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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 7 mai 1996

AFFAIRES COURANTES

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

LA CONSOMMATION D'ALCOOL

LES DROITS DE LA PERSONNE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

    Projet de loi C-33. Étude à l'étape du rapport 2395

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

LES MOTIONS D'AMENDEMENT

    Motions nos 11, 12, 13, 14 et 15 2396

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

REPRISE DU DÉBAT À L'ÉTABPE DU RAPPORT

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 2409
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 2412

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL DU CANADA

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS


M. Peric
2426">LE LOGEMENT

M. Peric L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU QUÉBEC

LES POMPIERS

LE CHILI

M. KARL BURKHART

M. FRANK PICKARD

LES JEUX OLYMPIQUES SPÉCIAUX DU PRINTEMPS DE L'ONTARIO

AIR CANADA

LES POMPIERS

CHYPRE

LA DÉFENSE NATIONALE

    M. Leroux (Shefford) 2429

LES ENTRAVES AU COMMERCE INTÉRIEUR

LE CRÉDIT-BAIL AUTOMOBILE

LE TOURISME

LE PARTI LIBÉRAL

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE SECTEUR FORESTIER

QUESTIONS ORALES

LES RÉFÉRENDUMS

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2431
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2432

LA FISCALITÉ

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2432
    M. Martin (LaSalle-Émard) 2432
    M. Martin (LaSalle-Émard) 2433

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Martin (LaSalle-Émard) 2433
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2433

LE BUDGET FÉDÉRAL

    M. Harper (Simcoe-Centre) 2433
    M. Martin (LaSalle-Émard) 2434
    M. Harper (Simcoe-Centre) 2434
    M. Martin (LaSalle-Émard) 2434

L'IMMIGRATION

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 2434
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 2434

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2435
    M. Martin (LaSalle-Émard) 2435

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LE FROMAGE AU LAIT CRU

LA FISCALITÉ

    Mme Stewart (Brant) 2436

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 2437

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

    Mme Stewart (Northumberland) 2437

LA DÉFENSE NATIONALE

LA CONSTITUTION

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2438

LA SANTÉ

LA PÊCHE AU SAUMON

RECOURS AU RÈGLEMENT

PÉRIODE DES QUESTIONS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

    Projet de loi C-33. Reprise de l'étude à l'étape du rapport,ainsi que de l'étude des motions nos 1, 9, 10, 11, 12, 13,14, 15, 18 2439

QUESTION DE PRIVILÈGE

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE-L'EMPLOI DE TERMES ANTIPARLEMENTAIRES

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

    Projet de loi C-33. Reprise de l'étude à l'étape durapport 2441

PROJET DE LOI C-33. AVIS DE MOTION CONCERNANT L'ATTRIBUTION DE TEMPS

LES MOTIONS D'AMENDEMENT

    M. Hill (Prince George-Peace River) 2454

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-217. Reprise de l'étude en deuxièmelecture de la motion 2458
    Adoption de la motion par 107 voix contre 89 2458
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loiet renvoi à un comité 2459

LA MAIN-D'OEUVRE ENFANTINE

MOTION D'AJOURNEMENT

L'ENVIRONNEMENT


2395


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 7 mai 1996

La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

M. Abbott: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Ayant été absent hier, c'est la première occasion que j'ai de réagir aux observations du ministre des Affaires étrangères qui m'a prêté des propos non conformes aux faits et tout à fait inexacts.

La position et l'engagement du Parti réformiste à l'égard des droits de la personne au Canada sont on ne peut plus clairs. J'appuie le Parti réformiste en ce qui concerne. . .

Le vice-président: Cela tient du débat.

______________________________________________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter aujourd'hui. La première vient de Sarnia, en Ontario.

Les pétitionnaires font remarquer à la Chambre que la gestion du foyer familial et le soin d'enfants d'âge préscolaire représentent une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de prendre des mesures en vue d'éliminer la discrimination fiscale à l'endroit des familles qui décident de s'occuper, à la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de malades chroniques, de personnes âgées et personnes handicapées.

LA CONSOMMATION D'ALCOOL

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition vient de Brantford, en Ontario.

Les pétitionnaires tiennent à faire remarquer à la Chambre que la consommation d'alcool peut causer des problèmes de santé ou affaiblir les facultés d'une personne et, plus spécialement, qu'on peut prévenir entièrement le syndrome d'alcoolisme foetal et les autres anomalies congénitales attribuables à l'alcool en évitant de consommer de l'alcool durant la grossesse.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement d'adopter une loi exigeant qu'on appose sur les contenants de boissons alcoolisées des étiquettes mettant en garde le consommateur contre les risques pour la santé.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis inondé de pétitions qui me sont envoyées par tous les moyens, sauf la voiture à cheval. Les pétitionnaires s'inquiètent de la façon dont le gouvernement essaie de faire adopter à toute vapeur une mesure législative visant à faire inscrire l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Les pétitionnaires exhortent le Parlement à s'opposer à cette démarche. Ils ont recours à divers moyens pour exprimer leur avis à ce sujet, mais ils entretiennent toujours des réserves quant à la méthode qu'utilise le gouvernement et au message qu'il véhicule dans cette affaire.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


2395

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le vice-président: Il y a 21 motions d'amendement inscrites au Feuilleton pour l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-33 modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne.

(1010)

Les motions seront groupées aux fins du débat. La présidence n'est pas encore prête à rendre une décision complète au sujet du groupement des motions et des modalités de mise aux voix. Les greffiers au Bureau ont précisé la procédure à suivre en ce qui concerne les députés qui ont présenté des motions.


2396

[Français]

Nous pouvons commencer avec le groupe no 1 qui comprend les motions nos 1, 9 à 15 et 18. Si cela convient à nos collègues, nous allons commencer avec le groupe no 1 qui comprend les motions que j'ai indiquées.

[Traduction]

LES MOTIONS D'AMENDEMENT

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.) propose:

Qu'on modifie le projet de loi C-33, dans le préambule, par substitution, aux lignes 20 à 32, page 1, de ce qui suit:
«la dignité et la valeur de tout individu,».
Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.) propose:

Motion no 9
Qu'on modifie le projet de loi C-33, à l'article 1, par adjonction, après la ligne 32, page 1, de ce qui suit:
«2.1 Rien dans les articles 2 et 3 n'a pour effet de rendre inopérante quelque disposition du Code criminel que ce soit.»
M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.) propose:

Motion no 10
Qu'on modifie le projet de loi C-33, à l'article 1, par adjonction, après la ligne 32, page 1, de ce qui suit:
«2.1 Les actes des institutions religieuses relatifs à l'embauche et à l'enseignement ne sont des actes de discrimination illicite pour l'application des articles 2 et 3 si ces actes sont conformes à la Charte canadienne des droits et libertés.»
M. Boudria: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je demande l'unanimité pour que toutes les motions présentées à l'étape du rapport du projet de loi C-33 soient réputées avoir été proposées, appuyées et lues à la Chambre. Nous avons récemment procédé de cette façon pour un projet de loi et ce serait commode pour les députés.

Le vice-président: Avant de demander le consentement, puisque la question a été soulevée hier, je devrais peut-être mentionner que tout député qui ne désire pas qu'on se passe de la lecture d'une motion peut simplement dire non. Qu'il le dise haut et fort. La même situation s'est produite hier. Je n'ai entendu personne dire non et j'ai présumé qu'il y avait unanimité, alors que ce n'était pas le cas.

Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.) propose:

Motion no 11
Qu'on modifie le projet de loi C-33, à l'article 1, par adjonction, après la ligne 32, page 1, de ce qui suit:
«2.1 La mention de l'«orientation sexuelle» aux articles 2 et 3 n'a pas pour effet de modifier le sens des termes «mariage», «famille» et «conjoint» en vertu de quelque loi fédérale que ce soit.»
Motion no 12
Qu'on modifie le projet de loi C-33, à l'article 1, par adjonction, après la ligne 32, page 1, de ce qui suit:
«2.1 La mention de l'«orientation sexuelle» aux articles 2 et 3 n'a pas pour effet de porter atteinte aux libertés de religion, d'expression ou d'association garanties en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.»
Motion no 13
Qu'on modifie le projet de loi C-33, à l'article 1, par adjonction, après la ligne 32, page 1, de ce qui suit:
«2.1 La mention de l'«orientation sexuelle» aux articles 2 et 3 n'a pas pour effet de rendre inopérante quelque disposition du Code criminel que ce soit.»
Motion no 14
Qu'on modifie le projet de loi C-33, à l'article 1, par adjonction, après la ligne 32, page 1, de ce qui suit:
«2.1 Rien dans les articles 2 et 3 n'a pour effet de permettre d'étendre, aux personnes cohabitant avec une autre personne du même sexe dans une situation assimilable à une union conjugale, la prestation d'avantages ou de droits matrimoniaux ou familiaux administrés et financés en vertu d'une loi fédérale.»
Motion no 15
Qu'on modifie le projet de loi C-33, à l'article 1, par adjonction, après la ligne 32, page 1, de ce qui suit:
«2.1 (1) Rien dans les articles 2 et 3 n'a pour effet d'autoriser le mariage entre personnes du même sexe.»
M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.) propose:

Motion no 18
Qu'on modifie le projet de loi C-33, à l'article 2, par adjonction, après la ligne 9, page 2, de ce qui suit:
«3.(2) Il demeure entendu que rien dans les articles 2 et 3 de la présente loi ne peut être interprété par les tribunaux de manière à ajouter l'expression l'orientation sexuelle à l'article 16, à l'y inclure ou à l'y interpréter.»
M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, je vais parler de la motion no 1, qui a aussi rapport avec la motion no 8.

On va ainsi changer la modification proposée dans le projet de loi C-33 pour ajouter simplement l'expression «orientation sexuelle» au libellé de l'article sur l'objet de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Ces motions apaiseront, dans une large mesure, les craintes de nombreux Canadiens qui pensent que le projet de loi C-33, dans sa version actuelle, va amener les tribunaux à interpréter la loi de telle façon que les couples gais pourront profiter des mêmes avantages dont jouissent les couples mariés et les familles et que les privilèges juridiques que l'État accorde aux conjoints de sexe opposé seront garantis aux conjoints de même sexe.

Le ministre de la Justice a précisé en termes explicites que ce n'était pas l'intention du projet de loi C-33. Il a déclaré que le projet de loi visait le marché du travail et rien de plus. Il nous a garanti qu'il n'avait rien à voir avec la définition de la famille, des avantages accordés aux bénéficaires de même sexe ou des couples de même sexe.

Si la grande majorité des Canadiens arrivent à être convaincus de cela, ils appuieront le projet de loi C-33. S'ils pouvaient être certains que les répercussions de cette loi se limiteront au milieu du travail, au moins 90 p. 100 y souscriraient.

(1015)

Le fait est que nous sommes une société tolérante. Les Canadiens n'aiment pas la discrimination. Ils la déplorent, qu'elle soit pratiquée pour des motifs d'orientation sexuelle, de race, de langue ou de religion, peu importe. La discrimination sera toujours la discrimination.

Si les Canadiens pouvaient être certains que le projet de loi C-33 se limitera à protéger les gais contre le harcèlement et tout traitement injuste en milieu de travail, je prétends que cette mesure jouirait d'un très large appui.

Cependant, de nombreux députés, dont je suis, qui représentent leurs électeurs n'ont pu se prononcer en faveur du projet de loi C-33 à l'étape de la deuxième lecture. Tout comme moi, les députés ont de bonnes raisons de croire que le libellé actuel du projet de loi pourrait être interprété par les tribunaux d'une façon qui élargirait la définition juridique de famille pour inclure les couples de même sexe.

Pour ma part, je crains que cela n'ouvre la porte à une interprétation telle de l'article 1 de la Charte canadienne des droits et libertés que, aux termes des lois provinciales, on ne puisse plus tenir compte


2397

du pour et du contre de l'orientation sexuelle dans les cas de garde d'enfants.

En d'autres termes, on ne pourrait plus prendre en considération l'orientation sexuelle des parents gais dans l'examen des demandes d'adoption. J'ai peur que cela ne viole les droits d'un enfant qui, toutes choses étant égales, pourrait mieux être élevé par des parents hétérosexuels que des parents homosexuels.

Je ne dis pas qu'il faudrait interdire l'adoption aux couples gais. Toutefois, les enfants devraient avoir le droit de prendre en considération l'orientation sexuelle des parents à qui les autorités les confient en adoption.

C'est ma principale préoccupation à l'égard de la version actuelle du projet de loi C-33. D'autres députés s'inquiètent plutôt des répercussions que pourrait avoir le projet de loi sur la définition juridique des termes «état matrimonial» et «famille».

Nos inquiétudes sont justifiées. Le projet de loi C-33 ne fait pas qu'ajouter l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne. II modifie la version anglaise de sorte que l'objet de la loi est de s'appliquer à «all individuals» au lieu de «every individual». Ce n'est pas rien. «All individuals» suppose l'exclusion et «every individual», l'inclusion. La première fait allusion aux individus pris isolément et la deuxième, les individus pris en groupes.

Les avocats que j'ai consultés sont d'avis qu'un juge pourrait interpréter «all individuals» comme si l'expression incluait les couples de même sexe aux fins de la loi. Cela est d'autant plus certain que le projet de loi C-33 supprime aussi, dans la version anglaise, les pronoms «himself» et «herself», «he» et «she» pour y inscrire «themselves» et «they».

Je propose les motions nos 1 et 8 pour supprimer les termes «tous les individus» et que je parraine remplace l'expression «tous les individus» et le pronom «leurs» par «tout individu» et «ses», et ajoute l'expression «orientation sexuelle».

Sauf erreur, il n'y avait aucune raison particulière pour que les rédacteurs remplacent «every individual» par «all individuals». En fait, je n'ai pu obtenir aucune explication à cet égard. Je suppose que ce n'était qu'aux fins de la syntaxe.

Toutefois, en apportant les amendements que je propose, nous, les députés, disons clairement aux tribunaux que la loi devrait s'appliquer aux individus pris isolément et non aux individus pris en groupes.

En adoptant cette motion, nous disons aux tribunaux qu'il n'est absolument pas dans notre intention que l'inclusion de l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne soit vue comme une approbation, implicite ou explicite, des unions entre personnes de même sexe.

En se prononçant en faveur de la motion, les députés déclarent que le projet de loi C-33 n'a rien à voir avec les questions concernant les unions entre personnes de même sexe, les parents de même sexe ou les prestations aux couples de même sexe. Le projet de loi concerne strictement les individus, et non les relations entre individus.

La volonté du gouvernement ne peut être plus claire. Compte tenu de ces explications, on ne devrait pas avoir d'hésitation à appuyer le projet de loi C-33. Il deviendrait une loi qui s'appliquerait exactement comme le ministre de la Justice l'a prévu, une loi qui servirait à lutter contre le harcèlement et la discrimination en milieu de travail. Les Canadiens pourront être fiers de cette loi.

(1020)

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement l'auteur de la motion, qui a fait valoir d'excellents arguments. Il a fait remarquer une chose que je trouve absolument essentielle. Il a exposé les craintes des Canadiens à propos des ramifications éventuelles qui ne sont pas énoncées dans le projet de loi, mais qui font l'objet de toutes sortes d'assurances données en dehors du projet de loi.

Le député a parlé de discrimination. Les Canadiens n'approuvent clairement pas la discrimination. Ils tiennent nettement à ce que personne ne fasse l'objet de discrimination. Le problème tient aux ramifications éventuelles, telles que le député les a décrites brièvement.

Ce qui me dérange découle des efforts que le député a faits pour découvrir pourquoi on modifiait le libellé de la loi. Cette loi est en vigueur depuis de nombreuses années. Elle a fait l'objet d'interprétations par les tribunaux, fondées sur son libellé actuel. Voilà soudain qu'en même temps qu'on ajoute ces deux termes controversés, on nous demande de modifier d'autres termes de l'article 2.

Le député nous dit qu'il a tâché de trouver la justification juridique pour apporter ces modifications. Il nous dit que le ministère de la Justice a été incapable de lui donner la moindre justification juridique. Je soutiens en fait qu'il n'y a aucune justification pour apporter ces modifications, à moins que ce soit pour faire précisément ce que prétend le député, à savoir s'adresser à des groupes plutôt qu'à des individus.

Le problème, c'est que nous n'avons pas encore entendu qui que ce soit du ministère de la Justice exposer clairement pourquoi on modifie ces termes. Faute d'une raison bien claire pour modifier une loi qui existe déjà et qui a fait l'objet d'interprétations judiciaires, je crois qu'il n'y a aucune raison claire pour modifier ces termes. Voilà pourquoi j'appuie entièrement la motion présentée par le député de Hamilton-Wentworth. J'attends une justification, de la part du secrétaire parlementaire ou du ministre de la Justice, pour cette modification et un argument qui puisse me convaincre d'accepter ce libellé plutôt que de laisser l'article 2 tel que libellé actuellement, sauf pour l'addition des termes «orientation sexuelle».

Je le répète, s'il n'y a aucune raison pour apporter la modification, il n'y a aucune raison pour voter en faveur. J'appuie l'amendement proposé par le député.

Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine, la Chambre va foncer, telle un bolide, au travers de l'intersection entre les valeurs et les impératifs politiques. Pas une seule trace de dérapage ne marquera la collision entre des visées radicales et les fondements mêmes de notre société. Pas le moindre espoir non plus de tenir un débat ouvert et complet. Or, aucun projet de loi n'est plus lourd de conséquences que ceux qui touchent les valeurs fondamentales, les éléments constitutifs de notre civilisation, les assises de notre culture.


2398

À cet égard, le projet de loi C-33 sera la loi la plus importante depuis l'adoption de la Charte des droits et libertés. Notre objectif n'est plus une société juste, mais une société d'avant-garde, une société sans structure, sans valeurs maîtresses, sans plan capable de guider la génération montante.

La famille fait le lien entre nos origines et le fondement de notre avenir. Son déclin, la banalisation de sa mission réduiront les enfants à l'état de cobayes du «meilleur des mondes».

Il serait aussi faux de comparer mes objections au projet de loi C-33 à celles du député de Nanaïmo que d'assimiler la position du ministre de la Justice à celle de la North American Man Boy Love Association, bien que les deux appuient le projet de loi.

En juin 1995, j'ai voté en faveur du projet de loi C-41. Sa seule conséquence directe était l'imposition de peines d'emprisonnement plus longues à des criminels violents qui s'attaquent aux homosexuels et à d'autres groupes identifiables. Il y a trois ans, j'étais prête à appuyer le projet de loi C-108, dont le libellé était presque identique à celui du projet de loi C-33. J'étais alors convaincue que la nouvelle définition de l'état civil limiterait la portée du projet de loi et empêcherait toute retombée négative sur le rôle irremplaçable et essentiel de la famille traditionnelle dans notre société.

(1025)

Le projet de loi C-33, par contre, est un cheval de Troie. Il porte en lui des armes juridiques pour livrer la guerre à nos valeurs essentielles, déjà entamée devant les tribunaux, la guerre constitutionnelle contre nos valeurs fondamentales. Il suffisait d'un moyen de plus pour débarrasser notre infrastructure sociale des valeurs familiales traditionnelles. Ce moyen, c'est le projet de loi à l'étude.

On a présenté le projet de loi C-33 à grand renfort de déclarations nobles et de nobles sentiments. J'ai écouté le ministre de la Justice nous expliquer que le projet de loi aiderait ceux qui peuvent être victimes de discrimination en milieu de travail. Là-dessus, je suis parfaitement d'accord. Aucun Canadien ne devrait être licencié ou rétrogradé pour un motif autre que la qualité de son travail. Il s'agit d'un principe fondamental que le gouvernement se doit de faire respecter.

Nous avons tous recours à des banalités, mais en insérant des banalités dans un projet de loi, le Parlement se démet de sa responsabilité qui consiste à prendre des décisions politiques difficiles et controversées. Ce n'est plus «un homme, une voix», mais plutôt «un juge, une voix.» Malheureusement, le concept de la justice est étouffé par les tribunaux.

De nos jours, les Canadiens ont été nettement écartés du débat sur la façon dont leur société doit évoluer, dont leurs enfants doivent être élevés. Désormais, ces décisions sont trop souvent prises par des juges non élus qui acquiescent aux demandes des groupes d'intérêts spéciaux. Il ne reste plus alors à la population qu'à lire les résultats dans les journaux et qu'à crier son indignation et son impuissance.

Certains avocats nommés à la magistrature par des dirigeants politiques ont abusé de la loi suprême du pays, la charte, pour tout légitimer, de la pornographie enfantine à la sodomie pratiquée sur un jeune de 14 ans par un délinquant sexuel fugitif. J'ai à peine le temps de vous donner un exemple.

Vernon Logan a été accusé de possession de pornographie enfantine et a plaidé coupable. Malgré son plaidoyer de culpabilité, le juge Brian Saunderson l'a complètement disculpé. Pourquoi? Parce que le juge est convaincu que la législation prohibant la pornographie enfantine est contraire à la Charte des droits.

Si j'ai bonne mémoire, la pornographie enfantine n'est pas protégée par la charte, mais les juges jouissent d'une liberté quasi illimitée pour interpréter la loi comme ils l'entendent et lire entre les lignes. Naturellement, on ne tient pas compte des droits des enfants qui sont la proie des pornographes. Les enfants ne comptent pas devant les tribunaux.

La loi devrait être fonction des valeurs que chérit une société. Les valeurs de la société ne devraient pas être fonction de la loi. De toute évidence, les tribunaux ne se font pas les gardiens de nos valeurs. Nous ne pouvons pas nous permettre de leur signer d'autres chèques en blanc. Plus de projets de loi comme le C-33. Je me suis enquis des conséquences du projet de loi C-33 auprès des employés de la Bibliothèque du Parlement, de notre conseiller législatif et même de personnes-ressources de l'extérieur. Est-ce radical de vouloir connaître les conséquences d'un projet de loi avant de se prononcer à son égard? On m'a dit ceci à la Bibliothèque du Parlement:

[. . .] il est impossible de dresser une liste exhaustive des raisons qui pourraient être admissibles, en théorie, de présenter une plainte de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle conformément à la Loi canadienne sur les droits de la personne.
On ne devrait pas être obligé d'être Nostradamus pour pouvoir prédire les conséquences d'un projet de loi. Avec sa portée illimitée, celui-ci ne constitue-t-il pas un chèque en blanc, sans assurances légales, ni garanties, ni sauvegardes, ni débat? Sans signature, monsieur le Président.

Mon mentor dans la rédaction des deux amendements que je propose a, bien sûr, été le ministre de la Justice lui-même qui, dans sa brochure sur le projet de loi, déclare ceci:

La modification proposée n'aura aucune incidence sur la définition de «mariage», «famille» ou «conjoint». Elle ne fera que garantir le respect de droits individuels.
On nous a dit aussi que ce projet de loi n'aura aucune influence sur les infractions criminelles. La meilleure façon de garantir cela, c'est de le préciser dans le projet de loi et c'est ce que je vise à faire avec mes amendements.

J'ajoute une définition de l'état matrimonial, celui-ci étant: «l'état de personne mariée, célibataire, séparée, divorcée, veuve ou de personne cohabitant, depuis au moins un an, avec une personne du sexe opposé dans une relation conjugale».

(1030)

Kim Campbell a dit de cette définition qu'elle confirmait simplement ce que prévoit la loi actuelle. N'est-ce pas ce que tous les Canadiens ou presque entendent par état matrimonial? Respecterait-on moins les droits humains au Canada si l'on affirmait une valeur primordiale de notre société? Est-ce trop demander que de vouloir qu'on fasse plus que parler du bout des lèvres de la notion de famille traditionnelle?

D'après le ministre de la Justice, le projet de loi C-33 n'est pas censé modifier la définition de l'état matrimonial. Dans ce cas, cet amendement est parfaitement conforme à la position du ministre de la Justice.

Mon deuxième amendement réaffirme la position du ministre voulant que le projet de loi C-33 n'ait aucune incidence sur les infractions criminelles. L'amendement est ainsi libellé: «Rien dans les articles 2 et 3 n'a pour effet de rendre inopérante quelque


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disposition du Code criminel que ce soit.» En d'autres termes, on ne peut utiliser le projet de loi C-33 pour faire obstacle à la justice.

Appuyer ces amendements, c'est permettre au Parlement d'atteindre son objectif, celui de garantir un milieu de travail non discriminatoire. C'est aussi montrer aux tribunaux que l'intention du Parlement en adoptant ce projet de loi n'est pas de favoriser une redéfinition de l'état matrimonial ni d'affaiblir le Code criminel. Appuyer ces amendements, c'est tenir compte de certaines préoccupations légitimes. S'y opposer, c'est prouver que nos préoccupations sont tout à fait fondées.

Je trouve le projet de loi C-33 inacceptable dans sa forme originale. Il est inacceptable pour l'Église à laquelle j'appartiens et pour la majorité de mes électeurs. Les amendements que je propose témoignent de mes préoccupations. Ils préservent l'objectif central de la politique gouvernementale sans avoir d'effet préjudiciable sur la famille et les enfants canadiens. Les amendements rendraient le projet de loi conforme aux arguments qu'on utilise pour nous convaincre de l'appuyer.

Les lieux communs ne permettront jamais de résoudre un débat qui porte sur des valeurs. Nous ne pouvons indéfiniment éluder les défis auxquels la société doit faire face avec des truismes spécieux, mais nous pouvons assumer nos responsabilités en apportant les modifications nécessaires pour que la société reste équitable, cela, sans porter atteinte du même coup à d'autres principes fondamentaux.

À l'intersection où se rencontrent les politiques et les valeurs, il faut toujours céder le passage à la conscience.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, en prenant la parole sur le motion no 10, j'en profiterai pour intervenir aussi sur les motions nos 19 et 20, qui sont connexes.

J'ai écouté attentivement l'orateur précédent. . .

Le vice-président: La Chambre n'a pas encore été saisie de la motion no 20. Elle le sera plus tard. Je vous prie donc de ne pas intervenir sur la motion no 20 et de vous en tenir aux motions indiquées.

M. McClelland: Monsieur le Président, je m'en tiendrais à la motion no 10, dont la Chambre est maintenant saisie.

Des députés qui ont pris la parole avant moi ont très éloquemment exprimé l'inquiétude que nombre de Canadiens, moi y compris, ressentent à propos de ce projet de loi. Cette inquiétude a trait en fait au degré d'honnêteté manifesté par le gouvernement dans ce projet de loi.

S'il doit y avoir un débat sur le fait de placer sur un pied d'égalité les relations entre personnes de même sexe et les relations hétérosexuelles, il faudrait dans ce cas avoir l'honnêteté de le dire. C'est là-dessus que le débat devrait porter.

C'est injuste de faire porter le débat sur la discrimination et de dire, non seulement aux députés, mais à tous les Canadiens qui se sentent mal à l'aise et qui s'y opposent, que, d'une certaine façon, ils réservent un traitement discriminatoire à des êtres humains qui sont homosexuels. C'est non seulement injuste, mais encore insultant. J'estime que c'est trompeur, malhonnête et indigne de la Chambre d'accélérer ensuite indûment le débat, alors que tous les Canadiens doivent entendre des arguments sages et réfléchis des deux côtés pour pouvoir déterminer si ces très importantes questions sont pertinentes dans notre société. Je suis embarrassé et j'ai honte.

Je suis embarrassé par le traitement réservé à nombre de témoins aux audiences du comité, et j'en ai honte. Des gens sont venus à Ottawa en pensant pouvoir faire entendre leur voix avec passion, avec dignité, avec un certain sens de solennité, car il s'agit après tout de leur Chambre des communes. Ce sont les réunions du comité où des gens des deux camps s'attendent à être entendus dans la dignité. Traiter des Canadiens comme du bétail pour faire adopter à la hâte le projet de loi constitue une atteinte à notre dignité à tous. En tout cas, j'espère que c'est ainsi qu'on le voit.

(1035)

Les amendements que je propose sont inspirés des amendements proposés par la Conférence des évêques catholiques du Canada. Leurs propositions d'amendements et les miennes ont pour seul but de restreindre la portée du projet de loi dans les limites précisées par le ministre de la Justice. Ils partent donc de considérations liées aux droits de la personne et à la justice.

Pratiquement tous les Canadiens disent appuyer les aspects du projet de loi se rapportant aux droits de la personne. Ils appuient l'idée de la prévention de la discrimination. Aucun Canadien ne devrait être victime de discrimination pour quelque raison que ce soit, y compris l'orientation sexuelle.

Par contre, il y a des gens qui affirment que les termes mariage, famille et tradition font partie des assises mêmes de notre société et que nous ne devons pas les traiter à la légère ou miner ces assises. Si nous devons modifier nos relations les uns avec les autres, au moins, faisons-le honnêtement.

Il existe des moyens d'offrir la justice et l'équité à nos concitoyens homosexuels. Ceux d'entre nous qui ne sont pas homosexuels, mais sont convaincus qu'il faut s'occuper de ces questions par souci de justice pensent que nous pouvons le faire par d'autres moyens, par exemple, par l'enregistrement d'un partenariat domestique qui ne menacerait pas le caractère sacré traditionnel de la famille et du mariage.

Je vous remercie de m'avoir accordé la parole pour présenter quelques commentaires d'introduction. Je mets la Chambre des communes, nous les députés, et tous les Canadiens en garde contre la tentation de traiter à la légère ceux avec qui nous ne sommes pas d'accord. Leur opinion, même si nous ne la partageons pas, a sa valeur et mérite d'être entendue avec dignité et respect. S'ils ne peuvent pas se faire entendre, ils nourriront au Canada un profond ressentiment.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le vice-président: Chers collègues, je veux faire une déclaration préliminaire avant de rendre ma décision sur la question des motions.


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La députée de Central Nova a proposé deux motions visant à supprimer les mots «orientation sexuelle» de chacun des articles du projet de loi. La députée de Port Moody-Coquitlam a proposé une motion identique. Par erreur, ces motions ont été retournées aux députées et n'ont pas été inscrites au Feuilleton des Avis.

Par conséquent, la présidence a décidé d'autoriser ces motions. Comme la députée de Central Nova a déposé ses motions en premier, les motions seront inscrites à son nom. Elles porteront les numéros 8A et 16A.

Il y a donc 23 motions d'amendement à l'étape du rapport du projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne. Elles seront groupées de la façon suivante aux fins du débat:

Le groupe no 1 sera composé des motions nos 1, 9 à 15 et 18. Le groupe no 2 sera composé des motions nos 2, 3, 17, 19, 20 et 21. Une version révisée de cette décision sera distribuée aux députés, car c'est plus facile pour eux de voir ces groupes sur papier que de m'entendre les lire rapidement. Le groupe no 3 sera composé des motions nos 4 à 8, 8A, 16 et 16A. Les modalités du vote sur les motions de chacun des groupes peuvent être consultées à la table des greffiers ou pourront l'être très bientôt. La présidence les rappellera aux députés au moment du vote.

Reprise du débat sur le groupe no 1.

REPRISE DU DÉBAT À L'ÉTABPE DU RAPPORT

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'étais tout à fait disposé à attendre mon tour puisque ma motion est la dernière du groupe et qu'il y a quatre autres motions, mais je vais prendre la parole maintenant puisque vous me le permettez.

(1040)

Le vice-président: Le député sait qu'il ne peut prendre la parole que sur un groupe de motions. S'il a mal compris ou s'il y a quelque ambiguïté, il pourrait peut-être demander le consentement unanime de la Chambre pour pouvoir prendre la parole au sujet de sa motion.

M. Wappel: Monsieur le Président, je vous remercie d'avoir apporté cette clarification. Je croyais que je pouvais prendre la parole au sujet des motions. Aussi, je demande le consentement unanime de la Chambre pour prendre la parole au sujet de ma motion no 18.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: De toute évidence, il n'y a pas consentement unanime. Le député ne peut pas prendre la parole au sujet de sa motion d'amendement.

Est-ce que quelqu'un qui n'aurait pas encore parlé désire prendre la parole au sujet du groupe no 1? Le député d'Ontario.

M. Dan McTeague (Ontario, Lib.): Monsieur le Président, je trouve passablement tragique que des députés soient parfois contraints par leur propre parti à censurer leurs interventions sur les questions et les amendements qu'ils ont eux-mêmes présentés à la Chambre des communes pour refléter non seulement leur propre conscience mais aussi, j'en suis sûr, les voeux et les volontés de leurs électeurs. Je trouve malheureux que le député de Winnipeg St. James n'ait pas permis au député de Scarborough-Ouest de le faire mais, dans les circonstances, je peux le comprendre.

Quand j'ai été élu à la Chambre des communes, j'étais membre du Parti libéral depuis environ 20 ans. J'ai travaillé avec énergie pour aider des gens comme l'honorable Paul Cosgrove, comme mon collègue de Scarborough-Rouge River et, au gouvernement provincial, comme Alvin Curling. Je crois que le Parti libéral est le défenseur de l'élément le plus important de la vie canadienne, la liberté d'expression.

C'est regrettable que le projet de loi divise les députés et sème la confusion parmi les électeurs parce qu'il n'avait pas été défini clairement lors des dernières élections. Au sujet des motions présentées par le député de Hamilton-Wentworth, je trouve important que les députés puissent expliquer les choses qui constituent des enjeux fondamentaux pour tous les Canadiens et ce, pour une raison bien simple.

Aux dernières élections, nous n'avons pas axé la campagne sur le projet de loi C-33. On ne trouve nulle part dans le livre rouge l'expression de la volonté du gouvernement de prendre des mesures pour maintenir et protéger un droit ou empêcher une certaine forme de discrimination qui existe probablement, mais qui existe aussi chez les politiciens et qui ne concerne pas exclusivement les gais et les lesbiennes. Le projet de loi C-33 n'a pas été mentionné dans le discours du Trône, même si certains qui s'intéressent à cette mesure semblent vouloir dire que c'était le cas.

Beaucoup de gens au Canada ont été surpris et consternés d'apprendre à leur réveil ce matin que nous nous sommes lancés dans un projet de loi qui, si nous le laissons passer comme ça, sans le modifier, va transformer radicalement la définition de la famille telle que nous l'entendons. Ce n'est pas moi qui dis cela. C'est le juge en chef de la Cour suprême, Antonio Lamer. Il a dit dans l'affaire Mossop, et ce n'est pas une opinion judiciaire incidente: «. . .si le législateur avait décidé d'inclure l'orientation sexuelle à la liste des motifs prohibés de discrimination, mon interprétation de l'expression "situation de famille" aurait pu être fort différente».

Ce que la Cour est prête à faire une fois que la Chambre aura approuvé jusqu'à un certain point le principe de mettre fin à la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, au moins dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, est très clair.

Ce n'est pas comme dans les provinces, par exemple en Ontario d'où je viens et qui a donné son nom à ma circonscription, où le gouvernement a, en 1986, modifié la disposition concernant les droits de la personne. Neuf ans plus tard, une motion était présentée devant cette même assemblée législative pour traiter de la question des avantages sociaux aux conjoints de même sexe, motion qui a radicalement modifié la définition de la famille aux fins de la législation de la province.

Cette mesure, qui a pris de 1986 à 1994, n'a pas été pure coïncidence. Même si à l'époque, la Chambre, votant librement, l'a


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rejetée, il est intéressant de noter que certains juges ontariens ont pris de grandes libertés avec ce qui s'est passé en 1986.

L'an dernier, de nombreux Ontariens ont été choqués par la décision d'un juge qui a conclu que, dans certains cas, les adoptions étaient acceptables. Que cela constitue ou non une question de discrimination en matière réelle, c'est une chose. Le Parlement a clairement l'obligation d'attirer l'attention du public là-dessus. Si nous ne sommes pas prêts à le faire, nous ne sommes pas à la hauteur de notre tâche en tant que représentants élus.

(1045)

Le fait que ce projet de loi franchisse à toute vapeur toutes les étapes préalables à son adoption est très inquiétant, non seulement pour ce député, mais également pour les 230 000 électeurs qu'il représente.

Bien que dans le groupe no 1 on retrouve de nombreuses motions d'une teneur importante, je n'en demeure pas moins inquiet. Ne permettons pas que ce projet de loi soit le cheval de Troie qui fera qu'on accordera des avantages aux conjoints de même sexe ou qui, en quelque sorte, minera, sapera, redéfinira ou réinventera la notion de famille.

Certaines choses dépendent de l'orthodoxie politique, mais on ne peut pas aller à l'encontre d'une tradition vieille de 10 000 ans. Je demande donc que la Chambre envisage sérieusement d'appuyer ces motions.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir la possibilité de parler à la Chambre, aujourd'hui, au sujet de la question d'ajouter l'expression «orientation sexuelle» à la liste que l'on trouve déjà dans la Loi canadienne sur les droits de la personne. Dans mon discours, je vais essayer d'exprimer les inquiétudes de mes électeurs de Wild Rose.

Un soir, lors d'une réunion publique, une de mes électrices disait que, des fois, des choses qui paraissent correctes ne font que conduire à des problèmes. Elle parlait bien entendu de l'addition de l'orientation sexuelle à une liste qui existe déjà et elle ajoutait que cela ne fera qu'allonger la liste, sans résoudre la question de la discrimination. Selon elle, la meilleure façon de s'opposer à la discrimination est de promouvoir constamment l'égalité et de se dispenser de toute liste, car il est certain que toute liste comportera toujours des omissions.

Tous les gens présents étaient d'accord avec la déclaration suivante, à savoir que la loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et que tous ont droit à la même protection et aux mêmes bénéfices de la loi, indépendamment de toute discrimination. Les gens présents estimaient que c'était suffisant pour promouvoir l'égalité et que, par conséquent, il suffisait de le faire appliquer.

Cette mesure législative est une façon d'exprimer le manque de confiance des Canadiens dans la valeur de la tolérance. C'est pourtant une des valeurs que ma femme et moi avons beaucoup appréciée lorsque nous sommes arrivés au Canada, en provenance des États-Unis, dans les années 60. Nous avons constaté que les Canadiens étaient effectivement un peuple tolérant, une qualité qui, à notre avis, manquait cruellement aux États-Unis.

Pendant mes 30 ans de vie active au Canada, particulièrement dans la province d'Alberta, j'ai constaté que la tolérance des Canadiens était restée constante. Toutefois, à cause de l'intervention des gouvernements, certains commencent à se sentir victimes de discrimination, simplement parce qu'ils ne sont pas sur la liste.

De nombreux jeunes blancs apprennent tout à coup qu'ils ne respectent pas les critères pour être acceptés dans les corps policiers, les services des incendies, les équipes de techniciens ambulanciers ou les forces armées, du simple fait de leurs caractéristiques physiques. Le fait de dresser une liste entraîne des programmes d'action positive qui nuisent aux perspectives d'avenir et brisent les rêves de bon nombre de ces jeunes hommes. Le principe du mérite, qui a déjà été le principal facteur, a rapidement disparu.

Les électeurs de Wild Rose me disent que c'est répréhensible. Si on en croit la brochure préparée par le ministère de la Justice, cette modification a pour objectif de protéger précisément les gais et les lesbiennes, puisqu'il est question de ce style de vie à la page 14 du document de 25 pages.

Ainsi, je crois qu'on peut supposer que le gouvernement définit, même si ce n'est pas de façon explicite, l'homosexualité comme une orientation sexuelle. Or, la majorité des électeurs de Wild Rose considèrent l'homosexualité comme un style de vie immoral et inacceptable dans notre société. Ils posent des questions au sujet de leurs valeurs personnelles comme: «Va-t-il devenir illégal de prêcher contre l'homosexualité? Va-t-on enseigner à mes enfants, à l'école, que l'homosexualité est un style de vie acceptable dans notre société? En tant que contribuable, vais-je devoir soutenir financièrement ce mode de vie d'une façon quelconque? À titre de propriétaire, est-ce que je vais être forcé de louer mon appartement à un couple homosexuel? En tant qu'employeur, va-t-on me forcer à engager un homosexuel plutôt qu'un hétérosexuel, ou va-t-on tenir compte du principe du mérite? Cette loi va-t-elle conduire à des mariages légaux d'homosexuels? Les homosexuels vont-ils être dorénavant en mesure d'adopter des enfants?»

(1050)

Ce projet de loi ne répond pas à toutes ces questions. Le problème qui va se poser à l'avenir, c'est qu'il incombera aux tribunaux de répondre à ces questions. En fin de compte, les tribunaux n'auront aucun compte à rendre aux gens.

Beaucoup de personnes croient que ce projet de loi nous entraîne sur un terrain glissant, qu'on va finir par accepter les choses mêmes auxquelles les gens s'opposent.

Personne dans ma circonscription n'accepte la discrimination sous quelque forme que ce soit. Lorsque le ministre affirme que les personnes visées n'auront plus à s'asseoir à l'arrière de l'autobus, il dit clairement aux Canadiens qu'il ne leur fait pas confiance et qu'il va donc légiférer pour eux.

Les Canadiens sont généralement tolérants. Cependant, l'hydre de l'intolérance fera de nouveau surface si le gouvernement continue de légiférer pour les gens. Des lois comme celle-ci montrent clairement qu'à titre de politiques, nous ne faisons pas confiance aux Canadiens. Parfois, les gens ont le sentiment que les gouvernements ne devraient pas se mêler des affaires sociales. On peut inclure mes électeurs dans ce groupe.


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Je souscris à toutes les motions du groupe no 1, surtout la motion de ma collègue de Port Moody-Coquitlam qui a pour objectif de protéger la définition de famille, de mariage et de conjoint.

C'est un triste jour pour la démocratie lorsque les députés ne peuvent parler de leurs propres motions ni du projet de loi dans son ensemble.

M. Jesse Flis (Parkdale-High Park, Lib.): Monsieur le Président, je félicite les auteurs du premier groupe de motions: les députés d'Edmonton-Sud-Ouest, de Hamilton-Wentworth, de Mississauga-Est et de Scarborough-Ouest. Je félicite également les députés qui ont proposé des amendements dans les autres groupes.

Le fait qu'il y ait autant d'amendements montre le dilemme que pose ce projet de loi pour bien des députés. Je dois avouer que, lorsque ce projet de loi a été présenté et discuté pour la première fois, non seulement je m'y opposais, mais je m'y opposais farouchement. Pourquoi? Pas parce qu'il vise à protéger les Canadiens dont l'orientation sexuelle diffère de la mienne, j'appuie cet aspect de tout coeur. Les questions que je me pose sont celles-ci: quelles seront les conséquences de cette mesure législative? Détruira-t-elle la définition de la famille? Détruira-t-elle ce sur quoi repose notre pays, de puissantes valeurs familiales?

C'est ce que ces amendements tentent de faire valoir. Lorsque le noyau familial commence à s'effriter, la société s'en trouve affaiblie. Lorsque la société est affaiblie, le pays l'est également. Nous ne serons plus classés par les Nations Unies comme le meilleur pays au monde si nous détruisons le noyau fondamental, la famille.

Pourquoi ai-je fait volte-face? Parfois, les politiques craignent d'admettre qu'ils font volte-face. Je l'ai fait après avoir sondé mon coeur et ma conscience. Si j'ai changé d'opinion, c'est en raison de la promesse qu'ont faite le premier ministre et le ministre de la Justice. Comme d'autres députés, je tenais à ce que l'on insère un préambule qui protégerait la famille traditionnelle.

(1055)

Je suis heureux que le ministre de la Justice ait inséré dans le projet de loi C-33 le préambule suivant:

Attendu que le gouvernement du Canada reconnaît et proclame l'importance de la famille comme fondement de la société canadienne et que la présente loi ne porte pas atteinte à son rôle fondamental dans la société;
Si les tribunaux honorent et respectent cette disposition à l'avenir, nous aurons une situation où tout le monde sera gagnant. Les gais et les lesbiennes seront gagnants car, espérons-le, ils ne feront pas l'objet de discrimination dans l'obtention d'un emploi auprès d'organismes et de sociétés réglementés par le gouvernement fédéral, et la famille sera gagnante, car elle sera protégée. Je ne crois pas que nous trouvions bien des mesures législatives visant à protéger la famille traditionnelle.

J'ai reçu plus de messages par télécopieur, d'appels téléphoniques, de lettres ainsi que d'observations sur ce sujet que sur tout autre au cours de mes douze années en tant que parlementaire. Je dirais que dans 80 à 90 p. 100 des cas on m'exhorte à voter contre cette mesure législative.

Que faire? Dois-je céder à ces démarches? En ce qui concerne les questions relatives aux droits de la personne, si je m'en tenais à l'opinion majoritaire, aucun groupe minoritaire ne bénéficierait jamais d'une quelconque protection. Je ne suis pas l'objet de pressions de la part du premier ministre. Le premier ministre ne m'a pas fourni d'indications sur la façon dont je dois voter. Je n'ai pas subi de pressions de la part du ministre de la Justice. Les pressions, nombreuses, émanent plutôt de la collectivité. Je dois cependant déclarer à la Chambre ce qui est bon, à court et à long termes, pour l'avenir de notre pays.

Le premier ministre et le ministre de la Justice ont répondu à beaucoup de mes préoccupations, qui sont les mêmes que celles que vient d'exprimer le député de Wild Rose. La première de ces préoccupations tenait à la question de savoir si par le truchement de cette modification les conjoints de même sexe vont bénéficier des avantages offerts aux couples traditionnels. On m'assure que cette modification ne va pas étendre ces avantages aux homosexuels et aux lesbiennes.

Une autre préoccupation avait trait à la question de savoir si cette mesure va accorder des droits ou des avantages particuliers aux homosexuels et aux lesbiennes. Une fois encore, on m'a dit que personne ne pourrait sérieusement prétendre que les lois fédérales et provinciales accordent des droits spéciaux aux catholiques, aux maris ou aux personnes handicapées. Même si chacun de ces groupes est expressément visé par la loi existante, il est évident qu'aucun droit spécial n'est accordé à quiconque. Il n'en ira pas autrement pour l'orientation sexuelle. La modification interdira la discrimination dans les domaines de compétence fédérale, notamment en matière d'emploi et d'accès aux biens et services.

Bon nombre de mes collègues qui siègent à la Chambre, tous partis confondus, ont exprimé la crainte que cette mesure ne modifie la définition du mariage, de la famille et du conjoint. Voilà pourquoi je me réjouis de ces amendements. Je crois en effet qu'ils règlent la question. Encore une fois, on m'a donné l'assurance que cette modification n'affectera en rien la définition du mariage, de la famille et du conjoint.

Je craignais également que cette mesure législative ne permette l'adoption d'enfants par des couples de même sexe. Ma famille a connu le bonheur d'avoir une fille adoptée, d'où l'importance que j'attache à cette question. Or, on m'a donné l'assurance que les questions d'adoption relèvent principalement de la compétence provinciale. Cette modification vise seulement à supprimer la discrimination dans l'emploi, le logement et la prestation de services. J'espère que les tribunaux se reporteront aux débats que nous avons tenus à ce sujet à la Chambre.

Je craignais aussi que cette modification n'aboutisse à la légalisation de la pédophilie. En effet, ma collectivité a été bouleversée par la présence d'un pédophile de la Colombie-Britannique qui a été expulsé de cette province parce que jugé trop dangereux. Où est-ce qu'on l'envoie? Dans la circonscription de Parkdale-High Park, dans un établissement correctionnel fédéral où il y a 50 lits pour criminels endurcis, dont des délinquants sexuels et des pédophiles.

(1100)

Dans la région du Grand Toronto, on aide actuellement 118 criminels dangereux à se réinsérer la société. C'est ce que nous devons faire. Il est injuste d'envoyer dans Parkdale-High Park 40


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p. 100 de ces dangereux criminels, mais c'est une question différente que je débattrai sur une autre tribune.

Par suite de ce projet de loi, est-ce que le gouvernement devra modifier 40 ou 50 autres lois fédérales? On m'a dit que cet amendement ne portait pas sur les prestations aux conjoints de même sexe. Aucune autre modification aux lois fédérales n'est en voie d'élaboration ni même nécessaire par suite de cette modification de la Loi sur les droits de la personne. Je crains que les prestations aux conjoints de même sexe ne gagnent du terrain, mais ce n'est pas à cause de ce projet de loi. Leur progrès se manifeste dans les conventions collectives. Je conseille aux représentants de toutes les Églises ainsi qu'aux gens qui exercent des pressions sur les députés de commencer à faire pression sur les syndicats qui signent les conventions collectives. Une fois qu'une disposition est inscrite dans une convention collective, même les tribunaux ne peuvent passer outre.

Nous avons déjà établi un précédent dangereux, lorsque les fonctionnaires ont signé un accord avec le Conseil du Trésor. Quand un membre du service extérieur décède pendant qu'il est en poste à l'étranger, le gouvernement assume tous les frais engagés pour que son conjoint de même sexe rentre au Canada. Ce n'est certes pas le projet de loi à l'étude qu'il faut blâmer. Les prestations aux conjoints de même sexe gagnent du terrain, comment? Au moyen des conventions collectives.

Je dirai aux représentants de toutes les Églises et à tous ceux qui se sont adressés à moi qu'il est peut-être temps de faire pression sur les syndicats.

Est-ce que par suite de ce projet de loi, les Églises et les écoles confessionnelles seront forcées d'engager des gais et des lesbiennes pour enseigner, même si c'est contraire à leur. . .

Le vice-président: Le temps de parole du député est écoulé. Y a-t-il consentement unanime pour qu'il continue?

Des voix: D'accord.

M. Flis: On m'a donné l'assurance que les Églises, les écoles confessionnelles et d'autres organisations religieuses n'étaient pas de compétence fédérale, de sorte que la mesure ne les touchait pas.

La décision que j'ai prise a été l'une des plus difficiles de ma vie. Je voudrais que tout le monde respecte les raisons qui m'ont poussé à prendre cette décision, parce que je respecte les décisions de tous les députés. J'ai été dégoûté de voir tous le gais et les lesbiennes venir manifester sur la Colline, quand ils ont entendu que le projet de loi donnerait lieu à un vote libre. C'est révoltant. Ils me demandent de respecter leurs droits, mais ils ne respectent pas mon droit de voter librement. J'ai trouvé cela dégoûtant.

Je regrette de terminer sur cette note, mais ces groupes minoritaires vont parfois trop loin et, s'ils le font, la population pourrait réagir brutalement.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur les motions du groupe no 1.

Depuis que le projet de loi a été présenté et que nous avons tenu un débat et un vote à l'étape de la deuxième lecture, tous les députés ont eu l'occasion de réfléchir sur la teneur du projet de loi et sur ce qui a été dit. Je voudrais tenter de mettre en lumière la question fondamentale qui est ici en jeu.

La discrimination injuste sous toutes ses formes est odieuse pour la Chambre et pour tous les Canadiens. Ce n'est pas la discrimination injuste, comme celle qui est fondée sur l'orientation sexuelle ou toute autre caractéristique, qui fait problème en l'occurrence. Les tribunaux ont jugé à maintes reprises que même si ces termes ne figurent pas à l'heure actuelle dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, cette dernière doit être interprétée comme s'ils y étaient.

(1105)

Au cours de la fin de semaine, j'ai eu l'occasion de discuter avec un procureur principal de la Couronne. Je lui ai demandé si un Canadien ou une Canadienne, peu importe qu'ils travaillent pour un organisme ou une société d'État relevant de la compétence fédérale et qu'ils passent à travers les mailles du système, seraient protégés par les lois canadiennes et par les tribunaux. Il m'a répondu: «Absolument pas».

Le ministre de la Justice a fait clairement remarquer à la Chambre que les Canadiens sont protégés. Les tribunaux ont jugé qu'on pouvait déjà interpréter la loi comme si l'orientation sexuelle y figurait. La modification, consistant simplement à ajouter ces deux termes, ne devrait avoir absolument aucune incidence sur ce qui se passe aujourd'hui en matière de protection contre la discrimination.

Il existe déjà une protection dans les lois canadiennes actuelles. Il s'agit, en principe, d'une mesure bénigne. Elle n'a absolument aucune autre conséquence que d'ajouter deux termes. Il devrait en être exactement ainsi. Personne à la Chambre n'en disconvient sans doute. Nous sommes égaux devant la loi. Il ne devrait y avoir aucune discrimination en ce qui a trait aux relations de travail, au logement, aux services, à l'appartenance à des groupes. À tous ces égards, nous sommes égaux devant la loi.

Au comité des droits de la personne, au cours de l'examen du projet de loi, on a fait valoir que s'il y est question uniquement de discrimination, le problème fondamental qui trouble la Chambre est de savoir pourquoi on ajoute un préambule qui traite d'une certaine façon de la notion de famille. J'ai besoin de savoir une chose. Si le projet de loi porte sur la discrimination, comment se fait-il que le préambule tente de régler le problème lié à la famille?

