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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 15 juin 1995

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE NIGÉRIA

    Mme Stewart (Northumberland) 13879
    M. Mills (Red Deer) 13880

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

COMPTES PUBLICS

INDUSTRIE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion 13881

PÉTITIONS

LES SOINS DE SANTÉ

LES DROITS DE LA PERSONNE

LES LANGUES OFFICIELLES

    M. Harper (Simcoe-Centre) 13882

LA JUSTICE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 13882

LE CODE CRIMINEL

    M. Harper (Simcoe-Centre) 13882

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 13882

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

LES DROITS DE LA PERSONNE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

    Projet de loi C-69. Reprise de l'étude de la motion d'approbation 13883
    M. White (North Vancouver) 13883
    Mme Ringuette-Maltais 13884
    Mme Ringuette-Maltais 13888
    M. Harper (Simcoe-Centre) 13892
    Amendement d'un amendement 13903
    M. Speaker (Lethbridge) 13903
    Report du vote sur la motion 13905
    La présidente suppléante (Mme Maheu) 13905
    M. Gauthier (Roberval) 13905

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

    Projet de loi C-70. Étude à l'étape du rapport 13906
    Motion d'approbation 13906
    Adoption de la motion par 127 voix contre 76 13906
    Motion de troisième lecture 13907

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

    Projet de loi C-69. Reprise de l'étude de la motion d'approbation 13908
    M. Gauthier (Roberval) 13908

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE PROGRAMME D'ENSEIGNEMENT COOPÉRATIF

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 13908

LES MÉDICAMENTS BREVETÉS

LES VOTES LIBRES

LE HOCKEY PROFESSIONNEL

LA BANQUE FÉDÉRALE DE DÉVELOPPEMENT

«FORGER LE LIEN»

LE RASSEMBLEMENT DES AÎNÉS ET DES PEUPLES TRADITIONNELS

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

LA DÉMOCRATIE AU CANADA

LE SERVICE JEUNESSE CANADA

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER DE 2002

LA CRÉATION D'EMPLOIS

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 13911

LE REVENU FAMILIAL

LES VOTES LIBRES

ILIQQUSIVUT

QUESTIONS ORALES

LA BOSNIE

    M. Gauthier (Roberval) 13912
    M. Gauthier (Roberval) 13912
    M. Gauthier (Roberval) 13912

LE MINISTRE DU PATRIMOINE CANADIEN

LE SOMMET DU G-7

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 13914
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 13914

L'ÉTHIQUE

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

LA BOSNIE

    M. Mills (Red Deer) 13915
    M. Mills (Red Deer) 13915

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

LA COMMISSION DES LIBÉRATIONS CONDITIONNELLES

L'AGRICULTURE

LA RECONVERSION DE L'INDUSTRIE MILITAIRE

LES AFFAIRES INDIENNES

LA FONCTION PUBLIQUE

LES TRAVAILLEURS DE LA COMPAGNIE SINGER

    M. Leroux (Shefford) 13918
    M. Leroux (Shefford) 13919

LE REVENU FAMILIAL

CUBA

LA PROTECTION CIVILE

QUESTION DE PRIVILÈGE

LES REPORTAGES PRÉSUMÉS ERRONÉS DANS LES MÉDIAS

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

SANCTION ROYALE

MESSAGE DU SÉNAT

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-41. Motion de troisième lecture 13921

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

    Projet de loi C-69. Reprise de l'étude de la motion d'approbation 13927

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-41. Reprise de l'étude de la motion 13928

MESSAGE DU SÉNAT

    Le président suppléant (M. Kilger) 13929

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-41. Reprise de l'étude de la motion de troisième lecture 13929

SANCTION ROYALE

    Le président suppléant (M. Kilger) 13938

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

    Projet de loi C-317. Motion visant à la deuxième lecture 13939

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-41. Reprise de l'étude de la motion 13947
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 13955
    Adoption de la motion 13973
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 13975
    M. Speaker (Lethbridge) 13975
    Adoption de la motion par 168 voix contre 51 13978
    Troisième lecture et adoption du projet de loi 13979

LOI SUR LA COMMERCIALISATION DU CN

    Projet de loi C-89. Étape du rapport et deuxième lecture 13979

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

MOTIONS D'AMENDEMENT

    Rejet de la motion no 1 13983
    Report du vote sur la motion 13984
    Rejet des motions nos 2 et 3 13984
    M. Speaker (Lethbridge) 13984
    Rejet de la motion no 5 13985
    Motions nos 8, 9 et 10 13985
    Adoption de l'amendement 13991
    Rejet de la motion no 7 modifiée 13991
    Rejet de la motion no 6 13991
    Report du vote sur les motions 9, 10 et 11 13991
    Report du vote sur la motion no 11 13991
    Motions nos 12 et 13 13991
    Motions nos 14 et 15 13991
    Rejet de la motion no 12 13997
    Rejet de la motion no 13 13997
    Report du vote sur la motion no 14 13997
    Report du vote par appel nominal sur la motion no 15 13997
    Report du vote sur la motion no 17 13999
    Adoption de la motion 13999

13879


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 15 juin 1995


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à neuf pétitions.

* * *

LE NIGERIA

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Madame la Présidente, en raison des travaux de la Chambre plus tôt cette semaine, je n'ai pas pu faire la déclaration que je vais livrer aujourd'hui. Néanmoins, notre gouvernement ne la considère pas moins importante.

Il y a deux ans, le 12 juin 1993, des élections présidentielles ont eu lieu au Nigeria. Il s'agissait là du vote le plus important jamais tenu en Afrique et, pour les Nigerians, la première occasion qui s'offrait à eux de choisir leur président. De plus, la période prolongée de transition vers la démocratie atteignait ainsi son apogée et, au cours de cette période de quatre ans, on ya adopté une constitution et des élections législatives ont été tenues dans les États locaux. Qui plus est, tant du point de vue des observateurs internationaux que du Canada, les élections ont été les plus honnêtes et les plus pacifiques de toute l'histoire du Nigeria.

Après avoir pris connaissance des résultats préliminaires du scrutin indiquant une majorité écrasante, tant en ce qui a trait au suffrage qu'aux États, pour le chef Moshood Abiola, le régime militaire a tout simplement annulé les élections. Une campagne de protestation au Nigeria et à l'étranger a donné lieu à des changements à la direction du pays et à des mois de confusion qui ont abouti à la prise du pouvoir, en novembre 1993, par le général Sani Abacha.

Depuis lors, son administration a dispersé tous les organismes élus, a emprisonné Abiola et beaucoup d'autres dirigeants du mouvement démocratique, a fermé des journaux, a réprimé les syndicats et les minorités, s'est investi d'un pouvoir juridique absolu et d'une immunité totale, a supprimé l'habeas corpus et a procédé à des exécutions publiques. L'échéancier de janvier 1996 pour le retour à la démocratie, fixé par la propre conférence constitutionnelle du régime, a récemment été abandonné, de sorte que le général Abacha peut rester en poste indéfiniment.

Le Canada s'intéresse vivement à ce qui se passe au Nigeria. Nos pays entretiennent d'importants rapports fondés sur notre appartenance commune au Commonwealth, sur les contacts humains réciproques, de même que sur notre engagement partagé envers le fédéralisme.

Le Nigeria est notre plus important marché d'exportation entre l'Afrique du Sud et le Maghreb et le plus grand importateur de nos produits dans toute l'Afrique. Sa population et ses ressources devraient en faire un chef de file naturel sur le continent. Au contraire, son régime militaire indélogeable exerce une influence terrifiante sur les démocraties avoisinantes et a été adopté dans les pays du Commonwealth de l'Afrique occidentale et ailleurs. Cela reste un facteur qui risque de déstabiliser la région.

Le Canada a réagi à la situation au Nigeria. Nous avons condamné les abus, au fur et à mesure qu'ils se sont présentés, et nous les avons dénoncés aux Nations Unies. Nous avons mis fin aux visites de hautes instances, aux programmes d'aide en matière de formation militaire, de même qu'aux exportations pouvant servir à des fins militaires.

(1005)

Nos relations diplomatiques limitées ont comporté nombre d'interventions au nom du chef Abiola, de Ken Saro-Wiwa et d'autres dirigeants dont les droits fondamentaux ont été bafoués.

Nous avons versé de modestes sommes au mouvement démocratique et avons invité plusieurs Nigerians en visite au Canada à faire part de leur première impression de la situation.

Repousser la démocratie, c'est la refuser. Les Nigerians sont assujettis à un régime militaire depuis 12 ans et ont déjà montré qu'ils étaient fin prêts pour la démocratie. Le régime du général Abacha doit maintenant agir sans hésiter pour restaurer la démocratie, le règne du droit et le respect des droits de la personne. La libération du chef Abiola et de l'ancien président Obasanjo constitueraient plus particulièrement un pas dans la bonne direction, tout comme la levée de l'embargo contre les médias, la libération ou l'inculpation des détenus ou la fixation d'une date ferme pour la fin du régime militaire.

En l'absence de progrès mesurables et visibles dans la réalisation de ces objectifs, les partenaires du Commonwealth n'auront d'autre choix que de tirer leurs propres conclusions. Nous reconnaissons aujourd'hui les efforts que déploient les démocrates Nigerians et les assurons que nous ne les oublions pas et qu'ils ne font pas de vaines démarches.

Le Président a souligné, lundi, la présence parmi nous du professeur Wole Soyinka, leader du mouvement démocratique et seul récipiendaire Nigerian du Prix Nobel, que j'ai moi-même rencontré. Comme pour l'Afrique du Sud, la lutte peut être


13880

longue, mais nous ne pouvons douter du résultat, car lesNigerians jouiront des mêmes droits que leurs frères d'Afrique du Sud.

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Madame la Présidente, au nom du Bloc québécois, il me fait plaisir aujourd'hui de rendre hommage à tous les démocrates nigériens.

Il y a à peine deux ans, la population du Nigeria croyait s'être dotée d'un processus démocratique digne de ce nom. Le chef, Moshood Abiola avait remporté sans équivoque une victoire éminemment démocratique. Malheureusement, on sait que le régime militaire n'a pas accepté ce résultat, annulant les élections et, finalement, désignant le général Sani Abacha comme chef d'État.

À cause des relations commerciales et politiques privilégiées entre le Canada et le Nigeria, il est du devoir du gouvernement canadien de condamner haut et fort les violations des droits fondamentaux dont sont victimes plusieurs Nigerians.

À notre avis, le gouvernement canadien ne fait cependant pas tout ce qui est en son pouvoir pour intervenir. Comme l'annonçait publiquement le ministre des Affaires étrangères, il y a à peine quelques semaines, le Canada s'apprête à promouvoir les échanges commerciaux sans égard au dossier de certains pays en matière des droits de la personne.

La nouvelle politique étrangère du gouvernement libéral est équivoque. Lors de l'assemblée annuelle de la section canadienne d'Amnistie internationale la semaine dernière, le directeur de la section anglophone déclarait à juste titre, et je cite: «Le silence sur les droits de la personne est une abdication atroce à nos responsabilités. Cela frise la complicité.»

Comme nous le soulignons, la politique du gouvernement canadien en matière des droits de la personne repose sur un double langage. Le gouvernement libéral a une politique qui ne répond qu'à des impératifs économiques avec les grands partenaires commerciaux du Canada, tels la Chine ou le Mexique, et, d'autre part, des discours très fermes envers les petits pays avec lesquels nos relations commerciales sont minimes ou inexsistantes.

Le Bloc québécois considère que le gouvernement libéral ne doit pas hésiter à affirmer et à défendre publiquement la démocratie et les droits de la personne, qui sont les fondements de la politique étrangère canadienne, et celà, à l'endroit de tous nos partenaires, sans égard au volume de nos relations commerciales.

Une telle prise de position enverrait un message clair aux populations et chefs d'État ou de gouvernement avec lesquels le Canada entretient des relations commerciales ou d'aide, comme c'est le cas avec le Nigeria. Le Canada ne doit pas rater l'occasion qui lui est ainsi donnée de faire une vigoureuse profession de foi démocratique dans une communauté internationale où la tentation de l'indifférence, du désintéressement ou du repli sur soi est omniprésente. Il est urgent de détromper les dictateurs qui traduisent en appuis les silences complices des pays porteurs d'idéal démocratique.

Plutôt que de tourner le dos aux régimes antidémocratiques et aux violations des droits de la personne, que ce soit en Chine ou ailleurs, plutôt que de faire en sorte que la question des droits de la personne ne soit discutée qu'en coulisses pour ménager les susceptibilités des pays représentant des marchés intéressants pour le Canada, le gouvernement doit adopter une politique qui soit cohérente, clairement articulée, enchâssée dans des textes législatifs ou réglementaires, et qui permette que les décisions soient soumises à une grille obligatoire, définie à l'avance, où s'intègrent trois composantes: les droits de la personne, l'aide au développement et le commerce international.

(1010)

Autrement, le seul avantage qu'aura le message que véhicule actuellement le gouvernement sera celui d'être clair: pour exercer leur dictature à l'abri de toute pression, les gouvernements du Sud n'ont plus qu'à devenir de bons partenaires commerciaux.

En terminant, je voudrais réitérer mon appui à tous les démocrates Nigerians. Je sais combien il peut être difficile de militer en faveur des droits de la personne et de la démocratie. Ces gens ont parfois l'impression de travailler d'arrache-pied pour obtenir de bien piètres résultats. Nous avons pourtant bon espoir que leurs efforts de démocratisation porteront fruit. D'ici là, l'opposition officielle appuiera leurs actions et dénoncera avec eux les violations des droits de la personne dont sont victimes de nombreux Nigerians.

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, je partage les sentiments de la secrétaire d'État pour l'Amérique latine et l'Afrique. Elle a bien fait ressortir la nécessité de rétablir la démocratie au Nigeria.

Il n'y a pas de doute que les Nigerians méritent un meilleur gouvernement que celui qui les dirige actuellement. Lorsqu'ils se sont présentés calmement aux bureaux de scrutin, il y a deux ans, ils espéraient sincèrement que, pour la première fois, ils auraient la chance de choisir leur président, mais leurs espoirs ont été anéantis. Non seulement leur dirigeant démocratiquement élu, le chef Moshood Abiola, a-t-il été appréhendé et incarcéré par l'armée, mais presque toutes leurs libertés individuelles leur ont été ravies. Ces tristes circonstances ont été décrites en détail par la secrétaire d'État.

Le gouvernement canadien était tout à fait justifié de réagir à cette usurpation de la démocratie en condamnant le gouvernement illégitime qui s'est emparé des rênes du pouvoir. Il a été tout aussi justifié de prendre certaines mesures de représailles contre celui-ci. À l'avenir, le Parti réformiste espère que le gouvernement canadien soutiendra avec vigueur la démocratie et améliorera le respect des droits de la personne au Nigeria et partout dans le monde.

En règle générale, le Parti réformiste favorise les mesures positives qui accroissent le respect des droits de la personne, comme soutenir le renforcement des institutions démocratiques et juridiques dans les pays en développement par l'entremise de notre programme d'aide internationale. L'aide canadienne dvrait favoriser la promotion des droits de la personne, le changement


13881

démocratique et la création d'institutions. Les réformistes sont aussi partisans de la collaboration entre les organisations non gouvernementales et le secteur privé pour la mise en place d'une société civile et d'une classe moyenne dans les pays en développement. De l'évolution de ces deux facteurs dépend un plus grand respect des droits de la personne.

Dans des cas extrêmes, comme le Nigeria, où le gouvernement se rend coupable d'énormes injustices en matière de droits de la personne et avec qui la coopération risque de ne mener à rien, nous encouragerions le recours multilatéral à certaines mesures de représailles.

Je voudrais dire aux Nigerians que leur cause tient à coeur au Canada et que nous maintiendrons l'engagement que nous avons pris de participer à la démocratisation et au respect des droits de la personne chez eux et ailleurs. Ils viendront à bout de la tyrannie par leur persévérance et leur opiniâtreté et les Canadiens attendent impatiemment le jour où ils accueilleront ici leurs dirigeants démocratiquement élus.

* * *

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

COMPTES PUBLICS

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui en cette Chambre le 13e rapport du Comité permanent des comptes publics qui porte sur le Service correctionnel du Canada.

En conclusion du rapport, le comité recommande que le vérificateur général supervise les efforts déployés par le Service correctionnel du Canada pour améliorer la planification des installations et la surveillance des délinquants mis en liberté et en fasse rapport au moment où il le jugera nécessaire.

Enfin, le comité croit que les recommandations contenues dans ce rapport doivent être appliquées de façon active. Il recommande également que, à moins qu'il n'en soit spécifié autrement, le Service correctionnel du Canada fasse rapport sur les progrès réalisés dans la mise en place des recommandations incluses dans ce rapport au plus tard en avril 1996.

À ce rapport est annexée une opinion dissidente de l'opposition officielle portant sur la politique d'occupation double des cellules, et j'aimerais citer, en terminant, deux recommandations contenues dans cette opinion dissidente: «Que le Service correctionnel canadien évalue l'impact à court, moyen et long terme de la politique d'occupation double des cellules carcérales, notamment sur la réhabilitation des détenus et qu'il en publie les résultats d'ici à janvier 1996.» Également: «Que le Service correctionnel canadien attende les résultats de cette étude avant d'intégrer la politique d'occupation double dans ses normes en matière de logement.»

(1015)

Conformément à l'article 109 du Règlement de la Chambre des communes, le comité demande au gouvernement de déposer une réponse globale au présent rapport.

[Traduction]

INDUSTRIE

M. Paul Zed (Fundy-Royal, Lib.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter le septième rapport du Comité permanent de l'industrie relatif au projet de loi C-91, Loi visant à maintenir la Banque fédérale de développement sous la dénomination de Banque de développement du Canada, avec des propositions d'amendement.

Le principal amendement vise à changer l'appellation de la Banque en Banque canadienne de la petite entreprise.

* * *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Étant donné l'excellente collaboration de la part de tous les députés, n'y aurait-il pas consentement unanime concernant cette motion?

Je demande le consentement unanime en faveur de la motion suivante. Je propose:

Que, nonobstant tout ordre spécial, la Chambre continue à siéger après 23 h 30 aujourd'hui afin d'étudier les initiatives ministérielles et qu'elle ne s'ajourne que lorsqu'une motion aura été présentée par un ministre.
Je demande le consentement unanime.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime pour adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, en conformité avec l'article 56.1 du Règlement, je propose:

Que, nonobstant tout ordre permanent ou spécial, la Chambre continue à siéger après 23 h 30 aujourd'hui afin d'étudier les initiatives ministérielles et qu'elle ne s'ajourne que lorsqu'une motion aura été présentée par un ministre.
La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre la motion veuillent bien se lever.

Et moins de 25 députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément au paragraphe 56.1 (3) du Règlement, la motion est adoptée.

(La motion est adoptée.)


13882

PÉTITIONS

LES SOINS DE SANTÉ

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre une pétition que m'a envoyée Mme Margaret Wiens de Quesnel, en Colombie-Britannique, et qu'ont signée plus de 1 000 électeurs de tous les coins de la circonscription de Cariboo-Chilcotin.

Les pétitionnaires demandent au gouvernement d'adopter immédiatement une loi prévoyant le libre choix des soins de santé offerts dans le cadre du régime canadien des soins de santé, c'est-à-dire la reconnaissance des formes de pratique non orthodoxe de la médecine (homéopathie, herboristerie, naturopathie, etc.) de même que le paiement des consultations et des remèdes prescrits.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Madame la Présidente, je présente également huit pétitions signées par plus de 200 électeurs de Quesnel, William Lake et Lilloet, villes situées dans la circonscription de Cariboo-Chilcotin.

Les pétitionnaires demandent que le Parlement s'abstienne de modifier le code des droits de la personne, la Loi canadienne sur les droits de la personne et la Charte canadienne des droits et libertés de quelque façon qui puisse donner l'impression que la société canadienne approuve les relations entre personnes du même sexe, y compris de modifier le code des droits de la personne pour y inclure, parmi les motifs interdits de discrimination, l'expression non définie «orientation sexuelle».

(1020)

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Madame la Présidente, j'aimerais présenter aujourd'hui quatre pétitions au nom des électeurs de Simcoe-Centre. La première porte sur le bilinguisme imposé par l'État.

Comme la grande majorité des Canadiens sont opposés à la politique des langues officielles qui leur a été imposée par le gouvernement libéral précédent, les pétitionnaires demandent la tenue d'un plébiscite dans le cadre duquel les Canadiens pourraient soit accepter soit rejeter cette politique imparfaite.

LA JUSTICE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition concerne la défense d'ivresse qui peut être invoquée à la décharge d'un accusé.

Les pétitionnaires croient que, lorsqu'une personne décide de consommer de l'alcool, elle doit accepter toutes les conséquences des actes qu'elle peut commettre pendant qu'elle a les facultés affaiblies.

LE CODE CRIMINEL

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition a trait à l'article 718.2 du projet de loi C-41. Les pétitionnaires craignent que le fait de préciser certains groupes dans la loi pourrait en exclure d'autres et que la détermination de la peine fondée sur la notion de haine est très subjective et sapera les fondements de notre système judiciaire.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, le dernier groupe de pétitionnaires demande au gouvernement du Canada de ne pas ajouter l'expression «orientation sexuelle» dans la loi sur les droits de la personne. Les pétitionnaires craignent en effet que l'inclusion de cette expression, sans la définir, ne donne une trop grande liberté d'interprétation aux tribunaux, à leur guise, ce qui constituerait un très dangereux précédent.

Le Parlement a l'obligation envers les Canadiens de faire en sorte que ses lois ne puissent être mal interprétées.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Madame la Présidente, en conformité avec l'article 36 du Règlement, je présente au nom de mes électeurs une pétition dont l'initiative revient à Mme Suzanne MacDonell.

Les pétitionnaires demandent que le Parlement presse le gouvernement de reconnaître, dès la fécondation, le foetus comme une personne de plein droit qui jouirait de la protection du paragraphe 15(1) de la Charte des droits.

De plus, ils demandent au Parlement de reconnaître l'enfant à naître comme une personne juridique et d'exercer son droit de le définir comme tel dans la loi; enfin, ils demandent que le Parlement mette fin, par le moyen le plus rapide, au financement public des avortements et de la pratique des avortements, respectant ainsi l'obligation que prévoit la Charte canadienne des droits et libertés pour le Parlement et le gouvernement.

Non seulement je suis heureux de présenter cette pétition, mais je lui accorde aussi mon appui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député sait bien qu'il n'y a pas de débat lorsqu'on présente une pétition.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Madame la Présidente, en conformité avec l'article 36 du Règlement, je suis heureux de présenter la pétition que voici des électeurs de la circonscription de Comox-Alberni.

Les 163 pétitionnaires demandent au Parlement de s'opposer à toute modification de la Loi canadienne sur les droits de la personne ou de la Charte canadienne des droits et des libertés visant à y inclure l'expression «orientation sexuelle».

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, nous répondons aujourd'hui aux questions nos 186, 187 et 188.

13883

[Texte]

Question no 186-M. Duncan:

En ce qui concerne les Indiens qui font des achats sur les réserves ou qui font livrer leurs achats sur les réserves, à combien se sont élevées les exonérations de TPS des Indiens admissibles pour les exercices financiers 1991-1992, 1992-1993 et 1993-1994?
L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Même si Revenu Canada recueille des renseignements afin d'appliquer la Loi sur la taxe d'accise sur la déclaration de taxe sur les produits et services, ainsi que sur le montant de la TPS perçue et sur les crédits de taxe sur intrants que chaque inscrit a réclamés, on ne rassemble pas les renseignements sur les exonérations accordées à des groupes spécifiques. Par conséquent, nous ne pouvons pas fournir les données demandées.

Question no 187-M. Duncan:

En ce qui concerne les Indiens qui font des achats à l'extérieur des réserves, à des magasins désignés et éloignés, a) à combien se sont élevées les exonérations de TPS des Indiens admissibles pour les exercices financiers 1991-1992, 1992-1993 et 1993-1994, et b) quels sont, par province, les magasins éloignés et désignés qui sont situés à l'extérieur des réserves?
L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib): a) Les magasins situés dans des endroits éloignés ne sont pas tenus de faire le cumul ou le compte rendu de leurs ventes totales à des Indiens. Aucune disposition législative ne stipule que ces renseignements doivent être fournis à Revenu Canada. En outre, les vendeurs se verraient imposer un fardeau beaucoup plus lourd au chapitre des rapports à produire s'ils devaient accumuler de telles données.

b) Les vendeurs situés à l'extérieur des réserves qui sont admissibles à titre de magasins éloignés ont le droit de passer outre aux exigences concernant la livraison à l'égard des ventes exonérées de la taxe qui sont effectuées au profit d'Indiens. Le ministère ne tient pas de liste exhaustive des vendeurs ou des magasins éloignés admissibles. Chaque vendeur est tenu d'établir s'il est admissible à titre de magasin éloigné, et de comptabiliser les montants de TPS dus s'il ne répond pas aux critères. L'admissibilité des vendeurs fait subséquemment l'objet d'une vérification par le ministère.

Question no 188-M. Duncan:

De quel montant était le crédit pour TPS accordé aux Indiens inscrits admissibles vivant sur les réserves, pour les exercices financiers 1991-1992, 1992-1993 et 1993-1994?
L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Revenu Canada ne peut fournir les renseignements demandés puisqu'il ne garde pas de statistiques sur le nombre de paiements de crédit pour la taxe sur les produits et services, CTPS, accordés aux Indiens inscrits. De plus, le ministère ne classe pas les particuliers par statut ou par lieu de résidence et, par conséquent, ne peut pas extrapoler les renseignements demandés à partir de sa banque de données.

[Traduction]

M. Gagliano: Madame la Présidente, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.


13883

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 14 juin, de la motion concernant les amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-69, Loi portant sur la création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et la révision des limites des circonscriptions électorales; ainsi que de l'amendement.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Avant de reprendre le débat, je signale qu'en raison de la déclaration ministérielle, l'étude des mesures d'initiative gouvernementale sera prolongée de douze minutes.

Je précise au député de North Vancouver qu'il lui reste quatorze minutes de débat.

(1025)

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Madame la Présidente, lorsque j'ai été interrompu hier soir, je parlais du projet de loi C-69. Au début de mon discours, j'ai parlé de la croissance de la dette et du déficit.

Pendant les 11 heures qui se sont écoulées depuis que j'ai cessé de parler hier, la dette a augmenté d'environ 50 millions de dollars. Pendant la nuit, les 50 millions de dollars que le gouvernement a dû emprunter se sont ajoutés avec les intérêts à la dette que devront supporter nos enfants et nos petits-enfants.

J'ai également dit hier soir que la question de la représentation des électeurs par le vote libre, qui constitue un aspect très important de beaucoup des projets de loi dont nous sommes saisis, ne s'est jamais posée pendant les législatures précédentes parce que les trois vieux partis dictatoriaux et arrogants ont tous choisi de faire passer leur programme avant tout.

Ils n'ont jamais voulu et ils ne veulent toujours pas gouverner le pays conformément aux voeux des électeurs. Ils ne sont pas disposés à mener les affaires publiques conformément aux voeux des contribuables. Nous en avons eu un très bel exemple il y a un quart d'heure lorsque le gouvernement s'est trouvé à forcer la Chambre à siéger bien après minuit pour débattre de projets de loi et de motions dont nous aurions pu débattre convenablement il y a longtemps. On aurait eu amplement le temps de consulter le public à leur sujet et de procéder dans les formes au lieu d'avoir à les faire adopter à la vapeur en quelques jours à la fin de la session sans que le public et les médias n'aient la possibilité de les examiner à fond.

Si le gouvernement tenait vraiment à respecter les voeux des électeurs et des contribuables canadiens, il n'agirait pas de la sorte. Il admettrait que plusieurs de ses projets de loi laissent beaucoup à désirer et il les retirerait ou les laisserait en plan.

À l'heure actuelle, à l'exception des réformistes et de quelques libéraux à l'esprit indépendant, les députés ne sont plus que des machines à voter. Nous en sommes réduits à trouver de quoi nous occuper entre les votes. Mis à part ceux que j'ai mentionnés, les députés ne cherchent tout simplement pas à faire valoir dans cette enceinte les vues de leurs électeurs.


13884

Les débats, les questions, les réunions en comité, les audiences, les témoignages et les voyages aux frais de la princesse ne sont que des moyens de tenir les députés occupés entre les votes, des votes dont l'issue est connue d'avance parce que le premier ministre en a décidé avant même que le débat ne commence.

À la toute fin de mon intervention hier, j'ai mentionné que, l'an dernier, le gouvernement avait déposé environ 60 projets de loi et que, à la fin de l'année, nous en avions adopté environ 60. Nous aurions donc pu, l'an dernier, venir ici une heure et adopter tous ces projets de loi en un seul vote et le résultat aurait été à peu près le même.

Même avec les débats et les discussions qui ont eu lieu, le résultat aurait été à peu près le même. S'il en est ainsi, c'est parce que le résultat est connu d'avance. C'est se moquer des efforts que font certains députés pour représenter vraiment les contribuables, les électeurs de ce pays.

Alors qu'il aurait dû faire l'objet d'une étude en bonne et due forme, le projet de loi dont nous sommes saisis résulte de l'ingérence partisane dans le processus impartial de redécoupage des circonscriptions électorales.

Et quand nous demande-t-on d'en débattre? À la toute fin de la session! Nous devons en parler jusqu'aux petites heures du matin. Le gouvernement ne s'intéresse guère à ce que les députés ont à dire sur ce projet de loi pas plus que sur les autres.

Les libéraux savent que le projet de loi va être adopté parce que le premier ministre a donné des instructions en ce sens. Le projet de loi va être adopté. Hier, six ou sept députés libéraux ont eu le courage de défier les ordres du premier ministre en votant contre le projet de loi sur le contrôle des armes à feu de manière à représenter vraiment leurs électeurs. Mes félicitations à ces députés qui n'ont pas craint de défendre les principes auxquels ils tiennent.

Nous avons appris hier que, pendant la réunion du caucus libéral, le premier ministre a dit aux députés libéraux que la deuxième fois qu'ils votaient contre un projet de loi du gouvernement, ils n'avaient qu'à prendre la porte. Si c'est vrai, j'espère que les députés d'en face se demanderont sérieusement au cours des prochains jours s'ils peuvent tolérer un tel ultimatum.

Peuvent-ils conserver leur dignité? Peuvent-ils continuer de prétendre avoir de la conscience professionnelle? Peuvent-ils regarder en face leurs proches et leurs électeurs et continuer de soutenir leur parti s'ils se soumettent à un tel ultimatum? Sont-ils des adultes animés d'un sens moral ou sont-ils disposés à n'être que des pions sur l'échiquier politique?

(1030)

De toute évidence, nous avons encore beaucoup de chemin à faire avant que les votes libres et représentatifs fassent partie intégrante des travaux de cette Chambre. Je crois vraiment que nous sommes à la veille d'une révolution dans la façon dont le Parlement fonctionne. S'il y a des dinosaures en face qui refusent d'accepter l'inéluctable changement, ils seront bientôt saqués par les électeurs. Il n'y aura plus alors de projets de loi C-18 ou C-69 parce que ce seront les Canadiens qui seront représentés ici plutôt que les partis politiques.

Mme Terrana: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. J'accepte mal que notre collègue dise que le premier ministre a menacé hier d'expulser du caucus les députés libéraux qui ne voteraient pas en faveur de nos projets de loi. C'est faux et je tiens à préciser que je m'y oppose.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais c'est là matière à débat.

M. White (North Vancouver): Madame la Présidente, comme je disais, le jour où les députés représenteront vraiment leurs électeurs, nous n'aurons plus besoin de projets de loi C-18 ou C-69 ou C-41 parce que ce sera le peuple canadien qui sera représenté dans cette enceinte plutôt que les partis politiques. Les projets de loi adoptés auront un sens parce qu'ils auront été voulus par les électeurs et les contribuables qui bâtissent le pays et fournissent l'argent nécessaire au fonctionnement de cette institution. Les débats seront de vrais débats. Les réunions en comité voudront vraiment dire quelque chose. Pendant la période des questions, les ministres répondront vraiment aux questions et les députés regagneront le respect du peuple canadien.

J'aurais deux choses à dire en terminant. D'abord, notre dette a augmenté de près d'un million de dollars pendant la durée de mon discours. Ensuite, la vice-première ministre a promis de démissionner si la TPS n'était pas abolie dans l'année suivant les élections. Elle ne l'a pas encore fait.

[Français]

Mme Pierrette Ringuette-Maltais (Madawaska-Victoria, Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté avec stupeur les propos de notre collègue. Peut-être pourrait-il relater aux députés de cette Chambre combien de fois les députés du Parti réformiste ont exercé, de façon individuelle, leur droit de vote démocratique en cette Chambre depuis le début.


13885

[Traduction]

M. White (North Vancouver): Madame la Présidente, je remercie la députée de sa question.

Je m'étonne de son étonnement. Il me semble que, depuis les dernières élections, elle aurait dû s'apercevoir que les députés réformistes ont pu voter librement à tous les scrutins qui ont eu lieu.

Nous réfléchissons longuement à tous les détails des projets de loi. Nous consultons tous régulièrement nos électeurs. Comme la plupart d'entre nous ont été élus par des gens dont les croyances et les sentiments sont semblables aux nôtres, il n'est pas rare que nous puissions tous voter de la même façon sur un projet de loi. Dans le cas des projets de loi ordinaires, c'est ce qui se produit. Lorsqu'il s'agit de questions controversées ou de questions à propos desquelles il y a des différences d'une région à l'autre, les députés réformistes ont montré très régulièrement qu'ils étaient libres de voter comme bon leur semble. Nous ne sommes jamais sanctionnés. Il n'y a jamais d'animosité entre nous parce que nous nous sommes entendus là-dessus. Les statuts du Parti réformiste exigent que les députés reflètent les voeux de leurs électeurs chaque fois qu'ils peuvent être clairement établis et c'est obligatoire lorsqu'il s'agit de questions morales.

Je remercie la députée de m'avoir permis d'éclaircir ce point.

(1035)

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Madame la Présidente, à propos de la politique nouveau style et des souhaits de ses électeurs dont le député a parlé, pourrait-il expliquer le comportement des réformistes hier soir, lesquels, pendant près de trois heures lors des votes, se sont délibérément levés et assis très lentement? Au lieu de se lever de façon que les greffiers puissent compter les voix très vite, ils se levaient et s'asseyaient très lentement. En ce qui concerne cette politique nouveau style, est-ce une nouvelle tactique du Parti réformiste? Ses électeurs en ont-il fait la demande?

M. White (North Vancouver): Madame la Présidente, le député pose une question intéressante. Il demande pourquoi certains membres du Parti réformiste se sont levés assez lentement hier soir, lors des votes sur le C-41. J'aimerais dire qu'à mon avis, ils imitaient et singeaient le député de Burin-Saint-Georges, qui se comporte souvent de la même façon.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Madame la Présidente, il est fort intéressant que ce projet de loi revienne du Sénat. Cet organe a déjà exprimé son déplaisir à propos du genre de projets de loi que présentent les libéraux, et il le fait de nouveau. Peut-être que, cette fois-ci, le gouvernement comprendra.

Si nous avons eu ce projet de loi, c'est d'abord parce que beaucoup de membres du Parti libéral n'aimaient pas la nouvelle délimitation des circonscriptions électorales. Elle ne correspondait pas à la réalité démographique qui, selon eux, servait leurs meilleurs intérêts et ils ne se sont pas demandé si elle servait les meilleurs intérêts de leurs électeurs ou des contribuables canadiens. Ils se sont donc mis à détruire le travail des commissions de délimitation des circonscriptions électorales dont le coût s'élevait à 8 millions de dollars.

Ma circonscription, ainsi que celles qui y sont reliées, a suivi le processus des audiences publiques en Colombie-Britannique, et je suis sûr que toutes les autres provinces ont fait de même. Les limites fixées initialement ne faisaient pas l'affaire des gens sur place. Peu importe si elles ne faisaient pas l'affaire des députés, le fait est qu'elles ne faisaient pas l'affaire des électeurs de ces circonscriptions.

Les audiences publiques ont été tenues selon le processus en place et le travail a été fait. Les commissions de délimitation des circonscriptions électorales se sont rendues dans les diverses villes où les audiences avaient été annoncées et elles ont été absolument inondées de lettres et de mémoires, sans compter les nombreuses personnes qui souhaitaient témoigner devant elles. Ceux qui n'étaient pas satisfaits de la délimitation initiale ont expliqué en détail ce qui ne faisait pas leur affaire, ont proposé des solutions de rechange en expliquant pourquoi celles-ci leur semblaient meilleures et comment le nouveau plan qu'ils présentaient pourrait fonctionner.

Les membres des commissions qui avaient participé à ces audiences publiques ont reçu cette information. Ils ont participé à d'autres audiences jusqu'à ce qu'ils aient entendu le point de vue des habitants de toute la région. À leur retour, ils ont étudié toute l'information et les observations recueillies. C'est ainsi que le processus doit fonctionner. Lorsque quelque chose ne fonctionne pas bien, c'est à ceux qui en subissent les conséquences, c'est-à-dire aux électeurs, et non aux députés, qu'il revient de le dire à ceux qui détiennent le pouvoir. C'est ainsi que s'est déroulé le processus. Ceux qui étaient chargés de fixer les nouvelles limites en ont conclu, d'après l'information recueillie que, de toute évidence, les gens étaient pour le changement. Ils ont donc redessiné les limites et ont modifié le programme en fonction des observations faites par les électeurs des circonscriptions touchées.

Le résultat auquel ils sont parvenus pour ma circonscription, ainsi que pour celles qui y sont reliées n'était pas absolument parfait, mais était supérieur à ce qui avait été proposé initialement, puisqu'il reflétait les souhaits des électeurs des diverses circonscriptions et représentait une solution que tout le monde pouvait accepter. Malheureusement, même à ce moment-là, ce n'était pas une solution que le gouvernement libéral pouvait accepter. Il a décidé que des changements s'imposaient. Il est vrai que, de temps à autre, ces limites méritent d'être améliorées et modifiées. Toutefois, cela ne veut pas dire qu'il faille dépenser des millions et des millions de dollars pour le faire. Il y a un temps pour tout.

(1040)

Il est toujours possible d'apporter des changements simples à la Loi sur les limites des circonscriptions électorales, mais il ne faudrait pas le faire à la dernière heure, en laissant tomber tout le travail que l'on vient pratiquement d'achever.


13886

Le coût de l'examen et de la modification des limites des circonscriptions électorales s'élève à près de 8 millions de dollars et c'est là un des problèmes de la décision du gouvernement. Comme je le disais, la plupart du travail a été fait. Il ne reste que la dernière étape. Pourtant, le gouvernement voudrait que l'on mette le tout au rebut pour modifier les règles du jeu et que l'on reparte de zéro.

Le public a déjà eu l'occasion de donner son avis sur les limites des circonscriptions électorales et sur ce qui a été proposé. Si le projet de loi est adopté et que le gouvernement fait table rase de tout le travail effectué pour repartir à zéro, deux solutions sont possibles: soit le gouvernement va écouter les gens, les électeurs du Canada, pour leur donner satisfaction, ce qui a déjà été fait, soit il ne va tenir aucun compte des électeurs du Canada, ce qui est souvent son style, et en faire à sa tête de façon que les nouvelles limites des circonscriptions électorales garantissent l'éligibilité de ses membres. C'est inacceptable.

Si nous voulons modifier la loi, beaucoup de points devraient y être ajoutés. Certains ont fait l'objet d'amendements au Sénat, contrairement à d'autres. Nous avons proposé d'imposer un plafond en ce qui concerne le nombre total de députés dans cette Chambre, ou même une diminution de ce nombre.

Le fait qu'un côté se paie du bon temps et fasse tout un cinéma provoque une réaction de l'autre côté et entraîne d'autres représailles. Avons-nous besoin de plus de monde pour cela? La présence d'un député à la Chambre coûte très cher. Les Canadiens vont-ils être mieux représentés uniquement parce que nous allons remplir cet endroit de plus de monde, augmenter le budget de fonctionnement du Parlement, réorganiser toute cette Chambre de manière à pouvoir y installer des sièges supplémentaires et en permettre l'expansion année après année. Est-ce dans l'intérêt du public? Je ne le crois pas.

Il nous faut des représentants élus qui soient à l'écoute des gens. Peu importe si la Chambre compte un millier de députés; cela ne servira absolument à rien s'ils n'écoutent pas leurs électeurs. C'est ce qui se produit à propos du projet de loi C-69.

Le gouvernement n'écoute pas ceux qui ont déjà donné leur point de vue aux commissions de délimitation des circonscriptions électorales. Il est prêt à en faire table rase. Il n'y a pas suffisamment de modifications proposées dans ces amendements ou dans le projet de loi du gouvernement, qui a déjà été renvoyé à l'autre endroit et qui est revenu ici pour être de nouveau renvoyé, pour justifier que l'on dépense de nouveau de 6 à 8 millions de dollars. Au bout du compte, nous allons arriver au même résultat, c'est-à-dire que le gouvernement ne tiendra nullement compte des souhaits des Canadiens.

Je suis ici pour représenter mes électeurs et cette représentation peut se faire le mieux possible grâce au processus de délimitation des circonscriptions électorales déjà en place. On ne tiendra aucun compte des souhaits de mes électeurs si ce projet de loi est adopté, avec ou sans les amendements proposés par le Sénat. Par conséquent, je n'appuie pas le projet de loi C-69 du gouvernement de quelque façon que ce soit, avec ou sans les amendements de l'autre endroit. Cela reste une mesure législative inacceptable et je ne l'appuierai jamais.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Madame la Présidente, c'est avec intérêt que j'ai écouté mon collègue au sujet du projet de loi.

Je m'intéresse aux travaux qu'il effectue dans le domaine du transport. Je me demande s'il a fait des observations à ce sujet en ce qui concerne le genre de représentation dont il est question. Je sais qu'il est assez souvent en déplacement et qu'il rencontre beaucoup de gens qui, peut-être, recherchent le genre de représentation dont il parle. L'idée qu'il se fait de la représentation est-elle fondée sur les remarques et les observations des personnes qu'il rencontre lors de ses déplacements? Dans l'affirmative, que lui dit-on?

(1045)

M. Gouk: Madame la Présidente, je remercie la députée de sa question. J'ai beaucoup voyagé, j'ai rencontré des gens et discuté avec eux de questions diverses, pas seulement de transport, mais aussi de la manière dont les limites des circonscriptions peuvent influer sur la représentation.

Par exemple, si le projet de loi est adopté, nous ne saurons pas, entre autres, quelles sont les limites de nos circonscriptions. Nous parlons de représentation, mais nous ne savons absolument pas qui va représenter cette région. Les limites de la circonscription de la députée de Calgary risquent d'être considérablement modifiées. En ce qui concerne ma propre circonscription, le modèle proposé à l'origine a été modifié en profondeur après que la commission de délimitation eut consulté les électeurs qui seraient touchés par ces changements.

Comme je l'ai déjà dit, soit nous respectons la volonté du peuple, soit nous lui imposons des changements de force. Dans ce cas-ci, nous ne savons pas ce que compte faire le gouvernement parce qu'il lui arrive parfois d'écouter ce que les autres ont à dire. Je ne sais pas s'il le fait parce que nous avons réussi à capter son attention, ou parce que les électeurs ont réussi à capter son attention, mais il lui arrive à l'occasion d'écouter et ainsi de nous surprendre. Mais la plupart du temps, le gouvernement n'écoute pas la population. Actuellement, des projets de loi de tous genres sont en train d'être adoptés à la vapeur par la Chambre. Le gouvernement ne tient certainement pas compte du point de vue de la population sur ces questions.

C'est un des problèmes auxquels nous sommes confrontés. Voilà le message que j'entends dans toutes les circonscriptions que je visite d'un bout à l'autre du pays. J'ai assisté à des réunions dans des villes comme Mississauga. Le problème, c'est que si le projet de loi est adopté comme le veut le gouvernement, avec ou sans les amendements dont nous sommes saisis, nous nagerons dans l'incertitude pour ce qui est des circonscriptions et de leurs limites. Nous ne savons absolument pas qui va représenter tel secteur dans telle circonscription.


13887

Pour ce qui est de la circonscription de Kootenay-Ouest-Revelstoke que je représente, la proposition actuelle prévoit de supprimer une partie de la région nord et de rajouter de vastes secteurs à l'ouest. La proposition antérieure prévoyait d'étendre les limites à l'est jusqu'à la circonscription voisine, et de supprimer une partie du secteur peuplé de ma circonscription. Il est important de tenir compte non seulement de notre circonscription, mais aussi de celles de tous les députés de toutes les régions.

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Madame la Présidente, le député a parlé du coût du Parlement et des députés. Il a tout à fait raison. Il est important que l'argent des contribuables soit bien dépensé et que ces derniers aient l'impression que leur argent est utilisé de manière judicieuse.

Toutefois, j'ai remarqué hier soir que le député mettait beaucoup de temps à se lever et à s'asseoir pendant les votes. J'ai entendu dire que les coûts de fonctionnement de la Chambre sont compris dans ceux du Parlement et qu'ils s'élèveraient à environ 48 000 $ l'heure. J'ai l'impression que le temps que les députés ont mis à se lever et à s'asseoir hier soir a eu pour effet d'ajouter trois heures de plus à la facture, ce qui fait grosso modo150 000 $, soit à peu près l'équivalent d'une année de salaire, dépenses connexes comprises, d'un député.

J'ai remarqué que le député mettait beaucoup de temps à se lever et beaucoup de temps à s'asseoir. Je me demande ce qu'il pense du fait d'avoir gaspillé pendant trois heures hier soir l'équivalent d'une année de salaire, avantages compris, d'un député.

M. Gouk: Madame la Présidente, je m'étonne que le député d'en face ait remarqué quelque chose.

J'aimerais revenir à la question du coût du Parlement et à ses commentaires concernant le temps que j'ai mis à me lever et à m'asseoir hier soir. Il devrait parler aux dirigeants de son parti. Nous leur avons demandé s'ils voulaient accélérer les travaux hier soir. Nous étions prêts à le faire. Nous avons proposé de mettre fin aux travaux de la Chambre, de sorte que nous aurions pu partir beaucoup plus tôt que prévu. Ils n'ont pas voulu.

S'ils veulent parler de gaspillage de temps et d'argent, voyons un peu pourquoi nous étions ici hier soir. Si nous étions ici, c'est parce que le gouvernement a eu maintes occasions, l'automne dernier et ce printemps, de déposer ces projets de loi que nous sommes en train d'examiner à toute vapeur en limitant les débats et en siégeant tard le soir. Parlons par exemple du projet de loi C-7, une mesure législative totalement inutile qui a traîné sur les tablettes pendant un an et que le gouvernement prévoit maintenant de faire adopter à toute vapeur la semaine prochaine.

S'il y a du gaspillage à la Chambre, ce n'est pas nous qui en sommes responsables, mais plutôt le député d'en face et le Parti libéral.

(1050)

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Madame la Présidente, j'ai eu l'occasion de voyager avec mon collègue du Comité des transports de sorte que je connais bien son point de vue. Nous avons toujours entretenu de bons rapports au sein du comité.

La circonscription de Vancouver-Est que je représente actuellement comprend une partie de l'ancienne circonscription de Kingsway que l'on va rétablir. En 1988, j'ai présenté un mémoire au comité itinérant au sujet de la circonscription de Kingsway. Je me souviens qu'à l'époque, j'avais suggéré que l'on garde la circonscription de Vancouver-Kingsway parce que la population augmenterait et qu'on en aurait de nouveau besoin. La plupart des électeurs voulaient garder la circonscription. Comme vous pouvez le constater, nous essayons, sept ans plus tard, de rétablir la circonscription de Kingsway. À l'époque, j'avais dit que les électeurs ne voulaient pas qu'on en modifie les limites.

Mon collègue pense-t-il que l'on devrait inclure dans un projet de loi des paramètres qui nous permettraient de faire de meilleurs choix pour ce qui est de la révision des limites des circonscriptions?

À propos, ma circonscription va perdre un de ses meilleurs secteurs, mais je ne tiens pas à aborder ce sujet parce je me conformerai à la décision qui sera prise. Je n'essaie pas de changer les choses. Je pense tout simplement que le processus de révision des limites des circonscriptions électorales devrait être mieux organisé et qu'il nous faut un projet de loi pour y arriver.

M. Gouk: Madame la Présidente, je tiens à remercier la députée pour sa question. Elle a raison. Nous avons connu de bons moments au sein de ce comité et j'aime bien connaître son point de vue à l'occasion.

Toutefois, j'ai trouvé intéressant le commentaire qu'elle a fait au sujet des paramètres qui nous aideraient à faire de meilleurs choix. Je ne savais pas que nous étions ici pour faire des choix. Je pensais que notre rôle consistait à défendre les choix de nos électeurs.

Les limites proposées pour ma circonscription posent problème. Toutefois, mes électeurs ont pu exposer leurs vues, de sorte que les limites de la circonscription ont été considérablement modifiées par rapport à la proposition initiale.

L'important, ce n'est pas de décider ce que nous, les députés, allons faire, mais plutôt de voir à ce que nos électeurs participent de façon démocratique aux travaux des commissions de délimitation des circonscriptions électorales. C'est ce qui s'est passé en Colombie-Britannique. Je ne peux que présumer que la députée, qui représente fort bien, j'en suis sûr, sa circonscription, a fait en sorte que le processus démocratique soit respecté au sein de cette commission.

En ce qui concerne les changements, oui, j'ai dit dans mon discours que des changements s'imposaient. Toutefois, ces changements devraient être apportés au moment de la révision des limites, non pas à la onzième heure, ce qui nous oblige à reprendre tout le processus, à grands frais, avec toute l'incertitude que cela crée pour les électeurs des diverses circonscriptions.


13888

Mme Pierrette Ringuette-Maltais (Madawaska-Victoria, Lib.): Madame la Présidente, j'ai bien entendu, mais je pense que le député allait nous faire des observations différentes et peut-être corriger ce qu'il a dit au début au sujet des coûts élevés qu'entraîne la présence de députés ici, ce qui est vrai, et du fait qu'il n'est pas nécessaire d'accroître les coûts et le nombre de députés à la Chambre.

Je suis surprise, car ce projet de loi permettra essentiellement aux Canadiens de l'Ouest de compter un nombre approprié de représentants à la Chambre. Je ne suis pas d'accord avec le député de l'ouest du Canada, qui veut priver les habitants de l'Ouest de la possibilité d'élire un plus grand nombre de représentants à la Chambre.

M. Gouk: Madame la Présidente, je comprends pourquoi cette question pose beaucoup de problèmes à la députée. Surtout que le ministre de la Justice a affirmé ne pas aimer l'arithmétique. Je suppose que c'est la même chose pour tous les membres du parti.

Il n'est pas toujours nécessaire d'augmenter le nombre de députés. Nous pouvons aussi le réduire. Nous ne disons pas qu'il ne devrait pas y avoir un équilibre entre les régions, mais plutôt qu'il faudrait modifier le nombre de députés d'une province à l'autre pour que les provinces bénéficient d'une représentation égale. Toutefois, il n'est pas nécessaire d'accroître les coûts pour y arriver.

(1055)

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Madame la Présidente, j'aimerais commencer mon intervention d'aujourd'hui sur le projet de loi C-69 en lançant un défi aux députés libéraux d'en face. Pourquoi ne se rendent-ils pas cette fin de semaine dans leurs circonscriptions interroger leurs électeurs pour savoir s'ils pensent que nous avons besoin de plus de politiciens à Ottawa? Qu'ils ne soient pas surpris si l'on ne les prend pas au sérieux, si l'on répond catégoriquement non en utilisant certaines expressions colorées que je ne peux prononcer dans cette Chambre.

La question dont nous sommes saisis aujourd'hui est bien simple: avons-nous besoin ou non de plus de politiciens à la Chambre des communes? Le gouvernement libéral veut porter le nombre des députés fédéraux de 295 à 301 d'ici aux prochaines élections générales. En revanche, les réformistes aimeraient ramener ce nombre de 295 à 265 ou moins et limiter la croissance future de la Chambre.

C'est dans ce sens que les Canadiens veulent qu'Ottawa agisse, qu'il réduise la taille du gouvernement, qu'il réduise la réglementation, qu'il réduise l'administration et qu'il réduise le nombre de politiciens. Il suffit de constater la popularité de M. Harris pendant la campagne électorale en Ontario pour le prouver. Celui-ci a promis de réduire de 25 p. 100 le nombre de députés à Queen's Park. Les libéraux provinciaux n'étaient pas d'accord, et nous avons bien vu ce qui leur est finalement arrivé.

Le coût que représente la présence de six nouveaux députés est un facteur que j'aimerais souligner au gouvernement libéral qui invoque constamment dans cette Chambre l'efficience et l'efficacité, qui parle de réduire le coût du régime de pension des députés et qui se vante de respecter ses promesses quand, en fait, il n'en tient aucune. J'aimerais lui demander de justifier cette contradiction parce qu'il va accroître de plusieurs millions de dollars les frais d'administration du pays en augmentant le nombre de politiciens baratineurs qui n'arrivent pas à faire leur travail parce que c'est un petit groupe sélect, le Cabinet, qui dirige le pays. Le reste d'entre nous est là pour la forme.

Actuellement, la rémunération d'un député fédéral. . .

M. Speaker (Lethbridge): Ils sont comme les maires.

M. Silye: Exactement. Je veux parler du coût, des frais généraux qu'entraînera la présence de six nouveaux députés. Je suis heureux de voir que le président du Conseil du Trésor est ici en raison de son projet favori, le régime de pension de grand luxe.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je suis sûre que le député est bien au courant qu'on ne signale ni la présence ni l'absence de qui que ce soit dans cette Chambre.

M. Silye: J'ai pensé que ce serait utile, mais je m'en excuse auprès de la présidence.

Actuellement, la rémunération d'un député fédéral est la suivante: un salaire imposable de 64 000 $, une indemnité de dépenses non imposable de 21 300 $ qui équivaut à 42 000 $ avant impôt, une indemnité de voyage non imposable de 6 000 $ et des avantages en franchise d'impôt. Ces avantages sont les suivants: un laissez-passer gratuit de VIA Rail; des appels interurbains personnels gratuits; un régime de soins de santé et de soins dentaires gratuit; le stationnement gratuit au bureau et dans les aéroports; des déplacements gratuits en avion pour les membres de la famille; une police d'assurance-vie gratuite qui vaut également pour le conjoint et les enfants à charge; des cours de langue seconde gratuits; quand les députés ne sont pas réélus ou ne se représentent pas, une indemnité de départ de 32 000 $ et une indemnité de réorientation de carrière de 9 000 $; plus un régime de pension scandaleux et abusif pour les députés qui ont siégé six ans, qui vaut entre 500 000 $ et 4,5 millions de dollars selon le nombre d'années de service et qui a été évalué à 28 400 $ par an par le groupe de consultants indépendants Sobeco, Ernst & Young, en février 1994. Cette énumération ne tient même pas compte des bulletins parlementaires, des autres documents dont le nombre ne dépasse pas 10 p. 100 des bulletins parlementaires, de la papeterie, de la photocopie, du courrier et j'en passe.

Tous les avantages équivalent selon moi à au moins 1 million de dollars par an pour chaque député qui se trouve dans cette Chambre, compte tenu de tous les frais généraux et de tout ce qu'ils coûtent aux contribuables. Si on multiplie ce chiffre par six, on en arrive à 6 millions de dollars.

Il ne faut pas oublier d'ajouter à ce montant le coût des élections, qui sera plus élevé, et de la répartition des circonscriptions; les libéraux ont évalué ce coût à 5,6 millions de dollars,ce qui porte à environ 12 millions de dollars le coût du projetde loi. Donc, 12 millions de dollars par suite de ce projet de loi, moins les 3 millions de dollars qu'est censé économiser la réforme des pensions des parlementaires, cela fait une augmentation nette de 9 millions de dollars, pour ce qui est des frais généraux de notre pays.


13889

(1100)

Nous avons une dette de 550 milliards de dollars et le gouvernement continue de dépenser comme si l'argent poussait dans les arbres. Comment le gouvernement libéral peut-il justifier l'augmentation du nombre des députés à 301? Nous savons tous que nous n'avons pas besoin de plus de députés. Il n'y a d'ailleurs pas assez de place pour ajouter six sièges de plus.

N'est-ce pas le plus grand libéral de tous les temps, Thomas Jefferson, qui a dit: «Le gouvernement qui dirige le mieux est celui qui dirige le moins.» Les libéraux semblent avoir oublié ce principe.

Permettez-moi de comparer le Canada à l'État de la Californie qui compte à peu près 30 millions d'habitants. Le Canada en compte 29 millions. Au niveau fédéral, la Californie est dirigée par 52 membres du Congrès, deux sénateurs, un gouverneur et un président, pour un total de 56.

Au Canada, nous avons 295 députés et nous voulons augmenter ce nombre à 301. Nous comptons 104 sénateurs, et ce nombre pourrait passer à 112. Plus de 400 parlementaires fédéraux dirigent le pays. Les politiciens américains sont-ils plus intelligents que les politiciens canadiens? Le système américain est-il meilleur que le nôtre?

Nous représentons en moyenne entre 80 000 et 100 000 personnes. Un membres du Congrès des États-Unis en représente 570 000 et les libéraux se plaignent que les circonscriptions sont trop grandes quand elles comptent 120 000 électeurs. Je ne comprends vraiment pas. Qu'est-ce qui distingue tant les politiciens américains? Je crois que nous sommes aussi compétents qu'eux et que nous pouvons représenter plus de gens. Naturellement, il suffit, selon moi, d'embaucher plus de personnel.

Cependant, je peux garantir que ces employés coûteront beaucoup moins cher au pays et aux contribuables en salaires que les députés et qu'on créerait plus d'emplois de 30 000 $, 40 000 $ et 50 000 $ que d'emplois de député à un demi-million de dollars.

N'avons-nous pas l'intelligence de faire ce que les Américains ont fait? N'avons-nous pas la technologie pour représenter un plus grand nombre d'électeurs?

Pour défendre son système d'enregistrement des armes à feu qu'il a présenté ici hier, le ministre de la Justice a fait valoir les nouvelles technologies mises à notre disposition. Pourquoi ne pouvons-nous pas appliquer l'argument des nouvelles technologies à la démocratie, au Parlement et au nombre de parlementaires?

Si la population américaine était représentée selon la même proportion qu'au Canada, savez-vous combien il y aurait de membres du Congrès chez nos voisins du Sud pour diriger les États comme nous le sommes ici? Il y en aurait 2 900; 2 900 parlementaires. C'est gênant. Voilà jusqu'à quel point notre représentation est disproportionnée. Je pense que notre situation est dix fois pire qu'aux États-Unis parce que nous ne respectons pas le principe selon lequel un gouvernement dirige mieux s'il dirige le moins possible.

Le Parti libéral prétend qu'il est scrupuleux sur le plan fiscal, mais quand il a une occasion de prendre les devants pour réduire les frais d'administration du pays, il décide plutôt d'accroître la taille du gouvernement.

Le ministre des Finances, se préparant sans doute pour sa future carrière d'humoriste, a à maintes reprises déployé toute son éloquence à propos des compressions d'effectifs et des réductions de dépenses dans la fonction publique. Pourtant, le gouvernement des Canadiens à Ottawa dépense beaucoup trop. Pourquoi ne pas réduire la taille de la Chambre des communes?

D'un côté, le gouvernement parle de mettre en disponibilité 400 000 fonctionnaires au nom des compressions et de la responsabilité fiscale et, de l'autre, il dit avoir besoin de six députés de plus pour réussir à comprimer les dépenses. N'est-ce pas contradictoire et paradoxal? Je ne peux pas le croire. Augmenter la taille de la Chambre des communes, la rendre imposante et faire le bonheur des simples députés.

J'entends quelqu'un d'en face m'interpeller. Cette personne est si loin du pouvoir dans son propre parti que, durant le vote d'hier soir, on lui a dit que son vote n'était pas nécessaire pour défaire les réformistes. C'est la démocratie à son meilleur et cela prouve qu'on peut réduire la taille de la Chambre. Les simples députés d'en face acceptent de laisser le Cabinet tout diriger.

Les libéraux refusent d'envisager les moyens plus efficaces proposés par le Parti réformiste pour répondre aux déplacements et à la croissance de la population. Si le nombre de députés était ramené de 295 à 265, nous aurions une Chambre de taille raisonnable. Les députés représenteraient plus de gens et auraient plus d'influence. Le simple député qui continue de chahuter aurait plus de pouvoir, plus de poids dans cette Chambre s'il n'y avait que 200 députés ici au lieu de 301. Ces députés seraient réellement utiles et auraient vraiment leur mot à dire. Ils pourraient véritablement faire contrepoids aux diktats du Cabinet.

(1105)

Quelqu'un vient de demander pourquoi je ne démissionne pas. Je veux bien le faire. Je ne suis pas d'accord avec ceux qui décident de faire carrière ici. Je ne souscris pas à ce qu'ils font ici. Ils se font réélire simplement pour avoir droit à leur belle pension dorée, plutôt que pour gouverner. Voilà ce qui cloche à la Chambre.

La Chambre me rappelle un aquarium dans lequel tous les petits poissons rouges, jaunes et bleus, sauf les vingt qui gravitent autour du premier ministre, s'agiteraient pour faire passer le temps. Tout ce qu'ils font, c'est coûter une fortune au pays et servir de porte-voix à un centre du pouvoir qui n'est en réalité qu'une dictature librement élue.

Les réformistes estiment que le moment est venu de réduire le nombre de députés et de le plafonner. Si leur nombre continue de s'accroître proportionnellement à la population, la Chambre prendra vite des proportions impossibles dont le coût sera insoutenable. Tôt ou tard, il faudra bien la limiter. Pourquoi ne pas le faire maintenant? Par là, je n'envisage pas un nombre fixe de députés, car je connais la Constitution et je sais quels engagements ont été pris auprès des provinces en ce qui concerne le


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nombre de sièges au Sénat: une province ne peut avoir moins de députés que de sénateurs. Il faut donc prévoir une disposition qui donne une certaine marge de manoeuvre. Je le comprends et je l'accepte.

La réponse à la croissance de la population n'est pas d'augmenter le nombre de ses représentants à la Chambre des communes mais de revoir périodiquement les limites des circonscriptions et de redistribuer les sièges en fonction des variations de la population, d'en revoir la répartition.

Voilà ce qu'est la représentation en fonction de la population, un principe extrêmement important. Je demande à la Chambre d'accepter qu'un député puisse représenter 150 000, 120 000 ou 200 000 personnes et pas seulement 100 000. Je mets la Chambre au défi d'accroître le nombre de personnes représentées et d'embaucher plus de personnel, ce qui, en bout de ligne, coûtera moins cher au pays que d'accroître le nombre de députés. C'est là la représentation en fonction de la population. Mais on ne peut l'avoir parce que les centres urbains deviendraient alors les maîtres du pays. Il faut en arriver à un équilibre entre les centres urbains et les régions rurales et entre les dix provinces au moyen d'une autre chambre, le Sénat.

On devrait se concentrer sur un Sénat des trois E: un Sénat élu, ce qui lui conférerait un certain pouvoir, lui imposerait l'obligation de rendre des comptes; un Sénat à représentation égale dont les sièges seraient attribués en nombre égal soit à chaque province, soit à chacune des cinq régions (l'Atlantique, le Québec, l'Ontario, les Prairies et la Colombie-Britannique). La représentation régionale fait fâcheusement défaut au Canada.

Le projet de loi sur le contrôle des armes à feu nous est venu tout droit de Toronto par l'intermédiaire du ministre de la Justice, sans égard aux véritables souhaits des autres régions et des autres Canadiens. Il a provoqué un clivage entre les gens de la campagne et ceux de la ville. Si nous avions eu un Sénat élu, égal et efficace, celui-ci aurait pu renvoyer le projet de loi, dire qu'il était peut-être bon pour le centre de Toronto, cette petite partie de l'Ontario, mais qu'il ne correspondait pas à ce que voulait le reste du pays. Que l'on change ce projet de loi, qu'on en fasse quelque chose de bien. Dans sa forme actuelle, il est inacceptable.

Le Sénat ne pourrait rejeter des mesures financières. Par contre, il pourrait améliorer l'efficacité d'autres mesures parce que ses membres seraient en contact avec leurs électeurs. Ils seraient payés pour les écouter. Pourquoi auraient-ils à rendre des comptes? Parce qu'ils seraient élus par ces gens et que, s'ils ne les représentaient pas, ceux-ci les mettraient à la porte. C'est pourquoi un Sénat élu serait efficace. C'est pourquoi le pays y gagnerait s'il donnait des pouvoirs au Sénat. C'est pourquoi l'égalité a autant d'importance: chacun serait traité avec justice et respect d'un bout à l'autre du pays.

Seul un Sénat des trois E peut arriver à doser les intérêts des provinces les moins peuplées et ceux des provinces les plus peuplées au sein du Parlement du Canada. Les réformistes estiment qu'il est temps pour le gouvernement, non pas de prendre de l'expansion, mais d'agir de manière financièrement responsable.

(1110)

J'implore mes collègues à la Chambre de se servir de leur jugement et de se faire le porte-parole du commun des mortels en agissant dans son intérêt.

Si nous devions ramener le nombre de sièges de 301 à 200 ou si nous devions réduire la taille de la Chambre des communes, les gens qui y siégeraient, pour représenter la population canadienne, y gagneraient en efficacité. Ils auraient plus de pouvoirs. Les Canadiens en retireraient plus d'avantages.

Les politiques doivent rendre des comptes à la population canadienne qui leur confie ses deniers. Le système risque de se détériorer et de se détraquer, si plus de gens à la Chambre soutirent davantage d'argent de la poche des contribuables. Il en coûtera simplement de plus en plus cher à notre pays.

Nous savons tous comment cela se passe lorsque nous travaillons en comité. Nous savons tous ce qui se passe lorsque nous voulons prendre des décisions. Lorsque nous voulons qu'une décision soit prise ou qu'un document soit rédigé par un comité, nous savons tous combien cela est difficile. Nous savons tous combien il est pénible d'en arriver à un consensus. Nous savons tous combien il est difficile, même au sein de nos partis, d'en arriver à un terrain commun d'entente. Nous sommes au courant de toutes ces choses. Pourquoi augmenter le nombre de personnes que nous voulons inclure dans ce processus décisionnel, alors que nous savons fort bien que le nombre actuel pose déjà un problème? Pourquoi nous compliquer la vie?

Pourquoi ne pas régler le problème en réduisant le nombre de décisionnaires? Les décisions en seraient d'autant meilleures et nous pourrions consacrer davantage de temps aux débats. On a joué à des jeux ridicules, cette semaine et hier soir, à commencer par la mesure d'attribution de temps que le gouvernement nous a imposée pour débattre de projets de loi importants qui touchent le pays tout entier; il s'attaque ainsi aux principes fondamentaux de la démocratie en limitant la liberté de parole. Nous n'aurions pas à faire tout ce que nous faisons pour pouvoir prendre la parole à la Chambre et nous adresser à la population canadienne, qu'elle soit représentée ici à la tribune, qu'elle regarde les travaux à la télévision ou qu'elle lise le compte rendu dans les journaux. Cela nous donnerait l'occasion d'expliquer certaines choses. Nous n'aurions pas à jouer ces jeux.

Nous connaissons tous la structure. Un parti doit constituer le gouvernement. La minorité de la Chambre est donc neutralisée. Si quelqu'un ne siège pas au Cabinet, il obtient un poste de secrétaire parlementaire ou de président de comité. Après cela, tous les autres le remplacent temporairement. Pour récompenser ceux qui assistent aux séances de comité, il y les voyages interparlementaires organisés par l'une de ces huit grandes associations qui aident vraiment notre pays parce ceux qui y participent y acquièrent des connaissances, y contribuent et y établissent des contacts. Ces personnes qui vont établir ces contacts, ces simples députés, qui rencontrent les gens en Europe, en Asie, en Chine et en France, reviennent ici et n'ont même pas l'oreille des ministres. Ils ne leur demandent même pas de compte rendu ni de rendre compte.


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Pourquoi ne mettons-nous pas de l'ordre à la Chambre et ne faisons-nous pas les choses mieux et différemment? Des changements s'imposent. Alors que les libéraux se vantent politiquement de resserrer les cordons de la bourse, à ce qu'ils disent, je suppose, ils essaient en réalité d'augmenter le nombre de sièges à la Chambre des communes, ce qui coûtera très cher.

Les compressions dont nous parlons n'auront pas d'incidence sur les gens dans les tours d'ivoire. En fait, avec le projet de loi C-68, la tour d'ivoire continue d'embaucher. La tour d'ivoire est le gouvernement. Le Cabinet et le premier ministre ont l'occasion de régler les problèmes qui se posent dans notre pays, mais on recourt encore, comme autrefois, à la discipline de parti.

Il y a un article de journal, aujourd'hui, à propos de ce qui s'est dit au caucus. Que ce soit vrai ou faux, il contient sûrement une part de vérité, puisque ces journalistes tiennent d'un des simples députés les propos que leur a tenus le premier ministre. C'est une triste affaire, lorsqu'un premier ministre est soupçonné d'avoir dit aux membres de son caucus que, s'ils ne respectent pas la position officielle du parti, leur bulletin de présentation ne sera pas renouvelé. S'ils ne votent pas selon l'esprit de parti, ils ne reviendront pas à la Chambre, ne pourront plus siéger au sein des comités et ne pourront plus voyager. On ne parle plus de direction éclairée, mais de dictature.

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Madame la Présidente, la comparaison entre le Canada et la Californie est vraiment inutile. Elle n'est pas pertinente. Le Canada est un pays beaucoup plus grand, le deuxième plus grand pays du monde, alors que la Californie est un État dont la superficie est plus petite.

Dans ma circonscription à caractère urbain, je représente 110 000 électeurs dont les besoins varient énormément. Ils veulent que je puisse me faire leur porte-parole. J'imagine que le député qui vient d'une région rurale a beaucoup plus de mal à desservir ses électeurs qui vivent si éloignés les uns des autres.

(1115)

Je trouve également que mon collègue s'exprime sur un ton blessant. Nous ne sommes pas ici à ne rien faire. Je travaille très fort et j'espère qu'il en est de même pour lui. Je sais que la plupart de mes collègues travaillent très fort. Mis à part les déplacements que nous devons faire en provenance de l'Ouest, nous avons énormément de travail à abattre tant ici que dans nos circonscriptions.

Je suis une simple députée. Je n'occupe aucun poste et je ne suis pas secrétaire parlementaire. Tout ce que je veux, c'est représenter efficacement les électeurs de ma circonscription. J'ai autant voix au chapitre que quiconque. Si les ministres ont un portefeuille, c'est parce qu'ils ont une mission à accomplir et qu'ils ont de l'expérience.

J'ai fait beaucoup de bénévolat au cours des 20 dernières années. J'ai mon intégrité et ma réputation à défendre et je suis offusquée de me faire dire que je ne fais rien d'autre ici que de réchauffer mon siège. Je fais beaucoup plus que cela, tout comme mes collègues.

Je voudrais également faire des commentaires au sujet du projet de loi sur les armes à feu. Dans certaines régions rurales, le projet de loi n'est pas acceptable, mais la majorité des gens vivent dans des régions urbaines. J'ai deux grosses boîtes de lettres en faveur du projet de loi sur les armes à feu dans mon bureau. Ce sont mes électeurs qui les ont envoyées. J'ai reçu très peu de lettres contre le projet de loi. J'en ai reçu en faveur de cette mesure. Nous savons tous que les gens font du bruit lorsqu'ils sont contre quelque chose, mais les sondages ont révélé un appui au projet de loi sur les armes à feu.

Je tiens également à rappeler à mon collègue que nous avons un système démocratique à la Chambre. Je répète que le premier ministre a malheureusement été mal cité. Il n'a pas dit ce qui a été rapporté. Ce n'est pas à moi à dire à mon collègue ce qu'il faut dire. Il y a un caucus et on sait que c'est là que l'on peut discuter de nos divergences d'opinion et de nos points de vue. Je veux qu'il soit bien clair le premier ministre n'a jamais tenu pareils propos. Le premier ministre est une personne très crédible et un grand leader.

M. Silye: Madame la Présidente, il est regrettable que la députée se sente offusquée. J'ai dû toucher une corde sensible. Elle me donne l'impression de se sentir très coupable; c'est comme si elle essayait de justifier le fait que le travail qu'elle accomplit en tant que députée est très constructif pour sa circonscription.

Je sais que nous travaillons tous fort. Je ne mets pas en doute son travail. Telle n'est pas la question. La question est de savoir le genre de résultats qu'elle obtient et ce qu'elle accomplit. Cela peut être une affaire d'opinion. Elle travaille fort. À quoi? Quel impact a-t-elle dans sa circonscription? Fait-elle mieux que la personne qu'elle a remplacée ou se contente-t-elle de faire la même routine?

Je sais ce que je fais dans ma circonscription. Je sais ce que je dois faire sur le plan administratif. Je sais que nous avons beaucoup à faire pour aider les électeurs à résoudre leurs problèmes. Toutefois, nous sommes ici pour d'autres raisons.

Elle ne peut pas comprendre ce que je veux dire quand je dis que nous avons librement élu une dictature en face de nous. Elle a décidé de faire des courbettes et de refuser d'admettre les propos que le premier ministre a tenus, alors que tous les Canadiens savent qu'il les a tenus. Tout le monde sait que la discipline de parti préconisée par quelqu'un qui est en politique depuis 30 ans, comme le premier ministre, est une habitude dont on ne peut se défaire. Ils essaient de défendre quelque chose qui n'est pas dans l'intérêt du pays.

Si elle était à l'écoute de ses électeurs, elle saurait qu'il existe des divergences d'opinion entre les circonscriptions rurales et les circonscriptions urbaines. Elle sait fort bien que tous ceux qui se trouvent ici, même s'ils sont membres du même parti, ne peuvent pas toujours voter de la même façon.

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Par ailleurs, en toute impartialité, elle devrait être disposée à débattre d'une question comme celle des votes libres à la Chambre des communes et de la possibilité de voter contre la présumée discipline de parti. Le gouvernement ne s'interroge même pas


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sur cette question, alors que notre parti en a fait une promesse électorale.

Je me suis présenté aux élections parce que le député de Calgary-Centre ne m'a jamais demandé dans un de ses bulletins parlementaires ce que je pensais, en tant qu'électeur, de la TPS, du libre-échange et de toutes les autres questions de l'heure. Il ne m'a jamais demandé mon avis, mais il ne cessait de m'envoyer des bulletins parlementaires et des photos, des «Joyeux Noël», des «Nous faisons un travail formidable», des «Voilà ce que nous faisons à Ottawa pour vous», des «Voilà comment les choses vont s'améliorer pour vous», des «Voilà pourquoi il est si important de m'envoyer à Ottawa».

Lorsque j'ai fait du porte à porte pendant ma campagne, j'ai promis aux gens de représenter Calgary à Ottawa et non l'inverse. Au sein du Parti réformiste, j'ai été en mesure de tenir cette promesse. Notre structure nous permet de suivre la ligne du parti, de discuter en caucus de tous les projets de loi et de toutes les motions, de même que de la position à adopter que nous évaluons par rapport à la politique de notre livre bleu, par rapport à notre plate-forme électorale et par rapport aux promesses que nous avons faites aux Canadiens pour être élus. Nous y sommes restés fidèles. Dans le cas des projets de loi et des motions dont notre caucus est saisi et à l'égard desquels nous avons une position, nous votons comme nous avons promis de voter.

Les libéraux ont promis le contrôle des armes à feu, mais ils n'ont jamais promis un système national d'enregistrement. Ils l'ont simplement ajouté. Cela ne figurait pas dans notre plate-forme, ni dans notre livre bleu. Par conséquent, nous avons dû prendre une décision personnelle et chercher à savoir ce que souhaitaient nos électeurs. Nous l'avons fait de diverses manières. Notre caucus avait décidé de se prononcer contre. C'est un mauvais projet de loi, un projet de loi terrible. Personnellement, je suis contre.

En janvier dernier, dans un bulletin parlementaire adressé à mes électeurs de Calgary-Centre, j'ai souligné les bons et les mauvais aspects du projet de loi, tout en exposant ma position. Un sondage m'a permis de voir que 53 p. 100 des personnes interrogées étaient en faveur du projet de loi, mais, d'après le sondage du gouvernement, 70 p. 100 des Canadiens étaient pour. Je savais qu'il y avait là une divergence d'opinion.

J'ai dit, dans des émissions-débats et à mes électeurs, et je suis sûr que la députée qui m'a posé la question a fait de même, que, pendant ce temps-là, j'avais reçu plus de commentaires et de réaction. J'ai fait un sondage scientifique après avoir pris connaissance des amendements et des changements que le ministre de la Justice était prêt à apporter à ce projet de loi, compte tenu des imperfections qu'il renfermait. Les résultats étaient équilibrés, 50 p. 100 des personnes interrogées étant des hommes et 50 p. 100 des femmes, avec 21 p. 100 des propriétaires d'armes à feu dans le centre urbain de Calgary, Calgary-Centre à forte densité de population.

J'ai été en mesure de faire quelque chose que les membres du parti d'en face ne peuvent pas faire. Très peu ont voté contre le projet de loi, neuf seulement, et ils vont faire l'objet de mesures disciplinaires. C'est pour cette raison que le premier ministre pointait un doigt accusateur au caucus de mercredi. Il a fait tout un discours, que les citations soient justes ou non.

Ce régime démocratique n'en est plus un lorsque l'on bâillonne ses propres représentants librement élus, payés pour représenter leurs électeurs et auxquels on dit de ne pas voter. Ils ne peuvent même pas se lever pour voter, si suffisamment de voix sont déjà exprimées pour défaire ce dont est saisi la Chambre. C'est honteux et inacceptable. C'est ce contre quoi je lutte. Cela peut choquer la députée que mes commentaires peuvent indigner, mais je suis convaincu d'avoir raison.

M. Fewchuk: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je pense que le député de l'autre côté parle de quelque chose qui n'a rien à voir avec les limites des circonscriptions électorales.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je crains que le député n'ait de toute façon épuisé son temps de parole.

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer aujourd'hui à ce débat sur le projet de loi C-69. Il est question ici d'ajouter des politiciens à cet endroit.

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Mon collègue de Calgary Centre l'a si bien dit. Si nous demandions à dix personnes dans la rue si elles accepteraient que l'on augmente le nombre de députés dans cette Chambre, je suis convaincu qu'elles nous répondraient toutes par un non retentissant. Sur quelle planète vivons-nous? Où étions-nous? Nous voici en train de débattre exactement du contraire de tout ce que nous a dit l'électorat canadien.

Je me demande où sont nos priorités lorsque nous discutons d'une mesure législative tellement intéressée. Ce projet de loi n'est motivé que par les possibilités de réélection des députés. C'est le syndrome du «quand nous devient moi»: qu'est-ce que j'en retire? Je veux protéger mon fief. Quelles répercussions cela a-t-il sur ma circonscription? Quelle incidence cela a-t-il sur mes chances d'être réélu?

Il ne se préoccupe pas de ce qu'il y a de mieux pour les contribuables harcelés de ce pays. Il ne tient pas compte de ce que veulent vraiment les contribuables. Nous avons affaire au syndrome du «quand nous devient moi»: je dois avant tout m'occuper de moi-même, ce que les électeurs canadiens veulent importe peu.

Nous ne parlons ni du déficit ni de la dette, le problème le plus épineux lorsque nous faisions campagne. Pendant la campagne électorale en Ontario, les sondages révélaient qu'il en était de même dans cette province. Au lieu de cela, nous parlons d'augmenter le nombre de députés. Le fait d'avoir plus de députés ne signifie pas que les électeurs seront mieux servis, puisque les déficits et la dette ont continué d'augmenter. Au cours de la dernière année la dette a augmenté de 100 millions de dollars. Nous discutons ici de cette question et nous avons affaire à une dette de 550 milliards de dollars. Nous nous endettons à raison de 1,036 $ par seconde et nous sommes ici à perdre notre temps à discuter de délimitations de circonscriptions et à ajouter des personnes, ce qui, à mon avis, fera grimper cette dette encore davantage.

