Publications de la Chambre
Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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TABLE DES MATIÈRES
AFFAIRES COURANTES
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
FINANCES
- M. Discepola 4233
TRANSPORTS
- M. Milliken 4233
- Proposition et adoption de la motion 4233
LES TRANSPORTS
- M. Milliken 4233
- La motion est proposée et adoptée 4233
RESSOURCES NATURELLES
- M. Milliken 4233
PÉTITIONS
LES CARTES DE TUEURS
- M. Jordan 4233
QUESTIONS AU FEUILLETON
- M. Robichaud 4233
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ-LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
- M. Forseth 4234
- Motion 4234
- M. Wappel 4237
- M. Bellehumeur 4238
- M. MacLellan 4238
- M. Benoit 4241
- M. Tremblay (Rosemont) 4241
- M. Wappel 4242
- M. Kerpan 4243
- Mme Venne 4243
- M. Forseth 4246
- M. Wappel 4246
- M. Bellehumeur 4247
- Mme Meredith 4247
- M. Abbott 4248
- M. Discepola 4249
- M. Bernier (Gaspé) 4250
- Mme Meredith 4250
- M. MacLellan 4252
- M. Lee 4253
- M. Allmand 4254
- M. McClelland 4256
- M. Chatters 4257
- M. Caron 4258
- M. McClelland 4259
- M. Dubé 4260
- Mme Sheridan 4261
- M. Benoit 4263
- M. Abbott 4263
- M. Patry 4263
- M. Leblanc (Longueuil) 4265
- M. Stinson 4265
- M. Bellehumeur 4265
AFFAIRES COURANTES
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
LES RESSOURCES NATURELLES
- M. Milliken 4267
- La motion est proposée et adoptée 4267
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
- M. Milliken 4267
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
LES PRODUITS CANADIENS
- M. Bodnar 4267
LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE L'INFIRMIÈRE
- Mme Dalphond-Guiral 4267
LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
- M. Stinson 4267
LA JOURNÉE INTERNATIONALE DES FAMILLES
- M. Flis 4268
LE TRIANGLE TECHNOLOGIQUE
- M. English 4268
LA SEMAINE NATIONALE DE LA POLICE
- Mme Bakopanos 4268
HAÏTI
- M. Paré 4268
LE PERSONNEL INFIRMIER
- Mme Bridgman 4269
LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE L'ENCÉPHALOMYÉLITE MYALGIQUE
- M. Patry 4269
LA PETITE ENTREPRISE
- M. St. Denis 4269
LES CHEMINS DE FER
- M. DeVillers 4269
LE TRANSPORT FERROVIAIRE
- M. Canuel 4269
LE REVENU NATIONAL
- M. Morrison 4270
LA JOURNÉE NATIONALE DE LA SANTÉ
- M. Pagtakhan 4270
MLLE TRACEY FERGUSON
- M. Bhaduria 4270
LE DÉCÈS DE M. JOHN SMITH
- M. Blaikie 4270
QUESTIONS ORALES
LES SONDAGES
- M. Bouchard 4271
- M. Dingwall 4271
- M. Bouchard 4271
- M. Dingwall 4271
- M. Bouchard 4271
- M. Dingwall 4271
LA DETTE PUBLIQUE
- M. Loubier 4271
- M. Martin (LaSalle-Émard) 4272
- M. Loubier 4272
- M. Martin (LaSalle-Émard) 4272
LES AFFAIRES INDIENNES
- M. Ramsay 4272
- M. Rock 4272
- M. Ramsay 4272
- M. Rock 4272
- M. Ramsay 4272
- M. Irwin 4273
BIO VAC
- Mme Guay 4273
- M. Dingwall 4273
- Mme Guay 4273
- M. Dingwall 4273
LES SONDAGES
- M. Williams 4273
- M. Dingwall 4273
- M. Williams 4274
- M. Dingwall 4274
LES PROGRAMMES SOCIAUX
- Mme Lalonde 4274
- M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 4274
- Mme Lalonde 4274
- M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 4274
L'ÉCONOMIE
- M. Speaker (Lethbridge) 4275
- M. Martin (LaSalle-Émard) 4275
- M. Speaker (Lethbridge) 4275
- M. Martin (LaSalle-Émard) 4275
LA TAXE DE VENTE
- M. Brien 4275
- M. Martin (LaSalle-Émard) 4276
- M. Brien 4276
- M. Martin (LaSalle-Émard) 4276
LES JEUX OLYMPIQUES
- M. Discepola 4276
- M. Ouellet 4276
LES SOINS DE SANTÉ
- M. Hill (Macleod) 4276
- M. Eggleton 4276
- M. Hill (Macleod) 4276
- M. Eggleton 4276
LES AFFAIRES INDIENNES
- M. Gauthier (Roberval) 4276
- M. Irwin 4277
- M. Gauthier (Roberval) 4277
- M. Irwin 4277
LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
- M. Forseth 4277
- M. Rock 4277
- M. Forseth 4277
- M. Rock 4277
LA BFC SHEARWATER
- M. MacDonald 4277
- M. Collenette 4278
LES PENSIONS ALIMENTAIRES
- Mme Gagnon (Québec) 4278
- M. Rock 4278
- Mme Gagnon (Québec) 4278
- M. Rock 4278
LES PÊCHES
- M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 4278
- M. Tobin 4278
VIA RAIL
- Mme Wayne 4279
- M. Young 4279
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
- Le Président 4279
RECOURS AU RÈGLEMENT
BIO VAC-DÉPÔT D'UN PROJET DE LETTRES
- Mme Guay 4279
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
- M. Gauthier (Roberval) 4279
- M. Gray 4279
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ-LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
- Reprise de l'étude de la motion 4279
- M. Bellehumeur 4280
- M. Bodnar 4281
- Mme Sheridan 4282
- M. Leblanc (Longueuil) 4283
- M. Rock 4283
- M. Abbott 4285
- M. Canuel 4287
- Mme Ablonczy 4287
- M. Bryden 4289
- Mme Barnes 4289
- M. Ringma 4289
- M. Bryden 4290
- Mme Kraft Sloan 4291
- M. Kirkby 4291
AFFAIRES COURANTES
COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
- Motion d'adoption du vingt-et-unième rapport 4291
- M. Milliken 4291
- Adoption de la motion 4291
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ-LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
- Reprise de l'étude de la motion 4291
- Mme Barnes 4291
- Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 4293
- M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 4294
- M. Ramsay 4294
- Mme Bethel 4295
- M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 4296
- Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 4297
SUSPENSION DE LA SÉANCE
- Suspension de la séance à 17 h 18 4298
REPRISE DE LA SÉANCE
- Reprise de la séance à 17 h 31 4299
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
L'ÉTIQUETAGE DES PRODUITS
- Reprise de l'étude de la motion 4299
- Mme Bridgman 4299
MESSAGE DU SÉNAT
- La présidente suppléante (Mme Maheu) 4300
SANCTION ROYALE
- La présidente suppléante (Mme Maheu) 4300
L'ÉTIQUETAGE DES PRODUITS
- Reprise de l'étude de la motion 4300
- Mme Minna 4300
- M. MacDonald 4301
- Adoption de l'amendement 4302
- Adoption de la motion 4302
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
LES RÉFUGIÉS
- M. Nunez 4302
- Mme Clancy 4303
LE RWANDA
- M. Caccia 4303
- M. Flis 4304
4233
CHAMBRE DES COMMUNES
La séance est ouverte à 10 heures.
_______________
Prière
_______________
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
FINANCES
M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter ce matin, dans les deux langues officielles, le cinquième rapport du Comité permanent des finances sur le projet de loi S-2, Loi mettant en oeuvre une convention conclue entre le Canada et la République de Hongrie, un accord conclu entre le Canada et la République fédérale du Nigéria, un accord conclu entre le Canada et le Zimbabwe, une convention conclue entre le Canada et la République argentine et un protocole conclu entre le Canada et le Royaume des Pays-Bas, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et apportant des modifications connexes à d'autres lois. Le Comité est convenu de faire rapport du projet de loi sans propositions d'amendement.
TRANSPORTS
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je pense que vous constaterez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante. Je propose:
Du consentement unanime, il est ordonné,-Que le Sous-comité du Comité permanent des transports sur la Voie maritime du Saint-Laurent soit autorisé à se rendre à Québec du 23 au 25 mai 1994, à St. Catharines et Thunder Bay du 31 mai au 3 juin 1994, et à Washington, D.C., les 6 et 7 juin 1994 pour y tenir des séances officieuses sur la viabilité de la Voie maritime du Saint-Laurent, et que le personnel nécessaire accompagne le Sous-comité.(La motion est adoptée.)
[Français]
TRANSPORTS
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je propose:
Que, la Chambre donne son consentement unanime pour qu'un attaché de recherche du Comité permanent des transports se rende au Forum canadien de recherche sur le transport qui a lieu à Victoria, en Colombie-Britannique, du 15 au 18 mai 1994.(La motion est adoptée.)
(1010)
[Traduction]
RESSOURCES NATURELLES
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je propose:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, concernant l'étude des pratiques d'exploitation forestière au Canada et la coupe à blanc, la Chambre autorise le Comité permanent des ressources naturelles à effectuer des voyages du 23 au 26 mai 1994 en Colombie-Britannique et en Alberta; et les 30 et 31 mai 1994 en Ontario, au Québec et au Nouveau-Brunswick, et que le personnel nécessaire accompagne le comité.Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime pour que le secrétaire parlementaire propose la motion?
Des voix: Non.
* * *
PÉTITIONS
LES CARTES DE TUEURS
M. Jim Jordan (Leeds-Grenville): Monsieur le Président, j'ai le privilège ce matin de présenter cette pétition au nom d'électeurs de ma circonscription, notamment de Mallorytown, d'Athens, d'Addison, Smith Falls et Lyn, qui demandent au gouvernement de modifier les lois canadiennes afin d'interdire l'importation, la distribution, la vente et la fabrication des cartes de tueurs, ainsi que d'informer les fabricants de ces cartes que, si leurs produits sont expédiés au Canada, ils seront saisis à la frontière et détruits.
* * *
[Français]
QUESTIONS AU FEUILLETON
L'hon. Fernand Robichaud (secrétaire d'État (Affaires parlementaires)): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions soient réservées.
[Traduction]
Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
_____________________________________________
4234
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ-LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby) propose:
Que la Chambre exhorte le gouvernement à réagir à l'évident manque de confiance des Canadiens dans la Loi sur les jeunes contrevenants et recommande que la définition d'«adolescent» au paragraphe 2(1) de la Loi soit modifiée pour désigner toute personne qui est âgée d'au moins dix ans mais qui n'a pas atteint l'âge de seize ans.-Monsieur le Président, je voudrais soulever aujourd'hui une question d'intérêt national. Notre pays souffre. Les principes fondamentaux de notre société, la paix, l'ordre et le bon gouvernement, sont remis en question par les Canadiens. Et c'est plus particulièrement le système judiciaire pour les jeunes qui soulève l'ire de la population.
Notre société est divisée, et la peur et la méfiance règnent. Les jeunes en qui nous fondons notre avenir sont perçus par la majorité des gens non pas comme une génération pleine d'espoir, mais comme des étrangers dont il faut se méfier.
Les jeunes s'expriment différemment. Ils ne s'habillent pas comme les autres et ils semblent n'accorder aucune valeur et n'avoir aucun respect pour tout ce qui nous est cher. C'est comme cela depuis la Seconde Guerre mondiale, depuis l'apparition de la sous-culture de la jeunesse.
De nos jours, cependant, la situation s'aggrave. Les jeunes écopent pour le manque de courage de notre société qui hésite à exiger le respect de certaines normes de comportement et à infliger les punitions qui s'imposent lorsque l'ordre social est menacé par l'attitude violente des jeunes. Lorsque certains jeunes commettent des écarts excessifs, la peur, le ressentiment et même l'impuissance frappent immédiatement la population.
En général, les gens ont l'impression que ces jeunes n'ont pas à répondre de leurs écarts de conduite. Ils croient avoir perdu le droit de vivre en paix et la peur de la violence les incite à mélanger le bon grain et l'ivraie. Au lieu de jeter un regard tendre sur les jeunes, ils ont trop souvent tendance à tous les percevoir comme des délinquants. La réputation d'une poignée de méchants déteint sur les bons.
Les Canadiens sentent plutôt, au fond d'eux-mêmes, que l'ordre social fondamental de leur société a été complètement perturbé par la violence chez les jeunes. Notre système judiciaire n'est plus qu'un appareil judiciaire qui semble irresponsable et insensible aux besoins de notre société.
Les libéraux nous ont donné la Loi sur les jeunes contrevenants. Les conservateurs l'ont remaniée à leur goût. Voilà maintenant dix ans que nous en subissons les conséquences, et les électeurs de ma circonscription et de toutes les régions du Canada nous ont dit clairement qu'ils ne voulaient plus de cette loi. Ils ne toléreront plus la Loi sur les jeunes contrevenants dans sa forme actuelle.
Je n'ai pas à rappeler à mes collègues que c'est à nous de prendre nos responsabilités. Nous proposons aujourd'hui cette motion au nom des millions de Canadiens qui ont clairement signalé aux candidats aux dernières élections que notre société ne veut plus de cette Loi sur les jeunes contrevenants.
(1015)
Cette préoccupation à l'échelle nationale touche au sentiment d'insécurité de la population et à la capacité du gouvernement de remplir son devoir le plus fondamental, à savoir protéger et défendre ses administrés.
La motion que je propose aujourd'hui à la Chambre est la suivante:
Que la Chambre exhorte le gouvernement à réagir à l'évident manque de confiance des Canadiens dans la Loi sur les jeunes contrevenants et recommande que la définition d'«adolescent» au paragraphe 2(1) de la Loi soit modifiée pour désigner toute personne qui est âgée d'au moins dix ans, mais qui n'a pas atteint l'âge de 16 ans.C'est dit simplement, mais je sais trop bien ce que cela donne quand les choses ne sont pas simples. Ce n'est pas en modifiant une loi que l'on va résoudre tous les problèmes de la criminalité et des conflits sociaux chez les jeunes, mais il faut procéder à la réforme du système judiciaire et la Loi sur les jeunes contrevenants semble un bon début.
En modifiant la loi, on peut créer un climat d'équilibre et de bon sens qui tienne convenablement compte de la nature humaine et de sa propension à la cupidité, à l'égoïsme et au refus des responsabilités.
La Loi sur les jeunes contrevenants ne renvoie pas une image réaliste de notre société et rejette le modèle de la sagesse parentale de l'ancienne loi. On a cru à tort pouvoir réformer la nature humaine au moyen de grandes mesures sociales concoctées au sommet. Lorsque la collectivité s'est rendu compte de ce que cela donnait dans la pratique, elle a commencé à se regimber.
La Loi sur les jeunes contrevenants a officialisé le recours à des pratiques anciennes, mais l'accessibilité garantie à un conseiller juridique a vraiment soulevé la controverse. La loi a fondamentalement envoyé le mauvais message à la collectivité mais, pour vérifier et faire valoir ces notions auprès des libéraux qui ont horreur d'admettre qu'ils se sont terriblement trompés, les réformistes ont recours à d'autres moyens pour tâter le pouls de la population.
Nous avons désormais la technologie nécessaire pour tenir un scrutin universel sur n'importe quelle question de l'heure. Le dispositif de télésondage de MT & T Technologies rend la chose bien réelle. Cette technologie permet à tout le monde de participer à un scrutin ou de répondre à une question d'actualité au moyen du téléphone.
4235
Pour accéder au système de la télédémocratie, les électeurs composent un numéro de téléphone spécial, puis leur numéro d'identification personnel ou NIP. Une fois qu'ils ont entendu les questions du sondage, ils appuient sur une touche pour voter oui ou non, puis sur la touche du carré pour confirmer leur vote.
Il s'agit d'un moyen peu coûteux de sonder un large échantillon de la population. C'est un moyen idéal pour recueillir de l'information et confirmer le degré d'approbation de propositions, et il vient s'ajouter à la panoplie des méthodes traditionnelles de sondage. La précision des enquêtes des maisons de sondage dépend toujours de critères comme la taille de l'échantillon, la structure du questionnaire et le reste. Grâce au système informatisé de vote à distance de MT & T Technologies, on a l'échantillon le plus large possible, même plus large que lors des scrutins traditionnels et des élections générales.
Mon collègue, le député de North Vancouver, a signé un contrat pour mettre cette technique à l'épreuve sur la Loi sur les jeunes contrevenants. En réservant un de leurs rares jours désignés pour soumettre à la Chambre une motion sur la question, les réformistes suivent le modèle qui est le fondement de leur parti et où ce sont les gens de la base qui dictent leur volonté à leurs élus.
Nous sommes prêts à vérifier scientifiquement l'opinion de la collectivité et à comparer les résultats que nous donnera le nouveau système à ceux que nous avons déjà obtenus par les méthodes traditionnelles. Toute personne qui veut en savoir plus sur le système peut téléphoner en tout temps au (604) 666-8378. Je répéterai ce numéro dans un instant.
Parallèlement au télévote qui aura lieu à North Vancouver en juin, une ligne téléphonique sera mise à la disposition de tous les Canadiens qui voudront appeler pour donner leur opinion. Si les médias s'acquittent de leur responsabilité sociale et font connaître notre numéro de téléphone, tous les Canadiens pourront participer au sondage.
On n'a pas à se contenter de notre parole lorsque nous disons que la population en a assez de l'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants. Nous vérifierons si c'est bien le cas au moyen de la télédémocratie. Il est temps que cette loi fasse ce que dit son titre et qu'elle soit modifiée pour s'occuper véritablement des jeunes contrevenants, pas des jeunes adultes.
Plusieurs propositions ont été faites. J'ai entendu des criminologues, des bureaucrates provinciaux analystes de programmes, des porte-parole de corps policiers, des travailleurs sociaux et, le plus important, des jeunes. J'ai de longues années d'expérience dans le système judiciaire pour les jeunes et je pose une question: qui dirige ce système de justice? Les criminels, les avocats, les tribunaux, les responsables des services correctionnels et les agents de libérations conditionnelles? Il semble bien que ce soit le cas.
Il y a eu des tentatives isolées pour laisser un rôle à la collectivité, mais elles ne suffisent pas. L'ensemble de la population doit avoir le dernier mot sur le fonctionnement du système de justice. Il ne s'agit pas seulement ici d'une délégation de pouvoirs, en ce sens que le gouvernement fait pour nous ce que nous ne pouvons pas faire nous-mêmes.
(1020)
Même si l'ordre social commence au sein de la famille, il doit être renforcé par nos institutions, nos écoles et nos organismes communautaires. Il nous faut assumer nos responsabilités.
Dans le cas de la criminalité chez les jeunes, la collectivité a des responsabilités à assumer sous la forme de procédures judiciaires officielles. Quand les règles sont trop vagues, il y a toujours des innocents qui finissent par souffrir injustement. La collectivité doit avoir les outils nécessaires pour dénoncer publiquement tout comportement inacceptable.
Les Canadiens veulent des mesures concrètes. Nous pouvons aller plus loin que le simple désir de faire régner la paix, l'ordre et le bon gouvernement, et faire du Canada un pays juste qui se préoccupe de ses victimes. Nous devons protéger les faibles et les innocents en faisant preuve de courage dans notre façon de traiter les contrevenants. Il existe beaucoup de manières productives de régler un conflit. Nous devons rompre le cycle des jeunes qui souffrent et qui font souffrir les autres.
J'ai entendu des tas d'arguments expliquant pourquoi nous ne devrions pas apporter telle ou telle modification à la Loi sur les jeunes contrevenants. Les arguments que je veux présenter à la Chambre sont fondés sur mes expériences personnelles. Je vais raconter un fait vécu qui montre comment la Loi sur les jeunes contrevenants peut être tout à fait inefficace.
Je me souviens d'un garçon du nom de Darrel qui, à l'âge de 11 ans, allumait des incendies à l'école et dans le quartier. Les autorités scolaires avaient des problèmes avec lui. Le travailleur social n'avait rien d'autre à offrir aux parents qu'un cours sur l'éducation des enfants et une recommandation pour que l'enfant voie un pédopsychiatre pendant six mois.
Il était trop jeune pour être assujetti à la Loi sur les jeunes contrevenants. Les foyers de groupe ne pouvaient pas accepter un pyromane. Le jeune voulait de l'aide, il avait besoin d'une main ferme et tous ceux qui le connaissaient avait peur de ce qu'il risquait de faire la prochaine fois. En tant qu'agent de probation, je ne pouvais rien faire d'autre qu'évaluer et aiguiller.
Malgré tous les efforts déployés par ses parents qui étaient de bons parents, Darrel a mis le feu à l'école primaire un soir pour chercher à se rendre intéressant auprès de ses copains. Lorsque les voisins ont remarqué l'incendie, ils ont vu les enfants s'enfuir. Résultat, l'école a brûlé à moitié, causant 1 million de dollars de dommages et forçant 600 élèves à fréquenter une autre école pendant un an.
Comme il ne s'agissait pas d'un enfant qui avait besoin de soins et de protection, les services sociaux ne pouvaient rien faire. Comme l'enfant ne souffrait pas de troubles mentaux, les services de santé mentale n'avaient rien d'autre à offrir que de la thérapie familiale. Darrel avait besoin qu'on brise le cycle de sa colère et de son égocentrisme en l'emmenant devant un tribunal où ses actes auraient été dénoncés officiellement. Il aurait pu bénéficier aussi d'un séjour dans un camp de plein air à caractère correctionnel sur ordonnance du tribunal. Cela s'est concrétisé plus tard, lorsqu'il avait 12 ans. Donc, notre système a été tout à fait inefficace pour lui et pour la collectivité.
Je me rappelle Brent. Il n'en faisait toujours qu'à sa tête, il prenait ce qui ne lui appartenait pas. Il a épuisé toutes les mesures de déjudiciarisation prévues par la Loi sur les jeunes contrevenants, depuis les ordonnances de dédommagement, les heures de travail bénévole au profit de la communauté et la
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détention de très brève durée jusqu'aux conditions sévères de l'ordonnance de probation. On lui a donné toutes les chances. Son dossier de jeune délinquant doit bien peser dix livres. À 17 ans, il a tué une connaissance d'un coup de couteau à la poitrine.
Brent agissait comme une bombe à retardement en défiant les autorités pour voir jusqu'où il pouvait aller trop loin. Il est allé jusqu'à tuer quelqu'un. L'histoire ne s'arrête pas là. On l'a placé en détention préventive dans un centre de détention pour adolescents. Sa petite amie pouvait lui rendre visite, tout comme sa mère et de nombreux amis. Les conditions de visite dans un centre de détention pour adolescents sont passablement relâchées, surtout s'il s'agit de quelqu'un qui est en détention préventive en attendant un verdict de culpabilité. À la suite d'une querelle avec sa petite amie, il s'est pendu dans la douche, et lorsqu'on l'a secouru, il avait déjà subi des lésions cérébrales. Il sera maintenant perpétuellement à la charge de la province en tant qu'invalide incapable de prendre soin de lui-même, à peine capable de dire un mot et de reconnaître qui que ce soit. La LJC ne lui a pas rendu grand service, ni à la victime du meurtre ni aux membres de sa famille.
Il avait planifié sa vie de patachon jusqu'à ce qu'il atteigne l'âge de 18 ans, comme son frère lui en avait déjà donné le mauvais exemple, mais cette fois-ci, l'histoire a tourné mal. Une loi différente aurait fait toute la différence. Voilà deux cas, tirés de mon expérience personnelle, de jeunes dont la vie aurait pris un tour bien différent si la LJC avait été formulée comme je le recommande aujourd'hui.
Nous proposons maintenant des dispositions bien précises. Si le Parti réformiste formait aujourd'hui le gouvernement, nous aurions déjà agi. La motion que nous présentons aujourd'hui constitue bien sûr la modification la plus fondamentale à apporter à la loi. J'imagine seulement la réaction du premier ministre à ce que nous, de ce côté-ci de la Chambre, dirons aujourd'hui. Il haussera les épaules, il rappellera que certains veulent un peu de ceci tandis que d'autres veulent un peu de cela. Mais nous ne céderons pas à la panique. Faites-nous confiance. Il faut souligner le côté positif. Ne vous faites pas de souci, soyez heureux. Voilà vraiment ce que les Canadiens veulent entendre.
Que le Canada se rappelle cependant aujourd'hui qui était ministre de la Justice lorsque la Loi sur les jeunes contrevenants a été adoptée. C'est le premier ministre actuel. Quel héritage il nous a laissé! Si les gens veulent blâmer quelqu'un pour le système judiciaire pour les jeunes, ils peuvent en rejeter à juste titre la responsabilité sur le gouvernement actuel.
La guerre froide entre l'Est et l'Ouest est terminée. La plus grande menace qui pèse maintenant sur nos collectivités se trouve chez nous, dans notre propre inaction pour préserver, protéger et défendre.
(1025)
Malheureusement, nos lois et nos principes moraux ont été influencés par les prétentions culturelles qui ont commencé à s'implanter durant les beaux jours de la contre-culture. On a notamment commencé à refuser la responsabilisation personnelle et on a souscrit à l'idée farfelue selon laquelle le pouvoir coercitif d'un État providence peut produire un sentiment d'élévation spirituelle, enrayer la pauvreté et le fanatisme, assurer la croissance économique et supprimer toutes les inadéquations individuelles et sociales.
Durant les années 80, la Loi sur les jeunes contrevenants a été adoptée et a d'abord officialisé le meilleur de ce que nous faisions en Colombie-Britannique depuis des années, notamment des stratégies de déjudiciarisation, des solutions de rechange, des camps en forêt, des institutions Borstal, des programmes de probation volontaire, des services de garde en milieu ouvert et des mesures novatrices adoptées au niveau local.
On a ensuite renoncé à l'esprit novateur à la dernière minute, malgré les recommandations contraires, simplement pour obtenir l'accord des provinces divisées. Si on modifiait simplement l'âge d'assujettissement à la loi, cela contribuerait pour beaucoup à rendre la loi efficace et à rassurer la population.
La Loi sur les jeunes contrevenants devrait s'appliquer aux 10 à 15 ans, inclusivement et non pas, comme c'est le cas actuellement, aux 12 à 17 ans inclusivement.
Par ailleurs, le paragraphe 3(1) qui concerne la déclaration de principes, devrait faire état des besoins et des droits des victimes au même titre que ceux des contrevenants. Il faudrait prévoir, au paragraphe 9(7), que les victimes et les parents d'un jeune contrevenant soient officiellement avisés des instances devant les tribunaux. En vertu de l'article 16, le renvoi à un tribunal pour adultes devrait être possible pour tout jeune assujetti à la loi et non pas seulement pour ceux de 14 ans et plus.
S'il estime que les circonstances le justifient, le procureur de la Couronne devrait pouvoir intenter des poursuites directement devant un tribunal pour adultes sans qu'il soit nécessaire de tenir des audiences pour le renvoi des jeunes de 14 ans et plus devant un autre tribunal. Dans ces circonstances, il est inutile d'entamer de longues procédures pour déterminer devant quel tribunal se tiendra le véritable procès.
L'article 17 devrait tout simplement être abrogé. Le public a le droit d'être informé des audiences visant le renvoi d'un jeune contrevenant devant un autre tribunal. Même si les audiences d'un tribunal pour adolescents sont généralement publiques, on ne peut en publier une partie pouvant permettre d'identifier le contrevenant ni en rendre compte.
En vertu de l'article 22 qui concerne le traitement des maladies mentales, le juge ne devrait pas avoir besoin du consentement du contrevenant à qui il inflige une peine pour lui ordonner de suivre des traitements.
Lorsque, aux termes de l'article 24, un juge ordonne la garde d'un contrevenant, il devrait s'en tenir à cela. Ce sont les autorités correctionnelles qui déterminent le type de garde dont les contrevenants feront l'objet selon les places disponibles en milieu ouvert ou fermé, les besoins fluctuant là aussi, tout comme dans le secteur des adultes. Laissons les administrateurs s'occuper des établissements correctionnels, et les tribunaux s'occuper de la détermination de la peine.
Il faudrait abroger l'article 38 et ne pas en adopter d'autre pour le remplacer. Lorsque la loi est enfreinte, le contrevenant ne devrait pas bénéficier du droit à la protection de la vie privée pour ce qui est de son infraction. Il faut rendre le crime public, pas le cacher.
4237
Le paragraphe 44(1) devrait permettre également de communiquer les dossiers et documents sur les jeunes aux autorités scolaires. Il faudrait abroger l'article 46 interdisant la communication de renseignements sur l'identité des jeunes. Il ne doit pas y avoir de restrictions. Il faut que justice soit faite, et qu'aucun doute ne subsiste à cet égard.
L'article 45.1 devrait être abrogé purement et simplement. Le tribunal pour adolescents doit être un tribunal pénal, et les règles sur les dossiers devraient être les mêmes que pour les adultes.
Une nouvelle mesure devrait être ajoutée à l'article 50.1 pour préciser que, si un parent manque à ses obligations normales de parent, le tribunal peut lui ordonner de verser à la victime une indemnité pour toute perte attribuable au vandalisme.
Enfin, il faudrait abroger l'article 56, car les pratiques de la common law et les règles judiciaires des tribunaux ordinaires suffisent amplement en ce qui concerne les témoignages des contrevenants. Si ce régime est satisfaisant pour les tribunaux ordinaires, il devrait l'être aussi pour les jeunes contrevenants.
Enfin, il faudrait encadrer de règles plus rigoureuses les enquêtes sur la libération provisoire, car il n'y a rien de plus décourageant pour les citoyens que de voir des prévenus dans la rue dès le lendemain de leur arrestation.
Il faut que nous ayons l'assurance que les infractions seront signalées et dénoncées selon un processus en bonne et due forme. Il faut s'occuper à la fois du contrevenant et de la victime. Le premier doit prendre conscience des effets de son comportement criminel sur les victimes et subir des conséquences à la mesure de son crime.
Quant aux victimes, il faut les aider et autant que possible réparer les torts qu'elles ont subis, grâce à une collectivité pleine de sollicitude et à un système judiciaire qui les défend.
En guise de conclusion, je vais résumer en disant que j'ai proposé aujourd'hui des solutions concrètes qui s'imposent si nous voulons rétablir la confiance dans le régime judiciaire des jeunes. Les Canadiens réclament de vastes changements dès maintenant, non pas une autre étude, une autre commission, une autre série de grandes consultations. Le ministre a en main plus d'un millier de mémoires qui ont été présentés par les Canadiens. C'est plus qu'assez de ce genre de chose.
Si les citoyens veulent participer directement et faire connaître leur opinion, il leur suffit de composer le numéro que je vais donner et d'apprendre à se servir des technologies de télésondage. Qu'ils envoient un message au gouvernement. Composez le 604-666-8378 et renseignez-vous sur la façon dont le service de télésondage sera utilisé en juin. Ce qui compte, c'est que la population réclame. Il reste à voir si le gouvernement a la volonté nécessaire pour lui répondre.
(1030)
M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, j'ai trouvé intéressants les propos du député. Je partage bien sûr le point de vue voulant que les Canadiens soient des plus insatisfaits de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Cependant, je trouve inquiétant qu'à la veille du réexamen de cette loi-il s'agit en fait du premier examen décennal de la loi depuis son entrée en vigueur-le député semble rejeter le processus d'examen avant même qu'il ait commencé.
La Loi sur les jeunes contrevenants n'est pas sortie de nulle part. Elle a remplacé la Loi sur les délinquants juvéniles de 1911. Nombre des problèmes dont se plaint le député ont été réglés dans la Loi sur les délinquants juvéniles. Lorsque le Parlement a décidé, au milieu des années 80, de modifier le traitement des jeunes contrevenants pour l'adapter au contexte des années 80 et non plus à celui du début du siècle, certaines décisions ont été prises.
Je comprends bien les observations du député, qui s'est intéressé à des articles précis. Pour ma part, je voudrais aborder la question d'une manière plus générale. Sur le plan des principes généraux, il y a une différence entre un jeune contrevenant qui a commis une première infraction et un adulte qui a violé le Code criminel. Il ne s'agit pas ici de récidivistes.
Voici la question que je voudrais poser au député. Le député pense-t-il qu'un jeune de 12 ou 13 ans qui, pour quelque raison que ce soit, qu'il s'agisse de difficultés pécuniaires ou autres, vole une tablette de chocolat, un stylo pour l'école ou quelque autre article peu coûteux dans un petit magasin et se fait prendre devrait être traité exactement comme un criminel adulte? Je ne pense pas.
J'estime que la société reconnaît que les jeunes peuvent faire des erreurs. Ce ne sont pas des adultes, ils peuvent faire des erreurs. Il ne s'agit pas de meurtres, de crimes violents. Il ne s'agit pas de gens qui se moquent du système judiciaire parce qu'ils se sont présentés devant les tribunaux quinze fois. Il s'agit plutôt de jeunes qui font une erreur et devraient, à mon avis, avoir la chance de se réhabiliter sans avoir à traîner toute leur vie un dossier criminel et à subir les railleries de leurs camarades de classe pour ce qu'ils ont fait.
Je parle par expérience personnelle. Je ne vais pas faire un long discours là-dessus. J'ai un ami à qui une chose pareille est arrivée aux termes de la Loi sur les délinquants juvéniles. Son nom n'a jamais été publié. Rien n'a jamais été su. Il n'a pas été traduit devant un tribunal pour adultes, mais devant celui que prévoyait la Loi sur les délinquants juvéniles. Ce fut une expérience humiliante pour lui. Aujourd'hui, il est un citoyen exemplaire et n'a pas eu affaire à la justice depuis l'âge de 14 ans. Je n'ose pas imaginer ce qui serait arrivé si son nom avait été rendu public.
Le député ne pense-t-il pas que la Loi sur les jeunes contrevenants doit traiter les jeunes contrevenants coupables d'une première infraction différemment des criminels adultes?
M. Forseth: Oui, monsieur le Président, je voudrais répondre. Ce n'est certainement pas la première fois que nous examinons la justice applicable aux jeunes. La Loi sur les jeunes contrevenants a déjà été modifiée depuis son adoption. Je rappelle aussi au député que j'ai été de ceux qui ont essayé d'appliquer l'ancienne loi sur les jeunes délinquants sur le terrain et que j'ai participé aux conférences fédérales-provinciales, ainsi qu'à toutes les discussions qui se sont tenues à répétiton sur la question au cours des années.
Nous ne sommes peut-être pas réceptifs aux nouvelles idées, mais d'autres n'ont pas su accueillir la réaction de la collectivité.
4238
Le jeune qui n'a jamais commis une infraction et qui vole une tablette de chocolat, comme dans l'exemple qu'il a cité, ne ferait pas, si j'en juge d'après l'expérience que j'ai acquise dans ma pratique en Colombie-Britannique, l'objet d'une accusation. Or, d'autres mesures prévues dans la Loi sur les jeunes contrevenants s'appliqueraient.
Similairement, un adulte qui vole une tablette de chocolat et dont c'est la première infraction ne ferait pas, selon la justice applicable aux adultes, l'objet d'une accusation. Il verrait son cas renvoyé par le procureur de la Couronne en vue d'être déjudiciarisé.
Il existe plus qu'il n'en faut de discrétion à tous les paliers du système de justice pour que celui-ci puisse fonctionner et prévoir les cas extrêmes comme ceux qui ont été cités en exemple.
(1035)
Ce que je veux dire, c'est que nous avons besoin d'un certain équilibre et d'une certaine proportionnalité. Il ne s'agit pas d'une question de philosophie sociale vue sous un angle politique, mais de l'expérience que la collectivité a tirée de l'application pratique de la loi à l'échelle nationale. Si c'était le bon équilibre, la collectivité devrait avoir une bonne réaction et une certaine confiance. Or, le manque de confiance qui transparaît dans notre motion est proportionnel à la preuve empirique des résultats sur le terrain.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement autant le discours du député qui vient de présenter la motion du Parti réformiste que les commentaires de l'autre député, et je ne suis pas persuadé, comme on vient de le dire, que tous les Canadiens ne sont pas satisfaits de la loi actuelle sur les jeunes contrevenants. Je pense qu'on a un sujet idéal pour que l'émotivité d'une personne sorte. Je pense qu'on a un sujet idéal pour lancer des grands débats philosophiques et je pense que ce n'est surtout pas un sujet qu'on doit mettre entre les mains de M. Tout-le-Monde qui va signaler un numéro de téléphone pour faire part de son émotivité face à un problème.
Au niveau des jeunes contrevenants, et je pense que c'est un phénomène qu'on voit de plus en plus, à cause justement du fait que c'est un jeune, on va le traiter différemment dans les journaux. Ça fait la une dans tous les journaux à sensation. Récemment, on a eu un cas dans la région, où cela a fait au moins la une pendant une semaine, et on en parle encore aujourd'hui. Je pense qu'avec un cas-type, on fait tout un éclat, tout un tracas sur ce sujet-là et ça influence directement la sensibilité que les gens ont face au problème.
Ce qui me désole un petit peu dans le commentaire que le député vient de faire en proposant cette motion, c'est que jamais il ne nous a cité une statistique justifiant des modifications comme il le demande. Jamais il n'a mentionné si vraiment chez les jeunes entre 10 et 12 ans, il y a vraiment une augmentation épouvantable où il faut vraiment sévir dans cette catégorie de gens-là.
Je vais lui en citer et j'aimerais qu'il les commente, ces statistiques, pour voir si j'ai de bonnes statistiques ou non.
Je pense que le plus évident, c'est l'homicide chez les jeunes. Je pense que c'est là surtout qu'on veut frapper avec une telle motion. C'est qu'en 1981,-je n'ai pas de données très récentes, mais on me dit suite aux vérifications que j'ai faites hier, que les données se poursuivent, mais ils sont en train de les compléter et je les aurai éventuellement-au Québec, on a eu treize cas d'homicide et au Canada trente-quatre cas. En 1982, neuf cas d'homicide au Québec et au Canada, vingt-trois. En 1983, trois cas au Québec, vingt cas au Canada et ainsi de suite, si bien que ma dernière donnée est de 1986, où il y a eu six cas d'homicide chez les jeunes au Québec et vingt-deux cas au Canada.
Également, il y a une autre statistique où il appert que la criminalité de tout acabit chez les jeunes a diminué de 8 p. 100 dans la province de Québec, et dans la métropole, à Montréal où elle a diminué de 34 p. 100 chez les délinquants, chez les jeunes. Il y a 34 p. 100 de moins de crimes en 1993 qu'il y en avait en 1992. Est-ce que ces données statistiques sont contredites par le député? Si oui, j'aimerais qu'il m'en donne pour justifier la motion qu'il nous présente ce matin.
[Traduction]
M. Forseth: Monsieur le Président, j'ai certainement des réserves au sujet de ce qu'on vient de dire sur la position des Canadiens. Je crois que la motion dont nous sommes saisis est un cri national d'insatisfaction à l'égard de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Pour ce qui est des statistiques que cite le député, il faudrait que je les examine. Nous ne prétendons pas qu'il y a actuellement un déferlement d'actes criminels parmi les jeunes, mais nous croyons que le mode actuel de fonctionnement de la Loi sur les jeunes contrevenants désavantage la collectivité.
Il ne faut pas se contenter de citer des statistiques, il faut aussi une loi qui sert bien de mesure corrective. La loi doit en outre envoyer le bon message à la collectivité. Quand on demande aux jeunes de mon coin ce qu'ils pensent de la Loi sur les jeunes contrevenants, ils répondent que la loi est une attrape, qu'elle est inappropriée et qu'elle doit correspondre aux valeurs sociales de la nation.
Le titre de la Loi sur les jeunes contrevenants doit faire référence aux jeunes contrevenants.
(1040)
À une époque aussi progressiste, une personne qui a l'âge d'avoir un permis de conduire ou de pointer une arme à feu depuis une automobile en direction de la rue doit répondre de ses infractions au Code de la route, de sa conduite en état d'ébriété ou de toute autre infraction devant un tribunal pour adultes.
M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole, ce matin, sur la motion dont nous sommes saisis, car elle traite d'un sujet très important.
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Comme l'a dit le député qui l'a présentée, elle porte sur un sujet qui préoccupe beaucoup de Canadiens. Cependant, elle ne les préoccupe pas nécessairement pour les raisons qu'il a données, du moins pas uniquement pour ces raisons. Les Canadiens se font beaucoup de souci pour nos jeunes, pour la prochaine génération, ils se demandent ce que l'avenir leur réserve, quel sera leur lot, lorsqu'ils arriveront à l'âge adulte et qu'ils devront assumer la direction de notre pays.
Le Parti libéral présentera, en juin, une mesure législative qui portera sur certaines des préoccupations soulevées par le député. Il sera impossible de savoir s'il approuvera ces changements tant qu'il n'en aura pas pris connaissance. Nous présenterons, en juin, une mesure qui portera sur des modifications à apporter à la Loi sur les jeunes contrevenants et qui, jusqu'à un certain point, durcira les peines imposées aux jeunes contrevenants.
La seconde étape sera une étude complète de la Loi sur les jeunes contrevenants qui sera entreprise à l'automne afin de décider des modifications qui devraient être apportées à cette loi, à la lumière des changements qui auront été recommandés en juin et des autres modifications à apporter pour répondre aux préoccupations des Canadiens.
Nous entendrons des témoins et je suppose que le comité se déplacera. Ce sera une étude complète et détaillée. Il est important que nous examinions cette loi non pas du point de vue des Canadiens. . .
Une voix: Ah non?
M. MacLellan: . . .mais aussi du point de vue des jeunes. Nous devons tenir compte des jeunes, car ils sont des Canadiens, eux aussi.
C'est une question qui inquiète beaucoup le grand public, car il y va de la sécurité des Canadiens. Nous nous préoccupons des jeunes, mais aussi de notre avenir, en tant que pays. Nous devons étudier tous les aspects de cette question.
Le député qui a présenté cette motion estime qu'il faudrait réduire l'âge maximal des jeunes contrevenants de 18 à 16 ans, et l'âge minimal, de 12 à 10 ans. C'est un changement extrêmement important qui sera abordé dans l'étude que nous présenterons, à l'automne, sur la Loi sur les jeunes contrevenants.
Je voudrais parler tout d'abord de la réduction de l'âge maximal de 18 à 16 ans. Certes, il faut que les jeunes contrevenants soient punis, mais il ne faut pas qu'ils soient écartés de la société jusqu'à la fin de leurs jours. Même si nous avons des transfèrements et que ces jeunes purgent la totalité de leur peine de 25 ans, un jeune qui a 17 ans réintégrera la société avant le mi-temps de sa vie.
Ces jeunes contrevenants recouvreront, un jour, la liberté. Quelle sorte de gens allons-nous alors côtoyer dans les rues? Certains jeunes contrevenants, de 16 à 18 ans, sont détenus dans des pénitenciers à sécurité maximale. C'est nécessaire pour certains. Il faut peut-être considérer certains d'entre eux comme incorrigibles.
(1045)
En règle générale, si on suspend l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants pendant cette période de deux ans, on se trouvera à envoyer des jeunes de 16 et 17 ans en prison, pas nécessairement pour un meurtre ou pour des crimes avec violence. Cela ne sera pas inscrit dans la loi. Il ne s'agit pas de dire que nous devons restreindre le nombre de jeunes qui vont dans des établissements à sécurité maximale parce qu'ils ont commis un meurtre ou un crime avec violence. Nous les soustrayons simplement de l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants. Ils doivent se débrouiller tout seuls dans le système pénitentiaire, tout comme s'ils avaient 35 ou 40 ans. Dans un pénitencier, ils risquent l'exploitation sexuelle et physique.
Si tel est le voeu du député, si tel est le voeu du Parti réformiste, soit, qu'ils le disent sans détour. Par contre, une fois qu'il aura payé sa dette à la société, le jeune ne sera pas nécessairement dans l'état que nous voudrions. Nous voulons faire en sorte que le jeune qui réintègre la société ne soit pas prêt à recommencer, ne soit pas furieux contre la société, contre le traitement que nous lui avons fait subir, car il sera alors porté à recommencer.
Certes, il y a l'aspect protection. Il nous faut protéger les victimes. Cela ne fait aucun doute. La loi a été conçue principalement à cette fin. Mais il y a aussi l'aspect réhabilitation. Il y en a qui disent:«La réhabilitation, c'est tout simplement une façon d'adoucir le traitement que nous réservons au contrevenant.» Il n'en est rien.
Que ça nous plaise ou pas, la réhabilitation doit jouer un rôle essentiel dans notre société, car si nous ne réhabilitons pas, d'une façon ou d'une autre, les enfants en détresse, notre société sera plongée dans le chaos et les jeunes seront l'objet des critiques de tous les adultes au Canada.
Pourquoi en arriver là? Pourquoi nous, Canadiens, devrions-nous être en guerre, être à couteaux tirés avec nos jeunes? Pourquoi devrions-nous faire de nos jeunes des sujets de préoccupation et de peur chez nous? Quand des jeunes commettent des crimes, nous disons que ces crimes ne doivent pas rester impunis. Il faut punir les jeunes contrevenants en pensant surtout à la victime, au bien de la population canadienne, mais également à la réintégration des jeunes contrevenants dans notre société.
Il ne s'agit là que d'un aspect. Ce n'est pas l'aspect qui revêtira la plus grande importance à long terme. Nous devons sévir immédiatement contre les contrevenants, mais ce qui est plus important, et pour mieux protéger la société à long terme, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour prévenir le crime.
C'est la raison pour laquelle l'objectif principal du gouvernement dans le domaine de la justice et de la sécurité publique doit être la prévention du crime, et non pas seulement chez ceux qui en ont déjà commis ou qui subissent actuellement leur procès.
Comme nous l'avons appris au sein du Comité de la justice pendant la dernière législature, plus un jeune contrevenant avance en âge, moins il est probable que sa réadaptation donnera des résultats. Il est extrêmement important de commencer à réadapter les enfants dès qu'on s'aperçoit qu'ils présentent un risque.
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Selon un psychiatre qui a comparu devant le Comité de la justice, le meilleur moment pour le faire est entre la naissance et le troisième anniversaire de l'enfant. C'est fort jeune.
Il est impossible d'aller plus loin en arrière dans la vie de l'enfant. Nous devons examiner ce problème, ainsi que la question de la garde des enfants et celle des foyers d'accueil. Tellement de jeunes sont ballottés d'un foyer d'accueil à l'autre qu'il leur est impossible de tisser des liens solides avec une famille. C'est un problème sur lequel nous devrons nous pencher.
(1050)
Nous sommes préoccupés par le fait que des parents seuls qui doivent travailler n'ont pas les moyens financiers d'embaucher quelqu'un pour s'occuper de leurs enfants après l'école. Ils n'ont pas les moyens de payer pour des services de garderie. C'est un problème que nous devrons examiner, même s'il nous agace et si nous pensons qu'il n'en vaut pas la peine. Il le faut.
Nous devons reconnaître que les divorces et les familles monoparentales sont une réalité bien présente dans notre société. Nous devons examiner ces problèmes ensemble, en tant que société, car nous faisons tous partie d'une seule et même collectivité. Nous devons amener les provinces à s'entendre sur la réadaptation des jeunes contrevenants et sur la diversification des programmes de travaux communautaires, au lieu de mettre ces jeunes en détention.
