est quand le ministre compte agir dans ce dossier, poser des actions concrètes, et surtout, déposer un plan d'action en ce sens. Malgré toute l'information qu'il doit aller chercher, il faut réagir immédiatement et le plus rapidement et il faut surtout savoir quelles sont les intentions immédiates du ministre dans ce dossier, indépendamment des études et des analyses?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à dire tout d'abord que je conviens avec la députée que la situation est inquiétante et urgente, mais il serait faux de prétendre que rien n'est fait pour la corriger.

Lorsque cette question a fait les manchettes, au printemps, surtout par suite de la publication du rapport de Mme Glenda Simms et du comité national qu'elle préside, et que je me suis informé, j'ai découvert que les procureurs généraux des provinces où cette pratique pose problème cherchent activement des solutions en collaboration avec des groupes de travail et les forces policières et qu'ils cherchent à faire appliquer la loi.

Des intervenants du milieu m'ont dit que la solution ne résidait pas dans une modification du Code criminel. Ce qu'il faut, c'est informer les gens, recueillir les faits et entamer des poursuites s'il y a lieu.


7037

Le problème, c'est notamment d'amener les gens à témoigner. C'est un des problèmes. Et ce n'est pas en modifiant le Code criminel qu'on changera cela. Notre rôle est. . .

* * *

LES ESSAIS NUCLÉAIRES

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, ma question porte sur les essais nucléaires et s'adresse au premier ministre, à qui je souhaite un bon voyage en Chine.

Depuis 1964, la Grande-Bretagne a effectué 44 essais nucléaires, la France, 210, et les États-Unis, plus de 1 000. Il y a deux semaines, la Chine a effectué son 41e essai nucléaire.

Le premier ministre profitera-t-il de sa visite à Beijing pour parler aux autorités chinoises de la nécessité de donner le bon exemple au reste du monde et de mettre un terme à ces essais nucléaires qui sont une menace pour notre planète?

L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique), Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.

Le Canada déplore effectivement l'essai nucléaire souterrain effectué récemment par la Chine. Notre gouvernement a convoqué l'ambassadeur de la Chine à Ottawa pour lui exposer les préoccupations du Canada à cet égard.

La visite du premier ministre nous donnera l'occasion d'exprimer directement aux plus hautes instances chinoises nos préoccupations concernant les essais nucléaires. Le Canada espère que la Chine assumera sa part des responsabilités qui incombent à tous les États possédant des armes nucléaires en vue de la conclusion rapide d'un traité sur l'interdiction des essais.

* * *

LA BOSNIE

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, on observe une tendance inquiétante qui menace la vie des Casques bleus canadiens en Bosnie. Depuis six mois, les troupes canadiennes engagées dans le centre de la Bosnie ont été à 13 reprises la cible d'attaques confirmées de la part de l'armée bosniaque. Tout récemment, l'adjudant Tom Martineau, de ma circonscription, a dû subir une intervention chirurgicale de cinq heures après avoir été atteint d'un coup de feu.

Ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Quand le ministre obtiendra-t-il du gouvernement bosniaque une explication concernant ces attaques, et quelle mesure prendra-t-il pour assurer la sécurité des soldats canadiens en Bosnie?

(1150)

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, nous ne sous-estimons pas les dangers auxquels nos troupes font face dans ce conflit. Nous étions parfaitement au courant de la situation avant de renégocier un mandat pour les six prochains mois. Les députés ont d'ailleurs eu l'occasion d'exprimer leurs préoccupations à cet égard à la Chambre.

Nous croyons vraiment qu'un effort de paix véritable est possible dans l'ex-république yougoslave de Bosnie-Herzégovine. C'est pour cette raison que nous y avons déployé nos troupes pour une autre période de six mois.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, cette réponse n'est pas acceptable. Nous avons fait face à maintes reprises à des attaques de la part de l'armée du peuple que nous tâchons de protéger. La situation est inacceptable.

Depuis 1991, nous avons fourni une aide de 50 millions de dollars à l'ex-Yougoslavie. Si ces attaques ne cessent pas, le gouvernement serait-il d'accord pour subordonner toute aide future à l'arrêt de ce genre d'action de la part du gouvernement bosniaque?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, nous regrettons que certains de nos soldats canadiens aient été blessés et même tués. L'incident auquel le député fait allusion est particulièrement pénible.

Les forces armées du Canada et le gouvernement canadien ont pour politique de ne pas prendre parti dans ce conflit. Nous sommes là-bas sous l'égide des Nations Unies pour contribuer à l'aide humanitaire et pour donner une chance véritable au processus de paix. Il est facile de supposer qu'un côté ou un autre est responsable d'une attaque. Bien franchement, nous ne savons parfois pas très bien qui croire en l'occurrence.

Il est préférable de tâcher surtout de protéger réellement nos soldats du mieux que nous pouvons. Quand nous savons vraiment de quel côté est venue une attaque, il vaut mieux exprimer nos protestations par le truchement des Nations Unies.

* * *

[Français]

LE IRVING WHALE

Mme Monique Guay (Laurentides, B.Q.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de l'Environnement. En réponse à une question du Bloc québécois relative au paiement des frais qui seront encourus pour régler le problème du Irving Whale, la ministre de l'Environnement signalait que ceux-ci seraient payés par le Fonds d'indemnisation des pétrolières. Or, le service de recherche du Parlement nous a indiqué que le fonds en question ne contient plus un sou.

La ministre confirme-t-elle que le Fonds d'indemnisation des pétrolières ne contient plus d'argent et, dans l'affirmative, quelle solution alternative envisage-t-elle pour financer les opérations qui seront entreprises pour régler le problème du Irving Whale?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, ce que j'ai indiqué en Chambre, c'est que l'argent va venir de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires. L'argent provient d'abord de notre gouvernement. C'est exactement le plan de financement que j'ai déposé devant cette Chambre il y a sept mois. J'aimerais remercier la députée pour sa question. Je suis contente qu'elle accepte finalement la politique prise par ce gouvernement, à l'effet que c'est un cas d'urgence et que nous devons être prêts à


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payer, parce que c'est un cas qui touche l'environnement et l'écosystème de tous les gens des îles de la Madeleine et aussi du Canada atlantique.

Mme Monique Guay (Laurentides, B.Q.): Monsieur le Président, la ministre ne convient-elle pas que la première responsable de l'accident du Irving Whale est la compagnie Irving et qu'elle doit s'assurer que ce soit cette compagnie qui paie et non l'ensemble des contribuables?

[Traduction]

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, en réalité, lorsque le Irving Whale a sombré, il y a 24 ans, la propriété de l'épave a été cédée au gouvernement du Canada comme le voulait la coutume à l'époque.

En fait, depuis 24 ans, les ministres, y compris le chef de la députée, n'ont pas eu assez de coeur au ventre pour récupérer le bâtiment, et après. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Je suis sûr que le courage de personne n'est en cause. La vice-première ministre a la parole.

Mme Copps: Monsieur le Président, ils n'ont même pas eu l'intérêt, la volonté politique nécessaires ne serait-ce que pour répondre aux lettres des Madelinots.

En trois mois, nous avons préparé le montage financier de l'opération, et le Irving Whale sera récupéré le printemps prochain. Au lieu de nous critiquer, la députée d'en face devrait applaudir l'initiative du gouvernement, qui a su intervenir en seulement trois mois.

* * *

LES INSTITUTIONS FINANCIÈRES

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État chargé des Institutions financières.

(1155)

À la suite des audiences récentes du Comité sénatorial des banques sur la disparition de la Confederation Life, le gouvernement est-il prêt à présenter des recommandations ou des mesures législatives semblables à celles qu'a préconisées le surintendant des institutions financières, M. John Palmer, dans ses exposés?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, un document sera rendu public plus tard cette année, relativement au système d'assurance-dépôts et à l'intervention plus rapide auprès des institutions financières.

Nous attendons le rapport du comité sénatorial qui sera publié sous peu. Les membres du comité ont porté un vif intérêt à la question et l'ont étudiée longuement. Nous attendrons donc de prendre connaissance de leur rapport et nous le lirons avec beaucoup d'intérêt avant de présenter un document.

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, je rappelle au secrétaire d'État que les Canadiens ont besoin de savoir si les libéraux mettront bel et bien en application les propositions de M. John Palmer.

Le gouvernement souscrira-t-il, en particulier, à la proposition de M. John Palmer de confier à des titulaires distincts les fonctions de président du conseil d'administration et celles de premier dirigeant, afin d'aider à éliminer les conflits d'intérêts et, s'il répond par l'affirmative, quand le fera-t-il?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit, nous examinerons le rapport global du comité sénatorial, nous prendrons en considération toutes les questions qui ont été abordées, y compris les propositions de M. Palmer, nous rédigerons un document sur la question plus tard cette année et nous espérons qu'un projet de loi à cet égard suivra peu après.

* * *

LES ARMES CHIMIQUES

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

En janvier 1993, plus de 100 pays, dont le Canada, ont signé un traité historique pour interdire la production, l'accumulation et l'utilisation d'armes chimiques. Malheureusement, près de deux ans plus tard, seulement 14 pays ont ratifié ce traité, alors qu'il en faut 65 pour qu'il entre en vigueur.

Le ministre peut-il nous dire quand le Canada va présenter un projet de loi de ratification du traité et ce qu'il va faire pour appuyer l'organisme d'exécution qui sera établi à La Haye?

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de soulever cette importante question.

Je voudrais informer la Chambre qu'un processus de consultation auprès des ministères et de l'industrie est actuellement en cours et que nous prévoyons de saisir la Chambre, au début de l'année prochaine, d'un projet de loi à cet égard.

Entre-temps, on procédera à l'établissement d'un secrétariat provisoire, à La Haye, qui se chargera des questions de procédure avant la ratification du traité. Le Canada a soumis des noms pour ce secrétariat. Dès que le traité aura été ratifié, nous allons présenter d'autres noms à l'organisme pour contribuer aux efforts visant à faire respecter les dispositions du traité.

* * *

[Français]

LE TRANSPORT MARITIME

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, B.Q.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Hier, le ministre des Transports déclarait relativement aux problèmes de sécurité qu'éprouvent certains traversiers canadiens du même type que l'Estonia, qu'il rencontrerait le président de Marine Atlantic pour s'assurer de prendre les mesures nécessaires pour

7039

améliorer la sécurité. Le ministre peut-il nous dire quelle action précise il entend prendre pour corriger le problème et rendre ces traversiers plus sécuritaires?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour sa question, parce qu'on sait tous que c'est une préoccupation pour les Canadiens et les Canadiennes, la sécurité sur les traversiers.

Le président de Marine Atlantic nous a avisé hier qu'il ferait une déclaration publique en collaboration avec la Garde côtière canadienne pour assurer les Canadiens, surtout lorsqu'on procède vers les périodes d'hiver où la situation peut être encore plus sérieuse. Cette déclaration doit être faite aujourd'hui.

* * *

[Traduction]

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, j'ai posé récemment au solliciteur général une question concernant le redéploiement des ressources de la GRC pour mieux lutter contre l'usage croissant des drogues à Nanaïmo. Le maire de Nanaïmo, le chef de la GRC pour la Colombie-Britannique et d'autres personnes intéressées ont tous confirmé qu'il existait vraiment un besoin.

On découvre maintenant que, alors que Nanaïmo doit se priver d'agents à cause du manque de ressources, 100 agents de la GRC ont été envoyés en mission en Haïti. Si l'on peut se permettre d'envoyer des gendarmes en Haïti, pourquoi ne peut-on pas aussi envoyer des agents à Nanaïmo?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le sous-commissaire Farrell, chef de la GRC pour la Colombie-Britannique, étudie actuellement le dossier pour déterminer s'il sera nécessaire d'augmenter le nombre d'agents enquêteurs à Nanaïmo. On m'a signalé qu'il devrait trouver les ressources additionnelles pour répondre aux préoccupations du député que je partage entièrement.

(1200)

Je répète que, selon les informations que j'ai reçues, il est fort probable que des agents supplémentaires soient affectés à Nanaïmo très bientôt.

* * *

LA RÉFORME DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

La diffusion du livre vert sur la réforme de la sécurité sociale a suscité de nombreuses discussions parmi les Canadiens. Dans la circonscription de Saskatoon-Humboldt, les étudiants du niveau universitaire désirent vivement participer à cet examen national. Mais ces étudiants et les députés de la Chambre voudraient savoir ce que d'autres Canadiens ont dit au ministre au sujet de ce document de travail, au cours de ses déplacements des 10 derniers jours dans le pays.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, pour donner une réponse très précise, hier et avant-hier, j'ai rencontré tous les représentants des étudiants des collèges et des établissements d'enseignement de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, afin de discuter notamment des moyens dont nous pouvons contribuer à refinancer les études supérieures, remettre plus d'argent dans le système et aider davantage les étudiants à poursuivre leurs études.

Les étudiants, de même que la plupart des Canadiens, désirent s'engager très activement dans un débat. Les Canadiens sont vraiment prêts à un changement. Ils reconnaissent qu'il est impossible de maintenir le statu quo et que nous devons réformer les structures. J'encouragerais tous les députés à s'engager dans le même genre de dialogue que nous avons lancé. À mon avis, ils y verront un processus très positif et très enthousiasmant.

_____________________________________________


7039

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

DÉCRETS DE NOMINATION

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, quelques décrets annonçant les nominations faites par le gouvernement.

Conformément au paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets sont renvoyés d'office aux comités permanents compétents énumérés dans la liste ci-jointe.

* * *

RÉPONSES DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'en profite, puisque j'ai la parole, pour déposer, dans les deux langues officielles, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, la réponse du gouvernement à une pétition.

* * *

LES COOPÉRATIVES

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, en ma qualité de ministre fédéral responsable des coopératives, je voudrais souligner que cette semaine est la Semaine nationale de la coopération au Canada et rendre hommage à ces institutions uniques et démocratiques qui ont une place si importante dans le tissu socio-économique du Canada.


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[Français]

Par ailleurs, le 20 octobre est également reconnu partout dans le monde comme la Journée internationale de la coopération d'épargne et de crédit.

[Traduction]

Dans son message, à l'occasion de la Semaine nationale de la coopération, le premier ministre a mentionné que ces organisations renforçaient la collectivité et le pays dans son ensemble. Ce n'est nulle part plus vrai que dans les 900 collectivités où les coopératives de crédit ou les caisses populaires sont les seules institutions financières offrant des services. De plus, dans le Nord du pays, après les institutions gouvernementales, les coopératives constituent les plus importants employeurs.

Au niveau national, 40 p. 100 environ des Canadiens sont membres de coopératives. Au Québec, comme dans la province de la Saskatchewan d'où je viens, quelque deux tiers des gens sont membres d'une coopérative sous une forme ou sous une autre. Ensemble, les 10 000 coopératives canadiennes offrent de l'emploi à 133 000 Canadiens et représentent des actifs de 134 milliards de dollars au total.

Cette année revêt une importance particulière pour les coopératives du monde entier, car elle marque le 150e anniversaire de la création de la première coopérative de consommateurs à Rochdale, en Angleterre.

En tant que ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, je suis conscient du rôle extrêmement important que les coopératives jouent dans le secteur agroalimentaire. En fait, on estime qu'elles représentent 48 p. 100 du marché de la volaille, 60 p. 100 du marché du lait et 70 p. 100 de celui des céréales.

(1205)

[Français]

Pour terminer, je tiens à féliciter le Mouvement coopératif canadien pour ses réalisations et j'invite la Chambre à rendre hommage aux coopératives en cette Semaine nationale de la coopération.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, B.Q.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole dans le cadre de la Semaine nationale de la coopération.

Je pourrais vous citer, à titre d'anecdote, que dans toutes les écoles primaires du Québec il y a des caisses scolaires et je me souviens qu'un des premiers gestes d'organisation que j'ai faits c'est celui de m'occuper de la caisse scolaire chez nous. Il me fait d'autant plus plaisir d'intervenir à ce titre dans cette déclaration.

Comme le soulignait le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, qui lui aussi a rempli cette fonction-là, semble-t-il, l'importance des coopératives partout au Canada est évidente. On me permettra, compte tenu de l'ampleur économiqque du Mouvement coopératif au Québec, et compte tenu de la place qu'il occupe dans l'histoire récente des Québécois et des Québécoises, de souligner le travail et la contribution particulière de ce mouvement dans notre société.

Les coopératives ont eu et ont toujours une importance vitale dans le développement économique du Québec. Adhésion volontaire, organisation démocratique, formation des membres, redistribution des surplus à la communauté et limitation de la rémunération du capital, voilà autant de principes qui sont conformes à la mentalité des gens du Québec et qui expliquent l'essor de ce mouvement en terre québécoise. De plus, les coopératives font partie de la vie des Québécois, de l'école primaire jusqu'au décès, jusqu'à des coopératives funéraires.

Que l'on parle de coopératives financières, agricoles, d'habitation, de consommateurs, des coopératives de travail ou de tout autre type, le Mouvement coopératif est en santé et continue de progresser au Québec. D'ailleurs, la relève est aujourd'hui assurée par l'essor des coopératives en milieu étudiant qui se fait grâce à l'intercoopération, jumelant des coopératives de divers secteurs pour permettre ce développement, notamment par la Société de développement coopératif.

De plus, évidemment, le Mouvement Desjardins, qui est le fleuron du monde de la coopération au Québec, qui s'étend au Canada aussi et dans plusieurs autres pays, particulièrement dans des projets de coopération internationale, le Mouvement Desjardins gère des actifs totaux estimés à plus de 75 milliards de dollars. Le Mouvement coopératif au Québec est composé de plus de 3 300 coopératives, regroupant plus de 5,9 millions de membres et créant plus de 60 000 emplois. Un très beau succès.

La vigueur du Mouvement coopératif au Québec s'explique par la très grande solidarité qui anime les Québécois. Nous nous sommes toujours serré les coudes pour progresser et se développer même si nous avons souvent eu à faire face à des conditions difficiles. C'est cette solidarité qui mènera bientôt les Québécois et les Québécoises à la souveraineté car on sait que la souveraineté passe par la souveraineté économique, et le Mouvemement Desjardins entre autres y aura contribué de façon particulière en nous donnant confiance les uns aux autres.

En terminant, je désire féliciter et remercier pour leur travail bénévole tous les coopérateurs du Québec et du Canada, sans qui le Mouvement coopératif ne pourrait être ce qu'il est aujourd'hui.

[Traduction]

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de prendre la parole aujourd'hui pour rendre hommage au mouvement coopératif au Canada.

Je profite de l'occasion pour féliciter des pionniers du mouvement coopératif de la clairvoyance et du sérieux qu'ils ont manifestés dans la réalisation de leurs rêves.