Qu'en est-il de l'emploi? Si on créait des emplois, les emplois dont on a désespérément besoin dans ce pays? Qu'en est-il du système judiciaire, ce système qui ne fonctionne pas et que les


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Canadiens demandent que l'on remanie? Qu'en est-il des programmes sociaux? La menace qui place sur ces programmes ce sont le déficit et la dette de même que le service de celle-ci.

Ce qui ne cesse jamais de m'étonner c'est que projet de loi après projet de loi, débat après débat, il ressort que les ministériels n'écoutent tout simplement pas la population canadienne. Je ne sais pas si le gouvernement n'écoute pas ou entend ce qu'il veut bien entendre, mais il ne donne tout simplement pas aux Canadiens ce qu'ils demandent et en fait ce qu'ils exigent. Il ne comprend pas que les choses ont changé au fil des ans. La politique d'il y a 30 ans, laquelle mène malheureusement le groupe d'en face, ne fonctionne plus.

Les Canadiens ne veulent plus en entendre parler. Les électeurs canadiens ont dit très fort et très clairement qu'ils veulent que les hommes et les femmes politiques à Ottawa les représentent, qu'ils veulent des porte-parole à Ottawa vu que de toute évidence ceux qui y ont travaillé au fil des ans n'ont rien accompli, qu'ils sont encore plus endettés et qu'ils obtiennent moins de services que jamais auparavant pour l'argent qu'ils investissent. La politique à l'ancienne du «c'est nous qui savons le mieux ce qui est dans l'intérêt du commun des mortels» ne passe tout simplement plus.

Je veux féliciter les ministériels qui ont représenté leurs électeurs. Il leur a fallu du courage. J'ai été tout simplement consterné lorsque j'ai eu vent des propos qu'aurait tenu le premier ministre. Je ne connais pas les mots exacts qu'il a utilisés. Il a félicité ceux qui ont modifié leur position et ont respecté la politique officielle du parti. Il a dit: «Il a fallu du courage pour ne pas lutter contre moi.» Qu'en est-il du courage qu'il a fallu pour s'opposer au chef et voter comme le voulaient les gens qui les envoyés ici à Ottawa? C'est là où réside le courage. Ils auraient dû être félicités. Les gens d'en face devraient comprendre cela.

C'est le message que transmettent les électeurs. Ils veulent des hommes et des femmes politiques qui les représentent à Ottawa, qui savent s'écarter de l'esprit de parti. Le malheur, c'est qu'ici il faut faire ce que l'on nous dit. Nous en avons eu un exemple hier soir. Je ne pouvais en croire mes yeux. Il y avait certains députés à qui l'on a dit de ne pas voter, que l'esprit de parti l'emportait et qu'on avait le nombre de votes qu'il fallait pour l'emporter. Il ne sera pas tenu compte de ces députés pour certains de ces votes. Ils étaient ici mais ne se sont pas levés pour voter.

Comment peuvent-ils avoir la conscience tranquille? Nous acceptons le salaire. Nous sommes ici pour accomplir un travail. Ici nous ne tenons pas compte des électeurs et nous sommes comptables à une seule personne, le whip. Faites ce que l'on vous dit, respectez l'esprit de parti, sinon gare à vous.

Deux poids, deux mesures. Je suis sûre que cela n'a pas échappé à ceux de l'autre côté. On les discipline et on leur inflige une punition pour avoir fait ce qu'il faut, représenter leurs électeurs. Puis nous avons le ministre du Patrimoine qui trahit la confiance du public. Il invite à dîner un groupe de personnes et rembourse des dettes politiques, mais il ne se fait même pas réprimander et tout va comme dans le meilleur des mondes. Il n'importe pas qu'il y ait apparence de conflit.

(1130)

La règle des deux poids, deux mesures doit être une source de grande confusion chez les autres membres du parti ministériel et laisse certes perplexes le public et les employés du ministère.

Hier soir, nous avons été témoins d'un spectacle. En tant que membre du Parti réformiste, j'ai été stupéfait de la tournure des événements. En élisant 205 nouveaux députés, la population a envoyé un message très clair: «Nous voulons un changement.» On peut donc penser que 205 nouveaux députés ont été élus ou que 205 députés ont été mis à la porte. Quoi qu'il en soit, le message est le même: «Nous voulons un changement.»

Une partie du problème vient peut-être du fait que le gouvernement croit avoir gagné les élections. C'est en tout cas ce que croient les membres du parti ministériel. Or, ils n'ont pas gagné les élections, ce sont plutôt les conservateurs qui ont perdu. Les électeurs canadiens sont encore à la recherche d'un parti qui les représentera vraiment. Jour après jour, ils continuent, insouciants. L'heure du Jugement sonnera en 1997 pour ceux qui ne sont pas attentifs, car ils seront remplacés par d'autres qui, eux, seront à l'écoute.

Les électeurs nous ont demandé d'examiner les vieilles façons de faire pour voir s'il n'y avait pas moyen de les améliorer et nous ont dit: «Peu nous importe que les choses se soient toujours faites ainsi. Ça ne marche pas. Nous voulons du changement. Nous avons besoin d'idées nouvelles. Ne faites pas des courbettes au parti. Écoutez-nous. Fiez-vous au gros bon sens de monsieur et madame Tout-le-monde. Le message? Nous voulons moins de gouvernement et un gouvernement plus efficace.» Ce n'est pas ce qu'accomplit ce projet de loi, ni même ce qu'il cherche à accomplir.

Le Parti réformiste, lui, a une vision. Ses membres sont tournés vers l'avenir. Nous sommes à l'écoute des électeurs. Nous allons remettre en question les vieilles façons de faire et nous en sommes très fiers. Il faut dépoussiérer, aérer. Remettons en question nos façons de faire. Il faut qu'il y ait un autre moyen parce que ceux que nous avons utilisés jusqu'ici ne donnent pas les résultats escomptés. Le pays n'aura jamais été aussi divisé, ni aussi endetté. De toute évidence, quelque chose ne va pas, un fil s'est cassé et il faut le réparer. Commençons par faire comprendre cela.

Viser la qualité, plutôt que la quantité, se défend. Rien ne justifie une augmentation du nombre de députés à la Chambre. Le Parti réformiste a proposé une réduction de 10 p. 100 de leur nombre. Nous avons affirmé qu'il était possible d'accomplir le travail avec moins de députés et nous en sommes indubitablement capables. Dans notre proposition, l'Ontario perdrait quelques sièges. À mon avis, l'Ontario est disposée à accepter cette baisse parce que les électeurs de l'Ontario savent qu'ils sont surgouvernés. Ils feraient bon accueil à une réduction du gouvernement.

Si le nombre de députés de l'Ontario passait de 301 à 278, il y en aurait 28 de moins. J'ai entendu dire qu'un député à la Chambre coûtait environ un million de dollars. Si c'est exact, nous pourrions nous attendre à économiser la somme considérable de 28 millions de dollars par année. Par ailleurs, il y aurait un


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double avantage: le gouvernement coûterait moins cher au contribuable et nous ferions mieux notre travail.

Plus n'est pas synonyme de mieux, comme le montrent les données statistiques publiées aujourd'hui par Statistique Canada. Ces données ont prouvé qu'une augmentation des impôts se traduisait par une baisse du revenu familial moyen. Celui-ci, qui était de 46 000 $ en 1989, vient de reculer à 43 000 $ à cause de la croissance du gouvernement et de l'augmentation des impôts. La famille moyenne dispose maintenant de 3 000 $ de moins. Voilà un exemple parfait qui montre que plus donne moins et que la situation ne s'améliore pas. Nous sommes surgouvernés.

Voyons ce qui se passe en Australie. On a mentionné plus tôt que l'Australie doublerait le nombre d'électeurs représentés par un député du Canada. En Allemagne, les députés représentent 2,5 fois plus d'électeurs qu'au Canada et, aux États-Unis, cinq fois plus. On peut donc facilement justifier une réduction du nombre de députés à la Chambre.

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L'un des objectifs de la révolution du bon sens en Ontario consiste à réduire la taille de l'assemblée législative de 25 pour cent. Aux dernières élections ontariennes, cette révolution du bon sens a reçu l'appui massif des électeurs parce qu'ils estiment que plus l'État est petit, plus il est efficace. La taille n'a rien à voir avec la qualité. Nous pouvons faire mieux.

La révolution du bon sens aurait pour effet d'éliminer le régime de retraite des députés et de laisser les députés s'occuper eux-mêmes de leur pension sans puiser dans les poches des contribuables. Ce message n'a pas été reçu à Ottawa. Nous venons de remplacer un régime de retraite en or par un en platine. Nous l'avons dégraissé un peu, mais je crois qu'il ne sera pas approuvé par l'électeur canadien et qu'il va devenir un enjeu important aux prochaines élections fédérales.

On a parlé du projet de loi sur les armes à feu que le gouvernement a fait adopter à la vapeur, en obligeant ses députés à suivre la ligne du parti sans égard à ce qu'en pensent leurs électeurs. Le gouvernement prétend que dans le livre rouge, il a dit qu'il le ferait. Il n'y a rien dans le livre rouge au sujet de l'enregistrement. Il y est bien question de sévir contre l'utilisation criminelle des armes à feu, mais il n'y a pas un mot sur l'enregistrement.

Les électeurs ontariens ont envoyé un message très clair. Mais, comme tous les autres, il ne sera pas reçu. Je suis certain qu'il ne sera pas enregistré par les libéraux et qu'ils continueront d'y être sourds. Les électeurs ontariens ont dit qu'ils veulent un gouvernement qui les écoute, un gouvernment qui intervient moins dans leur vie. Mais les libéraux ont fait la sourde oreille et ils vont en payer le prix aux prochaines élections.

Il y en a, parmi les députés d'en face, qui se sont mis à l'écoute de leurs électeurs. Je voudrais citer ce que quelques-uns d'entre eux ont déclaré au cours d'un débat précédent. Il s'agit du débat que nous avons eu en mars 1994 sur le projet de loi C-18. C'est le solliciteur général, je crois, qui a déclaré: «Depuis la Confédération, le nombre des sièges de la Chambre des communes est passé petit à petit de 181 en 1867 à 295 aujourd'hui. Si nous n'avions pas changé les règles il y a quelques années, il y en aurait maintenant plus de 340. Voilà quelque chose qui mérite examen.» Je suis parfaitement d'accord avec lui.

Le député de Halton a déclaré, et je cite: «En Australie, par exemple, le député représente environ deux fois plus d'électeurs. Le moment est venu de faire des changements. Sinon, nous allons devoir abattre un des murs.» Absolument d'accord. Cette Chambre est pleine. Il n'y a plus de place.

Le secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics: «Pendant la 34e législature, j'ai proposé que le Parlement envisage la possibilité de réduire sensiblement le nombre des députés. Ce serait l'occasion de voir si nous pourrions réduire du quart ou du tiers le nombre des députés.» Quelle bouffée d'air frais! Absolument d'accord. Il y a encore de l'espoir en face. Il y a là un grain de bon sens.

Le député libéral de Carleton-Gloucester a déclaré, et je cit: «Ne commence-t-on pas à être à l'étroit ici et notre dette publique n'a-t-elle pas augmenté au point où il faudrait faire quelque chose pour en ralentir la croissance?» Là encore, parfaitement d'accord. Grâce à une économie éventuelle de 28 millions de dollars, nous pourrions réduire sensiblement notre dette et notre déficit tout en servant mieux le contribuable canadien.

Pour revenir au projet de loi, parmi les amendements proposés par le Sénat, il y en a que nous pouvons appuyer, comme celui qui vise à réduire de 25 à 15 p. 100 l'écart permis par rapport au quotient électoral provincial. C'est un amendement que nous avons proposé et nous pouvons l'appuyer, car il aidera à égaliser le pouvoir électoral des circonscriptions d'une province.

Nous pouvons appuyer l'amendement qui prévoit que les deux membres de la commission qui ne sont pas juges doivent être des résidents de la province où la commission est établie. Il relève tout simplement du bon sens.

Parmi les amendements proposés par le Sénat, il y en a que nous pouvons appuyer. Cependant, en ce qui a trait à l'objet du débat d'aujourd'hui, nous perdons malheureusement beaucoup de temps et nous ne nous attaquons pas aux vrais problèmes auquel le pays est confronté.

(1140)

En terminant, j'ai appris l'autre jour que la cote d'écoute de la chaîne parlementaire a triplé au cours de la 35e législature. Je trouve que c'est une évolution encourageante parce qu'elle prouve que les Canadiens regardent ce qui se passe ici. Ils nous regardent et ils nous écoutent. C'est là une bonne nouvelle parce que c'est la preuve qu'ils ne prennent pas pour parole d'évangile tout ce qu'ils lisent dans la presse, qu'ils regardent ce qui se dit et


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se passe ici. Ils regardent ces votes. Ils connaissent les députés qui ont eu le courage de défendre et de représenter vraiment leurs électeurs. Ils connaissent ceux qui se sont laissé dicter la conduite à suivre. Je peux vous dire que c'est là exactement ce que les électeurs canadiens ne veulent pas que leurs élus fassent en ce moment.

Je trouve encourageant que la cote d'écoute ait triplé et je crois qu'elle va tripler encore à mesure que nous approchons des prochaines élections et que les électeurs canadiens se rendent compte de ce qui se passe ici.

Ce qui se passe ici peut s'expliquer. L'arrogance envers les électeurs s'explique sans doute par cette avance dans les sondages. Une telle avance peut facilement vous monter à la tête: «Nous ne pouvons rien faire de mal. Voyez où nous en sommes dans les sondages.»

Je crois qu'ils jugent de leur popularité sur la base d'une donnée bien artificielle et qu'ils feraient bien de tenir compte des résultats des élections ontariennes parce qu'ils indiquent jusqu'à quel point ils peuvent se tromper. C'est leur parti qui menait dans les sondages en Ontario. Mais quand la campagne s'est mise en branle, quand il s'est agi de parler des problèmes, leur avance s'est volatilisée. Voilà ce qui compte aujourd'hui. Ce qui compte, ce sont les problèmes et ceux qui peuvent le mieux les régler et qui sont à l'écoute des électeurs.

Jour après jour, ce gouvernement nous montre qu'il n'est pas à l'écoute des gens. C'est toujours la même rengaine: «Nous savons y faire. Obéissez au chef. Ne vous occupez pas des électeurs.» Voilà ce qui est tragique dans leur cas. Mais c'est ce qui nous sauve, car c'est ainsi qu'en 1997, les gens vont élire un gouvernement qui écoute vraiment les gens. Et je soutiens que ce sera un gouvernement réformiste.

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, comme j'étais dans mon bureau en train de regarder le débat à la télévision en vociférant, j'ai décidé de venir poser aux députés d'en face les questions que je lançais à mon écran de télévision.

Je suis plutôt surprise de voir combien les députés d'en face connaissent mal le projet de loi, parce qu'ils prétendent être ici pour économiser au pays de l'argent, pour représenter les gens et pour être efficaces.

L'ancien système de révision des limites des circonscriptions électorales a été concocté par une bande de dinosaures appelés progressistes-conservateurs qui siègent aujourd'hui au Sénat, où ils essaient de bloquer les projets de loi. Il y a là une autre bande de dinosaures pour les seconder dans cette tâche.

Ce projet de loi compte trois éléments auxquels j'aimerais entendre le député réagir en termes concrets. Dans le système actuel, les gens qui se rendent aqux assemblées publiques pour discuter des cartes électorales n'ont absolument aucune idée de ce qui se passe lorsqu'ils modifient une limite.

Je faisais partie du comité qui a conçu le nouveau système. La circonscription que je représente compte 250 000 habitants et ses limites n'ont pas changé depuis dix ans. Il y a dix ans, elle en comptait 88 000. Lorsque ces gens se rendent aux assemblées où ils sont supposés réagir intelligemment à la façon dont les limites sont fixées, ils n'ont aucune idée de ce qui arrive aux gens qui habitent à l'intérieur des limites qu'ils déplacent pour tenir compte d'une communauté d'intérêts.

Le projet de loi prévoit l'établissement de trois projets de révision assorti chacun d'un certain nombre d'habitants et il fixe les principes qui doivent guider le choix de la commission. Voilà une façon intelligente d'assurer la représentation qui n'a rien de magique et de chaotique comme l'autre.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit que les limites des circonscriptions seront révisées tous les cinq ans plutôt que tous les dix ans. De cette façon, il n'y aura plus de députée obligée de vociférer devant son écran de télévision parce qu'elle est surchargée, avec une circonscription de 250 000 habitants, qui en comptera 300 000 d'ici aux prochaines élections. Comment les gens d'en face répondent-ils à cela?

Ce projet de loi prévoit qu'il n'y aura pas de révision dans les provinces où la population n'a guère fluctué. Voilà une disposition qui va économiser de l'argent parce que, dans l'ancien système, on établissait quand même une commission. Cette commission s'adjoignait un grand nombre de bureaucrates qui faisaient tourner toutes sortes de rouages en pure perte.

Je voudrais que le député d'en face réponde directement à ces trois questions en s'abstenant de faire de longs discours sur notre façon de gouverner.

M. Harper (Simcoe-Centre): Madame la Présidente, je suis vraiment heureux que la députée d'en face ait cessé de vociférer devant son écran de télévision pour venir faire face à la réalité. J'aimerais qu'un plus grand nombre de députés suivent son exemple; comme cela, ils écouteraient et participeraient au processus.

(1145)

Dans sa première question, la députée a fait allusion à l'ignorance des gens. Ils se sont présentés à ces réunions et ne savaient rien. Elle commet là une erreur grave. La députée sous-estime l'intelligence de nos électeurs. Elle ne leur rend pas service en faisant des commentaires de ce genre, en disant que la plupart des gens qui ont assisté à ces réunions n'étaient pas informés, que les électeurs sont des idiots, qu'ils ont besoin de se faire guider, que nous devons les aider. Je tiens à dire à la députée d'en face que les électeurs sont beaucoup plus intelligents qu'elle ne le pense.

Le système n'a pas été modifié parce que le public a réclamé des changements, mais parce que des politiciens intéressés de ce côté-là de la Chambre ont dit: «Je risque à cause de ce système de ne pas être réélu.» C'est de cela dont il est question ici. Les électeurs n'ont pas réclamé ces changements. Ce sont les simples


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députés du gouvernement qui les ont demandés. Leur royaume était menacé. La députée elle-même ne l'a peut-être pas dit, mais d'autres l'ont fait. Ils ont dit: «Mon royaume est menacé et je dois faire quelque chose pour le protéger. Oublions ces cinq millions de dollars que nous avons gaspillés et reprenons le tout pour que je puisse protéger mes intérêts et me faire réélire.»

Peu importe les limites qui seront établies, la députée ne sera pas réélue parce qu'elle ne tient pas compte du point de vue des électeurs canadiens.

Nous parlons du nombre d'électeurs qu'il y a et du fait que nous ne représentons chacun qu'un certain nombre. Nous pouvons modifier les limites afin de réduire le nombre de députés. Je ne dis pas que nous devons garder les mêmes limites. Nous pouvons les modifier pour tenir compte des changements démographiques. J'ai utilisé l'exemple de l'Australie où les députés représentent deux fois plus d'électeurs. Aux États-Unis, c'est cinq fois plus et ils n'ont pas de gros problèmes. L'argument relatif à la quantité ne tient donc pas. Ce n'est pas la quantité qui compte, mais la qualité. On ne sera pas mieux servis s'il y a plus de députés.

Mme Ablonczy: Le premier ministre aura plus de députés qu'il pourra menacer.

M. Harper (Simcoe-Centre): Plus de députés qu'il pourra mettre au pas, à qui il pourra imposer ses vues, qui ne parleront pas au nom de leurs électeurs.

Éloignons-nous de cette charade. Il faut respecter la volonté des électeurs et non pas prendre des mesures visant à garantir la réélection des députés d'en face.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Madame la Présidente, je vais vous prouver que les simples députés ont encore le droit de s'exprimer dans cette Chambre.

J'ai écouté avec intérêt le député de Simcoe-Centre. Lorsque j'écoute le Parti réformiste, j'arrive à la conclusion suivante: des solutions simples à des problèmes complexes. Moi aussi j'ai des réserves sur ce projet de loi. Lorsque je l'ai examiné, j'ai constaté qu'on serait obligé de résilier une entente conclue avec les provinces en 1985 pour tenir compte des préoccupations de certains députés, y compris les miennes. J'ai alors pensé qu'on pourrait peut-être geler le nombre de députés à la Chambre.

Toutefois, il faudrait pour cela modifier l'entente constitutionnelle conclue à l'époque. Le député n'a pas dit comment il comptait régler ce problème, comment il allait conclure une entente avec les provinces afin de réduire le nombre de députés en conséquence.

La formule que je propose nous obligerait à réduire de manière considérable le nombre de députés pour appliquer le concept de la représentation selon la population. Il faudrait réduire le nombre de députés en Saskatchewan et au Manitoba. Si je ne m'abuse, la Saskatchewan perdrait environ quatre sièges.

Je n'entends pas le Parti réformiste ou ses députés de la Saskatchewan dire qu'ils sont prêts à perdre quatre sièges dans cette province. Soyons clairs et honnêtes. Ils devraient nous dire comment ils prévoient réduire le nombre de députés et s'ils sont prêts à perdre quatre sièges en Saskatchewan. Ils devraient également nous dire comment ils comptent s'entendre avec les provinces pour modifier l'accord de 1985.

(1150)

M. Harper (Simcoe-Centre): Madame la Présidente, je suis content que le député pose ces questions. Je voudrais commencer par son premier commentaire au sujet de solutions simples.

Les solutions sont simples. C'est plutôt le gouvernement qui n'a pas le courage de prendre les mesures qui s'imposent.

Les problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui n'ont rien de complexe. Ce qui manque, c'est la volonté, le courage de prendre les mesures qui s'imposent pour rétablir la santé financière de notre pays.

J'aimerais profiter de cette occasion pour féliciter le député. Il fait partie de ceux qui ont eu le courage, hier soir, de ne pas suivre la ligne du parti. Il a eu le courage de parler au nom de ses électeurs et je l'en félicite.

Il aurait dû toutefois allumer son téléviseur, car il aurait vu, hier soir, le député de Kindersley-Lloydminster déclarer qu'il accepterait une réduction du nombre de sièges en Saskatchewan. Il ne pense pas du tout à lui-même, mais aux intérêts du pays dans son ensemble. Nous avons effectivement joint l'acte à la parole. Personne n'a cherché à se défiler. Le député a déclaré à la Chambre hier soir que, oui, en effet, toutes les régions devront faire des sacrifices.

[Français]

M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Madame la Présidente, en écoutant le député de Simcoe-Centre, je retiens qu'on parle de carte électorale par opposition à la diminution de députés. Ce que je retiens surtout c'est qu'on utilise le même langage ou les mêmes remarques que le Bloc: Il y a trop de députés; il y a trop de gouvernements; on est sur-gouvernés; on est un pays en faillite; ça coûte trop cher; le gouvernement devrait être plus efficace, moins lourd; il faudrait une diminution de députés de 10 p. 100.

Nous leur offrions tout simplement d'en éliminer 75 d'un seul coup. Est-ce qu'ils commencent à comprendre notre option et vont-ils nous appuyer prochainement?


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[Traduction]

M. Harper (Simcoe-Centre): Madame la Présidente, je répondrais à la question du député qu'ils peuvent être 75 ici à vouloir quitter la Chambre, mais je ne crois pas du tout qu'ils représentent la majorité des électeurs de la province de Québec.

Je pense que la majorité des électeurs de cette province ne veulent pas quitter le Canada. Ils veulent être représentés ici même par des élus qui vont assurer l'unité du Canada et non pas diviser le pays, et cette situation va être corrigée aux prochaines élections.

M. Werner Schmidt (Okanagan-Centre, Réf.): Madame la Présidente, le projet de loi C-69 dont la Chambre est actuellement saisi est une mesure législative très importante. Je suis honoré de prendre la parole après le député de Simcoe-Centre. Le genre de débat que provoque ce sujet particulier est très intéressant.

Il est important pour trois raisons sur lesquelles je veux m'arrêter: du point de vue de la démocratie, du point de vue de la responsabilité financière et du point de vue du leadership.

Pour ce qui est du premier point de vue, celui de la démocratie, au Canada, le système démocratique est fondé sur l'élection de représentants de partis politiques. Cette représentation est plutôt difficile parce qu'il faut tenir compte de trois facteurs. En effet, le représentant doit d'abord tenir compte du mandat que son parti lui confie. Il s'agit des politiques et des principes sur lesquels se fonde un parti pour élaborer son programme électoral et présenter sa conception du gouvernement.

Le Parti réformiste est animé par trois principes qui sont le fondement de la représentation de nos électeurs dans cette Chambre. Premièrement, nous allons réformer le système démocratique du Canada tel qu'il existe aujourd'hui. À cette fin, il faut d'abord faire connaître les voeux de la population à cette Chambre et non l'inverse.

Deuxièmement, nous allons administrer les affaires du pays d'une manière financièrement responsable et voici ce que cela veut dire. Nous aurons un budget équilibré. Nous ne dépenserons pas l'argent que nous n'avons pas et nous considérerons l'argent que les contribuables nous donnent comme de l'argent en fiducie que nous gérerons au moins aussi bien que s'il s'agissait de notre argent personnel. Dans certains cas, nous devrions l'administrer mieux et avec plus de respect que s'il s'agissait du nôtre.

(1155)

Troisièmement, nous voulons que nos rues soient sécuritaires. Nous voulons que les biens et la vie des gens soient protégés. Nous voulons que les hommes, les femmes et les enfants de notre pays puissent marcher dans les rues impunément, sans craindre les attaques, quelles qu'elles soient. C'est pourquoi nous voulons réformer le système de justice pénale au Canada.

C'est le premier devoir d'un représentant réformiste, le mandat. Nous avons dit à la population que nous allions les représenter, que nous allions être responsables sur le plan financier et que nous allions réformer le système de justice pénale au Canada.

Pour ce qui est du deuxième aspect de notre représentation, la population nous a confié la mission de représenter le Parti réformiste en raison de certains talents et de certaines aptitudes, et de la confiance que nous avons su gagner. La population s'attend à ce que nous fassions preuve de jugement dans l'étude de tous les problèmes et enjeux auxquels doit faire face notre pays. Puis nous agirons dans le meilleur intérêt de la population que nous représentons, et non le nôtre, au meilleur de notre connaissance. C'est important.

Il y a un troisième aspect à notre représentation. Il s'applique très clairement à certaines questions morales comme la peine capitale. Nous tiendrons un référendum pour que la population puisse se prononcer sur un sujet par oui ou non.

Il y a trois aspects très différents de la représentation et nous voulons répondre à chacun d'eux avec loyauté, ce qui ne rend pas notre tâche facile. Il faut agir de façon responsable et dire aux gens: «Voilà ce que nous croyons. Voilà le point de vue que nous allons défendre et nous voulons connaître votre opinion sur les sujets qui vous touchent directement dans votre vie quotidienne.» Dans un système démocratique, c'est la première chose que nous allons faire.

Cela veut dire aussi que nous écoutons les gens. Ils nous disent que la taille du gouvernement est trop imposante, qu'il y a trop de représentants, que le gouvernement s'ingère trop dans la vie des gens, qu'il s'agisse des entreprises, des familles, des communautés. Peu importe où, le gouvernement est trop envahissant. Les gens nous ont dit qu'ils voulaient un gouvernement moins dominant.

Le projet de loi fait abstraction de ce que la population pense. Il propose de porter le nombre de députés de 295 à 301. Contrairement à ce que le député d'en face a laissé entendre, ce n'est pas un sermon. C'est une opinion très juste sur la démocratie. Si le député ne comprend pas, il aurait dû apprendre à faire la différence entre les faits et les déclarations.

C'est le problème des libéraux. Ils font toutes sortes de déclarations sans les mettre à exécution.

M. Forseth: Qu'est-ce que les gens veulent?

M. Schmidt: Je pense parfois qu'un seul député de l'autre côté de la Chambre suffirait, le premier ministre. Tout ce que les autres font, c'est écouter ce que le premier ministre dit. Il leur dit quoi faire, quand le faire, comment le faire et, parfois, il leur explique pourquoi il devrait le faire, par les mots «parce que je l'ai dit». Ce n'est pas de la démocratie. En fait, dans ces conditions, on pourrait réduire la taille de la Chambre de façon assez considérable.

Il y a un autre aspect qu'il faut soulever ici. Si le gouvernement se met à écouter la population et s'il applique ce qui est dans


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le projet de loi, il va donc consulter la population. Je demande au gouvernement qui il va consulter.

Je veux lire ce qui figure dans le projet de loi dont nous sommes actuellement saisis à propos de la communauté d'intérêts.

M. Forseth: Vous êtes en train de mettre les libéraux dans l'embarras.

M. Schmidt: Je cite le paragraphe 19(5) du projet de loi.

Pour l'application de l'alinéa (2)b), «communauté d'intérêts» vise des facteurs tels que l'économie des circonscriptions électorales, leurs limites existantes ou traditionnelles, le caractère urbain ou rural d'un territoire, les limites des municipalités et des réserves indiennes, les limites naturelles et l'accès aux moyens de communication et de transport.
(1200)

C'est une bonne formulation et une bonne disposition qui dit que l'intérêt de la population est primordial.

Par contre, d'autres dispositions du projet de loi nous en font douter. Quand il s'agit de consulter les gens, on dirait qu'il y a comme un blocage. Les commissions chargées de redessiner la carte électorale doivent tenir au moins une séance par province.

C'est insultant pour de grandes provinces comme le Québec, l'Ontario et la Colombie-Britannique. On est censé arriver, en une séance, à définir les limites des municipalités, examiner les intérêts économiques, se pencher sur le caractère urbain ou rural des circonscriptions? Pense-t-on qu'une personne qui habite au centre de Vancouver connaît les caractéristiques de Vermilion, en Alberta, de Kamloops ou de Prince-George? C'est ridicule.

Il faut donner aux commissions de vraies directives, d'où la nécessité de vraiment consulter la population.

Le projet de loi contient des subtilités intéressantes. Au paragraphe 21(6), on décrit la marche à suivre pour pouvoir présenter des observations à la commission. Cette disposition s'adresse à des gens ordinaires, des gens qui, je présume, ne s'y connaissent pas en matière de révision de la carte électorale et ne savent pas quel effet celle-ci aura sur eux. C'est là un insulte de première catégorie.

Il y a plus insultant encore. Ce que dit le projet de loi, c'est qu'avant d'établir son rapport, la commission doit tenir, dans la province pour laquelle elle a été constituée, au moins une séance afin d'entendre les observations des personnes intéressées. La tenue de cette séance doit être annoncée 60 jours à l'avance et les personnes qui désirent présenter des observations doivent présenter une demande écrite dans les 57 jours précédant la séance. Regardons cela de plus près. La séance est annoncée 60 jours à l'avance, et les demandes de participation peuvent être reçues jusqu'à 57 avant la tenue de la séance.

Prenons un autre amendement pour voir. Le paragraphe 21(6) prescrit ce qui suit:

La commission ne peut entendre les observations des personnes intéressées à moins d'avoir reçu, au moins sept jours avant la date fixée pour la tenue de la séance, un avis. . .
Laquelle des dispositions appliquera-t-on? Dans un cas, il est question d'un délai préalable de trois jours, alors que l'autre prévoit un délai d'au moins sept jours. Les deux dispositions se contredisent.

La personne qui voudra présenter des observations lira une des deux dispositions. Mais il lui faudra connaître davantage la mesure pour savoir comment procéder pour aviser la commission de son intention.

Un autre principe de la démocratie est violé. Le Sénat a proposé des amendements au projet de loi. Le Sénat n'est pas une assemblée élue, ses membres sont nommés par nul autre que le premier ministre. Dans ce cas-ci, le Sénat a interrompu le processus législatif. Il a proposé des amendements à un projet de loi élaboré par des représentants élus de la population. À mon avis, c'est théoriquement mauvais. C'est une violation de la démocratie telle que j'ai appris à la connaître. C'est la tradition, la Constitution du Canada qui confère au Sénat un tel pouvoir. Est-ce acceptable pour autant? Est-ce juste? Je ne le crois pas.

(1205)

Le Parti réformiste veut réformer le régime démocratique. Une réforme vise justement à doter le Canada d'un Sénat élu, afin que les membres de l'autre assemblée représentent vraiment les Canadiens.

La fonction et le service dont est chargée l'autre assemblée du Parlement sont précieux, puisque que ses membres doivent assurer une autre réflexion, ce qu'ils ont fait dans ce cas. Ils ont effectivement proposé des amendements très utiles qui peuvent mériter notre appui. C'est excellent et cela montre bien que cette assemblée peut jouer un rôle important dans le processus démocratique, mais il reste que cette assemblée devrait être élue comme l'est la Chambre des communes. J'espère vraiment que ce sera le cas.

Le Sénat doit assurer un équilibre relativement à la représentation qui existe à la Chambre. Il doit s'assurer qu'un équilibre soit établi entre les centres très populeux et les endroits moins peuplés, de façon que les intérêts de tous puissent être servis de façon appropriée. À cette fin, une restructuration en profondeur s'impose ici.

Les Canadiens ont dit qu'ils veulent un gouvernement qui non seulement soit moins lourd, mais aussi qui s'immisce moins dans leurs vies. La Chambre étudiera bientôt le projet de loi C-88. Cette mesure législative prévoit, à l'article 9, que le Cabinet peut suspendre, modifier ou étendre l'application d'une loi fédérale ou provinciale. Les députés de cette Chambre et les législateurs provinciaux ont le droit d'adopter des lois. Cette responsabilité leur incombe. C'est pour cette raison qu'ils ont été élus.

Or, le projet de loi qui sera bientôt étudié par cette Chambre enlève ce pouvoir aux députés, relativement à certaines questions, pour le confier plutôt au Cabinet. Cette mesure va à l'encontre de ce qui devrait se faire. Elle va à l'encontre de toute ma conception du régime démocratique.


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Parlons un peu de la responsabilité financière. Quelqu'un faisait récemment allusion à la notion de tradition. Il semble qu'une certaine tradition se soit développée dans cette Chambre au fil des années, en ce sens que l'augmentation du nombre de députés s'est accompagnée d'un accroissement parallèle de la dette nationale.

Il faut mettre un terme à ce genre de tradition. Certains ont prétendu que le gouvernement fédéral avait subi un régime de minceur et qu'il était dur. Je suppose qu'ils connaissent le sens de la plupart de ces mots. Non, ce gouvernement n'est pas mince; d'autre part, il est peut-être dur, mais pas sur le plan financier.

Qu'entend-on par un budget équilibré? Je suis arrivé ici afin de savoir comment nous étions parvenus à nous endetter de la sorte. Je signale, pour le bénéfice de tous ceux qui sont présents, que si nous sommes endettés, c'est parce que nous dépensons plus que nous en avons les moyens. Voilà pourquoi nous avons une dette. Il ne faut pas se leurrer. Si nous voulons assainir les finances publiques, nous devons faire des compressions et contrôler nos dépenses.

Le fait d'avoir un plus grand nombre de députés dans cette Chambre ne fera pas baisser mais plutôt augmenter les coûts. On pense évidemment aux conséquences concrètes telles que les salaires, les employés et les bureaux supplémentaires requis, mais il ne faut pas oublier non plus les pensions des députés, que les Canadiens ont en travers de la gorge.

Voyons un peu ce qui va se passer avec les deux C, soit le député Charest de Sherbrooke et la vice-première ministre Copps. À eux deux. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député n'ignore sûrement pas que nous ne désignons pas les députés par leur nom, mais plutôt par leur titre ou par le nom de leur circonscription.

M. Schmidt: Les jumeaux C, donc, le député de Sherbrooke et la vice-première ministre, occasionneront uniquement à eux deux une dépense de plus de 6 millions de dollars s'ils prennent leur retraite et vivent jusqu'à l'âge de 75 ans, en tenant compte d'un taux d'inflation d'environ 5 p. 100.

Il n'y a rien dans le projet de loi pour remédier le moindrement à ce genre de choses. Nous avons plutôt vu le contraire. Nous avons vu qu'on a mis fin au débat sur certains projets de loi. Le nouveau projet de loi annule l'effort de responsabilité budgétaire à un autre égard. S'il est adopté, il va en effet supprimer le travail déjà accompli, et les 6 millions déjà dépensés l'auront été en pure perte.

(1210)

Sur le plan budgétaire, l'attitude affichée paraît se résumer à ceci: «Dépensez, ne vous faites pas de souci, soyez heureux.» Nous avons vu comment fonctionne la démocratie dans notre pays, avec l'imposition de la clôture aux débats sur les projets de loi C-41, C-85, sur le régime de retraite des parlementaires, et le C-68, sur le contrôle des armes à feu. Dans chacun des cas, le gouvernement a mis fin au débat. Dans chacun des cas, il n'a pas tenu compte des voeux d'une forte proportion des Canadiens. Pire encore, les députés sont prévenus qu'en ne suivant pas la ligne du parti, ils risquent de compromettre leurs chances d'être candidats aux prochaines élections et mettent réellement en péril l'avancement de leur carrière politique.

On leur a dit quelle position ils devaient défendre: la position arrêtée par le premier ministre. C'est complètement rétrograde, à mon avis, et ce n'est pas dans cette direction qu'on devrait s'engager.

Ce que je trouve probablement le plus difficile à avaler, c'est le message qui semble émaner de la Chambre à l'adresse de nos jeunes. Ce message, à en juger par un projet de loi comme le C-41, c'est que la famille est vieux jeu. Or, de nombreux députés à la Chambre et moi savons que la famille est l'institution sociale la mieux en mesure de transmettre les valeurs d'une génération à l'autre. C'est au sein de la famille que nous apprenons le sens des responsabilités, c'est-à-dire que la liberté a un prix et que nous devons être responsables de nos actes, qu'il existe une chose appelée le simple savoir-vivre et qu'il faut savoir respecter autrui sans le craindre.

Il est nécessaire d'apprendre le courage, celui de se porter à la défense de ce en quoi nous croyons, et de représenter vraiment et loyalement les gens qui nous ont élus pour être leur porte-parole ici et pour gouverner les affaires du pays de la façon convenant le mieux à leurs intérêts, pour nous occuper de leurs intérêts et non des nôtres.

Le gouvernement a. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais le temps de parole du député est écoulé. Nous passons maintenant aux questions et observations. La parole est au député de Waterloo.

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Madame la Présidente, le député a parlé du déficit, des pensions, de l'élection des sénateurs et ainsi de suite, mais il n'a pas dit grand-chose du projet de loi à l'étude. Je me sens donc obligé de faire quelques réflexions de mon cru.

Ce que je vais dire, je vais le répéter à maintes reprises, car j'estime que les électeurs ont droit à ce rappel. Les membres du tiers parti ont déclaré qu'ils allaient pratiquer la politique différemment et que, au lieu de s'opposer aveuglément à toutes les mesures du gouvernement, ils essaieraient de contribuer à les améliorer. Nous, libéraux, tant les nouveaux que ceux de la vieille garde, nous réjouissions de ces promesses. Que se passe-t-il dans les faits? Le ton moralisateur de partis antérieurs remplacés par le Parti réformiste évoque pour moi les partis de droite aux États-Unis.

Presque toutes nos institutions et tous les projets de loi que nous proposons sont sous le feu de leurs attaques. Je me rappelle encore l'hypocrisie du chef du tiers parti qui a refusé une voiture officielle. Nous avons ensuite appris. . .

M. Morrison: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Le terme «hypocrisie» serait-il devenu parlementaire à mon insu?

(1215)

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le mot a été utilisé dans l'animation du débat. Je conviens qu'il est plutôt contestable. Je demande donc au député, comme à tous ses collègues, d'être un peu plus prudent à l'avenir.


13900

M. Telegdi: Madame la Présidente, j'ai utilisé ce mot pour décrire une action, non une personne.

Permettez-moi de m'expliquer. Le chef des réformistes, qui avait promis de faire les choses différemment, a refusé avec ostentation les clés d'une voiture officielle vieille de cinq ans, mais nous avons ensuite appris que le parti versait à ce chef un montant de 30 000 $ pour lui payer ses costumes.

On nous dit que, de ce côté-ci, nous sommes soumis à la dictature du premier ministre. N'oublions pas le code d'éthique que le chef du Parti réformiste a imposé à ses députés: il leur dit combien de verres ils peuvent boire, avec qui ils peuvent dîner, que ce ne peut pas être avec des personnes du sexe opposé, et ainsi de suite.

Le Parti réformiste n'est rien qu'un réchauffé du crédit social, qui avait derrière lui une histoire aussi longue qu'illustre. Lorsque les réformistes dénigrent les personnes que les premiers ministres ont nommées au Sénat, ils devraient avouer que le père du chef actuel du tiers parti a lui-même été nommé au Sénat. On ne les entend pas critiquer à ce sujet.

Quoi qu'il en soit, examinons les politiques. Certains ont mentionné l'enregistrement des armes à feu. Notre parti a appuyé l'enregistrement des armes à feu, parce que les Canadiens le réclament et qu'il s'agit d'une bonne politique gouvernementale. Nous ne sommes pas subjugués par la droite religieuse au Canada.

M. Morrison: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je me demande si le député classerait un non-croyant comme moi parmi la droite religieuse.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais c'est une divergence de vues, tout simplement.

M. Telegdi: Madame la Présidente, ils ont beaucoup parlé de leur promesse de voter comme le souhaitent leurs électeurs. Depuis toujours, les membres du tiers parti en ont fait leur mantra et nous répètent sans cesse qu'ils vont représenter leurs électeurs. Ils ont des numéros 1-900 afin de pouvoir recueillir le point de vue des citoyens et défendre leurs intérêts.

Toutefois, pendant le débat sur les armes à feu, certains députés réformistes ont affirmé qu'ils ne croyaient pas aux sondages. C'est ce qu'ont admis certains réformistes. Le chef du Parti réformiste a déclaré qu'il n'allait pas se fier au sondage effectué à ce sujet, parce que la population a du mal à bien comprendre la situation. Il a fait allusion au changement observé dans l'opinion publique et au fait qu'il n'allait pas écouter les électeurs.

Le député a mentionné un autre projet de loi dont nous avons été saisis, soit le projet de loi C-41, qui vise essentiellement à veiller à ce que les auteurs de crimes motivés par la haine soient sévèrement punis. Évidemment, son parti n'appuyait pas cette mesure législative.

Permettez-moi de vous raconter une petite anecdote au sujet du projet de loi à l'étude actuellement.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette d'interrompre le député, mais la période réservée aux questions et aux observations tire à sa fin. Il voudra peut-être laisser un peu de temps au député pour répondre.

M. Telegdi: Le réformiste qui m'a remplacé au conseil municipal de Waterloo a proposé une motion où il disait que le débat sur la révision des limites des circonscriptions électorales ne devrait pas avoir lieu. Cet ex-candidat réformiste n'a pas été le seul à le faire, puisque tous les membres des conseils municipaux à l'intérieur de la municipalité régionale de Waterloo, peu importe leur allégeance politique, l'ont dit à l'unanimité. Cette localité a rejeté à l'unanimité la proposition qui avait été faite. C'est ce que ce projet de loi veut dire et j'en suis heureux.

(1220)

Comment le Parti réformiste peut-il refuser d'écouter les représentants des localités qui représentent tous les partis politiques et adoptent tous la même position?

M. Schmidt: Madame la Présidente, j'ai trois réponses à donner. D'abord, le député qui vient de parler aurait vraiment intérêt à lire le code de déontologie du Parti réformiste. En fait, la teneur même de ce code lui ferait grandement regretter d'avoir dit ce qu'il a dit. Le député ferait bien d'examiner très attentivement les faits avant de faire des déclarations du genre de celles qu'il a faites.

Ensuite, pour ce qui est des électeurs d'Okanagan-Centre, ici comme là-bas, je les représente tous, qu'ils aient voté pour moi ou non. Il n'est pas question de représenter uniquement les membres du Parti réformiste. Il n'en a jamais été question, il n'en est pas question aujourd'hui et il n'en sera jamais question. J'ai été élu par la collectivité. Le député devrait faire très attention à ce qu'il dit.

Enfin, pour ce qui est d'être le captif de la droite religieuse, c'est là l'affirmation la plus déraisonnable qu'on ait faite à la Chambre depuis que j'ai été élu. Aucune droite religieuse ne subjugue ni n'appuie le Parti réformiste du Canada. Notre parti représente tout le monde qui partage les principes que nous défendons.

La Chambre devrait défendre la vertu et la vérité. C'est ce que défend le Parti réformiste et c'est ce qui doit le caractériser.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Madame la Présidente, nous débattons aujourd'hui les amendements du Sénat sur le projet de loi relatif à la révision des limites des circonscriptions électorales.

La révision des limites des circonscriptions consiste à redécouper les circonscriptions fédérales où nous habitons et votons. Dans ces circonscriptions, nous élisons des députés pour transmettre nos souhaits, protéger nos intérêts, faire valoir nos préoc-


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cupations à la Chambre des communes et nous informer sur ce qui se passe au gouvernement fédéral. Comme la population du pays connaît des fluctuations, il faut modifier la composition des circonscriptions où nous élisons démocratiquement nos représentants.

Les politiciens, notamment ceux qui sont au gouvernement, semblent considérer ce processus avec appréhension. En fait, le gouvernement précédent a reporté le processus plus d'une fois parce qu'il ne voulait pas désavantager ses députés en révisant les limites des circonscriptions, en changeant leur clientèle électorale de temps à autre, voire en supprimant des sièges si l'examen montrait qu'il y a trop de circonscriptions dans une province donnée. Les gouvernements ont fortement hésité à mettre ce processus en branle. En fait, la dernière révision a eu lieu il y a environ dix ans, même si la population a beaucoup fluctué depuis.

Qu'est-il arrivé quand ce gouvernement a été élu? Un processus de révision des limites des circonscriptions était en cours depuis un bon bout de temps et le travail était déjà bien avancé. Les commissions en place dans chaque province avaient plus ou moins achevé leur tâche.

Or, les députés ministériels ont constaté avec horreur et consternation qu'ils étaient désavantagés par ce processus démocratique. On voulait changer les limites de leurs circonscriptions. Dans certains cas, beaucoup de leurs circonscriptions disparaîtraient. Les députés allaient perdre leurs appuis. Par conséquent, les députés ministériels ont bruyamment protesté contre le processus.

Même si le processus avait déjà coûté plus de 5 millions de dollars de deniers publics, qu'il avait été fait convenablement et que tout était terminé, à l'exception des audiences publiques sur les recommandations, le gouvernement a décidé de tout reprendre à zéro. Il a donc présenté le projet de loi C-69, ce qui voulait dire qu'il fallait tout recommencer. Le processus n'est pas tellement différent de celui qui a été interrompu. En fait, des commissions indépendantes examinent divers facteurs pour réviser les limites des circonscriptions électorales, et elles devront recommencer à zéro si ce projet de loi est adopté. Nous ne savons pas exactement pourquoi, étant donné que le résultat sera environ le même.

(1225)

Ce projet de loi pose quatre problèmes que les Canadiens devraient savoir. Ces quatre problèmes sont les raisons pour lesquelles nous n'appuyons pas cette mesure législative.

Le premier problème, et le plus grave, c'est que le projet de loi et le processus qu'il appuie auraient pour effet d'augmenter de six le nombre de députés dans notre pays. Au lieu des 295 députés que nous avons actuellement, il y en aurait 301. Évidemment, le nombre continuerait de s'accroître en vertu de ce projet de loi. À chaque législature, il y aurait de plus en plus de parlementaires jusqu'à ce que nous soyons obligés de faire asseoir des députés dans les tribunes parce qu'il n'y aura plus assez de place ici.

C'est tout simplement ridicule. Cela montre un manque flagrant de leadership de la part du gouvernement, qui avait une belle occasion de limiter ou de réduire le nombre de députés. Certains de mes collègues ont fait ressortir le fait que le Canada est «surgouverné» et compte beaucoup plus de représentants par habitant que presque n'importe quelle autre démocratie. Pourtant, les libéraux disent aux Canadiens avec tout le sérieux du monde qu'ils ont besoin de plus de députés.

Pourquoi? Déjà, tous les ministériels se font dire par le premier ministre comment ils doivent voter sous peine d'être expulsés du parti et de ne pas avoir l'occasion de faire leur travail de représentant la prochaine fois. Pourquoi avons-nous besoin de plus de députés qui doivent faire tout ce qu'on leur dit comme des animaux de cirque? En quoi cela sera-t-il utile aux Canadiens?

Le Parti réformiste a présenté une proposition des plus sensées pour réduire légèrement le nombre de députés, qui passerait de 295 à 273. Cela se ferait de façon très juste et équitable. Je suis prêt à parier qu'aucune province qui perdrait des sièges ne se révolterait et ne réclamerait plus de députés. Cela ne risque tout simplement pas de se produire. Notre pays en a assez d'être «surgouverné». Les Canadiens veulent que nous fassions preuve d'un peu de leadership et d'un peu de bon sens dans la façon dont nous constituons notre Chambre des communes.

À l'instar de mes collègues du parti, je tiens à signaler que les députés que l'on élit coûtent chacun au moins 500 000 $ par an et probablement davantage, sans parler de la pension qu'ils touchent après six années de service seulement et ce, jusqu'à la fin de leurs jours.

On réduit les pensions de vieillesse, on ampute sans cesse les services de santé et les prestations de chômage ont été comprimées d'au moins 10 p. 100 dans le dernier budget; aussi, je me demande bien pourquoi on dépenserait de l'argent que l'on n'a pas à profusion, pour augmenter le nombre de représentants à la Chambre, alors que les 295 députés qui sont là actuellement n'arrivent pas à se reprendre en main et à remettre notre pays sur pied.

C'est tout simplement ridicule. J'ai honte de faire partie d'une Chambre des communes et j'aurais honte en tout cas de faire partie d'un gouvernement-mais ce n'est pas le cas, Dieu soit loué-qui est incapable de faire mieux que cela pour les Canadiens. Ne fut-ce que pour cette raison, c'est un mauvais projet de loi.

Le gouvernement a laissé passer une merveilleuse occasion de rétablir un certain équilibre en ramenant le nombre de représentants à des proportions raisonnables et de dépenser avec sagesse l'argent que nous avons, bref d'avoir un nombre suffisant de députés pour faire le travail sans le faire augmenter sans cesse.

Le deuxième aspect de ce projet de loi qui nous préoccupeest le fait que les libéraux insistent pour permettre un écartde pas moins de 25 p. 100 par rapport à la population d'une circonscription.


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(1230)

Même le Sénat n'en revenait pas. Cela signifie que le nombre de personnes représentées sera moins élevé dans certaines circonscriptions que dans d'autres. En fait, l'écart pourra atteindre 25 p. 100. À supposer qu'une circonscription compte deux fois plus d'habitants qu'une autre, cela voudrait dire que les électeurs auraient deux fois plus d'influence sur le plan démocratique que leurs confrères de la circonscription n'ayant que la moitié de leur nombre. C'est presque aussi grave que cela, en l'occurrence. L'écart peut être de 25 p. 100.

Le principe fondamental de la démocratie est la représentation proportionnelle. Elle en constitue un des fondements.

Je voudrais avoir le consentement unanime pour supprimer les articles 56 et 78 du Règlement.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Questions ou observations.

Mme Ablonczy: Madame la Présidente, je ne crois pas que vous m'écoutiez.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je ne pense pas que ce soit nécessaire d'accuser la présidence. On était en train de me consulter sur une autre question.

Mme Ablonczy: Je regrette beaucoup, madame la Présidente.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Pourriez-vous répéter ce que vous avez dit?

Mme Ablonczy: J'ai demandé le consentement unanime pour supprimer les articles 56 et 78 du Règlement.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Reprise du débat.

Mme Ablonczy: La troisième raison pour laquelle nous estimons que c'est un mauvais projet de loi et qu'il faut s'y opposer, c'est que les personnes nommées aux commissions qui redessinent les limites des circonscriptions n'ont plus à rendre compte au Parlement. Les commissions sont créées dans chaque province lorsque se produisent des changements dans la répartition de la population. C'est une bonne façon de procéder qui a permis de mettre fin au remaniement arbitraire des circonscriptions, pratique qui causait autrefois des difficultés dans bon nombre de pays. En fait, cela a été également le cas dans notre démocratie au XIXe siècle.

La Commission de délimitation des circonscriptions électorales a été établie en 1960. Elle est indépendante du gouvernement, c'est-à-dire que les élus ne peuvent prendre part aux décisions au sujet des limites des circonscriptions. Depuis cette date, on a veillé à prévenir toute ingérence politique.

Les nominations à ces commissions sont faites par le Président de la Chambre. Les députés peuvent les contester s'ils estiment que ces nominations ne sont pas objectives, que certaines personnes ne sont pas suffisamment indépendantes du gouvernement. C'est un bon moyen de contrôle.

Mais il ne suffit pas de s'assurer que le processus est juste et objectif, encore faut-il qu'il soit perçu comme tel, et nous devons faire ce qu'il faut pour cela. Nous voulons que cette responsabilité incombe au Parlement. Malgré tout le respect que nous avons pour le Président de la Chambre, il faut avoir la certitude de pouvoir scruter les nominations de près et de pouvoir les contester au besoin. Nous aimerions que le processus soit au-dessus de tout soupçon et qu'il relève du Parlement. Le projet de loi tend à affaiblir cette responsabilité du Parlement, et c'est la troisième raison pour laquelle nous nous y opposons.

La quatrième raison pour laquelle les Canadiens doivent se préoccuper de ce projet de loi est la suivante: s'il est adopté, il faudra reprendre tout le processus de délimitation des circonscriptions. Ce qui va arriver, c'est que les Canadiens ne sauront de quelle circonscription ils font partie que six mois avant les élections. Un grand nombre de Canadiens qui participent de plus en plus au processus démocratique devront essayer de se préparer pour les élections, nommer des représentants capables, selon eux, de faire du bon travail aux prochaines élections, tout cela sur la base de suppositions. Comment les associations de circonscription sont-elles censées nommer des candidats pour des élections alors qu'elles ne savent même pas d'où vont venir les électeurs. Elles essaieront de vendre des cartes de membre et d'attirer des gens qui participent au processus démocratique mais les gens ne sauront pas quelle rue ou quelle avenue le candidat représente.

(1235)

M. Silye: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Il ne semble pas y avoir quorum à la Chambre.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je ne vois pas de quorum à la Chambre. Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre et après le compte:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Il y a quorum.

Mme Ablonczy: Madame la Présidente, c'est un honneur de voir de l'autre côté un aussi grand nombre de députés venir écouter les paroles de sagesse que j'apporte à ce débat.

Nous avons devant nous un projet de loi rempli d'imperfections, qui ne sert pas adéquatement les Canadiens pour quatre raisons. Il accroît et va continuer d'accroître le nombre de députés à chaque législature. Il permet un écart très vaste entre le nombre d'électeurs dans chaque circonscription, portant par là atteinte au principe démocratique de base de la représentation proportionnelle étant donné que certains électeurs auront plus de poids que d'autres, selon le nombre d'électeurs dans la circonscription.

Il élimine, en ce qui concerne les commissions qui seront chargées de tracer les limites de nos circonscriptions, un important moyen de contrôler l'objectivité de ces commissions. L'incertitude règnera, une incertitude paralysante puisque les nouvelles limites ne seraient fixées que quelques semaines avant les


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élections, ce qui empêcherait les Canadiens de participer pleinement et librement au processus démocratique.

Pour toutes ces raisons, qui sont claires et d'une portée considérable, j'exhorte les députés à revenir sur leur décision d'appuyer le projet de loi qui ne sert pas les intérêts des Canadiens comme il le devrait et qui ne renferme pas les dispositions qui devraient s'y trouver.

Je propose:

Que l'amendement soit modifié en supprimant les nos 1, 4a), 6a) et 6b)(i) et en les remplaçant par ce qui suit:
«1, 4a) et 6a)».
(1240)

La présidente suppléante (Mme Maheu): L'amendement est recevable. Reprise du débat.

Mme Ablonczy: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je me demande si mon intervention sera suivie d'une période de questions et d'observations.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Il vous restait deux minutes. C'est pour ça que je n'ai pas annoncé la période de questions et d'observations. Questions et observations.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Madame la Présidente, lorsque le gouvernement est intervenu de façon intempestive, la commission chargée du redécoupage électoral était au beau milieu d'une série d'audiences, mais comme il n'y avait aucune plainte dans ma circonscription concernant la façon dont se ferait le redécoupage, personne ne s'est rendu aux audiences, moi non plus.

J'aimerais quelques renseignements. J'aimerais savoir comment les choses se passent. Je me demande s'il y a eu des audiences dans la circonscription de la députée et, dans l'affirmative, si elle peut éclairer un peu ceux d'entre nous qui n'ont pas participé à ce genre de chose.

Mme Ablonczy: Madame la Présidente, il y a eu une certaine confusion au sujet des audiences relatives au processus de redécoupage électoral, qui, comme je l'ai dit, était presque terminé lorsque le gouvernement l'a interrompu.

Du fait de la décision du gouvernement de déposer un projet de loi visant à reprendre le processus à zéro, certaines commissions n'étaient pas certaines si elles devaient ou non tenir des audiences. Certaines ont tenu des audiences alors que d'autres les ont remises à plus tard.

Dans certains cas, le délai de préavis a été très court. Il y a eu des audiences dans ma région et des témoins y ont fait des dépositions. Certains ont recommandé un meilleur redécoupage ou un redécoupage moins traumatisant de Calgary, ville où se trouve ma circonscription.

Par ailleurs, j'ai eu des échos des audiences tenues ailleurs et les gens semblaient satisfaits des nouvelles limites que proposait la commission, ce qui n'était pas forcément le cas dans le reste du pays.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Madame la Présidente, je suis très heureux des remarques de ma collègue.

L'une de mes principales inquiétudes au sujet de cette mesure législative, et puisque j'ai appuyé l'amendement j'en parlerai dans quelques instants, c'est que le gouvernement est en retard. Ce projet de loi imposera énormément de contraintes à la commission et l'empêchera d'exécuter adéquatement ses tâches. La députée pourrait-elle nous dire si elle croit le gouvernement capable de faire face aux circonstances que crée le projet de loi actuel?

Mme Ablonczy: Madame la Présidente, les difficultés seront importantes pour tous les intervenants, étant donné le nouveau scénario qui nous est imposé en matière de délimitation des circonscriptions électorales.

(1245)

L'administration, l'inscription et la consultation doivent être bien faites à chaque étape de ce processus. Les personnes qui devront regrouper les documents, faire les études et élaborer les conclusions en un temps record seront toutes soumises à une pression énorme. On ne pourra consacrer à la tâche autant de temps et de réflexion qu'on le voudrait, parce qu'on devra respecter des délais très courts et terminer le processus avant les prochaines élections. Il est particulièrement malheureux de voir que nous devons refaire une opération qui avait déjà été exécutée en profondeur il y a deux ans environ. Il n'y a aucune raison de recommencer maintenant alors que nous serons obligés de tout faire à la hâte.

Je crois que le député a fait ressortir une autre faiblesse du processus.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Madame la Présidente, c'est certainement un plaisir pour moi que d'appuyer l'amendement présenté par mon collègue. Nous l'avons présenté pour une raison bien précise.

L'amendement à l'étude en ce moment, qui vise l'article 6, prévoit que la commission ne recommande des changements aux limites existantes des circonscriptions électorales que si les facteurs sont suffisamment importants pour les justifier. Cet article prévoyait un paramètre assez strict que la commission devait suivre. Lorsqu'on examine les motifs qui sont derrière cette directive à la commission, on constate que cela revient à dire de ne pas toucher aux limites existantes à moins que ce soit absolument nécessaire. En un sens, c'est une intervention partisane qui contrôle ce que la commission peut faire ou ne peut pas faire. Cela ne permet pas de jeter un regard objectif sur les limites et par conséquent c'est injustifié. C'est pourquoi, en tant que Parti réformiste, nous avons proposé cet amendement pour essayer, autant que possible, de laisser à la commission suffisamment de souplesse dans la détermination des limites de circonscriptions.

Nous avons également ajouté, pour appuyer cela, un autre amendement, l'alinéa 4.a) qui prévoit que deux membres de la commission non judiciaire soient résidents de la province pour laquelle la commission est constituée.


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M. Morrison: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Mon collègue de Lethbridge a certaines remarques très importantes à faire. Est-ce que nous ne pourrions pas avoir quelques libéraux à la Chambre pour les écouter?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je suis désolée, le député sait très bien que l'on ne peut pas faire allusion à la présence ou à l'absence de qui que ce soit à la Chambre. Je pense qu'il va accepter de retirer ce qu'il a dit.

M. Morrison: Madame la Présidente, je retire mon observation péjorative. Toutefois, je vous demanderais de déterminer s'il y a quorum.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député demande que l'on détermine s'il y a quorum. Je ne vois pas suffisamment de députés.

Convoquez les députés.

Et le timbre ayant retenti:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Nous avons quorum, nous pouvons reprendre le débat.

M. Speaker (Letbridge): Madame la Présidente, je voudrais me prononcer sur l'amendement dont nous sommes saisis, sur le projet de loi C-69 ainsi que sur les recommandations du Sénat.

(1250)

Je voudrais d'abord toucher un mot sur le processus que ce projet de loi a subi depuis l'automne 1993, soit au début de la présente législature, jusqu'à aujourd'hui. Ce qui m'a déçu entre autres à propos du gouvernement libéral, c'est qu'il est arrivé ici mal préparé. Ce projet de loi est une preuve de plus du fait que les libéraux n'étaient pas prêts à assumer les responsabilités qui leur incombent.

Le Parti libéral a passé dix ans dans l'opposition. Un des rôles et des objectifs de la loyale opposition, c'est d'être un gouvernement en attente. Son objectif fondamental est de se préparer à accéder au pouvoir. Les libéraux devaient savoir quel genre de budget ils allaient présenter aux Canadiens. Ils devaient savoir quel genre de programme social ils allaient offrir aux Canadiens. Ils devaient savoir quel genre de projet de loi sur le remaniement des circonscriptions électorales serait présenté à la Chambre des communes en 1993.

Lorsqu'il est arrivé au pouvoir, le gouvernement n'était absolument pas prêt. Il a passé un an à tergiverser, à mener des études, sans trouver de réponses aux questions. Il n'avait rien d'un gouvernement en attente.

Qu'est-ce que les libéraux ont fait dans l'opposition? Qu'ont-ils fait de ce côté-ci de la Chambre? Ils font sensiblement la même chose aujourd'hui.

M. Volpe: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je sais bien que nous sommes tous ici pour débattre la vérité afin que la population soit mise au courant de tout. Néanmoins, je pense que, lorsqu'un député prend la parole, il doit savoir ce dont il est question.

Sous l'ancien régime, il était impensable qu'un parti d'opposition puisse intervenir dans le système; c'est un système qui fonctionne de façon indépendante. . .

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Veuillez continuer.

M. Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, vous avez dit qu'il ne s'agit pas d'un recours au Règlement, mais de l'expression d'une réaction du député face à l'irresponsabilité qui a régné en maître à la Chambre pendant dix ans, alors que les libéraux siégeaient de ce côté-ci et ne faisaient rien d'autre que de chercher à se faire du capital politique et à s'accaparer du puissant levier que représente le fait de former le gouvernement. Tout ce qu'ils recherchaient dans l'accession au gouvernement, c'était d'obtenir des avantages indirects, d'exercer les fonctions de ministre et de détenir des pouvoirs. Et ils étaient censés diriger le pays en conséquence. Ils n'étaient absolument pas préparés.

Depuis que je siège à la Chambre, soit depuis l'automne 1993, j'ai constaté que ça n'a pas changé, qu'il s'agisse du budget, de la politique sociale ou de la politique de la santé, qui a été reportée à l'automne. Le gouvernement ne sait pas encore quel genre de politique de la santé attend les Canadiens ou quel genre de. . .

Mme Terrana: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Nous sommes ici pour débattre le projet de loi C-69, et non pas faire le bilan de tel ou tel parti.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Reprise de débat.

M. Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, je discute du processus relatif au projet de loi C-69. J'ai dit, en introduction, que ce processus était mal conçu, qu'il était basé sur un manque de préparation de la part du gouvernement, qu'il était, fondamentalement, mauvais.

À ce stade-ci, nous essayons d'élaborer les règles de base en vertu desquelles une commission va établir les limites des circonscriptions électorales dans tout le pays. Les commissions vont avoir bien du mal à faire de l'excellent travail à cet égard, dans le peu de temps dont elle disposeront.

Il y a deux autres arguments dont je voudrais faire part au sujet du projet de loi C-69. Mon collègue de Calgary-Centre a exposé très clairement nos réserves face à la décision de porter le nombre de sièges à la Chambre de 295 à 301. Le Parti réformiste a adopté une position bien précise selon laquelle nous sommes prêts à réduire le nombre de sièges à la Chambre, chose tout à fait réfléchie. Cela va dans le sens du point de vue actuel des Canadiens, qui reconnaissent que nous devons être plus économes et suivre la voie qu'ils nous indiquent à ce stade-ci. Le Parti réformiste est tout à fait disposé à le faire.

(1255)

Il faut poser une question portant sur mes premières observations: Pourquoi le gouvernement n'en fait-il rien? Mes collègues ont précisé, dans le cadre du débat, que le gouvernement n'écoute pas les Canadiens, alors que c'est ce qu'ils souhaiteraient.


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Je voudrais préciser également, pour ma part, que si le gouvernement n'agit pas en ce sens, c'est parce qu'il n'a pas la volonté politique voulue. Il pratique l'ancienne politique des années 70 et du début des années 80, lorsque le gouvernement avait plus d'argent et n'avait pas peur de s'endetter, la population ne lui demandant aucun compte. Il s'agissait d'éviter les problèmes politiques, de ne prendre aucune décision difficile, d'accroître le nombre de députés, car personne ne savait la différence. On pouvait continuer d'agir comme on l'avait toujours fait.

Les libéraux n'ont pas changé. Ils ne se rendent pas compte que la société évolue, à l'instar de notre système politique. Les gens demandent aux dirigeants du pays et des provinces d'être plus économes et de tenir compte du budget du pays dans leurs décisions. Cela signifie que nous devons commencer ici.

Je reconnais un certain mérite au ministre des Finances, qui a prévu des compressions de dépenses d'environ 8 milliards de dollars dans son budget. Il a procédé aux réductions auxquelles ses collègues libéraux se sont opposés pendant longtemps. Il a fallu des mois pour que les membres du Cabinet se décident à dire qu'ils allaient réellement appuyer le ministre des Finances, en ce qui concerne ces réductions de dépenses. Jusque-là, ils avaient dit qu'ils n'en feraient rien. Enfin, quelqu'un leur a dit que le public réclamait des réductions de dépenses, et ils en ont fait dans le dernier budget. Cela a nécessité une certaine volonté politique. Les libéraux ont encore peur de prendre des décisions importantes pour le pays. Cela m'inquiète beaucoup.

M. Volpe: Nous avons pris celle-ci.

M. Speaker (Lethbridge): Dans le projet de loi C-69, nous constatons encore une fois le manque de volonté politique de prendre une décision importante.

Je m'arrête là, étant donné que le gouvernement veut défendre une position qui n'est pas défendable et qui est inacceptable pour le moment.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote!

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le vote porte sur le sous-amendement.

Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

(1300)

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément à l'article 45(6) du Règlement, le vote par appel nominal sur la question dont la Chambre est maintenant saisie sera reporté. Je vous reviendrai, après consultation, pour vous indiquer à quelle heure.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Madame la Présidente, j'aimerais soumettre à la Présidence dans son délibéré, qu'elle choisisse de faire le vote à 13 h 30 cet après-midi pour la raison suivante: si ce projet de loi n'est pas adopté par cette honorable Chambre plus tard aujourd'hui en version finale, il risque fort bien de disparaître puisqu'il y a, à l'intérieur de ce projet de loi, une disposition selon laquelle le projet de loi doit être adopté et recevoir la sanction royale par l'autre endroit pas plus tard que le 20 du mois courant. Cela veut dire que si le projet de loi n'est pas adopté dans tous ses aspects au plus tard aujourd'hui, on sera dans l'impossibilité de traiter du dossier et le projet de loi disparaîtra.

Donc, je vous soumets, madame la Présidente, lorsque vous prendrez en délibéré les soumissions des deux formations politiques dans cette Chambre qui feront des propositions à la Présidence sur l'heure du vote, que vous considériez que le projet de loi doit être non seulement voté à cette étape d'amendement, mais également à son étape finale plus tard ce jour, sinon l'exercice devient académique.

Là-dessus, j'aimerais terminer ma soumission à la Présidence, et j'espère que ce projet de loi, qui a été conçu par un comité parlementaire et qui a fait l'objet à ce moment-là d'un consensus en comité, sera adopté. Je crois qu'il serait très dommage et dommageable pour tous et toutes si le projet de loi était appelé à disparaître.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Madame la Présidente, notre Règlement est très clair à ce sujet et je me permettrai de vous en lire un extrait pour rafraîchir la mémoire de tout le monde.

Conformément à notre Règlement, il est bien indiqué que: «. . .pendant la sonnerie d'appel, le whip en chef du gouvernement ou le whip en chef de l'opposition peut demander à l'Orateur de différer le vote. L'Orateur diffère alors le vote à un autre moment déterminé qui ne dépasse pas l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien. . .», et le reste.

Or, selon nos usages et selon la façon dont on a toujours fonctionné dans cette Chambre, certainement depuis l'adoption de ce règlement, et c'est très clair, lorsqu'une demande pour différer le vote est présentée pour la séance suivante, nécessairement, la Présidence, lorsqu'une seule demande est faite et qu'elle est faite en premier lieu, acquiesce à cette demande. Et même si une demande revient par la suite d'une autre formation politique, il n'y a jamais eu de décision rendue qui a fait en sorte qu'on considère la deuxième demande.


13906

(1305)

Le Règlement est clair et c'est la première demande qui prévaut. Je vous demande donc d'accorder ce que vous a demandé mon collègue.

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Madame la Présidente, je suis d'accord avec le député qui a pris la parole avant moi. J'appuie cette décision. C'est le Règlement de la Chambre. Ce règlement est clair et bien établi et appliqué pour le bénéfice de tous les députés. Je crois qu'il faut acquiescer à la première demande formulée.

En outre, le whip du gouvernement a exercé beaucoup de pression pour que vous envisagiez sa demande. Il vous a laissé 30 secondes pour examiner la question. D'ailleurs, en vous pressant de la sorte, il a omis de dire que l'autre endroit avait toute la semaine prochaine pour étudier la question. C'est suffisant, et c'est pourquoi j'appuie la demande de l'opposition.

La présidente suppléante (Mme Maheu): J'ai déjà dit que j'allais examiner la demande. J'en reparlerai à la Chambre dans quelques minutes.

Entre-temps, nous poursuivons l'étude des initiatives ministérielles.

* * *

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-70, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu et des lois connexes, dont un comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

L'hon. Sergio Marchi (au nom du ministre des Finances) propose: Que le projet de loi modifié soit agréé.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 298)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Allmand
Anawak
Arseneault
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Barnes
Beaumier
Bellemare
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélanger
Campbell
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Cohen
Collenette
Comuzzi
Cowling
Culbert
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Duhamel
Eggleton
English
Fewchuk
Finestone
Finlay
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gallaway
Godfrey
Goodale
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Irwin
Jackson
Jordan
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Kraft Sloan
Lastewka
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Lincoln
Loney
MacAulay
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Marchi
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
Mifflin
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Pillitteri
Reed
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rock
Rompkey
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Serré
Shepherd
Sheridan
Skoke
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Torsney
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wells
Wood-127


13907

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Blaikie
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast)
Bélisle
Caron
Chrétien (Frontenac)
Crête
Cummins
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Savoye
Dumas
Duncan
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gauthier (Roberval)
Gilmour
Godin
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Guay
Hanrahan
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hermanson
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Jacob
Jennings
Johnston
Kerpan
Landry
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Marchand
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McLaughlin
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Ménard
Nunez
Picard (Drummond)
Pomerleau
Ramsay
Ringma
Rocheleau
Sauvageau
Schmidt
Silye
Solberg
Solomon
Stinson
Strahl
Thompson
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Venne
Williams-76

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Asselin
Bachand
Brien
Calder
Canuel
Copps
Crawford
Deshaies
Dupuy
Easter
Gagnon (Québec)
Guimond
Harper (Churchill)
Hickey
Knutson
Lalonde
Laurin
Martin (LaSalle-Émard)
Mercier
O'Reilly
Ouellet
Plamondon

(1345)

Le Président: Je déclare la motion adoptée. Quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois? Maintenant?

Des voix: D'accord.

L'hon. Herb Gray (au nom du ministre des Finances) propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. David Walker (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre de nouveau la parole pour appuyer l'adoption rapide du projet de loi C-70, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu.

Ce projet de loi, comme le savent les députés, porte exécution d'un certain nombre de mesures fiscales contenues dans le budget de 1994 et d'autres mesures annoncées par le gouvernement au cours de l'année qui vient de s'écouler.

Au moment de proposer la troisième lecture, il convient de rappeler le contexte dans lequel le projet de loi a été présenté. Nous sommes tous au courant des défis budgétaires que le Canada doit relever. Peu nombreux sont ceux qui contestent la nécessité d'appliquer des mesures rigoureuses et les choix difficiles que nous devons prendre collectivement. Personne, sans doute, ne contestera que l'équité et l'efficacité sont les principes essentiels dont nous devrons nous inspirer dans notre lutte contre le déficit.

Le gouvernement s'est inspiré de ces mêmes principes dans ses compressions de dépenses et le ministre en a fait autant dans les budgets de 1994 et 1995. Dans l'un et l'autre cas, les seules compressions budgétaires ne permettraient pas de réduire suffisamment le déficit. Aux compressions de dépenses, le gouvernement se devait d'ajouter des mesures fiscales.

La simple équité nous commandait d'agir ainsi. Lorsque le gouvernement a examiné le régime fiscal, son souci d'équité l'a amené à s'en prendre aux privilèges fiscaux inacceptables plutôt que d'imposer des hausses générales d'impôt aux contribuables canadiens.

Lorsque nous avons examiné le régime de l'impôt des sociétés, nous avons voulu faire en sorte que les entreprises paient leur juste part d'impôt sur le revenu pour financer les programmes gouvernementaux et nous avons voulu empêcher certaines entreprises ou secteurs d'activité de profiter indûment de certaines dispositions fiscales.

C'est dans cette optique que le budget de 1994 proposait un certain nombre de mesures concernant l'impôt des sociétés. Je tiens cependant à souligner que l'objectif du gouvernement n'était pas de pénaliser les entreprises canadiennes ou de nuire à leur compétitivité. Même que nous jugeons indispensable le maintien d'un système concurrentiel dans le contexte actuel de mondialisation de l'économie.

J'aimerais maintenant décrire brièvement certaines des mesures particulières annoncées dans le budget de 1994 qui se retrouvent dans le projet de loi C-70.

Par souci d'équité, la règle fiscale relative à la remise de dette et à la saisie a été modifiée. Les anciennes dispositions de la Loi de l'impôt ne tenaient, à toutes fins utiles, pas compte aux fins de l'impôt sur le revenu de bon nombre de transactions destinées à régler des dettes.

Les nouvelles règles fournissent une base solide dans le domaine du règlement de dettes. Elles prévoient essentiellement l'application du montant impayé pour réduire une perte reportée et l'ajout d'une partie des dépenses au revenu du débiteur. Je tiens cependant à signaler que des dispositions spéciales d'allégement viendront modérer la rigueur de ces nouvelles règles.

Passons maintenant au traitement fiscal des titres détenus par des institutions financières. Jusqu'à présent, on ne trouvait aucune règle particulière concernant le traitement fiscal de ces titres

13908

dans la Loi de l'impôt. Les mesures prévues dans le projet de loi C-70 visent à réduire l'incertitude dans ce domaine et à faire en sorte que le revenu tiré de tels titres soit bien évalué. En vertu des modifications proposées, certains titres seront évalués à leur valeur marchande, c'est-à-dire que l'augmentation ou la perte de valeur au cours d'une année doit être déclarée l'année même.

Toujours pour être justes, nous proposons une règle transitoire permettant d'étaler sur cinq ans les augmentations de revenu attribuables aux nouvelles règles. La plupart de ces nouvelles règles sont entrées en vigueur après le 21 février 1994.

(1355)

De nouvelles règles s'appliquent également aux titres de créance qui ne sont pas assujettis à l'évaluation à la valeur marchande. Elles portent sur l'évaluation du revenu pendant que les titres. . .

Le Président: Le député aura la parole lorsque nous reprendrons le débat.

* * *

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

La Chambre reprend l'étude de la motion concernant les amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-69, Loi portant sur la création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et la révision des limites des circonscriptions électorales; ainsi que de l'amendement.

Le Président: Plus tôt dans la journée, on a demandé à la présidence de différer le vote portant sur le sous-amendement au projet de loi C-69.

[Français]

Je demanderais aux whips de se consulter et j'espère qu'ils pourront en venir à une décision ou au moins à une recommandation à la Présidence.

[Traduction]

J'espère que les whips se consulteront entre eux. S'ils ne se seront pas entendus sur une décision, je reviendrai à la Chambre à 16 heures pour fixer l'heure à laquelle se tiendra le vote.

On a demandé que le vote ait lieu à 13 h 30. Cela n'a plus d'importance vu qu'il est passé 13 h 30. J'aimerais que les whips discutent entre eux. S'ils ne parviennent pas à une décision, je la prendrai à 16 heures.

[Français]

J'accorde la parole au député de Roberval sur un rappel au Règlement.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, j'interviens sur un rappel au Règlement concernant l'usage dans cette Chambre. Quand un whip demande de reporter un vote, j'ai relevé un certain nombre de situations et, de tout temps, la Présidence reporte le vote à la demande du seul whip qui se présente, lorsqu'il y en a juste un.

Est-ce que je pourrais savoir pour quelle raison vous demandez maintenant aux whips de se consulter, alors qu'il y a une seule demande de valide devant la Présidence et que, à notre avis, la Présidence doit l'apprécier?

Des voix: Bravo!

Le Président: J'ai demandé qu'on m'accorde un peu de temps, puisque la période des questions commencera d'ici à deux ou trois minutes, afin de revoir moi-même ce qui a précédé. Pour cette raison, je veux un peu de temps.

Non seulement cela, je demanderais aux whips de se consulter. S'ils le voulaient, peut-être qu'il ne serait pas nécessaire que le Président prenne une décision.

Mais au cas où il soit nécessaire de le faire, je le ferai à 16 heures.

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, avec tout le respect que je vous dois, je me permets de faire remarquer que le sous-alinéa 45(5)a)(ii) du Règlement prescrit clairement ce qui suit:

Pendant la sonnerie d'appel, le whip en chef du gouvernement ou le whip en chef de l'opposition peut demander au Président de différer le vote.
C'est ce qui s'est produit.

Le Président diffère alors le vote à un autre moment déterminé qui ne dépasse pas l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien du jour de séance suivant, qui n'est pas un vendredi.
C'est également cela qui est arrivé. Le whip de l'opposition a demandé de différer le vote. Cinq minutes plus tard, le whip du gouvernement est intervenu pour demander le contraire. Il a demandé de prendre le vote à 13 h 30. Il a été question de deux moments différents; soit qu'on diffère le vote à la prochaine séance, ou demain, de sorte que le vote serait de nouveau reporté jusqu'à lundi, soit qu'on le prenne aujourd'hui à 13 h 30. Comme il est trop tard pour aujourd'hui, le whip du gouvernement n'a pas présenté une demande valable. La demande du whip de l'opposition doit être respectée et agréée.

Le Président: Je remercie le whip du Parti réformiste d'avoir fait valoir son opinion; je vais certainement en tenir compte quand je prendrai ma décision à 16 heures.

Comme il est 14 heures, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés.