Nous devons également tenter d'exercer une influence dans les écoles. Le gouvernement fédéral ne peut pas imposer ses volontés dans ce domaine, car les écoles relèvent des provinces. Certes, nous avons le Guide alimentaire canadien et nous recommandons certains aliments aux jeunes, mais nous devons aussi respecter la Constitution. Nous pouvons cependant collaborer avec les provinces pour repérer les enfants à risque lorsqu'ils sont à l'école afin de tenter de les aider. Nous devons appuyer nos enseignants. Les gouvernement fédéral et provinciaux doivent s'épauler dans ce secteur très important. Sinon, nous perdrons sûrement beaucoup de nos jeunes.
Nous disons que des jeunes commettent des crimes. C'est bien vrai. Et c'est aussi une tragédie pour les victimes, soit les parents qui vont perdre leurs enfants, souvent, aux mains de jeunes contrevenants. Ces parents ne s'en remettront jamais car, pour eux, cette tragédie est certainement la pire qui puisse arriver. Je ne crois pas que qui que ce soit à la Chambre veuille minimiser l'ampleur d'un tel drame. J'en ai des frissons chaque fois que j'y pense. C'est un aspect du dossier des jeunes contrevenants dont il faudra tenir compte et nous devrons imposer une peine. Nous devrons absolument le faire.
Cependant, nous devons aussi essayer de repérer les jeunes qui pourraient éventuellement commettre des meurtres ou d'autres crimes afin de les prendre en charge et de changer leur comportement avant même qu'ils ne commettent ces crimes. C'est aussi un aspect vital de la société où nous vivons.
L'aspect le plus important je crois, car nous tentons toujours de le camoufler, est celui de l'exploitation sexuelle des enfants. On sait maintenant que presque 80 p. 100 des adultes qui agressent sexuellement des enfants furent eux-mêmes victimes d'abus sexuel. Les études ne démontrent pas qu'un enfant ayant subi des abus sexuels répétés, par exemple 20 fois ou plus, est plus ou moins susceptible de devenir à son tour abuseur qu'un enfant ayant été agressé une seule fois.
Il n'en demeure pas moins que si un enfant est victime d'exploitation sexuelle, on peut affirmer sans hésiter que la probabilité qu'il agresse à son tour des enfants est de plus de 50 p. 100. C'est une statistique assez troublante. Si nous ne commençons pas à faire de la prévention, si nous ne nous attaquons pas à ce problème, nous assisterons à une escalade. La proportion des abus sexuels demeurera au moins égale à ce qu'elle est aujourd'hui.
Nous devons donc absolument nous attaquer à cette question. Nous devons le faire parce que de tels comportements ruinent la vie des enfants. Nous devons aussi examiner la question de la prostitution des jeunes. Nous devons penser au fait que certains proxénètes choisissent des enfants de n'importe quel âge de nos jours, même ceux de 12 ans ou moins, mais certainement des enfants de moins de 18 ans, pour réaliser des profits financiers grâce à leur prostitution.
Et quelle est l'incidence de cette exploitation sur ces jeunes? Quelle sorte de châtiment réservons-nous aux proxénètes pour ces gestes qui, selon certains, sont totalement dévastateurs pour la vie de ces jeunes, qui leur causent des préjudices psychologiques irréparables, au point même qu'une fois devenues adultes, ces personnes ne réussiront jamais à donner à leur vie le sens qu'elle aurait dû avoir si elles n'avaient pas été exploitées ainsi.
(1055)
Ce sont là des questions qui se posent à la société et que nous devons régler. Comment allons-nous le faire? Bien sûr, il faut nous attaquer à la criminalité en punissant les délinquants, mais le fait est qu'en tant que Canadiens, nous devons examiner toute cette question des enfants à risque dans notre société.
À cette fin, le ministre de la Justice propose notamment la création d'un conseil national de prévention du crime qui regrouperait des représentants de divers ministères fédéraux et provinciaux et d'autres organismes. Il étudierait toute cette question et toute législation future pour voir si, en fait, on se préoccupe de tous les aspects permettant de réduire la criminalité dans notre société et pour s'assurer que cette législation est examinée sous tous ses angles, afin de veiller à ce qu'elle favorise vraiment la prévention du crime.
En tant que collectivités, nous devons favoriser un esprit de coopération entre tous les intéressés, qu'il s'agisse des corps policiers, de l'Aide à l'enfance, de la Société Elizabeth Fry, de la Société John Howard, des centres d'aide aux toxicomanes ou d'Alcooliques Anonymes. Cependant, nous devons tous comprendre, comme membres de notre collectivité, qu'à moins que chacun d'entre nous n'aborde cette question du point de vue des enfants de nos quartiers et de la nécessité de faire de la prévention et d'aider nos jeunes, non pas en tant que parents, oncles, tantes, ou proches, mais plutôt membres de la collectivité, nous allons être confrontés à une criminalité croissante de la part de nos jeunes.
Nous devons envisager les choses de ce point de vue. Or, ce n'est pas ce que nous faisons. Il y a dans certaines de nos villes des jeunes de couleur qui viennent d'autres pays et qui ont peut-être une instruction minimale. Ils peuvent être âgés de 16 ou 17 ans. Ils ne vont certainement pas accepter d'être dans la même salle de classe que des enfants qui ont 10 ans de moins qu'eux. Ils n'ont pas de travail. Il y a encore beaucoup de préjugés dans notre société. Le fait demeure que nous n'avons
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pas de travail à donner à nos jeunes comme nous le devrions. Les dés sont pipés contre eux.
Que font-ils alors? Ils veulent ce à quoi ils estiment que les jeunes ont droit et, en grand nombre, ils le cherchent dans les drogues et la criminalité. Nous devons nous pencher sur ce problème, particulièrement dans les vieux quartiers pauvres de nos villes. Nous ne pouvons le passer sous silence comme l'ont fait les Américains avec les résultats que l'on sait. Dans les villes américaines, il y a des quartiers où même la police ne s'aventure pas. Est-ce que c'est ça que nous voulons? Je ne le pense pas.
Nous devons récupérer ces jeunes, non seulement pour leur propre bien, mais aussi pour celui des Canadiens et du pays tout entier, et pour qu'ils deviennent des membres productifs de la société. L'avenir est entre leurs mains. Dans quelques années, c'est eux qui présideront aux destinées de ce pays.
Je demande aux députés de cette Chambre de parler aux jeunes. Je ne leur demande pas de les absoudre de leurs crimes. Je ne leur demande pas de leur dire qu'ils font bien de commettre des crimes ou qu'ils sont mal compris. Ce n'est pas cela que je demande. Ça ne les aiderait pas. Nous ne les aidons pas non plus en les plaçant dans des centres de détention où ils jouent au billard et regardent la télévision. Ils doivent prendre conscience des dures réalités de la vie; ils les connaissent, mais sous un angle différent.
Les jeunes ont peur, très peur. Ils pensent qu'ils n'ont pas d'avenir, qu'ils ne trouveront pas de travail. Beaucoup ont des problèmes à l'école et à la maison. Un grand nombre d'entre eux trouvent que la société est sens desus dessous, que ce monde manque de compassion et ça, ça dérange les jeunes. Les jeunes ne deviennent cyniques et égoïstes qu'une fois adultes. Ils déplorent le fait que nous ne nous occupions pas de notre prochain et que nous ne prenions pas le temps de les écouter. Nous devons leur prêter une oreille attentive.
Commençons par reconnaître les enfants à risque. Jetons un regard d'ensemble sur notre société en nous demandant comment aider ces jeunes. Si l'on fait cela, on réduira la criminalité. Si l'on peut mettre un terme aux agressions sexuelles contre les enfants, on aidera les générations futures. Bien entendu, nous devons apporter des changements à la Loi sur les jeunes contrevenants, car la société a devancé la législation. Nous n'avons pas réussi a évoluer aussi vite que la situation.
(1100)
Je n'éprouve aucun plaisir à dire que nous devons prévoir des peines plus sévères pour les jeunes contrevenants, mais c'est pourtant comme cela, en raison de la situation qui existe actuellement. Nous avons laissé le contrôle nous échapper. En tant que parlementaires, nous ne pouvons pas permettre que la situation se détériore davantage. Nous ne pouvons pas tolérer l'escalade.
Il faut enrayer la criminalité. Il faut s'attaquer aux causes. Nous devons dire aux jeunes: «Nous voulons travailler avec vous pour le bien du Canada. Vous obéissez aux lois et nous ferons notre possible pour comprendre ce qui vous arrive et les problèmes que vous avez.»
Dans le monde, en moyenne, on considère que 18 ans est le début de l'âge adulte. Ramener cet âge à 16 ans n'aidera pas les jeunes de notre société. Le gouvernement va proposer des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants au début de juin. Pour moi, j'estime qu'on doit se pencher sur les causes de la criminalité et comprendre les jeunes.
M. Leon E. Benoit (Végréville): Monsieur le Président, franchement, j'ai écouté toute la dernière intervention avec consternation. C'est toujours le même discours que ces libéraux toujours prêts à défendre la veuve et l'orphelin tiennent depuis dix ans. Cela m'inquiète vraiment.
Les propos du député au sujet des jeunes de 16 ans qui, lorsqu'ils se retrouvent en prison, sont victimes d'agression de la part des détenus de 30 ou 40 ans, illustrent bien ma pensée. Au lieu de régler le problème en améliorant le système carcéral, il s'en sert comme argument contre la modification que nous voudrions apporter aux limites d'âge prévues dans la Loi sur les jeunes contrevenants. Encore et encore, on traite les problèmes de mille et une façons, mais jamais en les abordant directement et sans détour. Je crois qu'il faudrait plus souvent s'attaquer sans détour au coeur des problèmes.
J'ai une observation à formuler et une question à poser au député. Quand il a abordé le sujet des proxénètes, je pense qu'il parlait en faveur du changement que nous proposons. Il a dit: «Quel genre de châtiment réservons-nous aux proxénètes?» À bien y penser, de plus en plus de proxénètes sont des jeunes de 16 ou 17 ans qui sont actuellement protégés par la Loi sur les jeunes contrevenants et contre lesquels on ne peut rien faire.
Je pense que la question qu'il posait et la réponse qu'il a donnée étaient réellement des arguments en faveur des changements que nous proposons aujourd'hui. Le député ne croit-il pas que c'est peut-être bien vrai?
M. MacLellan: Monsieur le Président, la prostitution, notamment chez les jeunes, est en hausse dans notre société. On pourrait même affirmer qu'il y a plus de souteneurs âgés de moins de 18 ans et de plus de 18 ans qu'il y en a eu dans le passé. C'est une réalité qu'on ne peut nier.
Je trouve tout de même illogique de dire que cela justifie le resserrement de la Loi sur les jeunes contrevenants. Il existe des lois qui traitent des souteneurs et de ceux qui profitent de la prostitution juvénile. À mon avis, nous devons examiner ces lois pour voir si elles sont assez sévères. Un tel examen s'impose et c'est pourquoi je le mentionne.
En fait, nous devons chercher pourquoi des jeunes de 16 ans sont souteneurs dans notre société. Comment est-ce possible? Si nous punissons ces jeunes, allons-nous régler le problème? Cette solution n'a pas fonctionné dans le passé. La seule façon de mettre un terme à ce type de prostitution, c'est d'aller au fond du problème.
Il est faux de dire que nous cherchons à atténuer le problème et il serait simpliste de s'en tenir au châtiment. La prévention du crime, c'est l'affaire de tout le monde; il faut sensibiliser tous les Canadiens à cette réalité et les amener à participer.
(1105)
[Français]
M. Benoît Tremblay (Rosemont): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, et je dois vous dire que je partage une très grande partie de son diagnostic, de même qu'une très grande partie des valeurs véhiculées par ses positions. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de travailler avec lui pendant plusieurs mois sur la question
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des armes à feu, alors qu'il était dans l'opposition. Je reconnais aujourd'hui à la fois son ouverture et sa préoccupation.
Il y a cependant un aspect dans son approche qui me laisse perplexe face à l'avenir de la situation dans les communautés. Si je suis d'accord avec l'ensemble de sa position en ce qui concerne les jeunes en général, on sait qu'on a des problèmes particuliers avec de jeunes récidivistes. Je pense qu'une attention spéciale devrait être accordée à cet aspect, et plus particulièrement aux adultes qui utilisent les jeunes pour commettre des crimes.
On l'a vu dans toute la question de la contrebande de cigarettes parce que c'était visible, mais ce qui a été fait dans la contrebande de cigarettes existe aussi dans d'autres situations criminelles. Aujourd'hui, il ne faudrait pas seulement parler des jeunes mais parler des adultes qui utilisent les jeunes, et c'est peut-être cet aspect de la loi qu'il faudrait changer: s'assurer que les adultes qui utilisent les jeunes pour commettre des crimes aient des punitions proportionnelles. Donc, ce n'est pas seulement la loi des jeunes contrevenants, mais celle des adultes qui les utilisent.
Pour l'ensemble des jeunes-et c'est là ma préoccupation fondamentale-on sait très bien qu'avec les restrictions budgétaires que nous avons, il n'y a pas d'expansion des services publics. Soyons réalistes, on a au contraire des coupures dans les secteurs publics. Mais au moment où on n'a pas d'expansion dans les services publics, il faut faire en sorte de renforcer, par tous les moyens, les mécanismes et les outils de solidarité sociale.
Si vous prenez la situation actuelle dans un comté comme le mien, on a des maisons des jeunes; on a aussi, dans certains quartiers où il y a plus de violence, où il y a de la prostitution, des travailleurs de rues, avec des organismes communautaires. Est-ce que vous savez comment vivent ces organismes? Ils vivent avec des programmes temporaires de création d'emploi qu'on appelle les PDE et les articles 25.
Actuellement, à Montréal, depuis le 1er avril, savez-vous ce qu'on se fait dire? Il n'y aura plus de PDE réguliers. Les fonds de fonctionnement pour les articles 25 n'existeront plus. Ce sont des montants minimums par rapport à l'ensemble; on parle de quelques millions sur un budget de 20 milliards. Est-ce que le secrétaire parlementaire peut au moins nous garantir, que dans une région urbaine comme la nôtre, il fera un message clair au ministre du Développement des ressources humaines pour que ces programmes qui coûtent très peu cher soient maintenus, de telle sorte que l'on ait des outils de solidarité sociale, parce qu'on est en train de les couper aujourd'hui. On est en train de couper les outils sur lesquels on dit s'appuyer pour améliorer la société.
[Traduction]
M. MacLellan: Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement l'intervention du député et je dois dire que je partage presque entièrement son avis.
Le problème est grave. Nous savons notamment que le Québec a lancé, il y a environ un an, une campagne d'information publique pour inciter les femmes maltraitées à se rendre à des refuges où elles pourraient obtenir des soins et trouver de l'aide. En quelques semaines seulement, les refuges étaient tellement bondés que la province a dû mettre un terme à sa campagne. Cela vous donne une idée de l'ampleur du problème.
Les programmes d'aide doivent être conservés. Le ministre du Développement des ressources humaines en est conscient. Je lui en ai parlé. J'ai même proposé une solution que les provinces pourraient peut-être appliquer. Il existe au Nouveau-Brunswick un projet-pilote auquel participent un millier de personnes âgées, pas des gens à la retraite, mais plutôt des personnes âgées entre 55 et 65 ans. On garantit à ces gens tant de semaines de travail pour les travaux communautaires qu'ils accomplissent. Je ne vois pas pourquoi ces travaux communautaires ne pourraient pas comprendre le travail auprès des jeunes, et surtout auprès des enfants en péril. Il y a des gens qui s'y entendent en informatique, et divers organismes sportifs qui pourraient peut-être oeuvrer auprès de certains jeunes.
(1110)
C'est dire que nous ne sommes pas complètement démunis. Si tous les députés proposent des solutions et si nous conjuguons nos efforts, je crois que nous réussirons à régler le problème. Avec la collaboration des provinces, nous pouvons sûrement apporter une aide précieuse.
M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Je serai très bref, monsieur le Président. Dans sa motion, le Parti réformiste propose quelque chose de très précis, à savoir réduire les limites d'âge de 12 à 10 ans et de 18 à 16 ans. Nous avons tous entendu parler de la triste affaire du garçonnet qui a été tué en Angleterre par deux enfants de moins de 12 ans. Or, si cette affaire était survenue ici même, au Canada, nous n'aurions rien pu faire du tout.
J'ai une question assez précise à poser au secrétaire parlementaire. Nous savons que le ministre de la Justice va renvoyer toute la Loi sur les jeunes contrevenants au Comité de la justice. Le secrétaire parlementaire peut-il nous dire si l'examen au Comité est assorti de restrictions ou si le Comité sera entièrement libre de tout examiner, y compris la réduction des limites d'âge?
M. MacLellan: Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de poser une question aussi pertinente.
Le Comité de la justice ne sera limité dans son travail par aucune restriction ou contrainte de quelque nature que ce soit. Il sera libre de présenter toutes les recommandations et d'adopter toutes les propositions qu'il voudra. On ne tentera nullement de restreindre sa pensée ni son action.
J'irai jusqu'à dire, en fait, que même le projet de loi que le ministre va présenter en juin et qui sera adopté avant que le Comité de la justice ne dépose son rapport pourra faire partie de cet examen et cela, même s'il viendra d'être adopté lorsque le Comité entreprendra ses travaux.
4243
M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre): Monsieur le Président, le député se dit inquiet à l'idée que nous puissions envoyer des jeunes de moins de 18 ans dans des pénitenciers ou des prisons. Je ne crois pas que c'est ce dont il est question ici. Je crois qu'il est question du crime et de la Loi sur les jeunes contrevenants.
À mon sens, la personne qui est prête à commettre un crime doit aussi être prête à purger sa peine. Au Canada, l'incarcération est le prix à payer pour un comportement antisocial.
Que peut dire le député aux victimes de jeunes contrevenants? L'affaire de Martensville, en Saskatchewan, me vient tout de suite à l'idée. Je connais personnellement certaines des victimes. Que peut dire le député aux parents et aux grands-parents d'enfants de deux ou trois ans? Leur dit-il que nous ne pouvons pas envoyer les jeunes contrevenants en prison parce qu'ils peuvent y subir des agressions sexuelles ou parce que ce sont des endroits peu recommandables? Je demande au député comment il s'y prendrait?
M. MacLellan: Monsieur le Président, ce n'est pas du tout notre position. Ce que j'ai dit en parlant des jeunes de 16 ou 17 ans, c'est que si nous les soustrayons à la Loi sur les jeunes contrevenants, nous les sortons du système. Nous ne retirons plus du champ d'application de la loi seulement ceux qui commettent des crimes avec violence, mais nous en retirons également ceux qui commettent des vols ou du vandalisme. La Loi sur les jeunes contrevenants ne s'appliquera plus à eux, un point c'est tout.
Nous étudierons le cas des meurtriers ou des auteurs d'autres crimes graves lorsque nous serons saisis du projet de loi que le ministre nous présentera, je l'espère. Nous espérons qu'il y aura des changements. Sinon, ce sera au Comité de faire son travail.
Il reste qu'envoyer des jeunes de 16 ou 17 ans en prison où ils subiront des agressions sexuelles et des mauvais traitements physiques n'aidera pas la société, car lorsqu'ils seront remis en liberté, ils se seront endurcis. Il faut punir les coupables de crimes. Croyez-moi, lorsque nous parlons de parents dont les enfants ont été assassinés par des jeunes contrevenants, il n'y a pas un député à la Chambre qui n'est pas touché de sympathie pour eux et de regrets sincères. Tous les députés, et surtout moi, voudraient pouvoir faire quelque chose d'utile pour ces parents.
C'est pourquoi je dis que nous devons d'abord et avant tout penser en fonction de la prévention pour éviter que ces crimes se produisent. Dix-huit ans est un âge accepté partout dans le monde. Le Comité de la justice étudiera l'âge limite, que ce soit 16 ans ou 18 ans, et tous les membres de ce Comité pourront se prononcer sur la question.
(1115)
[Français]
Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert): Monsieur le Président, encore une fois, le bruit et la fureur de la réaction la plus radicale proviennent des banquettes du Parti réformiste. Cette motion du député de New Westminster-Burnaby n'est qu'un autre fait d'arme de la croisade hystérique et malsaine du Parti de la panique sociale.
Qui sont maintenant les nouvelles têtes de Turcs de ces croisés des Prairies? Les jeunes, ceux qui n'ont pas le droit de vote, sont représentés dans ce Parlement par des adultes, des adultes effrayés qui voudraient appliquer aux jeunes des châtiments d'adultes pour des actes commis par des modèles adultes. Parce que tout est là. Toutes les statistiques prouvent avec éclat que la délinquance juvénile est marginale, en proportion de la criminalité globale. Pourtant, il suffit de quelques cas isolés et regrettables pour qu'une meute se forme et réclame l'imposition de châtiments exemplaires pour les jeunes coupables. C'est le châtiment qui est en cause.
Tous les abus de l'irrationnel collectif des réactionnaires culminent dans leurs cris de vengeance. Pourquoi? Pour blanchir leur propre conscience d'adulte à laquelle les renvoient les actes commis par des jeunes qui les imitent. Ils nous disent: «Ces jeunes ont commis des crimes d'adultes; ce sont des adultes, punissons-les comme des adultes.» Ils nous disent: «Balayons du revers de la main 30 années de recherche sur le traitement de la délinquance juvénile. Ils nous disent: «Aux poubelles, les statistiques sur la réhabilitation réelle et positive de la très vaste majorité des jeunes pris en charge par les réseaux de protection de la jeunesse. Au diable la clémence sociale pour ces enfants dont la criminalité naissante est généralement le produit d'une désintégration sociale pour laquelle les adultes sont les grands responsables.»
Se faisant l'écho de ces hystériques, le parti de la panique aboie maintenant des appels aux châtiments exemplaires du Code criminel pour les jeunes de plus de 16 ans, à leur emprisonnement dans les pénitenciers, à la prison à perpétuité.
Je suis scandalisée par cette motion, une motion communiquée à la dernière heure, dont nous pouvions toutefois prévoir le ton et le fond.
Je suis déjà intervenue sur une motion du Parti réformiste qui affirmait que les criminels jouissaient d'un traitement de faveur devant les tribunaux et que les victimes étaient délaissées par le système judiciaire. Je répondais alors à cette motion du Parti réformiste que cette affirmation n'était supportée par aucune donnée statistique vérifiable et qu'elle démontrait une ignorance des données réelles de l'actualité.
Je reprochais par la même occasion à la députée qui avait proposé cette motion de se faire le porte-parole de la réaction et de jouer le jeu des médias. J'ai également pris bonne note des répliques du Parti réformiste sur mes interventions dans cette Chambre à l'égard du contrôle des armes à feu et des dispositions discriminatoires de la Loi sur l'assurance-chômage envers les femmes à l'endroit d'un conjoint. Je constate que le Parti réformiste est parfaitement conséquent dans ses choix idéologiques.
La motion que nous débattons ce matin s'inscrit dans une démarche inquiétante. J'espère que tous les Canadiens verront ce que les députés du Parti réformiste ne voient peut-être pas eux-mêmes dans leurs positions politiques. J'y vois tous les germes d'un fascisme nostalgique qui s'ignore. J'y vois l'espérance d'un retour à une société que notre démocratie rejette. J'y vois l'appel à la loi du talion. Mais si c'était idéologique. . .
4244
[Traduction]
M. Abbott: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je me demande si l'emploi de l'expression «fascisme nostalgique» et particulièrement du mot «fascisme» en parlant du Parti réformiste ne serait pas considéré comme antiparlementaire.
(1120)
Le président suppléant (M. Kilger): Pour répondre au rappel au Règlement soulevé par le député de Kootenay-Est concernant l'emploi de certains termes durant le débat, je dirai d'abord que, lorsque les remarques faites sont de nature générale et qu'elles ne visent aucun député en particulier-c'est là un des critères-elles ne sont pas considérées comme antiparlementaires.
Toutefois, je profite de l'occasion pour rappeler à tous les députés que, lorsque le langage ou le ton utilisé est de nature à semer le désordre à la Chambre, la Présidence se doit d'intervenir. Je demande donc à tous les députés de tenir compte de cela dans leur choix de langage ou de ton.
En conclusion, les mots mentionnés par le député de Kootenay-Est dans son rappel au Règlement ne sont pas jugés antiparlementaires pour l'instant.
[Français]
Mme Venne: Monsieur le Président, il y a des susceptibilités qu'il faut certainement ménager. Je vais donc continuer sur la motion du Parti réformiste.
Je disais que j'y voyais l'appel à la loi du talion.
En passant, monsieur le Président, j'aimerais savoir si le temps qui a été pris pour votre réflexion me sera attribué pour poursuivre ensuite.
Le président suppléant (M. Kilger): Disons que je vais me servir du règlement utilisé lors d'une partie de soccer. Je vais prendre ce temps-là à mon compte, et par conséquent, je ne vous l'enlève pas.
Mme Venne: Monsieur le Président, j'avoue mon ignorance en matière de soccer, je vais donc devoir vous faire confiance.
Nous parlions donc de la loi du talion. Si c'était idéologique, je me dirais que de telles positions seraient inquiétantes parce qu'elles seraient le fruit de convictions qui pourraient un jour se traduire dans des législations inapplicables. Je ne crois pas que ce soit idéologique. La motion du Parti réformiste s'inspire d'un esprit beaucoup plus électoraliste que philosophique.
Tout d'abord, la seule affirmation qu'il puisse y avoir une inspiration philosophique dans les positions du Parti réformiste les scandaliserait eux-mêmes, j'en suis certaine. Ce ne sont pas des philosophes mais des politiciens. Ensuite, le fondement de cette motion n'est autre chose que la rumeur publique que le Parti réformiste cherche à récupérer à son avantage. Et cela, c'est très facile.
Porté par la rumeur publique, le Parti réformiste claironne que les jeunes ne sont pas accusés pour les crimes qu'ils commettent, que les jeunes commettent plus de crimes que les adultes, que les sentences imposées aux jeunes sont scandaleuses et que la plupart des crimes violents sont commis par des jeunes. Ça, c'est la rumeur. Même si le député ne le dit pas ouvertement, toute son argumentation repose sur ces propositions.
On ne peut présenter ce genre de motion sans croire que les jeunes délinquants forment numériquement et socialement un groupe criminel très menaçant pour la sécurité publique.
(1125)
Or, toutes les statistiques disponibles à ce jour démontrent, au contraire, que les jeunes sont plus accusés que les adultes pour les délits qu'ils commettent.
Selon le rapport de 1991 du ministère fédéral de la Justice, le taux d'accusation des jeunes était de 61 p. 100 et celui des adultes de 25 p. 100. Je cite le rapport: «Les données illustrent que les jeunes de 16 et 17 ans sont traités plus sévèrement que les adultes.»
D'autre part, selon les mêmes statistiques, le taux de condamnation de plaidoyers de culpabilité sur les accusations portées contre les jeunes est toujours nettement supérieur au taux enregistré pour les adultes. Enfin, puisqu'il s'agit de l'infraction la plus grave, le meurtre commis par un jeune peut donner lieu à un procès devant le tribunal pour adultes.
Un jeune reconnu coupable de meurtre devant la cour supérieure de juridiction criminelle est passible de l'emprisonnement à perpétuité. C'est seulement dans les cas où le jeune n'est pas cité devant un tribunal pour adultes que la sentence maximale pour meurtre sera de 5 ans.
Si la Couronne ne réclame pas que le jeune soit déféré au tribunal pour adultes, il sera traité par le Tribunal de la jeunesse. Et même si la Couronne demande de le référer, ce sera le juge qui décidera, selon les circonstances. Ce système fonctionne, monsieur le Président. À moins de mettre en doute systématiquement le système judiciaire, on doit admettre que les juges sont les mieux placés pour évaluer les circonstances objectives et subjectives d'une infraction.
Je crois que la discrétion que la loi laisse aux juges de référer le cas au tribunal pour adultes est très adéquate. Je pense donc qu'il n'y a pas lieu de changer un iota de la loi a cet égard. Tous les intervenants en matière de délinquance juvénile affirment que le régime actuel fonctionne et qu'il fonctionne bien. Pas parfaitement, bien sûr, mais bien.
Ça ne fait pas l'affaire du Parti réformiste, qui nous invite à coller le télescope sur des cas isolés. Les statistiques canadiennes sont généralement constantes d'une province à l'autre. Je n'ai donc pas d'hésitation à affirmer que la criminalité juvénile dans l'Ouest du pays n'est pas plus importante qu'au Québec ou dans les Maritimes.
Actuellement, rien ne justifie rationnellement la frénésie dont sont atteints ceux qui se rabattent sur les jeunes pour la prévention de la criminalité. Tout prouve, au contraire, que la criminalité est une réalité de la société des adultes. Les adolescents qui sont coupables de délits pour des infractions au Code criminel représentent une proportion nettement marginale, par rapport aux adultes.
Je cite les dernières statistiques obtenues du ministère de la Sécurité publique du Québec, et on peut appliquer les mêmes rapports à l'ensemble de la population canadiennne. Pour l'année 1993, sur 51 meurtres qualifiés, un seul aurait été le fait d'un jeune. Le rapport est de 6 sur 25 pour meurtre au second degré et de 0 sur 14 pour homicide involontaire.
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Ainsi, sur un grand total de 90 homicides au Québec, en 1993, les jeunes en auraient commis 7, soit moins de 10 p. 100 du total. Sur 241 tentatives de meurtre, 25 seraient le fait de jeunes, soit environ 10 p. 100. Et pour ce qui est des crimes contre la propriété, 644 vols qualifiés, sur un total de 3 177 incidents, ont été commis par des jeunes, soit environ 20 p. 100. Et sur 21 592 infractions contre la personne, les jeunes en auraient commis 2 244, soit un peu plus de 10 p. 100.
En matière de drogues, la réalité est renversante. Il s'agit d'une infraction presque exclusivement adulte, quand on parle de possession, de trafic ou d'importation d'héroïne, où le taux est inférieur à 5 p. 100 pour les jeunes. Pour la cocaïne, les mêmes infractions s'établissent à 8 p. 100 les jeunes. Qui viendra soutenir que la criminalité est plus forte chez les jeunes? Qui même osera prétendre que la moyenne d'individus criminalisés chez les jeunes est comparable à celle de la population adulte? Il ne faut pas se cacher la réalité, alors que les adultes représentent 75 p. 100 de la population totale du Canada, ils commettent plus de 90 p. 100 des crimes. La réalité est simple, monsieur le Président. Les jeunes ne sont pas criminalisés. Dans cette courte période de l'adolescence qui va de l'âge de 12 à 18 ans, une très faible proportion d'entre eux, soit moins de 4 p. 100, toutes statistiques compilées sur tous les incidents du plus banal au plus grave, commettront un délit. La plupart de ces délits seront des voies de fait à la suite de bagarres, des actes de vandalisme ou des infractions statutaires.
(1130)
La loi actuelle sur les jeunes contrevenants s'inspire d'une longue réflexion sur les cas de délinquance juvénile. En effet, on ne peut parler de criminalité juvénile parce que la réalité nie cette perception faussée. La presque totalité des jeunes atteindront l'âge adulte sans problème, alors que deux adultes sur trois risquent de figurer un jour dans les statistiques criminelles ou pénales.
Devant de telles évidences, quelle est la pertinence d'une motion comme celle que nous débattons et qui sera mise aux voix? Si le député de New Westminster-Burnaby a bien étudié son dossier, il sait que l'effet immédiat d'un amendement à la Loi sur les jeunes contrevenants, dans le sens de sa motion, la rendrait presque sans objet. Puisque les jeunes entre 16 et 18 ans forment la très vaste majorité de tous les cas traités par un tribunal de la jeunesse, pourquoi le député ne suggère-t-il pas tout simplement l'abrogation de la loi? Ce serait plus simple, plus franc et plus direct. Ça ne serait pas maquillé derrière d'apparentes bonnes intentions.
Sur quelle philosophie humaine repose cette conception de la responsabilité criminelle des enfants de 10 ans? Je veux bien croire qu'un enfant de cet âge comprend la différence entre le bien et le mal, mais le député croit-il vraiment qu'un enfant de 10 ans comprend la nature du mal? Le député croit-il qu'un enfant de cet âge soit déjà à ce point dénaturé, corrompu et méchant qu'il inflige le mal à dessein et qu'il en retire autre chose qu'une satisfaction gratuite d'affirmation par l'imitation des adultes?
De qui le député se fait-il messager? De ces groupes de vigilants paranoïaques qui n'ont d'autre activité quotidienne que de répandre la panique dans la population? De ces individus qui nous inondent de correspondance hystérique où transpire la haine? De ces penseurs de la nouvelle extrême droite pour qui la prison demeure encore la meilleure école pour les jeunes contrevenants?
En 1984, la nouvelle Loi sur les jeunes contrevenants s'inspirait d'une approche humaniste de la délinquance juvénile. Constatant que les jeunes n'étaient pas criminalisés et que leur situation de dépendance à l'égard des parents réduisait leur potentiel de risque, le législateur, après d'innombrables consultations, adoptait une loi qui privilégiait la relation d'aide entre les intervenants et le jeune qui commettait un délit.
La loi-et je le répète au cas où le député de New Westminster-Burnaby n'en aurait pas saisi les subtilités et les nuances-vise à responsabiliser le jeune en permettant l'intervention efficace des professionnels du milieu.
À la punition judiciaire qui en ferait immédiatement un criminel fiché, la loi privilégie le redressement efficace du jeune dans le cadre d'un suivi d'interventions. Et lorsqu'on lit bien la loi, on en comprend toute la portée généreuse. Si la loi ne sauvait qu'un seul jeune d'une vie criminelle, elle aurait atteint son but, alors que le Code criminel n'a pas d'autre but que de punir les coupables. Faites d'un jeune un coupable, il sera coupable pour la vie. Donnez la chance de comprendre le choix, vous le sauverez probablement pour la vie.
Je comprends qu'une telle voie n'est pas acceptable pour celui qui ne cherche que la vengeance, mais si les adultes cherchent vengeance, qu'ils l'appliquent d'abord entre eux. Qu'ils mettent en place des structures sociales, familiales et politiques adaptées à la jeunesse avant de venger le délit isolé commis par un jeune qu'ils auront été incapables de diriger dans le chemin de l'honnêteté. Cette motion est simplement déplorable. Elle m'aurait peut-être permis de discuter des amendements que nous annonce le ministre de la Justice depuis quelques mois, si elle avait eu le mérite de proposer quelque chose de substantiel dans l'administration de la loi. Je sais que la tentation est forte chez les libéraux de céder à certaines pressions pour rendre la loi plus sévère. Je sais qu'il faudra un jour nous pencher sur certaines situations que la loi ne prévoyait pas à son adoption parce que la réalité sociale ne le commandait pas alors.
(1135)
En effet, je suis prête à admettre que le système mérite des ajustements aux nouvelles réalités, en particulier au regard de la criminalité organisée. Je suis consciente du danger que représentent des bandes de jeunes dans certains secteurs urbains. Je crois qu'il s'agit là d'un phénomène avec lequel nous devons composer spécifiquement, mais ce n'est certainement pas en changeant l'orientation de la loi, en la dépouillant de tous ses effets sur le plan pratique et en abaissant l'âge de la responsabilité délictuelle que nous le ferons. Je ne pense pas que les bandes de jeunes comptent plusieurs membres âgés entre 10 et 12 ans.
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Le problème des bandes de jeunes s'associe à celui de la criminalité adulte organisée. À cet égard, nous prendrons position en temps et lieu. Pour le moment, je demande à cette Chambre de rejeter la motion du député de New Westminster-Burnaby.
[Traduction]
M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement les observations de la députée.
Je tiens à bien faire comprendre une chose. Avec la motion que nous proposons aujourd'hui, nous ne demandons pas particulièrement des peines plus sévères. Nous n'écartons pas l'aspect assistance sociale pour les délinquants qui peuvent vraiment en bénéficier. Étant donné que la Loi sur les jeunes contrevenants est moins capable de traiter les jeunes contrevenants de façon un peu différente que les adultes, nous demandons simplement qu'on l'applique au bon groupe.
Pourquoi la députée déforme-t-elle ce que j'ai dit? Pourquoi trouve-t-elle nécessaire de dénaturer notre motion aujourd'hui? Devant les préoccupations exprimées au Canada à l'égard de ce qui ne marche pas bien, quelle est donc l'idéologie qui la pousse à défendre au fond le statu quo?
Le grand débat à la Chambre la dernière fois, quand la Loi sur les jeunes contrevenants a été adoptée, portait surtout sur la limite d'âge supérieure, à savoir si ce serait 16, 17 ou 18 ans. La Chambre était essentiellement partagée à égalité sur la question de l'âge limite. Une décision a finalement été prise et, depuis dix ans, nous en subissons les conséquences.
La députée devrait demander à ses électeurs ce qu'ils veulent, au lieu de leur dire ce qu'ils devraient vouloir. Nous le savons très bien, d'après l'opinion exprimée par les Canadiens et d'après notre expérience. Les Canadiens demandent ce que notre motion propose aujourd'hui.
[Français]
Mme Venne: Monsieur le Président, je regrette, je n'ai aucunement déformé la motion du député de New Westminster-Burnaby. J'ai commenté sa motion, je n'ai pas parlé du tout du prolongement de sentences, contrairement à ce qu'il mentionne. J'ai parlé du fait qu'il veut abaisser l'âge de 12 à 10 ans et l'abaisser également de 18 à 16 ans, c'est ce dont j'ai parlé.
Quand il me demande de parler à mes commettants au sujet de ce qu'ils pensent de sa motion, je peux lui donner dès maintenant le résultat. Nous savons, selon beaucoup de sondages qui ont eu lieu à travers le Québec, et j'imagine à travers le Canada, que les gens sont assez satisfaits de cette loi. Comme je l'ai mentionné, elle n'est pas parfaite, il y a des améliorations à faire, mais au Québec on ne panique pas présentement au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants.
On en entend parler énormément, je le comprends, dans l'Ouest et dans la presse anglophone. Pourquoi exactement y a-t-il cette panique dans ce milieu? Est-ce que c'est la presse qui en fait trop? Ou y a-t-il effectivement quelques paranoïaques qui ont pris cela en main? Je ne sais trop, mais nous n'avons pas ce problème de paranoïa au Québec. Je pense que le député doit être au courant de ce qui se passe ailleurs qu'uniquement dans son coin puisqu'il prétend que chez lui, c'est la panique générale.
(1140)
[Traduction]
M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours de la députée et, sauf le respect que je lui dois, je ne crois pas que les déclarations incendiaires aient leur place dans un débat raisonné.
Je représente une circonscription, non pas de l'Ouest, mais de la région métropolitaine de Toronto. Le 2 mai dernier, j'ai tenu une assemblée publique, comme je le fais tous les mois. Le sujet en était la sécurité publique. Je tiens à dire à la députée que, pendant les cinq ans et demi où j'ai eu le privilège de représenter les gens de Scarborough-Ouest, j'ai discuté avec eux de nombreuses questions, dont celle de la criminalité.
Je veux revenir sur ce que dit vraiment la motion de l'opposition et non pas sur l'interprétation qu'en donnent certains. La motion de l'opposition dit qu'il y a un «évident manque de confiance des Canadiens dans la Loi sur les jeunes contrevenants».
J'ai personnellement constaté cela dans ma circonscription, celle de Scarborough-Ouest. Je crois que la majorité de mes électeurs manquent effectivement de confiance dans la Loi sur les jeunes contrevenants. Le 2 mai dernier, ils m'ont demandé majoritairement et d'une manière non équivoque ce que notre gouvernement entend faire à ce sujet.
Le gouvernement est tout à fait conscient du problème que pose la Loi sur les jeunes contrevenants. C'est pour cette raison qu'il s'est engagé à la modifier dans son livre rouge et que le ministre de la Justice proposera des modifications et soumettra l'ensemble de la loi au Comité de la justice, pour qu'il en fasse un examen exhaustif.
Je suis satisfait de ce que fait notre gouvernement. Je m'en réjouis. J'ai expliqué aux électeurs de Scarborough-Ouest que c'est ce que nous faisons, et ils sont disposés à attendre, car il n'y a pas le feu. Mais ne vous méprenez pas sur ce que je dis: il y a un évident manque de confiance. Il y a eu des motions proposées, non pas par de soi-disant fascistes de l'Ouest, mais par des députés de ce côté-ci de la Chambre qui ont présenté des projets de loi d'initiative parlementaire coparrainés par des libéraux et traitant de restrictions concernant l'âge.
La députée croit-elle que les honnêtes citoyens de Saint-Hubert sont si différents que cela des honnêtes citoyens de Scarborough-Ouest? Est-elle en train de me dire, en son âme et conscience, que pour eux, la Loi sur les jeunes contrevenants ne pose aucun problème et, le cas échéant, appuie-t-elle encore la proposition du ministre de la Justice de confier toute la loi au Comité de la justice pour qu'il l'examine?
4247
[Français]
Mme Venne: Premièremement, monsieur le Président, j'aimerais dire que lorsque j'ai parlé tout à l'heure de panique, j'ai bien dit dans l'Ouest, et j'ai dit également dans la presse anglaise. Ce qui veut dire que cela n'existe pas, cette même panique, au Québec, et je le redis, c'est comme ça, c'est une situation qui est telle, et c'est encore là peut-être notre société distincte.
Ce que je voulais mentionner également, c'est qu'il n'y a pas lieu non plus de faire «paniquer» les gens, même ailleurs dans les endroits où déjà il y a, comme vous le mentionnez, un manque de confiance dans la Loi sur les jeunes contrevenants. Vous dites qu'il y a un manque de confiance actuellement. Cela se peut, mais je ne crois pas que c'est en le criant sur tous les toits qu'on va arranger quelque chose. Je pense qu'il faut peut-être, et je l'ai mentionné dans mon discours tout à l'heure, améliorer la loi. J'ai dit qu'elle n'était pas parfaite. Je n'ai pas dit que tout le monde était en train de dire que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, j'ai dit qu'il y avait des choses à changer.
Entre autres, je ne l'ai pas mentionné tout à l'heure et c'est un point de vue qui est très personnel d'ailleurs, je pense qu'il y aurait lieu d'apporter une modification à la Loi sur les jeunes contrevenants pour que, de 16 à 18 ans, les jeunes aillent obligatoirement devant un tribunal pour adultes lorsqu'il s'agit de meurtre, et de meurtre seulement. C'est ma position, et je tiens à le souligner.
Donc, je n'ai pas dit que c'était vraiment le délire sur la Loi sur les jeunes contrevenants, mais j'ai bien dit que nous n'avons pas cette panique que vous avez chez vous.
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, j'ai écouté l'allocution de ma consoeur du Bloc québécois et je partage son discours en grande partie.
(1145)
Compte tenu que nous avons, au Québec, une position assez claire sur les modifications qu'il pourrait y avoir à la Loi sur les jeunes contrevenants, j'aimerais qu'elle fasse part à cette Chambre des conséquences que cela entraînerait si le Parlement adoptait la motion présentement à l'étude en ce qui concerne l'âge? Quelles seraient les conséquences pour tout le système qu'on a mis des années au Québec à établir et qui donne de très bons résultats à l'heure actuelle? Quelles seraient les conséquences de l'adoption de la motion du Parti réformiste sur tout le système en ce qui concerne les jeunes contrevenants au Québec?
Mme Venne: Monsieur le Président, présentement, comme je l'ai mentionné dans mon discours, au Québec, c'est le statu quo qui est demandé de la part de tous les intervenants.
Alors, quand il s'agit de vouloir changer tout le système, c'est-à-dire d'abaisser l'âge de 12 à 10 ans et de 18 à 16 ans dans la définition, on va certainement engorger les cours, c'est bien sûr; on va également engorger les prisons qui le sont déjà et, de plus, ce n'est pas la façon de réhabiliter les jeunes en les criminalisant davantage parce qu'on sait très bien que la prison n'est pas une école.
Alors, pour répondre rapidement à mon collègue, je ne pense pas que ce serait la solution pour nous, au Québec, puisque ce qui est préconisé par tous les intervenants du milieu, c'est vraiment le statu quo.
[Traduction]
Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, j'ai trouvé offensantes une ou deux observations de la députée de Saint-Hubert.
Il est vrai que nous sommes des politiques et non des philosophes. Nous ne vivons pas dans un monde chimérique où la société serait parfaite et où il y aurait un pays distinct. La députée accuse le Parti réformiste de tomber dans l'hystérie et la paranoïa et d'avoir des réactions purement instinctives à des incidents isolés.
Je lui répondrai qu'il y a là un peu d'hypocrisie. À cause d'un incident isolé à Montréal, incident qui a rempli tout le pays d'horreur, on réclame maintenant un réglementation rigoureuse des armes à feu.
[Français]
Mme Venne: Monsieur le Président, il me semble que le terme hypocrisie n'est pas parlementaire.
Le président suppléant (M. Kilger): Le terme hypocrisie en tant que tel n'est pas antiparlementaire. S'il se produisait qu'un député soit malheureux parce qu'un autre député lui aurait dit qu'il était hypocrite, je profiterais certainement de l'occasion pour lui rappeler que c'est antiparlementaire.
[Traduction]
Reprise de la période des questions et observations. La députée a la parole.
Mme Meredith: Monsieur le Président, je voudrais savoir pourquoi la députée a cette impression parce que nous réagissons à une inquiétude du public qui s'est exprimée dans un sondage que j'ai fait. Selon ce sondage auquel ont répondu plus de 3 000 personnes, 90 p. 100 de mes électeurs sont favorables à un abaissement de l'âge parce qu'ils s'inquiètent des jeunes qui sont trop jeunes pour recevoir les services de ce système et n'ont donc droit à aucune aide lorsqu'ils prennent des décisions regrettables.
Selon la députée, comment faut-il aider ces jeunes de moins de 12 ans à revenir sur le droit chemin si la loi ne s'applique pas à eux?
[Français]
Mme Venne: Monsieur le Président, j'aimerais tout d'abord dire que je n'ai pas traité directement le Parti réformiste de paranoïaque ou, enfin, de tout ce qu'elle mentionne. J'ai simplement dit qu'ils avaient peut-être «des tendances à», ce qui est tout à fait différent.
De plus, quand on dit que, présentement, il y a, dans la société, des gens qui sont vraiment très perturbés par la Loi sur les jeunes contrevenants, ce n'est pas en utilisant des forums comme celui-ci, c'est-à-dire la Chambre des communes, les médias, etc., et en essayant d'augmenter les effets, dans notre système, de la Loi sur les jeunes contrevenants par son manque de force, selon certains, ou par son laxisme, selon d'autres, qu'on va aider le débat. Je ne
4248
crois pas que c'est en essayant de dire que tout est de travers dans la société, dans notre système judiciaire, que cela va nous aider ou que cela fera avancer le débat, pas du tout.
