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TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 1er novembre 1995

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'UNITÉ CANADIENNE

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 16059

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

M. DAVID MCINTOSH

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

LE SÉNAT

L'UNITÉ CANADIENNE

LES ÉTUDES SUR LES DÉDOUBLEMENTS

RENÉ LÉVESQUE

    M. Lavigne (Beauharnois-Salaberry) 16060

M. KEN SARO-WIWA

LE MOUVEMENT SOUVERAINISTE QUÉBÉCOIS

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

    Mme Dalphond-Guiral 16061

LA CONSTITUTION

L'UNITÉ CANADIENNE

THE OTTAWA SUN

HOMMAGE AU PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

HOMMAGE AU PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16062

QUESTIONS ORALES

LE RÉFÉRENDUM

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16063
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16064
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16064

LA SOCIÉTÉ DISTINCTE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16064
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16065

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16065
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16065
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16066

LA SOCIÉTÉ DISTINCTE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16066
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16066

L'UNITÉ NATIONALE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16066
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16066

LES CHANGEMENTS CONSTITUTIONNELS

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16067
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16067

L'UNITÉ NATIONALE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16067
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 16067

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

LA VIOLENCE DOMESTIQUE

LES ASSISTÉS SOCIAUX

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 16069
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 16069

LA DÉFENSE NATIONALE

L'ÉCONOMIE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 16070
    M. Martin (LaSalle-Émard) 16070

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

    M. Speaker (Lethbridge) 16070

LES VOTES

AFFAIRES COURANTES

BUDGET SUPPLÉMENTAIRE (A), 1995-1996

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

L'IMMIGRATION

L'IMMIGRATION

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

LA LOI SUR LE SYSTÈME CORRECTIONNEL ET LA MISEEN LIBERTÉ SOUS CONDITION

    Projet de loi C-355. Adoption des motions deprésentation et de première lecture 16079

LE BUDGET SUPPLÉMENTAIRE (A), 1995-1996

RENVOI AUX COMITÉS PERMANENTS

    Adoption de la motion 16080

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion d'adoption du 96e rapport 16080
    Adoption de la motion 16080

INDUSTRIE

    Adoption de la motion 16080

PÉTITIONS

LES MARCHÉS DE L'ÉTAT

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔTDE DOCUMENTS

DEMANDES DE DOCUMENTS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LES SANCTIONS ADMINISTRATIVES PÉCUNIAIRESEN MATIÈRE D'AGRICULTURE ET D'AGROALIMENTAIRE

    Projet de loi C-61. Motion de troisième lecture 16081
    M. Chrétien (Frontenac) 16082
    Report du vote sur la motion 16095

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR LECOMMERCE INTÉRIEUR

    Projet de loi C-88. Reprise de l'étude endeuxième lecture 16095

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LOI SUR L'AIDE FINANCIÈRE AUX INTERVENANTS

    Projet de loi C-339. Motion de deuxième lecture 16096

ANNEXE


16059


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mercredi 1er novembre 1995


La séance est ouverte à 14 heures.

_______________

Prière

_______________

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'UNITÉ CANADIENNE

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, les événements de lundi au Québec nous ont montré que le verre est à moitié plein.

Au cours des dernières semaines, nous avons assisté à des manifestations d'émotions de la part des Canadiens d'un bout à l'autre du pays, qui sont passés de l'observation passive à la participation active aux affaires de leur pays.

Nous devrions tous être impressionnés par la profondeur de leurs sentiments, par leur bonne volonté et par leur ouverture au changement. Devant cette générosité, il incombe au Parlement de faciliter le développement de cette expression d'attachement pour le Canada. En tant que parlementaires, nous devons tâcher de cultiver cet empressement des Canadiens qui veulent participer au processus de redéfinition du Canada.

Il faut remercier les Canadiens de leur bonne volonté et de leur ouverture au changement. Il faut en apprécier la valeur et les impliquer dans le processus de redéfinition de leur pays.

* * *

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, depuis deux ans que nous sommes à la Chambre, les députés du Bloc québécois n'ont fait aucun mystère de leur programme. Bien que mes collègues et moi soyons catégoriquement opposés à ce programme, j'ai traité ces députés avec respect et je reconnais qu'ils ont fait de même à mon égard. La démocratie commande que nous agissions ainsi.

J'ai été absolument scandalisé par les commentaires de M. Parizeau le soir du référendum et par ceux de M. Bouchard il y a quelques semaines. Les chefs du mouvement séparatiste devraient se préoccuper davantage du principe d'égalité, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Québec, que de l'origine ethnique de ceux qui votent.

Le fait que M. Parizeau ait maintenant démissionné ne change rien à ses propos, pour lesquels il n'a toujours présenté aucune excuse. Il a démissionné, ce qui est bien, mais même sa démission est suspecte.

Il faut espérer que, dans les jours qui viennent, la grande majorité des Québécois prendront leurs distances par rapport à la position de MM. Parizeau et Bouchard, et. . .

Le Président: Je rappelle à tous les députés qu'à la Chambre, ils doivent s'adresser à chacun des députés par le nom de sa circonscription et non par son nom.

* * *

M. DAVID MCINTOSH

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec une profonde tristesse que je fais part à la Chambre du décès d'un grand journaliste et auteur canadien, Dave McIntosh.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, M. McIntosh a servi avec vaillance comme navigateur de bombardier, et il a reçu la Croix du service distingué dans l'Aviation. En 1946, il est entré au service de l'agence Presse canadienne, où il est resté pendant 25 ans. Il s'est bâti une réputation de journaliste d'une irrépressible curiosité et d'une honnêteté rigoureuse. Il était une autorité très respectée en matière de défense et il savait dénoncer d'une manière merveilleusement malicieuse les travers d'Ottawa et du Parlement.

La Tribune de la presse parlementaire a honoré M. McIntosh en le nommant membre honoraire à vie lorsqu'il a quitté le journalisme. M. McIntosh a publié quelques livres, dont le récit léger mais effrayant de son service de guerre, Terror in the Starboard Seat, ainsi qu'une collection très amusante de ses anecdotes sur le gouvernement, Ottawa Unbuttoned.

Nous nous joignons à sa femme, Jean, à ses enfants, à ses petits-enfants et à ses nombreux amis pour déplorer la disparition d'un Canadien exceptionnel.

* * *

[Français]

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais, en tant que député de Pierrefonds-Dollard, au Québec, circonscription qui correspond à la mosaïque du Canada, c'est-à-dire qui comprend 30 p. 100 d'allophones répartis en 52 groupes ethniques différents, 40 p. 100 d'anglophones et 30 p. 100 de francophones, vous dire à quel point j'ai été non seulement choqué des propos mûris et réfléchis tenus par le premier ministre


16060

du Québec au sujet des responsables de la défaite du camp référendaire, mais également outré du refus de ce dernier de se rétracter.

Cette attitude se doit d'être vigoureusement dénoncée, car le Québec, de même que le Canada, est une grande terre d'accueil pour tous les citoyens du monde. Les propos tenus par le premier ministre du Québec sont graves, puisqu'ils sont réfléchis et prononcés par un premier ministre, mais je veux réassurer tous mes collègues de cette Chambre et les citoyens du Canada que la réalité est toute autre. Les Québécois de toutes origines sont des gens fiers et les portes du Québec seront toujours ouvertes à tous les citoyens du monde.

* * *

[Traduction]

LE SÉNAT

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, au dernier référendum, l'électorat québécois a sonné l'alarme. Les citoyens du Québec et de l'ensemble du Canada réclament des changements à la fédération canadienne qui ne provoqueraient pas de disputes politiques.

Les vieilles pratiques politiques du premier ministre, qui continue de nommer ses partisans au Sénat, sont devenues inadmissibles. Le premier ministre doit prendre le virage qui mène à un nouveau Sénat, un Sénat qui serait élu, efficace et à représentation égale. La première mesure non constitutionnelle à prendre pour légitimer cette institution consiste à faire élire les membres de la Chambre haute.

Le Parti réformiste réclame des changements s'inspirant de la loi sur la sélection des sénateurs qui a été adoptée par l'assemblée législative de l'Alberta en 1989 et qui a permis l'élection du regretté sénateur Stan Waters.

Le référendum devait sonner le réveil chez le gouvernement fédéral. Le Parti réformiste est le seul parti fédéral qui propose des solutions aux problèmes. Les Canadiens sont conscients du fait que le réveil a sonné, mais que le premier ministre continue de roupiller.

* * *

L'UNITÉ CANADIENNE

Mme Jean Payne (St. John's-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier ici aujourd'hui tous les Canadiens qui ont participé au ralliement du non, au Québec, la fin de semaine dernière, et notamment ceux de St. John's-Ouest, ma circonscription.

Mon bureau a été inondé de lettres de soutien dans lesquelles on transmettait ses bons souvenirs à tous les Québécois en nourrissant l'espoir que le Québec restera dans le Canada.

Je veux citer une lettre d'une électrice d'Argentia, dans ma circonscription, exprimant ce qu'elle ressent au retour du ralliement pour le non, à Montréal:

Madame la députée,
Je ne me suis jamais sentie plus Canadienne que lorsque nous sommes arrivés à Montréal, la fin de semaine dernière, pour participer au ralliement et que nous avons été accueillis par des manifestations d'amour et de gratitude. Les gens que nous avons rencontrés étaient comme nous-leurs manifestations de gratitude à notre endroit faisaient vraiment chaud au coeur.
«Merci beaucoup pour votre considération, dit une femme. Nous en avons besoin; nous ne voulons pas nous séparer du Canada; nous souffrons beaucoup en ce moment.»

* * *

(1405)

[Français]

LES ÉTUDES SUR LES DÉDOUBLEMENTS

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, à la suite du référendum qui s'est tenu au Québec, le message des Québécois est on ne peut plus clair. Les Québécois veulent des changements profonds et rapides. J'ai promis à mes électeurs de Brome-Missisquoi de porter ce flambleau de changement à Ottawa.

Du parquet de cette Chambre, je demande bien humblement au gouvernement du Québec de nous faire parvenir, dans les plus brefs délais, les études sur les dédoublements qui sont en leur possession, de façon que nous nous mettions immédiatement à la tâche.

Bougeons tout de suite pour que, tous ensemble, d'un bout à l'autre du Canada, nous puissions dire rapidement à la population canadienne: Voici ce Canada évolutif que vous réclamez.

* * *

RENÉ LÉVESQUE

M. Laurent Lavigne (Beauharnois-Salaberry, BQ): Monsieur le Président, le 1er novembre 1987 nous quittait le père fondateur du Parti québécois et du mouvement souverainiste, M. René Lévesque.

Mieux que quiconque, M. Lévesque a incarné la confiance des Québécois en eux-mêmes. Il fut l'un des principaux artisans de la Révolution tranquille par son rôle de premier plan dans le gouvernement Jean Lesage et, notamment par la nationalisation de l'électricité, il a contribué à l'édification du Québec moderne.

Comme premier ministre du Québec, il a laissé un héritage marquant. Rappelons-nous par exemple la Charte de la langue française et de la reconnaissance du droit des autochtones à l'autonomie gouvernementale.

Il nous a légué un sens démocratique sans faille et des moeurs politiques assainies par, entre autres, l'adoption de la Loi sur le financement politique, sa plus grande fierté.

En grand démocrate, je suis sûr que René Lévesque aurait été fier des 94 p. 100 des Québécois et des Québécoises qui se sont prévalus de leur droit de vote lundi dernier.


16061

[Traduction]

M. KEN SARO-WIWA

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway, NPD): Monsieur le Président, l'auteur et environnementaliste nigérian, M. Ken Saro-Wiwa, lauréat du Goldman Environment Prize 1995 pour l'Afrique, a été condamné hier à la peine capitale, sans droit d'appel, par un tribunal spécial après un simulacre de procès.

M. Saro-Wiwa est le fondateur de PEN Nigéria, membre honoraire de PEN Canada, président de la Nigerian Association of Authors, président de la Ethnic Minority Rights Organization d'Afrique et dirigeant du mouvement en faveur de la survie du peuple ogoni.

Depuis 37 ans, ce peuple est exploité et son territoire est ravagé par des intérêts pétroliers internationaux qui en ont extrait pour plus de 30 milliards de dollars de pétrole et y ont provoqué un désastre écologique.

Je me joins à Amnistie Internationale, à Human Rights Watch et à PEN Canada pour dénoncer cette condamnation à mort. Je demande au gouvernement de faire de même dans les termes les plus énergiques, d'imposer des sanctions au Nigéria et d'exiger la remise en liberté immédiate et inconditionnelle de M. Saro-Wiwa, qui a toujours nié catégoriquement avoir été impliqué dans ces meurtres.

* * *

[Français]

LE MOUVEMENT SOUVERAINISTE QUÉBÉCOIS

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, la question que se posent aujourd'hui les millions de Québécoises et de Québécois qui ont voté lors du référendum de lundi est fondamentale.

À quelle source s'alimentent les racines profondes du mouvement souverainiste québécois? Le nationalisme territorial dont on nous a si souvent parlé au cours des derniers mois semble de plus en plus difficile à concilier avec les multiples déclarations d'intolérance venant de différents porte-parole du oui.

L'heure est à la solidarité et à la cohésion. De tous les coins du Québec, les Québécois et les Québécoises attendent que leurs gouvernements reprennent là où ils ont quitté plusieurs mois auparavant.

Le défi que nous avons à relever est de poursuivre la construction d'un Québec fort et dynamique à l'intérieur d'un Canada uni. Un tel projet de société ne saurait souffrir des effets désastreux qu'engendrent invariablement la ségrégation et l'intolérance.

* * *

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, lundi soir dernier, le chef du camp du oui a fait porter le poids de la défaite de son option sur le dos des communautés ethniques. Hier encore, alors qu'il annonçait sa démission en tant que premier ministre, il n'a même pas eu la décence de s'excuser. Au contraire, il a répété ses propos en essayant de les justifier.

Cela jette un éclairage troublant sur les fondements mêmes du nationalisme québécois. De toute évidence, celui-ci se moque des règles électorales qui prévalent au Québec qui ne tiennent pas compte de l'âge, de la citoyenneté et du lieu de résidence pour l'attribution du droit de vote.

(1410)

Une déclaration aussi troublante, faite à un moment crucial de l'histoire du Québec et du Canada, nous force à réfléchir au caractère démocratique du projet dont elle est issue. Nous réaffirmons aujourd'hui que le Canada est et demeurera pour toujours le pays de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes.

* * *

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, c'est avec une vive émotion que nous apprenions hier le départ de M. Jacques Parizeau. Tous les Québécois et toutes les Québécoises reconnaissent sa remarquable contribution à l'édification du Québec moderne.

Conseiller de plusieurs premiers ministres, il a participé à l'élaboration des projets qui font notre fierté. De la nationalisation de l'électricité à la création du Régime des rentes du Québec et de la Caisse de dépôt et de placement, M. Parizeau a forgé les outils indispensables à la société québécoise.

Sa contribution émérite à notre développement économique s'est illustrée notamment par le Régime d'épargne-action, le Fonds de solidarité, et plus récemment les Fonds de développement régionaux. L'innovation et la force de ses convictions ont été ses traits distinctifs.

Au nom de tous les Québécois et de toutes les Québécoises, monsieur Parizeau, je veux vous dire du fond du coeur, merci.

* * *

[Traduction]

LA CONSTITUTION

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, les habitants du Canada atlantique se demandent pourquoi les libéraux rejouent encore un vieux disque usé en parlant d'accorder au Québec le statut de société distincte.

Tous les Canadiens reconnaissent le caractère distinct du Québec sur les plans culturel, social et historique, mais ils ne veulent pas qu'une province se voit accorder un statut et des pouvoirs spéciaux au sein de la fédération.

Le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve et l'Île du Prince-Édouard sont également fiers de leur caractère distinct sur les plans social, historique et culturel. En fait, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick sont deux des quatre fondateurs de notre pays, avec l'Ontario et le Québec.


16062

Chaque province au Canada devrait avoir le statut de partenaire égal au sein de cette fédération. Chaque province au Canada est fière de son histoire unique et de son caractère distinct. Chaque province devrait participer à la vie de notre pays sur un pied d'égalité.

Le Parti réformiste défendra énergiquement le droit des provinces de l'Atlantique de se voir accorder les mêmes pouvoirs et droits que les autres provinces. Notre Constitution ne devrait pas être modifiée si c'est pour les priver du statut d'égalité.

* * *

L'UNITÉ CANADIENNE

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour remercier tous les habitants du Nouveau-Brunswick qui sont allés à Montréal à l'occasion de notre rassemblement de la semaine dernière. C'était absolument merveilleux.

Je remercie également tous les députés et sénateurs qui m'ont aidée à obtenir 6 000 drapeaux pour apporter à la gare maritime. Si les députés avaient entendu la foule chanter O Canada!

Les participants ont chanté de telle façon qu'on pouvait les entendre à Victoria, à Terre-Neuve et dans les Territoires du Nord-Ouest. Les murs des édifices en tremblaient. À mes amis du Parti réformiste, je dis que les habitants du Canada atlantique sont entre bonnes mains. Nous nous occupons d'eux.

* * *

[Français]

THE OTTAWA SUN

M. Mauril Bélanger (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le Président, l'excellente réputation canadienne sur la scène internationale lui vient entre autres de ses hauts standards de tolérance, de liberté et de respect. Les grands débats, chez nous, sont encouragés, car c'est du choc des idées que jaillit la lumière.

Ces valeurs fondamentales qui font la fierté de notre pays ont été maladroitement foulées hier par une caricature qu'a publiée le quotidien The Ottawa Sun. Cette caricature n'est pas que de mauvais goût. Elle est insultante et fait offense à toute personne sensée qui place les valeurs morales au-dessus des basses lignes partisanes.

Par la présente, je me fais le porte-parole de tous mes collègues pour dénoncer clairement et sans équivoque ce geste contre notre collègue député de Lac-Saint-Jean. Je souhaite qu'à l'avenir nous nous montrions encore plus fermes et intolérants face à ce genre de dessin dégradant qui s'attaque à l'intégrité physique des individus.

* * *

(1415)

HOMMAGE AU PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

L'hon. Lucien Bouchard (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais aujourd'hui rendre hommage au premier ministre du Québec, M. Jacques Parizeau. Par sa contribution exceptionnelle au développement du Québec, il a été un artisan essentiel de la confiance en soi qu'a acquise le peuple québécois.

Une voix: What?

M. Bouchard: Un peu de respect pour un grand homme qui quitte la vie politique, s'il vous plaît. Il n'y en a pas un de vous qui est digne de lui enlever un cheveu sur la tête.

Des voix: Bravo!

M. Bouchard: Monsieur le Président, l'histoire réservera à Jacques Parizeau une place de choix. . .

Des voix: Oh, oh!

[Traduction]

Le Président: Selon le Règlement, c'est maintenant la période réservée aux déclarations de députés. Nous avons toujours fait preuve de respect mutuel à la Chambre et nous continuerons de le faire.

[Français]

Je cède à nouveau la parole à l'honorable député de Lac-Saint-Jean pour faire une déclaration, et j'ai l'intention de l'écouter.

M. Bouchard: Monsieur le Président, l'histoire réservera à Jacques Parizeau une place de choix dans la marche des Québécois vers leur souveraineté. Pilier du mouvement souverainiste, il a. . .

M. Young: Tous les Québécois, ou seulement quelques-uns?

M. Bouchard: J'entends le ministre des Transports recommencer ses injures, monsieur le Président.

Pilier du mouvement souverainiste, Jacques Parizeau a, en plus, reconstruit le Parti québécois au lendemain d'une période particulièrement difficile. C'est en grande partie à cause de lui que les Québécois se donneront bientôt un pays.

Homme intègre et de convictions profondes, il n'a jamais douté de la nécessité, pour le peuple québécois, de devenir souverain.

Monsieur Parizeau, le peuple du Québec n'oubliera jamais vos efforts pour qu'enfin le Québec ait sa place dans la famille des nations. Vous serez reconnu aux côtés de René Lévesque comme un des grands bâtisseurs du pays du Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: Le très honorable premier ministre désire prendre la parole.

* * *

HOMMAGE AU PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

Le très hon. Jean Chrétien (Saint-Maurice, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais faire une courte déclaration, avec la permission de la Chambre.

16063

Évidemment, en vie publique, on n'est pas toujours d'accord avec tout le monde et parfois, cela crée des situations difficiles.

J'ai bien connu M. Parizeau. Je le connais depuis 1968 et j'ai eu l'occasion de travailler avec lui. Malgré nos divisions profondes au point de vue politique, c'est un homme qui a donné sa vie pour la vie publique. C'est un homme plein de talent qui a travaillé avec les gouvernements pendant de nombreuses années. Il était même conseiller auprès du gouvernement du Canada, au ministère des Finances, lorsque j'étais secrétaire parlementaire du ministre des Finances.

Un jour, nos voies se sont séparées et il est devenu un indépendantiste, un séparatiste. De ce côté, je respecte cette opinion et je l'ai toujours respectée, même si je ne suis complètement d'accord. Maintenant, il a décidé de prendre sa retraite. J'aurais souhaité que cela arrive dans des circonstances moins controversées pour lui-même et pour tout le monde, mais je n'ai aucun contrôle sur ces circonstances.

Je tiens à faire remarquer qu'ici, au Canada, nous vivons une des plus belles démocraties au monde. C'est un exemple. Il n'y a pas beaucoup de pays au monde où on peut soulever, d'une façon civilisée, des passions aussi profondes que de vouloir briser un pays et prendre une partie de ce pays pour en faire un autre.

(1420)

Seulement, c'est un exemple dans le monde qu'on ne peut se permettre ce genre de discours avec beaucoup de passion, mais avec un contrôle tout à fait surprenant. Et personnellement, j'ai même voyagé avec monsieur Parizeau. Nous avons été des compagnons de voyage. Il pouvait être un compagnon très agréable, à l'occasion, quand on ne parlait pas de politique. Évidemment, quand on se mettait à parler de politique, les déjeuners ou les dîners étaient plutôt houleux, mais je dois dire que c'était intéressant.

Aujourd'hui, il a décidé de prendre sa retraite après avoir servi le secteur public pendant de nombreuses années, et on doit le remercier d'avoir servi le public comme il l'a fait. Malheureusement pour moi, j'aurais voulu qu'il demeure un profond fédéraliste. Il a décidé de ne pas le demeurer, et moi, je le suis demeuré. Je suis très constant. Il est devenu constant après ça, il est demeuré peut-être le souverainiste ou le séparatiste le plus constant du groupe. Il n'a pas caché son opinion.

Il a même, un certain moment, quitté M. Lévesque parce qu'il n'était pas d'accord avec le beau risque. Et moi, je dis qu'il prend sa retraite, et les citoyens du Québec et les autres doivent le remercier pour la contribution qu'il a faite au débat public, même si nous n'étions pas d'accord. C'est ça qui est si noble, au Canada, c'est qu'on peut être en désaccord et tout de même servir le public au meilleur de ses connaissances et de ses talents.

[Traduction]

Le Président: Nous avons commencé par la période des déclarations de députés et le chef de l'opposition a fait sa déclaration. J'ai ensuite donné la parole au premier ministre qui, de toute évidence, en a fait une aussi et je crois que c'est devenu une période réservée aux hommages.

Je donnerai maintenant la parole au leader parlementaire, car je suppose qu'en se levant c'est ce qu'il demande, puis nous passerons à la période des questions.

M. Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, j'ai écouté l'intervention du premier ministre. Le Président peut-il veiller à ce que nous ayons droit au temps complet normalement réservé à la période des questions?

Le Président: La réponse est oui.

______________________________________________


16063

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE RÉFÉRENDUM

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, je pense que M. Parizeau et nous-mêmes saurons gré à M. le premier ministre du geste honorable qu'il vient de poser par ses propos. Je l'en remercie. Avec le consentement de la Chambre, j'aimerais déposer le rapport préliminaire du dépouillement du scrutin de lundi.

Le Président: C'est un peu différent aujourd'hui. Peut-être que l'honorable chef de l'opposition pourrait déposer ceci à la fin de la période des questions. On retourne toujours à la période des questions.

M. Bouchard: Monsieur le Président, nous, les Québécoises et les Québécois de toutes allégeances politiques, nous réjouissons ensemble de la qualité démocratique du débat référendaire qui vient de se terminer. En fait, le seul accroc aux règles démocratiques qu'on puisse déplorer est venu d'Ottawa, et de très haut, à savoir du gardien privilégié de la démocratie canadienne, le premier ministre du Canada. On se rappelle, en effet, que ce dernier a déclaré en cette Chambre, qu'il se réservait de ne pas respecter un verdict favorable à la souveraineté en cas d'une majorité serrée pour le oui.

(1425)

Ma question s'adresse au premier ministre. Sachant maintenant que la majorité du non n'est que de six dixièmes de 1 p. 100 au-dessus de 50 et, constatant que les souverainistes lui donnent l'exemple du respect démocratique en s'inclinant devant cette très mince majorité, ne croit-il pas qu'il doit, au nom de la démocratie canadienne, retirer ses propos et s'en excuser?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Absolument pas, monsieur le Président. Absolument pas. Tout d'abord, je dois dire que c'est vrai que 49,4 p. 100 des Québécois ont voté oui. Mais il y a probablement 30 à 40 p. 100 de ces gens-là qui ont voté oui croyant qu'ils allaient demeurer au Canada. Ils n'ont pas tous voté pour la séparation du Québec.

J'étais en automobile, il y a quelques minutes, et les gens appelaient les tribunes téléphoniques pour dire qu'ils ne le savaient pas, ils ne se doutaient pas que c'était un mandat pour faire la séparation.

Jamais le mot «séparation» n'est réapparu dans la bouche du chef de l'opposition depuis qu'il a été obligé de l'utiliser devant les Américains pour se faire comprendre.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, si je comprends bien, il est loisible à un premier ministre du Canada, dans ses fonctions, en pleine Chambre des


16064

communes, de faire des distinctions entre les votes, alors que les votes sont pour le oui.

Que dirait aujourd'hui le premier ministre du Canada si, comme chef de l'opposition officielle, je ne reconnaissais pas la majorité très mince du non? Que dirait-il? Il aurait raison de m'accuser de ne pas être démocrate.

Près de 2,3 millions de Québécois et de Québécoises ont opté, lundi, pour la souveraineté du Québec. Pour un premier ministre qui nous promettait de nous en faire manger une belle, c'est tout un rappel à l'ordre.

Mais la réalité québécoise continue de lui échapper puisqu'il pense maintenant répondre aux attentes du Québec par une insignifiante résolution de cette Chambre, où la reconnaissance du caractère distinctif du Québec serait évoquée du bout des lèvres.

Le premier ministre peut-il ignorer notre réalité québécoise au point de s'imaginer endiguer, par un simulacre aussi grotesque, l'irrésistible poussée souverainiste?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord les Québécois ont parlé et j'espère que le chef de l'opposition va accepter le verdict des Québécois qui ont décidé de rester au Canada. Le soir du verdict, il a dit qu'il allait recommencer immédiatement, alors que les gens ont parlé. C'est lui qui a perdu et qui aurait dû accepter le verdict.

Quant à moi, j'ai la responsabilité, dans ce pays, de faire respecter la Constitution canadienne. Cependant, je n'ai pas eu besoin de me servir de tous les pouvoirs qui nous sont confiés parce que le peuple du Québec a parlé, a décidé de rester au Canada. Et j'espère que le chef de l'opposition va comprendre que ce que les veulent Québécois, c'est que tous les gens qui sont élus, aussi bien à Québec qu'à Ottawa, le sont pour servir les citoyens, pour s'occuper de la croissance économique et de la création d'emplois et qu'ils en ont soupé d'entendre parler des problèmes constitutionnels. Ils veulent que les gouvernements reviennent aux vrais problèmes: la dignité des travailleurs au Québec.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, pour des gens qui en ont soupé, ce n'est pas pire, 94 p. 100, le pourcentage de participation au scrutin populaire.

Après le vote de lundi, le régime fédéral canadien est en sursis. Et ce sursis, il n'est dû qu'à quelques dixièmes de points du suffrage populaire. Dans ce contexte, le premier ministre ne voit-il pas que la seule solution réaliste pour le Québec et le Canada, c'est un nouveau partenariat, négocié d'égal à égal, au lendemain d'un prochain référendum québécois, dont la tenue est inexorable?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les gens ont parlé. La démocratie a parlé. Il est évident que le chef de l'opposition n'accepte pas la démocratie. Est-ce que M. Johnson qui a perdu l'élection avec quatre dixièmes de 1 p. 100 il y a un an. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Chrétien (Saint-Maurice): Est-ce que le gouvernement de M. Parizeau était un gouvernement illégitime, parce qu'ils avaient gagné par quatre dixièmes de 1 p. 100?

(1430)

Le peuple a parlé et il a décidé de rester au Canada malgré toute cette propagande incroyable où on disait aux gens: «Si vous votez non, il n'y aura plus d'assurance-chômage, il vont couper vos pensions», sans que cela soit prouvé. C'étaient des affirmations absolument gratuites. Malgré cela, malgré tous ces mensonges, ils n'ont pas gagné.

* * *

LA SOCIÉTÉ DISTINCTE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, il n'aura pas fallu plus de 24 heures après un non référendaire arraché par des décimales seulement pour que le premier ministre envisage de déposer une simple résolution à la Chambre des communes afin de reconnaître la réalité de la société distincte du Québec. Mais il fait tout cela en s'empressant d'ajouter que cette reconnaissance ne confère ni pouvoir ni statut spécial pour le Québec. Il semble d'accord avec le premier ministre de l'Ontario qui disait: «Ce n'est pas le temps de réagir de façon précipitée en promettant des choses qui pourraient ne pas être réalisables.

Ma question s'adresse au premier ministre. Le premier ministre est-il d'accord avec celui de l'Ontario à l'effet que tout changement qui pourrait être significatif pour le Québec ne serait pas acceptable pour le reste du Canada?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, pour moi, la reconnaissance de la société québécoise comme une société distincte est quelque chose qui est important, que le Parlement du Canada a déjà accepté, qui a été voté dans un référendum, et nous, nous avons voté pour la société distincte. . .

M. Bouchard: C'est faux.

M. Chrétien (Saint-Maurice): Alors que le chef de l'opposition. . .

M. Bouchard: Tout le monde le sait que c'est faux.

M. Chrétien (Saint-Maurice): . . .et que le leader de l'opposition ont voté contre Charlottetown. Et ensuite ils se promenaient au Québec, nous reprochant de ne pas avoir livré Charlottetown, quand eux, tous ces gens-là, ont tous voté pour la reconnaissance de la société distincte pour le Québec.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre oublie sciemment de dire que c'est lui qui a tué l'Accord du lac Meech. . .

Des voix: C'est lui! C'est lui!

M. Gauthier: Monsieur le Président, j'ai posé moi-même la question au premier ministre pour quel type de société distincte il était. Jamais il n'a voulu répondre. Aujourd'hui, je vais lui demander. Par son. . .

Voulez-vous demander à la vice-première ministre de se taire, monsieur le Président?

Des voix: Bravo!


