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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 125

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 24 septembre 1998

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

. 1400

VLE SERVICE D'ASSISTANCE CANADIEN AUX ORGANISMES
VM. John McKay
VLA FAMILLE
VM. Eric Lowther
VLA DÉFENSE NATIONALE
VMme Judi Longfield
VLA DIVERSITÉ CULTURELLE
VM. Eugène Bellemare

. 1405

VLE PRÉSIDENT NELSON MANDELA
VMme Jean Augustine
VLE PRÉSIDENT NELSON MANDELA
VM. Bob Mills
VLE PRÉSIDENT NELSON MANDELA
VM. Ovid L. Jackson
VLE PRÉSIDENT DE L'AFRIQUE DU SUD
VM. Daniel Turp
VLE PRÉSIDENT DE L'AFRIQUE DU SUD
VMme Eleni Bakopanos

. 1410

VLA COMMISSION DE LA CAPITALE NATIONALE
VM. Inky Mark
VLE BLOC QUÉBÉCOIS
VM. Claude Drouin
VLES ÉTANGS BITUMINEUX DE SYDNEY
VM. Peter Mancini
VLA MISSION COMMERCIALE
VM. Bryon Wilfert
VLE PRÉSIDENT DE L'AFRIQUE DU SUD
VM. Mark Muise

. 1415

VQUESTIONS ORALES
VLE SOMMET DE L'APEC
VM. Preston Manning
VL'hon. Herb Gray
VM. Preston Manning
VL'hon. Herb Gray
VM. Preston Manning
VL'hon. Herb Gray
VM. John Reynolds
VL'hon. Herb Gray

. 1420

VM. John Reynolds
VL'hon. Herb Gray
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Herb Gray
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Herb Gray
VM. Richard Marceau

. 1425

VL'hon. Herb Gray
VM. Richard Marceau
VL'hon. Herb Gray
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Herb Gray
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Herb Gray
VMme Elsie Wayne
VL'hon. Andy Scott
VMme Elsie Wayne
VL'hon. Andy Scott

. 1430

VM. Jim Abbott
VL'hon. Andy Scott
VM. Jim Abbott
VL'hon. Andy Scott
VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Paul Crête
VL'hon. Paul Martin
VM. Paul Crête
VL'hon. Paul Martin
VLE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA
VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin

. 1435

VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin
VLA TREMBLANTE DU MOUTON
VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief
VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief
VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Dick Harris
VL'hon. Paul Martin

. 1440

VM. Dick Harris
VL'hon. Paul Martin
VL'ÉCONOMIE CANADIENNE
VM. Yvan Loubier
VL'hon. Paul Martin
VL'AGRICULTURE
VM. Rey D. Pagtakhan
VL'hon. Sergio Marchi
VLE SÉNAT
VMme Deborah Grey
VL'hon. Herb Gray

. 1445

VMme Deborah Grey
VL'hon. Herb Gray
VM. Randy White
VLE SOMMET DE L'APEC
VMme Libby Davies
VL'hon. Herb Gray
VMme Libby Davies
VL'hon. Andy Scott
VM. Scott Brison

. 1450

VL'hon. Herb Gray
VM. Scott Brison
VL'hon. Paul Martin
VLA TEMPÊTE DE VERGLAS
VM. Denis Paradis
VL'hon. Marcel Massé
VLE COMMERCE
VM. Preston Manning
VL'hon. Sergio Marchi
VL'ÉCONOMIE CANADIENNE
VM. Yvan Loubier
VL'hon. Paul Martin

. 1455

VLES OCÉANS
VM. John Finlay
VM. Wayne Easter
VLE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA
VM. Maurice Vellacott
VL'hon. Paul Martin
VL'AGRICULTURE
VM. Dick Proctor
VL'hon. Lyle Vanclief
VLE PALAIS DES CONGRÈS DE MONTRÉAL
VM. Antoine Dubé
VL'hon. Martin Cauchon

. 1500

VLE SOMMET DE L'APEC
VM. David Price
VL'hon. Andy Scott
VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VM. Randy White
VL'hon. Don Boudria
VAFFAIRES COURANTES

. 1505

VDÉCRETS DE NOMINATION
VM. Peter Adams
VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Peter Adams
VLOI SUR L'OBSERVATION DE DEUX MINUTES DE
Vprojet de loi C-434. Présentation et première lecture
VM. Jason Kenney
VLA LOI SUR LA BANQUE DU CANADA
VProjet de loi C-435. Présentation et première lecture
VM. Richard Marceau
VPÉTITIONS
VLes armes nucléaires
VM. Mac Harb

. 1510

VLa Loi sur les jeunes contrevenants
VM. Chuck Cadman
VL'âge de consentement
VM. Chuck Cadman
VLes réfugiés
VM. Pat Martin
VLe réseau routier
VM. Pat Martin
VLes armes nucléaires
VM. Pat Martin
VLe mariage
VM. Randy White
VLe contrôle des armes à feu
VM. Paul Forseth
VLe mariage
VM. Paul Forseth
VLe CRTC
VM. Jay Hill
VLa Loi sur les jeunes contrevenants
VM. Grant McNally

. 1515

VLe mariage
VM. Grant McNally
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI DE 1998 POUR LA MISE EN OEUVRE DE CONVENTIONS FISCALES
VProjet de loi S-16. Deuxième lecture
VL'hon. Allan Rock
VM. Tony Valeri

. 1520

. 1525

VM. Jason Kenney

. 1530

. 1535

VM. Randy White

. 1540

VAmendement

. 1545

VM. Monte Solberg

. 1550

. 1555

VM. Paul Forseth

. 1600

. 1605

VM. Yvan Loubier

. 1610

. 1615

. 1620

. 1625

. 1630

. 1635

. 1640

. 1645

. 1650

VM. Dick Proctor

. 1655

. 1700

. 1705

VM. Gilles-A. Perron

. 1710

. 1715

VM. Scott Brison

. 1720

. 1725

VM. Keith Martin

. 1730

. 1735

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-251. Deuxième lecture
VMme Judi Longfield

. 1740

. 1745

VM. Michel Bellehumeur

. 1750

. 1755

VMme Rose-Marie Ur

. 1800

. 1805

VM. Chuck Cadman

. 1810

. 1815

VM. Dan McTeague

. 1820

. 1825

VM. Mark Muise

. 1830

. 1835

VM. Jacques Saada

. 1840

VMOTION D'AJOURNEMENT
VL'hépatite C
VM. Greg Thompson

. 1845

VMme Elinor Caplan
VAnnexe

. 1040

VL'hon. Gilbert Parent
VLe très hon. Jean Chrétien

. 1045

. 1050

VM. Nelson Mandela

. 1055

. 1100

. 1105

. 1110

. 1115

VL'hon. Gildas Molgat

. 1120

. 1125

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 125


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 24 septembre 1998

La séance est ouverte à 14 heures.



Prière


DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

 

. 1400 +

[Traduction]

LE SERVICE D'ASSISTANCE CANADIEN AUX ORGANISMES

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, avant de passer à ma déclaration, puis-je dire que ce matin vous avez très bien traduit notre sentiment à tous. Nelson Mandela prendra certainement sa place parmi les grands hommes du XXe siècle.

Je prends la parole à la Chambre pour rendre hommage à deux de mes électeurs qui ont enrichi notre siècle de leur contribution. Ces deux personnes, Stan Judd et John Mackillop, oeuvrent dans le cadre du Service d'assistance canadien aux organismes.

Stan Judd a passé un mois à Panama pour aider une entreprise qui achète, classe et distribue des grains de spécialité. M. Judd a, entre autres, amélioré la méthode de nettoyage et de classement des grains, mis au point un grain à cuisson plus rapide et conçu un emballage pratique. Grâce à M. Judd, cette entreprise devrait augmenter sa production, diminuer ses coûts et améliorer la qualité de ses produits.

M. Mackillop a été envoyé au Sri Lanka pour aider à produire des membres artificiels. Il a contribué à l'élaboration de cours et de matériel de formation pour une entreprise.

Stan Judd et John Mackillop méritent nos félicitations.

*  *  *

LA FAMILLE

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens sont de plus en plus conscients que ce n'est pas en multipliant les programmes gouvernementaux coûteux que l'on renforce la société, mais en respectant et en encourageant les millions de parents dévoués qui élèvent la prochaine génération.

Faut-il s'étonner que les études prouvent ce que nous savons déjà d'instinct, à savoir qu'une famille stable et aimante est le meilleur atout des enfants. Par exemple, une étude récente confirme que les enfants élevés par des parents biologiques formant un couple stable ont beaucoup plus de chances de finir leurs études secondaires et risquent moins d'avoir des problèmes de comportement.

Cependant, il arrive de plus en plus souvent que les universitaires, les bureaucrates et les gens bien intentionnés se présentent comme les défenseurs des intérêts des enfants. Ce qu'ils semblent oublier, c'est que ce sont les parents qui détiennent naturellement l'autorité.

Respecter l'autorité des deux parents et encourager, de manière tangible, le travail qu'ils font est l'un des meilleurs investissements à long terme que nous puissions faire.