Le mouvement des caisses populaires et des coopératives a exercé une influence très positive sur notre pays. La Co-op Vegetable Oils Limited d'Altona, au Manitoba, est l'un des nombreux exemples d'entreprises coopératives qui ont joué un rôle moteur dans leur domaine. Non seulement a-t-elle contribué à la mise au point d'une huile végétale à frire, mais elle a également su encourager et intensifier les échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis.

Il faut féliciter les coopératives et les caisses populaires d'avoir aidé les communautés à se développer et à s'améliorer. Il faut aussi reconnaître qu'elles ont été, dans notre économie, un intervenant qui a suscité la concurrence et offert aux gens un autre choix possible, ce qui est très bon pour une démocratie.


7041

C'est donc avec gratitude que, au nom du Parti réformiste, je salue les réalisations des coopératives et des caisses populaires. Nous leur souhaitons bon succès dans leurs entreprises à venir et les encourageons à continuer à donner l'exemple.

* * *

(1210)

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 41e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres des comités.

Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption du 41e rapport plus tard aujourd'hui.

[Traduction]

AGRICULTURE ET AGROALIMENTAIRE

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le troisième rapport du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire qui porte sur le projet de loi C-50, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé. Le rapport fait état de propositions d'amendement.

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je pense que la Chambre consentira à l'unanimité à ce que l'on ne lise pas le 41e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

Dans ce cas, je propose que le 41e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre soit adopté.

(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui cinq pétitions au nom de Canadiens de partout au Canada, notamment de ma circonscription de Wild Rose et d'autres régions de l'Alberta.

Dans trois des pétitions, les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas modifier le Code des droits de la personne, la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière qui laisserait entendre que la société approuve les relations entre personnes de même sexe ou l'homosexualité, et de ne pas modifier le Code des droits de la personne pour inclure dans les motifs de discrimination illicites l'expression non définie «orientation sexuelle».

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, ma prochaine pétition est signée par les mêmes personnes et demande que l'on interdise le suicide assisté.

L'AVORTEMENT

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, ma dernière pétition demande que l'on modifie le Code criminel pour étendre aux enfants à naître la protection accordée aux autres être humains.

Je présente respectueusement ces pétitions au nom de leurs signataires.

* * *

[Français]

S.C. La fiscalité

M. Stéphane Bergeron (Verchères, B.Q.): Monsieur le Président, il me fait plaisir de déposer aujourd'hui en cette Chambre une pétition signée par 122 citoyennes et citoyens du comté de Verchères et des environs, plus particulièrement des municipalités de Saint-Amable et de Saint-Antoine-sur-Richelieu.

Faisant notamment référence à l'abolition de l'universalité du crédit d'impôt en raison de l'âge, les signataires de cette pétition estiment que le gouvernement actuel s'est attaqué de façon indue aux revenus des personnes retraitées. Les signataires considèrent également que ces mesures sont foncièrement discriminatoires au plan fiscal, puisqu'elles s'attaquent à des personnes qui ont déjà largement contribué à l'économie canadienne, et font en sorte que celles-ci ne pourront espérer une amélioration de leur niveau de vie au cours des prochaines années.

En conséquence, les 122 signataires de cette pétition prient le Parlement de se prononcer contre toute mesure qui affecterait à la baisse le revenu des personnes retraitées. Il va sans dire que je partage l'analyse de la situation qui est présentée dans cette pétition et que j'appuie avec force la requête formulée par mes concitoyennes et concitoyens.

[Traduction]

LE PORT DE CHURCHILL

M. Elijah Harper (Churchill, Lib.): Monsieur le Président, au nom de la Hudson Bay Route Association, j'ai l'honneur de présenter des pétitions comportant en tout 2 626 signatures.

(1215)

Les pétitionnaires demandent au ministre responsable de la Commission canadienne du blé de voir à accroître au maximum les expéditions de grain qui transitent par le port de Churchill et à ce que 5 p. 100 au moins des expéditions annuelles de grain transitent par Churchill.

Je suis d'accord avec les pétitionnaires. Le port de Churchill est une ressource précieuse mais sous-exploitée. C'est la route la plus directe reliant les Prairies à la mer. Nous devons faire en sorte de mieux faire connaître ce port du Nord pour lui permettre de se montrer à la hauteur de son potentiel.

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LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36, j'ai l'honneur de présenter, au nom des habitants de ma circonscription, une pétition demandant au Parlement de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants.

* * *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui à la question no 75.

[Texte]

Question no 75-M. Godin:

Où s'appliquent les mesures de compression des dépenses de fonctionnement qui ont été annoncées au Budget des dépenses 1994-1995 pour le ministère des Anciens combattants, de l'ordre de 3,2 millions de dollars?
L'hon. Lawrence MacAulay (secrétaire d'État (Anciens combattants, Lib.)): Cette réduction de 3,2 millions de dollars a été répartie entre les budgets de fonctionnement d'Anciens combattants Canada sauf l'hôpital Sainte-Anne et le Foyer Saskatoon pour anciens combattants.

[Français]

Le vice-président: On a répondu à question indiquée par le secrétaire parlementaire.

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions soient réservées.

Le vice-président: Les autres questions sont-elles réservées?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: Je désire informer la Chambre qu'en raison de la déclaration ministérielle, les ordres émanant du gouvernement seront prolongés de sept minutes, conformément à l'article 33(2) du Règlement.

_____________________________________________


7042

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR L'OFFICE DES DROITS DE SURFACE DU YUKON

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-55, Loi établissant un organisme ayant compétence pour statuer sur les différends concernant les droits de surface au Yukon, et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le vice-président: Le député de North Island-Powell River a encore 30 minutes s'il le désire.

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, je vais reprendre au point où j'étais lorsque je me suis arrêté.

En plus des 8,3 milliards dont je parlais, il y a actuellement quelque 460 revendications ou poursuites par des autochtones qui ne sont pas chiffrées et ne sont donc pas incluses dans le passif éventuel. Franchement, personne ne sait à combien le total se montera. C'est la partie la plus inquiétante.

Si le ministre des Finances est tellement inquiet de notre situation financière, il pourrait peut-être commencer par revoir la politique du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien en matière de règlement des revendications autochtones. C'est une situation insoutenable qui exige une attention immédiate.

Pendant le débat sur les projets de loi C-33 et C-34, le Parti réformiste a mis en garde le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien au sujet des précédents qu'il risquait de créer en acceptant des règlements territoriaux massifs accompagnés d'engagements financiers à long terme. On a rejeté nos inquiétudes, mais elles se révèlent maintenant tout à fait fondées.

Nous pourrions argumenter au sujet du règlement des revendications en suspens, mais il n'y a pas de contestation. Le Parti réformiste est en faveur d'une conclusion rapide et mutuellement satisfaisante des négociations actuellement en cours. Nos objections et notre opposition viennent de ce que l'on ne prend pas en considération le coût de ces ententes. Les négociateurs fédéraux ont la mentalité du chèque en blanc. Non seulement c'est répréhensible, mais c'est aussi irresponsable. On nous demande aujourd'hui d'endosser cette mentalité.

Le ministre nous a dit aujourd'hui qu'il ne pensait pas pouvoir ordonner à la commission royale de déposer son rapport sur les peuples autochtones. Le gouvernement a fait un nouveau chèque pour prolonger la commission. Il me semble que le mandat de ceux qui font les chèques est tout aussi impératif que celui des membres de la commission royale qui veulent la prolonger.

Le projet de loi C-55 ajoute aux projets de loi C-33 et C-34, y compris dans le domaine des indemnités financières. De même, il crée un processus de règlement des différends entre les parties intéressées qui garantit les droits d'accès aux terres privées. Il crée également l'Office des droits de surface du Yukon, qui prendra en charge le processus de règlement des différends et dont les ordonnances seront exécutoires. Il confirme aussi le maintien des droits légaux des mineurs.

(1220)

Je reconnais que le projet de loi C-55 est le prolongement normal de la mesure dont la Chambre avait été saisie au printemps dernier. La procédure et le Règlement de la Chambre m'interdisent de discuter du contenu des projets de loi C-33 et C-34, mais non de réaffirmer que le Parti réformiste s'oppose à ces mesures et qu'il s'inquiète en voyant la manière dont on conclut des ententes de cette importance. C'est dommage que le


7043

gouvernement n'ait pas choisi de faire des consultations poussées sur les projets de loi C-33 et C-34, comme il semble l'avoir fait pour les mesures habilitantes présentées dans le projet de loi C-55.

Le monde des affaires, en particulier le très important secteur minier du Yukon, n'a pas eu autant de possibilités de participer aux délibérations qui ont mené à la présentation de l'entente finale sur les revendications territoriales du Yukon. Une ébauche du projet de loi C-55 a été distribuée aux sociétés minières et aux groupes qui les représentent, mais jamais on n'a eu l'amabilité de faire de même pour les projets de loi C-33 et C-34.

Des habitants du Yukon m'ont dit qu'ils n'avaient pas été mis au courant, avant qu'elles ne soient signées, des dispositions antérieures de l'entente entre le gouvernement fédéral et le Conseil des Indiens du Yukon, qu'ils sont payés pour connaître.

Cela dit, il est de mon devoir de formuler certaines préoccupations du Parti réformiste face au projet de loi C-55. Je tiens à affirmer à la Chambre que, dans sa participation à ce débat, mon parti ne cherche pas à faire de l'obstructionnisme. Je m'en voudrais de ne pas faire de critiques constructives de certains articles du projet de loi C-55. Mes collègues ajouteront leurs commentaires.

La partie I du projet de loi établit un processus de résolution des différends concernant les droits de surface et les droits d'accès. Plus précisément, l'article 8 crée l'Office des droits de surface du Yukon, composé de trois à 11 membres dont un président, tous nommés par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. La moitié des membres, à l'exception du président, sont nommés sur proposition du Conseil des Indiens du Yukon.

La partie I constitue véritablement l'essence du projet de loi. Cette partie et la façon dont seront nommés les membres établiront ou détruiront la crédibilité de l'office et donc de la loi. En matière de nomination, le ministre détient des pouvoirs énormes. Bien que cinq des membres doivent être proposés par le Conseil des Indiens du Yukon, le ministre est omnipotent. De tels pouvoirs risquent d'aboutir à la politisation de l'office.

Au Yukon, la plus grande crainte des gens du secteur est que le ministre soit tenté de nommer à l'office de bons vieux libéraux pour être sûr que les choses aillent comme il le veut. J'implore le ministre de faire preuve d'impartialité lorsqu'il choisira les membres qui formeront l'office.

Comme je l'ai dit plus tôt ici même, j'ai des réserves, et je n'en veux pour exemple que la nomination, au printemps dernier, du libéral Michel Robert, en tant que négociateur du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien dans l'affaire d'Oka, aux termes d'un contrat de 249 000 $ qui n'a pas fait l'objet d'un appel d'offres. M. Robert a également été nommé au CSARS, qui est soi-disant chargé de surveiller le SCRS.

(1225)

L'office décidera de quel différend il pourra être saisi seulement après que les parties auront tenté de régler leurs problèmes elles-mêmes. Il est donc essentiel que les membres de l'office fassent preuve de discernement et possèdent le sens des responsabilités.

Faute de quoi nous pourrions être témoins, de la part de l'office, d'un favoritisme éhonté pour les causes fallacieuses et frivoles dans lesquelles seront engloutis non seulement un temps précieux mais des ressources financières rares sous forme d'indemnités journalières s'élevant à 300 $ pour le président et à 250 $ pour les membres.

Ceci pourrait revenir très cher si la présidence ou certains membres de l'office cherchent à s'occuper. Bref, l'office ne peut devenir un autre lieu de prédilection pour des nominations politiques. Le temps de le dire et Joe Clark pourrait hériter d'une autre présidence.

Aux séances d'information données par le ministère, on a déclaré aux députés réformistes qu'aucun membre du personnel ne serait nommé à l'office. Or, l'article 19 du projet de loi C-55 prescrit clairement que l'office peut s'assurer les services, à titre de membres du personnel ou de mandataires, de conseillers ou d'experts, des personnes nécessaires à l'exercice de ses activités, fixer leurs conditions d'engagement ou d'emploi, et payer leur rémunération.

Ce qu'on nous a dit à nos séances d'information va à l'encontre non seulement de l'article 19 que je viens de citer, mais aussi des articles 20 et 21, qui donnent toute latitude à l'office pour acquérir des biens meubles et conclure des contrats en son propre nom. En plus des indemnités journalières versées à ses membres, quel sera donc le budget affecté à cet office et pourquoi nous a-t-on donné de mauvais renseignements à nos séances?

L'office fixe le montant de l'indemnité à verser en cas d'expropriation de terres désignées ainsi que de l'indemnité pour les parcelles de terres désignées que retient le gouvernement.

L'office rend des ordonnances définitives et exécutoires qu'il peut soumettre à la Cour suprême du Yukon. Son pouvoir étant considérable, j'espère que nous savons ce que nous faisons et que nous allons commencer à faire des nominations fondées sur le mérite et non sur le favoritisme.

La partie II du projet de loi traite des droits d'accès sur les terres désignées. Les modalités de fonctionnement de l'office sont claires à cet égard. Dans l'industrie minière du Yukon, on semble convaincu que la partie II est conçue précisément pour éviter les problèmes d'interprétation. Cependant, la partie III, sur les différends concernant les droits miniers sur les terres non désignées, manque de précision et risque de donner lieu à des problèmes. Les compétences et les pouvoirs sont définis de façon ambiguë aux articles 65 et 66 qui forment la partie III. La principale préoccupation que soulèvent ces articles, c'est que la moitié des membres de l'office sont désignés par le Conseil des Indiens du Yukon, comme le précise la partie I.

Ainsi, la moitié des membres de l'office qui sont nommés par des autochtones peuvent trancher des questions ayant trait à des terres non désignées. À mon avis, on ne pourra qu'aboutir à des guerres de territoires et à un exercice contre-productif fondé sur des interprétations raciales ou culturelles. Il est peut-être mal


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avisé d'exiger qu'il y ait une majorité d'habitants du Yukon à l'office et que la moitié des membres soient proposés par le Conseil des Indiens du Yukon. Il se peut que nous ouvrions inutilement la porte aux luttes raciales.

(1230)

Au début de mon discours, j'ai dit que le projet de loi C-55 peut sembler confirmer les principes insérés dans les projets de loi C-33 et C-34 et leur donner force de loi, mais il ne fait rien pour régler les différends qui pourraient survenir.

Le projet de loi C-55 met peut-être un terme au processus de règlement des revendications territoriales, mais il ouvre de nouvelles perspectives qui pourraient provoquer bien des problèmes nécessitant bien des solutions. Je sais qu'il faut apaiser les craintes qui ont ralenti l'investissement au Yukon. Les gens d'affaires du Yukon ont exprimé le désir de régler cette question une fois pour toutes et de chasser l'incertitude qui régnait jusque-là. Le Parti réformiste reconnaît qu'il faut des modalités claires et uniformes en ce qui concerne les revendications territoriales. Désormais, les règles du jeu sont connues des gens d'affaires du Yukon, mais cela ne veut pas dire nécessairement qu'elles leur plaisent, à eux et au Parti réformiste.

Le Parti réformiste a déjà officiellement annoncé qu'il appuyait le règlement rapide et mutuellement satisfaisant de toutes les revendications territoriales non encore réglées. Lorsque le Parti réformiste s'est opposé au processus de règlement des revendications territoriales prévu dans les projets de loi C-33 et C-34, il a expliqué sa philosophie et décrit les lacunes de ces mesures législatives.

En toute bonne conscience, il nous est impossible d'appuyer toutes les facettes du projet de loi C-55, surtout celles concernant la compétence de l'office sur les terres non désignées. Nous ne voulons gêner ni le développement économique du Yukon ni la formulation des règles qui le régiront.

M. Jack Iyerak Anawak (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.):

[Note de l'éditeur: Le député parle en inuktitut.]

[Traduction]

Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole au sujet du projet de loi C-55, Loi sur l'Office des droits de surface du Yukon. Je dois dire que j'aurais aimé obliger le député de Capilano-Howe Sound en portant mes bermudas et mes lunettes de soleil, mais le code de la Chambre des communes relativement à la tenue vestimentaire ne me permet pas de m'habiller de cette façon pour prendre la parole au sujet de ce projet de loi.

J'ai une observation à présenter sur quelque chose qu'a dit le député de North Island-Powell River. Le député craint que si les membres de l'office sont à plus de 50 p. 100 des Indiens du Yukon, cela ne pose des problèmes d'ordre racial. Il me semble que c'est là juger l'office avant même qu'il ne commence à fonctionner. On n'a pas confiance dans le Conseil des Indiens du Yukon pour choisir les membres de l'office et pour déterminer la forme que prendra cet office. Si l'on faisait davantage confiance aux organisations autochtones, notre pays s'en porterait beaucoup mieux.

À l'instar de mon collègue, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, j'exhorte la Chambre à appuyer ce projet de loi. J'estime que la Chambre a le devoir d'adopter au plus vite le projet de loi C-55 afin que les Canadiens du Yukon puissent commence à profiter de la stabilité et du climat de confiance que le règlement des revendications territoriales va apporter au territoire.

Après plus de 21 ans de négociations, nous en sommes enfin arrivés à un accord-cadre sur le règlement des revendications territoriales de 14 des premières nations du Yukon et à l'établissement, avec le projet de loi C-55, d'un nouveau régime concernant les droits de surface.

C'est un jour historique pour le Yukon, et les habitants de ce territoire s'attendent à ce que nous agissions de façon responsable et sans autre délai. Ils veulent que nous remplissions nos obligations morales et légales à l'endroit des premières nations.

(1235)

Comme l'a dit le ministre, nous avons déjà adopté des projets de loi visant à mettre en place un cadre général à tout le territoire pour ce qui est des ententes sur le règlement des revendications territoriales des premières nations et à réaliser l'autonomie gouvernementale des premières nations du Yukon. Nous sommes aujourd'hui saisis de la mesure législative qui permettra de mener tout cela à bonne fin.

Le projet de loi C-55 diffère nettement des deux lois qui ont été adoptées avant le congé d'été. Il traite de questions bien précises. Il est extrêmement technique. Je peux assurer aux députés qu'on a tenu compte des intérêts de tous les Yukonnais en rédigeant cette mesure législative et qu'on s'est assuré de respecter les obligations du gouvernement du Canada en vertu de l'accord général définitif négocié par les gouvernements et les premières nations du Yukon.

Le projet de loi C-55 prévoit l'établissement de l'Office des droits de surface du Yukon et d'un nouveau régime relatif aux droits de surface qui reflète les réalités changeantes en ce qui concerne la propriété foncière au Yukon. Je sais que certains députés d'en face ont exprimé des inquiétudes à l'égard du rôle et des pouvoirs de cet organisme.