Je pense qu'il faut examiner la loi, comme je le mentionnais tout à l'heure, parce que, en général, elle satisfait les intervenants et la population. Toutefois, dans certains cas particuliers, il y a peut-être des choses à améliorer. Je ne pense pas qu'il faille paniquer.
(1150)
[Traduction]
M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, au nom du whip du Parti réformiste, je voudrais informer la Chambre que, conformément au paragraphe 43(2) du Règlement, les députés de notre parti qui interviendront sur cette motion vont se partager leur temps de parole.
Quand je suis arrivé au Parlement, je croyais que mon devoir était de transmettre le point de vue de mes électeurs, et non l'inverse. Pendant trop longtemps les Canadiens ont eu l'impression, et ils n'avaient pas tort dans la plupart des cas, que les députés qu'ils élisaient pour les représenter à Ottawa finissaient toujours par s'enfler la tête et perdre de vue leur fonction première.
Pour ma part, j'ai la ferme intention d'exprimer le point de vue de mes électeurs et je crois bien qu'ils commencent à le savoir et à le croire.
Je crois que l'avenir du Canada est entre les mains de nos jeunes. La jeunesse canadienne représente vraiment l'avenir du Canada parce que ce dernier aura beau être grand et magnifique et regorger d'attraits de l'Atlantique au Pacifique et à l'Arctique, il ne sera jamais plus que ce que sa population voudra bien qu'il soit.
Ma priorité, en tant que député, a été de faire des exposés dans les écoles de ma circonscription. Tous les jours que j'ai passés dans ma circonscription depuis janvier, je me suis fait un devoir d'aller dans une école parce que c'est là que sont les futurs citoyens sur qui repose la grandeur future du pays.
Il y a une école secondaire à Fernie où un professeur du nom de Randy Rae donne un cours de droit. Outre qu'il soit professeur, il a un ranch et occupe un poste d'administrateur au district régional de Kootenay-Est. Randy comprend ce qu'est la démocratie, et il y croit. Après avoir convenu avec ses élèves que la Loi sur les jeunes contrevenants renfermait des lacunes, il leur a demandé de mettre au point un modèle de modification de la loi. Il leur a également dit que, à son avis, cet exercice ne serait pas une perte de temps parce que son député accepterait de faire valoir son point de vue et celui de ses élèves à la Chambre des communes. Il avait raison.
Le travail faisait référence à la Loi sur les jeunes contrevenants. Il expliquait en quoi consistait la loi et comment elle fonctionnait. À partir de copies des modifications proposées à la loi dans le passé, chaque élève a fait des entrevues, tenu des discussions, sondé au moins dix personnes, puis résumé ses opinions.
Je souligne que les résultats des sondages, en ce qui a trait aux modifications proposées à la Loi sur les jeunes contrevenants, correspondent en grande partie à ce que propose le Parti réformiste. Nous proposons notamment d'imposer des peines plus sévères aux jeunes contrevenants, d'abaisser l'âge à partir duquel un jeune tombe sous le coup de la Loi sur les jeunes contrevenants, de tenir les parents responsables, dans certains cas, des actes de leurs enfants et d'autoriser les médias à divulguer l'identité des jeunes contrevenants récidivistes.
Deux répondants au sondage ont proposé d'inclure des peines corporelles dans la Loi sur les jeunes contrevenants. Ce point de vue correspond aux opinions que j'ai recueillies au sein de la population.
Je tiens cependant à préciser que ce point de vue n'est pas celui du Parti réformiste et qu'il ne correspond pas non plus nécessairement au mien. Je dis simplement que puisque le système de justice applicable aux jeunes délinquants ne fonctionne pas, nous devrions envisager la possibilité d'imposer des peines corporelles après avoir procédé à une étude approfondie et objective de toute la documentation pertinente recueillie dans le monde.
Comme je le soulignais plus tôt, il est intéressant de noter que certaines opinions exprimées dans le sondage correspondent à ce que prône le Parti réformiste. Cela m'a rappelé quelque chose qui s'est passé durant les dernières élections fédérales. L'éditorialiste en chef d'un journal de ma région s'en est pris à notre point de vue préconisant qu'il faudrait modifier la Loi sur les jeunes contrevenants pour que les parents et tuteurs des jeunes délinquants soient tenus par le loi d'exercer leur autorité parentale à l'égard des jeunes. En fait, une bonne partie des médias ont critiqué mon parti à ce propos.
Toutefois, le sondage effectué par les élèves va dans le même sens que la ligne de pensée du parti.
À mon avis, la société a des responsabilités envers les jeunes et leurs parents. Il est clair que les points de vue ont divergé à partir d'un certain point. Les politiciens qui oeuvrent à Ottawa ont opté pour la permissivité, contrairement à la population, comme en font foi les opinions recueillies au cours du sondage effectué par les jeunes et le point de vue des gens que je rencontre tous les jours dans des foires commerciales, dans des clubs, des organisations ou dans les écoles. D'après ce que les gens me disent, il ressort très clairement que le système politique a toujours récupéré ceux qui sont envoyés siéger à la Chambre des communes. Ils ont été récupérés par Ottawa et, en fin de compte, ils ont délaissé la position des électeurs au profit de celle que le solliciteur général libéral, Jean-Pierre Goyer, a établie il y a 23 ans, en 1971.
(1155)
Ma question est celle-ci: le gouvernement écoutera-t-il? Il a fait une promesse après l'autre, mais écoutera-t-il? Commencera-t-il vraiment à mettre en oeuvre les mesures qui s'imposent ou s'engagera-t-il dans un examen du système de justice qui prendra encore 18 ou 24 mois? Accédera-t-il à la demande des habitants de Kootenay-Est et, en fait, de tous les Canadiens?
4249
Personne ne peut soutenir que la Loi sur les jeunes contrevenants n'a pas besoin d'être modifiée. Il est clair que quelque chose ne va pas lorsqu'on examine les statistiques des dernières années que Statistique Canada a publiées en janvier dernier. En 1992, les jeunes représentaient 13,7 p. 100 de toutes les personnes accusées de crimes violents, comparativement à 10,5 p. 100 en 1986. Il s'agit là d'un bond de 3 p. 100 en seulement six ans.
Sur les 135 348 jeunes qui ont enfreint le Code criminel en 1992, 15 p. 100 ont été accusés de crimes violents. En 1986, le taux était également de 10,5 p. 100.
Ce qui est encore plus choquant, c'est le taux d'augmentation des crimes violents commis par des jeunes comparativement aux adultes. Depuis 1986, les crimes violents chez les jeunes ont augmenté chaque année de 14 p. 100 en moyenne, alors que l'augmentation chez les adultes n'a été que de 8 p. 100 pour la même période.
Récemment, la députée libérale de London-Ouest, qui est également coprésidente du Comité de la justice et des questions juridiques, a dit à la Chambre que, lorsqu'il s'agit des crimes commis par des jeunes, nous devrions séparer la perception et la réalité. Elle a ajouté que les Canadiens pourront faire connaître leurs préoccupations à un comité lorsque la loi sera examinée en profondeur, soit tous les 10 ans. S'il faut attendre encore 18 à 24 mois, c'est trop et c'est pourquoi nous avons présenté cette motion.
Je tiens à dire à la vice-présidente du Comité de la justice, qui a cherché à diminuer les intentions et les préoccupations de mon parti à l'égard de la Loi sur les jeunes contrevenants, qu'il y a de nombreuses victimes et de nombreuses familles qui souffrent à cause de cette loi mal faite et qui ne souhaitent franchement pas que l'examen de cette loi s'étende sur dix ans. Il y a des problèmes qui ne peuvent attendre.
Je voudrais vous faire part d'un incident qui a été rapporté cette semaine par la Presse canadienne. L'attaque sauvage dont je vais vous parler s'est produite à Oyama, une petite collectivité d'environ 500 maisons située à 30 kilomètres au nord de Kelowna, en Okanagan. L'article se lit comme suit:
Un homme, qui a reçu un coup de hache à la tête après avoir réprimandé un jeune automobiliste qui avait omis de faire un arrêt obligatoire, repose aujourd'hui dans un état critique et pourrait rester paralysé pour le reste de ses jours.
Rodney Bell a été frappé à la tête par le côté émoussé d'une hache devant son épouse et ses enfants, littéralement horrifiés. Vendredi soir, peu avant minuit, huit adolescents se sont présentés au domicile de Bell situé à l'écart, près de la rive, pour le narguer. En effet, il les avait pris en chasse, la veille, parce que ces jeunes n'avaient pas fait un arrêt obligatoire et qu'ils avaient failli heurter sa voiture. Bell a essayé de faire entendre raison aux jeunes. L'un d'eux s'est alors emparé d'une hache qui se trouvait tout près, sur un tas de bois, et la lui a balancée avec force à la tête. La bande a ensuite pris la fuite.
La police a arrêté deux jeunes de 16 ans relativement à cette agression, mais les noms ne peuvent être divulgués en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants.M. Bell, hospitalisé, lutte contre la mort. S'il survit avec le risque d'être paralysé pour le reste de ses jours, la plus grande injustice à son égard, c'est probablement la suite des événements, qui est relatée dans les dernières lignes de l'article:
L'un des adolescents a été accusé de voies de fait graves et est encore en détention, tandis que l'autre a été accusé de voies de fait et libéré. . .Il a repris le chemin de l'école.
. . .mais, naturellement, vu leur jeune âge, la Loi sur les jeunes contrevenants nous empêche de citer leurs noms.Je souscris au principe que les jeunes soient l'avenir du Canada, qu'ils soient le Canada. Le moins qu'ils puissent espérer, c'est que la loi les protège eux-mêmes, leur personne, leurs biens et leurs parents.
Je félicite les élèves de ma circonscription. Je félicite Randy Rae et l'école secondaire Fernie. Je les remercie de la diligence avec laquelle ils ont formé leur projet ainsi que de l'effort qu'ils ont déployé pour communiquer avec moi. C'est le genre de communication venant de mes électeurs qui me persuade que je parle en leur nom lorsque je traite de la Loi sur les jeunes contrevenants. C'est le genre de communication que j'aime recevoir de la part des gens de ma circonscription. Étant leur député réformiste, je suis vraiment différent, car j'écoute.
Je veux représenter les opinions de mes électeurs à la Chambre. J'espère que le gouvernement libéral finira par comprendre que c'est ce que nous faisons et que c'est la raison pour laquelle nous sommes ici. Nous n'employons peut-être pas les mots de bon aloi, nous ne faisons peut-être pas ce qu'il est politiquement correct de faire, mais nous n'avons que faire de la rectitude politique. Ce qui nous importe, ce sont les résultats. Par-dessus tout, ce qui nous importe, c'est de représenter les opinions de la population canadienne. En l'occurrence, nous exhortons le gouvernement à agir immédiatement de façon à protéger nos jeunes et nos parents par la force de la loi.
(1200)
Je conjure tous les députés de la Chambre d'appuyer la motion pour amorcer le processus de modification de la Loi sur les jeunes contrevenants. Nos jeunes, le Canada de demain, réclament notre appui et notre protection.
M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt le débat de ce matin. En principe, je suis rarement d'accord avec mes collègues du Bloc québécois, mais la députée de Saint-Hubert a dit une chose sur laquelle je voudrais insister.
Si on avait écouté les questions qui ont été posées ces dernières semaines durant la période de questions, on aurait pratiquement l'impression que c'est la panique, que la criminalité est en train de s'intensifier. Je ne pense pas que la situation se soit généralisée. C'est pourquoi je suis d'accord avec la députée de Saint-Hubert pour dire que la réaction au Québec est, disons, plus calme, et je trouve que les députés réformistes de l'autre côté ont extrêmement tendance, dans leurs questions, à porter des jugements catégoriques et à semer la panique quand il n'y a aucune raison de paniquer.
4250
Examinons ce à quoi s'est engagé notre gouvernement, soit de revoir la Loi sur les jeunes contrevenants. L'opposition a demandé depuis le début de cette législature à participer davantage à la rédaction des mesures législatives. Nous avons renvoyé cette mesure législative au Comité pour obtenir ses recommandations.
Je trouve que cette motion est un peu prématurée et j'ai du mal à comprendre en quoi le fait de ramener l'âge à dix ans et d'empêcher que le nom de certains jeunes contrevenants ne soit divulgué va améliorer les statistiques citées par le député de l'autre côté. La proportion de jeunes accusés de crimes violents est de 135 000, soit 15 p. 100. Comment allez-vous réduire ce nombre en abaissant l'âge? L'argument de frappe de la motion est-il vraiment d'abaisser l'âge pour que plus de gens viennent s'ajouter aux statistiques? N'y a-t-il pas d'autres moyens de s'attaquer au problème?
Cette question va être renvoyée à un comité. Pourquoi ne pas attendre le rapport du Comité où l'opposition est également représentée? Pourquoi cette panique?
M. Abbott: Monsieur le Président, il doit y avoir une prise de conscience de notre part lorsque 3 000 Albertains se rassemblent par un bel après-midi ensoleillé. Comme l'a dit, je crois, la députée de Mississauga-Ouest, il y a un problème. Il n'y a pas panique en la demeure, mais c'est un problème et les Canadiens réclament des changements.
Nous espérons que le changement très précis que nous proposons donnera l'élan nécessaire à une réforme en profondeur. Malgré tout le respect que je dois au député, au solliciteur général et au ministre de la Justice, reconnaissons que le Parlement avance à pas de tortue, ce n'est un secret pour personne, et qu'il nous faudra 12, 18 ou même 24 mois pour accomplir cette tâche. Les gens à qui j'ai parlé veulent que ça change tout de suite. Nous demandons aux députés de cette Chambre, nous les implorons, de se rendre compte que les gens exigent des changements immédiats.
Je parle au nom des élèves dont plus tôt j'ai présenté le rapport à la Chambre. À mon avis, ce sont les jeunes que les lacunes et l'inefficacité de la Loi sur les jeunes contrevenants dérangent et troublent le plus.
[Français]
M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, je désire poser une courte question, mais celle-ci précédée d'un court commentaire. J'ai l'impression ce matin que les réformistes ont, dans leurs coupures de presse, beaucoup d'extraits du Photo Police. Je ne sais pas si ce genre d'hebdo existe dans l'Ouest, mais c'est un peu l'impression que j'ai lorsque j'entends les descriptions de choses terribles qui se passent.
(1205)
Je ne peux pas être d'accord avec eux et en ce qui me concerne,-la position du Bloc a été débattue et elle le sera encore par mon collègue de Berthier-Montcalm tout à l'heure-j'aimerais entendre le député parler sur la chose suivante: lorsqu'on parle de criminaliser en plus bas âge, d'abaisser l'âge sur cette chose-là, ça ne réglera pas le problème. Est-il d'accord avec moi sur le fait qu'il faudrait être proactif pour que les jeunes aient un appui afin qu'ils n'arrivent pas à faire des choses comme ça?
Tout à l'heure, le sens de l'interrogation de mon collègue était de demander de l'aide au gouvernement libéral pour qu'on ait des PDE afin d'occuper les jeunes et qu'on leur crée de l'emploi. Je ne pense pas que c'est en criminalisant ou en abaissant l'âge qu'on va régler le problème. J'aimerais qu'on puisse se donner la main, les deux partis d'opposition, pour que le gouvernement libéral nous donne les actions afin de sortir les jeunes de la rue, plutôt que de les envoyer plus jeunes en prison.
[Traduction]
M. Abbott: Monsieur le Président, lorsqu'il a présenté sa motion, mon collègue de Burnaby-New Westminster a donné d'excellents exemples de jeunes de moins de 12 ans qui ont été laissés pour compte par le système alors qu'ils étaient récupérables. À l'heure actuelle, il y a des individus qui en profitent pour faire commettre des actes criminels par des enfants parce que ces derniers échappent à la loi.
Notre société a changé. Les jeunes qui se trouvent à l'autre bout de l'échelle, ceux qui ont 16 ans et qui se conduisent bien, ont besoin de protection, c'est ce que disent les élèves du secondaire, mais ils ne la trouvent pas dans la Loi sur les jeunes contrevenants.
Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, j'aurais voulu avoir plus de dix minutes. Je veux commencer par lire à la Chambre la déclaration de principes énoncée dans la Loi sur les jeunes contrevenants:
(1) Les jeunes doivent assumer la responsabilité de leurs délits, mais ne sauraient être assimilés aux adultes quant à leur degré de responsabilité et aux conséquences de leurs actes.
(2) La société doit pouvoir se protéger contre toute conduite illicite.
(3) Les jeunes contrevenants jouissent de garanties particulières quant à leur droit à un procès juste.
(4) Les jeunes contrevenants ont des besoins spéciaux qui exigent une assistance particulière que le système pour adultes ne peut leur assurer.La Loi sur les jeunes contrevenants assure une meilleure protection des droits des jeunes, mais elle ne prévoit rien de concret pour assurer plus de protection à la société. C'est ce qui nous préoccupe.
Il est temps que nous commencions à voir les choses en face. La vérité, c'est que la société a changé. Quand j'étais plus jeune, il pouvait arriver qu'on se batte, mais ce n'était pas avec des armes. On utilisait ses poings ou l'on se bousculait, mais personne ne sortait de couteau. Aujourd'hui, la vérité, c'est que nos enfants sentent le besoin de s'armer.
4251
La motion que nous présentons aujourd'hui sur les limites d'âge fixées dans la loi reflète les sentiments de la société, comme mes collègues l'ont déjà expliqué. Bien qu'ils aient beaucoup entendu dire qu'on pourrait modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, que le Parlement étudiait la question et qu'il s'en occupait, les Canadiens se rendent bien compte que la limite du 16 janvier pour la présentation de propositions est largement dépassée. On n'est toujours pas plus près d'une décision.
Notre motion donne au Parlement une occasion de dire aux Canadiens que nous sommes à l'écoute, que nous sommes attentifs à leurs besoins et que nous prendrons les mesures nécessaires pour protéger la société, particulièrement nos enfants, parce que c'est ce qu'on nous demande.
J'ai un exemple qui illustre bien la raison pour laquelle nous jugeons bon de ramener la limite d'âge à 10 ans. J'ai reçu une lettre d'un électeur qui a été victime d'un accident. Le dimanche 24 avril 1994, alors qu'il rentrait à la maison en automobile, il a traversé une intersection importante où le feu était vert pour lui; sa voiture a été frappée par une automobile volée qui a grillé le feu rouge parce qu'elle était poursuivie par les policiers. Il semble qu'un crime ait été commis à cette occasion, plusieurs crimes même; mais, à cause de la Loi sur les jeunes contrevenants, aucun crime n'a été commis. Son automobile a été projetée de côté par le véhicule qui arrivait à grande vitesse et c'est pure chance que ni lui ni le conducteur du véhicule volé n'ait été tué.
(1210)
Le conducteur de cette automobile volée était le jeune Michael Smith de 11 ans. Mikey, comme on l'appelle, a admis avoir volé plus de 30 automobiles et il se vante qu'il continuera de le faire jusqu'à ce qu'il atteigne l'âge de 12 ans. Sa mère, Bonnie Hartwick, a demandé aux autorités d'arrêter son fils, de faire quelque chose. Elle avoue ne pas savoir quoi faire et supplie les autorités de l'aider. Notre système ne nous permet pas d'aider Mikey.
Qu'attendons-nous? Que les Mikey de ce bas monde tuent quelqu'un? Voilà pourquoi nous proposons d'abaisser l'âge limite; pour que les jeunes contrevenants qui prennent le mauvais chemin à un si jeune âge puissent être pris en charge et socialisés à nouveau afin qu'on puisse les ramener dans le bon chemin avant qu'il ne soit trop tard.
N'oublions pas ces deux enfants de 10 ans qui, en Angleterre, on assassiné un bambin de deux ans. Dans notre société canadienne, on ne pourrait absolument rien faire dans une telle situation. Le problème vient de la loi et de l'âge limite qui y est indiqué; il est temps qu'on réagisse et qu'on modifie ces dispositions de la loi afin de pouvoir régler les problèmes.
L'autre cause d'inquiétude est la limite d'âge supérieure. Les adolescents de 16 et 17 ans connaissent très bien la différence entre le bien et le mal et je fonde cette déclaration sur mon expérience personnelle puisque j'ai quatre fils et que le benjamin a 14 ans. Les jeunes de 16 et 17 ans savent donc reconnaître la différence entre le bien et le mal et, à mon avis, lorsqu'on parle de jeunes de cet âge comme Huenemann, Lord et Gamache, on parle d'adolescents de 16 et 17 ans qui ne sont plus des enfants innocents. Ce sont des meurtriers haineux qui tuent de sang-froid. Ce ne sont pas de petits voleurs. Il ne s'agit pas d'enfants accusés de voler à l'étalage, de voler des cigarettes, ou même des automobiles. Il s'agit de personnes qui ont de sang-froid et malicieusement assassiné un autre être humain. À 16 et 17 ans, ils savent parfaitement ce qu'ils font et ils devraient être traités comme des adultes pour les crimes d'adultes. Je voudrais aussi ajouter que nos tribunaux ont le pouvoir de transférer les causes de jeunes de 16 et 17 ans aux tribunaux pour adultes, mais ils semblent hésiter à le faire.
Voici un autre cas dont je voudrais vous faire part. Dans ma circonscription, il y a deux ans à Surrey, Jesse Cadman, 16 ans, a été tué sauvagement par un garçon de son âge. Celui-ci l'a poignardé dans le dos parce qu'il n'aimait pas le chapeau qu'il portait. Apparemment, des amis de l'assassin de Jesse lui avaient dit de ne pas s'en faire, qu'en tant que jeune contrevenant il ne risquait, au pire, que deux ans d'incarcération. Cela a bien failli arriver. Il n'en reste pas moins que Jesse Cadman a été sauvagement assassiné par un garçon de 16 ans qui savait parfaitement ce qu'il faisait et qui a bien failli s'en tirer avec deux ans de prison.
Le juge du tribunal pour adolescents avait refusé le transfert du procès de l'assassin de Jesse Cadman à un tribunal pour adultes. Cependant, les parents de Jesse, et en particulier son père, organisèrent un groupe appelé «CRY», Crime Responsibility and Youth, qui a réussi à exercer suffisamment de pressions sur le système judiciaire pour que le procès soit transféré à un tribunal pour adultes.
L'organisation du père de Jesse Cadman, Crime Responsibility and Youth, a fait circuler des lettres demandant, priant, suppliant la Chambre des communes de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants et, en trois semaines, j'ai reçu plus de 300 de ces lettres à mon bureau. J'ai visité les localités de ma circonscription pour voir si les gens étaient d'accord avec M. Cadman et d'autres au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants et en particulier au sujet de l'abaissement des limites d'âge. Sur 3 000 réponses, plus de 90 p. 100 de mes électeurs ont répondu que, oui, le moment était venu d'abaisser l'âge de la responsabilité, pour que l'on puisse traiter les jeunes, comme le meurtrier de Jesse Cadman ou ceux des petits Shawn sur l'île, en adultes responsables de leurs actes, car ils savaient parfaitement ce qu'ils faisaient.
(1215)
Le public réclame de la Chambre des communes qu'elle adopte des mesures plutôt que de continuer à étudier la question et à examiner la loi. Il demande à la Chambre, il la prie, de s'inquiéter un peu, de comprendre que le temps presse et qu'il faut faire quelque chose.
C'est la raison pour laquelle nous avons présenté cette motion, pour donner à la Chambre des communes la possibilité de montrer aux Canadiens que nous sommes prêts à les écouter, à tenir compte de leurs préoccupations et à prendre les mesures qui s'imposent. Il ne s'agit pas simplement d'en parler, d'étudier la situation, mais bien de prendre des mesures concrètes pour y remédier.
4252
Je crois qu'il est tout à fait regrettable que, la semaine dernière, le projet de loi C-217 du député de York-Sud-Weston n'ait fait l'objet que d'une heure de débat et n'ait pas été soumis à un vote.
Cette mesure visait à modifier la Loi sur les jeunes contrevenants. Il est très important que nous commencions à accorder à ce type de projets de loi toute l'attention qu'ils méritent. Je ne pense pas que notre réaction soit exagérée ou qu'elle témoigne d'une certaine paranoïa. À mon avis, le député de York-Sud-Weston et les députés réformistes sont très sincères lorsqu'ils affirment qu'on peut prendre des mesures dès maintenant, en attendant que le réexamen de la Loi sur les jeunes contrevenants soit terminé. Pourquoi ne pas agir? Pourquoi ne pourrions-nous pas lancer quelques initiatives pour montrer que nous pouvons remédier dans une certaine mesure à la situation et ce, dès maintenant?
Je supplie la Chambre; voici une occasion, avec cette motion, de montrer aux Canadiens que nous sommes inquiets de la situation et prêts à prendre des mesures concrètes. Ce n'est pas la réponse à tout. D'autres modifications s'imposent. Il faut mettre l'accent sur la prévention du crime. Personne ne prétend le contraire. Cependant, ce sont là les mesures qui donneront des résultats à long terme.
Les Canadiens demandent qu'on agisse tout de suite. Ils veulent avoir l'espoir que des modifications vont bel et bien être apportées et le sentiment que le gouvernement se préoccupe de la protection de la société et de nos enfants.
J'ai transmis au ministre de la Justice une lettre venant d'un jeune de 13 ans de ma circonscription qui s'était fait voler son chapeau par un autre jeune de 15 ans. Ses parents l'ont appuyé en demandant des comptes au jeune de 15 ans. À ce moment-là, celui-ci a poussé le père de côté en lui disant que s'il le frappait, il porterait plainte. Le jeune de 13 ans est terrifié. Il craint que l'autre jeune ne découvre où il vit et vienne s'en prendre à lui. Il a très peur d'aller à l'école. Il hésite à sortir de chez lui, car il sait que ce jeune délinquant va vouloir se venger.
J'ai reçu une lettre de la mère d'une jeune de 13 ans qui a été battue à l'école par des filles de 15 ans. Elle a rapporté l'incident à sa mère qui s'est plainte à l'école et depuis, les autres jeunes cherchent à s'en prendre à elle. Elle ne va plus à l'école, car elle est terrifiée à l'idée d'être victime d'une autre agression. Nous devons protéger nos jeunes et nous ne pouvons le faire qu'en prenant des mesures maintenant.
Je supplie la Chambre de souscrire à ce projet de loi. Montrons aux Canadiens que nous sommes sincères et que nous sommes prêts à agir plutôt que de nous contenter de leur faire des promesses.
M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, permettez-moi de faire deux ou trois observations sur le discours de la députée.
Au sujet des écoliers, elle a fait valoir des arguments que je connais bien; je crois d'ailleurs que nous les avons tous déjà entendus, peut-être même de la part de nos propres enfants.
(1220)
Le problème, c'est que, même si nous sommes d'accord avec la députée, ce qu'elle dit ne changera rien en ce qui concerne la Loi sur le jeunes contrevenants, parce qu'il est impossible d'incarcérer ces enfants sous prétexte qu'ils menacent et intimident d'autres enfants. C'est au niveau de la collectivité qu'il faut travailler.
Il y a beaucoup d'hypocrisie de la part des provinces sur cette question. Les provinces demandent qu'on modifie la Loi sur les jeunes contrevenants, mais elles passent sous silence le fait qu'elles sont responsables des enfants de moins de 12 ans. Elles voudraient laisser croire qu'elles ne peuvent rien pour aider ces enfants, que ce soit par l'intermédiaire de la Société d'aide à l'enfance ou du système scolaire. Elles préfèrent dire que, si ces enfants courent un risque et ne reçoivent pas d'aide, c'est parce que le gouvernement fédéral ne veut pas baisser l'âge auquel s'applique le terme «adolescent». Ce sont les provinces qui refusent l'aide qu'elles devraient prodiguer à ces enfants de moins de 12 ans.
Je voudrais poser une question à la députée et c'est de bonne foi que je le fais, parce que je cherche vraiment une réponse et que je crois que cela pourrait faire avancer les choses. Quand on parle de jeunes de 16 ou 17 ans, les exemples qu'on donne se rapportent toujours à des meurtres ou à des crimes avec violence. La députée pense-t-elle que c'est précisément là qu'il faut apporter des modifications en ce qui concerne les jeunes de 16 ou 17 ans, et qu'on n'a pas à modifier les dispositions de la Loi sur les jeunes contrevenants dans le cas des jeunes de 16 ou 17 ans qui commettent des crimes sans violence? Est-ce que c'est possible? La députée croit-elle qu'on pourrait procéder de cette façon?
Mme Meredith: Non, monsieur le Président, je ne crois pas que ce serait suffisant. Ce que nous proposons, c'est que les peines soient laissées à la discrétion des tribunaux. Il n'est pas nécessaire d'envoyer une personne reconnue coupable d'une infraction mineure à une prison à sécurité maximale. Les tribunaux sont déjà libres de prendre ce genre de décision.
Si l'on faisait comme vous le proposez, on se trouverait à dire: «Seuls les contrevenants de 16 et 17 ans les plus violents devraient être jugés devant un tribunal pour adultes.» Or, nous croyons que ce sont les tribunaux qui devraient décider d'envoyer un jeune de 16 ou 17 ans à un tribunal pour adolescents, s'ils jugent qu'il n'est pas en mesure de juger de la portée de ses actes et de distinguer le mal du bien. Cependant, les jeunes devraient systématiquement être tenus responsables de leurs actes, car ils devraient pouvoir, à 16 ou 17 ans, distinguer le mal du bien.
En cas d'infraction mineure, les tribunaux peuvent opter pour une condamnation avec sursis ou quelque chose du genre.
Je crois que même les tribunaux pour adultes ont la souplesse nécessaire pour traiter les adolescents de façon différente, afin que la peine ne soit pas sévère ou injuste. Les tribunaux pour adultes ont toute latitude à cet égard. Voilà pourquoi ils devraient juger les causes des jeunes de 16 ou 17 ans.
Une voix: Envoyez le bon message.
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M. Derek Lee (Scarborough-Rouge River): Monsieur le Président, je signale que je partage mon temps de parole avec le député de Notre-Dame-de-Grâce.
Je suis ravi de pouvoir dire ici quelques mots sur cette importante question. On reconnaît que la Loi sur les jeunes contrevenants est un élément de notre système de justice pénale qui a besoin d'être modifié, d'être réformé. J'ai même entendu dire dans différentes régions du Canada qu'on devrait tout bonnement s'en débarrasser. Toutefois, je ne suis certes pas de cet avis. Et je ne connais pas beaucoup de députés ici qui le sont.
Il semble que la criminalité chez les jeunes ait augmenté légèrement, mais ce qui est encore plus important, c'est que la violence chez les jeunes a augmenté plus qu'un peu. Cela inquiète beaucoup la société en général et les collectivités où cette violence a cours en particulier. Elles se sentent particulièrement démunies lorsque des jeunes commettent des délits graves parce que les jeunes contrevenants ne sont pas assujettis aux procédures judiciaires normales. Leur nom n'est pas publié et ils sont jugés dans des tribunaux spéciaux.
Je suis de ceux qui estiment qu'il faut se pencher sérieusement sur l'augmentation des délits violents commis par des jeunes.
Nous, parlementaires, n'avons pas pour la plupart accordé beaucoup d'attention aux délits mineurs des jeunes contrevenants. Ces délits posent et poseront toujours un problème, mais les adultes en commettent aussi. Ce sont les crimes plus graves qui nous inquiètent.
(1225)
Mon gouvernement convient qu'il faut apporter un certain nombre de modifications à notre système de justice pénale. Cela faisait partie de notre programme au cours de la dernière campagne électorale. Le ministre de la Justice a dit à la Chambre-et je sais que les députés d'en face écoutaient-qu'il présentera dans les prochaines semaines un projet de loi visant à modifier des parties de la Loi sur les jeunes contrevenants. Je crois comprendre qu'il travaille sur ce projet de loi depuis la dernière législature et qu'il est déterminé à le présenter.
Deuxièmement, mon gouvernement est disposé à demander au Comité de la justice de la Chambre des communes d'examiner toute la Loi sur les jeunes contrevenants. Ensuite, le Comité ferait probablement rapport à la Chambre en recommandant des modifications supplémentaires. Il pourrait s'agir de modifications en profondeur ou de modifications mineures, je l'ignore, mais le gouvernement laisserait aux membres du Comité et aux autres députés la liberté de formuler ces recommandations. Comme tous les députés, j'attends avec impatience l'occasion d'examiner la question.
L'un des plus importants postulats de la Loi sur les jeunes contrevenants, c'est que les jeunes contrevenants peuvent changer de vie pour de bon si la société leur en donne la possibilité. Le jeune contrevenant se retrouve devant un tribunal parce qu'il a commis une erreur grave. L'idée que la société doive intervenir d'une manière ou d'une autre et lui donner la possibilité de se corriger est un élément fondamental de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Une chose que le gouvernement a reconnue, c'est que, dans bien des cas, la peine infligée à un jeune est trop brève pour qu'il ait accès à quelque forme de traitement que ce soit. Une sentence de deux ou trois mois ne suffit tout simplement pas pour que les organismes et les spécialistes des services correctionnels offrent au jeune un programme ou un encadrement suffisant pour qu'il puisse réorganiser sa vie.
J'ai rencontré un jeune contrevenant au Camp Dufferin, un établissement situé en Ontario. C'était il y a deux ans et je m'en souviens très bien. Je lui ai demandé ce qu'il ferait lorsqu'il aurait purgé sa peine de trois ou quatre mois. Il m'a répondu tout simplement qu'il retournerait probablement à la salle de billard où ses problèmes avaient commencé. Il n'avait pas d'autre endroit où aller. Les trois ou quatre mois passés à Camp Dufferin étaient agréables, structurés, organisés. C'était un peu comme dans un camp militaire, c'était organisé, il y avait de la discipline. Après la peine, le programme de traitement prenait fin.
Il y a toutes sortes de problèmes de perception face à la Loi sur les jeunes contrevenants. Je veux en mettre un en relief au cas où personne d'autre ne l'aurait fait. Chaque fois qu'un adulte dit que la Loi sur les jeunes contrevenants est inutile, qu'elle ne fonctionne pas, qu'elle ne suffit pas, il envoie un message aux jeunes. De telles critiques n'ont aucune utilité.
Tout d'abord, je ne crois pas que ce soit entièrement vrai. Beaucoup de dispositions, y compris sur les peines, de la Loi sur les jeunes contrevenants sont très rigoureuses, mais les jeunes ne le savent pas ou n'en sont pas conscients puisqu'ils croient, comme ils l'entendent dire, qu'elle ne prévoit que des peines mineures et qu'elle n'impose aucune responsabilité.
Nous aurons beaucoup d'aspects de cette loi à étudier. La motion à l'étude aujourd'hui ne propose que d'abaisser les limites d'âge en remplaçant 12 ans et 17 ans par 10 ans et 15 ans. J'ai moi-même présenté un projet de loi à la Chambre recommandant qu'on ramène l'âge à 10 ans. J'avais examiné la question de façon approfondie.
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Diverses provinces d'un bout à l'autre du pays ont différents types de mesures législatives pour les enfants de moins de 12 ans. J'ai été surpris de constater que certaines provinces ont de bonnes mesures législatives qui pourraient permettre aux Services d'aide à l'enfance d'intervenir pour assurer la protection du public. Cependant, en Ontario, les interventions ne sont permises que pour assurer la protection de l'enfant.
Pour le jeune contrevenant qui commet une infraction relativement grave, par exemple une agression sexuelle ou un vol qualifié, et il arrive aujourd'hui que des enfants de 10 et 11 ans commettent ce genre d'infractions, on me dit que tout ce que les policiers peuvent faire, c'est reconduire l'enfant chez ses parents. Cela ne rend pas service à l'enfant, particulièrement lorsque ses parents ne sont pas à la maison, ce qui est souvent à l'origine du problème. Il y a beaucoup de familles perturbées dans les centres urbains.
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Les autorités provinciales ne peuvent rien faire pour nos jeunes de 10 et 11 ans. Je suis d'avis que le régime des jeunes contrevenants dans chaque province devrait s'appliquer à un jeune de 10 ou 11 ans de la même façon qu'il s'applique à un jeune de 12 ans. C'est certainement une idée que j'appuie. Pour ce qui est des jeunes de 16 et de 17 ans, je n'ai pas encore d'idée arrêtée sur le sujet. J'ai tendance à penser que la question devrait être examinée par le Comité, comme le propose le ministre de la Justice.
Les opinions varient au sujet de la détermination de la peine et de la publication des noms des jeunes contrevenants. C'est une question complexe qui met en cause la protection de la vie privée, l'intérêt public, les médias et les échanges d'information entre les établissements. Même les établissements qui sont là pour aider les jeunes contrevenants sont parfois handicapés par les entraves à la publication et à la divulgation qui existent dans la Loi sur les jeunes contrevenants. Il y a de la réorganisation à faire dans ce domaine. J'espère que cela se fera au Comité.
On s'entend en général sur la nécessité de créer une catégorie spéciale pour les jeunes contrevenants dangereux. Je crois que ce sujet sera abordé dans la mesure législative que le ministre présentera à la Chambre sous peu.
En tant que ministériel, je peux dire que le ministre de la Justice et le gouvernement se penchent sérieusement sur ce dossier. Tous les députés auront amplement l'occasion de discuter des questions soulevées aujourd'hui dans le cadre du débat sur cette motion de l'opposition et de nombreuses autres questions relatives à la Loi sur les jeunes contrevenants. Je suis impatient de travailler avec les autres députés dans ce dossier.
L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, quand j'ai lu la motion du Parti réformiste hier soir, je ne pouvais en croire mes yeux. Les députés du Parti réformiste interviennent depuis plusieurs semaines à la Chambre pour proposer une action d'ensemble rapide afin de lutter contre la criminalité juvénile. En fait, aujourd'hui même, les deux députés qui sont déjà intervenus pour le Parti réformiste ont dit que nous devons agir dès maintenant pour lutter contre la délinquance juvénile.
Que nous propose-t-on à cet égard? Le Parti réformiste tenait l'occasion, en cette journée réservée à l'opposition, d'exposer des propositions précises à la Chambre, mais tout ce que nous avons, c'est une proposition simpliste visant à changer l'âge. Voilà qui va régler le problème de la criminalité juvénile. Voilà le genre d'action d'ensemble rapide que souhaitent les réformistes pour régler le problème, une mesure simpliste consistant à changer la limite d'âge. Il est vrai que le député de New Westminster-Burnaby a abordé dans son intervention d'autres points où il faudrait effectuer des changements, mais pourquoi n'en est-il pas question dans cette motion qui fera l'objet d'un vote, si le Parti réformiste estime que nous devons passer maintenant à l'action?
Si nous n'avons que cette mince proposition, c'est peut-être que le Parti réformiste n'est pas vraiment certain de ce qu'on devrait faire à propos de la délinquance juvénile. C'est peut-être parce qu'il ne tient pas vraiment à aucune autre proposition que ce simple changement.
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C'est peut-être parce que les réformistes ne savent pas ce qu'on devrait faire à propos de la criminalité juvénile que nous n'en obtenons que cette motion ne proposant qu'un seul changement. Cette résolution en un seul point est peut-être le signe qu'ils commencent à comprendre que cette question est plus complexe qu'ils le croyaient au début. Ils commencent peut-être à comprendre qu'il n'existe pas de solution toute faite qu'il suffit de mettre en oeuvre pour que la délinquance juvénile disparaisse.
On a déjà essayé la manière forte, pure et dure, dans certains États des États-Unis en matière de justice pénale. La Floride, la Géorgie, le Texas et la Louisiane ont adopté l'approche pure et dure préconisée par le Parti réformiste, et avec quels résultats?
On enregistre en Floride un taux de 9 meurtres par 100 000 habitants; ce taux s'établit à 11 meurtres en Géorgie, à 12,7 meurtres au Texas, et à 17,4 meurtres en Louisiane. Au Canada, où nous avons une approche de réadaptation plus humaine, une approche plus globale de lutte contre la criminalité, nous avons un taux de 2,5 meurtres par 100 000 habitants. Or, les réformistes veulent que nous adoptions l'approche de la Louisiane, de la Floride, du Texas, de la Géorgie et autres États. C'est ce que je les entends préconiser chaque jour à la Chambre.
Nous, par contre, au Parti libéral, admettons que certaines modifications s'imposaient à la Loi sur les jeunes contrevenants, et nous allons les proposer. Le ministre de la Justice a dit qu'il allait les présenter d'ici deux semaines. Nous avons cependant fait également remarquer que cela ne constituait pas la solution globale à la délinquance juvénile. Il ne suffira pas de changer quelques mots dans la Loi sur les jeunes contrevenants pour faire cesser la criminalité juvénile.
La motion induit la population en erreur. Je crois que certains députés réformistes sont sincères, mais ils induisent vraiment la population en erreur en demandant l'adoption immédiate de mesures et en proposant une modification à la Loi sur les jeunes contrevenants qui tient en une ligne et qui se résume à modifier l'âge. Ils induisent la population en erreur s'ils croient résoudre ainsi le problème de la criminalité chez les jeunes.
Ceux qui connaissent le problème ont dit à maintes reprises que, si l'on veut vraiment faire quelque chose au sujet de la criminalité chez les jeunes, il faut s'attaquer aux très nombreuses causes de cette criminalité, qu'il s'agisse des foyers désunis, du manque d'emplois, de l'absence de loisirs ou, comme certains de mes collègues l'ont dit, du fait que de nombreux jeunes sont sans abri. Les causes sont nombreuses, et à moins de s'attaquer à celles-ci, on ne réglera pas vraiment le problème.
La motion des réformistes semble fondée sur l'hypothèse selon laquelle les crimes violents commis par des jeunes ont considérablement augmenté. Il n'en est rien. Il y a eu une hausse
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dans certaines catégories, mais il n'en est rien. . . Les réformistes donnent l'impression que nous avons perdu la maîtrise de la situation.
Dans certaines régions de notre pays, la situation est pire que dans d'autres. Cependant, si l'on examine les statistiques, on constate que les infractions donnant lieu aux préjudices corporels les plus graves-c'est-à-dire l'homicide, la tentative de meurtre, l'agression, l'agression sexuelle, etc.-ne représentent que 2,4 p. 100 des accusations d'infraction violente portées contre les jeunes et 0,4 p. 100 de toutes les accusations portées contre eux en vertu du Code criminel. La majorité des accusations portées contre les jeunes, soit 62 p. 100, concernent des infractions contre les biens.
C'est en 1975 qu'on a enregistré le plus grand nombre de meurtres commis par des jeunes contrevenants ayant entre 12 et 17 ans. En 1975, 68 jeunes âgés de 12 à 17 ans ont commis des meurtres. Le nombre le moins élevé a été enregistré en 1987, année où il y a eu 35 meurtres. Il n'y a pas de tendance qui se dégage, mais, peu importe le chiffre, 35 ou 68, c'est toujours trop. Quoi qu'il en soit, c'est une grave erreur de céder à la panique et de dire que tout échappe à notre contrôle.
Le Parti réformiste propose dans sa motion de ramener les âges minimum et maximum prévus par la Loi sur les jeunes contrevenants de 12 et 17 ans à 10 et 15 ans.
Dans l'état actuel des choses, les personnes de 18 ans et plus sont considérées comme des adultes et comparaissent devant les tribunaux ordinaires. Les jeunes de 12 à 18 ans sont envoyés devant les tribunaux pour adolescents et assujettis à la Loi sur les jeunes contrevenants. La plupart d'entre nous savent toutefois que les jeunes de 14 à 17 ans peuvent être renvoyés aux tribunaux pour adultes si le ministère public en fait la demande parce que le crime, un crime avec violence par exemple, est particulièrement grave.
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On ne cesse de le répéter, les jeunes de 12 ans sont du ressort des provinces. C'est à elles qu'il incombe d'agir pour protéger le public, réadapter et aider ces jeunes.
Pourquoi avoir choisi 12 et 18 ans comme âges limites, lorsque nous avons adopté la Loi sur les jeunes contrevenants? Nous avons choisi 18 ans parce que c'est généralement l'âge de la majorité non seulement au Canada, mais dans le reste du monde. Par conséquent, à compter de 18 ans, c'est le tribunal pour adultes. À moins de 18 ans, c'est le tribunal pour adolescents. Nous avons choisi 12 ans comme âge minimum, parce que cet âge est généralement reconnu comme celui de la puberté. En bas de 12 ans, les jeunes ne sont généralement pas considérés comme ayant les mêmes caractéristiques que les jeunes de plus de 12 ans. Voilà pourquoi ces âges ont été choisis.
Comme je l'ai déjà dit, le ministre de la Justice va présenter dans quelques semaines un projet de loi proposant quelques modifications très spécifiques, à la Loi sur les jeunes contrevenants. Ce projet ira beaucoup plus loin que la motion simpliste que le Parti réformiste a présentée aujourd'hui. Le ministre a aussi déclaré qu'il allait renvoyer toute la question de la Loi sur les jeunes contrevenants au Comité de la justice, dont je suis président, ce qui permettra une étude exhaustive, sans réserve aucune, de tous les éléments de la loi. Des mesures seront prises, mais seulement après mûre réflexion.
Nous entendons encore ce matin les députés du Parti réformiste demander constamment s'il faut protéger les droits des contrevenants ou ceux des victimes et de la société. Les deux ne s'excluent pas. C'est un faux problème.
Il n'y a pas de contradiction entre vouloir protéger la société et vouloir protéger les contrevenants. En fait, si nous voulons vraiment protéger la société, nous devons favoriser la réhabilitation des contrevenants parce que, dans la vaste majorité des cas, il s'agit de délits mineurs commis par des gens qui vont se réinsérer dans la société. Nous devons nous intéresser au traitement des contrevenants quand ils sont sous notre responsabilité, qu'ils soient en prison, en probation, en libération conditionnelle, etc. Si nous ne nous préoccupons pas du traitement des contrevenants, nous faisons fi de la sécurité de la société.
Nous devons nous y intéresser de très près et améliorer nos programmes destinés aux victimes et à la protection de la société. Nous devons le faire. Mais il est faux de dire qu'il faut favoriser ou bien les droits des contrevenants ou bien ceux de la société pour garantir que les contrevenants qui réintègrent la société soient moins dangereux. Il faut faire les deux. La réhabilitation est dans l'intérêt de la société.
En conclusion, je dirai ceci. Nous devons bien sûr réexaminer la Loi sur les jeunes contrevenants et la question de la criminalité juvénile. J'ai dit que le ministre de la Justice allait nous présenter un projet de loi dans quelques semaines et que nous allions procéder à un réexamen complet de la Loi sur les jeunes contrevenants. Nous devons le faire.
Il ne faut pas toutefois traiter la criminalité de la manière simpliste que propose ce matin le Parti réformiste, car cela n'aura aucun effet sur le taux de criminalité au Canada. Cela ne règlera pas les problèmes auxquels les réformistes ont fait allusion, et ils ont soulevé de très graves questions.
Ils parlent constamment de ces cas individuels d'actes criminels commis par des jeunes et qui sont horribles, tout le monde en convient. Il s'agit de cas horribles, mais, à cause de tout le battage que les médias font à ce sujet, le public a l'impression que la criminalité chez les jeunes est plus répandue qu'elle ne l'est en réalité. Nous reconnaissons qu'il y a de graves problèmes, mais nous ne les réglerons pas en adoptant les solutions simplistes que le Parti réformiste propose.