16065

Le Président: La question, s'il vous plaît. La parole est à l'honorable député de Roberval.

M. Gauthier: Monsieur le Président, par son projet de résolution aseptisé et sans contenu, le premier ministre admettra-t-il que ses positions sont exactement comme celles du premier ministre de la Colombie-Britannique, et doit-on comprendre que, pour ce premier ministre, reconnaître la société distincte au Québec, il n'y a pas de problème, mais en autant que cela ne veuille rien dire et que cela ne change rien au statu quo?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député n'a pas vu la résolution. Je ne sais pas où il prend son texte.

M. Gauthier: Quelle résolution?

M. Chrétien (Saint-Maurice): Non, mais c'est lui qui dit qu'il y a résolution, et il ne l'a pas.

Une voix: C'est dans le journal.

M. Chrétien (Saint-Maurice): Alors, voici, je dis que le Parlement du Canada s'est déjà prononcé. Et le Parlement du Canada pourra se prononcer encore. Mais, pour nous, nous avons toujours été pour la société distincte. Et là, maintenant, encore une fois, très bientôt, les Québécois verront les députés du Bloc québécois, séparatistes qu'ils sont, voter contre la société distincte dans cette Chambre des communes.

* * *

(1435)

[Traduction]

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, presque deux jours sont passés depuis le référendum québécois et, pourtant, personne n'a encore accepté la responsabilité de la stratégie fédéraliste inepte qui a conduit le pays au bord du désastre. Nous ne pouvons simplement pas accepter qu'une telle ineptie se répète.

Il y a dix-sept mois, nous avons exhorté le premier ministre à définir clairement le coût de la séparation en répondant à 20 questions sur le sens négatif d'un oui. Le premier ministre a rejeté ces questions en déclarant qu'elles étaient hypothétiques et il n'a rien fait. En agissant ainsi, il a presque causé la perte du Canada aux mains des électeurs québécois qui ont voté oui en croyant qu'ils resteraient Canadiens.

Les Canadiens veulent savoir qui est responsable d'aussi mauvais calculs pendant la campagne. Est-ce que ce sont les conseillers du premier ministre, est-ce que ce sont les stratèges du camp du non ou est-ce le premier ministre lui-même?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a qu'une seule personne qui est plus déçue que le chef de l'opposition d'avoir vu le non l'emporter, et c'est le chef du Parti réformiste.

Tous les jours, durant la campagne, il a essayé de toutes sortes de manières de mettre dans l'embarras ceux qui se battaient pour garder le Canada uni. Le chef du tiers parti disait que nous devions faire ceci ou cela pendant que le chef du Parti conservateur, le chef du Parti libéral du Québec et moi-même travaillions ensemble en dépit de nos divergences d'opinions pour essayer de garder le Canada uni.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre peut mettre en doute la loyauté des millions de Canadiens qui n'approuvent pas sa. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Manning: Mais cela ne changera rien au fait que c'est sa stratégie inepte qui a amené le pays. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Manning: Le premier ministre a attendu la dernière semaine de la campagne pour réagir aux demandes de changements profonds formulées par le Québec. Pendant des mois, tant à la Chambre qu'à l'extérieur de la Chambre, il s'est obstiné à prétendre que le statu quo et quelques changements d'ordre administratif suffiraient amplement. Ce n'est qu'aux derniers jours de la campagne qu'il a admis la nécessité de faire des changements et qu'il a commencé à en parler, mais c'était bien tard.

(1440)

Étant donné la volonté évidente de changement qui existe au Canada, je demande ceci au premier ministre: qui est le génie qui a décidé que le statu quo et quelques changements d'ordre administratif suffiraient? Est-ce que ce sont ses conseillers? Est-ce que ce sont quelques vieux sénateurs fossilisés, ou est-ce lui?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le chef du Parti réformiste est fidèle à lui-même. Il essaie de se grandir en se servant d'une situation où c'est nous qui nous sommes battus.

Lorsque les choses étaient vraiment importantes, le chef du Parti conservateur était là, j'étais là et beaucoup de députés de ce côté-ci étaient là, mais le chef du Parti réformiste n'était pas à Montréal vendredi dernier. Il ne faisait que nous critiquer comme il l'a fait pendant toute la campagne. Nous avons gagné. Le Canada a gagné en dépit du chef réformiste.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, après toutes les erreurs commises par le camp du non durant la campagne référendaire, le gouvernement fédéral s'apprête maintenant à commettre l'erreur ultime. Il semble que, pour répondre aux demandes de changements du Québec, le gouvernement fédéral soit prêt à se rabattre sur les vieux clichés que sont la société distincte et le veto constitutionnel pour cette province, demandant aux Canadiens de tremper de nouveau dans les eaux stagnantes du lac Meech.

Avec son processus descendant, son charabia constitutionnel et son faux symbolisme, l'approche utilisée depuis trente ans par les libéraux et les conservateurs pour essayer de sauver l'unité nationale est tout à fait inefficace, et les Canadiens le savent. Ils veulent savoir, de la bouche du premier ministre, qui est l'artisan de cette


16066

mauvaise stratégie. Est-ce que ce sont les mêmes gens qui ont élaboré la stratégie du non? Est-ce le premier ministre lui-même ou son nouveau conseiller constitutionnel de Sherbrooke?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsque toutes les provinces ont accepté une formule de modification à Victoria, le parti du père du chef du Parti réformiste, le Crédit social, était au pouvoir en Alberta, et il a accepté la formule de modification proposée à ce moment-là.

Le Président: Je me demande si nous pourrions raccourcir les questions et les réponses.

* * *

[Français]

LA SOCIÉTÉ DISTINCTE

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, désavoué de façon cinglante par ses propres électeurs dans son comté de Saint-Maurice, le premier ministre a perdu toute crédibilité pour proposer quelque changement constitutionnel que ce soit puisque, manifestement, il est déconnecté de la réalité québécoise.

Le premier ministre se rend-il compte que son incapacité à comprendre la réalité québécoise le rend inapte à traduire correctement les besoins du Québec au reste du Canada et tant que les Canadiens et les Québécois se parleront par son entremise plutôt que d'égal à égal, l'incompréhension persistera?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le Parlement du Canada va parler au nom de tous les Canadiens lorsqu'il sera saisi d'une résolution concernant ce problème. Je l'ai promis et nous allons le faire. Et là, les masques vont tomber, parce que les séparatistes ont toujours dit qu'ils n'avaient pas obtenu la société distincte. Or, ils ne la veulent pas.

On va les faire voter encore une fois et vous allez voir qu'ils vont voter, encore une fois, contre la société distincte pour les Québécois.

(1445)

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, même les électeurs de Saint-Maurice sentent que le premier ministre n'a jamais appuyé la société distincte. Le premier ministre ne comprend pas les électeurs de son comté et les électeurs de son comté ne le croient plus.

Le premier ministre ne convient-il pas qu'il fait perdre du temps à tout le monde en faisant croire aux Canadiens qu'il a compris ce que les Québécois voulaient?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce qui inquiète le Bloc québécois, c'est qu'ils savent très bien que nous allons agir. Mais cette fois-ci, ils vont être obligés de voter. Ce ne sera pas de beaux discours. Ils vont voter contre la société distincte et la vérité sera connue. Ce sont des séparatistes qui ne veulent pas l'avouer aux Québécois franchement et honnêtement.

[Traduction]

L'UNITÉ NATIONALE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Il semble que le premier ministre soit prêt à offrir au Québec une entente spéciale qui consiste dans les vieux clichés fédéraux que sont la société distincte et le veto constitutionnel. Les séparatistes disent depuis vingt ans que, parce que le Québec est une société distincte et un peuple distinct, il devrait devenir un État souverain.

Pourquoi le premier ministre pense-t-il que, en concédant au Québec la première partie de cette proposition, il peut empêcher que la deuxième ne se concrétise? Je crois que le premier ministre voudrait que je répète la question.

Des voix: Non.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, à ce moment-là, le député de Lethbridge était membre du Cabinet de l'Alberta lorsque celui-ci a accepté de donner à Québec un droit de veto. M. Strom était premier ministre, et le député de Lethbridge était ministre à l'époque.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, plutôt que de m'attarder à la non-réponse du premier ministre, permettez-moi de passer à l'aspect le plus incroyable de la stratégie de fortune du gouvernement fédéral pour sauver l'unité du pays.

Le gouvernement semble envisager sérieusement de donner un droit de veto constitutionnel au gouvernement du Québec, un gouvernement séparatiste déterminé à diviser le pays. Le premier ministre compte peut-être offrir cela au chef de l'opposition en guise de cadeau d'adieu, s'il décide de s'en aller à Québec.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: J'implore les députés de ne pas faire de procès d'intention sous quelque forme que ce soit. Je demanderais au député de bien vouloir poser sa question.

M. Manning: Je vais poser la question, et que le premier ministre écoute, car elle est fort simple.

Le premier ministre est-il vraiment sérieux lorsqu'il dit qu'il est disposé à donner au gouvernement séparatiste du Québec un droit de veto à l'égard de la Constitution du Canada?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le chef du troisième parti devrait prendre le temps de lire mon discours. J'ai dit que ce serait un droit de veto pour les Québécois.

* * *

[Français]

LES CHANGEMENTS CONSTITUTIONNELS

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, moins de 48 heures après le référendum québécois, plus personne ne s'entend au Canada anglais sur la nature des changements que tous prétendaient offrir au Québec à quelques


16067

jours de l'échéance référendaire. Les promesses de changement et les effusions d'amour apparaissent aujourd'hui de moins en moins crédibles et sincères.

Ma question s'adresse au premier ministre. Où sont donc passés les milliers d'individus qui disaient aimer le Québec la semaine passée?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, des milliers sont venus à Montréal, et dimanche dernier, dans des villes partout au Canada, il y a eu des réunions avec des dizaines et des dizaines de milliers de citoyens qui disaient à tous les Québécois: «Nous voulons que vous demeuriez citoyens du Canada.» Cela s'est passé dans toutes les capitales provinciales, dans des villes et des villages à travers le pays. Seulement, évidemment, pour le Bloc québécois. . . Ils veulent se séparer et c'est tout ce qui les intéresse.

(1450)

Ce ne sont pas les besoins de la population qui les intéressent, c'est d'avoir un bourgeois qui sera ambassadeur aux Nations Unies, un autre à Paris et un autre ailleurs, alors que les gens veulent qu'on crée des emplois et une stabilité économique pour les citoyens du Québec.

Des voix: Bravo!

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, doit-on comprendre que moins de 48 heures après le référendum, avec toutes les notes discordantes provenant des premiers ministres provinciaux du Canada anglais, que toutes les promesses de changement et les déclarations d'amour n'étaient rien d'autre que de l'hypocrisie?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais que les députés du Bloc québécois qui sont d'accord avec la déclaration de Jacques Parizeau le soir du référendum se lèvent dans cette Chambre.

* * *

[Traduction]

L'UNITÉ NATIONALE

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, ce qui est certainement ressorti de ce référendum, c'est que les Canadiens de chaque province veulent des changements et qu'ils veulent avoir davantage leur mot à dire dans le processus décisionnel qui déterminera l'avenir de leur pays. Ils ont perdu espoir et ils en ont marre des politiciens ainsi que de leurs tractations pour tenter de ressusciter l'accord du lac Meech ou celui de Charlottetown.

Le premier ministre peut-il garantir aux Canadiens qu'ils participeront à toute décision ayant des répercussions sur l'avenir de leur pays?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ils participent toujours aux décisions. Ils ont élu au Parlement des députés qui les représentent en tout temps et très bien.

Si la députée ne croit pas pouvoir défendre les intérêts de ses électeurs, c'est elle qui porte ce jugement. Je sais toutefois que les élus se sentent généralement mandatés pour parler au nom des gens de leur circonscription lorsqu'ils prennent la parole. À mon avis, c'est ainsi que fonctionne la démocratie. Si notre jugement est mauvais, il y aura des élections.

Lorsque je me rendrai dans les circonscriptions représentées par le Parti réformiste durant la prochaine campagne électorale, je sais que les gens se souviendront de ce que les députés réformistes ont fait la dernière semaine d'octobre 1995.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, je puis donner au premier ministre l'assurance que, s'il vient dans ma circonscription, il se rendra compte que mes électeurs et moi-même avons voté contre l'accord de Charlottetown. Cet accord est mort et enterré. Il n'y aura plus de statut de société distincte.

Tous les Canadiens doivent avoir leur mot à dire si nous voulons éviter la défaite lors d'un autre référendum au Québec. C'est une idée qui peut fonctionner et qui a l'appui de premiers ministres provinciaux comme celui de Terre-Neuve, Clyde Wells.

Le premier ministre va-t-il tenir des assemblées de citoyens partout au Canada ou a-t-il l'intention de ressusciter l'accord du lac Meech ou celui de Charlottetown encore une fois?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai l'intention de faire aucune des trois choses mentionnées par la députée.

* * *

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

Le gouvernement canadien négocie présentement avec le gouvernement israélien une entente de libre-échange. Les négociations en cours devraient permettre d'en arriver à un accord qui éliminerait toutes les barrières tarifaires et non tarifaires entre les deux pays et ce, dès le 1er janvier prochain.

(1455)

Le ministre peut-il nous informer de l'état d'avancement des négociations en cours et nous indiquer quelles mesures il entend prendre pour permettre entre autres aux manufacturiers québécois de maillots et de lingerie de se préparer à l'arrivée prochaine des Israéliens sur le marché canadien?

[Traduction]

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, les négociations avec Israël font des progrès. Elles ont débuté il y a six ou huit mois. Elle sont encore au point où divers détails n'ont pas encore été réglés comme, par exemple, les produits manufacturés dont les vêtements. Certains aspects du commerce de produits agricoles entre nos deux pays ont encore besoin d'être clarifiés.

Je ne peux donner d'autre réponse au député que de dire que les négociations sont en cours.


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[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, le ministre doit savoir que les Israéliens bénéficient d'un accès privilégié au marché européen du textile, contrairement aux fabricants québécois.

Puisque les manufacturiers québécois s'inquiètent des concessions que le gouvernement fédéral pourrait faire, le ministre entend-il, oui ou non, examiner le dossier avec le gouvernement du Québec, tel que le lui demandait le vice-premier ministre du Québec, le 23 octobre dernier?

[Traduction]

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, oui, nous verrons.

* * *

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre responsable de la Société canadienne des postes.

La Société canadienne des postes est sur le point de conclure une entente de cession-bail pour tous ses meubles extérieurs. Les partenaires du gouvernement dans cette affaire forment un consortium dirigé par SNC Lavalin, une société bien connue pour être proche du gouvernement et qui, en fait, a versé une contribution de 73 000 $ à la campagne électorale libérale en 1993.

Le ministre fournira-t-il une analyse coût-avantage de cette entente de cession-bail? De plus, le ministre rendra-t-il public le processus d'appel d'offres utilisé à cet égard?

M. Réginald Bélair (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, en raison de l'absence du ministre des Travaux publics, qui est aussi responsable de la Société canadienne des postes, je vais prendre note de la question du député et je lui fournirai une réponse écrite.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, il ne s'agit pas d'une entente insignifiante. Je trouve surprenant que le représentant du ministre n'en soit pas au courant.

Ma question supplémentaire s'adresse au ministre responsable de la Société canadienne des postes. Georges Clermont, le P.D.G. de la Société canadienne des postes, est bien connu à la Chambre en raison des liens qu'il a eus avec le promoteur José Perez. Il semble qu'un des principaux membres du consortium chargé de cette entente et partenaire du gouvernement soit en fait lié à M. Clermont par alliance. Le ministre peut-il confirmer que le P.D.G. de la Société canadienne des postes est lié par alliance au chef du consortium? Est-il d'avis que cela pourrait. . .

Le Président: Je ne crois pas que cela touche à la responsabilité administrative du ministre.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Si cela continue, on va se mettre à faire de la consultation matrimoniale. Veuillez poser votre question.

M. Harris: Le ministre croit-il qu'il peut sembler y avoir un conflit d'intérêts, compte tenu des liens qu'entretiennent les parties à cet accord?

M. Réginald Bélair (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, étant donné que le député a fait allusion à l'affaire Perez-Clermont, il importe de mentionner de nouveau à la Chambre que cette affaire est devant les tribunaux et qu'il ne convient donc pas de faire des observations là-dessus à l'heure actuelle.

* * *

LA VIOLENCE DOMESTIQUE

Mme Bonnie Hickey (St. John's-Est, Lib.): Monsieur le Président, hier, le Comité spécial de Terre-Neuve sur les intérêts des enfants a entendu combien la violence domestique pouvait être traumatisante pour les enfants. Il a entendu en particulier l'histoire épouvantable d'une famille où une femme a été poignardée 33 fois par son mari et laissée pour morte.

(1500)

Est-ce que la secrétaire d'État à la Situation de la femme pourrait dire à la Chambre les mesures que le gouvernement a prises pour aider à éliminer la violence contre les femmes?

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, la question de ma collègue présente un exemple tragique, et il est vrai que dans les deux tiers des cas de violence domestique et d'homicide les victimes sont des femmes. Le gouvernement connaît très bien les inquiétudes que soulèvent le harcèlement sexuel et le racisme, et il connaît aussi les effets de la violence sur les femmes.

Nous avons pris des mesures pour réduire les risques en proposant une mesure législative sur le contrôle des armes à feu, l'élimination de l'ivresse extrême comme défense, l'augmentation de l'efficacité des engagements de maintenir la paix, une mesure législative sur le harcèlement criminel, une réforme de la détermination de la peine qui prévoit des peines plus sévères dans le cas des crimes motivés par la haine et de ceux commis par des personnes en position de confiance, la reconnaissance de la persécution en fonction du sexe, toute la question des délinquants dangereux et de l'ADN.

Le gouvernement a pris des mesures pour faire en sorte que nos rues soient plus sûres, que nos maisons soient plus sûres et que le lieu de travail soit plus sûr. Nous continuerons à travailler dans ce domaine.

* * *

[Français]

LES ASSISTÉS SOCIAUX

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.


16069

Le ministre du Développement des ressources humaines, le 26 octobre, voulant confondre le Bloc québécois, disait en cette Chambre, et je le cite: «En août, j'ai reçu du gouvernement du Québec un document révélant que le nombre d'assistés sociaux avait baissé et non augmenté.» Il oubliait de mentionner qu'entre août 1994 et août 1995, il y a eu une augmentation de 20 000 personnes à l'aide sociale, dont au moins 10 000 à cause des coupures à l'assurance-chômage.

Le ministre du Développement des ressources humaines est-il satisfait que grâce à ces coupures à l'assurance-chômage, le Québec compte au moins 10 000 personnes de plus à l'aide sociale?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai ici les statistiques détaillées du gouvernement du Québec qui montrent, par exemple, qu'entre juin et juillet, le nombre d'assistés sociaux, en chiffres nets, a baissé de 4 000. Ce chiffre a continué de diminuer au point où, sur cette période de quatre mois, le nombre de prestataires de l'assistance sociale a chuté de 7 000.

Même le premier ministre Parizeau l'a reconnu à l'Assemblée nationale du Québec où il a admis, une fois de plus, qu'il y avait eu une baisse. Il s'est félicité de ce chiffre, tout comme nous.

Cela remet en question la perpétuelle allégation des bloquistes qui prétendent que ces modifications entraînent une augmentation du nombre d'assistés sociaux. Comment peut-on parler d'augmentation lorsque les chiffres baissent?

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, il serait temps que le ministre comprenne les bases de ces statistiques. C'est année après année qu'on voit l'augmentation, la croissance du nombre de personnes à l'aide sociale. Et année après année, il y a 20 000 personnes de plus à l'aide sociale. J'aimerais déposer ce rapport en cette Chambre un peu plus tard.

Le ministre acceptera-t-il qu'il est parfaitement inacceptable qu'en période de soi-disant prospérité, le nombre de personnes à l'aide sociale au Québec augmente de 20 000 en un an, alors qu'il se prépare à faire une nouvelle réforme qui en augmentera le nombre de façon considérable?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, au cours de la dernière année, et particulièrement dans la province de Québec, cela dit sans exclure les mesures que nous avons pris dans d'autres provinces, les modifications que nous avons apportées l'année dernière au régime d'assurance-chômage comprenaient l'introduction d'une prestation familiale spéciale qui a permis à 130 000 Québécois, surtout des femmes, de recevoir 1 000 $ de plus par année que les prestations normales.

De plus, parce que nous croyons à la nécessité de coopérer pour aider les gens à faible revenu, surtout les familles, nous avons conclu un accord avec le gouvernement du Québec cet été. Cet accord spécial de 81 millions de dollars prévoyait le versement d'un supplément de revenu à 27 000 familles à faible revenu. Une fois de plus, cela montre que, lorsque nous travaillons ensemble, nous arrivons à faire quelque chose, en tant que gouvernement, pour aider les gens qui sont vraiment dans le besoin.

* * *

(1505)

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale. Notre dette s'élève à plus de 550 milliards de dollars et il ne se passe pas un jour que je ne pose des questions au ministre à propos de la très mauvaise gestion de son portefeuille.

J'ai appris aujourd'hui que le ministre est en train d'acheter 150 plumes d'oie rangées dans des coffrets de velours noir. Elles portent le nom, gravé en or, du ministre de la Défense nationale et elles coûtent environ 2 000 $. C'est de la pure folie. Le ministre peut-il expliquer cette dépense aux Canadiens?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, c'est une question à inscrire au Feuilleton. Si le député souhaite avoir une plume, je le lui en enverrai une.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, c'est à cause de cette incompétence que nous sommes endettés de 550 milliards de dollars. Je voudrais demander ceci au ministre: pourriez-vous m'envoyer une plume afin que je puisse la faire voir aux Canadiens. . .

Le Président: J'exhorte tous les députés à s'adresser directement à la Présidence pour poser leurs questions. J'ignore si le ministre a entendu toute la question ou s'il veut répondre.

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a pas lieu de répondre quoi que ce soit.

* * *

L'ÉCONOMIE

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été ravi d'apprendre ce matin que nous avions atteint notre objectif de réduction du déficit pour 1994-1995.

Pendant la campagne électorale de 1993, nous nous étions proposés d'équilibrer notre budget, tout en favorisant la croissance économique et la création d'emplois au Canada.


16070

Le ministre des Finances peut-il dire à mes électeurs de Carleton-Charlotte et à la Chambre s'il est toujours prévu que nous atteindrons notre objectif l'année prochaine et notre objectif intermédiaire d'un déficit égal à 3 p. 100 du PIB en 1997?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, je peux effectivement dire au député que cela est prévu et que la réduction du déficit constitue un élément essentiel de notre programme de création d'emplois, car cette réduction signifie des taux d'intérêt moins élevés et des taux d'intérêt moins élevés signifient davantage d'emplois pour les Canadiens.

Je peux assurer au député que nous atteindrons notre objectif intermédiaire de 3 p. 100 et notre objectif pour cette année, soit de 32,7 milliards de dollars. Je suis ravi de lui dire que, non seulement nous avons atteint notre objectif pour 1994-1995, mais nous l'avons dépassé de 2,2 milliards de dollars.

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse aussi au ministre des Finances. Elle porte sur le rapport du Conference Board du Canada, rendu public il y a une semaine environ, selon lequel la productivité et les profits sont à la hausse, mais les salaires, eux, ne bougent pas.

Puisque ce genre de conjoncture est exactement ce que les détracteurs de la mondialisation et du libre échange avaient prédit, je voudrais demander au ministre des Finances ce qu'il compte faire. Est-il souhaitable que l'économie canadienne soit dans pareil état? Ou bien le gouvernement a-t-il un plan d'action pour qu'à un moment donné, il n'y ait pas que les profits et la productivité qui augmentent, que les salaires et le niveau de vie des Canadiens ordinaires augmentent aussi?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, je suis certain que le député a fait un petit lapsus en posant sa question, car il n'est pas sans savoir que la productivité est d'une importance capitale, si nous voulons que le revenu réel des Canadiens augmente.

À partir de 1973 et durant une vingtaine d'années, dans l'ensemble du monde occidental, la productivité a connu un déclin, d'où la baisse des revenus réels.

La question du député est néanmoins pertinente. D'ailleurs, si nous insistons tant, de ce côté-ci de la Chambre, pour que les Canadiens acquièrent plus de compétences et que le Canada participe plus activement à la nouvelle économie, c'est justement parce que nous voulons que les Canadiens fassent autre chose que peiner dans des secteurs où d'autres pays sont plus compétitifs à cause de leur niveau de vie moins élevé, que nous voulons avoir l'économie la plus moderne que nous puissions nous donner.

(1510)

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, peut-être que je pourrais demander le consentement de la Chambre pour déposer, au nom du chef de l'opposition officielle, le rapport préliminaire des résultats du dépouillement des votes du scrutin de lundi soir. Je demande le consentement de la Chambre.

[Traduction]

Le Président: Y a-t-il consentement unanime à ce que ce document soit déposé?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, je demanderais également le consentement, au nom de ma collègue de Mercier qui désirait, tout à l'heure, déposer les statistiques des assistés sociaux, telles que compilées par le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu du gouvernement du Québec pour aider le ministre du Développement des ressources humaines. Je demande le consentement.

[Traduction]

Le Président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement conformément au commentaire 487(1) de Beauchesne, selon lequel les menaces sont antiparlementaires. Je désire attirer votre attention, monsieur le Président, sur les remarques formulées par le député de York-Sud-Weston, qui a dit très clairement à la Chambre lors du débat antérieur: «Vous devriez être jugé pour trahison, Preston.»

Ces remarques constituent de véritables menaces et sont clairement inacceptables. Je demande qu'elles soient rayées du compte rendu des délibérations de la Chambre.

Le Président: Le député en question n'est pas présent à la Chambre. Votre Président n'a pas entendu ces remarques.

Nous prendrons cette question en délibéré. Nous vérifierons si les remarques figurent dans le hansard et nous réglerons la question le plus tôt possible.

LES VOTES

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, hier soir durant le vote sur le projet de loi C-103, le whip en chef du gouvernement a proposé que les résultats du vote sur la motion M-19, relative au projet de loi C-61, soient appliqués à la motion dont la Chambre était alors saisie.

Cela est confirmé par l'enregistrement vidéo des délibérations d'hier soir. Or, à la page 16056 du hansard, le whip du gouvernement demande que les résultats du vote soient appliqués à l'inverse.

L'enregistrement vidéo montre c'est vous, monsieur le Président, qui, à la suite de la décision de la Chambre, avez demandé des éclaircissements au whip en chef du gouvernement. Cet échange est toutefois absent du hansard.


16071

Ma première préoccupation, c'est que le hansard, le compte rendu officiel des délibérations de la Chambre des communes, ne reflète pas les réalités des délibérations d'hier soir. Il est vrai que les députés peuvent apporter au hansard des modifications mineures, des corrections grammaticales par exemple, mais ce genre de changement va totalement à l'encontre de ce que le whip en chef du gouvernement a clairement exprimé, comme en témoigne l'enregistrement vidéo.

(1515)

Ma deuxième préoccupation, c'est qu'on a demandé le consentement unanime de la Chambre pour que le résultat du vote sur la motion no 19, à l'étape du rapport, s'applique à la motion d'adoption, à l'étape du rapport, du projet de loi C-103. La Chambre a effectivement donné son consentement, comme on peut le vérifier sur l'enregistrement vidéo.

Monsieur le Président, ce n'est que plus tard que vous avez constaté que le gouvernement avait appliqué le résultat d'un vote qui avait pour effet d'entraîner le rejet du projet de loi C-103 et que vous avez demandé au whip en chef du gouvernement s'il n'avait pas plutôt voulu faire appliquer ce résultat à l'inverse. Vous lui avez demandé si c'était le cas ou non.

Je fais valoir que la Chambre avait clairement donné son consentement unanime afin que le résultat du vote s'applique de la façon proposée en premier lieu par le whip en chef du gouvernement. Si un changement devait être effectué, il incombait au Président de demander le consentement unanime de la Chambre tout entière, et non de simplement discuter de la question avec le whip en chef du gouvernement. Monsieur le Président, si vous regardez l'enregistrement vidéo, vous constaterez que mon argument est fondé.

En résumé, je tiens d'abord à dire qu'il est très préoccupant de voir que le compte rendu officiel du Parlement ne reflète pas le résultat du vote d'hier soir à la Chambre. De plus, l'enregistrement montre clairement que la Chambre a donné son consentement unanime afin que l'on applique le résultat d'un vote antérieur, ce qui a entraîné le rejet d'un projet de loi d'initiative gouvernementale. Si le whip en chef du gouvernement a commis une erreur et qu'il voulait que la décision de la Chambre soit renversée, il se devait d'obtenir le consentement de celle-ci et non pas simplement expliquer à la présidence quelle était son intention véritable. Ce serait trop facile.

En fait, il n'est pas si facile de corriger une telle erreur et il serait dangereux de le faire de cette façon. La raison fondamentale pour laquelle j'invoque le Règlement c'est que la plus importante protection que nous, députés de l'opposition, avons dans cette Chambre, c'est vous, monsieur le Président, ainsi que le Règlement établi.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, à première vue, l'objection du député me semble raisonnable.

Je l'exhorterais, pour commencer, à respecter les usages de la Chambre en ce qui concerne le texte du hansard. Si je me trompe dans un discours et que j'emploie des mots que je ne voulais pas employer, comme ajouter une négation par erreur, puis que je répète ma phrase correctement, les deux phrases ne se retrouveront pas dans le hansard. Ne figurera dans le hansard que ce que je voulais dire au départ. Le texte est révisé et imprimé comme si je n'avais prononcé qu'une phrase.

De même, quand je répète des mots pour insister sur une idée, ils figurent au hansard, mais les répétitions causées par du chahut à la Chambre ou d'autres interruptions sont omises. Les éditeurs coupent ces passages.

Dans le cas dont parle le député, il y a manifestement eu un malentendu quant à ce qui est arrivé, quant à ce que le whip en chef du gouvernement a dit. Votre Honneur est ensuite intervenu pour dissiper ce malentendu en demandant au whip en chef du gouvernement s'il voulait effectivement que le résultat du vote soit appliqué à l'inverse, ce qu'il a confirmé, et les éditeurs ont apporté la correction, comme s'il n'y avait pas eu de malentendu. La question n'a pas été remplacée dans le hansard.

Premièrement, l'usage n'a jamais été de reproduire intégralement tout ce qui se dit à la Chambre dans le hansard. Il en a toujours été ainsi, et cela fait plus de 30 ans que je lis le hansard. Je crois que le député en conviendra.

Deuxièmement, après que le résultat du vote a été appliqué comme l'avait demandé le whip en chef du gouvernement hier soir, le malentendu que l'on attribue à la présidence n'en était pas un, à mon avis. Si l'honorable whip a raison, le projet de loi aurait été rejeté parce qu'il y avait plus de non que de oui. C'est ce qu'il veut dire.

Je me souviens très bien de cet échange. Je n'ai pas vérifié l'enregistrement vidéo mais, après le vote, Votre Honneur a dit: «Je déclare la motion adoptée.» Je me souviens que nous étions sur le point d'adopter le projet de loi C-103 à l'étape du rapport. Votre Honneur a ensuite demandé: «Quand ce projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois?» On a répondu: «À la prochaine séance de la Chambre.»