Le rôle de l'Office des droits de surface du Yukon est très clair. Il réglera les différends concernant les droits d'accès, l'utilisation des terres et le paiement d'indemnités dans l'ensemble du territoire. Toutefois, on ne fera appel à l'office que lorsque les négociations directes entre les parties auront échoué. La promulgation de cette mesure législative et la mise en oeuvre des accords définitifs avec les premières nations donneront plus de certitude à tous les habitants du Yukon.

Le projet de loi C-55 établit un nouveau régime en ce qui concerne l'accès aux terres publiques et privées qui mettra le Yukon sur un pied d'égalité avec les provinces au Canada. Il prévoit des règles claires et précises.

Ce genre de mécanisme de règlement des différends ne vient pas d'être inventé. Il est déjà en place ailleurs au Canada et fonctionne bien. En fait, l'Office des droits de surface du Yukon est modelé sur d'autres organismes semblables qui existent actuellement en Alberta, en Saskatchewan, en Colombie-Britannique et au Manitoba. Ces organismes provinciaux ont été établis pour régler les différends entre les propriétaires de surface,


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généralement des agriculteurs, et ceux qui exploitent le sous-sol, par exemple les sociétés pétrolières et minières.

Au Yukon, nous prévoyons que les différends qui surviendront mettront en cause principalement des compagnies minières qui possèdent des droits miniers relativement à des terres qui ne sont pas visées par un accord et pour lesquelles d'autres parties détiennent les droits de surface ou encore relativement à des terres appartenant aux premières nations, comme le genre de situation qu'on retrouve en Alberta et en Saskatchewan. Le règlement des différends au Yukon sera fondé sur les mêmes principes fondamentaux, soit l'accès raisonnable, l'utilisation responsable et l'indemnisation équitable.

Dès que l'Office des droits de surface du Yukon sera formé, le gouvernement compte emmener ses membres en Alberta, en Saskatchewan, en Colombie-Britannique et au Manitoba, où ils pourront observer les organismes provinciaux à l'oeuvre. Le gouvernement songe aussi à inviter un représentant de ces organismes provinciaux à venir au Yukon pour donner de la formation ou toute autre forme d'aide.

Comme le ministre l'a signalé, c'est une solution de rechange rentable à l'utilisation des tribunaux pour le règlement des différends. Cela encouragera les sociétés pétrolières et minières de même que les gouvernements à travailler en partenariat avec les premières nations et les autres utilisateurs des terres pour le bien de toutes les parties intéressées.

L'office n'entendra même pas un différend s'il n'est pas convaincu que les parties en cause se sont vraiment efforcées d'en arriver à une entente. Les offices provinciaux ont non seulement réduit les coûts pour toutes les parties, mais aussi permis de résoudre les différends plus vite que les tribunaux n'auraient pu le faire, ce qui a aidé à prévenir des délais longs et coûteux dans l'exploitation des ressources.

Le ministre conviendrait certainement que le gouvernement du Canada, les premières nations du Yukon, les industries minières et pétrolières et le gouvernement territorial seraient heureux que l'Office des droits de surface du Yukon ne se réunisse jamais. Autrement dit, qu'il n'y ait jamais de différends à résoudre. Mais notre monde n'est pas parfait, et l'on ne peut pas compter que tout se règle tout seul. Des différends sont à prévoir entre les parties, chacune ayant des préoccupations raisonnables et légitimes.

Pour assurer un bon gouvernement, nous devons être prêts à régler les problèmes lorsqu'ils surgissent. C'est pourquoi il est important de prévoir dès maintenant un mécanisme de règlement des différends sur les droits de surface au Yukon.

J'ai bon espoir que l'office des droits de surface que le projet de loi C-55 mettra en place sera un moyen efficace. Il agira de façon juste et responsable pour veiller à ce que le développement économique au Yukon se fasse conformément à l'accord-cadre final. Il protégera également les droits existants, y compris les droits miniers des tiers dans la zone concernée.

(1240)

Permettez-moi de rappeler aux députés que les premières nations du Yukon n'ont jamais résisté au développement. Elles ont simplement dit qu'elles voulaient avoir leur mot à dire sur les modalités de l'exploitation des ressources. Comme propriétaires des terres, elles auront voix au chapitre. Comme 50 p. 100 des membres de l'office seront nommés par les premières nations, celles-ci auront part aux décisions importantes qu'il faudra prendre.

En outre, les droits des tiers ou des propriétaires de terres non désignées sont reconnus dans ce projet de loi et l'entente-cadre définitive. La nécessité de cet organisme a été clairement énoncée dans l'entente-cadre définitive. Il ne fait que remplacer les fonctionnaires ou tribunaux maintenant désignés dans la loi sur les mines comme organisme de règlement des différends.

Je tiens à donner l'assurance à la Chambre que la mise sur pied de l'Office des droits de surface du Yukon se fera d'une manière responsable sur le plan financier et qu'elle répondra aux besoins de la population du Yukon et du Canada. Certes, l'établissement de tout organisme de l'État entraîne des coûts, mais on peut les réduire au minimum grâce à une planification et à une gestion prudentes. La taille et le personnel de l'Office des droits de surface du Yukon seront maintenus au strict minimum et ses décisions seront expéditives.

Le projet de loi C-55 atteindra certains objectifs très précis, mais il est important que la Chambre se penche sur ses conséquences globales. Pour commencer, il est fondamental de comprendre que sans le projet de loi C-55 on ne pourra régler les revendications territoriales au Yukon.

Encore une fois, nos efforts pour satisfaire les revendications légitimes des premières nations du Yukon seront entravés. Une autre génération d'Indiens du Yukon risque de devoir recommencer à zéro pour négocier une entente à laquelle les parties sont déjà parvenues. Des occasions de développement économique vitales seront perdues. Nous ne pouvons pas permettre une telle issue. Le gouvernement du Canada a pris des engagements dans l'entente-cadre définitive de 1993, y compris celui de créer un office des droits de surface, et nous devons respecter ces engagements.

Je voudrais rappeler aux députés le débat qui a eu lieu à la Chambre il y a quatre mois et qui s'est conclu par la reconnaissance que l'entente-cadre était solide et qu'elle profiterait à tous les habitants du Yukon. En garantissant une base territoriale sûre, les règlements des revendications territoriales permettent aux premières nations du Yukon de se construire un avenir meilleur. Le gouvernement et tous les habitants du Yukon profiteront de l'activité économique accrue et du renforcement du développement politique du territoire.

En plus de se voir confirmer la propriété de vastes terres, les premières nations du Yukon auront droit à une indemnité financière non négligeable. Cette indemnité est essentielle à la prospérité future des premières nations du Yukon. Elle leur procurera les ressources financières nécessaires pour créer des emplois dans leurs collectivités, fournir des services et, de façon généra-


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le, relever le niveau de vie des Indiens du Yukon. Ces réalisations profiteront à tous les habitants du Yukon et à tous les Canadiens.

Il s'agit bien plus que de la simple création d'un nouveau régime pour les droits de surface. L'enjeu est la croissance économique du Yukon aussi bien que son développement politique et administratif. Est également en jeu l'esprit de partenariat, de confiance et de réalisation mutuelle que le gouvernement s'efforce d'établir dans ses relations avec les premières nations du Yukon et d'ailleurs. L'avenir même des premières nations du Yukon est en jeu. Ces dernières attendent depuis trop longtemps pour faire entendre leurs voix et obtenir qu'on réponde à leurs préoccupations.

Cela étant dit, j'exhorte les députés à voir plus loin que les complexités juridiques et procédurales de ce projet de loi, si importantes soient-elles. Je presse les députés d'adopter un point de vue plus large, de reconnaître que l'Office des droits de surface du Yukon est essentiel au processus de règlement des revendications territoriales. Je leur rappellerai que tous les habitants du Yukon et tous les Canadiens s'attendent à ce que nous parvenions au règlement des revendications territoriales.

C'est le temps d'aller de l'avant, de jeter les bases d'un avenir meilleur pour toute la population du Yukon. À cette fin, je presse les députés d'appuyer le projet de loi C-55 pour qu'il soit étudié le plus vite possible à l'autre endroit. C'est la seule chose responsable à faire pour garantir que la mise en oeuvre des règlements des revendications territoriales et des ententes définitives sur l'autonomie gouvernementale se fasse sans tarder.

(1245)

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, dans ses observations préliminaires, le député qui vient de prendre la parole a fait des déclarations concernant les préoccupations du Parti réformiste quant à la capacité du Conseil des Indiens du Yukon de désigner leurs représentants à l'office en question.

Or, nous ne nous faisons pas de souci quant à la capacité du conseil de nommer des représentants. Ce qui nous inquiète, comme en fait foi mon discours, c'est que cela puisse donner lieu à du favoritisme de la part du ministre, à des dissensions et à des guerres de territoire.

Permettez-moi une mise au point: rien dans le compte rendu ne laisse entendre que nous approuvons de quelque façon que ce soit ces déclarations.

M. Anawak: Monsieur le Président, j'ai clairement entendu le député affirmer que la participation de 50 p. 100 du Conseil des Indiens du Yukon à l'Office des droits de surface du Yukon pouvait donner prise à quelque comportement racial. Voilà pourquoi j'ai fait ces observations. À mes yeux, ces propos mettaient en doute la capacité du conseil de traiter des problèmes qu'il pourrait éprouver au sein de l'Office des droits de surface, de protéger les intérêts de tous les habitants du Yukon.

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté le discours du député ainsi que sa réponse à la question de mon collègue.

Nous cherchons les 10 meilleurs habitants du Yukon à pouvoir s'occuper de ces affaires. Il n'y a absolument pas lieu d'y voir une question raciale de notre part. Je voudrais convaincre le député d'en face à ce sujet.

M. Anawak: Monsieur le Président, je suis convaincu qu'on trouvera dans les «bleus» le mot «racial». C'est pour cette raison que j'ai dit que c'était une remarque déplacée.

Soit, nous cherchons les 10 meilleures personnes ou les meilleures personnes que le Conseil des Indiens du Yukon peut proposer pour régler les différends. Et je serais honoré si les membres de l'Office des droits de surface étaient tous des Indiens du Yukon. Ils seraient probablement plus compétents que n'importe qui dans ce pays pour régler les différends qui surgiront.

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens à regret aujourd'hui, car je dois m'opposer au projet de loi C-55.

Ce projet de loi est tributaire des projets de loi C-33 et C-34 débattus avant l'ajournement d'été et adoptés malgré la ferme opposition de nombreux Canadiens bien informés, notamment celle du caucus réformiste.

On me dit que les projets de loi C-33 et C-34 ne pourront entrer en vigueur qu'une fois le projet de loi C-55 adopté. J'aimerais pouvoir appuyer ces trois projets, car je crois que les autochtones du Canada devraient effectivement progresser vers l'autonomie et prendre en main leur propre avenir. Malheureusement, je ne peux le faire à cause de certains éléments qui me préoccupent.

J'amorcerai toutefois mes commentaires en relevant des aspects positifs. Premièrement, puisque le transport pose problème dans le Nord durant une bonne partie de l'année, je suis heureux de la disposition qui permet aux membres de l'office de participer aux réunions par téléphone.

Deuxièmement, il est bien que l'office ne puisse intervenir que dans les dossiers qui lui sont soumis par d'autres intervenants et qu'il ne puisse pas s'immiscer, bon gré mal gré, dans les négociations où les parties arrivent à s'entendre par elles-mêmes.

Troisièmement, étant donné que les retards dans les décisions peuvent entraîner de véritables difficultés, du fait que les saisons de prospection et d'exploitation minières sont très courtes au nord du 60e parallèle, l'article 27 me réjouit particulièrement. Il porte que:

Dans la mesure où l'équité et les circonstances le permettent, les demandes présentées à l'office sont instruites avec célérité et sans formalisme.
(1250)

Quatrièmement, devant le cauchemar administratif qu'allaient probablement entraîner les projets de loi C-33 et C-34, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a au moins consulté publiquement et largement les groupes intéressés et la population du Yukon en général pour déterminer quelle serait la meilleure façon de résoudre les conflits d'intérêts prévus grâce à la nouvelle mesure législative proposée dans le projet de loi C-55.


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Si j'ai bien compris, il y a 16 mois, une ébauche du projet de loi a été transmise à 11 groupes d'intérêts, dont la Yukon Chamber of Mines, la Klondike Placer Miners Association, l'Association canadienne des producteurs pétroliers et deux groupes représentant les trappeurs et les pourvoyeurs du Yukon. En plus de passer des annonces publicitaires dans les journaux locaux, le gouvernement a apparemment déployé des efforts sincères pour faire participer toutes les parties directement visées à la discussion, ce qui est tout à fait louable.

Cependant, je crois également qu'il m'incombe, en tant que membre de l'opposition, de signaler les lacunes de cette mesure législative et de préciser que je crois fermement qu'aucun groupe autochtone ne devrait se voir accorder des droits à l'autonomie gouvernementale supérieurs à ceux des gouvernements municipaux. La superficie des terres visée par le projet de loi C-55, ainsi que la richesse des ressources naturelles en cause font que cette entente déborde largement le cadre d'un gouvernement de type municipal.

J'espère que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien écoutera ce que nous avons à dire et améliorera tout le processus en ce qui concerne les initiatives du gouvernement fédéral qui compteront parmi les mesures aux conséquences les plus importantes et les plus durables jamais prises par le gouvernement canadien. En effet, ces accords sur le règlement des revendications territoriales et ces mécanismes de règlement des différends constitueront, sans aucun doute, un précédent pour tout le processus de règlement des revendications territoriales des autochtones encore en souffrance, surtout en Colombie-Britannique.

De plus, ces accords lient les contribuables canadiens pour de très nombreuses années. Si l'on inclut toutes les listes et tous les guides nécessaires pour trouver des sujets particuliers, cette dernière mesure législative, le projet de loi C-55, comporte quelque 64 pages qui essaient de nous sortir du pétrin dans lequel on s'est mis en décidant de céder aux premières nations la compétence sur des milliers et des milliers de milles carrés de territoire au Yukon.

J'ai une très grande admiration et beaucoup de sympathie pour les peuples autochtones. En outre, étant donné qu'ils ont démontré qu'ils étaient prêts à administrer eux-mêmes leurs propres affaires, je suis tout à fait d'accord pour qu'on démantèle le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et qu'on cède ces droits aux autochtones eux-mêmes.

Je crois dans l'égalité de tous les Canadiens et dans la nécessité de n'accorder de statut spécial à personne. Je pense également que nous devons bien nous assurer, dans le cadre d'une mesure législative de ce genre, de ne pas créer le type même de réserves et de systèmes partiaux basés sur la race que le gouvernement et les gens de l'Afrique du Sud essaient depuis des générations de faire disparaître de leur pays.

Ainsi, je suis persuadé qu'il faut mettre dès maintenant un terme à toute initiative fédérale qui, d'une façon ou d'une autre, diverge de la façon dont le gouvernement fédéral traite tous les autres Canadiens. En adoptant des mesures comme le projet de loi C-55, il s'agit de laisser aux autochtones eux-mêmes, de façon raisonnable et efficiente, le soin d'administrer leurs propres affaires.

Cependant, ces trois mesures législatives vont bien au-delà de ce que je considère être raisonnable et efficient. Ces mesures législatives continuent d'accorder des responsabilités spéciales aux premières nations du Yukon, y compris d'importantes subventions en espèces, et créent des zones d'habitation et des droits distincts fondés uniquement sur la race.

Parallèlement, elles accordent presque tous les droits et toutes les responsabilités d'une nation moderne, à part entière, à ces groupes dont la population totale s'élève à environ 7 300 habitants divisés en 14 bandes et dispersés sur l'une des terres les moins peuplées de notre planète.

Même les plus petites villes du Canada ont des populations plus importantes que la population totale de ces groupes auxquels on veut aujourd'hui accorder le statut de nation. Tous ceux qui s'intéressent aux affaires publiques de leurs administrations municipales savent qu'il n'est pas toujours facile pour des villes comme Vernon ou Salmon Arm, dams ma circonscription, Okanagan-Shuswap, d'avoir le personnel et d'offrir les services que les gens demandent.

(1255)

C'est vraiment ridicule. Il est insensé d'accorder autant de responsabilités à si peu de gens. Cela ne pourra fonctionner que si tous les contribuables canadiens apportent, en permanence, un appui financier. Le projet de loi C-55 demande tout simplement que l'on appuie une administration qui ne pourrait pas fonctionner autrement.

Le projet de loi C-55 crée un organisme qui réglera les différends sur l'utilisation des terres qui ne manqueront pas de survenir à cause de la décision du gouvernement de transférer à ces 7 300 autochtones du Yukon la responsabilité de gérer, d'administrer, de contrôler et de protéger environ 16 000 milles carrés de terres, ce qui équivaut à environ 75 p. 100 de la superficie de la Nouvelle-Écosse.

Cela comprend les ressources naturelles, les entreprises, la délivrance des licences professionnelles et commerciales, la responsabilité de toutes les constructions, le zonage et l'aménagement des terres, la planification et les installations sanitaires, l'exploitation et l'utilisation des véhicules, la prévention de la pollution et la protection de l'environnement du Yukon qui est extrêmement sensible.

Nous savons tous que le gouvernement libéral aime se vanter du nombre d'emplois que les citoyens et les entrepreneurs, au Canada, ont réussi à créer depuis les élections de 1993 malgré la réglementation exagérée, la mauvaise gestion et les surtaxes du gouvernement fédéral.

Nul doute que certains de ces emplois ont été créés directement par le gouvernement. Il semble apparent que les règlements des revendications territoriales autochtones contribueront grandement à la création d'emplois, car il y aura des postes d'administration pour quiconque ne sera pas en train de témoigner lors des nombreux différends susceptibles de découler du changement de statut de cette parcelle de terre, dont la superficie est équivalente, comme je l'ai mentionné plus tôt, à environ les trois quarts de celle de la Nouvelle-Écosse, une terre qu'on divise maintenant en terre désignée de catégorie A, terre désignée de catégorie B ou terre désignée en fief simple.


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Le projet de loi C-55 a pour objet principal de créer un groupe quelconque qui aura le pouvoir et les ressources nécessaires pour régler les nombreux différends qui surgiront lorsque des mineurs, des trappeurs, des guides de chasse de gros gibier et bien des Canadiens ordinaires se rendront subitement compte que des secteurs où ils croyaient autrefois avoir le droit légal de gagner leur vie ont été remis aux premières nations par le gouvernement fédéral ou territorial.

