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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 29 novembre 1994

RECOURS AU RÈGLEMENT

UN ARTICLE DANS LE OTTAWA CITIZEN

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

PÉTITIONS

LE SUICIDE ASSISTÉ

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE SUICIDE ASSISTÉ

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE

    Projet de loi C-57. Motion de troisième lecture 8390
    M. Chrétien (Frontenac) 8419
    M. Chrétien (Frontenac) 8421
    M. Leblanc (Longueuil) 8422

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'ENVIRONNEMENT

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    M. Leroux (Shefford) 8423

LES TECHNIQUES DE REPRODUCTION

MME ALEXA MCDONOUGH

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

L'ÉQUIPE FÉMININE DE BASKET-BALL, LES WESMEN DE WINNIPEG

LE SOMMET DE PARIS SUR LE SIDA

LES INDEMNITÉS DE DÉPART

LA STATION DE MONTAGNE SILVER STAR

LES CRIS DE LA BAIE JAMES

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 8425

LE PARTI RÉFORMISTE

ÉQUIPE CANADA

L'ÉTHIQUE

L'ENREGISTREMENT DES ARMES À FEU

LE COMMERCE INTERNATIONAL

L'OSTÉOPOROSE

LA COUPE GREY

QUESTIONS ORALES

LA BOSNIE

    M. Gauthier (Roberval) 8426
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8426
    M. Gauthier (Roberval) 8426
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8427
    M. Gauthier (Roberval) 8427
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8427

LA MIL DAVIE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8427
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8427

L'ÉCONOMIE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 8427
    M. Martin (LaSalle-Émard) 8428
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8428

LE PROJET HIBERNIA

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8428

LA BOSNIE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8429
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8429

LE SIDA

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8429
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8429

LE CRTC

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 8429
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 8430

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8430

LES PENSIONS ALIMENTAIRES POUR ENFANTS

LA SANTÉ

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 8431
    M. Martin (LaSalle-Émard) 8432

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES PÊCHES SUR LA CÔTE OUEST

LES SOINS DE SANTÉ

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8433
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8434

LA PRESTATION FISCALE POUR ENFANTS

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8434

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE

    Projet de loi C-57. Reprise de l'étude de la motion 8434
    M. Leblanc (Longueuil) 8434
    M. Leblanc (Longueuil) 8443

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion 8446

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE

    Projet de loi C-57. Reprise de l'étude de la motion detroisième lecture 8446
    Report du vote sur la motion 8458

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

L'INVENTAIRE DES BIENS DANS LES BUREAUX DE DÉPUTÉS

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 8462
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 8463
    Adoption de la motion 8466

MOTION D'AJOURNEMENT

LA FISCALITÉ

LES NOMINATIONS FAITES PAR LE GOUVERNEMENT


8389


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 29 novembre 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

RECOURS AU RÈGLEMENT

UN ARTICLE DANS LE OTTAWA CITIZEN

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, mon recours au Règlement se rapporte à la conversation que j'ai eue avec vous hier au sujet d'un article paru dernièrement dans le Ottawa Citizen.. Vous avez demandé si je mettais en doute l'intégrité de la présidence.

Je déclare officiellement que je ne vous prête pas la moindre arrière-pensée et que je ne mets pas en doute l'intégrité de la présidence.

Le Président: Dois-je comprendre que la députée nie absolument toute déclaration que l'article lui a attribuée?

Mme Grey: C'est exact, monsieur le Président.

Le Président: Je remercie beaucoup la députée pour sa déclaration. Une telle situation peut se produire à l'occasion. Des paroles peuvent être citées hors contexte et je tiens à dire à la députée et à la Chambre que j'accepte la déclaration et que je considère cette affaire terminée.

_____________________________________________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 16 pétitions.

(1005)

PÉTITIONS

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir à la Chambre pour présenter deux pétitions. La première, qui vient de 40 électeurs d'Edmonton-Sud-Ouest et qui est due à l'initiative de Lynette Ruptash, demande que les médecins n'aident pas à mettre un terme à la vie, mais s'efforcent plutôt de la sauver. Les pétitionnaires font remarquer que la majorité des Canadiens observent les lois et respectent le caractère sacré de la vie humaine. La deuxième pétition porte 30 signatures. Les pétitionnaires demandent aussi que les médecins n'aident pas à mettre un terme à la vie humaine. Les pétitionnaires s'opposent à tout le principe de l'euthanasie. Je suis heureux de présenter cette pétition à la Chambre.

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, en conformité avec l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter une pétition de la part de plusieurs habitants d'Athabasca.

Les pétitionnaires demandent une loi assez sévère pour dissuader les jeunes de commettre des crimes et assez rigoureuse pour assurer une véritable justice.

Je présente la pétition et j'en appuie les signataires.

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole pour présenter une pétition signée par 2 318 de mes électeurs de North Island-Powell River, qui demandent respectueusement au gouvernement de faire adopter une loi plus sévère pour punir toutes les infractions commises par les jeunes contrevenants afin qu'ils aient davantage à répondre de leurs actes.

J'appuie la pétition. Elle a été signée par 11,5 p. 100 des habitants de la région de Powell River, et le nombre des signatures représente une proportion plus élevée encore de la population adulte.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole pour présenter deux autres pétitions.

Cette troisième pétition demande au Parlement du Canada de ne pas apporter à la loi sur les droits de la personne des modifications qui auraient pour effet d'inclure l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

8390

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): J'ai une autre pétition signée par 30 personnes qui se prononcent contre l'euthanasie.

* * *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

[Traduction]

M. McClelland: Monsieur le Président, le 10 mai, j'ai fait inscrire au Feuilleton une question à l'intention de la ministre de la Santé. Je voudrais savoir si le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre est en mesure de fournir une réponse.

M. Milliken: Monsieur le Président, je sais que le député a fait montre de beaucoup de patience en attendant la réponse à sa question. Je peux lui assurer que j'ai vu un projet de réponse. Comme nous l'avons cependant jugée insatisfaisante, puisqu'elle ne répondait pas vraiment à la question du député, nous l'avons renvoyée au ministère pour y être révisée.

Je suis convaincu qu'une réponse complète nous parviendra très bientôt. Dès que je la recevrai, je serai très heureux de la communiquer au député ici à la Chambre.

Le président suppléant (M. Kilger): Les questions restent-elles toutes au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


8390

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE

L'hon. Douglas Peters (au nom du ministre du Commerce international, Lib.) propose: Que le projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, la mesure que nous étudions aujourd'hui à l'étape de la troisième lecture, le projet de loi C-57 portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, entérine l'accord du GATT conclu au terme de l'Uruguay Round, accord que le ministre du Commerce international a signé au nom du Canada le 15 avril 1994 à Marrakech.

Grâce à ce projet de loi, le Canada pourra recueillir les fruits du plus important accord commercial de l'histoire, qui met en place un cadre plus ouvert et plus stable pour le commerce international. Les exportations et les investissements du Canada pourront augmenter, ce qui est crucial pour le maintien de la prospérité du Canada et la réalisation des objectifs du gouvernement en matière de création d'emplois et de croissance économique.

(1010)

Depuis la Seconde Guerre mondiale, la part du commerce extérieur dans le produit intérieur brut a augmenté de plus de 70 p. 100, ce qu'il faut mettre au compte de la libéralisation des échanges, de notre capacité d'exploiter de nouveaux débouchés et de la réduction des droits tarifaires moyens imposés par le Canada, qui ont été ramenés de plus de 10 p. 100 à seulement 3 p. 100, si on se fie aux données de 1992. Ces facteurs seuls n'expliquent pas nécessairement la croissance économique, mais on peut assurément conclure que la libéralisation des échanges et la suppression des entraves au commerce comme les droits tarifaires peuvent se traduire par des progrès économiques tout en créant des emplois.

Les accords commerciaux et de libre-échange doivent être justes, complets et transparents. Bien que certains problèmes n'aient toujours pas été réglés entre le Canada et ses partenaires, je crois que les intérêts commerciaux de notre pays sont mieux servis que jamais. Depuis l'adoption du premier accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, c'est-à-dire le GATT, dans les années 40, la production mondiale a quintuplé et la qualité de vie s'est améliorée dans les pays commerçants. Beaucoup d'entraves commerciales sont disparues et nombre de pays du tiers monde ont rejoint les rangs des pays développés. Il y a encore du progrès à faire.

Avant d'entrer en fonction, notre gouvernement a dit clairement qu'il continuerait à appuyer le GATT, qui est une pièce maîtresse de la politique commerciale du Canada. Nous nous sommes efforcés avant tout d'arracher à l'impasse les négociations de l'Uruguay Round et de bâtir la nouvelle Organisation mondiale du commerce. Le projet de loi à l'étude est le fruit de ces efforts. Les négociations de l'Uruguay Round ont été les plus importantes négociations commerciales jamais entreprises.

Le résultat final regroupe plus d'une trentaine d'accords, d'ententes et de déclarations. Ces accords marquent des gains considérables pour le Canada. Voici les plus importants.

Premièrement, les ententes concernant l'accès aux marchés comprennent les plus importantes dispositions tarifaires de l'histoire, la plupart des tarifs industriels étant réduits d'au moins le tiers. Deuxièmement, le secteur agricole est pour la première fois assujetti au régime multilatéral fondé sur des règles. Troisièmement, le commerce et les services ainsi que la propriété intellectuelle liée au commerce sont assujettis à la discipline multilatérale. Quatrièmement, l'accord réforme en profondeur et renforce les règles concernant les subventions et les recours commerciaux, ce qui constituait l'un des objectifs prioritaires du Canada dans cette série de négociations. Cinquièmement, le nouveau mécanisme intégré de règlement des différends, qui comprend des règles plus claires, des délais plus serrés et un processus d'appel et qui a force obligatoire pour les parties, est une nette amélioration par rapport au système existant dans le cadre du GATT et il devrait réellement empêcher l'adoption de mesures unilatérales en réponse à des différends commerciaux.

Enfin, l'accomplissement ultime de l'Uruguay Round, c'est la création d'une nouvelle Organisation mondiale du commerce, l'OMC, qui supervisera la préparation des divers accords complexes issus de cette série de négociations et qui constituera une assise institutionnelle solide en matière de commerce internatio-


8391

nal. L'Organisation mondiale du commerce deviendra le troisième pilier, avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, de la structure commerciale et financière mondiale.

L'achèvement de l'Uruguay Round aura des répercussions majeures sur l'économie mondiale et canadienne bien au-delà de l'an 2000.

[Français]

Selon les estimations du secrétariat du GATT, les revenus globaux seront, en l'an 2005, d'au moins 500 milliards de dollars américains supérieurs à ce qu'ils auraient été sans les négociations de l'Uruguay Round. En partant d'une hypothèse économique prudente, nous estimons que les gains quantifiables du Canada seront d'au moins 0,4 p. 100 au chapitre des revenus réels, soit de 3 milliards de dollars chaque année, lorsque l'accord sera intégralement en vigueur, ce qui signifie une augmentation annuelle de 400 $ du revenu de chaque famille canadienne.

Ces gains quantifiables ne représentent cependant qu'une partie des gains réels que nous sommes presque assurés de réaliser. Il est clair que pour le Canada, le défi consiste maintenant à maximiser sa part des retombées économiques qui découleront de l'Uruguay Round, grâce à l'intensification du commerce et des investissements, laquelle se traduira par la création d'emplois, une augmentation du revenu et un niveau de vie réel plus élevé.

(1015)

Les possibilités sont considérables. Dans plusieurs secteurs traditionnellement forts de l'économie canadienne, comme ceux des produits de la forêt, des produits chimiques et des produits pharmaceutiques, les tarifs seront éliminés ou considérablement abaissés dans le monde entier, sans compter que d'importantes barrières non tarifaires seront abattues.

Notre secteur tertiaire, qui compte pour 20 p. 100 de nos recettes d'exportation, profitera de l'ouverture de stabilisation des marchés mondiaux. De nouveaux accords sur les droits de propriété intellectuelle relativement aux produits exportés et des règles de jeu plus claires à l'égard du soutien financier à la recherche et au développement créeront de nouveaux débouchés pour nos industries à forte concentration de technologie et de savoir.

Je tiens à souligner tout particulièrement les perspectives d'exportation et de croissance qui sont maintenant offertes aux petites et moyennes entreprises dans les nouveaux marchés spécialisés étrangers. Actuellement, ce sont elles qui créent le plus d'emplois au Canada.

[Traduction]

Notre secteur des services, qui représente 20 p. 100 de nos gains d'exportation, bénéficiera de perspectives mondiales plus sûres et améliorées. Les nouveaux accords sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce ainsi que les règles du jeu plus claires à l'appui des activités de recherche et développement créeront de nouvelles perspectives pour nos industries à forte composante technologique et à forte concentration de savoir.

Je veux particulièrement souligner les possibilités d'exportation et de croissance dont bénéficieront les petites et moyennes entreprises qui trouveront de nouveaux créneaux commerciaux à l'étranger. Ce sont ces entreprises qui sont la plus importante source de création d'emplois au Canada.

On dit que si on ne se prévaut pas d'une chose, on la perdra. Si nos petites et moyennes entreprises ne saisissent pas ces nouvelles possibilités, notre économie risque de perdre gros. Voici pourquoi. Entre 1979 et 1989, les petites et moyennes entreprises ont créé plus de 85 p. 100 des nouveaux emplois, ce qui fournissait du travail à plus de 2,2 millions de personnes. Selon les données de 1992, sur 920 729 entreprises existantes, 920 233 ou 99,8 p. 100 étaient des petites et moyennes entreprises comptant moins de 100 employés. Sur les 10 736 700 emplois du secteur privé, plus de 6 360 000 ou près de 59 p. 100 étaient des emplois dans de petites et moyennes entreprises. Par conséquent, la plupart des nouveaux emplois seront créés par ce secteur de notre économie.

Ces chiffres présentent des tendances similaires dans la plupart des pays développés. Si l'on comparait le nombre de sociétés canadiennes qui entretiennent des relations commerciales avec d'autres pays, on constaterait que les petites et moyennes entreprises du Canada laissent échapper de nombreuses possibilités. En fait, selon une étude réalisée en 1990, cent entreprises canadiennes comptaient pour plus de 60 p. 100 des 141 milliards de dollars d'exportations et seulement 7,6 p. 100 de toutes les entreprises canadiennes étaient exportatrices, alors qu'en Corée 42 p. 100 des exportations sont attribuables à des PME; à Taïwan, 55,9 p. 100 des PME exportent, et en Chine, 50 p. 100 des PME le font.

Pour augmenter le nombre de PME engagées dans le commerce international, nous devons faire participer le secteur de la petite entreprise et faire en sorte que les différents paliers de gouvernement répondent à leurs besoins et à leurs préoccupations. Évidemment, nos concurrents tentent déjà de profiter de ces mêmes possibilités. Cependant, nous devons être plus rusés, plus persévérants et plus dynamiques dans la recherche et l'exploitation des nouveaux marchés qui émergent dans le monde et des marchés existants que nous avons tant de mal à percer.

Face à ce défi, le gouvernement a récemment amorcé une initiative commerciale internationale appelée Accès 95. Cette initiative vise à traduire les mesures complexes d'ouverture du marché de l'Uruguay Round en une stratégie choisissant les meilleures perspectives d'exportation parmi les milliards de dollars de nouvelles possibilités sur le marché mondial.

(1020)

Cette initiative aidera nos partenaires commerciaux à choisir et à développer plus efficacement ces nouveaux marchés présentant les rendements à valeur ajoutée les plus élevés à longue échéance. En accroissant la compétitivité des industries, Accès 95 contribuera à la stratégie interne visant à attirer des investissements dans les industries de haute technologie et les emplois de l'avenir.

Avant de donner une description d'Accès 95, je voudrais souligner les perspectives commerciales internationales qui devraient s'ouvrir aux exportateurs du pays par suite de l'adoption du projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui.


8392

Les agriculteurs de l'Ouest devraient profiter de l'augmentation graduelle des prix internationaux des céréales et des oléagineux ainsi que des cultures spéciales au cours de la période de transition de six ans et de l'accroissement des possibilités d'exportation.

Les Canadiens profiteront d'un environnement équitable du fait que les subventions à l'exportation que les États-Unis et l'Europe versent à leurs agriculteurs seront réduites de 36 p. 100. Les restrictions quantitatives touchant les importations et les prélèvements à l'importation variables seront remplacés par des droits de douane réduits de 15 p. 100 pour une période de six ans, stabilisant ainsi les marchés d'exportation en Europe, en Asie et en Amérique latine pour le blé, le canola, l'orge, le malt et la luzerne.

Nos producteurs de boeuf et de porc profiteront également du remplacement des restrictions à l'importation et des prélèvements à l'importation par un régime tarifaire, de même que des règles améliorées et plus uniformes sur les mesures sanitaires et phytosanitaires. Cela devrait entraîner une hausse des exportations des géniteurs, des embryons et des produits de boeuf et de porc en Europe, au Japon, en Corée et en Australie.

Les producteurs du secteur de l'agroalimentaire de tout le Canada peuvent tirer avantage des perspectives d'exportation grandement améliorées, notamment en ce qui concerne les produits laitiers, les plants de pomme de terre, les fruits et légumes frais et traités, la bière, le whisky et les produits horticoles.

L'établissement de règles internationales plus claires et de règlements phytosanitaires prévoyant des droits plus équitables vont stimuler encore davantage les exportations et encourager les fabricants canadiens à investir et à réaliser des projets de modernisation et d'expansion. Quant à nos consommateurs, ils auront ainsi accès à une gamme plus étendue de produits alimentaires meilleur marché.

Les fabricants de machines pour l'horticulture, la construction et l'exploitation minière de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba et de l'Ontario pourront continuer de réaliser des économies d'échelle puisqu'ils disposent déjà d'un plus grand accès au marché américain. L'élimination des tarifs sur bon nombre de ces machines que l'on observe sur les grands marchés étrangers devrait avoir pour effet d'encourager nos exportations.

Les fabricants de l'Ouest qui sont spécialisés dans les techniques axées sur les cultures spéciales et à grande échelle sont bien placés pour tirer parti de nouveaux débouchés, tout comme d'ailleurs nos exportateurs de matériaux de construction, de machines pour l'exploitation minière et de matériel de manutention.

Les fabricants de produits chimiques à vocation exportatrice de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Québec et de l'Ontario peuvent profiter d'une réduction des tarifs de l'ordre de 40 p. 100 et plus, ainsi que des mesures d'harmonisation des taux qui varieront entre zéro et 6 p. 100. Les perspectives sont excellentes pour les produits chimiques sur les grands marchés industriels et pour les produits spécialisés vendus sur chacun de ces marchés.

[Français]

Les entreprises d'informatique et d'instrumentation, concentrées au Québec et en Ontario, devraient accueillir avec enthousiasme l'élimination ou la réduction considérable des tarifs dans les principaux marchés industriels. Elles auront un accès accru grâce à la consolidation des tarifs dans les pays nouvellement industrialisés et à la plus grande discipline dans l'application des normes techniques.

L'élimination généralisée des barrières non tarifaires ouvrira de nouveaux débouchés aux fabricants d'ordinateurs et de pièces d'ordinateurs. Les nouvelles règles sur les services et sur les investissements et une meilleure protection des droits d'auteur faciliteront le commerce des services informatiques liés aux ventes d'ordinateurs et de logiciels.

Les fabricants d'appareils électroniques et de machinerie industrielle de l'ensemble du Canada devraient se préparer à exploiter les débouchés d'exportation nouveaux et exceptionnels qui s'offrent à eux dans les marchés industriels clés où les tarifs sur les appareils électroniques, la plupart des appareils électriques et la machinerie industrielle seront parfois réduits de 65 p. 100. Le recul des tarifs fera également baisser les prix de la machinerie importée, ce dont les investisseurs canadiens songeant à équiper ou à moderniser leurs usines ne peuvent que se réjouir.

(1025)

[Traduction]

Le secteur des pêches de Terre-Neuve, de l'Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse et de la Colombie-Britannique peuvent diversifier leurs exportations de produits de base et à valeur ajoutée de la pêche à destination de l'Europe, du Japon et de la Corée qui réduiront leurs tarifs entre 8 et 30 p. 100 et qui abaisseront leurs barrières non tarifaires. Les tarifs canadiens applicables à une gamme étendue d'intrants et de matériel de transformation du poisson seront réduits ou éliminés.

Les industries du métal de première fusion et des métaux ouvrés de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan, de l'Ontario et du Québec peuvent également bénéficier de réductions sensibles des barrières tarifaires et non tarifaires décidées par nos principaux partenaires commerciaux pour mousser la vente de métaux de première fusion et ouvrés tels que l'aluminium, le nickel, le zinc et le cuivre. Cela pourrait déboucher, à plus ou moins long terme, sur de nouveaux investissements. Les droits de douane doivent être éliminés sur une vaste gamme de produits de l'acier, si l'on veut que le climat soit plus stable pour les investisseurs et que l'accès aux principaux marchés industrialisés soit plus assuré.

L'accord sur les subventions et les mesures compensatoires stipulerait plus clairement quelles mesures peuvent être prises contre la vente par nos compétiteurs de produits subventionnés de fer et d'acier, qui remplacent les produits canadiens sur les marchés étrangers et sur les marchés nationaux des pays accordant des subventions.

Les exportateurs canadiens de produits pharmaceutiques et d'instruments médicaux seront les premiers à profiter de l'accord, car leurs principaux partenaires commerciaux élimineront les droits sur ces produits et réduiront une vaste gamme d'obstacles non tarifaires. Ce contexte commercial plus dynamique devrait faciliter la recherche et le développement, les investisse-


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ments et l'essor du secteur manufacturier au Canada. Un commerce plus libre avec les pays en développement devrait favoriser l'exportation de produits pharmaceutiques spécialisés. Les débouchés pour les instruments médicaux de haute technologie en Europe et en Asie devraient aussi se multiplier, de même que les ventes d'instruments ordinaires en Amérique latine.

Dans le cas de ces industries animées par le rythme accéléré des grandes découvertes technologiques, le nouvel accord sur la propriété intellectuelle sera particulièrement avantageux, car il veillera à ce que les nombreux aspects des instruments médicaux et des médicaments visés par le droit de propriété ne soient pas reproduits par des concurrents étrangers.

Nos industries des télécommunications au Québec, en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique sont aussi appelées à une expansion additionnelle sur les principaux marchés industriels si les droits de douane sont éliminés ou réduits considérablement. Si de nombreux pays en développement avancé respectent les droits réduits, les Canadiens auront accès à ces marchés en pleine expansion. De plus, en vertu de l'accord sur le commerce et les services, nos techniciens auront plus facilement accès aux marchés étrangers, ce qui augmentera nos chances d'obtenir des contrats étrangers pour des systèmes de télécommunications.

Nos industries du transport au Manitoba, au Québec et en Ontario profiteront aussi du meilleur équilibre international qui découlera d'une discipline accrue quant à l'utilisation des subventions gouvernementales. Cela facilitera l'exportation d'avions d'affaires, de petits moteurs, de produits de l'avionique, de trains d'atterrissage, de simulateurs et de contrats pour la fourniture de pièces et de services.

Des réductions de droits de douane atteignant 33 p. 100 stimuleront les exportations dans le secteur de l'automobile, du transport urbain et du matériel ferroviaire. De même, des réductions importantes des droits canadiens sur les pièces automobiles d'origine réduiront les coûts pour les fabricants de matériel d'origine.

[Français]

Les entreprises de transformation du bois du Nouveau-Brunswick, du Québec et de la Colombie-Britannique seront plus concurrentielles sur les marchés étrangers, car soumises à des règles plus justes quant au prix et à la qualité de leurs produits. En effet, les tarifs sur le bois d'oeuvre et les produits du bois chuteront de 50 p. 100 dans les principaux marchés industriels et seront allégés dans de nombreux pays en développement.

Puisque l'application de normes, comme le règlement phytosanitaire de l'Union européenne, et l'élaboration, en Europe et au Japon, des normes sur les produits et des codes du bâtiment seront soumises à une discipline plus stricte, nos entreprises pourront plus facilement pénétrer ces marchés étrangers d'une importance vitale.

(1030)

Les compagnies de pâtes et papiers de la Colombie-Britannique, de l'Ontario, du Québec et des provinces de l'Atlantique jouiront d'avantages sans précédent dans les marchés étrangers. Pour la première fois de l'histoire, la plupart des pays industrialisés se sont engagés à éliminer complètement leurs tarifs. Cette décision s'applique notamment à l'industrie des pâtes et papiers, de même qu'au commerce des livres et autres produits imprimés en papier. De plus, nombre de pays en développement réduiront et consolideront leurs tarifs sur les produits du papier, ce qui représente pour les exportateurs canadiens d'excellentes occasions de diversifier leurs exportations à valeur ajoutée.

Outre les tarifs, qui seront progressivement éliminés sur une période de dix ans, un certain nombre d'obstacles non tarifaires seront également supprimés, notamment les exigences de l'Union européenne sur le papier hydrofuge. L'Accord relatif aux procédures en matière de licences d'importation et l'Accord relatif aux obstacles techniques au commerce assureront aux entreprises canadiennes un accès plus stable aux marchés étrangers en général et à ceux des pays en développement, en particulier.

Dans l'ensemble, la libéralisation mondiale du commerce et l'adoption de conditions d'accès plus prévisibles devraient inciter nos producteurs à moderniser leurs usines et favoriser à long terme le rétablissement des entreprises du secteur des pâtes et papiers.

[Traduction]

Les industries de services de tout le Canada sont étroitement liées aux perspectives d'exportation à l'étranger des secteurs de marchandises connexes. On estime que les services représentent 39 cents de chaque dollar de marchandises exportées. De plus, les exportations de services, à elles seules, représentent 25 milliards de dollars par an et augmentent presque deux fois plus vite que les autres exportations.

L'Accord général sur le commerce des services de l'Organisation mondiale du commerce prévoit, pour la première fois, un cadre complet de règles et de sanctions applicables aux services, dont les services bancaires et les investissements. Dès qu'un pays s'engage à ouvrir, dans une certains mesure, son secteur de services, il doit accorder aux entreprises canadiennes de ce secteur un traitement égal à celui qu'il accorde aux entreprises nationales.

Ces mesures de sauvegarde et d'ouverture des marchés permettront aux entreprises canadiennes d'avoir plus facilement accès aux milliards de dollars requis pour les services informatiques, les services de construction, de génie spécialisé, de gestion, de télécommunications, d'environnement, ainsi que les services financiers et professionnels.

L'ampleur et la complexité de ces débouchés se reflète dans le texte de l'Uruguay Round qui renferme 500 pages de règles commerciales en plus d'environ 26 000 pages de listes tarifaires applicables à 120 pays. L'initiative ACCÈS 95 du gouvernement vise à transformer certaines de ces dispositions complexes et souvent très techniques en une stratégie commerciale qui aidera les entreprises canadiennes à profiter des gains que nous avons durement acquis sur le plan de l'accès à des marchés étrangers.

ACCÈS 95 est l'une de plusieurs initiatives importantes que le gouvernement a prises pour répondre à l'évolution rapide des besoins de nos entreprises. Nous nous sommes engagés à axer nos ressources de développement du commerce extérieur sur les débouchés qui rapportent le plus à l'industrie dans les années 90. Étant donné la situation financière actuelle, je tiens à préciser


8394

que cette initiative sera financée à partir de ressources existantes.

Le gouvernement est particulièrement résolu à renforcer nos liens avec les petites et les moyennes entreprises. Ces entreprises n'ont pas toujours les ressources et les connaissances du marché nécessaires pour découvrir de nouveaux débouchés à l'étranger. Le gouvernement modèle ses programmes et ses services de façon à aider les petites et les moyennes entreprises à développer leurs créneaux particuliers sur les nouveaux marchés étrangers.

(1035)

À la demande des premiers ministres, le ministre du Commerce international et ses homologues provinciaux cherchent à adopter une approche au commerce qui s'inspire de l'Équipe Canada, afin de mieux coordonner l'expansion du commerce à l'échelle internationale. L'avantage de cette approche a été démontré par la signature de contrats d'une valeur éventuelle de 8 milliards de dollars en Chine et de plus de 100 millions de dollars au Viet Nam, lorsque le premier ministre du Canada a emmené une équipe de premiers ministres et de 375 chefs d'entreprise en Asie, plus tôt ce mois-ci.

Nous prévoyons que la prestation efficace de programmes simplifiés d'expansion du commerce au moyen de guichets uniques fédéraux-provinciaux permettra d'améliorer l'accessibilité des entreprises, tout en supprimant le double emploi inutile. Cette approche supposera l'accroissement conjoint des services de sensibilisation des exportateurs, afin de préparer les petites et moyennes entreprises à effectuer des exportations et à les étendre au-delà du marché américain. L'établissement de liens plus forts en matière d'investissement et de technologie aidera les petites et moyennes entreprises à trouver à l'étranger les technologies de production et les partenaires qui leur conviennent le mieux.

La concentration plus efficace des ressources fédérales existantes a grandement amélioré les moyens d'application de notre réseau d'information et de renseignement sur les marchés internationaux. Elle permet de relier les bureaux à l'étranger aux analystes industriels et aux agents de commerce d'un peu partout au Canada, dans la collecte et la diffusion aux entreprises canadiennes de renseignements opportuns et approfondis sur les marchés étrangers, renseignements qui portent directement sur leurs intérêts prioritaires.

[Français]

L'initiative Accès '95 a été conçue en fonction de ces priorités. Lancée récemment par les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international, celui de l'Agriculture et celui de l'Industrie, Accès '95 permettra, premièrement, de signaler aux exportateurs canadiens les adoucissements de tarifs et d'obstacles non tarifaires qui constitueront pour eux des gains importants, car il leur sera ainsi plus facile d'exporter quelque 200 produits clés et 11 types de services dans 42 marchés prioritaires.

Deuxièmement, elle permettra d'obtenir de nos bureaux à l'étranger des renseignements sur les nouveaux marchés les plus prometteurs et sur les facteurs clés à respecter pour être compétitifs dans ces marchés.

Troisièmement, Accès '95 permettra de communiquer ces renseignements rapidement et directement aux entreprises intéressées par l'intermédiaire de notre réseau de renseignement sur les marchés.

Quatrièmement, elle permettra de fournir à nos exportateurs des services d'experts-conseils spécialisés, bien informés et capables de leur expliquer les dispositions complexes de l'Accord de l'OMC, notamment les calendriers d'application, et de leur indiquer les meilleures façons de surmonter les obstacles qu'ils rencontreront à l'étranger.

En visant spécifiquement les ouvertures découlant de l'accord signé au terme de l'Uruguay Round, Accès '95 devrait encourager nos petites et moyennes entreprises, déjà prêtes à exporter aux États-Unis dans le cadre de l'Accord de libre-échange, à percer aussi les marchés latino-américains, asiatiques et européens.

[Traduction]

Avant de terminer mes observations, je tiens à remercier les députés des deux côtés de la Chambre pour l'attitude constructive qu'ils ont adoptée à la Chambre et en comité à l'égard de ce projet de loi des plus importants. J'espère que nos collègues de la Chambre haute adopteront la même attitude, au moment où le Canada déploie des efforts particuliers, de concert avec ses partenaires commerciaux de toutes les régions du monde, afin d'adopter la loi habilitante à temps pour l'entrée en vigueur de cet accord, le 1er janvier 1995.

Permettez-moi d'assurer aux députés qui sont peut-être préoccupés par l'élaboration de lois ou l'absence de ces dernières dans d'autres capitales du monde que nous surveillons très attentivement le processus de mise en oeuvre de tous nos principaux partenaires commerciaux. Je peux réitérer les assurances qu'a déjà données le ministre du Commerce international, à savoir que nous ne proclamerons cette loi que lorsque nos principaux partenaires en auront terminé avec leurs procédures de mise en oeuvre.

En outre, le projet de loi C-57 prévoit que le gouverneur en conseil ne donne effet à cette mesure législative que s'il est convaincu que l'Accord sur l'Organisation mondiale du commerce est en vigueur.

(1040)

En soumettant ce projet de loi à l'approbation de la Chambre, le gouvernement compte que tous les partis appuieront les principes fondamentaux des mesures commerciales exposées dans le préambule, à savoir qu'un régime commercial multilatéral basé sur des conditions d'accès aux marchés mutuellement convenues et sur des règles commerciales non discriminatoires est la pierre angulaire de la politique commerciale canadienne, que le commerce doit être libre, équitable et ouvert pour garantir l'avenir de l'économie canadienne et pour assurer la compétitivité et le développement durable à long terme du Canada et que l'expansion du commerce contribue à la création d'emplois, rehausse le niveau de vie, permet d'offrir de meilleurs choix aux consommateurs et renforce l'union économique canadienne.

Tels sont les objectifs essentiels que cherche à promouvoir ce projet de loi. J'invite mes collègues à veiller avec moi à son adoption sans plus tarder. Encore une fois, je tiens à remercier mes collègues de l'opposition pour leur excellente contribution à


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l'étude de ce projet de loi en comité, à l'étape de la deuxième lecture à la Chambre des communes et aussi à celle du rapport.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, n'allez pas croire que tout à l'heure, lorsque je suis allé me chercher un verre d'eau, je me refusais à vous en apporter un. Bien au contraire, je me propose éventuellement de vous offrir quelque chose d'un peu plus corsé, par exemple un jus de pommes, sachant que le Québec est un des principaux producteurs de jus de pommes.

Cela étant dit, nous en sommes aujourd'hui à l'étape finale de l'adoption du projet de loi C-57, visant à la mise en oeuvre des nouveaux accords du GATT, signés à Marrakech le 15 avril dernier par près de 125 partenaires commerciaux. Plus de huit ans de tractations ont mené à un compromis historique dont l'ensemble des pays signataires peuvent être fiers. Le Bloc québécois et moi-même, comme nous l'avons souligné tout au long du processus d'adoption de ce projet de loi, appuyons le projet de loi C-57, malgré le fait qu'il comporte un certain nombre de lacunes sur lesquelles j'aurai l'occasion de revenir un peu plus loin.

Pourquoi appuyons-nous le projet de loi C-57? J'ai eu l'occasion, à quelques reprises en cette Chambre, de préciser et de rappeler que le Québec est fondamentalement une société libre-échangiste, ouverte sur le monde. Le Québec a été et est encore à l'avant-garde des promoteurs du libre-échange entre le Canada, les États-Unis, le Mexique et, éventuellement, d'autres partenaires commerciaux. Le Québec a été et est toujours promoteur de l'ALENA et, comme je le disais, promoteur de son élargissement à d'autres pays du continent américain.

Je vais faire le tour rapidement des différents gains, pour le Québec et pour le Canada, qui sont associés à la signature des accords de l'Uruguay Round. On y voit d'abord un accès élargi aux marchés étrangers pour nos entreprises, sous forme bien sûr de réduction de tarifs douaniers, par exemple dans le secteur du bois, des pâtes et papiers, des produits pharmaceutiques. En conséquence, il y aura certainement augmentation des exportations et c'est ce qui est souhaitable, évidemment, à travers cet accord.

Il y a un renforcement des règles commerciales. Les États membres du GATT se sont souvent servis du caractère vague de certaines définitions pour adopter des mesures protectionnistes. Le nouveau GATT, les accords de l'Uruguay Round clarifient un certain nombre de règles commerciales, particulièrement au niveau de la définition de subvention, les types de subventions permises, compensables ou prohibées, l'utilisation des droits compensateurs, des mesures de sauvegarde, des droits anti-dumping, etc.

Le nouveau GATT jette également les bases d'un système axé sur les règles de droit plutôt que sur les rapports de force. On ose espérer que les États sauront faire bon usage de ces règles de droit qui sont établies dans le nouveau GATT. On prévoit également un nouveau mécanisme de règlement des différends. Le conseil général de l'Organisation mondiale du commerce sera responsable d'un mécanisme de règlement des différends conçu pour être plus rapide et plus efficace.

Encore une fois, un tel système, qui est basé sur des règles de droit, permettra aux plus petits partenaires commerciaux, comme le Canada, de se défendre plus efficacement contre le protectionnisme des géants économiques que sont, par exemple, l'Europe, le Japon ou les États-Unis. On note également que l'Organisation mondiale du commerce remplacera le secrétariat du GATT. Une nouvelle structure plus moderne qui remplace l'ancienne, devenue un peu désuète, qui était mal adaptée aux stratégies protectionnistes de plus en plus fréquentes, mal adaptée aux nouveaux secteurs faisant l'objet d'ententes, comme ceux de la propriété intellectuelle et des services, sur lesquels j'aurai l'occasion de revenir un peu plus loin.

(1045)

On note également une diminution des subventions à l'exportation des produits agricoles. Après des discussions houleuses, les membres du GATT sont finalement parvenus à s'entendre sur une réduction des subventions à l'exportation de l'ordre de 36 p. 100 en valeur totale de productions exportées et de 21 p. 100 en ce qui a trait aux volumes. Bien entendu, on parle ici de pourcentages et non de valeurs réelles.

L'écart entre les pays qui subventionnent le moins leurs productions et ceux qui les subventionnent le plus restera le même. C'est donc dire qu'il y a un effet pervers qui demeure, dans la mesure où les pays en voie de développement ainsi que ceux, comme le Canada, qui subventionnent peu, en comparaison d'un certain nombre de leurs partenaires, continueront à être désavantagés. Il n'en reste pas moins qu'il s'agit là d'un pas positif qui réduit la pression à la hausse et qui donne espoir aux pays les moins je dirais «subventionneurs».

Les accords de l'Uruguay Round contiennent également une clarification des règles concernant la propriété intellectuelle. C'est un sujet qui est abordé pour la première fois au niveau des instances du GATT. On accorde une protection minimale, un plancher, dirais-je, aux créateurs et aux entreprises. Ces nouvelles dispositions s'appliquent aux droits d'auteur, aux marques de commerce, aux brevets, etc. Elles limitent le piratage industriel et le commerce des marchandises contrefaites.

Les accords de l'Uruguay Round prévoient également une ouverture des marchés publics qui facilitera l'accès de nos entreprises aux appels d'offres des organismes gouvernementaux et des différents gouvernements de nos partenaires. Ces dispositions s'appliquent en fonction de limites prescrites aux achats publics de biens et de services et aux contrats de construction.

Encore une fois, on voit un élargissement des marchés pour nos entreprises qui, en retour, devront se montrer plus compétitives et plus agressives. En fait, c'est le défi auquel elles doivent faire face dans le cadre d'une libéralisation plus grande des échanges commerciaux.

Comme je le soulignais tout à l'heure, les services sont maintenant inclus dans l'accord du GATT, en vertu des nouvelles dispositions, malgré que cette libéralisation du secteur des services soit moins poussée que dans le cas des biens et marchandises. Il faut comprendre que, dans le cas des biens et marchandises, il y a déjà un certain nombre d'années d'expérience et de négociations qui ont amené une plus grande libéralisation dans le secteur des biens et marchandises, mais il y a une amorce dans le secteur des services qui pourra se poursuivre ultérieurement.

Je rappelle que le secteur des services représente 20 p. 100 de l'économie mondiale. Les entreprises canadiennes et québécoises des secteurs des télécommunications-le secrétaire parle-


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mentaire en faisait état tout à l'heure-et des services financiers pourront profiter de cette libéralisation.

Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir, car les divergences sont encore nombreuses à ce niveau entre les principaux partenaires commerciaux, dont les États-Unis, l'Union européenne et le Japon, en ce qui concerne notamment le transport, les télécommunications, l'audiovisuel et les services financiers.

Finalement, on prévoit également dans l'accord de l'Uruguay Round que les industries culturelles et la coproduction peuvent, selon la volonté de chaque pays, être exclues de la liste des matières régies par le GATT. Je pense que nous devons à la France d'avoir obtenu cette disposition. Le Canada, à l'instar de ce qui est prévu dans l'ALENA, a exclu de sa liste de concessions ses industries culturelles ainsi que les accords de coproduction.

Je termine ici mon énumération de ce qui peut être considéré comme les bons coups de l'accord de l'Uruguay Round, et je me permettrai d'aborder, à ce stade-ci, un volet un peu moins reluisant, si je puis dire, de cet accord et, conséquemment, des dispositions qui sont prévues dans le projet de loi C-57.

Tout au long de la négociation de l'accord et, un peu plus tard, de l'élaboration du projet de loi C-57, le gouvernement fédéral a clamé haut et fort sa volonté de vouloir consulter les provinces. Il est indéniable qu'un effort a été fait dans ce secteur: un avant-projet de loi préparé par le gouvernement a été soumis aux gouvernements provinciaux. J'ajouterais que cet effort a été fait tout simplement parce que le fédéral ne peut se passer de la collaboration des provinces pour la mise en oeuvre de l'accord quant aux juridictions particulières des provinces. Il n'en demeure pas moins que trois demandes fondamentales du Québec sont demeurées et demeurent lettre morte de la part du gouvernement fédéral.

(1050)

D'une part, on voulait s'assurer que le projet de loi contienne une clause fédérale prévoyant la consultation des provinces pour ce qui est de l'application des dispositions de l'accord quant aux juridictions provinciales. Les provinces et le Québec en particulier ont accepté d'adapter leurs législations et leurs réglementations respectives à l'entente qui a été conclue par le gouvernement du Canada au niveau international.

Le Québec aurait espéré, à tout le moins, être mieux défendu par le gouvernement canadien. La clause fédérale prévue à l'Accord de Marrakech est en effet beaucoup trop menaçante et contraignante dans la mesure où elle donne au gouvernement fédéral la pleine responsabilité de la mise en oeuvre de l'acte final. Au minimum, le Québec aurait souhaité que cette clause ne soit pas modifiée par rapport à ce qu'elle était dans l'ancien accord. Et au mieux, que le gouvernement fédéral défende plus vigoureusement les intérêts de ses provinces lorsqu'il s'est agi de négocier avec les partenaires du GATT une clause fédérale plus respectueuse de la réalité constitutionnelle canadienne.

L'article 24.12 de l'acte final stipule en effet que le gouvernement du Canada est, et je cite: «. . .pleinement responsable de l'observation des dispositions du GATT» et qu'il «. . .prendra toutes les mesures raisonnables en son pouvoir pour que cette obligation soit assurée ou soit mise en oeuvre par les gouvernements locaux.» C'est donc dire que ce qui est prévu actuellement, ce n'est pas que le gouvernement fédéral va consulter les provinces, mais plutôt que le gouvernement fédéral va décider pour les provinces.

Non seulement le Québec s'est-il opposé à ce libellé, mais il aurait aimé voir inscrit dans le projet de loi C-57 des articles instituant un mécanisme de consultation fédéral-provincial pour les décisions importantes et celles touchant spécifiquement les champs de compétence et domaines de juridiction qui relèvent des provinces.

Encore une fois, monsieur le Président, vous me permettrez de constater que le système fédéral aura démontré son inefficacité à produire des ententes satisfaisantes pour toutes les parties en cause.

Je reviendrai un peu plus loin sur le mécanisme fédéral-provincial de règlement des différends. On aurait souhaité également, bien sûr, que le projet de loi prévoie un certain nombre de programmes d'adaptation pour les travailleurs et entreprises, particulièrement pour les travailleurs et entreprises des secteurs mous comme le textile et le vêtement qui se retrouvent en grand nombre au Québec. Cela faisait d'ailleurs l'objet d'une promesse contenue dans le livre rouge, promesse qui, semble-t-il, ne sera pas tenue. Mais j'aurai l'occasion également d'y revenir un peu plus loin.

Comme je l'ai souligné plus tôt, le projet de loi C-57 comporte un certain nombre de lacunes que nous avons tenté d'atténuer en proposant plusieurs amendements en comité et à l'étape du rapport. Le gouvernement, pour des raisons, je dirais, d'ordre philosophique qui sont pour le moins contestables, a pris la décision de les rejeter en bloc, sans faire de jeu de mots. Nous espérons que le fait de ne pas avoir considéré sérieusement ces amendements ne constituera pas un obstacle majeur au bon fonctionnement de la mise en oeuvre de l'accord de l'Uruguay Round.

Il est primordial que le gouvernement sache qu'en rejetant les amendements proposés qui, je dois le souligner, avaient été édulcorés, avaient été modifiés de manière qu'ils puissent convenir aux membres de la majorité gouvernementale, il allait à l'encontre de la volonté de plusieurs groupes directement concernés par le projet de loi C-57.

Monsieur le Président, vous me permettrez de faire ici un rappel des différents amendements que nous avons proposés, les raisons pour lesquelles nous les avons proposés et certains effets néfastes du rejet de ces amendements par le gouvernement.

Il y avait tout d'abord l'amendement proposé par ma collègue de Laval-Est qui visait à l'établissement d'un mécanisme de consultation obligatoire avec les provinces. Évidemment, ce mécanisme de consultation aurait porté spécifiquement sur les sujets relevant des compétences des provinces. On aurait pu également étendre ce processus de consultation à la question des règlements des différends commerciaux et des sujets d'intérêt économique majeurs au plan international.

(1055)

Un tel mécanisme de consultation, je le rappelle, existe dans la législation américaine qui est devant le Congrès, concernant, d'une part, les sujets économiques majeurs, section 102 partie B


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du projet de loi américain, mais également au sujet du règlement des différends, section 102, partie C, paragraphe 3(i).

Dans un contexte où les conflits commerciaux sont nombreux et qu'ils touchent de plus en plus les compétences provinciales, on aurait pu s'attendre à ce que le gouvernement prévoie un mécanisme pour consulter les provinces. Je pense que c'est nécessaire, dans un État fédéral comme celui que prétend être le Canada et qui dit respecter les champs de compétence des provinces, que l'on prévoie un mécanisme de règlement des différends accompagné d'un mécanisme de consultations fédérales-provinciales.

Le secrétaire parlementaire nous disait plus tôt qu'il y avait une bonne collaboration entre le fédéral et les provinces au niveau commercial. Il nous parlait de Team Canada. Il demeure que le gouvernement du Québec a émis le souhait, et émet encore le souhait, qu'un mécanisme de consultation soit prévu dans le projet de loi. Si le gouvernement prétend vouloir consulter les provinces, pourquoi s'obstine-t-il à refuser que cette consultation soit explicitement prévue dans le projet de loi? Il est inconcevable qu'on se refuse à le faire.

On nous parlait de Team Canada, mais lorsqu'on travaille en équipe, on s'attend à ce que tous les joueurs puissent aller sur la glace. Le secrétaire parlementaire nous parlait du glorieux voyage en Asie de Team Canada récemment. Eh bien, le gouvernement fédéral, dans un entêtement obstiné, s'est refusé, pour des raisons techniques, à permettre à l'un de ses joueurs d'aller sur la glace. Team Canada est une équipe qui fonctionne déjà mal dès le départ.

L'amendement proposé visait également à obliger le gouvernement fédéral à obtenir l'accord préalable des provinces avant de poser des gestes importants qui auraient des incidences sur leurs champs de compétence, tels que, par exemple, une modification relative au mécanisme d'allocation des contingents tarifaires. Dans l'état actuel des choses, le ministre du Commerce international a toute discrétion quant à l'attribution des contingents tarifaires. On aurait souhaité que les provinces soient consultées quant à l'attribution de ces contingents et quant à l'établissement ou la mise en oeuvre des politiques relatives au mécanisme de sélection de nos partenaires commerciaux pour l'accès au marché canadien.

Si vous me permettez, monsieur le Président, je vais passer quelques minutes sur la question des contingents tarifaires, parce que je pense qu'il y a là des sujets importants de préoccupation. Cet amendement visait à ce que le ministre, lorsqu'il prend des décisions concernant la fixation des prix et les quantités d'exportation subventionnées, puisse tenir compte des actions prises par les compétiteurs étrangers dans les secteurs en cause.

Revenant sur la question des contingents tarifiaires, je veux simplement dire que le gouvernement fédéral appliquera, sur un certain nombre de produits agricoles, des tarifs douaniers à peu près nuls pour les produits qui vont entrer au Canada. Au-delà de la quantité prévue, les tarifs vont augmenter de façon importante jusqu'à 200 ou 300 p. 100. C'est le gouvernement fédéral, le ministre, en toute discrétion, qui se réserve le droit de déterminer quels importateurs pourront importer en vertu de ces tarifs préférentiels.

Le gouvernement fédéral, dans des ententes plus ou moins formelles, détermine de quels pays proviendront certains produits agricoles importés au Canada et qui bénéficieront de ces tarifs préférentiels. Il nous a semblé essentiel de faire en sorte que les provinces aient leur mot à dire dans la désignation des importateurs bénéficiant de ces faibles tarifs douaniers.

Ceci est d'autant plus important que les intérêts des provinces peuvent être souvent concurrents les uns avec les autres et que le processus a tout avantage à être le plus ouvert possible, de façon à éviter la magouille et les conflits d'intérêts. On sait, par exemple, que le gouvernement fédéral a déjà convenu avec certains pays-dont la Nouvelle-Zélande qui obtient un contingent tarifaire important sur le beurre, en contrepartie probablement d'un contingent équivalent pour l'exportation de boeuf canadien en Nouvelle-Zélande-des accords dans lesquels il garantit à certains de leurs produits un accès au marché canadien en échange d'un accès au leur.

(1100)

Sur le fond, d'une part, ce type d'accord peut avoir des conséquences fâcheuses pour nos producteurs locaux et indisposer nos autres partenaires commerciaux. D'autre part, les pays en développement-je pense qu'il est important de le préciser-sont les grands perdants dans ce genre d'accord, car ils n'ont rien à offrir en échange d'un accès à nos marchés. Il faut en tenir compte, monsieur le Président.

On voulait par cet amendement éviter la possibilité d'un marchandage sur l'attribution des contingents tarifaires et les possibilités de conflits d'intérêts pour le ministre. Évidemment, on voulait éviter que le ministre puisse éventuellement profiter, d'une certaine façon, dans l'attribution des contingents tarifaires, des intérêts souvent contradictoires des provinces, les unes par rapport aux autres.

Cet amendement visait également à assurer que le ministre n'autorise pas que les produits importés en dehors des contingents tarifaires, lors de pénuries sur le marché intérieur, soient vendus à des prix inférieurs aux prix pratiqués pour les mêmes produits sur le marché intérieur.

Je passe maintenant à l'amendement sur l'article 3, proposé par le député de Longueuil, qui visait à assurer un suivi parlementaire parlementaire minimal et à forcer le gouvernement canadien à faire un bilan public de la mise en oeuvre des accords du GATT, ce qui constituait, à notre avis, une mesure de prudence minimale. Cet amendement nous avait été suggéré par l'Union des producteurs agricoles du Québec et la Fédération canadienne de l'agriculture, lorsqu'ils ont comparu devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.

Encore une fois, le gouvernement a considéré que cet amendement ne valait pas la peine d'être retenu, puisqu'il l'a rejeté hier en fin de journée.

Cet amendement visait également à ce que nous puissions faire le bilan de la mise en oeuvre de l'accord par nos principaux partenaires commerciaux, plus particulièrement les États-Unis. Il faut comprendre que la législation américaine, qui est actuellement devant le Congrès, prévoit des dispositions semblables. L'article 424 du projet de loi américain stipule en effet que pas plus tard que six mois après la date d'entrée en vigueur de l'accord, le président doit soumettre un rapport portant sur la


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façon dont le Canada se conforme à ses obligations en ce qui concerne les produits laitiers et la volaille.

Ce genre de mesure n'a rien d'exagérément agressif. Elle ne viole pas l'esprit des accords de l'Uruguay Round. Elle nous permet simplement de rester vigilants face à nos principaux partenaires économiques qui peuvent, à l'occasion, de leur côté, se montrer agressifs à notre égard.

D'autre part, l'amendement visait également à faire en sorte que le gouvernement dépose annuellement un rapport portant sur les impacts de l'accord sur les travailleurs et les entreprises, ce dont j'ai déjà fait état plus tôt.

Le gouvernement libéral, quand il était en campagne électorale, a fait des promesses à ce propos. On sait que de nombreux travailleurs et entreprises seront affectés par l'entrée en vigueur des accords de l'Uruguay Round. Il ne fait aucun doute qu'ils sont prêts à relever les défis qui se présentent devant nous en vertu des accords de l'Uruguay Round, mais il est nécessaire de leur donner un coup de pouce pour les aider à affronter cette nouvelle réalité.

Je passe maintenant à l'amendement à l'article 58, proposé par le député de Louis-Hébert, qui visait à faire en sorte que les artistes soient protégés, non seulement maintenant, mais également dans le futur. On voulait rendre l'article technologiquement neutre, c'est-à-dire ne pas le limiter aux technologies qui existent aujourd'hui ou qui existaient autrefois. L'article 58 prévoit en effet de protéger les enregistrements sur rouleau perforé. Imaginez, monsieur le Président, les enregistrements sur rouleau perforé!

Comme je le signalais dans le débat à l'étape du rapport, si j'avais été parlementaire en cette Chambre, immédiatement après la Seconde Guerre mondiale, discutant du projet de loi de mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation internationale du commerce, je me serais probablement senti un peu à l'aise avec cet aspect me disant que le rouleau perforé pour enregistrer des sons, n'est quand même pas si vieux que ça. Mais en 1994, à l'époque du laser et des fibres optiques, je pense qu'on devrait prévoir un article qui soit technologiquement neutre, c'est-à-dire qui ne se limite pas simplement aux technologies qui existent ou qui existaient auparavant, mais qui prévoit le développement de nouvelles technologies, de nouvelles méthodes d'enregistrement de l'information.

(1105)

Il s'agissait d'un amendement purement technique, simple, mais fondamentalement important. Aujourd'hui, comme l'indiquait le mémoire qui a été déposé par l'Union des artistes devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, et je cite: «Le rouleau perforé prête à rire, tant il est désuet comme mode de fixation des enregistrements sonores. Demain, qui sait, ce seront les cassettes numériques ou les disques laser qui feront sourire et nous paraîtront des techniques d'un autre âge.»

En se limitant à parler du rouleau perforé, l'approche du gouvernement nous apparaissait timorée et hésitante. Elle ne laisse absolument rien présager de bon pour la révision de la législation sur les droits d'auteur. Le fait que nous apportions un seul amendement à cet égard ne signifie par pour autant que nous cautionnions la position du gouvernement actuel, qui tarde, de façon indue, à déposer un projet de loi modifiant les droits d'auteur.

Le gouvernement, et nous avons fait cette critique de façon claire la semaine dernière, ne doit certainement pas se servir des traités commerciaux pour procéder au hasard et de façon incidente à la révision de la législation sur le droit d'auteur. Encore une fois, comme l'a suggéré le rapport de la majorité libérale du Comité mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère du Canada, le gouvernement s'approprie des champs de compétence partagée, sous prétexte qu'il s'agit de leur extension sur la scène internationale et que, comme il est le seul titulaire, il prétend qu'il lui revient de s'en occuper.

L'amendement à l'article 185, que j'ai eu l'honneur de proposer, visait simplement à clarifier les lignes directrices dont se servira le tribunal du commerce pour juger les causes de dumping. L'article 185 du projet de loi C-57 porte sur la façon dont le Tribunal canadien du commerce extérieur devra évaluer les plaintes relatives au dumping. Devant un tel tribunal, il est important non seulement de prouver qu'il y a effectivement dumping, mais que ce dumping cause préjudice à l'industrie canadienne.

De plus, le projet de loi prévoit que le tribunal ne peut constater un préjudice que si les circonstances causant ledit préjudice sont nettement prévues et imminentes. Vous comprendrez, monsieur le Président, qu'une telle disposition, «prévues et imminentes», est beaucoup trop restrictive et beaucoup trop vague. Alors, ce qu'on souhaitait, à travers cet amendement, c'est tout simplement de permettre de clarifier, de préciser un peu ces circonstances pouvant causer un préjudice, circonstances qui sont tout à fait vagues, actuellement.

