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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 7 juin 1994

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

AFFAIRES AUTOCHTONES ET DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

LOI SUR LA SÛRETÉ DU TRANSPORT MARITIME

    Projet de loi C-38. Adoption des motions portantprésentation et première lecture 4907

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

    Projet de loi C-256. Adoption des motions portantprésentation et première lecture 4907

PÉTITIONS

L'ÉTHANOL

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'UNITÉ NATIONALE

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 4911
    Mme Ringuette-Maltais 4912
    M. Leblanc (Longueuil) 4915
    M. Tremblay (Rosemont) 4915
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 4920
    M. Tremblay (Rosemont) 4927
    M. Harper (Calgary-Ouest) 4930
    Mme Stewart (Brant) 4932
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 4934
    M. Leblanc (Longueuil) 4935
    M. Leblanc (Longueuil) 4936
    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 4937
    M. Leblanc (Longueuil) 4938

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LA BATAILLE DE NORMANDIE

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ENVIRONNEMENT

    M. Chrétien (Frontenac) 4941

LA SEMAINE DE L'ENVIRONNEMENT

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 4941

L'ÉDUCATION

L'AVIATEUR BILLY BISHOP

L'ENVIRONNEMENT

LES FRANCO-ONTARIENS

L'UNITÉ NATIONALE

L'UNIVERSITÉ TRENT

LE SONDAGE DES ÉLECTEURS

LA SEMAINE DE L'ENVIRONNEMENT

LA VICE-PREMIÈRE MINISTRE

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 4944

LE BLOC QUÉBÉCOIS

LE TEMPLE CANADIEN DE LA RENOMMÉE MÉDICALE

LA SEMAINE NATIONALE DES TRANSPORTS

LE JOUR J

QUESTIONS ORALES

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

LES MÉDICAMENTS EXPÉRIMENTAUX

    M. Gauthier (Roberval) 4945
    M. Gauthier (Roberval) 4946

ADOPTILE COMMERCE

LE CRTC

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 4947
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 4947

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

LES NAVIRES À DOUBLE COQUE

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

    M. Hill (Prince George-Peace River) 4948
    M. Hill (Prince George-Peace River) 4948

LES AFFAIRES INDIENNES

L'IMMIGRATION

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 4949
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 4950

LES TRANSPORTS

LE CONSEIL DES ARTS DU CANADA

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 4950
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 4951

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES VICTIMES DE LA THALIDOMIDE

LA SOCIÉTÉ CN EXPLORATION

L'ÉCONOMIE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 4952

LES SUBVENTIONS AU TRANSPORT

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'UNITÉ NATIONALE

    Reprise de l'étude de la motion et de l'amendement 4953
    M. Leblanc (Longueuil) 4953
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 4953
    M. Gauthier (Roberval) 4960
    Mme Kraft Sloan 4962
    Adoption de l'amendement par 140 voix contre 87 4972
    Adoption de la motion par 179 voix contre 49 4973

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LOI SUR LE CALCUL DES INTÉRÊTS DES CARTES DE CRÉDIT

    Projet de loi C-233. Motion portant deuxième lecture 4974
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 4978
    Adoption de l'amendement 4979
    Annulation de l'ordre; retrait du projet de loi 4979

4907


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 7 juin 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à des pétitions.

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

L'hon. Charles Caccia (Davenport): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le deuxième rapport du Comité sur l'environnement et le développement durable.

[Traduction]

Ce rapport porte sur le projet de loi C-23, Loi mettant en oeuvre la convention pour la protection des oiseaux migrateurs au Canada et aux États-Unis.

AFFAIRES AUTOCHTONES ET DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.

Votre comité a examiné le projet de loi C-16, Loi sur le règlement de la revendication territoriale des Dénés et Métis du Sahtu, et s'est entendu pour en faire rapport sans propositions d'amendement.

* * *

[Français]

LOI SUR LA SÛRETÉ DU TRANSPORT MARITIME

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports) demande à présenter le projet de loi C-38 intitulé Loi concernant la sûreté du transport maritime.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

* * *

[Traduction]

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud) demande à présenter le projet de loi C-256, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (transfert du revenu au conjoint).

(1005)

-Monsieur le Président, c'est un grand honneur pour moi de présenter mon premier projet de loi d'initiative parlementaire à la Chambre des communes. Je tiens à remercier la députée de Madawaska-Victoria de l'avoir appuyé.

Ce projet de loi modifierait la Loi de l'impôt sur le revenu pour permettre à une personne de partager son revenu avec son conjoint, ou de lui verser un maximum de 25 000 $, si ce dernier s'occupe de la maison et prend soin d'au moins un enfant à charge n'ayant pas commencé à aller à l'école à plein temps.

On reconnaîtrait ainsi la valeur du travail des parents qui restent au foyer. Les gens pourraient choisir de s'occuper eux-mêmes de leurs enfants. Le conjoint qui reste à la maison pourrait alors acheter des REER et s'assurer ainsi un revenu de retraite plus équitable. En outre, cela libérerait des emplois et des places de garderie, parce que certains pourraient dès lors se permettre de quitter le marché du travail pour rester à la maison et prendre soin de leurs enfants.

C'est un grand honneur pour moi de présenter ce projet de loi. J'ai hâte d'en débattre avec mes collègues pour obtenir le soutien de la Chambre à l'égard de cette mesure que je crois importante.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

PÉTITIONS

L'ÉTHANOL

M. Rex Crawford (Kent): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis heureux de présenter une pétition soumise par des habitants de la circonscription de Kent.

Les pétitionnaires demandent au gouvernement fédéral de soutenir le projet d'usine d'éthanol à Chatham, en Ontario, dans une région que l'Accord de libre-échange canado-américain et l'ALENA ont frappée durement. Ce projet favorisera un déve-

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loppement durable de la région et assurera la création d'entreprises agricoles respectueuses de l'environnement.

Les pétitionnaires demandent humblement qu'il plaise au Parlement de maintenir pour une période de dix ans l'exemption de taxe d'accise actuellement en vigueur pour l'éthanol et de faciliter ainsi l'établissement au Canada d'une industrie de l'éthanol solide et autosuffisante.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: Toutes les questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


4908

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'UNITÉ NATIONALE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest) propose:

Que cette Chambre déclare avec vigueur et appuie le désir des Canadiens et des Canadiennes de respecter le pacte fédéral en tant que pays unique, et prenne l'engagement de renforcer notre économie, d'équilibrer les budgets de nos gouvernements, d'appuyer nos services sociaux, de conserver notre milieu, de protéger notre patrimoine et notre diversité culturelle, de défendre nos vies et notre propriété, de démocratiser davantage nos institutions et nos processus décisionnels, d'affirmer l'égalité et le caractère unique de tous nos citoyens et de nos provinces, et de forger des relations pacifiques et productives avec d'autres pays du monde.
(1010)

-Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui au sujet de cette motion qui traite de l'unité canadienne d'une façon positive et dans une optique fédéraliste.

La motion présente deux parties, soit une affirmation et une description. La première partie demande simplement à la Chambre de déclarer vigoureusement et d'appuyer le désir des Canadiens de respecter le pacte fédéral en tant que pays unique. Il va sans dire que tout fédéraliste à la Chambre peut et doit appuyer cette proposition.

La deuxième partie de la motion décrit brièvement les caractéristiques particulières que devrait présenter, selon les réformistes, la fédération canadienne au seuil du XXIe siècle. Il s'agit d'une description abrégée d'un nouveau Canada, sur laquelle nos membres reviendront plus en détail au cours du débat.

Il faut noter que la motion ne comporte aucun élément négatif. Ce n'est pas une critique à l'endroit du gouvernement, de sorte que les députés ne peuvent et ne doivent pas la considérer comme étant une motion de confiance. Il n'y a pas la moindre menace implicite à l'égard des Québécois qui, pour une raison ou une autre, ne croient plus au fédéralisme.

La motion énonce simplement une affirmation positive du désir de la majorité des Canadiens de continuer à former une union fédérale et une description abrégée des caractéristiques que devrait avoir une telle union à l'avenir. La motion est libellée de façon assez généreuse et son objet est tellement positif que la plupart des députés devraient l'appuyer.

Pourquoi présenter cette motion à la Chambre? Nous le faisons parce que nous constatons un vide grandissant sur la question de l'unité nationale, un vide au niveau du leadership. Si ce vide n'est pas comblé par une vision du fédéralisme et une réaction réfléchie au défi séparatiste, il risque d'engendrer des déceptions en matière constitutionnelle et des réactions enflammées au défi séparatiste. Le Canada entier, toutes ses provinces et ses territoires, en souffriraient.

Depuis un mois, nous avons relevé de nombreuses preuves de l'existence de ce vide ainsi que des déceptions et des réactions qu'il provoque. On dit que la nature a horreur du vide; ce devrait être la même chose pour le Parlement. Les réformistes présentent cette motion et, plus tard cette semaine, feront parvenir une liste de questions au premier ministre, afin de combler le vide d'une façon constructive et prometteuse.

Ce sont des fédéralistes insatisfaits qui ont constitué le Parti réformiste et qui l'appuient aujourd'hui.

[Français]

Nous sommes des fédéralistes insatisfaits.

[Traduction]

Notre parti est né dans l'Ouest et a progressivement acquis des appuis dans tout le pays en s'adressant, par exemple, aux gens qui n'en reviennent pas de la façon dont le gouvernement dépense et endette le pays. Nos partisans sont pour la plupart des gens qui rejettent les modèles constitutionnels ou les politiques publiques fondés sur de prétendus partenariats entre groupes raciaux et linguistiques et qui souhaitent des ententes constitutionnelles reposant sur l'égalité de tous les Canadiens entre eux et de toutes les provinces entre elles.

Nos partisans sont pour la plupart des gens qui déplorent l'absence de représentation régionale efficace à Ottawa et le peu d'empressement des partis fédéraux traditionnels à même considérer, sans parler de réaliser, des réformes démocratiques telles que la tenue de votes vraiment libres, le recours à des référendums et initiatives populaires ou la révocation des députés.

Ce ne sont là que quelques-uns des reproches que les partisans réformistes et des centaines de milliers de Canadiens formulent à l'endroit du fédéralisme actuel. Nous pouvons donc nous identifier aux autres Canadiens, dont des Québécois, qui sont aussi mécontents ou déçus du fédéralisme actuel.

Cela m'amène à parler de ce qui nous différencie surtout du Bloc. Plutôt que de rejeter le fédéralisme ou la notion d'union fédérale de tous les Canadiens, nous sommes déterminés à réformer le fédéralisme et à surmonter les problèmes du système, à savoir: une tendance chronique à trop dépenser, des ententes


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constitutionnelles injustes, une trop grande centralisation des décisions et de la politique, toutes caractéristiques qui contribuent à la mauvaise réputation du fédéralisme actuel.

Nous avons pesé tant le fédéralisme actuel que le séparatisme et nous avons estimé qu'ils laissent autant à désirer l'un que l'autre. Cela nous a incités à chercher une conception nouvelle et meilleure de l'union fédérale canadienne.

[Français]

Monsieur le Président, nous avons évalué le séparatisme et le fédéralisme actuels et nous croyons que ces deux formules sont imparfaites. Cela nous a poussé à rechercher la vision d'une union fédérale nouvelle et améliorée pour les Canadiens.

(1015)

[Traduction]

Il y a deux façons de créer une vision améliorée de l'État fédéral canadien. La première consiste à convoquer les premiers ministres à des conférences fédérales-provinciales en vue exclusivement de modifier la Constitution avec l'aide de divers représentants choisis du monde de l'enseignement et des groupes d'intérêts. C'est la démarche qui a mené à l'établissement de la Constitution de 1982, de l'Accord du lac Meech et de l'Accord de Charlottetown, et cette démarche n'a pas produit un fédéralisme capable d'inspirer un plus grand attachement des Canadiens envers l'union fédérale.

L'autre démarche consiste à participer à des centaines de réunions, grandes et petites, tranquilles et bruyantes, avec les Canadiens ordinaires et à leur poser ces simples questions: «Dans quel genre de pays voulez-vous vivre au seuil du XXIe siècle? Dans quel genre de pays voulez-vous que nos enfants vivent? Quelles devraient être, selon vous, les caractéristiques distinctives d'un Canada nouveau et meilleur?»

Les réformistes font cela depuis cinq ans, surtout dans l'Ouest et dans certaines régions de l'Ontario. Nous avons l'intention de continuer dans l'Ouest, dans tout l'Ontario, au Québec, dans le Nord et dans le Canada atlantique. Jusqu'à maintenant, nous avons constaté que lorsque vous posez ces questions et que vous écoutez attentivement les réponses, les Canadiens sont prêts à vous faire part de leurs craintes, de leurs rêves et de leurs aspirations. Si vous leur posez les questions, ils vous répondront.

Dans les rêves et les aspirations exprimés par des Canadiens et par des groupes de Canadiens, vous trouvez la substance, la matière brute à partir de laquelle vous pouvez former une image composite d'un Canada nouveau et meilleur du XXIe siècle.

Nous avons adopté des expressions abrégées pour désigner les caractéristiques distinctives de ce nouveau Canada et certaines se retrouvent dans la motion, comme la simple expression «renforcer notre économie». Dans le contexte du XXIe siècle, cela signifie instaurer une économie véritablement concurrentielle sur la scène internationale, fondée sur le savoir, axée sur les services, durable du point de vue environnemental, et capable de produire de bons emplois bien rémunérés pour tous les citoyens.

Pour arriver là, il faut mettre en oeuvre certaines politiques publiques, notamment une politique financière visant à réduire les coûts de fonctionnement du gouvernement, une politique fiscale pour faire profiter les contribuables de cette réduction des coûts et stimuler la création d'emplois, une politique commerciale visant à éliminer les obstacles au commerce, y compris les obstacles au commerce interprovincial, une politique de l'éducation et de la formation visant à créer une population active concurrentielle à l'échelle mondiale.

Pour mettre en place la nouvelle économie pour le XXIe siècle, il pourrait aussi être nécessaire de modifier la Constitution en y incluant la nécessité, pour le gouvernement, de présenter des budgets équilibrés, le renforcement des pouvoirs fédéraux sur le commerce, une nouvelle répartition des responsabilités en matière d'éducation et de formation.

Définir la nouvelle économie et la mettre en oeuvre pour faire un nouveau Canada ne saurait se limiter à un débat constitutionnel, mais il pourrait bien y avoir certains aspects constitutionnels que l'on ne peut pas laisser de côté. Dans notre motion, nous avons utilisé des expressions simples comme «renforcer notre économie» qui servent de rubriques. Celles-ci peuvent sembler banales, mais si l'on comprend que chacune désigne tout un ensemble de programmes publics, d'initiatives du secteur privé et de modifications constitutionnelles qu'il faut mettre en oeuvre pour permettre l'émergence de l'économie du XXIe siècle, alors chaque expression prend tout son sens et décrit une caractéristique distinctive du nouveau Canada.

Certains se demanderont ce que cette façon de définir un nouveau Canada offre aux Québécois. En bref, elle offre aux Québécois les mêmes avantages qu'à tous les autres Canadiens, y compris la liberté de se développer et de sauvegarder leur identité culturelle propre.

[Français]

En bref, la réponse à cette question est la suivante: «Cette approche offre aux Québécois et aux Québécoises les mêmes avantages qu'à tous les autres citoyens du Canada, y compris la liberté de promouvoir et de protéger un caractère culturel distinct.

[Traduction]

Cette vision offre aux Québécois ainsi qu'à tous les autres Canadiens les nouveaux emplois qu'apportera la nouvelle économie, des emplois qui sont plus susceptibles d'être créés et conservés si votre agent négociateur dans le monde nouveau du libre-échange représente un marché de 28 millions de personnes plutôt qu'un marché de 8 millions de personnes.

(1020)

Cette vision offre aux Québécois ainsi qu'aux autres Canadiens un allégement du fardeau fiscal, et non les hausses de taxes qu'entraînerait l'établissement d'un gouvernement souverainiste qui aurait des obligations nationales, des obligations envers le Canada et de nouvelles obligations internationales.

Cette vision offre aux Québécois ainsi qu'à tous les autres Canadiens des services sociaux viables sur le plan financier, des


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régimes d'assurance sociale bien conçus qui reposent sur une population plus nombreuse et une base économique plus importante et qui sont donc plus sûrs que ceux qui reposent sur une population moins nombreuse et une base économique moins importante.

La vision du Parti réformiste à l'égard d'un nouveau Canada reconnaît également que les Québécois ainsi que les autres Canadiens veulent être traités de façon égale en vertu de la loi et être libres de préserver leur patrimoine culturel et linguistique. Lorsqu'on leur pose la question, les Canadiens répondent qu'ils veulent à la fois l'égalité et la liberté de préserver leur diversité culturelle.

Le problème qui existe dans notre pays, c'est le manque d'appui à l'égard de ces objectifs. Nous devons trouver une façon de permettre la réalisation de ces deux objectifs à l'intérieur d'un même État. La vision recommandée par les réformistes comporte deux volets. Premièrement, nous devrions reconnaître de façon explicite dans les arrangements constitutionnels fondamentaux du Canada le principe de l'égalité des provinces et de tous les citoyens.

Les fédéralistes devraient trouver encourageant le fait que le sondage Décima-MacLean's réalisé immédiatement après la défaite de l'Accord de Charlottetown a révélé pour la première fois qu'une majorité absolue de Canadiens dans chaque province, y compris au Québec, appuient le modèle constitutionnel basé sur l'égalité des provinces plutôt que celui basé sur les groupes fondateurs.

Deuxièmement, dans le partage des pouvoirs prévu aux termes de la Constitution canadienne et dans les politiques gouvernementales découlant de ce partage des pouvoirs, nous devrions faire de la préservation du patrimoine culturel et linguistique une responsabilité personnelle et provinciale. Le rôle du gouvernement fédéral à l'égard de ces questions devrait se limiter à la prévention de la discrimination fondée sur des motifs culturels ou linguistiques.

Ce n'était là qu'un bref aperçu de notre vision dynamique d'un Canada nouveau et meilleur. Mes collègues parleront de façon plus approfondie de cette vision. Nous sommes également impatients d'entendre le point de vue des autres députés. Je veux surtout exposer le processus grâce auquel le Canada, cette grande union fédérale d'un océan à l'autre, peut se renouveler. Il faut commencer par demander aux gens quelle direction ils voudraient prendre, et écouter attentivement ce qu'ils ont à dire. On élaborera ensuite des politiques visant à faire avancer le pays dans cette direction. On doit proposer davantage que le statu quo et, si les politiques exigent des modifications constitutionnelles, on cherchera à les faire approuver également, mais seulement à la fin du processus plutôt qu'au début.

Voilà ce que les réformistes tâchent de faire depuis cinq ans à une échelle limitée en tant que parti extraparlementaire. Maintenant que notre parti dispose d'une forte représentation parlementaire et de ressources plus considérables, nous sommes en mesure de faire davantage pour poursuivre cette vision d'un nouveau Canada et pour créer un point de ralliement pour les Canadiens qui souhaitent que le Canada demeure une union fédérale.

Nous prendrons trois autres initiatives pour promouvoir la cause du fédéralisme dans les mois à venir. Tout d'abord, nous sommes en train de mettre sur pied au sein de notre parti un nouveau groupe de travail sur le Canada qui sera chargé de raffiner et d'étoffer davantage cette vision d'un nouveau Canada. Ce groupe de travail inclura des membres de notre caucus. Il sollicitera un apport additionnel des habitants des régions du pays où nous ne sommes pas bien représentés. Il entreprendra un effort important de télédémocratie à ce sujet au début de l'automne.

Deuxièmement, nous mettons également sur pied un groupe de planification d'urgence chargé de préparer une réponse fédéraliste raisonnée et fondée sur des principes à toutes ces questions inquiétantes que la menace de sécession du Québec soulève pour le Canada. Nous publierons cette semaine une liste des questions qu'abordera le groupe de planification d'urgence, dont le mandat sera par ailleurs établi d'ici la fin de juin.

Troisièmement, nous rassemblerons les résultats de ce travail pour formuler un énoncé plus complet de vision d'un nouveau Canada et une réponse fédéraliste raisonnée et fondée sur des principes aux questions soulevées par le séparatisme, que nous présenterons au pays lors de notre assemblée nationale ici à Ottawa du 14 au 16 octobre.

Voilà ce que font les réformistes pour combler le vide au chapitre de l'unité nationale, au moyen d'une vision positive de l'avenir et d'une réponse fédéraliste raisonnée et fondée sur des principes à la menace de séparation. Voici la question que nous posons au gouvernement: durant les trois prochains mois, que fera-t-il de plus que de préconiser le statu quo pour combler le vide existant au regard de l'unité nationale?

(1025)

Ces derniers jours, le premier ministre s'est rendu en Normandie parce que, à l'instar d'autres pays, le Canada a commémoré l'anniversaire du jour J en Europe. Cet événement est encore lourd de sens pour nous et pour d'autres personnes dans le monde. Il signifie qu'il y a certains idéaux et préoccupations pour lesquels des hommes et des femmes sont prêts à donner leur vie. Si les dirigeants et les législateurs peuvent discerner et communiquer ces idéaux et préoccupations aux gens de leur génération, ils peuvent donner à ceux-ci une vision pour laquelle il vaut la peine de vivre et de lutter.

Durant la guerre, les dirigeants des démocraties occidentales du XXe siècle, les Borden, King, Churchill, Wilson et Roosevelt, ont tous compris cela. À ce propos, l'un d'eux a dit ceci: «Des mères qui ont perdu leurs fils en France sont venues me voir, m'ont serré la main et m'ont dit: «Que Dieu vous bénisse!». J'ai suggéré la ligne de conduite qui a entraîné la mort de leurs enfants. Pourquoi alors, chers compatriotes, devraient-elles prier Dieu de me bénir? Parce qu'elles croient»-et écoutez bien les paroles qui suivent-«en quelque chose qui transcende largement toutes les réalités immédiates et palpables de la guerre.»

Il y a certaines valeurs, la liberté, la sécurité, l'égalité, le patrimoine, l'unité, la démocratie et notre foyer qui transcendent grandement la réalité immédiate et palpable des mesures d'intérêt public et de nos travaux quotidiens. Il y a finalement des


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valeurs pour lesquelles les gens sont prêts à mourir et, partant, pour lesquelles ils sont prêts à vivre et à lutter.

Les Canadiens qui ont débarqué en Normandie ne se battaient pas pour le maintien du statu quo, pour une identité canadienne morcelée ou pour le droit à la sécession. Ils se battaient pour des idéaux très transcendants, qui étaient pourtant ancrés dans leurs croyances et leurs espoirs personnels.

Si le premier ministre pouvait revenir au Canada avec une nouvelle vision de ces idéaux très transcendants à communiquer aux Canadiens d'aujourd'hui et si le Parlement pouvait l'aider à intégrer cette vision aux espoirs et aux rêves des Canadiens de toutes les régions de notre pays, la Chambre aurait alors fait sa part pour établir un point de ralliement en faveur du fédéralisme, ce qui constitue l'esprit et l'essentiel de la résolution à l'étude.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je voudrais dire au chef du Parti réformiste que nous nous félicitons de la tenue de ce débat aujourd'hui. Le Parti libéral, le gouvernement du Canada a ainsi l'occasion de réaffirmer son engagement à l'égard de l'intégrité du Canada ainsi que la conception qu'il propose de notre pays.

Je commencerai par une question sur la partie de votre intervention qui concerne le commerce mondial.

Le Président: À l'ordre. Étant donné la nature de l'intervention, la présidence sera encore plus vigilante aujourd'hui. Je rappelle donc à tous les députés qu'ils doivent s'adresser à la présidence.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Merci, monsieur le Président. Ma question au chef du Parti réformiste porte sur le commerce mondial, dont le député a parlé dans son discours.

Des spécialistes américains des affaires ont signalé qu'un des handicaps dont les États-Unis souffrent dans leurs échanges internationaux est le fait que peu d'Américains connaissent des langues étrangères. Depuis 25 ans, les libéraux favorisent une politique de multiculturalisme incitant les Canadiens à conserver et à promouvoir leur langue et leur culture d'origine.

(1030)

Nous croyons que la politique énoncée par Pierre Trudeau en 1971 constitue aujourd'hui l'un des plus grands avantages que nous ayons, comme pays commerçant, car nous avons des concitoyens qui peuvent retourner dans leur pays d'origine pour représenter le Canada parce qu'ils ont conservé leur langue.

Dans votre nouvelle conception du Canada-je m'adresse au chef du Parti réformiste par votre entremise, monsieur le Président-, continueriez-vous. . .

Le Président: À l'ordre, je vous prie. Le député aurait-il l'obligeance de s'adresser à la présidence?

M. Mills (Broadview-Greenwood): Merci, monsieur le Président. Il s'agit aujourd'hui d'un débat passionné. Le chef du Parti réformiste appuierait-il une politique de multiculturalisme qui établirait un lien entre multiculturalisme et politique commerciale?

M. Manning: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Comme nous le disons dans notre motion, nous sommes en faveur de l'objectif du maintien de notre patrimoine culturel et de sa diversité, ce qui laisse beaucoup de place au concept de la préservation du patrimoine multiculturel du Canada. Quant à l'opinion du député suivant laquelle cela a une dimension économique, nous ne le contestons pas. Là où nous ne sommes pas d'accord, c'est sur les moyens à prendre pour y parvenir.

Nous sommes d'avis qu'il est possible de préserver notre patrimoine culturel en en faisant la responsabilité des particuliers, peut-être à des fins lucratives, ainsi que celle des associations privées et des niveaux de gouvernement inférieurs.

Il faut que le gouvernement se retire de ce secteur et qu'il se contente de prévenir la discrimination fondée sur la culture, la langue, etc. La différence n'a pas trait à l'objectif, mais aux moyens à prendre pour atteindre cet objectif.

Ce nouveau Canada des plus efficaces évolue dans un monde dominé par le libre-échange. Cela ajoute un argument au fait qu'il nous faut avoir un gouvernement fédéral différent de ce qu'il était il y a dix ans, c'est-à-dire qu'il nous faut un plus gros gouvernement fédéral pour agir comme agent de négociation pour ces grands accords commerciaux internationaux. Nous estimons qu'un agent de négociation représentant 28 millions de personnes aura plus de succès dans un monde dominé par le libre-échange qu'un gouvernement représentant, par exemple, 8 millions de personnes.

M. Peter Adams (Peterborough): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement le discours du député qui a parlé, vers la fin de son intervention, du jour J, de notre patrimoine et de notre fierté nationale. Le député et les membres de son parti ne sont pas sans savoir que les grands pays de ce monde, peu importe comment vous définissez leur réussite, n'ont pas été bâtis sur des considérations techniques, des formules ou une conception technocrate de la nationalité, mais bien sur les émotions et les sentiments de leurs habitants ainsi que sur leur patrimoine.

Bien des grands pays ont mis au point des techniques pour canaliser l'énergie que leur a insufflée leur fierté nationale.

L'orateur précédent se tourne vers le XXIe siècle, mais pour ce faire, il faut examiner clairement et honnêtement l'état actuel de notre nation.

Les grandes caractéristiques de notre nation, de ce merveilleux pays qu'est le Canada, de ce remarquable régime confédéral, sont liées à la composition de la population canadienne. Par exemple, nous avons des centaines de Premières Nations, des autochtones qui parlent plusieurs familles de langue et une multitude de langues comme telles.

Nous avons également deux peuples fondateurs, que cela plaise ou non au député, deux groupes qui sentent qu'ils ont une certaine responsabilité et occupent une place spéciale dans la nation moderne du Canada. Il y a ceux qui parlent français et ceux dont la langue première est l'anglais.


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De plus, parmi les Canadiens, nous retrouvons des Canadiens de première génération qui appartiennent à plus de 200 groupes ethniques et s'expriment probablement dans 300 des 6 000 langues parlées dans le monde. Ces gens, y compris les plus récents immigrants, ont tous accepté ou tentent d'accepter le patrimoine commun des Canadiens.

(1035)

Je voudrais demander au député de nous dire comment les peuples autochtones et les langues qu'ils parlent, les deux peuples dits fondateurs et les Canadiens de première génération appartenant à 200 groupes ethniques et représentant une proportion importante de notre population cadrent dans l'idée qu'il se fait du Canada.

M. Manning: Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de ses questions et de ses observations.

Il s'agit là, à notre avis, de la pointe de l'iceberg. Le député voudrait savoir ce que cela cache. Lorsque nous disons que le Canada devrait être caractérisé par son engagement envers la protection de notre patrimoine et de notre diversité culturelle, nous laissons toute la latitude nécessaire pour reconnaître les différents éléments de la diversité canadienne dont a parlé le député.

Il y a le rôle des autochtones, celui des néo-Canadiens venus de divers pays et celui des populations francophones et anglophones qui ont fondé le pays. Tout cela entre dans notre vision d'un nouveau Canada. En ce qui concerne les autochtones, nous prévoyons, dans notre vision d'un nouveau Canada, éliminer le ministère des Affaires indiennes, qui est trop paternaliste, et transférer ses responsabilités, ses fonctions et ses fonds à des gouvernements autochtones locaux. Comme nous l'avons dit à maintes reprises et comme nous le répétons aujourd'hui, il s'agit de savoir non pas s'il faut le faire, mais comment il faut le faire.

Du point de vue historique et sociologique, nous reconnaissons que les francophones et les anglophones ont tous deux joué un rôle dans la fondation et l'évolution du Canada. Cependant, nous estimons que si l'un de ces groupes veut prendre des dispositions à caractère constitutionnel, il ne doit pas lier les droits prévus au titre de la Constitution à des facteurs comme la race, la culture ou la langue, car, en agissant ainsi, on finit par diviser plutôt que par unifier.

Nous semblons être d'accord sur le grand objectif qui consiste à préserver notre patrimoine et notre diversité culturelle, même si cet objectif est défini en termes assez généraux. Je pense qu'il y aura des divergences d'opinions, à la Chambre, quand il sera question des dispositions constitutionnelles à prendre pour atteindre cet objectif.

[Français]

Mme Pierrette Ringuette-Maltais (Madawaska-Victoria): Monsieur le Président, ma question sera très courte. J'ai écouté avec incrédulité les propos du chef du Parti réformiste. J'ai écouté aussi, la semaine dernière, les propos d'un député réformiste en cette Chambre concernant les citoyens du Canada Atlantique et le fait que, selon ce député réformiste, les citoyens du Canada Atlantique étaient des cas de charité pour le gouvernement fédéral.

Donc, aujourd'hui, avec les propos du chef du Parti réformiste, je me pose plusieurs questions: Est-ce que les propos tenus la semaine dernière par son député rentraient dans sa nouvelle vision du Canada? Est-ce qu'il est d'accord sur les propos de son député? Et pour lui, le Canada Atlantique va-t-il demeurer dans une confédération qui pourra lui permettre de s'épanouir, tant au niveau linguistique qu'économique et social, tout comme au début de cette Confédération?

[Traduction]

M. Manning: Monsieur le Président, pour répondre brièvement à la question de la députée, notre vision d'un nouveau Canada comprend assurément le Canada atlantique. Elle comprend l'économie toute revigorée du Canada atlantique.

Ce à quoi l'autre député faisait allusion, et cela, sans mauvaise intention de se part, c'est que ces 30 dernières années, nous avons eu recours à des subventions au développement régional pour essayer de stimuler le développement économique du Canada atlantique. Des économistes du monde entier disent aujourd'hui que la démarche adoptée par le Canada à l'égard du développement économique n'est pas le modèle à suivre. Nous avons investi des milliards de dollars et les taux de chômage et de croissance économique dans ces provinces ne sont pas meilleurs qu'ils ne l'étaient au départ.

Dans notre vision, nous proposons une solution de rechange. Les programmes de développement régional de l'avenir tireront profit des dimensions nord-sud du libre-échange. C'est précisément ce que fait la Colombie-Britannique, qui est la région de notre pays à avoir l'économie régionale la plus forte. Le premier ministre du Nouveau-Brunswick élabore actuellement une stratégie à ce sujet. C'est, selon nous, l'orientation que devrait prendre le développement régional.

(1040)

[Français]

L'hon. Fernand Robichaud (secrétaire d'État (Affaires parlementaires)): Monsieur le Président, c'est pour moi, vraiment, un plaisir et un honneur de prendre la parole aujourd'hui dans le cadre du débat lancé par le Parti réformiste. Cela me donnera et nous donnera à tous et chacun, toutes et chacune, l'occasion de réfléchir sur une question fondamentale, une question de première importance, et de réaffirmer, je le dis bien, de réaffirmer notre désir de vivre ensemble dans un pays uni.

[Traduction]

Je tiens à dire clairement à la Chambre que je parle aujourd'hui en tant que Canadien, Néo-Brunswickois et Acadien. En tant qu'Acadien et fils du Nouveau-Brunswick, j'ai une histoire et des racines distinctes, mais je suis extrêmement fier d'être Canadien.

[Français]

Depuis l'arrivée de nos ancêtres, au prix souvent de dures luttes, il s'est créé ici, en terre d'Amérique, un berceau solide pour notre langue et notre culture. Notre pays n'est pas qu'un territoire, c'est un creuset dans lequel une union historique de deux langues et de deux cultures s'est forgée.

Le débat d'aujourd'hui me rappelle le débat de 1992, lorsque cette Chambre a accepté la proposition de modification constitutionnelle du Nouveau-Brunswick, qui a assuré l'enchâssement,


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dans la Constitution canadienne, des principales dispositions de la loi reconnaissant l'égalité des deux communautés linguistiques officielles du Nouveau-Brunswick.

Il est important de rappeler aux réformistes, qui n'étaient pas ici à l'époque, l'importance, la valeur réelle et symbolique de cet amendement constitutionnel. Tout d'abord, la mesure consacre de façon presque irréversible le cheminement que les deux communautés linguistiques ont effectué depuis de nombreuses années, les progrès qu'elles ont réalisés ensemble et l'avenir commun qu'elles veulent construire sous le signe de la coopération et du partenariat.

Cette mesure témoigne aussi de la maturité sociale de deux groupes linguistiques qui veulent vivre ensemble et transmettre aux générations futures de Néo-Brunswickois la volonté de poursuivre l'expérience sociale et économique commencée. Ainsi, le Nouveau-Brunswick est à plusieurs égards le reflet d'une réalité de notre fédération.

Chez nous, en mettant du coeur à l'ouvrage, en faisant, bien sûr, des compromis, et surtout, en respectant la réalité des autres, nous sommes parvenus à créer un climat de bonne entente, propice à des aménagements linguistiques fructueux et satisfaisants.

Le Nouveau-Brunswick a été, de tout temps, une terre d'asile pour nos deux communautés linguistiques. D'une part, c'est là que sont venus se réfugier une bonne partie des Acadiens et Acadiennes après la déportation de l'année 1755. C'est là, aussi, d'autre part, que sont venus s'établir des loyalistes qui fuyaient les États-Unis après le Traité de Paris.

Aujourd'hui, cette tradition d'accueil est encore bien présente chez nous. De partout au monde nous arrivent de nouveaux citoyens désireux de bâtir avec nous un avenir heureux, pour eux, et bien sûr, pour leur descendance. Je souhaite vivement que cet exemple de respect des différences, de tolérance face à la diversité culturelle et d'accueil à l'égard des autres soit contagieux dans l'ensemble du Canada.

Malgré les écueils qui marquent quelquefois l'expression de notre identité nationale, il n'en demeure pas moins que nous avons plus de choses en commun à célébrer que nous avons de différences à circonscrire.

(1045)

[Traduction]

Les Canadiens ont fait la preuve de la générosité d'esprit qui a fait de notre société l'une des plus ouvertes au monde. La composition même de la Chambre des communes en témoigne. Malheureusement, je dois dire, à regret, que la générosité et la tolérance qui caractérisent les Canadiens ne semblent pas être partagées par les deux partis d'opposition régionaux. Ces partis veulent diviser le Canada. Ils veulent un camp francophone et un camp anglophone. Ils veulent scinder les régions. Ils veulent en arriver au point où la division fera disparaître le Canada et le rendra méconnaissable. Je trouve cela malheureux.

J'ai entendu le Parti réformiste présenter des motions contre la politique des langues officielles, une politique juste, qui témoigne d'une vision pragmatique de la réalité linguistique canadienne et qui impose des obligations linguistiques au seul gouvernement fédéral, tout en laissant les choix linguistiques aux Canadiens. Le Parti réformiste manifeste son opposition parce qu'il ne comprend pas la politique des langues officielles et ne voit pas l'équité et le pragmatisme qui lui servent de fondement.

Quand la Parti réformiste parle de multiculturalisme, il ne manifeste aucune tolérance et ne tient pas compte de la réalité de l'Ouest, où des Ukrainiens, des Chinois, des Allemands, des Suédois et une douzaine d'autres groupes ethniques sont venus chercher une vie meilleure pour eux et leurs enfants, à l'abri de la persécution et de l'intolérance, libres de choisir leur nouveau foyer, tout en demeurant fiers de leur patrimoine.

La reconnaissance et le respect de la diversité culturelle sont inhérents à l'identité canadienne. Quand on traverse les villes, les petites municipalités ou les exploitations agricoles du Canada, on constate que le multiculturalisme n'est pas seulement une politique, mais aussi une réalité. Je ne suis pas sûr, cependant, que le Parti réformiste l'ait pleinement compris.

Hier, le premier ministre assistait en Normandie aux célébrations commémorant le 50e anniversaire du jour J et la participation des braves Canadiens qui ont combattu là-bas et y sont morts. Le premier ministre a souligné que ces gens venaient de divers milieux, qu'ils étaient de races et de cultures diverses, mais que tous avaient combattu côte à côte. Il disait des soldats:

Ils avaient tous une chose en commun: ils faisaient partie d'une nation jeune et d'un genre nouveau où les haines anciennes ne faisaient pas le poids face aux promesses de l'avenir, où les gens croyaient qu'ils pouvaient parler des langues différentes, pratiquer des religions diverses et vivre en paix. Ils ne sont pas morts en tant qu'anglophones ou francophones, en tant que gens de l'Est ou de l'Ouest, en tant que chrétiens ou juifs, en tant qu'immigrants ou autochtones. Ils sont morts en tant que Canadiens.
(1050)

[Français]

Malheureusement, il y a des politiciens qui se penchent uniquement sur le négatif. Le négativisme, c'est pour eux un mode de vie, une sombre façon de voir notre grand pays. Oui, certes, nous avons nos difficultés, il reste beaucoup de travail à faire, mais quel pays n'en n'a pas? Partout au monde on envie le Canada tellement nos conditions de vie sont bonnes.

Vous n'êtes pas sans savoir que cette année encore un rapport des Nations Unies nous place au premier rang des nations. Ce rapport mentionne que, si l'on tient compte de tous les éléments qui font le bonheur des citoyens, le Canada est le pays du monde où il fait le mieux vivre. La menace constante qui pèse sur l'unité du Canada nous porte grandement préjudice. La confiance des autres pays dans notre économie et notre avenir s'en trouve ébranlée.

Les différents paliers de gouvernement passent plus de temps à se disputer les pouvoirs qu'à rechercher ensemble des solutions aux problèmes qui nous préoccupent. Les barrières commerciales que nous maintenons en place au sein du pays font entrave à notre économie, alors que partout ailleurs dans le monde on tend à les éliminer. Les pouvoirs fédéraux et provinciaux se chevauchent, les programmes font double emploi. C'est pour ces raisons que nous, en tant que gouvernement, préférons mettre de côté les questions constitutionnelles pour nous concentrer plutôt sur la coopération et sur des solutions pratiques et réalistes à nos


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problèmes, contrairement au Bloc québécois qui, lui, vise à séparer le pays, à le détruire.

Nous avons été élus il y a un peu moins de huit mois. Après avoir écouté la population, nous nous sommes fixé des objectifs très clairs. Notre premier objectif était, bien sûr, et il l'est encore, la création d'emplois; le deuxième, l'assainissement des finances publiques; le troisième, la réforme de la sécurité sociale et le quatrième, la restauration de l'intégrité au sein des affaires publiques.

Nous avons consacré toute notre énergie à promouvoir la croissance économique et la création d'emplois parce que, pour nous, c'est évidemment la priorité numéro un. Il importe de redonner aux personnes qui, malheureusement, doivent demander l'assurance-chômage ou le bien-être social, la dignité du travail. Je pense que c'est la préoccupation de tous les citoyens et de tous les administrateurs publics du pays, et il nous faut poursuivre cet objectif primordial.

Si, depuis des années, on avait mis autant d'énergie à promouvoir la croissance économique et la création d'emplois qu'on en a mis à parler de Constitution, nous serions beaucoup plus avancés dans notre pays et ça, les gens le réalisent bien. Dans notre recherche de solutions pratiques, permmettez-moi de porter à votre attention quelques exemples concrets.

Aujourd'hui, le ministre de l'Industrie rencontre ses homologues provinciaux afin de faire avancer le dossier du libre-échange du commerce au pays. Nous avons constaté que les barrières économiques entre les provinces étaient, comme je viens de le mentionner, il y a quelques instants, une entrave au commerce national. Nous avons donc agi. Nous collaborons avec les provinces et les progrès réalisés à ce jour sont impressionnants.

Je viens de mentionner les chevauchements et le double emploi entre le gouvernement fédéral et les provinces. Voici une autre sphère que nous examinons sérieusement. Le président du Conseil privé et ministre des Affaires intergouvernementales se penche activement sur ce dossier. En collaboration avec les provinces et tous les ministères fédéraux, il examine chaque cas de chevauchement et de double emploi. Ceci afin d'en arriver à des ententes administratives qui permettront de mieux servir les Canadiens et Canadiennes de façon plus efficace.

(1055)

Nous avons mis en place le Programme national d'infrastructures. Ce programme est un exemple de ce qui peut être fait pour le bien-être de tout le pays, lorsque les trois paliers de gouvernement collaborent.

[Traduction]

C'est le genre de mesures concrètes que les électeurs du Canada nous ont demandé de prendre, quand ils nous ont élus en octobre dernier. Ils ont voté en faveur de la fin des disputes constitutionnelles qui ont préoccupé le précédent gouvernement durant plus d'une dizaine d'années. Les Canadiens ont voté à une majorité écrasante pour la création d'emplois. Ils ont voté pour qu'on leur transmette un message d'espoir. Ils ont voté en faveur de l'honnêteté et de l'intégrité au sein du gouvernement. Ils ont voté pour un parti qui a incarné et défini le fédéralisme, depuis la fondation du Canada.

Le gouvernement et les citoyens de ce pays savent ce qu'est le Canada, et nous voulons faire en sorte qu'il soit encore meilleur. C'est ce qu'on entend par un bon gouvernement et c'est ce que veulent les Canadiens. Ils ont le droit d'espérer cela et nous avons l'intention de le leur donner.

Nous savons tous que les mots peuvent blesser, qu'ils peuvent faire de la peine aux gens de notre pays et qu'ils peuvent faire tort au pays même. Depuis des années, les Canadiens se voient, eux-mêmes et leur pays, scrutés, critiqués et rabaissés par ceux-là même qui devraient donner l'exemple et susciter un sentiment de confiance en l'avenir. Les mots peuvent vraiment blesser, car c'est avec des mots que les chefs des partis d'opposition essaient de fausser la réalité quotidienne des Canadiens.

La réalité, elle se trouve là où les gens vivent et travaillent en vue de bâtir un avenir pacifique et productif, et non pas dans les débats interminables sur des définitions abstraites couchées sur du papier. Nous ne voulons pas nous enfermer dans une camisole de force verbale.

[Français]

J'entends le chef de l'opposition dire «Ah!». Eh bien, les mots du chef de l'opposition, il y a deux semaines à Shédiac, ont justement été rejetés par la communauté acadienne, ces paroles qui visaient en fait à séparer le pays. On lui a tout simplement dit «Non, merci.»

[Traduction]

Notre débat politique devrait porter sur les moyens de créer des emplois, de bâtir notre économie, de protéger notre filet de sécurité sociale, de protéger l'environnement et de faire en sorte que le gouvernement fonctionne mieux et à moindres coûts pour nos citoyens. Notre débat politique n'a déjà que trop été infecté par le virus du doute de soi-même et de l'anxiété. Il est attristant de voir que le chef du Parti réformiste a contracté ce virus.

[Français]

Permettez-moi de citer M. Michel Doucet, un militant acadien de longue date qui, récemment, lorsqu'il exprimait la vision canadienne sur l'avenir du pays, faisait écho de la vision que je viens d'énoncer et je cite: «Pour la francophonie canadienne en général et pour l'Acadie en particulier, le salut passe par la continuité du système fédéral; un système fédéral où le Québec et les communautés francophones et acadienne du Canada seraient capables de trouver les moyens d'assurer leur sécurité culturelle puisqu'il est essentiel que le Canada se rappelle que la culture menacée, en cette terre d'Amérique, est la culture française.»

L'une des forces qui a donné naissance à la Confédération est la conviction que l'on pouvait réaliser de grandes choses en s'unissant plutôt qu'en agissant de façon isolée, et que les ci-


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toyens de chacune des provinces pourraient jouir d'un avenir meilleur en étant unis dans un même pays.

(1100)

Monsieur le Président, comme vous me signalez que mon temps de parole achève, j'aimerais profiter de l'occasion pour proposer l'amendement suivant:

Qu'on modifie la motion en retranchant tous les mots suivant les mots «Canadiennes de» et en les remplaçant par ce qui suit:
«Continuer de vivre ensemble dans un système fédératif.»
M. Nic Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention le chef du Parti réformiste ainsi que le secrétaire d'État aux Affaires parlementaires. L'un dit qu'il faut absolument rediscuter de la question; l'autre dit qu'il ne faut plus en parler. Le secrétaire d'État aux Affaires parlementaires dit qu'il ne faut pas en reparler. Moi, je pense qu'il a raison de dire qu'il ne faut pas en reparler parce qu'il y a eu de longs débats qui ont duré très longtemps, depuis 1989. Je suis dans ce Parlement depuis 1984 et on en parle depuis très longtemps.

Vous vous en souvenez, monsieur le Président, il y a eu des débats et des commissions parlementaires. Il y a eu deux ou trois commissions parlementaires; il y a eu tous ces débats qui n'en ont pas fini. Il y a eu des résultats aussi: il y a eu Meech. Et Meech, vous le savez, n'a pas fonctionné. Pourtant, là-dedans, il y avait de minimes recommandations pour le Québec.

Des voix: Oui, mais pas pour les régions, par exemple.

M. Leblanc (Longueuil): Et pour les autres régions aussi. Cela aurait pu bien fonctionner, mais on a refusé Meech pour le Québec.

Il y a eu un autre débat après: Charlottetown; toutes sortes de débats ont eu lieu, des commissions ont eu lieu et il y a eu aussi Charlottetown. Vous vous souvenez que Charlottetown a aussi échoué. Alors, quand on dit qu'on veut en reparler ou qu'on ne veut pas en reparler, je pense qu'il est trop tard pour en reparler. Pour nous, c'est déjà fait.

Au Québec aussi, on a fait un exercice, l'exercice le plus sérieux que le Québec a fait de son histoire: on a eu la Commission Bélanger-Campeau qui a reçu 600 mémoires et entendu 200 témoins. Il y a eu aussi, en même temps, une commission spéciale d'experts. Les résultats, encore une fois, selon les grands experts du Québec, sont qu'il faut que le Québec, pour pouvoir s'épanouir à sa juste valeur et pour pouvoir sortir de cette crise économique, où il est en train de faire faillite avec le reste du Canada, obtienne une vingtaine de pouvoirs réels. Ce que je dis maintenant, ce n'est pas moi qui le dis, mais ce sont les Québécois, les experts québécois qui l'ont dit. Et ça a été refusé dans Charlottetown aussi.

Alors, quand le député dit qu'il faut continuer à faire le débat, pour nous, le débat est terminé. On est rendu à l'autre étape, celle de réaliser la souveraineté du Québec. Pas au détriment du reste du Canada, mais pour l'avantage du Québec.

(1105)

Alors, je suis d'accord avec le secrétaire d'État aux Affaires parlementaires qui dit: Il ne faut plus en parler. Il a raison, pour nous le débat est terminé, ce débat-là est terminé. Nous sommes passés à l'autre étape.

M. Robichaud: Monsieur le Président, j'ai bien écouté les commentaires de mon ami et chaque fois que les partis d'en face parlent de Meech, de Charlottetown, qu'on ne parle pas du rapport Charest, cela me porte un peu à réfléchir. C'était pourtant une solution. Il y a des gens qui ont démissionné, qui ont «sacré le camp» à cause de certaines de ces choses.

Lorsqu'on parle de Charlottetown sur quoi il y a eu un référendum, j'ai l'impression que tout l'appareil du Bloc ne voulait absolument pas que cela passe pour la simple raison que cela aurait été bon pour le Québec et aurait mis de côté tout à fait son option de séparation.

Pour vous, invoquer Charlottetown manque un peu de sens. Du moins dans mon esprit cela n'a aucun sens. Vous parlez de crise économique, mais vous en êtes rendus à un point où vous voulez. . .

Je m'excuse, monsieur le Président, mais les gens d'en face parlent de crise économique et je veux, par vous, monsieur le Président, répondre à leurs préoccupations. Le député nous a dit qu'il ne voulait pas faire la séparation au détriment du reste du Canada. Pour l'amour du ciel, comment allez-vous faire cela? Juste le discours sur la séparation que vous tenez actuellement lance une insécurité totale sur les marchés. On y voit le pays comme étant un endroit où il ne fait plus bon vivre, où il ne fait plus bon de venir faire des affaires, où on se pose des questions sur l'avenir d'un pays. Pourtant, c'est le pays qui nous a permis, et à vous, et je me réfère aux groupes de francophones de la province de Québec et à nous les Acadiens, à tous les autres groupes du pays, c'est bien la formule Canada qui nous a permis d'être où nous sommes actuellement. Tout d'un coup vous arrivez et vous nous dites que vous ne voulez pas faire la sépara-tion. . .!

Le Président: À l'ordre! À l'ordre! Dans tous les cas, j'aimerais que les députés s'adressent toujours au Président de la Chambre, s'il vous plaît.

M. Robichaud: Mes excuses, monsieur le Président. Je voulais tout simplement dire qu'ils nous disent qu'ils veulent faire cette séparation sans nuire au reste du Canada. C'est difficile à prendre! Je pense que les Canadiens savent mieux que cela et ne se laisseront pas emporter par un tel discours.

M. Benoît Tremblay (Rosemont): Monsieur le Président, dans le discours du secrétaire d'État, on avait suffisamment de choses pour au moins soulever une contradiction.

Il a commencé son discours en glorifiant le Parlement canadien d'avoir adopté, dans la Constitution canadienne, le bilinguisme institutionnel au Nouveau-Brunswick, comme si c'était quelque chose d'extraordinaire. Il a poursuivi en nous disant que ce n'était plus important de parler de Constitution, que c'était un vulgaire bout de papier, qu'il faudrait parler maintenant de création d'emploi. Je demanderais au secrétaire d'État de savoir ce


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qu'il veut. Si la Constitution, ce n'est pas important, expliquez-moi comment c'est si important que ce qui se passe au Nouveau-Brunswick soit dans la Constitution.

(1110)

Or, en réalité, on sait très bien que la Constitution, c'est important, parce que c'est la loi fondamentale qui décide qui peut faire quoi dans ce pays, et c'est la source des multiples problèmes qu'on a, de la duplication permanente entre les deux niveaux de gouvernement, parce que le gouvernement fédéral pense toujours qu'il peut faire mieux que les autres gouvernements et empiète sur toutes les juridictions des provinces.

Je voulais soulever au moins cette contradiction, si on glorifie le Parlement fédéral pour avoir adopté un amendement constitutionnel, comment peut-on, par la suite, dire que la Constitution est un vulgaire bout de papier?