*  *  *

LA DÉFENSE NATIONALE

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Monsieur le Président, ces deux derniers jours, le quartier général de la Défense nationale a fêté le 75e anniversaire du ministère et le 30e anniversaire du quartier général.

En tant que membre du Comité permanent de la Défense nationale et des anciens combattants, je suis ravie que les Canadiens aient ainsi eu l'occasion d'en apprendre davantage sur le ministère et sur les hommes et les femmes qui y travaillent.

Cet été, j'ai eu l'insigne plaisir d'être invitée à prendre la parole à l'assemblée annuelle des anciens combattants de l'Ontario Regiment. On m'y a remis un poème de Charles Province que je voudrais vous lire en souvenir du sacrifice suprême qui a été consenti par un si grand nombre:

C'est au soldat, non au journaliste, que nous devons la liberté de presse.
C'est au soldat, non au poète, que nous devons la liberté d'expression.
C'est au soldat, non à l'organisation étudiante, que nous devons la liberté de manifester.
C'est au soldat, non à l'avocat, que nous devons le droit à un procès juste.
C'est grâce au soldat qui salue le drapeau, qui sert sous les drapeaux et dont le cercueil est recouvert du drapeau que le protestataire peut brûler le drapeau.

*  *  *

[Français]

LA DIVERSITÉ CULTURELLE

M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.): Monsieur le Président, à l'invitation de la ministre du Patrimoine canadien, les ministres de la Culture de 19 pays se sont réunis à Ottawa, les 29 et 30 juin derniers, pour participer à un forum sur l'importance de soutenir les cultures nationales à l'heure de la mondialisation et de promouvoir la coopération dans ce domaine.

La création d'un réseau ministériel international pour promouvoir et protéger la diversité culturelle en est un résultat, ainsi que la création d'un groupe de coordination composé de la Suède, du Mexique, de la Grèce et du Canada.

Parmi dix initiatives convenues, on en retrouve une demandant aux chefs de file en radiodiffusion de promouvoir la diversité culturelle de la télévision, et la collaboration avec l'Organisation des États américains pour établir un plan culturel.

La Conférence canadienne des arts tenait un forum parallèle sur la culture et la coopération où plus de 60 organisations du secteur des arts, de la culture et du développement ont participé. Voilà qui montre très bien...

Le Président: La députée de Etobicoke—Lakeshore a la parole.

*  *  *

 

. 1405 + -

[Traduction]

LE PRÉSIDENT NELSON MANDELA

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, c'est un honneur et une joie d'accueillir dans notre capitale nationale aujourd'hui le grand homme qu'est le président de l'Afrique du Sud, l'honorable Nelson Mandela.

M. Mandela est le symbole vivant de la puissance de l'esprit humain et un véritable héros moderne. Il s'est battu pour ce à quoi il croyait et n'a jamais cessé de croire profondément aux droits fondamentaux de la personne—les droits à la dignité, à la liberté et à l'égalité—qui sont chers au coeur des Canadiens.

On ne saurait sous-estimer le courage dont M. Mandela a fait preuve en s'élevant contre l'injustice et l'oppression dans le régime d'apartheid en Afrique du Sud. À l'instar de nombre de Canadiens, comme Sherona Hall, et d'autres partisans de l'ANC, j'ai participé dans ma jeunesse à des activités d'appui au mouvement anti-apartheid.

Aujourd'hui, nous sommes remplis d'orgueil, car, sous la direction du président Mandela, l'Afrique du Sud se transforme pacifiquement en une société démocratique qui respecte les droits de tous ses citoyens.

Nelson Mandela passera à l'histoire comme l'un des piliers du XXe siècle.

Merci, Monsieur Mandela, d'avoir fait en sorte que l'Afrique du Sud et le monde soient meilleurs. Les Canadiens sont fiers que vous nous rendiez visite aujourd'hui.

*  *  *

LE PRÉSIDENT NELSON MANDELA

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, au nom de l'opposition officielle, j'invite tous les députés de la Chambre des communes et les Canadiens d'un bout à l'autre du pays à rendre hommage au président de l'Afrique du Sud, M. Nelson Mandela.

Les Canadiens ont appuyé la lutte qu'il a menée contre l'oppression, parce qu'ils croient que tous les êtres humains sont égaux. En effet, nous croyons que les principes de justice, de responsabilité et de liberté s'appliquent à tous les êtres humains.

Aujourd'hui, les Canadiens applaudissent et appuient une Afrique du Sud renouvelée qui travaille pour réaliser les idéaux que sont la démocratie, l'égalité et la liberté, et qui est un modèle pour les autres États, en Afrique et ailleurs dans le monde. Les Canadiens appuient aussi les efforts de l'Afrique du Sud pour revigorer sa démocratie, réformer ses institutions gouvernementales et se préparer à entrer dans le XXIe siècle.

Bref, le Canada et l'Afrique du Sud sont depuis longtemps des pays amis et ils continueront de l'être. C'est pour nous un grand honneur d'accueillir aujourd'hui Nelson Mandela et son épouse pour célébrer une victoire de la liberté sur l'oppression.

*  *  *

LE PRÉSIDENT NELSON MANDELA

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'être aujourd'hui de ceux qui accueillent M. Nelson Mandela au Parlement canadien. La visite du président Mandela nous donne l'occasion d'honorer un homme remarquable qui, pendant toute sa vie, a lutté contre le racisme et l'apartheid.

Guidé par sa douceur, sa sagesse et sa force, il a engendré une révolution pacifique. Grâce à son dévouement, cet héritage impressionnant continue d'inspirer les enfants et les jeunes d'Afrique du Sud.

Le gouvernement du Canada est fier de parrainer l'événement «Mandela and the Children», qui aura lieu demain au Skydome. Nelson Mandela s'adressera à nos jeunes et les sensibilisera aux activités que poursuit le Canada en Afrique du Sud.

Cet événement rassemblera les jeunes du Canada et ceux de l'Afrique du Sud dans une cause commune, soit l'élimination du racisme et la promotion des droits de la personne.

Le combat de ce grand leader nous encourage tous à réaffirmer notre engagement envers la tolérance, l'égalité et la justice sociale.

*  *  *

[Français]

LE PRÉSIDENT DE L'AFRIQUE DU SUD

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, je désire m'associer à mes collègues pour souligner la visite officielle du président de l'Afrique du Sud, M. Nelson Mandela.

À la veille de la célébration du 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, c'est un véritable défenseur des droits de l'homme qui nous fait l'honneur de sa présence.

Les actions de Nelson Mandela, sa vie même, ont marqué non seulement l'Afrique mais l'ensemble du monde. Au sacrifice de sa personne, M. Mandela s'est imposé en véritable homme d'État, comme un leader politique respecté et aimé, et il demeurera pour toujours un modèle de ce qu'est un combattant pour la liberté.

Au moment où d'autres peuples continuent de lutter pour la démocratie, la ténacité exemplaire de Nelson Mandela devrait faire réfléchir ceux qui croient que la répression saurait faire taire ceux qui, comme le président Mandela lui-même, incarnent le courageux combat pour les droits fondamentaux.

Monsieur le président Mandela, au nom des députés du Bloc québécois, au nom de tous les Québécois, merci.

*  *  *

LE PRÉSIDENT DE L'AFRIQUE DU SUD

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, j'invite tous mes collègues à applaudir l'initiative du gouvernement d'appuyer le président Mandela dans les efforts qu'il déploie pour combattre la discrimination raciale dans son pays et sur la scène internationale.

Comme on le sait, le président Mandela est un des chefs internationaux les plus crédibles et les plus respectés en matière de promotion de la justice sociale, comme notre pays l'a reconnu hier en le faisant compagnon de l'Ordre du Canada.

 

. 1410 + -

L'appui apporté par le gouvernement du Canada à la campagne «Mandela et les enfants» s'inscrit tout naturellement dans la tradition de notre pays qui, au fil des années, s'est fait le champion de la paix et des droits de la personne partout dans le monde.

Notre participation à cette initiative donne en outre une dimension internationale à la campagne nationale menée chaque année depuis neuf ans par le gouvernement et de nombreux Canadiens pour combattre le racisme et la discrimination, la campagne du 21 mars.

[Traduction]

À l'aube du XXIe siècle, nous devons travailler encore plus assidûment, inspirés par l'un des grands héros de l'histoire contemporaine, M. Mandela, à éradiquer toutes les formes de racisme et de discrimination au Canada et dans le monde entier.

*  *  *

LA COMMISSION DE LA CAPITALE NATIONALE

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.) Monsieur le Président, un organisme gouvernemental plutôt secret prend des décisions à huis clos et sans consultation du public.

La Commission de la capitale nationale, dont les membres ne sont pas élus, propose de consacrer quelque 5 milliards de dollars à un projet douteux qui se répercutera sur l'assiette fiscale de la ville.

Nous venons d'apprendre que le président non élu de la CCN, M. Marcel Beaudry, a exercé des pressions sur une conseillère municipale élue de la ville d'Ottawa, Mme Elisabeth Arnold. M. Beaudry a demandé à la conseillère Arnold de retirer deux recommandations d'un projet de rapport municipal. Les recommandations s'opposaient vivement à la destruction d'édifices patrimoniaux et à la limitation du développement du centre-ville qu'entraînerait la réalisation du projet de la CCN pour la rue Metcalfe.