Cet organisme de règlement des différends, qui doit se nommer l'Office des droits de surface du Yukon, est composé d'un président et de deux à 10 membres, dont la majorité sont des résidents du Yukon, et la moitié sont nommés sur proposition du Conseil des Indiens du Yukon.

Je remarque que ni le fait d'être membre des premières nations du Yukon ou d'avoir des intérêts dans leurs terres ne sera considéré comme motif d'exclusion. Je crains donc que cet Office des droits de surface du Yukon ne devienne un nid douillet pour les petits copains du gouvernement.

À mon avis, dans tous les groupes gouvernementaux, il est important d'éviter même l'apparence de conflits d'intérêts. J'espère donc que tous les intéressés accorderont une attention particulière à cet aspect.

À partir de la page 33 du projet de loi, on traite des différends concernant les droits miniers sur les terres non désignées. Je mets en doute la logique de cette mesure, dont de nombreux aspects sont fondés uniquement sur la race, mais qui par ailleurs confère une autorité à l'égard des terres non autochtones à un office dont la moitié des membres sont des autochtones.

En outre, étant donné la grande diversité des lois concernées, notamment la Loi sur les opérations pétrolières au Canada, la Loi sur l'extraction de l'or dans le Yukon et la Loi sur l'extraction du quartz dans le Yukon, il semble que l'Office des droits de surface du Yukon devra trouver des moyens perfectionnés pour évaluer les diverses revendications, car le projet de loi C-55 ne contient à peu près rien à cet égard.

Quels principes l'office devra-t-il appliquer dans le règlement des différends? Le moment du dépôt d'une revendication est-il important? Depuis combien de temps une personne doit-elle avoir déposé une revendication de droit minier pour que les autochtones la reconnaissent? Combien de redevances les bandes pourront-elles exiger des promoteurs de projets d'exploitation de ressources minières? Quel genre d'offices de protection de l'environnement seront nécessaires? Quel pourcentage des fonds des bandes pourra être affecté à l'exploitation d'une mine où des autochtones seraient employés?

Je suis sûr que nous souhaitons tous que les chefs et les conseils de bande du Yukon agissent de façon tout à fait responsable et démocratique envers les membres des bandes locales. Où les responsabilités de l'office à l'égard des autochtones et des non-autochtones sont-elles énoncées? Le projet de loi C-55 oblige l'office à présenter un rapport annuel, mais il ne précise pas, en cas de conflits mettant en cause les meilleurs intérêts des autochtones, quels intérêts prévaudront. De tels conflits ne risquent-ils pas de durer des années?

(1300)

Enfin, j'ai constaté avec un certain étonnement que le projet de loi confère à l'office un pouvoir discrétionnaire qui lui permet d'effectuer l'adjudication d'une partie ou de la totalité des coûts des audiences qu'il tient. Il est bien de prescrire que les audiences doivent se tenir sur des terres autochtones chaque fois que cela est possible, et qu'elles doivent se dérouler le plus rapidement et le plus simplement possible.

L'expérience nous a cependant appris que des audiences portant sur des conflits d'intérêts graves mettant en cause les revendications territoriales des autochtones peuvent s'étirer sur des années, au plus grand plaisir des avocats et autres parties intéressées de l'élite autochtone. Le projet de loi ne prévoit, par exemple, aucune limite quant au nombre de conseillers juridiques ou autres soi-disant experts auxquels l'une ou l'autre des parties à un conflit pourrait faire appel. C'est pourquoi je crains que nous ne soyons encore une fois en train d'engager les contribuables à signer un chèque en blanc.

Certaines personnes affirment que la plupart des différends surviendront et seront réglés peu après l'entrée en vigueur des projets de loi C-33 et C-34. Je crains cependant qu'à mesure que la population augmentera et que les ressources de la planète iront en se raréfiant au cours du prochain siècle, la population canadienne et les premières nations du Yukon ne soient prises dans des disputes administratives pratiquement sans fin au sujet des droits de surface dans le nord du Canada.

J'espère sincèrement que le projet de loi C-55 offre un cadre approprié au règlement des différends de ce genre. Je ne vois cependant aucune indication qui me permette d'être raisonnablement certain que le projet de loi C-55 assurera le respect de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement dans l'intérêt de toute la population canadienne, y compris celle des provinces et des futures générations. C'est pourquoi je demande à la Chambre de rejeter le projet de loi.

M. Jack Iyerak Anawak (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je me demande si je peux poser une question au député. Dans son intervention il a utilisé souvent le mot «native», pour désigner les peuples autochtones.

Le député pourrait-il élaborer un peu sur son sentiment à l'égard de la façon dont ont été traités les autochtones du Yukon au cours des années et pourrait-il nous dire s'il reconnaît que les peuples autochtones, le Conseil des Indiens du Yukon et d'autres groupes méritent un traitement particulier du fait qu'ils étaient là bien avant l'arrivée du reste de la population du Yukon?

M. Stinson: Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations. Tout d'abord, je regrette qu'il ait été offusqué par l'utilisation répétée du mot «native». C'est un terme que j'emploie également à mon endroit ou pour désigner mes collègues nés dans ce pays, parce que nous sommes tous des «native Canadians», c'est-à-dire des Canadiens de naissance. Je peux comprendre l'objection du député, vu l'usage qui est fait du terme.


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Je reconnais que, par le passé, la population autochtone du Yukon n'a pas été particulièrement bien traitée par la population blanche. Il y avait des injustices. Cependant, il ne faut pas qu'une injustice en remplace une autre. Cette fois, nous devons faire les choses correctement. C'est maintenant que nous avons l'occasion de faire des choses qui, espérons-le, resteront valables dans les siècles à venir.

Ce que nous voulons, et ce que je veux personnellement, c'est que nous fassions les choses bien la première fois, pour que nous puissions aller de l'avant et non continuer à recourir aux tribunaux ou à se heurter encore aux mêmes problèmes dans 100 ou 200 ans.

Nous avons des responsabilités à l'égard de la population canadienne et de l'avenir du Canada dans son ensemble. Essayons de faire les choses bien cette fois, au lieu de les faire comme par le passé. J'espère que cela répond à la question du député.

(1305)

M. Elijah Harper (Churchill, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais parler du projet de loi C-55, Loi sur l'Office des droits de surface du Yukon.

Auparavant, je voudrais faire certains commentaires de nature générale sur la façon dont cette mesure législative est arrivée à voir le jour. Nous avons déjà été saisis de deux projets de loi concernant le Yukon, l'un sur le règlement des revendications territoriales, l'autre sur l'autonomie gouvernementale. Je suis quelque peu troublé de constater que le député qui vient de prendre la parole ne comprend pas la relation des premières nations avec le reste du pays. Il m'arrive souvent de penser que c'est ce genre d'ignorance qui induit le public en erreur. Je ne blâme pas le député. Je pense qu'il ne connaît tout simplement pas la question, qu'il n'est pas au courant.

J'ai toujours dit que la première chose à faire dans ce pays était de régler les problèmes avec les premiers peuples, les premières nations du Canada. Après tout, ce sont les premières nations qui ont accueilli un grand nombre des colons venus s'installer dans ce pays, dont on retrouve aujourd'hui certains descendants à la Chambre.

C'est grâce à la générosité des peuples des premières nations qu'un grand nombre de Canadiens ont pu tirer parti des terres et des ressources de ce pays. Il y a encore dans de nombreuses régions du Canada des revendications territoriales qui n'ont pas été réglées avec les premières nations.

Au Manitoba, ma région, il existe des traités qui ont été signés il y a longtemps. Par contre, il n'en existe pas dans certaines régions de la Colombie-Britannique, dans les territoires et au Yukon. En fait, l'accord sur le règlement de la revendication territoriale que nous venons de conclure est l'aboutissement d'une question qui devait être réglée avec les peuples des premières nations du Canada. C'est un traité adapté aux temps modernes, qui assure aux premières nations les moyens dont elles ont besoin pour leur autosuffisance et leur autonomie gouvernementale.

Comme le député l'a dit, les Canadiens doivent être informés des engagements pris par le gouvernement fédéral envers les premières nations. Nous devons, à mon avis, examiner les promesses faites à ce pays par les premières nations qui, dans le cadre de traités, ont convenu de partager les terres et les ressources avec le reste du pays.

Les premières nations ne le nient pas. Elles ne se posent pas la question: «Pourquoi prenons-nous des engagements envers les autres?» Elles n'hésitent nullement à lier nos générations futures de sorte que nous puissions partager nos terres et nos ressources avec les nouveaux venus. En fait, cet engagement, ces promesses sont éternels. Les traités disent qu'aussi lontemps que brillera le soleil, aussi longtemps que poussera l'herbe, aussi longtemps que couleront les rivières, nous tiendrons parole. Nous attendons des gouvernements qu'ils fassent preuve de la même compréhension à l'égard de notre peuple.

(1310)

Comme l'a dit le député, qu'est-ce que le gouvernement promet aux premières nations de ce pays? Cela fait plus d'un siècle que nous attendons que ces questions soient réglées. Nous avons des premières nations au Yukon qui attendent depuis très longtemps le règlement de leurs revendications.

Pendant toutes ces années, les gouvernements ont exploité les ressources du Yukon. Les Canadiens en ont bénéficié, mais d'un bout à l'autre du pays, il y a encore des premières nations qui n'ont même pas le minimum nécessaire pour vivre, comme un logement, ce que de nombreux Canadiens trouvent tout naturel d'avoir.

En tant que membre des premières nations, cela fait très longtemps que j'essaye d'éduquer le grand public, de le sensibiliser à ces questions et de lui faire comprendre la grande générosité des premières nations. Il est intéressant d'entendre certains députés d'en face dire que le règlement de ces revendications se fait au détriment des Canadiens ordinaires. J'espère qu'ils comprendront qu'il n'en est rien.

Si le gouvernement devait comptabiliser les recettes que lui procurent depuis un siècle les territoires et les ressources que les premières nations ont bien voulu partager avec le reste du pays, il arriverait à des milliards de dollars. Si les premières nations pouvaient obtenir ne serait-ce qu'un infime pourcentage de ces sommes, elles n'auraient pas besoin de compter sur la charité des gouvernements. Il arrive souvent qu'elles soient obligées de demander l'aide de ces derniers. C'est souvent une expérience humiliante car cela donne l'impression que nous sommes des mendiants en quête d'une aumône.

La vérité, c'est que les autochtones, les premières nations, ont déjà tellement donné sans recevoir grand-chose en retour qu'il est grand temps que les gouvernements honorent leurs obligations à l'égard des premières nations de ce pays. Nous ne demandons ni plus ni moins que cela. Nous demandons que les gouvernements tiennent leurs promesses.

(1315)

L'autre question dont je veux discuter, c'est l'interprétation que fait le député de l'autonomie gouvernementale. Le député a dit qu'un gouvernement autonome ne devrait pas avoir plus de pouvoirs qu'une municipalité. C'est encore quelque chose qu'il comprend mal. Dans notre pays, ce sont la reine et ses représentants, c'est-à-dire le pays souverain qu'était l'Angleterre, qui a conclu des traités avec les premières nations du Canada. Par conséquent, une nation a conclu une entente avec un groupe de personnes de notre pays, et ce groupe a certainement plus


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d'importance qu'une municipalité. Il s'agit des premières nations de notre pays.

Le processus de négociation de traités est un droit qui revient aux peuples autochtones, aux premières nations, depuis des millénaires. Le processus de négociation d'un traité ne fait que confirmer et reconnaître que les premières nations pratiquent l'autonomie gouvernementale depuis très longtemps. C'est là quelque chose que les Canadiens et les gouvernements de notre pays doivent bien comprendre.

Nous avons une relation spéciale et unique avec le Canada. En utilisant le mot spécial, je ne veux pas dire que nous sommes meilleurs que d'autres, mais aucun autre groupe habitant le Canada n'a, avec les gouvernements, une relation comme celle qu'entretiennent les premières nations.

En signant des traités, nous avons conclu des ententes avec un autre gouvernement, d'une manière que nous comprenons bien. Nous avons été très conciliants avec les autres gouvernements du Canada et avec l'ensemble des Canadiens. Il est temps pour nous de tirer profit des ressources que nous offrent les terres dont autrefois nous étions les maîtres.

Je suis très heureux d'exprimer mon appui à cette mesure législative qui mérite le soutien des députés des deux côtés de la Chambre. Les gens du Yukon sont presque unanimes à dire qu'il est temps d'aller de l'avant avec le règlement de la revendication territoriale des Indiens du Yukon. Le projet de loi C-55 est la dernière pièce de la base législative nécessaire.

Les députés savent bien que l'entente-cadre conclue avec les Indiens du Yukon se préparait depuis 21 ans. Certains qui n'étaient même pas nés à l'amorce des négociations ont maintenant fondé une famille. Avec l'adoption du projet de loi C-55 par le Parlement, ces familles pourront commencer à jouir des avantages de cette entente, y compris des avantages financiers.

Ce règlement de revendication ne fera rien de moins qu'assurer un avenir juste et prospère aux enfants des Indiens du Yukon. Reconnaissant également la valeur des aînés des premières nations pour leur persévérance, leur patience et leur sagesse, ce règlement leur assure une compensation pour les nombreuses années difficiles qu'ils ont connues.

Ce règlement donne aux Indiens du Yukon de tout âge une chance de reprendre à neuf, dans un nouveau partenariat avec les gouvernements, la gestion des terres et des ressources du Yukon.

Les députés savent aussi que l'accord général définitif a été ratifié par toutes les parties intéressées, soit les gouvernements fédéral et territorial, les premières nations du Yukon, la communauté des affaires et les habitants non autochtones du Yukon.

Tous les intéressés ont appuyé cet accord parce qu'il doit apporter au Yukon une certitude concernant les titres de propriété et les droits. Cette certitude est indispensable pour que les projets de développement minier et énergétique se réalisent, créent des emplois et ouvrent des possibilités de revenu et de commerce à tous les habitants du Yukon.

(1320)

Nous devons reconnaître ouvertement cet appui en adoptant le projet de loi C-55 sans délai à la Chambre des communes. Il serait insensé et irresponsable d'agir autrement, sans compter que cela réduirait la crédibilité de l'État auprès des premières nations, des habitants du Nord et de tous les Canadiens.

Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui met en place une nouvelle structure des droits de surface et un office des droits de surface pour le Yukon. L'établissement de cet office est au coeur de l'accord général définitif et traduit donc un engagement pris par le gouvernement canadien envers tous les habitants du Yukon.

Une chose ressort nettement de ce projet de loi et c'est l'étendue du processus de négociation qui a été réalisé depuis sa présentation à la Chambre des communes. Pendant que les lignes directrices du projet de loi C-55 étaient en voie d'élaboration, les fonctionnaires fédéraux ont mené une vaste consultation auprès de la population en général et des groupes intéressés du Yukon.

Cette consultation a eu lieu à plusieurs reprises concernant le libellé et le contenu de la mesure législative. Plusieurs groupes représentant l'industrie minière ont participé au processus de rédaction législative, dont la Yukon Chamber of Mines, la Klondike Placer Miners Association, l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs et l'Association minière du Canada.

Les intérêts de l'industrie pétrolière, qui a aussi un enjeu important dans la question des droits de surface, ont été bien défendus par l'Association canadienne des producteurs pétroliers. L'administration territoriale du Yukon a exprimé son opinion, de même que le Conseil des Indiens du Yukon, diverses premières nations du Yukon et le Conseil tribal des Gwich'in.

Pour obtenir l'avis des intéressés, on a envoyé le projet de lignes directrices aux principaux groupes d'intérêts, y compris la Yukon Trappers Association et la Yukon Outfitters Association. On a également fait paraître un avis dans les journaux du Yukon pour informer la population qu'elle pouvait obtenir copie des lignes directrices.

Les consultations sur le tout premier avant-projet de loi ont commencé au mois de juin 1993, il y a donc 15 mois, lorsqu'une première ébauche du projet de loi a été envoyée à tous les groupes d'intérêts. Plus tard au mois de juin, tous ces groupes ont été convoqués à une réunion à Whitehorse. Les autres parties du projet de loi ont été remises aux groupes aux mois d'octobre et de février. Par la suite, on a tenu d'autres réunions avec le Conseil des Indiens du Yukon et les gouvernements territoriaux à Vancouver, au mois de mars, et avec d'autres groupes d'intérêts à Whitehorse, au mois d'avril.

À la lumière des observations recueillies au cours de ces réunions et par d'autres moyens, une nouvelle partie devant s'ajouter au projet de loi a été rédigée et diffusée en juin dernier. Aux mois de juillet, d'août et de septembre, les différents inter-


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venants ont participé à d'autres réunions et proposé de nouvelles modifications au projet de loi.

Je n'ai pas l'intention ici de décrire en détail toutes les réunions qui ont porté sur le projet de loi C-55, mais il est important que la Chambre comprenne bien que le gouvernement n'a ménagé aucun effort pour recueillir l'avis des intervenants qui seront touchés par la création d'un nouvel organisme chargé de statuer sur les droits de surface au Yukon.

La plupart des préoccupations ont été prises en considération, mais il a fallu faire certains compromis. Le projet de loi est conforme aux dispositions de l'accord sur les revendications territoriales et avantageux pour tous les habitants du Yukon, puisqu'il leur offre une forme de gouvernement transparent, accessible et sensible à leurs besoins.

Les députés auraient du mal à trouver un groupe d'intervenants importants du Yukon qui s'oppose aux principes sous-jacents de ce projet de loi. Les divers groupes ne sont peut-être pas d'accord sur tous les plans, mais ils reconnaissent la nécessité de mettre sur pied un organisme territorial qui sera chargé de statuer sur les droits de surface et de veiller sur un régime stable, équitable et responsable.

Je crois que nous devons profiter de l'occasion qui nous est offerte pour mettre sur pied ce régime. Je le répète, non seulement le report de la création de cet organisme est inutile, mais il mettra en péril la mise en oeuvre des accords finaux négociés avec les premières nations du Yukon.

Je me permets de rappeler aux députés que de tels accords ont déjà été conclus avec quatre premières nations du Yukon: la première nation des Gwitchin Vuntut, la première nation des. . .

(1325)

Le vice-président: Le temps mis à la disposition du député est désormais expiré. Y a-t-il consentement unanime pour qu'il termine rapidement son allocution?

Des voix: D'accord.

M. Harper (Churchill): Monsieur le Président, je vais lire le reste du texte que j'ai préparé, c'est-à-dire quatre pages environ. Je vais m'efforcer de lire vite.