_____________________________________________


13908

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE PROGRAMME D'ENSEIGNEMENT COOPÉRATIF

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, un groupe d'étudiants de l'Université du Nouveau-Brunswick, qui participent au programme d'enseignement coopératif, sont aujourd'hui en visite dans la capitale. Ils sont venus afin d'encourager la mise au point de nouveaux


13909

programmes intéressants d'enseignement coopératif. Ces programmes consistent en six périodes de stage représentant un total de deux ans d'une expérience professionnelle précieuse pour chaque participant.

Les étudiants, notamment ceux qui font des stages loin de l'école et loin de chez eux, apprennent à devenir indépendants et à gérer leur temps. Ils ont aussi la possibilité de nouer d'importants contacts avec les employeurs. Sur 37 étudiants participant à ce programme, qui doivent sortir diplômés cette année de l'Université du Nouveau-Brunswick, cinq seulement sont encore à la recherche d'un emploi.

La plupart des étudiants qui ne participent pas au programme ne commenceront à travailler qu'une fois diplômés. L'avantage le plus immédiat et le plus concret du programme d'enseignement coopératif est financier. Ce programme finance l' enseignement et la formation de l'étudiant sans qu'aucune aide ne soit requise ou alors une aide minime. Les étudiants de l'Université du Nouveau-Brunswick demandent au gouvernement d'encourager la mise au point de programmes d'enseignement coopératif.

* * *

[Français]

LES MÉDICAMENTS BREVETÉS

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, l'acharnement que les libéraux ont mis en début de mandat à modifier la Loi sur les médicaments brevetés s'explique mal sur le plan économique. En effet, le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés nous apprend cette semaine que le prix de ces médicaments a diminué de près de 0,5 p. 100 en 1994.

Depuis 1987, année de l'entrée en vigueur de la loi, le prix des médicaments brevetés n'a augmenté en moyenne que de 2,1 p. 100, moins que l'inflation, alors qu'au total, le prix des médicaments a augmenté en moyenne de 7,5 p. 100. Ce sont donc les médicaments génériques qui ont vu leurs prix grimper en flèche.

En plus d'avoir contenu ses prix, l'industrie des médicaments d'origine a investi 561 millions de dollars en recherche et développement l'an dernier, ce qui est supérieur à ses engagements. Les libéraux doivent cesser de harceler cette importante industrie dont les retombées sont considérables pour le Québec et le Canada.

* * *

[Traduction]

LES VOTES LIBRES

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, après les élections de 1993, mon parti m'a demandé si j'accepterais de m'occuper du dossier de la réforme parlementaire. Je suis rapidement parvenue à la conclusion qu'un élément crucial de ce dossier était le vote libre. Et ce, au sens non seulement où les responsables des ministériels permettraient un vote libre sur un projet de loi donné, mais aussi où les partis autoriseraient la dissidence, particulièrement à l'égard de certains projets de loi d'initiative ministérielle faisant partie du programme du gouvernement.

De l'avis des auteurs du rapport McGrath, publié en 1985, et des membres du Comité de gestion de la Chambre de 1993, on devrait autoriser les députés à exprimer leur dissidence sans crainte de représailles de la part de la direction de leur parti. Ces deux groupes pensent que l'expression de la dissidence ferait de la Chambre un endroit plus sain.

Je suis heureuse de voir que les députés, des deux côtés de la Chambre, commencent à exprimer leur dissidence. Cependant, il n'y aura pas de vote libre tant que subsistera la crainte de représailles de la part de la direction de leur parti. J'espère que les responsables des ministériels verront dans cette dissidence une saine expression de notre système démocratique et que ceux qui ont exprimé leur dissidence n'auront pas à subir de représailles.

* * *

LE HOCKEY PROFESSIONNEL

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, je voudrais attirer l'attention du gouvernement sur le fait qu'on attend une décision de Revenu Canada sur l'entente visant à sauver les Jets de Winnipeg.

On a demandé à Revenu Canada de considérer comme un don de charité les millions de dollars qui seront consacrés à l'achat et au sauvetage de l'équipe de Winnipeg, mais aucune réponse n'a été reçue à ce sujet.

Étant donné tout ce qui se passe au pays, et surtout dans le secteur du hockey professionnel, il me semble qu'on ne peut pas considérer la LNH comme une oeuvre de charité. J'aimerais bien que l'équipe demeure à Winnipeg, mais je ne veux pas qu'on crée un précédent en accordant au hockey professionnel le statut d'oeuvre de charité aux fins d'établissement de l'impôt. Je crois que ce serait un précédent terrible et une injustice épouvantable.

* * *

LA BANQUE FÉDÉRALE DE DÉVELOPPEMENT

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, depuis sa création, il y a 50 ans, la Banque fédérale de développement a répondu aux besoins des grandes et petites entreprises au Canada. L'institution a toujours su adapter son fonctionnement à un climat politique, social et économique en constante évolution. Toutefois, une fois de plus, le moment de procéder à des changements radicaux est venu.

(1405)

C'est pourquoi les principaux entrepreneurs de London-Middlesex applaudissent au projet de loi sur la Banque de développement du Canada qui a été déposé récemment. Cette nouvelle loi changera le nom de la banque actuelle mais, surtout, lui permettra d'évoluer et d'élaborer des programmes et des services qui répondent aux besoins d'aujourd'hui.

Actuellement, nous devons nous adapter aux réalités d'une nouvelle économie mondiale, une économie qui donne aux entrepreneurs, petits et moyens, la responsabilité de promouvoir la croissance économique et la création d'emplois.


13910

Je pense que cette initiative démontre une fois de plus, les engagements de notre gouvernement envers la population du Canada. J'ai hâte de voir cette nouvelle loi mise en oeuvre.

* * *

«FORGER LE LIEN»

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Monsieur le Président, les 8 et 9 juin, l'Université Acadia, Chrysler Canada, le ministère de l'Éducation ainsi que le ministère du Développement économique de Nouvelle-Écosse vont parrainer un colloque international sur l'éducation et l'économie intitulé «Forger le lien». Cette manifestation, préambule au sommet de Halifax, réunira des dirigeants d'entreprise, des éducateurs et des jeunes qui discuteront de nouveaux partenariats entre l'éducation et l'économie.

Pour les jeunes Canadiens les possibilités de trouver leur premier emploi dans un domaine donné sont beaucoup plus grandes s'ils possèdent la formation et l'expérience professionnelle voulues. Qu'il s'agisse de l'enseignement postsecondaire et d'un stage, ça aide à faire un premier pas. Les emplois disponibles vont être plus nombreux que jamais auparavant pour celui qui possède plus de connaissances théoriques et pratiques.

Il est donc capital qu'en tant que gouvernement, nous forgions des liens encore plus étroits entre les éducateurs et le monde des affaires. C'est dans le cadre de forums comme celui-ci qu'un plus grand nombre de jeunes Canadiens en viendront à saisir les liens existant entre une bonne éducation et de bons emplois.

* * *

LE RASSEMBLEMENT DES AÎNÉS ET DES PEUPLES TRADITIONNELS

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, le 12e rassemblement annuel des aînés et des peuples traditionnels a eu lieu à l'Université Trent, à Peterborough. Trois mille autochtones et autres se sont réunis sous le thème de la croissance de la famille grâce aux aînés.

Des cérémonies, des pièces de théâtre, des concerts et des ateliers ont été organisés. Les ateliers ont notamment porté sur les traditions orales, les écoles d'immersion, le fait d'être Indien aujourd'hui, la vie des Inuit, le ressourcement, des questions concernant les femmes autochtones, la langue traditionnelle et les herbes médicinales. La pièce «Les rythmes de la Terre», dans laquelle des jeunes apportent des changements dans leur milieu, a constitué l'un des faits saillants de cette rencontre. Elle a été jouée par des autochtones de Curve Lake et de Hiawatha.

La conférence annuelle des aînés regroupe des Canadiens autochtones qui s'entraident et aident les autres afin de faire du Canada un pays où il fait encore mieux vivre.

J'ajoute avec plaisir que l'Université Trent nommera une nouvelle chancelière à l'automne. Il s'agit de Mary Simon, anciennement présidente de la conférence circumpolaire inuit et actuellement ambassadrice du Canada pour les affaires circumpolaires.

[Français]

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau, BQ): Monsieur le Président, le quotidien The Globe and Mail de ce matin fait état des coupures de personnel qui affectent la Société Radio-Canada et qui constituent l'amorce de plus importantes coupures qui risquent de changer complètement le rôle, la nature et même le mandat de la Société.

À la suite du dernier budget, la Société Radio-Canada et la CBC devront se départir de plus de 1 000 employés. Cependant, M. Tony Manera, l'ancien président, avait avancé que de 3 000 à 4 000 emplois devront être coupés d'ici trois ans. Dans ce contexte, il est donc étonnant que le ministre du Patrimoine refuse toujours de dévoiler les compressions budgétaires qu'il a imposées à la Société Radio-Canada.

Il ne faudra pas non plus s'étonner que, dans un avenir rapproché, la programmation d'émissions télévisées devienne de plus en plus américaine et qu'on assiste à la longue agonie de ce qui a été un joyau de notre culture, tant québécoise que canadienne.

* * *

[Traduction]

LA DÉMOCRATIE AU CANADA

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, j'ai le regret de dire que les derniers jours marquent la fin de la démocratie pour les Canadiens.

Il n'y a pas si longtemps, le premier ministre promettait une représentation équitable à tous les Canadiens qui éliraient les libéraux. Non seulement il a manqué à l'une des promesses fermes qu'il a faites dans le livre rouge, mais aussi il a prévenu les membres de son parti de respecter la discipline de parti, faute de quoi il recourra à l'arme ultime et refusera de signer leur déclaration de candidature, au moment des prochaines élections. Ces députés pourraient alors se voir privés de leur cher régime de retraite, ce qu'ils redoutent au plus haut point.

Je tiens à dire aux députés d'en face que nous respectons chaque jour les désirs de nos électeurs, qu'ils peuvent proposer leurs propres représentants et que notre chef tiendra compte de leurs désirs au moment de signer des déclarations de candidature. Étant donné ces trois politiques, nos électeurs savent que nous sommes le seul vrai parti démocratique du Canada.

* * *

(1410)

LE SERVICE JEUNESSE CANADA

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord, Lib.): Monsieur le Président, nos jeunes sont pleins d'idées nouvelles, d'énergie et de connaissances dont ils peuvent faire profiter nos institutions nationales, nos milieux de travail, notre société. En retour, il faut leur ouvrir des débouchés. Il est donc louable que le gouvernement aide les jeunes qui ne fréquentent plus l'école et n'ont pas de travail à obtenir la formation et l'expérience nécessaires à leur réussite, à l'avenir.


13911

Grâce au Service jeunesse Canada, 850 jeunes de tout le pays participent à 63 projets qui vont les aider à acquérir une expérience de travail extrêmement utile tout en apportant une contribution importante à leur collectivité.

Dans ma circonscription, Winnipeg-Nord, le Comité de justice pour les jeunes de Maples s'attaquera au racisme, à la violence commise par les bandes et à la fraude, grâce à des programmes de sensibilisation à la criminalité.

En fait, les Canadiens ont bien des raisons de s'enorgueillir du Service jeunesse Canada. Nous sommes fiers du renouveau, de l'espoir et de la vision que nos jeunes offrent à notre merveilleux pays.

* * *

[Français]

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER DE 2002

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard, Lib.): Monsieur le Président, en tant que président du caucus libéral du Québec, je veux me joindre à tous les Québécois et les Canadiens pour souhaiter bonne chance à la ville de Québec face à la possibilité qu'elle soit choisie demain la ville hôte pour les Jeux d'hiver de l'an 2002. En effet, c'est dans quelques heures que sera prise cette importante décision et nous saurons enfin si la ville de Québec sera l'heureuse élue.

Il va sans dire que c'est avec beaucoup d'anticipation que nous attendons cette décision et inutile de dire que nous serions très heureux d'avoir chez nous les Jeux d'hiver de l'an 2002. Le Québec est reconnu mondialement, d'une part, grâce à nos athlètes de renom qui ont su devenir ses ambassadeurs en nous représentant de façon remarquable, et, d'autre part, grâce à notre accueil chaleureux.

Le fait que la ville de Québec soit en lice parmi les concurrents de haut calibre démontre hors de tout doute que nous sommes à la hauteur des prochains Jeux d'hiver. À tous les intervenants dans cet important dossier, merci! À la ville de Québec, bonne chance!

* * *

LA CRÉATION D'EMPLOIS

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul, Lib.): Monsieur le Président, le ministre québécois délégué à la restructuration a rendu public hier la 8e étude sur la souveraineté du Québec. Une des premières conclusions à laquelle en vient l'auteur est que l'Outaouais québécois perdrait au moins 3 500 emplois avec l'accession du Québec à l'indépendance. Si on ajoute ces 3 500 postes bien rémunérés aux 5 000 autres dont le ministre a confirmé la disparition dans les sièges sociaux des grandes entreprises de Montréal, le bilan séparatiste de création d'emplois s'établit déjà à 8 500 postes en moins.

Le ministre québécois délégué à la restructuration devrait sans tarder mettre un terme à la production de ces études et utiliser les fonds disponibles pour créer des emplois plutôt que pour en annoncer la disparition. C'est ce que veulent les Québécois et Québécoises et c'est à cela que le gouvernement du Canada travaille.

* * *

LE REVENU FAMILIAL

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, une étude de Statistique Canada révélait hier que le revenu familial après impôt avait diminué de 2,1 p. 100 en 1993. Par rapport à 1989, les familles québécoises et canadiennes disposent en moyenne de 3 025 $ de moins par année. Toutes les couches de la société sont frappées par cette chute amorcée en 1989, qui nous ramène à des niveaux de revenus que nous n'avions pas connus depuis le début des années 1970. Même les familles les plus pauvres ont vu leur revenu après impôt diminuer depuis 1989.

Les économistes prévoient que ce déclin pourrait bien continuer au cours des prochaines années, d'autant plus que le gouvernement fédéral, avec ses réformes de l'assurance-chômage, laisse tomber les travailleurs les moins bien rémunérés. La dignité du travail, c'est d'abord la dignité de pouvoir en vivre. C'est ce que ce gouvernement devrait comprendre avant de couper aveuglément son soutien à ceux qui en ont besoin.

* * *

[Traduction]

LES VOTES LIBRES

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, à la page 90 du livre rouge libéral, on dit qu'un gouvernement libéral renforcera les pouvoirs des députés en prévoyant une plus grande liberté de vote. Hier, le premier ministre a violé cette promesse en avertissant ses propres députés que si n'importe lequel d'entre eux refusait, plus d'une fois, dans le cadre d'un vote, de respecter la discipline du parti, il ne signerait pas sa déclaration de candidature pour les prochaines élections fédérales.

Lorsqu'on viole des promesses électorales au sujet d'une plus grande liberté de vote pour les députés de l'arrière-ban, on expulse des députés de comités, on leur retire leurs privilèges en matière de voyages ou on menace de ne pas signer leur déclaration de candidature et quand, comme hier soir, le whip du gouvernement leur ordonne de ne pas se prononcer, on ne fait pas preuve de leadership. Il s'agit plutôt d'une dictature qui impose ses vues aux moutons que sont les députés d'en face.

(1415)

Je suppose que si le caucus libéral ressemble au caucus Mulroney et bêle comme lui, c'est alors l'équivalent d'un caucus Mulroney qu'on peut, lui aussi, conduire à l'abattoir aux prochaines élections.

13912

ILIQQUSIVUT

M. Jack Iyerak Anawak (Nunatsiaq, Lib.):

[Note de l'éditeur: Le député s'exprime en inuktitut.]

[Traduction]

Monsieur le Président, aujourd'hui, à 16 heures, Inuit Tapirisat du Canada tiendra une conférence de presse sur la colline du Parlement. On y dévoilera Iliqqusivut, l'Esprit inuit du pavillon de l'Arctique qu'on pourra visiter à l'Exposition nationale canadienne de cette année, à Toronto.

Pendant dix-huit jours, en août, les Inuit apporteront un peu de l'Arctique à l'ENC de Toronto. Le pavillon mettra en vedette des entreprises, des artistes et des interprètes de la culture inuit. Les visiteurs pourront entendre les chants de gorge inuit bien connus et voir les danseurs accompagnés au tambour, participer à des jeux traditionnels inuit de l'Arctique, déguster les mets du Nord, l'omble et le caribou, et acheter sculptures, gravures, bijoux et vêtements inuit.

J'encourage tous les députés, leur personnel et tous les autres Canadiens à se rendre à l'ENC, cet été, pour faire l'expérience du mode de vie inuit. Pour en avoir un avant-goût, qu'ils se joignent à nous, plus tard cet après-midi, sur la pelouse en face du Parlement.

_____________________________________________


13912

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA BOSNIE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le Sommet du G-7 s'est ouvert ce matin à Halifax, alors que 12 Casques bleus et observateurs canadiens sont toujours détenus en otage par les forces serbes. Ils servent littéralement de bouclier dans un contexte où on assiste à une offensive de troupes bosniaques aux abords de Sarajevo en vue de chasser les Serbes qui assiègent la capitale bosniaque.

Le ministre de la Défense peut-il nous indiquer quelles mesures concrètes ont été prises pour renforcer la sécurité des quelque 850 Casques bleus canadiens déployés à Visoko et qui se retrouvent pris entre deux feux dans l'affrontement entre les troupes bosniaques et les troupes serbes au nord de Sarajevo.

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, j'apprécie la question du député. Je dois l'informer que des arrangements, des précautions, ont été pris à la base de Visoko pour une attaque, à cause des concentrations de forces musulmanes. La situation nous inquiète beaucoup mais jusque-là, nos troupes sont en bonne forme et il n'y a pas de danger imminent.

Pour les 11 membres des forces canadiennes à Ilijas, c'est un vrai problème à cause du début des hostilités dans cette région. Jusqu'à présent, ils sont en bonne forme et ne sont pas en danger.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Défense a utilisé, à une période des questions antérieure, l'expression «ils se trouvent dans une situation très délicate».

J'aimerais que le ministre de la Défense nous indique plus clairement ce qu'il voulait dire par cette expression «situation très délicate» et comment explique-t-il que ces Casques bleus n'aient toujours pas été libérés? Pourrait-il nous en parler de façon plus précise, s'il vous plaît?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes très inquiets de ce que nos militaires n'aient pas été libérés. Hier, j'ai appelé le chargé d'affaires du gouvernement yougoslave afin de déposer une plainte officielle auprès des autorités de Belgrade.

Nous sommes très reconnaissants au président Milosevic et au gouvernement yougoslave à Belgrade des efforts qu'ils ont déployés en vue d'obtenir la libération des otages avec l'aide des Serbes de Bosnie. Toutefois, nous leur avons demandé d'intercéder immédiatement afin d'obtenir la libération des 11 Canadiens qui se trouvent à Ilijas et celle du capitaine Rechner qui est toujours à Pale, le quartier-général serbe de Bosnie.

ll n'y a aucune raison de détenir ces personnes, si ce n'est pour les utiliser comme boucliers humains pour empêcher les musulmans de Bosnie, qui accumulent actuellement des forces, de lancer une attaque pour libérer les banlieues de Sarajevo qui sont aux mains des Serbes.

(1420)

Il est totalement inacceptable que les deux parties utilisent le personnel des Nations Unies, et en particulier des Canadiens, comme pions dans le conflit qui les oppose.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, étant donné que le premier ministre se trouve actuellement à la réunion du G-7 et que se retrouvent là des acteurs extrêmement importants dans toute cette pénible histoire, est-ce que le ministre de la Défense peut nous dire si le premier ministre entendait, dès aujourd'hui, saisir les chefs d'État du G-7 de l'urgence d'agir rapidement afin de sauver nos troupes, afin de préserver les soldats canadiens qui se retrouvent actuellement dans la plus mauvaise situation dans cette partie de la planète?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je suis convaincu que notre premier ministre a l'intention de soulever le sujet à Halifax avec ses collègues du G-7, parce qu'il sait bien que la situation n'est pas bonne et tout le monde a le même désir, soit la libération de tous les otages, de tous les détenus.

[Traduction]

Je suis sûr que le premier ministre soulèvera la question auprès de ses collègues à Halifax. Tous les pays membres du G-7 sont préoccupés, comme tout le monde, de la détérioration de la situation dans l'ancienne Yougoslavie.


13913

Quant à savoir si le Canada participera à la force de réaction rapide, le premier ministre en décidera. Il fera connaître sa décision au moment opportun.

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense.

Comme l'a mentionné le ministre de la Défense, les chefs d'État au Sommet du G-7 vont discuter de la situation en Bosnie. Cependant, hier, à Washington, le président français, Jacques Chirac, a déploré la lenteur entourant la mise sur pied de la force de réaction rapide en Bosnie, pendant qu'ici, on ignore toujours si le Canada participera oui ou non à cette force.

Est-ce que le ministre de la Défense peut nous dire si oui ou non, le Canada va participer directement à la mise sur pied de la force de réaction rapide, tel que proposé par la France et la Grande-Bretagne?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà répondu à cette question.

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, je pense que le ministre et le premier ministre n'ont jamais répondu à cette question. Ils ont dit qu'ils en discuteraient au G-7, et on a encore la même réponse.

Comment le gouvernement peut-il refuser de prendre l'engagement de participer à la force de réaction rapide-parce qu'on n'a toujours pas eu de réponse-abdiquant ainsi ses responsabilités en matière de renforcement de la sécurité des Casques bleus en Bosnie, et ce, alors qu'une bonne partie de l'important contingent des Casques bleus canadiens s'y trouve actuellement dans une situation très précaire?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada n'abdique certainement pas ses responsabilités.

Au cours des derniers mois, nous avons pris des mesures pour nous assurer que nos forces prennent toutes les précautions nécessaires, comme je l'ai expliqué dans ma réponse à la question précédente. On a particulièrement amélioré les fortifications de notre base de Visoko, particulièrement augmenté la protection de nos troupes et pris un certain nombre d'autres moyens pour les aider à remplir leurs fonctions.

La force de réaction rapide est une initiative que nous approuvons. Ses effectifs seront en grande partie composés de forces britanniques et françaises. Les alliés de l'OTAN aimeraient évidemment que le Canada y participe. Avant d'accepter, nous voulons être sûrs que cette force sera déployée à notre satisfaction. Nous serons bientôt en mesure de donner des réponses plus précises là-dessus.

LE MINISTRE DU PATRIMOINE CANADIEN

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, le leader du gouvernement à la Chambre a dit hier qu'il n'acceptait pas les prémisses sur lesquelles reposaient nos questions sur la violation, par le ministre du Patrimoine, du code d'éthique fédéral. Pourtant, il ne s'agit pas de suppositions, de conjectures ou de spéculations, mais bien de faits.

C'est un fait que le ministre du Patrimoine a invité certains clients du ministère à faire une contribution politique. C'est un fait que tous ceux qui étaient présents au dîner-bénéfice ont obtenu un contrat ou un poste du gouvernement. C'est un fait que le ministre a violé de façon flagrante l'article 23 du code d'éthique du gouvernement.

Que faut-il pour que le premier ministre limoge un ministre dont la conduite est contraire à l'éthique? Une condamnation au criminel?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il existe une faille fondamentale dans la question de la députée, car compte tenu des renseignements disponibles, cette question ne repose pas sur des faits. Je ne suis au courant d'aucune information selon laquelle le ministre aurait personnellement invité des personnes au dîner. Le ministre était tout simplement présent à l'événement. Il n'y a rien de mal à ce que des ministres, de même que des députés de n'importe quel parti, assistent à des dîners-bénéfices. Cela fait partie du processus politique normal au Canada. On me dit que les dons ont été dûment enregistrés.

(1425)

Pourquoi la députée pose-t-elle des questions qui ne semblent pas reposer sur des faits?

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, il est établi que le ministre a assisté au dîner-bénéfice et qu'il est personnellement responsable des contrats qui portent sa signature.

Les excuses du gouvernement et ses déclarations soigneusement formulées afin de limiter les dégâts ne trompent personne. Le ministre du Patrimoine a clairement agi de façon répréhensible et le gouvernement ne fait qu'empirer les choses en refusant de communiquer les listes complètes de tous ceux qui ont été invités au dîner du ministre, de tous ceux qui ont versé un don, et de tous les donateurs qui ont obtenu des contrats ou des postes du ministère du Patrimoine. Le fait d'ensevelir ces renseignements sous de la documentation d'Élections Canada ne réglera pas le problème.

Voici ma question complémentaire: Si le gouvernement n'a rien à cacher, pourquoi se retranche-t-il derrière des réponses aussi ridicules? Quand rendra-t-il ces listes publiques?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, les renseignements disponibles montrent clairement que ce dîner n'a pas été organisé par le gouvernement et que les invitations n'ont pas été envoyées par le ministre ou le


13914

gouvernement. Par conséquent, ce dossier ne relève pas du gouvernement, si ce n'est que les dons sont inscrits dans les rapports d'Élections Canada. L'inscription de ces dons dans les documents d'Élections Canada ne vise pas à cacher des choses, mais bien à se conformer aux exigences de la loi.

Encore une fois, pourquoi la députée pose-t-elle des questions de ce genre, au lieu de s'intéresser aux dossiers qui préoccupent véritablement la majorité des Canadiens?

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, après le livre rouge et les déclarations entendues au cours de la dernière campagne électorale, je pensais que l'intégrité était une question assez importante au pays.

Le premier ministre a dit que le ministre du Patrimoine n'était pas fautif parce que des reçus avaient été remis pour tous ces dons. Le fait de monnayer l'accès à un ministre ne peut être justifié par une poignée de reçus. Le ministre du Patrimoine a violé le code d'éthique fédéral en se plaçant en situation de conflit d'intérêts. Toutefois, au lieu de faire ce qui convient dans les circonstances, c'est-à-dire d'exiger la démission de son ministre, le premier ministre s'entête à défendre une position indéfendable.

Le gouvernement fait passer la politique avant les principes, de sorte que son code d'éthique n'est qu'une farce. Trop, c'est trop. Le ministre du Patrimoine va-t-il démissionner dès maintenant?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la députée porte une accusation tout à fait injustifiée lorsqu'elle dit que l'accès au ministre du Patrimoine a été monnayé. D'une façon générale, les ministres communiquent avec la population de diverses façons acceptables, notamment par le biais de dîners-bénéfices.

S'il y a quelqu'un qui fait passer la politique avant les principes, c'est bien la députée et son parti.

* * *

[Français]

LE SOMMET DU G-7

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, il y a quelques semaines à peine, le premier ministre déclarait que le Sommet du G-7 se tiendrait à Halifax au lieu de Québec, car le drapeau canadien ne flottait pas sur l'hôtel de ville du maire séparatiste de Québec. Or, le Sommet du G-7 s'ouvre à Halifax, et pour citer le journal La Presse: «Si on ne parle pas anglais on coule carrément à pic.»

Comment le premier ministre suppléant, dont le gouvernement défend une vision du Canada prétendument bilingue, «coast to coast to coast», n'est-il pas gêné et embarrassé par l'absence quasi totale du français sur le site même du Sommet du G-7 à Halifax?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, à ce Sommet, il y a les porte-parole des pays du G-7, incluant la France et le Canada. C'est évident que les deux langues officielles sont représentées au site du Sommet.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, on voit la tête des francophones, mais l'image, la vitrine est anglaise. Comment le fédéral peut-il expliquer qu'au Sommet du G-7, le Canada, comme toujours, donne encore une image unilingue anglaise, alors qu'au Québec, les porte-parole fédéraux ne cessent de sauter sur la première occastion pour vanter les mérites d'un Canada bilingue?

(1430)

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je rejette carrément la prémisse de la question de l'honorable députée. Le visage que nous montrons au Sommet est celui d'un pays bilingue, d'un pays fier et d'un pays uni. Il est dommage que l'honorable députée essaie de ternir cette image de pays uni.

Une voix: C'est vrai.

Des voix: Bravo!

* * *

[Traduction]

L'ÉTHIQUE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre suppléant.

Il a été révélé que le directeur général et le directeur du service d'adjudication des Travaux publics ont accordé des contrats à des membres de leur famille immédiate sans concours. Un directeur a embauché sa femme pour faire son travail de bureau. M. Hugues Bureau-Saint-Pierre a reçu près de 50 000 $ de sa généreuse tante Lillian depuis septembre 1993.

Le gouvernement fait-il enquête à ce sujet? Dans l'affirmative, punira-t-il les responsables de cette conduite contraire à l'éthique?

M. Réginald Bélair (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement s'est engagé, lors de la dernière campagne électorale, à gouverner avec intégrité. Nous avons bien l'intention de tenir parole.

Nous sommes au courant de la situation que le député a signalée. Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a chargé son sous-ministre de donner pour directive de respecter les lignes directrices.

Nous n'avons pas pour pratique courante à la fonction publique d'embaucher des membres de la famille. Les personnes auxquelles le député a fait allusion font actuellement l'objet


13915

d'une vérification interne. Si nous constatons à la suite de cette vérification que les allégations sont fondées, nous ordonnerons au ministère de prendre des mesures correctives.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je trouve encourageant de voir l'intérêt que le gouvernement porte à l'éthique dans la fonction publique, mais n'est-il pas ironique de voir qu'il fera enquête sur des cas de conduite contraire à l'éthique dans la fonction publique, alors que la conduite contraire à l'éthique dénoncée chez le ministre du Patrimoine et chez le ministre des Travaux publics ne fait absolument pas l'objet d'enquête?

Il n'est pas étonnant que le vérificateur général ait dit avoir constaté une certaine confusion en matière d'éthique dans la fonction publique. L'exemple venu d'en haut prouve en l'occurrence la véracité du vieux dicton selon lequel le poisson commence à pourrir par la tête.

Ma question complémentaire s'adresse au premier ministre suppléant. Comme le code d'éthique fédéral ne semble pas s'appliquer au Cabinet, comment le gouvernement compte-t-il faire appliquer les normes d'éthique dans la fonction publique?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement attache une très grande importance à l'éthique. Nous le manifestons tous les jours de bien des manières en ce qui concerne le Cabinet et en ce qui concerne la fonction publique.

Quant à la métaphore plutôt de mauvais goût que le député a utilisée en parlant de poisson, le processus est manifestement déjà très avancé et s'est généralisé dans tout son parti à en juger par sa question.

* * *

[Français]

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

Nous avons appris aujourd'hui, de la part de fonctionnaires de Santé Canada, qu'on peut importer et utiliser légalement l'hormone somatotrophine synthétique au Canada. Or, à plusieurs reprises, la ministre de la Santé a tenté de rassurer l'opinion publique en déclarant en Chambre que l'utilisation de la somatotrophine est illégale au Canada et que les fraudeurs seraient punis.

Alors que la ministre de la Santé savait qu'il y avait un vide juridique dans la Loi sur les aliments et drogues qui permet l'utilisation légale de la somatotrophine synthétique au Canada, comment a-t-elle pu laisser croire en Chambre que Santé Canada contrôle la situation?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, selon nous, le cadre réglementaire actuelest suffisant pour prévenir l'usage de la somatotrophine bovine au Canada. L'exemple dont le député se sert est une petite exception.

Je suis certainement au courant des préoccupations du député, mais jusqu'à maintenant, elles se sont révélées non fondées. Nous poursuivrons nos enquêtes et si nous découvrons des problèmes, nous prendrons les actions appropriées.

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, je ferai remarquer à la ministre que cette petite exception est partagée par l'ensemble du Comité permanent de l'agriculture qui s'est réuni ce matin. Elle en parlera au secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture qui a exactement la même opinion.

(1435)

Comment la ministre explique-t-elle que, depuis un an, elle n'a proposé aucune mesure pour corriger cet important vide juridique et que, maintenant, le moratoire volontaire de son collègue de l'Agriculture arrive à échéance?

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, pour la grande majorité des Canadiens, à l'exception des pharmaciens et des vétérinaires, il est illégal d'importer, de vendre et de distribuer de la somatotrophine bovine.

Jusqu'à maintenant, Santé Canada estime que le cadre réglementaire mis en place est efficace pour prévenir l'utilisation de ce produit au Canada. Si ce n'est pas le cas, nous prendrons les mesures appropriées.

* * *

LA BOSNIE

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, selon toutes les informations qui nous parviennent de Bosnie, nos soldats de la paix ne peuvent plus accomplir leur travail. Le commandant canadien dit qu'ils sont «paralysés sur place».

Le ministre des Affaires étrangères a réagi en disant ce matin que, «si nos soldats de la paix ne peuvent plus remplir leur mission, il faudra les évacuer».

Vu la déclaration du ministre, le gouvernement se prépare-t-il à évacuer les soldats canadiens de Bosnie?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Non.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, nous avons appris aujourd'hui que le gouvernement participerait à la force d'intervention en Bosnie. La présence d'une force semblable cadre mal avec le mandat du maintien de la paix et ne peut avoir que deux buts: participer comme combattant à un conflit qui prend de l'ampleur ou faciliter le retrait des troupes de l'ONU.

Étant donné que le gouvernement fournit des soldats à la force d'intervention, cela veut-il dire qu'il renonce à sa profession de neutralité ou qu'il prépare le retrait de nos troupes, comme nous le préconisons depuis six mois?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le député doit avoir appris, en lisant les rapports sur la réunion de l'OTAN, il y a une ou deux semaines, que la mise sur


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pied d'une force de réaction rapide avait pour seul but d'aider le personnel de l'ONU qui était en danger. C'est pourquoi cette force a été constituée.

Qu'un pays participe ou non à cette force ne change rien au fait que la force de l'ONU n'est pas présente sur place comme belligérante, mais pour instaurer la paix. C'est justement la position du Canada. Nous entendons rester et nous acquitter de notre mandat à moins qu'il ne devienne absolument impossible de poursuivre. Le premier ministre l'a dit clairement à la Chambre à de nombreuses reprises.

Il est vrai que, ces dernières semaines, nous avons buté sur des difficultés considérables dans l'exécution de ce mandat, mais nous croyons qu'il est possible de trouver une solution.

* * *

[Français]

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture. Soixante-quinze pour cent des consommateurs ne veulent pas de la somatotrophine. L'industrie laitière réclame le prolongement du moratoire sur l'utilisation de cette hormone et, ce matin, le Comité permanent de la santé a voté une résolution pour reconduire le moratoire pour au moins deux ans. À 15 jours de l'échéance du moratoire, le ministre de l'Agriculture tergiverse encore sur la question.

Le ministre confirme-t-il qu'il y a plus qu'une petite exception, comme le ministre de la Santé vient de le dire, mais un terrible vide juridique qui permet l'utilisation de la somatotrophine au Canada, et admettra-t-il que seule la prolongation du moratoire pourrait, dans l'immédiat, protéger les consommateurs qui veulent boire du lait qui n'a pas été produit à partir de somatotrophine?

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, la ministre de la Santé a mentionné les dispositions de la Loi sur les aliments et drogues et le règlement découlant de cette loi, tous des textes qui relèvent de sa compétence, et a bien expliqué ce que prévoient cette loi et ce règlement. Elle a tout à fait raison de dire que ce produit peut être importé par très peu de gens et dans des cas bien précis. La réponse de la ministre de la Santé est tout à fait conforme à la réalité.

Elle a aussi ajouté que si, après étude, le cadre législatif se révèle incapable de bien régler la situation au Canada, il pourra être renforcé.

(1440)

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, cessons donc de tourner autour du pot. Ma question était très claire.

Le ministre de l'Agriculture reconnaît-il, oui ou non, le droit aux citoyens de boire du lait naturel qui n'est pas produit à partir d'hormones et, dans l'affirmative, qu'attend-il pour prolonger le moratoire jusqu'à ce qu'il soit possible pour les consommateurs d'avoir cette assurance de boire du lait naturel et comme ils le veulent?

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, au cours de la dernière année, à la suite d'une recommandation faite par le Comité de l'agriculture de la Chambre des communes, nous avons créé, avec la collaboration de tous les intéressés, y compris de nombreux représentants du secteur privé, un groupe de travail chargé d'examiner les diverses répercussions de l'utilisation de la somatotrophine. Nous voulions ainsi suivre le conseil du Comité de l'agriculture qui nous recommandait d'obtenir plus de renseignements à ce sujet et de diffuser tous les détails, afin que tout le monde soit bien au fait de la situation.

Il reste une analyse importante à compléter, l'élément essentiel des travaux, soit l'examen scientifique réglementaire des aspects médicaux de l'utilisation de la somatotrophine bovine, étude qu'effectue actuellement le ministère de la Santé. Tant que le ministère de la Santé ne sera pas rassuré au sujet des répercussions de ce produit sur la santé et la sécurité de la population, il n'émettra pas d'avis de conformité.

* * *

LA COMMISSION DES LIBÉRATIONS CONDITIONNELLES

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, le Service correctionnel du Canada a publié aujourd'hui son rapport sur le meurtre de Dennis Fichenberg, 25 ans, survenu le 5 septembre 1993.

Fichenberg a été assassiné par Paul Butler, un détenu fédéral alors en semi-liberté. Au moment de sa condamnation, Butler était considéré comme un psychopathe et, au moment de sa mise en liberté, on le qualifiait de détenu à risque élevé et à fort potentiel de violence. Et pourtant, il a été six mois en semi-liberté et cela, même s'il a commis bien des infractions pendant cette période.

Le solliciteur général est-il satisfait de la manière dont le Service correctionnel et la Commission des libérations conditionnelles ont traité la mise en liberté de Butler?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député n'ignore pas que la Commission des


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libérations conditionnelles est un organisme quasi judiciaire indépendant qui fonctionne en toute autonomie et que, conformément à la loi, le ministre n'a pas le droit d'intervenir dans ses décisions.

Je tiens à dire toutefois que, dans le rapport d'enquête qui a été publié, il est recommandé de remédier à la situation et d'apporter des changements de telle sorte qu'un incident de cette nature ne se reproduise plus. Je vous assure que cela a été fait car, tout comme la députée, je ne veux pas que ce genre de choses se répète.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, il semblerait que Butler a pu demeurer en semi-liberté parce qu'il avait déjà servi d'informateur à la GRC.

Le solliciteur général peut-il me dire si Butler a bénéficié d'une semi-liberté à la demande de la GRC, et le ministre approuve-t-il cette intervention de la GRC?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, dans le rapport de l'enquête sur cette affaire, il est dit que la Commission des libérations conditionnelles s'est surtout inspirée, comme critère, de la nécessité de protéger la population.

Je ne suis pas en mesure de dire si la GRC est intervenue ou non dans cette affaire.

En outre, cet incident s'est produit avant que nous formions le gouvernement et je vais m'assurer dans toute la mesure du possible que les circonstances qui ont mené à une fin aussi tragique ne se reproduisent plus. Je me réjouis de constater que la députée partage ma préoccupation à cet égard.

* * *

L'AGRICULTURE

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Comme le ministre le sait, depuis plus d'un an maintenant, le programme de filet de sécurité agricole fait l'objet d'une étude. Le ministre pourrait-il dire à la Chambre, aux centaines d'agriculteurs de Carleton-Charlotte et aux milliers d'agriculteurs du pays où en est rendue cette étude et quand ses résultats seront rendus publics?

(1445)

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, pendant la plus grande partie de 1994, nous avons discuté de la composition future des filets de sécurité agricoles avec les organismes du secteur de l'agriculture et les gouvernements provinciaux.

En décembre 1994, le gouvernement fédéral et les provinces se sont unanimement entendus sur les principes de la composition du futur programme des filets de sécurité au Canada.

À l'heure actuelle, mes collaborateurs travaillent à la rédaction d'un protocole d'entente global qui sera, je l'espère, signé, en temps opportun, par le gouvernement fédéral et les provinces et qui comprendra les éléments fondamentaux du filet de sécurité de l'avenir, soit la nécessité de la compatibilité commerciale ainsi que de la neutralité par rapport au marché et à la production.

Nous voulons garantir l'équité et l'équilibre interprovinciaux. Nous voulons atteindre un ratio de partage des coûts où la part du gouvernement fédéral serait d'environ 60 p. 100, et celle des provinces, de 40 p. 100. Nous voulons en outre que le système soit uniforme dans tout le pays et que les provinces aient assez de latitude pour atteindre les objectifs locaux et régionaux.

Nous croyons que nous y arriverons. Le protocole d'entente est déjà bien avancé.

* * *

[Français]

LA RECONVERSION DE L'INDUSTRIE MILITAIRE

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, l'entêtement du ministre de l'Industrie à ne pas mettre en place un véritable programme de reconversion de l'industrie militaire et à sabrer dans le peu de fonds restant dans le programme de productivité de l'industrie du matériel de défense destiné à la reconversion a des conséquences graves pour Montréal. En effet, Pratt & Whitney, un fleuron de l'industrie aérospatiale canadienne, envisage de déménager son centre de recherche.

Le ministre de l'Industrie est-il conscient qu'en refusant de mettre en place un véritable programme de reconversion, il est en train de compromettre la capacité technologique de l'industrie aérospatiale québécoise, diminuant ainsi sa capacité concurrentielle?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, je voudrais féliciter le député de son intérêt dans les grandes questions du développement technologique ici au Canada. Je suis très conscient de ce problème qui a été discuté dans les journaux en ce qui concerne Pratt & Whitney.

J'aimerais lui dire que même dans le Budget qui a réduit évidemment les fonds disponibles pour ce programme, nous nous sommes engagés à réviser le programme. Nous allons discuter au Cabinet des grandes questions sur le développement technologique, et j'aimerais bien entendre ce qu'il a à dire au sujet de ces programmes.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, malgré l'élégance un peu britannique du ministre, il n'a pas répondu à ma question.

Je lui demande, puisque Ottawa a financé 18 p. 100 des investissements en recherche et développement de Pratt & Whitney au cours des dix dernières années, principalement pour des applications militaires, pourquoi le ministre refuse-t-il aujourd'hui d'appuyer les applications civiles des recherches de cette entreprise? Pourquoi le ministre refuse-t-il d'aider une entreprise québécoise? C'est cela la question.

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Premièrement, monsieur le Président, j'aimerais rappeler au député que Pratt & Whitney n'est pas exactement une entreprise québécoise. C'est une entreprise multinationale qui a aussi des installations non seulement à Montréal, mais aussi à Halifax et à Lethbridge, en Alberta. C'est une question vraiment importante pour toutes les régions du Canada.


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J'aimerais aussi lui indiquer que pendant les dix dernières années, Pratt & Whitney Canada a reçu presque 525 millions de dollars du gouvernement fédéral et nous nous sommes déjà engagés à lui accorder encore 91,2 millions de dollars de plus pendant les quatre prochaines années. Alors, ce n'est pas exactement le fait que nous avons oublié Pratt & Whitney.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, le barrage routier près d'Adams Lake est encore en place aujourd'hui.

Quatre-vingt-six jours après l'érection de ce barrage routier par les trois bandes autochtones impliquées, il y a eu au moins deux manifestations de violence qui ont donné lieu à des accusations au criminel. La semaine dernière, on a incendié un pont dans un parc provincial.

Le ministre des Affaires indiennes croit-il toujours qu'il doit recevoir une invitation expresse des parties en cause avant d'intervenir?

(1450)

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme le solliciteur général et moi-même l'avons dit à la Chambre à maintes reprises, les services de police en Colombie-Britannique sont assurés par la GRC en vertu d'un contrat passé avec la province.

En ce qui concerne cette route, il y a trois scénarios possibles. Le meilleur scénario, c'est qu'il s'agit d'une voie publique qui mène à la réserve. Le deuxième scénario, c'est que les propriétaires de l'autre côté du barrage routier ont droit de passage et peuvent donc entreprendre des poursuites judiciaires. La pire scénario, celui que mon collègue semble avancer, c'est que ces terres appartiennent totalement aux premières nations. Si c'est le cas, elles ont le droit de barrer la route sur leurs terres, comme n'importe quel autre propriétaire au Canada.

J'espère que nous pourrons trouver en terrain d'entente avec les autochtones afin que les gens puissent se rendre chez eux. Nous sommes prêts à travailler avec le gouvernement de la Colombie-Britannique, comme nous le faisons heureusement dans bien des situations. Nous allons intervenir pour aider à trouver une solution. Ce sont là les faits, et tout ce qu'on peut dire à la Chambre ne changera rien aux faits.

Le problème découle des fouilles archéologiques qui ont été entreprises à cet endroit. La personne qui en était chargée devait respecter le mandat défini par la province, ce qu'elle n'a pas fait. On lui a écrit à ce sujet, mais elle n'a encore rien fait pour corriger la situation.

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, le problème va bien au-delà de cela. Le gouvernement fédéral était censé intervenir dans ce dossier il y a longtemps, dès la signature du contrat de réfection de la route, comme le ministre le sait et comme nous le savons tous.

Le ministre des Affaires autochtones de la Colombie-Britannique, M. Cashore, a également communiqué avec le ministre à ce sujet. Ce dernier a été informé le 13 avril que cette affaire devait être traitée de façon prioritaire. Il a également reçu la même demande de la part des autochtones et des propriétaires fonciers.

Je sais que rien n'est facile pour ce ministre. Malheureusement, il ne sait rien faire d'autre. Quand assumera-t-il ses responsabilités aux termes de la Loi sur les Indiens et décidera-t-il d'intervenir dans cette affaire?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, on me pose la même question et je donne la même réponse. Je la répète.

La province négocie actuellement avec la bande. Nous espérons que les parties en arriveront à une entente. Cependant, l'application des lois est un secteur de compétence provinciale. Le député veut-il que nous relevions la GRC de ses obligations et que nous allions nous-mêmes faire le travail d'application des lois en Colombie-Britannique?

* * *

LA FONCTION PUBLIQUE

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor.

Cette semaine a été désignée Semaine nationale de la fonction publique pour rendre hommage à la contribution des fonctionnaires fédéraux.

Pourtant, le gouvernement est en train de couper 45 000 postes dans la fonction publique fédérale. Comment le gouvernement peut-il désigner une semaine pour souligner les réalisations de ses fonctionnaires tout en leur enlevant leur emploi?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, c'est une période difficile pour la fonction publique car la nécessité de couper dans les dépenses pour respecter notre promesse de réduire le déficit nous force à réduire également les effectifs.

Nos fonctionnaires sont dévoués et nous devons reconnaître leur mérite. Ils ont mis en oeuvre bon nombre d'innovations. Nous pourrions citer de nombreux exemples de l'excellence de leur travail, et il n'y a pas meilleur moment pour les en remercier.

La fonction publique du Canada est l'une des meilleures au monde.

* * *

[Français]

LES TRAVAILLEURS DE LA COMPAGNIE SINGER

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Travail.

Les ex-travailleurs de la compagnie Singer de Saint-Jean affirment que le gouvernement fédéral n'a pas rempli ses obligations contractuelles à leur égard en versant les ristournes de leur fonds de pension à l'employeur plutôt qu'aux travailleurs.


13919

À la suite de la question du Bloc québécois du 1er juin, laissée sans réponse, la ministre du Travail va-t-elle corriger, une fois pour toutes, l'erreur du gouvernement fédéral commise envers les travailleurs de la Singer?

(1455)

[Traduction]

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je vais me renseigner et je ferai rapport aussitôt que possible au député.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, la question a été posée il y a déjà plus de trois semaines.

Ma question additionnelle s'adresse également à la ministre du Travail, qui a été élue pour répondre aux questions en cette Chambre. Comment la ministre du Travail, en refusant d'intervenir rapidement dans ce dossier, peut-elle se faire la complice d'une pareille injustice à l'égard des ex-travailleurs de Singer, dont la moyenne d'âge est de 80 ans et qui espèrent enfin obtenir justice après toutes ces années de lutte?

[Traduction]

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le député est tout à fait irresponsable s'il se sert d'une situation comme celle-là pour faire de la politique partisane.

Si le député s'informait des responsabilités du ministre du Développement des ressources humaines, il verrait que cette question relève en fait de ce ministre. Lorsque vous vous attaquez à la ministre du Travail, et je sais parfaitement où vous voulez en venir. . .

Le Président: Les députés sont priés de s'adresser à la présidence.

* * *

LE REVENU FAMILIAL

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, les familles canadiennes ont raison. Statistique Canada a publié les chiffres officiels. Les revenus familiaux nets d'impôt ont diminué de 6,5 p. 100 en dollars réels depuis 1989 et de 2,1 p. 100 au cours de la dernière année sur laquelle porte l'enquête. Les Canadiens en ont assez de la piètre performance de l'économie dont ils rejettent avec raison la responsabilité sur le gouvernement fédéral.

Le ministre accepte-t-il la responsabilité de la diminution du revenu familial et modifiera-t-il les politiques qui en sont la cause?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.

Les statistiques qu'il cite s'arrêtent en 1993. Je lui rappelle qu'il y avait des élections cette année-là et que depuis lors, environ un demi-million d'emplois ont été créés au Canada. Les statistiques pour 1994, c'est-à-dire la première année de notre mandat, indiqueront une forte hausse des revenus familiaux.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, depuis 1981, la Journée d'affranchissement de l'impôt, c'est-à-dire le jour de l'année où les Canadiens commencent à empocher véritablement leur revenu annuel, a été retardée de 73 jours. Le Fraser Institute a annoncé que ce sera le 5 juillet cette année. Ce qui est tragique, c'est que les impôts et les taxes toujours plus élevés que nous payons ne nous procurent pas davantage de services. Ils servent à payer l'intérêt sur notre dette colossale.

Quand le gouvernement obstruera-t-il le gouffre insondable dans lequel s'engloutissent les deniers des contribuables en réduisant la dette et en permettant aux familles canadiennes de bénéficier à nouveau d'une hausse de leur revenu net d'impôt, comme cela fut le cas pendant des décennies avant que le déficit n'augmente à une allure folle?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, j'apprécie beaucoup cette question parce que le gouvernement est précisément en train de réduire le déficit, de le ramener à 3 p. 100 du PIB au cours de la troisième année de son mandat pour finir par équilibrer le budget. Cela veut dire que le montant de la dette et les impôts baisseront en temps voulu.

* * *

CUBA

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre suppléant.

Bien qu'il entretienne des relations diplomatiques cahoteuses avec Cuba depuis 50 ans, le Canada a noué avec ce pays des relations commerciales et d'affaires fort importantes, tandis que les États-Unis continuent d'imposer un embargo qui a eu un effet désastreux sur la population cubaine.

Aujourd'hui, les Américains reviennent à la charge et menacent de mettre sur leur liste noire toutes les sociétés canadiennes qui ont des relations commerciales avec Cuba. Le premier ministre suppléant peut-il nous dire si le premier ministre soulèvera cette question à la réunion du G-7 cette semaine et s'il en profitera pour condamner le blocus américain de Cuba ainsi que pour reprocher aux États-Unis de menacer comme ils le font les Canadiens et les entreprises canadiennes?

(1500)

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il s'agit d'une question à deux volets.

La première partie porte sur le projet de loi Helms, à l'égard duquel le ministre et le gouvernement ont manifesté publiquement leur opposition. Nous trouvons encourageant que l'administration américaine ait jusqu'ici fait savoir clairement qu'elle aussi avait des réserves au sujet de ce projet de loi.

Pour ce qui est de la deuxième partie de la question de la députée, relativement aux mesures dont pourraient faire l'objet certaines sociétés canadiennes qui font affaire avec Cuba, nous ne disposons d'aucun renseignement officiel. Dès que nous en aurons, nous prendrons les mesures qui s'imposent dans l'intérêt des Canadiens et des entreprises canadiennes.


13920

LA PROTECTION CIVILE

M. John Loney (Edmonton-Nord, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale, de qui relève l'organisation Protection civile Canada.

Des inondations ont récemment causé les pires dommages des dernières décennies dans le sud de l'Alberta. Il en coûtera très cher pour remettre cette partie de ma province dans l'état où elle était avant le désastre. Est-ce que l'Alberta a demandé de l'aide au ministre? Dans l'affirmative, le ministre a-t-il ordonné à Protection civile Canada d'offrir son aide à l'Alberta, pour que celle-ci se relève du désastre?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral a effectivement prévu un programme d'aide financière pour de telles situations. Ce matin, l'Alberta a présenté une demande d'aide pour solutionner les problèmes très graves auxquels la province est confrontée depuis quelques jours.Cette demande recevra le traitement habituel. À mon avis, elle devrait être agréée sans la moindre difficulté.

L'aide financière est généralement affectée au coût de remplacement de l'infrastructure publique, mais elle peut également s'adresser à des individus, des agriculteurs et des entreprises qui doivent remettre en état les parties essentielles de leurs maisons ou de leurs installations qui sont détruites par suite de catastrophes, comme les inondations dans ce cas-ci.

Le Président: J'informe les députés que la période de questions est maintenant terminée.

J'ai une question de privilège de la part du député de Renfrew-Nipissing-Pembroke.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

LES REPORTAGES PRÉSUMÉS ERRONÉS DANS LES MÉDIAS

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, je soulève une question de privilège relativement à des articles de journaux qui influent sur les relations excellentes que j'entretiens depuis longtemps avec tous les députés ainsi que le respect que j'éprouve à leur endroit.

Je suis au Parlement depuis presque 30 ans et je n'ai jamais été l'objet de reportages aussi ignobles et bas que ceux qui ont paru dans le Globe and Mail et le Toronto Star. Ces articles minent les bonnes relations que j'ai avec tous les députés.

Dans le Toronto Star d'aujourd'hui, on peut lire ce qui suit: «Lorsque Hopkins a pris place au restaurant du Parlement hier, après la réunion du caucus, les députés libéraux qui s'y trouvaient se sont levés et ont quitté le restaurant au bout de quelques minutes.»

Quant au Globe and Mail, on pouvait y relever le commentaire suivant: «L'amertume des députés libéraux était manifeste même dans le restaurant du Parlement, où ils ont commencé à s'éloigner d'une table lorsque leur collègue, Leonard Hopkins, qui ne partageait pas leur avis au sujet du contrôle des armes à feu, s'y est assis.»

La vérité, c'est que je ne suis même pas allé au restaurant du Parlement hier. Je ne m'y suis jamais assis hier, ni le matin, ni le midi, ni le soir. De toute évidence, aucun journaliste du Toronto Star ou du Globe and Mail n'y était non plus.

Ces articles sont inexacts et faux, ils sont loin de la vérité. Je n'ai jamais été traité de cette façon, même dans la revue Frank.

Les responsables de calomnies de ce genre ne cherchent évidemment qu'à faire du tort et salir des réputations. Je demande respectueusement que vous examiniez ces articles et, si vous considérez qu'à première vue, j'ai raison de soulever une question de privilège, je proposerai la motion nécessaire.

(1505)

Je tiens à remercier tous les députés pour l'attention qu'ils m'ont accordée pendant que je faisais mes observations.

Des voix: Bravo!

Le Président: Notre collègue de Renfrew-Nipissing-Pembroke s'est bien défendu. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'aller plus loin. Vous jouissez d'une réputation irréprochable à la Chambre des communes depuis une trentaine d'années. Elle reste intacte.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais poser la question du jeudi au leader du gouvernement et lui demander s'il veut bien nous informer du menu législatif pour la semaine à venir.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je fais la déclaration hebdomadaire sur les travaux de la Chambre.

Le premier projet de loi dont nous débattrons cet après-midi est le C-41, touchant la détermination de la peine. Après six heures de débat, conformément à un ordre de la Chambre, nous procéderons au vote sur la motion de troisième lecture du projet de loi.

Nous aurons ensuite pour priorités de terminer l'étude des propositions d'amendement du Sénat au projet de loi C-69, concernant le remaniement des circonscriptions électorales, et de terminer également l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-85, sur le régime de retraite des parlementaires, et du projet de loi C-89, concernant le CN.

13921

Nous sommes également impatients de progresser dans l'étude du projet de loi C-87, sur les armes chimiques, du projet de loi C-86, concernant la Commission canadienne du lait, du projet de loi C-82, concernant la Monnaie, du projet de loi C-88, concernant le commerce intérieur, de même que d'un certain nombre de projets de loi qui ont été mentionnés plusieurs fois au compte rendu officiel au cours de la semaine dernière.

J'espère que cela aidera les députés à planifier leurs activités d'ici à demain, en fait d'ici au 23 juin, devrais-je dire. Nous serons heureux de poursuivre nos consultations avec les partis d'opposition à propos de l'aménagement des travaux de la Chambre et dans le but de faire avancer nos travaux comme le public l'attend de notre part.

_____________________________________________

13921

LA SANCTION ROYALE

[Traduction]

Le Président: J'ai l'honneur d'informer la Chambre que j'ai reçu le message suivant:

Résidence du Gouverneur général
Ottawa

Monsieur le Président,
J'ai l'honneur de vous aviser que l'honorable John Sopinka, juge puîné de la Cour suprême du Canada, en sa qualité de suppléant du Gouverneur général, se rendra à la salle du Sénat aujourd'hui, le 15 juin 1995, à 17 h 15, afin de donner la sanction royale à certains projets de loi.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.
le secrétaire du Gouverneur général,
Judith A. LaRocque

* * *

MESSAGE DU SÉNAT

Le Président: J'ai l'honneur d'annoncer à la Chambre que le Sénat lui a adressé un message pour l'informer qu'il a adopté le projet de loi C-81, Loi modifiant la Loi concernant la «Buffalo and Fort Erie Public Bridge Company».

* * *

(1510)

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je m'excuse d'avoir été un peu lent à me lever après qu'on a posé la question au leader du gouvernement à la Chambre.

Le leader à la Chambre pourrait-il nous dire combien de projets de loi le gouvernement compte mettre à l'étude ce soir avant l'ajournement?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme la Chambre a approuvé une motion visant à prolonger les heures de débat, nous comptons utiliser ce temps aussi utilement et aussi fructueusement que possible de manière à faire avancer autant que possible l'étude de projets de loi importants pour l'intérêt public.

Si mon honorable collègue voulait en discuter davantage, moi-même, le leader adjoint à la Chambre ou le whip en chef du gouvernement serons sûrement heureux de procéder à ces consultations derrière les rideaux.

_____________________________________________


13921

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) propose: Que le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.

-Monsieur le Président, le projet de loi C-41, dont nous discutons aujourd'hui à l'étape de la troisième lecture, est le résultat de 14 années d'efforts en vue de procéder à une réforme globale du processus de détermination de la peine, processus qui fait partie du droit pénal canadien.

Depuis 1983, une commission royale, de même que la Commission de réforme du droit et la Commission canadienne sur la détermination de la peine ont toutes prôné une réforme en profondeur du processus de détermination de la peine. Par ailleurs, un comité multipartite de cette Chambre recommandait déjà en 1988 un bon nombre des mesures énoncées dans le projet de loi C-41 dont nous sommes saisis aujourd'hui.

Cette mesure législative nous donne enfin les moyens de mettre en oeuvre des changements concrets qui donnent suite aux recommandations de longue date formulées par divers groupes de la société canadienne et liées à la nécessité de procéder à une réforme, afin d'améliorer sensiblement le processus de détermination de la peine prévu dans notre droit pénal.

[Français]

Le projet de loi énonce pour la première fois l'objectif et les principes de la détermination de la peine auxquels devront se reporter les tribunaux au moment de déterminer la peine d'un contrevenant.

Cet énoncé comprend les objectifs fondamentaux de la détermination de la peine et les principes que les tribunaux devraient appliquer lorsqu'ils déterminent la sentence des contrevenants adultes.

Ce projet de loi prévoit divers changements à apporter à la procédure et aux règles de preuve au moment de la détermination de la peine. Ces changements permettront d'intégrer au Code criminel les pratiques réclamées par les cours d'appel, les propositions exposées dans des mesures législatives précédentes, de même que les propositions faites par la Commission de réforme du droit.


13922

Le projet de loi prévoit des dispositions qui permettent aux provinces d'exercer le pouvoir d'établir les programmes de mesures de rechange visant les personnes à qui une infraction est imputée. Incorporées au projet de loi à la demande expresse des provinces, ces dispositions s'inspirent de dispositions semblables contenues dans la Loi sur les jeunes contrevenants et visent à tirer profit de l'expérience des provinces dans l'élaboration et l'administration de programmes du genre.

[Traduction]

L'un des buts fondamentaux du projet de loi est de formuler et d'inscrire, pour la première fois dans une loi canadienne, un énoncé des objectifs et des principes de la détermination de la peine.

(1515)

Comme les députés le savent, jusqu'à maintenant le processus de détermination de la peine s'est inspiré de principes élaborés uniquement par les tribunaux. Le système de common law, et plus précisément les juges au Canada, ont fourni, à l'appui de ces principes, des énoncés convaincants. Les commissions, comités et autorités auxquels j'ai fait allusion au début recommandent tous, depuis des années, que les objectifs et les principes soient inscrits dans la loi, aux fins d'uniformité.

Ce projet de loi donne au Parlement l'occasion de préciser les objectifs clés de la détermination de la peine, de fournir aux juges une liste des facteurs qui doivent être pris en considération, de façon à guider ceux-ci et à favoriser l'uniformité, afin que l'objectif du processus soit bien compris et que le résultat du processus comme tel soit plus prévisible qu'il ne l'est à l'heure actuelle.

Quels sont l'objectif et les principes? Ils sont énoncés clairement et simplement dans le texte législatif: la peine doit être proportionnelle à la gravité de l'infraction; les crimes comparables doivent être punis par des peines comparables; ceux qui contreviennent au droit pénal doivent subir des sanctions; ils doivent au besoin être isolés de la société; il faut viser la réinsertion sociale. En outre, lorsque le tribunal détermine la peine, il doit tenir compte de circonstances aggravantes ou atténuantes pour qu'elles soient équitablement prises en considération dans le processus.

Permettez-moi de dire un mot de certains des principaux éléments du projet de loi C-41 qui, je crois, améliore notre dispositif de détermination de la peine.

Tout d'abord, le point de vue des victimes. Je voudrais parler à ce sujet des modifications apportées à l'article 745 du Code criminel, article qui a acquis une certaine notoriété à la Chambre, car on en a réclamé l'abolition.

Il s'agit de l'article qui dit que, lorsqu'une personne purge une sentence avec délai préalable à la libération conditionnelle de plus de 15 ans, cette personne peut s'adresser à un tribunal formé d'un juge et d'un jury pour obtenir la permission de demander la libération conditionnelle, malgré la longue période d'inadmissibilité. La modification proposée par le projet de loi C-41 à cet article obligerait le tribunal qui reçoit cette requête à tenir compte du point de vue de la famille de la victime, pour que la famille ait une certaine influence.

Le projet de loi C-41 élargit considérablement les droits relatifs au dédommagement dans le droit pénal pour que les victimes et leurs droits soient toujours pris en considération dans la détermination de la peine au lieu de nécessiter une démarche spéciale.

Les dispositions du projet de loi C-41 à cet égard permettraient de faire exécuter par les tribunaux civils les ordonnances de dédommagement. Une ordonnance de dédommagement ne portera pas atteinte au recours civil.

Le projet de loi C-41 améliore également le processus prévu pour le paiement des amendes imposées, comme peine, à l'auteur d'une infraction criminelle. De nos jours, trop de détenus sont incarcérés dans les prisons et les pénitenciers pour défaut de paiement d'amende. Il est illogique que l'État dépense plus d'argent pour les garder en prison qu'il n'en aurait perçu si le contrevenant avait payé l'amende.

Selon le projet de loi, le tribunal devra déterminer si le contrevenant peut payer l'amende envisagée avant de l'infliger. Si le contrevenant ne peut payer, des mesures de rechange, comme les services communautaires, seront envisagées et appliquées. De plus, les provinces pourront utiliser leurs propres mécanismes, qui sont déjà en place, pour percevoir les amendes imposées par le tribunal. Toujours aux termes du projet de loi, au lieu d'incarcérer les gens pour défaut de paiement d'amende, les provinces pourront refuser de délivrer des permis ou d'accorder des privilèges afin d'inciter les contrevenants à payer l'amende qui leur a été infligée. Compte tenu de toutes les mesures que je viens de décrire, dans les cas de défaut de paiement d'amende, on ne recourra à l'incarcération qu'en dernier ressort.

(1520)

Parmi les améliorations qu'apporte le projet de loi C-41, il faut mentionner la probation comme sanction appropriée, une peine très souvent infligée dans le système de justice pénale du Canada. Le projet de loi C-41 prévoit un processus pour veiller à ce que les tribunaux aient accès à des renseignements plus complets et plus précis au moment de déterminer la peine, notamment aux rapports présentenciels qui devraient donner aux juges et aux tribunaux une meilleure idée du caractère du contrevenant.

Le projet de loi C-41 prévoit des châtiments plus sévères pour ceux qui manquent aux conditions de la probation ainsi que des conditions de probation plus claires et cohérentes.

La mesure législative renferme une autre innovation, soit l'application de mesures de rechange dans le cas des contrevenants adultes. Le gouvernement fédéral fournit cet instrument à la demande des provinces elles-mêmes. Chacune d'elles aura le droit d'établir et d'administrer son propre ensemble de mesures de rechange.


13923

Dans le cadre du système, les personnes qui seront traduites pour la première fois devant un tribunal pour un premier délit, peu grave et non violent, seront retirées du cadre judiciaire si elles reconnaissent avoir mal agi, et on trouvera un autre moyen de leur donner une leçon. Des mesures de ce genre permettront de garder le temps, rare et précieux, des tribunaux pour les délits plus graves qu'il est plus important de juger.

Une autre nouveauté prévue dans le projet de loi C-41, c'est la notion de sursis. Il s'agit d'une nouvelle forme de sanction pour les personnes condamnées à un emprisonnement de moins de deux ans, qui leur permet, en fait, de purger leur peine au sein de la collectivité plutôt qu'en prison. Dans cette nouvelle forme de sanction, qui coûtera moins cher à l'État et qui donnera probablement de meilleurs résultats, le tribunal peut exiger si nécessaire une surveillance étroite de la personne et imposer à celle-ci des conditions strictes qu'elle devra respecter si elle ne veut pas risquer de finir de purger sa peine en prison.

Enfin, le projet de loi C-41 établit pour la première fois en un même endroit une liste détaillée, convaincante, compréhensible et pratique des règles de preuve de l'audience de détermination de la peine: le fardeau de la preuve, le pouvoir du tribunal d'obtenir des renseignements additionnels concernant la détermination de la peine, et la nécessité que les juges justifient la peine imposée. Dans tous les cas, la société connaîtra la logique ou les raisons motivant la peine. On prévoit également que nous saurons simplement et clairement quelles règles régissent la détermination de la sentence pour nous assurer que les tribunaux auront à fonctionner d'une façon vraiment juste et uniforme.

Le projet de loi C-41 est une mesure détaillée et globale visant à apporter graduellement des modifications raisonnables et valables au Code criminel, comme suite à des recommandations que font depuis de nombreuses années des organismes indépendants et un comité de la Chambre. Il améliore vraiment cette partie essentielle du système de justice criminelle.

Je félicite le comité de la Chambre pour son examen minutieux du projet de loi. Le comité a entendu de nombreux témoins. Il a travaillé très fort, étudiant un à un les articles du projet de loi et toutes les mesures qu'il prévoit. Je crois que le projet de loi s'est trouvé considérablement amélioré par suite des efforts attentifs déployés par le comité.

(1525)

Comme c'est arrivé lorsque j'ai comparu devant le comité et que j'ai pris la parole à la Chambre en deuxième lecture, un élément du projet de loi est ressorti plus que tout autre à cause de l'intérêt et de la controverse qu'il a suscités. Il s'agit de l'article 718.2 du projet de loi, qui porte sur les circonstances aggravantes dont le tribunal devrait tenir compte dans la détermination de la peine.

L'article 718.2 du Code criminel, tel qu'énoncé dans le projet de loi C-41, prévoit que l'un des principes régissant la détermination de la peine dans les tribunaux de droit pénal est que le tribunal tient également compte du principe que la peine est adaptée aux circonstances aggravantes ou atténuantes. Ces circonstances ont trait soit à l'infraction, soit au délinquant. Par exemple, s'il s'agit d'un délinquant primaire, les circonstances seraient considérées comme atténuantes, et s'il s'agit d'un récidiviste, elles seraient considérées comme aggravantes.

Après cette déclaration générale, l'article donne plus de précisions. Sans limiter la portée générale de la déclaration à laquelle je viens de faire allusion, il stipule que certains facteurs seront considérés comme des circonstances aggravantes dont le tribunal tiendra compte. L'article prévoit que sont considérés comme des circonstances aggravantes des éléments de preuve établissant, notamment, que l'infraction est motivée par des préjugés ou de la haine fondés sur des facteurs tels que la race, l'origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique ou l'orientation sexuelle.

C'est évidemment cet article qui a suscité des critiques au sujet de l'approche retenue J'estime qu'il est important, d'abord, de garder à l'esprit ce que fait cet article et comment il fonctionne. Il ne s'agit pas de punir des gens à cause de leurs idées. Cela n'a rien à voir avec la liberté de pensée ni avec la création d'une police de la pensée, qui serait chargée de régir le comportement des gens.

Cet article sur la détermination de la peine vise à aider le tribunal à déterminer quelle devrait être la peine une fois qu'il est établi qu'un crime a été commis. Tout ce que cet article dit, c'est qu'une fois qu'il est prouvé qu'un crime a été commis, le tribunal doit déterminer s'il y a des circonstances aggravantes ou atténuantes. Si l'infraction a été motivée par des préjugés ou la haine, auquel cas les circonstances seraient considérées comme aggravantes.

Entre autres choses, en incluant cet article dans le projet de loi, le gouvernement remplit un engagement pris pendant la campagne électorale de 1993. À la page 80 du livre rouge, conformément à une promesse que le premier ministre a faite à des groupes favorables à l'égalité, le Parti libéral a entrepris de modifier le droit pénal pour accorder ce genre de protection à des groupes vulnérables qui sont souvent victimes de crimes motivés par la haine.

À part cela, si on a besoin de trouver une autre raison justifiant ce qui n'est rien de plus qu'une proposition sensée, on n'a qu'à regarder le nombre croissant de crimes de ce genre. Chaque groupe majeur parmi les minorités visibles signale une augmentation considérable et troublante du nombre de crimes motivés par la haine au cours des dernières années. Parmi ces groupes, il y a le B'nai Brith qui a dit au ministère de la Justice qu'on compte maintenant plus de 40 groupes haineux organisés au Canada. Les groupes religieux et les minorités craignent vraiment, avec raison, que l'existence et les activités de ces groupes haineux ne soient en train de détruire le tissu social de la société canadienne.


13924

(1530)

Il existe d'autres preuves de l'augmentation de ce genre de crimes. Les services de police d'un bout à l'autre du pays ont mis sur pied des unités chargées exclusivement de faire enquête sur les crimes motivés par la haine.

Dans un témoignage présenté devant la Commission des droits de la personne du Québec, un groupe a parlé de l'expérience américaine, où un homme homosexuel sur cinq et une femme homosexuelle sur dix ont déclaré avoir été victimes d'agression et où un tiers de tous les répondants ont dit avoir reçu des menaces de violence.

Les services de police à Toronto et à Ottawa ont signalé récemment que les crimes motivés par la haine fondée sur l'orientation sexuelle viennent au troisième rang en importance parmi ce genre de crimes.

À mon avis, il est clair que cette intervention législative s'impose. Dans cet article du Code criminel, nous avons dressé la liste des caractéristiques qui sont le plus souvent la cible des crimes de ce genre, soit la race, l'origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique et l'orientation sexuelle.

Pourquoi avons-nous dressé cette liste? Certains prétendent que nous avons choisi certains groupes à qui nous avons décidé d'accorder un traitement spécial ou une protection spéciale, de leur donner un statut spécial. Ce n'est pas le gouvernement qui a choisi ces groupes pour leur donner un statut spécial; ce n'est pas le ministre de la Justice qui a identifié ces groupes pour leur accorder un traitement spécial. Ce sont plutôt les voyous et les brutes, ce sont les criminels et les punks qui les poursuivent pour les battre et le Parlement a aujourd'hui l'occasion de riposter en faisant preuve de maturité et en montrant qu'il est prêt à agir d'une façon logique et à faire le nécessaire.

C'est la rigueur même de la logique qui nous pousse à adopter cette attitude. Les preuves auxquelles nous sommes confrontés nous forcent à agir. C'est le sens moral qui nous oblige à fournir au droit pénal un moyen de mettre un frein à cette brutalité.

À propos de statut particulier, je vous signale que si les homosexuels et les lesbiennes, par exemple, jouissent d'un tel statut, c'est parce qu'ils sont la cible des voyous et des mauvais coups. Si certains députés souhaitent accéder également à ce statut particulier, on pourrait certainement en discuter. Le seul critère auquel il est lié est la vulnérabilité. Les seuls droits spéciaux en cause sont ceux qui doivent être ciblés et ce projet de loi vise précisément à réparer cette injustice.

Dès 1977, dans le cadre de l'affaire Ingram, portée devant la cour d'appel de l'Ontario, les cours d'appel supérieures du Canada ont reconnu que le fait de cibler quelqu'un, de l'attaquer et d'en faire la victime d'un délit à cause d'une caractéristique telle que l'orientation sexuelle constitue une circonstance aggravante dont il convient de tenir compte lorsqu'il s'agit de déterminer la peine. Cette disposition ne fait que codifier ces considérations raisonnables et rationnelles en les intégrant au Code criminel pour pouvoir uniformiser le système à l'échelle nationale.

Lorsqu'un criminel vise une personne et commet une infraction criminelle contre cette personne ou ses biens à cause de sa race, de son origine nationale ou ethnique, de sa langue, de la couleur de sa peau, de sa religion, de son sexe, de son âge, d'un handicap mental ou physique ou de son orientation sexuelle, il s'agit d'un crime dirigé non seulement contre la victime mais aussi contre tout le groupe auquel elle appartient.

(1535)

Dans les États américains où il existe des lois analogues, on les appelle communément des lois contre les crimes d'intimidation parce que le contrevenant sait que ses agissements ont non seulement pour effet de faire du mal à la personne qui reçoit un coup, de l'effrayer ou de l'atteindre, mais aussi d'intimider tous les membres de ce groupe qui sont censés se sentir plus vulnérables la prochaine fois qu'ils se promèneront dans la rue. C'est précisément cet aspect des crimes de ce genre qui les distingue des autres et qui justifie l'attitude adoptée dans le projet de loi C-41.

Nous avons parlé d'orientation sexuelle. Nous n'avons pas jugé nécessaire d'en donner la définition parce que la signification est claire. Depuis 1977, cette expression se trouve dans les lois sur les droits de la personne de huit provinces et territoires canadiens. Elle n'a jamais posé le moindre problème d'interprétation, de définition ou d'application. On n'a jamais demandé ce qu'elle voulait dire.

Dans le type d'attaques perpétrées contre les homosexuels, dont on n'entend que trop parler depuis quelques années, les agresseurs, les voyous et les brutes qui s'en prennent à quelqu'un en raison de son orientation sexuelle n'ont aucune difficulté à savoir ce qu'ils cherchent lorsqu'ils rôdent en ville le samedi soir, à la recherche d'un homme ou d'une femme à battre, parce qu'ils pensent qu'il est homosexuel ou qu'elle est lesbienne.

J'insiste sur le fait que lorsqu'ils étudient les projets de loi, les parlementaires ont la responsabilité d'en juger les mérites de façon logique et rationnelle. J'espère sincèrement que l'on nous épargnera les observations du genre «le projet de loi C-41 est un projet de loi consacré aux droits des homosexuels», «le projet de loi C-41 vise à protéger les valeurs familiales traditionnelles», «le projet de loi C-41 confère un statut particulier dans tel ou tel autre but».

Le projet de loi C-41 est une mesure pénale qui modifie le Code criminel. Il ne concerne pas du tout les droits de la personne, l'accès aux prestations, le droit de se marier ou d'adopter des enfants. Il s'agit de condamner ceux et celles qui ont été reconnus coupables d'un crime. Il s'agit de déterminer la nature et la durée de cette peine, compte tenu du désir de la société de décourager les auteurs d'attaques motivées par la haine. Il donne au Parlement l'occasion de dire que l'on ne tolérera pas ce genre d'attaques, que tous nous condamnons les actes criminels motivés par la haine.


13925

Je recommande à mes collègues d'appuyer ce projet de loi. Je signale par ailleurs que nous avons reçu, au cours des derniers jours, l'appui de l'Église unie du Canada, de B'nai Brith Canada, du Congrès juif canadien, de la Fédération canadienne des municipalités, du chef de police d'Ottawa, du président du Conseil régional des Services de police d'Ottawa-Carleton, du Centre for Research Action on Race Relations, de Urban Alliance on Race Relations, du chef de police du Toronto métropolitain, de l'Association canadienne des chefs de police, du maire de la ville de Toronto et encore et encore.

Ces personnes, qui occupent des postes de responsabilité dans la société canadienne, sont au fait du problème que ce projet de loi cherche à régler et elles reconnaissent l'efficacité de la solution proposée dans l'article 718.2. J'exhorte mes collègues à regarder au-delà de l'écran de fumée que constituent les fausses caractérisations, à examiner ce que fait réellement le projet de loi et cet article, et à appuyer le gouvernement et ces importantes mesures, afin de tenter de solutionner un problème social d'une importance croissante.

À l'approche de la troisième lecture, écoutons notre raison. Je demande aux députés de tous les partis de se joindre au gouvernement et de faire quelque chose pour améliorer le Code criminel en général et, en particulier, pour démontrer notre volonté de ne plus tolérer au Canada les crimes motivés par la haine.

(1540)

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas d'hier que l'on parle de réforme en matière de sentence. Le processus de consultation a débuté il y a dix ans pour finalement aboutir aujourd'hui au débat en troisième lecture sur le projet de loi C-41 sur la détermination de la peine. Un aboutissement qui a été précédé de débats acrimonieux.

L'énoncé de principe qui sous-tend le projet de loi va dans la bonne direction. Ainsi, le maintien d'une société juste, paisible et sûre par l'imposition de sanctions adéquates et ce, parallèlement à d'autres initiatives de prévention du crime et au respect de la loi, ne peut que susciter mon appui. De plus, les mesures visant la déjudiciarisation de certains comportements délictueux mineurs, les mesures alternatives à la détention et les peines conditionnelles avec sursis se veulent des mesures innovatrices qui permettront de désengorger nos institutions carcérales et d'axer la détermination des peines sur la réhabilitation plutôt que l'incarcération.

Cela étant dit, je crois qu'il est essentiel de souligner l'ampleur de l'impact qu'aura le projet de loi non seulement sur l'accusé qui se retrouve devant les tribunaux, mais aussi sur la population en général.

La détermination de la peine constitue l'une des étapes les plus importantes dans le processus de justice pénale. Contrairement à ce que bien des gens croient, la plupart des personnes accusées d'actes criminels ne subissent pas de procès. La grande majorité des personnes accusées plaident coupables à l'accusation telle que portée. Leur seule expérience de notre système judiciaire n'est donc souvent qu'une brève comparution devant le tribunal où elles se voient imposer une sentence. La plupart des accusations qui sont portées sont réglées hors cour à cause de la négociation de plaidoyer. D'ailleurs, sans ce processus, le système judiciaire se congestionnerait à un tel point qu'à toutes fins utiles, il cesserait de fonctionner dans l'état actuel des choses.

L'accusé soumet donc un plaidoyer de culpabilité en espérant que son procureur négocie une sentence raisonnable avec la Couronne. Si les deux parties arrivent à une entente, elles la soumettent au juge. Celui-ci l'entérine ou non, car il n'est pas lié par la suggestion commune de la défense et de la Couronne. Il se peut également que la défense ait demandé la confection d'un rapport présentenciel et que le juge décide de l'étudier en délibéré avant de rendre sa sentence.

Il y a deux éléments qui sont retenus par la population: le verdict et la sentence. La majorité ne se préoccupe pas des technicités des avocats. Elle veut savoir si oui ou non l'individu est coupable et ensuite savoir quelle peine lui méritent ses actes délictueux. La sentence n'implique pas seulement l'accusé, mais le public en général. L'apparence de justice, l'exemplarité, la clémence et l'effet dissuasif de la peine sont autant d'aspects importants de la détermination de la sentence.

Malgré l'importance de la détermination de la peine, le Code criminel n'a jamais donné d'orientation exhaustive aux juges. Les juges exercent une entière discrétion et ont pleins pouvoirs quant à la nature et à la sévérité d'une peine. Le droit applicable en matière de sentence est écrit par les juges et non pas par le législateur. Il s'agit de l'exemple classique de la judge-made law qui fait partie de notre héritage anglo-saxon.