Nous recommandons à la Commission de la capitale nationale de se montrer transparente et responsable.

*  *  *

[Français]

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur le Président, le moins que l'on puisse dire, c'est que les souverainistes et les réformistes ne vivent pas dans l'harmonie. Malgré leur promesse de mariage, les noces auront été de courte durée!

D'un côté, les bloquistes se font les alliés de Mike Harris et le Parti réformiste courtise un péquiste comme M. Rodrigue Biron, un ancien ministre péquiste.

De leur côté, les souverainistes sont encore une fois divisés sur la tenue d'un référendum. Jacques Parizeau rappelait encore, hier, que le Parti québécois n'avait pas le courage de dire franchement aux Québécoises et Québécois s'il y aura ou non un référendum.

La population québécoise n'est pas dupe; elle demande des solutions pratiques à ses problèmes et refusera toujours qu'on lui fasse avaler n'importe quoi, comme tentent de le faire les bloquistes et les souverainistes.

*  *  *

[Traduction]

LES ÉTANGS BITUMINEUX DE SYDNEY

M. Peter Mancini (Sydney—victoria, NPD): Monsieur le Président, c'est avec un sentiment de colère et de tristesse que je m'adresse à la Chambre aujourd'hui.

Une étude rendue publique à Sydney révèle que le taux de cancer y est de 16 p. 100 supérieur à la moyenne nationale et que l'incidence de nombreux autres problèmes de santé et maladies y est élevée à un point alarmant. Aussi bouleversants qu'ils puissent être, ces résultats n'ont rien de surprenant pour les habitants de ma ville. Nous subissons cette situation depuis une génération.

Les habitants du Cap-Breton ont extrait le charbon et fabriqué l'acier qui a servi à construire les voies ferrées qui ont relié le pays d'un océan à l'autre. L'acier fabriqué à Sydney a aidé le Canada et les alliés à combattre durant la Première et la Seconde guerres mondiales.

Les habitants de ma circonscription ont payé un prix terrible pour leur pays. Ils ont sacrifié et leur vie et leur santé.

En retour, nous demandons que le gouvernement prenne des mesures réelles et immédiates et s'engage à fournir les fonds nécessaires pour nettoyer les étangs bitumineux de Sydney avant qu'une autre génération d'habitants du Cap-Breton ne subisse le même sort que la génération précédente. Je le demande non seulement en tant que représentant de mes électeurs, mais aussi en tant que Canadien.

*  *  *

LA MISSION COMMERCIALE

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, cet été, j'ai eu l'honneur de diriger une mission commerciale dans la République populaire de Chine. Faisaient partie de la délégation des représentants d'une foule de secteurs, y compris la gestion des déchets, la consultation commerciale, les textiles, l'informatique et le gouvernement local.

Nous avons fait la promotion des industries de ma circonscription, celle d'Oak Ridges. Étant donné que la circonscription compte une importante population asiatique, nous jouissons d'un avantage sur le marché chinois. Je suis heureux d'aider les entreprises de ma circonscription à tisser des liens commerciaux avec l'un de nos principaux partenaires commerciaux.

Au nom de tous les participants à la mission, je voudrais remercier de son aide le député de York-Ouest et ministre du Commerce international.

C'est avec fierté que j'ai suivi l'exemple du premier ministre en dirigeant ma propre petite «Équipe Canada».

*  *  *

[Français]

LE PRÉSIDENT DE L'AFRIQUE DU SUD

M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, aujourd'hui, nous avons accueilli parmi nous un véritable homme d'État. Le président Mandela est l'incarnation même de ce terme. Vision, intégrité, sens de l'État, voilà autant de qualités qu'incarne cet homme.

Les députés progressistes-conservateurs se réjouissent tout particulièrement de la visite du président Mandela.

 

. 1415 + -

À l'époque, le premier ministre Mulroney et le ministre des Affaires étrangères, Joe Clark, se sont battu avec acharnement, au sein des pays du G7 et du Commonwealth, pour mettre fin à l'apartheid en Afrique du Sud.

Voilà des chefs qui étaient profondément déterminés à mettre fin aux violations des droits humains à l'échelle internationale. Sous leur direction, le gouvernement progressiste-conservateur s'est montré fidèle à la réputation dont jouit le Canada de tenir tête aux régimes oppressifs.

La visite du président Mandela témoigne de la force de cette tradition.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

LE SOMMET DE L'APEC

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre donne des réponses évasives aux Canadiens au sujet des mesures qu'il a prises durant le sommet de l'APEC. Les notes de la police continuent de relier le premier ministre à la suppression des manifestations étudiantes. Une femme qui faisait partie des invités du premier ministre a affirmé l'avoir vu personnellement diriger directement les activités de sécurité. Les Canadiens veulent connaître la vérité.

Le gouvernement va-t-il réviser sa position, selon laquelle le premier ministre n'est pas intervenu personnellement dans les actions policières durant le sommet de l'APEC?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les allégations auxquelles fait référence le chef de l'opposition ont été faites par une invitée, une certaine Mme Sparrow, qui a admis qu'elle ne pouvait pas entendre ce que disait le premier ministre.

Le premier ministre a catégoriquement nié les allégations de Mme Sparrow. Je crois que cela devrait mettre un terme à la question.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, qu'est-il advenu du concept de responsabilité ministérielle? Qu'est-il advenu de l'acceptation de cette responsabilité par le premier ministre?

Le premier ministre rejette la responsabilité sur la police et sur son personnel. Il blâme les manifestants et ses doreurs d'images cherchent maintenant à discréditer un témoin.

Pourquoi le premier ministre persiste-t-il à refuser d'informer les Canadiens des directives qu'il a données à la GRC et à ses collaborateurs?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a été présent à la Chambre tous les jours jusqu'à aujourd'hui et a répondu aux questions les unes après les autres.

J'ajouterai que les manifestants étudiants ont eux-mêmes demandé à la Commission des plaintes du public contre la GRC, qui est un organisme civil indépendant, d'examiner la situation. La commission procède actuellement à l'examen du dossier.

Pourquoi le chef de l'opposition tente-t-il de miner le travail de cet organisme réputé, créé par le Parlement?

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, la Commission des plaintes internes de la GRC est la seule commission, aujourd'hui encore, qui examine les événements du sommet de l'APEC. Cette enquête ne peut pas viser les politiciens ni les fonctionnaires. Même si la commission tente d'obliger le premier ministre à rendre des documents publics, ce dernier peut refuser d'accéder à la requête. La commission demeurera impuissante tant que le premier ministre continuera de demeurer évasif au sujet de ses activités.

Le gouvernement va-t-il s'engager aujourd'hui à obtenir du premier ministre qu'il collabore avec la commission, et notamment qu'il fournisse tous les documents et comparaisse comme témoin s'il est convoqué?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement fournit de la documentation à la commission. Cette dernière n'a pas demandé au premier ministre de comparaître, et cette question demeure très hypothétique pour l'instant.

Je répète au chef de l'opposition qu'il ne devrait pas miner le travail d'une commission civile indépendante, à laquelle les manifestants étudiants ont eux-mêmes demandé d'examiner la question.

Pourquoi le chef de l'opposition tente-t-il d'empêcher la commission de faire le travail que les manifestants eux-mêmes lui ont demandé de faire, s'il est de leur côté? Il n'agit pas dans l'intérêt des étudiants, ni dans celui des droits de la personne. Il se contente de faire beaucoup de bruit.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement nous invite à laisser la Commission des plaintes du public contre la GRC faire son travail. Il nous dit qu'on pourra faire toute la lumière sur cette affaire. Permettez-moi de dire aux députés...

Des voix: Bravo!

M. John Reynolds: Monsieur le Président, les ministériels adorent cela maintenant, mais c'était loin d'être le cas en 1986, lorsque ce projet de loi a été présenté.

L'actuelle ministre du Patrimoine a dit, en 1986, au gouvernement de l'époque que la seule raison pour laquelle il aimait la Commission des plaintes du public contre la GRC c'était parce qu'il éprouvait des problèmes.

Or, le gouvernement libéral actuel aime la Commission des plaintes du public contre la GRC, parce qu'il éprouve à son tour toutes sortes de problèmes.

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de nous rappeler qu'il faisait partie du gouvernement Mulroney qui a présenté cette mesure à la Chambre. Elle a été adoptée par le Parlement et le fait qu'il s'en prenne maintenant à une institution qu'il appuyait à l'époque montre que son attaque contre la commission est tout à fait injustifiée.

 

. 1420 + -

Il devrait donner à la commission le même appui maintenant qu'à l'époque, car elle est prête à faire le travail que les manifestants veulent eux-mêmes qu'elle fasse.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre suppléant devrait comprendre que je n'étais pas là à ce moment-là. Je ne faisais pas partie du gouvernement Mulroney.

Je voudrais lui citer à nouveau ce que l'actuelle ministre du Patrimoine a déclaré au sujet de ce projet de loi dans le cadre du débat. Elle a dit alors que la commission aurait des pouvoirs très limités et devrait se limiter à procéder à des enquêtes internes et à examiner les preuves. Mais elle ne serait pas autorisée à mener ses propres enquêtes.