(1520)

Le Président a compris que le whip en chef du gouvernement voulait que les résultats du vote soient appliqués de façon à adopter la motion. Tous les députés savaient que le gouvernement allait gagner le vote et que les résultats devaient être appliqués en conséquence.

L'éditeur du hansard a simplement, et je dirais avec raison, supprimé les questions qui ont donné lieu aux éclaircissements pour donner l'impression que le whip en chef du gouvernement avait procédé correctement la première fois. Il semble qu'il ait fait cette erreur. Suite à mon intervention, le Président a compris l'intention du whip en chef du gouvernement; la procédure correcte a été suivie, le projet de loi a été adopté à l'étape du rapport et il a été ordonné qu'il soit lu pour la troisième fois à la prochaine séance de la Chambre.

Si le Président avait bien entendu le whip en chef du gouvernement et appliqué les résultats du vote antérieur de la façon suggérée par l'honorable whip du Parti réformiste, le résultat aurait été différent et on aurait eu des éclaircissements sur-le-champ, parce que j'écoutais les délibérations et j'ai entendu ce qui se passait. Je savais qu'il avait été ordonné que le projet de loi soit lu pour la troisième fois à la prochaine séance de la Chambre. Sinon, je serais intervenu.


16072

Même si je comprends les arguments du whip du Parti réformiste, je crois que les éditeurs du hansard ont agi de façon tout à fait correcte dans ce cas-ci. Le député n'a aucune raison de se plaindre parce que tout a été clarifié hier soir. Le Président et le whip en chef du gouvernement n'ont rien fait en secret. Tout s'est fait ici à la Chambre au vu et au su de tout le monde. Si le député s'opposait à la procédure, il aurait dû soulever ses objections à ce moment-là.

Le Président: Je vais revenir au whip du Parti réformiste. Je donne maintenant la parole au whip du gouvernement.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, comme la présidence et tous les députés le savent, les whips ont tenu il y a un certain temps des entretiens officieux-je sais que quelqu'un d'autre occupait le poste de whip du Parti réformiste-en vue de trouver un système souple pour accélérer la tenue des votes, ce qui permet d'économiser beaucoup d'heures supplémentaires et d'argent dans les cas où la méthode traditionnelle demanderait parfois sept ou huit heures en soirée. Il suffit maintenant de quelques minutes.

Il me déplaît beaucoup d'interrompre cette conversation privée, monsieur le Président.

Le Président: Je demande l'attention de tous les députés. Ce rappel au Règlement nous touche tous et il est important. Si les députés veulent avoir des discussions, qu'ils aient l'obligeance de se rendre derrière les rideaux.

M. Boudria: Comme je le disais, ce système a été mis en place de manière officieuse avec le whip précédent.

À un certain nombre d'occasions, par le passé, il est arrivé que des whips disent qu'ils votaient oui alors qu'ils voulaient dire non. Même les whips d'en face sont intervenus de façon un peu familière en disant: «Non, ce n'est pas ce que vous voulez faire», afin de s'entraider, car il s'agit d'une entente officieuse dont le but avoué est d'accélérer un processus qui prenait autrefois plusieurs heures.

Pour que ce système fonctionne encore mieux, un document officieux est échangé entre les divers whips et remis aux greffiers, de manière que, s'il y a une erreur à l'occasion, on puisse la corriger.

Encore une fois, le whip du Parti réformiste doit prendre note que cette formule a été établie en collaboration avec tous les whips. Je fais ici allusion au député de Calgary-Centre.

Ce que j'essaie de faire ressortir, c'est que ce système officieux, car il l'est, a été établi par les whips, qui se sont toujours aidés les uns les autres pour qu'il soit correctement rendu compte des intentions de chaque parti à la Chambre. C'est ainsi qu'on a procédé.

Nous pourrions revenir au système antérieur. Cet ancien système coûte environ 25 000 $ l'heure. Je crois qu'il en coûte environ 17 000 $ l'heure pour les heures supplémentaires ordinaires et 25 000 $ l'heure si les heures sont prolongées. Même dans un cas comme celui d'hier soir, les coûts auraient pu se situer entre 100 000 $ et 150 000 $. En fait, la procédure n'a rien coûté aux contribuables, grâce à ce système officieux que nous avons mis en place avec toute la bonne volonté qui a prévalu jusqu'ici. Je souhaite simplement que nous gardions ces bonnes dispositions les uns envers les autres, comme nous l'avons fait depuis un an, depuis que nous avons établi le système.

Le whip précédent et moi avons eu des relations de travail extrêmement efficaces, et j'espère qu'elles resteront aussi bonnes avec l'actuel titulaire de cette fonction de l'autre côté de la Chambre. Je crois que de cette façon, lorsque les députés ne sont plus capables de fonctionner les uns avec les autres, lorsque surgissent des désaccords comme il s'en est produit aujourd'hui, les whips peuvent se réunir rapidement derrière les rideaux pour découvrir en quoi consiste le désaccord entre les députés et réussir à s'entraider pour faire mieux fonctionner la Chambre et aider le Président dans ses fonctions à notre service à tous. Voilà le système dans le cadre duquel nous avons tous auparavant fonctionné individuellement et collégialement comme groupe de whips.

(1525)

J'espère qu'en tant que whips, nous continuerons de fonctionner ainsi et de nous entraider pour bien traduire la volonté de la Chambre au lieu d'essayer de nous faire trébucher l'un l'autre chaque fois que l'occasion s'en présente.

On se bat par tous les moyens dans les débats à la Chambre, et c'est selon les règles du jeu. Je le sais bien, puisque je siège à la Chambre depuis plus longtemps que beaucoup de mes collègues. Dans l'exercice de nos fonctions de whips, cependant, il y a aussi les relations de travail très étroites que nous entretenons les uns avec les autres, et j'espère que cela continuera, non pas pour mon bien, mais pour celui de notre assemblée et celui de notre pays.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, puisque je suis le whip précédent auquel tout le monde fait allusion, permettez-moi d'intervenir brièvement.

Selon l'argument du whip de notre parti et selon la vérification que j'ai effectuée dans notre système, il y a eu un échange entre vous, pendant que vous étiez au fauteuil, et un député. Or, cette intervention ne figure pas dans le hansard. Voilà l'argument qui est soulevé. Nous respectons, et c'est certainement mon cas, toutes les paroles qui sont prononcées à la Chambre, y compris l'intervention du député de Kingston et les Îles.

Le député de Kingston et les Îles a souligné que nous avions raison de corriger des mots. Mais l'élimination de toute une intervention représente une grave omission. Notre but n'est pas de prendre le gouvernement en faute; nous faisons simplement remarquer l'absence d'une intervention. Cette omission nous préoccupe, car qu'arriverait-il si l'intervention se révélait importante plus tard? Toute la question est là.

Nous entendons et espérons toujours veiller à poursuivre nos travaux dans le même esprit de collaboration que nous avons manifesté jusqu'à maintenant.

16073

M. Ringma: Monsieur le Président, il y a quelques points que j'espère pouvoir clarifier. Tout d'abord, j'appuie ce que mon collègue vient de dire au whip en chef du gouvernement. Nous devrions certainement continuer de collaborer comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant. Il n'y a pas d'autre façon de procéder.

Je tiens également à préciser qu'il n'est absolument pas question ici d'accuser qui que ce soit de faire des choses en secret. Il ne s'agit pas de cela.

Je veux aussi revenir sur un point soulevé par le député de Kingston et les Îles. La correction dans le hansard n'a pas été faite par suite de l'intervention d'un député, mais bien par suite d'un autre vote. Il y a une différence énorme entre les deux.

Enfin, je dois maintenir mon rappel au Règlement parce qu'il est fondé sur le fait que, en tant que députés de l'opposition, nous dépendons totalement de vous, monsieur le Président, et du Règlement de la Chambre. Sans cela, nous ne pourrions pas fonctionner.

Le Président: Chers collègues, j'ai entendu les interventions des deux côtés, et je dois évidemment accepter une certaine responsabilité dans cette affaire. Permettez-moi d'expliquer brièvement ce qui s'est passé. Si je me souviens bien, le whip du Parti réformiste m'a demandé des éclaircissements, après quoi j'ai demandé à mon tour des éclaircissements au whip du gouvernement. Lorsque ce dernier m'a donné les éclaircissements en question, j'ai regardé le whip du Parti réformiste. Cela ne figure pas dans le hansard, mais on peut le voir sur l'enregistrement vidéo. Le whip a montré qu'il était d'accord en hochant la tête, et nous avons continué.

Mais le point que le whip du Parti réformiste a soulevé lorsqu'il a dit que nous devons respecter le Règlement est évidemment très valable. Je crois que, en général, nous avons respecté le Règlement dans ces circonstances.

Les députés permettraient-ils à leur Président de faire une observation? Je suis ici depuis des décennies et il me semble que le système que les whips des trois partis ont élaboré, avec les indépendants, permet à la Chambre de travailler beaucoup plus efficacement et beaucoup plus rapidement. Habituellement, tous ces détails sont mis au point avant que les votes n'aient lieu.

(1530)

En tant que député depuis longtemps et aussi en tant que Président, je crois que ce genre de collaboration est bonne pour cette institution.

Si, par mégarde, j'ai omis de voir à ce que cela figure dans le hansard, je peux assurer à la Chambre que, s'il arrivait que quelque chose de semblable se produise de nouveau, je m'empresserais de m'assurer que tout est fait exactement conformément aux règles. Toutefois, j'encourage mes collègues à persévérer et à avoir confiance dans un système qui est un peu nouveau mais qui est efficace.

Je félicite les whips de tous les partis pour ce qu'ils ont fait pour cette institution en voyant à ce que les votes puissent se dérouler de façon un peu plus rapide mais juste, et c'est ce qui importe ici.

Je vous remercie pour vos observations. Je suis d'accord avec le whip du Parti réformiste lorsqu'il dit que nous devons respecter le Règlement et, en tant que Président, je peux vous assurer que j'y verrai.

______________________________________________


16073

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

BUDGET SUPPLÉMENTAIRE (A), 1995-1996

Un message de Son Excellence le Gouverneur général, transmettant le budget supplémentaire (A) pour l'exercice se terminant le 31 mars 1996, est présenté par le président du Conseil du Trésor et est lu par le Président de la Chambre.

* * *

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à trois pétitions.

* * *

L'IMMIGRATION

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer aujourd'hui, dans les deux langues officielles, les niveaux d'immigration pour 1996.

* * *

L'IMMIGRATION

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu le plaisir de déposer le document sur les niveaux d'immigration pour 1996. Le dépôt de ce document est exigé par la loi. La date d'échéance est le 1er novembre de chaque année. C'est la loi. Mais c'est toujours beaucoup plus qu'une mesure législative, beaucoup plus qu'une simple obligation, et celui de cette année ne fait pas exception. En termes simples, voici un plan pour l'avenir, un plan qui nous guidera demain et par la suite.

(1535)

Il y a un an, j'ai présenté à la Chmabre la stratégie décennale du gouvernement en matière d'immigration et son Plan de citoyenneté et d'immigration. Ce dernier faisait suite à des consultations d'envergure menées auprès de Canadiens et de Canadiennes de toutes les conditions et de toutes les régions du pays. La voie tracée était claire. C'est une voie que nous avons suivie fidèlement.


16074

Le document sur les niveaux qui vous est présenté témoigne de notre volonté de travailler en partenariat avec les provinces et les territoires; c'est également la suite de notre entente avec la population du Canada et avec ceux qui considèrent le Canada comme leur pays. Ce document révèle que votre gouvernement travaille pour la croissance économique, mais non aux dépens de notre mission humanitaire.

Le nombre d'immigrants et de réfugiés pour 1995 a été établi à entre 190 000 et 215 000. Ces prévisions se réaliseront puisque leur nombre devrait s'élever à entre 198 000 et 220 000 à la fin de 1995. En 1996, le nombre d'immigrants et de réfugiés devrait se situer entre 195 000 et 220 000. Les niveaux sont légèrement supérieurs à l'an dernier. C'est ce que nous avions prévu.

L'an dernier, nous avons fait le point de notre programme d'immigration. Nous avons pris des décisions et apporté d'importants changements. Nous avons renforcé la base de telle sorte que nous pouvons désormais commencer à élargir ce programme. Les niveaux montrent aussi que nous avons réalisé ce que je crois être un bon équilibre. Nous accueillons beaucoup d'immigrants à caractère économique. C'est la clientèle que visaient nos efforts accrus de promotion et de recrutement dans le monde entier.

Mais nous accueillons aussi beaucoup de membres de la catégorie de la famille. Tout se passe comme prévu dans le plan de l'an dernier pour ce qui est de rééquilibrer le volet famille et le volet économique. Les immigrants à caractère économique et leurs personnes à charge constitueront 50 p. 100 du nombre total d'immigrants en 1996. Le volet famille représentera 46 p. 100. Les 4 p. 100 qui restent seront constitués des personnes accueillies pour des motifs humanitaires.

Le Canada a besoin d'immigrants.

[Français]

Notre pays a besoin de travailleurs et d'investisseurs pour maintenir et améliorer notre niveau de vie. Nous en avons besoin pour relancer notre économie et pour créer de l'emploi.

Comme je l'ai souvent répété en Chambre, et surtout un peu partout au pays, la sauvegarde et l'amélioration du niveau de vie de chaque Canadien dépendront en partie de l'existence d'un processus d'immigration fort et dynamique.

[Traduction]

Les immigrants et les réfugiés se classent parmi les Canadiens les meilleurs, les plus brillants, les plus motivés et les plus vaillants. Ces gens nous aideront à édifier un pays plus fort et doté d'une économie plus dynamique. C'est pourquoi nous faisons la promotion du Canada comme d'un endroit où il fait bon s'établir. Nous reprenons nos efforts de promotion et de recrutement dans le monde entier après les avoir suspendus pendant un certain nombre d'années. Nous lançons le message suivant: le Canada était, est et sera une terre d'avenir.

En 1996, les immigrants à caractère économique se répartiront en trois catégories: les travailleurs qualifiés, les gens d'affaires et une nouvelle catégorie renfermant les candidats des provinces et des territoires, qui seront exclusivement parrainés par les provinces et les territoires.

Nous savons bien que les gens doivent être adaptables pour réussir sur le marché du travail, qui évolue rapidement. C'est pourquoi nous modifierons très bientôt les critères de sélection des travailleurs qualifiés. Les nouveaux critères mettront en valeur les compétences qui sont nécessaires pour réussir à long terme-l'expérience, la compétence linguistique, l'éducation et la faculté d'adaptation à une économie mondiale en mutation constante.

(1540)

Les gens d'affaires sont un autre groupe faisant partie de la catégorie des immigrants à caractère économique. Nous pensons accueillir de 18 000 à 20 500 hommes et femmes d'affaires l'an prochain. Nous avons depuis un an discuté avec nos divers partenaires des provinces et du secteur privé au sujet des deux composantes du programme d'immigration des gens d'affaires: le programme des investisseurs et le programme des entrepreneurs.

Depuis ses débuts en 1986, le programme des investisseurs a permis d'attirer plus de 13 000 personnes, qui ont investi plus de 2,5 milliards de dollars dans des entreprises et des fonds autorisés. On a ainsi créé ou maintenu 17 000 emplois pour les Canadiens. Notre gouvernement veut poursuivre ces succès. Je veux attirer encore plus de capital de risque pour appuyer la croissance et la création d'emplois, surtout dans le secteur de la petite et de la moyenne entreprises.

L'an dernier, le ministre de l'Industrie et moi avons constitué un comité de représentants du secteur privé pour qu'il étudie le programme et propose des améliorations. Le rapport du comité a récemment été publié, et nous étudions les recommandations et les commentaires formulés par des Canadiens de tout le pays. Un nouveau programme sera mis en place d'ici au 1er juillet prochain.

Comme le programme des investisseurs, le programme des entrepreneurs vise un but important: créer des emplois et stimuler la croissance. Nous voulons attirer des gens d'affaires qui peuvent aider l'économie canadienne en gérant eux-mêmes leur entreprise. En outre, en 1996, nous allons apporter des modifications au programme des entrepreneurs afin d'en augmenter les retombées économiques.

Comme je l'ai déjà signalé, une nouvelle catégorie renfermant les candidats des provinces et des territoires reflétera une réalité toute simple de notre pays, celle qu'une province n'a pas nécessairement les mêmes besoins qu'une autre sur le plan de l'emploi.

Le Canada est un vaste pays s'étalant sur six fuseaux horaires. La nouvelle catégorie reconnaît le fait que les emplois nécessaires dans la région subarctique ne sont pas forcément les mêmes que dans une région côtière, dans les Prairies ou dans le Grand Toronto. En conséquence, la catégorie des candidats permettra à chaque province ou territoire de déterminer chaque année un nombre restreint


16075

d'immigrants à caractère économique, négociable et à négocier, pour répondre à des besoins économiques particuliers.

Avec cette catégorie, nous reconnaissons que les gouvernements fédéral et provinciaux doivent plus que jamais collaborer pour s'adapter à une économie qui évolue à toute vitesse.

L'aspect économique de notre politique d'immigration n'est, toutefois, qu'un élément d'un ensemble complexe. Nous continuerons d'accueillir des membres de la catégorie de la famille et des personnes qui ont besoin de la protection du Canada.

En ce qui concerne la politique d'immigration, le gouvernement libéral reconnaît depuis longtemps l'importance de la famille. Nous reconnaissons pleinement l'importance de la famille non seulement dans la vie d'un immigrant, mais aussi dans la vie de notre pays. Croyez-moi, la réunion des familles est et continuera d'être un élément capital du programme d'immigration du Canada. En fait, la notion de famille est présente dans toutes les catégories dont j'ai parlé jusqu'ici.

Le plan de 1996 prévoit l'arrivée de 78 000 à environ 86 000 immigrants de la catégorie de la famille. La majorité d'entre eux sont des membres de la famille immédiate: des conjoints, des fiancés et des enfants à charge de Canadiens.

Je pense que l'engagement que nous avons pris de garder ensemble les membres d'une même famille révèle clairement le genre de pays que nous voulons avoir, un pays qui se soucie des autres, un pays qui accorde beaucoup d'importance aux valeurs humanitaires. Ces vertus sont bien apparentes dans les politiques touchant les réfugiés qui ont été adoptées non seulement par notre gouvernement, mais par tous les gouvernements canadiens précédents.

(1545)

Devant la souffrance et les atrocités, les Canadiens ne tournent pas le dos.

[Français]

Cette année encore, le nombre de réfugiés est présenté séparément des données sur les autres immigrants, car nous sommes convaincus qu'il est préférable de gérer le programme pour les réfugiés en partenariat avec les autres intervenants intéressés et distinctement du programme d'immigration.

Les modifications que nous prévoyons exigeront une grande collaboration entre nous et les intervenants du secteur privé. Nous voulons continuer à revitaliser le parrainage des réfugiés par le secteur privé et inciter un plus grand nombre de personnes à participer et à améliorer la situation humaine.

[Traduction]

J'ai la joie de vous annoncer que nous réalisons déjà des progrès. Récemment, le gouvernement et un certain nombre d'organismes non gouvernementaux se sont associés pour répondre à un appel du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en vue de rétablir dans divers pays environ 5 000 réfugiés d'ex-Yougoslavie. Le Canada a accepté d'accueillir 10 p. 100 de ces réfugiés. Nous avons convenu de partager les coûts d'installation d'au moins 500 personnes au Canada. C'est le gouvernement qui offrira une aide financière aux réfugiés pour la période cruciale des trois premiers mois. Des répondants du secteur privé assureront le relais pour les neuf mois suivants, ou jusqu'à ce que les réfugiés soient autonomes, selon la première éventualité.

À ce stade-ci, je voudrais remercier les organisations et les familles canadiennes de toutes les régions du pays ainsi que les députés de tous les partis qui se sont renseignés sur ce programme. Je voudrais remercier sincèrement les personnes et les organisations qui ont posé des gestes concrets. Une église du Nouveau-Brunswick est prête à parrainer une famille de quatre personnes de la Yougoslavie avant Noël. En plus des 500 réfugiés que le Canada s'est engagé à accueillir, la province de Québec ouvre les bras à 100 autres réfugiés de l'ancienne république de Yougoslavie.

Voilà des exemples de ce que peuvent accomplir des gens de bonne volonté qui sont animés par la compassion et le courage lorsqu'ils s'associent de coeur et d'esprit. Grâce au Parlement et à un certain nombre de mesures gouvernementales, nous avons beaucoup accompli dans le domaine de l'immigration.

Nous avons renforcé l'intégrité de notre processus d'immigration en adoptant le projet de loi C-44 et en apportant des modifications à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Nous avons pu conclure des accords avec divers pays au sujet des titres de voyage nécessaires pour les renvois.

Nous avons collaboré avec des collectivités de tout le Canada pour venir en aide à des réfugiés du monde entier. Nous avons coopéré avec d'autres ministères et des citoyens canadiens pour faire en sorte que la voix du Canada se fasse entendre avec force et éloquence à la Conférence mondiale de la population tenue au Caire et à la Conférence de Beijing.

Nous avons amélioré le traitement des demandes reçues au Canada et à l'étranger. Nous améliorons constamment nos structures et nos procédures d'installation et d'intégration des immigrants dans l'intérêt non seulement des nouveaux arrivants, mais aussi du Canada.

Naturellement, il nous reste encore des choses à faire. Il nous reste des objectifs à atteindre, et nous y parviendrons. Comme je l'ai dit au début, nous avons un plan et nous le suivons fidèlement.

Je suis optimiste. Je crois en l'immigration. La situation enviable du Canada dans le monde actuel témoigne sans aucun doute du fait que l'immigration a été avantageuse pour notre nation. Il n'y a aucune raison pour que l'immigration ne puisse continuer à rendre le Canada aussi fort et aussi dynamique à l'avenir.

Dans notre plan d'immigration pour 1996, notre destination est simple: un avenir qui tienne compte à la fois de la croissance économique et des valeurs humanitaires, un avenir avantageux pour


16076

les immigrants et pour un Canada fort, bref, un avenir digne du Canada.

(1550)

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais faire quelques commentaires sur les niveaux d'immigration que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration vient de déposer à cette Chambre selon la loi de l'immigration.

Le ministre nous annonce que le Canada accueillera l'année prochaine un total qui se situe entre 195 000 et 220 000 immigrants et réfugiés, soit des chiffres qui se situent entre 171 000 et 187 000 immigrants et entre 24 000 et 32 000 réfugiés.

Il vient de mentionner les efforts que le Canada fait en faveur des réfugiés. J'ai noté que nous avons fait des efforts concernant les ressortissants de l'ancienne Yougoslavie. J'aimerais également que le ministre fasse des efforts additionnels dans le cas des autres pays et des autres continents, particulièrement pour venir en aide aux femmes et aux enfants en détresse. Je pense qu'il faudrait mettre l'accent sur les femmes et les enfants en détresse qui constituent la majorité des réfugiés dans le monde. Le Québec va accepter l'année prochaine 27 000 immigrants et réfugiés, et c'est le Québec qui a fixé ce quota, conformément à l'entente Canada-Québec.

En général, nous sommes d'accord avec le chiffre déterminé par le ministre et son gouvernement. En fait, c'est presque le même plan que celui qu'il nous avait soumis l'année dernière, sauf de légers changements. Le premier étant une légère hausse de 5 000 nouveaux immigrants; le deuxième, qu'il y a 3 500 places pour les immigrants visés par une mesure de renvoi à exécution différée et admis pour raisons humanitaires; et le troisième changement étant qu'on prévoit une nouvelle catégorie, celle des candidats proposés par une province ou un territoire. On prévoit accepter dans cette catégorie un millier de nouveaux immigrants.

Le ministre vient de manifester sa volonté de travailler en partenariat avec les provinces et les territoires, mais il ne prévoit que 1 000 places pour les neuf provinces et les deux territoires. Ce n'est pas beaucoup. Ce n'est pas un effort sérieux de décentralisation et de collaboration avec les provinces. Nous savons que les provinces, à part le Québec qui a déjà des pouvoirs très définis dans ce domaine, réclament également des pouvoirs en matière d'immigration, notamment le Manitoba et la Saskatchewan.

Les chiffres déterminés par le ministre en 1994 indiquaient que le Canada recevrait, en 1995, entre 190 000 et 215 000 immigrants. En fait, pour les huit premiers mois de cette année, le Canada n'a reçu que 132 000 nouveaux immigrants. J'estime que d'ici à la fin de cette année le nombre de nouveaux arrivants sera inférieur à 200 000.

Il faut noter qu'aujourd'hui les éventuels immigrants sont moins intéressés à venir au Canada. C'est le cas particulièrement de beaucoup de pays asiatiques. Beaucoup de ces éventuels immigrants préfèrent naturellement aller aux États-Unis ou en Australie, ou encore dans d'autres pays qui connaissent un fort taux de croissance économique. Et tout cela malgré les sommes considérables que le gouvernement canadien dépense en publicité, en promotion et en recrutement de nouveaux immigrants dans de nombreux pays étrangers.

(1555)

Mais l'obstacle le plus important, sans doute, à la venue de nouveaux immigrants, est la taxe d'entrée de 975 $ en plus des 500 $ initiaux pour l'examen du dossier. Cette taxe constitue une barrière énorme pour les gens qui proviennent des pays pauvres.

En plus de fixer les quotas d'immigration, je pense que le ministre aurait dû nous annoncer des mesures pour réduire les délais et retards dans le traitement des dossiers d'immigration. Malgré quelques efforts faits par le ministère, que je reconnais volontiers, parfois une demande de résidence permanente au Canada prend 18 mois ou plus. Alors, les réfugiés qui ont attendu ici un ou deux ans pour obtenir ce statut sont obligés d'attendre encore un an ou plus pour accéder au statut de résident et ainsi de faire venir leur conjoint ou conjointe et leurs enfants. C'est inhumain de séparer les familles pour de si longs délais. Le ministre devra prendre les mesures appropriées dans ce domaine.

Je voudrais aussi dénoncer ici le recours abusif au test d'ADN afin de prouver le lien de parenté entre parents et enfants. De nombreux membres de la communauté haïtienne de mon comté de Bourassa, de Montréal-Nord et de l'ensemble de la région de Montréal, se plaignent à l'effet que les fonctionnaires, surtout à l'ambassade du Canada à Port-au-Prince, exigent des tests qu'ils trouvent discriminatoires.

Il faut ajouter que le coût d'un test d'ADN atteint 1 000 $ et, naturellement, souvent, ils n'ont pas cet argent. Il devrait suffire de produire les actes de naissance pour prouver les liens de parenté.

Je demande au ministre la raison qui justifie que cette pratique soit plus généralisée chez les Haïtiens. Pourquoi, sauf exception, ne l'exige-t-on pas des immigrants venant par exemple d'Europe? Ces mesures vont souvent à l'encontre du programme de réunification des familles que le ministre vient de mentionner et à propos duquel il dit que c'est une priorité pour le gouvernement.

J'aimerais surtout commenter la question de la taxe à l'immigration. Depuis son implantation dans le dernier budget fédéral, nous, du Bloc québécois, n'avons pas cessé de manifester notre total désaccord et de combattre cette taxe à l'immigration d'un montant de 975 $ que doivent débourser les immigrants et réfugiés afin d'obtenir le statut de résident permanent.

De nombreuses organisations au Québec et au Canada ont dénoncé et mené des campagnes contre cette mesure discriminatoire. Le 28 octobre dernier, il y a quelques jours, à l'occasion de la Journée nationale contre la taxe d'entrée, la table de concertation des organismes de Montréal au service des réfugiés a réitéré ses réserves quant à l'imposition des frais pour les droits d'établissement des réfugiés, des immigrants et de leurs familles. Cet organisme très respectable qualifie cette taxe de fardeau intolérable et discriminatoire.


16077

Le Canada est le seul pays au monde qui a décidé d'imposer de tels frais à des réfugiés reconnus conformément à la Convention de Genève. Il faut ajouter que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a émis des réserves très sérieuses quant à ce dangereux précédent.

Le président du Congrès du travail du Canada, Bob White, a déclaré, et je le cite: «. . .que la taxe d'entrée est foncièrement contraire aux valeurs canadiennes d'équité, d'égalité et de progrès.»

(1600)

Il a ajouté que les immigrants riches peuvent payer cette taxe, mais la plupart des personnes d'origine africaine, asiatique ou latino-américaine désirant émigrer ou chercher refuge au Canada n'en ont pas les moyens. Je profite de cette occasion pour demander au ministre pourquoi le nombre d'immigrants et de réfugiés venant de l'Amérique latine ne cesse de diminuer d'année en année? C'est presque impossible de venir au Canada depuis quelques années de l'Amérique latine.

Le système de prêts pour venir en aide aux gens qui doivent payer ces taxes n'a pas fonctionné. Et tout à l'heure, un des fonctionnaires nous a dit qu'ils n'ont aucun moyen pour mesurer l'impact de cette taxe à l'étranger. Il y a beaucoup de demandes de prêts qui sont refusées, car le candidat ne possède pas les moyens de rembourser ce prêt.

Une fois de plus, je demande au ministre de mettre fin à cette taxe, du moins dans le cas particulier de réfugiés. Je vous rappelle que même certains de ses collègues libéraux lui ont adressé cette demande en ce qui concerne les réfugiés. Je vous dis que mon épouse, mes deux enfants et moi-même sommes venus du Chili en 1974. Si nous avions eu à payer plus de 4 000 $ à titre de droit d'établissement et pour que notre dossier soit traité par les autorités de l'immigration, nous n'aurions jamais pu venir.

Mais ce qu'il y a de plus grave encore, c'est que tous les fonds recueillis, estimés à 146 millions de dollars pour 1995, sont versés aux revenus généraux et non aux services d'établissement destinés aux immigrants. Naturellement, malgré la taxe à l'immigration qui, comme je viens de le dire, va collecter, en 1995, 146 millions de dollars, le transfert de responsabilités aux ONG en matière d'immigration et d'intégration des nouveaux arrivants va signifier une diminution draconienne des fonds et des services.

Déjà, des centaines de fonctionnaires ont perdu leur emploi au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Seulement pour 1996, le gouvernement réduira de 20 p. 100 le nombre de fonctionnaires au sein des administrations centrale et régionales. Je dénonce encore une fois ces coupures massives de fonctionnaires.

Brièvement, je demande au ministre de porter plus attention aux rapports préparés par le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Ce comité a préparé plusieurs rapports qui ont été déposés en cette Chambre et on n'a jamais eu la réaction du ministre. Malgré qu'il y ait beaucoup de témoins qui soient venus témoigner devant ce comité et qu'on ait dépensé beaucoup d'énergie, le ministre ne daigne pas réagir à de tels rapports.

Je termine en disant que le ministre devrait prendre encore d'autres mesures additionnelles pour lancer une campagne d'éducation et de sensibilisation auprès de la population canadienne sur les apports et les aspects positifs que les immigrants offrent à notre société.