Les juges, par l'interprétation qu'ils font des lois et le pouvoir moral qu'ils exercent, contribuent à façonner et à développer les valeurs fondamentales sur lesquelles se fonde la société. Malheureusement, et je ne cesserai jamais de le décrier, la magistrature se caractérise par une sous-représentation chronique des femmes. Lynn Smith, doyenne de la Faculté de droit de l'Université de Colombie-Britannique, a énoncé le problème avec clarté dans un article intitulé A system that is changing.

(1545)

Je me permets d'en citer un passage éloquent: «Les racines du système juridique ont été implantées par les hommes, élaborées à une époque où les femmes ne pouvaient ni voter, ni être élues, ni être avocates ou faire partie d'un jury. Le droit visait à la protection des intérêts jugés importants par les hommes et à la conformité avec les réalités de leur vie en tant qu'hommes. Si on considère que le droit a tenu compte de la situation des femmes, les lois n'ont cependant été adoptées que sous une perspective entièrement masculine.»

La majorité des quelque 1 400 juges qui imposent les peines sont des hommes. Les juges nommés par le fédéral, soit dansles cours supérieures des provinces, soit à la Cour fédérale,sont par une écrasante majorité des hommes. Au total, sur 950 juges fédéraux, 134 seulement sont des femmes. Tous ont une situation socio-économique enviable. Les accusés qui comparaissent devant eux sont rarement aussi bien nantis: ils ne sont pas toujours des hommes.


13926

La majorité des femmes qui se retrouvent devant les juges sont chômeuses, reçoivent de l'aide sociale ou, à la rigueur, travaillent à temps partiel. La plupart des juges ne connaissent pas la vie des femmes qui comparaissent devant eux. Quatre-vingt-dix pour cent des femmes qui purgent une peine d'emprisonnement ont été trouvées coupables d'infractions mineures contre les biens, comme le vol à l'étalage. Elles se retrouvent également derrière les barreaux pour le non-paiement d'amendes.

Il est clair que la clientèle féminine qui est incarcérée est particulière. Elle n'est généralement pas emprisonnée pour des crimes violents, ce qui m'amène à souligner une des grandes faiblesses de ce projet de loi. L'article 718 énonce l'un des objectifs principaux de la détermination de la peine, c'est-à-dire le maintien d'une société juste, paisible et sûre. Il s'agit d'un objectif bien noble mais qui risque d'être difficile à atteindre. Pour que soit atteint cet objectif, il est essentiel d'éliminer les préjugés des juges, fondés sur le sexe ou la classe sociale. Les magistrats se doivent de suivre un chemin qui est bien balisé.

C'est quand même étonnant de constater que les rédacteurs du projet de loi n'ont pas jugé bon de considérer les caractéristiques intrinsèques à l'accusé lorsque vient le temps de lui imposer sa sentence. En effet, à l'exception des facteurs aggravants associés aux crimes motivés par la haine ou impliquant un abus de confiance, il n'existe nulle part dans le projet de loi C-41 l'obligation pour un juge de considérer l'état d'indigence de l'accusé ou son sexe.

Les femmes qui se retrouvent devant les tribunaux forment une clientèle particulière et distincte de celle des hommes, ne serait-ce que par le genre d'infractions que les femmes commettent. Leur comportement n'est pas le même et les buts qu'elles cherchent à atteindre non plus.

Si au moment d'imposer sa sentence, le juge considère de la même façon les hommes et les femmes, il arrivera nécessairement à une décision inéquitable, d'où l'injustice. L'équité ne signifie pas un traitement égal. Deux sentences identiques pour les mêmes infractions n'en porteront pas les mêmes stigmates s'il s'agit d'un homme ou d'une femme.

De nombreuses femmes qui ont des démêlés avec la justice ont déjà connu de graves difficultés à cause de la pauvreté, des mauvais traitements qu'elles ont subis de la part des hommes, de l'éclatement de leur famille et du fait que ce sont elles, la plupart du temps, qui se retrouvent responsables d'une famille.

Les magistrats doivent être sensibilisés à cette situation. La solution viendra le jour où les femmes siégeront en aussi grand nombre que les hommes sur les bancs de nos cours de justice. Il n'en tient qu'au bon vouloir du ministre de la Justice pour remédier à la situation.

(1550)

Une des pierres angulaires du projet de loi est très certainement les mesures de rechange pour les délinquants adultes. Si la province mettait en place un système de mesures de rechange, un adulte inculpé pourrait, plutôt que d'être poursuivi, être dirigé vers un programme d'éducation ou de services communautaires autorisés. Les conditions et les restrictions applicables au programme de mesures de rechange proposé sont presque identiques à celles de l'article 4 de la Loi sur les jeunes contrevenants.

Par exemple, les inculpés devront se reconnaître responsables de l'acte ou de l'omission et manifester librement leur ferme volonté de participer à un tel programme. Rien n'interdirait à la Couronne d'utiliser sa discrétion afin d'autoriser des poursuites, si elle estime qu'il y a des preuves suffisantes et que l'intérêt de la société le justifie.

Cependant, et c'est normal quand il s'agit d'une loi fédérale, la mise en application de ces mesures de rechange sera le lot des provinces. En effet, ce sera le procureur général provincial qui mettra en place le système de mesures de rechange. Les législations «coast to coast» ne garantissent pas nécessairement l'uniformité de leur application partout au pays.

Aucune mesure d'application n'est prévue dans le présent projet de loi C-41. La mauvaise volonté du fédéral d'ignorer les mécanismes d'application de ses propres lois fait en sorte que le fardeau d'implanter le système sera supporté par les provinces, qui auront à se débrouiller avec les problèmes de plomberie.

Ce genre de mise en application créera des disparités provinciales ou territoriales qui risquent de court-circuiter d'autres dispositions du projet de loi et, de ce fait, sa philosophie. En effet, comment espérer créer une parité de sentences à travers le pays si certaines régions n'ont pas ou ne peuvent mettre en place un système de mesures de rechange. Un individu qui a commis une infraction dans une région où il n'existe pas de système de rechange ne pourra s'en prévaloir, et cette partie du projet de loi deviendra sans objet.

Les inculpés qui, malheureusement, seront dans ce qu'on pourrait appeler la mauvaise province, auront des sentences différentes. Pour des infractions semblables, commises dans des circonstances semblables, certains se verront imposer des sentences différentes, ce qui va carrément à l'encontre de l'énoncé de principe de l'article 718.2

Toujours au chapitre de l'éventail des sentences que le juge peut imposer vient s'ajouter la condamnation avec sursis. Ce régime permet d'accorder un sursis à l'individu qui pourra purger sa peine au sein de la collectivité, sous réserve de l'observation des conditions qui lui auront été imposées par le tribunal. Un sursis sera accordé uniquement si une personne est déclarée coupable d'une infraction pour laquelle aucune peine minimale d'emprisonnement n'est prévue et si la peine infligée est de moins de deux ans.

La condamnation avec sursis ne fait qu'ajouter à la confusion. Il existe déjà la possibilité pour le juge de surseoir au prononcé de la sentence et d'imposer une ordonnance de probation pour une durée déterminée. Une condamnation avec sursis aura les mêmes effets qu'une sentence suspendue assortie d'une ordonnance de probation. Bonnet blanc, blanc bonnet. Il aurait mieux valu que le ministre de la Justice ne perde pas son temps à réinventer la roue.


13927

En ce qui a trait à la procédure, le projet de loi C-41 innove au chapitre des droits des victimes. L'article 722 obligera le magistrat, au moment de l'audition sur sentence, à tenir compte de la déclaration de la victime. Le ouï-dire sera toujours admissible sur sentence et si la victime est décédée ou n'est pas en mesure de faire une déclaration, son conjoint, un parent ou quiconque en a la garde, pourra faire la déclaration à sa place.

Depuis le temps que je m'époumonne à décrier le rôle mineur laissé à la victime lors des procédures judiciaires, je ne peux que me satisfaire de ce développement important. Mais ce ne doit être qu'un début.

(1555)

La victime doit prendre la place qui lui revient en cour et non pas seulement être un témoin à charge. L'affaire Daviault est un triste exemple des failles de notre système. Henri Daviault a été acquitté dernièrement, faute de preuve. L'affaire avait fait beaucoup de bruit et a poussé le ministre de la Justice à déposer son projet de loi sur l'intoxication. Mais, voilà qu'en 1993, la victime est décédée. Malgré l'ordonnance d'un nouveau procès, la Couronne n'avait plus de témoin et le juge s'est vu obligé d'acquitter Daviault.

Justice a-t-elle été rendue? De sa tombe, la victime ne peut témoigner et sa déclaration n'est pas admissible en preuve actuellement. Daviault est maintenant un homme libre et nous ne saurons jamais ce qui s'est vraiment passé. Les victimes d'actes criminels doivent être parties aux litiges criminels. Elles ne doivent plus être de simples témoins de l'État. Elles devraient avoir droit à la représentation par avocat et pouvoir contre-interroger l'accusé, s'il décide de témoigner. La victime devrait pouvoir présenter ses propres témoins.

Les règles sur le ouï-dire pendant un procès devraient être assouplies pour bénéficier à la victime. Somme toute, le système ne devrait pas traumatiser une seconde fois la victime, qui a déjà eu à subir toute cette violence. Vingt ans après l'ouverture des premières maisons d'hébergement au Québec, la violence faite aux femmes perdure. Mettre fin à ce fléau constitue le défi majeur de notre société.

Cette violence n'est pas seulement physique, mais elle a aussi des dimensions psychologiques, affectives, économiques et sociales. La violence conjugale est un fléau qu'il faut absolument arrêter. Bien que la raison soit évidente, le problème demeure et la plupart des députés de cette Chambre continuent de faire la sourde oreille, malheureusement. Ils ne font que refléter l'attitude d'une société trop tolérante vis-à-vis la violence conjugale.

Évidemment, la plupart se disent sensibles à la violence et désapprouvent ces comportements aberrants. Plusieurs encore soutiennent que la violence conjugale est répréhensible, mais en même temps, ils cherchent une excuse pour expliquer l'attitude dérangeante de l'agresseur. Par exemple, il était ivre. Cet état d'esprit entretient donc la tolérance sociale face à la violence conjugale. On considère qu'il y a toujours deux côtés à la médaille. On tente de comprendre l'agresseur et on blâme la victime. On laisse entendre que, de façon générale, l'homme a des raisons d'être violent envers sa femme et que la victime ne réagit pas à la mesure de nos attentes.

En droit criminel, lorsque les tribunaux sont confrontés à un problème de violence conjugale, la sentence est trop souvent clémente pour l'agresseur trouvé coupable. Et pour cause. Le rapport présentenciel, qui influence grandement le juge dans sa décision, comporte une analyse faussée du problème. On s'en tient principalement à faire une analyse individuelle de la personnalité ou de l'histoire de l'agresseur. En faisant ce genre d'analyses, le système joue le jeu de l'agresseur.

On le déresponsabilise et on évite les sanctions graves que méritent ces gestes. Je maintiens donc que dans tous les cas de violence conjugale, de quelque gravité que ce soit, si la victime est un conjoint ou un ex-conjoint, cette situation de fait devra être considérée comme une circonstance aggravante, nécessitant ainsi une sentence plus sévère. En effet, l'ex-conjointe est trop souvent victime d'aggressions, tant physiques que psychologiques.

Monsieur le Président, je sais que vous devez intervenir à 16 heures. Je vais donc, je crois, vous laisser la parole et peut-être la reprendre par la suite.

* * *

(1600)

[Traduction]

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

La Chambre reprend l'étude de la motion portant sur les amendements du Sénat au projet de loi C-69, Loi portant sur la création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et la révision des limites des circonscriptions électorales; ainsi que de l'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Chers collègues, j'ai demandé un peu plus tôt si les whips pouvaient s'entendre pour différer le vote. La présidence préfère toujours que ce genre de décision soit prise en harmonie, après consultation. À ma connaissance, les whips n'ont pas pu s'entendre.

J'ai vu les enregistrements vidéo de ce qui s'est produit un peu plus tôt aujourd'hui. J'ai pu constater que le whip suppléant du Bloc québécois avait agi de la façon normale et acceptée. J'ai pris note également de ce que le whip du gouvernement avait à dire en ce qui concerne ce point et j'ai pris en considération ce que le whip du Parti réformiste a déclaré à la Chambre.

Je veux qu'une chose soit bien claire pour tous les députés. Il appartient maintenant à la présidence de prendre la décision. Je vais vous dire sur quoi je ne base pas ma décision. Je ne donne pas raison au premier qui se présente. Il ne serait pas normal, à mon avis, qu'on laisse les whips se bousculer jusqu'au bureau pour être le premier arrivé. Nous sommes ici à la Chambre des communes et nous devons avoir un certain décorum. Vu qu'on m'a remis la responsabilité de prendre la décision, j'ai décidé d'ordonner que le vote sur cet amendement particulier ait lieu le lundi 19 juin à 23 h 30.


13928

[Français]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, comme je le disais précédemment, l'ex-conjointe est trop souvent victime d'agressions, tant physiques que psychologiques. Lors d'une rupture, la tension est à son paroxysme et dégénère trop souvent en violence. L'ex-conjoint est un cas particulier, car l'agresseur responsabilise souvent sa victime pour l'échec de la relation.

En matière d'homicide conjugal, qui est la forme extrême de violence, la probabilité qu'une femme soit tuée par son époux est neuf fois plus élevée que la probabilité qu'elle soit tuée par un étranger. Les conjointes séparées sont, cependant, beaucoup plus à risque.

Lorsque les couples cohabitent au moment du meurtre, pour chaque homme assassiné, quatre fois plus de femmes le sont. Donc, un rapport de 4 pour 1. Ce rapport passe à plus de 10 pour 1 quand les couples sont séparés. Ces statistiques sont incontournables et effarantes: pour chaque homme tué par son ex-conjointe, on peut compter dix fois plus de conjointes assassinées par leur ex-conjoint.

Les résultats d'une enquête pancanadienne sur l'agression contre la conjointe à laquelle ont participé plus de 12 300 femmes ont été publiés en mars 1994. Cette enquête nous révèle des circonstances pour le moins troublantes sur la violence conjugale. La violence contre les conjointes ou ex-conjointes dérange et on préfère l'ignorer plutôt que de regarder la réalité en face. Il est grand temps que cette Chambre lance un message clair aux conjoints violents qui sont en grande majorité des hommes. Le message se doit d'être aussi clair pour les magistrats qui ont à considérer les circonstances entourant la commission d'un crime violent contre la conjointe.

Je ne parle pas que de la violence physique évidemment, je parle également de violence psychologique. La violence psychologique produit des effets aussi nuisibles que durables. Le dénigrement, les injures et les insultes sont des armes aussi dévastatrices que les gifles et les coups de poing. Elles infligent des blessures profondes qui ne cicatrisent pratiquement jamais.

(1605)

L'enquête nationale publiée l'an dernier tentait de tester les théories sur les liens entre la violence physique et la violence psychologique. Environ le tiers des femmes mariées ou l'ayant déjà été ont déclaré que leur conjoint ou ex-conjoint avait usé de violence psychologique. Les anciens partenaires sont considérés plus violents psychologiquement que les partenaires actuels dans une proportion de 59 p. 100 contre 17 p. 100.

Bien que la violence psychologique puisse se produire en l'absence de violence physique, les deux types se sont produits ensemble dans la majorité des cas. Les trois quarts des femmes se disant victimes de violence physique ou sexuelle ont déclaré être également victimes de violence psychologique. Dix-huit pour cent des femmes ne subissant pas de violence physique de la part de leur conjoint ont déclaré être victimes de violence psychologique.

Les principales formes de violence décrites par les femmes lors de cette enquête étaient qu'elles se faisaient soit pousser, empoigner, bousculer, le tout suivi de menaces de se faire frapper, de gifles, d'objets lancés et de coups de pied, de morsures et de coups de poing. Bon nombre de femmes ont également été battues, agressées sexuellement, étranglées, frappées avec un objet et menacées avec une arme à feu ou un couteau. Il est rare qu'une seule forme de violence ait été rapportée.

Le Bloc québécois a proposé un amendement qui tenait compte de toutes ces formes de violence. En effet, en définissant les voies de fait au sens de l'article 265 du Code criminel, on y inclut l'utilisation de la force contre la conjointe, la tentative et la menace d'employer la force. La définition s'applique à toutes les espèces de voies de fait, y compris les agressions sexuelles, les agressions sexuelles armées, les menaces à une tierce personne, l'infliction de lésions corporelles et les agressions sexuelles graves. Malheureusement, notre amendement n'a pas été retenu.

Près de la moitié de ces femmes victimes de violence ont subi des blessures. Les types de blessures les plus fréquents étaient des ecchymoses dans 90 p. 100 des cas, venaient ensuite les coupures, les égratignures, les brûlures, les fêlures et les fractures. Presque 10 p. 100 des femmes ayant été blessées ont affirmé avoir souffert de lésions internes et subi une fausse-couche.

J'aimerais citer le juge Jean-Guy Boilard de la Cour supérieure du Québec. En imposant sa sentence au prévenu Fouad Ghazal jeudi dernier dans le district de Hull, le juge, s'adressant à l'accusé qui a assassiné son épouse, s'exprimait ainsi, et je cite: «La violence conjugale est un crime répugnant devenu l'une des préoccupations sociales de notre époque. S'imaginer qu'on l'enrayera est une utopie. Ce qui importe, c'est de la sanctionner pour traduire la réprobation sociale.»

J'espère que tous les membres de la magistrature partageront les vues du juge Boilard.

Pour en revenir au projet de loi sur la détermination de la peine, comme je l'ai souligné avant-hier, le débat a été faussé dès le départ. La plupart ont cristallisé le débat sur l'expression «orientation sexuelle», qui se retrouve à l'article 718.2 du projet de loi. L'article en question ne traite que des circonstances dont doit tenir compte le juge au moment d'imposer sa sentence. Je l'ai dit et je le répète, ce n'est pas une nouvelle charte des droits.

Les craintes qu'ont certains de voir un individu puni plus sévèrement ne se justifient pas. On doit punir et sanctionner toute forme de violence. Si la victime est agressée parce qu'elle fait partie d'un groupe facilement identifiable ou semble appartenir à un tel groupe, il s'agit manifestement d'une circonstance aggravante qui devrait être sévèrement punie.


13929

(1610)

Les démarches et les revendications du Bloc québécois ont fait en sorte que deux autres caractéristiques supplémentaires se retrouvent à l'article 718.2. En effet, l'origine nationale ou ethnique de même que la langue se retrouvent dorénavant dans la nomenclature.

Il nous semblait primordial d'envoyer un message clair aux tribunaux pour sanctionner les crimes motivés par des préjugés linguistiques. Un individu n'a pas le droit de maltraiter un francophone parce qu'il parle français, et ceci vaut également pour toutes les minorités linguistiques au Canada. Je hais la violence sous toutes ses formes et je m'insurge contre la violence ciblée, qui est la plus pernicieuse de toutes.

La violence faite aux femmes en est l'exemple le plus criant. J'appuie donc sans réserve un projet de loi qui fait en sorte que les préjugés de l'agresseur qui sont basés sur le sexe de sa victime constituent la forme extrême d'un esprit moralement blâmable. Nous sommes en droit d'être en désaccord avec certaines dispositions du projet de loi et nous sommes en droit d'exprimer notre opinion. Toutefois, certaines opinions me font craindre le pire.

Il n'y a pas si longtemps, le débat portait sur la discrimination contre les Noirs et, en général, sur les minorités visibles. Le projet de loi C-41 nous indique que notre société se dirige dans la bonne direction, c'est-à-dire vers le civisme et la tolérance. La violence sous toutes ses formes doit être dénoncée. Les conséquences des crimes motivés par la haine sont incommensurables. Il n'y a pas qu'une seule victime. Elles sont beaucoup plus nombreuses. Toutes les personnes appartenant aux groupes visés deviennent des victimes.

Cette situation ne doit pas être tolérée. Il s'agit d'un choix individuel et de société. Pour ma part, j'ai choisi de vivre dans une société qui dénonce la violence.

* * *

MESSAGE DU SÉNAT

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de poursuivre le débat, j'ai l'honneur de faire savoir à la Chambre que le Sénat a transmis un message pour informer qu'elle a adopté le projet de loi suivant: C-44, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la Loi sur la citoyenneté et modifiant la Loi sur les douanes en conséquence.

* * *

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler pour la dernière fois de ce projet de loi à la Chambre des communes. Il n'y a pas de doute que je vais en parler encore souvent et à bien des endroits, car les citoyens de ce pays s'adressent à moi par téléphone, par lettre et par télécopieur pour exprimer leur inquiétude et me poser des questions sur ce qui va arriver avec ce projet de loi, ainsi que sur sa forme au moment de quitter cette Chambre pour aller au Sénat, pour approbation définitive ou amendement.

Il y a trois domaines dont je voudrais parler à propos du projet de loi C-41. Je voudrais parler des mesures de remplacement, ensuite de la partie qui traite de l'article 745 et finalement parler brièvement de l'article 718.2. Je pourrais peut-être commencer par là.

Le ministre de la Justice s'est exprimé assez longuement sur ce que l'on appelle la catégorie des crimes motivés par la haine dont fait mention ce projet de loi. Je pense qu'il est regrettable que de nombreuses parties de ce projet de loi aient été négligées à cause de cet aspect particulier. Il nous faut déterminer si nous avons affaire à un bon projet de loi ou à un mauvais projet de loi, si nous aurons finalement une bonne ou une mauvaise mesure législative.

Je prétends, avec respect, que ce n'est pas un bon projet de loi et que c'est une mauvaise mesure législative. Je vais essayer de justifier mes inquiétudes dans mon discours de cet après-midi.

(1615)

Ce projet de loi ne s'attaque pas à l'origine de la haine. Il ne s'attaque pas à l'origine des préjugés ou du parti pris. Il ne s'attaque pas aux questions à l'origine de la frustration, du stress et de la peur qui, à mon humble avis, engendrent la haine.

Le gouvernement est en train d'adopter des mesures législatives qui suscitent la colère, la peur et la frustration. Il suffit de lire les lettres que nous recevons au sujet du projet de loi C-68, du projet de loi C-41 et le projet de loi sur le régime de pension des députés pour voir que le gouvernement est en train d'aviver la colère et la frustration des gens de ce pays.

Ce projet de loi ne s'attaque pas à la cause. Il n'apaise pas les sentiments à la base du parti pris, des préjugés, de la haine, qui finissent par se traduire par des actes commis par des hommes contre d'autres hommes.

Quand j'étais enfant et que j'allais à l'école en Saskatchewan, il y avait dans notre collectivité des gens de toutes origines. On racontait des blagues ethniques. Des blagues ukrainiennes, des blagues contre les Anglais, contre les Écossais et contre les Français. Presque toutes se voulaient moqueuses. Même si elles étaient humoristiques, il n'en restait pas moins qu'elles se voulaient moqueuses. Pourtant, cela ne gênait personne car nous savions tous que nous étions égaux devant la loi.

Malgré toutes les blagues que nous racontions et que nous faisions, nous étions tous égaux devant la loi, et c'est ça que l'on est en train de détruire. Sinon l'égalité, en tous cas, le sens de l'égalité devant la loi. La mesure législative présentée par le gouvernement crée des droits spéciaux à un statut spécial pour certains citoyens. C'est ça qui va créer un parti pris. Si on accorde des droits et des privilèges spéciaux à des individus, d'autres ne vont pas aimer ça. Ils y verront du parti pris et des préjugés.


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Je repense à cet exemple aux États-Unis où, en arrivant dans sa classe un lundi matin, une institutrice a dit à ses élèves: «Tous les enfants de cette classe qui ont les yeux marron sont spéciaux. Ils ont un quotient intellectuel plus élevé. Ils sont plus intelligents.» Elle a vu le résultat. Elle a vu les amitiés se défaire entre les enfants aux yeux marron et ceux aux yeux bleus ou d'une autre couleur. Une semaine plus tard, elle a dit aux élèves: «Je me suis trompée. Ce ne sont pas les enfants aux yeux marron qui sont les plus intelligents. Ce sont ceux aux yeux bleus.» Puis, se rasseyant, elle a regardé ce qui se passait.

Elle a vu les préjugés. Elle a vu naître dans la classe les sentiments qui sont à l'origine du parti pris, des préjugés, de la colère et de la frustration. Ce projet de loi n'éliminera pas ces sentiments. Il les exacerbe.

Il crée l'impression dans l'esprit des gens à travers le pays qu'on accorde des droits spéciaux à certaines catégories de personnes, alors que nous devrions tous nous sentir égaux devant la loi, quelles que soient notre race, la couleur de notre peau, notre langue ou notre façon de vivre. Nous devons tous avoir le sentiment que nous sommes protégés par la loi et que nous sommes égaux devant la loi, que ceux qui administrent la loi et les forces politiques du pays demeureront fidèles à ce principe et n'en dévieront jamais.

Quand on regarde les mesures de rechange, on voit quoi? Qu'est-ce que ça veut dire? Dans ce projet de loi, le recours à des mesures de rechange laisse à penser que l'on va soustraire au système judiciaire et au système pénal les délinquants violents au même titre que les délinquants non violents. Cela m'inquiète énormément. Il est vrai qu'il y a de nombreux cas qui doivent être réglés en dehors du système pénal, ou de l'industrie de la justice criminelle, comme je l'appelle. J'ai été gardien de la paix pendant 14 ans et la plupart des incidents mineurs dont j'ai eu à m'occuper ne sont jamais allés devant les tribunaux car je considérais que ce devait être le dernier recours.

(1620)

Je ne suis pas ignorant du principe sous-jacent, ni de l'utilité et de l'efficacité de ce qu'on appelle les mesures de rechange. Toutefois, elles devraient être sélectives. Il devrait y avoir une différence entre les délinquants violents et les délinquants non violents.

Ce projet de loi ne fait pas cette différence. L'un de nos collègues d'en face en a d'ailleurs parlé à l'étape du rapport. De ce fait, les délinquants violents pourront bénéficier du traitement offert en vertu des mesures de rechange. L'État, les administrateurs de la loi, auront le droit d'autoriser des criminels violents, des délinquants ayant attaqué d'autres personnes, à se soustraire au système judiciaire ou au système pénal.

Dans le cas des infractions non violentes, par exemple le vol de biens ou la destruction volontaire de la propriété publique ou privée, lorsque la vie ou la sécurité des personnes n'est pas menacée, je peux comprendre qu'on envisage le recours aux mesures de rechange pour punir les délinquants en cause, surtout s'il s'agit de jeunes.

Lorsque nous avons présenté un amendement au comité pour exclure les criminels violents de ces mesures de rechange, personne n'a voulu tenir compte de notre amendement et il a été défait par les libéraux. Ce fut une grave erreur.

Ce projet de loi est lacunaire. Il est mal rédigé. Je ne crois pas qu'il atteindra les objectifs visés et nous procurera une société plus sûre. J'affirme respectueusement que ce texte est bien plus un geste politique, une déclaration politiquement correcte qu'un projet de loi efficace.

Voici ce que l'Association canadienne des policiers a déclaré dans son mémoire au comité permanent à propos du projet de loi:

À quelques exceptions près, le projet de loi C-41 est maladroit, compliqué, contradictoire, malhonnête et, pis encore, presque entièrement inutile pour quiconque connaît ou utilise la common law du Canada.
Bien que le projet de loi essaie de codifier certains principes fondamentaux de la détermination de la peine, éliminant ainsi cette discrétion judiciaire élémentaire, il accorde aussi, au même moment, d'énormes nouveaux pouvoirs discrétionnaires à toute une panoplie d'intervenants du système judiciaire. Le fil conducteur commun à tous ces nouveaux pouvoirs, c'est qu'ils favorisent tous le délinquant en ce sens qu'ils rattachent aux actes criminels des conséquences non privatives de liberté.
La réforme de la détermination de la peine visait la protection et ce projet de loi n'offre que des platitudes. La réforme exigeait la limpidité, le projet de loi est confus et même carrément hypocrite. Il fera sans doute grimper davantage les coûts déjà astronomiques du système de justice pénale.
Sur ce même thème, j'ai reçu une lettre datée du 13 juin 1995 de M. Newark, directeur exécutif de l'Association canadienne des policiers. J'en donne un extrait:

Je prends la liberté de vous écrire dans l'espoir que la logique intervienne dans une décision qui me semble être déjà prise quant à l'adoption de ce projet de loi. Dès le départ je dois préciser que, comme certains d'entre vous le savent sans doute, cette lettre exprime le point de vue des policiers ordinaires qui travaillent quotidiennement dans les salles d'audience de notre pays et coïncide avec mon expérience personnelle acquise au cours des 12 années où j'ai exercé les fonctions de procureur plaidant.
Ce projet de loi vise à codifier certains, je dis bien «certains» grands principes régissant la détermination de la peine qui ont cours dans nos tribunaux depuis une centaine d'années. C'est un exemple typique de l'arrogance dont peuvent faire preuve des bureaucrates qui s'imaginent qu'il suffit d'employer une expression ou une phrase donnée pour que tout soit logique et conforme aux «principes» considérés comme valables au ministère fédéral de la Justice.
Lorsque j'ai vu ce projet de loi pour la première fois- c'était en 1992, sous le régime conservateur et on le connaissait sous le nom de projet de loi C-90-, j'étais convaincu que c'était l'oeuvre de gens qui n'étaient jamais allés dans une salle d'audience autrement qu'à titre d'observateur universitaire. L'enquête que j'ai menée par la suite m'a donné raison, ce qui n'a rien de rassurant. Peu importe l'idée que chacun se fait de la façon dont la peine devrait être déterminée, il reste que ce projet de loi qui vise à redéfinir les principes en question aura pour effet de multiplier les litiges, entraînant ainsi des millions de dollars de dépenses pour un système qui s'efforce déjà de faire plus avec moins.
Même la disposition relative à l'orientation sexuelle dont on fait tant de cas témoigne de l'inutilité de ce projet de loi. L'article 718.2 dit simplement que le tribunal qui impose la peine devrait considérer une infraction motivée par un des éléments énumérés, y compris l'orientation sexuelle, comme une circonstance aggravante. A-t-on jamais pu citer un cas où un tribunal a jugé que ce n'était pas une circonstance aggravante? Pareille position judiciaire constituerait une erreur de droit et cela est si évident qu'au cours de toutes mes années de tribunal je n'ai jamais rencontré ou entendu pareil argument et que, bien au contraire, tous les manuels ou précis traitant de la pratique courante en matière de détermination de la peine reconnaissent cette motivation comme étant une circonstance aggravante.
Bref, cette disposition controversée est absolument inutile. Or, d'après mon expérience, si adopter une loi inutile est en général une décision peu judicieuse, ça l'est à coup sûr en matière de droit criminel [. . .].Je vous prierais de ne pas oublier que notre association, les chefs de police et, soit dit en passant, tous les procureurs de la Couronne, s'opposent à l'adoption de ce projet de loi.
Le projet de loi C-41 est mal formulé, inconséquent et contradictoire. Il est vraiment le produit d'une bureaucratie qui, contrairement aux représentants élus, n'a pas de comptes à rendre ou de circonscription à représenter.
(1625)

Cette lettre a été écrite par le directeur exécutif de l'Association canadienne des policiers, et ce sont là ses commentaires et ses vues sur le projet de loi.

Dans sa lettre, il souligne que cet avis est également partagé par les chefs de police et les procureurs de la Couronne qu'il


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connaît et auxquels il a parlé, ainsi que par les agents de la paix. Je trouve très étrange que le ministre de la Justice partage le point de vue des chefs de police et de l'Association canadienne des policiers en ce qui concerne le projet de loi C-68 sur le contrôle des armes à feu.

Le ministre s'est servi d'eux régulièrement et à maintes reprises pour faire avancer la mesure législative sur le contrôle des armes à feu. Cependant, quand il s'agit du projet de loi C-41, leur opinion ne compte pas. Pourquoi leur opinion est-elle bonne, judicieuse et avisée quand il s'agit d'appuyer le projet de loi C-68 ou certaines parties de ce projet de loi, et malavisée et inacceptable quand il s'agit du projet de loi C-41? Il y a ici un manque de logique qui m'échappe. Je ne comprends pas que le ministre de la Justice puisse utiliser ces organisations, leurs opinions et leur appui pour faire accepter un projet de loi et complètement ignorer le fait qu'elles dénoncent vigoureusement le projet de loi C-41. Je tenais à le dire.

(1630)

Ce projet de loi a trait aussi à l'article 745 du Code criminel. L'article 745 du Code criminel accorde aux personnes reconnues coupables de meurtre au premier degré ou à celles condamnées à une peine d'emprisonnement de plus de quinze ans la possibilité de demander une libération conditionnelle anticipée ou, du moins, de demander une réduction du délai préalable à leur libération conditionnelle après avoir purgé quinze ans de leur peine. Bien entendu, cela s'applique surtout aux personnes reconnues coupables de meurtre au premier degré.

Je demande: Que vaut une vie? Que considère-t-on comme une peine juste et équitable pour celui ou pour celle qui, de façon délibérée et préméditée, tue une personne innocente? Quelle est la peine juste et équitable pour cela?

Lorsque le gouvernement a supprimé la peine capitale, on nous a garanti qu'on allait protéger la société en imposant des peines d'emprisonnement à perpétuité aux personnes condamnées pour des meurtres au premier degré. Ces gens n'étaient pas censés être admissibles à une libération conditionnelle avant 25 ans. Cependant, je prétends que 99 p. 100 des Canadiens à l'époque ignoraient qu'on avait inséré l'article 745 dans le Code criminel.

Les députés peuvent affirmer qu'on en a discuté à la Chambre. Cependant, c'était avant que nos débats ne soient télévisés et je suis persuadé que très peu de gens savaient qu'on avait inséré cet article dans le Code criminel et ce que cela signifiait. Je crois que le gouvernement de l'époque a ainsi trahi et trompé les Canadiens. Mon bureau reçoit des appels et des lettres de gens qui disent clairement qu'ils n'étaient pas au courant des projets du gouvernement, lorsqu'il a ajouté l'article 745 au Code criminel.

Nous avons présenté un amendement à ce projet de loi qui supprimerait carrément l'article 745 pour qu'une peine d'emprisonnement à perpétuité ait vraiment tout son sens. Nous accorderions au moins une plus grande valeur à la vie humaine et toute personne tuant délibérément, avec préméditation, devrait alors purger sa peine, qu'elle ait des remords ou non, que sa réinsertion sociale soit possible ou pas. Elle doit payer sa dette envers la société. Nous disons que c'est exactement ce que le gouvernement a dû promettre dans les années 70, lorsqu'on a envisagé cette modification. Nous proposons de supprimer cette disposition. Je m'oppose au projet de loi C-41 pour cette raison également.

En résumé, je voudrais revenir sur la question de la violence dans la société, qui nous conduit à classer les gens par catégories. En vertu de ce projet de loi, les tribunaux imposeraient des peines plus sévères dans le cas de certains crimes. Si une personne est victime d'une agression de la part de quelqu'un qui la hait, et si elle tombe dans une des catégories prévues dans le projet de loi, son agresseur sera puni plus sévèrement. Par contre, si elle n'appartient à aucune de ces catégories, on n'imposera pas une peine plus lourde à son agresseur. Quant à moi, c'est là tout le problème. Cette mesure crée un statut particulier en catégorisant les personnes et, selon moi, c'est inacceptable.

(1635)

Comme je l'ai déjà dit, cette mesure créera des tendances et des préjugés plus vite qu'on pourrait le croire. Il suffit que je vous dise, monsieur le Président, que vous ne valez pas autant que moi parce que vous avez les yeux bruns, car moi, j'ai les yeux bleus. Nous devons éviter ce genre de choses à tout prix et ce projet de loi ne permet pas d'éviter cela. Quand on commence à établir dans la loi des droits spéciaux pour certains groupes, on évolue en terrain glissant.

Ce n'est pas avec ce projet de loi qu'on pourra réduire le nombre de crimes haineux dans notre pays. Comment fait-on pour éliminer les émotions qui suscitent la haine et les crimes haineux? De toute ma vie, je n'ai jamais trouvé d'autres moyens que la compréhension et l'amour. L'expérience m'a appris qu'une seule chose peut remplacer la haine dans l'esprit et le coeur d'une personne.

J'ai grandi dans ma famille, avec mes six frères, ma mère et mon père. Avec ma femme, j'ai élevé quatre enfants. Nous avons connu toute la gamme des sentiments et des émotions, y compris la frustration, la colère, l'amertume et tous ces sentiments négatifs qui peuvent affecter les êtres humains. Je sais d'expérience que, quand j'ai froid, si je ne me laisse pas pénétrer par la chaleur d'un radiateur, je ne me réchaufferai pas. Si je ne me laisse pas pénétrer par l'amour manifesté par ma famille, mes voisins et mes collègues, l'acrimonie dont je me sens parfois l'objet même en cet endroit pourrait me faire perdre le meilleur de moi-même. J'ai l'impression que ce phénomène se manifeste parfois.


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La députée du Bloc a parlé de violence psychologique. J'espère que ce ne sera pas déplacé si je me permets de demander quelle sorte de violence psychologique a été employée au sein du caucus libéral quand le chef libéral, le premier ministre du Canada, a expliqué aux troupes qu'il fallait respecter les ordres, sinon. . . Il s'adressait ainsi à des gens mûrs qui ont été élus librement par les Canadiens lors d'élections démocratiques. Mais que se passe-t-il?

Il y a deux sortes de violence. Il y a d'abord la violence physique. C'est ce dont traite ce projet de loi, mais il échoue lamentablement, selon moi. Il y a ensuite la violence mentale. Je pense souvent que cette forme est bien pire, parce qu'elle est source de violence physique. Si nous ne nous attaquons pas, en tant que parlementaires, aux facteurs déterminants des préjugés et de la haine, nous ne réussirons pas à surmonter le problème. Si nous commençons à adopter des attitudes choquantes, pour nous-mêmes et nos enfants, en disant par exemple que les Canadiens ne sont pas tous égaux devant la loi, nous nous engageons sur une pente glissante.

Je me rappelle que dans mon enfance les gens faisaient des plaisanteries sur les groupes ethniques et on ne s'en formalisait pas. Pourquoi? Parce que nous savions que nous étions tous égaux devant la loi. Lorsque ce n'est pas le cas, et on peut le constater dans les pays qui n'ont pas de lois qui consacrent l'égalité de tous et où existent des statuts et droits spéciaux et des privilèges, la colère, la frustration et la haine font leur apparition.

Ce projet de loi ne réglera pas ces problèmes. Je crois que le ministre de la Justice se trompe s'il veut créer une catégorie des personnes qui bénéficieraient d'un traitement privilégié devant les tribunaux. Je ne m'explique pas que le ministre de la Justice, qui a pourtant l'air d'un homme intelligent, ait présenté un tel document. Je ne peux pas lui donner mon appui.

(1640)

M. Allmand: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je me demandais si, avec le consentement unanime de la Chambre, je ne pourrais pas poser une question au député au sujet de son intervention. Je sais qu'aucune période de questions n'est prévue dans ce cas-ci, mais la Chambre pourrait peut-être m'autoriser à lui poser quand même une question.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu ce que demande le député de Notre-Dame-de-Grâce. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais rendre hommage au député pour tout le travail qu'il a accompli au sein du comité. Par contre, dans son discours, il laisse entendre que certaines dispositions du projet de loi feraient en sorte que les personnes qui ont les yeux bruns ou bleus jouiraient d'un traitement de faveur. Il a dit que le projet de loi risque de privilégier les personnes aux yeux bleus au détriment de celles qui ont les yeux bruns et vice versa, de sorte que certaines personnes seraient avantagées par rapport à d'autres. Ce n'est pas vrai. Je demanderais au député de réexaminer la question.

Le projet de loi parle de la haine fondée sur la race. On ne dit pas que telle race doit être privilégiée par rapport à telle autre. Elles sont toutes égales. Autrement dit, les dispositions pertinentes du projet de loi s'appliquent aussi bien aux personnes de race blanche que de race noire ou jaune qui ont été victimes d'un acte de violence. On ne fait aucune distinction entre les groupes.

Pour ce qui est de la nationalité, le projet de loi parle d'origine nationale. Il ne précise pas que les Anglais doivent être privilégiés par rapport aux Français ou aux Polonais. Il parle de religion. Il ne fait pas passer les juifs avant les catholiques ou les catholiques avant les presbytériens. Autrement dit, aucun groupe n'est privilégié et tous les groupes sont égaux.

Toutes les races, toutes les origines nationales, toutes les couleurs, toutes les religions, tous les sexes, tous les âges, toutes les déficiences mentales ou physiques sont considérés sur le même pied d'égalité, au même titre que toutes les orientations sexuelles. Si l'on attaquait des personnes hétérosexuelles, elles auraient droit à la même protection en vertu du projet de loi que des gais ou des lesbiennes.

Il a entendu les représentants de l'Association bu Barreau canadien et du Barreau du Québec, d'éminents avocats, présenter le même argument au comité. Comment peut-il dire alors que le projet de loi favorise un groupe par rapport à un autre quand ce n'est manifestement pas le cas? La formulation est très générale et ne favorise aucun groupe par rapport à un autre, comme les éminents avocats qui ont témoigné devant le comité nous l'ont d'ailleurs confirmé.

M. Ramsay: Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention, mais il ne comprend pas ce que je veux dire.

Ce que je dis, c'est qu'il y a des catégories. Il les a mentionnées. Je suis protégé tant que j'entre dans l'une ou l'autre de ces catégories. Qu'arrive-t-il si je n'entre dans aucune catégorie et si l'on m'agresse? Le député de Wild Rose se demande dans quelle catégorie il entre s'il est agressé par quelqu'un qui déteste les obèses. Ma foi, cette catégorie n'existe pas. Si je suis attaqué ou agressé parce que j'appartiens au parti politique auquel j'appartiens, comment le projet de loi me protège-t-il? Il ne me protège pas, car cela ne constitue pas une catégorie.

Je comprends ce que veut dire le député, mais ce n'est pas là l'argument que je faisais valoir. Ce que je veux faire valoir, c'est que si l'on commence à établir des catégories, on ferait mieux de ne pas s'arrêter, car il y a un nombre infini de raisons pour lesquelles des gens sont en colère et haïssent d'autres personnes. Parce qu'ils sont gras ou laids ou tout simplement parce qu'ils ne sont pas de bonne humeur pour une raison ou pour une autre. . .

Une voix: Ou riches.

M. Ramsay: Oui, riches, ou pauvres peut-être. Voilà ce que je veux faire valoir. Je croyais avoir été clair, mais si ce n'est pas le cas, j'espère que l'intervention de mon collègue aura permis d'éclaircir les choses.


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M. Harris: J'invoque le Règlement, Monsieur le Président. Dans le cadre de cet important débat, je voudrais seulement demander à la présidence de vérifier s'il y a quorum à la Chambre.

(1645)

Le président suppléant (M. Kilger): Je constate qu'il y a quorum. Le débat reprend. Nous passons à l'autre étape du débat, où les députés ont 20 minutes pour présenter leur allocution, qui est suivie d'une période de questions et d'observations de dix minutes.

Mme Hedy Fry (secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole. Je suis contente d'avoir l'occasion de prendre la parole dans le débat sur ce projet de loi. Je suis enthousiaste en songeant à ce que le projet de loi C-41 veut dire et veut faire pour tous les Canadiens.

Il fait suite aux travaux des commissions de réforme du droit qui nous disent clairement depuis des années qu'il est nécessaire d'établir l'objet et le principe de la détermination de la peine. Le ministre de la Justice et le gouvernement actuels prennent enfin une initiative à ce sujet.

Je ne comprends pas pourquoi les membres du troisième parti de la Chambre s'opposent à ce projet de loi avec un telle hargne et un tel acharnement. Qu'est-ce qui ne leur plaît pas dans cette mesure? C'est ce que je voudrais savoir. N'estiment-ils pas que les peines devraient dénoncer les comportements illégaux et avoir un effet dissuasif sur d'autres personnes? Ne sont-ils pas d'accord que dans certains cas, le but de la peine doive être d'isoler le contrevenant de la société et de protéger celle-ci? N'approuvent-ils pas la réadaptation et l'acceptation de la responsabilité des crimes que l'on a commis?

Ils ne contestent tout de même pas qu'il faille accorder la priorité à la réparation du tort causé à la victime. Que peut-on trouver à redire à ce sujet? N'estiment-ils pas que la peine doit être proportionnelle à la gravité du crime et au degré de responsabilité du contrevenant? Voudraient-ils que l'on impose des peines uniformes sans tenir compte de l'âge du contrevenant ni de la gravité du crime?

Un enfant de neuf ans devrait-il être jugé aussi coupable qu'un jeune de 25 ans? Les peines imposées pour des infractions aux règlements de la circulation devraient-elles être aussi sévères que pour un meurtre au deuxième degré?

Veuillez m'excuser si je suis sarcastique mais l'objet et le principe de la peine décrits dans ce projet de loi sont tellement logiques, tellement naturels, que j'ai de la peine à comprendre pour quelle raison on s'y oppose.

Il y a trois autres dispositions de ce projet de loi dont je compte parler aujourd'hui: Je parlerai d'abord de l'article qui prévoit des solutions de rechange à l'incarcération, ensuite des aspects du processus de détermination de la peine qui visent à défendre les droits des victimes et enfin et surtout de l'article 718, qui énumère entre autres choses les circonstances aggravantes entraînant un accroissement de la sévérité de la peine.

Il est logique de prévoir une solution de remplacement à l'incarcération. C'est raisonnable et cette disposition dit en résumé dans une langue que même moi, qui ne suis pas avocate, peut comprendre, que la peine doit être proportionnelle à la gravité du crime.

Elle dit simplement que les gens qui ne constituent aucune menace pour la société ne doivent pas être incarcérés et qu'il faudrait leur offrir la possibilité d'une sentence conditionnelle, qu'ils devraient payer leur dû au sein de la collectivité sous surveillance appropriée, et qu'ils devraient dédommager et la collectivité et la victime.

En cas d'amende-un tiers des gens qui se trouvent dans les prisons provinciales se trouvent là uniquement parce qu'elles n'avaient pas les moyens de payer leurs amendes-la province peut, si la personne ne peut pas payer, lui retirer ses licences et ses permis ou lui demander de la payer en faisant du travail d'intérêt communautaire.

Si les députés du troisième parti ne croient pas à la logique et à la justice de ces solutions de rechange, ils doivent assurément être d'accord quant à leur logique économique. Ces solutions de rechange épargnent au contribuable les frais de l'incarcération,

Le deuxième chose dont je veux parler au sujet de ce projet de loi, l'article 745, concerne la victime et la détermination de la peine. L'impact du crime sur la victime, la famille et la personne qui fournit les soins va être important et il en sera tenu compte dans la détermination de la peine.

Cela aide le délinquant à comprendre les effets réels de l'impact de son crime sur des personnes réelles. Cela satisfait sans aucun doute au principe de responsabilité du délinquant, qui devient ainsi directement responsable envers la victime et se trouve obligé de dédommager la victime ou la famille. Cet aspect passe avant toute autre chose.

Je ne comprends pas qu'un troisième parti dont les membres se targuent sans arrêt dans cette Chambre de défendre les victimes puisse ne pas être d'accord sur cette partie du projet de loi.

Enfin, je voudrais parler de l'article 718.2 du projet de loi, qui est la disposition la plus controversée et celle à laquelle le troisième parti est vraiment opposé. Il tient compte des circonstances aggravantes dans la détermination de la peine. Ces circonstances sont claires et précises. Il y en a deux: abus de la confiance de la victime, abus d'autorité à son égard. Ces circonstances seraient considérées comme aggravantes. Je lis ce passage: «Des éléments de preuve établissant que l'infraction est motivée par des préjugés ou de la haine fondés sur des facteurs tels que la race, l'origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique ou l'orientation sexuelle.»

(1650)

Je voudrais retenir deux expressions: «des éléments de preuve» et «sur des facteurs tels que». J'ai entendu le tiers parti dire à la Chambre que nous allons mener une chasse aux sorcières, devenir paranoïaques et inculper quiconque passe à tabac une autre personne, parce que nous croirons que son acte est motivé par de la haine. Or, une fois l'accusé reconnu coupable, il faudra établir la preuve que son acte est motivé par de la haine.C'est clair.


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Nous venons d'entendre l'orateur précédent dire qu'il avait l'impression que nous classions les gens dans des catégories différentes et que nous accordions des privilèges à certains d'entre eux. Il a mentionné les personnes obèses. Dans un passage de l'énoncé, on dit: «facteurs tels que», ce qui englobe tout ce qui ne figure pas dans la liste. Le député devrait réellement réfléchir à tout cela. Je me demande s'il a lu le projet de loi en entier.

Je voudrais expliquer pourquoi cette question préoccupe le tiers parti. Si nous évitons les faux-fuyants et cessons de nous demander si nous devrions ou non inclure tout le monde, nous constatons tout de suite que c'est à l'insertion de l'expression «orientation sexuelle» que s'opposent les députés d'en face. C'est à cela qu'ils s'opposent. Je veux qu'ils sachent que je me réjouis de cette insertion.

Lorsque j'étais médecin, j'ai vu beaucoup de jeunes hommes arriver à la salle d'urgence, atteints de blessures à la suite de coups reçus parce qu'ils étaient homosexuels. Dans ma circonscription, le vendredi et le samedi soir, le harcèlement des homosexuels est le sport préféré de braves machos qui roulent dans les rues en quête de personnes homosexuelles ou, pire encore, qu'ils croient être homosexuelles. L'alcool aidant, ils intimident, effraient et brutalisent ces personnes.

Lorsqu'il avait 17 ans, mon fils revenait à la maison un soir avec un ami. Ils attendaient l'autobus à un arrêt. Parce qu'il était avec son camarade de classe, des gens les ont roués de coups et traités de pédés. Si six autres personnes n'étaient pas accourues pour leur venir en aide, mon fils et son ami auraient probablement été morts lorsqu'on les a amenés à la salle d'urgence. Ce sont à des situations de ce genre que je songe lorsque je parle de crimes contre la personne qui sont motivés par de la haine. Lorsque quelqu'un commet un crime contre une autre personne parce qu'il croit qu'elle fait partie d'un certain groupe, il le commet contre tous les membres de ce groupe.

Je m'excuse si je suis un peu émue. Ces situations existent réellement. Nous pouvons bien parler dans cette Chambre de ce que dit la loi, des détails, de mettre les points sur les i et ergoter sur chaque mot, cela n'empêche que dans la réalité, des incidents de ce genre se produisent tous les jours.

Dans ma circonscription, il n'y a pas que les hommes qui sont visés. Les lesbiennes aussi sont la cible de ces expéditions nocturnes du seul fait de leur orientation sexuelle, pour cette seule raison et aucune autre.

N'avons-nous pas retenu les leçons de l'histoire? Au tout début, au temps des croisades, il y a eu les guerres de religion. Plus récemment, dans l'Allemagne nazie, les gens étaient la cible de passages à tabac parce qu'ils étaient juifs. Ces actes de violence, qui étaient approuvés par le gouvernement, n'avaient pas débuté dans le cadre d'une guerre, mais étaient le fait d'individus, puis de groupes pour finir par atteindre les proportions d'un génocide.

N'avons-nous retenu aucune leçon du passé? Est-ce que nous sommes assis ici dans ces sièges à la Chambre des communes avec la ferme conviction que nous avons fait des progrès, que nous sommes parvenus à nos fins puisque nous vivons dans une société tolérante et d'une grande diversité et qu'il y a ici des députés de couleurs et de religions différentes?

Assise dans mon siège, j'ai écouté le député s'offusquer du fait qu'on accorderait un statut et des droits spéciaux à certaines personnes. Dans ma circonscription et dans le reste du Canada, les homosexuels et les bisexuels ont des droits spéciaux, c'est vrai. Ils ont le droit de se faire rosser de coups tous les vendredis soirs et tous les samedis soirs, de se voir refuser le droit de travailler, le droit de vivre, le droit de se promener dans la rue, d'aller au cinéma et de jouir des plaisirs de la vie que les députés de cette Chambre tiennent pour acquis.

(1655)

Le député qui a parlé avec une telle désinvolture, que connaît-il de la haine et des préjugés? Il appartient à un groupe majoritaire représenté à la Chambre. Il jouit d'un certain statut et il n'aura jamais à connaître la discrimination ni l'humiliation d'être vilipendé. Moi, je sais ce que c'est. Ce n'est pas parce que le groupe auquel j'appartiens est maintenant accepté que je ne peux pas parler au nom de ceux qui ne le sont pas.

Quotidiennement, des députés du troisième parti se lèvent dans cette Chambre pour proclamer qu'ils défendent les victimes et qu'ils protègent leurs droits. Honte à eux qui refusent d'appuyer le projet de loi. Ce faisant, ils abandonnent les homosexuels et les lesbiennes du pays qui sont quotidiennement victimes de violence.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, je viens d'une ville du centre de la Colombie-Britannique, qui connaît de graves difficultés à l'heure actuelle. Certains jeunes se tiennent en bandes et, pour s'amuser, s'attaquent aux gens qu'ils rencontrent dans la rue et les battent. Ils n'exercent aucune discrimination, car ils ne prennent pas le temps de regarder la couleur de leurs victimes, ni de leur demander quelle est leur orientation sexuelle ou leur religion. Ils battent les gens, c'est tout.

Les réformistes ont tenté de dire ici que leurs agressions ne sont pas moins graves parce qu'ils ne connaissent pas la religion ou l'orientation sexuelle de leurs victimes ou qu'ils ne savent pas si elles appartiennent à l'une de ces catégories où le gouvernement veut classer les gens.

La députée tente de nous dire que, lorsqu'on bat quelqu'un pour le plaisir, sans motif, simplement parce qu'on trouve cela amusant de battre quelqu'un, on commet un geste moins grave que lorsqu'on s'attaque à une personne qui appartient à l'une de ces catégories proposées par les libéraux. C'est tout à fait insensé.

Je crois que la députée est une personne intelligente. Comment peut-elle se lever et affirmer que, lorsqu'une victime appartient à une catégorie imaginée par le gouvernement libéral à la suite de pressions de la part de quelque groupe d'intérêt spécial, une agression contre elle sera plus grave que toute agression contre des personnes appartenant à d'autres catégories?

Lorsqu'ils ont entrepris leur soi-disant mission d'enquête, les libéraux ont pris le temps d'inviter tous les groupes d'intérêts spéciaux auxquels ils ont pu penser à venir s'adresser à eux et dire ce qu'ils pensaient du système de justice pénale. Toutefois, ils ont oublié une chose. Ils ont oublié de parler aux Canadiens en général. J'utilise ce mot avec fierté. Tous ceux qui vivent dans ce pays sont des Canadiens et ont droit à l'égalité devant la loi,


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quelle que soit leur couleur ou leur religion, qu'ils soient homosexuels, protestants ou catholiques.

Le gouvernement laisse entendre que le choix d'une personne quant à son orientation sexuelle ou à sa religion fait que tout crime commis contre elle sera plus grave que le même crime commis contre un Canadien ordinaire. C'est absolument ridicule. Une telle assertion ne sert qu'à gagner la faveur des groupes d'intérêts spéciaux qui placent le gouvernement au pouvoir. Le Canadien moyen saura bien défaire ce gouvernement lors des prochaines élections.

Le président suppléant (M. Kilger): Chers collègues, je voudrais faire une observation. Nous en sommes encore au tout début d'un débat limité à une période de six heures. Dans un tel cas, les députés signalent à la présidence s'ils ont l'intention de partager leur temps de parole. Je n'ai aucune idée, pour l'instant, de la façon dont les autres partis ont l'intention de procéder; tout ce que je sais, c'est qu'un grand nombre de députés désirent participer au débat.

(1700)

Lorsque les députés partagent leur temps de parole, ils n'ont que cinq minutes pour les questions et observations. Pour faciliter la participation du plus grand nombre possible de députés, la présidence va essayer de s'en tenir strictement aux limites. Si un député prend quatre minutes pour poser sa question, la réponse devra être très brève. Finalement, c'est une question de bonne volonté de la part de tous les députés. Si l'un d'entre eux utilise les cinq minutes pour ses questions et observations, c'est son choix.

Cette fois-ci, je vais, à regret, donner le ton. Je vais demander à la secrétaire parlementaire de ne pas utiliser plus d'une minute pour sa réponse parce que je devrais réellement donner la parole à l'orateur suivant.

Mme Fry: Monsieur le Président, je me suis demandé pendant un moment si c'était une question ou un discours. Je vais répondre à la question très clairement. Le député demande comment je peux déterminer qu'il s'agissait de voies de fait délibérées. Mon fils et des amies filles ont parcouru ces mêmes rues, au même moment, dans la ville de Vancouver et n'ont jamais être attaqués. Il s'est fait traiter de pédé. C'est le terme qui a été utilisé. C'est le terme qu'utilise ceux qui cherchent noise. Ça s'appelle descendre en ville pour casser la gueule à quelques pédés. C'est de la haine dirigée contre un groupe particulier.

Je ne sais pas ce que le député entend par groupes d'intérêts particuliers. Le projet de loi traite des femmes, des enfants, des personnes âgées et des victimes. Le troisième parti nous dit maintenant que les femmes sont un groupe d'intérêts particuliers. Ils ont déjà dit cela. Maintenant, ce sont les enfants qui constituent un groupe d'intérêts particuliers, tout comme les victimes. Tout le monde est un groupe d'intérêts particuliers pour le troisième parti. Ce n'est pas un parti qui parle au nom des Canadiens. À vrai dire, je ne sais pas au nom de qui il parle.

M. Bill Graham (Rosedale, Lib.): Monsieur le Président, c'est un grand privilège pour moi d'intervenir au sujet de cet important projet de loi dont la Chambre est saisie aujourd'hui.

On a dit bien des choses sur cette mesure. Je me pose trois questions lorsque j'examine la nature de ce projet de loi. Tout d'abord, quel est le but de cette mesure? Ensuite, est-elle nécessaire? Et enfin, aura-t-elle des conséquences imprévues ou regrettables? On a beaucoup parlé des répercussions regrettables qu'elle pourrait avoir.

Que fait ce projet de loi au juste? Il s'agit d'une révision en profondeur du système de déterminaion de la peine au Canada, ce que réclament les commissions de réforme du droit, les juristes et les criminologues depuis 20 ans. Nous avons demandé une révision exhaustive des normes régissant la détermination de la peine au Canada. Il s'agit d'un projet de loi d'ensemble qui aborde ces questions. C'est un projet de loi extrêmement important qui découle d'études cherchant à déterminer le genre de sanction qui pourrait prévenir la criminalité tout en favorisant la réinsertion sociale des criminels. C'est l'objectif de ce projet de loi.

Il est tout à fait regrettable que le débat à la Chambre ait tourné autour de l'article 718.2 qui oblige les tribunaux à déterminer si l'infraction a été motivée par des préjugés ou de la haine fondés sur des facteurs tels que la race, l'origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique ou l'orientation sexuelle ou tout autre facteur semblable. Étant donné que les membres du troisième parti passent tout leur temps à ne parler que de cela et à mettre l'accent là-dessus, permettez-moi de me pencher sur cette question.

Cette disposition s'impose-t-elle? Oui. Nous avons entendu ce qu'en pensait le secrétaire parlementaire. Nous vivons dans un siècle qui a été témoin de la Seconde Guerre mondiale et de l'holocauste. Nous voyons ce qui se passe en ex-Yougoslavie et nous avons discuté de la situation à la Chambre. Les événements actuels en Bosnie sont le fruit d'une haine qui remonte à plusieurs années et qui découle de luttes sectaires, les gens se haïssant ou se méprisant les uns les autres. Au comité des affaires étrangères, nous avons reçu des représentants de l'organisme B'nai Brith du Canada qui en savent long là-dessus. Vous pourriez écouter, vous, là-bas, du troisième parti.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Je préviens les députés qu'il s'agit d'un débat extrêmement délicat qui soulève des points de vue bien arrêtés. Je sais que nous voulons le mener dans le plus grand respect. Toutes les interventions doivent passer par la présidence, par le Président, et les députés ne doivent jamais s'adresser directement à leurs collègues.

(1705)

M. Graham: Monsieur le Président, notre comité a reçu un rapport de l'organisme B'nai Brith. Il porte sur la menace que l'extrême droite fait peser sur la paix et la sécurité internationales. Dans ce rapport de 350 pages, on montre qu'il y a encore de très fortes tendances à l'antisémitisme et au racisme dans le monde et qu'on doit y prêter attention. Ce rapport établit également un lien entre le racisme, l'antisémitisme et l'homophobie.


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Selon ce rapport, il s'agit d'une seule et même chose. On dit clairement que ce sont les mêmes voix qui réclament l'élimination des gens différents des autres.

À propos d'extrémisme aux États-Unis, le rapport dit ceci:

L'homosexualité est un thème récurrent de l'extrémisme. Les croyants sont libres de soutenir que l'homosexualité est incompatible avec leur théologie, mais les campagnes anti-homosexuels se transportent de l'église à la place publique et traitent les gais comme des gens malades, tourmentés par la maladie, volontairement pervers et inaptes à fréquenter des garçons sains de corps et d'esprit, ce qui est nettement une marque d'extrémisme. Les gais américains sont devenus les nouveaux boucs émissaires chez eux, peut-être encore plus que dans tout autre pays démocratique et, de même que Der Sturmer de Julius Steicher a été une contribution directe à l'anti-sémitisme nazi et à ses suites, ainsi les propos homophobiques des extrémistes religieux conduisent au tabassage des homosexuels et au meurtre.
Lorsque j'entends certains propos de la part de députés de la Chambre qui parlent de relativisme, qui parlent d'un groupe exclu de la protection que doit assurer la société civilisée et qui invoquent la loi naturelle, je pense à ce passage du rapport et je frisonne. Le droit naturel auquel je me réfère se trouve dans la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Egan c. Nesbitt, qui soutient que la discrimination est illégale dans notre pays.

Quand les députés d'en face parle d'extrémisme et du problème des incidents violents, je pourrais leur citer des dizaines d'incidents violents qui se sont produits dans des circonscriptions urbaines de notre pays. Il s'en est produit dans ma propre circonscription, Rosedale. Comme la députée de Vancouver-Centre, je connais des personnes qui, alors qu'elles descendaient la rue Church, se sont fait attaquer, sous prétexte qu'elles étaient gaies, par des gens sortis d'une voiture.

En août 1989, Alain Brosseau, un jeune homme que l'on croyait homosexuel, a été projeté en bas du pont Interprovincial qui relie Ottawa à Hull. Nous pouvons apercevoir ce pont d'ici. Ses agresseurs ont dit aux tribunaux qu'ils voulaient simplement tabasser un homosexuel. L'un des agresseurs a dit qu'il lui avait mis un faux revolver contre la tempe et que, le voyant pris de panique, il s'était mis à rire. Un autre l'a tenu par les pieds, au-dessus du pont, et lui a dit qu'il aimait bien ses chaussures. Après quoi, il l'a lâché.

Dans cette même ville, deux étrangers se sont approchés d'un homme qui revenait de Hull et lui ont demandé où il était allé. Quand il leur a donné le nom du bar, un bar d'homosexuels, ils l'ont traité de pédé et l'ont tellement roué de coups qu'il a dû être hospitalisé pendant deux jours.

Au cours de l'intervention de la députée qui a pris la parole avant moi, j'ai entendu certains députés d'en face dire: «Épargnez-moi!» Pourtant, personne n'a épargné ces gens. Si on ne les a pas épargnés, c'est parce qu'on estime qu'ils constituent des proies rêvées, comme on l'a entendu dans les interventions qui ont été faites ici et qui expliquent pourquoi des gens peuvent être attaqués en raison de leur comportement, de leur religion ou de leur race, ou encore parce qu'ils ne font pas partie d'un groupe toléré par certains groupes de notre société.

Une société civilisée ne peut tolérer ce genre de conduite et nous ne pouvons pas accepter qu'elle se perpétue. Nous devons y faire obstacle dans nos lois pénales. Nous devons concevoir des lois qui s'inspirent de la notion de comportement civilisé, qui font comprendre à nos concitoyens que s'ils s'engagent sur cette voie, ils se retrouveront dans cette obscurité qui a conduit l'Allemagne nazie dans des guerres qui ont ruiné l'Europe .Nous vivons dans une société tolérante. Ne nous laissons pas leurrer par ceux qui disent que ce projet de loi aura des conséquences imprévues, notamment la tolérance à l'endroit de la pédophilie et d'autres crimes.

Le ministre a accepté un amendement qui n'était pas nécessaire légalement parlant, mais qui répond à cette préoccupation, et il a dit qu'il n'aura pas pour effet de légaliser une conduite jusque-là illégale. On n'a jamais laissé entendre une telle chose. Comment peut-on soutenir que, lorsqu'un juge essaie de déterminer la juste peine à imposer dans un cas donné, il tient bien compte des circonstances pour éviter que des crimes semblables ne se reproduisent? N'oublions pas que ce projet de loi porte sur la détermination de la peine et sur la manière de prévenir des comportements anti-sociaux. Ce sont là les circonstances dont le juge tient compte.

(1710)

Comment cela pourrait-il conduire à une augmentation de la pédophilie au Canada, qui constitue une infraction criminelle connue de tous les juges? Cet argument est un faux-fuyant concocté par ceux qui veulent discréditer l'idée de lois pénales modernes, compatissantes et éclairées, qui visent à extirper de notre société les maux que sont la haine, le racisme, l'homophobie et d'autres formes de conduites intolérables dans une société.

En tant que citoyens, nous avons la chance de vivre en paix dans notre pays. Nous avons de la chance. En général, nous pouvons nous promener n'importe où sans crainte d'être agressés. Ce qui n'exclut pas, comme le disaient des députés d'en face, qu'une personne qui se promènerait en pleine nuit puisse être victime d'agression. Je ne le nie pas. C'est possible.

Cependant, je demande aux députés d'en face et aux autres députés de la Chambre de réfléchir à ce que ce projet de loi fait pour les personnes qui, chaque fois qu'elles circulent dans les rues de cette ville, sont la cible d'attaques simplement à cause de leur nature intrinsèque. Ce n'est pas par hasard qu'elles risquent d'être attaquées. Le député de Wild Rose a dit qu'il risque d'être attaqué parce qu'il est obèse.

Il a bien raison. On m'a déjà dit que j'avais l'air trop anglais; peut-être qu'on m'attaquera un jour à cause de cela. Cependant, ce n'est pas un risque auquel le député de Wild Rose ou moi-même sommes exposés tous les jours de notre vie, comme ceux qui savent qu'ils risquent d'être directement la cible d'agressions simplement en raison de leur nature, de leur race ou de leur religion.

Ce projet de loi exhaustif sur la détermination de la peine est le fruit de plusieurs années d'étude. Il consacre les efforts de sociologues, de criminologues et de nos juristes les plus chevronnés, qui tentent de trouver un moyen de moderniser le Code criminel pour que tous les Canadiens puissent vivre dans une


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société pluraliste et tolérante, aujourd'hui et dans le siècle prochain, une société moderne et civilisée dans laquelle nous puissions tous être fiers de vivre en toute quiétude et en toute sécurité.

C'est la raison pour laquelle je suis fier de parler de ce projet de loi. Je suis fier de faire partie du gouvernement qui l'a présenté.

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, j'aurais deux questions à poser au député qui est tenu pour un éminent avocat.

Les réformistes ont laissé entendre que l'article 718.2 favorise certains groupes par rapport aux autres. À leur avis, du point de vue de la détermination de la peine, les personnes qui sont victimes d'un crime ou d'une agression en raison de leur race, de leur origine ethnique ou de leur langue, par exemple, jouissent d'un avantage par rapport à celles qui ne font pas partie des groupes énumérés. Or, à l'étape de l'étude en comité, nous avons modifié cet article en y ajoutant les mots «des facteurs tels que» pour s'assurer que la liste des groupes visés par les dispositions sur les crimes haineux ne soit pas restrictive.

Grâce à cette modification, à l'ajout de l'expression «des facteurs tels que» en comité, on englobe les cas où une personne est attaquée parce qu'elle est chauve, grosse, libérale ou réformiste. Qu'en pense le député?

L'autre argument qu'on nous a servis est le suivant: même si tous les groupes bénéficient d'une protection égale, pourquoi imposer une peine plus sévère pour des crimes haineux commis envers un groupe plutôt qu'un individu. Mais n'est-il pas vrai que, dans le Code criminel, la peine maximale pour un crime est dix ans ou la perpétuité, ou 15 ans? Reprenons l'exemple du député du Parti réformiste. Dans sa localité, il y a des gens qui se promènent dans la rue et qui tabassent d'autres gens parce qu'ils les détestent. Ce n'est pas la haine contre le groupe qui les motive. Le juge pourrait imposer la peine maximale dans ce cas. Si elle est de dix ans, il peut imposer une peine de dix ans.

Ce que dit cet article, c'est que, s'il comptait imposer une peine de cinq ans, il pourrait peut-être ajouter deux ans, pour un total de sept ans. S'il s'agit d'un crime contre la personne, le juge ne pourrait-il pas imposer la peine maximale, même si les motifs de haine prévus dans cet article n'entraient pas en ligne de compte?

J'aimerais que le député réponde à ces deux questions.

(1715)

M. Graham: Monsieur le Président, le savant président du Comité de la justice pose deux excellentes questions.

Nous cherchons désespérément comment, à titre de parlementaires, nous pouvons donner des instructions aux tribunaux et aux juges sur la façon de se pencher sur ces cas. L'exemple du député illustre clairement que l'on demande à un juge de prendre cela en considération, de déterminer le tort que subit la société et d'intensifier la peine qui serait infligée autrement. Il est évident que si l'agression est particulièrement malveillante et mérite la peine maximale, le juge est parfaitement libre de l'infliger.

Nous voulons donner aux magistrats l'occasion d'envoyer un message à la société. C'est d'ailleurs le but de la sentence. Nous ne voulons pas simplement une justice rétributive. Le but de la sentence, c'est d'envoyer des messages à la société pour définir la conduite qu'une société civilisée peut tolérer, de permettre aux tribunaux d'infliger une peine plus lourde pour un comportement de ce genre et de faire comprendre que ce comportement ne sera pas toléré. C'est précisément ce qu'illustre la question du député; nous avons ici l'occasion de permettre à nos tribunaux de se prononcer sur ces questions et de les régler. À cet égard, il s'agit d'un ajout très intelligent à ce projet de loi sur la détermination de la peine.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, j'ai de la difficulté à saisir le lien lorsque le député dit que si les délinquants commettent de tels actes, on va adopter la ligne dure et les dissuader d'agir de la sorte. Cela fait deux ans que je dis qu'il faut se montrer sévère envers ceux qui commettent des meurtres ou des agressions sexuelles.

Les bloquistes disent que je veux mettre tout le monde en prison et jeter la clé. Quant aux libéraux, ils disent que ce n'est pas une solution. Or, tout à coup, voilà que c'en est une solution. Qu'est-ce qui a changé? Pourquoi ne pas traiter tout le monde sur le même pied lorsqu'on adopte de telles mesures? Pourquoi imposer un châtiment plus ou moins sévère, selon que l'infraction est liée ou non à un motif particulier? Les conséquences sont aussi graves dans un cas que dans l'autre.

Quand allons-nous adopter une approche globale et cesser de faire toutes sortes de distinctions?

M. Graham: Monsieur le Président, je comprends jusqu'à un certain point la position du député. Il va de soi que nous ne voulons pas tolérer le genre de comportement antisocial auquel il a fait allusion. Toutefois, le député ne tient absolument pas compte de l'importance d'intégrer cette approche aux autres mesures sociales.

M. Thompson: C'est ce qu'on fait maintenant. C'est ce qu'on a déjà fait.

M. Graham: Par exemple, le Code criminel renferme des dispositions en vertu desquelles il est illégal de prêcher la haine contre d'autres personnes. Ces questions sont liées à des aspects fondamentaux de notre société.

Plus tôt, j'ai fait allusion à la situation qui sévit dans l'ex-Yougoslavie. Il existe aujourd'hui dans le monde des problèmes que le député et moi avons connu durant la Seconde Guerre mondiale, alors que certains groupes sectaires vouaient une haine mortelle à d'autres. Ce projet de loi vise à traiter de façon intelligente et, je dirais, très réfléchie des causes profondes du

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mal, en allant au-delà des manifestations de violence auxquelles le député fait allusion.

Une distinction peut être établie entre des actes criminels, du point de vue de leur caractère antisocial. Ce projet de loi dit aux juges ce dont ils devraient tenir compte. C'est pourquoi j'appuie cette mesure intelligente et nécessaire. Les policiers de ma circonscription disent que ce genre de crime est en hausse et que cette mesure législative est nécessaire.

M. Thompson: Les policiers vous disent que ce projet de loi n'est pas bon.

M. Graham: Vous pouvez me croire, les policiers de Toronto nous disent que cette mesure s'impose. Le député se leurre s'il n'admet pas cela.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je comprends qu'en vertu de ce qui nous attend, il ne me sera pas possible de parler 20 minutes de suite et que vous allez m'interrompre pour que ceux qui le désirent puissent se rendre au Sénat pour la sanction royale.

(1720)

Permettez-moi de commencer en disant qu'aucune ligne partisane, aucun clivage de parti ne peut m'interdire aujourd'hui d'adresser, bien sincèrement, mes remerciements au ministre pour le courage qu'il a eu en étant d'abord persévérant, parce qu'on sait que si un projet de loi a suscité la controverse, si un projet de loi a suscité la polémique, c'est bien le projet de loi qui est devant nous.

Je sais très bien que le ministre a démontré énormément de courage, énormément d'humanisme. Permettez-moi, malgré nos clivages partisans, de le remercier. Je le remercie à trois titres, en ma qualité de parlementaire d'abord, en ma qualité de citoyen ensuite, en ma qualité de gai en troisième lieu.

Je crois, et j'espère que tous les termes que je vais employer sont parlementaires, mais je crois qu'il faut vraiment être obtus, qu'il faut vraiment être bornés et qu'il faut vraiment vivre sur une autre planète pour ne pas se rendre compte que, de fait, il y a des gens dans notre société qui vivent la violence. Il y a des gens dans notre société qui vivent la violence parce qu'ils sont homosexuels.

On peut bien fermer les yeux sur une réalité comme celle-là, mais cela ne change rien au fait que, comme parlementaires, nous sommes interpellés sur cette réalité. Donc, je réitère bien simplement mes remerciements au ministre de la Justice. Je lui réitère mes remerciements bien sincèrement pour le courage qu'il a démontré. Évidemment, il ne s'agit pas d'en prendre une habitude, mais dans ce cas-ci, je le remercie bien sincèrement.

Je veux dire aussi qu'il serait intéressant pour nos amis réformistes-qui, il faut quand même en convenir, lorsqu'ils tentent de comprendre cette réalité, ne font pas exactement dans la dentelle-de venir passer une journée dans la communauté gaie. J'aurais même tendance à vous dire, si c'est parlementaire, que c'est plutôt dans le papier sablé qu'ils ont entrepris de vernir l'immeuble démocratique du Québec et du Canada.

Il serait sans doute intéressant que les collègues du Parti réformiste puissent venir passer une journée en compagnie d'un certain nombre de porte-parole des membres de la communauté gaie, qu'ils puissent peut-être délaisser leur coin d'appartenance et qu'ils puissent venir dans le village gai. Je leur lance l'invitation.

Je suis député de Hochelaga-Maisonneuve, mais juste à côté, dans le comté du sympathique whip du Bloc québécois, se trouve le village gai. Je leur lance donc l'invitation, si l'un d'entre eux veut pousser la logique jusqu'à véritablement comprendre ce qui se passe.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous poursuivrons le débat après notre visite au Sénat.

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SANCTION ROYALE

[Traduction]

Le gentilhomme huissier de la verge noire apporte le message suivant:

Monsieur le Président, c'est le désir de l'honorable suppléant du Gouverneur général que cette honorable Chambre se rende immédiatement auprès de lui dans la salle de l'honorable Sénat.
En conséquence, le Président et les députés se rendent au Sénat.

Et de retour:

Le président suppléant (M. Kilger): J'ai l'honneur de faire savoir à la Chambre que, lorsqu'elle s'est rendue au Sénat, il a plu au suppléant du Gouverneur général de donner, au nom de Sa Majesté, la sanction royale à certains projets de loi:

Projet de loi C-43, Loi modifiant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et d'autres lois en conséquence-Chapitre 12
Projet de loi C-44, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la Loi sur la citoyenneté et modifiant la Loi sur les douanes en conséquence-Chapitre 15
Projet de loi C-53, Loi constituant le ministère du Patrimoine canadien et modifiant ou abrogeant certaines lois-Chapitre 11
Projet de loi C-75, Loi modifiant la Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles et à la commercialisation selon la formule coopérative-Chapitre 13
Projet de loi C-81, Loi modifiant la Loi concernant la «Buffalo and Fort Erie Public Bridge Company»-Chapitre 14
Projet de loi C-97, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1996-Chapitre 16
[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 30, la Chambre abordera maintenant l'étude des Affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.

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Je voudrais faire une parenthèse pour ajouter qu'avant d'aller au Sénat, l'honorable député d'Hochelaga-Maisonneuve avait la parole sur le projet de loi C-41 à l'étape de la troisième lecture et nous y reviendrons après l'heure consacrée aux Affaires émanant des députés.

_____________________________________________


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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

M. Bernard St-Laurent (Manicouagan, BQ) propose: Que le projet de loi C-317, Loi modifiant le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (briseurs de grève et services essentiels), soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent du développement des ressources humaines.

-Monsieur le Président, il me fait plaisir de pouvoir plaider en cette Chambre aujourd'hui le projet de loi C-317, projet antibriseurs de grève. Ce projet de loi, qui modifiera le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, a pour objet d'interdire l'embauche de briseurs de grève afin de remplacer les employés en grève ou en lock-out au sein d'un employeur visé au Code canadien du travail et les employés en grève dans la fonction publique fédérale.

(1740)

Le projet de loi vise également à maintenir les services essentiels lors d'une grève ou d'un lock-out au sein d'une société d'État ou dans la fonction publique fédérale.

Comme vous le savez, la cause des travailleurs me tient beaucoup à coeur. C'est pour cette raison que j'ai déposé en cette Chambre, au nom du Bloc québécois, ce projet de loi qui protégerait adéquatement les travailleurs actuellement victimes de pratiques déloyales de la part de leur employeur.

Au Canada, plus de 10 p. 100 de la main-d'oeuvre est régie par les dispositions du Code canadien du travail. Cela représente, au Québec, 217 600 travailleurs et au Canada, plus de 1 083 000.

Le débat sur l'adoption d'une loi antibriseurs de grève par le Parlement fédéral pour les entreprises qui sont sous sa juridiction ne date pas d'hier. En 1980, l'honorable Ed Broadbent, alors chef du NPD, avait déposé un projet de loi privé visant à interdire les travailleurs de remplacement. Entre 1981 et 1992, plusieurs syndicats ont réclamé successivement une loi antibriseurs de grève à Ottawa.

Enfin, en 1990, le Bloc québécois avait déposé par l'entremise de mon collègue, le député de Richelieu, un projet de loi qui avait pour but d'interdire l'embauche de personnes afin de remplacer les employés en grève ou en lock-out dans une société d'État. Ce projet de loi, qui en était rendu au stade de la deuxième lecture, a malheureusement été rejeté, mais par seulement 18 voix.

C'est en 1977 que le législateur québécois a adopté ce qui est appelé communément une loi anti-scabs au Québec. Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er février 1978.

Pour comprendre les raisons de leur adoption, il faut remonter au début des années 1960. Dans cette ère de grandes réformes, les relations entre le Canada et les syndicats ont permis une révision des lois du travail qui a occasionné une forte croissance des effectifs syndicaux. Les syndicats ont peu à peu radicalisé leur position. Au début des années 1970, en réaction à l'élection des libéraux et à l'imposition de leur Loi sur les mesures de guerre, faut-il s'en souvenir, les syndicats se sont dissociés ouvertement des agissements de l'État. Une grève du Front commun des travailleurs du secteur public mettait en branle l'émergence d'une nouvelle solidarité syndicale. En très peu de temps, cette solidarité s'est transposée dans le secteur privé.