Lorsqu'ils siégeaient dans l'opposition, les libéraux n'aimaient pas ce projet de loi. Ils s'élevaient contre le fait que la commission n'était pas indépendante, qu'elle ne pouvait faire enquête sur le gouvernement. Pourquoi les ministériels ont-ils changé d'idée?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je prie le député de m'excuser de ne pas me rappeler exactement à quel moment il nous a quittés. Je suppose que son aura planait encore au-dessus du gouvernement au moment où ce projet de loi...

Le Président: Nous avons tous entendu la question et je sais que nous voudrions entendre la réponse. Le vice-premier ministre a la parole.

L'hon. Herb Gray: Monsieur le Président, je pense que la meilleure chose à faire est de laisser la commission faire son travail. Si, après enquête, elle estime dans son rapport qu'il y a des plaintes fondées, on se penchera là-dessus à ce moment-là.

À l'heure actuelle, la loi précise que la commission a le pouvoir d'entendre des plaintes, de faire enquête, d'entendre des témoignages et de faire des rapports publics.

Laissons-la s'acquitter de son travail. C'est ce que les manifestants étudiants demandent. Pourquoi l'opposition essaie-t-elle de miner les plaintes des manifestants au lieu de leur permettre de profiter du processus qu'ils ont eux-mêmes réclamé?

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, jusqu'à maintenant, le premier ministre a nié toute implication dans l'affaire de l'APEC.

Pourtant, on apprend qu'un témoin l'a vu en train de s'impliquer personnellement et directement dans les questions de sécurité au moment de l'ouverture du Sommet.

Comment interpréter le comportement du premier ministre, qui disait encore au début de la semaine n'être au courant de rien, alors que de plus en plus de témoignages et de faits l'incriminent?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a nié catégoriquement les allégations de ce soi-disant témoin.

Ce témoin a dit qu'il n'a pas entendu du tout les mots du premier ministre en temps et lieu. Alors, les allégations du chef du troisième parti sont totalement erronées.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le fait que le premier ministre l'ait nié—on l'a vu nier le fait qu'il ait dit qu'il allait abolir la TPS—on sait ce que ça vaut. Cela ne nous sécurise pas qu'il ait nié.

Mais compte tenu de ces faits nouveaux, compte tenu qu'on sait que le premier ministre s'est impliqué personnellement au coeur même de l'action, comme il l'avait fait en «clennettisant» un militant de l'autre côté de la rivière, quand on sait que c'est lui qui donnait des ordres à la GRC, quelle crédibilité peut avoir l'enquête de la GRC si le premier ministre ne s'engage pas maintenant à y témoigner?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la commission n'a pas demandé au premier ministre de témoigner. De plus, la commission créée par ce Parlement travaille à distance du gouvernement, à distance de la Gendarmerie royale.

Alors, permettons à la commission de faire son travail. C'est ce qu'ont demandé les étudiants qui ont déposé leurs plaintes devant cette même commission.

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre a déclaré hier, et je cite: «Je suis un populiste et je peux même me défendre moi-même à l'occasion.»

Or, le premier ministre a malheureusement perdu le contrôle de lui-même et ce, plus d'une fois.

Est-ce que ce n'est pas un peu préoccupant pour les Canadiens d'avoir un premier ministre qui perd complètement le contrôle de lui-même dans des situations tendues?

 

. 1425 + -

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le Bloc québécois a totalement perdu le contrôle de lui-même quand on écoute les questions erronées qu'il pose aujourd'hui.

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le premier ministre se rend compte qu'en adoptant un comportement aussi indécent pour la fonction qu'il occupe, il jette du discrédit sur l'ensemble de la population canadienne et ce, simplement pour plaire à un dictateur paranoïaque?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je me demande qui a préparé cette question. Est-ce que c'est M. Landry ou M. Parizeau?

[Traduction]

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le premier ministre et le solliciteur général ne cessent d'éluder les questions en se cachant derrière la Commission des plaintes du public.

Comment la commission peut-elle faire son travail et découvrir la vérité si le premier ministre ne comparaît pas devant elle et si le cabinet du premier ministre a détruit des documents cruciaux? Pourquoi ce camouflage?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Tout d'abord, monsieur le Président, le chef du NPD fait une allégation qui, à ma connaissance, n'est pas fondée sur des faits. Deuxièmement, la commission n'a pas demandé au premier ministre de comparaître devant elle. Troisièmement, la commission a été mise en place par le Parlement. Ses pouvoirs lui ont été conférés par le Parlement. Or, rien n'indique qu'elle ne s'acquittera pas du travail que le Parlement attend d'elle, et surtout du travail qu'attendent d'elle les manifestants étudiants qui ont déposé des plaintes devant cette commission.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Des manifestants étudiants qui ne seront pas représentés par des avocats, monsieur le Président.

Hier, le premier ministre a refusé de répondre aux questions sur la destruction de documents concernant le sommet de l'APEC. Aujourd'hui, nous avons appris que l'ex-directeur des opérations, Jean Carle, a reconnu avoir détruit des documents relatifs à l'incident du poivre de Cayenne.

Que cache le cabinet du premier ministre? Qui essaient-ils de protéger?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): La première chose que je dois faire, monsieur le Président, c'est vérifier l'exactitude des affirmations et insinuations faites par la députée. Après vérification, le premier ministre ou moi-même serons en mesure de fournir une réponse plus complète.

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, des permis ministériels visant à permettre à un général et à six commandos de Suharto d'entrer au Canada ont été délivrés le jour même où les Indonésiens en ont fait la demande, soit le 19 novembre 1997. Ces permis ont été délivrés une semaine avant le sommet de l'APEC, après que les Indonésiens eurent demandé à la GRC s'ils pouvaient tirer sur des manifestants canadiens.

La ministre de l'Immigration pourrait-elle nous dire si ses fonctionnaires ont informé la GRC qu'elle avait délivré ces permis et quand ils l'ont fait? Va-t-elle déposer à la Chambre tous les documents ayant trait à ces permis?

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, les mesures de sécurité entourant le sommet de l'APEC relevaient de la GRC. C'est la raison pour laquelle l'enquête est menée par la commission des plaintes du public. Nous nous devons de préserver l'intégrité de cette enquête afin de connaître tous les faits, même s'il y en a plusieurs ici qui voudraient mettre cette intégrité en doute.

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre responsable de la délivrance des permis d'entrée au Canada, et non au solliciteur général, puisqu'elle ne porte pas sur la commission des plaintes du public.

Nous savons que des permis ont été délivrés afin de permettre aux commandos de Suharto d'entrer au Canada. En vertu de la loi, seule la ministre de l'Immigration peut délivrer de tels permis.

Ces permis ont été délivrés après que les Indonésiens eurent demandé à la GRC s'ils pouvaient tirer sur des Canadiens.

Pour quelle raison la ministre de l'Immigration a-t-elle accordé ces permis? Est-ce que le bureau du premier ministre lui a demandé de le faire? Est-ce que son bureau a immédiatement fait savoir à la GRC que les permis avaient été délivrés?

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à maintes reprises cette semaine, les questions de sécurité relèvent de la GRC. Étant donné que la GRC fait l'objet d'une enquête de la part de la commission des plaintes du public—et ce à la demande des manifestants eux-mêmes—il serait imprudent, voire inapproprié de ma part, de faire quoi que ce soit qui pourrait avoir une incidence sur l'issue de cette enquête.

 

. 1430 + -

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, voici un extrait d'un article paru dans le Vancouver Sun d'aujourd'hui sous la plume de Peter O'Neil: «le commissaire aux plaintes du public dit qu'il tente toujours d'obtenir des documents du cabinet du premier ministre, du Conseil privé et du ministère des Affaires étrangères.»

On se rappelle la Somalie. On se rappelle l'enquête Krever. On se rappelle la destruction de documents. Or, nous n'avons pas reçu hier l'assurance du premier ministre ou du solliciteur général qu'il n'y aura pas destruction de documents.

Aurons-nous cette assurance aujourd'hui, oui ou non?

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le président, je peux assurer le député qu'il n'y a en ce moment aucun indice que des problèmes se posent à cet égard.

En fait, le conseil pour la commission a dit très clairement n'avoir aucune difficulté à avoir accès aux documents demandés.

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Que ne voilà-t-il pas une jolie réponse de la part du solliciteur général. Elle se borne à la question du niveau de l'enquête en cours.

Or, il n'y a pas de niveau d'enquête. Elle relève de la Commission des plaintes du public et je cite la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada: «Ils ne peuvent enquêter que sur un membre ou toute autre personne nommée ou employée sous le régime de la présente loi.»

Voilà ce sur quoi la Commission des plaintes du public peut enquêter. Le solliciteur général tente de nous jeter de la poudre aux yeux dans l'espoir d'étouffer cette affaire...

Le Président: L'honorable solliciteur général a la parole.

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, cette enquête possède les mêmes pouvoirs que le genre d'enquête que le député réclamait, à savoir les pouvoirs d'une commission d'enquête.