[Traduction]

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, dans cette réplique à la déclaration du ministre sur les niveaux d'immigration pour l'année à venir, je dois dire que je n'ai pas été rassurée outre-mesure par le portrait tout en rose que le ministre a brossé de l'état de la politique d'immigration du Canada.

La légère augmentation du nombre d'immigrants est quelque peu trompeuse, car le nombre réel d'immigrants qui arriveront cette année est plus proche des faibles niveaux projetés pour cette année, ce qui sera sans doute également le cas l'an prochain. Cependant, en annonçant une légère augmentation de 5 p. 100, le gouvernement peut dire qu'il se rapproche de sa promesse du livre rouge.

(1605)

Le livre rouge des libéraux énonce ce qui suit, et je cite: «Nous devons continuer à fixer les seuils d'immigration à environ 1 p. 100 de notre population par an.» Ce qui donne quelque chose comme 300 000 immigrants par année. Or, nous n'avons atteint que les deux tiers de ce chiffre. Je suis d'avis que c'est un chiffre bien plus raisonnable que celui qui figure dans le livre rouge, mais qui pourrait quand même être source de difficultés.

Le problème réside en partie dans le fait que le ministère éprouve de la difficulté dans le traitement des demandes. Le mois dernier, un des gestionnaires du bureau de Végréville a parlé au personnel des députés de la région de Vancouver. À ce moment-là, il a annoncé que le bureau de Végréville avait un arriéré de quelque 15 000 dossiers, dont 7 000 dataient d'un an. Si nous avons ce genre d'arriéré maintenant, que va-t-il arriver si le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration met en oeuvre les réductions proposées de près du quart de son personnel?

Un autre aspect intéressant de cette annonce sur les nouveaux niveaux est la nouvelle catégorie provinciale-territoriale. Cette nouvelle catégorie permettra aux provinces et aux territoires, à l'exception du Québec, de se répartir un total de 1 000 immigrants. J'ai dit à l'exception du Québec parce qu'en vertu de l'Accord Canada-Québec, ce dernier exerce déjà entièrement la responsabilité du choix des immigrants qui lui sont destinés. Cela s'applique seulement aux immigrants à caractère économique. Quoi qu'il en soit, l'an dernier, le Québec a pu choisir plus de 11 000 immigrants de cette catégorie qui sont venus s'installer dans cette province. Par souci d'équité, le gouvernement fédéral a décidé de permettre au reste des provinces et territoires d'avoir leur mot à dire dans la sélection d'un total de 1 000 immigrants.

Les chiffres montrent un autre aspect intéressant de l'Accord Canada-Québec. En vertu de cet accord, le Québec reçoit 90 millions de dollars pour l'établissement des immigrants. De son côté, le gouvernement fédéral dépense environ 270 millions de dollars dans le reste du Canada. Par conséquent, la part du Québec est d'environ un quart du total des fonds, ce qui correspond grosso modo au


16078

pourcentage que représente la population du Québec au Canada. Cela correspond aussi à l'intention du Québec d'accueillir 47 000 immigrants, soit le quart des immigrants au Canada. Cependant, les choses n'ont pas fonctionné selon les plans et le Québec n'a accueilli que 26 000 immigrants l'an dernier, ce qui ne représente que 13 p. 100 du total. Pourtant, la province a quand même reçu 90 millions de dollars, soit environ le quart des fonds destinés à l'établissement des immigrants.

L'an prochain, le Québec n'accueillera que 27 000 immigrants et réfugiés, soit 12 ou 13 p. 100 du total. Pourtant, la province recevra encore 90 millions de dollars ou le quart des fonds.

Étant donné les commentaires du premier ministre Parizeau sur le vote ethnique au Québec, je peux comprendre pourquoi les immigrants hésitent à s'installer dans cette province. Il reste toutefois que les fonds fédéraux consacrés à l'établissement d'un immigrant au Québec représentent le double des fonds consacrés à l'établissement d'un immigrant ailleurs au Canada.

Les niveaux d'immigration, le nombre d'immigrants et la quantité de fonds ne forment qu'une partie de l'équation. Les Canadiens s'inquiètent tout autant des qualités des immigrants que nous recevons que de leur nombre. Des sondages révèlent que peu de Canadiens appuient la politique d'immigration actuelle du Canada. Le gouvernement aime dire que c'est à cause du Parti réformiste. Je remercie le gouvernement de reconnaître ainsi notre influence, mais je dois dire aux membres du Parti réformiste que notre parti reflète très bien les préoccupations des citoyens ordinaires.

Les citoyens ordinaires sont contrariés lorsqu'ils entendent dire que 14 p. 100 des parrains d'immigrants ne respectent pas leurs obligations, ce qui a coûté 700 millions de dollars en 1993. Ils ont été choqués de lire dans le journal le Citizen d'Ottawa du 30 septembre dernier que 19 p. 100 des prestataires d'aide sociale de la région d'Ottawa-Carleton sont des immigrants et des réfugiés. Ils veulent que le gouvernement soit plus ferme avec les parrains qui ne respectent pas leurs obligations. En attendant, ils voient des affaires comme celle de Mohammed Assaf.

(1610)

En 1989, Mohammed Assaf parraina son frère et sa famille, qui s'établirent en Alberta. Toutefois, moins de deux ans plus tard, la famille de son frère a fait appel à l'assistance sociale. Les contribuables albertains ont dû payer 40 000 $ en prestations d'aide sociale. Les services sociaux de l'Alberta ont vainement tenté de recouvrer cette somme du parrain, Mohammed. Celui-ci a ensuite voulu parrainer sa deuxième femme, afin qu'elle vienne au Canada. Dans leur grande sagesse, les fonctionnaires de l'immigration lui ont répondu qu'il ne pouvait pas la parrainer, parce qu'il avait une obligation non remplie à titre de parrain.

Mohammed Assaf remboursa 8 000 $ sur les 40 000 $ qu'il devait, puis trouva une meilleure solution. Il interjeta appel devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Devinez ce qui arriva? Les membres de la CISR lui ont dit: «Ne vous inquiétez pas pour votre dette envers les contribuables canadiens, nous allons vous laisser parrainer votre deuxième femme de toute façon.»

Quel genre de message envoie-t-on ainsi, non seulement aux immigrants, mais à l'ensemble des Canadiens? Des décisions aussi scandaleuses de la part de la CISR minent tous les efforts que peut faire le ministre pour régler le problème des parrains qui ne respectent pas leurs engagements.

Il ne suffit pas de blâmer la CISR. Ses membres ont fait l'objet de nominations partisanes par le ministre. Il est quelque peu ironique de constater que tous les efforts que fait le ministre, par l'entremise de son ministère, sont ruinés par les amis du parti qu'il a lui-même nommés à la CISR.

Même si le pourcentage d'immigrants qui arrivent au pays en vertu du programme de réunion des familles est en train de diminuer, ce volet continue de poser de graves problèmes. La plupart des Canadiens reconnaissent que la réunion des familles est un objectif louable. Toutefois, cela doit être limité à la famille immédiate.

Une des études contenues dans le livre intitulé Diminishing Returns indiquait que, depuis quelques années, chaque immigrant admis au Canada dans la catégorie de la famille a été suivi de sept autres immigrants. Malheureusement, bon nombre d'entre eux viennent contre de l'argent, que ce soit sous forme de grosse dot ou de mariage simulé. J'ai appris que dans un cas, une femme était contrariée parce qu'elle éprouvait de la difficulté à parrainer la venue de son quatrième époux en quatre ans. Des comédies de ce genre jettent le discrédit sur le système.

Par contre, certains immigrants contribuent de façon positive à l'économie canadienne. Toutes les études montrent que ces gens font plus d'argent que les Canadiens de naissance.

L'an dernier, le ministre a annoncé avec fierté que le pourcentage d'immigrants de la composante à caractère économique passerait de 43 p. 100 à 55 p. 100 de l'immigration totale. Ces chiffres peuvent être encourageants, mais ils sont trompeurs. En fait, la majorité des immigrants de la composante à caractère économique n'ont pas de revenus élevés mais sont à la charge d'immigrants à revenu élevé. En réalité, seulement 17 p. 100 des immigrants de la composante à caractère économique ont des revenus élevés. Si l'on tient compte des réfugiés, seulement 14 p. 100 des nouveaux arrivants contribuent à notre économie.

Malheureusement, bon nombre de ces gens perdent leurs illusions lorsqu'ils arrivent ici. À Vancouver, des médias ont rapporté récemment que plusieurs immigrants originaires de Hong Kong ont décidé d'y retourner. Parmi les principales raisons de leur départ, ces gens invoquent les taxes nombreuses et élevées et les innombrables règlements gouvernementaux qui entravent la création de la richesse. N'est-il pas ironique que ces personnes croient que, sur le plan des affaires, elles s'en tireront mieux dans deux ans sous le régime communiste de la République populaire de Chine que sous le gouvernement libéral actuel?


16079

Enfin, je voudrais dire un mot au sujet de l'accueil de réfugiés au Canada. Nous avons toujours été généreux pour ce qui est d'admettre des réfugiés au sens de la Convention et nous devrions continuer de faire notre part et d'accueillir les personnes qui fuient la persécution en Afrique, en Asie et dans l'ancienne Yougoslavie. Malheureusement, les personnes que nous accueillons ne sont pas nécessairement des réfugiés au sens de la Convention.

(1615)

Un de mes employés a récemment rencontré un jeune réfugié somalien qui suit des cours à l'Université d'Ottawa. Le problème c'est que cet individu n'est ni un réfugié, ni un Somalien. Il est né à Djibouti, un pays voisin, et alors qu'il était résident français, a décidé de venir à Ottawa pour suivre des cours à l'université. Quand il a commencé à manquer d'argent, il s'est adressé à un bureau d'immigration où il s'est fait passer pour un réfugié somalien et c'est ainsi que les contribuables canadiens financent maintenant ses études.

Et que dire de Tejinder Pal Singh, qui a déjà été condamné pour un détournement d'avion. Il est venu au Canada où il a demandé le statut de réfugié sous un nom d'emprunt et est maintenant en liberté sous caution à Vancouver, pendant que la CISR entend son cas.

Si le gouvernement veut que les Canadiens acceptent ouvertement les réfugiés, il ferait mieux de s'assurer que nous sommes en train d'ouvrir nos portes à de véritables réfugiés au sens de la Convention et non à des criminels, des pirates de l'air ou des escrocs.

Si le gouvernement veut que tous les Canadiens appuient sa politique d'immigration, il ferait mieux de s'assurer que nous admettons au Canada des gens qui veulent faire une contribution positive à notre pays, et non des rejets misérables en provenance de pays surpeuplés.

* * *

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter le 96e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres du Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées et la liste des membres associés du Comité permanent du patrimoine canadien.

Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption de ce rapport plus tard aujourd'hui.

[Traduction]

LA LOI SUR LE SYSTÈME CORRECTIONNEL ET LA MISE EN LIBERTÉ SOUS CONDITION

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-355, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (arrestation sans mandat).

-Madame la Présidente, je serai bref. Je présente aujourd'hui un court projet de loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition pour permettre aux policiers, partout au Canada, d'arrêter sans mandat une personne qui ne respecte pas les conditions de sa libération conditionnelle ou de sa libération d'office. Plusieurs agents de police des quatre coins du pays m'ont affirmé que, s'ils pouvaient agir ainsi, ils seraient en mesure d'empêcher certains crimes. Je crois que la prévention est l'une de nos grandes préoccupations et qu'elle constitue un objectif important pour tous les partis à la Chambre.

Quand des services de police m'ont fait part de cette idée, ils m'ont signalé que ce serait une mesure préventive extrêmement utile. Cela permettrait d'éviter des morts et des blessures ainsi que des dommages contre les biens des autres Canadiens. J'espère que cette mesure législative sera adoptée bientôt.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

* * *

(1620)

LE BUDGET SUPPLÉMENTAIRE (A), 1995-1996

RENVOI AUX COMITÉS PERMANENTS

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Madame la Présidente, aux termes des paragraphes 81(5) et 81(6) du Règlement, je voudrais présenter une motion concernant le renvoi du budget supplémentaire.

Je propose:

Que le budget des dépenses supplémentaire (A) pour l'exercice se terminant le 31 mars 1996, déposé le 1er novembre 1995, soit renvoyé aux différents comités permanents de la Chambre énumérés ci-après.
Madame la Présidente, selon la pratique habituelle à la Chambre et si l'on y consent, je demande que la liste soit imprimée dans le hansard sans être lue.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre a entendu la proposition du président du Conseil du Trésor. Y consent-on?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: La liste suit:]


16080

Au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
Agriculture et Agroalimentaire, crédits 1a et 15a

Au Comité permanent du patrimoine canadien
Patrimoine canadien, crédits 1a, 5a, 10a, L21a, 25a, 30a, 45a, 80a, 130a et 145a

Au Comité permanent de l'environnement et du développement durable
Environnement, crédits 1a et 10a

Au Comité permanent des finances
Finances, crédits 1a et L30a
Revenu national, crédit 1a

Au Comité permanent des pêches et des océans
Pêches et Océans, crédit 1a

Au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
Affaires étrangères, crédits 1a, 5a, 10a, 16a et 20a

Au Comité permanent des opérations gouvernementales
Conseil privé, crédits 1a et 5a
Patrimoine canadien, crédit 140a
Travaux publics et Services gouvernementaux, crédits 20a, 21a, 25a, 31a et 41a

Au Comité permanent de la santé
Santé, crédits 1a, 5a, 10a, 20a et 25a

Au Comité permanent du développement des ressources humaines
Développement des ressources humaines, crédits 1a, 5a, 10a, 15a, 25a, 30a, 35a et 50a

Au Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées
Justice, crédit 15a

Au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord
Affaires indiennes et du Nord canadien, crédits 1a, 5a, 10a, 15a, 35a, 45a, 46a et 55a

Au Comité permanent de l'industrie
Agence de promotion économique du Canada atlantique, crédit 1a
Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, crédits 1a et 5a
Finances, crédits 45a et 50a
Industrie, crédits 1a, 25a, 65a, 75a, 80a, 85a, 90a et 95a

Au Comité permanent de la justice et des questions juridiques
Justice, crédits 1a, 5a, 40a et 45a
Solliciteur général, crédits 1a, 10a, 15a, 25a, 30a et 45a

Au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants
Anciens combattants, crédits 1a, 5a et 10a
Défense nationale, crédits 10a, 15a et 20a

Au Comité permanent des ressources naturelles
Ressources naturelles, crédits 1a, 20a, 30a et 35a

Au Comité permanent des transports
Transports, crédits 1a, 5a et 10a

Au Comité mixte permanent des langues officielles
Conseil privé, crédit 25a

(La motion est adoptée.)

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je propose: Que le 96e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre plus tôt aujourd'hui, soit adopté.

Il s'agit du rapport que j'ai déposé précédemment, celui qui donne les noms des nouveaux membres des différents comités.

(La motion est adoptée.)

INDUSTRIE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je propose:

Que la Chambre, en vertu de l'article 119.1(1) du Règlement, autorise le Comité permanent de l'industrie de télédiffuser ses réunions avec les banques et les autres prêteurs durant la semaine du 6 novembre 1995, conformément aux principes directeurs de la politique portant sur la télédiffusion des réunions de comités.
(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LES MARCHÉS DE L'ÉTAT

M. George S. Rideout (Moncton, Lib.): Madame la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de présenter une pétition sur les pratiques d'appels d'offres du ministère de la Défense nationale.

* * *

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, si la question no 223 pouvait être transformée en ordre de dépôt de document, ce document serait déposé immédiatement.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 223-M. Frazer:

À l'égard du ministère de la Défense nationale et des appels qu'il a interjetés à l'égard de jugements de la cour martiale entre janvier 1970 et juin 1995, a) combien d'appels le ministère a-t-il interjetés par année, b) quels sont les détails-notamment les noms et les dates-des causes dans lesquelles le ministère a appelé du jugement, c) quels étaient, dans chaque cas, le verdict de la cour martiale et la peine infligée, d) pour quelles raisons le ministère a-t-il appelé de chacun des jugements en questions au cours de la période spécifiée, e) quel a été le résultat de chaque appel interjeté par le ministère à l'égard de jugements de la cour martiale?

16081

(Le document est déposé.)

[Traduction]

M. Peter Milliken: Madame la Présidente, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

* * *

DEMANDES DE DOCUMENTS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je demande que toutes les motions portant production de documents soient reportées.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


16081

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LES SANCTIONS ADMINISTRATIVES PÉCUNIAIRES EN MATIÈRE D'AGRICULTURE ET D'AGROALIMENTAIRE

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) propose: Que le projet de loi C-61, Loi établissant un régime de sanctions administratives pécuniaires pour l'application de la Loi sur les produits agricoles au Canada, de la Loi relative aux aliments du bétail, de la Loi sur l'inspection des viandes, de la Loi sur les produits antiparasitaires, de la Loi sur la protection des végétaux et de la Loi sur les semences, soit lu pour la troisième fois et adopté.

-Madame la Présidente, je suis ravi qu'il me soit permis de prendre la parole quelques minutes cet après-midi, à la dernière étape de l'étude du projet de loi C-61, Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire.

(1625)

J'ai le plaisir de signaler à la Chambre, comme cela a été mentionné plus tôt au cours du débat, que cette mesure bénéficie d'un solide appui de la part des principales associations du secteur agroalimentaire canadien. Les députés ont déjà eu l'occasion d'étudier le projet de loi dans le menu détail. Ils sont parfaitement conscients des avantages qu'il présente et que la plupart d'entre eux appuient en principe ce que nous essayons de faire. Par conséquent, je serai bref et me contenterai de vous rappeler les éléments principaux du projet de loi C-61.

Pour commencer, le projet de loi mettra à la disposition des fonctionnaires de mon ministère une plus vaste gamme de mesures qui leur permettront de vraiment faire respecter les règlements régissant la salubrité et la qualité des aliments. Ils seront notamment habilités à imposer des sanctions pécuniaires et à négocier des solutions, au lieu d'avoir à compter exagérément sur le seul outil dont ils disposaient dans le passé, à savoir les poursuites pénales.

Le projet de loi permet au gouvernement de répondre aux exigences de l'industrie, qui réclame un système garantissant l'application équitable et uniforme de mesures à l'égard des importateurs et des entreprises nationales qui commercialisent des produits non conformes aux normes canadiennes en matière de salubrité, de sécurité et de qualité. Cela facilitera l'établissement de règles du jeu équitables au sein de l'industrie agroalimentaire canadienne.

Le projet de loi C-61 nous permettra de mieux faire appliquer les règlements aux points d'entrée frontaliers, puisque nous serons autorisés à y imposer des sanctions pécuniaires aux voyageurs qui tentent d'entrer illégalement au Canada des produits de la viande ou des végétaux qui pourraient être porteurs de maladies animales ou végétales qui ne sont pas naturellement présentes dans notre pays.

Le projet de loi C-61 est équitable et opportun. Il permet de négocier des solutions en cas de non-respect des règlements. Les sanctions administratives pécuniaires peuvent être réduites à zéro dollar si le contrevenant prend immédiatement les mesures correctives nécessaires. Après tout le but recherché, c'est le respect des règlements. Cela se traduit par de meilleurs produits et une application plus efficace de la réglementation. Un tel système met donc l'accent sur le respect de la loi, et non sur les mesures punitives.

Enfin, le projet de loi C-61 améliorera la compétitivité de l'industrie canadienne tout en permettant le maintien de l'excellente réputation dont jouit le Canada sur la scène internationale en raison de la qualité supérieure et de la salubrité de ses aliments.

Le recours à des sanctions pécuniaires, qui n'est pas un concept nouveau dans le système de réglementation fédérale, va dans le sens des initiatives entreprises par les autres ministères. Le système que nous proposons n'est pas sans rappeler celui qu'utilisent le Ministère des Transports et le Ministère du Développement des ressources humaines.

Il y a un point qui a été soulevé lors de la discussion en comité du projet de loi C-61, soulevé également à l'étape du rapport, ici à la Chambre des communes, et dont je devrais parler un moment. Il s'agit de la suggestion erronée que mon secrétaire parlementaire pourrait avoir, d'une certaine façon, induit en erreur les membres du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire en ce qui concerne les lettres d'appui que mon ministère a reçues des associations qui représentent l'industrie pendant le processus de consultation relié à ce projet de loi.

L'industrie a été tenue au courant des progrès du projet de loi C-61 depuis le tout début et elle continuera d'être informée jusqu'à ce que la mesure législative soit adoptée.

Agriculture et Agroalimentaire Canada a commencé le processus de consultation sur ce projet de loi au début de 1992. C'était pendant le processus d'examen de la réglementation. Cet examen a confirmé qu'il y avait effectivement, au sein de l'industrie, un soutien impor-


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tant pour le principe des pénalités pécuniaires de nature administrative.

(1630)

Plus tard dans l'année, en octobre 1992, le Dr Art Olson, sous-ministre adjoint à la Direction générale de la production et de l'inspection des aliments, a envoyé une lettre à toutes les associations qui seraient touchées, dont celles qui figurent sur la liste des associations de cette industrie qui a été fournie au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire pendant son étude du projet de loi C-61.

La lettre du Dr Olson informait toutes les organisations du secteur de l'intention du ministère de mettre sur pied un système de pénalités pécuniaires de nature administrative. Le ministère s'était également engagé, pendant cette même période, dans des négociations directes avec un certain nombre de groupes représentatifs. Après le premier contact et les premières consultations avec l'industrie, mon ministère a reçu un certain nombre de lettres d'appui de divers organismes du secteur.

Le jour où le projet de loi C-61 a été déposé à la Chambre des communes, en décembre 1994, une autre lettre a été envoyée par mon ministère, celle-ci à 132 associations pour les informer que le processus avait maintenant passé le stade de la consultation, le stade de la rédaction préliminaire, et que l'on avait maintenant un projet de loi officiel, imprimé et prêt à être étudié. Il était important d'informer l'industrie de ce fait.

À la lettre aux 132 associations, on avait joint un document de quatre pages résumant les principales dispositions du projet de loi C-61. La lettre de décembre 1994 invitait les représentants de l'industrie à s'adresser au ministère s'ils avaient des questions ou des inquiétudes particulières. Nous avons reçu quelques demandes de renseignements à ce moment-là.

Il convient de noter que, au cours de ce processus, parmi les 132 associations industrielles consultées, aucune n'a manifesté qu'elle avait changé d'avis quant à son appui au projet de loi C-61. Au moment où la deuxième lettre a été envoyée, un communiqué a été envoyé à plus de 1 000 représentants des médias et du secteur afin de les informer.

De décembre 1994 à aujourd'hui, le processus a franchi les diverses étapes parlementaires. Ces dernières semaines, de hauts fonctionnaires ont communiqué avec dix de ces associations industrielles qui s'étaient déjà prononcées en faveur de la mesure législative. Il s'agit des associations dont a parlé le député de Kindersley-Lloydminster quand il a mis en doute l'affirmation selon laquelle elles étaient toujours favorables à l'adoption du projet de loi C-61.

On a donc communiqué de nouveau avec ces dix organismes, pour confirmer ce qu'est leur position. Il se trouve que, des 10 organismes cités par le député de Kindersley-Lloydminster, trois seulement ont dit avoir été contactés par le Parti réformiste. Neuf d'entre eux ont affirmé qu'ils maintenaient leur appui à cette mesure législative; dans le cas du deuxième, le responsable venait d'arriver à son poste et n'était pas encore en mesure d'émettre une opinion.

Le ministère prend toutes les dispositions utiles pour que ce responsable, qui occupe un poste important, connaisse bien tous les aspects du projet de loi C-61.

Il est on ne peut plus clair qu'on a consacré tout le temps et l'effort voulu à cette consultation. Les renseignements communiqués au comité et à la Chambre par le gouvernement et ses représentants en ce qui a trait à ce processus consultatif étaient complets et exacts.

(1635)

Le processus suivi pour amener le projet de loi C-61 à la dernière étape à la Chambre a été excellent. On a eu amplement le temps d'en discuter. On a fait part de nombreuses idées dans le cadre de ce processus, que ce soit de façon informelle, à l'étape de la rédaction, ou formelle, sous la forme d'amendements présentés au comité ou à la Chambre, qui sont très utiles. Le gouvernement a fait preuve d'ouverture et de souplesse face à toutes ces idées, puisqu'il a accepté un certain nombre des amendements proposés et il les a inclus dans ce qui est maintenant la dernière version du projet de loi C-61.

Le projet de loi va nous donner un système pour traiter des violations et des violations possibles des règles et règlements sur la santé et la salubirté des aliments, qui sera plus rapide, plus équitable, plus rentable et plus souple. Nous serons ainsi en mesure de faire davantage respecter tous les règlements sur la santé et la salubrité, dans le domaine de l'agriculture et l'agroalimentaire, ainsi que d'aider les entreprises agroalimentaires canadiennes à devenir et demeurer extrêmement compétitives.

Étant donné que nous avons discuté de façon approfondie de ce projet de loi et de tous les amendements proposés, j'exhorte mes collègues à la Chambre, des deux côtés, à appuyer le projet de loi C-61 et à l'adopter rapidement pour le renvoyer ensuite à l'autre endroit.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la Présidente, je n'étais pas présent lors des discussions qui ont eu lieu, la semaine dernière, sur le projet de loi C-61. C'est mon ami, mon collègue et aussi mon voisin de comté, le député de Lotbinière, qui a participé aux discussions ici, en cette Chambre, concernant les amendements que l'opposition officielle a présentés sur le projet de loi C-61.

Comme vous le savez très bien, je devais travailler activement dans la circonscription de Frontenac pour offrir un contrepoids aux électeurs et électrices face à mon collègue de l'Assemblée nationale qui siège sur les banquettes de l'opposition pour obtenir une majorité en faveur du oui dans le comté de Frontenac. Et je profite de l'occasion pour remercier les électeurs et électrices de Frontenac d'avoir appuyé la proposition de la souveraineté assortie d'un partenariat.

J'ai cependant attentivement pris connaissance de ces discussions et je dois avouer être étonné de la frivolité avec laquelle les


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députés du gouvernement ont commenté nos amendements. Cependant, le Bloc québécois est d'avis que le projet de loi C-61 permettra au ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire d'atteindre plusieurs des objectifs qu'il s'est donné, notamment le désengorgement des tribunaux et les économies qui en résulteront pour les contribuables. En ce sens, le Bloc québécois est d'accord avec le principe d'un système de sanctions pécuniaires administratives.

Néanmoins, le Bloc québécois ne peut donner son appui au projet de loi tel que présenté par le gouvernement. La raison en est fort simple: le ministère fédéral du Transport, qui a su implanter un système de sanctions pécuniaires sans pour autant permettre la négociation de ces sanctions entre le ministère et les contrevenants. C'est le talon d'Achille, selon nous de l'opposition officielle, cette fameuse possibilité de négocier la peine. Par contre, le ministère fédéral de l'Agriculture n'a pas écouté les amendements présentés par le Bloc québécois et continue de supporter le principe de transaction pour négocier la peine.

Ce faisant, le Bloc québécois estime que le projet de loi pourrait avoir des conséquences importantes sur le plan du non-respect de l'équité en matière de justice.

(1640)

Le judiciaire est différent du législatif. Ici, à la Chambre des communes, nous pouvons brasser des projets de loi, les améliorer, les soupeser, les analyser, mais quand viendra le temps de leur application, cela reviendra au système judiciaire. Et en aucun temps, dans une société qui se respecte, le judiciaire doit avoir un lien étroit et direct avec le législatif. Sinon, quel genre de société aurions-nous? Est-ce que le gouvernement vise à obtenir éventuellement une société totalitaire où nos concitoyens et concitoyennes seront redevables devant nos élus, où le système judiciaire perdra son autorité? J'espère qu'on ne vivra pas dans un régime totalitaire.

Il est donc déplorable que le gouvernement fédéral ait rejeté du revers de la main les amendements présentés par le Bloc québécois. Ceux-ci avaient pour objectif d'éliminer le risque de décision arbitraire dans le processus d'application des sanctions.

Le ministre de l'Agriculture devrait reconnaître que les transactions, les négociations qu'il autorisera pour réduire la peine infligée à un contrevenant ne sont pas indispensables pour atteindre l'objectif qu'il s'était fixé, c'est-à-dire de désengorger les tribunaux.

L'expérience de son collègue, le ministre des Transports, confirme qu'il est beaucoup plus avantageux pour un contrevenant de payer immédiatement l'amende prévue pour une peine plutôt que de recourir aux tribunaux, surtout s'il sait que la cause est perdue d'avance. Le système de sanction pécuniaire est en soi un incitatif suffisant pour encourager le contrevenant à régler son cas en dehors des tribunaux. Toute transaction supplémentaire pour réduire le montant de la peine n'ajoute rien de plus, sinon un risque important d'iniquité dans le traitement des peines.

À la suite des amendements présentés par le Bloc québécois, par l'intermédiaire de mon collègue de Lotbinière, pour abolir toute forme de transaction, de négociation entre le ministère et le contrevenant, le ministère de l'Agriculture ne nous a pas convaincus, mais pas du tout, qu'il n'existait aucun risque de décision arbitraire dans ce fameux processus d'application de sanctions pécuniaires. Le processus de négociation qui permet à l'agent de réduire la peine d'un contrevenant nous apparaît toujours inéquitable et surtout dangereux pour une démocratie.

Pour justifier le rejet rapide des amendements présentés par le Bloc québécois, le député de Brandon-Souris a indiqué, et je le cite: «L'important, ici, c'est que l'on se conforme à la loi. Que la sanction soit alourdie ou allégée est secondaire dans la plupart des cas à la nécessité d'opérer un changement chez l'auteur de l'infraction.»

Et le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire abondait tout à l'heure dans le même sens en disant: «L'important, c'est le respect de la loi, et peu importe l'application de la loi.

Dans ma circonscription, je parlais avec un chef de police d'une petite municipalité qui avait dû témoigner dans la ville de Sherbrooke. Pour illustrer à quel point les amendes, les sanctions sont rendues insignifiantes, il me racontait que des accusés qui devaient répondre à 7 ou 8 chefs d'accusation d'infraction dans des résidences d'été l'ont dépassé, lorsqu'il revenait dans sa localité. Pour régler leurs amendes, leurs infractions, cela avait été tellement rapide, et il y avait une sanction de peine d'emprisonnement, qu'ils ont dépassé le chef de police à vive allure en faisant des gestes et des signes que je n'oserais pas faire en cette Chambre.

(1645)

Nos corps policiers sont désabusés à un point tel qu'ils se posent souvent la question: Est-ce qu'on doit faire notre travail ou encore fermer les yeux et dire qu'on fera semblant de ne pas avoir vu les coupables parce que notre système judiciaire s'en va à la dérive, à la banqueroute?

En d'autres mots, le député de Brandon-Souris estime que l'important est de faire respecter la loi, peu importe si on la fait respecter de façon équitable, juste pour tous. Il ne peut pas répondre à cela. Or, je regrette, au Québec on n'achète pas ce genre de justice.

Il faut bien se comprendre. Les amendements proposés par le Bloc québécois n'abolissaient pas le système de sanctions pécuniaires. Je le répète, le Bloc québécois est d'accord avec ce principe qui permet encore une fois de désengorger les tribunaux.