La petite brochure accompagnant le projet de loi parlait de la famille traditionnelle. Le préambule parle de la famille; pas de la famille en tant que telle, mais de la famille tout court.

Il existe différentes définitions. Comme je ne suis pas juriste, j'ai essayé de savoir où je pouvais trouver, dans les lois canadiennes, la définition de la famille. J'ai été étonné d'apprendre que cette définition ne se trouve nulle part. La définition évolue au gré des décisions judiciaires, en fonction des normes et des valeurs sociales. Le terme «famille» est, au mieux, très vague. On peut avancer


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d'excellents arguments à l'appui de n'importe quelle définition de ce qui constitue la famille.

Aux audiences du comité, le député de Burnaby-Kingsway a interrompu les délibérations au moment du vote sur le préambule et posé la question suivante à la présidence: «Les fonctionnaires auraient-ils l'obligeance de nous dire si le terme «famille», utilisé dans le préambule, exclut les homosexuels?» La question était extrêmement précise.

Les fonctionnaires du ministère de la Justice ont dit que le projet de loi ne portait pas sur la famille, mais sur la discrimination et que le préambule n'était pas pertinent à cet égard, et ils ont refusé de confirmer ou de nier que les homosexuels sont englobés dans le terme «famille». Le problème n'est pas là, mais le débat se poursuit.

Le débat entre les fonctionnaires de la justice et le député a continué. La présidente du comité est intervenue en disant que le terme englobait les hétérosexuels, les bisexuels et les homosexuels. Quelques minutes après, je me dois de le dire par souci de justice et d'exactitude, la présidente s'est ravisée et a demandé si elle pouvait retirer cette observation.

La présidente a été ministre, elle a parcouru le monde pour représenter le Canada en matière de droits de la personne. Dans une discussion sur cette question fondamentale, elle a déclaré instinctivement que la famille comprenait les homosexuels, les hétérosexuels et les bisexuels.

Il me semble évident que les simples citoyens et même les tribunaux risquent, parce que le terme est vague, d'y englober autre chose que la famille hétérosexuelle traditionnelle.

Je vois dans le préambule une tentative pour essayer de rejoindre des députés qui s'interrogent sur la notion de famille. On essaie de les rejoindre en leur laissant entendre subtilement qu'il s'agit de la famille hétérosexuelle traditionnelle. Toutefois, ils ne sont pas encore prêts à adopter ce langage.

(1110)

Mon dilemme, c'est que j'approuve entièrement la nécessité de supprimer tout motif de discrimination. Je sais que la grande majorité des députés estiment que toute discrimination est parfaitement injuste. Mais la question comporte un autre aspect. Si le projet de loi ne traite que de discrimination, pourquoi y a-t-il un préambule? Pourquoi expliquer quelque chose qui n'a rien à voir avec le projet de loi? Il y a là une contradiction.

On dit aussi que des questions comme le mariage et l'adoption relèvent de la compétence provinciale et que nous ne devrions donc pas en parler ici. Il est de la compétence fédérale de décider qui peut se marier. Les provinces ont la responsabilité d'émettre les licences de mariage, mais pas de déterminer qui peut se marier. Il est donc opportun que nous discutions ici de cette question.

En ce qui concerne l'adoption, il a été affirmé maintes fois ici que cette question relève de la compétence provinciale et que nous ne pouvons donc pas en parler ici. Toutefois, l'adoption internationale relève de la compétence fédérale. Par conséquent, la Chambre peut discuter de la question de l'adoption.

En tant que député, je parle souvent de la famille. J'ai présenté plus d'une centaine de pétitions sur la discrimination et la famille. J'ai parlé de l'impôt et de la famille. J'ai parlé d'immigration et de réunification des familles. J'ai parlé du projet de loi sur l'assurance-emploi qui renvoie au revenu familial. J'ai parlé dans certaines interventions de la Sécurité de la vieillesse et du critère de revenu familial. Nous parlons tout le temps ici de la famille. Il en est question dans tous les projets de loi.

À un congrès auquel j'ai participé il y a deux semaines, on a adopté une résolution qui visait à supprimer toute discrimination des lois canadiennes. Eh bien, ce qu'il faut retenir, c'est que toutes les lois, toutes les mesures législatives sont discriminatoires en soi. La discrimination n'est pas toujours mauvaise. Nous convenons tous qu'il existe une discrimination juste, à savoir la discrimination positive ou, comme le disent les Américains, la promotion sociale qui discrimine en faveur de la famille à cause de son statut spécial. Nous discriminons en faveur des personnes handicapées, des autochtones et des personnes âgées, pour ne citer que quelque cas. La discrimination n'est pas toujours injuste. Elle reflète les normes et les valeurs de la société.

Si ce projet de loi ne concerne que la discrimination, le préambule est de trop. Mais, dans leur sagesse, les rédacteurs du projet de loi ont voulu que le préambule soit là pour essayer d'apaiser une préoccupation.

Le projet de loi va loin, mais pas assez loin. Dans les amendements proposés, on tente d'éclaircir un fait et de répondre à la question suivante: La définition de la famille inclut-elle les couples homosexuels?

Dans l'affirmative, cela signifierait que la définition englobe les familles hétérosexuelles, bisexuelles et homosexuelles et soulèverait une autre question très précise, comme le mentionnait le député de Pardale-High Park, à savoir si d'autres mesures législatives seraient alors touchées. Elles le seraient forcément, puisque la définition de la famille devrait alors être modifiée. Par conséquent, toutes les lois canadiennes où l'on fait mention de la famille ou encore où l'on y fait allusion pourraient, par définition, être contestées devant les tribunaux. Voilà le problème.

Aucun député à la Chambre n'appuierait une personne qui exerce une discrimination contre un Canadien pour quelque motif que ce soit. Nous devons respecter les positions qu'adoptent les autres députés. Toutefois, d'autres questions se sont glissées dans le débat. Il s'agit de questions très importantes.

À l'étape de la deuxième lecture, j'ai dit que je me posais des questions et je me les pose encore. J'ai dit que certaines choses me préoccupaient et elles me préoccupent encore. J'ai aussi dit que j'entretenais des doutes raisonnables quant aux conséquences. C'est toujours le cas, à cause justement des questions que je me pose.

(1115)

J'espère que les députés analyseront attentivement les ramifications de ce projet de loi. Dans cette mesure législative, comment distingue-t-on la discrimination injuste des autres questions qui ont été soulevées?


2405

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, d'entrée de jeu, je vais expliquer clairement à tous les députés et à tous les Canadiens mon opinion personnelle sur la discrimination.

La discrimination fondée sur des caractéristiques personnelles est tout à fait condamnable. La position de mon parti va dans le même sens. Nous croyons que chaque personne au Canada devrait être traitée également. Ces principes transparaissent dans notre position sur les autochtones, sur le Québec et sur la question dont nous sommes saisis aujourd'hui, celle de l'orientation sexuelle.

Comme j'avais prévu que la question serait soulevée à la Chambre, j'ai pu faire un sondage à ce sujet auprès des électeurs de ma circonscription. J'ai sondé leur opinion le plus directement et le plus simplement possible. J'ai découvert que 79 p.100 des électeurs de Macleod, la circonscription du sud de l'Alberta que je représente, étaient contre l'idée d'inclure l'expression non définie «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Les réformistes ont fait des sondages à l'échelle de leur parti et ont découvert qu'entre 91 et 93 p. 100 de ses membres étaient contre l'inclusion de pareille définition, que celle-ci soit ou non plus convenable parce que expressément définie.

Je dois dire que, depuis que la question a été soulevée, bien des gens m'ont écrit pour s'épancher. Je vais parler de certaines lettres que j'ai reçues ce matin à ce sujet.

Steve, d'Okotoks, s'oppose au projet de loi C-33. Sheila dénonce formellement cette mesure législative et me demande de voter contre. Al m'explique que les homosexuels ne devraient pas avoir de statut particulier et il veut que je vote contre le projet de loi C-33. Greg s'oppose au projet de loi et m'invite à continuer mon bon travail. C'est une observation un peu partiale, je m'en excuse. Rod s'oppose au projet de loi et espère que je vais voter contre. Enfin, Lorne et sa famille s'opposent au projet de loi et espèrent que je vais voter contre.

Je tiens à dire publiquement à la Chambre que je vais respecter la volonté de mes électeurs, les quelque 79 p. 100 et plus qui ont pris la peine de m'écrire et ceux qui continuent de le faire et me demandent pourquoi un farouche opposant à la discrimination, un médecin et chirurgien, quelqu'un qui a opéré et conseillé des homosexuels, qui est en rapport étroit avec la communauté homosexuelle de sa région voterait contre un projet de loi qui est censé n'être rien de plus qu'une mesure législative antidiscriminatoire.

Je vais dire publiquement que je suis aussi en rapport avec des membres de ma famille qui sont homosexuels. J'ai parlé de la question avec eux. Nous avons eu des discussions très personnelles, et ils comprennent ma position. Si j'ai des réserves à propos de ce projet de loi, c'est parce qu'il encourage un mode de vie, un comportement qui n'est pas sain. Je parle maintenant en tant que médecin ayant des connaissances et une expérience particulières.

Les problèmes particuliers liés à ce style de vie sont le VIH, le syndrome digestif des sodomites, l'augmentation des cas d'infection parasitique, la réduction de l'espérance de vie et, enfin, celui que j'ai choisi de souligner aujourd'hui, une augmentation des cas d'hépatite au Canada.

Au cours du premier semestre de 1991, les U.S. Centres for Disease Control ont étudié l'incidence de l'hépatite dans les grands centres urbains américains. Les chercheurs ont découvert qu'à Denver, 29 p. 100 des cas d'hépatite A touchaient la communauté homosexuelle. Chacune des données que je communiquerai à la Chambre sera le pourcentage découvert dans la communauté homosexuelle de ces grands centres urbains. À New York, 60 p. 100 des cas d'hépatite A touchaient la communauté homosexuelle. À San Francisco, c'était 50 p. 100, à Toronto, 42 p. 100, à Melbourne, en Australie, 26 p. 100.

(1120)

Ces pourcentages ont été découverts dans un segment de la population de ces grands centres urbains où il y a de fortes concentrations d'homosexuels. Le pourcentage global dans la société est d'environ 3 p. 100, alors que, dans ces communautés, il peut atteindre jusqu'à 15 p. 100. Il est généralement de 10 p. 100 environ. Comparez ces pourcentages aux nombres de personnes.

Je crains que ce projet de loi ne soit le début d'un processus où l'on fera la promotion de l'homosexualité dans nos écoles. Je voudrais soulever un point en particulier qui vient du guide du conseil de l'éducation de Toronto sur l'orientation sexuelle destiné aux enseignants. Dans ce document, on encourage les enseignants à parler ouvertement et franchement de l'homosexualité, et c'est bien. C'est excellent. Il faut en parler. Toutefois, je me préoccupe d'un certain processus.

Voici un exemple qui est donné aux enseignants quant à ce qu'ils devraient dire aux jeunes. Cela devrait être fait, d'après le guide, par une lesbienne ou un homosexuel. Il faut que la personne parle d'après son expérience personnelle. Voici ce qu'on lit dans le manuel: «Je suis homosexuel et je suis bien dans ma peau. Je vis une relation à long terme et sérieuse avec mon partenaire. C'est ce qu'il y a de mieux pour moi; je pense que cela serait extraordinaire pour quiconque. . .» En disant que l'homosexualité serait extraordinaire pour n'importe qui, on fait la promotion de l'homosexualité. Je m'inquiète beaucoup, en tant que médecin, du fait que faire la promotion d'un style de vie malsain n'est pas bon pour le Canada.

Qu'en est-il de la promotion dans un sens large dans notre système d'éducation? J'ai un formulaire de l'Université d'Ottawa. . .

[Français]

M. Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je pense que la journée sera très longue, mais serait-il possible de ramener les députés réformistes à l'essence même des motions?

À moins qu'il n'y ait eu un problème d'interprétation, j'ai cru comprendre que le député qui a la parole vient de dire que les comportements homosexuels n'étaient pas sains. Il parle d'un exemple tiré de son petit livre, mais là, il porte un jugement.

Je tiens à rappeler que le projet de loi tend à éliminer les comportements de gens qui sont contre ceux qui ont une orientation


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sexuelle différente. Je trouve que les propos choisis semblent porter un jugement de valeur. J'aimerais qu'il puisse se réaligner sur le projet de loi et qu'on parle de cela, mais qu'on ne porte pas de jugement de valeur.

Le vice-président: Je remercie le député. À titre d'occupant du fauteuil, je dois dire qu'il y a des gens qui traitent très souvent d'un sujet qui ne se rapporte pas au projet de loi. Mais, dans ce cas-ci, les propos du député de Macleod touchent, à mon avis, de façon assez directe, le sujet du projet de loi.

[Traduction]

M. Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, j'ai ici une demande d'inscription à la faculté de droit de l'Université d'Ottawa. Dans le formulaire, il y a une section où on dit: «Je désire m'identifier moi-même comme: membre d'un groupe minoritaire culturel, racial ou linguistique; personne ayant un handicap physique ou des difficultés d'apprentissage; lesbienne, gai ou bisexuel». On dit ensuite que le processus de sélection de la faculté de droit repose sur un système de quotas pour ces groupes. C'est là, à mon sens, une autre mesure qui encourage un mode de vie malsain.

Certains prétendront que j'ai pris la parole à la Chambre des communes pour stigmatiser la communauté homosexuelle. J'affirme simplement que je tiens à ce que mes connaissances médicales soient clairement exposées à la Chambre des communes. Faire autrement ne rendrait pas service au Canada.

D'autres prétendront que, par mes paroles, je fais de la discrimination. Je tiens à ce que ces gens sachent que la discrimination est mal. Il ne devrait exister aucune forme de discrimination. Cependant, permettre un système de quotas et permettre que notre système d'éducation encourage quelque chose de malsain est mal, tout comme il serait mal de laisser entrer au Canada une personne atteinte d'une grave maladie.

(1125)

[Français]

Le vice-président: Le député de Gaspé invoque le Règlement, mais j'espère que cela ne porte pas sur le même sujet, parce que si c'est le même. . .

M. Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, lorsque le député utilise l'expression «encourager un comportement malsain», je pense que c'est justement faire de la discrimination, et c'est justement ce que le projet de loi tente d'éviter. Alors, il faut. . .

Le vice-président: J'accorde à nouveau la parole à l'honorable député de Macleod.

[Traduction]

M. Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, je terminerai mon intervention en déclarant que, au Canada, la discrimination sous toutes ses formes est mal. Il ne devrait pas exister à la Chambre des communes de discrimination envers ceux qui ont un mode de vie ou un comportement différent. Se cacher derrière le terme homophobe pour permettre que l'on encourage un comportement malsain est bien pire. Je crois qu'il faut dire la vérité à la Chambre des communes. Je crois qu'il faut dire ouvertement que le texte du projet de loi nous amène dans une direction où ne devrions pas aller.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, si vous me le permettez, avant d'aller au fond des choses, je voudrais attirer l'attention de la Présidence sur le fait qu'à mon point de vue, des expressions comme «mode de vie malsain», qui sont employées un peu légèrement par les très légers députés du Parti réformiste, n'ont pas leur raison d'être dans un débat comme celui-là.

Que l'on nous dise que l'on ne comprend pas l'homosexualité ou qu'on n'a pas été en contact avec des homosexuels, ça va. Mais je crois que les députés du Parti réformiste devraient être un peu plus polis et certainement un peu plus avertis dans les propos qu'ils tiennent. Je sais que c'est beaucoup demander à des gens qui ont fait preuve de beaucoup de préjugés depuis qu'ils ont les pieds dans ce Parlement, de l'avis même de leur chef, de toute façon.

Cela étant dit, je voudrais rappeler de quoi nous discutons aujourd'hui. Nous discutons d'un projet de loi qui vise à interdire toute espèce de discrimination basée sur l'orientation sexuelle. L'ensemble des amendements qui sont présentés et dont nous sommes aujourd'hui saisis en tant que parlementaires veulent créer la confusion. Ils veulent créer une confusion malsaine, conservatrice, rétrograde, de ceux qui ont fait carrière en exploitant des préjugés. On sait que pour certaines parties du pays, c'est facile d'exploiter des préjugés.

Le premier préjugé que l'on exploite par les amendements qui sont déposés en cette Chambre, c'est la confusion qui existe entre couple et famille. Je sais bien, en tant qu'individu, en tant qu'homosexuel, que deux personnes, qu'elles soient de sexes différents ou de sexes opposés, ne forment pas une famille. Personne n'a prétendu que deux personnes qui n'ont pas d'enfant forment une famille. Pourquoi aujourd'hui a-t-on l'impertinence, je dirais même la malhonnêteté, de vouloir confondre les Canadiens avec deux concepts qui sont franchement distincts? Encore une fois, qui, dans cette Chambre, gagne à vouloir continuer à exploiter cette confusion?

Tentons une fois pour toutes d'être clairs. Que dit le ministre de la Justice? Le ministre de la Justice dit: «Nous savons qu'il existe, dans certains milieux de travail, de la discrimination basée sur l'orientation sexuelle.» Comment ne pas se rappeler que si le ministre de la Justice est en instance de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne, c'est justement parce qu'en 1990, un employé des forces armées, M. Haig, a été congédié parce qu'il a avoué à son supérieur qu'il faisait partie du groupe homosexuel et on l'a congédié des Forces armées canadiennes.

C'est de la discrimination et on n'a pas à chercher à savoir siM. Haig avait une famille, s'il avait des enfants ou de quel type de famille il provenait. Ce dont on a à se préoccuper pour l'heure, c'est de la discrimination qui sévit en milieu de travail ou de toute autre espèce de discrimination que des gens qui reçoivent des services de l'appareil fédéral pourraient faire l'objet.


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(1130)

Quand je vois par exemple la députée du Parti réformiste, pour ne pas la nommer, je crois que son comté est Port Moody-Coquitlam, quand je vois des gens qui se permettent, avec une espèce de légèreté très peu digne d'un parlementaire, de vouloir faire des amendements sur le mariage, sur la famille, sur les conjoints, je le répète, je trouve cela malhonnête. Je ne crois pas que cela serve la cause des droits de la personne.

Il faut être capables, comme parlementaires, de distinguer les genres et les sexes. Nous sommes en présence d'un projet de loi qui veut mettre fin à la discrimination. Bien sûr, il se trouve que lorsqu'on est en couple et que l'on est privé de certaines prestations, que ce soit des prestations de revenu, des prestations pour un congé de deuil, il y a certains tribunaux de droit commun ou certains tribunaux administratifs qui, à travers le pays, ont mis des employeurs en instance de verser des prestations. Mais ce n'est pas parce qu'ils formaient une famille, c'est parce qu'ils étaient en couple.

Quand est-ce qu'on va avoir la capacité, l'ouverture d'esprit de comprendre, dans cette Chambre, que l'on soit un couple homosexuel, ou que l'on soit un couple hétérosexuel, que la discrimination n'a pas sa place? J'espère que c'est à propos de cela que les députés de cette Chambre vont comprendre.

Je poserais une question aux députés réformistes. Vous savez que les députés réformistes sont, en matière des droits de la personne, ce que le cinéma muet est au septième art, c'est-à-dire plutôt tournés vers le passé. Je leur demande ceci: Est-ce qu'ils croient sérieusement que lorsqu'on est en amour et qu'on est homosexuel, cela se vit différemment de ceux qui sont hétérosexuels? Est-ce que ces gens-là croient que lorsqu'on est un citoyen, qu'on paie des taxes et qu'on a droit à des prestations, que l'on mérite d'en être privé parce qu'on est homosexuel? Y aurait-il deux types de fiscalité dans ce pays? Est-ce qu'il y a un de ces députés qui sera capable de se lever et de dire qu'un rapport d'impôt est différent s'il provient d'une personne homosexuelle ou d'une personne hétérosexuelle? Personne ne peut dire cela.

Regardez la pauvreté de l'argumentation. Ceux qui s'opposent, ceux qui nous présentent les amendements dont nous sommes saisis en ce moment, n'ont rien d'autre à dire que de s'en remettre à un discours pauvrement traditionaliste, où on est incapable de se prononcer sur le mérite du droit, où on est incapable de la moindre cohérence juridique. Ces gens-là savent très bien que leur argumentation, sur le plan juridique, ne tient pas.

Quand on n'est pas capable, comme la majorité des gens qui présentent des amendements aujourd'hui, de se lever en cette Chambre et de dire clairement les choses sur le plan de la rigueur juridique, on s'emploie à exploiter des préjugés. On s'emploie, je le répète, à exploiter des préjugés qui n'ont qu'un seul but, semer la confusion dans l'esprit des Canadiens et des Canadiennes, dans l'esprit des Québécois et des Québécoises.

Je le répète, et je pense que je suis une voix respectée en matière des droits de la personne dans ce Parlement, personne parmi nous ne prétend qu'un homme et une femme, ou qu'une femme et une femme, ou qu'un homme et un homme forment une famille s'il n'y a pas d'enfant.

Je ne vois pas la pertinence, à ce stade-ci, pour les députés du Parti réformiste ou pour l'aile «flintstone» du Parti libéral, de présenter des amendements qui pourraient, encore une fois, et vous savez comment ils ont été habiles à cultiver les préjugés et à se prévaloir, chaque fois qu'ils en ont eu l'opportunité, de cette espèce de don qu'on aurait espéré en voie de disparition, ce don qui consiste à affirmer une chose et à penser son contraire, à semer la confusion.

Une commission comme la Commission canadienne des droits de la personne, jusqu'à preuve du contraire, n'est pas dirigée par le Bloc québécois, jusqu'à preuve du contraire la Commission canadienne des droits de la personne est une commission indépendante, une commission formée par des gens qui ont un mandat public, un mandat qu'ils détiennent de cette Chambre, qu'ils détiennent du pouvoir exécutif. Comment se fait-il que ces gens-là passent sous silence que depuis 1979, le commissaire des droits de la personne recommande, année après année, rapport après rapport, avec une terminologie on ne peut plus explicite, que l'on cesse de perpétuer des pratiques discriminatoires.

(1135)

La définition de ce qu'est la discrimination est très claire sur le plan juridique. La discrimination, c'est d'accorder un traitement différent sur la base d'une caractéristique précise, une distinction qui n'a pas sa raison d'être parce que, je le rappelle, quand on est une personne homosexuelle, qu'on remplit son rapport d'impôt et qu'on le fait parvenir au ministère du Revenu à Ottawa, il n'y a pas deux types de fiscalité, il n'y a pas deux types de monnaie dans ce pays, il n'y a pas deux types de rapport d'impôt.

Pourtant, là, on s'inquiète de la capacité que cela pourrait vouloir dire que la discrimination nous empêche d'accorder des traitements différents sur le plan de la fiscalité. Ces gens ne sont pas capables de comprendre. Ils n'ont pas l'ouverture d'esprit. Ils n'ont pas la générosité de coeur. Ils préfèrent toujours être fermés, être dans des ornières, appartenir à leur petit monde clos, étroit, «mean», «cheap», qui consiste à vouloir que l'on se ridiculise parce que l'on est différent.

Ce temps est révolu. Il se trouve qu'à travers le pays, au Canada et au Québec, il y a une majorité de gens, à quelque dénomination religieuse qu'ils appartiennent, quelle que soit leur formation professionnelle, quelle que soit leur vision de la famille, il y a une majorité de gens au pays qui partagent notre point de vue selon lequel, lorsque nous sommes des parlementaires, nous devons faire tout en notre pouvoir pour mettre fin à la discrimination. Un jour, les gens qui continuent à vouloir donner des signes de discrimination auront des comptes à rendre aux Canadiens et aux Québécois. Ils devront s'expliquer. Et je sais qu'à ce moment-là, la population canadienne les jugera bien sévèrement parce qu'il y a une majorité de gens qui comprend bien qu'il est inacceptable qu'on fasse de la discrimination.

C'est, encore une fois, ce à quoi nous renvoie fondamentalement ce projet de loi. Le ministre de la Justice a été très clair en comité; il a été très clair lorsqu'il a fait une déclaration ici même en cette Chambre en deuxième lecture, il s'agit de mettre fin à des pratiques discriminatoires. C'est vrai que mettre fin à des pratiques discriminatoires signifie accepter les différences.

Qu'allons-nous devoir faire, en tant que parlementaires? Qu'est-ce que la population canadienne va devoir faire pour faire compren-


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dre à ce groupe d'irréductibles qu'ils ne servent personne en continuant à perpétuer un discours qui n'a plus sa raison d'être, un discours qui est à la limite de la haine, un discours qui donne à penser que l'on doit être coupable parce qu'on est différent? C'est ça, pour l'essentiel, les amendements qu'ont déposés les députés réformistes et les députés de la majorité-certains députés, heureusement pas tous-certains députés de la majorité ministérielle. Qu'est-ce qui les dérange dans le fait que, dans un article de loi, on ajoute l'interdiction de discriminer sur la base de l'orientation sexuelle?

Y a-t-il des députés dans cette Chambre, y a-t-il des députés parmi les motionnaires qui ne sont pas à l'aise avec leur sexualité? Y a-t-il des députés qui ne sont pas capables de comprendre qu'on puisse avoir un désir pour quelqu'un de même sexe? Quand on est bien dans sa peau, quand on est content de ce qu'on est, quand on est équilibré, quand on est généreux, on est capable d'admettre la différence.

Cherchons à comprendre pourquoi des députés sont incapables d'admettre ce type de distinction. Pourquoi se sentent-ils à ce point menacés qu'ils se regroupent tous ensemble? C'est une espèce de vigile. Ils se regroupent tous ensemble, ils se réunissent, ils font des déclarations, ils présentent des pétitions et ils se donnent un plan d'action, un plan d'action qui a un seul objectif: miner le droit, dans cette société, pour les gens d'être différents.

Je vais vous raconter un témoignage que nous avons entendu en comité parlementaire lorsque nous avons étudié le projet de loi C-33 à l'étape du rapport.

On nous a dit qu'à travers le Canada, pas juste au Québec, pas juste à l'Île-du-Prince-Édouard, pas juste dans l'Ouest canadien, à travers le Canada, deux millions de gens se suicident chaque année. Dans le groupe d'âge de 15 à 24 ans, c'est la deuxième cause de suicide après les accidents de la route. Parmi les suicides qui surviennent dans le groupe des 15 à 24 ans, 60 p. 100 de ceux qui se suicident le font parce qu'ils ont de la difficulté à accepter leur orientation sexuelle. C'est le témoignage d'un pédiatre de l'Université de Calgary, représenté par un député réformiste en cette Chambre, ce qui ajoute l'injure à l'insulte.

(1140)

Est-ce que ces gens comprendront que le projet de loi dont nous sommes saisis vise à faire en sorte que l'on mette fin à la discrimination et que mettant fin à la discrimination, les gens vont comprendre que même s'ils sont différents, ils ont leur raison d'être dans la société.

[Traduction]

M. Julian Reed (Halton-Peel, Lib.): Monsieur le Président, il y a environ trois jours, mon bureau a reçu un fax d'un jeune homme du Nouveau-Brunswick. Il disait: «Je vous en prie, appuyez le projet de loi C-33.» Il s'agit d'un hétérosexuel déclaré qui a passé l'été avec un groupe de gens dont la majorité était des homosexuels. Il disait dans son fax que ce groupe avait fait de la discrimination contre lui.

Le projet de loi parle d'orientation sexuelle; il ne parle pas d'orientation homosexuelle ou hétérosexuelle. Il parle simplement d'orientation sexuelle. Chaque fois que nous employons le mot sexe, tout le monde semble dresser l'oreille pour une raison ou une autre.

Il a été beaucoup question, durant ce débat, de la menace que pose cette mesure législative pour la famille. Pensez-vous vraiment que la famille pourrait être menacée par une mesure adoptée par cette Chambre ou par n'importe quelle autre assemblée législative dans le monde? La famille est une entité naturelle. Les familles se forment depuis des milliers et des milliers d'années pour des raisons évidentes: le soutien mutuel, le réconfort et la procréation. Le mot famille n'a pas besoin d'être défini. Il implique que c'est une famille hétérosexuelle.

Nous pouvons dire que deux personnes du même sexe qui vivent ensemble constituent une famille. Mais pensez à la famille historique et aux raisons pour lesquelles elle existe. La famille n'est menacée par aucune mesure qui puisse être débattue ou adoptée à la Chambre. Cela devrait être clair. Ma famille continuera d'exister pendant des générations à venir, du moins je l'espère, tout comme elle existe depuis des générations. Elle a survécu à toutes sortes de menaces allant des persécutions religieuses à l'Inquisition, sans oublier Oliver Cromwell, pourtant elle existe toujours et est plus forte que jamais.

Je demanderais aux gens qui pensent que leur famille est menacée d'examiner leurs propres valeurs et de trouver eux-mêmes une solution à leur problème.

Notre pays a été fondé par des gens qui sont venus d'Europe et qui ont implanté ici leurs valeurs judéo-chrétiennes. Ces valeurs, qui sont à la base de la plupart des grandes religions du monde, comprennent entre autres la tolérance, la compréhension et le pardon. Même si la Bible n'approuve pas certaines choses, elle dit clairement que ce n'est pas à nous de juger de ces choses. Elle nous interdit de porter de tels jugements.

Mon défunt père a grandi dans le quartier «cabbagetown», à Toronto. Il est devenu membre du Conseil canadien des chrétiens et des juifs à une époque où ce n'était pas très bien vu. C'est ridicule mais, à cette époque, il régnait le même genre de peur que celui dont certains députés ont fait état aujourd'hui. On trouvait à l'époque sur la plage de Sunnyside, à Toronto, des enseignes portant: «Interdit aux chiens et aux juifs». Mon père participé à ce mouvement qui a permis à notre société de faire un certain progrès et de mettre fin à la discrimination ouverte contre les juifs à Toronto.

(1145)

Ce projet de loi modifiant la Loi sur les droits de la personne permet tout simplement à notre pays, reconnu pour sa tolérance, sa générosité et son souci du prochain, de gravir un échelon de plus sur la voie du progrès. Il est juste et opportun d'accorder notre appui à ce projet de loi et de ne pas succomber à la peur qui est parfois engendrée au nom de la religion, surtout au nom de la religion.

Je respecte le point de vue de chacun à se sujet. J'ai ma propre opinion et certains de mes amis, à l'intérieur de mon caucus ou dans les rangs d'en face, ont une opinion différente. Pour moi, il ne s'agit pas d'une question morale. Il est ici question de droits de la personne et du progrès de notre société vers quelque chose d'un peu mieux. Rien de ce que nous pouvons faire ici ne menacera nos familles.


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Si nous parlons d'orientation sexuelle et en particulier des homosexuels comme l'on fait certains députés, quoique le projet de loi s'applique dans les deux sens, je voudrais que mes collègues me disent qui sont les homosexuels? Qui sont-ils? Ce peut-être votre frère, votre soeur, un cousin, un ami ou un membre d'une famille voisine.

On entend souvent dire que l'homosexualité est un choix. Ceux qui sont de cet avis n'ont qu'à parler un instant avec des homosexuels. Ils verront que ce n'est pas le cas. Choisir de vivre comme un homosexuel n'est pas nécessairement un choix apprécié de la société. Les homosexuels ne constituent pas la majorité de la population. Ils ne représentent qu'une très petite minorité.

Les générations futures évalueront notre degré de civilisation à la manière dont nous aurons traité nos minorités. Il y a quelques siècles, la société avait envers les malades mentaux et les personnes handicapées de naissance une attitude bien différente de celle que nous avons aujourd'hui. Ces personnes se retrouvaient dans ce qu'on appelait à l'époque des asiles d'aliénés. Aujourd'hui, nous considérerions tous inacceptable cette façon de traiter les gens.

Nous avons changé notre façon de penser par l'amélioration de nos connaissances, par la compréhension et en tentant de. . .

(1150)

Le vice-président: Le temps de parole du député est expiré.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais faire remarquer que le dernier député qui a pris la parole se contredit.

Il a commencé en disant que la famille ne changera pas quoique fasse la Chambre. Il a ensuite conclu que la société est en train de changer, qu'elle fait des progrès et que nous devrions appuyer ces changements.

J'ai écouté ses remarques avec beaucoup d'attention. Si ses arguments sont valides, cela signifie que, logiquement, il devrait appuyer les amendements. La protection de la famille et l'effet de cette mesure sur la famille ne devraient poser aucun problème en ce qui le concerne.

Les événements de la semaine dernière me rappellent beaucoup un petit lézard que nous avions dans le Pacifique Sud quand je me trouvais là-bas, en 1988-1989. C'était ce qu'on appelle un gecko. Il avait, pour s'échapper, un mécanisme très spécial. Si une personne voulait l'attraper et n'était pas assez rapide, il pouvait se détacher de sa queue. La personne se retrouvait avec une queue qui s'agitait dans la main tandis que le gecko prenait la fuite. L'attention se trouvait détournée de l'objet principal. Les libéraux essaient de détourner l'attention de la Chambre de la question principale dont elle est saisie en agitant leur langue, accusant les réformistes d'être anti-homosexuels et de faire des distinctions. Ils sont vraiment en train de détourner l'attention de ce qu'ils sont en train de faire à la Chambre.

Les Canadiens finiront par se rendre compte que les libéraux essaient de détourner leur attention en soulevant d'autres questions, en proférant des insultes et en usant d'autres tactiques. Ils vont finir par y voir clair. Tout comme on se rend compte après un certain temps que même si la queue du gecko s'agite encore, le gecko s'est échappé, les Canadiens vont se rendre compte que les libéraux essaient de faire en sorte qu'on ne découvre pas ce qu'ils sont en train de faire.

Le Parlement est saisi d'une question: l'inclusion de l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, une mesure que l'on veut imposer de façon anti-démocratique aux Canadiens sans défiance. On empêche le débat en invoquant l'attribution de temps à toutes les étapes-cela, à mon avis, pour empêcher que les Canadiens ne s'agitent et ne se rendent compte de ce qui se passe. Le gouvernement est en train d'essayer de faire adopter cette mesure législative à toute vitesse avant que les Canadiens ne se rendent compte de ce qui se passe.

Au fait, ce n'est pas une promesse électorale du Parti libéral. C'est simplement une promesse que le premier ministre a faite aux homosexuels à Vancouver. Je me demande pourquoi cette promesse a plus de poids que celle concernant la TPS.

Permettez-moi de replacer cette discussion dans son contexte. Le Canada se sortira peut-être éventuellement du catastrophique bourbier financier dans lequel il s'est enfoncé, mais les torts que nous causerons à nos concitoyens en faisant les modifications que nous avons apportées cette semaine à la Loi canadienne sur les droits de la personne continueront à nous hanter durant bien des générations. Pourquoi? La manière pas catholique que nous avons de passer notre dette à nos enfants sera peut-être corrigée d'ici une ou deux générations, du moins je l'espère, mais il faudra beaucoup plus de temps pour redresser le tort irréparable que causera à la société le fait de reconnaître sur un pied d'égalité, en pratique, le mariage entre gais ou lesbiennes et le mariage traditionnel.

Nous détruirons le tissu même de la société en permettant aux tribunaux de redéfinir le mariage. Ainsi, les gais et lesbiennes auront le droit d'adopter des enfants. Si nous ne croyons pas que ce soit une bonne chose, nous devons approuver tous les amendements présentés. Si nous sommes sûrs qu'il ne faut pas que cela se produise, nous devrions approuver ces amendements.

Toutes les études que j'ai consultées montrent que les enfants se développent de façon plus équilibrée quand ils vivent avec leur père et leur mère. La crise sociale que nous connaissons actuellement s'amplifiera si nous approuvons cette mesure législative. Nous devons encourager les parents à prendre un engagement à vie quand ils acceptent la responsabilité de soigner et d'éduquer des enfants. Le fait que la société ait accepté les unions provisoires a été la source d'un grand nombre de problèmes. Beaucoup de problèmes constatés dans les domaines de l'éducation et de la justice viennent de là.

(1155)

Tandis que l'attention du public et des médias est tournée vers Sheila Copps et quelques députés réformistes qui se sont fait remarquer par leurs commentaires, les libéraux en profitent pour changer la société de telle manière que les générations futures en viendront à se demander qui s'était endormi au volant le jour où l'on a percuté un tel rocher. Comme les potins vont bon train, les libéraux vont pouvoir échapper à un examen minutieux de ce qu'ils font au Parlement ce mois-ci.

Il faut se rappeler que l'ajout de l'orientation sexuelle dans la Loi canadienne sur les droits de la personne portera un coup de plus aux


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valeurs traditionnelles du mariage. Je ne suis pas le seul à le dire. Je rapporte ici les pensées d'un très grand nombre de Canadiens.

Ce qu'il faut bien faire valoir, dans ce débat sur l'inscription de l'orientation sexuelle dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, c'est que cette modification entraînera une redéfinition de la famille au Canada. C'est comme une équation algébrique où a suppose b, ou un problème de géométrie où la progression logique des déductions mène à une conclusion irréfutable. On peut déduire de cette proposition qu'elle entraînera une redéfinition de la famille. Même le plus haut tribunal du pays l'a dit. Cela aura un effet très néfaste sur l'unité de base de notre société.

En tant que parlementaires, nous avons la responsabilité de voir plus loin, de prévoir l'effet global qu'aura cette mesure sur la société. Le gouvernement libéral nous assure que le projet de loi n'a pas pour objet d'entraîner ces conséquences négatives, mais les bonnes intentions ne garantissent pas les bons résultats. Le tribunal ou le juge qui étudie une loi l'interprète au pied de la lettre. Il s'en tient à ce qui est écrit. Il ne lit pas les discours des libéraux.

Un de mes collègues d'en face a dit qu'on lui avait garanti que cela ne se produirait pas, mais ces garanties ne sont pas consignées dans la loi. Les amendements proposés doivent être approuvés pour que ces assurances soient bien réelles. Je prie donc tous les députés d'approuver ces amendements.

Les discours des libéraux ne sont pas plus crédibles que leurs promesses concernant la TPS et l'ALEMA. Nous n'avons aucune certitude lorsqu'ils nous assurent que cette mesure n'aura aucun impact sur la famille. Je crains énormément les effets possibles de cette mesure législative si elle demeure inchangée. Les amendements proposés par le Parti réformiste visent à limiter certains effets négatifs du projet de loi. Les couples homosexuels ne devraient pas obtenir un statut équivalent à celui des couples mariés.

Le très révérend Adam Exner de l'archidiocèse de Vancouver a fait la déclaration suivante, qui reflète le point de vue de nombreux Canadiens à mon avis: «Il faut aussi protéger les droits des Canadiens qui, pour des raisons morales, s'opposent au comportement homosexuel». C'est exactement ce que les réformistes ont tenté de faire valoir dans tout le brouhaha de la dernière semaine. Nous ne devrions pas diviser la société en groupes. La Loi canadienne sur les droits de la personne ne devrait pas mentionner de groupes précis. Le très révérend Adam Exner a dit aussi que «les couples homosexuels ne doivent obtenir ni le statut de couples mariés ni son équivalent».

Permettez-moi de citer la politique intérimaire du parti, qui a été approuvée par notre caucus et le conseil démocratiquement élu du Parti réformiste:

Le Parti réformiste affirme que toutes les personnes sont égales devant la loi, qu'elles ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi et qu'elles ont le droit de vivre en toute liberté, selon les limites prévues par la loi. Conformément à la Charte des droits et libertés, les homosexuels profitent des mêmes droits et privilèges que toutes les autres personnes au Canada. Le caucus du Parti réformiste est d'avis que l'on doit continuer à protéger les droits de chaque individu en sa qualité d'être humain et non à cause de son orientation sexuelle. C'est pourquoi le caucus réformiste s'oppose à l'intention du gouvernement d'inclure l'orientation sexuelle comme motif de distinction illicite dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, et dans d'autres lois, car il considère que cet ajout est inutile et inopportun.
La vraie question est de savoir quels seront les effets à long terme de l'ajout de l'orientation sexuelle comme motif de distinction illicite dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

(1200)

Bien d'autres députés ont déjà fait valoir d'excellents arguments, mais celui qui m'inquiète le plus est celui qui touche l'état, la structure fondamentale de l'unité de base de notre société. Voilà le point que je voulais mentionner aujourd'hui; j'espère que j'aurai l'occasion d'en parler plus longuement plus tard.

M. Brent St. Denis (Algoma, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends part au débat sur le projet de loi C-33 et ses amendements.

Je tiens à ce qu'il soit catégoriquement clair que j'appuie la modification ajoutant l'orientation sexuelle à la liste des motifs de distinction illicite prévus à la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Je pense que les députés conviennent tous que si nous vivions dans un monde idéal et dans un pays idéal, nous n'aurions pas besoin de codifier les droits de la personne parce que tous les êtres humains seraient traités sur un pied d'égalité. Nous n'aurions pas à nous soucier devant nos tribunaux ou ailleurs du fait que certaines minorités sont victimes de discrimination.

En dépit du fait que le Canada est de loin le meilleur pays au monde, il n'en demeure pas moins que la discrimination y est une réalité. Nous avons donc besoin d'un code. Comme en témoignent les déclarations faites la semaine dernière par certains de nos collègues, il est triste mais vrai qu'il nous faut un code. Je pense qu'il est temps que nous y incluions l'orientation sexuelle.

C'est une question qui relève des droits de la personne. Je respecte mes collègues pour qui c'est une question morale. Ils ont leurs propres raisons pour être parvenus à cette conclusion et je l'accepte. Nous ne sommes pas d'accord, mais cela ne me fera pas changer d'avis, pour moi c'est fondamentalement une question de droits de la personne.

J'aimerais inclure dans mon intervention d'aujourd'hui des extraits d'un éditorial paru dans un journal local de ma circonscription, Algoma. Je ne lirai pas le texte tout entier. J'invite ceux de mes collègues qui n'ont pas vu l'éditorial au complet à me contacter et je me ferai un plaisir de leur en donner une copie.

Cet éditorial est paru dans l'Expositor de Manitoulin du mercredi 27 mars. Il est intitulé «La discrimination-Irrationnelle:

Ceux qui s'opposent à ce qu'on ajoute ce motif de distinction illicite à la Loi sur les droits de la personne (qui interdit déjà la discrimination fondée sur l'âge, le sexe et la race) donneront comme exemple le projet de loi déposé par le Nouveau Parti démocratique de l'Ontario du temps où il était au pouvoir dans cette province, lequel aurait reconnu légalement les relations entre partenaires de même sexe, ouvrant ainsi la porte à l'adoption par des couples homosexuels.

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C'est cette question de l'adoption qui avait jeté la zizanie au sein des députés tant libéraux que néo-démocrates en Ontario. Les conservateurs étaient unanimes dans leur opposition au projet de loi.
Le premier ministre Chrétien peut s'attendre à la même chose parce que ceux qui s'opposent au projet de loi vont invoquer des arguments comme l'adoption pour défendre ce genre de discrimination légèrement voilée: elle n'est pas officielle, mais elle existe quand même.
Soulignons que la plupart des objections servent uniquement à noyer le poisson.
D'aucuns avanceront que la reconnaissance officielle du droit des homosexuels à ne pas être l'objet de discrimination (tout un concept, si on y pense) portera en quelque sorte atteinte à nos valeurs morales et à la société canadienne, et aura comme effet pervers d'accroître le nombre des couples homosexuels.
Étant donné la perception extrêmement négative des homosexuels dans la société en général, il est difficile d'imaginer que les gens de cette persuasion puissent choisir volontairement une telle orientation et ce style de vie.
Même s'il est parfois délicat de laisser entendre que l'homosexualité n'est pas une question de choix, mais qu'elle est innée, la majorité des gens semblent penser que c'est bien le cas. C'est ce que nous enseignent Darwin et la biologie. Dans toutes les espèces, l'instinct le plus fondamental est l'instinct de reproduction qui assure la survie de l'espèce.
Bien entendu, ce n'est pas une priorité pour ceux qui choisissent d'avoir un partenaire du même sexe, peut-être de leur plein gré, mais plutôt, et même très probablement, en raison de leur chimie propre. Il n'en est pas mois qu'ils font partie de notre société.
Ils sont une minorité, bien sûr, mais ils sont avec nous. Tout comme dans l'Église unie du Canada, qui a courageusement estimé que le fait d'être homosexuel n'était pas en soi une bonne raison pour refuser l'ordination, la discrimination sur la base de l'orientation sexuelle n'est tout simplement pas une bonne idée dans notre société canadienne, que nous estimons spéciale dans le monde.
La plupart d'entre nous continueront d'être déconcertés par l'idée de relations entre personnes du même sexe. Cela, comme l'homosexualité elle-même, est probablement une sorte de réponse instinctive. C'est probablement la façon dont nous sommes constitués.
Mais nous avons également l'avantage d'être des êtres sensibles, capables de surmonter les craintes et les réactions irrationnelles.
L'appui du premier ministre Chrétien aux modifications à la loi sur les droits de la personne ne fera aucun tort à la majorité hétérosexuelle et aidera certainement la minorité homosexuelle.
(1205)

J'applaudis l'éditeur de l'Expositor de Manitoulin pour ses remarques très perceptives.

Les rares fois où j'ai eu l'occasion de voyager à l'étranger, je l'ai fait, comme tous les députés je suppose, avec beaucoup de fierté pour notre pays. Nous savons que les Canadiens sont tolérants, compréhensifs et compatissants. Nous avons ouvert nos portes à des gens du monde entier. Je suis beaucoup plus fier en tant que Canadien de dire que nous tolérons les minorités dans notre société, y compris les homosexuels, que de dire à l'extérieur que nous ne nous les tolérons pas.

Le fait que nombre de mes collègues et certains Canadiens soulèveront dans leurs discussions la question du mariage, de l'adoption et des prestations au conjoint de même sexe, cela reste qu'un élément du débat de la part des gens qui sont de ce côté-là de l'argument. Toutefois, je ne suis tout simplement pas d'avis que le mariage, l'adoption et les prestations aient quelque chose à voir avec la modification présentée. Ce sont essentiellement des questions du secteur privé ou de compétence provinciale.

Ce que nous faisons en adoptant cette modification, c'est faire en sorte que le milieu de travail fédéral et toutes les industries qui sont réglementées par le gouvernement fédéral, ne fassent pas de discrimination sur la base de l'orientation sexuelle dans l'emploi et dans la fourniture de biens et de services.

Huit des provinces et territoires ont déjà adopté une telle disposition dans leur code provincial ou territorial. Par conséquent, le gouvernement fédéral ne fait que s'aligner sur les autres niveaux de compétence du pays. Je suis fier du fait que le gouvernement fasse preuve de leadership et agisse pour faire adopter une promesse qui, disons-le franchement, fait partie de la plate-forme de notre parti depuis près de 20 ans. Il est temps que nous fassions quelque chose.

Je respecte ceux de mes collègues qui voient cela comme une question morale. Ce n'est pas mon cas. Pour moi, ce n'est rien de plus qu'une question de droits de la personne. Nous ne modifions pas le Code criminel. Les comportements qui étaient illégaux avant cette modification continueront de l'être après.

Nous pouvons spéculer ad infinitum ou ad nauseam sur les conséquences possibles. C'est une chose que l'on peut faire à propos de n'importe quelle mesure législative soumise à la Chambre. On peut spéculer. C'est honnête. Toutefois, il nous appartient de juger si la spéculation est raisonnable. Selon moi, cette spéculation n'est pas raisonnable, mais il n'est reste pas moins que je respecte ceux qui usent de cet argument dans un débat équitable.

(1210)

Je ne suis aucunement obsédé par les conséquences qui pourraient résulter de cette modification. Si quelque chose devait clocher, pourquoi cela ne s'est-il pas produit aussi quand les assemblées législatives provinciales ont apporté des modifications à leurs codes? Je ne me souviens pas d'avoir entendu parler de choses terribles qui se sont produites quand ces codes ont été modifiés il y a 10, 15 et 20 ans. Je suis persuadé que cela ne va pas se produire non plus cette fois-ci.

J'invite mes collègues à bien mesurer leurs propos quand ils se prononcent contre cette mesure, à ne pas laisser entendre que le ciel va nous tomber sur la tête si cette modification est adoptée et à ne pas oublier qu'elle ne va conférer aucun statut spécial à quelque catégorie de personnes que ce soit. Il s'agit tout simplement de protéger les droits fondamentaux d'une minorité au sein de notre société.

La semaine dernière encore, les tribunaux et les Canadiens ont appris que, selon le code des droits de la personne, l'intolérance vis-à-vis de n'importe quelle minorité n'est pas acceptable chez nous. Nous formons une société moderne qui fait l'envie du monde entier.

J'encourage mes collègues, même ceux qui pensent que nous faisons fausse route, à revoir leur position et à faire ce que la conscience nous dicte.


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M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, c'est pour moi un privilège que de traiter du projet de loi C-33 et de m'y opposer.

Des dizaines de milliers de pétitions contre ce projet de loi sont parvenues à mon bureau et à de nombreux autres bureaux et, pourtant, le gouvernement poursuit son dessein. Je félicite les députés d'en face qui ont le courage de s'opposer à ce projet de loi, face à la toute-puissance de la majorité gouvernementale.

Je voudrais parler de ce qui ne va pas avec notre pays et des préoccupations que nous avons, moi, les personnes avec qui j'ai grandi et celles que je côtoie. Où s'en va le Canada?

Nous voyons le gouvernement mettre en place des programmes d'équité en matière d'emploi, des programmes de multiculturalisme, la loi sur les langues officielles, des projets de loi sur les droits des homosexuels et d'autres mesures de sociologie appliquée de ce genre. J'ai du mal à accepter que, si l'on s'oppose à un des aspects de l'une quelconque de ces mesures législatives, on soit tout de suite taxé de bigot, de raciste et d'homophobe. Par ailleurs, si une, deux ou trois d'entre non font une déclaration quelque peu malencontreuse, on nous loge tous à la même enseigne.

Je trouve le problème des plus préoccupants. Il peut s'agir, par exemple, d'un groupe de boy scouts, d'un groupe religieux ou de n'importe quel autre groupe. Il suffit qu'un ou deux membres du groupe disent quelque chose de mal et les conséquences rejaillissent sur tout le groupe. Malheureusement, cela en dit long sur la direction que prend le Canada.

Lorsque j'ai dirigé la petite troupe du Parti réformiste, j'ai remarqué qu'un certain nombre de subventions grotesques étaient accordées à des organismes. Dans un cas, on donnait 30 000 $ pour étudier la dynastie Tszu Tszu dans la vieille Chine.

(1215)

On a formulé alors une observation qui semblait amusante à l'époque. Or, le Vancouver Province qui est, au mieux, une feuille de chou libérale, m'a accusé d'être raciste parce que j'avais publié ce communiqué. Il a, depuis, repris cette accusation à d'autres reprises.

Au Canada, si quelqu'un fait une affirmation, même mineure, même si des milliers de personnes n'y voient absolument rien de mal, il suffit qu'un seul groupe, et les médias sont autant à blâmer que les autres à cet égard, se mette à parler de racisme pour que tout le monde se cache.

Dans le cadre du débat sur les droits des gais, si l'on est en désaccord avec ces droits, on est qualifié d'homophobe. On n'ose rien dire contre ces droits, sous peine d'être considéré homophobe. Je plains vraiment certains de nos vis-à-vis qui ont eu le courage de défendre ce en quoi ils croyaient et qu'on considère comme tels.

Permettez-moi de vous donner une idée de là où je veux en venir. Je pense que la meilleure façon de l'expliquer, c'est de vous lire une décision rendue par la Cour suprême en 1993, dans laquelle on disait qu'on n'avait pas violé les droits conférés par la charte à un homme gai lorsqu'on lui avait refusé un congé de deuil à la suite de la mort de son partenaire. C'était la décision du juge.

Le juge en chef de l'époque a écrit: On ne saurait condamner le refus de l'avantage comme constituant une discrimination fondée sur la situation de famille sans introduire dans la Loi canadienne sur les droits de la personne l'interdiction que le législateur a spécifiquement décidé de ne pas inclure dans la loi, à savoir l'interdiction de la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

En fait, le juge a ajouté: Si le législateur avait décidé d'inclure l'orientation sexuelle dans la liste des motifs prohibés de discrimination, mon interprétation de l'expression «situation de famille» aurait pu être fort différente. Voici un juge qui affirme que lorsque le gouvernement libéral inclura l'orientation sexuelle dans la liste des motifs de distinction illicite, il rendra une décision toute autre.