Je rappelle aux députés que quatre ententes de la sorte ont été conclues avec les premières nations du Yukon, à savoir, je le répète, les ententes intéressant la nation Gwitchin Vuntut, la nation Nacho Nyak Dun, les nations Champagne et Aishihik, et le Conseil des Tlingits de Teslin. Les négociations sur les ententes définitives avec les 10 autres premières nations dépendent de l'adoption et de la promulgation du présent projet de loi et de l'entrée en vigueur des lois sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale des premières nations du Yukon que les députés ont adoptées en juin dernier.

L'un des principaux objectifs des ententes sur le règlement des revendications territoriales est de déterminer avec certitude la propriété des terres et des ressources. On est en train de l'atteindre au Yukon et il en résultera de nombreux avantages économiques et sociaux pour les autochtones et pour les non-autochtones du Yukon.

De pair avec la détermination de la propriété vient la nécessité d'établir un régime précis d'accès aux terres privées et publiques. Ce système doit être sérieux et équitable pour tous les habitants du Yukon et il doit faire en sorte que les industries extractives du Yukon soient sur un pied d'égalité avec celles du reste du Canada.

J'ai bon espoir que le projet de loi C-55 va établir un tel régime au Yukon, qu'il va définir un ensemble de règles communes à tout le territoire. Tous les intervenants seront représentés au sein de l'organisme qui s'occupera des différends entre les détenteurs des droits de surface et ceux qui veulent avoir accès aux ressources souterraines.

L'Office des droits de surface évitera que ces différends soient portés devant les tribunaux. Comme mes collègues l'ont déjà fait remarquer, les services de l'office seront beaucoup moins coûteux que les recours devant les tribunaux.

L'Office des droits de surface sera un organisme très important au Yukon. Grâce à lui, les sociétés minières et d'autres entreprises pourront exercer leur droit légitime d'accès aux terrains privés de même qu'aux terrains de l'État. Ainsi, des projets d'exploitation des ressources retardés pendant de nombreuses années pourront aller de l'avant.

L'organisme verra aussi à ce que les indemnisations versées pour l'utilisation des terres soient justes et raisonnables. Cela est particulièrement important pour les premières nations qui détiendront les droits de surface sur de vastes régions où les droits d'exploitation du sous-sol ont déjà été accordés.

En outre, le mandat de l'Office des droits de surface prévoit que celui-ci devra faire respecter tous les droits d'accès de la population et du gouvernement aux terres visées par des règlements de revendications territoriales.

Toutefois, les détenteurs de ces droits d'accès ne doivent pas modifier de façon marquée le tracé des routes existantes sans obtenir au préalable l'autorisation des premières nations touchées. Il faudra également obtenir le consentement des premières nations pour construire de nouvelles routes d'accès sur les terres désignées.

La Chambre a de nombreuses bonnes raisons d'appuyer le projet de loi C-55 et, en réfléchissant à ces raisons, les députés ne doivent pas non plus oublier que, au départ, il fait suite à un engagement que le gouvernement du Canada a pris envers les premières nations et tous les autres habitants du Yukon.

Il s'agit de régler les revendications territoriales des premières nations du Yukon en se fondant sur l'entente-cadre définitive et la création de l'office fait partie intégrante du règlement de ces revendications.

La volonté du gouvernement de régler les revendications territoriales en suspens a été clairement énoncée dans le livre rouge et nous avons l'intention de ne laisser passer aucune occasion de travailler en ce sens.

Nous avons accompli de grands progrès au cours de l'année écoulée et nous avons réussi à prendre un certain rythme. Plus récemment, nous avons conclu une entente finale avec le Sahtu, les Dénés et les Métis de la vallée du Mackenzie. Les négociations d'autres revendications territoriales se déroulent bien.


7052

En réglant ces revendications de façon juste et responsable, le gouvernement réglera des différends qui existent depuis longtemps avec les premières nations et contribuera à instaurer des relations harmonieuses entre les autochtones et les non-autochtones.

J'exhorte les députés à participer activement à l'instauration de ces bonnes relations en appuyant le projet de loi C-55 à l'étape de la deuxième lecture.

(1330)

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, le député de Churchill s'est attardé assez longuement à des questions qui ne sont pas directement liées au projet de loi C-55. Dans ses remarques, il a parlé d'un manque de compréhension de la part des députés de ce côté-ci de la Chambre. Le problème, c'est peut-être que nous comprenons trop bien la situation.

Le député parle de la générosité avec laquelle les autochtones ont cédé leur patrimoine et leurs ressources à nos ancêtres. C'est là, à mon avis, une fausse interprétation de l'histoire. Les autochtones ont perdu leur territoire et leurs ressources parce qu'ils se sont retrouvés devant un nombre écrasant de personnes qui possédaient une supériorité technologique.

Aucune personne saine d'esprit n'oserait dire que les règles du jeu étaient équitables. Les envahisseurs n'étaient pas contre la tromperie, la chicane et le vol, mais certaines tribus autochtones n'étaient pas des anges non plus. Cependant, ce sont là des choses du passé.

La question que je veux poser au député est simple et courte. Il s'est intégré depuis longtemps au reste de la société canadienne. Pourquoi continue-t-il à promouvoir l'idée que les autres autochtones du Canada ne devraient pas faire de même?

M. Harper (Churchill): Monsieur le Président, le député vient de confirmer à la Chambre ce que j'ai dit plus tôt, soit qu'il y a un manque flagrant de compréhension de sa part. C'est souvent cette forme d'ignorance qui contribue à induire la population en erreur.

Si le député connaissait bien les premières nations, il saurait que nous avons été très généreux. Il devrait examiner la signification exacte des traités. La majeure partie de ces documents ont été conçus par des représentants du gouvernement, dans certains cas par des prêtres qui ne comprenaient pas les autochtones.

Nous avons une histoire orale très riche. Pour nous, les traités voulaient dire que nous devions vivre côte à côte et nous respecter mutuellement, et non chercher à nous dominer l'un l'autre. C'était ça l'esprit des traités. Le député ne trouvera pas ce genre de choses dans les livres d'histoire. Cependant, s'il parlait à nos aînés, il verrait à quel point nous avons été généreux de partager nos terres et nos ressources avec son peuple.

Nous n'avons jamais été conquis. Nous avons choisi de conclure des traités avec votre gouvernement. Nous constatons aujourd'hui que beaucoup d'autochtones vivent dans la pauvreté, tandis que les autres Canadiens vivent dans de meilleures conditions de logement. Le niveau de vie au Canada est l'un des meilleurs dans le monde et fait l'envie de bien des pays, mais les membres des premières nations n'en jouissent pas.

Je le répète, nous demandons simplement que le gouvernement respecte sa parole telle que consignée dans les traités. Nous ne demandons rien de plus, rien de moins.

M. Jack Iyerak Anawak (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je me demande si le député de Churchill ne pourrait pas répliquer plus longuement à l'observation qu'on vient d'entendre, nous enjoignant à nous intégrer au reste de la société canadienne. Nous nous intégrons à la société canadienne quand nous entrons à la Chambre des communes et quand nous arrivons chaque matin au bureau, mais cela, comme on dit, c'est parce qu'à Rome, il faut vivre comme les Romains. Quand nous rentrons chez nous, c'est différent. Les gens ne viennent pas me parler en disant «M. Anawak», mais en disant «Allo, Jack».

Nous n'avons pas l'habitude de faire de distinctions entre les personnes, car nous nous respectons les uns les autres. Je me demande si le député ne pourrait pas en dire un peu plus long sur ce thème. Oui, nous nous intégrons au reste de la société canadienne. Mais en même temps, nous attachons beaucoup d'importance à notre culture et nous voulons la conserver à tout prix.

(1335)

Je me rends bien compte que nous nous écartons du sujet, mais étant donné l'observation qu'a faite le député d'en face, je trouve approprié de dissiper tout malentendu sur ce que nous ressentons comme députés qui nous intégrons au reste de la société canadienne quand nous avons à le faire.

Le vice-président: Dans sa réponse, le député de Churchill pourra utiliser la minute et demie de débat qui reste s'il le désire.

M. Harper (Churchill): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. J'ai décidé de participer à la vie politique canadienne parce que je voulais soulever de nombreuses questions.

Nous, les membres des premières nations, n'avons même pas été reconnus comme citoyens de ce pays pendant très longtemps. C'est en 1960 que nous avons obtenu pour la première fois le droit de vote, et au Québec, ce droit nous a été reconnu en 1969. Il y a donc beaucoup de lois concernant les premières nations qui ont été adoptées sans le plein consentement et l'entière participation des intéressés.

Il est difficile de débrouiller en si peu de temps toute l'histoire du pays et celle des politiques législatives depuis un siècle. En fait, j'ai été le premier Indien inscrit à se faire élire dans la province du Manitoba il y a 11 ou 12 ans. J'ai exercé la plupart de mes activités politiques à l'intérieur de la vie politique canadienne. Auparavant, j'ai été chef de bande.

J'ai eu pour ambition de participer à la vie politique canadienne afin que, grâce à ma participation, beaucoup d'autres Canadiens commencent à comprendre les membres des premières nations.

7053

[Français]

Le vice-président: Comme il est plus ou moins 13 h 37, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LES PRÊTS D'ÉTUDES

M. Manning: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Comme vous le savez certainement, depuis la présentation de la motion M-291, la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants a été abrogée et remplacée par la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants.

Je demanderais le consentement unanime pour modifier la motion en remplaçant les mots «Loi fédérale sur les prêts aux étudiants » par « Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants».

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(Adoption de l'amendement.)

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager de modifier la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants de façon à y inclure un système de remboursement des prêts variant selon le revenu, afin de:
a) diminuer pour les contribuables le coût de l'éducation postsecondaire en réduisant la quantité et la valeur des prêts non remboursés, en imposant des intérêts composés plutôt que des intérêts simples sur les prêts non remboursés et en réduisant la quantité et la valeur des comptes de perception des prêts en question;
b) traiter avec plus d'équité et de souplesse les étudiants du postsecondaire en leur accordant pour le remboursement de leurs frais d'instruction des périodes plus longues établies selon un pourcentage fixe du revenu individuel;
c) veiller à ce que les maisons d'enseignement postsecondaire du Canada reçoivent les fonds dont elles ont besoin pour maintenir la haute qualité des services qu'elles assurent à l'heure actuelle.
-Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour faire valoir le bien-fondé de cette motion. Mais, avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais donner une raison plus générale pour que le Parlement dans son ensemble-non seulement les réformistes ou les députés ministériels, mais tous les députés-lance un message d'espoir aux jeunes en appuyant cette proposition.

Tous les parlementaires et ceux qui appartiennent à la vieille génération ne se privent pas de souligner la valeur et l'importance de la jeune génération. Mais les gestes concrets sont plus éloquents que les mots. Or, c'est un message bien différent que traduisent les mesures prises par le Parlement et le gouvernement. Par exemple, les dépenses excessives chroniques et systématiques des gouvernements de notre génération ont fini par créer une lourde dette et une fiscalité qui ne l'est pas moins, et c'est ce que nous léguons à la jeune génération.

(1340)

Il s'agit d'un héritage terrible, et, à moins que nous ne nous attaquions au problème, notre génération de politiques aura sur le bien-être de la génération montante un effet essentiellement négatif, et non pas constructif.

J'estime donc important que le Parlement et les dirigeants de notre pays proposent une solution valable aux jeunes, une solution qui, de par sa nature, leur montrera que nous sommes conscients de leur importance et de leur valeur pour l'avenir de notre pays et que nous sommes prêts à investir en eux et non pas seulement à leur transmettre nos dettes.

Durant la dernière campagne électorale fédérale, j'ai fait deux propositions au sujet de l'enseignement supérieur qui ont semblé susciter une réaction très positive chez les jeunes. J'ai tout d'abord proposé de donner aux étudiants un plus grand droit de regard sur les dépenses engagées au chapitre de l'éducation, en distribuant les paiements de transfert fédéraux au titre de l'éducation sous forme de bons d'échange non remboursables.

L'autre proposition qui a suscité d'excellentes réactions est celle dont il est fait état dans la mesure d'initiative parlementaire à l'étude. Il en est aussi fait mention dans le document de travail du gouvernement sur le développement des ressources humaines. Il s'agit d'un régime de remboursement des prêts en fonction du revenu.

Je tiens à signaler que, lors du débat national des chefs qui a eu lieu à Ottawa durant la campagne électorale et dans le cadre duquel les questions de l'auditoire étaient très restreintes, la seule question qu'un jeune a pu poser concernait ce que les étudiants pouvaient faire pour financer leurs études dans l'avenir, compte tenu des frais de scolarité et des coûts d'éducation plus élevés. Je crois que le régime de remboursement des prêts en fonction du revenu est la meilleure solution, en l'occurrence.

J'aimerais faire un bref survol de la situation actuelle. Nous savons tous que les étudiants ont besoin d'argent pour financer leurs études. Je le sais par expérience. Sandra et moi avons cinq enfants, dont trois sont d'âge à fréquenter l'université. Les principales sources de financement des étudiants sont le revenu qu'ils gagnent personnellement, de nombreux étudiants cumulant de nos jours deux emplois pendant leurs études pour essayer d'atteindre leur objectif; les fonds que les familles peuvent parfois fournir et qui sont souvent très limités dans bon nombre d'entre elles; les bourses d'étude qui sont habituellement accordées en fonction des résultats scolaires et d'autres critères; et enfin, les emprunts contractés.

À l'heure actuelle, la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, anciennement appelée la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants, est la principale mesure législative fédérale garantissant les prêts contractés par les étudiants. En vertu des dispositions de ce régime, le gouvernement garantit les prêts que consentent à des étudiants des prêteurs du secteur privé, notamment les banques, le coût du prêt étant subventionné par le gouvernement tant que l'étudiant poursuit des études à plein temps. L'étudiant commence habituellement à rembourser son prêt environ huit mois après avoir terminé ses études. S'il y a défaut de paiement, les prêteurs sont remboursés, et le prêt est


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habituellement transmis à une agence de recouvrement embauchée à contrat par le gouvernement.

Le système actuel laisse principalement à désirer parce qu'il prévoit des fonds insuffisants pour les étudiants confrontés à des frais de scolarité et à des coûts d'éducation plus élevés et parce qu'un étudiant sur cinq finit par ne pas faire ses paiements pour rembourser son prêt.

Le Parti réformiste s'est demandé s'il n'existait pas une meilleure solution de rechange. Nous croyons que le régime de remboursement des prêts en fonction du revenu en est une. Comme c'est un titre à coucher dehors, je parlerai dorénavant du RPFR.

En gros, il s'agit d'un régime qui permet aux étudiants de rembourser leurs prêts sur une certaine période après l'obtention de leur diplôme, compte tenu de leur revenu annuel, la perception se faisant par l'entremise du régime d'impôt sur le revenu. Après l'obtention de son diplôme, un étudiant commencerait à rembourser son prêt selon sa capacité de paiement établie en fonction de ses revenus. Le montant exact qu'un ancien étudiant rembourserait chaque année varierait d'une année à l'autre en fonction de son revenu. Le montant fixé en proportion du revenu serait payé par l'entremise du régime fiscal. Si le revenu de l'étudiant n'atteint pas le montant minimal fixé, le paiement serait reporté au moment où le revenu de l'étudiant augmenterait.

Ce système de remboursement est fondé sur le relevé exact du revenu de l'étudiant après la fin de ses études supérieures. Comme il connaît en détail le revenu de l'étudiant de même que ces coordonnées grâce à la déclaration de revenus de ce dernier, Revenu Canada serait le percepteur chargé du recouvrement des prêts. Nous souscrivons à cette idée de remboursement des prêts en fonction du revenu pour trois raisons.

(1345)

La première, c'est qu'elle permettrait de maintenir la qualité élevée de notre système d'éducation. Comme le ministre des Finances l'a fait remarquer ces jours derniers, les pressions sur les finances publiques sont énormes. Les ressources sont de plus en plus limitées et le gouvernement fédéral comme les provinces se demandent comment refinancer l'éducation postsecondaire.

Les gouvernements contribuant de moins en moins au financement et les coûts augmentant sans cesse, la qualité de l'éducation baissera à moins que nous ne trouvions d'autres sources de revenus. Le manque d'équipement de laboratoire, la taille de plus en plus grande des classes et le contingentement des admissions ont pour cause directe la réduction de la contribution de l'État en raison de l'escalade des coûts de l'éducation.

Toute solution valable pour le problème de sous-financement de l'éducation supérieure doit reposer sur l'obtention de sources de financement non gouvernementales, y compris une augmentation des frais imposés aux étudiants, mais on ne peut pas augmenter les frais de scolarité et d'autres frais liés aux études sans rendre le coût des études universitaires encore plus prohibitif qu'il ne l'est présentement.

Si, toutefois, les étudiants peuvent rembourser leurs prêts en fonction de leur revenu sur une plus longue période, au besoin, le fardeau d'une hausse des frais de scolarité serait supportable. Les prêteurs privés et le gouvernement fédéral seraient également en mesure de consentir davantage de prêts et des prêts d'un montant plus élevé à faible risque parce qu'ils seraient garantis par les revenus supérieurs futurs des diplômés et plus sûrs du fait des pouvoirs de perception de Revenu Canada.

La deuxième raison pour appuyer cette idée, c'est qu'elle assure une plus grande équité et une plus grande flexibilité aux étudiants. Le système actuel de prêts aux étudiants comporte de nombreuses lacunes, dont la plupart entraînent un taux élevé de cessation de paiement.

Les emprunteurs éventuels sont soumis aux traditionnels examens des moyens d'existence qui tiennent compte du revenu de leurs parents et de leurs partenaires. Les étudiants dont les parents sont relativement aisés n'ont souvent pas droit aux prêts étudiants, même s'ils ne reçoivent aucune aide de leurs parents. Quels que soient leur emploi et leur revenu, les étudiants sont tous obligés de payer leurs prêts au même rythme et au même taux, après les études.

Le nombre élevé de prêts non remboursés qui en découle produit deux effets négatifs. C'est, pour les emprunteurs irresponsables, une invitation à abuser du système, au détriment de ceux qui ont vraiment besoin de ces prêts. Et puis, il est plus difficile de convaincre la population d'appuyer le programme des prêts aux étudiants parce c'est souvent le contribuable qui doit payer les pots cassés. Par contre, le plan de remboursement des prêts variant selon le revenu lie le montant du paiement à la capacité de payer et garantit davantage le remboursement des prêts, un bon point à la fois pour les étudiants et pour les contribuables.

En effet, en vertu de la loi actuelle, les contribuables paient l'écart entre l'intérêt payé par les emprunteurs et l'intérêt accumulé que réclament les prêteurs privés. Les contribuables subventionnent les frais d'intérêt pendant que l'emprunteur fait ses études et, à la fin, ils en sont réduits à payer la note pour les prêts que les emprunteurs ne remboursent pas et à acquitter les comptes de perception. Les frais des prêts non remboursés pèsent de plus en plus lourd sur le système. Un peu plus tôt cette semaine, dans le Globe and Mail, Peter Moon a donné une idée des dimensions de ce fardeau.