Cependant, il s'agit là d'une approche nouvelle et intelligente, surtout dans un contexte de crise des finances publiques. Cela dit, on ne peut désengorger les tribunaux, créer un système parallèle de justice, si cela risque d'implanter un système arbitraire de justice. Dès qu'il existe la possibilité de négocier sa peine avec des fonctionnaires, on met un biais inacceptable dans le traitement des peines.


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Et d'une façon plus précise, après avoir décelé une infraction, les agents de la direction générale de l'inspection et de la production recommanderont à leur directeur d'imposer la sanction. Le processus décisionnel est donc centralisé et le ministère prétend que la réglementation enlève tout risque de décisions arbitraires. Mais cela est faux. Cela est faux et d'ailleurs le gouvernement n'a même pas daigné déposer la réglementation, pourtant si importante dans ce cas-ci, pour évaluer la pertinence du système de négociations pour abaisser la peine.

L'agent du ministère est autorisé à conclure une transaction avec le contrevenant pour réduire son amende de un dollar pour chaque deux dollars que l'entreprise investit pour améliorer ces procédés, se procurer du matériel neuf, ou encore former ses employés. Nous sommes donc contre ce principe. Dans notre système de justice, on ne négocie pas les peines. Je répète: dans notre système de justice, on ne négocie pas sa peine.

Je vois le député de Brome-Missisquoi qui a déjà occupé la fonction de bâtonnier dans son district, il sait très bien que le prisonnier qui est reconnu coupable ne négocie pas sa peine, loin de là.

Imaginez-vous, madame la Présidente, sur l'autoroute 40, la 401, descendant à Montréal un officier de l'OPP, par exemple, vous arrête pour excès de vitesse. Là, vous commencez à négocier votre billet d'infraction. Vous êtes délinquante, vous filiez à 140 kilomètres à l'heure, et vous négociez avec l'agent de l'OPP: «Bien écoutez, j'allais à 140, j'étais dans une côte, ça descend, l'auto a accéléré, alors soyez indulgent, je suis vice-présidente à la Chambre des communes. Indiquez donc 121 kilomètres, ou encore laissez-moi filer en douce, à l'anglaise.»

(1650)

La justice aurait deux poids, deux mesures? Non. Je ne crois pas que les Québécois et les Québécoises accepteraient, madame la Présidente, que vous négociiez votre billet d'infraction avec un agent de l'OPP, encore moins avec un agent de la Sûreté du Québec, parce que ça ne serait vraiment pas gentil qu'un député, encore pire, la vice-présidente de la Chambre des communes, puisse négocier. Et ça pourrait arriver dans notre loi, ici, pour les agriculteurs ou ceux qui gravitent autour de l'agriculture, qu'ils pourraient négocier de gré à gré une diminution sans précédent de leur peine.

Cela pourrait avoir des désavantages sur la viabilité et la fiabilité également de nos produits agricoles ici, au Canada. Alors, négocier votre billet d'infraction sur la route, j'ai entendu dire que c'était possible, mais vous comprendrez comme moi que ce n'est pas l'idéal. Dans ce cas-ci, un contrevenant qui est plus riche, plus puissant financièrement, serait en mesure d'investir pour remédier à une situation précise, serait récompensé en voyant son amende, sa pénalité, diminuer-pour chaque 2 $ d'investis, on l'abaisse d'un dollar-si bien que quelqu'un qui en aurait les moyens, la possibilité financière, pourrait l'annuler complètement, alors que celui qui serait moins bien nanti ne pourrait pas la régler de la même façon et, à ce moment-là, il y aurait, dans notre système de justice qu'on nous propose, une certaine iniquité.

Il s'agit d'un traitement inéquitable, qui repose sur le pouvoir de dépenser d'un individu ou d'une entreprise. De plus, qui évaluera le coût des efforts réalisés par l'entreprise ou un individu pour remédier à sa situation? Par exemple, la formation dans une région peut coûter beaucoup plus cher qu'ailleurs, tout comme la machinerie. Ce sont là des individus et des entreprises qui seront pénalisés.

Seront-ils informés de tous les moyens à leur disposition pour remédier à la situation? Qu'arrivera-t-il avec un gonflement arbitraire des factures par des fournisseurs complices? Si l'on cherche des incitatifs pour accroître l'investissement et la formation dans une entreprise, alors améliorons les moyens déjà existants, par exemple des incitatifs fiscaux ou autres, mais ne les lions pas à la négociation d'une sentence.

De plus, la loi prévoit une réduction de 50 p. 100 de l'amende si le contrevenant paie cette dernière sans la contester ou réclamer d'audience devant un tribunal. Encore une fois, nous sommes contre ce principe. Dans notre système de justice, la présomption d'innocence est un droit fondamental. Madame la Présidente, je reviens à l'exemple de tout à l'heure. Vous êtes prise en flagrant délit à filer à 140 kilomètres à l'heure et votre amende est de 225 $. Vous avez votre billet, vous payez séance tenante ou dans les sept à dix jours, mais là, dans ce régime qu'on nous propose, si vous payez sans plaider votre billet, on le coupe en deux.

Alors, 225 $ coupés en deux, ça donnerait 112,50 $. Alors, voyez-vous, pour désengorger, on va abaisser votre pénalité de 50 p. 100, ce qui est un non-sens. À moins que le gouvernement, par astuce, par génie, double les amendes en se disant: «On aura un incitatif.» Alors là, il falsifie la réalité de l'application de cette loi.

Dans notre système de justice, la présomption d'innocence est un droit fondamental et, dans une situation imprécise, on indique clairement à l'entreprise ou bien à l'individu qu'il a avantage à se taire et à payer séance tenante.

(1655)

On lui accorde donc le droit d'audience, mais on lui dit: «Écoute, tu as un revolver sur la tempe.» On lui dira qu'il est déjà reconnu coupable et que s'il veut minimiser sa peine, il n'a qu'à payer sans faire de vagues, sans contester. De plus, tout individu a un droit de représentation, n'est-ce pas?

Par ailleurs, le Bloc québécois avait proposé des amendements pour s'assurer que le président et les membres de la Commission, dont le but est de réviser les décisions prises par les fonctionnaires du ministère, puissent le faire. Un contrevenant pourrait, s'il le désire, avoir audience auprès de la Commission pour exiger une révision de sa peine. Or, la Commission-écoutez bien cela, madame la Présidente, soyons très attentifs-est nommée par le ministre et le mandat des membres est renouvelable. Les membres doivent évaluer des décisions prises par les employés du ministère qui, évidemment, sont redevables devant le ministre. N'y a-t-il pas là un conflit d'intérêts?


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Des gens qui siégeraient sur cette Commission, souhaitant voir leur mandat renouvelé pour un deuxième terme, seraient plus complaisants envers le ministère, collaboreraient davantage aux directives, tandis que quelqu'un qui serait récalcitrant ne verrait pas son mandat renouvelé.

De toute façon, je regardais la façon qu'on a utilisée pour nommer le président du Comité d'arbitrage de l'assurance-chômage dans mon district, le district de Thetford. La présidente qu'on a nommée pour siéger à ce comité, pour trancher les litiges à l'assurance-chômage, je pense bien que le choix est bon politiquement, parce qu'elle a les deux mains liées au Parti libéral du Québec et au Parti libéral du Canada, mais elle n'a jamais vu un travailleur ou un chômeur de proche. Pourquoi ne pas avoir pris quelqu'un qui savait ce qu'est le régime d'assurance-chômage, sauf dans les livres, quelqu'un qui l'a déjà utilisé? Là, c'est du patronage. En tout cas, c'est une recommandation, semble-t-il, de l'Association libérale du comté de Frontenac, et on l'a acceptée.

J'espère qu'on ne procédera pas de la même façon pour nommer ici des gens, qu'ils vont avoir déjà vu de près le système dans lequel on les envoie, donc, des gens compétents. Pour décider de la compétence de quelqu'un, il faut avoir milité dans le Parti libéral, aux deux paliers, Québec et Ottawa, et là, tu es compétent.

Pour s'assurer d'une plus grande transparence lors de la nomination du président et des membres de la Commission, nous du Bloc québécois avons suggéré que ceux-ci soient nommés par le ministre avec approbation du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Pourtant, au Comité de l'agriculture et de l'agroalimentaire, là comme ailleurs, les membres de ce gouvernement sont en plus grand nombre, contrôlent le comité, font toujours passer leur vue.

Nous de l'opposition, avec nos collègues du troisième parti, on ne fait que questionner. On propose, bien sûr, des résolutions, des motions qui sont, la plupart du temps, reléguées aux oubliettes parce que le parti ministériel se sert de sa majorité. Ils auraient pu passer leur liste de président et de commissaires, mais au moins la faire valider par le comité. On a refusé et refusé. Et on dira que nous avons devant nous un parti démocrate.

(1700)

Vous savez tous que le monde agricole est très petit. Mais, encore une fois, nos amendements ont été vite rejetés du revers de la main. Aussi, le gouvernement a démontré qu'il faisait peu de cas des propositions avancées par l'opposition officielle. Et en tant que porte-parole de l'opposition officielle du Bloc québécois en cette Chambre en matière d'agriculture, je constate que le gouvernement n'aurait jamais tenu compte des amendements proposés par le Bloc québécois dans ce domaine. Enfin, bien que nous appuyions le principe de base d'un système de sanctions pécuniaires administratives, nous savons fort bien que le gouvernement n'avait pas besoin d'y rajouter en plus un système de négociation des peines.

En effet, les fonctionnaires du ministère fédéral des Transports nous l'ont confirmé lors de leur passage au Comité permanent de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. En soi, le système de sanctions pécuniaires est suffisant comme incitatif pour désengorger les tribunaux.

Le Bloc québécois s'oppose donc vivement au projet de loi C-61 parce qu'il implante un système de négociation des peines entre les fonctionnaires et les contrevenants. Cette nouvelle forme de justice ne se pratique pas à l'heure actuelle au Québec. Elle m'apparaît non conforme aux traditions québécoises et à notre système de justice. Je soupçonne que ce genre de considération n'a pas été pris en ligne de compte lors de la rédaction du projet de loi. Et je serais curieux de voir si le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire serait prêt à réviser sa loi si, lors de son application, on constate que celle-ci entre en conflit avec les traditions et les valeurs de la société québécoise.

En résumé, ce projet de loi de sanctions pécuniaires a un but intéressant en soi, désengorger le système judiciaire, désengorger les tribunaux.

Là où nous, de l'opposition, ne sommes pas d'accord, c'est de négocier sa peine. Cela entraînera, j'en suis convaincu, des abus. Cela entraînera des négociations en dessous de la table. Cela amènera des négociations douteuses.

M. Robichaud: Non, non, non.

M. Chrétien (Frontenac): Oui, douteuses. On risque non pas de servir l'agriculture, mais plutôt de lui nuire.

M. Robichaud: Cela n'arrivera pas.

M. Chrétien (Frontenac): Mon collègue de Beauséjour sait très bien que lorsqu'on prend en flagrant délit un pêcheur qui contrevient aux lois fédérales, on ne négocie pas sur la longueur du poisson qu'il a capturé en cachette, on ne négociera rien. On va prendre le pêcheur fautif au large de sa circonscription et on va le traduire en justice.

Je l'ai dit, le judiciaire et le législatif, il ne faut pas qu'ils couchent dans le même lit. Jamais. Pourtant, nombre d'avocats siègent dans ce parti. Ils devraient être les premiers à dénoncer ce projet de loi C-61 parce qu'il est vicieux.

M. Robichaud: Bien non. Jean-Guy, vous venez de dire que vous allez l'appuyer.

M. Chrétien (Frontenac): Bien non, on ne l'appuiera pas. Il me dérange, madame la Présidente.

Le but est louable. Quand je prenais votre exemple personnel, madame la Présidente, vous avez un billet d'infraction, 140 kilomètres à l'heure, 225 $, vous le payez. Si vous le payez, est-ce qu'on va couper en deux votre amende? Non. Et c'est heureux ainsi.

(1705)

Mon collègue qui a été bâtonnier dans sa région, le député de Brome-Missisquoi, le sait très bien. Le fond est bon, mais c'est lorsque viendra le temps de négocier son amende, pas à la hausse, bien sûr, mais à la baisse, qu'on pourra se poser de sérieuses questions sur la viabilité de l'administration du projet de loi C-61.


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Alors, en terminant, pour ces raisons évoquées, je conclus en vous rappelant que le Bloc québécois n'appuiera pas le gouvernement pour faire adopter le projet de loi C-61.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je désire informer la Chambre qu'en raison de la déclaration ministérielle, les ordres émanant du gouvernement seront prolongés de 43 minutes, conformément à l'article 33(2) du Règlement.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-61, Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire.

Voilà au moins deux ou trois ans que les sanctions administratives pécuniaires figurent dans les plans du ministère de l'Agriculture. Dans le cadre d'un système de sanctions pécuniaires administratives ou SPA, un inspecteur qui détermine qu'il y a eu violation d'une loi en matière d'agroalimentaire peut imposer une amende à l'auteur de l'infraction au lieu de recourir au système judiciaire. Selon le ministère, les SPA visent essentiellement à faire respecter les lois plutôt qu'à avoir un effet coercitif. Les États-Unis et certains pays d'Europe utilisent un système de sanctions pécuniaires administratives depuis un certain temps déjà.

Le Parti réformiste n'a rien contre le principe des sanctions pécuniaires administratives. Nous aimons l'idée d'un système de sanctions plus efficace et rentable, un système qui aide les particuliers et les entreprises à se conformer aux règlements. En outre, la plupart des organismes que j'ai consultés appuient le principe des sanctions pécuniaires administratives. Il y a toutefois une différence entre appuyer le principe des SPA et appuyer un programme de SPA comme celui qui est proposé dans le projet de loi à l'étude.

Avant de parler des problèmes liés à cette mesure législative, je crois qu'il serait utile d'expliquer brièvement à la Chambre l'histoire du projet de loi C-61 depuis son dépôt il y a quelque temps. Le 5 décembre 1994, le projet de loi C-61 franchit l'étape de la première lecture à la Chambre. Il est ensuite étudié à l'étape de la deuxième lecture les 10 et 13 février de cette année. Il est alors renvoyé au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire qui en fait l'étude les 15, 23 et 30 mars ainsi que le 4 avril de cette année.

Le 15 mars, des représentants du ministère expliquent les dispositions du projet de loi et répondent aux questions. Le 23 mars, des représentants de Transports Canada expliquent le système de sanctions pécuniaires administratives adopté en 1985 en vertu de la Loi sur l'aéronautique et ils répondent aux questions. Le 30 mars, Ghislaine Richard, l'ancienne vice-présidente du Tribunal de l'aviation civile, témoigne devant le comité; elle lui explique le rôle du tribunal, notamment en ce qui concerne la mise en application du système de sanctions pécuniaires administratives de Transports Canada, et elle répond aux questions.

Le 4 avril, des représentants d'Agriculture et Agroalimentaire Canada reviennent pour répondre aux réserves exprimées par les membres du comité, à propos des dispositions qui découragent quiconque de contester les chefs d'accusation, des critères liés au fardeau de la preuve et concernant le rajustement du montant des sanctions et d'autres problèmes soulevés lors de l'étude du projet de loi. La mesure législative est alors mise de côté et, en raison des critiques formulées à son endroit, nous avons pensé qu'elle pourrait ne jamais refaire surface à la Chambre.

Je voudrais revenir sur un point que j'avais soulevé au comité et à la Chambre et sur lequel le ministre de l'Agriculture vient de faire des observations. Au comité, le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture a distribué une liste d'associations industrielles qui,d'après lui, avaient appuyé le projet de loi C-61. Il a laissé entendre qu'il y avait des lettres attestant cet appui et que nous pouvions demander des copies de ces lettres si nous le voulions.

Nous avons demandé des copies de ces lettres et nous avons constaté que la majorité d'entre elles dataient de deux ou trois ans avant le dépôt du projet de loi à la Chambre au mois de décembre dernier. Nous reconnaissons que le ministère de l'Agriculture a consulté ces associations industrielles. Cependant, nous avons des doutes quant à la manière selon laquelle le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture a présenté les faits ou le manque de faits à mes collègues et moi en ce qui concerne le soutien accordé au projet de loi.

La plupart des lettres au ministère souscrivaient au principe du régime de sanctions administratives pécuniaires, mais pas nécessairement au projet de loi dans son libellé actuel.

(1710)

Le ministre de l'Agriculture a dit que nous n'avons communiqué qu'avec trois des associations ayant déclaré avoir appuyé le projet de loi C-61. Le ministre se trompe. Depuis que le secrétaire parlementaire a présenté la liste au comité, nous avons communiqué directement avec le président ou le responsable des relations publiques de huit des onze organismes figurant sur la liste.

Dans certains cas, les signataires des lettres n'étaient plus au service des organismes en cause. Cela présentait un problème pour déterminer qui étaient les véritables porte-parole. Les huit organismes que nous avons contactés directement comprennent ceux qui figurent sur la liste distribuée par le secrétaire parlementaire. Nous n'avons pu parler avec certaines de ces personnes parce qu'elles ne font plus partie des organismes qu'elles représentaient.

Le secrétaire parlementaire a dit qu'il s'agissait là de lettres d'appui qui avaient été versées au dossier du projet de loi C-61. Ce n'est pas vrai. Ces lettres ont été rédigées avant la présentation du projet de loi C-61. Il se peut, comme le ministre l'a dit, que d'autres lettres aient été échangées avec ces organismes. Le ministre ne nous a certainement pas fourni des copies d'autres lettres d'appui qu'il aurait reçues relativement au projet de loi C-61 et ne nous a pas dit à quelle date ces lettres auraient été rédigées. Il nous a dit qu'il avait émis des communiqués et contacté quelque 100 organismes, mais il ne nous a jamais fourni de preuves concrètes pour appuyer ses dires.

Quand nous avons communiqué avec les personnes dont les noms nous ont été donnés par le secrétaire parlementaire, ces personnes se sont dites très surprises d'apprendre qu'il y avait un projet de loi C-61. Quelques-uns nous ont demandé de leur envoyer le projet de


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loi en disant que s'ils étaient censés l'avoir appuyé, ils devaient au moins savoir ce qu'il contenait. Ils ont été assez choqués.

Le ministre n'a pas atténué nos préoccupations. Des lettres, que l'on prétendait en faveur du projet de loi, nous ont été communiquées. Cependant, elles n'appuyaient pas du tout le projet de loi C-61. Elles avaient été écrites avant même que les libéraux forment le gouvernement.

Les renseignements qu'on nous a communiqués étaient inexacts. Si cette affaire illustre comment fonctionne le ministère de l'Agriculture et démontre la compétence du ministre et de son secrétaire parlementaire, ceux d'entre nous qui sont agriculteurs ont de bonnes raisons d'être inquiets.

Je le répète, le Parti réformiste appuie le régime de sanctions administratives pécuniaires, mais nous voulons savoir si le ministère de l'Agriculture n'a consulté les associations du secteur qu'une seule fois et a ensuite fait comme il l'entendait ou s'il a véritablement pris le temps de répondre aux préoccupations des gens du secteur. Certaines de ces préoccupations étaient exposées dans les lettres, qui n'étaient pas des lettres d'appui au projet de loi C-61, mais simplement des lettres d'appui au régime de sanctions administratives pécuniaires.

Ce n'est qu'après que le Parti réformiste ait soulevé la question à la Chambre que le bureau du ministre a appelé des associations d'agriculteurs pour demander leur soutien. Comme le ministre l'a clairement admis dans son discours, il a dû faire marche arrière et communiquer avec ces associations. Je crois que nous avons touché un point sensible ou que nous avons un peu brassé les choses en remontant les pistes puisque le ministre, qui n'avait pas fait son travail, a éprouvé certains problèmes. Il ne savait pas ce qui se passait.

En parlant du projet de loi C-61 avec des représentants des associations du secteur, il est apparu que sa mise en oeuvre suscitait de sérieuses préoccupations. Les associations, les producteurs et l'industrie de transformation des aliments veulent des garanties que le système sera appliqué de façon juste et uniforme pour tous les programmes et toutes les régions.

Les responsables du ministère de l'Agriculture qui ont comparu devant le comité ont parlé à plusieurs reprises de l'importance d'assurer aux Canadiens des disponibilités alimentaires sûres et de l'impact des sanctions administratives pécuniaires sur les efforts en vue de veiller à ce que ce soit possible.

S'il ne fait aucun doute que certaines violations toucheront la question de la salubrité des aliments, un grand nombre d'autres violations seront de nature technique. Par exemple, il se peut que l'impression sur une étiquette soit trop petite d'un centimètre ou qu'il y ait des problèmes à importer un certain type d'herbicide utilisé sans difficulté aux États-Unis depuis des années.

L'un des oragnismes de l'industrie nationale que nous avons consulté a émis certaines réserves en ce qui concerne l'application de sanctions pour des violations à caractère technique du Règlement, comme celles que nous venons de citer. Ces organismes estiment que le ministre n'a pas vraiment répondu aux préoccupations de l'industrie.

Il serait bon que le ministre clarifie la situation et nous fournisse la preuve de communications récentes avec ces organismes. Qu'on nous montre des lettres échangées en 1995 et pas des lettres de 1992 ou 1993.

Les réunions que le comité a tenues les 23 et 30 mars 1995 ont amené les députés des deux côtés de la Chambre à exprimer de vives préoccupations. Je ne siégeais pas au comité de l'agriculture à ce moment-là, mais j'ai pu revoir le procès-verbal des délibérations en question. Une des principales préoccupations soulevées par les membres du comité était la question des mesures raisonnables.

(1715)

Dans le projet de loi original qui a été soumis à l'étude du comité, l'article 18 dit ceci:

Le contrevenant ne peut invoquer en défense le fait qu'il a pris les mesures nécessaires pour empêcher la violation ou qu'il croyait raisonnablement et en toute honnêteté à l'existence de faits qui, avérés, l'exonéreraient.
Cet article excluait explicitement comme défense les mesures nécessaires prises par les personnes ayant reçu un procès-verbal pour violation. Cela a suscité des questions, à savoir si le régime de SAP devrait être appliqué comme un régime de stricte responsabilité ou de responsabilité absolue. La stricte responsabilité signifie qu'il faut prouver qu'une personne a commis délibérément la violation. La responsabilité absolue ne tient pas compte de l'intention de la personne qui a commis la violation et, par conséquent, n'accepte pas en défense le fait d'avoir pris des mesures raisonnables.

M. Mazowita, directeur de la législation et de l'application des règlements à Transports Canada, a témoigné devant le comité et commenté cette question dans le contexte de l'aviation. Il a dit:

Dans le domaine de l'aviation, nous estimons tout à fait normal que l'on puisse invoquer la diligence raisonnable . . . il y a des tas de situations dans lesquelles le pilote, ou l'opérateur commercial,ou fabricant, a fait tout ce qu'il était raisonnablement tenu de faire et, dans notre programme, nous estimons qu'il n'est pas nécessaire de punir des particuliers ou des sociétés qui ont agi en toute bonne foi.
On a alors demandé pourquoi des mesures raisonnables pouvaient être invoquées en défense aux termes de la Loi sur l'aéronautique, mais pas dans le contexte des sanctions administratives pécuniaires.

Ce n'était pas la première fois qu'on exprimait des préoccupations au sujet des mesures raisonnables. Dans une note en date du 16 février 1995 que l'avocat général a adressée au Comité mixte permanent de l'examen de la réglementation, on exposait ces préoccupations. Dans la note, Edgar H. Schmidt citait le principe suivant, que la Cour suprême du Canada a fait valoir dans le Renvoi concernant le paragraphe 94(2) de la Loi sur la sécurité des véhicules automobiles. Elle disait notamment:


16088

Depuis des temps immémoriaux, notre législation prévoit qu'on ne doit pas punir un innocent. On a longtemps reconnu ce principe comme un élément essentiel de notre système d'administration de la justice qui est basé sur une croyance dans la dignité et la valeur de la personne humaine, ainsi que sur la primauté du droit.
À mon avis, c'est parce qu'une responsabilité absolue va à l'encontre des principes de justice fondamentale que la Cour a créé des présomptions que les assemblées législatives n'ont pas l'intention de faire en sorte que des infractions de nature réglementaire tombent dans cette catégorie.
En fait, je le répète, en droit pénal, la responsabilité absolue va toujours à l'encontre des principes de justice fondamentale, quelle que soit la nature de l'infraction.
Toujours au sujet de la question de la responsabilité absolue,M. Schmidt a ajouté:

Depuis l'entrée en vigueur de la Charte, certains principes priment même les lois adoptées par les assemblées législatives. En ce qui concerne les infractions de responsabilité absolue, la Cour suprême du Canada a jugé que l'article 7 de la Charte. . .
-qui dit que chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne et qu'il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale-

. . .interdit la création d'infractions de responsabilité absolue passibles d'emprisonnement. Essentiellement, la Cour a jugé que, même si toutes ces infractions violaient les principes de justice fondamentale, seules celles qui allaient à l'encontre du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne portaient atteinte à l'article 7 de la Charte. Étant donné que les violations prévues par le projet de loi C-61 ne peuvent entraîner l'emprisonnement, il est peu probable qu'elles aillent à l'encontre des intérêts particuliers protégés par l'article 7. Cependant, cela ne change rien au fait que, en faisant en sorte que ces violations deviennent des infractions de responsabilité absolue, le projet de loi ne respecte pas les principes de justice fondamentale.
L'alinéa 18g) du projet de loi C-61 place effectivement dans cette catégorie des violations qui, selon la Cour suprême du Canada, sont des infractions de responsabilité absolue. Il convient de noter que les violations, aux termes de ce projet de loi, seraient, pour la plupart, des contraventions à la loi ou aux règlements qui constitueraient également des infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité ou par voie d'acte d'accusation.

Le projet de loi donne au ministre le pouvoir de transformer les violations qui ne sont actuellement que des infractions de responsabilité dont il faut prouver l'intention de responsabilité absolue, en les désignant simplement aux termes de l'article 4 du projet de loi. Ce n'est pas moi qui le dit, mais M. Schmidt, qui s'y connaît.

(1720)

En réponse aux questions soulevées par M. Schmidt, le cabinet du ministre de l'Agriculture faisait valoir à ce dernier qu'une norme de responsabilité absolue allait «garantir que les personnes régies par le règlement feraient preuve de beaucoup de prudence et de diligence, compte tenu des conséquences qu'une infraction pourrait avoir sur la santé et la sécurité des personnes.»

Le Parti réformiste est également en faveur d'une grande diligence et de la protection de la santé humaine. Si l'on a des raisons de croire qu'une pratique met la santé humaine en danger, je la classerais parmi les infractions. La personne qui est accusée de l'infraction pourra alors invoquer pour sa défense qu'elle a pris toutes les mesures nécessaires, un droit dont ne jouissent pas les personnes à qui un avis d'infraction est signifié. Lorsqu'une personne commet une infraction extrêmement grave, elle a le droit d'invoquer, pour sa défense, l'argument qu'elle a pris toutes les mesures nécessaires. Par contre, aux termes du projet de loi C-61, une personne qui commet une infraction moins grave ne peut invoquer cet argument à sa décharge.

Je devrais préciser que ce ne sont pas toutes les infractions aux lois régissant l'agriculture et l'agroalimentaire qui entrent dans la catégorie des menaces à la santé et à la sécurité des personnes. Les libéraux et le ministère de l'Agriculture ont souvent dit que la responsabilité absolue était la seule solution, si l'on veut que le système fonctionne comme il faut. Je suis certain que les ministériels se disent qu'il y a des dispositions dans la loi qui tiennent compte de l'intention de la personne à qui est signifié l'avis d'infraction.

Nous avons soulevé ce point au comité, il y a une dizaine de jours. À cette occasion, ni M. Phil Amudsen, directeur général de la production et de l'inspection des aliments de la région du centre-ouest, ni M. Reg Gatenby, chef des affaires juridiques à la direction générale de la production et de l'inspection des aliments, n'ont vraiment traité la question en profondeur. Voici ce que M. Amudsen nous a dit:

Dans la matrice des sanctions, l'intention est l'un des facteurs qui servent à établir quelle peine doit être imposée. Elle entre donc en ligne de compte dans le processus, sans cependant pouvoir être invoquée pour se disculper de toute la violation.
Par exemple, dans la matrice des sanctions, l'intention tombe dans la catégorie de la gravité de la faute et compte quatre degrés. Le premier degré est définit comme suit: «A commis inconsciemment ou par inadvertance une infraction ou a délibérément commis une indiscrétion et a pris les mesures nécessaires pour que cela ne se reproduise plus.» Aucuns points ne sont attribués à cette catégorie.

Le deuxième degré est celui de la négligence et suppose l'évaluation du degré de contrôle des précautions, de la faisabilité, de la connaissance des risques et du degré d'expertise. Trois points sont retenus pour une telle violation.

Au troisième degré, l'intention est indéterminée. La violation résulte de la négligence et entraîne aussi la perte de trois points.

Selon le quatrième et dernier degré, la violation est commise sciemment et coûte cinq points.

La matrice des sanctions incluant l'intention n'est pas un argument de défense pour alléguer que toutes les mesures nécessaires ont été prises. Par exemple, le contrevenant qui a pris les mesures nécessaires versera une sanction correspondant à la gravité de l'inconduite dont le montant sera légèrement inférieur à celui que verse le contrevenant qui a agi sciemment. Le système n'est pas juste. Il devrait y avoir un recours pour celui qui prend les mesures nécessaires. J'approuve qu'on punisse sévèrement les contrevenants qui ont agi sciemment et délibérément. Mais nous devrions être plus tolérants envers ceux qui prennent les mesures nécessaires.


16089

Voici un exemple. Aux termes de la Loi sur les produits parasitaires, les agriculteurs doivent verser une indemnisation en cas de dérive des herbicides ou des pesticides qu'ils pulvérisent. Tout agriculteur sait que s'il vente, ils peuvent difficilement contrôler la pulvérisation. La vitesse et la direction du vent peuvent changer en quelques secondes. Ce projet de loi ferait en sorte que des sanctions seraient imposées même aux agriculteurs qui auraient pris les mesures nécessaires en procédant à la pulvérisation. Je reviendrai sur un amendement que nous avions proposé à cet égard à l'étape du rapport à la Chambre.

Je voudrais m'arrêter brièvement sur les délais prescrits dans le projet de loi C-61. Quand les membres du comité ont examiné cette mesure, au début de l'année, ils ont exprimé de graves inquiétudes. Au cours des dernières minutes, j'ai simplement soulevé une des nombreuses inquiétudes que tous les partis entretiennent au sujet de ce projet de loi.

Après le 24 avril 1995, il n'a plus été question du projet de loi. Pourquoi a-t-on mis cette mesure de côté pendant plus de six mois? Les libéraux attendaient-ils que la controverse cesse? Le comité éprouvait de graves inquiétudes à propos de cette mesure. Il a proposé des amendements qui devaient être examinés. À la place, lorsque le comité a repris ses travaux à l'automne avec de nouveaux députés, il a dû examiner des amendements proposés par le ministère de l'Agriculture. Même si le ministère a accepté deux ou trois amendements que je qualifierais de symboliques, les amendements portant sur les points les plus inquiétants n'avaient pas été traités de façon appropriée, y compris un amendement concernant les mesures nécessaires qui sont prises.