M. Robichaud: Monsieur le Président, je n'ai pas dit que la Constitution était un vulgaire bout de papier. J'ai reconnu l'importance de l'amendement constitutionnel, lorsqu'il s'agit des langues officielles au Nouveau-Brunswick. Ce que j'ai voulu dire et ce que j'ai dit, c'est que les Canadiens aimeraient plutôt nous voir parler de problèmes qui les touchent dans la réalité de tous les jours et cette réalité, c'est l'emploi, c'est la dignité d'un travail.

Les Canadiens ont réalisé, lors de la dernière élection, qu'on avait suffisamment parlé de Constitution et qu'on devait porter toute notre attention aux problèmes qui les touchent à tous les jours, ceux de se trouver un emploi et d'avoir la dignité de travailler pour gagner leur vie.

[Traduction]

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, avant ses remarques négatives à l'endroit du Parti réformiste, le député nous a fait partager quelque peu sa vision du Canada et a fait référence, je crois, à l'union historique qui règne entre les deux groupes linguistiques et culturels au Nouveau-Brunswick qui, a-t-il suggéré, devrait servir de modèle à notre pays.

Le député ne trouve-t-il pas nécessaire d'étendre cette vision, que cette vision n'est pas suffisamment vaste pour s'appliquer au pays tout entier? Le député n'est-il pas d'accord pour dire que, quand vous parlez aux habitants du centre-ville de Victoria de l'union historique qui règne entre les deux groupes culturels et linguistiques, ils ne la ressentent pas? Si vous parlez à la plupart des autochtones de l'union historique qui règne entre les deux groupes linguistiques et culturels, cela ne correspond pas à l'idée qu'ils se font du Canada.

Le député ne trouve-t-il pas nécessaire d'aller au-delà du concept voulant simplement faire du Canada un partenariat entre les groupes anglophones et francophones?

[Français]

M. Robichaud: Monsieur le Président, j'ai dit que je souhaitais même que l'exemple du Nouveau-Brunswick se propage un peu partout au pays et vous dites qu'on devrait peut-être aller plus loin.

Bien sûr, on doit toujours faire des ajustements, mais je suis inquiet et je ne vois pas le progrès du côté du Parti réformiste lorsqu'on voit, dans cette Chambre, des propositions qui visent, en fait, à changer ou à éliminer le programme des langues officielles.

Pour les communautés du Nouveau-Brunswick et pour beaucoup de communautés ailleurs au pays, cette loi a joué un grand rôle. Je comprends mal que le Parti réformiste veuille le bien-être de toute la communauté, d'une part, et d'autre part, vise à éliminer les programmes qui ont permis que nous puissions vivre et connaître autant de progrès et que nous ayons vraiment connu un certain épanouissement. Je trouve curieux d'entendre ce discours de la part du Parti réformiste.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, je voudrais remercier le chef du Parti réformiste de nous donner l'occasion de participer à ce débat. J'avais cru comprendre qu'il nous en priverait, puisqu'il avait annoncé qu'il n'allait pas se mêler de ce qu'il avait appelé les «chicanes de famille».

Je pense qu'il se rend compte maintenant que c'est plus qu'une chicane de famille, que c'est un problème fondamental, qu'il préexiste à toutes les questions économiques, à toutes les difficultés que nous avons, la question de déficit et tout le reste, et tant que nous n'aurons pas réglé ce problème, et je le remercie de l'avoir compris, nous devrons l'aborder de plein front, en tout cas, c'est ce que nous, du Bloc québécois, avons décidé de faire.

(1115)

Tous les pays occidentaux, membres après 1939 de la vaste Coalition anti-nazie, ont célébré hier le 50e anniversaire du débarquement des troupes alliées en Normandie. Les milliers de jeunes soldats qui sont tombés et tous leurs frères d'armes étaient en réalité, pour reprendre la manchette du magazine Time, «les croisés de la dernière grande croisade». Celle-ci a provoqué, après la fin des hostilités, la création de deux blocs antagonistes qui voulaient également instaurer une paix durable en Occident.

L'Occident vit en paix avec lui-même depuis près de 50 ans. Il y a bien sûr des orages et des sautes d'humeur. Mais aujourd'hui aucun pays occidental ne songerait à recourir aux armes pour régler à son avantage un conflit politique ou économique avec un autre pays. Les ennemis d'hier, pensons à l'Allemagne, de la France en particulier, des ennemis plusieurs fois séculaires, sont devenus les alliés les plus solides d'aujourd'hui.

Cette paix occidentale intérieure est fondée sur deux grands principes: celui de la démocratie et celui de la souveraineté nationale. Ces deux principes sont interreliés: l'exercice de la démocratie garantit celui de la souveraineté nationale. De la sorte, se trouvent résolues les deux questions fondamentales qui se posent à propos de l'organisation politique des sociétés humaines: comment accède-t-on au pouvoir et qui gouverne qui?

La réponse occidentale à ces deux questions brille par sa clarté. Les nations préfèrent se gouverner elles-mêmes et à l'intérieur de chaque nation les citoyens et les citoyennes veulent choisir démocratiquement leur gouvernement. En deux mots


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comme en mille, l'État-nation démocratique constitue la règle à l'intérieur de notre civilisation occidentale.

Y a-t-il plus belle occasion que cette célébration solennelle des idéaux qui ont rassemblé, il y a 50 ans, autant de peuples et de combattants sous une même bannière pour rappeler à tous les Canadiens et à tous les Québécois notre attachement profond à ces valeurs fondamentales que sont la paix et la démocratie?

Lorsqu'on fournit au sentiment national le cadre qui lui permet de s'épanouir normalement, c'est un gage de paix. Et quel exemple de collaboration constructive les Nations de l'Europe occidentale ont donné au monde entier depuis plus de 40 ans! Sans pour autant aliéner la souveraineté nationale, lorsqu'il s'agit de questions fondamentales, il y a une grande leçon pour le Canada, pays jeune, mais qui s'est avéré étrangement incapable d'une flexibilité que commandaient pourtant d'incontournables données sociologiques et économiques.

La démocratie apparaît certes comme le régime le plus exigeant pour les gouvernants et pour tout l'appareil de l'État en termes de retenue, de transparence et de respect des droits de la personne. Dans les moments difficiles, et tous les pays en connaissent au cours de leur histoire, la tentation est forte de prendre quelques libertés avec la démocratie. Le Canada ne fait pas exception à cette règle. Pensons à la Loi des mesures de guerre en 1970.

Ces moments plus difficiles permettent de tester la solidité de la fibre démocratique d'une société. Mais l'avenir immédiat ne nous inspire aucune crainte de ce côté. Ce n'est certes pas au moment où la démocratie gagne du terrain dans le monde, notamment en Amérique latine, nonobstant la triste situation d'Haïti, et en Europe centrale, que le Canada fera marche arrière.

[Traduction]

Soyons clairs à ce sujet. Il est parfaitement normal que le gouvernement fédéral prépare une campagne de persuasion pour convaincre les Québécois des mérites du statu quo, mais il est aussi parfaitement normal que nous fassions la promotion de la seule alternative qui existe: la souveraineté politique du Québec.

Le chef du Parti réformiste parle d'un nouveau fédéralisme, mais les 30 dernières années nous ont abondamment démontré que cette prétendue nouvelle vision n'est rien d'autre qu'un cul-de-sac. Il y a deux possibilités. Il y aura un débat politique et la population du Québec décidera. Nous devrons tous respecter les résultats de la consultation, c'est cela la démocratie.

Cela ne signifie pas que tout est permis. On ne saurait tolérer les coups bas ni un salissage systématique. Ces mots sont-ils trop forts? Nous espérons, au départ de cette importante campagne, que la décence l'emportera. On peut avoir des opinions bien arrêtées sur les questions de l'heure sans faire un démon de son adversaire. C'est la façon dont nous avons toujours agi et nous continuerons d'agir ainsi.

Une fois que l'on aura filtré tous les bruits parasites on pourra se concentrer sur la question centrale. Si le Canada a d'aussi mauvais résultats, c'est principalement parce qu'il y a en son sein des visions diamétralement opposées. Dans l'esprit des anglophones il y a un gouvernement national à Ottawa et 10 provinces égales. Autrement dit un gouvernement principal et 10 gouvernements secondaires.

(1120)

Pour les Québécois, le gouvernement national est à Québec et la doctrine de l'égalité des provinces est un refus de reconnaître leur histoire et leurs aspirations.

Étant le gouvernement principal, Ottawa peut intervenir dans presque tous les domaines provinciaux, simplement en utilisant son pouvoir de dépenser. Que se passe-t-il lorsque le Québec et Ottawa ont des priorités différentes? Non seulement leurs bureaucraties se superposent, mais souvent elles travaillent l'une contre l'autre. Et si le Canada anglophone préfère transférer certains pouvoirs provinciaux au gouvernement fédéral, il peut le faire non seulement administrativement, mais aussi juridiquement; le Québec ne peut donc empêcher l'érosion de ses pouvoirs.

Ceci se résume à une simple réalité: le fédéralisme canadien signifie que le gouvernement du Québec est subordonné au gouvernement central pour les grands dossiers autant que pour les moins importants. À l'heure actuelle, le Québec n'a pas encore tous les pouvoirs requis pour être le principal intervenant dans l'établissement de ses priorités économiques, sociales ou culturelles. Autrement dit, le Canada anglophone a un droit de veto sur le développement futur du Québec au sein de la fédération.

Personne ne renonce joyeusement au pouvoir, mais on peut au moins espérer que le Canada anglophone reconnaîtra clairement l'impasse où le régime actuel nous a tous deux menés. La crise budgétaire n'est que le symptôme le plus visible de cette impasse. L'impossibilité totale de faire un mouvement politique d'importance dans un sens quelconque en est un autre. Le gouvernement fédéral ne cédera jamais ses énormes pouvoirs, d'abord pour des raisons idéologiques, mais aussi parce que de nombreuses provinces ne possèdent pas les ressources nécessaires pour assumer ne serait-ce qu'une mince partie de ses pouvoirs. En fait, la nécessité d'un gouvernement central plus fort pour le Canada anglophone, dans le secteur de l'éducation par exemple, ne fait aucun doute. Toutefois, les provinces plus importantes, en constatant la résistance farouche du Québec à tout transfert quel qu'il soit vers Ottawa, hésiteront à se rallier au mouvement fédéral.

Ainsi l'impasse et la confrontation font partie intégrante du système. Il est facile de prévoir, par exemple, que le programme éventuel de réforme de la sécurité sociale de M. Axworthy n'atteindra pas ses objectifs. Les déficits exorbitants continueront de s'accumuler, ce qui accélérera le processus de déclin relatif de l'économie canadienne.


4918

[Français]

Le peuple québécois quant à lui rejette le statu quo qui ne saurait jamais le satisfaire. Il s'est nettement exprimé à ce sujet lors des dernières élections fédérales. Il a compris, lui, ce que n'ont pas encore compris les Québécois et les Québécoises occupant les banquettes ministérielles dans cette Chambre, à savoir, qu'il est des moments dans l'histoire où bien gouverner signifie modifier en profondeur le régime. Nous approchons de l'un de ces moments.

Certains préfèrent avoir le nez collé sur la manchette du journal avant de reconnaître qu'il se passe quelque chose. C'est leur droit, même si cela témoigne d'une forme particulière d'hypermétropie historique. En fait, chaque mois qui passe démontre, et démontrera l'impuissance du gouvernement fédéral à sortir le Canada et le Québec de la crise économique et budgétaire qui les mine de plus en plus.

Dans le cadre du débat sur le Budget du 22 février dernier, nous avons attiré l'attention de cette Chambre sur plusieurs aspects discutables du Budget, rappelons-en deux. Premièrement, le ministre des Finances avait délibérément gonflé son estimation du déficit de l'année 1993-1994 pour mieux faire briller sa performance de l'année en cours. Le service de la dette, au cours de la présente année, avait notammment était surestimé. Il y a quelques semaines, le ministère des Finances nous donnait raison; il s'attend maintenant à un déficit en deçà de 44 milliards de dollars au lieu des 45,7 annoncés le 22 février dernier.

Deuxièmement, nous avions affirmé que les projections de taux d'intérêt contenues dans le Budget péchaient par excès d'optimisme. Aujourd'hui, plus personne ne les juge crédibles. Les taux d'intérêt sur les titres à court et long terme dépassent maintenant de presque deux points de pourcentage le niveau moyen prévu dans le Budget, malgré la baisse des derniers jours.

(1125)

Il est impossible, au vu de la piètre situation financière du gouvernement fédéral, que les taux d'intérêt baissent de manière significative au Canada sans un mouvement similaire aux États-Unis. Or, l'économie américaine s'approche du seuil d'utilisation de ses capacités productives qui vont donner cours à des pressions inflationnistes plus importantes. On n'a qu'à considérer le taux de chômage de nos voisins du Sud: il a baissé à 6 p. 100 en mai, alors que le nôtre se maintient à 11 p. 100.

Dans ces conditions, la politique monétaire américaine demeurera plus restrictive, et le taux d'intérêt américain pourrait augmenter encore. Ajoutons à cela une projection de recettes trop optimiste, et on comprendra que le gouvernement imite, dès le départ, celui qui l'a précédé dans la sous-évaluation des déficits.

Comme les hypothèses économiques sous-tendant le déficit prévu pour 1995-1996 sont encore plus optimistes que celles portant sur l'exercice actuel, cette sous-évaluation prendra forcément de l'ampleur l'année prochaine. Comment s'étonner alors que les milieux financiers ne croient pas dans la promesse du ministre des Finances de réduire le déficit fédéral à 3 p. 100 du PIB en 1996-1997? L'Institut C.D. Howe vient d'avertir le gouvernement, dans une étude toute récente, que ses dépenses devraient être réduites de 7,2 milliards de dollars s'il voulait honorer la promesse des 3 p. 100. Dans quelques mois, l'incapacité du gouvernement fédéral à redresser sa situation financière autrement qu'en balayant la crise dans la cour des provinces sera évidente pour tous. Voilà ce que nous réserve le prochain budget fédéral.

Il faut reconnaître d'emblée que le ministre des Finances a déjà annoncé la couleur. Devant la montée des interrogations qui fusaient de toute part à propos de la précarité des finances publiques fédérales, il s'est engagé, il y a un mois et demi, à réduire massivement les transferts aux provinces à compter de 1996-1997. Il est même allé plus loin, puisque c'est surtout de cette manière qu'il entend éliminer le déficit fédéral d'ici à l'an 2000.

D'une part, le gouvernement fédéral prétend décider de tout; il lorgne même du côté de l'éducation. De l'autre, il s'apprête à refiler aux provinces la facture de sa propre irresponsabilité fiscale. Le fédéralisme fiscal s'annonce ainsi de plus en plus désavantageux pour le Québec. La tendance des dernières années connaîtra une brusque accélération. Et il deviendra plus évident que jamais que le Québec doit rapatrier tous ses moyens, s'il tient vraiment à briser le cercle vicieux de la délinquance d'un régime qui constitue chaque jour davantage une entrave fondamentale à sa liberté d'action.

Nous savons donc que la dynamique politique et économique qui meut le régime actuel joue profondément, et non pas seulement superficiellement, en faveur de la souveraineté du Québec. Les années qui viennent confirmeront que cette souveraineté s'inscrit dans le sens de notre histoire.

[Traduction]

J'ai entendu l'explication du chef du Parti réformiste sur ce que le Canada devrait faire pour sortir de la crise. Je l'ai entendu proposer qu'il y ait une sorte de nouvelle ronde de négociations, mais qu'un grand nombre de députés et de ministres, en compagnie de fonctionnaires, assistent d'abord à des assemblées publiques partout au Canada.

En l'entendant, j'ai eu une impression de déjà-vu et j'ai pensé que cette méthode s'apparentait beaucoup à celle de Keith Spicer. Est-ce qu'on se souvient du train de Keith Spicer, qui a parcouru le pays tout entier pour prendre le pouls de la population? Des opinions de toutes sortes ont alors été exprimées, mais, au bout du compte, il n'en est rien resté. La montagne a accouché d'une souris, dit l'expression. Je suis bien découragé à la pensée que nous pourrions recommencer tout cela, si nous suivions la recommandation des réformistes.

Le chef du Parti réformiste connaît peu l'histoire du Québec. Pour ma part, j'ai 55 ans et j'ai consacré la plus grande partie de mes 30 ans de vie adulte à la stérilité des discussions fédérales-provinciales, au bourbier constitutionnel. Comme la population du Québec et probablement du reste du Canada, j'ai l'impression qu'au cours des 30 dernières années, nous avons perdu l'énergie, l'argent et la vigueur politique qu'il nous fallait pour bâtir quelque chose de vrai dans tous les coins de cet immense pays,


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parce que nous avons plutôt misé sur des discussions stériles concernant la Constitution.

Nous sommes aujourd'hui saisis d'une nouvelle proposition qui résume ce terrible cirque. Les gens ont oublié l'expérience que nous avons vécue au moment du référendum de 1980 au Québec, le rapatriement unilatéral de la Constitution en 1982, qui a imposé au Québec la Constitution actuelle qu'il n'a jamais signée, ainsi que le fait que toutes les tentatives pour amener le Québec à signer la Constitution ont échoué, parce que la population du Canada et celle du Québec ont dit non.

(1130)

J'étais député lorsque cette institution politique du Canada, la Chambre des communes, a décidé qu'il devrait y avoir une entente concernant l'Accord de Charlottetown, j'étais ici lorsque tous les partis fédéralistes représentés à la Chambre-sauf le Bloc qui s'est opposé-ont voté en faveur de l'Accord de Charlottetown et j'ai bien vu que la population du Québec et du reste du Canada l'a rejeté.

Je pense que la véritable raison pour laquelle le gouvernement ne s'intéressera pas vraiment à un débat sur une nouvelle proposition, c'est qu'il sait fort bien qu'elle est impossible. Il sait que tout a été fait, de bonne ou de mauvaise foi, et qu'on a essayé toutes sortes de solutions, de stratégies imaginatives, mais que c'est comme si le Canada était atteint d'une maladie incurable. Le pays n'a pas le pouvoir de changer quoi que ce soit et d'adapter la Constitution à la réalité parce que le Canada nie la réalité.

Il y a deux réalités. Tant que les gens à l'extérieur du Québec n'auront pas accepté cet état de choses, rien ne sera possible. Il y a deux réalités: celle du Québec et celle du reste du Canada.

Les Québécois ne pensent pas qu'ils sont meilleurs que les autres, mais différents des autres. Ils ne font rien pour détruire quoi que ce soit. Notre objectif n'est pas de détruire le Canada. Notre objectif est de mettre en oeuvre une solution pour adapter les structures politiques aux réalités.

Ma vision de ce pays diffère de celle des gens d'en face. Je respecte leur vision. J'ai infiniment de respect pour leur idéal.

Je respecte les soldats qui sont morts au cours de la dernière guerre. Hier, c'est en toute sincérité et avec le plus grand respect que j'ai déposé une gerbe de fleurs au monument aux morts. Des membres de nos familles ont combattu pour la démocratie et d'autres grands principes et sont morts en Europe. Nous devrions respecter les morts et ne pas leur faire dire ce qu'ils n'ont pas dit. Le silence est désormais leur privilège, leur prérogative. Nous ne devrions pas chercher à les ressusciter. Nous devrions accepter le fait qu'ils sont morts pour une bonne cause et qu'ils nous ont légué une part de leur courage. Nous devrions les respecter et ne pas tenter d'imaginer ce qu'ils pensaient au fond de leur coeur au moment de mourir sur ces plages, loin de leurs familles. Il faudrait respecter nos héros tombés au champ d'honneur. Ils ont emporté leurs dernières pensées avec eux, pour l'éternité.

Hier, devant le monument aux morts, j'ai demandé à la députée de Québec de déposer, elle-même, la gerbe de fleurs, car elle venait de me confier, quelques instants plutôt, une chose dont elle n'avait jamais parlé auparavant. Émue par l'atmosphère tragique et grandiose d'hier, elle m'a avoué: «Vous savez, mon père y était. Il a fait la guerre en Europe.» Je lui ai dit: «Alors, c'est vous qui devriez déposer la gerbe de fleurs.» Et c'est ce qu'elle a fait.

Ce matin, j'ai été très vexé et attristé en lisant les déclarations de la vice-première ministre au sujet du geste que nous avons posé hier.

Je termine en ces mots. Je sais que ce débat très difficile fait appel aux sentiments. Je promets de rester démocrate toute ma vie et de respecter l'opinion des autres, et je demande aux gens de respecter la nôtre.

(1135)

Mme Marlene Catterall (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor): Monsieur le Président, je ne peux m'empêcher de réagir à ce que je viens d'entendre. Je dois préciser au chef de l'opposition officielle, au chef du Bloc québécois, qu'il ne respecte pas ma conception du Canada.

Mon Canada comprend le Québec. Mon Canada comprend Jacques Cartier et Samuel de Champlain, qui a remonté la rivière des Outaouais en passant à quelques pieds d'ici. Mon Canada comprend les voyageurs et les coureurs des bois qui ont exploré l'ouest et le nord de notre beau grand pays. Tel est mon Canada. Et j'entends me battre de toutes mes forces pour vous empêcher de le détruire.

Mon Canada comprend la ville de Québec et le nord de la province de Québec. Dans ma conception du Canada, les Québécois sentent que les Rocheuses leur appartiennent, que la côte du Pacifique est à eux, qu'ils sont chez eux à Halifax et que Terre-Neuve fait partie de leur pays.

Pour moi, il n'y a pas deux Canadas comme pour vous. Pour moi, il n'y a qu'un seul Canada. Pour moi, il n'y a pas un Canada anglais et un Canada français. Il y a un seul Canada où les francophones hors Québec, qui sont au nombre de un million, peuvent s'exprimer et vivre et être servis dans leur propre langue par le gouvernement, à l'instar des francophones du Québec et des anglophones du Québec.

Je me rends compte que nous différons sérieusement d'opinion en ce qui concerne notre pays. Toutefois, j'ai une idée de notre pays, non pas de ses parties ni des choses qui nous divisent. Je veux que l'histoire et la contribution des hommes et des femmes extraordinaires qui sont venus de France pour coloniser mon Canada fassent partie de la tradition et de l'avenir de mes enfants.

L'union fait la force. Un Canada uni sera plus vivant qu'un Canada divisé en 10, 11, 20 ou même deux parties. Je ne crois pas à un Canada divisé en deux. Si le Québec quitte la Confédération,


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le reste de notre pays sera vidé de sa substance même et s'écroulera. Je ne vous laisserai pas faire cela.

Le Président: Encore une fois, je sais que cette question nous tient terriblement à coeur, mais j'insiste pour que tous les députés aient l'obligeance d'adresser leurs observations à la présidence. C'est très important. La parole est au député d'Esquimalt-Juan de Fuca. Veuillez m'excuser. J'ignorais que vous vouliez présenter une observation. La parole est au chef de l'opposition.

M. Bouchard: Je vous remercie pour vos sages paroles, monsieur le Président.

Je veux dire à la députée qui vient de parler que je respecte sa position. J'éprouve une sympathie sincère pour ses sentiments parce que le débat d'aujourd'hui porte en grande partie sur des sentiments et des émotions profondément ressentis.

Cependant, j'ajouterai, si je puis me permettre, que le respect de la vision de l'autre implique aussi que l'autre ne nous impose pas cette vision. Je crois que nous touchons ici aux principes même de la démocratie. Il ne m'appartient pas, en tant qu'individu, d'imposer quoi que ce soit aux autres. Il ne m'appartient pas de prendre une décision pour l'ensemble d'une collectivité. Il appartient au peuple québécois de prendre la décision. Ces choses-là ne sont pas simples et cela a déjà été dit.

(1140)

Je me souviens que le débat sur l'Accord du lac Meech a été très limité. J'ai entendu tout à l'heure le secrétaire du ministre aux Affaires parlementaires affirmer que le Bloc avait été très heureux de voir l'Accord du lac Meech s'effondrer, mais ce n'est pas vrai. Si quelqu'un s'est battu avec acharnement pour faire adopter cet accord, c'est bien moi.

Je n'étais pas le champion de la cause de Meech, c'était le premier ministre Mulroney. Je me souviens qu'à un moment au cours du débat, le premier ministre Mulroney a déclaré que si Meech était rejeté, l'avenir du Canada pourrait être compromis. Il a dit quelque chose du genre. J'avais alors constaté que partout au Canada on lui reprochait d'être trop émotif et pas assez réaliste, mais voyez où nous en sommes aujourd'hui.

Nous avons tenté de faire adopter l'Accord du lac Meech. Nous avons presque supplié le reste du Canada. Nous sommes un peuple fier, mais nous avons quand même supplié. Nous avons demandé au reste du Canada d'appuyer les cinq conditions minimales posées par le Québec pour signer la Constitution qu'il n'a pas encore signée.

J'ai consacré deux ans de ma vie à ce projet. J'ai accepté le beau risque en faisant cela. Je me suis un peu éloigné de ma famille souverainiste pour travailler pour cette cause parce que, comme le premier ministre Mulroney et comme beaucoup de Québécois, une majorité de Québécois, je croyais qu'il valait le coup de tenter de réconcilier le pays autour des exigences minimales qui nous permettaient de sauver l'honneur. Nous voulions qu'une donnée très importante dans la vie politique québécoise soit incluse dans la Constitution, non pas dans la liste des pouvoirs, mais dans le préambule: nous voulions que l'on reconnaisse que le Québec formait une société distincte, que l'on reconnaisse. que les Québécois forment un peuple. Les Québécois veulent être reconnus comme étant un peuple, c'est fondamental. Nous ne pouvons rien y changer. C'est un fait incontournable de la vie politique canadienne.

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Au nom du whip du Parti réformiste, je veux informer la Chambre que les membres de notre caucus partageront leur temps de parole, conformément au paragraphe 43(2) du Règlement.

Le Président: C'est entendu. Je redonne la parole au député d'Esquimalt-Juan de Fuca.

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, le député du Bloc québécois ne devrait pas se surprendre que notre parti ait voulu les inclure, lui et ses collègues, dans cette discussion.

Contrairement à certains autres partis, nous tenons à inclure tous les Canadiens dans nos décisions concernant le pays. Il ne s'agit pas ici d'une querelle de famille, mais bien d'un effort concerté par un groupe de personnes à la Chambre qui cherchent à diviser le pays et, tout comme le député d'en face, je ne le tolérerai pas.

Comment ces gens s'y prennent-ils pour essayer d'arriver à leur fin? Une de leurs tactiques consiste à induire les Québécois en erreur au sujet de ce qui se passe vraiment dans notre pays. Je voudrais bien savoir ce que le Canada a fait de mal aux Québécois. Il n'y a que des choses positives qui me viennent à l'esprit.

Le gouvernement du Canada donne aux Québécois plus d'argent sous forme de paiements de transfert que ce que les Québécois versent au gouvernement fédéral sous forme d'impôts. Je dirais aussi que, dans le passé, les gouvernements fédéraux se sont pliés aux exigences du Québec pour essayer de garder cette province dans le giron constitutionnel. Le Québec jouit d'un statut spécial, d'un traitement spécial, et cela ne fait que semer la division dans le pays.

Il existe dans le monde un problème qui s'appelle le tribalisme: une tribu ou un groupe contre une autre tribu ou un autre groupe. C'est peut-être la plus grande source de division que nous ayons sur cette planète. Francophones, anglophones, hommes, femmes, noirs, blancs, c'est la même chose. Tout ce que nous pouvons espérer dans ce monde, c'est d'être traités de façon égale en vertu de la loi, de n'être victimes d'aucun préjudice. Ce que nous faisons de notre vie en tant qu'individus dépend entièrement de nous.

La question que je veux poser au député du Bloc est la suivante: qu'y a-t-il de si mauvais dans la vision d'un pays où nous sommes tous traités de façon égale, où nous avons tous les mêmes droits en vertu de la loi, où la culture et la langue relèvent de chaque province, que ce soit le Québec, le Nouveau-Brunswick ou la Colombie-Britannique? Qu'y a-t-il de si mauvais dans la vision d'un Canada qui inclut tous les Canadiens? Je veux que le député me dise ce qu'il y a de si mauvais dans cette vision.

(1145)

M. Bouchard: Monsieur le Président, j'ai deux choses à faire remarquer au député.


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Tout d'abord, le Québec a déjà été exclu de la famille constitutionnelle par le reste du Canada. Nous devrions en effet nous rappeler que le gouvernement fédéral s'est ligué en 1982 avec le reste des provinces anglophones pour imposer la Constitution au Québec. Il s'agit là d'un fait indéniable. Nous avons été rejetés, et nous tâchons maintenant d'établir une base politique à partir de ce fait.

Deuxièmement, j'entends le chef du Parti réformiste proposer un nouveau fédéralisme. Je n'ai absolument aucun doute que ce sera un fédéralisme pire, si la chose est possible, que celui qui existe déjà. Il commence en effet par établir dans sa proposition que tout sera basé sur l'égalité des provinces, un principe que le Québec rejette depuis 30 ans.

Tous les premiers ministres du Québec, à commencer par Jean Lesage, l'un des plus grands chefs politiques du Québec, ont toujours combattu ce principe d'égalité; voici que nous entendons maintenant le Parti réformiste proposer un nouveau fédéralisme prévoyant la consécration d'un nouveau principe dans la Constitution, celui de l'égalité des provinces. Permettez-moi de vous dire que même si j'étais encore fédéraliste, je n'accepterais jamais que ce nouveau fédéralisme exclue le bilinguisme officiel.

N'importe quelle réforme proposée sur cette base par le Parti réformiste ne pourra être acceptable. Il n'y a pas de réforme possible dans ce pays. Les Québécois devront plutôt choisir entre le statu quo, c'est-à-dire la stagnation, ce dont nous cherchons à nous écarter depuis 30 ans, et le nouveau et noble projet consistant à bâtir un pays véritable au Québec, de manière à permettre aux habitants du reste du Canada d'avoir leur propre pays bâti selon les voeux de leur esprit et de leur coeur.

Je ne doute pas un seul instant qu'il existe un ciment solide, un ciment national, liant tous les Canadiens anglophones de l'extérieur du Québec. Je peux constater à la Chambre l'émotion de ces gens-là qui ont pour leur pays une véritable passion, égale à celle que j'éprouve pour le mien.

Le Président: Comme les députés réformistes partageront maintenant leur temps, les intervenants disposeront de dix minutes, et cinq minutes seront prévues pour les questions et réponses.

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour livrer mon discours le plus important à ce jour, dans le cadre de la 35e législature. Ce discours fait état de mon opinion personnelle, non pas à titre de représentant d'une race ou d'une province, mais en tant qu'immigrant fier d'être devenu citoyen canadien. Par votre entremise, monsieur le Président, je m'adresse, non pas aux politiciens de la Chambre, mais bien aux Canadiens de toutes les régions, aux électeurs qui nous ont confié la tâche de défendre leurs intérêts.

Je vais tâcher d'aborder la motion à l'étude de la façon suivante: premièrement, je vais exposer ma position sur la séparation du Québec d'une manière très claire et non équivoque; deuxièmement, je vais parler de certaines conséquences de la séparation du Québec et souligner à nouveau l'importance d'une nouvelle vision du Canada comme solution de rechange à la séparation, comme l'a fait plus tôt notre chef, le député de Calgary-Sud-Ouest.

Je suis tout à fait conscient que mes modestes opinions et commentaires sur cette question très importante ne pèseront peut-être pas lourd au bout du compte. Quoi qu'il en soit, je crois que tous les politiciens et tous les Canadiens qui veulent que les Québécois continuent de faire partie du Canada doivent réaffirmer leurs convictions, s'en prendre aux mythes et présenter la réalité et le vrai visage de notre grand pays.

Je veux que le Québec fasse partie de la grande fédération canadienne qui nous a tous si bien servis, au même titre que l'Alberta. C'est insensé de se séparer après 127 ans, notamment à un moment où les déficits et la dette sont aussi élevés. Ensemble, les diverses régions du Canada sont plus fortes, comme en témoignent notre dossier enviable par rapport à la participation aux guerres, notre stabilité politique, notre prospérité et notre liberté. S'il vaut la peine de mourir pour une cause, il vaut la peine d'en débattre.

Je trouve vraiment inconcevable que nous ne puissions pas, comme Canadiens, trouver ensemble un terrain d'entente. Cette incertitude qui persiste cause déjà des préjudices à notre diversité économique, sociale et culturelle, et le monde entier surveille la situation.

(1150)

Je respecte le principe suivant lequel les députés fédéraux doivent s'abstenir d'intervenir dans les élections provinciales. Je respecte les droits des Québécois d'envoyer des membres du Bloc québécois les représenter à Ottawa et je respecte leur droit de tenir un référendum sur la séparation. Toutefois, comme cette question me touche directement, j'estime avoir le droit d'en parler.

Je respecte le chef du Bloc québécois et les nombreux députés avec qui j'ai travaillé au sein des comités et, plus récemment, avec qui j'ai joué au basket-ball. Mais je regrette sincèrement la voie qu'ils ont choisie. Le chef du Bloc québécois est un homme intelligent, charismatique et expérimenté; il tente d'obtenir la meilleure entente possible pour le Québec. Mais je m'oppose catégoriquement à la méthode qu'il a choisie, soit la séparation plutôt qu'un nouveau fédéralisme.

Les conséquences de la séparation du Québec seront, à bien des égards, très lourdes pour tous les Canadiens. J'ai examiné la question en tant qu'homme d'affaires ayant 25 ans d'expérience. J'en ai conclu qu'il était non seulement dangereux, mais très naïf, de croire qu'un Québec séparé aurait droit à tous les avantages actuels de la fédération.

Nous n'avons pas de convention «d'achat-vente» pour faire la séparation, ni de procédures mutuellement négociées en tant que partenaires amicaux pour faciliter la sécession d'une province. Ni l'Acte de l'Amérique du Nord britannique ni la Loi constitutionnelle de 1982 ne prévoient une procédure pour le démembrement ordonné de notre grand pays.

Le fait est que les nombreux points de vue présentés par les forces séparatistes, en l'absence de précédents, ne sont dans bien des cas que des projections inexactes de ce que seraient les choses dans un Québec séparé et souverain. Tous les Canadiens devraient faire une évaluation honnête de la question de la séparation qui risque de se produire et se demander si le risque de la séparation donnera lieu à un avenir plus prévisible ou s'il vaut


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mieux travailler tous ensemble à la création d'un nouveau et meilleur fédéralisme.

Je voudrais poser quelques questions sur la séparation, que les Canadiens voudraient bien poser. Qui va négocier la séparation? Faudra-t-il des élections fédérales pour décider? Pendant que nous nous battrons au sujet du droit de détruire le pays, notre économie fragile en souffrira; est-ce vraiment cela que nous voulons? Notre déficit et notre dette sont si élevés qu'on se demande comment un nouveau pays pourra commencer avec une dette si lourde? Comment la dette sera-t-elle partagée? Quelle sera la valeur du dollar? Qu'en est-il des taux d'intérêt canadiens? Le Québec paiera-t-il? Les créanciers voudront-ils refinancer des entités séparées aussi endettées? Pour ma part, cela me tracasse rien que d'y penser. Sur le plan de la monnaie, le Québec aurait un statut colonial inférieur, étant à la merci de la politique monétaire canadienne. Cela est-il acceptable pour les Québécois?

Les Québécois ont-ils évalué les effets de la séparation sur des secteurs subventionnés de leur économie, comme les textiles et le meuble, ainsi que sur le statut protégé de l'industrie laitière? L'industrie aérospatiale continuera-t-elle de croître sans l'appui du reste du Canada?

Si les négociations s'enveniment, quel règlement satisfaisant pourra-t-il être atteint dans des domaines comme la défense, la double citoyenneté, l'Accord nord-américain de libre-échange, l'Accord de libre-échange, le contrôle sur le Saint-Laurent et la frontière dans le golfe du Saint-Laurent, pour lesquels le consentement du Canada sera nécessaire?

Qu'en est-il des droits territoriaux et des territoires des autochtones? Ces derniers pourront-ils rester au sein du Canada ou la majorité des Québécois aura-t-elle le droit de décider de l'avenir des peuples autochtones?

Je crois que le Canada acceptera la séparation si elle est l'aboutissement d'un référendum dont la question est claire et qui reflète la volonté de la majorité des Québécois. Mais qui a jamais dit, en dehors du Québec, que la souveraineté-association était une option négociable? Si la question référendaire porte sur la souveraineté et que le vote est favorable, comment négocier avec l'autre partie qui dit que l'option n'a jamais été envisagée, mais seulement la séparation et non la souveraineté?

Dans ces conditions, n'est-il pas préférable de travailler tous ensemble pour relancer notre économie en réglant une fois pour toutes le problème de l'unité? Aux Canadiens qui douteraient que ce soit possible, je rappellerai une citation d'un des Pères de la Confédération, Thomas D'Arcy McGee, qui a fait face à la même crise dans les années 1860 et qui, comme moi, voulait faire du Canada le plus beau des pays.

Voici ce qu'il a dit: «Une politique qui consiste à réunir toute notre population en une seule entité solide et à compenser la faiblesse du nombre par l'influence morale stimulante de notre unité, une politique qui vise à unir les divers ordres, à émousser les arêtes blessantes des préjugés hostiles, une politique qui tente de susciter l'intérêt pour le pays et chaque être humain, pour le caractère de chaque élément de la collectivité, et le souci réciproque des uns pour les autres, selon le mot d'ordre: tous pour un et un pour tous, une politique telle ne vieillira jamais, elle ne perdra jamais son éclat.»

Le Bloc québécois soutient que le fédéralisme n'a jamais marché, ne peut pas et ne va pas marcher. Il rappelle les échecs de la Loi constitutionnelle, de l'Accord du lac Meech, de l'Accord de Charlottetown, qu'il présente comme une preuve suffisante. Nous reconnaissons ces échecs. Mais ils ont été des échecs pour tous, pas uniquement pour les Québécois, parce que ce n'était pas les bonnes personnes qui négociaient les bonnes choses, et qu'ils s'y prenaient mal, c'est-à-dire en imposant les solutions d'en haut.

(1155)

La 35e législature a les bonnes personnes à la bonne place pour négocier de la bonne manière la nouvelle conception du fédéralisme présentée par le chef du Parti réformiste ainsi que le premier ministre et son parti, qui croient aussi en la possibilité de garder ce grand pays uni.

Le chef du Bloc québécois tient une occasion extraordinaire d'utiliser ses grands talents pour pallier les faiblesses du fédéralisme moribond que nous avons, pour protéger les intérêts des Québécois et faire du Canada un pays plus fort et plus riche. Madame la Présidente, j'invite les Québécois à exiger cela de lui.

En accordant la priorité au Canada, à un Canada qui comprend le Québec, nous tirons tous avantage d'une nation bilingue où sont appliquées les recommandations originales du rapport Laurendeau-Dunton sur le bilinguisme et le biculturalisme. Cela n'a rien à voir avec le coûteux gâchis dans lequel se trouve actuellement la question relative à la langue seconde, un programme qui est l'oeuvre de technocrates et qui, de l'avis de la plupart des Canadiens, aussi bien au Québec qu'ailleurs, ne marche pas.

En réactualisant et en appliquant l'esprit de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, en redonnant aux provinces tous les pouvoirs dont elles devraient disposer dans les domaines des ressources, de l'éducation, de la langue et de la culture, en se comportant comme un vrai parti de l'opposition officielle, le Bloc québécois, de concert avec le Parti réformiste, peut forcer plus efficacement ce gouvernement injuste, borné et faible à s'attaquer aux problèmes réels de ce magnifique pays qu'est le nôtre. Ensemble, nous pourrions forcer le gouvernement fédéral à se retirer des domaines de compétence provinciale qui ne le regardent pas.

Ensemble, nous pourrions convaincre l'actuel gouvernement que le Canada est confronté à un problème de dépenses, et non pas à un problème de recettes, et que les responsables sont le déficit et la dette, pas la séparation du Québec. Résolvons le problème du déficit et de la dette qui nous maintient dans cette récession responsable de notre chômage élevé et qui menace l'existence de nos programmes sociaux. Atténuons l'immense fardeau de la dette en recourant à des mesures constructives et novatrices de réduction des dépenses, ce qui aura pour effet de rétablir vraiment la confiance dans les milieux d'affaires.

N'allons pas, en nous séparant, accentuer l'incertitude qui pèse déjà sur notre qualité de vie. Il nous faut une fédération de provinces, nouvelle et démocratique, dotée d'un programme de développement économique sain qui se préoccupe de l'environnement, ainsi qu'une Constitution qui reconnaisse l'égalité et le


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caractère unique de tous les citoyens et des provinces, y compris le Québec.

En conclusion, je vais à nouveau emprunter les propos tenus en 1860 par l'honorable Thomas D'Arcy McGee, un partisan du Canada qui a décrit la réalité qui est toujours vraie aujourd'hui, telle que je la vois même, et je cite: «Je regarde l'avenir de mon pays d'adoption avec espoir, certes, mais non sans anxiété. Je le vois divisé en plusieurs communautés, chacune s'occupant de ses propres affaires, mais également liées ensemble par des institutions libres, un dialogue libre et un système de commerce libre. Je vois une génération. . .»

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette beaucoup, mais le temps de parole du député est écoulé.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Madame la Présidente, je félicite mon collègue du Parti réformiste pour son excellente présentation. J'aimerais seulement lui souligner quelques faits, si vous le permettez.

Le député et collègue avec qui j'ai l'occasion de travailler souvent en comité, un excellent député, dans sa présentation, dit d'entrée de jeu qu'il faut cesser de dire aux Québécois que la seule solution maintenant est entre le statu quo et la souveraineté, et qu'il faut parler d'un fédéralisme renouvelé. Je suis encore très jeune, mais depuis que je suis tout petit j'entends parler de fédéralisme renouvelé.

Rappelez-vous, depuis 1964, la réunion qui avait eu lieu à Québec entre l'honorable Lester B. Pearson, dont je respecte énormément la mémoire, c'est un des plus grands hommes politiques canadiens, sinon le plus grand, et Jean Lesage, premier ministre du Québec à cette époque. Rappelons-nous aussi toutes les conférences et les réunions constitutionnelles qu'il y a eu entre les provinces canadiennes ou entre le Québec et le gouvernement fédéral. Rappelons-nous celle de Victoria en 1971 avec Robert Bourassa.

Rappelons-nous aussi tout le débat constitutionnel de 1980 où justement on a discuté de l'avenir du Québec, de l'avenir du Canada aussi. Rappelons-nous, en 1981, à la suite de la défaite référendaire, M. Trudeau, qui était alors premier ministre, disait aux Québécois: Votez non à la souveraineté et vous aurez une réforme en profondeur et un fédéralisme renouvelé, comme vous en rêvez depuis 1867, depuis qu'on vous a fait croire que vous pourriez avoir votre place comme peuple dans cette nouvelle confédération qui n'a jamais été une confédération.

(1200)

Rappelons-nous aussi le rapatriement forcé de 1982, où justement, on n'a pas dit au Québec de prendre sa place, on l'a mis à sa place, en lui imposant un rapatriement unilatéral de la Constitution et une charte, donc le rapatriement de la Constitution à l'encontre, je dirais, de la quasi-unanimité des membres de l'Assemblée nationale du Québec.

L'année 1984 est remplie de ce qu'a dit M. Lévesque, le timonier du Québec à ce moment, un homme d'État qui a tendu la main aux fédéralistes en disant: «Nous allons entrer de plain-pied dans le beau risque.» Et M. Mulroney, avec Meech, tous les échecs qu'il y a eu depuis le début. . .

Depuis que je suis tout petit, depuis que j'ai le biberon, j'entends parler de fédéralisme renouvelé, et récemment, tout le débat s'est intensifié, tout a été bousculé, l'échec de Meech, la commission Beaudoin-Dobbie, Beaudoin-Edwards, l'accord du 7 juillet qui est devenu celui de Charlottetown par après, et on a échoué là-dedans.

Ce n'est pas l'échec de votre pays, votre pays est le vôtre. Vous l'aimez, vous aimez ce Parlement, mais laissez-nous construire le nôtre. Ce n'est pas la destruction du Canada qu'on veut, mais on sait fort bien qu'à l'heure actuelle, et depuis 30 ans on s'en est aperçu de façon plus intense année après année, le fédéralisme renouvelé est de la fumée, il y a deux options à l'heure actuelle, le statu quo, qui est inacceptable pour le Québec, et la souveraineté du Québec.

Alors, je me demandais si le député et collègue et ami aussi est conscient de toute cette histoire, cette histoire, je vous dirais, de perte de temps. Là où le Québec a tenté de prendre sa place dans ce régime et là où des promesses se sont envolées comme de la fumée, à toutes les fois qu'un politicien fédéral s'est ouvert la bouche pour parler de l'accueil du Québec, de la nouvelle place qu'on ferait au Québec, finalement, à toutes les fois, on a remis le Québec à sa place.

[Traduction]

M. Silye: Madame la Présidente, je voudrais tout d'abord remercier le député de son compliment. Je sais qu'il parlait sincèrement. Moi aussi j'ai du respect pour lui et pour le travail que nous avons accompli ensemble.

Lorsqu'on a peu d'expérience, il est difficile de s'exprimer de manière à n'offenser personne, mais on expose néanmoins ses convictions. À mon avis, il est temps que nous le fassions. Nous devons exposer nos convictions.

Pour en revenir à Thomas D'Arcy McGee, j'estime que cette génération est peuplée d'hommes et de femmes travailleurs, satisfaits, intègres et libres, qui sont capables de préserver en temps de paix et de guerre une Constitution digne de notre pays. C'est là la chose importante.

Il est important de préserver ce que nous avons construit pendant 127 ans. En Alberta, il arrive que nous ayons des divergences d'opinions avec le gouvernement fédéral. Au Québec, vous avez aussi des divergences d'opinions avec le gouvernement fédéral. Mais il faut lutter ensemble pour que le tout soit plus fort qu'aucune de ses parties. Voilà le message que nous tentons de transmettre.

Tous les exemples que le député nous a donnés au sujet de rapports et de commissions qui n'ont pas fonctionné étaient des exemples d'une vision descendante de la démocratie, d'une vision descendante qui consiste à tenter de livrer des services qu'on juge appropriés pour la population. Nous, du Parti réformiste, et les députés du Bloc québécois, reconnaissons tous que cela ne fonctionne pas.

Pourquoi l'opposition ne réunit-elle pas ses ressources pour lutter contre le gouvernement, pour le Québec et pour les régions que nous représentons, afin de montrer qu'une vision ascendante. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais votre temps de parole est écoulé et j'ai dépassé l'heure.

Le Parti réformiste a informé la présidence que ses députés désirent partager leur temps de parole. Je ne vois aucun autre député réformiste qui soit prêt à participer au débat. La période


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des questions et d'observations est terminée. Les députés partagent leur temps de parole.

M. Silye: Madame la Présidente, si on nous alloue une demi-heure et que je partage mon temps avec ma collègue que, pour une raison ou une autre, il est impossible de joindre, ce temps me reste-t-il alloué de façon à me permettre de donner une réponse satisfaisante et de poursuivre la période des questions et observations? Y aurait-il consentement unanime à ce que nous poursuivions la période des questions et observations jusqu'à ce que le temps qui nous est alloué soit écoulé?

La présidente suppléante (Mme Maheu): S'il y a consentement unanime, le député peut utiliser les 14 minutes allouées à la députée de Calgary-Nord. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Reprise du débat, le député de Calgary-Centre.

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Je voudrais essentiellement achever les remarques que j'ai commencé à faire tout à l'heure au député du Bloc québécois. Ce qui est important aujourd'hui et ce qui est important pour l'avenir du Canada, c'est d'exposer ouvertement l'essentiel de ce qui est en jeu.

(1205)

Les conséquences de la séparation sont très incertaines, et c'est à cette incertitude que nous devons faire face. C'est à cette incertitude que nous devons nous attaquer. Toutes les questions que j'ai soulevées dans mon intervention sont seulement des questions générales. Les détails et l'envers de ces questions, nous ne les connaîtrons que quand le Québec décidera de son avenir. Nous y serons préparés. Comme l'a fait remarquer le chef de notre parti, nous aurons, grâce à nos groupes de travail, accompli une plus grande part de travail à ce sujet et aurons un plus grand nombre de solutions à proposer.

J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Puis-je laisser le temps qui me reste à ma collègue qui est maintenant présente parmi nous afin de lui permettre d'utiliser les 10 minutes qui restent pour faire son intervention, sans commentaires et sans questions?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime à ce que nous revenions à ce qui était initialement prévu?

M. Gagliano: Madame la Présidente, je donne mon consentement à condition que le député, qui a déjà utilisé quelques minutes, laisse à sa collègue le temps qui reste, et pas nécessairement 10 minutes.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Madame la Présidente, la motion dont nous sommes saisis réaffirme le désir du peuple canadien de demeurer uni dans le régime fédéral et demande à la Chambre d'entériner cette volonté.

En tant qu'élus qui ont accepté de remplir des fonctions de confiance et d'assumer des responsabilités au Parlement canadien, notre priorité absolue est de préserver et de protéger l'unité et le caractère national du pays que nous devons servir.

L'unité est plus qu'un concept abstrait ou qu'un idéal détaché de la réalité de tous les jours. Il y a des choses qui unissent les gens dans la structure et le fonctionnement d'une fédération. Les citoyens doivent prendre conscience des avantages concrets que leur apporte leur association à la Confédération.

Pendant des décennies, nos systèmes d'assistance sociale ont grandement contribué à faire du Canada un pays envié dans le monde. Malheureusement, notre situation économique actuelle a éliminé nos systèmes de soutien traditionnels. C'est pourquoi la population canadienne veut avoir l'assurance que les dirigeants du nouveau Canada du XXIe siècle prendront des mesures décisives qui feront qu'elle continuera de bénéficier de services sociaux durables et à un coût abordable.

Il est impératif, et cela pour une simple raison, d'adopter une démarche nouvelle dans l'administration des programmes sociaux. Les ressources financières du Canada sont de plus en plus absorbées par l'énorme dette nationale. Chaque année, le quart de nos dépenses totales sert à payer l'intérêt sur la dette. Cette année seulement, un énorme déficit de 41 milliards de dollars s'ajoute aux quelque 500 milliards déjà empruntés par les gouvernements conservateurs et libéraux précédents.

Chose incroyable, le gouvernement actuel entend emprunter encore 100 milliards de dollars, ce qui aura pour effet de diminuer nos ressources liquides de quelque quatre à six milliards de dollars par année à cause de la hausse des coûts en intérêts. Ce sont là autant de milliards de dollars perdus, alors que nous devons financer les soins de santé, les pensions et l'éducation au Canada.

Pendant plus de deux décennies, les élus chargés d'administrer les affaires de ce magnifique pays se sont permis d'enfreindre la règle fondamentale de la saine gestion financière, qui commande de vivre selon nos moyens.

Pour acheter la bonne volonté des groupes d'intérêts et financer des dépenses gouvernementales extravagantes et exagérées, les décideurs conservateurs et libéraux ont hypothéqué notre pays, dont la dette se situe actuellement à près de 518 milliards de dollars, soit plus de 18 000 $ pour chaque homme, femme et enfant vivant au Canada. À chaque seconde qui passe, notre dette s'accroît de 1 500 $. En fait, lorsque j'aurai terminé mon discours, la dette nationale se sera accrue de près de un million de dollars.

Cette incroyable mauvaise gestion et la dette qui en a résulté ont gravement amoindri notre capacité de financer les programmes sociaux dont nous avons profité jusqu'à maintenant.

Confrontés à l'instabilité et à la non-viabilité des programmes sociaux actuels, il n'est pas surprenant que de nombreux Canadiens aient perdu confiance dans le système fédéral.

(1210)

Il n'est pas surprenant qu'à leur avis un Canada uni offre peu d'avantages personnels à long terme en échange des énormes dettes à long terme qu'il a accumulées.