Nous serons saisis d'un projet de loi d'ici quelques semaines et nous procéderons à une révision en profondeur de la question. Ce sera une étude sérieuse. Nous entendrons des particuliers et des organisations de toutes les régions du Canada.
C'est ainsi que nous procédons. Nous recueillons les points de vue de tout le monde, spécialistes, simples citoyens, agents de police, agents de correction, travailleurs sociaux, enseignants, psychologues et autres, en fait tous ceux que le sujet intéresse.
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C'est ainsi que nous allons procéder. Voilà comment nous devons faire, et j'invite le public à aider le Parlement, durant les travaux, à améliorer les choses, les lois et la situation en ce qui a trait à la criminalité chez les jeunes.
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M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai prêté une oreille attentive au discours de mon collègue d'en face. Nous savons tous que le député d'en face siège depuis longtemps au Parlement et que, depuis nombre d'années, il s'intéresse à notre système de justice pénale.
Comme mon collègue l'a mentionné, il préside actuellement le Comité de la justice de la Chambre, un organisme qui joue un rôle très important et des plus puissants à la Chambre des communes. Je tiens à signaler que le président du Comité de la justice professe une opinion particulière sur la criminalité, comme en témoigne le fait que nous avons appris récemment qu'il a exprimé l'avis que 15 ans était peut-être l'âge maximal que doit avoir quelqu'un qui va en prison pour un crime, quel que soit ce crime.
Le député d'en face se rappellera que, dans cette enceinte, le 7 octobre 1971, le solliciteur général est intervenu dans le but d'améliorer encore le processus d'incarcération, le régime carcéral, qui avait un besoin urgent de réforme. Le gouvernement de l'époque a changé d'approche, mettant l'accent, non plus sur la protection de la société, mais sur la réhabilitation des criminels, ce qui est une bonne chose. Selon le compte rendu des Débats, le solliciteur général d'alors a dit, et je cite: «À partir d'aujourd'hui, nous ferons passer la réhabilitation avant la protection de la société.» C'était le 7 octobre 1971. Il s'agissait d'un changement radical d'orientation du système correctionnel. C'était un changement radical d'attitude de la part du Parlement.
Après 23 ou 24 ans, nous pourrions peut-être revenir sur la question et nous dire: «Un instant! Il est sans doute bon de mettre un peu l'accent sur la réhabilitation, car nous savons combien c'est important pour empêcher les récidives. Mais force nous est aussi de protéger la société.»
À un moment donné, le député a posé la question suivante: «Vu que l'occasion s'offre à nous de présenter une motion qui fasse l'objet d'un vote, pourquoi en avons-nous conçu une qui soit si peu rigoureuse?» Si elle est si peu rigoureuse, c'est seulement parce qu'elle devait être la moins rigoureuse possible si nous voulions obtenir l'appui des libéraux, ceux-là mêmes qui sont responsables de ce gâchis. Nous voulions en finir le plus rapidement possible avec ce débat. Nous voulions que cette motion soit si peu rigoureuse qu'aucun député ne puisse se prononcer contre.
Comme nous nous trompions! S'il n'aime pas cette motion, le député d'en face, le président du Comité de la justice, veut-il bien préciser à la Chambre et aux Canadiens quelle est sa grande priorité? S'il devait présenter une motion aujourd'hui, quelle serait-elle?
M. Allmand: Monsieur le Président, je suis très heureux de répondre aux questions du député. Ce n'est pas une mince affaire qu'il propose à la Chambre aujourd'hui. C'est dur et tout à fait inefficace. Il inclut dans la Loi sur les jeunes contrevenants les jeunes de 10 et 11 ans qui, parce qu'ils n'ont pas l'âge de la puberté, devraient être visés par les lois assurant la protection des enfants et d'autres lois de compétence provinciale.
Nous nous opposons à la mesure qu'il propose parce qu'elle est trop dure, qu'elle ne serait pas efficace et qu'elle ne réglerait pas les problèmes dont il a parlé.
En ce qui a trait aux propos que le solliciteur général, M. Goyer, aurait tenus le 7 octobre 1971, tout ce que je peux dire, c'est que, lorsque j'ai été nommé solliciteur général, en 1972, j'ai adopté une position complètement à l'opposé de celle-là. S'il veut des citations, je peux lui en donner. J'ai répété à maintes reprises que notre but principal, notre priorité, au ministère du Solliciteur général, était de protéger le public. C'est la politique du ministère depuis 1972. S'il le désire, pas aujourd'hui, mais lorsqu'il le voudra, je pourrai lire, aux fins du compte rendu, des discours que j'ai prononcés à la Chambre ou à l'extérieur de la Chambre qui sont diamétralement opposés aux propos qu'il attribue à M. Goyer. Je ne sais pas si cette citation est complète ou non. Oublions donc les citations de M. Goyer. Je peux lui fournir de mes propres citations, ainsi que des citations de M. Fox et de M. Blais qui ont été tour à tour solliciteur général. Ni l'un ni l'autre n'accepterait cette citation qui a été reprise plusieurs fois à la Chambre.
Le député réformiste dit qu'il veut innover, au Parlement, et adopter une approche plus juste et plus honnête. Pourtant, aujourd'hui, le député m'a accusé d'avoir dit qu'il faudrait limiter à 15 ans la durée maximale des peines pour tous les criminels. Je n'ai jamais dit ça et je n'appuierais jamais une telle proposition. Cependant, je sais qu'il circule sur la colline une lettre disant à tous les députés que je suis favorable à la libération systématique des meurtriers après 15 ans. C'est complètement faux!
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Ce que j'ai dit, c'est que la date d'admissibilité à la libération conditionnelle, dans le cas du meurtre au premier degré, devrait être de 15 ans et que nous devrions supprimer l'article 745 du Code qui autorise la libération après 15 ans et que, dans le cas du meurtre au deuxième degré, elle devrait être de 10 ans. C'est pas mal différent de ce que le député a dit et de ce que la lettre dit. Le député devrait s'amender. Il devrait s'excuser d'avoir laissé entendre que j'avais dit qu'il faudrait libérer automatiquement tous les prisonniers, peu importe le crime commis, après 15 ans. Il a tort d'avoir dit cela.
Quand la libération était possible après 10 ans, moins de la moitié des détenus étaient libérés à ce moment-là. S'il regarde les statistiques, il verra que l'admissibilité à la libération conditionnelle ne signifie pas automatiquement la libération. En fait, le détenu doit prouver qu'il a été réhabilité et qu'il ne représente plus de danger pour le public. Ce n'est pas facile à faire.
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Le but de l'admissibilité à la libération conditionnelle est de veiller à ce que les personnes qui sont réellement réhabilitées et qui ne constituent pas un danger pour la société puissent réintégrer la société, se reprendre, prendre soin de leur famille et ne pas être prises en charge par l'État.
Lorsque vous me citez, citez-moi bien. Que vous ne soyez pas d'accord avec moi m'importe peu. Tout ce que je vous demande, c'est de ne pas déformer mes propos.
Le président suppléant (M. Kilger): Je regrette. Je sais que les députés ont des opinions très fermes sur ce sujet très important, mais je dois respecter le temps qui est alloué à chacun, afin de permettre au plus grand nombre possible de prendre la parole au cours de la journée. Nous reprenons donc le débat avec le député d'Athabasca.
M. McClelland: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je voudrais dire au député d'en face que je retire entièrement cette remarque qui portait atteinte à sa réputation. Je vous remercie de me permettre de mettre les choses au clair.
M. Allmand: J'en suis reconnaissant.
Le président suppléant (M. Kilger): Je remercie le député de sa collaboration.
M. David Chatters (Athabasca): Monsieur le Président, je vous remercie de me permettre de participer aujourd'hui au débat concernant la Loi sur les jeunes contrevenants.
Je voudrais dire d'abord que j'ai bien hâte, tout comme les députés de mon parti et mes électeurs, que le ministre de la Justice élabore et présente à la Chambre un projet de loi modificatif. À mon avis, il est déplorable que le processus d'examen approfondi et de recommandations dont l'orateur précédent a parlé n'ait pas eu lieu avant la rédaction de ce projet de loi, ce qui aurait réellement permis d'apporter des changements.
J'estime que la Loi sur les jeunes contrevenants tentait d'établir un équilibre entre l'approche socialiste de la Loi sur les délinquants juvéniles et la nécessité de protéger la société contre la criminalité.
Contrairement à certains membres de la société, je ne préconise pas l'abrogation de la Loi sur les jeunes contrevenants. Après les consultations que j'ai eues avec certaines personnes de la GRC et des Services correctionnels, je suis convaincu que la faute réside davantage dans l'application de la loi que dans la loi elle-même.
Peut-être que si la loi prévoyait des grilles de détermination des peines ou des peines minimales obligatoires et accordait moins de pouvoirs discrétionnaires aux tribunaux, cela aurait un effet plus dissuasif sur les jeunes contrevenants.
Je suis ici pour me faire le défenseur des modifications qu'il est proposé d'apporter à la Loi et qui visent les 20 p. 100 de jeunes délinquants pour lesquels cette Loi ne fonctionne pas. L'un des meilleurs aspects de l'ancienne loi sur les jeunes délinquants est qu'elle autorisait à poursuivre les personnes qui avaient contribué à l'infraction commise par un jeune. La remise en vigueur de cette mesure permettrait, comme avant, de faire porter la responsabilité sur les parents et d'empêcher que des criminels adultes, comme les infracteurs du milieu de la drogue ou les chefs de gang spécialisés dans le vol de voitures, ne se dissimulent derrière les jeunes.
Durant le débat d'aujourd'hui, on a cité tout un tas de statistiques, et je voudrais moi-même vous en citer quelques-unes. Selon Statistique Canada, en 1991, 22 p. 100 de toutes les accusations pour infraction aux lois fédérales ont été portées contre des jeunes. Sur 146 000 accusations portées contre les jeunes, 13 p. 100, soit 18 000, concernaient des crimes violents. Depuis 1986, le nombre d'accusations pour crimes violents a augmenté de 102 p. 100, bien que la population dans ce groupe d'âge ait diminué de 1,8 p. 100. Une augmentation de 102 p. 100! Je pense que nous faisons ici face à une crise.
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De tous les jeunes ayant fait l'objet d'une accusation, environ 53 p. 100 étaient âgés de plus de 16 ans et environ 46 p. 100 avaient un casier judiciaire. Sur ces 46 p. 100, 19 p. 100 avaient déjà fait l'objet d'au moins cinq condamnations. Ce sont les jeunes qui font partie de ces 19 p. 100 qui constituent le problème auquel nous voulons vraiment nous attaquer. Ce groupe semble défier la loi et se réfugier derrière la Charte des droits et libertés.
Les victimes d'infractions commises par les jeunes ont été négligées et exclues du processus judiciaire. Nous reconnaissons tous que les victimes et leurs familles souffrent énormément et se sentent violées, abandonnées et non protégées par le système de justice canadien.
Je voudrais simplement demander au dernier orateur du Bloc québécois et à tous les autres qui ont pris la parole aujourd'hui comment ils se sentiraient si leur propre famille était déchirée et détruite par un jeune récidiviste n'ayant aucun respect pour l'autorité.
Je crois que la récente création des comités de justice pour la jeunesse et des centres d'aide aux victimes dans certaines parties de ma circonscription en Alberta a fait une différence. Les victimes peuvent, pour la première fois, participer au processus. Je suis convaincu que d'autres centres d'aide aux victimes devraient être créés dans toutes les régions du pays; grâce à la déclaration de la victime, ces centres permettent aux victimes de se faire entendre et de donner leur avis sur la détermination de la peine de leurs agresseurs et cette possibilité améliore grandement la situation. En outre, les victimes devraient recevoir une compensation financière qui serait versée, dans toute la mesure du possible, par l'agresseur, le coupable. Le Parti réformiste croit donc qu'on devrait apporter les modifications suivantes à la Loi sur les jeunes contrevenants: que l'âge d'une personne pouvant être déclarée coupable d'une infraction soit ramené de 12 à 10 ans comme on le demande dans notre motion; que les contrevenants de 16 et 17 ans soient considérés comme des contrevenants adultes; que les contrevenants de 14 ou 15 ans qui commettent des crimes graves soient transférés aux tribunaux pour adultes; que les noms des contrevenants soient révélés au public et aux médias; que les parents soient tenus responsables lorsqu'il est possible de prouver qu'ils ont manqué à leur devoir; que les contrevenants détenus soient obligés de s'inscrire à des programmes de préparation à la vie adulte.
4258
Le ministre de la Justice et certains députés d'en face ont déclaré que pour résoudre le problème de la criminalité juvénile nous devons nous attaquer à la racine du mal, aux causes fondamentales, c'est-à-dire la pauvreté, les attitudes sociales permissives et l'absence de perspectives, selon la perception des jeunes. Je tiens certainement à dire que nous devons continuer à déployer des efforts pour résoudre ces problèmes, mais si nous devons y parvenir un jour, ce ne sera sûrement pas rapidement.
La société perd de plus en plus confiance dans notre système de justice et elle exige des changements immédiats. Ces demandes se font de plus en plus pressantes alors que nous sommes témoins de l'augmentation marquée des crimes violents, comme le meurtre récent à coups de couteau d'une jeune mère dans sa maison, à Edmonton, ou celui, toujours à coups de couteau, d'un jeune de 16 ans à Hull, la semaine dernière ou les coups de feu tirés d'une voiture en marche qu'on a vus dans tout le pays.
Il y a à peine deux jours, un jeune délinquant a volé une grosse semi-remorque pour faire une virée et a fini par tuer une mère et sa fille ici même, à Ottawa, en cherchant à échapper à la Police.
Je parie que pratiquement tous les députés dans cette enceinte aujourd'hui connaissent des cas où en faisant preuve d'une trop grande indulgence à l'égard de jeunes contrevenants récidivistes, on a permis à des jeunes incontrôlables de se moquer du système.
Je me souviens que, l'été dernier, ma circonscription a été témoin d'un exemple plutôt alarmant; un jeune récidiviste coupable de nombreux crimes contre les biens a été condamné à un certain nombre d'heures de travail communautaire. On l'a escorté jusqu'à un cimetière local où on l'a laissé avec une tondeuse et un bidon d'essence et on lui a demandé de couper le gazon. Lorsque le surveillant est revenu un peu plus tard pour vérifier où il en était, non seulement le jeune délinquant s'était enfui, mais il avait pris avec lui la tondeuse et le bidon d'essence et les avait vendus un peu plus loin. Un peu plus tard, selon la rumeur, on aurait aperçu ce jeune homme ligoté à l'arrière d'une camionnette; un inconnu excédé lui aurait fait franchir les limites de la ville. Il a récidivé et a fini par être traduit devant un tribunal pour adultes, mais il n'a jamais commis d'autres crimes dans cette localité.
Cet exemple montre non seulement de façon véritable le mépris que beaucoup de ces récidivistes ont pour le système, mais donne également un aperçu de ce qui pourrait arriver si les collectivités et les gens continuent de perdre confiance dans la capacité du système de justice pénale de protéger leur famille.
(1300)
Je suis persuadé que tous les députés seront d'accord pour dire que nous ne voulons pas que les gens se fassent justice eux-mêmes, c'est pourquoi j'exhorte le gouvernement à répondre à cette préoccupation publique croissante, comme en ont témoigné les énormes manifestations contre le système de justice pénale actuel qui ont eu lieu dans tout le pays. Je l'invite à agir rapidement afin de rétablir la confiance de la population dans ce système tout à fait essentiel.
[Français]
M. André Caron (Jonquière): Monsieur le Président, j'ai bien entendu l'exposé de mon collègue d'Athabasca et je pense que c'est un exposé qui est fait avec sincérité et honnêteté.
Je remarque toutefois que les exemples qui sont donnés ressortent de cas particuliers, et le député demandait quelle serait la réaction des députés du Bloc ou des députés du gouvernement si leur enfant avait à vivre des situations particulièrement pénibles provoquées par des jeunes contrevenants.
C'est sûr que la réaction en serait une de révolte, une réaction forte et axée sur la punition, le ressentiment. Mais, il faut quand même noter qu'en tant que députés du Parlement canadien, nous avons quand même la responsabilité de regarder peut-être les choses en perspective et un petit peu plus froidement.
Je remarque avec intérêt que le député d'Athabasca a souligné qu'il fallait attaquer les racines du problème, qui sont la pauvreté, la drogue, la mauvaise scolarisation. C'est sûr que les réactions souvent excessives ou les crimes commis par de jeunes contrevenants peuvent s'expliquer par un contexte sociologique particulier. Mais j'ai particulièrement aimé ce qu'a dit le député d'Athabasca, au début de son discours.
Il a laissé entendre que le problème n'est peut-être pas la loi, mais l'administration de la loi. J'ai bien l'impression que si je regarde la loi et si je regarde, souvent, ce que les juges en font, j'ai l'impression qu'elle pourrait être, dans certains cas, appliquée avec plus de sévérité.
Par exemple, à moins que je ne me trompe, des jeunes contrevenants peuvent être traduits devant des tribunaux pour adultes à partir de la loi actuelle. Alors, j'aimerais poser la question suivante au député d'Athabasca: Est-ce qu'il ne croit pas que si les juges, ceux qui font appliquer la loi, les gens, aussi, qui l'appliquent dans les prisons, ceux qui s'occupent des questions de libération conditionnelle, si ces gens-là avaient un petit peu plus d'attention en ce qui concerne certains et appliquaient la loi avec plus de sévérité, peut-être qu'on ne serait pas obligé d'amender la loi actuelle?
[Traduction]
M. Chatters: Monsieur le Président, il semblerait que le député et moi soyons en accord sur presque tout ce qu'il a dit.
Je suis tout à fait d'accord qu'appliquer plus vigoureusement les règlements actuels serait déjà un pas de géant dans la bonne direction. Cela dit, il est certain qu'il y a un petit pourcentage de contrevenants pour lesquels la loi actuelle est inefficace. D'après les chiffres dont je dispose, il s'agit de 25 p. 100 de contrevenants qui récidivent. Certains récidivent plusieurs fois, et il est clair que, dans leur cas, la loi est inefficace. Il faut doter le système de moyens dissuasifs.
Mais ne perdons pas le sens des proportions. La loi actuelle fonctionne pour 70 à 75 p. 100 des contrevenants qui sont traduits en justice. J'espère que nous n'allons pas complètement nous défaire de la loi, et que nous allons y apporter des modifications qui nous permettront de traiter sévèrement le pourcentage de contrevenants pour lesquels la loi fonctionne.
4259
Je n'irai sans doute pas aussi loin que certains de mes collègues ou de mes électeurs qui ont approuvé le traitement infligé à ce jeune de Singapour qui s'est fait prendre en train de barbouiller des voitures de graffitis et qui a été condamné à une peine jugée sévère selon les normes canadiennes. En tout cas, je suis sûr qu'il n'est pas prêt à recommencer là-bas.
(1305)
M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Je vous remercie beaucoup, monsieur le Président, et je remercie la Chambre de me donner l'occasion de prendre la parole dans l'important débat que nous tenons aujourd'hui sur ce sujet chaud.
En réalité, nous parlons aujourd'hui de la confiance des Canadiens envers leurs assemblées législatives pour se tenir au fait des événements et réagir en conséquence. Par exemple, les parlementaires à Ottawa ne peuvent pas prétendre ignorer que la population s'indigne au sujet des dispositions de la Loi sur les jeunes contrevenants, ou de la criminalité en général, quand cela provoque des manifestations de 5 000 personnes à Edmonton et à Calgary.
Le débat d'aujourd'hui porte sur une facette seulement de la Loi sur les jeunes contrevenants. Cependant, ce dont il est vraiment question, c'est de savoir si les Canadiens se sentent en sécurité chez eux, si le droit à la sécurité est respecté, si les Canadiens ont le sentiment que leurs biens sont protégés, s'ils peuvent quitter la maison en sachant qu'elle sera encore là à leur retour, avec son contenu.
Nous avons tous, aux dernières élections, frappé aux portes, dans tous les quartiers, et rencontré des gens qui vivaient en otage dans leur propre maison et faisaient des paiements mensuels à des compagnies de systèmes de sécurité. Pourquoi? Parce que des délinquants peuvent entrer chez eux par effraction, en ressortir et aller tranquillement s'introduire dans une autre sans en subir la moindre conséquence, s'ils ont moins d'un certain âge.
Les statistiques à notre disposition ne montrent pas un taux très élevé de criminalité, pour ce qui est du nombre d'arrestations et de condamnations. Parlons plutôt du nombre de crimes commis et non du nombre de condamnations. Parlons de ceux qui ont été reconnus coupables d'une ou deux infractions, mais qui en ont peut-être commis 5, 15 ou 20.
Les statistiques ne permettent pas toujours de mesurer le sentiment de sécurité qu'ont les gens, dans leur maison. Je pense qu'on en aurait une meilleure mesure en examinant la multiplication des organismes privés de protection, au Canada, et la croissance de l'industrie spécialisée dans la protection des gens, au foyer et au travail.
Nous devons préserver un certain équilibre dans ce débat. À mesure que progressera le débat, au cours des semaines et des mois à venir, quand le gouvernement présentera son projet de loi sur les jeunes contrevenants, il faudra préserver un équilibre. Pour ce faire, nous devons savoir où nous en sommes, et avoir une idée de ce que nous voulons obtenir.
Je vais lire la motion, pour ceux qui viendraient tout juste d'ouvrir leur poste de télévision.
Que la Chambre exhorte le gouvernement à réagir à l'évident manque de confiance des Canadiens dans la Loi sur les jeunes contrevenants et recommande que la définition d'«adolescent» au paragraphe 2(1) de la Loi soit modifiée pour désigner toute personne d'au moins dix ans mais qui n'a pas atteint l'âge de seize ans.Cela signifie que l'âge limite serait abaissé de deux ans. Comme d'autres députés l'ont mentionné, cela garantirait d'une part la possibilité d'imposer des peines plus systématiquement et, d'autre part, que les délinquants puissent être pris en charge à un plus jeune âge.
Cette motion répond à une préoccupation très évidente, dans ma circonscription. Entre 80 et 90 p. 100 de mes électeurs réclament un affermissement de la Loi sur les jeunes contrevenants et souhaitent que les tribunaux imposent des peines plus sévères.
Nous discutons à la Chambre des lois sur le contrôle des armes à feu et des possibilités de changer les règles à cet égard. Pourtant, nos tribunaux ne font même pas respecter les règles déjà en vigueur. C'est là le principal problème, et la principale cause de la criminalité qui afflige notre société, de nos jours.
Qu'on fasse quoi que ce soit au sujet de la criminalité, qu'il s'agisse des jeunes contrevenants ou des délinquants adultes, on doit être sûr de trois choses. Ces trois certitudes s'offrent à l'enfant fautif face à un parent responsable et efficace, soit celle d'être identifié, celle d'être jugé rapidement et équitablement, et celle d'être puni.
(1310)
D'après moi, bien des Canadiens ont l'impression que notre système de justice pénale, surtout dans le cas des jeunes contrevenants, n'offre aucune de ces certitudes, qui assureraient pourtant son efficacité.
Quand nous sommes victimes d'un cambriolage, par exemple, la Police répond à notre appel-même si parfois elle y met du temps-et rédige un procès-verbal que nous présentons à la compagnie d'assurances, et c'est tout. Encore une fois, nous sommes pris en otages. Nous devons assumer la hausse de nos primes d'assurance et accepter que nos maisons puissent encore être cambriolées. La certitude d'un jugement rapide et équitable n'existe pas, car combien de ces effractions sont portées devant un tribunal? Quant à la certitude d'une punition, n'en parlons pas.
Notre système de justice pénale, surtout en ce qui concerne les jeunes contrevenants, n'offre aucune des certitudes qu'il faudrait pour provoquer un changement d'attitude. Ce sont pourtant des certitudes que nous avons dans nos familles, lorsque nous éduquons nos enfants.
Lorsqu'un enfant endommage la maison, est-ce que le parent responsable reste indifférent? Est-ce qu'il n'identifie pas le coupable? Est-ce qu'il ne procède pas à un jugement rapide et équitable? Est-ce qu'il n'impose pas une punition? Les réponses sont évidentes. Si nous assumons une telle responsabilité sur le plan personnel, pourquoi, à l'échelle du pays, nous en lavons-nous les mains et disons-nous que l'enfant en question manque de sécurité et qu'il peut donc se permettre de traiter la société comme il l'entend. C'est la société qui est à blâmer.
4260
Si l'on poursuit ce raisonnement, qu'il soit logique ou non, on en arrive à dire, par exemple, qu'un enfant qui naît et grandit dans un milieu modeste devient naturellement un contrevenant, alors que celui qui naît dans un milieu privilégié ne s'attire jamais d'ennuis. Nous savons fort bien que ce n'est pas le cas. Les contrevenants viennent de tous les milieux, peu importe la race ou la langue. Ce sont les valeurs de la société qui comptent, autrement dit, ce que nous, en tant que société, avons décidé comme étant acceptable ou inacceptable.
Dans l'intervention qu'il vient de faire, le député s'est dit en désaccord avec le fait que ce jeune, qui était à Singapour et qui a violé la loi du pays, ait eu à subir le châtiment habituellement imposé là-bas pour le crime qu'il a commis, c'est-à-dire le fouet.
Sauf erreur, le taux de criminalité à Singapour est nettement inférieur au nôtre. Je me demande si les gens se sentent mieux en sécurité au centre-ville d'Ottawa, de Toronto, de Vancouver ou d'Edmonton ou au centre-ville de Singapour.
Je ne dis pas que nous devons pousser jusqu'à un extrême ou l'autre, mais je me souviens d'avoir eu, moi-même, des démêlés avec la justice. Ce n'est pas d'hier que je m'intéresse à la réforme. J'ai fréquenté une école de réforme vers l'âge de 11 ans. Je participais à un camp avec d'autres garçons et nous avons décidé que nous en avions assez. Nous avons donc fait une fugue. Nous devions avoir 11 ou 12 ans à l'époque. Notre escapade a duré trois ou quatre jours.
Aujourd'hui, je peux m'imaginer toute l'angoisse que nous avons fait subir à notre entourage. Je serais fou d'inquiétude s'il venait à l'idée d'un de mes enfants de faire la même chose.
De toute façon, nous avons mangé ce que nous avons trouvé. Si nous avions été futés, nous aurions sûrement trouvé le moyen de voler une automobile, mais nous n'y sommes pas parvenus, ce qui ne veut pas dire que nous n'avons pas essayé. Nous commettions des méfaits. Du moins, c'est l'expression qu'on utiliserait aujourd'hui pour décrire nos actions.
Je n'oublierai jamais le jour où, pendant que je déambulais dans la rue, la Police m'a mis la main au collet. Ce policier serait probablement arrêté aujourd'hui pour le geste qu'il a fait. Je marchais tranquillement et, tout à coup, le policier m'a mis la main au collet, m'a soulevé de terre et m'a dit de monter dans l'auto-patrouille. Encore aujourd'hui, j'ai du mal à avaler mes Shreddies, parce c'est ce qu'on nous servait à la maison de détention. Tout cela pour vous dire que les jeunes qui ont à maille à partir avec la justice ne tournent pas tous mal. Certains peuvent même devenir des députés, ce qui est peut-être logique. Je parle pour moi-même, bien sûr, et non pour les députés d'en face.
(1315)
Que devons-nous faire, en tant que parlementaires, pour changer cette perception non seulement de la criminalité chez les jeunes Canadiens, mais de la criminalité en général? Il ne s'agit pas simplement de modifier la loi ou de la faire appliquer. Il s'agit plutôt des valeurs qui sont chères à notre société, notamment des valeurs familiales et du sentiment d'appartenance à une collectivité. Il s'agit d'assumer nos responsabilités personnelles, de veiller à ce que nos dirigeants nous montrent la voie à suivre et à ce que les gens responsables prennent leurs responsabilités.
Aujourd'hui, certains orateurs nous ont dit que les jeunes étaient dissipés en classe et faisaient ce qu'ils voulaient à l'école. Les enseignants aiment-ils cela? J'imagine que non. Les enseignants vous diront cependant qu'ils ont les mains liées. Nous les avons menottés et ils ne peuvent rien faire. Ils ne peuvent pas lever la main sur les enfants. Ils doivent se contenter de dire: «Tu es un mauvais garçon, une mauvaise petite fille. Tu n'aurais pas dû faire cela.» Cela ne donnera pas de grands résultats.
Nous devons modifier nos valeurs et faire de la responsabilité personnelle une priorité chez tous les contrevenants, jeunes et vieux.
[Français]
M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, le député d'Edmonton-Sud-Ouest s'est permis un témoignage qui, à mon avis, démontre qu'un jeune qui commet un délit mineur ou une infraction peut se redresser, peut devenir un excellent citoyen, et non seulement il le peut, mais on doit tout faire pour que cela se produise.
Ma collègue, députée de Saint-Hubert, nous a démontré ce matin que les crimes commis par les jeunes, par rapport à l'ensemble des crimes, et peu importe la gravité, étaient de l'ordre de 10 p. 100. Cela veut donc dire que 90 p. 100 des crimes commis sont le fait d'adultes. Je pense qu'un point très important qu'il ne faut jamais perdre de vue est que la criminalité est surtout exercée par les adultes et souvent de façon organisée.
Étant porte-parole du Bloc québécois pour les jeunes, je pense qu'il faut laisser un message très positif à notre jeunesse, un message de répression. Des chiffres fournis par le service de la bibliothèque nous indiquent que malgré le renforcement de policiers ou d'agents de sécurité, au cours des 30 dernières années, on n'a pas noté une plus grande efficacité.
Tantôt, je rapportais les propos de ma collègue de Saint-Hubert qui disait qu'au Québec il y avait peu de protestation, peu de mouvements, pas de mobilisation pour exiger des changements majeurs à la loi actuelle. Cependant, en écoutant les députés du Parti réformiste, on peut comprendre que ce n'est pas la même chose qui se passe ailleurs.
J'aimerais demander à l'honorable député s'il peut nous donner des statistiques ou des résultats de sondages de sa région ou encore des statistiques de taux de criminalité pour justifier son propre positionnement et celui de son parti par rapport à cette loi parce qu'on avoue que nous, du Québec, ne comprenons pas.
[Traduction]
M. McClelland: Monsieur le Président, au cours de mon exposé, j'ai dit quelques mots au sujet de la valeur des statistiques, de ce qu'on peut ou de ce qu'on ne peut pas leur faire dire. Les statistiques qu'on nous a fournies au cours de cette séance d'information portaient sur le nombre d'accusations et de condamnations, mais n'avaient rien à voir avec le nombre de délits et d'infractions. Si on inclut le nombre de délits et d'effractions, cela fera augmenter considérablement les statistiques.
4261
(1320)
Les statistiques que j'ai citées découlent de sondages qui ont été menés dans ma circonscription auprès de gens qui sont particulièrement touchés par la criminalité.
Il est absolument essentiel que nous n'en venions pas au cours de ce débat à condamner en bloc tous les jeunes, car tous ne sont pas mauvais. La vaste majorité d'entre eux sont merveilleux. La vaste majorité nous sont une source d'inspiration. Ils viennent visiter le Parlement et nous les rencontrons. Il faut donc faire ici très attention de ne pas laisser entendre un instant que tous les jeunes sont mauvais.
Toutefois, il faut voir les choses telles qu'elles sont et non telles qu'on aimerait qu'elles soient. Il arrive que des jeunes se conduisent d'une manière telle qu'ils ont besoin d'un traitement spécial, qu'ils ont besoin que la société s'occupe d'eux ou se protège contre eux.
À mon avis, il faut distinguer les gens qui commettent une erreur de ceux qui répètent toujours la même erreur et n'apprennent jamais de leurs erreurs. Tirer une leçon d'une erreur qu'on a commise, cela s'appelle prendre de l'expérience. Mais répéter sans cesse la même erreur sans en tirer la moindre leçon, cela révèle un manque de moralité. Il faut distinguer les gens qui ont besoin d'un coup de pouce pour trouver le droit chemin de ceux qui sont un danger pour la société. Il faut faire bien attention de ne pas mettre tout le monde dans le même panier.
Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Pierrefonds-Dollard.
J'interviens aujourd'hui pour dire ce que je pense de la motion à l'étude concernant la Loi sur les jeunes contrevenants. Le gouvernement est très conscient des préoccupations des Canadiens à l'égard de la criminalité juvénile.
Pendant la campagne électorale, nous avons insisté sur la nécessité de réformer la Loi sur les jeunes contrevenants. Depuis les élections, le ministre de la Justice a manifesté à plusieurs reprises son intention de procéder avec célérité pour répondre à certaines des principales préoccupations à cet égard en présentant très bientôt un projet de loi modificatif.
Le ministre s'est en outre déclaré résolu à faire réviser la loi toute entière. Le Comité permanent de la justice et des affaires juridiques entreprendra cette tâche au cours de l'année qui vient.
Comme je siège au Comité de la justice, je suis très heureuse de faire partie du comité qui sera chargé de revoir la Loi sur les jeunes contrevenants. Cette loi a maintenant dix ans. Il se trouve que je venais de terminer mes études de droit à l'Université de la Saskatchewan lorsque le projet de loi concernant les jeunes contrevenants a été présenté. Les avocats de notre promotion ont été parmi les premiers à faire une étude très approfondie de ce qui était alors une nouvelle loi. Je me réjouis donc de faire partie du groupe qui révisera la loi après dix années d'application.
Un des aspects du travail du Comité consistera à écouter les points de vue de tous les Canadiens, à les écouter exprimer des préoccupations qui sont certainement très réelles.
La Loi sur les jeunes contrevenants crée un système judiciaire séparé pour les adolescents. Elle s'inspire de principes particuliers qui visent à protéger la société tout en tenant compte des besoins spéciaux des jeunes délinquants.
Elle établit un équilibre entre la nécessité d'assurer la protection du public et celle de répondre aux besoins des jeunes qui violent la loi. Nous ne devrions pas oublier que l'intérêt de la société englobe l'objectif de la réadaptation des jeunes aussi bien que celui de la protection de la société elle-même.
L'intérêt de la société impose également qu'on permette aux jeunes de parvenir à la maturité et, comme le député vient de le dire, de tirer la leçon de leurs erreurs; voilà pourquoi il faut un système judiciaire séparé pour les jeunes. Nous croyons que la protection de la société comporte deux obligations: empêcher les jeunes de commettre des actes criminels et aider ceux qui ont commis des crimes à redevenir des citoyens respectueux des lois.
En tant que parent, je souscris au principe selon lequel les jeunes sont responsables de leurs actes. Je sais bien cependant que les jeunes n'ont pas le même degré de responsabilité que les adultes car si c'était le cas, je n'aurais pas besoin d'agir comme un parent.
En raison de leur état de dépendance et de leur niveau de développement et de maturité, les jeunes ont des besoins spéciaux. Ils ont notamment besoin de conseils, d'aide, de surveillance, de discipline et d'orientation. L'utilité de la Loi sur les jeunes contrevenants pour les jeunes ayant commis des infractions très graves est toutefois devenue une importante source de préoccupation des Canadiens.
(1325)
Il y a un puissant lobby populaire qui estime que des peines plus sévères protégeraient mieux la population, qu'elles seraient généralement dissuasives et qu'elles réaffirmeraient nos principes fondamentaux concernant le caractère sacré de la vie et la condamnation du meurtre par la société. Les Canadiens doivent avoir confiance dans les lois qui visent à les protéger.
L'une des grandes préoccupations de la population concerne l'âge minimum de la responsabilité criminelle, qui est de 12 ans en vertu de la loi actuelle. Bon nombre voudraient qu'il soit ramené à 10 ans. L'ancienne loi, la Loi sur les jeunes délinquants, fixait à sept ans l'âge minimum de la responsabilité criminelle.
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L'idée de ramener l'âge de la responsabilité criminelle à 10 ans n'est pas nouvelle. Lors des consultations et des débats qui ont mené à l'adoption de la Loi sur les jeunes contrevenants, certains observateurs ont préconisé, à peu près avec les mêmes arguments que ceux qu'on entend aujourd'hui, que cet âge soit ramené à 10 ans. D'autres ont dit qu'il devrait être de 14 ans. On a finalement décidé de le fixer à 12 ans, en partant de l'hypothèse que, d'une manière générale, les enfants de moins de 12 ans n'ont pas les connaissances ni l'expérience nécessaires pour bien comprendre la nature et les conséquences de leurs gestes, sans compter qu'ils n'ont pas la capacité de participer d'une manière significative au procès dont ils font l'objet. Évidemment, ce sont là des conditions fondamentales à la tenue d'un procès juste et équitable au criminel.
La population s'inquiète aussi de l'âge maximal concernant la responsabilité criminelle, à l'autre extrémité de la fourchette d'âges assujettis à la Loi sur les jeunes contrevenants. Certains ont proposé de ramener l'âge maximal à 16 ans, aux termes de la Loi sur les jeunes contrevenants. La question de la limite supérieure d'âge a aussi été longuement discutée au cours du débat sur la Loi sur les jeunes contrevenants en 1982. On a inclus les jeunes de 16 et 17 ans parce que l'on a jugé que c'était dans l'intérêt des jeunes et de la société canadienne.
Dans la grande majorité des cas, surtout pour les jeunes qui commettent les infractions les moins graves, la limite d'âge actuelle donne le temps de vieillir à l'abri de l'influence des criminels adultes endurcis. Je crois que c'est un argument qu'a présenté le député d'Edmonton.
Le gouvernement tient à mettre en place un système judiciaire pour les jeunes qui protège vraiment nos collectivités, qui tient les jeunes responsables de leurs actes illégaux, mais qui tient également compte des besoins des jeunes qui ont un comportement antisocial, donc, qui aide à leur réhabilitation.
Les limites d'âge supérieure et inférieure constituent un élément très important de la loi et elles correspondent aux convictions des Canadiens. Par conséquent, la question sera examinée dans le contexte d'un examen global du système judiciaire pour les jeunes. Tous pourront exprimer leur point de vue, qui sera pris en considération dans le cadre d'un examen global de la loi.
Une autre préoccupation de la population a trait à la publication des noms des jeunes délinquants. Certains préconisent la publication des noms des jeunes qui ont ou sont réputés avoir commis un acte criminel lorsqu'ils ont déjà été reconnus coupables d'au moins deux actes criminels distincts. La Loi sur les jeunes contrevenants actuelle permet la divulgation de certains détails d'un crime ou d'un procès. Cette loi permet une large couverture des procès des jeunes, ainsi que la publication de renseignements sur les tendances, les profils des jeunes et les programmes qui donnent de bons résultats.
Cependant, il importe de faire la distinction entre les impressions et la réalité. L'importance qu'on accorde, particulièrement dans les médias, aux cas extrêmes ou exceptionnels crée une fausse image de la criminalité chez les jeunes et de la façon dont elle est traitée par notre système de justice. À mon avis, il est donc important de comprendre qu'il y a des raisons valables d'interdire la publication de renseignements pouvant permettre d'identifier un jeune accusé, notamment pour protéger les frères et soeurs de l'accusé qui pourraient être mis à l'écart par la société, pour encourager le jeune contrevenant à se conformer à la décision rendue et à ne plus commettre de crimes et pour empêcher que des barrières ne se dressent et ne nuisent au jeune contrevenant qui veut reprendre le droit chemin en se trouvant un emploi ou en poursuivant ses études.
Nous ne devons pas oublier non plus que les familles des jeunes contrevenants font souvent partie du processus de réinsertion sociale et que l'interdiction de dévoiler l'identité du jeune peut les aider dans ce rôle, ce qui est avantageux pour le jeune, pour la famille et pour la collectivité.
Dans le contexte de la sécurité publique, la divulgation de l'identité d'un jeune contrevenant peut créer un faux sentiment de sécurité, car les médias ne peuvent pas rapporter tous les cas et ne rejoignent pas nécessairement l'ensemble de la population.
La protection de la société est aussi un facteur à considérer. Dans sa réponse au discours du Trône, le ministre de la Justice a dit qu'il était en faveur d'un partage accru des renseignements concernant les jeunes contrevenants avec les personnes qui ont besoin de ces renseignements pour des raisons de sécurité. Il a également dit qu'il avait l'intention d'inclure des dispositions sur le partage des renseignements dans le projet de loi qu'il présentera en juin.
(1330)
Je voudrais commenter rapidement une importante proposition qui a été faite pendant la campagne électorale, soit d'accroître le maximum de la peine que peuvent imposer les tribunaux pour adolescents dans les cas de meurtres au premier et au deuxième degrés.
Dans le projet de loi qu'il déposera en juin, le ministre de la Justice formulera des propositions visant à améliorer le régime de justice pour les jeunes et à favoriser des mesures plus efficaces et efficientes pour aider les contrevenants tout en protégeant le public.
Dans bien des cas, le comportement criminel des jeunes qui comparaissent devant les tribunaux pour adolescents est un fait isolé et sans gravité. Dans un faible pourcentage de cas, cependant, il s'inscrit dans une série de difficultés plus sérieuses. Il est essentiel de comprendre les besoins particuliers de ces jeunes si nous voulons servir leurs intérêts et aussi les intérêts à long terme de la société.
La Loi canadienne sur les jeunes contrevenants a été reconnue par l'ONU comme un modèle en matière de justice pour les jeunes. Elle témoigne d'audace en délimitant les paramètres du droit pénal pour les jeunes et ne permettant le recours aux sanctions du droit pénal que pour les comportements clairement criminels.
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La loi a toutefois établi nettement qu'il faut faire une distinction entre les adolescents et les adultes parce que les besoins ne sont pas les mêmes et que l'intervention doit par conséquent être différente. Cette distinction ne doit toutefois pas faire oublier le principe que la société a le droit d'être protégée de la criminalité des jeunes.
Selon l'interprétation des tribunaux canadiens, les intérêts de la société comprennent à la fois la protection du public et la réadaptation des contrevenants. Cette interprétation fait que la tâche du système de justice pour les jeunes est très lourde, puisqu'il faut donner satisfaction sur les deux plans. L'ampleur de la tâche est particulièrement évidente dans les cas où des jeunes se livrent à des crimes violents ou récidivent de manière chronique. Ces groupes de contrevenants font ressortir la nature pluridimensionnelle du défi que doivent relever les tribunaux pour les jeunes et l'importance de celui que nous avons nous-mêmes à relever.
M. Leon E. Benoit (Végréville): Monsieur le Président, en parlant de notre motion qui vise à ramener de 12 à 10 ans l'âge minimum prévu par la loi, la députée a dit que bien des gens étaient favorables à cette proposition. Combien de gens?
S'il se présentait un cas comme celui qui est arrivé en Angleterre où deux jeunes de 10 ans ont tué un enfant de 2 ou 3 ans, que faudrait-il faire d'après elle pour traiter un cas pareil dans notre société en vertu de nos lois?
Mme Sheridan: Monsieur le Président, je crois que j'ai dit qu'avant l'adoption du projet de loi initial, on avait discuté à la Chambre s'il fallait fixer l'âge à 10, 12 ou 14 ans, ou à un autre âge. Le consensus qui s'est dégagé, c'est que l'âge de 12 ans répondait mieux aux besoins. Il m'est donc impossible de dire avec exactitude combien de députés étaient en faveur de l'âge de 10 ans, si j'ai bien compris la question du député.
Ensuite, en ce qui concerne les événements tragiques en Angleterre où des enfants de cet âge ont brutalement tué un garçonnet, je voudrais bien pouvoir dire au député qu'en renforçant la Loi sur les jeunes contrevenants on peut prévenir ce genre de chose. Mais ce n'est pas vrai. Il est impossible de prévenir ce genre de comportement horrible par des moyens législatifs.
Ce que nous devons garder à l'esprit, c'est que notre système judiciaire juvénile a deux fonctions: il doit d'abord protéger la société des jeunes contrevenants récidivistes, mais aussi déterminer les causes profondes des comportements comme celui des jeunes impliqués dans cette affaire tragique en Grande-Bretagne. Ce n'est qu'en abordant la question d'une manière globale qu'on pourra trouver des solutions à ce genre de problème.
M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, je me demandais si, étant donné que la députée est membre du Comité de la justice, elle n'admettrait pas que, lorsque cette affaire aura été renvoyée au Comité, il est très peu vraisemblable qu'il en découle des recommandations à tout le moins avant 1995.
D'après les quelques observations formulées un peu plus tôt au cours de ce débat, il semblerait que tout est parfait au Québec aux yeux des bloquistes et qu'il s'agit simplement d'un thème régional. Quant aux députés de l'Ouest, nous n'avons peut-être pas cette barrière de communication.
Puisqu'elle a consulté ses électeurs à ce sujet, la députée conviendrait-elle qu'ils sont aussi préoccupés que les miens? En accomplissant une chose très simple, qui va se produire en toute logique, ne conviendrait-elle pas qu'il s'agirait là d'un signe très positif pour la population canadienne, pour ses électeurs, si la Chambre faisait preuve de sérieux dans ce dossier?
(1335)
Mme Sheridan: Monsieur le Président, je pense que la population canadienne se rendra compte que l'actuel gouvernement est tout à fait sérieux à ce propos du seul fait que le ministre de la Justice, comme il l'avait promis au départ, a réagi rapidement dans ce dossier, car il va proposer des modifications au mois de juin. Il s'y est engagé dès le départ. De plus, toute la loi va être renvoyée au comité parlementaire, qui est non sectaire, pour qu'il procède à un examen approfondi qui portera sur ses avantages et ses inconvénients, ainsi que sur les améliorations possibles.
Je sais que le député d'en face aime bien nous exposer ses vues sur la façon dont nous devrions écouter les électeurs, que ce soit par la voie de référendums ou autrement. Or, la meilleure façon, c'est encore d'assurer le maintien du système des comités, qui permet aux Canadiens, à tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin à notre système de justice pénale, de faire connaître leurs points de vue. La population canadienne se réjouira de savoir que le ministre de la Justice s'engage à ouvrir un processus qui lui donnera la possibilité de formuler ses revendications et qui sera suivi de mesures.
[Français]
M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard): Monsieur le Président, la Loi sur les jeunes contrevenants est une loi d'exception, parce qu'elle n'est pas générale et ne s'applique pas à tout le monde.
C'est une loi d'exception, parce qu'elle crée des régimes différents pour les jeunes, c'est une loi d'exception, parce qu'elle a un esprit et une philosophie uniques. Enfin, c'est une loi exceptionnelle parce qu'elle tient compte des besoins particuliers de nos jeunes.
La Loi sur les jeunes contrevenants prévoit les conditions de l'équilibre entre la protection de la société et les besoins de l'adolescent. Il faut se rappeler que l'intérêt de la société est autant la réhabilitation des jeunes que la protection de la société elle-même. L'intérêt de la société est aussi de permettre à un jeune d'atteindre la maturité nécessaire pour faire face à la vie et à la réalité.