Par la suite, des grèves extrêmement mouvementées ont eu lieu vers le milieu des années 1970. Rappelons-nous la grève de la Firestone, celle de la Canadian Gypsum et surtout celle de la désormais populaire United Aircraft.

C'est le Parti québécois qui a adopté dans son programme l'idée d'interdire l'utilisation de briseurs de grève.

Un fait marquant est survenu à une semaine de l'adoption du projet de loi. À l'occasion d'une grève à la compagnie Robin Hood, de Montréal, à l'époque, qui est une compagnie de compétence fédérale, des agents de sécurité ont ouvert le feu sur des grévistes et en ont blessé huit. Et la personne qui a donné l'ordre de tirer s'appelle M. Robert Grynszpan. Je vous donne son nom parce que tout à l'heure, comme par hasard, on le verra revenir dans l'actualité.

Au Québec, depuis l'adoption des dispositions antibriseurs de grève, des études ont révélé qu'il y a effectivement eu une diminution dans la durée des conflits.

Il est évident que la loi québécoise n'a pas été accueillie favorablement par les employeurs. Le Conseil du patronat, qui s'opposait farouchement à cette loi, a obtenu, en 1991, la permission de la contester devant la Cour suprême. Il a toutefois décidé par la suite d'abandonner les procédures, jugeant que le climat des relations de travail avait changé depuis l'application des dispositions de la loi. Et ce petit bout de phrase que je viens de dire devrait amplement dicter la conduite du gouvernement fédéral actuel.

Ce projet de loi ne cherche pas à imposer au reste du Canada une législation essentiellement québécoise.

(1745)

Au Canada, la tendance semble intégrer le principe de la prohibition d'utiliser des travailleurs de remplacement afin d'effectuer le travail des grévistes dans la culture des relations de travail.

Les lois récentes de l'Ontario et de la Colombie-Britannique de même que les tentatives au fédéral en font foi. Avec le Québec, ces trois provinces à elles seules représentent plus de 75 p. 100 de la population canadienne. La majorité des travailleurs et des employeurs sont donc régis par des dispositions législatives interdisant l'utilisation de briseurs de grève. Certes, le degré de prohibition peut varier, mais le principe demeure le même et


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semble accepté, tant dans le milieu patronal que dans le milieu syndical.

Au Québec, plusieurs syndicats et employeurs sont d'accord pour dire que les dispositions antibriseurs de grève ont eu pour effet de réduire considérablement le nombre et la durée des conflits de travail. Ils s'entendent aussi pour dire que cela a contribué à diminuer les risques de violence sur les piquets de grève, et ce, au bénéfice des deux parties.

Dans le sens contraire, le recours aux briseurs de grève n'a fait, dans les dernières années, que prolonger les conflits entre syndicats et dirigeants. Des statistiques prouvent que les conflits de plus grande importance quant au nombre de travailleurs impliqués sont généralement ceux où l'on emploie des briseurs de grève. On a également remarqué que plus un conflit s'allonge, plus la proportion de briseurs de grève augmente.

On a qu'à penser au conflit de la minoterie Ogilvie de Montréal qui n'est toujours pas résolu à l'heure actuelle. Si vous me le permettez, j'aimerais brièvement rafraîchir la mémoire de mes collègues concernant ce conflit de travail qui s'éternise depuis plus d'un an maintenant et qui risque de se prolonger encore longtemps si nous n'agissons pas bientôt.

En janvier 1992, la convention collective liant les travailleurs de la minoterie Ogilvie de Montréal et leur employeur, Labatt, est échue.

En juin de cette même année, la compagnie Labatt, alors propriétaire de la minoterie, vend celle-ci à ADM Archers-Daniels-Midland Co., une multinationale américaine.

De 1992 à 1993, les négociations pour renouveler la convention collective se révèlent infructueuses, l'employeur déposant des demandes basées sur des conditions de travail en vigueur aux États-Unis. Imaginez!

D'octobre 1993 à février 1994, l'employeur impose unilatéralement les conditions de travail prévues par le projet patronal seulement.

En février 1994, le syndicat dépose une plainte devant le Conseil canadien des relations de travail pour négociation de mauvaise foi. Pourquoi? Pour la simple et bonne raison que l'employeur refusait simplement de négocier.

Le 6 juin 1994 marque le début de la grève générale; 116 travailleurs-et je devrais ajouter 116 familles-sont affectés.

Seulement quatre jours plus tard, l'employeur, par l'entremise d'un centre d'emploi fédéral-je répète, par l'entremise d'un centre d'emploi fédéral-embauche des briseurs de grève pour remplacer les grévistes. Imaginez!

J'ai ici entre les mains une copie du document qui a paru au Centre d'emploi de Verdun. Je me permets de faire un bref énoncé de certaines données qui s'y trouvent. Ce n'est pas banal.

La date: le 5 décembre 1994, 14 h 18, Centre d'emploi de Verdun. Offre d'emploi: opérateur de chariot élévateur; 10 $ l'heure; temporaire, 40 heures, avec possibilité de surtemps. À quel endroit? Minoterie Ogilvie. On se permet même de demander trois à cinq années d'expérience. Mais il n'est pas mentionné s'il s'agit de trois à cinq années d'expérience comme opérateur de chariot élévateur ou comme briseur de grève. Il reste ce petit anachronisme qu'on ne connaît toujours pas. Puis on lit: Attention, conflit de travail sévit à cette compagnie. Donc, on ne peut pas prétexter l'ignorance. On note dans le même énoncé: L'employeur, Archer-Daniels-Midland Co. (Ogilvie Montréal), 950 Mills, Montréal, Québec, H3C 1Y4. Et moi aussi je donnerai un numéro de téléphone: 514-847-8522. Contactez Francine Farmer. Attention, compagnie en grève.

Ce n'est pas rien, monsieur le Président! C'est une preuve épouvantable que le gouvernement était de connivence avec une compagnie dans un conflit de travail qui embauchait des briseurs de grève.

(1750)

Je poursuis mon énoncé. La minoterie Ogilvie continue sa production à l'aide de ces briseurs de grève, le Code canadien du travail ne l'interdisant pas. Elle continue même à déclarer des profits en imposant des dispositifs de sécurité qui ne sont quand même pas banals. On parle de caméras, on parle de clôtures, d'agents de sécurité, tout ceci est mis en place pour surveiller les grévistes et transporter les briseurs de grève à l'intérieur du site.

L'enjeu des négociations se résume comme suit: du côté syndical, les revendications sont simples; on n'en a fait aucune, on ne veut pas obtenir d'emplois supplémentaires, on ne veut obtenir aucun gain supplémentaire en ce qui a trait à la protection d'emplois, on ne veut obtenir aucune somme d'argent supplémentaire non plus. Ça se résume en une phrase: «garder nos emplois tels qu'ils sont, au salaire que nous avons», point.

On ne peut pas trouver meilleure attitude de la part des employés dans les périodes que nous vivons à l'heure actuelle, un très haut taux de compréhension. Des demandes patronales, cependant, je n'en ai noté que quelques-unes: le droit de modifier les horaires unilatéralement. En termes plus vulgarisés, cela veut dire: On va vous faire travailler quand on veut, comme on veut, pour combien on veut, à l'endroit où on veut. Deuxièmement, l'abolition de l'ancienneté pour les promotions et les mises à pied. En termes plus vulgaires, plus t'es têteux, plus tu vas avancer. Employons un terme québécois, je n'en trouve pas d'autre.

Il y a aussi la perte de sécurité d'emploi; cela veut dire encore la même chose, je ne le répéterai pas. L'élimination des préavis de mises à pied. Cela veut dire que quand tu pars le matin pour travailler, embrasse comme il faut ta femme et tes enfants parce qu'il se peut que le soir, tu ne puisses plus travailler à cette compagnie-là et tu n'as pas un mot à dire.

L'augmentation de la sous-traitance: ça veut dire de ne pas oublier de dire à ta femme que ça se peut qu'il rentre de tes chums que tu ne connais pas pantoute pour faire la même job que toi.

L'augmentation de l'embauche de salariés temporaires: cela veut dire que ton groupe de chums qui va peut-être venir faire ta job, il augmente encore un peu plus.


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La restriction des droits syndicaux: je reviens à ma première éventualité, plus t'es têteux, plus t'es sûr de garder ta job.

Finalement, on a tenté des rencontres avec un conciliateur qui n'ont absolument rien donné. Pour ajouter un ingrédient à la soupe-rappelez-vous le fameux nom que je vous mentionnais tout à l'heure-le gérant actuel de la minoterie Ogilvie n'est nul autre que Robert Grynszpan, celui-là même qui, en 1977, a donné l'ordre de tirer, ce qui a blessé huit grévistes à Montréal. En 1977, dans un pays démocratique où la guerre n'est pas déclarée, un homme a donné l'ordre de tirer. Cet homme-là est aujourd'hui gérant d'usine à Ogilvie à Montréal. Il se promène dans la rue comme vous et moi.

Puisqu'ils travaillent dans une industrie assujettie au Code canadien du travail, les syndiqués de la minoterie doivent payer le prix de l'absence dans ce même Code de dispositions interdisant l'emploi de briseurs de grève durant un conflit de travail. Les travailleurs de la minoterie ont plusieurs fois réclamé une loi antibriseurs de grève pour les entreprises sous juridiction fédérale. En dépit d'une promesse faite en octobre 1994, le ministre du Développement des ressources humaines avait repoussé jusqu'au printemps de 1995, on s'en rappellera, la présentation d'un tel projet de loi devant la Chambre des communes. La ministre du Travail, nouvellement arrivée en poste, avait également promis d'en faire une priorité.

(1755)

Cela ne devait pas être inscrit dans le livre rouge, il faut croire. Il est donc grand temps que le gouvernement prenne des dispositions pour que cesse ce type de conflits de travail où chaque jour des travailleurs en grève voient des briseurs de grève empocher des salaires à leur place parce que le fédéral ne fait rien pour mettre fin à cette injustice flagrante.

Tout le monde a droit au respect, les travailleurs également. Ils ont droit à une qualité de vie, au respect de leur personne et de leurs droits. L'emploi de moyens de pression comme l'utilisation de briseurs de grève par un employeur lors d'une grève légale fait naître chez les employés un stress démesuré, fait accroître les risque de violence et envenime les négociations.

L'utilisation de briseurs de grève ne mène qu'à des pratiques dictatoriales et déloyales, à des conventions collectives à rabais et des relations de travail malsaines qui auront pour effet de réduire la qualité des services, sans compter que probablement, on grossira aussi les rangs des sans-emploi.

En ayant recours à des briseurs de grève durant le conflit de travail, le rapport de force penche automatiquement en faveur de l'employeur. On comprendra donc les employeurs qui usent d'une telle pratique de ne pas manifester d'empressement à négocier avec diligence et bonne foi.

Le choix d'introduire dans la législation canadienne des dispositions antibriseurs de grève très semblables à celles du Code du travail du Québec est simple. Au Québec, ces dispositions qui ont été introduites en 1978 ont fait leur preuve. Après 17 années, elles ont résisté à l'usure du temps. Les lois de l'Ontario et de la Colombie-Britannique sont d'ailleurs basées sur les dispositions en vigueur au Québec.

Ce projet de loi veut simplement introduire des principes démocratiques que l'on connaît de nos jours dans plusieurs pays et même dans le nôtre, des principes démocratiques que l'on applique à chaque jour et qui, à maintes reprises, ont démontré leur potentiel bénéfique dans la résolution des conflits de travail.

Il ne s'agit que de regarder les statistiques qui montrent que, par exemple, depuis l'adoption d'une loi antibriseurs de grève au Québec, loin d'allonger les conflits de travail, on les a réduits de l'ordre de 35 p. 100 en durée moyenne. C'est une chose que nous avons à considérer.

Que l'on ne dise pas que le Code canadien du travail est un outil complet pour régler les conflits sous sa juridiction. On n'a qu'à se rappeler la grève chez Autobus Voyageur, de 1986 à 1987; la grève des Postes, il y a quelques années à peine; la grève au Port de Montréal, encore toute fraîche à notre mémoire; la QNS&L de Sept-Îles, l'an dernier, pendant trois mois, et est-il besoin de le mentionner, la fameuse grève qui sévit depuis un an à la minoterie Ogilvie de Montréal.

Aujourd'hui, nous en sommes au stade de la deuxième lecture. Il s'agit pour les députés qui se lèvent et qui auront, plus tard, à voter, de nous dire, si en principe, ils sont d'accord ou non pour civiliser les rapports sociaux, les rapports du travail au Canada. Ensuite, s'ils veulent apporter des amendements, ils pourront se présenter au comité législatif, suggérer toutes sortes d'amendements qu'ils jugent pertinents ou nécessaires. Mais pour le moment, c'est le principe que l'on doit regarder.

On doit se demander si le Québec, l'Ontario et la Colombie-Britannique ont eu raison d'instaurer un régime civilisé dans les relations de travail, régime civilisé qui a rétabli le véritable rapport de force lors des négociations résultant des conflits de travail.

Une grève qui est brisée par des «scabs», n'est pas une grève. Ce n'est pas une grève, car c'est le droit de grève hypocritement nié. Ou on est pour le droit de grève, un droit fondamental qui a été acquis durement, après de longues années, par les travailleurs, ou on est contre. Si on est pour, on ne voudra pas brimer de manière directe ou indirecte le droit de grève, sacré pour un travailleur, et un droit de grève avec lequel les employeurs ont appris à vivre au Canada.

Il y a longtemps que les employeurs savent ce qu'est une grève, un lockout ou comment il faut négocier. Au Québec, nous vivons depuis 17 ans avec des dispositions antibriseurs de grève, et je soumets qu'il serait indigne pour cette Chambre de refuser de mettre la pendule à l'heure de la démocratie du XXe siècle, à l'aube du XXIe.

Le Code canadien du travail se doit d'être actualisé et amélioré afin qu'il puisse répondre aux besoins et à la réalité d'aujourd'hui.

(1800)

Et la réalité d'aujourd'hui est qu'il y a encore d'honnêtes travailleurs qui, après avoir travaillé pendant 15, 20 ans et même plus pour la même entreprise, se retrouvent sur le pavé avec des piquets de grève pour tout simplement protéger les avantages qu'ils ont acquis pour eux et pour leur famille, faut-il le mentionner, au cours de ces années, ou pour tout simplement protéger leur emploi. Chaque jour, ils voient des briseurs de grève, des


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scabs, qui entrent travailler à leur place et qui empochent leur salaire à leur place. Je trouve cela inadmissible.

Je terminerai en mentionnant que ce problème, on l'a réglé dans trois provinces qui représentent plus de 70 p. 100 de la population du Canada. Comme ce projet de loi s'adresse à une faible proportion de la main-d'oeuvre au pays, il me semble évident que la législation fédérale doive s'ajuster à la législation provinciale et ainsi la compléter. Il est grand temps, à mon avis, que la législation fédérale fasse un pas vers l'avant et redonne au travail sa fierté et aux travailleurs leur dignité.

[Traduction]

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole pour participer au débat sur le projet de loi C-317, Loi modifiant le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, qui, s'il était adopté, interdirait l'embauche de briseurs de grève pendant les grèves légales. Le projet de loi comprend aussi des dispositions visant à assurer le maintien des services essentiels en cas de grève ou de lock-out dans une société d'État ou dans la fonction publique.

Bien que le projet de loi tende à modifier aussi bien la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique que le Code canadien du travail, je m'en tiendrai aux modifications qui se rapportent au code.

Les deux propositions précises que le député présente concernent les négociations collectives. On me permettra de dire en quelques mots ce que je pense de cette institution. En un mot comme en cent, je suis partisan des négociations collectives parce que cette formule fonctionne et favorise une prise de décisions démocratique.

En consultant le Code canadien du travail, on remarque le préambule de la partie I, celle qui porte sur les relations patronales-syndicales. Il me semble que ce préambule explique avec beaucoup d'éloquence pourquoi il nous faut et pourquoi nous avons un système de libres négociations collectives.

Le préambule parle de favoriser le bien-être de tous par l'encouragement de la pratique de libres négociations collectives. Il présente la liberté syndicale et la pratique des libres négociations collectives comme le moyen d'établir de bonnes conditions de travail et de saines relations entre les travailleurs et les employeurs. Il exprime le désir du Parlement du Canada d'accentuer son appui aux efforts conjugués des travailleurs et du patronat pour établir de bonnes méthodes de négociation collective. Autrement dit, le préambule de la partie I du Code canadien du travail exprime en des termes on ne peut plus clairs l'engagement du gouvernement fédéral à préserver et à encourager la pratique de la négociation collective.

Les partis politiques de toutes tendances adhèrent à ce principe. Comme on peut s'y attendre, les syndicats sont eux aussi en faveur de la négociation collective. En effet, au fil des années, ils ont résisté avec toutes les ressources qu'ils peuvent mobiliser contre tout effort visant à limiter l'accès des travailleurs à la négociation collective ou à la remplacer par une réglementation gouvernementale ou d'autres mécanismes.

Le maintien de l'intégrité du processus de négociation collective constitue probablement la préoccupation la plus importante de la majorité des syndicalistes. Pour beaucoup d'employeurs, ce processus fournit un moyen efficace pour promouvoir la stabilité dans le milieu de travail, pour obtenir le consentement de leurs effectifs et en arriver à des solutions innovatrices à toute une variété de problèmes de travail. Les employeurs qui apprécient les partenariats avec les syndicats se rendent compte qu'ils peuvent représenter un avantage concurrentiel.

Paul Weiler, un éminent spécialiste canadien du droit du travail, auteur et professeur à Harvard, décrit le mieux cet état de fait. Il dit que la négociation collective est un mode de représentation des employés qui sert deux fonctions sociales essentielles. Tout d'abord, elle assure aux travailleurs une certaine protection contre l'employeur et contre les vicissitudes du marché du travail, une protection contre les salaires et les avantages sociaux inférieurs à la normale et contre le traitement arbitraire et injuste en milieu de travail. Deuxièmement, elle fournit aux travailleurs un certain degré de participation au processus de prise de décision d'une organisation. Elle exige que les employés se chargent de définir et de défendre leurs intérêts et, au besoin, d'arriver à des compromis à ce sujet.

(1805)

Comme l'a écrit le professeur Weiler: «La négociation collective est aussi intrinsèquement précieuse qu'une expérience de l'autonomie. Si l'on croit comme moi que l'autodétermination et l'autodiscipline sont fondamentalement valables, et qu'elles constituent en fait la caractéristique d'une communauté vraiment humaine, il est difficile de voir comment la loi peut être neutre quant à savoir si ce genre de démocratie économique doit apparaître dans le milieu de travail.»

Je le répète, je soutiens notre système de négociation collective, non seulement à cause de sa nature démocratique, mais aussi à cause de son efficacité. Environ 95 p. 100 de tous les différends en contexte de négociations collectives dans les secteurs de compétence fédérale régis par le Code canadien du travail sont réglés sans le recours à un arrêt de travail.

Quand il faut recourir à une tierce partie et que le service de médiation et de conciliation apporte son aide, environ 90 p. 100 des différends sont réglés sans arrêt de travail. Le temps perdu à cause des grèves et des lock-outs ne représente qu'une fraction de un pour cent, beaucoup moins que le temps perdu à cause d'accidents sur les lieux de travail.

Le système fonctionne, parce que le règlement du conflit de travail incombe à ceux qui en sont directement touchés. On reconnaît que ce sont les employés et les employeurs qui connaissent le mieux leurs propres besoins et on leur demande donc d'assumer la responsabilité des conditions de travail.


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En analysant la situation chez nos voisins du Sud, on voit ce qui pourrait se produire au Canada si nous laissions notre système de négociation collective se détériorer. Aux États-Unis, les syndicats et la négociation collective sont grandement menacés et les répercussions commencent à se faire sentir. Selon la commission chargée d'étudier l'avenir des relations patronales-syndicales, «le déclin des syndicats a contribué à l'augmentation des inégalités».

La commission a signalé, entre autres, que la répartition des gains entre les travailleurs est plus inégale aux États-Unis que dans tous les autres pays industrialisés. Les travailleurs les moins bien rémunérés aux États-Unis gagnent beaucoup mois que les travailleurs de même niveau en Europe de l'Ouest. Les Américains travaillent environ 200 heures de plus dans une année que les Européens. Tandis que le taux d'accident de travail aux États-Unis ne s'est pas vraiment amélioré au cours de la dernière décennie, il a considérablement diminué au Canada. Les commissaires ont été tellement bouleversés par les résultats de leurs travaux qu'ils ont senti le besoin de déclarer: «Une société saine ne peut suivre bien longtemps l'exemple des États-Unis sans risquer une bifurcation plus marquée de son marché du travail.»

Naturellement, les relations de travail au Canada ne sont pas sans problème. Il y a des arrêts de travail qui gênent les gens. Toutefois, dans la vaste majorité des cas, les syndicats et les employeurs reconnaissent qu'un arrêt de travail est beaucoup plus dispendieux qu'un règlement pacifique. Il est dans l'intérêt des deux partis de régler leurs différends par la négociation et non par la force brute.

Il faut signaler que la négociation collective est avantageuse autant pour la partie patronale que pour la partie syndicale. La majorité des répondants à une enquête menée auprès des grands employeurs ont déclaré qu'ils parvenaient à atteindre leurs objectifs à la table des négociations, qu'ils réussissaient à collaborer avec le syndicat pendant toute la durée de la convention collective et qu'ils étaient capables de s'adapter aux changements technologiques.

Ce que les employeurs et les gestionnaires recherchent avant tout, à mon avis, c'est la stabilité. En général, c'est ce que leur procure la négociation collective.

(1810)

Le projet de loi d'initiative parlementaire dont nous sommes saisis modifierait grandement la négociation collective pour les sociétés visées par le Code canadien du travail. Par conséquent, j'estime que ce genre de réforme devrait être envisagé dans le cadre d'un examen approfondi de la partie I du Code canadien du travail.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président, je me réjouis de participer aujourd'hui au débat sur ce projet de loi parrainé par le député de Manicouagan.

Selon le sommaire qui figure à la page 1a, ce projet de loi a pour but d'interdire l'embauche de personnes afin de remplacer les employés en grève ou en lock-out au sein d'un employeur visé au Code canadien du Travail et les employés en grève dans la fonction publique fédérale.

En fait, ce projet de loi fait beaucoup plus qu'interdire l'embauche de nouveaux travailleurs. Modelé sur la législation québécoise du travail, ce projet de loi prévoit que le gouvernement interdise à qui que ce soit d'accomplir le travail d'une personne qui est en grève ou en lock-out au sein d'entreprises relevant de la compétence fédérale, de sociétés d'État et de la fonction publique. Il vise également à maintenir les services essentiels lors d'une grève ou d'un lock-out au sein d'une société d'État et dans la fonction publique fédérale si la santé et la sécurité de la population sont menacées, et il confère des pouvoirs accrus au gouverneur en conseil.

La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique prévoit un mécanisme visant à assurer les services essentiels en cas de grève, et remplacer la catégorie des employés désignés visée dans la loi par ces dispositions ne peut pas être considéré comme un pas en avant.

Nous savons que le député parraine ce projet de loi notamment parce qu'il s'inquiète des répercussions du conflit de travail qui dure depuis un an aux Minoteries Ogilvie, à Montréal. Des députés de tous les partis représentés à la Chambre se sont dits préoccupés par ce qui se passe à la société Ogilvie, et nous sommes tous impatients de voir cette affaire résolue. J'ai appris avec plaisir que des progrès ont été accomplis aux séances de médiation tenues les 25 et 26 mai, et qu'il a été convenu de reprendre les pourparlers les 20 et 21 juin.

Si le député de Manicouagan voulait vraiment aider à régler ce différend, il aurait appuyé le projet de loi C-262, présenté par mon collègue, le député de Lethbridge. Si le gouvernement, le député et ses collègues s'inquiétaient vraiment du sort des travailleurs des Minoteries Ogilvie et d'autres travailleurs relevant de la compétence fédérale, ils n'avaient qu'à voter en faveur du projet de loi C-262, le 20 mars, et à appuyer le député de Lethbridge à l'égard de son projet de loi sur l'arbitrage des propositions finales.

Si le député et ses collègues veulent protéger les deux parties aux conflits de travail, ils préconiseront l'arbitrage des propositions finales pour résoudre définitivement les querelles patronales-syndicales.

Lorsque les travailleurs des ports de la côte ouest ont été visés par une loi de retour au travail, l'an dernier, le ministre du Développement des ressources humaines a appuyé le recours à l'arbitrage des propositions finales comme mécanisme de règlement. Le comité des transports, dans sa stratégie maritime nationale rendue publique récemment, a recommandé l'établissement d'un mécanisme d'arbitrage des propositions finales pour le règlement de tous les différends entre les pilotes et leurs clients.

Comme je l'ai dit à quelques reprises à la Chambre, la formule de l'arbitrage des propositions finales semble gagner en popularité. Le comité des transports a également recommandé que la


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nouvelle Loi concernant la sûreté du transport maritime prévoie un mécanisme d'arbitrage des propositions finales pour le règlement de tous les différends entre la nouvelle société sans but lucratif de la Voie maritime et ses employés.

Je voudrais confirmer de nouveau que le Parti réformiste est en faveur du processus de négociation collective et qu'il ne veut pas intervenir dans les négociations entre les parties. Nous considérons l'arbitrage des propositions finales comme un outil pouvant être utile aux deux parties, les syndicats et les employeurs.

Il y a trois provinces au Canada qui interdisent le recours aux travailleurs suppléants en cas de grève ou de lock-out: ce sont le Québec, la Colombie-Britannique et l'Ontario. Pas plus tard que la semaine dernière, les électeurs ont élu un gouvernement conservateur dont le chef a promis d'abroger la loi 40, la loi du NPD qui interdit le recours aux travailleurs suppléants en Ontario. Le député devrait peut-être chercher à savoir si le public est en faveur d'une loi contre les travailleurs.

(1815)

Les députés du Parti réformiste s'inquiètent des répercussions des grèves et des lock-out sur les travailleurs, les employeurs et les Canadiens qui, le plus souvent, font les frais du retrait des services par des industries monopolistiques.

Les grèves récentes dans l'industrie du rail mettent en évidence l'incapacité du Code du travail de prévenir une interruption des services essentiels. Je félicite le député de tenter de s'attaquer au problème controversé du maintien des services essentiels. Cependant, ce projet de loi ne renferme pas de disposition sur le maintien des services essentiels dans le secteur privé.

Nous sommes tous d'accord pour dire que le gouvernement fédéral a la responsabilité d'agir dans l'intérêt bien compris des Canadiens, mais je m'étonne que le député veuille accroître les pouvoirs du gouverneur en conseil.

Dans un monde interdépendant, la sécurité économique est menacée par les grèves majeures dans des services qui servent de liens nationaux et internationaux. Les transports et les communications, par exemple, sont des services essentiels à la circulation quotidienne des gens, des biens et des services. Une interruption des services de quelque durée que ce soit a toujours des conséquences économiques appréciables.

L'avantage concurrentiel du Canada est déterminé par l'efficacité et la fiabilité de son réseau de transport et de communication. Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre toute interruption majeure des réseaux qui relient le pays.

L'économie canadienne a été durement touchée par la grève du rail du mois de mars, qui a coûté 3 milliards de dollars. Les effets de cette grève sont maintenant perçus comme ayant contribué à la baisse du produit intérieur brut par rapport à ce qui avait été prévu et à la chute des indicateurs économiques avancés. C'est un coup que l'économie canadienne ne pouvait pas se permettre d'absorber.

Je crois que, si l'arbitrage des propositions finales avait été en place, cela aurait allégé les problèmes auxquels les parties à ce conflit étaient confrontées. C'est de loin le moyen le plus efficace et impartial de régler un conflit entre les travailleurs et les employeurs lorsqu'on se retrouve dans une impasse qui a de graves répercussions sur les Canadiens.

Il n'y a rien qui empêche les deux parties d'en arriver à une entente pourvu qu'elles agissent de façon juste et ouverte l'une envers l'autre. En fait, la présence d'un arbitre qui peut adopter la proposition intégrale d'une partie ou l'autre exerce une pression énorme sur les deux parties pour qu'elles en arrivent à une entente. Je crois que cela contribuerait à préserver et à renforcer le processus de négociation d'un contrat de travail.

Dans les cas où des questions fondamentales comme la sécurité d'emploi sont en jeu, il se peut qu'on n'en arrive jamais à une entente au moyen de la négociation collective, et une grève ou un lock-out ne peuvent qu'aggraver la situation. La meilleure solution, c'est qu'une personne respectée par les deux parties prenne une décision sur l'équité d'une proposition et que le processus soit perçu comme étant légitime par les deux parties. On devrait modifier l'article 57 du Code canadien du travail, qui prévoit le règlement définitif, par un arbitre, de tout différend pouvant survenir pendant la durée d'application d'une convention collective, pour y inclure l'arbitrage des propositions finales dans les conflits qui surviennent après l'expiration de la convention collective.

Je tiens à assurer à la Chambre que je crois dans le processus de négociation collective mais que, lorsqu'il s'agit de services essentiels, les Canadiens devraient être protégés contre des arrêts de travail perturbateurs et coûteux. La partie I du Code canadien du travail fait actuellement l'objet d'un examen. Je prie instamment la ministre du Travail d'adapter le Code à la réalité économique d'aujourd'hui en élargissant la définition des services essentiels et en prévoyant l'arbitrage des propositions finales dans les conflits touchant les services essentiels après l'expiration de la convention collective.

Dans une grève ou un lock-out, on considère que la partie gagnante est celle qui est capable d'absorber les pertes le plus longtemps. Dans la réalité, nous savons qu'aucune des parties ne gagne. Les deux parties subissent des pertes importantes sur le plan des relations et sur le plan pécuniaire. En bout de ligne, personne ne tire profit d'une grève, ni les travailleurs, ni les employeurs, ni les Canadiens. Ce projet de loi envenimerait des relations déjà tendues et creuserait l'écart entre les travailleurs et les employeurs.

(1820)

Le Code canadien du travail est désuet et, en tant que législateurs, nous devons trouver et mettre en oeuvre les solutions qui répondront le mieux aux besoins de toutes les parties concernées.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-317 visant à inclure des dispositions antibriseurs de grève dans le Code canadien du travail et dans la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique fédérale.


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Je félicite mon collègue du Bloc québécois, le député de Manicouagan, pour son heureuse initiative que j'appuie avec vigueur et enthousiasme et particulièrement pour l'excellent discours qu'il vient de prononcer.

Ce projet de loi vise à maintenir l'équilibre des forces entre les parties au cours des négociations, afin de réduire la durée des grèves et des lock-out. Il a aussi pour objectif d'éviter la violence durant les conflits de travail.

Les principales dispositions de ce projet de loi sont les suivantes: interdire l'embauche de personnes afin de remplacer les salariés en grève ou en lock-out au sein d'une entreprise sous juridiction fédérale, et les employés en grève dans la fonction publique fédérale; maintenir les services essentiels lors d'une grève ou d'un lock-out au sein d'une société d'État et dans la fonction publique fédérale.

Ce texte s'inspire des dispositions similaires introduites en 1977 au Code du travail du Québec par le gouvernement du Parti Québécois, à l'époque. Depuis, l'Ontario et la Colombie-Britannique se sont dotés également d'une législation antibriseurs de grève. Aujourd'hui, 75 p. 100 des travailleurs canadiens sont régis par ces dispositions.

La loi adoptée par l'Assemblée nationale du Québec, le 22 décembre 1977, prohibant l'utilisation de briseurs de grève pendant un conflit de travail constituait la première législation en cette matière au Canada. Elle faisait suite à des grèves d'une grande violence dans les années 1970, dont celles chez Firestone et Canadian Gypsum et particulièrement le long et dur conflit à la United Aircraft, aujourd'hui Pratt & Whitney. Les grévistes étaient membres de mon ancien syndicat, le TCA, les Travailleurs canadiens de l'automobile.

Les grèves sont basées sur l'idée que l'arrêt de la prestation de travail devrait inciter l'employeur à accepter et à offrir de meilleures conditions de travail. Si l'employeur pouvait remplacer les grévistes par d'autres personnes, la grève deviendrait inutile, coûteuse, voire désastreuse pour ceux qui exercent ce droit reconnu par le Code canadien du travail, par l'Organisation internationale du travail et par tous les pays démocratiques.

Quand les travailleurs en conflit constatent que d'autres personnes les remplacent, souvent escortées par des gardes de sécurité, ils deviennent exaspérés, frustrés et peuvent poser des gestes de violence. Ils réagissent ainsi à la provocation et les conséquences sont néfastes.

L'adoption au Québec des dispositions anti-scabs répondait à une demande pressante du mouvement syndical, particulièrement de la FTQ. Cependant, les syndicats ont déploré le manque de vigueur des mesures approuvées en 1977 et ont exigé une prohibition absolue de recourir à toute personne pour remplacer un salarié en grève ou en lock-out.

En fait, le texte législatif contenait des failles qui ont poussé le gouvernement québécois à proposer de nouveaux amendements au Code du travail en 1983 pour combler les lacunes qui étaient apparues à l'usage et à l'interprétation judiciaire du Tribunal du travail, de la Cour supérieure et de la Cour d'appel.

Environ 114 000 travailleurs québécois dans les banques, la fonction publique fédérale, les ports fédéraux, les télécommunications et le transport sont régis par le Code canadien du Travail.

(1825)

Parmi eux se trouvent les 116 employés de la minoterie Ogilvie-ADM de Montréal, affiliés à la CSN qui, le 6 juin dernier, ont souligné le premier anniversaire de leur grève. Ce conflit perdure depuis plus d'un an à cause de l'utilisation de briseurs de grève par cet employeur américain. Ces travailleurs, ainsi que l'ensemble du mouvement syndical québécois et canadien, réclament depuis longtemps l'adoption d'une loi antibriseurs de grève au niveau fédéral.

J'ai rencontré cet après-midi un groupe de grévistes sur la colline parlementaire qui se trouvent, en ce moment, dans les tribunes. Je tiens à les saluer, à saluer tous les travailleurs d'Ogilvie-ADN et je leur manifeste et réitère mon appui et mon souhait d'un règlement raisonnable dans les plus brefs délais.

Je comprends leurs frustrations, car j'ai travaillé 19 ans à la FTQ où j'ai vu et vécu des conflits similaires. Ce conflit pourrit à cause de ce déséquilibre dans le rapport de force. J'appuie également la campagne de la CSN et de la FTQ pour favoriser l'introduction, dans le Code canadien du travail, de dispositions antibriseurs de grève.

Le 18 septembre 1992, une explosion à la mine Giant Gold à Yellowknife tuait neuf mineurs lors d'une grève où l'employeur avait embauché des «scabs». Cette tragédie aurait pu être évitée avec une loi antibriseurs de grève. Ce conflit a duré 18 mois et s'est terminé seulement en décembre 1993. En janvier dernier, une personne a été condamnée comme auteur de cette explosion.

C'est sûr qu'une loi en cette matière réduirait considérablement les risques de violence sur les piquets de grève. Lorsque les conservateurs étaient au pouvoir, les libéraux se sont prononcés en faveur d'une telle législation. Depuis qu'ils sont arrivés au pouvoir en 1993, ils ont viré à droite et changé de position. Le ministre du Développement des ressources humaines avait promis de présenter en décembre 1994 un projet de loi visant à bannir le recours aux briseurs de grève. Il n'a pas tenu parole.

La nouvelle ministre du Travail donne maintenant comme excuse son intention de proposer une réforme plus large du Code canadien du travail en prétextant que ce texte n'a pas été retouché depuis 20 ans. La ministre du Travail, députée du riche comté de Westmount, est encore plus insensible que son prédécesseur en cette matière.

Elle a probablement peur d'aller à l'encontre des intérêts de ce groupe d'électeurs aisés. Cependant, les travailleurs d'Ogilvie, dont l'usine se trouve à la frontière du comté de la ministre, attendent toujours sa promesse de s'occuper de la solution de ce conflit.

Je demande encore une fois au gouvernement d'être cohérent avec les positions que ses députés défendaient dans l'opposition et de déposer un projet de loi antibriseurs de grève afin d'éviter que le conflit de travail ne se détériore et ne s'étire inutilement. Nous savons déjà que le projet de loi déposé par mon collègue de


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Manicouagan, probablement, ne sera pas adopté faute d'appui gouvernemental, mais nous reviendrons à la charge.

Il faut que le gouvernement partage les expériences positives des trois principales provinces et devienne convaincu que les mesures antibriseurs de grève sont nécessaires et visent à diminuer les risques d'affrontement, parfois violents, d'une grève ou d'un lock-out.

Au Québec, les études révèlent, comme mon collègue de Manicouagan l'a dit, que depuis l'entrée en vigueur de ces dispositions, il y a eu une réduction considérable de la durée des conflits de travail. Le même phénomène s'est produit en Ontario et en Colombie-Britannique.

Il faut corriger l'iniquité dont sont victimes les 680 000 travailleurs régis par la Partie I du Code canadien du travail. Parfois, la grève est le seul recours des travailleurs. Une législation en cette matière éviterait les iniquités que doivent vivre les travailleurs syndiqués qui travaillent pour des entreprises fédérales, par rapport à leurs collègues qui oeuvrent pour des entreprises voisines, sous juridiction provinciale, donc protégés par une loi antibriseurs de grève.

(1830)

Je conclus en faisant appel à la ministre du Travail pour qu'elle ne se cache pas devant la révision globale du Code canadien du travail et pour qu'elle dépose immédiatement un projet de loi à cet effet. Je lui demande d'agir avec la même célérité qu'elle a utilisée, en mars dernier, pour bafouer les droits des travailleurs en déposant une loi spéciale de retour au travail pour les cheminots.

Pour tous ces motifs, j'appuie vigoureusement le projet de loi C-317.

[Traduction]

M. John English (secrétaire parlementaire du Président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je me réjouis d'avoir l'occasion de m'adresser à la Chambre au sujet d'une question importante pour le gouvernement, soit les services essentiels.

On a beaucoup discuté de cette question à d'autres paliers de gouvernement relativement à leur compétence en matière de travail. Je suis convaincu que chacun reconnaît, ici, que le gouvernement fédéral est un employeur spécial et qu'il a le mandat de s'assurer que les Canadiens peuvent s'attendre à recevoir certains services.

La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique est une mesure législative sensée, qui a aidé les parties impliquées dans des conflits de travail complexes pendant un quart de siècle. Il convient de se rappeler que c'est grâce à l'initiative d'un gouvernement libéral que les fonctionnaires fédéraux ont obtenu le droit de négocier des conventions collectives.

Toutefois, il a été reconnu à l'époque, et c'est encore le cas aujourd'hui, que le droit de négocier des conventions collectives dans la fonction publique ne peut s'exercer au détriment de la santé et de la sécurité de la population canadienne.

Au fil des ans, la plupart des conflits de travail ont été réglés de manière satisfaisante sans qu'il ait été nécessaire d'adopter des lois forçant le retour au travail. Le gouvernement a pour position de ne pas engager de travailleurs de l'extérieur pour faire le travail des fonctionnaires en grève. En fait, la politique actuelle de l'employeur sur cette question consiste à recourir aux gestionnaires et au personnel exclus de l'unité de négociation.

Il importe également de reconnaître que le gouvernement n'a jamais nié le droit d'un employé de venir travailler volontairement, à titre individuel, pendant une grève.

Comme je l'ai déjà dit, le gouvernement fédéral ne peut être comparé aux employeurs d'autres secteurs. La responsabilité de fournir des services gouvernementaux aux citoyens canadiens n'est jamais comparable à celle d'une entreprise privée qui fournit des chaussures, du savon ou de la farine.

Le gouvernement fédéral fournit de nombreux services pour lesquels il n'existe pas d'alternative acceptable. Bon nombre de ces services sont considérés comme allant de soi, jusqu'au moment où ils sont retardés ou ne sont pas fournis. Par exemple, nous faisons confiance aux inspecteurs des viandes et nous en dépendons, tout comme nous le faisons pour les agents responsables d'une foule de produits de consommation surveillés par le gouvernement fédéral. De plus, nous dépendons de notre système de transport, des patrouilles des pêches hauturières et côtières et de la vigilance des douaniers aux postes de douane. Les Canadiens à revenus fixes, les chômeurs et les personnes âgées comptent sur l'application ininterrompue de nos programmes sociaux.

La santé des Canadiens pourrait être en danger si l'on ne procédait pas à une analyse approfondie des effets des nouveaux médicaments à usage médical et vétérinaire. Je suis certain que vous pourriez tous citer d'autres exemples que j'ai omis.

Comme les députés peuvent le constater, les services gouvernementaux ont une importance capitale pour la santé et la sécurité publiques. La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique est actuellement formulée de manière à protéger la santé et la sécurité des Canadiens grâce à la désignation des postes; en effet, toute participation à une grève est interdite aux titulaires de ces postes avant même le déclenchement d'une grève légale.

Cela signifie que l'employeur doit déterminer les postes qui sont essentiels pour la santé et la sécurité publiques trois mois avant la parution de l'avis de négociation et trois mois avant l'échéance de la convention collective. Par conséquent, les postes qui doivent être désignés doivent faire l'objet d'un préavis minimum de six mois.

Le système actuel est en vigueur depuis 1967. Pas plus tard qu'en 1993, à l'occasion de l'étude d'un projet de loi visant à modifier la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Chambre a eu la sagesse de juger bon de le maintenir.

Toutes ces considérations confirment le fait que le gouvernement fédéral a besoin d'une législation du travail unique, différente de celle des autres employeurs, pour garantir l'exécution des services en dépit des conflits de travail qui doivent finir par être réglés.

13947

En outre, je signale à tous les députés intéressés que la législation doit être revue dans sa totalité. Il n'est pas recommandable d'en réviser seulement certaines dispositions. De nombreuses dispositions de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ont été rédigées dans un but précis et pour des raisons particulières. Il faut les examiner en regard l'une de l'autre.

(1835)

Par exemple, la désignation des services essentiels, dont il est justement question, a pour but précis de permettre d'adopter la notion du droit de grève pour les fonctionnaires fédéraux. Elle sert également à permettre au gouvernement, en tant qu'employeur, de céder le droit d'imposer le lock-out.

Enfin, je tiens à mettre mes collègues en garde contre la tentation de présenter le projet de loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique sans être parfaitement au courant de la genèse de cette mesure législative importante et des résultats qu'elle donne.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): La période prévue pour l'étude des Affaires émanant des députés est maintenant expirée. Conformément à l'article 93 du Règlement, l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.

_____________________________________________


13947

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je m'excuse du contretemps. J'étais en comité et je vous remercie de votre patience. Avant d'être interrompu pour se rendre à l'autre Chambre, j'en étais à faire une aimable invitation aux collègues du Parti réformiste pour qu'ils puissent saisir jusqu'à quel point, pour la communauté gaie, ce projet de loi revêt une importance toute particulière.

Avec courage, conviction, car il me faut un peu de témérité, je maintiens l'invitation. Donc, je me tourne vers le Parti réformiste, avec votre permission, et je leur dis que si, à titre de parlementaire, ils sont soucieux de parfaire leurs connaissances de ce qu'est la réalité gaie et des sévices potentiels auxquels s'exposent leurs membres, je suis disponible à leur faire rencontrer des porte-parole et des dirigeants de ces groupes, puisque, à travers leurs prises de position et à travers leurs affirmations, je me permets de penser que les collègues du Parti réformiste, très connaissants en certains domaines, sont plutôt ignorants en ce domaine spécifique.

Je crois que, là comme ailleurs, une réalité davantage approfondie leur permettrait sans doute de modifier à la fois leur comportement et certainement leur compréhension. Alors, c'est avec beaucoup de sympathie que j'adresse à chacun des membres du Parti réformiste l'invitation potentielle pour que nous puissions passer ensemble une journée à l'intérieur du village gai, afin qu'ils puissent rencontrer les porte-parole et être en. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre! Je tiens à rappeler à la Chambre que toute intervention doit se faire par l'entremise de la Présidence, particulièrement dans un débat où nous avons des points de vue quand même assez différents. Il y a beaucoup d'émotion, il y a des sensibilités et beaucoup de respect est nécessaire pour continuer le débat dans le cadre parlementaire que nous avons. Alors, je rappelle à mes chers collègues que toute intervention doit se faire par l'entremise de la Présidence et non directement d'un à l'autre en tant qu'individus.

M. Ménard: Monsieur le Président, c'est un principe que je croyais n'avoir jamais perdu de vue, mais je vous remercie de me le rappeler. Donc, par votre bienheureux intermédiaire, je réitère l'invitation aux députés du Parti réformiste.

Il faudrait peut-être rappeler un certain nombre de faits. À plusieurs reprises, au long du débat, certains collègues ont soutenu en cette Chambre qu'il pouvait être préjudiciable de reconnaître à l'article 718.2 le principe et le concept d'orientation sexuelle. Ce qui est assez étonnant, dans une prise de position comme celle-là, c'est que cela donne à penser que le concept, parlons strictement du concept d'orientation sexuelle, est quelque chose de nouveau, quelque chose d'innovateur, qui est de l'ordre du précédent.

Permettez-moi de rappeler que dans la jurisprudence canadienne, les tribunaux, tant administratifs que de droit commun, sont en instance, ont été saisis à plusieurs reprises de la question ou du concept de l'orientation sexuelle. Vous savez que cela fait exactement 18 ans et cela a commencé avec l'inclusion, dans la Charte québécoise des droits de la personne, puisque le Québec, province avant-gardiste entre toutes, a été la première à légiférer et à inscrire dans son Code des droits de la personne une protection spécifique nominale en vertu de l'orientation sexuelle.

(1845)

Je pense bien que si vous vous livriez à l'exercice de demander à chacun des opposants au projet de loi de nous donner ne fût-ce qu'un seul exemple où un tribunal de droit commun ou un tribunal administratif a fait un rapprochement entre la protection que le législateur a voulu offrir en incluant, comme motifs de discrimination illicite, l'orientation sexuelle et l'une ou l'autre des perversions que certains députés ont portées à notre connaissance, vous seriez incapable de trouver un parlementaire qui peut, en toute connaissance et en toute rigueur, soutenir ces rapprochements. C'est pour cela qu'il faut déplorer ce genre de rapprochement.

Il faut rappeler que le ministre de la Justice et son gouvernement veulent offrir une protection qui, très explicitement, vise à faire en sorte que lorsque, devant un membre de la magistrature, on aura une situation où une personne qui a une orientation sexuelle, tant homosexuelle que hétérosexuelle, aura été victime de violence en raison de ladite orientation sexuelle, la magistrature devra, dans la détermination de la peine, selon qu'on parle d'un homicide, d'un sévice ou d'une voie de fait, à partir de principes législatifs très, très clairs, déterminer s'il s'agit d'une circonstance aggravante.


13948

Donc, dans la détermination de la peine, la personne qui se sera rendue coupable de tels sévices sera sanctionnée plus sévèrement. C'est ce que vise, pour l'essentiel, le projet de loi C-41.

Là, on a entendu toutes sortes de propos, que par respect pour vous, je ne qualifierai pas. On disait oui, mais il y a un problème. Il y a un problème sur le plan juridique, et cela a été surtout tenu par les collègues du Parti réformiste, parce qu'on nous a dit: Mais on n'a pas défini ce qu'est l'orientation sexuelle. On disait, oui, mais il y a un danger que la magistrature, que les tribunaux ne puissent pas véritablement bien appliquer la loi, puisqu'on n'a pas offert de définition de ce qu'est l'orientation sexuelle.

Pourtant, aucun des détracteurs de la loi ne s'est interrogé sur le fait qu'on n'a pas non plus défini ce qu'est la liberté de culte, la liberté religieuse. Qu'est-ce que c'est aussi l'origine nationale? On s'est pourtant retrouvé. On est quand même dans une société où, par le passé, il y a des gens qui se sont immolés au nom de la liberté religieuse, au nom de la liberté de conscience. Il y a des gens également qui ont perpétré des sévices, vous le savez bien, au nom de la liberté religieuse.

Il y a même des collègues, vous me permettrez de le dire, monsieur le Président, qui ont soutenu des propos, à mon point de vue, certainement à la limite de la politesse, mais certainement à la limite de la démocratie et en cette Chambre, au nom de la liberté religieuse. Personne ne s'est levé parmi les détracteurs de la loi pour dire: Oui, mais il faut définir la liberté religieuse, ou il faut définir ce qu'est l'origine nationale.

Pourquoi cette obstination, ma foi malsaine, à vouloir s'acharner sur l'un des motifs explicites de discrimination, en pensant qu'il peut ou qu'il pourrait ouvrir la porte à la reconnaissance de ce qui est, évidemment, de l'ordre de la perversion. Il s'est trouvé un certain nombre d'esprits pas très éclairés qui ont été jusqu'à faire des rapprochements avec la pédophilie. Imaginez-vous s'il faut être assez ignorant, s'il faut être assez méconnaissant de ce qu'est la réalité de l'univers de l'orientation sexuelle pour faire des rapprochements comme ceux-là.

Quiconque s'intéresse un peu à la psychologie ou la psychiatrie sait très bien que l'homosexualité n'a rien à voir avec la pédophilie. L'homosexualité n'a absolument rien à voir avec la pédophilie. Ce sont des rapprochements comme ceux-là qui ternissent des réputations et qui sont extrêmement malheureux sur le plan législatif.

Laissez-moi vous citer quelques faits qui, vraiment, attestent hors de tout doute combien le ministre de la Justice a posé un geste heureux, un geste responsable, un geste démocratique, en nous présentant une législation comme celle-là.

(1850)

Le «National Gay and Lesbian Task Force» des États-Unis dit que selon une étude qu'ils ont réalisée il y a trois ans, donc une étude relativement contemporaine, un gai sur cinq-un gai sur cinq, monsieur le Président, je ne sais pas si vous m'autorisez juste à porter mes yeux de ce côté-là-un gai sur cinq et une lesbienne sur dix ont été agressés physiquement. On ne parle pas de choses empiriquement observées. Il s'agit d'une enquête menée par un groupe autorisé aux États-Unis, pays qui sert souvent de référence à nos collègues du Parti réformiste, et on a des données qui nous amènent à comprendre des témoignages livrés par des personnes appartenant à la communauté gaie.

On nous dit qu'un gai sur cinq, donc mathématiquement, vous constaterez comme moi qu'on parle de 20 p. 100, un gai sur cinq et une lesbienne sur dix révèlent avoir été agressés physiquement.

On a même des données qui nous permettent de saisir un peu la réalité canadienne. Une étude a été effectuée au Nouveau-Brunswick et, si je comprends bien le Canada anglais, le Nouveau-Brunswick n'est pas très loin de la Nouvelle-Écosse et, en Nouvelle-Écosse, il y a certains parlementaires qui sont très préoccupés par la réalité gaie. Il ne s'agit pas pour moi de nommer des noms.

Toujours est-il que dans cette étude qui a été effectuée au Nouveau-Brunswick, qui n'est pas loin de la Nouvelle-Écosse, on entend bien, on nous dit la chose suivante: «Quatre-vingt-deux pour cent des gais et lesbiennes qui ont répondu à cette enquête ont été, à un moment ou à un autre dans leur vie, victimes de violence physique.»

Un tel pourcentage, 82 p. 100, commence à être un chiffre préoccupant. On ne peut quand même pas dire que c'est une tendance qui est marginale, que c'est quelque chose d'insignifiant. Je ne sais pas si les collègues réformistes ont pris connaissance de cette étude, mais je pense qu'ils gagneraient à la parcourir. Ils pourraient à ce moment-là comprendre qu'il est utile pour le législateur de légiférer, parce que, encore une fois, quel est le principe de fond? Le principe de fond est qu'on est encore dans une société intolérante, tant au Québec qu'au Canada, et je dirais ma foi peut-être davantage au Canada anglais, parce que, si on me le permet, je pourrais vraiment faire la démonstration que nous avons, nous au Québec, une longueur d'avance dans la compréhension de ces réalités.

Le fond de la question-et j'aurais souhaité que les collègues réformistes soient davantage préoccupés par cette question-le fond de la question est que le seul fait d'être gai ou d'être reconnu comme tel par un certain nombre de gens dans la société fait en sorte que l'on est victime de violence. Ce n'est pas un épiphénomène, ce n'est pas quelque chose de fictif, ce n'est pas quelque chose qui se produit marginalement, quand on se donne la peine de consulter les études.

Vous savez comme moi qu'il n'y a aucun doute que cette loi sera adoptée, on va y contribuer comme opposition officielle, je pense même qu'on va y contribuer, je parle avec beaucoup de prudence, je pense qu'on va y contribuer de façon unanime. Mais je ne veux pas trop m'avancer.

Toujours est-il que le législateur, en adoptant une loi comme celle-là, envoie un message très clair à la population canadienne. Ce qu'il dit à la population canadienne et à la population québécoise, c'est que dans notre société, on ne tolérera pas que des gens soient molestés parce qu'on est une société de droit, parce qu'on est une société où on croit à l'égalité des individus, et on croit à ce point à l'égalité d'individu qu'on dit que l'égalité des individus peut aussi vouloir dire l'expression d'une différence sur le plan sexuel. On y croit assez comme société qu'on ne tolérera pas, au nom de cette différence, que des gens soient molestés, que des gens soient agressés.


13949

Lorsque cela se produira, on prendra les moyens pour que ce soit dissuasif. Pour que ce soit dissuasif, il faut que le législateur demande à la magistrature de sanctionner plus sévèrement les gens qui s'adonnent à des trafics de répression. Est-ce que c'est sorcier de comprendre cela? Est-ce qu'il y a là quelque chose qui dépasse l'entendement? Est-ce qu'il faut un doctorat pour comprendre ce genre de réalité? Je pense que non, mais ça prend deux ingrédients, deux ingrédients dont tous les parlementaires de cette Chambre ne sont pas nantis. Le premier est une ouverture d'esprit, une simple et bonne ouverture d'esprit à la différence. Mais c'est trop demander à certains parlementaires.

Le deuxième est une tolérance, une tolérance qui fait que l'on peut comprendre qu'il y a des gens qui, pour toutes sortes de raisons, on peut bien dire que c'est inné, on peut bien dire que c'est un facteur de personnalité, mais la réalité incontournable est qu'il y a des gens qui sont différents dans le vécu de leur sexualité. On demande aux parlementaires, qui sont des législateurs qui doivent donner le ton, d'être ouverts à cette réalité-là. Mais c'est trop demander à certains collègues et j'imagine qu'ils auront à expliquer, devant leurs électeurs, leur prise de position.

(1855)

Je vous disais tout à l'heure que je crois que, au Québec, il y a, à cet égard, une ouverture d'esprit qu'on ne retrouve pas toujours ailleurs et si vous me demandiez d'essayer de l'expliquer, je dirais que cela tient peut-être à deux facteurs. Cela semble tenir au fait que d'abord, globalement en tant que société, on réprouve la violence. Je crois que globalement, en tant que société au Québec, on admet qu'il y a des personnes gaies, homosexuelles, qui sont encore victimes de violence. On ne tente pas d'escamoter ou de se cacher derrière cette réalité, qui prend la forme d'un constat d'évidence.

Mais, pourquoi est-ce que le Québec peut, à cet égard, se réclamer, s'enorgueillir d'une certaine ouverture d'esprit qu'on ne retrouve pas partout au Canada anglais, encore que je sache très bien qu'il y a des coins du pays qui sont très ouverts à cette réalité? Cela tient à deux faits. Le premier est que je crois que les Québécois, lorsqu'ils abordent cette question, ne demandent pas à leurs élus de se situer sur le terrain de la morale. Je pense que lorsque les Québécois abordent ces questions et qu'ils font le constat qu'il y a de la violence à l'endroit d'un groupe en particulier, qu'on appelle entre autres les gais, ils se situent sur le plan de la promotion d'un droit. Ils se situent sur le plan civique.

Ils ne demandent pas à une majorité ou à une minorité d'imposer une morale. Vous comprendrez que les dérapages qu'il y a eus en cette Chambre, lorsque l'on a discuté de cette question, sont venus de députés qui, à mon sens, se sont levés en cette Chambre en parlant de la morale, comme si la morale était quelque chose d'indivisible, comme s'il existait une seule morale qui soit la même pour tous et qui mérite d'être inculquée aux individus, comme si c'était quelque chose d'universel.

On sait bien, quand on est parlementaires, quand on se promène un peu à travers le monde, quand on lit un peu et quand on écoute la télévision, quand on se donne la peine d'échanger avec les gens, qu'il n'existe pas une morale, qu'il n'existe pas une religion. La morale doit s'écrire toujours au pluriel, parce qu'il y a autant de morales, de principes éthiques qui guident les individus. Et c'est heureux qu'il en soit ainsi et ce n'est pas seulement le cas du Québec ou ce n'est pas seulement le cas du Canada.

Si on veut, en tant que Parlement, traverser ce débat avec succès, sans procès d'intention, avec un minimum de bonne foi, il ne faut pas se situer au niveau de la morale. Il faut se situer au niveau juridique, parce que nous sommes d'abord ici pour faire des lois, pour légiférer. Monsieur le Président, puisque vous m'indiquez que mon temps se termine, je concluerai en demandant à tous les députés de poser un geste hautement démocratique et de profonde tolérance et de donner leur appui à ce gouvernement, au ministre de la Justice, dont je veux saluer le courage, et de voter unanimement en faveur du projet de loi C-41.

[Traduction]

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je félicite le député pour avoir dit très clairement que nous ne sommes pas en train de débattre de la moralité dans cette Chambre. Ce dont nous sommes en train de débattre, c'est du droit criminel et de la nature des projets de loi sur la détermination de la peine, non seulement maintenant mais à l'avenir.

Le député a clairement exprimé le point de vue qui recueille le consensus dans ce pays. Quand nous regardons autour de nous, ce ne sont pas seulement les gais, les lesbiennes et les groupes bisexuels qui sont en faveur de cette mesure législative. C'est aussi L'Église unie du Canada, le B'nai Brith, la Fédération des municipalités canadiennes, le Congrès juif canadien, le Centre de recherche-action sur les relations raciales et l'organisme Urban Alliance on Race Relations.

Je sais que le député est du Québec et je m'en remettrai donc à une partie des documents communiqués par cette province. Je m'en remets spécialement à la Commission des droits de la personne du Québec qui, en novembre 1993, a mené la première enquête publique sur la discrimination et la violence contre les gais et les lesbiennes. Les audiences tenues dans le cadre de cette enquête avaient fait pas mal de bruit dans cette province et dans tout le Canada. Si cela avait fait pas mal de bruit, c'est parce que 15 hommes homosexuels avaient été assassinés à Montréal entre 1989 et 1993. Ce sont ces meurtres qui avaient déclenché ce débat dans la province.

D'autres débats se sont tenus à Vancouver, Toronto et avec les policiers dans tout le pays.

(1900)

Le chef de la police à Ottawa et le service de police du Grand Toronto sont en faveur de cette mesure législative. Partout, cette mesure législative est nécessaire. Ce que je voudrais, c'est que le député nous dise ce qu'il sait de ce qui se passe tous les jours dans la vie des gais et des lesbiennes pour qu'il soit nécessaire d'avoir dans ce projet de loi cet article sur le crime motivé par la haine.

[Français]

M. Ménard: Monsieur le Président, je veux remercier la députée de sa question, mais la remercier davantage pour le soutien actif qu'elle a apporté au projet de loi. Je sais qu'elle est membre du comité qui a étudié le projet de loi. La députée a mentionné avec beaucoup de pertinence que le Québec, il y a deux ans, a mandaté, par l'entremise de la Commission québécoise des droits de la personne, je crois que c'était la première fois que cela se passait en Amérique du Nord, une commission d'enquête itinérante qui en est arrivée à la conclusion suivante.


13950

D'abord, on a constaté qu'il y avait vraiment une vingtaine de personnes qui avaient été tuées sur la base de leur orientation sexuelle. Il y en avait près d'une centaine qui avaient témoigné devant cette commission qui disaient avoir été victimes de sévices.

La députée a également raison de nous rappeler que, finalement, c'est dans le quotidien que tout cela se passe. Il m'arrive très souvent, comme député, de rencontrer des gens qui viennent me voir, qui sont homosexuels et qui me disent qu'ils ont été intimidés.

Dans tous ces cas, ça ne va pas jusqu'à des sévices physiques, ça ne va pas jusqu'à la mort, mais je crois que la députée nous rappelle avec beaucoup de justesse qu'il est encore très présent ce réflexe de tabasser les gais parce que, quelquefois, ils peuvent avoir l'air plus efféminé, quelquefois parce qu'ils se définissent ouvertement comme ça.

La seule façon raisonnable que l'on peut envisager pour changer cet état de fait, c'est de faire en sorte qu'il y ait quelque chose de dissuasif, et quelque chose de dissuasif passe évidemment par des mesures comme celles que nous propose son gouvernement.

Encore une fois, posons-nous la question, comme parlementaires, et j'aurais le goût de l'adresser à nos amis réformistes, par votre intermédiaire toujours, monsieur le Président: Qu'est-ce qui dérange tant, dans une société de droit comme le Canada, dans le fait que l'on puisse dire que nous ne tolérerons pas que l'homosexualité, l'expression d'une différence parmi d'autres, puisse faire l'objet de représailles?

Je pense, monsieur le Président, que vous serez d'accord avec moi pour dire que lorsqu'on est bien dans son identité, qu'elle soit masculine ou féminine, lorsqu'on est bien dans sa sexualité, on est capables d'admettre qu'il puisse y avoir des différences. Je crois qu'il faut, en tout respect, questionner-j'emploie le mot bien-être-questionner le bien-être de certains collègues qui ne font pas preuve de tolérance à l'endroit de l'expression de cette différence.

Si j'étais à la place de certains députés réformistes, je me poserais certaines questions.

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais commencer mes observations au député en lui disant que je le respecte en tant que personne, en tant que député, en tant que Québécois et en tant que Canadien. Je ne lui veux aucun mal, sincèrement.

Je vais faire une déclaration qui va avoir l'air très ridicule. Je vais dire que je veux-et j'ai avec moi mon collègue de Wild Rose-que les gros soient inclus dans cette liste. Je le veux vraiment. Je pourrais relater aux députés mon expérience. Lorsque j'étais jeune j'ai été attaqué et battu parce que j'étais gros. J'ai été comme cela toute ma vie, donc je veux être sur cette liste. Je veux faire en sorte que les gens ne s'attaquent pas à moi parce qu'ils ont ce préjugé contre les personnes obèses.

Bien sûr, les députés vont me dire que ce n'est pas nécessaire. Je vais leur répondre, pourquoi me haïssez-vous? Pourquoi êtes-vous tellement obèsophobes? Voilà, j'ai dit quelque chose à la Chambre que tout le monde trouve ridicule, simplement parce que ce n'est pas basé sur des faits.

Tout d'abord, oui, c'est vrai que j'ai été battu. Cela ne veut pas dire que le fait que j'étais gros était plus important que le problème d'un autre enfant qui, lui aussi, avait été battu parce qu'il avait une tête encore plus drôle que la mienne.

(1905)

Je me rappelle, une autre fois, avoir été pris à partie parce que je venais de la campagne alors que j'allais à une école en ville. Nous avons nos différences, et les enfants sont parfois bien cruels. Cela ne veut pas dire que nous devons commencer à catégoriser: telle personne, tel groupe; telle autre personne, tel autre groupe. Ce que nous devons faire pour réduire les différences, c'est traiter tout le monde de la même façon.

Lorsque je dis à mon collègue d'en face que je le respecte en tant que personne, je n'ai certainement pas l'intention d'essayer de savoir ce qu'il fait lorsqu'il quitte cet endroit. C'est son choix. Je ne le crains pas et je ne lui veux aucun mal. Cependant, je désire rappeler qu'aucun député du Parti réformiste n'a jamais dit que, en raison du choix qu'il avait fait, il n'avait pas à se plaindre si on s'attaquait à lui. Je suis contre toute agression. Lorsque j'entends parler de personnes qui ont été battues parce qu'elles étaient homosexuelles, je suis tout aussi révolté que je le serais si c'était quelqu'un d'autre, la raison n'a pas d'importance.

Il est temps que, en tant que Canadiens, nous commencions à appliquer les mêmes règles de justice à tout le monde et à nous assurer que la protection de la loi est universelle. Je peux garantir au député que je ne le déteste pas. Je ne lui en veux pas personnellement. Je dis simplement qu'il doit être égal à nous tous ici.

[Français]

M. Ménard: Monsieur le Président, je dirai à mon collègue que de tous les réformistes, il est sans doute mon collègue préféré. Mais, je ne sais pas si je dois me réjouir ou pleurer de son intervention parce que, avec tout le respect que je lui dois, mon collègue se lève en cette Chambre, il dit: «Je ne déteste pas le député», tant mieux. Par contre, il nous dit: «Je souhaite que tout le monde soit sur le même pied d'égalité».

Vous comprendrez qu'à sa face même, une affirmation comme celle-là traduit un manque de sensibilité, puisque si l'on admet dans la société canadienne et québécoise qu'il y a des gens qui, spécifiquement, se font molester sur la base de leur orientation sexuelle, on ne peut pas être d'accord avec les conclusions de notre collègue, qui dit que tout le monde doit être traité sur le même pied d'égalité.

C'est un peu comme le raisonnement qui avait cours, il y a quelques années, et je mesure mes propos, mais vous allez comprendre jusqu'à quel point l'exemple, pour absurde qu'il soit, est quelque chose qu'il nous faut rappeler. Il y a quelques années, je me rappelle très bien qu'il y avait un débat, dansnotre société, où on disait: «Lorsqu'une personne, une femme généralement, a été victime d'un viol, il faut tenir comptede savoir si elle a été provocatrice dans le sévice qu'elle a vécue.» Je sais bien qu'il y a des personnes très sensées, même des hommes de loi qui tenaient le raisonnement que lorsqu'une femme a été violée, si elle était aguichante, si elle avait une petite jupe, la sanction devait être différente parce qu'elle avait été provoquante.


13951

Je n'ai jamais adhéré à ce genre de logique. Ce que nous dit notre collègue, c'est: «Je suis prêt à accepter l'homosexualité, à condition que ces gens soient pareils comme tout le monde et qu'à ce moment, on ne reconnaisse pas qu'ils font l'objet d'une discrimination spécifique et d'une violence qui leur est propre.» C'est contradictoire, c'est paradoxal, c'est illogique et ce n'est pas possible, et c'est pour cela que l'on a un projet de loi comme celui qui est devant nous aujourd'hui.

[Traduction]

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps avec le député de St. Catharines.

(1910)

Je suis très heureuse de pouvoir participer à ce débat sur le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence, à l'étape de la troisième lecture. Il s'agit d'un projet de loi qui touche le droit pénal et porte plus précisément sur les crimes haineux.

Permettez-moi tout d'abord de féliciter le ministre de la Justice qui a répondu aux attentes des Canadiens quant à la réforme de notre processus de détermination de la peine, en établissant un cadre de dispositions claires qui guideront les tribunaux de notre pays.

Nous avons devant nous un projet de loi qui touche le droit pénal et porte sur les crimes haineux. Il s'agit d'une mesure législative globale qui, pour la première fois, donne aux Canadiens l'occasion de définir les objectifs et les principes de la détermination des peines attribuées pour les actes criminels.

En ces temps difficiles, il faut donner des lignes directrices claires et précises aux tribunaux qui doivent protéger la société, faciliter la réadaptation des contrevenants et développer leur sens des responsabilités et favoriser la réparation des dommages physiques et psychologiques, parfois irréparables, causés aux victimes et à la collectivité.

Les règles de la preuve et de la procédure sont clairement définies dans ce projet de loi qui propose aussi des mesures de rechange à l'emprisonnement et des peines avec sursis pouvant être purgées au sein de la collectivité, à condition que les coupables respectent scrupuleusement les conditions fixées par le tribunal.

Ce projet de loi présente des dispositions qui, de concert avec les efforts de la collectivité, contribueront à la réadaptation des délinquants tout en protégeant la population contre les criminels ayant commis des crimes graves et violents.

Malgré ce que l'on peut entendre à la Chambre, l'appui qu'il a reçu partout au pays témoigne de la force de ce projet de loi.

Je représente une circonscription urbaine de la région métropolitaine de Toronto où les gens n'aspirent qu'à une chose: vivre dans la paix et la sécurité. Les habitants d'Etobicoke-Lakeshore croient fermement aux mesures de prévention du crime comme moyen d'accroître la sécurité dans la collectivité. En tant que collectivité, nous faisons de nombreux efforts pour éliminer la criminalité. Je pense ici à l'Association pour la prévention du crime à Etobicoke, qui a réussi à sensibiliser davantage notre collectivité à la prévention du crime. Je voudrais lire à la Chambre le conseil du mois que cette association a publié dans son bulletin de mai 1995. Il se lit comme suit: «L'information du public, par divers moyens, constitue un élément clé de la prévention du crime. Il faut que les gens sachent que la prévention est possible, que cela fonctionne et que ça en vaut la peine».

Les réformes de la détermination de la peine que renferme le projet de loi C-41 donneront tout leur sens aux efforts que font les collectivités canadiennes. Nos gouvernements se sont engagés à assurer la sécurité de nos maisons, de nos rues et de nos collectivités. Le projet de loi C-41 répond clairement à cet engagement. Nous voulons que les Canadiens se sentent de nouveau en sécurité grâce à l'adoption de politiques qui réduiront et aideront à prévenir la criminalité dans les collectivités canadiennes.

Les Canadiens ont demandé que l'on modifie le système de justice pénale, et nous avons répondu à leur demande en proposant des réformes qui augmenteront les droits des victimes et favoriseront le respect de la loi.

Quand il est question d'éducation du public, nous voulons faire en sorte que les gens connaissent tous les faits. À l'heure actuelle, ils ne connaissent pas tous les faits.

Je voudrais maintenant parler des points de cette mesure législative qui, à mon avis, font ressortir les avantages que ces réformes signifieront pour la protection de tous les Canadiens.

Une fois ce projet de loi adopté, les juges devront, dans chaque cas, justifier la peine imposée. Ces justifications profiteront aux gens et faciliteront les appels qui pourraient être faits par la suite.

Ce projet de loi se penche également sur les infractions commises dans les situations d'abus de confiance, habituellement contre des enfants et de plus en plus contre des femmes, dans les cas de violence. Ces personnes vulnérables, qui ne jouissent plus de la protection essentielle dont elles sont censées jouir dans la société, la trouveront désormais auprès des tribunaux.

Cette mesure législative sera aussi avantageuse pour les victimes dont on a trop longtemps négligé les souffrances et les angoisses.

(1915)

L'objectif et les principes assureront la réparation des torts causés à la victime ou à la collectivité tout en forçant les délinquants à assumer la responsabilité de leurs actes.

Cela signifie, tout d'abord, qu'on peut maintenant évaluer la réparation financière à verser pour compenser la perte de biens ou les dommages subis par la victime. Je sais que de nombreuses personnes âgées de ma collectivité, qui ont été victimes d'un vol, seront très heureuses de cette nouvelle disposition.


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Dans le cas des crimes moins graves, le fait de forcer le délinquant à indemniser ses victimes favorise souvent sa réinsertion sociale. Les modifications à l'article 745 du Code criminel donneront aux victimes de violence la chance de préciser les répercussions de ce crime dans leur vie, dans le cadre de l'audience ayant pour objectif de déterminer si ce délinquant est admissible ou non à une libération conditionnelle anticipée.

Il est grand temps qu'on accorde davantage d'importance aux victimes. Leur déclaration jouera un rôle clé dans la décision de libérer ou non les délinquants violents. Dorénavant, on va considérer officiellement les amendes comme des peines. De nombreux délinquants sont emprisonnés pour des crimes non violents, du simple fait qu'ils sont incapables de payer l'amende qui leur a été imposée.

Dans le cas de ces délinquants, on imposera des amendes basées sur leur capacité de payer. L'incapacité de rembourser entraînera d'autres sanctions, comme la probation ou le service communautaire.

Ceux qui ont les moyens de payer devront absolument verser l'amende. Les systèmes d'amendes feront baisser les coûts de fonctionnement de nos institutions. La collectivité joue un rôle important dans ce projet de loi, surtout en vertu de la disposition prévoyant des peines autres que l'emprisonnement.

Sous stricte surveillance, un délinquant non violent, coupable d'un crime moins grave, qui n'est pas considéré comme dangereux pour la société, pourrait purger sa peine au sein de la collectivité, d'une façon quelconque. Les services de counselling, la probation, les amendes et le service communautaire font partie d'un programme plus efficace de réinsertion sociale pour les délinquants primaires, coupables de crimes mineurs.

On pourra dépenser un peu d'argent pour protéger la population contre les délinquants plus violents, coupables de crimes plus graves. Leur réinsertion sociale se fera alors en prison. Ce projet de loi sera bon pour nos collectivités, car il renferme des mesures qui empêcheront qu'on cultive la haine dans notre pays.

Les crimes haineux sont une réalité regrettable et intolérable dans notre société. On ne peut passer sous silence ou balayer du revers de la main le fait que des personnes sont prises à partie en raison de leur race, de leur religion, de leur ethnicité, de leur orientation sexuelle.

Selon les groupes de prévention criminelle anti-préjugés de la police, les infractions motivées par la haine sont à la hausse. Il faut aussi avoir à l'esprit que ces statistiques ne tiennent peut-être pas compte des nombreux crimes haineux qui ne sont pas signalés parce que la victime a peur ou qu'on a l'habitude de se méfier des autorités.

Certains députés ont-ils déjà cherché à comprendre combien il pouvait être traumatisant pour les victimes de savoir qu'elles ont été attaquées en raison même de ce qu'elles sont, de leurs apparences? Il s'agit là d'une attaque éminemment personnelle parce qu'on ne peut pas changer ces traits caractéristiques.

Les Canadiens ont exprimé leur inquiétude devant la montée intolérable de ce type de violence et, en réponse, nous avons introduit ces modifications qui permettront aux juges d'imposer des peines plus lourdes à ceux qui sont reconnus coupables d'un crime motivé par la haine fondée sur la race, la nationalité, la couleur, la religion, le sexe, les handicaps mentaux ou physique ou encore l'orientation sexuelle.

En travaillant au sein de la collectivité à améliorer l'éducation et en adoptant des mesures plus sévères, nous aboutirons à une meilleure coordination de la réponse à la haine. L'article 718 qu'on a tant débattu en face intervient précisément quand une personne est reconnue coupable d'un crime motivé par la haine à l'égard d'un groupe donné.

Le gouvernement reconnait la nécessité d'éliminer le flou qui entoure actuellement le processus de détermination de la peine de façon à protéger les groupes qui, sans raison aucune, sont pris violemment à partie.

L'histoire nous enseigne que c'est notre société qui en souffrira les conséquences si la violence, l'intimidation et les tactiques de peur sont tolérées à l'égard d'un groupe donné. Nous vivons dans une société qui prône l'égalité et le projet de loi C-41 produira un puissant effet de dissuasion sur tous ceux qui menacent la vie humaine.

Les pratiques de détermination de la peine devraient refléter les valeurs chères aux Canadiens et cette mesure législative témoigne à l'évidence de nos valeurs fondamentales que sont l'égalité et la démocratie.

(1920)

La population appuie fermement ce projet de loi parce que les Canadiens savent que cette mesure, ajoutée à d'autres éléments de notre plan de prévention de la criminalité, engendrera des changements et réduira les menaces à la sécurité des habitants.

La réforme du système pénal, les modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants, la réforme du système de libération conditionnelle et des services correctionnels, la création d'un conseil de prévention de la criminalité ainsi que le resserrement du contrôle des armes à feu contribueront grandement à faire de nos villes des endroits dont les habitants se savent en sécurité.

En outre, nous poursuivons nos démarches pour la réforme des programmes sociaux en appliquant des mesures plus efficaces pour combattre la pauvreté, favoriser les études, contrer le chômage et faciliter l'alphabétisation. Nous progressons vers une société plus sûre, moins violente et plus progressiste.

Le projet de loi C-41 nous fait faire un pas de plus dans cette direction. Faisons preuve de tolérance et donnons notre appui à ce projet de loi.

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je constate avec plaisir que la secrétaire parlementaire a fait le tour de la question dans son discours sur le projet de loi.

J'aimerais établir certaines comparaisons avec les commentaires qu'elle a formulés. J'ai ici copie d'un rapport de l'Association canadienne des policiers, groupe dont le ministre de la Justice a chanté les louanges parce qu'il avait appuyé le projetde loi C-68.


13953

Dans l'introduction à leur rapport, les policiers déclarent:

Dans l'ensemble, le projet de loi C-41 est lourd, compliqué, contradictoire en soi, empreint de duplicité; par surcroît, il serait presque entièrement inutile pour quiconque connaît le moindrement la tradition de common law du Canada.
En codifiant ainsi des principes fondamentaux de détermination de la peine, le projet de loi enlève ce pouvoir discrétionnaire aux juges et confère une quantité considérable de nouveaux pouvoirs à toutes sortes d'intervenants du système judiciaire. Tous ces nouveaux pouvoirs ont en commun d'être à l'avantage du contrevenant du fait que les peines encourues pour avoir commis un crime sont non privatives de liberté.
Alors que la réforme en matière de détermination de la peine prévoit la protection, le projet de loi n'offre que des platitudes. Là où elle prévoit la clarté, il n'offre que confusion et hypocrisie. Cette copie conforme du projet de loi C-90 présenté par les conservateurs quand ils étaient au pouvoir est loin d'être le bébé du gouvernement actuel, mais cela ne l'empêchera pas d'en revendiquer la paternité s'il est adopté. De plus, s'il est adopté, il est presque certain qu'il va faire monter en flèche le budget déjà astronomique de la justice pénale, dont l'aide juridique est sans contredit l'élément dont la croissance est la plus rapide.
En définitive et compte tenu des grands défis que le système judiciaire doit relever en matière de véritable prévention du crime et de protection du public, il est terrible de penser qu'il faut débattre d'un tel projet de loi au sacrifice d'autres questions légitimes. Cela aussi fera partie de l'héritage de ce gouvernement, si ce projet devient loi.
L'Association canadienne des policiers conclut en disant:

Le projet de loi C-41 est ambigu, contradictoire et, dans une grande mesure, parfaitement inutile. C'est un exemple frappant de ce qu'un ancien membre libéral du comité de la justice appelait une mesure législative factice. En apparence, on dirait une véritable réforme de la détermination de la peine, mais en réalité cette réforme va donner lieu à des poursuites sans fin, avec les dépenses que cela suppose, et tout cela pour rien. Ce projet de loi est un exemple frappant de ce que l'on fait de pire en matière de révision du croit criminel, en ce sens qu'il n'est pas pratique, qu'il est mal conçu et qu'il donnera des résultats complètement incompatibles avec ce que la grande majorité des Canadiens estime qui doit être fait.
Ce projet de loi n'a en aucune façon été conçu ou poli en tenant compte de la réaction politique des députés, qui devront répondre devant leurs électeurs des résultats qu'elle produira.
Aujourd'hui, alors qu'il y a tant à faire pour prévenir les crimes et pour protéger la société contre les multirécidivistes violents, le projet de loi nous embarrasse et il continuera de le faire.
En pensant à l'objectif que poursuit le gouvernement en proposant le projet de loi C-41, je me vois forcé de demander à la secrétaire parlementaire du premier ministre quelle est sa justification. Je ne peux que supposer que c'est pour vous conformer aux intérêts et aux exigences du mouvement politiquement correct que vous représentez si bien.

(1925)

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Encore une fois, je rappelle aux députés qu'ils doivent s'adresser à la présidence.

Je rappelle aussi à la Chambre que la secrétaire parlementaire dispose seulement d'une minute pour répondre.

M. Mayfield: Je vous présente mes excuses.

Mme Augustine: Tout d'abord, monsieur le Président, j'accepte volontiers ces excuses, car je sais que ce genre de débat soulève toujours les pires sentiments chez les députés, dufait que nous traitons de problèmes auxquels la société est confrontée.