Le projet de loi actuel prévoit également que le gouverneur en conseil peut, à la recommandation du ministre des Finances et si le coeur lui en dit, poser, sous forme de réglementation, des balises qui donneront au Tribunal canadien du commerce extérieur des indications plus précises sur les preuves acceptables et l'interprétation générale des nouvelles conditions relatives au dumping.

L'Industrie canadienne des producteurs d'acier soumettait à notre attention que les Américains, dans leur législation, étaient beaucoup plus précis et donnaient à leurs tribunaux, comme je viens de le dire, des indications beaucoup plus claires, beaucoup plus précises, quant à la façon d'interpréter ces nouvelles conditions et sur les éléments de preuve qui pourraient être présentés devant un tribunal.

Compte tenu de cet état de fait, il est évident que les producteurs canadiens sont nettement désavantagés par rapport à leurs concurrents américains, puisqu'ils n'ont absolument aucune indication sur la façon dont ils devront prouver qu'ils sont victimes de dumping de la part de leur contrepartie américaine. J'ai fait état de l'importance, pour l'économie canadienne, de l'industrie de l'acier. Je ne reviendrai pas sur ces éléments, mais il faut comprendre à quel point cette modification au projet de loi était impérieuse, non seulement pour l'industrie de l'acier, mais également pour un très grand nombre d'industries et de secteurs de l'économie canadienne.

(1110)

Le but de l'amendement visait, d'une part, à ordonner au gouverneur en conseil, plutôt que de simplement lui permettre, à la va-comme-je-te-pousse, quand ça lui plaît, d'établir des


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balises par voie de règlements pour guider les entreprises et le tribunal dans ses décisions. Il visait également à préciser les types d'éléments de preuve qui devaient figurer parmi les facteurs décrits dans le règlement et suggérait que le ministre de l'Industrie soit associé à l'opération puisque, évidemment, il est probablement celui qui est le plus à même de juger de l'évolution de la situation des différents secteurs de l'économie canadienne.

J'aimerais souligner, à ce stade-ci, la contribution importante de mon collègue de la circonscription de The Battlefords-Meadow Lake qui a présenté à cette Chambre un certain nombre d'amendements qui, sur le fond, dans la plupart des cas, se rapprochaient des amendements proposés par le Bloc québécois et qui, malheureusement, ont été également rejetés. Dans ses interventions, lui aussi, il a bien souligné la différence qui existe entre la législation américaine qui prévoit un certain nombre d'outils pour défendre leurs industries, et la législation canadienne qui s'en remet à la bonne volonté des instances de l'Organisation mondiale du commerce et aux strictes règles du droit. La loi canadienne fait preuve d'un purisme dangereux qui, je le souhaite de tout coeur, s'avérera une stratégie viable qui rapportera des bénéfices à l'économie canadienne.

Il est important de faire un petit aparté, une parenthèse sur l'évolution de la législation devant le Congrès américain. On a appris, ces derniers jours, que le vent avait tourné et qu'une majorité de sénateurs avaient l'intention d'approuver le projet de loi américain sur les accords de l'Uruguay Round, même si, comme le disait le secrétaire au Trésor américain, M. Lloyd Bentson, et je cite: «Le vote du GATT n'est pas encore bouclé.» Tout nous permet d'être des plus optimistes au moment où on se parle.

Cependant, advenant l'éventualité où le Congrès rejetteraient l'Accord du GATT et où les États-Unis se replieraient sur eux-mêmes, il faudrait craindre alors un retour au protectionnisme qui se propagerait au niveau mondial et qui aurait des conséquences désastreuses pour l'ensemble de l'économie mondiale. Le signal que va envoyer notre principal partenaire commercial est donc capital. Nous suivrons donc avec beaucoup d'attention les travaux du Congrès et nous souhaitons que le ministre canadien du Commerce international se serve de tous les outils qui sont à sa disposition pour faire pression auprès de notre partenaire américain en faveur de l'adoption, dans les plus brefs délais, du projet de loi sur les accords de l'Uruguay Round et pour faire comprendre aux législateurs américains récalcitrants la gravité des enjeux qui sont en cause.

En terminant, on me permettra d'émettre un certain nombre de critiques sur le processus auquel nous nous sommes prêtés au cours de ces dernières semaines. Il ne fait aucun doute, au moment où on se parle et même dès le début, que le Bloc québécois appuie, appuyait et appuiera cette législation sur la mise en oeuvre des accords de l'Uruguay Round. On sait que nos collègues du Parti réformiste font de même.

On se surprend donc que le gouvernement ait tardé si longtemps avant de soumettre son projet de loi à l'attention des parlementaires. Il l'a fait à la dernière minute et ensuite il a exercé toutes les pressions possibles et imaginables pour que le projet de loi progresse le plus rapidement possible en Chambre, en comité, à toutes les étapes et à toutes les lectures. Ce faisant, l'attitude du gouvernement nous a empêchés, autant que faire se peut, de faire un travail rigoureux et consciencieux sur le projet de loi C-57 qui, je le rappelle, comporte plus de 200 articles.

Compte tenu de l'ampleur et du volume de ce projet de loi, on aurait dû s'attendre à ce que le gouvernement, à tout le moins, comme il l'a fait dans le cas d'autres législations, nous consulte. Un avant-projet de loi a circulé au niveau des différents secteurs de l'économie canadienne et au niveau des différentes provinces et c'est une bonne chose qu'il en soit ainsi.

(1115)

Nous aurions souhaité, à tout le moins, compte tenu de l'unanimité qui existait en cette Chambre, que le gouvernement ait la décence de faire circuler cet avant-projet de loi aux autres parlementaires, que nous puissions y jeter un coup d'oeil et, éventuellement, faire des suggestions, avant que le projet de loi se retrouve en comité et en Chambre, et qu'à ce moment-là, le gouvernement, coincé j'imagine par le fait que tout est public et voulant préserver son image, se refuse à quelque compromis et à quelque modification que ce soit de son projet de loi.

Pour ce qui est de l'étude en comité, on a limité le nombre de témoins à comparaître. On leur a accordé très peu de temps pour se préparer. De toute façon leurs présentations n'ont pas du tout été prises en considération et les travaux étaient organisés de telle sorte qu'on ne pouvait pas prendre en considération leurs revendications. On a terminé nos audiences publiques il y a deux semaines, le mercredi, et le lendemain, nous étudiions le projet de loi article par article.

Comment voulez-vous que nous puissions prendre en considération les propositions, les observations, les suggestions des gens qui témoignaient devant le comité, si dès le lendemain, nous avions à adopter à toute vapeur les 200 et quelques articles de ce projet de loi?

En conclusion, bien sûr nous appuyons le projet de loi visant la mise en oeuvre des accords de l'Uruguay Round. J'ai fait état de l'importance de ce projet de loi pour le Québec et du consensus qui existe en cette Chambre sur cette question.

Nous donnons notre approbation à ce projet de loi en espérant que le gouvernement garde à l'esprit les réserves que nous avons formulées depuis le début des travaux sur ce projet de loi, réserves qui, dans la plupart des cas, nous avaient été soumises par les témoins qui ont comparu devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Je rappelle la Fédération canadienne de l'agriculture, l'Union des producteurs agricoles, l'Union des artistes, l'Association canadienne des producteurs d'acier, simplement pour vous dire que plusieurs préoccupations ont été soulevées, plusieurs suggestions ont été faites, mais le gouvernement n'en a pas tenu compte. Nous souhaitons qu'il ait à l'esprit, au niveau de sa réglementation à tout le moins, ces différentes réserves que nous avons formulées.

On espère évidemment que ces lacunes dont souffre le projet de loi C-57 n'auront pas de conséquences fâcheuses pour des secteurs déjà fragiles de notre économie et que ces lacunes ne placeront pas les entreprises québécoises et canadiennes en position désavantageuse par rapport à nos principaux partenaires commerciaux.

En ce qui concerne la mise en oeuvre des accords de l'Uruguay Round, on espère, car c'est tout ce que l'on peut faire, que le gouvernement fédéral aura l'obligeance, comme il le prétend, de


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consulter les provinces lorsqu'il prendra des décisions majeures sur des questions qui les concernent.

On espère que le gouvernement s'assurera de maintenir un suivi adéquat et qu'il étudiera le comportement de nos principaux partenaires commerciaux, qu'il remplira la promesse du livre rouge en ce qui concerne la reconversion des entreprises et des travailleurs, et je cite l'extrait du livre rouge, je pense qu'il est important de le faire: «Dans le cadre de la libéralisation des échanges commerciaux, les pouvoirs publics doivent aider à la reconversion des travailleurs et des entreprises. Pour que la restructuration de l'économie canadienne trouve grâce aux yeux de la population, cet effort financier doit se faire.»

Nous savons fort bien que dans l'état actuel des finances publiques, le gouvernement libéral risque d'être tenté de passer outre à cette promesse de mettre sur pied des programmes de reconversion des entreprises les plus affectées par les accords de l'Uruguay Round et l'ALENA.

Le Bloc québécois et moi-même, bien sûr, reconnaissons de bon gré la nécessité de réduire de façon judicieuse le monstrueux déficit canadien. Cependant, nous sommes également conscients que les travailleurs et travailleuses dans certains secteurs de notre économie devront fournir des efforts supplémentaires pour s'adapter aux nouvelles réalités du marché.

Quoique je sois absolument convaincu que la main-d'oeuvre et les entreprises québécoises et canadiennes sauront faire preuve de l'innovation et du dynamisme nécessaires pour faire face à ces nouvelles réalités, je sais également que l'intervention de l'État est, dans certains cas, absolument nécessaire.

En terminant, je voudrais à mon tour remercier tous les parlementaires qui ont participé aux travaux visant à l'adoption en cette Chambre du projet de loi C-57, particulièrement mes collègues de Louis-Hébert, de Laval-Est et de Longueuil, mes collègues du parti gouvernemental et du Parti réformiste, et tout spécialement les organismes et individus qui ont pris la peine, en dépit des vicissitudes du processus, de se déplacer, de venir comparaître, ici à Ottawa, aux frais des contribuables, devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, même si leurs préoccupations et leurs suggestions n'ont pas été prises en considération.

(1120)

L'honorable secrétaire parlementaire soulignait l'approche constructive dont ont fait preuve les parlementaires des deux côtés de la Chambre. Je dois souligner, en terminant, que de mon côté, je ne peux donner une aussi bonne note au gouvernement qui n'a pas coopéré de façon aussi constructive et aussi coopérative que nous l'aurions souhaité.

Cela étant dit, bien sûr, nous appuierons ce projet de loi.

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'appuyer le projet de loi C-57 qui met en oeuvre l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, conclu sous l'égide du GATT.

Le fait que tous les partis se soient entendus pour donner suite à l'étude du projet de loi fait honneur à la Chambre et aux Canadiens. Nous reconnaissons que cette entente commerciale crée, au plan de la politique interne canadienne, certains problèmes qu'il faudra résoudre, mais le Canada a grandement besoin de cet accord. En fait, ce pays a été l'un des principaux défenseurs de l'adoption de règles commerciales depuis la Seconde Guerre mondiale.

Lorsque le GATT a été conclu en 1947, le Canada était l'un des premiers pays à proposer un accord commercial fondé sur des règles. Depuis sept ans, nous avons travaillé sans réserve, dans le cadre de l'Uruguay Round, en vue d'assujettir des secteurs d'activité comme l'agriculture et les services, entre autres, à des règles commerciales internationales, et cela pour la première fois. Ces secteurs n'avaient jamais été assujettis aux règles commerciales internationales et nous croyons qu'il est très important qu'ils le soient.

Le Parti réformiste appuie entièrement la mise en oeuvre du GATT et la création de l'Organisation mondiale du commerce. Nous sommes impatients que l'organisation voie le jour et fonctionne.

Le Canada a besoin d'échanges commerciaux réglementés, car ils seront avantageux pour nous. Le Canada est un pays vaste, peu peuplé mais doté de ressources considérables. Environ 30 p. 100 de notre PNB dépend directement des échanges commerciaux. À la différence de pays comme les États-Unis, qui ont une économie beaucoup plus fermée que la nôtre, le Canada dépend des échanges commerciaux et est un leader mondial à ce chapitre.

Une des raisons pour lesquelles nous comptons sur ces échanges, c'est qu'il y a une guerre commerciale dans le secteur de l'agriculture depuis une dizaine d'années. Nous avons vu les effets économiques destructeurs qu'une guerre commerciale peut avoir dans l'industrie touchée. Sans l'Uruguay Round, cette guerre risquait de se propager à d'autres secteurs, ce que le Canada ne pouvait tout simplement pas se permettre. La conclusion de l'accord était donc très importante pour nous.

Il est impossible de jouer le jeu si chacun y va de ses propres règles. Voilà ce que nous entendons par règles commerciales internationales. Vu sous cet angle, le commerce ressemble beaucoup à un jeu. Nous entendons constamment parler de règles du jeu équitables, et il y a à cela une raison. Cette expression signifie que nous avons besoin de règles qui soient les mêmes pour tous et qui accordent des possibilités égales à chaque équipe.

Si je puis me permettre une analogie, la situation me fait beaucoup penser au hockey, mon sport favori. Ce sport a été inventé au Canada. Au fil des ans, nous avons défini les règles du hockey. Nous sommes très bons dans ce sport au plan national et nous devons agir en tant qu'équipe nationale lorsque nous allons à l'étranger. Il nous faut recruter les meilleurs joueurs et les former. À cet égard, le hockey ressemble beaucoup à l'Uruguay Round. Nous avons besoin de règles internationales au hockey comme dans le commerce.

Comme au hockey, il faut un arbitre impartial dans le commerce. L'Organisation mondiale du commerce fera office d'arbitre impartial chargé d'appliquer les règles de façon équitable. En passant, le Président suppléant qui occupait le fauteuil il y a un instant sait certainement ce que c'est que d'être arbitre puisqu'il


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a été arbitre dans la ligue nationale pendant de nombreuses années. Un arbitre doit d'abord avoir une bonne vue. Il doit être vigilant, et ce sera justement en quoi consistera le rôle de l'Organisation mondiale du commerce.

Le Canada, qui est une nation commerçante, bénéficiera grandement de la libéralisation des échanges commerciaux. Le Canada produit des quantités excédentaires de beaucoup de biens et de services qui sont en demande dans le monde entier. Par contre, il lui est impossible de produire toute la gamme des biens et services dont les Canadiens ont besoin. C'est pourquoi nous avons avantage à exporter nos biens et nos services, dans les domaines où nous réussissons le mieux-et nous réussissons bien dans un grand nombre de domaines. De la même façon, nous avons avantage à importer les biens et les services que d'autres pays réussissent mieux.

(1125)

En 1993, le Canada a exporté pour 181 milliards de dollars en biens et services, ce qui représente environ 30 p. 100 de notre produit intérieur brut. Pour chaque tranche d'un milliard en nouvelles exportations, plus de 1 100 nouveaux emplois sont créés. C'est très important pour le Canada qu'il maintienne des pratiques d'exportation fructueuses.

Une libéralisation des échanges commerciaux permettra aux Canadiens de jouir d'une plus grande prospérité. Au Canada, le commerce fournit un emploi sur quatre. Dans ma circonscription, Peace River, les emplois reposent en grande partie sur le commerce.

La région de Peace River, en Alberta, est actuellement en plein essor. Notre économie est très forte. L'agriculture se porte bien. Le secteur du pétrole et du gaz est en expansion. Le secteur des forêts est aussi en expansion. C'est une chance pour ma circonscription que toutes ces industries enregistrent d'excellentes ventes à l'exportation. La circonscription de Peace River, en Alberta, est la meilleure preuve qu'on puisse trouver du succès de ces exportations.

L'application de cet accord commercial nous pose toutefois quelques difficultés. Nous en subissons certaines conséquences chez nous. Je peux comparer la situation à celle de notre équipe nationale de hockey. Nous devons collaborer avec nos joueurs pour faire en sorte que l'accord fonctionne bien pour le Canada, sauf que dans le cas présent, les joueurs sont les différents éléments du monde des affaires et les provinces. Nous devons tous collaborer.

Je poursuis mon analogie encore un peu. Si l'on ne peut s'entraîner ensemble, comment peut-on apprendre à jouer? Les jeunes joueurs commencent à l'échelle locale, sur la patinoire de leur quartier. S'ils devaient rester dans leur cour, comment pourraient-ils acquérir l'habileté nécessaire, apprendre les manoeuvres et progresser?

Récemment, le GATT a reproché au Canada d'avoir trop de barrières commerciales intérieures. Nous devons porter attention à ce qu'on nous dit. Nous devons respecter les exigences minimales et adopter le projet de loi C-57 pour qu'il entre en vigueur. Je crois que c'est la bonne façon de faire. Nous voulons que cet accord entre en vigueur très rapidement et, pour ce faire, nous devons nous soumettre à ses exigences. Cela signifie qu'il nous faut modifier environ 31 lois pour que notre législation en respecte les exigences minimales.

Cela démontre que notre politique intérieure présente des défauts graves que nous devons régler. J'espère que le directeur de l'équipe, l'entraîneur, le gouvernement fédéral, se mettra au travail pour régler ces problèmes. Il y a notamment les difficultés que soulèvent les règlements et les subventions dans le domaine des transports, les règlements gouvernementaux et le développement régional, enfin tout ce qui réduit notre compétitivité sur les marchés étrangers.

Il y a toutes sortes de barrières. Dans les industries de l'agriculture et de la transformation des aliments, on compte plus d'une centaine de barrières. Ce sont, par exemple, les offices de commercialisation, les contingents de production, les normes de qualité et d'emballage, ainsi que les subventions au transport et les paiements de stabilisation.

Dans les industries des boissons alcoolisées et du vin, les barrières prennent la forme d'exigences de production provinciales, d'obligations d'embouteiller sur place, de majorations de prix différentes, de contingents, de normes d'emballage et de favoritisme en matière de commercialisation.

L'industrie des transports est confrontée à des exigences provinciales différentes concernant l'octroi de licences, la dimension et le poids, les règlements de sécurité, les pouvoirs discrétionnaires des offices de transport, la taxe sur les carburants et la taxe de vente. On a même affirmé que les barrières commerciales étaient plus nombreuses à l'intérieur du Canada que dans toute l'Union européenne. Nous devons corriger cette situation et ce ne sera pas une mince tâche.

En ce qui concerne les marchés publics, nous avons des préférences implicites et explicites pour les fournisseurs locaux de même que des exigences visant l'acquisition de produits locaux. Comme les dépenses à ce chapitre dépassent les 100 milliards de dollars par an, soit environ 20 p. 100 de notre production intérieure brute, elles ne sont pas à négliger.

Les problèmes que soulève la mobilité de la main-d'oeuvre sont dus aux exigences qui varient d'une province à l'autre pour l'octroi des licences de professionnels et de commerçants. Ces barrières sont des obstacles de taille pour les travailleurs spécialisés qui sont prêts à se déplacer mais qui doivent alors satisfaire à d'autres exigences pour obtenir des permis de travail.

Il y a aussi la mobilité des capitaux qui est ralentie par les subventions à l'industrie, les fonds d'investissement locaux et les encouragements fiscaux.

(1130)

Ces barrières sont souvent utilisées pour stimuler le développement régional et représentent une affectation de ressources financières peu rentable. Pour le Canada, ces barrières et d'autres barrières commerciales internes coûtent environ 6,5 milliards de dollars par an, ce qui est totalement inadmissible. Nous devons y voir.

Les barrières au commerce interprovincial ont fragmenté notre marché intérieur et réduit notre compétitivité sur les marchés internationaux. Ces barrières favorisent en outre les grandes sociétés qui ont les moyens de se soumettre aux règles rigoureuses du gouvernement. Elles empêchent en même temps les petites entreprises de réaliser tout leur potentiel commercial. Si nous n'arrivons pas à améliorer la concurrence à l'intérieur même de nos frontières, nous ne profiterons jamais pleinement de ces possibilités commerciales accrues.


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Pas plus tard qu'hier, la presse a rapporté un point intéressant. Le directeur des affaires nationales à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, Garth Whyte, trouve paradoxal de voir qu'Ottawa et les provinces semblent collaborer très étroitement en Asie, alors qu'ils ne s'entendent pas sur la suppression des barrières commerciales interprovinciales ici même, au Canada. C'est une chose que j'ai déjà signalée bien des fois à la Chambre et qui nuit vraiment à nos entrepreneurs lorsqu'ils veulent faire du commerce au plan international.

M. Whyte ajoute que nombre des 85 000 petites et moyennes entreprises de tout le Canada qui forment la FCEI ne songent même pas à s'approprier les marchés internationaux parce qu'elles n'arrivent pas à prendre, dans les provinces voisines, l'expansion qui leur permettrait d'être concurrentielles à l'étranger. C'est là notre talon d'Achille. L'examen de notre politique étrangère a montré qu'il nous faut créer au Canada un environnement plus propice aux échanges internationaux qui donnerait aux petites et moyennes entreprises l'occasion d'être concurrentielles.

Le plus gros de notre commerce international passe par une centaine d'entreprises du Canada. L'occasion est belle pour les petites et moyennes entreprises d'être concurrentielles, mais il faut d'abord lever les barrières commerciales entre les provinces pour qu'elles s'approprient une plus grande part du marché canadien, puis en profitent pour prendre de l'expansion au plan international.

Notre équipe nationale éprouve des problèmes. Elle ne travaille pas en équipe. C'est à l'entraîneur, au gérant de l'équipe, en face, d'y voir. L'Équipe Canada doit être plus efficace au pays avant d'améliorer sa performance à l'étranger.

Je prévois aussi que la mise en oeuvre de l'Organisation mondiale du commerce nous posera des problèmes au Canada qu'il nous faut chercher à résoudre. Il y aura des différends que le gouvernement devra régler. Pour reprendre l'analogie avec le hockey, si les punitions sont trop nombreuses, le jeu en souffre. Dans ce cas-ci, les punitions, ce sont les tarifs douaniers et les barrières commerciales interprovinciales.

L'allocation des contingents tarifaires, par exemple, nous posera des problèmes. Il nous faudra régler les problèmes de notre secteur de la gestion de l'offre, de même que ceux soulevés, dans le cadre de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, par la mise en oeuvre de l'Organisation mondiale du commerce et le plafonnement qui sera imposé aux exportations.

J'espère que le gouvernement travaillera en étroite collaboration avec les industries et les provinces visées pour que la période d'adaptation se passe bien et que nous puissions un jour commencer à éliminer progressivement les quotas, les subventions et les tarifs douaniers d'un océan à l'autre et faire du Canada une vraie nation libre-échangiste.

Je vous donne des exemples, notamment celui du boeuf. Les deux camps en présence nous présentent leurs arguments. Un groupe soutient que les contingents tarifaires sont assez élevés et doivent demeurer inchangés. L'autre groupe soutient qu'ils sont nettement trop bas et ils demandent un plus large accès aux marchés. Je peux entrevoir certains problèmes. Il y aura même un commerce des contingents tarifaires, ce qui, à mon sens, n'est pas nécessairement bon.

Comme nous l'avons entendu aujourd'hui de la part du secrétaire parlementaire, du critique bloquiste et de nos porte-parole, tout le monde surveille les mouvements de l'autre grande équipe, l'Équipe États-Unis, qui ajoute de nombreuses exigences et de nombreux règlements à son projet de loi de mise en oeuvre de l'accord. Je ne crois pas que les États-Unis aient choisi la bonne voie.

(1135)

Je crois que l'arbitre, en l'occurrence, l'Organisation mondiale du commerce, examinera cette loi de très près lorsqu'il sera appelé à trancher des différends. Tous les facteurs seront pris en considération et peu importe en faveur de qui les décisions sont rendues, elles seront appuyées par les 123 pays membres.

Je suis donc partisan de l'adoption rapide du projet de loi pour soumettre à l'Organisation mondiale du commerce certains différends où le Canada est partie depuis longtemps, par exemple, celui sur le blé de l'Ouest et celui sur l'acier. Dans ce dernier cas, nous savons tous le nombre de requêtes soumises à des groupes d'arbitrage par les États-Unis. Ce sont là deux dossiers qu'il faudrait soumettre rapidement à l'Organisation mondiale du commerce pour obtenir une décision et bénéficier du poids de tous les pays membres.

Ce qui se passe aux États-Unis est d'un intérêt capital pour le Canada étant donné que c'est avec ce pays que nous faisons 75 p. 100 de notre commerce. Cependant, nous avons d'excellents rapports avec les États-Unis, qui ont permis au Canada de devenir le septième pays commerçant du monde, même si nous sommes 31e par notre population.

En terminant, je tiens à dire que notre parti souhaite que l'Organisation mondiale du commerce soit rapidement mise sur pied et que l'accord du GATT soit rapidement mis en oeuvre. Nous croyons que le Canada saura tirer son épingle du jeu. Nous aurons un arbitre neutre qui, je l'espère, sera vigilant. Nous pourrons miser sur nos meilleures qualités, à savoir, nos connaissances et notre savoir-faire. Nous n'allons pas faire comme certaines équipes qui ont tendance à recourir à la force. Nous pouvons compter sur nos compétences pour réussir. Nous pouvons avoir de bons échanges commerciaux avec n'importe quel pays à condition que les règles du jeu soient équitables pour tous.

Alors, que la partie commence. Mettons cet accord en oeuvre le plus rapidement possible afin que le Canada puisse jouer un rôle de premier plan au sein de l'Organisation mondiale du commerce en vue des futures réformes. Continuons de travailler fort chez nous pour régler certains des problèmes que nous avons du point de vue des obstacles au commerce. Occupons-nous de régler notre problème de dette et de déficit parce que nous savons que cela nous coûte extrêmement cher. Notre taux d'imposition très élevé est une des raisons qui font que nous ne sommes pas dans une bonne position concurrentielle sur le plan international.


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Nous pourrons gagner la partie si nous nous occupons de régler ces problèmes.

Nous croyons que l'Équipe Canada peut tenir tête à n'importe quelle autre équipe dans le monde à condition que nous ayons les mêmes règles.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de reprendre le débat, je tiens à rappeler à la Chambre que, conformément à l'article 74 du Règlement, après les trois premiers orateurs, les députés qui prendront la parole au cours des cinq prochaines heures de débat pourront faire des discours de 20 minutes, qui seront suivis d'une période de 10 minutes réservée aux questions et aux observations. Il arrive que les députés partagent leur temps de parole. S'ils décident de le faire, j'espère qu'ils en aviseront la présidence.

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, du côté du parti ministériel, il y aura deux orateurs pour chaque période de 20 minutes pendant les cinq premières heures de débat.

M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River, Lib.): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de prendre la parole afin d'appuyer le projet de loi C-57, qui porte mise en oeuvre d'un accord issu des négociations de l'Uruguay Round menées sous l'égide de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce.

Plus de 120 pays sont signataires de cet accord, et ce projet de loi permettra au Canada de participer à l'accord commercial le plus exhaustif de l'histoire.

Le gouvernement actuel a été élu pour un certain nombre de raisons. Ce sont ces mêmes raisons qui font qu'on le tient en haute estime. Nous avons le chef, l'équipe et le plan qu'il faut, en l'occurrence, le livre rouge. Dans ce livre, il était essentiellement question de créer des emplois et de redonner du travail aux Canadiens, de leur permettre à tous de participer à l'économie, de leur conférer à tous la dignité qui vient du fait d'avoir un emploi et la fierté qui vient de la capacité de subvenir aux besoins des leurs.

Depuis l'élection de notre premier ministre et du nouveau gouvernement, plus de 300 000 nouveaux emplois ont été créés, la plupart étant des emplois à plein temps. En outre, la confiance des milieux d'affaires et des consommateurs est à la hausse. Cela est attribuable au fait que le gouvernement a concentré tous ses efforts à tenir sa promesse de créer des emplois et qu'il y a réussi, avec tous les Canadiens.

(1140)

Ainsi, grâce au programme d'infrastructure qui a permis la construction de routes, de réseaux d'égouts, de trottoirs et d'établissements de soins de santé ainsi que la mise en oeuvre d'autres projets valables, des dizaines de milliers de Canadiens ont maintenant retrouvé du travail.

Que ce soit par le biais de l'examen du secteur des sciences et de la technologie, de l'examen du Programme de la diversification de l'économie de l'Ouest proposé par le ministre du Développement des ressources humaines ou de son examen très important et indispensable des programmes sociaux, nous cherchons les meilleures façons de créer un climat propice à la croissance économique et à la création d'emplois dans notre pays.

Nous cherchons des façons de rendre le Canada plus concurrentiel sur le marché mondial. Le succès remporté par nos ministres du Commerce international et de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire auprès du GATT est tout à fait conforme à l'orientation du gouvernement, celle de créer des emplois et de favoriser la croissance économique au Canada.

L'Uruguay Round du GATT a mené à un accord international qui a néanmoins de nombreuses répercussions locales importantes et positives à Prince-Albert, à Churchill River et partout en Saskatchewan.

Le secteur manufacturier des machines agricoles est une importante industrie de la Saskatchewan qui en bénéficiera. Les droits de douane sur ces produits seront éliminés dans le monde entier sur cinq ans. Les Canadiens de l'Ouest et les fabricants de machinerie agricole de la Saskatchewan sont particulièrement bien placés pour profiter de cette nouvelle réalité économique puisque notre technologie d'aridoculture à grande échelle est à la fine pointe dans le monde entier tant en matière de protection de l'environnement que d'efficience économique et d'efficacité de la production.

Ces industries sont déjà très concurrentielles en raison de la proximité du marché américain et du bon accès à ce dernier. Nous pouvons donc profiter efficacement des nouvelles possibilités.

Je crois dans les agriculteurs de la Saskatchewan parce qu'ils ont survécu à la sécheresse. En outre, ils sont aux prises avec le niveau peu élevé des prix des matières premières attribuable à la guerre des subventions aux exportations de céréales dévastatrice que se livrent les États-Unis et l'Union européenne.

Il ne fait pas de doute que les agriculteurs de la Saskatchewan comptent parmi les producteurs les plus efficaces du monde. Par conséquent, la réduction des subventions au niveau international sera une bonne nouvelle pour nos producteurs parce qu'ils sont déjà très productifs.

L'un des changements les plus importants qu'entraînera cet accord est la fin de la terrible et dévastatrice guerre de subventions à l'exportation de céréales que se livrent les États-Unis et l'Union européenne. Le volume des exportations de blé de l'Union européenne et des États-Unis sera réduit de plus de 40 p. 100 au cours des six prochaines années. Cette réduction se traduira par un accès et des perspectives commerciales accrus pour les agriculteurs canadiens qui produisent des céréales et des oléagineux.

C'est une bonne nouvelle pour les agriculteurs. De plus, à mesure que les subventions seront réduites, les industries de transformation de produits agricoles de l'ouest du Canada seront appelées à croître. Pendant trop longtemps dans l'Ouest, nous avons été des porteurs d'eau. Pendant trop longtemps, nous avons expédié nos produits à l'extérieur de la province et du pays pour y être transformés.


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Nous vivrons assez longtemps pour voir l'économie de la Saskatchewan se diversifier davantage, pour voir nos agriculteurs ne plus avoir à expédier une si grande partie de leur production à l'extérieur de la province ou du pays pour y être transformée. Les agriculteurs de la province le feront sur place.

Nous assisterons bientôt à l'implantation d'industries de transformation de nos produits agricoles dans la province. Nous dépendrons moins de l'incertitude créée par les fluctuations des prix internationaux des matières premières, ce qui favorisera notre stabilité économique, la diversification de l'activité économique et des marchés au Canada. C'est une formule gagnante pour la stabilité et la croissance économiques.

Le GATT assurera également une plus grande protection aux agriculteurs canadiens en ce sens que les États-Unis ne pourront plus invoquer leurs lois commerciales répressives et d'autres réglementations à l'encontre des importations canadiennes de blé et d'autres produits agricoles.

Cet accord constitue une bonne nouvelle pour le secteur des viandes rouges de l'économie de la Saskatchewan. L'industrie de la transformation de la viande connaîtra de nouveaux débouchés à l'exportation et d'autres possibilités d'investissements. Le secteur minier bénéficiera de l'apport de nouvelles règles commerciales qui assureront aux produits crus un plus grand accès à certains marchés. En outre, il y aura davantage de transformation secondaire des métaux. Jusqu'à présent, les barrières tarifaires dans les autres pays nuisaient à l'exportation de métaux ainsi transformés.

(1145)

Grâce à la réduction des tarifs, l'accord du GATT aidera aussi le secteur des pâtes de nos diverses régions. Cela aura pour effet de rendre encore plus viable l'industrie canadienne et d'améliorer la situation financière de Weyerhauser Canada Limited qui exploite un complexe de pâtes et papiers déjà prospère dans la circonscription que je représente. Pour les mêmes raisons fondamentales, le secteur du bois d'oeuvre et des produits de bois connaîtra un regain d'activité.

L'accord du GATT viendra assurément prêter main-forte aux secteurs de production primaire qui bénéficieront de la réduction des tarifs, tout comme aux secteurs de production secondaire ou de transformation.

Une des principales retombées du GATT pour le Canada est l'établissement de règles commerciales plus claires et la mise en place de mesures de règlement des différends. Tout cela est particulièrement important pour le Canada, une économie de taille intermédiaire. Dorénavant, c'est la règle de droit qui tranchera les différends commerciaux, et non pas la plus forte économie ou le pays qui peut s'imposer économiquement sur le marché international.

Cette mesure est particulièrement utile pour les économies du tiers monde qui, depuis trop longtemps, sont sous l'influence d'intérêts économiques arbitraires hors frontières et de pays industrialisés. Elles seront ainsi mieux traitées. Quand elles pourront compter sur la règle de droit, par opposition au pouvoir économique, elles pourront en arriver à une plus grande indépendance économique. Les pays du tiers monde pourront alors voir leur économie prospérer et en venir à posséder plus de ressources pour acheter plus de biens et de services de pays comme le Canada.

Cet accord est avantageux pour le Canada tout entier. Il l'est pour l'Ouest, la Saskatchewan et Prince-Albert-Churchill River. Qu'il s'agisse de débouchés plus importants pour l'industrie des pâtes et papiers, pour le secteur des mines, de l'agriculture ou des produits du bois, ou encore pour toutes les industries ou les activités manufacturières ou à valeur ajoutée associées à la production de ressources primaires, tous ces débouchés ont des retombées très positives sur les habitants de ma circonscription.

Cet accord libérera considérablement l'esprit d'entreprise qui existe déjà dans ma circonscription et dans tout le pays. Avec le temps, les richesses et les débouchés accrus bénéficieront à tout le monde.

Encore une fois, je voudrais féliciter le ministre du Commerce international et le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire pour leurs efforts et leur perspicacité et les remercier d'avoir fait leur part pour que le gouvernement puisse respecter l'engagement qu'il avait pris dans le livre rouge de créer des emplois et de ramener la dignité dans la vie de tant de Canadiens qui, bien involontairement, se sont retrouvés au chômage. C'est ce que nous avions promis de faire. C'est ce que nous faisons. C'est ce que nous continuerons de faire avec l'aide de tous les Canadiens. Nous continuerons de créer des emplois et de favoriser les débouchés économiques et la stabilité.

Le GATT est un excellent accord. Le projet de loi et les modifications corrélatives à l'appui de cet accord servent très bien les intérêts du Canada. C'est pourquoi je l'appuie. Pour terminer, je voudrais remercier tous les députés des partis de l'opposition qui ont appuyé cette excellente initiative et cet excellent accord.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, je sais gré au député de ses observations.

Nous parlons depuis déjà un an des problèmes de détours qu'on fait faire aux céréales, mais le ministre n'a toujours pas pris de mesures à cet égard. Selon le député, de combien de temps disposons-nous pour régler quelques-uns de ces problèmes? Ils seront devenus très graves lorsque nous adhérerons à l'Organisation mondiale du commerce. J'aimerais que le député fasse quelques observations là-dessus.

M. Kirby: Monsieur le Président, pour répondre à la question du député au sujet des détours, le ministre de l'Agriculture a indiqué clairement qu'il fallait examiner cette pratique inutile.

Le ministre a déjà mené des consultations étendues et elles se poursuivent toujours. Je pense que tous les intervenants qui sont témoins de cette pratique s'accordent pour dire qu'elle doit cesser. Le processus de consultation doit continuer et continuera, et des mesures seront prises une fois que les modifications législatives appropriées auront été faites.


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(1150)

Nous désirons assurément appliquer tous les changements nécessaires pour faire en sorte que le Canada respecte l'Accord international sur les tarifs douaniers et le commerce. Nous prendrons ces mesures. Le ministre de l'Agriculture s'efforce activement de trouver une solution à ce problème en particulier.

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, nous savons tous que le Canada est surtout champion pour négocier ces accords à l'extérieur du pays.

Ce qui semble poser un problème, d'après ce que beaucoup de gens d'affaires canadiens ont fait savoir, ce sont les barrières commerciales interprovinciales et les taxes élevées, ici, au Canada. Le député peut-il me dire ce qu'il pense des barrières commerciales interprovinciales que nous avons dans notre pays?

M. Kirkby: Monsieur le Président, l'existence de barrières commerciales interprovinciales est certainement une question très importante que nous devons examiner. Comme le député le sait, le ministre de l'Industrie a déjà, de concert avec ses homologues provinciaux, pris des mesures pour réduire ces barrières. Ces mesures ont donné lieu à un accord qui a été signé et convenu au cours de l'été dernier.

C'est aussi un élément qui revêt beaucoup d'importance pour plusieurs autres ministres, en particulier le ministre du Développement des ressources humaines, qui préconise depuis de nombreuses années des liens économiques beaucoup plus étroits entre les provinces de l'Ouest, pour réduire les barrières au commerce interprovincial.

Il faudra faire un effort constant pour que ces barrières soient éliminées de façon intelligente. Nous sommes déjà en bonne voie d'y parvenir. C'est un début, mais nous devrons continuer de chercher à réduire ce genre de barrières qui entravent notre croissance économique et nuisent à notre compétitivité sur la scène internationale, afin que nos entreprises établies aux quatre coins de notre grand pays soient plus compétitives et plus en mesure d'affronter la concurrence mondiale. L'atteinte de cet objectif aura ensuite d'importantes retombées économiques positives, partout au Canada.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi C-57, Loi de mise en oeuvre de l'Accord sur l'Organisation mondiale du commerce, une extension de l'accord de l'Uruguay Round.

Il est approprié que nous examinions les raisons pour lesquelles il est nécessaire de libéraliser le commerce. À mesure que le monde a évolué, divers pays ont bien sûr créé des barrières commerciales. Dans notre pays, nous avons eu recours à toutes sortes de mesures tarifaires pour protéger l'industrie locale.

Ce qui se produit en fait dans le monde, c'est que nous appuyons et protégeons des industries bien souvent inefficaces. Autrement dit, si quelqu'un en Afrique est mieux placé pour fabriquer quelque chose nous devrions le laisser faire et nous concentrer sur les secteurs où nous avons un avantage comparatif, comme l'industrie des pâtes et papiers. C'est ce qui fait l'avantage de la libéralisation du commerce.

Il est important que le Canada se rende compte que la libéralisation du commerce permet de rendre le mécanisme des échanges plus efficace et aussi d'accroître le volume des échanges qui se font dans le monde, ce qui signifie pour notre pays une part d'une assiette plus grande. Nous nous en porterons donc tous mieux. Essentiellement, il y a tout à gagner à libéraliser le commerce.

Autre fait à signaler dans notre économie et en fait dans le monde, la vogue des grosses sociétés est finie. Des pressions sont faites sur les grosses sociétés en Amérique du Nord, en Europe et dans d'autres pays industrialisés afin de les amener à réduire leurs effectifs, à réduire leur taille et à être plus efficaces et plus efficientes pour se tailler une place dans les marchés à créneaux chez elles. Deux facteurs importants pour le Canada.

(1155)

Le Canada s'est beaucoup concentré sur le secteur des matières premières. Je pense notamment aux mines de fer, à l'acier et aux produits forestiers. Toutes ces industries semblent essentiellement sur le déclin. Quand je dis déclin, j'entends par là que nous devons ajouter de la valeur à nos produits. Cela pour être plus efficace et pour attirer le commerce mondial. Il ne suffit plus, par exemple, de vendre nos billes à l'état brut à la Chine. Nous devons les transformer dans notre pays.

Mon collègue a parlé plus tôt de l'industrie céréalière. Il est important que nous ajoutions de la valeur aux produits des Prairies avant l'exportation.

En outre, le Canada est reconnu comme étant un pays qui a des alliances commerciales bien précises. La première alliance fut conclue avec le Royaume-Uni, mais depuis un siècle, nous commerçons surtout avec les États-Unis. Nous voyons le Canada comme un pays commerçant d'envergure internationale mais en réalité, 90 p. 100 de nos échanges commerciaux se font avec les États-Unis. Le Canada n'est pas vraiment un pays commerçant d'envergure internationale. Il se limite plutôt au contexte nord-américain.

Nous devons mettre un terme à cette situation. Nous devons nous tourner vers le marché mondial et trouver d'autres débouchés commerciaux, et cela pour plusieurs raisons. La croissance du marché américain pourrait ne pas être aussi rapide que celle d'autres marchés, comme le sud-est asiatique, peut-être l'Europe et, qui sait, les pays d'Europe de l'Est. La prospérité économique du Canada pourrait en venir à dépendre de ces partenaires commerciaux.

L'Organisation mondiale du commerce ouvre une porte au Canada, elle lui offre une chance de faire quelque chose de différent, de pratiquer le commerce différemment. À l'aube du XXIe siècle, je crois que le moment est venu d'examiner notre politique industrielle et les changements que nous pouvons y apporter.

Je parlais de la petite et moyenne entreprise, un secteur qui connaît une croissance rapide et qui pourrait exploiter le marché mondial. Je pense, notamment à l'industrie de la recherche biomédicale, à l'élaboration de logiciels, aux télécommunications, au génie géomatique, des secteurs d'activité où le Canada excelle. Un des problèmes réside dans le fait que les Canadiens ne sont pas conscients de leurs compétences et ne se rendent pas


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compte que d'autres pays voient le Canada comme un leader mondial dans certains de ces domaines.

Les cheminées d'usine sont de moins en moins actives en Amérique du Nord. L'économie fondée sur cette industrie est en régression. Dans un ouvrage publié récemment, Nuala Beck écrit qu'il y a en Colombie-Britannique davantage de travailleurs dans le secteur des communications et des télécommunications que dans l'exploitation forestière. En Nouvelle-Écosse, l'éducation compte davantage de travailleurs que les pêches, la foresterie et la construction réunies. C'est le signe que les choses changent au Canada.

Comment le gouvernement peut-il faciliter ce processus et faire du Canada un véritable pays commerçant à l'échelle mondiale? La petite et moyenne entreprise sera le moteur de l'économie de demain et la matière grise lui servira de combustible. Ce secteur d'activité sera dirigé par une nouvelle catégorie d'entrepreneurs, qui seront les nouveaux employeurs et qui créeront la richesse. Statistique Canada a publié récemment des données qui montrent que la croissance de la création d'emplois dépend presque entièrement de sociétés comptant moins de 50 employés, alors que celles qui en comptent davantage perdent des emplois. Quand on parle de création d'emplois, une chose qui tient à coeur à notre gouvernement, il faut voir où les emplois sont créés. Chez nous, c'est dans la petite et moyenne entreprise. La croissance de l'emploi dans ce secteur est en moyenne de 3 à 10 p. 100 par année.

Le Canada a toujours été un pays commerçant. Trente pour cent de notre produit intérieur brut dépend du commerce et la majeure partie de nos échanges commerciaux passe par quelques sociétés seulement. Or, ces entreprises, dont beaucoup sont de vieilles sociétés industrielles, réduisent leurs effectifs.

Nous devons prendre un nouvel élan et aider la petite et moyenne entreprise à percer sur les marchés internationaux. Le gouvernement peut jouer un rôle de premier plan à cet égard; d'ailleurs, les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international ont mis en oeuvre de nouvelles initiatives avec la collaboration des banques canadiennes qui sont présentes presque partout dans le monde.

(1200)

On prévoit et met en place ce qu'il faut à ces industries, de petites et moyennes entreprises, pour avoir un accès efficace au commerce international. On leur donne des séances de formation dynamiques. On élabore de nouvelles méthodes intuitives pour financer le commerce d'exportation du secteur des PME. On entend redéfinir la Société pour l'expansion des exportations ainsi que la Corporation commerciale canadienne pour les doter de nouveaux instruments afin qu'elles puissent fournir du financement et de l'aide aux PME qui tentent de percer sur les marchés internationaux.

Nous devons en outre restructurer nos missions à l'étranger. Au début de mai, je suis allé à Beijing et j'ai visité notre ambassade. L'attitude de certains employés m'a surpris. Ils semblaient devoir rester tout le temps sur la scène internationale. Ils comptaient quitter la Chine pour aller en Afrique, mais sans rentrer au Canada. Franchement, leur attitude à l'égard du Canada m'a froissé. Il faut qu'il y ait un changement parce que ces gens doivent s'intéresser davantage au fait que notre commerce doit progresser grâce aux PME et non grâce aux multinationales comme IBM.

Comme on le sait, monsieur le Président, le premier ministre et d'autres membres de l'Équipe Canada sont allés en Chine. Je voudrais ajouter une observation sur ma propre mission. Je signale en passant que la Chine n'est pas un pays signataire du GATT, mais elle devrait l'être sous peu. Pendant mon séjour à Beijing, j'ai pu établir des contacts pour certains de mes électeurs. Or, j'apprends maintenant que la municipalité de Whitby a conclu une alliance économique avec une province chinoise. C'est une province qui compte 85 millions d'habitants. Quelques petites et moyennes entreprises de Durham y font du commerce à l'heure actuelle. Cela a créé des emplois. C'est ce qui arrive maintenant. Ce n'est pas une simple vue de l'esprit.

Les gouvernements sont parfois les pires ennemis des petites et moyennes entreprises. Par exemple, les petites et moyennes entreprises doivent affronter des taxes d'affaires élevées, des normes et des règlements provinciaux nombreux et, bien sûr, la terrible TPS et des impôts élevés, tant sur le revenu des particuliers que sur celui des sociétés.

Le déficit nous écrase. De ce fait, les marchés de capitaux sont tellement achalandés que les gens qui veulent lancer des petites ou moyennes entreprises n'y obtiennent pas les capitaux dont ils ont besoin pour ce faire. Ce que nous pouvons faire de mieux pour les petites et moyennes entreprises, c'est de réduire nos déficits et nos emprunts de façon que les marchés de capitaux soient ouverts aux futures petites et moyennes entreprises.

Il y a des choses que notre gouvernement a faites. Il y a la Loi sur les prêts aux petites entreprises, les programmes d'aide en matière de capital-risque, mais nous pouvons faire beaucoup plus.

Je regrette que les petites et moyennes entreprises de notre pays n'aient pas accès aux marchés de capitaux dont elles ont besoin. Il faut créer un marché hors bourse pour les petites et moyennes entreprises, un marché qui soit plus facile d'accès que la Bourse de Toronto, qui exige cinq années d'états financiers et une feuille de route plutôt imposante, ou que la Bourse de Vancouver que beaucoup d'investisseurs canadiens craignent un peu.

Ce qu'il nous faut, c'est une réglementation qui permette à M. Tout-le-monde d'investir dans des CPG, d'investir dans les petites et moyennes entreprises s'il le désire.

Bref, ce sont les petites et moyennes entreprises, avec les négociations du GATT et le projet de loi C-57, qui vont assurer l'avenir du Canada, qui vont le faire entrer dans le XXIe siècle.

Le président suppléant (M. Kilger): Je ne veux pas prendre qui que ce soit par surprise, mais il est évident que la présidence ne peut pas accorder la parole à un député à moins qu'il ne se soit levé.


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[Français]

Je veux simplement que les députés sachent que la Présidence ne peut donner la parole à qui que ce soit à moins que le député ne soit debout.

Laissez-moi expliquer un peu plus à fond, peut-être. La Présidence accepte que la liste soit un outil qui puisse nous servir et, effectivement, elle nous sert de temps à autre.

[Traduction]

Si quelqu'un d'autre demandait la parole, je n'hésiterais pas à la lui accorder. C'est à moi qu'il incombe de protéger les privilèges et les droits de tous les députés et je n'hésiterais pas à accorder la parole à un député debout à sa place.

(1205)

Cela ne devrait étonner personne. Je ne fais pas de reproche et je ne veux pas angoisser qui que ce soit, mais il est évident que le débat doit se faire selon certaines règles et j'estime que nous touchons ici à une règle capitale pour le bon déroulement de nos travaux.

[Français]

M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, je m'excuse. C'est dû à mon manque d'expérience. Je croyais que vous alliez me nommer au début. Je vous promets que je serai là la prochaine fois.

J'interviens aujourd'hui dans le cadre du débat en troisième lecture du projet de loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, ou le GATT.

Nous sommes au lendemain de la défaite de deux motions d'amendement au projet de loi présentées par deux de mes collègues du Bloc québécois, la députée de Laval-Est et le député de Longueuil.

La première motion, présentée par la députée de Laval-Est, visait à établir un processus de consultation obligatoire avec les provinces, lorsque la mise en oeuvre de l'accord porte sur un sujet relevant de la compétence législative des provinces en matière de résolution des différends commerciaux, ou lorsqu'il s'agit de sujets d'intérêt économique majeur sur le plan international. Cette motion visait aussi à faire en sorte que l'accord préalable des provinces soit essentiel avant d'autoriser une modification relativement au mécanisme d'allocation des contingents tarifaires, de même qu'avant d'établir ou de mettre en oeuvre des politiques relatives au mécanisme de sélection de nos partenaires commerciaux pour l'accès au marché canadien.

Par cette même motion, nous souhaitions de plus que, à l'égard des exportations subventionnées, le ministre du Commerce international tienne compte en tout temps des actions prises par les compétiteurs étrangers dans les secteurs en cause. Enfin, cette première motion visait à faire en sorte que le ministre prenne des mesures à l'égard des produits agricoles importés, qui sont en dehors du contingent tarifaire, en cas de pénurie de ces produits sur le marché intérieur, afin d'assurer que ces produits ne soient pas importés à des prix inférieurs aux prix en vigueur au pays.

La deuxième motion, présentée par le député de Longueuil, s'inscrivait dans cet esprit de transparence et d'indispensable reddition de comptes qui devrait tous nous gouverner aujourd'hui. Nous souhaitions amender le projet de loi afin que le ministre du Commerce international soit tenu de déposer chaque année devant la Chambre des communes un rapport tenant compte des priorités identifiées par le comité de la Chambre des communes habituellement chargé des questions relatives aux affaires extérieures. Cette obligation ministérielle devait concerner la mise en oeuvre de l'accord au Canada, les obligations et les engagements commerciaux pris au niveau international par les partenaires commerciaux d'importance du Canada, dont tout particulièrement les États-Unis, et enfin les impacts de l'accord sur les travailleurs et les entreprises canadiennes.

Malheureusement pour les provinces, pour la population, pour les contribuables et pour la démocratie, ces deux motions ont été rejetées par la majorité silencieuse du gouvernement libéral. Le projet de loi aurait pourtant bénéficié de ces deux amendements. Mais que ce soit pour ceux-là ou pour tous les autres, il ressort du présent exercice que le gouvernement fédéral n'est absolument pas disposé à ce qu'un véritable débat se tienne sur la question; un débat serein, une consultation propre à enrichir le projet qui se trouve devant nous. Tout ce qu'il veut, c'est que cet engagement, aussi volumineux par sa forme que lourd de conséquences sur le plan économique, soit passé à toute vapeur sous son rouleau compresseur.

(1210)

Il y a des gens ici qui ont de la mémoire et qui vont se souvenir de cet écart parlementaire et de bon gouvernant. Nous allons nous souvenir des conditions déplorables qui entourèrent l'adoption de cette loi fondamentale. Car, si cette loi ne semble constituer qu'un geste accessoire, qu'une rectification législative de l'accord signé par le Canada, à Marrakech, le 15 avril 1994, les détails de cet accord auront des conséquences encore méconnues pour plusieurs.

Des impacts sont peut-être même encore insoupçonnés par les spécialistes en la matière. Du simple fait de ne pas vouloir aller vers les gens qui vivent sur le terrain une économie de marché, de ne pas vouloir entendre leurs représentants, de ne pas vouloir écouter le gros bon sens et de s'en tenir qu'aux chiffres et qu'à la macroéconomie, le gouvernement s'écarte intentionnellement de ces lumières, au risque de plonger ce pays encore un peu plus profondément dans le gouffre de la crise financière. Le gouvernement manque à ses responsabilités en passant à toute vitesse le projet de loi C-57.

Mes collègues l'ont déjà bien expliqué, le Québec est un tenant du libre-échange et des accords commerciaux internationaux. Comme le disait si bien le député de Rosemont, il s'agit même d'une manière fort élégante de confirmer les souverainetés des pays signataires, autant que d'assurer leurs associations dans cette mondialisation des marchés et des économies. Un Québec souverain ne perdrait pas de temps à être reconnu membre de l'Organisation mondiale du commerce, en vertu de l'article XVI(5)c) du GATT. Il en résulterait une incontournable


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association commerciale avec tous les pays membres de l'accord, dont le Canada.

Je ne suis pas un savant dans ce domaine fort complexe du commerce international. Ce que je sais cependant, c'est qu'il est profitable que les peuples du monde entier s'entendent afin d'équilibrer les relations entre les marchés respectifs, dans un esprit de respect mutuel. Mais comme le dirait Gilles Vigneault, la complexité du commerce international dépasse de sept brasses en profondeur le mystère de la Sainte Trinité. Le commun des mortels a plus souvent qu'autrement peine à s'y retrouver. C'est pourquoi il m'apparaît opportun d'illustrer l'impact de la mise en oeuvre de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce à l'aide d'un exemple concret et bien terre à terre. J'ai nommé le cas du poulet.

Le Canada est signataire de l'Accord de libre-échange avec les États-Unis et de l'Accord de libre-échange nord-américain, ou l'ALENA. L'article 706 de l'Accord de libre-échange prévoit que si le Canada maintient ou instaure des restrictions quantitatives à l'importation de produits de poulet, il devra permettre leur importation jusqu'à un contingentement équivalent à 7,5 p. 100 de la production nationale de poulet au Canada. L'ALENA s'accorde sur le même principe que celui de l'Accord de libre-échange en cette matière.

Pour l'année 1994, le contingent de poulet importable au Canada se chiffre à 46 488 000 kilogrammes. Sous cette barrière nationale et annuelle, il est possible pour un importateur d'obtenir sur demande des licences d'importation de poulet. Ce contingent paraît bien suffisant cette année, puisqu'au 25 octobre dernier, les licences d'importation accordées n'atteignaient que 76 p. 100 du contingent établi.

Les négociations de l'Uruguay Round ont mené à la transformation des mesures de contingentement des produits agricoles en milieu tarifaire. C'était une manière d'appliquer l'article XI du GATT. Cette entente a conduit le Canada à soumettre au GATT, le 15 décembre 1993, la liste des tarifs qui remplaceront les quotas agricoles. Selon cette grille tarifaire, les importations de poulet au-delà du quota établi selon les accords de libre-échange passeront cette fois les douanes, mais à 280 p. 100 de sa valeur, un tarif élevé qui est censé protéger les producteurs québécois et canadiens pour plusieurs années.