À mesure que les services diminuent, on voit aussi diminuer la motivation à sauvegarder l'unité du pays. Des impôts sans cesse plus élevés et des avantages réduits pour les contribuables ont de


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tout temps constitué une excellente recette d'agitation sociale et civile, d'instabilité et éventuellement même de révolte.

Si les Canadiens acceptent volontiers de remettre une grande part de leurs revenus au gouvernement fédéral, ils vont s'attendre à obtenir une certaine valeur en échange. Les Canadiens ont toujours été fiers et reconnaissants du fait qu'ils pouvaient compter sur des programmes qui comblaient au moins leurs besoins fondamentaux lorsqu'ils étaient vulnérables parce que jeunes, vieux, malades ou sans ressources.

Bon nombre d'entre nous s'inquiètent de voir des services et des avantages accordés à ceux qui n'en ont pas vraiment besoin. Depuis trop longtemps, nos dirigeants politiques semblent ne pas avoir la force de faire les choix difficiles qui s'imposent, le courage de prendre les mesures appropriées afin de donner aux programmes sociaux un fondement financier solide à long terme.

Les réformistes croient que les Canadiens veulent préserver le financement fédéral qui soutient les soins de santé, l'éducation supérieure, la prestation pour enfants, le supplément de revenu garanti pour les aînés, la pension des anciens combattants et la sécurité de la vieillesse, pour les foyers qui reçoivent moins que le revenu moyen des ménages du pays.

Ils sont d'avis que leurs cotisations au Régime de pensions du Canada devraient être gérées de sorte à assurer qu'ils auront aussi droit à des prestations de retraite quand viendra leur tour. Cela signifie qu'il y aurait moins de ressources pour la sécurité de la vieillesse des aînés dont le revenu excède la moyenne nationale, pour l'appui fédéral au régime d'assurance-chômage et, dans une certaine mesure, pour l'aide sociale et les paiements de péréquation.

Les Canadiens se sont engagés à prendre soin de ceux qui ne peuvent s'en sortir seuls, des membres les plus faibles de notre société, mais ils savent qu'on ne peut maintenir le niveau actuel de nos dépenses en programmes sociaux sans procéder à l'établissement de priorités adéquates et à une réorganisation intelligente.

Malheureusement, malgré les défaillances de notre filet de sécurité actuel, notre gouvernement fédéral s'entête à refuser de prendre les mesures qui s'imposent pour le sauver. Lorsque d'autres intervenants, le Parti réformiste par exemple, font des propositions précises et concrètes visant à sauvegarder et à protéger nos services essentiels, on les tourne en ridicule et on sème la peur.

On peut citer, comme exemple frappant de ce genre d'attitude, celle de notre ministre de la Santé qui qualifie les changements requis pour préserver le financement des soins de santé de mesures favorisant un système de soins de santé à deux paliers. Elle sait très bien qu'il existe au moins 10 paliers de soins de santé au pays, dont un lui donne un accès privilégié aux services médicaux du MDN.

Les ministres du présent gouvernement devraient craindre les conséquences qu'entraînera le refus d'effectuer des changements. Menacer les provinces ne résoudra rien. Que doivent penser les Canadiens en voyant grimper les coûts des services? La qualité des services diminue, mais on leur dit que les propositions constructives visant une meilleure gestion sont dures et injustes.

La motion du Parti réformiste à l'étude aujourd'hui propose notamment la reconnaissance et l'appui du désir des Canadiens et des Canadiennes de respecter le pacte fédéral en tant que pays unique et l'engagement d'appuyer nos services sociaux. Nous croyons que les Canadiens d'aujourd'hui et de demain pourront compter sur le fait que les services dont ils ont le plus besoin, et qu'ils souhaitent obtenir, leur seront rendus si nous prenons les mesures ci-dessous.

Premièrement, réorganiser les programmes sociaux contributifs, comme l'assurance-chômage et le Régime de pensions du Canada, afin qu'ils s'autofinancent entièrement. Notre RPC non financé est une bombe à retardement financière et politique. Selon le Parti réformiste, les Canadiens ont vraiment besoin de la sécurité financière qui serait assurée si le RPC était entièrement autofinancé. Si l'on ne fait pas cela, les cotisations des travailleurs au RPC vont augmenter, ce qui se produit d'ailleurs déjà. Au début, les cotisations au RPC étaient fixées à 3,6 p. 100 du revenu, aujourd'hui elles sont à 5,2 p. 100. On s'attend à ce que, en 2016, elles atteignent 10 p. 100.

Deuxièmement, les prestations des programmes sociaux non contributifs, comme la sécurité de la vieillesse, devraient n'être versées qu'aux ménages dont le revenu est inférieur au revenu familial moyen au Canada. Si l'on avait une bonne gestion on pourrait continuer à aider les personnes âgées dans le besoin. Ce sera impossible si l'on donne de l'argent à des personnes qui ont des revenus suffisants.

Troisièmement, on devrait donner aux étudiants et aux stagiaires un certain droit de décider comment est dépensé l'argent affecté à l'enseignement, peut-être par l'utilisation de coupons d'enseignement. Laissons les besoins et la demande des utilisateurs déterminer quels services d'enseignement seront fournis, plutôt que d'accorder automatiquement à des établissements des ressources limitées, sans se préoccuper de savoir s'ils donnent une formation efficace.

(1215)

Quatrièmement, il faudrait modifier la Loi canadienne sur la santé pour donner une plus grande souplesse aux provinces en matière de financement des soins, de sorte que l'on puisse mieux rationaliser des ressources qui diminuent et faire en sorte que les services essentiels demeurent.

Personne ne devrait se voir refuser des soins au Canada par manque d'argent. Il est clair que nous ne pouvons plus nous permettre de payer 100 p. 100 des coûts, pour 100 p. 100 des services fournis à 100 p. 100 de la population, indépendamment des besoins.

Personne ne s'y trompe lorsqu'on prétend qu'il ne faudra rien changer dans les services de santé. Nous devrions au contraire confronter honnêtement la réalité et faire en sorte que les Canadiens puissent être confiants que les services essentiels seront maintenus et qu'on pourra continuer de les financer à très long terme.

Les Canadiens veulent certainement vivre dans un pays où les dépenses sociales sont organisées équitablement de telle façon qu'on les paie avec nos revenus. Nous attendons des particuliers, des groupes, des gouvernements et des pays qu'ils fonctionnent selon ce principe. Nous savons que, ce faisant, nous aurons largement les moyens de maintenir nos programmes sociaux essentiels et de remplir nos obligations de société civilisée, à


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savoir nous occuper de ceux qui ne peuvent subvenir à leurs besoins.

C'est un défi que je lance aux députés, les dirigeants et les représentants élus de la nation. Travaillons ensemble à bâtir un nouveau Canada qui saura résoudre les défis du XXIe siècle, notamment maintenir des services sociaux essentiels pour la présente génération et toutes les suivantes.

[Français]

M. Alfonso Gagliano (Saint-Léonard): Madame la Présidente, avant d'entreprendre mon discours sur ce débat, j'aimerais annoncer à la Chambre que les députés du côté du gouvernement partageront leur temps en 10 minutes de discours et 5 minutes pour la période des questions, sauf pour les ministres qui, lorsqu'ils se lèveront pour parler, prendront le temps que le Règlement leur permet.

J'ai l'honneur de représenter mes concitoyens et concitoyennes de Saint-Léonard depuis 1984. Durant toute cette période, je n'ai jamais oublié un seul instant que depuis la naissance de ce pays, le Canada, des générations de députés se sont succédé ici pour exprimer leur fierté et leur foi dans ce pays, le Canada.

Ces hommes et ces femmes d'âges et de milieux différents venaient aussi de toutes les régions d'un des plus vastes pays au monde. Quelques-uns, trop peu nombreux hier comme aujourd'hui, ont représenté les peuples qui vivaient déjà ici depuis des centaines d'années, avant que le premier Européen n'y mette le pied.

Toutes ces personnes, dont le souvenir repose ici pour toujours, étaient regroupées au sein de formations politiques différentes qui se sont livrés ici des joutes parlementaires parfois très dures. Vous le savez très bien, madame la Présidente, l'unanimité n'est pas notre règle dans cette Chambre; c'est plutôt l'exception. Mais tous ceux et celles qui ont siégé aux Communes jusqu'à tout récemment ont partagé le désir de servir leurs concitoyens et concitoyennes et de contribuer au progrès et à l'unité du Canada.

En temps de paix et en temps de guerre, en période de prospérité comme durant les crises économiques, chacun et chacune des générations de députés a contribué à faire du Canada un des pays les plus prospères, les plus pacifiques et les plus admirés au monde.

Notre souveraineté en tant que pays, notre maturité en tant que société se sont ainsi édifiées graduellement par l'oeuvre patiente et déterminée de tous ceux et celles qui croyaient en la suprématie de la loi, en l'invincibilité de la justice et dans le respect de la différence par le travail acharné de tous ceux et celles qui connaissent l'expérience, la valeur de l'effort, le destin, la force de la solidarité. Aujourd'hui, c'est notre tour d'apporter notre pierre à cet édifice majestueux, dont nos prédécesseurs ont dessiné les plans et creusé les fondations.

Qu'on soit né à Senneterre ou à Siculiana, en Saskatchewan ou en Sicile, qu'on parle anglais avec un accent de Bonaventure ou français avec des intonations de Berlitz, nous disons, à notre façon, la même chose.

(1220)

Nous disons, comme des milliers d'autres députés avant nous et comme des millions de Canadiens et Canadiennes: Hier et aujourd'hui, voici le pays que nous aimons, le pays que nous voulons conserver dans toute sa grandeur et dans toute sa splendeur.

Depuis les dernières élections, il y a, dans cette Chambre, un groupe de députés assez nombreux pour former l'opposition officielle, dont l'ambition est de mettre fin à l'expérience canadienne. Je respecte sans réserve et sans aucune arrière-pensée la décision de nombreux électeurs et électrices québécois qui ont choisi d'envoyer des députés séparatistes à Ottawa.

Tous les députés du Bloc québécois sont arrivés ici de la même façon que ceux et celles qui représentent le Parti libéral, le Parti réformiste ou d'autres formations. Ces députés séparatistes fédéraux parlent, même parfois avec émotion, de la nécessité de protéger le bilinguisme dans les Forces armées canadiennes et de veiller sur nos maisons d'édition canadiennes. Mais personne ici ni ailleurs au Canada ne s'est fait d'illusion sur les véritables objectifs du Bloc québécois. Ils n'osent pas le dire aussi franchement, mais ce que le Bloc québécois veut, c'est tuer le Canada. Parce que le Canada sans le Québec ne sera plus le Canada.

Les bloquistes prétendent être des bons chirurgiens. Ils voudraient nous faire croire que, avec l'aide du grand frère péquiste, ils pourraient procéder à une amputation sans douleur sur le corps de la fédération canadienne. L'opération pourrait réussir; le seul problème, c'est que le patient mourrait, et le patient, c'est le Canada.

Ces quelques députés du Bloc font présentement, en se vantant, des protestations de patriotisme temporaire. C'est la première étape de l'opération qu'ils voudraient pratiquer. C'est ce que j'appelle l'anesthésie.

Mais je peux vous assurer qu'ils n'endormiront personne. Les Québécois et Québécoises, les fils et les filles d'explorateurs, de découvreurs, d'inventeurs ne tourneront jamais le dos au pays qui leur a permis de croître et de se développer dans la liberté, dans l'abondance et dans la dignité.

Je pense que même la présence parmi nous dans ce Parlement de députés qui prétendent à la fois pouvoir représenter l'opposition loyale de Sa Majesté et travailler au démantèlement du Canada pourrait avoir un effet salutaire sur tous les Canadiens et Canadiennes et en particulier sur mes compatriotes du Québec. Parce que le Bloc, ces alliés du Parti québécois, en nous rappelant tous les jours tout ce que nous pourrions perdre en tant que Québécois et Québécoises avec le démantèlement du Canada, nous permettent en même temps de mieux mesurer toute la richesse de notre citoyenneté canadienne.

Et à cause de la présence ici même des députés séparatistes, tous les Canadiens et Canadiennes prennent maintenant et enfin conscience que l'unité du Canada, la préservation de notre patrimoine culturel et de notre sécurité économique ne sont pas uniquement un problème québécois.

Lors du référendum de 1980, une majorité de Québécois et Québécoises a réitéré à la face du monde entier son attachement au Canada. Bien sûr, nous avons des problèmes importants à


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régler, et beaucoup de ces problèmes se rapportent directement aux rapports entre le Québec et le reste du Canada, mais le Bloc n'est pas un remède aux problèmes du Québec. C'est, en partie, un symptôme de la frustration de beaucoup de Québécois et Québécoises devant des insuccès constitutionnels, mais le Bloc n'a pourtant rien fait pour aider à régler ces problèmes.

Le Parti réformiste n'est pas non plus un remède aux problèmes du Canada. C'est, en grande partie, un symptôme de l'impatience de beaucoup de Canadiens et Canadiennes devant des problèmes économiques et politiques auxquels le Parti réformiste n'a pourtant aucune solution.

On ne guérit pas un malaise en observant ses symptômes. Nous devons avoir le courage de corriger ce qui entrave notre progrès comme fédération, tout en ayant la sagesse de préserver ce qui a fait du Canada une des grandes réussites dans l'histoire de l'humanité.

Je parle français et j'en suis fier; mes enfants et mon épouse parlent français et ils en sont aussi fiers. Nous sommes des Québécois et nous sommes des Canadiens.

(1225)

Pour moi, et pour toute ma famille, la connaissance de la langue française et les liens d'amitié qu'elle nous a permis de nouer sont devenus des racines profondes. La langue française, pour nous, a été le passeport qui nous a permis de contribuer, à notre tour, à une société généreuse et dynamique. La seule société française en terre d'Amérique qui nous a accueillis à bras ouverts.

Mon souhait le plus cher et ma détermination la plus forte à titre de député et de citoyen canadien seront toujours d'avoir le privilège de pouvoir collaborer à la sécurité du Québec et à l'unité du Canada. J'entendais tout à l'heure mon collègue du Bloc faire le récit et la liste de toutes les conférences constitutionnelles qui ont failli donner une nouvelle Constitution au Canada. Il a oublié que pendant ces 30 ans où nous regrettons tous de ne pas avoir réussi à régler nos problèmes constitutionnels, il y a eu des choses qui ont permis au Québec de se développer. Le Régime des rentes du Québec, l'accord de l'immigration, par exemple, sont deux de ces choses. Regardons, actuellement, notre programme d'infrastructures tripartite qui fonctionne bien.

Pendant tout ce temps, le Québec s'est développé. Quels programmes, quelles choses empêchent le Québec de se développer et d'être une société dynamique à l'intérieur d'une fédération canadienne? Je suis fier d'être Québécois, mais je suis fier d'être Canadien et je travaillerai toujours fort démocratiquement. J'ai toujours eu beaucoup de respect pour ceux et celles qui, même dans cette Chambre, utilisent tous les outils qu'ils ont pour défendre leur option, mais démocratiquement, comme le Bloc québécois, je me battrai pour garder ce pays uni et pour que le Québec soit un Québec fort mais à l'intérieur d'une fédération canadienne.

Voilà le rêve de nos pères fondateurs de ce pays et voilà le rêve que nous aussi, comme députés, devons continuer à tous les jours, à toutes les occasions, à poursuivre pour réussir à préserver ce pays. D'ailleurs, malgré toutes nos misères, il y a des millions d'êtres humains qui donneraient tout ce qu'ils ont pour venir habiter au Canada.

M. Benoît Tremblay (Rosemont): Madame la Présidente, j'ai pu me rendre compte que le député de Saint-Léonard n'est pas très fort en chirurgie. On a appris récemment que c'est un expert-comptable: je pense qu'il aurait dû s'en tenir à la comptabilité. S'il faisait la comptabilité de ce qui se passe au Canada et au Québec, il saurait que le Canada est aujourd'hui le pays le plus endetté du monde sur les marchés étrangers.

Si les taux d'intérêt que nous connaissons maintenant ne descendent pas, c'est précisément parce que 45 p. 100 de la dette canadienne est empruntée sur les marchés étrangers et que les prêteurs commencent à avoir une proportion importante de leur portefeuille investie en emprunts canadiens. On sait aussi qu'avec le dernier Budget, on aura des déficits pendant plusieurs années et que le contrôle des finances publiques est excessivement difficile dans un contexte où, malgré son incapacité à gérer ce qui est déjà sous sa responsabilité, le gouvernement fédéral décide régulièrement d'envahir des champs de juridiction des provinces en pensant qu'il peut faire mieux.

Madame Lise Bissonnette du journal Le Devoir en a décortiqué un exemple cette semaine. Le gouvernement fédéral a décidé d'intervenir dans les programmes d'alphabétisation. Le Québec dépense déjà 63 millions de dollars, imaginez-vous que le gouvernement fédéral rajoutera 2,5 millions. Deux millions et demi avec, sans doute, un million de publicité, avec un long communiqué émanant d'ailleurs du ministère des Affaires extérieures-qui nous permettait de dire que le gouvernement fédéral considère peut-être déjà le Québec comme un pays étranger-, mais avec toute une bureaucratie fédérale-provinciale parce que finalement, après beaucoup de discussions, le gouvernement fédéral a reconnu que c'était d'abord une juridiction québécoise et qu'il faudrait coordonner les efforts, qu'il faudrait s'entendre sur les critères. On a réuni plein de fonctionnaires pendant des mois pour arriver à s'entendre sur des critères.

Imaginez-vous qu'après tout ça, il y a en moyenne 25 000 $ par commission scolaire au Québec qui pourraient être consacrés à l'alphabétisation.

(1230)

C'est extraordinaire; 25 000 $. Ce n'est pas le salaire annuel d'un professeur qui serait consacré à l'alphabétisation, mais cela permet au gouvernement fédéral d'occuper l'espace publicitaire probablement à plus de frais que 2,5 millions de dollars pour donner 25 000 $ par commission scolaire. C'est absolument aberrant qu'un comptable de profession puisse, aujourd'hui, nous faire un discours sur la chirurgie. De grâce! J'espère que dans son prochain discours, le député de Saint-Léonard parlera d'abord de comptabilité.

M. Gagliano: Madame la Présidente, je remercie le député pour ses propos concernant mes connaissances comptables, même si depuis dix ans, je ne pratique plus. Le député dit que cela se voit, peut-être bien.

Quand cela convient au Bloc québécois, il soulève souvent l'argument soulevé par le Parti réformiste sur la dette nationale. C'est un argument qu'on utilise pour essayer d'amener de l'eau à leur moulin, à leur cause. Mais le député sait très bien que je suis


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au courant de ses connaissances en économie, il connaît très bien le système de la dette nationale. Il ne s'agit pas seulement de la dette fédérale. Le Québec qui évolue dans toute sa splendeur a aussi une dette, ainsi que les autres provinces, comme d'ailleurs tous les pays au monde. C'est dans notre système.

On pourrait tirer avantage du problème de la dette, car cela a permis à la société canadienne et québécoise de se développer. On a une qualité de vie. Pour la deuxième année consécutive, les Nations Unies disent que le Canada est le meilleur pays au monde pour ce qui concerne la qualité de vie. J'espère qu'en parlant de nos difficultés financières, il pourra dire qu'on a le meilleur système et la meilleure qualité de vie au monde. Ce sont des choses qu'il faut dire. Il n'y a pas seulement des aspects négatifs, il y a aussi des choses positives apportées par l'expérience canadienne. Le député nous parle de taux d'intérêt. Il veut que je parle d'économie et de finances.

Quand je suis arrivé au Canada en 1958-mon temps est expiré, mais accordez-moi deux secondes-Montréal était la métropole du Canada. Toutes les grandes compagnies avaient leur bureau chef à Montréal. Depuis 30 ans que ces gens veulent séparer le Québec du Canada, Montréal n'en est plus la métropole, elle est la métropole de la pauvreté.

M. Clifford Lincoln (secrétaire parlementaire de la vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Madame la Présidente, un ministre fédéral allemand me racontait, l'autre jour, comment, après la guerre, lorsque les alliés ont décidé de travailler pour doter la nouvelle Allemagne d'un système de gouvernement, ils ont choisi le système fédéral parce qu'il donnerait une autonomie beaucoup plus flexible aux parties du pays, qu'il apporterait un équilibre entre les régions plus fortes et plus faibles et aussi parce que c'est un système qui a particulièrement réussi dans plusieurs pays du monde, tels que la Suisse, les États-Unis et le Canada.

De tous les pays du monde, certes, le Canada est le plus décentralisé de tous. Doté d'une Constitution des plus compliquées datant de l'ère coloniale, c'est un des pays les plus complexes à gouverner. Il est sûr que Descartes aurait conclu que le concept canadien de gouvernement est impraticable, que le Canada, tel que constitué, est ingouvernable.

Pourtant, le miracle canadien, c'est qu'il défie tout le rationalisme des concepts constitutionnels ou gouvernementaux. Le miracle canadien, c'est qu'en dépit des frustrations du système, et il y en a, en dépit du peu de population tout au long d'un territoire immense, en dépit des disparités régionales qui perdurent malgré tous les grands efforts, en dépit de tous les obstacles formidables auxquels nous faisons face à tous les jours, le Canada, non seulement survit, mais évolue de façon unique parmi les pays du monde.

(1235)

Les descendants des deux peuples fondateurs qui s'étaient fait la guerre jadis ont choisi de faire naître le nouveau pays dans la paix, dans la fraternité, dans la volonté de partager, malgré les difficultés prévisibles.

[Traduction]

Le miracle du Canada c'est que, conçu dans la paix, il a traversé les époques dans la paix, cultivant un esprit de liberté, de justice et de tolérance. En fait, vu de l'extérieur, du point de vue d'un étranger, ce que nous qualifions de querelles, de chamailleries et de grands débats, nos échanges verbaux de tous les jours, semblent bien insignifiants, bien futiles, bien peu de chose.

Au fil des années, j'ai eu la chance d'entendre des citoyens de plusieurs pays du monde. Je sais à quel point nos éternelles chicanes familiales les surprennent. Ils en sont abasourdis. Je le vois dans leurs yeux. Toute leur attitude montre qu'ils nous considèrent comme des enfants gâtés incapables d'apprécier nos multiples richesses et avantages à leur juste valeur.

Nous avons l'avantage des grands espaces. Nous avons des paysages terrestres et marins dont la splendeur toujours changeante s'étend à l'infini. Nous jouissons d'une qualité de vie que seuls les pays riches et privilégiés peuvent offrir. Mais par-dessus tout, nous partageons la richesse appréciable de nos solides valeurs, qui ont résisté au temps et pour lesquelles nous avons fait des sacrifices communs. Ces valeurs sont l'humilité de notre peuple, la générosité des Canadiens envers leur collectivité et leur prochain et la préservation d'un idéal de justice sociale, malgré les obstacles inévitables de la diversité raciale, des principes divergents et, bien sûr, des restrictions économiques.

Notre système de valeurs est solide et stable. La fibre de l'unité canadienne est profondément ancrée. Elle n'est peut-être pas exprimée bruyamment et explicitement, mais elle est extrêmement solide.

[Français]

Ceux qui cherchent à déstabiliser le Canada et renier cet héritage commun ont une responsabilité immense envers nos concitoyens. Tristement, j'écoute les lamentations des collègues du Bloc qui, jour après jour, pourfendent le fédéralisme et le Canada. Tous les maux qui affligent le Québec proviennent, on l'a entendu plus tôt, toujours du système fédéral et du Canada.

L'indépendance du Québec va tout régler. Le paradis terrestre va être recréé. Bientôt, ce sera le bonheur parfait. Ensemble, le nouveau Québec, indépendant, va bâtir le nirvana. Quiconque crie gare, quelle que soit l'institution qui donne un avertissement quelconque, comme l'autre jour, la Banque de Montréal, est décrié et c'est la levée du bouclier. Tout de suite, les tenants du séparatisme en appellent au boycott des citoyens.

[Traduction]

Ceux qui veulent détruire notre pays, ses valeurs léguées par nos ancêtres, son système de partage des richesses, ainsi que l'équité et la justice dont jouissent tous ses habitants, assument une immense responsabilité, non seulement envers leurs compatriotes, dans leur propre province, mais envers tous les Canadiens. Inévitablement, la séparation et les risques qu'elle comporte, l'imprudence de ce geste, non seulement entraîneront des


4929

difficultés économiques mais déchireront nos collectivités, au sein même du Québec. Les provinces se tourneront aussi les unes contre les autres. Un pays magnifique sera déstabilisé; les Maritimes seront coupées de l'Ontario. Un pays qui a partagé une même destinée fabuleuse pendant près de treize décennies sera morcelé.

(1240)

[Français]

Ceux d'entre nous à qui a été légué le privilège de préserver ce pays, de préserver ces valeurs partagées pendant 127 ans, doivent se résoudre à défendre ces idéaux farouchement, avec passion. Combien plus fructueuse, madame la Présidente, combien plus saine la fraternité plutôt que des querelles instestines! Combien plus saine, plus fructueuse l'unité plutôt que la division! Combien plus sain et fructueux de faire plutôt que de défaire! Combien plus sain et fructueux de bâtir des ponts qui vont nous rejoindre, plutôt que des fossés qui vont nous séparer!

[Traduction]

N'est-il pas préférable de faire que de défaire? Mieux vaut chercher à s'élever que de se quereller et se plaindre. Il faut travailler au bien commun et non poursuivre des objectifs et des intérêts sectaires. Nous devons ériger des ponts qui nous unissent et nous aident à franchir les fossés qui nous séparent, plutôt que d'élever des murs qui nous divisent et nous déchirent.

Je crois passionnément dans le Canada, parce que c'est un pays bon et généreux. Il l'a été envers moi et les miens. Or, le Québec s'est aussi montré généreux à mon égard et je ne peux concevoir un Canada sans le Québec. Au Québec, il y a de la sagesse, de la vitalité et du dynamisme. La province apporte au Canada un caractère différent qui rend le pays unique.

Si nous croyons dans ce pays, nous devons nous battre avec passion pour l'idéal consistant à le préserver, car il est privilégié entre tous. Moi aussi, j'espère de tout coeur que le Canada vivra longtemps et que le Québec en soit toujours une partie dynamique.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Madame la Présidente, il me fait plaisir de répondre à mon collègue libéral. D'ailleurs, il nous a habitués depuis que nous le connaissons, soit à l'Assemblée nationale ou soit ici, à des discours lyriques et dénués de sens par rapport aux réalités politiques et aux débats aussi réels qu'on vit au Québec comme au Canada.

Lorsqu'il nous a traités tout à l'heure de prophètes de malheur ou de personnes intransigeantes avec les institutions financières, je lui rappellerai qu'à toutes les fois que les institutions financières vont se mêler de faire de la politique, vont se mêler du débat politique qui concerne les citoyens et citoyennes du Québec et le choix démocratique de ceux-ci en faveur de la souveraineté, je pense qu'il sera de notre devoir de mettre le doigt sur ces institutions et de dénoncer justement ce qu'elles font de plus que ce qu'elles devraient normalement faire, c'est-à-dire de l'analyse économique et financière.

Remarquez au cours des deux dernières années quelles institutions financières ont porté justement un dur coup, selon leur définition, selon les rapports qu'elles déposaient face au projet souverainiste. Il y a la Banque Royale, il y a la Banque de Montréal, il y a la CIBC et il y a la Banque Scotia. Regardez dans la liste des gros donateurs du Parti libéral du Canada et vous allez retrouver la Banque Royale, la Banque de Montréal, la CIBC et la Banque Scotia, et d'autres institutions financières qui font supposément des analyses objectives.

Alors, étant de grands contributeurs à la caisse du Parti libéral du Canada, et là je ne parle pas de petits dons de 2 000 $ ou 3 000 $, je parle de 35 000 $ jusqu'à 47 000 $ par année, alors je ne serais pas surpris qu'entre le premier ministre et ces institutions financières, il y ait un dialogue franc et régulier sur la question nationale.

Alors, qu'on ne vienne pas nous faire brailler sur la liberté des institutions financières de s'impliquer dans le débat politique. Elles n'ont pas le droit de s'impliquer dans le débat politique et on doute de leur crédibilité. Je peux vous dire que moi, personnellement, tous mes collègues souverainistes, nous allons dénoncer vertement au cours des prochains mois toute implication politique qui ne tient pas à une analyse sérieuse, soit sur le plan financier ou soit sur le plan économique.

J'aimerais revenir sur les propos tenus par le whip du Parti libéral tout à l'heure, où il disait. . . tout le monde, bon, voilà. Alors, ce que je voulais dire, en conclusion, c'est que le discours lyrique que le député vient de nous servir sur le Canada est sans fondement. Il n'est pas fondé.

(1245)

Qu'on regarde donc les vrais problèmes qui confrontent ce pays. Si vous êtes de vrais Canadiens et que vous voulez reconstruire un nouveau Canada sans le Québec, regardez les problèmes qui confrontent le Canada à l'heure actuelle, des problèmes économiques, des problèmes qui tiennent le taux de chômage à 11 p. 100, un des taux les plus élevés dans les pays occidentaux.

Regardez aussi le taux d'endettement; le Canada est le deuxième pays le plus endetté au monde et ce n'est pas le Budget du ministre des Finances qui réglera le problème. D'ailleurs, il y a une semaine ou un peu moins, l'Institut C.D. Howe nous a rappelé sérieusement que le Budget du ministre des Finances ne fera rien pour reprendre le contrôle sur les finances publiques, ne contient aucune mesure, sauf celle de brimer les droits des chômeurs et de leur imposer, au cours des trois prochaines années, des coupures de 5,5 milliards de dollars. Globalement, le Budget manque tellement de crédibilité, que seulement les coûts supplémentaires en intérêt feront en sorte que les économies réalisées, sur le dos des chômeurs, seront des économies qui égaleront à peu près zéro.

Examinez aussi les investissements que le Canada fait en matière de formation de la main-d'oeuvre et comparez-les aux autres pays industrialisés qui se prennent en main et qui arrivent à faire face aux défis de la mondialisation. Regardez aussi l'incidence de la pauvreté chez les enfants au Canada. Les conservateurs ont eu tellement honte-et vous aussi, je pense, parce que vous avez maintenu la situation-les conservateurs ont eu tellement honte, dis-je, qu'ils ont changé la façon de calculer l'incidence de la pauvreté quand l'ONU leur a dit qu'on retrouvait au


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Canada un des plus hauts taux d'incidence de pauvreté chez les enfants. C'est ça la réalité du Canada.

Si vous continuez avec vos discours lyriques-de toute façon depuis que je vous connais, vous n'avez tenu que des discours lyriques-il n'y a jamais rien eu de concret de mis sur la table et je ne suis pas surpris de votre discours.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je rappelle au député que les commentaires doivent être adressés à la Présidence et non directement au député. Je ne vous signalais pas que votre temps était écoulé, mais je désirais vous indiquer que vos commentaires doivent porter sur le discours de l'orateur qui vous a précédé.

Je cède la parole à l'honorable secrétaire parlementaire, qui dispose de très peu de temps.

M. Lincoln: Madame la Présidente, ce n'est pas tout à fait juste, car le député du Bloc a pris tout mon temps. N'ai-je pas droit à deux minutes?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Il faudrait obtenir le consentement unanime de la Chambre pour prolonger votre temps de parole.

[Traduction]

Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

M. Hermanson: Madame la Présidente, nous voudrions aussi poser une brève question une fois que la réponse aura été entendue.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais nous ne pouvons prolonger le débat indéfiniment. Le secrétaire parlementaire dispose d'environ 30 ou 45 secondes.

M. Lincoln: Voilà bien une preuve de l'arrogance des bloquistes. Le député m'accuse de prononcer des discours lyriques, d'être un orateur lyrique.

[Français]

Je préfèrerais être lyrique qu'amer, je préfèrerais être lyrique que de toujours chercher noise à tous les gens qui ne sont pas d'accord avec moi. Les institutions financières qui dénoncent le Parti québécois n'ont pas le droit de se prononcer dans un discours politique-il faut retenir ça-ils n'ont pas le droit de se prononcer, d'après ce que le député a dit, dans un discours politique. La Banque de Montréal, ça ne vaut rien, ce sont des anglais. La Banque Royale, ça ne vaut rien, ce sont des anglais.

M. Loubier: Non, non.

M. Lincoln: Je n'ai pas interrompu le député, il voudra bien respecter les autres, ou au moins avoir la courtoisie de les écouter. C'est ça leur arrogance, ils ne veulent jamais admettre les autres.

[Traduction]

M. Hermanson: J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Je me demande s'il y aurait consentement unanime de la Chambre, comme je l'ai demandé précédemment, pour que je pose une brève question. L'autre député a accaparé beaucoup de temps et fait une déclaration au lieu de poser une question.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais il est impossible de prolonger le temps de parole du député. Si vous posez une question, il devra y avoir une réponse.

Y a-t-il consentement unanime pour prolonger la période afin d'avoir une question et une réponse?

Des voix: D'accord.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Merci, madame la Présidente. Je serai bref.

Le député a dit que le Bloc se trompait en affirmant que si le Québec se séparait du Canada ce serait le paradis. Je suis d'accord avec lui.

Cependant, beaucoup de Canadiens, tant au Québec que dans les autres provinces, s'inquiètent parce que de larges pans de notre économie s'en vont à l'autre endroit. Et je ne parle pas du Sénat lorsque je dis «l'autre endroit».

(1250)

Je me demande ce que le député peut nous dire pour nous donner un peu d'espoir face à notre économie, pour nous donner à tous le désir de demeurer au Canada et pour que personne ne s'inquiète de devoir déménager à l'autre endroit.

M. Lincoln: Madame la Présidente, en quelques mots, je renvoie le député aux titres d'aujourd'hui dans le Quorum: «La croissance économique dépasse les prévisions de Martin». Le Canada devrait connaître un taux de croissance brut de 3,9 p. 100 au cours de l'année. Nous avons pris les rênes d'un pays dont les pronostics économiques étaient très sombres. Nous nous sommes engagés à ramener le déficit à 3 p. 100 du PNB en trois ans. Nous le ferons. Avec les libéraux au pouvoir, les choses vont s'améliorer.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer au débat sur la motion présentée par le député de Calgary-Sud-Ouest, motion dans laquelle nous affirmons notre volonté de demeurer un État fédéral uni; j'aimerais parler plus particulièrement de la partie de la motion dans laquelle nous affirmons l'égalité et le caractère unique de tous nos citoyens et de nos provinces.

L'égalité des citoyens est l'essence même, le principe fondamental de la démocratie, principe dont les Canadiens-ou du moins une soi-disant élite-se sont éloignés au profit d'une notion appelée les droits des groupes.

Dans l'Accord de Charlottetown, cette notion a pris de plus en plus la forme d'une proposition visant à inclure dans notre Constitution l'idée selon laquelle les droits des citoyens sont déterminés, non pas indépendamment de leur race, de leur langue, de leur culture ou de leur sexe, mais en raison de ceux-ci. Je


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ne suis pas le seul à penser ainsi. L'ancien chef libéral, M. Trudeau, l'a souligné lorsqu'il a parlé de la hiérarchie des droits qui était prévue dans cet accord.

À notre avis, cette tendance à privilégier les droits des groupes porte non seulement atteinte au principe fondamental de l'individu et des droits individuels au sein de la collectivité, mais elle a aussi été préjudiciable à notre identité collective nationale.

J'aimerais parler d'un éditorial d'Andrew Coyne, paru dans la livraison d'hier du Globe and Mail. L'auteur y dit que les droits des groupes et leur lien avec la grande théorie de la victimologie politique nous ont amenés à nous voir de plus en plus comme une nation de groupes victimes et, en fin de compte, comme une nation victime, sans identité ni pouvoir.

Nous, les réformistes, proposons de revenir à l'essence même de la démocratie libérale, de réaffirmer les principes de la démocratie à une époque moderne et d'assurer l'égalité politique par une réforme des institutions. Plus précisément, nous préconisons des innovations comme les votes libres pour les représentants du peuple au Parlement du Canada, la démocratie directe dans l'ensemble de la population, l'adoption à l'ère moderne, avec nos populations instruites, de mécanismes permettant la tenue de référendums, la prise d'initiatives et la révocation. Même dans le domaine des modifications constitutionnelles, il pourrait y avoir des mécanismes comme les assemblées et la ratification par le peuple.

L'égalité entre les citoyens ne nie pas l'originalité de chacun. Cette objection revient sans cesse. Nous reconnaissons l'existence au Canada de toutes sortes d'identités collectives et individuelles. Nous préconisons que le gouvernement du Canada fasse porter ses efforts sur la promotion de notre identité collective comme pays au lieu de s'intéresser, comme il le fait depuis une génération, à des choses comme le multiculturalisme officiel ou la promotion du Canada comme fédération de deux peuples fondateurs, les Anglais et les Français.

À notre avis, il faudrait plutôt nous intéresser aux notions de race, de culture, de langue, à des conceptions plus neutres de notre identité nationale. Pour les réformistes, définir un pays comme l'union de peuples fondateurs, les anglophones et les francophones, est aussi ridicule que de les définir comme un pays formé de deux religions fondatrices, les protestants et les catholiques.

Je voudrais aussi parler de l'égalité des provinces, ce qui est le deuxième élément. Cela concerne ce qui, selon nous, est un principe fondamental d'une fédération. Le fait que nous sommes une fédération formée de provinces a été clairement reconnu dans le texte constitutionnel de 1867, ce qui était très opportun, car ce régime remplaçait le désastreux État unitaire binational qui a existé de 1841 à 1867. Le Canada n'a pas toujours respecté le principe de l'égalité des provinces. Ma province, l'Alberta, et les provinces des Prairies en général ont été délibérément créées comme des entités politiques inférieures après la Confédération, erreur qui n'a été corrigée que des décennies plus tard.

(1255)

À cause de l'évolution de nos régimes parlementaires, les petites provinces ont toujours été soumises, au niveau fédéral, à la domination des provinces centrales, l'Ontario et le Québec, vu le déséquilibre du poids politique aux Communes et le déclin du Sénat comme institution politique efficace.

Plus tard, toutes les provinces, même les plus grosses, ont éprouvé des problèmes avec la fédération parce que le gouvernement fédéral a invoqué son pouvoir de dépenser pour empiéter sur des champs de compétence clairement provinciaux. Évidemment, ce mauvais fonctionnement de la division des pouvoirs est dû tant au gouvernement fédéral qu'aux gouvernements provinciaux.

Nous proposons, en tant que réformistes, de réaffirmer notre engagement envers l'égalité des provinces par la réforme des institutions et le rétablissement d'une division des pouvoirs équilibrée au sein de la fédération. J'ai dit à maintes reprises à la Chambre que nous espérions réformer le Sénat sur le modèle triple E afin que ce dernier devienne une deuxième Chambre d'assemblée efficace où les provinces seraient représentées par un même nombre de sénateurs élus. Autrement dit, nous voulons que le Sénat soit une Chambre efficace représentant les provinces, comme les Pères de la Confédération l'avaient voulu pour que les grandes provinces ne se servent pas du Parlement du Canada pour dominer les plus petites provinces.

[Français]

Cette préoccupation de la représentation régionale n'est pas seulement une question pour de petites provinces, mais il s'agit aussi d'une préoccupation de petites régions dans de grandes provinces, comme la Colombie-Britannique, l'Ontario et aussi le Québec. Nous espérons avoir, en effet, dans un Sénat réformé, une mesure pour la représentation régionale dans de grandes provinces, par exemple, la Gaspésie et la Côte-Nord du Québec ou le nord de l'Ontario.

Bien sur, quand nous parlons de l'égalité des provinces dans cette motion, nous parlons aussi de leur caractère unique. Nos critiques diront: Bien sûr, vous voulez juste voir le Québec comme une province comme les autres. Bien sûr que non. Une égalité ne veut pas dire une identité. Le principe d'une fédération ne veut pas dire que les provinces sont identiques, ça veut dire qu'elles partagent certaines valeurs et certaines politiques, par exemple, les priorités économiques mentionnées dans la motion, mais aussi le principe d'une fédération veut dire que les provinces ont leur caractère distinct, leur caractère unique par la division des pouvoirs dans un État fédéral. Ces caractères uniques dans le Canada, par exemple, comprennent des choses comme les réalités culturelles dans la province de Québec, comme la langue, évidemment, et certaines réalités géographiques, comme les ressources naturelles dans les provinces de l'Ouest. Et dans un État fédéral, ces choses devraient être de juridiction provinciale, et la division du pouvoir devrait être respectée dans un État fédéral développé.

[Traduction]

En conclusion, j'ai parlé de l'égalité et du caractère unique des provinces, de la réalité canadienne actuelle et des changements


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qu'il faudrait apporter. Certains des changements dont j'ai parlé n'ont trait qu'aux simples politiques. D'autres seraient plus sérieuses, car il s'agit de modifications constitutionnelles qu'il faudra faire à un certain point dans l'avenir.

Je voudrais rappeler à tous les députés que quels que soient les changements constitutionnels envisagés qui influeront de façon marquée sur le statut des citoyens ou des provinces, il faudra que cela soit fait dans le respect de la démocratie, de la Constitution et de la suprématie du droit. Pareilles modifications ne peuvent se faire par des actes illégaux ou unilatéraux. J'espère que les discussions que nous tiendrons dans les mois à venir sur notre avenir auront lieu dans le cadre de la démocratie constitutionnelle et dans le respect des lois.

(1300)

Mme Jane Stewart (Brant): Madame la Présidente, je tiens à dire combien je suis déconcertée par le fait que cette motion soit présentée à la Chambre aujourd'hui.

Dieu seul sait que, au cours de la campagne électorale que nous venons de vivre, le seul point sur lequel j'étais d'accord avec le Parti réformiste, c'était que les Canadiens en avaient assez des discussions sur l'unité et des discussions sur la Constitution. Et voilà que le Parti réformiste saisit la Chambre de cette motion!

Je comprends de moins en moins. J'entends le Parti réformiste clamer: «Nous sommes contre le processus, contre la démarche pyramidale adoptée par le gouvernement.» Pourtant, quand nous entreprenons la révision de notre politique de sécurité sociale, qui est unique aux Canadiens, que nous invitons les réformistes à prendre part au débat sur la question, ils disent: «Ça ne suffit pas! Nous voulons une initiative rigoureuse et ferme. Le gouvernement doit intervenir dans ce domaine.» Je ne saisis pas la différence.

Dans son discours, le député a invoqué les difficultés que nous éprouvions à appliquer la dynamique de groupe et à considérer les gens comme des groupes. Pourtant, il est question de diversité dans leur motion même. Pour moi, la diversité, c'est comprendre les divergences individuelles, parler de ces divergences et savoir que, en encourageant les parties à faire un tout, on obtient, à la fin, de bien meilleurs résultats.

Je suis déroutée, très déroutée par cette motion. Le chef du troisième parti parle d'un nouveau Canada. Ma foi, qu'a-t-on à reprocher au Canada qui a grandi et évolué au cours des 127 dernières années? C'est un pays compatissant, généreux.

Le député parle de dette et de déficit. Je lui dirai que je croyais qu'il avait vu la lumière, qu'il avait d'importantes choses à dire sur l'art de gouverner un pays. L'important, ce n'est pas seulement la gestion de la dette et du déficit, mais également les problèmes qui tourmentent les Canadiens, en tant qu'êtres humains. Je croyais que les réformistes avaient vu la lumière, mais ils ne font que répéter le vieux refrain. Je suis déroutée. Tout à fait déroutée!

M. Harper (Calgary-Ouest): Madame la Présidente, je suis entièrement d'accord avec la députée pour dire qu'elle est déroutée. En fait, elle est tellement déroutée que j'ai à peine compris la dernière partie de cette intervention.

Cependant, je ferai des observations sur le premier point, que j'estime important, soit la question des changements constitutionnels et du moment et de la façon dont nous devrions procéder.

Pendant la campagne électorale, notre parti a bel et bien déclaré, tout comme le gouvernement, d'ailleurs, que les Canadiens n'étaient pas intéressés par des discussions au sujet de changements constitutionnels exhaustifs pour le moment. Je suis certes d'accord avec cela. À mon avis, il faudrait placer nos priorités ailleurs.

Malheureusement, nous devons faire face à la réalité. Nous avons à la Chambre un parti qui, jour après jour, parle des changements constitutionnels les plus radicaux et les plus étendus possibles, à savoir la désintégration, la séparation, la division, la redivision de l'État fédéral en deux états complètement séparés, dont un serait vraisemblablement un état unitaire au Québec et les autres restent encore à définir.

Nous entendons ce refrain quotidiennement. Le Québec se prépare à des élections où cette question sera un enjeu. Bien sûr, les séparatistes ne veulent pas décrire cela comme un changement constitutionnel, car ils se rendent compte que cela soulèverait immédiatement dans l'esprit de la population québécoise toutes les complexités et les difficultés que cela suppose. Le fait est que les Québécois seront appelés très bientôt à discuter encore une fois de changements constitutionnels et ce, dans le contexte de tous les problèmes que pose le fédéralisme.

Nous reconnaissons que ces problèmes existent et nous y préconisons quelques solutions. Je ne fais que souligner dans ma déclaration que notre parti a certains points de vue d'ordre constitutionnel. Il y a également au sujet du Canada des choses que nous voudrions changer et qui pourraient l'être en dehors du cadre constitutionnel.

Sans pour autant prévoir des négociations constitutionnelles, la motion vise à souligner qu'il existe d'autres points de vue d'ordre constitutionnel, y compris ceux des réformistes, qui n'impliquent pas le genre de bouleversement qu'entraînerait le séparatisme.

(1305)

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Madame la Présidente, au Canada, comme en fait dans le monde entier, l'environnement est l'élément commun qui unit tous les êtres humains. Nous ne pouvons nous passer de consommer de l'air et de l'eau, qui sont essentiels à notre subsistance. Les divers éléments de notre environnement ont un effet positif ou négatif sur ces deux ingrédients indispensables à la vie.

Dans ma circonscription, ce sont les jeunes qui s'intéressent le plus à la question de l'environnement. Quand je visite les écoles, je suis sûr qu'à chaque fois, ils vont soulever la question, non pas d'un point de vue scolaire, mais parce qu'ils s'intéressent vraiment à la question.


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Que ce soit dans mes interventions à la Chambre ou dans les discours que j'adresse au public, j'ai toujours dit, et je le répète, que l'avenir du Canada, ce sont les jeunes, et c'est en pensant à leur avenir que je fais cette intervention aujourd'hui. Nous devons aux jeunes de notre grande nation, le Canada, de veiller sérieusement à protéger leur avenir.

Depuis le début de cette législature, j'ai pris part aux travaux du Comité permanent de l'environnement et du développement durable et du Comité permanent des ressources naturelles, notamment aux travaux portant sur les questions forestières. Cela m'a amené à prendre conscience de notre environnement et de ses effets sur l'air et l'eau, ce qui n'a rien à voir avec les frontières politiques établies par les hommes. Ces frontières, tracées de façon arbitraire sur une carte, nuisent plus que toute autre force à notre capacité à contrôler les éléments de notre environnement.

Au Canada, la concurrence qui oppose les compétences provinciales crée un déséquilibre pour l'industrie et influe sur les décisions des entreprises en matière d'investissement. Par exemple, en tant que membre suppléant du Comité permanent du patrimoine canadien, je me suis penché sur la question des limites des parcs nationaux, qui ont souvent pour effet de diviser des réalités écologiques uniques.

Ce qui arrive à l'environnement à l'intérieur d'un parc est le reflet de ce qui arrive à l'environnement à l'extérieur de ce même parc, tout simplement parce que le parc et ce qui l'entoure font partie du même cadre écologique. Les insectes et les maladies qui détruisent nos forêts peuvent, en se développant à l'intérieur des limites des parcs nationaux, traverser la limite tracée par l'homme et détruire des forêts commerciales. Bien sûr, le contraire est également vrai. Par exemple, la pollution industrielle des rivières en amont d'un parc peut avoir de graves conséquences pour la faune et la flore, ainsi que pour l'équilibre écologique d'un parc national.

Si je cite ces exemples, c'est pour illustrer les conséquences négatives que pourrait avoir pour l'environnement la fragmentation du Canada si le Québec devenait un État souverain. Nous ne pouvons vraiment pas nous sentir à l'aise, du point de vue de l'environnement, devant les limites arbitraires qui ont établies, les lignes tracées sur une carte pour définir le Québec comme entité distincte de notre merveilleux pays. Les activistes politiques, au Québec, veulent prendre le contrôle de leur propre territoire et concevoir leurs propres règlements dans le domaine de la protection de l'environnement.

Je voudrais aujourd'hui parler des problèmes environnementaux qui menacent notre pays et montrer comment la séparation du Québec pourrait avoir des conséquences néfastes pour cette province et le reste du Canada.

Je ne parle pas ici de l'environnement pour vous faire peur et prédire les pires catastrophes, mais simplement pour souligner les répercussions que la séparation du Québec aura sur notre pays et sur cette province.

Voici un aperçu de ce qui est arrivé depuis l'ouverture de la session. Je dois dire, avec tout le respect que je dois aux députés du Bloc québécois qui font partie du Comité permanent des ressources naturelles et du Comité permanent de l'environnement et du développement durable, que leurs interventions sont plutôt limitées et axées uniquement sur le Québec.

Par exemple, notre comité des ressources naturelles étudie actuellement la gestion responsable des forêts, surtout lorsque la coupe à blanc est utilisée en réponse à la question suivante: des forestiers professionnels responsables ont-ils le droit de recourir à la coupe à blanc?

Nous essayons d'aider le Service canadien des forêts et le ministère des Ressources naturelles à définir la position du Canada sur la durabilité des forêts qu'ils se proposent de présenter à des réunions internationales. Ces réunions auront pour but d'établir des normes internationales sur la gestion de la durabilité des forêts. Ces normes mèneront à l'étiquetage écologique des produits forestiers dans le monde entier.

L'établissement d'une nouvelle frontière internationale entre le Canada et le nouvel État que serait le Québec ne ferait que rendre plus complexe un problème qui l'est déjà et diviser notre voix collective sur la scène mondiale. À titre d'État indépendant, le Québec sera-t-il prêt, par exemple, à préconiser les mêmes normes que le Canada dans les discussions internationales sur l'étiquetage écologique, ou fera-t-il concurrence au Canada sur ce chapitre?

Des forêts saines génèrent de l'oxygène, l'air que nous respirons. La création d'une nouvelle autorité politique ne fera rien qui me permette de mieux respirer.

Dans leur livre rouge, les libéraux ont dit qu'ils voulaient créer un poste de vérificateur général de l'environnement au Canada.

(1310)

Après des audiences épuisantes, le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a produit un rapport détaillé sur le poste de commissaire à l'environnement et au développement durable. Le Parti libéral avait promis un vérificateur général de l'environnement durant la campagne électorale. La décision de nommer un commissaire au lieu d'un vérificateur général a été prise par consensus, après de sérieuses discussions et des séances de travail ardues.

Les bloquistes qui siégeaient au comité étaient en désaccord et, bien qu'une telle opinion dissidente soit légitime en vertu du processus national canadien, je sais que si le Bloc québécois représentait aujourd'hui un Québec indépendant, on ne pourrait donner suite à ce projet de première importance.

Mon parti approuve l'examen environnemental à guichet unique pour toutes les provinces et pour le pays tout entier. Les députés du Bloc peuvent-ils sérieusement prétendre que le concept qu'ils défendent n'est pas à courte vue et particulier au Québec?


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Ils déclarent dans leur conclusion, et je cite: «Nous croyons toutefois que le comité pave la voie à un organisme qui ne fera qu'ajouter au fouillis et à la confusion qui règnent dans le domaine de l'évaluation environnementale.»