Quelle est la raison d'être des comités, si l'on rejette des amendements bien réfléchis pour ne tenir compte que des amendements proposés par les ministères?

(1725)

Le livre rouge énonce ce qui suit à la page 22: «Pour améliorer le fonctionnement de la Chambre des communes, nous élargirons le rôle des députés dans l'élaboration des lois, par le biais des comités». C'est ce qu'ils disaient, mais ce n'est certainement pas ce qu'ils font.

La semaine dernière, lors de l'étude du projet de loi C-61 à l'étape du rapport, les libéraux ont accepté trois amendements du Parti réformiste. Nous avons proposé ces amendements à l'étape du rapport tout simplement parce que nous savions qu'ils n'auraient eu aucune chance d'être acceptés au comité.

Il était très amusant d'observer l'étude du projet de loi article par article au comité il y a deux semaines. Un certain nombre de nouveaux membres sont apparus au comité. Ils ont été importés spécialement pour l'occasion. La séance avait été prévue pour un lundi soir, ce qui est très bizarre pour l'étude article par article. Deux membres du comité seulement connaissaient vraiment la teneur du projet de loi. L'un d'eux, je lui reconnais ce mérite, était le député de Malpèque, dans l'Île-du-Prince-Édouard, et l'autre était le secrétaire parlementaire, celui qui nous avait donné de l'information qui s'était révélée inexacte.

Les autres membres étaient simplement des machines à voter. En fait, la députée de Dauphin-Swan River avait la liste des amendements approuvés par le ministère de l'Agriculture qu'elle était chargée de proposer au moment opportun. Il était évident que tout autre amendement qu'on aurait pu proposer aurait été écarté sommairement sans véritable examen.

Voilà qui n'est pas très élogieux pour le processus d'étude en comité à la Chambre. C'est révélateur de l'attitude du gouvernement libéral. Cela nous révèle que le travail en comité représente en grande partie un service de garderie pour les députés libéraux d'arrière-ban, non un endroit réservé à l'examen de projets de loi sérieux.

Même si les amendements acceptés à l'étape du rapport incorporaient au projet de loi des éclaircissements bien nécessaires, le gouvernement a refusé d'accepter des amendements qui auraient rendu le système de sanctions administratives pécuniaires non seulement meilleur, mais plus acceptable pour l'industrie, pour les producteurs et pour ceux qui sont chargés de faire respecter la loi.

Les libéraux, notamment le député de Regina-Wascana, le ministre de l'Agriculture, se sont félicités d'avoir fait preuve d'un esprit de coopération en acceptant les amendements du Parti réformiste. Or, le gouvernement bâtit une façade de démocratie, mais fait inévitablement peu de cas des aspects constructifs du processus de consultation.

Je voudrais maintenant parler des amendements que j'ai proposés à l'étape du rapport. Je le répète, le gouvernement libéral est peu disposé à considérer des amendements qui auraient eu une grande portée sur l'application de la loi. Les amendements visaient à circonscrire et à nuancer les pouvoirs du ministre et ceux de la commission. Il s'agissait de clarifier certains éléments de la loi concernant les droits et responsabilités du contrevenant ainsi que ceux du ministre en ce qui concerne les sanctions pécuniaires et les transactions visant le respect de la loi.

Le premier amendement que le Parti réformiste a proposé à l'étape du rapport, soit la motion no 1, visait à encadrer l'exercice des pouvoirs du ministre. Dans l'état actuel des choses, rien, dans la loi, n'établit les différences entre les violations visées par le régime de sanctions administratives pécuniaires et les infractions qui justifient les recours judiciaires.

Cet amendement aurait exigé du ministre qu'il présente des critères. Au comité, les témoins du ministère de l'Agriculture ont dit qu'une violation extrêmement grave serait considérée comme une infraction relevant du judiciaire, tandis que le régime de sanctions administratives pécuniaires s'appliquerait pour les violations très graves.

La question que je me pose est la suivante: à quel point le seuil est-il franchi et la violation devient-elle une infraction? Il devrait y avoir une certaine cohérence. Il n'est ni équitable ni raisonnable de prendre cette décision arbitrairement au coup par coup.


16090

Les particuliers et sociétés doivent avoir des indications claires sur la procédure que le ministère entend suivre dans l'application du programme de sanctions administratives. Il est décevant que les députés d'en face écartent un amendement comme celui-là, qui aurait clarifier les choses.

Le texte actuel permet au ministre de faire usage de ses pouvoirs de manière à épargner à ses amis les rigueurs de la justice, s'ils les méritent, et d'être sévère envers ses adversaires politiques. Il peut également se montrer conciliant devant les violations commises dans sa propre circonscription, mais excessivement rigoureux si elles ont été commises dans des circonscriptions néo-démocrates ou réformistes. On pourrait en arriver à de petits jeux politiques comme on en voit à des niveaux inférieurs de l'administration publique. Il n'y a pas de contrepoids, pas de critères, pas de paramètres pour limiter les excès dans l'application du régime de sanctions administratives pécuniaires.

Le deuxième amendement réformiste, la motion no 3, proposait de couper de moitié les sanctions pour une première violation. Le plein montant prévu par le projet de loi aurait été exigé pour les violations suivantes.

Le député de Malpèque a prétendu, à l'étape du rapport, que le Parti réformiste cherchait toujours à punir avec la plus grande rigueur les infractions aux lois ou aux dispositions quasi législatives. Je ne suis pas d'accord.

(1730)

Le Parti réformiste croit qu'il faudrait faire preuve d'une certaine clémence envers les petits producteurs et les petits transformateurs lors d'une première violation. La plupart des violations qui tombent sous le coup de la loi sur les sanctions en matière d'agriculture et d'agroalimentaire ne sont pas passibles d'amendes importantes. Il faut se souvenir qu'on ne parle pas d'actes criminels. On parle de petits entrepreneurs, des producteurs ou des transformateurs qui, étant donné la conjecture économique actuelle, seraient facilement acculés à la faillite par des amendes de l'ampleur que propose le projet de loi.

S'il y a une deuxième violation, c'est à ce moment-là qu'on doit sanctionner. Il aurait été raisonnable de prendre cet amendement en considération.

N'est-il pas ironique que les députés libéraux fassent preuve de tant de compassion lorsqu'il s'agit de contrevenants violents, de criminels graves? Ils veulent être très circonspects et protéger les droits de ces individus dont certains sont des récidivistes dangereux et sans pitié. Mais lorsqu'il s'agit de petits entrepreneurs, de gens qui gagnent leur vie dans l'agriculture ou dans l'industrie de la transformation, les libéraux veulent se montrer très stricts et imposer de lourdes sanctions pécuniaires, même dans le cas d'une première violation, sans même leur accorder le droit de se défendre en prouvant qu'ils ont pris toutes les précautions nécessaires.

Nous nous posons des questions sur les priorités de ce gouvernement. Parfois, ça nous rend malades.

Le troisième amendement que nous avions proposé à l'étape du rapport, dans la motion no 4, était également plein de bon sens. Il visait à indiquer qui était l'agent verbalisateur ayant notifié le contrevenant de la violation. Comme je le disais jeudi, c'est une précaution commune qui est utile et valable et qui protège le contrevenant présumé. Je veux insister à nouveau sur le fait que cet amendement est plein de gros bon sens. Je croyais que les libéraux avaient suffisamment de gros bon sens pour l'accepter; malheureusement, ce n'était pas le cas.

Le quatrième amendement que nous avons proposé, dans la motion no 5, visait à améliorer le projet de loi en accordant, à la personne recevant un procès-verbal de violation, 45 jours pour payer la sanction ou contester les faits reprochés auprès du ministre ou de la commission. Le projet de loi stipule que le ministre peut prescrire tout règlement jugé approprié; autrement dit, le projet de loi donne carte blanche au ministre. Ce dernier peut faire tout ce qu'il veut.

Je crois que certains des règlements en question pourraient être inclus dans la loi. Les députés libéraux répètent sans cesse qu'il n'est pas pratique d'indiquer des délais précis dans la loi parce qu'il est très difficile de les modifier par la suite. L'amendement proposé exige uniquement une période de temps minimale avant que le contrevenant ne soit obligé de payer ou de contester devant le ministre. Le but est d'empêcher le ministre de fixer des délais arbitraires et déraisonnables pour le paiement de la sanction par la personne recevant le procès-verbal de violation.

Cet amendement et d'autres semblables proposent des paramètres essentiels pour que l'industrie ait confiance dans le régime de sanctions administratives pécuniaires.

En vertu du présent projet de loi, le ministre pourrait exiger paiement ou contestation dans les deux jours. Un délai de deux jours est tout à fait déraisonnable. Aucun paramètre n'est indiqué. Le champ est entièrement libre. La chasse est ouverte à l'année selon le projet de loi C-61.

Le cinquième amendement que nous avons proposé était inclus dans la motion no 11 et visait à empêcher le ministre d'exiger une caution pour un montant excédant la gravité de la violation. Cet amendement apporte des précisions au sujet de ce qu'il faut entendre par une caution raisonnable et est équivalent à l'acceptation de l'amendement proposé par le Parti réformiste à l'article 10 qui prévoit l'inclusion d'une disposition pour octroyer une caution raisonnable-et cet amendement a été accepté par le ministre-dont le montant et la nature doivent agréer au ministre en garantie de l'exécution de la transaction.

Cet amendement se veut un moyen d'encourager la personne intéressée à exécuter la transaction et de dissuader le ministre d'abuser du système.

Je voudrais toucher un mot du sixième amendement que j'ai moi-même proposé. Il exigerait que, une fois saisie d'une affaire, la commission rende sa décision dans les six mois qui suivent. Cette mesure vise à empêcher que l'on mette plus de six mois à rendre une décision. Nous proposons cet amendement en vue d'accélérer le processus de révision.


16091

Comme je l'ai dit à l'étape du rapport, ces causes pourraient traîner en longueur, ce qui n'est pas juste pour l'accusé, pour la personne qui attend la révision de son cas et, par-dessus tout, pour le contribuable, vu que cela pourrait coûter une révision qui semblerait ne pas avoir de fin, car on peut s'éterniser sur ce genre de choses.

Tous les particuliers qui sont visés par cette mesure législative souhaitent un système qui soit souple et donne des résultats. Il est dans l'intérêt de la Chambre d'atteindre cet objectif dans l'adoption de mesures législatives, et je suis déçu quand le gouvernement refuse d'accepter des propositions d'amendement constructives.

Le septième amendement, soit la motion no 19, est le plus important que nous ayons proposé. Il vise à permettre à quiconque d'invoquer en défense le fait qu'il a pris les mesures nécessaire et à le disculper s'il croyait raisonnablement et en toute honnêteté à l'existence de faits qui, avérés, l'exonéreraient.

(1735)

J'ai abordé cette question un peu plus tôt au cours de mon intervention et elle a été soulevée en comité. Si le gouvernement avait accepté notre amendement, on aurait pu calmer les inquiétudes que l'avocat-général et les représentants de l'industrie ont mentionnées au comité. Toutefois, l'inquiétude règne encore. Comme le gouvernement a refusé de permettre aux contrevenants d'invoquer en défense le fait qu'ils avaient pris les mesures nécessaires, il nous est impossible, à moi et à mes collègues, d'appuyer le projet de loi. Voilà l'une des principales raisons pour lesquelles nous ne pouvons pas approuver le projet de loi C-61.

Le dernier amendement que je mentionnerai est la motion no 23, qui a été proposée à l'étape du rapport. Cette motion portait sur les conflits d'intérêt et la nomination des membres de la commission de révision. L'amendement allait plus loin que la disposition sur les conflits d'intérêt, puisqu'il précisait que les lobbyistes ou les parties à un contrat avec l'administration publique fédérale ne pouvaient être membres de la Commission.

Lorsque le gouvernement au pouvoir actuellement siégeait dans l'opposition, lorsque les libéraux siégeaient de ce côté-ci de la Chambre, ils dénonçaient presque quotidiennement les nominations à des commissions et à des tribunaux qu'effectuaient les conservateurs. Devinez ce qui se passe aujourd'hui. Les libéraux qui siègent maintenant de l'autre côté de la Chambre trouvent les pratiques des conservateurs, donc le statu quo, satisfaisants.

Notre pays vient de traverser une crise, face à la menace que représentait la séparation possible du Québec. Le temps est venu de proposer des solutions. L'une des solutions à nos problèmes est de prendre notre élan et d'obtenir l'approbation de la population canadienne pour tendre vers un gouvernement plus décentralisé.

Une façon pour le gouvernement fédéral de joindre l'acte à la parole serait de cesser de se mêler autant des nominations à tous les postes sur lesquels il peut garder une mainmise par l'intermédiaire du Conseil privé. Mais ce n'est pas ce que le gouvernement a décidé de faire. Il a décidé de se mêler directement de toutes les nominations à tous les conseils et organismes quasi judiciaires.

C'est une insulte aux Canadiens de tout le pays. Cela a mené à l'incompétence. Cela pourrait nuire terriblement à l'administration des sanctions pécuniaires. On aurait pu corriger cela en prévoyant, dans le projet de loi, des lignes directrices strictes en matière de conflits d'intérêts. Toutefois, les libéraux ont opté pour le statu quo. Ils ont préféré avoir la possibilité de faire des cadeaux à leurs amis. Ils voulaient avoir cette possibilité et ils ont refusé de fermer la porte au népotisme et aux nominations partisanes.

Nous voulons que ce projet de loi soit clair et concis pour ce qui est des pratiques employées pour les nominations. Une mesure législative compliquée ouvre la voix aux abus et à la confusion pure et simple, comme c'est le cas avec la Loi de l'impôt sur le revenu, qui est devenue très compliquée. Elle est devenu un véhicule pour les échappatoires, les abus et l'évasion fiscale. Plus le gouvernement la remanie, plus cela semble empirer.

C'est pourquoi mes collègues, les députés de Calgary-Centre et de Capilano-Howe Sound, et nos autres collègues poussent notre pays à adopter l'impôt uniforme. Ils s'entretiennent avec des Canadiens de tout le pays au sujet de la réforme fiscale qui supprimera la confusion, la complexité, et qui réduira le coût et les tracasseries administratives. C'est aussi l'orientation que devrait prendre le ministère de l'Agriculture.

Si l'on pouvait mettre fin à des tracasseries administratives inutiles et à une intervention directe du gouvernement dans les nominations, on simplifierait l'administration des sanctions pécuniaires, tout comme on simplifierait la Loi de l'impôt sur le revenu si l'on imposait un impôt uniforme.

Les deux derniers amendements dont je veux parler viennent de la moins-que-loyale opposition officielle. Cela peut sembler étrange, mais nous avons appuyé, il est vrai, des amendements proposés par le député de Lotbinière. Nous envisagions de proposer les mêmes, mais le député nous a pris de vitesse.

Un de ces amendements prévoyait que toute nomination par le gouverneur en conseil au tribunal d'examen soit approuvée par le Comité de l'agriculture. Le Parti réformiste appuie entièrement une démarche de ce genre. En fait, le gouvernement libéral l'a appuyée aussi et cela, par écrit. Les libéraux l'ont appuyée avant les élections. À la page 88 de la publication intitulée: Pour la création d'emplois-Pour la relance économique. Le plan d'action libéral pour le Canada, il est dit que les libéraux établiraient des mécanismes permettant un examen par le Parlement des nominations par décret à certains postes élevés.

Où sont ces mécanismes? Où sont ces mécanismes d'examen? Où sont les comités parlementaires devant examiner ces nominations? On vient de nous apprendre que le ministre et le Conseil privé ont nommé quelqu'un à la présidence de la SRC. Cette nomination n'a jamais été soumise à la Chambre des communes. C'est en même temps que tout le monde que nous avons appris que l'ancien député


16092

conservateur, Perrin Beatty, qui faisait partie du gouvernement précédent qui a contribué à accumuler une dette de cinq cents et quelques milliards de dollars, est le nouveau président de la SRC. Nous n'avons pas été consultés.

(1740)

Le projet de loi prévoit la formation d'une commission, mais les parlementaires n'ont pas leur mot à dire. Nous sommes mis de côté. Nous sommes des spectateurs. Nous ne sommes pas invités à tirer les leviers du gouvernement. Nous sommes seulement censés suivre l'action passivement. Si le député est du côté ministériel, il doit applaudir poliment. S'il fait partie de l'opposition, la stratégie libérale consiste à l'ignorer, à foncer et à espérer pouvoir acheter l'issue des prochaines élections. Évidemment, nous savons que les coffres sont vides et que les libéraux ne peuvent plus acheter cette issue. Tout cela va leur retomber dessus, comme c'est arrivé aux conservateurs.

Les libéraux auront de graves problèmes à justifier toutes les nominations par décret du conseil qui n'ont pas fait l'objet d'un examen par des autorités autres que le Conseil privé, les ministres et leurs sous-ministres.

Je voudrais demander aux députés d'en face si des mesures ont été prises dernièrement quant à l'examen des nominations par le Parlement. Je crois que, pour commencer, cela aurait été une excellente idée de soumettre au comité de l'agriculture les nominations à la commission de révision.

Je veux conclure en faisant une dernière remarque. En établissant le programme de SPA, on voulait non seulement faire respecter les lois, mais aussi adopter un programme compatible avec celui des États-Unis. Il ne sert pas à grand-chose d'avoir un programme de SPA harmonisé avec celui des États-Unis si les exigences des deux pays ne sont pas harmonisées ou équivalentes.

Le moment est venu que le gouvernement harmonise ses normes avec celles des pays avec lesquels il a des échanges commerciaux. Un certain nombre d'agriculteurs et de sociétés de biotechnologie sont mécontents de ce que le gouvernement ne reconnaisse pas ou ralentisse le processus d'homologation de certaines variétés de semences ou de certains herbicides.

Les représentants d'une société de biotechnologie m'ont dit que leur société songeait à quitter le Canada et à ramener aux États-Unis les emplois qu'elle a créés dans notre pays si la procédure actuellement en place n'est pas modifiée.

Des millions de dollars sont en jeu en l'occurrence, sans parler des perspectives d'emploi. Si le Canada ne veut pas coopérer, les sociétés iront s'établir dans un environnement plus hospitalier.

Le ministère de l'Agriculture devrait avoir de bonnes raisons de ne pas autoriser l'utilisation d'un produit ou harmoniser ses règlements avec ceux de nos principaux partenaires commerciaux. Actuellement, il est très lent. Il est paralysé et ne semble pas en mesure de tenir ses promesses très souvent.

En conclusion, comme je l'ai déjà dit, si on avait adopté les amendements proposés par le Parti réformiste, ce projet de loi s'en serait trouvé amélioré pour tous les intéressés. Le Parti réformiste est d'avis qu'un régime de sanctions administratives pécuniaires pourrait être un bon moyen pour accroître l'observation et constituerait un moyen plus juste pour régler le problème de l'inobservation que si l'on recourait aux tribunaux. Cependant, sans les modifications proposées par le Parti réformiste, nous ne pouvons pas appuyer ce projet de loi.

Les gens d'en face nous chahutent.

Des voix: Non, non, non.

M. Hermanson: Ils disent: «non, non, non. Nous ne voulons pas de votre approche raisonnable. Nous ne voulons pas avoir de comptes à rendre.» Ils se contentent de dire qu'on les laisse tranquilles, qu'ils veulent continuer tout bonnement à cacher le plus possible de renseignements au public.

Je tiens à donner l'assurance à la Chambre que, de ce côté-ci, nous ne le permettrons pas. C'est pourquoi nous exposons ainsi les lacunes du projet de loi C-61. C'est pourquoi nous ne pouvons pas appuyer le projet de loi C-61. Il est temps de commencer à édifier le pays pour qu'il soit prêt à entrer dans le XXIe siècle. Ce projet de loi aurait pu nous aider à le faire, mais il n'est pas allé jusqu'au bout. Je demanderais aux députés d'en face, lorsqu'ils rédigeront d'autres projets de loi, de penser un peu plus clairement qu'ils ne l'ont fait dans le cas du projet de loi C-61.

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk, Lib.): Madame la Présidente, je n'avais pas l'intention de participer au débat jusqu'à ce que j'entende le député réformiste parler du projet de loi C-61 et tenter de faire croire que les députés de ce côté-ci avaient décidé tout à coup, après presque un an, de l'adopter tout simplement parce qu'ils font partie du gouvernement.

Je sais que le député a commencé à venir un peu tard aux réunions du comité permanent de l'agriculture. Je ne me souviens pas l'avoir vu participer à une seule réunion du comité portant sur le projet de loi C-61, même s'il était membre de ce comité. Le député devrait pourtant savoir-et tous ses collègues lui diront-que le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire a discuté à fond du projet de loi. En fait, ce sont les députés ministériels membres de ce comité qui ont exprimé quelques préoccupations. L'étude du projet de loi C-61 montre bien comment fonctionnent nos comités. Elle démontre que les simples députés ministériels membres d'un comité peuvent faire valoir leur opinion sur un projet de loi.

(1745)

Lorsque le projet de loi a été renvoyé au comité, les députés libéraux membres du comité ont exprimé de nombreuses réserves. Nous avions des préoccupations et nous en avons fait part au ministre. Nous lui avons soumis des amendements que nous voulions apporter au projet de loi avant de l'adopter.


16093

Le ministre, dans sa sagesse, a présenté ces propositions à ses fonctionnaires et, si vous lisez le projet de loi, vous y trouverez un certain nombre d'amendements proposés par des députés ministériels, et non pas par les députés de l'opposition, qui ont choisi de ne pas se présenter à la plupart des réunions. Prenez par exemple l'alinéa 4(1)d):

prévoir les critères de majoration ou de minoration de ce montant. . . notamment pour un montant inférieur à la sanction infligée. . . ainsi que les modalités de cette opération.
Cela n'était pas là à l'origine, mais les députés ministériels ont jugé que c'était assez important pour être ajouté. Au paragraphe 4(3):

Figurent parmi les critères prévus par le ministre au titre de l'alinéa (1)d) notamment. . .
Encore une fois il est question ici de la nature de l'intention ou de la négligence du contrevenant. Cela a été ajouté par les ministériels membres du comité.

À l'article 7, qui porte sur la verbalisation, on dit que l'agent verbalisateur doit avoir des motifs raisonnables de croire qu'une violation a été commise. Cela n'était pas là auparavant. Les députés d'arrière-ban du parti ministériel ont jugé que c'était important. Nous avons passé des mois et des mois à étudier cette mesure législative. Je dois dire que le Parti réformiste n'était pas là pour nous aider.

Le député a également l'audace de dire que le gouvernement n'était même pas prêt à examiner des amendements raisonnables. L'amendement no 20 du Parti réformiste, pour clarifier le fardeau de la preuve, est un amendement du député. L'amendement no 28, pour clarifier les dépenses, est un amendement du député. L'amendement no 10 vise à s'assurer que la caution demandée par le ministre en garantie de l'exécution de la transaction est raisonnable. Le député a employé le mot «raisonnable», mais le gouvernement a accepté des amendements de l'opposition à cet égard. Nous sommes allés loin pour essayer de soulager les craintes des députés d'en face, qui croyaient que nous n'étions pas prêts à écouter leurs préoccupations à ce sujet.

Le député a parlé des décrets et de l'article 110 du Règlement qu'il devrait lire. Il dit que les comités ont le droit d'examiner les décrets. C'est un droit très important pour les députés que de pouvoir examiner les décrets. Il nous permet de nous acquitter de nos fonctions pour ce qui est de surveiller l'exécutif. C'est quelque chose que le député sait aussi.

En ce qui concerne le projet de loi lui-même, j'avais certaines préoccupations, comme je l'ai déjà dit. En tant que président d'un comité, je me suis assis avec le ministre et ses fonctionnaires. Ils sont allés plus loin que ce à quoi je m'attendais pour mettre de l'avant des propositions en vue d'atténuer mes préoccupations, celles d'autres membres du comité et même celles d'autres députés qui ne faisaient pas parti du comité de la procédure de la Chambre.

Nous avons eu des réunions avec les fonctionnaires et avons proposé des amendements qui, selon nous, étaient raisonnables. Je veux remercier le ministre de l'Agriculture pour avoir accepté ces amendements. Cela montre à quel point cette institution peut être efficace lorsque tous les députés travaillent ensemble.

(1750)

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Madame la Présidente, il est toujours intéressant de voir les libéraux s'exciter et nous accorder une certaine reconnaissance.

Comme je le disais il y a quelques mois, j'avais autrefois une moissonneuse-batteuse rouge. Elle était de la couleur du Parti libéral et elle me causait toujours des problèmes. On dirait que le Parti libéral s'y prend de cette façon avec ses projets de loi. La machine rouge semble ne plus rapporter d'argent et les libéraux ont trouvé un autre projet de loi pour s'en procurer. La machine ne semble cependant plus être réparable, et je ne vois pas comment l'argent suffira à lui seul. Les libéraux n'ont pas grand-chose à donner en échange. Je ne crois pas que l'argent que ce projet de loi leur permettra d'aller chercher sera suffisant pour qu'ils puissent gagner encore une fois les élections.

Cela me semble étrange. J'ai tenté d'amener le gouvernement libéral à donner un peu plus de mordant à certains des pouvoirs d'enquête de la commission des grains et de la commission du blé. Curieusement, lorsque des agriculteurs se sont plaints qu'une des organisations avait bradé à moitié prix 1,5 million de boisseaux vers les États-Unis et que cela constituait une infraction à la loi anti-dumping, le ministre de l'Agriculture n'a même pas daigné leur répondre. Voilà comment les libéraux pratiquent la justice.

Ce projet de loi me préoccupe. Les libéraux veulent porter les amendes de 1 000 $ à 250 000 $. À mon avis, cette mesure vise les multinationales ou d'autres grandes entreprises, qui ont les moyens de négocier et de persuader le gouvernement en le menaçant de lui faire perdre des votes aux prochaines élections s'il ne les traite pas en douceur. Je ne crois pas que ce soit là le genre de justice qu'il nous faut.

Il est très important de commencer à se rendre compte que les petits exploitants ont besoin de protection. L'obligation de prendre les mesures nécessaires n'est pas comprise. Il n'y a pas d'autre recours que de payer l'amende ou de négocier. Ceux qui auront encore de l'argent pourront s'adresser aux tribunaux, mais ce n'est cependant pas ainsi que les petits exploitants agissent habituellement.

Il convient de signaler que le projet de loi est ainsi conçu que le ministre est responsable de huit lois et non pas d'une seule. Je voudrais rappeler à la Chambre que lorsque j'ai commencé à examiner certaines irrégularités ou certains actes illégaux, la première chose que j'ai voulu qu'on examine était la contrebande de blé grandin au Canada. Snowflake est réputé pour ce genre de commerce. Quand ce n'est pas du blé, ce peut être de l'alcool ou des cigarettes et cela semble bien marcher.

Fait intéressant, lorsque j'ai insisté pour qu'il y ait une enquête au sujet de la contrebande de blé grandin, les douaniers étaient disposés à venir témoigner en cour. Pour une raison quelconque, le ministère de l'Agriculture a prétendu qu'aucun acte illégal n'avait été commis. Le gouvernement nous dit maintenant qu'il tient vraiment à protéger la qualité du blé et de notre viande et qu'il le fera au


16094

moyen de sanctions pécuniaires. Les tribunaux ne peuvent pas avoir le dernier mot, parce qu'on leur a ni plus ni moins dit de se contenter de regarder et de ne pas poursuivre.

Je veux vous lire une déclaration sur cette question que j'ai obtenue par l'intermédiaire de l'agent d'accès à l'information:

En 1993, un article de journal a révélé l'affaire, et le ministère de l'Agriculture a déclaré au même moment que les douanes canadiennes avaient fait une erreur en n'empêchant pas l'entrée du blé au Canada. Le service des douanes ne permet donc plus l'importation de blé au Canada.
On avait la preuve que c'était de la contrebande, et le gouvernement a permis à Agriculture et à Agroalimentaire Canada de contourner la loi.

(1755)

Or, les sanctions administratives pécuniaires régleront-elles le problème? Tout ce qu'elles vont faire, c'est enrichir un gouvernement libéral mené par l'argent et dont la machine rouge ne fonctionne plus. Les libéraux essaient d'accumuler des fonds pour acheter d'autres élections, mais je ne pense pas que ça va marcher. Si le gouvernement agit ainsi, il devra probablement aussi légaliser la contrebande d'alcool, parce qu'il y a plus d'argent à faire là-dedans qu'avec le blé grandin. Pourquoi se contenter des petites sommes? Ils devraient voir grand, car ils devront trouver une vraie bonne machine pour gagner les prochaines élections. Je ne crois pas que la vieille machine rouge un peu déglinguée qu'ils ont employée aux dernières élections les aidera.

Le problème majeur avec les sanctions administratives pécuniaires, c'est qu'elles ne dissuaderont pas les contrebandiers, surtout pas pour les petites infractions. Ceux qui bénéficieront du projet de loi C-61 sont les joueurs importants qui ne s'en font pas pour les sanctions, puisqu'ils font généralement plus d'argent en enfreignant la loi.

Quand j'ai reçu le dernier numéro du Fireman Country, j'avais hâte de voir ce qui se passait avec le projet d'harmoniser les règlements sur les produits chimiques avec les États-Unis. Il est étonnant d'apprendre qu'il entre illégalement au Canada pour 10 millions de dollars de produits chimiques qui sont distribués aux agriculteurs. Qu'est-ce que les libéraux ont fait à ce sujet? Le secrétaire parlementaire a déclaré qu'ils n'avaient tout simplement pas la main-d'oeuvre nécessaire pour faire cesser cette activité. S'ils n'ont pas la main-d'oeuvre nécessaire pour faire cesser ce type d'infraction, comment peuvent-ils croire que quelques sanctions suffiront?

Le gouvernement a essayé de freiner la contrebande de cigarettes en ouvrant les frontières 24 heures sur 24. Les douaniers veillaient pour s'assurer que personne ne passerait. J'ai de petites nouvelles pour eux. Je ne sais pas si c'est pareil partout, mais dans la région de Snowflake, les contrebandiers ne se présentent généralement pas aux bureaux des douanes. Ils se frayent en principe un chemin à travers les broussailles. C'est là qu'ils semblent faire les meilleures affaires. Comment les sanctions administratives pécuniaires vont-elles nous protéger contre ces individus? Je ne sais pas comment nous allons les appliquer.

Quand nous avons un projet de loi comme celui-ci qui propose plus ou moins comme solution d'aller chercher des fonds, plutôt que de nous en remettre au système judiciaire, ça se retourne contre nous. C'est pourquoi je me méfie de ce projet de loi. Pas seulement parce qu'il va alléger les pressions exercées sur les tribunaux, mais parce qu'il va probablement contribuer à accroître le nombre de violations. Les individus qui auront les moyens vont s'enrichir au lieu de s'appauvrir.