(1215)

Cette barrière tarifaire doit, toujours selon l'entente, régresser d'au moins 15 p. 100 au cours des six prochaines années. Il s'agit donc d'un nouveau régime de protection. Le contingentement qui laissait passer ou non les produits du poulet selon les quotas établis à 7,5 p. 100, se voit maintenant substitué par un contingentement tarifaire.

Cette nouvelle formule prévoit toujours le principe de contingentement, mais toute demande d'importation au-delà du quota se verra dorénavant attribuer un tarif de 280 p. 100 de la valeur marchande. Vraisemblablement, ce nouveau système de contingent tarifaire, ou CT, sera en place dès janvier prochain.

Le poulet demeurera sur la liste des marchandises d'importation contrôlée établie en vertu de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation, de sorte que toutes les importations nécessiteront une licence. Cette évolution du système de protection du marché intérieur, dans un contexte paradoxal de libre-échange, n'est pas sans causer certaines frictions avec notre grand voisin. Les États-Unis prétendent que le Canada, en introduisant de nouveaux tarifs dans les échanges bilatéraux, contrevient directement à ses obligations en vertu de l'ALENA. Une interprétation stricte de cet accord en fonction de son article 302 montre que le Canada doit abolir tous ses tarifs envers les États-Unis avant la fin de 1998, et qu'aucun nouveau tarif ne doit être imposé à l'un ou l'autre des partenaires. Si tel était le cas, la production du poulet ne serait ainsi plus protégée.

La position canadienne prétend, de son côté, que le GATT doit prévaloir sur l'ALENA. L'article 309 de l'ALENA reconnaît d'ailleurs au Canada le droit d'invoquer l'article XI du GATT ou toute mesure qui le remplacerait pour protéger son industrie agricole. C'est un débat qui demeure à être entendu.

Pour ce qui concerne le marché du poulet, force est de reconnaître que la situation ne change pas de manière dramatique. Alors que nous n'avions qu'un quota strict, nous n'aurons par cette loi qu'un quota augmenté d'une tarification très pesante. Ce qui dérange notre aile parlementaire, si j'ose m'exprimer ainsi, ce sont les clauses traitant des cas de pénurie.

Nous savons en effet que les exigences sur les produits du poulet sont de plus en plus élevées. Que ce soit du poulet vivant, éviscéré, défait en partie, désossé ou transformé, nous sommes devant des produits de plus en plus diversifiés et exigés tels quels. Malgré un contingent dont la barre semble être placée très haut, certains besoins, notamment en matière de restauration, requièrent des produits qui peuvent paraître en situation de pénurie. À cet égard, le projet de loi C-57 laisse l'entière discrétion au ministre de déterminer l'accès et le tarif en conséquence pour les produits jugés en situation de pénurie.

À l'instar de la Fédération canadienne de l'agriculture, le Bloc québécois aurait souhaité que le ministre soit tenu de prendre des mesures en cas de pénurie, afin d'assurer que les produits importés ne soient pas à des prix inférieurs aux prix en vigueur sur le marché intérieur. Le pouvoir discrétionnaire du ministre demeure une méthode de cas par cas propre à laisser passer du favoritisme, sinon à ne pas donner des règles standard égales et justes. Cela sans compter le découpage territorial qu'établit ce projet de loi, un découpage en régions, qui vient confirmer toute la disparité de ce beau Canada. L'union de ce pays n'existe que dans son opposition au Québec.

Il en résulte une certaine inquiétude. Comment assurer une saine protection de notre industrie agricole, tout en assurant un approvisionnement continu à travers la production assez diversifiée de cette industrie? C'est la question que se posent bon nombre de commerçants qui dépendent de produits de transformation.

L'application de cette loi nous permettra sans doute de nous faire une idée claire sur cet enjeu au cours des mois à venir. Comme le dit le préambule du projet de loi, le commerce entre les pays doit être libre, équitable et ouvert pour garantir l'avenir économique de ces pays, et pour s'assurer la compétitivité et le développement durable à long terme.


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L'expansion du commerce contribue à la création d'emplois, réhausse le niveau de vie, permet d'offrir de meilleurs choix aux consommateurs et renforce l'union économique des peuples.

(1220)

Un régime commercial multilatéral, basé sur des conditions d'accès au marché mutuellement convenues et sur des règles commerciales non discriminatoires, applicables à tous, est la pierre angulaire de toute politique commerciale moderne et ouverte sur le monde.

Les accords commerciaux issus des négociations commerciales multilatérales du cycle de l'Uruguay créeront un environnement commercial international beaucoup plus ouvert et stable pour l'agriculture, les ressources, le secteur manufacturier, les services, la technologie et l'investissement du pays. L'Organisation mondiale du commerce permettra la gestion intégrée du nouveau système renforcé de commerce multilatéral, notamment en ce qui a trait au règlement des différends commerciaux.

L'OMC, successeur du GATT, servira également de forum pour les futures négociations commerciales destinées à poursuivre la libéralisation des échanges à l'échelle planétaire et à établir de nouvelles règles commerciales mondiales. Dans cette perspective, il faut faire concorder la législation canadienne. C'est pourquoi ce projet de loi, qui apporte des modifications à quelque 31 lois actuellement en vigueur, va donner effet à l'accord sous l'Organisation mondiale du commerce, sur le territoire canadien.

L'avenir des peuples de ce monde passe par leur entente économique. C'est la raison pour laquelle nous ne sommes absolument pas inquiets par rapport aux liens incontournables qui associent, bon an mal an, les citoyens de Terre-Neuve avec les citoyens de Vancouver, ceux de Québec avec ceux de Los Angeles, ceux d'Halifax avec ceux de Miami. L'identité, l'authenticité, les nécessaires différences qui nous enrichissent ne sont pas des barrières, mais des ponts qu'il faut savoir passer entre les femmes et les hommes de tout âge et de toute culture.

Reconnaître ses différences n'est pas se replier sur soi-même. C'est au contraire s'ouvrir vers autrui. La légendaire société des nations est toujours une avenue que nous devons rechercher, sans nier l'autre et sans se nier soi-même. C'est dans cet esprit que les accords internationaux de commerce constituent aussi une manière concrète de reconnaître une souveraineté des pays. Soyez assuré, monsieur le Président, que le Québec sera partie prenante de cette réalité internationale. Un Québec souverain sera partie prenante du marché mondial.

En résumé, le Bloc québécois appuiera ce projet de loi. Malgré le rejet des amendements que nous avons proposés, malgré quelques réticences aussi, nous savons que l'avenir des peuples passe par leurs ententes réciproques. Nous nous accordons avec les grands principes qui sous-tendent ce projet de loi. La mise en oeuvre de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce est nécessaire et souhaitable.

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté le député avec beaucoup d'intérêt. Je comprends qu'il se dise préoccupé par l'adaptation que les industries devront faire pour passer au régime de libre-échange.

J'ai une question à poser au député: que préfère-t-il? L'élimination graduelle des tarifs sur une période de dix ans, comme le prévoit l'ALENA, ce qu'il a mentionné, ou le système du GATT qui prévoit la réduction des tarifs sur une certaine période? Lequel est préférable pour le secteur de sa province protégé par le système de gestion de l'offre dont il a parlé? J'aimerais qu'il donne une réponse.

[Français]

M. Godin: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de cette question. Je ne suis pas un spécialiste dans le domaine, et de plus, il faut comprendre que l'application dans ce domaine est assez récente. Il est assez difficile pour moi de dire exactement ce qui est bon ou ce qui devrait être soit un contingentement ou le système tarifaire.

Encore la semaine passée, chez moi, dans mon comté, c'était la question du poulet qui impliquait les commerces.

(1225)

Un commerçant est venu me voir à ce sujet. Encore là, c'est assez difficile de déterminer précisément ce qui est ou serait avantageux dans l'avenir, soit tarifaire ou contingentement. Pour le moment, je pense, dans le cas du poulet, naturellement, que le commerçant cherche toujours à aller chercher le moindre prix du produit, puis, naturellement, bien souvent il ne s'arrête pas à nos producteurs comme tels. Je pense que c'est un équilibre qu'il va falloir trouver et c'est tout simplement le temps qui va nous le dire.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté le député avec intérêt, surtout lorsqu'il a parlé de la gestion de l'offre.

J'aimerais approfondir certains points. Le député se dit préoccupé par la mise en oeuvre de l'accord du GATT, il se dit inquiet de la portée des accords de libre-échange, que ce soit le GATT, l'ALENA ou l'ALE. Le Canada a une perception de ces accords et les États-Unis en ont une autre. Il est évident qu'il s'agit d'une question très importante.

Cependant, je demande ceci au député: si le Québec se séparait l'an prochain ou un peu plus tard, quel tort subirait, à son avis, le secteur de l'économie québécoise protégé par la gestion de l'offre? Par exemple, l'industrie laitière québécoise perdrait certainement la moitié de son marché presque du jour au lendemain puisque le Québec, avec seulement 25 p. 100 de la population canadienne, occupe près de 50 p. 100 du marché. Il ne fait aucun doute que le reste du Canada ne serait pas prêt à absorber la production excédentaire québécoise.

J'aimerais que le député nous dise quelques mots sur le tort que la séparation ferait subir au Québec en comparaison du tort


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que pourrait lui faire subir la mise en oeuvre de l'accord du GATT et d'autres accords.

[Français]

M. Godin: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. Ce qu'il faut comprendre lorsqu'on parle de souveraineté, c'est que si le Canada était un pays complètement autosuffisant, peut-être qu'il pourrait forcer ou dicter des choses au Québec. Mais je pense que le Canada comme tel c'est un pays qui, comme le Québec, doit avoir recours aux marchés extérieurs, et je suis persuadé dans ce domaine que le Québec va tout simplement très bien s'en tirer dans ce grand commerce international qui va être de plus en plus régi par ces traités.

Pour mieux répondre à mon collègue, je pourrais lui suggérer de se référer au débat que présentait mon collègue de Rosemont, le 1er novembre. Je pourrais le citer en disant ceci:

C'est très largement une question de droit international, un droit dont le ministre a applaudi, aujourd'hui, l'élargissement et le renforcement. En effet, l'article XXVI(5)c) du GATT prévoit qu'un nouvel État, issu d'une partie du territoire d'un État déjà membre du GATT devient automatiquement lui-même membre du GATT à la date de son accession à la souveraineté, s'il en fait la demande et s'il accepte les conditions et les exigences applicables à l'État dont il dépendait auparavant. C'est fort simple et très clair. D'ailleurs, dans une étude publiée par le C.D. Howe Institute, la plupart des grands spécialistes canadiens de cette question ont parfaitement reconnu cette réalité.
Tout simplement, le Canada va respecter, va travailler en fonction du Québec comme il travaille en fonction de tous les autres pays souverains.

[Traduction]

M. Benoit: Monsieur le Président, je voudrais un peu plus de détails à ce sujet. Je crois qu'il est très important que les producteurs laitiers et les agriculteurs du Québec dans les secteurs assujettis à la gestion de l'offre examinent cette question. C'est extrêmement important.

(1230)

Je voudrais demander au député de donner un peu plus de détails à ce sujet. Premièrement, le Québec n'est évidemment pas signataire du GATT ni des accords de libre-échange. Ces accords ne s'appliqueraient pas si le Québec se séparait. C'est la première chose à considérer.

Deuxièmement, il n'existe dans le droit international aucun précédent qui pourrait s'appliquer à la séparation volontaire du Québec. Il n'en existe aucun.

Je voudrais que le député explique comment il peut dire honnêtement aux producteurs laitiers du Québec qu'il n'y aura pas de problème majeur du point de vue de l'accessibilité des marchés ni du point de vue des prix qui, du jour au lendemain, tomberont au niveau des prix mondiaux au lieu de rester au niveau des prix artificiellement élevés fixés dans le cadre du système de la gestion de l'offre au Canada.

[Français]

M. Godin: Monsieur le Président, je pense que je n'ai peut-être pas été compris tout à l'heure. Si le député voulait se référer au journal des débats du 1er novembre, mon collègue de Rosemont a très bien répondu à cette question, et vous allez le retrouver automatiquement. Cela fait partie de la procédure du GATT, à l'alinéa XVI(5)c). Je pourrais relire ce passage, mais ce que j'ai dit tout à l'heure, c'est qu'un nouveau pays issu d'un pays qui a déjà signé le GATT n'aurait qu'à faire une demande pour être automatiquement accepté.

Deuxièmement, il faut comprendre une chose, c'est que, dans le commerce, c'est donnant donnant. Il ne faut pas essayer de faire peur à tout le monde en nous faisant accroire que le lait qu'on vend au Canada anglais, du jour au lendemain, on ne l'achètera plus.

Il faudrait reconnaître aussi que l'Ouest canadien vend à la province de Québec pour 600 à 800 millions de boeuf. Or, en ce qui concerne le commerce qui se fait présentement entre le Québec et le Canada anglais, je pense qu'on n'élève pas du boeuf là-bas tout simplement pour venir en aide au Québec. On élève du boeuf parce qu'il y a des profits à faire. Et pourquoi le vend-on au Québec au lieu d'un peu partout? Parce que vous avez l'avantage de vendre ici au Québec; c'est là qu'est votre client.

Or, je pense que ce sera donnant donnant, à ce moment-là. Si vous refusez d'acheter le lait du Québec, peut-être qu'il faudrait envisager de vendre votre boeuf ailleurs.

[Traduction]

M. Benoit: Monsieur le Président, lorsque le député compare les industries assujetties à la gestion de l'offre, où les prix sont artificiellement élevés, à l'industrie du boeuf, personne n'est dupe. Il est évident que le boeuf se vend partout aux prix mondiaux, y compris au Canada. Le Québec n'occupe plus la place qu'il occupait sur le marché canadien du boeuf. Le député essaie de nous duper en essayant de comparer les secteurs assujettis à la gestion de l'offre à celui du boeuf, mais il ne réussira pas.

Je voudrais qu'il réponde à cela.

[Français]

M. Godin: Monsieur le Président, à mon avis, on n'essaie pas de duper personne. Il s'agit tout simplement de la réalité. C'est du commerce. Dans le commerce, que ce soit du lait, du boeuf ou d'autres produits, c'est donnant donnant. On discute et on en vient à une entente: «J'achète ton produit, tu achètes mon produit.»

Maintenant, en ce qui concerne la souveraineté du Québec, je pense que si c'était si néfaste pour les Québécois, je ne vois pas comment il se fait que le Canada anglais se prépare à dépenser des millions et des millions. Déjà, présentement, on se prépare au Québec à présenter 13 émissions, tout simplement pour nous démontrer les avantages d'être dans le Canada.

À l'âge de 14 ans, j'ai eu connaissance de la transaction de vente du commerce de mon voisin. Voici les questions que l'acheteur a demandées: «Ton commerce, veux-tu le vendre?» «Oui.» «As-tu des dettes?» «Non.» «Fais-tu un déficit ou un profit?» «Oui, je fais du profit.» «Combien veux-tu?» Ce sera la même chose pour le Canada. Si le Canada a une dette de 508 milliards et un déficit de 40 milliards, il va falloir mettre tout cela dans la balance. Soyez assuré que si pour le Canada il n'étaient pas intéressant de garder le Québec, on nous laisserait aller beaucoup plus facilement qu'on le fait à l'heure actuelle.


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(1235)

[Traduction]

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais intervenir brièvement ce matin dans le débat sur le projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.

L'Organisation mondiale du commerce dont le Canada devient membre ne fonctionnera que s'il existe chez tous les pays une volonté politique de la faire fonctionner. Les Américains se plaignent d'avoir perdu une partie de leur souveraineté dans le cadre du GATT. Pas de pot! Nous en avons parlé à la Chambre pendant le débat sur l'Accord de libre-échange, et nous n'avons pas obtenu beaucoup de sympathie pour le Canada.

Quand on devient membre d'un organisme mondial, il y a certaines conditions auxquelles il faut consentir et qu'un pays responsable est tenu de respecter. Les pays qui entrent dans l'Organisation mondiale du commerce feraient donc mieux de savoir dans quoi ils s'engagent.

Ce n'est pas parce que nous tenons ce débat à la Chambre et que nous adoptons la mesure à l'étude que nous n'aurons pas de problèmes. Mais l'accord présentera également de nombreux côtés positifs.

Il y a une chose qui me dérange vraiment, et je veux revenir ici sur un élément de l'excellente intervention que le député de Malpèque a faite il y a quelques jours. Il a parlé des pressions que les milieux d'affaires exerçaient sur le Congrès américain. Dans le contexte d'aujourd'hui, avec un Congrès à majorité républicaine et un président démocrate, le phénomène doit être encore plus fort qu'il y a quelques mois.

Un mémoire présenté au Congrès américain par les milieux d'affaires affirmait simplement ceci: «La seule façon pour des organismes internationaux comme l'Organisation mondiale du commerce de prendre de la force, c'est d'en enlever aux pays membres. Voilà exactement ce que fait l'Organisation mondiale du commerce. Cet organisme donne lieu en effet à une discrète prise de pouvoir d'une ampleur sans précédent de la part de bureaucrates internationaux. Elle réduit la souveraineté des États-Unis. Elle déplace le contrôle sur un système commercial mondial des pays développés vers les petits pays non développés. Plus grave encore, elle crée une autocratie internationale qui empiète sur les institutions démocratiques des États-Unis.» Voilà le genre de pression que le monde américain des affaires exerce sur le Congrès des États-Unis.

Voyons un instant ce que prévoient le projet de loi du Sénat et celui de la Chambre des représentants pour la mise en oeuvre de cet accord concernant l'Organisation mondiale du commerce.

Voici ce que stipule l'alinéa 102(a)(1): «La loi des États-Unis l'emporte en cas d'incompatibilité. Les dispositions de tout accord de l'Uruguay Round, et leur application à qui que ce soit ou à quelque circonstance que ce soit, qui sont incompatibles avec une loi des États- Unis sont inopérantes.» Dans ces conditions, comment donc les États-Unis peuvent-ils signer l'accord concernant l'Organisation mondiale du commerce? Ils disent qu'ils ne le respecteront pas avant même que de l'avoir accepté.

Voici maintenant ce qu'affirmait Mickey Kantor, le représentant au commerce des États-Unis auprès de l'Organisation mondiale du commerce: «Notre souveraineté se trouve davantage protégée sous le régime de ce nouvel accord qu'elle ne l'a été depuis 47 ans dans le cadre du GATT.

(1240)

Larticle 102 de la mesure de mise en oeuvre est clair: en cas de divergence entre l'accord de l'Uruguay Round ou un de ses règlements d'application et une loi américaine, c'est celle-ci qui l'emporte.»

Ce sont là des propos que nous connaissons fort bien. Je me souviens distinctement, comme d'autres députés, de les avoir entendus aux Communes pendant le débat sur l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis: la loi américaine l'emporte.

Ce sont là des préoccupations dont il faut tenir compte dans le débat sur le projet de loi. Je reviendrais à mon affirmation initiale: l'Organisation mondiale du commerce ne donnera rien à moins que tous les pays signataires de l'accord n'aient la volonté politique de la faire marcher.

Je voudrais vous parler, à titre d'exemple, d'une loi américaine qui a été adoptée en 1930, juste après le début de la grande récession. Elle porte sur les produits importés aux États-Unis. Prenons comme exemple les allumettes Eddy. Si le paquet d'allumettes portait le nom d'un restaurant, l'indication «Fabriqué au Canada» devait figurer immédiatement sous ce nom. S'il y avait le nom d'un autre restaurant, comme dans le cas d'une chaîne, par exemple, la mention «Fabriqué au Canada» devait venir tout de suite après, dans un caractère de même taille. Toutes les lettres devaient être de la même taille.

Lorsque cette exigence n'était pas satisfaite, on arrêtait les camions à la frontière américaine. Or, 62 ans plus tard, en 1992, des camions ont été arrêtés à la frontière parce que la mention «Fabriqué au Canada» ne figurait pas au bon endroit sur le paquet d'allumettes, conformément aux exigences des Douanes américaines. Les Américains voulaient faire des difficultés, ils cherchaient les moyens de bloquer l'entrée des produits canadiens. Si c'est ainsi que les Américains entendent procéder, comment les autres pays du monde peuvent-ils avoir droit à un juste traitement, avec semblables politiques?

L'une des façons dont le Canada peut profiter de la nouvelle Organisation mondiale du commerce est de suivre l'excellent exemple donné par le premier ministre du Canada, neuf premiers ministres provinciaux et environ 375 hommes et femmes d'affaires qui se sont lancés à l'attaque de la Chine, bien amicalement, en s'appuyant sur nos relations qui remontent à plusieurs dizaines d'années. La délégation, qui s'est également rendue à Hong Kong et dans d'autres pays d'Asie, a remporté un succès phénoménal. Nous pourrions employer la même méthode dans d'autres régions du monde. Nous devrions cibler les pays qui sont en train de se doter d'une classe moyenne importante, comme c'est maintenant le cas dans de nombreux pays asiatiques.

Il y a là-bas une classe moyenne considérable qui va être en mesure de faire du commerce avec l'étranger. Des gens d'affaires pourraient aller là-bas, discuter avec eux et conclure des accords. La vente de notre technologie présente un excellent


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potentiel. Au fil des ans, le Canada s'est doté d'une excellente base en R-D et en technologie.

Malheureusement, l'industrie privée, au Canada, a l'un des bilans les plus médiocres, parmi les sept pays les plus industrialisés, sur le plan de la recherche et du développement. Pour que l'Organisation mondiale du commerce soit un succès, les entreprises canadiennes vont devoir investir davantage dans la R-D.

(1245)

Si elles ne le font pas, nous finirons par avoir des difficultés au chapitre de la concurrence. Si elles le font, nous pourrons concurrencer quiconque au niveau industriel. La vente de deux réacteurs CANDU à la Chine est un excellent exemple de ce qui peut être accompli.

La classe moyenne y est en expansion. Ce pays progresse très rapidement. Il aura besoin d'énergie sous toutes ses formes. Nous avons la possibilité d'y accroître nos ventes dans l'avenir. Pour les radio-isotopes à des fins médicales, il y a tout un marché qui s'ouvre dans le monde, notamment dans les pays asiatiques.

Il faudra accorder beaucoup d'attention aux pays d'Europe de l'Est. Les économies y sont en très mauvais état. Le reste du monde a intérêt à aider ces pays à se remettre en selle pour qu'ils deviennent aussi de précieux partenaires commerciaux.

En conclusion, j'aimerais lire un passage d'un article paru dans le Globe and Mail du 9 janvier 1992. On y dit ceci:

Alors que les droits de douane continuent de tomber aux termes de l'Accord de libre-échange canado-américain, les exportateurs canadiens déplorent que les États-Unis aient de plus en plus recours aux règles de commercialisation pour faire obstacle aux produits canadiens.
Selon Jim Moore, vice-président des orientations de l'Association des exportateurs canadiens, c'est un facteur de discorde très important. Les États-Unis sont le seul pays à avoir des dispositions exhaustives sur l'indication du pays d'origine.
Si nous voulons traiter avec les autres sur un pied d'égalité, il faut que cela change. Le gouvernement devra, d'une certaine façon, protéger le système de gestion de l'offre qui est très important pour l'agriculture. Nous avons actuellement des droits de douane élevés. Il vaut mieux nous préparer à de dures négociations, car nous voulons que cela reste en place.

Au Canada, l'agriculture est une industrie comme les autres; elle doit être bien gérée et être épaulée par le gouvernement du Canada.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour donner mon avis sur le projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.

Comme je fais partie du comité permanent de la Chambre des communes chargé d'étudier ce projet de loi, je connais l'importance qu'il revêt pour les entreprises canadiennes. Le gouvernement est très conscient de la nécessité de créer un environnement favorable aux entreprises du Canada. Nous savons qu'il est essentiel pour nos entreprises de jouir de tous les avantages possibles pour soutenir la concurrence tant sur le marché intérieur que sur le marché international.

Sur le plan intérieur, le gouvernement s'est efforcé de créer un environnement propice à la création d'emplois et à la prospérité des entreprises. Avec l'aide des provinces, nous avons mis en oeuvre un programme d'infrastructure qui créera 90 000 emplois sur deux ans. Nous travaillons également à l'établissement d'un plan visant à créer un meilleur environnement pour la petite entreprise; ce plan comprend la constitution d'un fonds de roulement pour la croissance, des programmes visant à aider les petites entreprises à prendre de l'expansion et à créer des emplois, l'enregistrement d'un seul numéro d'entreprise pour réduire la paperasserie, la formation des centres d'entreprises à titre de comptoirs uniques pour la prestation de tous les services gouvernementaux, l'incubateur technologique, un outil très important.

Avec la coopération des provinces, nous avons conclu la première entente fédérale-provinciale de l'histoire du pays sur la suppression des barrières commerciales entre les provinces, domaine où il reste encore beaucoup de travail à faire. L'économie canadienne a créé plus de 300 000 emplois dans les neuf premiers mois de l'année, et il s'agit d'emplois à temps plein pour la plupart.

Par exemple, l'augmentation des ventes intérieures et extérieures de l'industrie automobile a incité General Motors à reporter l'abandon progressif des activités de sa fonderie prévue pour décembre dans ma circonscription. La fonderie est un important employeur à St. Catharines. Il s'agit là d'une excellente nouvelle.

Nous savons tous qu'il est important d'aider les entreprises canadiennes à exporter. Le Canada fait partie d'un marché international en expansion constante. Il est donc vital de rendre ce marché accessible aux entreprises canadiennes.

(1250)

Sur le plan économique, le commerce doit constituer une de nos plus grandes priorités. C'est que, au Canada, les exportations permettent de créer un emploi sur cinq. En fait, parmi les pays du Groupe des Sept, le Canada se classe seulement au deuxième rang, après l'Allemagne, pour la dépendance envers le commerce international. L'année dernière, lors de la campagne électorale, le gouvernement avait déclaré dans son livre rouge que la politique commerciale et les relations commerciales revêtaient une importance cruciale pour la réalisation des objectifs socio-économiques du Canada.

Nous avons pris note de l'importance du GATT pour l'accroissement de l'accès du Canada aux marchés internationaux. Nous avons dit clairement que nous étions favorables à un règlement des négociations de l'Uruguay Round, qui se trouvaient dans une impasse.

Le livre rouge traitait également du problème de définition des subventions et du dumping et du fait que le Canada faisait l'objet de tactiques de harcèlement commercial en raison de l'absence de définitions dans les accords commerciaux.

Le règlement des différends est souvent long et coûteux et ne contribue en rien à améliorer le commerce ou les relations entre les pays. J'étais membre du comité mixte spécial chargé d'étudier la politique étrangère du Canada. Il y a quelques semaines, le comité a déposé son rapport, qui souligne la nécessité de créer et de promouvoir une orientation internationale au profit des entreprises canadiennes. Ce rapport indique également que l'Organi-


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sation mondiale du commerce est cruciale pour l'élaboration d'un système commercial international fondé sur des règles et qu'elle devrait constituer une organisation prioritaire pour la participation canadienne. Je suis convaincu que, si le monde peut avoir un système commercial fondé sur des règles, les Canadiens seront en mesure de réussir sur la scène internationale.

Il a fallu sept ans pour mettre fin à l'Uruguay Round, auquel 123 pays ont participé. L'accord qui est intervenu comprend des engagements nationaux pour réduire les tarifs douaniers et les barrières non tarifaires, une réforme complète des règles commerciales et l'élargissement du système commercial mondial pour y englober notamment les services et la propriété intellectuelle.

L'Organisation mondiale du commerce mettra en oeuvre les réalisations de l'Uruguay Round. Cette institution permanente et efficace surveillera la politique commerciale mondiale et réglera les différends multilatéraux entre les pays. Nous assistons au début d'une nouvelle ère commerciale.

Dans le discours qu'il a prononcé à la Chambre le 27 octobre, le ministre du Commerce international a déclaré que l'Organisation mondiale du commerce va enfin donner de solides fondements institutionnels au commerce international en devenant le troisième pilier de la structure financière et commerciale du monde, les deux autres étant la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.

La création de l'OMC est un grand pas dans la direction du commerce multilatéral et aidera les exportateurs canadiens à obtenir leur juste part des marchés étrangers. Cela aura aussi pour effet de créer des emplois et d'élever le niveau de vie des Canadiens.

Un accès accru aux marchés, voilà qui constitue également une bonne nouvelle pour les consommateurs qui se verront ainsi offrir une gamme plus étendue de biens et services de qualité et meilleur marché.

Le Canada doit être un chef de file parmi les pays qui contribuent au développement des organisations mondiales. La semaine dernière, j'ai eu l'occasion de visiter une pisciculture de ma région qui veut exporter du poisson au Japon. Grâce à l'Uruguay Round, les droits de douane ont été réduits de 70 p. 100 dans le cas du Japon. Nous savons depuis belle lurette que les exportations de poisson font l'objet de harcèlement commercial qui prend la forme de droits compensateurs. En vertu du nouvel accord, les exportateurs canadiens peuvent espérer avoir un accès plus sûr aux marchés pour l'exportation du poisson et, du même coup, du bois, du porc et du magnésium, des produits qui ont déjà tous donné lieu à des différends.

Une autre entreprise de ma région aimerait vendre des maisons préfabriquées sur les marchés étrangers. Cet accord fait réaliser des gains fort importants aux exportateurs canadiens de bois et de produits du bois. Des négociateurs intervenant sur nos plus importants marchés étrangers consentent à une réduction progressive variant entre 45 et 50 p. 100 des droits de douane applicables au bois et aux produits du bois sur une période de cinq ans. Dans le secteur des maisons préfabriquées, les droits de douane baisseront dans les pays de l'Union européenne, en Corée et au Japon.

Comme tout le monde le sait, le gouvernement fédéral a récemment organisé un voyage de promotion commerciale à l'intention d'un groupe d'entrepreneurs canadiens, des premiers ministres des provinces et d'autres personnes intéressées. Cette tournée a remporté un vif succès et constitue un excellent exemple du bon fonctionnement de l'Équipe Canada. Les exportateurs canadiens d'aujourd'hui et de demain savent maintenant que le travail d'équipe peut rapporter gros.

(1255)

En conclusion, je voudrais souligner encore une fois que, grâce à un effort de réflexion et à des accords fondés sur des règles, le Canada peut non seulement intensifier ses exportations, mais également jouer un rôle important dans les interventions de l'OMC en vue de seconder certes les grands pays industrialisés, mais plus encore les petits pays moins développés dans leurs efforts pour élargir leurs secteurs.

L'heure est venue pour nous de donner l'exemple aux autres en procédant à la mise en application du GATT selon le plan établi. L'OMC doit remplacer le GATT en 1995. Voilà une étape capitale pour la communauté internationale et le Canada est heureux d'y prendre part. En tant que ministériel et membre du comité chargé d'étudier ce projet de loi, tout comme mes collègues d'en face, je souhaite la mise en oeuvre de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce dans un très proche avenir.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai trouvé les commentaires du député de St. Catharines fort intéressants. Ayant travaillé avec lui à l'examen de la politique étrangère, je sais qu'il appuie le libre-échange et l'institution de l'Organisation mondiale du commerce.

Pourrait-il me dire s'il reconnaît-et je crois que c'est le cas-qu'il y a beaucoup de travail à faire ici pour améliorer le climat qui règne dans les milieux d'affaires, à l'échelle nationale, en ce qui a trait à nos obstacles au commerce intérieur et à la mesure dans laquelle ces obstacles limitent notre capacité de faire des échanges et de donner à nos petites et moyennes entreprises la possibilité de se développer pour qu'elles puissent aussi faire des échanges internationaux?

M. Lastewka: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Peace River. En effet, cela a été un plaisir, pour moi, que de procéder à cet examen avec lui et avec tous nos collègues du Comité des affaires étrangères et du commerce international. Le député a parfaitement raison. Nous avons beaucoup de travail à faire, au Canada, et nous devons travailler non seulement avec les exportateurs actuels, mais aussi avec les autres entreprises qui souhaiteraient exporter leurs produits. Nous devons leur fournir des réseaux de communications beaucoup plus rapides et beaucoup plus faciles à utiliser.

Il y a eu, dans ma région, un comité qui a étudié les différentes régions des États-Unis et du Canada situées le long de la frontière. Il y a beaucoup de zones de libre-échange aux États-Unis qui exportent leurs produits au Canada et dans d'autres pays.

Il faudra que nous examinions-je pense que c'est ce que le gouvernement est en train de faire-de nouveaux moyens de facilliter les choses pour faire en sorte que nos fabricants et nos entreprises soient assujettis aux mêmes règles du jeu que les États-Unis, puisque nous cherchons à exporter chez les Américains, mais aussi à celles de nombreux autres pays du monde. Il


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est très important que nous travaillions avec ces organisations immédiatement.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir parler à nouveau du projet de loi C-57 qui porte mise en oeuvre de l'accord instituant la participation du Canada à l'OMC. En guise d'introduction à certains de mes propos, je voudrais dire que nous, qui vivons dans ce monde en développement et dans un pays comme le Canada, devons nous rappeler que la mondialisation est un élément fondamental de l'évolution de notre univers et du contexte où nous devons maintenant faire des affaires.

Nous devons tous reconnaître que la Communauté européenne, l'Union européenne, est en pleine croissance, qu'elle forme peu à peu une véritable entité, une région du globe qui participe de plus en plus au commerce mondial. Il était intéressant, ce matin, lorsque nous avons parlé au président de la République tchèque, de l'entendre affirmer que son pays était un membre associé de l'UE, de voir à quel point il espérait qu'il en deviendrait un membre officiel et comment il souhaitait aussi que, d'ici la fin du siècle, une grande partie du commerce mondial de son pays se fasse avec cette région.

Il y a aussi, bien entendu, la région Asie-Pacifique et tous les pays dangereusement en développement avancé avec leur puissance et leur force commerciale. Évidemment, les Amériques forment le troisième bloc important du commerce international. Les Canadiens se tromperaient terriblement en ne réalisant pas que nous devons jouer un rôle fort actif au sein de l'OEA et profiter de tout ce que cette participation signifie pour le développement des entreprises et la création d'emplois au Canada.

Bien des gens ont parlé des aspects négatifs, de la possibilité que nous ne puissions pas être suffisamment compétitifs et que nous soyons engloutis par notre gigantesque voisin du Sud. Je ne crois pas que ce soit une véritable menace. En fait, l'OMC éclaircira la situation de sorte que tout sera mieux équilibré, comme l'a affirmé le député d'en face. Cet équilibre sera même plus marqué qu'il ne le croit, à mon avis, et nous serons plus compétitifs par rapport aux États-Unis et aux autres pays.

(1300)

Nous devons devenir plus dynamiques. Le Canada a toujours souffert d'un complexe d'infériorité. Nous n'avons pas su être aussi fonceurs que nous aurions pu l'être dans le milieu du commerce international. Nous devrions aussi rassurer ceux qui s'inquiètent en disant qu'il existe un mécanisme d'examen et un mécanisme de règlement des différends qui donnera de bien meilleurs résultats que tout ce que nous avons connu jusqu'à maintenant. Il y aura possibilité d'examiner les questions qui préoccupent, par exemple, le monde de l'industrie sidérurgique, de l'industrie du boeuf et d'autres industries. Nous devons rassurer ces industries et leur dire qu'elles auront la possibilité de soulever les questions qui les préoccupent.

Selon cette mesure législative et d'autres mesures législatives similaires actuellement adoptées par d'autres gouvernements dans le monde, les membres de l'OMC ont convenu de réduire ou d'éliminer les tarifs et autres barrières commerciales. C'est une très bonne chose, ce dont nous avons besoin en cette veille du XXIe siècle. C'est une mesure législative orientée vers l'avenir qui va créer des emplois et permettre aux Canadiens de préserver le mode de vie auxquels ils se sont habitués. C'est la seule façon de maintenir ce mode de vie.

Avant de passer à la partie principale de mon intervention, je voudrais citer un court extrait d'un chapitre du rapport du comité mixte spécial chargé de l'examen de la politique étrangère du Canada dont j'ai été membre avec d'autres députés. Le chapitre en question s'intitule «Vers une prospérité commune». J'insiste sur le mot prospérité. Nous sommes menacés de perdre notre position, notre statut et notre qualité de vie et c'est une façon de changer les choses.

J'espère que le ministre des Affaires étrangères va accorder une attention particulière à ce chapitre et à ce paragraphe. Ce chapitre dit entre autres: «Les échanges et les investissements internationaux, de même que les arrangements financiers qui les facilitent (ou les entravent) influent de façon déterminante sur la richesse, la prospérité et le bien-être de tous les Canadiens.» Arrêtons-nous là une minute et réfléchissons à ce que cela signifie pour nous, comme je le dis, à la veille du XXIe siècle.

Le chapitre poursuit: «Au cours du siècle prochain, la clé de la participation du Canada à l'économie mondiale résidera dans son aptitude à établir des liens mutuellement satisfaisants sur les plans des échanges et des investissements avec les nouveaux géants commerciaux qui seront nos voisins à l'est, au nord et à l'ouest.» Nous devons donc regarder au-delà de nos frontières et plus loin encore si nous voulons participer au commerce international. C'est l'un des domaines les plus importants pour notre économie et donc une mesure législative qui traite de cette question influe assurément sur la vie de tous les citoyens de ce pays.

Je suis sûr que personne ne sera surpris d'apprendre que je suis un adepte du libre-échange et qu'avant d'être élu à ce poste, j'étais un homme d'affaires. À mon avis, l'OMC est pour nous une occasion unique de nous assurer l'accès à tous ces nouveaux marchés.

Comme plusieurs de mes estimés collègues l'ont déjà mentionné, les nouveaux domaines qui seront visés par l'OMC, alors qu'ils ne l'étaient pas dans le dernier accord du GATT, sont les services, l'investissement lié au commerce et la propriété intellectuelle. Ces nouveaux secteurs sont d'une importance vitale pour notre prospérité future, puisqu'à lui seul, le commerce des services constitue environ le quart de l'ensemble des échanges mondiaux, qui représentent 4 billions de dollars. Quel pays est mieux placé que le Canada pour offrir ces services, bancaires ou autres, partout dans le monde?

Comme nous le savons tous, les services constituent le plus important secteur de l'économie du monde industrialisé et, dans bien des pays, c'est celui qui connaît la croissance la plus rapide. L'OCDE estime que les nouvelles règles entraîneront une augmentation annuelle des échanges mondiaux d'au moins 360 milliards de dollars. En outre, on prévoit des gains annuels de 3 milliards pour le Canada, quand l'accord sera mis en oeuvre intégralement. Ce n'est pas rien. En plus de permettre l'expansion d'un système multilatéral établi sur une réglementation, la création de l'OMC augmentera aussi la capacité du Canada de s'assurer que les plus grands partenaires du commerce international n'utilisent pas leur pouvoir économique pour l'engager unilatéralement dans toutes les disputes commerciales qui pourraient se développer.


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(1305)

Le nouveau mécanisme de règlement des différends augmentera aussi le pouvoir de négociation du Canada face aux États-Unis. Même si nos bonnes relations avec ce pays ont permis au Canada, qui arrive au trente et unième rang pour sa population, d'accéder au titre de septième pays commerçant du monde, ces relations ne sont pas sans difficultés. Je suis sûr que l'OMC nous aidera à gérer cette relation commerciale au cours de la prochaine décennie et qu'elle favorisera la prospérité de nos deux pays.

J'aborde maintenant le thème plus général du commerce lui-même et de ses avantages pour le Canada. Plus de 20 p. 100 des travailleurs canadiens ont un emploi qui dépend des exportations. Cela représente plus de 2 millions d'emplois. Les exportations comptent en outre pour plus de 30 p. 100 du produit intérieur brut du Canada. L'an dernier, elles ont représenté quelque 181 milliards de dollars de produits et services.

Par conséquent, il est essentiel que le Canada se vende activement dans le reste du monde. Si nous ne suivons pas la cadence de la mondialisation, nous serons tous en difficulté. Un pays comme le Canada ne peut pas se permettre une politique protectionniste, au milieu des années 90. Il est donc indispensable que la Chambre appuie le projet de loi C-57. Nous n'avons tout simplement pas la population qu'il faudrait pour agir autrement.

L'OMC offre d'immenses possibilités aux entreprises canadiennes en matière de croissance des exportations. Nous devrons aussi ouvrir nos marchés aux étrangers, mais, à mon avis, cela ne pose pas de problème grave. Certaines industries passeront par une période d'adaptation, mais les entreprises canadiennes peuvent concurrencer n'importe qui dans le monde. Débarrassons-nous de ce complexe d'infériorité dont je parlais plus tôt.

Nous voulons simplement un système international équitable et ouvert avec des règles du jeu équitables, et l'Organisation mondiale du commerce y contribuera largement. Lorsqu'il entrera en vigueur l'an prochain, l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce engagera quelque 120 pays à réduire graduellement les barrières commerciales. Cela aura pour effet à long terme d'accroître considérablement les échanges commerciaux dans le monde.

On sait que tout accroissement du commerce mondial entraîne une hausse des exportations des entreprises canadiennes et la création de nouveaux emplois pour les travailleurs canadiens, soit plus de 11 000 pour chaque milliard de dollars de hausse des exportations, mais aussi une prospérité accrue pour les familles canadiennes.

Selon les chiffres publiés par le ministère des Finances, et que le ministère juge modérés, l'application de l'accord sur l'Organisation mondiale du commerce assurera au Canada un gain annuel estimé à 3 milliards de dollars, soit la création d'environ 30 000 nouveaux emplois chaque année par suite de ce seul accord. L'OMC nous aidera également à diversifier nos exportations, dont 80 p. 100 sont actuellement destinées aux États-Unis.

Un des marchés en croissance les plus prometteurs pour le commerce canadien, sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce, est la région Asie-Pacifique, qui pourrait absorber d'ici cinq ans 40 p. 100 des exportations mondiales totales. Nous avons obtenu jusqu'à maintenant un certain succès. Le Japon, par exemple, qui est notre deuxième partenaire commercial en importance, importe davantage du Canada que le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France réunis.

En outre, la Chine, avec sa population énorme et une économie qui affiche la plus forte croissance au monde, sera sans doute au début du prochain siècle la deuxième économie en importance de la planète. Certains problèmes subsistent quant à l'adhésion de la Chine à l'Organisation mondiale du commerce, mais il ne s'agit plus de savoir si la Chine adhérera, mais bien quand elle le fera.

Nous aimerions aussi accroître les échanges commerciaux avec les pays d'Amérique latine. J'ai parlé de l'OEA et de l'importance pour le Canada de jouer un rôle de premier plan au sein de cette organisation. Nous sommes en faveur d'une expansion de l'ALENA, grâce auquel le Canada jouit d'un accès sans précédent et préférentiel au marché mexicain, qui compte 85 millions de consommateurs et est en croissance. Toutefois, tant que les Amériques ne décideront pas que l'expansion de l'accord est aussi dans leur intérêt, l'Organisation mondiale du commerce représentera certainement, pour les entreprises canadiennes, un moyen de percer sur leurs marchés. Cela ne veut pas dire que le Canada n'a pas vraiment à insister sur l'expansion de l'ALENA. Cela signifie simplement que l'OMC donnera son aide dans ces conditions en attendant.

(1310)

Comme je viens de le mentionner, l'OMC comportera une structure qui se chargera du règlement des différends commerciaux à l'échelle internationale et qui veillera à ce que les plaintes légitimes de pratiques commerciales déloyales soient traitées selon un échéancier clairement établi. Ce mécanisme sera vraisemblablement beaucoup plus efficace que celui qui est en place en vertu de l'ALENA, ce qui devrait nous faciliter beaucoup la tâche et aider à chasser les craintes de certaines de nos industries.

En travaillant à titre de porte-parole en matière d'affaires étrangères pour le Parti réformiste, j'ai maintes fois entendu vanter l'importance d'un tel système multilatéral à base de règles. Même si l'OMC ne règle pas tous les problèmes liés au commerce international, il permettra de franchir un pas de géant dans la bonne direction.

Il faut espérer qu'au cours des prochaines années, le Canada manifestera un esprit de leadership en promouvant le renforcement de ce système multilatéral à base de règles et en invitant l'OMC à traiter de façon efficace les questions relatives aux recours commerciaux et aux mesures antidumping.

L'OMC devra aussi s'attaquer au problème des subventions aux exportations agricoles. Même si l'OMC fait du bon travail en promouvant les intérêts canadiens, il restera néanmoins beaucoup à faire pour mettre fin au gâchis auquel les subventions agricoles ont abouti avec les années. Le Parti réformiste voudrait


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que le gouvernement joue un rôle constructif et énergique à cet égard, et il pourra le faire par l'intermédiaire de l'OMC.

J'en arrive maintenant au sujet connexe des barrières commerciales internes. J'ai entendu l'orateur précédent en parler un peu. Il est parfaitement ironique de constater que nous faisons de réels progrès pour éliminer nos barrières internationales, mais que nous restons confrontés à des barrières à l'intérieur du Canada.

En vertu du système en place, des barrières commerciales provinciales divisent le marché intérieur canadien. Non seulement notre compétitivité à l'échelle internationale en souffre, mais notre prospérité collective s'en trouve aussi réduite. À cause des obstacles provinciaux au libre-échange, le coût du commerce au Canada augmente d'environ 6,5 milliards de dollars par année. Cette situation est totalement inadmissible. Ce montant correspond à environ 1 000 $ par famille.

Nous avons fait des progrès, mais personne n'a vraiment attaqué le problème comme nous pensons qu'il faut le faire. Par conséquent, nous demandons au gouvernement fédéral d'exercer plus de pressions sur les provinces pour éliminer ces obstacles au commerce, qui ne font que miner notre capacité à profiter de l'OMC.

Si nous pouvions éliminer les obstacles au commerce intérieur, nous pourrions accroître l'efficacité des entreprises canadiennes ainsi que leur capacité à soutenir la concurrence au niveau international. Quelle meilleure façon d'améliorer notre position sur le marché mondial! Cela vaut surtout pour les petites et moyennes entreprises qui sont lésées par le système actuel.

En conclusion, le Canada doit promouvoir activement le libre-échange partout dans le monde. Il lui faut, pour cela, abolir les obstacles au commerce provincial, jouer un rôle de premier plan au sein de l'OMC et de l'OEA et respecter ses obligations internationales.

Pour atteindre son premier objectif, le Canada devra collaborer avec les provinces. Pour atteindre le deuxième, il lui faudra collaborer avec d'autres pays afin de veiller à ce que la nouvelle Organisation mondiale du commerce se penche sur des questions véritablement universelles et multilatérales et réunisse le plus grand nombre de membres, selon les pratiques généralement acceptées.

Notre appui à l'OMC et l'intérêt que nous portons à cette nouvelle organisation ne font plus aucun doute. Nous pouvons tous nous rendre compte de la prospérité que cette organisation nous apportera. Il suffit maintenant d'informer les gens de tous les avantages que ce nouvel accord commercial peut nous procurer.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député de Red Deer pour son excellent exposé. Je me réjouis de constater qu'il a su relever quelques-unes des lacunes de l'ALENA qu'on a essayé de corriger au GATT et avec l'Organisation mondiale du commerce.

(1315)

Pour faire de l'exportation, diverses entreprises du Canada ont besoin de formation et d'aide. Ne doivent-elles pas non seulement connaître les règles, mais encore comprendre ce qu'il faut faire pour exporter leurs produits dans diverses régions du monde, que le député a sûrement visitées?

Et, pour arriver à commercialiser leurs produits, les exportateurs ne devront-ils pas collaborer dans tout le Canada à la manière de l'Équipe Canada afin de mettre en oeuvre l'OMC, ce qui doit se faire très rapidement pour que celle-ci bénéficie dans le monde entier des avantages que vous avez mentionnés?

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, je remercie le député pour ses questions. L'information, je le répète, est l'élément clé. Le problème, c'est qu'il est tellement facile de commercer avec les États-Unis. Comme tout le monde le sait, la langue est la même et les moeurs sont à peu près les mêmes, de telle sorte qu'il est plutôt facile d'aller y faire du commerce. Lorsque les choses se corsent aux États-Unis, c'est alors qu'on se tourne vers le reste du monde et que nos entreprises, surtout les grandes, prennent le risque de faire du commerce dans d'autres pays. Le vrai problème, c'est que, lorsque le marché américain se fait à nouveau accueillant, beaucoup de petites et moyennes entreprises retournent immédiatement sur le marché américain et oublient leurs intérêts internationaux.

La solution n'est pas, je le répète, que le gouvernement alourdisse encore la bureaucratie pour essayer d'aider les entreprises à aller faire des affaires à l'étranger. Non pas. La solution, c'est de collaborer avec les entreprises au moyen de colloques et de co-entreprises pour qu'elles aillent faire des affaires à l'étranger, pour leur obtenir les contacts. Le gouvernement fournit les contacts à la manière de l'Équipe Canada, ouvre les portes, et les entreprises font le reste. Tout ce que le gouvernement devrait faire, c'est leur ouvrir les portes.

Il s'agit pour les organismes gouvernementaux d'encourager les entreprises, de les aider, certes, avec les aspects techniques, et non de faire carrément le travail pour elles. Cela ne marchera jamais. Ce ne sera qu'un fardeau de plus pour la société.

M. Lastewka: Monsieur le Président, je remercie le député de Red Deer pour sa réponse. J'aimerais que le député nous parle de l'importance de pouvoir exporter dans des régions où on ne parle ni l'une ni l'autre des langues officielles du Canada.

Il a commencé à dire qu'il y avait du travail à faire de ce côté et qu'il fallait du temps. Je crois qu'il a parlé de la formation et de l'aide dont les exportateurs ont besoin pour pouvoir pénétrer les marchés de ces régions. Il a dit que lorsque la situation ira mieux, nous ne devrons pas nous replier et nous contenter d'exporter aux États-Unis. Il a mentionné des régions du monde dont il fallait explorer les marchés, mais en ajoutant que, puisque le monde était si grand, il fallait fixer des priorités pour faciliter les échanges, mais laisser les entreprises s'occuper de la fabrication et de l'exportation.

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, encore une fois, le député de St. Catharines pose des questions importantes et je suis convaincu que nous pourrions faire une bonne équipe s'il fallait en former une pour déterminer par quels moyens faire la promotion des entreprises.

Il y a énormément de gens d'origines ethniques diverses au Canada. Nous devons faire appel à ces gens. Pour ce qui est de la région Asie-Pacifique, nous avons un bassin d'un million de


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Canadiens d'origine asiatique où nous pouvons puiser pour nous aider à atteindre nos objectifs.

Je reviens à la mondialisation de l'économie. L'Union européenne a l'avantage de former un marché plus évolué. En Europe, il n'est pas rare de connaître trois ou quatre langues et de bien comprendre les cultures d'autres peuples. Il est évident que l'anglais peut être très utile presque partout dans le monde, sauf dans les pays de l'Europe de l'est. Les Canadiens originaires de ces pays peuvent certainement nous aider à en pénétrer les marchés.

Dans la région Asie-Pacifique, l'anglais est très important, mais le mandarin est plus important encore et il est évident que les Canadiens originaires de cette région peuvent nous aider.

(1320)

Soyons francs. Dans les Amériques, il y a 34 pays membres de l'OEA et un seul parle français, Haïti. Dans tous les autres, on parle espagnol ou anglais. Ces langues sont importantes et il est extrêmement important de faire appel aux Canadiens d'origine sud-américaine pour pénétrer les marchés d'Amérique latine. Nous devons, par l'intermédiaire des Affaires étrangères, faire beaucoup plus d'efforts que maintenant pour former les Canadiens d'origine étrangère et faire appel à leurs services.

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer cet après-midi à ce débat sur l'Organisation mondiale du commerce.

Les négociations commerciales multilatérales de l'Uruguay Round, qui se sont déroulées dans le cadre de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, ou GATT, visaient à adapter le droit commercial international aux réalités du XXIe siècle. Les négociateurs ont conclu qu'il fallait prendre trois mesures clés pour atteindre ce but.

Premièrement, après de longues et laborieuses négociations, on a réussi à régler des différends de longue date touchant le commerce de certaines marchandises, notamment les produits agricoles.

Deuxièmement, on a décidé de créer une Organisation mondiale du commerce. L'OMC sera une institution permanente dont le mandat consistera à surveiller la politique commerciale internationale et à régler les différends entre les pays grâce à une approche multilatérale.

Troisièmement, le commerce des services, qui représente environ un quart du total des échanges commerciaux internationaux dont la valeur atteint 4 billions de dollars, a été assujetti pour la première fois au droit commercial international.

En plus de ces trois mesures clés, les négociateurs de l'Uruguay Round se sont entendus sur plus de 25 mesures distinctes qui, ensemble, représentent la plus importante série de nouvelles règles commerciales depuis la création du GATT en 1947. Ces mesures comprennent notamment des règles commerciales plus sévères, particulièrement en ce qui concerne les subventions et les droits compensateurs, ainsi qu'un mécanisme plus efficace de règlement des différends.

De nouveaux secteurs ont également été assujettis pour la première fois aux règles commerciales internationales, notamment la propriété intellectuelle, les investissements liés au commerce et les services. Par ailleurs, la plupart des 120 pays qui participaient à ces négociations ont pris d'importants engagements relativement à la réduction ou à l'élimination des droits de douane et des autres entraves au commerce.

Il y a un grand thème qui se dégage des principes, propositions et dispositions contenus dans les 26 000 pages de texte de l'acte final du GATT: le multilatéralisme. C'est parce que les accords de l'Uruguay Round placent fermement sur une base multilatérale le droit régissant le commerce mondial que le marché mondial ne sera plus jamais le même. L'OMC freinera la tendance des gouvernements à recourir à des mesures commerciales unilatérales pour harceler les exportateurs des pays concurrents. Cela veut dire que le Canada sera moins vulnérable aux efforts déployés par les économies rivales qui profitent de leur taille et de leur puissance pour entraver les exportations canadiennes. On ne dira jamais trop à quel point il s'agit d'une réalisation importante pour le Canada, où un emploi sur cinq dépend des exportations.

Je voudrais parler aujourd'hui de la deuxième grande réalisation. L'Organisation mondiale du commerce, ou OMC, mettra en application les résultats des négociations de l'Uruguay Round. En remplaçant le secrétariat du GATT, l'OMC coordonnera le fonctionnement de ses trois nouvelles composantes: le Conseil des marchandises, le Conseil des services et le Conseil de la propriété intellectuelle. Le règlement des différends sera accéléré grâce à l'imposition d'un délai rigoureux établi pour la conclusion du processus une fois lancé. Les membres s'engagent également à éviter de recourir unilatéralement à des mesures de représailles.

Il faut remarquer que le processus de règlement des différends sous l'égide de l'OMC empêchera un membre de bloquer l'adoption des rapports des commissions chargées de régler les différends commerciaux ou ceux des causes entendues en appel par des tribunaux d'appel. Cette disposition constitue la pierre angulaire assurant le fonctionnement en douceur des nouvelles institutions multilatérales.

Les négociations commerciales multilatérales de l'Uruguay Round revêtaient une importance vitale pour le Canada, qui est l'un des pays dont l'économie dépend le plus du commerce international, car elles ont permis d'élargir l'accès aux marchés et d'établir des institutions et des règles commerciales plus solides. Les résultats des négociations constituent une réalisation historique, mais il reste maintenant à les traduire dans la réalité.

Il faut, dans la lancée, terminer les négociations dans des domaines comme ceux des services financiers, des télécommunications et marchés de l'État. Il est clair que ce sont là des domaines d'importance grandissante pour le développement économique mondial. Nous devons tous nous efforcer, dans le cadre de la libéralisation, de définir les règles le mieux possible. Il ne faut pas nier les avantages que les producteurs et les consommateurs peuvent en tirer.