Le ministre de la Justice, le premier ministre et le gouvernement le savent. En fait, c'est également le cas d'un certain nombre de nos vis-à-vis qui posent des questions au gouvernement au sujet de ces déclarations. Cependant, le gouvernement reste muet sur la question, en espérant faire adopter cette mesure le plus rapidement possible et avec le moins de problèmes possible, afin d'obtenir peut-être auprès de la communauté gaie davantage de votes que tout autre parti, pour pouvoir conserver le pouvoir. Nous sommes alors encore confrontés au pire exemple de sociologie appliquée.

C'est un cercle vicieux. Cela en dit long sur ce qui se passe au Canada. On ne peut s'opposer à cela sans être traités d'homophobes. Il s'agit de ne pas défendre ce en quoi on croit, car alors on sera considérés comme des racistes.

J'ignore combien de fois on m'a traité de raciste, parce que j'ai fait déporter deux personnes. J'ai déployé d'énormes efforts durant un an et demi pour y parvenir. L'une venait du Salvador et l'autre du Laos. Peu importe qu'une de ces personnes avait participé au meurtre d'un enfant dans mon quartier. Peu importe que l'autre avait été reconnue coupable de 12 actes criminels et de deux viols. Ces faits n'ont aucune importance. En défendant les droits de mes concitoyens d'aider la police à aider les victimes, j'ai été traité de raciste. Comme moi, ma famille s'en offusque, de même que mes amis et ma mère, je suppose, puisqu'elle est à l'écoute.

(1220)

Si nous ne sommes pas d'accord avec le parti au pouvoir, alors nous sommes racistes, bigots et homophobes. J'espère que le Canada ne s'engage pas dans cette voie. Nous méritons mieux que cela.

Enfin, ce n'est pas par hasard que le Parti réformiste a été victime des événements de la semaine dernière. En politique, le petit qui s'en prend au géant et critique son système, y compris ses spécialistes des médias et ses politiciens, s'expose à de grands risques. La Chambre peut avoir l'assurance que tous ceux qui nous appuient et


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qui suivent nos activités comprendront que nous sommes ici pour de bon et que nous allons nous battre sans jamais reculer.

M. Barry Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Madame la Présidente, je suis extrêmement fier de prendre aujourd'hui la parole en faveur de la mesure à l'étude.

Le projet de loi C-33 ajoutera l'orientation sexuelle aux motifs de distinction illicite prévus à la Loi canadienne sur les droits de la personne. La présentation du projet de loi et son adoption, que j'attends avec impatience à l'instar d'un grand nombre de mes collègues, permettront de remplir un engagement que le Parti libéral avait pris il y a bien des années. Cette mesure répond à d'innombrables résolutions du grand Parti libéral et jouit d'un immense appui au Parlement et d'un bout à l'autre du pays.

Le Parti libéral, auquel j'ai adhéré il y a 20 ans, est un parti bien connu pour sa défense des droits de la personne et sa lutte en faveur des minorités. Je me réjouis de voir que le jour est enfin venu pour nous de débattre de cette mesure attendue depuis longtemps.

Le projet de loi n'enlève rien à personne. Il ne crée pas de statut spécial, mais répond à une réalité. Les gais et les lesbiennes sont victimes de discrimination dans notre société à cause de ce qu'ils sont.

Je suppose qu'en tant que juif, j'ai une sensibilité particulière à l'égard des autres minorités à cause de l'histoire de mon peuple. Les juifs ont connu la discrimination, la persécution et pire encore au cours du siècle actuel et tout au long des siècles, trop souvent à cause tout simplement de ce qu'ils étaient ou de ce qu'ils avaient la réputation d'être. J'attache une grande importance à ce que nous faisons ici aujourd'hui. Je pense que les juifs ont un devoir spécial de se porter à la défense d'une mesure comme celle-ci en faveur des droits de la personne.

Je constate avec plaisir que les deux principaux organismes porte-parole de la communauté juive, B'nai Brith Canada et sa Ligue des droits de la personne qui a une excellente réputation en matière de défense des droits de la personne, ainsi que le Congrès juif canadien et l'excellent travail qu'il accomplit également dans ce domaine, appuient tous deux fermement les efforts du gouvernement pour modifier la loi sur les droits de la personne afin d'interdire la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

Il y a peut-être d'autres parallèles avec l'expérience du peuple juif que certains de mes collègues ne peuvent pas comprendre.

(1225)

La sensibilité de certains est peut-être plus vive, mais je m'inquiète lorsque j'entends décrire certains de nos concitoyens-nos frères, nos soeurs, nos amis, nos connaissances-dans des termes qui les marginalisent. Ces mots sont déshumanisants.

Eli Wiesel l'a dit avec éloquence et nous ne devons pas l'oublier: «l'holocauste a commencé par des mots.» Je préfère appartenir à un parti, à un gouvernement qui utilisent les mots pour enrichir, éclairer, informer et protéger plutôt que pour détruire, attaquer, isoler, dénigrer.

Certains ont soutenu que ce projet de loi menaçait la famille. Il n'en est rien. Certains disent que les gais et les lesbiennes ou leur mode de vie menacent et sapent la famille. Permettez-moi de dire un mot d'un couple qui est venu me voir récemment à mon bureau, une mère et un père qui ont à peu près le même âge que mes parents. Ils m'ont parlé d'un de leurs enfants qui est homosexuel. La douleur que j'ai lue dans les yeux du père lorsque je l'ai rencontré pour la première fois ne tenait pas à la situation de son fils, mais au fait que d'autres Canadiens traiterait son fils différemment à cause de son homosexualité.

Lorsque nous parlons de ce qui risque d'arriver à la famille à cause de ce qui est proposé dans le projet de loi, nous oublions le mal que nous faisons ainsi aux familles. Il ne faut pas perdre de vue ceux qui sont en cause. Ce sont des êtres humains. Ce sont des personnes. Il ne s'agit pas de mystérieux inconnus. Ce sont des amis, des collègues, des frères, des soeurs, des fils et des filles. Ils ont des familles.

Il n'y a pas beaucoup à ajouter. C'est une question très importante. J'ai hâte d'entendre les interventions d'autres députés, même si certains ne partagent pas mon avis.

Les gais et les lesbiennes ne nous ont pas demandé de les reconnaître, comme certains l'ont soutenu à la Chambre. La reconnaissance, ce n'est pas une chose qui s'accorde et se retire. Ils ont leur dignité à eux. Tout ce qu'ils ont demandé au gouvernement, et tout ce que nous leur accorderons, c'est la reconnaissance de leur droit à l'égalité devant les lois de notre pays.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, je remercie la Chambre de me permettre de participer au débat à l'étape du rapport du projet de loi C-33, qui a été présenté à la Chambre il y a quelques heures à peine et que le gouvernement libéral veut nous faire adopter à toute vitesse de peur que les Canadiens n'apprennent la vérité à l'égard de ce projet de loi. Il craint que les dissensions au sein de son propre parti ne s'aggravent si les Canadiens se rendent compte que le projet de loi C-33 est absolument inutile, que l'opposition qu'il suscite est importante et croissante.

Les députés d'en face appuient le projet de loi, mais ils oublient quelque chose de très important dans leurs discours. En effet, ils disent que tout bon Canadien devrait appuyer ce projet de loi et que tous les députés devraient l'appuyer, mais ils ne tiennent pas compte des Canadiens qui contestent le projet de loi C-33.

Je veux faire savoir à la Chambre ce qui se passe en fait au Canada. Mon bureau a reçu des centaines de communications depuis les quelques jours que le projet de loi C-33 a été présenté à la Chambre. Pour chaque communication en faveur du projet de loi


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C-33, il y en a environ 200 contre. Bien sûr, cela ne dérange pas les libéraux. Ils utilisent les grands moyens pour faire adopter le projet de loi. Ils ont intérêt à le faire vite. Si une telle opposition existe, ils ne veulent certes pas qu'elle gagne du terrain. Ils veulent étouffer cette opposition, la tuer dans l'oeuf. Ils veulent utiliser les grands moyens pour faire adopter le projet de loi au plus vite.

(1230)

Les gens qui ont laissé un message sur mon répondeur, en fin de semaine, me demandaient tous, à moi, leur député, de voter contre le projet de loi C-33. Pas un seul ne me demandait d'appuyer le projet de loi C-33.

Des gens m'ont demandé de voter contre le projet de loi C-33. Ils m'avaient déjà demandé de voter contre le projet de loi C-41. Ils n'aiment pas voir inclure dans le projet de loi l'expression «orientation sexuelle» qui n'est pas définie.

Je jasais avec un autre député qui me disait que son bureau recevait 15 appels téléphoniques toutes les dix minutes. Les membres de son personnel n'ont pas eu le temps de manger hier. Ils étaient inondés d'appels et 90 p. 100 des gens appelaient pour demander à leur député de s'opposer au projet de loi C-33.

Pour les gens d'en face, cela n'a pas d'importance. Ils ont une mission à accomplir et ils veulent réussir. Ils ont affirmé et prétendu que cette mesure législative était nécessaire.

Même si les Canadiens s'opposent férocement à ce projet de loi, et le mouvement d'opposition prend de plus en plus d'ampleur, cela n'a pas d'importance. En fait, cela ne fait que les inciter à aller plus vite et à veiller à ce que le projet de loi soit adopté avant que l'opposition se fasse trop virulente.

Les députés d'en face allèguent que leur seul objectif est de prévenir la discrimination contre les homosexuels de notre société. Ils disent: «C'est tout. Nous ne voulons pas aller au-delà de ce principe primaire. Cela ne signifie pas que les gais et les lesbiennes recevront des prestations de conjoints. Cela ne signifie pas que nous leur accorderons le droit d'adopter des enfants. Nous n'élargissons pas la définition de l'expression orientation sexuelle pour inclure les activités actuellement illégales. Nous ne ferions jamais cela. Faites preuve d'un peu de logique. Pourquoi insinuez-vous une telle chose?»

Nous débattons actuellement le premier groupe d'amendements au projet de loi. Ces amendements visent à clarifier toutes ces questions. Ils renforceraient les affirmations des députés d'en face. On pourrait alors s'attendre à ce que les députés d'en face s'exclament: «Quelle bonne idée! Nous allons appuyer ces amendements. Ils viennent renforcer ce que nous disons de ce côté-ci de la Chambre.»

Ils n'en font rien. En rejetant ces amendements, ils ne font qu'accroître les soupçons des Canadiens. Je recevrai d'autres appels à mon bureau. Je verrai monter l'opposition à ce projet de loi et à d'autres mesures législatives similaires qui suivront.

Les gens disent qu'on ne peut pas faire confiance aux libéraux. On ne pouvait pas leur faire confiance au sujet de la TPS. Leur parole ne valait rien. Pourquoi devrions-nous leur faire confiance au sujet de ce projet de loi? Pourquoi devrions-nous les croire lorsqu'ils disent que ce n'est pas un premier pas vers l'octroi de prestations de conjoints aux couples de même sexe? Pourquoi devrions-nous les croire lorsqu'ils disent que ce projet de loi n'accordera pas aux conjoints de même sexe le droit d'adopter des enfants. Ils ne nous disent pas la vérité. Ils improvisent selon les circonstances. Ils vont de l'avant et essaient de faire adopter un projet de loi qui semble conforme à ce que souhaite le dernier groupe de pression auquel ils ont parlé.

J'ai participé à une émission avec un député libéral, celui de Saskatoon-Dundurn. Plusieurs des personnes qui ont téléphoné ont dit craindre que le projet de loi n'enfreigne la liberté religieuse. Le député de Saskatoon-Dundurn a dit: «Je suis un bon catholique. Cela n'a aucune répercussion sur la liberté religieuse. C'est un faux-fuyant.»

Si c'est vrai, pourquoi les députés libéraux n'appuient-ils pas les amendements qui protégeraient la liberté religieuse? On pourrait penser qu'ils réclameraient cela à cor et à cri, qu'ils bondiraient de leur siège pour dire qu'ils appuient ces amendements, car ce sont de bons amendements, mais ils n'en font rien.

On finit par se demander pourquoi ils n'appuient pas les amendements. Quel est leur programme? Quels sont leurs plans? Ils ne nous l'ont pas dit dans le passé. Ils ne nous ont certainement pas dit la vérité à propos de la TPS. Ils ont induit les Canadiens en erreur au sujet de la TPS.

Les Canadiens se demandent ce que le libéraux vont faire de ce projet de loi. Quel est leur programme? Quelle est leur mission? Qu'essaient-ils d'accomplir à long terme?

Si ce qu'ils prétendent est vrai, pourquoi ne le prouvent-ils pas en appuyant les amendements proposés au projet de loi C-33? Pourquoi ne joignent-ils pas le geste à la parole? Pourquoi ne se lèvent-ils pas et ne votent-ils pas en faveur de certains de ces amendements? Où est leur courage?

(1235)

J'en ai assez des députés qui disent que le projet de loi n'aura pas toutes ces conséquences, mais qui refusent néanmoins d'appuyer les amendements. Cette attitude est foncièrement répréhensible et elle déshonore la Chambre. Je suis très déçu que les députés d'en face refusent d'appuyer les amendements qui clarifieraient les questions qu'eux-mêmes essaient de faire valoir. C'est injuste et intellectuellement malhonnête. Cela jette le discrédit sur la Chambre des communes.

Les libéraux disent que le projet de loi C-33 vise à empêcher la discrimination contre les gais et les lesbiennes. Le Parti réformiste s'oppose à la discrimination contre tous les Canadiens. Je ne crois pas que la discrimination visée soit un fléau au Canada. Il y a peut-être quelque chose qui m'a échappé. Peut-être que le député de Saskatoon-Dundurn sait quelque chose que j'ignore et que c'est


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pourquoi il n'écoute pas les centaines d'appels qu'il reçoit à son bureau et qui viennent d'opposants à ce projet de loi.

Je n'ai pas lu dans les journaux que la discrimination a pris des proportions épidémiques au sein de la communauté gaie et lesbienne. Toutefois, même si c'était le cas, nous avons des lois contre cela. Si les gais ou les lesbiennes sont victimes de discrimination, ils peuvent invoquer la Charte des droits. Le paragraphe 15(1) de la loi s'applique-t-il à tous les Canadiens, sauf aux gais et aux lesbiennes? Non, ce n'est pas ce qu'il dit. La Charte s'applique également à tous. Tous les Canadiens sont protégés par la Charte: La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination.

La maison Angus Reid a fait un sondage dans lequel elle énonçait qu'à l'heure actuelle, la Charte des droits prévoit que la loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et que tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination. Elle demandait ensuite: «Pensez-vous qu'une autre loi est nécessaire pour protéger les gais et les lesbiennes dans notre société?»

Si les Canadiens savaient que la Charte des droits offrent cette protection, 90 p. 100 d'entre eux s'opposeraient au projet de loi C-33. Ils se prononceraient de façon catégorique sur l'inutilité de ce projet de loi.

Je conclus en lisant une lettre que j'ai adressée à tous ceux qui m'ont demandé quelle est ma position relativement au projet de loi. Je la lis à titre de clarification.

Je suis contre le projet de loi pour les raisons suivantes:
Je suis en faveur de l'égalité pour tous les Canadiens, quels que soient leur race, leur langue, leur culture, leur religion, leur sexe ou leur orientation sexuelle, et non pas à cause de ces caractéristiques.
C'est aussi la position du Parti réformiste.

Je crois que tous les Canadiens jouissent déjà d'une bonne protection législative contre la discrimination.
Le terme orientation sexuelle n'est pas encore défini, ce qui laisse la porte ouverte à ceux qui ont des pratiques sexuelles déviantes (comme les pédophiles) et qui pourraient demander à être protégés par ces lois.
Nombre d'experts juridiques sont d'avis que cette mesure. . .
La présidentes suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le député de Kingston et les Îles a la parole.

[Français]

M. Peter Milliken (Kingston et les Îles, Lib.): Madame la Présidente, j'apprécie beaucoup l'opportunité de participer au débat sur ce projet de loi très important, surtout après le discours de l'honorable député de Kindersley-Lloydminster.

[Traduction]

Certains députés ont laissé entendre que nous n'avons pas besoin de la loi proposée dans cette mesure législative. S'ils ont des doutes quant aux preuves nécessaires pour appuyer une telle loi, ils n'ont qu'à regarder les nombreux cas qui ont été portés devant la Commission des droits de la personne du Canada, dont beaucoup ont ensuite fait l'objet d'appels devant les tribunaux, concernant des actes de discrimination perpétrés contre des membres de groupes minoritaires; pas seulement des cas de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, mais d'autres aussi.

La discrimination est très répandue au Canada. Je reconnais que nous avons fait des progrès au cours des dix dernières années, mais la discrimination continue de poser un problème. En modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, ce projet de loi cherche à mettre fin à cette discrimination.

(1240)

Nous avons eu des preuves de cette discrimination dans les déclarations faites récemment par certains députés réformistes à l'extérieur de la Chambre. Je n'entrerai pas dans les détails. Cependant, il n'en reste pas moins que ces déclarations ont forcé le chef du Parti réformiste à publier un manifeste; c'est un peu tard peut-être, mais il l'a fait. Je vais en citer un extrait parce que je crois que les raisons pour lesquelles lui et son parti s'opposent à ce projet de loi ne sont ni raisonnables ni justes. Je cite un passage tiré de l'édition de ce matin du Citizen d'Ottawa:

Les réformistes s'opposent au projet de loi du gouvernement sur les droits des homosexuels non pas parce que nous sommes en faveur de la discrimination, mais bien parce que nous favorisons une meilleure approche pour prévenir la discrimination. Le parti appuie l'affirmation de l'égalité de tous les Canadiens devant la loi plutôt que la protection de cette égalité au moyen de la création de catégories spéciales de Canadiens qui ont des droits particuliers. Cependant, le fait que certains députés réformistes sont incapables-ou refusent-d'appuyer cette raison motivée de s'opposer au projet de loi C-33 est à l'origine des problèmes que le parti connaît dans le moment.
Je suis certain que même la députée de Halifax trouve cette dernière affirmation un peu difficile à avaler. Certains d'entre nous ont de la difficulté à avaler la première partie aussi, et je voudrais faire quelques remarques à ce sujet.

Qu'est ce que le chef du Parti réformiste propose exactement en ce qui concerne l'affirmation de l'égalité de tous les Canadiens? Quelles chimères nous sert-il comme justification pour changer cette loi?

Une voix: C'est difficile à comprendre, n'est-ce pas?

M. Milliken: Le député dit que je ne comprends pas. Je suis sur le point de lui expliquer parce qu'il est évident que c'est une excuse pour camoufler l'étroitesse d'esprit affichée par ses collègues à la Chambre des communes. C'est une excuse lamentable.

Ce qu'il faut retenir ici, c'est que leur notion d'égalité consiste à abroger la Loi canadienne sur les droits de la personne pour la remplacer par une déclaration affirmant l'égalité de tous. Je souligne, comme je l'ai souvent fait à la Chambre, que cette loi n'accorde pas de droits spéciaux à des groupes particuliers. Elle déclare, comme le fait le projet de loi, qu'il ne peut pas y avoir de discrimination fondée sur certains motifs.


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Des motifs sont notamment le sexe, l'âge et la couleur. Ces mots sont neutres. Ils sont neutres dans la loi sur les droits de la personne. Ainsi, par la mention de sexe, la loi donne des droits égaux aux hommes et aux femmes. Par la mention de l'orientation sexuelle, elle donne des droits aux personnes bisexuelles, aux lesbiennes, aux gais et aux hétérosexuels, et ces droits s'appliquent à tous. La mention de couleur ne donne pas uniquement des droits aux noirs, mais à tous les Canadiens, peu importe la couleur de leur peau.

Nos vis-à-vis l'oublient. Ils croient que parce que le sexe, la couleur et l'orientation sexuelle sont mentionnés, cela signifie que les droits ne s'appliquent qu'aux femmes, aux noirs, aux gais et aux lesbiennes. C'est, pour eux, ce que cela signifie. Pourquoi pensent-ils ainsi? Parce que le Parti réformiste est composé d'hommes âgés, de race blanche. Ils ne se rendent pas compte que la discrimination existe parce qu'elle n'a pas été un problème particulier pour les hommes âgés, de race blanche qui ont déjà un emploi et sont très bien dans notre société.

Le Parti réformiste est composé principalement de ces hommes. Dans une réunion de réformistes, la prédominance des hommes est frappante. Ils sont presque tous blancs. Ils sont presque tous anglo-saxons. Ils ne font pas partie des autres groupes minoritaires qui forment le Canada et, en fait, on ne retrouve pas dans ce parti la majorité féminine qui est sous-représentée dans de nombreuses institutions et de nombreuses professions au Canada depuis des générations.

Nous voyons aujourd'hui le Parti réformiste tenter de cacher le fait que ses membres ne souscrivent pas aux principes de la loi sur les droits de la personne, qui visent à accorder des droits égaux à tous les Canadiens.

Une voix: Un statut particulier.

M. Milliken: Revoilà le député. Un statut particulier. Parce que c'est écrit sexe, il conclut que cela signifie que les femmes ont un statut particulier grâce à cette loi et obtiennent ainsi des droits qu'elles n'auraient pas autrement. Les hommes ont les mêmes droits, mais le député ne peut pas accepter que les droits doivent être les mêmes. À son avis, c'est là un statut particulier. Le chef réformiste fait de son mieux pour cacher les problèmes qui existent au sein de son parti en soutenant qu'il suffirait de déclarer que tous sont égaux.

Voyons un peu où cela nous mènerait. Quels seraient les motifs de distinction illicites dans une nouvelle loi réformiste? Il n'y en aurait aucun. Tous seraient déclarés égaux. Par conséquent, toute personne victime de discrimination pourrait porter sa cause devant les tribunaux.

Il y a, parmi les députés réformistes, un professeur à la retraite. Je me demande comment il réagirait si l'Université Simon Fraser, où il a enseigné, refusait d'accepter un étudiant parce que ses notes ne sont pas suffisamment élevées et que celui-ci criait à la discrimination en faisant valoir sa citoyenneté canadienne et le fait que le nouveau code des droits de la personne des réformistes Zinterdit la discrimination au Canada. Cet étudiant dirait que même s'il a eu des notes moins élevées que tel autre, qui a été accepté, il tient néanmoins à être admis à cette université. Que répondrait le député?

(1245)

Je voudrais connaître le point de vue du député de Calgary-Sud-Ouest à ce sujet. Je parie qu'il n'a pas la moindre idée de ce qu'il dirait, car il serait incapable de mettre de l'avant et de faire appliquer une loi qui permettrait de faire ce qu'il prône. Cette motion n'est que chimère.

On ne peut pas établir de distinctions entre les groupes et prendre des mesures discriminatoires sans que les fondements de cette discrimination ne soient énoncés dans la Loi sur les droits de la personne. Cette loi définit les fondements de la discrimination. Presque tous les Canadiens en reconnaissent le bien-fondé et le caractère raisonnable.

Le gouvernement veut, par cette modification, faire justice à un groupe de Canadiens qui se plaignent énergiquement et depuis longtemps d'être traités injustement. Ces personnes sont déjà incluses dans les codes des droits de la personne de sept provinces. Les tribunaux ont également confirmé que la législation sur les droits de la personne les incluait.

Cette mesure législative ne fait pratiquement rien de nouveau. Elle permet au Parlement de se mettre à jour par rapport à ce qui se passe dans la société, une chose qui aurait dû être faite il y a longtemps et qui, manifestement, dépasse les députés de l'autre côté.

Certains députés, dont le député de Kindersley-Lloydminster, disent qu'à leur avis, on fait indûment adopter ce projet de loi à toute allure.

M. Cummins: N'êtes-vous pas d'accord?

M. Milliken: Je ne suis pas d'accord.

Il est important que les députés comprennent que s'ils cherchent à faire retarder l'adoption de cette mesure législative, c'est pour pouvoir répandre des idées tout à fait fausses sur l'effet qu'elle aura de façon à ce que l'on s'y oppose. Ce projet de loi est clair, il est direct et la Chambre devrait l'approuver sans délai.

Qui sont les groupes auxquels le député de Calgary-Sud-Ouest fait allusion dans son intervention? Je l'ignore. Il dit que ces groupes sont mentionnés dans la loi sur les droits de la personne. Ils n'y sont pas mentionnés. Comme je l'ai dit, il est fait allusion à «tous les Canadiens». Aucun groupe n'est visé en particulier à des fins de protection spéciale dans les dispositions de la loi auxquelles se rapporte l'amendement que nous examinons aujourd'hui.

J'ai reçu à ce sujet pas mal de lettres, pas tant de mes électeurs mais de groupes de Colombie-Britannique et d'Alberta notamment, qui m'ont écrit pour me citer un passage du Lévitique, ainsi que divers écrits de l'apôtre Paul, tirés de son épître aux Romains, je crois, et quelques autres. Que ces gens me citent ce genre de


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références bibliques et me disent que je devrais voter contre ce projet de loi en raison de ces versets de la Bible m'inquiète.

J'ai à leur intention et à celle des députés de l'autre côté un message auquel je leur demande de réfléchir. Je sais qu'ils attachent beaucoup d'importance aux enseignements de la Bible. Je voudrais citer l'Évangile selon Saint Matthieu:

Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés. Car on vous jugera du jugement dont vous jugez, et l'on vous mesurera avec la mesure dont vous mesurez. Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l'oeil de ton frère, et n'aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton oeil? Ou comment peux-tu dire à ton frère: Laisse-moi ôter une paille de ton oeil, toi qui as une poutre dans le tien? Hypocrite, ôte premièrement la poutre de ton oeil, et alors tu verras comment ôter la paille de l'oeil de ton frère.
Voici un autre passage: «Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux, car c'est la Loi et les Prophètes.»

Que les députés de la Chambre se souviennent de ces paroles alors que nous nous apprêtons à voter sur ce projet de loi très important. Ces paroles, qui proviennent du Sermon sur la montagne, résument ce que le gouvernement essaie d'accomplir au moyen de ce projet de loi: l'équité et la justice pour notre société.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, il y a deux éléments que j'aimerais aborder. De toute évidence, on pourrait passer beaucoup de temps à parler des détails du projet de loi lui-même et des circonstances qui ont mené à la formulation d'une telle mesure, ou encore à commenter les enfantillages dont nous avons été témoins de la part des députés d'en face. Au lieu de cela, je voudrais aborder deux questions: premièrement, le fait qu'on a bafoué les principes démocratiques et, deuxièmement, la question de l'égalité et de ce que le projet de loi C-33 fait vraiment à cet égard.

(1250)

En ce qui concerne la démocratie, j'ai promis à mes électeurs que jamais plus ils n'entendraient dire qu'Ottawa a toujours raison. Plutôt que de leur dire ce qui est le mieux pour eux, nous discuterons des enjeux et nous voterons de la manière dont ils nous l'auront demandé. Je vais revenir plus tard sur le résultats de consultations que j'ai tenues auprès de mes électeurs, au cours des quatre derniers jours.

Le hic, c'est qu'on n'a pas beaucoup de temps. Lundi dernier, on a présenté le projet de loi. Mardi, on l'a débattu. Mercredi, on a imposé la clôture. Le projet de loi a été renvoyé au comité et le voici de retour aujourd'hui. On imposera de nouveau la clôture et le vote à l'étape de la troisième lecture se tiendra jeudi, au plus tard. Quelqu'un peut-il me dire comment les députés peuvent consulter leurs électeurs avec un calendrier aussi serré?

Mes électeurs veulent avoir une assemblée publique. Ils veulent examiner les deux côtés de la médaille. J'ai eu une rencontre très intéressante avec un groupe représentant la collectivité gaie de ma circonscription. Je leur ai dit que j'aurais aimé avoir la chance de discuter intelligemment et en public des droits des gais et de toute autre question d'intérêt, de traiter scientifiquement le projet de loi C-33 dans sa totalité, mais qu'on nous le fait avaler de force, clôture après clôture, tout comme les progressistes conservateurs l'avaient fait. Nous n'avons aucune chance d'intervenir réellement. Je n'ai certainement pas eu la chance de communiquer avec mes électeurs comme j'avais promis de le faire. Nous avons fait de notre mieux.

Un des arguments que nous avons entendus de la part des députés d'en face, c'est que les électeurs ne sont pas assez brillants pour comprendre ce genre de choses. C'est ce que pensaient les conservateurs et les gens qui ont orchestré l'accord de Charlottetown. Ils ne pensaient pas que les gens seraient suffisamment informés pour le comprendre et pour se prononcer. En 1993, la population a pris les choses en main et a mis les conservateurs à la porte pour cette raison.

Je dis qu'on bafoue la démocratie dans cet endroit. À cause de la clôture et de l'adoption à toute vapeur de ce projet de loi, les Canadiens n'ont pas eu l'occasion de communiquer avec leurs députés comme ils le devraient. Ce genre de mesure législative refait surface de temps à autre depuis trente ans. Qu'y a-t-il de si urgent tout d'un coup? On ne nous donne qu'une semaine pour l'étudier. Je présente mes excuses au peuple canadien pour le rôle que je dois jouer dans cette affaire. C'est dégoûtant de devoir faire les choses ainsi. Tout le monde devrait avoir honte.

En ce qui concerne le projet de loi C-33 et toute la notion de statut spécial, comme dans le cas de Charlottetown, tout groupe qui a voulu promouvoir l'idée de statut spécial a constaté que cela ne marchait tout simplement pas. Cette notion ne fait que diviser les Canadiens encore plus. Elle divise les familles et les voisins qui se connaissent depuis des années.

Quand nous disons que tout le monde est égal ou que nous nous opposons à toute forme de discrimination, tout le monde comprend. C'est clair: je suis contre la discrimination, qu'elle soit fondée sur l'orientation sexuelle, la couleur, la religion ou n'importe quoi d'autre. C'est clair. Tout le monde est égal et tout le monde devrait protéger cette égalité au lieu de créer des catégories spéciales et d'accorder un statut spécial en vertu de la loi. C'est une autre source de honte que nous devons au gouvernement.

Voyons le genre de choses que nous devrions envisager. Nous disons qu'il faut parler aux gens et leur demander leur opinion. J'ai posé la question suivante dans ma circonscription: comment voulez-vous que votre député vote sur le projet de loi C-33 qui, s'il est approuvé, modifiera la Loi canadienne sur les droits de la personne pour inclure l'orientation sexuelle comme motif de distinction illicite? J'ai calqué ma question sur le texte du projet de loi pour qu'elle soit aussi juste que possible. J'ai précisé qu'ils devaient examiner les deux côtés de la médaille dans ce cas-là, comme dans le cas de toutes les questions.

(1255)

Je peux dire aux députés d'en face que les résultats obtenus sont les suivants: 1 152 électeurs s'opposent au projet de loi, d'après les appels téléphoniques, les signatures de pétitions et les lettres reçues jusqu'à hier soir; nous avons reçu 18 noms en faveur du projet de loi. Il y a quelques semaines, en réponse au projet de loi du Sénat, j'ai mentionné que j'avais rencontré les gens de la communauté homosexuelle de ma région. Ils ont recueilli 402 signatures en faveur d'une pétition beaucoup plus large que je présenterai à la Chambre, dès qu'elle aura été approuvée. Même en ajoutant ces noms à la liste et en supposant que le projet de loi n'ait pas changé, le résultat serait toujours de 1 152 contre 420.

Les gens nous téléphonent. Hier, nous avons reçu 80 appels à mon bureau et tous les interlocuteurs, sans exception, ont déclaré


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que je devrais voter contre cette mesure législative. Une bonne partie de mes électeurs, environ 68 p. 100, vivent dans des régions urbaines. Étant donné la présence d'une grande entreprise pétrochimique, étant donné que bon nombre de mes électeurs sont des diplômés universitaires, je suppose qu'ils sont en meilleure posture que bien des Canadiens, mais ils font une réflexion intellectuelle sur toutes ces questions. Le fait que nous ayons reçu, en moins d'une semaine, 1 500 réponses au sujet d'un projet de loi me porte à croire que ces gens se tiennent au courant. Contrairement à mes collègues d'en face, qui croient que les électeurs sont idiots, j'estime que les électeurs sont bien informés, qu'ils savent ce qui se passe et qu'il suivent la situation de près.

Je tiens à rappeler à tous les députés que la population canadienne est à l'affût. Elle voit bien que nous sommes en train de détruire la démocratie. Elle voit que nous leur imposons cette mesure législative sans qu'elle ne puisse dire un seul mot. Elle se dit que ça sufit.

Ce projet de loi ne propose pas une discussion sur l'homosexualité. Il nous demande d'accorder un statut spécial à un groupe en particulier. Chaque Canadien a droit à l'égalité, et je dis bien à l'égalité. Quelle partie du mot «égalité» le gouvernement a-t-il du mal à comprendre?

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je vais parler des motions nos 1, 9 à 15 et 18.

Je ne suis pas certain de comprendre l'objet de la motion no 1. Celle-ci propose de remplacer, dans le préambule de la mesure législative, les mots «tous les individus» par les mots «tout individu».

Le préambule du projet de loi C-33 a été proposé par les rédacteurs de la section législative du ministère de la Justice. Il n'a rien à voir avec les modifications concernant l'orientation sexuelle. Les rédacteurs suivaient tout simplement la pratique habituelle qui veut que, lorsqu'un article d'une loi est modifié, on essaie en même temps de moderniser la langue de la loi.

La modernisation de la langue n'a pas d'incidence juridique. Ce que je veux dire par là, c'est qu'elle ne modifie pas la loi telle qu'elle existe. Il est également nécessaire de rendre la version anglaise équivalente à la version française dont la langue est modernisée depuis déjà quelque temps. Ce que l'on propose dans cet amendement va tout simplement à l'encontre de la modernisation de la langue. La modernisation de la langue est importante lorsque l'on étudie les mesures législatives, car cela revient à les simplifier.

(1300)

La motion no 9 dit en partie que rien dans les articles 2 et 3 n'a pour effet de rendre inopérante toute disposition du Code criminel. J'ai lu cet article très soigneusement, mais je n'en comprends pas l'objet.

N'importe quel avocat dira que le projet de loi C-33 et la Loi canadienne sur les droits de la personne n'ont rien à voir avec le Code criminel. Ils ne touchent pas le Code criminel. Ils n'ont pas préséance sur le Code criminel. Je peux simplement conclure que cette motion résulte d'un manque de compréhension de la mesure législative en cause. J'aurais pensé qu'un parlementaire aurait une meilleure idée de ce qu'est une mesure législative fédérale et de quelle façon elle est utilisée.

La Loi canadienne sur les droits de la personne et le projet de loi C-33 ne s'appliquent qu'à deux choses en particulier: l'emploi et la fourniture de biens et de services. Le Code criminel n'a absolument rien à voir avec le sujet à l'étude.

Peut-être que les députés confondent la Loi canadienne sur les droits de la personne avec la Charte canadienne des droits et libertés. La Charte fait partie de la Constitution. En tant que loi suprême du pays, la Constitution prime toute autre loi, fédérale, provinciale ou municipale, ce qui comprend le Code criminel. Toutefois, nous ne parlons pas de la Charte ici. Nous parlons simplement de la Loi canadienne sur les droits de la personne qui ne s'applique absolument pas au Code criminel.

Enfin, le préambule dit clairement que le projet de loi C-33 ne protège que le respect du droit et de la légalité. Tout comportement illégal reste illégal. Il n'est pas protégé par la Loi canadienne sur les droits de la personne.

J'ai essayé également de comprendre le but de la motion no 10, mais je ne vois toujours pas pourquoi un amendement comme celui-là serait nécessaire. La Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique à un pourcentage relativement petit d'employeurs et de fournisseurs de services de compétence fédérale, soit le gouvernement fédéral et les entreprises réglementées par le fédéral, comme les banques, les compagnies aériennes, les chemins de fer et les compagnies de télécommunications.

La Loi canadienne sur les droits de la personne et les modifications prévues dans le projet de loi C-33 ne s'appliquent pas aux Églises ou aux organismes religieux, qui sont visés par les lois provinciales sur les droits de la personne et ne sont pas touchés par les modifications présentées. Cet amendement est inutile. Pour dire les choses carrément, il ne serait pas applicable, il ne servirait à rien.

Les Églises et les organismes religieux sont réglementés par les lois provinciales sur les droits de la personne. La loi fédérale n'est pas le bon endroit où insérer ces amendements. C'est là une question que les provinces devront aborder dans leurs propres mesures législatives. Ces institutions ne sont absolument pas touchées par le projet de loi C-33, qui ne peut modifier que la loi fédérale sur les droits de la personne, la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Si cette loi s'appliquait aux Églises et aux organismes religieux, ce qui n'est pas le cas, un employeur pourrait encore refuser d'engager une personne pour des motifs raisonnables et justifiables dans les circonstances. Ainsi, la Cour suprême du Canada a jugé qu'il était raisonnable et justifiable pour une école catholique d'exiger que les vues religieuses de ses enseignants soient conformes à celles


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de l'Église. Les Églises et les organismes religieux peuvent s'appuyer là-dessus pour justifier que les personnes qu'ils s'engagent adhèrent à leurs principes religieux.

En ce qui concerne la motion no 11, aucune modification à la définition des termes «mariage», «famille» et «conjoint» n'est prévue ni nécessaire dans le cas présent. Le projet de loi C-33 ne modifie pas le droit canadien. La notion d'orientation sexuelle est déjà prévue dans notre droit. Les tribunaux l'ont déjà établi aux termes de la charte et de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Cet amendement ne ferait que préciser de façon explicite dans la Loi canadienne sur les droits de la personne ce qui existe déjà.

Les tribunaux sont déjà saisis de la question des avantages consentis aux conjoints de même sexe et d'autres questions. Qu'on apporte ou non cette modification, les tribunaux trancheront ces questions et tiendront compte des lois pertinentes comme ils l'entendent.

La motion no 12 propose un amendement qui dit notamment que la mention de l'orientation sexuelle «n'a pas pour effet de porter atteinte aux libertés de religion, d'expression ou d'association garanties en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.» Cet amendement est également inutile. La charte protège déjà les libertés de religion, d'expression et d'association.

La charte fait partie de la Constitution du Canada. Pour sa part, la Constitution constitue la loi fondamentale du pays. Elle a préséance sur toutes les autres lois, fédérales et provinciales, y compris la Loi canadienne sur les droits de la personne. Ainsi, aucune disposition de la Loi canadienne sur les droits de la personne ne pourrait primer sur la charte ou affecter les libertés de religion, d'expression ou d'association garanties par la charte. Cette motion repose sur une mauvaise compréhension intrinsèque des lois du pays. La liberté de religion, d'expression et d'association est garantie par la Charte, et le projet de loi C-33 ou toute autre loi ne peut pas la supprimer. Comme l'amendement proposé n'ajouterait rien à la loi, il n'est pas nécessaire.

(1305)

Il est également important de se rappeler que la Loi canadienne sur les droits de la personne vise l'emploi et la fourniture de produits et de services au niveau fédéral. Par conséquent, la portée de cet amendement est très limitée. Il ne vise ni les Églises ni les institutions religieuses. Le projet de loi C-33 ne peut aucunement avoir un effet sur la liberté de religion ou d'expression.

La motion no 15 ajouterait un article disant que rien dans les articles 2 ou 3 n'a pour effet d'autoriser le mariage entre personnes du même sexe. La Loi canadienne sur les droits de la personne et, partant, le projet de loi C-33, ne visent absolument pas le mariage. La loi ne vise que l'emploi et la fourniture de produits et de services. La primauté de la loi concerne les lois portant sur l'emploi ou sur la fourniture de produits et de services. Bien que le gouvernement fédéral puisse adopter des lois concernant la capacité de se marier, ces lois ne relèvent pas des secteurs de l'emploi ou de la fourniture de produits et de services.

Comme Maxwell Yalden, président de la Commission canadienne des droits de la personne, l'a dit le mois dernier devant le comité sénatorial chargé d'étudier le projet de loi S-2: «Nous ne parlons pas des personnes mariées ou non. Notre commission n'a rien à faire là-dedans.» C'est exact. La Loi canadienne sur les droits de la personne ne s'applique tout simplement pas au mariage.

La common law a toujours prévu que le mariage est l'union entre un homme et un femme. La common law a autant de force qu'une mesure législative. La common law sur le mariage ne pourrait être modifiée que par une mesure législative fédérale portant expressément sur le mariage. Comme il a été dit précédemment, la Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique à l'emploi et à la fourniture de biens et de services et ne saurait toucher les mesures législatives relatives au mariage.

En 1993, dans l'affaire Layland et Beaulne contre l'Ontario, le plaignant récuse la prescription du droit coutumier selon laquelle le mariage est l'union d'un homme et d'une femme en évoquant l'article 15 de la charte et en posant qu'il s'agit d'un cas de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. La charte, partie intégrante de la Constitution, a la priorité sur toutes les autres lois. C'est ce que la plupart des tribunaux ont conclu: «Le fait que le droit coutumier restreint le mariage à des personnes de sexe opposé ne constitue pas une forme de discrimination contre la partie requérante, contrairement à l'article 15 de la Charte.» Telle est la loi qui s'applique actuellement dans tout le pays.

En ce qui concerne la motion no 18, une seule réponse est de mise. Le projet de loi n'ajoute pas et ne peut avoir pour effet d'ajouter l'orientation sexuelle à la disposition dite de l'action positive, l'article 16, de la Loi canadienne sur les droits de la personne. L'argument que la motion sous-tend est spécieux. L'article 16 dresse sa propre liste de motifs. S'il s'agissait d'établir un programme d'action positive axé sur l'orientation sexuelle, il faudrait modifier l'article 16.

Le projet de loi C-33 ajoute l'orientation sexuelle aux articles 2 et 3 et non pas à l'article 16. La liste des motifs que l'on trouve à l'article 16 n'est en rien modifiée.

Le gouvernement votera contre tous les amendements du groupe no 1.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Madame la Présidente, le ministre de la Justice veut nous faire croire que son projet de loi n'est qu'une déclaration floue, mais rassurante qui ne suppose aucun coût financier ou social.

Il nous dit allègrement que la modification qu'il propose à la Loi canadienne sur les droits de la personne n'a rien à voir avec les unions entre personnes de même sexe, les prestations aux conjoints de même sexe ou l'application de lois régissant les impôts et les propriétés conjointes.

Le ministre n'approuve peut-être pas les opinions du juge en chef de la Cour suprême du Canada, ce qui étonne un peu puisque c'est son parti qui a déjà transféré la responsabilité de gouverner le


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Canada d'un Parlement élu à une Cour suprême nommée. Cette question fera toutefois l'objet d'un autre débat.

Aujourd'hui, acceptons simplement la réalité qui veut que, dans une grande mesure, ce soit ce tribunal qui décide. En 1993, dans la cause Mossop, on a refusé un congé de deuil à M. Mossop au décès du père de son conjoint homosexuel, parce que la définition de conjoint de fait ne s'appliquait pas. C'était très bien. Or, le juge en chef a déclaré que la situation aurait été complètement différente, si le Parlement avait inclus l'orientation sexuelle parmi les motifs prévus dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

(1310)

Le ministre est tellement sur la défensive, sur la question des répercussions à long terme de ce projet de loi, qu'hier, il a fait circuler un long document dans lequel il tente, au moyen de généralités et de demi-vérités, de discréditer la recherche minutieuse effectuée par le député de Scarborough-Ouest et par le Service de recherche de la Bibliothèque du Parlement. Je trouve que le ministre proteste vraiment trop fort.

Ce n'est guère surprenant quand on pense qu'en mars 1994, il a déclaré catégoriquement qu'en toute logique, la prochaine étape consisterait à modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne pour étendre les droits aux prestations de conjoint aux couples formés de personnes de même sexe. Si ce projet de loi n'est vraiment qu'une mesure formelle, pourquoi recourir à la ruse et à la tromperie?

Le ministre insiste sur le fait que, même si le mariage est de compétence fédérale, la célébration et l'enregistrement des mariages relèvent des provinces. Il sait fort bien que la loi est la somme de toutes les lois et de tous les précédents. Il est absurde de laisser entendre que cette mesure législative fédérale n'aura aucun effet sur les politiques provinciales. Dire que cela ne précipitera pas l'avalanche des décisions des offices de réglementation et des tribunaux inférieurs en faveur des prestations aux conjoints de même sexe, c'est forcer les limites du bon sens.

Certains de nos vis-à-vis à l'esprit moderne et dans le vent pourraient bien demander: quelle serait la différence, si quelques centaines d'homosexuels avaient droit à l'assurance pour soins dentaires à titre de conjoints? Personnellement, j'y verrais une grande différence, parce que mes électeurs y verraient une grande différence.

Le projet de loi C-33 a été déposé il y a seulement neuf jours, mais il a déjà provoqué une flambée de colère. La stratégie du ministre, qui consistait à faire adopter le projet de loi à la Chambre avant qu'une véritable opposition publique ne se manifeste, est déjà un échec.

Deuxièmement, le versement d'avantages sociaux à des conjoints du même sexe donnera plus de poids à la demande de reconnaissance par l'État du mariage entre personnes de même sexe. Ces libéraux extrêmement raffinés demanderont alors quelle différence cela peut faire si les unions homosexuelles sont considérées comme des mariages. À ceux qui prétendent tout savoir, qu'importe la sagesse populaire que les siècles nous ont léguée? Que leur importe que l'élément constitutif de presque toutes les civilisations connues ait été la famille traditionnelle?

À quelques variantes près, les définitions de la famille, dans ces civilisations, auraient correspondu à celle du Parti réformiste: des personnes unies par le sang, le mariage ou l'adoption. Le mariage, qui englobe les relations de fait, est défini comme l'union, reconnue par l'État, d'un homme et d'une femme.

C'est la définition que nous préconisons en ce qui concerne le versement d'avantages au conjoint aux termes de nombreux programmes financés ou réglementés par le pouvoir fédéral. Si l'État n'a rien à faire dans la chambre des citoyens, le corollaire est que les homosexuels n'ont pas à aller puiser dans l'argent des contribuables.

Comment établir une démarcation rationnelle en ce qui concerne les avantages sociaux? Que doit-on faire dans le cas assez courant d'hétérosexuels de même sexe qui vivent ensemble pendant de longues périodes parce que cela est plus commode ou leur permet de réaliser des économies? Ont-ils droit à moins de considération que des homosexuels qui sont dans la même situation? Le gouvernement devra-t-il avoir une équipe d'enquêteurs qui iront dans les chambres pour s'assurer que les personnes en cause se livrent bien aux pratiques nécessaires?

L'institution du mariage et de la famille s'est développée au cours des âges, et elle a bien servi la civilisation. Elle a bien servi l'objectif essentiel de la procréation et de l'éducation des enfants. Une famille forte est la cellule de base de la société. Quand elle est affaiblie par l'hédonisme, la société en souffre dans son ensemble. Quiconque sait tirer des leçons de l'histoire devrait étudier celle de l'ancienne Athènes et de l'ancienne Rome.

(1315)

Il est impossible d'accorder des droits spéciaux à un groupe sans diminuer les droits des autres. En l'occurrence, ce sont les enfants qui seront éventuellement les perdants. Le ministre soutient que le projet de loi ne met pas les enfants en danger en faisant valoir que, bien qu'elle constitue en théorie une orientation sexuelle, la pédophilie est maintenant un acte criminel. Je rappelle cependant au ministre qu'il y a moins de 30 ans, les actes homosexuels étaient illégaux: voyez où nous en sommes maintenant.

En supposant cependant qu'il n'y ait aucun danger de détournement de la loi, il devrait être évident que le projet de loi offrira des possibilités aux pédophiles potentiels quel que soit leur sexe.

Est-ce que les députés d'en face voudraient vraiment mettre leurs enfants en danger en forçant les communautés à accepter par exemple des homosexuels comme chefs scouts ou des homosexuels de quelque sexe que ce soit comme conseillers d'orientation scolaire? Combien de désastres du genre de celui de Mount Cashel faut-il pour faire comprendre aux gens que les instincts de défense des générations antérieures de parents étaient fondées sur des craintes raisonnables?


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Les libéraux aiment parler à n'en plus finir de leur vif souci pour les enfants, mais ils n'hésitent pas à les exposer à un traumatisme potentiel pour faire triompher leurs fantasmes idéologiques.

Qu'on ne s'y trompe pas, je ne me préoccupe pas beaucoup de ce que font des homosexuels adultes en privé, mais je me préoccupe beaucoup des enfants. Je suis un parent. . .

Une voix: Du Ringma tout craché!

M. Morrison: Si la députée de Halifax pense que le projet de loi auquel nous nous opposons est si excellent, je lui dirai que je ne fais pas de discrimination sexuelle à cet égard. Je ne voudrais pas non plus qu'un hétérosexuel s'occupe d'une troupe de guides. Voilà le genre de choses qu'on voudrait encourager dans le monde politiquement correct des gens d'en face: pédophiles du monde entier, unissez-vous.

Ma position est claire pour tout le monde. Ce projet de loi est une parodie. Il est mauvais. Nous lui ferons une lutte de tous les instants. Nous parlons au nom de nos électeurs qui s'y opposent de toutes leurs forces.

M. Wappel: J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Je suis ici depuis 10 heures ce matin et la députée de Central Nova est ici depuis environ 10 h 10 et tente de signaler à la présidence qu'elle veut prendre la parole. Elle n'a pas quitté son siège depuis le début du débat ce matin; en fait, elle l'occupe certainement depuis plus longtemps que la députée de Halifax. Je me demandais si vous auriez l'obligeance de lui permettre d'intervenir dans le débat.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Reprenons le débat. La députée de Halifax a la parole.

Mme Mary Clancy (Halifax, Lib.): Madame la Présidente, je suis ravie de participer au débat d'aujourd'hui. Je suis particulièrement contente que mon collègue, le député de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia ait parlé d'histoire, car certaines de mes observations portent sur l'histoire. Je veux surtout souligner les affirmations que le député a faites au sujet de certains gestes qui étaient considérés comme des actes criminels par le passé, mais qui ne le sont plus.

Bien d'autres choses étaient par le passé inscrites dans nos lois et ont aujourd'hui été retranchées. Par exemple, les femmes n'étaient pas considérées comme des personnes. Ce n'est plus le cas, du moins dans la loi, bien que dans la pratique cela se voit parfois encore. Avant 1870, partout dans le Commonwealth britannique, les femmes mariées ne pouvaient être propriétaires de biens immobiliers. Tous les biens qu'elles possédaient au moment de leur mariage devenaient la propriété de leur mari. Nous avons changé cela. Je pourrais vous donner des milliers d'exemples de ce genre.

Cependant, un meurtre est un meurtre depuis l'époque où Caïn a tué Abel et demeure encore un meurtre de nos jours. La pédophilie n'est pas une orientation sexuelle. C'est un crime. Elle continuera d'être un crime tant que de bonnes gens siégeront à la Chambre des communes. Je crois que de bonnes gens siégeront à la Chambre des communes pendant encore très longtemps.

(1320)

Je suis passionnément en faveur de la séparation de l'Église et de l'État. Je crois fermement dans la séparation des questions morales et juridiques. Je suis intimement persuadée que les modifications à la Loi sur les droits de la personne constituent des questions juridiques, et qu'elles s'imposent depuis longtemps.

En 1604, l'Angleterre et l'Écosse ont formé le Royaume-Uni de Grande-Bretagne avec comme monarque Jacques 1er d'Angleterre, aussi connu sous le nom de Jacques VI d'Écosse. C'est avec lui qu'a pris fin l'ère élisabéthaine. Sous son règne, Shakespeare a écrit ses pièces de théâtre, les premiers poètes métaphysiques sont apparus, de grands poètes et de grands hommes d'Église comme John Donne et George Herbert, pour n'en nommer que deux.

Nous avons lu et entendu les merveilleux psaumes et poèmes que sir Walter Raleigh et sir Philip Sydney ont écrits. Il n'y avait pas beaucoup de femmes écrivains en ce temps-là, car les femmes étaient alors considérées comme du bétail, mais cela a changé.

Le joyau de la couronne du règne du Roi Jacques fut peut-être le justement célèbre et magnifique ouvrage connu sous le nom de Bible autorisée.

La Bible autorisée est considérée non seulement comme la véritable révélation divine par les chrétiens, mais encore comme un chef-d'oeuvre de la littérature mondiale. J'ai étudié cet ouvrage dans le cadre d'un cours sur les chefs-d'oeuvre de la littérature occidentale qu'offrait la Mount Saint Vincent University, il y a quelque 25 ans.

La Bible autorisée est lue avec ravissement et plaisir par les gens de toutes les confessions, car elle fait honneur à la langue anglaise. Je me demande si tous les députés savent que, selon la plupart des historiens, Jacques Ier, Jacques Stuart d'Angleterre, Jacques VI d'Écosse, le fils de Marie reine d'Écosse et de Lord Darnley était un homosexuel.