Ce qui inquiète le Bloc, c'est que le gouvernement canadien, représentant la deuxième plus vaste étendue de terre sur la planète, ait préséance sur leur compétence provinciale beaucoup plus restreinte. Le danger c'est que les compétences plus restreintes mènent invariablement à des vues plus limitées et à des discussions et des négociations sans fin. Ceci nous amènerait en bout de ligne à un compromis entre nations indépendantes qui ne ferait qu'amplifier la confusion qui existe déjà entre les provinces individuelles et le gouvernement du Canada au sujet des questions environnementales.

Le Parti réformiste appuie le principe du développement durable qui oppose au besoin d'un environnement sain, la nécessité de maintenir la croissance et le progrès de l'économie canadienne. Le Parti réformiste croit que les aspects environnementaux d'un projet doivent avoir ni plus ni moins de poids que ses aspects économiques, sociaux et techniques.

Dans ce même rapport sur le commissaire à l'environnement et au développement durable, les députés du Parti réformiste affirment, à la page 25, que les industries et les entreprises canadiennes risquent de se trouver, à court terme, dans une position non concurrentielle si le Canada adopte des principes de comptabilité verte avant les autres pays.

Quand je parle de comptabilité verte, je veux parler de nouvelles pratiques de comptabilité et de méthodes commerciales imaginatives qui permettent d'évaluer exactement à combien s'établissent certains coûts environnementaux auparavant indéfinis. Les coûts véritables peuvent ainsi figurer au bilan officiel du pays. En appliquant prématurément et isolément des principes de comptabilité verte aux comptes nationaux du Canada, nous risquons d'influer sur notre produit national brut et de décourager les investisseurs canadiens et étrangers.

Pour que l'entreprise canadienne reste compétitive à l'échelle internationale, le Parti réformiste croit qu'il serait judicieux, pour le Canada, de ne pas trop prendre d'avance sur ses principaux partenaires commerciaux, sur des idées comme l'application des principes de comptabilité verte dans les comptes nationaux ou l'imposition d'une taxe verte ou d'une taxe sur les hydrocarbures.

Dans le contexte du débat d'aujourd'hui, cet exemple doit être vu dans la perspective d'une division du Canada, advenant la séparation du Québec. De toute évidence, le chef séparatiste avait pour objectif d'obtenir l'autonomie et le contrôle du Québec. Si le Québec avait des compétences politiques et économiques distinctes et faisait concurrence à ce qu'il resterait du Canada, la compétition pourrait se faire suivant des normes environnementales fixées selon le plus petit dénominateur commun. Les concepts progressistes comme la comptabilité verte seraient presque sûrement oubliés, en raison des nouvelles pressions engendrées par la concurrence.

Si les membres du Bloc québécois ne peuvent même pas s'entendre avec les autres membres du comité de l'environnement sur un rapport banal portant sur l'établissement du bureau du commissaire à l'environnement et au développement durable, que devons-nous penser de la possibilité de coopération entre un Québec souverain et le reste du Canada?

L'élément par excellence qui réunit tous les êtres humains est l'environnement dans lequel ils vivent. Le fait de diviser la nation du Canada en couchant sur une carte des lignes tracées de façon artificielle ne peut que diminuer notre volonté, et même notre capacité, de protéger nos ressources équilibrées sur le plan environnemental.

Étant l'une des principales puissances intermédiaires du monde, nous pouvons agir en chef de file. La nation du Canada constitue une masse critique imposante qui peut imposer des pratiques environnementales saines assujetties à de nouvelles normes élevées. La fragmentation du Canada diluera notre influence dans le monde. Notre terre a désespérément besoin de leadership pour élaborer et établir des pratiques environnementales saines qui dépassent les frontières politiques.

Nous ne devons pas construire de nouveaux murs politiques. Nous devons les détruire, pour sauvegarder l'environnement, pour aider nos enfants et pour assurer notre avenir.

(1315)

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Madame la Présidente, je félicite le député, qui a prononcé un excellent discours. Il a traité de la nécessité de sauver la planète, mais aussi de la notion de normes nationales. Je crois que c'est comme cela qu'apparaît une volonté nationale, qui permet de développer un patriotisme, un attachement pour son pays.

Le député a parlé de normes nationales en matière d'environnement et je suis entièrement d'accord avec lui. Le député ne convient-il pas qu'il importe aussi que, dans d'autres domaines, par exemple, le multiculturalisme, il est préférable de se doter de normes nationales, soit d'un programme national, plutôt que d'avoir dix programmes provinciaux différents? Le député peut-il accepter que tout le principe visant à établir des normes et des programmes nationaux dans bien des domaines, outre celui de l'environnement, puisse permettre un équilibre entre les régions pauvres et riches, par exemple à l'égard des soins de santé, de l'éducation ou de la formation? Ne convient-il pas que c'est une bien meilleure façon de bâtir un pays?

M. Abbott: Madame la Présidente, j'apprécie les observations du député.

Les questions concernant l'eau et l'air, par exemple, sont des questions absolues. Par ailleurs, celles qui traitent notamment du multiculturalisme ou du biculturalisme supposent des interactions entre des êtres humains. Même si je respecte le fait que le député établisse un lien, je crois que ces questions sont d'un ordre un peu différent. Les questions absolues de l'air et de l'eau vont au-delà des frontières politiques, c'est pourquoi il faut absolument établir des normes nationales dans ce domaine.


4935

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil): Madame la Présidente, le député du Parti réformiste a beaucoup parlé de l'environnement. Moi, je peux lui dire une chose, justement en ce qui concerne l'environnement. La Loi sur l'environnement du Québec et la Loi sur l'environnement d'Ottawa, qui a été faite, d'ailleurs, après la loi du Québec, sont tellement différentes, sont tellement distinctes, qu'on est obligé de faire deux études environnementales chaque fois qu'on a un projet important.

Même le président d'Hydro-Québec dit qu'il ne peut pas asseoir les fonctionnaires du gouvernement fédéral et les fonctionnaires du Québec ensemble pour analyser une étude environnementale. Moi, personnellement, je crois sincèrement, encore une fois, que le gouvernement fédéral veut mettre ses grands sabots dans la gestion de l'environnement, justement pour être capable de diriger, de centraliser davantage son pouvoir à Ottawa.

Je vais vous donner un exemple. Notre richesse naturelle particulière, au Québec, c'est l'hydro-électricité. Et parfois, on fait bloquer des projets d'hydro-électricité, possiblement pour avantager le développement de l'uranium en Ontario ou le pétrole dans l'Ouest canadien, alors que si on avait la responsabilité de son environnement, on pourrait faire des études correctement et on pourrait, en même temps, s'épanouir économiquement, suivant ses priorités à soi.

Encore une fois, l'environnement, bien sûr qu'au niveau de l'air, c'est le gouvernement fédéral et c'est probablement le monde qu'il faut intéresser. Mais, en ce qui concerne l'environnement et des projets à caractère économique, où on peut très bien faire les études environnementales au Québec, on n'a pas besoin du gouvernement fédéral pour venir gêner le développement industriel afin souvent de favoriser d'autres secteurs d'activités qui sont à l'extérieur du Canada.

Et c'est dans ce sens qu'on veut absolument avoir ce pouvoir réel pour l'environnement et pour bien d'autres domaines aussi.

[Traduction]

M. Abbott: Madame la Présidente, je vois bien que le député et moi-même différons d'opinion sur cette question. Je ne peux que réaffirmer ce que j'ai dit au cours de mon allocution.

Il me semble que l'idéal serait qu'il n'y ait pas de frontières politiques en matière environnementale. Idéalement, on ne devrait pas se servir de l'environnement comme d'un stratagème ou d'une tactique de pression sur le plan économique. J'estime que ce n'est pas en traçant d'autres frontières qu'on va protéger notre environnement.

(1320)

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre): Monsieur le Président, hier, à l'instar d'autres pays occidentaux, le Canada s'est remémoré les sacrifices que des jeunes gens et des jeunes femmes ont consentis pour la paix et la liberté du monde entier. Le courage de ces jeunes a permis au Canada de devenir un chef de file sur la scène internationale. C'est avec fierté que nous avons entendu hier notre premier ministre, notre gouverneur général et les autres Canadiens et Canadiennes qui sont allés en Europe rappeler pour nous de façon éloquente le souvenir des Canadiens morts au combat, toucher le coeur de l'assemblée et recevoir des félicitations.

Beaucoup de Canadiens ont ressenti la même fierté. Beaucoup de Canadiens ont estimé que ce pays qui s'appelle le Canada, que ce pays qui est le nôtre, que ce pays que nous sommes nombreux à avoir adopté dans les années d'après-guerre, que ce pays ne doit pas être détruit.

Le Canada a offert des emplois et des possibilités. Je suis au nombre des personnes qui ont adopté ce pays avec fierté et qui ont été accueillies par les Canadiens. On m'a offert l'occasion de croître et de me développer en mettant mes talents et ma compétence au service de la société canadienne.

Une forte proportion des habitants de nos grands centres urbains ne sont pas nés au Canada. Comme moi, ils viennent d'ailleurs. Ils ont créé une collectivité dynamique, une communauté qui constitue un modèle pour le reste du monde, une société cosmopolite. Nous formons une société variée, multiculturelle, multiraciale, multilingue, multiethnique et multiconfessionnelle qui fait l'envie du monde entier. Le Canada est considéré comme le pays du monde où il fait le mieux vivre. Des changements sont survenus, mais le chef de l'opposition veut nous faire croire que le Canada se résume toujours à deux solitudes. Les Canadiens commencent à en avoir ras le bol d'entendre constamment dénigrer leur pays.

Je voudrais vous faire part ici d'un des nombreux messages que j'ai reçus par télécopieur et qui tombe à point aujourd'hui. Il vient d'une de mes électrices, Christa Jacobs. Elle tient à dire certaines choses. Elle dit: «En 1962, je suis devenue citoyenne canadienne de mon plein gré. J'étais enthousiaste et fière d'appartenir à un pays démocratique composé de 10 provinces et de deux territoires.»

Elle ajoute toute une série de choses, mais je n'en mentionnerai que quelques-unes. Je cite sa lettre parce qu'elle fait valoir que les Canadiens en ont assez d'entendre l'opposition rabaisser constamment notre grande nation. Elle dit: «Les plans de M. Bouchard auraient pour effet de détruire le contrat que j'ai passé avec le Canada en 1962 puisque, si le Québec se séparait, le Canada qui resterait ne serait plus le pays dont je suis devenue citoyenne et où je paie mes impôts. Je me demande ce que pensent de la question les autres personnes qui sont devenues canadiennes de la même façon que moi.»

(1325)

Elle continue en parlant des deux langues officielles: «Ne créez pas deux ethnies officielles. Je parle plusieurs langues. Je peux parler allemand, russe et italien. Je ne crois pas que parler une langue fait de moi quelqu'un de particulier. C'est l'appartenance à un pays qui compte.»

Je tiens encore à souligner que les Canadiens qui suivent nos travaux chaque jour commencent à en avoir assez d'entendre constamment rabaisser leur pays. Elle affirme: «M. Bouchard agit comme le Robespierre de la politique canadienne et, avec son groupe de jacobins modernes, il pratiquerait une forme ou une autre de purification ethno-historique. Plus ça change, plus c'est la même chose.» Elle dit ensuite qu'elle est très déçue et que les Canadiens sont de plus en plus déçus d'entendre le chef de l'opposition rabaisser constamment le pays.


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Nous sommes devenus une société attentive à ses membres, un pays à la fois juste et libre, pacifique et prospère. Les Canadiens qui éprouvent un profond sentiment d'attachement à leur pays commencent à s'impatienter. Beaucoup estiment qu'ils ne sont pas respectés, qu'ils ne sont pas compris, qu'ils ne sont pas désirés. Nous entendons de tels propos chaque jour, et la déception croît.

Le Canada est un modèle pour le reste du monde. Ceux qui ont créé le Canada partageaient un engagement commun pour la liberté, la démocratie représentative et le respect de la loi. Les Canadiens veulent que le gouvernement fédéral garde ses pouvoirs, qu'il reste fort et qu'il continue d'assurer le fonctionnement efficace de l'union économique et des programmes sociaux nationaux.

Il y a très peu de pays du monde où je n'ai pas voyagé. En Afrique du Sud, j'ai vu qu'il était possible d'avoir 11 langues officielles. J'ai vu des gens de divers groupes ethniques et culturels qui essayaient de travailler ensemble pour bâtir un pays en se servant de notre pays, le Canada, comme modèle. On me posait constamment des questions sur notre démocratie. On me demandait comment une personne comme moi, une femme noire qui n'est pas née au Canada et qui parle avec un accent des Caraïbes, avait pu devenir députée au Parlement du Canada, et j'étais fière de dire aux Sud-Africains que cela était possible dans notre pays.

Les Canadiens savent que nous bénéficions d'un certain nombre de programmes sociaux qui reflètent bien notre compréhension de ce qu'est la collectivité. Ces programmes sont mis en oeuvre de façon à permettre aux gouvernements de tenir compte des besoins changeants de la société canadienne. Je travaille actuellement à la modernisation et à restructuration de nos programmes de sécurité sociale. Je peux dire que les propos que tiennent les députés d'en face n'ont souvent rien de constructif.

Dans d'autres pays, les gens risquent leur vie et sacrifient leur sécurité matérielle pour obtenir les libertés que les générations qui nous ont précédés nous ont déjà garanties. Notre sens de la liberté est modéré par notre sens de la justice, de la générosité et de la compassion pour tous. Nous devons rester déterminés à assurer le bon fonctionnement de notre pays et à voir à ce que chaque Canadien soit un élément de notre image nationale.

(1330)

M. Ken Epp (Elk Island): Madame la Présidente, j'ai vraiment apprécié l'intervention que la députée d'en face vient de faire. En tant que jeune député né dans une famille d'immigrants qui a fait oeuvre de pionnier dans l'Ouest, j'éprouve le même amour pour notre pays tout entier.

La question qui se pose réellement ici aujourd'hui, du moins pour la plupart d'entre nous à la Chambre, n'est pas de savoir si nous vivons dans le meilleur pays au monde. Il ne s'agit pas de savoir si nous voulons maintenir les programmes et les caractéristiques qui font notre renommée. Il s'agit en réalité de savoir comment nous allons le faire.

La députée pourrait-elle répondre aussi précisément qu'elle le peut à l'une ou l'autre des questions que nous posons dans notre motion? Quelle vision a-t-elle pour renforcer réellement notre économie? Quelle vision a-t-elle pour équilibrer les budgets? Comment pouvons-nous maintenir les services sociaux et arranger nos affaires de telle façon que nous puissions continuer d'offrir les services que nous aimerions tous promettre?

Je pourrais poursuivre indéfiniment. Quant à notre patrimoine culturel, je le partage. Je suis un Canadien dont la langue maternelle n'était ni l'anglais ni le français. Comme la députée l'a affirmé catégoriquement, nous sommes un pays multiracial, multiethnique et multilingue.

Si nous voulons préserver cela, il faudrait entretenir une réelle vision permettant de donner à tous les Canadiens, y compris les 25 p. 100 dont la langue maternelle n'est ni l'anglais ni le français, un véritable sentiment d'appartenance.

Mme Augustine: Je suis heureuse de répondre, madame la Présidente, car il s'agit de savoir ce qui fait de nous des Canadiens, c'est-à-dire le fait que nous sommes en faveur d'un État fédéral et que nous avons tous besoin de travailler ensemble. Or à la Chambre, on ne voit vraiment pas les Canadiens, quelle que soit leur position sur la question, travailler ensemble pour renforcer l'économie, pour mettre le principe d'équité en pratique, pour assurer tous ces éléments qui composent un pays et participer à toutes ces activités d'édification d'un pays, comme cela devrait se faire.

Nous passons beaucoup de temps à discuter de la question de savoir qui nous sommes et à l'examiner, au lieu de commencer par parler de ce qui fait que nous sommes des Canadiens. Nous abordons toutes les questions pêle-mêle, les droits provinciaux et les droits fédéraux, la Constitution et beaucoup d'autres questions qui reviennent souvent sur le tapis, au lieu de nous concentrer sur ce qui fait de nous des Canadiens, sur ce que nous souhaitons pour notre pays, et d'examiner comment nous pouvons travailler ensemble pour faire en sorte que nous ayons un pays et que nous offrions des réponses à la collectivité canadienne et à ses nombreuses composantes. Voilà la question importante.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil): Madame la Présidente, j'ai entendu la secrétaire parlementaire du premier ministre parler de la frustration des gens du Bloc québécois. À plusieurs reprises, elle a mentionné cette frustration. Je dois lui rappeler qu'en étant ici, nous avons un mandat qui est clair, qui est très clair, qu'il y a eu un cheminement qui s'est passé. Il y a Meech qui a «foiré». Après ça, il y a eu Bélanger-Campeau qui a étudié en profondeur les besoins du Québec et les Québécois se sont prononcés très ouvertement là-dessus. Après cela, le Canada anglais a refusé ce que les Québécois ont demandé cette fois-là. Alors, c'est un échec total.

Plus tard, les Québécois ont élu 54 députés du Bloc québécois ici, à Ottawa. Il me semble qu'on a un mandat qui est très clair. Ce n'est pas un mandat de personnes qui sont frustrées. Nous sommes ici parce que les Québécois veulent que nous y soyons pour défendre leurs intérêts. Il faudrait peut-être que la secrétaire


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parlementaire du premier ministre le comprenne. Si elle ne connaît pas la courte histoire des cinq ou six dernières années, je ne vois pas comment elle peut comprendre le Canada à l'heure actuelle.

Alors, j'aimerais bien qu'on parle de choses telles qu'elles le sont. La réalité, c'est que nous sommes ici, nous avons un mandat qui est clair. Devant les Québécois, nous sommes très à l'aise d'être ici. Les Québécois paient de 25 à 30 p. 100 des impôts du gouvernement fédéral. Nous méritons d'avoir une part de la direction de ce pays en attendant qu'on fasse la souveraineté du Québec.

[Traduction]

Mme Augustine: Madame la Présidente, j'ai parlé des frustrations quotidiennes des Canadiens lorsqu'ils entendent parler, comme l'a dit le député, du mandat clair des bloquistes, relativement à la séparation.

Nous sommes ici pour bâtir un pays. Nous sommes ici pour satisfaire aux besoins économiques actuels. Nous sommes ici pour assurer le bon fonctionnement de nos sociétés ou collectivités. Nous sommes ici pour offrir à tous le genre de société dans laquelle nos enfants trouveront des emplois et des possibilités de prospérer et de s'épanouir.

(1335)

Le fait que les députés d'en face parlent constamment de la séparation en raison de leur mandat, voilà ce dont je parle quand je dis qu'il y a des frustrations. Nous sommes frustrés de cela, à l'instar des Canadiens.

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury): Madame la Présidente, je me réjouis de participer à ce débat pour exprimer mon engagement profond à préserver l'unité canadienne.

Je dois aussi dire que je suis déçu de la façon dont ce débat s'est finalement tenu à la Chambre. Je ne suis pas convaincu que le chef du Parti réformiste n'utilise pas simplement cette conjoncture critique dans l'histoire de notre pays pour marquer des points éphémères sur le plan politique.

Dans sa motion, le chef réformiste parle de la nécessité de définir une vision pour le Canada. Il décrit ensuite une série de mesures possibles qui traduisent sa vision personnelle et celle de son parti.

Ma vision nationale ne s'appuie pas sur les mesures que nous prenons, mais sur les valeurs que nous chérissons. En l'occurrence, il s'agit de la générosité, du respect mutuel et de la responsabilité incombant aux générations et aux différents États, pour n'en nommer que quelques-unes. Les mesures que nous prenons devraient alors refléter les valeurs que véhicule cette vision.

Dans le passé, bon nombre ont commis l'erreur de bâtir un pays uniquement en fonction de la bonne gestion et de l'ordre social, et il n'est pas nécessaire que le Canada répète leur erreur. Cela dit, je reconnais la valeur du régime démocratique, qui me permet d'ailleurs d'exprimer mon opinion sur la question.

D'une certaine façon, je crois que je suis soulagé. La plupart des députés et des Canadiens se réjouissent de pouvoir réaffirmer leur engagement, celui de faire en sorte que notre pays demeure le meilleur endroit où vivre dans le monde, comme l'a déclaré récemment l'ONU, car ni un Canada sans le Québec ni un Québec sans le Canada ne pourraient espérer occuper le même rang sur la scène internationale.

Outre l'abondance évidente de ressources et la richesse relative, notre véritable trésor réside dans notre histoire unique, dans notre capacité d'en arriver à des compromis, de comprendre la position et la perspective des autres, d'aller au-delà de nos intérêts bassement personnels, dans l'intérêt de l'ensemble. C'est ainsi que nous avons évolué.

Consciemment ou non, les Canadiens savent de façon certaine qu'aucun de nous, aucune région, aucune collectivité ne vit seule dans ce pays. Nous ne pouvons ni ne devons prétendre à une forme quelconque de supériorité morale ou culturelle. C'est ce qui fait la grandeur de notre pays; non pas notre richesse, la beauté de notre pays, la vaste étendue de son territoire, notre potentiel inépuisable de développement, mais notre population, l'orientation que nous nous sommes donnée.

Il suffit de jeter un coup d'oeil sur ce qui se passe ailleurs pour comprendre que la lutte entre éléments de notre propre Confédération est à l'image du débat plus large qui se déroule sur tous les continents.

Dans de nombreux pays, les conflits culturels ont été à l'origine d'affrontements sanglants et ont englouti des générations entières. Quel drame, et tout cela, à cause de l'intransigeance. Atterrés, nous regardons les autres, pas nous, qui échouent dans leurs efforts pour trouver la volonté de coexister et même prospérer.

Au Canada, nos valeurs diverses ont été une source d'enrichissement. Nos différences nous ont enseigné la compassion, le respect mutuel, la volonté de connaître et d'accepter les complexités d'autres cultures, d'autres mondes, d'autres points de vue.

Nous acceptons tout cela et nous présentons notre multiculturalisme comme une richesse distinctive. Trop longtemps, nos dirigeants ont été trop timides, craignant que les simples citoyens n'épousent pas le même esprit de compromis, n'aient pas la même générosité, les mêmes objectifs nobles dont je parle.

Mon sentiment est autre. Résultat de leur relative jeunesse, de leur histoire unique et peut-être d'une préoccupation peu naturelle pour la Constitution, les Canadiens ont passé plus de temps que de raison à discuter, à débattre, à définir leur pays, mais c'est ce qu'ils ont fait, et le Canada en sort plus mûr. Il suffit d'examiner ce qui se fait chez nos voisins du Sud pour s'en convaincre. La conception américaine de la nationalité exige des citoyens


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qu'ils se conforment à un ensemble étroitement défini de coutumes, de traditions et de principes.

(1340)

D'aucuns diront que cette conception convenait à une certaine époque, mais qu'elle est maintenant dépassée. Le présent et l'avenir appartiennent à ceux qui pourront profiter de la grandeur et de la diversité du monde et même de notre pays.

Pendant que je me demandais si je devais poser ma candidature aux dernières élections, je me souviens d'avoir regardé le Congrès démocrate qui s'est tenu à Atlantic City. L'un des principaux orateurs à ce congrès a été le sénateur Bill Bradley. J'ai été fasciné d'entendre ce sénateur du New Jersey dire que si les États-Unis étaient devenus une grande puissance à cause de leurs ressources naturelles, il fallait maintenant qu'ils assoient leur puissance sur autre chose parce que l'importance des matières premières allait en diminuant. Il était d'avis que grâce au rétrécissement des frontières du village planétaire les États-Unis maintiendraient leur position sur la scène mondiale à cause du grand nombre de groupes culturels qui disent s'y sentir chez eux.

Je suis partiellement d'accord avec l'analyse du sénateur, mais je rejette sa conclusion. C'est au Canada que les gens venant de différents pays se sentent chez eux. C'est au Canada que les gens peuvent vraiment faire vivre leur culture avec l'aide et l'encouragement des pouvoirs publics.

[Français]

Madame la Présidente, j'ai eu la chance de grandir dans la seule province officiellement bilingue d'un pays bilingue. La plupart de mes amis, et moi-même, valorisons l'ouverture et la protection des droits des minorités, et pour nous les possibilités qui découlent de la diversité constituent un mode de vie. Il faut reconnaître que ma génération d'anglophones du Nouveau-Brunswick est dans l'ensemble unilingue, mais c'est uniquement une question de circonstances. Mes enfants et les autres membres de leur génération sont pour la plupart bilingues. Les luttes et les débats qui ont ponctué notre passé n'ont à leurs yeux plus aucun sens.

[Traduction]

Au début du siècle, le premier ministre et fondateur du Parti libéral moderne a fièrement déclaré que le XXe siècle serait celui du Canada. Nombreux sont les gens plus matérialistes qui considèrent la prédiction de Laurier comme un voeu pieux.

À l'aube du XXIe siècle, où bien des pays du monde sont aux prises avec des luttes ethniques et l'absolutisme idéologique, un choix s'offre à nous. L'isolationnisme et la recherche de boucs émissaires qui vont de pair avec ces luttes ethniques ne sont pas la réponse. Je crois au pluralisme et au bilinguisme, dans notre cas. La générosité de notre pays sera considérée comme la leçon première du XXe siècle. Il n'en tient qu'à nous de servir de modèle de compréhension ou de flexibilité plutôt que de devenir un autre malheureux exemple de pays sectaire.

Certes, nous avons des défis à relever et notre passé n'est pas sans tache. Nous devons enfin offrir aux peuples autochtones la possibilité de profiter pleinement, selon un mode de leur choix, de l'abondance et du confort dont nous jouissons tous. Nous devons remédier aux iniquités qui continuent de nous diminuer tous, que ce soit entre les sexes ou entre les derniers arrivés et ceux qui sont ici depuis des générations.

Nous devons veiller à ce qu'il existe toujours des politiques et des programmes pour protéger et promouvoir les deux langues officielles et prévenir l'assimilation où qu'on vive au Canada.

En outre, nous devons mieux promouvoir encore les valeurs dont je parle. Le racisme existe au Canada, mais j'estime qu'il est dû bien plus à l'ignorance et à la peur qu'à une haine atavique ou à une profonde incompatibilité.

Il ne faudrait jamais sous-estimer le travail et quelquefois la dépense que comporte l'établissement d'un modèle de nation qui exige patience, compréhension et générosité d'esprit. Bref, cela amène tous les Canadiens à faire chacun leur possible.

Illustrons cela par un exemple. Chaque printemps, nous sommes beaucoup à nous adonner au rituel annuel qui consiste à décider des plantes que nous allons faire pousser. Nous parcourons les marchés et les pépinières de la région. Certains d'entre nous, moins optimistes, achètent des fleurs annuelles résistantes, sachant bien que ces plantes requièrent peu de soins. Les plus braves décident chaque année d'acheter et de cultiver des roses et d'autres fleurs aussi délicates. Nous aussi savons qu'elles exigent plus de soins et que les chances de succès sont moins élevées. Au bout du compte, ceux qui ont choisi de cultiver des roses et d'autres fleurs magnifiques auront accompli quelque chose de particulier. Il en va de même pour un pays, si nous avons, par pur hasard ou sous l'effet d'une vision, décidé de cultiver des roses ou non. C'est plus difficile, ça exige plus de soins, plus de patience et de créativité. Mais même la piqûre d'un débat épineux ne réussit pas à nous arrêter dans la poursuite de notre objectif global parce que, au bout du compte, nous avons accompli quelque chose de particulier, et c'est grâce à cet effort constant que la plupart des Canadiens restent inébranlables.

(1345)

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil): Madame la Présidente, j'écoutais le député qui parlait des fleurs et des rêves, mais le Canada, le grand rêve canadien, à mon avis, est passablement amoché.

Encore la semaine passée, alors que j'étais dans l'Ouest canadien, on parlait beaucoup du rêve canadien, mais on ne se rend pas compte de la dette et du déficit annuel qu'on n'arrive pas à contrôler. Nous sommes sur le bord de la faillite et c'est gens-là s'imaginent encore que le pays est le plus riche au monde. On prend une déclaration des Nations Unies qui dit qu'on est au premier rang du standard de vie, mais c'est un standard de vie qu'on obtient à crédit.


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Je l'ai répété plusieurs fois et je le répète encore pour le bien des citoyens qui pensent encore à rêver: Oui, il faut rêver dans la vie, bien sûr, mais il faut rêver d'une façon réaliste aussi, car l'hypothèque a atteint le maximum. Notre maison, avant, était libre d'hypothèque, mais maintenant on est hypothéqué au maximum, même chose pour notre auto. On a encore le même standard de vie, bien sûr, mais on l'a obtenu à crédit. Là, on est sur le bord du précipice et on ne s'en rend pas compte. On continue à rêver.

On pense encore qu'un gouvernement central très fort va pouvoir tout diriger, mais c'est le contraire. Il faut une décentralisation profonde pour que les régions du Canada, dans une grande confédération, avec un gouvernement central peut-être muni de députés, puissent faire des recommandations éventuellement. Je ne sais pas quelle forme cela pourrait prendre, mais il faut une décentralisation très profonde pour faire en sorte que les régions puissent s'épanouir suivant leurs possibilités et les opportunités. Mais le gouvernement fédéral s'entête à vouloir tout centraliser ici, à Ottawa. C'est pour cela que le Canada s'en va vers la faillite. C'est aussi simple que ça.

Arrêtons de rêver. Il y a une réalité qui est là. Et la réalité, c'est qu'il faut un Québec souverain et un Canada souverain. On va travailler très bien ensemble, comme on le fait actuellement sur le plan économique, mais les deux vont mieux performer. C'est ce qu'on vous offre. On vous offre une façon de mieux performer, alors profitez-en.

On vous dit qu'on va mieux performer, mais ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les experts du Québec, ceux de la Commission Bélanger-Campeau. Ils ont décidé, mais pas juste décidé, ils ont étudié la question en interviewant tout le monde, les gens d'affaires, les syndicats, tous les secteurs d'activité économique sociale. Ils ont dit que le Québec, pour s'épanouir à sa juste valeur, avait besoin de 22 ou 23 pouvoirs réels. Cela a été refusé. Alors, arrêtons de rêver. Il y a une réalité qui est là. Faisons un Canada anglais fort et prospère, faisons un Québec fort et prospère et travaillons dans l'unité. On ne veut rien diviser, on ne veut nuire à personne. On veut s'épanouir; on a le droit. Pourquoi nous en empêcher? On veut aussi que vous vous épanouissiez, de la même façon que nous. Alors, arrêtons de rêver et de parler de fleurs et parlons un peu d'argent et d'occasions d'avenir.

[Traduction]

M. Scott (Fredericton-York-Sunbury): Madame la Présidente, je remercie le député de sa question.

Ma réaction immédiate à l'idée que le pays s'en tirerait mieux si le député arrivait à ses fins? Ma réaction immédiate, c'est de songer à la province dont je suis originaire, le Nouveau-Brunswick, et aux 250 000 Acadiens qui ne souscriraient probablement pas à cette déclaration.

Je demanderais l'avis des Nations Unies pour savoir si le Canada «rêve» et celui des centaines de milliers de personnes qui aimeraient bien pouvoir vivre dans ce pays.

En ce qui concerne le rapport entre la question dont il s'agit et le déficit, je ne peux que reconnaître la nécessité de nous occuper de nos finances avec sérieux, ce que nous faisons, je crois. Enfin, j'inviterais les députés qui reviennent constamment à cette question à songer aux programmes qui sont financés et qui ont été financés. Étant un Canadien de l'Atlantique, je sais qu'il y en a au sein du Parti réformiste qui ne sont pas suffisamment sensibles à la nature de ce pays et à l'esprit de générosité dont j'ai parlé. Je n'arrive pas à imaginer comment le pays pourrait s'en tirer mieux, une fois divisé.

(1350)

Mme Deborah Grey (Beaver River): Madame la Présidente, je voudrais simplement dire que je suis extrêmement heureuse de pouvoir participer à ce débat aujourd'hui.

Pour faire suite aux observations du député qui m'a précédée et à propos d'esprit de générosité, n'oublions pas d'où vient la majeure partie de cet argent des contribuables. Elle vient des Canadiens de l'Ouest, qui font preuve de générosité envers le reste du Canada. Que cela soit bien clair.

Je répète que je suis extrêmement heureuse de prendre la parole dans ce débat aujourd'hui. Je traiterai de la partie de notre motion qui dit: «démocratiser davantage nos institutions et nos processus décisionnels». Comme nous sommes à la Chambre mois après mois, nous sommes tous bien conscients de la situation dans laquelle nous nous trouvons et Dieu sait que nous avons besoin d'une réforme démocratique de nos institutions et de nos processus décisionnels.

En outre, il est bien évident que beaucoup de gens à l'extérieur de cette Chambre, du Québec et d'ailleurs, exigent certaines choses qu'ils avaient déjà exigées lors des dernières élections. Il s'agit autant des gens du Québec que d'ailleurs, car ces choses sont aussi importantes pour les uns que pour les autres. Au Québec comme ailleurs, ils veulent une réforme dynamique et constructive de leurs institutions politiques. Ils demandent que les gouvernements les écoutent, les consultent et leur rendent des comptes. Et les Québécois veulent améliorer la qualité d'un gouvernement représentatif dans ce pays.

Nous le savons bien. Madame la Présidente, vous et moi étions ici lors de la dernière législature et nous savons, en raison du débat national au sujet de l'Accord du lac Meech, de l'Accord de Charlottetown et, plus récemment, du démarchage que nous avons fait lors des élections fédérales l'automne dernier, des réunions à l'hôtel de ville et d'autres communications avec nos électeurs, que les gens disaient presque en pleurant: «Il faut faire quelque chose pour démocratiser les institutions et le Parlement.»

Nous tous qui participons à cette 35e législature pouvons répondre à ce désir de réforme de nos institutions politiques. Beaucoup de mes collègues et moi-même avons présenté un certain nombre de propositions qui conduiraient à une réforme démocratique dans cette Chambre.

Comme on l'a mentionné précédemment et comme l'a mentionné il y a quelques instants mon collègue de Calgary-Ouest, ce dont nous avons besoin dans cette Chambre, peu importe la


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province ou la région d'où l'on vient, c'est d'un plus grand nombre de votes libres. Comme nous en avons entendu tellement parler, si les députés veulent influer sur l'élaboration de politiques en comité ou à la Chambre, ils doivent pouvoir penser librement.

Là encore, nous lisons des articles rédigés par certains députés ministériels qui sont assez braves pour dire en comité: «Je ne crois pas que cela soit correct. Peut-être que je voterai contre.» On les prend à part, on leur parle un peu et ils doivent rentrer dans le rang. Ils ne peuvent plus rien dire. Mes collègues de l'autre côté le savent très bien.

Nous voulons veiller à ce qu'un plus grand nombre de votes libres soient autorisés à la Chambre. Nous avons aussi besoin d'un changement d'attitude à l'égard de la motion de censure. Quand mes collègues de la partie ministérielle et moi étions assis sur les banquettes de l'opposition lors de la dernière législature, nous entendions sans cesse répéter que tous les votes sur des mesures législatives ne devaient pas être considérés comme une motion de censure. Comme les choses changent, comme elles deviennent différentes quand on passe de l'autre côté, à une distance de 12 ou 14 pieds!

Il faudrait que le gouvernement et les dirigeants des partis acceptent un changement qui permettrait aux députés de voter dans le sens souhaité par leurs électeurs, sans que cela signifie la chute du gouvernement. Je peux en tout cas vous assurer, au nom du chef de mon parti, qu'il serait prêt à donner son consentement à ses homologues pour permettre cela.

Nous avons aussi besoin de dispositions prévoyant la révocation des députés qui ont perdu ou trahi la confiance de leurs électeurs. Comme les députés le savent, j'ai longuement parlé de cette question à la Chambre. Cela semble en gêner certains, même à présent. Cependant, la révocation permettrait de veiller à ce que chaque député consulte et serve ses électeurs et pas simplement son parti. Si nous pouvons faire quelque chose pour changer l'attitude des Canadiens à l'égard de cet endroit, c'est bien cela.

Nous croyons aussi en la tenue d'élections tous les quatre ans, à des dates prédéterminées, de façon à ce que ça ne coïncide pas nécessairement avec un événement qui jouerait en faveur du gouvernement. Nous avons encore vu cela aux dernières élections où les conservateurs ont pensé que, parce qu'ils avaient cet avantage, ils pouvaient déclencher des élections au moment qui leur semblait le plus opportun. Malheureusement, l'histoire montrera que peut-être, ça a été une erreur.

Cependant, si nous avions des élections tous les quatre ans, à des dates prédéterminées, cela éliminerait le problème d'essayer de penser à la date la plus opportune et de jouer avec les dates.

(1355)

Nous sommes aussi en faveur d'un référendum exécutoire sur les questions nationales et les questions constitutionnelles et morales importantes qui changeraient le tissu social fondamental de notre pays. Nous avons eu un référendum dans notre pays. Naturellement, je me réjouis des résultats obtenus, parce que mon parti est le seul parti politique fédéral à s'être prononcé contre l'Accord de Charlottetown. Il n'y a rien de mal à cela.

La perte du référendum sur l'Accord de Charlottetown par certains députés à la Chambre et les partis qu'ils représentaient a eu un effet très positif. Les habitants de ma circonscription et de toutes les autres circonscriptions du pays, j'en suis certaine, ont eu l'impression qu'on leur avait donné de vrais pouvoirs et qu'ils pouvaient, par leur vote, exprimer leur point de vue, que cela était exécutoire et avait de l'influence.

De même, les initiatives des citoyens sont très importantes. Les gens eux-mêmes peuvent inscrire sur un bulletin de vote, dans le cadre d'un référendum, des questions qui seront traitées au moment des élections. Ne serait-il pas fantastique que les gens sachent qu'ils ont accès à la Chambre et qu'ils ne sont pas simplement représentés par un député qui tient régulièrement les propos suivants, qu'il m'a été donné d'entendre à maintes reprises: «Mon opinion est importante, l'opinion des habitants de ma circonscription est importante, mais au moment du vote, c'est moi qui déciderai.» Rien ne saurait être plus arrogant ou plus loin de la vérité. Si nous voulons démocratiser la Chambre, c'est une chose qui est absolument essentielle.

Les réformistes préconisent la réforme du Sénat. Nous parlons d'un Sénat triple E, élu par le peuple, où les provinces seraient représentées également, ce qui permettrait une meilleure représentation des intérêts régionaux. Il se pourrait qu'il y ait ici des gens du Québec, peut-être même de l'Ontario-les deux plus grosses provinces-qui disent ceci: «Nous avons plus de sénateurs, donc nous avons le pouvoir absolu, puisque nous sommes majoritaires au Sénat.» Il est important que toutes les provinces comprennent que chacune d'elles n'est que l'un des dix enfants de la Confédération et qu'elle occupe une part égale au sein de la Confédération.

Rien ne peut justifier, à mes yeux, que ma province, l'Alberta, ait six sénateurs et que le Québec et l'Ontario en aient vingt-quatre. Il y a quelque chose qui ne va pas dans ce calcul. Le Québec est important au sein de la Confédération, mais nous devrions modifier le Sénat.

Bon nombre de mes collègues pensent qu'il faudrait abolir le Sénat. Encore récemment, nous avons vu que le Sénat était important, qu'il était, à vrai dire, indispensable. Sa décision de rejeter le projet de loi C-18, qui suspend l'application de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, est un bon exemple du second regard, plus sobre, qu'il peut donner à une mesure législative, à une mauvaise mesure législative, dans ce cas-ci. Nous avons pu voir les ministériels reconnaître qu'elle était mauvaise. De telles interventions sont très rares, de la part des sénateurs, et ne sont pas très bien accueillies, habituellement, parce que les sénateurs ne sont pas élus.

J'ai cependant réussi à prouver ce que je voulais prouver, c'est-à-dire que le Canada est une fédération qui se compose de provinces égales et qu'il faudrait tenir compte de cette réalité au Sénat, car les sénateurs jouent effectivement un rôle. Si leur cause était un peu plus légitime, ils seraient mieux placés pour rejeter les mauvaises mesures législatives et faire contrepoids à certaines des décisions qui sont prises à la Chambre des communes.

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En tant que réformistes, nous estimons que l'adoption de ces réformes politiques et démocratiques mènerait à une participation plus active des Canadiens ordinaires au processus législatif. Elle permettrait de relever la qualité du débat et des lois du Parlement et d'améliorer encore davantage la démocratie canadienne.

On a dit et redit aujourd'hui à quel point il faisait bon vivre au Canada. Nous sommes d'accord. Tous les députés reconnaîtront que le Canada est un pays magnifique. Pourtant, de nombreuses personnes, notamment les députés qui siègent à ma droite, veulent renoncer à cela. En tant que Canadienne de l'Ouest et membre de la famille canadienne, je me pose évidemment la question suivante: que veut le Québec?

Une équipe de recherchistes stagiaires de l'Université du Michigan tente justement de répondre à cette question: qu'attend le Québec du Canada, s'il décide d'y rester?

Mes collègues disent qu'ils représentent tout le Québec, ce qui n'est pas plus vrai que de dire que mon parti représente tous les électeurs de l'Ouest ou que des députés ministériels représentent tous les Canadiens parce qu'ils forment le gouvernement. Des électeurs ont donné leur appui au Bloc et nous les respectons, mais, comme on l'a dit plus tôt, nombreux sont les gens du Québec et d'ailleurs qui disent que le Canada est le pays où il fait le mieux vivre. Nous devons faire fond sur nos réussites.

Nous oublions souvent la route longue et difficile que nous avons parcourue ensemble au sein de la Confédération. Nous nous rappelons rarement nos grandes réussites communes. En fin de compte, la question que nous devrons nous poser à la fin du débat actuel, et je suis très heureuse qu'il ait lieu, est la suivante: si les députés sont prêts à s'unir et à démocratiser nos institutions, si nous sommes tous prêts à collaborer, à reconnaître que notre pays est un pays magnifique et que nous devons aller de l'avant, le Québec voudra-t-il rester au sein du Canada? Si nous unissons tous nos efforts et travaillons en ce sens, je crois que le Québec dira oui. Nous lui proposons de reconnaître que notre pays sera plus fort et meilleur si nous demeurons unis, au lieu d'opter pour la division en supposant, de façon très hypothétique, que cette situation serait meilleure.

(1400)

Mon temps de parole tire à sa fin. Il nous reste une minute avant les déclarations orales. Je répondrai aux questions et observations immédiatement après. Toutefois, je tiens à donner à mes collègues l'assurance que nous voulons édifier un nouveau Canada. Nous leur offrons, à eux et à leurs électeurs, d'y travailler avec nous.

Le Président: Il y aura évidemment des questions lorsque nous reprendrons le débat après la période des questions. Nous passons maintenant aux déclarations de députés.


4941

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA BATAILLE DE NORMANDIE

M. David Iftody (Provencher): Monsieur le Président, comme nous le savons, il y a cinquante ans hier, le jour J marquait le début de la grande libération de l'Europe et même du monde.

C'est avec grande fierté que j'ai représenté le gouvernement du Canada lors d'une cérémonie de dépôt de gerbes le week-end dernier au Manitoba. J'ai parlé à cette occasion du courage de ceux qui ont donné leur vie pour libérer le monde de toute tyrannie et oppression.

J'ai aussi rappelé ces soldats, comme Irving Scott et Alex Tarasenko, de Provencher, qui tout jeunes, furent parmi les premiers à débarquer sur les plages de Normandie et furent parmi les premiers à affronter les balles et les mines terrestres.

Il est difficile d'imaginer l'ampleur du fardeau que nous avons imposé à ces jeunes Canadiens en leur demandant d'accomplir cette tâche en notre nom.

Merci à vous MM. Scott et Tarasenko. Merci à vous tous qui avez participé au débarquement du jour J. Nous vous en sommes reconnaissants et nous n'oublierons jamais votre contribution.

* * *

[Français]

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ENVIRONNEMENT

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, à titre de porte-parole de l'opposition officielle, il me fait plaisir de souligner la Semaine nationale de l'environnement.

La protection de notre environnement doit se faire dans nos gestes quotidiens. Les projets et les différentes activités de chaque palier de gouvernement doivent s'inscrire dans la perspective du développement durable. Notre société doit relever ce défi important et la Semaine de l'environnement est le moment propice pour réfléchir sur les moyens d'action qui doivent être mis de l'avant pour assainir notre milieu.

Il faut souligner ici le travail de milliers de personnes regroupées au sein d'organismes environnementaux ou agissant dans les écoles et dans les centres de loisirs, qui font la promotion de l'environnement. Leur action est essentielle et nous devons le reconnaître.

* * *

[Traduction]

LA SEMAINE DE L'ENVIRONNEMENT

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, puisque nous célébrons maintenant la Semaine canadienne de l'environnement, il est opportun de réfléchir à notre chance.


4942

Si la Terre n'avait que quelques pieds de diamètre et qu'elle flottait au-dessus d'un champ quelque part, les gens viendraient de partout pour voir un tel phénomène. Ils seraient émerveillés par ses grandes étendues d'eau, ses creux et ses bosses, la fine couche de gaz l'entourant et l'eau en suspension dans ce gaz. Ils s'émerveilleraient aussi des créatures évoluant à la surface de ce globe et nageant dans ses eaux. Les gens considéreraient cette sphère comme sacrée et la protégeraient farouchement.

Cette boule constituerait la plus grande des merveilles; les gens l'imploreraient pour obtenir la guérison, la connaissance et la beauté et chercheraient à savoir comment elle a été créée. Ils la vénéreraient et la défendraient au prix même de leur vie. Si seulement le diamètre de la Terre ne mesurait que quelques pieds.

Participons activement à la Semaine de l'environnement.

* * *

L'ÉDUCATION

Mme Marlene Catterall (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor): Monsieur le Président, vendredi dernier, le Président a signalé à la Chambre qu'un groupe de jeunes bien spécial était présent à la tribune.

Ces élèves de l'école secondaire Ridgemont participent au programme d'expérience de travail intitulé «Associés pour progresser». Ce programme a été créé en 1986 grâce, en bonne partie, au travail acharné de l'une de mes électrices, Mme Patricia Mainwaring.

Mme Mainwaring enseigne à l'école secondaire Ridgemont, qui se spécialise dans l'aide aux élèves ayant un handicap intellectuel ou des troubles du développement. Elle a su voir en ses élèves des personnes capables de se rendre utiles en contribuant de différentes manières au travail que nous accomplissons à la Chambre des communes.

Avec l'aide de bénévoles, ces jeunes ont appris à faire beaucoup de choses. Ils ont aussi acquis plus d'indépendance et peuvent maintenant être fiers d'eux-mêmes.

Quand j'enseignais à l'école secondaire Ridgemont, il y a 30 ans, ces élèves n'auraient même pas pu être intégrés à notre réseau scolaire. Maintenant, ils sont intégrés à la structure du Parlement et contribuent à la tâche de gouverner le pays. Je félicite Mme Mainwaring pour le bon travail qu'elle a réalisé.

* * *

(1405)

L'AVIATEUR BILLY BISHOP

M. Ovid L. Jackson (Bruce-Grey): Monsieur le Président, je voudrais informer les députés de cette Chambre que samedi dernier, le 4 juin, j'ai assisté à une courte cérémonie tenue au lieu de naissance de Billy Bishop, à Owen Sound. L'édifice où il est né est maintenant un musée dédié à la mémoire du soldat canadien le plus décoré; il a reçu la première Croix de Victoria du Canada pour ses exploits aériens.

Lors de la cérémonie, un représentant de la Société canadienne des postes, M. Tom Creech, a annoncé qu'un timbre serait émis en l'honneur de Billy Bishop et dévoilé à Owen Sound le 12 août de cette année.

Il est fort approprié d'émettre ainsi un timbre pour rendre hommage au pilote qui, à la fin de la Première Guerre mondiale, avait descendu plus d'avions ennemis que tout autre pilote britannique.

Les restes de Billy Bishop sont inhumés au cimetière Greenwood de Owen Sound, où sont aussi enterrées les dépouilles de deux autres décorés de la Croix de Victoria, le soldat Thomas Holmes et le lieutenant-colonel David Currie qui a déjà été, je crois, gentilhomme huissier de la Verge noire ici à la Chambre.

J'ai mentionné le nom de M. Currie hier et on l'avait mal orthographié; j'espère qu'on corrigera la graphie de son nom et de celui de sa femme, aussi originaire de Owen Sound, qui habite maintenant ici à Ottawa.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

M. Larry McCormick (Hastings-Frontenac-Lennox and Addington): Monsieur le Président, récemment, la ministre de l'Environnement et le ministre de l'Agriculture ont annoncé dix projets de partenariat en Ontario. Ces projets devaient promouvoir des pratiques agricoles écologiques qui seraient bénéfiques aux habitats du poisson et des espèces sauvages et pourraient rétablir leur équilibre normal.

La circonscription d'Hastings-Frontenac-Lennox and Addington est fière de collaborer au plan vert Canada-Ontario en matière d'agriculture. Au cours des trois prochaines années, ce plan injectera 1,8 million de dollars dans des projets pilotes, dans le cadre du programme de préservation des terres humides et boisées et des espèces sauvages.

Je suis très heureux que l'association Canards illimités, les agriculteurs et les propriétaires terriens de Lennox and Addington participent à ce projet de partenariat.

J'ai également le plaisir d'annoncer que les services de protection de la nature de Napanee participeront aux projets pour les sites de Little Creek, Selby et Wilton Creek, qui prévoient la construction de brise-vents et de rideaux-abris, une reforestation, des rangées de clôtures, le retrait de terres fragiles, le clôturage de pâturages pour le bétail et la stabilisation des berges.

En assurant son appui au plan d'assainissement de la baie de Quinte, le gouvernement permettra au programme pour la préservation des terres humides et boisées et des espèces sauvages d'atteindre ses objectifs.

* * *

[Français]

LES FRANCO-ONTARIENS

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, lors de l'assemblée annuelle de l'ACFO en fin de semaine dernière, la ministre de la Santé a semé la consternation et a embarrassé les 200 Franco-Ontariens participants. Tous ont pu prendre connaissance des propos irréfléchis de la ministre, quali-


4943

fiant les Franco-Ontariens de niaiseux. Tous ont pu attester du manque de sens démocratique de la ministre qui qualifiait le chef du Bloc québécois de traître à son pays. Plusieurs ont été choqués par son discours simpliste, faisant peu de cas de la liberté de jugement des Franco-Ontariens.

Force est de constater qu'à travers cet épisode, la ministre de la Santé est devenue gênante. Laissons aux Franco-Ontariens le soin d'apprécier le discours d'ouverture du Bloc québécois. Nous avons confiance en leur jugement.

* * *

[Traduction]

L'UNITÉ NATIONALE

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre): Monsieur le Président, en tant que Canadiens nous tenons parfois notre histoire pour acquise. Je me suis aperçu que c'était aussi mon cas.

Cette fin de semaine, ma femme et moi avons assisté à deux événements qui m'ont fait réaliser que nous devons prendre le temps de nous remémorer notre passé. Le premier, bien sûr, était les services commémoratifs du débarquement en l'honneur des Canadiens morts au combat pour défendre notre avenir et notre liberté.

Le deuxième événement était le spectacle son et lumière qui se donne ici, sur la colline du Parlement, et qui traite remarquablement notre histoire, notre patrimoine et notre culture. J'ai été bouleversé par ce spectacle magique sur la colline du Parlement, notre symbole national de démocratie et de patriotisme. Je pense que l'on retrouve ce sentiment de fierté d'être Canadien dans tout le pays, même dans les coins les plus reculés. Nous sommes tous unis dans nos coeurs. Le fait d'être Canadien est ressenti avec émotion.

En regardant et en écoutant cette recréation du développement du Canada, ma femme et moi avons éprouvé un grand sentiment de joie. Nous avons été profondément touchés et je sais que tous les Canadiens partagent notre sentiment. Nous devons vaincre toutes les menaces contre l'unité et mettre un terme à cette idée que nous pourrions être autre chose qu'une nation unie.