*  *  *

[Français]

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Finances aurait proposé cette semaine à ses collègues du Conseil des ministres de contourner la Loi sur l'assurance-emploi afin d'utiliser les énormes surplus annuels de six milliards de dollars à autre chose qu'au financement de l'assurance-emploi.

En voulant agir de la sorte, le ministre des Finances n'est-il pas en train de chercher tout simplement à légaliser le détournement de fonds qu'il opère avec les surplus de la caisse de l'assurance-emploi, depuis déjà plusieurs années?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait regarder ce que le gouvernement a fait depuis plusieurs années.

Lorsqu'on a pris le pouvoir, l'intention du gouvernement précédent était de hausser ces taux à 3,30 $; on les a gelés à 3,07 $. Depuis ce temps, à chaque année, on a baissé les cotisations à l'assurance-emploi. L'an dernier, on les a baissés de 20¢. De plus, on a éliminé les cotisations à l'assurance-emploi pour les jeunes de moins de 25 ans.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, le ministre peut-il nier que s'il ne procède pas bientôt à une diminution très substantielle du taux de cotisation à la caisse de l'assurance-emploi, les ponctions qu'il opère et qu'il compte continuer d'opérer devront être considérées comme illégales?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je constate que le gouvernement a des choix à faire. Et nous allons faire ces choix.

Le choix du Bloc québécois, c'est de baisser les impôts et de hausser les dépenses, et c'est de s'assurer que le Canada va, encore une fois, retourner en situation de déficit. Ce n'est pas notre choix.

*  *  *

[Traduction]

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances a dit hier que Bernard Dussault avait été congédié à propos de «questions d'ordre gestionnel». Or, c'est un fonctionnaire qui affichait depuis sept ans un dossier impeccable au poste d'actuaire en chef du Canada.

J'ai une question à l'intention du ministre. La décision de le congédier avait-elle quelque lien que ce soit avec le rapport qu'il devait bientôt présenter sur la solvabilité du Régime de pensions du Canada?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le surintendant des institutions financières a déjà répondu à cette question. Il y a répondu par la négative.

Soyons bien clairs. Le ministre des Finances n'a pas eu part à la décision et n'a pas pris la décision.

Le Parti réformiste veut-il dire qu'il appartiendrait au ministre des Finances d'embaucher et de congédier l'actuaire en chef? Veut-il dire que nous devrions politiser les meilleurs fonctionnaires au monde?

J'espère que non, car le gouvernement n'en a pas l'intention.

 

. 1435 + -

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances doit rendre des comptes à la Chambre à l'égard du Régime de pensions du Canada. C'est lui qui est responsable, non M. Palmer.

Nous voulons savoir ce que le ministre des Finances savait à ce sujet. Il a déjà dit qu'il savait à l'avance qu'il existait des problèmes d'ordre gestionnel. Il ne s'attend sûrement pas à ce que nous croyions qu'il ne s'est pas donné la peine de s'enquérir de la nature de ces problèmes. Nous avons maintenant besoin de savoir quelle était la nature de ces problèmes. S'il ne le sait pas, que fait-il donc aux fonctions qu'il occupe?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je savais évidemment qu'il y avait des divergences de vues entre le surintendant et l'actuaire en chef au sujet de questions d'ordre gestionnel. Cela se passe à l'intérieur du ministère des Finances, mais je n'ai pas eu part à la décision.

Tout le monde sait que le chaos règne au sein du caucus réformiste, qui est en proie à des difficultés d'ordre gestionnel, mais je ne m'en mêlerai pas.

*  *  *

[Français]

LA TREMBLANTE DU MOUTON

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Le ministre fédéral de l'Agriculture a déjà procédé à l'abattage de 11 000 bêtes au Québec pour enrayer la tremblante du mouton, et on s'apprêterait à en abattre des milliers d'autres sans autre forme d'analyse.

Est-ce que le ministre de l'Agriculture ne devrait pas suspendre les abattages et procéder, avec les producteurs et le ministre de l'Agriculture du Québec, à une étude de la situation avant d'aller plus loin?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je l'ai dit l'autre jour et je continuerai de le répéter, ce n'est certainement pas de gaieté de coeur que nous faisons ce que nous sommes obligés de faire en vue d'éradiquer une maladie à déclaration obligatoire qui s'attaque à nos troupeaux.

Il s'agit d'une maladie qui doit être déclarée partout dans le monde et il est essentiel de l'éliminer pour protéger nos troupeaux. Nous indemnisons les producteurs pour la perte de chaque bête infectée et nous assumons les frais de sa destruction.

Nous travaillons avec l'industrie pour éviter le plus de désagrément possible aux producteurs. Encore une fois, je demande la collaboration du gouvernement québécois pour y parvenir.

[Français]

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, le ministre ignore-t-il que si nos meilleurs producteurs de moutons du Québec sont dans une situation si dramatique, c'est parce que nos troupeaux ont été contaminés par des sujets qui venaient de la ferme expérimentale fédérale de Lennoxville?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de rectifier les faits. La déclaration de la députée est sans fondement.

Je lui rappelle aussi que, depuis trois ans, le gouvernement a donné au Québec 200 millions de dollars pour l'aider à appliquer le Programme de sécurité du revenu agricole. Si le Québec avait utilisé ces fonds comme les autres provinces l'ont fait, il serait aujourd'hui en mesure d'aider ses producteurs.

*  *  *

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, la Commission de l'assurance-emploi est sur le point de forcer le gouvernement à réduire les cotisations à l'assurance-emploi.

Il semble que le ministre des Finances n'est pas prêt à tuer cette poule aux oeufs d'or. Il projette de modifier la loi afin de pouvoir continuer à escroquer l'excédent de plusieurs milliards de dollars de l'assurance-emploi.

Le ministre des Finances dit qu'il faut faire des choix. Je lui demande de faire aujourd'hui le bon choix en disant qu'il ne modifiera pas la loi, qu'il obéira à la Commission et qu'il réduira les cotisations à l'assurance-emploi. Va-t-il le faire aujourd'hui?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit tout à l'heure en réponse à une autre question, notre gouvernement a réduit les cotisations tous les ans depuis que nous avons pris le pouvoir. Ce n'est pas tout. Dans le dernier budget, nous avons supprimé les cotisations des entreprises qui engagent des jeunes Canadiens. Il importe de comprendre que c'est là le principe que suit et que continuera de suivre le gouvernement.

 

. 1440 + -

M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances sait pertinemment qu'il existe, en sus de l'excédent permis, une somme de six milliards de dollars qu'il peut décider aujourd'hui d'affecter à la réduction des cotisations à l'assurance-emploi. Accessoirement, cela contribuera à stimuler l'économie, à créer des emplois et à rendre les entreprises et les travailleurs canadiens beaucoup plus heureux. Faisons le bon choix aujourd'hui!

Le ministre des Finances entend-il suivre la directive de la commission de l'assurance-emploi et employer cet excédent pour réduire à nouveau les cotisations à l'assurance-emploi, oui ou non?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, depuis le tout début, lorsque le pays était acculé au pied du mur, nous avons supprimé le déficit en adoptant une démarche équilibrée. Cette démarche équilibrée comprenait la réduction des cotisations à l'assurance-emploi et des impôts, l'investissement dans des domaines qui sont importants pour l'avenir du pays et la réduction de la dette.

Ce programme fonctionne et continuera de fonctionner. Nous maintiendrons le cap.

*  *  *

[Français]

L'ÉCONOMIE CANADIENNE

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, trois mois consécutifs de ralentissement économique; un indice composé qui affiche une croissance zéro au mois d'août; une réduction du carnet de commandes des entreprises; une augmentation des faillites; un ralentissement de l'emploi dans les services commerciaux; une révision générale à la baisse pour toutes les prévisions de 1999.

Combien d'avertissements de ce genre seront nécessaires pour que le ministre des Finances se sorte la tête du sable et dépose rapidement un budget spécial comportant des baisses d'impôt et une majoration des transferts sociaux aux provinces?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, pour répondre au député, j'estime qu'on devrait simplement consulter les experts et je me permets d'en citer un: «Pour parler clairement et il ne faut pas paniquer, rompre avec la discipline durement acquise des dernières années. Nous nous retrouverions très vite avec une devise encore plus faible, des taux d'intérêt plus élevés, la baisse des investissements et l'augmentation du chômage». Il s'agit d'une citation de Ken Courtis, l'économiste en chef de la Deutsche Bank. Le député est en train de nous suggérer de retourner en situation de déficit. Ce n'est pas notre intention de faire cela.

*  *  *

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

Des camions canadiens transportant aux États-Unis des produits agricoles de façon tout à fait régulière continuent de faire l'objet d'inspections injustifiées et d'être retardés à certains passages frontaliers.

Quelles mesures le ministre est-il disposé à prendre pour régler ce problème et le régler tout de suite?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, ce matin, le secrétaire à l'Agriculture des États-Unis a rendu compte à notre ambassadeur de la séance spéciale du Cabinet qui a eu lieu hier soir à Washington. Malheureusement, la réponse est tout bonnement inacceptable.