Richard Ier était un autre personnage important de l'histoire britannique. Reportons-nous à des temps immémoriaux, à l'époque où régnait Richard Ier. C'était à la fin du XIIe siècle, l'âge des ténèbres. Il y avait alors un grand roi qui a quitté l'Angleterre pour aller en terre sainte libérer les lieux saints des Sarrasins. Qui était cet homme? Il s'appelait Richard Coeur de Lion. Devinez quoi. Selon la plupart des spécialistes de cette période, il était lui aussi un homosexuel.

Certains disent que Jules César était bisexuel.

M. Wappel: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Comme vous le savez, il ne s'agit pas du débat à l'étape de la troisième lecture. Le débat porte expressément sur les amendements qui sont réunis dans le groupe no 1 et qui concernent le projet de loi C-33. Aucun ne traite des croisades ou d'histoires du genre. Je vous demande de rappeler la députée à l'ordre et de lui enjoindre de parler des motions réunies dans le groupe no 1.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Reprise du débat. La parole est à la députée de Halifax.

Mme Clancy: Madame la Présidente, je regrette que le député de Scarborough-Ouest se sente si menacé par le fait qu'il y a un lien


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entre l'Histoire et le débat d'aujourd'hui. Il peut, à sa guise, me chahuter en privé ou en public s'il ose le faire.

Richard Coeur de Lion était aussi un homosexuel. Quant à Jules César, la plupart des historiens spécialistes de cette époque croient qu'il était bisexuel. Il y a des centaines et des milliers d'autres exemples.

(1325)

J'ai écouté le député de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia parler des enfants, des chefs scouts, de la pédophilie et de toutes ces questions. Ce qui m'effraie plus que tout à la Chambre, c'est le fanatisme, l'intolérance et la peur de l'inconnu.

Ce qui m'effraie, c'est une réaction comme celle qu'a eue la population de Salem, une sorte de chasse aux sorcières à l'endroit de ceux qui ont un mode de vie différent, une orientation sexuelle différente, une orientation pas criminelle, mais différente.

Lorsque, plus tard cette semaine, la Chambre adoptera la modification à la Loi sur les droits de la personne proposée par le ministre de la Justice et qu'elle rejettera le groupe d'amendements dont nous discutons actuellement, je serai fière des députés des deux côtés de la Chambre qui ont compris que le fait de ne pas souffrir de discrimination, de ne pas avoir peur, de pouvoir vivre à part entière dans la société, c'est quelque chose que tous les Canadiens méritent. C'est quelque chose que tous les Canadiens devraient attendre de leur gouvernement.

De nombreux Canadiens ne peuvent se prévaloir de leurs droits reconnus dans la Charte des droits et libertés en raison de considérations financières. Cependant, les citoyens canadiens peuvent se prévaloir de leurs droits reconnus dans les lois fédérale et provinciales sur les droits de la personne et ils s'en prévaudront, comme il se doit.

Personnellement, je suis fière de participer aux travaux de la Chambre cette semaine pour appuyer la modification proposée par le ministre de la Justice et pour voter contre des amendements qui sèment la peur, qui préconisent l'intolérance et qui sont anticanadiens.

M. Strahl: Madame la Présidente, si j'ai le consentement unanime de la Chambre, je céderai le temps qui m'est accordé au député de Scarborough-Ouest pour qu'il puisse présenter son point de vue sur la question. Je demande le consentement unanime de la Chambre.

M. Morrison: Comment épelez-vous Halifax? B-I-G-O-T.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): D'habitude, nous donnons la parole à un député du gouvernement, puis à un député de l'opposition officielle, et ainsi de suite. La demande du député est-elle acceptée à l'unanimité?

Mme Catterall: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je crois que vous constaterez que le député a déjà eu la parole dans le débat et que, par conséquent, sa demande est irrecevable.

Mme Clancy: Madame la Présidente, je soulève la question de privilège. Comme je prenais mon fauteuil, le député de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia a lancé assez fort pour que moi et d'autres députés l'entendions: «Comment épelez-vous Halifax? B-I-G-O-T.»

C'est inacceptable et antiparlementaire. Je vous demande d'examiner la question et de rendre une décision.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Je lirai la transcription pour vérifier l'objet de votre plainte.

(1330)

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir parler des propositions d'amendement, mais je dois dire que nous assistons aujourd'hui à un spectacle pitoyable. Les libéraux n'ont pas à être fiers de refuser de tenir un débat sur des sujets que beaucoup de Canadiens jugent importants. Que nous parvenions ou pas à nous entendre sur ces sujets est une chose, mais nous pourrions au moins avoir un débat.

Que se passe-t-il donc à la Chambre? Que veut-on dire? Veut-on dire que l'on ne peut pas parler de ces questions? Que se passera-t-il si nous en parlons? Les règles démocratiques seront-elles appliquées? Aurions-nous une dose excessive de démocratie? Laisserait-on les députés des deux côtés de la Chambre parler en toute conscience du sujet? De quoi les libéraux ont-ils donc peur?

La situation me rappelle un peu. . .

Mme Catterall: Madame la Présidente, je soulève la question de privilège. Les propos que vient de tenir le député portent sur les intentions des députés.

Peut-être que ce n'est pas une atteinte au privilège. J'invoque plutôt le Règlement. Le fait de prêter des intentions aux députés est contraire aux procédures normales et au Règlement de la Chambre.

Madame la Présidente, je vous demanderais de vous pencher sur la question, d'autant plus qu'il y a eu une allusion injustifiée aux intentions des députés ministériels, qui se sont prononcés pour et contre ce projet de loi. Le Parti réformiste n'a pas permis aux députés de son parti de le faire.

Des voix: Oh, oh!

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le whip adjoint a soulevé un point. J'espère que tous les députés en tiendront compte dans leurs observations et leurs déclarations sur les motions dont nous sommes maintenant saisis.

M. Strahl: Madame la Présidente, je vais en tenir compte, mais je ne changerai guère d'avis quant à ce qui se passe, car ce n'est pas correct.

Tout ce que nous demandons, c'est de pouvoir débattre la question dans sa totalité. Nous voulons que tous les députés expriment leur pensée sur ces importantes questions. Que se passe-t-il quand le débat est étouffé chez les libéraux, ou de quelque côté que ce soit?

Ce qui se passe, c'est que des contradictions restent sans explication. De bons points sont soulevés sans que personne ne puissent répondre. Les Canadiens doivent bien penser que quelque chose ne va pas, qu'on tente de les tromper, de leur cacher quelque chose derrière des portes closes, que quelque chose se trame en coulisse


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puisque les libéraux ne veulent pas qu'il y ait de véritables discussions.

Écoutez la contradiction suivante, si vous le voulez bien. Quand le ministre de la Justice a présenté ce projet de loi, il a dit: «Ce projet de loi n'accorde pas d'avantages aux couples de même sexe.» C'est de cette question dont nous sommes saisis dans cette modification.

Le 12 mars 1994, dans une entrevue à Xtra West, le magazine gai de Vancouver, il a dit: «Si le gouvernement déclare que la discrimination est interdite, il s'ensuit, en toute logique, que les couples de même sexe ont droit aux avantages.» Or, à la Chambre, mercredi, il a dit que ce projet de loi n'avait rien à voir avec les avantages accordés aux couples.

Il y a deux ans, dans une entrevue au magazine Xtra West, il a dit: «Absolument, cela débouchera sur les avantages au conjoint.» On pourrait discuter de la question de savoir si les homosexuels devraient avoir droit aux avantages au conjoint. Est-ce une question qu'il faut aborder, comme le parrainage au ministère de l'Immigration?

Est-ce que nous voulons vraiment aller dans ce sens-là? Le ministre a également dit qu'il n'était pas nécessaire que les modifications législatives soient d'une grande portée. Elles pourraient ne porter que sur les règlements, comme la politique d'immigration. Est-ce cette orientation que nous voulons adopter en tant que pays? Il faut débattre la question.

Nous ne pouvons en débattre parce que le gouvernement ne le permet pas. C'est ça le problème. Un jour, à un auditoire, le ministre a dit: «Ne vous inquiétez pas. Il n'y a rien là. Ce n'est qu'une simple modification pour veiller à ce que nous n'ayons pas recours à des pratiques d'embauche discriminatoires.» À cela, je dis bravo.

(1335)

N'est-ce que cela? Deux ans auparavant, il disait que cela conduirait à l'admissibilité aux prestations de conjoint. Nous avons donc le même ministre qui envoie deux messages différents à deux publics différents.

Ce genre de contradiction préoccupe beaucoup de Canadiens et les amènent à se demander ce que le gouvernement fait en réalité. Quel message envoie-t-il et à qui l'envoie-t-il? Est-ce toujours le même message? Je ne suis pas certain. C'est ce qui arrive lorsqu'on limite le débat. Nous pourrions vider la question. Nous pourrions avoir une bonne discussion, mais le gouvernement ne veut pas nous en donner la chance.

Cela me rappelle ce qui s'est passé avec la motion sur la société distincte. Lorsqu'on a présenté une motion sur la société distincte, certains ont demandé ce que cela voulait dire. Le gouvernement nous a défendu d'en parler et a décidé de limiter le débat. Les députés n'ont pas eu le droit de discuter de la question. J'ai dit que j'avais des inquiétudes. Lorsque j'ai des inquiétudes, j'aime bien pouvoir les exprimer, même si je ne réussirai peut-être pas à faire valoir mon point. On ne peut évidemment pas gagner à tous les coups, mais je devrais avoir le droit, comme tous les députés de la Chambre, de discuter des questions importantes.

Il est intéressant de noter que, encore une fois, il s'agit de deux petits mots. Ce fut d'abord la société distincte, et c'est maintenant l'orientation sexuelle. Qu'est-ce que cela veut dire? Nous n'avons pas le droit d'exprimer nos inquiétudes.

Ce qui est arrivé avec ce premier groupe d'amendements, c'est que les députés ont dit que, comme le gouvernement ne leur permettait pas d'exprimer leurs inquiétudes et d'en discuter, ils avaient décidé de présenter des amendements pour répondre aux préoccupations des gens qui ont téléphoné à leurs bureaux et qui ont soulevé ces questions. Quel autre moyen les députés ont-ils si on ne leur permet pas de s'exprimer?

Les députés ont proposé des amendements. Certains de ces amendements visent uniquement à permettre à des députés de prendre la parole. S'ils déclarent qu'ils sont préoccupés par la redéfinition de la famille, ils proposeront un amendement.

Le ministre affirme qu'il n'est pas question de redéfinir la famille. Les députés proposent donc un amendement qui précise que la définition actuelle de la famille, selon la politique canadienne, demeure inchangée. Cela mettrait un terme à la discussion. Si le ministre est sincère et que le projet de loi n'inclut pas les prestations de conjoint, qu'il ne redéfinit pas le mariage et qu'il ne change rien en ce qui concerne les autres questions visées par les amendements, il votera en leur faveur. Le ministre dira au député de Scarborough-Ouest qu'il a bien agi et qu'il a tiré les choses au clair pour la population canadienne. Il lui dira qu'il a démontré qu'il ne s'agit pas d'un accord de coulisse, qu'il n'y a pas eu d'accord de complaisance, qu'il n'y a pas de plan d'action secret et que le gouvernement a agi au grand jour. Dans ce cas, il suffit de le dire clairement.

S'il est sincère, il appuiera les amendements. Il dira qu'il ne veut faire peur à personne, ni ouvrir une boîte de Pandore ou nous entraîner dans l'inconnu. Le ministre voudra prouver sa sincérité en votant pour les amendements et montrer qu'il ne veut pas redéfinir le mariage ou utiliser le projet de loi pour accorder les prestations de conjoint aux homosexuels.

Les députés d'en face pourraient peut-être prêter attention pour un instant. Il est intéressant que la Société canadienne du SIDA ait suggéré des façons de reconnaître un homophobe. Les députés veulent-ils savoir comment? Certaines idées sont très bonnes. Les personnes qui rient des farces qui tournent les homosexuels en dérision peuvent être homophobes.

Le deuxième symptôme d'homophobie est le refus d'accorder les prestations de conjoint aux couples homosexuels. Le fait que l'an dernier lors de l'examen du projet de loi d'initiative parlementaire concernant les prestations de conjoint aux couples de même sexe, l'ensemble de ce cabinet ait voté contre à peu près presque tout, est intéressant. Pourquoi ont-ils voté contre? Parce que ce sont d'ardents homophobes. Est-ce vrai? Bien sûr que non.

Ce qui s'est passé alors et ce qui s'est passé cette semaine à la Chambre, c'est qu'on ne peut parler de cette question sans passer pour homophobe. La Société canadienne du SIDA ne dirait pas de la plupart des membres du Parti réformiste qu'ils sont homophobes. Ils ont voté contre les prestations aux conjoints de même sexe. Quelle honte! Quelle honte! Moi aussi, j'ai voté contre. Suis-je pour autant homophobe? Non. Pas plus que le cabinet, pas plus que les


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gens de ce côté-là et que les gens de ce côté-ci. Nous ne sommes pas homophobes. Quel rapport avec la question?

C'est étouffer le débat. Nous ne sommes pas autorisés à discuter de la question. Si nous avons le malheur de la soulever ou d'en parler en public, automatiquement nous sommes homophobes. Quelle foutaise. C'est empiéter sur la liberté d'expression que d'interdire aux gens de dire leur façon de penser à la Chambre des communes, qui plus est en dehors de la Chambre des communes, surtout pas en public, peut-être pas en privé. Peut-être la «brigade de la pensée» devrait-elle intervenir pour s'assurer que notre façon de penser est la bonne.

(1340)

Ces tactiques de bras de fer de la part des membres du Parti d'en face et aussi de la part de certaines sociétés qui disent: «seul notre programme est le bon.» sont répugnantes. Ils ne veulent simplement pas parler de ces questions et s'éduquer les uns les autres, ils ne veulent pas parler de ce qui constitue ou non une famille. Ce n'est pas la question. Nous ne pouvons pas en parler.

Il y a là-bas des gens qui sont là depuis 10 heures du matin, mais qui n'ont pas été autorisés à parler. Quelle honte. J'ai proposé de partager mon temps avec les députés d'en face. J'ai dit que je le ferai car ici, je peux parler. Je cèderai la totalité du temps qui m'était accordé au député d'Ontario. Mais il n'a pas le droit de parler. Des députés se sont précipités pour lui dire: «Non, je ne vous laisserai pas parler.»

Les Canadiens pensent-ils que cette Chambre est libre et démocratique? Les libéraux pensent-ils la même chose lorsqu'ils veulent modifier la définition du mot «conjoint», mais sans permettre le débat parce qu'il risquerait de conduire à un consensus? Pour eux, ce sera soit leur façon ou rien du tout. Le libre débat est interdit. Ils sont prêts à utiliser toutes les tactiques. Ils recourront au mépris, aux pressions, ils essaieront de nous envoyer en voyage autour du globe, ils feront tout pour nous tenir tranquilles, parce qu'ils ne veulent pas entendre des discussions.

Voilà ce qu'il y a d'inacceptable dans ce débat, plus que toute autre chose. Voici ce que je vais faire. . .

[Français]

M. Ménard: Madame la Présidente, à plusieurs reprises, des collègues réformistes ont indiqué que la Société canadienne du sida, que vous connaissez, avait fait un rapprochement entre l'opposition à une éventuelle reconnaissance des bénéfices pour les conjoints de même sexe et l'homophobie. On fait référence à la campagne qu'a fait la Société canadienne du sida l'an passé. Je voudrais demander à mon collègue de déposer le document qu'il a cité.

Je voudrais que vous interveniez pour qu'il dépose le document qu'il a cité.

Le vice-président: Est-ce qu'il y a consentement unanime pour que le député dépose le document en question?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

[Traduction]

M. Strahl: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Nous débattons déjà d'un rappel au Règlement. Nous passerons à un autre ensuite.

[Français]

Est-ce que nous avons le consentement de la Chambre pour que le document soit déposé?

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Nous avons le consentement unanime. Donc, nous demandons à l'honorable député de Fraser Valley-Est de déposer le document qu'il a cité.

[Traduction]

Je donne la parole au député de Fraser Valley-Est pour son rappel au Règlement.

M. Strahl: Madame la Présidente, je n'ai pas le document en main. Je me ferai un plaisir de le déposer le plus tôt possible.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Madame la Présidente, je devrai parler en termes très généraux du projet de loi C-33 et des nombreuses motions présentées en vue de l'amender.

Pour étudier et analyser efficacement les répercussions du projet de loi C-33, il faudrait que je répète bon nombre des faits et des concepts déjà présentés.

C'est fort d'une conviction profonde et d'une assurance intérieure que j'aborde aujourd'hui le projet de loi C-33, qui reflète l'engagement du gouvernement à modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne. La loi stipule déjà clairement qu'il est illégal de faire une distinction fondée sur la race, la couleur, la religion, l'âge, le sexe, l'état matrimonial et la déficience.

La modification qui ajoute deux mots de plus à la liste réaffirme essentiellement une résolution adoptée par le Parti libéral en 1994, lors de son congrès d'orientation bisannuel. Cette résolution représentait une politique déjà préconisée par le Parti libéral depuis au moins 1978.

En janvier 1994, durant une réponse au premier discours du Trône du gouvernement, le ministre de la Justice a indiqué que la Loi canadienne sur les droits de la personne serait modifiée. Il a déclaré plus précisément, et je cite: «L'engagement que le premier ministre a pris pendant la campagne électorale a été réitéré dans le discours du Trône. Nous allons proposer des modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne. Ces modifications auront entre autres pour effet d'ajouter l'orientation sexuelle à la liste des motifs de distinction illicite.»

(1345)

La Chambre tente de mettre ce principe en application depuis 1986. Depuis cette date, les gouvernement successifs ont exprimé leur intention d'apporter cette modification à la loi. Le projet de loi C-33 le fera enfin.


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La plupart des gens ne réalisent pas que ce projet de loi fera ce que huit provinces ou territoires canadiens ont déjà fait. Chacun d'eux possède déjà une loi séparée en matière de droits de la personne; c'est le cas du Québec, de l'Ontario, du Manitoba, de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick, de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan et du Yukon. En outre, ce projet de loi nous permet de tenir compte de la jurisprudence et du rapport d'un sous-comité parlementaire multipartite qui a reconnu, en 1985, que les homosexuels avaient droit à la protection de la loi au même titre que le reste de la population.

À quoi vise au juste cette modification? Essentiellement, elle fait en sorte qu'un individu qui est licencié ou qu'un organisme fédéral refuse de servir à cause de son orientation sexuelle peut déposer une plainte pour discrimination. Par organisme fédéral, j'entends toute entreprise, publique ou privée, qui est soumise à la législation et à la réglementation fédérale, telles que les banques, les compagnies de chemins de fer, les compagnies aériennes, les compagnies de télécommunication et tous les employés fédéraux.

C'est clairement une question de justice et d'équité pour environ 10 p. 100 de la main-d'oeuvre canadienne. Et les 90 p. 100 qui restent? Je le répète, dans ce pays, la vaste majorité de la main-d'oeuvre restante est couverte par la législation territoriale ou provinciale.

Le Parti réformiste veut faire croire aux Canadiens que ce projet de loi menace la place qu'occupe la famille dans la société. C'est absolument et complètement faux. En fait, ce gouvernement a toujours protégé, maintenu et présenté des mesures législatives confirmant que la famille traditionnelle était la pierre angulaire de la société, et il continuera à le faire. Ce sont les liens d'affection qui unissent les membres d'une cellule familiale qui garantissent la cohésion et la bonne santé de cette dernière.

Dans notre famille, ma tendre épouse et moi-même avons enseigné à nos enfants et à nos petits-enfants que nos relations avec autrui, qu'il s'agisse d'un groupe ou d'un individu, devaient être empreintes des valeurs chrétiennes qui nous sont chères. Nous ne pouvons les réserver à une poignée d'heureux élus. Comment peut-on être un bon chrétien si on se limite à quelques rares élus, rejetant tous les autres parce qu'ils sont différents?

Cette modification n'aura absolument aucune incidence sur la définition de ce qu'est un mariage, une famille ou un conjoint. En fait, les mesures législatives similaires au niveau provincial n'ont jamais eu de conséquences en ce qui concerne la question des prestations au conjoint de même sexe. Ce sont des faits, que le Parti réformiste les aime ou non. Le mariage est une question provinciale, pas une question fédérale. L'adoption est une question provinciale, pas fédérale. Et il n'est pas question que cela change.

C'était une bien triste occasion, la semaine dernière, lorsque le député de Nanaïmo-Cowichan a fait ses déclarations discriminatoires à l'égard des gais et des minorités visibles. Il est vraiment regrettable que des députés du Parlement canadien, à notre époque, souscrivent encore à des idées aussi méprisables. Cependant, il n'est pas seul. Je voudrais vous faire part d'expériences récentes que j'ai faites dans ma circonscription de Thunder Bay-Atikokan.

Au cours des deux dernières semaines, le personnel de mon bureau et moi-même, lorsque j'étais là, nous avons reçu environ 40 appels téléphoniques. La plupart dans les deux derniers jours, après que ces personnes aient assisté à un office religieux. Chaque fois que j'ai pu prendre un appel, j'ai demandé à la personne: «Pourquoi me demandez-vous de voter contre cette modification?» Généralement, le correspondant me disait: «C'est que cela va permettre les mariages entre personnes du même sexe.» Il fallait alors que je leur explique que ce n'était pas le cas. Ou alors il me disait: «Cela va permettre aux couples homosexuels d'adopter des enfants.» Là encore, il fallait que je leur explique pourquoi il n'en était rien.

(1350)

Les appels se classaient dans trois catégories. Un grand pourcentage de ces personnes ont accepté ma position, après que je leur ai expliqué l'objectif du projet de loi C-33. Ils ont accepté mes explications. Ils étaient heureux et n'étaient plus inquiets. Il y avait un groupe plus petit qui ne voulait rien entendre. Ces personnes ne voulaient pas discuter avec moi et voulaient simplement que je leur envoie de la documentation. Ce que nous avons fait.

Enfin, il y avait un tout petit groupe, quatre individus au total, pas plus, dont les propos m'ont réellement fait peur. Ils ont proféré des menaces et indiqué ce qu'il convenait de faire, selon eux, à des gens si différents. Il fallait les amener à l'extérieur de la ville et les lapider. Ils ont également parlé des sangsues de notre société, ceux qui ponctionnent les finances de l'état, qu'il fallait traiter de la même façon.

C'est à ce moment-là que j'ai su que je n'avais pas le choix. J'ai su que je devais suivre la seule voie possible, l'adoption du projet de loi C-33. Je devais m'assurer que-tant que nous aurions dans notre société des néo-nazis qui prônent ce qu'ils me disaient-nous fassions tout notre possible, en tant que députés, pour remplir notre mandat de protéger tous les citoyens de ce pays en dépit des différences.

Les Canadiens n'approuvent pas la discrimination basée sur la préférence sexuelle. Un sondage effectué en 1994 par Angus Reid le montrait bien, puisque 81 p. 100 des personnes interrogées n'approuvaient pas la discrimination dont avaient souffert leurs collègues gais ou lesbiennes dans le milieu de travail.

En conclusion, je suis fier que notre gouvernement ait fait plus pour l'égalité des droits de tous les citoyens au cours de ses deux premières années de fonction que le gouvernement précédent en presque une décennie.

Le projet de loi C-33 apporte la justice aux Canadiens. Je félicite le ministre et le gouvernement de leur volonté. Je demande aux Canadiens de toutes les origines ethniques et de toutes les confessions religieuses de célébrer leurs différences. . .

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Reprise du débat. Le député de Kootenay-Est a la parole.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Madame la Présidente, en guise de préambule à mon intervention dans le débat, je voudrais lire un article que je viens de publier dans les quotidiens de chez nous.

2426

Le gouvernement fédéral a déposé une nouvelle mesure législative, le projet de loi C-33, qui insérerait l'expression «orientation sexuelle» dans la Charte canadienne des droits et libertés. Les députés libéraux soutiennent que cette insertion spéciale dans la Charte assurerait la protection des homosexuels.
À mon avis, notre loi actuelle sur les droits de la personne garantit l'égalité des droits, des responsabilités et de la protection des Canadiens. C'est en effet un principe fondamental du droit canadien. Le paragraphe 15(1) de la Charte vise tous les Canadiens. Ainsi, la loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination. . .
Si tel est le cas, vous, comme moi, devez vous demander pourquoi nous avons besoin de déclarer qu'un groupe particulier doit bénéficier d'une protection spéciale. Nous sommes tous des êtres humains qui ont le droit d'être traités d'une manière égale et équitable.
Le libellé et l'objet précis du projet de loi soulèvent d'autres préoccupations. La première, c'est que l'orientation sexuelle n'est définie nulle part dans le projet de loi C-33, ce qui laisse place à une interprétation. La deuxième préoccupation qu'on m'a signalée consiste à savoir comment l'insertion de l'expression «orientation sexuelle» dans la loi sur les droits de la personne aura un effet sur le droit des homosexuels de demander le statut de personnes mariées ou engagées dans une relation apparentée au mariage. Enfin, il faudrait protéger les droits à la liberté de conscience des Canadiens qui s'opposent peut-être moralement à une conduite homosexuelle.
En me fondant sur ce que j'ai souligné ici et sur ce que j'estime être l'opinion de la majorité de mes électeurs, je vais voter contre le projet de loi C-33. Je voterai non en espérant raffermir la conviction des Canadiens qu'ils sont égaux et qu'aucun statut particulier ne devrait être accordé à des personnes ou des groupes en particulier.
(1355)

À propos des motions dont la Chambre est saisie, je souscris à la motion no 11 qui est proposée par l'un des nôtres. Elle précise que la mention de l'orientation sexuelle ne va pas modifier le sens des termes «mariage», «famille» et «conjoint» en vertu de quelque loi fédérale que ce soit.

J'attire l'attention de mon collègue de Thunder Bay et de tous les autres députés libéraux sur le fait que le gouvernement a décidé d'inclure le terme «famille» dans le préambule du projet de loi. Malgré que le préambule n'ait pas force de loi puisqu'il s'agit simplement d'un préambule, le fait que le terme «famille» qui y figure ne soit pas défini pose le même problème que la mention de l'orientation sexuelle, elle aussi non définie.

Je vais donc voter en faveur de la motion no 11 parce que le terme «famille» n'est pas défini. En outre, il n'y aura pas de redéfinition ou de définition des termes «mariage» et «conjoint». Cette absence de définition et le fait qu'on s'en remet ainsi à la jurisprudence singifient une abdication de ses responsabilités de la part de la Chambre des communes. Nous devrions avoir le courage de dire ce que nous pensons et d'agir conformément à nos paroles.

Je souscris également à la motion no 10 qui est présentée par un des nôtres. Cette motion reconnaît la liberté des institutions religieuses, pourvu que leurs pratiques soient compatibles avec la charte des droits et libertés. Il va sans dire que si nous étendons des droits à un groupe donné cela aura automatiquement pour effet d'empiéter sur les droits d'un autre groupe. Sinon, cette démarche ne rimerait à rien.

La Chambre doit, en principe, se faire le champion de la liberté d'association et de la liberté des cultes. La Chambre doit défendre le principe qui veut que l'Église ne doit pas intervenir dans les affaires de l'État. Si cette mesure législative vise, comme je le pense, à donner des directives à des groupes religieux reconnus et organisés et à déterminer ce qu'ils peuvent faire et ce qu'ils ne peuvent pas faire, j'ai raison de m'inquiéter car le danger est bien réel. On n'a qu'à songer à ce qui s'est déjà produit en Alberta relativement à cette question et au cas d'un collège d'Edmonton.

Ce projet de loi se veut un exercice non partisan. J'en veux pour preuve qu'il y a des députés libéraux qui, comme moi-même et mes collègues, craignent les conséquences qui pourraient résulter de ce projet de loi. Ce n'est pas un projet de loi politique au sens où on l'entend généralement et je ne vais donc pas faire des commentaires par trop partisans. Je tiens à souligner qu'il y a des députés au sein du Parti libéral qui songent aux conséquences de ce projet de loi, entre autres, sur la légitime séparation entre l'Église et l'État.

Le vice-président: Je suis désolé de devoir interrompre le député. Il pourra encore parler pendant environ cinq minutes après la période des questions.

* * *

[Français]

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL DU CANADA

Le vice-président: Chers collègues, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport du vérificateur général du Canada à la Chambre des communes, volume I, en date de mai 1996.

[Traduction]

Conformément à notre Règlement, le document est renvoyé en permanence au Comité permanent des comptes publics.

Nous allons maintenant passé aux déclarations de députés.

______________________________________________


2426

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE LOGEMENT

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour demander au gouvernement fédéral de garantir aux gens de ma circonscription vivant dans la Cambridge New Hope Housing Co-op qu'ils ne perdront pas leur maison lorsque le gouvernement provincial deviendra responsable du logement social.


2427

Je reçois des lettres de nombreux habitants de la New Hope Co-op, de jeunes enfants comme Scott Entwhistle, âgé de huit ans, qui s'inquiète de perdre sa maison et de devoir vivre dans la rue. Je reçois des lettres de parents qui luttent pour offrir à leur famille un foyer sûr et abordable où grandir et qui ont peur que le gouvernement de Mike Harris ne sabre dans le financement de leur coopérative.

(1400)

Je ne peux, seul, apaiser les craintes de ces gens. J'ai besoin de l'aide de notre ministre responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement et du premier ministre pour faire savoir à ces gens que le gouvernement ne les abandonne pas entre aux mains du gouvernement de Mike Harris.

* * *

[Français]

L'ASSEMBLÉE NATIONALE DU QUÉBEC

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, c'est la quatrième fois en moins de 30 jours qu'unanimement, le Parti libéral du Québec et le gouvernement du Québec prennent position contre les politiques d'Ottawa.

Il y a trois semaines, l'Assemblée nationale du Québec, après avoir unanimement rejeté la notion de «foyer principal» proposée par les libéraux fédéraux, a demandé à la ministre des Ressources naturelles de reconsidérer sa position visant à couper sa subvention au projet de recherche tokamak. Il y a deux semaines, l'Assemblée nationale du Québec a unanimement condamné la décision du ministre de l'Environnement de bannir l'usage de l'additif MMT dans l'essence.

La semaine dernière, l'Assemblée nationale du Québec a unanimement réitéré le droit fondamental des citoyens québécois de décider seuls de leur avenir politique et constitutionnel, quoi qu'en dise le ministre fédéral de la Justice.

Le gouvernement fédéral est de plus en plus coupé de la réalité québécoise.

* * *

[Traduction]

LES POMPIERS

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, l'Association internationale des pompiers se réunit à Ottawa cette semaine, ce qui nous donne l'occasion de réfléchir à l'énorme contribution de nos pompiers à la sécurité et au bien-être de nos collectivités. Ils servent la population avec distinction et héroïsme.

Malgré leur travail dangereux, le gouvernement fédéral ne fait pas tout en son pouvoir pour garantir leur sécurité au travail. Les pompiers exhortent le gouvernement à prendre des mesures élémentaires pour rendre leur métier extrêmement dangereux un peu plus sûr, mais en vain jusqu'à maintenant.

Ils demandent des choses qui non seulement leur profiteraient, mais serviraient également à protéger leur famille, leurs amis et leur collectivité. Il est question d'un protocole de déclaration obligatoire pour les aviser lorsqu'ils entrent en contact avec des maladies infectieuses dans le cadre de leur travail, ainsi que d'un processus d'identification des matières dangereuses pour qu'ils connaissent le type de produits dangereux qui peuvent être présents sur la scène d'un accident. Ce sont des choses qui pourraient profiter à tout le monde, aussi bien aux pompiers qu'à la population.

J'exhorte le Parlement à apporter son appui pour s'assurer que les gens qui sont chargés de nous sauver la vie sont bien protégés également.

* * *

LE CHILI

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'ai récemment fait un séjour au Chili, dans le cadre d'une délégation parrainée par le Congrès du Travail du Canada.

Le CTC et son homologue chilien ont demandé aux gouvernements du Canada et du Chili d'inscrire dans tout accord commercial canado-chilien une série de droits sur la main-d'oeuvre et l'environnement qui pourraient servir de base pour renforcer les dispositions de l'ALENA qui sont actuellement très faibles.

Au Chili, le droit du travail est en gros celui qu'ont mis en place les dictateurs de la droite. Si ce droit suffit à ce pays pour devenir partenaire de l'ALENA, il faut vraiment informer les Canadiens de l'absence de sens moral de tels accords commerciaux.

Je tiens également à souligner que les habitants de San Alfonso et ceux qui vivent dans un sanctuaire naturel des environs, appelé Cascada Animas, s'inquiètent du gazoduc que construit la société canadienne Nova Corp. Il était gênant d'entendre comment cette multinationale canadienne a agi et j'invite Nova Corp. à tenir compte des inquiétudes de la population et à modifier ses plans en conséquence.

En entendant parler du gazoduc et des activités des sociétés minières du Canada dans le nord du Chili, j'avais l'impression de devenir l'équivalent canadien du méchant Américain. Les sociétés canadiennes peuvent certainement faire mieux.

* * *

M. KARL BURKHART

M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais saluer la contribution bénévole extraordinaire qu'un de mes électeurs, M. Karl Burkhart, a faite au développement du tiers monde.

M. Burkhart, accompagné de son épouse Elizabeth, est allé au Sri Lanka, envoyé par le Service d'assistance canadien aux organismes à titre de conseiller bénévole auprès d'entreprises. Il a offert ses connaissances spécialisées en informatique, sa connaissance de l'entretien des machines et ses compétences en traduction, afin d'aider deux fabricants de textiles sri lankais.


2428

Les bénévoles du SACO sont des hommes et des femmes possédant une compétence professionnelle, qui sont habituellement à la retraite et qui sont prêts à partager leur expérience de nombreuses années avec des entreprises et des organisations qui en ont besoin dans des pays en voie de développement un pays ou des collectivités autochtones du Canada. Depuis 1967, quelque 7 000 bénévoles du SACO ont rempli plus de 30 000 affectations dans plus de 100 pays et dans toutes les provinces du Canada.

Au nom de tous les députés, je félicite Karl Burkhart. Il a fait bien valoir la devise du SACO, qui consiste à partager l'expérience acquise pendant toute une vie.

* * *

M. FRANK PICKARD

M. Benoît Serré (Timiskaming-French River, Lib.): Monsieur le Président, je félicite M. Frank Pickard, président-directeur général de Falconbridge Ltd., l'une des plus grandes sociétés minières canadiennes. M. Pickard doit recevoir de l'Université Laurentienne un doctorat honorifique en administration des affaires.

[Français]

Je félicite M. Frank Pickard, président-directeur général de Falconbridge Limited, l'une des plus grandes sociétés minières du Canada. M. Pickard doit recevoir de l'Université Laurentienne un doctorat honorifique en administration des affaires.

[Traduction]

La carrière impressionnante que M. Pickard a poursuivie dans l'industrie minière reflète bien les emplois et les possibilités de promotion que le secteur minier offre aux Canadiens d'un océan à l'autre. Né à Sudbury, M. Pickard a commencé sa carrière en 1957 comme ouvrier de la production pour devenir le grand patron de Falconbridge. Le doctorat honorifique sert également à souligner la participation de M. Pickard à des projets communautaires et le soutien qu'il a apporté à de nombreuses réalisations à Sudbury et dans le nord de l'Ontario.

(1405)

[Français]

Au nom de tous les honorables députés de cette Chambre, je félicite M. Pickard de l'hommage qui lui est rendu, et je lui souhaite, à lui et à Falconbridge, mes meilleurs voeux de succès.

* * *

[Traduction]

LES JEUX OLYMPIQUES SPÉCIAUX DU PRINTEMPS DE L'ONTARIO

M. Bob Kilger (Stormont-Dundas, Lib.): Monsieur le Président, je veux faire l'éloge d'efforts et de performances dignes d'une médaille d'or dont nous avons été témoins la fin de semaine dernière à Cornwall, qui accueillait les Jeux olympiques spéciaux du printemps de l'Ontario.

Quelle expérience enrichissante ce fut pour tous les participants! Environ 725 athlètes ont pris part aux épreuves réparties en cinq disciplines: jeu des cinq quilles et jeu des dix quilles; hockey en gymnase; natation et dynamophilie.

Le Service de police de Cornwall, qui en était l'hôte officiel, avec la collaboration de nombreux commanditaires et de centaines de bénévoles, a fait de ces jeux les meilleurs jamais vus.

Nous exprimons nos remerciements et nos félicitations aux agents Chico Ouellette et Bryan Snyder qui en avaient formé le projet il y a trois ans et qui ont réussi à le faire approuver, de même qu'au coordonnateur Jan Munro et à l'équipe de direction des jeux.

La devise des Jeux olympiques spéciaux «Donnez-moi l'occasion de gagner, mais si je n'y parviens pas, donnez-moi celle de concourir avec courage» a été mise en pratique toute la fin de semaine.

Félicitations aux courageux athlètes et aux vaillants citoyens. Ce sera au tour de Chatham de recevoir les Jeux en 1997.

* * *

[Français]

AIR CANADA

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, «sitting comfortabull?», nous demande Air Canada dans l'annonce placée dans un journal européen. Cette publicité, qui se sert du chef Sitting Bull pour créer une image stéréotypée et raciste des autochtones au Canada, est insultante, de l'avis des Premières nations et du Bloc québécois.

Pour Air Canada, il s'agit seulement d'un «standard Canadian image». Est-ce une image typiquement canadienne que de dévaloriser une culture? On espère que non.

Le Bloc québécois fait appel au gouvernement pour exercer toutes les pressions nécessaires auprès de la compagnie aérienne pour que cette publicité dévalorisante, non seulement pour les Premières nations, mais aussi pour l'image des Canadiens en général, soit retirée et que des excuses soient offertes.

De plus, la publicité devrait être conçue par une compagnie canadienne plutôt que par une maison de publicité britannique qui ne se serait pas encore débarrassée de son passé colonialiste.

* * *

[Traduction]

LES POMPIERS

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, si la profession de pompier est l'une des plus dangereuses au pays, c'est principalement à cause du manque de renseignements immédiats concernant les matières dangereuses.

Les pompiers ont l'habitude de prodiguer des soins médicaux d'urgence dans des conditions non hygiéniques. Leur tâche est entravée par le manque d'information disponible lorsqu'ils arrivent sur les lieux, surtout durant les quelques premières minutes, qui sont critiques.

La mise en oeuvre d'un système d'identification des matières dangereuses permettrait aux pompiers de disposer des renseignements dont ils ont besoin pour intervenir de façon efficace afin de protéger la vie et les biens des gens.

Je me joins à l'Association internationale des pompiers pour demander instamment au ministre des Transports d'aménager au Canada un centre de démonstration du système informatisé nord--


2429

américain d'intervention d'urgence, qui protégera nos pompiers et leurs familles, ainsi que nos familles et le reste de la société.

* * *

CHYPRE

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, le mardi 30 avril a eu lieu à Toronto une cérémonie reconnaissant la contribution des militaires canadiens à la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre.

La collectivité cypriote de Toronto a organisé cette activité pour rendre hommage aux Canadiens et aux Canadiennes qui ont servi de façon admirable, avec honneur et distinction, durant plus de 30 ans à Chypre. Les gardiens de la paix canadiens qui ont participé à la mission onusienne peuvent être fiers de leur bilan impeccable.

Pendant la cérémonie, le haut commissaire de Chypre au Canada, M. Iacovides, a remis au ministre de la Défense nationale une plaque honorant nos gardiens de la paix. Le gouvernement et les militaires canadiens ont été couverts d'éloges pour leur longue tradition de service exemplaire dans les missions de maintien de la paix partout dans le monde, et plus particulièrement à Chypre.

Je désire moi aussi remercier et louer les Forces canadiennes ainsi que le ministre de la Défense nationale. Félicitations pour votre excellent travail.

* * *

[Français]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, c'est avec dégoût que nous apprenions que le major-général John Arch MacInnis s'est payé un party pour fêter sa retraite à même les fonds des contribuables québécois et canadiens. Ce party de retraite aurait coûté entre 250 000 $ et 300 000 $. C'est tout simplement scandaleux!

Le pire, c'est que le chef de cabinet du major-général, le colonel Fred Noseworthy, a bel et bien été mis en garde du fait qu'une telle dépense choquerait les contribuables et démoraliserait les troupes. Le colonel Noseworthy a préféré envoyer paître tant les militaires que les contribuables.

(1410)

Je vous invite à lire la réponse qu'il a donnée dans le quotidien The Ottawa Sun d'aujourd'hui.

Ce comportement est tout à fait inacceptable. Nous exigeons que le ministre de la Défense, pour une fois, fasse preuve de leadership, qu'il ordonne un remboursement de ces dépenses et prenne les mesures nécessaires pour éviter que cela ne se reproduise plus.

[Traduction]

Le vice-président: Le député de Végréville a la parole.

LES ENTRAVES AU COMMERCE INTÉRIEUR

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Le premier ministre a déclaré, tant dans le livre rouge que dans les deux discours du Trône, qu'il accordait une priorité élevée à l'élimination des entraves au commerce intérieur. Il a également promis de créer des emplois. Or, les taux de chômage se maintiennent au-dessus de la barre de10 p. 100. Les Canadiens veulent des emplois. Si le premier ministre était plus souvent au pays et se concentrait davantage sur l'élimination des obstacles au commerce intérieur, peut-être son gouvernement serait-il alors en mesure de remplir sa promesse de créer des emplois et toujours plus d'emplois.

Le Fraser Institute estime que les obstacles au commerce coûtent jusqu'à 3 500 $ par année aux familles canadiennes. D'après les groupes de réflexion et les groupes d'entreprises, le coût des obstacles aux échanges interprovinciaux pour les entreprises canadiennes se chiffrerait entre 6 et 10 milliards de dollars par année. Parce que le gouvernement manque à sa promesse d'éliminer les obstacles au commerce intérieur, on se retrouve avec des dizaines de milliers, voire des centaines de milliers d'emplois perdus.

Pour l'amour des Canadiens qui cherchent désespérément du travail, le premier ministre et son gouvernement vont-ils enfin remplir cette promesse électorale?

* * *

LE CRÉDIT-BAIL AUTOMOBILE

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour attirer l'attention de la Chambre sur le fait que nombre de mes électeurs s'inquiètent de voir les banques avoir accès au marché du crédit-bail automobile.

La circonscription que je représente est mi-urbaine, mi-rurale. Cela donne parfois lieu à une répartition bipolaire des points de vue, mais, dans le cas qui nous occupe, tous mes électeurs, qu'ils habitent en milieu rural ou urbain, s'entendent pour dire ceci: «Ne permettez pas aux banques de pénétrer le marché du crédit-bail automobile.»

Des gens d'un peu partout dans ma circonscription et dans ma province m'ont écrit et téléphoné pour me dire qu'ils s'opposaient à de tels changements. Ils trouvent tous que, en permettant aux banques d'avoir accès à ce marché, on signe automatiquement l'arrêt de mort des concessionnaires automobiles, les petites entreprises qui offrent actuellement ce genre de services. Ces entreprises font travailler des gens de la région, contribuent à la vie communautaire et appuient les activités bénévoles qui font la force d'une collectivité.

Les grandes banques et les constructeurs d'automobiles n'ont pas besoin de gens comme moi pour défendre leurs intérêts; ils peuvent compter sur les services d'experts grassement payés pour cela. Les gens qui m'intéressent, ce sont les petits entrepreneurs de Saskatoon-Humboldt et de partout en Saskatchewan. Je prie donc le gouvernement, en leur nom, de ne pas modifier la Loi sur les banques pour que les banques puissent avoir accès au marché du crédit-bail automobile.


2430

[Français]

LE TOURISME

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, le gouvernement du Québec a fermé, à la surprise de tous, son Office du tourisme à Paris. Dorénavant, les touristes français désireux de s'informer en vue d'un futur voyage au Québec sont priés de s'adresser à leurs agents de voyage ou encore de consulter le serveur québécois du réseau Minitel.

Il est pour le moins désolant de voir que le gouvernement du Québec a oublié d'informer sa clientèle française qu'elle peut, comme par le passé, avoir recours aux services de l'Ambassade du Canada pour obtenir de l'information sur leur prochain séjour au Québec.

Alors que cette semaine, nous célébrons la Semaine nationale du tourisme, comment peut-on expliquer l'attitude pour le moins surprenante du gouvernement du Québec? Doit-on comprendre qu'il préfère priver son industrie touristique d'une importante ressource promotionnelle, plutôt que d'offrir, comme il se doit, aux touristes français la possibilité d'utiliser les services de l'ambassade canadienne?

* * *

[Traduction]

LE PARTI LIBÉRAL

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, dans le livre qui devrait les faire rougir de honte, les libéraux ont dit qu'ils allaient donner un rôle plus important aux députés, que ceux-ci participeraient à un plus grand nombre de votes libres et qu'ils auraient une plus grande influence au sein des comités. Les libéraux promettaient en outre d'être plus à l'écoute des citoyens et de redonner confiance à la population en ce qui a trait au processus parlementaire. Tous ces engagements se révèlent être une farce de mauvais goût.

Depuis une semaine, le gouvernement a déposé des projets de loi qu'il est bien décidé à faire adopter à toute vapeur, sans que le public ou les députés n'aient la chance d'en discuter de façon adéquate. Le gouvernement a recours à la force de la clôture dès que le débat s'amorce. Est-ce cela la démocratie pour les libéraux?

Lorsqu'ils formaient l'opposition, les libéraux protestaient à grands cris lorsque le gouvernement conservateur de M. Mulroney avait recours à cette méthode. Maintenant, ils sont obéissants comme des marionnettes et n'hésitent pas à voter en faveur d'une motion d'attribution de temps à chaque étape du processus législatif, même en comité.

Le public n'a pas la chance d'exprimer ses vues, et ses représentants sont muselés. C'est une honte. J'exhorte les députés libéraux à assumer les responsabilités qu'ils ont envers leurs électeurs, à mettre fin à cette farce et à faire ce que la conscience leur dicte.

* * *

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal): Monsieur le Président, le projet de loi C-33 dont nous discutons aujourd'hui vise à interdire la discrimination en matière d'emploi, de logement et de fourniture de biens et de services, d'un groupe vulnérable de notre société, pour des motifs d'orientation sexuelle. Cette mesure vise à assurer l'équité, à promouvoir l'égalité et à traiter tous les citoyens dans la dignité et le respect. Elle vise à assurer l'égalité, non pas à octroyer des droits spéciaux à qui que ce soit.

Nous voulons protéger les homosexuels qui risquent de perdre leur emploi et leur maison uniquement en raison de leur orientation sexuelle. Ces personnes sont actuellement les seuls Canadiens qui ne peuvent compter sur la protection offerte par la Loi canadienne sur les droits de la personne et que les réformistes n'hésiteraient pas à congédier.

(1415)

Le projet de loi C-33 accorderait enfin aux gais et lesbiennes du Canada le même statut et la même protection juridique contre la discrimination que ceux dont jouissent tous les autres Canadiens, rien de plus, mais rien de moins.

Je félicite la Coalition pour l'égalité de son témoignage devant le comité, cette semaine, de même que les 30 autres groupes de témoins. Je remercie aussi les 30 parents, paroissiens, lesbiennes et gais, membres de la coalition, qui sont venus à Ottawa aujourd'hui afin que justice soit faite.

* * *

[Français]

LE SECTEUR FORESTIER

M. George S. Rideout (Moncton, Lib.): Monsieur le Président, c'est la Semaine nationale de l'arbre et des forêts et j'aimerais souligner le travail effectué par l'Institut forestier du Canada.

[Traduction]

Ce groupe est la seule association nationale non gouvernementale au Canada qui soit vouée uniquement à la cause d'une saine gestion des forêts canadiennes.

L'Institut forestier du Canada compte parmi ses membres plus de 2 300 forestiers, éducateurs et scientifiques représentant divers intérêts forestiers de tous les coins du pays. Ses objectifs clés sont les suivants: améliorer tous les aspects de l'exploitation forestière au Canada, enrichir les connaissances des membres sur les forêts, mieux faire comprendre au public tous les aspects de l'exploitation forestière et cultiver l'esprit de corps parmi les membres.

L'institut a été l'élément catalyseur qui a permis de réunir tous les groupes qui s'intéressent à la forêt, depuis les partisans de la préservation jusqu'aux dirigeants de l'industrie forestière canadienne, afin de dégager une conception de l'avenir des forêts susceptible de satisfaire la diversité des exigences.

[Français]

Permettez-moi de féliciter l'Institut forestier du Canada pour le travail remarquable qu'il a accompli au cours des années.

> 2431


2431

QUESTIONS ORALES

[Français]

LES RÉFÉRENDUMS

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, tel que le permettent nos règles, je salue le retour du premier ministre. Je suis heureux de le voir parmi nous.

Hier, le premier ministre a lié la démarche fédérale dans le dossier Bertrand au fait que le gouvernement du Québec aille ou non se défendre devant les tribunaux, et il a déclaré: «Si le gouvernement du Québec n'y participe pas, ce sera plus facile pour nous de ne pas y participer.»

En utilisant cette forme de chantage pour amener le Québec à ne pas se défendre devant les tribunaux, est-ce que la nouvelle stratégie du premier ministre n'est pas de faire en sorte que, finalement, les tribunaux soient les seuls à trancher quant au droit des Québécois à décider eux-mêmes de leur avenir?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je dois tout d'abord dire que j'étais heureux d'être à Montréal hier, et j'ai rencontré le premier ministre du Québec.

Ce sujet est un problème qui relève du ministre de la Justice et procureur général du Canada qui est, en vertu de la loi, de la Constitution et des coutumes parlementaires, le défenseur de la Constitution canadienne.

Je voudrais citer ce qui est écrit en première page du quotidien Le Devoir de ce matin. M. Bouchard dit, à la page 1A, du Devoir de ce matin: «Ça paraît un peu difficile, pour ne pas dire impossible, pour un gouvernement de se désintéresser.» Je pense que le procureur général représente un gouvernement. M. Bouchard a dit qu'il était difficile pour un gouvernement de se désintéresser. Donc, le procureur général du Canada représente le gouvernement du Canada.

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, en liant la participation du Québec à celle d'Ottawa, en disant au gouvernement du Québec que s'il renonçait à aller défendre le droit des Québécois à décider eux-mêmes de leur avenir, alors ce sera facile pour nous de ne pas y aller, est-ce que le premier ministre ne se livre pas là à un odieux chantage et est-ce qu'il ne nous dévoile pas, ce faisant, sa nouvelle stratégie qui consisterait à laisser aux tribunaux le soin de décider seuls si le Québec peut ou non décider de son avenir?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est en fait la position prise par le gouvernement du Québec qui a inspiré notre intérêt dans cette cause. Nous n'avons aucun intérêt dans la position de M. Bertrand, ni dans les points soulevés par M. Bertrand.

Mais le gouvernement du Québec a dit clairement, il y a quelques semaines, dans cette cause, que ni la Constitution ni les cours du Canada n'ont rien à voir dans la déclaration de souveraineté du Québec.

(1420)

C'est une chose extraordinaire.

Alors, à titre de procureur général du Canada, je dois considérer si je peux aider la cour avec cette question, parce que la position du gouvernement du Québec est extraordinaire.

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, si l'attitude du gouvernement du Québec est extraordinaire, les réponses du ministre sont très ordinaires, elles.

Je voudrais savoir du premier ministre pourquoi il se montre tout à coup si inquiet de la légalité d'un référendum au Québec, alors qu'il a participé dans le passé à celui de 1980, à celui de 1995, sans jamais mettre en question la légalité, le droit des Québécois à décider eux-mêmes de leur avenir. Pourquoi tout à coup, maintenant, cela devient si important pour lui, sinon parce qu'il a le dos collé au mur et il le sait?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la question n'a rien à voir avec la légalité des référendums. Ce n'est pas cette question qui a attiré l'attention du gouvernement national et nous ne portons pas le moindre intérêt aux divers points soulevés par M. Bertrand. . .

[Français]

M. Bertrand a commencé son litige civil il y a plusieurs mois, au mois d'août de l'année dernière.

[Traduction]

Nous ne sommes pas partie à ce procès. Nous ne nous intéressons pas aux diverses positions prises par M. Bertrand. Nous nous intéressons plutôt à la position adoptée par le gouvernement du Québec ces dernières semaines.

Cela ne concerne pas la légalité des référendums. Il s'agit plutôt de savoir si la Constitution du Canada ou les tribunaux ont un rôle à jouer dans tout le processus que veut appliquer le gouvernement séparatiste du Québec pour accéder à la souveraineté et à l'indépendance.