* * *

L'UNIVERSITÉ TRENT

M. Peter Adams (Peterborough): Monsieur le Président, pour marquer le 25e anniversaire de son programme d'études autochtones, soit le plus ancien au Canada, l'Université Trent a décerné des diplômes honorifiques à trois Canadiens autochtones de renom. Un des récipiendaires était l'aîné mohawk Ernie Benedict, qui a collaboré à la fondation du North American Indian Travelling College qui, grâce à l'enseignement qui y est dispensé, aide à préserver les traditions culturelles des peuples autochtones. Le collège se trouve sur l'île Cornwall, en Ontario.

Douglas Cardinal, architecte responsable du Musée canadien des civilisations et de bien d'autres structures au Canada et à l'étranger, a aussi reçu un diplôme honorifique. Né en Alberta, il y a passé une grande partie de sa vie avant de déménager son bureau à Ottawa.

(1410)

La troisième récipiendaire est Rosemarie Kuptana, présidente de l'organisme Inuit Tapirisat du Canada, la voix des Inuit canadiens. Madame Kuptana a travaillé dans le Nord auprès de la Société Radio-Canada ainsi que de la société Inuit Broadcasting. C'est une personnalité marquante dans le domaine des affaires autochtones, tant à l'échelle nationale qu'internationale.

Nous félicitons ces Canadiens remarquables. Nous félicitons également le département d'études autochtones de l'Université Trent pour le leadership qu'il a manifesté dans le milieu universitaire pendant 25 ans.

Monsieur le Président, je voudrais féliciter le député de Winnipeg-Nord et sa femme à l'occasion de la naissance de leur fils.

* * *

LE SONDAGE DES ÉLECTEURS

M. Tony Valeri (Lincoln): Monsieur le Président, j'ai le grand plaisir d'informer la Chambre des communes que des centaines de ménages de ma circonscription ont répondu à mon questionnaire maison. L'opinion des Canadiens de Lincoln est importante et je tiens à ce que mes électeurs sachent que leur représentant est à l'écoute.

Il est on ne peut plus clair que les habitants de Lincoln veulent que la réduction du déficit figure au nombre des principales priorités du gouvernement. Ils veulent que le gouvernement réduise ses dépenses et ses subventions aux sociétés d'État.

En tant que représentant de Lincoln, je partage les préoccupations et les déceptions de mes électeurs. Je suis encouragé de voir que le gouvernement a décidé de promouvoir la responsabilité et la prudence en matière financière.

Le gouvernement va continuer à réduire son coût de fonctionnement, comme l'exigent les électeurs de Lincoln, et je ferai tout mon possible pour que nous soyons un bon gouvernement, comme nous nous le proposons. Je vais continuer à sonder l'opinion des électeurs de Lincoln et je m'empresserai d'en faire part à mes collègues de la Chambre des communes.

* * *

LA SEMAINE DE L'ENVIRONNEMENT

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est): Monsieur le Président, je veux aujourd'hui souligner que le premier jour de la Semaine de l'environnement, le dimanche 5 juin dernier, le gouvernement fédéral a publié un rapport de mi-parcours sur le Plan d'action du Fraser.

Le fleuve Fraser est la clé de la prospérité socio-économique et environnementale actuelle et future des Canadiens de la Colombie-Britannique. Je suis heureuse de faire savoir que la mise en oeuvre du plan, dont les principaux objectifs sont la dépollution, le rétablissement de la productivité et la mise en place d'un système de gestion garantissant la santé à long terme du bassin du Fraser, se déroule très bien, et que l'on peut observer des progrès réels.

Cependant, nous n'en continuons pas moins de lutter pour atteindre tous les objectifs du plan. Cela nécessite une étroite collaboration avec tous les groupes du bassin du Fraser, dont les


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groupes autochtones, les gouvernements provincial et municipaux, l'industrie et les groupes de citoyens locaux.

* * *

[Français]

LA VICE-PREMIÈRE MINISTRE

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, à nouveau hier, la vice-première ministre a été incapable de s'élever à la hauteur de ses responsabilités. Elle a affirmé: «It hurts me to see Mr. Bouchard putting his wreath before the Cenotaph today ».

Je signale d'abord à la vice-première ministre que la couronne a été déposée par la députée de Québec, dont le père, Léon Gagnon, a participé aux combats de la Normandie et combattu en Europe, de 1939 à 1945, pour la liberté et la démocratie.

Le sens de la dignité la plus élémentaire aurait dû inciter la vice-première ministre au respect de la douleur des autres. Une députée doit pouvoir honorer la mémoire de son père même si la vice-première ministre ne partage pas ses opinions politiques.

Le courage et le sacrifice de nos aînés sont un patrimoine commun et personne ne peut le récupérer à des fins partisanes. L'événement souligné hier appartient à l'histoire collective des Québecois et des Canadiens de toute allégeance. Le Québec ne reniera jamais cet héritage, peu importe ses choix politiques.

* * *

[Traduction]

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley): Monsieur le Président, j'ai entendu certains députés à la Chambre qui ont l'air de s'être laissés gagner par la stratégie du Bloc québécois.

Le Bloc semble avoir réussi à adoucir son image de parti séparatiste aux yeux de certains députés. Durant les débats, les déclarations et la période des questions, certains députés préfèrent employer les termes souveraineté et souverainiste au lieu des termes séparation et séparatiste, qui sont plus justes.

Je prie instamment tous les députés de la Chambre qui s'opposent catégoriquement à la destruction du Canada de montrer qu'ils comprennent bien l'objectif ultime du Bloc québécois en traitant dorénavant les députés de ce parti de séparatistes.

Faisons savoir clairement aux députés du Bloc que leur choix de termes ne les aidera pas à tromper qui que ce soit à la Chambre ni au Canada.

(1415)

LE TEMPLE CANADIEN DE LA RENOMMÉE MÉDICALE

Mme Sue Barnes (London-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais signaler à la Chambre que l'installation des dix premiers lauréats élus au Temple canadien de la renommée médicale a eu lieu le vendredi 27 mai 1994 à London, en Ontario.

L'occasion est bien choisie pour rendre hommage au Dr Charles Drake, un neurochirurgien de London de réputation internationale, et aux neuf autres éminents récipiendaires de cette distinction.

Leurs réalisations remarquables dans leur domaine respectif et leurs contributions à la médecine en général leur ont valu d'entrer au Temple canadien de la renommée médicale.

Ces Canadiens sont arrivés au pinacle de leur profession et ont effectué des découvertes capitales dans leur domaine de compétence, contribuant ainsi au progrès de la science. Ils ont également contribué à la compréhension de la maladie, ce qui a permis une amélioration de la santé générale des gens partout dans le monde. Nous les remercions de leur travail et nous leur en rendons hommage.

* * *

LA SEMAINE NATIONALE DES TRANSPORTS

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest): Monsieur le Président, c'est la Semaine nationale des transports. Étant président du Comité permanent des transports, j'ai le plaisir de signaler l'excellence des centaines de milliers d'hommes et de femmes qui voient au progrès de notre industrie des transports.

Les changements qui bouleversent le monde entier continuent d'influer sur notre industrie des transports. Pour relever ces défis, le gouvernement et l'industrie doivent scruter l'avenir et harmoniser leurs efforts afin de stimuler notre compétitivité et le renouveau économique.

Les députés seront sans doute heureux d'apprendre que, vendredi dernier, à Thunder Bay, l'industrie a remis ses prix d'excellence.

Si j'avais le temps, j'énumérerais tous ceux qui ont reçu un prix d'excellence. Pour l'heure, qu'il suffise que je mentionne le nom de ceux qui ont reçu le prix de bravoure: il s'agit de M. Mervyn Peever de Prince George, en Colombie-Britannique, un chef de train qui a risqué sa vie pour sauver une petite fille de 3 ans qui se trouvait sur la voie d'un train de marchandises; et de M. André Fréchette, un camionneur de Tracy, au Québec, qui a sauvé deux personnes d'un autobus en flammes.

Dans le cadre de la Semaine nationale des transports, je félicite tous les gens qui assurent le bon fonctionnement du système de transports canadien 365 jours par année, 24 heures sur 24.

* * *

LE JOUR J

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends aujourd'hui la parole pour rendre hommage à un groupe d'anciens combattants vaillants et courageux qui ont participé, le week-end dernier, aux célébrations entourant la commémoration du jour J.

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À titre de membres du régiment des anciens combattants parachutistes établi par l'Association internationale des anciens combattants aéroportés, ils ont en effet organisé un vaste exercice de parachutage dans la capitale nationale et la région environnante. C'était un événement excitant à observer.

Je suis certain que les anciens combattants et tous les Canadiens ont été touchés par cette commémoration spectaculaire de l'arrivée des Alliés en Normandie.

L'exercice de parachutage a été organisé par le capitaine Glen Blumberg, électeur de Markham et directeur de la section canadienne de l'Association internationale des anciens combattants aéroportés.

Grâce à ses efforts, des parachutistes des trois principaux pays ayant pris part à l'opération, soit le Canada, le Royaume-Uni et les États-Unis, ont participé au parachutage. Des représentants de nos autres Alliés de la Seconde Guerre mondiale ont également participé à l'événement.

Au nom de tous mes collègues du Parlement, je félicite le capitaine Blumberg, l'ancien combattant. . .

_____________________________________________


4945

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, après avoir annulé, en avril, la Conférence provinciale-fédérale des ministres de la Sécurité du revenu, le ministre du Développement des ressources humaines a aussi reporté le dépôt de son plan d'action sur la réforme des programmes sociaux, pourtant prévu pour la fin d'avril. Et à quelque 15 jours de la fin de la session, le gouvernement, en butte à l'opposition des provinces, n'a toujours pas dévoilé ses intentions en matière de réforme des programmes sociaux.

Je demande à la vice-première ministre de nous indiquer si le gouvernement entend rendre public son plan d'action sur la réforme des programmes sociaux avant l'ajournement de la Chambre, ou s'il s'apprête plutôt à l'annoncer après l'ajournement des travaux, de façon à éviter d'en débattre, ici, à la Chambre?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, le travail du ministre des Ressources humaines va très bien. En effet, cette semaine, il a pu rencontrer, en Europe, des délégués d'autres pays qui sont en train de revoir leurs systèmes sociaux, et on s'attend qu'il rende bientôt public son rapport et son plan d'action.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, c'est une bonne nouvelle! Le ministre, qui ne réussit pas à rencontrer ses vis-à-vis provinciaux, au Canada, rencontre des ministre européens. Excellente nouvelle!

Devons-nous comprendre qu'en raison des objections des provinces au projet fédéral, aucune nouvelle date n'a été fixée pour la tenue de la Conférence fédérale-provinciale de ces ministres, annulée en avril dernier, et qui devait porter sur la réforme des programmes sociaux?

(1420)

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, j'espère que le chef de l'opposition ne veut pas laisser croire à la Chambre que le ministre du Développement des ressources humaines ne doit pas parler avec ses homologues de l'OCDE.

Je sais que le chef de l'opposition a d'autres plans pour son pays mais je sais que le ministre du Développement des ressources humaines est bien mieux accueilli en Europe que le chef de l'opposition quand il y est allé, il y a quelques semaines.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, je pense que tous les Canadiens et tous les contribuables vont être ravis d'apprendre que le ministre est en Europe pour rencontrer ses homologues européens, mais cependant, ce n'est pas en Europe que le plan va se faire, ce n'est pas en Europe qu'on va convaincre les premiers ministres des provinces du Canada que le plan est acceptable. C'est ici que cela se fait.

Monsieur le Président, est-ce que la vice-première ministre reconnaît que l'impasse perdure entre Ottawa et les provinces dans le dossier de la réforme des programmes sociaux, parce que, comme dans le cas de la santé, les provinces refusent de faire les frais du désengagement financier du gouvernement fédéral qui réduit son déficit sur leur dos, alors qu'en même temps il veut les contraindre à respecter les normes nationales?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, c'est un autre exemple malheureux de la politique du chef de l'opposition qui se promène toujours avec deux poids deux mesures. Cela ne lui semble pas incohérent qu'il y a deux semaines, il se soit promené à Paris pour discuter de la séparation du Québec? Mais le fait que le ministre du Développement des ressources humaines soit en Europe pour discuter des ressources humaines, c'est tout à fait logique et on a déjà déclaré que le plan d'action sera présenté au public canadien d'ici peu de temps.

* * *

LES MÉDICAMENTS EXPÉRIMENTAUX

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, un reportage de la télévision de Radio-Canada nous apprend que deux enfants ont eu des réactions qui ont mis leur vie en danger après avoir reçu de l'Hôpital Sainte-Justine un médicament expérimental, l'ALG, approuvé par Santé Canada. Ce médicament expérimental n'a pourtant jamais été approuvé ni autorisé à l'exportation par les autorités américaines. Ce médicament fait


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d'ailleurs l'objet d'une enquête criminelle après avoir provoqué la mort de deux personnes aux États-Unis.

Comment la ministre de la Santé peut-elle justifier la décision de son ministère d'autoriser l'usage de l'ALG, alors que ce médicament expérimental à hauts risques n'a jamais été approuvé et autorisé à l'exportation par les États-Unis depuis sa mise au point au début des années 1970?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, il est entendu que je vais m'informer du cas en question. Je n'ai pas les détails. Si vous voulez, je suis prête à vous donner toutes les informations nécessaires que je pourrai obtenir. Si vous avez des informations à me communiquer, faites-les-moi parvenir.

Le Président: Avant de donner la parole au député de Roberval, je vous demanderais, chers collègues, de toujours vous adresser à la Présidence.

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, avec plaisir, comme je le fais d'habitude, d'ailleurs.

Monsieur le président, par votre entremise, je me permettrais de suggérer à la ministre d'écouter les nouvelles de Radio-Canada où il a été question de ce cas aujourd'hui. Je voudrais du même souffle lui demander si elle peut s'engager, par la même occasion, sur les circonstances qui entourent la décision de son ministère d'autoriser l'usage de ce médicament dangereux dans onze hôpitaux canadiens, et reconnaît-elle que le système actuel d'autorisation de médicaments souffre de très graves lacunes puisque Santé Canada n'effectue aucun contrôle ou suivi sur les effets d'un médicament expérimental après l'avoir autorisé?

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, j'aimerais avoir le temps d'examiner ce cas précis, car je ne dispose pour l'instant d'aucun renseignement à ce sujet.

Permettez-moi de rappeler à la Chambre que les scientifiques et les agents de Santé Canada sont très prudents lorsqu'il s'agit de médicaments expérimentaux. Je suis convaincue qu'ils feront tout en leur pouvoir pour garantir l'efficacité des produits distribués au Canada.

* * *

(1425)

LE COMMERCE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre.

La ministre sait que les ministres du Commerce du Canada se sont rencontrés pour discuter des moyens de libéraliser les échanges à l'intérieur du Canada. Diverses associations commerciales ont avancé qu'il existait plus de 500 obstacles au commerce, qu'ils nous coûtaient 6 milliards de dollars et faisaient disparaître des emplois.

Le gouvernement fédéral envisage-t-il d'intervenir plus activement, de prendre des initiatives pour abattre les barrières au commerce interprovincial si les ministres des provinces ne réussissent pas à faire plus qu'effleurer le problème?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, l'optique globale adoptée par le ministre de l'Industrie, qui a mené les débats à l'échelon fédéral sur ces questions, a permis de faire beaucoup plus qu'effleurer le problème. Le ministre reçoit d'excellentes réactions de ses homologues provinciaux dans des domaines allant de la protection de l'environnement à la suppression d'un certain nombre de ces 500 obstacles et plus qui entravent le commerce interprovincial.

Nous avons bon espoir que, à la fin de juin, à l'expiration du délai que le ministre et ses collègues provinciaux se sont imposé, le gouvernement libéral pourra se vanter d'un nouveau succès.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, il semble que le bilan de ces échanges soit que les ministres se présentent avec des listes d'exceptions longues comme le bras.

La Constitution autorise le gouvernement fédéral à réglementer le commerce intérieur et extérieur et lui donne certains moyens pour lutter contre les obstacles internes au commerce. L'article 121 de la Constitution stipule: « Tous articles du crû, de la provenance ou manufacture d'aucune des provinces seront, à dater de l'union, admis en franchise dans chacune des autres provinces. »

Voici ma question à la vice-première ministre: que fait le gouvernement fédéral pour exercer les pouvoirs que lui confie la Constitution et notamment pour appliquer l'article 121 afin de libéraliser les échanges au Canada?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, la question du député montre qu'il ferait bien de tout reprendre depuis le début, en matière constitutionnelle.

Ce matin, ce même député a reproché au gouvernement fédéral d'être trop autoritaire dans un certain nombre de domaines et il a souhaité que nous nous départissions de nos responsabilités au profit des provinces. Cet après-midi, il nous dit que nous n'intervenons pas assez.

En fait, le ministre de l'Industrie a opté pour la négociation. Il a réuni toutes les parties et espère conclure un accord complet de libre-échange d'ici la fin de juin.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai une autre question supplémentaire.

Les barrières internes au commerce sont dressées par les gouvernements provinciaux et ils nuisent aux entreprises et aux consommateurs. Le gouvernement fédéral a choisi comme solution de réunir les provinces, responsables du problème, et de leur demander de le résoudre.

Le gouvernement envisage-t-il de réunir les entreprises et les consommateurs qui souffrent des conséquences de ces entraves et de leur donner les moyens de les combattre, par exemple en


4947

mettant en place pour le Canada un mécanisme de règlement des différends commerciaux semblable à celui qui est prévu dans l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, les négociations se poursuivent au moment où je parle. L'un des grands objectifs du ministre de l'Industrie est justement de créer un dispositif de règlement rapide des différends.

Ce qui distingue notre optique de celle que le chef du Parti réformiste préconise est que nous essayons de dégager un consensus pour travailler avec les provinces, pas contre elles.

* * *

[Français]

LE CRTC

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, hier, le CRTC a rendu une décision dans le dossier du canal de nouvelles continues en français. Ce nouveau service a été attribué à la Société Radio-Canada. Cependant, l'accès à ce service pour les francophones hors Québec sera discrétionnaire et dépendra du bon vouloir des câblodistributeurs.

Ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien. Ne considère-t-il pas comme tout à fait inéquitable la décision rendue par le CRTC qui ne garantit d'aucune façon que les communautés francophones et acadienne du Canada pourront bénéficier du canal de nouvelles continues en français, alors que depuis plusieurs années, elles soutiennent financièrement, par leur abonnement, le canal anglophone équivalent Newsworld?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, j'ai bien pris note des décisions du CRTC et je comprends le désappointement des communautés francophones et acadienne. Je signalerais par contre qu'il existe des procédures pour faire appel et que cette procédure, essentiellement, implique le gouvernement du Canada, puisque c'est au gouvernement du Canada que l'appel se fait.

(1430)

Je serai moi-même impliqué dans l'appel, et je ne peux pas être juge et partie. C'est pour ça que je devrai limiter mes commentaires à ceux que je viens de faire.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, je voudrais quand même avoir une réponse très claire du ministre du Patrimoine canadien.

Est-ce à dire que le ministre du Patrimoine canadien entend personnellement intervenir auprès du Conseil des ministres pour que la décision du CRTC soit revue? Est-ce la signification de ce qu'il vient de me dire, un peu dans son langage d'ambassadeur, je dirais?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je remercie notre collègue de faire allusion à mes anciennes incarnations.

Ce que je faisais n'était strictement que d'expliquer les procédures qui doivent être respectées. L'initiative d'un appel doit venir des communautés concernées; l'initiative ne vient pas du gouvernement. Et comme je l'ai expliqué, le gouvernement devenant, à ce moment-là, juge, il ne peut pas être juge et partie au départ de la procédure.

* * *

[Traduction]

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général.

Dimanche, les agents de la GRC de Burnaby ont été mêlés à une fusillade avec David Barlow. Heureusement, personne n'a été tué au cours de l'incident. Toutefois, David Barlow est responsable de la mort de deux autres personnes.

En 1972, il a été reconnu coupable du meurtre d'un policier de Floride et condamné à la peine de mort, laquelle a été par la suite commuée en réclusion à perpétuité. En 1980, Barlow est rentré au Canada où il a été reconnu coupable d'un meurtre commis au Nouveau-Brunswick, en 1987.

Le ministre veut-il expliquer à la population canadienne comme il se fait qu'un individu comme Barlow soit considéré comme peu dangereux et puisse hanter de nouveau nos rues?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, je trouve que c'est une situation préoccupante. J'ai demandé qu'une enquête complète soit effectuée et qu'un rapport détaillé soit préparé sur toute cette affaire. Lorsque le rapport sur cette situation préoccupante me sera remis, je serai heureux de communiquer l'information à ma collègue.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, au rythme où se succèdent les enquêtes nationales sur les problèmes que pose le système de justice, le ministre remettra davantage de Canadiens au travail que le programme d'infrastructure.

Quoi qu'il en soit, à propos de l'incident concernant Barlow, le premier ministre de la Colombie-Britannique, Mike Harcourt, a déclaré que le système de justice du Canada devait pratiquer la tolérance zéro à l'égard des délinquants dangereux.

Le ministre est-il lui aussi prêt à exiger une tolérance zéro à l'égard de délinquants dangereux comme Barlow?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, il y a actuellement un groupe de travail fédéral-provincial portant sur le cas des délinquants dangereux. Ce groupe doit soumettre son rapport aux ministres en juillet. Il se penche sur les mesures à prendre à l'égard des délinquants dangereux. Nous avons hâte de recevoir le rapport pour adopter des mesures pertinentes dans ce genre de situation difficile.

Entre-temps, le premier ministre de la Colombie-Britannique est libre de demander à ses procureurs de la Couronne de prendre des mesures plus concrètes, dont celle, pour commencer, que les délinquants soient déclarés dangereux à leur première infraction.


4948

Néanmoins, au palier fédéral, nous prenons ce cas très au sérieux. Nous avons l'intention d'agir en fonction des conclusions du groupe de travail fédéral-provincial, car les solutions passent par un effort concerté aux niveaux fédéral et provincial.

* * *

[Français]

LES NAVIRES À DOUBLE COQUE

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne): Monsieur le Président, hier, la ministre de l'Environnement s'entêtait et persistait à soutenir que, l'année dernière, le Canada avait adopté une législation sur les navires à double coque. Elle a parlé de la Maritime Shipping Act, loi qui n'existe tout simplement pas. Elle se référait sans doute à la Loi sur la marine marchande, amendée l'an dernier par le projet de loi C-121, où le gouvernement ne faisait qu'annoncer son intention de légiférer sur les navires à double coque.

Comment la ministre de l'Environnement peut-elle expliquer sa réponse, alors que le service juridique du ministère des Transports, son ministère et la Garde côtière affirment qu'il n'existe pas de législation en vigueur actuellement sur les doubles coques?

(1435)

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Évidemment, monsieur le Président, les soi-disant faits que le député dépose aujourd'hui sont aussi valables que ce qu'il a déposé hier, parce que la Garde côtière ne relève même pas de mon ministère.

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne): Monsieur le Président, je voudrais tout simplement que la ministre nous réponde.

Une voix: C'est parce qu'elle ne le sait pas!

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, j'ai dit hier que le Canada Shipping Act, qui est entré en vigueur le 31 décembre 1993, traite du problème des doubles coques en ce qui concerne les bateaux qui transporte de l'huile, les tankers.

J'ai aussi dit hier, et je le répète aujourd'hui, que si le député veut que tous les bateaux sillonnant le Saint-Laurent et toutes les autres rivières du Canada aient des doubles coques, on va être obligé d'abolir tout le travail aux ports de Montréal et de Québec. Je ne pense pas que ce soit la politique du Bloc québécois.

* * *

[Traduction]

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

M. Jay Hill (Prince George-Peace River): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Depuis la libération de Larry Fisher, un délinquant sexuel récidiviste, la GRC a publié une note de service interne pour dire qu'il frapperait probablement de nouveau. Au cours de la fin de semaine, Fisher a été aperçu dans la ville de Dawson Creek, dans ma circonscription. Des gens de l'endroit s'inquiètent énormément de l'apparition soudaine de Fisher dans leur collectivité.

Quelles lois faut-il modifier pour empêcher que des délinquants dangereux, comme Larry Fisher, ne soient remis en liberté?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je ne vais pas parler du cas de M. Fisher, en particulier, mais je vais faire de mon mieux pour répondre à la question en général.

Je pense qu'il faudrait d'abord appliquer les lois qui existent déjà. La partie XXIV du Code criminel prévoit déjà, en termes clairs, que, à l'étape du prononcé de la sentence d'un délinquant, le procureur de la Couronne peut, si les circonstances le justifient, présenter une demande au tribunal pour que celui-ci déclare que cette personne est un délinquant dangereux. Cette personne peut alors être détenue pendant une période indéterminée et ne jamais recouvrer la liberté.

La première chose à faire, comme mon collègue, le solliciteur général, l'a souligné, c'est d'informer nos homologues provinciaux de la possibilité de recourir à cet article, lorsque la situation le justifie, et de présenter une demande au tribunal pour que celui-ci déclare que cette personne est un délinquant dangereux.

Certains délinquants peuvent ne pas entrer dans la définition des délinquants dangereux, au sens de la partie XXIV, mais devoir tout de même faire l'objet d'une détention continue dans l'intérêt public. Comme le solliciteur général l'a dit, un rapport sur de tels cas est actuellement établi aux niveaux fédéral et provincial. Ce rapport porte notamment sur le lien entre le système de justice pénale, qui est de compétence fédérale, et le système de santé, qui est de compétence provinciale. Nous avons l'intention de mettre sur pied, avec la collaboration des provinces, un système qui traite de ces cas afin d'assurer la sécurité des Canadiens.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River): Monsieur le Président, je remercie le ministre de sa réponse. Encore une fois, nous entendons parler de rapports et d'études. La dernière chose que les Canadiens veulent, à l'heure actuelle, c'est une autre étude sur les causes du crime. Cette question a été étudiée à satiété. Les gens exigent de l'action de la part du ministre.

Avec des prédateurs comme Larry Fisher en liberté, pendant combien de temps le ministre compte-t-il examiner les solutions de rechange qu'il a mentionnées à la Chambre la semaine dernière?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, il est facile de se moquer du processus d'étude. Mais si vous me permettez de le dire, je crois que la dernière chose que les Canadiens veulent, c'est une action mal avisée où le gouvernement se précipiterait pour adopter une solution qui risque de ne pas être efficace.

Mes collègues et moi savons que cette question est importante et qu'il faut tenir compte de ces cas. Or, nous savons aussi que la question est complexe et nous allons nous y attaquer comme il se doit. L'étude sera approfondie, mais notre action sera efficace et les résultats seront convaincants, une fois que nous aurons trouvé une solution avec la collaboration de nos homologues des provinces.


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[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes.

La tension continue de monter à Oka, alors que des échanges de coups de feu et des rafales de mitraillette ont amené des résidants du territoire à demander une présence accrue de la police. La Sûreté du Québec a même saisi une arme de type AK-47, munie d'un laser, en plus d'avoir constaté l'existence d'un arsenal impressionnant.

(1440)

Compte tenu de la gravité de la situation à Oka, le ministre des Affaires indiennes peut-il informer cette Chambre, si le négociateur, Me Michel Robert, a pu amorcer les négociations avec les représentants du conseil de bande de Kanesatake?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, les négociations ont effectivement commencé, dans la mesure où le médiateur et le négociateur se sont rencontrés. Le programme est donc appliqué.

En ce qui concerne les coups de feu, cette question relève davantage de la Sûreté du Québec. J'ai reçu indirectement des rapports précisant que la Sûreté du Québec a l'affaire en main et que la poursuite des négociations n'en sera pas affectée.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Monsieur le Président, ma deuxième question s'adresse au solliciteur général. Convient-il que la nature offensive des armes identifiées par la police permet d'accréditer l'existence d'un important trafic d'armes, ce que refuse d'admettre le solliciteur général?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, l'honorable député a tort, je n'ai jamais refusé d'admettre l'existence d'un trafic d'armes important. J'ai dit, ainsi que le premier ministre il y a quelques mois, qu'une des raisons d'être de notre programme national contre la contrebande est que cette contrebande inclut le trafic d'armes. C'est pourquoi nous avons mis sur pied ce programme contre la contrebande, y compris le trafic d'armes, et nous allons continuer nos efforts avec la Sûreté du Québec et les autres corps policiers.

* * *

[Traduction]

L'IMMIGRATION

M. John Loney (Edmonton-Nord): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

De nombreux électeurs de ma circonscription m'ont fait part de leurs inquiétudes au sujet du cas d'Alexandre Makar. M. Makar enseigne actuellement à Edmonton. Toutefois, son autorisation d'emploi arrive à échéance le 30 juin, date à laquelle il devra retourner en Ukraine parce qu'il n'est pas admissible pour des raisons d'ordre médical. Il a, en effet, une maladie rénale rare.

Le ministre pourrait-il dire à la Chambre où en est le dossier?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question et de l'intérêt que lui-même et d'autres députés portent à l'affaire.

Premièrement, la personne dont il est question possède, comme on l'a dit, une autorisation de travail. Cet homme a présenté au Canada une demande de statut de résident permanent, mais a été jugé non admissible à la suite d'un examen médical.

Ce cas est un exemple classique de contradiction entre la compassion manifestée envers la personne par la communauté d'Edmonton et la non-admissibilité sur le plan médical qui est l'un des critères que les Canadiens veulent que nous appliquions à tous les candidats. Nous ne prenons pas cette question à la légère puisque, l'an dernier, sur les 325 000 candidats qui ont fait l'objet d'un examen médical, 2 000 ont été refusés.

Deuxièmement, nous avons peut-être un système de santé inégalé dans le monde, mais ses ressources sont limitées et la province a son mot à dire. C'est pourquoi je suis entré officiellement en communication avec le premier ministre de l'Alberta pour connaître le point de vue de la province concernant les services de santé offerts et les conséquences pour la santé de cette personne d'une autorisation à rester. De plus, le premier ministre de la Saskatchewan ayant publiquement accordé son appui, je suis également entré en communication avec son cabinet pour voir quelles mesures pouvaient être prises pour trouver un lieu de résidence à cet homme en Saskatchewan, dans le cas où les discussions avec l'Alberta échoueraient.

Il s'agira donc de faire la part des choses entre la compassion et la responsabilité financière dont nous devons faire preuve pour assurer la viabilité du système de soins de santé partout au Canada, en dépit des nombreuses demandes d'exceptions aux règles qui sont adressées à mon ministère.

* * *

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général.

Comme je l'ai mentionné à la Chambre la semaine dernière, le libéré conditionnel Wayne Perkin a récemment été reconnu coupable du meurtre d'Angela Richards, commis dans ma circonscription en 1992. Quand j'ai demandé à la Commission nationale des libérations conditionnelles les détails concernant la décision de mettre M. Perkin en liberté en 1990, on m'a fait savoir que ces renseignements étaient confidentiels étant donné que ces événements s'étaient produits avant l'adoption de la nouvelle loi qui s'applique aux audiences à compter de novembre 1992.

Le solliciteur général est-il prêt aujourd'hui à nous garantir qu'il va modifier la loi de façon à permettre l'accès aux rapports d'audiences de la Commission nationale des libérations conditionnelles qui se sont tenues avant le mois de novembre 1992?


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(1445)

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, je prends note de la suggestion du député. Elle vaut vraiment la peine qu'on l'étudie. J'y veillerai dans le cadre de l'actualisation et du renforcement du régime de libération conditionnelle et du système correctionnel dont je m'occupe actuellement.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je remercie le solliciteur général de sa réponse.

La décision rendue par la Commission nationale des libérations conditionnelles dans cette affaire a conduit ultimement à la mort d'une jeune femme de 24 ans, Angela Richards. La commission aurait dû être au courant d'autres faits qui sont en train d'être révélés au sujet de M. Perkin, qui fait l'objet de nouvelles accusations.

Le solliciteur général va-t-il introduire une mesure législative pour veiller à ce que, à l'avenir, les commissaires soient informés des enquêtes en cours pour qu'on puisse maintenir en incarcération des détenus admissibles à la libération conditionnelle jusqu'à ce qu'une enquête raisonnable ait pu être faite?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, mon collègue a fait une autre suggestion qui mérite d'être étudiée, quoique je ne sois pas sûr qu'elle doive faire l'objet d'une mesure législative.

J'ai pris des mesures afin d'améliorer la procédure administrative de façon à ce que la Commission nationale des libérations conditionnelles dispose de toutes les informations nécessaires avant de prendre une décision sur ces questions. Je vais essayer de faire ce que demande le député au niveau administratif, et verrai ce qui devra être fait au niveau législatif.

* * *

[Français]

LES TRANSPORTS

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Le gouvernement se propose de privatiser massivement les services offerts par Transports Canada. Cette privatisation a pour but de permettre au gouvernement de se désengager du soutien qu'il offre au système de transport canadien.

Avant de s'engager sur la voie d'une privatisation importante des activités de Transports Canada, le ministre a-t-il un minimum de garantie quant à l'impact qu'une telle privatisation aura sur le développement économique et sur l'inflation, du fait de l'augmentation des coûts de transport?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, d'abord je suis certain que l'honorable député sait que le discours qu'on a tenu à Thunder Bay, vendredi soir, n'a pas parlé tellement de privatisation. Ce n'est pas la voie dans laquelle le ministère des Transports veut s'engager.

Nous avons surtout parlé de commercialisation, qui est un phénomène, une approche totalement différente.

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes): Monsieur le Président, quel que soit le terme, le ministre est-il conscient qu'un important désengagement du gouvernement dans le financement des transports affectera gravement, premièrement, tous les ports du Saint-Laurent par la commercialisation de la Garde côtière, deuxièmement, tous les consommateurs par l'augmentation du prix des marchandises et troisièmement, toutes les régions éloignées sur lesquelles l'impact d'une augmentation des prix serait le plus fort?

[Traduction]

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, le député pose une question qui inquiète beaucoup de gens au pays.

De toute évidence, il est vrai que partout au Canada les autorités locales cherchent à obtenir une plus grande participation aux décisions qui touchent directement leurs collectivités et leurs régions. Je suis très surpris qu'un député du Québec ne s'intéresse pas à un processus qui assurerait une participation très importante aux intervenants locaux.

J'ajouterais même que la plupart des groupes d'utilisateurs et de clients du pays sont absolument convaincus et qu'ils m'en ont fait part en termes très clairs. Ils croient que si les groupes d'utilisateurs et de clients peuvent participer davantage, le système sera beaucoup plus efficace, efficient et abordable et j'aurais cru que ce serait aussi l'opinion du député.

* * *

LE CONSEIL DES ARTS DU CANADA

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Le 4 mai dernier, j'ai demandé au ministre s'il allait faire des nominations au Conseil des arts du Canada, dont 13 des 21 sièges étaient alors vacants. Le ministre m'avait répondu qu'il tenait à ne faire aucune nomination avant la fin de l'examen dont cet organisme fédéral faisait l'objet. On s'attendait à ce que cet examen soit terminé à l'automne.

Le ministre peut-il expliquer la raison de son inconstance et nous dire pourquoi il a encore une fois changé d'idée, récemment, en procédant quand même à deux nominations au Conseil des arts du Canada?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, pour ce qui est de la taille du Conseil des arts du Canada, cet examen est terminé dans la mesure où cela touche mon portefeuille, et nous avons fait les recommandations qui s'imposaient au ministre intéressé. Pour ce qui est des questions de patrimoine, nous savons maintenant combien de personnes siégeront au conseil, ce dont j'ai déjà fait part à la Chambre.

(1450)

Le directeur que j'ai nommé plus tôt cette semaine ou la semaine dernière n'est pas membre du conseil. Nous avons attendu un certain temps avant de faire cette nomination. Nous jugions qu'il était grand temps de passer à l'action. L'autre


4951

personne nommée occupera le poste de président, et sa nomination était indispensable au bon fonctionnement du Conseil des arts.

Voilà ce que nous avons fait. Nous avons nommé les titulaires de ces postes et nous savons maintenant combien de personnes siégeront au conseil d'administration. À l'avenir, nous procéderons aux nominations de façon plus orthodoxe.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je croyais que le ministre savait déjà combien de sièges étaient vacants et combien devaient être comblés. Je ne mets certainement pas en doute le talent et la compétence de la personne désignée.

Cependant, je m'interroge sur l'intérêt que porte le ministre au processus d'examen des organismes gouvernementaux. Le ministre peut-il dire à la Chambre quelle est la pertinence du processus d'examen des institutions fédérales, dans le contexte actuel?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je suis heureux de dire à la Chambre que j'accorde beaucoup d'intérêt à cet examen. Mon ministère a été le premier à présenter ses recommandations au ministre intéressé. Je suis surpris d'entendre des députés du Parti réformiste me poser ces questions, parce que ce processus permet de réduire les dépenses et de faire des économies. Nous mériterions d'être félicités pour ce que nous faisons.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Beaucoup de mes électeurs, qui sont des propriétaires responsables d'armes à feu, craignent de perdre leur liberté de posséder une arme et de pouvoir chasser, alors que des criminels irresponsables poursuivent leur violence et leurs activités illégales.

Le ministre pourrait-il garantir aux Canadiens que sa révision des lois sur le contrôle des armes à feu fera une distinction entre les besoins des propriétaires responsables d'armes à feu dans les régions rurales et les criminels qui achètent ou importent illégalement des armes à feu pour leurs activités?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, l'objectif premier du gouvernement en ce qui concerne sa stratégie de lutte contre le crime et la violence, c'est la sécurité des Canadiens. Nous reconnaissons que la réglementation des armes à feu n'est qu'un élément d'une stratégie globale.

Dans la mesure où les armes à feu sont réglementées, je peux garantir à la députée que tout sera fait pour minimiser l'intrusion auprès de ceux qui utilisent leurs armes dans des buts légitimes comme la chasse ou le sport.

La Chambre des communes peut s'attendre à ce que le gouvernement agisse avec rigueur contre la contrebande d'armes à feu et leur utilisation à des fins criminelles. Ce sera l'aspect central du travail que nous allons entreprendre dans les mois à venir.

* * *

[Français]

LES VICTIMES DE LA THALIDOMIDE

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé. La semaine dernière, le journal La Presse révélait que la majorité des victimes de la thalidomide n'avaient toujours pas été indemnisées. Ainsi, sur 424 requérants, plus de 318 attendent toujours que le gouvernement fédéral traite de leur dossier.

Ma question est la suivante: La ministre de la Santé a-t-elle l'intention d'agir pour que soient enfin indemnisées les victimes d'un drame pour lequel le gouvernement fédéral a déjà admis une responsabilité?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, nous sommes certainement intéressés à ce que tous les gens que nous pouvons retracer et qui ont pris cette drogue soient indemnisés. Je crois qu'il y a des cas, par exemple, où c'est moins clair, et c'est là où il y a certains problèmes.

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, la ministre ne réalise-t-elle pas que dans la plupart des cas, seule une preuve circonstancielle est possible et que c'est le type de preuve exigée par l'administration fédérale qui empêche justement ces victimes d'obtenir justice?

(1455)

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, il est toujours nécessaire d'avoir certaines preuves avant d'indemniser les gens. Sans cela, on serait ouverts à toutes sortes de demandes. Vous le savez, nous avons un problème de dette et de déficit. Il est certain que nous pouvons examiner cela de très près pour voir s'il peut y avoir une façon de découvrir s'ils sont vraiment les victimes de cette drogue ou non.

* * *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ CN EXPLORATION

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

Le mois dernier, au cours de son congrès, le Parti libéral a adopté une proposition, parrainée par l'association d'une circonscription de Regina, recommandant la privatisation de la société CN Exploration et sa vente à une entreprise de la Saskatchewan. Selon certaines rumeurs, cette vente serait réalisée au profit d'amis libéraux. Doug Richardson, ancien candidat libéral et chef de cabinet sous M. Turner, aurait fait du lobbying en faveur de la vente de CN Exploration, pour le compte d'une entreprise de Regina, dont le conseil d'administration représente le gratin des libéraux en Saskatchewan.

Le ministre peut-il garantir à la Chambre que la privatisation de cette société d'État s'effectuera ouvertement et que le prix de


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vente correspondra à la véritable valeur marchande, qui est estimée au moins à 70 millions de dollars, mais qui pourrait même atteindre 150 millions de dollars?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, étant donné la situation qui règne actuellement dans le secteur des chemins de fer ainsi que toutes les discussions et toute l'incertitude que soulèvent les activités ferroviaires au Canada, il est évident que tout dessaisissement par le CN d'un de ses éléments d'actif serait examiné méticuleusement et qu'il faudrait prouver hors de tout doute que la transaction est dans le meilleur intérêt des contribuables canadiens.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, je remercie le ministre d'avoir donné cette garantie. Il est encourageant de voir les libéraux aller de l'avant pour privatiser des sociétés d'État.

Le ministre peut-il en outre indiquer à la Chambre les mesures qui sont prises, le cas échéant, pour empêcher le nouveau propriétaire de la Saskatchewan, si la société CN Exploration est vendue, de la revendre à une société de l'extérieur de la Saskatchewan, pour réaliser facilement un profit aux dépens des contribuables canadiens? Par ailleurs, le produit de la vente doit-il être versé au Trésor fédéral ou au CN?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, il n'y a rien de plus amusant que de regarder les réformistes faire leurs pirouettes. Il est regrettable que la question du député ait été rédigée avant qu'il puisse écouter la réponse à sa première question.

Je répète que toute entente qui serait conclue par le CN concernant le dessaisissement d'un élément d'actif ferait l'objet d'un examen minutieux. La transaction devrait se révéler dans le meilleur intérêt des contribuables canadiens.

Le fait de proposer qu'une transaction puisse être examinée dans le but de déterminer si quelqu'un pourrait s'en servir pour réaliser ensuite un profit va même au-delà de ce que pourraient faire les réformistes.

* * *

L'ÉCONOMIE

M. Janko Peric (Cambridge): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Selon un rapport de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'économie canadienne se porte mieux que ne l'avait prévu le ministre dans son budget.

Comment le ministre explique-t-il la différence entre le rapport de l'OCDE, qui prévoit un taux de croissance économique de 3,9 p. 100 cette année au Canada, et les prévisions insérées dans son propre budget, selon lesquelles l'économie canadienne afficherait un taux de croissance de 3 p. 100, soit une différence de près d'un point de pourcentage?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, je voudrais féliciter le député pour sa question. Je suis surpris qu'aucun député de l'opposition n'ait songé à me la poser.

Le député n'est pas sans savoir que nous avons fondé notre budget sur des estimations très prudentes, car nous savions que certaines variables allaient augmenter tandis que d'autres diminueraient. Heureusement, notre économie affiche un taux de croissance nettement supérieur à nos estimations. Malheureusement, comme l'aura remarqué le député, les taux d'intérêt sont plus faibles, ce qui a un effet égalisateur.

Il reste que ces nouvelles ont de quoi nous réjouir. Ce sont de très bonnes nouvelles pour les travailleurs et de très bonnes nouvelles pour tout le pays. Le redressement est attribuable à nos exportations, à la demande intérieure et au regain de confiance dans notre pays. J'aime à penser que notre budget et notre façon de gouverner y sont aussi pour quelque chose. D'ailleurs, le fait que nous n'ayons pas adopté la politique à court terme. . .

Des voix: Bravo!

* * *

(1500)

LES SUBVENTIONS AU TRANSPORT

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

J'ai eu l'occasion, moi aussi, de lire le discours que le ministre a prononcé à Thunder Bay. Une partie de ce discours m'a inquiété, soit celle où le ministre parle des subventions qui sont versées directement au réseau de transport, illustrant son propos presque exclusivement d'exemples de subventions directes au transport ferroviaire.

Cela me semble perpétuer le mythe voulant que seul le transport ferroviaire est subventionné au Canada et que les autres secteurs, tels les transports aérien et routier, ne sont pas soutenus par les contribuables ou ne le sont peut-être qu'indirectement et moins explicitement.

Le ministre va-t-il donner l'assurance à la Chambre que, quelles que soient ses intentions à l'égard de notre réseau de transport, il tiendra compte du fait que les routes, les aéroports et des secteurs autres que le transport ferroviaire sont aussi très fortement subventionnés, quoique pas aussi explicitement? Gardera-t-il cela à l'esprit lorsqu'il se penchera sur le secteur ferroviaire?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, je remercie le député de poser la question. Il ne fait aucun doute qu'en apportant au réseau de transport canadien les modifications qui en rendront le coût abordable, nous devrons continuer à faire preuve d'équité et de justice.

Il est vrai que les subventions auxquelles nous faisons allusion concernent surtout le transport ferroviaire, mais il faudra réexaminer aussi, bien sûr, les subventions au transport des marchandises dans les provinces de l'Atlantique, qui se fait beaucoup par camion.

Ce que nous visons, c'est un réseau de transport intégré dont le coût soit abordable et au sein duquel tous les moyens de transport aient autant de chances de se concurrencer.

Le Président: Le député de Vancouver-Sud m'a prévenu qu'il voulait soulever une question de privilège.

4953

M. Dhaliwal: Monsieur le Président, en ce qui concerne la question de privilège, le député de Simcoe s'est entretenu avec moi et je vais reporter cette question à lundi prochain.

_____________________________________________


4953

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'UNITÉ NATIONALE

La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.

Le Président: À l'ordre. Le débat reprend. Il y a une question adressée à la députée de Beaver River.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, j'aimerais faire quelques commentaires à la députée de Beaver River qui a parlé particulièrement de la grande générosité des gens de l'Ouest envers les gens de l'Est.

J'aimerais lui rappeler qu'il y a environ six ou sept ans, l'ouest du Canada a connu de grands problèmes avec les institutions financières. Je tiens à lui faire remarquer, puisque sa mémoire est peut-être courte, qu'il en a coûté au gouvernement canadien tout près de 3 milliards de dollars pour sauver les institutions financières de l'ouest du Canada à cette époque.

Alors, au sujet de sa grande générosité, je pense qu'elle devrait se rappeler ce fait et se rendre compte que le Canada a peut-être plus aidé l'Ouest qu'il aide les gens de l'Est.

L'autre chose que j'aimerais signaler à la députée de Beaver River c'est que, quand nous avons eu des problèmes avec nos caisses d'entraide économique, qui étaient de petites institutions financières du Québec, jamais le gouvernement fédéral ne leur est venu en aide. Alors, vous voyez que l'équité dans ce pays n'est pas nécessairement toujours appliquée. C'est en ce sens que je tiens à remettre les choses dans leur perspective et à dire que si le Canada a été très généreux, cela s'est fait à partir des impôts et des taxes du Québec aussi.

Alors, j'aimerais que la députée se rétracte et qu'elle dise qu'elle a probablement reçu plus qu'elle n'en a donné dans le passé.

(1505)

[Traduction]

Mme Deborah Grey (Beaver River): Madame la Présidente, même si j'ai eu beaucoup de mal à entendre les observations du député, je voudrais lui répondre brièvement.

Lorsque nous parlons de la générosité ou du partage équilibré des fonds d'un bout à l'autre du pays, n'oublions pas la contribution de chaque province à la fédération canadienne. Le député a certainement pu voir dans diverses publications, et je fais particulièrement allusion ici aux conclusions de Robert Mansell, économiste de l'Université de Calgary, que l'Alberta a apporté une contribution nette à la fédération canadienne. Par contre, le Québec et certaines des provinces de l'Atlantique ont plutôt été bénéficiaires des fonds nationaux.

Examinons, dans un contexte plus général, certaines des choses dont les députés se plaignent.

Il ne faut pas essayer de compter chaque dollar et chaque cent, mais plutôt regarder la situation de façon globale et nous demander ce qu'est cette fédération dont nous parlons.

Il est important que nous comprenions que cette fédération est comme une famille, ce dont j'ai parlé dans mon discours et ce dont d'autres députés ont parlé aussi. Dans une famille, on ne peut pas compter chaque dollar et chaque cent. Il y a des enfants qui nécessitent plus de dépenses que d'autres, et nous comprenons cela.

Lorsque nous examinons toute cette situation, ne nous arrêtons pas à des questions d'argent ou à d'autres questions sans grande importance. Nous devons voir la fédération canadienne comme une unité, comme une famille composée de dix provinces égales. Je crois que nous sommes plus forts et que nous sommes certainement plus en mesure d'entretenir des relations commerciales avec la communauté internationale en tant que pays uni. Comme mon chef l'a signalé plus tôt, le Québec serait vraiment en meilleure position financièrement s'il faisait partie d'un bloc commercial représentant un marché de 28 millions de personnes que s'il essayait de se débrouiller seul en tant que bloc commercial représentant un marché de seulement 8 millions de personnes.

Mon collègue est intelligent et je sais qu'il comprend la notion de bloc commercial. Nous avons vu ces blocs commerciaux devenir de plus en plus grands au cours des dernières années.

Si le Québec veut faire cavalier seul, il formera un bloc commercial beaucoup plus petit. Si le député croit que ses propos influent sur la situation financière du pays, il devrait peser ses mots. Je ne crois pas que la solution de la séparation serait une situation viable. Ce serait de loin préférable pour cette province d'accepter l'invitation du reste du Canada et de faire partie de ce bloc commercial plus important.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Madame la Présidente, au cours des dix minutes qui suivent, je parlerai de la vision et des aspirations des gens que je représente. Je parlerai au nom de ces Canadiens qui tiennent à ce que le Canada demeure une seule nation.

Beaucoup de Canadiens se demandent pourquoi leurs représentants élus passent tant de temps à parler d'unité nationale. Dans bien des cas, on juge que le problème, ce sont les politiciens, pas le bon peuple de l'une ou l'autre des provinces. Il est vrai qu'il existe des différences entre chacune des régions du Canada, mais on ne peut pas régler les problèmes d'un pays en s'en séparant.

Ce n'est pas parce que nous avons connu de nombreuses années de favoritisme politique et de mauvaise gestion financière que notre nation se retrouve devant un dilemme insoluble. La population du Canada atlantique a une culture unique, tout comme les Québécois, les Ontariens et les habitants de l'Ouest. Cela


4954

ne signifie pas que nous n'avons pas de culture proprement canadienne. Il en existe une. Beaucoup de choses nous lient.

Au cours des années qui viennent, les Canadiens exigeront une plus grande égalité, une plus grande affirmation de notre identité et une plus grande responsabilisation du gouvernement fédéral. Je crois bien que nous le ferons tous ensemble, avec les mêmes équipes nationales de hockey, avec le même hymne national et avec la même fierté pour notre drapeau.

Cependant, je suis convaincu qu'il nous faut une nouvelle vision, une nouvelle démarche politique. Les vieux partis nous ont conduits à la croisée des chemins où nous nous trouvons aujourd'hui et nous avons besoin de changement.

On observe une grande frustration au cours de la 35e législature actuelle en raison du favoritisme politique, des réponses insatisfaisantes données aux questions que les partis d'opposition posent au nom de leurs électeurs, des mesures législatives inefficaces et du peu d'attention accordée à la situation financière dans laquelle les vieux partis nous ont mis.

(1510)

Lorsque l'ancienne façon de faire aura été éliminée, le Canada, c'est-à-dire l'ensemble des provinces et des territoires, pourra progresser et prendre la première place dans le monde. Cependant, qu'est-ce qui nous unira tous? Comment pouvons-nous partager le Canada tout en respectant les différences culturelles de chacune de ses parties?

Nous devons retrouver la stabilité financière, les budgets équilibrés et la confiance en l'avenir sans aucune crainte face aux paiements d'intérêts à des prêteurs étrangers et le reste.

On a dit que la seule chose qui était nécessaire au succès du projet séparatiste, c'était que le peuple de notre bonne nation ne fasse rien. Nous devons prendre les choses en main nous-mêmes et équilibrer le budget en adoptant une démarche ferme et réaliste. Par exemple, nous ne pouvons pas ramener le déficit à 3 p. 100 du produit intérieur brut d'environ 730 milliards de dollars et négliger de dire aux gens que le gouvernement augmentera, ce faisant, la dette du Canada de 100 milliards de dollars au cours des trois prochaines années. Cela confine à la supercherie. Nous avons été témoins de cela pendant dix ans. Nous en avions été témoins cinq ans auparavant, et nous en sommes de nouveau témoins aujourd'hui.