Se pose également la question de l'adhésion de nouveaux membres à l'OMC, notamment et surtout la Chine, Taiwan et la Russie. Le Canada s'est déclaré favorable en principe à leur adhésion. L'accroissement du nombre de membres sera bénéfique pour le régime d'échanges commerciaux encadrés par des règles définies et présentera des avantages importants pour les pays en cause.


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(1325)

Cependant, l'adhésion n'est pas un droit. Les pays qui voudront faire partie du GATT et de l'OMC devront s'engager à avoir une économie de marché transparente, épouser les principes fondamentaux du système de commerce multilatéral et améliorer réellement l'accès à leur marché. Par contre, nous ne devons pas imposer aux nouveaux venus des règles plus sévères que celles des autres membres.

D'autres questions commerciales reviennent à la surface: le commerce et l'environnement, les normes de travail, l'investissement, la politique sur la concurrence. Tous les pays commerçants sont aux prises avec ces questions, qui sont complexes et se prêtent mal à des solutions simples. Nous estimons néanmoins qu'il ne faut pas perdre de vue certains principes dans la définition de ces problèmes, leur étude et l'élaboration de solutions.

Tout d'abord, le Canada n'est pas en faveur du recours à des sanctions commerciales pour imposer des normes de conduite. Même si on laisse de côté la question de l'équité dans un monde caractérisé par une interdépendance de plus en plus grande, où le seul dénominateur commun est le respect d'un système de marché, il en coûterait trop cher à tous les pays de laisser un seul d'entre eux se servir de sa puissance économique pour imposer ses propres normes.

Deuxièmement, nous devons être conscients du risque que de nouvelles règles, à moins qu'elles ne soient l'expression d'un large consensus international, ne deviennent un moyen d'imposer un nouveau protectionnisme. En cette matière, nous sommes sensibles aux préoccupations des autres pays, qu'il s'agisse des pays développés comme des pays en voie de développement, qui craignent que les nouvelles règles ne visent que l'érection de barrières contre leurs exportations.

En troisième lieu, le Canada veut garantir que les règles du système commercial multilatéral soient complémentaires et non pas contraires à la réalisation d'objectifs plus larges dans le domaine social. En ce concerne le commerce et l'environnement, nous sommes déterminés à atteindre l'objectif du développement durable. Quant au commerce et aux normes du travail, nous souscrivons à la nécessité du respect des normes du travail reconnues à l'échelle internationale.

Il y a un processus en cours pour déterminer comment l'OMT traitera les questions liées au travail et à l'environnement. À l'heure actuelle, le Canada travaille sur ces très importantes questions avec ses partenaires commerciaux.

Nous estimons que des organismes internationaux comme l'Organisation de coopération et de développement économiques ainsi que l'Organisation mondiale du travail devraient accélérer leurs études sur ces questions et utiliser leurs constatations pour guider la discussion au sein de la nouvelle OMT. Nous craignons que, sans ce genre de travail de base, l'OMT ne s'enlise avant même d'avoir eu l'occasion d'établir ses fondements institutionnels.

Les négociations de l'Uruguay Round ont eu des effets marqués sur des industries comme l'agriculture et la fabrication de l'acier dans la circonscription d'Erie. Les discussions sur le commerce mondial dans le cadre du GATT ont eu pour résultat l'établissement de règles communes régissant le commerce mondial des produits agricoles. Lors des pourparlers concernant le commerce de ces produits, les questions clés que le Canada avait à coeur comprenaient l'amélioration de l'accès aux marchés, l'accroissement de la discipline à l'égard des subventions ayant un effet de distorsion sur le commerce mondial, des mesures plus prévisibles et plus sûres à la frontière, pour protéger les programmes de gestion de l'offre de denrées agricoles du Canada, et l'assurance que les règlements sanitaires ne soient pas utilisés comme obstacles déguisés au commerce.

Le commerce des denrées agricoles s'est avéré l'une des questions les plus épineuses abordées durant les sept années qu'a duré cette série de négociations. Le Canada a finalement atteint ses objectifs. À l'issue de ces négociations, les tarifs sur les denrées agricoles baisseront de 36 p. 100 et de pas moins de 15 p. 100 pour certains produits. Cette réduction sera réalisée en six étapes égales, entre 1995 et 2001.

En outre, tous les pays du GATT ouvriront leurs marchés à un minimum d'importations à compter de 1995, une augmentation du niveau étant prévue en 2001. Les tarifs qui remplaceront les quotas aideront aussi à maintenir un système de gestion de l'offre efficace pour les producteurs canadiens de volaille, d'oeufs et de produits laitiers. Les producteurs de viande rouge, de porc et de produits horticoles bénéficieront aussi des nouvelles perspectives commerciales en Asie et ailleurs.

Les volumes moins élevés d'exportations subventionnées devraient, à moyen terme, entraîner une hausse des prix du grain et d'autres denrées agricoles, éperonnant la demande de matériel et de machines agricoles au Canada et sur d'autres marchés.

Les manufacturiers canadiens ont expédié du matériel agricole d'une valeur de quelque 865 millions de dollars en 1992. Les exportations ont totalisé 467 millions de dollars. Plus de 90 p. 100 de celles-ci étaient destinées aux États-Unis. C'est aussi des États-Unis que provient la majeure partie du matériel agricole que le Canada importe.

L'industrie canadienne produit des tracteurs à quatre roues motrices, des moissonneuses-batteuses, du matériel pour les semis et les instruments de préparation du sol, du matériel pour la manutention et la récolte du foin ainsi que du matériel pour la manutention et l'entreposage du grain. Il s'agit d'une technologie de pointe pour la production de céréales dans les grandes exploitations agricoles soumises aux conditions de sécheresse des Prairies. Il existe d'énormes possibilités d'expansion des exportations vers l'Australie, le Mexique, l'Europe, la Russie, l'Ukraine et la Chine. L'usine John Deere de ma circonscription, chef de file dans la fabrication d'instruments aratoires et de machines agricoles, accueillerait avec plaisir cette augmentation des débouchés, j'en suis convaincu.

(1330)

Au cours des récentes années, l'industrie canadienne a été aux premières lignes de nombreuses réalisations technologiques. Mentionnons la conception de tracteurs de grande capacité, bidirectionnels et à quatre roues motrices et la conception de moissonneuses-batteuses à batteur axial. De tels progrès seront protégés mondialement pour la première fois grâce aux dispositions de l'accord intervenu au cours de ces négociations qui traitent des aspects commerciaux des droits de propriété intellectuelle.


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Au cours des cinq années commençant le 1er janvier 1995, le Canada et ses principaux partenaires commerciaux, dont l'Union européenne, le Japon et les États-Unis, de même que certains pays industrialisés, comme la Finlande, la Corée, la Norvège et la Suède, aboliront graduellement tous les obstacles tarifaires et non tarifaires au commerce de leurs principaux produits dans ce secteur.

Les sociétés fabriquant une gamme complète de produits et de grosses pièces d'équipement, comme les tracteurs et les moissonneuses-batteuses, tireront avantage de cette abolition graduelle des tarifs sur les principaux marchés. Les fabricants de séries partielles d'instruments et de pièces, comme des sarcleuses, des charrues-ciseaux, des semoirs et des distributeurs d'engrais, verront aussi les tarifs descendre à zéro. Les fabricants de séries complètes ou partielles profiteront également d'un meilleur accès aux fournisseurs étrangers de pièces essentielles.

Toutes ces mesures équilibrent les règles du jeu pour les fabricants canadiens de matériel agricole. Avant la ratification de l'accord par le Canada et les États-Unis, ces deux pays laissaient entrer, en franchise de droit, les machines agricoles provenant de la plupart des pays les plus favorisés en vertu du GATT. Un bon nombre de ces pays maintiennent les obstacles tarifaires et non tarifaires sur le matériel agricole importé. Après cinq ans d'application de l'accord qui a résulté de l'Uruguay Round, ces barrières seront chose du passé.

Dans ma circonscription, il y a une usine, la Stelco, qui figure parmi les 15 sociétés concentrées dans six provinces qui forment notre industrie sidérurgique primaire. Ma circonscription compte aussi une raffinerie de nickel en activité, l'Inco, le nickel étant un autre secteur essentiel de l'industrie sidérurgique.

En 1993, l'industrie sidérurgique a réalisé un chiffre d'affaires de plus de 8,6 milliards de dollars. Elle emploie environ 33 000 Canadiens. Quelque 18 000 Canadiens travaillent dans le secteur des tuyaux, des tubes, des fils et des accessoires de tréfilerie pour transformer l'acier en produits finis.

Grâce à l'Uruguay Round, la plupart des pays industrialisés, dont l'Union européenne, le Japon et la Corée, vont réduire progressivement, sur une période de dix ans, l'ensemble des droits de douane applicables à l'acier et aux produits de l'acier.

Bref, la création de l'Organisation mondiale du commerce se veut l'expression de la présence de réalités nouvelles dans les relations économiques et politiques établies entre les pays. Le système commercial n'est plus le domaine exclusif de quelques-uns. Les négociations de l'Uruguay Round s'étant déroulées sur une période de sept ans, nous avons pu assister à l'évolution des rôles des principaux intervenants.

J'ai parlé du succès de l'Uruguay Round et de ses retombées positives sur ma circonscription. En fait, nous venons tout juste de nous mettre à l'oeuvre. Avec la création de l'Organisation mondiale du commerce, nous venons de faire le premier pas. Il nous faut maintenant nous mettre au service de cette institution pour qu'elle nous fasse entrer dans le XXIe siècle.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'allocution que vient de prononcer le député d'Érié, et j'ai été surpris d'apprendre que le tracteur John Deere que je possède a probablement été construit dans sa circonscription. Je voudrais aussi rappeller à mon honorable collègue de la circonscription d'Erie que les Québécois et les Québécoises ont été en 1988 ceux qui ont manifesté la plus grande ouverture face au commerce extérieur, notamment dans le cadre de l'ALENA.

En effet, au Quebec, sur 75 circonscriptions, la très grande majorité, plus de 62, ont été données au Parti conservateur qui avait fait de l'ALENA la pierre angulaire de sa campagne électorale de 1988. Évidemment, en ce qui concerne les produits agricoles, les Québécois occupent une place de choix dans l'agriculture dite l'agriculture de la gestion de l'offre: la volaille, le lait et les oeufs. Pour remplacer cette gestion de l'offre dans l'Accord du GATT, il y aura ce qu'on appelle communément la tarification qui peut aller dans certains cas jusqu'à 360 p. 100.

(1335)

Évidemment, l'orateur précédent a parlé de cette tarification qui est en place pour les six prochaines années, et ces six prochaines années sont cruciales pour que nos agriculteurs aient le temps de s'adapter, de se positionner.

Bien sûr, en cas de litige, il y aura un panel devant lequel on pourra présenter nos doléances. Or, un panel c'est bien beau, mais il faudra avoir des négociateurs parmi nos représentants qui se tiennent debout, non pas s'en aller là comme un chien battu en se disant déjà défaits avant de commencer à vouloir défendre nos commettants, nos représentants.

J'ai à l'esprit trois faits bien précis qui ne m'impressionnent guère dans la façon dont nos représentants nous ont défendus jusqu'à maintenant. Vous avez le cas du bois d'oeuvre, vous avez le cas des porcs et vous avez le cas également, plus récemment, du blé dur, le durum, qui concerne précisément nos provinces de l'Ouest.

Or, c'est la garantie qui m'inquiète, et j'aimerais que mon collègue de la circonscription d'Erie, qui m'a précédé, puisse sécuriser les agriculteurs du Québec en disant que ceux qui vont les représenter devant ces tribunaux, devant ces panels seront à la hauteur de nos espérances.

[Traduction]

M. Maloney: Monsieur le Président, je remercie le député de ses commentaires. Je suis d'accord avec lui. Il faut absolument que nos négociateurs soient fermes et énergiques. Je ne suis pas d'accord, cependant, sur les points dont il a parlé, c'est-à-dire l'industrie du bois d'oeuvre, l'industrie du porc et, plus récemment, la situation du blé dur.

Il y a eu des groupes spéciaux et il y a eu des contestations. Dans tous les cas, on a constaté que la position du Canada était la bonne. Chose certaine, lorsque le ministre de l'Agriculture a négocié avec les Américains-et on sait que les Américains sont des négociateurs très durs-il l'a fait en pensant au bien de notre pays. Si l'on considère que ces situations ont créé un précédent et donnent en quelque sorte l'exemple, je n'ai aucune inquiétude, car je sais que les négociateurs canadiens tiendront compte des intérêts du Québec et du reste du pays. Nous nous montrerons fermes et énergiques dans nos négociations pour le bien de notre industrie agricole.

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, j'étais curieux d'entendre le député libéral d'Erie faire des observations sur l'industrie sidérurgique et sur les producteurs d'acier dans sa circonscription, étant donné qu'il


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appuie le projet de loi C-57 dont la Chambre est saisie aujourd'hui.

Il a fait valoir que cette industrie était très importante dans sa circonscription et que cet accord commercial serait avantageux pour ses habitants. Or, cela va carrément à l'encontre de ce que nous ont dit les dirigeants de l'Association canadienne des producteurs d'acier. Ils ont dit que ce projet de loi nécessitait des amendements importants pour garantir la protection des producteurs d'acier et de l'association dans leur échanges commerciaux avec les Américains.

Les États-Unis ont une mesure législative très puissante qui protège leurs producteurs d'acier. Lorsque le Canada produit de l'acier et le vend à l'économie américaine et aux entreprises américaines, il est assujetti à des règlements très rigoureux et très sévères. En fait, il est arrivé, à certaines occasions, que les États-Unis imposent des droits antidumping aux producteurs d'acier canadiens.

Ce projet de loi C-57 ne répond pas aux préoccupations de l'Association canadienne des producteurs d'acier. Pourtant, le député d'Erie dit à la Chambre, tout comme le député du Bloc, qu'il appuiera ce projet de loi. Les deux prétendent qu'il sera avantageux pour l'industrie sidérurgique. Pourquoi le député d'Erie dit-il qu'il appuiera le projet de loi et qu'il sera avantageux pour l'industrie sidérurgique au Canada, alors que l'Association canadienne des producteurs d'acier affirme le contraire? Elle a réclamé certains amendements que le Nouveau Parti démocratique a déposés à la Chambre pour l'aider à avoir des règles du jeu équitables dans ses échanges commerciaux avec les Américains.

(1340)

Monsieur le député, pourquoi appuyez-vous ce projet de loi? Pourquoi dites-vous qu'il aidera les Canadiens à. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Je regrette que la période de questions et d'observations soit relativement courte lorsque les députés partagent leur temps de parole. Je rappelle à tous les députés d'adresser leurs interventions à la présidence.

M. Maloney: Monsieur le Président, à la suite de l'Uruguay Round, la plupart des pays industrialisés, dont ceux de l'Union européenne, le Japon et la Corée, vont progressivement éliminer tous les tarifs sur l'acier et les produits de l'acier sur une période de dix ans.

J'ai ici une citation de l'Association canadienne des producteurs d'acier qui dit: «L'Uruguay Round profitera à l'industrie sidérurgique canadienne si, comme prévu, la libéralisation du commerce donne bien lieu à une croissance économique et à une augmentation de la demande en ce qui concerne l'acier.»

Pour ce qui est des nouvelles dispositions régissant les subventions, l'Association canadienne des producteurs d'acier a déclaré qu'il était plus facile d'entamer une action contre un pays étranger dont les subventions nuisaient gravement à nos exportations dans un pays tiers.

Les producteurs d'acier canadiens sont d'accord. Les améliorations négociées en ce qui concerne les mécanismes anti-dumping vont donner lieu à certains avantages. Selon l'Association canadienne des producteurs d'acier, les changements qui ont été négociés vont permettre d'aligner un peu mieux les pratiques américaines sur les pratiques canadiennes et d'empêcher quelque peu les États-Unis de recourir aux mesures anti-dumping à des fins de harcèlement commercial.

Les producteurs d'acier canadiens accueillent favorablement l'OMC qui, disent-ils, permettra une plus grande flexibilité que l'ancien conseil du GATT, où il fallait l'unanimité pour agir. La garantie d'accès aux marchés obtenue grâce à l'élimination des barrières commerciales existantes. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Je regrette, mais le temps de parole du député est nettement écoulé.

L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique), Lib.): Monsieur le Président, le Canada peut assumer un rôle plus important dans le monde si l'on crée un contexte multilatéral sûr pour des pays comme le nôtre, dans les limites du droit international et sous la gouverne des Nations Unies.

Je veux féliciter le ministre du Commerce international du bon travail qu'il a fait pour promouvoir la mise en oeuvre de l'accord établissant l'Organisation mondiale du commerce au moyen du projet de loi C-57.

La création de l'OMC est largement attribuable à une initiative conjointe du Canada et de l'Union européenne. L'OMC est un moyen d'assurer un cadre institutionnel commun à tous les pays, pour la conduite des relations commerciales internationales.

L'accord de l'Uruguay Round, qui a été conclu en avril, met un terme aux négociations commerciales les plus importantes et les plus complètes qu'on ait jamais entreprises. Cet accord aura de formidables retombées sur l'économie mondiale.

L'entente finale comporte plus de 30 accords auxquels vient se greffer un accord créant l'Organisation mondiale du commerce, qui nous assurera un cadre beaucoup plus solide pour le règlement des différends commerciaux.

L'Uruguay Round permettra d'alléger les tensions commerciales bilatérales et de renforcer les règles du GATT pour les rendre encore plus équitables, transparentes et prévisibles. Ces négociations ouvrent la voie à l'intégration d'économies en voie de développement ou dotées d'un processus central de planification, comme la Chine, notre sixième partenaire commercial en importance.

Grâce à l'accord découlant de l'Uruguay Round, l'accès aux marchés pour les produits industriels s'améliorera grandement, la plupart des tarifs étant réduits d'au moins un tiers. En tout, on prévoit que le Canada enregistrera des gains commerciaux d'environ 2,5 milliards de dollars américains d'ici l'an 2002. En revenus nets, directs et indirects, cette série de négociations rapportera quelque 4 milliards de dollars américains.

L'adoption du projet de loi C-57 permettra au Canada de tirer d'énormes avantages de sa participation à l'accord découlant de l'Uruguay Round et à l'Organisation mondiale du commerce.

L'accord sur l'OMC assure un environnement commercial plus libre et plus équitable. Il aura des effets bénéfiques pour nos secteurs traditionnels de l'agriculture et des ressources et per-


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mettra une plus grande ouverture des marchés aux produits à valeur ajoutée et aux produits de haute technologie.

Non seulement cet accord aidera le Canada à s'adapter aux forces de la mondialisation mais il nous permettra d'en exploiter les avantages par le développement d'une structure industrielle dynamique. L'Uruguay Round accroîtra considérablement nos possibilités d'exportation vers l'Asie-Pacifique, région dont je suis responsable, qui possède l'économie la plus dynamique du monde.

L'Uruguay Round stimulera énormément les exportations canadiennes de produits agricoles et de ressources vers les pays du Pacifique. L'accord nous apportera également plus de débouchés dans le domaine des télécommunications et dans d'autres secteurs importants de l'infrastructure, où les besoins de l'Asie sont considérables et où le Canada détient une bonne position concurrentielle.

(1345)

L'Organisation mondiale du commerce, qui supervisera l'application des accords et en assurera l'administration, sera un important facteur d'égalisation du commerce international pour les pays de faible et de moyenne importance et pour les pays en voie de développement. Des pays comme le Canada seront moins vulnérables aux tentatives des économies plus puissantes d'empiéter sur leurs marchés d'exportation.

Récemment, l'accélération du processus et l'établissement de délais, les mesures prises pour faire en sorte qu'il soit plus difficile de bloquer l'application du rapport d'un groupe spécial et la promesse d'éviter les mesures de rétorsion unilatérales présentent un intérêt tout particulier pour le Canada.

Le projet de loi C-57 clarifiera l'utilisation des règles commerciales multilatérales et assurera une plus grande discipline à ce chapitre. Pour la première fois, il existera un processus d'appel ayant force obligatoire, ce qui constitue une amélioration par rapport au système actuel du GATT. Il est important que le projet de loi C-57 entre en vigueur le plus rapidement possible afin que le ministre puisse exercer ses pleins pouvoirs législatifs et poursuivre ses importantes initiatives sur la scène internationale, dans l'intérêt de tous les Canadiens.

La puissance économique actuelle et future du Canada dépendra de notre volonté de demeurer à l'avant-garde de la libéralisation du commerce et de participer activement à l'établissement de nouveaux liens et à la création de nouvelles structures en vue d'étendre la portée d'un ordre international fondé sur des règles.

Le premier ministre a déclaré à Hong Kong, au cours de notre récent voyage en Asie, qui a été couronné de succès: «Nous serons un exemple pour le monde et nous entrerons dans le XXIe siècle fiers, concurrentiels et généreux.» Le projet de loi assurera la réussite de l'Organisation mondiale du commerce et permettra au Canada de demeurer un des pays les plus prospères du monde.

Mme Elsie Wayne (Saint John, P.C.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques observations au député.

Je ne sais pas si le député ou ses collègues du gouvernement se rendent compte que ce projet de loi menace la viabilité de l'industrie sucrière du Canada. Depuis une semaine, on me fait remarquer que, si les mesures prises par les Américains, qui sont d'ailleurs prévues dans ce projet de loi, n'étaient toujours pas contestées par le gouvernement canadien, des sociétés canadiennes devront fermer de nombreuses installations faisant partie de l'industrie sucrière.

Dans ma région, il se peut que la sucrerie Lantic ferme ses portes le 1er janvier 1995, si le projet de loi dans sa forme actuelle n'est pas remis en question.

On me dit que le gouvernement canadien ne s'est pas aperçu qu'en présentant des engagements concernant l'accès au marché, les États-Unis en ont profité pour restreindre considérablement notre capacité déjà limitée d'exporter sur le marché américain. Cela vise l'industrie sucrière canadienne.

Le député peut-il me dire ce que le ministre entend faire à cet égard? Il nous reste à peu près un mois. Il se peut que 1 700 emplois soient menacés dans l'industrie sucrière du Canada, si nous laissons adopter ce projet de loi tel quel.

M. Chan: Monsieur le Président, je ne suis pas au courant de l'effet qu'aura le projet de loi sur l'industrie sucrière.

Si nous considérons toute l'incidence de cette mesure au Canada, il ne fait aucun doute dans mon esprit que l'Uruguay Round et la mise en place de l'Organisation mondiale du commerce nous permettent de progresser vers un libre accès aux marchés partout dans le monde.

Je voudrais prendre la question en délibéré et demander au ministre du Commerce international et au ministère d'étudier la question afin de fournir une réponse appropriée à la question de la députée.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, mon collègue du Parti libéral qui vient d'intervenir a apporté plusieurs arguments voulant que l'OMC soit très avantageux pour le commerce extérieur du Canada.

(1350)

Il disait que ce serait avantageux pour les agriculteurs, pour exporter nos richesses naturelles, pour la haute technologie; ce sera également avantageux pour les industries de transformation. Est-ce que cela peut être avantageux sur toute la ligne?

C'est un homme franc, il est reconnu comme tel. Est-ce qu'il pourrait prendre quelques secondes, quelques minutes de son temps pour nous dire dans quel domaine ce serait moins avantageux?

[Traduction]

M. Chan: Monsieur le Président, il ne fait aucun doute dans mon esprit qu'il y a au Canada des entreprises qui sont moins compétitives et d'autres qui le sont davantage.

L'élément le plus important de cet accord est le fait qu'il impose des règles du jeu équitables à tous les pays: les règles seront désormais les mêmes pour tout le monde. En créant des mécanismes de règlement des différends bien définis et en exigeant que les économies fortes prennent des mesures latérales si elles veulent influer sur les exportations des puissances économiques moyennes, on fait un pas dans la bonne direction.

Nous, les Canadiens, devrons devenir très compétitifs dans notre façon de saisir les occasions offertes avant de pouvoir profiter de cet accord. Il n'y a pas à s'en sortir. Pour conserver notre force économique de même que toute notre intégrité et toutes les valeurs du Canada, nous devons être en mesure de réussir sur le marché mondial. Même dans le secteur agricole, si nous pouvions jouir de toute la latitude nécessaire pour soutenir

8422

la concurrence au niveau international, si les subventions étaient éliminées dans la plupart des autres pays, nous serions en mesure de réussir fièrement et librement.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais intervenir dans le débat.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de permettre au député d'intervenir, je voudrais savoir s'il y a d'autres observations ou d'autres questions à poser au secrétaire d'État?

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, j'ai eu l'occasion comme membre officiel du Comité mixte du commerce international de travailler assez longuement en ce qui concerne la nouvelle voie que l'on doit donner au Canada pour faire en sorte que le Québec et le Canada se comportent mieux au niveau international. Nous avons étudié les nouvelles politiques en ce qui concerne différents secteurs, et la façon dont le Canada devrait se comporter en ce qui a trait aux affaires internationales.

Tout particulièrement aujourd'hui, nous parlons du projet de loi C-57 qui confirme l'Organisation mondiale du commerce. En tant que membre de ce comité et en tant que député de cette Chambre depuis plus de dix ans maintenant, je dois d'abord vous dire que je suis d'accord avec l'ensemble du projet de loi. C'est pour cette raison que je vais plutôt parler du rôle que les législateurs du Québec et du Canada devraient jouer vis-à-vis de cette nouvelle ouverture des marchés à laquelle nous aurons à faire face dans les années futures.

La responsabilité des législateurs est de collaborer, créer et maintenir une société juste et équitable. Pour créer une société juste et équitable, il faut garder à l'esprit de permettre aux individus, aux Québécois et aux Canadiens, un peu d'espoir, pour ceux et celles en tout cas qui ont le désir de risquer de créer, d'investir et de réussir dans cette société. Tout en étant équitable, il faut aussi s'assurer que les gens ont un peu l'espoir de réussir sans être obligés de donner avant de recevoir.

Il faut s'attaquer aussi au problème économique, cela va de soi. On a un problème économique majeur actuellement. Il y a presque 12 p. 100 de chômeurs et 12 p. 100 de gens qui touchent le bien-être social, ce qui veut dire qu'il y a 22, 23 ou 24 p. 100, selon les régions, de gens qui sont aptes à travailler mais qui n'ont pas de travail. C'est très malheureux et il faut s'attaquer à ce problème économique qui est épouvantable.

Il faut s'assurer aussi de l'adoption de législations appropriées qui vont faire en sorte d'améliorer la situation économique.

(1355)

Le problème économique, bien sûr, je viens de le mentionner, est un chômage élevé, une main-d'oeuvre qualifiée qui ne trouve pas d'emplois, une main-d'oeuvre qui manque de compétence pour occuper des emplois disponibles, la faiblesse de la création d'emplois et une déficience dans la formation de la main-d'oeuvre. Ce sont des constats que l'on peut faire chaque jour. Il y a des problèmes majeurs.

La productivité est stagnante. On sait que la productivité n'augmente pas réellement à l'heure actuelle, alors il faut trouver de nouvelles façons de l'augmenter pour faire face, justement, à ces marchés internationaux. Il y a une stagnation, aussi, des investissements. Il faut une formule pour faire en sorte que les gens viennent investir, et pour ce faire, bien sûr, il faut, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, un environnement pour nos entreprises qui soit propice à l'investissement.

On remarque que depuis plusieurs années, les investisseurs hésitent énormément à venir s'installer pour différentes raisons, entre autres la dette, l'emploi qui est inadéquat. Il y a aussi les marchés. Envers les marchés, c'est un avantage pour les investisseurs, mais il faut trouver de nouvelles façons pour faire en sorte que la stagnation des investissements disparaisse.

Pour ce qui est de la dépendance à l'endroit des produits manufacturés et importés, actuellement, on est dépendant de beaucoup de ces produits. On est dépendant d'autres pays. Par exemple, les États-Unis ont plusieurs grandes sociétés qui se sont installées ici et nous avons aussi beaucoup de produits que nous importons. On devient dépendant des importations et de nos produits manufacturés qui ne sont pas nécessairement contrôlés par nous.

Il faut trouver des solutions intelligentes à ce sujet, favoriser la création d'emplois et la formation de la main-d'oeuvre. Nous sommes toujours aux prises avec cette incohérence, ce manque de concertation entre le gouvernement fédéral et le Québec, pour la formation de la main-d'oeuvre. C'est un handicap épouvantable pour le Québec de ne pas pouvoir contrôler sa formation de la main-d'oeuvre et de la former adéquatement pour nos entreprises, pour faire en sorte d'augmenter la productivité.

C'est un malheur, c'est scandaleux et c'est un entêtement du gouvernement fédéral, qui continue à vouloir former la main-d'oeuvre avec des critères nationaux. On sait très bien que plusieurs pays du monde, particulièrement les pays qui réussissent très bien, l'Allemagne et le Japon, entre autres, font depuis plusieurs années une formation de la main-d'oeuvre régionale, une formation de la main-d'oeuvre propice à l'industrie, une formation de la main-d'oeuvre même au niveau de la science.

Souvent, on a des critères vraiment régionaux pour faire en sorte que les employés, les individus qui sont formés correspondent vraiment au secteur d'activité économique de la région. Monsieur le Président, comme vous me demandez d'arrêter pour la période des questions, je reviendrai après. Merci.

Le Président: D'accord, mon cher collègue, vous reprendrez la parole après la période des questions.

[Traduction]

Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


8422

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, la vice-première ministre et ministre de l'Environnement a récemment annoncé un plan d'action à cinq volets qui contribuera à relancer les initiatives à caractère écologique d'Environnement Canada et à épargner de l'argent.


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L'un des plus importants changements que prévoit ce plan est l'introduction d'une politique d'acquisition reposant sur des principes écologiques et visant à garantir l'achat de produits sains pour l'environnement. Selon la nouvelle politique d'acquisition, les employés doivent utiliser des produits portant l'Éco-Logo ou dépassant les normes du programme Choix environnemental et utiliser des produits qui ont été recyclés ou qui peuvent l'être.

La politique exhorte les fonctionnaires à éviter tout produit contenant des ressources qui proviennent de régions écologiquement fragiles. Le personnel évitera également d'acheter des produits trop emballés et, si possible, demandera aux fournisseurs de reprendre les emballages excessifs pour les réutiliser et les recycler.

Cette initiative permet non seulement de protéger l'environnement et d'épargner de l'argent, mais aussi de contribuer au développement des entreprises environnementales canadiennes, et partant, de créer des emplois, de stimuler l'économie et d'accroître notre compétitivité au niveau international.

De nombreux ministères ont déjà emboîté le pas et pris des mesures environnementales importantes.

* * *

[Français]

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement libéral rejette les appels des milieux d'affaires et d'associations de citoyens qui demandent une réduction des cotisations d'assurance-chômage. Le taux élevé de cotisation freine la création d'emplois en plus de démoraliser les contribuables qui paient toujours davantage pour moins de services.

Comment le gouvernement peut-il continuer à faire la sourde oreille aux demandes des contribuables, sachant que le taux actuel, selon les dires du ministre des Finances, tue les jobs?

Le ministre doit établir une véritable stratégie de création d'emplois plutôt que de ramasser les discours d'illusions que le gouvernement libéral entretient auprès de la population.

Le gouvernement libéral doit trouver une solution plus originale que de continuer à presser le citron des contribuables québécois et canadiens pour financer la dette.

* * *

[Traduction]

LES TECHNIQUES DE REPRODUCTION

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, en 1989, une commission royale d'enquête a été chargée de se pencher sur la question des nouvelles techniques de reproduction. Pendant quatre ans, cette commission a mené des recherches et tenu des audiences publiques, des sondages d'opinion et des consultations auprès d'un large éventail de groupes.

En 1993, la commission a publié son rapport en deux volumes, comptant 1 300 pages et 293 recommandations. Cela fait plus d'un an que ce rapport a été publié, mais la réponse tardive du gouvernement s'est résumée en une promesse de tenir d'autres discussions.

Le temps n'est plus aux discussions, mais à l'action. C'est pourquoi je me suis inspirée de six recommandations de la commission pour proposer une motion d'initiative parlementaire sur la question de la détermination du sexe du foetus à des fins non médicales.

J'exhorte le gouvernement à m'emboîter le pas et à donner suite aux recommandations du comité pour empêcher une commercialisation plus poussée des techniques de reproduction.

* * *

MME ALEXA MCDONOUGH

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, au nom du caucus néo-démocrate, je veux rendre hommage à Alexa McDonough qui, la semaine dernière, a démissionné de son poste de chef du Nouveau Parti démocratique de la Nouvelle-Écosse. Les nombreuses réalisations d'Alexa en Nouvelle-Écosse nous rappellent que notre parti a été celui qui, le premier, a confié à des femmes des postes de responsabilité.

En 1932, Agnes Macphail, qui, en 1921, avait été la première femme à se faire élire au Parlement, s'est inscrite au CCF. En 1951, Thérèse Casgrain est devenue chef de l'aile québécoise du CCF et, même si elle n'a pas été élue, elle a été la première femme chef d'un parti politique provincial au Canada.

Un an après son élection comme chef du parti en 1980, Alexa est elle-même devenue la première femme à diriger un parti dans une assemblée législative. Ma collègue, le chef du NPD, la députée du Yukon, a bouclé la boucle en 1989 en devenant la première femme à se faire élire à la tête d'un parti fédéral.

Nous remercions Alexa pour 14 années de dévouement à la cause de la justice sociale au Canada, cause qui doit être défendue partout dans le monde en cette époque de mondialisation effrénée. Nous reconnaissons tous la dette que nous avons envers les Canadiennes distinguées et engagées qui ont dirigé notre mouvement et qui, en même temps, sont entrées dans l'histoire du Canada.

* * *

[Français]

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre du Québec s'est adressé la semaine dernière aux membres du Canadian Club de Toronto.

Dans son allocution, le leader indépendantiste du Québec a mis en garde ses auditeurs contre les conséquences qu'aurait sur eux une éventuelle victoire du non lors du prochain référendum.


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Il les a prévenus que si les Québécois votaient non à son projet d'indépendance du Québec, ils continueraient d'être insatisfaits de leur statut au Canada et seraient aussi emmerdants pour les Canadiens anglais qu'une interminable séance chez le dentiste, rapporte le quotidien Le Droit.

Il a affirmé qu'une victoire du non au référendum ne règlera rien et que tous les problèmes constitutionnels canadiens persisteront, alors qu'une victoire du oui débarrasserait pour de bon le Canada du problème québécois.

Je crois que le premier ministre du Québec a raté une belle occasion cette semaine de faire toute la lumière sur le contenu véritable de son projet indépendantiste. Ce n'est certes plus en essayant de faire peur au reste du Canada qu'il va réussir à vendre son projet. L'important pour les gens du Québec c'est de savoir clairement. . .

* * *

[Traduction]

L'ÉQUIPE FÉMININE DE BASKET-BALL, LES WESMEN DE WINNIPEG

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, saviez-vous que l'équipe féminine de basket-ball de l'Université de Winnipeg, les Wesmen, est en train de passer à l'histoire?

Vendredi soir dernier, cette équipe a égalé le record du plus grand nombre de victoires consécutives dans l'histoire du sport collégial en Amérique du Nord en enregistrant sa 88e victoire d'affilée. Ce record avait été établi entre 1970 et 1974 par l'équipe masculine de l'Université de la Californie à Los Angeles, les Bruins.

(1405)

On ne peut vraiment pas arrêter ces jeunes femmes. Elles pourraient fort bien battre le record nord-américain lorsqu'elles affronteront les Bisons de l'Université du Manitoba vendredi soir prochain.

Je demande à mes collègues de se joindre à moi pour leur souhaiter bonne chance sur le terrain vendredi soir. À toutes les joueuses et à leur entraîneur, Tom Kendall, nous souhaitons un nouveau record nord-américain.

* * *

LE SOMMET DE PARIS SUR LE SIDA

Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Monsieur le Président, notre premier ministre assistera au Sommet de Paris sur le SIDA le 1er décembre. Ce sommet est une initiative de la France en coopération avec l'OMS. Quarante-deux pays, représentant 70 p. 100 de la population mondiale, affirmeront conjointement leur engagement à lutter contre le VIH et le SIDA.

La déclaration de Paris reflétera les principes et les valeurs déjà adoptés par les Nations Unies concernant le VIH et le SIDA et constituera un nouvel encouragement pour inciter les pays à répondre aux besoins urgents au moyen de mesures pratiques et durables. Cette déclaration devrait entrer en vigueur en janvier 1996.

Le SIDA est un problème de santé publique, et les chefs politiques du monde ont fait du combat contre cette maladie une priorité. On accordera une attention spéciale à la réduction de la vulnérabilité des femmes au SIDA, au rôle important des associations des personnes atteintes du SIDA, et au renforcement des mécanismes nationaux et internationaux de défense des droits de la personne et de l'éthique par rapport au SIDA.

Je suis fière de dire que le Canada s'est acquis une réputation de chef de file international dans les trois domaines.

* * *

[Français]

LES INDEMNITÉS DE DÉPART

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, après quatre mois de travail, M. Gary Anstey, adjoint exécutif du ministre des Pêches et des Océans, a bénéficié d'une indemnité de départ de 31 000 $. M. Anstey a été réengagé le mois dernier à un salaire annuel de 93 000 $ et n'a pas eu à rembourser son indemnité, bien qu'il ait quitté volontairement son emploi.

En guise de réplique, le ministre des Pêches et des Océans tente de calmer l'indignation légitime du public en expliquant que cette pratique respecte les lignes directrices émises par le Conseil du Trésor.

Alors, que pense le ministre des Pêches et des Océans des règles établies par le ministère du Développement des ressources humaines qui prive les chômeurs de leurs prestations s'ils ont volontairement quitté leur emploi? Cette politique de deux poids, deux mesures ne fait que miner la crédibilité du ministre des Pêches et des Océans et de l'ensemble du gouvernement qui acceptent de perpétuer pareille pratique devenue encore plus inacceptable dans un contexte de crise des finances publiques.

* * *

[Traduction]

LA STATION DE MONTAGNE SILVER STAR

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui féliciter l'une des étoiles de la circonscription d'Okanagan-Shuswap. Il s'agit de la station de montagne Silver Star, qui a été récemment classée meilleure station de ski de famille dans le Insider Guide to Ski Resorts de Fodor.

La station de montagne Silver Star, située à 45 minutes de Vernon, ville en croissance du nord de l'Okanagan, a également été remarquée dans le Ski Canada Magazine de novembre. Elle a obtenu le titre de plus beau village de montagne dans l'ouest du Canada, devant Whistler, qui vient au deuxième rang.

En 1993, la station Silver Star a attiré quelque 263 000 skieurs, qui auraient, selon les estimations, injecté 50 millions de dollars dans l'économie régionale. La montagne reçoit plus de 18 pieds de neige par année, ce qui assure des conditions stables sur les 72 pistes, desservies par 8 remonte-pentes. Avec le ski nautique l'été et le ski de neige l'hiver, la splendide circonscription d'Okanagan-Shuswap est vraiment en train de devenir la mecque des amateurs de sports de plein air.


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[Français]

LES CRIS DE LA BAIE JAMES

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'aviser la Chambre que le gouvernement du Canada a récemment signé une entente tripartite substantielle pour les services de police avec les Cris de la Baie James et la province de Québec. Il est prévu que l'effectif en place sera doublé. Ceci permettra au service de police d'améliorer la sécurité des personnes vivant dans les neuf communautés cries couvertes par cette entente.

Ce service de police des Premières nations sera mieux adapté, tenant compte davantage de la culture et des besoins des personnes cries qui y vivent. Cete entente, d'une durée de trois ans, reflète bien les grandes lignes véhiculées dans la politique sur les services de police des Premières nations. Cette politique prévoit le partage des coûts à raison de 52 p. 100 par le gouvernement du Canada et 48 p. 100 par le gouvernement provincial.

Je suis assuré, chers confrères et consoeurs, que vous vous joindrez à moi pour transmettre mes félicitations au solliciteur général du Canada, au gouvernement du Québec et aux Cris de la Baie James pour la signature d'une entente aussi importante.

* * *

(1410)

[Traduction]

LE PARTI RÉFORMISTE

Mme Marlene Cowling (Dauphin-Swan River, Lib.): Monsieur le Président, on a vite découvert le manque de profondeur de la pensée réformiste.

Depuis plus d'un an, les députés réformistes divaguent au sujet des compressions de dépenses publiques. Divaguer, c'est bien le mot, car leur porte-parole en matière de finances a reconnu hier n'avoir pas la moindre idée des répercussions qu'auront sur les Canadiens ou sur leur économie les compressions de 25 milliards de dollars qu'ils préconisent. Le Parti réformiste considère-t-il que c'est là une ligne de conduite responsable en matière de finances publiques?

Les réformistes veulent à tout prix sabrer les dépenses, qu'importe ce qui arrive, qu'importe s'ils provoquent une crise économique.

Le Parti réformiste ne s'en soucie peut-être pas, mais je me réjouis que le gouvernement libéral ait à coeur le bien-être des Canadiens et leur prospérité économique. Les réformistes ont eu plus d'un an pour examiner les dépenses gouvernementales, et c'est là le mieux qu'ils peuvent faire. Ils devraient avoir honte.

* * *

ÉQUIPE CANADA

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre et Équipe Canada ont montré la voie à suivre pour la prospérité du pays.

La signature récente, avec la Chine et l'Indonésie, de contrats commerciaux évalués à des milliards de dollars stimulera la croissance de l'économie canadienne. L'activité économique dépendra, dans les années à venir, de notre accès aux marchés en expansion constante des pays du Pacifique.

Je demande au gouvernement d'adopter le concept d'Équipe Canada pour tisser de nouveaux liens économiques avec d'autres pays. Je suis favorable à la mise sur pied d'une mission commerciale sur le modèle d'Équipe Canada pour percer ces nouveaux marchés d'une très grande importance pour les biens et services que nous produisons dans la circonscription de Bramalea-Gore-Malton, voire dans toutes les circonscriptions du pays.

* * *

[Français]

L'ÉTHIQUE

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, après un an de pouvoir, le gouvernement libéral s'est rapidement distingué par les nombreux cas de patronage et de nominations politiques empreintes de favoritisme. Tous se souviennent des promesses du livre rouge selon lesquelles, une fois au pouvoir, les libéraux s'engageraient dans une réforme du système parlementaire sur une base non partisane.

Or, plutôt que d'enclencher une telle réforme, le gouvernement libéral s'est contenté de répéter les mêmes abus que le gouvernement précédent. Ce manque flagrant d'éthique et de transparence par rapport aux engagements mêmes des libéraux est lourd de conséquences. Il démontre hors de tout doute que le Parti libéral du Canada, loin d'apporter un renouveau dans le parlementarisme canadien, se complaît sans gêne dans la même arrogance, allant jusqu'à battre des records de patronage, pourtant durement condamné à l'époque où ils étaient dans l'opposition.

Voilà une raison supplémentaire, puisque le système canadien ne peut se réformer, pour que le Québec s'en affranchisse le plus rapidement possible.

* * *

[Traduction]

L'ENREGISTREMENT DES ARMES À FEU

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, un agent qui est dans la GRC depuis vingt ans m'a dit ce qui suit: «D'après mon expérience, l'utilisation d'armes à feu dans les agressions et les meurtres n'est rien à côté de celle de couteaux et d'instruments contondants. Restreindre l'utilisation légale des armes à feu par d'autres citoyens constitue une intrusion inutile.

Si le gouvernement met en oeuvre son plan d'enregistrer les armes à canon long, nous serons tellement occupés à remplir des formules et à faire respecter la loi que les criminels en profiteront. Autant ranger nos uniformes et nos revolvers dans le placard parce que tout notre temps sera consacré au travail de bureau.»

À ma connaissance, les plus fermes opposants à l'enregistrement des armes à feu sont des agents de la GRC, notamment des

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agents à la retraite comme l'ancien commissaire adjoint Robert Head et d'autres ici même sur la colline du Parlement.

L.H. Nicholson, le plus respecté des commissaires de l'histoire de la GRC, s'est opposé avec véhémence à l'enregistrement. Mais, évidemment, les libéraux ne s'intéressent pas aux points de vue des gens qui savent en fait de quoi ils parlent.

* * *

LE COMMERCE INTERNATIONAL

Mme Elsie Wayne (Saint John, P.C.): Monsieur le Président, pendant de nombreuses années, les États-Unis ont systématiquement réduit l'accès du Canada à leurs marchés. Lorsque le Canada a signé l'accord résultant de l'Uruguay Round, le 15 avril 1994, l'industrie sucrière canadienne s'est réjouie de la conclusion de ces négociations.

Ce qu'elle ignorait, c'est que les États-Unis en ont profité pour restreindre sévèrement la capacité déjà limitée du Canada d'exporter ses produits vers les marchés américains lorsqu'ils ont déposé leurs engagements sur l'accès aux marchés. Résultat: l'accès aux marchés américains risque d'être pratiquement anéanti le 1er janvier 1995, lorsque les États-Unis mettront en vigueur leur annexe du GATT.

Au cours des années 80, le gouvernement américain a pris des mesures pour empêcher les raffineurs canadiens de sucre de canne d'exporter leurs produits vers les États-Unis. Maintenant, ce sont les producteurs de betteraves qui seront touchés. À moins que le gouvernement fédéral n'agisse, 1 700 emplois seront perdus au Canada.

(1415)

J'exhorte le gouvernement à trouver une solution à ce problème. Comme il ne reste plus qu'un mois, le temps presse.

* * *

L'OSTÉOPOROSE

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, novembre est le Mois de l'ostéoporose.

L'ostéoporose est une affection débilitante qui fragilise les os et les rend plus susceptibles aux fractures. Plus d'un million de Canadiennes de plus de 50 ans souffrent d'ostéoporose et deux autres millions risquent de développer cette maladie. En outre, 400 000 hommes canadiens en sont atteints.

On peut prévenir et traiter l'ostéoporose par l'information et la sensibilisation. C'est pourquoi Santé Canada appuie financièrement la Société de l'ostéoporose du Canada et sa campagne en faveur de meilleurs soins pour les os. Cette campagne encourage les Canadiens à examiner leur alimentation, afin qu'elle soit suffisamment riche en calcium, et à faire des choix de vie plus sains.

Le programme d'alimentation prénatale du Canada fournit aux futures mères des séances de counseling et des conseils sur les bons aliments à ingérer pour absorber plus de calcium. En enseignant aux femmes comment rester en bonne santé avant et après la grossesse, on améliore la vie des Canadiens de la prochaine génération.

Je suis heureuse de voir que ces initiatives visent le bien-être de toutes les générations. Je crois que les députés devraient, eux aussi, examiner leur style de vie et agir dès maintenant à cet égard.

* * *

LA COUPE GREY

M. Harbance Singh Dhaliwal (Vancouver-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole à la Chambre aujourd'hui pour féliciter les Lions de la Colombie-Britannique de leur saison vraiment exceptionnelle de leur brillante victoire en finale de la coupe Grey et d'avoir gardé notre précieuse coupe au Canada.

Les Lions de la Colombie-Britanniques ont dépassé nos attentes et ont su défendre l'honneur du Canada en veillant à ce qu'une équipe sans nom retourne chez elle comme elle était venue, c'est-à-dire les mains vides. L'équipe des Lions a fait la fierté de tous les habitants de Vancouver et de la Colombie-Britannique, ainsi que de tous les Canadiens.

Au nom de tous les députés et de tous les électeurs de Vancouver-Sud, je félicite l'équipe de football, les Lions de la Colombie-Britannique, qui a remporté une victoire fantastique!

Des voix: Bravo.

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8426

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA BOSNIE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, on apprend que les forces serbes bosniaques ont intensifié leur offensive sur l'enclave musulmane de Bihac où 70 000 personnes sont littéralement assiégées en compagnie de 1 200 Casques bleus impuissants. Pendant ce temps, l'étau se resserre considérablement sur les Casques bleus à Visoko et l'armée serbe bosniaque menace de les bombarder dans les 48 heures.

Le premier ministre confirme-t-il l'information selon laquelle l'armée serbe bosniaque s'apprête à bombarder la base des Casques bleus canadiens à Visoko?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous n'avons pas d'indication voulant que les Serbes s'apprêtent à reprendre leur attaque sur la base de Visoko. Nous espérons que tout le monde va garder son sang-froid, que les combats vont cesser et qu'on va accepter un cessez-le-feu dans les plus brefs délais.

Les soldats canadiens sont là, non pas pour faire la guerre, mais pour des raisons humanitaires, pour distribuer de la nourriture et des médicaments à la population. Ils ont fait un excellent travail jusqu'à aujourd'hui et ni les Serbes ni les Musulmans n'ont de raison d'attaquer nos vaillants soldats.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre est-il certain, a-t-il vérifié si les résolutions adoptées par l'ONU permettent aux Casques bleus de riposter et d'assurer leur sécurité s'il advenait que l'armée serbe mette à exécution ses menaces de bombardement?


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Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les Nations Unies ont donné des règles d'engagement très précises à chacun des groupes qui opèrent sous leur égide. S'ils sont vraiment attaqués ils peuvent riposter, mais j'espère qu'ils n'auront pas à avoir recours au droit qu'ils ont de se défendre.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre peut-il nous indiquer si le Canada entend user de son influence pour faire en sorte que le groupe contact composé de la France, du Royaume-Uni, de la Russie, de l'Allemagne et des États-Unis adopte une position uniforme quant aux moyens à privilégier pour mettre en place ce processus de négociation de paix en Bosnie?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, notre ministre des Affaires étrangères se trouve à Moscou, à l'heure actuelle. Il a eu des conversations un peu plus tôt aujourd'hui avec ses collègues russes. Tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut essayer de trouver une solution négociée et qu'il faut un cessez-le-feu dans les plus brefs délais.

* * *

(1420)

LA MIL DAVIE

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. L'Office Canada-Terre-Neuve des ressources pétrolières vient de rendre sa décision sur le transfert, sans appel d'offres, d'un contrat de construction à la Saint John Shipbuilding dans le cadre du mégaprojet Hibernia. L'Office Canada-Terre-Neuve a statué de manière non équivoque que le chantier québécois MIL Davie avait été lésé puisqu'il avait lui-même soumissionné sur ce contrat, contrairement à la Saint John Shilbuilding. Il s'agit d'un important contrat représentant plusieurs centaines d'emplois.

Comment le premier ministre justifie-t-il la décision du consortium Hibernia, dont il est actionnaire, d'octroyer directement ce contrat à la Saint John Shipbuilding plutôt qu'à la MIL Davie, en violation flagrante des règles prévues pour l'octroi du contrat?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été informé hier de ce malheureux incident. Je suis d'accord avec l'honorable député que le contrat n'aurait pas dû être octroyé directement aux chantiers maritimes de Saint John. J'ai demandé au ministre des Ressources naturelles d'entrer immédiatement en communication avec le président du consortium, et nous leur avons demandé de réviser leur décision. Certains prétendent qu'ils avaient le pouvoir légal de le faire, mais ils brisaient certainement l'esprit de l'accord à l'effet de donner une chance à tous les coureurs. Nous espérons qu'ils vont réviser leur position de telle façon que la MIL Davie puisse faire une soumission, comme les autres.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le premier ministre s'engage à donner des directives claires aux représentants du gouvernement qui siègent au sein du conseil d'administration d'Hibernia, afin que ce dernier plaide en faveur de l'octroi du contrat à la MIL Davie?

[Traduction]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons communiqué avec le consortium pour l'informer qu'il devrait revoir sa décision. Nous avons été très clairs. Il y a un représentant, non pas un représentant direct du gouvernement fédéral mais d'une société liée au gouvernement, et nous lui ordonnerons de voter en faveur d'une modification de la décision.

* * *

L'ÉCONOMIE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, selon un document confidentiel du Fonds monétaire international rendu public aujourd'hui, l'objectif du gouvernement de réduire le déficit à 3 p. 100 du PIB est tout à fait inadéquat et fera en sorte que la dette fédérale grossira de 155 milliards de dollars en quelques années.

Le problème est que l'objectif de réduction du déficit du ministre est essentiellement politique, puisqu'il vise à apaiser ceux qui s'opposent aux dépenses élevées. Il ne s'agit pas d'un véritable objectif financier visant à équilibrer le budget.

Le ministre des Finances va-t-il suivre l'avis du FMI et proposer sans tarder des objectifs de réduction du déficit plus audacieux?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, l'objectif de 3 p. 100 est très important. Il correspond à l'étape de l'évolution de l'économie nationale où le taux de croissance de l'économie surpasse de nouveau le taux de croissance de la dette.

L'objectif de 3 p. 100 est aussi un objectif très ambitieux, puisqu'il signifie qu'en moins de trois ans, le déficit aura diminué de moitié en pourcentage du PIB. Cet objectif n'a été atteint par aucun gouvernement des 20 dernières années et sa réalisation exigera un programme très ambitieux.

Non seulement nous sommes disposés à suivre l'avis du FMI, mais j'ajouterai qu'au cours des conversations que nous avons eues à Madrid avec les représentants d'autres pays membres du FMI, le Canada a été cité en exemple pour sa performance économique.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre tourne autour du pot. Si le ministre des Finances ne s'engage pas à établir un objectif de réduction du déficit plus audacieux, n'est-ce pas en réalité parce qu'il ne réussit pas à convaincre ses collègues du Cabinet de prendre les mesures nécessaires pour réduire les dépenses du gouvernement?

Au cours du mois qui vient de s'écouler, les ministres et dirigeants d'organismes ont comparu les uns après les autres devant nos comités pour plaider, non pas en faveur de réductions majeures des dépenses mais en faveur d'un accroissement des dépenses ou de leur maintien à un niveau élevé. Par exemple, le ministre du Patrimoine aurait déclaré la semaine dernière qu'il démissionnerait si la Société Radio-Canada était partiellement privatisée.


8428

Le ministre des Finances est-il prêt à porter les compressions des dépenses au niveau recommandé au FMI et ailleurs, même au risque de voir certains de ses collègues du Cabinet démissionner?

(1425)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, le Cabinet et le gouvernement s'en tiennent tous à l'objectif de 3 p. 100.

Il n'y a aucune scission dans notre parti, contrairement à ce qui s'est passé au sein du Parti réformiste, dont le chef a eu les mains liées par l'intervention d'un de ses députés qui a enfin déclaré qu'après une année, il était peut-être temps d'agir de façon constructive et dire ce que le parti entendait faire pour réduire le déficit.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, la réalité financière est la suivante. Les marchés financiers internationaux ont déjà pris en considération l'objectif de réduction du déficit du gouvernement; ils savent que notre devise est faible, que les taux d'intérêt sont à la hausse et que le chômage est toujours à 10 p. 100.

À moins d'adopter une position plus courageuse en vue de la réduction du déficit pendant la reprise économique actuelle, le gouvernement fera exactement la même erreur que le gouvernement Mulroney en 1984-1985.

Pourquoi le premier ministre ne met-il pas une partie de son capital politique actuel au service de l'élimination du déficit, au lieu de permettre à ses ministres de gaspiller ce capital politique en demi-mesures?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, notre programme est très clair. Nous avons réduit les dépenses et nous continuerons de le faire, mais nous veillons en même temps à maintenir la croissance économique.

Si nous éliminions dès demain le déficit de 42 milliards de dollars, il y aurait une terrible récession au Canada. Il est plus sage de procéder progressivement et c'est ce que nous faisons.

Beaucoup de gens disent que nous réduisons trop les dépenses, mais nous atteindrons notre objectif de 3 p. 100 du PIB pendant la troisième année de notre gouvernement.

* * *

[Français]

LE PROJET HIBERNIA

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Ressources naturelles.

Le gouvernement fédéral injecte des milliards dans le projet Hibernia et dispose de l'un des six sièges au conseil d'administration, ce qui lui permet d'influencer les décisions administratives, comme celle menant à l'octroi sans appel d'offres de contrats accordés à la Saint John Shipbuilding.