La protection de la société, quant à elle, signifie pour nous deux choses: l'obligation d'empêcher l'adolescent de commettre des infractions criminelles et l'obligation de subvenir à ses besoins d'aide. Bien entendu, les jeunes sont responsables de
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leurs actes, mais ils ne peuvent être assimilés aux adultes quant à leur degré de responsabilité.
À cause de leur état de dépendance, de leur degré de développement et de maturité, ils ont des besoins spéciaux qui exigent des conseils et du soutien, mais aussi de la surveillance, de la discipline et de l'encadrement. Le traitement des jeunes en difficulté est une mesure que l'on ne doit pas simplement tolérer, mais que l'on doit rechercher, approuver et soutenir.
Il n'est cependant pas facile, monsieur le Président, de résoudre le problème de la rééducation des jeunes. Il est évident que notre loi actuelle présente des faiblesses: de tragiques incidents récemment ont démontré qu'elle doit être améliorée. Les critiques concernant la loi sont de plus en plus nombreuses et intenses. De nombreux facteurs contribuent au manque général de confiance, en particulier la méconnaissance du phénomène de la criminalité chez les jeunes et des dispositions de la loi.
Le public ne sait pas, pour ne donner qu'un exemple, que le tribunal pour adolescents peut infliger des peines aussi longues que le tribunal pour adultes, pour une infraction semblable, et qu'il condamne en proportion beaucoup plus de contrevenants que ne le fait le tribunal pour adultes, et ce, relativement à presque tous les types d'infraction.
Mais, il y a malgré tout, dans la population, une inquiétude bien réelle causée par l'escalade de la violence chez les jeunes. On ne peut parler de violence chez les jeunes sans tenir compte du contexte social et culturel plus large dans lequel elle survient. La pauvreté, le peu d'estime de soi, le chômage, le peu d'instruction, l'isolement, le manque de logements décents et le fait qu'un jeune ait été exposé très tôt aux mauvais traitements, souvent dans sa propre famille, sont des facteurs qui contribuent, dans bien des cas, à rendre un jeune violent.
(1340)
Le gouvernement a promis, tout au long de la campagne électorale, de procéder rapidement à la réforme de la loi. Il a adopté une approche globale et équilibrée de la criminalité chez les jeunes, avec plusieurs idées dominantes, dont la reconnaissance de l'importance de la prévention des problèmes particuliers de la jeunesse autochtone et la défense d'un système de justice distinct mais renforcé pour tous les jeunes, sauf les plus dangereux.
Afin de donner la meilleure orientation à la réforme, le gouvernement tient compte d'un certain nombre de facteurs qui sont jugés importants. Il est évident que le système de justice pour les jeunes ne peut être évalué en faisant abstraction des autres systèmes, c'est-à-dire la protection de l'enfance, la santé et l'éducation qui sont essentielles à la prévention de la criminalité chez les jeunes et qui entrent en jeu avec le système de justice lorsqu'un adolescent commet une infraction.
La confiance du public doit renaître, mais le gouvernement fédéral n'y arrivera pas seul. Il est inutile de blâmer aveuglément la loi sans jeter un regard sur les faiblesses qui accompagnent son application et sur les insuffisances des services.
[Traduction]
Le ministre de la Justice a récemment annoncé la stratégie retenue pour effectuer la refonte de la Loi sur les jeunes contrevenants. La réforme du système de justice se fera en deux étapes: premièrement, le dépôt d'un projet de loi en juin et, deuxièmement, une étude parlementaire qui portera sur la nature et l'étendue de la criminalité chez les jeunes.
L'étude portera également sur les limites d'âge, le rôle des parents et les solutions autres que pénales. En fait, l'ancien système de justice applicable aux jeunes fera l'objet d'une révision. L'étude examinera des moyens que le gouvernement pourrait prendre pour mieux prévenir la criminalité chez les enfants et les jeunes et pour favoriser des solutions intégrées à leurs problèmes dans les domaines de la santé, de l'immigration et de l'emploi.
Le projet de loi portera principalement sur l'homicide et d'autres infractions criminelles causant des lésions corporelles. On envisage également d'apporter d'autres modifications à la loi pour la rendre plus efficace dans les cas d'activités criminelles impliquant des jeunes. Les modifications pourront porter sur les dispositions de la loi concernant les tribunaux, la détention et la preuve.
Le gouvernement veut rendre les moyens d'intervention plus efficaces afin d'assurer une meilleure protection et de renforcer les mesures de réadaptation prévues dans le système de justice. Le gouvernement veut également trouver d'autres solutions que la détention dans les cas d'infractions moins graves.
Ces modifications amélioreront considérablement la loi. Elles viseront deux groupes: les jeunes délinquants qui pourront être pris en charge par le système de justice communautaire et ceux qui commettent des infractions plus graves punissables de peines plus lourdes.
Les changements proposés demeurent fidèles à l'idée d'une approche personnalisée qui permet au tribunal de la jeunesse de prendre la décision la plus rationnelle possible en tenant compte des circonstances propres à chaque cas. Je crois que les modifications seront pondérées, qu'elles tiendront compte du principe de la réadaptation et qu'elles encourageront l'administration de peines au niveau communautaire.
Il est vrai que le Canada éprouve des problèmes à cause d'une minorité de jeunes qui commettent des infractions graves et des actes de violence. Il ne faut cependant pas perdre de vue que la grande majorité des jeunes qui ont des démêlés avec la justice ne récidivent pas et deviennent de bons citoyens.
Le système de justice pour les jeunes vise a répondre à des besoins qui sont propres aux jeunes encore au stade du développement et de la maturation. Il est vraiment organisé en fonction des jeunes. Il prévoit l'établissement de rapports présentenciels qui permettent d'adopter une approche plus globale que celle adoptée dans le système pour adultes, ainsi que l'établissement des rapports médicaux et psychologiques qui peuvent être exigés lorsque le juge pense que les jeunes souffrent de troubles d'apprentissage ou de troubles caractériels. En outre, les familles peuvent participer à toutes les étapes du processus.
4265
Le problème de la criminalité chez les jeunes est très complexe. Ce n'est pas seulement en modifiant la loi qu'on parviendra à le régler, mais ce sera déjà un pas dans la bonne direction pour regagner la confiance du public.
(1345)
[Français]
M. Nic Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques observations sur le discours du député de Pierrefonds-Dollard. Je veux faire quelques commentaires aussi parce que, personnellement, j'ai le plaisir d'avoir des jeunes adolescents qui font parfois des commentaires que je trouve un peu embêtants. Ils disent: Tu sais, papa, si on m'arrête, il n'y a pas de problème, jusqu'à 18 ans on ne me fera rien.
C'est un peu ce que les jeunes se disent. Ils se disent que même s'ils font des choses qui ne sont pas correctes, la police de toute façon ne pourra pas les arrêter, ne pourra pas les condamner parce qu'ils sont mineurs. C'est un des aspects, quand on parle de l'application de la loi, comme l'a mentionné le député de Pierrefonds-Dollard, où je pense qu'il y aurait peut-être lieu, à cet égard en tout cas, d'envisager, sans pénaliser les jeunes outre mesure, qu'on puisse au moins les aviser de leurs responsabilités.
Il a parlé aussi du fait que les jeunes se comportent souvent en considérant les exemples qu'ils ont des adultes. Si on se comporte mal, on risque que ses enfants fassent de même. Je pense qu'il faut peut-être penser un peu à changer les lois relatives aux adultes et la façon dont les adultes sont jugés afin d'améliorer notre société et que nos enfants puissent réagir le mieux possible lorsqu'ils auront à prendre des responsabilités, faire en sorte qu'ils aient au moins l'exemple des adultes.
Il faudrait aussi parler de la violence à la télévision. Il faudrait parler aussi de donner de l'espoir aux jeunes. Tant que les jeunes n'auront pas d'espoir, ils auront probablement plus tendance à désespérer de la vie, s'en foutre un peu et ne pas respecter cette société. C'est dans cet esprit-là qu'il faut respecter, à mon avis, cette jeunesse qui, dans le fond, n'est pas vraiment coupable de ces crimes. Cela ne veut pas dire qu'il faut laisser faire, mais je crois qu'il faut être très ouvert, comme la loi le prévoit, très ouvert et très large dans la façon dont on va juger ces jeunes.
J'aimerais que le député, puisque j'ai l'occasion de poser une question, nous dise ce qu'il croit qu'on pourrait faire pour améliorer la façon de traiter les pénitences qu'on pourrait donner aux jeunes.
M. Patry: Monsieur le Président, je remercie le député de Longueuil pour sa question. Disons qu'ayant moi aussi des enfants, on se fait toujours dire la même chose, même dans nos propres familles, savoir, qu'il ne faut pas que les parents frappent les enfants parce que nous aussi on va se faire traîner devant les tribunaux pour les jeunes.
Pour répondre à votre question, je pense qu'actuellement le problème est une très grande méconnaissance de la loi telle qu'elle existe. Les jeunes pensent fréquemment au fait que s'ils commettent un crime, un délit mineur, il n'y a rien là parce qu'à 18 ans, ils n'ont plus de casier judiciaire, tout va rentrer dans l'ordre, ils peuvent faire ce qu'ils veulent.
C'est l'impression qu'ont les jeunes. Effectivement, ce n'est pas la réalité, la loi est tout autre. Cela n'empêche pas que le gouvernement, actuellement, désire apporter des amendements à la loi et je suis certain que parmi ces amendements, premièrement on va essayer de faire mieux comprendre la loi telle qu'elle sera définie dans l'avenir, mais aussi faire en sorte que les jeunes contrevenants puissent faire face à la réalité du crime comme tel.
[Traduction]
M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap): Monsieur le Président, à en juger par le discours du député, il est difficile de savoir au juste s'il tente de défendre ou non la Loi sur les jeunes contrevenants.
Je voudrais poser quelques questions au député. Tout d'abord, sait-il ou peut-il dire à la Chambre quelle peine est actuellement infligée à un jeune contrevenant de 16 ans, par exemple, qui commet un viol ou un meurtre? Il dit que le gouvernement songera peut-être à prolonger les peines. J'espère qu'il ne se bornera pas à y songer.
(1350)
La vaste majorité des jeunes sont très respectueux, travailleurs et veulent faire leur chemin dans la vie, mais je me demande si le député se rend compte que la majorité des enfants qui vont à l'école pour essayer d'apprendre ont peur d'une minorité de jeunes qui créent des problèmes. J'espère que, avant de prendre quelque décision que ce soit, le gouvernement voudra également tenir compte de ce que les jeunes ont à dire au sujet des problèmes que cause une minorité d'entre eux.
[Français]
M. Patry: Monsieur le Président, je prends bien note de la question de l'honorable député. Il ne s'agit pas de défendre actuellement la Loi sur les jeunes contrevenants, je crois plutôt qu'il faut l'amender et la bonifier comme telle, la bonifier en ce sens qu'il y a des problèmes qui existent actuellement dans le pays et qu'on doit faire face auxdits problèmes. En faisant face auxdits problèmes, les jeunes, tel que vous l'avez mentionné, les jeunes gangs qui terrorisent les jeunes actuellement même dans les écoles primaires, dans les écoles secondaires ainsi que dans les cégeps, ces jeunes-là doivent être mis au pas. Mais on ne doit pas seulement les mettre au pas en les amenant à la cour et en les condamnant. Je crois beaucoup plus à la réinsertion sociale avec de l'aide soit des psychologues, des médecins et des spécialistes en ce sens, parce que si on ne fait que les mettre en prison, on va développer de vrais criminels.
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, pour une fois on ne peut pas dire que cette Chambre n'a pas de suite dans les idées. Il y a environ dix jours, le député de York-Sud-Weston, député du gouvernement libéral, présentait un projet de loi public, le projet de loi C-217 qui avait comme
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but, entre autres, l'abaissement de l'âge comme limite pour l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants, l'augmentation des peines maximales et la publication des noms des jeunes délinquants récidivistes.
Aujourd'hui, la motion du Parti réformiste, présentée par un député de la Colombie-Britannique, voudrait que la Chambre presse le gouvernement de répondre au manque évident, selon eux, de confiance face à la Loi sur les jeunes contrevenants en recommandant une modification de la définition du jeune contrevenant à l'article 2(1) de ladite loi afin qu'un jeune contrevenant devienne une personne de 10 ans ou plus mais de 16 ans ou moins.
Encore une fois, on se rabat sur l'abaissement de l'âge. Je dis que c'est un petit peu semblable à ce qui a déjà été présenté par le projet de loi C-217 étant donné qu'en abaissant l'âge à 16 ans, on a fait une remarque tout à l'heure dans le débat, on ne touchait pas à la sévérité de la loi. On a dit: On ne fait juste qu'abaisser l'âge. Mais en abaissant l'âge du jeune délinquant à 16 ans, les 16-18 ans qui vont être traités devant les tribunaux pour adultes, eux, vont avoir les sentences d'un adulte et c'est là que l'augmentation se fera sentir au niveau de la sentence.
Pourquoi cette approche? Pourquoi ce sentiment d'intolérance qui semble surtout provenir des provinces anglophones et qui, malheureusement, trouve écho en cette Chambre? Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, à force d'être alarmiste, on fausse la réalité. À force de crier «au feu», certains députés voient de la fumée. Regardons la vérité en face. Cessons de nous conter des peurs. La délinquance, hélas, sera probablement toujours parmi nous. Nous devrons toujours avoir des lois qui réprimeront ces actes non acceptés par la société, mais des lois dans un État civilisé chercheront en même temps à obtenir de bons résultats.
Dans le cas des jeunes contrevenants, il faut avoir une loi qui ne fera pas dudit jeune un vieux délinquant et qui le restera toute sa vie parce que la société intolérante l'aura décidé ainsi. Un État moderne doit chercher à connaître la cause de la délinquance, à chercher à comprendre le motif de la délinquance, et si possible, travailler à la déraciner dans le coeur du jeune délinquant. Est-ce que c'est possible de faire cet exercice sans partisanerie, sans préjugé, en ne désirant pas modeler une loi sur un cas répugnant, sur un meurtre gratuit, mais en ayant en tête que la recherche de l'équilibre entre la punition, c'est-à-dire la sentence, et la rééducation, c'est-à-dire la réinsertion sociale du jeune délinquant ou contrevenant?
Pour ce faire, il faut regarder les statistiques, véritable miroir de la réalité. Il ne faut surtout pas se contenter des premières pages des journaux à sensation et de lire les colonnes juridiques de ceux-ci. En effet, je crois que le sentiment d'insécurité est amplifié par l'actualité largement diffusée par les journaux. C'est rare, cependant, que l'on publiera des statistiques rassurantes. Pourtant, elles le sont rassurantes, les statistiques, et surtout au Québec.
(1355)
Selon une étude menée par M. Jean Trépanier, professeur de l'école de criminologie de l'Université de Montréal, seulement une personne sur six qui commettent un délit est un mineur. Une personne sur six, c'est loin du 50 p. 100 qu'on suggère, selon le débat qu'on tient aujourd'hui, avec l'emphase qu'on veut mettre sur les modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants.
Il appert, selon l'étude, que la criminalité juvénile a même diminué aux alentours de 8 p. 100 au Québec au cours des 15 dernières années et que même à Montréal, pour la même période, on a remarqué une diminution extrêmement importante. À Montréal, le nombre de délinquants juvéniles s'élevait à 10 145 en 1979, comparativement à 6 679 l'an passé. Là où le bât blesse, et je serai honnête envers les membres de cette Chambre, c'est que la proportion de crimes contre la personne commis par des jeunes, plus visibles et davantage couverts par les médias, a grimpé sensiblement pendant la même période.
Même si leur nombre a augmenté, les crimes contre la personne qui sont le fait de jeunes restent minimes, si on fait le calcul en chiffres absolus. C'est pourquoi je suis d'avis que la motion présentée aujourd'hui par le Parti réformiste fait fausse route. La perception au Québec est nettement différente. Que fait-on de différent au Québec pour les jeunes délinquants pour avoir cette perception différente de celle que semblent avoir les autres provinces face à ce problème?
Au Québec, lorsqu'un jeune commet un délit, il est immédiatement pris en charge par les services sociaux et non par la justice. Chez nous, on décriminalise immédiatement et complètement la démarche légale. C'est important de le retenir parce qu'on peut dire que le seul endroit au Canada où la prise en charge se fait par les services sociaux du début à la fin du processus légal, jusqu'aux mesures finalement imposées par les tribunaux, semble être au Québec.
Au Québec, on a une liste de délits. Lorsqu'un crime n'est pas dans cette liste, il y a une certaine discrétion de la part du service de police pour porter plainte ou non. Si le délit apparaît sur la liste, le service de l'ordre a l'obligation de judiciariser le dossier en portant une plainte contre le jeune contrevenant. À ce moment, le directeur de la Protection de la jeunesse prend en charge le mineur. Comme je vous le dis, à moins que je ne fasse erreur, c'est uniquement au Québec qu'on procède de cette façon.
Au Québec, et cela pourrait faire sursauter quelques personnes, le maximum de la détention est de trois ans, plus deux ans de liberté conditionnelle. Après avoir examiné la problématique des jeunes contrevenants, je peux vous dire que la majorité des intervenants en matière de criminalité juvénile, même au Canada, reconnaissent que le Québec fait les choses différemment. Et cette particularité se fait sentir dans les traitements qu'il apporte aux jeunes contrevenants.
L'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants et tout le système entourant le jeune délinquant et mis à sa dispostion au Québec font en sorte que cela fonctionne assez bien. Je pense qu'on peut dire, avec la réussite, si on regarde les statistiques, que c'est
encourageant. Si nous voulons être convaincus, nous n'avons qu'à regarder le rapport. . .
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je regrette d'interrompre l'honorable député, mais il pourra continuer plus tard. L'honorable député de Kingston et les Îles invoque le Règlement.
_____________________________________________
4267
AFFAIRES COURANTES
[Français]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
LES RESSOURCES NATURELLES
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, avec le consentement unanime de la Chambre, je propose:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, concernant l'étude des pratiques d'exploitation forestière au Canada et la coupe à blanc, la Chambre autorise le Comité permanent des ressources naturelles à effectuer des voyages du 23 au 26 mai 1994 en Colombie-Britannique et en Alberta; et les 30 et 31 mai 1994 en Ontario, au Québec et au Nouveau-Brunswick, et que le personnel nécessaire accompagne le comité.(La motion est adoptée.)
(1400)
[Traduction]
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, encore une fois, je demande le consentement unanime de la Chambre pour que nous revenions à la présentation de rapports par les comités permanents et spéciaux, afin de déposer le 21e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant la composition des comités.Je demande que nous nous passions de faire la lecture de ce rapport.
[Français]
Il vise la substitution de M. Leblanc pour Mme Debien au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.
[Traduction]
Le Président: Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre?
Des voix: D'accord.
M. Milliken: Monsieur le Président, je propose: Que le 21e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, déposé plus tôt aujourd'hui à la Chambre, soit agréé.
Le Président: Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion?
Des voix: D'accord.
Une voix: Non.
Le Président: Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.
_____________________________________________
4267
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LES PRODUITS CANADIENS
M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, nombre d'entre nous avons entendu, il y a quelques semaines, des reportages faisant valoir que l'huile de coco utilisée dans les salles de cinéma n'était pas aussi saine qu'on le pensait à l'origine.La semaine dernière, les chaînes de cinémas américaines ont décidé de remplacer l'huile de coco par de l'huile de colza canola canadienne, qui est plus saine. Cineplex Odéon, une compagnie canadienne, a refusé de le faire, préférant attendre et réfléchir à la question. Cette réponse n'est pas satisfaisante. Une compagnie canadienne devrait appuyer les produits canadiens, plus sains, avant d'appuyer les produits étrangers de qualité inférieure.
Or, il semble que, au Canada, cela ne soit pas la règle mais plutôt l'exception. Nous avons déjà eu ce problème avec les vins canadiens et un nombre incalculable de produits. Quand allons-nous commencer à acheter les produits canadiens qui sont de qualité supérieure et à redonner du travail aux Canadiens?
* * *
[Français]
LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE L'INFIRMIÈRE
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de fierté qu'aujourd'hui, le 12 mai, en cette Journée internationale de l'infirmière, je salue les 264 000 infirmières canadiennes, et plus particulièrement les 65 000 infirmières du Québec. Plus que jamais ces professionnelles de qui l'on exige beaucoup méritent que l'on reconnaisse la qualité exceptionnelle du service qu'elles rendentà la population.«L'infirmière fait toute la différence», tel est le thème de cette journée. Au nom de cette différence, à ces hommes et à ces femmes que je connais bien pour les avoir longtemps côtoyés, je dis merci de leur présence fidèle. Leur compétence et leur capacité d'écoute sont les cartes maîtresses de la qualité de nos services de santé.
Reconnaître cette réalité, c'est reconnaître l'apport indispensable des infirmières au maintien des valeurs fondamentales de notre société.
* * *
[Traduction]
LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap): Monsieur le Président, un travailleur forestier de 44 ans, père de famille, est
4268
aujourd'hui à l'hôpital dans un état critique, parce qu'un groupe d'adolescents lui a tranché le crâne avec une hache samedi soir. La femme de la victime a dit qu'il avait crié après les adolescents parce qu'ils n'avaient pas fait un arrêt obligatoire la veille.
Le gouvernement dit que la criminalité chez les jeunes est attribuable à la pauvreté et au chômage. Si elle est vraiment attribuable à la pauvreté et au chômage, pourquoi n'y a-t-il pas eu une augmentation notable de la criminalité durant les terribles années trente? Pourquoi à Terre-Neuve, où le taux de chômage est le plus élevé du Canada, le taux de criminalité est-il le moins élevé?
Cette agression s'est produite dans la municipalité d'Oyama, en Colombie-Britannique, une belle région de vergers de moins de 1 000 habitants, sans quartier pauvre, sans bidonville, sans gangs. Les élèves de l'école secondaire George Elliot sont en train d'organiser une campagne de lavage de voitures pour recueillir des fonds au profit de la famille de la victime. C'est bien la preuve qu'il existe de jeunes adultes responsables.
Quand le gouvernement va-t-il assumer ses responsabilités et modifier la Loi sur les jeunes contrevenants?
* * *
LA JOURNÉE INTERNATIONALE DES FAMILLES
M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, les Nations Unies ont récemment promulgué qu'à compter de 1994, le 15 mai serait la Journée internationale des familles.Malgré le rythme trépidant des années 1990, on ne doit pas sous-estimer l'importance de la famille ni la tenir pour acquise. C'est l'unité familiale qui transmet d'une génération à l'autre la culture et les traditions et c'est la famille qui est la première source de soins et d'éducation des enfants. En fait, notre propre survie dépend de la famille.
(1405)
Selon le comité canadien pour l'Année internationale de la famille, on doit appuyer nos familles si l'on veut que notre société demeure tolérante, productive et compatissante.
Nous devons résister aux forces qui menacent de détruire nos familles et favoriser les liens familiaux qui font du Canada une nation forte.
Ce dimanche, il faudra donc nous rappeler que, malgré toutes nos différences, nos liens familiaux nous unissent à l'échelle locale, nationale et mondiale.
* * *
LE TRIANGLE TECHNOLOGIQUE
M. John English (Kitchener): Monsieur le Président, hier, les villes de Kitchener, Waterloo, Cambridge et Guelph, qui forment ce qu'il est convenu d'appeler le triangle technologique du Canada, ont eu l'honneur de recevoir le ministre fédéral de l'Industrie.Durant sa visite, le ministre a annoncé un nouveau programme gouvernemental qui viendra en aide aux petites entreprises, force motrice de notre croissance économique. À la suite d'un dialogue permanent avec ce secteur, le ministre a annoncé un programme de financement de 50 millions de dollars qui s'ajoutera aux prêts bancaires.
C'est dans l'ordre des choses que le ministre discute du secteur des petites et moyennes entreprises à cet endroit car la région du triangle technologique du Canada est l'une des plus belles réussites du pays dans le contexte de la nouvelle économie fondée sur les connaissances dont ce secteur est l'un des pivots.
Je me joins donc aux députés de Cambridge, Guelph et Waterloo pour remercier le ministre d'avoir reconnu les besoins des petites et moyennes entreprises.
* * *
[Français]
LA SEMAINE NATIONALE DE LA POLICE
Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis): Monsieur le Président, la semaine prochaine, du 15 au 21 mai, est la Semaine nationale de la police. La Semaine de la police a débuté en 1970 et a été créée par la Communauté canadienne policière. Le but était d'augmenter la connaissance de la police au Canada et de mettre l'accent sur la nécessité de la coopération entre la communauté et la police.[Traduction]
La Semaine nationale de la Police est l'occasion pour tous les Canadiens de rendre hommage aux membres des nombreux services de police du Canada, pour le professionnalisme et le dévouement dont ils font preuve et pour les sacrifices personnels qu'ils doivent faire dans le cadre de leurs fonctions.
Comme les services de police s'adaptent aux besoins changeants de la société, nous devons tous nous serrer les coudes pour collaborer avec eux plus que jamais, si nous voulons lutter efficacement contre la criminalité, au moindre coût possible.
Nous, du gouvernement, reconnaissons le dévouement des policiers, et nous tenons à leur assurer notre appui. J'invite tous les Canadiens à se joindre à nous pour saluer le travail de nos distingués policiers.
* * *
[Français]
HAÏTI
M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, un nouveau coup de théâtre dans la tragédie haïtienne a eu lieu hier, à Port-au-Prince. À quelques jours de la fin de l'ultimatum fixé au 21 mai par le Conseil de sécurité de l'ONU, la dictature militaire, plutôt que de quitter le pouvoir, a nommé un président fantoche à la tête de la République.Le Bloc québécois proteste et condamne avec véhémence cette mascarade. Le gouvernement canadien doit cesser de zigzaguer sur la question haïtienne. Le Canada a-t-il, oui ou non, obtenu toutes les garanties qu'il escomptait de la République dominicaine quant au respect de l'embargo total, et combien de temps faudra-t-il encore attendre, avant que le Canada ne tienne un langage clair et non équivoque? Le Canada doit se tenir prêt à intervenir, de concert avec la communauté internationale, afin de mettre un terme, une fois pour toutes, au drame haïtien.
4269
[Traduction]
LE PERSONNEL INFIRMIER
Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord): Monsieur le Président, je me joins aujourd'hui à mon collègue du Bloc pour rendre hommage au personnel infirmier en cette Journée internationale des infirmières et infirmiers pendant la Semaine nationale des infirmières et infirmiers.Depuis l'époque de Florence Nightingale, la profession du personnel infirmnier s'est grandement améliorée, qu'on pense aux connaissances acquises ou aux normes applicables aux soins donnés au chevet des patients. Les pratiques et les principes de la profession se sont aussi élargis pour englober des domaines comme la recherche, l'enseignement, la consultation et l'administration.
Le travail du personnel infirmier constitue le pivot des soins de santé. Ces travailleurs participent à presque tous les aspects des soins et assurent leurs services sept jours sur sept, 24 heures sur 24. Ils réussissent en outre à relever le défi de maintenir leurs services malgré les restrictions financières. Ils font l'effort supplémentaire qui permet de conserver la grande qualité des soins infirmiers dont nous bénéficions.
À cette occasion, ne nous contentons pas de reconnaître le travail inestimable du personnel infirmier. Engageons-nous également à prendre les mesures nécessaires pour assurer un meilleur financement des soins de santé au Canada.
* * *
[Français]
LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE L'ENCÉPHALOMYÉLITE MYALGIQUE
M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard): Monsieur le Président, le 12 mai 1994 a été désigné la journée internationale de l'encéphalomyélite myalgique, mieux connue sous le nom de syndrôme de la fatigue chronique. Cette terrible maladie suscite de plus en plus d'intérêt en raison des difficultés professionnelles, sociales et affectives qu'elle cause aux victimes et aussi des coûts importants qu'elle représente pour la société. Le SFC est très difficile à définir. En effet, il n'existe pas de critère diagnostic rigide concernant ce syndrome.(1410)
Les chercheurs en concluent qu'il pourrait être causé par des agents différents ou qui rassembleraient plusieurs maladies différentes.
Quoi que nous réserve l'avenir, nous devons espérer que la recherche permettra de trouver une base physiologique pour l'explicaton du syndrome de la fatigue chronique.
* * *
[Traduction]
LA PETITE ENTREPRISE
M. Brent St. Denis (Algoma): Monsieur le Président, tous les Canadiens doivent savoir que la petite entreprise canadienne est responsable de la création de plus de 80 p. 100 des emplois. Il est évident que la relance de notre économie dépend d'un secteur de la petite entreprise actif et sain.Notre gouvernement en est conscient et travaille à créer un environnement stable dans lequel la petite entreprise pourra croître et prospérer. Nous y parviendrons en améliorant la Loi sur les prêts aux petites entreprises, en travaillant avec les banques pour qu'elles rendent les capitaux plus accessibles et en diminuant les charges sociales. De plus, nous allons réduire les tracasseries administratives qui étouffent la croissance de la petite entreprise. Après tout, le gouvernement doit travailler en collaboration avec le monde des affaires et non prétendre le dominer.
Les petits entrepreneurs de ma circonscription m'ont souvent dit qu'ils attendaient le jour où ils n'auraient plus à s'occuper de toute la paperasse que le gouvernement leur demande. Par exemple, le gouvernement reste résolu à remplacer la TPS par une autre taxe qui soit plus juste et plus efficace, plus facile à administrer et plus pratique pour les petites entreprises. Il prend son engagement au sérieux et tiendra ses promesses.
* * *
LES CHEMINS DE FER
M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord): Monsieur le Président, le Canada a besoin d'une stratégie globale concernant le transport ferroviaire si l'on veut que le pays soit bien desservi dans l'avenir.[Français]
Les chemins de fer contribuent de façon positive au développement économique de notre pays. Il est important de reconnaître que les lignes principales et secondaires qui desservent les communautés canadiennes sont essentielles à notre infrastructure économique. Plusieurs milliers d'emplois dépendent des chemins de fer, et je suis d'avis que beaucoup d'autres emplois peuvent être créés si le gouvernement adopte une politique proactive dans ce domaine.
[Traduction]
Récemment, le CN a indiqué qu'il désirait abandonner encore une autre ligne qui dessert des usines de Simcoe-Nord, comme il l'a fait dans beaucoup d'autres régions de l'est du Canada. Toute fermeture de ligne représente une perte d'emplois et de potentiel.
Au nom de tous les Canadiens, je demande au gouvernement de mener une campagne pour conserver notre infrastructure ferroviaire.
* * *
[Français]
LE TRANSPORT FERROVIAIRE
M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, à l'initiative des groupes Dignité rurale et Ralliement gaspésien, se tiennent actuellement à Bonaventure et à Gaspé des audiences au sujet du maintien du service de transport ferroviaire.Plusieurs groupes et individus ont pu ainsi s'exprimer au sujet du maintien du «Chaleur», le dernier train assurant le transport des personnes dans la péninsule gaspésienne, un outil indispensable pour le développement économique de la région.
4270
En l'absence de représentant du Parti libéral à ces audiences, j'aimerais attirer moi-même l'attention du ministre des Transports sur les inquiétudes légitimes exprimées par la population. Le ministre s'engage-t-il à tenir en bonne et due forme des audiences publiques à ce sujet, tel que le recommandait le rapport du Parti libéral sur l'avenir du transport en Gaspésie?
* * *
[Traduction]
LE REVENU NATIONAL
M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia): Monsieur le Président, depuis la mise en place de la TPS, Joe Arling, propriétaire d'un motel à Swift Current, en Saskatchewan, a versé ses paiements tel qu'indiqué dans le guide de Revenu Canada qui précise que les loyers pour une période supérieure à 30 jours sont exonérés de la TPS.M. Arling vient d'être informé par un vérificateur que cette exonération ne s'applique que si 90 p. 100 des chambres sont louées à long terme, ce qui n'est pas précisé dans le guide. Ce n'est que dernièrement que le personnel de Revenu Canada a été mis au courant de cette règle et les contribuables l'ignorent toujours.
Les bureaucrates de Revenu Canada reconnaissent que M. Arling a fait de son mieux pour observer la loi, mais maintiennent qu'ignorer la loi, même lorsque les agents de l'État eux-mêmes ne sont pas capables de vous renseigner, n'est pas une excuse. Ils refusent d'envisager un règlement négocié et sont déterminés à appliquer la loi dans toute sa rigueur, quel qu'en soit le coût pour le ministère et mon électeur.
Les gens d'affaires, qui font de leur mieux pour jouer le rôle de percepteurs bénévoles, ne méritent pas d'être traités de la sorte par des bureaucrates inflexibles.
Cette affaire a été portée à l'attention du ministre du Revenu national il y a deux mois et j'attends toujours une réponse.
* * *
LA JOURNÉE NATIONALE DE LA SANTÉ
M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Monsieur le Président, nous célébrons aujourd'hui la Journée nationale de la santé sur le thème «Pour un avenir plus sain».Dans tout le pays, l'Association canadienne de santé publique, l'Association des hôpitaux du Canada et d'autres organismes communautaires oeuvrant dans le domaine de la santé feront, à juste titre, fièrement état de leurs réalisations.
C'est l'occasion de rappeler aux Canadiens tous les progrès accomplis jusqu'à aujourd'hui dans le domaine de la santé et tout ce que nous pouvons faire de plus pour assurer la santé de tous.
(1415)
Qu'on célèbre aussi aujourd'hui la Journée internationale des infirmières est une heureuse coïncidence. Les infirmières jouent un rôle crucial dans l'édification d'un monde en meilleure santé, tant au Canada que sur la scène internationale.
Je félicite les organisateurs, organismes et particuliers, de leur initiative. Je félicite ce gouvernement et cette assemblée pour l'appui indéfectible dont ils font preuve à l'égard des professionnels et des bénévoles de la santé qui ont pour mission de veiller à l'état de santé des Canadiens et des gens du monde entier.
* * *
MLLE TRACEY FERGUSON
M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville): Monsieur le Président, j'ai le plaisir aujourd'hui de féliciter une de mes électrices pour ses remarquables exploits sportifs et son travail communautaire dévoué.Tracey Ferguson, une habitante de Markham, a reçu la semaine dernière du YMCA un prix pour s'être distinguée. Les commanditaires de ce prix ont choisi Mlle Ferguson car elle était, selon eux, un modèle remarquable pour les jeunes de ma circonscription.
Même si elle n'a que 19 ans, Tracey a obtenu toute une série de prix pour ses exploits athlétiques et son travail bénévole. En tant qu'athlète olympique en chaise roulante, elle a remporté des médailles d'or au basket-ball aux Jeux mondiaux de 1991 et aux Jeux paraolympiques de 1992. Elle a également reçu, en 1993, le Prix humanitaire Terry Fox pour son travail bénévole.
Au nom de mes collègues dans cette enceinte, je tiens à féliciter Mlle Ferguson.
* * *
LE DÉCÈS DE M. JOHN SMITH
M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de tristesse que j'interviens aujourd'hui au nom du caucus néo-démocrate pour rendre hommage au regretté John Smith, chef du Parti travailliste britannique.On dit souvent qu'en Grande-Bretagne, la gauche doit plus au méthodisme qu'au marxisme. John Smith, un socialiste chrétien, a été l'exemple même de cette tradition. C'était un Écossais pragmatique dont les croyances politiques étaient fondées sur sa foi chrétienne et son analyse idéologique. Il a perdu la vie au moment même où il était au faîte de sa popularité auprès de l'électorat britannique.
À sa famille, nous transmettons nos condoléances et nous rappelons les paroles bibliques: «C'est bien, bon et fidèle serviteur.»
À ses camarades du Parti travailliste, nous disons que la lutte continue. Aux Britanniques, nous rappelons qu'ils ont malheureusement perdu un remarquable futur premier ministre. À ses concitoyens écossais, nous reprenons les mots de la fameuse chanson écossaise: «Ô fleur de l'Écosse, quand verrons-nous à nouveau ta pareille?»
4271
QUESTIONS ORALES
[Français]
LES SONDAGES
L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics.Pendant que divers observateurs multiplient les cris d'alarme à l'égard de la situation préoccupante des finances publiques et du déficit fédéral, le gouvernement nous annonce qu'il va allègrement dépenser, cette année, 67 millions de dollars pour des sondages auxquels les Canadiens n'auront pas accès, alors qu'ils les financent pourtant à même leurs impôts.
Comment le ministre peut-il justifier, dans le contexte actuel des finances publiques et de l'endettement fédéral, que son gouvernement engloutisse pas moins de 67 millions de dollars pour des sondages réalisés par des amis du régime, puisque les contrats seront octroyés à la discrétion des ministres?
[Traduction]
L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique): Monsieur le Président, je remercie le chef de l'opposition pour sa question, mais les faits qu'il cite sont inexacts.
Le montant de 63 millions de dollars auquel il fait allusion est une dépense que le gouvernement canadien entend consacrer à des fins de publicité et de sondages. Depuis le début de la Confédération, les gouvernements engagent de telles dépenses pour informer les Canadiens des divers programmes mis à leur disposition et de la manière dont ils peuvent en bénéficier.
[Français]
L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, je crois que le ministre respecterait davantage les faits s'il nous disait que la véritable raison pour laquelle le gouvernement a décidé de garder secret le résultat des enquêtes, c'est qu'il veut cacher aux contribuables canadiens qu'il a déjà amorcé une stratégie massive de sondages au Québec dans la perspective du référendum sur la souveraineté. Est-ce que le ministre ne veut pas l'admettre?
[Traduction]
L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique): Monsieur le Président, je suis déçu de constater que le chef de l'opposition n'approuve pas les lignes directrices que le gouvernement vient d'élaborer.
Permettez-moi de rapporter au chef de l'opposition ainsi qu'aux autres députés les paroles suivantes: «Je constate avec plaisir que le gouvernement adopte des méthodes et revoit ses directives pour garantir l'ouverture et la transparence, ainsi que pour éviter la concentration des contrats dans une région donnée ou de commandes à un fournisseur particulier.» Ces propos sont de Claude Boulay, président de l'association québécoise des agences de publicité.
(1420)
Le chef de l'opposition doit savoir qu'il est important pour un gouvernement, tant provincial que fédéral, de pouvoir informer les Canadiens d'un bout à l'autre du pays sur la variété de programmes et d'activités qu'il met à leur disposition.
[Français]
L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, c'est justement le problème des apparences; le gouvernement professe par cette politique l'intention d'informer les Canadiens. Il avait d'ailleurs pris l'engagement électoral de favoriser la transparence dans les affaires du gouvernement, et voici que, dans cette politique qui est justement apparemment transparente, il propose de cacher les faits, de cacher l'information.
En particulier, je lui demande comment il peut concilier avec ses engagements antérieurs, cette décision de cacher aux contribuables les résultats d'innombrables sondages qui seront faits pour combattre la souveraineté du Québec.
[Traduction]
L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique): Monsieur le Président, à l'époque où le député d'en face faisait partie du gouvernement précédent, j'ai examiné les lignes directrices établies par son gouvernement et voilà l'ampleur de ces directives. . .
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je regrette d'interrompre le ministre, mais je lui rappelle qu'il est préférable de ne pas utiliser des accessoires pendant la période des questions.
M. Dingwall: Je voudrais dire au chef de l'opposition que c'est la première fois qu'un gouvernement fédéral ou provincial a le courage d'adopter des lignes directrices qui portent sur des questions fondamentales, comme l'obligation de rendre des comptes, la compétitivité et la transparence.
Je m'attendais à ce que le chef de l'opposition se lève et s'excuse de ne pas avoir présenté ce genre de directives à l'époque où il faisait partie du gouvernement conservateur.
* * *
[Français]
LA DETTE PUBLIQUE
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, la situation de la dette publique du gouvernement du Canada demeure extrêmement préoccupante et les milieux financiers ont mal réagi au Budget du gouvernement, déplorant la timidité des mesures de réduction des dépenses annoncées. Malgré tout cela, le gouvernement s'obstine à refuser le nécessaire examen de l'ensemble des dépenses publiques.
4272
Alors, ma question s'adresse au ministre des Finances. Compte tenu du fait que la dette du Canada représente 84 p. 100 du PIB, alors que dans les autres pays du G-7, à l'exception de l'Italie, la dette représente moins de 33 p. 100 du PIB, le ministre ne convient-il pas que le gouvernement doit procéder à l'assainissement des dépenses publiques par l'élimination du gaspillage et des chevauchements?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, nous sommes tout à fait d'accord sur le fait qu'il faut éliminer le gaspillage et les chevauchements. D'ailleurs, c'est une des raisons pour lesquelles nous avons demandé au ministre du Renouveau de la fonction publique d'entreprendre un examen programme par programme, ligne par ligne, des dépenses gouvernementales.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, le ministre des Finances ne convient-il pas que la solution pour mettre fin au gaspillage des fonds publics, comme le gaspillage que le gouvernement s'apprête à faire avec 67 millions de dollars à engloutir dans les sondages, le ministre ne convient-il pas que cette solution aux finances publiques passe par un comité spécial d'examen des dépenses du gouvernement, poste par poste, comme nous le réclamons depuis le début de la campagne électorale?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, il y a déjà un système en place. Ce sont les comités de la Chambre et l'examen des prévisions budgétaires. Si vraiment le député était sincère dans sa question, il demanderait à ses collègues d'assister aux comités et d'examiner dans le contexte des prévisions budgétaires toutes les agences du gouvernement.
[Traduction]
Il y a moyen d'examiner les dépenses publiques comité par comité. Je parle ici du budget des dépenses et je dirai au député d'en face que si ses collègues participaient aux séances des comités et faisaient leur travail, ils pourraient effectivement examiner ces dépenses.
* * *
LES AFFAIRES INDIENNES
M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes.À une question que mon collègue, le député de Calgary-Sud-Ouest, lui a posée, le 5 mai dernier, le ministre a répondu catégoriquement ceci: «La prochaine fois que la Chambre sera saisie d'un projet de loi sur les autochtones, le député verra clairement que la Charte des droits et libertés s'appliquera.»
(1425)
Hier, toutefois, le ministre de la Justice a déclaré que l'application de la Charte relativement à l'autonomie gouvernementale des autochtones demeurait à discuter.
Qui est le porte-parole du gouvernement sur cette question? Le ministre garantira-t-il à la Chambre que la Charte des droits et libertés va s'appliquer dans le cadre de l'autonomie gouvernementale des autochtones, oui ou non?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, il est clair pour le gouvernement fédéral que la Charte canadienne des droits et libertés doit s'appliquer à tous les Canadiens, y compris aux autochtones du Canada vivant en autonomie gouvernementale.
Je signale que notre gouvernement demeure déterminé à s'assurer que les droits et libertés individuels de tous les Canadiens continuent d'être protégés, même dans le cadre de nouvelles ententes d'autonomie gouvernementale des autochtones.
M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, ma question supplémentaire s'adresse au même ministre.
Le ministre de la Justice a dit hier que la question des droits de la personne était une priorité pour les négociateurs fédéraux. Il y a une grande différence entre une garantie et une priorité.
Le ministre considère-t-il les droits conférés par la charte comme monnaie d'échange dans les négociations sur l'autonomie gouvernementale des autochtones ou peut-il garantir que le gouvernement ne conclura aucune entente qui ferait en sorte que la Charte des droits et libertés ne s'appliquerait pas à tous les Canadiens?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je ne peux rien ajouter à ce que j'ai déjà dit. Je crois qu'il est clair que, aux yeux du gouvernement, la Charte doit s'appliquer à tous les Canadiens.
Durant les négociations qui s'amorcent sur l'autonomie gouvernementale des autochtones, nous nous assurerons que les droits garantis par la Charte s'appliquent à tous les Canadiens, y compris aux autochtones visés par une entente d'autonomie gouvernementale.
M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, c'est une promesse qui nous a été faite à plusieurs reprises, mais les signaux que nous recevons du gouvernement ne sont pas très clairs. Ma dernière question s'adresse au ministre des Affaires indiennes.
Hier, le ministre a admis qu'il ne comprend pas parfaitement bien la notion d'autonomie gouvernementale, qu'il ne sait pas où mènera cette notion et que beaucoup d'autochtones, y compris des chefs, n'y souscrivent pas. En dépit de tout cela, le ministre a affirmé que, une fois la machine de l'autonomie gouvernementale mise en marche, il n'y aura rien pour l'arrêter.
4273
De quel droit le ministre se permet-il d'imposer une telle expérience aux Canadiens alors qu'il admet lui-même ne pas savoir quelles en seront les conséquences?
L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, si mon collègue était venu à notre congrès libéral hier, il aurait entendu le discours. Mais, je garde espoir qu'un jour, peut-être, il se joindra à nous et il pourra alors entendre. . .
Des voix: Oh, oh.
M. Irwin: Il y a toujours de l'espoir. Il pourra alors entendre tout le discours dans lequel nous avons énuméré les mesures que nous avons prises, qu'il s'agisse de l'exploitation forestière en Colombie-Britannique, de la co-gestion en Saskatchewan ou de ce que nous avons fait au Manitoba, au Labrador, au Nunavut et dans tout le pays, tout cela en six mois. Nous avons également dit très clairement que ce n'est pas facile.
Cependant, lorsque les libéraux font une promesse, ils la tiennent, même si ce n'est pas facile.
* * *
[Français]
BIOVAC
Mme Monique Guay (Laurentides): Monsieur le Président, nous savons que les Canadiens recevront cette année deux millions de doses de vaccins antigrippe made in USA. Le gouvernement fédéral en tant que courtier en a décidé ainsi. Les autres vaccins proviendront de BioVac qui se dit insatisfaite de l'entente puisqu'elle doit mettre à pied 26 personnes, en plus d'annuler un important projet d'investissement.Ma question s'adresse au solliciteur général. Peut-il nous dire si c'est une nouvelle disposition de son code d'éthique qui a conduit son ministre des Travaux publics à envoyer lui-même un projet de lettre par laquelle la firme BioVac devrait lui exprimer sa satisfaction quant à la décision qu'il a prise de séparer en deux le contrat de fourniture de vaccins? Le solliciteur général cautionne-t-il une telle procédure?
[Traduction]
L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique): Monsieur le Président, la députée parle à nouveau de BioVac et de Connaught et de la décision que le gouvernement a prise au sujet d'un contrat particulier d'achat de vaccins au nom des gouvernements provinciaux.
Qu'elle sache que nous avons toujours cru et que nous croyons encore que notre décision était très équitable. Elle était dans l'intérêt de toutes les parties. Pour ce qui est de la lettre, j'ignore tout à fait de quoi il s'agit, mais je me ferai un plaisir de me renseigner à ce sujet.
(1430)
[Français]
Le Président: L'honorable députée devrait attendre jusqu'à la fin de la période des questions pour poser cette question.
Mme Monique Guay (Laurentides): Monsieur le Président, comment le ministre peut-il justifier l'utilisation d'une telle procédure à l'endroit d'un fournisseur du gouvernement, alors que sa responsabilité d'accorder les contrats gouvernementaux est absolument incompatible avec un tel comportement?
[Traduction]
L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique): Monsieur le Président, la députée présente une autre erreur factuelle au sujet du contrat avec BioVac et Connaught.