Je ne vais pas trop m'étendre sur ce sujet. Mon collègue de Kindersley-Lloydminster a dit à peu près tout ce qu'il y avait à dire. Nous avons besoin d'un système judiciaire qui soit le même pour tous, un système judiciaire qui impose une certaine amende pour une infraction ou une violation donnée.

Le député du Bloc a fait remarquer de façon très éloquente qu'il y avait un prix fixe à payer pour un procès-verbal que se voit infliger une personne qui a dépassé de 20 milles à l'heure la limite de vitesse. C'est ainsi que ce programme devrait fonctionner. Des lignes directrices prévoyant les amendes à payer devraient être établies et appliquées.

Peut-être un jour, les choses seront-elles différentes. Peut-être que lorsque la machine passera au vert de l'autre côté, le nombre de violations et d'infractions diminuera parce que nous aurons une base juridique qui s'occupera des contrevenants d'une façon juste et équitable et parce que le petit sera protégé comme les autres.

(1800)

Madame la Présidente, je vous sais gré de m'avoir accordé ces quelques minutes et j'espère que la Chambre appuiera certains amendements proposés par les réformistes.

Une voix: Il est trop tard.

M. Robichaud: Il est trop tard maintenant pour des amendements.

M. Silye: Le député a fait de bonnes recherches.

M. Hoeppner: C'est trop tard. J'avais l'impression qu'il valait mieux labourer un peu avant de commencer la moisson afin que la récolte soit meilleure.

Les libéraux ne semblent pas comprendre qu'avant de moissonner, il faut semer. Ils aiment cueillir les prunes avant qu'elles ne soient mûres. Nous allons continuer à les laisser faire en espérant qu'aux prochaines élections, nous pourrons renverser la vapeur.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les oui l'emportent.


16095

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre:

M. Boudria: Madame la Présidente, nous demandons que le vote sur la motion soit reporté à demain 10 heures.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément à l'alinéa 45(5)a), le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à demain 10 heures et le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

* * *

[Français]

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR LE COMMERCE INTÉRIEUR

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 19 juin 1995, de la motion: Que le projet de loi C-88, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. René Laurin (Joliette, BQ): Madame la Présidente, le projet de loi C-88 traite du commerce intérieur au Canada. Le projet de loi réfère fréquemment à l'Accord sur le commerce intérieur qui, lui, contient plusieurs centaines et même des milliers d'articles. Mais comme le projet de loi C-88 réfère très fréquemment à l'Accord, je pense qu'il en va d'un certain intérêt de revenir ou d'exposer d'abord les grandes lignes de ce projet de loi et de l'Accord lui-même.

L'Accord comporte six grandes sections: une section générale, dans laquelle les grands principes d'application de l'Accord sont énoncés; une section qui réaffirme les droits constitutionnels; une troisième parlant de la détermination des règles et obligations de portée générale; une quatrième section sur les règles particulières aux onze secteurs qui sont touchés par l'Accord; une cinquième partie concernant les procédures de règlement des différends; et enfin, la dernière, une sixième, traitant des cas d'exception.

Trois grands principes généraux sous-tendent cet Accord. On y parle d'abord de traitement équivalent entre les personnes, les biens et les services, peu importe notre provenance au Canada. Un deuxième grand principe sous-jacent à cet Accord concerne l'harmonisation des normes et des règlements, de façon à éliminer le recours à certaines pratiques pouvant faire obstacle au commerce intérieur au pays. Et enfin, un troisième grand principe général veut qu'on assure la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux.

(1805)

Les articles de l'Accord auxquels se réfère le projet de loi C-88 sont essentiellement ceux en rapport avec le processus de règlement des différends. Il y a les articles 1601, 1602, 1603 et 1604 qui concernent la constitution, le mandat et la composition du Comité du commerce intérieur et de son secrétariat. Le rôle du Comité, entre autres, est de superviser la mise en oeuvre de l'Accord et de faciliter le règlement des différends.

L'article 1705 représente un intérêt particulier. Il a trait à la demande de constitution d'un groupe spécial lorsque des litiges surviennent. Les parties à un différend peuvent, après une période de médiation et de conciliation, demander la constitution d'un groupe spécial. Ce groupe est constitué de cinq membres qui doivent trancher de la validité du différend et des mesures de rétorsion que la partie lésée sera autorisée à prendre. À cet article, on y définit ce qu'on entend par «l'une des parties». «Une partie», selon l'Accord, est une province ou un territoire, ou encore le gouvernement fédéral lui-même. Les parties peuvent agir pour le compte de personnes physiques ou morales, à condition qu'il existe un lien direct et substantiel avec celles-ci.

Dans le cas des provinces, on dit qu'un lien existe avec une personne si cette personne réside dans la province et que les préjudices qu'elle subit ont des conséquences économiques pour la province. Dans le cas du gouvernement fédéral, il est réputé avoir un lien avec une personne si celle-ci est constituée en vertu d'une loi fédérale ou si elle traite des affaires dans un secteur d'activité relevant de la compétence législative du fédéral. Dans ce cas-ci, la loi nous paraît beaucoup et même trop généreuse, parce que, lorsqu'on parle des activités relevant de la compétence législative du fédéral, on connaît la propension du gouvernement à vouloir toucher tous les domaines d'activité, à s'immiscer même dans des domaines qui sont de juridiction provinciale.

Alors, lorsqu'on parle ici que le gouvernement fédéral serait réputé être une des parties et même représenter une personne lorsque celle-ci traite des affaires dans un secteur d'activité relevant de la compétence législative du fédéral, il faut faire attention parce qu'on pourrait retrouver le gouvernement fédéral dans toutes les sphères de la société, selon la définition qu'il entend lui-même donner à son rôle.

Il faut bien comprendre que les décisions du groupe spécial ne sont pas exécutoires, bien sûr, mais le groupe spécial détermine si les mesures en litige vont effectivement à l'encontre des dispositions de l'Accord et si elles ont causé un préjudice.

De plus, le Comité doit faire des recommandations visant à faciliter le règlement du différend. Et si la partie visée par la plainte ne se conforme pas aux recommandations du groupe spécial, alors l'article 1710 s'applique, lequel prévoit les sanctions qui peuvent être imposées à la partie touchée par la plainte.

Mais la véritable portée du projet de loi consiste en ceci. C'est que l'objectif premier du projet de loi est d'entériner l'Accord sur la libéralisation du commerce intérieur. Le Bloc québécois a toujours été en faveur de la libéralisation des échanges. La preuve, c'est que le Bloc québécois et tous les autres politiciens du Québec, dont ceux du Parti québécois en priorité, avaient défendu l'ALENA. Toutefois, même si nous sommes d'accord avec le principe et que nos appuyons le principe de ce projet de loi, nous ne pouvons accepter le libellé de l'article 9 qui permet une interprétation beaucoup plus large qui pourrait permettre au gouvernement d'Ottawa d'intervenir et d'imposer des mesures de rétorsion, même lorsqu'il n'est pas partie au litige.

16096

(1810)

Le gouvernement fédéral pourrait s'immiscer, parce qu'on dit que chaque fois qu'une tierce partie qui a un lien avec le fédéral ou a un lien dans une activité dont le champ est de compétence fédérale-on connaît, je le disais tout à l'heure, la propension du fédéral à toucher tous les domaines-à ce moment-là, le fédéral pourrait être omniprésent. Cet article est beaucoup trop large pour qu'on puisse l'appuyer.

Selon les termes de l'Accord, toujours en référence à cet article, le gouvernement fédéral doit se doter de la possibilité d'imposer des mesures de rétorsion dans le cas où il serait une partie lésée. Toutefois, le libellé de l'article 9 du projet de loi nous amène à faire deux objections majeures.

La première a trait aux premiers mots, à la première phrase du texte de l'article 9, qui dit ceci:

Le gouverneur en conseil peut, par décret, aux termes de l'article 1710 de l'Accord, en vue de suspendre des avantages d'une province ou de prendre contre elle des mesures de rétorsion ayant un effet équivalent. . .
Alors là, le projet de loi, à l'article 9, permet donc au gouverneur en conseil de «suspendre les droits ou privilèges qui sont accordés à une des parties, de modifier ou suspendre l'application du texte législatif fédéral à son égard» ou encore «assujettir cette partie à l'application d'un texte législatif fédéral» ou enfin, «de prendre toute autre mesure qu'il estime nécessaire.»

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je m'excuse d'interrompre l'honorable député. Il lui restera 11 minutes la prochaine fois que nous reprendrons le débat sur ce projet de loi.

Comme il est 18 h 13, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.

______________________________________________


16096

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LOI SUR L'AIDE FINANCIÈRE AUX INTERVENANTS

M. John Finlay (Oxford, Lib.) propose: Que le projet de loi C-339, Loi visant à procurer de l'aide financière aux intervenants aux auditions de certains bureaux et offices, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Madame la Présidente, je suis honoré d'intervenir aujourd'hui pour parler de mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet C-339, Loi visant à procurer de l'aide financière aux intervenants aux auditions de certains bureaux et offices.

Le financement des intervenants, que l'on appelle aussi le financement des participants dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, apporte de l'aide financière à ceux qui défendent les intérêts du public lors des auditions des organismes gouvernementaux ou des commissions et conseils nommés.

À titre de politiciens, nous parlons souvent éloquemment de la nécessité de consulter nos électeurs. Nous encourageons les citoyens à s'exprimer et à bien se faire entendre. Je demande à la Chambre et je me pose aussi la question: Qu'avons-nous fait pour nous assurer que les législateurs et les gouvernants entendent vraiment les Canadiens?

Comme la ministre de l'Environnement l'a affirmé durant le débat sur la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, c'est une chose de dire que les gens ont le droit de donner leur avis, mais c'est une toute autre chose de leur donner les outils nécessaires pour qu'ils exercent ce droit. Je crois que le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui donnera au citoyen moyen, peu importe ses moyens financiers, les outils dont il a besoin pour se faire entendre et participer au processus décisionnel.

Le financement des intervenants est un concept que je connais depuis des années à cause de l'intérêt que je porte à la conservation et à l'environnement. Toutefois, il a pris tout son sens lorsque quelques-uns de mes électeurs membres de la Ontario Pipeline Landowners Association, la OPLA, m'ont fait part des difficultés qu'ils avaient à témoigner devant l'Office national de l'énergie.

Ces propriétaires fonciers devaient recueillir une somme d'argent importante pour embaucher des experts afin de s'opposer à un changement dans la convention de bail concernant le pipeline qui traverse leur terres. Convaincus à l'évidence que le pipeline pourrait contaminer le sol, qu'il présentait un danger pour la sécurité et qu'il pourrait leur coûter des frais de nettoyage si jamais il était abandonné, ils voulaient s'assurer que l'ONE serait mis au courant de leurs inquiétudes.

Pour préparer une cause convaincante, les propriétaires fonciers avaient besoin de l'aide d'avocats et d'experts qui témoigneraient en leur nom devant l'Office national de l'énergie. Des professionnels qualifiés exigent des honoraires. Les dirigeants de la OPLA ont témoigné en consacrant leur propre temps à la cause, mais ils ont dû hypothéquer leurs revenus futurs pour payer les avocats et les ingénieurs qui ont témoigné en leur nom et au nom des autres signataires des baux.

Que se serait-il produit s'ils n'avaient pas pu réunir les sommes requises pour obtenir une représentation adéquate? L'Office national de l'énergie aurait dû prendre une décision sans entendre ceux qui courent le plus de risques, à savoir les propriétaires.

Je prétends que l'Ontario Pipeline Landowners Association parlait dans l'intérêt du public. Si l'oléoduc posait un risque environnemental ou sanitaire, ce serait un risque pour tout le monde, mais ce serait les propriétaires des terrains qui en souffriraient le plus.

Dans un récent article qui m'a été envoyé par M. Stuart O'Neil, président de l'OPLA, on parle d'une explosion d'oléoduc dans une localité rurale près de Williamstown, en Ontario. N'est-il pas dans l'intérêt du public que l'Office national de l'énergie entende ce genre de chose?

Comme on peut le voir en regardant la décision de l'Office national de l'énergie dans ce cas, l'Ontario Pipeline Landowners Association a présenté des arguments très valables. J'ai cette décision ici et je demanderais le consentement unanime pour déposer le document dans le cadre de ce débat.


16097

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député a-t-il le consentement unanime pour déposer ce document?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

M. Finlay: Une aide financière aux intervenants garantirait au public que l'on entendrait, lors des auditions, ceux qui ont un intérêt valable. Depuis des années, le public demande à participer à la prise de décisions et l'aide financière aux intervenants garantirait cette participation.

Je ne présente pas une idée neuve au Parlement. Une aide financière aux intervenants a déjà été accordée aux groupes environnementaux et autochtones, ainsi qu'aux conseils municipaux à l'occasion de l'enquête sur le pipeline de la vallée du Mackenzie, mieux connue sous le nom de Commission Berger, dans le milieu des années 1970. Le juge Thomas Berger avait estimé qu'une aide financière était nécessaire pour que les divers intérêts soient représentés aux auditions.

Comme le juge Berger le disait en annonçant l'aide financière: «Ces groupes sont parfois qualifiés de groupes d'intérêt public. Ils représentent des intérêts identifiables qui ne devraient pas être négligés et même qu'il est essentiel de considérer. Ils ne représentent pas l'intérêt public, mais il est dans l'intérêt du public de les entendre.»

En 1989, le gouvernement de l'Ontario proclamait la Loi sur le projet d'aide financière aux intervenants, un projet pilote de trois ans. Ce programme a été prolongé jusqu'au printemps de 1996. En présentant cette mesure à l'assemblée législative de l'Ontario, le procureur général de l'époque, Ian Scott, qui avait été conseiller de la Commission Berger, disait qu'un système régularisé d'aide financière aux intervenants était un élément essentiel si l'on voulait rendre la justice accessible à tous. Mon projet de loi C-339 est calqué sur la loi de l'Ontario.

Il est intéressant de noter que les membres de l'Ontario Pipeline Landowners Association qui ont discuté de cette situation avec les propriétaires qui ont comparu devant l'Office de l'énergie de l'Ontario, ont conclu que le processus était plus juste et beaucoup moins exclusif tant pour les propriétaires que pour le promoteur de l'oléoduc. Le succès de cette loi en Ontario augure bien du succès de la mesure législative que je présente aujourd'hui.

(1820)

En plus de l'expérience acquise lors des travaux de la Commission Berger et en vertu de la loi ontarienne, le gouvernement fédéral a une certaine expérience de l'aide financière aux intervenants grâce aux travaux du CRTC et à l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, ainsi qu'aux travaux de la Commission d'enquête Krever sur les réserves de sang du Canada qui finance, à l'heure actuelle, un certain nombre d'intervenants.

Le Parti libéral fédéral s'est engagé très clairement dans son livre rouge à procurer de l'aide financière aux intervenants dans le cadre de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. On a respecté cette promesse en adoptant le projet de loi C-56, en décembre dernier. À l'époque, la ministre de l'Environnement et vice-première ministre, le député réformiste de Comox-Alberni et le député néo-démocrate de The Battlefords-Meadow Lake ont défendu ce type de financement. Aujourd'hui, je cherche à obtenir le même consensus parmi tous mes collègues à la Chambre pour faire avancer ce projet de loi afin qu'il puisse être renvoyé au Comité permanent des ressources naturelles pour qu'il l'étudie plus en profondeur.

J'aimerais rappeler à la Chambre une déclaration que le député de The Battlefords-Meadow Lake a faite dans le cadre du débat sur la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Il a déclaré qu'il était clair que faute d'aide financière suffisante pour les intervenants, on ne pourrait procéder aux évaluations voulues, car ceux qui souhaitaient s'opposer aux promoteurs d'un projet n'avaient pas les mêmes moyens que ces derniers. En fait, selon le député, nous devons avoir des règles du jeu égales pour tous, afin que promoteur du projet et l'intervenant aient la même capacité de présenter des faits grâce auxquels on pourra prendre la meilleure décision possible.

En 1992, l'Ontario a effectué une étude sur la Loi sur le projet d'aide financière aux intervenants. Dans le cadre de cette étude intitulée «Accès et répercussions: Une évaluation de la Loi sur le projet d'aide financière aux intervenants, 1988», on dit ceci au sujet de la nécessité de financer les intervenants: «La participation est nécessaire pour des raisons d'équité. Elle ouvre également la porte à de meilleures décisions étant donné que ceux qui doivent décider dans l'intérêt public peuvent recueillir des renseignements plus larges et davantage d'opinions sur la question. On ne peut atteindre ces objectifs si les ressources des participants sont très limitées pour défendre leur point de vue.»

Certains ont le sentiment que les gens qui souhaitent intervenir devant des commissions et des organismes fédéraux devraient recueillir eux-mêmes des fonds pour présenter des instances. Certains estiment que, même s'ils représentent on ne peut plus clairement l'intérêt public, les intervenants doivent assumer tous les frais. Voulons-nous envoyer à nos électeurs le message que seuls les bien nantis ont le droit de témoigner à ces auditions? Nous ne pouvons pas demander aux Canadiens d'hypothéquer leurs maisons et leur avenir dans le seul but de faire une représentation dans l'intérêt public.

Est-ce à dire que les gouvernements prennent les meilleures décisions possible après avoir entendu seulement l'avis de ceux et celles qui sont assez riches pour se payer les meilleurs avocats et les meilleurs spécialistes? Il est de mon devoir, en tant que député représentant toute la population d'Oxford, de veiller ce que tous mes électeurs puissent avoir une influence sur le processus décisionnel du gouvernement. Ce projet de loi leur en offre l'occasion et, mieux encore, assure une meilleure prise de décisions.

J'aimerais maintenant toucher un mot sur certains articles du projet de loi qui revêtent une importance particulière. L'article 2 précise: «La présente loi a pour objet d'obliger les promoteurs de projets susceptibles d'avoir une influence sur un intérêt public ou sur l'environnement et dont la loi prescrit l'évaluation en vertu d'un régime d'auditions publiques préalables à leur approbation par le gouvernement ou l'un de ses organismes à fournir de l'aide financière pour défrayer l'intervention des organismes ayant un intérêt publique véritable à défendre lors d'auditions tenues par l'autorité chargée d'évaluer le projet.»

On m'a posé la question: «Pourquoi le promoteur devrait-il fournir de l'aide financière à l'intervenant?» Dans le rapport intitulé «Accès et répercussions», le gouvernement de l'Ontario exprime l'avis que, pour assurer le meilleur contrôle possible des coûts et des avantages d'un projet, il s'agit de faire en sorte que les person-


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nes qui sont directement touchées par ces décisions, c'est-à-dire les promoteurs, assument les frais liés à l'aide financière aux intervenants. Ce sont les promoteurs qui sont les pivots du processus de réglementation.

(1825)

Il convient de noter qu'à l'alinéa 4(3)f) de mon projet de loi il est requis que la commission d'aide financière «tienne compte des représentations que peuvent soumettre les promoteurs relativement à la demande» d'un intervenant. Cette disposition autorise le promoteur à faire une représentation concernant l'intérêt public véritable qu'a l'intervenant et concernant sa propre capacité de financer l'intervention.

Pour établir les critères d'octroi de l'aide financière, je me suis servi de ceux que l'on trouve dans loi ontarienne. Celle-ci s'est elle-même inspirée des critères établis par le juge Berger, un pionnier dans le domaine de l'octroi de l'aide financière aux intervenants tant au palier fédéral qu'au palier provincial.

Pendant le débat à l'étape de la troisième lecture de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, le député de Comox-Alberni a dit que les lignes directrices concernant la participation devraient examiner si le candidat représente un intérêt manifestement identifiable qu'il y a lieu de faire valoir à l'audition et si une représentation distincte de l'intérêt aiderait la commission et contribuerait à l'audition. À mon avis, avec le projet de loi C-339, les critères d'octroi d'une aide financière répondent clairement aux normes qu'a énoncées le député lors du débat concernant la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

Le paragraphe 4(4) du projet de loi dit:

Une commission d'aide financière ne peut accorder d'aide financière à un intervenant à moins qu'elle ne soit convaincue que les questions qu'il soulève ont trait exclusivement ou principalement à l'intérêt public et non à des intérêts privés. La commission s'assure de plus:
a) que l'intervenant fait valoir un intérêt manifestement identifiable et pertinent à l'examen auquel l'autorité doit procéder et qu'il y a lieu de faire valoir cet intérêt aux auditions;
b) que l'intervenant n'a pas les moyens financiers de présenter sa cause sans aide financière:
c) que l'intervenant a fait des démarches raisonnables pour obtenir des fonds d'autres sources;
d) que l'intervenant a des antécédents de souci pour l'intérêt qu'il défend et d'engagement envers cet intérêt;
e) que l'intervenant a fait des démarches raisonnables pour agir de concert avec les autres intervenants qui défendent des intérêts semblables au sien;
f) que l'absence d'aide financière nuira à la défense de cet intérêt;
g) que l'intervenant a préparé une proposition dans laquelle il indique l'usage qu'il fera de l'aide financière, qu'il a l'expertise pour comptabiliser l'utilisation des fonds, qu'il s'engage à présenter à la commission la comptabilité des dépenses et lui permettra d'examiner ses livres pour fins de vérification.
Il convient de mentionner que l'alinéa 4(5)b) du projet de loi autorise le promoteur à interjeter appel de l'ordonnance d'aide financière auprès de l'autorité chargée d'évaluer le projet.

Je crois fermement que le projet de loi améliorera les méthodes et le processus de prise de décisions du gouvernement. Le Comité permanent des ressources naturelles jugera peut-être utile d'y apporter certains amendements. Je me ferai un plaisir, comme les autres témoins qui pourraient être convoqués, de coopérer avec le comité en vue d'améliorer cette importante mesure législative pour qu'il soit ensuite adopté.

Pour terminer, je dirai simplement que le temps est venu, à ce stade important de notre histoire, de dire aux Canadiens que leurs interventions sont les bienvenues et que le gouvernement fédéral actuel est d'avis que la qualité des décisions à prendre s'en trouvera améliorée.

Je prie tous les députés de bien vouloir appuyer le projet de loi afin de donner à tous les Canadiens la possibilité de contribuer de façon responsable à notre avenir collectif.

Il y a 18 mois, depuis le pupitre situé tout au bout de la quatrième rangée, le plus éloigné de la présidence, je prononçais mon premier discours comme député d'arrière-ban et membre de la promotion de 1993. À mon arrivée à Ottawa, et au Parlement, je m'inquiétais de savoir comment un député d'arrière-ban, un simple député de n'importe quel parti, pouvait influer sur la politique ministérielle. Comment exercer une quelconque influence? Comment s'y prendre pour pouvoir dire à ses électeurs: «J'ai fait ceci ou cela» ou encore «J'ai réussi à faire modifier, à négocier, à proposer quelque chose qui a été incorporé dans la loi et c'est justement ce que vous m'aviez dit que vous vouliez.» Je ne prétends pas avoir réponse à tous les problèmes, mais je suis néanmoins très fier de dire que c'est moi qui ai présenté ce projet de loi. C'est par ce moyen, entre autres, que le simple député peut influer sur les décisions que prend le gouvernement.

(1830)

La participation aux travaux de comités est un autre moyen. J'aime les comités, parce qu'ils me donnent l'occasion d'étudier des questions importantes en collaboration avec des collègues de tous les partis et d'apprendre beaucoup à leur contact.

Le projet de loi C-339 fera l'objet d'un vote, et j'attends avec impatience la suite du débat.

[Français]

M. Bernard Deshaies (Abitibi, BQ): Madame la Présidente, premièrement, je veux dire que j'ai le plaisir d'intervenir dans ce débat en deuxième lecture sur le projet de loi C-339 de mon collègue, le député d'Oxford. Je dois le féliciter de sa bonne volonté de vouloir augmenter la démocratie, ici au Canada, en permettant à des groupes d'exprimer leur opinion sur des projets environnementaux concernant les richesses naturelles.

Ce projet de loi C-339 est très simple. Il ne comporte pratiquement que deux pages, si on enlève les pages contenant la terminologie et les définitions employées dans ce projet de loi. Ce projet de loi établit le principe selon lequel le promoteur d'un projet, qui doit être examiné et approuvé par une prescription d'une loi fédérale, comme par exemple le projet de loi C-56, la Loi sur l'évaluation environnementale qui touche l'intérêt public ou l'environnement,


16099

devrait financer les frais des intervenants aux auditions publiques sur ce projet.

On pourrait, à prime abord, être favorable au principe de fournir de l'aide financière aux groupes qui veulent participer aux audiences publiques car souvent, les groupes qui représentent les moins bien favorisés de la société n'ont pas les moyens de se payer des études scientifiques, le transport, les recherches ou les démarches nécessaires pour prouver leur bonne foi. Je pense ici aux études nécessaires par exemple dans ma région, en Abitibi, dans le Grand Nord canadien ou dans le Cercle arctique, par exemple, où les intervenants n'ont sûrement pas les moyens financiers pour se déplacer et se loger afin d'assurer la défense des gens qu'ils représentent.

On a pu constater dans le passé que des citoyens ont été pénalisés dans leurs droits parce qu'ils n'avaient pas les moyens, comme les grosses entreprises ou promoteurs, de défendre leur opinion sur un projet. Nous sommes donc favorables au principe que ce soit les promoteurs de projet qui assument les frais de gestion d'évaluation.

Mais après une étude plus approfondie de ce projet de loi, on réalise qu'il a une portée beaucoup plus grande que celle qu'il évoque a priori. Plusieurs questions se posent, dont la première à savoir si ce projet de loi a été élaboré pour compléter le programme qui existe déjà au Bureau fédéral des évaluations environnementales créé par le projet de loi C-56, Loi sur l'évaluation environnementale.

Il est évident que le gouvernement pourrait, dans le processus proposé par le projet de loi C-339, économiser les sommes qu'il doit fournir présentement aux groupes intéressés à participer aux audiences publiques environnementales. Si tel est le cas, pourquoi ne pas amender tout simplement le projet de loi C-56, plutôt que de créer de toute pièce une nouvelle loi? Ce qu'il est difficile d'évaluer présentement, ce sont les types d'organismes qui vont profiter du programme et la réaction des promoteurs. Aussi, par ce projet de loi, on institutionnalise un processus de dédoublement puisque, souvent, les gouvernements provinciaux ont déjà leurs structures pour évaluer les projets des promoteurs.

Alors, pourquoi encore, tout comme le fait le projet de loi C-56, créer des dédoublements dans le processus d'analyse en ressources naturelles et en environnement? Ici encore, dans ce projet de loi, on créerait une commission qui imposerait de nouvelles contraintes administratives qui s'ajoutent à celles trop nombreuses que l'industrie dénonce comme nuisibles au développement des projets, donc à l'emploi.

Entre autres, l'industrie minière, par son Association nationale, lors de la journée portes ouvertes, le 18 octobre dernier, a eu comme principale revendication, pour l'aider à se développer, de simplifier les nombreuses et lourdes structures administratives actuelles qui freinent leur développement.

(1835)

Avec le projet de loi C-339, on veut créer un autre palier administratif, au lieu d'intégrer le principe d'aide aux intervenants à un autre niveau de décision qui existe déjà.

Dans les deux pages du projet de loi qui permettent de définir les nombreux mots utilisés, on ne sait pas très bien ce que signifie exactement l'expression employée «d'intérêt public». En effet, un grand nombre d'interventions non sérieuses, ou peu sérieuses, pourraient être faites au nom de l'«intérêt public», ce qui retarderait et augmenterait le coût des études ou du projet pour le promoteur.

Par ailleurs, le projet de loi permet aux intervenants qui ont des antécédents de défense sérieuse de certains aspects de l'intérêt public de présenter leur cause relativement à ce projet à l'autorité chargée de l'approuver. Dans cette situation, on pourrait alors remettre en cause l'objectivité de la Commission d'aide financière qui décide quels groupes seraient financés par le promoteur.

Il est clair qu'en aucun cas le fait de forcer le promoteur à fournir de l'aide financière ne devrait mettre en danger la faisabilité d'un projet. Cependant, il pourrait arriver que le promoteur soit le gouvernement lui-même. C'est ici le cas du Irving Whale.

Ainsi, le groupe SVP qui est contre le renflouage du Irving Whale, tel que suggéré par le gouvernement, n'est pas assuré par ce projet de loi de se voir reconnaître comme organisme que le gouvernement fédéral ne veut pas reconnaître comme organisme ayant des antécédents de défense sérieuse puisque la Commission est nommée par le gouvernement lui-même.

Une question se pose: Qui a avantage à représenter ces organismes d'intérêt public? Il est à craindre que certains vont se trouver des intérêts personnels dans ce processus et n'hésiteront pas à se spécialiser dans la défense des organismes d'intérêt public.

Comme par exemple on peut se poser la question, lors de l'étude pour l'ouverture d'un nouveau site minier, si la représentation d'un groupe local, sans expertise, mais voulant respecter leur environnement, tout en ayant la possibilité de développer leur région par de nouveaux emplois, pourrait être confronté à un groupe tel que Greenpeace qui pourrait, par son expertise et sa renommée internationale, faire prévaloir leur objectif sur celui de la population locale.

Par ailleurs, dans l'article 7b), contrairement à ce que propose le projet de loi, de l'aide financière ne devrait pas être accordée pour couvrir les frais d'avocats. Les audiences publiques ont pour but d'aider le gouvernement à prendre une décision publique et non une décision juridique.

Généralement, il a été observé que lorsque des avocats représentent certains groupes, les autres témoins sont intimidés et refusent par la suite de présenter leur point de vue. Les audiences prennent alors une tournure juridique. Cette opinion provient de fonctionnaires qui ont l'habitude de ce genre d'audiences.

Dans les articles 3 et 4, la Commission d'aide financière devrait également s'assurer que les études que les témoins veulent faire financer n'ont pas déjà été entreprises. Exemple: les commissions créées par le Bureau fédéral d'évaluations environnementales, si on se réfère au projet de loi C-56 qui a déjà cet instrument, font faire de nombreuses études scientifiques, en plus d'écouter des témoins lors d'audiences publiques.

Il ne faudrait pas financer des témoins afin qu'ils effectuent les mêmes études que celles de la Commission. Le projet de loi C-339 ne prévoit pas cette éventualité.


16100

En conclusion, nous considérons que ce projet de loi comporte de bonnes idées et que son principe est innovateur, mais il comporte malheureusement un certain nombre de graves lacunes.

Ce projet de loi devrait donc être modifié avant d'être présenté au Comité des ressources naturelles, afin que l'objectif de permettre aux groupes d'intervenants de défendre leur point de vue avec l'aide financière nécessaire soit possible.

Aussi, vu la très grande ouverture de ce projet de loi dans sa formulation actuelle sur l'empiètement des juridictions provinciales, telles les ressources naturelles et l'environnement, nous devrons voter contre le projet de loi C-339, tel que proposé aujourd'hui.

[Traduction]

M. Finlay: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Pendant mon discours, j'ai demandé le consentement unanime pour déposer le document sur l'audition tenue à London, en Ontario, le lundi 10 janvier 1994, au sujet des demandes faites par Intercoastal Pipe Line Incorporated et la Compagnie Pipeline Interprovincial, aux termes des articles 52 et 58 de la Loi sur l'Office national de l'énergie.