Comme il s'agit d'une question fondamentale, le procureur général du Canada pourrait fort bien être en mesure d'aider les tribunaux. Nous envisageons donc d'intervenir sur ce point dans l'intérêt public.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, je pense que le gouvernement oublie que dans l'affaire Bertrand, le gouvernement du Québec est intimé, tandis que le gouvernement du Canada est seulement mis en cause. On devrait peut-être faire le partage de ces deux choses-là.

Incapable de livrer la marchandise, incapable de répondre clairement à nos questions, le premier ministre continue à improviser sa position constitutionnelle, et c'est frappant encore aujourd'hui.


2432

Le premier ministre admettra-t-il qu'en invoquant l'implication possible du fédéral dans la cause Bertrand, non seulement il se place en situation d'affrontement avec le gouvernement du Québec, mais également avec ses alliés fédéralistes du Québec, Daniel Johnson en tête, qui eux reconnaissent le droit des Québécois à décider eux-mêmes de leur avenir?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, le gouvernement du Canada a été mis en cause par M. Bertrand dans son litige civil. Alors, nous sommes impliqués en matière de procédure devant les cours.

[Traduction]

Le député parle d'improvisation. Les députés à la Chambre des communes et les habitants du Canada voient plutôt le gouvernement donner suite à un engagement qu'il a pris dans le discours du Trône prononcé en février dernier. Le gouvernement avait alors déclaré que, s'il devait y avoir un autre référendum, il fallait en connaître clairement les conséquences et tous les Canadiens devraient avoir leur mot à dire. Nous cherchons à remplir cet engagement, à y donner suite.

Si nous décidons d'intervenir dans cette cause, ce sera pour dénoncer une proposition qui n'a aucun fondement, ni en principe ni en droit, car il est faux de dire que la Constitution et les tribunaux n'ont aucun rôle à jouer dans le processus que certains veulent utiliser pour que le Québec accède à la souveraineté.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, justement, si le gouvernement du Canada est seulement mis en cause, qu'il laisse donc les Québécois décider entre eux de leur avenir et qu'il se retire, qu'il n'y aille pas à la Cour supérieure, c'est tout.

(1425)

Comment le premier ministre-puisque le premier ministre est là, j'en profite-comment le premier ministre peut-il concilier son attitude provocatrice à l'égard du Québec, alors qu'il a donné mandat à son ministre des Affaires intergouvernementales de parcourir le Canada pour y prêcher la bonne parole et la réconciliation nationale?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il y a une cause devant les tribunaux. Les participants devant les tribunaux feront valoir leur point de vue. Si le Parti québécois et le Bloc québécois sont si convaincus de leur point de vue juridique, ils ne devraient avoir aucune crainte à aller devant les tribunaux. L'argument, s'ils ont le bon argument, prévaudra. L'avocat qui représentera le fédéral, s'il y en a un, s'il n'a pas raison, va perdre. C'est ainsi devant les tribunaux. Quand je pratiquais le droit et que j'avais une bonne cause, je ne demandais pas à mes adversaires de se retirer. J'étais très heureux de débattre avec eux.

Cependant, ce n'est pas un problème politique, c'est un problème de droit à ce moment-ci. Ce n'est pas nous qui avons présenté la motion devant les tribunaux, c'est le gouvernement du Québec, déclarant qu'il n'y avait virtuellement plus de Constitution au Canada. Alors, nous allons défendre le point de vue légal, si le ministre de la Justice décide de le faire.

Quant à la réconciliation, nous avions un programme très bien défini dans le discours du Trône et nous comptons le mettre de l'avant devant les gouvernements provinciaux le mois prochain, alors qu'il y aura une conférence des premiers ministres ici même, à Ottawa. Le plan de réconciliation que nous avons mis de l'avant, très bien dirigé par le ministre des Affaires intergouvernementales, sera de l'avant et montrera que nous, nous sommes en faveur du fédéralisme renouvelé et non pour la séparation du Québec.

* * *

[Traduction]

LA FISCALITÉ

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui que le gouvernement ontarien doit annoncer la première étape dans la réalisation de sa promesse de réduire les impôts provinciaux. Toutefois, les contribuables ontariens connaissent l'appétit insatiable du gouvernement fédéral en matière fiscale, appétit qui a amené les libéraux à hausser les recettes fiscales fédérales de plus de 25 milliards de dollars depuis qu'ils ont pris le pouvoir.

Pour que la réduction des impôts ontariens soit optimale, il faut que les consommateurs soient persuadés que les dollars ainsi gagnés resteront dans leur poche et qu'aucun autre gouvernement ne mettra pas la main dessus.

Le premier ministre s'engagera-t-il aujourd'hui à ce que son gouvernement n'augmente pas les impôts fédéraux et n'annule pas l'effet stimulant de la réduction des impôts ontariens?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, avec nos trois derniers budgets, nous avons prouvé aux Canadiens que nous pouvions ramener le déficit de 6,2 à 3 p. 100 du PIB sans hausser les impôts. Dans bien des cas, les impôts ont même été réduits.

Nous nous réjouissons fort de voir que le gouvernement ontarien s'efforce de nous imiter.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, vous nous excuserez de ne pas croire le premier ministre lorsqu'il est question de déclarations au sujet de la fiscalité.

Le bilan du gouvernement en matière de réduction des impôts est catastrophique. La seule chose qui soit pire, c'est son bilan pour ce qui est des promesses tenues. Les Canadiens méritent de savoir que le gouvernement fédéral ne s'emparera pas de l'argent laissé dans leur poche par suite des réductions d'impôts provinciaux pour financer des choses comme l'harmonisation de la TPS qui coûte 1 milliard de dollars.

Le premier ministre est-il disposé à conclure une entente fédérale-provinciale visant à assurer que l'argent provenant de la réduction des impôts provinciaux reste dans les mains des contribuables canadiens?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la réponse est la même que les dix dernières fois où le chef du Parti réformiste a posé la question, à savoir que nous en avons discuté abondamment aux conférences fédérales-provinciales des ministres des finances. On s'entend en général pour dire


2433

qu'il serait contre-productif pour tout ordre de gouvernement d'en profiter pour hausser ses impôts, ne serait-ce que parce que cela aurait une incidence néfaste sur l'économie canadienne.

Je rappelle au député que non seulement le gouvernement n'a pas haussé l'impôt sur le revenu des particuliers dans ses trois derniers budgets, mais qu'il a vraiment affiché ses couleurs dans le dernier budget. Nous n'avons haussé ni les impôts des sociétés ni les taxes d'accise. Nous n'avons pas du tout haussé les impôts et nous n'avons pas moins réduit le déficit.

(1430)

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Juste une petite question, monsieur le Président. Si, comme le dit le ministre, il existe vraiment une entente entre le gouvernement fédéral et les provinces pour ne pas envahir le territoire fiscal de l'autre, le ministre déposera-t-il cette entente à la Chambre?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député a parfaitement compris ce que j'ai dit. Les ministres des finances ont discuté de la question et ils en sont venus à une entente générale.

Permettez-moi de poser une question au chef du Parti réformiste. Dans leur dernier budget, les réformistes proposaient de réduire les pensions de vieillesse et les soins de santé, mais pas les impôts.

Pourquoi le député propose-t-il ici que nous fassions ce qu'il n'était pas disposé à préconiser lui-même?

* * *

[Français]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, jeudi dernier, le ministre des Finances réaffirmait en cette Chambre qu'il parlait au nom du gouvernement lorsqu'il a admis avoir commis une erreur de bonne foi, disait-il, en n'abolissant pas la TPS.

La vice-première ministre a démissionné pour bris d'engagement et le ministre des Finances a réitéré ses excuses au nom du gouvernement. Seul le premier ministre refuse d'admettre que son gouvernement a berné les Canadiens en se faisant élire avec la promesse d'abolir une taxe dont il élargit maintenant l'application.

Puisque le premier ministre continue d'affirmer que son gouvernement a respecté son engagement face à la TPS, peut-il nous dire pourquoi son ministre des Finances a présenté, au nom du gouvernement, des excuses aux Canadiens?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député doit comprendre que lorsqu'un ministre fait un discours en Chambre, il parle au nom de son gouvernement. D'ailleurs, c'est ce que j'ai fait l'autre jour, lorsque la vice-première ministre, la députée d'Hamilton-Est, a fait sa conférence de presse. Elle a très bien expliqué la situation. D'ailleurs, j'aimerais dire à la Chambre que j'ai parlé à la députée d'Hamilton-Est ce matin; elle est en bonne forme et elle va gagner ses élections.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas à l'ex-vice-première ministre que le ministre des Finances devrait parler, c'est au premier ministre.

J'aimerais que le premier ministre, qui est là aujourd'hui, nous dise s'il est d'accord, lui, avec son ministre des Finances qui, lui, a admis avoir fait une erreur; c'est ce qu'il a dit. Le ministre des Finances a dit qu'il parlait au nom du gouvernement; la vice-première ministre parlait aussi au nom du gouvernement et elle a démissionné.

Est-ce que le premier ministre pourrait parler au nom du gouvernement et cesser d'avoir l'air d'un vieux politicien qui a toujours raison et qui est incapable d'admettre ses erreurs?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme le disait la vice-première ministre lorsqu'elle a démissionné, elle est allée plus loin que la promesse du livre rouge. La promesse du livre rouge, on la trouve à la page 20, où nous disons que nous voulons harmoniser la taxe, simplifier le système, avoir un système de taxe de vente au Canada qui ne nécessiterait pas, pour les entreprises, que des vérificateurs de deux gouvernements les visitent. C'était très clair à la page 20 et ça demeure très clair.

Ce que le ministre des Finances a dit et que j'ai répété ici dans cette Chambre, c'est que nous aurions voulu pouvoir mettre ce système en place plus rapidement, c'était notre désir. Mais comme nous impliquions les provinces, il était nécessaire d'obtenir leur consentement.

À ce jour, nous avons obtenu le consentement de quatre provinces. Cela ne s'applique pas à l'Alberta. Nous comptons que les autres provinces se joindront bientôt, mais nous sommes déçus que toutes les provinces n'aient pas accepté d'entrer immédiatement dans le programme, contrairement à ce que nous avions souhaité. Nous avions indiqué que nous espérions accomplir cet objectif au cours de cette année, et nous espérons que les provinces non impliquées s'impliqueront avant la fin de l'année.

* * *

[Traduction]

LE BUDGET FÉDÉRAL

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral actuel se sert des actes de Dieu comme excuse pour ne pas tenir ses promesses. L'acte de Dieu que craint Mike Harris, c'est les conséquences qu'on doit subir lorsqu'on ne tient pas ses promesses.

(1435)

Dans le budget qu'il a présenté aujourd'hui, le gouvernement de l'Ontario respecte deux grandes promesses électorales: une date ferme pour l'atteinte de l'équilibre budgétaire et une baisse des impôts.

Quand le ministre des Finances suivra-t-il l'exemple de huit ministres provinciaux en fixant une date ferme pour l'atteinte de l'équilibre budgétaire?


2434

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a dit très clairement qu'il continuerait de fixer des objectifs mobiles sur deux ans parce que c'est cette façon de procéder qui nous a permis d'avoir du succès sur le plan de la réduction du déficit, succès qui a été reconnu par les marchés aux quatre coins du monde.

Nous sommes le premier gouvernement canadien depuis très longtemps qui a non seulement atteint ses objectifs en matière de réduction du déficit, mais qui les a même dépassés, ce que nous continuerons de faire. C'est malheureux pour les réformistes parce qu'ils ont perdu leur programme.

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, c'est malheureux pour les contribuables canadiens parce que, lorsque le gouvernement parle de ramener le déficit à 5, 4 et 3 p. 100 du PIB, il ne mentionne pas les 40 milliards et les 50 milliards de dollars que le service de la dette coûte aux contribuables ontariens.

Le manque de détermination du ministre fédéral des Finances à l'égard de l'élimination du déficit inquiète les contribuables ontariens. Ils se demandent si la baisse des impôts provinciaux sera neutralisée par une razzia fiscale fédérale.

Les Canadiens jugent leurs ministres des Finances d'après leur capacité d'équilibrer le budget. Le ministre des Finances fédéral est bon dernier à ce chapitre. Quand commencera-t-il à donner l'exemple?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis certainement d'accord avec le député pour dire qu'il y a des fois où il convient de citer l'Ontario. Permettez-moi simplement de citer ce que le premier ministre de cette province a dit au sujet de la TPS.

En 1994, il a dit, au sujet de la TPS, que les manufacturiers et les entreprises de cette province économiseraient plus de 1 milliard de dollars s'ils pouvaient déduire les coûts qu'ils ne peuvent pas déduire actuellement de la taxe de vente provinciale. Il a également dit que c'était l'un des principaux désavantages qui nuisaient aux manufacturiers ontariens sur le plan de la concurrence. Il a ajouté que les entreprises ontariennes en avaient assez.

Voici quelque chose que j'ai répété la semaine dernière, mais le député l'a peut-être déjà oublié. Le premier ministre de l'Ontario a dit: «Cessez de faire des beaux discours, cessez de faire de la politique, cessez de porter des accusations et occupez-vous de l'harmonisation et de la simplification de la TPS.» C'est ce qu'il a dit, et il avait raison.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

La ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a admis hier en cette Chambre que l'opération qui s'est déroulée au Québec à la veille du référendum, en vue d'accélérer la délivrance des certificats de citoyenneté, avait un caractère particulier et aurait nécessité un effort sans précédent.

Or, l'ancien ministre de l'Immigration, interrogé par l'opposition, a toujours banalisé cette opération en la ramenant sur un pied d'égalité avec des opérations semblables effectuées à la veille des élections dans les autres provinces.

Comment le premier ministre peut-il expliquer que son ancien ministre de l'Immigration ait tenté de banaliser l'opération tenue au Québec juste avant le référendum, si ce n'est pour cacher au peuple québécois que le fédéral faisait tout ce qu'il pouvait pour tenter d'influencer le résultat du référendum?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été très claire hier et je vais le répéter. Mon prédécesseur, l'actuel ministre de l'Environnement, n'a pas nié, absolument pas, l'information à l'effet que nous faisions un effort particulier pour le Québec au moment du référendum pour délivrer les certificats de citoyenneté à des personnes qui avaient le droit de recevoir des certificats de citoyenneté, tout comme présentement, à l'heure où on se parle, nous faisons un effort particulier aussi pour la Colombie-Britannique, alors que des élections provinciales s'en viennent. Il y a un mouvement accéléré pour délivrer des certificats de citoyenneté là-bas aussi, en Colombie-Britannique.

Je pense que l'exercice du droit de vote est un droit fondamental chez nous et si des personnes ont le droit de l'exercer, on doit tout mettre en oeuvre pour qu'elles le fassent.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, vraiment, avec ce gouvernement-là, ça commence à être la limite. J'invite la ministre à aller lire exactement ce que son collègue a dit; il a dit le contraire de ce qu'elle dit.

Bien sûr qu'il a admis que c'était la même chose pour toutes les élections, mais ils ont fait un effort particulier pour le référendum. Et vérification faite, pour l'élection avant celle de l'Ontario, ils n'ont rien fait de spécial; pour la Colombie-Britannique, s'ils ont fait quelque chose, ils ont commencé hier, parce que la semaine passée, ils n'avaient rien fait.

(1440)

Et là, j'invite le collègue du Développement des ressources humaines à faire ce qu'il faut pour régler vite le problème de ceux qui ont des fonds à recevoir.

Comment le premier ministre peut-il accepter que dans ce dossier encore, son gouvernement bafouille, que ses deux ministres de l'Immigration se contredisent formellement, l'un avouant que l'opération était tout à fait normale et l'autre confirmant que le fédéral a agi de façon particulière?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a aucune contradiction entre les deux affirmations qui ont été faites. Et la preuve de cela, c'est lorsqu'on regardera, quand nous aurons les statistiques des certificats de citoyenneté qui auront été émis pour 1995 au Québec et que nous les comparerons par rapport à 1994. En 1994, environ 40 000


2435

certificats de citoyenneté ont été émis; en 1995, ce sera aux environs de 43 000. En Colombie-Britannique, il y en a eu environ 27 000 en 1994, et en 1995, il y aura au-delà de 8 000 certificats de plus qui auront été émis.

Je comprends que le potentiel d'indignation du Bloc québécois soit très élevé, mais quand même, regardons les faits.

* * *

[Traduction]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, j'ai entre les mains un aide-mémoire sur la TPS destiné à aider à camoufler le fait que le premier ministre n'a pas réussi à éliminer la TPS en raison de ce que l'on a appelé un «acte de Dieu».

À la page 2 de ce recueil d'hymnes à la sainte harmonisation, on lit: «La TPS n'est pas morte, enterrée et éliminée.» J'imagine que c'est là la vérité révélée.

Le ministre des Finances, Sheila Copps et le recueil d'hymnes à la sainte harmonisation du premier ministre disent tous que la promesse a été rompue. Le premier ministre admettra-t-il enfin que c'est lui, pas Dieu, qui a trompé les Canadiens lorsqu'il leur a dit qu'il éliminerait la TPS?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je répète que la politique du gouvernement était très claire et qu'on peut la lire à la page 20 du livre rouge. Ils ne veulent pas lire cette page, mais ils continuent d'accuser le gouvernement d'avoir manqué à sa promesse.

Qu'en est-il du programme national d'infrastructure dont il est question à la page 54, de l'annulation du programme d'acquisition d'hélicoptères, de l'atteinte de l'objectif de réduction du déficit à3 p. 100 du PIB, de la nomination d'un conseiller à l'éthique et de l'adoption d'une loi sur les armes à feu? Voulez-vous d'autres exemples?

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, Dieu merci, je suis dans mes souliers et pas dans les siens.

Il y a des renseignements que l'on ne retrouve pas dans le petit recueil d'hymnes du premier ministre. Nous savons tous à quel point il aime citer la page 20 de son livre rouge. Pourrait-il nous dire à quel page de son nouveau recueil d'hymnes à la sainte harmonisation il admet avoir forcé les Canadiens à payer un milliard de dollars pour conserver cette taxe que tout le monde hait? À quelle page?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, lorsque j'entends le député parler, je pense «grand Dieu, mais c'est Dieu».

Le député devrait commencer à comprendre que, lorsque l'on procède à des rajustements structurels profonds, le gouvernement fédéral a la responsabilité d'aider les régions à s'adapter aux rajustements.

C'est ce que nous avons fait en 1972, au moment de la réforme fiscale. C'est ce que nous avons fait dans l'ouest du Canada, lorsque nous avons aidé les céréaliculteurs. L'entraide entre les régions constitue une des principales assises du Canada.

C'est peut-être très difficile à comprendre pour les députés réformistes, mais ils pourraient au moins essayer de comprendre qu'ils devraient défendre l'idée d'un Canada uni, pas d'un Canada qui abandonne simplement. . .

Le vice-président: La parole est à la députée de Laval-Est.

* * *

(1445)

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

L'organisme Développement et Paix recueillait récemment une pétition de 163 500 noms déplorant les conditions de travail atroces qui prévalent chez certains sous-traitants étrangers des compagnies de vêtements des géants Nike et Levi's. Les principales victimes sont des femmes, des adolescentes et même des enfants.

Est-ce que le ministre peut nous dire ce que fait le Canada pour éviter que des produits fabriqués dans des conditions de travail déplorables entrent ici, comme ceux offerts par Nike et Levi's?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous nous préoccupons des questions de main-d'oeuvre. Cela a été un aspect important de nos pourparlers sur l'accord de libre-échange avec le Chili. Le premier ministre et mon collègue, le ministre des Affaires étrangères, ont soulevé la question du travail des enfants à maintes occasions.

Nous continuons de travailler avec nos partenaires commerciaux, notamment par l'entremise de l'Organisation internationale du Travail et de l'Organisation mondiale du commerce, pour tenter de sensibiliser davantage les intéressés à ces questions, d'accroître le respect des droits de la personne et d'améliorer les conditions de travail.

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, au-delà des soucis et des préoccupations du ministre et des beaux discours comme ceux qu'on connaît de la part du premier ministre en Chine, et pourtant, la situation n'a absolument pas changé, j'aimerais savoir: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il entend, dans un proche avenir, exiger que les compagnies canadiennes oeuvrant à l'étranger respectent des normes de travail humaines, interdisant notamment le travail des enfants?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il s'agit d'une question un peu controversée pour le mouvement syndical canadien, et j'ai constaté, à la suite de discussions que j'ai eues avec les représentants du Chili, que les sociétés canadiennes se comportent là-bas de manière très responsable. Elles offrent les meilleurs salaires, avantages et conditions de travail.


2436

Je m'attends à ce que les sociétés canadiennes se comportent de manière responsable à l'étranger. Nous avons eu de nombreuses occasions d'encourager cela et nous continuerons de le faire.

* * *

[Français]

LE FROMAGE AU LAIT CRU

M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé.

Le 30 mars de cette année, la Gazette du Canada publiait un projet de règlement portant sur le fromage au lait cru. De nombreux fabricants au Québec et certaines charcuteries italiennes de Vancouver ont manifesté leurs inquiétudes face à ce même projet de règlement.

Est-ce que le ministre de la Santé peut informer cette Chambre de la situation qui prévaut au sujet du fromage au lait cru?

[Traduction]

L'hon. David Dingwall (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue et les autres membres de mon caucus, ainsi que les députés de l'opposition qui ont soulevé cette question à la Chambre.

J'ai déjà eu l'occasion de consommer des fromages au lait cru et j'ai trouvé ces produits très bons.

L'intention du gouvernement du Canada n'est pas d'abandonner l'industrie, les producteurs, les consommateurs ou la communauté scientifique d'aucune façon. Il y a un processus en place, une comité consultatif d'experts qui examinera toutes les options possibles, y compris les améliorations technologiques et l'étiquetage.

Nous attendons les résultats des délibérations de ce comité, qui se réunira entre autres demain, à Québec.

* * *

LA FISCALITÉ

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, le vérificateur général a révélé aujourd'hui que Revenu Canada a accordé aux riches une échappatoire fiscale fort discutable. Grâce à cette échappatoire, des actifs de fiducies familiales d'une valeur de 2 milliards de dollars ont pu sortir du pays en franchise d'impôt.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Pourquoi le gouvernement a-t-il attendu deux ans et demi pour supprimer cette échappatoire secrète qui a coûté des centaines de millions de dollars en recettes perdues, tout en refusant catégoriquement de faire marche arrière en ce qui concerne la TPS?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, en ma qualité de nouvelle ministre du Revenu national, je puis dire que je suis heureuse de recevoir mon premier avis de la part du vérificateur général.

Le cas en question découle de deux décisions en matière d'impôt qui ont été examinées par le vérificateur général et qui ont été prises avant notre accession au pouvoir, soit en 1985 et en 1991. Le vérificateur a soulevé des questions très importantes. J'en ai discuté avec lui. J'ai lu son rapport ligne par ligne pour bien saisir ses préoccupations et lui demander son point de vue sur les mesures à prendre.

(1450)

Je suis heureuse de dire qu'il a été très clair et qu'il a mis au jour des problèmes de trois ordres, que son point de vue sur les mesures à prendre coïncide avec le mien et que, en fait, le ministre des Finances et moi avons pu mettre en oeuvre certaines de ces mesures.

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, ce que nous voulons vraiment savoir, c'est: Est-ce la ministre ou le vérificateur général qui dirige le ministère? C'est le genre de réponse que nous voulons entendre.

En examinant les faits, on constate que tous les fonctionnaires ayant été parties à cette décision ont dit que d'une certaine façon, il s'agissait bien d'une échappatoire fiscale. Nous en avons eu de nombreuses preuves au cours de toutes les réunions qu'ils ont tenues. Mais à la dernière réunion avec les hauts fonctionnaires-et peut-être même les politiques, nous ne le savons pas, car il n'y a aucun compte rendu ni dossier-, la décision a été renversée.

La ministre peut-elle expliquer aux contribuables du Canada pourquoi ils doivent acquitter leurs impôts sur le revenu alors que les riches et les puissants ont eu droit à une entente secrète pour économiser des centaines de millions de dollars?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, cela est arrivé en 1991. Je voudrais que le député comprenne que nous avons pris cette question très au sérieux.

Soyons clairs. Le vérificateur général a dit qu'il s'inquiétait de possibles ambiguïtés dans la Loi de l'impôt sur le revenu. Il tient à ce qu'elles soient clarifiées. Nous aussi.

Nous avons demandé au Comité des finances d'examiner ces aspects spécifiques de la Loi de l'impôt sur le revenu et de nous en faire rapport. C'est avec impatience que nous attendons de connaître ses recommandations.

* * *

[Français]

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Selon les informations obtenues aujourd'hui dans le rapport du vérificateur général, le ministère de la Défense nationale a comptabilisé des pertes de 80 millions de dollars en matériel dans le cadre de son appui aux différentes missions de paix auxquelles le Canada a participé.

Comment le ministre explique-t-il que son ministère ait comptabilisé des pertes de 80 millions de dollars en matériel, alors qu'il a été incapable de fournir au vérificateur général plusieurs des documents nécessaires pour expliquer ces pertes?


2437

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je signale au député que de la documentation a été mise à notre disposition. Nous continuons de discuter de la question avec le vérificateur général.

Il est vrai que du matériel est parfois perdu pendant des missions. Nous essayons de voir si le montant qui a été communiqué aujourd'hui est exact. nousle saurons lorsque tous les faits auront été établis.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, étant donné que le vérificateur général considère que ce trou de 80 millions demeure largement inexpliqué, le ministre de la Défense déclenchera-t-il une autre opération «fouille» pour trouver les documents manquants, comme dans le cas du dossier de la Somalie?

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je répondrai à cette question dans l'esprit où elle a été posée.

* * *

LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ce matin, le vérificateur général a ajouté sa voix aux nombreuses autres qui critiquent le Service correctionnel du Canada. Confirmant de façon cinglante, chiffres à l'appui, ce que nous avons toujours affirmé, il a présenté le gouvernement et l'appareil bureaucratique comme un navire à la dérive, sans personne à la barre.

Ma question s'adresse au solliciteur général suppléant. Si la réadaptation constitue le plus important des deux volets du mandat du Service correctionnel du Canada, comment expliquer que le service consacre seulement 7 p. 100 de son budget d'un milliard de dollars à la réadaptation et que les fonctionnaires dilapident les93 p. 100 qui restent en coûts d'exploitation?

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le rapport du vérificateur général a été remis ce matin. Le solliciteur général l'a examiné et se réjouit des recommandations qu'il contient.

Nous reconnaissons également, comme le rapport lui-même le mentionne, que le Service correctionnel du Canada a obtenu des résultats remarquables avec ses programmes de réadaptation. Certains des programmes mis en oeuvre ont fait l'objet d'une reconnaissance internationale.

(1455)

LE COMMERCE INTERNATIONAL

Mme Susan Whelan (Essex-Windsor, Lib.): Monsieur le Président, les entreprises dans les localités frontalières comme Essex-Windsor, ma circonscription, sont de plus en plus conscientes du sentiment croissant de protectionnisme des Américains.

Le ministre du Commerce international pourrait-il dire à la Chambre quels sont les problèmes et ce qu'il fait pour défendre les intérêts de l'ensemble des Canadiens?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, ces 50 dernières années, dans le cadre l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, le commerce international a fait des progrès considéarbles.

Nous avons aujourd'hui un système nettement plus ouvert, les échanges ont été libéralisés et les règles sont plus claires qu'elles ne l'ont jamais été. Nous le devons en partie au leadership dont ont fait preuve les États-Unis et nous avons toujours besoin de ce leadership.

Les Américains ne doivent pas revenir au protectionnisme. Ce n'est ni dans leur intérêt, ni dans celui de personne. Nous n'avons pas besoin de mesures législatives comme le projet de loi Helms-Burton, où les États-Unis s'en prennent à leurs amis, leurs voisins et leurs principaux partenaires commerciaux pour viser un autre pays, en l'occurrence Cuba.

Nous continuons de protester contre cette mesure. Ce n'est pas du leadership, mais nous avons besoin du leadership des Américains pour promouvoir un système de commerce fondé sur des règles précises et la libéralisation des échanges.

* * *

[Français]

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Selon le rapport du vérificateur général déposé aujourd'hui, on apprend que des hauts fonctionnaires ont tenu plusieurs réunions afin d'émettre une décision anticipée au sujet de l'imposition des gains en capital dans les fiducies familiales. Le vérificateur met en doute le bien-fondé de cette décision qui a impliqué des fonctionnaires du ministère des Finances.

Qu'entend faire le ministre des Finances pour corriger la situation et éviter au gouvernement de perdre des centaines de millions de dollars qui échapperaient au fisc si rien n'est fait dans les prochaines semaines?

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, en réponse à l'inquiétude qu'a soulevée le vérificateur général en disant que notre documentation n'était peut-être pas aussi complète qu'elle pouvait l'être, je


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signale que mon sous-ministre a rencontré le sous-ministre des Finances et que nous avons adopté des améliorations à la documentation des décisions importantes.

* * *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement affirme qu'il croit à l'intégrité et à la nécessité de rendre des comptes au Canadiens.

Parallèlement, il permet à un officier supérieur de dépenser une somme aussi exagérée que 250 000 $ pour fêter une passation de commandement. Le major-général McInnis a ainsi dépensé un quart de million de dollars puisés à même l'argent des contribuables pour se payer une petite fête.

De toute évidence, la chaîne de commandement du ministère de la Défense n'existe plus. Pourquoi le ministre n'a-t-il rien fait pour empêcher ce gaspillage révoltant de l'argent des contribuables?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je suis d'accord avec le député pour dire que c'est un exemple flagrant de gaspillage. C'est extravagant et inacceptable.

Je désapprouve toutefois la conclusion du député. Nous avons un nouveau commandant de l'armée. Nous avons un nouveau chef d'état-major de la Défense qui a adopté des règles sans équivoque à l'intention des officiers supérieurs afin qu'ils fassent désormais avec les deniers publics ce que la population veut qu'ils fassent.

* * *

[Français]

LA CONSTITUTION

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre et elle concerne la conférence des premiers ministres dont il a parlé, il y a quelques minutes.

J'aimerais savoir de la part du premier ministre s'il peut nous informer aujourd'hui de l'ordre du jour de la conférence proposée qui doit avoir lieu à courte échéance, au mois de juin, d'une part, et, d'autre part, j'aimerais savoir si le premier ministre a l'intention de bouger et de respecter ses engagements référendaires, incluant son engagement d'inscrire dans la Constitution la reconnaissance du Québec comme société distincte?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'ordre du jour n'est pas prêt en ce moment. Le ministre des Affaires intergouvernementales a rencontré les représentants de la plupart des gouvernements et il les a consultés pour établir un ordre du jour qui sera connu lorsque nous l'aurons déterminé. Je rencontrerai, la semaine prochaine, le premier ministre du Québec. Le ministre sera à Québec jeudi de cette semaine et nous devrons également parler aux représentants d'autres gouvernements.

L'ordre du jour n'est pas encore prêt, mais lorsqu'il le sera, nous serons heureux de le déposer à la Chambre.

Quant à la promesse que j'ai faite, j'ai fait voter ici, à la Chambre même, une résolution à cet effet. Pour pouvoir l'inscrire dans la Constitution canadienne, il faut obtenir le consentement du gouvernement du Québec. J'aimerais bien que les députés du Bloc québécois, en face, nous fassent dire par le premier ministre du Québec qu'il veut inscrire la société distincte dans la Constitution.

(1500)

Je suis sûr que la Chambre des communes sera très enthousiaste d'adopter la loi, ainsi que le nombre de provinces requis au Canada. Mais il faut que le gouvernement du Québec nous dise qu'il le veut. On ne peut pas le faire unilatéralement, parce que la Constitution ne nous le permet pas.

* * *

[Traduction]

LA SANTÉ

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Le ministre peut-il assurer à la Chambre qu'il possède suffisamment de moyens et de pouvoirs de réglementation et de coercition pour prévenir l'utilisation de cadavres de bétail infecté dans les aliments destinés à d'autres animaux et protéger ainsi la santé et la sécurité des Canadiens?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je crois que la question du député porte sur l'encéphalopathie spongiforme des bovins, communément appelée la maladie de la vache folle.

L'élément important, qui mérite bien d'être répété, c'est que selon toutes les données, la maladie de la vache folle n'existe pas au Canada et que, par conséquent, ce virus ne peut envahir la chaîne alimentaire.

L'Organisation mondiale de la Santé a récemment fait certaines recommandations pour indiquer aux divers pays ce qu'ils pouvaient faire à l'égard de cette maladie. Je suis heureux de vous dire que la grande majorité de ces recommandations ont été mises en oeuvre il y a déjà longtemps au Canada, bien avant le fait et non après.

Mon ministère et les organisations d'éleveurs que la question intéresse étudient présentement les recommandations les plus récentes de l'OMS.

* * *

LA PÊCHE AU SAUMON

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, attendu que l'objectif déclaré du plan ministériel de revitalisation de la pêche commerciale au saumon en Colombie-Britannique est de réduire la flotte de 50 p. 100; et qu'en vertu du traité qui entrera bientôt en vigueur, les Nisga'a se verront accorder près de 27 p. 100 des prises dans la rivière Nass, et que deux autres bandes n'ont pas encore conclu d'accord relativement à la rivière Nass, le ministre ne convient-il pas que ce plan de rationalisation vise uniquement à redistribuer les prises par le biais de traités?

L'hon. Fred Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le député sait pertinemment que la capacité de capture est de trois à huit fois ce qu'elle était il y a 15 ans. Il sait que dans tous les secteurs les pêcheurs perdent de l'argent. Il sait

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également que le problème en ce qui concerne le saumon est que les stocks sont dans un état grave, voire critique.

Ce n'est pas une question, c'est un problème. Il s'agit de proposer un plan efficace pour régler le problème, et c'est ce que nous faisons. Je puis garantir que nous élaborerons un plan qui nous permettra d'exploiter la ressource d'une façon durable et de rendre le secteur économiquement viable; nous réglons le problème.

Le vice-président: Le temps réservé à la période des questions est écoulé.

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je fais un rappel au Règlement qui découle de la période de questions.

Je voudrais signaler à la présidence une question qu'on a posée au secrétaire parlementaire du solliciteur général. Je demanderais à la présidence d'examiner les bleus et de déterminer si le temps accordé au secrétaire parlementaire était conforme à nos traditions, voire aux autres questions qui ont été formulées aujourd'hui.

Je soutiens que la question était beaucoup plus longue que le temps accordé au secrétaire parlementaire pour y répondre. J'espère que la présidence prendra mon rappel en délibéré et l'examinera en vue de rendre une décision qui sera juste et équitable, comme d'habitude.

Le vice-président: Je remercie le whip du gouvernement. En effet, on a probablement interrompu le secrétaire parlementaire un peu rapidement.

La présidence s'efforçait de donner la parole à beaucoup de députés qui n'avaient pas pu l'avoir aujourd'hui. Si le secrétaire parlementaire n'avait pas dit «troisièmement» et qu'il avait tout simplement abordé ses arguments, il aurait probablement pu en présenter quelques-uns.

______________________________________________


2439

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement, ainsi que des motionsnos 1, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 18.

Le vice-président: Il reste trois minutes et 50 secondes au député de Kootenay-Est.

M. Strahl: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Pendant mon intervention sur ces amendements, juste avant la période de questions, j'ai cité un extrait d'un document montrant que, selon la Société canadienne du sida, quiconque s'oppose aux avantages consentis aux conjoints est homophobe.

On m'a invité à présenter ce document. Je voudrais maintenant le faire. Il dit que:

Nous faisons tous preuve d'homophobie lorsque nous privons les couples de gais et de lesbiennes de droits fondamentaux comme les avantages consentis aux conjoints.
Je voulais seulement vous le signaler.

(1505)

[Français]

Le vice-président: Puisqu'il y a consentement unanime pour que ce document soit déposé, alors, c'est fait.

[Traduction]

Je n'étais pas ici, mais on me dit que le consentement unanime a déjà été donné. J'entends le whip en chef du gouvernement manifester son accord.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, vers la fin de mon intervention, juste avant la période des questions, je cherchais à faire valoir qu'il fallait modifier cette mesure législative de manière à protéger les valeurs qui sont les plus chères à notre société, à savoir la liberté d'association et la liberté de culte. De plus, l'État ne devrait pas intervenir dans les affaires de l'Église. C'est précisément ce que vise la motion no 10 que présente mon collègue d'Edmonton.

Ma collègue de Port Moody a présenté pour sa part les motions nos 13 et 14. La motion précise que la mention de l'«orientation sexuelle» n'aura pas pour effet de rendre inopérante quelque disposition du Code criminel que ce soit. Quant à la motion no 14, elle affirme que rien dans le projet de loi n'aura pour effet d'étendre aux conjoints de même sexe les avantages qui sont offerts aux couples traditionnels.

Les porte-parole du gouvernement nous ont donné de vagues assurances que cette mesure législative ne visait pas cet objectif. J'attire l'attention du gouvernement sur la présence d'une industrie constitutionnelle dont nous avons perdu le contrôle, une industrie formée d'avocats grassement rémunérés, qui pullulent ici à Ottawa et qui ont pour toute tâche de se pencher sur les mesures législatives en vigueur. En plus de cette industrie constitutionnelle, nous avons des mesures législatives comme celle-ci, une mesure législative qui prime sur toutes les autres lois.

Je soutiens que le gouvernement et le ministre de la Justice ne sauraient jurer, en leur âme et conscience, que cette mesure législative ne va pas à l'encontre des lois actuelles.

Je tiens à citer le député de Mississauga-Sud qui a tenu les propos suivants: «Ce qu'il faut retenir, c'est que toutes les lois, toutes les politiques sont discriminatoires en soi. La discrimination n'est pas toujours mauvaise. Nous convenons tous qu'il existe une discrimination juste, à savoir la discrimination positive ou, comme le disent les Américains, l'action positive qui discrimine en faveur de la famille à cause de son statut spécial. Nous discriminons en faveur des personnes handicapées, des autochtones et des personnes âgées,


2440

pour ne citer que quelques cas. La discrimination n'est pas toujours injuste. Elle reflète les normes et les valeurs de la société.»

Je suis d'accord avec le député. Son intervention logique et sensée dans le débat est peut-être un exemple qui explique pourquoi on empêche de participer à ce débat tant de libéraux qui ont un point de vue qui se trouve être contraire à celui de tous les libéraux bien pensants, si vous voyez ce que je veux dire, monsieur le Président, tous ces libéraux qui savent ce qui est bon pour le Canada et vont nous imposer leurs vues que nous le voulions ou pas.

Qu'y a-t-il de scandaleux dans ce projet de loi et la façon dont on le fait adopter envers et contre tous? Le scandale réside dans l'énorme hypocrisie du gouvernement libéral sur cette question. Il y a des gens sur les banquettes libérales qui, tout comme moi et à l'instar de mes collègues réformistes et, en fait, de la grande majorité des Canadiens, pensent que c'est une mauvaise mesure, mal pensée et inutile. Pourtant, le gouvernement, dans son hypocrisie, leur refuse le droit d'intervenir, ce que je trouve honteux.

En conclusion, c'est un débat extrêmement difficile et très émotif, en particulier pour de nombreux Canadiens pour lesquels il s'agit d'une valeur à laquelle ils attachent beaucoup d'importance. J'en suis conscient.

(1510)

Cependant, cela ne change rien au fait qu'en refusant à des députés le droit d'exprimer leur point de vue à la Chambre des communes, le gouvernement pratique une censure absolue et adopte une attitude dictatoriale, chose qu'aucun ministériel ne devrait approuver.

M. Andy Mitchell (Parry Sound-Muskoka, Lib.): Monsieur le Président, avant d'aborder le projet de loi C-33 en général, je voudrais commenter certaines informations provenant de l'autre côté de la Chambre au sujet de la censure et du fait d'empêcher la participation au débat.

Si je me souviens bien, lorsque la Chambre a voté sur le projet de loi en deuxième lecture, le parti ministériel a permis à ses membres de voter selon leur conscience, de sorte que certains ont voté pour et d'autres contre. Le Parti réformiste a voté en bloc, 29 à zéro; il n'y a pas eu de vote libre. Comme on peut le voir, certaines tribunes sont plus démocratiques que d'autres.

La question dont nous sommes saisis est beaucoup trop importante pour ce genre de suggestion de la part du député. Parlons du fond du projet de loi, qui me semble important. Je conviens avec le député qu'il s'agit d'un sujet controversé.

Certains passages du projet de loi font peur aux gens. Certains craignent-à tort, je pense-que leur propre mode de vie et leurs croyances soient menacés. Ce n'est pas le cas.

Cette modification ne confère pas des droits ou des privilèges spéciaux à certaines personnes. Elle veut plutôt faire en sorte que nous jouissions tous de droits égaux. Le projet de loi protège le droit de nos compatriotes de ne pas subir de discrimination, de ne pas perdre leur emploi en raison de leur orientation sexuelle, de leur race ou de leur religion.

Nous devons lutter pour obtenir cette protection législative, comme le montrent clairement les propos tenus la semaine dernière par certains députés de l'autre côté de la Chambre. Certaines de leurs observations reflètent leurs préjudices et leur intolérance. Nous avons entendu des commentaires choquants. Ces remarques ont prouvé hors de tout doute que la discrimination existe dans la société canadienne et qu'il est impératif pour le gouvernement de rectifier la situation. Cette discrimination est une honte.

La discrimination va à l'encontre de tout ce qui est cher aux Canadiens. Congédier un employé ou le faire travailler dans l'arrière- boutique à cause de sa race, de son sexe, de son orientation sexuelle ou de sa religion est simplement inacceptable.

En tant que gouvernement, nous devons faire preuve de leadership dans ce dossier. Il nous incombe de donner l'exemple et de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne de façon à interdire la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Comme je l'ai dit plus tôt, les reportages de la semaine dernière montrent à quel point cela est nécessaire.

Je suis un fervent défenseur de la famille et je crois fermement que nos familles continueront de renforcer et d'unifier notre société. Je crois aussi que chacun doit pouvoir jouir des droits de la personne et c'est pourquoi j'appuie ces droits pour tous les Canadiens.

La Loi canadienne sur les droits de la personne contient déjà une liste des motifs de distinction illicites. L'ajout de l'orientation sexuelle à cette liste contribuerait à prémunir les Canadiens contre la discrimination fondée exclusivement sur leur orientation sexuelle dans des domaines tels que l'emploi, le logement et l'accès à des biens et à des services.

Le projet de loi à l'étude aujourd'hui n'a pas pour but de faire bénéficier les couples de même sexe de diverses prestations, ni de modifier la définition des termes mariage, famille et conjoint. Il vise tout simplement à reconnaître le droit de vivre sa vie sans faire l'objet de discrimination.

Nous proclamons également l'importance de la famille, en tant que fondement de la société canadienne. Voici ce que dit le préambule du projet de loi:

[Attendu] que le gouvernement du Canada reconnaît et proclame l'importance de la famille comme fondement de la société canadienne et que la présente loi ne porte pas atteinte à son rôle fondamental dans la société;
Je pourrais voter contre cette modification à la Loi canadienne sur les droits de la personne. Je suis persuadé que, ce faisant, je ferais plaisir à certains de mes électeurs et j'en décevrais d'autres aussi.

(1515)

En fin de compte, je ne serai pas éternellement au Parlement, et un jour viendra où je devrai faire mon propre examen de conscience. Ai-je bien fait, me demanderai-je alors? Mes actions étaient-elles en accord avec mes convictions? Ai-je agi pour le bien du Canada et des Canadiens?

2441

Je pense sincèrement que je pourrai répondre oui à toutes ces questions, parce qu'il est mal de faire de la discrimination et qu'il est bon de le rappeler. Il faudrait bien que quelqu'un le fasse comprendre aux réformistes.

Par votre entremise, monsieur le Président, je voudrais dire aux députés réformistes que la discrimination est répréhensible et qu'il ne suffit pas de seulement la condamner. C'est des gestes concrets que nous posons ici, en tant que parlementaires, dont les gens se souviennent et s'inspirent. Le geste que nous posons en adoptant ce projet de loi fera clairement comprendre aux Canadiens que la discrimination n'a pas sa place dans notre société et qu'elle ne sera pas tolérée.

J'invite nos collègues du Parti réformiste à voter comme moi en faveur de cet amendement afin de joindre le geste à la parole et faire clairement entendre qu'eux aussi trouvent la discrimination inacceptable.

Cette mesure législative s'impose de façon urgente. J'espère que nos vis-à-vis prendront la bonne décision et qu'ils appuieront l'adoption de cet amendement.

En tant que parlementaires, nous devons aux Canadiens et à nos électeurs d'agir dans le meilleur intérêt du pays, ce qui signifie en l'occurrence déclarer clairement et catégoriquement que la discrimination est inacceptable et qu'elle ne sera pas tolérée.

Si mon appui à cette mesure législative me coûte des votes aux prochaines élections, tant pis. S'il me coûte des amis, il faudra bien que je m'en accommode parce que je crois fermement que toute forme de discrimination est inacceptable. Fort de cette conviction, je voterai en mon nom personnel et au nom de ceux de mes électeurs qui partagent cette conviction et qui veulent voir grandir leurs enfants dans un monde sans haine ni préjugés. Pour toutes ces raisons, je voterai pour le projet de loi à l'étape de la troisième lecture.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE-L'EMPLOI DE TERMES ANTIPARLEMENTAIRES

Le vice-président: En ce qui a traite à un incident survenu ce matin, les bleus ont été remis à la présidence. J'en ai discuté avec le député de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia. Je l'invite à prendre la parole et à retirer le terme qu'il a utilisé ce matin.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, je n'avais certes pas l'intention de ternir l'excellente réputation des habitants d'Halifax. Je crois que la député d'Halifax savait fort bien ce que je voulais dire, étant donné surtout qu'elle utilise ce terme régulièrement, avec désinvolture.

Cependant, je retire le terme parce qu'il est antiparlementaire.


2441

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, j'avais déjà pris de nombreux rendez-vous lorsque la Chambre a soudain été saisie de ce projet de loi; c'est pourquoi je n'ai pu me prononcer aux étapes de la première et de la deuxième lectures. Toutefois, je suis ici et j'y resterai jusqu'à la fin des étapes du rapport et de la troisième lecture, et je déclare sans ambages que je me prononcerai contre ce projet de loi. Je voterai en faveur des amendements, mais je doute que ces derniers recueillent beaucoup d'appui de la part de la majorité des libéraux d'en face.

Ils ont laissé entendre qu'il y aurait un vote libre. Je suis d'avis que des précisions s'imposent à cet égard. Je doute qu'il y ait des objections au vote libre, sinon il y aurait eu le même nombre de députés qui s'y seraient opposés de toute façon, ce qui aurait causé de graves problèmes au premier ministre, étant donné les mesures prises récemment de leur côté dans le cadre de leur étonnante version de la démocratie libérale.

(1520)

Il est intéressant de noter qu'en dépit du fait qu'il s'agit d'un vote libre, le droit des députés libéraux de s'exprimer librement est très limité. C'est une constatation que nous avons faite jusqu'à maintenant, et je suis convaincu que cela continuera d'être le cas tout au long du débat.

Je suis opposé à diverses formes de discrimination, dont un bon nombre sont mentionnées dans le projet de loi. Toutefois, le problème en ce qui a trait à cette mesure législative c'est qu'elle ne traite pas uniquement de ces formes de discrimination. Elle ouvre plutôt les portes toutes grandes, de sorte qu'une personne pourra dire: «Ce n'est pas ce qu'ils voulaient dire.» De la même façon, une autre dira peut-être: «Ils pensent que c'est ce que cela veut dire», ou quelque chose du genre.

Nous connaissons les problèmes qui se posent au moment d'appliquer une mesure législative, même une bonne, ce qui, à mon sens, n'est certainement pas le cas ici. Après avoir fait l'objet de pressions continues, le ministre de la Justice a finalement convenu de faire adopter un projet de loi interdisant la possibilité d'invoquer l'état d'ébriété comme moyen de défense. Que s'est-il passé? Les tribunaux ont dit: «De toute façon, ce n'est pas tout à fait ainsi que nous interprétons la Constitution.» Dans certaines causes, on n'a pas tenu compte de cette interdiction, malgré le fait qu'elle ait été décrété par la Chambre tout entière. Les tribunaux s'en sont tenus à leur propre interprétation. Lorsque nous laissons une telle question à la discrétion des tribunaux, nous ouvrons un véritable guêpier.

Certains amendements visent à apporter des précisions relativement à certains points qui, de l'avis du public, pourraient poser des


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problèmes, notamment des changements au Code criminel ou des façons de contourner son application. Il y a aussi la possibilité que des programmes spéciaux soient mis sur pied en raison de l'orientation sexuelle. Ce sont des questions qui préoccupent les gens, particulièrement dans ma circonscription.

Le député qui a pris la parole avant moi a dit qu'il doit voter selon sa conscience. Moi, je dois voter selon ce que mes électeurs estiment être approprié. Ceux-ci ne m'ont pas élu pour être leur chef, mais plutôt pour être leur représentant. Chaque député de cette Chambre devrait exprimer la volonté de ceux qui l'ont élu.

Certaines personnes dans ma circonscription sont très préoccupées par certaines choses qui se produisent déjà. Je vais vous citer un extrait d'une brochure dont le financement a été assuré en partie par le gouvernement fédéral. Cette brochure a été diffusée dans les écoles et le collège communautaire de ma circonscription, au motif qu'il s'agissait d'un document sur le sida. Je tiens à assurer la Chambre que je vais censurer l'extrait que je veux vous lire. Néanmoins, celui-ci pourrait choquer les députés. Je n'ai certainement pas l'intention de choquer qui que ce soit. Si la présidence juge à-propos d'intervenir, je comprendrai parfaitement sa décision. Je vous signale que ce document financé en partie par le gouvernement a déjà fait l'objet d'une censure.

Ce document explique les pratiques sans risque pour-je substitue mon propre mot-la fornication. Il y est question de pratiques comme le fisting. Il s'agit de l'introduction de toute la main à l'intérieur du corps. Le texte dit ceci: «Le fisting peut occasionner des lésions anales ou vaginales graves. Pour éviter les risques, il vaut mieux porter un gant de caoutchouc.» Ce document vient de Man to Man Society, organisme qui reçoit des fonds du gouvernement.

Il y est question de jouets. Je passe sur les utilisations proposées de ces jouets, mais le document conseille, toujours au nom d'une sexualité sans risque, de toujours nettoyer les jouets qu'on partage avec d'autres personnes.

Le document parle encore du rasage, du perçage et de la scarification. Il dit que, pour la scarification au moyen d'un couteau, l'idéal est le scalpel jetable. Il recommande la scarification par la chaleur, les fers à marquer étant beaucoup plus sûrs parce que la chaleur tue le virus. Il est encore question de la torture à l'électricité. La méthode sans risques? «Nettoyez à fond tout ce qui entre en contact avec le sang et les autres liquides organiques.» C'est un document nocif. J'ai du mal à lire certains passages.

Je crois que je me suis fait comprendre. Mais ce document n'est pas le seul, et je ne l'ai pas trouvé dans une obscure librairie spécialisée. Il circulait dans le réseau scolaire public de ma circonscription. Voilà pourquoi mes électeurs sont en colère, exaspérés, inquiets.

(1525)

J'ai beaucoup d'électeurs-pas une forte majorité, bien entendu, que ce soit bien clair-qui appartiennent à la communauté homosexuelle. Ce ne sont pas des gens qui font beaucoup de bruit comme les membres de Gay Pride, ni des gens qui participent à ces étranges défilés par lesquels on fait la promotion du mode de vie homosexuel. Les homosexuels de ma circonscription sont des citoyens comme les autres qui contribuent à l'économie de notre région. Ils prennent part à la vie de la collectivité. Ils dirigent des entreprises. Mes électeurs n'ont aucune difficulté à accepter qu'un homme, par choix ou autrement, tombe amoureux d'un autre homme, ou qu'une femme devienne amoureuse d'une autre femme. Le problème n'est pas là.

Le problème, c'est que ce projet de loi est mal rédigé. Il est si large qu'on craint l'interprétation que les tribunaux vont en donner. J'ai expliqué ce qui était arrivé dans le cas du projet de loi sur la défense fondée sur l'état d'ébriété, considéré comme une bonne mesure lorsque nous l'avons adopté. Ils craignent que des documents méprisables ne se retrouvent dans notre réseau scolaire, qu'on ne favorise le droit de préconiser ouvertement un mode de vie différent, qu'on n'accorde les avantages sociaux aux conjoints de même sexe.