Par conséquent, nous avons consulté le ministre de l'Agriculture et le ministre chargé de la Commission canadienne du blé, et le Canada a remis à 14 heures aux États-Unis et à l'OMC un avis officiel les informant que nous allions exercer nos recours dans le cadre de l'ALENA et de l'OMC. Ce sera un premier pas. Et nous avons bon espoir régler cette affaire une fois pour toutes.

*  *  *

LE SÉNAT

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, il y a déjà quelques jours que nous posons des questions à la ministre de la Justice au sujet de l'élection d'un sénateur en Alberta, mais elle ne bouge pas et laisse le premier ministre s'en prendre à notre province. Si elle laisse ainsi le premier ministre s'en prendre à nous en public, je ne peux que conclure qu'elle est loin de défendre les intérêts des Albertains en privé.

Je voudrais que la ministre me dise aujourd'hui, si elle est autorisée à répondre, quel élément de l'article 24 de la Constitution l'empêche d'appuyer l'élection d'un sénateur en Alberta.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Mes collègues, je sais que nous avons été absents pendant un certain temps, et nous avons peut-être oublié que les questions sont posées au gouvernement et que n'importe qui sur les banquettes ministérielles peut y répondre.

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la députée est à la Chambre depuis assez longtemps. Elle doit savoir qu'il ne convient pas de demander un avis juridique à la ministre de la Justice. C'est manifestement pour cette raison que cette dernière ne veut pas répondre à la question de la députée et elle n'a pas à y répondre.

 

. 1445 + -

De toute façon, je ne comprends pas pourquoi, au nom de la démocratie, la députée cherche à faire approuver un processus antidémocratique, l'élection à vie de quelqu'un qui n'aura de comptes à rendre à personne et qui n'aura jamais à se faire réélire.

Pourquoi la députée ne défend-elle pas la démocratie au lieu d'appuyer un processus qui, si on l'examine bien, est vraiment antidémocratique?

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, franchement, je n'aurais jamais pensé qu'une élection pouvait être antidémocratique. Pardonnez-moi.

Je veux demander au gouvernement encore une fois pourquoi il invoque toujours l'article 24 de la Constitution. Il n'y a absolument rien dans l'article 24 qui empêche une élection. Il n'y a rien non plus qui dit que le premier ministre doit être directement impliqué.

Je demande à la ministre de la Justice, qui vient de l'Alberta, pourquoi elle n'appuie pas sa province dans l'élection d'un sénateur, élection qui aura lieu le 19 octobre et qui est tout à fait légale.

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je crois qu'il a déjà été bien établi que les ministres ne répondent pas aux questions concernant les responsabilités régionales. Ils répondent aux questions concernant les responsabilités ministérielles.

C'est quelque chose que la députée devrait savoir étant donné qu'elle est ici depuis assez longtemps. Pourquoi veut-elle qu'on élise une personne à vie sans que les gens qui l'ont élue aient la possibilité de remplacer cette personne par quelqu'un d'autre si ils ne sont pas satisfaits du travail qu'elle fait? Ce n'est pas démocratique.

Malgré ce que la députée dit ici, elle et son parti auraient pu avoir un Sénat élu s'ils avaient appuyé l'accord de Charlottetown, mais ils l'ont rejeté. Ils doivent maintenant subir les conséquences de cette décision irresponsable de leur part.

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, cela vous surprendra peut-être, mais je ne suis guère préparé à cette question.

Je voudrais que la ministre de la Justice, qui vient, je le répète, de l'Alberta, nous dise pourquoi au juste elle ne répond pas aux questions...

Le Président: La parole est à la députée de Vancouver-Est.

*  *  *

LE SOMMET DE L'APEC

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au vice-premier ministre. Aujourd'hui, nous avons appris comment le Canada s'était illustré en tant que fer de lance de la bataille contre l'apartheid, un système décrié à cause de son violent mépris des droits de la personne. Cependant, au sommet de l'APEC, le premier ministre a déshonoré le pays en foulant aux pieds les droits des étudiants canadiens de souhaiter la bienvenue à leur façon à un dictateur reconnu pour son mépris tant des droits de la personne que de la vie humaine.

Le gouvernement fera-t-il la lumière sur l'affaire de l'APEC et réaffirmera-t-il aux jeunes Canadiens que notre pays respecte les droits de la personne et qu'il ne les viole pas?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je dois rejeter les prémisses de la question de la députée. Le premier ministre est un ardent protecteur des droits de la personne. Il a été le principal défenseur de la Charte des droits et libertés. Cela devrait être reconnu et le premier ministre mérite des félicitations pour se porter constamment à la défense des droits de la personne tant au Canada qu'ailleurs dans le monde.

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, pour un premier ministre qui est censé être un grand défenseur des droits de la personne, le moins qu'on puisse dire, c'est que ses actes à Vancouver sont plus éloquents que ses paroles. Les étudiants qui ont manifesté au sommet de l'APEC ont été violemment attaqués, puis emprisonnés sans raison, et on s'attend maintenant à ce qu'ils se défendent eux-mêmes sans soutien financier contre un bataillon d'avocats du gouvernement.

Le premier ministre et le gouvernement feront-ils ce qui s'impose, soit fournir un avocat aux étudiants qui ont été attaqués au moment du sommet de l'APEC?

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, en fait, c'est justement parce que nous respectons le processus judiciaire que nous voulons laisser la Commission des plaintes du public faire son travail, comme les étudiants l'ont demandé.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, le premier ministre dit qu'il est plus efficace d'engager le dialogue avec les dictateurs que de les isoler. L'idée, c'est que, en amenant les dictateurs à dialoguer, on peut leur en apprendre un peu sur les droits de la personne. Ma question au premier ministre est la suivante: Suharto a-t-il appris quelque chose au sujet des droits de la personne pendant son séjour au Canada, ou est-ce le premier ministre qui pris des leçons de Suharto sur l'oppression et l'abus de pouvoirs systématique?

 

. 1450 + -

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je rejette la prémisse non fondée de la question du député.

Je sais que les médias ont rapporté que le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères avaient soulevé la question des droits de la personne, lorsqu'ils avaient rencontré Suharto en Indonésie. Il fallait beaucoup d'audace pour le faire. On devrait les féliciter de cela et de tout ce qu'ils font pour la défense des droits de la personne, au Canada et ailleurs dans le monde.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, hier, le ministre des Finances a dit à la Chambre qu'au Canada, la politique est séparée de l'administration de la fonction publique. Pourtant, quand le ministère des Finances de l'Ontario a demandé de l'information sur le RPC à Bernard Dussault, qui était alors le premier chien de garde du RPC, celui-ci lui a répondu par lettre qu'il ne pouvait fournir cette information parce qu'il fallait l'acheminer par l'intermédiaire d'un nouveau comité du ministère des Finances chargé d'en étudier le caractère délicat sur le plan politique.

Le ministre peut-il nous dire pourquoi son ministère a bâillonné Bernard Dussault? Est-ce simplement un autre abus de pouvoirs?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, c'est toute une question supplémentaire.

En fait, je ne suis pas au courant de la correspondance qu'ont pu échanger M. Dussault et le gouvernement de l'Ontario. Je vais vérifier cette affaire.

*  *  *

[Français]

LA TEMPÊTE DE VERGLAS

M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, plusieurs municipalités de mon comté, et aussi de la région, se plaignent de ne pas avoir été remboursées pour leurs réclamations à la suite de la tempête de verglas.

Est-ce que le président du Conseil du Trésor pourrait expliquer où est passé l'argent?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, dans l'accord d'aide en cas de désastre, ce sont les gouvernements provinciaux qui sont responsables et de l'administration du désastre et du remboursement aux municipalités, aux particuliers et aux organisations qui ont subi des pertes. Le rôle du gouvernement fédéral est de rembourser la province par la suite, suivant une certaine formule.

Ce qui est arrivé dans le cas de ces municipalités, c'est que le gouvernement péquiste refuse de rembourser aux municipalités les montants auxquels elles pourraient avoir droit, parce que c'est une responsabilité provinciale. Et le gouvernement provincial ne peut pas se cacher, parce que nous ne remboursons pas les...

Le Président: Le chef de l'opposition officielle a la parole.

*  *  *

[Traduction]

LE COMMERCE

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, chaque jour où les États américains frontaliers continuent de violer l'accord de libre-échange, ces violations causent du tort à nos agriculteurs.

Nous accueillons favorablement la décision du gouvernement canadien de faire le premier pas en vue de mettre fin au différend en le soumettant à un groupe spécial d'arbitrage prévu aux termes de l'ALENA.

Le ministre peut-il dire à la Chambre quel est le meilleur délai possible pour la mise sur pied d'un groupe officiel de règlement du différend, et peut-il dire aux agriculteurs canadiens ce qu'ils doivent faire dans l'intervalle?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, pour répondre à la première question de mon collègue, j'ai dit très clairement qu'une intervention auprès du groupe d'arbitrage de l'ALENA et auprès de l'OMC n'était qu'un premier pas. De toute évidence, nous verrons la réaction des États-Unis et agirons en conséquence.

Pour répondre plus précisément à la question du député, la première rencontre dans le cadre de l'ALENA doit être fixée dans les 15 jours, tandis que celle avec l'OMC doit avoir lieu dans les 10 jours.