La ministre peut-elle justifier aujourd'hui son refus à toutes les demandes de l'opposition, depuis des mois, par rapport à l'ingérence quotidienne dans les décisions de gestion de la compagnie, ce qui a conduit aux problèmes actuels dans la façon d'accorder les contrats à la Saint John Shipbuilding?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais répéter ce que j'ai déjà dit et peut-être rectifier légèrement ce que le député vient de dire.

Nous occupons l'un des cinq sièges au conseil d'administration du projet Hibernia. Ce conseil a pour responsabilité de veiller à la bonne gestion quotidienne du projet Hibernia.

Je vais redire aujourd'hui ce que j'ai déjà dit, à savoir que le gouvernement n'a pas l'intention de procéder à une micro-gestion quotidienne de ce projet.

Comme le premier ministre l'a souligné, en ce qui a trait à la situation mettant en cause MIL Davie, l'Office Canada-Terre-Neuve des ressources pétrolières a déclaré que l'on n'avait pas donné à ce chantier et à d'autres compagnies canadiennes la pleine possibilité de présenter une soumission pour les travaux en question. Je pense que le premier ministre a dit très clairement aujourd'hui que cette situation nous préoccupait autant que le député et que nous allions prendre des mesures.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la même ministre.

D'après la réponse de la ministre de ne pas s'ingérer dans la gestion quotidienne, est-ce que je dois comprendre que le refus du fédéral d'intervenir s'inscrit dans une stratégie gouvernementale visant à fermer le dernier grand chantier maritime du Québec, alors que 90 p. 100 de tous les efforts de rationalisation dans la construction navale ont été soutenus par le Québec?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à répéter ce que j'ai dit plus tôt. J'ai été informé hier de l'octroi possible de ce contrat sans soumission. Nous sommes intervenus immédiatement. Nous avons demandé au président du consortium de rescinder la décision et de donner une chance aux autres constructeurs canadiens de pouvoir avoir accès à ce contrat.

Nous avons pris une décision immédiate, et les accusations du député ne tiennent pas.

* * *

(1430)

[Traduction]

LA BOSNIE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, les Serbes bosniaques ont annoncé leur intention de bombarder la base canadienne de Visoko. Au moment même où je vous parle, les soldats canadiens sont terrés


8429

dans leurs bunkers. L'aéroport de Sarajevo est fermé. Aucune aide humanitaire ne passe.

Le premier ministre continue-t-il à insister que les troupes canadiennes ont un rôle à jouer en Bosnie?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les troupes canadiennes sont très utiles là-bas. Nos soldats en Bosnie sont appelés à servir dans des circonstances extrêmement difficiles et à occuper des postes d'une très haute responsabilité.

Les soldats canadiens distribuent vivres et médicaments et continuent à essayer de négocier, afin de ramener la paix. Ils ne sont pas là pour pacifier le pays, mais pour maintenir la paix. Pour le moment, cette paix n'existe pas.

J'ai affirmé hier que tout le monde voulait voir l'arrêt des hostilités. Nous voulons que les belligérants, des deux côtés, parviennent à un accord de cessez-le-feu pour que les troupes canadiennes, qui servent sous l'égide des Nations Unies, puissent accomplir leur mission. Je pense qu'elles vont rester jusqu'à la fin de leur mandat, car lorsque les Canadiens s'engagent à faire quelque chose, ils le font.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, ce que veut le premier ministre est une chose qu'il ne peut avoir parce que la situation s'est aggravée. Il n'y a aucune opération d'aide humanitaire à l'heure actuelle en Bosnie.

Ce matin, le général Rose a dit que la situation débordait le cadre d'une mission de maintien de la paix. Si on envoyait les renforts nécessaires pour reprendre le contrôle de la situation, les Casques bleus canadiens seraient obligés de se battre et ils n'en ont pas le mandat.

Est-ce que le premier ministre pense que les Canadiens devraient se battre en Bosnie ou qu'ils devraient se retirer? Quelle est la position du gouvernement canadien?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la position du Canada est très claire: rester et essayer de ramener la paix. C'est la raison pour laquelle, depuis trois ans, nos soldats sont d'un si grand secours. Nous avons tenu un débat ici même; tout le monde a été consulté; la majorité des députés voulaient que le contingent canadien reste là-bas et mène à bien son mandat.

Nous allons négocier avec nos alliés mais nous avons décidé que la meilleure chose à faire était de rester avec les autres et d'essayer de ramener la paix. Le rôle du Canada n'est pas de participer aux hostilités. Nos soldats ne sont pas là-bas pour faire la guerre, mais pour faire régner la paix.

* * *

[Français]

LE SIDA

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. À quelques heures du départ pour le Sommet de Paris sur le SIDA, le premier ministre a fait, hier, étalage de son ignorance complète du dossier. C'est malheureux, mais il en est ainsi. Espérons qu'il en connaîtra plus aujourd'hui. Le premier ministre a répondu, hier en Chambre, que les sommes consacrées à la lutte contre le SIDA seraient révisées, comme tous les autres programmes gouvernementaux.

Le premier ministre peut-il confirmer, à la veille de son départ pour Paris, que son gouvernement s'apprête à réduire les fonds consacrés à la lutte contre le SIDA, contrairement à ce qu'il a toujours défendu, alors qu'il était dans l'opposition?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai donné aucune indication que nous avions l'intention de réduire les fonds. Ce n'est un secret pour personne que tout le monde voudrait qu'on verse plus d'argent pour la recherche médicale, non pas seulement pour le SIDA, mais pour les autres causes. Le gouvernement a des engagements, sur une période de cinq ans, de 203,5 millions de dollars et j'ai l'intention de respecter nos engagements.

Je dis que si on avait plus de moyens, on pourrait en mettre plus. Il y a une somme de 1,5 million de dollars qui n'a pas encore été allouée là-dessus, et la ministre a certaines options, dont un sommet d'organisé sur cette question, à Vancouver, en 1996. Une partie de cet argent servira à préparer ce sommet, qui amènera des experts ici, au Canada, de façon à faire avancer le dossier.

Alors, oui, hier, je n'étais pas au courant de ce qui se passait avec le 1,5 million de dollars, mais ça ne veut pas dire que je ne connais pas bien le dossier. Mais, au moins, je ne le savais pas, je me suis informé et j'ai la réponse aujourd'hui. J'ai assez d'humilité pour savoir que je ne peux pas tout connaître.

(1435)

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas plus clair, le premier ministre parle d'engagement sur cinq ans. Doit-on comprendre de l'incapacité du gouvernement à donner une réponse claire pour cette année qu'il confirme ainsi sa volonté de couper dans le budget sur le SIDA?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, un budget sera présenté à la Chambre au mois de février. Tous les dossiers sont étudiés en ce moment. Aucun n'est exempté, mais il n'y a pas d'indication que ce dossier sera plus affecté que les autres. Personnellement, j'espère qu'il demeurera au niveau promis antérieurement.

* * *

[Traduction]

LE CRTC

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Vendredi, le gouvernement a annoncé qu'il allait passer outre à la recommandation du CRTC et procéder à un ré-examen de la politique en ce qui concerne la transmission directe par satellite. Cet examen sera fait par un petit groupe d'initiés et à huis clos.


8430

Même si l'on demandera des interventions publiques, la décision sera prise par ce groupe nommé par le ministre.

Le ministre devrait prouver qu'il n'a pas de favoris dans l'industrie. Pourquoi ne laisse-t-il pas le CRTC, un organisme indépendant, étudier cette question?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le ministre du Patrimoine canadien et moi-même avons annoncé aujourd'hui la composition du groupe qui examinera les mémoires du grand public en vertu de son mandat publié dans la Gazette du Canada au sujet de la transmission directe par satellite.

Je voudrais que la députée comprenne bien deux choses. Tout d'abord, il ne s'agit absolument pas d'un rejet de la décision du CRTC d'accorder une exemption. Cette décision reste et le CRTC a fait savoir comment il prendrait ses décisions à l'avenir.

Je précise aussi cet autre point: il s'agit de la définition de la politique du gouvernement. C'est la responsabilité de celui-ci et non d'un organisme de réglementation. C'est pour cela que nous avons été élus en octobre de l'an dernier. C'est la responsabilité que nous devons assumer et que nous assumerons en annonçant une nouvelle politique.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, c'est effectivement une définition de la politique du gouvernement que de nommer un groupe soi-disant impartial de trois membres dont deux sont étroitement liés à Power Corp., au premier ministre et à ses associés.

L'examen n'a pas commencé, mais la manipulation est déjà là. Est-ce que le ministre du Patrimoine canadien restaurera la confiance dans le processus en annulant ce groupe et en renvoyant la question à un sous-comité mixte de l'industrie et du patrimoine?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, la députée vient de faire une déclaration très grave en ce qui concerne ces trois personnes, qui sont toutes d'anciens sous-ministres du gouvernement du Canada qui ont fait la preuve de leur bon jugement, de leur intégrité et de leur intelligence pendant des années.

Je voudrais la rassurer et lui dire que je me suis personnellement occupé, au mieux de mes compétences, de déterminer si ces personnes pouvaient être en position de conflit d'intérêts. Si la députée à connaissance de sources de conflit, j'aimerais qu'elle fasse des allégations précises sur la nature de ces sources, et ce, à une tribune qui engage sa responsabilité.

Entre temps, je dirais qu'il n'est pas convenable de mettre en doute l'intégrité de personnes qui acceptent une tâche à la demande du gouvernement du Canada.

[Français]

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le premier ministre ignorait hier le fonctionnement des programmes canadiens en matière de recherche clinique sur le SIDA, lui qui, dans 24 heures, doit en discuter à Paris.

Le premier ministre peut-il nous dire si son gouvernement a accepté la proposition conjointe de la Société canadienne du SIDA, de la Société canadienne d'hémophilie et de l'Association canadienne de santé publique visant à allouer les fonds discrétionnaires encore disponibles de 1,1 million de dollars à des projets de recherche clinique et fondamentale pour pallier le manque flagrant de fonds dans ces domaines?

(1440)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je vais tenter d'expliquer la situation de ce fonds de 1,5 million de dollars. J'ai indiqué qu'une partie de ce fonds avait déjà été allouée pour servir à l'organisation d'un sommet à Vancouver et que le ministre va assumer ses responsabilités et allouer les fonds encore disponibles là où ils pourront servir le mieux.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, comment le premier ministre justifie-t-il qu'il soit impossible de connaître, à quatre mois de la fin du présent exercice financier, les intentions du gouvernement sur la gestion du fonds discrétionnaire de 1,1 million? Et je veux rappeler au premier ministre que, l'an passé, 800 000 $ ont été périmés. Ils n'ont pas été dépensés parce que la ministre ne les a pas attribués aux organismes communautaires.

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, écoutez, c'est un peu ridicule de commencer à questionner des choses comme ça. Pour le 1,5 million de dollars, on sait que nous avons formé un comité qui a établi des lignes directrices pour les projets qui seront approuvés.

Pour le moment, nous avons quelques demandes à l'étude; elles n'ont pas été approuvées encore. On a déjà approuvé 400 000 $ pour la convention de Vancouver, en 1996.

* * *

[Traduction]

LES PENSIONS ALIMENTAIRES POUR ENFANTS

Mme Beryl Gaffney (Nepean, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Je me réjouis de la déclaration faite la semaine dernière par le ministre, à savoir qu'il allait revoir entièrement les lois régissant les pensions alimentaires pour enfants dans les cas de divorce. Ma question au ministre est comment. Comment va-t-il veiller à ce que les besoins des enfants soient satisfaits? En quoi ses plans vont-ils permettre de veiller à ce que les deux parents soient traités de façon juste et équitable? Et ce qui est plus important, quand?


8431

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai examiné avec mes collègues du Cabinet les questions que vient de poser la députée cet après-midi, ceci en vue des améliorations que je me propose d'apporter aux lois concernant le versement et l'imposition des pensions alimentaires pour enfants.

Les propositions auxquelles nous sommes en train de travailler portent sur trois questions: premièrement, la méthode de calcul utilisée pour déterminer le montant de la pension alimentaire à verser pour l'enfant; deuxièmement, la méthode utilisée pour le calcul des impôts et, troisièmement, la mise en place d'une stratégie nationale pour faire appliquer les ordonnances une fois qu'elles sont rendues.

En ce qui concerne la première et la troisième questions, nous travaillons en étroite collaboration avec nos homologues des provinces et des territoires pour nous assurer que le processus soit intégré.

Le ministre des Finances, le ministre du Développement des ressources humaines, le ministre du Revenu et ma collègue, la secrétaire d'État chargée de la Situation de la femme introduiront des propositions précises, y compris, si nécessaire, des propositions de modification des lois pertinentes une fois que les préparatifs seront terminés.

* * *

LA SANTÉ

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, la ministre de la Santé veut empêcher les cliniques privées d'Alberta d'imposer des frais d'établissement. Cette mesure touchera des cliniques privées dans toutes les provinces-des cliniques de chiropratique, de physiothérapie, d'avortement, de soins pour les cadres. . . En ai-je assez dit?

La ministre traitera-t-elle toutes les cliniques privées du Canada exactement de la même façon?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, c'est très difficile de prendre une question au sérieux quand on est en face d'une bande de bouffons.

Des voix: Oh, oh!

(1445)

Le Président: Je sais que nous voulons tous connaître la réponse. La ministre peut-elle terminer sa réponse?

Mme Marleau: Monsieur le Président, les cliniques privées qui imposent des frais d'établissement pour des services médicaux nécessaires sont une source de préoccupation pour tous les ministres de la Santé du Canada.

En septembre, nous nous sommes rencontrés à Halifax. Tous les ministres de la Santé présents, sauf celui de l'Alberta, ont convenu de travailler ensemble à régler le problème que posent ces cliniques.

Ce que j'ai à dire à l'Alberta, c'est que cette province devrait se joindre à nous pour contribuer à la protection de l'assurance-santé, notre meilleur programme social.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, l'Alberta n'a pas participé à ce groupe de travail parce qu'elle a son propre groupe de travail et fera rapport à la ministre directement, ce que cette dernière sait parfaitement.

Je vous rapporte deux cas. Une clinique spécialisée dans les cataractes impose des frais d'établissement de 1 275 $ et des honoraires de 526 $. Une autre clinique, spécialisée dans les problèmes de fertilité, impose des frais d'établissement de 2 750 $ et des honoraires de 1 235 $. L'une de ces cliniques est à Calgary et l'autre, à Toronto. Si la ministre ferme la clinique de Calgary, fermera-t-elle aussi celle de Toronto?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, nous connaissons la position du Parti réformiste sur l'assurance-santé. Pour un parti qui se targue d'être honnête, c'est triste qu'il n'ait pas été franc durant la campagne électorale et qu'il n'ait pas dit aux Canadiens qu'il souhaitait l'établissement de tickets modérateurs. Le Parti réformiste veut une médecine payante. Pas nous. Nous voulons que les gens puissent se faire soigner parce qu'ils ont besoin de soins, et non parce qu'ils ont plus d'argent que d'autres.

* * *

[Français]

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Le gouvernement fédéral a rejeté hier l'appel des milieux d'affaires pour une réduction des cotisations à la caisse de l'assurance-chômage. Tandis que le ministre des Finances, lors de son dernier budget, affirmait que, selon ses propres calculs, une réduction de 7c. dans les cotisations créerait 40 000 emplois, son collègue du Développement des ressources humaines affirmait pour sa part qu'un état de compte de l'assurance-chômage meilleur que prévu, donc avec un surplus, permettrait d'autres diminutions de cotisations.

Comment le ministre des Finances peut-il justifier son obstination à ignorer les recommandations du milieu des affaires de diminuer davantage les cotisations, alors que, d'une part, il dit, la main sur le coeur, vouloir créer des emplois, et que, d'autre part, la Caisse accuse un surplus de 2,7 milliards de dollars?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, vous comprendrez que je trouve ironique que le député me demande aujourd'hui de suivre les conseils de la communauté des affaires, alors qu'habituellement, lorsqu'il prend la parole, c'est pour me demander de ne pas suivre les recommandations de la communauté des affaires.

Cela étant dit, le député comprendra que le ministre du Développement des ressources et moi-même voulons diminuer les cotisations à l'assurance-chômage. C'est d'ailleurs pour cela que nous l'avons fait, de 3,07 $ à 3 $. Il est très important que nous ayons une stabilité. Cela veut dire qu'on ne veut pas être dans une position où on serait forcé d'augmenter les cotisations d'assurance-chômage en période de récession pour les diminuer en période de croissance. On ne veut pas que cela fonctionne comme un yo-yo. C'est pour cela qu'on veut avoir une stabilité et on va les diminuer en temps et lieu.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, si j'ai bien compris, le ministre des Finances m'accuse de faire preuve de discernement face à des propositions qui nous sont faites, alors que lui devrait en faire preuve lorsqu'il est question de régler ces pratiques.


8432

Le ministre réalise-t-il qu'en refusant de diminuer les cotisations au niveau que lui suggèrent les milieux d'affaires, il contredit allègrement son collègue du Développement des ressources humaines, il sacrifie délibérément 100 000 emplois, selon ses propres calculs, et il donne raison à la vice-présidente de la Chambre de commerce du Canada qui disait que le ministre des Finances n'a aucune espèce de souci pour la création d'emplois?

(1450)

[Traduction]

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de voir que le député se convertit aux opinions exprimées par les gens d'affaires et par la Chambre de commerce.

Je suis certain que les autres groupes qu'il représente se réjouiront de constater sa conversion sur le chemin de Damas. Le député aurait toutefois intérêt à écouter ce que le ministre du Développement des ressources humaines et moi-même avons dit. Il est capital qu'une fois réduites, les cotisations d'assurance-chômage ne remontent pas et que les milieux d'affaires et les travailleurs ne subissent pas l'effet du yo-yo, où chaque ralentissement de l'économie nous force à hausser ces cotisations, ce qui est contre-productif.

Nous avions donc dit que les cotisations allaient certainement diminuer, mais quand ce sera fait, notre gouvernement fera en sorte qu'elles ne remontent pas.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, le 22 septembre dernier, le ministre de la Justice a dit ce qui suit en réponse à une question que je lui posais: «Nous avons lu dernièrement le rapport sur les faiblesses de l'actuel système d'enregistrement des armes à autorisation restreinte et sur la nécessité d'apporter des améliorations.»

Le ministre de la Justice faisait-il allusion au rapport de son ministère sur l'examen effectué par M. Terence Wade de l'actuel système d'enregistrement des armes de poing ou y a-t-il plus d'un rapport faisant état des lacunes du système canadien d'enregistrement de telles armes?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est effectivement le rapport auquel je faisais allusion.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Justice n'a pas remis le rapport de Terence Wade au Comité permanent de la justice. Il ne l'a pas rendu public et ses fonctionnaires ont refusé d'en tenir copie aux députés.

Ce rapport est-il tenu secret parce qu'il condamne sans réserve le système actuel d'enregistrement des armes de poing, qu'il expose l'incapacité de ce système à réduire l'utilisation de telles armes à des fins criminelles, et qu'il montre aussi l'inutilité du plan du ministre visant à élargir ce système inefficace aux carabines et aux fusils de chasse?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la réponse n'a rien à voir avec les propos du député.

En fait, je ne vois pas pourquoi les députés ne pourraient avoir accès à ce rapport. Si j'avais su qu'il s'y intéressait, j'en aurais donné copie au député.

Ce rapport évalue le système d'enregistrement des armes de poing et fait état des lacunes et des aspects à améliorer. Ce document s'est révélé un outil précieux, puisqu'il nous a permis de voir comment on pourrait concevoir un système d'enregistrement des personnes, si nous décidions de prendre une telle mesure.

* * *

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire responsable de la Société canadienne des postes.

Les Canadiens d'un bout à l'autre du pays ont été étonnés d'apprendre que, l'an dernier, les timbres canadiens ont été imprimés en Australie et non au Canada. Qu'a fait le ministre pour régler cette question?

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, c'est en février dernier que le ministre a déclaré que la Société canadienne des postes avait hâte de rapatrier la production des timbres dès que ce serait économiquement possible. En novembre, des ententes ont été signées avec la Société MBC et la Compagnie canadienne des billets de banque pour que les timbres soient de nouveau produits au Canada.

Les députés seront heureux d'apprendre que, dès la mi-décembre, les timbres canadiens seront de nouveau imprimés ici, au Canada. Cette mesure créera des emplois au Canada pour des Canadiens.

* * *

[Français]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. À moins de trois semaines de l'ajournement de la Chambre pour la période des Fêtes, le ministre de la Justice n'a toujours pas déposé de projet de loi sur le contrôle des armes à feu, contrairement à son engagement et à celui du premier ministre pris en cette Chambre à maintes reprises.

Le ministre a-t-il l'intention, oui ou non, de déposer son projet de loi avant Noël?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, notre gouver-


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nement annoncera bien avant Noël ses décisions concernant son programme de contrôle des armes à feu.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, le ministre nous a déjà dit, le 22 septembre, qu'il déposerait un projet de loi en novembre, non pas des propositions.

Alors, comme il semble se rétracter, est-ce là la façon dont le ministre entend tenir parole?

(1455)

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je me permets de signaler tout d'abord que le mois de novembre se termine seulement demain soir, du moins de ce côté-ci de la Chambre.

Ensuite, mon engagement est clair depuis le début. Sur l'ordre du premier ministre, je devais rédiger des propositions précises pour que le gouvernement prenne des décisions et annonce sa position sur le contrôle des armes à feu au Canada.

Et c'est exactement ce que nous faisons.

* * *

LES PÊCHES SUR LA CÔTE OUEST

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, plus tôt ce mois-ci, les agents des pêches ont présenté au ministre des Pêches et des Océans un rapport révélant que des mesures d'exécution insuffisantes étaient l'une des principales causes de la situation désastreuse que nous connaissons cette année sur la côte ouest en ce qui concerne la pêche au saumon. Pourtant, le rapport présenté au groupe d'examen du ministre n'accordait aucune importance à cette réduction des mesures d'exécution.

Pourquoi le ministre cacherait-il ce renseignement critique à son groupe d'examen?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à assurer au député, car je sais que cette question lui tient beaucoup à coeur, qu'aucun renseignement n'a été caché au groupe d'examen Fraser.

Tout intervenant, que ce soit au sein de l'industrie commerciale ou même au sein du secteur d'exécution, qui a des renseignements à présenter au groupe d'examen est tout à fait libre de le faire.

J'ai eu une rencontre très fructueuse avec les agents d'exécution à Vancouver. J'étudie les informations qui m'ont été données. J'espère que le fait d'écouter les gens sur le terrain nous aidera à faire un meilleur travail en 1995 que ce que nous avons pu faire en 1994.

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, le fait est que certains renseignements contenus dans le rapport des agents des pêches n'ont pas été transmis au groupe d'examen. Ces renseignements confirmaient que certaines enquêtes sur l'habitat et sur la pêche illégale n'avaient pas été réalisées, que certaines opérations d'infiltration avaient été abandonnées subitement et que les rapports sur les mesures d'exécution n'étaient pas acheminés jusqu'aux niveaux hiérarchiques supérieurs.

Pourquoi le ministre n'a-t-il pas porté ces renseignements et d'autres renseignements critiques contenus dans le rapport des agents des pêches à l'attention du groupe d'examen?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je dois dire que je n'avais pas bien compris la question la première fois que le député l'a posée.

Je n'ai aucunement l'intention d'essayer d'influencer, directement ou indirectement, le résultat de l'examen effectué par le groupe indépendant dirigé par l'ancien Président de la Chambre des communes, John Fraser.

Je conviens que toute l'information disponible doit être présentée au groupe d'examen pour que ses conclusions soient justes. Tous les renseignements qui me seront donnés, même dans le cadre d'une réunion confidentielle avec les agents des pêches qui cherchent à m'aider durant ma période d'apprentissage, seront transmis au groupe d'examen.

* * *

LES SOINS DE SANTÉ

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Cela fait un an qu'on parle à la Chambre du problème des cliniques privées en Alberta. En faisant payer aussi bien le patient que le gouvernement, ces cliniques s'inscrivent clairement dans un système de santé à deux niveaux que le premier ministre a jugé inacceptable.

Le premier ministre, qui faisait partie du gouvernement qui a élaboré et fait adopter la Loi canadienne sur la santé, peut-il nous dire, puisque le ministère ne parvient toujours pas à se prononcer, apparemment, si ces cliniques enfreignent effectivement la Loi canadienne sur la santé telle qu'il la conçoit?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes absolument attachés à la Loi canadienne sur la santé, et elle doit être respectée.

Quant à l'interprétation, la question est actuellement à l'étude. Comme tout le monde le sait, la Loi canadienne sur la santé ne traite pas de tous les soins offerts aux Canadiens.

Nous examinons la question. Si cette pratique est contraire à la Loi sur la santé, nous appliquerons tout simplement la loi et retirerons les fonds.

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question complémentaire à poser au premier ministre.

(1500)

Je ferai remarquer en toute déférence, monsieur le Président, que la question est à l'étude depuis un certain temps. Il est évident pour tout le monde que ces cliniques fonctionnent depuis déjà un bon moment. Le premier ministre pourrait-il nous dire à

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quelle date il pense que le ministère pourra prendre cette décision?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la ministre a déjà dit qu'il s'agit d'un problème d'interprétation. Il fait présentement l'objet de discussions entre neuf gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral pour préciser quels sont les soins assurés sous le régime de la Loi sur la santé.

Nous examinons donc le problème avec les provinces. Quand nous en arriverons à une conclusion, nous fixerons une limite, et si ces cliniques l'outrepassent, nous retirerons l'indemnité comme le prévoit la loi.

* * *

LA PRESTATION FISCALE POUR ENFANTS

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre du Développement des ressources humaines.

La semaine dernière, la coalition Campagne 2000 a publié des statistiques révélant que, depuis cinq ans, le nombre d'enfants pauvres au Canada a augmenté de 331 000. Compte tenu de cette situation déplorable, le ministre peut-il dire à la Chambre s'il se donne pour objectif d'améliorer la prestation fiscale pour enfants?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député d'aborder ce qui est probablement le plus grave problème social du Canada, le fait que beaucoup d'enfants vivent dans la pauvreté.

Comme les députés le savent, nous avons essayé d'aborder le problème de front en disant aux Canadiens, dans le Livre vert, que nous voulions mobiliser tous nos efforts pour que les parents d'enfants pauvres aient de meilleurs débouchés sur le marché du travail, pour soutenir davantage les services de garderie et pour bonifier ou augmenter les prestations pour enfants.

La question clé est de savoir si nous pourrons obtenir l'appui des députés, des provinces et des Canadiens de tout le pays pour un grand effort national de lutte contre la pauvreté chez les enfants. J'ai toujours espoir que nous le pourrons et que, avec l'aide du député et d'autres personnes, nous y parviendrons.

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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, comme j'ai été interrompu avant la période des questions orales, il me fait plaisir de poursuivre pour rappeler que je suis d'accord, et mon parti également, avec le projet de loi C-57, car le Québec est très ouvert aux marchés internationaux. On a toujours été très ouverts sur le monde, particulièrement en ce qui concerne le commerce.

Je disais qu'il faut trouver des solutions intelligentes, telles que stimuler la croissance économique à l'intérieur du Québec et du Canada, en donnant un environnement propice à nos entreprises. Nous avons de très graves problèmes en ce qui concerne l'environnement propice à accorder à nos entreprises, car ces dernières font face à deux gouvernements qui, par exemple, ont deux modes de taxation et deux modes d'imposition.

Ils ont des règlements et des lois en ce qui concerne l'environnement qui sont tout à fait distincts, ce qui embête royalement les entreprises qui font face à ces deux paliers de gouvernement. Par exemple, en ce qui concerne l'environnement, elles sont obligées de faire des études environnementales pour la loi du Québec et d'autres pour la loi fédérale.

(1505)

Cela gêne les projets importants qui concernent l'environnement. Tout est dédoublé, comme par exemple le bureau de la main-d'oeuvre, ce qui fait que cet environnement dont les entreprises ont besoin pour s'épanouir n'est pas présent. Il faut, rapidement bien sûr, pour cibler l'environnement, restreindre les obligations des entreprises à cet égard.

Une avenue de solutions est le commerce international. Ce n'est pas la seule, bien sûr, mais c'est une solution très importante pour faire la promotion de nos entreprises. Encore une fois, je dois faire mention ici que j'ai déposé une motion en cette Chambre qui a été défaite hier soir. Elle avait pour but de permettre, justement, à l'industrie de l'acier, entre autres, d'avoir des règlements suffisamment sévères ici, au Canada, du moins aussi sévères que les règlements des États-Unis en ce qui concerne l'import-export, et particulièrement en ce qui concerne le dumping.

Cette motion a été défaite et, encore une fois, je n'ai pas compris les raisons pour lesquelles le gouvernement a persisté à ne pas vouloir accueillir cette motion. À maintes reprises, des représentants de l'industrie de l'acier nous ont demandé de réviser les règlements dans le projet de loi C-57. Le gouvernement a refusé d'appuyer ma motion et je regrette énormément qu'on n'ait pu amender cette partie de la loi.

Je tiens à dire aujourd'hui aux gens de l'industrie de l'acier, qui sûrement m'écoutent, parce qu'ils sont attentifs à ce déroulement, qu'on a fait, nous du Bloc québécois, tous les efforts nécessaires pour répondre à leurs demandes. Mais malheureusement, le gouvernement n'a pas tenu compte de nos revendications et de leurs revendications.

Il faut aussi, pour faire face à cette compétition internationale, favoriser la créativité. On a aussi déposé une motion. On dit dans la loi, par exemple, qu'on doit «protéger tous les produits actuels». On avait déposé une motion selon laquelle il fallait aussi «protéger les futurs produits». On pense qu'il est très important, sur le plan de la loi, si on veut encourager la créativité, nos entrepreneurs, nos petites entreprise, de protéger les produits futurs au même titre que les produits passés.

Encore une fois, le gouvernement a refusé d'accepter cette motion, qui nous apparaissait une motion tout à fait normale, équitable, présentée dans le but d'aider nos créateurs, nos petites entreprises, nos chercheurs à avoir l'espoir de mieux réussir


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dans ces grands marchés qui seront de plus en plus ouverts sur le monde.

Il faut adopter une approche intelligente et structurée. Il faut contrer le gaspillage d'énergie et de ressoures, en s'attaquant à tous les marchés sans discernement, en ignorant des facteurs tels que le transport, la spécialisation et les économies d'échelle. Il faut une bonne planification stratégique qui tienne compte de nos forces, de nos faiblesses, des avantages et des inconvénients et une évolution précise des marchés intéressants et promoteurs.

Nous du Québec avons et devons continuer à concéder nos positions sur le continent nord-américain. Nous du Québec, particulièrement, avons appuyé le libre-échange nord-américain et nous avons appuyé, en premier lieu, le libre-échange avec les États-Unis, ce qui a été, je me souviens, un débat extrêmement lourd à appuyer. J'étais membre du gouvernement à l'époque et je peux vous dire qu'en 1988, quand je me suis représenté aux élections, la principale raison était justement de faire adopter le libre-échange avec les États-Unis.

(1510)

J'avais l'appui de la grande majorité des Québécois. Nous étions presque unanimes à accepter ce libre-échange entre le Canada et les États-Unis. Pour nous du Québec, c'était d'une importance cruciale.

Depuis plusieurs années, plusieurs décennies, nous avons des échanges commerciaux avec les États-Unis. Environ 80 p. 100 de nos exportations mondiales sont faites vers les États-Unis. Vous comprendrez que nous voulons continuer à consolider nos efforts pour poursuivre nos exportations vers les États-Unis, car c'est un marché très important.

Juste pour vous donner une petite idée. En ce qui concerne ce grand marché américain, je vais me restreindre à un certain rayon. Par exemple, si je pars de Montréal et si je fais 1 000 kilomètres, en incluant une partie des États-Unis et Toronto, il y a 100 millions de personnes vivant dans ce rayon de 1 000 kilomètres autour de Montréal. Vous imaginez que c'est 100 millions de consommateurs, les consommateurs les plus riches du monde. C'est pour ces raisons qu'il est très important que nous, du Québec, continuions à faire du développement et des affaires avec l'espace nord-est des États-Unis.

Il ne faut pas, bien sûr, négliger les autres marchés, comme par exemple l'Asie-Pacifique. On sait que dans cette région les marchés se développent, les standards de vie augmentent, particulièrement au Japon et en Chine. On sait qu'en Chine, l'an passé, la croissance a été d'environ 12 à 15 p. 100. Il y a 1,2 milliard de personnes qui vivent en Chine. Il y a tout lieu d'avoir l'oreille bien tendue vers ces pays, celui-là en particulier, pour en profiter dans le futur.

Nous sommes un peu craintifs de laisser au fédéral cette responsabilité d'aider le Québec à promouvoir notre économie. On a entendu dire, ce n'est pas officiel, mais il y a des tendances qui nous font entrevoir que le gouvernement canadien va diminuer le nombre d'employés qui s'occupent du commerce international aux États-Unis, pour l'augmenter dans les pays de l'Asie-Pacifique.

Cela nous inquiète un peu, parce que, comme je viens de le mentionner, nous voulons continuer, pour des raisons très simples, à faire des affaires avec les États-Unis. Nous voulons augmenter nos relations commerciales avec eux, parce que c'est un lieu propice, et c'est beaucoup plus facile, parce qu'ils parlent une langue qui est près de la nôtre, soit l'anglais. De plus, nous avons à peu près les mêmes cultures: culture économique, culture sociale. Nous vivons dans un monde presque semblable, ce qui n'est pas tout à fait la même chose lorsqu'il s'agit de faire affaire avec des pays de l'Asie-Pacifique où les langues sont beaucoup plus difficiles, où les distances sont beaucoup plus éloignées et les efforts que cela exige pour promouvoir nos produits sont beaucoup plus coûteux, beaucoup plus longs.

À une époque de déficit, de dette énorme, je pense qu'il faut ouvrir les voies les plus faciles pour rentabiliser davantage nos entreprises, pour que notre économie fonctionne mieux et que les gouvernements puissent se renflouer dans un délai assez court.

C'est pour ces raisons que, dans les années qui viennent, nous pensons, nous du Québec particulièrement, qu'il faut continuer à faire des efforts pour que nous puissions maintenir et augmenter nos marchés vers les États-Unis.

(1515)

Bien sûr, pour ce faire, il faut une très grande cohérence entre nos industries, les syndicats, le gouvernement, nos universités, etc. Si nous n'avons pas cette concertation, je pense que nous aurons beaucoup de difficultés dans le futur à être efficace et productif.

C'est pour ces raisons que nous du Québec avons hâte de pouvoir se prendre en main dans le but de se concerter et d'éliminer les duplications de toutes sortes, car, de ce fait, nous avons beaucoup de difficultés à nous concerter et à être efficaces. C'est dans ce sens-là que nous avons hâte de prendre en charge nos impôts, nos taxes et dépenser cet argent suivant nos priorités et faire en sorte de progresser plus rapidement dans ce monde international.

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, je veux d'abord féliciter mon collègue de Longueuil pour son intervention qui est pratique et collée à la réalité. Ce n'est pas un discours théorique. On voit que le député de Longueuil a de l'expérience.

Je le remercie aussi d'avoir rappelé l'ouverture du Québec à l'endroit du libre-échange et du commerce extérieur. Le Québec n'est pas une société refermée sur elle-même, bien au contraire. Je le remercie aussi d'avoir rappelé l'importance que représente le commerce avec les États-Unis pour le Canada et pour le Québec, alors que 80 p. 100 de nos échanges commerciaux se font avec notre grand voisin du Sud.

J'aimerais lui poser la question suivante: Est-ce qu'il croit que les accords intervenus par suite de la négociation de l'Uruguay Round permettront aux pays les plus pauvres de progresser? Est-ce qu'il sera aussi possible, dans le cadre de ces accords, de protéger l'environnement et de mieux protéger les droits des travailleurs des pays moins bien organisés que les pays occidentaux?

M. Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, je remercie le député de Louis-Hébert de ses bonnes paroles.


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En ce qui a trait à la question d'aider les pays les plus pauvres, il faudra être très prudent parce qu'on a tendance à penser à court terme et à penser au commerce avant de penser justement aux plus pauvres du monde. Il est bien évident que si on augmente notre productivité, notre commerce, notre capacité de payer, nous aurons plus les moyens d'aider les pays les plus pauvres.

À plusieurs égards, il faudra porter une attention très particulière, comme je l'ai mentionné auparavant, à ne pas faire en sorte de travailler uniquement avec des pays qui nous favorisent le plus. Il faudra aussi développer des marchés avec les pays les plus pauvres, ce qui va les aider à se développer.

À plusieurs reprises, lors de voyages avec des responsables des affaires étrangères dans les pays en développement, les ambassadeurs que nous avons rencontrés nous ont dit qu'une des façons d'aider les pays en développement, c'était de faire du commerce avec eux.

Alors, comme ce projet de loi C-57 a pour but d'ouvrir et de permettre de faire de plus en plus de commerce, je pense que si nous le faisons avec beaucoup de dignité, nous pourrons échanger avec ces pays en développement plus que nous le faisons maintenant et cela fera en sorte d'habiliter ces pays à devenir meilleurs dans le domaine du commerce. Il n'y a rien de mieux que la pratique pour apprendre à faire des affaires.

Si on peut montrer aux pays en développement comment emprunter, comment prêter, comment faire des affaires, comment fabriquer, je pense que c'est une des meilleures façons de les aider.

(1520)

Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas aider ceux qui sont dans la misère, ceux qui ont besoin d'être nourris chaque jour ou ceux qui ont besoin d'aide pour mieux cultiver, etc.

Dans ce sens, je pense que cette ouverture des marchés sur le monde offrira aux pays en développement de meilleures occasions d'échanges commerciaux et de meilleures occasions d'apprendre des pays qui ont bien réussi sur le plan commercial. Je suis convaincu que cela leur donnera un sacré bon coup de main dans l'avenir.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Je crois comprendre que le député de Winnipeg Transcona partagera son temps de parole avec le député de The Battlefords-Meadow Lake. Chacun d'eux aura donc dix minutes pour l'intervention et cinq pour les questions.

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer à ce débat cet après-midi. Il semble que le NPD soit le seul parti à la Chambre à s'opposer au projet de loi dont nous sommes saisis, celui qui prévoit la création de l'Organisation mondiale du commerce.

Il semble que, contrairement au parti ministériel, à l'opposition officielle et au Parti réformiste, notre parti soit le seul qui soit prêt à faire une critique soutenue du fonctionnement du monde selon le GATT, selon l'ALENA et selon l'ALE.

Certains pourraient dire que nous défendons des valeurs du passé, et, dans un sens, c'est vrai. Nous préconisons une libéralisation des échanges et des marchés qui soit adaptée aux besoins sociaux et humains, plutôt que la satisfaction des exigences des multinationales désireuses d'organiser le monde selon leur bon plaisir. C'est ce que nous retenons de l'OMC et de son projet de loi de mise en oeuvre.

Au regard de l'économie mondiale, l'OMC est en fait une nouvelle constitution rédigée par et pour les multinationales. On aurait pu éviter cela, durant les négociations, et même après, si l'on avait tenté, par exemple, de faire inclure une disposition à caractère social, garantissant la reconnaissance par les multinationales et les autres sociétés de normes de travail ou de normes environnementales fondamentales, par exemple, pour éviter le nivellement par le bas.

Ce n'est pas ce qui s'est produit durant les négociations, même si j'ai cru comprendre que certains pays avaient proposé l'idée, mais pas le Canada, malheureusement. Il a été impossible de faire cela durant le débat sur ce projet de loi, malgré les amendements proposés par le Nouveau Parti démocratique; le parti ministériel a en effet rejeté nos amendements, expliquant qu'il devait travailler à l'élaboration d'une disposition à caractère social et rendre compte régulièrement à la Chambre des progrès réalisés à ce chapitre.

L'autre préoccupation que nous avons soulevée dans le débat, que nous avons exprimée à l'étape du rapport et que nous exprimons maintenant, c'est qu'en dépit de l'établissement de la nouvelle OMT, qui est censée implanter un nouveau régime de réglementation pour mettre fin au harcèlement commercial, les Américains ne respecteront vraisemblablement pas les règles, comme l'attestent leur comportement dans le cadre de l'ALENA et les mesures évasives qu'ils ont insérées dans leur projet de loi de mise en oeuvre.

C'est pourquoi nous avons proposé des modifications à notre loi pour qu'elle comporte les mêmes dispositions que la loi américaine. Nous pensions que ce qui était juste pour les Américains l'était aussi pour les Canadiens. Ce qui est bon pour l'un est bon pour l'autre. Ce fut peine perdue. Le gouvernement s'est opposé à nos amendements, comme d'autres l'ont fait, et les a rejetés.

On est donc en droit de se demander à quelles conditions se fera la mondialisation par l'entremise de l'OMT. Il semble que ce soit aux conditions des multinationales et, en second lieu, à des conditions plus avantageuses aux Américains qu'aux Canadiens et aux autres. Les Américains s'assurent toujours d'insérer ces conditions dans leurs lois pour garantir que le reste d'entre nous jouent selon leurs règles; cependant, quand la situation se corse et que leurs intérêts sont en jeu, ils ne respectent pas les règles.

Dans sa forme actuelle, sans disposition en matière sociale, l'OMC présiderait un nouvel ordre commercial mondial où les multinationales maintiendraient leur position en tant qu'hors-la-loi, comme il conviendrait de les appeler. Elles seraient libres de poursuivre leurs propres objectifs sans se soucier de la compétence législative d'un pays quelconque, alors que, face au nouvel ordre mondial qui règle le marché global, l'accord instituant l'OMC, dans sa version actuelle, se montre, à notre avis, étonnamment partial puisqu'il défend les droits des investisseurs et ne fait rien en faveur des travailleurs.


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(1525)

Cet accord prétend que les conditions de travail, la sécurité sociale et l'environnement ne sont pas des enjeux commerciaux et que les tentatives pour réglementer ces domaines seront considérées comme des obstacles au commerce. Il défend énergiquement le droit des multinationales de passer outre à toute politique officielle qui irait à l'encontre de leurs droits de propriété intellectuelle et de la libre circulation des capitaux, mais il refuse de soutenir le droit des travailleurs de créer des syndicats ou de travailler dans un milieu sûr.

Dans les pays industrialisés d'Europe et d'Amérique du Nord, la mondialisation des marchés a contribué à élever les taux du chômage chronique, à faire baisser les salaires réels et à accroître la fatigue et le stress chez les travailleurs qui doivent effectuer des heures plus longues. Chose plus importante encore, les salaires ont sensiblement baissé par rapport au PIB. Autrement dit, les travailleurs voient leur part rétrécir de jour en jour.

Alors que de forts taux de croissance, comme ceux que nous connaissons au Canada, s'accompagnent d'une augmentation du nombre des chômeurs et d'une baisse des salaires réels, il est on ne peut plus clair que les retombées de la croissance attribuables au nouvel ordre mondial ne vont toucher qu'un groupe très restreint de Canadiens, pendant que la population canadienne tout entière n'y verra que du feu.

Certains pays asiatiques en développement connaissent des taux exceptionnels de croissance, grâce à ce nouvel ordre mondial, mais, dans les économies les plus prospères, telles que l'Indonésie, la Corée du Sud, Singapour et la Chine, cette croissance survient dans des sociétés où les droits fondamentaux de la personne n'existent pas, des sociétés dépourvues de syndicats indépendants, des sociétés qui pratiquent abondamment le travail des enfants, les travaux forcés et le travail des conscrits. On parle parfois du miracle asiatique, du nouveau miracle. Pour ma part, ce n'est qu'une ancienne forme d'exploitation sous des dehors nouveaux et cela ne tient absolument pas du miracle.

L'OMC, telle qu'elle est actuellement, donne son blanc-seing à une économie mondiale où les retombées de la croissance touchent de plus en plus les actionnaires des multinationales et de moins en moins leurs employés et les collectivités. Il nous faut une OMC qui se préoccupe non seulement des traditionnels différends commerciaux entre pays, mais également du problème qu'il est maintenant convenu d'appeler le «dumping social» et auquel j'ai fait allusion plus tôt. C'est le cas des pays dont l'avantage concurrentiel tient à des marchés de l'emploi non contrôlés et à une absence de règlements dans le domaine de la protection de l'environnement. Ces pays ont recours aux divers moyens que leur impose ce nouvel ordre mondial pour rivaliser avec leurs concurrents en pratiquant une baisse qualitative de leurs normes sociales afin de créer ce que, par euphémisme, on appelle un climat favorable aux investissements.

Il faut ajouter une clause sociale pour réaliser un équilibre entre l'efficience d'un marché où il y a libéralisation des échanges, les méthodes d'investissement et la solidarité sociale de toutes les collectivités qui veulent que l'on respecte les droits fondamentaux de la personne et que l'on recoure à des pratiques d'emploi décentes là où le capital circule librement.

Comme je l'ai mentionné, au cours du débat à l'étape du rapport, nous avons proposé d'apporter au projet de loi C-57 une modification qui demandait au gouvernement de rendre régulièrement compte au Parlement des progrès réalisés dans les négociations de l'OMC en vue d'obtenir une clause sociale. Dans une modification connexe appuyée par le Bloc québécois, nous avons aussi proposé d'interdire l'importation de marchandises fabriquées par des enfants en contravention de la convention de l'Organisation internationale du travail.

L'idée d'une clause sociale recueille un vaste appui dans le monde entier qui la perçoit comme une mesure nécessaire pour faire contrepoids à la libéralisation des investissements. L'idée de prévoir une clause sociale pour l'OMC a l'appui du secrétariat de l'Organisation internationale du travail qui, plus tôt au cours du mois, a lui-même recommandé à l'organe directeur de l'OIT de prévoir une telle clause pour l'OMC.

Le rapport majoritaire du comité mixte qui a récemment examiné la politique étrangère du Canada comportait également une recommandation demandant qu'il y ait une coordination des normes sociales et des normes de main-d'oeuvre internationales. Nous avons donc été déçus, mais pas surpris, d'apprendre que les libéraux qui ont écrit ce rapport n'appuyaient pas notre modification qui nous aurait fait faire un pas de plus vers la réalisation de l'objectif qu'ils partageaient.

Au cours du débat sur la modification que nous avons proposée concernant la main-d'oeuvre enfantine, le secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international a dit qu'il était d'accord avec l'esprit de notre motion et que le gouvernement examinait actuellement la question avec l'OCDE et l'OIT. Cependant, il s'est bien gardé de dire que, à une réunion que les Nations Unies ont tenue récemment pour discuter de leur prochaine conférence sur le développement social, le Canada s'était vivement opposé à toute tentative visant à établir un lien entre le commerce et les normes de main-d'oeuvre ou d'environnement. Le gouvernement devrait avoir honte.

Cela confirme le changement de position spectaculaire du Parti libéral sur les questions commerciales.

(1530)

Pendant la campagne électorale, les libéraux s'opposaient à l'ALENA parce qu'il ne renfermait pas de définition du terme «subvention» et que les accords auxiliaires sur le travail et l'environnement n'étaient pas assez rigoureux. Puis, ils ont ratifié l'ALENA sans que le terme «subvention» ait été défini et alors que les accords auxiliaires étaient encore fragiles.

Le ministre du Commerce international a ensuite parlé d'approfondir et d'élargir l'ALENA, allant jusqu'à le comparer aux premiers jours de la Communauté européenne. Maintenant, les libéraux disent s'opposer à l'établissement, dans l'accord instituant l'OMC, de tout lien entre le commerce et les normes sur le travail et l'environnement. La métamorphose est complète.

Lors de sa récente visite en Chine et en Indonésie, le premier ministre a soutenu que le meilleur moyen d'améliorer la situation des droits de la personne dans certains pays en développement était de se livrer à des échanges commerciaux avec ces pays. Toutefois, l'accord instituant l'OMC qui, à l'heure actuelle, ne prévoit pas de clause sociale, fera que les violations des droits de la personne se multiplieront. En effet, rien dans l'accord instituant l'OMC n'empêche des pays d'autoriser le travail


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des enfants, de recourir à la main-d'oeuvre des détenus et des conscrits ou de priver des travailleurs de leur droit de former des syndicats indépendants.

La Chine pourrait se joindre à l'OMC, ce qui est probable, et s'attendre à bénéficier de la protection offerte par les règles de libre-échange de l'OMC, alors qu'elle autorise encore le travail d'enfants de dix ans dans des usines dangereuses et à un salaire de famine. Pour sa part, l'Indonésie pourrait continuer de diriger une économie où plus de deux millions d'enfants travaillent dans des conditions qui enfreignent les normes de l'OIT. En s'opposant à lier le commerce et les normes de travail, le gouvernement tourne en dérision son argument en faveur de la défense des droits de la personne grâce aux échanges commerciaux.

En outre, et pour conclure, les partisans de la libéralisation des marchés mondiaux présument que, à mesure que les pays en développement deviendront plus prospères, leur main-d'oeuvre plus expérimentée et plus sûre d'elle exercera des pressions sociales internes et insistera pour obtenir des salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail, comme cela s'est produit par le passé. Cette présomption ne tient pas compte du fait que le vaste bassin de chômeurs dans les secteurs ruraux des économies de l'est et du sud de l'Asie, par exemple, sans parler de l'ancienne Union soviétique, constitue un énorme obstacle à la hausse des salaires à un rythme raisonnable.

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour participer au débat à l'étape de la troisième lecture sur le projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, qui lie définitivement le Canada à l'accord du GATT.

Les Canadiens connaissent très peu cet accord de 26 000 pages que leur gouvernement a signé en leur nom à la réunion spéciale du GATT qui s'est tenue à Marrakech, le 15 avril 1994. Cet accord est intervenu après huit ans de négociations. Il s'agit d'une entente colossale qui amène le Canada bien au-delà des frontières établies par l'Accord de libre-échange avec les États-Unis et l'Accord de libre-échange nord-américain.

Et maintenant, après un bref débat, le gouvernement libéral s'apprête à accepter le nouvel ordre mondial économique dicté par les multinationales et à restreindre davantage l'aptitude du Canada à déterminer sa propre destinée économique.

Après le vote d'hier, alors qu'on a vu le Parti réformiste et le Bloc québécois se joindre aux libéraux pour appuyer ce projet de loi à l'étape du rapport, il est facile de comprendre qui est la véritable opposition du Canada ici, au Parlement. Seuls les néo-démocrates, qui ont pris le temps d'examiner non seulement cette dernière entente, mais aussi toutes les ententes commerciales précédentes, défendent les intérêts des Canadiens ordinaires devant la mondialisation économique et la domination, non, monsieur le Président, la tyrannie des multinationales.

Ne vous y trompez pas. La mise en oeuvre de l'accord et la création de l'Organisation mondiale du commerce constituent un nouveau gouvernement mondial qui a le pouvoir de dire aux pays ce qu'ils peuvent et ne peuvent pas faire à l'intérieur même de leurs frontières. Ce ne sera certes pas un gouvernement démocratique. Ce nouveau gouvernement est dominé par des multinationales non élues qui prennent sur elles de se substituer à toute possibilité de réaction démocratique aux problèmes mondiaux.

C'était l'entente qui avait été négociée par l'équipe Mulroney, mais qui a été signée et qui est maintenant mise en oeuvre par le gouvernement libéral sans que quiconque s'y oppose, sauf les néo-démocrates. C'est tout à fait extraordinaire.

L'accord, par l'entremise de cette mesure législative, sacrifie les agriculteurs et les travailleurs et compromet les perspectives économiques de l'ensemble des jeunes au Canada, en particulier de ceux qui vivent dans les régions.

À cette époque de notre histoire et à ce stade de notre développement économique, nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour défendre les Canadiens de toutes conditions.

(1535)

L'Organisation mondiale du commerce est en fait la nouvelle constitution d'une économie mondialisée, rédigée par les multinationales au profit des multinationales. Le gouvernement libéral a rejeté l'idée d'apporter à l'OMC une clause sociale qui permettrait de veiller à ce que les multinationales reconnaissent les normes fondamentales en matière de main-d'oeuvre et d'environnement et d'empêcher ainsi que l'on ne fasse appel au plus bas dénominateur commun. J'ai fait des commentaires à ce sujet et au sujet de la main-d'oeuvre enfantine à l'étape du rapport l'autre jour.

Je voudrais prendre un moment pour essayer de relier un ou deux faits qui ne semblent avoir aucun rapport entre eux. Il n'y a pas longtemps, le premier ministre et les premiers ministres de toutes les provinces et de tous les territoires, à l'exception du Québec, se sont rendus en Chine en mission commerciale. Ils ont parlé commerce et ont conclu toute une série d'ententes. On a fait étalage de ces ententes dans tous les journaux du pays. Le premier ministre et les premiers ministres provinciaux nous disaient que l'économie en Chine connaît ou va connaître un boom dans un avenir très proche, et que le Canada devait faire partie de ce boom.

Entre temps, au Canada, en réponse à leur interprétation des clauses de l'accord du GATT, le ministre des Transports et le ministre de l'Agriculture étaient en train de dire aux agriculteurs canadiens que nous allions devoir modifier notre programme national d'aide au transport ou tarif du Nid-de-Corbeau. Il semblerait que, dans quelques années, cela aura comme net résultat la réduction des subventions à l'acheminement du grain canadien vers les ports d'exportation, la réduction du prix à la ferme et, par conséquent, la réduction des quantités de grain cultivé dans les Prairies pour l'exportation.


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Mais revenons un instant à la Chine. Je viens de lire un article écrit pour le Worldwatch Institute sous le titre «Who Will Feed China?» Je recommande certainement à tout le monde cet article de Lester R. Brown, président de Worldwatch.

M. Brown fait état de l'aisance croissante des Chinois, de la poussée démographique, de l'augmentation de la demande en denrées alimentaires, notamment la viande. Qui plus est, il souligne la baisse de la capacité de production de la Chine en ce qui concerne ces denrées.

L'expérience des autres pays du monde nous a appris que lorsque les revenus augmentent, l'une des premières choses que font les gens à faible revenu avec leur argent est de diversifier leur alimentation, consommant davantage de viande, de lait et d'oeufs. C'est ce qui est en train d'arriver en Chine, tout comme avant au Japon, en Corée du Sud et à Taïwan. L'augmentation de la demande pour une alimentation diversifiée s'accompagne bien entendu d'une augmentation de la demande en grain.

La Chine encourage la production de poules pondeuses et donc la production d'oeufs. L'objectif de consommation officiel est de 200 oeufs par personne et par an d'ici l'an 2000, soit deux fois plus que ce que les Chinois ont consommé en 1990. En passant, c'est à peu près l'équivalent de la consommation annuelle d'oeufs aux États-Unis.

On s'attend à ce que la population de la Chine atteigne 1,3 milliard d'habitants d'ici l'an 2000, et à ce que la consommation d'oeufs s'élève à 26 milliards. Fait intéressant, les poules chinoises pondent environ 200 oeufs par an chacune. La Chine aura donc besoin de 1,3 milliard de poules pour répondre à ses besoins.

Le point à retenir, c'est que pour atteindre cet objectif, la Chine aura besoin de 24 millions de tonnes de grain de plus pour nourrir les poules qui devront pondre tous ces oeufs. Or, 24 millions de tonnes de céréales c'est précisément la quantité totale exportée par le Canada.