J'habite dans un milieu rural, dans une collectivité rurale de l'Ouest, tournée vers les activités de plein air. Nous avons un beau territoire de chasse. J'appartiens à un club de tir au pigeon d'argile, et je participe. C'est là une activité très importante dans ma circonscription. Lorsque le projet de loi C-68 a été proposé, il a soulevé un tollé de protestations.

Depuis que je suis député, j'ai reçu des lettres sur tous les sujets, mais l'idée que les conjoints de couples homosexuels puissent bénéficier de prestations de conjoints, un des éléments du projet de loi C-41, a suscité plus d'opposition que n'importe quel autre sujet, y compris le projet de loi C-68.

Jusqu'à présent, les gens ont eu peu de temps pour se mobiliser, chose que je trouve vraiment révoltante. Le gouvernement néo-démocrate précédent de l'Ontario avait proposé un projet de loi de ce genre. Il a permis la tenue d'un débat et d'un vote libres. La différence, c'est qu'il n'a pas essayé de le faire adopter à la hâte au comité ou à la Chambre. Il n'a pas invoqué la clôture.

Il a donné aux citoyens et aux communautés de la province le temps de se mobiliser pour faire connaître leur position à leurs représentants élus. Je crois que le gouvernement libéral fait étudier ce projet de loi à la hâte afin de ne pas donner aux gens, non seulement de l'Ontario mais du reste du pays, le temps de se mobiliser. Ils se sont néanmoins mobilisés.

Pour établir un équilibre, je vais lire quelques extraits de lettres que j'ai reçues de la part de personnes qui sont favorables au projet de loi. Je veux présenter une opinion équilibrée. Comme je veux représenter fidèlement mes électeurs, je lirai des extraits de lettres pour et contre. Certains se disent favorables à une adoption rapide du projet de loi C-33 parce qu'il respecte un engagement. Voilà l'argument le plus fort qu'ils font valoir dans leur lettre. Les auteurs d'une autre lettre veulent faire clairement comprendre qu'ils considèrent les relations sexuelles entre adultes consentants comme une affaire personnelle. Je suis du même avis.

Je ne vois rien à redire à ce que les gens font dans l'intimité de leur foyer, dans les limites du raisonnable. Je pourrais lire d'autres extraits de ce dépliant. Il laisse entendre que nous devrions pénétrer un peu dans les foyers.

Je ne pense pas que nous devrions refuser d'embaucher quelqu'un, ou le congédier ou refuser de lui louer un appartement simplement parce que son orientation sexuelle est différente de la nôtre, si nous nous donnons la peine de définir ce que nous entendons par là.

Je ne me rappelle pas exactement son nom, mais il existe une société faisant la promotion de l'amour entre hommes et garçons.


2443

La pédophilie constitue une orientation sexuelle à laquelle je m'oppose complètement et totalement. J'espère que tous les députés à la Chambre s'y opposent également. Si on ne définit pas les termes, si on se contente de parler d'orientation sexuelle, on s'expose à ce risque.

Comme j'ai reçu beaucoup de lettres d'opposition au projet de loi, je voudrais en lire quelques extraits également. Un correspondant dit: «Chaque Canadien est déjà protégé en tant que personne. Pourquoi ce qui se fait dans l'intimité de la chambre à coucher a-t-il besoin de la protection de la loi?»

Un autre écrit: «Il s'agit d'une menace grave et immédiate à la famille naturelle. En tant que personne, l'homosexuel a droit au respect à cause de son caractère humain, non à cause de son comportement sexuel.»

(1530)

Les protections existent. S'il est nécessaire d'apporter des éclaircissements, il faudrait le faire clairement. Le projet de loi n'est pas clair; il est incroyablement vague. Les amendements proposés à l'étape du rapport tentent de clarifier plusieurs éléments du projet de loi. Ils ont été proposés par des députés qui s'opposent à cette mesure. Si nous devons avoir un projet de loi, clarifions-en au moins l'objet, en y faisant entrer ce que le gouvernement prétend qu'il veut dire mais sans le préciser dans le projet de loi.

J'exhorte les députés d'en face à songer sérieusement à accepter les amendements que nous avons proposés. S'ils refusent de les accepter, ils peuvent être assurés que je voterai contre le projet de loi C-33.

Mme Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le Président, je suis ce débat depuis déjà trop d'années. À ceux qui s'intéressent sincèrement à la défense des droits de la personne au Canada et à l'ajout de l'orientation sexuelle aux motifs de distinction illicite et à ceux qui ont de réserves importantes et légitimes au sujet du projet de loi C-33, je recommande de relire le discours qu'a prononcé mon collègue, le ministre de la Justice, à l'étape de la deuxième lecture.

Ils trouveront réponse à leurs nombreuses questions et à certaines de leurs préoccupations qui viennent, je le reconnais en toute légitimité, du plus profond de leur coeur. Je comprends cela.

Il serait insensé de ne pas reconnaître que, au fil des ans, il y a eu des malentendus, des stéréotypes, des mythes, des propos déformés et tout ce que vous voulez, mais il reste que certains groupes dans notre pays sont victimes de discrimination et de préjugés. Parmi ces gens, qui forment un groupe important-vous n'avez qu'à naviguer sur Internet pour voir ce que je veux dire-il y a ceux qui choisissent une orientation différente pour exprimer leur sexualité.

Dans les minutes qui me sont accordées aujourd'hui, je n'ai pas le temps de fournir des explications aussi claires et réfléchies que celles du ministre, mais le ministre a expliqué, comme nous tous d'ailleurs, pourquoi notre but ici n'est pas d'accorder un droit spécial et pourquoi nous en tenons des propos très bien définis et concis lorsque nous disons qu'un segment de notre population est victime de discrimination. Ce n'est pas canadien. Ce n'est pas la façon dont nous aimons aborder les questions. L'ajout de l'orientation sexuelle à l'article 3 de la Loi sur les droits de la personne vient compléter la liste originale des motifs de distinction illicite.

En tant que présidente du Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées, j'ai constaté que l'étude de ce projet de loi est en quelque sorte la suite logique du travail que j'accomplis depuis de nombreuses années à la Chambre. Je me suis beaucoup intéressée à la question des droits de la personne. On se souviendra que, lorsque la Charte des droits et libertés a été adoptée en 1982, il s'est écoulé trois ans avant l'entrée en vigueur de l'article 15, des dispositions sur la non-discrimination et de la liste de motifs de distinction illicite envers les personnes les plus vulnérables.

On nous a demandé d'examiner l'article 15, de l'étudier et de voir comment il pourrait entrer en vigueur en 1985. Le recours a l'attribution de temps a été très révélateur. Nous avons constaté de nombreuses formes de discrimination, que ce soit envers les aînés, les handicapés, les femmes ou les enfants. Nous avons examiné l'ensemble des lois, que celles-ci concernent l'économie, les assurances ou toutes les autres questions avec lesquelles nous devons composer quotidiennement.

Je suis fière d'avoir fait partie de ce comité qui comprenait des députés de tous les partis et qui a travaillé avec acharnement pour examiner la question des droits à l'égalité et pour faire rapport à ce sujet. Nous avons examiné les domaines où il fallait modifier les lois fédérales pour assurer le respect des droits individuels. Après avoir consulté des Canadiens d'un océan à l'autre, le comité a acquis la certitude que le fait de mettre au ban de la société un groupe de citoyens constituait un dangereux précédent. Il a aussi constaté que, dans une démocratie, il est également dangereux de laisser à la volonté populaire ou à la conjoncture historique le soin de décider si un groupe particulier fera partie ou non de ceux qui ont des garanties en matière de droits de la personne.

(1535)

Bien des gens réagissent de manière viscérale aux questions concernant l'homosexualité. Nous en avons entendu à la Chambre, et je pense qu'ils expriment de graves craintes auxquelles ils sont exposés depuis longtemps. Ils traduisent des attitudes et des stéréotypes qui existent de longue date dans la société. Le moment est venu de remettre nos idées en place et de présenter les faits tels qu'ils sont.

Nous sommes saisis d'une question d'intérêt public qui mérite mûre réflexion. Nous y avons réfléchi depuis 1985. Dans la société, il faut protéger les minorités pour qu'elles soient sur le même pied que tous les autres.

Que le gouvernement prévoit des dispositions législatives pour les protéger ne signifie pas qu'il approuve une religion, une idée politique ou un trait de caractère particulier. Cela signifie simplement que, dans une société libre et démocratique, la discrimination fondée sur ces différences ne sera pas tolérée en vertu de la loi.


2444

À maintes occasions à la Chambre, nous avons dit que ni le racisme ni l'âgisme ne doivent être tolérés. Nous avons supprimé l'obligation de congédier des personnes à cause de leur âge. Nous avons examiné le racisme et élaboré une série de programmes pour protéger ceux qui en sont victimes, notamment les membres des minorités visibles.

En 1985, notre comité a rencontré des Canadiens homosexuels qui appartenaient à tous les groupes d'âge, à toutes les professions et à toutes les religions. C'était la première fois que bon nombre d'entre nous étions en rapport avec des défenseurs de ce mode de vie. Il faut reconnaître bien honnêtement et franchement que cela nous a un peu bouleversés. Ce qui nous a tout d'abord bouleversé, c'est le nombre de personnes que nous avons rencontrées. Dans toutes les villes et tous les villages où nous sommes allés, il y avait des gens qui avaient choisi de vivre différemment de nous. Il y en a partout. Ils font partie de la famille élargie et j'ai la certitude que si les députés font le tour de leur famille, ils constateront que certains de leurs proches ont des préférences homosexuelles.

Les minorités ont besoin d'être protégées. Mais accorder une protection juridique ne signifie pas que l'on approuve ces choix. C'est la discrimination pour ce genre de motif que nous ne tolérerons pas.

Nous avons rencontré ces gens. Nous avons entendu parler des sévices et de l'oppression psychologique dont ils ont été victimes. Nous avons entendu parler de la propagande haineuse qui est dirigée contre eux et du fait qu'on en a fait des démons à bien des égards. Nous avons entendu parler de la discrimination ouverte dont ils sont victimes dans l'emploi, le logement et les services.

[Français]

D'ailleurs, certains d'entre eux craignaient de comparaître devant le comité de peur de perdre leur emploi ou de se faire chasser de leur domicile.

Tel était le Canada il y a seulement dix ans, un pays qui se vantait de pratiquer la justice, la compassion, la tolérance et le respect mutuel, mais ce n'était pas le cas pour les personnes ayant une différente orientation sexuelle.

[Traduction]

Mes collègues, dont certains n'avaient jamais eu conscience ou ne s'étaient jamais très inquiétés de la discrimination faite aux homosexuels et aux lesbiennes, et moi avons soumis à la Chambre un rapport unanime intitulé «Égalité pour tous». Dans ce rapport, nous avons recommandé que l'orientation sexuelle soit ajoutée à l'article 15 de la Charte des droits et libertés comme motif de discrimination illicite.

Si les députés se donnaient la peine de lire ce document, qui renferme certains éléments que nous avons entendus, ils constateraient que nous avons utilisé le terme orientation sexuelle. Nous avions le choix entre un certain nombre de termes différents. Toutefois, c'est ce terme qui est le plus utilisé dans le monde. C'est un motif inclusif d'exclusion. Il s'applique aux homosexuels, aux hétérosexuels et aux transsexuels.

M. Gouk: Qu'en est-il des pédophiles?

Mme Finestone: Ce projet de loi n'a rien à voir avec les pédophiles. L'ignorance du député est tout simplement abominable. Agissez comme un parlementaire et comprenez qu'il n'est pas question ici de pédophilie et d'actes criminels.

[Français]

C'était le moins que nous puissions faire pour satisfaire aux exigences de la Charte, pour faire en sorte que les valeurs canadiennes aient une véritable signification et pour que notre pays maintienne sa réputation de justice.

(1540)

[Traduction]

La semaine dernière, lorsque notre comité permanent a entendu des témoins, j'ai appris que très peu avait changé. On nous a parlé d'un couple de lesbiennes, à bord d'un train, à qui on a dit d'arrêter de se tenir par la main, sans quoi on les ferait descendre du train. On nous a parlé des gens renvoyés des forces armées et des employés congédiés ici, sur la colline, monsieur le Président, situation que vous voudrez peut-être examiner.

[Français]

On nous a rappelé et raconté l'histoire d'un homosexuel qui, ayant occupé le poste de gérant d'un immeuble pendant de nombreuses années sans que l'on se plaigne de lui, a été licencié lorsque la direction a appris qu'il était gai.

[Traduction]

Des parents de gais et de lesbiennes nous ont dit qu'ils avaient dû affronter leurs propres préjugés. Ils en avaient beaucoup à apprendre, comme beaucoup de députés ici. Ils étaient très inquiets pour le bien-être de leurs enfants, sachant que ceux-ci devraient affronter beaucoup d'ignorance, de haine et de discrimination.

Personne à la Chambre, et pas moins de sept. . .

Le vice-président: Je suis désolé, mais le temps accordé à la députée est écoulé. Acceptez-vous à l'unanimité de laisser la députée poursuivre pendant une minute encore?

Des voix: D'accord.

Mme Finestone: Monsieur le Président, j'ai entendu pas moins de sept ministres de la Justice promettre d'inclure l'orientation sexuelle dans les motifs de distinction illicite. Pas un d'entre eux ne l'a fait et les gais et les lesbiennes du Canada ont dû en payer le prix.

Nous sommes très heureux d'avoir un ministre déterminé à enfin donner aux gais et aux lesbiennes le même statut que tous les autres Canadiens et à les protéger au même titre de la discrimination, rien de plus, rien de moins. Contrairement à ce que beaucoup de députés craignent, le projet de loi ne change rien à la définition de mariage et de famille, il ne légalise pas les comportements sexuels criminels et il ne confère aucun avantage.


2445

Je trouve plutôt injuste, voire irresponsable, que des députés pensent que ces trois aspects seront modifiés par le projet de loi. Ils savent parfaitement bien que ce n'est pas le cas. Ils se servent de cela à leurs propres fins. Cette mesure ne donne aucun avantage. Elle ne porte pas sur les actes illégaux ni sur les actes criminels. Elle ne change rien à la définition de la famille.

Si nous voulons avoir une discussion sur l'état de la famille, nous devrions inscrire cette question à notre programme. L'état de la famille est le reflet des réalités économiques, sociales et politiques qui existent aujourd'hui dans notre pays. C'est ce qui cause certaines des préoccupations ressenties à l'égard de la famille.

Les lesbiennes ont des familles. Les gais ont des familles. Ce sont des familles reconstituées. Ce sont des familles de fait. Il y a toutes sortes de familles. Ce projet de loi traite de l'orientation sexuelle et demande que, en tant que groupe, ces gens ne fassent pas l'objet de discrimination. C'est tout à fait juste.

C'était quand la dernière fois que le fait d'accorder des droits égaux aux femmes a diminué les droits. . .

Le vice-président: La députée a certainement eu plus d'une minute pour terminer.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je suis honoré de pouvoir prendre la parole au sujet du projet de loi à l'étude.

Notre pays se trouve maintenant à la croisée des chemins en raison du processus dans lequel nous nous sommes engagés et des résultats que le projet de loi ne manquera pas de produire.

La manière dont les choses ont été faites me préoccupe beaucoup. Je crois que le respect envers la loi et le gouvernement découle directement de la façon dont les députés représentent leur circonscription et du soin qu'ils mettent à écouter la population canadienne.

On constate un manque de respect grandissant envers les gouvernements qui ont imposé toutes sortes de règles, de règlements et de lois aux Canadiens sans leur consentement. Le meilleur exemple est la TPS, qui a retenu l'attention du Parlement et de tous les Canadiens. Pendant la campagne électorale de 1993, les électeurs m'ont dit à d'innombrables reprises que mon prédécesseur n'avait pas défendu leur point de vue à ce sujet.

(1545)

Lorsque nous voulons modifier une loi et étudier un projet de loi aussi important que celui-ci, il est impératif que les députés aient le temps de retourner devant leurs électeurs pour discuter du libellé du projet de loi et des ses effets.

On nous refuse cette possibilité. Les obstacles que nous devons surmonter dans l'exercice de notre travail sont tels qu'ils constituent une atteinte à nos privilèges.

Je suis très mécontent que le gouvernement, motivé par le seul opportunisme politique, ait décidé de présenter ce projet de loi maintenant. Cela ne faisait pas partie des projets à long terme du gouvernement. Le discours du Trône n'en fait pas mention. Tout à coup, à la fin de janvier, il est devenu extrêmement important de proroger le Parlement et de recommencer à neuf. Puis, il y a eu un nouveau discours du Trône exposant toute une liste de projets que le gouvernement considérait prioritaires. Ce projet de loi n'était pas mentionné dans le discours du Thrône. Le ministre a dit, il y a environ un mois, qu'il n'avait pas l'intention de déposer de projet de loi pour l'instant.

Pourquoi l'a-t-il fait? Je constate un cynisme grandissant de la part des politiciens. Je crois que le gouvernement a eu recours à cette tactique pour éloigner les critiques très sévères dont il faisait l'objet de la part des médias au sujet de son obligation de rendre compte, du respect de ses promesses électorales, de la TPS et d'autres questions. Le gouvernement s'est servi de ce projet de loi pour éloigner les critiques.

Ce n'est pas raisonnable. Je ne crois pas que la vie et le bien-être des Canadiens et de leurs familles devraient en quelque sorte figurer sur la liste des questions à régler pour des raisons politiques.

Ma deuxième plainte est encore plus sérieuse, car je veux parler de la nécessité d'invoquer la clôture. Ça n'a pas de sens. Alors que nous voulons rétablir la confiance dans le gouvernement, la Chambre des communes et le Parlement, pourquoi faire adopter ce projet de loi à toute allure parce que nous soupçonnons que, si les gens débattent de cette question, l'opposition sera telle qu'il y aura de graves retombées politiques? Ce n'est pas raisonnable.

Il m'a toujours semblé que le recours à la clôture devait être réservé aux questions d'une extrême urgence. Elle devrait être invoquée quand l'intérêt de notre pays ou notre sécurité sont en jeu, quand un problème doit être réglé sans attendre si nous ne voulons pas qu'il ait des conséquences graves.

Il est tout à fait déraisonnable de la part du gouvernement de mettre un terme au débat à la Chambre et au comité. Les Canadiens sont nombreux à vouloir dire leur mot sur cette question. Combien de temps ont-ils eu pour se préparer? Je suppose qu'ils ont eu droit à une fin de semaine et qu'ils ne devraient donc pas se plaindre. Devraient-ils tout laisser tomber pour venir à Ottawa témoigner devant le comité et présenter leur mémoire? Les gens ont eu un délai très court pour répondre.

Le vote sera terminé avant que beaucoup de gens ne sachent seulement qu'il a eu lieu, tout simplement parce qu'il faut du temps pour communiquer avec les gens. Qu'y aurait-il de mal à nous donner la possibilité de poser carrément et équitablement la question aux gens que nous représentons?

(1550)

Si les arguments en faveur de cette mesure législative sont si puissants, elle aura certainement l'appui du public. Si le public ne l'appuie pas, soyons honnêtes et admettons que nous n'avons qu'un respect mitigé de la démocratie. C'est clair que nous avons renoncé au principe que, dans une démocratie, c'est la majorité qui dirige. Nous avons même renoncé au principe que l'opinion des électeurs


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compte. Je ne sais pas pourquoi nous nous embarrassons de ce processus si l'on y ajoute autant de contraintes.

Je voudrais faire certaines observations concernant le projet de loi. Beaucoup de gens qui appuient la mesure ont essayé de nous rassurer en nous disant que l'enjeu s'arrêtait là et que tout ce dont on parlait était affaire de discrimination.

Je parlerai haut et clair en faveur des principes qui interdisent la discrimination contre des individus sur la base de certaines caractéristiques personnelles. Toutefois, la Loi canadienne sur les droits de la personne présente réellement deux faiblesses dans son énumération. Une première faiblesse, c'est la difficulté de ne pas inclure tous les éventuels groupes et individus. La deuxième faiblesse est tout aussi importante puisqu'on peut présumer que les pratiques discriminatoires sont permises envers quiconque ne figure pas sur cette liste.

Je rejette fermement cette hypothèse. L'une des principales raisons qui m'incitent à m'opposer à ce projet de loi, c'est que je ne figure pas sur la liste et que c'est donc correct et acceptable que je sois victime de discrimination.

Les députés doivent se demander de quoi je parle. Je suis ce genre d'homme qu'on décrit comme costaud. On emploie aussi parfois le terme corpulent. Je suis victime de discrimination pour des raisons de poids. Cela ne se limite pas au fait qu'on me coince dans les sièges étroits de la classe économique dans les avions. Cela va beaucoup plus loin. Ici même, à la Chambre, j'ai été victime de discrimination à mon endroit à cause de mon poids.

Voici comment. Je travaillais auparavant au Northern Alberta Institute of Technology. En tant que membre du personnel, j'avais le droit d'adhérer au régime d'assurance. En arrivant ici, j'ai cru que j'allais pouvoir obtenir un régime équivalent, mais on m'a refusé l'adhésion au régime d'assurance-vie de la Chambre des communes à cause de mon poids. On n'a pas voulu tenir compte du fait que mon père a 85 ans et qu'il pèse le même poids. On n'a rien voulu entendre. Je ne figure pas sur la liste.

Je tiens à dire en terminant que la liste n'est pas complète tant que tous les Canadiens n'y figureront pas. Voilà la situation. La discrimination n'est pas acceptable. Tout ce que nous ne faisons, c'est ajouter des éléments à la liste, ce qui signifie forcément qu'on peut faire de la discrimination à l'endroit de tous ceux qui ne figurent pas encore sur la liste. Je rejette cette situation et j'exhorte les députés libéraux, qui ont le pouvoir de faire quelque chose à cet égard, à voter contre ce projet de loi parce qu'il est tellement erroné.

[Français]

PROJET DE LOI C-33. AVIS DE MOTION CONCERNANT L'ATTRIBUTION DE TEMPS

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il a été impossible d'en arriver à un accord en vertu des dispositions du paragraphe 78(1) ou 78(2) du Règlement relativement aux délibérations, à l'étape du rapport et à l'étape de la troisième lecture, du projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne.

En vertu des dispositions du paragraphe 78(3) du Règlement, je donne avis qu'un ministre de la Couronne présentera une motion d'attribution de temps à la prochaine séance de la Chambre afin d'attribuer un nombre spécifié de jours ou d'heures aux délibérations à ces étapes et aux décisions requises pour disposer de ces étapes.

[Traduction]

LES MOTIONS D'AMENDEMENT

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends part au débat sur le projet de loi C-33.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, il serait sans doute bon de voir où en est notre grand pays et d'examiner l'évolution du Canada.

(1555)

Il ne fait aucun doute que, lorsque les Français et les Anglais sont arrivés ici, le pays était habité par un grand nombre d'autochtones qui formaient leur propre nation. Il ne fait aucun doute que, au fil des ans, l'une des erreurs que nous avons commises est la façon dont nous avons traité les autochtones. Il ne fait aucun doute que les immigrants qui sont venus au Canada ont fait la pénible expérience du racisme.

Je me souviens avoir lu des articles sur l'évolution des différents groupes qui ont peuplé le Canada et être tombé, dans un livre, sur une affiche qui disait: «On embauche. Irlandais, prière de s'abstenir.» Par une ironie du sort, ma femme est Irlandaise.

Il ne fait aucun doute que les Chinois qui ont travaillé à la construction de la voie ferrée ont été victimes de discrimination. Leurs épouses, qui n'avaient pas le droit de vivre avec eux, étaient logées dans des genres de casernes.

On ne sait que trop ce qui est arrivé aux Canadiens d'origine japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils ont été arrêtés, enfermés dans des camps, dispersés en dehors de la Colombie-Britannique, et leurs biens ont été confisqués.

Dans ma région, Kitchener-Waterloo, il ne fait aucun doute que les gens d'origine allemande ont eu des problèmes. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Italiens aussi ont été victimes de discrimination.

Les juifs ont été victimes de discrimination au cours de ce siècle et des siècles précédents. Le Spirit of St. Louis, un navire qui transportait des centaines de juifs, n'a jamais pu accoster dans un port et tous les passagers à bord, des femmes et des enfants pour la plupart, ont fini par être tués.

Je suis arrivé de Hongrie comme réfugié en 1957. Je suis douloureusement conscient des événements qui se déroulent actuellement en Europe, spécialement dans l'ex-Yougoslavie, mais également dans d'autres pays. Dans ces pays, il y a des problèmes de minorités qui ne s'entendent pas entre elles.

Lorsque j'étais président de la Fédération des étudiants, à l'Université de Waterloo, au début des années 70, j'ai entendu parler de cas de personnes à qui on avait refusé de louer un logement, parce qu'elles étaient d'origine chinoise ou autre. Nous en avions la preuve.

Juste avant cela, nous avions eu le grand débat sur les droits de la personne aux États-Unis. C'est à ce moment-là que nous avons appris ce que voulait dire nous vaincrons et ce que l'on faisait aux Afro-Américains aux États-Unis. Ce genre de discrimination existait aussi au Canada.


2447

À la fin des années 70, une des bénévoles, qui travaillait pour une organisation où j'étais directeur exécutif, s'est suicidée, parce qu'elle ne pouvait plus supporter de vivre dans un monde où l'homophobie était si présente.

En 1990, pendant l'opération Tempête du désert, les gens de ma collectivité ayant des origines arabe et juive se sont réunis pour essayer de combler le fossé qui existait entre leurs deux communautés et s'assurer que ce qui se produisait au Moyen-Orient n'aurait pas de répercussions ici.

Il en a résulté la création d'une commission des relations raciales dans la région de Waterloo. Son objectif était d'améliorer la compréhension entre les différents groupes qui constituent notre communauté.

Il n'est pas difficile de s'apercevoir que le fanatisme est bien vivant. On en a fait preuve ici même à la Chambre. Je remarque dans les journaux d'aujourd'hui que la députée réformiste de Calgary-Sud-Est s'interroge sur sa place dans un parti qui épouse des opinions racistes et extrémistes. C'est le résultat d'un incident qui a eu lieu la semaine dernière et où l'ancien whip du Parti réformiste a déclaré aux Canadiens qu'il était normal de licencier quelqu'un en raison de son orientation sexuelle, qu'il était acceptable de licencier quelqu'un ou de le faire travailler dans l'arrière-boutique en raison de sa couleur.

(1600)

C'était acceptable parce que, malheureusement, trop de gens dans le troisième parti expriment ces opinions. Il est regrettable que de telles opinions soient proférées par des députés. Le travail de député devrait être d'essayer de rapprocher les diverses communautés et non de les diviser, en les montant les unes contre les autres. Ce qui fait tout l'intérêt de ce pays, c'est que nous avons appris de nos expériences passées et que nous avons travaillé à construire une société tolérante.

La question de savoir si le sujet d'aujourd'hui devrait faire l'objet d'un vote libre ou s'il devrait être soumis à la discipline de parti a déjà été débattue avant que la décision ne soit prise la semaine dernière. J'étais partagé à ce sujet.

Je pense que le projet de loi dont nous parlons vise essentiellement les droits de la personne et l'égalité des Canadiens. Nous disons également que personne ne pourra licencier quelqu'un en raison de son orientation sexuelle. Une banque, par exemple, ne pourra pas refuser des services à une personne en invoquant son orientation sexuelle. Pour moi, c'est une question de droits de la personne. Certains de mes collègues dans le Parti libéral ont dit que, pour eux, c'était une question morale.

À l'origine, j'ai dit au whip de notre parti que j'estimais que ce devait être un vote de parti et que je voulais que l'on vote selon la ligne du parti. J'ai écouté le débat. J'ai vu ce qui s'est produit à la Chambre lorsque l'ex-whip du Parti réformiste s'est levé et a tenu les propos que l'on sait. Non seulement a-t-il formulé les commentaires en question, mais de nombreux députés autour de lui, et même la direction du parti, ont appuyé sa déclaration. À ce moment, j'ai souhaité que le vote soit libre. Lorsque cette question est posée à la Chambre, je veux que les gens sachent que nous avons le droit de voter selon notre conscience.

Je suis très fier de voter en faveur du projet de loi. Je suis fier de me lever pour appuyer ce projet de loi, qui contribuera à faire du Canada le meilleur pays du monde. Il rendra notre société encore plus tolérante.

Je crois qu'aucun Canadien ne voudrait qu'on refuse un emploi à une personne en raison de son orientation sexuelle. Je crois qu'aucun Canadien ne voudrait qu'on refuse un prêt bancaire à quelqu'un en raison de son orientation sexuelle.

Je regrette que certains députés aient mal présenté le projet de loi et qu'ils aient fait valoir des arguments tout à fait fallacieux, en disant, par exemple, que si l'on adoptait ce projet de loi, on légalisait la pédophilie. Les arguments de ce genre ne sont que des faux-fuyants dont se servent ceux qui veulent maintenir le statu quo, qui déplorent l'existence d'une loi sur les droits de la personne au Canada et qui veulent entraver l'adoption du projet de loi.

Ce projet de loi ne se fonde pas sur l'orientation sexuelle pour accorder à un groupe des privilèges refusés aux autres Canadiens. Il garantit simplement qu'on ne refusera pas à un groupe en particulier ce que tous les autres Canadiens peuvent obtenir.

Je serai fier de me lever à ma place pour voter en faveur de ce projet de loi. Les gens du Canada seront fiers de nous, eux aussi.

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'aime bien prendre part aux débats sur les projet de loi dont la Chambre est saisie.

Le projet de loi C-33 est une autre mesure législative qui a soulevé de sérieux débats dans tout le pays et à juste titre d'ailleurs. Je vais aborder trois aspects sur lesquels, à mon avis, les députés d'en face ne se sont pas penchés suffisamment.

(1605)

Premièrement, ce projet de loi concerne le lieu de travail. Il y est question des conditions de travail dans les organismes gouvernementaux, les sociétés d'État et les secteurs d'activité qui relèvent du gouvernement fédéral. Nous disposons déjà d'une loi qui porte sur le sexe au travail ou plus précisément le harcèlement sexuel au travail.

Le harcèlement sexuel est totalement interdit au travail, cela va de soi. Quiconque pense pouvoir adopter un comportement qui a des connotations sexuelles doit être puni. Nous ne tolérerons pas pareille attitude au travail. Le harcèlement sexuel a été défini comme étant plus grave que les voies de fait. Il comprend même les propos ayant une connotation sexuelle, les mentions de prouesse sexuelle, d'aventure sexuelle, tout ce qui a un caractère sexuel et qui peut être insultant pour quelqu'un d'autre au travail. C'est bien qu'il en soit ainsi.

Par conséquence, accepter l'orientation sexuelle sur le lieu de travail contrevient directement à la loi déjà existante qui interdit le


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harcèlement sexuel. Voilà maintenant qu'on dit que l'orientation sexuelle est admise, mais pas le harcèlement sexuel.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement pense que l'orientation sexuelle, quelqu'en soit la manifestation, -et je ne suis pas certain de la forme qu'elle prendra-a sa place au travail. Nous pouvons croiser à notre insu dans la rue des gens ayant une orientation sexuelle différente et nous ne le saurons jamais. On voudrait maintenant nous dire qu'il n'y a pas de mal à afficher son orientation sexuelle au travail, alors que le harcèlement sexuel est tout à fait illicite. Cela contredit totalement les faits, contradiction dont le gouvernement n'a pas tenu compte au moment où il insiste sur l'adoption de ce projet de loi, allant à l'encontre des désirs de beaucoup de Canadiens.

Ensuite, bien des Canadiens estiment que l'expression «orientation sexuelle» est un mot-code désignant l'homosexualité et le lesbianisme. Certains trouvent ces actes repoussants et répugnants et s'opposent à leur légalisation par la Chambre. Le Parti réformiste est chargé de représenter l'opinion divergente selon laquelle certaines personnes estiment que des questions comme celles-ci ne devraient pas être couchées dans la loi.

Il est important de se faire le porte-parole de ceux qui s'opposent au point de vue que présente le gouvernement. Il est important de reconnaître que ces gens adoptent cette opinion de manière tout à fait légitime. Ils ont droit à leurs opinions. Ils ont le droit de voir leurs opinions exprimées. Ces opinions sont exprimées librement par le Parti réformiste. J'espère qu'elles sont exprimées par plus de gens que les quelques députés d'en face qui doivent rassembler leur courage pour s'élever contre leurs collègues du Parti libéral et exprimer librement l'opinion d'un grand nombre de personnes dans leur circonscription qu'ils représentent et qui ne sont pas d'accord avec ce projet de loi.

Enfin, ce projet de loi est débattu publiquement depuis deux ou trois semaines. Il y a autre chose qui existe depuis deux ou trois mille ans, à savoir une sorte de code moral que nous appelons les principes judéo-chrétiens. Nous pourrions dire qu'ils ont résisté à l'épreuve du temps. Il s'agit de principes comme «Tu ne tueras point», «Tu respecteras ton père et ta mère», «Tu ne commettras pas l'adultère», etc.

(1610)

Lorsqu'on se penche sur les choses que nous faisons depuis 25 ans, on s'aperçoit que la Chambre a abandonné le principe selon lequel on ne doit pas tuer. Elle n'exprime même plus d'opinions sur l'avortement. Nous n'avons pas de loi, au Canada, contre l'avortement. Au Canada, chaque année, 100 000 enfants à naître sont victimes d'un avortement. Nous tournons le dos à une expression qui remonte à 3 000 ans: Tu ne tueras point.

Le député de Burnaby souscrit à l'idée de supprimer ce principe. Nous mettons maintenant l'accent sur les personnes plus âgées. Nous en sommes presque rendus à l'euthanasie. On va en discuter à la Chambre, à l'avenir. Si on met en parallèle l'ancien principe et code moral selon lequel on doit honorer son père et sa mère et le débat sur l'euthanasie qui pointe à l'horizon, on doit se demander ce qui se passe.

Ainsi, j'invite tous les députés à opposer un code qui remonte à près de 3 000 ans au débat qui a lieu depuis environ trois semaines. Je tiens à dire à mes collègues ministériels et bloquistes que si ces principes ont résisté à l'épreuve du temps pendant 3 000 ans, si des milliers de personnes sont mortes pour eux et n'ont pas hésité à sacrifier leur vie pour les faire respecter, ils doivent sûrement mériter qu'on les conserve.

J'espère sincèrement que les ministériels et les bloquistes réfléchiront sérieusement à cette question. Même s'ils ont peut-être le sentiment qu'ils ont en main tous les faits, même s'ils pensent peut-être que c'est la bonne chose à faire, rappelons-nous que depuis 3 000 ans, nous avons un code aux termes duquel ce que nous nous apprêtons à faire est répréhensible, à l'instar des mesures que nous avons prises récemment au sujet de l'avortement et de celles que nous pourrions prendre dans un avenir rapproché en ce qui concerne l'euthanasie.

Nous jetons au rebut le code moral qui nous régit depuis 3 000 ans. Nous disons que les députés et les simples citoyens ont une sagesse et une connaissance qui dépassent de loin celles des gens qui ont vécu sur cette terre au cours des 3 000 dernières années. C'est un simple avertissement.

J'exhorte mes collègues à peser le pour et le contre très sérieusement. À mon humble avis, nous aurions tort d'approuver ce projet de loi.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, j'aime généralement commencer mes discours en disant que je suis heureux de participer à ce débat. Malheureusement, je trouve que le débat sur le projet de loi C-33 sème la confusion et entraîne, en fait, une certaine hostilité et des divisions, même dans ma propre collectivité.

Le grand public doute encore de l'intégrité des députés. Je note le sondage publié récemment par Ekos Research qui a découvert qu'à peine 15 p. 100 des gens avaient confiance dans leurs élus. Je prends souvent le temps de me demander pourquoi. Il me semble que c'est parce que beaucoup de gens croient qu'une fois élus, les politiques ne représentent pas leur point de vue. Bien entendu, c'est ce qui se produit dans une certaine mesure du fait de la diversité de notre nation. Comment pouvons-nous amener les députés de l'Ontario à voter pour des taxes à la consommation harmonisées dans les Maritimes, alors que cela ne semble pas être dans leur propre intérêt sur le plan financier?

(1615)

Le problème s'aggrave encore davantage lorsqu'on en arrive à des questions morales. En général, la population a deux points de vue sur le projet de loi C-33. On pense qu'il s'agit d'une question de droits de la personne ou d'une question de moralité. Il y a ceux qui croient que nous nous assurons que tous les citoyens peuvent vivre


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sans être victimes de discrimination et ceux qui pensent que c'est un premier pas vers une redéfinition de la famille et du mariage.

Je suis très mal à l'aise d'avoir à juger à l'avance de la moralité des gens de Durham. Ce n'est pas que je refuse d'assumer mes responsabilités, mais plutôt que je me rends compte que la définition de moralité d'une personne peut être bien différente de celle d'une autre.

À ce sujet, je félicite mon chef d'avoir permis la tenue d'un vote libre. Nous devrions prendre le temps de faire davantage confiance à nos élus, mais d'un autre côté, ces derniers devront prouver qu'ils peuvent, à titre individuel, relever le défi.

Au Royaume-Uni, même si de nombreux ministériels ont exprimé des points de vue contraires, leurs gouvernements ne sont pas tombés. Je crois que les électeurs peuvent ainsi mieux faire connaître leur point de vue. Une discipline de parti de rigueur variable aiderait, dans une large mesure, à rétablir la confiance que la population a dans la Chambre.

Je note en passant que les déclarations de la communauté homosexuelle s'opposant à un vote libre vont à l'encontre du désir de cette communauté d'éliminer la discrimination et les abus de pouvoir dont elle est victime.

Pour revenir au projet de loi, j'ai étudié les modifications et j'ai lu la jurisprudence. Ce projet de loi est très clair; il a trait aux pratiques d'embauchage au niveau fédéral, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du gouvernement, ainsi qu'à la fourniture des biens et services.

La plupart d'entre nous conviennent que la discrimination est inacceptable quelle que soit notre attitude envers les différents modes de vie. La tendance à faire travailler les noirs et les homosexuels dans l'arrière-boutique nous montre que les créatures préhistoriques en Alberta ne se trouvent pas toutes au Royal Tyrrell Museum of Palaeontology à Drumheller. Je suis sûr que de nombreux Albertains pensent comme moi.

Mes valeurs sont conventionnelles. En tant que père de famille, je respecte le rôle historique de cette institution, c'est-à-dire le mariage entre deux personnes de sexes opposés. C'est la seule conclusion possible si l'on étudie l'anthropologie.

L'interprétation juridique d'une loi ne se répercute pas nécessairement sur les définitions d'une autre loi. Quoi qu'il en soit, la plupart des problèmes exprimés par ceux qui voient cela comme une question de moralité sont liés à la Charte des droits et libertés et à l'interprétation de l'article 15 de ce texte. De toute façon, le mariage et l'adoption relèvent essentiellement de la compétence des provinces.

Sept des provinces ont inclus dans leur législation sur les droits de la personne une disposition interdisant la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. En outre, les tribunaux ont interprété la Loi canadienne sur le droits de la personne comme si l'expression « orientation sexuelle» figurait déjà dans la liste des motifs de distinction illicite. Autrement dit, ces modifications ne font que rendre la loi conforme à l'interprétation qu'en font les tribunaux.

Afin de bien représenter mes électeurs, j'ai mis de côté mon opinion sur ces questions et j'ai fait faire un sondage professionnel dans ma circonscription, du 1er au 3 mai derniers. Nous y avons effectué plus de 400 appels.

La question était très simple: «Comme vous le savez, le ministre de la Justice a présenté un projet de loi à la Chambre des communes, afin d'ajouter dans la Loi sur les droits de la personne l'interdiction de faire de la discrimination en se fondant sur l'orientation sexuelle. Cette interdiction s'appliquerait à l'emploi dans la fonction publique fédérale et dans les sociétés constituées sous le régime de la loi fédérale. Cette loi s'appliquerait également à la réception et à la vente de biens et de services. Êtes-vous franchement pour, passablement pour, passablement contre ou franchement contre cette mesure législative, ou sans opinion?»

(1620)

Ma circonscription est à la fois urbaine et rurale. Bien que mon bureau ait été débordé d'appels venant d'opposants, le sondage a révélé une position très différente: 56 p. 100 des électeurs de Durham appuient cette mesure législative.

De plus, dans le cadre d'un sondage pancanadien effectué par Angus Reid, entre le 18 et le 24 avril, on a téléphoné à environ 561 personnes en Ontario. Les résultats ont été identiques à ceux de mon propre sondage. Autrement dit, 56 p. 100 de la population est favorable à ce projet de loi.

Il est clair que la majorité des électeurs de Durham veulent que j'appuie cette mesure législative, ce que j'ai l'intention de faire. La valeur d'une société civile ne se mesure pas au traitement qu'elle accorde à sa majorité, mais plutôt à ses minorités.

Pour que tous les éléments de notre société bénéficient d'un traitement équitable, il est raisonnable de trouver des façons d'empêcher la discrimination contre ceux qui forment une minorité. Il est à la fois juste et raisonnable d'agir ainsi. Même ceux qui désapprouvent ces modifications accepteront ce corollaire.

Je crois m'être acquitté de mes obligations en votant librement sur cette question. Je suis heureux de défendre les opinions des électeurs de Durham. À ceux qui s'y opposent, je rappelle que l'opposition constitue une grande force de nos institutions démocratiques. La population peut débattre ouvertement de questions comme celle-ci et arriver à une conclusion.

Même si cette conclusion est loin d'un consensus, la plupart des électeurs de Durham reconnaîtront que le Parlementaire n'a pas à juger à l'avance de leur conduite morale, mais ils concluront qu'il est juste et raisonnable de garantir à certains éléments de notre société qu'ils ne seront pas victimes de discrimination.

Je suis heureux d'avoir représenté les électeurs de Durham dans ce dossier. Je voterai comme ils me l'ont recommandé, c'est-à-dire en faveur de ce projet de loi.

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole relativement à ce projet de loi. Je m'oppose à cette mesure que j'estime être fondamentalement im-


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parfaite, comme le confirme d'ailleurs le fait qu'un grand nombre de députés de tous les partis soient préoccupés par son contenu.

La portée de ce projet de loi est plus grande que le gouvernement ne veut bien l'admettre. Dans l'affaire Mossop, le juge en chef Lamer a dit: «De fait, dans le cas qui nous occupe, si le législateur avait décidé d'inclure l'orientation sexuelle à la liste des motifs prohibés de discrimination, mon interprétation de l'expression «situation de famille» aurait pu être fort différente et j'aurais peut-être alors conclu que la situation de M. Mossop mettait en jeu à la fois son orientation sexuelle et sa situation de famille». Telle est la préoccupation qu'un grand nombre d'entre nous avons relativement à ce projet de loi.

Max Yalden, président de la Commission canadienne des droits de la personne, a abondé dans le même sens lorsqu'il a dit: «Nous sommes fortement en faveur d'une modification qui interdirait la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Si des avantages sont accordés à un couple hétérosexuel vivant en union libre, les mêmes avantages devraient être consentis à un couple qui se trouve dans la même situation, hormis le fait qu'il s'agit de deux hommes ou de deux femmes. Notre position à cet égard est très claire. Nous attendons la réaction du gouvernement».

Cette impression est bien fondée, puisqu'elle est partagée par le juge en chef de la Cour suprême et par une autorité telle que M. Yalden.

Le journal local signalait que la position du gouvernement, à savoir que cette question n'était pas importante, laissait grandement à désirer. Si j'employais les termes utilisés dans l'article en question, je suis certain que la présidence jugerait mes propos non parlementaires.

(1625)

J'aimerais signaler les propos d'un député d'en face qui a dit que certains de nos députés se sont levés en Chambre aujourd'hui et ont qualifié cette mesure législative de «xxx». Je vous laisse le soin de deviner le mot qui est remplacé par ces x. Quoi qu'il en soit, la portée de ce projet de loi est plus grande qu'on ne le croirait à première vue.

Le député qui a pris la parole juste avant moi a parlé de sondages. Dans ma circonscription, nous avons voulu savoir ce que les gens pensaient de cette mesure. Nous avons posé deux questions. La première était: «Croyez-vous que le gouvernement fédéral devrait modifier la loi de façon à inclure l'orientation sexuelle à la liste des motifs de discrimination illicite?» Une faible majorité était d'avis que c'était là un objectif raisonnable.

La deuxième question demandait: Seriez-vous en faveur de cette modification si elle voulait dire que les couples homosexuels auront droit aux prestations économiques et familiales, dont les avantages prévus dans l'assurance-maladie, les prestations de survivants, les avantages fiscaux et ainsi de suite? C'est sur ce point que les gens ont fixé la limite. Quand nous évoquons cette possibilité dans la question, l'opposition au projet de loi s'élève.

Quiconque fait sérieusement un sondage auprès de ses électeurs au sujet du projet de loi doit poser ces deux questions. La première cherche à savoir s'ils sont en faveur du projet de loi, et la seconde et plus importante cherche à savoir s'ils continuent de l'appuyer si le projet de loi comporte ces implications.

Étant donné ces implications et étant donné qu'une importante collectivité religieuse dans notre pays se préoccupe de ces implications, la Conférence canadienne des évêques catholiques a proposé certains amendements au député d'Edmonton appartenant à mon parti. Il a vérifié auprès de l'Union évangélique du Canada pour savoir si cet organisme appuierait ces amendements au projet de loi.

Les amendements proposés par les évêques catholiques sont, premièrement, que la définition de la notion de couple et de famille, aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne, soit limitée aux couples hétérosexuels, comme le dit le Conseil canadien des évêques catholiques, à cause du rôle irremplaçable de la procréation et de l'éducation des enfants, dont dépend l'avenir de la société; deuxièment, que la loi permette de tenir compte de l'historique et des objectifs de cette mesure lorsqu'il s'agit de voir si certaines distinctions en matière de politique équivalent à une discrimination injuste; troisièment, que soient protégées les méthodes d'enseignement et d'embauche des institutions religieuses.

Malheureusement, le gouvernement, bien qu'il soutienne que le projet de loi n'aura pas ces conséquences, répugne à appuyer les amendements qui vont dans le sens de la position des évêques catholiques et des Chrétiens évangélistes du Canada. Cela me semble très révélateur des intentions qui animent le gouvernement.

Je n'ai aucune difficulté à voter contre ce projet de loi. Je crois que mes électeurs y sont fermement opposés pour les motifs que j'ai donnés. Toutefois, ma plus grande préoccupation, à l'égard de ce projet de loi, se rapporte à ce qui est la plus grande priorité dans ma vie. Croyez-le ou non, même si j'attache beaucoup d'importance à mon poste de député, ce n'est pas ma première priorité. La première est de tâcher d'être un père acceptable pour mes enfants. J'ai mes lacunes, certainement, mais je reçois un grand soutien de ma femme, à qui je dois une reconnaissance éternelle.

Lorsque j'examine ce projet de loi et que j'analyse les raisons pour lesquelles le gouvernement le propose, je me demande si cette mesure vise seulement à prévenir la discrimination ou si elle ne propose pas plutôt à nos enfants un mode de vie différent en disant qu'il est tout aussi valable et important que l'autre.

Je ne peux pas dire à mes enfants qu'ils peuvent choisir soit de se marier, de fonder une famille et d'élever des enfants, soit de vivre selon un autre mode de vie tout aussi légitime, l'homosexualité. Je ne crois pas que ces deux modes de vie sont égaux. Cela ne veut pas dire que, parce qu'un adulte prend une décision personnelle, je m'oppose à lui ou le méprise. Aucunement. Mon rôle n'est pas de juger.

(1630)

Mon rôle de parent consiste à présenter à mes enfants les possibilités qui s'offrent raisonnablement à eux. Si nous appuyons ce projet de loi, qui finira par donner aux couples homosexuels des avantages sociaux semblables à ceux des couples hétérosexuels, nous nous trouvons à dire à nos enfants, au fond, que c'est un mode de vie légitime. Je ne crois pas que nous puissions présenter les choses de


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cette manière. C'est pourquoi je suis très inquiet et voterai contre le projet de loi le moment venu.

Mme Karen Kraft Sloan (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, avant de prononcer mon discours, je voudrais faire quelques observations sur l'intervention de l'orateur précédent.

De toute évidence, les familles n'ont pas toutes la même façon de voir les choses, mais dans ma famille, la leçon la plus importante que je veux enseigner à mes enfants, c'est de respecter et d'apprécier la dignité de tous les êtres humains, peu importe la façon dont ils choisissent de vivre leur vie. Les déclarations du député vont à l'encontre de la philosophie de son parti qui continue de parler d'égalité.

Je suis très heureuse de pouvoir intervenir à la Chambre aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-33. La Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique au gouvernement fédéral et aux sociétés sous réglementation fédérale. Les dix provinces et les deux territoires ont leur propre loi sur les droits de la personne.

Chacune de ces lois-fédérale, provinciales ou territoriales-sur les droits de la personne contient une liste de motifs de distinction illicite. Au Canada, la plupart de ces lois visent à combattre la discrimination en matière d'emploi, d'hébergement et de fourniture de biens et de services.

La Loi canadienne sur les droits de la personne régit essentiellement l'emploi et la fourniture de biens et de services dans les secteurs de compétence fédérale. À l'heure actuelle, les motifs de distinction illicite énumérés dans la Loi canadienne sur les droits de la personne sont ceux qui sont fondés sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l'âge, le sexe, l'état matrimonial, la situation de famille, la déficience et l'état de personne graciée.

Le projet de loi C-33 ne fait qu'ajouter l'orientation sexuelle aux motifs de distinction illicite. L'an dernier, je suis intervenue à la Chambre pour appuyer le projet de loi C-41. Tout au long de mon discours, les députés réformistes n'ont cessé de me chahuter et de me conspuer. Les réformistes s'opposaient au fait que j'appuyais l'ajout de l'orientation sexuelle aux motifs de distinction illicite, notamment en ce qui concernait la littérature haineuse. Ils n'ont rien compris alors et ils ne comprennent toujours rien.

L'an dernier, j'ai affirmé que nous étions nombreux à présumer que la société canadienne est ouverte, tolérante et accueillante. Toutefois, on ne peut pas toujours tenir cela pour acquis. Les députés du Parti réformiste ont déclaré publiquement qu'ils congédieraient un employé homosexuel. En outre, ils ont présenté des observations plutôt désobligeantes à l'endroit des Canadiens de race noire. Ces observations sont absolument inacceptables. Elles prouvent à quel point une loi sur les droits de la personne est nécessaire.

Imaginez un instant que vous êtes gai ou lesbienne et que vous êtes à l'emploi de quelqu'un qui, comme les députés réformistes, croit qu'il a le droit de vous congédier non pas au mérite, mais à cause d'une caractéristique personnelle. Et pourtant, les réformistes ne cessent de dire et de répéter qu'ils appartiennent au parti de l'égalité et que le seul critère d'emploi est le mérite.

Personne ne peut nier que la discrimination que les gais et les lesbiennes subissent dans leur milieu de travail est bien réelle. Beaucoup travaillent dans des milieux hostiles et homophobes où il est de mise de se moquer des gais. Les lesbiennes et les gais doivent souvent taire leur identité sexuelle pour décrocher ou garder un emploi. Il s'ensuit qu'ils ne peuvent pas parler ouvertement de leur vie personnelle ni de leur partenaire.

(1635)

Lorsqu'on ne peut pas se permettre d'échanger avec ses collègues sur des activités extérieures au travail, on peut se sentir très seul. Personne ne veut se trouver en situation de devoir cacher ce qu'il est de peur d'être la cible de violence verbale ou physique ou d'être congédié.

Bien que des députés des deux côtés de la Chambre ne sont pas prêts à étendre aux gais et aux lesbiennes la protection de la loi contre toute discrimination, c'est que le Parti réformiste qui me déçoit le plus parce qu'il a adopté en principe le droit de chacun de discriminer contre les gais et les lesbiennes. Il se dit, je le répète, le parti de l'égalité, mais serait-ce seulement pour les gens qui ressemblent aux députés réformistes et qui se comportent comme eux? N'y a-t-il aucun député réformiste qui ait suffisamment de courage et de principes pour se prononcer officiellement contre la ligne de parti du Parti réformiste jurassique? N'y a-t-il aucun député réformiste qui veuille se prononcer ouvertement à la Chambre pour la protection de tous les Canadiens, indépendamment des considérations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, le sexe, l'âge, la déficience, la religion et l'orientation sexuelle?

Certains essaient de leurrer la population en laissant entendre qu'ils appuieraient le projet de loi si seulement l'expression «orientation sexuelle» était convenablement défini. Ce n'est là qu'une excuse pour leur homophobie ou leur adhésion à la ligne du tiers parti.