*  *  *

[Français]

L'ÉCONOMIE CANADIENNE

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Finances peut bien jouer au fin-finaud avec nous, mais ce qu'il a oublié de dire, tout à l'heure, c'est que tous les analystes, à l'heure actuelle, à la suite de l'augmentation des taux d'intérêt par la Banque du Canada et les derniers chiffres de ralentissement, veulent que le ministre des Finances agisse et intervienne en stabilisant l'économie.

Est-ce que le ministre des Finances va jouer encore au fin-finaud lorsque, dans quelques mois, on sera en pleine récession, par sa faute, lorsque dans quelques mois, on aura perdu des milliers de jobs, par sa faute, parce qu'il n'aura pas voulu écouter les indicateurs économiques actuels?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député doit savoir que les taux d'intérêt à moyen et court terme sont plus bas qu'ils ne l'étaient il y a deux mois, même un mois. D'ailleurs, ils sont quasiment à un taux record au point de vue de la stimulation de l'économie.

Encore une fois, si le député ne veut pas me croire: «Nous pensons que l'économie canadienne est forte, qu'elle est solide, qu'elle n'est pas en péril».

Des voix: Oh, oh!

L'hon. Paul Martin: Cette citation vient de Lucien Bouchard, premier ministre du Québec, au mois d'août.

Le Président: Le député d'Oxford a la parole.

*  *  *

 

. 1455 + -

[Traduction]

LES OCÉANS

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, c'est l'Année internationale des océans. Comme notre pays est bordé par l'Atlantique, le Pacifique et l'Arctique, je demande au ministre des Pêches ce que le gouvernement fait pour protéger nos océans.

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, au début de son mandat, le gouvernement a reconnu l'importance des océans. Nous avons donc adopté la Loi sur les océans, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1998.

Au cours de l'été, de nombreuses activités marquant l'Année internationale des océans se sont déroulées dans tout le pays. Le gouvernement s'est doté d'une stratégie concernant les océans et nous y travaillons de façon plus approfondie.

Récemment, deux projets pilotes de protection du milieu marin ont été mis sur pied en Colombie-Britannique. On envisage de les implanter également dans l'Atlantique et dans l'Arctique.

*  *  *

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.): Monsieur le Président, voyons un peu si nous avons bien compris ce qui s'est passé en ce qui concerne le limogeage de l'actuaire en chef du Régime de pensions du Canada.

À ce que nous comprenons, le surintendant des Institutions financières aurait informé le ministre des Finances de certains problèmes concernant l'actuaire en chef, un homme grandement respecté et réputé pour son intégrité et sa compétence.

Le ministre voudrait nous faire croire qu'il ne s'est même pas donné la peine de s'enquérir de la nature de ces problèmes. C'est absolument incroyable.

Est-ce vraiment là la position du ministre? Veut-il faire avaler cette histoire aux Canadiens?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je reviens au point. Le député ne comprend tout simplement pas comment le système fonctionne. M. Dussault relève du surintendant des Institutions financières. La politique et l'administration de la fonction publique sont deux choses entièrement séparées.

Examinez attentivement ce que disent les réformistes. Ils laissent entendre que les politiciens devraient influencer le choix des cadres supérieurs de la fonction publique. Ils laissent entendre que nous devrions politiser la fonction publique.

Ce serait la mort de la meilleure fonction publique de ce pays et le Parti réformiste devrait le comprendre.

*  *  *

L'AGRICULTURE

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture sait sans aucun doute que le Congrès américain s'apprête à présenter cet automne un programme d'aide à l'agriculture de plusieurs milliards de dollars.

Le gouvernement des États-Unis réagit à l'atteinte d'un niveau plancher des prix des produits en promettant d'aider ses agriculteurs.

Les prix sont extrêmement déprimés de notre côté aussi du 49e parallèle. Le ministre de l'Agriculture peut-il faire savoir aujourd'hui à la Chambre quel programme d'aide d'urgence il prévoit pour les agriculteurs canadiens?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, au Canada, le programme d'aide d'urgence et le filet de sécurité sont déjà en place dans le domaine de l'agriculture. Nous n'avons donc pas besoin d'envisager de programmes spéciaux comme ceux sur lesquels se penchent en ce moment les Américains.

D'ailleurs, ils étudient notre système et cherchent des moyens de le copier. Nous avons, par exemple, l'assurance-récolte et le compte de stabilisation du revenu net. Dans ce seul compte, il y a deux milliards et demi de dollars pour aider les agriculteurs en cas de coup dur, comme le faible prix des produits qui s'observe partout dans le monde cette année.

*  *  *

[Français]

LE PALAIS DES CONGRÈS DE MONTRÉAL

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur le Président, au cours des neuf mois de discussions avec le fédéral autour du projet d'agrandissement du Palais des congrès de Montréal, jamais le secrétaire d'État responsable du Développement régional n'a soulevé le Programme des infrastructures comme moyen de financement de ce projet.

Pourquoi, tout à coup, le secrétaire d'État responsable du Développement régional nous sert-il cet argument, sinon parce qu'il se sent incapable de livrer la marchandise et de convaincre le ministre de l'Industrie?

L'hon. Martin Cauchon (secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, le projet d'agrandissement du Palais des congrès de Montréal date depuis au moins l'année 1996 et avait d'ailleurs été priorisé par le gouvernement du Québec dans le cadre du Sommet socioéconomique de Montréal. On se rappellera qu'il avait été tenu en l'absence du gouvernement du Canada qui, on se rappellera aussi, en avait été écarté par le gouvernement du Québec.

Ce que je dis, c'est qu'à la suite de cette décision, si le gouvernement du Québec avait donné la priorité à Montréal, on aurait utilisé le Programme d'infrastructures. Malheureusement, il n'accorde pas la priorité à Montréal, comme le gouvernement canadien le fait.

Nonobstant l'absence de véhicule, nous continuons à...

Le Président: Je regrette, mais je dois maintenant céder la parole au député de Compton—Stanstead.

*  *  *

 

. 1500 + -

LE SOMMET DE L'APEC

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Pour entrer au Canada, les soldats de Suharto ont d'abord eu la permission de la ministre. Ils ont eu sa bénédiction.

Est-ce que la ministre va continuer d'affirmer à cette Chambre qu'il n'y a eu aucun abus de pouvoir alors que c'est elle qui, sous l'autorité du premier ministre, a donné à des criminels reconnus un permis pour tuer en sol canadien? Quelle est la vérité?

[Traduction]

Le Président: Je crois que certains commencent à aller un peu loin dans leurs questions. Je suis disposé à vous donner beaucoup de liberté, mais je crois que les limites ont été atteintes.

Si le solliciteur général veut répondre, nous l'entendrons.

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux que redire que les mesures de sécurité lors du sommet de l'APEC ont été la responsabilité de la GRC. Les Canadiens disposent d'un mécanisme pour faire la lumière sur ces incidents et ce mécanisme a été enclenché.

Par respect pour la Chambre des communes, j'aimerais bien que les députés laissent le processus élaboré par cette même Chambre des communes suivre son cours pour nous faire connaître la vérité.

*  *  *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, étant donné la faiblesse du dollar et la situation économique de notre pays, les Canadiens aimeraient apprendre, du leader du gouvernement à la Chambre, la nature des travaux de la Chambre prévus pour la semaine prochaine et le reste de la semaine en cours.

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, en dépit du préambule du leader de l'opposition à la Chambre, c'est avec plaisir que je réponds à sa question.

[Français]

Cet après-midi, nous allons étudier le projet de loi S-16, Loi de 1998 pour la mise en oeuvre de conventions fiscales. Demain, nous amorcerons le débat sur le projet de loi C-35 concernant les importations et, si le temps le permet, le projet de loi C-51, modifiant le Code criminel.

Toutefois, demain, nous n'irons pas plus loin que les porte-parole du gouvernement et de l'opposition officielle concernant le projet de loi C-51 à la suite d'une entente intervenue au préalable. Tous ces projets de loi sont à l'étape de la deuxième lecture.

[Traduction]

Lundi, nous étudierons, à l'étape de la deuxième lecture, le projet de loi modifiant la Loi sur les prêts aux petites entreprises, qui a été présenté hier. Je pense qu'il porte le numéro C-53.

Mardi, nous reprendrons le débat en troisième lecture sur le projet de loi C-3 concernant les empreintes génétiques, qui fait malheureusement l'objet d'une motion de renvoi. Ensuite, si le temps le permet, nous passerons au projet de loi C-42, qui modifie la Loi sur le tabac.

Mercredi, nous espérons finir l'étude du projet de loi C-51 et de toutes les mesures législatives mentionnées précédemment qui seront encore en suspens.

Jeudi, nous espérons commencer l'étude du Projet de loi C-43, qui porte sur l'Agence du revenu.



AFFAIRES COURANTES

 

. 1505 + -

[Traduction]

DÉCRETS DE NOMINATION

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de déposer, dans les deux langues officielles, un certain nombre de décrets de nomination pris récemment par le gouvernement.

Conformément aux dispositions du paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets sont renvoyés aux comités permanents compétents, ainsi que l'indique la liste jointe.