Nous parlons d'une société où règne le respect de la diversité et de la personne. Nous parlons notamment de mesures qui, d'elles-mêmes, facilitent la prévention et la réinsertion.

Le projet de loi dont nous sommes saisis garantirait le fonctionnement de notre société, comme je l'ai dit tout à l'heure, ainsi que la sécurité de tous les membres de notre société, peu importe la race, la couleur, la religion, la nationalité, l'âge, le sexe ou l'orientation sexuelle.

Je pense que cela est difficile pour le député. Je peux citer de nombreuses sources qui font des commentaires élogieux à l'endroit de ce projet de loi.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion d'intervenir sur le projet de loi C-41 aujourd'hui, d'abord parce que j'estime qu'il est très important parce qu'il protège les droits des victimes, et en fait la promotion, et ensuite parce que plusieurs idées fausses sont véhiculées sur ce projet de loi. Certaines personnes, dont certains de mes électeurs, s'inquiètent de l'inclusion de l'expression orientation sexuelle dans le projet de loi. Ils craignent que, d'une certaine manière, cela ne fasse la promotion de l'homosexualité, n'entraîne des restrictions sur le plan religieux ou des modifications du Code criminel ayant pour effet de rendre acceptables des choses comme la pédophilie.

Je voudrais d'abord traiter de ces questions. Le projet de loi C-41 porte sur la détermination de la peine. Il vise à traiter sévèrement les délinquants ayant commis un crime grave et à fournir des programmes de services communautaires ou éducatifs aux délinquants non violents.

L'article 718 du projet de loi prévoit que le tribunal devrait tenir compte de circonstances aggravantes dans la détermination de la peine. Le projet de loi stipule que si un crime a été motivé par la haine ou si le délinquant a abusé de la confiance de la victime, cette haine ou cet abus de confiance doit être considéré comme une circonstance aggravante et donc être sévèrement puni.

Le projet de loi énonce que les crimes haineux sont ceux qui sont motivés par des facteurs comme la race, la nationalité, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience physique ou mentale ou l'orientation sexuelle.

Je voudrais dire clairement que j'estime que les crimes haineux, quels qu'ils soient, sont intolérables et que nous devons prendre des mesures proactives pour extirper la haine de la société. J'appuie fermement toute mesure disant sans équivoque que les crimes fondés sur la haine ne seront pas tolérés et qu'ils seront sévèrement punis.

Cependant, je crois fermement à la famille et suis également préoccupé par le risque d'érosion des valeurs familiales en raison de l'utilisation de l'expression «orientation sexuelle». Compte tenu de ces préoccupations et de celles de quelques-uns de mes électeurs, j'ai écrit au ministre de la Justice et lui ai posé très clairement les questions suivantes: ce projet de loi a-t-il un effet sur la question des avantages ou des droits d'adoption accordés aux personnes de même sexe, et les tribunaux pourraient-ils interpréter l'orientation sexuelle comme incluant la pédophilie ou d'autres formes de déviation sexuelle? En ce qui


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concerne les avantages sociaux et les droits d'adoption pour les couples homosexuels, le ministre a clairement indiqué que le projet de loi ne traite pas de ces questions. Des causes concernant les avantages sociaux accordées aux couples homosexuels ont récemment été portées devant les tribunaux, mais le projet de loi C-41 n'a aucun effet sur cette question.

On craint également que l'utilisation de l'expression «orientation sexuelle» dans la loi ne crée un précédent et ne s'étende à un moment donné à bien d'autres questions, comme celles dont certains députés d'en face ne cessent de parler.

Je tiens à assurer mes électeurs que l'utilisation de cette expression n'est pas nouvelle dans notre système de justice. En fait, elle est employée depuis 1977 et figure actuellement dans les lois sur les droits de la personne de huit provinces.

(1930)

La deuxième question que j'ai posée au ministre, c'est si on pouvait considérer comme orientation sexuelle la pédophilie et d'autres comportements sexuels. Encore une fois, le ministre a répondu par la négative. Le Code criminel décrit clairement les contrevenants et prévoit des mesures contre eux.

Le ministre a souligné que cette mesure législative n'est pas nouvelle; elle n'est pas ambiguë et ne traite pas d'actes criminels comme la pédophilie. J'ai entendu certains paroissiens de St. Catharines exprimer la crainte qu'on ne supprime la liberté de parole. Encore une fois, le ministre m'a assuré, et je cite le passage de sa lettre: «Les dispositions du projet de loi n'interdisent pas et ne peuvent interdire aux gens d'avoir des croyances ou d'en parler au sein de leurs Églises, de leurs congrégations ou de leurs collectivités. Le projet de loi traite de ceux qui commettent des crimes à cause de préjugés ou de la haine. Il n'aura aucune conséquence sur la liberté d'expression.»

Récemment, une des congrégations a écrit au ministre pour lui faire part de ses préoccupations et appuyer le projet de loi C-41. «L'Église considère qu'il est de son devoir de combattre l'injustice», disait la lettre. Et plus loin:

Nous avons pour mandat d'aider l'Église à accomplir la mission divine de faire en sorte que nous ayons une église et une société actives et englobantes, qui s'efforcent de protéger les droits de tous et de répondre aux besoins de tous, y compris ceux des personnes qui sont marginalisées pour des motifs tels que la race, la culture, le sexe, l'état civil et la situation financière, l'âge, les convictions religieuses, l'orientation sexuelle et les incapacités.
Le projet de loi C-41 vise principalement à parfaire notre législation en matière de détermination de la peine et en préciser l'objet. Le projet de loi comporte des dispositions relatives aux victimes et aux crimes motivés par la haine et prévoit, aux fins de la réadaptation de certains contrevenants, des mesures de rechange telles que le service communautaire, la probation et les amendes, ainsi que la mise à jour des procédures et des règles de la preuve.

Le projet de loi C-41 me tient particulièrement à coeur parce qu'il porte sur les droits des victimes de violence. C'est triste, mais notre système judiciaire semble trop souvent protéger les contrevenants et faire peu de cas des victimes. Le projet de loi contribue grandement à faire ressortir l'importance de respecter et de protéger les victimes. C'est un petit pas dans la bonne direction.

Il y est question de la protection et de la promotion des droits des victimes. On y énonce l'objectif de la détermination de la peine. À l'heure actuelle, le Code criminel ne comporte aucun énoncé de l'objectif et des principes du prononcé des peines. La nouvelle loi viendrait donc combler cette lacune en fournissant un énoncé qui pourrait servir de guide aux tribunaux en ce qui concerne l'objectif essentiel du prononcé de la peine.

Cette déclaration inclut, au nombre des objectifs de la détermination de la peine, la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité. En outre, les peines devraient susciter chez les délinquants une prise de conscience de leurs responsabilités, notamment par la reconnaissance du tort causé aux victimes et à la collectivité. La déclaration souligne aussi l'importance du maintien d'une société paisible et sûre.

La deuxième façon dont le projet de loi s'occupe des victimes d'actes de violence, c'est en autorisant la présentation de déclarations par celles-ci. En effet, les victimes pourront présenter des observations sur le préjudice qui leur a été causé ou sur la perte qu'elles ont subi par suite du geste posé par un délinquant. Ces déclarations influeront sur le prononcé de la peine et sur l'admissibilité d'un délinquant à une libération conditionnelle en vertu de l'article 745.

Dans le passé, la commission des libérations conditionnelles refusaient de permettre aux victimes de présenter des observations. Il s'agit d'un changement important, et je suis certain que tous seront d'accord pour dire que le tort causé à une victime par un délinquant devrait être pris en compte au moment de décider si celui-ci doit bénéficier d'une libération conditionnelle. Ainsi, il sera tenu compte de l'expérience vécue par la victime, qui aura la chance de se faire entendre.

La troisième façon dont le projet de loi veille à la protection et à la promotion des droits des victimes, c'est au niveau de la restitution. Il favorise l'obtention d'une compensation dans les cas d'abus touchant une famille. Les frais liés au déménagement, au logement temporaire ou au soutien d'un enfant pourront être versés aux victimes lorsqu'il s'agit d'une femme ou d'une famille qui doit déménager, par exemple lorsque le père est le délinquant.

(1935)

Je ferais preuve de négligence en ne prenant pas la parole sur ce projet de loi aujourd'hui. D'expérience, je comprends ce que sont la haine et la discrimination et le tort qu'elles peuvent causer à une personne. Ce sont des attitudes très destructrices qu'il faut réprimer sévèrement. Au cours de ma vie, j'ai été à même de constater qu'un nom comme le mien était perçu de façon différente, avec tout ce que cela peut sous-entendre. Par conséquent, je sais de quoi je parle.

Il est temps que l'on donne la priorité aux droits des victimes. J'espère que, à l'avenir, le ministre de la Justice déposera à la Chambre d'autres mesures législatives ayant pour effet d'améliorer le sort des victimes de violence.

Le chef de police de la municipalité régionale d'Ottawa-Carleton appuie fortement ce projet de loi. La Fédération canadienne des municipalités a écrit pour manifester son appui à cettemesure.


13955

Un vote en faveur de ce projet de loi est un vote contre la discrimination et la haine à l'endroit d'individus ou de groupes. Les manifestations de haine n'ont pas leur place au Canada, et cette mesure se veut un engagement à prendre pour combattre les délinquants motivés par un tel sentiment.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, ma question est très simple. Si une femme est victime d'une agression sexuelle, c'est terrible. Si elle est violée parce qu'elle est lesbienne, pourquoi ce crime devrait-il être puni plus sévèrement? C'est la question clé à laquelle aucun député d'en face n'a encore répondu. Tant que la question reste sans réponse, le projet de loi ne devrait pas être adopté.

M. Lastewka: Monsieur le Président, le projet de loi porte sur les décisions que les juges sont appelés à prendre au sujet de divers crimes, dont les agressions sexuelles. Trop souvent, nous avons vu que la loi manquait de précision. Elle est appliquée très différemment d'une région à l'autre du Canada.

Ce projet de loi ajoute des précisions, de manière à faciliter la prise de décision d'un juge. Avant d'infliger une peine, il pourra se demander si le crime a été motivé par la haine ou non. Voilà ce qui compte vraiment. Nous voulons faire comprendre à tous les Canadiens que le gouvernement appliquera des lois plus sévères chaque fois qu'un crime sera motivé par la haine. Le message est clair.

M. Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, avec tout le respect que je dois au député, je lui ferai remarquer qu'il n'a pas répondu à la question. Pourquoi un crime est-il plus grave qu'un autre?

D'après ce qui se passe devant nos tribunaux, je crois que ce projet de loi ne servira qu'à fournir plus de travail aux avocats. Ils pourront faire valoir qu'un crime a été motivé par un préjugé ou par la haine. Plutôt que de s'en tenir aux faits-un crime a été commis et ce comportement est inacceptable-, on considérera un autre élément. Je me demande ce qui motive ce projet de loi. Aurait-il été conçu par des avocats, ou par des gens qui vont en bénéficier?

(1940)

Au Canada, les procès coûtent déjà assez cher. Il n'est pas nécessaire d'y ajouter une nouvelle dimension.

Nous devons répondre à la question, à savoir le cas d'une femme qui est victime d'une agression sexuelle n'est-il pas aussi grave que celui de la personne violée parce qu'elle appartenait à une catégorie spéciale?

M. Lastewka: Monsieur le Président, le fait qu'un crime soit motivé par la discrimination ou la haine ne change en rien l'exemple du député d'en face. Il est très clair que si le crime est motivé par la haine, il faut en tenir compte dans la détermination de la peine.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, je me trouve encore une fois à parler d'un projet de loi dont le débat a été limité par une motion d'attribution de temps imposée par le gouvernement et ses cohortes du Bloc québécois.

Lorsqu'il a proposé les motions d'attribution de temps pour l'étude des projets de loi C-41, C-68 et C-85, le secrétaire d'État aux Affaires parlementaires a dit que le gouvernement était forcé de procéder ainsi parce que le Parti réformiste avait présenté des centaines d'amendements dans le seul but de retarder l'adoption de ces mesures.

Si l'on examine les amendements proposés à l'étape du rapport du projet de loi C-41, on constate qu'ils sont au nombre de 25. De ces 25 amendements, seulement 5 ont été proposés par le Parti réformiste. Comment le secrétaire d'État peut-il prétendre qu'en proposant 5 des 25 amendements, le Parti réformiste tentait de faire traîner l'étude du projet de loi C-41?

Comment le gouvernement peut-il prétendre qu'il était nécessaire de limiter le débat pour faire adopter ce projet de loi, alors qu'il a été présenté à l'étape du rapport le 22 mars. Le gouvernement a eu près de trois mois pour le faire adopter.

Non, ce n'est pas le Parti réformiste qui cause des problèmes au gouvernement à propos de ce projet de loi, c'est une poignée de députés libéraux d'arrière-ban qui ont suscité tellement d'angoisse chez le gouvernement qu'il a dû recourir à l'attribution de temps pour faire adopter le projet de loi avec aussi peu de discussion que possible.

Je veux parler de la qualité du débat ici. Je veux revenir sur certaines observations faites par la députée de Vancouver-Centre. Je me réjouis de voir qu'elle est revenue dans la salle de sorte qu'elle pourra entendre ce que j'ai à dire. Cela me met dans tous mes états quand je vois la députée de Vancouver-Centre oser mettre en doute que le député de Crowfoot ait lu le projet de loi en entier. Je ne me rappelle pas avoir vu la députée de Vancouver-Centre siéger pendant des mois au comité de la justice pour entendre des témoins ou étudier le projet de loi article par article pour tâcher de l'améliorer.

La députée d'Etobicoke-Lakeshore a dit pour sa part que ce projet de loi portait sur les crimes motivés par la haine et que cela était son seul objet. Ces personnes devraient peut-être prendre quelques minutes pour lire vraiment le projet de loi et constater qu'il porte sur beaucoup plus de sujets que les crimes motivés par la haine. Le député du Bloc québécois qui a pris la parole devrait en faire autant lui aussi. Le projet de loi porte sur la détermination de la peine. Il porte sur les mesures de rechange. Il porte sur l'abus de confiance par un fonctionnaire public, et sur l'article 745 et beaucoup plus encore que les crimes motivés par la haine. Après avoir siégé au Comité de la justice pendant des mois pour entendre des témoignages sur le projet de loi C-41, je trouve inadmissible qu'on n'ait tenu aucun compte de nombreux éléments que j'ai soulevés à propos du projet de loi, à cause de l'expression «orientation sexuelle» qui est ajoutée à l'article 718.2 du Code criminel et de la liste de motifs qu'on y trouve.

(1945)

Les députés de Rosedale et de Vancouver-Centre ont dit que les policiers appuyaient sans réserve le projet de loi. Comme d'autres députés l'ont fait remarquer, l'association des policiers n'appuie pas ce projet de loi. Lorsque le ministre de la Justice faisait la promotion de son sinistre projet de loi C-68, au sujet du contrôle des armes à feu, il a soutenu que les chefs de police et l'Association canadienne des policiers étaient en faveur de la réglementation des armes. Dans ces conditions, quel Canadien pourrait oser s'y opposer? Je dois dire aux députés ministériels


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que les chefs de police et l'Association canadienne des policiers ne soutiennent pas le projet de loi C-41. Voici une citation de l'Association canadienne des policiers:

Notre système de justice pénale repose à la fois sur un texte législatif, le Code criminel, et la jurisprudence constituée par les interprétations et les applications accumulées au fil des ans. Ce sont les pierres angulaires de notre système.
Le projet de loi vise à codifier certains, et seulement certains principes de la détermination de la peine qui ont évolué dans nos tribunaux depuis une centaine d'années. Cette approche qui consiste à redéfinir des principes entraînera d'interminables litiges qui feront gaspiller des millions de dollars à un système qui s'efforce d'utiliser plus efficacement ses ressources existantes.
L'Association canadienne des policiers représente les agents de tout le pays, pas seulement d'Ottawa. Elle ajoute qu'elle se sent obligée d'expliquer pourquoi le projet de loi est si peu judicieux et de rappeler que:

La détermination de la peine est un élément beaucoup trop important pour qu'on l'entrave par une mesure aussi médiocre. Il faudrait tout reprendre du début. À cette heure tardive, nous vous exhortons à agir de la même manière et à faire tout ce qu'il faudra pour faire avorter ce projet de loi.
Ce sont des déclarations très claires que formulent ces policiers, dont l'avis était très important lorsqu'ils appuyaient le projet de loi C-68, mais ne compte plus lorsqu'on discute du projet de loi C-41. Le gouvernement peut-il nous dire pourquoi l'avis des policiers était si important lorsqu'on étudiait un projet de loi et ne veut plus rien d'autre lorsqu'on passe à une autre mesure législative?

Un gouvernement apporte habituellement des modifications à une loi parce qu'il désire changer l'orientation de cette mesure législative ou combler certaines lacunes. Comme le signalait l'Association canadienne des policiers, ce projet de loi est loin d'atteindre ces buts.

La modification dont tout le monde parle, ici, ce soir, celle qui vise l'article 718.2, n'atteint pas non plus ces objectifs. Selon la modification proposée, la perpétration d'infractions motivées par des préjugés ou de la haine est considérée comme circonstance aggravante et entraîne, par conséquent, des peines plus sévères. Nous avons eu droit à des discours passionnés de la part de membres du parti ministériel qui nous ont raconté les expériences qu'ils ont vécues et les injustices dont ils ont souffert en tant que victimes de discrimination. Je n'en doute pas. Je ne doute pas, non plus, que bien des Canadiens vivent la même situation.

De nombreux témoins sont venus dire au Comité de la justice que les tribunaux prennent en considération tous ces facteurs depuis déjà plusieurs années. Avant de déterminer la peine, les tribunaux examinent tous les circonstances aggravantes et atténuantes. Ils imposent déjà des peines plus sévères aux auteurs d'infractions motivées par de la haine ou des préjugés.

Le motif du contrevenant a toujours été pris en considération. À l'heure actuelle, les tribunaux imposent souvent des peines plus sévères à ceux qui ont commis des infractions motivées par de la haine ou des préjugés. Si c'est déjà le cas, pourquoi ajouter cet article dans le projet de loi C-41? Disons-nous aux tribunaux que nous adoptons cette nouvelle loi simplement pour leur demander de préserver le statu quo? Il y a une différence, cependant, puisque l'article 718.2 mentionne neuf formes de discrimination.

Le Comité de la justice a tenté de déterminer si cette liste était limitative. Autrement dit, le tribunal peut-il considérer comme circonstance aggravante la perpétration d'une infraction motivée par une forme de discrimination qui ne figure pas dans la liste?

(1950)

Le député d'en face a fait remarquer qu'un amendement avait été apporté à cette disposition. Oui, un amendement ajoutant des éléments similaires y a été apporté. Comme d'habitude lorsque des avocats témoignent devant un comité, il y en a qui ont dit que la liste ne serait pas exclusive et d'autres, qu'elle serait considérée comme exclusive. Si elle ne devait pas être exclusive, pourquoi le gouvernement a-t-il inclus une liste?

S'il y a une chose qui est évidente, c'est que les personnes qui seront accusées en vertu de cet article vont contester son exclusivité. Il est également probable que si nous, parlementaires, laissons cet article tel qu'il est, ce sera aux tribunaux de décider si quelque chose renvoie à une circonstance mentionnée dans cette liste. Voilà pourquoi cet article devrait être complètement supprimé. Je n'ai entendu personne affirmer que les tribunaux en général n'ont pas pu tenir compte de circonstances aggravantes dans l'examen de crimes fondés sur la haine, les préjugés ou le parti pris.

Je le répète, c'est l'article 718.2 qui attire le plus l'attention, mais d'autres points méritent d'être examinés de plus près, dont la question des mesures de rechange. La notion de mesure de rechange est valable. Personne au sein du Parti réformiste ne conteste cette notion.

Ce projet de loi, toutefois laisse beaucoup trop de questions sans réponse. D'abord, qu'est-ce qu'une mesure de rechange? On ne peut pas le dire, car il n'existe pas de définition. Il n'existe même pas de ligne directrice sur ce que les provinces peuvent adopter comme mesure de rechange. Qui a droit à des mesures de rechange? C'est là une autre question sans réponse. Le projet de loi prévoit seulement que la personne qui prendra la décision devra considérer la peine comme juste. Qui est cette personne? Encore là, pas de réponse. Le projet de loi ne précise pas qui devra prendre ces décisions. En fait, le projet de loi ne prévoit même pas quels types de délits conviennent à des mesures de rechange.

On croirait que les gens qui ont déjà bénéficié de mesures de rechange ne devraient plus y avoir droit. Le projet de loi ne le dit pas. Il pourrait être extrêmement difficile de déterminer si un délinquant a déjà bénéficié de mesures de rechange, car il n'est pas obligatoire de rapporter le recours à ces mesures et il n'y a pas de registre central des cas où des mesures de rechange ont été prises. Les articles concernant les mesures de rechange sont tout simplement trop vagues pour qu'on les appuie.


13957

Une autre question importante que le projet de loi C-41 ne règle pas est celle des titulaires de charges publiques qui perdent leur emploi s'ils sont reconnus coupables et condamnés à une peine d'emprisonnement. Précédemment, un député trouvé coupable d'une infraction criminelle risquait seulement de perdre son poste s'il était condamné à une peine de plus de cinq ans d'emprisonnement.

Le comité de la justice a accepté un amendement du Parti libéral à cette disposition, qui réduit la durée de l'emprisonnement de cinq à deux ans. Cependant, le comité a rejeté un amendement du Parti réformiste selon lequel tout représentant élu devrait perdre son poste s'il était condamné à toute peine d'emprisonnement. C'était peut-être un peu trop sévère pour les libéraux, mais la tolérance zéro est fondée sur la réalité. Un agent de GRC qui est trouvé coupable d'une infraction criminelle perdra son emploi s'il est condamné ne serait-ce qu'à une journée de prison. Comment le Parlement peut-il justifier ces deux poids deux mesures?

Nous disons que nous nous attendons à ce que les agents de notre corps de police national respectent une norme de conduite très sévère voulant qu'ils perdent automatiquement leur emploi s'ils sont condamnés à toute peine d'emprisonnement. Or, quand il est question de notre norme de conduite, de la norme de conduite des législateurs, nous disons que seul un emprisonnement de deux ans ou plus dans un pénitencier fédéral nous rendrait inaptes à occuper notre poste de représentant élu. Comment le gouvernement peut-il justifier une telle contradiction?

Toutefois, le plus grave problème que comporte le projet de loi C-41 n'est pas nécessairement ce qu'il y a dedans, mais plutôt ce qui n'y est pas. Le projet de loi C-41 n'apporte que des modifications superficielles alors que c'est une réforme en profondeur qu'il faut.

(1955)

Je reviens à la lettre de l'ACP parce qu'on y lit-et je l'ai lue plus tôt-que le projet de loi devrait être refait en entier. Ce ne sont pas seulement les députés du Parti réformiste qui disent que le projet de loi doit être mis au rebut. L'ACP le dit aussi.

Nous avons besoin d'un projet de loi sur la détermination de la peine qui aura pour effet d'enfermer les délinquants violents à haut risque et de les garder en prison jusqu'à ce qu'ils ne constituent plus une menace pour la société. Nous avons besoin d'un projet de loi sur la détermination de la peine qui aura pour effet que le tribunal infligera aux délinquants des peines qui serviront de moyens dissuasifs non seulement pour eux, mais pour tous les autres, de façon générale. Nous avons besoin d'un projet de loi sur la détermination de la peine prévoyant des peines proportionnelles à la gravité des crimes, des peines infligées d'une manière uniforme et avec un degré élevé de certitude.

Le système de justice souffre d'un manque considérable d'appui public. Si on veut que la population ait de nouveau confiance dans le système de justice, il faut adopter des lois qui rendront vraiment nos rues et nos localités plus sûres.

Le projet de loi C-41 ne constitue pas la solution, et je presse les députés non seulement de l'opposition, mais encore du gouvernement, de ne pas appuyer un projet de loi si mal conçu qui nuira à la justice dans notre pays.

Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Monsieur le Président, comme la députée s'est adressée à moi personnellement dans son discours, je vais non seulement répondre mais lui poser une question.

La députée a dit que je n'ai pas assisté à toutes les heures et les heures de délibérations du comité et que je n'ai pas écouté les témoins. On n'a pas besoin d'être présent pour pouvoir lire un projet de loi du début à la fin, pour pouvoir le comprendre. C'est très simple à faire. C'est aussi très facile d'obtenir le compte rendu des délibérations du comité, de le lire et de le comprendre.

Il n'y a pas que cela qui m'ait permis de comprendre les témoins. Ayant pratiqué la médecine familiale pendant 23 ans, je sais ce que les crimes motivés par la haine font aux gens. J'ai travaillé dans des salles d'urgence à Vancouver et j'ai vu arriver des gens qui avaient été battus à cause de leur orientation sexuelle et à cause de leur race. J'ai une raison très valable de parler comme je l'ai fait.

Si vous discutez des notes explicatives du projet de loi, si vous l'épluchez article par article pour mettre les points sur les i, mais que vous ne comprenez pas les principes sur lesquels repose ce projet de loi ou la partie du projet de loi qui affectera la vie des Canadiens où qu'ils vivent, qui aura des répercussions très réelles sur la vie des Canadiens, c'est que vous êtes passée complètement à côté de la question.

La députée comprend-elle ces principes?

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de continuer, je tiens à rappeler aux députés que, même si, en général, le débat s'est déroulé de façon très parlementaire, comme il s'agit d'une question qui suscite de vives réactions, il est très important que les orateurs s'adressent à la présidence.

Mme Fry: Monsieur le Président, je veux poser une question à la députée. La députée comprend-elle pourquoi le fait qu'un crime soit motivé par la haine devrait être considéré comme un facteur aggravant? Les crimes motivés par la haine ne causent pas seulement des souffrances physiques, mais aussi des souffrances psychologiques. Les crimes motivés par la haine laissent des traces indélébiles sur un individu. Les crimes motivés par la haine causent l'érosion continuelle de l'estime de soi des membres d'un groupe qui ont l'impression que la société les a rejetés. Les membres de ce groupe n'ont aucune confiance en eux, et ce sentiment les hante pour le reste de leur vie.

Je voudrais demander à la députée si elle comprend vraiment cet aspect des crimes motivés par la haine.

Mme Meredith: Monsieur le Président, je peux dire en toute honnêteté que je comprends parfaitement l'intention de ce projet de loi et l'impact que peut avoir sur une personne un crime motivé par la haine. C'est la raison pour laquelle je me réjouis que les tribunaux en tiennent déjà compte.

(2000)

Je comprends que la députée est médecin et non avocate, mais si elle examinait des transcriptions de procès et le prononcé de la peine, elle constaterait que les tribunaux en tiennent déjà compte. Ils tiennent déjà compte du fait qu'une raclée peut être attribuable au fait qu'une personne était homosexuelle ou d'une race que les contrevenants n'aimaient pas. Les peines sont plus sévères dans ces circonstances aggravantes.


13958

Comme les tribunaux le font déjà, nous n'avons pas besoin de codifier et de discuter sur la question de savoir s'il faut ajouter un autre groupe à la liste des motifs de discrimination. Car c'est ce qui se passera.

Dans une affaire qu'elle connaît très bien, qui a été jugée à Vancouver, on a tiré sur une personne à cause de sa profession. Il se peut qu'il entre dans une des catégories de cette liste. Des avocats en débattront devant un tribunal et lui feront perdre son temps, alors que ce facteur entre déjà en ligne de compte parce que la liste n'est pas jugée exhaustive.

Je signale donc à la députée que les tribunaux tiennent déjà compte de facteurs de ce type. Il n'est absolument pas nécessaire d'adopter une loi afin de dresser une liste. Je répète que ce n'est qu'un aspect de la loi.

Au cas où des députés de cette Chambre n'auraient pas saisi, il s'agit de mesures de rechange qui ne sont pas précisées; on ne dit pas qui prend les décisions, à quels crimes ou contrevenants elles s'appliquent, ni s'ils ont droit à des mesures de rechange une, deux, trois, dix ou quinze fois. Je pense qu'il faut se pencher la-dessus. Nous ne pouvons adopter une loi à cause d'une seule disposition; nous devons l'examiner dans son ensemble. Si l'ensemble est mauvais, nous sommes tenus moralement, en tant que législateurs, de rejeter le projet de loi.

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, j'ai un petit commentaire à faire.

Dans ses observations préliminaires, la députée de Surrey-White Rock-South Langley s'est plainte au sujet de l'attribution de temps sous prétexte que ce n'est pas son parti qui fait de l'obstruction et qui nous fait perdre du temps.

Je crois qu'elle était ici hier quand les Canadiens ont pu voir les réformistes nous faire perdre du temps délibérément en votant au ralenti et en ridiculisant du même coup le Parlement. C'est ce que j'appelle un outrage au Parlement. C'est pourquoi l'attribution de temps est nécessaire en l'occurrence. Nous n'avons pas imposé la clôture. Ils auraient raison de se plaindre de l'imposition de la clôture.

À mon avis, quand on a affaire à ce genre d'attitude, l'attribution de temps est synonyme de bonne gestion du temps.

Mme Meredith: Monsieur le Président, je répondrais aux allégations qui viennent d'en face en disant que c'est intéressant de voir un ministériel faire des commentaires sur la nécessité d'attribuer une période de temps alors que ce projet de loi est à l'étape du rapport depuis le 22 mars. Si le gouvernement est lent à un point tel qu'il lui faut plus de trois mois pour mener à bien le débat sur un projet de loi à partir de l'étape du rapport ou plutôt de sa présentation, je ne suis pas disposée à en assumer la responsabilité.

Hier soir, on a donné à chaque député l'occasion de faire consigner son vote et c'est un droit conféré à tous les députés. Je ne présenterai pas d'excuses à la Chambre, ni à qui que ce soit d'ailleurs, pour avoir provoqué la situation d'hier soir, afin que tous les députés aient la possibilité de faire inscrire

M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à faire remarquer que dans sa déclaration, la députée a signalé que pour le moment, le droit pénal est composé du Code criminel et de la common law. Le seul but poursuivi par cet amendement est de codifier tout simplement la common law existante-il ne modifie donc pas la loi-afin que les juges et les avocats sachent exactement de quoi il retourne sous une forme très succincte.

Le vice-président: La députée dispose de la même période de temps pour répondre.

(2005)

Mme Meredith: Monsieur le Président, je serai très brève.

Ils ont déjà la latitude voulue; ils ne doivent pas se contenter de consulter une liste mais analyser tous les facteurs en cours pour voir s'ils correspondent à ceux qui sont énumérés dans une liste ou non. Les six ou sept critères énumérés ne sont pas les seules preuves de partialité, de haine et de préjugés. Il y en a beaucoup d'autres. Il s'agit d'une liste restrictive qui est intégrée au code et qui donnera aux avocats un nombre croissant d'occasions de pomper de l'argent du système.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-41. Je voudrais surtout parler des changements qu'il est proposé d'apporter à l'article 718.2 du Code criminel, qui traite des crimes motivés par a haine-la haine étant jugée comme une circonstance aggravante aux fins de la détermination de la peine.

Cet article du Code criminel cherche plus précisément à criminaliser les personnes qui commettent une infraction motivée par du parti pris, des préjugés ou de la haine fondés sur des facteurs tels que la race, l'origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique ou l'orientation sexuelle.

Cet article tient compte du fait qu'il y a d'une part les crimes commis contre des individus et d'autre part les crimes commis contre le groupe. Beaucoup d'actes criminels peuvent porter un grave préjudice à une collectivité. Les crimes motivés par la haine mettent un groupe psychologiquement mal à l'aise, détériorant la qualité psychologique de la vie et entraînant un préjudice psychologique. Comme nous le savons, les préjudices et les traumatismes psychologiques peuvent provoquer des maladies physiques, couramment appelées maladies psychosomatiques. Tous les membres du groupe désigné seront affectés dans une certaine mesure, certains plus que d'autres. Presque tous verront


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leur concept de soi se détériorer et finiront par se sentir comme des citoyens de seconde classe.

Il est important de prendre note du fait que tous les groupes énumérés dans le projet de loi se voient accorder une protection égale, je répète une protection égale. Par exemple, les crimes motivés par la haine commis contre des hommes sont traités de la même façon que ceux commis contre de femmes. Les blancs se voient accorder la même protection que les orientaux, les chrétiens la même protection que les musulmans, les anglophones la même protection que les francophones, les hétérosexuels la même protection que les homosexuels, les Canadiens ukrainiens la même protection que les Canadiens iraniens et les Canadiens autochtones.

Chacun des groupes mentionnés sera peut-être, à un moment ou à un autre, victimes de crimes motivés par la haine. Tous ces groupes ont été choisis parce qu'ils avaient été traités de façon excessivement négative, pour une raison quelconque, à un moment donné. Pourquoi? À cause de l'ignorance tout simplement. L'ignorance est à la base de ce genre de comportement négatif. Certaines personnes entretiennent l'ignorance pour contrôler un groupe, pour s'enrichir ou pour empêcher d'autres personnes de savoir qu'elles pourraient trouver mieux ailleurs.

La peur est un autre facteur de contrôle. Ceci me fait penser, et démontre bien, que nous avons désespérément besoin d'informer les gens, de renseigner tous les Canadiens afin qu'ils aient une image d'eux-mêmes suffisamment rassurante pour pouvoir en toute confiance prendre des décisions et faire des choix. Toute personne qui essaiera de les manipuler pour une raison quelconque ne parviendra jamais à les dégrader, à les déstabiliser et à les humilier au point de pratiquement détruire leur image d'eux-mêmes.

Rappelez-vous que la plupart de ceux qui s'attaquent aux autres et haïssent les êtres humains ont une bien piètre image d'eux-mêmes. À cause de cette image négative, ils tentent de ramener les autres à un niveau d'estime de soi inférieur au leur.

(2010)

Étant donné ces réalités, il est étonnant que les opposants au projet de loi arrivent à la conclusion qu'il accorde une protection spéciale à certains groupes en particulier. Ce qui précède montre clairement, au contraire, que chacun est traité également et que chaque crime haineux sera puni également.

Le projet de loi C-41 n'accorde aucun droit spécial à qui que ce soit. Il protège tous les Canadiens. Chaque Canadien appartient à une nationalité, une race, un sexe et il a un âge, une orientation sexuelle et des croyances religieuses. Si l'un ou l'une d'entre nous croit faire exception à cette règle, nous lui demandons de nous le faire savoir immédiatement.

Puisque personne ne se lève, je présume que mon hypothèse était exacte.

Les critiques qui prétendent que l'insertion de l'expression «orientation sexuelle» servira en quelque sorte à promouvoir l'homosexualité sont dans l'erreur et ne méritent même pas qu'on leur réponde. Je n'arrive pas à voir en quoi ce projet de loi pourrait promouvoir une orientation sexuelle donnée ou d'ailleurs tout autre groupe protégé par le projet de loi C-41.

On a fait croire à certains détracteurs de ce projet de loi qu'il proposait des modifications qui conduiraient à la reconnaissance du mariage entre personnes du même sexe et même des prestations au conjoint du même sexe. C'est absolument ridicule. Ce projet de loi porte sur des actes criminels définis par le Code criminel et n'a rien à voir avec la question des relations entre personnes du même sexe.

Les droits civils et politiques des homosexuels feront l'objet d'un débat dans un contexte entièrement différent, celui des droits de la personne à l'échelle nationale et internationale. Ces droits civils et politiques sont étrangers au projet de loi dont nous somme saisis aujourd'hui. Certains députés savent faire la distinction. Mais, à en juger d'après ce que j'ai entendu hier et aujourd'hui à la Chambre, d'autres ont beaucoup de mal à la faire.

En outre, je crains que certains aient profité de ce débat pour exprimer la répugnance qu'ils éprouvent à l'égard de certains styles de vie. Bien que je reconnaisse qu'ils ont droit à leur opinion à ce sujet, j'estime que le débat d'aujourd'hui n'est pas le moment pour eux de l'exprimer. Nous devons traiter de ce sujet de façon rationnelle, sans nous laisser emporter par nos émotions.

Le débat d'aujourd'hui porte sur le besoin urgent d'éviter que des crimes violents motivés par la haine ne soient perpétrés au Canada. Nous ne devons pas perdre de vue cette distinction.

Il est tout à fait évident que les critiques et les allégations qui visent le projet de loi C-41 sont entièrement sans fondement et, qui plus est, trompeuses. Ces critiques sont basées sur des demies vérités, des idées fausses et des erreurs de perception.

Que ceux qui s'opposent à l'énumération des caractéristiques personnelles d'un individu dans la loi se souviennent que l'article sur les crimes motivés par la haine n'aurait aucune portée sans elle. En effet, dans plusieurs de ses décisions, la Cour suprême du Canada a prévenu que toute mesure législative traitant de haine devait être extrêmement précise et décrire les groupes cibles qu'elle est censée protéger.

J'exhorte tous les députés de la Chambre à analyser de manière objective le débat qui entoure ce projet de loi et à prendre leur décision en fonction des principes de justice et d'équité.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Thunder Bay-Atikokan d'avoir fait baisser la tension dans cette Chambre en ramenant le débat à un niveau un peu plus léger que celui que nous avions. Bien entendu, je pense que c'est simplement parce que nous traitons d'un projet de loi en réalité frivole.

Tous les députés d'en face qui ont pris la parole ont semblé se préoccuper d'un seul article de ce projet de loi. Personne ne semble s'apercevoir que ce projet de loi est épais et qu'il contient un bon nombre d'articles, dont beaucoup sont aussi mauvais que celui dont tout le monde semble vouloir parler.


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(2015)

Toutefois, vu qu'on nous a lancé le gant sur ce sujet particulier, cette catégorisation des gens qui prévoit que seuls ceux qui sont inclus, et aucun autre, ont droit à cette protection contre la haine, je vais continuer à en parler. Je sais, c'était un peu frivole que de dire que tout le monde a une race et tout le monde a une religion, mais le député sait que cela va beaucoup plus loin. De toute façon, je vais jouer sur son terrain et selon ses règles.

Je vais lui soumettre un cas qui n'est pas vraiment hypothétique. Un juif se promène dans un secteur mal famé d'une ville, il est agressé et laissé à moitié mort par quelqu'un qui en veut à son portefeuille. Est-ce qu'il souffre moins qu'il n'aurait souffert si son attaquant avait su qu'il était juif lorsqu'il l'avait agressé. J'aimerais bien une réponse directe à cette question.

M. Dromisky: Monsieur le Président, dans ce cas la victime a été volée et, au cours du vol, elle a été physiquement agressée d'une façon qui peut être très grave. Dans les deux cas, nous avons des lois contre cela. Je ne pense pas que l'attaquant était au courant du fait qu'il avait affaire à un juif. Par conséquent, je pense que la loi prévoit cette situation et indique clairement le genre de punition que le criminel doit recevoir.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, la commission de police a écrit une lettre dans laquelle elle s'oppose très fortement à ce projet de loi. Si le député n'a pas vu la lettre, je lui conseille de s'en procurer une copie. Dans cette lettre, il est dit haut et fort que de nos jours dans les salles d'audience sont rassemblés de nombreux textes, de nombreux périodiques, des cas de jurisprudence auxquels on a recours depuis des années pour réprimer les crimes haineux. Et j'ajouterai que cet effort a donné de très bons résultats.

Si le gouvernement fédéral estime que ce n'est pas le cas, je le prierais de s'entretenir avec un de ses représentants au Comité de la justice. Celui-ci a cité des statistiques tirées de procès qui montrent que les crimes commis contre la communauté homosexuelle arrivent en troisième position sur la liste, soit après les crimes motivés par la haine raciale et, je crois, par la haine religieuse. Il existe des données sur ce chapitre. Cela se fait. Voilà pourquoi la commission de police s'opposent à cette disposition. Elle considère qu'elle fait double emploi, qu'elle est inutile. Or, ces gens savent de quoi il retourne et ils font du bon boulot.

Quelle est la véritable raison d'être de l'article 178.2 s'il en est ainsi?

M. Dromisky: Monsieur le Président, les arguments formulés ici et la contestation à laquelle nous assistons en ce moment sont des répétions de ce qui se passait probablement à la Chambre dans les années 30. À cette époque, c'étaient les mêmes principes qu'invoquaient les adversaires de toute modification de nos lois.

Nous avons repéré dans notre société tout au long de notre histoire divers groupes qui ont été pris à partie par des gens qui leur vouaient une haine farouche. Divers individus ont attaqué certains groupes. Le besoin s'est fait sentir. Reconnaissant ce besoin, un Parlement responsable a alors modifié le Code criminel afin de protéger ce segment de la société canadienne contre ce que j'appellerais une bande d'ignorants.

Nous sommes arrivés à un moment de notre histoire où, pour une raison ou pour une autre, un groupe est pris à partie pour la simple raison qu'on le hait. Force nous est donc de protéger ce segment de notre société, d'où la modification apportée à cette disposition.

(2020)

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, ma question sera très brève. Vu que le député qui vient de prendre la parole est tellement convaincu de la logique du projet de loi, comment se fait-il qu'il faille expliquer à tous les ministériels comment voter là-dessus? Comment se fait-il qu'ils n'y arrivent pas tout seuls si la logique de cette mesure législative est si impeccable?

M. Dromisky: Monsieur le Président, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de convaincre quiconque parmi les ministériels de la façon de voter sur ce projet de loi. Les ministériels sont des êtres très rationnels qui sont très préoccupés par la sécurité de leurs compatriotes, de leurs électeurs et des citoyens de ce pays.

Le vice-président: Nous reprenons le débat. Je donne la parole à la députée de York-Simcoe. Peut-être y aurait-il lieu de consigner au compte rendu que, par suite d'une entente, la députée de York-Simcoe partage son temps de parole avec le député qui vient d'intervenir dans le débat.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, c'est un privilège que de prendre la parole à la Chambre sur une question que tous les Canadiens trouvent importante. Je voudrais profiter de cette occasion pour dire que j'appuie fermement le projet de loi C-41.

Je tiens, en particulier, à parler des dispositions du projet de loi sur la détermination de la peine dans le cas des crimes motivés par la haine. Il y a beaucoup de renseignements erronés qui circulent à propos de ces amendements. Je suis heureuse d'avoir la possibilité de rétablir les faits et de dissiper les malentendus qui pourraient avoir surgi au cours du débat.

Le projet de loi C-41 est un projet de loi général qui propose de modifier les dispositions du Code criminel sur la détermination de la peine. L'un des amendements propose un durcissement des peines imposées aux personnes qui ont déjà été reconnues coupables de crimes motivés par de la haine fondée sur des facteurs tels que la race, la nationalité, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique ou l'orientation sexuelle de la victime.

À l'heure actuelle, certains crimes motivés par la haine ne sont pas visés par les lois canadiennes contre la haine. Il s'agit, entre autres, des infractions au Code criminel qui sont motivées par de la haine contre un groupe précis et qui ne mettent pas en cause la propagande haineuse, comme les attaques physiques ou le meurtre. Dans le passé, la loi considérait la profanation d'une synagogue comme un simple méfait, sans reconnaître la douleur et la peur intenses que cela créait chez tous les membres de la communauté visée. Par conséquent, il faut absolument inclure dans ce projet de loi les crimes motivés par la haine.


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Malheureusement, les crimes motivés par la haine sont devenus très courants dans notre société. Les manifestations de haine sont nombreuses et vont des voies de fait des skinheads contre les gais au meurtre d'un Cri, en passant par la profanation de synagogues. Ces agressions visent presque tous les groupes minoritaires et sont, la plupart du temps, violentes et méchantes. On ne peut plus les tolérer.

Les statistiques montrent que les crimes motivés par la haine augmentent considérablement dans notre pays. B'nai Brith a identifié plus de quarante groupe haineux au Canada. Les crimes commis envers des populations précises sont à la hausse. Les crimes motivés par la haine amènent bon nombre de Canadiens à se sentir vulnérables et à avoir peur. Nous ne devons plus tolérer une telle situation dans la société canadienne. Il est temps que le Canada reconnaisse les crimes haineux comme des crimes particulièrement graves qui s'attaquent à la diversité de notre société. Le projet de loi C-41 dit clairement que ces infractions motivées par la haine ne sont pas du tout acceptables.

Les corps policiers de tout le pays reconnaissent également que le nombre de crimes motivés par la haine est en hausse. Ainsi, on a créé des unités spéciales pour composer avec la nouvelle nature des crimes. L'unité des crimes motivés par des préjugés de la police régionale d'Ottawa-Carleton a déjà fait sa marque sur le chapitre des crimes haineux dans la région de la capitale nationale. On lui attribue une baisse importante de tous les crimes de ce genre à Ottawa et, parce que c'est le premier service de ce genre, il servira de modèle aux autres villes cherchant à résoudre ce problème.

Les autorités canadiennes ont bien du mal à essayer de surveiller et de contenir les groupes haineux. Le projet de loi C-41 est une mesure importante pour les aider à éviter qu'on persécute des Canadiens innocents ou qu'on s'en prenne à eux. Les articles 718, 718.1 et 718.2 du projet de loi C-41 modifient les dispositions sur la détermination de la peine à imposer dans le cas des crimes haineux. Les services policiers de tout le pays accueillent avec plaisir ces modifications et y souscrivent.

Dans le passé, les décisions des tribunaux reconnaissaient le principe fondamental qui préconisait de tenir compte, dans la détermination de la peine, du fait qu'un crime était motivé par la haine ou non. Ces articles garantiront l'application de ce principe uniformément dans tout le pays.

Je crois fermement qu'il nous faut une mesure législative bien précise pour mettre un terme aux crimes haineux au Canada. Ces crimes sont plus graves que ceux qui sont commis à l'endroit d'individus et doivent être sanctionnés plus sévèrement en vertu du Code criminel.

(2025)

Par exemple, il est vraiment horrible qu'un jeune homme rentrant chez lui à pied se fasse attaquer tout simplement parce qu'il fait partie d'un groupe en particulier. Cela montre que le crime est prémédité et qu'il est commis dans l'intention de s'en prendre délibérément à un groupe cible.

Non seulement les crimes haineux ont pour effet de rendre les membres d'un groupe cible plus vulnérables ou craintifs, mais, malheureusement, de par la nature même, ils se répètent souvent. C'est pourquoi il est essentiel de punir ces crimes plus sévèrement.

Les auteurs de ces crimes doivent comprendre que la société canadienne ne peut tolérer leurs préjugés et leur haine et que les peines qu'on leur impose doivent refléter le fait que les Canadiens condamnent collectivement la criminalité.

Beaucoup d'entre nous sont persuadés que le Canada est une société ouverte, tolérante et inclusive. Nous ne pouvons plus tenir cela pour acquis. Le Canada change depuis des décennies. Malheureusement, certains n'aiment pas le changement et s'y opposent obstinément. Cela finit par créer davantage de problèmes. Les gens commencent par prendre comme boucs émissaires certains groupes censés être à l'origine du problème. C'est inacceptable.

Nous ne pouvons blâmer certains groupes pour les problèmes qui assaillent notre société. Il est beaucoup plus facile de blâmer les autres que de chercher des solutions à nos problèmes complexes. Il ne faut pas nous laisser prendre à pareil jeu. Nous devons travailler ensemble pour parvenir à un consensus et pour gérer efficacement l'évolution de notre société. Nous devons cependant aussi comprendre qu'il est vital de protéger les personnes et les groupes contre les crimes motivés par la haine.

Les crimes motivés par la haine sont presque invariablement fondés sur les caractéristiques suivantes: la race, la nationalité, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, l'incapacité mentale ou physique ou l'orientation sexuelle. Il est donc nécessaire d'inscrire ces caractéristiques dans la loi pour nous assurer que les dispositions sur la détermination de la peine soient appliquées par les tribunaux.

J'ai reçu du courrier au sujet du projet de loi C-41. Mes électeurs s'inquiètent surtout de l'inscription dans la loi de l'expression «orientation sexuelle». Premièrement, le projet de loi ne confère aucun droit spécial. Il protège, au contraire, tous les Canadiens. Tous les Canadiens ont une nationalité, une race, un âge, un sexe et une orientation sexuelle.

Le projet de loi ne donne pas de droits spéciaux aux homosexuels et ne risque absolument pas de nuire à la famille traditionnelle. J'ai rassuré mes électeurs sur ces faits, mais j'en profite pour le répéter ici: nous sommes saisis d'un projet de loi sur la détermination de la peine et la criminalité, qui protégera toutes les victimes de crimes motivés par la haine. Cette mesure n'a absolument rien à voir avec la reconnaissance des mariages entre personnes du même sexe et ne risque en rien de détruire la famille traditionnelle.

Je crois fermement que tous les Canadiens devraient être protégés contre les agressions brutales perpétrées sur des victimes choisies, et je soutiens absolument l'inscription dans la loi de l'expression «orientation sexuelle» comme motif de haine. En faisant cela, on reconnaîtrait le fait que les gestes criminels visant à terroriser la collectivité gaie et lesbienne sont de plus en plus fréquents et qu'ils sont malheureusement devenus un problème dans la société canadienne.


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L'expression «orientation sexuelle» a été définie adéquatement. En fait, elle est déjà employée dans un certain nombre de textes légaux au Canada, y compris la législation sur les droits de la personne de huit des provinces canadiennes. Les tribunaux ont toujours considéré que l'expression signifiait l'hétérosexualité, l'homosexualité ou la bisexualité. La pédophilie n'en fait pas partie. En fait, elle est une infraction punissable en vertu du Code criminel du Canada.

J'ai aussi entendu des électeurs dire qu'ils craignaient que le projet de loi C-41 ne porte préjudice à la liberté de parole. Ce projet de loi vise les infractions punissables uniquement par le Code criminel. C'est un projet de loi qui porte sur la détermination de la peine et il s'appliquera une fois qu'une personne aura été reconnue coupable d'un crime. Des sermons d'église ne sont pas des crimes, pas plus que l'opposition morale à l'homosexualité. Cependant, le harcèlement des homosexuels est un crime. Personne, peu importe ses croyances, ne sera touché par le projet de loi, à moins de commettre une infraction punissable par le Code criminel et d'en être reconnu coupable. En outre, la liberté d'expression religieuse est garantie dans la charte des droits.

Nous ne pouvons pas feindre d'ignorer que les crimes fondés sur de la haine sont en hausse. Nous ne devons plus tolérer ces crimes dans notre société. L'engagement qu'ont pris les libéraux à ce sujet est très clair depuis le départ. Le projet de loi C-41 ne fait que concrétiser une autre des promesses que nous avons faites dans le livre rouge. Je me suis toujours élevée contre les crimes de toutes sortes fondés sur de la haine. J'ai basé ma campagne électorale sur cette promesse et j'appuie entièrement le projet de loi à sa dernière lecture.

Je crois fermement que le projet de loi C-41 est une mesure cruciale qui permettra d'indiquer clairement que les crimes fondés sur de la haine ne seront pas tolérés dans la société canadienne. J'exhorte fortement tous les parlementaires à appuyer le projet de loi pour que nous puissions travailler ensemble à assurer la protection de tous les Canadiens.

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'ai bien remarqué la forte émotion qu'a manifestée la députée qui m'a précédé. Elle tient à ce que les crimes haineux soient sévèrement punis par les tribunaux.

(2030)

Vous et moi, monsieur le Président, représentons des circonscriptions d'Edmonton et nous sommes aux prises, dans cette ville et dans d'autres localités, avec le problème des gangs de Vietnamiens qui s'en prennent à des blancs parce qu'ils sont de race différente. Si des blancs agressaient des Vietnamiens, le tribunal devrait certainement tenir sérieusement compte de l'origine ethnique des Vietnamiens visée à l'article 718.2.

Or, dans le cas contraire où des gangs de Vietnamiens pilleraient et terroriseraient des quartiers, je voudrais que la députée m'explique comment le projet de loi garantit le même respect aux victimes et oblige les tribunaux à appliquer des peines aussi sévères à leurs agresseurs.

Mme Kraft Sloan: Monsieur le Président, en tant que parlementaires, nous devons nous plier aux règles et à la procédure de la Chambre. L'une de ces règles nous oblige à laisser le sectarisme et l'étroitesse d'esprit à la porte de la Chambre.

Je voudrais vous faire remarquer que votre. . .

Le vice-président: Je rappelle aux députés qu'ils doivent s'adresser à la présidence.

Mme Kraft Sloan: Je voudrais dire aux Canadiens qui suivent le débat ce soir qu'il s'agit là d'un autre exemple de pseudo-observation et de discrimination à rebours, comme les députés du tiers parti le font fréquemment.

Le projet de loi porte sur la détermination de la peine fondée sur la race et l'origine ethnique. Il ne précise pas la race ou l'origine ethnique de l'individu en cause. Un individu peut être condamné pour un crime motivé par la haine raciale ou ethnique, qu'il soit noir, blanc, rouge, jaune, vert ou violet.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je crois que la députée qui vient de parler a mis le doigt sur l'un des principaux problèmes que pose cette mesure législative.

Quand ma collègue a parlé de traitement différent selon que des Vietnamiens commettent des crimes contre des personnes de race blanche ou que des Blancs commettent des crimes contre des Vietnamiens, elle n'a pas parlé de discrimination dans les deux cas, mais plutôt de discrimination à rebours dans un des cas.

J'aimerais qu'elle m'explique. Pourquoi ne s'agit-il pas de discrimination pure et simple dans un cas comme dans l'autre?

Mme Kraft Sloan: Monsieur le Président, par votre entremise, je voudrais dire au député d'en face que je parlais d'un exemple typique que les gens d'en face utilisent pour illustrer ce qu'ils appellent de la discrimination à rebours. Je n'utilise pas cette expression. Je parle de discrimination tout court. Je faisais allusion aux exemples que les députés d'en face ont utilisés, surtout dans les débats sur l'équité en matière d'emploi, quand ils n'arrêtaient pas de crier à la discrimination à rebours.

S'il avait écouté, le député saurait que ce que j'ai dit, c'est que si une personne était reconnue coupable d'un crime et qu'il s'agissait d'un crime haineux en ce sens que l'agression avait pour motif des préjugés fondés sur la race ou l'origine ethnique de la victime, la couleur de sa peau à elle n'importait pas.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, la députée de York-Simcoe souffre du même problème de compréhension que ses collègues si elle croit que le projet de loi C-41 ne comporte qu'un article. On ne parle de rien d'autre que de cette disposition sur la haine.

(2035)

J'aimerais lui poser la même question que j'ai posée au député de Thunder Bay-Atikokan, qui s'intéresse aussi à cet aspect.

Reprenons l'exemple fictif du juif qui se perd dans un mauvais quartier, où il se fait attaquer et est laissé pour mort par une personne qui ne sait pas qu'il est juif et qui ne voulait que voler son portefeuille. À une autre occasion, l'agresseur sait qu'il est juif et l'a pris pour cible ce jour-là pour le plaisir de tabasser un juif; dans ce cas, le vol du portefeuille n'est qu'accessoire. La gravité des blessures du monsieur est identique dans les deux cas


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et il est hospitalisé. Pourquoi l'agresseur devrait-il être condamné à une peine plus sévère dans un cas que dans l'autre? Où est le bon sens et la justice là-dedans?

Mme Kraft Sloan: Monsieur le Président, je tiens à signaler qu'une de mes collègues a parlé d'aspects différents. Elle a parlé des répercussions sur les victimes entre autres. D'autres députés de l'opposition ont également parlé de plusieurs aspects différents du projet de loi. Certains d'entre nous ont néanmoins choisi de se concentrer sur cet aspect-ci parce que les députés ministériels ne comprennent pas. Nous avons cru qu'à force de répéter, peut-être on arriverait. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Reprise du débat. Le député de Prince George-Bulkley Valley.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, une des choses qui deviennent de plus en plus évidentes dans tout ce débat, c'est que le Parti libéral n'est pas à l'aise en ce qui concerne l'article 718.2.

Nous, de ce côté-ci, savons que le projet de loi fait quelque 75 pages. Certains ministériels ont pris soin de souligner que cette mesure avait 75 pages. Cependant, tous les députés libéraux qui sont intervenus ce soir ont immanquablement parlé de l'article 718.2. Pourquoi? C'est qu'ils sont gênés par cet article. Ils se sentent obligés de le défendre constamment, mais leurs arguments sont de moins en moins convaincants.

Nous constatons que, au cours de ce débat, qui dure depuis que le projet de loi a été présenté, les intervenants prennent de plus en plus une attitude proactive et s'empressent de défendre l'article 718.2, afin d'éviter les questions de leurs vis-à-vis. Si j'étais perplexe à l'égard d'un tel article que mon parti, en tant que gouvernement, aurait proposé, je ferais probablement la même chose.

Les députés ont reçu des dizaines de milliers de lettres, de cartes et de signatures sur des pétitions de la part de Canadiens qui ont pris le temps de lire le projet de loi C-41. Ils s'y sont arrêtés pour essayer de saisir la véritable signification de l'article 718.2, le genre de précédent qu'il pouvait établir et les répercussions que pourraient avoir à long terme les définitions qu'on y donne de certaines catégories.

Il ne faut pas oublier que, si la mesure est adoptée, ce sera la première fois que l'expression «orientation sexuelle» figurera dans la loi au Canada. Certains s'en inquiètent beaucoup.

Si je comprends bien, les libéraux prennent cette attitude proactive pour défendre l'article 718.2 parce qu'ils veulent faire dévier les questions de certains députés de ce côté-ci.

(2040)

Cette disposition les rend mal à l'aise. Ils savent qu'elle n'est pas correcte. Ils savent qu'elle a soulevé une vague d'inquiétude chez les Canadiens, non chez les groupes d'intérêt auxquels ils ont parlé, mais chez la masse des Canadiens d'un bout à l'autre du pays qui s'inquiètent eux aussi de voir cette disposition figurer dans le projet de loi.

Les libéraux ont tous reçu des lettres et des cartes à ce sujet. Ils ont vu les pétitions. Notre Code criminel tâche de refléter les valeurs qui nous tiennent à coeur et établit les peines à imposer en cas de violation de ces valeurs.

Le gouvernement en exercice et les parlementaires ont le devoir d'écouter les Canadiens, d'en écouter un vaste échantillonnage pour découvrir le sentiment du Canadien moyen, de sorte que lorsque nous apportons des modifications au Code criminel, elles reflètent vraiment la perception ou l'opinion de la société quant à la direction à prendre à cet égard.

Le projet de loi C-41 ne reflète pas l'opinion du Canadien moyen, car les libéraux n'ont pas cherché à connaître un vaste échantillonnage des opinions des Canadiens moyens. Ce n'est pas leur genre. Ils ont plutôt choisi des gens pour assister aux audiences du comité, pour y présenter des mémoires émanant de groupes et d'organismes, plutôt que des opinions individuelles, de sorte qu'ils puissent les façonner selon le véritable plan d'action libéral que l'on voit à l'oeuvre dans la mesure à l'étude et en faire quelque chose de politiquement opportun pour le parti.

C'est un des nombreux projets de loi que les libéraux ont présentés au cours de la présente session et qui ne répondent pas aux véritables points de vue des Canadiens. Je voudrais aborder un instant la justice pénale et parler aux députés d'un sondage que j'ai effectué, de sorte qu'ils sachent bien si je représente ou non l'opinion de mes électeurs à propos de certaines des choses que je dis ce soir. C'est que, par dessus tout, je ne suis pas ici pour défendre les points de vue du chef du Parti libéral, mais pour représenter les électeurs qui m'ont envoyé ici pour être leur porte-parole.

J'ai donc effectué un sondage en matière de justice pénale afin d'obtenir un vaste éventail d'opinions des habitants de tous les coins de ma circonscription. J'ai envoyé un questionnaire à 30 000 ménages pour connaître leur opinion au sujet de la peine de mort. Quatre-vingt-huit pour cent des répondants ont dit souhaiter le rétablissement de la peine de mort pour le meurtre au premier degré. Des 88 p. 100 qui ont répondu et sont en faveur du rétablissement de la peine capitale, 58 p. 100 estiment que cette peine devrait également s'appliquer aux agresseurs d'enfants. Cinquante-quatre pour cent disent qu'ils appliqueraient aussi la peine capitale aux violeurs et 45 p. 100 aux trafiquants de drogues. Les députés peuvent se faire une idée de ce que pensent mes électeurs. Je pense comme eux.

Nous avons un Code criminel auquel nos tribunaux sont tenus de se conformer. Dans les dispositions sur les peines, une certaine latitude est laissée aux juges. Les peines sont déjà prévues dans le système de justice pénale, exception faite de la peine capitale, dont nous devons la disparition au député de Notre-Dame-de-Grâce. Ce ne sont pas les peines qui font problème, mais leur application par les juges. C'est la détermination de la peine qui pose des difficultés. Les juges ont la latitude nécessaire, mais ils ne s'en prévalent pas.

(2045)

Une agression est toujours une agression, peu importe contre qui et peu importe les caractéristiques de la victime. Une agression physique est un crime sordide. Une agression sexuelle encore plus. Une agression qui cause une infirmité permanente ou un handicap est un crime horrible, et des peines sont prévues


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pour punir ces crimes. Mais un gouvernement tel que celui-ci n'a pas le cran d'encourager les juges à agir énergiquement et de rationaliser les peines qu'ils devraient fixer. C'est là que le bât blesse. Inutile de modifier les dispositions sur la détermination de la peine. Elles sont là, mais on ne s'en sert pas. C'est exaspérant pour tous les Canadiens.

Une disposition du projet de loi porte sur les délinquants d'origine autochtone. Il y a une quinzaine de jours, un Indien a été reconnu coupable d'agression sexuelle. Il avait aussi proféré des menaces de mort contre sa victime. Il a été jugé et reconnu coupable. Selon mon idée et celle de la plupart des Canadiens, c'est un crime très grave.

Même les libéraux les plus compatissants d'en face reconnaîtront avec moi que l'agression sexuelle est un crime très grave. C'est aussi très grave de menacer une personne de mort si elle ne fait pas ce qu'on veut.

La personne a été reconnue coupable et les preuves ont montré qu'elle avait déjà été arrêtée et condamnée pour vol à main armée. Toutefois, pour faire preuve de créativité, céder aux pressions politiques ou encore satisfaire ceux qui réclamaient un verdict politiquement correct, le juge a décidé de s'en remettre à un groupe de détermination de la peine au lieu d'imposer la peine prévue dans le Code criminel. C'est une nouvelle approche qui est utilisée lorsque des contrevenants autochtones sont en cause.

Le groupe de détermination de la peine, formé d'anciens, a condamné à un an d'isolement cet homme qui avait été reconnu coupable d'agression sexuelle et qui a dit à sa victime, pendant qu'il l'agressait: «Si tu ne collabores pas, je vais te tuer», cet homme qui avait déjà été condamné pour des vols à main armée, des crimes qui sont considérés comme des infractions très graves au Canada, qu'ils soient perpétrés au moyen d'une arme enregistrée ou non.

M. Thompson: C'est honteux. Honteux.

M. Harris: Il a été condamné à un an d'isolement. Il devait aller vivre un an dans une région isolée et des aînés devaient aller le conseiller.

Cette nouvelle a paru dans un journal de Halifax que j'ai lu en chemin vers ma circonscription. Lorsque je suis finalement arrivé à Prince George, en Colombie-Britannique, je me suis aperçu que la nouvelle avait été publiée le lendemain dans le Citizen de Prince George et que mon téléphone n'arrêtait pas de sonner. Les gens m'appelaient pour me demander: «Les gens sont-ils tous fous là-bas?» Je leur répondais: «Non, seulement les libéraux.»

(2050)

Voilà le genre de justice que préconisent les libéraux. Une personne devrait être tenue responsable du crime qu'elle a commis. Mais, de l'avis des libéraux, il ne faudrait jamais tenir l'auteur d'un crime responsable de son geste. Jamais. Selon la philosophie des libéraux, c'est la société qui est responsable. Il faut donc punir la société. C'est la société qui a façonné les criminels, qui ne sont donc pas à blâmer.

L'argument que je veux faire valoir, c'est que le Code criminel renferme déjà des dispositions qui traitent des infractions graves, et même des crimes motivés par de la haine qui sont mentionnés dans l'article 718.2. La loi prévoit déjà des peines pour ces crimes-là.

Je veux revenir à la détermination de la peine. L'alinéa 718.2c) prévoit:

L'obligation d'éviter l'excès de nature ou de durée dans l'infliction de peines consécutives.
Lorsque j'ai lu cela, j'ai vu Pierre Elliott Trudeau et son ministre de la Justice, à qui l'on doit l'article 745. Cela me semble être la consécration légale du cri de ralliement des libéraux défenseurs de la veuve et de l'orphelin. Il ne faut surtout pas que les tribunaux songent à punir les criminels pour leurs crimes!

En fait, beaucoup de Canadiens se demandent s'il existe des peines consécutives. Pourquoi un criminel reconnu coupable de plusieurs délits devrait-il purger toutes ses peines concurremment de telle sorte que, au bout du compte, il finisse par purger la peine punissant un seul de ses délits?

Cette notion de peines consécutives et concomitantes est la première cause du marchandage de plaidoyers, de ces marchés que les avocats concluent hors des tribunaux, autour d'une tasse de café: «Si tu veux jouer au golf cet après-midi, arrivons-en à un compromis et finissons-en avec cette affaire!»

Puis les Canadiens lisent dans les journaux que quelqu'un qui a été reconnu coupable d'un délit grave s'est vu imposer une peine ridiculement légère. La plupart du temps, ce sont les juges qui sont blâmés, alors que les avocats concluent leurs marchés à l'extérieur des tribunaux, avant même que le juge en soit saisi. J'ai un certain respect pour les avocats. Ils doivent gagner leur vie, eux aussi. Notre parti ne s'en prend pas à eux, monsieur le Président.

Je crois que les libéraux se fourvoient complètement avec le projet de loi C-41. Je crois qu'ils réagissent simplement aux pressions des groupes d'intérêts qui les ont appuyés au cours de la campagne électorale. Les libéraux sont renommés pour cela. C'est probablement M. Trudeau qui a le mieux réussi à regrouper les gens dans diverses catégories et divers groupes de telle sorte que, les élections venues, les libéraux n'avaient pas besoin de s'adresser aux individus, mais seulement aux chefs, et les individus suivaient.

Notre pays est sur une mauvaise pente. Nous, parlementaires, ferions preuve de négligence si nous osions oublier que les Canadiens ont le droit de décider du genre de société dans laquelle ils veulent vivre. Tant que le gouvernement refuse d'entendre tout le spectre des opinions, des idées et des préoccupations des Canadiens ordinaires, toutes les modifications qu'il tentera d'apporter au système de justice criminelle ne bénéficieront qu'à ses partisans.

(2055)

C'est l'objectif sous-jacent du projet de loi. Celui-ci ne s'attaque pas à la criminalité comme il le devrait, mais tente plutôt de calmer la population, les groupes d'intérêt spécial qui leur donnent beaucoup de fil à retordre à l'heure actuelle.


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Je ne puis absolument pas appuyer un tel projet de loi. J'ai probablement reçu plus de 15 000 lettres de mes électeurs, qui me disent: «Vous êtes notre député de Prince George-Bulkley Valley. Nous vous implorons de voter contre le projet de loi C-41, et plus particulièrement contre l'article 718.2» qui tente de catégoriser certains types de crimes en fonction de facteurs que le Parti libéral voulait y inscrire.

En guise de réponse à ces personnes qui m'ont élu pour les représenter, je dirai que je voterai assurément contre le projet de loi C-41, me conformant ainsi aux souhaits de mes électeurs, chose que le parti d'en face est incapable de faire.

Laissez-moi reformuler cela. En toute équité, certains députés de ce parti, et je leur fais des excuses publiques, ont eu le courage de dire qu'ils respecteraient le voeu de leurs électeurs qui les ont envoyés ici justement pour ça. Je les félicite, mais je condamne le whip et le premier ministre pour les propos qu'ils ont tenus à propos des députés qui ont eu le courage de voter de manière démocratique conformément au voeu de leurs électeurs.

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis avocat. Le Parti réformiste a peut-être décidé de ne plus s'en prendre aux avocats, mais les remarques que mon collègue a faites m'obligent à prendre part au débat. Je veux faire trois ou quatre observations. Je demanderais à mon collègue d'avoir un crayon et une feuille de papier à la portée de la main pour pouvoir prendre des notes. Il voudra peut-être faire une ou deux remarques par la suite.

Je m'intéresse beaucoup à ce projet de loi, l'ayant étudié en tant que membre du Comité de la justice. J'ai suivi le débat. Je remarque que ce sont toujours les deux mêmes partis qui se renvoient la balle. Où est l'opposition loyale de Sa Majesté dans ce débat?

Il y a eu un orateur du Parti réformiste, puis un de mon parti, puis un autre du Parti réformiste et encore un autre de mon parti. Je ne vois pas les bloquistes prendre la parole pour exprimer leur opinion, pour dire s'ils appuient ou non ce projet de loi.

Le porte-parole en matière de justice a pris la parole et dit quelques mots. Oui, un bloquiste a parlé de l'un des nombreux articles de ce projet de loi. C'est honteux qu'un parti ne prenne pas ses responsabilités au sérieux en tant qu'opposition loyale de Sa Majesté.

Étant membre du Comité de la justice qui a étudié cette mesure législative, je veux dire quelques mots au sujet des témoins qui ont comparu devant ce comité. Il est vrai que ceux qu'on pourrait appeler les Canadiens ordinaires, par exemple la personne qui habite la rue Grenoble dans ma circonscription, n'ont pas eu l'occasion de venir témoigner.

Je tiens à dire au député que les groupes qui sont venus témoigner devant le Comité de la justice représentaient à mon avis toutes les parties concernées par ce projet de loi et ont présenté des arguments pour et contre diverses dispositions du projet de loi.

Je ne crois pas que les Canadiens aient été laissés de côté dans ce processus parce que chacun des membres du comité a adopté une certaine approche relativement à l'étude de cette mesure législative et a pu poser les questions qu'il jugeait nécessaires selon la façon dont il voulait représenter ses électeurs.

(2100)

Je sais qu'une partie importante des discussions a porté sur l'article 718.2. Pourtant, ce projet de loi contient une foule de principes intéressants et il traite de divers sujets. Nous avons eu des leçons d'histoire au sujet du premier ministre Trudeau et de ceux qui étaient ministres de la Justice certaines années. Voyons un peu ce que veut le Parti réformiste.

L'article 730 traite d'absolutions inconditionnelles et sous conditions que les tribunaux peuvent accorder dans certaines circonstances. Le Parti réformiste est-il en faveur des absolutions inconditionnelles et sous conditions, oui ou non?

Une voix: Oui.

M. Wappel: L'article 731 concerne la probation. Le Parti réformiste appuie-t-il la notion de probation?

Une voix: Oui.

M. Wappel: L'article 734 porte sur les amendes. Le Parti réformiste appuie-t-il la notion d'amendes telle que décrite à l'article 734?

Et l'article 738, qui porte sur le dédommagement des victimes de crime et, en particulier, sur une proposition voulant que les gens violents à l'endroit de leur conjoint soient tenus de leur verser des dommages-intérêts?

J'aimerais savoir quelles sont les politiques du Parti réformiste sur ces points précis du projet de loi.

M. Harris: Je voudrais répondre, monsieur le Président. La réponse à toutes les dernières questions du député est absolument affirmative.

Le projet de loi a toutefois beaucoup de points communs avec le projet de loi C-68. Il renferme d'excellentes dispositions mais en contient d'autres qui sont extrêmement mauvaises, à cause de la façon dont les libéraux procèdent.

C'est juste la même chose qui se passe que dans le cas du projet de loi C-68 que nous avions suggéré de scinder, ajoutant que nous appuierions le gouvernement en ce qui concerne les peines plus sévères mais que nous ne pouvions pas le faire pour ce qui est de l'enregistrement. Nous avons apporté des amendements à ce projet de loi pour essayer de faire disparaître certaines mauvaises dispositions susceptibles, à notre avis, de causer beaucoup de problèmes. Je vous rappelle que certains députés d'en face étaient du même avis que nous. Le whip du gouvernement et le ministre de la Justice ont refusé, en affirmant qu'il fallait absolument l'adopter.

En fait, nous sommes autorisés à essayer de faire disparaître les dispositions boiteuses du projet de loi, ce que nous avons fait. Le député de Crowfoot a présenté des tas d'amendements pour essayer d'en faire une mesure acceptable en conservant les bons passages et en se débarrassant de ceux qui sont mauvais. Je sais que le député a présenté lui-même un grand nombre d'amendements précisément dans ce but.


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Cependant, le ministre de la Justice, avec le soutien du premier ministre, avait un programme et il a tout simplement essayé de nous imposer cette mesure de force. Que Dieu vienne en aide aux membres du parti ministériel qui voteront contre le projet de loi car ils vont devoir rendre des comptes au whip dans le courant de l'été.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, j'entends les réformistes parler du projet de loi comme étant «frivole», ils disent aussi qu'il accorde des pouvoirs aux gens qui ont une orientation sexuelle différente, ils disent de plus qu'il y a déjà, en ce moment, une flexibilité. Oui, les juges ont une flexibilité, mais ils n'ont pas l'obligation par contre de respecter l'orientation sexuelle, ou la race, ou l'homme, ou la femme. C'est une flexibilité qui est réservée à un être humain. On ne crée pas l'obligation.

Au Québec, il y a une loi intitulée la Charte des droits et libertés et, depuis 17 ans déjà, on applique cette loi-là. On n'a jamais eu de problématique de dire que les gens qui ont une certaine orientation sexuelle ont plus de pouvoirs que quelqu'un d'autre, qu'une femme ou qu'un homme, bien au contraire. Et je pense que c'est un exercice très démocratique.

Les réformistes font leur vierge offensée aujourd'hui. J'entends parler de peine de mort, aujourd'hui et demain, j'entendrai peut-être dire: «Battons nos enfants, c'est encore mieux, ils vont plus nous écouter.» Je pense que dans ce projet de loi, il n'y a rien de spécial; c'est un bon projet de loi. Je pense qu'il faut l'adopter. Nous, on est d'accord. Cela fait déjà longtemps que, chez nous, ça fonctionne comme cela.

(2105)

Je demanderais aux réformistes d'arrêter de jouer aux vierges offensées, ici, en cette Chambre. Je leur demanderais d'utiliser leur logique et de regarder le projet de loi tel qu'il est, de le lire, surtout, parce qu'ils ne l'ont pas lu. J'ai l'impression qu'ils ne le comprennent pas très bien. On va peut-être le leur traduire. Je leur demanderais également de faire un effort de compréhension pour faire avancer la démocratie dans ce gouvernement.

[Traduction]

M. Harris: Monsieur le Président, ça discutait ferme là-bas.

Je vais faire des commentaires sur les premières déclarations de la députée. Elle a dit que les juges n'ont pas d'obligations. Du fait même qu'ils sont chargés de présider les procès au criminel, ils ont en fait la responsabilité et l'obligation de se charger de la détermination de la peine de ceux qui sont jugés coupables d'avoir commis des crimes dans notre pays. Ils en ont l'obligation, c'est clair. Le problème, c'est quand on a affaire à des politiciens qui ne leur permettent pas de faire leur travail et qui veulent essayer de les influencer pour des motifs d'ordre idéologique ou par opportunisme politique. C'est là une ingérence dans le système judiciaire.

Si les juges pouvaient faire leur travail sans subir l'influence des politiciens et des partis politiques qui estiment qu'il ne faut pas condamner les auteurs de crimes, la sécurité publique s'améliorerait.

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Monsieur le Président, je serai très bref.

Je dois dire qu'à mon avis, ce débat n'est pas bon pour le public canadien. Cette Chambre est la plus haute cour du pays. Honnêtement, j'en ai assez d'entendre les députés du Parti réformiste, chaque fois qu'ils veulent défendre un argument-ce qu'ils ont tout à fait le droit de faire-, prendre, intentionnellement ou involontairement, un Canadien autochtone, un Indien, comme le député vient de le faire, comme exemple pour montrer que tout le système de détermination de la peine est mauvais.

A-t-il utilisé l'exemple d'un homme blanc adulte de l'Alberta? Non. Il a utilisé l'exemple d'un autochtone. C'est pareil quand il y a une crise dans le secteur des pêches sur la côte ouest. Ils parlent de pêche illégale par les autochtones.

Chaque chose que j'ai entendue de la part de cette bande de l'autre côté depuis qu'ils ont été élus pue le racisme. Il pue le genre de chose que j'ai passé la plupart de ma vie d'adulte à tenter de détruire. Je trouve aberrant de l'entendre répéter sans arrêt dans le plus haut tribunal du pays.

M. Harris: Monsieur le Président, je ne sais pas, était-ce une question?

Monsieur le Président, je voudrais invoquer le Règlement. Le député semble avoir l'impression que j'ai fabriqué cette histoire. Pas du tout. C'est arrivé. Je l'ai lu dans les journaux. J'ai lu le reportage. Je n'ai pas inventé l'idée que. . .

Le vice-président: À l'ordre! Le député de Dartmouth a très clairement traité son collègue de stupide. À mon avis, le fait qu'un député traite à voix haute un collègue de stupide ne sied pas au décorum de cette Chambre.

Il y a parmi nous très peu de députés qui étaient à la Chambre sous l'ancienne législature et je puis assurer mes collègues que les Canadiens pensaient que nous nous conduisions alors de façon épouvantable.

Le député de Dartmouth désire-t-il retirer ce qu'il a dit?

M. MacDonald: Monsieur le Président, je faisais partie de l'ancienne législature et je ne tiens pas souvent de propos aussi vifs. Je suis désolé, mais les remarques du député m'ont incité à le faire. Si la présidence le désire, je retirerai ce que j'ai dit.

J'interviendrai plus tard dans ce débat et je clarifierai mes propos de sorte que les personnes qui écoutent comprennent bien l'intention de ce que je viens de dire au député.

Le vice-président: Je remercie vivement le député de Dartmouth. Reprise du débat. Le député de Wild Rose.


13967

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 43(2) du Règlement, à partir de maintenant, les députés de notre parti partageront leur temps de parole.

Quand je vais faire des courses pour acheter une caisse de pommes, si elles sont à moitié pourries, je n'en acheterai pas toute une caisse. C'est pour ça que je ne peux accepter ce projet de loi. Il contient de bons éléments mais c'est dommage qu'ils soient gâchés par un certain nombre d'aspects carrément mauvais.

(2110)

Je vais dire deux mots des mesures de rechange. Cela aidera peut-être mon ami d'en face, qui est juriste, de comprendre que je suis d'accord avec les juristes qui ont posé la même question que moi dans la revue Law Times. En effet, dans un éditorial du Law Times, on pose la question suivante: «Est-ce que le ministre administre la justice ou est-ce que sa tentative de changement est une autre de ses tentatives manquées dans le domaine de la sociologie appliquée?» Je suis entièrement d'accord avec cet article. Depuis deux ans, le ministre essaie de jouer au sociologue et je pense qu'il ferait mieux de se contenter d'être ministre de la Justice.

Je m'oppose aux mesures de rechange pour les raisons que je viens de mentionner. Je m'oppose à l'idée que nous avons adopté le projet de loi C-37, qui est censé rendre la loi plus sévère à l'égard des jeunes contrevenants, pour qu'ensuite on nous propose ce projet de loi sur la détermination de la peine dans lequel se trouve un article qui dit que les délinquants de 16 et 17 ans qui sont jugés par un tribunal pour adultes doivent tout de même être considérés comme juvéniles au moment de la détermination de la peine. S'ils sont traduits devant un tribunal pour adultes, ils devraient s'attendre aux mêmes peines que les adultes. Même les jeunes dans les écoles pensent que c'est comme ça que ça devrait se passer.

J'aimerais faire une autre brève observation concernant une déclaration du whip du gouvernement que j'ai lue dans le hansard. Il a osé dire que je mettais tous les adolescents dans le même sac parce que j'ai parlé de voyous de 16 et 17 ans. Je ne nie pas en avoir parlé, mais je n'accepte pas sa remarque; les 30 ans que j'ai passés dans une école devraient me valoir un peu plus de respect que ça pour le travail que j'y ai fait et pour la façon dont je traitais les élèves.