Les cours et les tribunaux ont examiné un certain nombre de cas de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Ils ont bien compris que, par orientation sexuelle, on entend hétérosexualité, homosexualité et bisexualité. Les opposants au projet de loi induisent les Canadiens en erreur en disant que la pédophilie sera sanctionnée. La pédophilie est illégale, que celui qui s'y livre soit homosexuel ou hétérosexuel. En tant que comportement illégal, elle reste assujettie au Code criminel et n'est pas protégée par cette modification.

Tom Harpur a dit que bien des voies mènent à Dieu. Comme M. Harpur, je pense que, pour les croyants, il y a de nombreuses voies qui mènent à Dieu. Celle que j'ai choisie, c'est celle de la chrétienté. Il faut que je dise à la Chambre à quel point je suis blessée et furieuse que certains députés se servent de la religion pour promouvoir leurs idées politiques. Ils ont menacé et manipulé des personnes bien intentionnées, et je trouve cela inexcusable.

Les principes fondamentaux de la foi chrétienne comprennent la compassion, le respect et la tolérance. La protection contre la discrimination fait justement appel à la compassion, au respect et à


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la tolérance. La diversité est la marque de la création. La diversité est saine et naturelle. Il faut la protéger.

Il y a 70 ans, en tant que femme, je n'aurais pas été considérée comme une personne. S'il n'y avait pas eu de volonté politique pour enrayer cette grossière injustice, je ne serais pas à la Chambre aujourd'hui en train de défendre les droits fondamentaux d'autres groupes vulnérables de la société canadienne. Si nous voulons être civilisés et humains, nous devons protéger les droits de tous les Canadiens.

Dans mon premier discours, j'ai dit que les parlementaires ne faisaient que passer à cet endroit. J'estime que c'est une chance et un honneur d'être à la Chambre au moment où le gouvernement fédéral a enfin décidé de présenter un projet de loi qui inclut l'orientation sexuelle parmi les motifs de discrimination illicite.

J'exhorte les députés des deux côtés de la Chambre à saisir ce moment historique très important et à appuyer le projet de loi.

(1640)

[Français]

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de participer au débat cet après-midi sur le projet de loi C-33, projet de loi qui vise à modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne pour y inclure la discrimination à l'égard des personnes homosexuelles et lesbiennes.

Combien de personnes ont été victimes de discrimination en raison de leur homosexualité? Il y a bien sûr des gens qui, comme ceux du Parti réformiste, en font une guerre de tranchées lorsqu'ils entendent le mot «homosexualité». Combien de personnes ont été privées de leur habitation ou en ont été chassées parce qu'elles vivaient leur homosexualité?

La discrimination se produit même dans le milieu de travail. Il y a des entreprises, des corporations, des associations qui ont fait venir à l'avance, et cela se fait encore à l'occasion, lors d'un avis de concours pour un emploi, les CV. Combien de personnes ont été discriminées à cause de leur âge, ont été pénalisées lors de la sélection pour des emplois qui étaient offerts? Combien de personnes ont été discriminées et n'ont même pas été convoquées à l'entrevue afin de pouvoir démontrer leurs compétences et leurs moyens pour vouloir exercer cet emploi? Combien de personnes n'ont pas obtenu de promotion dans leur milieu de travail à cause, encore une fois, de la discrimination?

La discrimination ne se fait pas seulement lorsqu'on parle d'homosexualité, chez les homosexuels ou chez les lesbiennes. La discrimination se fait aussi sur le dos des personnes âgées. On dit souvent à une personne âgée, on l'entend régulièrement, qu'elle est trop vieille pour faire ce travail. On dit aussi que la personne est mise au rancart parce qu'elle n'a plus la capacité, à cause de son âge, d'avoir une promotion. On offre souvent à la personne âgée un programme de retraite parce que son âge dérange la performance de l'entreprise. Bien sûr, les personnes âgées subissent actuellement beaucoup de discrimination dans notre société.

On retrouve aussi la discrimination chez des personnes de couleur. Prenons un exemple. À Montréal, 60 p. 100 de la population de Montréal sont des gens de couleur, des gens de race qui viennent du Vietnam, du Japon, de l'Italie, de la Grèce. Bref, environ 60 p. 100 de la population actuelle de Montréal provient des communautés culturelles.

Bien sûr, ce sont des gens qui veulent faire profiter leurs concitoyens de leur expérience de vie et de leurs qualifications de travail dans une entreprise. Très souvent, et malheureusement, il y a des entreprises qui n'en veulent pas. Avec le CV, encore une fois, il y a beaucoup de discrimination lorsque l'entreprise regarde l'âge de la personne, sa nationalité, et elle a peur que ça dérange son entreprise. Elle n'embauchera pas la personne. Elle ne lui donnera même pas l'occasion de passer une entrevue pour être sélectionnée.

Combien de personnes sont punies à cause de leur sexe? Aujourd'hui, on sait que dans l'industrie, il y a beaucoup plus de métiers non traditionnels. Je suis un ancien employé de la compagnie Reynolds à Baie-Comeau, un employé en congé sans solde actuellement, et aujourd'hui, on retrouve à l'intérieur de l'usine d'aluminium à Baie-Comeau des femmes électriciens, des femmes soudeurs, des femmes qui exercent des métiers qui avaient toujours été occupés par des hommes. Aujourd'hui, les femmes se qualifient dans des métiers autrefois réservés aux hommes. Aujourd'hui, ils sont exercés aussi par des femmes.

On voit souvent, dans les offres d'emploi, que le masculin inclut le féminin ou que le poste est ouvert aux femmes. Qu'on soit un homme ou une femme, le poste est disponible autant à un qu'à l'autre. À compétence égale, salaire égal. Je pense qu'une femme qui fait le travail aux côtés d'un compagnon de sexe différent, ce n'est pas parce qu'elle est électricienne qu'elle devrait gagner moins cher. Elle devrait avoir le même salaire que l'homme.

(1645)

Combien de personnes sont discriminées à cause de la langue? On dit aujourd'hui que l'employeur, à salaire égal, va aller chercher quelqu'un qui est multilingue, par exemple, s'il parle anglais et s'il parle français. Il y a aussi des compagnies dans le domaine du tourisme, des compagnies aériennes, des compagnies qui vendent des voyages, si elles peuvent avoir des personnes qui parlent plusieurs langues, elles leur donneront la priorité. Cela peut pénaliser des gens qui n'ont malheureusement pas eu la chance d'apprendre une autre langue, principalement au Québec, où la langue première est le français; ils sont très qualifiés pour travailler dans une agence de voyage, par leur expérience, mais ils seraient pénalisés parce qu'ils ne parlent pas deux langues.

Également, combien de personnes, ici au Canada, sont discriminées et pénalisées à cause de leur handicap? Combien de personnes sont discriminées à cause d'un accident qu'elles ont eu? La personne était très compétente, très active, très rentable pour l'entreprise, mais elle a été mise au rancart, parfois congédiée, à cause d'un handicap à la suite d'un accident ou d'une maladie.

En 1977, lorsque M. Lévesque, ex-premier ministre du Québec, avait inclus, à l'Assemblée nationale du Québec, une clause dans la Charte des droits et libertés permettant aux homosexuels et aux lesbiennes de ne pas vivre de discrimination. C'est déjà inclus dans la Charte des droits et libertés au Québec. On est seulement à peu près 20 ans plus tard. Bien sûr, le Québec a toujours été avant-gardiste dans ces choses-là.

C'est pour cela que le Québec a envoyé, ici à Ottawa, 53 ou 54 députés du Bloc québécois, pour démontrer au gouvernement canadien qu'il était temps, en 1996, d'inclure dans la Charte fédérale des droits et libertés la même clause que celle qui existe déjà au Québec. Je pense que ce n'est pas un luxe. Le gouvernement fédéral doit évoluer, il doit être à la fine pointe de l'actualité. La position du Bloc québécois est tout simplement de venir entériner à Ottawa ce


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qui l'a déjà été par le Parti québécois en 1977, sous le règne deM. René Lévesque.

Il y a eu des propos tenus par le Parti réformiste à propos de ce projet de loi que je qualifie de racistes et qui pourraient avoir comme conséquence d'amener la violence. Je m'explique.

Les propos racistes tenus par l'ex-whip du Parti réformiste dernièrement, de mettre dans l'arrière-boutique une personne qui, dans son entreprise, serait reconnue comme étant homosexuelle, cela me semble être des propos vulgaires et racistes.

Le Parti réformiste réclame de plus en plus de votes libres dans cette Chambre, mais lorsque des députés de ce parti, à l'intérieur de leur caucus, réclament d'être moins à l'extrême droite, d'être plus vers le centre droit, comme ce fut le cas dernièrement lorsque la députée de Calgary-Sud-Est, le député de Simcoe-Centre et le député de Calgary-Centre ont demandé au Parti réformiste d'être moins radical dans ses prises de position, le caucus réformiste s'est jeté sur ces trois personnes comme une meute de loups. Cela n'avait aucune allure.

Je pense que le Parti réformiste doit aller vers la raison. Également, le chef du Parti réformiste, le député de Calgary-Sud-Ouest, disait, et on l'a lu dans les journaux, qu'il approuvait la violence, que les gestes posés par le premier ministre envers un manifestant, surtout lorsqu'il s'agit d'un souverainiste, il les approuvait. C'est inciter les gens à la violence, inciter son parti à la violence, et cela a les conséquences qu'on connaît. Lors des quelques élections partielles qui ont eu lieu au Québec, le Parti réformiste n'a recueilli que 0,5 p. 100 de la faveur populaire au Québec.

En terminant, permettez-moi de faire comprendre à cette Chambre et aux électeurs qui nous écoutent à la maison qu'il y a toute une différence entre la reconnaissance des couples de même sexe et le fait d'empêcher la discrimination.

(1650)

[Traduction]

Mme Roseanne Skoke (Central Nova, Lib.): Monsieur le Président, je prends part à ce débat sur les amendements dont la Chambre est saisie dans le groupe 1, qui portent sur la liberté de religion, d'expression et d'association, le mariage, la famille et le conjoint, le Code criminel et le préambule. Gardant cela à l'esprit, j'ai des remarques à faire sur les propos que le ministre de la Justice a tenus à la Chambre le 30 avril 1996 sur le projet de loi C-33. Ses propos sont consignés dans le hansard.

Le ministre de la Justice a dit alors: «À mon humble avis, aucun participant n'a une supériorité morale ou n'est plus saint que les autres.» Je voudrais rappeler à la Chambre que, dans le préambule de la Constitution canadienne, nous reconnaissons la primauté du droit et la suprématie de Dieu.

En reconnaissant la suprématie de Dieu, nous faisons entrer la loi naturelle dans nos lois. Par conséquent, la justice, la loi et la moralité sont inséparables. Le projet de loi C-33 est une question de moralité. Quand il légifère, le Parlement doit veiller à ce que ses lois soient justes et conformes à la morale. La question dont la Chambre est saisie est une question de moralité et de conscience; il s'agit donc aussi d'une question de croyance religieuse, d'opinion personnelle et de liberté d'expression.

Le ministre de la Justice a dit de manière non équivoque durant le débat que c'était une question de droits de la personne. Qu'est-ce qu'un droit de la personne? Je rappelle à la Chambre que le premier droit, le droit le plus fondamental et le principal droit fondamental est le droit à la vie. Tant que le Parlement n'aura pas traité du droit à la vie à partir de la conception jusqu'à la mort naturelle, le Parlement n'a pas la compétence voulue pour inclure l'orientation sexuelle dans les droits de la personne.

Professer que l'orientation sexuelle est un droit de la personne et légiférer à cet égard, c'est dire que les droits de la personne sont déterminés par le comportement. C'est une erreur. Conférer à quelqu'un un droit de la personne en fonction de son orientation sexuelle, c'est lui conférer un droit spécial, c'est conférer à un groupe d'intérêt spécial un droit spécial en fonction d'un comportement caractéristique d'un style de vie.

Ranger l'homosexualité parmi les droits de la personne donnera aux homosexuels un statut juridique spécial qui leur permettra de redéfinir la famille et le conjoint et de porter atteinte au caractère sacré du mariage, d'infiltrer nos programmes scolaires et notre système d'éducation et d'imposer un mode de vie différent à nos jeunes.

Inclure par voie législative l'orientation sexuelle parmi les droits de la personne équivaut à élever le critère juridique actuel en le faisant passer de la tolérance à l'acceptation.

Tous les Canadiens sont égaux devant la loi. Les Canadiens sont tolérants et font preuve de compassion. Toutefois, en donnant un droit précis aux homosexuels dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, le Parlement exige des Canadiens qu'ils aillent plus loin que la tolérance et la compassion en acceptant l'homosexualité comme naturelle et morale.

L'homosexualité est contre nature et immorale. Les termes contre nature et immoral sont des termes utilisés dans des débats juridiques. La justice, le droit et la moralité sont inséparables. Comme l'a admis le ministre de la Justice, il s'agit ici d'un débat moral.

Selon le hansard, le ministre de la Justice a tenté de réfuter les arguments ayant trait aux droits que le projet de loi C-33 accordera. Il a parlé de la famille: «Certains soutiennent qu'elle va miner ou faire diminuer directement ou indirectement l'importance de la famille dans la vie canadienne.» Je suis du nombre.

(1655)

Au Canada, les familles détiennent des droits inhérents et inviolables. Les familles existaient avant l'Église et avant l'État. Les droits des familles doivent être maintenus et protégés.

La mention de l'importance de la famille dans le préambule du projet de loi C-33 vise simplement à apaiser les députés à qui la question pose de sérieux problèmes moraux et de conscience et, à mon avis, c'est une grave erreur de la part du ministre de la Justice. En mentionnant la famille dans une modification visant à accorder


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des droits spéciaux basés sur l'orientation sexuelle, on viole les droits de la famille. Cela permet une redéfinition de la famille, que nous avons choisi de protéger.

Dans le hansard, le ministre de la Justice donne aussi son opinion subjective sur la façon dont sa propre famille ne sera pas touchée par ce projet de loi. Les Canadiens ne s'intéressent pas à l'opinion subjective du ministre de la Justice. Il n'a pas le droit d'imposer son opinion aux familles canadiennes.

Sur la question de la religion, le ministre de la Justice a dit ceci, comme en témoigne le hansard: «En gros, ce projet de loi va dans le sens des enseignements les plus fondamentaux de la religion.» Il a également ajouté: «J'ai développé le plus grand respect pour les principes de la foi catholique. Je prétends que cette modification est tout à fait conforme à ces principes.» Cela ne relève pas du débat.

Le ministre de la Justice a dépassé les limites de sa compétence en parlant au nom de l'Église. J'utilise le mot «Église» dans son sens large. Le ministre de la Justice a fait des déclarations sur des questions de droit ecclésiastique et de droit canonique qui ne relèvent pas de sa compétence. En disant que ce projet de loi va dans le sens des enseignements les plus fondamentaux de la religion, le ministre de la Justice ne respecte pas la liberté individuelle et personnelle de religion et de croyance dont chaque Canadien jouit aux termes de la Charte canadienne des droits et libertés.

Le fait de dire que ce projet de loi va dans le sens des enseignements les plus fondamentaux de la religion ferme aussi la porte à toute défense fondée sur des motifs religieux qui pourrait être présentée plus tard relativement au projet de loi C-33.

La déclaration du ministre de la Justice selon laquelle «ce projet de loi va dans le sens des enseignements les plus fondamentaux de la religion» constitue de l'ingérence dans le domaine de l'Église. Le principe de la séparation de l'Église et de l'État est bien fondé dans notre histoire, dans notre culture et dans nos lois. L'État n'a pas le droit d'intervenir dans les affaires de l'Église.

Toutefois, il convient de rappeler à la Chambre que l'Église a le droit et la responsabilité de se préoccuper des affaires de l'État sur les questions de morale, de valeurs, de principes et de religion. À cet égard, j'ai prié le ministre de la Justice par lettre, et je le fais encore aujourd'hui à la Chambre, de retirer les déclarations qu'il a faites à la Chambre concernant la religion. Je le prie de retirer particulièrement la déclaration suivante: «En gros, ce projet de loi va dans le sens des enseignements les plus fondamentaux de la religion. Je prétends que cette modification est tout à fait conforme à ces principes.»

Je demande au ministre de la Justice de reconnaître qu'il a dépassé les limites de sa compétence à la Chambre.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, compte tenu de l'imposition d'attribution de temps dont le projet de loi C-33 fait l'objet, je suis heureux de pouvoir prendre la parole au sujet de cette mesure. Je ne le fais cependant pas par plaisir. J'aurais beaucoup préféré que le gouvernement libéral ne présente pas ce projet de loi.

Je voudrais d'abord apporter mon appui aux propositions d'amendement présentement à l'étude. Ces propositions, présentées de bonne foi, améliorent considérablement l'intention du projet de loi et le rendent beaucoup plus acceptable. Je souhaite qu'elles soient adoptées et que le projet de loi soit amendé selon les termes des neuf premières motions.

(1700)

J'appuie en particulier la motion no 11 qui a été présentée par ma collègue. Cet amendement ajouterait une nouvelle disposition précisant que la mention de l'«orientation sexuelle» ne modifierait pas le sens des termes «mariage», «famille» et «conjoint» en vertu de quelque loi fédérale que ce soit.

Cette question revêt une importance particulière car elle semble préoccuper grandement les électeurs de Prince-George-Peace River, la circonscription du nord-est de la Colombie-Britannique dont je suis le représentant. La population du Canada, d'un océan à l'autre, s'inquiète beaucoup de cette modification particulière et de l'emploi de l'expression «orientation sexuelle», qui n'a pas été définie par le ministre de la Justice ou le Parlement.

Je voudrais lire, pour qu'elle paraisse au compte rendu, une déclaration concernant le projet de loi C-33 provenant de l'archidiocèse de Vancouver:

Pour que la modification proposée par le gouvernement fédéral à la Loi canadienne sur les droits de la personne au sujet de l'orientation sexuelle soit acceptable, il faudrait que la mesure législative ait trois protections essentielles. Tout d'abord, l'orientation sexuelle doit être définie; deuxièmement, la modification ne doit pas être utilisée pour donner aux couples homosexuels un statut marital ou un statut équivalant au mariage; et troisièmement, les droits de conscience des Canadiens qui s'opposent moralement au comportement homosexuel doivent être protégés.
L'orientation sexuelle devrait être définie pour que l'on renvoie aux personnes homosexuelles et non à l'activité homosexuelle. Par personnes homosexuelles, je veux dire les personnes qui sont attirées de façon prédominante, exclusive ou très forte par des personnes du même sexe. Une telle définition garantirait que la portée de la modification soit ce qu'elle doit être, c'est-à-dire l'interdiction de toute discrimination injuste contre les personnes homosexuelles, lesquelles ont la même dignité humaine inaliénable que les autres membres de la société. En spécifiant personnes homosexuelles, la définition empêcherait également que la modification ne soit utilisée pour protéger la pédophilie ou d'autres comportements sexuels aberrants.
Il est également nécessaire que la mesure législative déclare explicitement que les modifications ne doivent pas servir à redéfinir ce que l'on entend par mariage, famille ou conjoint, de façon à inclure les couples homosexuels ou à conférer des avantages semblables à ceux du mariage à ces couples. Sans une telle déclaration, le préambule de la modification qui mentionne «l'importance de la famille», n'est pas claire et pourrait être mal interprété.
Troisièmement, la mesure législative doit indiquer clairement que la modification ne doit pas être utilisée pour empêcher les Canadiens qui s'opposent au comportement homosexuel d'agir en conformité avec leur conscience, tout en continuant à faire preuve de respect à l'égard des personnes homosexuelles. Elle ne doit pas les forcer à faire quelque chose qui pourrait indiquer qu'ils approuvent le comportement homosexuel ni les empêcher de faire des choses qui reflètent leurdésapprobation d'un tel comportement. Par exemple, on devrait permettre aux

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employeurs de faire de la non-pratique de l'activité homosexuelle une qualification professionnelle acceptable. (La loi du Manitoba sur les droits de la personne le prévoit de façon explicite.
Ces garanties sont nécessaires pour préserver le bien commun, tout en permettant à la société canadienne de s'opposer clairement à toute discrimination injuste à l'égard des personnes homosexuelles.
Ce document m'a été envoyé par le Révérend Père Adam Exner, OMI, du bureau de l'archevêque de Vancouver. J'ai pensé qu'il était particulièrement approprié de verser cela au compte rendu, parce que cela correspond bien aux amendements que nous sommes en train d'examiner.

La motion no 12, également présentée par ma collègue, ajoute une nouvelle disposition affirmant que l'orientation sexuelle n'a pas pour effet de porter atteinte aux libertés de religion, d'expression ou d'association garanties en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.

(1705)

Je vais me reporter rapidement au livre bleu des réformistes. Le projet de loi C-33 provoque certes, depuis présentation à la Chambre, il y a environ une semaine, une grande agitation au sein du Parti réformiste, du Parti libéral et de la plupart, sinon tous, les partis politiques.

C'est la première occasion que j'ai de parler de ce projet de loi, car j'étais dans ma circonscription ces deux dernières semaines. Beaucoup de gens de la base discutent de cette question d'un bout à l'autre du pays. Une discussion ouverte et honnête sur les ramifications possibles du projet de loi C-33 se tient actuellement.

Les habitants de Prince George-Peace River m'ont bien fait comprendre en tant que leur représentant élu, quelle était la position de la majorité sur ce projet de loi. La motion no 12 cadre bien avec le principe no 8 du livre bleu des réformistes:

Nous croyons qu'une justice fondamentale doit être accessible à tous, personnes, groupes, provinces et régions du Canada. Cette justice fondamentale doit permettre à toutes les régions de bénéficier également, sans discrimination, de sa participation à la Confédération, et de tirer parti des programmes et des dépenses du gouvernement du Canada.
Cela cadre bien avec cet amendement. C'est pourquoi nous appuyons cette motion.

La motion no 13 mérite aussi une certaine attention. Elle ajoute une nouvelle disposition, selon laquelle l'orientation sexuelle n'a pas pour effet de rendre inopérante quelque disposition du Code criminel que ce soit.

La motion no 14 ajoute une disposition affirmant que rien dans le projet de loi n'a pour effet de permettre d'étendre la prestation d'avantages aux personnes cohabitant avec une autre personne de même sexe. Ceci est conforme à la politique réformiste et, ajouterai-je, aux résultats du sondage effectué dans ma propre circonscription.

J'ai effectué ce sondage au moyen d'un bulletin parlementaire envoyé à mes électeurs, il y a environ deux ans, au printemps 1994, mais les résultats sont toujours pertinents. Les résultats sont encore valables aujourd'hui. Comme on nous avait avertis dans l'infâme livre rouge du Parti libéral que les libéraux avaient l'intention d'agir ainsi, j'ai pris l'initiative de poser cette question aux électeurs de Prince George-Peace River, il y a deux ans. Plus de 1 200 électeurs ont répondu à ces questions.

La question no 3 était la suivante: la Loi canadienne sur les droits de la personne devrait interdire la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. C'était très concis et très direct. On a constaté que 34 p. 100 des répondants étaient d'accord là-dessus, que 54 p. 100 n'étaient pas d'accord et que 12 p. 100 étaient indécis. Ce n'est pas une majorité importante, mais c'est une majorité quand même.

Une autre question de la même catégorie demandait si les conjoints de même sexe devaient être admissibles aux prestations de conjoint accordées aux couples classiques formés d'un homme et d'une femme. Ici, 16 p. 100 des répondants se sont dits d'accord et 75 p. 100, en désaccord. Il y avait sur ce point 9 p. 100 d'indécis.

La grande majorité des électeurs de Prince George-Peace River ont des convictions profondes sur cette question. C'était du moins le cas de ceux qui ont répondu à ce questionnaire.

Il y a environ une heure, l'une des stations de radio les plus en vue de ma région, CJDC, de Dawson Creek, dans ma circonscription, qui diffuse une émission-débat très populaire, m'a transmis un message par télécopieur. C'est signé par un certain nombre d'employés de cette station. On peut y lire:

Je suis contre le projet d'inscrire l'orientation sexuelle dans la Loi canadienne sur les droits de la personne sans que l'expression soit définie et que les Canadiens aient pu en discuter comme il se doit.
Un grand nombre de personnes m'ont fait savoir très clairement, parce que je suis leur représentant, comment ils jugent que je dois voter sur cette mesure législative. J'ai reçu plus de 100 lettres par courrier électronique au cours des deux derniers jours seulement. Dans toutes ces lettres, les auteurs s'opposaient à ce projet de loi. J'ai reçu des messages par télécopieur et des appels, et j'ai rencontré des gens en personne au cours des dernières semaines où j'ai pu visiter ma circonscription. Les électeurs venaient me rencontrer pour me communiquer leur point de vue sur cette mesure législative.

En résumé, si ces amendements ne sont pas adoptés, je devrai voter contre le projet de loi, non pas parce que je veux que certains soient victimes de discrimination, mais plutôt parce que l'ajout d'une expression non définie pourrait entraîner toutes sortes de conséquences que j'ai certainement exposées clairement dans mes interventions passées. Voilà ce qui m'inquiète. Je voterai donc contre le projet de loi C-33.

(1710)

M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-33 fera l'objet d'un vote libre. Je sais qu'il est de coutume que le gouvernement exige de ses députés, de ses ministres, des secrétaires d'État et même des secrétaires parlementaires qu'ils appuient toute mesure d'initiative ministérielle. C'est presque une lapalissade. Je tiens cependant à ce que les députés sachent que lorsque je voterai, je le ferai en fonction des mérites de cette mesure.

J'ai eu l'avantage de consulter mon association de circonscription au cours des 18 derniers mois. Nous savions qu'un projet de loi


2456

à teneur sociale serait déposé. Il y a à peine une semaine ou une dizaine de jours, je me suis entretenu avec les membres de mon association de circonscription qui ont assisté, à titre de délégués, au congrès du parti voici un mois. La façon dont je voterai a été lourdement influencée par les opinions dont on m'a fait part. Je crois toutefois que je peux contribuer au débat en dissipant une certaine confusion qui règne inutilement dans la discussion.

Tout d'abord, il existe une fausse dichotomie entre les positions constitutionnelles et le point de vue éthique. Toute constitution est fondée sur l'éthique, sur un choix de valeurs. On oublie parfois que Jefferson et Madison, qui ont inspiré la majeure partie du constitutionalisme contemporain, étaient partisans de ce qu'on appelle aujourd'hui une société ouverte, et cela, c'est un choix de valeurs. Je crois que nous devrions avoir un respect mutuel pour les positions prises jusqu'à maintenant par chaque côté dans ce débat.

Une partie du problème que soulève l'approche canadienne de ce dossier remonte, bien entendu, à l'un des choix importants que nous avons faits en 1982 lorsque nous avons rapatrié la Constitution. Nombre d'entre nous avions à l'époque conseillé au gouvernement et à M. Trudeau de prendre comme modèle de charte des droits soit la déclaration américaine des droits, dont la légende veut qu'elle ait été rédigée par Madison un dimanche matin, soit la géniale déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et de 1791, qui figure toujours dans la Constitution de la cinquième république et qui est la plus copiée au monde. Le génie de ces deux chartes est qu'elles résument en une seule page les principes fondamentaux d'une société libre.

Le principe de l'égalité y est énoncé-égalité devant la loi, protection égale en vertu de la loi-mais en termes généraux et sans aucune limitation. Il est sans doute regrettable que notre charte soit très longue et que le principe de l'égalité soit accompagné d'une liste exhaustive d'exemples d'égalité ou de catégories auxquelles il s'applique. Cela a pour effet d'éliminer la généralisation, l'universalité, et d'étouffer la créativité novatrice. C'est sans doute l'une des raisons pour lesquelles nos tribunaux, et même la Cour suprême, ont élaboré par intermittence et sporadiquement les principes émanant de la Charte.

Je comprends donc pourquoi ceux qui ne sont sur aucune liste se sentent exclus. Comme le dit l'expression latine: expressio unius fit exclusio alterius; l'expression de l'un implique l'exclusion de l'autre. Cela fausse en quelque sorte la notion de développement constitutionnel par la dialectique, selon laquelle les principes généraux peuvent s'adapter aux nouvelles réalités sociales.

J'ai reçu une lettre fort intéressante du président de l'Association du Barreau canadien, M. Gordon Proudfoot, qui déplore le processus étapiste, pragmatique et axé sur les problèmes qui a donné lieu à l'élaboration de la charte des droits aux États-Unis, et dans bien des pays européens qui s'en sont inspirés par la suite, parce que dans ce processus la Cour suprême a joué un rôle créatif, en étroite collaboration avec le ministère de la Justice qui a fourni les causes types. Les changements ont donc été opérés graduellement et de façon très pragmatique; la jurisprudence ne révèle aucune folle expérimentation, comme certains auraient pu le craindre. Je crois que cette façon de faire aurait été préférable pour le Canada, mais tout cela appartient déjà au passé.

(1715)

Notre charte est longue et conçue pour les avocats, non pas pour la population. Elle est difficile à comprendre pour les non-initiés. La Loi canadienne sur les droits de la personne est identique à la Charte des droits à cet égard.

J'ai aussi reçu une lettre très sérieuse de l'archevêque Exner de Vancouver. Le député d'en face l'a citée plus tôt. On y trouve une réflexion très utile. L'une des difficultés vient de la formulation de la modification proposée à la Loi canadienne sur les droits de la personne. Cette loi est générale; elle s'applique par exemple à certains organismes qui pourraient être considérés comme privés en vertu de la Charte des droits. En outre, elle s'applique à des entités assujetties aux règlements fédéraux, comme les compagnies aériennes.

Contrairement à ce que l'on pense en général, la Loi canadienne sur les droits de la personne ne constitue pas un code général de conduite. La modification proposée explique clairement ce que c'est. Contrairement à la Charte, cette loi se limite à interdire la discrimination en matière d'emploi et de fourniture de biens et de services. C'est stipulé dans la loi. Cela est peut-être suffisant pour que l'objectif soit clair et qu'il ne donne pas lieu à diverses interprétations juridiques.

Selon moi, au lieu d'inclure dans le préambule la phrase concernant la discrimination en matière d'emploi et de fourniture de biens et de services, le ministre de la Justice aurait dû la placer dans le corps du projet de loi, peut-être dans l'article 1. Ainsi, il aurait été clair et net, en droit, que cette mesure législative vise simplement à prévenir toute discrimination en matière d'emploi et de fourniture de biens et de services. En explicitant ainsi la portée du projet de loi, on aurait dissipé les craintes inutiles ou les questions des gens, intègres et de bonne foi, qui s'inquiètent de voir ce projet de loi donner à tous la licence de faire des incursions dans bien d'autres domaines de la politique sociale.

Il peut arriver qu'une collectivité décide, dans sa sagesse, d'appliquer la chose à d'autres domaines. Mais si c'est l'objet de la loi, comme je l'ai dit, et je pense que c'est l'évidence même, il vaudrait mieux en tenir compte au moment de la rédaction.

Je ne crois pas que l'on puisse craindre une interprétation trop libre de la part de juges, des gens non élus. Je ne crois pas que cette crainte soit justifiée compte tenu du libellé actuel. Pour que les choses soient encore plus claires, et il y a une maxime latine que je ne citerai pas pour dire cela, je suis d'avis que le ministre de la Justice pourrait se pencher sur la question à l'étape du rapport et apporter les modifications que j'ai proposées.

Les valeurs de notre société ouverte qui sont inscrites dans la charte des droits figurent également dans cette mesure, puisque la population canadienne dans son ensemble accepte l'idée qu'en matière d'emploi la discrimination fondée sur tous les motifs énoncés dans le projet de loi est inacceptable aux yeux de la société. C'est une raison on ne peut plus valable. C'est en m'appuyant là-dessus que je me suis prononcé en faveur de cette mesure législative.


2457

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, je ne m'attendais pas vraiment à me prononcer dans le débat d'aujourd'hui. Je pensais le faire à la troisième lecture. Cependant, maintenant que j'en ai la chance, je vais ajouter mes observations à ce qui a été dit.

Je suis réformiste et je crois en l'égalité de tous les citoyens. C'est la raison pour laquelle je me suis présenté sous la bannière réformiste. J'ai vécu des expériences dans un autre pays où l'on disait que l'égalité existait, mais je n'en ai pas été témoin. J'ai dit à plusieurs reprises dans mes discours que, pendant les visites que j'ai faites dans l'ancienne Union Soviétique, je me suis rendu compte à quel point la démocratie était importante.

Lorsque je vois la démocratie à l'oeuvre à la Chambre aujourd'hui, cela me rappelle beaucoup le Manifeste de 1917, lorsque existaient la liberté d'expression, la liberté de religion et la liberté d'accès à la propriété. Mais cette liberté n'était réservée qu'à deux ou trois personnes de haut niveau. On faisait taire les autres ou on les exterminait.

Le gouvernement semblait presque faire preuve de parti pris lorsqu'il a prétexté ces derniers jours qu'il ne pouvait remplir ses promesses à cause d'actes de Dieu.

(1720)

Si nous regardons l'histoire de la création, nous voyons que Dieu a créé un mari et sa femme. Que pensez-vous qu'il s'est passé? Le mari a blâmé Dieu parce qu'il n'a pas tenu sa promesse de ne pas mordre dans le fruit de la vie. Il a dit que cela ne serait pas arrivé si Dieu ne lui avait pas donné cette femme. C'est à ce moment-là que la discrimination a commencé.

Je ne crois pas que c'est le genre de chose que nous voulons favoriser, à savoir blâmer Dieu pour nos problèmes ou parce que nous avons fait certaines choses. Nous voulons Lui attribuer du mérite pour qu'il nous guide et nous donne la sagesse de rédiger une bonne mesure législative.

Lorsque j'examine ce projet de loi, j'ai l'impression qu'il constitue un point de départ pour s'attaquer à la famille en tant que cellule de base. Je ne peux pas y voir autre chose. Si ce n'est pas le cas, pourquoi le gouvernement refuse-t-il d'appuyer les amendements présentés par mes collègues? Ces amendements visent à protéger les institutions fondamentales que sont le mariage et la famille. Si cela est inacceptable, que contient le projet de loi? Il faut y réfléchir.

Le projet de loi est un écran de fumée. C'est probablement une façon d'encourager un peu plus la destruction de l'unité familiale qui est à la base de notre société. Nous avons entendu dire maintes fois à la Chambre que, lorsque cela se produira, quand l'unité familiale fondamentale sera détruite, ou non fonctionnelle, il en sera de même pour le pays. C'est un aspect du projet de loi qui mérite réflexion.

En 1917, les communistes ont dit qu'ils allaient établir l'unité et la liberté. Ils ont dit que, puisque les familles n'élevaient pas leurs enfants correctement, ils allaient s'en charger. Le mariage n'était plus vraiment nécessaire. L'unité familiale non plus. Staline était au pouvoir depuis peu d'années quand il a été confronté à un énorme problème. Il y avait tellement d'orphelins qu'il ne savait que faire d'eux.

J'invite les députés à lire les livres d'histoire; ils constateront qu'il a fallu traverser une période très difficile, voir horrible, avant de remettre le système en marche. En 1935 ou 1936, Staline a fait adopter une mesure prescrivant les lois sur le divorce les plus rigoureuses qui aient jamais été appliquées dans le monde. Il a vu que l'unité familiale fondamentale était justifiée. Même s'il ne croyait pas en Dieu, il a compris que la société ne pouvait fonctionner sans cette unité.

Hier ou avant-hier, j'ai été renversé en regardant, dans le cadre de l'émission «Newsworld», un documentaire sur la famille de Igor Gouzenko. Je me souviens de l'époque où les membres de la famille Gouzenko ont fui le système d'espionnage de la Russie et demandé l'asile au Canada. Ils bénéficient encore d'une protection, parce qu'il y a toujours un décret ordonnant leur mise à mort pour ce qu'ils ont fait. Ils en ont été avertis au cours des discussions sur leur défection. M. Gouzenko a déclaré que cela voulait dire que les siens mourraient en Russie. Que faire? Pouvaient-ils s'exposer à ce risque? Ils seront exécutés.

Leur famille leur a dit que si jamais ils quittaient le pays, mieux valait pour eux qu'ils ne reviennent jamais, pour aucune considération. Ceux-ci font maintenant l'objet de mesures de sécurité très strictes. Ils vivent cachés dans notre pays. Personne ne sait qui ils sont. Lorsqu'ils passent à la télévision, leur visage doit encore être cachés. Quelle vie. Quel prix à payer. Quel tribut imposé par l'Union soviétique à ce peuple.

Selon M. Gouzenko, il a fallu que 50 millions de personnes meurent pour leur idéal avant que le système ne soit finalement renversé. Solzhenitsyn a écrit un ouvrage dans lequel il dit que 40 millions de personnes sont mortes. Lorsque je me suis rendu en Union soviétique en 1991, après le changement de régime, des vérifications avaient fait grimper cette estimation à 60 millions.

Un vieux monsieur là-bas m'a dit: «Nous allons payer des siècles durant nos erreurs et le fait que notre gouvernement ait voulu éliminer la religion qui a fait naître cette terre.

(1725)

Pour cinq années de grandeur durant la Seconde Guerre mondiale, nous avons propagé cette idéologie et nous en sommes vantés durant 70 ans, mais nous n'avons jamais laissé le reste du monde voir ce qui se passait dans notre pays.»

À ce rythme, il a dit qu'il faudrait 970 ans pour écrire les histoires d'horreur que se sont produites dans ce pays, car le régime n'a pas tenu compte de l'unité familiale de base, de la raison pour laquelle elle avait été instituée et de la fonction qu'elle avait.

Aujourd'hui, nous discutons de cette question. Voulons-nous attirer ce genre de châtiment sur notre pays? Nous avons entendu parler de l'empire romain et des autres empires où l'unité familiale était devenue dysfonctionnelle, et nous avons vu qu'ils avaient fini par s'écrouler. Si c'est cela que nous essayons de faire, nous sommes engagés dans la bonne voie.

2458

Je ne veux pas être complice de cela. Je voterai contre le projet de loi en troisième lecture. J'espère que le gouvernement libéral comprendra qu'il n'est pas bon d'adopter ce projet de loi sans ces amendements.

Il n'y a aucun sujet de débat à la Chambre sur lequel j'aie reçu autant d'appels téléphoniques, de lettres et de pétitions me demandant de ne pas appuyer les projets de loi C-41 et C-33.

Quand nous avons eu à nous prononcer sur le projet de loi C-68, nous avons entendu un sénateur dire qu'il ne s'agissait pas en réalité d'une mesure visant à faire enregistrer les armes à feu ou à restreindre davantage l'utilisation des armes à feu, mais plutôt d'une manipulation des structures sociales. C'est exactement ce qui s'est passé en Union soviétique. On y a d'abord aboli la peine de mort, puis on y a mis en oeuvre un système d'enregistrement des armes à feu, avant de les confisquer purement et simplement. Et finalement, que s'est-il produit? Une révolution. Seuls les dirigeants avaient des armes à feu. Les pauvres qui en étaient dépourvus sont morts de façon très violente sous les balles.

Si nous ne voulons pas croire ce que nous lisons, allons voir dans l'histoire ce qui s'est passé et les leçons qu'elle peut nous enseigner. Si nous voulons savoir ce que l'homosexualité et la permissivité ont causé dans certains pays, voyons ce qui se passe en Afrique et les problèmes dont souffre ce continent. Il existe dans l'univers des lignes directrices que nous devons suivre, sinon nous en supporterons les conséquences.

Que voulons-nous? Voulons-nous plus de liberté pendant quelques années et en supporter ensuite les conséquences, ou voulons-nous suivre les préceptes qui nous ont été tracés autrefois et qui ont donné de bons résultats pendant des siècles? L'unité familiale a contribué à bâtir un pays après l'autre. Une fois que nous avons un pays, nous avons un gouvernement. Où voulons-nous aller? Allons-nous détruire la famille et détruire le gouvernement? Songeons à ce qui se passe actuellement au Libéria. Voulons-nous ce genre de régime? Pas moi.

Ce fut un honneur et un privilège d'intervenir brièvement dans ce débat. J'espère que nous allons prendre cette question au sérieux, réfléchir à ces amendements et les adopter avec le projet de loi, car nous voulons tous l'égalité.

[Français]

M. Ménard: Monsieur le Président, je ne sais pas si vous avez compris comme moi-c'est peut-être dû à une difficulté de traduction, car cela nous arrive toujours un peu plus tard-mais je crois que le député va un peu loin en nous suggérant, comme parlementaires, un rapprochement avec des sociétés qui vivent des situations ouvertes de conflits ethniques, certains pays d'Afrique, et la question. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Avec tout le respect que j'ai pour tous mes collègues en Chambre, je dois dire qu'il ne s'agit pas d'un recours au Règlement. On s'engage vraiment dans le débat.


2458

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 1er mai, de la motion: Que le projet de loi C-217, Loi modifiant le Code criminel (protection des témoins), soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 30, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé de la motion à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-217, Loi modifiant le Code criminel (protection des témoins).

Convoquez les députés.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Selon la pratique, le vote par appel nominal sera pris rangée par rangée, en commençant avec le proposeur. Je demanderai ensuite aux autres députés qui sont en faveur de la motion et qui se trouvent du même côté de la Chambre que le proposeur de bien vouloir se lever.

[Français]

Ensuite, les votes de ceux qui appuient la motion et qui se trouvent de l'autre côté de la Chambre seront enregistrés. Les votes de ceux qui s'opposent à la motion seront enregistrés dans le même ordre.

(La motion, mise aux voix, est adoptée)

(Vote no 54)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Althouse
Assadourian
Asselin
Augustine
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Bakopanos
Bélanger
Bélisle
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Blaikie
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Caccia
Cannis
Chamberlain
Chrétien (Frontenac)
Crête
Cullen
Dalphond-Guiral
de Jong
Deshaies
DeVillers
Dromisky
Duceppe
Dumas
Easter
Fillion
Fontana
Gaffney
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gauthier
Godin
Graham
Grose
Guay
Guimond
Harvard
Hopkins
Hubbard
Iftody
Jacob
Kraft Sloan
Lalonde
Langlois
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Lincoln
Loney
Loubier
Maloney
Marchand
Massé
McCormick
McGuire
McLaughlin
McTeague
McWhinney
Ménard
Mercier


2459

Meredith
Minna
Mitchell
Murphy
Nault
Nunez
O'Brien (London-Middlesex)
O'Reilly
Paradis
Parrish
Patry
Payne
Peric
Pettigrew
Picard (Drummond)
Pomerleau
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Rocheleau
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Speller
St. Denis
Taylor
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Vanclief
Venne
Verran
Wells
Zed -107

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Anderson
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bélair
Benoit
Bertrand
Boudria
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bryden
Calder
Campbell
Clancy
Cohen
Collenette
Comuzzi
Cowling
Crawford
Culbert
Cummins
Dhaliwal
Dion
Discepola
Duncan
Dupuy
Epp
Fewchuk
Flis
Forseth
Frazer
Fry
Gagliano
Gallaway
Gilmour
Godfrey
Goodale
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West/Ouest)
Harper (Churchill)
Harper (Simcoe Centre)
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Irwin
Jackson
Kerpan
Keyes
Kirkby
MacAulay
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Martin (LaSalle-Émard)
McClelland (Edmonton Southwest/Sud-Ouest)
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
Mills (Red Deer)
Morrison
Pagtakhan
Penson
Peters
Pillitteri
Proud
Ramsay
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rock
Schmidt
Scott (Skeena)
Solberg
Speaker
Steckle
Stewart (Brant)
Stinson
Strahl
Szabo
Thompson
Volpe
Wappel
Wood
Young-89

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Arseneault
Bachand
Barnes
Bethel
Bevilacqua
Canuel
Caron
Chan
Collins
Daviault
Duhamel
Hickey
Landry
Lebel
Lefebvre
MacAulay
Paré
St-Laurent
Tremblay (Lac-Saint-Jean)
Walker

(1800)

Le président suppléant (M. Kilger): Je déclare la motion adoptée.

En conséquence, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de la justice et des questions juridiques.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé au comité.)

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de procéder, conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la question qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Davenport-L'environnement.

[Traduction]

Le vice-président (M. Kilger): La Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

* * *

LA MAIN-D'OEUVRE ENFANTINE

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait prendre des mesures pour interdire l'importation de produits fabriqués ou contenant des pièces fabriquées par la main-d'oeuvre enfantine telle que définie par l'Organisation internationale du travail.
-Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui pour débattre de ma motion, qui incite le gouvernement libéral à prendre des mesures pour interdire l'importation au Canada de produits fabriqués par la main-d'oeuvre enfantine, l'un des grands fléaux de notre économie mondiale moderne. À la fin de mon intervention, je demanderai le consentement unanime de la Chambre pour que cette motion soit mise aux voix, ce qui donnera aux députés l'occasion de s'exprimer sur cette question très importante.

Ce n'est pas la première fois que la Chambre a l'occasion de discuter de cette question importante. En novembre 1994, pendant la ratification de l'accord concernant l'Organisation mondiale du commerce, la Chambre a étudié une motion du Nouveau Parti démocratique visant à modifier les lois douanières du Canada afin d'interdire l'importation de produits fabriqués par la main-d'oeuvre enfantine. À l'époque, nous affirmions que, au moment où la communauté internationale se débattait avec les répercussions sociales de la mondialisation de l'économie, il fallait veiller à ce que les nouvelles règles commerciales protègent non seulement les droits légitimes des investisseurs internationaux, mais aussi les droits légitimes de la main-d'oeuvre et surtout les droits fondamentaux des groupes vulnérables, comme les travailleurs juvéniles.


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Nous cherchions à apporter une contribution positive au débat sur le commerce, en nous joignant à un mouvement international en plein essor qui tend à placer les répercussions sociales du commerce au coeur même du projet d'amélioration des règles commerciales internationales. À l'instar du Parti réformiste, le gouvernement a rejeté nos amendements sur le travail des enfants et une disposition à caractère social, faisant remarquer qu'il ne voulait pas faire parti d'un mouvement pour l'établissement d'un système de commerce international qui tiendrait compte autant des droits des enfants qui travaillent que des intérêts des multinationales.

(1805)

Il a fait écho à cette position dans les décisions qu'il a prises au sein d'organismes internationaux, se ralliant aux pays qui souhaitaient qu'on étudie le problème du travail des enfants au lieu de faire quelque chose à cet égard au sein de l'OCDE et de l'Organisation internationale du travail.

La position du gouvernement a semblé changer par suite de la détermination et du dévouement de Craig Kielburger, le jeune activiste dont bien des Canadiens ont récemment entendu parler. Craig a confronté publiquement le premier ministre en Asie, lorsque l'Équipe Canada était en mission dans cette partie du monde. Craig a demandé au premier ministre ce que faisait le Canada pour contribuer à mettre fin au travail des enfants. Craig et les autres enfants qui faisaient campagne en Inde et ailleurs ont manifestement touché une veine sensible parmi la population canadienne et la communauté internationale.

Par son affrontement spectaculaire avec le premier ministre, Craig a pu percer les mantras du secteur publicitaire, qui s'efforce de faire oublier que les produits dont il fait la promotion sont souvent fabriqués dans des conditions épouvantables dans les pays en voie de développement. Il a pu pousser le gouvernement canadien à dire qu'il prendrait des mesures à l'égard du travail des enfants.

Craig semble avoir fait honte au gouvernement pour son inaction, mais, pas plus que moi-même ni que qui que ce soit d'autre, il n'a réussi jusqu'à maintenant à faire qu'il ait assez honte pour se décider à agir. Le gouvernement parle dans son discours du Trône de travailler à établir un consensus international sur la question du travail des enfants. Il a aussi contribué financièrement au programme de l'OIT sur le travail des enfants, ce que, soit dit en passant, je réclamais dans une motion d'initiative parlementaire déposée au cours de la dernière session du Parlement. Quoi que ce soit de plus décisif ou de plus vigoureux que ces timides mesures semble fort peu probable, pour le moment du moins.

Ce que j'espère obtenir avec le présent débat, c'est contribuer à soutenir, voire à accentuer l'élan qui se dessine peut-être à cet égard en permettant aux députés de joindre leur voix à celles de plus en plus nombreuses qui réclament des mesures nationales et internationales sur le travail des enfants, et demander au gouvernement de mettre ses cartes sur table quant aux mesures qu'il entend prendre au juste.

Car, malgré les belles intentions énoncées dans le discours du Trône, les médias ont dit que la position que le Canada a adoptée au sujet du problème du chômage, lors du récent sommet du G-7, continuait d'exclure le travail des enfants et les droits de la personne des règles commerciales internationales. Cela ne correspond pas à ce que le premier ministre a promis à Craig Kielburger.

Le nombre d'enfants qui sont forcés de travailler dans les pays en développement et leurs conditions de travail sont atterrants. L'Organisation internationale du Travail estime qu'environ 200 millions d'enfants sont forcés de travailler dans le monde, dont quelque 55 millions en Inde seulement. Les conditions de travail de ces enfants sont souvent inhumaines et, dans bien des cas, en Inde et au Pakistan, il s'agit littéralement d'esclavage.

Selon l'Organisation internationale du Travail, la moitié des enfants qui fabriquent des tapis au Pakistan meurent de malnutrition ou de maladie avant l'âge de 12 ans. En Chine, dans les zones économiques spéciales, des fillettes de 10 ans travaillent dans des usines de jouets pour 10 $ par mois.

Nul ne prétend éliminer une catastrophe sociale de cette envergure du jour au lendemain. Il s'agit d'un problème complexe qui est profondément enraciné dans les cultures sociales et économiques de certains pays en développement et en l'absence de structures politiques qui respectent les droits fondamentaux de la personne. Mais le plus important, c'est que le travail des enfants est aussi enraciné dans la mondialisation des marchés à l'échelle internationale. En fait, le travail des enfants s'est intensifié parallèlement à la libéralisation des marchés mondiaux, les multinationales étant à la recherche de marchés du travail où les salaires et les conditions sont de moins en moins élevés. Elles trouvent la main-d'oeuvre la moins coûteuse auprès d'entrepreneurs de pays en développement qui emploient des enfants pour produire des tapis, des textiles, des vêtements, des souliers, des jouets et d'autres produits peu transformés qu'elles commercialisent à l'échelle mondiale.

C'est parce que le travail des enfants est si étroitement lié au commerce mondial qu'il incombe à la communauté internationale de participer aux efforts en vue d'améliorer le triste sort des enfants qui travaillent et d'amorcer le processus visant à supprimer le travail des enfants.

À mon avis, les Canadiens veulent vraiment trouver des façons de prendre l'initiative et de jouer un rôle constructif dans ces efforts internationaux. Tout le monde se demande ce que les Canadiens et leurs gouvernements peuvent faire pour que la situation change.

Tout d'abord, en tant que consommateurs, les Canadiens peuvent changer quelque chose. Il doit parfois sembler à la plupart des Canadiens que le monde étrange des règles du commerce international, des organismes qui les appliquent et du jargon obscur de l'économique internationale ont peu d'effets directs ou immédiats sur leur vie.


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(1810)

En tant que consommateurs, nous sommes tous directement liés à l'économie mondiale. Chaque fois que nous achetons une paire de chaussures de sport fabriquée en Indonésie, un jouet fabriqué en Chine ou un tapis fabriqué en Inde ou au Pakistan, nous participons directement au commerce international et contribuent également sans doute au travail des enfants.

De plus en plus de gens au Canada et ailleurs dans le monde prennent conscience qu'en tant que consommateurs, ils contribuent à ce problème. Nous nous faisons complices, en quelque sorte. Il arrive trop rarement que l'un d'entre nous ne soit tourmenté à l'idée que les vêtements ou les jouets qu'il achète pour ses enfants puissent avoir été fabriqués par des enfants dans des ateliers de misère.

Néanmoins, les consommateurs prennent de plus en plus conscience qu'ils ont l'obligation morale de se demander par qui et dans quelles conditions ont été fabriqués les produits qu'ils achètent. Il s'ensuit que nous avons une responsabilité morale envers la main-d'oeuvre enfantine.

En tant que consommateurs, nous détenons un réel pouvoir pour faire changer les choses. Si les consommateurs n'achètent pas des produits dont on sait qu'ils ont été fabriqués par des enfants, les multinationales qui les produisent et les importent modifieront leurs pratiques. Le défi est de faire savoir aux consommateurs où, comment et par qui les produits ont été fabriqués.