À l'heure actuelle, environ un emprunteur sur cinq ne rembourse pas immédiatement ses prêts aux étudiants. Environ les deux tiers d'entre eux finissent par rembourser, mais pas avant que le gouvernement fédéral n'ait assumé la dette auprès de la banque et n'ait amorcé un quelconque processus de perception. L'autre tiers, soit environ 7 p. 100 de tous les prêts aux étudiants, passe aux mauvaises créances. Présentement, 180 000 étudiants n'ont pas remboursé leurs prêts, et les créances atteignent près de un milliard de dollars. Enfin, environ 2 p. 100 de tous les étudiants emprunteurs ont recours à la faillite pour se soustraire à l'obligation de rembourser leurs prêts.

Dans un système où le remboursement des prêts serait fonction du revenu, ces coûts seraient tous considérablement réduits. Les économies entraînées par une diminution des frais de recouvrement, en particulier, seraient importantes. L'an dernier, le gouvernement a dépensé environ 23,3 millions de dollars en frais de recouvrement pour récupérer environ 100 millions de dollars. Si l'on calcule qu'il y a pour environ un milliard de dollars de prêts non remboursés, cela pourrait coûter aux agences de recouvrement dans les 300 millions de dollars.


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Bref, les réformistes sont en faveur d'un système de remboursement des prêts variant selon le revenu pour plusieurs raisons. Premièrement, c'est un système important, efficace, juste et souple qui permet aux étudiants d'investir davantage dans l'éducation, ce qui contribue à financer et à maintenir, au Canada, un système de haute qualité. Deuxièmement, il est souple et juste envers les étudiants, car il laisse tomber l'examen habituel des ressources et donnent aux anciens étudiants la chance de rembourser leurs prêts sur des périodes plus longues établies en fonction de leur revenu. Troisièmement, il diminue les coûts pour les contribuables, car il réduit la quantité et la valeur des prêts non remboursés, laisse tomber la bonification des intérêts et réduit les frais de recouvrement.

(1350)

Je voudrais rapidement comparer les engagements que le Parti réformiste et le gouvernement libéral ont pris envers le financement de l'éducation postsecondaire. Je constate souvent que certaines des meilleures idées du gouvernement viennent, en fait, du Parti réformiste. Les gouvernements canadiens ont ignoré ce genre de proposition pendant environ 40 ans, tout comme les expériences faites en Australie et en Nouvelle-Zélande. Quelques semaines seulement après que ma motion a été inscrite au Feuilleton, il était question, dans le projet de loi C-28, de faire l'expérience d'un système de remboursement des prêts variant selon le revenu.

Dans le cadre du débat sur ce projet de loi, les réformistes ont proposé de refondre tout le système de prêts aux étudiants en prévoyant notamment un remboursement des prêts en fonction du revenu et, quelques mois plus tard, c'est exactement ce qu'on prévoyait dans le document de travail sur la politique sociale du gouvernement. Nous voulons bien que le gouvernement adopte les bonnes idées du Parti réformiste. Nous nous plaignons simplement du fait qu'il lui faut tellement de temps pour s'y résoudre et nous espérons qu'il pourra bien mettre ce système en oeuvre.

Il y a, cependant, une différence importante entre notre système de remboursement des prêts variant selon le revenu et celui que propose le gouvernement libéral. Contrairement aux libéraux, les réformistes ne voient pas la réforme des prêts aux étudiants comme un moyen de se décharger de la dette du gouvernement sur les étudiants ou d'abandonner le rôle de gouvernement fédéral dans le financement de l'enseignement supérieur.

Nous voyons ce type de remboursement des prêts comme un moyen de remplacer le système actuel de prêts aux étudiants et un complément des transferts fédéraux au titre de l'éducation. Selon nous, la partie en espèces de ces transferts pourrait être versée directement aux étudiants sous la forme de bons d'études non remboursables.

Par contre, dans son document de travail, le gouvernement recommande d'éliminer les transferts en espèces du gouvernement fédéral au titre de l'éducation. Cela réduirait de plus de 40 p. 100 les transferts fédéraux en matière d'éducation et les étudiants devraient alors combler la différence.

C'est pourquoi les étudiants s'inquiètent tant des propositions gouvernementales. Ils ne sont pas stupides. Ils connaissent la différence entre un prêt remboursable et un bon d'études non remboursable. Même si je considère les prêts dont le remboursement est fonction du revenu comme une proposition utile en soi, les étudiants actuels et futurs craignent avec raison que l'élimination soudaine des transferts fédéraux en espèces nuise à la qualité de l'éducation, limite l'accès à l'enseignement et les force à s'endetter de façon démesurée.

En conclusion, je tiens à parler brièvement de l'appui accordé au système de remboursement des prêts variant selon le revenu et de la place qu'on devrait lui donner dans les priorités du Parlement sur le chapitre des dépenses. Tous les députés savent que le Parti réformiste s'est fait la réputation de réclamer sans cesse des réductions de dépenses visant à équilibrer le budget fédéral au cours de la présente législature, mais comme nous l'avons signalé dans notre plan d'élimination du déficit sur trois ans déposé l'hiver dernier, un des rares domaines où les réformistes ne prônent pas de compressions de dépenses, c'est celui de l'enseignement postsecondaire.

Qu'on ne s'y méprenne pas: l'objectif du Parti réformiste est d'éliminer le déficit, mais l'enseignement postsecondaire, en tant qu'investissement dans l'avenir du Canada, est tellement important à nos yeux que nous serions prêts à réduire massivement les dépenses dans d'autres secteurs pour maintenir le financement actuel de l'éducation.

Je soutiens que tout ce que le gouvernement fait, tout l'argent qu'il dépense, l'investissement réel qu'il fait dans l'avenir doit porter sur l'éducation et la formation des Canadiens de la jeune génération.

Compte tenu de cela, l'insuffisance des propositions que le ministre du Développement des ressources humaines a présentées dans son document de travail au sujet du financement de l'éducation nous porte franchement à mettre en doute la détermination du gouvernement d'établir des priorités de dépenses dans son processus de réforme des programmes sociaux ou de réduction du déficit.

Je demande à la Chambre et aux députés d'en face: Est-il plus important d'accorder des subventions fédérales de 1,1 milliard de dollars à la SRC que de financer l'éducation des jeunes? Je ne le crois pas. Est-il plus important de financer le multiculturalisme à l'aide de 40 millions de dollars que de financer l'éducation des jeunes? Je ne le crois pas. Est-il plus important de dépenser 50 millions de dollars en primes au bilinguisme pour les fonctionnaires que de financer l'éducation des jeunes? Je ne le crois pas. Est-il plus important de dépenser 1,4 million de dollars pour un film qui glorifie le meurtre de Pierre Laporte que de financer l'éducation des jeunes? Je ne le crois pas. Est-il plus important d'accorder des subventions fédérales de plus de trois milliards de dollars au secteur privé que de financer l'éducation des jeunes? Je ne le crois pas.

(1355)

En terminant, j'espère que la Chambre appuiera cette motion qui vise à réformer les prêts aux étudiants, compte tenu surtout des propositions que le gouvernement a faites dans son document de travail sur la politique sociale. Envoyons aux jeunes Canadiens le message clair que leur éducation, leurs connaissances,


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leurs compétences et leur avenir constituent notre plus grande priorité.

M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, il est bon de voir que le député a finalement réussi à conclure son exposé après avoir annoncé trois fois qu'il voulait conclure.

Le gouvernement croit que notre compétitivité, et donc notre prospérité, dépend des compétences et des talents des Canadiens. Les politiques que nous choisissons aujourd'hui auront des répercussions importantes sur l'avenir. C'est pourquoi le gouvernement fédéral veut s'assurer que les étudiants auront accès aux prêts et augmenter les montants qu'ils pourront recevoir en vertu du programme.

Nous avons fait des démarches auprès des provinces afin d'entreprendre la mise en oeuvre de projets pilotes dans certains domaines comme la transition de l'école au travail et l'apprentissage des technologies, car nous savons que la demande des Canadiens à l'égard de leur système d'éducation ne diminuera pas au cours des années à venir. Les ressources que nous utilisons doivent donc être réparties de façon à produire les meilleurs résultats possibles. Les partenariats de recherche avec les gouvernements provinciaux permettront de trouver de nouvelles façons de procéder pour que tous les Canadiens aient accès à une éducation et à une formation adéquates.

Les députés savent déjà que nous devons maximiser le rendement de chaque dollar de recettes fiscales. Ils devraient aussi réaliser que l'une des meilleures façons d'investir ces dollars est certainement d'aider les Canadiens à acquérir des connaissances, qu'il s'agisse d'enfants, d'adolescents, de gens déjà sur le marché du travail ou de personnes qui veulent y retourner.

Il vaut la peine de répéter que le gouvernement, tout comme la plupart des Canadiens, attribue une grande valeur à l'éducation postsecondaire. Le Canada et les Canadiens consacrent des sommes importantes à l'éducation supérieure. Chaque étudiant au niveau collégial ou universitaire doit beaucoup aux contribuables canadiens, mais ceux-ci profitent aussi d'une main-d'oeuvre bien instruite.

Nos diplômés des collèges et des universités remboursent les investissements de diverses façons. Chez les diplômés d'université, le taux de chômage est de 5,7 p. 100, tandis que chez ceux qui ne terminent pas l'école secondaire, il s'élève à plus de 16 p. 100. Ceux qui ont terminé des études postsecondaires gagnent environ 40 p. 100 de plus que les autres, dans leur vie. L'an dernier, plus de trois millions de Canadiens ont eu recours à un programme quelconque de sécurité du revenu, à un moment ou à un autre.

En période de compressions, il devient très difficile d'affecter des ressources. Les besoins sont plus grands et les protestations, plus fortes. Dans ces circonstances, un gouvernement doit écouter attentivement les différents intéressés avant de fixer une politique.

Pour justifier le soutien accordé aux études supérieures, on peut signaler que, au cours des trois dernières années, il y avait 17 p. 100 plus d'emplois offerts aux diplômés universitaires, tandis qu'il y en avait 19 p. 100 de moins pour ceux qui n'avaient pas terminé leurs études secondaires. D'ici l'an 2000, il faudra avoir au moins 16 ans d'études pour 45 p. 100 des emplois offerts sur le marché.

C'est dans cet esprit que nous avons amélioré le Programme canadien de prêts aux étudiants. Ces mesures visent à répondre aux préoccupations exprimées au fil des ans par les groupes d'étudiants, les gouvernements provinciaux et l'ensemble de la population. On peut invoquer de nombreuses raisons d'améliorer les prêts aux étudiants.

Il n'y a aucun doute qu'en investissant maintenant dans l'éducation, on réduit les coûts futurs d'aide sociale. En offrant maintenant aux Canadiens une éducation solide et diverses possibilités de formation, on aide les générations suivantes à grandir dans un monde plus sûr. Nous devons investir maintenant dans la constitution d'une main-d'oeuvre qualifiée, pour que des choix réels s'offrent au Canada et aux Canadiens dans l'avenir.

Le travail en ce sens est déjà commencé. De nouvelles mesures d'aide financière sont offertes aux étudiants dans la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, qui prévoit des conditions de remboursement plus conformes à leur niveau de revenu. Les prêteurs assumeront une plus grande responsabilité en ce qui concerne l'administration et le recouvrement des prêts.

Cette réforme a pour effet que des étudiants dans une situation semblable seront traités de la même façon dans toutes les provinces participantes. Certains étudiants craignent que les conditions de remboursement déterminées en fonction du revenu aient pour effet de leur imposer une lourde dette, mais nos intentions sont exprimées très clairement dans la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants.

Voyez ce que nous avons fait. La Loi fédérale sur les prêts aux étudiants prévoit maintenant quatre nouvelles catégories de subvention, de manière à répondre aux besoins des étudiants à temps partiel, des étudiants handicapés, des mères seules et des femmes inscrites à certains programmes d'études supérieures.

Nous voulons que les gens reçoivent une bonne éducation. Le Canada retire beaucoup de ce qu'il investit dans une main-d'oeuvre diplômée compétente et bien formée. Par ailleurs, le gouvernement estime que ceux qui reçoivent une éducation postsecondaire doivent prendre leurs responsabilités. Lorsque nous accordons des prêts à des étudiants, par exemple, nous sommes d'avis qu'ils doivent compléter leurs études et rembourser leurs prêts s'ils le peuvent.

Dans sa motion, le député demande au gouvernement d'envisager la création d'un système de remboursement en fonction du revenu. En toute déférence, je répondrai brièvement que le gouvernement songe déjà à cette solution.

(1400)

En mai et juin, le projet de loi C-28, Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, a été adopté et a reçu la sanction royale. Cette loi permet d'appliquer des formules de remboursement en fonction du revenu. Nous consultons actuellement les provinces au sujet des projets pilotes qui pourraient être implantés. Le gouvernement ontarien et le ministère du Développement des ressources humaines, entre autres, ont présenté, en septembre dernier, un symposium de deux jours sur le remboursement en fonction du revenu. Statistique Canada participe actuellement à des travaux en vue d'établir un modèle économique de remboursement en fonction du revenu qui permettra d'essayer diverses formules.

La question que nous devrons nous poser au sujet d'une formule de remboursement en fonction du revenu ou de toute autre proposition relative aux études supérieures est la suivante: La


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solution retenue permettra-t-elle aux Canadiens qui le veulent de poursuivre des études collégiales et universitaires?

Les discussions au sujet du remboursement en fonction du revenu ne se déroulent pas dans le vide. Nous savons tous que l'avenir économique du Canada dépendra de plus en plus des diplômés collégiaux et universitaires. Les choix que feront ces étudiants auront un effet déterminant sur la compétitivité du Canada et sur sa capacité de demeurer l'un des meilleurs pays au monde, à mon avis le meilleur.

Ces brèves observations ne suffisent évidemment pas à rendre justice au concept de remboursement en fonction du revenu. Je puis cependant dire au député que le gouvernement est toujours disposé à examiner de nouvelles façons de faire plus avec moins. Nous avons déjà pris des dispositions en vue d'étudier le système de remboursement en fonction du revenu.

Les réformes du programme de prêts d'études, qui sont maintenant mises en oeuvre ne sont pas la dernière façon dont le gouvernement entend aider les Canadiens à financer leurs études postsecondaires. S'il existe des preuves convaincantes que le Canada aurait avantage à envisager un système de remboursement des prêts variant selon le revenu, les résultats le diront.

Nous sommes ouverts aux bonnes idées. En tant que nation, nous consacrons chaque année 2,6 p. 100 de la valeur du produit de notre économie à l'éducation postsecondaire. C'est beaucoup. C'est aussi le pourcentage le plus élevé si on le compare avec les autres pays du monde. Après leurs études secondaires, 60 p. 100 des élèves s'inscrivent au collège ou à l'université. Nous ne devons pas oublier que, dans une année donnée, deux tiers des étudiants n'ont pas recours aux prêts. La majorité des étudiants sortent diplômés avec moins de 5 000 $ de prêts.

Nous avons bien étudié la question du remboursement des prêts en fonction du revenu. Certaines associations d'étudiants estiment que les avantages que leur procurerait un tel système seraient vite annulés si les écoles ou les gouvernements provinciaux augmentaient les frais de scolarité.

Nous savons tous que nous ne pouvons imposer des barèmes de frais de scolarité aux gouvernements provinciaux. Les frais de scolarité ont augmenté ces dernières années. Je vais vous dire. L'enseignement et la formation sont des responsabilités partagées. Les gouvernements peuvent offrir aux étudiants un vaste choix de possibilités, mais les Canadiens ont l'obligation d'investir dans leur propre avenir.

En tant que pays, nous sommes prêts à consacrer des ressources à l'éducation. Cependant, les Canadiens estiment que nous ne produisons pas le type de diplômés dont nous avons besoin. Nous faisons tous face à une réalité nouvelle. Quand les gens cessent d'apprendre, ils cessent de gagner de l'argent. Nous ne voulons pas que les nouveaux diplômés se retrouvent avec un fardeau, avec une dette considérable. La nouvelle loi est bien claire sur ce point. Nous cherchons à mettre en place un système qui appuie les personnes qui vont à l'école et non un système qui les pénalise pour leur ambition.

Durant toute leur vie professionnelle, beaucoup de Canadiens, sinon la plupart, devront acquérir de nouvelles compétences. Pour cela, nous devons revoir notre attitude en tant que Canadiens, gouvernements, entreprises et associations. Le problème, c'est l'accessibilité. Ils ont beau avoir toutes les capacités et toute l'ambition nécessaires, les étudiants potentiels ne peuvent espérer faire des études s'ils n'ont pas les moyens de les financer et s'ils ne disposent pas d'un système réaliste qui leur permette de rembourser leurs prêts.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, B.Q.): Monsieur le Président, il me fait plaisir à mon tour, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de formation et de jeunesse, de vous faire part de la position de notre parti sur la motion M-291 présentée par le chef du Parti réformiste.

Cette motion, je dois vous le rappeler, se lit comme suit: «Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager de modifier la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants de façon à y inclure un système de remboursement des prêts variant selon le revenu, [. . .]»

Le concept du remboursement proportionnel au revenu semble, à première vue, avoir pour but d'aider les étudiants. Si c'était ça le but, il est bien sûr que du côté de l'opposition officielle, on souscrirait très largement à cette motion.

(1405)

Mais c'est un concept qui n'a pas été clairement défini jusqu'à présent. Il est facile de l'utiliser à d'autres fins.

Telle que présentée, la motion du chef du Parti réformiste justifie, à notre point de vue, l'approche préconisée par l'actuel gouvernement qui consiste à faire porter le fardeau financier des études supérieures aux étudiants.

Je n'ai pas besoin d'insister sur le fait que la dette publique, qui dépasse les 500 milliards de dollars, est considérable, mais il est assez facile de dire que ce n'est pas la faute des étudiants. Ce n'est pas la faute des jeunes qui entreprennent des études supérieures. Je ne ferai pas un débat pour savoir sur qui repose cette faute, mais ce n'est pas simplement sur ce gouvernement-ci. On sait que cette dette s'accumule en spirale de façon particulièrement intensive depuis l'année 1979. Elle a commencé sous le règne libéral puis s'est continuée avec les conservateurs pour se poursuivre encore aujourd'hui.