(1840)

Madame la Présidente, je demande votre avis. Je croyais avoir reçu le consentement unanime, mais je me trompe peut-être. Je réitère ma demande.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député a-t-il le consentement unanime pour déposer le rapport?

Des voix: D'accord.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Vous avez le consentement unanime.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, le député a déposé aujourd'hui le projet de loi C-339, qui vise à procurer de l'aide financière aux intervenants.

Au Canada, nous avons mis sur pied des organismes indépendants quasi judiciaires pour prendre des décisions relativement à l'utilisation des terres. Le projet de loi propose une aide financière aux intervenants qui participent au processus. Par exemple, si une importante société pétrolière veut construire un pipeline sur des milles et des milles de terres agricoles, celle-ci doit d'abord présenter une demande à l'Office national de l'énergie. L'office évalue alors l'impact du projet sur d'autres personnes et sur l'environnement, avant de donner le feu vert à la compagnie.

Le projet de loi vise à traiter d'un problème qui survient lorsqu'un projet est susceptible de porter préjudice à des personnes ou à leurs biens. Une grande compagnie a les moyens de recourir aux services de toute une brochette d'avocats pour défendre son point de vue et minimiser l'impact de son projet. Il peut arriver qu'une partie de la vérité ne soit pas dévoilée au cours des auditions. Les membres de l'office pourraient prendre une décision fondée sur l'information incomplète présentée aux auditions, ce qui serait certainement contraire à l'intérêt public.

Il y a une question de politique ici, je le reconnais. Le projet de loi C-339 cherche à corriger ce déséquilibre en obligeant une grande entreprise, une société pétrolière par exemple, qui soumet une demande à un organisme quasi-judiciaire à payer pour certains autres groupes qui s'opposent à son projet. Voilà une façon de fournir une aide financière aux intervenants.

Des lois provinciales existent déjà à cet égard dans plusieurs provinces, dont l'Ontario et le Manitoba. La loi ontarienne exige que l'entreprise qui présente une demande finance les adversaires du projet. Le député a dit qu'il avait conçu son projet de loi d'initiative parlementaire sur le modèle de cette loi.

Je tiens à féliciter le député d'Oxford des intentions dans lesquelles il a rédigé son projet de loi, car cette mesure résulte d'une expérience difficile qu'ont vécue un certain nombre de ses électeurs. Elle lui a été inspirée par une situation qui s'est présentée dans sa circonscription en mai 1994, quand 130 familles agricoles ont dû s'unir pour s'opposer à une demande présentée à l'Office national de l'énergie par la société Interprovincial Pipeline qui voulait convertir des pipelines traversant leurs propriétés.

Les agriculteurs ont réussi à obtenir gain de cause, mais cela leur a coûté 365 000 $ plus les intérêts. Pour s'opposer au pipeline, ils ont dû former une coalition couvrant un vaste territoire, et débourser beaucoup d'argent personnel pour faire défendre leur cause. Sur le plan strictement économique, sans parler du plan humain, les intervenants n'ont eu besoin d'aucune aide financière dans ce cas-là. L'entreprise qui avait présenté la demande et un autre organisme, en l'occurrence un groupe d'agriculteurs, possédaient les ressources nécessaires et ont été capables de les rassembler pour lutter contre cette demande.

Autrement dit, comme les agriculteurs ont pu réunir des fonds et obtenir gain de cause, on constate qu'il n'a pas été nécessaire de fournir une aide financier aux intervenants. La théorie économique stricte nous dit toutefois que, plus le nombre de personnes touchées par une décision est élevé, plus les ressources financières disponibles pour s'y opposer sont considérables. Leur nombre augmente au fur et à mesure que des personnes s'aperçoivent que leurs intérêts sont touchés. Ce serait le cas si la théorie économique stricte s'appliquait.

Malheureusement, le monde pur de l'économiste n'est pas le monde réel dans lequel nous devons vivre. Un grand nombre de ces demandes ne font pas beaucoup de bruit, si bien que des personnes qui sont concernées n'en entendent pas parler avant d'être elles-mêmes touchées par les problèmes, parfois des années après.

Une grande société comme une pétrolière a aussi l'avantage d'avoir une meilleure information. Elle existe depuis longtemps et a eu le temps d'acquérir l'expertise et l'information qu'il faut présenter à la commission. La plupart des grandes sociétés ont également beaucoup d'argent pour financer les recherches, payer un tas d'avocats et faire de belles présentations aux commissions. Elles peuvent se permettre de faire traîner les auditions en longueur. Tous les avantages sont de leur côté.

Il convient parfaitement de discuter de ce sujet, mais j'ai également des questions à poser sur le projet de loi. Par exemple, est-il juste qu'une société privée soit obligée de financer le groupe qui risque de saboter sa propre demande? Cette partie du projet de loi


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sera presque certainement contestée devant les tribunaux par les sociétés qui risquent d'en souffrir.

Je relève également dans le projet de loi une hypothèse regrettable qui a peut-être faite par inadvertance, soit que toutes les sociétés qui comparaissent devant les bureaux ou offices sont de grandes sociétés en mesure de financer leurs adversaires. Le projet de loi ne prévoit rien pour les petites entreprises qui doivent faire approuver par les autorités fédérales des projets de faible envergure et seraient donc soumises à toutes les dispositions de la loi.

Dans ma circonscription, par exemple, une très petite entreprise voulait exploiter une mine de sable au silicate. On parlait de mine, mais il s'agissait en fait d'une gravière. Mais on parle de mine parce que c'est du sable au silicate. Les promoteurs de ce projet se sont pliés à toutes les exigences qu'ils pouvaient imaginer pour obtenir l'aval de la province, pour se faire dire qu'ils devaient obtenir l'approbation du gouvernement fédéral, parce qu'ils voulaient exploiter une mine. Ces gens ont fini par abandonner leur projet. Ils ont dit: «Cela va nous coûter encore 100 000 $, et nous n'en avons pas les moyens.»

(1845)

Imaginez ce qui se serait produit si un voisin avait craint que le vent emporte du sable au silicate et que les promoteurs avaient eu à financer sa participation comme intervenant. Il n'y aurait eu qu'un ou deux participants, mais jamais les promoteurs n'auraient eu les moyens de financer un intervenant.

Aux termes du paragraphe 4(7) du projet de loi, l'aide financière accordée à un intervenant est calculée non pas en fonction de la capacité de payer des promoteurs, mais en fonction des tarifs courants pour les services juridiques d'avocats. À elle seule, cette disposition suffirait pour décourager certains promoteurs en quelques heures seulement.

Il y a un autre sujet qui me préoccupe, soit la portée très vague du projet de loi. Cette mesure législative s'applique à tous les projets situés sur le territoire domanial ou sur des biens-fonds privés, qui doivent être approuvés par une autorité fédérale, y compris un bureau, un office ou même un fonctionnaire, qui est obligée de tenir des auditions auxquelles le public peut intervenir. Connaissez-vous un projet de n'importe quelle taille qui n'a pas besoin de tout un tas d'approbations du gouvernement fédéral avant d'être lancé au Canada? Pas moi. S'il fallait accorder de l'aide financière aux intervenants pour tous les projets qui nécessitent l'approbation du gouvernement fédéral, le programme deviendrait vite impossible à gérer.

Enfin, le projet de loi pourrait être à l'origine de bien des contestations juridiques de la part de toutes sortes de groupes qui n'hésiteraient pas à se présenter devant les tribunaux pour réclamer l'aide financière que leur aurait refusée la commission d'aide financière créée aux termes de cette mesure législative. En fait, la loi peut même amener la création de groupes qui n'existeraient peut-être pas autrement, à cause l'aide financière que le gouvernement fédéral promet de fournir par l'intermédiaire du Programme de contestation judiciaire ou conformément à la Loi sur l'aide financière aux intervenants. Nous savons que, pendant des décennies, la bureaucratie fédérale a ainsi créé une demande pour ses propres services et je suis persuadé que des ministères fédéraux accueilleraient volontiers la charge de travail supplémentaire.

Ce sont là des problèmes délicats. Je comprends les intentions du député, mais je n'ai pas pu trouver le moyen de modifier la loi de manière à réduire au minimum les abus dont je parle. Si les mesures de financement des promoteurs ne se concrétisent pas, c'est-à-dire que si les entreprises privées réussissent à contester l'opportunité pour elles de financer leurs propres adversaires, ou si elles n'arrivent pas pour une raison ou pour une autre à fournir l'aide financière, je crains que le gouvernement ne soit obligé, comme d'habitude, de prendre la relève. Cela deviendrait la vache à lait publique type dont profiteraient divers groupes d'intérêts ayant des degrés de responsabilité et des programmes politiques divers. Nous savons que cette vache fédérale est tarie et qu'elle ne produira pas de lait avant longtemps.

Je le répète, si la commission n'aime pas le programme d'un groupe et refuse de l'appuyer, les tribunaux, qui ont manifesté ces dernières années beaucoup de sympathie à l'endroit des groupes d'intervenants, la forceront peut-être à le faire.

On pourrait peut-être résoudre le problème, du moins en partie, si l'on amenait les groupes d'intervenants à répondre aux préoccupations de leur circonscription en leur permettant d'avoir auprès de Revenu Canada un statut équivalent à celui des organismes de charité. Ils pourraient donc être aidés en partie par le gouvernement fédéral. Cela exigerait un engagement et une responsabilité financières de la part des intervenants, mais aucune commission ni aucune loi du Parlement.

J'ai bien peur que la Loi sur l'aide financière aux intervenants, si les choses vont comme je le crains, ne complique singulièrement la tâche des entreprises dans l'élaboration de nouveaux projets au Canada.

Récemment, nous avons rencontré des porte-parole d'entreprises minières durant la semaine dont le thème était «Les mines: une industrie à appuyer». Ces porte-parole nous ont dit qu'il fallait attendre jusqu'à trois ans pour obtenir les approbations des gouvernements provinciaux, après quoi le gouvernement fédéral devait faire les évaluations environnementales initiales, etc.

Le ministre de l'Industrie a également parlé du problème des chevauchements entre les responsabilités fédérales et provinciales, ce qui rend plus difficile l'ouverture de mines. Le ministre de l'Industrie tente à l'heure actuelle de coordonner ces responsabilités pour réduire les tracasseries administratives imposées aux entreprises. Je crains que la Loi sur l'aide financière aux intervenants ne cause d'autres problèmes aux entreprises qui tentent de créer des emplois, de la richesse et des occasions d'affaires au Canada. Nous pouvons certes nous passer à l'heure actuelle d'une autre série de problèmes.

(1850)

Je voudrais parler du principe qui sous-tend le projet de loi. Nous venons tout juste de présenter notre proposition en vingt points pour une nouvelle répartition des obligations des divers ordres de gouvernement au Canada. Le premier point de cette proposition, si je ne m'abuse, est que les ressources naturelles et la gestion de celles-ci relèvent, selon la Constitution, des provinces et qu'il faudrait le plus possible laisser les provinces s'en occuper.

J'ai dit tout à l'heure que deux provinces ont déjà réglé la question chez elles en permettant le financement des intervenants aux termes d'une loi provinciale. J'estime qu'il serait peut-être préférable de laisser les provinces s'occuper du secteur des ressour-


16102

ces naturelles et de permettre aux autres provinces d'adopter une loi semblable.

Je reconnais que le député d'Oxford a décelé un déséquilibre dans le système. Toutefois, je ne suis pas convaincu que le projet de loi qu'il a proposé réglerait le problème sans en créer d'autres. Néanmoins, je me ferai un plaisir de proposer au Comité permanent des ressources naturelles, auquel je siège, d'inviter le député qui a présenté ce projet de loi, ainsi que d'autres témoins, à comparaître devant lui pour proposer des modifications ou des améliorations grâce auxquelles l'objectif visé par le député dans ce projet de loi serait atteint.

Je voudrais certes féliciter le député de ses efforts, mais j'hésite à appuyer ce projet de loi pour les raisons que j'ai exposées. Je vais écouter les autres discours pour voir si je peux l'appuyer.

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre aujourd'hui la parole pour appuyer le projet de loi C-339, une mesure d'initiative parlementaire concernant l'aide financière à accorder aux intervenants. C'est certes un sujet qui mérite d'être pris en considération par les députés et le gouvernement. Je remercie le député d'Oxford d'avoir présenté cette mesure.

Comme le député l'a expliqué, l'aide financière aux intervenants n'est pas un principe nouveau pour les gouvernements ou la Chambre. La dernière fois où il en a été question sérieusement, c'est lorsque nous avons discuté des mérites d'inclure un programme d'aide financière aux intervenants dans le projet de loi sur l'évaluation environnementale, lors de la dernière législature. Les députés se souviendront que j'étais à l'époque un ardent défenseur d'un programme global d'aide financière aux intervenants.

Aujourd'hui, le projet de loi C-339 nous invite à approuver le principe selon lequel le promoteur d'un projet qui doit être approuvé par un conseil ou un organisme fédéral devrait aider financièrement les intervenants qui ont un intérêt public à défendre devant le conseil; il établit aussi quelques lignes directrices sur le fonctionnement de ce programme d'aide financière.

Le projet de loi C-339 mentionne expressément que, avant de recevoir une aide financière, l'intervenant doit respecter un certain nombre de critères très précis: il doit faire valoir un intérêt manifestement identifiable et pertinent; il ne doit pas avoir les moyens financiers de présenter sa cause; il doit avoir fait des démarches raisonnables pour obtenir des fonds d'autres sources; il doit avoir des antécédents de souci pour l'intérêt qu'il défend; il doit avoir fait des démarches raisonnables pour agir de concert avec d'autres intervenants; et il faut que l'absence d'aide financière nuise à la défense de cet intérêt.

Les critères exigent également que l'intervenant ait préparé une proposition dans laquelle il indique l'usage qu'il fera de l'aide financière, qu'il a l'expertise pour comptabiliser l'utilisation des fonds et qu'il s'engage à présenter à la commission la comptabilité des dépenses et lui permettra d'examiner ses livres pour fins de vérification.

Selon le député qui a présenté le projet de loi, cette mesure législative vise principalement à donner à tous ceux qui agissent dans l'intérêt public la chance de se faire entendre devant les conseils et organismes fédéraux. Le but est admirable et les critères sont sévères, peut-être même trop restrictifs. Il y a quand même des choses qui, je crois, doivent être dites dans ce débat aujourd'hui.

Premièrement, je veux m'assurer qu'il n'y a aucun malentendu. Mes collègues néo-démocrates et moi-même sommes d'ardents partisans de l'aide financière aux intervenants. Nous sommes bien conscients du fait que, lorsque le promoteur d'un projet veut obtenir un permis pour construire quelque chose, il a généralement les fonds nécessaires pour répondre aux exigences de la demande, ce qui peut comprendre une évaluation environnementale.

Évidemment, le promoteur veut que son projet soit approuvé, et les renseignements qu'il présentera montreront sans doute ce projet comme quelque chose de positif.

Par contre, il peut y avoir d'autres personnes qui, agissant dans l'intérêt public, voudraient que d'autres renseignements soient pris en considération avant que le conseil ou l'organisme en question n'approuve la demande du promoteur du projet. Ces autres personnes n'ont peut-être pas les ressources voulues pour faire les recherches nécessaires et pour préparer leurs positions et les défendre, aussi, sans un programme d'aide financière aux intervenants, rien ne garantit qu'un point de vue original pourra un jour être présenté au groupe qui émet les permis.

(1855)

Lorsque le Parlement a étudié la Loi canadienne sur les évaluations environnementales, il y a quelques années, l'Association du Barreau canadien appuyait l'inclusion d'un système d'aide financière pour les intervenants. Je cite le mémoire de l'association: «Un financement provisoire devrait être accordé aux groupes ou aux particuliers qui désirent participer à des auditions publiques et qui ont prouvé s'intéresser assez sérieusement au processus et être en mesure d'apporter une contribution sérieuse. C'est là un moyen juste et efficace d'égaliser les chances de toutes les parties.»

L'Association du Barreau Canadien a également déclaré que les frais des intervenants devraient être payés et suggérait d'adopter un processus pour examiner les dépenses engagées par une partie lors d'auditions et peut-être même pour obliger une partie à payer les dépenses d'une autre partie.

Un autre témoin, de l'étude McJannett Rich, étude juridique bien connue et spécialisée en environnement, a défendu avec énergie un système d'aide financière des intervenants et a proposé quelques règles qu'on jugeait importantes. Dans son exposé au comité parlementaire, le cabinet d'avocats a déclaré que l'aide financière aux intervenants était extrêmement importante et qu'elle devrait être accessible à ceux qui participent à des examens publics, conformément aux cinq principes suivants. Premièrement, il incombe au gouvernement de veiller à ce que les fonds soient disponibles et d'en assurer l'attribution. Deuxièmement, quelle que soit la source de l'aide financière, le promoteur ne doit exercer aucun contrôle sur l'attribution des fonds. Troisièmement, les critères d'admissibilité


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des intervenants à une aide financière doivent être rapidement élaborés et diffusés. Quatrièmement, un comité d'attribution des fonds indépendant de la commission doit être créé. Cinquièmement, l'aide financière doit être accordée suffisamment tôt pour que les groupes bénéficiaires aient le temps de s'organiser, de préparer des mémoires et d'effecteur les enquêtes nécessaires.

Les mémoires de deux avocats environnementalistes, MM. Steven Hazell et Brian Pannell, soulignaient également la nécessité d'accorder une aide financière aux intervenants. Dans leur mémoire les deux avocats insistent également sur les points suivants: La participation du public à la prise de décisions environnementales est indispensable. La collectivité a le droit de prendre part aux décisions qui touchent ses intérêts. La participation du public est la meilleure façon d'introduire dans le processus décisionnel des renseignements et valeurs qui en seraient autrement exclus. En outre, le public est en mesure d'effecteur un examen indépendant du fondement des actions d'un promoteur. La participation du public permet d'examiner en profondeur toutes les solutions possibles; elle permet de prendre de meilleures décisions et contribue à améliorer le processus et à le rendre plus crédible, tout en obligeant les décideurs à mieux rendre compte de leurs actions.

MM. Pannell et Hazell ajoutent qu'une aide financière est nécessaire à une participation efficace du public. Selon eux, la disproportion entre les ressources des promoteurs et celles des personnes ordinaires rend nécessaire la présence d'un organisme de financement indépendant capable d'accorder une aide financière adéquate aux membres engagés de la collectivité, afin qu'ils puissent participer pleinement et efficacement. Les fonds pour l'aide financière aux intervenants devraient, disent-ils, provenir du promoteur du projet et être attribués et administrés par un organe indépendant.

Je ne saurais trop insister sur la nécessité de mettre en place dans les meilleurs délais un programme d'aide financière aux intervenants ou aux participants qui soit clair et acceptable. C'est plus important que jamais vu l'accent de plus en plus fort mis sur l'exploitation des ressources, vu le nombre de plus en plus grand de projets qui sont proposés, et vu aussi l'absence de confiance de plus en plus marquée de la part du public à l'égard des programmes gouvernementaux qui traitent des questions environnementales. Nous devons cependant faire très attention à ce que nous faisons.

Je ne pense pas que le gouvernement devrait s'en tirer aussi facilement. Il nous faut établir un programme de financement adéquat assez sûr. Le projet de loi C-339 n'exige pratiquement rien du gouvernement fédéral et rejette une trop grande part du fardeau sur les promoteurs. Nous devrions envisager un programme qui fasse assumer une part un peu plus grande du fardeau par le gouvernement.

Deuxièmement, nous devons faire attention à ce que certaines règles concernant le financement du programme ne soient pas totalement axées sur le promoteur. Je crains, comme le député qui a pris la parole avant moi, que les promoteurs de petits projets locaux issus de la base ne soient pas à même de faire une demande et que des projets, par ailleurs dans l'intérêt de la communauté, ne se concrétisent pas si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle.

(1900)

Il y aura des moments où la proposition présentée aujourd'hui par mon collègue d'Oxford risquerait de faire augmenter les frais des promoteurs au point que les promoteurs locaux abandonneraient tout simplement, surtout dans les régions rurales et le nord du Canada et peut-être aussi dans les collectivités autochtones. Je ne voudrais vraiment pas que cela se produise.

J'insiste sur le fait que je vais appuyer le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui. Le député d'Oxford nous a rendu un grand service en soulevant cette question et en la portant à l'attention du gouvernement. Nous avons besoin d'un processus d'aide financière aux intervenants qui soit mieux défini et peut-être plus autonome. J'ai vraiment hâte de pouvoir examiner la question plus à fond au comité.

Je félicite le député d'Oxford de son initiative. S'il réussit à obtenir un examen parlementaire complet du projet de loi, je l'exhorte à examiner le processus plus attentivement. Il en conclurait probablement que la prochaine étape devrait être d'apporter une modification afin d'établir un organisme de financement indépendant plutôt que de laisser le pouvoir de décision aux commissions et organismes chargés d'examiner les demandes.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de commenter le projet de loi d'initiative parlementaire présenté par mon collègue d'Oxford, le projet de loi C-339 sur l'aide financière aux intervenants.

Le but de ce projet de loi est d'exiger que toute personne qui propose un projet mettant en cause l'intérêt public ou l'environnement et qui, de par la loi, doit faire l'objet d'un examen public avant d'être approuvé par le gouvernement ou un organisme gouvernemental, fournisse de l'aide financière aux organisations qui représentent un aspect pertinent de l'intérêt public et qui désirent intervenir dans le processus d'examen pour le représenter.

L'aide financière aux intervenants n'est pas un concept nouveau dans notre pays. L'Ontario a une loi sur l'aide financière aux intervenants qui a d'ailleurs servi de modèle au projet de loi C-339. La loi ontarienne a été inspirée par le financement offert, au milieu des années 70, aux intervenants participant à l'enquête sur le pipeline de la vallée du Mackenzie connue sous le nom de commission Berger.

La commission qui était chargée d'enquêter sur le bien-fondé de construire un pipeline dans la vallée du Mackenzie, dans les Territoires du Nord-Ouest, avait déterminé que les nombreux intérêts présents dans la région devaient être représentés aux auditions. Il avait été jugé nécessaire de donner aux groupes de citoyens les moyens financiers de tenir tête aux partisans du pipeline et d'étayer leurs interventions par une recherche solide.

Alors que dans le cas de la commission Berger, le financement venait du gouvernement fédéral, le projet de loi C-339 ne fait pas appel aux contribuables canadiens pour financer les intervenants. Au contraire, c'est le promoteur du projet qui devra fournir le financement.

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C'est une proposition unique et fort intéressante qui part du principe que, si le promoteur est obligé de défrayer les intervenants, il sera d'autant plus motivé à travailler avec les intervenants éventuels pour trouver des solutions avant de soumettre son projet à l'organisme ou à la commission pertinente. L'expérience vécue en Ontario a déjà démontré l'efficacité de ce financement.

Après avoir assisté aux récents travaux de l'Office national de l'énergie au sujet d'une soumission pour la conversion d'un oléoduc inutilisé, qui s'étend de Sarnia à Milton en Ontario, en passant par ma circonscription, Lambton-Middlesex, je suis plus que jamais convaincue qu'un système de financement devrait aussi être mis à la disposition des intervenants dans le cas des auditions devant des organismes, commissions ou offices du gouvernement fédéral.

Étant donné que cet oléoduc converti aurait traversé des terres agricoles à fort rendement dans le sud-ouest de l'Ontario, les propriétaires fonciers de la région étaient très préoccupés par la proposition, avec raison. Après plusieurs mois d'auditions, l'Office national de l'énergie s'est rangé du côté des propriétaires, en prenant nettement à coeur la sécurité de la population. Bien que très satisfaits de la décision, les propriétaires ont néanmoins dépensé 300 000 $ de leur propre argent pour participer aux auditions tenues sous l'autorité de l'Office national de l'énergie.

Si les entreprises présentant des propositions avaient été enregistrées en Ontario, les auditions auraient été de compétence provinciale et se seraient déroulées devant la Commission de l'énergie de l'Ontario; les frais juridiques de toute participation aux auditions auraient alors été payés par l'entreprise requérante. Malheureusement, pour les propriétaires qui voulaient intervenir, la demanderesse était une société de l'Alberta. Ils ne pouvaient donc pas invoquer la loi ontarienne.

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Je suis tout à fait d'accord avec le porte-parole des intervenants qui a fait valoir que, dans la situation, les montants en jeu étaient tels que les propriétaires ou tout autre intéressé n'ont absolument pas les moyens de défendre leurs droits et intérêts, lorsqu'une demande relève de la compétence du gouvernement fédéral.

À plusieurs occasions, au cours de l'année écoulée, mes collègues du sud-ouest de l'Ontario et moi-même avons eu affaire avec cette association de propriétaires. Collectivement, nous avons recherché des solutions et nous en sommes tous arrivés à la même conclusion, celle qu'il doit y avoir des modifications à la Loi sur l'Office national de l'énergie qui permettent aux propriétaires et autres parties, intervenant aux auditions de l'ONE et agissant dans l'intérêt du public, de bénéficier d'une aide pour se préparer aux auditions publiques.

Nous avons conclu également que l'attribution d'une aide aux intervenants, au niveau fédéral, aurait au moins trois résultats favorables. Tout d'abord, l'aide garantirait un traitement égal de toutes les parties intéressées. Deuxièmement, elle garantirait une plus grande sécurité du public en ouvrant le processus au grand public. Troisièmement, elle économiserait de l'argent à long terme.

Les quelque 300 000 $ dépensés par l'association des propriétaires ne représentent pas grand-chose si l'on compare cette dépense à la pratique actuelle qui exige que l'on maintienne un organisme gouvernemental important pour examiner toutes les propositions de conduites d'hydrocarbures.

Actuellement, même si la Loi sur l'Office national de l'énergie permet d'accorder une aide financière limitée aux intervenants pour les auditions sur le détail du tracé, certains aspects techniques de la loi empêchent que les intervenants ne reçoivent de l'aide dans le cas des conduites de gaz naturel. Malheureusement pour les propriétaires du sud-ouest de l'Ontario, la société de l'Alberta a proposé de convertir un oléoduc inutilisé en gazoduc, ce qui fait que les propriétaires n'ont pas pu être entendus en raison de la Loi sur l'ONE.

En communiquant avec la ministre des Ressources naturelles, j'ai été informée que le ministère se livre actuellement à un exercice avec l'ONE pour réexaminer un certain nombre des fonctions de l'Office et remédier à un certain nombre de carences de la loi. La ministre m'a assurée que la question de l'aide financière aux intervenants figurait dans cet exercice. De plus, le ministre des Ressources naturelles m'a également signalé que, en raison de la situation financière du gouvernement, il y a fort à parier que toute aide financière accordée aux intervenants devrait venir des promoteurs.

C'est précisément là où le projet de loi C-330 pourrait combler un vide dans la politique fédérale. En fait, il cadrerait très bien avec l'étude actuelle de l'Office national de l'énergie.

Le projet de loi est conçu pour aider ceux qui ont des préoccupations légitimes. Il ne s'agit certes pas d'offrir de l'aide financière à des groupes d'intérêts. En fin de compte, il va améliorer la façon dont le gouvernement fédéral et ses organismes et commissions prennent des décisions qui nous touchent tous. De plus, ce qui importe encore davantage, c'est qu'en demandant au promoteur d'un projet en particulier d'offrir une certaine aide financière aux intervenants, on fera en sorte que le gouvernement n'ait plus à plonger dans ses poches chaque fois qu'il y a une audition. Au lieu de cela, la commission ou l'organisme gouvernemental consacrera tous ses efforts à juger de la validité du projet.

Le projet de loi C-339 demande à l'autorité pertinente de nommer une commission d'aide financière chargée de déterminer qui profitera du projet. Elle entendra les demandes financières d'intervenants et décidera à qui on doit accorder cette aide. Avant de pouvoir la recevoir, l'intervenant devra respecter un certain nombre de critères importants.

Il doit faire valoir un intérêt manifestement identifiable et pertinent à l'examen auquel l'autorité doit procéder et montrer qu'il y a lieu de faire valoir cet intérêt aux auditions. Il lui incombe de prouver qu'il n'a pas les moyens financiers de présenter sa cause sans aide financière. Il s'agit pour lui de faire des démarches raisonnables pour obtenir des fonds d'autres sources. Il doit avoir des antécédents de souci pour l'intérêt qu'il défend et d'engagement envers cet intérêt. Il lui incombe aussi de faire les démarches raisonnables pour agir de concert avec les autres intervenants qui défendent des intérêts semblables au sien. Il doit démontrer qu'il a préparé une proposition dans laquelle il indique l'usage qu'il fera de l'aide financière et présenter à la commission la comptabilité des dépenses pour lui permettre d'examiner ses livres pour fins de vérification.

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Il y a amplement de garanties pour s'assurer que l'intervenant ne demande pas une aide financière pour des motifs frivoles.

Ce projet de loi m'impressionne beaucoup. En effet, non seulement on donne un excellent moyen aux intervenants de faire connaître leur point de vue pour aider la commission ou l'organisme à prendre une décision en ayant les meilleurs renseignements possibles à sa disposition, mais également on fait cela sans faire porter un lourd fardeau financier au gouvernement.

Je peux certes comprendre pourquoi le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a décidé que ce projet de loi d'initiative parlementaire fera l'objet d'un vote. C'est simplement parce qu'il comble un vide dans la politique du gouvernement fédéral et offre un moyen unique de s'attaquer à une question d'intérêt public pressante, sans qu'il en coûte davantage au gouvernement.

J'exhorte tous les députés à accorder à ce projet de loi tout l'appui qu'il mérite.

M. Larry McCormick (Hastings-Frontenac-Lennox and Addington, Lib.): Madame la Présidente, c'est un honneur pour moi de pouvoir me prononcer sur le projet de loi C-339 proposé par mon collègue, le porte-parole de la circonscription d'Oxford.

Je tiens à féliciter et à remercier mon collègue qui représente la grande circonscription d'Oxford pour la somme incroyable de travail et de recherche qu'il a consacrée à cette mesure législative.

Ce projet de loi a essentiellement pour objet d'offrir à toutes les personnes qui parlent dans l'intérêt public l'occasion de témoigner devant certains bureaux et offices fédéraux. Grâce à ce projet de loi, les bureaux et offices fédéraux prendront de meilleures décisions puisqu'ils seront mieux à même de consulter la population et de faire appel à sa participation.

Le projet de loi C-339 vise à procurer de l'aide financière à ceux et celles qui ont un intérêt véritable. Il ne s'agit pas d'accorder des fonds à des groupes d'intérêts spéciaux. Il est dans l'intérêt de chacun de nous que l'on fasse valoir l'intérêt public.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À l'ordre, s'il vous plaît. Le député pourra poursuivre son intervention la prochaine fois que le sujet sera débattu.

Comme il est 19 h 13, la période réservée aux initiatives parlementaires est maintenant terminée. Conformément à l'article 93 du Règlement, l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

La Chambre s'ajourne jusqu'à 10 heures demain, en conformité du paragraphe 24(1).

(La séance est levée à 19 h 13.)