La solution à long terme à la poursuite de la coexistence de tous les Canadiens dans un climat de coopération consiste à inciter davantage les Canadiens ordinaires à épargner, à investir, à travailler et à donner du travail aux autres. Aujourd'hui, nous faisons en sorte qu'il soit coûteux d'employer des travailleurs et nous subventionnons les gens pour qu'ils restent à la maison. Nous avons un système qui impose de plus en plus le travail et subventionne le non-travail.

Si toutes les provinces adoptent la vision d'un pays qui vit selon ses moyens, qui épargne pour les générations à venir et qui dépense pour des choses nécessaires, nous saurons coexister en nous respectant les uns les autres. Je voudrais exposer aux députés certaines des caractéristiques que présentera un Canada uni quand nous aurons enfin écarté le plus grand obstacle, la dernière des idéologies des partis traditionnels.

Premièrement, les gouvernements n'ont pas d'argent qui leur appartienne vraiment. Ce n'est pas leur argent. Il est nécessaire d'adopter une mesure législative permettant aux citoyens de contrôler les dépenses de l'État.

Deuxièmement, les budgets doivent être équilibrés tous les trois ans tant au niveau provincial qu'au niveau fédéral.

Troisièmement, tout emprunt de quelque gouvernement que ce soit doit être approuvé par référendum, national pour notre gouvernement fédéral et provincial pour les gouvernements provinciaux.

Quatrièmement, un secteur privé vigoureux, avec peu ou pas de subventions de l'État, constitue un attribut qui mènerait le Canada dans la bonne direction pour l'an 2000 et au-delà. Enfin, le favoritisme politique devrait disparaître. Nous devons bien sûr en parler sérieusement avec nos vis-à-vis ici, car nous en avons déjà vu beaucoup.

Voyons un peu certaines recommandations concernant la stabilité financière de notre grand pays. Si tous les Canadiens s'y mettaient, ce serait pour nous tous une motivation à travailler et à demeurer ensemble.

Premièrement, l'une des principales priorités de toutes les provinces devrait être d'accorder préséance aux intérêts nationaux plutôt qu'aux intérêts provinciaux.

Deuxièmement, il faudrait modifier le système de paiements de transfert aux provinces défavorisées, car il les a rendues moins rentables économiquement. Les provinces qui reçoivent des paiements de transfert croient fermement qu'elles devraient obtenir davantage, et celles qui sont mises à contribution se demandent pourquoi elles doivent verser des sommes aussi élevées.

Troisièmement, le gouvernement fédéral a eu accès à des recettes fiscales nettement supérieures à celles dont il a besoin pour s'acquitter strictement de ses responsabilités fédérales. Le favoritisme et le gaspillage dont sont témoins les contribuables de toutes les provinces doivent cesser, mais ce n'est pas ce qui se produit. Au contraire, ils subsistent. Tant que le gouvernement ne prévoira pas dans sa volumineuse réglementation qu'il faut y mettre un terme, toutes les provinces éprouveront des difficultés.

Si nous pouvons convaincre le gouvernement actuel que ses priorités devraient être d'assurer une saine gestion et d'arriver à un équilibre budgétaire, toutes les provinces seront alors très motivées à demeurer au sein de la fédération canadienne.

Pour assurer l'indépendance financière des provinces et placer la Confédération sur des assises financières plus solides, il est proposé que le principe d'un budget équilibré soit inclus dans la Constitution. Il faut l'y inclure et respecter ce principe. Il faut vivre selon nos moyens, et toutes les provinces auront ensuite l'impression de faire partie d'un projet auquel elles peuvent contribuer. Cela exigerait que toutes les dépenses du gouvernement soient financées par les recettes fiscales actuelles et que tout manque à gagner soit compensé par une diminution des dépenses.


4955

(1515)

Équilibrer le budget signifie aussi équilibrer les échanges entre les provinces. Nous devons renoncer à cette tendance qu'ont la plupart des politiques à toujours vouloir quelque chose en échange. Nous sommes à un point tournant, une décision doit être prise au sujet de l'égalité des députés et non au sujet de la question de savoir qui va obtenir le plus de ce pays qui nous a si bien servis.

Les vieux partis politiques ont une vision fossilisée du Canada. La mauvaise gestion des finances du pays a créé des différences régionales importantes entre toutes les provinces. Le temps est venu d'adopter un nouveau thème. Il est temps de sortir du parc Jurassique et d'entrer dans l'avenir.

M. Dennis J. Mills (Broadview-Greenwood): Pas de clichés.

M. White (Fraser Valley-Ouest): Oui, c'est un cliché, mais, madame la Présidente, le député d'en face sort tout droit du parc Jurassique.

J'en appelle aux gens de la Saskatchewan, de Terre-Neuve, du Québec, de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, du Nouveau-Brunswick, du Manitoba, de l'Ontario, de la Nouvelle-Écosse, de l'Île-du-Prince-Édouard, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest pour qu'ils mettent de côté les différences régionales et travaillent à l'édification d'un pays doté de solides assises financières.

J'ai une autre préoccupation. Nous excluons des millions de jeunes qui n'ont pas l'âge de voter de la présente discussion. Nous déciderons de leur avenir, mais ils subiront les conséquences de cette décision et de ce gâchis. Cela vous dit-il quelque chose? C'est la philosophie du libéralisme en vertu duquel on peut emprunter d'année en année et s'endetter constamment. Même les conservateurs l'ont fait. Si nos jeunes pouvaient voter, ils ne se sépareraient pas, ils construiraient un Canada plus fort.

Nous ne pouvons avoir un pays fort si nous encourageons la différence à l'aide de politiques multiculturelles, de politiques linguistiques, de politiques spéciales pour les autochtones, du favoritisme et d'autres pratiques politiques. Nous formons une fédération de 10 provinces égales. Le Canada est fort et libre. Le Canada est notre pays et restera toujours uni.

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est): Madame la Présidente, j'aimerais dire que, bien qu'il s'agisse d'un geste étonnant de la part du Parti réformiste, je me réjouis d'entendre ce débat sur l'unité nationale. Pendant 20 ans, depuis la Colombie-Britannique, j'ai cherché à garder le Canada uni par tous les moyens dont je disposais à l'autre bout du pays.

J'aimerais rappeler à mes collègues que nous sommes un parti démocratique et que, parce que nous sommes un parti démocratique, tout est décidé par voie de consensus et à majorité simple.

Aux audiences concernant l'Accord de Charlottetown, j'ai écouté plusieurs interventions. Bien des solutions y ont été proposées. Nous avons entendu les Canadiens exprimer leurs voeux. Le référendum a été coûteux. Les référendums sont toujours coûteux. Je crois que les élections sont l'occasion de dire ce que nous pensons du travail accompli par le gouvernement.

Je voudrais ajouter que, au cours de toutes ces discussions-et j'ai écouté les exposés toute la matinée-je n'ai jamais entendu le Parti réformiste se prononcer sur le droit inhérent des autochtones à l'autonomie gouvernementale. C'est un fait: l'un des thèmes le plus souvent débattu et qui semblait faire le plus l'unanimité, c'était le droit inhérent des autochtones à l'autonomie gouvernementale.

Mon collègue voudrait-il nous expliquer quelle est la position du Parti réformiste à propos du droit inhérent des autochtones à l'autonomie gouvernementale?

M. White (Fraser Valley-Ouest): Madame la Présidente, je voudrais seulement faire deux commentaires. Il est paradoxal, pour ne pas dire surprenant, d'entendre à la Chambre les réformistes parler d'unité nationale. Je pense que les réformistes sont aussi nationalistes que le gouvernement d'en face. La différence réside dans la façon de diriger le gouvernement et de diriger un pays, c'est dans la façon de faire. Chose certaine, je n'approuve pas l'optique adoptée.

Les réformistes se sont toujours préoccupés du droit inhérent des autochtones à l'autonomie gouvernementale. Nous croyons à ce droit. La différence, c'est que le gouvernement n'a pas encore défini en quoi consistait ce droit, le genre d'administration qui s'y rattache, combien cela va coûter, si le ministère des Affaires indiennes continuera d'exister, etc.

(1520)

Nous croyons au droit inhérent des autochtones à l'autonomie gouvernementale, mais il y a beaucoup de questions auxquelles il faudra répondre avant que nous n'apposions notre signature au bas d'un document, et cela n'est pas difficile à comprendre.

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Madame la Présidente, j'ai entendu beaucoup de motions au cours des jours réservés à l'opposition et je peux vous dire que celle-ci est de la blague. C'est de la frime, de l'opportunisme politique.

Nous avons ici une motion qui compte six ou sept points et je n'appuierai absolument pas le chef du Parti réformiste, qui a parlé ce matin de la vision qu'ont les réformistes d'un nouveau Canada. Absolument pas!

Je vais citer les propos que le chef du Parti réformiste a tenus le 20 janvier; il y a toutes sortes d'autres extraits du hansard que nous pourrions citer. Voici ce que le chef du Parti réformiste a dit:

Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
Le premier ministre a déclaré à maintes reprises qu'il ne voulait pas rouvrir le dossier constitutionnel et que la priorité de son gouvernement, c'était les emplois et la croissance économique. Pourtant, hier, lui-même et d'autres députés libéraux ont été entraînés dans des échanges animés avec des députés bloquistes sur l'avenir constitutionnel du Québec.
Il y a des millions de Canadiens, y compris des Québécois, qui veulent que le Parlement mette l'accent sur la réduction du déficit, l'emploi et la sauvegarde des services sociaux.

4956

Le premier ministre a-t-il renoncé à sa promesse de rester à l'écart du bourbier constitutionnel? Est-il encore déterminé à s'occuper des priorités économiques, financières et sociales?
C'est exactement ce que fait le Parti libéral. Nous tentons de relancer l'économie et de remettre le Canada sur pied.

Madame la Présidente, je vous ferai remarquer que, à mon avis, la position des réformistes sur cette question entraîne la division au sein du pays et sert les intérêts des bloquistes; la seule comparaison que je ferai entre les deux, c'est que le Bloc est au moins honnête et franc à cet égard. Je ne peux pas en dire autant du Parti réformiste.

Ils veulent diviser le pays, et ce, pour de basses raisons politiques.

M. White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, il est incroyable de constater à quel point ce processus soulève des émotions.

Le gouvernement présente un amendement aujourd'hui afin de retrancher les mots «prend l'engagement de renforcer notre économie». De toute évidence, cela fait problème puisque les libéraux veulent supprimer ces mots. Ils veulent aussi retrancher «d'équilibrer les budgets de nos gouvernements». Qu'y a-t-il de mal à débattre d'une motion qui propose «d'appuyer nos services sociaux, de conserver notre milieu, de protéger notre patrimoine et notre diversité culturelle»? Il est temps que le gouvernement commence à en parler.

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Madame la Présidente, le député qui vient d'intervenir a tout à fait raison lorsqu'il dit que ce débat fait appel aux sentiments des Canadiens. Dans ce sens, il est peu typique de la façon dont nous abordons généralement les questions politiques.

Le gouvernement ne réserve pas un jour de l'année pour débattre de l'unité nationale. Il veille plutôt à ce que, chaque jour, les gestes qu'il pose contribuent à bâtir notre pays et non à le détruire.

Le député a dit qu'il fallait diviser le pays en petites parcelles. Je l'ai entendu dire que, si nous divisions le pouvoir entre l'Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard, la Colombie-Britannique et toutes les autres provinces, nous nous retrouverions tout à coup avec une nouvelle formule pour un fédéralisme renouvelé.

Le gouvernement du Canada croit que son engagement envers l'édification de notre pays devrait être évident dans toutes les mesures et toutes les décisions qu'il prend. Nous ne pouvons accepter une motion qui n'est en fait qu'une série de platitudes. Cette série de voeux pieux n'est qu'une tentative mal dissimulée de raviver les tiraillements constitutionnels qui vont à l'encontre du but recherché.

(1525)

Il y a quelques semaines, j'ai été atterrée en entendant le chef du Parti réformiste qui, de son siège à la Chambre, accusait le premier ministre, un homme qui, pendant 30 ans, a personnalisé l'équité, la droiture et le nationalisme, de se laisser entraîner dans une querelle de famille, simplement parce que le premier ministre défendait la position du gouvernement du Canada sur un certain nombre de questions très importantes.

Je crois que le Parti réformiste ne sait pas vraiment en quoi consiste sa stratégie, car le débat lancé aujourd'hui par son chef ne fait malheureusement que contribuer à l'éclatement du pays. Les réformistes favorisent la cause du séparatisme, car ils ne font que prouver à qui veut l'entendre qu'on n'est pas en train de construire, mais bien de détruire le Canada.

[Français]

Avec la motion d'aujourd'hui, le chef du Parti réformiste a essayé de faire pire que simplement s'engager dans des débats stériles. Il a essayé de positionner le Parti réformiste sur les deux côtés de la clôture sur des questions fondamentales. Il a essayé de jouer avec les politiques de son parti.

[Traduction]

À cet égard, le chef du Parti réformiste essaie de s'asseoir entre deux chaises, ce qui risque d'être extrêmement pénible.

Qu'est-ce que le chef du Parti réformiste entend par «appuyer nos services sociaux»? Son parti aurait-il changé son fusil d'épaule en ce qui concerne l'universalité de l'assurance-maladie? Conviendrait-il maintenant avec le gouvernement qu'il faut contester vigoureusement la pratique des honoraires médicaux supplémentaires? Ce qui est encore plus déroutant, c'est l'idée exprimée dans la motion qu'il faut «protéger notre patrimoine et notre diversité culturelle». Qu'est-ce que cela veut dire, venant d'un parti qui a fait campagne contre le multiculturalisme? Qu'est-ce que cela veut dire, venant d'un parti qui a déjà proposé une motion contestant le bilinguisme officiel?

Le Parti réformiste a une politique plutôt déroutante. Il veut en théorie protéger notre patrimoine et notre diversité culturelle, mais il s'y oppose dans la pratique. Dans sa formulation actuelle, la motion du Parti réformiste est incompréhensible.

Lorsque les réformistes parlent de diversité, faut-il en déduire qu'ils sont en faveur de l'autonomie gouvernementale des autochtones? Lorsqu'ils parlent d'égalité, faut-il comprendre qu'ils favorisent désormais l'équité en matière d'emploi et l'accès à de bonnes garderies pour les parents qui travaillent? Ils parlent de forger des relations productives avec d'autres pays du monde; est-ce à dire qu'ils ne proposent plus de réduire le montant de l'aide internationale? Lorsqu'ils parlent de défendre nos vies, faut-il comprendre qu'ils sont désormais en faveur du contrôle des armes à feu, qu'ils ont si vigoureusement contesté?

Je suis persuadée que la réponse à toutes ces questions est non. Mais le Parti réformiste croit pouvoir s'en tirer avec des formules déconcertantes qui ont le sens qu'ils veulent bien leur donner.


4957

Ce qu'il y a peut-être de plus troublant là-dedans-et c'est là le message que je veux transmettre à la Chambre-c'est que, encore une fois, le Parti réformiste joue le jeu des séparatistes du Bloc québécois. Nous ne croyons pas que le chef du Parti réformiste soit naïf. Nous savons qu'il veut simplement fournir au Bloc des raisons de s'en prendre au fédéralisme. En tant que libéraux, fédéralistes et Canadiens, nous le regrettons vivement.

[Français]

Ce matin, des députés du Bloc se sont levés à la Chambre pour se plaindre des commentaires que j'ai faits hier à propos de la présence de leur chef à la Citadelle, lors du 50e anniversaire du Jour J. Ce qui est important, ce que j'ai dit hier et ce que je continue à dire, oui, c'est une question très émotive. Quand vous avez un chef d'un parti politique qui est venu au Parlement du Canada pour détruire notre Parlement du Canada, oui, c'est émotif, mais je défends son droit de parole du fond de mon coeur, parce que parmi les choses qui ont motivé les soldats il y a 50 ans, c'est justement la démocratie absolue et totale qu'on voit avec les porte-parole de l'opposition en face. Ce qu'il y a de pire, ce qui est peut-être moins généreux, c'est que le chef de l'opposition ne voit rien de mal à ce qu'il se promène à travers le monde, se vantant d'un pays séparé. Il se vante du fait qu'à Paris il s'est fait accueillir comme un nouveau chef d'un nouvel État, mais il nie au gouvernement du Canada les mêmes possibilités de se rendre dans d'autres pays pour trouver des solutions économiques, ce que nous cherchons ici.

(1530)

Maintenant, les séparatistes, ces soi-disant défenseurs de la liberté, veulent maintenant museler toute institution financière et économique qui n'est pas d'accord avec eux. Hier, on a vu les propos de M. Parizeau. Aujourd'hui, c'est la Banque de Montréal. Demain, ce peut être Wood Gundy. Le lendemain, est-ce que ce sera le simple citoyen du Québec qui n'aura pas le droit de parole qu'il devrait avoir dans un débat qui est fondamental pour l'histoire de notre pays?

[Traduction]

Le chef du Bloc québécois pense qu'il devrait être libre de voyager au Canada et partout dans le monde pour promouvoir ses idées séparatistes. Mais s'il fallait qu'un ministre de la Couronne ose aller à une réunion de l'OCDE pour échanger des idées sur l'économie. . . Deux poids, deux mesures.

Les théories de conspiration et les attaques contre le Québec ou le Canada peuvent peut-être aider les divers partis à se gagner des appuis politiques, mais elles ne font rien pour régler les problèmes économiques fondamentaux de notre pays.

Les libéraux veulent participer à ce débat aujourd'hui parce que nous voulons nous concentrer sur la principale raison pour laquelle nous avons été élus au Parlement, soit redonner des emplois aux Canadiens.

[Français]

La semaine dernière, le chef de police de Shawinigan était dans sa ville jumelle, Hamilton. On a eu la chance de passer toute la journée ensemble. Vous savez, madame la Présidente, la chose qui m'a frappée, qui continue à me frapper, si vous parlez à un jeune à Shawinigan, à Chicoutimi, au Lac-Saint-Jean, à Hamilton, à Toronto, qu'est-ce qu'il cherche? Il partage les mêmes buts.

Je suis marraine d'une jeune fille de deux ans à Montréal, qui parle français à la maison avec un père anglophone. Malgré la proposition de certains séparatistes qui ne connaissent pas la vie des Québécois, il y en a. On a 25 députés libéraux francophones qui ont oeuvré ici à la Chambre et ailleurs à travers le pays pour les droits des minorités à travers ce beau pays. Mais que pensez-vous, la journée même où il n'y aura plus de Canada, pensez-vous qu'il y aura des droits pour les minorités? Des millions de francophones qui demeurent actuellement à Timmins, à Sudbury, à Haileybury, au Nouveau-Brunswick, à Saint-Albert, est-ce qu'ils auront de quoi à dire dans une nouvelle réalité politique?

Madame la Présidente, pourquoi ne travaille-t-on pas ici ensemble pour des causes qui touchent tous nos jeunes, un travail de façon farouche pour essayer de renouveler nos atouts sociaux, nos ressources humaines, parce qu'une chose est évidente, si vous êtes sur le point d'être formé à Montréal, à Toronto, à Vancouver, le système actuel ne fonctionne pas. Mais au lieu de nous unir des deux côtés de la Chambre, tout ce que nous avons du côté du Bloc, c'est le blocage, le «chialage», une décision de ne rien accepter qui soit bon parce que ça vient du gouvernement fédéral.

[Traduction]

Ce qu'il y a de plus triste dans tout cela, c'est que, si on fait abstraction de la politique et des querelles régionales, on se rendra compte en parlant aux jeunes à Lethbridge, à Red Deer ou à Dawson Creek, qu'ils partagent tous les mêmes rêves. Ils ont tous les mêmes besoins que les jeunes de Chicoutimi ou de Chibougamau.

(1535)

Ce qui est malheureux dans ce débat, c'est que le Parti réformiste et le Bloc québécois semblent croire que nous aurions un meilleur pays si nous le séparions en divers éléments linguistiques ou géographiques. Ce qu'ils ne comprennent pas, c'est que tout pays qui veut bâtir son avenir doit comprendre son passé. Il suffit de regarder la réalité du Canada.

[Français]

Pourquoi? Pourquoi sommes-nous reconnus comme un peuple généreux à travers le monde? Parce que nous avons, dès le début de notre histoire, enraciné dans la Constitution, on a décidé de créer une nation avec deux peuples fondateurs et c'est un principe fondamental de ce que nous sommes aujourd'hui.

Pourquoi avons-nous des lois sur les armes à feu qui sont drôlement différentes de celles de nos voisins, les États-Unis? Parce que nous avons cru au début de notre histoire que ce n'est pas nécessairement l'individu qui doit avoir priorité dans la société, c'est l'individu et la collectivité.

Et la collectivité, c'est un principe qui a été endossé dans la Constitution même, en 1867. Oui, on a eu des problèmes. On a vécu et on continue à vivre des périodes difficiles. Mais, c'est


4958

comme dans un mariage: ou vous communiquez et vous allez réaliser quelque chose de fantastique, ou vous fermez la porte.

Et malheureusement, ce qui arrive, les députés d'en face ferment la porte. Ils n'ont aucun intérêt à faire marcher l'économie canadienne, ils n'ont aucun intérêt à faire travailler des jeunes chômeurs de Roberval, parce que si les jeunes chômeurs de Roberval ont un travail, ça valorise l'économie et la fonction du gouvernement du Canada.

[Traduction]

Si le Parti réformiste voulait vraiment faire progresser la cause du fédéralisme et de l'unité nationale, il mettrait l'accent sur la tâche importante que représentent le redressement de notre économie et la mise en place de ce qu'il faut pour relever les véritables défis du XXIe siècle.

En octobre dernier, les Canadiens se sont prononcés pour l'espoir. Ils ont voté pour avoir un gouvernement honnête et intègre. Nous avons fait des erreurs et nous en ferons d'autres, mais, en gros, l'honnêteté et l'intégrité ont fait la marque du gouvernement. Les électeurs ont voté pour mettre fin aux querelles de compétences et, d'ailleurs, le premier ministre est fier d'avoir promis de mettre l'accent sur la création d'emplois et de se tenir à l'écart du piège des dissensions constitutionnelles. Posons-nous la grande question: où, ailleurs dans le monde, préférerait-on vivre?

[Français]

Est-ce que c'est vrai ou si ce n'est pas vrai que le Canada, malgré tous nos problèmes et tous nos défis, c'est le meilleur endroit au monde pour élever nos enfants?

[Traduction]

C'est le meilleur pays du monde où grandir. C'est le meilleur pays du monde pour les soins médicaux. C'est le meilleur pays du monde pour se construire un avenir.

Nous sommes sur le point d'éliminer les frontières au commerce interprovincial. Mon collègue, le secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, travaille d'arrache-pied à des projets visant à redonner des emplois aux Canadiens.

Le député réformiste riait tout à l'heure de notre programme d'infrastructure. Je peux lui dire que dans les locaux de l'Union internationale des journaliers, dans ma circonscription, lorsque les travailleurs se font appeler pour un emploi, ils ne rient pas. Ils remercient Dieu qu'un gouvernement libéral ait eu le bon sens de créer un programme de création directe d'emplois pour redonner du travail aux Canadiens. C'est un exemple du fédéralisme fonctionnel: un pays qui redonne du travail à ses citoyens.

En cinq mois, le ministre responsable du programme d'infrastructure a signé avec toutes les provinces des ententes portant sur des projets précis, ce qui n'est pas une mince affaire.

[Français]

On sait, à partir d'aujourd'hui, que selon l'OCDE, notre économie s'accroîtra de 3,9 p. 100. C'est presque 4 p. 100. Et l'année prochaine, on attend une croissance économique de 4,5 p. 100.

(1540)

Les Canadiens et les Canadiennes n'ont pas eu tort d'élire notre gouvernement parce qu'ils ont compris le message. C'est la relance économique qui va faire fonctionner notre pays. La meilleure manière d'assurer l'unité du Canada est de renforcer les liens qui nous unissent, pas ceux qui nous séparent.

Si vous aviez la possibilité de parler pendant une demi-heure avec ma fille de 7 ans, vous verriez qu'elle partage les mêmes rêves, les mêmes espoirs que tous les enfants au Canada. Oui, on peut mettre l'emphase sur les choses qui ne marchent pas. Même si ce n'était pas le Canada, il y aurait encore et toujours des chicanes entre les niveaux de gouvernement. Si ce n'est pas le gouvernement fédéral, c'est la ville contre la province, si ce n'est pas le gouvernement fédéral, c'est la ville contre les régions. C'est dans la nature de l'être humain de trouver qu'il y a quelque chose qui ne va pas. C'est évident, c'est normal et c'est même voulu.

De là jusqu'à dire que le gouvernement fédéral, c'est fini, que cela ne marche plus, non seulement c'est un manque de logique, mais. . .

[Traduction]

. . .c'est refuser à chaque citoyen du Canada la possibilité de satisfaire son désir réel de pouvoir tirer le maximum de ses capacités.

[Français]

Ils ne veulent pas que nous venions ici pour pleurnicher, nous chicaner, ergoter. Quelle que soit l'expression, ils veulent que nous venions ici pour faire travailler le pays.

Vous pouvez toujours chercher une autre excuse pour ne pas le faire marcher, comme nous le voyons dans la proposition mise de l'avant aujourd'hui.

[Traduction]

Nous n'avons pas pour objectif de nous laisser entraîner dans le marécage constitutionnel, mais plutôt de travailler avec les Canadiens comme nous l'avons fait. La semaine dernière, nous avons conclu la toute première entente environnementale pour la région de l'Atlantique engageant Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard à travailler ensemble avec le gouvernement fédéral pour opérer des changements écologiques positifs. Voilà ce que c'est qu'un gouvernement efficace.

Nous n'avons pas besoin de modifications à la Constitution et nous n'avons pas besoin de la rhétorique négative du Parti réformiste. Nous avons plutôt besoin d'un plan visant à redonner du travail aux Canadiens pour bâtir un pays meilleur.

Nous ne voulons pas qu'un groupe linguistique l'emporte sur un autre. L'unilinguisme anglais n'est pas la solution. Quand un groupe linguistique réussit au détriment d'un autre, le Canada ne marche pas bien. Le Canada marche bien quand les membres de chaque groupe linguistique ont le droit et la chance de devenir tout ce qu'ils veulent être. Voilà en quoi consiste la vision du Canada du Parti libéral. Quand je peux siéger à la Chambre des communes en compagnie d'un immigrant chinois venu s'établir dans notre pays, qui est maintenant devenu secrétaire d'État chargé des affaires de l'Asie et du Pacifique et qui est fier de


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parler plus d'une langue, je me dis que c'est cela faire progresser le Canada et mettre à profit le talent de ses citoyens.

Nous avons un plan d'action à caractère économique et social. Nous nous sommes donné pour mission de remédier aux maux du Canada. Si nous restons dans la voie droite et étroite que le premier ministre nous a tracée. . .

[Français]

. . .si nous mettons l'emphase sur la création d'emploi et la croissance économique, il est évident que les Canadiens vont travailler, le Canada va travailler et c'est là notre but dans tout ce débat sur l'unité canadienne.

[Traduction]

Mme Deborah Grey (Beaver River): Madame la Présidente, la députée de Hamilton-Est a laissé entendre à plusieurs reprises que nous étions des instruments aux mains du Bloc québécois, que nous malmenions le fédéralisme, que nous tenions un discours négatif et que nos discussions sur la Constitution ne mènent nulle part.

Permettez-moi de m'exprimer très clairement de sorte que tous les députés puissent comprendre. Nous ne parlons pas de la Constitution proprement dite. Nous parlons du fédéralisme, en l'occurrence. C'est de cela dont il faut discuter à la Chambre. Il y a certainement une différence entre des querelles sur la Constitution et d'autres sur le fédéralisme. Personne à la Chambre, je l'espère, ne dirait que le Canada est un pays tout à fait horrible. Ce n'est tout simplement pas le cas.

(1545)

Des observations en ce sens sont venues d'en face. Nous croyons tellement au Canada que nous sommes venus ici pour défendre ses intérêts et que nous avons dû, pour cela, renoncer à d'autres carrières; la politique n'est pas notre gagne-pain depuis de très nombreuses années. Nous demandons une discussion ouverte et franche sur cette question, pas le genre de diatribes auxquelles nous avons eu droit. Ce n'est pas acceptable.

Permettez-moi de rappeler à la députée en quoi consiste notre position sur le bilinguisme, parce que, de tous les députés du parti ministériel, c'est probablement elle qui a le plus parlé de notre programme. La députée connaît très bien la position de notre parti au sujet du bilinguisme officiel. Contrairement à ce qu'elle prétend, nous ne préconisons pas l'usage exclusif de l'anglais.

Permettez-moi de donner à la députée l'occasion de dire qu'un débat à ce sujet a quelque chose de positif. C'est peut-être malheureux que quelqu'un d'autre ait eu l'idée avant eux.

La députée de Brant dit qu'elle est perplexe au sujet des élections et souligne à quel point les gens n'ont pas parlé de la Constitution. La situation a beaucoup changé. J'aimerais que la députée nous dise ce qu'elle en pense. Nous n'en avons pas parlé longuement parce que l'Accord de Charlottetown et celui du lac Meech étaient des souvenirs trop récents et douloureux. Nous en avons toutefois discuté durant la campagne électorale de l'automne dernier.

La députée peut-elle commenter le fait que les choses ont bien changé? Il y avait huit députés bloquistes à la Chambre avant les dernières élections, et il y en a maintenant 54.

La députée sait pertinemment que les libéraux ont mordu la poussière au Québec lors des dernières élections. La situation dans cette province est maintenant bien différente de ce qu'elle était l'automne dernier, des élections y étant imminentes.

La députée peut-elle nous expliquer très brièvement, durant le temps qu'il lui reste pour les questions et observations, pourquoi le parti d'en face s'acharne à défendre le statu quo au regard du fédéralisme, comme sa collègue de Brant l'a dit plus tôt? Pourquoi la discussion est-elle empreinte de sectarisme? Pourquoi ne pouvons-nous pas simplement discuter de cette question de manière à procéder ensemble à l'édification d'un nouveau pays, projet auquel voudraient participer les bloquistes et les autres Québécois?

Mme Copps: Madame la Présidente, je suppose que je m'emporte parce que l'avenir de mon pays me tient à coeur. Je crois qu'il en va de même de la députée. Elle aime son pays. Elle veut qu'il reste uni. Mais je suis d'avis que les politiques que son parti et elle proposent auraient malheureusement l'effet contraire.

Ils ont présenté une motion il y a seulement quelques semaines en vertu de laquelle le pays serait essentiellement divisé en zones linguistiques où l'anglais serait la seule langue de toutes les provinces, à l'exception du Québec, et où le français serait la seule langue du Québec, à l'exception de l'ouest de Montréal. Ils renforçaient cette idée que ce qui allait maintenir le pays ensemble était une sorte de ghettoïsation linguistique.

J'estime que le résultat inattendu de leurs propositions est d'envoyer le même message que celui du Bloc québécois qui incite les Québécois à se séparer.

Le message du Bloc, c'est que le Québec peut fonctionner sans le Canada. Le malheureux message des propositions linguistiques du Parti réformiste, c'est que le Canada fonctionnerait bien mieux sans le Québec. C'est ça le message. La différence entre ces propositions et les politiques du Parti libéral et du gouvernement du Canada, c'est que nous croyons fermement que deux des fondements de notre pays sont le principe des deux peuples fondateurs et l'apport des immigrants venus par la suite.

Mes arrière-grands-parents venaient d'Irlande. En principe, ils n'étaient ni anglophones ni francophones, mais du côté des républicains d'Irlande.

La réalité, c'est que tous ces gens différents se sont unis pour former une force incroyable, un véritable actif pour notre pays. En reconnaissant les droits fondamentaux des deux peuples fondateurs, nous soulignons l'importance d'accorder les mêmes possibilités et l'égalité des chances à tous les citoyens du pays. J'estime qu'il est important de comparer notre cheminement à celui des États-Unis qui n'ont pas adopté de principe semblable.


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Ils disaient essentiellement à leurs minorités de s'assimiler, d'entrer dans le melting-pot pour le bien de tous.

La Constitution canadienne a donné naissance à une démarche coopérative où les différentes régions du pays avaient le droit de parler des langues différentes pour faire marcher le système.

(1550)

Je pense que c'est la différence fondamentale entre la politique linguistique du parti d'en face et la politique des deux peuples fondateurs du gouvernement libéral.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Madame la Présidente, la ministre a parlé avec beaucoup d'émotion, mais je dis que l'équilibre, c'est la passion et la raison. Où se situaient ses émotions lors de l'Accord du lac Meech, lors de l'entente de Charlottetown? Je vais parler avec ma raison.

La conjoncture est arrivée de telle sorte qu'étant un peuple, nous ne sommes pas dans la même maison. Nous sommes un peuple à qui on dit: Passe par la petite porte. Ce que nous réclamons, nous voulons tout simplement être un peuple, avoir notre maison et laisser l'autre maison à ceux qui la veulent. On dit que c'est beau le Canada. Bravo! C'est beau, c'est vrai que c'est beau. Le Québec également c'est beau. Mais ensuite, on pourra dire que les Canadiens et les Québécois sont de meilleurs amis. On pourra vivre en bons voisins, on pourra être heureux et on pourra fonctionner ensemble.

Tantôt, j'entendais les députés du Parti réformiste dire qu'ils veulent un autre Canada. Cela fait 15, 20 et même 50 ans qu'on veut un autre Canada, et on ne peut pas l'avoir. Alors, je lui pose une brève question: Nous voulons devenir souverains, vous autres, vous dites: Non, non, non. Un enfant de 18 ans qui demande à partir de la maison, est-ce que son père va tout le temps le retenir avec des biscuits? Pourquoi veulent-ils tant nous retenir? C'est la question que je pose.

Mme Copps: Madame la Présidente, je n'offre pas de biscuits ni de bonbons et je pense que c'est insultant pour les Québécois et les Québécoises de leur faire croire que si on leur offre des bonbons, ils vont rester au Canada.

On doit se poser la question. D'abord, il parle d'une bonne amitié, oui, on a de bonnes amitiés à travers ce beau pays. Si jamais vous avez vu un mari et une femme qui avaient une bonne communication, qui étaient les meilleurs amis mais qui décident de se séparer et finalement de se divorcer, je ne sais pas si vous avez déjà vu le film The War of the Roses, mais les personnes les plus logiques au monde, quand l'émotion fait surface, c'est la passion et la raison.

Deuxièmement, quand le chef de l'opposition s'est rendu à Washington, il a dit que nous vivions selon le meilleur système social au monde. Il a dit aux Américains qu'il veut lui-même retenir un passeport américain pour son fils. Il a dit que sa femme veut garder un passeport américain pour son fils pour qu'il ait la double citoyenneté parce qu'elle est républicaine et fière de l'être. C'est lors d'une entrevue qu'il a accordée à Washington qu'on a appris ces faits. Il a aussi affirmé que malgré tous les mots utilisés à l'égard des Québécois-un Québécois est premier ministre et un autre est chef de l'opposition-malgré toutes les paroles qui ont été prononcées dans toute l'histoire du Canada et des propos qui ont été tenus durant la période d'avant la révolution tranquille, maintenant, vous, Québécois et Québécoises qui vivez dans un Canada uni et qui êtes placés pour affronter les vrais défis du XXIe, qui avez une qualité d'entrepreneurship qui est inégalée à travers ce pays, il faut en profiter. Vous avez aussi des qualités de. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette d'interrompre l'honorable ministre. Nous reprenons le débat avec l'honorable député de Roberval.

M. Michel Gauthier (Roberval): Madame la Présidente, nous venons d'assister sans l'ombre d'un doute à la présentation d'une vision du Canada que j'appellerais «le Canada des illusions.» Mme la vice-première ministre est spécialiste de ce genre de prestidigitation qui nous présente des choses sous un couvert apparemment tout à fait intéressant, tout à fait acceptable, mais qui cache des réalités qu'il convient de nommer aujourd'hui, et nous sommes ici pour en parler.

(1555)

Le Canada de Mme la vice-première ministre, on s'en rappellera pas plus tard qu'hier, c'est le Canada d'une vice-première ministre qui nie, à toutes fins utiles, au chef de l'opposition officielle en cette Chambre, et à une députée dont le père s'est battu sur les fronts en Europe, une vice-première ministre qui nie même ce droit de déposer des couronnes de fleurs à des Québécois qui sont morts parce qu'ils partageaient le même idéal que d'autres combattants d'autres nations.

Le Canada d'illusion de Mme la vice-première ministre est ce Canada où les francophones hors Québec, ceux de Kingston, notamment, sont obligés de se battre pour obtenir des écoles françaises adéquates, des écoles françaises avec de l'eau courante et des salles de toilette.

En 1994, ce beau Canada d'illusion est ce Canada où les francophones hors Québec doivent se battre pour ce qui est nécessaire et considéré comme nécessaire depuis des années, dans tous les pays civilisés. Le Canada d'illusion de la vice-première ministre est ce Canada où chacun des citoyens naît avec une dette de 18 000 $ sur les épaules. Voilà le Canada, le beau grand Canada d'illusion de Mme la vice-première ministre.

Le Canada d'illusion de la vice-première ministre est celui où les citoyens naissent avec une perspective d'emploi qui est à peu près la plus mauvaise des pays industrialisés, un taux de chômage de 12 à 14 p. 100, dépendant des conjonctures, et 20 p. 100 dans une région comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean, qu'elle a citée à plusieurs occasions dans son intervention.

Oui, nous allons en parler, du Saguenay-Lac-Saint-Jean, nous allons en parler des jeunes qui veulent travailler dans ce pays et nous allons en parler de la vision idéaliste du beau Canada de Mme la vice-première ministre.

Ce Canada, dont elle nous parlait avec autant de sincérité, apparamment, tout à l'heure, est ce pays où la Constitution a été rapatriée, en 1982, sans l'accord de la seule province à majorité francophone de ce pays. C'est dans ce pays, ce beau pays, où on a imposé à une minorité extrêmement importante qui fait la presque totalité de la population de toute une province, où on a imposé une Constitution dont on ne voulait pas, une Constitution


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qui s'est tramée dans le dos du Québec. Ce Canada d'illusion est un Canada qui est le résultat du travail odieux de plusieurs représentants de ce gouvernement à travers les années. Et nous allons revoir l'histoire.

Puisqu'on veut en entendre parler, laissons de côté les revendications traditionnelles et légitimes de la majorité francophone du Québec, laissons de côté toutes ces revendications pour regarder d'un peu plus près le rôle obscur, le rôle triste qui a été joué par des ténors de ce gouvernement, au cours de notre histoire récente. À quel moment les relations se sont-elles envenimées le plus au Canada?

Rappelons-nous le règne de Pierre Elliot Trudeau. Rappelons-nous cette période de très grande centralisation, où le premier ministre, de toute évidence, avait décidé que sa conception du Canada, et appuyé d'ailleurs par ses colllègues, était un Canada où les pouvoirs devaient être centralisés et où les provinces n'étaient que des gouvernements d'ordre secondaire.

Vous voulez connaître un des problèmes majeurs qui a fait en sorte que nous sommes aujourd'hui, en cette Chambre, à débattre d'une motion, et où de toute évidence, le beau grand Canada de Mme la vice-première ministre est en train de s'effriter? Une des premières raisons, c'est l'attitude centralisatrice, odieuse, ignorante du fait francophone, qui a été celle du premier ministre Pierre Trudeau dans un passé récent.

(1600)

Madame la Présidente, je vous rappelerai qu'en d'autres circonstances il a été possible de penser que dans ce Canada que l'on voulait idéal, il y aurait eu une place convenable et acceptable pour le Québec. Mais en toutes circonstances, je vous dirai, c'est toujours arrivé à des périodes où l'électorat s'était débarrassé d'un gouvernement libéral. Jamais, jamais quand le Canada a été gouverné par le Parti libéral, jamais dans notre histoire récente il n'y a eu de paix politique. Les gens aujourd'hui pleurent en essayant de nous dire combien c'est dommage que les séparatistes qui sont dans cette Chambre, élus démocratiquement il faut le dire, combien c'est dommage que ces gens-là viennent présenter une position politique différente de la leur.

C'est de se fermer les yeux que de ne pas reconnaître le rôle épouvantable qui a été joué par les différents gouvernements libéraux qui se sont succédé dans ce parlement et qui ont nié l'existence même du fait français au Québec. Des gouvernements qui ont toujours eu une tendance centralisatrice qui ne se prend plus au Québec. Est-ce que c'est clair? Le Québec ne prend plus l'attitude centralisatrice auquelle ces gens-là croient.

Vous vous souvenez de l'Accord du lac Meech, tout le monde s'en souvient. Cela a été un moment politique extrêmement important pour le Québec. Oui, les Québécois ont donné au Canada une dernière chance de se refaire une beauté. Oui, les Québécois avaient réussi à négocier avec les autres provinces, avec les autres régions du Canada et avec le gouvernement fédéral, des conditions minimales. Oui, on ne peut nier qu'il y a eu un effort extraordinaire qui a été fait par l'ensemble des Québécois pour accepter les cinq conditions qui ont présidé à l'Accord du lac Meech. Même les premiers ministres, je vous le rappellerai, s'étaient engagés, au nom de leur province, à vendre dans leur région respective ces exigences comme étant acceptables.

Nous allons voir ce qu'elles sont, ces exigences. Reconnaissance du Québec comme société distincte, et rôle de promotion de ce caractère distinct à la Législature du gouvernement du Québec. Était-ce étonnant, scandaleux, odieux qu'on demande que les francophones du Québec, qui forment un peuple, puissent être reconnus comme étant une société distincte? Cela m'apparaît comme une condition élémentaire, une condition de base.

Reconnaissance du pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral, mais avec droit de retrait et pleine compensation pour les gouvernements provinciaux, parce que la propension malheureuse de l'État central à venir envahir les champs de juridiction provinciaux-cette propension malheureuse-devait être balisée pour éviter que dans l'avenir cette société puisse s'exprimer come elle souhaitait le faire.

Participation du Québec à la nomination de trois juges de tradition civiliste pour la Cour suprême; enchâssement de l'entente Cullen-Couture dans la Constitution, c'est-à-dire le pouvoir pour le Québec de contrôler son immigration et protéger la nature même du peuple québécois; le consentement unanime des provinces lors des réformes de certaines institutions fédérales. Voilà des conditions qui apparaissaient à tout le monde, au Québec comme à plusieurs personnes au Canada anglais, tout à fait acceptables pour le Québec, conditions très minimales, mais au moins conditions autour desquelles le dialogue était possible.

Savez-vous qui a fait en sorte que les premiers ministres sont revenus sur leur signature? Regardons les grands responsables de l'échec de cette dernière belle occasion que nous a fournie l'histoire d'atteindre ce Canada que décrivait madame la vice-première ministre comme un Canada merveilleux.

(1605)

Vous vous souvenez d'un dénommé Clyde Wells; ce n'est pas tout à fait un bloquiste, ce n'est pas tout à fait un péquiste, ce n'est pas non plus un réformiste. Clyde Wells c'est un rouge, madame la Présidente, c'est un rouge comme les rouges d'en face.

Vous connaissez M. McKenna? McKenna, ce n'est pas un bloquiste, McKenna ce n'est pas un réformiste, McKenna, c'est un rouge.

Vous vous souvenez de Mme Carstairs-elle n'était pas au pouvoir, elle-Sharon de son prénom. Elle n'était pas au pouvoir Mme Carstairs, mais quel rôle a-t-elle joué dans l'impossibilité d'accepter l'Accord du lac Meech? Mme Carstairs, ce n'était pas une bleue, ce n'était pas une bloquiste, ce n'était pas une péquiste, ce n'était pas une réformiste, c'est encore une rouge.

Enfin, on se souviendra du rôle extraordinaire joué par le député de Churchill, un rouge lui aussi, madame la Présidente, qui a utilisé des moyens techniques pour faire en sorte qu'on ne puisse accepter l'Accord du lac Meech dans sa province.

Voilà les personnes, les acteurs qui ont joué le rôle le plus déterminant dans le rejet de l'Accord du lac Meech. Ce sont des rouges, ce sont des libéraux qui, le soir même du bris de l'Accord, le soir même du congrès libéral, faisaient l'accolade au chef actuel, le premier ministre, M. Jean Chrétien. Voilà qui sont ces personnes qui ont fait en sorte que les cinq conditions accep-


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tables pour toutes les parties, pour que le Canada continue d'être un pays viable, voilà les vrais responsables de l'échec dans lequel on se trouve aujourd'hui.

Ces mêmes personnes vont venir pleurer dans cette Chambre, vont venir faire la leçon aux réformistes, faire la leçon aux bloquistes, faire la leçon à tout le monde sur leur belle vision du Canada. Ces gens-là bercent le peuple d'illusions. C'est clair ça. Vous bercez le peuple d'illusions. Cessez de vous fermer les yeux. Regardez la réalité telle qu'elle se présente dans le Canada.

Il ne doit pas y avoir juste des gens «disconnectés» de la réalité de ce côté-là. Il doit y avoir des personnes qui sont capables d'être sensibles aux réalités des francophones. Il doit y avoir des personnes qui sont encore capables de comprendre que la démocratie a joué au Québec, que le Bloc québécois est ici maintenant pour une raison très claire.

On a fait une campagne électorale pour faire la promotion de la souveraineté du Québec et j'ai des nouvelles pour les rouges d'en face: on va faire la promotion de la souveraineté du Québec sur toutes les tribunes, ne vous en déplaise, sur toutes les tribunes qu'on décidera de choisir. On va utiliser tous les arguments qui sont à notre portée pour faire comprendre, non seulement aux Québécois, mais à d'autres pays, à des gens de l'extérieur et à d'autres personnes au Canada, comment ce projet, éminemment démocratique, s'appuiera sur une démarche sérieuse, responsable, démocratique, correcte, respectueuse des gens, des personnes, des réalités.

Cette démarche, elle sera à l'image de nos interventions ici à la Chambre. Elle sera à l'image de la collaboration que nous avons toujours accordée pour permettre à ce Parlement de fonctionner comme il se devait.

Je terminerai en vous disant que des leçons de démocratie, on n'en a pas à recevoir de ce côté-là. S'il y a un endroit où la minorité anglophone est bien traitée, est respectueusement considérée et fait partie entière, intégrante d'une société au Canada, c'est au Québec.

Quel autre endroit dans ce pays peut se permettre, peut se vanter de donner à sa minorité un réseau complet de commissions scolaires, des écoles, des hôpitaux, des institutions de santé, non pas uniquement à leurs bénéfices, mais des institutions dirigées par les anglophones du Québec?

(1610)

Oui, nous respectons les anglophones du Québec. Oui, nous avons l'intention de continuer à dresser des ponts avec cette communauté qui fait partie intégrante de la force actuelle du Québec.

Permettez-moi de vous dire que les gens d'en face auraient bien intérêt à faire en sorte qu'il en soit de même aussi chez eux. Nous n'avons de leçon de démocratie et de respect des autres à recevoir de personne. Nous faisons un travail éminemment acceptable au plan démocratique et nous entendons mener à bien ce projet. Non pas qu'il n'y aurait pas eu, à une certaine époque, d'autres solutions, mais nous entendons mener à bien ce projet parce qu'il y a, de l'autre côté, les vrais responsables de tout le gâchis constitutionnel qu'a connu le Canada depuis les années 1980.

Les deux premiers ministres libéraux qui se sont succédé ont fait en sorte que la situation est devenue intenable dans ce pays. Ils en sont les grands responsables et ils continuent de le nier. On s'est même offert un ineffable premier ministre qui se promenait avec 54 députés souverainistes élus dans son Parlement en disant: «Il ne sera pas question de Constitution durant mon mandat. Il n'y a pas de problème constitutionnel au Canada.» Il faut le faire, madame la Présidente.

Tant qu'on aura des gens qui auront les yeux fermés de ce côté-là de la Chambre, tant que nous assisterons, jour après jour, à des efforts de centralisation, comme c'est le cas depuis que nous avons été élus dans cette Chambre, il y a quelques mois; tant que nous assisterons à d'odieuses tentatives de rapatrier des pouvoirs au gouvernement central; tant que nous assisterons à des remises de conférences fédérales-provinciales parce que non seulement le Québec mais la plupart des gouvernements provinciaux ne peuvent plus tolérer les envahissements de juridiction que ces gens-là leur font subir; tant que nous serons dans un contexte politique où les gens d'Ottawa ne descendront pas pour comprendre la réalité de chacun des milieux au Canada, non pas seulement celle du Québec, mais celle des autres régions du Canada; tant que nous aurons à la place de dirigeants, des gens aussi peu soucieux de ce qui se produit dans les régions du Canada, nous aurons des offensives centralisatrices, nous aurons des provinces, des premiers ministres et des citoyens qui se rebelleront, et ils auront à régler ces problèmes dans le Canada qui sera le leur, parce que le Québec aura décidé démocratiquement de faire ses propres choix, à ce moment-là, j'en ai la certitude,

[Traduction]

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Madame la Présidente, la vice-première ministre a dit qu'elle avait été peinée à la vue du chef de l'opposition qui déposait une gerbe, mais elle a défendu son droit de poser ce geste parce qu'elle croit en un pays démocratique. Je dois vous dire que j'ai éprouvé la même peine et la même souffrance quand je suis allée au monument aux morts pour constater que le premier groupe de députés était celui du Bloc, des séparatistes.

Soit! Des séparatistes ont perdu des parents durant la guerre, mais il s'agissait d'une guerre où le Canada combattait en tant que nation unie pour préserver une nation unie. Bien que j'aie défendu, dans ma circonscription, le droit du Bloc de former le parti de l'opposition, ça me désole de voir ces gens qui n'hésiteraient pas à détruire ce pays.

Je voudrais ajouter que le chef du Parti réformiste doit s'enorgueillir de l'exploit qu'il a accompli aujourd'hui. Je me demande ce qui se passe dans les coulisses de l'opposition: on se donne le mot, on parle stratégie, on collabore, on tire à pile ou face, le Québec sans le Canada ou le Canada sans le Québec. Madame la Présidente, quand vous regarderez les nouvelles ce soir, vous verrez le député d'en face élever le ton, rougir, réclamer à cor et à cri plus de droits, plus de droits pour le Québec, et vous constaterez combien il est difficile de défendre, dans ma circonscription, son droit de siéger dans cette enceinte.


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(1615)

Nous devons tout cela au chef du Parti réformiste qui a fait preuve de beaucoup de légèreté en déchaînant les passions avec ce débat. Si le député d'en face est respectueux des droits des peuples, je lui pose la question suivante: pourquoi ignore-t-il et refuse-t-il de respecter le droit des autochtones du Québec à acquérir leur souveraineté et leur autonomie gouvernementale?

[Français]

M. Gauthier (Roberval): Madame la Présidente, que dire? Que dire! La leçon de démocratie qui nous est servie par une députée qui, j'en suis sûr, ne le fait pas de mauvaise foi, mais elle omet, dans son jugement, dans sa considération, tout le rôle dont j'ai parlé que ses chefs, ses premiers ministres, ses ministres ont joué.

Ma collègue me dit d'abord qu'elle a été affligée lorsqu'elle a vu le chef de l'opposition rendre hommage aux combattants décédés. Premièrement, le Canada qu'ont défendu ces gens n'était pas le Canada qui a été trituré, qui a été arrangé, qui a été spolié, qui a été changé, qui a été torturé, qui a été modifié sans le consentement du Québec. La députée devrait comprendre cela. Le Canada que M. Trudeau, son ancien chef et ancien premier ministre, nous a légué, ce Canada dans lequel actuellement les Québécois ne se reconnaissent plus, ce n'était pas le même Canada à cette époque. N'oublions pas cela.