Tout à l'heure, j'ai entendu le député du parti ministériel dire une chose très erronée. Il disait que l'enseignement supérieur était une responsabilité partagée par les gouvernements fédéral et provinciaux. Le député a mal lu la Constitution. La Constitution stipule clairement que l'éducation et l'enseignement supérieur-et ce n'est pas mon but aujourd'hui de faire un débat sur la Constitution, mais il est toujours bon de le rappeler, puisque même des députés de cette Chambre semblent l'ignorer-sont de responsabilité provinciale.

Malgré cela, on sait que le gouvernement fédéral, jusqu'à présent, s'est servi du pouvoir de dépenser-c'est également inscrit dans la Constitution-pour envahir ce champ. Comme au Québec une partie des impôts servait jusqu'à maintenant à financer ces études-là sous l'autorité du gouvernement fédéral, il était normal qu'on essaie d'obtenir notre part. Mais rappelons encore une fois que cela relève de la juridiction provinciale.

Or, on s'est prévalu jusqu'à maintenant au Québec de notre droit de retrait avec compensation financière. Mais il ne s'agit pas du débat que je veux faire aujourd'hui.

Nous croyons qu'il faut approfondir le débat sur le RPR avant de le mettre en branle. Toutefois, nous nous opposons à toute utilisation du RPR s'il a pour but ultime de refiler l'entière facture des études supérieures aux étudiants, car les frais de


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scolarité augmentent déjà à un rythme effréné. L'endettement des étudiants prend lui aussi des proportions alarmantes, pas seulement la dette nationale. L'endettement personnel des étudiants est déjà en croissance accélérée.

En effet, les étudiants ont beaucoup de difficulté à rembourser leurs prêts une fois leurs études terminées. Un article paru dans le Globe and Mail du 18 octobre dernier prétend même que le gouvernement fédéral aurait actuellement près de un milliard de dollars en comptes à recevoir de la part d'ex-étudiants incapables de rembourser leurs prêts. C'est tellement vrai que, pour pallier ce fait, grâce à la nouvelle loi sur l'aide financière votée le 23 juin dernier, on va maintenant recourir aux banques dont on connaît la générosité habituelle. Elles ne se gêneront pas pour recouvrer le paiement des dettes des étudiants.

Je rappelle une autre statistique: 10 p. 100 des faillites personnelles seraient faites par d'anciens étudiants qui seraient incapables de payer leurs études. Que veut-on faire maintenant? On veut augmenter encore cet endettement-là. Où va-t-on, monsieur le Président?

Même si les chiffres se contredisent souvent, selon le Comité des ressources humaines, la moyenne nationale d'endettement par étudiant serait de 11 000 $. À première vue, cela ne semble pas beaucoup, mais faisons attention à la moyenne. On sait que la moyenne tient compte également des étudiants qui ne terminent pas leurs études, soit collégiales ou universitaires. Cela veut dire qu'au Québec en tout cas, les 11 000 $ de moyenne générale seraient plus de l'ordre de 16 000 $ à 17 000 $ pour ceux qui terminent leur bac, et on parle même d'un chiffre plus élevé.

(1410)

Actuellement, on parle d'une moyenne de 21 000 $ pour les étudiants qui ont terminé leur maîtrise et de 37 000 $ pour les étudiants qui ont terminé leur doctorat. La Fédération des étudiants pense que ces chiffres doubleront. On n'a qu'à s'imaginer quelle sorte d'endettement cela risque de créer. Il y a donc un sérieux problème de remboursement de prêts étudiants.

Alors, à mon avis, il est erroné de penser que la présentation de cette motion vise à aider les étudiants. D'ailleurs, si on lit l'alinéa a) du projet de loi présenté par le chef du Parti réformiste, on voit clairement que ce n'est pas cela. Son premier objectif est de «diminuer, pour les contribuables, le coût de l'éducation postsecondaire». Le but n'est pas d'aider les étudiants, mais de diminuer le déficit. Alors, sous cette forme, nous sommes évidemment contre.

Une étude plus attentive du texte de la motion nous éclaire sur les véritables motivations de ce parti qui prône d'abord et avant tout des coupures. Alors, j'ai dit qu'à l'alinéa a), on suggère de diminuer les coûts de l'éducation postsecondaire pour les contribuables. Donc, comme pour le gouvernement libéral, le Parti réformiste suggère un désengagement financier du gouvernement dans le domaine de l'enseignement postsecondaire. C'est d'abord dans un but de réduction des dépenses de l'État que les réformistes présentent cette motion.

Pour ce qui est des étudiants, ils subiront la hausse des frais de scolarité provoquée par les coupures gouvernementales. Les réformistes, tout comme le gouvernement libéral, présentent le remboursement proportionnel au revenu comme une bénédiction pour les étudiants, mais ils ne disent pas que cette mesure accompagne d'importantes coupures dans le financement des institutions d'enseignement postsecondaire. C'est un cadeau empoisonné.

Nous sommes contre les coupures dans l'éducation postsecondaire. Si le gouvernement veut se désengager de ce champ de compétence exclusive des provinces, qu'il le fasse complètement, pas juste financièrement. Le gouvernement semble vouloir contrôler davantage, mais il veut le faire en finançant moins. C'est un bizarre de paradoxe. Le remboursement des prêts des étudiants doit être modifié, mais pas dans le cadre proposé par le chef du Parti réformiste, ni par le gouvernement libéral avec son actuelle réforme des programmes sociaux.

On mentionne parfois des pays comme la Suède, l'Australie et la Nouvelle-Zélande qui ont adopté des régimes de remboursements proportionnels aux revenus. En Nouvelle-Zélande, on sait pourquoi; c'est le FMI qui l'y a obligé. Mais, on oublie que la situation des étudiants ainsi que le financement des études supérieures diffèrent d'un pays à l'autre. Donc, il est très difficile d'appliquer ici ce qui se fait ailleurs, d'autant plus que les systèmes de RPR appliqués dans ces pays sont relativement récents et les résultats préliminaires démontrent que cela s'avère un échec.

Un exemple plus près de nous, un projet-pilote en Ontario avait 1 000 places disponibles et seulement 75 jeunes se sont prévalus de cette disposition, 75 sur 1 000. Et pourquoi? Parce que, il faut le rappeler, les gens, les étudiants, la Fédération canadienne des étudiants et la Fédération québécoise, toutes les principales fédérations étudiantes, actuellement, sont contre. Pourquoi? Parce que ça ne concerne que le prêt et il n'y a aucune disposition qui parle de bourse.

Alors, au Québec, il y a un programme de bourse auquel les gens sont très attachés. Étant donné qu'il me reste seulement une minute pour conclure, je vois le président du Comité des ressources humaines, un comité dont je fais partie et qui organisera une large consultation à travers le pays. Je pense qu'une idée comme celle-là peut être débattue, mais je pense qu'il faut faire une consultation en profondeur avant de mettre cela en branle.

[Traduction]

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir parler de la motion de mon estimé collègue, la motion no 291 visant à modifier la Loi fédérale sur les prêts aux étudiants pour que le remboursement se fasse en fonction du revenu, de façon à réduire le coût pour les contribuables du financement de l'enseignement postsecondaire.

Avant de commencer, je voudrais répondre à l'objection de mon collègue. Il ne s'agit pas d'une guerre de compétences entre les provinces. La motion que nous présentons s'appliquerait à tous les étudiants, quelle que soit leur province d'origine. J'invite mon collègue à regarder la situation en Nouvelle-Zélande et en Australie, deux endroits où les choses se font comme le propose la motion et où cela fonctionne bien.


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(1415)

Si la santé est la chose la plus importante pour les Canadiens, l'enseignement est certainement leur plus important investissement. Un solide investissement dans l'éducation, plus particulièrement celle des jeunes, est certainement notre meilleure garantie d'intégrité sociale et économique.

Les universités canadiennes traversent actuellement une grave crise financière. Les administrateurs, les professeurs et les étudiants admettent tous que cette crise compromet les chances de donner aux jeunes de ce pays la meilleure éducation possible.

Le sous-financement généralisé de tous les campus a des effets pernicieux. On a déjà coupé dans le gras du système. On en est maintenant arrivé à l'os auquel on commence à s'attaquer.

Il n'y a pas si longtemps que j'ai reçu mon diplôme de l'Université de Toronto après sept ans d'études. La situation ne s'est pas améliorée depuis. Le sous-financement est encore un énorme problème pour les étudiants, comme en font foi les exemples suivants. Le pourcentage d'étudiants qui empruntent est passé de 44 p. 100, en 1982, à 47 p. 100, en 1990, mais le montant qu'ils doivent à la fin de leurs études a fait un bond spectaculaire, passant de 5 400 $ à 8 600 $ pour un simple baccalauréat. C'est particulièrement vrai des étudiants qui viennent des groupes socio-économiques défavorisés.

Le fait que les coûts augmentent est aggravé par le fait que les étudiants ne trouvent pas d'emplois d'été ni de travail à temps partiel pour les aider à payer leurs frais de scolarité. En fait, ils sont coincés entre l'arbre et l'écorce. D'une part, ils reconnaissent qu'une formation postsecondaire est leur meilleure chance d'avoir une carrière et de devenir financièrement indépendants. D'autre part, il leur est de plus en plus difficile de financer leurs études et ils savent que s'ils abandonnent, ils seront condamnés toute leur vie à des petits emplois mal rémunérés, sans grande chance d'avancement.

Des études récentes ont montré qu'une formation postsecondaire était l'atout principal qui permettait aux gens de trouver du travail. La crise financière des étudiants est à l'image de celle de notre pays, bien qu'à une autre échelle. En effet, les déficits ne cessent d'augmenter, ce qui fait gonfler la dette, les intérêts à payer sont donc de plus en plus lourds, et le gouvernement doit consacrer de telles sommes au service de la dette qu'il a de moins en moins d'argent pour les programmes tels que l'éducation. Je sais que nous n'arrêtons pas de répéter la même chose, mais nous continuerons à le faire des milliers de fois jusqu'à ce que le gouvernement se décide à prendre les mesures qui s'imposent.

Il faut mettre un terme à ce cercle vicieux. Pour cela, j'invite le ministre des Finances à se joindre à nous, puisqu'il a finalement admis qu'il y avait un problème et qu'il comprend ce qu'il faut faire. Il ne possède toutefois pas de plan. Nous, les réformistes, nous en avons un et c'est celui qui vise un déficit zéro en trois ans. Encore une fois, nous offrons notre aide au ministre des Finances pour qu'il fasse des compressions justes, équitables et constructives et qu'il allège les difficultés des Canadiens tout en donnant à notre économie le tonus dont elle a tant besoin. Nous avons un programme, il n'a qu'à nous le demander.

Dans notre parti, nous avons également cherché des solutions pour que tous les étudiants admissibles aient un droit égal à l'enseignement postsecondaire, qui ne doit pas être l'apanage des riches. À l'instar de mon collègue, permettez-moi de rappeler le principe que notre parti préconise depuis des années et qui est celui du remboursement des prêts variant selon le revenu. Ce principe jouit d'une grande faveur auprès des groupes d'étudiants, d'administrateurs et d'éducateurs partout au Canada. Ces groupes l'ont applaudi en disant qu'il était juste, plus efficace et plus responsable en ce qui a trait aux impôts que tout autre principe qui sous-tend le régime de prêts aux étudiants.

Les limites et les critères de notre régime n'ont pas changé depuis 1984. Il est désuet par rapport à la hausse des coûts de l'éducation et à celle du coût de la vie et par rapport à la baisse des emplois offerts. Il est devenu archaïque, il n'aide pas les étudiants et il doit être réformé sans délai.

Quand ils obtiennent leur diplôme, les étudiants entrent difficilement sur le marché du travail et cette difficulté ne fait qu'augmenter avec le temps. Les revenus réels étant peu élevés et les perspectives d'emploi peu nombreuses, ils ne peuvent rembourser leurs emprunts. C'est ainsi que le défaut de rembourser atteint 70 p. 100 au cours des 12 à 18 premiers mois. Le système ne peut donc pas être autonome et ne peut s'autogénérer en prévision des Canadiens de demain. Cette situation coûte de l'argent aux contribuables. Elle entraîne un fardeau, bien inutile d'ailleurs, et elle prive l'enseignement supérieur de fonds.

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Voyons un peu la gravité de la situation. En 1992, le défaut de paiement est devenu un problème chronique. Depuis 1964, la valeur des prêts non remboursés se chiffre à environ un milliard de dollars. Cette somme correspond à 180 000 prêts. La récupération de ce montant coûtera entre 135 et 270 millions de dollars. Encore une fois, il s'agit d'une somme dont sera privé notre système d'enseignement et qui serait beaucoup plus utile si elle servait à aider les étudiants qui en ont vraiment besoin.

Le ministre des Finances a aussi proposé d'éliminer progressivement, d'ici l'an 2006, les contributions en espèces à l'enseignement, qui se chiffrent actuellement à 2,6 milliards de dollars. Une telle mesure entraînera une augmentation marquée des frais de scolarité qui, selon certains, doubleront en 1997. Le problème atteindra un point critique d'ici très peu de temps.

L'aspect le plus intéressant est le fait que même si la plupart des diplômés d'études postsecondaires finissent par se trouver un emploi, ceux-ci ne gagnent pas beaucoup d'argent dans les premières années qui suivent l'obtention de leur diplôme. Or, étant donné la rigidité du système actuel de remboursement, ces personnes ne peuvent rembourser leurs prêts. Cette perte est tragique tant pour les contribuables que pour notre système d'enseignement, tout en étant inutile.


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C'est pourquoi nous proposons le système de remboursement des prêts variant selon le revenu. Cette formule procurerait une meilleure garantie de remboursement, étant donné que les paiements seraient établis en fonction du revenu de l'étudiant. Un tel programme ne coûterait pas plus cher, puisqu'on se servirait des données fiscales et qu'il serait ainsi facile à administrer.

En outre, ce système serait financièrement autonome du fait qu'il favoriserait un pourcentage beaucoup plus élevé de remboursements, assurant ainsi des fonds beaucoup plus importants pour le système d'enseignement. Cette formule est aussi juste et non discriminatoire.

L'enseignement est l'outil qui assurera notre avenir. En cette ère de mondialisation et de spécialisation caractérisée par de rapides mouvements de capitaux sur les marchés internationaux, les économies nationales sont contraintes de s'adapter rapidement. C'est la raison pour laquelle notre système d'enseignement doit pouvoir évoluer rapidement en fonction des besoins d'une économie en pleine mutation.

On estime que les diplômés actuels changeront de profession quatre ou cinq fois, peut-être même plus, au cours de leur vie. Dans ce contexte, nous avons besoin d'un système d'enseignement élargi; or, la mesure proposée favorisera le financement de celui-ci en limitant les pertes liées au non-remboursement des prêts.

J'implore le gouvernement de se tourner vers l'avenir. J'entends par là qu'il doit regarder 40 ans en avant et non pas cinq ans pour évaluer les besoins de notre économie et favoriser la mise en place d'un système d'enseignement adéquat. Une telle démarche exigera du courage et de la prévoyance.

Notre pays a besoin d'une solide main-d'oeuvre; or, celle-ci ne peut être solide que si on lui fournit les possibilités de formation voulues, ce qui suppose des fonds qui sont de plus en plus difficiles à trouver. Voilà pourquoi il faut absolument appuyer la motion no 291. Notre parti l'appuie. J'espère que les députés de tous les autres partis feront abstraction de toute considération politique et appuieront aussi cette motion qui vise à aider les étudiants partout au pays.

M. Barry Campbell (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, si nous voulons débattre cette motion à fond, il faudrait prendre quelques instants pour réfléchir à ce que nous attendons de l'enseignement supérieur au Canada.

Les Canadiens savent que la concurrence, tant au niveau national qu'international, se fait plus vive. Les industries à forte intensité de savoir prennent de plus en plus d'importance. Nous entendons parler plus souvent de concepts comme l'enseignement à distance et l'éducation permanente.

Les choses évoluent plus vite. L'essor économique d'aujourd'hui et de demain repose sur les secteurs à forte concentration de savoir, comme les télécommunications, les services environnementaux, l'informatique et la biotechnologie.

Le monde du travail a beaucoup changé. Les Canadiens peuvent désormais s'attendre à changer d'emploi plusieurs fois au cours de leur carrière. Comme le signalait le député, personne ne peut s'attendre à occuper un poste permanent et sûr et à travailler pour un seul employeur tout au long de sa vie.

Nous savons que, dans la majorité des cas, il faudra au moins 16 années d'études pour occuper les emplois qui sont actuellement créés. Les travailleurs de demain devront donc faire des études supérieures et continuellement se recycler pour demeurer compétitifs sur le marché du travail.

D'un côté, on dit aux Canadiens qu'ils doivent poursuivre leurs études, mais de l'autre côté, les frais de scolarité et les changements observés dans la structure familiale et l'environnement économique rendent la vie difficile à ceux qui voudraient retourner aux études.

Par conséquent, nous prenons très au sérieux la motion du député qui demande au gouvernement d'envisager la possibilité de créer un système de remboursement des prêts variant selon le revenu. Grâce à ce système, les diplômés pourraient rembourser leurs prêts en fonction de leur revenu. Ils pourraient commencer à travailler en sachant que le remboursement de leurs prêts étudiants ne viendra pas gruger tout leur revenu. Ce genre de système pourrait intéresser d'éventuels étudiants qui se laissent décourager par la perspective d'avoir à rembourser leurs prêts, à coup de grands montants fixes, dès leur arrivée sur le marché du travail.

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Le député n'ignore pas que le gouvernement fédéral et les provinces ont déjà discuté de ces notions dans le passé. Nous allons continuer de les examiner. Le système de remboursement des prêts aux étudiants en fonction de leur revenu mérite d'être examiné consciencieusement. Notre évaluation tiendra compte de son coût possible, car le gouvernement fédéral doit réduire ses dépenses dans tous les domaines afin d'éponger le déficit. Cela est aussi clair pour le chef du Parti réformiste que pour moi. Mais le coût ne sera pas le seul élément à considérer.

La motion du député est l'occasion de discuter plus à fond du remboursement des prêts dont il est question dans le document de travail sur la réforme de la sécurité sociale. Chaque année, les provinces reçoivent une plus grande proportion du financement de l'enseignement postsecondaire par suite du transfert de points d'impôt. L'ensemble des fonds transférés par le gouvernement fédéral n'augmente pas. Ce qui signifie que, si les transferts de points d'impôt viennent accroître les recettes provinciales, les recettes qui sont censées servir à soutenir les établissements d'enseignement, les versements au comptant qui entrent dans les transferts, diminuent.

Dans les années à venir, les gouvernements provinciaux vont garder les points d'impôt dont la valeur va croître avec l'économie. Le gouvernement fédéral propose aux provinces de transformer les versements au comptant qui entrent dans les transferts en prêts et bourses plus généreux pour les étudiants. C'est ainsi qu'on aurait une caisse permanente de deux millions de dollars pour accorder des prêts aux étudiants.