Je peux affirmer au gouvernement que je passais 95 p. 100 de mon temps avec environ 5 p. 100 des jeunes et que 4 p. 100 recevaient des sanctions et 1 p. 100 avaient des problèmes sérieux. Je ne les traitais pas tous de la même façon. Je n'apprécie pas qu'on me prête ce genre de comportement.

Je vous jure que si je me promenais dans la rue et que je voyais deux personnes en train de se battre, si l'un avait jeté l'autre à terre et était en train de le tabasser, je peux vous garantir que je tenterais de l'arrêter et que je ne demanderais pas si la victime est un homosexuel, un noir ou quelque chose d'autre. Cela ne ferait aucune différence. J'essaierais d'arrêter la bagarre, parce que c'est ainsi que cela doit être. On ne saurait tolérer ce genre de chose.

À entendre certains députés, on pourrait penser que ma réaction serait: «Ah, c'est un homosexuel, et bien continuez». Quelle stupidité. Je m'insurge contre ce genre de remarques et de sous-entendus.

J'ai un beau-frère qui est noir et je l'aime tout autant que n'importe quel beau-frère. Ses enfants sont noirs également. Je les aime beaucoup, ce sont mes neveux et nièces. Je sais ce que c'est que de faire face à des préjugés, car ils en sont parfois victimes. Je sais que cela se produit alors que ce ne devrait jamais être le cas. Si l'on pense une seconde que ce genre de mesure législative va résoudre le problème, on se trompe. Elle ne résoudra rien.

Je voudrais parler d'une chose qui me surprend vraiment. J'aimerais bien savoir combien d'employeurs dans ce pays embauchent du personnel et leur disent: «Vous travaillez pour moi, mais si vous enfreignez la loi, assurez-vous de ne pas aller en prison pour plus de deux ans et je vous garde comme employé.» Cela me paraît pas mal stupide. Ce que nous disons aux contribuables de ce pays c'est que violer la loi n'a guère d'importance dans la mesure où cela ne vous vaut pas plus de deux ans d'incarcération. Vous pouvez garder votre emploi. Par conséquent, si on doit être condamné, il faut s'assurer que ce soit 18 mois seulement. Cependant, c'est un progrès. Nous avons ramené cela de cinq ans à deux ans.

La dernière chose dont je veux parler c'est l'article 718.2. Je ne voulais même pas en parler. Je pense sincèrement que les tribunaux font un excellent travail en ce qui concerne les crimes haineux en ce moment. J'ai vu de nombreux rapports sur les tribunaux qui prouvent qu'ils traitent ces gens efficacement. Ils font un excellent travail dans ce domaine.

Tout ce que je souhaiterais c'est qu'il en soit de même pour toutes les formes d'infractions, de sorte que nous n'ayons pas besoin de nous révolter et de mettre sur pied des groupes de protestation dans tout le pays pour réclamer justice sans l'obtenir.

(2115)

En près de deux ans que je siège ici, je n'ai encore jamais vu passer une mesure législative qui va mettre quelqu'un à l'abri du danger, pas une.

Mme Augustine: Le projet de loi C-68.

M. Thompson: Encore moins. Prenez l'article 718.2. S'ils font bien leur travail, pourquoi faut-il ajouter l'orientation sexuelle alors? C'est une bonne question.

J'ai entendu mon collègue dire tout à l'heure que, si la mention de l'orientation sexuelle est ajoutée, ce sera une première. Je sais que le commissaire aux droits de la personne est d'avis que, si l'ajout de cette mention est adopté dans ce cas-ci, il le sera aussi dans la Loi sur les droits de la personne ainsi que dans la charte et dans bien d'autres documents.

Des voix: Bravo!

M. Thompson: Ils ne demandent pas mieux et ils ne s'en cachent pas. C'est pour cela qu'ils sont contents: c'est ce qu'ils souhaitent.

Je parle à titre personnel; ce que je dis n'a rien à voir avec l'orientation du Parti réformiste. Je veux que tout le monde sache que je n'approuve pas les homosexuels. Je n'approuve pas leur activité. Je ne les condamne pas. Je n'aime pas ce qu'ils font. Je pense que ce qu'ils font est mal, contre nature et absolument immoral. Et 85 à 90 p. 100 des Canadiens partagent mon avis.


13968

Si les députés se donnaient la peine de sonder l'opinion des habitants de chacune de leurs circonscriptions, de lire les pétitions qui aboutissent sur le bureau, ainsi que les lettres qui leur sont envoyées à leur bureau, ils seraient bien forcés de se faire les porte-parole de la population canadienne et de dire: «Non, il n'en sera fait mention dans aucune mesure législative canadienne parce que cela revient à sanctionner l'immoralité». C'est exactement ce que cela fait.

Je m'opposerai toujours, dès qu'on attaquera la bonne vieille unité familiale qui a bâti le Canada. Je refuse qu'on modifie cette unité familiale, notamment au moyen d'un projet de loi comme celui dont nous sommes saisis.

Je suis convaincu qu'ils ont inscrit cet article 718.2 pour pouvoir apporter une modification de ce genre un jour. En conversant avec de simples députés libéraux, j'ai pu constater qu'ils pensent comme moi. Je le sais. Je leur ai parlé personnellement.

Une voix: Vraiment?

M. Thompson: Oui, c'est exact. Je les invite à défendre les valeurs morales et à dénoncer les mauvaises moeurs. Au moment du vote, ce soir, qu'ils se rappellent ce que les Canadiens leur ont dit, qu'ils lisent leur courier, qu'ils pensent aux pétitions; pour une pétition en faveur du projet de loi, il y en a eu au moins dix contre. Ils doivent donc rejeter ce genre de mesure, qui ne doit pas exister au Canada. Je vous prie de vous y opposer. Défendez vos convictions et représentez vraiment les Canadiens.

Une voix: Je n'ai jamais vu une personne aussi bornée.

M. Thompson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je demande que le député qui vient de dire que je suis borné revienne retirer ce qu'il a dit. Il s'agit du député de Hamilton-Ouest.

Le vice-président: Le député de Hamilton-Ouest a-t-il dit que le député était borné?

Des voix: Oui.

Le vice-président: J'aimerais écouter le député de Hamilton-Ouest s'il a la politesse de revenir à la Chambre.

Le député de Hamilton-Ouest a entendu le recours au Règlement et il a peut-être quelque chose à dire.

M. Keyes: Monsieur le Président, j'aurai quelque chose à dire si la présidence retire l'observation selon laquelle je manque de politesse.

(2120)

Le vice-président: Chers collègues, je sais que cette question est très controversée, mais il y a des règles, il y a des mots qui sont antiparlementaires. Si un député en traite un autre de borné et que ce dernier s'en trouve offensé, je crois que le député ayant prononcé le mot devrait avoir l'amabilité de le retirer. Je demande donc au député de Hamilton-Ouest de retirer ce qu'il a dit.

M. Keyes: Monsieur le Président, je répéterai ma remarque. Si le Président se lève et demande au député de Hamilton-Ouest d'avoir la décence de revenir à la Chambre et de s'excuser, alors je dois questionner le Président.

Le vice-président: Le secrétaire d'État aux Affaires parlementaires désire-t-il invoquer le Règlement?

M. Gagliano: Oui, monsieur le Président. En votre qualité de Président, vous avec le droit de faire régner l'ordre ici, mais votre façon de réagir nous porte à croire que vous êtes d'accord et que vous avez pris votre décision, mais sans donner la chance au député de s'exprimer et de dire si oui ou non il a prononcé ce mot. Je pense qu'à titre de Président de la Chambre, vous devez entendre les deux versions des faits avant de prendre une décision.

Le vice-président: Est-ce qu'un autre député veut prendre la parole au sujet du rappel au Règlement? Le leader parlementaire du Parti réformiste.

M. Hermanson: Monsieur le Président, je vois que le député qui a fait ces commentaires est revenu à la Chambre. Monsieur le Président, si j'ai bien compris, vous avez déclaré qu'il serait décent de sa part de revenir à la Chambre et de faire valoir sa version.

Je suis de l'avis du secrétaire d'État aux Affaires parlementaires. Il faut donner au député de Hamilton-Ouest l'occasion de dire si oui ou non il a vraiment employé ce mot. Il a posé le geste approprié et est revenu à la Chambre. Je demande qu'il nous dise maintenant s'il a l'intention de retirer les remarques qu'il a faites à l'égard de mon collègue, le député de Wild Rose.

M. Milliken: Monsieur le Président, je vous prie de vous reporter aux commentaires nos 488, 489, 490 et 492 dans la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne. Le mot «borné» ne paraît nulle part parmi les mots non parlementaires qui y sont énumérés.

M. Adams: Monsieur le Président, je voudrais préciser que je ne sais pas ce qu'a dit le député de Hamilton-Ouest, mais j'ai déjà moi-même utilisé le mot «borné» à l'égard du député d'en face et je l'ai retiré parce qu'il était non parlementaire.

Le vice-président: Je remercie le député de Peterborough de sa politesse envers les autres députés à la Chambre. Est-ce qu'un autre député veut intervenir relativement à ce recours au Règlement? Je donne donc encore une fois la parole au député de Hamilton-Ouest.


13969

M. Keyes: Je suis désolé, monsieur le Président, mais encore une fois pour quelle raison? Je ne saisis pas très bien ce que vous demandez.

Le vice-président: Je demande si le député aurait l'amabilité de retirer le mot «borné» qu'il a utilisé tout à l'heure, il me semble.

M. Keyes: Monsieur le Président, par respect pour la Chambre. . . est-ce que monsieur le Président écoute?

Des voix: Oh, oh!

M. Keyes: Par respect pour la Chambre et par respect pour un collègue de la Chambre, je vais retirer le terme «borné» dont j'ai qualifié le député parce que, moi aussi, je m'exprimais avec passion dans la discussion que j'avais avec lui.

Mais, monsieur le Président, me demander d'avoir la décence de revenir à la Chambre, voilà une remarque de votre part, monsieur, que j'ai eu du mal à digérer.

Le vice-président: Je remercie le député pour son geste.

M. Keyes: Je vous remercie de votre courtoisie.

Le vice-président: Si le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères veut bien poser une question ou formuler une observation.

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais profiter de l'occasion pour féliciter le député de Wild Rose qui est un ancien enseignant comme moi et qui a déclaré à la Chambre ce qu'il ferait s'il était témoin d'un combat de rue, indépendamment de la couleur, de la religion, etc., des belligérants. Je l'en félicite.

À l'instar des autres réformistes qui ont pris part au débat, il s'est plaint de ce que la seule disposition à laquelle les libéraux s'intéressaient était l'article 718.2. La raison pour laquelle nous nous y intéressons, c'est que. . .

M. Hermanson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement parce que j'aimerais savoir si le député intervient dans le cadre du débat ou dans le cadre de la période des questions et observations.

Le vice-président: Le député intervient dans le cadre de la période des questions et observations.

(2125)

M. Flis: Monsieur le Président, la raison pour laquelle nous avons beaucoup parlé de l'article 718.2, c'est parce que c'est le seul point dont parlait le Parti réformiste et que nous essayions de lui faire comprendre que ce n'était pas la seule question dont traitait le projet de loi.

J'attire l'attention du député sur l'article 718. Certains articles m'ont donné du fil à retordre, mais j'ai apprécié l'article 718, qui porte sur l'objectif et les principes de la détermination de la peine, parce que je représente une circonscription où il y a maintenant beaucoup de criminalité. L'article 718 dit ceci:

Le prononcé des peines a pour objectif essentiel de contribuer, parallèlement à d'autres initiatives de prévention du crime, au respect de la loi et au maintien d'une société juste, paisible et sûre par l'infliction de sanctions justes visant un ou plusieurs des objectifs suivants:
a) de dénoncer le comportement illégal;
Malheureusement, il y a des Canadiens qui ont des comportements illégaux. On y dit encore:

b) de dissuader les délinquants, et quiconque, de commettre des infractions;
c) d'isoler, au besoin, les délinquants du reste de la société;
Au cours de la période des questions, le Parti réformiste a insisté sur ce point. Les alinéas 718e) et f) sont particulièrement importants. Le premier dit:

e) d'assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité;
Les juges, jusqu'ici, n'avaient pas de directives à cet égard. Ce projet de loi leur en donne. Si des torts sont causés à une collectivité, le juge en tiendra compte au moment de déterminer la peine. Le délinquant pourrait aider davantage la collectivité en assurant la réparation des torts qu'il a causés qu'en croupissant en prison pendant cinq ans.

Puis le second dit:

f) de susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants, notamment par la reconnaissance du tort qu'ils ont causé aux victimes et à la collectivité.
L'organisation Parkdale Focus Community Watch axe essentiellement son action sur cette question. Elle veut assurer la sécurité des rues et des habitations de la collectivité.

Je voudrais que le député me dise s'il approuve l'objectif et les principes énoncés à l'article 718.

M. Thompson: Monsieur le Président, j'ai siégé, moi aussi, au comité de la justice pendant un certain nombre d'heures pour étudier ce projet de loi. Je le répète, il y a des choses que j'apprécie vraiment dans cette mesure. Je vois d'un très bon oeil certaines des dispositions figurant à l'article 718. Je pense que l'objectif était très louable.

Ce que je ne peux comprendre, c'est la nécessité d'avoir une liste exhaustive. Lorsqu'on établit une liste des facteurs sur lesquels la haine est fondée, on ne peut qu'exclure alors certaines personnes. Je ne vois pas comment on peut l'éviter. De plus, nous avons effectué des recherches là-dessus, et mon collègue a déclaré que les homosexuels étaient troisièmes sur la liste des groupes cibles. Le premier était le racisme et j'ai oublié quel était le second. Des statistiques montrent que les tribunaux traitent très bien ces questions de nos jours.

Le ministre de la Justice a reçu, des commissions de police, une lettre dans laquelle on dit justement cela. Ces commissions s'opposent à tout l'article 718.2, du fait qu'elles tiennent justement compte de critères de ce genre depuis des années. Elles ont toute une jurisprudence ainsi qu'une série de documents là-dessus et accomplissent de l'excellent travail à ce chapitre.


13970

Si elles sont très efficaces, pourquoi le ministre ne prête-t-il pas l'oreille aux commissions de police, comme il l'a fait dans le cadre du projet de loi sur le contrôle des armes à feu et ne supprime-t-il pas cet article? Je dois supposer que c'est à cause de l'inclusion de l'expression «orientation sexuelle». Je ne peux voir pourquoi on insérerait cette notion dans le projet de loi si on n'a pas l'intention de lui donner beaucoup plus de portée. Cela m'inquiète, lorsqu'il s'agit de légaliser l'adoption par des conjoints de même sexe et d'accorder à ces gens des prestations au conjoint. C'est ce qui dérange les Canadiens.

M. Jack Iyerak Anawak (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.):

[Note de l'éditeur: Le député s'exprime en inuktitut]

[Traduction]

Monsieur le Président, je voudrais poser une question très simple au député de Wild Rose. Le député approuverait-il un crime, comme un meurtre ou un acte de discrimination, commis contre une personne homosexuelle en raison de son homosexualité?

(2130)

M. Thompson: Non, monsieur le Président, je n'approuve pas. Je croyais l'avoir dit très clairement. Aucun être humain au Canada ne doit subir un tel traitement, pour quelque raison que ce soit. Je ne suis pas d'accord lorsque des gens disent que ce genre de crime est plus grave en raison des motifs pour lesquels il a été commis.

Les tribunaux sont actuellement saisis de nombreux crimes. Je pense, en particulier, à l'affaire des familles Mahaffy et Fisher qui a bouleversé le pays tout entier. Toute personne au courant de cette affaire a été affectée.

Les députés d'en face le croiront ou non, mais chaque fois qu'une chose semblable survient à un être humain, pour quelque motif que ce soit, j'en suis affecté. Je ne veux pas que des choses semblables se produisent au Canada. Je ne veux pas que mes petits-enfants soient exposés à cette menace et c'est pourquoi je suis ici. Je veux des lois pour lutter contre ces problèmes, mais je ne crois pas que le projet de loi soit efficace, quoi qu'en dise le bouffon de Kingston.

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de prendre aujourd'hui la parole sur le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence.

Il y a dans ce projet de loi un certain nombre d'éléments que je trouve personnellement encourageants. Par exemple, c'est bon de voir que la déclaration de la victime sera autorisée à titre de témoignage, bien que les députés réformistes aient fait savoir que l'obligation qu'elle soit présentée par écrit les inquiétait un peu.

L'une de mes plus grandes préoccupations, cependant, c'est le fait que ce projet de loi consacre encore davantage les divisions entre les Canadiens, comme on peut le voir à l'article 718.2. Ce faisant, il ne fait rien pour rapprocher les Canadiens et renforcer les principes fondamentaux de la justice. Tout ce qu'il fait, c'est de stigmatiser, de classifier et de diviser les Canadiens, et d'alimenter les soupçons.

Au cours du siècle dernier, l'un des plus grands penseurs de tous les temps a proposé une perspective assez radicale de l'histoire et de la société. Qu'on soit d'accord ou non avec ses idées et ses opinions, la plupart des gens s'entendent pour dire que Karl Marx était l'un des grands philosophes de son époque. Ses théories sur l'évolution et les conflits au sein de la société reposent sur un grand principe de base: notre société est constituée de groupes identifiables. Selon le modèle de Marx, les changements se produisent lorsque les groupes se polarisent et entrent en lutte, propriétaires terriens contre paysans, prolétariat contre bourgeoisie ou capitalistes contre communistes. Selon Marx, ces groupes se livrent une lutte sans merci, ce qui entraîne une modification radicale de la société.

De nos jours, la plupart des Canadiens refusent à juste titre de s'identifier aux principes marxistes sur la division de la société et la lutte des classes. Les Canadiens veulent que leur pays soit une terre où tous, riches ou pauvres, hommes ou femmes, puissent aspirer à réaliser leurs rêves et mettre tout en oeuvre pour atteindre leurs objectifs, quels qu'ils soient. Nous voulons un pays sans racisme et sans discrimination, de sorte que, lorsque nous nous regardons les uns les autres, nous voyons uniquement des concitoyens. Paradoxalement, ce sont nos gouvernements, et non les Canadiens, qui cherchent à consacrer et à renforcer les divisions mêmes que les Canadiens essaient d'aplanir.

C'est en 1982 que le gouvernement de Pierre Trudeau a présenté sa controversée charte des droits et libertés. Cette charte ne déclarait pas simplement que la loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous. Elle énonçait les motifs précis de discrimination illicite. Autrement dit, elle exposait les motifs précis aux termes desquels on peut considérer les Canadiens comme égaux ou inégaux.

Au grand étonnement de bien des Canadiens, le paragraphe 15(2) de la Charte accorde à nos gouvernements le pouvoir et l'autorisation de faire de la discrimination. De par son libellé et ses objectifs, la Charte divise délibérément les Canadiens en groupes identifiables, tant devant les tribunaux que devant leurs concitoyens.

Depuis l'adoption de la Charte, les Canadiens d'un bout à l'autre du pays ont lutté contre l'immuabilité de ces divisions dans leur quête pour devenir simplement des Canadiens avant tout, et non des Canadiens-ceci ou des Canadiens-cela, et non des Canadiens divisés. Par exemple, Statistique Canada est devenu extrêmement mécontent, lors du dernier recensement, parce que beaucoup de Canadiens ont refusé de divulguer leur origine ethnique. Ils se considéraient uniquement comme des Canadiens et l'ont dit à Statistique Canada en inscrivant «Canadien» sur le formulaire.

(2135)

Voici le message qu'ils envoyaient: «Nous sommes Canadiens, et non des membres d'un groupe identifiable.» En dépit de cette opposition, Statistique Canada continue de colliger les chiffres, et il ne fait aucun doute que, dans les recensements à venir, il posera encore d'autres questions sur l'origine ethnique.


13971

Il est étrange que le député de Calgary-Centre ait présenté une pétition, lundi dernier, pour demander que Statistique Canada songe à ajouter «Canadien» à sa liste d'origines ethniques. Il y a là un message. Les Canadiens en ont assez des divisions, assez des classifications. Ils veulent la parité. Ils veulent l'égalité.

Cela m'amène au projet de loi C-41 et aux projets de modifications au Code criminel dont nous discutons aujourd'hui. Une bonne partie du débat a tourné autour de l'article 718.2 du projet de loi. Tous les députés ont sans doute reçu de nombreuses lettres les invitant à voter contre le projet de loi en entier à cause de cet article, et plus particulièrement à cause de l'insertion de l'expression «orientation sexuelle».

La semaine dernière, mon collègue, le député de Port Moody-Coquitlan, a tenté de remettre au ministre de la Justice plus de 10 000 lettres de Canadiens qui s'opposent à l'insertion de cette expression. De même, plus de 70 000 Canadiens ont signé leur nom sur plus de 600 pétitions contre cet aspect du projet de loi. Des articles de journaux évaluent à plus de 70 000 le nombre des lettres adressées au ministre contre l'article 718.2.

Ces Canadiens s'opposent à cet article pour un grand nombre de raisons. Certains sont contre pour des raisons fondées sur leurs convictions religieuses ou morales. D'autres sont contre pour des raisons juridiques. Ce qui me préoccupe surtout, c'est que cet article met encore une fois en valeur l'idée qu'il n'existe pas de véritables Canadiens dans le pays, seulement des groupes identifiables qui se trouvent à partager un territoire dans la partie septentrionale du continent.

Je suis d'accord avec le principe fondamental dont s'inspire cet article, à savoir que les auteurs de crimes violents motivés par des préjugés ou de la haine devraient être punis plus sévèrement. Au Canada, après tout, nous sommes contre toutes les formes de violence. Quand nous voyons ce qui se passe au sud de la frontière, nous sommes bouleversés par la criminalité et la brutalité qui sévissent dans beaucoup de villes des États-Unis. N'est-il pas ironique de constater que Washington, la capitale des États-Unis, affiche le taux d'homicide le plus élevé de l'Amérique du Nord? C'est une tragédie que personne de nous ne souhaite voir répétée au nord du 49e parallèle.

Fait plus important, toutefois, nous sommes un peuple qui, dès le début, s'est opposé à la discrimination. Même avant la Confédération, nous sommes volontiers devenus la destination finale des esclaves américains en fuite. Nous avons offert un nouveau foyer et un nouvel avenir à des centaines d'esclaves américains assoiffés de liberté. Depuis, nous avons accueilli des immigrants de tous les coins du monde qui ont voulu profiter de la liberté dont nous jouissions depuis tant d'années. Beaucoup sont venus non seulement pour être libres, mais aussi pour contribuer à l'édification de notre société.

Mes électeurs et moi réprouvons la manière dont le gouvernement s'écarte de ces principes et cherche par ce projet de loi à ancrer des divisions. Le projet de loi explique ce qu'est la discrimination du point de vue du gouvernement fédéral. Dans la liste des motifs, nous trouvons la race, l'origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, le sexe ou l'âge, la déficience mentale ou physique, l'orientation sexuelle ou d'autres facteurs encore.

Comme je l'ai déjà dit, il a beaucoup été question de l'ajout de l'expression «orientation sexuelle». Comme l'ont fait remarquer l'Association du Barreau canadien, l'Association des psychiatres du Canada et le Barreau du Québec, l'absence de définition de cette expression ouvre la possibilité que des pratiques comme la pédophilie soient acceptées dans la loi. Ces associations, je dois le préciser, réclament une définition claire limitant l'extension de l'expression à l'hétérosexualité, l'homosexualité et la bisexualité. Le gouvernement n'a pas répondu directement à cette préoccupation.

Il me semble contradictoire que le gouvernement refuse de définir «orientation sexuelle», mais insiste pour définir et limiter le terme «discrimination». Il semblerait que certaines caractéristiques méritent une plus grande protection que d'autres. Ceux qui seront agressés en raison de caractéristiques autres que les motifs énumérés n'ont pas l'assurance d'être protégés à fond par la loi.

(2140)

Par exemple, cet article s'appliquerait-il à un Canadien qui s'en prendrait aux intellectuels, à l'image de l'Américain qui envoie des lettres piégées à des universitaires? S'appliquerait-il dans les cas où les victimes sont choisies à cause de leur taille, de leur faiblesse, de leur accent ou de toute autre caractéristique qui correspond à cette zone grise sur le plan juridique ou législatif? En fait, nous n'en savons rien.

Je suis heureux de constater qu'un certain nombre de députés reconnaissent cette lacune. Des propositions ont été faites en vue de simplifier cet article et de prévoir de nouvelles mesures qui s'appliqueraient à toutes les infractions motivées par des préjugés ou de la haine. Malheureusement, il semble que le ministre de la Justice tient à apaiser les groupes d'intérêts spéciaux et à préserver intacte la liste des caractéristiques.

En terminant, je dirai que, depuis de nombreuses années, les Canadiens tentent d'aller au-delà des catégories définies par le gouvernement dans l'espoir de former, un jour, un seul peuple. Ce projet de loi va à l'encontre de leur objectif et vise à reconnaître officiellement les catégories dans le but d'apaiser les craintes des groupes d'intérêts spéciaux.

Les Canadiens ont clairement exprimé leur opposition à ces catégories et ont revendiqué la même protection pour tous les citoyens devant la loi. Par conséquent, j'ai l'intention de m'opposer à ce projet de loi lorsque le dernier vote aura lieu et j'encourage d'autres députés à faire de même.

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'ai des observations à faire sur ce qui a été dit au cours du débat de ce soir. Je voudrais comparer cela à des questions et réponses ainsi qu'à une discussion que j'ai trouvée extrêmement intéressantes de deux manières. Cette discussion a eu lieu dans ma circonscription et portait sur ce projet de loi. C'était un dimanche après-midi entre 16 heures et 18 heures environ à la Citadelle de l'Armée du salut à London. Il y a été question de l'article 718.2.


13972

Un aspect fort intéressant de la discussion, c'est toute la désinformation qui s'est faite dans la salle par des gens qui venaient pour une séance d'information et qui s'inquiétaient beaucoup de la moralité publique et de l'évolution des lois au Canada.

Le pasteur de ce groupe est venu me voir à mon bureau de circonscription. Il a dit: «Je suis très inquiet. J'ai l'impression de ne plus pouvoir prêcher sur ce que je veux dans mon église et cela me préoccupe beaucoup.» J'ai répondu: «Vos sermons constituent-ils une infraction criminelle?» Il a répondu: «Bien sûr que non.» Je lui ai dit: «Ne vous en faites pas parce qu'il n'y a pas d'infractions prévues dans ce projet de loi.»

Puis je lui ai demandé: «Y a-t-il autre chose qui vous préoccupe?» Il a dit: «C'est qu'il y a une pente savonneuse. Si vous faites cela, nous finirons par arriver au point où nous perdrons toutes les croyances auxquelles nous tenons beaucoup.» J'ai répondu: «Si cela vous inquiète et si cela inquiète d'autres électeurs, pourquoi est-ce que vous ne m'inviteriez pas sur votre tribune? Organisez la chose et j'irai.»

C'est ce que j'ai fait. J'ai expliqué l'article en détail. J'ai parlé de la teneur du projet de loi, des abus de confiance, qui nous préoccupent tous, ainsi que des crimes qui sont commis dans nos collectivités d'un bout à l'autre du pays. Ce fut une longue discussion. J'ai parlé du libellé de l'article avant les amendements qui y ont été apportés et qui en font un meilleur article, à mon avis. À la fin de la journée, ils étaient convaincus qu'ils n'avaient plus de raison de s'inquiéter.

J'ai offert de me rendre dans d'autres églises de ma circonscription pour expliquer cet article, mais elles n'ont pas accepté mon offre. Cela m'inquiète. Je crois que beaucoup de gens pensent que cet article fait quelque chose qu'il ne fait pas en réalité.

Je veux faire quelques remarques sur un autre point. Lorsque je pratiquais le droit, une partie de mon travail était avec la commission d'examen des cas psychiatriques aux fins du Code criminel en Ontario. Dans le cadre de ces fonctions à temps partiel, j'ai souvent été confrontée à des situations impliquant des pédophiles. Je tiens à dire très clairement que, à mon avis, il n'est absolument pas question de pédophilie dans ce projet de loi. J'ai eu affaire à des pédophiles. Je sais ce que c'est.

(2145)

Ce projet de loi ne sanctionne pas la pédophilie. Comme je l'ai expliqué aux gens de l'Armée du salut ce jour-là à la citadelle, la pédophilie est un crime au Canada. En réalité, la pédophilie est un trouble mental selon le DMS-IV-c'était III lorsque je faisais ce genre de travail. Les hétérosexuels commettent souvent des actes de pédophilie. Cette pratique est plus courante chez les hétérosexuels.

M. Benoit: Comment le savez-vous?

Mme Barnes: Parce que les études psychiatriques nous le démontrent. C'est bien connu.

Monsieur le Président, je vais m'adresser à vous parce qu'il est difficile de faire comprendre à certains députés d'en face qu'il est plus facile de parler calmement aux gens qui se préoccupent des vraies questions en jeu dans ce projet de loi lorsque le niveau de décibels n'est pas trop élevé, de leur expliquer que nous avons un Code criminel et que ce projet de loi n'a rien à voir avec la moralité.

C'est facile de plaisanter. Je suis venue ici en tant qu'avocate pour devenir politicienne. Je suppose que, aux yeux de certaines personnes, j'ai déjà deux prises contre moi. Je ne sais pas ce que serait la troisième. Ce serait peut-être de devenir réformiste.

J'ai probablement pris cinq minutes pour faire mes observations. Je n'ai pas de question à poser au député du troisième parti.

M. Mayfield: Monsieur le Président, l'Association du Barreau canadien, l'Association des psychiatres du Canada, l'Association du barreau du Québec parlent de leur inquiétude d'ouvrir la porte à l'acceptation légale de pratiques comme la pédophilie.

En empruntant cette voie, même si ce n'est pas explicite dans le projet de loi, on donne une orientation, une indication aux tribunaux, lesquels vont déjà plus loin que les législateurs, comme on a pu le voir en Ontario, où les législateurs ont rejeté une mesure que les tribunaux ont réintégrée par la suite. En Alberta, on procède à une remise en question.

Je pense que nous établissons des précédents qui privent le Parlement de son statut de plus haut tribunal du pays.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis très déçu de constater que l'on s'éloigne de plus en plus des questions vraiment pertinentes. Les députés d'en face parlent de créer des distinctions, de conférer des droits spéciaux; ils affirment que le gouvernement décide d'accorder un statut particulier à certaines personnes.

Ce n'est pas le gouvernement ni le ministre qui font cela. Comme je l'ai déjà dit cet après-midi, ce sont les vauriens, les brutes et les criminels qui s'en prennent aux homosexuels et aux lesbiennes. Ils leur confèrent un statut particulier en les pourchassant pour les battre. Ce projet de loi essaye d'inciter le Parlement du Canada à faire quelque chose à ce sujet.

Mes amis d'en face ont tendance à oublier que le projet de loi porte sur la détermination de la peine en droit pénal. Le député de Wild Rose nous dirait que nous fermons les yeux sur l'immoralité, que nous faisons éclater la cellule familiale. Il n'approuve pas l'homosexualité. Nous ne lui en demandons pas tant.

Il est également question de religion. Nous ne lui demandons pas d'approuver toutes les religions pratiquées par les Canadiens. Cela ne relève de la sociologie appliquée mais du droit pénal. Il s'agit de punir les criminels, et je pensais que c'est ce que souhaitaient les réformistes.


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Le vice-président: Les services du greffier me rappellent que le temps de parole du député est écoulé mais je lui donnerai l'occasion de répondre très brièvement.

M. Mayfield: Monsieur le Président, je tiens à répondre parce que j'estime que le ministre a fait une observation pertinente en disant que c'est le projet de loi qui fait l'objet du débat. Comme on l'a déjà fait remarquer, les vauriens sont des vauriens et il faut les traiter de la même manière dans tous les cas.

Je tiens à rappeler au ministre ce qu'a dit l'Association canadienne des policiers, une organisation dont il a fait des louanges, dans le cadre du débat sur le projet de loi C-68:

Le projet de loi C-41 est flou, contradictoire et en grande partie parfaitement inutile. C'est un exemple flagrant de ce qu'un ex-membre libéral du comité de la justice appelait un projet de loi bidon. On le fait passer pour une réforme intelligente en matière de détermination de la peine mais il ne fera que déclencher toute une série de procès entraînant inutilement ou presque, des frais astronomiques.
(2150)

C'est ce qu'a dit cette association à propos du projet de loi, sans tenir compte des différentes catégories qui y sont définies.

M. Boudria: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Certains députés se sont consultés à propos d'une tournure employée dans la version française du projet de loi qui pourrait être remplacée par quelque chose de mieux.

Elle se trouve dans les dispositions du projet de loi concernant le dédommagement, à l'article 738. Je propose par conséquent:

[Français]

Que l'article 138 du projet de loi C-41 soit modifié par substitution aux lignes 40 et 41, page 33, de ce qui suit:
«garde d'enfants, qu'une telle personne a réellement engagé pour demeurer ailleurs. . .»
Je demande le consentement unanime de la Chambre pour effectuer ce changement dans le texte français et je remercie mes collègues du Bloc d'avoir porté à notre attention ce besoin d'améliorer le texte. Il me fait plaisir de soumettre cette amélioration à cette Chambre.

Le vice-président: La Chambre a entendu la motion du whip du gouvernement. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-41. Je félicite le ministre de la Justice d'avoir présenté ce projet de loi à la Chambre.

Je félicite également tous les membres du Comité de la justice qui ont revu ce projet de loi alors que l'attention du public était concentrée sur eux. Je voudrais aussi féliciter mon collègue de Brant pour la précieuse contribution qu'il a faite en proposant un amendement prévoyant un dédommagement pour les victimes de violence familiale. Cette amendement rendra ce projet de loi encore meilleur.

Mon bureau a reçu de nombreuses lettres tant en faveur que contre ce projet de loi. Malheureusement, la majorité des lettres portent sur deux mots à l'intérieur d'un article. Très peu de correspondants parlent de la nécessité de réformer le système de détermination de la peine ou de la nécessité d'inclure un énoncé du but et des principes de la détermination de la peine.

Très peu de personnes ont reconnu que les milieux juridiques avaient généralement réservé un accueil favorable à ce projet de loi. Il est très facile de s'emporter. Nous l'avons vu ce soir à plusieurs reprises. S'en tenir aux faits et à la logique demande plus d'habileté que de courage. J'appuie ce projet de loi plus plusieurs raisons, mais surtout parce que notre système judiciaire et le Canada en général s'en porteront mieux.

Le projet de loi C-41 est très similaire au projet de loi C-90 qui avait été présenté pendant la législature précédente. Le projet de loi C-90 est mort au Feuilleton quand la première ministre, Mme Campbell, a déclenché les dernières élections fédérales.

En fait, toute la question de la réforme du système de détermination de la peine a été pendant des années le sujet d'étude des gouvernements libéraux et conservateurs. Le projet dont nous sommes saisis prend ses origines dans un document sur la détermination de la peine publié en 1984.

Nous devrions sans doute offrir nos excuses à nos collègues d'antan, qui ont milité en faveur d'une réforme de la détermination de la peine, d'avoir laissé traîner les choses si longtemps.

La version libérale de la réforme de la détermination de la peine contient une différence importante par rapport à la version précédente. Cette différence, que j'expliquerai en détail plus tard, figure dans le livre rouge publié par le Parti libéral pendant la dernière campagne électorale et les candidats libéraux, d'un bout à l'autre du pays, moi y compris, étaient prêts à défendre cette politique pendant toute la campagne.

Je me demande pourquoi les députés de l'opposition qui s'y sont si violemment opposés maintenant n'ont pas exercé des pressions sur leur parti pour en faire un cheval de bataille pendant la campagne électorale.

Il y a trois aspects du projet de loi que j'aimerais aborder. Le premier a trait au fait qu'il propose d'ajouter une déclaration de l'objectif et des principes de la détermination de la peine dans le Code criminel. Notre rôle en la matière s'est largement limité à fixer des peines maximales en fonction des délits, sans nous préoccuper des objectifs de principe du processus de détermination de la peine.

Il semblerait que nous ayons mis la charrue avant les boeufs. Il est juste et normal qu'avant de mettre en place une procédure de détermination de la peine, nous énoncions les principes qui ont guidé le Parlement dans son choix d'un système de détermination de la peine. La déclaration d'objectifs et de principes qui figure dans ce projet de loi décrit les objectifs du prononcé des


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peines comme suit: favoriser la réinsertion sociale des délinquants et les aider à devenir des citoyens respectueux des lois; isoler, au besoin, les délinquants du reste de la société; assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la société; susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants, notamment par la reconnaissance du tort qu'ils ont causé aux victimes et à la collectivité; dénoncer le comportement illégal; dissuader les délinquants, et quiconque, de commettre des infractions.

(2155)

À l'avenir, lorsque le gouvernement ou même un député proposeront un projet de loi dans lequel il est question de peine au criminel, nous pourrons en juger en fonction des principes directeurs énoncés dans le projet de loi C-41. De même, les tribunaux criminels du Canada pourront suivre les mêmes principes plutôt que des séries de pratiques et de principes de détermination des peines différentes d'une province à l'autre, comme c'est le cas maintenant.

La deuxième partie du projet de loi dont je veux parler traite des changements à la libération conditionnelle ou aux audiences en application de l'article 745. Actuellement, le Code criminel autorise la lecture des déclarations de la victime seulement au moment des audiences pour la détermination de la peine. Ce projet de loi permettrait que les déclarations de la victime soient lues aux audiences en vertu de l'article 745, permettant ainsi à la victime de faire connaître le tort causé par le contrevenant.

Je devrais dire en préambule que j'ai été heureux d'appuyer le projet de loi C-226, présenté par le député de York Sud-Weston, lorsqu'il est venu en deuxième lecture à la Chambre des communes. Il serait intéressant de savoir quelles seront les recommandations du Comité de la justice lorsque ce projet de loi reviendra à la Chambre dans un avenir prochain.

Je préférerais que l'article 745 soit abrogé. Si ce n'est pas possible, alors les amendements proposés dans le présent projet de loi seraient mon deuxième choix. Les victimes doivent avoir leur mot à dire dans la façon dont le crime a influé sur leur vie. La libération conditionnelle, si elle demeure dans notre système de justice criminelle, devrait être une rareté, accordée seulement aux détenus qui prouvent qu'il est peu probable qu'ils commettent le même crime à nouveau et qui ont servi une partie suffisante de leur peine.

Je ne veux pas voir un Clifford Olsen libéré après une audience en vertu de l'article 745. Je pense qu'il serait encore moins probable qu'il soit libéré si les familles de ses victimes étaient en mesure de témoigner aux audiences. Dans cette Chambre, nous parlons souvent avec éloquence de la nécessité de reconnaître les droits des victimes. Ce projet de loi traite de cette question. Tous les députés devraient applaudir le gouvernement d'avoir pris cette mesure nécessaire.

Le troisième sujet dont je veux parler est celui des peines pour les crimes motivés par la haine. Je m'inquiète lorsque la haine amène des gens à commettre un crime. Nous voyons trop de crimes motivés par la haine ou les préjugés. Dans notre pays, nous avons vu des gens faire de la propagande haineuse et prêcher leurs faussetés dans nos écoles, nos rues et nos lieux de travail. Il y a moins de deux ans, des tenants de la suprématie des blancs ont manifesté sur la colline du Parlement pour crier au monde entier toute la haine qu'ils ressentaient à l'égard des gens différents d'eux par leur race, leur religion, leur handicap physique ou leur orientation sexuelle.

Après l'adoption de ce projet de loi, un juge prononçant une peine tiendra compte des circonstances aggravantes pour déterminer cette peine. Ceci ne s'appliquera qu'après la déclaration de culpabilité. Ainsi, le juge prononçant la peine pourra donner une punition signifiant clairement à tous les groupes propagateurs de haine et aux adeptes d'une idéologie haineuse que leurs actions ne seront pas tolérées au sein de la société canadienne. Je félicite le gouvernement d'avoir inclus cet article dans le projet de loi. Si nous pouvons garder plus longtemps en prison les gens coupables de crimes haineux, notre société s'en portera mieux.

Malheureusement, la discrimination a toujours existé, depuis les débuts de l'histoire du Canada. Il suffit de penser à notre comportement inhumain à l'égard des autochtones, ou des citoyens d'ascendance ou d'origine japonaise durant la Seconde Guerre mondiale. Il y a 80 ans à peine, les femmes n'avaient pas le droit de voter au Canada, parce qu'on ne les considérait pas comme des personnes.

J'ai pris le temps de lire le débat sur le vote des femmes, qui a eu lieu en 1918. Les députés affirmaient qu'il était contraire à la loi naturelle d'accorder le droit de vote aux femmes. Ici-même, dans cette enceinte, les députés ont déclaré que les femmes ne voulaient pas voter. Nous savons maintenant qu'ils avaient tort. Nous réalisons tous l'importance du rôle des femmes dans notre société et leur rôle précieux en cette Chambre des communes. Il nous semble ridicule aujourd'hui que quelqu'un ait déclaré un jour qu'il était contraire à la loi naturelle d'accorder le droit de vote aux femmes.

(2200)

Il y a des gens qui croient que c'est contraire à la loi naturelle de protéger un segment de notre société par le truchement de ce projet de loi. Il est tout à fait possible qu'il y ait ici même des députés qui estiment qu'on devrait refuser cette protection au groupe en question. Avec tout le respect que je leur dois, je dois exprimer mon désaccord. Lorsqu'il peut être établi qu'un groupe au sein de notre société est victime de discrimination, la loi devrait intervenir pour assurer sa protection. Quelqu'un ici peut-il affirmer qu'il n'y a pas de tabassage d'homosexuels au Canada?

J'ai entendu l'argument voulant qu'on ne peut identifier l'orientation sexuelle de quelqu'un simplement en le regardant. C'est aussi mon avis. Allons-nous demander aux gens de nier ce qu'ils sont? On peut dire aussi qu'il est impossible d'identifier la religion d'une personne simplement en la regardant. Et pourtant des groupes religieux ont été de tous temps persécutés. Je le répète, il serait humiliant et on aurait tort de conseiller à des citoyens de nier leurs différences pour ne pas être persécutés. C'est plutôt au gouvernement d'intervenir pour que tous ces groupes. . .

Le vice-président: Désolé, mais je dois interrompre le député parce qu'il partage son temps de parole, je crois, avec la députée de Burlington. Si c'est bien le cas, nous passons aux questions et observations.


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M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, justice différée est justice refusée. Cette mesure législative donnera lieu à des procès plus longs, plus complexes et plus coûteux.

Certains de mes amis qui sont à la GRC m'ont dit qu'ils étaient choqués parce qu'ils travaillent très fort et que, pourtant, les tribunaux ne rendent pas la justice, souvent en raison de formalités de procédure. Pourquoi ne pas présenter une mesure législative qui mettrait fin à certaines des échappatoires au lieu d'en créer d'autres, comme le fait cette mesure législative?

Les mêmes libéraux, à qui l'on doit la Loi sur les jeunes contrevenants, nous présentent aujourd'hui la justice sous une autre forme. Je me demande si nous allons avoir des rassemblements au sujet du projet de loi C-41 dans quelques années.

Le fait de diviser les personnes en groupes accroît-il les préjugés ou les diminue-t-il? Si je n'appartiens pas à un groupe identifiable, qu'arrive-t-il si une personne me déteste pour une raison autre que la particularité physique, mentale ou comportementale qui caractérise l'appartenance à un groupe? Pourquoi faut-il que la haine entre dans une certaine catégorie définie par un libéral pour recevoir plus de considération qu'une haine fondée sur d'autres motifs?

M. Finlay: Monsieur le Président, je pense que les gens se divisent eux-mêmes en groupes, de façon très naturelle. C'est ce qu'ils font depuis des millénaires. Je ne pense pas que nous puissions empêcher ce phénomène.

La société dans laquelle je veux vivre et dans laquelle je veux que mes petits-enfants vivent se base sur l'amour, la compréhension et l'acceptation des personnes comme elles sont. Je veux que les personnes qui passent de la haine au crime soient sévèrement punies.

J'exhorte tous les députés de la Chambre à voter en faveur de ce projet de loi. Cela a déjà trop tardé.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, on a dit, à la Chambre, que les libéraux voulaient faire adopter cette mesure législative pour que les tribunaux ou les juges soient obligés de déterminer les peines d'une certaine façon. Les députés de ce côté-ci de la Chambre ont dit que les juges avaient déjà une certaine souplesse dans la façon d'appliquer les lois et de déterminer les peines. Cela m'amène à penser qu'il y a un manque de confiance dans les juges de notre pays. Le député pourrait-il me dire pourquoi?

M. Finlay: Monsieur le Président, compte tenu de tout ce que j'ai entendu à la Chambre aujourd'hui, il est évident que le député a posé sa question à l'envers. Nous faisons confiance aux juges, mais tout ce que nous avons entendu, c'est qu'ils ne font pas ceci ou cela, qu'ils libèrent les criminels trop tôt, ou encore qu'ils n'imposent pas de peines assez sévères pour ceci ou cela.

(2205)

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'intervenir ce soir pour parler du projet de loi C-41. Il est important. Il donne l'exemple en établissant des normes d'équité et d'égalité pour tous les Canadiens dans notre système de justice pénale.

Il se peut qu'à cause de la campagne ou de la croisade de la députée de Central Nova nous soyons passés à côté de certains des principes qui sous-tendent ce projet de loi. Nous avons oublié qu'on codifie les principes régissant la détermination de la peine, qu'on donne une portée juridique aux déclarations des victimes et qu'on apporte des modifications qui vont aider à rétablir l'équilibre dans les cas de violence familiale.

L'été dernier, j'ai rencontré des avocats de ma collectivité et au cours des douze derniers mois, je me suis entretenue avec de nombreuses personnes de Burlington au sujet du projet de loi. Ces gens arrivent à la conclusion que les profanes s'intéressent de plus en plus à la loi et que nous devons donc établir clairement les objectifs et les principes en matière de détermination de la peine. Ce projet de loi codifie clairement ces principes.

Les peines doivent servir à dénoncer le comportement illégal, à dissuader les délinquants de commettre des infractions, à favoriser leur réinsertion sociale, à susciter la conscience de leurs responsabilités, ainsi qu'à assurer la réparation des torts causés aux victimes et à leur famille, en plus d'amener les délinquants à reconnaître les torts qu'ils ont causés.

Ce projet de loi servira à s'assurer que moins de Canadiens seront emprisonnés pour non-paiement d'amendes, amendes qui, dans bien des cas, étaient beaucoup trop élevées pour les moyens des délinquants.

L'article 718 donne une portée juridique aux déclarations des victimes. Les groupes de défense des victimes, comme l'association «Les Canadiens contre la violence partout recommandant sa révocation», appuient depuis longtemps cet article.

Une initiative remarquable vient des députés ministériels de l'arrière-ban et plus particulièrement, d'une députée membre du caucus des femmes libérales. Il s'agit d'une modification à l'article 738 portant sur le dédommagement. Je suis heureuse qu'à la suite de l'adoption par le gouvernement de l'amendement que la députée de Brant a proposé, on tienne beaucoup plus compte des répercussions de la violence familiale au moment de prendre des ordonnances de dédommagement. Lorsqu'elle a déposé son amendement, ma collègue a déclaré que les victimes de violence familiale ne devraient pas être confrontées à des problèmes financiers en plus des troubles évidents, sur les plans physique et émotif, qui découlent d'une situation de ce genre.

L'article 738 amendé donnera aux juges le pouvoir d'ordonner le versement d'un dédommagement aux femmes battues qui sont forcées de quitter le domicile conjugal. Cela couvrira des coûts comme le logement temporaire, l'alimentation, la garde des enfants et le transport, qu'une femme doit supporter à la suite d'un crime de ce genre.

Pour ce qui est de l'article 718.2, qui traite des crimes haineux, le débat sur ce sujet a mis en lumière les profonds sentiments de haine qu'on retrouve au Canada, et c'est tout à fait regrettable. Je pense que l'appui que le projet de loi a reçu de la part de nombreuses églises et de nombreux Canadiens reflète bien la valeur réelle des Canadiens. Même si nous aimons croire que nous sommes une société tolérante et modérée, il est extrêmement pénible de constater que nous avons, au Canada, des groupes actifs dont l'idéologie est basée sur la haine des autres.


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Les groupes que nous connaissons tous, comme Aryan Nation, Heritage Front, Church of the Creator et le Aryan Resistance Movement recrutent activement des membres au Canada, à l'heure actuelle, et ils ciblent plus particulièrement les jeunes. Il y a plus de 40 groupes haineux organisés au Canada. Ils utilisent des techniques qu'ils ont perfectionnées aux États-Unis et se servent du réseau Internet aux fins les plus basses.

En 1993, des jeunes ont été accusés, à Montréal, d'avoir battu un homme. Ils ont reconnu qu'ils participaient à une activité appelée «le jeu» consistant à trouver des homosexuels et à les battre.

Partout au pays, la police met sur pied des brigades du crime chargées spécifiquement des crimes haineux, pour répondre aux besoins et mettre fin à la violence. Les services de police créent ces unités non pas parce qu'ils approuvent le mode de vie des gais ou parce qu'ils veulent promouvoir l'homosexualité, mais parce qu'ils se rendent compte, dans l'exercice de leurs fonctions, que la violence est endémique. Or, leur travail consiste justement à protéger la collectivité et à assurer la sécurité de tous ses habitants, et surtout des membres des groupes les plus susceptibles d'être victimes de la haine.

L'organisation B'nai Brith nous a appris que, en 1993, on avait dénombré 256 incidents antisémites consistant en du harcèlement et du vandalisme. Cela représente une hausse de 31 p. 100 par rapport à 1992, et c'est le plus grand nombre d'incidents jamais enregistré depuis 12 ans que B'nai Brith tient ces statistiques.

Dans Ottawa-Carleton, on a dénombré 387 crimes motivés par la haine au cours des deux dernières années. On a porté 105 accusations. Le racisme a causé 215 incidents, la religion, 110, et l'orientation sexuelle, 45. Nous devons prendre tous les moyens-la sensibilisation, l'action communautaire et les coalitions interculturelles. Nous devons utiliser toutes ces techniques, là où il faut s'attaquer aux crimes fondés sur la haine, là où on peut faire une différence, et aussi dans la loi.

(2210)

Ce projet de loi a à deux objectifs: faire savoir aux collectivités victimes de persécution que toute forme de violence contre un groupe ou une personne est inacceptable et que nos lois nous donnent les moyens d'y voir; encourager les victimes à déclarer les incidents, afin que la police puisse avoir une bonne idée de l'ampleur du problème et prendre des mesures appropriées pour sensibiliser les gens et décourager cette haine.

L'organisation B'nai Brith a aussi déclaré au comité que les crimes haineux n'ont rien à voir avec les agressions ayant le vol pour mobile. Les crimes haineux visent non seulement la victime elle-même mais tous ceux qui ont la même couleur de peau, parlent la même langue ou pratiquent la même religion. Ces actes visent à violer, intimider ou isoler. Ils visent non seulement la victime mais l'ensemble du groupe.

Lorsque qu'une pierre à laquelle est attachée une menace d'attaque à la bombe est lancée en pleine nuit dans la fenêtre d'une maison simplement parce que son occupant est musulman, tous les coreligionnaires de la victime dans le quartier sont terrorisés. Le but de ceux qui répandent la haine est justement de terroriser une communauté tout entière. Lorsque des survivants de l'holocauste qui se croyaient en sécurité dans leur communauté au Canada aperçoivent un svastika peint sur leur synagogue, les membres de toute la communauté prennent peur.

Les députés réformistes doivent se souvenir que lorsque des groupes haineux s'en prennent à des minorités, ils le font dans l'intention de les isoler du reste de la collectivité. Une fois isolées, ces minorités deviennent des cibles plus faciles à attaquer. Une fois qu'ils ont pris une minorité pour cible, ces groupes ne s'arrêtent pas là. Ils trouvent de nouvelles cibles. Ils s'en prennent aux juifs, puis aux gais et continuent d'étendre leur sphère d'activité.

Les dirigeants de communautés et les autorités publiques qui, par leur indifférence personnelle ou collective, n'interviennent pas pour punir ou contrôler les actes de violence motivés par la haine ou la propagande haineuse laissent tout simplement la discrimination et la violence fondées sur la haine devenir des comportements acceptables et la norme dans les contacts. À la page 81 du livre rouge, les libéraux prônent l'égalité pour tous les Canadiens et déclarent qu'ils doivent vivre à l'abri de la haine et du harcèlement.

La liste des caractéristiques contenue à l'article 718.2 détermine les groupes, les personnes qui sont le plus souvent la cible d'actes haineux, selon les renseignements fournis par le ministère de la Justice. Cet article ne confère pas de droits particuliers à un groupe donné parce que tous les Canadiens sont visés individuellement par cette liste.

Nous avons tous un sexe, une race, une nationalité, une religion et, oui, une orientation sexuelle. Lorsque certains disent qu'en insérant l'expression «orientation sexuelle» dans le projet de loi C-41, particulièrement dans cet article, on encourage un certain mode de vie, c'est comme s'ils disaient que, parce que nous y avons inséré le terme «religion», nous encourageons les gens à devenir catholiques, ou parce que nous y avons inséré le mot «sexe», nous encourageons les députés de la Chambre à changer de sexe.

Rappelons-nous que le projet de loi C-41 s'applique lorsqu'un crime a été commis. L'article proposé n'entre pleinement en vigueur qu'une fois qu'une condamnation au criminel a été enregistrée. Le projet de loi ne crée pas de nouveaux crimes. Il demande uniquement aux juges, si le crime a été motivé par de la haine, de considérer qu'il s'agit là d'une circonstance aggravante.

Je cite Martim Niëmoller, le théologien allemand, qui a dit: «Lorsque Hitler s'est attaqué aux juifs, je n'étais pas en cause, car je n'étais pas juif. Lorsqu'il s'est attaqué aux catholiques, je n'étais pas en cause, car je n'étais pas catholique. Lorsqu'il s'est attaqué aux syndicats et aux industriels, je n'étais pas en cause, car je n'étais pas membre des syndicats. Puis, il s'est attaqué à moi et à l'Église protestante, mais il ne restait plus personne pour se soucier de moi.»

Dans l'intérêt de tous les Canadiens, de tous les enfants du Canada, au nom des valeurs d'équité et de justice qui m'ont été inculquées, ainsi qu'à ma famille et dans mon Église, j'encourage les députés à adopter le projet de loi C-41 le plus tôt possible.

(2215)

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, ce que j'entends me trouble profondément. La dernière intervenante, et j'ai entendu les trois derniers intervenants, a laissé entendre que s'opposer au projet de loi, c'est


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prendre position en faveur des crimes haineux, les crimes passionnels, et quoi encore. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas ce que fait le Parti réformiste.

Le problème, c'est que ce que l'on nous demande suppose que l'on empiète gravement sur les droits les plus fondamentaux qui existent dans une démocratie. Certains pays se sont dotés, dans leur constitution, de moyens de limiter la capacité du gouvernement d'adopter des mesures qui restreignent la liberté d'expression. C'est une affaire de liberté d'expression que de pouvoir dire ce que l'on a à dire. On ne peut pas supprimer cette liberté sans s'engager sur le terrain extrêmement glissant de la destruction de la démocratie.

C'est quand les gens passent des paroles aux actes et se livrent à des actes de violence qu'il faut leur tomber dessus à bras raccourcis et les punir, pas quand ils ne font qu'exprimer leur opinion. Où faut-il fixer la limite?

Il y a des parlements et des assemblées législatives de par le monde, des personnes autrement plus arrogantes que les personnes qui ont pris la parole ce soir, qui prétendent connaître la solution à tous les maux de l'humanité: le bâillon.

Les fondateurs des États-Unis estimaient qu'il s'agissait d'un des plus graves dangers que courait la démocratie. Personne n'approuve ces crimes, mais ce dont il est question ici, et je l'ai entendu, c'est de recours à la coercition idéologique et à la limitation de la liberté d'expression, ce qui nous mènera tout droit à la perte de notre liberté. Voilà pourquoi je voterai contre ce projet de loi.

Mme Torsney: Monsieur le Président, il est toujours navrant de se rendre compte, après avoir débattu d'un projet de loi durant de longues heures à la Chambre, que nos collègues ne savent même pas sur quel projet de loi porte le débat.

Le projet de loi C-41 est un projet de loi sur la détermination de la peine. Les mesures qu'il contient ne s'appliquent que si un crime est commis. Il faut qu'une personne soit agressée avant que le juge détermine la peine. C'est le point de départ de ce projet de loi.

Une attention particulière est accordée aux infractions motivées par la haine. C'est un moyen parmi tant d'autres que nous pouvons utiliser, en tant que leaders de notre communauté. Je prierais le député de ne pas rester indifférent devant les crimes haineux et de mettre toutes les chances de notre côté en votant pour ce projet de loi. C'est important pour tous les Canadiens qui tiennent à la liberté d'expression. L'enjeu, ce n'est pas la liberté d'expression, mais les gens qui laissent leur haine se manifester par des actes de violence. Quand il y a eu agression, alors ces facteurs entrent en ligne de compte.

J'en ai assez d'entendre dire, à ce stade-ci du débat, qu'on vient juste de se rendre compte qu'il s'agit d'un projet de loi sur la détermination de la peine. Nous ferions peut-être tous mieux de faire un effort de lecture.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je félicite la députée qui vient de parler de son engagement envers l'équité et la justice.

Dans un numéro récent du journal des étudiants de l'Université Carleton d'Ottawa, il y avait une bande dessinée dont une vignette montrait une femme qui brandissait un gros couteau de chasse en souriant et qui demandait à d'autres femmes si leur vie serait plus facile si elle amputait tous les pénis. Sur une autre vignette, elle tenait une hache dégoulinante au dessus de la légende «non coupable».

Je voudrais savoir comment la députée peut appuyer un projet de loi qui considérerait la haine plus grave si elle est dirigée contre un groupe plutôt qu'un autre. Le groupe visé dans la bande dessinée n'est pas mentionné dans le projet de loi C-41.

Mme Torsney: Monsieur le Président, c'est peut-être la raison la plus importante qui explique qu'il n'y ait pas de définition des expressions sexe, orientation sexuelle, race ou religion; c'est que les hommes sont du sexe masculin.

(2220)

Si une femme attaque un homme parce qu'il est homme, on pourra invoquer le projet de loi pour considérer qu'il s'agit d'une circonstance aggravante.

Si un groupe d'homosexuels attaquent une personne parce qu'elle est hétérosexuelle, la personne peut invoquer cet article du projet de loi pour qu'une peine plus rigoureuse leur soit infligée.

Si on vous attaquait sous prétexte qu'on a pensé que vous étiez un témoin de Jéhovah-comme c'est malheureusement arrivé souvent au Canada-, qu'on a tiré cette déduction du fait que vous portiez un complet et une serviette, comme bon nombre d'entre nous avons fait pendant la campagne électorale, l'avocat aurait recours à cet article pour demander une sentence plus rigoureuse. Toutes les personnes présentant les caractéristiques mentionnées sont exposées à des crimes motivés par la haine au Canada.

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer moi aussi au débat.

Le débat a porté en grande partie sur l'élément orientation sexuelle de l'article 718.2. J'ai reçu moi aussi une forte réaction des gens de ma circonscription et de partout au Canada à ce sujet. Ils s'inquiètent surtout de voir que cette expression n'est pas définie et qu'on ne peut prévoir les conséquences que peut avoir son insertion dans le projet de loi.

On a exposé longuement les arguments contre l'inclusion de cette expression. Je voudrais surtout parler des répercussions que pourrait avoir le fait d'imposer des peines plus sévères pour certains crimes que pour d'autres. Dans le projet de loi, il s'agit des crimes motivés par la haine, qui est une réaction émotive ou humaine.

Un autre aspect que je trouve préoccupant, c'est la catégorisation des conditions. Je ne pense vraiment pas qu'il faille que j'appartienne à quelque religion ou à quelque catégorie que ce soit. Si quelqu'un m'agresse, la loi devrait me reconnaître le droit de faire punir ce crime.


13978

Je voudrais également voir pourquoi nous avons tant de difficulté avec la criminalité au Canada. Nous reconnaissons tous que nous avons un problème de criminalité et que nous avons divers groupes qui nous rendent la vie très difficile. Je voudrais essayer de comprendre ce qui s'est passé. Qu'est-il arrivé à notre système de justice pour renverser ainsi la situation?

Cela m'amène à un concept philosophique. Nous assistons depuis une trentaine d'années à une érosion graduelle du concept de droit. En philosophie morale, il existe deux façons opposées d'envisager une situation. Une école de pensée est représentée par le philosophe allemand Emmanuel Kant, dans son Fondement de la métaphysique des moeurs. Kant soutenait que les actions devaient se fonder sur l'intention de la personne accomplissant l'action et non sur ses conséquences. Kant lui-même disait: «Une action faite par devoir trouve sa valeur morale ou son jugement non dans la fin qu'elle se propose d'atteindre, mais dans la maxime d'après laquelle elle est déterminée.» Il y a là encore implication d'intention. Il se trouve à dire au fond que le résultat de ce que l'on fait n'importe pas vraiment; ce qui importe, c'est la raison pour laquelle on le fait.

Le point de vue opposé est présenté par John Stuart Mill dans son ouvrage sur L'utilitarisme, où il soutenait que les actions de l'individu devraient être fondées sur les conséquences de l'action. Il se préoccupait davantage des conséquences des actions de l'individu que de l'intention qui les motivait.

(2225)

Il est facile de comprendre cette idée. Prenons l'exemple d'une personne qui en frappe une autre. Kant voudrait savoir pourquoi cette personne a frappé, ce qui a motivé son geste. Mills attirerait l'attention sur le fait que la personne a effectivement frappé une autre et que c'est ça le délit.

Qu'est-ce que cela a à voir avec le projet de loi à l'étude? Je suis fermement convaincue que le système de justice canadien a changé et que, au lieu de s'occuper des actes et des conséquences de ces actes, nous essayons de considérer les intentions et de nous comporter au tribunal comme des psychologues ou des psychiatres.

Nous nous sommes heurtés aussi à d'autres problèmes qui pourraient bien avoir un rapport avec cette réorientation philosophique dans la conception de notre système de justice. Nous disons par exemple que les criminels obtiennent plus de droits que les victimes. Cela se rapproche de mon argument: nous nous soucions davantage des motivations et nous négligeons la victime.

Un certain nombre de choses se sont produites dans notre système qui me portent à croire qu'il y a eu un net changement de nature philosophique dans notre société et que nous sommes passés des conceptions de Mill à celles de Kant et insistons de plus en plus sur les motivations.

Pour moi, cette érosion a débuté lorsque nous avons commencé à considérer l'état d'esprit ou la maladie mentale, dans les cas de crimes dont les auteurs étaient des malades mentaux. Nous avons eu tendance à leur pardonner leur crime jusqu'à un certain point parce qu'ils ne savaient pas ce qu'ils faisaient. De là, peu à peu, nous en sommes venus à nous interroger sur la toxicomanie. Si je me drogue ou si je bois, par exemple, je peux dire que je ne suis pas responsable de mes actes parce que je suis sous l'effet de la drogue.

Ces préoccupations au sujet de la motivation semblent prendre des proportions inouïes. Mais en fait, peu importe au fond l'état émotionnel: quand on tue une personne, cette personne est morte, un point c'est tout.

Nous devons essayer de faire en sorte que les personnes qui ont besoin d'aide, qui peuvent nuire aux autres ou se causer du tort à eux-mêmes puissent être prises en charge avant de se retrouver devant les tribunaux, de manière à éviter ce genre de problème.

Le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 299)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Allmand
Anawak
Anderson
Assad
Assadourian
Augustine
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bevilacqua
Bhaduria
Bodnar
Bonin
Bouchard
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélanger
Bélisle
Caccia
Campbell
Cannis
Caron
Catterall
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Clancy
Cohen
Collenette
Comuzzi
Cowling
Crête
Culbert
Daviault
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Dubé
Duceppe


13979

Duhamel
Dumas
Easter
Eggleton
English
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Gerrard
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Guay
Harb
Hopkins
Hubbard
Ianno
Jackson
Jacob
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Kraft Sloan
Landry
Langlois
Lastewka
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Lincoln
Loney
Loubier
MacAulay
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Maheu
Maloney
Manley
Marchand
Marchi
Marleau
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Mercier
Mifflin
Milliken
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Ménard
Nault
Nunez
O'Brien
Pagtakhan
Paradis
Parrish
Paré
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pillitteri
Pomerleau
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rock
Rompkey
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Serré
Sheridan
Simmons
Speller
St-Laurent
St. Denis
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Walker
Whelan
Wood
Young
Zed-168

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Benoit
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast)
Cummins
Duncan
Epp
Forseth
Frazer
Gilmour
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hermanson
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Jennings
Johnston
Kerpan
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McTeague
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Ramsay
Ringma
Schmidt
Scott (Skeena)
Silye
Skoke
Solberg
Speaker
Steckle
Stinson
Strahl
Thompson
Wappel
Wayne
Williams-51

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Bachand
Bethel
Brien
Calder
Canuel
Chrétien (Saint-Maurice)
Copps
Crawford
Debien
Deshaies
Dupuy
Easter
Gagnon (Québec)
Guimond
Harper (Churchill)
Hickey
Knutson
Lalonde
Laurin
Martin (LaSalle-Émard)
Mercier
O'Reilly
Ouellet
Plamondon
Rocheleau
Venne

(2250)

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

* * *

LOI SUR LA COMMERCIALISATION DU CN

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-89, Loi prévoyant la prorogation de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada sous le régime de la Loi canadienne sur les sociétés par actions ainsi que l'émission et la vente de ses actions au public, dont un comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: À l'ordre. Je voudrais rendre une décision en ce qui concerne le groupement des motions à l'étape du rapport du projet de loi C-89.

Il y a 16 motions d'amendement inscrites au Feuilleton à l'étape du rapport du projet de loi C-89, Loi prévoyant la prorogation de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada sous le régime de la Loi canadienne sur les sociétés par actions ainsi que l'émission et la vente de ses actions au public.


13980

[Français]

La motion no 16 est identique à une motion que l'on a étudiée et rejetée en comité. En conséquence, conformément à l'article 76(5) du Règlement, elle ne sera pas choisie.

[Traduction]

Les autres motions seront groupés aux fins du débat de la façon suivante: le groupe no 1 comprend les motions nos 1 à 4.

Le groupe no 2 comprend la motion no 5.

[Français]

Groupe no 3: les motions nos 6 à 11.

[Traduction]

Le groupe no 4 comprend les motions nos 12 et 13.

[Français]

Groupe no 5: la motion no 14.

Groupe no 6: la motion no 15.

[Traduction]

Les modalités de mise aux voix des motions de chacun des groupes sont disponibles au bureau. La présidence rappellera à la Chambre les modalités s'appliquant dans chacun des cas au moment du vote.

Je vais mettre à l'étude les motions nos 1 à 4.

MOTIONS D'AMENDEMENT

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.) propose:

Motion no 1
Qu'on modifie le projet de loi C-89 en supprimant l'article 8.
Motion no 2
Qu'on modifie le projet de loi C-89, à l'article 8, par adjonction, après la ligne 22, page 6, de ce qui suit:
«(8) Le présent article cesse d'avoir effet cinq ans après l'entrée en vigueur de la présente loi.»
Motion no 3
Qu'on modifie le projet de loi C-89, à l'article 8, par adjonction, après la ligne 22, page 6, de ce qui suit:
«(8) L'alinéa (1)c) cesse d'avoir effet cinq ans après l'entrée en vigueur de la présente loi.»
[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ) propose:

Motion no 4
Qu'on modifie le projet de loi C-89, à l'article 9, par substitution, à la ligne 29, page 6, de ce qui suit:
«paragraphe 8(1);
c) vendre une filiale du CN ou une partie de ses opérations à moins que le CN et l'acquéreur ne se soient engagés par écrit envers le ministre, selon des conditions qu'il estime satisfaisantes, à prendre des mesures raisonnables pour faire en sorte que la filiale ou la partie vendue des opérations continue pendant une période raisonnable d'être une entreprise viable et à maintenir, en autant que possible, après la vente, les intérêts des employés touchés par celle-ci.
9.1 Pour toute vente visée à l'alinéa 9c), le ministre fait déposer devant les deux Chambres du Parlement le libellé des engagements pris en vertu de cet alinéa.»
[Traduction]

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais dire quelques mots au sujet des amendements que je propose, puis laisser la parole à mes collègues.

Les deux premières motions concernent les restrictions que le gouvernement impose quant à la vente des actions du CN et à l'emplacement de l'administration centrale. Je tiens seulement à signaler à mes collègues bloquistes que cette affaire n'a rien à voir avec le Québec. Peu importe qu'on opte pour Montréal, Toronto, Winnipeg, Vancouver ou pour quelque endroit obscur dont personne n'a jamais entendu parler, une entreprise ne devrait pas être forcée de s'installer dans tel ou tel lieu. Elle devrait être libre de s'installer où elle veut.

Pour ce qui est de la disposition concernant les actions conférant plus de 15 p. 100 des droits de vote, elle me semble restrictive. On nous a dit au comité qu'elle ne réglait rien, mais elle pourrait causer des problèmes à la longue. Par conséquent, j'estime que nous devrions considérer qu'elle constitue une contrainte injustifiée.

La troisième motion prévoit que le gouvernement, s'il ne juge pas bon de supprimer ces restrictions, accepte au moins d'imposer un délai pendant lequel l'entreprise devra s'y soumettre. Il s'agit d'une tentative pour faire adopter une disposition de temporarisation de cinq ans.

La seule observation que je ferai au sujet de la motion no 4 proposée par le Bloc, c'est que je comprends pourquoi il la propose, mais je la trouve un peu trop restrictive en ce qu'elle rend la vente encore plus difficile. Nous estimons qu'il y a de meilleures façons de procéder. Je cède maintenant la parole à mes collègues pour le débat sur ce groupe de motions.

(2300)

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole sur les motions nos 1 à 4 du groupe 1 relatives au projet de loi C-89.

Dans la motion no 1, on demande que soit supprimée la disposition prévoyant que le siège social du CN soit établi de façon permanente à Montréal et que soit supprimée également la restriction à la propriété de plus de 15 p. 100 d'actions du CN.

Dans le marché d'aujourd'hui, il est absurde d'indiquer l'endroit où est fixé en permanence le siège social d'une société; en outre, cela tourne en dérision un projet de loi sérieux. Cette question de la permanence me fait penser à l'histoire d'un homme qui a demandé un emploi à mon employeur précédent. Quand celui-ci lui a offert un emploi, l'homme a demandé si c'était un emploi temporaire ou permanent. La réponse qu'il a reçue, c'est que dans cette entreprise, il n'y avait pas d'emplois permanents. Je suis d'avis qu'un détail semblable ne serait pas exigé dans un


13981

marché libre, et qu'aucune entreprise du secteur privé n'est confrontée aux mêmes restrictions. C'est une question uniquement politique et cette exigence devrait être retirée du projet de loi.

De plus, restreindre le pourcentage d'actions qu'une personne physique, une personne morale ou une association peut détenir n'est pas sensé. Quels sont les encouragements offerts aux nouveaux investisseurs pour adopter un nouveau style de gestion pour revitaliser ce dinosaure? À quelle dernière mode des investisseurs le gouvernement se plie-t-il?

Cette disposition restreint également le meilleur prix que le CN pourrait obtenir sur le marché. Encore une fois, comme l'a dit un investisseur, la restriction de 15 p. 100 limite la transaction. Cette restriction atténue la confiance des investisseurs et évince les investisseurs qui recherchent des entreprises criblées de dettes et en difficulté qui peuvent être restructurées et rentabilisées, produisant ainsi des dividendes et des plus-values. J'appuie la motion no 1.

En ce qui concerne les motions nos 2 et 3 du groupe 1, je suis favorable à l'idée d'ajouter à l'article 8 une limite de cinq ans après laquelle les restrictions relatives au siège social et à la propriété ne s'appliqueraient plus, si la motion no 1 n'est pas adoptée.

La motion no 4 vise à exiger l'approbation parlementaire pour toute offre faite par le secteur privé pour les actifs du CN. Cette disposition est redondante. Si le projet de loi C-89 est adopté, le Parlement aura déjà donné son approbation à la vente du CN. Je n'appuie pas la motion no 4.

Si le gouvernement ne peut pas obtenir une offre intéressante, il aura à en répondre plus tard.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir, malgré l'heure tardive, sur notre quatrième amendement qui se lit comme suit:

Qu'on modifie le projet de loi C-89, à l'article 9, par substitution, à la ligne 29, page 6, de ce qui suit: «paragraphe 8(1);
c) vendre une filiale du CN ou une partie de ses opérations à moins que le CN et l'acquéreur ne se soient engagés par écrit envers le ministre, selon des conditions qu'il estime satisfaisantes, à prendre des mesures raisonnables pour faire en sorte que la filiale ou la partie vendue des opérations continue pendant une période raisonnable d'être une entreprise viable et à maintenir, en autant que possible, après la vente, les intérêts des employés touchés par celle-ci.
9.1 Pour toute vente visée à l'alinéa 9c), le ministre fait déposer devant les deux Chambres du Parlement le libellé des engagements pris en vertu de cet alinéa.»
(2305)

Vous aurez remarqué, à la lecture, que nous avions, comme parti, un objectif principal qui était, malgré la décision du gouvernement libéral de privatiser le CN, le maintien et la préservation des emplois, parce que derrière une privatisation ou un abandon des affaires, on se concentre parfois sur les aspects économiques, mais je pense qu'il est important de se pencher sur les aspects humains vécus par les personnes touchées par des modifications de leurs conditions de travail et même l'abolition de leur poste.

Vous remarquerez que cet amendement a pour but d'accorder un droit à cette Chambre sur les opérations de vente des actifs du CN qui ne sont pas directement reliées au transport ferroviaire.

Si nous, du Bloc québécois, avons pris la décision de déposer cet amendement, il est clair que c'est parce que le ministre des Transports a affirmé à plusieurs reprises qu'il avait l'intention de vendre à la pièce les actifs du CN qui ne sont pas directement reliés au transport ferroviaire. Et l'on sait, pour connaître les opérations du Canadien National, que l'une des plus importantes filiales du CN qui sera vendue, c'est la compagnie AMF Technotransport, située à Pointe-Saint-Charles, à Montréal. On parle de 1 300 emplois, 1 300 travailleurs et travailleuses qui ont vu cette entreprise, l'an dernier, subir des pertes de l'ordre de 35 millions de dollars, malheureusement.

Lorsque le ministre a comparu devant le Comité permanent des transports, il nous a dit qu'il qualifiait l'avenir d'AMF comme étant très précaire et il a refusé, malgré nos questions, de garantir la survie d'AMF. Vous comprendrez que la disparition de cette entreprise aurait des conséquences catastrophiques pour la grande région de Montréal.

Par contre, une entreprise européenne s'est montrée intéressée. On parle alors de la compagnie Alsthom, une entreprise française qui peut, dans ses lettres de noblesse, mentionner qu'elle a contribué fortement à bâtir le TGV en France. Il y a aussi, et j'aimerais la mentionner avec un maillage ou avec une synergie, avec une fierté du fleuron québécois du monde des affaires, la compagnie Bombardier.

Alsthom n'a pas de filiale nord-américaine de construction de matériel ferroviaire. Donc, AMF Technotransport, située à Pointe-Saint-Charles, pourrait facilement devenir sa tête de pont en Amérique du Nord, ce qui engendrerait des retombées très positives pour AMF et pour la grande région de Montréal.

J'aimerais ajouter, avant de terminer, que si l'on donnait la possibilité ou l'on encourageait Alsthom-et c'est le sens de notre amendement-à prendre le contrôle de AMF, je suis persuadé que le Québec serait très bien positionné, lorsqu'un jour sera enfin prise la décision de construire un TGV reliant Québec et Windsor.

N'oublions pas que Alsthom Bombardier détient la licence exclusive pour la construction d'un TGV, d'un train à grande vitesse, en Amérique du Nord.

(2310)

N'oublions pas qu'il y a, pour les 12 prochaines années, environ sept ou huit projets de TGV, ce qui placerait très bien le nouveau consortium Alsthom AMF dans une excellente position pour pouvoir postuler des contrats de construction de matériel roulant pour les projets à venir de TGV aux États-Unis. N'oublions pas que l'on parle de retombées économiques de l'ordre de 200 milliards de dollars. Encore une fois, un constructeur québécois pourrait fort bien réussir dans le domaine de la construction sur le marché mondial.

En terminant, j'aimerais conclure en vous mentionnant que l'amendement vise à assurer que, peu importe l'acheteur, les précautions seront prises pour assurer que AMF soit une entreprise viable et que les emplois des Montréalais et Montréalaises qui y travaillent, et des gens de la grande région de Montréal, soient protégés.


13982

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, nous parlons aujourd'hui de la privatisation de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada.

Bien que les réformistes appuient cette initiative du gouvernement, il reste certains problèmes à régler à propos de ce projet de loi: premièrement, il exige que le siège du CN soit situé en permanence à Montréal et deuxièmement il limite à 15 p. 100 le pourcentage d'actions pouvant être détenues par une seule et même personne.

La dette du CN s'élève actuellement à environ 2,5 milliards de dollars. D'après les représentants de ce secteur, elle doit être ramenée à 1,5 milliard pour obtenir la cote BBB et pour pouvoir vendre. Le ministre a le pouvoir de réduire la dette du CN dans les proportions qu'il veut; il serait donc possible de la ramener à un montant nettement inférieur à celui à partir duquel les contribuables en retiraient quelque chose.

Voyons ce qui se passe dans le cas des sociétés d'État. Dans le rapport de 1982 du vérificateur général, on dit ceci: «Les sociétés d'État ressemblent à un énorme iceberg flottant lentement sur l'Atlantique embrumé, un iceberg silencieux, majestueux et imposant. La population a tendance à n'en voir que les parties supérieures formées de géants comme Petro Canada, Radio-Canada, la Société canadienne d'hypothèques et de logement. La masse de l'iceberg qui se trouve sous la surface est moins spectaculaire, elle est moins susceptible d'attirer l'intérêt public, de recevoir l'attention du Parlement et pourtant elle coûte cher aux contribuables».

Il y a 12 ans que cela a été écrit et rien n'a changé. Dans son rapport annuel au Parlement de 1994, le président du Conseil du Trésor a donné un aperçu de la partie de cet iceberg qui est immergée en énumérant les avoirs du gouvernement du Canada: 48 sociétés d'État mères, 64 filiales en propriété exclusive, cinq entreprises d'économie mixte, trois co-entreprises, 51 autres entités, huit entreprises détenues aux termes de la Loi sur la faillite.

La politique du Parti réformiste en matière de privatisation et d'entreprises indique que nous sommes en faveur de confier la propriété et le contrôle des entreprises au secteur qui peut leur permettre de remplir leur fonction de la façon la plus rentable, en rendant le plus de comptes aux propriétaires et en offrant le moins de risques d'entraîner une dette publique. Nous estimons que c'est, dans la plupart des cas, mais pas nécessairement dans tous, le secteur privé qui réunit ces conditions.

La position libérale que j'ai eu de la difficulté à trouver dans le livre rouge est la suivante: les libéraux disent que depuis une décennie, les petites et moyennes entreprises sont le moteur de l'économie canadienne. Le livre rouge dit que le gouvernement libéral favorisera leur croissance. Le 2 mai, dans le cadre du débat sur le projet de loi C-89, le ministre des Transports a dit qu'il cadrait avec l'intention du gouvernement de faire intervenir le secteur privé dans les secteurs où il est le plus compétent pour accomplir la tâche.

Dans le budget de février, le ministre des Finances a dit ceci: «Notre philosophie est simple: s'il n'est pas nécessaire que le gouvernement fasse quelque chose, il ne devrait pas le faire. Et à l'avenir, il ne le fera pas.»