Si la consommation individuelle de céréales augmente même de façon modeste en Chine et qu'elle passe du volume actuel de quelque 300 kilos à 350 kilos en l'an 2030, la demande grimpera à 568 millions de tonnes. Compte tenu d'une production totale de seulement 263 millions de tonnes en l'an 2030, le manque, qui aura atteint le volume pour le moins impressionnant de 305 millions de tonnes de céréales, sera comblé par les importations. En 1993, les exportations de céréales pour l'ensemble des pays du monde n'ont atteint que 200 millions de tonnes. Cela veut dire qu'en l'an 2030, la Chine pourrait consommer près des deux tiers des exportations mondiales actuelles de céréales.

Nous savons que la Chine n'est pas le seul pays qui est en expansion et qui est susceptible de manquer de céréales. L'Inde, l'Iran, l'Éthiopie, le Nigéria et d'autres sont dans la même situation.

(1540)

Plus que jamais, il faut que le gouvernement fédéral veille à assurer une commercialisation ordonnée, une commercialisation à comptoir unique et le soutien du transport intérieur, de telle sorte qu'au fur et à mesure que le monde aura besoin de nos céréales, nous pourrons non seulement produire celles-ci mais aussi les livrer rapidement et efficacement.

Je constate que la période de temps qui m'a été attribuée est presque écoulée. J'aurais voulu aborder bien d'autres points encore, mais je vais conclure en vous disant que non seulement je vais m'opposer à cette mesure législative, mais aussi encourager tous les autres députés à en faire autant, de façon à donner une chance aux Canadiens de soutenir la concurrence internationale.

Les échanges commerciaux peuvent contribuer à étendre la prospérité et les connaissances, tout comme ils peuvent accélérer les tendances destructives qui ont actuellement cours. C'est avec regret que je vois cette mesure législative, et par ricochet ce gouvernement, nous mener vers une voie très destructive.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser au député une question que je préface du truisme suivant: si on évite la concurrence, on ne peut être compétitif.

Le député peut-il dire s'il croit que des industries protégées au Canada sont vraiment devenues plus compétitives, de sorte qu'elles ont pu réduire leurs coûts et offrir de meilleurs produits aux consommateurs, parce qu'il y avait des restrictions au commerce, ou de barrières commerciales, qui étaient imposées à l'intérieur du Canada? Le député voit-il un parallèle entre les barrières commerciales provinciales, qui entraînent une hausse des prix et diminuent la concurrence, et les barrières commerciales nationales?

M. Taylor: Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir répondre à cette question ainsi qu'à une autre qui m'est venue à l'esprit pendant l'intervention du député d'Edmonton.

Selon ma vision du monde, je considère essentiellement que les mots «compétition» et «efficacité» vont de pair; une économie compétitive est une économie efficace.

Lorsque nous jugeons que l'économie d'un pays ou du monde entier est efficace, nous pouvons nous attendre qu'elle produise une richesse pouvant être redistribuée afin que tous les habitants du pays ou du monde en bénéficient.

Une économie efficace crée des emplois; or, l'économie mondiale d'aujourd'hui ne fait rien pour augmenter le nombre d'emplois. Les pays membres de l'OCDE affichent tous des taux de chômage se situant entre 7 et 30 p. 100. Des chiffres semblables nous disent qu'en fait, l'économie de ces pays n'est pas très efficace.

Le temps m'a manqué, mais, dans mon discours, je voulais aussi aborder la question du commerce et de l'environnement. En répondant à la question du député, je dirai qu'à mon avis, le commerce et l'environnement sont étroitement liés. Quand nous pensons à l'avenir et à la capacité de peuplement de la terre, nous


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pouvons aisément deviner qu'en tant que leaders, notre tâche consiste à prévoir assez longtemps à l'avance pour que nos petits-enfants puissent vivre sur la planète sans devoir recourir à des aliments produits à partir de substances artificielles.

Aujourd'hui, quand nous examinons les documents de planification du GATT, nous constatons qu'une baisse du nombre d'emplois est prévue dans de nombreux secteurs de l'économie existante. Sur la liste des futurs chômeurs, il y a d'abord les agriculteurs, les travailleurs agricoles, les travailleurs du textile et les employés de bureau. Cette liste donne à penser que les planificateurs du GATT s'attendent à ce que nous n'ayons plus de nourriture, plus de vêtements et plus de possibilité de nous renseigner puisqu'il n'y aura plus personne pour les recueillir.

La population mondiale s'accroît d'une manière insensée. Au Canada, les leaders devraient s'efforcer pour bâtir une économie efficace qui produise de la richesse afin que les Canadiens aient des emplois leur permettant de soutenir la concurrence à l'échelle mondiale.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, je n'avais pas la liste des orateurs et je me suis levé assez souvent. C'est finalement à mon tour et je vous remercie de votre indulgence.

Je suis toujours très heureux de participer aux débats de la Chambre. Aujourd'hui, il est question du projet de loi instituant l'Organisation mondiale du commerce. En tant qu'ex-agriculteur devenu homme politique, je suis content de pouvoir aborder ce genre de questions.

(1545)

On a beaucoup parlé aujourd'hui d'échanges commerciaux avec nos divers partenaires. À propos de nos échanges commerciaux avec les États-Unis, je voudrais rappeler à certains députés que nous avons un excédent commercial d'environ 35 milliards de dollars à l'heure actuelle. Il est toujours possible d'envisager une augmentation de nos échanges commerciaux avec les Américains, mais il faudrait aussi nous rendre compte que nous risquerions alors d'importer plus de produits américains.

Nous pourrions nous retrouver en difficulté si nous perdions notre excédent commercial avec les États-Unis, puisque nous affichons un déficit commercial avec bien d'autres pays qui auraient facilement les moyens d'acheter plus de produits que nous pouvons leur en vendre. Les Japonais affichent un excédent commercial de deux milliards de dollars avec nous, un peu comme les Allemands, de même que les Britanniques et même les Mexicains.

À la lumière de ces faits, il me semble que nous avons du mal à pénétrer ces marchés. J'ai bien l'impression que le problème est attribuable à l'inefficacité de nos industries manufacturières et de nos sociétés d'exportation. Au cours des deux dernières semaines, des témoins sont venus dire au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire que, même si elles recevaient gratuitement les matières premières que produisent nos agriculteurs, les industries manufacturières ne parviendraient pas à soutenir la concurrence. Il ne semble donc pas que les producteurs primaires soient à l'origine du problème.

Par conséquent, je voudrais parler de ce qui me semble être l'un de nos grands problèmes, c'est-à-dire la politique des transports. Hier soir, la télévision du réseau anglais de Radio-Canada s'est penchée sur la question du refoulement du grain de Thunder Bay à Winnipeg et de son acheminement de Winnipeg aux États-Unis. On nous a dit maintes fois que le gouvernement libéral en place s'efforce de corriger des problèmes que cela pose. Je signale que la politique sur le transport du grain de l'Ouest a été adoptée par l'ancien gouvernement libéral. Cette politique comportait une disposition intéressante prévoyant que les entreprises de transport telles que les sociétés ferroviaires pourraient être poursuivies si elles ne livraient pas les produits conformément à la Loi sur le transport du grain de l'Ouest.

Le refoulement du grain revient tout simplement au non-respect de cet accord. Il nuit au système de transport. Il le rend inefficace. Il nous empêche d'être concurrentiels avec les autres pays. Il impose aussi un fardeau fiscal additionnel aux contribuables canadiens. À lui seul, il leur coûte aujourd'hui de 15 à 40 millions de dollars par année. Nous ne pouvons pas nous permettre cela au Canada, compte tenu de la dette que nous avons.

Il faut aussi se rendre compte que les sociétés ferroviaires éprouvent des difficultés financières dans certains secteurs. Compte tenu des taxes élevées sur le carburant comparativement aux États-Unis et aux autres pays, des taxes additionnelles que nos sociétés doivent payer comparativement aux sociétés américaines notamment-dont je connais un peu la situation-elles sont aussi dans le pétrin et s'efforcent de joindre les deux bouts.

D'autres problèmes se posent dans la gestion des sociétés d'État. Lorsqu'un gestionnaire bénéficie d'un prêt sans intérêt de 300 000 $ comme petit avantage social, cela ajoute au coût d'expédition de nos produits. Ce sont là des questions qu'il faut examiner.

(1550)

On dit qu'il nous faut plus de valeur ajoutée. Cela fait dix ans que j'entends cela dans le secteur agricole. Il nous faut plus de valeur ajoutée mais, l'instant d'après, on nous dit que nous avons perdu une centaine d'usines de transformation et d'abattoirs.

Pourquoi est-ce arrivé? Tout simplement parce que nous ne sommes pas concurrentiels au plan international pour les produits finis. Nous sommes très concurrentiels pour les matières premières. Toutefois, des marges bénéficiaires de 200 p. 100 entre le producteur et le détaillant, ce n'est tout simplement pas efficace.

Il nous faut régler ces problèmes pour devenir concurrentiels au sein de l'Organisation mondiale du commerce. On se demande parfois pourquoi il faut toujours que le producteur produise davantage pour que nous soyons plus efficaces. L'examen des statistiques révèle que nous avons accru notre production de céréales et d'oléagineux. Nous avons accru la production de tous nos autres produits bien au-delà de ce que nos usines peuvent transformer.


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Nous devons nous rendre compte qu'il faut faire quelque chose parce que pour soutenir la concurrence, il faut être concurrentiel. Il est impérieux de revoir les subventions au transport des grains de l'Ouest. Puisque le GATT nous obligera à le faire un jour, aussi bien le faire le plus tôt possible, nous ne nous en porterons que mieux par la suite.

Pendant la campagne électorale, le Parti réformiste préconisait la mise en oeuvre d'un programme d'élimination des distorsions du commerce comportant, notamment, l'élimination des subventions au transport. Il me semble que c'est la direction que nous devrons prendre pour rendre notre système de transport plus efficace.

Tenant compte des règles de l'Organisation mondiale du commerce applicables aux subventions, nous constatons que nous pourrons continuer de verser des subventions pour expédier une partie de nos céréales, mais que, un beau jour, peut-être au milieu d'un mois, nous constaterons que nous avons atteint notre quota de grain subventionné et que nous devons expédier le reste à un tarif totalement différent.

Cela compliquera beaucoup la commercialisation, surtout lorsque les agriculteurs constateront les petits volumes de canola admissibles à des subventions puisque les quotas ont été fixés en fonction de notre production pendant la période allant de 1985 à 1990.

La production de canola a énormément augmenté entre 1990 et 1993. Les quantités de canola dont nous pourrons subventionner le transport seront très petites de sorte qu'il se pourrait que la production du premier mois seulement soit admissible aux subventions et que le reste doive être expédié au tarif normal.

La même situation s'appliquera au blé et je peux entrevoir l'effet perturbateur que cela pourrait avoir lorsque les agriculteurs se querelleront entre eux pour faire arriver leur production sur le marché, pour profiter du plus petit avantage possible, pour obtenir un prix un tout petit peu meilleur. Il en résultera beaucoup de souffrances et beaucoup de ressentiment parmi les agriculteurs.

Je recommande donc fortement au gouvernement de restructurer rapidement le programme des subventions du transport des grains de l'Ouest pour éviter les querelles entre agriculteurs. Nous n'avons pas besoin de plus de querelles. Ce qu'il nous faut, c'est de la collaboration.

Si nous ne suscitons pas un plus grand esprit de collaboration parmi les agriculteurs, les manufacturiers et les transporteurs, nous ne pourrons pas soutenir la concurrence mondiale. Il est très important que nous entrions de plain-pied dans l'Organisation mondiale du commerce et que nous respections les règles du jeu.

Monsieur le Président, quelqu'un a mentionné un jour que vous aviez déjà été arbitre. Je crois que vous admettrez que les juges de ligne sont aussi très importants dans une partie parce qu'ils aident à assurer le bon déroulement du jeu.

(1555)

Je crois que le député néo-démocrate ne se rend pas compte que nous aurons des arbitres et des juges de ligne qui ne viennent pas des multinationales du secteur de la transformation des aliments. Les règles seront établies et appliquées par les pays. Le succès de cette initiative dépend de la volonté et de la détermination des pays comme le Canada qui appuieront cette organisation commerciale et verront à ce que les lois soient respectées.

Je saurais gré aux députés d'en face d'essayer de nous rendre d'abord compétitifs chez nous en éliminant les entraves au commerce, en réduisant les impôts excessifs et en empêchant les grèves qui paralysent le système de manutention du grain. Nous avons besoin de collaboration. Nous devons accroître nos exportations afin d'améliorer notre balance commerciale et afin que notre pays soit de nouveau productif et riche.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, c'est un moment historique.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Le député de Végréville a la parole pour un rappel au Règlement.

M. Benoit: Monsieur le Président, je demandais la parole pour participer au débat. Le député de Lisgar-Marquette et moi-même devions partager notre temps de parole.

Le président suppléant (M. Kilger): J'ai consulté les services du greffier et on m'a confirmé que le député de Lisgar-Marquette n'a bel et bien utilisé que 10 minutes de son temps de parole. Malheureusement, la présidence n'a pas été informée que le député partagerait son temps de parole avec un collègue. Toutefois, comme le député n'a utilisé que la moitié du temps prévu, je vais donner la parole au député de Végréville pour une intervention de 10 minutes, qui sera suivie d'une période de 5 minutes réservée aux questions et aux observations. Je m'excuse auprès du député de Vancouver Quadra.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi portant mise en oeuvre de l'accord du GATT instituant l'Organisation mondiale du commerce.

C'est la première fois depuis que les négociations du GATT se sont tenues que l'agriculture constitue un élément essentiel de l'accord, et c'est très encourageant. Comme nous pouvons le constater d'après l'appui général que suscite cette mesure visant à mettre en oeuvre l'accord du GATT et à mettre en place l'Organisation mondiale du commerce, cet appui est également très répandu à la Chambre. Il est très encourageant de le constater.

Le projet de loi présente cependant quelques problèmes. Je voudrais exposer quelques-unes de mes préoccupations à cet égard, bien que, je tiens à le répéter, le Parti réformiste et moi-même l'appuyons. Il subsiste cependant quelques inquiétu-


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des touchant la mise en application de l'accord du GATT et le fonctionnement de l'Organisation mondiale du commerce.

Je sais que les agriculteurs sont prêts à accueillir cet organisme. Je l'ai constaté ces dernières années au fil des négociations du GATT. J'entends certes dire maintenant de la part des agriculteurs et des organismes agricoles qu'ils appuient cet accord. Il est clair que les agriculteurs sont prêts pour la mise en oeuvre de cet accord et pour la mise en place de l'Organisation mondiale du commerce comme arbitre, pour reprendre l'analogie utilisée par mon collègue. Mais le gouvernement est-il prêt, lui?

Je vais poser aujourd'hui beaucoup de questions pour savoir si le gouvernement est prêt pour l'application de l'accord du GATT et pour la mise en place de l'Organisation mondiale du commerce.

Mes questions portent sur deux points. Le premier a trait aux barrières interprovinciales au commerce et à l'inaction du gouvernement actuel pour y remédier, surtout en matière agricole.

(1600)

L'agriculture a été un élément très important des négociations du GATT. Pourtant, dans les négociations sur la réduction des mesures faisant obstacle au commerce interprovincial que le gouvernement a tenues avec les provinces l'été dernier, il n'y a eu pour ainsi dire aucun accord de quelque importance entre les autorités fédérales et provinciales au sujet de l'agriculture. Ainsi donc, un enjeu commercial important au niveau mondial et dans le cadre du GATT n'a même pas été abordé dans notre pays. Premier point.

Le deuxième concerne les organismes gouvernementaux. Je me demande si le gouvernement est prêt pour cet accord quand je vois son attitude et constate qu'il refuse de modifier certains organismes de l'État.

Je voudrais dire un mot des obstacles qui entravent le commerce interprovincial. L'agriculture occupe une grande place dans l'accord du GATT, mais elle n'a pas été considérée comme un élément important au Canada, lorsqu'il s'est agi de libéraliser les échanges de produits agricoles entre les provinces. Il serait important que le ministre de l'Agriculture et d'autres ministres prennent des mesures pour abaisser ou renverser ces barrières au commerce interprovincial.

Mon troisième point concerne les organismes gouvernementaux et la façon dont le gouvernement les traite. Les organismes auxquel je songe surtout sont la Commission canadienne du blé, les offices de commercialisation et l'administration de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest. Dans le cas de cette dernière, je serai très bref, car le député de Lisgar-Marquette a déjà traité du sujet dans une certaine mesure. Je parlerai d'abord de la Commission canadienne du blé ainsi que des réserves que j'ai à faire au sujet des changements qu'il faudrait lui apporter pour que l'accord du GATT fonctionne.

D'abord, dans cet accord, on apporte deux modifications à la Loi sur la Commission canadienne du blé. Elles sont énoncées aux articles 48 et 49 du projet de loi. L'article 48 du projet de loi traite des modifications apportées à l'article 45 de la Loi sur la Commission canadienne du blé. En vertu de ces modifications, la Commission canadienne du blé ne contrôlera que les exportations et non plus les importations de blé et d'orge.

Je voudrais attirer l'attention des députés là-dessus. À l'heure actuelle, la Commission canadienne du blé contrôle les importations et les exportations de blé et d'orge au Canada. Par suite de cette modification, elle ne contrôlerait plus que les exportations de blé et d'orge. Je me demande si cela est vraiment sensé. Notre gouvernement contrôlera les exportations alors que nous venons tout juste de conclure un accord de libre-échange qui vise à rendre plus libres les échanges commerciaux des signataires de l'accord. Cela n'a aucun sens.

L'autre modification, qui figure à l'article 49 du projet de loi, a trait à l'article 46 de la Loi sur la Commission canadienne du blé. En vertu de cette modification, la Commission canadienne du blé ne délivrerait plus les licences d'importation au Canada. Je le répète, on supprime la restriction sur les importations de grain et la délivrance de licences d'importation, mais on maintient les restrictions à l'exportation en vertu de la Loi sur la Commission canadienne du blé. Il semble tout à fait ridicule que la loi continue de restreindre les exportations, mais non les importations dans le cadre de la Loi sur la Commission canadienne du blé.

Comment ces modifications vont-elles se traduire pour l'industrie du grain? Je pense qu'elles auront de nombreuses répercussions. D'abord, les agriculteurs américains pourront vendre directement aux minotiers canadiens, mais les agriculteurs canadiens pourraient ne pas pouvoir en faire autant. Cela vous semble-t-il incroyablement ridicule? À moi, oui. Il faut apporter d'autres modifications à la Loi sur la Commission canadienne du blé pour permettre aux agriculteurs canadiens de vendre directement aux minotiers canadiens, comme les agriculteurs américains pourront le faire. C'est un droit qu'auront les agriculteurs américains une fois que ce projet de loi aura été adopté, et je ne doute pas qu'il le sera.

(1605)

J'aimerais vous raconter l'histoire d'un entrepreneur canadien qui m'a été racontée lors de la manifestation concernant la Commission du blé, qui a eu lieu à Regina il y a trois ou quatre semaines. Pour diversifier ses activités, cet agriculteur a construit un moulin sur sa terre. Il a embauché des gens de l'extérieur pour faire fonctionner ce moulin-le genre d'exploitation que nous souhaitons tous voir.

Quel était son problème et pourquoi a-t-il été l'un de ceux qui ont pris la parole lors de la manifestation de Regina? C'est très simple. Pour pouvoir utiliser son propre blé dans son moulin, cet agriculteur devait vendre son grain par l'entremise de la Commission canadienne du blé, cela, pour se conformer rigoureusement à la loi. Il avait besoin de sa propre farine parce qu'il fabriquait des produits spéciaux qu'il vendait partout dans l'ouest du Canada. Or, pour pouvoir utiliser le blé qu'il cultivait pour produire sa farine, il devait passer par la Commission canadienne du blé. Cela semble vraiment incroyable quand on parle de libéraliser le commerce.

Cet agriculteur voulait aussi vendre ses produits spéciaux sur le marché américain. Qu'est-ce qui l'empêche de le faire? La Commission canadienne du blé l'en empêche parce que, pour vendre sa farine sur le marché américain, l'agriculteur devrait obtenir un permis en vertu de la Loi sur la Commission canadien-


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ne du blé. Une autre restriction à laquelle il refuse de se conformer.

Quand on examine la situation de cet agriculteur et qu'on extrapole un peu, si le projet de loi est adopté, ce qui ne fait pas l'ombre d'un doute, l'agriculteur pourrait aller acheter pour son moulin du blé d'un agriculteur américain de l'autre côté de la frontière, sans passer par la Commission canadienne du blé. Il pourra le faire aux termes de ces modifications. Le vendeur n'aura pas besoin de permis pour importer le blé qu'il utilisera dans son moulin, mais il ne peut y utiliser son propre blé ni celui de son voisin, en raison des restrictions de la Commission canadienne du blé. Cela semble absurde et ce l'est.

J'aimerais maintenant poser au ministre une série de questions. Premièrement, lui semble-t-il raisonnable de laisser aux agriculteurs canadiens la même liberté qu'aux agriculteurs américains? Cela lui paraît-il raisonnable? Les agriculteurs canadiens ne devraient-ils pas avoir au moins la même latitude que les agriculteurs américains lorsqu'il est question de commercialiser leur blé et leur orge, et à plus forte raison s'il est question de le commercialiser au Canada? Ils n'ont pas la même liberté actuellement.

Voici ma deuxième question: comment ce ministre, ou tout autre ministre, pourrait-il refuser aux agriculteurs le contrôle de leur propre organisation, la Commission canadienne du blé, puisque celle-ci leur appartient après tout, étant donné qu'ils paient tous les coûts de fonctionnement de cette commission censée exister dans leur intérêt?

J'ai posé cette question au ministre à plusieurs reprises au cours des derniers mois, et il a toujours répondu par une formule évasive ou en disant qu'il faudrait étudier le dossier.

Lorsque je parle de remettre aux agriculteurs le contrôle de leur propre organisation, il s'agit uniquement de faire en sorte que les agriculteurs puissent élire un conseil d'administration qui remplacerait le conseil actuel dont les membres sont nommés. Ainsi, la Commission canadienne du blé devrait rendre des comptes aux agriculteurs, c'est-à-dire à ceux qui paient effectivement ses dépenses. Pourquoi le ministre, ou qui que ce soit, doit-il faire une étude avant de décider de confier aux agriculteurs le contrôle de leur propre organisation en les autorisant à choisir les membres du conseil d'administration? Je ne peux tout simplement pas imaginer de réponse à cette interrogation.

Durant le temps qu'il me reste, je voudrais poser une ou deux autres questions. D'abord, est-ce qu'on a demandé aux agriculteurs s'ils voulaient maintenir le monopole de la Commission canadienne du blé? Quelqu'un leur a-t-il posé cette question? Je l'ai fait et je sais que d'autres députés réformistes l'ont fait. Le ministre ne l'a certainement pas fait et il est grand temps qu'il le fasse. Le ministre a une obligation envers eux. Il doit leur demander s'ils veulent maintenir ce monopole. Est-ce que quelqu'un a demandé aux agriculteurs s'ils désiraient remplacer les commissaires nommés par un conseil d'administration élu?

(1610)

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît! Je sais qu'une période de dix minutes peut parfois s'écouler très rapidement et je dois respectueusement vous interrompre.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, j'ai une petite question à poser au député de l'Ouest. J'aimerais savoir comment il considère le fait qu'on paie encore pour transporter le grain de l'Ouest, que ce sont les Canadiens qui doivent supporter le transport du grain de l'Ouest. J'aurais toujours souhaité qu'on puisse subventionner le transport du grain proportionnellement à la distance parcourue. Encore une fois, on se rend compte qu'on subventionne le transport du grain de l'Ouest, mais quand il s'agit du grain de l'Est, il n'y a pas de subventions au transport. Cela m'a toujours paru inéquitable. J'aimerais avoir des explications à ce sujet du député de l'Ouest.

[Traduction]

M. Benoit: Monsieur le Président, la question avait trait aux subventions et visait à déterminer si elles ne devaient pas être proportionnelles à la distance parcourue. De plus, le député a affirmé qu'il n'y avait pas de subventions dans le cas du grain en provenance du Canada central, ce qui bien sûr est faux. Les opérations d'entretien de la Voie maritime sont très coûteuses. On y a consacré, et continue d'y consacrer, beaucoup d'argent. Des subventions sont versées aux agriculteurs du Canada central en fonction des livraisons, comme c'est le cas pour les agriculteurs de l'Ouest.

Il s'agit ensuite de s'interroger sur la raison d'être première de la subvention du Nid-de-Corbeau. C'est que, au début du siècle, il fallait acheminer le produit brut vers le Canada central pour qu'il y soit transformé. C'est pour cette raison qu'on a commencé à accorder la subvention du Nid-de-Corbeau. Ce n'est pas parce que les transformateurs du Canada central tenaient à ce que les agriculteurs de l'Ouest soient des porteurs d'eau. Ça n'a plus sa raison d'être. La subvention du Nid-de-Corbeau a empêché les agriculteurs de l'Ouest de se doter d'un secteur de la transformation bien à eux.

Il ne s'agit plus de savoir si la subvention doit être proportionnelle à la distance parcourue. La question est de savoir si la subvention est pertinente. La réponse est non. Il ne devrait pas y avoir de subvention, qu'elle soit proportionnelle à la distance parcourue ou versée sous quelque autre forme que ce soit.

Quant aux fonds qui sont actuellement octroyés en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, le Parti réformiste a recommandé qu'ils soient inscrits dans une mesure visant à compenser les effets de la distorsion commerciale que subissent les agriculteurs qui sont victimes des pratiques déloyales d'autres pays. Ces indemnités seraient directement versées aux agriculteurs en cas de dommages occasionnés à toute marchandise, quelle qu'elle soit.

Ces indemnités pourraient d'abord s'appliquer au grain, puis, au fil des ans, à toutes les autres marchandises.

[Français]

M. Jean Landry (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, j'aurais une question à poser à l'honorable député concernant le transport du grain. À l'heure actuelle, afin d'être subventionné, le grain de l'Ouest s'en vient virer ici à Thunder Bay. Cela, c'est pour le transport du grain vers l'Europe. Ensuite il retourne dans l'Ouest, à Vancouver, et de Vancouver il est transporté par bateau et s'en va à Panama pour se rendre en Europe. J'aimerais savoir si mon confrère aurait d'autres solutions à apporter quand on


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parle d'économie. J'aimerais qu'il puisse proposer des économies sur le transport à ce niveau-là.

[Traduction]

M. Benoit: Monsieur le Président, je crois que cette question porte sur les détours dans l'acheminement des céréales, une pratique qui existe depuis plusieurs années et qu'on a soulignée très clairement au ministre il y a un an. En effet, les céréales sont expédiées à Thunder Bay au tarif subventionné, puis réacheminées au plein tarif du marché. Cela n'a aucun sens.

Comme le député vient de le mentionner, cette pratique coûte aux contribuables canadiens entre 15 et 40 millions de dollars par année. C'est absurde et inacceptable. Lorsque le ministre de l'Agriculture a découvert cette situation, pourquoi n'a-t-il pas pu y mettre un terme dans un délai d'un mois? Pourquoi? Il n'a aucune bonne excuse. Il aurait dû agir.

Le ministre lui-même fait des détours. Au début, il avait dit que les détours dans l'acheminement des céréales cesseraient le 1er janvier. Maintenant, il reporte cette décision à la fin de juillet prochain, à la prochaine campagne agricole.

(1615)

Certes, les contrats qui ont été conclus avant que ce problème ne soit largement reconnu posent des difficultés, mais il faudrait les régler directement. Cette pratique aurait dû cesser il y a bien longtemps.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, la possibilité qui nous est donnée de participer à ce débat est historique parce que celui-ci marque la fin d'un demi-siècle d'expérience dans le commerce international, une expérience qui nous semble toutefois imparfaite, et notre entrée dans le XXIe siècle.

Je me souviens de la vision qu'avait eue, à l'époque de la guerre, le président Franklin Roosevelt, ce grand leader, dont les plans pour l'après-guerre comprenaient la création non seulement d'une organisation des Nations Unies, mais aussi d'une organisation parallèle, une organisation internationale du commerce qui défendrait les principes de la libéralisation des échanges et qui éliminerait les barrières tarifaires partout dans le monde.

Le président Roosevelt n'a pas vécu assez longtemps pour voir sa vision se réaliser ou, plutôt, pour la voir échouer. Laissons aux historiens le soin d'expliquer les raisons de cet échec. Certains l'ont attribué à la guerre froide, mais il faudrait plutôt l'attribuer à la persistance des sentiments protectionnistes aux États-Unis, combinée à la tentative des plus malavisées que l'on a faite rétroactivement de se remettre de la grande dépression en envisageant l'imposition de tarifs élevés, selon l'approche proposée par Smoot-Hawley.

M. Roosevelt et ses successeurs, M. Truman et les autres, ont dû lutter contre cela. Ils ont aussi dû lutter contre la nouvelle tendance néo-isolationniste des Américains qui était liée à la controverse sur l'amendement de Bricker qui cherchait à limiter la contribution des États-Unis au renouveau politique et à la reprise économique de l'Europe de l'Ouest.

L'échec de l'Organisation internationale du commerce a fait s'écrouler tous les espoirs placés dans la conférence de Bretton Woods vers la fin de la guerre en vue de la création de cette étrange institution. Certains ont dit, en s'inspirant de Guys and Dolls, qu'il s'agissait «du plus vieux jeu de hasard du monde», mais, en fait, il s'agit d'une conférence diplomatique internationale qui revient régulièrement, le GATT.

Le GATT avait beaucoup de choses à offrir. Si l'on se penche sur ce qu'il a fait, on constate qu'il a donné lieu à beaucoup d'opérations de résolution de problèmes particuliers. Dans chaque cas on réunissait une équipe de spécialistes qui procédait à une série de négociations diplomatiques complexes, jamais ouvertes au grand public.

La fonction du GATT était de parvenir à des principes généraux, mais il n'y avait pas de vision générale de l'économie mondiale. C'est pour cela qu'a resurgi, cinquante ans plus tard, la notion d'une organisation internationale du commerce. Elle devrait en fin de compte jouer sur le plan économique le rôle que l'Organisation des Nations Unies joue sur le plan politique.

Avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, on a maintenant un trio complet d'organisations économiques internationales. C'est certainement pour le mieux et il était certainement plus que temps. C'est un processus de fédéralisation. Un processus constitutionnel. Cela signifie que les grandes questions du commerce mondial ne seront plus débattues en secret dans quelque station de vacances, en période creuse, car c'est vraiment dans de tels endroits que se tenaient les conférences du GATT.

Le GATT bénéficiait des tarifs hors saison. Il visitait l'Uruguay en hiver, au lieu des plages l'été. Il avait son rôle, mais il n'a pas réellement répondu aux problèmes qui se posent à l'aube du XXIe siècle. Cette initiative de créer l'OMC vient à un moment où les barrières s'écroulent dans le monde entier. Le mur de Berlin s'est écroulé politiquement. Lorsque l'on s'ouvre aux idées politiques, on ne peut pas rejeter les idées économiques.

On a dit, et c'est vrai, que l'on pouvait avoir une économie de marché sans avoir une société démocratique libérale, mais que l'on ne saurait la maintenir. L'expérience britannique montre certainement que les principes du libre-échange sont apparus avant la libéralisation politique, mais que celle-ci suit celui-là.

À bien des égards, c'est une occasion historique pour nous. Le débat a été constructif et utile. J'ai remarqué en particulier les interventions de mes collègues, de mes amis du Parti réformiste, et leurs inquiétudes au sujet du fédéralisme. Je peux leur affirmer que de ce côté de la Chambre nous partageons leur souhait de voir un fédéralisme plus souple et plus coopératif, qui ne soit pas seulement basé sur le bon sens politique, mais aussi sur la bonne


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volonté, la collaboration et la liaison entre le gouvernement fédéral et les autorités provinciales. La libéralisation du commerce dépend de la coopération de tous les paliers de gouvernement.

(1620)

Ces interventions ont été utiles et on en a pris note. Vous pouvez être sûrs qu'on en tiendra compte lors de la mise en oeuvre des programmes de réforme structurelle du gouvernement. Nous passerons ainsi d'une période où la politique économique canadienne a été régie par le bilatéralisme et par le multilatéralisme à travers cette conférence internationale périodique appelée GATT, à ce qu'on a appelé une conception mondialiste, à une perspective mondiale, à une organisation constitutionnelle parlementaire où les débats sont ouverts, où les délégués peuvent faire des propositions et des contre-propositions, mais où tout se fait ouvertement. Cela, je pense, correspond bien à l'esprit de notre époque.

Il ne s'agit pas d'une organisation fermée, encore qu'il est important de souligner-et je pense que nous ne l'avons pas oublié-qu'on ne peut, dans un débat sur une loi mettant en oeuvre l'Accord sur l'Organisation mondiale du commerce, insérer, sous la forme d'amendements à la législation intérieure, des réserves unilatérales à un traité international. Si nous voulons être un membre fondateur de l'Organisation mondiale du commerce, ce doit être sans réserve et avec pleine confiance en notre capacité de faire en sorte que le système fonctionne.

Nous nous sommes libérés de l'ancien ordre plus facilement que certains pays, en tous cas plus facilement que notre voisin, les États-Unis. La charrue a remplacé l'épée. Les forces économiques sont notre guide à la veille du siècle prochain. L'ancien ordre sur lequel était fondé la guerre froide n'est plus. En tant que membre fondateur de l'Organisation mondiale du commerce, nous sommes en mesure de faire des suggestions très concrètes en ce qui concerne l'adhésion de nouveaux membres. Nous pouvons aider la Chine à adhérer à l'organisation. Nous pouvons examiner le cas de Taïwan, car je crois qu'on ne peut ignorer Taïwan. Nous pouvons chercher quelle sera la place de la Russie lorsque sa nouvelle phase de libéralisation sera achevée.

Cette transition d'un monde où les forces militaires et politiques étaient axées sur la guerre froide à un nouvel ordre mondial reposant sur le libre-échange et la libre circulation des idées qui l'accompagne présente un défi énorme.

Pour le Canada, le défi est d'autant plus grand que nous avons ouvert la voie dans bien des domaines en politique étrangère. Nous avons inventé le maintien de la paix. À bien des égards, si on retourne aux principes de base des Nations Unies, on s'aperçoit que ce sont ces mêmes idées que nous avançons pour démocratiser cet organisme mondial qui est sans doute trop facilement devenu un club pour ses membres permanents.

C'est le défi que représente ce projet de loi, dans un certain sens. Le fait qu'il y ait un tel consensus entre presque tous les députés de cette Chambre en faveur de ce principe et de cette idée est une source de bonheur.

L'entrée en vigueur de ce nouveau système à l'aube du XXIe siècle ne remet pas en cause nos relations spéciales avec les États-Unis et le Mexique aux termes de l'ALENA. Ces accords demeurent, mais ils s'inscrivent dans le contexte plus large d'un monde obéissant à ses propres principes mais dans lequel la pluralité des processus décisionnels est possible. Cela est éminemment canadien. Je reviens à mon point de départ. Nous vivons un moment historique. Un demi-siècle d'une situation héritée du vieil ordre économique d'avant la Deuxième Guerre mondiale touche à sa fin et fait place à un espoir nouveau, à une vision nouvelle. C'est un privilège d'y avoir participé.

M. Vic Althouse (Mackenzie, NPD): Monsieur le Président, j'ai été heureux d'entendre le député de Vancouver Quadra remettre dans son contexte historique la proposition sur l'Organisation mondiale du commerce, dont nous sommes aujourd'hui saisis à l'étape de la troisième lecture. On a déjà tenté quelque chose de semblable après la Seconde Guerre mondiale mais toujours, d'après ce que j'ai lu, les États-Unis s'y sont opposés.

(1620)

J'ai constaté avec intérêt que de l'avis du député, qui est aussi, semble-t-il, l'opinion du gouvernement, ils avaient réussi à contrecarrer toute tentative d'insérer des réserves unilatérales dans les accords internationaux.

Je crois qu'il faisait alors allusion aux amendements que les membres du NPD avaient présentés à la Chambre, à l'étape du rapport. En fait, nous tentions d'assurer des règles du jeu justes pour les Canadiens, par rapport aux Américains. Leur loi, que nous avons copiée et que nous espérons inscrire dans notre propre législation, dit effectivement que lorsque des questions commerciales soulèvent un différend ou posent un problème, les lois américaines l'emportent. Les Américains s'en tiennent à ce principe depuis qu'ils ont formé leur pays. Leur constitution en donne le droit au Congrès, et je peux le comprendre.

Cependant, j'ai beaucoup de difficulté à comprendre les mesures prévues dans leur projet de loi, qui dit que les États-Unis considèrent que le règlement des différends doit encore se faire par consensus. Tout le monde n'interprète pas de la même façon ce que dit l'accord international. L'accord dit: «En cas de différend, la question litigieuse doit être réglée par un vote à la majorité.» La persistance des Américains à affirmer qu'un consensus est nécessaire signifie qu'en cas de différend entre nous et un pays ayant l'une des économies les plus importantes du monde et certainement la plus grosse armée du monde, seul un consensus pourrait régler la question. Autrement dit, si les États-Unis ne veulent pas, nous ne pouvons pas nous entendre.

Nous sommes saisis d'une occasion historique et nous avons conçu une véritable Organisation mondiale du commerce, où une majorité définit des règles qui s'appliquent également à toutes les parties. Dans cette perspective, le député ne craint-il pas que, dans nos relations avec les États-Unis, ce seront toujours eux qui mèneront, et qu'il faudra encore quelques décennies avant que


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l'OMC fasse une différence dans nos relations avec notre principal partenaire commercial?

M. McWhinney: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question réfléchie. Nous croyons à la primauté du droit. L'Organisation mondiale du commerce a une constitution, une charte et des règles, notamment des règles concernant la façon de prendre les décisions, et nous tenterons de les faire appliquer aux autres pays, y compris les États-Unis si nécessaire.

Bien entendu, la charte évoluera. J'espère que nous proposerons dans l'avenir des modifications qui auront pour effet de renforcer les mécanismes de règlement des différends et de soumettre en dernier recours les litiges au jugement exécutoire de la Cour internationale de justice. Cette perspective ne nous effraie pas, mais elle semble effrayer les États-Unis pour diverses raisons. Nous pourrons peut-être tenter de ranger notre voisin à notre point de vue.

* * *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Je m'excuse d'interrompre, mais je serai bref. Vous constaterez que la Chambre consent à l'unanimité à la motion suivante:

Je propose:

Que, tout vote par appel nominal demandé le 1er décembre 1994 au cours des Affaires émanants des députés soit différé jusqu'à la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement le mardi 6 décembre 1994.
(La motion est adoptée.)

* * *

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui à l'appui du projet de loi C-57. Je n'aborderai pas les aspects se rapportant à l'agriculture aujourd'hui. Je m'attacherai plutôt aux répercussions du projet de loi sur un élément important de l'industrie canadienne, à savoir le secteur de la pétrochimie.

Mon intervention est intéressée en ce sens que l'industrie de la pétrochimie est justement la plus importante dans ma circonscription. C'est en effet le hasard qui a voulu qu'une première nappe de pétrole soit découverte à une vingtaine de milles de Sarnia vers le milieu des années 1850. Il arrivait tant de pétrole par camion, par train et, plus tard, par pipeline que Sarnia est devenue une ville pétrolière, d'où la création de l'industrie pétrochimique qui joue aujourd'hui un rôle de premier plan dans l'économie de la région.

(1630)

La demande de pétrole et de produits pétroliers, surtout après la Deuxième Guerre mondiale, a donné lieu au développement des sociétés pétrochimiques partout au Canada, mais plus particulièrement dans ma circonscription.

La demande de produits pétrochimiques et connexes a augmenté en flèche durant l'après-guerre, c'est-à-dire entre la fin de Deuxième Guerre mondiale et jusqu'aux années quatre-vingt. Les personnes qui travaillaient dans ce secteur de l'économie avaient vraisemblablement le revenu par habitant le plus élevé au Canada.

Toutefois, au cours des années quatre-vingt, l'industrie de la pétrochimie a essuyé un certain nombre de coups durs sur le plan économique. La demande a fléchi depuis 1988 sous l'effet de la récession, tandis qu'augmentait la concurrence, surtout en provenance des pays de la ceinture du Pacifique. De plus, la modification des règlements gouvernementaux a eu une incidence néfaste sur cette industrie qui revêt néanmoins une importance vitale pour l'économie canadienne.

Il convient de signaler qu'en Ontario, le gouvernement provincial a édicté un certain nombre de règles environnementales qui font fuir les capitaux de ce secteur. Dans ma seule circonscription, nous avons perdu plus de 5 000 emplois depuis 1988. Il n'en reste pas moins que la pétrochimie procure toujours 17 000 emplois et continue de jouer un rôle important.

On compte 17 installations de pétrochimie dans ma circonscription. Il y a Imperial Oil, Shell Oil, Dupont et les autres. Ces entreprises offrent 10 000 emplois directs et en créent 7 000 de plus indirectement, dans des secteurs connexes. Il est intéressant de noter que certains employés du secteur de la pétrochimie gagnent deux fois et demie le salaire annuel moyen des travailleurs canadiens.

On voit bien que, si l'on veut que l'essor de cette industrie se poursuive, la clé du succès réside dans la libéralisation des échanges. C'est pourquoi l'adoption du projet de loi C-57 est essentielle au bien-être économique d'un grand nombre de mes commettants. Pour comprendre pourquoi, il suffit de jeter un coup d'oeil à l'industrie chimique ou pétrochimique canadienne.

Les fabricants de produits chimiques au Canada réalisent un chiffre de ventes annuel de plus de 10 milliards de dollars et emploient quelque 30 000 Canadiens. Quant au secteur des produits chimiques dans son ensemble, il emploie 90 000 autres Canadiens. Cette industrie est en fait le troisième secteur manufacturier en importance au Canada et aussi le troisième pour la valeur ajoutée. L'industrie des produits chimiques dépend des marchés internationaux pour sa survie. En fait, les exportations comptent pour bien plus de 50 p. 100 de la production annuelle au Canada. Dans certaines installations, notamment dans mon com-


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té du sud de l'Ontario, les exportations représentent bien plus de 80 p. 100 de la production totale.

C'est pourquoi la normalisation des droits de douane réalisée par l'Organisation mondiale du commerce ou OMC est si importante. En 1993, les exportations totales de produits chimiques dans le monde entier s'élevaient à environ 313 milliards de dollars américains, ou 9,2 p. 100 du total des exportations mondiales. La même année, la production mondiale totalisait plus de 1,25 billion de dollars américains.

Le projet de loi C-57 représente un progrès important pour l'industrie chimique dans mon comté, dans tout le Canada et particulièrement en Alberta. En adhérant à l'Organisation mondiale du commerce, le Canada et ses principaux partenaires commerciaux, dont l'Union européenne, le Japon et les États-Unis, ainsi que d'autres nations industrialisées ont convenu de réviser à la baisse et d'harmoniser une vaste gamme de tarifs sur les produits chimiques. Les tarifs canadiens actuellement inférieurs aux niveaux d'harmonisation resteront inchangés.

L'accord englobe également de nouveaux règlements internationaux sur la protection des droits liés à la propriété intellectuelle, y compris un ensemble de normes touchant les droits d'auteur et les marques de commerce en vertu desquelles chaque gouvernement doit protéger et respecter les droits liés à la propriété intellectuelle. Cela est très important pour les Canadiens, car nous avons inventé un certain nombre de procédés chimiques protégés en tant que propriété intellectuelle.

Cet accord sera généralement avantageux pour le Canada à plusieurs égards. Je pense encore une fois à mon comté, qui en tirera des avantages.

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La réduction et l'harmonisation des tarifs de la nation la plus favorisée permettront de faciliter l'accès sur les marchés à créneaux des exportations canadiennes de produits chimiques et de produits du plastique. Cet accès amélioré sera particulièrement bénéfique pour les industries de la pétrochimie et de la résine synthétique, qui sont axées sur les exportations et qui sont établies au Canada.

Pour notre pays, la force de l'Organisation mondiale du commerce et du GATT réside dans la vaste participation des pays. Les disciplines qui trouveront des applications dans les pays en développement auront un meilleur accès à ces marchés. En libérant l'accès aux marchés internationaux, l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce aidera l'industrie canadienne à mieux s'orienter vers les marchés mondiaux.

Au Canada, la structure classique d'une économie de succursales cède la place à une industrie de plus en plus en mesure de livrer concurrence sur les marchés mondiaux. L'accord aidera le Canada à s'acquitter de ses responsabilités en matière de R-D et de fabrication à l'échelle internationale, et l'Organisation mondiale du commerce comportera un mécanisme de règlement des différends amélioré qui représentera une solution efficace aux guerres commerciales.

Je voudrais parler brièvement de l'avenir. L'industrie de la pétrochimie doit absolument avoir accès aux marchés pour vendre ses produits. Cet accès est indispensable au renouveau économique, peu importe dans quelle circonscription il se produit. Être compétitif à l'échelle mondiale, c'est avoir un véritable accès aux marchés mondiaux. En ratifiant l'accord, nous permettons à notre pays de franchir un premier pas important. Nous devons poursuivre nos efforts si nous voulons garantir la croissance continue de ce secteur indispensable de notre économie.

Je pense que nous devons féliciter les Canadiens qui ont pris part aux négociations commerciales pour leur succès au cours de l'Uruguay Round. Ils ont réussi à convaincre les marchés-cibles très importants de la Corée, de Singapour et de Hong Kong d'accepter la plupart des lignes tarifaires. Ces marchés revêtent un intérêt particulier pour le secteur pétrochimique au Canada.

Toutefois, d'autres pays-et il ne fait aucun doute qu'il faut s'occuper de cet aspect-doivent être encouragés à harmoniser leurs droits de douane sur les produits chimiques. Je songe notamment à la Chine, dont l'industrie chimique est deux fois et demie plus importante que la nôtre, du point de vue de la production. Le taux de croissance annuelle de l'industrie chinoise est de 15 p. 100. Nous devons donc convaincre les Chinois d'harmoniser leurs droits de douane sur les produits chimiques et d'assouplir leurs mesures d'importation restrictives, afin que nos produits puissent avoir accès à ce marché.

En terminant, il faut bien comprendre que nous vivons dans un monde où les économies d'échelle sont déterminantes. À l'heure actuelle, la production des usines ontariennes, et en fait de la plupart des usines canadiennes de produits pétrochimiques, répond aux besoins des marchés nationaux et régionaux, mais non des marchés internationaux. Pour être véritablement compétitives, ces usines doivent desservir les marchés internationaux, ce qui suppose qu'elles doivent avoir libre accès à ceux-ci. Plus les marchés sont importants, plus efficace et plus compétitive peut être l'industrie canadienne. Cela va de soi.

Nos grandes usines de fabrication de produits pétrochimiques tels que l'éthylène, qui sont situées à Joffre, en Alberta, et dans ma circonscription de Sarnia, contribuent sensiblement à notre balance commerciale avec d'autres pays, notamment les États-Unis.

Notre position est encore avantageuse, au moment où les pays côtiers du Pacifique tentent de faire une percée sur les marchés. Des études récentes montrent clairement qu'au Canada la main-d'oeuvre requise dans ces usines de pétrochimie vient au deuxième rang pour ce qui est du niveau d'études et de formation, immédiatement après celle de l'industrie du logiciel.

Pour veiller à ce que les diplômés de nos écoles techniques aient un emploi, le Canada doit constamment chercher de nouveaux marchés pour ses produits. Dans bien des cas nos concurrents asiatiques n'ont tout simplement pas le personnel qualifié pour faire marcher de façon efficace et efficiente les usines de pétrochimie.

Il ne faut pas oublier que l'industrie pétrochimique se classe au premier rang des industries manufacturières canadiennes pour ce qui est de la valeur ajoutée aux matières premières. Nous avons des matières premières en abondance, il suffit de visiter les champs de gaz de l'Alberta pour se rendre compte du volume de gaz dont nous disposons. Il y a aussi du gaz en Ontario. Mais pour l'instant, il faut adopter ce projet de loi pour avoir accès à des marchés où nous pourrons écouler les produits canadiens.


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Nous pouvons prendre les matières premières et les transformer pour leur ajouter de la valeur.

(1640)

Cependant, si nous n'adoptons pas ce projet de loi, c'est à petit feu que nous ferons mourir cet important segment de l'économie canadienne.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, le député a commencé par dire qu'il ne parlerait pas aujourd'hui d'agriculture et il n'en a effectivement pas parlé. J'ai une question à lui poser au sujet de l'agriculture.

Le député n'ignore pas que l'Ontario Wheat Board est dirigé par un conseil d'administration élu, que ce conseil élu en surveille l'exploitation. Dans l'Ouest, la Commission canadienne du blé est dirigée par un groupe de commissaires nommés.

Je voudrais connaître l'opinion sincère du député. Est-il logique qu'un office de commercialisation tel que la Commission canadienne du blé, qui est payé par les agriculteurs de l'ouest du Canada, soit dirigé par un groupe de commissaires nommés plutôt que par un conseil d'administration élu, comme c'est le cas en Ontario?

Si le député ne trouve pas cela logique, que peut-il proposer pour que cela change et vite? S'il trouve logique que les agriculteurs n'aient pas droit de regard sur une organisation pour laquelle ils paient, peut-il nous dire pourquoi?

M. Gallaway: Monsieur le Président, comme c'est souvent le cas avec les députés d'en face, cela manque de suite. De toute façon, je devrai m'assurer d'abord avec le député de ce qu'il veut dire au juste avant de risquer une observation.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour son discours très intéressant sur l'industrie pétrochimique. C'est un secteur que je connais très peu et qui n'existe pas dans ma circonscription.

Le député a mentionné l'éducation des travailleurs de cette industrie. A-t-il l'impression que nos établissements de formation fournissent à la tâche? Sont-ils en mesure de former les diplômés dont nous avons besoin pour nous imposer sur les marchés mondiaux?

M. Gallaway: Monsieur le Président, je ne crois pas que l'on puisse douter de la capacité de nos établissements d'enseignement de produire les diplômés dont nous avons besoin. Comme je l'ai dit, nous avons innové dans bien des secteurs des techniques gazières et de la raffinerie, deux composantes de l'industrie pétrochimique. Nous avons ouvert la voie dans ce domaine technique et dans l'abaissement du coût de l'unité de production.

Nous avons un problème de population active vieillissante. Les techniques évoluent si rapidement qu'il est parfois difficile pour les travailleurs de suivre le mouvement ou de comprendre pleinement les principes scientifiques appliqués à un moment précis.

Ce problème est commun à l'ensemble de l'industrie et pas uniquement au Canada. La même chose se produit aux États-Unis, particulièrement sur la côte du golfe du Mexique, où l'industrie doit constamment recycler ses travailleurs, non pas parce qu'ils sont mal formés, mais parce que les changements scientifiques et technologiques se produisent si rapidement que les travailleurs ne peuvent pas assimiler tout l'aspect théorique complexe de leurs fonctions.

Le président suppléant (M. Kilger): En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Regina-Lumsden-Les taux d'intérêt; le député de The Battlefords-Meadow Lake-Les nominations faites par le gouvernement.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler du projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.

Le Canada est et, je suppose, restera une nation commerçante. C'est le commerce qui a ouvert la région d'où je viens, l'Ouest, à la civilisation européenne. Ce sont les négociants de la Compagnie de la Baie d'Hudson et de la Compagnie du Nord-Ouest qui ont exploré l'Ouest à des fins commerciales. Le Canada a toujours profité des situations où il pouvait commercer librement et sans entraves.

Je voudrais parler aujourd'hui de la question des filets de sécurité dans le secteur agricole, qui sont également touchés par le projet de loi à l'étude.

(1645)

Nous devons comprendre que les filets de sécurité dans le secteur agricole sont en réalité des programmes de gestion des risques. Ce sont des mécanismes visant à aider les agriculteurs à gérer les risques liés à la production de quelque chose dont nous avons tous besoin: les produits alimentaires.

En plus de leur valeur nutritive, les produits alimentaires ont une autre caractéristique qui les rend uniques, soit le fait qu'ils sont périssables. Il y a des risques particuliers liés à la production et à la vente d'un produit périssable.

C'est cette caractéristique des produits alimentaires et les risques qui y sont liés qui nous ont amenés à mettre au point des programmes de gestion des risques, c'est-à-dire nos filets de sécurité dans le secteur agricole. Fondamentalement, la responsabilité de la gestion des risques doit être assumée par l'agriculteur comme par tout autre entrepreneur. Les agriculteurs acceptent le fait qu'il existe des risques inhérents à la production de denrées alimentaires. Ils tâchent de prendre de sages décisions et de gérer soigneusement leur produit tout au long de son cycle de vie.

En plus de cet aspect périssable de leur produit, l'autre risque fondamental tient à l'aspect extrêmement fluctuant ou incertain de leur revenu, attribuable à des forces absolument indépendantes de la volonté d'agriculteurs comme moi. Ces forces tiennent


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aux risques naturels, aux cycles du marché et aux effets de distorsion commerciale.

Il y a donc trois outils de gestion des risques dont les agriculteurs ont fondamentalement besoin: un régime d'assurance-récolte ou d'assurance du bétail pour parer aux risques naturels, un programme de stabilisation du revenu pour faire face aux cycles du marché et un programme d'aide à l'ajustement aux distorsions commerciales pour remédier aux effets de distorsion commerciale.

J'ai eu le plaisir de participer activement aux vastes consultations que mon parti a entreprises auprès des agriculteurs de tout le Canada avant les élections de 1993 pour recueillir leurs points de vue sur ces questions. Nous nous réjouissons de voir que les libéraux qui n'ont pas fait campagne sur un programme d'après-GATT commencent maintenant à reconnaître que les vieux programmes de sécurité du revenu agricole vont devoir changer.

Il semble plutôt étrange que le Parti libéral, l'un des plus anciens partis au Canada, n'ait pas commencé plus tôt à consulter les agriculteurs. De fait, nous constatons à la Chambre que les libéraux font toutes leurs consultations après les élections. Je suis fier d'appartenir à un parti qui a effectué ses consultations avant les élections. J'y vois l'une des raisons pour lesquelles un si grand nombre d'entre nous se sont fait élire. Cela nous donne également une grande autorité pour nous exprimer sur la plupart des questions que nous abordons à la Chambre, y compris la mesure à l'étude.

Voyons quels sont certains des concepts qui ont mené aux règles, aux conditions et aux définitions de ce qui doit maintenant devenir des programmes de sécurité du revenu agricole internationalement acceptés. On a beaucoup parlé ces dernières années d'améliorer la politique agricole liée au soutien des programmes de sécurité du revenu agricole.

Même si les négociations du GATT ont abouti à des réformes, il reste encore beaucoup à faire dans la pratique. L'OCDE, c'est-à-dire l'Organisation de coopération et de développement économiques, regroupe les pays suivants: Australie, Autriche, Canada, Communauté européenne, Finlande, Japon, Nouvelle-Zélande, Norvège, Suède, Suisse et États-Unis.

Dans l'ensemble de l'OCDE, le soutien global de l'agriculture par l'État et par les consommateurs représente encore bien au-delà de 40 p. 100 de la valeur de la production agricole. Malgré certains progrès sur le front des programmes agricoles intérieurs, les obstacles commerciaux résistent avec entêtement à la libéralisation. Nombre des mesures qui sont adoptées, y compris le soutien direct du revenu des agriculteurs, pour remplacer les subventions, sont encore liées d'une certaine manière à la production de denrées agricoles.

Quant aux règles qui doivent encadrer le commerce, le sentiment de beaucoup d'agriculteurs, largement partagé, est que les avocats et les bureaucrates vont dépenser un temps et des montants considérables pour trouver les moyens de contourner les règles du GATT. Nous savons déjà, par exemple, que la CEE a conservé sa politique de paiement global en échange du maintien de la politique agricole nationaliste des États-Unis.