La caisse deviendrait de plus en plus importante avec le temps et profiterait à des générations successives de Canadiens. Cela n'a rien de la réduction aveugle et brutale des coûts que craignent des adversaires de la réforme de la sécurité sociale. Bien conçue et soigneusement administrée, cette caisse pourrait venir en aide à des générations d'étudiants.

La motion du député vient s'ajouter à toutes les autres propositions qui reflètent la volonté d'adopter des moyens innovateurs d'aider les Canadiens qui en sont capables et qui le veulent à


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fréquenter le collège ou l'université. Nous avons déjà pris des mesures pour accroître l'aide aux étudiants et pour aider ceux-ci à se lancer sur le marché du travail au sortir de l'école.

Nous attendons beaucoup de nos diplômés. Nous voulons qu'ils maintiennent le Canada parmi les pays les plus avancés du monde. Étant donné ces attentes, l'aide que nous accordons aux étudiants qui en ont besoin ne traduit pas uniquement notre attachement aux valeurs de justice et d'égalité, mais elle constitue un véritable investissement dans nos ressources humaines. Les sommes et les conditions des prêts aux étudiants reflètent la confiance que nous avons en leurs aptitudes.

Nous devons instaurer un climat susceptible d'attirer les entrepreneurs et les investisseurs. Nous avons besoin d'une main-d'oeuvre hautement qualifiée et polyvalente pour soutenir sans défaillir la concurrence mondiale dans le secteur de la haute technologie. Les Canadiens veulent maintenant que nous donnions des orientations claires sur lesquelles ils pourraient se guider au moment de prendre leurs décisions personnelles en matière d'éducation et de formation.

Les décideurs d'aujourd'hui doivent donner à tous les Canadiens des choix réalistes parce que nous avons besoin plus que jamais de mobiliser les compétences et les capacités de tout le monde pour bâtir notre avenir. En créant des possibilités, le gouvernement confirme son engagement à l'égard de l'éducation et de la formation. Nous tenons nos promesses.

Depuis 30 ans, le Programme canadien de prêts aux étudiants a aplani les obstacles financiers à l'enseignement postsecondaire pour plus de deux millions d'étudiants. Grâce aux nouvelles mesures que nous avons introduites le printemps dernier, les personnes handicapées pourront plus facilement faire des études. Cela nous permettra d'avoir une main-d'oeuvre plus nombreuse, plus instruite et plus représentative.

D'autres réformes s'adressent au nombre croissant d'étudiants à temps partiel pour qui la limite de prêt a été portée de 2 500 $ à 4 000 $. En vertu des nouveaux arrangements, les étudiants à temps partiel ne paieront que l'intérêt sur leur prêt tant qu'ils seront à l'école. Les parents seuls qui veulent faire des études se heurteront à moins d'obstacles. L'évaluation des besoins tiendra maintenant compte des frais de garde d'enfants et des frais de transport, en plus des frais de scolarité et de l'achat de livres.

Comme les femmes sont sous-représentées au niveau du doctorat en génie, en mathématiques et en sciences, elles seront admissibles à des bourses spéciales pouvant atteindre 3 000 $ par année.

Les réformes prévues dans la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants visent à faciliter l'accès à l'enseignement postsecondaire pour les personnes qui ont besoin d'aide à cet égard. Aujourd'hui, plus de 900 000 étudiants à plein temps et plus d'un demi-million d'étudiants à temps partiel font des études postsecondaires. Ils ne sont pas seulement un investissement dans notre avenir; ils sont notre avenir.

La nouvelle Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants permet également au gouvernement fédéral de participer avec des provinces à des projets pilotes de remboursement des emprunts en fonction du revenu. Le député d'en face s'en rappellera peut-être, nous avons ajouté cette disposition à la Loi sur les prêts aux étudiants afin de pouvoir en examiner l'utilité.

Le système de remboursement en fonction du revenu comporte des aspects très intéressants. Il peut être conçu pour répondre à diverses catégories de besoins pendant que les étudiants sont encore aux études. Après avoir terminé ses études, le diplômé qui trouve un emploi peut rembourser son emprunt à un rythme correspondant à ses moyens.

Le risque de l'étudiant est réduit, car le remboursement peut s'ajuster à un revenu inopinément faible. Certains étudiants qui s'opposent au système de remboursement en fonction du revenu accusent le gouvernement de se décharger de ses responsabilités, car ils croient que les étudiants seront lourdement endettés au sortir de l'université. Ce système de remboursement peut être conçu pour protéger le très petit nombre d'étudiants qui se trouvent obligés de contracter un très lourd endettement.

Dans la mesure où nous avons prévu dans la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants des dispositions concernant de grosses dettes, nous pourrions concevoir également un système capable d'en alléger le fardeau dans ces cas-là. On évalue à environ 2 000 $ par année le fardeau additionnel pour l'étudiant moyen. Pour voir les choses dans leur contexte, je ferai remarquer que deux ans après terminé ses études, le titulaire d'un diplôme d'études postsecondaires gagne un revenu supérieur de 25 p. 100 à celui qui n'a qu'un diplôme d'études secondaires.

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Quand les étudiants contractent un emprunt pour financer leurs études, ils sont les mieux placés pour juger quel volume de dette ils peuvent supporter. S'ils se trompent sur leurs futurs revenus, ils ne seront tenus de rembourser que ce qu'ils ont les moyens de rembourser.

Les emprunteurs sont en effet protégés contre le risque de ne pas être capables de rembourser, et leur emprunt est lié à leur capacité de rembourser plutôt qu'à celle de leurs parents. Nous ne voulons pas écraser nos étudiants sous d'énormes dettes, loin de là. Nous soutiendrons leurs efforts pour qu'ils puissent faire les études qu'ils souhaitent. Nous voulons qu'ils poursuivent leurs études, qu'ils décrochent des emplois et finissent par en créer eux-mêmes. C'est ainsi que toute la société bénéficiera du système de remboursement des prêts aux étudiants.

La motion du député et la nouvelle Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants visent toutes deux à répartir équitablement les coûts de l'éducation entre les gouvernements et les étudiants eux-mêmes.

Au Canada, certains groupes s'opposent au système de remboursement en fonction du revenu tandis que d'autres y voient des avantages. L'Association des universités et collèges du Canada a proposé un régime semblable. L'Association des collèges communautaires est généralement favorable, et l'idée intéresse quelques associations d'étudiants. Je remarque que certains établissements s'inquiètent des propositions avancées dans la réforme de la sécurité sociale relativement aux transferts du FPE.

Nous avons cependant des échanges avec ces établissements et nous nous félicitons de leur participation active à l'examen de la sécurité sociale. Leurs idées et leur appui sont d'une importance capitale pour tous les Canadiens.

Il n'existe ailleurs dans le monde aucun modèle exact qui puisse nous montrer comment ce régime s'appliquerait au Cana-

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da, dans notre contexte particulier. Nous devons évaluer l'idée dans notre contexte propre. Nous voulons évaluer les possibilités d'établir un vaste système qui aidera les étudiants dans le besoin sans accabler davantage les contribuables.

On peut réaliser des économies au chapitre des programmes sociaux en affectant les ressources là où elles sont nécessaires, en offrant à ceux qui en ont besoin de la formation et la possibilité d'acquérir les compétences professionnelles pertinentes et en protégeant ceux qui ont besoin d'aide.

Le système actuel n'est pas efficace. Il maintient certains Canadiens dans la pauvreté et la dépendance. Tout nouveau système devra aider les gens à acquérir les compétences nécessaires pour redevenir autonomes.

Nous espérons que l'examen des programmes sociaux mettra en lumière des idées plus intéressantes et novatrices. On peut supposer qu'il faudra des régimes souples et adaptés aux besoins pour satisfaire aux exigences de la formation de la main-d'oeuvre canadienne.

En dernière analyse, les Canadiens veulent un système qui fonctionne. Nous savons que le succès dans le domaine de la technologie de pointe est la clé d'une société prospère et humanitaire. La clé de l'avenir, ce sont les études supérieures. Les Canadiens doivent partager les bénéfices et les coûts des succès en matière d'éducation.

Nous prévoyons que beaucoup plus de Canadiens s'inscriront dans nos collèges et universités. Jeunes et vieux voudront acquérir les compétences qui leur permettront de conserver des emplois rémunérateurs et présentant des défis. Dans le cadre de l'examen des programmes sociaux, on examinera tout ce qui peut contribuer à ce succès. Ensemble, à titre de partenaires, nous pouvons gérer nos ressources en matière d'éducation, de manière à satisfaire aux besoins de tous les étudiants. Lorsque nos étudiants réussissent, leur succès rejaillit sur nous tous.

Dans sa motion, le député fait ressortir une solution possible pour garantir des prêts aux étudiants justes et efficaces. Dans le cadre de l'examen des programmes sociaux et dans d'autres contextes, nous resterons à l'écoute et nous continuerons de chercher et d'examiner toutes les solutions permettant aux Canadiens de s'assurer un avenir prospère et productif, par l'intermédiaire de la formation et de l'éducation.

Le vice-président: Je signale à mes collègues qu'il reste environ sept minutes au député de Capilano-Howe Sound. Il disposera de trois minutes lors du prochain débat de deux heures sur cette question.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, cette semaine, comme jamais auparavant, le ministre des Finances a sabré dans l'idéologie libérale traditionnelle et ses idées illusoires quand il a prévenu qu'il fallait effectuer des compressions, sinon c'était la faillite nationale.

L'étude des compressions à effectuer est en cours. Je m'attends avec optimisme à ce que le secteur de l'enseignement postsecondaire n'échappe pas plus au scalpel que tous les coûteux programmes que l'on trouve dans notre société, à l'exception de ceux qui sont destinés aux gens qui sont vraiment dans le besoin, aux handicapés et aux personnes âgées.

Si ce secteur de l'enseignement joint sa voix à celles de tous les autres bénéficiaires de fonds gouvernementaux dans leur refus traditionnel de subir des compressions et que le gouvernement cède à leurs pressions, la crise financière qui s'en vient aura tôt fait de faire paraître insignifiantes les récentes compressions proposées.

Quoi qu'il arrive, je crois que c'est dans l'intérêt même du secteur de l'enseignement supérieur d'examiner des méthodes de résolution des problèmes financiers du gouvernement.

Je recommande ce plan d'action parce que je suis tout à fait convaincu des atouts économiques et sociaux de l'enseignement supérieur. Comment pourrait-il en être autrement, après 30 ans d'enseignement universitaire, après avoir vu de mes yeux vu de nombreuses générations de jeunes acquérir les connaissances et la maturité qui les préparent à réussir dans leur vie professionnelle. J'adopte cette position parce que je suis réaliste et que je veux qu'il y ait toujours au Canada un secteur de l'enseignement supérieur très fort.

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L'innovation financière qui aidera ce secteur à surmonter les problèmes financiers à venir réside dans l'établissement du système de remboursement des prêts variant selon le revenu qu'on propose dans la motion d'initiative parlementaire débattue aujourd'hui. Que sont au juste ces types novateurs de prêts? L'idée est simple. Les étudiants reçoivent des prêts gouvernementaux qu'ils peuvent utiliser pour payer leurs frais de scolarité aux établissements d'enseignement supérieur. Les prêts, plus les intérêts courus, sont remboursés sous forme de versements, une fois que les emprunteurs ont atteint un certain niveau de revenu. Le ministère du Revenu se transforme alors en une agence de recouvrement peu coûteuse.

Une mesure législative détaillée devra préciser un certain nombre de caractéristiques importantes de ce système, comme le montant maximum qu'une personne peut emprunter, l'intérêt exigé, le seuil de revenu et le moment où le remboursement des prêts commence, ainsi que la période d'amortissement nécessaire pour déterminer la surcharge maximale annuelle d'impôt sur le revenu.

Même s'il ne faut jamais sous-estimer les problèmes que peuvent cacher ces détails, nous pouvons compter sur des recherches et une expérience pratique suffisante concernant le principe du remboursement des prêts en fonction du revenu pour être certains que le système est applicable, efficient et équitable. Nous donnerons ainsi aux étudiants la capacité de supporter davantage le coût réel de leur éducation. Les établissements d'enseignement supérieur pourront, pour leur part, récupérer une plus grande partie de leurs frais d'exploitation en remplaçant les crédits perdus du fait des problèmes financiers actuels du gouvernement.

Chose certaine, les étudiants n'aimeront pas devoir absorber une plus grande partie du coût de leur éducation. Je serais très déçu s'ils ne protestaient pas massivement et s'ils ne ressortaient pas les vieilles histoires sur l'injustice du système, la façon dont il empêche les étudiants qui ont des parents moins fortunés

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d'avoir accès à un enseignement supérieur. Je comprends ces étudiants. Ils ont profité, pendant longtemps, d'une bonne entente, et très peu sont prêts à renoncer à une aussi bonne affaire.

J'ai profité de ces avantages quand j'étais étudiant. Le temps des lunchs gratuits et des bonnes affaires est terminé. Tous ceux qui appuient le nouveau plan et moi-même aimerions bien qu'il en soit autrement, que nous puissions revenir au temps où les contribuables payaient tout. Mais cette situation est bel et bien terminée. Le pays est au bord de la faillite, et les étudiants devront assumer leur part du fardeau pour empêcher que cette catastrophe ne se produise. Ne tirez pas sur le messager, je vous en prie.

Ceux qui s'inquiètent de la justice et de l'efficacité du système proposé devraient examiner certains faits. Le Canada consacre énormément de ressources à l'enseignement supérieur. Les coûts annuels directs et indirects s'élèvent à 15 000 $ par étudiant environ. La seule facture totale qui soit plus élevée est celle des soins de santé.

Nous avons plus de 100 universités et autres institutions d'enseignement supérieur pour 29 millions de Canadiens. En Nouvelle-Écosse, la capacité d'accueil dans les universités est de 32 élèves pour 1 000 habitants. Le rapport est de 21 pour 1 000, en Ontario, et de 13 pour 1 000, en Colombie-Britannique.

Grâce aux investissements passés dans le domaine de l'enseignement supérieur, 17 p. 100 des Canadiens sont titulaires d'un diplôme universitaire. Nous nous comparons donc favorablement à la France, où la proportion est de 7 p. 100, et au Royaume-Uni, où elle est de 8 p. 100.

Les étudiants devraient aussi tenir compte d'un autre fait, lorsqu'il est question de leur capacité de payer une plus grande part du coût véritable des études supérieures. Je regrette, mais je dois reprendre mon souffle. Je continuerai la prochaine fois. L'idée, c'est que le taux de rendement personnel des études supérieures. . .

Le vice-président: Grâce à la gentillesse du secrétaire parlementaire, il est proposé qu'on ne tienne pas compte de l'heure. Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

M. Grubel: Monsieur le Président, la générosité des députés d'en face me touche vraiment.

Les données du recensement montrent que le revenu des Canadiens qui sont titulaires d'un diplôme de baccalauréat est supérieur à celui des Canadiens qui ont moins d'instruction. La valeur actuelle de ces hausses de revenu à vie est beaucoup plus élevée que les coûts nécessaires à l'obtention de diplômes. Ces coûts comprennent les récents frais de scolarité, l'achat de livres et de fournitures et, ce qui l'emporte de loin sur tous les autres coûts, les gains auxquels on renonce pendant la poursuite d'études universitaires.

Au cours des dernières décennies, le taux de rendement de ces investissements a varié entre 7 et 10 p. 100, ce qui représente un taux excellent. Il peut absorber des augmentations très importantes des frais de scolarité, sans être inférieur aux taux de rendement réels à long terme qu'offrent les instruments financiers du marché.

Les étudiants qui sont préoccupés par l'équité du régime fiscal et du système de dépense de notre société devraient prendre conscience du fait que la vaste majorité des diplômés universitaires viennent de familles qui se situent au milieu et au haut de l'échelle de répartition des revenus. Pourtant, un fort pourcentage des recettes fiscales qui servent à payer leurs études est perçu sur les contribuables canadiens à faible revenu. En effet, le système actuel force les gagne-petit à subventionner les études universitaires des mieux nantis.

Le système projeté corrigera cette injustice, faisant en sorte que les familles à revenu moyen ou élevé paient une plus large part des services d'éducation supérieure qu'elles reçoivent. Si, par malheur, ils ne pouvaient pas bénéficier de ces avantages, alors les étudiants ne seraient pas tenus de rembourser.

Il convient de rappeler aux étudiants qui pourraient s'inquiéter de l'accès des personnes défavorisées aux études supérieures que celles-ci sont souvent laissées pour compte dans le système actuel parce qu'elles ne sont pas admissibles au remboursement de prêt à taux fixe. Dans le nouveau système, on ne posera aucune question, et les étudiants pourront obtenir sans problème des prêts qu'ils ne devront rembourser que s'ils en sont effectivement capables.

Enfin, je voudrais soulever une question dont on parle rarement. À l'heure actuelle, les étudiants n'ont guère de choix. Les programmes offerts par des monopoles d'État en matière d'enseignement supérieur prennent du temps à s'adapter à la demande des étudiants dans un monde en évolution. Il est bien connu que la solution à ces problèmes réside dans l'emploi de bons, ces certificats non remboursables que l'on donne aux étudiants et que ceux-ci peuvent encaisser à l'établissement de leur choix. Le Parti réformiste est en faveur de l'emploi de tels bons et de la liberté d'action qu'ils donnent aux étudiants.

Le programme de remboursement des prêts en fonction du revenu marque un pas vers le but ultime que sont les bons. Il permet lui aussi aux étudiants de s'inscrire aux programmes d'études qui les intéressent plutôt qu'à ceux que professeurs et bureaucrates jugent intéressants. En optant pour tel établissement plutôt que tel autre, ils le font prospérer au détriment des autres et, puisqu'ils engagent des fonds qu'ils devront rembourser, ils sont adéquatement motivés à faire des choix éclairés.

Voici venue l'ère des prêts d'études supérieures dont le remboursement varie selon le revenu. Le système proposé constitue une solution efficace et équitable aux problèmes causés par la crise financière que traverse notre pays.

J'espère que le gouvernement prendra acte du projet de loi d'initiative parlementaire présenté par le Parti réformiste qui est à l'étude aujourd'hui et qu'il proposera sous peu une mesure législative visant à le mettre en application.

Le vice-président: La présidence remercie les députés d'avoir fait preuve d'un esprit de collaboration et d'entraide envers le député qui vient de parler.

L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée. Conformément à l'article 93 du Règlement, l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

La Chambre s'ajourne à 11 heures lundi prochain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 14 h 44.)