Passons à l'analyse de la nature du rôle que le gouvernement devrait jouer lorsqu'il s'agit d'opter pour la privatisation ou pour la société d'État. Voici quelques considérations d'ordre général. Le gouvernement devrait se contenter de faire ce qu'il peut faire, à savoir de maintenir la paix, l'ordre et le bon gouvernement. Il devrait réglementer, administrer, adopter des lois, défendre les frontières mais il ne devrait pas intervenir sur le marché pour créer des emplois. Avec les fonds de développement régional, les subventions et les sociétés d'État, le gouvernement provoque des distorsions dans le secteur privé, il crée des emplois temporaires et favorise la concurrence déloyale dans les secteurs industriels. En fait, les pouvoirs publics sont une partie du problème et non la solution.

(2315)

Il existe une grosse différence entre dépenser des capitaux empruntés et dépenser des avoirs propres qui ne doivent pas être remboursés. Le secteur privé comprend la différence et il est temps que les politiciens la comprennent aussi. Le capital de risque motive tandis que les crédits de l'État sont une source de gaspillage.

En guise de conclusion, je dirais que j'estime que dans le monde actuel, le rôle de l'État devrait être de créer un climat et une infrastructure économiques facilitant les investissements et non de faire directement les investissements lui-même. Le secteur privé s'en chargera. Le Parti réformiste adhère au principe du projet de loi C-89 et il est en faveur de la privatisation de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada.

Nous voudrions seulement faire disparaître certains obstacles inhérents au projet de loi, et nous espérons que le gouvernement acceptera nos suggestions.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, je prends la parole pour appuyer la motion no 4, un amendement au projet de loi C-89. Cette motion a été proposée par mon collègue, le député de Beauport-Montmorency-Orléans, et il a pour but de donner un droit à la Chambre sur les opérations de vente des actifs du CN qui ne sont pas directement reliés au transport ferroviaire.

Le ministre a affirmé à plusieurs reprises qu'il avait l'intention de vendre à la pièce les actifs du CN qui ne sont pas directement liés au transport ferroviaire. Une des plus importantes filiale du CN qui sera ainsi vendue est AMF Technotransport, située à Pointe-Saint-Charles à Montréal. Cette entreprise emploie plus de 1 300 travailleurs et a enregistré des pertes de l'ordre de 35 millions de dollars l'année dernière.

Le ministre a qualifié l'avenir d'AMF de précaire lors de sa visite au comité et a refusé de garantir la survie d'AMF. La disparition de cette entreprise aurait des conséquences catastrophiques pour la région de Montréal. Les travailleurs du CN craignent que la privatisation ne leur enlève leur sécurité d'emploi et leur régime de retraite. Et c'est déjà commencé.

Aujourd'hui, nous lisions dans les journaux que l'arbitre vient d'imposer la convention collective et qu'il y a eu recul par rapport à la sécurité d'emploi et dans d'autres domaines. Le syndicat des TCA qui représente environ 12 500 travailleurs du CN a fait des représentations concernant le processus de privatisation. Les travailleurs ont déjà vécu des mauvaises expériences


13983

causées par la privatisation de deux sections du CN: Route Canada et AMF.

Pour ce qui est de Route Canada, les nouveaux propriétaires l'ont achetée et ensuite fermée, provoquant ainsi le licenciement de plus de 2 000 salariés. La société AMF, devenue une filiale du CN, n'a pas reconnu la convention collective. Il a fallu plus d'un an aux tribunaux pour rétablir les droits des travailleurs. Plusieurs syndicats représentent les travailleurs du CN, particulièrement, comme je viens de le dire, le TCA. Dans leur ensemble, les syndicats sont en faveur du maintien du statut de société d'État pour le CN, mais avec une représentation des syndicats au conseil d'administration.

Il faut souligner que ces travailleurs sont très productifs. À la suite de très dures négociations et parfois après de longues grèves, ils ont obtenu des salaires et des conditions de travail acceptables et raisonnables. Cependant, la direction du CN a obtenu et continue d'exiger des concessions de la part des syndicats, notamment au niveau de la sécurité d'emploi. Cet acquis, qui ne couvre qu'une partie des salariés, a été obtenu en échange d'autres concessions.

(2320)

Donc, les syndicats s'inquiètent de l'avenir, car ces dernières années, il y a eu des suppressions massives d'emplois. D'autre part, les postes de cadre n'ont pas été touchés de façon équivalente.

Il est urgent, à mon avis, d'améliorer le climat des relations de travail au sein du CN et cette tâche incombe particulièrement à la direction de cette société. Les syndicats et les travailleurs qu'ils représentent ont des inquiétudes particulièrement au niveau de leurs emplois. Justement, cet amendement vise à protéger une certaine sécurité d'emploi des travailleurs.

Le projet de loi ne prévoit aucune disposition pour assurer les droits acquis des employés du CN ni pour maintenir le même niveau d'emploi existant actuellement. C'est une question très importante pour les salariés. Ils ne veulent pas se retrouver en chômage avec la nouvelle compagnie. C'est le même problème pour les employés des filiales, comme je viens de le dire, telles que la société AMF Technotransport de Montréal. L'immense majorité des employés du CN ont plus de 20 ans d'ancienneté.

Je surveillerai la nouvelle compagnie concernant le respect scrupuleux des conventions collectives en vigueur dans cette société d'État. J'ai l'intention de surveiller très attentivement les transferts d'obligations et de droits conventionnels au nouvel employeur.

[Traduction]

Le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

M. Joe Fontana (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je veux parler du premier groupe de motions. Je dois m'excuser. L'opposition m'avait dit qu'elle aurait plus d'un orateur sur ces motions. Si je peux, j'aimerais parler des motions nos 1 à 4, particulièrement celles qui portent sur l'article 8.

Les motions no 1 à 3 proposent de supprimer immédiatement ou dans cinq ans la restriction de 15 p. 100 relative à la propriété individuelle et la stipulation que le siège social du CN doit demeurer à Montréal.

Le gouvernement a choisi d'inclure dans le projet de loi une restriction de 15 p. 100 relative à la propriété individuelle pour une raison bien précise. Comme l'émission publique des actions du CN sera la plus importante dans l'histoire du Canada et ne pourrait probablement pas être absorbée entièrement par les investisseurs canadiens, l'accès aux marchés étrangers sera essentiel au succès de cette initiative. Toute forme de restriction relative à la propriété étrangère serait perçue de façon négative par les investisseurs étrangers et pourrait entraîner une baisse considérable de la demande d'actions du CN, ce qui risquerait même de compromettre la capacité du gouvernement de vendre 100 p. 100 de la société d'État.

Toutefois, afin de s'assurer qu'aucun individu, canadien ou autre, ne puisse prendre le contrôle du CN, le gouvernement a décidé de prévoir une restriction de 15 p. 100 relative à la propriété individuelle. C'est une approche équilibrée qui permet aux investisseurs d'acheter un pourcentage intéressant des actions de la société et d'avoir une certaine influence sur son orientation future sans qu'ils puissent en prendre le contrôle. Comme cela ne devrait avoir aucun impact sur la valeur des actions du CN, il n'y a pas lieu de supprimer ou de temporariser cette restriction.

En ce qui concerne le siège social du CN, il a toujours été situé à Montréal et il n'y a aucune raison pour que cela change. En précisant qu'il doit rester là, nous nous trouvons à envoyer un message de stabilité et de continuité aux travailleurs et aux investisseurs. Cela n'a absolument rien à voir avec la politique. C'est simplement une question de bonnes pratiques commerciales.

Le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Le vote porte sur la motion no 1. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Des voix: À la majorité.

(La motion no 1 est rejetée.)

(2325)

Le Président: Le vote suivant porte sur la motion no 4. La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.


13984

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est reporté.

La motion no 1 ayant été rejetée, nous allons devoir mettre la motion no 2 aux voix.

M. Gouk: Monsieur le Président, puisque l'on vient de voter sur la motion no 1, ce qui est juste, les motions nos 2 et 3 pourraient être mises aux voix ensemble. Cela irait.

Le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le Président: Je vais donc mettre aux voix les motions nos 2 et 3. La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: J'imagine que la Chambre veut voter sur les deux motions à la fois? C'est bien cela?

Des voix: Oui.

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter les motions?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur des motions veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Des voix: À la majorité.

(Les motions nos 2 et 3 sont rejetées.)

Le Président: Nous passons maintenant au groupe no 2, soit à la motion no 5.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.) propose:

Motion no 5
Qu'on modifie le projet de loi C-89 par adjonction après la ligne 12, page 7, de ce qui suit:
«11.1 Depuis la date de prorogation, pendant la période initiale suivant cette date, il est interdit au ministre et au CN de vendre ou de céder les actions à des personnes qui ne sont pas canadiennes.
(2) Pour l'application du paragraphe (1):
«période initiale» S'entend d'une période de quatre-vingt-dix jours ou de la période plus longue établie par décret du gouverneur en conseil;
«personne canadienne» S'entend
a) soit d'un particulier ayant la citoyenneté canadienne ou le statut de résident permanent au Canada;
b) soit d'une société commerciale enregistrée au Canada dont la majorité des actions comportant droit de vote sont détenues:
(i) soit par des particuliers répondant aux conditions énoncées à l'alinéa a),

(ii) soit par des sociétés commerciales dont la majorité des actions comportant droit de vote sont détenues par des particuliers répondant aux conditions énoncées à l'alinéa a).»

-Monsieur le Président, je voudrais expliquer en quelques mots pourquoi je présente cette motion. Elle porte sur le point qu'a soulevé le secrétaire parlementaire durant l'analyse du groupe précédent de motions, lorsqu'il a expliqué la restriction de 15 p. 100 imposée à la propriété individuelle.

Cette mesure protégera les Canadiens et leur permettra d'acheter ces actions; elle réglera aussi les problèmes que seule une autre restriction pouvait régler. Je confie à mon collègue de Lethbridge la tâche de débattre de cette motion.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques remarques. D'abord, je dois dire que j'approuve la privatisation du CN. Je crois que c'est la bonne mesure à prendre à l'heure actuelle, du point de vue de l'économie.

La dette du gouvernement du Canada s'élève à 550 milliards de dollars et ceci inquiète énormément les Canadiens. Le Canadien National a accumulé une dette de 2,5 milliards de dollars et c'est un fardeau pour la population du Canada. Il est temps de privatiser cette société, de la confier au secteur privé afin qu'elle soit soumise aux règles du secteur privé, sur le plan du financement et de l'efficience.

(2330)

L'amendement dont il est question ce soir, qui propose une période d'exclusivité de 90 jours pendant laquelle les actions seraient offertes uniquement aux Canadiens, est un excellent amendement, parce que, si les particuliers ou les sociétés ont le capital suffisant ici au Canada pour acheter le Canadien National et l'exploiter à titre d'entreprise canadienne, ce sera une bonne chose. Toutefois, les actions seront réparties entre les Canadiens de diverses façons.

Donnons donc la première option aux Canadiens. Après les 90 jours, on pourra offrir les actions sur les marchés internationaux de sorte que tous ceux qui voudront investir pourront le faire et participer à l'économie canadienne de façon tout à fait appropriée et valable.

M. Joe Fontana (London-Est, Lib.): Monsieur le Président, la motion no 5 propose que les actions du CN soient vendues seulement à des particuliers et des sociétés du Canada pendant les 90 premiers jours où elles seront sur le marché boursier. Cela aurait un effet négatif, tant sur le montant que le gouvernement


13985

recevra pour ses actions du CN que sur sa capacité de vendre la totalité des actions.

Étant donné l'importance de l'offre publique initiale, il est improbable que le marché des valeurs canadien soit en mesure d'absorber la totalité de l'émission. Par conséquent, pour vendre 100 p. 100 des actions du CN à un prix qui maximise le rendement pour les contribuables canadiens, il faut que les investisseurs étrangers puissent investir dans ces actions.

Modifier cet article de la façon proposée par le Parti réformiste à la motion no 5, constituerait une limitation de la propriété étrangère. Toute limitation de la possibilité pour les étrangers de participer à l'achat d'actions du CN entraînerait une diminution de la valeur et les actions devraient être vendues moins chères pour être vendues en totalité à des Canadiens.

Étant donné la taille probable de cette émission d'actions, tous les Canadiens qui le désirent auront la possibilité d'acheter des actions de la société, ce qui conduira à un actionnariat canadien important. Un amendement comme celui que propose la motion no 5 est par conséquent inutile.

Le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Le vote porte sur la motion no 5. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Une voix: À la majorité.

(La motion no 5 est rejetée.)

Le Président: Nous passons maintenant au groupe no 3 qui comprend plusieurs motions.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.) propose:

Motion no 6
Qu'on modifie le projet de loi C-89 en supprimant l'article 12.
Motion no 7
Qu'on modifie le projet de loi C-89, à l'article 12:
a) par substitution, à la ligne 13, page 7, de ce qui suit:
«12. (1) Le ministre peut, avec l'agrément du»; et
b) par adjonction, après la ligne 29, de ce qui suit:
«(2) Seule l'application du produit de la vente des titres mentionnés à l'alinéa (1)c) peut réduire la dette totale du CN envers Sa Majesté du chef du Canada, à moins que le montant auquel cette dette est ainsi réduite ne soit supérieur au montant déterminé par un organisme accrédité d'évaluation de crédit et attesté par écrit par lui au ministre qui permettrait au CN d'avoir une cote de crédit non inférieure à la cote BBB. Si tel est le cas, le ministre peut effectuer les prélèvements mentionnés à l'alinéa (1)c) dans la mesure où ils sont nécessaires pour réduire la dette globale au montant attesté par l'organisme accrédité d'évaluation de crédit.»
[Français]

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ) propose:

Motion no 8
Qu'on modifie le projet de loi C-89, à l'article 12:
a) par substitution, à la ligne 13, page 7, de ce qui suit:
«12. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le ministre peut, avec l'agrément du»; et
b) par adjonction, après la ligne 29, page 7, ce qui suit:
«(2) Nul accord ou entente ne peut être conclu en vertu de l'alinéa (1)a ou b), ni aucun paiement fait en vertu de l'alinéa 1)c), à moins que les conditions suivantes ne soient remplies:
a) le ministre a déposé devant la Chambre des communes une proposition de permettre la conclusion de l'accord ou entente ou le versement du paiement;
b) la proposition a été déférée au comité de la Chambre désigné par elle;
c) le comité a fait rapport qu'il approuve la proposition;
d) la Chambre des communes a agréé le rapport du comité.»
Motion no 9
Qu'on modifie le projet de loi C-89, par adjonction, après la ligne 34, page 7, du nouvel article suivant:
«13.1 Avant que plus de cinquante pour cent des actions du CN ne soient devenues la propriété de personnes autres que Sa Majesté du chef du Canada, le ministre ne peut procéder à aucune opération qui aurait pour effet:
a) soit de transférer à Sa Majesté du chef du Canada quelque partie, filiale, entreprise ou bien du CN dont la valeur dépasse un million de dollars,
b) soit de transférer à une personne autre que Sa Majesté du chef du Canada quelque partie, filiale, entreprise ou bien du CN dont la valeur dépasse dix millions de dollars,
à moins que les conditions suivantes ne soient remplies:
c) le ministre a déposé devant la Chambre des communes une proposition de permettre la réalisation de l'opération;
d) la proposition a été déférée au comité de la Chambre désigné par elle;
e) le comité a fait rapport qu'il approuve la proposition;
f) la Chambre des communes a agréé le rapport du comité.»
Motion no 10
Qu'on modifie le projet de loi C-89, par adjonction, après la ligne 34, page 7, du nouvel article suivant:

13986

«13.1 (1) Avant que plus de cinquante pour cent des actions du CN ne soient devenues la propriété de personnes autres que Sa Majesté du chef du Canada, le ministre ne peut procéder à aucune opération qui aurait pour effet:
a) soit de transférer à Sa Majesté du chef du Canada quelque partie, filiale, entreprise ou bien du CN dont la valeur dépasse un million de dollars;
b) soit de transférer à une personne autre que Sa Majesté du chef du Canada quelque partie, filiale, entreprise ou bien du CN dont la valeur dépasse dix millions de dollars, à moins d'avoir, à la fois:
c) référé l'opération au vérificateur général;
d) obtenu de lui qu'il examine l'opération et prépare un rapport à déposer devant la Chambre des communes, dans lequel il atteste que l'opération est à l'avantage du Canada et du CN.
(2) Le vérificateur général fait déposer le rapport devant la Chambre des communes dans les quinze jours suivant la date du renvoi par le Ministre.»
M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ) propose:

Motion no 11
Qu'on modifie le projet de loi C-89, par adjonction, après la ligne 34, page 7, du nouvel article suivant:
«13.1 (1) Le régime de pension des employés du CN appelé Régime de pension du CN continue d'exister, d'être versé à la Commission des pensions du CN qui continue de l'administrer selon les règles en vigueur immédiatement avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
(2) Il est interdit de modifier le régime de pension du CN sans l'agrément de la Commission des pensions du CN.»
(2335)

[Traduction]

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, une fois encore je voudrais donner quelques mots d'explication sur mes amendements.

Pendant l'étude en comité, le ministre est venu témoigner et a déclaré qu'il avait l'intention de retirer à la société ses actifs et ses ressources et de payer juste assez de ses dettes pour qu'elle ait une cote de crédit BBB.

J'ai accepté cela, mais je voudrais imposer une restriction pour être sûr que le ministre n'aille pas plus loin que ce qu'il a déclaré. Étant donné qu'il a fait cette déclaration, je pense qu'il est raisonnable de lui demander de s'engager par l'intermédiaire d'un amendement à la mesure législative. Toutefois, s'il n'est pas prêt à faire cela, j'estime que nous devrions lui enlever le pouvoir d'acquitter arbitrairement le montant de dettes qu'il choisit.

En ce qui concerne les motions nos 8, 9 et 10, je les ai étudiées, mais je n'ai pas trouvé de raison claire me permettant de recommander que nous les appuyions. Par contre, la motion no 11 du Bloc québécois est une bonne motion. Elle traite d'un sujet particulièrement délicat. Je pense que beaucoup de gens seront rassurés, sans que cela cause de problèmes, et je recommande que nous appuyions cette motion.

Cela dit, je cède la parole à mon collègue de North Island-Powell River pour le débat.

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, je ne vais pas me prononcer sur les motions nos 8, 9 et 10. Je préfère écouter le Bloc.

Toutefois, j'appuie les motions nos 6, 7 et 11. La motion no 6 empêcherait le gouvernement d'acquitter les dettes du CN. La dette actuelle du CN s'élève à 2,5 milliards de dollars. Selon les experts financiers et industriels, il ne sera jamais vendu à un prix raisonnable avec un niveau d'endettement pareil, d'où la nécessité de ramener sa dette à un montant qui assurerait une cote BBB qui est celle des obligations de bonne qualité. Un montant de 1,5 milliard de dollars assurerait la solvabilité des obligations. La Chambre ne saurait conférer au ministre le pouvoir de réduire de quelque montant que ce soit la dette du CN. C'est risqué et imprudent.

Tout d'abord, le ministre se verrait ainsi autorisé à réduire le fardeau de la dette du CN à un montant bien inférieur à la rentabilité du rendement assuré aux contribuables. Cela pourrait avoir pour effet d'accroître le prix des actions du fait que l'offre semblerait plus alléchante, mais le rendement serait moindre pour les contribuables. Je suis convaincu que ce n'est pas l'intention du ministre, mais ce n'est pas une raison pour inclure ce genre de passe-droit dans la loi ou l'accorder.

Deuxièmement, une réduction excessive de la dette du CN serait préjudiciable à CP Rail, tout comme ça a été le cas quand Air Canada a été privatisé. Il ne s'agit pas simplement d'équilibrer la dette de deux compagnies. Contrairement à ce qui se passe généralement dans le secteur privé, le CN a pu acheter des biens somptueux sans avoir à se préoccuper de leur financement. Le plus récent exemple est le généreux plan de rachat que le CN a consenti à ses travailleurs en vue de réduire ses effectifs. Si le CN bénéficie gratuitement de cet avantage stratégique, cela portera injustement un dur coup au marché.

Si la motion no 7 était adoptée, le gouvernement serait tenu de limiter la réduction de la dette du CN au seul montant nécessaire pour obtenir la cote BBB, et ce, d'abord en utilisant les fonds disponibles de la compagnie et en cédant une partie de ses biens immobiliers. Autrement dit, il s'agirait d'abord d'utiliser l'encaisse et de commencer à se départir de certains actifs. Si les députés appuient cette motion on ne peut plus raisonnable, la motion no 6 qui supprime toute autorisation d'aide financière de la part du gouvernement serait inutile.

De plus, j'appuie la motion no 11 qui prévoit que le régime de retraite du CN continue d'exister et que la commission des pensions du CN continue de l'administrer selon les règles gouvernementales actuellement en vigueur. C'est une mesure prudente et équitable.

Il arrive trop souvent que les employés, qui exercent peu de contrôle sur la situation qui les touche, sont les gros perdants par suite d'un changement de propriété. À bien des égards, c'est la motion la plus importante et la plus réfléchie à être adoptée par la Chambre. Si nous remontions tous très loin dans notre mémoire collective, nous trouverions des cas de personnes qui ont été traitées injustement par le système.


13987

(2340)

Je voudrais proposer ici d'apporter un amendement à la motion no 7. Il vise un court passage de la motion no 7 qui y figure par erreur. Nous voulons que la motion prévoie que le produit de la vente des titres serve à réduire toutes les dettes du CN et non seulement celles contractées envers le gouvernement du Canada. Par conséquent, je propose:

Qu'on modifie la motion no 7 en supprimant les mots «envers Sa Majesté du chef du Canada».
Le Président: Un amendement à la motion no 7 a été proposé. Le député de Blainville-Deux-Montagnes a maintenant la parole pour participer au débat.

[Français]

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ): Monsieur le Président, mon intervention portera sur les motions 8, 9 et 10. Le Bloc québécois approuve le principe même du projet de loi C-89 visant à transférer à des intérêts privés le réseau ferroviaire du CN et à racheter les autres actifs de la société pour en disposer ensuite.

Mais nous nous opposons toutefois, avec la dernière énergie, aux pouvoirs exorbitants que le ministre des Transports, par ce projet de loi, prétend s'arroger pour la réalisation de ces opérations. Les amendements que je défends ici ont pour objet de confier plutôt ces pouvoirs à la Chambre et/ou au vérificateur général.

Premièrement, aux termes de l'article 12, le ministre des Transports ne s'arroge rien de moins que le pouvoir, notamment, de payer les dettes du CN en puisant pour cela non seulement dans le revenu de la vente des actions, mais aussi dans le Trésor public. Cette opération visant à rendre plus alléchant le produit à vendre revient donc, en fait, à prendre de l'argent dans la poche du contribuable pour le mettre dans celle des acheteurs, éventuellement étrangers.

Cela est insoutenable. Il est étrange, pour employer un terme parlementaire, il est étrange, dis-je, qu'un gouvernement ait le cynisme de proposer aux représentants du peuple de donner à un ministre le pouvoir d'effectuer une telle opération.

Mon amendement vise à soumettre la conclusion d'un tel accord avec le CN à l'approbation préalable de la Chambre, devant qui le ministre l'aura déposé et qui en aura, à son tour, saisi un comité désigné par elle. Il me paraît que, de la part du parti ministériel, repousser cet amendement et accepter l'article 12 tel qu'il est serait parfaitement irresponsable.

En deuxième lieu, la boulimie de pouvoirs du ministre des Transports ne se limite pas à vouloir être autorisé par la Chambre à payer les dettes du CN avec l'argent du contribuable. Aux termes de l'article 6, il s'arroge aussi sans broncher le pouvoir de se faire transférer ou de faire transférer à un tiers, moyennant une éventuelle contrepartie dont il fixe lui-même le montant, tel bien du CN qui l'intéresserait.

(2345)

À cette exorbitante exigence, nous opposons, au choix de la Chambre, les motions nos 9 et 10. Par la motion no 9, nous proposons qu'avant que plus de 50 p. 100 des actions du CN soient vendues, le ministre ne peut ni se faire transférer un bien du CN de plus de un million, ni faire transférer à un tiers un bien de plus de 10 millions, à moins que le projet d'une telle opération n'ait été déposé devant la Chambre par le ministre et que la Chambre, sur avis favorable du comité désigné par elle, ne l'ait approuvé.

Par la motion no 10, donc au choix la motion no 9 ou la motion no 10, nous proposons plutôt que l'approbation de ces opérations par la Chambre soit remplacée par l'obligation pour le ministre d'en référer le projet au vérificateur général, qui en fera rapport à la Chambre dans les 15 jours, son avis devant être positif pour que l'opération se fasse. Encore une fois, il me paraît inconcevable que l'un ou l'autre de ces garde-fous ne soit pas accepté par mes collègues d'en face.

En conclusion, les amendements que je propose ici visent à faire en sorte que la vente du CN ne se fasse pas comme si cette compagnie était la propriété personnelle du ministre des Transports, dont il pourrait disposer en utilisant à sa guise notre argent pour acheter les biens du CN ou pour payer les dettes de cette compagnie. Le CN est un bien public, un bien du peuple, dont les représentants du peuple ne peuvent, sans renoncer à leurs responsabilités, confier à un ministre le pouvoir d'en disposer comme il l'entend.

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, je vous entretiendrai pendant quelques minutes particulièrement de la motion no. 11 qui traite du régime de retraite. On sait que, si on se rappelle l'histoire du Canada, le chemin de fer devait catalyser le développement économique dans les diverses régions du Canada. Mais le problème, avec les années, est que l'on se retrouve face à une compagnie qui était propriété de la Couronne et qui sera privatisée sous peu.

Le problème est que si le CN devient une entreprise privatisée, comme cela se fera, il agira maintenant en fonction des intérêts des détenteurs d'actions plutôt que de ceux des communautés canadiennes. Le Canada traverse présentement une période difficile, alors que certaines régions luttent carrément pour se remettre de la récession et s'ajuster au libre-échange. Nous sommes en partie inquiets que cette privatisation ajoute à l'instabilité, au moment même où il est nécessaire, au Canada, d'avoir un réseau de transport fiable.

Dans l'hypothèse où le CN serait vendu à une valeur inférieure à sa valeur comptable, le manque à gagner pourrait être, selon les estimations, de un milliard de dollars ou plus. Il faudrait se demander si le gouvernement libéral devant nous accordera une remise de dettes ou non au CN. D'un côté, il faut que le CN, sous sa forme privatisée, soit rentable pour assurer sa croissance à long terme. D'autre part, dans une période de restrictions budgétaires et au moment où le gouvernement ne cesse de répéter que les contribuables canadiens doivent accepter des diminutions dans les programmes sociaux, il est difficile de justifier la décision de dépenser des deniers publics afin de hausser la valeur des actions qui seront détenues par des intérêts privés.


13988

La privatisation du CN aura aussi un autre coût. Il est presque évident que certains travailleurs et travailleuses perdront leur emploi dans le processus. En plus du coût des indemnités de départ, il faudra compter aussi celui des prestations d'assurance-chômage et des divers programmes de recyclage. Après avoir fait ce préambule, je veux expliquer que c'est pour cette raison que j'ai présenté cette motion no 11, qui se lit comme suit:

13.1 (1) Le régime de pension des employés du CN appelé Régime de pension du CN continue d'exister, d'être versé à la Commission des pensions du CN qui continue de l'administrer selon les règles en vigueur immédiatement avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
(2) Il est interdit de modifier le régime de pension du CN sans l'agrément de la Commission des pensions du CN.
(2350)

Vous comprendrez, et je pense qu'il est clair, que cet amendement vise à protéger le régime de retraite des employés du CN.

J'aimerais faire un petit aparté. Je n'ai jamais remis en question les services de traduction et d'interprétation de la Chambre, je crois que nous avons d'excellents professionnels, mais j'aimerais que le service se penche sur le texte de mon amendement. Dans la rédaction de mon amendement, il me semble qu'au lieu de parler de «régime de pension»-j'ai déjà communiqué avec des linguistes de l'Office de la langue française et apparemment «régime de pension» est une traduction littérale de «pension plan»-on devrait parler de «régime de retraite». Étant donné que je ne possède pas la science infuse, j'aimerais que notre service d'interprétation puisse m'indiquer si mon amendement est dans un français correct alors qu'on réfère à plusieurs endroits aux termes «régime de pension».

Je me répète, mais vous comprendrez que cet amendement vise à protéger le régime de retraite des employés du CN. Le projet de loi C-89 ne contient effectivement aucune mesure assurant qu'aucun changement ne sera apporté au régime de retraite du CN après sa privatisation.

En conclusion, étant donné qu'il est devenu clair pour tous les travailleurs canadiens et québécois, pas uniquement ceux du rail, que le Bloc québécois a été le seul parti à défendre leurs intérêts en cette Chambre, malgré le fait que le NPD avec sa vision traditionnelle défendait le droit des travailleurs et travailleuses au Canada. Pour quelqu'un qui a travaillé pendant toute sa carrière du côté patronal comme moi, je suis encore plus fier de présenter cet amendement.

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, à l'instar de mon collègue de Beauport-Montmorency-Orléans, je veux appuyer la motion no 11.

Cette motion vise à protéger le régime de retraite des employés du Canadien National. Vous avez constaté que le projet de loi C-89 ne dit rien du fonds de retraite. Je pense qu'il est important que des mesures soient prises dans la loi même pour que le fonds de pension des employés du CN soit protégé.

Pourquoi? C'est à la suite de l'histoire récente, et de celle un petit peu plus lointaine du Canadien National. Nous avons remarqué, au cours des récentes années, certaines propensions du Canadien National à vouloir faire absorber par ses employés les coûts des transformations de la modernisation du système. On a rationalisé, sous prétexte d'améliorer la productivité. On a quand même changé dans une certaine mesure les conditions de travail des employés.

Surtout, lors de la dernière grève qui est à la fois grève et lock-out, on a vu que le Canadien National a adopté une stratégie visant à changer radicalement les conditions de travail de ses employés et à faire que le Parlement canadien adopte une loi spéciale, de façon à ce que ces conditions-là soient décrétées.

Nous avons vu hier la publication du rapport de la Commission de médiation-arbitrage, qui a fait que les pires craintes qu'on avait évoquées, nous du Bloc québécois, lors de la discussion sur la Loi de retour au travail des employés du Canadien National et ceux du Canadien Pacifique aussi, les pires craintes qu'on avait évoquées, c'est-à-dire un changement unilatéral des conditions de travail en faveur de l'employeur, se sont concrétisées.

Je pense qu'il est absolument important que le Parlement canadien protège les employés du Canadien National en ce qui a trait à leurs conditions de retraite. La motion de mon confrère de Beauport-Montmorency-Orléans devait être appliquée et je pense que ce serait très raisonnable, de façon à ce que les conditions, après la commercialisation du Canadien National, fassent en sorte qu'il soit interdit de modifier le régime de retraite du Canadien National sans l'accord de la Commission de pension du CN.

(2355)

Vous savez que les règlements de la Commission des pensions du Canadien National font en sorte que les employés peuvent avoir une certaine influence et un mot à dire sur la réglementation, sur la façon dont le fonds est administré.

Je pense que si une motion comme celle-là est adoptée-j'ai constaté qu'un collègue réformiste est allé dans le même sens-ce serait, de la part du Parlement canadien, tout à fait indiqué. Les employés du CN qui ont fait carrière au Canadien National étaient dans une certaine mesure à l'emploi du gouvernement canadien, étaient à l'emploi d'une société d'État. Je pense que la Chambre des communes ne doit pas renoncer, sous prétexte de privatisation, à faire en sorte que justice soit rendue aux travailleurs qui ont longtemps consacré tous leurs efforts au fonctionnement de cette compagnie et qui, à l'âge de la retraite, sont en droit d'obtenir les avantages pour lesquels ils ont si longuement travaillé.

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, je désire également appuyer la motion no 11, qui est une motion très importante.

Les travailleurs et le syndicat sont très inquiets concernant l'avenir de leur caisse de retraite à laquelle ils ont contribué pendant des années. Malheureusement, le projet de loi C-89 ne contient aucune mesure pour protéger les fonds de retraite lors de la privatisation. C'est une omission très grave.

Cet amendement obéit à une demande des syndicats, parce qu'ils ne font confiance ni à l'employeur ni au gouvernement en cette matière. Ils ont déjà eu des mauvaises expériences à cet égard. L'employeur n'a pas toujours contribué à la caisse de la façon prévue dans les ententes. Ces fonds ne devraient pas être utilisés pour acheter des actions. Le risque en est trop grand dans un marché trop volatile.


13989

Ce fonds constitue la seule source de revenu pour la plupart des retraités. Je pense que les travailleurs devraient exercer un contrôle accru sur leur fonds de retraite, car ça leur appartient.

Aucune modification ne devrait être apportée au Régime des pensions sans le consentement de la Commission des pensions du Canadien National et sans le consentement des travailleurs et de leurs syndicats. Les travailleurs ont beaucoup contribué à la caisse de retraite de la Compagnie des chemins de fer nationaux. Par exemple, en 1989, les employés ont perdu une augmentation de salaire additionnelle de 1 p. 100 dans le but d'acquérir une indexation partielle du régime. Alors, voilà l'importance de cet amendement que j'appuie entièrement.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, vu l'heure tardive, je ne prendrai pas beaucoup de temps.

Étant donné que, dans mon comté, 500 travailleurs du CN sont concernés par cette affaire, j'aimerais intervenir pour appuyer le proposeur de la motion, notre critique en matière de transport, le député de Beauport-Montmorency-Orléans. Les gens qui ont travaillé au CN, pour les avoir côtoyés de près, y ont mis beaucoup d'énergie, beaucoup de coeur. On pense à ceux qui y travaillent maintenant, mais c'est une longue histoire, c'est une page historique importante pour eux. Je pense que c'est la moindre des choses que d'appuyer cette motion.

[Traduction]

Le Président: Nous sommes encore au groupe no 3.

M. Joe Fontana (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, dans un esprit de coopération, en ce qui concerne l'amendement que les réformistes ont proposé d'apporter à leur motion no 7, je ne crois pas que nous ayons des objections à cet amendement d'ordre administratif, mais je tiens à dire que nous nous opposons à leur motion no 7 et je vais maintenant expliquer pourquoi.

Les motions nos 6, 7 et 8 proposent toutes trois des amendements à l'article 12 qui donne au ministre la capacité de toucher à la structure du capital du CN. Pour que les actions du CN attirent les investisseurs et pour que cette société soit en mesure de financer de façon abordable ses activités dans l'avenir, il faut que la dette du CN permette d'obtenir une bonne cote de ses obligations avant la vente. Pour obtenir cette cote, le CN doit réduire sa dette. On ne connaîtra pas l'importance exacte de cette réduction tant que les sociétés d'évaluation du crédit ne se seront pas familiarisées avec le CN et n'auront pas discuté de la question avec le gouvernement et le CN lui-même.

(2400)

Toute réduction de la dette se fera en trois temps. Tout d'abord, pour réduire sa dette, le CN a déjà entrepris de vendre plusieurs de ses biens non ferroviaires, comme CN Exploration. Le produit de ces ventes servira à réduire la dette. Ensuite, dans le but de vendre les services ferroviaires essentiels du CN, le gouvernement a proposé que le CN lui transfère ses biens immobiliers secondaires pour un montant raisonnable avant l'émission des actions. Cela réduira également la dette du CN.

Le gouvernement examinera attentivement toute autre réduction de la dette, en tenant compte de la nécessité de mettre le CN sur le même pied que ses concurrents et de veiller à ce qu'il demeure viable à l'avenir. Cependant, le ministre doit avoir la plus grande marge de manoeuvre possible pour prendre ces décisions, de concert avec le ministre des Finances. Toute disposition, qui exigerait que la Chambre des communes, un comité de la Chambre ou le vérificateur général examinent ces actions et les approuvent, limiterait cette marge de manoeuvre et pourrait empêcher que la transaction se déroule de façon efficace et en temps voulu, ce qui aurait des répercussions sur la valeur obtenue.

Par conséquent, on ne peut souscrire à ces motions.

Les motions nos 9 et 10, et le nouvel article 13.1 que l'opposition propose, enlèveraient au ministre des Transports la marge de manoeuvre nécessaire pour s'occuper du transfert de biens dans le contexte de la commercialisation du CN.

Du fait de la nature commerciale de cette transaction, il faut absolument que le transfert se fasse d'une façon efficace et en temps voulu. La nécessité de faire rapport à la Chambre ou de demander au vérificateur général d'examiner les transactions de ce genre avant que le transfert puisse avoir lieu nuirait beaucoup à la capacité du ministre d'ordonner que ces transferts se fassent en temps opportun. Or, si les transferts ne se déroulent pas de façon efficace, cela pourrait nuire à la valeur de la transaction.

De plus, dans la mesure où ces biens sont transférés à une autre société d'État, ils seront enregistrés dans le plan d'activité d'une société d'État, dont on déposera annuellement un sommaire au Parlement. Tous les députés pourront alors examiner régulièrement la valeur des biens de cette société d'État. En outre, le vérificateur général aura la possibilité de se pencher sur ces transferts dans le cadre normal de ses activités.

On peut ajouter à cela que la nature commerciale de ces biens demande, dans certains cas, une certaine confidentialité qui pourrait être menacée si le ministre devait faire rapport à la Chambre au sujet d'une transaction de ce genre.

Par conséquent, compte tenu du besoin d'opportunité, d'efficience et de confidentialité, nous ne pouvons pas accepter ces amendements.

Je voudrais parler un peu plus longuement de la motion no 11, qui porte sur les pensionnés et les employés du CN. Nous reconnaissons la nécessité, pour les femmes et les hommes qui ont travaillé ou travaillent encore pour cette grande compagnie, de comprendre et de savoir comment ils vont être traités en ce qui a trait à leur pension du CN.

Les pensions de tous les pensionnés et de tous les employés du CN sont protégées de diverses manières mais, avant tout, par la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension. Elles continueront d'être protégées lorsque le CN aura été commercialisé. La Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension énonce les règles que doivent suivre, en matière de pension, toutes les compagnies qui sont sous réglementation fédérale. Cela permet de traiter également toutes les personnes qui ont droit à ces pensions, dont les employés et les pensionnés du CN.


13990

Lorsque le Canadien National aura été vendu à des investisseurs privés, toutes les pensions promises dans le cadre du régime de pension du CN continueront d'être honorées. Le régime de pension du CN ne fera pas partie d'émissions d'actions. Ce régime est un régime de pension à prestations déterminées, ce qui signifie que peu importe les aléas du marché, l'employé est assuré d'avoir une pension. Cette pension est calculée en fonction d'une formule fixe et les seules variables de cette formule sont les gains moyens et les années de service. Ce régime est enregistré auprès du gouvernement fédéral en vertu de la Loi sur les normes de prestation de pension, comme je l'ai mentionné, qui est appliquée par le Bureau du surintendant des institutions financières, et en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui est appliquée par Revenu Canada.

Les pensions promises sont documentées dans le texte du régime de pension du CN qui décrit les droits des 50 000 pensionnés et conjoints survivants, ainsi que des 25 000 participants actifs. Ces pensions promises sont garanties par les actifs de la caisse fiduciaire de retraite du CN qui ne font pas partie des actifs et revenus du CN. Les actifs de la caisse sont la propriété du fiduciaire de la caisse, la Compagnie Montréal Trust du Canada.

(2405)

En plus d'être réglementés par le Bureau du surintendant des institutions financières et par Revenu Canada, le régime et la caisse de retraite du CN sont vérifiés par les vérificateurs internes de la compagnie et par des vérificateurs externes. Les aspects financiers, actuariels et administratifs du régime de pension du CN sont également assujettis à l'examen de la commission de pension du CN, qui compte cinq représentants de la compagnie, cinq représentants syndicaux, cinq pensionnés et un représentant des employés non syndiqués. Le régime et la caisse de retraite du CN font en outre l'objet d'évaluations actuarielles périodiques de l'actuaire externe, dont les rapports sont présentés à la commission de pension du CN, soumis au conseil d'administration et déposés auprès des autorités réglementaires.

Ces processus visent à protéger les crédits accumulés de tous les membres du régime de pension du CN: les retraités, les conjoints survivants et les participants actifs. Une version abrégée de cette information figurait sur le relevé de pension d'avril de tous les pensionnés, en réponse à la question qu'ils posent le plus souvent, soit au sujet de la sécurité des pensions du CN. Le bulletin mensuel Keeping Track d'avril 1995, envoyé à tous les employés actifs et aux pensionnés, contenait un tableau à ce sujet.

Le gouvernement s'engage à protéger les pensions des employés du CN et de la nouvelle société. C'est notre engagement. Les amendements proposés par l'opposition ouvriraient le régime aux employés de sociétés constituées en vertu de lois fédérales, qui demanderaient leur propre protection additionnelle. Nous risquerions de nous retrouver avec une macédoine de lois qui protégeraient divers intervenants dont les intérêts varieraient d'un groupe à l'autre, au lieu d'avoir une loi unique qui assure une protection uniforme et claire. Ce manque d'uniformité ne permettrait pas de protéger les intérêts des Canadiens aussi efficacement qu'une loi unique.

Par conséquent, puisque les employés et les pensionnés du CN bénéficient déjà de la protection de la loi qui ne serait pas affectée par une privatisation du CN, le gouvernement ne peut donner son appui à la motion.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, mon intervention sera très brève et elle portera sur la question des fonds de retraite.

Je pense qu'il est important de savoir que les travailleurs du CN et les travailleurs du rail de partout savent très bien à qui ils peuvent faire le plus confiance dans cette Chambre.

[Traduction]

Le Président: Le vote porte sur l'amendement à la motion no 7. La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

M. Fontana: Monsieur le Président, je m'excuse auprès des députés de l'autre côté de la Chambre. Nous nous étions engagés à accepter l'amendement à la motion no 7. Si vous pouviez reprendre le vote, je suis sûr qu'on fera preuve de collaboration et qu'on corrigera la situation.

Le Président: Il est un peu tard. Est-ce d'accord pour que nous reprenions le vote?

Des voix: D'accord.

(2410)

Le Président: Nous voterons encore une fois sur l'amendement à la motion no 7. La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?


13991

Des voix: D'accord.

(L'amendement est adopté.)

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion amendée veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Une voix: À la majorité.

(La motion no 7 amendée est rejetée.)

Le Président: Le prochain vote porte sur la motion no 6. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Une voix: À la majorité.

(La motion no 6 est rejetée.)

Le Président: Le prochain vote porte sur la motion no 8.

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, est-ce qu'on pourrait considérer un vote sur les motions nos 8, 9, 10 et 11?

[Traduction]

M. Gouk: Monsieur le Président, nous accepterions de voter sur les motions nos 8, 9 et 10 regroupées, mais nous aimerions un vote distinct sur la motion no 11.

Le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le Président: Nous allons voter sur les motions nos 8, 9 et 10. Plaît-il à la Chambre d'adopter les motions?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur des motions veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur les motions est différé.

(2415)

Le Président: Le vote porte sur la motion no 11. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est reporté.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.) propose:

Motion no 12
Qu'on modifie le projet de loi C-89 en supprimant l'article 15.
Motion no 13
Qu'on modifie le projet de loi C-89, à l'article 15, par substitution, aux lignes 1 à 4, page 8, de ce qui suit:
«15. (1) La Loi sur les langues officielles continue de s'appliquer au CN comme s'il était encore une institution fédérale au sens de celle-ci.
(2) Le paragraphe (1) cesse d'avoir effet cinq ans après l'entrée en vigueur de la présente loi.»
M. Boudria: Monsieur le Président, je me demande si l'on ne pourrait pas réunir les groupes 4, 5 et 6 pour le débat, si la Chambre y consent.

[Français]

M. Duceppe: Je suis d'accord, monsieur le Président, dans la mesure où nous pourrons voter individuellement sur chacune des quatre motions.

[Traduction]

Le Président: Est-ce d'accord pour réunir les groupes 4, 5 et 6 pour le débat, puis nous voterons séparément sur chaque motion?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ) propose:

Motion no 14
Qu'on modifie le projet de loi C-89, par adjonction, après la ligne 4, page 8, du nouvel article suivant:

13992

«15.1 Au plus tard le 1er janvier 1996, le ministre conclut, avec le CN, une entente pourvoyant à l'entretien, la réparation et la rénovation du Pont de Québec, en la ville de Québec, par le CN et fixant le début des travaux au plus tard le 1er mai 1996.»
Motion no 15
Qu'on modifie le projet de loi C-89, à l'article 16, par adjonction, après la ligne 17, page 8, de ce qui suit:
«(3) Le paragraphe (1) ne s'applique pas:
a) à une activité du CN située dans une province et qui est exploitée en vertu d'une entente qui la soumet à la compétence de cette province;
b) à un ouvrage, une filiale ou une compagnie propriété du CN qui est entièrement située ou entièrement exploitée dans une province.»
[Traduction]

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, je commencerai par présenter brièvement mes propres motions. Mon collègue s'occupera des autres.

Je tiens à signaler deux choses. La première, c'est que la Loi sur les langues officielles ne fait pas l'objet de la motion. Il s'agit d'une contrainte imposée aux entreprises privées dans le cas où ce serait en fait le contraire de ce que le secrétaire parlementaire, le député de London-Est, a dit antérieurement au sujet du siège social. Il a dit que parce qu'il est à Montréal et qu'il y a toujours été, il y restera pour probablement toujours. C'est possible. Si l'entreprise en question applique la politique fédérale en matière de langues officielles et que cela donne de bons résultats, je suis certain qu'elle continuera à le faire mais par contre, si cela ne donne rien, il ne faut pas la forcer à la pointe du fusil.

Je ne devrais pas employer cette expression, je suppose. Elle offusquerait le ministre de la Justice qui confisque toutes les armes. Je devrais plutôt dire qu'il ne faut pas lui tordre le bras et l'obliger à se soumettre à cette politique. Ce serait d'ailleurs un petit jeu dangereux compte tenu du fait que la police devra déterminer d'abord si on le fait parce que l'on veut qu'elle utilise une langue donnée ou pour une question de race, de religion ou d'orientation sexuelle. Je ferais peut-être mieux de commencer à être plus prudent.

Je parlerai brièvement des groupes nos 5 et 6. Il y a d'abord le groupe no 5 concernant la motion bloquiste sur le pont de Québec. J'ai écouté les gens qui sont venus témoigner devant le comité à ce sujet. Il s'agit d'une organisation très enthousiaste et très dévouée qui tient beaucoup à son projet de préservation du pont. J'appuie leur cause. Ces gens ont parlé d'un obligation légale du CN. Si cela est vrai, et je n'ai aucune raison de croire le contraire vu le sérieux dont ils ont fait preuve dans ce dossier, il importe peu que le CN soit encore une société d'État ou privatisée.

(2420)

Cette obligation légale, si elle existe, restera attachée à la compagnie et il faudra en tenir compte et veiller à son exécution. Je leur ai dit que moi-même et d'autres députés serions prêts à en discuter-je sais que le Bloc est très préoccupé par cet aspect-s'ils pouvaient fournir la preuve qu'il s'agit d'une obligation légale.

En ce qui concerne le groupe no 6, je suis passablement de l'avis du Bloc. Néanmoins, ce n'est pas ainsi qu'il faudrait procéder. Le gouvernement m'a déjà avisé que, la semaine prochaine, il allait présenter une mesure législative ayant trait à la réforme de la réglementation de l'industrie ferroviaire tout entière. Il n'y a pas lieu de s'employer à en privatiser une petite partie quand on sait que la loi de réglementation sera présentée sous peu.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, au préalable, étant donné que je ne suis pas très au courant de la procédure, j'aimerais poser une question à titre d'information. J'aimerais savoir si j'aurai droit à plus de dix minutes pour m'entretenir sur chacun des groupes. Puisqu'on a procédé à des regroupements, j'aurai certainement besoin de plus de dix minutes. Comment fonctionne-t-on à ce moment-là?

M. Boudria: On demande le consentement unanime.

M. Guimond: Je dois demander le consentement unanime. Je vous remercie, monsieur le Président.

[Traduction]

Le Président: Certains ont demandé la permission de dépasser un peu leur temps de parole normal, parce que trois groupes distincts feront l'objet du même vote. La Chambre consent-elle à l'unanimité à laisser un peu plus de temps à ceux qui prennent la parole?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Guimond: Monsieur le Président, je vous remercie et je m'excuse auprès de vous. J'espère que vous ne considérez pas le fait que j'aie remercié le whip en chef du gouvernement de m'avoir donné son consentement à une prolongation de mon temps de parole comme un manque de respect à votre endroit.

J'aimerais tout d'abord intervenir sur la motion no 12 présentée par mon collègue de Kootenay-Ouest-Revelstoke qui demande notamment la suppression de l'article 15, lequel article se lit comme suit: «La Loi sur les langues officielles continue de s'appliquer au CN comme s'il était encore une institution fédérale au sens de celle-ci.»

Je trouve très dommage que mon collègue réformiste, qui est un ardent Canadien qui veut maintenir l'unité du Canada, ne se comporte pas de la sorte et fasse ce qu'on appelle au Canada anglais du «Quebec bashing». C'est très malheureux et le Parti réformiste aura à en subir les conséquences, lui qui a des ambitions, un jour, de présenter des candidats aux élections fédérales au Québec. Au Québec, nous avons une belle devise: «Je me souviens» et soyez persuadé, monsieur le Président, que les Québécois s'en souviendront, si, bien entendu, le Québec fait encore partie du Canada, ce qui est peu probable, une fois que nous aurons gagné le référendum.


13993

Mais nous ne manquerons aucune occasion de rappeler aux Québécois et aux Québécoises que le Parti réformiste a déposé des amendements pour soustraire la nouvelle compagnie privatisée à la Loi sur les langues officielles. Ce n'est pas la première fois, comme le rappelle mon collègue, le député de Bourassa, et ce parti dépose régulièrement à la Chambre des communes des pétitions pour se plaindre de la Loi sur les langues officielles. Je veux souligner que le gouvernement a pris ses responsabilités en déposant, dans le projet de loi C-89, cet article 15, qui prévoit que la Loi sur les langues officielles continuera de s'appliquer au CN privatisé.

Le gouvernement s'est comporté de façon concordante avec ce qui s'est fait lorsque le gouvernement précédent, en 1988, avait procédé à la privatisation d'Air Canada. Je pourrais aussi revenir sur un autre amendement de mon collègue qui demande aussi de remettre en question l'engagement que le gouvernement actuel prend de maintenir le siège social dans la communauté urbaine de Montréal.

(2425)

J'aimerais maintenant vous entretenir rapidement de l'amendement no 14, qui prévoit que le gouvernement fédéral, donc le ministre des Transports, malgré la privatisation du CN, demeure responsable de l'entretien du pont de Québec.

Le pont de Québec représente un joyau du patrimoine mondial. Ce n'est pas un pont qui enjambe un ruisseau au fond d'un rang, mais c'est plutôt une structure qui a été considérée, par sir Wilfrid Laurier, lors de son inauguration, comme étant un chef-d'oeuvre d'architecture, une fierté non seulement du Québec, de la ville de Québec et de la région de Québec, mais une fierté du Canada.

Je veux déplorer ici devant vous l'attitude de mes collègues membres du Comité permanent des transports, entre autres, notre président, le député de Hamilton-Ouest, le secrétaire parlementaire du ministre des Transports et député de London-Est, qui ont manqué carrément de politesse lorsque les gens de la Coalition pour la sauvegarde du pont de Québec sont venus présenter leur mémoire au Comité la semaine dernière. Et je pèse mes mots.

Le président de notre comité et le secrétaire parlementaire sont deux unilingues anglophones. Lorsque les gens ont fait leur présentation unilingue en français, le président de notre comité et le secrétaire parlementaire du ministre des Transports ont enlevé leurs écouteurs, ont bavardé ensemble et n'ont absolument rien compris à la présentation des gens de la Coalition pour la sauvegarde du pont de Québec.

Ils m'ont même demandé pourquoi ils n'avaient pas présenté une demande dans le cadre du programme d'infrastructures. C'est aberrant. Le propriétaire du Pont de Québec, c'est le Canadien National, ce n'est pas la ville de Québec. Pourquoi est-ce que la ville de Québec aurait présenté une demande dans le cadre du programme d'infrastructures pour la réfection du pont de Québec? Cela démontrait une méconnaissance totale du dossier et, en plus, une impolitesse envers des francophones unilingues qui sont venus présenter leur mémoire devant le Comité permanent des transports.

Je vous rappelle que le comité de la sauvegarde du pont de Québec n'est pas un comité politique, au contraire, c'est un comité apolitique. Je peux vous dire que personnellement, je n'ai jamais rencontré les membres de ce comité et il n'était pas question qu'ils s'associent à moi ou à notre parti. Ils font un travail totalement apolitique. Je peux vous dire que les gens de la région de Québec ont été très déçus de la façon dont cette coalition a été reçue ici à Ottawa.

Le pont est dans un état pitoyable. D'après la coalition, les évaluations très sommaires des réparations sont de l'ordre de 41 à 45 millions de dollars. Que se passera-t-il si le nouveau CN privatisé refuse de respecter ses engagements eu égard au pont de Québec? Qu'arrivera-t-il? Il continuera à se dégrader? C'est un joyau du patrimoine mondial.

Encore une fois, je déplore-j'avais oublié de le dire tout à l'heure-que le président du Comité permanent des transports ait banalisé le pont de Québec en me disant qu'il était bien entendu que le nouveau CN privatisé n'irait pas sauver n'importe quel pont qui enjambe un ruisseau au fond d'un rang ou n'importe quel bout de rail dans n'importe quel village du Canada, ou n'importe quelle vieille gare au Canada.

Le pont de Québec a été comparé à cela, et c'est aberrant. Pour s'en convaincre, peut-être que les gens qui nous écoutent diront que le député du Bloc québécois fabule et il en invente. Je vous suggère de consulter les procès-verbaux du Comité permanent des transports et vous serez en mesure de constater où est la vérité.

En terminant, j'aimerais parler un peu de la motion no 15. L'objectif de cet amendement est d'éviter que les CFIL, les chemins de fer à intérêts locaux, dans lesquels le CN pourrait avoir des intérêts, soient placés sous juridiction fédérale.

(2430)

On sait que, actuellement, tout ce qui est transport intraprovincial est de compétence provinciale. Nous nous inquiétons au sujet du libellé de l'article 16 du projet de loi, et c'est la raison pour laquelle on dépose un amendement pour s'assurer que les CFIL demeurent dans le champ de juridiction provinciale et non pas dans le champ de juridiction fédérale.

Il est bien entendu qu'en déclarant que les ouvrages de transport de nature interprovinciale, mais en utilisant les mots-vous verrez dans le projet de loi-«à l'avantage du Canada», on évite que les CFIL, dans lesquels le CN aurait des intérêts, soient automatiquement placés sous juridiction fédérale, et c'est là le sens de notre amendement.

Le CN pourrait ainsi devenir un partenaire et participer à la création des CFIL. Je pense que notre parti a démontré une ouverture vis-à-vis les CFIL; c'est peut-être une voie d'avenir, une voie où on aura beaucoup plus de flexibilité pour répondre aux clients, etc. Mais pour éviter l'abandon, ce qui est important, c'est qu'un grand nombre de tronçons pourront être repris par des CFIL, dont certains pourront même appartenir au CN. Je pense qu'au lieu d'abandonner le service dans des régions, il est important, et je conclus là-dessus, de considérer le rail comme un aéroport, comme un port. Un outil de transport, c'est avant tout un instrument de développement économique régional.


13994

Il est bien entendu que lorsqu'on ferme la ligne de chemin de fer, ça peut compliquer drôlement la capacité de faire du développement économique régional.

En concluant, je vous cite un exemple: il y a un projet de cimenterie à Port-Daniel, en Gaspésie. C'est malheureux, mais le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine n'a jamais questionné, n'est jamais intervenu sur ce projet de cimenterie, et pourtant c'est dans son comté, probablement parce que ça ne l'intéresse pas. Mais il y a un projet de cimenterie dans ce magnifique petit village qui affiche, malheureusement, un taux de chômage qui se situe au-delà de 25 p. 100 et les promoteurs de cette cimenterie ont deux exigences. La première, c'est d'avoir un port de mer; le village de Port-Daniel est situé dans la Baie-des-Chaleurs, et je pense que d'avoir un port de mer en eau profonde ne pose pas de problème. La deuxième exigence, pour sortir la poudre de ciment vers les marchés canadiens et américains, est d'avoir une ligne de chemin de fer, parce qu'on sait que l'état de la route en Gaspésie ne peut supporter un camionnage lourd.

Donc, si on ferme la ligne de chemin de fer en Gaspésie, comment va-t-on pouvoir faire en sorte d'attirer des entreprises et pouvoir développer le Québec? C'est ce que je voulais dire en conclusion.

[Traduction]

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, je ne vais pas vous demander plus de temps ou plus de dix minutes. En fait, il se peut que toute mon intervention prenne moins de cinq minutes.

J'ai remarqué une certaine ambivalence dans les banquettes ministérielles à l'égard de ce projet de loi de privatisation. Évidemment, la privatisation n'est pas une entreprise qu'on fait rien que pour le plaisir. Quand on privatise une société, on le fait pour une bonne raison, c'est-à-dire pour donner à une société d'État les moyens de faire de l'argent et d'être efficace.

Le député de London-Est a pris la parole à plusieurs reprises pour dire que nous ne devons pas imposer de contraintes à une société après sa privatisation, sans quoi nous allons à l'encontre de nos propres objectifs. Le gouvernement entend toutefois imposer à cette société privée de continuer à respecter la Loi sur les langues officielles. Pourtant, la Loi sur les langues officielles a été conçue pour les organismes gouvernementaux.

Si le CN continue à encourir les dépenses supplémentaires causées par cette politique et si le commissaire aux langues officielles lui met toujours des bâtons dans les roues, cette société ne pourra pas être aussi compétitive qu'il le faudrait. Il n'est pas nécessaire de lui imposer ces difficultés. Le CN tient la plus grande partie de ses activités à l'ouest de la tête des Grands Lacs. Que ce soit parmi les employés ou au sein de la clientèle, on parle très peu français dans cette région.

Il y aura sûrement des endroits où le CN, comme n'importe quelle autre société au Canada, conservera volontairement la politique de bilinguisme.

(2435)

[Français]

J'ai travaillé de temps en temps dans des mines ou des chantiers où on parlait deux ou même trois langues. Nous devions les utiliser comme il faut pour l'efficacité ou pour la sécurité, mais jamais pour cause de considérations politiques. Ça, c'est le bilinguisme sensé. Il n'est pas toujours nécessaire d'avoir des règles pour tout.

[Traduction]

Je veux parler encore plus brièvement de la motion no 14. On voit encore là un exemple de tentative de la part du gouvernement de conserver un droit de regard sur la société après sa privatisation. Seule la direction de l'entreprise devrait être en mesure de décider quels ponts et quelles voies elle va garder.

Si le gouvernement dit vraiment la vérité, on privatise cette société afin qu'elle fonctionne mieux. Il ne faut pas que les bureaucrates ou les politiciens mettent leurs sales pattes dans les affaires d'une entreprise privée. Sinon, autant ne pas privatiser l'entreprise et continuer à lui dire quoi faire. On ne peut pas gagner sur tous les tableaux.

Ou bien on la privatise, ou bien elle continue d'être à 50 p. 100 une société d'État. J'approuve vivement le projet de privatisation.

En ce qui concerne la dernière motion, celle avec laquelle les députés bloquistes proposent de simplifier le système de réglementation en donnant à cet égard plus de pouvoirs aux provinces et moins au gouvernement fédéral, je suis d'accord en principe, mais je crois que ce n'est ni le lieu ni le moment de débattre de cette question.

Cela ne devrait certes pas figurer dans ce projet de loi. Je termine là-dessus mes cinq minutes d'intervention.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, je serai très bref. Je vais aller exactement dans le sens des propos tenus par mon collègue de Beauport-Montmorency-Orléans.

Le pont de Québec, bien sûr, est un joyau du patrimoine. Il est dans un état indescriptible, suite à l'irresponsabilité autant de Transports Canada que du CN. Le motif pour lequel il est nécessaire d'apporter cet amendement, c'est que ces deux entreprises que sont Transports Canada et le CN n'ont jamais pris leurs responsabilités. Donc en introduisant cet élément dans la loi, peut-être aurons-nous plus de chances de faire en sorte que le Pont de Québec redevienne ce qu'il devrait être, un objet de fierté pour la région de Québec.


13995

Autant la tour Eiffel caractérise la ville de Paris, que la statue de la Liberté la ville de New York, le pont de Québec est un élément qui identifie la région de Québec.

L'amendement est nécessaire parce qu'en 1993, le CN et Transports Canada ont signé une entente qu'ils n'ont jamais respectée. Pourquoi devrions-nous maintenant penser que, après la vente du CN à des actionnaires privés, ces actionnaires diraient tout d'un coup, la main sur le coeur: Il nous faut maintenant assurer la pérennité du pont de Québec. C'est de la foutaise, nous n'en croyons rien.

L'entente qui est intervenue en 1993, à l'article 4, est extrêmement claire: «Le Canada cède le pont de Québec au CN. Le CN s'engage à financer un grand programme d'entretien de ce pont, y compris l'installation et l'entretien d'un éclairage architectural pour remettre cet ouvrage dans un état qui assure sa viabilité à long terme et l'y maintient. Sans que les obligations spécifiées du CN soient limitées, ce dernier tentera de conclure un accord avec la province de Québec.» Et d'ailleurs, Transports Québec n'a jamais été contre un engagement en ce sens.

(2440)

Toujours dans la même entente, à l'article 13, on lit ceci: «La présente entente est régie par le droit du Canada, est interprétée conformément à ce droit et lie les parties et leurs successeurs et cessionnaires.» Alors, si une entente signée entre le ministre des Transports et le CN est restée absolument inopérante, pourquoi faut-il penser que les actionnaires privés feraient mieux? Alors, nous pensons qu'il est essentiel que l'amendement no 14 soit adopté pour permettre, pour s'assurer que les gens qui doivent assumer leurs responsabilités quant à l'entretien du pont de Québec les assument.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, mes collègues m'invitent à justifier ma présence dans ce débat. Autant la présence du député de Louis-Hébert s'explique du fait qu'un pilier du pont est situé dans son comté, autant je dois ajouter qu'il y en a un autre dans le mien.

Vous savez, ce pont a été construit en 1917 et, à l'origine, il servait à permettre aux trains de traverser le fleuve Saint-Laurent. C'est un fleuve, monsieur le whip du Parti libéral. Ce n'est pas un ruisseau, comme le disait mon collègue de Beauport. Or, si jamais ce pont, faute d'entretien, s'écroulait, il ne s'agit pas d'insécuriser la population, mais si jamais il s'écroulait et que les trains du CN ne pouvaient plus passer dessus, imaginez le trajet qu'il faudrait faire pour transporter des marchandises. Il faudrait passer par Québec, se rendre à Montréal et ensuite s'en aller vers les Maritimes.

Cela n'a pas de sens! C'est inacceptable. Bien sûr, pour les 20 prochaines années, le pont ne risque peut-être pas de tomber, mais son apparence physique est en train de se détériorer, à un tel point que les gens de la région de Québec nous disent que c'est un pont qui appartient au fédéral et qu'il est le symbole même du fédéralisme, c'est-à-dire que l'état du fédéralisme au Québec, actuellement, est en pleine décrépitude.

Ça fait réagir du monde ici. Si les gens du gouvernement fédéral libéral actuel voulaient améliorer un peu leur visibilité d'ici le référendum, ils devraient s'engager dans le sens demandé par la coalition, parce que chaque jour, chaque personne qui vient me voir, non seulement les gens de la région de Québec, mais les visiteurs de l'étranger, constatent la décrépitude de ce symbole. Alors, je pense qu'il serait à l'avantage du Parti libéral, c'est un précieux conseil qu'on donne au gouvernement, de voir à l'entretien du pont, à refaire son image.

Or, ça serait aussi aux gens de la coalition à leur rappeler que cela créerait 200 emplois pendant six ans. N'est-ce pas, mon collègue? Pendant six ans. Cela permettrait la restauration de ce pont et cela créerait des emplois, en plus de l'achat de matériaux. Donc, il y a un impact économique. On cherche des projets pour mettre du monde au travail, des choses utiles, alors en voilà un, le pont de Québec.

C'est un coût de 40 millions de dollars, mais il faut le mettre. Fait assez bizarre d'ailleurs, un ingénieur m'a raconté cette semaine qu'on a confié l'étude de tout cela à une firme américaine. Le CN a confié cela à une firme américaine. Les Américains reconnaissent l'importance de ce pont. Ils s'y sont intéressés et lui ont d'ailleurs attribué un prix d'architecture et d'ingénierie. On a déjà dit que c'était l'une des huit merveilles du monde. Ce n'est pas rien.

Mais actuellement, la merveille n'émerveille plus personne. C'est devenu le contraire, c'est devenu une honte. Alors, il faut faire quelque chose, mais laisser cela entre les mains d'une compagnie qui se privatisera, ça n'a pas de bon sens.

(2445)

Aucune compagnie privatisée n'acceptera de mettre 40 millions de dollars pour restaurer ce pont, à moins qu'on ne l'y oblige. Personne ne le fera. Alors, on demande au fédéral de se comporter comme un propriétaire, non pas comme un locataire, puisque c'est lui qui en est le propriétaire, et de restaurer ce pont pendant qu'il en est encore temps.

L'amendement proposé par notre collègue, le député de Beauport-Montmorency-Orléans, est valable puisque le gouvernement fédéral a cru bon d'enlever la tour de Toronto des actifs du CN. Si c'est bon pour Toronto, ça devrait être bon pour Québec. Je termine là-dessus, il est assez tard.

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Monsieur le Président, je serai bref. On ne se demandera pas pourquoi j'interviens sur la question du pont de Québec.

Une voix: On va le savoir.

M. Langlois: Tout d'abord, c'est pour des raisons historiques. Lorsqu'il s'est effondré pour la deuxième fois, mon grand-père était présent. Alors, cela a meublé les histoires au coin du feu dans ma jeunesse. J'ai eu l'occasion de le traverser souvent. L'honorable député de Lévis parlait de la tour du CN à Toronto, eh bien, la comparaison qu'on pourrait faire avec le pont de Québec, ce serait plutôt de le comparer à la tour de Pise, car il est à peu près dans le même état.


13996

Il y a un dernier élément qui est d'ordre plus personnel et même d'ordre religieux, parce que chaque fois que je traverse le pont de Québec en train, je me vois confronté à ma destinée et je ne peux m'empêcher de réciter mon acte de contrition. Je me demande, chaque fois, si je réussirai à me rendre de l'autre côté.

Si vous avez eu l'occasion de vous rendre dans la ville de Québec à plusieurs reprises, je vous invite au moins à aller contempler le pont de Québec de la belle ville de Saint-Romuald et vous constaterez le désastre visuel qu'il constitue, en plus du risque pour la sécurité des personnes qui doivent le traverser.

Ce pont demeurant la propriété de la Couronne fédérale et par voie de succession d'État, on verra ce qui arrivera après, on aura au moins l'assurance que ce pont pourra être réparé, puisque les travaux nécessaires ont été constatés. Je vois, dans les notes que mon collègue de Beauport-Montmorency-Orléans a eu la grâce de me remettre, qu'en 1994-cela ne fait pas très longtemps, c'est l'an dernier-on a mandaté et payé une firme américaine, la firme Mojeski and Masters, 700 000 $ U.S. pour effectuer une inspection visuelle de la sous-structure et de la superstructure du pont. Il doit y avoir des compétences au Canada pour faire ce genre de travail, mais on a donné le contrat à une compagnie américaine.

Dans le contexte du démantèlement des voies ferrées que nous avons suivi dans Bellechasse, tout le tronçon Monk, c'est-à-dire les trains qui partaient de Charny pour se rendre à Edmunston, au Nouveau-Brunswick, on a démantelé la voie ferrée. Il n'y a même plus de rails. L'emprise n'a pas encore été rétrocédée aux propriétaires initiaux, mais les rails ne sont plus là.

Devant la catastrophe qu'a constituée le démantèlement des voies ferrées, depuis 1867, le chemin de fer étant un symbole et une réalité au Canada, c'est avec plaisir que j'appuie l'amendement du député de Beauport-Montmorency-Orléans, et que je voterai en faveur du maintien du pont du Québec comme propriété de la Couronne.

[Traduction]

M. Joe Fontana (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à assurer à tous les députés ici présents que je prendrai moins de temps que les députés du Bloc québécois. Je ne parlerai pas plus longtemps que ne l'a fait le député de Kootenay-Ouest-Revelstoke.

En ce qui concerne les motions nos 12 et 13, qui modifient l'article 15 du projet de loi, le CN fonctionne actuellement dans les deux langues officielles, conformément à la Loi sur les langues officielles. Comme il restera un chemin de fer national, le CN continuera de servir ses clients anglophones et francophones dans tout le pays.

Le maintien de l'application de la Loi sur les langues officielles ne nécessitera pas de changement à ses activités. En outre, les dirigeants du CN ont fait valoir que c'était bon pour les affaires que d'exploiter un chemin de fer bilingue.

(2450)

De plus, l'intention du CN de continuer de fonctionner comme compagnie bilingue n'aura non plus aucun impact sur la valeur des actions de la compagnie quand elles seront vendues.

En ce qui concerne la motion no 14, qui porte sur l'entretien, la réparation et la remise en état du pont de Québec en la ville de Québec, le gouvernement comprend le désir de veiller à ce que le pont de Québec soit maintenu en bon état, mais ce n'est pas par le projet de loi C-89 que l'on va obtenir de telles garanties.

Mettre un article pareil dans ce projet de loi serait mal vu par les investisseurs qui y verraient un coût d'exploitation imposé au CN. Le CN a dit qu'il était prêt à porter à 1,5 million de dollars sa contribution aux frais d'entretien. Cependant, la province de Québec doit faire une contribution égale. Il ne faut pas oublier que la province a un intérêt dans ce pont parce que c'est un ouvrage d'art routier, un secteur qui relève de la compétence provinciale.

J'espère que les députés du Bloc feront valoir à leurs amis à Québec qu'ils ont une part de responsabilité égale en ce qui concerne l'entretien de ce pont étant donné que 70 p. 100 de la circulation sur ce pont est routière et que la circulation routière relève de la compétence provinciale.

Je peux assurer au député et à tout le monde que l'état de ce pont ne pose aucun danger. Le pont a besoin d'être réparé. Le CN est tenu de veiller à son entretien et a promis de le faire. Cependant, il faut faire en sorte que la province fasse sa part, de même que les gens dont on nous a parlé, qui tiennent à conserver ce pont pour des raisons historiques.

Ainsi, nous ne pouvons appuyer la motion no 14.

En ce qui concerne la motion no 15, qui touche l'article 16, le projet de loi C-89 n'aura aucune répercussion sur le palier dont relèveront les compagnies ferroviaires interprovinciales ou intraprovinciales. À l'heure actuelle, les chemins de fer interprovinciaux sont de compétence fédérale et doivent respecter les règlements fédéraux sur la sécurité. Les compagnies intraprovinciales peuvent choisir de se constituer en personne morale aux termes de la loi de la province dans lesquelles elles sont établies ou encore de la loi fédérale.

De nos jours, la plupart des exploitants de lignes ferroviaires intraprovinciales sur courtes distances, préfèrent se constituer en personne morale aux termes de la loi provinciale. Les compagnies de ce genre, établies au Canada, qu'elles soient interprovinciales ou intraprovinciales, demeurent des compagnies ferroviaires de première catégorie et sont donc visées par la loi fédérale.

On peut prendre pour exemple de cela la compagnie ferroviaire sur courtes distances que le CN et ses employés ont établie récemment dans le nord du Québec. Là encore, le projet de loi C-89 ne touchera rien de cela et l'amendement proposé à l'article 16 est donc inutile.

Le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Le vote porte sur la motion no 12. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?


13997

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Une voix: Avec dissidence.

(La motion no 12 est rejetée.)

Le Président: Le prochain vote porte sur la motion no 13. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion, veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Une voix: Avec dissidence.

(La motion no 13 est rejetée.)

Le Président: Le prochain vote porte sur la motion no 14.

(2455)

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est différé.

Nous passons maintenant au groupe no 6 et le vote porte sur la motion no 15. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est différé.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, je n'utiliserai pas la même terminologie que le whip en chef du gouvernement qui dit: «Je crois que vous trouverez consentement unanime.» Je crois qu'il y a consentement unanime à l'effet de déposer un amendement supplémentaire. Dois-je le lire?

Des voix: On aimerait le comprendre.

M. Guimond: Vous aimeriez le comprendre? D'accord. À cette heure-là j'ai tendance à être solitaire.

Je propose donc, appuyé par le député de Kamouraska-Rivière-du-Loup:

Que l'article 8 soit modifié en ajoutant immédiatement après la ligne 19, page 5, ce qui suit:
«(5.1) Les alinéas 5a), b) et c) s'appliquent seulement:
a) aux personnes qui ont la citoyenneté canadienne ou qui sont résidents permanents au Canada;
b) aux sociétés constituées au Canada qui ne sont pas contrôlées par des personnes qui ne sont ni citoyens canadiens, ni résidents permanents au Canada, non plus que par des personnes morales constituées à l'étranger.»
[Traduction]

Le Président: Y a-t-il consentement unanime à ce que le député propose la motion?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Guimond: Monsieur le Président, je vais essayer d'aller le plus rapidement possible.

Vous savez que les firmes Scotia McLeod, Nesbitt Burns et Goldman Sachs ont été retenues pour coordonner la commercialisation du CN au niveau international. L'objectif de cet amendement est de s'assurer que le Canadien National demeure sous contrôle canadien puisque c'est l'argent des contribuables canadiens qui a servi à le bâtir, et c'est le sens de notre amendement.

Je peux vous dire que, au Comité des transports, j'ai été énormément déçu de voir le syndicat des trois compagnies responsables d'enclencher le processus d'émission d'actions refuser de répondre à mes questions et, entre autres, une question très légitime que j'avais posée qui était: Quels seront vos honoraires pour faire cet exercice? Je pense que les payeurs de taxes du Québec et du Canada ont le droit de savoir quels seront les honoraires versés à Scotia McLeod, à Nesbitt Burns et Goldman Sachs, une compagnie américaine, pour enclencher le processus d'émission d'actions du CN.

C'était très légitime, et je me suis fait répondre que «c'est un renseignement confidentiel auquel je ne peux apporter de réponse.» Moi je veux dire que c'est une réponse insatisfaisante.

13998

J'avais des questions très pertinentes à leur poser pour lesquelles je n'ai pas eu non plus de réponse. Je vous les cite, seulement quelques-unes, j'en avais une liste de 21. Entre autres je leur ai demandé:

[Traduction]

Sur quelles statistiques financières se fondera-t-on pour fixer le prix de vente du CN? Je m'intéresse aux statistiques suivantes pour les années 1990-1995 à 2000. J'ai posé des questions sur l'encaisse d'exploitation, l'encaisse qui reste après les dépenses en capital mais avant les dividendes, le bénéfice d'exploitation et le bénéfice net.

(2500)

[Français]

J'avais de telles questions, pour lesquelles je n'ai pas obtenu de réponse. Je leur avais demandé, entre autres:

[Traduction]

Quelle est, d'après vous, la valeur des biens-fonds et des autres biens immobiliers?

[Français]

Je n'ai obtenu aucune réponse, et c'est la raison pour laquelle je suis très inquiet que le nouveau CN privatisé ne tombe sous contrôle étranger, alors que les contribuables du Québec et du Canada ont contribué largement à le bâtir.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je serai aussi très bref. Je voudrais juste attirer l'attention des députés de la Chambre sur l'impact d'adopter ou de rejeter cet amendement.

Je voudrais rappeler l'histoire. Il y a eu des choix faits, au cours de l'histoire canadienne, à l'effet que le chemin de fer passe, entre autres, du Nouveau-Brunwick à travers l'est du Québec et vers l'Ontario par la suite. Ces choix-là avaient même conduit à la mise en place de programmes de subventions au transport pour compenser le fait qu'il y avait plus de kilométrage à passer par là que passer par les États-Unis.

Si on n'adopte pas l'amendement qui est devant nous présentement, on pourrait facilement se retrouver dans une situation où les intérêts américains pourraient acheter, contrôler le CN et s'assurer ainsi de la fermeture de certaines parties de la ligne et ce, à l'avantage des lignes américaines, c'est-à-dire des lignes qui traversent les États-Unis.

Cette situation-là est vraie dans l'est du Canada et dans l'ouest du Canada. Je pense que si on n'y fait pas attention, on se rendra compte, dans 25, 30 ou 35 ans, qu'on a fait un choix stratégique au désavantage du Québec et au désavantage du Canada. Par le passé, on a vu que le Québec a subi plusieurs contrecoups des choix stratégiques qu'on avait faits par rapport au rail. L'amendement qui est devant nous vise à éviter ce genre de situation-là.

J'attire l'attention sur le fait aussi qu'il ne serait pas interdit à un groupe canadien de posséder plus de 15 p. 100 des actions du CN. Cela pourrait permettre à des intérêts québécois, par exemple, de s'assurer qu'à l'avenir, tout le réseau ferroviaire du Québec soit développé en correspondance avec le réseau routier. C'est pour ces raisons que cet amendement devrait être adopté.

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, même s'il est tard, je demande la permission pour dire quelques mots, car je pense que c'est un sujet très important.

J'appuie cette motion qui est importante, parce que les libéraux, lorsqu'ils étaient dans l'opposition, étaient plus nationalistes et canadiens qu'aujourd'hui. Je pense qu'ils défendaient mieux les intérêts des Canadiens, il y a quelques années. Aujourd'hui, c'est chose du passé. Je pense qu'il y a des gens dans ce pays qui craignent le contrôle étranger de la nouvelle compagnie qui va acheter le CN.

Le seul fait, par exemple, d'avoir choisi la firme Goldman Sachs de New York est un mauvais signe, quant à moi, et pour cette raison, je tiens à appuyer cette motion qui est très importante.

[Traduction]

M. Joe Fontana (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je veux prendre deux minutes à peine pour parler d'un amendement et d'une question très importante.

Tout d'abord, je tiens à dire que rien ne prouve qu'il y a eu une prise de contrôle par les intérêts étrangers dans d'autres pays où il y a eu privatisation. En fait, pour empêcher toute prise de contrôle individuelle relativement au CN, comme nous l'avons déjà mentionné, nous avons imposé une restriction de 15 p. 100 à la propriété individuelle.

De plus, l'article 8 de la loi habilitante interdit aux investisseurs de s'associer pour contrôler la compagnie en combinant le pouvoir de vote que leur confèrent leurs parts. Insérer un tel amendement dans ce projet de loi nuirait à la fois à la valeur des actions et à ce que le gouvernement et, partant, le contribuable canadien, recevrait.

Je ne pense pas que nous ayons de leçon à recevoir du Bloc québécois en ce qui concerne la protection des intérêts des Canadiens. Nous voulons obtenir, pour les Canadiens, le meilleur rendement possible en ce qui concerne ce chemin de fer national et nous n'avons pas besoin de leçons de ces députés sur la façon de construire de bons chemins de fer nationaux.

Je voudrais aussi profiter de l'occasion pour dire qu'en ce qui concerne les montants à propos desquels le député s'est informé, ils seront déterminés, de toute évidence, en temps utile. Je crois qu'il a également entendu que c'est cette équipe mondiale qui offrira les actions dans toute l'Amérique du Nord et sur les autres continents. C'est pourquoi elle a été formée.

(2505)

Il a également entendu que notre ministre des Transports a en fait négocié le meilleur marché possible en ce qui concerne les commissions et ces gens-là lui ont fait des compliments pour la fermeté dont il a fait preuve au cours des négociations. Je peux vous assurer que nos preneurs fermes mondiaux nous en donneront pour notre argent.

Le Président: Chers collègues, nous sommes arrivés au groupe 7, à la motion no 17. La Chambre est-elle prête à se prononcer?

13999

Des voix: Le vote.

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est reporté.

La Chambre passe maintenant aux votes par appel nominal différés à l'étape du rapport du projet de loi à l'étude.

Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre:

Le Président: Conformément à l'article 45 du Règlement, les votes par appel nominal différés sont reportés au lundi 19 juin à 23 h 30.

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) propose:

Que la Chambre s'ajourne maintenant.
(La motion est adoptée.)

(La séance est levée à 1 h 9.)