En d'autres termes, nous allons voir se multiplier les tractations et les manipulations de chiffres dans les données sur le commerce et les mesures de soutien. Ainsi le veulent les compromis inhérents aux négociations internationales, sans doute, mais ce sont malheureusement les agriculteurs qui, souvent, se retrouvent sous les feux croisés des adversaires dans les affrontements économiques.

Il existe en ce moment dans les pays de l'OCDE divers types de filets de sécurité et de programmes de soutien pour l'agriculture. Tout d'abord, sur le soutien total venant des consommateurs et de l'État, environ 71 p. 100 sont transférés au moyen de mesures politiques relevant les prix que les agriculteurs touchent sur le marché pour leurs produits et qui sont payés par les consommateurs. Ces prix sont supérieurs aux cours mondiaux. C'est ce qu'on appelle généralement un système de soutien des prix.

Au Canada, le système de gestion de l'offre se retrouve dans cette catégorie. On pourrait dire bien des choses positives de la gestion de l'offre, mais il y a certainement beaucoup d'aspects négatifs qu'il faut mentionner aussi.

Les obstacles au commerce interprovincial qui existent dans notre pays constituent l'un des grands inconvénients du régime de gestion de l'offre. Il est pour le moins paradoxal que nous discutions aujourd'hui d'un projet de loi qui libéralise le commerce international, alors que nous offrons à nos partenaires commerciaux internationaux l'exemple d'une politique intérieure tellement navrante à ce chapitre.

(1650)

Quelle que soit la forme que prend notre aide, comme l'a souvent dit mon collègue d'en face, le député de Malpèque, le véritable problème pour les agriculteurs, c'est le revenu marchand net vraiment peu élevé pour les denrées alimentaires. Les agriculteurs méritent simplement un rendement équitable pour leur investissement. Comme tout le monde, ils veulent obtenir la juste valeur de leurs produits. Ils ne tiennent pas particulièrement aux nombreuses subventions ni à l'aide du gouvernement.

Je signale aux députés d'en face que, pour accroître les revenus marchands, il faut limiter ces mesures de soutien des prix qui entravent les forces du marché. Nous devons pouvoir compter sur un marché libre et équitable pour obtenir les rendements que nous voulons tous. Je suis donc heureux de voir que nos arrangements commerciaux fondés sur des règles traitent de ce genre de subvention et tendent vers leur suppression.

En deuxième lieu, seulement 13 p. 100 du soutien agricole prend la forme de paiements directs aux agriculteurs par le gouvernement. Une bonne partie de ces paiements sont transférés au secteur agricole dans le cadre de politiques en vertu desquelles les prix payés aux producteurs sont relevés par des subventions fondées sur la production. Même si ces subventions n'ont aucun effet direct sur les prix à la consommation, la plupart d'entre elles sont liées à la production. Elles prennent la forme de paiements d'appoint, lesquels sont des paiements qui comblent la différence entre le prix garanti par unité et le prix du marché; le versement par tête est le prix payé par tête de bétail.

Le troisième type de soutien représente 16 p. 100 de l'ensemble des paiements de soutien. Il est largement composé des mesures budgétaires et financières du gouvernement qui ne


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visent pas des agriculteurs ou des cultures en particulier, mais le secteur agricole dans son ensemble. Cela comprend les infrastructures, la recherche, l'inspection, l'information, l'éducation et la formation financées par l'État.

Il importe de souligner que le montant prévu pour ces trois formes de soutien varie beaucoup au sein des pays membres de l'OCDE. Certains pays mettent davantage l'accent sur le soutien des prix du marché, d'autres sur les paiements directs et d'autres sur le soutien plus général. D'où le problème de négociation de règles justes et équitables pour tous.

Cependant, cela pourrait aussi se traduire par l'abandon des programmes qui faussent les échanges et l'avènement d'un marché international libre et équitable qui pourrait permettre aux agriculteurs de gagner leur vie en fournissant à l'humanité les produits les plus importants qui soient pour elle, ses aliments.

Les programmes de soutien des prix et les autres subventions auxquelles j'ai fait allusion coûteraient aux consommateurs et aux contribuables des États membres de l'OCDE plus de 350 milliards de dollars par année en budget alimentaire et en impôts plus élevés. Ces politiques ont un effet de distorsion sur la structure des échanges commerciaux et attisent les tensions entre pays.

À la réunion ministérielle de l'OCDE en 1987, les gouvernements se sont donc engagés à mettre un bémol au soutien total et à remplacer les subventions liées à la production et au rendement par d'autres mesures d'intervention. Un des programmes autorisés par le GATT consiste à verser directement un revenu d'appoint aux agriculteurs. Il s'agit du deuxième type de filet de sécurité ou de soutien que j'ai mentionné, c'est-à-dire le revenu d'appoint direct.

J'aimerais toucher un mot du revenu d'appoint direct à l'intention des agriculteurs. Il s'agit ici d'un programme de stabilisation des revenus agricoles qui prend en compte le risque lié aux cycles du marché. Le revenu d'appoint direct, c'est essentiellement des transferts de revenu financés à même le budget et accordés directement aux agriculteurs visés. Cette mesure diffère donc des autres mécanismes d'intervention qui consistent à verser des revenus aux agriculteurs indirectement, soit en appliquant des mesures de stabilisation des revenus agricoles qui ont pour effet d'augmenter les prix à la consommation, soit en diminuant les coûts des intrants, ou encore en affectant des fonds au secteur agricole dans son ensemble.

Le principal avantage que présente le revenu d'appoint direct, c'est qu'il est possible de le restreindre aux agriculteurs qui en ont besoin. Ce qui n'est pas le cas du soutien des prix qui s'applique aux marchandises, si bien que la plupart des sommes ainsi affectées vont aux gros producteurs qui n'en ont pas nécessairement besoin.

Un système de soutien des prix des marchandises, comme celui de la gestion de l'offre, crée une dépense prohibitive quant à son outil de production, le quota. Il restreint l'esprit d'initiative chez les agriculteurs parce que les nouveaux venus ne peuvent y accéder que grâce à de grosses mises de fonds consécutives à une grosse dette ou à un héritage.

Ce mécanisme réglementé de commercialisation ne retransmet pas assez rapidement les signaux du marché aux producteurs et réduit les capacités d'innovation de l'industrie. Par conséquent, le système de gestion de l'offre doit s'adapter plus rapidement à la libéralisation des échanges, car il y va de son intérêt. Je sais que certains députés d'en face commencent à admettre cette certitude, même s'ils le font à contrecoeur.

En outre, les mesures de soutien du revenu des agriculteurs sont plus efficaces que les mesures de soutien des prix des produits. Ces dernières profitent davantage aux secteurs situés en amont ou en aval plutôt qu'à ceux qu'il s'agit d'aider, ou encore, elles sont appliquées en pure perte, les pays concurrents se livrant à la surenchère. Il s'agit d'un phénomène qu'on appelle l'inefficacité des transferts.

Des paiements directs et bien ciblés de soutien du revenu ont un degré élevé d'efficacité, car presque tous les transferts atteignent leur objectif, soit de soutenir le revenu des agriculteurs.

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En outre, au cas où les députés d'en face ne sont toujours pas convaincus qu'il existe un meilleur moyen, permettez-moi d'expliquer un autre avantage que présentent les mesures de soutien du revenu agricole par opposition à des mesures de soutien des prix des produits. Comme les mesures de soutien du revenu sont financées par les budgets nationaux, elles sont plus transparentes et peuvent donc être examinées plus facilement que les mesures de soutien des prix, qui sont cachées dans des prix à la consommation élevés.

En toute équité et objectivité, nous devons admettre que toutes les mesures de soutien, y compris les paiements directs de soutien du revenu, fausseront un peu la réalité. Cependant, j'estime que les mesures de soutien des prix ou de la production de denrées précises sont celles qui faussent le plus la réalité. Comme je l'ai mentionné précédemment, ce sont les mesures de soutien des prix qui sont à blâmer.

Les mesures de soutien de la production sont déficientes, car elles encouragent la surproduction ou la sous-production de certaines denrées, ce qui entraîne un risque moral ou une situation qu'on appelle l'exploitation du système, ou encore, elles favorisent des pratiques non respectueuses de l'environnement. À tout prendre, il devrait être évident que remplacer les mesures de soutien des prix et de la production par des mesures de soutien du revenu est la solution de l'avenir. Tout le monde aurait avantage à l'adopter.

Les paiements directs de soutien du revenu doivent répondre à deux conditions pour que les agriculteurs axent davantage leur production sur le marché. Tout d'abord, le montant du paiement devrait généralement être déterminé pendant une certaine période, ce qui éviterait d'entraîner un risque moral. Nous ne voulons pas d'un programme de soutien du revenu qui encouragerait les agriculteurs à modifier leur comportement pour faire des gains monétaires, au détriment de la sauvegarde de l'environnement ou de pratiques commerciales équitables.

Deuxièmement, le montant du paiement ne devrait pas être déterminé selon le volume de la production actuelle ou future de produits précis ou selon certains facteurs de production pour éviter d'influencer les choix des agriculteurs entre des produits ou des techniques de production.

Nous devons aussi continuer de définir soigneusement l'objectif de chaque type de paiement de revenu direct, qu'il s'agisse d'un paiement de revenu pour aider les agriculteurs à s'adapter à d'autres activités, d'un plan pour établir un revenu minimum, d'une mesure pour encourager les activités environnementales ou d'un programme pour stabiliser le revenu en raison des cycles


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du marché. Tous semblent être admissibles en vertu du GATT. Il faudrait très bien expliquer les cas où on peut obtenir des paiements de revenu directs pour faire en sorte qu'il y ait le moins de distorsion possible dans l'utilisation des ressources et pour éviter que l'on ne recoure à des moyens détournés pour soutenir les produits agricoles, ce qui nuirait aux réformes que l'on est en train d'effectuer.

Comment détermine-t-on le montant du paiement de revenu direct? Essentiellement de deux façons. Premièrement, nous pouvons évaluer les frais que l'agriculteur a engagés dans les activités visées par les paiements. Deuxièmement, nous pouvons évaluer le manque à gagner en n'entreprenant pas une activité ou le mesurer par rapport à une base prédéterminée, comme la perte de revenu attribuable aux cycles du marché, comparativement à une tendance récente du revenu.

La durée des programmes de paiement de revenu direct dépend de la durée du problème. Autant que possible, il faudrait privilégier des solutions basées sur le marché, parce qu'il s'agit de solutions à long terme susceptibles de se produire à mesure que la réforme se concrétise.

Au début de mon intervention, j'ai parlé de l'Ouest qui était exploré et qui se développait parce que des libres-échangistes et d'autres gens étaient prêts à courir des risques dans l'espoir de faire un peu d'argent. À mesure que le Canada entrera dans l'économie mondiale, nous pourrons nous attendre, encore une fois, à connaître certaines aventures, peut-être dans un contexte différent, peut-être dans la civilisation de haute technologie où nous évoluons actuellement. Ce sera passionnant aussi pour l'agriculture. Il y a des possibilités fantastiques auxquelles le projet de loi C-57, à sa façon, nous permet d'accéder.

Même si ce projet de loi ne règle pas tous les problèmes du commerce international et sûrement pas tous les problèmes de l'agriculture, il marque un pas dans la bonne direction. C'est pourquoi nous appuyons le GATT et la Loi de mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce. Nous espérons qu'il s'agit là d'une mesure qui réduira les fonds que le gouvernement consacre non seulement à l'agriculture, mais aussi à de nombreux autres produits. Cela permettra au marché de soutenir nos industries, dont l'industrie agricole, pour que ce ne soient pas uniquement les agriculteurs, mais tous les Canadiens qui profitent d'impôts moins élevés et d'une économie forte et qui puissent envisager l'avenir avec optimisme.

M. Vic Althouse (Mackenzie, NPD): Monsieur le Président, le député a fait un excellent tour d'horizon théorique de ce qui pourrait être formidable s'il y avait un consensus quant aux règles. Toutefois, le sujet du débat est l'Organisation mondiale du commerce qui est un organisme international. Un pays ne peut donc pas le contrôler à lui seul.

Je voudrais souligner en passant que notre pays est divisé en provinces, depuis sa création, que ces provinces ont des pouvoirs et que le député a choisi de ne pas en tenir compte dans sa présentation théorique. Les provinces contrôlent la production sur leur territoire et c'est pourquoi les offices de commercialisation fonctionnement comme ils le font.

(1700)

Toutefois, ma question concerne les aspects internationaux de ce projet de loi. Je voudrais attirer l'attention du député sur nos relations avec les autres pays, surtout en ce qui concerne l'aide à l'agriculture, puisque c'était là le thème principal de son discours.

Je remarque que, depuis le début des négociations, en 1986, tous les pays se sont engagés verbalement à commencer à réduire les subventions et l'aide à l'agriculture. Je note aussi que, dans tous les pays de l'OCDE qu'il a mentionnés, l'aide au secteur agricole a augmenté de 7 p. 100, je crois, l'année dernière, comparativement aux années précédentes. La tendance n'est décidément pas à la diminution de l'aide aux agriculteurs dans les pays de l'OCDE, à l'exception du Canada où elle a baissé de 12 p. 100 au cours de la dernière année, comparativement à l'année précédente.

Nous entendons beaucoup parler de règles du jeu équitables. Monsieur le Président, en votre qualité d'ancien arbitre au hockey, je sais que vous comprenez cela tout autant que vous comprenez à quel point il est important que deux équipes aient des équipements semblables et quoi encore. Il me semble que les ententes verbales ont réussi jusqu'à maintenant à établir un certain équilibre, mais les joueurs de l'équipe canadienne n'ont presque aucun équipement, tandis que les joueurs des équipes adverses possèdent des protecteurs bien rembourrés et sont assurés de tout l'appui de leurs supporters, c'est-à-dire de leurs gouvernements nationaux.

J'ai lu les documents que notre pays a produits. Je les ai obtenus dans le cadre de l'accès à l'information car c'était impossible autrement. Je constate que notre pays a l'intention, sous le gouvernement libéral, appuyé par le Parti réformiste et d'autres, de réduire l'aide à l'agriculture à un rythme encore plus rapide que nous ne l'avons fait jusqu'ici, même si les autres pays sont encore loin de nous rattraper et de retirer leurs mesures de protection spéciales.

On en est au point où, à la fin de la décennie, quand les six années de mise en oeuvre seront terminées et que nous entrerons dans la septième année qui est sensée marquer l'achèvement du nouvel ordre mondial, le Canada versera au secteur agricole 1,5 milliard de moins que ce que lui permet l'accord. Tout sera beau et impeccable. Nous jouerons au hockey dans nos dessous pendant que tous les autres continueront d'avoir le même niveau d'aide qu'ils ont actuellement, avec peut-être quelques réductions mineures.

Je me demande comment le député peut dire que c'est juste ou comment il peut défendre cela quand il s'agit de nos relations avec les autres pays. Comment peut-il appuyer une chose comme celle-ci?

M. Hermanson: Monsieur le Président, je remercie le député de Mackenzie de ses observations. Je sais qu'il porte un intérêt sincère à l'agriculture et qu'il est très attaché à l'industrie.

Il a parlé, en passant, des offices de commercialisation et du fait que les provinces se sont vu attribuer une certaine compéten-


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ce dans ce domaine. Or, la loi qui s'applique est une loi fédérale et cette loi a engendré des anomalies.

Par exemple, je me demande si le député de Mackenzie approuve le fait que la province de Québec jouit d'un avantage par rapport au reste du Canada en ce qui concerne les contingents de lait de transformation. En fait, certaines provinces comme la nôtre, la Saskatchewan, n'ont pas un accès équitable au marché du lait de transformation à cause des injustices et des barrières au commerce interprovincial. Nous devons remédier à cette situation intolérable qui a certainement nui à l'industrie agricole de notre province.

(1705)

Quant à ce que disait le député au sujet des règles du jeu équitables et de la nécessité d'avoir ce qu'il faut pour jouer le jeu, je suis d'accord avec lui sur certaines choses. J'ai dit dans mon discours que nous comparons en quelque sorte des pommes à des oranges.

Je tiens cependant à préciser que la décision du ministre de l'Agriculture de réduire de moitié nos exportations de blé dur vers les États-Unis a probablement été l'une des tentatives les plus lâches de priver les producteurs canadiens des moyens dont ils ont besoin pour jouer le jeu. J'estime, comme mon collègue, que des actions semblables, alors que les accords commerciaux nous donnent raison, sont inacceptables.

Les exportations de blé dur canadien vers les États-Unis étaient en hausse constante et leur rythme s'accélérait. Or, parce que l'oncle Sam a fait des pressions auprès du ministre canadien de l'Agriculture, ce dernier a oublié les règles, il a oublié l'équipement, il l'a jeté.

Il faut aller sur la glace pour jouer le jeu, mais je ne crois pas que le ministre de l'Agriculture y soit encore allé. S'il l'a fait, il n'a certainement pas franchi la ligne bleue. Il mérite peut-être une pénalité pour ne pas avoir pris part au jeu. Je ne sais, monsieur le Président, si vous avez déjà imposé ce genre de pénalité, mais je crois que le ministre de l'Agriculture en mérite une.

Nous avons l'ALENA et le GATT, mais si nous abandonnons dès qu'on exerce des pressions sur nous, alors que les règles sont en notre faveur et que les décisions des tribunaux sont en notre faveur, ce n'est pas bien et c'est une insulte à l'endroit des agriculteurs canadiens. J'en appelle au ministre de l'Agriculture, et je suis certain que le député de Mackenzie m'appuiera, pour qu'on ne nous dépouille pas des atouts qui nous permettent de tenir tête à nos concurrents.

Je suis convaincu que, si tout le monde respecte les règles du jeu, les agriculteurs canadiens se montreront à la hauteur de n'importe quelle autre équipe, tout comme nous l'avons été contre les Russes en 1976. Je suis certain qu'en tant que producteurs agricoles et partenaires du libre-échange, nous saurons nous mesurer à n'importe quel concurrent au monde et faire bonne figure. Et je parie que lorsque le dernier coup de sifflet retentira et que les lumières s'allumeront à la fin de la troisième période, nous serons victorieux si le gouvernement ne nous met pas des bâtons dans les roues et si notre ministre de l'Agriculture se range à nos côtés.

Le président suppléant (M. Kilger): Je désire être sûr que tout le monde a bien compris. Le député de Regina-Lumsden parlera pendant 15 minutes environ et le député de Regina-Qu'Appelle, pendant 5 minutes, ce qui fera les 20 minutes réglementaires.

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, j'ai le devoir, mais aussi le plaisir, de prendre la parole pour m'opposer au projet de loi C-57, la mesure législative qui entérine la création de l'Organisation internationale du commerce.

Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles les néo-démocrates s'opposent à ce projet de loi, mais avant de les exposer, je voudrais faire une observation. Il me semble que devant un projet de loi de quelque 250 pages, présenté par le gouvernement libéral, qui met en oeuvre le programme des grandes multinationales et qui est appuyé par le Bloc québécois et le Parti réformiste, les Canadiens devraient faire très attention aux conséquences éventuelles. Lorsqu'un projet de loi est appuyé par le Parti libéral, le Bloc québécois et le Parti réformiste, il doit y avoir quelque chose de particulier, de mystérieux, de suspect; quelque chose qui sera probablement au détriment des Canadiens du simple fait que ces trois partis l'appuient.

Je doute que beaucoup de députés aient lu le projet de loi et qu'ils en comprennent les implications, mais moi je l'ai lu en grande partie. Je ne l'ai pas tout lu, mais ce que j'en ai lu est incroyable. Il faut voir ce que signifie ce projet de loi pour les producteurs canadiens, pour les producteurs agricoles, pour les producteurs d'acier, pour les producteurs de sucre et autres.

Je dis cela, parce que ce projet de loi ne défend pas les Canadiens. Les députés néo-démocrates de cette assemblée-le député de Winnipeg-Transcona, le député de The Battlefords-Meadow Lake, le député de Mackenzie et d'autres-ont déclaré à notre caucus et à la Chambre qu'ils avaient de graves inquiétudes au sujet de ce projet de loi. Nous avons déjà entendu tout ce qui concerne l'agriculture. Nous avons entendu aussi ce qui concerne la main-d'oeuvre infantile et les autres questions de justice sociale.

Lorsque je regarde un projet de loi, je pense aux critères auxquels il devrait répondre pour que je l'appuie. Il faut qu'il soit juste. Il faut qu'il soit équitable pour ceux qui sont visés. Il faut qu'il fasse montre d'un certain sens des responsabilités. Le gouvernement doit justifier ses décisions en ce qui a trait à ce projet de loi.

(1710)

D'après ce que j'ai pu voir en lisant cette mesure législative, je ne peux en conclure qu'une chose. Si la mesure ne respecte pas le critère que je viens de mentionner et qui serait acceptable pour les Canadiens et les électeurs de Regina-Lumsden, que je représente, on ne peut pas aller de l'avant avec ce projet de loi sans tenir un débat approfondi et présenter des amendements.


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C'est pourquoi le Nouveau Parti démocratique a présenté des amendements à la Chambre pour qu'on respecte ces questions d'équité, de justice, de responsabilité et d'obligation de rendre des comptes. Le gouvernement, les membres du Parti réformiste et les membres du Bloc québécois les ont rejetés. C'est très déconcertant pour les Canadiens, ainsi que pour notre caucus. Nous avons tenté d'assurer une certaine justice.

Je veux faire valoir quelques points au sujet de ce projet de loi. Par exemple, l'OMC constitue en fait une nouvelle constitution pour l'économie mondiale, qui a été rédigée par et pour les sociétés multinationales et transnationales du monde. Le gouvernement a rejeté l'idée d'inscrire une clause d'ordre social dans l'accord pour garantir la reconnaissance par les multinationales des principales normes sur les conditions de travail et le respect de l'environnement. Cela aurait évité le nivellement par le bas.

Même si l'OMC est censée offrir un nouveau régime commercial encadré par une réglementation qui empêchera les tactiques de harcèlement, l'attitude qu'ont adoptée les États-Unis en vertu de l'ALENA et les mesures évasives prévues par leur mesure habilitante montrent qu'il est très peu probable que les Américains respectent les règles.

Mes remarques porteront surtout sur la législation américaine et la façon dont elle protège les producteurs et les gens d'affaires américains. Malheureusement, le projet de loi dont la Chambre est saisie aujourd'hui ne protège pas les Canadiens de la même façon.

Le principal argument des partisans de l'OMC est qu'elle introduira un nouveau régime commercial fondé sur des règles exécutoires concernant le dumping et les subventions. Le seul problème, c'est que le plus gros intervenant, les États-Unis, ne semble pas avoir l'intention de respecter ces règles. Nous avons déjà constaté que nos exportations de bois d'oeuvre et de blé continuent de faire l'objet de harcèlement malgré les règles de l'ALENA.

Les résultats des récentes élections au Congrès américain ne donnent pas grand espoir aux Canadiens que cette attitude est sur le point de changer. Chose plus importante, les Américains ont intégré à leur loi d'application une longue liste de dispositions garantissant que l'OMC ne renversera jamais une mesure du Congrès des États-Unis ou d'un État américain. Les Américains ont donné avis qu'ils traiteront les règles de l'OMC comme celles de l'ALENA: ils en feront fi si elles vont à l'encontre des intérêts américains.

Nous du Nouveau Parti démocratique avons proposé des amendements qui auraient intégré à la loi canadienne la même protection contre les décisions de l'OMC que les Américains se sont accordé. Le gouvernement, toujours aussi crédule face à la bonne volonté des Américains, a choisi de rejeter nos amendements. C'est la même crédulité dont faisait preuve l'ancien gouvernement conservateur. Il faisait tout pour plaire aux Américains et nous constatons maintenant que les libéraux ne sont pas si différents des conservateurs. En fait, il n'y a pas de différence. Ils ont fait exactement la même chose que le gouvernement conservateur durant la dernière législature. Libéraux ou conservateurs, cela revient au même, j'imagine.

Dans un sens, nous pouvons nous attendre à ce que les Américains sabotent les nouvelles règles de l'OMC tout comme ils ont saboté le mécanisme de règlement des différends de l'ALENA. Pour les obtenir, ces règles, il a fallu sacrifier une grande partie de notre souveraineté en matière de politique de placement et de normes de sécurité sociale. Une fois le protectionnisme américain assujetti à un système à base de règles, on peut commencer à repenser la constitution de l'économie mondiale pour qu'elle soit à l'image des intérêts des collectivités.

Permettez-moi de relater à la Chambre un petit incident survenu en mai dernier, auquel certains députés, dont moi, ont été mêlés, en tant que membres du comité du caucus sur l'acier. Ce comité réunit les députés de tous les partis qui représentent une circonscription productrice d'acier. Je suis fier de dire que, dans ma circonscription, nous avons IPSCO, la Interprovincial Pipe and Steel Company, laquelle emploie 1 100 personnes. Il s'agit d'une entreprise extrêmement consciencieuse, dont les pratiques sont saines sur le plan écologique. Elle produit une grande quantité d'acier et de tuyaux en acier pour le marché canadien et américain et même pour des marchés à l'extérieur de l'Amérique du Nord.

À l'occasion de notre visite au Congrès américain, nous avons discuté avec des sénateurs et des députés du Congrès la question de la production d'acier. Ce qui nous avait amenés là-bas, c'est que des producteurs canadiens d'acier avaient été lésés par des allégations de dumping formulées par l'industrie sidérurgique américaine. Nous voulions parler aux législateurs parce que certaines lois américaines en vigueur ne tiennent aucun compte de l'existence de l'ALENA ni de l'accord sur l'OMC, qui est à l'étude aujourd'hui, quand il s'agit de protéger les producteurs américains.

(1715)

S'ils croient ou jugent-aucune preuve n'est requise-qu'un préjudice est causé à leur industrie, il peuvent recourir à n'importe quel moyen autorisé par la loi en vigueur pour détourner les courants commerciaux ou empêcher les pays exportateurs de continuer de vendre un produit donné dans leur pays.

Nous avons demandé, en tant que caucus, que cette loi soit modifiée de façon à tenir compte des préoccupations des producteurs canadiens d'acier, de nos producteurs agricoles et des producteurs de sucre, entres autres, pour que les producteurs canadiens soient protégés au cas où l'accord sur l'OMC leur serait préjudiciable. Nous avons été déboutés par le gouvernement qui a fait fi de notre demande, ce qui nous inquiète beaucoup, comme les gens du milieu d'ailleurs.

Le député libéral de Vancouver Quadra a donné un aperçu historique de ce que Franklin Delano Roosevelt voulait réaliser dans les négociations commerciales. Je veux rappeler au député de Vancouver Quadra ce qu'a dit l'ancien président Franklin Delano Roosevelt: «Pour mesurer le progrès dans une société, il faut savoir si l'on donne assez à ceux qui en manquent et non pas si l'on enrichit ceux qui en ont déjà beaucoup.» C'est un message très important qui était pertinent à l'époque et l'est toujours: les gouvernements doivent protéger leurs citoyens contre les initiatives économiques nuisibles d'autres pays, quelles que soient les règles mondiales en matière de commerce.


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Oui, il existe des normes et des règles pour gouverner les échanges commerciaux, mais en fin de compte, si cela nuit à son propre pays, le gouvernement est élu par les citoyens pour les protéger.

Cependant, si le gouvernement fait adopter une loi qui n'assure pas cette protection, il renonce à son obligation et au droit de gouverner les citoyens qui l'ont élu. Que diable se passe-t-il? Je n'y comprends rien. À mon avis, personne au pays ne le comprend non plus.

Il faut que les Canadiens sachent que le projet de loi C-57 nuit aux producteurs d'acier canadiens. Il nuit aux producteurs agricoles canadiens. Il nuit aux producteurs de sucre canadiens. Cela veut donc dire qu'il nuit à beaucoup de Canadiens.

Puisqu'il en est ainsi, pourquoi le gouvernement fait-il du tort à sa population? Beaucoup de nos concurrents profitent de notre pays et de notre économie. Nous ne devons pas défaire les murs et nos mécanismes de défense et encourager les pays étrangers à venir piller et saccager notre économie davantage.

Le gouvernement se trompe gravement s'il adopte le projet de loi C-57 sans modification. En fait, beaucoup de gens nous appuient. J'ai une lettre ici d'un représentant des raffineries de sucre. Mon ex-voisine de pupitre, une députée conservatrice, la députée de Saint John, également ex-maire de Saint John, a écrit au ministre des Finances pour lui signaler les répercussions qu'aurait le projet de loi C-57 sur l'industrie sucrière.

Je pourrai y revenir dans quelques instants, mais je voudrais vous citer quelques déclarations des producteurs d'acier du Canada, qui ont fait des démarches auprès du gouvernement et sont venus témoigner, pas plus tard que le 16 novembre dernier, devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Ils soutiennent, chiffres à l'appui, que le projet de loi C-57 leur nuira.

Les producteurs d'acier se disent victimes de l'industrie sidérurgique des États-Unis, qui porte des accusations d'antidumping contre eux-j'ai d'ailleurs des précisions à ce sujet. Ces accusations leur coûtent des millions de dollars. Ils soutiennent que ce genre de mesures antidumping cause un préjudice à leurs exportations.

Nous ne pratiquons pas le dumping de l'acier aux États-Unis, Nous produisons de l'acier ici et le vendons directement aux termes de contrats que nous négocions si notre offre est retenue, comme le ferait tout autre producteur en Amérique du Nord. Pourtant, les Américains nous accusent, nous, d'être improductifs et excessivement compétitifs, parce qu'ils estiment que nous nuisons à leur industrie.

Les faits et les chiffres prouvent tout le contraire. Les producteurs d'acier du Canada demandent donc au gouvernement d'apporter quelques modifications sur les points suivants. Ils ont proposé, et nous l'avons répété à la Chambre, que la Loi sur les mesures spéciales d'importation soit modifiée afin de fournir au Tribunal canadien du commerce extérieur certains pouvoirs en ce qui concerne les préjudices causés aux exportations canadiennes d'acier.

(1720)

Contrairement à la loi américaine de mise en oeuvre, notre projet de loi C-57 ne prévoit aucune ligne directrice précisant ce qui peut être considéré comme une preuve acceptable. Faute de lignes directrices, il sera très difficile pour une société canadienne de savoir comment prouver une menace de préjudice imminente et prévisible. Bien qu'elle mette en oeuvre les mêmes principes de l'OMC, la loi des États-Unis rendra la vie plus facile aux sociétés américaines.

Selon la loi américaine de mise en oeuvre, si le dumping cesse après le dépôt d'une plainte, la Commission du commerce international peut ne pas tenir compte des preuves fournies après son évaluation du préjudice. Ainsi, les accusations de préjudice sont plus facilement maintenues. Le projet de loi C-57 ne contient aucune disposition semblable.

Les producteurs d'acier ont également abordé d'autres questions. Le projet de loi C-57 ne précise pas comment la menace de préjudice doit être interprétée au moment de l'examen d'une mesure antidumping. La loi américaine, quant à elle, prévoit certaines mesures à prendre dans ces circonstances.

Je pourrais continuer à énumérer toutes les mesures que les producteurs d'acier trouvent préjudiciables. Il reste que chaque fois qu'ils remportent un contrat, qu'ils peuvent exporter de l'acier aux États-Unis, même si l'ALENA est en vigueur et même si l'OMC sera bientôt sur pied, les Américains, déçus d'avoir perdu le contrat accordé par appel d'offres ouvertes, peuvent dire: «Nous ne laisserons pas ce contrat nous échapper; nous allons leur demander des précisions.» Lorsque les Américains leur demandent toutes sortes de renseignements, les producteurs d'acier du Canada doivent dépenser littéralement des millions de dollars pour recueillir les données requises, et ces coûts s'ajoutent à leur estimation originale et grugent tous leurs profits. Les Américains demandent ces renseignements dans le but de retarder les choses et de décourager les Canadiens. Mais la loi leur permet d'agir ainsi.

Si les Américains peuvent harceler les producteurs d'acier du Canada, c'est que la loi et le Congrès les appuient. Toutefois, les Canadiens et le gouvernement du Canada disent: «Non, nous n'agirons pas comme les Américains. Nous ne voulons pas protéger les Canadiens, parce que nous imiterions ainsi les Américains.»

Les Américains sont assez astucieux. C'est d'ailleurs pourquoi ils sont les gens d'affaires qui réussissent le mieux. C'est aussi pourquoi ils ont la meilleure économie. Ils prennent toujours des initiatives économiques susceptibles de profiter à leur pays.

Les néo-démocrates s'opposent au projet de loi C-57, parce qu'il nuit à l'économie du Canada.

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, au cours de la période qui reste, je vais aussi parler du projet de loi C-57. Je souligne que les néo-démocrates ne s'opposent pas comme tel au libre-échange, mais qu'ils souhaitent un véritable libre-échange, en fonction de règles du jeu


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équitables. Or, l'ALENA, l'Accord de libre-échange et le projet de loi C-57 ne favorisent pas un tel équilibre.

À nos yeux, la Communauté européenne correspond plus à notre conception de ce qu'est le véritable libre-échange. Les Européens reconnaissent que l'élimination des barrières douanières et la mise en place d'un régime de libre-échange englobent non seulement des mesures économiques, mais aussi des normes sociales et environnementales, de même que des normes de travail.

Les Européens ont fait en sorte que des pays comme l'Espagne, le Portugal et la Grèce, dont les normes sociales et environnementales et les normes de travail ont traditionnellement laissé à désirer, prennent des mesures pour relever ces normes, de façon à ce que tous soient sur le même pied et que les industries de la Hollande, de la France et de l'Allemagne ne déménagent pas dans ces pays, où la main-d'oeuvre est moins chère. Autrement dit, on s'est appliqué à mettre en oeuvre leurs accords de libre-échange. C'est fondamentalement ce que nous recherchons aussi, un authentique terrain d'entente. Niveler au plus haut dénominateur commun plutôt qu'au plus petit.

Les travailleurs canadiens et les recettes du Canada vont en souffrir. Ce modèle de commerce mondial va faire que les entreprises vont s'installer là où la main-d'oeuvre est la moins chère. Elles vont s'installer là où les ressources sont meilleur marché et où les impôts sont les moins élevés. C'est la bonne façon de faire des affaires. C'est comme cela qu'il faut s'y prendre. Il faut s'assurer de payer le moins cher possible pour les matières premières, la main-d'oeuvre et les impôts. C'est logique.

Ces accords permettent aux entreprises de n'avoir aucune responsabilité sociale ni économique à l'égard des États.

(1725)

Nous sommes à un moment de l'évolution de la race humaine où les progrès technologiques peuvent produire une abondance qu'aucune autre époque n'a connue, et pourtant, des pays comme le Canada et les États-Unis s'enfoncent de plus en plus dans la pauvreté et ont de moins en moins de ressources et de richesses à partager entre leurs citoyens.

Nous voyons reculer notre niveau de vie. Nous vivons pourtant dans un pays d'abondance. Cela ne serait-il pas attribuable aux structures de notre économie? La richesse produite n'est pas répartie. De grandes entreprises se soustraient à leurs responsabilités sociales en installant leurs sièges sociaux à l'étranger, comme le permettent les accords internationaux, et les revenus du gouvernement diminuent. L'État-nation, la souveraineté et le pouvoir souverain des États-nations s'érodent tranquillement.

C'est pourquoi je suis stupéfié de voir le Bloc appuyer cette mesure. Si le Québec réussit un jour-je ne le souhaite pas et je ne crois pas que cela se produise jamais-mais s'il réussit un jour à devenir une nation, les Québécois constateront que les nations n'ont plus aucun pouvoir. Tous les pouvoirs des États auront été cédés dans ces accords commerciaux.

Donc, ce dont nous parlons, dans ce coin-ci de la Chambre, d'où provient la seule opposition à un changement aussi radical, c'est du fonctionnement de notre pays et de notre économie, c'est de la façon dont nous réglementons les sources de revenu, l'emploi et la richesse. Nous nous opposons au caractère injuste de ces accords commerciaux qui profiteront à la minorité au détriment de la majorité et qui auront des conséquences néfastes sur le Canada en tant que pays souverain.

J'implore les libéraux-qui faisaient de belles promesses lorsqu'ils étaient dans l'opposition, qui étaient contre l'ALENA et l'Accord de libre-échange mais qui, maintenant qu'ils sont au pouvoir, semblent approuver ces accords-de garder une certaine conscience sociale, d'exiger que le gouvernement inclue dans ces accords commerciaux des dispositions liées aux programmes sociaux, à l'environnement et à la main-d'oeuvre afin de veiller à ce que les règles du jeu soient vraiment équitables pour tout le monde et à ce que les gains historiques que nous avons réalisés du point de vue de notre économie et de notre richesse soit protégés au lieu d'être ramenés au plus petit dénominateur commun.

Je prie instamment les vrais libéraux de faire des pressions auprès de leur caucus et de leur gouvernement pour s'assurer que le gouvernement du Canada défendra les travailleurs et les gens ordinaires de notre pays et qu'il ne les abandonnera pas comme l'ont fait les gouvernements conservateurs précédents.

M. Milliken: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Il est presque 17 h 30, et je crois que vous pourrez constater que la Chambre est disposée à terminer le débat sur cette importante mesure législative cet après-midi. Il reste deux députés qui veulent prendre la parole et ils siègent tous deux de ce côté-ci de la Chambre. S'ils prennent la parole pendant dix minutes chacun, sans période de questions, nous pourrions terminer à 17 h 50. À ce moment-là, vous constaterez qu'il y a consentement pour que la motion soit mise aux voix et que le vote soit demandé.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu la proposition du secrétaire parlementaire. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.

Je voudrais faire ressortir aujourd'hui à quel point l'adoption de ce projet de loi est importante pour l'économie du pays en général et celle de ma circonscription, Bramalea-Gore-Malton, en particulier.

Pour pouvoir atteindre ses objectifs de création d'emplois et de relance de l'économie du pays, le gouvernement doit accroître la capacité d'exportation du Canada. Le projet de loi dont nous sommes maintenant saisis jouera un rôle essentiel dans le renforcement de l'accès du Canada aux marchés internationaux en expansion constante. En créant un environnement commercial international plus stable et plus ouvert, l'Accord instituant l'Or-


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ganisation mondiale du commerce stimulera les exportations canadiennes et les investissements au Canada.

(1730)

Les gouvernements canadiens reconnaissent depuis longtemps l'importance des efforts de la libéralisation des échanges. Le Canada se classe parmi les principaux pays commerçants du monde.

Depuis deux décennies, les exportations canadiennes ont crû plus rapidement que les exportations européennes et à peu près au même rythme que les exportations américaines. L'Accord de libre-échange conclu avec les États-Unis en 1989 a produit un gain annuel de revenus réels de l'ordre de 2,5 p. 100.

Chaque région et chaque secteur de l'économie canadienne ont profité de la libéralisation du commerce entre le Canada et son principal partenaire commercial.

Selon une récente étude menée par l'Institut C.D. Howe sur les conséquences de l'ALE, les exportations canadiennes vers les États-Unis, au cours des trois années de mise en oeuvre de l'accord, ont été les plus fortes dans les secteurs ainsi libéralisés, notamment le secteur manufacturier non axé sur les ressources.

La circonscription de Bramalea-Gore-Malton est située dans une région du pays qui dépend largement du secteur de la fabrication non axé sur les ressources. Les dispositions de ce projet de loi portant sur le secteur agricole revêtent une très grande importance puisque, pour la première fois, ce secteur sera assujetti à un système multilatéral fondé sur des règles.

Dans ma circonscription, l'importance de ces changements se traduira par une augmentation des débouchés pour les aliments transformés sur les marchés. Nous devons appuyer ce projet de loi pour que les Canadiens aient l'occasion de profiter d'un meilleur accès aux marchés.

Dans le secteur des produits industriels, par exemple, l'accord découlant des négociations de l'Uruguay Round prévoit que les droits de douane seront réduits du tiers. En fait, ils ont été entièrement éliminés dans dix secteurs.

Quant à l'accroissement des échanges commerciaux, les exportations canadiennes vers l'Union européenne profiteront de réductions des droits de douane atteignant presque 60 p. 100. Les droits sur les exportations canadiennes vers le Japon seront réduits de 70 p. 100.

Ces baisses de droits auront des répercussions importantes sur les entreprises de Bramalea-Gore-Malton qui exportent vers l'Europe ou vers les marchés naissants des pays de la région du Pacifique.

Un meilleur accès, des droits de douane réduits et une attitude compétitive reconnaissant les possibilités qui s'offrent dans le monde entier constitueront la pierre angulaire de la croissance dans l'avenir.

Ce projet de loi est aussi important pour ma circonscription parce que, pour la première fois, le commerce des services et la propriété intellectuelle liée au commerce sont régis par des règles multilatérales. Ces règles fourniront une base plus solide pour la mise au point et le transfert de technologies.

L'accord favorise une libéralisation continue du commerce des services et de la propriété intellectuelle dans un secteur que l'on évalue à quelque deux billions de dollars par an. On prévoit une croissance accrue dans ce secteur. En fait, certaines sociétés de ma circonscription sont bien placées pour profiter des nouveaux débouchés dans ces secteurs.

Il est important de souligner que le processus de consultation a été extrêmement profitable pour les négociations qui ont conduit à la création de l'Organisation mondiale du commerce.

Les milieux agricoles, les milieux d'affaires et les provinces ont été étroitement consultés tout au long de ces négociations. Le fait que l'on ait prévu des consultations préalables dans ce processus nous porte à croire que les résultats refléteront fidèlement les affaires qui se font dans les différentes régions du pays.

(1735)

Le projet de loi dont nous sommes saisis est extrêmement important, car l'Organisation mondiale du commerce remplacera le GATT. Cette organisation, ainsi que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, constitueront désormais le fondement d'une structure financière et commerciale d'envergure mondiale. Il ne faudrait pas en sous-estimer l'importance, car il existera désormais une tribune pour l'élaboration de nouvelles règles commerciales mondiales et les négociations visant à libéraliser davantage les échanges commerciaux dans le monde.

J'appuie ce projet de loi en raison des avantages qu'il offrira non seulement à ma circonscription, mais aussi, sans aucun doute, au Canada tout entier. J'exhorte les députés à appuyer le projet de loi C-57 afin que l'Organisation mondiale du commerce soit instituée rapidement.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat en troisième lecture du projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce. Cette mesure a principalement pour objet d'établir la nouvelle Organisation mondiale du commerce, qui administrera l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce signé par 123 gouvernements au Maroc, en avril dernier.

Le projet de loi inaugure une nouvelle ère du commerce international et fait du Canada un participant à part entière de l'accord commercial le plus considérable de l'histoire. Le projet de loi C-57, la loi de mise en oeuvre, modifie la loi existante. Il contient seulement les modifications nécessaires pour permettre


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au Canada de remplir ses obligations en vertu de l'accord international.

Le Canada et de nombreux autres pays ont participé pendant sept ans et demi à des négociations multilatérales difficiles et souvent décevantes dans le cadre de l'Uruguay Round du GATT. Pendant toute la durée des négociations, le Canada a énergiquement défendu la conclusion d'une entente qui ouvrirait la voie à un accroissement des échanges commerciaux et des investissements dans le monde. Nous n'avons évidemment pas obtenu tout ce que nous voulions, mais c'est le cas de la plupart des ententes négociées.

J'ai l'intention d'appuyer le projet de loi, mais mon appui est tempéré par un optimisme prudent, car il subsiste beaucoup de questions au sujet de ce qui peut être ou devrait être réalisé dans cette nouvelle ère de commerce international. Tant que nous ne connaîtrons pas mieux les modalités de fonctionnement de ce nouveau contexte commercial, l'incertitude persistera.

L'Uruguay Round englobait 15 secteurs d'activité commerciale, dont les services et les marchés publics, et il institue de nouvelles règles concernant les différends commerciaux. Nous savons tous que l'accord a bien failli ne pas voir le jour. Si le Canada et d'autres pays ne l'avaient pas signé, on peut se demander où nous en serions aujourd'hui. Les affaires auraient peut-être continué comme à l'ordinaire, mais c'est très peu probable.

Plusieurs litiges commerciaux très graves surgis entre les États-Unis, la Communauté européenne et le Japon avaient été laissés en suspens en attendant les résultats de l'Uruguay Round. En tant que puissance économique moyenne, le Canada s'est souvent trouvé pris entre les feux de ces formidables blocs commerciaux et nos intérêts en ont souffert. Le Canada a finalement été forcé, après s'être retrouvé isolé, d'abandonner son objectif premier, qui était le renforcement et la clarification de l'article XI. Nous nous sommes vus contraints de protéger nos produits soumis à la gestion de l'offre en commençant à imposer des droits de douane élevés au lieu de contingents.

Je souligne que l'agriculture constitue l'industrie principale dans ma circonscription, Lambton-Middlesex. Les statistiques montrent que les comtés de Lambton et Middlesex produisent chaque année pour près de trois quarts de milliard de dollars de produits agricoles et qu'on y achète pour plus d'un demi-milliard de dollars de fournitures et de matériel agricoles.

C'est un euphémisme que de dire que mes électeurs sont préoccupés par ce qui les attend. Je ne saurais le leur reprocher, au moment où nous entrons dans une toute nouvelle ère du commerce mondial et où nous devons, dans une certaine mesure, montrer une confiance aveugle. En tant que parlementaires, notre principal défi, compte tenu des difficultés financières où nous nous trouvons et des obligations internationales auxquelles nous sommes soumis, est de trouver un juste équilibre entre les rigueurs et la puissance du marché et l'obtention d'une plus grande équité à l'endroit des agriculteurs. Il vaut la peine de préserver une collectivité agricole, et je ne dirai jamais assez à quel point nous devons profiter de nos talents pour ce faire et même les développer.

(1740)

Ce serait une grave erreur, pour le Canada, de s'asseoir sur ses lauriers, maintenant que ces dix ans de négociations commerciales, commencées avec l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis, ont finalement abouti. La mondialisation des grandes sociétés signifie qu'il faudra maintenant s'attaquer à une foule de nouveaux problèmes.

Le commerce international ne se fait plus entre les nations, mais entre des sociétés transnationales très bien organisées, qui font des affaires dans le monde entier. Cela signifie qu'il faut des règles internationales sur des choses comme la réglementation imposée par les gouvernements, les lois sur la concurrence, les normes de l'industrie et même les règles régissant les marchés du travail. L'Organisation mondiale du commerce n'est que le début du processus.

Par exemple, les députés devraient savoir que seule une poignée de sociétés contrôle toute la transformation des produits agricoles du Canada. Si nous ne réagissons pas, je m'inquiète grandement pour l'avenir des agriculteurs canadiens. S'il n'existe pas d'encouragement à l'agriculture, nos fils et nos filles préféreront faire autre chose. Or, quand un pays ne peut plus se nourrir, il devient le mendiant de l'économie mondiale.

Il y a des choses que nous faisons bien, au Canada, qui font l'envie du monde entier. À l'échelle internationale, le Canada a une réputation de fournisseur fiable de certains des produits agroalimentaires les meilleurs, les plus sûrs, les plus variés et qui se distinguent par leur caractère unique. L'industrie agroalimentaire du Canada représente 8 p. 100 du PIB, soit plus de 15 milliards de dollars de ventes à l'exportation par année, 40 p. 100 de la balance commerciale positive du Canada, deux millions d'emplois, soit 15 p. 100 de la totalité des emplois, et 70 milliards de dollars de biens produits chaque année.

On nous dit que l'Organisation mondiale du commerce réglera des problèmes comme les subventions à l'exportation et les sanctions commerciales unilatérales, qu'on aura suffisamment confiance dans son impartialité et son efficacité, et qu'elle veillera à l'application de règles multilatérales malgré les pressions de puissants groupes d'intérêts et de gouvernements nationaux protectionnistes.

Je suis heureuse qu'on s'entende de plus en plus, au Canada, pour dire que nous devons mettre au point nos propres stratégies pour répondre aux situations nouvelles qui se présentent. Par exemple, je suis très impressionnée par tout le travail qu'a accompli le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, au cours des six derniers mois.

Depuis mai, le comité a amorcé une étude ambitieuse sur l'avenir de l'agriculture au Canada, pour évaluer les objectifs actuels en matière d'agroalimentaire et les adapter aux besoins de l'an 2000 et du siècle prochain. Se fondant sur les critères de l'équité, de la durabilité et de l'efficacité, le comité se penche actuellement sur le rôle du secteur agroalimentaire dans la vie rurale et dans l'économie canadienne et tente, avec les producteurs, les transformateurs, les consommateurs et les autres parties intéressées, de mettre au point une stratégie nationale à long terme en ce qui concerne l'agriculture.

Pris ensemble, ces éléments constitueront une politique agricole globale qui permettra au secteur agro-alimentaire canadien

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de passer de plain-pied au siècle prochain. Ce sont précisément les efforts au niveau de la base comme ceux-ci qui vont permettre de préparer l'agriculture canadienne à faire face aux défis qui nous attendent.

Je profite de cette occasion pour rendre hommage au comité de l'agriculture et le féliciter pour ses efforts. Je suis sûre qu'il réussira dans ses entreprises. Espérons que l'Uruguay Round sera la dernière série-marathon de négociations.

Je pense qu'on préférera à cela des négociations plus limitées et plus ciblées sur tout un choix de secteurs. C'est ainsi que ça devrait être. Le Canada a déjà investi des sommes importantes dans la recherche agricole. Au cours des deux dernières décennies, sa production agricole a atteint un taux de croissance annuelle qui est l'un des plus élevés au monde.

Je n'en veux pour exemple que le cas du canola, plante mise au point au Canada par des chercheurs du gouvernement fédéral, et qui, partie de zéro en 1974, alimente une industrie dont le chiffre d'affaires pour 1994 est évalué à 9,35 milliards de dollars.

Malheureusement, depuis quelques années, les investissements dans les activités promotrices de croissance telles que la recherche et le développement des marchés dans le secteur agroalimentaire ne cessent de diminuer. Il faut que nous renversions la vapeur car, sous les auspices de l'OMC, nous allons devoir faire face à une concurrence encore plus féroce.

Permettez-moi de dire, en guise de conclusion, que les divers ordres de gouvernement, le secteur privé et les regroupements d'agriculteurs doivent élaborer une stratégie agricole commune. Cette nécessité est d'autant plus pressante que la mondialisation des échanges rend le marché international extrêmement concurrentiel. Une telle stratégie doit tenir compte de trois éléments interdépendants.

Nous devons continuer à appuyer l'agriculture, l'agroalimentaire et autres secteurs basés sur les ressources naturelles qui forment la clé de voûte de l'économie canadienne.

Nous devons investir davantage dans la recherche agroalimentaire. Nous devons faire en sorte que les agriculteurs canadiens qui produisent pour 70 milliards de denrées alimentaires chaque année reçoivent leur juste part de la richesse issue de l'agriculture.

Je suis fermement convaincue qu'en appliquant ces critères, et une fois posés les fondements d'un secteur agricole national fort, nous serons en mesure de tenir tête à n'importe quel concurrent au monde.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, le whip adjoint en chef m'a demandé de différer le vote. En conséquence, conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à demain, à 17 h 30. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

Mme Catterall: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y a déjà un autre vote prévu pour demain. Vous constaterez, je crois, qu'il y a consentement unanime pour tenir ce vote à la fin de la période normale réservée aux initiatives ministérielles.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 45, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

L'INVENTAIRE DES BIENS DANS LES BUREAUX DE DÉPUTÉS

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.) propose:

Que, de l'avis de la Chambre,
1) pendant une période électorale, mais avant la date des élections, chaque député devrait être obligé de certifier quels meubles, fournitures et pièces d'équipement se trouvent:
a) dans son bureau de circonscription, la liste devant alors être attestée par le scrutateur, et
b) dans son bureau de la Chambre des communes, la liste devrait alors être attestée par le personnel de la Chambre des communes;
2) après une élection, l'entreposage et/ou le transfert des meubles, fournitures et pièces d'équipement au nouveau député devrait être organisé:
a) dans le bureau de circonscription et/ou par le scrutateur, et
b) dans le bureau de la Chambre des communes, par le personnel de la Chambre des communes;

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3) si un député qui quitte le Parlement ne remet pas tous les meubles, fournitures et pièces d'équipement en question, on devrait déduire la valeur des biens non remis du traitement et/ou de la pension du député ou veiller à obtenir une compensation et, dans les cas extrêmes, porter des accusations criminelles.
-Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir l'occasion de débattre la motion d'initiative parlementaire M-290 visant à combler les lacunes qui existent en ce qui concerne les biens et fournitures que les députés ayant perdu leurs élections doivent remettre à leurs successeurs.

À l'heure actuelle, seul le chapitre G-3 du deuxième volume du manuel des allocations et services offerts aux députés mentionne la remise des biens des bureaux de circonscription et des bureaux de la Chambre des communes. Je voudrais vous citer l'extrait du manuel qui traite le plus directement de cette question:

Tout député qui demande un nouveau mandat mais qui n'est pas réélu doit quitter son bureau de circonscription moins de 30 jours après la date des élections. Par conséquent, les frais essentiels d'entretien du bureau pendant cette période de transition de 30 jours (par ex. les frais associés aux fournitures de bureau, à la location de téléphones, au service de réponse téléphonique, aux services publics, à la location de meubles et pièces d'équipement) doivent être imputés au budget du bureau du député.
C'est le seul endroit où l'on mentionne un délai, une période de transition de 30 jours, sans toutefois apporter de précisions en ce qui concerne le transfert des biens.

(1750)

Monsieur le Président, je crois qu'il est important de lire ici le texte de la motion, comme vous venez de le faire.

Au cours de la prochaine heure, je serais heureux de recueillir des suggestions et des conseils sur la façon d'améliorer la période de transition pour les nouveaux députés, particulièrement, comme la motion le mentionne, en ce qui a trait au transfert des biens et des fournitures de bureau.

Après les élections, la population s'attend à de grandes choses de la part de ses nouveaux députés. La bonne volonté est actuellement le principe qui préside au transfert opportun et ordonné des biens, mais ce principe peut être malmené et peut même bloquer les travaux des députés et l'aide que ces derniers peuvent offrir à leurs électeurs.

J'ai pu le constater personnellement et je sais que d'autres ont connu la même épreuve. Surtout après les dernières élections où plus de 200 nouveaux députés, 200 députés impatients de s'atteler à la tâche tant à leur bureau de circonscription qu'à Ottawa, n'ont pu le faire, car certains candidats battus refusaient tout net de remettre les biens de l'État, faisaient traîner les choses ou, dans certains cas, ne pouvaient être joints ou refusaient de retourner les appels. J'ai vécu cette expérience. En fin de compte, mon bureau n'a été prêt qu'au mois de janvier. Un jour de plus, et j'aurais attendu jusqu'en février, soit plus de trois mois après les élections.

Le service de la gestion du matériel de la Chambre des communes n'a pu rendre compte des biens et localiser ceux-ci parce qu'il n'a pu retracer le député sortant, non plus que deux des quatre bureaux de circonscription que celui-ci avait utilisés, et aussi parce que le député avait placé des biens dans des installations d'entreposage sans en informer ce service. Comportement tout à fait répréhensible et irresponsable de la part du député sortant, qui a refusé de faire preuve de bonne volonté et qui a causé des problèmes, non seulement pour moi mais pour les habitants de North Island-Powell River.

Permettez-moi de vous entretenir davantage de mes malheurs en vous citant les propos de mon adjoint de circonscription, c'est-à-dire le deuxième employé dans la circonscription: «À mon premier jour de travail, le 1er décembre 1993, je suis entré dans un bureau où il n'y avait que quelques rares meubles empruntés. Aucun appareil n'appartenait au gouvernement du Canada. En fait, j'ai dû apporter mon propre ordinateur pour répondre au courrier.»