Si la députée possède des éléments de preuve établissant que BioVac ou Connaught ont fait quelque chose d'incorrect ou d'inacceptable, elle devrait les présenter à la Chambre pour que nous puissions les examiner. Je ne dispose d'aucun renseignement permettant de croire qu'il y a eu quoi que ce soit de répréhensible.
La députée sait que le contrat était juste et équitable pour toutes les parties. Je comprends parfaitement bien que la députée veuille que tout le contrat soit attribué à une seule société, mais elle doit sussi comprendre qu'il y a d'autres enjeux.
* * *
LES SONDAGES
M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics.Beaucoup de Canadiens se rappelleront les protestations des libéraux lorsque le gouvernement conservateur a gardé secrets les résultats de sondages, et beaucoup se rappelleront leur promesse électorale d'instaurer la transparence au sein du gouvernement. Le gouvernement semble malheureusement avoir déjà tout oublié à cet égard.
Voici ma question au ministre. Peut-il exposer les critères particuliers que les autres ministres doivent respecter quand ils commandent secrètement des sondages d'opinion? En fonction de quels critères particuliers détermine-t-on si les résultats des sondages doivent être tenus secrets, ou cette information doit-elle également rester secrète?
L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique): Le député a posé plusieurs questions, mais il faut dire que les lignes directrices sont très claires. Nous sommes le premier gouvernement à avoir institué des lignes directrices pour nous attaquer au problème.
Je voudrais citer à l'intention du député ce que disait Frank Graves, le président du comité de liaison entre l'industrie et le gouvernement de la Canadian Association of Marketing Research Organizations: «Au nom de la Canadian Association of Marketing Research Organizations, je tiens à dire que nous approuvons l'orientation générale et les principes énoncés dans
4274
la nouvelle politique. Nous appuyons fermement toutes les initiatives visant à assurer un processus plus transparent et compétitif qui fera de la meilleure valeur globale la clé pour le choix des approvisionnements.»
Voilà quel est essentiellement l'objet de ces lignes directrices: avoir un processus compétitif, en assurer la transparence et le respect de l'obligation de rendre des comptes. Voilà ce que font les lignes directrices.
M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, j'ai aussi demandé si les résultats des sondages seraient gardés secrets. Selon les lignes directrices, ils sont gardés secrets à la discrétion du ministre. Le prochain gouvernement découvrira peut-être lui aussi qu'il n'existait pas de règles. Il ne semble pas y en avoir.
Voici ma question au ministre. Si le gouvernement est élu par les Canadiens et qu'il utilise leur argent pour leur poser des questions, pourquoi refuse-t-il de leur dévoiler les résultats des sondages?
L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique): Monsieur le Président, il est évident que le député n'a pas lu les lignes directrices.
Elles disent très clairement. . .
Des voix: Bravo!
M. Dingwall: Je remercie les députés de leur appui.
Des voix: Oh, oh!
M. Dingwall: Monsieur le Président, le député devrait savoir que les lignes directrices prévoient très clairement que le gros des informations provenant des sondages sera divulgué au public. Je sais que c'est difficile, mais le député devrait comprendre que, comme l'a établi la Cour suprême à maintes reprises, il y a des choses que le Cabinet doit garder secrètes pour protéger l'intérêt public, l'intérêt national.
(1435)
Si le député croit qu'il n'y a pas de circonstances dans lesquelles il vaut mieux taire les résultats de sondages et s'il croit qu'il est impossible de nuire à l'intérêt public en divulguant ces résultats, il vit dans un monde imaginaire.
* * *
[Français]
LES PROGRAMMES SOCIAUX
Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.La Législature ontarienne a adopté hier, à la quasi-unanimité, une résolution demandant au gouvernement fédéral de négocier avec les provinces sa réforme des programmes sociaux. De plus, le premier ministre ontarien, inquiet des conséquences budgétaires de la réforme pour sa province, souligne que plusieurs des programmes visés par l'initiative fédérale sont, pour l'essentiel, de compétence provinciale exclusive ou conjointe.
Compte tenu des objections majeures formulées par le Québec et maintenant par l'Ontario face aux visées centralisatrices de son projet de réforme, quand le ministre du Développement des ressources humaines s'assoira-t-il enfin avec les provinces pour négocier directement avec elles? Quand la réunion qui était prévue pour le 18 avril aura-t-elle enfin lieu?
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, la députée n'ignore sûrement pas que l'idée de consulter pleinement les provinces vient de nous et non des provinces.
Au mois de janvier, lorsque nous avons dévoilé cette initiative, nous avons dit que nous voulions établir un partenariat total non seulement avec les provinces, mais encore avec une grande variété de Canadiens, d'intervenants et de groupes d'intérêts. Je suis très heureux que l'Assemblée législative de l'Ontario ait souscrit à ce principe qui consiste à avoir des discussions franches et ouvertes.
En fait, à titre d'exemple, il y a deux semaines environ, j'ai rencontré le ministre de l'Éducation et le ministre des Services communautaires de l'Ontario pour discuter directement avec eux des très importantes initiatives que nous voulons prendre.
Je suis très heureux que le gouvernement de l'Ontario, à l'instar de tous les autres gouvernements provinciaux, soit prêt à collaborer avec nous pour instituer un important forum. Si seulement le Bloc québécois était plus coopératif.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, la question posée était celle-ci: Quand la réunion qui était prévue pour le 18 avril aura-t-elle lieu avec l'ensemble des provinces pour amorcer un processus?
Le ministre, dans ces conditions, puisqu'elle n'a pas eu lieu et n'est pas annoncée, peut-il nous confirmer que son plan d'action, d'abord annoncé pour la fin d'avril, sera déposé avant la fin des travaux parlementaires prévue pour le 14 juin?
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, il est très important, à mon avis, de veiller à ce qu'avant même la tenue d'une réunion de tous les ministres concernés nous puissions
4275
nous entendre sur des programmes et travailler sur un certain nombre d'initiatives.
Nous essayons d'amorcer un processus qui dotera le pays d'un système de garderies qui convient. Nous devons examiner une série d'initiatives stratégiques qui feraient partie de notre programme de 800 millions de dollars.
En conséquence, j'ai demandé à mon sous-ministre de communiquer avec ses homologues des autres gouvernements pour élaborer ces programmes. Je crois savoir qu'ils se réuniront à la fin du mois. Plus précisément, ils se réuniront le 30 mai, si je ne m'abuse, pour mettre au point les programmes dont nous aurons besoin pour les discussions et les consultations fédérales-provinciales.
Je tiens à assurer à la députée et à la Chambre que nous faisons avancer ce dossier résolument et prudemment en recourant à la consultation. Je sais que cela la réjouira.
* * *
L'ÉCONOMIE
M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.Depuis le dépôt du budget fédéral en février, les choses ont changé. Les taux d'intérêt réels et nominaux à court et à long terme ont augmenté. Les prévisions pour l'année en cours et l'année prochaine sont revues à la baisse. Le taux de chômage reste lamentablement élevé. Bref, tous les indicateurs économiques ont tourné au rouge.
(1440)
Hier, nous en avons appris la raison. Selon une étude qui vient d'être publiée, le Canada traîne derrière la Pologne, l'Éthiopie, le Brésil, la Nouvelle-Zélande et même le Rwanda en guerre. . .
Le Président: Le député voudrait-il poser sa question?
M. Speaker (Lethbridge): Ma question s'adresse au ministre des Finances. Maintenant que nous avons rejoint le tiers monde au chapitre de l'endettement, le ministre des Finances va-t-il admettre que la dette canadienne constitue notre principal problème économique?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, le député semble avoir une série de statistiques qui pourraient bien avoir été établies par Lewis Carroll, mais qui n'ont assurément rien à voir avec la réalité.
Je me permets de lui rappeler qu'au cours des trois derniers mois, nous avons créé 115 000 emplois, l'indice de l'offre d'emploi a augmenté de 2 p. 100 en avril et en mars, l'indicateur avancé a augmenté de 0,7 p. 100, la confiance du consommateur et des entreprises a connu une hausse de 13 p. 100 au cours du premier trimestre, les mises en chantier ont augmenté de 5,9 p. 100 en avril et les ventes au détail ont augmenté de 0,9 p. 100.
J'ajouterai que, selon le Fonds monétaire international, l'an prochain, le Canada sera au premier ou au deuxième rang des pays du G-7 pour ce qui est de l'emploi, de la productivité, de la croissance et de la confiance, et je suis d'accord avec le FMI.
Le Président: Je croyais un instant que nous allions avoir droit à d'autres citations.
M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, le ministre des Finances peut bien être optimiste, mais les Canadiens s'inquiètent sérieusement du déficit et de la dette, et je suis certain que cela l'inquiète aussi.
Le ministre a reconnu à la Chambre qu'il inscrira l'élaboration d'une stratégie nationale de réduction du déficit comme premier point de l'ordre du jour de la réunion que tiendront les ministres des Finances en juin. Le ministre va-t-il le faire pour que des objectifs nationaux de réduction du déficit puissent être établis dans le cadre de cette réunion?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à la Chambre-je crois même que c'était la semaine dernière, quand je répondais à une question du député-je suis tout à fait disposé à proposer à mes homologues provinciaux d'inscrire la réduction de la dette et du déficit au nombre des points importants dont nous discuterons à notre prochaine conférence.
Cependant, je voudrais simplement rappeler au député d'en face que lorsque nous avons fait les prévisions du déficit pour l'année qui vient tout juste de se terminer, nous avions fixé un objectif de 44 à 46 milliards de dollars, objectif qui était, malheureusement, très élevé. Nous nous étions fondés, pour cela, sur les chiffres que nous avions connus en janvier, en février et en mars en raison de la situation de l'emploi et de la croissance au cours des mois d'octobre, de novembre et de décembre l'année précédente.
Je suis heureux de dire qu'en raison de la très forte création d'emplois, beaucoup plus forte que prévue, le déficit se situera au bas de cette échelle. Même qu'il pourrait se situer sous cette échelle.
Cela montre que même si la réduction des dépenses du gouvernement est sûrement un objectif très important de ce gouvernement, même si c'est essentiel pour réduire le déficit, redonner du travail aux Canadiens demeure encore la chose la plus importante que nous puissions faire.
* * *
[Français]
LA TAXE DE VENTE
M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.Hier, après avoir réitéré son intention d'harmoniser les diverses taxes de vente, le ministre des Finances a confirmé qu'il veut mettre en place une taxe unique, et je cite: «Nous voulons établir une taxe de vente, parce que c'est ce que la communauté des affaires, les consommateurs et les gouvernements provinciaux veulent.» De plus, le ministre des Finances a refusé de s'engager à ne pas envahir les champs fiscaux de toutes les provinces.
4276
(1445)
Quelle que soit la solution de remplacement à la TPS, est-il dans les visées du ministre des Finances que sa proposition de taxe unique, englobant l'ensemble des taxes provinciales et fédérales, soit gérée et perçue par le gouvernement fédéral?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, c'est très clair que non seulement les consommateurs, mais la communauté des affaires dans toutes les provinces veut vraiment une taxe harmonisée pour amoindrir les taux d'administration et rendre la vie beaucoup plus simple aux consommateurs. C'est notre désir, et je crois qu'en grande majorité, c'est aussi le désir des gouvernements provinciaux. Maintenant, pour ce qui est de la façon de le faire, c'est certainement quelque chose à négocier et nous sommes très ouverts à cet égard.
M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, le ministre des Finances a affirmé que les gouvernements provinciaux veulent une taxe unique. Peut-il nous confirmer s'il y a des négociations en cours avec les gouvernements provinciaux en vue de fondre les taxes de vente provinciales et la TPS en une seule taxe de vente nationale?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, la réponse est non. Il y en a déjà eu. À la rencontre des ministres des Finances, à Halifax, en janvier, cela a été discuté comme hypothèse. Tout le monde attend avec grande impatience le rapport du Comité permanent des finances sur la TPS.
* * *
LES JEUX OLYMPIQUES
M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Comme il le sait, la Ville de Québec a posé sa candidature en vue d'accueillir les Jeux olympiques d'hiver de l'an 2002.Compte tenu des doubles responsabilités du ministre des Affaires étrangères, c'est-à-dire comme ministre responsable du Québec et comme chef de la diplomatie canadienne, qu'est-ce qu'il entend faire pour aider la Ville de Québec dans ses efforts pour obtenir les Jeux olympiques d'hiver?
L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, je suis heureux d'annoncer que le gouvernement du Canada nommera un ambassadeur de carrière qui aura pour mandat exclusif d'épauler la Ville de Québec dans ses démarches afin d'obtenir les Jeux olympiques d'hiver de 2002.
Le ministère des Affaires étrangères fournira un appui logistique et technique à la candidature de Québec, comme nous l'avons fait dans le passé pour d'autres villes canadiennes qui voulaient obtenir les Jeux olympiques. Je suis convaincu que cette nomination, qui se fera après consultation avec le Comité organisateur de Québec 2002, pourra être un atout très précieux pour la ville de Québec dans sa quête en vue de l'obtention des Jeux olympiques.
* * *
[Traduction]
LES SOINS DE SANTÉ
M. Grant Hill (Macleod): Monsieur le Président, au Canada, le système de soins de santé s'occupe fort bien des politiciens, grâce au régime de soins médicaux élargi et fort généreux dont jouissent les membres de l'élite politique et bureaucratique. Peut-être la ministre de la Santé pense-t-elle que le régime d'assurance-maladie est gratuit?La ministre admet-elle que le système de soins de santé est à deux vitesses, une pour les gens ordinaires et une pour l'élite politique?
L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, la réponse est courte, c'est non.
Si le député fait allusion à la protection accrue prévue dans notre régime de soins de santé pour les adhérents, qu'il sache que tous les employés de la fonction publique y ont droit. Les personnes qui désirent une protection accrue doivent payer dix dollars de plus, comme dans le secteur privé. Nous ne croyons pas dans ce système à deux vitesses dont parle le député.
M. Grant Hill (Macleod): Monsieur le Président, la ministre de la Santé a déclaré à plusieurs reprises qu'elle croyait en un système de soins de santé qui soit le même pour tous au Canada. Elle déclarait plus précisément que chacun devrait avoir accès aux soins selon ses besoins et non pas en fonction de l'épaisseur de leur porte-monnaie.
La ministre peut-elle expliquer pourquoi certaines personnes peuvent passer devant les autres si elles ont dans leur porte-monnaie une carte d'identité de député?
L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, ce n'est absolument pas le cas. Nous assurons au personnel de la fonction publique des services similaires à ceux offerts par la plupart des employeurs du secteur privé. Nous voulons être un bon employeur pour le personnel de la fonction publique.
* * *
(1450)[Français]
LES AFFAIRES INDIENNES
M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, le ministre des Affaires indiennes, réagissant hier au contentieux qui oppose le gouvernement du Québec et les Mohawks de Kanawake quant à la perception de la taxe sur les carburants, affirmait que ça ne serait pas une mauvaise idée pour les Mohawks d'aller en cour pour résoudre le conflit avec le Québec qui a fermé les postes d'essence sur leurs réserves.
4277
Comment le ministre des Affaires indiennes peut-il, de façon responsable, à titre de membre du gouvernement fédéral, inciter des gens à contester l'application d'une loi qui relève de la compétence du gouvernement du Québec?
[Traduction]
L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, nous avons actuellement deux moyens pour trouver des solutions: les tribunaux et la négociation. Il règne un certain mécontentement parmi les autochtones. Par exemple, l'affaire Williams, qui a a fait l'objet d'une décision en 1983, continue d'être différée sans qu'on trouve de solution.
Les autochtones devraient-ils s'adresser aux tribunaux? C'est une option. S'ils estiment que nous ne répondons pas rapidement et efficacement à leurs préoccupations, les tribunaux constituent peut-être une solution, mais elle n'est habituellement pas la seule. Nous devons essayer avec les autochtones de trouver des solutions équitables. Si nous ne sommes pas équitables, ils pourront toujours s'adresser aux tribunaux.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, le ministre des Affaires indiennes ne réalise-t-il pas que par son ingérence dans ce dossier, plutôt que d'aider à trouver une solution, il vient envenimer les relations déjà tendues entre les Mohawks et le gouvernement du Québec? Ne réalise-t-il pas cela?
[Traduction]
L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): En fait, monsieur le Président, c'est le contraire qui est vrai. Les deux premiers mois où nous avons siégé ici, nous avons entendu les députés d'en face dénigrer systématiquement les Mohawks. Je constate qu'ils ont cessé de le faire, et je leur en suis reconnaissant.
Nous avons tenté de collaborer avec les Mohawks et les avons rencontrés à la table ronde. M. Sirros, du Québec, se réunit régulièrement avec eux. Des ministres d'un peu partout dans le pays les rencontreront la semaine prochaine.
Je discuterai avec M. Sirros non seulement du problème qu'on a soulevé aujourd'hui, mais également de ce que nous allons faire au sud de la route 344. Le Bloc a non seulement dit que nous devrions nous préoccuper de ce dernier problème, mais il a aussi invité le gouvernement fédéral à se rendre au Québec pour le régler.
* * *
LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.Le ministre a entendu le débat d'aujourd'hui au nom de Canadiens qui exigent des mesures immédiates relativement à la Loi sur les jeunes contrevenants. Même si le discours du Trône n'a pas précisé que le système de justice pénale pour les jeunes contrevenants était une priorité du gouvernement, le ministre a déclaré qu'il s'attaquerait à cette question en juin.
Le ministre va-t-il prendre le débat d'aujourd'hui comme signal de départ et présenter immédiatement des modifications. . .
Le Président: Le député pourrait-il reformuler sa question. Si la Chambre est déjà saisie de cette question, celle-ci ne devrait pas être soulevée durant la période des questions. J'invite le député à poser sa question en d'autres termes.
M. Forseth: Monsieur le Président, le ministre de la Justice va-t-il modifier immédiatement les limites d'âge prévues dans la Loi sur les jeunes contrevenants?
Le Président: La question porte précisément sur le débat que nous tenons aujourd'hui. Elle est plutôt pointue. Je vais permettre au ministre d'y répondre s'il le désire, et dans la négative, je vais passer à la question suivante.
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, comme le député le sait pertinemment, le fait est que j'ai dit encore hier que nous allions présenter dans quelques semaines un projet de loi visant à modifier la Loi sur les jeunes contrevenants. On apportera alors des modifications immédiates et on renverra la loi dans son ensemble au Comité de la justice pour qu'il l'examine en profondeur après dix ans d'application. Selon moi, c'est le Comité qui peut le mieux étudier la question soulevée par le député de façon approfondie et méthodique et c'est donc là qu'elle devrait être abordée.
M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, le ministre va-t-il reconnaître que si la loi a des fins éducatives et dissuasives, il est important qu'on envoie ce message? Le ministre peut-il garantir à la Chambre qu'il ne fera pas traîner encore davantage les choses en procédant à d'autres études et consultations et qu'il va agir immédiatement en présentant des modifications sous peu?
(1455)
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, la Chambre devrait savoir, puisque je l'ai déjà précisé, que nous allons déposer un projet de loi dans quelques semaines, en juin, afin d'apporter des modifications précises à la loi. C'est là la voie que nous entendons suivre.
* * *
LA BFC SHEARWATER
M. Ron MacDonald (Dartmouth): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.Hier, l'Union des employés de la Défense nationale a rendu publique une lettre signée par un haut fonctionnaire du ministère de la Défense nationale indiquant que le gouvernement avait l'intention de fermer complètement la BFC Shearwater, en Nouvelle-Écosse, dès que l'on aurait remplacé le parc d'hélicoptères Sea King.
Cette déclaration est tout à fait contraire aux assurances données par le ministre de la Défense nationale et le premier ministre.
4278
Je pose donc la question au ministre: est-ce que ce fonctionnaire se faisait l'écho de la politique gouvernementale, et si ce n'est pas le cas, quelle est la politique du gouvernement en ce qui concerne la BFC Shearwater?
L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, j'ai été tout aussi surpris que le député lorsque cette lettre a été portée à mon attention. C'était la position du gouvernement précédent mais, comme vous le savez, nous avons annulé le contrat des hélicoptères EH-101, ce qui fait que la position énoncée dans cette lettre citée par le député n'est plus la politique du gouvernement.
Je suis sûr que l'avenir de toutes les installations militaires de Nouvelle-Écosse est assuré, y compris celles de la région de Halifax, mais il faudra naturellement attendre le résultat de l'étude en cours sur la politique de défense.
Mon collègue et moi avons visité les ateliers de réparation cette semaine. Le travail qui est fait à la BFC Shearwater, notamment sur les hélicoptères Sea King, est permanent. C'est un bon travail, qui sera utile aux Forces armées canadiennes pour les mois et les années à venir.
* * *
[Français]
LES PENSIONS ALIMENTAIRES
Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Nous apprenions ce matin que le gouvernement songe à porter en appel le jugement rendu par la Cour fédérale dans la cause Thibodeau relativement aux pensions alimentaires. Les ministres de la Justice et des Finances auraient déjà expliqué au caucus libéral les motifs selon lesquels le gouvernement fédéral portera la cause en appel.Ma question est la suivante: Le ministre de la Justice peut-il nous confirmer l'intention de son gouvernement d'interjeter appel à la Cour suprême et dans l'affirmative, quels sont les motifs qui le conduisent à le faire?
[Traduction]
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, le gouvernement envisage d'interjeter appel du jugement de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Thibaudeau, essentiellement pour des raisons pratiques.
Le gouvernement veut qu'il soit bien clair-et nous insistons là-dessus-que nous ne sommes pas contre le résultat obtenu par la plaignante, en ce sens que nous avons pour principal objectif de faire en sorte que les impôts soient équitables, surtout pour les parents qui élèvent leurs enfants seuls et pour ceux qui versent une pension pour un enfant. Nous avons été bien clairs là-dessus dans les documents du budget, de même que dans les politiques de notre parti. Le gouvernement tient à garantir aux parents qui ont la garde de leurs enfants que nos politiques fiscales leur permettent de garder la plus grande part possible de leurs revenus. C'est notre plus grande préoccupation.
Le jugement de la semaine dernière arrive au moment où nous sommes en train de réviser la politique. Nous craignons en outre qu'il ait déstabilisé la situation au Canada, parce que ceux qui paient et ceux qui reçoivent une pension ne savent plus exactement quels sont leurs droits. Le jugement lui-même est tronqué, dans un sens, puisqu'il règle la question pour ceux qui reçoivent de l'argent, mais non pour ceux qui ont droit à une déduction pour la pension versée. C'est ce qui nous inquiète, sur le plan pratique.
Permettez-moi de dire, en terminant, que nous tenons à élaborer une politique fiscale qui sera juste pour les enfants et pour les parents qui les élèvent seuls. Nous envisageons donc d'en appeler du jugement afin d'être sûrs qu'il ne crée pas un revirement de situation à leur détriment en causant une certaine confusion quant à leurs droits.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, le ministre réalise-t-il qu'en interjetant appel, son gouvernement perpétue la discrimination fiscale dont les femmes sont principalement victimes, en continuant de considérer comme revenu imposable les pensions alimentaires qu'elles reçoivent pour la prise en charge de leurs enfants?
[Traduction]
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Comme je le disais, monsieur le Président, le gouvernement envisage de faire appel, mais n'a pas encore pris de décision.
Quant à la question de discrimination, ce gouvernement a l'intention de consulter tous ceux que cette mesure touche le plus, comme l'a répété à plusieurs reprises le ministre des Finances, afin d'y apporter toutes les modifications nécessaires pour que l'argent aille aux personnes qui s'occupent des enfants. C'est le but que nous recherchons.
* * *
(1500)
LES PÊCHES
M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre des Pêches et des Océans.Les pêches sur la côte ouest sont au bord de la catastrophe. Le ministère des Pêches a ramené le nombre de ses agents de 153 à 85, et il doit y avoir une nouvelle réduction de 25 p. 100 des effectifs au cours des trois prochaines années.
Certains agents ont été remplacés par des agents autochtones dont le seul mandat est de surveiller les activités de pêche dans leur propre réserve. À cause de mesures comme celles-là et de fermetures de services, les stocks sont décimés.
Compte tenu de ces faits, pourquoi le ministre ferme-t-il le bureau des pêches de Sooke, en Colombie-Britannique, et réduit-il le nombre d'agents des pêches, qui sont à la ligne de front dans la lutte contre le braconnage?
L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, il n'y a absolument rien de plus éprouvant, rien qui mette à plus rude épreuve la patience de gens posés, rationnels, compatissants et conciliants que ces plaintes constantes, ces demandes constantes de compressions pour réduire le déficit qui reviennent presque tous les jours, et d'entendre les demandes occasionnelles d'accroissement des dépenses qui sont formulées les autres jours.
Le Parti réformiste ferait mieux de se brancher.
* * *
VIA RAIL
Mme Elsie Wayne (Saint John): Monsieur le Président, la population de Saint John utilise beaucoup le service ferroviaire de VIA Rail pour l'Atlantique, entre Halifax et Montréal, qu'elle considère très important. Ma question s'adresse au ministre des Transports.Il semble qu'une entreprise privée de lignes ferroviaires secondaires soit disposée à acheter et à exploiter la ligne principale allant de Saint John, au Nouveau-Brunswick, à Sherbrooke, au Québec, en vertu de pouvoirs relevant de la compétence provinciale. Il faudrait aussi modifier la Loi sur les transports nationaux pour que des trains de passagers VIA puissent circuler sur de telles voies dont l'exploitation relève de la compétence provinciale.
Si cela est exact, combien de temps faudrait-il avant que la mesure législative entre en oeuvre et comment faudrait-il s'y prendre pour que cela se fasse dans les plus brefs délais?
L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, la question que pose la députée est importante pour la population du Nouveau-Brunswick.
Même si cette transaction est très incertaine, la députée peut avoir l'assurance qu'à titre de ministre des Transports, nous allons insister pour accélérer l'adoption d'une mesure législative ou d'une modification aux règles existantes, le cas échéant, afin de favoriser l'efficacité du service ferroviaire, aussi bien pour les passagers que pour les marchandises, au Nouveau-Brunswick et dans le reste du Canada atlantique.
* * *
[Français]
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le Président: Chers collègues, je désire souligner la présence à la tribune de l'honorable Marcelle Mersereau, vice-première ministre et ministre de l'Environnement de la province du Nouveau-Brunswick.Des voix: Bravo!
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
BIOVAC-DÉPÔT D'UN PROJET DE LETTRES
Mme Monique Guay (Laurentides): Monsieur le Président, pourrais-je avoir le consentement unanime de cette Chambre pour déposer le projet de lettres de satisfaction envoyées à BioVac par le cabinet du ministre des Travaux publics?Le Président: La Chambre a entendu la demande de l'honorable députée. Est-ce que l'honorable députée a le consentement unanime de la Chambre?
Des voix: D'accord.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, je voudrais, comme c'est l'usage de le faire à ce moment-ci, demander à mon honorable collègue, le leader parlementaire du gouvernement, de nous indiquer, non pas pour les prochains jours, mais pour les prochaines semaines, l'ordre des travaux de la Chambre.[Traduction]
L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Madame la Présidente, je confirme à la Chambre que nous ne siégerons ni demain ni la semaine prochaine. Nous allons reprendre nos travaux le 24 mai prochain. Je suis certain que les députés ne manqueront pas de travail à faire à l'extérieur de la Chambre durant cette période.
Les 24 et 25 mai, la chambre entreprendra l'étude du projet de loi C-28 sur les prêts aux étudiants, puis le projet de loi C-27 qui doit apporter des modifications législatives d'ordre technique en matière d'impôt sur le revenu. Si le temps le permet, nous passerons à l'étude du projet de loi C-26 modifiant la Loi sur la Bibliothèque nationale.
Conformément à un ordre spécial, le 26 mai, la Chambre entamera l'étape du rapport sur le projet de loi C-17 portant exécution de certaines dispositions du budget.
(1505)
Quand les leaders parlementaires se rencontreront pendant la semaine de notre retour, nous aurons plus de renseignements à leur communiquer et à transmettre à la Chambre.
M. Milliken: J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Je pense que vous constaterez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante:
[Français]
Que le 21e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre présenté à la Chambre aujourd'hui soit adopté.[Traduction]
La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime pour que le secrétaire parlementaire propose la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
_____________________________________________
4279
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Français]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ-LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
La Chambre reprend l'étude de la motion
4280
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Madame la Présidente, avant de poursuivre, pouvez-vous m'indiquer combien il me reste de temps?
La présidente suppléante (Mme Maheu): Treize minutes.
M. Bellehumeur: Madame la Présidente, avant la période des questions orales, j'étais à expliquer à cette Chambre le rapport de Boscoville. Boscoville, pour ceux qui ne connaissent pas cet endroit, est un institut où l'on s'occupe des jeunes contrevenants à Montréal. Vous le saviez sans doute, madame la Présidente.
Entre 1968 et 1983, une étude très sérieuse a porté sur 25 jeunes contrevenants qui avaient commis des homicides. Après un séjour à cette institution, on a découvert que les 25 jeunes qui y étaient allés avaient eu un très bon pronostic sur la personne, que les traitements et le cheminement qu'on leur avait donnés avaient porté fruit et que, lorsqu'ils sont sortis de cette institution, il n'y a pas eu de récidive. L'étude démontre de plus que ces résultats sont atteints au cours d'un processus qui dure environ trois ans.
Donc, cela a pris trois ans à l'institution pour faire de ces jeunes des personnes responsables une fois qu'ils sont sortis de l'institution.
On mise beaucoup, à Boscoville, sur la réhabilitation, la réadaptation et la réintégration. J'ai pris le cas de Boscoville parce j'ai en ma possession une étude très sérieuse qui a servi dans plusieurs comités. Il y a aussi des statistiques, il y a des précisions; il y a vraiment une orientation très marquée qui a influencé tout le cheminement, au Québec, en ce qui concerne le traitement du jeune délinquant. Il s'agit d'un document extrêmement important. J'aurais aussi pu choisir une autre institution parce que, au Québec, on a plusieurs insitutions de ce genre.
Cette démarche de rééducation se fait par les éducateurs, naturellement. Elle se fait aussi par la famille, parce que la famille est extrêmement importante lorsque le jeune a commis un délit comme un homicide, et par les jeunes eux-mêmes, parce qu'il y a vraiment un travail qui se fait entre jeunes dans ce traitement.
L'objectif est la réinsertion sociale, la réhabilitation du jeune. Il faut que ce dernier reconnaisse qu'il a changé, par l'acceptation des personnes qu'il rencontrera à la suite de son séjour.
La réhabilitation signifie avant tout la reconnaissance explicite d'une transformation morale profonde qui a permis au jeune contrevenant, en tant que personne, de retrouver le sentiment de sa dignité humaine et, sur le plan social, de se revaloriser suffisamment pour mériter d'être accueilli partout, sans la moindre réserve, comme un citoyen intègre et responsable.
Peut-on atteindre cet objectif en misant sur l'abaissement de l'âge des jeunes contrevenants?
(1510)
Poser la question, c'est y répondre. Je peux comprendre que dans le Canada anglais, la perception face aux jeunes contrevenants soit différente, étant donné qu'il n'existe pas tout le système de protection que nous avons mis en branle au Québec depuis plusieurs années.
Dans certaines provinces, on peut même dire que les jeunes sont pratiquement traités comme des adultes une fois qu'ils sont trouvés coupables d'un acte, sauf qu'il y a une aile A pour les jeunes et une aile B pour les adultes. Cependant, un fait demeure, le jeune contrevenant est installé pour une période de temps dans l'université du crime, soit la prison.
Il est normal que la perception et que la mentalité des personnes de l'Ouest canadien soient différentes de la nôtre. Toute la philosophie devant le jeune contrevenant est complètement différente. Il y a juste en Ontario où a entrepris vraiment, depuis quelques années, de se doter d'instruments semblables à ceux qui existent au Québec en prenant en charge les jeunes délinquants. Mais encore là, l'Ontario, c'est assez récent, ils ne connaissent pas toute l'étendue de ce programme et ne maîtrisent pas tout le résultat de la mise en place de ce système.
Il faut bien comprendre que d'imposer des sanctions plus fortes comme le demande la présente motion, ou abaisser l'âge limite pour être traité par la Loi sur les jeunes contrevenants n'est pas une solution aux problèmes auxquels fait face la société actuelle. Il faut plutôt miser sur un choix politique très clair, soit celui de doter tout le système judiciaire d'infrastructures capables d'accueillir des jeunes délinquants. C'est ce qu'il faut comprendre et c'est là-dessus qu'il faut miser.
Dans la présentation du projet de loi privé C-217, j'avais mentionné que le projet de loi était simpliste. Effectivement, il est bien plus simple pour une société d'écraser, de tenter d'anéantir l'élément rebelle d'un jeune contrevenant, en l'incarcérant, en l'isolant et en le mettant hors circuit pour une période donnée. Il est sûr qu'on règle le problème pendant qu'il est en prison, mais après, qu'arrive-t-il au jeune? Que devient-il?
Je crois plutôt qu'il faut regarder réellement le problème du jeune. Il faut savoir pourquoi cet individu a commis le crime qu'on lui reproche et comment on peut vraiment l'aider à réintégrer la société.
Je pense que la majorité des citoyens et citoyennes du Québec et du Canada sont prêts à écouter ceux qui ont passé leur carrière, leur vie à cette cause, ceux et celles qui ont reçu une formation dans ce domaine, qui ont rencontré tous les jours des délinquants et qui tentent de les aider. Il faut les écouter, mais aussi il faut se poser les bonnes questions. Nous, à titre de législateurs, avons l'obligation de poser les véritables questions, entre autres, qu'est-ce que je peux faire avec eux, non pas pour eux, mais qu'est-ce que je peux faire avec eux, avec les jeunes délinquants? Pourquoi ce délinquant a-t-il commis ces crimes? Qu'est-ce que je peux faire pour m'assurer qu'à un moment donné, il pourra revivre dans la société comme un citoyen honnête sans qu'on doive le surveiller continuellement?
La motion que nous avons devant nous invite le gouvernement à baisser l'âge de 18 ans moins un jour à 16 ans moins un jour pour qu'un jeune soit considéré comme un jeune contrevenant en vertu de la loi.
Je ne sais pas si les tenants de cette modification savent que près de 80 p. 100 de la clientèle qui, présentement, est traitée et suivie dans les centres d'accueil qui passent par le directeur de la Protection de la jeunesse au Québec se situent justement entre 16
4281
et 18 ans. Ces données ne sont sûrement pas différentes dans les autres provinces canadiennes.
Ce qui est dangereux pour le Québec, et c'est pour ça que je m'oppose farouchement à toute modification de ce genre, c'est que de telles modifications affectent directement la philosophie et tout le système de réadaptation dont nous nous sommes dotés au Québec.
En désirant abaisser l'âge à 16 ans moins un jour, on veut sûrement s'assurer que les jeunes aient un renvoi automatique devant les tribunaux pour adultes. Encore là, ce renvoi existe déjà avec l'actuelle loi. Si le procureur de la Couronne juge que le jeune devrait passer devant les tribunaux pour adultes, il peut le faire s'il a entre 16 et 18 ans, et on ne le fait pas. Le système ne le fait pratiquement pas. Selon les statistiques, c'est seulement 5 p. 100 des renvois qui sont faits devant le tribunal pour adultes. Ceci veut donc dire qu'il faut, non pas s'attaquer aux conséquences d'un phénomène social désastreux, mais plutôt s'attaquer à la cause, à la racine de la criminalité. C'est cela qui importe et c'est cela, je pense, que la motion a complètement ignoré.
Il faut s'attaquer aux causes, comme je l'ai dit tout à l'heure. Mais on peut peut-être se demander ce que sont les causes. Aujourd'hui, j'ai rarement entendu ce qu'étaient les causes de la criminalité.
Il y a eu une table ronde qui s'est penchée sur ce sujet et je vais vous en énumérer quelques-unes. Les causes de la criminalité, c'est entre autres la détérioration du tissu social, le chômage et la pauvreté, l'éclatement de la famille, l'isolement social et la perte de l'esprit communautaire, la déresponsabilisation collective, la violence dans les médias et également à la télévision, la consommation d'alcool et de drogue, l'absence de célérité dans le système judiciaire et de certitude de la peine.
(1515)
C'est cela, l'ensemble des causes réelles de la criminalité et c'est cela qu'on veut oublier avec une motion du genre de celle que nous avons devant nous ce matin.
Je disais tout à l'heure que moi, je m'opposais à des modifications qu'on voulait proposer dans la motion. Moi, c'est à titre de député du Bloc québécois, mais c'est plus que cela, car à l'Assemblée nationale du Québec, on s'est prononcé sur ce sujet-là les 4 et 5 mai derniers, relativement à un débat qui était non partisan, un débat qui était sincère, pendant lequel les partis de l'opposition et du gouvernement se sont interrogés, à savoir, qu'est-ce qu'on devrait apporter à la loi ou qu'est-ce qu'on ne devrait pas apporter à la Loi sur les jeunes contrevenants.
Dans ce débat non partisan, les députés ont adopté de façon unanime une motion et je vais vous la lire: «Cette motion est à l'effet que cette Assemblée réclame que toute modification à la Loi fédérale sur les jeunes contrevenants respecte les lois et politiques du Québec en matière de protection de la jeunesse.» Par cette courte mais explicite motion, la position du Québec est très claire. Aucune personne en cette Chambre ne pourrait prétendre, désormais, ignorer la position du Québec à cet égard.
En terminant, je résumerai la position du Bloc par rapport à cette motion et en ces termes; j'ai dix points que je vais vous énumérer assez rapidement.
Le premier: nous sommes contre la motion qui est présentée par le Parti réformiste parce qu'elle est essentiellement répressive. Et par ce geste, on oublie la finalité de la loi pénale, qui est la réhabilitation du contrevenant. Deuxièmement, l'abaissement de l'âge de 12 à 10 ans ne justifie pas des statistiques de la criminalité. Troisièmement, la motion ne fournit aucun apport pour juguler le problème de la criminalité chez les jeunes. Quatrièmement, l'augmentation de la criminalité chez les jeunes est en grande partie attribuable a des actes d'aggression mineurs entre pairs. Cinquièmement, l'augmentation des taux de criminalité en 1992, selon les données que nous avons jusqu'à ce jour, a été moindre que par les années antérieures, ce qui peut porter à croire qu'un resserrement tel que souhaité par la motion est inutile.
Sixièmement, l'augmentation des statistiques sur la criminalité et l'intérêt des médias pour la criminalité chez les jeunes a fait en sorte d'amplifier le problème de la criminalité juvénile. Septièmement, l'augmentation globale du nombre de crimes avec violence, en grande partie attribuable aux voies de fait mineures. Huitièmement, beaucoup d'intervenants soutiennent que la problématique relative au renvoi d'adolescents devant les tribunaux d'adultes réside dans les attitudes des différents intervenants plutôt que dans la loi elle-même. Neuvièmement, la motion oublie toute la problématique de la rééducation et de la réinsertion sociale et finalement, dixièmement, la documentation actuelle ne soutient pas l'argument voulant que l'alourdissement des sentences et l'abaissement de l'âge aient un effet dissuasif quelconque.
Pour toutes ces raisons, madame la Présidente, vous avez deviné que je suis contre la motion et je serai contre tout projet de loi qui aura pour effet, finalement, de mettre des bâtons dans les roues sur tout le processus de réhabilitation et de réinsertion sociale dont nous nous sommes dotés au Québec, depuis des années, au niveau des jeunes contrevenants.
[Traduction]
M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Madame la Présidente, le dernier orateur a bien résumé certains aspects des problèmes que nous posent les jeunes contrevenants.
Je me demande si le député jugerait raisonnable de ramener l'âge limite de 18 à 16 ans pourvu que le jeune contrevenant âgé de 16 ou 17 ans ait encore la possibilité de demander d'être jugé devant un tribunal pour adolescents, ce qui empêcherait les jeunes récidivistes de se retrouver devant un tribunal pour adolescents, mais permettrait au jeune qui a rarement des démêlés avec la justice de se présenter devant un tribunal pour adolescents.
Au cas où ma question ne serait pas claire, permettez-moi de la reformuler. À l'heure actuelle, la Couronne doit présenter une demande lorsqu'elle veut qu'un jeune contrevenant soit jugé devant un tribunal pour adultes. Ne serait-il pas plus opportun de confier au jeune contrevenant la responsabilité de demander d'être jugé devant un tribunal pour adolescents?
4282
(1520)
[Français]
M. Bellehumeur: Madame la Présidente, comme je l'ai dit tout à l'heure selon les statistiques que j'ai consultées, plus de 80 p. 100 des jeunes présentement qui sont devant le Tribunal de la jeunesse sont justement dans ce groupe de jeunes de 16 à 18 ans. Donc, pour renverser le fardeau de démontrer au tribunal que le jeune devrait plutôt être traité en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants qu'en vertu de la loi ordinaire, que devant un tribunal ordinaire, je vois deux choses. La première, ce sera d'augmenter le fardeau, il va y avoir beaucoup de production de requêtes de ce style-là. Tous les jeunes, 80 p. 100 des jeunes vont demander d'être traités en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, donc ce sera un fardeau supplémentaire pour les tribunaux.
La deuxième chose, c'est qu'à l'heure actuelle, le renvoi peut se faire et c'est seulement 5 p. 100 des cas demandés qui sont renvoyés devant le tribunal pour adultes. Donc, c'est faire un fardeau supplémentaire, de l'ouvrage et de l'encombrement supplémentaire du rôle pour rien, compte tenu du fait qu'on sait qu'à peu près 95 p. 100 des demandes de ces 80 p. 100 vont être accueillies par les juges parce que ce sont les juges qui prennent la décision finale à l'heure actuelle, et les juges ne décident pas, selon la jurisprudence, selon leurs connaissances, selon les éléments au dossier et la preuve apportée, de transférer ces jeunes-là devant le tribunal.
Je pense que c'est déplacer le problème, mais ce n'est pas de le régler, de vouloir faire des jeunes de 16 à 18 ans des demandeurs du renvoi devant le Tribunal de la jeunesse au lieu de l'inverse présentement. Je pense que ce n'est pas une bonne solution.
[Traduction]
Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt): Madame la Présidente, je veux d'abord formuler l'observation suivante. Je crains que le député ne pense que la motion proposée par le Parti réformiste reflète l'opinion de tous les Canadiens de l'Ouest.
En tant que résidante de l'Ouest, je tiens à dire à la Chambre et au député qu'en fait la philosophie qui sous-tend la motion du Parti réformiste, qui semble préférer l'imposition de peines à toute autre solution aux problèmes des jeunes contrevenants, ne correspond pas à l'approche que privilégient les gens de l'Ouest, et certainement pas à l'approche que moi et les autres ministériels de l'Ouest prônons.
J'invite le député à venir faire un tour dans l'Ouest. Je lui servirai de guide et je lui ferai rencontrer diverses personnes qui lui donneront un autre point de vue sur cette question.
Cela dit, je peux comprendre que le député ait cette impression, compte tenu que le Parti réformiste représente une certaine partie de la population de l'Ouest. Cette motion propose des solutions simplistes à des problèmes complexes. Elle reflète l'obsession du Parti réformiste qui veut à tout prix faire des compressions et des économies de bouts de chandelle. Cette motion reflète aussi une approche trop draconienne vis-à-vis de certains problèmes très complexes auxquels nous devons faire face en tant que société.
Je viens de l'Ouest mais j'ai aussi des racines écossaises. Personne ne saurait être plus préoccupé par l'économie que mes ancêtres écossais. Par conséquent, j'aimerais proposer trois dictons à la Chambre et aux réformistes afin qu'ils y réfléchissent attentivement, dans le contexte de ce problème très sérieux. Le premier est celui qui dit: «Faire des économies de bouts de chandelle».
Le deuxième dit: «Payez maintenant ou payez plus tard». Quant au troisième dicton, il dit: «Ouvrage hâté, ouvrage gâté». J'estime avoir toute la compétence voulue pour traiter de ces trois proverbes et vous expliquer pourquoi je les ai retenus.
«Faire des économies de bouts de chandelle». Il est certain que l'on peut envoyer de jeunes contrevenants en prison aujourd'hui et avoir l'impression d'épargner de l'argent parce que nous ne nous préoccupons pas de leur réinsertion sociale, mais nous allons devoir plus tard en payer le prix parce que, comme l'a souligné mon éminent collègue, ces jeunes vont aller à l'université du crime qui leur dispensera une formation très solide. Si nous n'investissons pas afin de les aider à régler leurs problèmes, nous allons nous retrouver avec des criminels qui commettront des délits encore plus graves.
«Payez maintenant ou payez plus tard» reflète la même notion, de sorte que je ne vais pas me répéter.
«Ouvrage hâté, ouvrage gâté». Nous faisons ici allusion aux jeunes contrevenants qui sont aux prises avec une foule de problèmes. Comme l'a fait remarquer mon collègue du Québec, il ne suffit pas de dire que quelqu'un mérite la prison parce qu'il a voulu voler une voiture. Une analyse trop hâtive de la question ou peut-être une réaction instinctive à des tragédies comme celle qui s'est produite en Grande-Bretagne et qu'on a mentionnée plus tôt ne feront que nous coûter beaucoup plus cher au bout du compte.
(1525)
Je félicite mon collègue du Québec d'avoir bien cerné les causes du problème. Je conviens avec lui que la question mérite une étude approfondie. Je félicite le ministre de la Justice pour son attitude à l'égard des jeunes contrevenants. J'exhorte le ministre et son gouvernement et tous les députés qui sont sérieux à s'engager dans une analyse longue et approfondie des causes du problème et à trouver un équilibre entre la nécessité de protéger la société et celle de régler les problèmes qui assaillent nos jeunes.
Je dirai pour terminer que je suis ravie que mon collègue du Québec siège avec moi au Comité de la justice et que j'ai hâte de travailler avec lui à trouver des solutions à tous ces problèmes complexes.
[Français]
M. Bellehumeur: Madame la Présidente, il me fait extrêmement plaisir d'intervenir après des commentaires aussi élogieux d'un député du gouvernement. Ce n'est pas tous les jours qu'on entend ça, je le prendrai avec plaisir aujourd'hui. Je suis également heureux de savoir qu'il y a des gens dans l'Ouest canadien qui pensent différemment du Parti réformiste. Je félicite la députée de s'être levée pour le dire.
4283
Présentement, ce qu'on entend dans cette Chambre est amplifié par tout l'esprit médiatique dont on entoure le cas qu'on voit dans les journaux et tout le dossier des jeunes contrevenants. Je vois que dans l'Ouest canadien, il y a peut-être des gens qui pensent un peu la même chose que nous au Québec. J'invite donc le ministre de la Justice à faire attention lorsqu'il voudra modifier la Loi sur les jeunes contrevenants. Il semble y avoir une position au Québec qui peut peut-être être reflétée à certains égards dans l'Ouest canadien.
La Loi sur les jeunes contrevenants, c'est d'y toucher si on en voit le besoin. Quant à moi, au Québec, on ne voit pas le besoin de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, mais le besoin de l'appliquer justement et de donner les moyens pour qu'elle soit appliquée dans l'ensemble du pays qu'est le Canada.