Niera-t-on, quelle que soit notre option politique, le droit de se recueillir sur la tombe de ceux et celles qui nous ont précédés, et qui ont combattu pour préserver les valeurs démocratiques? Niera-t-on ce droit? Est-ce qu'on sera dans un pays où on s'indignera que nous puissions rendre hommage aux nôtres qui se sont battus pour la démocratie?

Nous souhaitons plus que tout autre que le respect des valeurs démocratiques soit profondément inscrit et enraciné dans ce Parlement, parce que ce respect des valeurs démocratiques nous sera utile un jour pour que nous puissions mener à bien le projet qui nous tient à coeur.

Concernant les droits des autochtones, j'aimerais, sans aller très loin sur le sujet parce que le temps nous manque, dire à la députée que si elle était vraiment au fait des questions autochtones, elle réaliserait qu'au Québec, c'est l'endroit, dans tout le Canada, où les autochtones ont et de loin le meilleur niveau de vie. Et de loin. Elle réaliserait également qu'au Québec, c'est l'endroit où les autochtones, en tout premier lieu au Canada, ont obtenu des reconnaissances gouvernementales qu'ailleurs encore ils n'espèrent même pas.

Elle oublie qu'au Québec, plus des deux tiers du territoire du Québec a été négocié, discuté. Il y a eu une entente avec les Cris de la Baie James, avec les inuits, une entente dans laquelle il y a une parfaite harmonie, signée par toutes les parties. Pas unilatéralement comme les ententes qu'ils ont déjà imposées, mais une vraie entente signée par toutes les parties et qui réglait une série de problèmes qui ne sont réglés nulle part ailleurs au Canada.

(1620)

Le Québec a été l'endroit, dans ce Canada, où le dialogue avec les populations autochtones a été le plus large, le plus ouvert, le plus consensuel, le plus intéressant de toutes les parties du Canada.

J'inviterais la députée à parler au ministre des Affaires autochtones, à essayer de discuter avec lui, et pour inviter tous les autres endroits au Canada à faire, pour leurs communautés autochtones, ce que le Québec a fait. Et cela sera un grand progrès.

[Traduction]

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Madame la Présidente, le député du Bloc peut bien râler, crier et faire du bruit, mais cela ne changera rien. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je m'excuse d'interrompre. Lorsque je donne la parole à un député, il n'est pas nécessaire de me dire de quel côté il est. Je vois les députés se lever et je sais qui se lève en premier. Veuillez continuer.

M. Harvard: Madame la Présidente, je crois que je vais reprendre au début.

Le député du Bloc peut toujours râler, rager, pointer du doigt et devenir aussi rouge qu'il le voudra, les Canadiens le reconnaîtront pour ce qu'il est. Il joue pour la galerie et tout ce qu'il dit n'a pas l'ombre de la crédibilité.

Malheureusement, le chef du Parti réformiste est le grand responsable du spectacle qui se déroule à la Chambre cet après-midi, puisque c'est lui qui a tendu ce piège, un piège que seul le Bloc québécois pouvait tendre.

Que veut le Bloc? Il veut que nous nous chamaillions au sujet de la Constitution. Il veut que nous nous disputions au sujet du fédéralisme. Le Bloc veut que nous nous crêpions le chignon au sujet du Canada, et c'est exactement ce que nous avons fait tout l'après-midi. Nous nous sommes disputés au sujet de ce pays, le plus merveilleux pays du monde, et le chef du Parti réformiste est le grand responsable de ce théâtre.

Quant au Bloc, il profite de la démocratie canadienne et de notre générosité. Dans quel autre pays permettrait-on au chef de l'opposition de prêcher le séparatisme et de faire de son mieux pour détruire le pays?

Je dirai au député du Bloc qui vient de prendre la parole que, s'il vivait dans un autre pays, il se retrouverait derrière les barreaux. Il serait en prison. Étant donné le genre de pays dans lequel nous vivons, les droits démocratiques permettent au député de répandre l'infâme séparatisme.

Madame la Présidente, je reconnais au député le droit de dire ce qu'il dit, mais qu'il sache bien que nous nous opposerons à lui chaque fois que nous en aurons l'occasion. Nous le battrons à son propre jeu, car, à la fin, ce sera la démocratie qui vaincra au Canada. Le séparatisme sera rejeté. Nous devons battre le Bloc. Nous allons battre ses 54 députés, parce que ce pays est un pays magnifique et que tous les Canadiens et les Québécois en sont


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conscients. Les bloquistes pourront faire tout ce qu'ils voudront, mais c'est nous qui allons gagner la bataille.

[Français]

M. Duceppe: J'invoque le Règlement, madame la Présidente.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je voudrais clarifier un point. Il y a 20 minutes plus 10 minutes. Il y a des questions ou des commentaires.

Une voix: Il reste deux minutes.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Il ne reste pas deux minutes, je regrette, j'ai calculé le temps avec beaucoup d'exactitude. Sur un recours au Règlement, je reconnais l'honorable député de Laurier-Sainte-Marie.

M. Duceppe: Madame la Présidente, je demanderais à cette Chambre s'il y a consentement unanime, comme on l'a fait pour un député du Parti libéral, ce matin, alors qu'on a donné notre consentement afin qu'il puisse répondre. On l'a fait ce matin avec beaucoup de générosité.

(1625)

Alors, j'imagine qu'il y a beaucoup de générosité, comme vient de le dire mon honorable collègue de l'autre côté de la Chambre, et qu'on accordera 30 ou 45 secondes, comme vous l'avez fait ce matin, je pense, afin que le député qui venait de prononcer un discours puisse effectivement répondre à l'intervention qui vient d'être faite. Je demande donc le consentement unanime.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Est-ce que le député a le consentement unanime de la Chambre pour que le député de Roberval puisse répondre?

Des voix: Non.

[Traduction]

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra): Madame la Présidente, après l'atmosphère apocalyptique des cinq dernières minutes qui m'ont rappelé un opéra de Wagner exécuté par un orchestre itinérant dans une petite ville de province, je voudrais revenir au sujet du débat, à savoir la motion présentée par le chef du Parti réformiste et l'amendement proposé par le leader du gouvernement à la Chambre. Cela concerne la question de la réforme constitutionnelle actuelle et la question du fédéralisme.

Je reviendrai sur un point soulevé par le Parti réformiste qui critique le gouvernement de n'avoir pas su définir ce que le chef du Parti réformiste a appelé un programme constitutionnel pour le référendum au Québec.

Il est un temps où c'est le moment d'aborder les questions constitutionnelles dans toute société, mais ce ne l'est pas dans la plupart des cas. Les seules fois où ça réussit, c'est en période d'euphorie nationale, quand il y a consensus national, en principe à la suite d'une grande victoire militaire ou d'une grande révolution. Nous n'avons eu ni l'une ni l'autre au Canada, et donc les changements ont dû être apportés sur la base d'un ajustement pragmatique effectué à petits pas. Cela a relativement bien fonctionné.

Le problème fondamental du programme proposé par le chef du Parti réformiste est qu'il y a, comme le disait Franklin Roosevelt, trop de «si». Si un certain parti devait remporter certaines élections dans une province, si la question devait ensuite être mise à un référendum, s'il devait remporter ce référendum, s'il devait ensuite décider que la simple majorité était suffisante pour entamer des négociations et si, enfin, l'autre parti décidait lui-même que les chiffres étaient suffisants pour donner sa crédibilité au vote et pour justifier des négociations en retour.

C'est pure folie de vouloir qu'on définisse un programme constitutionnel dans une situation aussi hypothétique que celle-ci. Comme le juge Owen Roberts, de la Cour suprême des États-Unis, l'a dit: «Une constitution, ce n'est pas un billet d'excursion en train valable pour un voyage donné à une époque donnée et pour une destination donnée.» Une constitution est faite pour durer.

On a l'impression que l'on parle des questions constitutionnelles pour éviter, comme du temps de Mulroney, de se pencher sérieusement sur les problèmes économiques. Nous ne voulons plus de ces cirques ambulants de Meech et de Charlottetown. À chaque fois, ça a été un échec et ça n'a pas réglé les problèmes de l'époque.

Ce que je reproche au programme constitutionnel du Parti réformiste, c'est l'absence d'une vision d'ensemble cohérente; on nous offre une série de réponses ponctuelles à un problème particulier et les avantages politiques perçus semblent primer.

J'ai pris note des critiques formulées par le Parti réformiste à l'égard du projet de loi C-18 et je suis d'accord avec certaines d'entre elles. Cependant, je déplore l'absence totale d'idées de fond sur la réforme électorale qui aillent au coeur même du processus constitutif et qui soient plus importantes que les processus constitutionnels comme tels.

Je me demande aussi si l'accent qui a été mis sur l'aspect constitutionnel des propositions, du référendum, des initiatives et de la révocation ne camoufle pas un manque de réflexion plus fondamentale et plus poussée sur des questions plus importantes, comme les relations entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif et la nécessité d'avoir un pouvoir fort, qu'il soit législatif ou judiciaire, pour compenser le pouvoir exécutif impérial que l'on retrouve encore aujourd'hui dans les systèmes constitutionnels issus de Westminster.

Pour terminer, en ce qui concerne l'autonomie gouvernementale des autochtones, je trouve qu'il y a beaucoup d'ambiguïtés à tirer au clair et je pense que cela est peut-être symptomatique de divisions politiques au sein d'un parti.

Mais revenons à l'optique adoptée par le gouvernement libéral face au Québec. Je pense que, à ce stade, nous pouvons dire qu'il y a certains paramètres et qu'il faut les nommer. Le gouvernement fédéral possède la totalité du pouvoir constitutionnel de contrôler et de déterminer la tenue d'un référendum par un


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gouvernement provincial sur un sujet tel que la séparation du système fédéral.

(1630)

Pour des raisons politiques qui étaient, je n'en doute pas, correctes et appropriées en 1980, il a été décidé de ne pas les exercer. Cependant, les paramètres d'aujourd'hui comprendraient sûrement la capacité d'examiner une question pour s'assurer de sa clarté et de l'absence de toute ambiguïté et pour veiller à ce qu'elle ne ressemble pas à la question délibérément nébuleuse qui a été posée en octobre 1980.

Deuxièmement, on doit pouvoir contrôler le moment du référendum, et je pense qu'il est clair que ce sera le dernier référendum à être autorisé. Nous ne pouvons pas constamment aller d'un référendum à un autre, année après année. Un dernier, ensuite ce sera tout.

Troisièmement, je pense qu'il ne doit pas y avoir, pour aucune province, d'ententes constitutionnelles spéciales conclues en vue du référendum. Le Canada n'est pas un supermarché qui offre des ententes spéciales une journée pour une occasion donnée.

Pour en revenir à l'optique adoptée par le gouvernement fédéral, y a-t-il une doctrine Chrétien? Le chef du Parti réformiste a laissé entendre que non. J'estime que la différence et la subtilité de l'optique du gouvernement sont bien enracinées dans le constitutionnalisme et l'élaboration de constitutions, tels qu'exprimés dans la common law. Aujourd'hui, la doctrine Chrétien se rapproche davantage du fédéralisme pluraliste de l'ère Pearson, parfois appelé fédéralisme coopératif, que des impératifs néo-keynésiens du gouvernement Mulroney, et peut-être dans une certaine mesure, du gouvernement Trudeau à certaines périodes.

Cette optique n'est pas le Sermon sur la Montagne, un ensemble de règles théoriques abstraites conçues dans une tour d'ivoire et dans le vide politique, loin des problèmes concrets. Il s'agit essentiellement d'une optique pragmatique, empirique, axée sur les problèmes, appliquée étape par étape. À mon avis, c'est la seule qui convienne et qui soit possible à une époque de changements fondamentaux comme il s'en produit ici, au Canada, et dans l'ensemble de la communauté mondiale.

Parmi les facteurs à examiner, il faut dire que la souveraineté est une notion du XIXe siècle complètement désuète à une époque où des ententes juridiques supranationales comme l'Accord de libre-échange, l'ALENA et l'OTAN sont conclues. Nous avons constaté dans notre débat sur les missiles de croisière que ces engagements sont considérés comme obligatoires, même si, dans certains cas, les gouvernements peuvent penser qu'ils n'auraient pas dû exister. C'est ce que notre gouvernement a pensé de la décision de M. Mulroney au sujet des missiles de croisière. Mais nous l'avons acceptée comme partie intégrante de nos obligations supranationales.

Il y a le passage de la souveraineté, même à une période où l'on remarque la survie des contradictions et le renouveau du particularisme ethnique dans un sens pathologique, comme nous en avons été témoins en Bosnie-Herzégovine et dans d'autres régions du monde.

Ce dont nous avons réellement besoin, c'est d'une philosophie opérationnelle du fédéralisme qui soit rigoureusement empirique et axée sur les problèmes. Parmi les domaines où des gestes concrets ont déjà été posés, permettez-moi de citer l'émergence de ce pragmatisme fonctionnel dans la perspective du programme d'infrastructure conçu pour assurer la reprise économique. Il prévoit une coopération étroite et soutenue avec les provinces et les municipalités et une modification a priori assez importante des structures abstraites du gouvernement qui répartissent habituellement les pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces. Il prévoit aussi l'abolition des obstacles au commerce interprovincial et celle-ci repose sur les négociations et les discussions.

Dans ma propre circonscription, mes adjoints défendent devant les commissions de délimitation des circonscriptions électorales une cause qui comporte un engagement en faveur de circonscriptions multiethniques et contre ces circonscriptions à ethnie unique de l'ancien temps, lesquelles se rapprochent davantage du XIXe siècle quant à la façon de voir le multiculturalisme et les sociétés multiethniques.

En matière de questions autochtones, je vous recommande les projets de loi C-33 et C-34 dont l'étude a été brutalement interrompue dès le début du débat, il y a une semaine environ.

(1635)

Vous trouverez là un exemple de pragmatisme consensuel entre deux parties, les chefs autochtones du Yukon et le gouvernement, un cas où l'on a employé une démarche graduelle et pratique pour en arriver à l'autonomie gouvernementale des autochtones au sein du fédéralisme canadien, sous réserve des dispositions de la Charte des droits. À mon avis, c'est un modèle de conception intelligente d'une constitution, tout à fait adaptée au XXIe siècle et nous y sommes parvenus bien avant la fin du siècle en cours.

Le premier ministre s'est engagé personnellement à la réforme du Parlement. Je crois qu'il réalise, parce que sa façon de voir les choses se rapproche davantage du pragmatisme plus doux du premier ministre Pearson, que le Parlement a un rôle à jouer, qu'il exerce un pouvoir équilibreur nécessaire face à l'exécutif. Les changements qui peuvent être effectués dans ce cas sont entièrement du ressort fédéral.

Tout compte fait, je dis simplement qu'il existe un processus constitutionnel cohérent et permanent qui génère des principes précis, empiriques et axés sur les problèmes, qui vont donc probablement résister aux défis et aux changements.

Le défaut du Sermon sur la Montagne, c'est qu'il s'agit d'une illusion créée à l'intention de ceux qui recherchent une panacée et veulent s'éloigner des situations problématiques concrètes.

Voilà donc quelle est la doctrine Chrétien d'après moi. C'est une philosophie constitutionnelle et, comme l'a dit Molière dans Le bourgeois gentilhomme, vous pouvez parler en prose toute votre vie sans le savoir. L'essence du pragmatisme fonctionnel est au coeur même du constitutionnalisme établi par la common law en place depuis déjà longtemps au Canada, auquel se sont ajoutés des éléments du droit civil.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Madame la Présidente, mon honorable collègue qui est un spécialiste des questions constitutionnelles a fait un certain nombre de remarques qui valent la peine, je pense, d'être soulignées. Quant à la


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question à savoir si la question au Québec sera claire, il y a longtemps qu'on vous l'a annoncé, on posera la question «Est-ce que les Québécois et les Québécoises veulent que le Québec devienne un pays souverain?». Cela me semble très clair.

Je vous ferai remarquer qu'en matière de clarté électorale, en matière de démocratie, le Québec n'a pas grand leçon à recevoir. Je pense à la Loi sur le financement des partis, alors qu'au Québec seuls des individus ayant qualité d'électeurs peuvent contribuer à un parti. Ce n'est pas le cas ici, où des syndicats et des grandes compagnies peuvent financer les partis, comme, par exemple, le Parti libéral. Donc, ça se fera dans la plus grande démocratie, comme à l'habitude.

Est-ce qu'il y aura plus qu'un référendum? Référons-nous à l'histoire. Terre-Neuve a adhéré au Canada après plus qu'un référendum, et jamais n'a-t-on demandé à l'ensemble des Canadiens de voter à savoir s'ils voulaient accueillir Terre-Neuve au sein de la fédération ou non. Ils ont reconnu le choix de Terre-Neuve, des Terre-Neuviens de prendre eux-mêmes leur décision, comme on devra reconnaître le choix des Québécois de faire de même.

On nous dit également que la souveraineté est quelque chose du passé, du XIXe siècle. Est-ce à dire que pour mon collègue, comme pour le Parti libéral, la souveraineté du Canada est quelque chose du passé et que dans le fond, tant qu'à avoir un grand ensemble, pourquoi ne pas s'annexer aux États-Unis? Parce qu'une logique est bonne ou n'est pas bonne. Quant à moi, je pense que la souveraineté du Canada est importante et que le Canada doit exister à titre de pays indépendant, voisin des États-Unis, et que dans ce sens-là si c'est important pour le Canada, je ne vois pas pourquoi ça ne pourrait l'être pour le Québec, qui a également le droit à la souveraineté, tout comme le Canada y a droit.

J'en viens à la question du droit à l'autodétermination. Cela a été reconnu par le NPD dès les années 1960, par le Parti conservateur en 1991, à Toronto, et son chef, le premier ministre, a écrit dans un livre, vers les années 1985, que sa participation au référendum de 1980 était une reconnaissance de facto du droit à l'autodétermination du Québec.

Je termine par une question. Nous avons entendu mon collègue et moi, l'autre jour, à un comité de la Chambre, le professeur Jackson, de Carleton, qui nous précisait que le Québec constitue une nation, même s'il est pour un pays uni qui est le Canada, selon lui, dans sa vision, et que Diefenbaker a fait une erreur en parlant de one nation, alors qu'il aurait dû parler de one country.

(1640)

Donc son collègue, constitutionnaliste comme lui, parlait de l'existence de la nation québécoise. Et je lui demande: À titre de libéral, de membre d'un parti qui reconnaît l'existence des premières nations, est-ce qu'il reconnaît lui aussi que, au même titre que les premières nations, le Québec est une nation?

Il s'agit d'une question à laquelle son collègue d'Outremont n'a pas daigné répondre, l'autre jour, pour des raisons bien évidentes. Mais le sachant un honnête homme et constitutionnaliste, je lui demande s'il considère effectivement que le Québec est une nation.

M. McWhinney: Madame la Présidente, je remercie le député au sujet de son interrogation sur la question référendaire. Mes commentaires étaient limités à la question formulée en 1980. Il y avait là une ambiguïté calculée qui n'est pas, à mon avis, acceptable aujourd'hui.

Sur la question du financement des partis politiques, je prône une réforme profonde du système de financement des partis politiques.

En ce qui concerne le droit à l'autodétermination, il existe beaucoup de possibilités d'exercer ce droit. On peut l'exercer au sein d'un système fédéral souple, comme l'ont fait les autochtones du Yukon.

M. Duceppe: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement et je demande le consentement unanime.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je comprends que vous invoquez le Règlement, mais il ne faudrait pas prolonger après chaque orateur.

Y a-t-il consentement unanime pour laisser terminer l'honorable député de Vancouver Quadra?

Des voix: D'accord.

M. McWhinney: Au sujet de la dernière question sur la souveraineté. . .

M. Duceppe: La nation. Le Québec en tant que nation.

M. McWhinney Le droit à l'autodétermination est limité, suivant le droit international, aux peuples, pas aux nations! Alors, en ce qui concerne les peuples, le droit international n'exige aucune réponse effectuée par une séparation.

M. Duceppe: Le Québec est-il une nation?

M. McWhinney: Une nation, c'est un peuple, certainement. Mais «nation» n'est pas un terme. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): À l'ordre, s'il vous plaît. Nous reprenons le débat.

[Traduction]

M. Alex Shepherd (Durham): Madame la Présidente, aujourd'hui, on nous a servi, presque sans discontinuer, du nationalisme façon XIXe siècle et je voudrais m'en excuser auprès de nos téléspectateurs. C'est une autre ronde de discussions constitutionnelles dont nous aurions certainement pu nous passer.

Je voudrais aussi mentionner que nous sommes maintenant à l'époque de l'autoroute électronique qui ne reliera pas des États membres d'un pays, mais plutôt des foyers partout dans ce pays. Les francophones du Québec et de la région de l'Atlantique pourront se parler. Alors, quelle est la logique des États-nations?

Je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui pour parler de l'avenir du Canada. Comme beaucoup d'autres ici, je suis venu à la capitale pour essayer de définir la voie que suivra notre pays au moment de son entrée dans le XXIe siècle.


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J'ai voyagé dans beaucoup de pays du monde et j'ai pris le temps non seulement d'étudier les pays visités, mais aussi d'observer mon propre pays du point de vue des habitants des pays que je visitais. Je reviens de Chine où j'ai été avec un groupe de parlementaires pour appuyer les petites et moyennes entreprises qui cherchent de nouvelles occasions commerciales. Dans ce pays en évolution rapide, nous avons trouvé pour plus de 250 millions de dollars de nouveaux débouchés.

Je note que le Parti réformiste, qui est l'auteur de cette motion, a choisi de ne pas envoyer de représentants. Je trouve cela regrettable, car je pense que beaucoup d'entreprises de l'Ouest auraient pu bénéficier de leur participation. De toute façon, cela fait partie de l'avenir du Canada puisqu'il s'agit d'établir de nouvelles relations commerciales et de se faire de nouveaux amis dans le monde.

Lorsque j'étais là-bas, j'ai eu une discussion intéressante avec un économiste de leur ministère de l'Agriculture. Je n'ai pas le temps de tout vous raconter, mais ce qu'il m'a dit en fin de compte, c'est que la Chine, un des derniers pays communistes du monde, à la recherche de nouveaux filets de sécurité sociale alors que l'on s'éloigne de plus en plus d'une société agraire, avait décidé de ne pas étudier le système canadien. Pourquoi? Parce qu'ils estimaient que nous étions trop socialistes.

Je pense que le Canada doit entrer dans une nouvelle ère, celle que j'appellerais l'ère de l'entrepreneurisme. Ce n'est pas nécessairement la poursuite du profit, mais plutôt la poursuite d'objectifs mesurables pour la société.

Nous devons aussi redéfinir le rôle du gouvernement dans la société. Pour citer un récent best-seller intitulé Reinventing Government, disons que le gouvernement devrait avoir pour but de diriger, et non de ramer. J'entends par là que le gouvernement ne devrait pas participer directement à l'économie, mais plutôt se contenter de faire connaître ses objectifs définis de façon démocratique et créer le climat économique qui favorisera la réalisation de ces objectifs.

(1645)

Je crois que l'ensemble de la population et le gouvernement doivent remettre en question leur attitude générale. Je n'ai pas à mentionner tous les défis que le monde a dû relever au cours des six mois de session de cette Chambre. Le GATT, l'ALENA et l'autoroute électronique, pour n'en nommer que quelques-uns, jettent un défi au Canada et aux Canadiens, les incitant à s'améliorer, à adopter une nouvelle attitude et à attendre de pied ferme les défis du XXIe siècle.

Nous devons redonner le gouvernement aux gens. Nous devons transformer la fonction publique pour que les fonctionnaires considèrent la population comme une clientèle, et non comme un aspect du travail qu'il faut bien supporter. Fonction publique 2000 et la gestion de la qualité totale ne sont que des débuts, et il faudra beaucoup trop de temps pour que ces projets donnent des résultats concrets, c'est-à-dire pour que les simples citoyens constatent la différence.

Nous devons former des fonctionnaires nouvelle vague et leur confier des responsabilités, afin qu'ils se chargent de faire des changements. Ces fonctionnaires ne devraient pas être soumis à la réglementation et aux ordres mais plutôt être jugés, rémunérés et promus en fonction de l'atteinte de leurs objectifs, et non pas simplement en fonction des années d'expérience à leur poste.

Nous parlons de différents secteurs du gouvernement, qui se feront concurrence pour fournir des réseaux de services plus efficaces, les moins efficaces devant être améliorés sous peine de disparaître.

Nous parlons d'un gouvernement qui valorise l'investissement dans l'éducation, la formation et le perfectionnement, l'amélioration de notre matière grise si l'on veut, mais qui limite l'accès aux régimes de soutien du revenu aux retraités ou à ceux qui sont vraiment dans le besoin.

En ce qui concerne le changement d'attitude, il faut mettre un terme à l'esprit de clocher qui anime un grand nombre de nos législateurs provinciaux. Le nouveau Canada ne tolérera pas les barrières au commerce interprovincial. Nous devons nous rendre compte des forces que recèlent la centralisation et la décentralisation.

Dans le nouveau Canada, il faudra qu'on puisse établir des normes nationales en matière d'éducation. Du coup, les commissions scolaires locales seront libres de se livrer à la concurrence pour déterminer lesquelles permettront d'atteindre les objectifs de la façon la plus efficace. Les enfants et leurs parents devraient avoir le droit de décider quelles écoles aviveront la concurrence en matière d'éducation.

Les gens d'affaires joueront un rôle formateur et constructif pour les jeunes qui étudient. Ils admettront que cela leur donnera une longueur d'avance dans l'économie mondiale.

Dans le nouveau Canada, le régime d'assurance-maladie misera sur la médecine préventive plutôt que sur la maladie. On paiera les médecins pour qu'ils maintiennent les gens en santé plutôt que de traiter leurs maladies. De plus, la société apprendra à faire la distinction entre la nécessité et le désir, de sorte que les soins d'un simple rhume ne seront plus assurés. Les médecins ne seront pas rémunérés en fonction du nombre de patients qu'ils traiteront, mais en fonction du nombre de personnes qu'ils ne traiteront pas, c'est-à-dire en fonction de la santé de la population.

Nous parlons d'un système judiciaire qui s'intéressa davantage aux causes de la criminalité qu'à l'emprisonnement des criminels et à l'entretien des pénitenciers, un système qui reconnaîtra que la prévention de la criminalité coûte beaucoup moins cher que de longues peines d'emprisonnement.

Nous parlons d'un pays où on reconnaîtra que le chômage est plus un bon point qu'une lacune. On y réduira la durée de la semaine de travail afin de répartir le chômage également dans tout le pays.

On y encouragera les collectivités autochtones à s'occuper elles-mêmes de leur avenir économique et à retrouver la fierté perdue de leurs ancêtres.

On y comprendra que c'est un déshonneur pour notre système que les mères célibataires vivent sous le seuil de la pauvreté. On y créera des garderies pour que celles-ci puissent se recycler et trouver un emploi au sein de la nouvelle économie, dans leur


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intérêt et celui de leurs enfants. Les garderies elles-mêmes se concurrenceront au niveau des méthodes d'enseignement.

Dans le secteur agricole, nous allons mettre au point des systèmes de commercialisation plus compétitifs. Nous allons nous adapter aux fluctuations du commerce international. Nous allons améliorer notre productivité dans les domaines où le Canada a une longueur d'avance.

Il s'agira principalement de la technologie des additifs alimentaires, de l'élevage sélectif et de l'insémination artificielle, de même que du recours à des pratiques agricoles écologiques. Plus important encore, le nouveau Canada reconnaîtra que le pouvoir populaire est l'outil ultime, qu'il faut permettre au peuple de prendre en main son économie et sa destinée. C'est là le point fort d'un nouveau pays entrepreneurial.

(1650)

Je me permets de faire remarquer ici que nous ne parlons pas du nationalisme hiérarchique étroit que préconise le Bloc québécois, un nationalisme qui voudrait voir les Canadiens revenir au XIXe siècle, qui voudrait faire de la population rurale une source de main-d'oeuvre et de nourriture bon marché en l'empêchant de prendre de l'expansion et de participer à l'économie mondiale.

Je ne parle pas de la domination d'une société par une autre. Rien ne saurait être moins vrai. Je me souviens de l'époque où Toronto était un bastion de l'élite anglophone. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Les Anglais de souche forment désormais une minorité dans cette ville et celle-ci ne s'en porte pas plus mal, bien au contraire. On y trouve des affiches en grec, en italien et, oui, en français. Ce ne sont là que quelques-unes des nouvelles avenues que le Québec et le reste du Canada doivent explorer ensemble et qui leur apporteront une vie plus saine et une société plus heureuse.

Je ne parle pas d'argent. Je crois que ce nouveau gouvernement entrepreneurial reconnaîtra aussi les nouvelles valeurs familiales et accordera une plus grande importance à une bonne adaptation des enfants.

Bref, la restructuration économique actuelle nous oblige à nous demander qui nous sommes et où nous voulons aller, à définir un nouveau modèle entrepreneurial où tout le monde prend part au succès de la nouvelle société canadienne du XXIe siècle. C'est ainsi que nous proposons de remettre en question notre façon de gouverner et de traiter les uns avec les autres. C'est la solution de l'avenir pour le Canada et pour tous les Canadiens, de l'est à l'ouest et du nord au sud.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Madame la Présidente, je suis très heureuse d'avoir l'occasion, aujourd'hui, de participer à ce débat sur l'unité nationale. Les déclarations faites par les députés d'en face m'inquiètent quelque peu, car ils semblent penser que si nous évitons d'aborder la question, si nous refusons de reconnaître que ce débat soulève la controverse partout au pays, le problème finira par disparaître. C'est faux. Il faut absolument tenir ce débat à la Chambre des communes si nous ne voulons pas nous sentir déphasés par rapport aux autres Canadiens.

Cet après-midi, je voudrais parler d'un élément qui fait la fierté des Canadiens, c'est-à-dire l'ordre public.

Les Canadiens ont toujours accordé beaucoup d'importance à l'ordre public. Quel autre pays a une force policière comme symbole national? L'importance que nous accordons à l'ordre public peut être illustrée par les différences qui distinguent le Canada des États-Unis. Ces deux pays ont colonisé l'ouest il y a plus de 100 ans.

À quelques exceptions près, la colonisation de l'Ouest s'est déroulée dans l'ordre, grâce essentiellement à la présence de la police montée du Nord-Ouest qui s'est établie dans l'Ouest avant l'arrivée massive des colons européens.

Pour vous décrire le succès de la police montée, je vais vous raconter une anecdote, celle de la cavalerie américaine raccompagnant des Sioux au Canada après la bataille de Little Big Horn. De nombreux cavaliers américains, armés jusqu'aux dents, escortent des milliers de Sioux jusqu'à la frontière du Canada, où ils les remettent entre les mains de deux agents de la police montée. Le commandant des troupes de cavalerie américaines demande aux agents canadiens où se trouve le reste de leurs effectifs. Les Canadiens lui répondent: «Il est derrière la colline, en train de préparer notre petit-déjeuner».

Cette petite histoire illustre bien comment les deux pays ont adopté des attitudes différentes à l'égard de l'ordre public. Les Canadiens ont toujours respecté l'ordre public. Nous nous comparons fréquemment aux États-Unis pour montrer que nous ne sommes pas vraiment un pays violent. Malheureusement, comparativement à d'autres pays développés, nous semblons l'être devenus.

Les Canadiens sont mécontents de cette situation. Ce n'est pas ce que nous voulons. Les gens d'un bout à l'autre du pays ont la même attitude qu'il y a 100 ans à l'égard de l'ordre public. Nous voulons que le respect de l'ordre public redevienne une partie intégrante de notre société.

(1655)

Nous voulons nous sentir en sécurité dans nos maisons et dans nos rues. Nous aimerions pouvoir laisser nos portes non verrouillées sans avoir peur de se faire cambrioler. Nous aimerions pouvoir nous promener dans les parcs le soir sans risquer de se faire attaquer et voler.

Nous aimerions pouvoir offrir de l'aide aux étrangers dans le besoin sans avoir peur de se faire agresser. Nous aimerions pouvoir laisser nos enfants jouer seuls dans les parcs de nos quartiers sans craindre qu'ils se fassent enlever. Les élèves aimeraient pouvoir aller à l'école sans se demander si leurs camarades de classe sont armés de revolvers et de couteaux.

Les Canadiens aimeraient pouvoir faire toutes ces choses, mais ils ont peur. Non seulement notre pays semble être devenu plus violent au cours des 20 dernières années, mais c'est la réalité. Je pourrais vous citer des tas de statistiques, mais un seul exemple suffira.


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En 1971, on a enregistré 203,9 crimes avec violence par 100 000 habitants. En 1991, 20 ans plus tard, ce taux était de 1 099 crimes avec violence par 100 000 habitants, Cela représente une augmentation de 500 p. 100 en 20 ans. Pourquoi une telle augmentation? Il n'existe apparemment pas d'explication catégorique.

Certains tentent de minimiser la tendance. Certains tentent de nous faire croire que les statistiques ne font état d'aucune augmentation du taux de criminalité. À mon avis, les chiffres démontrent que la criminalité est en hausse et il est temps de le reconnaître.

Nous pouvons parler de certaines causes de base possibles comme la pauvreté, le manque d'éducation et le reste, mais cela n'explique pas pourquoi la criminalité se répand dans toutes les couches socio-économiques de notre société. Si nous connaissions les véritables causes de la criminalité, nous pourrions les combattre, mais puisque nous ne les connaissons pas, nous devons nous attaquer aux symptômes.

Mon parti a clairement reçu des électeurs le mandat de faire quelque chose au sujet du problème de la criminalité, de ne pas le négliger, de ne pas tenter d'y trouver une explication logique, mais de faire quelque chose pour le combattre. À leur congrès, le mois dernier, les libéraux ont entendu leur sondeur principal leur dire que la criminalité était le principal problème dans les grands centres urbains.

Ce n'est pas le Parti réformiste qui est le premier à réclamer des changements. C'est la population du Canada. Il y a très peu de questions qui font l'unanimité au Canada, mais, à mon avis, la sécurité dans nos collectivités et dans nos rues préoccupe tout le monde sans exception, de l'est à l'ouest et du nord au sud.

Dans mon dernier bulletin parlementaire, j'ai inclus une question sur le fait de ramener la fourchette d'âges prévue dans la Loi sur les jeunes contrevenants à 10 à 15 ans. J'ai obtenu près de 3 500 réponses, ce qui équivaut à un taux de réponse de 8 p. 100. Plus de 90 p. 100 des répondants étaient en faveur de cette modification. En outre, bon nombre de ceux qui s'y opposaient ont dit que la loi devrait être entièrement abolie.

Comment un politicien peut-il ignorer la volonté d'une majorité aussi écrasante de la population? Ceux qui ne seront pas à l'écoute, qui refuseront de reconnaître l'existence d'un problème de criminalité dans nos rues, le font à leurs risques et périls. S'ils croient vraiment que les Canadiens vont attendre encore longtemps que le gouvernement prenne des mesures et commence à se préoccuper d'eux, ils se trompent grandement.

Notre travail est très simple à la Chambre des communes. À mon avis, nous pouvons, à titre de députés, commencer à faire quelque chose sans tarder. Pour tout aspect de la législation criminelle, la Chambre doit respecter un principe, celui selon lequel la protection de la société a préséance sur les droits des criminels. Nous devons envoyer à tous les Canadiens un message non équivoque selon lequel la violence envers autrui est inacceptable et ne sera pas tolérée.

Dans ma localité, un mari a tué sa femme. Il a reconnu sa culpabilité à une accusation d'homicide involontaire et s'est vu infliger une peine de cinq ans. Il a écopé de cinq ans pour avoir tué une Canadienne.

(1700)

Retirons de la société les contrevenants dangereux jusqu'à ce que nous ayons l'assurance qu'ils ne sont plus dangereux. Retirons les Fisher et les Barlow de nos rues pour que les gens s'y sentent plus en sécurité. Laissons les contrevenants non violents à l'extérieur des pénitenciers et faisons-les rembourser leur dette à la société d'une manière plus constructive, par exemple, par la restitution, des travaux communautaires ou d'autres mesures semblables. Assurons-nous que notre système de justice pénale soit prompt à agir, juste et cohérent. Permettons au citoyen moyen d'être à nouveau maître des rues dans nos localités.

Les Canadiens de toutes les régions de notre grand pays exigent des changements. Nous avons les moyens législatifs de satisfaire à leur demande. Nous rendrons un très mauvais service à notre pays si nous ne satisfaisons pas à leur demande, si nous ne réagissons pas et si nous ne redonnons pas aux Canadiens la liberté de circuler dans leurs localités et leurs rues.

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Madame la Présidente, je vais tâcher de rester bref. La députée du Parti réformiste qui vient de parler voudrait nous faire croire qu'eux seuls, les réformistes, se préoccupent réellement de la sécurité dans notre pays, qu'ils sont les seuls à s'inquiéter de la criminalité. Ce n'est pas vrai. Nous, de ce côté-ci, sommes tout aussi inquiets et parfois tout aussi abasourdis qu'eux par la criminalité.

Ce qui m'inquiète cependant dans ses propos, c'est la façon dont elle passe sur les causes de la criminalité. Elle a dit en effet que nous n'en connaissons pas les causes, ce qui n'est pas vrai à mon avis. Si elle se posait de nouveau la question, elle constaterait que nous en connaissons la plupart des causes: famille dysfonctionnelle, abus de stupéfiants, manque de chances, manque d'éducation, manque d'espoir, racisme. Ce sont là plusieurs des sources de la criminalité.

Si la députée ne le croit pas, si elle pense vraiment, comme elle l'a affirmé dans son intervention, que nous devrions nous attaquer uniquement aux symptômes, je voudrais qu'elle me dise ce qu'elle pense des problèmes auxquels on fait face dans la communauté autochtone. Pourquoi tant d'autochtones remplissent-ils nos prisons? Pourquoi dans ma province, par exemple, les autochtones composent-ils plus de la moitié de la population des détenus?

La raison me paraît évidente. C'est parce qu'on observe malheureusement chez les autochtones de notre pays plus de familles dysfonctionnelles que chez n'importe quel autre groupe. Ils souffrent plus de racisme que n'importe qui d'autre. Ils souffrent plus de pauvreté que n'importe qui d'autre. Ils souffrent plus de manque d'espoir que n'importe qui d'autre, et ainsi de suite. Voilà pourquoi les autochtones remplissent les prisons.

Il est absurde de prétendre, comme le fait la députée, que nous pouvons ne pas tenir compte des sources ou des causes de la criminalité pour en traiter uniquement les symptômes, car nous ne parviendrons jamais à trouver des solutions à la criminalité si nous ne nous attachons pas à ses sources. Même si nous construisons toutes les prisons du monde, même si nous imposons tous les châtiments possibles, même si nous employons tous les


4970

moyens de dissuasion imaginables, tant que les choses continueront au train où elles vont et tant que la société produira des jeunes criminels, ce sera un éternel recommencement.

Mme Meredith: Madame la Présidente, personne ne propose de fermer les yeux sur certaines des causes de la criminalité, mais il est profondément injuste de laisser entendre que tous les pauvres sont des criminels en puissance, que toutes les familles monoparentales élèvent des criminels. Ces groupes commencent à en avoir assez qu'on leur reproche de produire les criminels de notre société.

Comme je l'ai dit dans mon intervention, la criminalité atteint toutes les classes socio-économiques. Tel homme qui a tué sa femme était ingénieur. Une foule de personnes qui sont derrière les barreaux avaient une carrière professionnelle bien établie et ont transgressé les lois. La consommation de drogues et d'alcool est effectivement une cause de criminalité, et nous devrions nous attaquer à ces problèmes non en enfermant les gens, mais en traitant la maladie dont ils souffrent. Il est vrai que la pauvreté entraîne une certaine vulnérabilité, mais ce n'est pas la seule cause de criminalité. Prétendre qu'elle l'est en clamant qu'il faut s'attaquer à la racine du problème sans tenir compte des symptômes, c'est de la témérité. Il faut s'occuper à la fois des causes et des symptômes. On ne peut faire l'un sans l'autre. Nous pouvons chercher tout de suite à guérir les symptômes et nous attaquer immédiatement au problème à plus long terme. Les résultats de la prévention du crime ne se feront pas sentir dans un an ou deux. Il faudra cinq ou dix ans pour que nous en voyions l'aboutissement.

(1705)

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Madame la Présidente, malheureusement, la manière dont le Parti réformiste s'occuperait de la Constitution fait songer à sa vision de la criminalité, c'est-à-dire qu'elle est plutôt simpliste.

Une chose mérite d'être signalée au Bloc québécois, qui a fait de cette journée une grande occasion. C'est que l'Accord du lac Meech n'a pas obtenu le soutien populaire, mais qu'il a été appuyé par trois premiers ministres canadiens du Québec, Pierre Elliott Trudeau, Brian Mulroney et, chose certaine, l'actuel premier ministre. Ce fait est important. L'Accord de Charlottetown a fait l'unité du pays contre lui.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Madame la Présidente, j'ai l'honneur aujourd'hui de prendre la parole au sujet de la motion du Parti réformiste, qui se lit comme suit:

Que cette Chambre déclare avec vigueur et appuie le désir des Canadiens et des Canadiennes de respecter le pacte fédéral en tant que pays unique, et prenne l'engagement de renforcer notre économie, d'équilibrer les budgets de nos gouvernements, d'appuyer nos services sociaux, de préserver notre environnement, de protéger notre patrimoine et notre diversité culturelle, de défendre nos vies et notre propriété, de démocratiser davantage nos institutions et nos processus décisionnels, d'affirmer l'égalité et le caractère unique de tous nos citoyens et de nos provinces, et de forger des relations pacifiques et productives avec d'autres pays du monde.
Quelle merveilleuse vision du Canada. Je suis heureux de me joindre à mon chef, le député de Calgary-Sud-Ouest, et à mes collègues, qui ont fait preuve de leadership et de sagesse en commençant à définir un nouveau fédéralisme susceptible de créer un Canada revitalisé ou nouveau dont dix provinces ou plus pourraient être fières.

L'amendement du gouvernement me déçoit. Il propose de faire un gâteau sans recette. C'est la continuation du rôle irresponsable que joue le gouvernement libéral en disant qu'il tient à l'unité du pays, mais ne propose pas de plan à cette fin. Il ne prend pas les moyens pour atteindre son objectif, compromettant du même coup l'avenir du fédéralisme.

En janvier, le chef de mon parti a dit que la 35e législature était sans précédent. Il avait raison. Il y a quelques années, peu de gens auraient prédit une Chambre des communes où l'opposition officielle serait le Bloc québécois, où les députés de cette formation auraient accepté d'emblée de former l'opposition officielle, de prêter le serment d'allégeance à la reine et d'être payés par le gouvernement fédéral tout en ayant pour mission de détruire le pays par la séparation du Québec.

Encore moins de gens auraient prédit que le gouvernement libéral serait resté inactif et aurait fait comme si de rien n'était. Qui aurait prédit que le gouvernement libéral serait resté à ne rien faire et à faire comme si de rien n'était pendant que des séparatistes s'attaqueraient aux fondements même du pays?

Cette triste situation a poussé les réformistes à agir et à tenter de recimenter le pays en proposant une nouvelle formule de fédéralisme à laquelle les Canadiens qui tiennent au fédéralisme, y compris ceux qui vivent au Québec, voire surtout eux, pourraient souscrire.

Je voudrais prendre quelques minutes pour parler de la motion et, plus particulièrement, de la partie où il est question de «protéger notre patrimoine et notre diversité culturelle». Il y a de nombreux mythes et de nombreuses idées fausses associés à la culture et au patrimoine. Certains ont tendance à associer les mythes aux Grecs, aux Égyptiens et aux Babyloniens de l'Antiquité. Mais nous, au Canada, nous avons nourri plusieurs mythes, dont voici les plus courants.

Mythe no 1: Le Canada se compose de deux nations fondatrices. Certains sont même allés jusqu'à appeler les Anglais et les Français les races fondatrices. Même si le mythe veut qu'une entente soit intervenue entre le Haut-Canada et le Bas-Canada, cela ne tient guère si l'on considère qu'il y a toujours eu des autochtones au Canada et que, au cours des 128 années de notre existence en tant que pays, des gens sont venus de partout pour aider à bâtir notre pays.

(1710)

Mythe no 2: Le Canada sera plus uni si nous adoptons des mesures législatives en matière linguistique. Les Canadiens ne se sentent pas plus unis depuis l'adoption de la Loi sur les langues officielles. Au contraire, cette loi n'a été qu'une pomme de discorde. Elle n'a fait que nuire au bilinguisme au Canada au lieu d'être un atout, comme devrait l'être la connaissance de plusieurs langues.

Mythe no 3: Le Canada ne pourra conserver son patrimoine multiculturel que si le gouvernement utilise des dollars d'impôt pour organiser des activités folkloriques dans tout le pays afin de sauvegarder notre patrimoine et notre diversité culturelle.

Les réformistes ont réussi à détruire le mythe qui veut que le Canada puisse encore être décrit comme un pays fait de deux principales cultures fondatrices. De toute évidence, nous sommes rendus bien loin de cette vision étroite de notre pays. Il y a quelques semaines, les réformistes ont longuement parlé à la Chambre de l'échec de la politique officielle de bilinguisme et


4971

ont proposé en remplacement une solution réaliste et constructive, qui sèmerait moins la discorde et serait moins coûteuse que le statu quo.

Je voudrais parler brièvement du troisième mythe et expliquer pourquoi le fait d'avoir un Secrétariat officiel au multiculturalisme qui accorde des subventions et fait des déclarations ronflantes n'est pas le meilleur moyen de protéger notre héritage multiculturel de façon harmonieuse. Le gouvernement devrait arrêter de se mêler des affaires multiculturelles. Permettez que je vous explique ce que j'entends par affaires multiculturelles.

Le secrétaire d'État au Multiculturalisme a dépensé plus de 3,8 milliards de dollars en 1992-1993. Une grande partie de ces fonds pourraient être transférés à d'autres ministères qui en feraient une utilisation plus appropriée. L'enseignement postsecondaire, pour lequel 2,9 milliards de dollars sont transférés aux provinces, est un bon exemple d'un programme que le plan réformiste mettrait à l'abri de compressions budgétaires. Le programme de garantie de prêts d'études, qui représente 500 millions de dollars, est un autre bon exemple, tout comme les efforts financés par le fédéral en vue de combattre le racisme et de protéger les droits de la personne.

Par contre, on pourrait éliminer le financement-plus de 26 millions de dollars au total-accordé aux universités, à des particuliers et aux associations qui encouragent le développement culturel. En outre, on pourrait épargner l'argent des contribuables- 47 millions de dollars durement gagnés-en réduisant le financement accordé à des groupes linguistiques.

Mais alors, si, comme nous l'avons dit, ce n'est pas au gouvernement de financer et d'administrer le multiculturalisme, qui devrait être chargé de protéger et de conserver notre héritage culturel et qui devrait financer les efforts à cette fin? C'est une question légitime. Le Parti réformiste est tout à fait pour que les individus et les groupes soient libres de préserver leur héritage culturel en utilisant leurs propres ressources, et nous défendrons le droit qu'ils ont de le faire.

Nous ferions porter les efforts du gouvernement fédéral sur le renforcement du sentiment d'appartenance de tous les Canadiens, sans égard à la race, à la langue ou à la culture. Nous nous opposons à l'idée d'avoir des Canadiens d'origine étrangère, un concept préconisé par le gouvernement actuel et ses prédécesseurs.

Si l'on n'accepte pas que la culture puisse être conçue et structurée par l'État, il va de soi que l'épanouissement, la préservation et la promotion de notre patrimoine multiculturel doivent être laissés aux individus, aux associations privées et, dans certains cas, aux niveaux de gouvernement inférieurs.

Le gouvernement fédéral devrait se concentrer sur l'élimination de la discrimination fondée sur la race, la langue ou la culture. Comment cette vision intéresse-t-elle le Québec? C'est, je crois, le point central du débat d'aujourd'hui. Les réformistes croient que cette vision des questions linguistiques et culturelles est peut-être la solution qui permettra aux Québécois de parvenir à un sentiment de sécurité culturelle et linguistique. Elle ferait en sorte que les Canadiens du Québec pourraient promouvoir et préserver leur langue et leur culture par l'intermédiaire du gouvernement provincial. C'est pourquoi le gouvernement fédéral devrait laisser aux individus et aux niveaux inférieurs de gouvernement la responsabilité de protéger et de promouvoir la langue et la culture.

Dans le cas du Québec, le gouvernement provincial accepterait probablement de relever le défi. D'autres provinces pourraient décider de ne pas le faire, mais nous croyons que c'est la prérogative des provinces de promouvoir la langue et la culture sur leur territoire respectif.

Le gouvernement fédéral conserverait et même renforcerait son rôle de protection des minorités contre la discrimination partout au Canada. Nous estimons également que le gouvernement fédéral devrait constituer l'élément unificateur de tous les Canadiens, d'où qu'ils soient, quel que soit leur patrimoine culturel et peu importe qu'ils soient des Canadiens de la première ou de la dixième génération.

En reconnaissant aux gens la liberté de défendre leurs intérêts linguistiques et culturels sans ingérence du gouvernement fédéral, nous renforcerions l'unité du pays. Il est beaucoup plus productif d'insister sur ce que tous les Canadiens ont en commun que sur leurs différences, qui menacent de nous diviser. Si le gouvernement travaillait à unir les Canadiens, nous serions tous beaucoup plus heureux.

Aussi, j'appuie énergiquement la motion présentée par mon parti, car elle prépare le Canada à vivre encore 125 ou 128 ans de réussite dans une confédération composée de dix provinces égales et peut-être encore plus, si les Territoires du Nord-Ouest viennent à entrer dans la Confédération. Tous ceux qui vivraient dans ce pays s'y sentiraient chez eux, peu importe qu'ils soient d'origine asiatique ou européenne, d'ascendance française ou anglaise ou membres des Premières Nations, les peuples autochtones du Canada. Voilà le genre de Canada où je veux vivre, et c'est, je crois, le genre de pays qui susciterait l'enthousiasme chez la plupart des Canadiens et qui les inciteraient à travailler pour défendre et préserver ses intérêts.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 17 h 15, il est de mon devoir, conformément à l'article 81(16) du Règlement, d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire à l'expédition des travaux des subsides.

[Traduction]

La question porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.


4972

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Convoquez les députés.

(L'amendement, mis aux voix, est adopté.)

(Vote no 50)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Allmand
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Berger
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
de Jong
DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gauthier (Ottawa-Vanier)
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Harb
Harper (Churchill)
Harvard
Hickey
Hopkins
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
LeBlanc (Cape Breton Highlands-Canso)
Lee
Loney
MacLellan (Cape Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Marchi
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murray
Nault
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Patry
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rompkey
Scott (Fredericton-York Sunbury)
Serré
Shepherd
Sheridan
Simmons
Skoke
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo

Taylor
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Valeri
Vanclief
Walker
Whelan
Wood
Young
Zed-140

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Asselin
Bachand
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bouchard
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brien
Brown (Calgary Southeast)
Bélisle
Canuel
Caron
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Savoye
Deshaies
Dubé
Duceppe
Dumas
Epp
Fillion
Frazer
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Gilmour
Godin
Grey (Beaver River)
Grubel
Guay
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hermanson
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Johnston
Kerpan
Lalonde
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Manning
Marchand
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Mercier
Meredith
Mills (Red Deer)
Nunez
Paré
Penson
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Péloquin
Ramsay
Rocheleau
Sauvageau
Scott (Skeena)
Speaker
Stinson
Strahl
Thompson
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Venne
White (Fraser Valley West)
White (North Vancouver)
Williams-87

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Axworthy (Winnipeg South Centre)
Collenette
Guimond
Jacob
Manley
Ménard

(1745)

Le Président: Je déclare l'amendement adopté. Le prochain vote porte sur la motion principale telle que modifiée. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.