La frustration de mes employés grandissait de jour en jour. Ceux-ci se sont rendus au bureau de mon prédécesseur. Le bureau était fermé à clé et il n'y avait personne. Un coup de fil à la gestion du matériel à Ottawa n'a rien donné. Les responsables n'avaient aucune idée de l'endroit où se trouvaient les biens et ils faisaient des efforts considérables mais vains pour retrouver le député.

Un responsable de la gestion du matériel de la Chambre des communes a résumé le problème en disant que le député avait deux lignes téléphoniques, chacune avec un répondeur qui disait de téléphoner à l'autre numéro. Les appels n'étaient jamais retournés. C'est à ce moment que j'ai acheté un photocopieur. Je savais qu'un député efficace se devait d'avoir des qualités d'enquêteur, mais la situation devenait ridicule.

Les représentants de la gestion du matériel m'ont dit que leurs démarches ne donnaient aucun résultat et qu'ils ne pouvaient faire plus, parce qu'ils n'en avaient pas le pouvoir. Ils ont mentionné la possibilité d'essayer d'influencer le député en faisant appel à l'association de comté ou au chef du parti.

Le 8 décembre 1993, un employé de la Chambre des communes a téléphoné à mon bureau de circonscription pour dire qu'on avait retrouvé les meubles et l'équipement de bureau. On a promis de livrer le tout à mon bureau principal. Le 13 décembre, certains meubles de base sont arrivés. Le 17 décembre, on a livré d'autres meubles, mais il n'y avait toujours pas l'ombre d'un ordinateur ou d'un photocopieur, comme l'indiquait la feuille d'inventaire. Les employés de mon bureau ont continué d'utiliser mon ordinateur et ont emprunté un photocopieur.

Il y avait alors une forte accumulation de courrier et de dossiers à classer. C'était de mauvais augure pour ce qui est du délai de réponse.

(1755)

Le 20 décembre, un employé de la Chambre des communes a rappelé disant qu'on ignorait totalement où se trouvaient les ordinateurs. J'ai alors décidé d'acheter deux ordinateurs en me servant du budget affecté à mon bureau. Comme l'ancien député avait quatre bureaux de circonscription, les biens du gouvernement étaient dispersés. Nous en avons retrouvé certains qui étaient entreposés et pour lesquels il fallait payer plus d'un mois d'entreposage, étant donné que l'ancien député avait payé l'entreposage pour deux semaines en disant que la Chambre des communes acquitterait le reste de la facture, mais il n'avait pas laissé d'autres instructions et n'avait pas informé la Chambre. Encore une fois, les ordinateurs ne se trouvaient pas tous à cet entrepôt.


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J'ai vite constaté que le télécopieur retrouvé était en piètre état, au point qu'il me fallait en acheter un nouveau. J'ai reçu d'autres articles le 24 décembre 1993. Le 5 janvier 1994, j'ai reçu livraison du nouveau télécopieur. Le même jour, soit plus de deux mois après les élections, j'ai pris livraison de deux nouveaux ordinateurs.

Le 7 janvier, j'ai retrouvé le matériel du bureau de Sechelt de l'ancien député et, après conciliation avec la feuille d'inventaire, je me suis rendu compte qu'il manquait bien des articles, entre autres, les ordinateurs, dont un modèle 386 et un ordinateur portatif, n'étaient toujours pas là. Comme la facture de l'entrepôt de Sechelt n'était toujours pas payée, je l'ai acquittée moi-même pour calmer l'irritation de l'exploitant de l'entrepôt.

Le 22 janvier, j'ai appris que d'autres articles avaient été retrouvés dans un entrepôt de Campbell River. À l'exception de l'ordinateur portatif, les ordinateurs s'y trouvaient, mais c'était de vieux modèles 286. Le 31 janvier, j'ai procédé à une conciliation officielle, mais l'ordinateur portatif 286 manquait toujours. En mai, on m'a informé qu'il avait été retourné à Ottawa endommagé et inutilisable, et un responsable de la gestion du matériel m'a dit qu'on avait demandé à l'ancien député de payer pour l'ordinateur portatif, ce qu'il a fait.

C'est assez pénible que moi-même, mes employés et le personnel de la Chambre des communes aient dû chercher par toutes sortes de moyens pour trouver les biens du gouvernement. Mais puisque le Parlement n'avait pas siégé pendant environ sept mois avant les élections, les demandes de services s'étaient accumulées et les électeurs attendaient avec raison que l'on réponde à leurs demandes justifiées.

J'avais beaucoup de difficulté à remplir mes fonctions de député, faute de matériel. Le député précédent avait été en poste pendant 14 ans. J'étais nouvellement élu et, en raison du souvenir encore frais dans ma mémoire d'une campagne électorale âprement disputée, je ne voulais pas rendre public le comportement inexcusable de mon prédécesseur parce que j'ai toujours adopté la position morale quand d'autres ne l'avaient pas fait et je ne voulais pas donner l'impression que ma victoire m'avait changé.

On ne doit pas permettre que les événements que je viens de décrire se reproduisent. Ce sont les contribuables canadiens qui ont acheté et payé les biens et il nous faut de meilleures règles que celles qui existent actuellement. Les agents de la gestion du matériel ont fait tout leur possible, dans le cadre de leur mandat, malgré la grande distance. Néanmoins, c'est grâce aux enquêtes menées par mes employés que nous avons pu trouver certains des biens entreposés. Les députés se rendent compte que mes employés avaient besoin de la permission de la Chambre des communes pour voir les biens entreposés, ce qui était embêtant et pour cette raison on ne les a pas vus, ce qui retardait encore le rapprochement de notre inventaire.

Ce serait beaucoup mieux pour nous tous si nous avions des directives clairement définies pour le transfert des biens. À mon avis, c'était de la malice et de la vengeance que de retenir tous les biens de bureau et j'aurais dû pouvoir compter sur un moyen de recours et non simplement sur de la bonne volonté pour avoir gain de cause. J'ai été le dernier député à recevoir ses biens. Mais je sais que je n'étais pas le seul à sentir ce chagrin et cette frustration et c'est pourquoi je tiens tellement à présenter ma motion.

(1800)

Des activités du genre de celles auxquelles s'est livré mon prédécesseur équivaudraient à du vol dans le secteur privé. Il faut délier les mains des gestionnaires des pièces d'équipement de la Chambre des communes et permettre aux nouveaux députés de bien faire leur travail. La bonne volonté ne suffit pas. Il faut rendre des comptes. Il faut donner du mordant aux règles et méthodes de remise des biens et prendre des mesures contre les personnes qui ne les respectent pas.

Ma motion exige la participation des scrutateurs au niveau des circonscriptions. Ceux-ci seraient chargés de vérifier que les biens se trouvent toujours dans le bureau de l'ancien député et de coordonner le transfert.

À Ottawa, les préposés à la gestion du matériel s'assureraient que les articles sont correctement entreposés ou transférés. Si le député qui quitte le Parlement ne remettait pas tous les articles, on devrait déduire la valeur des biens non remis du traitement et/ou de la pension du député ou veiller à obtenir une compensation et, dans les cas extrêmes, à porter des accusations criminelles.

Au cours de l'épreuve résultant de cette débandade et de l'attitude insensée de l'ancien député, diverses stratégies s'offraient à moi, y compris, je le répète, communiquer avec l'association de comté et le chef du parti de l'ancien député. L'autre option était de passer par la présidence, ce qui était compliqué du fait qu'il y avait là aussi changement de titulaire.

En dernière analyse, les gestionnaires des pièces d'équipement de la Chambre des communes n'ont pas le pouvoir de transférer des biens et doivent compter sur la bonne volonté de l'ancien député, qui, dans le cas qui nous occupe, était nulle.

Mon cas est peut-être particulièrement frappant mais, comme en attesteront des collègues qui prendront la parole tout à l'heure, il n'est pas unique. Si l'on ne fait rien, la situation va empirer. Voici pourquoi. Actuellement, les limites des circonscriptions sont stables. Nous savons tous que nous serons appelés à nous prononcer sur un projet de loi qui ferait varier les limites des circonscriptions électorales tous les cinq ou dix ans. Par conséquent, de moins en moins de circonscriptions demeureront inchangées entre deux élections et les députés élus ignoreront de quel ancien bureau de circonscription ou de quel ancien député il hériteront leur matériel.

Il est clair qu'il incombe à la Chambre de se pencher sur la méthode actuelle de transfert du matériel. Nous ne pouvons pas tolérer une situation où les législateurs du Canada sont rendus inaptes à remplir leurs fonctions parce que les règles applicables à leur propre cas, notamment pour une chose aussi simple que le transfert de meubles, de fournitures et de pièces d'équipement, sont inexistantes. Si la Chambre permet que se continuent une


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injustice et un gaspillage de deniers publics, elle ne remplit pas son rôle.

Je voudrais présenter une autre option pour terminer. Je n'ai pas parlé au directeur général des élections, mais il serait peut-être possible, en modifiant la Loi électorale, de lui donner le pouvoir de s'occuper du transfert ordonné et régulier des biens du gouvernement.

Il s'agit d'une question sérieuse et, même si je n'avais pas été victime d'un délai indu qui m'a fait perdre beaucoup de temps, j'exhorterais la Chambre à prendre des mesures. Dans l'état actuel des choses, la Chambre ne peut rien faire, les gestionnaires du matériel ne peuvent rien faire et la seule bonne volonté ne suffit pas.

Je remercie la Chambre de m'avoir donné la possibilité de discuter de ma motion.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer à ce débat aujourd'hui, car la question soulevée dans la motion du député est très sérieuse.

Je tiens à signaler au départ que, même si je crois que cette question mérite que nous en discutions, je ne suis pas certain que les suggestions du député, soit porter des accusations criminelles et faire intervenir le directeur du scrutin, soient particulièrement utiles.

Je vais d'abord parler de ces suggestions et je vais ensuite essayer de dire quelque chose de constructif au sujet de la motion présentée par le député, car je sais qu'il prend cette question très au sérieux.

(1805)

Je tiens également à dire que je ne crois pas que tous les députés aient eu la même expérience que lui. Je pense que la plupart des députés n'ont pas trouvé la situation aussi pénible que le député l'a décrite lorsqu'ils sont arrivés ici. Dans mon cas, ce n'était évidemment pas en 1993 que j'ai pris la place d'un député sortant, mais bien en 1988.

Dans la plupart des cas, les députés sortants ont été très civils à l'endroit des nouveaux élus. Ils leur ont remis toutes les fournitures qui étaient dans leurs bureaux. Je crois aussi que le député aurait pu demander de l'aide d'une façon qu'il ne connaissait peut-être pas à ce moment-là. Il a demandé de l'aide après s'être rendu compte que la plupart des fournitures semblaient avoir disparu.

À mon avis, la motion du député pose deux problèmes. Premièrement, le député propose que le scrutateur s'occupe de cela. Je suppose qu'il veut dire le directeur du scrutin dans la circonscription et non un des scrutateurs dans un des bureaux de scrutin.

S'il veut dire le directeur du scrutin dans la circonscription, il suggère que cette personne aille faire un inventaire dès que le bref est émis. Je tiens à signaler au député que le directeur du scrutin dans la circonscription doit mettre son propre bureau sur pied dans les quelques heures suivant l'émission du bref. Il doit embaucher tout son personnel pour que la machine électorale puisse démarrer. C'est durant les jours suivant l'émission du bref que le directeur du scrutin est le plus occupé. L'idée de demander à cette personne de prendre du temps pendant cette période pour aller faire l'inventaire des meubles et des fournitures qui se trouvent dans le bureau du député est absolument ridicule.

Si le député y réfléchit, il comprendra que le directeur de scrutin n'a pas d'affaire en période électorale à aller au bureau du député pour dresser l'inventaire de l'équipement de bureau. Il y a d'autres raisons pour lesquelles ce n'est pas une bonne idée, et je les exposerai plus en détail dans un instant.

La deuxième critique que j'aurais à faire, c'est que je ne suis pas convaincu que le député ait besoin du scrutateur pour faire ça. Des douzaines de scrutateurs sont nommés dans chaque circonscription, un par bureau de scrutin. Ma circonscription compte environ 240 bureaux de scrutin. D'autres en comptent davantage. Nous n'avons sûrement pas besoin d'attendre que ces scrutateurs soient nommés, ce qui prend quelques semaines au cours de la période électorale, pour commencer, puis d'en choisir un qui sera chargé d'aller au bureau du député pour inspecter l'équipement de bureau. Cela ne me paraît pas nécessaire.

Je voudrais parler des arrangements actuels régissant l'équipement de bureau des députés, et voir comment ils sont établis par les dispositions actuelles du Manuel des allocations et des services des députés. Le député a sûrement lu le Manuel des allocations et des services. Il est bien possible qu'il se soit endormi une fois arrivé aux pages concernant le matériel. J'en ai fait l'expérience en lisant le manuel. C'est une lecture difficile. Loin de moi la pensée que le député ait pu faire preuve de négligence dans l'exercice de ses fonctions, mais ce manuel est parfaitement assommant.

Il comporte toutes sortes de dispositions concernant l'équipement de bureau, les budgets et ainsi de suite. Si le député veut bien se reporter au paragraphe 7(1) des règlements administratifs-je crois qu'ils se trouvent à la fin ou au début du manuel; il existe un manuel distinct à cet égard, mais ils se trouvent également dans ce manuel- il lira ce qui suit:

Dans les cas où un député contrevient à ces règlements et si la situation n'est pas rectifiée à la satisfaction du Bureau. . .
C'est-à-dire le Bureau de régie interne.

. . .le Bureau peut ordonner la retenue de toute somme d'argent requise pour rectifier la situation sur tout budget, indemnité, allocation ou autre paiement pouvant être mis à la disposition du député [. . .]et
c) [. . .]s'il l'estime nécessaire [. . .]le Bureau peut ordonner le blocage, pour le temps et aux conditions qu'il estime nécessaires, de tout budget, indemnité, allocation ou autre paiement pouvant être mis à la disposition du député.


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Le bureau peut en outre faire respecter ses règlements en recourant aux procédures civiles. Il peut en effet intenter des poursuites contre les députés qui ont violé les dispositions des règlements administratifs du bureau. Il doit être clair que l'inventaire des biens des députés ne peut pas se faire juste avant les élections.

Le député pourra constater qu'il se fait chaque année un inventaire des biens qui se trouvent dans son bureau de circonscription. Selon mon expérience personnelle, la liste est envoyée au personnel du député, et celui-ci doit vérifier et ensuite signer un document attestant que ces articles se trouvent bien dans son bureau de circonscription. Si le député est aux prises avec un problème réel parce que les meubles ou l'équipement ont été détruits ou abîmés par le député sortant, ce qui, selon les rumeurs, se serait produit dans un cas, il peut demander quand l'inventaire a lieu pour pouvoir commenter l'état des biens dont il a la responsabilité.

(1810)

Je ne comprends vraiment pas pourquoi ce serait un problème particulier, sauf exception, que les députés examinent la liste des actifs chaque année et fassent leurs observations au personnel de la gestion du matériel de la Chambre, et que ces rapports soient publics. Comme le député le sait, les rapports sont disponibles à l'élection d'un nouveau député. La liste est remise au nouveau député. On lui dit qu'il peut s'attendre à ce que les articles figurant dans la liste des services de gestion du matériel se trouvent dans son bureau de circonscription. Je fais allusion, bien sûr, au député qui a ouvert le débat par cette motion.

Je ne suis pas sûr que nous puissions faire grand-chose pour empêcher d'anciens députés de partir avec du matériel. Cela se produit à divers endroits. Je le répète, presque tous les députés ont été très honnêtes à cet égard, et ils ont reçu ce qu'ils devaient raisonnablement recevoir de leur prédécesseur.

Je sais que le député de North Island-Powell River a éprouvé des problèmes. Je constate à la mine des députés d'en face que certains d'entre eux ont connu une expérience semblable. Mais telle n'a pas été l'expérience de la vaste majorité des députés.

Il ne vaut guère la peine, à mon avis, de lancer une chasse aux sorcières ou d'adopter des règles draconiennes qui seraient extrêmement lourdes, peu commodes et coûteuses à administrer dans le seul but de récupérer quelques milliers de dollars ici et là pour du matériel manquant, comme il est proposé dans la motion présentée par le député de North Island-Powell River.

Je comprends certes sa préoccupation. Je reconnais qu'il y a des gens malhonnêtes, et nous le déplorons tous. Mais la loi prévoit déjà assez de recours. Si des gestes malhonnêtes ont été posés, des accusations peuvent être portées. Nous n'avons pas besoin qu'une motion soit présentée à la Chambre pour porter des accusations. Nous pouvons le faire s'il y a eu fraude.

Il n'y a pas lieu de croire, à mon avis, que la liste des biens dressée tous les ans et mise à jour régulièrement par le personnel et les hauts fonctionnaires de la Chambre chargés du matériel, et qui est approuvée ensuite par les députés, soit incomplète au moment de l'entrée en fonction du nouveau député.

Si c'est le cas, il me semble qu'il n'est pas nécessaire de s'engager dans de longues procédures en vertu desquelles toutes sortes de gens viendraient inspecter tous les jours le matériel que l'on trouve dans les bureaux des députés. Ce serait nuisible, coûteux et inutile. Je ne doute pas que le député, puisqu'il est membre du Parti réformiste, s'oppose à toute forme de gaspillage de la part du gouvernement.

Or, j'estime que certaines mesures prévues dans la motion dont nous sommes saisis entraîneraient beaucoup de gaspillage.

[Français]

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole dans le cadre de cette motion et de donner le point de vue de l'opposition officielle quant à la motion du député de North Island-Powell River.

D'entrée de jeu, je veux dire que, effectivement, nous appuyons cette motion. On appuie cette motion parce qu'il s'agit d'argent des contribuables. Il s'agit également de voir à la bonne gestion du matériel mis à la disposition des élus.

La motion présentée par le député de North Island-Powell River se réfère justement à la saine gestion, au transfert lors d'une élection ou à la récupération lorsqu'il y a disparition de meubles, de fournitures et pièces d'équipement que le député a sous sa responsabilité durant son mandat et qui appartiennent à la Chambre. Rappelons-le, si cela appartient à la Chambre, cela appartient à tous les contribuables.

(1815)

Cette motion rappelle la grande difficulté d'établir un inventaire permanent des biens dans un contexte tel que celui de la Chambre des communes, où le personnel politique change très régulièrement, c'est-à-dire à tous les quatre ou cinq ans.

Même si depuis 1977, selon les informations que l'on a auprès du Service de la gestion du matériel, où il existe un inventaire de tout le matériel de bureau qui appartient à la Chambre, plus de 90 des 205 nouveaux députés élus l'automne dernier ont fait part de variantes importantes entre le rapport d'inventaire de ce qu'ils auraient dû recevoir et de ce qu'ils avaient réellement reçu. C'est inquiétant, 90 sur 205 nouveaux n'ont pas le matériel exact vu dans l'inventaire. On est en droit de se poser des questions et le député qui dépose la motion, le député de North Island-Powell River, a raison de poser la question.

Dès le mois d'avril, plusieurs journaux canadiens rapportaient la disparition d'équipements de la Chambre, tels des systèmes vidéo, télévisions, télécopieurs et meubles, depuis la dernière élection d'octobre 1993. Et on peut lire dans La Presse du 13 avril, par exemple, que «le personnel des Communes s'efforce de retrouver des téléviseurs, des magnétoscopes, des ordinateurs, des téléphones cellulaires, des télécopieurs et des meubles appartenant au gouvernement. . .», toujours d'après des informations que nous avons directement du Service de la gestion du


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matériel. Et on sait que là-dedans, il y a du matériel qui ne se met pas facilement dans la poche intérieure du veston.

Il ne faut cependant pas conclure trop hâtivement au vol ou à la fraude, comme plusieurs seraient tentés de le faire. En effet, selon nos informations, il est très difficile de prouver qu'il y ait vraiment eu intention de vol de la part d'anciens députés. La preuve en est que la presque totalité des objets disparus fut récupérée-et le député sera content-par le personnel du Service de la gestion du matériel et que les bien non récupérés furent portés au compte des députés qui en avaient la responsabilité.

Les difficultés qui entourent la possibilité d'établir un inventaire fiable des biens de la Chambre sont nombreuses et ce n'est pas ainsi l'honnêteté des députés qui est mise en cause. Le fait que le Service de gestion du matériel ne soit pas toujours avisé de façon expéditive des changements aux inventaires des députés pendant leur mandat en est une, entre autres, et le fait également que le transfert des biens du bureau de comté du député défait à celui du nouveau député est souvent difficile, compte tenu de la rivalité qui existe entre les deux individus, en est une autre.

Il y a également le fait que certains biens des bureaux de comté, entre autres ordinateurs portatifs, téléphones cellulaires, systèmes vidéo, sont laissés dans les bureaux d'Ottawa du député défait, en pensant sans doute que le député nouvellement élu sera installé dans les mêmes locaux sur la colline, ce qui n'est pas nécessairement le cas.

Il faut donc noter que la façon dont on attribue la responsabilité des inventaires aux députés, soit sur la parole d'honneur, comporte ses avantages, mais aussi, reconnaissons-le, ses inconvénients. Le Bloc québécois est pleinement conscient de l'importance de protéger l'ensemble des biens, à la fois dans les bureaux de comté et les bureaux d'Ottawa des députés, puisqu'ils appartiennent à la Chambre des communes et sont payés à même l'argent des contribuables.

Dans cette optique, on ne peut faire autrement que d'appuyer la motion 290 du député qui suggère un renforcement-êtes-vous d'accord?-un renforcement des mesures de vérification des inventaires d'équipement. Je n'entends pas le député dire qu'il est d'accord. Ça ne marche pas, quoi? Je disais donc que la motion du député suggère un renforcement des mesures de vérification d'inventaire des équipements, meubles et autres, ainsi que des responsabilités de chaque député-c'est important, on gère les taxes payées par les gens-donc, par rapport à ces biens, et cela dans le but de protéger la propriété publique. Nous sommes d'accord.

Cependant, plusieurs des mesures suggérées dans la motion existent déjà, il faut quand même le reconnaître. Depuis plusieurs années, une vérification physique de tous les lieux des députés à Ottawa est effectuée sur une base annuelle.

(1820)

L'apparition d'un inventaire électronique, par l'utilisation de codes zébrés, augmente la protection et la surveillance de ces biens. Jusqu'à tout récemment, toujours selon le Service de la gestion du matériel, un problème majeur subsistait dans la gestion du matériel. Là, il y a un problème et on l'a identifié. C'était la question de l'équipement dans les bureaux de comté.

Il faut être conscient de l'endroit où se situe le problème exactement et, semble-t-il, c'est majeur dans les bureaux de comté. En effet, le manque de personnel du Service de la gestion du matériel ne permettait pas d'effectuer un suivi adéquat des inventaires du matériel de comté. En appui à la motion de mon collègue, je voudrais dire à la députation ministérielle que le problème a été identifié. C'est dans les comtés et c'est un manque de personnel pour le suivi.

Le personnel étant désormais plus nombreux, un lien efficace de confiance et de collaboration plus étroit s'est établi entre la Gestion du matériel et les bureaux de comté. C'est un correctif qu'on vous reconnaît et qu'on reconnaît à la Chambre.

Une politique des biens est sur le point d'être mise en place. On en a effectivement parlé au Comité permanent des affaires de la Chambre. Cette politique est sur le point d'être mise en place et on parle du début de la prochaine session. Espérons qu'elle sera mise en oeuvre par le Comité des affaires de la Chambre qui a discuté et approuvé cette mise en oeuvre de politique.

C'est donc une politique des biens qui reprend, en somme, les principaux éléments contenus dans la motion du député, la motion 290, qui nous invite à être des gestionnaires efficaces, serrés et responsables parce que les biens et le matériel que nous possédons, ce sont les contribuables qui, en somme, en sont responsables au premier chef.

[Traduction]

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler d'une motion comme celle-ci puisque je suis parmi les députés qui ont eu une mauvaise expérience après les élections.

Mais, évidemment, le député de Kingston et les Îles dit qu'il ne faut pas s'en faire puisque nous parlons seulement de cas isolés. Il ne s'agit pas de cela, monsieur le Président. C'est une question de responsabilité.

Je sais que cette question pose un problème pour certains députés d'en face. Ce n'est pas un problème dont nous avons parlé à la Chambre des communes. La responsabilité est une valeur que tous les Canadiens doivent respecter, particulièrement les députés de la Chambre des communes.

Je me demande si les libéraux vont écouter ce que j'ai à dire. Après tout, ils forment un gouvernement majoritaire. Nous avons appris aujourd'hui que le Bloc appuiera cette motion présentée par un de nos députés, et je suis certain que la grande majorité de mes collègues réformistes l'appuieront également.

Puisqu'on parle ici de responsabilité et de biens appartenant aux contribuables, la question est de savoir ce que feront les ministériels quand viendra le temps de voter sur cette question, que ce soit la semaine prochaine, mercredi ou encore jeudi. Découvriront-ils un tout petit détail d'ordre technique qui les empêchera de voter en faveur de cette motion? Trouveront-ils, comme le dit le député de Kingston et les Îles, que la situation n'est peut-être pas si grave que nous le pensons? Se diront-ils que, comme la situation n'est pas si grave, ils devraient voter contre cette motion? Ou encore se diront-ils qu'il est question ici


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de responsabilité et qu'ils devraient peut-être voter en faveur de cette motion? Cela reste à voir.

M. Milliken: Cette motion ne fera pas l'objet d'un vote.

M. White (Fraser Valley-Ouest): C'est vrai. Vous voyez, ils ont déjà trouvé une façon de réfuter mon argument. La motion ne fera pas l'objet d'un vote. Mais l'appuieront-ils?

Une voix: Nous l'appuierons, mais elle ne fera pas l'objet d'un vote.

M. White (Fraser Valley-Ouest): Voilà.

La question ici est de savoir à qui appartiennent ces biens. Ils appartiennent aux contribuables. Quel que soit le député en poste, ces biens lui sont prêtés, qu'il les ait achetés lui-même pendant son mandat ou qu'il les ait obtenus de son prédécesseur. Le fait est que ces biens appartiennent toujours aux contribuables. C'est essentiellement la même chose que lorsqu'on loue un article quelconque; on doit le remettre d'une façon ou d'une autre.

(1825)

Dans mon cas, lorsque j'ai été élu, je me suis rendu aux entrepôts, avec mon prédécesseur, et j'ai examiné les biens. Je ne savais pas vraiment si les objets correspondaient à la liste d'inventaire ou non, mais j'ai visité les lieux et j'ai dit d'accord, expédiez le tout à mon nouveau bureau. Les meubles et appareils sont arrivés environ deux semaines plus tard. Jusque-là, tout allait bien. Lorsque j'ai ouvert la porte de mon nouveau bureau, lorsque le camion est arrivé et que les déménageurs ont commencé à sortir les meubles, j'ai dû retourner certaines pièces. J'ai dit: «Ce matériel est en piteux état. Retournez-le, et je prendrai d'autres dispositions à ce sujet. Apportez le téléviseur et le magnétoscope, ils sont usagés et ont l'air d'être un peu usés, mais installez-les quand même. Donnez-moi aussi le vieux téléphone cellulaire qui sera sûrement utile.»

Quelque temps plus tard, j'ai pensé qu'il valait mieux examiner la liste d'inventaire. Comme l'a déjà dit le député de Kingston et les Îles, on nous remet une liste d'inventaire. J'y ai vu un magnétoscope et j'ai coché sans problème. J'étais toutefois inquiet de voir que, sur la liste, les dates d'achat étaient assez récentes et les prix très élevés. En fait, il s'agissait de plusieurs milliers de dollars, même pour le téléviseur et le magnétoscope, alors que je ne donnerais vraiment pas cher pour les appareils que j'ai reçus. Leur valeur pourrait s'élever à 200 $ ou 300 $, au total. À ce moment-là, j'ai donc pensé qu'il y avait peut-être anguille sous roche.

En fouillant un peu, nous avons constaté que ces nouveaux appareils avaient bel et bien été achetés, mais qu'ils ne se trouvaient certainement pas dans mon bureau. Ils étaient ailleurs.

M. Milliken: C'est scandaleux!

M. White (Fraser Valley-Ouest): Le député libéral dit que c'est scandaleux et ça l'est très certainement. C'est une honte qu'ils ne comprennent pas ce que signifie l'imputabilité ou l'obligation de rendre compte et qu'ils ne saisissent pas le sens de toute cette question.

Le député avait acheté le matériel neuf, l'avait apporté chez lui et remplacé par du vieux.

M. Wappel: C'est scandaleux!

M. White (Fraser Valley-Ouest): Il m'a fallu quelque temps pour corriger la situation. Mais nous avons enfin réussi à tout ramener à sa place.

Le fait est qu'il devrait y avoir un mécanisme pour assurer l'imputabilité et rendre des comptes.

Je comprends la réaction des libéraux. Tout ce que nous entendons, ce sont des «c'est scandaleux». On crie au scandale. On passe son temps à dire qu'il faudrait bien faire quelque chose. Mais voilà, on ne fait rien. C'est vraiment malheureux!

Or, il ne s'agit pas d'un cas isolé. Cela se produit de temps en autre. Tout ce que nous demandons à la Chambre des communes, c'est que ça cesse. Si un mécanisme est mis en place, nous nous en chargerons. Nous ne demandons pas la lune.

Nous ne cherchons pas les ennuis. Absolument pas! Un député a dit récemment que le Parti réformiste se lançait dans une chasse aux sorcières avec cette motion. C'est encore mon ami de Kingston et les Îles. Je ne vois pas le rapport avec la chasse aux sorcières et, de toute façon, il faut dépasser cette affaire de chasse aux sorcières. Les gens d'en face doivent faire preuve d'un plus de sincérité dans leurs déclarations et s'intéresser au fond de la question.

Je vais vous dire, monsieur le Président, ce que je ne confierais pas au député de Kingston et les Îles. Je ne confierais jamais au député la gestion de mon magasin. Voici la situation: «Tiens, quelqu'un part avec le matériel. Quelqu'un s'enfuit avec mes biens, mais ce n'est pas grave. Il ne sont que quelques-uns à agir de la sorte. Ne nous en faisons pas pour si peu.» C'est ainsi qu'on perd tous les profits réalisés dans une entreprise.

Pour résoudre la situation, il suffit d'adopter une motion comme celle-ci et de dire en substance: «Oui, voilà ce qu'il faut faire pour en venir à bout. Il faut signaler un tel cas.» Il faut aller au fond des choses. Même un cas comme celui-ci est inacceptable, parce que s'il y en a un, il y en aura d'autres. En fait, nous avons entendu parler de deux d'entre eux aujourd'hui, et il y en a d'autres.

M. McClelland: Si on ne peut régler les petites choses, comment pourra-t-on régler les gros problèmes?

M. White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, nous nous amusons, aujourd'hui, parce que les députés d'en face ne comprennent pas de quoi nous parlons.

(1830)

La motion que mon collègue a présentée à la Chambre traite de l'imputabilité. Il est vraiment dommage que les députés d'en face ne comprennent rien à ce principe. Nous essayons vraiment de leur expliquer de quoi il s'agit. Peut-être que, au cours des trois prochaines années, nous arriverons à leur montrer à épeler le mot «imputabilité» et que nous les amènerons à penser et à


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agir en tenant compte de ce principe, mais, pour l'instant, ils ne savent vraiment pas ce que signifie ce mot.

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas censé prendre la parole, mais j'entends le député de Fraser Valley-Ouest répéter le mot «imputabilité». Je souhaiterais que nous soyons à la période de questions et de réponses. L'été dernier, j'ai eu le plaisir d'assister à la conférence que le Comité des comptes publics a donnée à Charlottetown. Mon billet m'a coûté au total environ 700 $. Je voudrais demander au député de Fraser Valley-Ouest, qui a pris l'avion à Vancouver, avec sa femme. . .

M. White (Fraser Valley-Ouest): Elle a payé son billet.

M. O'Reilly: . . .pour se rendre à Charlottetown, puis au Nouveau-Brunswick, et ensuite à St. John's, combien il a payé son billet. Où était son sens de l'imputabilité? Parlons-en de l'assiette au beurre.

M. Thompson: Il l'a payé avec son argent.

M. O'Reilly: Je ne peux pas croire que le député puisse parler d'imputabilité.

M. White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais faire consigner au compte rendu que je n'ai pas reçu de chèque, mais que j'en ai déposé un auprès du gouvernement, pour payer toutes les dépenses personnelles de ma femme lors de la conférence du Comité des comptes publics.

Soit dit en passant, je suis très indigné par l'accusation. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Nous reprenons le débat avec le député d'Athabasca.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur cette question, simplement parce que j'ai aussi connu l'expérience dont nous ont fait part les deux autres députés de mon caucus. Je suis vraiment indigné par l'attitude cavalière des députés d'en face sur toute cette affaire. Je crois que, même si un seul député avait connu une telle expérience, cela suffirait à justifier une enquête approfondie et des changements.

Avant d'être élu, j'ai visité le bureau de l'ancien député. C'était un bureau bien aménagé, avec de bons meubles, de bons ordinateurs dans les deux bureaux et tout l'équipement souhaitable. Après les élections, son contenu a été déménagé à mon bureau, et j'ai été surpris de constater que seule une bien petite partie du matériel m'était apportée. Les deux classeurs que j'ai reçus étaient verrouillées et semblaient avoir été jetés en bas des escaliers. Quand un serrurier les a ouverts, parce que je n'avais pas les clés, j'ai constaté que les rails qui supportent les dossiers n'y étaient pas. Il a donc fallu du temps et de l'argent pour arranger cela. L'ordinateur qui figurait à l'inventaire et que je devais recevoir brillait par son absence et avait fait place à quelques pièces de matériel informatique désuet et sans numéro de série.

Le député d'en face affirme que tous les députés reçoivent régulièrement un inventaire qu'ils doivent examiner en regard de leur matériel de bureau. Ils doivent alors le signer pour confirmer que tout le matériel y est. En fait, un inventaire daté du 13 septembre 1993 avait bien été reçu et examiné et, je présume, signé par l'ancien député, mais immédiatement après les élections, ce même ancien député s'est présenté au service de la gestion du matériel pour biffer un certain nombre d'éléments dont il pouvait expliquer l'absence d'une manière ou d'une autre. Ce n'était pourtant qu'un mois et des poussières après le dernier inventaire qu'il avait confirmé.

(1835)

Même si des règles existent, elles ne sont certainement pas appliquées. Dans mon cas, c'était très évident, et je ne comprends pas pourquoi. Tout de suite après les élections, quand j'ai reçu le matériel et que j'ai constaté à quel point il en manquait, j'en ai parlé aux employés de la gestion du matériel. J'ai vraiment senti qu'ils hésitaient à faire quelque chose à ce sujet.

Je n'ai pas réussi à intéresser qui que ce soit à mon problème. On m'a dit qu'il faudrait des mois pour tirer la situation au clair et que je ferais mieux de ré-équiper moi-même mon bureau parce que je n'allais pas récupérer ces pièces d'équipement à temps. On m'a donné toutes sortes d'excuses.

Le député me dit que s'il y a eu fraude, il y a des règles qui prévoient des sanctions et qu'on donnerait suite à l'affaire. Comment est-il possible de prouver qu'il y a eu fraude si personne ne fait enquête au départ?

J'ai tenté énergiquement de récupérer le matériel qui manquait et j'en ai effectivement reçu une partie de l'ancien député qui me l'a envoyé de chez lui dans des caisses en bon état. Toutefois, quand j'ai ouvert les caisses, par exemple celle qui contenait l'imprimante au laser, j'ai constaté que cet appareil était gravement endommagé. Il en a coûté 800 $ aux contribuables canadiens pour la faire remettre en état.

Je pourrais donner d'autres exemples. J'étais très mécontent et en plus, j'ai dû débourser 500 $ en frais juridiques pour me défendre contre l'ancien député qui me poursuivait pour diffamation. J'ai de nouveau communiqué avec la Chambre des communes pour obtenir de l'aide et du soutien, mais ma demande a été rejetée.

Il apparaît évident que si des règles existent, elles ne sont pas appliquées. Je ne comprenais pas pourquoi, mais plus le temps passe, plus je comprends pourquoi. C'est une question d'attitude.

Récemment, en entrant dans l'édifice Wellington, j'ai demandé à l'agent de sécurité qui se trouvait sur place si j'étais autorisé à faire telle ou telle chose, cela concernait des invités qui devaient venir me voir, et il m'a répondu que je pouvais faire tout ce que je voulais car j'étais le bon Dieu en personne à la Chambre. Voilà d'où vient le problème. Personne n'a de comptes à rendre. À cause de cette attitude, le personnel responsable de la gestion

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du matériel a hésité à faire enquête au sujet des accusations que je portais.

Cette attitude fait en sorte que les députés adoptent des règlements qui ne sont jamais appliqués. Les députés peuvent circuler librement dans n'importe quel immeuble sur la colline. La Chambre a adopté une directive qui interdit de fumer dans les immeubles de la colline, mais cela n'empêche pas une fumée bleue de sortir des bureaux. C'est que nous sommes le bon Dieu en personne. Je trouve cette situation inacceptable.

Malgré tout ce fouillis, j'ai cependant trouvé une chose encourageante: en fin de compte, la responsable des services aux députés, Mme Edna MacKenzie, m'a demandé lorsque j'ai discuté de la situation avec elle si je pouvais l'aider à élaborer un système quelconque. . .

Des voix: Oh, oh!

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. J'ai de la difficulté à comprendre le député qui a la parole. Je demande la collaboration des députés des deux côtés.

L'atmosphère peut changer très rapidement à la Chambre. L'humeur peut être très bonne à un moment donné et changer subitement du tout au tout.

Je voulais simplement m'assurer que les députés termineront les travaux dans la bonne humeur, tout en discutant aussi énergiquement qu'ils le voudront. En somme, il nous incombe à chacun de respecter le décorum.

(1840)

M. Chatters: Monsieur le Président, comme je le disais, alors que j'essayais de résoudre le mystère du matériel de bureau manquant, j'ai parlé à la personne qui venait d'être nommée responsable des services aux députés, Mme Edna Mackenzie. Elle m'a demandé si je voulais bien l'aider et faire en sorte que le système soit modifié afin que ce genre de choses ne se reproduise pas. Cela m'a fait plaisir.

Ce n'est certainement pas parfait, mais c'est déjà un début. Je vois que ce côté-ci de la Chambre est prêt et je sais que le personnel qui gère cette institution l'est également. Je crois que la seule chose qui manque maintenant, c'est le désir du gouvernement de prendre l'initiative et de mettre fin à cet état de chose. À mon avis, c'est extrêmement grave. Ça me serait bien égal s'il s'agissait seulement du fait qu'on n'ait pas transféré le drapeau monté sur une hampe qu'on retrouve dans le bureau de tous les députés au Canada, et que je n'ai pas eu l'honneur de recevoir.

Mais il s'agit également de tous les biens de consommation que je n'ai pas eus et qui ensemble représentent une somme considérable. Je pense que c'est très grave et j'espère que le gouvernement va prendre la situation au sérieux afin que nous prenions les mesures nécessaires pour que cela ne se reproduise plus.

M. Duncan: Monsieur le Président, si j'en crois le débat que nous avons eu, je pense que nous sommes généralement d'accord sur cette motion, à l'exception de certains de l'autre côté.

Je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime en ce qui concerne la motion suivante:

Que la question des meubles, fournitures et pièces d'équipement qui se trouvent dans le bureau de circonscription et le bureau de la Chambre des Communes de chaque député soit renvoyé pour étude au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
M. Milliken: Monsieur le Président, le député m'a parlé de ceci et nous sommes tout à fait d'accord pour que le comité permanent examine cette question.

J'espère que les députés qui ont dit avoir un problème comparaîtront devant le comité pour lui parler de leurs problèmes parce que cela intéressera le comité d'entendre ce qu'ils ont à dire. Si quelque chose peut être fait pour remédier au problème, je suis sûr que le comité fera les recommandations appropriées.

(La motion est adoptée.)

Le président suppléant (M. Kilger): L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée. Conformément au paragraphe 96(1) du Règlement, l'article est rayé du Feuilleton.

_____________________________________________


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MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA FISCALITÉ

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, le vérificateur général signale dans son rapport que des sociétés doivent 2,9 milliards de dollars en impôts qu'elles n'ont pas payés à Revenu Canada pour 1993.

Il dit aussi dans son rapport qu'il est clair qu'un recouvrement plus efficace des impôts est préférable à une hausse des impôts. Il ajoute que les impôts à recevoir ont une grande importance nationale et que le fait de ne pas les recouvrer aurait de graves répercussions sur le déficit.

Ce sont les sociétés et les grosses entreprises qui sont principalement responsables du fardeau que placent les impôts non payés et les dépenses fiscales sur le déficit. Je m'inquiète du fait que le gouvernement ait 2,9 milliards d'impôts à percevoir. Le gouvernement fédéral a la responsabilité de s'assurer que le Trésor reçoit l'argent qui lui est dû. Les sociétés doivent 32 p. 100 des impôts non payés. Un autre 12 p. 100 des impôts non payés vient des employeurs, autrement dit des sociétés, qui n'ont pas acquitté leurs charges sociales. Selon le vérificateur général, la grande majorité des comptes en souffrance datent de moins d'un an.

Le gouvernement fédéral doit s'efforcer de recouvrer ces comptes en souffrance. Ce n'est cependant que la première étape. Le gouvernement a aussi la responsabilité de mettre fin aux allégements fiscaux et de fermer les échappatoires qui profitent


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aux sociétés et aux particuliers à hauts revenus. Comment se fait-il qu'un Canadien dont le revenu est de 286 000 $ puisse réduire son taux d'imposition à moins de 10 p. 100, alors que les Canadiens à revenus moyens ou faibles doivent débourser près d'un tiers de leur revenu imposable? Le régime fiscal donne des allégements fiscaux aux sociétés et aux riches, et malgré cela il y en a qui ne paient pas leur dû. Cette situation doit être rectifiée.

(1845)

Le gouvernement doit confronter les fraudeurs et fermer les échappatoires. Le gouvernement doit aussi entreprendre une réforme fiscale et ne pas se contenter de réduire les programmes sociaux.

Notre économie vient de traverser une période difficile, mais ce ne sont pas toutes les sociétés qui étaient en difficulté. Beaucoup ont fait des profits considérables, mais sans payer leur juste part d'impôts.

Dans sa réponse, le ministre du Revenu national disait que beaucoup de compagnies et de particuliers ont connu une période difficile après la récession. Cette marque de sympathie ne s'étend malheureusement pas aux chômeurs qui se voient réduire leurs prestations. Les chômeurs aussi ont souffert de la récession, mais eux ils n'ont pas la sympathie du gouvernement.

Le gouvernement doit imposer les bénéfices pour que les sociétés rentables paient leur juste part d'impôts lorsqu'elles sont en mesure de le faire. Le vérificateur général a évalué les dépenses fiscales à 37 milliards, 15 milliards seulement venant des REER. La majorité des Canadiens qui ont des REER sont des gens moyens qui préparent leur retraite et, en économisant, reportent une partie de leur revenu sur des années futures. Le reste des dépenses fiscales vient des radiations des sociétés.

Pourquoi le gouvernement ne s'efforce-t-il pas d'accroître ses recettes en supprimant certaines dépenses fiscales à l'égard des sociétés et en fixant un plafond aux contributions que les personnes à revenu élevé peuvent faire aux REER?

La fiscalité a grand besoin d'une refonte. Les sociétés ne payent pas leur juste part d'impôts. Le gouvernement libéral a clairement laissé entendre que la réduction du déficit est prioritaire, mais il n'a pas examiné sérieusement la possibilité d'accroître les recettes provenant d'entreprises rentables.

Le gouvernement préfère couper dans les programmes sociaux. On augmente les frais de scolarité des étudiants et réduit les prestations de vieillesse et d'assurance-chômage avant même de songer à exiger des entreprises rentables et des riches qu'ils paient leur juste part d'impôts.

Le gouvernement continue en outre à faire des cadeaux aux entreprises rentables. En tant qu'ancien homme d'affaires, je comprends qu'une société veuille faire des bénéfices, mais pourquoi verser des millions de dollars en subventions à des sociétés comme Royal Oak Mines et Rolls-Royce Canada, ainsi que Bombardier? La chambre de commerce reçoit 2,1 millions de dollars.

Je demande au gouvernement qu'il s'attache sérieusement à réduire le déficit et, à cette fin, qu'il perçoive auprès des sociétés l'argent qu'elles lui doivent et réforme la fiscalité canadienne pour qu'elle soit juste.

Mme Susan Whelan (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, le député de Régina-Lumsden a demandé quand Revenu Canada commencera à accorder plus d'attention à la perception des 3 milliards de dollars en impôt sur les sociétés impayé. Il sera heureux d'apprendre que nous y accordons notre attention et que nous percevons les taxes dues.

J'aimerais préciser le montant dû par les sociétés. Le député a indiqué que les sociétés doivent 3 milliards de dollars. En fait, le montant dont fait état le vérificateur général est de 2,1 milliards de dollars, auquel s'ajoute une somme de 0,8 milliard de dollars, due par des employeurs qui ne sont pas toujours des sociétés.

Le député devrait savoir qu'il y a toujours une partie des impôts établis par Revenu Canada qui est en souffrance. De telles sommes ne constituent pas un manque à gagner, mais plutôt des impôts établis qui n'ont pas encore été perçus. Souvent, les personnes qui les doivent sont d'honnêtes contribuables qui ont l'intention de payer ainsi que des entreprises que essaient de se remettre de la récession. Il ne s'agit pas d'une source inexploitée de ressources que le gouvernement pourrait utiliser pour réduire le déficit.

Ce sont des créances qui font déjà partie du plan financier du gouvernement. Ces sommes seront recouvrées majorées des intérêts, sauf s'il y a des motifs valables de redresser les cotisations. Moins de un pour cent du total des recettes brutes ne pourra être perçu en raison d'insolvabilité et de faillites.

J'aimerais aussi ajouter, que les grandes sociétés ne bénéficient d'aucun privilège particulier. En fait, contrairement à la plupart des contribuables, les grandes sociétés sont assujetties à un mode de perception accéléré. La Loi de l'impôt sur le revenu interdit l'application immédiate de mesures de perception relativement à la plupart des catégories de créances pendant les 90 jours suivant la date d'envoi de l'avis de cotisation, sauf dans le cas des grandes sociétés, qui doivent payer immédiatement la moitié de la cotisation établie.

Les programmes d'exécution de Revenu Canada sont fondés sur une stratégie exhaustive visant à favoriser l'observation volontaire et à optimiser l'efficacité de nos ressources consacrées à l'exécution.

Tous les députés, y compris mon collègue de Regina-Lumsden, admettront que les résultats de cette stratégie sont assez éloquents: les taxes à payer sont versées volontairement dans une promotion de 95 p. 100, et Revenu Canada a pour mandat d'assurer la protection de l'assiette fiscale. Le ministère a toujours eu à coeur de garantir le plus haut niveau d'observation qui soit, et cela n'est pas près de changer.

LES NOMINATIONS FAITES PAR LE GOUVERNEMENT

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, N.D.P.): Monsieur le Président, jeudi dernier, j'ai posé à la vice-première ministre une question sur deux nominations récentes au Sénat et

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je lui ai suggéré, ainsi qu'au premier ministre et au gouvernement libéral, une façon de traiter le Sénat dans l'avenir.

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Mes remarques et ma question faisaient suite aux nominations, annoncées plus tôt durant la semaine par le gouvernement, de deux libéraux de longue date, Jean-Robert Gauthier d'Ottawa et John Bryden du Nouveau-Brunswick. J'ai indiqué que ces deux nominations étaient sans doute très valables, mais que la question allait bien au-delà de la valeur des candidats.

Les Canadiens favorisent une réforme du Sénat. Ils espèrent que le gouvernement fera le nécessaire pour abolir le Sénat ou en élire les membres afin que la deuxième chambre du Parlement rende compte à la population canadienne et non pas seulement au premier ministre qui nomme chaque sénateur.

Tant que le premier ministre continuera de nommer les sénateurs, il s'exposera aux traditionnelles accusations de favoritisme. Les Canadiens ne voient pas de différence entre le gouvernement actuel et ceux qui l'ont précédé. Encore une fois, le premier ministre a cru bon d'ignorer les appels à la réforme du Sénat et de suivre l'exemple de Mulroney en nommant ses amis et ses partisans à la Chambre haute.

Le premier ministre a raté une belle occasion de corriger les abus commis pendant de nombreuses années. La situation doit changer le plus rapidement possible et seul le premier ministre est en mesure d'agir en ce moment.

Il y a environ deux ans, j'ai assisté à une conférence constitutionnelle à Calgary, où des Canadiens ordinaires ainsi que des experts de tout l'Ouest canadien discutaient du Sénat et de l'avenir de la démocratie au Canada. J'ai entendu beaucoup d'arguments en faveur d'un Sénat élu et même de la représentation proportionnelle comme base de l'élection non seulement des sénateurs mais aussi des députés.

Je dis cela pour indiquer que je sais déjà qu'il y a, au Canada, énormément de gens compétents auxquels un premier ministre pourrait faire appel s'il voulait vraiment faire quelque chose pour rétablir la confiance des Canadiens envers les gouvernements, mettre fin au favoritisme et réformer le Sénat.

Le Sénat actuel, où les membres sont nommés et n'ont pas à répondre de leurs actes devant la population, doit être aboli. J'ajoute que je serais favorable à son remplacement par un Sénat élu ayant des responsabilités plus précises et tenu de rendre des comptes d'abord aux régions. Je sais que toute réforme du Sénat comme nous le connaissons nécessiterait des modifications constitutionnelles que non seulement la Chambre et les provinces accepteraient, mais les sénateurs eux-mêmes aussi. Nous avons vu avec l'accord de Charlottetown à quel point il peut être difficile de modifier la Constitution. Mais il doit bien exister plus d'un moyen d'abolir le Sénat. J'ai invité les libéraux à prendre une initiative courageuse et originale.

En outre, les Canadiens sont préoccupés par le déficit croissant de leur pays et par le désir du gouvernement fédéral de réduire le déficit en sabrant les dépenses. Il semble malheureux que les libéraux disent aux Canadiens que notre pays n'a plus les moyens d'avoir des programmes sociaux, mais peut se permettre d'envoyer plein de partisans politiques au Sénat.

Beaucoup d'emplois seront perdus cette année dans la fonction publique par suite des compressions budgétaires. Beaucoup de Canadiens ordinaires vont perdre leur emploi et d'autres n'en trouveront pas parce que les postes de fonctionnaire qui deviendront vacants ne seront pas pourvus. Les libéraux devraient faire au Sénat ce qu'ils font à la fonction publique. Lorsqu'un poste devient vacant au Sénat, le premier ministre devrait résister à la tentation politique de le pourvoir et le laisser vacant. Avec le temps, le Sénat s'abolirait de lui-même par attrition. Cela vaudrait certes mieux que de continuer à y nommer des fidèles du parti qui n'ont ni le mandat ni la volonté de réformer le système.

Je demande au gouvernement libéral de faire preuve d'audace et de réformer le Sénat par l'attrition des postes de sénateur.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il est intéressant de voir le député changer d'avis à propos du Sénat. Au cours de la dernière législature, quand il était question de la TPS, je me souviens que son parti avait proposé une motion demandant au Sénat de rejeter le projet de loi sur la TPS. Il avait voté en faveur de cette motion. À moins qu'il n'ait été absent ce jour-là, je suis sûr que c'est ce qu'il a fait. Tous les députés de son parti ont appuyé cette motion. Ils ont appuyé le Sénat et ils ont abandonné la politique qu'ils prônaient depuis longtemps à propos de l'abolition du Sénat. Aujourd'hui, j'entends deux députés de ce parti râler et dire qu'ils n'ont jamais eu une telle politique. Je voudrais que le Nouveau Parti démocratique se décide.

Je voudrais parler plus sérieusement des questions qu'a soulevées le député. Ce qu'il voudrait que le premier ministre fasse est vraiment stupide. Il voudrait que le premier ministre ne tienne pas compte d'un des éléments qui constituent le Parlement. Comme il le sait, le Parlement se compose de trois éléments: la Couronne, la Chambre et le Sénat. Il veut que le premier ministre fasse comme si le Sénat n'existait pas, qu'il ne remplisse pas les sièges laissés vacants de sorte que le Sénat ne soit plus qu'un ramassis de vestiges du passé. Petit à petit, il sera réduit à sa plus simple expression et deviendra de moins en moins efficace, puisque plus personne ne sera nommé au Sénat et que les sièges vacants le resteront.

Ceux qui sont encore là peuvent assumer les fonctions du Sénat. L'une des fonctions du Sénat est d'étudier les projets de loi adoptés par la Chambre. En fait, l'accord du Sénat est indispensable pour qu'ils deviennent lois. Le député semble l'avoir oublié, c'est trop pratique. Ce qu'il demande au premier ministre de faire, c'est de laisser un Sénat conservateur dicter à la Chambre quoi faire de ses projets de loi. Je ne pense pas que le premier ministre, qu'aucun premier ministre digne de ce nom, accepte jamais une telle chose.

Comme il le sait, lors des dernières élections, le Parti conservateur a été quasiment éliminé de la Chambre des communes, à l'exception de deux députés, qui sont rarement ici car, paraît-il, ils ont d'autres responsabilités, entre autres essayer de reconstituer leur parti. Pendant ce temps, nous devons essayer de gouverner le Canada avec un Sénat en majorité conservateur.

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M. Solomon: Il n'y a qu'à l'abolir.

M. Milliken: Le député veut qu'on l'abolisse. Il sait pertinemment que cela requiert le consentement unanime des provinces. Il sait aussi pertinemment que certaines provinces, surtout dans sa région, s'opposent à l'abolition du Sénat.

M. Solomon: Pas la Saskatchewan.

M. Milliken: Je suis ravi de l'entendre. On me dit que ce n'est pas le cas pour l'Alberta ni la Colombie-Britannique. Si une province s'y oppose, ce sera la fin de cette initiative.

Pendant la campagne électorale de 1993, le premier ministre a fait la promesse très judicieuse de ne pas toucher à la Constitution du Canada. Les Canadiens en avaient assez des remaniements constitutionnels. Ils nous ont coûté cher. Les tentatives de réforme de la Constitution de l'ancien premier ministre et ses bourdes dans ce domaine ont presque démembré le pays. Le premier ministre actuel a promis de donner aux Canadiens ce qu'ils veulent, c'est-à-dire tout, sauf une réforme constitutionnelle.

Nous n'examinerons pas la réforme du Sénat, car cela nécessiterait une modification de la Constitution. Suggérer que nous devrions faire du Sénat le faible maillon de la chaîne parlementaire en refusant de combler les poste vacants est un non-sens.

Les candidats qui ont été nommées au Sénat cette semaine sont tous excellents. Ils ont d'excellentes qualifications. Le député ne leur rend pas service en les traitant de politicards.

L'ancien député d'Ottawa-Vanier a fait une carrière distinguée en tant que membre d'une commission scolaire. Après avoir obtenu son doctorat en chiropractie en 1953, il a été de longues années chiropracticien avant d'être élu au Parlement et a en fait continué d'exercer sa profession pendant quelque temps alors qu'il était député. Il a fait un excellent travail comme député et comme chef de file dans sa localité. Une personne aussi qualifiée mérite assurément qu'on la nomme au Sénat.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 38(5) du Règlement, la motion portant que la Chambre s'ajourne est maintenant réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24 du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 57.)