M. Nic Leblanc (Longueuil): Madame la Présidente, j'ai trouvé cela intéressant quand le député de Berthier-Montcalm nous a parlé de l'institut de Boscoville. J'aimerais bien qu'il nous parle un peu plus de cet institut qui joue un rôle important au Québec, cela serait probablement un exemple pour le reste du Canada.
M. Bellehumeur: Madame la Présidente, j'avais prévu en parler dans mon discours, mais comme j'ai été interrompu, j'ai sauté quelques passages qui parlaient justement de l'institut de Boscoville. Ce qui est intéressant dans cet institut, c'est qu'on a analysé les individus dès leur arrivée. On a fait une analyse des cas pour déterminer en quoi consistait la clientèle, ce qu'était le profil d'un jeune délinquant.
Je pense qu'il sera important pour les réformistes et les tenants de l'abaissement de l'âge de savoir ce qu'est le profil d'un jeune contrevenant, des 25 qui ont été traités à l'institut. Les jeunes coupables ont un passé délinquant très peu chargé, c'est-à-dire qu'il n'y a presque pas de cas de récidive, c'est habituellement la première fois qu'ils font face à la justice.
Deuxièmement, le délit semble être le résultat d'un ensemble de circonstances plutôt que d'une vie organisée selon un mode criminel. La plupart des jeunes proviennent d'un milieu très appauvri à tous les niveaux. Là encore, il y a des cloches qui ont sonné lorsque j'ai entendu des députés dire que ce n'est pas vrai que les jeunes contrevenants viennent surtout de familles défavorisées. Les statistiques disent le contraire. Regardons les statistiques et on verra ce qu'il en est. C'est sûr qu'il y aura toujours un mouton noir quelque part, mais la grande majorité viennent de secteurs défavorisés.
Troisième point, la motivation à être placé dans une institution comme à Boscoville est très bonne. Les gens se reconnaissent. Les jeunes contrevenants reconnaissent que c'est un avantage d'être traités en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants et qu'il y a une possibilité de réintégration. Pour eux, c'est extrêmement important et c'est peut-être pour ça qu'en bout de ligne, les cas de récidive sont à peu près nuls.
À Boscoville, il y a deux phases de traitement. Je pense que j'aurai l'occasion, éventuellement, d'en discuter plus longuement. Je vois que le temps s'écoule. J'aurai le temps éventuellement de discuter des deux phases. Je pense que c'est un document que je vais déposer au Comité de la justice et des affaires juridiques, parce que c'est extrêmement important.
(1530)
Si le gouvernement fédéral peut intervenir, s'il a des sous à investir pour les jeunes contrevenants, il faudrait peut-être qu'il s'organise avec les provinces pour les investir au bon endroit, comme à l'institut de Boscoville, où il est extrêmement important qu'on mette toute l'emphase sur le jeune, le respect de soi et la reconnaissance de l'acte qu'il a commis.
Au bout de la deuxième phase, ils ont accepté-finalement le processus est beaucoup plus long que cela-mais ils ont accepté l'acte qu'ils ont commis et ils vivent avec les conséquences. Mais en bout de ligne, ils sont capables de réintégrer la société afin d'être de meilleurs citoyens, de payer des taxes, de faire vivre le système et d'intégrer la société comme étant des citoyens anonymes.
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Madame la Présidente, je voudrais aussi féliciter l'honorable député pour son discours.
[Traduction]
Si je puis me permettre, je dirai que nous avons eu une très bonne analyse des questions auxquelles nous sommes confrontés en abordant l'examen de la loi.
Nous discutons aujourd'hui de la motion, mais les Canadiens ont clairement dit que la sécurité de leurs collectivités et la criminalité étaient des sujets prioritaires pour eux. Les inquiétudes suscitées par la criminalité chez les jeunes, surtout en raison des événements tragiques survenus ces derniers mois, ont pris une importance particulière pour la Chambre des communes.
Je sais que les députés de tous les partis voudront que je précise d'emblée que lorsque nous parlons des jeunes criminels et des jeunes contrevenants, nous ne parlons que d'un très petit pourcentage de jeunes Canadiens. L'immense majorité d'entre eux veulent s'améliorer et vivre des vies de citoyens productifs.
Néanmoins, la population a exprimé une préoccupation croissante au sujet du fonctionnement de la Loi sur les jeunes contrevenants et de son efficacité. Je me fie à cette loi et je crois aux principes sur lesquels elle repose et au système judiciaire pour les jeunes qu'elle a instauré au Canada. Je pense qu'il faut mettre l'accent à la fois sur la protection de la population et sur la réadaptation des jeunes, mais je reconnais, et le gouvernement reconnaît, que certaines modifications s'imposent maintenant.
[Français]
Comme je l'ai dit, je déposerai en Chambre un projet de loi modifiant cette loi au mois de juin. Ce projet de loi reprendra les engagements pris pendant la campagne électorale d'améliorer la manière dont la loi s'occupe de la criminalité des jeunes, particulièrement en ce qui a trait aux infractions violentes sérieuses.
J'aimerais toutefois mentionner, d'entrée de jeu, que modifier la loi n'est pas en soi la solution à la criminalité des jeunes du Canada. Nous induirions les Canadiens en erreur si nous tenions de tels propos.
4284
[Traduction]
Il doit être clair que, pour faire des progrès dans le domaine de la criminalité chez les jeunes, il ne faut pas seulement rendre notre système de justice plus efficace, mais aussi faire de la prévention de façon constructive en cherchant à rejoindre le plus grand nombre de jeunes possible. Il faut s'attaquer aux causes de la criminalité et reconnaître la nécessité de changer la culture de violence dans laquelle les jeunes Canadiens grandissent aujourd'hui.
À titre de ministre de la Justice, je coordonne, au nom du premier ministre, les efforts de neuf ministères qui s'intéressent au problème de la violence dans la société canadienne. C'est une vaste initiative qui regroupe des ministères à vocation très différente. Par exemple, le ministère du Patrimoine canadien, qui est responsable de la radiodiffusion, se penche sur la question de la violence à la télévision et au cinéma, une des causes du problème. Le ministère de la Santé, qui est responsable des programmes pour les jeunes et les femmes enceintes et qui voit à la prestation des services sociaux dans le contexte des soins de santé, se penche sur certaines conditions qui peuvent engendrer la criminalité dans notre pays. Quant au ministère des Affaires indiennes et du Nord, il participe à cette initiative parce que notre système de justice pénale ne répond pas aux besoins des autochtones.
(1535)
Nous déployons ces efforts parce que nous reconnaissons que nous devons non seulement rendre la Loi sur les jeunes contrevenants plus efficace, mais aussi nous pencher de façon globale sur le problème de la criminalité, particulièrement celui de la criminalité chez les jeunes.
J'aime bien parler des causes sous-jacentes de la criminalité. Lorsque je réponds aux questions qui me sont posées à la Chambre au sujet de la criminalité, j'insiste sur le fait que le problème du crime dans la société canadienne doit être abordé de deux façons. Oui, nous devons modifier les mesures législatives comme la Loi sur les jeunes contrevenants et le Code criminel pour les rendre plus efficaces, pour que les criminels sachent qu'ils seront tenus responsables de leurs actes et qu'ils seront punis. Cependant, nous devons aussi reconnaître et faire comprendre à la population que le système de justice pénale ne pourra pas à lui seul régler le problème du crime dans notre société.
S'il suffisait d'adopter des lois plus sévères, d'imposer des peines plus longues et d'agrandir les pénitenciers pour régler le problème de la criminalité, les États-Unis seraient aujourd'hui le paradis terrestre. Nous avons donc la preuve que cette approche ne peut pas à elle seule donner des résultats. Il est évident que nous devons aussi nous attaquer aux causes de la criminalité.
Quand on me pose des questions sur les causes de la criminalité, personne n'est sûrement étonné de m'entendre parler des familles dysfonctionnelles, du mauvais traitement des enfants, du fait que certains enfants n'ont pas de repas chaud une fois par semaine, du fait que l'école et les programmes d'enseignement n'ont plus d'intérêt pour beaucoup d'enfants, que les jeunes sont très nombreux à penser qu'ils n'ont aucun intérêt dans notre système économique ni aucun avenir à espérer et perdent tout intérêt à préserver et à améliorer le statu quo, car c'est pour eux quelque chose à laquelle ils n'ont aucune part.
Voilà pourquoi je dis que le ministre du Développement des ressources humaines, le ministre des Finances et le ministre de l'Industrie ont tout autant à voir avec la prévention de la criminalité que le ministre de la Justice, car nous ne réussirons à avoir des résultats réels et à long terme que si nous créons une société dans laquelle nous réduirons au minimum les conditions qui engendrent la criminalité.
Il y a près de 30 ans, Lyndon Johnson devenait président des États-Unis d'Amérique, et quelqu'un qui y faisait allusion m'a rappelé récemment une étude effectuée, sauf erreur par la Fondation Eisenhower, au sujet de la Grande Société, le programme législatif que le président Johnson avait proposé en 1964 ou 1965 et par lequel le gouvernement américain lançait une vaste initiative englobant l'éducation pour les jeunes, le renforcement du système de santé, des programmes de Bon départ pour les enfants des milieux défavorisés, bref le genre d'approche globale et intégrée dont je parle aujourd'hui.
L'étude effectuée 25 ans après la mise en oeuvre des programmes de la Grande Société ont démontré les effets de ces initiatives et les conséquences positives que l'on récolte quand on met l'accent sur cet aspect du gouvernement autant que sur la justice pénale.
Ces études ont révélé en effet que pour les enfants qui avaient grandi en bénéficiant des programmes de la Grande Société, le contraste entre leur vie et celle des jeunes qui n'en avaient pas bénéficié était saisissant: un taux d'emploi supérieur, un taux de criminalité inférieur, un plus grand degré de stabilité dans les familles, une meilleure santé. Ce sont là des conséquences démontrables d'approches éclairées qui reconnaissent le lien entre des programmes sociaux conçus et mis en oeuvre efficacement et le système de justice pénale.
En élaborant nos solutions au problème des jeunes contrevenants, nous devons également garder la criminalité juvénile en perspective. Il ne faut pas oublier que ce sont les adultes qui continuent de commettre la majorité des actes criminels au Canada: 79 p. 100 des actes criminels sont commis par des adultes, et ces derniers commettent 86 p. 100 des crimes violents au Canada.
Il ne fait pas de doute que les crimes avec violence sont à la hausse chez les jeunes, mais la hausse de la criminalité violente chez les jeunes porte sur des infractions moins graves. Le nombre des jeunes inculpés d'homicide ou de tentative de meurtre, par exemple, est demeuré relativement stable au fil des années.
La vaste majorité des infractions criminelles commises par les jeunes sont des infractions contre les biens, dans une proportion de 60 p. 100 en 1992. Plus de la moitié de ces crimes étaient des vols d'une valeur généralement inférieure à 1 000 $. Seulement 14 p. 100 des jeunes contre lesquels des accusations ont été portées en 1992 ont été accusés de crimes avec violence, y compris d'homicides, ce qui représente une augmentation de seulement 6 p. 100 depuis 1986.
4285
(1540)
Ne perdons pas de vue ces faits quand nous proposons des modifications à la loi. Nous en proposons et, si vous me le permettez, j'aimerais maintenant en parler.
[Français]
En matière de modification à la loi, nous étudions la possibilité d'augmenter les peines maximales pour meurtre devant le tribunal pour adolescents. Les juges pourraient ainsi prononcer une plus longue peine quand cela serait nécessaire pour assurer la réadaption et mieux protéger le public. Ces peines maximales incluraient des périodes de réinsertion dans la collectivité afin de s'assurer que les adolescents puissent bénéficier de supervision et d'appui lors de leur retour dans la communauté. C'est là un élément déterminant à la fois pour le jeune et pour la protection du public.
[Traduction]
Nous croyons aussi que le système pour adultes est peut-être plus en mesure de s'occuper de certains adolescents de 16 ou 17 ans qui commettent des crimes violents causant des préjudices personnels très graves. En outre, dans l'intérêt public, il pourrait être nécessaire de clarifier la loi pour permettre le partage d'informations entre des professionnels, tels les policiers et les autorités scolaires, et certains membres du public, lorsque des contrevenants violents sont en cause.
Nous envisageons aussi de maintenir le dossier judiciaire plus longtemps dans le cas des jeunes condamnés pour avoir causé des préjudices corporels. Nous reconnaissons aussi le fait que, souvent, les victimes de crimes considèrent le système de justice comme un échec. Une solution à cela consisterait à permettre au tribunal de prendre en considération la déclaration de la victime quand vient le moment de déterminer la peine de l'adolescent, comme cela se fait dans le système pour adultes.
Je ferais remarquer que trop de jeunes au Canada, dont un nombre disproportionné de jeunes autochtones et membres de minorités, se retrouvent en détention. Actuellement, un tiers des jeunes trouvés coupables sont incarcérés et près de la moitié d'entre eux ont commis des crimes contre la propriété.
Quand nous incarcérons des contrevenants à faible risque, nous mobilisons des ressources coûteuses et limitées qui seraient mieux utilisées si on s'en servait pour ceux qui constituent un danger pour la société. L'incarcération augmente également le risque de récidive lorsque ces contrevenants sont libérés. Lorsque c'est possible, ces jeunes devraient recevoir des sanctions de travaux communautaires et être comptables à la collectivité et aux victimes, afin d'être à l'abri de l'influence de contrevenants plus anti-sociaux.
Je souligne qu'en élaborant les modifications que je présenterai à la Chambre dans quelques semaines, j'ai essayé de tenir compte du point de vue des provinces et des territoires. Ce sont les provinces et les territoires qui font appliquer la loi. Le gouvernement fédéral partage les coûts, mais il a pour obligation première d'administrer.
Parallèlement à la présentation des modifications dont j'ai parlé, j'ai dit aussi clairement que le gouvernement se propose d'entreprendre un large examen public de la Loi sur les jeunes contrevenants en cette dixième année depuis son entrée en vigueur. L'examen, auquel participera le Parlement, portera sur l'ensemble de la question, y compris la proposition dont nous sommes saisis aujourd'hui. J'ajouterai que le gouvernement est d'avis que l'âge auquel la loi s'appliquerait est une question que le Comité de la justice devra étudier dans le cadre de l'examen global.
[Français]
J'espère que par le biais de cette révision en profondeur, nous serons capables d'atteindre un plus grand consensus sur la manière la plus efficace de régler les nombreux et difficiles problèmes de la criminalité des jeunes.
En terminant, j'aimerais dire quelques mots sur l'importance de la prévention du crime et particulièrement en ce qui concerne les jeunes.
[Traduction]
Je précise encore que nous abordons la question d'un point de vue très large parce que nous reconnaissons que notre attitude traditionnelle face au crime ne convient pas. Nous sommes en faveur d'une démarche intégrée et globale visant trois objectifs: réduire les incitations au crime, améliorer les efforts de prévention et régler les problèmes sociaux.
(1545)
Je demande à tous les députés d'épauler le gouvernement et d'améliorer la Loi sur les jeunes contrevenants de manière à garantir que nos jeunes, la plus grande ressource du pays, deviennent des citoyens à part entière et respectueux des lois. J'estime que c'est un défi que nous devons tous relever.
M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Madame la Présidente, le ministre le sait, je respecte profondément, comme tous les autres députés de ce côté-ci, la façon dont il aborde nombre de ces questions, et je voudrais formuler certaines de mes questions dans cet esprit.
On a dit qu'il existait de petits mensonges, de gros mensonges et des statistiques. J'admets que l'utilisation de statistiques pose des problèmes. Les miennes semblent refléter celles que le ministre a employées, mais donnent une impression différente. En 1992, 13,7 p. 100 des personnes accusées de crimes avec violence étaient des jeunes. En 1986, la proportion n'était que de 10,5 p. 100. Cela représente une augmentation de 30 p. 100 sur une très courte période.
Sur les 135 348 jeunes contre qui des accusations ont été portées en vertu du Code criminel en 1992, 15 p. 100 ont été accusés de crimes avec violence, progression de 50 p. 100 par rapport aux 10,5 p. 100 de 1986.
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Plus troublant encore, il y a eu pendant cette période une augmentation de 8 p. 100 des crimes avec violence chez les adultes, mais l'augmentation annuelle moyenne a été de 14 p. 100 chez les jeunes.
Dans le débat d'aujourd'hui, quelques libéraux et beaucoup de bloquistes ont fait certaines réflexions, laissant entendre ou disant carrément que le Parti réformiste cédait à la panique, qu'il ne prenait pas de recul, qu'il exagérait. J'oserai dire au ministre, avec tout le respect que je lui dois, que les gens de ma circonscription et de tout le Canada, y compris dans la belle province de Québec, sont profondément inquiets de ce qui se passe.
Je demande au ministre s'il n'y a pas moyen d'introduire dans notre processus parlementaire quelque chose qui s'apparente à ce que nous avons proposé dans notre motion. Il s'agirait pour le Parlement, pour l'actuel gouvernement, d'envoyer rapidement et clairement un signe qui soit la preuve que nous respectons vraiment l'opinion de la population et que les choses sont en train de changer.
Je reconnais qu'un examen approfondi de la part du comité de la justice s'impose. Je l'admets, car je ne voudrais pas d'une mesure législative bâclée. Mais ne pourrions-nous pas, comme nous l'avons proposé, faire au moins un petit geste de bonne volonté envers la population canadienne pour lui faire comprendre que nous prenons la chose au sérieux et que nous allons effectivement le faire afin de regagner la confiance des Canadiens, ce qui est aussi, j'en suis convaincu, le voeu le plus cher du ministre et du gouvernement?
M. Rock: Madame la Présidente, pour traiter d'abord de la préoccupation dont parlait le député, je dirai que je reconnais et respecte cette préoccupation et je fais mon possible pour y sensibiliser les députés et la population canadienne.
Loin de moi l'idée de vouloir en nier l'existence, bien au contraire. Les modifications que nous allons proposer prouvent, à mon avis, que le gouvernement est conscient de cette préoccupation et qu'il entend y donner suite.
(1550)
Je me permets de rappeler au député que dans le document qui a servi de fondement à la campagne en vue des élections qui se sont tenues l'automne dernier, nous reconnaissions que des changements devaient être apportés à la Loi sur les jeunes contrevenants et qu'il fallait notamment prolonger les peines de détention maximales dans les cas d'actes de violence graves, modifier les dispositions de la loi concernant les transfèrements, assurer un meilleur échange d'informations entre les services de police, les conseils scolaires et les autres autorités compétentes, puis insister davantage sur les traitements, la réadaptation et d'autres mesures.
Il ne s'agit pas d'une décision de dernière minute de notre part. Les documents que nous avons produits durant la campagne électorale en faisaient état, et nous tenons à apporter ces changements.
Je reconnais et respecte cette préoccupation. Les modifications que nous proposerons, non seulement à la Loi sur les jeunes contrevenants, mais aussi au Code criminel et au conseil de la prévention du crime en tiendront compte.
Je crois cependant, comme je le disais dans mon discours, que les choses doivent être vues dans leur véritable contexte. Ce contexte est fourni, dans une certaine mesure, par les faits et surtout les statistiques. Le député a cité ses propres chiffres en réponse aux miens et doit savoir que les meilleurs renseignements dont le ministère de la Justice dispose sont contenus dans les statistiques que j'ai fournies et qui démontrent, par exemple, que 14 p. 100 des personnes accusées d'actes de violence en 1992 étaient âgés de 12 à 17 ans, ce qui représente une hausse de 6 p. 100 depuis 1986.
Le député a en main des statistiques différentes des miennes ou, du moins, elles le semblaient lorsqu'il les a présentées. Nous devrions peut-être comparer nos sources pour tenter d'expliquer cette disparité. Mais, peu importe ces statistiques, nous avons suffisamment de preuves pour nous inquiéter et c'est sur cette inquiétude que nous allons nous pencher.
Le député a soulevé deux autres aspects que je voudrais aborder. Tout d'abord, que pouvons-nous dire à la population au sujet des changements concrets que nous proposons? J'ai tenté de répondre à cette question au cours de mes observations, mais peut-être un peu trop obscurément. Cependant, pendant mon discours d'aujourd'hui, j'ai dit que nous estimions nécessaire d'imposer des peines maximales plus longues pour les graves crimes de violence. Nous pensons que certains jeunes de 16 ou 17 ans qui ont été accusés de crimes entraînant de graves lésions corporelles ou la mort devraient peut-être subir leur procès devant un tribunal pour adultes.
J'ai également mentionné la diffusion de renseignements. J'entends par là que, lorsqu'un jeune contrevenant a été condamné à la suite d'un grave crime de violence, la collectivité devrait se protéger en étant mise au courant de cette condamnation. Pour protéger la société, nous devrions confier aux forces policières la responsabilité de diffuser ces renseignements aux conseils scolaires et à d'autres groupes qui doivent être informés. J'ai mentionné, entre autres, les déclarations de la victime devant les tribunaux pour adolescents.
J'ai parlé de ces questions pour donner une idée de l'orientation que le gouvernement entend prendre dans les changements qu'il présentera.
Permettez-moi de traiter de l'autre aspect que le député a soulevé, soit le processus. Le député a demandé comment nous pouvons rassurer les Canadiens que ces changements et les initiatives dont j'ai parlé seront mis en oeuvre dans un délai raisonnable.
J'ai l'intention, comme je l'ai dit, de présenter une mesure législative en juin. Suivant la façon de procéder habituelle, elle sera renvoyée au Comité de la justice pour étude, puis reviendra à la Chambre des communes pour débat et décision.
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Ce processus est fort distinct de l'examen à long terme. Un examen à long terme pourra demander au Comité de six à huit mois d'audiences où il entendra des témoignages, recueillera des preuves et prendra connaissance du point de vue des Canadiens. Après quoi, ayant examiné de façon méthodique et exhaustive notre système de justice pour les jeunes, il produira un rapport. Son rapport et ses recommandations ne seront peut-être pas présentés à la Chambre avant l'an prochain. Mais cela n'est pas lié au projet de loi à court terme, aux modifications précises que j'ai l'intention de proposer en juin.
Je m'attends à ce que cette mesure législative soit renvoyée au Comité et revienne à la Chambre rapidement, sans que l'on ait à attendre les résultats de l'examen à long terme.
(1555)
Grâce à la collaboration des partis d'en face, nous avons adopté une mesure législative en deux jours, cette semaine, et nous l'avons envoyée au Sénat pour qu'il l'examine. Je ne veux pas dire que c'est ce qui va arriver avec ce projet de loi, mais c'est un exemple d'action concertée et efficace de la part des parlementaires qui ne tardera pas à produire des résultats.
Selon mes prévisions, le projet de loi que je présenterai en juin sera examiné et nous reviendra pour que nous puissions prendre une décision au début de l'automne et qu'il puisse entrer en vigueur. Puis, en temps et lieu, le Comité terminera son examen approfondi et présentera son rapport et ses recommandations.
J'espère que cela répond aux points qu'a soulevés le député.
La présidente suppléante (Mme Maheu): J'autorise une brève question au député de Matapédia-Matane.
[Français]
M. René Canuel (Matapédia-Matane): Madame la Présidente, j'ai une question à poser au ministre.
Je suis allé au Tribunal de la jeunesse pendant des années, puisque j'ai enseigné toute ma vie. Je m'aperçois avec raison, vous l'avez dit tantôt, que si on ne débute pas la prévention très jeune, même aux niveaux primaire et secondaire, à ce moment-là, nous sommes obligés d'imposer des lois un peu radicales, beaucoup trop, et c'est toute la société qui va payer par la suite.
Chez nous, des politiciens sont venus dans les écoles et ils ont travaillé très fort. Et puis le budget-au niveau provincial, évidemment-a été coupé. Je suis aussi au courant du fait que le budget de la Gendarmerie royale du Canada pour la prévention a également été coupé.
Est-ce qu'on ne devrait pas mettre l'accent, beaucoup plus que l'accent, mettre le «paquet» sur la prévention, allouer des sommes d'argent et avoir du personnel très qualifié pour pouvoir essayer d'enrayer ce mal dès le jeune âge?
[Traduction]
La présidente suppléante (Mme Maheu): Je prie le ministre de la Justice d'être aussi bref que possible.
M. Rock: Comptez sur moi, madame la Présidente, je serai bref. Ma réponse est absolument. Je suis tout à fait d'accord.
Il y a, dans ma circonscription, un organisme qui s'appelle le Centre George Hull. Ce centre regroupe des professionnels, des psychiatres, des conseillers et des travailleurs sociaux qui concentrent leur attention sur l'aide aux enfants à risque élevé et aux familles qui ont des problèmes.
Je me suis rendu à ce centre, il y a un ou deux mois, pour rencontrer les gens et discuter avec eux de leur travail. Ces gens m'ont expliqué de façon très persuasive que ne pas aider un enfant à risque élevé, dès les premiers stades de l'enfance, c'est faire fi du problème qui, avec le temps, va prendre des proportions tragiques et risque de coûter cher à la société.
Je sais que j'ai très peu de temps, mais je voudrais dire au député que je suis tout à fait d'accord avec lui lorsqu'il dit que, quand nous créerons le conseil de prévention du crime, nous n'aurons peut-être pas beaucoup de fonds à lui consacrer immédiatement. Que le député sache que je me fais fort de voir à son efficacité en veillant à le financer suffisamment à l'aide, en partie du moins, je l'espère, des produits de la criminalité et, s'il le faut, de fonds provenant du secteur privé.
Nous devons coordonner et réorienter les efforts nationaux vers la prévention, comme l'a si bien décrit le député.
Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Madame la Présidente, hier soir j'ai écouté avec intérêt une allocution que le juge Lilles du Tribunal territorial du Yukon a présentée lors d'une conférence qui portait le titre approprié de Justice des jeunes en crise. Le juge Lilles a profité de cette occasion pour faire valoir qu'à son avis le système actuel fonctionnait très bien et que des mesures plus sévères ne régleraient pas le problème.
En fait, certains d'entre nous ont exprimé la même idée ici aujourd'hui.
La seule solution proposée par cet expert juridique est de ne pas retirer les enfants de leurs foyers et de donner plus de moyens aux familles au sein des collectivités.
En résumant l'allocution, la co-présidente de la conférence a demandé pour la forme aux participants quel était le meilleur moyen de combattre ceux qui prônent une coercition accrue.
Les Canadiens doivent réaliser qu'il y a d'ardents défenseurs du système actuel de justice pour les jeunes au sein même de ce système. Certains de ces gens s'opposent si vigoureusement à tout changement important que le mot «combat» fait tout naturellement partie de leur discours.
(1600)
La conférence était donc intitulée Justice des jeunes en crise, mais les participants, et principalement le juge Lilles, ne semblaient pas associer le mot crise aux défauts du système. La crise réside plutôt dans le fait que certaines personnes veulent modifier le système.
L'objectif énoncé est donc que ceux qui oeuvrent à l'intérieur du système doivent combattre cette tendance au changement. Si le système de justice des jeunes est lui-même en crise, en défendant le système actuel, le juge Lilles n'a pas montré qu'il avait conscience d'une crise quelconque.
4288
Malheureusement, il semble que nos décideurs politiques soient trop souvent influencés par un tel point de vue. Nous avons cru pendant trop longtemps, comme on l'a entendu à la Chambre hier, que le crime était causé par «la pauvreté, les familles perturbées, les mauvais traitements infligés aux enfants et le désespoir». Pourquoi persiste-t-on à servir de pareilles absurdités à des êtres humains logiques?
Les députés de cette Chambre ont souffert à des degrés divers de la pauvreté, de la vie en famille perturbée, de mauvais traitements et, à un moment donné ou à un autre au cours de leur vie, d'un sentiment de désespoir. Pourquoi sont-ils devenus des législateurs au lieu de devenir des contrevenants? Par ailleurs, comment expliquer le fait que de nombreux contrevenants viennent de foyers où ils sont à l'aise financièrement et aimés de leurs parents et où leurs possibilités sont illimitées?
Les explications simplistes devant les comportements illégaux ne vont certainement pas corriger la situation actuelle. Nous devrions bien sûr combattre énergiquement la pauvreté, l'éclatement des familles, les mauvais traitements faits aux enfants et l'instabilité psychologique. Toutefois, ce sont des réalités qui ne seront jamais éliminées complètement. Ce que nous devons faire, c'est offrir de l'aide aux membres de notre société qui ont été blessés par ces circonstances, mais en leur faisant bien comprendre que ces facteurs ne nous amèneront pas à tolérer des violations des droits et de la sécurité d'autrui.
Ce qui est à l'origine des inquiétudes actuelles du public au sujet du système judiciaire de notre pays, c'est moins le niveau de criminalité que l'absence de réponse ferme et sans équivoque.
Lorsqu'on a pénétré chez moi par effraction pour y voler des dizaines de milliers de dollars de biens durement acquis, la police m'a dit: «C'étaient probablement des adolescents et même si on les attrape cela ne résoudra pas le problème, car nous en avons déjà vu qui ont été condamnés pour la troisième fois pour vol par effraction et n'ont reçu qu'une peine avec sursis.»
Ce qui inquiète les Canadiens, c'est que le message se répand chez les jeunes qui savent que le mépris des droits d'autrui et la criminalité sont des activités sans grands risques. Les Canadiens sont furieux et maintenant découragés d'entendre les législateurs et les juristes dire constamment et ouvertement aux jeunes qui menacent la propriété et la sécurité d'autrui: «Ne vous en faites pas. Nous sommes ici pour vous aider, pas pour vous enquiquiner. Nous comprenons que ce n'est pas de votre faute. Si vous aviez eu un meilleur logement ou de meilleurs parents, ou si vous aviez vécu dans une autre communauté, nous savons que vous n'auriez pas fait cela.»
Ce que les Canadiens veulent entendre des législateurs et des juristes c'est: « Nous savons que la vie est dure parfois et que cela fait mal. Nous sommes prêts à vous aider, mais il faut d'abord que vous compreniez bien un chose. Vous ne touchez pas aux autres ou à leurs biens. Nous ne le permettrons pas. Si vous choisissez de violer cette simple règle de notre société, les conséquences pour vous ne seront pas plaisantes. L'atteinte aux biens ou à la vie d'autrui est une activité à haut risque dans notre société. C'est une chose que nous ne tolérons pas.»
L'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants envoie justement le message contraire aux jeunes délinquants. Elle leur dit que quoi qu'ils fassent, on les excusera toujours ou presque et on ne les tiendra pas personnellement responsables. Plutôt, on demandera à leur foyer, à leur famille, à leur collectivité de répondre à tous leurs besoins réels ou perçus, afin qu'ils aient le goût d'être de braves citoyens, pourvu, bien entendu, qu'on ne les force pas à vivre dans des conditions inconfortables ni à faire quoi que ce soit qui pourrait réduire leur estime d'eux-mêmes ou nuire à leur liberté d'agir selon leur propre opinion et leurs valeurs. De plus en plus, les jeunes eux-mêmes se disent exaspérés par l'absence de valeurs et de limites sociétales appropriées et sensées. Heureusement, beaucoup d'entre eux, la majorité, continuent d'être soumis à ces contraintes sociétales tout à fait essentielles par leurs parents et la collectivité dans son ensemble. La plupart des jeunes Canadiens sont honnêtes, responsables et respectueux des lois et font honneur à leur famille et à nous tous.
(1605)
Alors qu'ils ont du mal à faire les bons choix face aux tensions et aux défis résultant de l'évolution rapide du monde, nous devons reconnaître leur travail acharné et leur discipline. Une façon importante d'y parvenir consiste à adopter l'attitude contraire face aux jeunes qui commettent des actes illégaux témoignant d'un manque de respect total envers les autres. Comme ce sont eux qui risquent le plus d'être victimes des jeunes criminels, nous devons au moins leur donner un système qui assure leur protection et leur sécurité.
Ce sont les raisons qui m'amènent à appuyer la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui. Le chef de police de Calgary, ma propre ville, M. Borbridge, a confirmé que l'Association canadienne des chefs de police est favorable à ce qu'on abaisse à 16 ans l'âge maximum d'application de la Loi sur les jeunes contrevenants, comme on l'a proposé.
Plus de la moitié des jeunes accusés d'infraction avec violence sont âgés de 16 à 17 ans, et les crimes avec violence dans lesquels des jeunes sont impliqués ont fortement augmenté depuis l'adoption de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Je ne crois pas que les Canadiens réclament un retour inconsidéré à un régime de châtiments sévères dépourvu de toute compassion et négligeant les besoins de réadaptation. Il est toutefois évident qu'ils veulent que le système de justice exige des jeunes qu'ils soient tenus beaucoup plus responsables de leurs actes. Ils veulent que les jeunes contrevenants rendent des comptes à la société et que les droits des citoyens respectueux de la loi soient protégés. Ils veulent que le fait de s'en prendre aux biens et de menacer la sécurité des autres cesse d'être un défi excitant qui ne pose pas grand risque. Ils veulent que les conséquences subies par ceux qui enfreignent délibérément la loi soient assez graves et désagréables pour inciter les jeunes à la prudence et les dissuader d'enfreindre les droits des autres.
La nature et le genre de conséquences possibles pour ces actes peuvent bien sûr faire l'objet d'un débat. Je crois toutefois que la grande majorité des gens que nous représentons, ceux qui nous ont choisis pour les représenter et qui paient la note au bout du compte, souhaitent fortement que la loi soit modifiée dans le sens proposé.
4289
Je suggère que nous fassions notre travail de législateurs en répondant favorablement à la demande du public, qui désire plus de protection. Je crois que cette motion est un pas dans la bonne direction et j'exhorte les députés à l'appuyer.
M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Madame la Présidente, j'ai bien aimé les commentaires de mon honorable collègue. Mais je dois lui poser une question.
Elle a dit qu'à son avis, la pauvreté et la situation sociale n'étaient pas à l'origine de la criminalité chez les jeunes et elle n'en veut pour preuve que le fait qu'il existe bien des gens qui viennent d'un milieu pauvre et dysfonctionnel et qui sont honnêtes. Elle a même cité des députés de cette Chambre.
J'aimerais que la députée me dise si elle croit que tout le monde est pareil. Ne pense-t-elle pas que chaque individu peut réagir différemment à la condition de pauvreté et que, par conséquent, certains peuvent être portés au crime alors que d'autres peuvent être portés à être honnêtes dans les mêmes circonstances?
J'aimerais qu'elle m'explique la logique de son argument et qu'elle me dise en outre à quoi elle attribue les actes criminels chez les jeunes.
Mme Ablonczy: Madame la Présidente, je remercie mon honorable collègue de sa question.
Il est clair que la pauvreté et les familles dysfonctionnelles sont des facteurs de criminalité. Je ne le mets nullement en doute. Mais cela n'excuse pas les actes criminels. J'estime que ce n'est pas parce que ces facteurs existent dans la vie d'un individu que nous devons l'excuser d'avoir choisi de violer les droits des autres. Ce n'est pas une excuse légitime.
(1610)
Nous devons reconnaître qu'il est difficile de prendre de bonnes décisions sous l'influence de ces facteurs, mais nous devons continuer à exiger ce genre de décisions. Bien des gens se trouvant dans ces mêmes circonstances sont capables de prendre de bonnes décisions et le font régulièrement.
Quant aux causes de la criminalité, je serais probablement canonisée si je pouvais les décrire en une phrase. Au lieu de rechercher les causes, nous devrions plutôt nous arrêter sur un petit détail appelé la responsabilité de l'individu. On peut toujours expliquer pourquoi on agit de telle ou telle manière, mais en tant que société, nous devons dire que, quelles qu'en soient les raisons, ces choix sont inacceptables. Et c'est sous cet angle que nous devons aborder ces agissements.
Mme Sue Barnes (London-Ouest): Madame la Présidente, la députée a déclaré qu'on avait pénétré chez elle par effraction et que c'étaient probablement des jeunes.
La même chose s'est produite chez moi et, comme personne n'a été arrêté, j'ignore qui en est responsable. Lorsque nous discutons, il est très important d'éviter de généraliser, de blâmer automatiquement les jeunes. Dans ce cas, il aurait très bien pu s'agir d'un adulte. La députée a ajouté que la Police avait fait cette observation; quoi qu'il en soit, il faut éviter de telles généralisation.
Nous pouvons traiter des faits. Or, nous ignorons qui a pénétré par effraction chez moi et chez la députée. J'aimerais entendre ce que la députée a à dire au sujet des faits réels et des perceptions.
Mme Ablonczy: Madame la Présidente, je ne voulais pas porter atteinte à la réputation des jeunes, je ne faisais que rapporter les paroles des policiers. Ils m'ont dit que, d'après la nature des biens volés et la façon de procéder pour pénétrer dans la maison, on pouvait croire qu'il s'agissait de jeunes.
Cela dit, ils ont déclaré qu'ils ne pourraient pratiquement rien faire, même s'ils arrivaient à identifier les malfaiteurs. Ce que j'ai compris, c'est que, s'il s'agissait de jeunes, je n'avais qu'à accepter ce qui s'était passé, car rien n'empêcherait les jeunes de commettre ces actes.
La présidente suppléante (Mme Maheu): À l'ordre. En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Bourassa, les réfugiés; le député de Vancouver Quadra, le Traité sur le saumon du Pacifique; le député de Davenport, le Rwanda.
M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan): Madame la Présidente, dans le cadre de ce débat sur la motion visant la Loi sur les jeunes contrevenants, je constate une différence entre la perception qu'ont les Canadiens du problème et celle qu'en ont les ministériels.
Je pense que le public est d'avis que quelque chose ne va pas et que des mesures s'imposent. Jusqu'à un certain point, le gouvernement reconnaît cet état de faits. Lorsque j'écoute le ministre de la Justice, celui-ci convient qu'il y a quelque chose qui ne va pas et que le gouvernement veut prendre des mesures. Toutefois, le ministre ne semble pas animé par le même sentiment d'urgence que nous.
Quoi qu'il en soit, où se situe la réalité? Lorsque je lis ce que les médias disent des jeunes contrevenants et que je regarde ce qui se passe, je me demande s'il n'y a pas un peu d'exagération quelque part.
(1615)
Afin d'essayer de situer le problème, je me suis penché sur ma propre expérience de vie et je me suis demandé comment les choses se passaient lorsque j'étais enfant. Il ne fait aucun doute que la situation était différente lorsque je grandissais à Vancouver. À l'époque, nous avions beaucoup moins de privilèges et on ne voyait pas souvent de policiers. Quand on en voyait, il y avait tout lieu d'être inquiet. C'est un fait qu'il y avait quelques mauvais garnements dans le quartier qui avaient tendance à se mettre dans le pétrin.
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C'est le souvenir que j'ai de la situation à l'époque. Il y avait certainement des jeunes contrevenants, tout comme il y en a aujourd'hui.
Revenons à la situation actuelle. Les jeunes d'aujourd'hui sont-ils différents de ceux de ma génération? Je ne peux que répondre non, parce qu'ils ne peuvent tout simplement pas être très différents. Les différences importantes sont le résultat d'une lente évolution. Les jeunes d'aujourd'hui sont donc forcément semblables à ceux de mon époque. Par conséquent, qu'est-ce qui est différent? À mon avis, c'est la société qui a changé. C'est toute la société dans laquelle évoluent les jeunes d'aujourd'hui qui a changé, y compris nous tous. Nous avons changé. Nous formons la société au sein de laquelle évoluent nos enfants. Que faisons-nous de différent?
L'un des changements se situe évidemment au niveau des parents. De nos jours, il arrive souvent que les deux parents travaillent et ne soient pas à la maison. Les enfants ne bénéficient pas du même encadrement familial qu'auparavant.
L'autre changement majeur selon moi est la notion de responsabilités vis-à-vis celle des droits. Aujourd'hui, tous parlent de leurs droits mais jamais de leurs responsabilités. J'imagine que ce phénomène est en partie lié au droit, à la Charte des droits et aux autres choses du genre. C'est aussi le reflet de notre société, une société qui met l'accent sur les droits de l'individu plutôt que sur les responsabilités de chacun. C'est là une partie du problème.
Lorsque nous abordons cette question, nous ne devrions pas condamner simplement le gouvernement, la loi ou encore les circonstances influant sur le comportement des jeunes contrevenants. Nous devrions examiner la société en général et nous demander quels sont les problèmes et quelles sont les erreurs pour lesquels nous devons, individuellement, accepter une part de responsabilités.
Chose certaine, la philosophie de notre société m'apparaît comme l'un des plus graves problèmes à régler. J'ai l'impression que le pendule a atteint un extrême et que la société est prête à le voir revenir vers le milieu, sans aller, je l'espère, jusqu'à l'autre extrême, car je déteste les extrêmes et je préférerais que les choses restent plus équilibrées.
Lorsque j'évoque le passé, je revois les nombreuses années que j'ai passées dans l'armée. L'armée avait ce qu'on appelait les casernes de détention militaire. Il en existait plusieurs un peu partout au Canada. Aujourd'hui, il en reste une, je crois, à Edmonton. La caserne de détention militaire était, à l'époque, une véritable institution, et elle l'est encore aujourd'hui. Permettez-moi de vous raconter ce que je sais de ces casernes.
(1620)
Il ne m'est jamais arrivé, fort heureusement, d'être détenu dans ce genre de caserne, mais si l'un des jeunes soldats commettait une infraction assez grave pour devoir subir un procès par voie sommaire, mais pas assez grave pour se retrouver en cour martiale, le commandant pouvait lui infliger une peine de 30 jours d'emprisonnement dans une caserne de détention militaire.
Je sais, pour l'avoir observé, que les jeunes qui passaient 30 jours en taule, 30 jours dans une caserne de détention militaire, en revenaient changés à tout jamais. Ils ne voulaient plus jamais retourner dans une caserne de détention. Ils obéissaient. Ils allaient même jusqu'à modifier leur comportement pour éviter une autre peine de 30 jours en taule.
Que leur faisait-on là-dedans? Est-ce qu'on les battait? Non pas. Il n'y avait pas de châtiment corporel, pas même pour les simples soldats. Ce qu'on faisait, c'est qu'on les disciplinait à mort. Lorsqu'ils y entraient, on leur coupait les cheveux en fonction des normes fixées par la prévôté qui dirigeait l'endroit et on ne leur demandait pas leur avis.
Aujourd'hui, un jeune contrevenant qui est condamné, disons, à une peine de six mois, peut faire ce qu'il veut pendant ces six mois. Il peut avoir les cheveux longs, porter les vêtements qu'il veut, parler à sa guise, regarder la télévision en couleurs. C'est fantastique!
Les 30 jours de taule d'autrefois étaient bien plus durs que les six mois d'aujourd'hui. On vous coupait les cheveux, on vous disait quand parler. Vous ne pouviez pas être insolent. On vous disait exactement comment cirer vos chaussures, y compris les semelles, comment astiquer les cuivres, comment faire votre lit. Vous étiez surveillé de près à chaque minute de ces 30 jours par un sergent qui s'y connaissait en discipline. Vous n'étiez pas battu, mais vous deviez tout faire comme il faut pendant cette période.
Je le répète, cela vous changeait un jeune pour la vie. Après cela, il en avait assez et il était décidé à bien se tenir.
Je dirai aux députés et aux Canadiens en général que si ce châtiment-car c'était bien un châtiment-était efficace, on pourrait certes y recourir à nouveau. Qu'est-ce qui nous empêche en tant que société d'en faire seulement l'essai, de confier à un peloton composé de types du genre des anciens membres de la prévôté le soin de s'en occuper. Je parie que nous obtiendrions de bons résultats.
Pour terminer, je voudrais dire un mot au sujet de quelque chose d'autre. J'appuie cette modification et je signale aux députés et même à tous les Canadiens qu'un référendum aura lieu à titre d'essai en juin, à Vancouver-Nord, en Colombie-Britannique. Surveillez-le bien. Ce référendum se fera au moyen de. . .
La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais le temps de parole du député est expiré. Le député de Hamilton-Wenworth a la parole pour poser une question ou présenter des observations.
M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Très brièvement, madame la Présidente. Sauf erreur de ma part, Amnistie Internationale décrit l'isolement cellulaire comme une forme de torture. Je me demande si le député peut dire quelques mots à ce sujet.
M. Ringma: Madame la Présidente, ils ne sont pas en isolement cellulaire lorsqu'ils sont dans les salles disciplinaires. Ils sont avec les autres détenus. Ils doivent sortir, faire les exercices, et le reste. Ce n'est qu'une forme rigoureuse de discipline.
(1625)
Si vous n'êtes pas d'accord, c'est très bien, mais je trouve que cela donne des résultats. J'aimerais que nous en fassions l'essai pour voir si cela peut marcher avec nos jeunes. Je parie que nous obtiendrions des résultats.
Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Madame la Présidente, le député soutient que ce n'est pas une forme de mauvais traitement physique, mais à mon avis, les mauvais traitements peuvent prendre plusieurs formes, y compris celle de la cruauté mentale. Le système qu'il décrit me paraît très sévère.
Le député a aussi laissé entendre que ces individus avaient été transformés pour la vie. Je crois que les gens qui sont soumis à des formes accentuées de cruauté mentale sont transformés pour la vie. Nous savons tous ce qui se passe lorsque nous battons régulièrement un chien.
Il a été amplement démontré, et il existe de nombreux documents sur le sujet, que beaucoup des jeunes enfants qui ont maille à partir avec la justice ont subi un traumatisme à la naissance et souffrent de graves difficultés d'apprentissage, aussi je ne vois pas très bien ce que le genre de traitement proposé par le député pourrait faire pour aider ces enfants en déficit affectif et malades.
M. Ringma: Madame la Présidente, je dois dire que je suis d'accord avec la députée sur son dernier commentaire. Bien sûr, il faut tenir compte des cas de maladie. Néanmoins, il y a probablement un juste milieu à trouver. Nous pourrions dire: «D'accord, nous reconnaissons que tu es malade, nous t'aiderons à guérir, mais entre-temps, voici les règles et tu dois les suivre.»
M. Gordon Kirby (Prince-Albert-Churchill River): Madame la Présidente, je veux d'abord faire une brève observation. Il y a probablement des différences entre les gens qui sont incarcérés dans une prison militaire et ceux qui sont incarcérés dans une prison ordinaire. Une de ces différences, c'est que ceux qui sont incarcérés dans une prison militaire veulent sortir de prison et continuer de servir dans les Forces armées. Ils ont quelque chose à perdre s'ils n'obéissent pas.
Je crois qu'il faut reconnaître que beaucoup de nos jeunes n'ont rien à perdre et que ce genre de traitement ne les aiderait pas.
Le Parti réformiste parle de compressions budgétaires. Il est question dans cette motion de réduire l'âge minimum et l'âge maximum prescrits aux fins de l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants. Cela alourdirait considérablement le fardeau qui pèse sur nos établissements de détention pour adultes et pour jeunes contrevenants.
Si nous parcourions le pays, nous verrions que nos prisons sont déjà surpeuplées. Dans le contexte des compressions budgétaires, comment allons-nous faire pour construire plus de pénitenciers alors que nous avons de la difficulté à assumer le coût des installations existantes? Comment allons-nous faire pour payer tous les nouveaux employés qu'il faudra embaucher? Voilà un autre exemple de cas où on propose des solutions sans penser au coût. Que répond le député à cela?