Deux solutions liées au pouvoir des consommateurs ont été imaginées. La première consiste à apposer sur les produits des étiquettes attestant que ceux-ci n'ont pas été fabriqués par des enfants. Un exemple en est l'étiquette «Rugmark», une innovation récente qui s'attaque au problème du travail des enfants dans l'industrie du tapis de l'Asie du Sud, laquelle est bien connue pour exploiter les enfants. On parle d'appliquer cette solution à d'autres produits.

L'autre utilisation possible du pouvoir du consommateur dans la lutte contre le travail des enfants est le mouvement du commerce équitable. Des organismes comme «Bridgehead» d'Oxfam commercialisent les produits de pays en voie de développement qui ont été fabriqués dans de bonnes conditions de travail et se vendent à un prix équitable. Les consommateurs qui veulent avoir la certitude d'acheter des biens produits dans ces conditions ont l'occasion, par l'entremise de ces organismes, de faire leurs emplettes de manière moralement responsable en s'adressant à des organismes comme Bridgehead partout dans le monde.

Le mouvement en faveur d'un meilleur étiquetage et la croissance du commerce équitable constituent, pour les consommateurs, des tendances que tous voudraient à n'en pas douter voir se maintenir et prendre de l'ampleur. Le problème de la main-d'oeuvre enfantine et les autres problèmes associés aux normes internationales du travail ne peuvent pas et ne devraient pas être résolus uniquement par les consommateurs consciencieux.

Tout d'abord, les multinationales peuvent compter sur des agences de publicité extrêmement puissantes qui ont un énorme pouvoir sur notre culture populaire et peuvent cacher le contexte social des pays en développement où les produits sont fabriqués.

Pour un Craig Kielburger capable de remuer la conscience des Canadiens et du premier ministre en passant quelques minutes aux nouvelles nationales, il y a des douzaines de vedettes du sport à la réputation bien établie qui sont prêts à faire la promotion des produits des multinationales. Les armes sont loin d'être égales. Le gouffre qui existe entre les millions de dollars payés à une vedette du sport pour faire la promotion de souliers de course dans une annonce de 30 secondes et les quelques sous payés à l'enfant qui fabrique ces souliers dans un atelier de sueur asiatique et qui passera sa vie à y peiner constitue le plus éloquent motif de condamnation de la nouvelle économie mondiale.

L'autre raison pour laquelle nous ne devrions pas compter exclusivement sur le pouvoir des consommateurs, c'est que nous ne sommes pas uniquement des consommateurs, mais que nous sommes aussi des citoyens. Nous sommes les citoyens d'un État qui a les moyens de prendre des mesures, seul et dans le cadre des organismes internationaux dont il est membre et qui ont le pouvoir d'imposer des mesures efficaces pour éliminer le travail des enfants.

Les Canadiens veulent savoir que leur gouvernement fait tout ce qu'il peut pour jouer un rôle constructif dans les efforts internationaux de lutte contre l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine. Malheureusement, le gouvernement du Canada n'a pas fait tout ce qu'il pouvait. Le gouvernement a joué la comédie des paroles rassurantes, mais sa politique sur la main-d'oeuvre enfantine a consisté à s'en laver les mains. Il s'est contenté de faire étudier le problème par l'OCDE et par l'OIT, mais, en s'opposant à ce que l'Organisation mondiale du commerce, l'organisme qui fixe les règles du commerce mondial, s'occupe de quoi que ce soit qui se rapprocherait des droits de la personne, des normes du travail et des normes environnementales, le gouvernement s'est toujours rangé parmi ceux qui veulent que les règles commerciales ne tiennent aucun compte de l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine et des autres abus des droits de la personne. En outre, le gouvernement du Canada n'a pris aucune mesure pour restreindre l'importation ici de produits fabriqués par la main-d'oeuvre enfantine.

(1815)

Que devons-nous penser de la décision du gouvernement de condamner l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine mais de l'autoriser dans les marchés commerciaux, d'étudier le problème mais de ne pas prendre de mesure à cet égard? Je crois que l'inaction du gouvernement est fondée sur certaines hypothèses non déclarées, soit que la main-d'oeuvre enfantine est un élément inévitable du processus de développement, que c'est nécessaire pour les enfants des pays en développement de souffrir de l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine tant que leurs sociétés ne se seront pas bien adaptées à la mondialisation et que, à l'avenir, la pratique de l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine disparaîtra à mesure que les économies en développement deviendront plus prospères, tout comme cette pratique a disparu en Europe et en Amérique du Nord.

Il y a deux choses qui clochent terriblement dans cette confiance non fondée dans l'inévitabilité du progrès économique. La première, c'est qu'elle ne tient pas compte du fait qu'une bonne partie de la main-d'oeuvre enfantine dans les sociétés en développement est un résultat direct du soi-disant progrès économique. La main-d'oeuvre


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enfantine n'est pas une vieille coutume sociale non rentable que les pratiques économiques libérales vont finir par faire disparaître. Ce problème découle de la libéralisation des échanges commerciaux. C'est de cette façon que beaucoup de sociétés ont répondu à la libéralisation des échanges commerciaux. Ce problème continuera de s'aggraver tant que le coût de la main-d'oeuvre restera le principal avantage concurrentiel des pays en développement qui n'ont pas de normes de travail.

La deuxième chose, c'est que cet optimisme est fondé sur une mauvaise interprétation de l'histoire de la main-d'oeuvre enfantine dans les sociétés occidentales. La main-d'oeuvre enfantine n'a pas disparu au Canada en raison du progrès économique. Elle a été abolie en raison de l'indignation des citoyens qui trouvaient immoral qu'on permette l'exploitation des enfants, indignation qui a forcé les gouvernements à réglementer le monde du travail et à établir des normes de travail pour protéger les enfants.

Si nous voulons avancer dans notre lutte contre la main-d'oeuvre enfantine dans les pays en développement aujourd'hui, nous devons reconnaître que cela ne se fera pas sans l'établissement et l'application de normes juridiques pour protéger les droits des enfants. Dans le contexte actuel de la mondialisation, la communauté internationale aura un rôle à jouer pour ce qui est de s'assurer que ces normes de travail sont établies.

Imaginons ce qui arriverait si nous traitions les droits des multinationales avec la même nonchalance que nous traitons les droits des enfants. Par exemple, une partie intégrante des nouvelles règles de l'Organisation mondiale du commerce est la protection de la propriété intellectuelle des multinationales. Les compagnies pharmaceutiques veulent avoir des pleins droits sur la valeur de leurs médicaments, et les maisons d'enregistrement ne veulent pas le piratage de leurs disques compacts et de leurs vidéoclips par des indépendants.

Imaginons une situation où le gouvernement dirait aux sociétés multinationales, comme il le fait déjà à l'égard des enfants ouvriers: «Nous pensons que vos droits doivent être respectés, mais l'adoption de règles commerciales à cette fin détruirait le commerce. Mais ne vous en faites pas, nous étudions la question à l'OCDE. Plus ces pays verront leur prospérité s'accroître par l'exploitation de votre propriété intellectuelle, plus ils respecteront vos droits. Faites preuve de patience. Les rajustements nécessaires ne manqueront pas de se produire.» Les multinationales ne le toléreraient pas. Elles se moqueraient de tout gouvernement qui leur présenterait pareil argument.

Le problème est que les multinationales ont les moyens de se moquer des gouvernements, mais pas les enfants ouvriers. C'est pourquoi les gouvernements n'ont pas ménagé leurs efforts pour défendre les intérêts des multinationales. En Chine, l'absence de réglementation des disques compacts et de cassettes vidéo vendus sur le marché noir a empêché que ce pays soit accepté au sein de l'Organisation mondiale du commerce. Les gouvernements protègent les intérêts des compagnies pharmaceutiques multinationales en adoptant des lois sur les brevets pharmaceutiques. Pourtant, ces mêmes gouvernements, et parmi eux le gouvernement canadien, ont refusé d'inclure des dispositions sur les droits des travailleurs ayant force de loi dans les accords commerciaux. L'impuissance totale des enfants face aux très puissantes multinationales qui les exploitent impose aux gouvernements une obligation morale incontournable de défendre les droits des enfants.

Les gouvernements peuvent faire deux choses: Ils peuvent unir leurs efforts au sein des organisations internationales pour accorder autant d'attention aux droits de l'homme qu'aux intérêts économiques lorsqu'ils élaborent des accords commerciaux internationaux. Ils pourraient, par exemple, inclure des dispositions sociales dans ces accords, ou encore redéfinir le mandat de l'Organisation internationale du travail pour lui permettre de faire appliquer ses ententes dans les conventions. Les Nations Unies pourraient aussi créer un nouvel organisme ou un conseil économique calqué sur le modèle de l'actuel Conseil de sécurité. Quelque soit le mécanisme, il est vital que les droits de la personne et les normes de travail forment une partie essentielle du programme des échanges internationaux.

Les gouvernements peuvent aussi prendre des mesures indépendantes. Cela m'amène aux détails de la motion que je propose aujourd'hui. Les gouvernements peuvent, de leur propre initiative, réglementer le commerce et les produits fabriqués par la main-d'oeuvre enfantine en contravention des conventions de l'Organisation internationale du travail. Ma motion aujourd'hui demande au gouvernement de prendre des mesures pour obliger les importateurs à faire une déclaration certifiant que les produits qu'ils importent ne sont pas manufacturés par la main-d'oeuvre enfantine.

Il serait important, lorsque l'on conçoit les mesures, de préciser que les importateurs sont tenus de certifier que leurs fournisseurs n'exploitent pas la main-d'oeuvre enfantine pour la fabrication d'un produit. Il est en effet courant pour un fournisseur de ne pas employer directement des enfants mais de sous-traiter avec des fabricants locaux qui font appel à la main-d'oeuvre enfantine.

Le principal avantage de ce type d'approche en vue de combattre l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine est de mettre la réglementation complexe d'un pays industrialisé comme le Canada au service de la lutte contre un problème de sous-développement.

(1820)

Nombre de gouvernements dans les pays en développement font des efforts afin de mettre en place des règlements visant à protéger les enfants. Bon nombre de ces pays n'ont pas les ressources nécessaires pour veiller à l'application des règlements concernant la main-d'oeuvre enfantine, aussi bien intentionnées que puissent être ces règlements. Les pays industrialisés comme le Canada ont l'obligation d'aider les gouvernements des pays en développement à empêcher les multinationales de vendre des produits fabriqués par des enfants.

Les mesures prises par le gouvernement canadien ont pour but d'interdire l'importation de produits fabriqués par des enfants, et de placer sur les gros importateurs et détaillants la responsabilité d'établir que les produits importés n'ont pas été fabriqués par des enfants. Les sociétés elles-mêmes participeraient ainsi au coût de faire appliquer le règlement.

Certains diront que les priver de leur source d'emploi ne va pas aider les enfants exploités. Après tout, dans la plupart des cas, leur revenu doit être une fraction indispensable du revenu familial. Sur ce point, certains observateurs font remarquer que le succès du


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programme Rugmark, qui visait à attirer l'attention du public sur le travail des enfants, avait fait du tort aux enfants qui travaillent au Bangladesh, où des entreprises exportant leurs produits en Europe de l'Ouest et en Amérique du Nord n'engageaient plus d'enfants. On a dit que de faire travailler des enfants était peut-être une forme d'exploitation, mais que, pour les plus pauvres des sociétés pauvres, cela assurait au moins leur survie, et qu'on aurait tort de retirer aux familles cette source de revenu.

Si l'on réussissait à mettre un terme au commerce international de produits fabriqués par des enfants, il faudrait que la communauté internationale veille à alléger les conséquences immédiates de ce changement. Elle devrait donc s'engager à établir, avec les pays en voie de développement, des liens qui ne se limitent pas aux échanges commerciaux sur les marchés libres. De dire que nous ne devons pas cesser d'acheter des produits fabriqués par des enfants parce que cela ferait diminuer le niveau de vie des pauvres, c'est oublier que la communauté internationale peut faire bien plus pour les vrais pauvres que d'acheter des produits fabriqués par leurs enfants.

Comme tous ceux qui oeuvrent dans le domaine du développement international le savent bien, l'accès à une éducation de base est l'une des clés du développement. La communauté internationale devrait aider les plus pauvres en bâtissant des écoles pour leurs enfants, et non en achetant des breloques fabriquées par leurs enfants.

Maintenant, je veux demander à la Chambre si elle consent à l'unanimité à ce que ma motion fasse l'objet d'un vote à la fin de l'heure.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Une voix: Non.

M. Blaikie: Monsieur le Président, j'aimerais qu'il soit consigné au compte rendu que, selon une lettre que m'a envoyée le leader adjoint du gouvernement à la Chambre, c'est le gouvernement qui a refusé de donner suite à ma demande.

M. Ron MacDonald (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord dire au député d'en face que, personnellement, j'aurais été prêt à accepter que l'on continue à présenter au public, à la Chambre des communes, cette très importante question, l'exploitation de la main-d'oeuvre juvénile. Le député parle de cette question avec beaucoup de passion et cela depuis pas mal de temps. Il y en a d'autres dans cette Chambre qui partagent son point de vue. Je pense que la Chambre aimerait en attester.

La raison pour laquelle il n'y a pas eu consentement unanime, ce n'est pas qu'il y aient des députés, ici, qui estiment qu'on ne devrait pas s'occuper de ce problème, mais ce serait plutôt la façon de le régler. La méthode que préconise le député est louable et s'attaque à une partie du problème, mais beaucoup d'entre nous pensons que le problème est beaucoup plus vaste que cela. Certains des députés qui sont ici savent qu'on n'a parfois qu'une seule occasion de s'occuper d'un sujet comme celui-ci. Si une motion ne concernant qu'une petite partie d'un problème est mise à l'ordre du jour et étudiée, il se peut que le problème plus vaste prenne du temps à revenir devant les parlementaires pour être étudié plus en profondeur.

Le député sait que les initiatives parlementaires sont étudiées par le Comité des affaires de la Chambre et de la procédure. Les projets de loi et les motions sont tirés au sort. Certains des ces projets de loi et de ces motions sont très bons. Dans sa sagesse, ce comité décide quels articles peuvent faire l'objet d'un vote. Ce comité a des représentants du Parti réformiste, du Parti libéral et du Bloc québécois. Il décide quels articles peuvent faire l'objet d'un vote. Si une question ne fait pas l'objet d'un vote, cela ne signifie pas qu'elle est sans importance, seulement qu'à ce stade le comité estime qu'elle ne devraient pas se conclure par un vote.

Avant de commencer mes remarques à l'appui de ce que le député nous a présenté, je dois dire que je suis dans une position assez inhabituelle. Je représente le gouvernement qui estime que cette motion, bien que son intention soit fort louable, ne couvre pas suffisamment toute l'ampleur de la question.

Au député d'en face, je dois dire que j'ai ici une lettre qui a été envoyée par notre leader suppléant à la Chambre à M. Craig Kielburger. Le leader parlementaire a dit: «En ma qualité de leader adjoint du gouvernement à la Chambre je suis disposé à discuter avec M. Blaikie de la façon dont il convient de demander à la Chambre de se prononcer sur cette question dans un avenir très proche. Cela devra se faire de manière ordonnée, en consultation avec les leaders parlementaires de tous les partis.» Bien qu'il ait été décidé que cette motion ne pouvait faire l'objet d'un vote, le leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, parlant au nom du gouvernement, a exprimé son appui pour la mesure qui a été présentée et a offert au député d'en saisir la Chambre dans les plus brefs délais.

(1825)

En fait, les gens dans cette Chambre et nos concitoyens d'un bout à l'autre du pays reconnaîtront que le premier ministre lui-même a déclaré publiquement, tant à l'étranger qu'à l'extérieur de cette enceinte, ainsi que dans le discours du Trône, que c'était un dossier que le gouvernement prenait très au sérieux et que le gouvernement voulait l'aborder très rapidement.

Le gouvernement canadien est déterminé à prendre des mesures pour mettre fin à ce genre d'exploitation et pour travailler conjointement à tous les niveaux en vue d'éliminer les conditions qui empêchent les enfants de réaliser leur plein potentiel.

Le bien-fondé de l'objectif de la motion n'est pas mis en doute. En fait, il est très logique de penser qu'en rendant la main-d'oeuvre enfantine non rentable, on éliminera le recours à cette dernière. L'interdiction des importations est une mesure que le gouvernement hésite à prendre comme étant la façon la plus efficace de donner suite à l'engagement pris dans le discours du Trône à l'égard des droits des enfants et de leur protection, convaincu qu'il est que le développement économique et le respect des droits de l'homme vont de pair.


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Il s'agit de savoir si en soi interdire l'importation de produits fabriqués par des enfants permettra d'atteindre l'objectif visé. Un certain nombre de critères ont guidé les délibérations du gouvernement à cet égard.

Cette mesure sera-t-elle efficace? Ira-t-elle aussi loin qu'il faudra aller, selon le gouvernement, pour mettre fin à cette pratique? Les pratiques d'emploi fondées sur l'exploitation et le rudoiement d'enfants révèlent le dilemme des terribles problèmes inhérents au sous-développement: la pauvreté, le manque de gouvernement, la faiblesse des institutions démocratiques, pour ne nommer que ceux-là. L'emploi d'enfants est aussi une question culturelle et une pratique sociale traditionnelle qui découle de la pauvreté des familles et de l'accès impossible à l'éducation. En interdisant tout simplement l'importation de biens fabriqués par des enfants, on ne règle pas les questions fondamentales sous-jacentes.

Dans plus de 90 p. 100 des cas, les enfants fabriquent des produits utilisés sur place et non exportés. Par conséquent, plus de 90 p. 100 des activités échapperaient au contrôle. Les restrictions quant à l'importation n'auraient aucun effet sur ces millions d'enfants et ne changeraient pas les conditions de sous-développement qui favorisent ces pratiques abusives. Le développement est la seule arme contre ces pratiques.

Certaines données prouvent que l'interdiction de l'importation ne résout pas efficacement les problèmes liés à la fabrication des produits exportés, malgré tous les efforts. Au lieu de cela, les enfants mis à la porte des usines se retrouvent parfois dans des situations potentiellement plus dangereuses. Les employeurs prêts à recourir à de telles pratiques sont sournois, déterminés et rusés. Ils trouvent d'autres enfants et camouflent mieux leurs pratiques.

Le Canada a fait des progrès importants quant à la promotion et à la mise en oeuvre d'un système de commerce international ouvert, multilatéral et fondé sur des règles. Nous croyons que le seul moyen de mettre fin à cette pratique horrible de l'exploitation d'enfants est d'établir une collaboration multilatérale avec d'autres gouvernements, par le truchement d'organisations internationales, d'associations commerciales, de banques et d'autres organismes semblables.

Nous devons choisir les meilleures solutions pour mettre fin à l'exploitation des enfants. Le gouvernement estime que la façon la plus efficace dont le Canada dispose pour mettre fin au travail des enfants consiste: premièrement, à développer progressivement des relations de collaboration en vue de satisfaire les besoins humains de base, de réduire la pauvreté et de favoriser une saine gestion publique et, deuxièmement, à participer à des opérations multilatérales qui cadrent avec les engagements fondamentaux du Canada envers les droits de la personne, l'établissement de normes justes et équitables en matière de travail et de commerce.

L'ACDI consacre actuellement environ 1 million de dollars par jour au développement et à la défense des besoins des enfants. Bon nombre de ces programmes ont précisément pour but d'éliminer les causes du travail des enfants, d'atténuer ses effets les plus nocifs et de réadapter ses victimes. Le ministère des Affaires étrangères, le ministère de la Défense nationale et l'ACDI se préoccupent du sort des enfants soldats et des enfants vivant des économies de reconstruction ou de transition qui font suite aux conflits armés, où l'on tolère que les enfants travaillent dans des conditions très dangereuses puisque c'est la prix à payer pour accélérer le développement social et économique de la région.

Par le truchement de l'ACDI et du ministère du Développement des ressources humaines et grâce à l'appui politique indéfectible du ministère des Affaires étrangères, le Canada a octroyé une subvention de 700 000 $ dans le cadre du programme international pour l'élimination du travail des enfants, afin d'organiser des cours de formation en la matière de concert avec les pays qui se sont engagés à mettre fin à cette pratique chez eux.

(1830)

On donnera directement suite à ce projet dans le cadre de conférences qui auront lieu en Norvège et aux Pays-Bas plus tard cette année. Plus de 30 pays en voie de développement et industrialisés, y compris le Canada, y participeront et on cherchera alors à établir de véritables plans d'action pour s'attaquer aux véritables problèmes que pose le travail des enfants.

Le Canada a joué un rôle actif dans la décision de l'Organisation internationale du travail de parvenir à une nouvelle convention pour éliminer les formes les plus nocives de l'utilisation de la main-d'oeuvre enfantine. Les ministères des Affaires étrangères et du Développement des ressources humaines continuent de travailler en étroite collaboration pour préparer la prochaine conférence de l'OIT, en juin, qui a pour thème central le travail des enfants. De plus, le gouvernement cherche des moyens de mieux sensibiliser les consommateurs et il travaille avec le secteur privé et des groupes communautaires à cette fin.

Une très grande part de notre engagement s'appuie sur la détermination des Canadiens de jouer un rôle actif par l'entremise de leurs gouvernements. Pour donner suite à l'engagement que nous avons pris dans le discours du Trône, les ministères des Affaires étrangères et de la Justice ont déposé une loi pour modifier le Code criminel du Canada afin qu'on puisse poursuivre les Canadiens qui se livrent au tourisme sexuel, qui est la forme la plus haineuse d'abus de la main-d'oeuvre enfantine.

Le Canada déploie également des efforts pour veiller à ce qu'on adopte le protocole optionnel sur les droits de l'enfant concernant la vente des enfants, ainsi que la pornographie et la prostitution enfantines, toutes des choses ne se produisent pas simplement dans des pays étrangers. Malheureusement, elles se passent également dans les rues de nos villes, dans tout le Canada.

Nous participons aussi aux consultations régionales dans les Amériques et nous avons également apporté une forte contribution à la déclaration provisoire d'action en préparation de la conférence sur l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales qui aura lieu en Suède, en août, et où nous jouerons un rôle actif.

Nous apprenons, par l'entremise de pays animés des mêmes sentiments et grâce à notre propre expérience, que la meilleure façon de réussir consiste à adopter des approches multiples mettant l'accent sur la participation locale dans la lutte contre la pauvreté, les soins aux enfants, l'éducation, les programmes très larges de création d'emplois pour les jeunes et les adultes. Il faut également déployer des efforts au niveau multilatéral pour mettre en oeuvre


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des règles basées sur des normes commerciales et des normes du travail fondamentales.

Le gouvernement souscrit à l'initiative du député. Cependant, le gouvernement s'est engagé dans le discours du Trône et dans les déclarations faites par des membres du Cabinet, notamment le premier ministre, à offrir à la communauté internationale ses ressources limitées, sa bonne volonté et sa réputation internationale pour s'attaquer à ce problème bien réel.

J'espère qu'on acceptera rapidement l'offre que notre leader adjoint à la Chambre a faite au député. Il se peut que dans très peu de temps, on trouve la tribune voulue et la bonne occasion pour que tous les députés participent à un débat sur le problème d'une grande portée que constitue le travail des enfants.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je veux d'abord vous dire que nous allons appuyer le projet de loi présenté par l'honorable collègue du NPD et nous souhaitons que ce projet de loi puisse faire l'objet d'un vote.

Je voudrais rappeler qu'il y a quelques jours, une délégation de parlementaires canadiens, dont je faisais partie, se rendait à Genève pour participer à la Conférence internationale des droits de l'homme. Nous avons, dans le cadre de cette conférence, visité l'Organisation internationale du travail.

Je trouve pour le moins étrange que le gouvernement refuse que ce projet de loi fasse l'objet d'un vote, puisque nous avons tous été sensibilisés, et je vais avoir l'occasion d'en parler dans le menu détail, puisqu'on a remis aux parlementaires canadiens une évaluation faite par le Bureau international du travail au sujet de l'ampleur du travail accompli par des enfants dans différents pays du monde.

Je voudrais rappeler une définition de l'Organisation internationale du travail: «Nous considérons que le travail des enfants implique toute activité économique effectuée par une personne âgée de moins de 15 ans, quel que soit le statut professionnel de celle-ci.» Alors, il y a donc une définition claire: «[. . .] une activité économique effectuée par une personne âgée de moins de 15 ans-ce n'est pas particulièrement vieux, ça-quel que soit le statut professionnel de celle-ci.»

L'Organisation internationale du travail évaluait, en 1990, qu'à travers le monde, 78 millions d'enfants de moins de 15 ans étaient engagés économiquement. Et de ces 78 millions, près de 70 millions étaient âgés entre 10 et 14 ans. Je crois que c'est important d'avoir ces données présentes à l'esprit.

(1835)

Il faut constater que partout au monde, particulièrement à l'intérieur des grands organismes des Nations Unies, il y a une conscience, un éveil face à l'intolérance que nous devons avoir, la non-acceptation de ce qu'implique pour 78 millions d'enfants au monde d'être placés dans des conditions où on choisit entre la scolarité et le travail.

Peut-être l'a-t-on rappelé dans le discours livré par le proposeur de la motion, mais c'est présentement l'Asie qui abrite le plus grand nombre d'enfants qui travaillent. Quelquefois, on peut penser que c'est le lot des pays en développement, que c'est une réalité qui échappe aux pays industrialisés. J'ai moi-même posé la question lorsque je me suis rendu à Genève avec un certain nombre de mes collègues, et j'ai appris qu'il y avait, en Ontario, des compagnies qui exploitaient des enfants, de jeunes enfants qui sont engagés, particulièrement des enfants d'immigrants. On m'a dit que c'est aussi le cas aux États-Unis, chez nos voisins du Sud.

Mais l'Organisation internationale du travail a évalué de manière plus précise qu'en Turquie, en 1994, 8,3 p. 100 des enfants étaient économiquement actifs. Je pense qu'il est important de savoir, comme parlementaires canadiens, que ce n'est pas seulement le lot des enfants qui ont eu l'infortune de voir le jour dans des pays en développement.

Pour dresser un tableau un peu nuancé de cette réalité, on sait également que les enfants sont deux fois plus actifs économiquement dans les zones rurales que dans les zones urbaines. Et plus intéressant encore, parce que cela nous donne la mesure de l'intervention que nous devrons faire, ou l'intervention à laquelle nous devrons souscrire lors de la prochaine conférence de Norvège à laquelle a référé le collègue, les trois quarts des enfants qui sont engagés économiquement dans les différents pays à travers le monde et qui totalisent les 78 millions d'enfants dont j'ai parlé sont engagés à l'intérieur d'entreprises familiales.

Cela ajoute à la difficulté qu'on aura, parce qu'il y a toutes sortes de considérations qui sont liées à la vie de la famille, qui sont liées à la promiscuité, qui sont liées finalement aux liens qu'un enfant peut avoir avec sa famille immédiate. Les trois quarts des enfants qui sont engagés économiquement le sont à l'intérieur d'entreprises familiales, dans des secteurs économiques très particuliers, comme le textile, la confection, les tapis, dont a parlé le proposeur, particulièrement pour l'Égypte et l'Inde, et également dans le secteur de la chaussure.

Ce qu'il est important de comprendre, c'est qu'il y a un lien à faire dans la compréhension qu'on doit avoir comme parlementaires de cette réalité entre l'accès à l'éducation et le travail des jeunes enfants.

Lorsque nous nous sommes rendus à Genève, nous avons été à même de constater que, s'agissant des pays en développement, le coût d'un élève inscrit au primaire représente le tiers des revenus en espèces de la famille. Dans beaucoup des ménages en question, plusieurs enfants sont d'âge scolaire. C'est pour cela que l'Organisation internationale du travail, parallèlement à la conscientisation qu'elle tente de déployer pour nous amener à comprendre, nous, pays riches, combien il est important que nous soyons solidaires de législations qui pourraient voir le jour dans ces pays nationaux pour prohiber le travail des jeunes enfants, combien tout cela, en définitive, nous renvoie à la question de l'éducation.

Je pense qu'on est capables, nous, de comprendre cela, comme parlementaires, particulièrement les parlementaires du Québec, parce qu'il n'y a pas si longtemps, nous avons été à même, comme société, de faire un rattrapage considérable au niveau de l'éduca-


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tion. Il n'est pas évident, lorsque les conditions d'accès à l'école primaire ne sont pas réunies, qu'il soit possible de lutter contre le travail des jeunes enfants.

Laissez-moi vous rappeler que seulement 68 p. 100 des enfants dans le monde achèvent le cycle d'éducation primaire, alors qu'il s'agit de 95 p. 100 dans les pays industrialisés. Je pense que des chiffres comme ceux-là nous rappellent tout le lien, toute l'adéquation qu'il faut faire entre le travail des enfants et l'accès à un système d'éducation. Bien sûr, et le proposeur et le secrétaire parlementaire y ont référé, il y a un lien entre le travail des enfants et la pauvreté de la famille. Il y a aussi un lien entre le travail des enfants et la richesse globale d'une famille.

(1840)

Dans les enquêtes qui ont été menées par l'Organisation internationale du travail, particulièrement pour des pays comme le Bangladesh et l'Inde, le travail des enfants est, dans bien des cas, intimement lié à la survie de la famille.

Ce n'est pas pour rien que l'Organisation internationale du travail, par la voie de son directeur général à Genève, nous a bien fait comprendre que, à l'intérieur même de l'Organisation des Nations Unies, c'est une question qui est extrêmement névralgique, qui divise beaucoup les pays riches et les pays pauvres, parce que les pays pauvres ne sont pas nécessairement prêts, s'agissant de leurs compétences nationales, à ce qu'une législation nationale soit adoptée.

Cela nous renvoie finalement à la question du transfert de la richesse. Que recommande l'Organisation internationale du travail? Elle nous demande, évidemment, de créer une organisation internationale, de créer un cadre réglementaire qui sera à même d'exercer une vigilance sur cette question. Elle nous rappelle que trois actions fondamentales devraient être posées par les gouvernements concernés.

La première est bien sûr une législation relative au travail des enfants; la deuxième a trait à une politique nationale sur le travail des enfants qui fixera des priorités publiques et qui mobilisera l'ensemble de la société. Ce que nous rappelle également l'Organisation internationale du travail, c'est que le financement d'un système d'instruction primaire qui garantisse l'accès à une école de qualité à tous les enfants est absolument essentiel pour remporter cette bataille.

Je remercie le député du NPD qui a présenté la motion. Je souhaite qu'elle fasse l'objet d'un vote et je veux assurer mon collègue que le Bloc québécois est extrêmement préoccupé par cette question.

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir intervenir au sujet de cette motion, qui traite d'un sujet très sérieux et très important, l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine.

En tant que parlementaires, nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour protéger les enfants du monde entier qui sont forcés de travailler. Le député qui a présenté cette motion croit sincèrement, comme nous tous d'ailleurs, qu'il faut s'attaquer à ce problème. J'espère, durant mon discours ce soir, pouvoir exposer un moyen non sectaire nous permettant de trouver quelques éléments de solution à ce problème.

La motion M-189 va très loin en interdisant l'importation de produits fabriqués par la main-d'oeuvre enfantine, mais cela améliorera-t-il vraiment le sort des enfants en question? Je crois qu'il y a d'autres solutions. Je suis d'accord avec ce qui s'est dit ce soir-et c'est certainement un début-mais je crois qu'il existe une autre façon d'aborder ce problème, comme je vais essayer de vous l'expliquer.

Le principal problème lié à l'application de la motion M-189, c'est que bon nombre des enfants du tiers monde qui travaillent ont besoin de ce revenu pour survivre. S'ils perdaient leur emploi aujourd'hui sans que nous mettions en place en même temps des programmes pour les nourrir, les loger et les éduquer, nous leur nuirions au lieu de les aider. Je ne suis pas le seul à penser ainsi. J'ai vraiment cherché une solution ou des moyens possibles de corriger la situation.

Je voudrais remercier le député de Yorkton-Melville, qui m'a fourni des renseignements provenant d'organismes tels que l'UNICEF et de certaines autres ONG réparties dans le monde entier. Ces organisations étudient ce problème depuis longtemps. Elles sont quotidiennement confrontées à la situation. Elles savent où elle existe et sous quelle forme; elles sont au courant des abus qui se commettent et des conséquences de ces abus.

Cet après-midi, certains députés ont eu l'occasion d'échanger avec cinq membres du Conseil canadien pour la coopération internationale. Le CCCI vise à regrouper les ONG pour faire front commun non seulement face aux parlementaires, mais aussi face aux donateurs, aux industries et aux travailleurs, entre autres.

(1845)

J'ai passé peu de temps en compagnie de ses représentants, mais j'ai eu l'occasion de leur présenter la motion. J'ai dit que j'allais prononcer un discours dans une heure ou deux et ils m'ont demandé de leur en tracer les grandes lignes. J'ai été heureux de constater que, en plus d'être tous opposés à l'exploitation des enfants, nous avons aussi convenus que nous devions éviter de nous précipiter. En effet, nous devons élaborer un programme pour nous attaquer à ce problème d'une manière réfléchie. Ils ont plutôt renforcé les constatations de mes recherches.

Les responsables de l'UNICEF s'opposent à une interdiction de la main-d'oeuvre enfantine parce qu'ils savent d'expérience combien dévastatrices peuvent être les conséquences d'une telle démarche. Par exemple, la seule menace d'une telle interdiction aux États-Unis a entraîné le licenciement massif d'enfants travaillant dans des manufactures de vêtements dans des pays comme le Bangladesh. Ce fait est confirmé. J'ai vu les chiffres. Ces personnes ont dit que ce fait était confirmé, tout comme beaucoup d'autres.

Selon un responsable, les écoles ne pouvaient accueillir ces enfants et ceux-ci se sont tous retrouvés davantage exploités, dans des emplois plus dangereux et moins rémunérateurs. Certains de ces enfants pauvres ont même dû se prostituer après avoir perdu leur emploi dans les manufactures de vêtement.

Tel n'est pas le but de la motion no 189, mais ce pourrait néanmoins être bien involontairement sa conséquence indirecte. Par conséquent, je ne peux appuyer la motion telle qu'elle est formulée, mais je voudrais proposer une autre voie qui pourrait nous mener à une solution. Je le répète, nous abhorrons tous l'exploitation des enfants, mais nous devons avoir une solution de rechange. Nous devons avoir autre chose à offrir.


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Pour en revenir à l'étude que l'UNICEF a consacrée à la question, ces gens ont fait enquête sur plus de 2 000 fabriques de vêtements qui emploient environ 12 000 enfants. Ils ont constaté que près de 90 p. 100 des enfants venaient d'une famille monoparentale ou de foyers où l'un des parents était décédé ou était handicapé. Plus de 50 p. 100 des enfants étaient le seul soutien de la famille.

De plus, il arrive souvent que les enfants en question soient des filles qui accompagnent leur mère à l'usine. On a constaté qu'il était plus sûr pour elles de travailler aux côtés de leur mère que de rester seules à la maison.

Je voudrais également vous faire part de mon expérience personnelle. J'ai eu l'occasion de me rendre au Népal, où j'ai pu rencontrer un certain nombre d'enfants tibétains qui fabriquaient des tapis. Je pensais que la rencontre prendrait dix minutes. Il a fallu deux heures. Le plus étonnant est que ces enfants de 12, 13 ou 14 ans parlaient cinq langues. Ils avaient appris en parlant avec des touristes, en leur vendant leurs tapis. Je les ai interrogés sur leur travail. Le dévouement avec lequel ils fabriquaient et vendaient ces tapis, gagnaient de l'argent pour leurs familles et les réfugiés venus du Tibet, était vraiment étonnant.

J'aurais été porté à croire qu'ils étaient malheureux, en colère à cause de leur situation, mais c'était bien différent. J'ai également eu la chance de parler avec des enfants qui travaillaient dans des usines en Égypte, en Inde, au Rwanda, et leur situation est comparable. Je ne dis pas que nous devons approuver, mais simplement que nous devons trouver une autre solution avant de les priver de leur emploi.

Quelle serait la solution? Il est évident que le problème du travail des enfants est complexe. Il n 'y a pas de solution facile. Ce que nous devons trouver, c'est une solution à long terme qui tiendrait compte des besoins des enfants et de leur famille.

Si le gouvernement acceptait de chercher une telle solution par l'entremise du programme canadien d'aide au développement, il pourrait commencer par demander au Comité des affaires étrangères, dont je suis membre, de se pencher sur cette question.

(1850)

Je crois que les membres du comité apprécieraient grandement qu'on lui confie un projet qui en vaut autant la peine. Nous pourrions alors dire que, au lieu de faire certains des travaux sans signification que nous faisons, nous voulons plutôt étudier la situation des travailleurs juvéniles. Examinons les faits. Trouvons une solution. Il existe peut-être une meilleure façon de faire les choses.

Grâce à la collaboration des ONG-je sais qu'elles aimeraient bien que nous embarquions dans un tel projet-nous pourrions, tous ensemble, trouver une solution, grâce à laquelle nos programmes d'aide contribueraient vraiment à changer des vies, au lieu de simplement envoyer de l'aide à des gouvernements étrangers.

Au pire, nous donnerions à ces jeunes les fonds nécessaires pour qu'ils fréquentent l'école, peut-être seulement le soir au début. Ils pourraient travailler aux côtés de leurs parents le jour et aller à l'école le soir. C'est peut-être là une possibilité. Toutefois, nous contribuerions à perfectionner ces enfants.

Je n'ai pas toutes les réponses. Tout ce que je sais, c'est qu'il y a là un problème. Nous en convenons tous. Tous les intervenants en ont convenu. Ce serait là quelque chose de vraiment significatif que nous, parlementaires, pourrions cautionner de telle sorte que les Canadiens pourraient dire qu'ils ont fait quelque chose collectivement pour les enfants pauvres du monde.

J'appuie toute cette notion, mais je ne puis pas appuyer cette motion. Je sais que le député de Winnipeg Transcona l'a proposée avec les meilleures intentions du monde. C'est pourquoi je voudrais que le gouvernement adopte une politique globale à long terme sur le problème du travail des enfants.

J'estime en outre que le Comité des affaires étrangères serait une bonne tribune pour tenir des réunions sur cette question, interviewer des témoins, présenter des recommandations au gouvernement afin d'arriver un jour, comme c'est à espérer, à résoudre ce grave problème.

M. George Proud (secrétaire parlementaire du ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté ceux qui ont participé à ce débat ce soir, et c'est l'une des rares fois où je puis dire avec certitude que l'esprit de la motion rallie tous les députés ici présents.

L'exploitation économique des enfants est une atteinte aux droits fondamentaux de la personne. C'est une atteinte à des valeurs qui sont chères à pratiquement tous les Canadiens, soit le respect et l'équité.

Je sais fort bien que si nous tenions un vote afin d'inviter les pays à abolir le travail des enfants, tous les députés ici présents, indépendamment de leur affiliation politique, se lèveraient pour appuyer une motion en ce sens.

Le député de Winnipeg Transcona, l'auteur de la motion dont nous sommes saisis, croit qu'en adoptant celle-ci, le Canada ferait un pas important dans la bonne direction. Malheureusement, c'est un peu plus compliqué que cela. Condamner systématiquement le travail des enfants, c'est laisser entendre que tous les enfants qui travaillent sont exploités. Dans bien des pays, y compris le Canada, le travail à temps partiel fait toutefois partie de la vie de nombreux enfants et il n'est pas synonyme d'exploitation ni préjudiciable à leur épanouissement. En fait, il peut aider les jeunes à acquérir des compétences et de la confiance.

Le député va sûrement dire qu'il ne vise pas les emplois à temps partiel des jeunes qui travaillent dans des restaurants comme les MacDonald ou qui livrent les journaux après l'école, et je le comprends. Cependant, pour lutter efficacement contre l'exploitation des enfants par le travail, il faut établir une distinction entre le travail qui aide un enfant à devenir un adulte responsable et celui qui est nettement préjudiciable à son bien-être. C'est là l'aproche du gouvernement du Canada.

Le travail oppressant des enfants est lié à la pauvreté, mais il est aussi influencé par la culture et les valeurs sociales traditionnelles. Il ne sera pas facile de le supprimer. Empêcher simplement les


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enfants de travailler n'est pas une solution. Nous avons besoin de solutions de rechange pour garantir leur éducation, leurs soins et, fait tout aussi important, des revenus substantiels à leur famille.

En ce qui concerne l'appel lancé par le député au gouvernement pour qu'il interdise l'importation de biens fabriqués par de la main-d'oeuvre enfantine, comme le définissent les conventions de l'Organisation internationale du travail, je voudrais souligner que le Canada est membre de l'organe directeur du secrétariat de l'OIT. Nous y sommes représentés par des fonctionnaires de Développement des ressources humaines Canada chargés de la question du travail.

(1855)

Cela nous permet de jouer un rôle proactif au sein de l'OIT. Le député de Winnipeg-Transcona n'ignore sûrement pas que l'OIT a pris un certain nombre de mesures portant sur le travail des enfants. En tant qu'organisme des Nations Unies composé de 173 États, l'OIT a adopté, en 1973, la Convention 138, qui fixe l'âge minimum auquel toute personne peut travailler.

Au Canada les employeurs se conforment massivement aux principes sous-jacents de la Convention 138. Par exemple, tous les gouvernements du Canada ont adopté des lois précisant à quelles conditions les enfants qui n'ont pas encore atteint l'âge leur permettant de quitter l'école peuvent travailler. L'emploi des enfants qui n'ont pas encore atteint cet âge est habituellement interdit pendant les heures de classe. En dehors de ces heures, les gouvernements interdisent habituellement de faire travailler les enfants ayant moins d'un certain âge dans certains postes et dans certaines conditions où ils courent des risques de blessure et des risques pour leur santé, leur éducation et leur bien-être.

Néanmoins, il existe certaines divergences entre la convention et la situation au Canada. En fait, aucun gouvernement au Canada n'interdit complètement de faire travailler les enfants, pas même les enfants de moins de 13 ans, lorsque les tâches sont légères. En règle générale, au Canada, les tâches légères peuvent être d'excellentes occasions d'apprentissage et de socialisation.

Pour ces raisons, la ratification de la convention 138 est encore à l'étude. La ratification et la mise en oeuvre de la convention nécessiteraient l'accord de toutes les parties.

Le Canada appuie aussi les efforts de l'OIT en vue d'éliminer la pauvreté chez les enfants grâce au programme national pour l'élimination de la main-d'oeuvre enfantine. En février dernier, le ministre des Affaires étrangères, en collaboration avec le ministre de la Coopération internationale et le ministre du Travail, a annoncé que le Canada verserait une contribution de quelque 700 000 $ à ce programme.

La contribution du Canada à ce programme permettra à celui-ci de poursuivre son travail, qui consiste à encourager les gouvernements à respecter les normes internationales relatives à l'âge minimum des travailleurs. Cet investissement nous rapprochera de la fin de l'exploitation de près de 200 millions d'enfants dans le monde.

Le député sait sans aucun doute que l'Organisation internationale du travail tient sa conférence annuelle en juin. La question de la main-d'oeuvre enfantine est censé figurer à l'ordre du jour de la rencontre officielle tripartite des ministres. Le ministre du Travail dirigera la délégation canadienne, qui tentera d'obtenir l'appui des autres délégations pour que les États membres de l'organisation interviennent contre les formes d'exploitation les plus abusives de la main-d'oeuvre enfantine.

En plus des mesures dont j'ai déjà parlé, le gouvernement canadien a ratifié, en 1991, la Convention des Nations Unies relative aux droits des enfants. Cette convention oblige les parties signataires à protéger les enfants contre l'exploitation économique et contre les formes de travail susceptibles d'entraver leur éducation ou de nuire à leur santé ou à leur bien-être.

L'aide aux enfants occupe une place importante dans le programme canadien d'aide au développement. Le député de Dartmouth disait tout à l'heure que l'ACDI consacre quotidiennement environ un million de dollars aux programmes d'aide aux enfants.

En tant que signataire de l'ALENA, le Canada est un partenaire de l'accord nord-américain sur la coopération relative au travail, qui reconnaît le principe de la protection des enfants et des jeunes dans le domaine du travail.

De plus, nous ne nous appuyons pas que sur des mesures qui sont actuellement en vigueur. Le gouvernement travaille présentement avec l'Organisation internationale du travail pour parvenir à un consensus international. Ce consensus, que l'organisation examinera à sa conférence de 1998, comprendra la création d'un nouveau texte juridique sur le renforcement de l'action internationale contre les formes de main-d'oeuvre enfantine les plus abusives. Nous devons surtout tenter de mettre fin aux principaux abus dont la main-d'oeuvre enfantine est victime.

La motion présentée par le député demande au gouvernement d'interdire unilatéralement l'importation de produits fabriqués par la main-d'oeuvre enfantine. Le député de Dartmouth a déjà parlé de cette question. Il existe également un risque de faire de la main-d'oeuvre enfantine un problème caché, ce qui placerait les enfants concernés dans des situations encore plus dangereuses.

Il est important de souligner la position sans équivoque du gouvernement qui estime que les objectifs en matière de commerce et des droits de la personne ne sont pas rivaux. Ils se renforcent mutuellement. Ils nous permettent d'exprimer nos valeurs fondamentales. Ils nous permettent de travailler à la promotion de règles commerciales plus précises et plus ouvertes. De cette façon, nous renforçons nos valeurs et nous nous rapprochons de nos objectifs en matière de commerce et des droits de la personne. Le gouvernement est prêt non seulement à travailler avec les gens d'affaires, mais aussi à consulter les syndicats, les ONG oeuvrant pour la lutte contre la pauvreté et pour la défense de l'enfance, et les milieux universitaires.

(1900)

Pour terminer, je voudrais dire au député de Winnipeg Transcona que je partage sa frustration. Je partage sa colère face à l'existence de cette main d'oeuvre enfantine. Cependant, je crois en toute honnêteté que le gouvernement a une approche plus efficace qui permettra d'arriver à des solutions à long terme. Je regrette donc de ne pourvoir, pour cette raison, appuyer la requête du député qui demande que cette motion fasse l'objet d'un vote.

2469

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, il reste deux minutes seulement; j'ai juste le temps de dire que le député de Winnipeg Transcona a encore une fois proposé une excellente initiative.

Nous avons tous entendu les différents points de vue. Cette initiative exige une volonté politique et le consentement unanime du Parlement. Ce n'est pas un de ces cas où l'on peut dire «oui,mais. . . » en présentant une longue liste de conditions préalables à toute action. Dans ce cas, une décision politique passe obligatoirement par le consentement unanime de la Chambre, qui transmettrait ainsi un message politique clair au gouvernement.

Le député de Red Deer a expliqué longuement toutes les conditions à remplir pour qu'il n'appuie la motion. Il fallait mettre un point sur tous les i et une barre sur tous les t. Le député de Winnipeg Transcona a satisfait à presque toutes les conditions énumérées par le député de Red Deer.

La question dont nous sommes saisis a touché et troublé profondément la population canadienne, à cause des reportages diffusés à la télévision il y a quelques mois.

Il est évident que d'autres initiatives devront être prises en parallèle. Cependant, avant tout, la communauté internationale doit s'exprimer clairement, pas uniquement à Genève devant l'OIT, mais aussi dans tous les Parlements, afin que le monde entier sache ce que nous pensons du travail des enfants et des mesures correctives qui s'imposent. À cet égard, je suis convaincu que tous les députés appuieraient entièrement le député de Winnipeg Transcona.

Le président suppléant (M. Kilger): La période réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée et l'article est rayé du Feuilleton.

______________________________________________

2469

MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

L'ENVIRONNEMENT

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, la question à l'étude ce soir consiste à savoir si le ministre des Pêches et des Océans maintiendra au niveau de 1993-1994 le financement de l'Institut des eaux douces de Winnipeg et du Centre canadien des eaux intérieures de Burlington. Ces deux organismes de recherche sur les eaux douces se sont acquis une renommée internationale. Ils étudient l'eau des lacs et des rivières du Canada et en surveillent la qualité.

Pendant les années 1970 et 1980, on a élaboré des politiques visant à lutter contre les pluies acides et à réglementer l'utilisation des phosphates dans les détergents. Ces politiques sont attribuables, en grande partie, aux travaux scientifiques innovateurs effectués à l'Institut des eaux douces.

Un autre progrès a été réalisé récemment quand des chercheurs de l'Institut des eaux douces ont démontré que le toxaphène, un insecticide interdit, se déplace dans l'atmosphère depuis aussi loin que l'Asie et l'Amérique centrale et vient contaminer certains de nos lacs.

Ces études nous aident à comprendre l'écologie de notre pays et nous mettent en garde contre les dangers qui la menacent. Elles nous apprennent également quand les produits toxiques pénètrent dans la chaîne alimentaire. Nous sommes ainsi en mesure de surveiller leurs effets à long terme sur la santé des Canadiens et sur notre environnement.

L'eau douce est la ressource de l'avenir. Nous réduisons malheureusement les budgets de recherche à l'Institut des eaux douces et au Centre canadien des eaux intérieures. J'apprends que le budget consacré aux recherches sur l'eau douce, qui s'élevait à 10,5 millions en 1993-1994, subira des coupes pouvant atteindre 70 p. 100. Cela laisse présager la fin d'importants travaux de nombreux chercheurs canadiens à l'Institut des eaux douces et de leurs recherches de premier plan également. La protection de nos ressources en eau douce pour le bien des générations à venir exige un financement permanent de la recherche.

Pour conclure, je demande ce soir au ministre, par l'entremise de son secrétaire parlementaire, s'il s'engage à maintenir au niveau de 1993-1994 le budget consacré aux travaux de recherche sur l'eau douce au Canada.

M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de répondre à la question du député de Davenport qui s'est distingué par sa participation à des programmes nationaux et internationaux de protection de l'environnement.

Dans le cadre de l'exercice de réduction du déficit amorcé par le gouvernement fédéral, le budget du ministère des Pêches et des Océans sera amputé d'environ 40 p. 100 sur une période de cinq ans. Afin de pouvoir atteindre cet objectif en matière de réduction de budget, le ministère a examiné tous ses programmes en utilisant les quatre grands critères suivants: la réduction, l'élimination, la privatisation et le recouvrement des frais.

Cet examen des programmes a entraîné la prise de décisions difficiles en ce qui concerne toutes les activités du ministère, y compris les programmes scientifiques. Par exemple, le ministère se soustraira de ses responsabilités relativement à plus de 800 ports de plaisance. Les programmes de recherche en parasitologie et en aquaculture en eau douce seront supprimés et le principal navire de recherches océanographiques du ministère, le NM Hudson, sera désaffecté dans le cadre des réductions de dépenses de programmes du ministère.

Il ne fait aucun doute que l'Institut des eaux douces, à Winnipeg, et le Laboratoire des Grands Lacs pour les pêches et les sciences aquatiques, à Burlington, ont fait de précieuses contributions au secteur de l'écologie d'eau douce. Il est impossible de préserver les budgets de ces deux centres compte tenu des compressions budgétaires importantes qui s'imposent au ministère.

2470

En dépit des compressions effectuées dans les programmes scientifiques dans tout le pays, le ministère est résolu à conserver un programme des sciences d'eau douce tant à l'Institut des eaux douces qu'au Laboratoire des Grands Lacs pour les pêches et les sciences aquatiques. Les priorités de recherche du programme des sciences des eaux douces, à l'Institut des eaux douces, visent principalement la région des lacs expérimentaux, le diagnostic de l'état de santé des poissons et le maintien de l'expertise afin d'aider le ministère à s'acquitter de ses responsabilités en matière de gestion de l'habitat du poisson, ainsi que le maintien des compétences relatives à la croissance et la reproduction du poisson.

Pour compléter le financement de base qu'il accorde à la région des lacs expérimentaux, le ministère continue à rechercher des partenariats qui assureront la stabilité du financement à long terme de ce programme.

En ce qui concerne les Grands Lacs, le ministère se consacrera surtout à la restauration de l'habitat dans les zones menacées des lacs inférieurs, à la recherche sur les espèces introduites par accident et à la mesure des contaminants toxiques dans le poisson.

À l'échelon du gouvernement, il importe de remarquer qu'il y a un certain nombre d'organismes, en particulier, Environnement Canada, qui ont des programmes de recherche sur les eaux douces. Environnement Canada exploite des installations importantes comme l'Institut national de recherche sur les eaux et l'Institut national de recherches en hydrologie.

Le budget des programmes d'Environnement Canada dans le domaine des eaux douces est beaucoup plus important que celui du ministère des Pêches et des Océans. On ne peut pas passer sous silence la réduction de l'importance du ministère, mais le gouvernement est, et continuera à être, actif dans les domaines qui touchent les eaux douces.

Le président suppléant (M. Kilger): La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 14 heures demain, conformément à l'article 24 du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 8.)