4973

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 51)

POUR

Députés
Abbott
Ablonczy
Adams
Alcock
Allmand
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Berger
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Boudria
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast)
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
de Jong
DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Epp
Finlay
Flis
Fontana
Frazer
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gauthier (Ottawa-Vanier)
Gilmour
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West)
Harper (Churchill)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Hopkins
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Johnston
Kerpan
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
LeBlanc (Cape Breton Highlands-Canso)
Lee
Loney
MacLellan (Cape Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manning
Marchi
Marleau
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
McWhinney
Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan

Parrish
Patry
Penson
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Ramsay
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rompkey
Scott (Fredericton-York Sunbury)
Scott (Skeena)
Serré
Shepherd
Sheridan
Simmons
Skoke
Speaker
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stinson
Strahl
Szabo
Taylor
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Thompson
Tobin
Torsney
Ur
Valeri
Vanclief
Walker
Whelan
White (Fraser Valley West)
White (North Vancouver)
Williams
Wood
Young
Zed-179

CONTRE

Députés
Asselin
Bachand
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bouchard
Brien
Bélisle
Canuel
Caron
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
de Savoye
Deshaies
Dubé
Duceppe
Dumas
Fillion
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Guay
Lalonde
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Marchand
Mercier
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Péloquin
Rocheleau
Sauvageau
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Venne-49

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Axworthy (Winnipeg South Centre)
Collenette
Guimond
Jacob
Manley
Ménard

Le Président: Je déclare la motion, telle que modifiée, adoptée.

Comme il est 17 h 55, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

4974


4974

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LOI SUR LE CALCUL DES INTÉRÊTS DES CARTES DE CRÉDIT

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord) propose: Que le projet de loi C-233, Loi sur la limitation du taux d'intérêt, de l'application des intérêts et des frais reliés aux cartes de crédit, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, je suis heureux de parrainer ce projet de loi intitulé «Loi sur la limitation du taux d'intérêt, de l'application des intérêts et des frais reliés aux cartes de crédit».

Depuis leur apparition en 1968, les cartes de crédit sont devenues des plus commodes pour des milliers de Canadiens. L'an dernier, il y avait plus de 55 millions de cartes de crédit en circulation, ce qui représentait plus de 10 p. 100 de l'ensemble des dépenses à la consommation au Canada. Elles sont devenues bien plus qu'un autre moyen de paiement. Sans carte de crédit, il peut se révéler impossible, par exemple, de louer une voiture ou de réserver une chambre d'hôtel.

Il se passe rarement une journée sans que j'utilise mes cartes, soit pour m'identifier soit pour faire un achat. Cependant, tout se paie, et dans le cas des banques et des cartes de crédit émises par des commerçants, le coût peut être très élevé.

J'ai décidé de présenter un projet de loi portant sur les éléments les plus litigieux dans le domaine des cartes de crédit, parce que je crois qu'il faut absolument réglementer ce que je considère comme des pratiques injustes à l'endroit des consommateurs canadiens-et je ne suis pas le seul à penser ainsi.

Je suis tout à fait conscient que les principaux intéressés, sur les marchés financiers, tremblent à la seule pensée qu'une mesure législative pourrait venir modifier leurs règles du jeu. Ils réagiront rapidement en affirmant que, si rien n'est fait, tout s'arrangera pour le mieux.

Je vais néanmoins tenter de démontrer à la Chambre que tout indique qu'une réglementation s'impose.

[Français]

Ce n'est pas la première fois que le Parlement s'intéresse à la question des cartes de crédit puisqu'au cours des huit dernières années, trois comités parlementaires se sont penchés sur ce marché au Canada. Le Comité permanent des finances a publié un rapport en 1987 et le Comité permanent des consommateurs et des sociétés, en 1989 et en 1992. Dans chacune des études, la question était abordée sous un angle un peu différent.

(1800)

Elles ont traité, par exemple, de l'importance de la concurrence, de la difficulté pour les consommateurs d'obtenir des renseignements sur les taux ou du problème du calcul des intérêts, mais elles donnaient toujours la priorité au fait que les intérêts sont élevés et qu'ils ont tendance à le rester malgré la base d'autres types de taux.

Les banques ont chaque fois déclaré aux comités que leurs taux étaient raisonnables étant donné qu'ils ne leur rapportaient pas grand-chose. Cela est difficile à croire, surtout quand les banques enregistrent des profits records. Chaque fois que les membres des comités demandaient à connaître le taux des bénéfices, les banques refusaient de répondre en arguant que cela les rendait vulnérables à la concurrence. Cette mauvaise volonté n'a pas empêché les membres des comités de découvrir que les banques empochaient des frais d'intérêt de 70 à 80 p. 100 de leurs clients.

[Traduction]

Selon les banquiers, étant donné que bon nombre des détenteurs de cartes représentent un risque très élevé pour les institutions financières, celles-ci doivent exiger, pour les cartes, un rendement plus élevé que pour tout autre genre de prêts afin de compenser leurs pertes. Cependant, les preuves fournies au Comité permanent de la consommation et des corporations montrent que les défauts de paiement des prêts sur cartes de crédit sont moins nombreux que les défauts de paiement des prêts aux entreprises et des autres types de prêts à la consommation.

Quand on a soulevé la question du plafonnement des taux, les banquiers ont dit qu'ils seraient forcés de refuser la carte aux gens à faible revenu. Les membres du comité n'ont pas bien accueilli cette menace puisque les propres chiffres des banques montrent que les Canadiens à faible revenu sont plus susceptibles de payer en entier le solde mensuel que leurs homologues à revenu plus élevé.

Le rapport de 1987 du comité des finances indique que 83,3 p. 100 des gens considérés comme à faible revenu paient effectivement en entier le solde mensuel, tandis que 41 p. 100 des détenteurs de cartes ayant un revenu égal ou supérieur à 60 000 $ négligent régulièrement de payer le solde mensuel.

Ann Finlayson et Sandra Martin, deux journalistes d'enquête, ont résumé très adéquatement ces tactiques dans leur essai intitulé Card Tricks. Elles déclarent dans ce livre que l'ardeur des banquiers à menacer de retirer leurs cartes aux détenteurs à faible revenu ne prouve rien d'autre que leur capacité de rejeter tous les gens à faible revenu, ce qui ressemble fort à la politique extrêmement rigide qu'ils pratiquaient à l'époque en matière de prêts aux petites entreprises.

[Français]

En fin de compte, ce futile exercice a permis aux membres de se rendre compte de la difficulté d'obtenir des banquiers l'information dont ils avaient besoin pour formuler des recommandations éclairées. Les banques ont certes tenté de calmer les esprits en baissant légèrement les taux d'intérêt des cartes. À ce sujet, le Comité permanent des consommateurs et des sociétés a même révélé, en 1989, qu'au moment où le Comité des finances révisait le premier jet de son rapport en 1987, la marge entre le taux d'escompte de la Banque du Canada et le taux d'intérêt perçu sur


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la carte Visa était de 11,46 points de pourcentage. Or, peu après que le rapport eût été déposé, la marge est tombée de 7,31 points.

[Traduction]

Je voudrais expliquer ce que ferait le projet de loi C-233 s'il était adopté. Ce projet de loi a deux objectifs: le premier est de limiter le taux d'intérêt que peuvent imposer les institutions financières et les détaillants; le deuxième est de standardiser le calcul des intérêts et le délai de grâce obligatoire en cas de paiement partiel pour tous les types de cartes de crédit.

On nous dit que dans notre société de marché libre on ne saurait réglementer les taux d'intérêt. Pourtant, il existe une disposition fédérale qui traite des taux d'intérêt criminels, c'est l'article 305.1 du Code criminel. Toutefois, son application aux avances de fonds sur carte de crédit est difficile, vu que la définition d'un taux d'intérêt criminel est un taux annuel effectif dépassant 60 p. 100 du capital prêté.

Le projet de loi C-233 réglementerait de façon réaliste les taux d'intérêt que portent les cartes de crédit. On fixerait un plafond flottant en fonction du taux d'escompte de la Banque du Canada pour le mois précédent. L'écart entre le taux d'escompte et le taux d'intérêt que porterait une carte de crédit dépendrait du type de carte. Dans son rapport de 1987, le comité des finances concluait que parmi les différents types de plafonds utilisables, un plafond flottant semblait le plus sophistiqué et le plus pratique.

Les cartes de crédit émises par les institutions financières, y compris les caisses de crédit, les caisses populaires et autres sociétés coopératives, ne pourraient porter un intérêt supérieur de plus de 6,5 ou 8,5 points de pourcentage au taux d'escompte de la Banque du Canada, selon que l'institution facture ou non des frais d'adhésion, de renouvellement ou de transaction.

Les cartes de crédit émises par les compagnies pétrolières ne pourraient dépasser le taux d'escompte de la Banque du Canada de plus de 9,5 points de pourcentage. Celles émises par les magasins de détail ne pourraient dépasser le taux d'escompte de la Banque du Canada de plus de 11,5 points de pourcentage sur un solde impayé dépassant 400 $.

(1805)

Les détaillants qui émettent des cartes utiliseraient un système progressif plutôt qu'une limite flottante. La raison de cela, c'est que les détaillants n'ont pas les mêmes moyens que les institutions financières. On reconnaîtrait aussi de cette façon que les coûts d'exploitation sont plus élevés pour les détaillants que pour les institutions financières.

Je dois cependant faire remarquer que les détaillants ont néanmoins exagéré. Leurs taux d'intérêt sont restés pratiquement inchangés à 28,8 p. 100 pendant toutes les années 1990, alors que les taux d'intérêt ont atteint un plancher record.

Le ministre de l'Industrie a déjà écrit au président du Conseil canadien du commerce de détail pour qu'il prie ses membres de réduire leurs taux d'intérêt.

[Français]

Je propose d'imposer un plafond aux taux, parce que beaucoup de gens ont l'impression que les entreprises émettrices de cartes de crédit récoltent des profits exorbitants.

Comme je l'ai dit plus tôt, les faits semblent confirmer cette hypothèse. Le concept de plafond n'est ni nouveau, ni radical. En effet, plus de 35 États américains ont imposé cette mesure. Encore une fois, ceci est un précédent en faveur de la réglementation au sein du marché financier.

Dans son rapport de 1989, le Comité permanent des consommateurs et des sociétés a recommandé, et je cite: «Que jamais l'écart entre le taux des cartes et le taux d'escompte ne dépasse 8 p. 100 dans le cas des cartes bancaires, et 16,5 p. 100 dans le cas des cartes des détaillants.»

Je citerai aussi le rapport minoritaire de 1992, qui lui, dit: «Lorsque la Banque de Montréal a introduit une carte de crédit assortie du plafond flottant de 5,5 p. 100 au-dessus du taux préférentiel, elle a fait la preuve que les banques ont à leur disposition d'autres façons de faire de l'argent. Elle a également confirmé que le plafonnement flottant des taux des cartes de crédit ne défie pas les lois de la finance et ne ruine pas les banques.»

Les taux dont je me suis servi se fondent sur les informations données dans le projet de loi déposé au cours de la dernière Législature, qui étaient reprises dans le rapport de 1989 du Comité permanent des consommateurs et des sociétés.

[Traduction]

Comme je l'ai déjà mentionné, la deuxième partie du projet de loi C-233 uniformiserait le calcul des intérêts sur toutes les cartes de crédit et imposerait un délai de grâce pour les paiements partiels.

Cette proposition est demandée depuis longtemps par divers groupes de revendication, notamment par l'Association des consommateurs du Canada. Des recommandations à cet effet sont aussi contenues dans le rapport de 1987 du Comité des finances, dans celui de 1989 du Comité de la consommation et des affaires commerciales ainsi que dans un rapport minoritaire présenté en 1992. Il est évident que les modifications proposées dans le projet de loi C-233 bénéficient d'un appui considérable.

Par exemple, disons qu'on effectue un achat de 1 000 $ au moyen d'une carte de crédit et que ce soit le seul achat qui figure sur le relevé mensuel. Habituellement, on dispose d'un délai de grâce de 21 jours, à compter de la date de réception du relevé, pour acquitter le montant total sans qu'il y ait des frais d'intérêt. Cependant, si l'on verse un montant partiel, disons de 700 $, des frais d'intérêt sont imposés de deux façons. D'abord, il y a des intérêts sur le montant de 1 000 $, à compter de la date de l'achat jusqu'au jour du versement de 700 $. Ensuite, des intérêts sont facturés sur le solde de 300 $, à partir de la date du paiement partiel jusqu'à celle du relevé suivant. Autrement dit, les institutions financières qui émettent des cartes de crédit font de l'argent sur le dos de ceux qui, pour une raison ou une autre, n'acquittent pas le montant complet, afin de compenser pour la période de grâce accordée à ceux qui acquittent le montant complet.


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À mon avis, c'est l'inverse de la théorie de Robin des bois, qui prévoit d'enlever au pauvre pour donner au riche. En réalité, la période de grâce est un instrument de marketing pour que les gens aient et utilisent des cartes de crédit.

Aux termes du projet de loi C-233, la simple distinction entre les fonctions de débit et de crédit d'une carte serait modifiée. Par conséquent, la partie d'un achat payée à la date d'échéance, ce qu'on appelle le paiement partiel, sera traitée comme un paiement reporté et les intérêts ne porteront que sur le solde impayé, qui sera, quant à lui, traité comme un prêt.

Le titulaire bénéficierait donc d'un délai de grâce entre la date d'achat et celle du paiement partiel. Prenons l'exemple suivant. Au moyen de votre carte de crédit, vous faites un achat de 1 000 $. Puis, lorsque vous recevez votre compte, vous remboursez 700 $.

(1810)

Les intérêts indiqués sur le relevé suivant ne porteront que sur le solde impayé de 300 $ à partir de la date du premier relevé jusqu'à la date du deuxième relevé. Le titulaire n'aura pas à payer de frais d'intérêt sur le paiement de 700 $, contrairement à ce qu'exigent actuellement certains établissements financiers.

[Français]

Nous parlons ici de responsabilité et d'équité. Il est évident que les personnes qui accumulent des dettes sur leur carte de crédit doivent prendre leurs responsabilités. Cependant, il ne faut pas oublier que les entreprises émettrices n'ont pas intérêt à ce que les factures mensuelles soient régulièrement réglées au complet. Elles profitent seulement des gens qui, pour une raison ou pour une autre, ne peuvent faire qu'un versement partiel.

Comme nous l'avons vu dans le cas des cartes des banques, les versements partiels ne diminuent pas la somme sur laquelle sont calculés les intérêts et, dans le cas des cartes des détaillants, ceux-ci imposent des taux exorbitants.

Des organismes comme l'Association coopérative d'économie familiale et le Service d'aide au consommateur de Shawinigan traitent avec des centaines de personnes écrasées de dettes. Ils trouvent qu'il est trop simple d'obtenir une carte ou d'augmenter la limite de son crédit et que les entreprises émettrices se soucient peu des conséquences sociales du crédit trop facile.

En mars dernier, le Service d'aide au consommateur de Shawinigan a publié une étude intitulée «Cartes de crédit: problèmes pour les consommateurs, profits pour les émetteurs» dans laquelle on pouvait lire et je cite: «Les compagnies émettrices, en se préoccupant surtout de leurs profits, ont négligé souvent les conséquences graves que les cartes de crédit pouvaient avoir sur la vie du consommateur.»

[Traduction]

D'aucuns estiment que le Parlement ne devrait pas légiférer le secteur des cartes de crédit, puisque les gens passent en toute liberté ce genre de contrat. Le problème, c'est qu'il ne s'agit pas d'un contrat libre dont on peut négocier les modalités, comme on le fait pour un prêt bancaire régulier. Il faut soit accepter les conditions de l'émetteur de cartes de crédit, soit se passer d'une carte. Les bien nantis peuvent toujours refuser les conditions que leur impose l'émetteur de cartes de crédit. Malheureusement, bien des consommateurs ont besoin de crédit à court terme pour mener leur vie de façon méthodique et efficace.

La main-d'oeuvre évolue et de plus en plus de gens travaillent à leur propre compte. Ils n'ont pas l'avantage de recevoir un chèque de paie toutes les deux semaines. Dans de telles circonstances, ils ont absolument besoin d'une carte de crédit.

On s'empresse toujours de me rappeler que les banques canadiennes ne sont pas des institutions publiques même si elles servent des fins publiques. Il demeure que les banques canadiennes sont très privilégiées et extrêmement puissantes au Canada. Une concurrence véritable est douteuse dans un marché oligopole.

Le rapport minoritaire de 1992 décrit exactement notre système spécial de libre entreprise: «Les faits prouvent amplement que, au Canada, les taux d'intérêt sur les cartes de crédit et la rémunération des services bancaires répondent non pas aux forces du marché, mais à des forces oligopoles qui sont de par leur nature même politiques et qui ne sont donc influencées que par des pressions publiques.»

Beaucoup estiment que les banques canadiennes ont le devoir de réagir davantage sur des questions comme les taux d'intérêt sur les cartes de crédit et les prêts aux entreprises agricoles et aux petites entreprises, justement compte tenu du statut spécial qui est le leur dans notre marché.

[Français]

Force est de constater que les entreprises émettrices n'ont absolument pas tenu compte des nombreux éléments dont je viens de parler. Je pense, par conséquent, que le temps est venu de mettre de l'ordre dans l'industrie de la carte de crédit. Le projet de loi C-233 constitue, sans nul doute, un pas dans la bonne direction.

[Traduction]

J'ai en main une opinion juridique émise par les conseillers législatifs de la Chambre des communes, qui dit que le gouvernement fédéral a la compétence de promulguer le règlement réclamé dans ce projet de loi.

Enfin, je tiens à remercier les nombreuses organisations qui m'ont aidé dans cette affaire très délicate. Je remercie tout spécialement mes collègues de la Chambre et mes électeurs qui ont appuyé ce projet de loi. J'espère qu'on répondra bientôt à nos préoccupations.

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières): Madame la Présidente, je suis très heureux en tant que porte-parole en matière d'industrie d'avoir à me prononcer sur ce projet de loi. Je voudrais dès maintenant féliciter mon collègue de Simcoe-Nord de sa présentation du projet de loi C-233, Loi sur la limitation du taux d'intérêt, de l'application des intérêts et des frais reliés aux cartes de crédit.


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(1815)

Ce projet de loi a surtout pour but de limiter le taux d'intérêt que portent les cartes de crédit. Ainsi, celles émises par une compagnie pétrolière ou un magasin spécialisé dans la vente au détail ne pourront porter respectivement un taux excédant de plus de 9,5 p. 100 ou 11,5 p. 100 le taux d'escompte de la Banque du Canada. Celles émises par une institution financière ne pourront porter un taux excédant de plus de 6,5 ou de 8,5 p. 100 le taux d'escompte de la Banque du Canada, selon que l'institution exige ou non des frais d'adhésion, de renouvellement ou d'utilisation.

Je voudrais, à ce stade-ci de mon exposé, rendre hommage-et le député de Simcoe-Nord en a parlé brièvement-au Service d'aide au consommateur de Shawinigan qui est très brillamment dirigé, depuis de nombreuses années, par Mme Madeleine Plamondon, du comté de Saint-Maurice. En effet, depuis des années, cet organisme prend la défense des consommateurs. En mars dernier, il a publié un document sur les cartes de crédit et il vient d'en émettre un autre concernant l'assurance-vie. Depuis de nombreuses années, il a à coeur et il réussit à mettre de l'avant les intérêts du consommateur.

Pour donner toute l'ampleur de ce phénomène qui est de plus en plus présent et omniprésent dans nos vies, dans notre économie, je voudrais aussi donner certaines données statistiques qui vont illustrer le phénomène.

On estime à 55 millions le nombre de cartes de crédit en circulation au Canada, et ce, d'après une étude d'Industrie Canada publiée en décembre 1993, donc récemment. Ces 55 millions de cartes de crédit représentent 2,7 cartes pour chaque adulte âgé de 18 ans et plus. De ce nombre, 25 millions sont des cartes Visa ou MasterCard, et ce, contre 12 millions en 1981. Donc, la quantité a doublé en un peu plus de dix ans. La répartition est de 17 millions de cartes de grands magasins et 3,3 millions de cartes d'essence.

Le nombre total des cartes Visa et MasterCard en circulation en 1993 a augmenté, comparativement au chiffre enregistré en 1992, passant de 24,4 millions à 25 millions, pour une augmentation, en une seule année, de 600 000 nouvelles cartes sur le marché.

Les cartes Visa et MasterCard ont été utilisées pour plus de 695 millions de transactions en 1993. Le volume des ventes, en 1993, s'établissait à 47,9 milliards de dollars par rapport à 43,1 milliards en 1992.

Enfin, à la fin d'octobre 1993, les soldes impayés-c'est une donnée très importante et très angoissante, même-des cartes Visa et MasterCard totalisaient 13,2 milliards de dollars. Cette somme représente une augmentation du montant enregistré en 1992, soit 11,4 milliards de dollars. Ce solde impayé est trois fois plus élevé qu'en 1981.

Pour vous donner une idée de la problématique, toujours à même ce document, il est bon de savoir que, en 1993, les taux d'intérêt auxquels doivent se plier les consommateurs qui ont une carte de crédit MasterCard ou Visa tournent autour de 15 p. 100. Ceux qui ont une carte de crédit des compagnies pétrolières, notamment Petro Canada, Imperial Oil et Irving Oil, 24 p. 100. Les grands magasins à rayon s'acharnent à vouloir de plus en plus de consommateurs, et cela s'explique, quand on sait qu'ils demandent 28 p. 100, toujours d'après le document d'Industrie Canada. Il faut les nommer un par un, ça vaut la peine: Canadian Tire, Eaton, Home Card, La Baie, Sears, Simpsons et Zellers. Ces magasins demandent 28,8 p. 100 d'intérêt sur les soldes impayés. Donc, on voit là toute la problématique.

Sur le plan de notre évolution collective-et il faut remercier le député de Simcoe-Nord, encore une fois, de nous donner l'occasion de le faire-il est bon aussi de donner l'évolution de ce qu'il en est du crédit à la consommation au Canada depuis une trentaine d'années. En 1960, le crédit à la consommation représentait 3,5 milliards de dollars; en 1981, on était rendu à 46,6 milliards de dollars; et en 1992, 99,5 milliards de dollars.

Parallèlement, il est intéressant de noter l'évolution des faillites personnelles, parce que ça ne prend pas la tête à Papineau pour faire la relation entre le crédit à la consommation, donc l'endettement, et la venue éventuelle d'une faillite personnelle. En 1970, on a compté au Canada, 2 700 faillites personnelles; en 1981, 23 000 et en 1992, 61 882 faillites personnelles.

(1820)

De 1986 à 1992, le taux d'endettement par rapport au revenu personnel disponible est passé de 48,4 p. 100 à 66,2 p. 100 et ce qu'il faut retenir, c'est que la carte de crédit est passée de mode de paiement, semble-t-il-tout simplement pour faire des transactions-à un mécanisme de crédit. C'est là toute la gravité de la situation.

Qui dit crédit, dit endettement. La carte de crédit a permis d'une façon facile et rapide, cela il faut le retenir, d'une façon facile et rapide à des consommateurs de faire d'importants achats, d'effectuer des voyages, de payer et de se payer des cadeaux, de faire face à des imprévus puis d'échelonner, à grands frais, le remboursement de ces dépenses sur le reste de l'année.

Souvent, cette consommation, cette surconsommation-parce qu'on vit dans un contexte de consommation de masse-est devenue synonyme de surendettement. Ce surendettement découle, en bonne partie, quand on regarde, comme l'ont fait les gens de Shawinigan ici, le Service d'aide aux consommateurs-il découle de la multiplicité des cartes de crédit qui sont sur le marché et de la multiplicité qui est faite aux citoyens comme tels. Chaque carte de crédit comporte une limite de crédit, mais quand on a plusieurs cartes de crédit, chacune comporte sa limite de crédit qui s'additionne les unes aux autres. C'est là, les études l'ont démontré, où le consommateur devient complètement empêtré et où il perd le contrôle de ses finances personnelles.

La situation est d'autant plus grave, et on y a fait allusion, que seulement 50 p. 100 des détenteurs de cartes de crédit paient leur solde sur réception. Les analyses ont démontré que parmi les 50 p. 100 qui, sur le plan des statistiques, semblent payer dès la réception, il y en aurait 20 p. 100 qui paieraient sur réception en empruntant sur leur marge de crédit personnelle. Donc, on voit là l'enchaînement. Il s'agit de cartes de crédit par-dessus cartes de crédit, et c'est la marge de crédit personnelle qui sert à payer les cartes de crédit. On s'endette, on se surendette et on fait une faillite personnelle, ce qui devient une sorte d'engrenage infernal.

D'après les analyses, il y aurait trois grandes causes à ce phénomène. D'abord, le manque d'information et de formation des consommateurs sur les modalités de paiement. On n'informe pas assez les gens. Un trop grand laxisme, une trop grande accessibilité au crédit sans qu'il y ait contrôle suffisant ou


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sagesse de la part des prêteurs, ce qui donne lieu à un endettement excessif. Et aussi, bien sûr, là où on n'a pas de contrôle, les événements graves de la vie comme la perte d'emploi, les séparations, les divorces, les accidents, les problèmes de santé.

Il y a une responsabilité pour corriger la situation qui appartient à un certain nombre d'intervenants. Bien évidemment, il faut commencer par le consommateur lui-même qui est responsable de ses actes. Ensuite, il y a les associations de consommateurs qui doivent continuer leur beau travail de formation et d'éducation. Bien sûr, existent aussi les compagnies émettrices, très importantes, qui doivent faire l'objet d'un meilleur encadrement. Et le dernier intervenant sont les gouvernements qui doivent continuer d'encourager la formation et l'information, mais qui doivent aussi réglementer, et une des façons de réglementer, c'est de limiter les taux d'intérêt comme la proposition que nous avons devant nous aujourd'hui. C'est pourquoi nous l'appuyons.

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Madame la Présidente, je ne savais pas que l'opposition ne prendrait pas la parole.

Je tiens à féliciter le député de Simcoe-Nord pour les efforts qu'il déploie pour tenter d'obtenir de justes prix pour les consommateurs de sa circonscription. C'est une question très importante parce qu'il n'y va pas uniquement de notre devoir envers les consommateurs, mais aussi de la volonté de notre gouvernement d'examiner des moyens de donner aux petites et aux moyennes entreprises l'accès aux capitaux. Dans un sens philosophique, on pourrait dire que ces deux aspects se rejoignent quelque part.

(1825)

Nous déployons de grands efforts pour que les consommateurs commencent à être traités avec équité par les institutions financières au Canada. Je crois que le député de Simcoe-Nord a mis le doigt sur quelque chose qui préoccupe tous les Canadiens.

Ces sept dernières années, les parlementaires ont accordé beaucoup d'attention à la question. En fait, trois comités parlementaires ont étudié le sujet entre 1987 et 1992. Les trois fois, rien dans les éléments de preuve présentés ne justifiait une réglementation des taux d'intérêt.

Premièrement, certaines données ont établi que si les taux d'intérêt avaient été plafonnés entre 1973 et 1991, les économies réelles pour le détenteur de carte type auraient été minimes. Par exemple, un détenteur de carte ayant un solde impayé de 1 000 $ n'aurait économisé que 50 c. par mois. Par ailleurs, il semble probable que le plafonnement des taux d'intérêt amènerait les prêteurs à limiter l'accès au crédit aux personnes jugées à haut risque. Cela pourrait inclure les personnes à faible revenu et les personnes ayant une éducation sous la moyenne, de même que les jeunes adultes et les immigrants de fraîche date. Il se pourrait donc très bien que le projet de loi nuise aux personnes qu'il vise à protéger.

Par ailleurs, certains prétendent que, si les taux d'intérêt étaient limités par la loi, ils deviendraient probablement en pratique des taux plancher et que, pour maintenir leurs niveaux de recettes, les prêteurs pourraient simplement faire varier d'autres facteurs comme les frais annuels et les délais de grâce.

Même si les dispositions de ce projet de loi qui portent sur la limitation des frais et le calcul des intérêts contribueraient à empêcher que cette dernière éventualité ne se produise, je crains que les contrôles sévères proposés par le député nuise à la concurrence à un moment où le marché des cartes de crédit offre aux consommateurs plus de choix que jamais.

Je veux donc féliciter encore une fois le député pour cette initiative, et je demande le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion suivante:

Qu'on modifie la motion en supprimant tous les mots après le mot «que» et en les remplaçant par ce qui suit:
Que le projet de loi C-233, Loi sur la limitation du taux d'intérêt, de l'application des intérêts et des frais reliés aux cartes de crédit, ne soit pas lu maintenant pour la deuxième fois, mais que l'ordre sois annulé, le projet de loi retiré et son objet renvoyé au Comité permanent de l'industrie.
La présidente suppléante (Mme Maheu): Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter l'amendement?

[Français]

M. Laurin: Madame la Présidente, nous aimerions avoir des explications, s'il vous plaît. Est-ce que vous pourriez nous expliquer ce qu'il adviendra du projet de loi du député si on refuse maintenant la deuxième lecture pour l'envoyer tout de suite au Comité permanent? Je voudrais qu'on m'explique l'étape qu'on veut éliminer.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le projet de loi, au lieu de demeurer un projet de loi non votable, disparaît et le sujet est renvoyé au comité pour une étude complète.

(1830)

M. de Savoye: Madame la Présidente, juste pour clarifier la situation, quelle est l'alternative?

La présidente suppléante (Mme Maheu): L'alternative est que l'heure pour l'étude de ce projet de loi va s'écouler et le projet de loi va disparaître.

[Traduction]

Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter l'amendement?

M. Adams: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Si la Chambre donne son consentement unanime, les députés qui veulent parler non seulement du projet de loi lui-même mais de toute la question sur laquelle il porte auront-ils la chance de le faire ou non?

La présidente suppléante (Mme Maheu): La question serait renvoyée au comité, où, je suppose, les députés auraient la chance d'exprimer leur point de vue, mais le projet de loi disparaîtrait pour ce soir.


4979

Ce que nous pouvons faire, puisque de nombreux députés ont manifesté leur intérêt à cet égard, c'est mettre la motion aux voix et obtenir ensuite le consentement unanime de la Chambre pour terminer le débat ce soir si vous le désirez.

De toute façon, vous avez entendu l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est adopté.)

La présidente suppléante (Mme Maheu): Par conséquent, l'ordre est annulé, le projet de loi est retiré et l'objet en est renvoyé à un comité.

(L'ordre est annulé et le projet de loi est retiré.)

La présidente suppléante (Mme Maheu): Avons-nous maintenant le consentement unanime pour terminer le débat ce soir, c'est-à-dire donner aux orateurs qui figuraient sur la liste la chance de parler, ou pour continuer jusqu'à ce que l'heure soit écoulée?

M. Boudria: Madame la Présidente, je pourrais peut-être venir en aide à la présidence en proposant que pour le reste du débat, avec le consentement unanime, on puisse continuer à discuter du sujet qui figurait au Feuilleton jusqu'à ce que nous l'en rayions il y a un instant. Cela permettrait à certains de nos collègues qui voulaient en parler de le faire, nonobstant le fait qu'il soit techniquement disparu du Feuilleton il y a un instant.

Je sollicite donc le consentement unanime à cet égard.

La présidente suppléante (Mme Maheu): C'est ce que je demandais, je vous remercie. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député de Broadview-Greenwood désire-t-il intervenir?

M. Mills (Broadview-Grenwood): Je vais passer, madame la Présidente.

M. Ken Epp (Elk Island): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer au débat sur cette motion. Depuis longtemps, je suis de ceux qui estiment que les banques jouent un rôle très important dans notre société, non seulement pour financer les entreprises, mais aussi pour fournir à court terme l'argent dont les gens ont provisoirement besoin pour faire rouler notre économie.

Comme on l'a déjà dit, bien des gens règlent en totalité, chaque mois, les dépenses qu'ils ont engagées avec leur carte de crédit et, dans la plupart des cas, ils n'ont donc aucuns frais à payer. Il y en a toutefois qui ne le font pas, et c'est là que le problème se pose.

Nous devons d'abord nous poser la question suivante: quel est l'objectif ou la justification de ce type de projet de loi? On peut probablement dire, de façon très générale, que nous voulons une certaine justice. Nous voulons que les utilisateurs de ce service bancaire n'aient pas de frais indus ni de taux exorbitants à payer, tout en donnant cependant aux banques des raisons suffisantes de continuer d'offrir ce service et, partant, de fournir le petit coup de pouce nécessaire pour que l'économie continue de rouler.

Une fois qu'on a établi son objectif, il faut se demander comment on compte l'atteindre. Voici où les opinions pourraient commencer à diverger. Bien des députés d'en face souscrivent à la première hypothèse, celle selon laquelle cela ne peut fonctionner à moins que le gouvernement impose des taxes, subventionne cela, le contrôle, le finance et le réglemente. Je soutiendrai humblement que ce n'est pas vrai.

Si on étudie le développement du Canada, tout s'est fait comme par enchantement avant qu'il n'y ait d'intervention importante du gouvernement en ce qui concerne l'exploitation des entreprises et le financement des propriétaires de maison.

(1835)

Je rejette donc l'idée que nous devons imposer une réglementation. Je suis convaincu que le marché peut établir un bon équilibre. Si nous n'intervenons pas dans le système de libre entreprise et laissons jouer une juste concurrence, les taux resteront modérés. S'il y a beaucoup d'argent à faire sur ce marché, il attirera de nouvelles entreprises, elles se livreront concurrence et offriront leurs services à meilleur compte. Ceux qui pratiquent des taux élevés devront donc les abaisser. Les taux s'établiront au plus bas niveau possible, en deçà de quoi les entreprises ne réaliseraient pas de bénéfices.

La meilleure solution est de ne pas légiférer pour plafonner les taux, mais d'observer la situation. Nos lois devraient simplement assurer la juste divulgation des frais réels.

C'est une des pires erreurs dans ce domaine. Il y a des méthodes irrégulières pour présenter les taux d'intérêt. Il n'y a pas de bonne comparaison. Nous devons admettre, et je le dis en connaissance de cause parce que j'ai été dans le domaine des mathématiques pendant des années, que 85 p. 100 de la population n'aiment pas les mathématiques. C'est surprenant combien de gens ont de la difficulté à faire des opérations simples comme la conversion au système métrique. Quand on parle de taux d'intérêt et de ces choses-là, ils sont perdus.

Si les institutions financières ne veulent pas, de leur plein gré, adopter une méthode de calcul des taux et des frais qui soit simple, il faudrait peut-être adopter une loi.

Je voudrais mentionner brièvement trois secteurs où la publicité doit dire la vérité. Le premier, c'est qu'il doit y avoir une certaine uniformité dans la déclaration des frais. Les frais pour ces différentes cartes varient de zéro à un maximum de 30 $ par année. Selon le solde reporté, l'intérêt peut être négligeable ou assez élevé. J'estime qu'il incombe aux institutions financières d'indiquer clairement à combien s'élèvent les coûts réels.

Le deuxième a trait à l'utilisation de taux nominaux par opposition aux taux réels. C'est une question que beaucoup de consommateurs ne comprennent pas. Il faudrait obliger les insti-


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tutions financières à utiliser les taux réels. L'utilisation de taux nominaux, qui est largement répandue, est très trompeuse.

Cela ne fait pas une grande différence si les taux sont bas. Quand j'ai fait un calcul, par exemple, je n'ai pas trouvé de banques qui le font, mais il y a des détaillants qui font payer, disons, 2,4 p. 100 par mois. Entre parenthèses, ils inscrivent 28,8 p. 100 par année, ce qui n'est pas vrai, évidemment. Le calcul des intérêts se fait toujours tous les mois. Par conséquent, ils sont composés mensuellement et le taux réel de 28,8 p. 100 par année composé mensuellement devient en fait un taux de 32,9 p. 100 par année.

S'ils étaient tenus d'exprimer le taux réel, ils ne pourraient pas jouer ces petits jeux avec les consommateurs qui ont du mal à faire la distinction entre les taux réels et les taux nominaux.

Le troisième aspect que je voudrais aborder, et il aura probablement l'effet d'une bombe, car je n'ai jamais entendu personne en parler, c'est que plusieurs institutions financières dont je suis au courant et que j'ai vérifiées personnellement finissent par calculer leurs intérêts en fonction à la fois du temps et du taux. Pour simplifier la formule, la plupart d'entre nous savent que l'intérêt égale le principal multiplié par le taux, multiplié par le temps. J'ai parlé du taux et de la façon dont elles le truquent, et je voudrais parler maintenant du temps.

Elles procèdent d'une manière très intéressante. Ainsi, chaque fois qu'il y a une opération, qu'il s'agisse du calcul des intérêts courus en fonction de la date du relevé ou qu'un paiement a été effectué, elles calculent les intérêts jusqu'à cette date inclusivement.

(1840)

Si j'empruntais mille dollars sur ma carte de crédit le matin et que je les remboursais dans l'après-midi, c'est peut-être normal que je doive des intérêts pour une journée.

Par contre, si j'emprunte mille dollars à midi aujourd'hui et que je les rembourse demain à midi, il n'est pas juste, à mon avis, de me compter des intérêts pour deux jours et pourtant, si vous vérifiez, c'est ce qu'elles font. Si ce projet de loi est renvoyé à un comité, j'espère que cette question sera examinée car c'est un problème qui coûte très cher aux consommateurs canadiens et, que je sache, un problème dont le public n'est guère au courant.

J'ai fait une expérience à ce sujet et j'ai constaté que si je faisais un paiement, l'intérêt était calculé depuis la date de mon relevé précédent jusqu'à celle du paiement inclusivement; on me facturait des intérêts à nouveau pour cette dernière date dans le relevé suivant. Donc, essentiellement, l'institution financière dont je suis client me soutirait 24 jours supplémentaires d'intérêt dans l'année, sauf que je n'ai pas continué l'expérience aussi longtemps. Juste assez pour m'assurer que c'était bien ainsi qu'elle procédait.

En utilisant un report de 18 p. 100 par an et en estimant à 11 milliards de dollars le total des soldes impayés, j'ai calculé que cela rapportait à ces institutions financières une somme supplémentaire de 141 millions de dollars par an, ce qui, à mon avis, est prendre aux consommateurs un montant substantiel.

J'aurais d'autres choses à dire, mais mon temps de parole est écoulé. Je félicite le député pour ce projet de loi. Je compte bien qu'il sera renvoyé à un comité et que les questions que j'ai soulevées y seront examinées attentivement.

M. Wayne Easter (Malpèque): Madame la Présidente, je voudrais féliciter mon collègue de Simcoe-Nord d'avoir présenté ce projet de loi, qui est devenu une motion, et de m'avoir permis d'appuyer la motion. Cette mesure était attendue depuis trop longtemps.

Pour faire suite à ce que disait le député qui a parlé avant moi, il va de soi que le fait d'avoir laissé les lois du marché dicter les taux d'intérêt a été un échec. Depuis des années, les institutions financières escroquent le public avec les taux d'intérêt liés à l'utilisation des cartes de crédit.

Il incombe au gouvernement de protéger les consommateurs canadiens contre la recherche du profit injuste et parfois exagéré des grandes institutions financières. Mon expérience personnelle dans le domaine de l'entreprise m'a appris que les frais d'intérêt pouvaient être très lourds, devenir rapidement incontrôlables et créer des difficultés financières extrêmes.

Bien sûr, il faut s'attendre à ce que les institutions financières visées fassent valoir qu'il n'appartient pas au gouvernement fédéral de fixer les taux d'intérêt à la place des banques. Nous devons nous y attendre, mais cela ne fera que favoriser la tenue d'un débat salutaire.

Toutefois, la teneur du débat actuel montre qu'un contrôle devrait être exercé sur les taux d'intérêt.

En tant que députés, nous avons le droit et la responsabilité de protéger les Canadiens contre des pratiques bancaires injustes et contre des taux d'intérêt trop élevés liés à l'utilisation des cartes de crédit.

Le projet de loi, ou la motion à l'étude, ne doit pas être vu comme une attaque contre les banques, mais comme une mesure visant à assurer des relations justes et équitables entre les banques et les consommateurs. Nous savons qu'il incombe au gouvernement d'assurer la stabilité du marché financier pour que les banques et les institutions prêteuses puissent prospérer.

Nous recourons pour cela à la Loi sur les banques et à la Banque du Canada. Les mêmes institutions financières qui prennent aux Canadiens ce qui me semble être des intérêts exorbitants et qui font preuve d'une très grande imagination dans le calcul des frais d'intérêt ont la possibilité d'emprunter de l'argent au gouvernement fédéral au taux d'escompte de la Banque du Canada, qui est très bas.

Pourtant, ces mêmes institutions ne font pas profiter les consommateurs canadiens de ces avantages. Elles utilisent plutôt la différence entre le taux qui leur est consenti et celui qu'elles imposent aux utilisateurs de cartes de crédit pour réaliser d'énormes profits.

Au bout du compte, ce sont les consommateurs canadiens qui se trouvent à faire réaliser des profits énormes aux banques. Ce sont eux qui paient la facture. Pourtant, ce sont sur eux que nous

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comptons, en tant que gouvernement, pour relancer l'économie. C'est ce que propose aujourd'hui le député de Simcoe-Nord. Il propose un projet de loi qui favorise la croissance économique, tout en permettant aux consommateurs de dépenser davantage grâce à la limitation des taux d'intérêt liés aux cartes de crédit.

(1845)

Cette mesure législative vise à établir des règlements justes et raisonnables à l'intention des institutions de crédit, en faisant en sorte que ces institutions puissent réaliser des profits raisonnables sur les services qu'elles offrent.

Je voudrais également souligner les répercussions positives que cette mesure législative aura sur notre économie. Elle créera un climat plus positif pour les gens ordinaires qui ont recours au crédit pour acheter des produits et des services, en accroissant les dépenses, puisqu'ils n'ont pas à consacrer une bonne part de leur marge brute d'autofinancement aux frais d'intérêt bancaires.

Il ne devrait pas y avoir un seul député qui soit contre le fait qu'on investisse plus de capitaux dans le secteur du détail. De plus, on a dit que les établissements émetteurs de cartes de crédit affichent une stabilité telle qu'ils n'ont pas relevé leurs taux comme l'a fait la Banque du Canada ces derniers mois.

Ma foi, pas étonnant! Notre pays connaît ses plus bas taux d'intérêt en 30 ans et les établissements financiers n'ont à aucun moment réagi à la forte récession en abaissant les taux d'intérêt qu'ils font payer à leurs clients ces temps-ci. Le fait est que, lorsque les taux d'intérêt sont élevés, les banques pratiquent des taux de crédit élevés et que, lorsque les taux d'intérêt sont bas, elles ne modifient pas leurs taux de crédit pour soutirer encore plus d'argent aux utilisateurs.

Ce n'est pas de la petite bière! À l'heure actuelle, sur le marché du détail, les cartes de crédit représentent environ 50 milliards de dollars en achats au Canada. Il n'est pas étonnant que les banques et les autres institutions financières soient si peu disposées à maintenir et, encore moins, à abaisser leurs taux d'intérêt pour le bénéfice du consommateur canadien.

Quand le taux d'intérêt moyen se situe entre 11,5 et 19 p. 100, cela peut déjà rapporter de gros bénéfices aux banques.

Je sais que certains diront: «qu'y a-t-il de mal à faire des bénéfices?» Il faut néanmoins se demander jusqu'où un bénéfice est raisonnable. Si les établissements émetteurs de cartes de crédit, les banques, ne se montrent pas raisonnables, alors le gouvernement a le devoir d'agir dans l'intérêt de la population, et c'est ce que nous tentons de faire, je crois, avec le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui.

J'ai vu des gouvernements antérieurs s'inquiéter au sujet des taux d'intérêt sur les cartes de crédit, parfois même au sujet des taux d'intérêt sur les prêts. Toutefois, quand la pression montait et que les gouvernements se trouvaient acculés au pied du mur, ils laissaient tomber.

Ce projet de loi donne au gouvernement l'occasion d'agir. Or, c'est par ses actes qu'on révèle sa vraie nature. Nous avons été élus pour former un gouvernement d'action. Nous allons montrer que nous respectons nos engagements, et voir à ce que l'objet de ce projet de loi donne lieu à des mesures concrètes, lorsque le Comité de l'industrie en sera saisi.

C'est pourquoi je veux que tous mes collègues comprennent bien l'objet du projet de loi présenté par le député. Cette mesure vise à établir une réglementation juste, pour les banques et les autres institutions financières, afin de les empêcher de faire des profits massifs aux dépens des consommateurs moyens du Canada. Après tout, ce sont ces derniers qui ont été les plus touchés par la récession qui, selon nos statistiques, sévit maintenant dans le secteur de la vente au détail.

L'industrie des banques n'a pas autant souffert, dans les périodes difficiles. Il est temps d'adopter une loi qui protège le Canadien moyen contre les taux d'intérêt excessifs des grandes institutions financières.

Comme je le disais un peu plus tôt, nous faisons tout ce que nous pouvons pour que les institutions prêteuses demeurent stables et sûres, en vertu de la Loi sur la Banque du Canada, et par l'intermédiaire de la Banque du Canada, qui leur prête de l'argent à des taux avantageux.

(1850)

Nous avons au moins le devoir envers les consommateurs canadiens de nous assurer que les règles du jeu sont justes et que l'éventail des taux d'intérêt est raisonnable. J'encourage le Comité de l'industrie à veiller à ce que l'objet de ce projet de loi donne lieu à des mesures concrètes. Le gouvernement doit bien montrer qu'il est prêt à agir sérieusement.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Madame la Présidente, je suis également heureux d'associer ma voix, ici, ce soir, à celle de mes collègues sur le projet de loi C-233.

Évidemment, comme nous savons déjà que ce projet de loi va être déféré auprès d'un comité, je n'insisterai pas davantage sur les mérites qu'il a et qui auraient amené mon discours, justement, à le suggérer et à le recommander. Tout de même, de manière à ajouter ma voix à celle de l'honorable député qui m'a précédé, j'aimerais insister davantage, encore, pour être bien certain que le comité comprend que ce projet de loi jouit d'un fort soutien au sein de cette Chambre.

Rappelons que depuis le début des années 1980, trois comités parlementaires ont examiné le marché des cartes de crédit au Canada. Le Comité de la consommation et des corporations, en 1989, avait comme thème l'importance de la divulgation, alors que celui de 1992 se penchait sur la possibilité de restriction d'entrée. En 1987, le Comité des finances avait examiné l'ampleur de la concurrence.

Quoique ces thèmes aient été différents, les trois examens avaient comme éléments centraux la chèreté, la chèreté des taux d'intérêt applicables aux cartes de crédit et la persistance terrible de ces taux d'intérêt élevés, alors même que les autres taux d'intérêt fléchissent partout ailleurs.

Le comité de 1989 recommandait que le maximum du taux applicable aux cartes émises par les institutions financières soit fixé à 8 point de pourcentage au-dessus du taux d'escompte,

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alors que celui de 1992 recommandait, de son côté, qu'aucun plafond ne soit imposé.

Au cours de la dernière législature, trois députés, dont deux conservateurs, Don Blenkarn et Louise Feltham, et un néo-démocrate, John Rodriguez, ont déposé à la Chambre des projets de loi relatifs aux cartes de crédit, et ceci démontre donc que ce n'est pas seulement cette législature qui se penche sur la question, mais qu'il y a une longue succession de préoccupations, qui aujourd'hui voient le début d'un aboutissement, par le fait que la motion soit référée à un comité.

J'aimerais aussi mentionner que récemment, j'ai moi-même déposé deux projets de loi sur le sujet qui nous préoccupe actuellement et ce, le 21 mars dernier. Il s'agit des projets de loi C-227 et C-228, lesquels portent pour l'essentiel et dans les mêmes termes ou à peu près, sur les préoccupations du projet de loi C-233.

Vous comprendrez donc combien je suis heureux d'associer ma voix, ce soir, à celle de mon collègue de North-Simcoe. Il faut bien admettre que les taux d'intérêt facturés aux consommateurs utilisant une carte de crédit ne reflètent en aucune façon le coût réel du crédit consenti à ces consommateurs. Ces consommateurs sont tout simplement exploités.

Le projet de loi C-233 diffère, dans une certaine mesure, de ceux que j'avais moi-même déposé auprès de cette Chambre en première lecture. Et j'aimerais, dans un premier temps, et pour le bénéfice du comité qui devra se pencher sur ces questions, exprimer un certain nombre de différences et le motif pour lequel j'étais enclin à appuyer les différences que je propose.

Dans le projet de loi C-233, à l'article 9, paragraphe 1, on mentionne dans la version française que les intérêts sont calculés mensuellement, tandis que la version anglaise n'en fait aucunement mention. Dans le projet de loi C-227, que je déposais, à l'article 5.1, paragraphe 1, le calcul est fait mensuellement.

Dans le projet de loi C-233, sont exclus de l'article 9 les avances de fonds, alors que le projet de loi C-227 n'exclut point ces avances de fonds.

Dans le projet de loi C-233, au paragraphe 10(1), on exclut-mais je ne sais si c'est volontaire ou pas-les contrevenants de l'article 3. L'article 3, je le rappelle, indique «. . .que les institutions financières qui exigent ou stipulent des frais d'adhésion ou de renouvellement. . .» etc. Donc, on exclut les contrevenants à cet article des amendes. Dans le projet C-228 que je déposais, ce projet inclut l'imposition d'amendes à tous les contrevenants, même à ceux qui exigent ou stipulent des frais d'adhésion ou de renouvellement.

Dans le C-233, aux alinéas 10(1)a) et b), il y a l'imposition d'amendes maximales de 75 000 $ et de 50 000 $ respectivement. Dans le C-228, nous proposons les mêmes amendes; nous avons dû consulter les mêmes recherchistes. Par contre, notre projet de loi propose aussi des amendes minimales, contrairement au C-233.

Mon collègue de Simcoe-Nord ainsi que mon collègue de Trois-Rivières ont mentionné l'étude réalisée par le Service d'aide aux consommateurs et portant sur les cartes de crédit, étude réalisée par Mme Madeleine Plamondon et MM. Henri-Paul Labonté et Marc Pépin. Puis-je souligner, pour le bénéfice de cette Chambre et du comité qui suivra, que cette étude a été rendue possible grâce à une subvention d'Industrie Canada, ce qui la rend, non seulement crédible, puisqu'elle est crédible de par ses auteurs, mais hautement pertinente puisqu'elle est financée par les deniers publics.

En page 2 de cette étude, on nous présente immédiatement l'essentiel du message et le voici. Les auteurs disent et je cite: «Nos conclusions touchent la responsabilisation des émetteurs de cartes et l'urgence, pour le gouvernement, de se pencher sur la question». Manifestement, c'est ce que nous faisons ce soir. Je termine en indiquant que dans le public, il y a vraiment de l'appui pour ceci. D'abord la Borrowers Action Society qui m'écrivait au sujet de mes projets de loi, mais je transfère le bénéfice à mon collègue de Simcoe-Nord, disait:

[Traduction]

«Nous sommes très heureux de l'initiative que vous et le Bloc québécois prenez dans ce domaine, et je veux vous assurer de mon entière collaboration, ainsi que de l'appui de la Borrowers Action Society. Notre organisme compte 7 000 appuis recensés dans toutes les régions du Canada. Si nous pouvons vous être utiles de quelque façon que ce soit, n'hésitez pas à nous le faire savoir.»

La présidente suppléante (Mme Maheu): La période consacrée aux initiatives parlementaires est maintenant expirée.

[Français]

Comme il est 18 h 56 et qu'il n'y a aucun député pour prendre part aux délibérations sur la motion d'ajournement, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 55.)