M. Ringma: Madame la Présidente, c'est avec grand plaisir que je réponds à la question du député. Si vous instituez un système où il y a une forme quelconque de châtiment, vous réduirez le nombre de détenus. Ces derniers ne voudront pas retourner en prison. Vous accomplirez en 30 jours dans le genre de prison dont je parle ce que vous n'arrivez pas à accomplir en six mois ou même en un an dans les pénitenciers modernes d'aujourd'hui où les détenus jouissent de tous les plaisirs de la vie. Faites-leur passer 30 jours pénibles en prison et vous verrez qu'ils ne voudront pas y retourner. Vous réduirez ainsi le nombre de détenus, ce qui entraînera une diminution des coûts. De plus, on aura de moins en moins besoin de ces établissements. C'est une proposition très sincère.
_____________________________________________
4291
AFFAIRES COURANTES
(1630)[Traduction]
COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Madame la Présidente, le moment me semble bien choisi pour proposer une motion très importante. Je propose donc: Que le vingt-et-unième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, déposé plus tôt aujourd'hui, soit adopté.Je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour adopter la motion.
(La motion est adoptée.)
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4291
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ-LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
La Chambre reprend l'étude de la motion.Mme Sue Barnes (London-Ouest): Madame la Présidente, lutter efficacement contre la criminalité juvénile constitue une priorité du gouvernement. Les Canadiens, y compris les jeunes, se préoccupent beaucoup de leur sécurité. La violence dans les écoles de notre pays est particulièrement importante. Comme j'ai moi-même trois enfants qui fréquentent l'école primaire, ce problème ne me laisse certainement pas indifférente.
Quelle est la solution au problème des jeunes qui commettent des actes criminels? Est-ce la Loi sur les jeunes contrevenants qui fait problème? Est-ce qu'un simple changement des limites d'âge, comme le recommande la motion, règle le problème? Il est clairement nécessaire d'améliorer la façon dont la loi s'attaque à la criminalité juvénile, et spécialement au crime grave commis avec violence. En examinant les modifications à apporter à la loi, cependant, il est essentiel de commencer par bien comprendre la loi et la nature et l'ampleur de la criminalité.
4292
Comme je l'ai dit plus tôt cette semaine à la Chambre, nous devons distinguer entre la perception et la réalité.
Nombreux sont les Canadiens qui croient que la Loi sur les jeunes contrevenants est impuissante, qu'il n'y a pas de conséquences pour un jeune délinquant déclaré coupable d'une infraction criminelle. La réalité est en fait bien différente. Selon la gravité de l'infraction, ses circonstances et le jeune traduit devant le tribunal, nous devons nous rappeler que le tribunal a affaire à des cas individuels. Les conséquences pour le jeune délinquant peuvent varier depuis l'amende, ou le travail bénévole au profit de la collectivité, ou la probation, jusqu'à la détention. Environ un tiers des jeunes traduits devant les tribunaux sont condamnés à la détention.
La loi prévoit également le transfert possible à un tribunal pour adultes. Aujourd'hui, s'il est trouvé coupable de meurtre par un tribunal pour adultes à la suite d'un renvoi, un jeune pourrait passer sa vie en détention. Prenons un exemple à l'appui. Un jeune de 16 ans qui est condamné pour meurtre par un tribunal pour adultes et qui vit jusqu'à 75 ans pourrait passer 59 ans de sa vie en détention. Il y a une possibilité de libération conditionnelle, certes, mais ce n'est qu'une possibilité.
Les gens, notamment les jeunes, ne comprennent pas non plus pourquoi, lorsqu'il y a condamnation devant un tribunal pour adolescents, un dossier suivra le jeune pendant de nombreuses années, avec les conséquences que cela comporte sur ses possibilités d'études et d'emploi.
Actuellement, pour les infractions moins graves, le dossier est conservé pendant cinq ans à partir de la date de la condamnation. Dans le cas d'infractions punissables sur acte d'accusation, il est conservé pendant cinq ans à partir du moment où la peine finit d'être purgée et à condition qu'aucune autre infraction punissable sur acte d'accusation ne soit commise entre-temps.
Bien des gens croient aussi que, à cause de la Loi sur les jeunes contrevenants, les policiers ont les mains liées lorsqu'ils ont affaire à des jeunes; cette idée va d'ailleurs de pair avec celle selon laquelle les jeunes ont trop de droits. En fait, les policiers ont, à l'égard des jeunes et des adultes, les mêmes pouvoirs d'enquête et d'arrestation.
La Loi sur les jeunes contrevenants renforce même les pouvoirs des policiers en établissant clairement que les empreintes digitales et des photographies peuvent être prises et que des dossiers criminels peuvent être établis. Qui plus est, pour diverses catégories d'infractions, le taux de condamnation devant les tribunaux pour adolescents est nettement plus élevé que celui devant les tribunaux pour adultes.
Quant à la nature des crimes commis au Canada, il est très important de situer dans une juste perspective les crimes violents perpétrés par des jeunes. Au Canada, 86 p. 100 des crimes violents sont commis par des adultes, et 14 p. 100 sont commis par des jeunes de moins de 18 ans. D'après les statistiques nationales, environ la moitié des crimes violents commis par des jeunes correspondent à des voies de fait simples. Il peut s'agir, par exemple, d'une gifle, d'une poussée ou d'un coup donné dans une cour d'école. Quoi qu'il en soit, entre 1986 et 1992, une moyenne de 46 jeunes par année ont été accusés d'homicide en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Durant les années 70, lorsque la majorité des provinces traitaient les jeunes de 16 et 17 ans comme des adultes, 60 jeunes de moins de 18 ans étaient accusés d'homicide. En somme, il y a eu moins d'accusations d'homicide portées sous le régime de la Loi sur les jeunes contrevenants, en général.
(1635)
Il ne faut pas perdre de vue que beaucoup de ces accusations n'aboutissent pas à une condamnation. En 1992-1993, le Tribunal de la jeunesse a entendu 40 causes de meurtres. Il y a eu 16 condamnations et six causes ont été renvoyées aux tribunaux pour adultes. Dans 18 cas, il y a eu sursis ou retrait ou la cause a été rejetée.
Je ne veux pas par là minimiser l'importance des crimes avec violence. Toute violence est inadmissible. Je ne veux pas dire non plus que nous ne pouvons pas améliorer la loi. Nous pouvons et nous devons le faire. Il faut toutefois veiller à ce que les changements assurent vraiment une meilleure protection à la population à court et à long termes et une meilleure réadaptation des jeunes contrevenants.
Aucune modification simple comme celle qui est proposée dans la motion à l'étude n'améliorera le système de justice pour les jeunes. Je suis prête à évaluer tous les faits qui seront présentés lorsque le Comité de la justice examinera cette mesure législative-je suis d'ailleurs vice-présidente de ce comité pour le parti ministériel-, mais je ne suis pas disposée, a priori, à modifier les âges prévus par la loi.
Dans ma circonscription, celle de London-Ouest, le London Family Court Clinic a souligné avec insistance dans son rapport de 1993 que les âges actuels, soit 12 et 17 ans, sont tout à fait satisfaisants. Le Dr Lee Shed, de cette clinique, me dit qu'aucune recherche ou étude clinique ne permet de dire que la criminalisation d'enfants de 10 ans garantirait la sécurité des collectivités. Ce sont plutôt des programmes appliqués en dehors du système de justice qui peuvent améliorer cette sécurité.
Le système canadien de justice pour les jeunes est à une croisée des chemins. Si des modifications législatives s'imposent, elles ne sauraient suffire. Nous devons accroître nos efforts de prévention du crime. Nous devons mieux coordonner le fonctionnement du système de justice juvénile avec les secteurs de l'éducation, de la santé et la protection des enfants. Pour ce faire, nous aurons besoin de la collaboration des provinces.
Nous devons déterminer avec soin comment les parents pourraient jouer un plus grand rôle dans la prévention du crime chez eux et dans l'aide accordée pour la réhabilitation de leurs enfants qui auraient commis une infraction criminelle. Une démarche multidisciplinaire conviendrait mieux et serait plus responsable qu'une démarche ponctuelle.
Nous devons nous mettre à l'écoute des professionnels qui remportent du succès. Nous devons prêter attention aux résultats de recherches qui montrent qu'on peut avoir du succès. Ces mêmes professionnels peuvent également tracer le profil psychologique des jeunes qui commettent des crimes violents.
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Il y aura certes toujours des cas imprévisibles, mais il y en a beaucoup qui sont prévisibles et qu'on peut prévenir. Nous devons surveiller ces profils psychologiques parce qu'ils donnent des indications précieuses nous permettant d'agir sur certains comportements avant qu'il ne soit trop tard.
Les signes d'un comportement trop agressif sont souvent détectés à l'âge préscolaire et certainement à l'âge de cinq, six, sept ou huit ans. Le moyen le plus efficace d'aider les enfants qui ont un comportement agressif consiste à réagir dès que le comportement se manifeste. Sinon, le comportement agressif s'établira et sera très difficile à modifier. Si on n'agit pas sur de tels comportements quand les enfants sont jeunes, on aura encore plus de difficulté à les modifier lorsque les enfants atteindront l'adolescence. Il est clair que la collaboration entre parents, éducateurs et médecins, au besoin, est la clé.
Des messages de base doivent être adressés constamment aux enfants et aux adolescents. Ces messages doivent transmettre un ensemble de valeurs axées sur l'égalité des races et des sexes et le respect fondamental de l'intégrité de toutes les personnes, quel que soit leur âge.
La violence conjugale et les tentatives de domination ou d'abus de pouvoir de la part de certains adultes transmettent les mauvais messages à nos enfants et à nos adolescents. J'ai hâte que la Loi sur les jeunes contrevenants soit modifiée et j'ai hâte d'étudier la mesure législative dont nous allons bientôt être saisis par notre ministre de la Justice.
J'ai hâte également que le comité parlementaire procède à l'examen exhaustif de notre système de justice applicable aux jeunes. Je suis absolument convaincue que cet examen aboutira à un plan cohérent qui incitera les Canadiens à travailler ensemble dans l'intérêt de nos jeunes et de nos enfants et dans le but d'avoir des communautés canadiennes plus sûres.
(1640)
Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Madame la Présidente, j'ai beaucoup apprécié tout ce que la députée nous a dit cet après-midi.
J'ai assisté à la rencontre sur la justice criminelle qui s'est tenue la semaine dernière à Calgary. J'ai pu passer du temps avec les parents de victimes et je me suis entretenue avec certains d'entres eux, notamment une néo-Canadienne dont le fils avait été tué dix jours plus tôt par un jeune qui avait fait feu sur lui. Cette femme n'a plus de fils et n'a pas de mari au Canada. Elle n'était accompagnée que de sa fille.
Au nom de cette mère que j'ai rencontrée à Calgary, je voudrais interroger ma collègue sur le contenu de son discours, plus particulièrement au sujet de l'approche multidisciplinaire qu'elle recommande d'adopter. Le ministre de la Justice parlait cet après-midi d'une approche à deux volets. Il me semble y avoir une certaine confusion dans la sémantique ou encore dans les intentions du gouvernement.
Nous avons d'une part une mère qui demande qu'on fasse quelque chose, qui cherche des réponses, qui a perdu son fils et, d'autre part, un gouvernement qui me donne une réponse différente.
J'aimerais que la députée réponde à mes observations et qu'elle m'explique la différence entre l'approche multidisciplinaire dont elle parlait et l'approche à deux volets dont le ministre de la Justice parlait plus tôt cet après-midi.
Mme Barnes: Madame la Présidente, je suis tout à fait ravie de répondre à la question de la députée d'en face. L'approche multidisciplinaire consiste à intégrer tous les ministères du gouvernement et tous les paliers de gouvernement. La santé en est un bon exemple.
Quand je suis allée à Vancouver, récemment, j'ai visité une école publique située au coeur de la ville. Dans cette école, on sert aux élèves non seulement le petit déjeuner, mais aussi le repas du midi. Je dirais que c'était là la plus grande partie de l'apport nutritionnel de ces enfants. L'enseignement s'y fait dans un cadre très difficile. Cela m'a sensibilisée aux approches multidisciplinaires nécessaires dans une salle de classe, à la difficulté d'apprendre aux enfants à lire et à écrire et aux différences de culture. Cette école est très différente d'un grand nombre d'écoles dans ma circonscription.
Ce que nous devons faire, c'est gérer nos problèmes non pas de façon compartimentée, c'est-à-dire que les ministères ne se consultent pas les uns les autres, mais de façon ouverte, de telle sorte que les responsables de la santé vont consulter ceux de l'éducation qui vont consulter ceux de l'emploi. La pauvreté est la cause d'une grande partie de la criminalité. Nous devons comprendre cela. La violence engendre la violence. Avec la destruction des familles et la transformation de la vie familiale, la famille n'est plus ce qu'elle était du temps du programme télévisé Leave it to Beaver. C'est impossible.
Il y a dans notre pays beaucoup de familles pauvres où l'on ne s'occupe pas des enfants qui sont laissés à eux-mêmes. Il y a beaucoup de familles où la femme, pour échapper à la violence de son conjoint, quitte le foyer pour la pauvreté en emmenant ses enfants avec elle. C'est ce qui arrive dans ce pays.
Peu importe que nous parlions ou non de justice. Il y a des aspects multidisciplinaires à la justice. Peut-être est-il temps que nous réexaminions les mesures législatives relatives au contrôle des armes à feu pour empêcher que les armes à feu ne détruisent des familles et ne fassent des victimes.
Aucun parti à la Chambre n'a l'exclusivité en matière de sensibilité. Nous sommes tous, en tant que députés, préoccupés au sujet des victimes dans notre société. Les députés de ce côté-ci de la Chambre respectent les victimes.
(1645)
Il est important de se rappeler que nous devons nous attaquer à tous les aspects du problème-et ils sont nombreux-et nous aurons le temps de le faire durant cette législature. Je fais l'un de mes objectifs d'être très active dans ce domaine.
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M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Madame la Présidente, je félicite la députée de ce brillant discours. Elle a soulevé un certain nombre de points très valables. Je pense cependant qu'elle ne considère qu'une partie du problème.
Ce qui choque les habitants de ma circonscription et qui me choque, personnellement, c'est que personne, apparemment, ne cherche à défendre les droits de la société dans son ensemble. Nous parlons continuellement des droits de la victime, des droits de l'accusé, des droits du coupable. Nous faisons de beaux discours sur les droits de la victime. Mais malheureusement, et c'est franchement dommage, il se trouve que récemment, les droits de la victime en sont venus à passer après ceux du criminel.
La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais votre temps de parole est expiré. Voudriez-vous que la députée vous réponde brièvement?
M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Je voudrais essentiellement, madame la Présidente, que la députée me dise ce que son parti va faire pour que les droits de la société l'emportent sur ceux des criminels.
Mme Barnes: En réponse à cette question, madame la Présidente, nous allons veiller à ce que la Loi sur les jeunes contrevenants se penche sur la réhabilitation des enfants pour que, au bout du processus, ils soient devenus de meilleurs citoyens. Pas seulement grâce aux peines imposées, mais aussi grâce à la modification des comportements. Je crois que si nous savons bien utiliser nos ressources, nous pourrons y parvenir et réussir à briser le cycle.
M. Jack Ramsay (Crowfoot): Madame la Présidente, je tiens à remercier tous les députés qui ont participé à ce débat. Je voudrais faire quelques observations au sujet de ce projet de loi. Bien sûr, je l'appuie et je prends la parole en ce sens.
J'ai grandi dans une famille nombreuse où les châtiments corporels étaient de rigueur. Nous connaissions les règles et, évidemment, les conséquences qu'entraînait leur violation. Aujourd'hui, je connais les conséquences de leur violation.
J'ai quatre enfants et je ne recours pas au châtiment corporel chez moi. Mais ils savent que s'ils violent les règles dans ma maison, je serai prêt à les punir et ils en subiront les conséquences. Les règles sont très rarement violées dans ma maison. Bien entendu, ma meilleure arme pour empêcher mes enfants de mal se conduire, c'est de leur manifester mon amour et de me préoccuper de leurs besoins.
En 1984, la Loi sur les jeunes contrevenants est entrée en vigueur et abrogeait la Loi sur les délinquants juvéniles. Depuis cette année-là, 46 homicides en moyenne ont été commis chaque année par des enfants de 12 à 17 ans. Des chiffres révèlent qu'en 1991, 22 p. 100 des 679 000 accusations de violation des lois fédérales ont été portées contre des jeunes. Sur les plus de 146 000 accusations portées contre des jeunes, 13 p. 100 sont liées à des actes de violence. Ces 18 000 accusations d'actes de violence représentent une augmentation de 102 p. 100 par rapport à 1986. Cependant, au cours de la même période, la population des adolescents a diminué de 1,8 p. 100.
Je demande à ceux qui prétendent que la Loi sur les jeunes contrevenants fonctionne: est-ce que 46 meurtres par année représentent une victoire? Une augmentation de 102 p. 100 dans les attaques violentes prouve-t-elle que la loi est un succès? Si le système fonctionne, il n'y a pas lieu de le changer, bien sûr. Mais s'il ne fonctionne pas, nous devrions chercher sérieusement des moyens de le réformer.
Je ne crois pas que la loi soit un succès, et ceux qui le croient n'ont aucune idée de ce que c'est qu'un meurtre. Ils ne connaissent pas la peur, la douleur et l'angoisse que le criminel fait subir à sa victime. Ils ignorent tout des actes de désespoir des victimes qui implorent en vain leur meurtrier de les épargner.
Les chiffres que je viens de citer représentent un échec, l'incapacité de répondre au comportement criminel de nos jeunes. Ils montrent bien que les criminels n'ont aucun respect pour votre droit et mon droit à la vie, ainsi que pour la loi et notre système de justice, un système qui ne les punit pas vraiment selon la gravité de leurs crimes.
(1650)
Ces chiffres expliquent pourquoi des députés des deux côtés réclament des mesures concrètes et ce, dès maintenant. Nous ne voulons pas attendre une autre année, car cela pourrait entraîner peut-être 46 autres morts. Il n'est pas question non plus d'attendre six mois, ce qui représenterait 23 meurtres de plus. Nous souhaitons agir le plus rapidement possible. Il faut commencer dès maintenant à mettre en vigueur des réformes qui assureront une meilleure protection aux Canadiens.
Nous demandons que le gouvernement modifie la Loi sur les jeunes contrevenants pour que nos jeunes aient davantage de comptes à rendre sur leur comportement délinquant. Nous recommandons que le ministre donne aux jeunes un choix et leur envoie un message très clair: respectez la loi ou subissez-en les conséquences.
Nous sommes tous en mesure de faire des choix. Lorsqu'on prend la mauvaise décision, il y a des conséquences. La vie est ainsi faite et notre système de justice ne l'a pas encore enseigné à bon nombre de nos jeunes.
La Loi sur les jeunes contrevenants devait au départ parvenir à un équilibre entre la protection de la société d'une part et la nécessité de respecter les droits du jeune délinquant d'autre part. Quels sont les droits d'un jeune délinquant au juste? C'est là une question à laquelle nous devons réfléchir avant d'apporter des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants.
Les meurtriers, les violeurs et les autres criminels, quel que soit leur âge, qui décident de faire du vandalisme ou de tuer un autre être humain abandonnent leurs droits au moment où ils décident d'enlever la vie à quelqu'un. C'est là une chose très claire, étant donné qu'en tant que membres de la société, nous avons le droit de tuer un agresseur en état de légitime défense. L'agresseur abandonne tous ses droits, notamment celui à la vie,
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lorsqu'il attaque et force ainsi sa victime à se défendre si elle ne veut pas être tuée.
La Loi sur les jeunes contrevenants et d'autres lois ont malheureusement rétabli les droits des meurtriers. Le principe directeur de la Loi sur les jeunes contrevenants, de notre législation dans son ensemble et de notre système de justice pénale devait être que toute personne qui commet des actes criminels perd alors automatiquement ses droits.
Au lieu de parvenir à un équilibre acceptable, la Loi sur les jeunes contrevenants favorise plutôt les trafiquants de drogues dans nos écoles secondaires, ainsi que les violeurs et les meurtriers. Les peines légères, la non-publication des noms et la croyance que les enfants de dix ou onze ans ne distinguent pas le bien du mal sont les facteurs qui ont enlevé toute poigne au système judiciaire. La Loi sur les jeunes contrevenants a donné priorité aux droits des contrevenants sur ceux des victimes.
Examinons la question des droits. Quand quelqu'un fait irruption chez nous et qu'il nous attaque, nous ou un membre de notre famille, nous avons le droit inhérent et le devoir de nous défendre et de protéger nos enfants. S'il faut tuer pour cela, notre société nous en donne le droit.
Les délinquants qui ont tiré sur Nicholas Battersby, qui était sans défense, et qui l'ont tué, n'ont tenu aucun compte de ses droits. Ils n'ont pas tenu compte de son droit à la vie, de son droit de vivre en paix chez lui, de son droit de connaître les plaisirs que lui réservait son avenir. L'État n'a pas protégé les droits de Nicholas Battersby, et ses assaillants y ont mis fin. On ne peut pas dire que ses assassins se sont vu refuser ces mêmes droits. Actuellement, la Loi sur les jeunes contrevenants leur permet de conserver les droits qu'ils ont si brutalement enlevés à leur victime.
On peut se demander ce qu'une personne doit faire de plus pour perdre ses droits et ses libertés. Si le fait d'enlever la vie d'un être humain ne met pas fin à tous leurs droits sauf à celui d'un procès juste, les droits de la personne ne veulent plus rien dire dans notre société, ni la vie elle-même.
Avec tout le respect que je leur dois, je dis que les Canadiens bonasses qui ont rétabli les droits des assassins qui mettent fin à ceux de leurs victimes ne doivent pas comprendre ce que signifie une vie humaine et les droits qu'on y associe. Ils ont fait l'erreur de faire une victime du criminel, en laissant entendre que celui-ci n'est pas responsable des choix qu'il a faits et qui l'ont amené à faire un geste criminel. Ils trouvent dans la vie du criminel des circonstances qui justifient ses actes brutaux et sadiques.
Quelles que soient nos origines, quelle que soit la misère dans laquelle nous sommes plongés, nous pouvons tous faire des choix. Nous savons tous la différence entre le bien et le mal et nous sommes tous responsables de nos actes, quand nous prenons la mauvaise décision. Nous ne pouvons blâmer personne d'autre que nous. Nous devons assumer la responsabilité de nos actes.
(1655)
Chaque jour, des millions de Canadiens prennent la décision d'être honnêtes, d'être justes et de respecter les biens et la vie d'autrui. On ne peut donc justifier la conduite criminelle de quelqu'un par son passé ou par son environnement.
Et pourtant, notre système judiciaire, particulièrement en ce qui concerne la Loi sur les jeunes contrevenants, prétend que les jeunes ne sont responsables ni de leurs choix ni de leurs actions. C'est une erreur monumentale que les lois de notre pays devant protéger les biens et la vie des citoyens rendent quelqu'un d'autre responsable du choix fait par les criminels.
Le message des législateurs, c'est qu'on ne récolte pas ce qu'on a semé. C'est inacceptable et tout à fait déraisonnable. La principale lacune de notre législation, l'injustice perpétrée par notre système judiciaire est d'avoir rendu aux criminels, aux dépravés, les droits qu'ils ont perdus au moment où ils ont décidé de s'attaquer aux biens et aux droits d'autrui.
Mme Judy Bethel (Edmonton-Est): Madame la Présidente, il ne fait pas de doute que de nombreux Canadiens sont préoccupés par la criminalité juvénile et plus précisément par le traitement que la Loi sur les jeunes contrevenants réserve aux jeunes qui commettent des crimes. Les récents incidents tragiques survenus à Ottawa, Toronto, Edmonton et ailleurs ont attisé l'intérêt des Canadiens pour cette question, c'est bien normal.
Je tiens à préciser très clairement que de tels incidents ponctuels, même s'il y en a plusieurs, ne constituent pas nécessairement une épidémie. La grande majorité des jeunes Canadiens sont ambitieux, travaillants et respectueux de leurs compatriotes. La grande majorité d'entre eux deviendront des adultes productifs et respectueux des lois. Nous ne rendons pas service aux jeunes en les identifiant tous à la minorité d'entre eux qui s'adonne au crime.
En réalité, selon les statistiques, au cours des récentes années, la criminalité juvénile n'a pas augmenté de façon notable au Canada. Ce sont les adultes, et non les jeunes, qui commettent encore la majorité des crimes au pays. En outre, il faut se rappeler que la plupart des crimes commis par les jeunes sont non violents et visent des biens et non des personnes. Néanmoins, il est vrai que certains jeunes commettent des crimes, que cette question est cruciale pour le tissu social de notre pays et que le présent gouvernement doit s'y attaquer sans détour.
L'automne dernier, le ministère de la Justice a procédé à une consultation publique sur la Loi sur les jeunes contrevenants en distribuant un questionnaire à environ 40 000 groupes et personnes au Canada et en demandant leur opinion sur plusieurs points concernant cette loi.
Il demandait entre autres si l'âge minimum stipulé dans la loi devait être abaissé, si l'âge maximum devait aussi être abaissé et si les tribunaux devaient transférer plus souvent les jeunes aux tribunaux pour adultes. Il demandait aussi si l'identité des jeunes contrevenants devait être publiée et, si oui, à quel stade des procédures. Devait-on encourager les juges à ne condamner à la détention que les jeunes contrevenants violents? La Loi sur les
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jeunes contrevenants devrait-elle être assouplie pour donner un meilleur accès des jeunes à un traitement?
Enfin, le document de consultation comportait une série de questions sur les modifications qui devraient être faites au niveau communautaire et ailleurs dans la société pour prévenir la criminalité juvénile et sur les mesures additionnelles à prendre pour assurer la réadaptation des jeunes contrevenants, de façon à ce qu'ils ne récidivent pas et ne passent pas le reste de leur vie dans la criminalité.
J'ai pris soin d'expliquer le contenu de ce document de consultation pour faire valoir les points qui suivent. Ce document sollicitait l'opinion des Canadiens sur la plupart, sinon la totalité, des questions brûlantes de l'heure qui se rapportent à la Loi sur les jeunes contrevenants, y compris celle qui fait l'objet de la motion d'aujourd'hui, la tranche d'âge à laquelle la loi s'applique.
Il est encourageant de noter que plus de 1000 personnes ont pris la peine d'envoyer des réponses écrites aux questions du document. Toutes ces réponses ont été lues et sont en cours d'analyse. Ce qui est encourageant aussi c'est que la majorité des répondants étaient réfléchis et faisaient des propositions de changements intéressantes et utiles.
(1700)
En même temps, il n'y a pas de doute que les réponses montraient que les Canadiens sont préoccupés par la Loi sur les jeunes contrevenants en général, par la façon dont elle est appliquée, et qu'ils se demandent si elle est efficace contre la criminalité juvénile.
Plus spécialement, on s'inquiétait des tranches d'âge qui figurent dans la loi, de la publication du nom des contrevenants, du transfert à un tribunal pour adultes, du type et de la durée des peines, du traitement et de la réadaptation, et aussi de la prévention de la criminalité juvénile.
Le gouvernement actuel a déjà fait savoir qu'il avait l'intention de proposer des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants. En fait, il y a tout juste un an, en avril 1993, que le document sur la criminalité et la justice a été rendu public. Dans ces documents, le gouvernement a notamment proposé d'apporter à la Loi sur les jeunes contrevenants les modifications suivantes: des peines d'emprisonnement plus longues en cas de condamnation pour meurtre, afin de garantir un traitement complet, un meilleur accès aux programmes de réhabilitation et la diffusion de plus amples renseignements sur l'identité des jeunes contrevenants.
Les modifications nécessaires ne peuvent pas toutes être effectuées rapidement et aisément. Les problèmes que soulèvent cette loi et le système de justice pour les jeunes sont difficiles et importants. De plus, les réactions au processus de consultation publique sur la loi indiquent clairement et malheureusement qu'à plusieurs égards, il n'y a pas de consensus chez les Canadiens quant aux modifications à apporter à la Loi sur les jeunes contrevenants.
Je sais néanmoins que mon collègue, le ministre de la Justice, convient que les modifications les plus pressantes peuvent être réalisées dans les plus brefs délais, soit avant même que la Chambre ne s'ajourne pour l'été.
Sauf erreur, le ministre ne tardera donc pas à présenter un projet de loi. Les députés comprendront qu'il restera des questions à résoudre. Pour s'y attaquer, le ministre de la Justice a déjà déclaré publiquement qu'il entendait procéder à un examen exhaustif de la Loi sur les jeunes contrevenants et du système de justice pour les jeunes.
Il semble que cet examen sera entrepris par un comité parlementaire et supposera la tenue de consultations auprès de groupes et de particuliers intéressés partout au Canada. Les Canadiens pourront ainsi décrire au Parlement la forme qu'ils veulent donner à la Loi sur les jeunes contrevenants et au système de justice pour les jeunes.
Ce processus de consultation revêt une importance extrême, parce que finalement ce sont ceux qui se sentiront bien servis et protégés par cette loi, ceux qui y seront assujettis et ceux qui les aideront, qui doivent être satisfaits de la loi et du système de justice pour les jeunes.
En terminant, j'insiste en disant que cette loi et ce système doivent recevoir l'appui des Canadiens. Autrement, ce sera l'échec de nos efforts pour éliminer la criminalité chez les jeunes qui afflige notre société. Nous ne pouvons nous permettre d'abandonner la petite minorité de nos jeunes qui, pour une raison ou une autre, commettent des crimes. Si nous les abandonnons, la société devra au bout du compte assumer un prix beaucoup plus élevé que celui qu'elle versera pour les aider pendant qu'ils sont encore jeunes.
M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Madame la Présidente, je félicite la députée de son excellent discours. Celle-ci s'est montrée très éloquente tout en expliquant certaines des raisons pour lesquelles les jeunes en viennent à commettre des délits.
Cela dit, je fais valoir à la députée que l'une des déclarations qu'elle a faite au début de son intervention est erronée. Je fais allusion à son propos portant que la criminalité chez les jeunes n'augmente pas. En fait, la criminalité augmente plus rapidement chez les jeunes que pour les autres groupes. En outre, le nombre d'actes de violence augmente beaucoup plus rapidement chez les jeunes.
Il y a de nombreuses années, j'ai payé mes études en travaillant comme agent de correction dans un établissement à sécurité maximale, et j'ai aussi été médecin dans des institutions carcérales. L'une des choses les plus tragiques pour les jeunes et les adultes qui sortent de prison est de constater qu'il n'y a rien pour eux.
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Je me souviens d'avoir rencontré l'été dernier un jeune de quinze ans qui me suppliait en disant: «Je vous en prie, Dr Martin, ne me laissez pas sortir de cette institution. C'est la troisième fois que je me retrouve ici et si je sors je sais que ce ne sera que pour revenir encore ici.»
(1705)
Ça m'a brisé le coeur de devoir dire à ce pauvre jeune que je ne pouvais rien faire pour lui. J'ai une suggestion à formuler aux députés. Je leur demande d'essayer de trouver un système pour que ces personnes, et en particulier les jeunes dans des centres de détention, ne retournent pas à la vie qu'ils menaient avant leur incarcération. Comme on l'a mentionné, un grand nombre de ces contrevenants proviennent de milieux très difficiles et n'ont souvent guère d'autres choix que d'y retourner.
Je veux poser une question à la députée. Quelles mesures précises-je ne veux pas de beaux discours-elle et son parti comptent-ils prendre pour régler les problèmes liés aux jeunes contrevenants?
Mme Bethel: Madame la Présidente, je remercie le député pour sa question.
Premièrement, je voudrais préciser que je parlais de résultats statistiquement significatifs. On n'a observé aucune hausse statistiquement significative des crimes avec violence commis par des jeunes. Je ne voudrais pas que le député tire une fausse conclusion de ce que j'ai dit.
Je suis ravie que le député nous ait parlé de sa carrière antérieure. J'ai, moi aussi, oeuvré auprès des jeunes contrevenants, que ce soit au service de police d'Edmonton ou au conseil municipal, où l'on a d'ailleurs élaboré, sur une période de deux ans, une stratégie pour rendre les villes plus sécuritaires et où l'on mettait l'accent surtout sur la prévention du crime.
À Edmonton, nous avons toujours cru en des solutions équilibrées. Bien sûr, il faut songer aux conséquences des actes de violence et des infractions contre la personne et contre les biens. Voilà pourquoi nous avons bien précisé ici que nous sommes disposés à approuver le prolongement des peines dans le projet de loi qui sera bientôt déposé.
Nous nous demandons ce que nous pouvons faire pour nos jeunes. Nous pouvons veiller à ce qu'ils aient accès au genre de programme de réadaptation qui dissiperait les craintes que nous décrivait le député. Il nous a raconté l'histoire déchirante d'un jeune homme qui ne voulait pas sortir de prison par crainte de récidiver.
J'ose espérer que les détenus qui partagent ces craintes ont accès à un bon programme de réadaptation. Ce jeune homme risque peu de récidiver, puisqu'il semble conscient de la situation et désireux de participer à un programme de réadaptation.
Nous avons besoin de solutions équilibrées. L'intérêt que le député porte aux programmes de réadaptation et à la prévention du crime m'encourage.
Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Madame la Présidente, nous avons aujourd'hui l'occasion d'être positifs.
Nous pouvons montrer aux jeunes de notre pays que nous nous soucions de leur sort et que nous sommes disposés à prendre les décisions qui leur seront profitables au bout du compte. Nous pouvons par la même occasion montrer aux Canadiens que nous les écoutons, que nous sommes sensibles à leur angoisse et à leur colère.
Nous avons aujourd'hui l'occasion de faire quelque chose pour mettre fin à toutes les souffrances et à toutes les frustrations et pour répondre à tous les espoirs et à toutes les attentes. Ce que les Canadiens attendent de leurs députés, c'est qu'ils agissent, et la motion que nous proposons, de ce côté-ci, répond aux attentes des Canadiens.
Les députés d'en face peuvent aussi montrer aujourd'hui qu'ils ont entendu les Canadiens et qu'ils sont sensibles à leurs demandes, comme je sais qu'ils le sont. Ils peuvent appuyer notre motion. Il ne sera pas facile, semble-t-il, de les amener à comprendre comment nous voyons le problème de la criminalité chez les jeunes.
C'est pourquoi je me propose de plaider aujourd'hui en faveur du changement. Mes collègues ont exposé bien des façons constructives de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants. Nous proposons simplement avec encore plus de vigueur de réformer le système de la justice pénale et plus particulièrement de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants.
Quoi qu'on en dise, il y a une recrudescence de la criminalité chez les jeunes et cela, pour une foule de raisons dont il a été question aujourd'hui. Il est clair que le peu d'efficacité de la Loi sur les jeunes contrevenants n'aide pas, mais je tiens à signaler aussi que les Canadiens ne se trompent pas lorsqu'ils ont l'impression que la criminalité chez les jeunes est à la hausse. Il y a en face des députés qui trouvent alarmiste qu'on cite des statistiques montrant que la criminalité augmente chez les jeunes et qui parlent de réaction instinctive ou excessive à des cas isolés.
(1710)
Je fournirai tout à l'heure des renseignements qui montrent à quel point tellement de députés d'en face ont tort. Je leur demande de se mettre à l'écoute des Canadiens. Ils pourront alors constater eux aussi l'ampleur du problème.
Les députés de mon parti s'efforcent de régler le problème. Au cours de la campagne électorale, partout-sur le seuil de leur porte, dans les assemblées de mairie, dans les débats publics et dans les cafés-les gens parlaient de la Loi sur les jeunes contrevenants et des droits des victimes. Nous les avons entendus et nous leur avons promis de faire valoir leurs préoccupations à Ottawa. Nous tenons notre promesse. Malheureusement, le gouvernement n'a encore rien fait, mais on nous dit que de grandes choses sont en vue. Il reste que jusqu'à maintenant, il n'a rien fait au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants et de la réforme du système de justice pénale. On nous a fait des promesses, cela nous le savons, mais l'action est toujours pour bientôt. Et nous continuons d'attendre.
Je sais à quel point les Canadiens sont inquiets. Le jour de la Fête des mères, j'ai assisté à une manifestation tenue à Calgary en même temps qu'une autre qui avait lieu à Edmonton et plus de
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4 000 personnes sont venues pour exprimer leur inquiétude devant la flambée de crimes avec violence commis par des jeunes et le manque de mesures de dissuasion des actes criminels. Croyez-moi, c'était pénible d'entendre toutes les histoires qui ont été racontées.
Lorsque la Loi sur les jeunes contrevenants a été présentée, les législateurs étaient peut-être animés de bonnes intentions, mais ils ont raté leur coup. Après l'entrée en vigueur de la loi, les jeunes contrevenants ont vite compris qu'ils pouvaient commettre des crimes et que s'ils se faisaient prendre ils ne sentiraient même pas la peine qui leur serait infligée.
Malheureusement, les jeunes contrevenants sont devenus très rusés. Ils savent que lorsqu'ils commettent un crime, leurs chances de se faire prendre sont très minimes. Et le pire, c'est que même s'ils se font prendre, leurs noms ne seront pas publiés et ils savent que leur casier judiciaire sera effacé cinq ans après qu'ils auront fini de purger leur peine. Ils savent que la peine maximale que peut leur imposer un Tribunal de la jeunesse est de trois ans. Ils savent que les tribunaux de la jeunesse n'aiment pas renvoyer de causes devant les tribunaux des adultes. En fait, en 1990-1991, moins de 1 p. 100 des causes portant sur des actes criminels avec violence ont été renvoyées devant les tribunaux des adultes. Les jeunes contrevenants savent qu'ils peuvent réintégrer la collectivité sans avoir subi aucune forme de traitement. En clair, ils savent qu'ils peuvent s'en tirer impunément.
Ceux d'entre nous qui prennent part au débat ont été traités d'alarmistes par beaucoup d'autres députés à la Chambre aujourd'hui, et je veux dissiper ce malentendu. Je veux ramener le débat plus près des gens en citant quelques statistiques terrifiantes qui s'ajoutent à celles que nous avons déjà entendues.
Selon le MacKenzie Institute, de Calgary, le taux de crimes avec violence commis par des jeunes a augmenté de 179 p. 100 entre 1988 et 1991-179 p. 100! Les manifestants qui sont venus le jour de la Fête des mères ne réagissaient pas en alarmistes devant un faux problème. Ils réagissaient en sachant pertinemment que le taux de crimes avec violence commis à Calgary et ailleurs par des jeunes augmente à un rythme alarmant. De plus, non seulement la criminalité augmente chez les jeunes, mais un criminologue de Mont-Royal, John Winterdyk, s'inquiète aussi parce que leurs crimes semblent de plus en plus souvent commis au hasard, de plus en plus violents et de plus en plus absurdes.
J'ai d'autres statistiques qui viennent corroborer le triste constat de M. Winterdyk. Au total, 15 p. 100 des 135 348 jeunes accusés d'infractions au Code criminel en 1992 ont été accusés de crimes avec violence. Cette proportion était de 10,5 p. 100 en 1988. Cette hausse de 5 points de pourcentage en quatre ans seulement est assez inquiétante. Par ailleurs, le nombre de jeunes accusés de crimes de violence augmente plus vite que le nombre d'adultes accusés de ce genre de crimes. De 1988 à 1992, la hausse annuelle moyenne du nombre de crimes avec violence chez les adultes a été de 5 p. 100, alors qu'elle a été de 14 p. 100 chez les jeunes. Cela montre que non seulement notre société devient plus violente, mais aussi que les jeunes deviennent plus violents plus vite.
Madame la Présidente, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de me joindre à d'autres députés de la Chambre pour participer au débat sur cette importante question.
La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 17 h 15, j'ai le devoir, conformément au paragraphe 81(16) du Règlement, d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute motion relative aux crédits dont la Chambre est saisie.
Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
La présidente suppléante (Mme Maheu): Convoquez les députés.
Après l'appel du timbre :
La présidente suppléante (Mme Maheu): Le whip en chef du gouvernement m'a demandé, conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, de reporter le vote sur la motion.
[Français]
En conséquence, conformément à l'article 45(5)a) du Règlement, le vote par appel nominal sur la question dont la Chambre est maintenant saisie est différé jusqu'au mardi 24 mai 1994 à 17 h 30, alors que la sonnerie d'appel se fera entendre pendant au plus 15 minutes.
[Traduction]
SUSPENSION DE LA SÉANCE
M. Milliken: Madame la Présidente, puis-je proposer que la séance soit suspendue soit jusqu'à 17 h 30, c'est-à-dire l'heure prévue pour le début de la période réservée aux initiatives parlementaires, soit jusqu'au moment de l'arrivée du gentilhomme huissier de la verge noire à la porte de la Chambre, ce qui ne saurait tarder, si j'ai bien compris.La présidente suppléante (Mme Maheu): La séance est suspendue jusqu'à 17 h 30.
(La séance est suspendue à 17 h 18.)
___________________________
REPRISE DE LA SÉANCE
La séance reprend à 17 h 31.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
L'ÉTIQUETAGE DES PRODUITS
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 12 avril, de la motion.Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord): Madame la Présidente, je suis heureuse de pouvoir parler de la motion à l'étude. J'appuie la motion en principe, mais je me pose certaines questions à propos de la signification des dates ou de leur interprétation.
La motion elle-même parle d'une date «meilleur avant» pour la consommation de produits alimentaires et de boissons, et également d'une date «d'expiration». Il s'agit en soit d'une excellente approche, car les consommateurs devraient avoir une meilleure compréhension de la qualité du produit qu'ils achètent tant sur le plan fraîcheur que sur le plan valeur nutritive.
Je m'interroge cependant au sujet de l'interprétation même des dates. Dans son intervention du 12 avril, le député de Winnipeg-Nord a dit que la date d'expiration correspondait à la durée de conservation du produit en magasin. Or, plus loin dans son exposé, il a parlé de produits qui ont ou passent pour avoir une durée de conservation de 90 jours ou moins, mais portent quand même une date de péremption. Comme il y a une date inscrite sur l'emballage, je suis portée à croire que cela pourrait être déroutant pour le consommateur qui se demande s'il a affaire à une date d'expiration ou à une date de péremption et quelle peut bien être la différence, dans l'état actuel des choses.
(1735)
Les aliments et les boissons sont des produits périssables, et la qualité du produit varie vraiment selon le facteur temps. Nous avons besoin d'identifier ce facteur temps en termes beaucoup plus explicites au moyen de nos dates, car je ne vois vraiment aucun autre moyen de l'établir.
Si nous donnons à la date d'expiration le sens de durée de conservation, nous indiquerons aux épiciers que le produit doit être vendu avant cette date ou, sinon, être retiré des tablettes. Par contre, si nous considérons la date d'expiration comme celle avant laquelle le produit alimentaire doit être consommé, nous nous trouvons à établir une situation concernant la date à laquelle le produit peut être acheté. Qu'en advient-il quand nous l'apportons à la maison? À moins d'exiger du fabricant qu'il se mette à inscrire des messages du genre «doit être gardé au réfrigérateur une fois ouvert» ou divers autres genres d'instructions pour le consommateur, nous devons avoir une certaine idée de ce que signifie cette date.
La date d'expiration indique-t-elle la durée de conservation du produit en magasin? Signifie-t-elle que le produit reste frais tant qu'il demeure dans son emballage initial, mais que la situation change une fois que l'emballage est ouvert? Ou entend-on par date d'expiration la date avant laquelle le produit doit être effectivement consommé?
Suivant le même raisonnement, si l'on considère la période de détérioration d'un produit, à partir du moment où il est emballé jusqu'à celui où il est consommé, on peut se heurter à différents critères ou normes. Il s'ensuivra probablement des discussions sur ce qui constituerait une date de péremption valable.
Si on voit un produit sur lequel figurent deux dates et que la date de péremption correspond à la date de conservation à l'étalage, le commerçant doit alors vendre ce produit avant cette date ou le retirer de l'étalage. La date «meilleur avant» serait alors une date antérieure.
S'agit-il d'une situation qui pourrait donner lieu à un double système de commercialisation? Par exemple, le pain frais et celui qui date d'un jour seraient vendus à un certain prix jusqu'à la date «meilleur avant», puis à un prix différent, de cette date jusqu'à la date de péremption. Sur le plan commercial, il y aurait d'autres discussions sur la signification véritable de la date «meilleur avant» et sur ses critères.
Voici une autre chose qui m'est venue à l'esprit au sujet de ces dates. Si la date de péremption ne correspond pas à celle de la durée de conservation à l'étalage, mais à la date de consommation réelle, je crois qu'il y aura différents critères applicables à différents types d'aliments. Il faudra qu'on les inscrive tous sur l'emballage pour qu'on sache comment entreposer les produits une fois ouverts.
Le député de Winnipeg-Nord a parlé, si je ne m'abuse, d'une boîte de sauce tomate qui a été placée au réfrigérateur. La date de péremption figurant sur cette boîte de sauce tomate n'était plus pertinente une fois celle-ci ouverte. En trois ou quatre jours, la sauce n'était plus bonne. Je crois que la date de péremption était plus longue, qu'elle était un an et demi plus tard.
Il est question en l'occurrence de deux choses différentes qui devront être traitées clairement dans le projet de loi. Que signifie vraiment la date de péremption? S'agit-il de la durée de conservation à l'étalage ou de la date avant laquelle le produit doit être consommé? S'il s'agit de la durée de conservation dans l'établissement et si nous l'insérons entre la date d'emballage et la date d'expiration, nous risquons de donner prise à des tactiques de mise en marché.
(1740)
L'autre conséquence possible qui vient à l'esprit, à propos de cette approche, concerne la garantie. Si la date d'expiration, la durée de conservation et la date de péremption sont groupées à un endroit, nous demandons en fait aux fabricants de garantir que leurs produits, si l'emballage demeure inchangé, sera de la même qualité que le jour de l'emballage jusqu'à la date de péremption. Par la suite, il pourrait y avoir détérioration graduelle. Le produit pourrait toujours être consommé entre la date de péremption et la date d'expiration et pourrait être vendu.
Voilà quelques-unes des préoccupations que m'inspire cette question de dates. Nous devons les préciser très clairement pour les consommateurs. Dans l'état actuel des choses, je puis regarder la date sur un certain produit. . .
La présidente suppléante (Mme Maheu): À l'ordre. Je suis désolée d'interrompre la députée.
* * *
MESSAGE DU SÉNAT
La présidente suppléante (Mme Maheu): J'ai l'honneur d'annoncer à la Chambre que le Sénat lui a adressé un message pour l'informer qu'il a adopté les projets de loi suivants: le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif; le projet de loi C-8, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la protection des pêches côtières (force nécessaire); le projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu national et d'autres lois en conséquence; le projet de loi C-29, Loi modifiant la Loi sur la protection des pêches côtières; le projet de loi C-21, Loi modifiant la Loi sur la sécurité ferroviaire; et le projet de loi C-212, Loi reconnaissant le hockey et lacrosse comme sports nationaux du Canada.