*  *  *

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à sept pétitions.

*  *  *

[Traduction]

LOI SUR L'OBSERVATION DE DEUX MINUTES DE SILENCE LE JOUR DU SOUVENIR

 

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-434, Loi visant à promouvoir l'observation de deux minutes de silence le jour du Souvenir.

—Monsieur le Président, je propose, appuyé par le député d'Edmonton-Est, la première lecture d'un projet de loi visant à promouvoir l'observation de deux minutes de silence le jour du Souvenir. C'est une variante d'un projet de loi antérieur que j'avais présenté ici et qui tendait essentiellement à la même chose.

Le projet de loi demande à tous les Canadiens d'observer deux minutes de silence le jour de l'Armistice ou le jour du Souvenir, comme cela se faisait précédemment au Canada et dans le reste du Commonwealth britannique. Malheureusement, ces dernières années, cette tradition a eu tendance à se perdre.

Le projet de loi est calqué sur un projet de loi d'initiative parlementaire similaire présenté à l'Assemblée législative de l'Ontario et adopté par celle-ci, de même d'ailleurs qu'au Parlement britannique à Westminster. Il a l'appui de la Légion canadienne et de nombreuses autres organisations d'anciens combattants.

J'espère que ce projet de loi sera tiré au sort et que nous aurons l'occasion, à l'approche du jour du Souvenir de Novembre, de parler de cet important sujet.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

[Français]

LA LOI SUR LA BANQUE DU CANADA

 

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ) demande à présenter le projet de loi C-435, Loi modifiant la Loi sur la Banque du Canada (retrait du billet de mille dollars).

—Monsieur le Président, il me fait plaisir de déposer aujourd'hui, avec l'appui de mon collègue de Rosemont, le projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur la Banque du Canada (retrait du billet de mille dollars).

Ce projet de loi vise à donner aux forces policières du Canada un moyen plus efficace de lutter contre le blanchiment d'argent et contre le crime organisé. C'est une mesure qui est demandée depuis longtemps par les policiers canadiens, québécois et montréalais.

Le Canada est l'un des seuls pays à avoir des billets d'une dénomination aussi élevée. Ainsi, après l'entrée en vigueur du projet de loi, les billets de mille dollars seront en vigueur pendant encore trois mois. Les gens pourront donc échanger leurs billets pendant trois mois à la caisse ou à la banque près de chez eux.

Cependant, après ce délai de trois mois, ils devront se rendre ici, à Ottawa, à la Banque du Canada, qui échangera leurs billets de mille dollars. Après ces six mois, les billets de mille dollars n'auront plus cours légal au Canada, et ce, conformément au désir de plusieurs forces policières du pays.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

[Traduction]

PÉTITIONS

LES ARMES NUCLÉAIRES

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je présente aujourd'hui une pétition signée par bon nombre d'électeurs de ma circonscription. Les pétitionnaires demandent à cette Chambre d'appuyer l'élaboration immédiate, et la conclusion avant l'an 2000, d'une convention internationale établissant un échéancier ayant force exécutoire pour l'abolition de toutes les armes nucléaires du monde.

 

. 1510 + -

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter deux pétitions aujourd'hui.

La première renferme environ 200 signatures. Elle demande au Parlement de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, c'est-à-dire d'abaisser la limite d'âge, de transférer ces jeunes aux tribunaux pour adultes dans les cas d'infractions avec violence et de publier les noms des contrevenants violents.

L'ÂGE DE CONSENTEMENT

M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une seconde pétition à présenter, signée par environ 800 personnes qui demandent au Parlement de modifier le Code criminel et de faire passer de 14 à 16 ans l'âge requis pour consentir à des activités sexuelles avec un adulte.

LES RÉFUGIÉS

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter aujourd'hui.

La première demande au gouvernement de revoir sa politique sur les réfugiés au sens de la convention qui n'ont pas de documents et d'appliquer la recommandation formulée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration pour que la période d'attente avant qu'un réfugié reconnu puisse être accepté comme réfugié au sens de la convention passe de cinq à trois ans.

LE RÉSEAU ROUTIER

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, la deuxième pétition que je veux présenter au nom des électeurs de ma circonscription est ainsi libellée: «Nous, les soussignés, attirons l'attention sur le fait que...»

Le vice-président: Je suis désolé. Comme il le sait sûrement, le député ne peut lire une pétition. Il est invité à en présenter un résumé dans son intervention; je lui saurais gré de se conformer au règlement et de ne pas lire la pétition.

M. Pat Martin: Monsieur le Président, c'est la première fois que je présente une pétition et, sincèrement, je n'étais pas au courant.

Les pétitionnaires demandent que le réseau routier national soit amélioré et modernisé dans l'intérêt de la création d'emplois et de l'industrie des transports.

LES ARMES NUCLÉAIRES

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, la troisième et dernière pétition que je voudrais présenter concerne l'abolition des armes nucléaires. Dans la même veine que les signataires de la pétition qu'un autre député vient de présenter, les nombreux signataires de cette pétition demandent l'abolition des armes nucléaires d'ici l'an 2000 et la création d'une convention internationale qui établira un échéancier obligatoire pour l'éradication de ces armes.

LE MARIAGE

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à déposer à la Chambre aujourd'hui, et toutes deux traitent de la même question.

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter le projet de loi C-225, Loi modifiant la Loi sur le mariage (degrés prohibés) et la Loi d'interprétation, afin qu'il soit stipulé que seuls peuvent se marier un homme non marié et une femme non mariée.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, j'ai aujourd'hui deux pétitions à présenter au nom des électeurs de New Westminster—Coquitlam—Burnaby.

Les signataires de la première pétition ne croient pas qu'un contrôle plus strict des armes à feu soit la solution à la criminalité. Ils demandent donc au Parlement d'abroger le projet de loi C-68 et de réorienter les centaines de millions de dollars prévus à cet égard vers des programmes qui amélioreront réellement la sécurité publique.

LE MARIAGE

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, ma seconde pétition vient de 102 personnes qui croient qu'il incombe au Parlement de veiller à ce que le mariage, tel qu'on l'a toujours connu et compris au Canada, soit préservé et protégé. Elles exhortent le Parlement à promulguer le projet de loi C-225 qui précise qu'un mariage ne peut être contracté qu'entre un homme célibataire et une femme célibataire.

LE CRTC

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais présenter une pétition signée par plus de 200 électeurs de Prince George—Peace River. Ils font remarquer que le jour même où la CRTC a refusé d'octroyer une licence à quatre radiodiffuseurs religieux, il a accordé une licence à la station de télévision pornographique de Playboy.

Les pétitionnaires croient que la Constitution garantit la liberté de religion, de conscience et d'expression aux Canadiens. Par conséquent, ils demandent au Parlement de revoir le mandat du CRTC et de lui ordonner d'adopter une nouvelle politique encourageant la délivrance de licences à des radiodiffuseurs religieux.

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, j'ai un certain nombre de pétitions aujourd'hui.

La première porte sur la réduction de 12 à 10 ans de l'âge à partir duquel s'applique la Loi sur les jeunes contrevenants et réclame également d'autres modifications à cette loi. Les pétitionnaires veulent qu'on accroisse de 10 à 15 ans la peine maximale pour meurtre au premier degré et qu'on réaffirme la responsabilité des parents.

 

. 1515 + -

LE MARIAGE

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, j'ai également une pétition d'électeurs portant sur le mariage. Les pétitionnaires demandent qu'on promulgue le projet de loi C-225, Loi modifiant la Loi sur le mariage et la Loi d'interprétation, de manière à préciser qu'un mariage ne peut être contracté qu'entre un homme célibataire et une femme célibataire.

Je présente la pétition au nom de mes électeurs. Je voudrais rappeler à mes collègues qu'il est de mon devoir de présenter les volontés de mes électeurs.

J'ai une autre pétition que je présenterai à un autre moment.

Le vice-président: Nous attendons tous cela avec impatience.

*  *  *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI DE 1998 POUR LA MISE EN OEUVRE DE CONVENTIONS FISCALES

 

L'hon. Allan Rock (au nom du ministre des Finances): propose: Que le projet de loi S-16, Loi mettant en oeuvre un accord conclu entre le Canada et la République socialiste du Viêtnam, un accord conclu entre le Canada et la République de Croatie et une convention conclue entre le Canada et la République du Chili, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Randy White: Monsieur le Président, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour partager le temps de parole de 40 minutes de l'opposition officielle en quatre périodes de dix minutes. Il n'y a aucune question ou observation reliée à cela.

Le vice-président: La Chambre donne-t-elle son accord à la proposition de l'honorable leader parlementaire de l'opposition officielle?

Des voix: D'accord.

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi S-16.

Ce projet de loi mettra en oeuvre les conventions fiscales que le Canada a récemment signées avec le Vietnam, la Croatie et le Chili. Le projet de loi S-16 est important parce qu'il fait partie d'un effort soutenu pour mettre à jour le réseau canadien de conventions fiscales.

Les conventions fiscales sont directement liées au commerce international. Elles ont donc une incidence sur la performance économique intérieure du Canada et présentent d'importants avantages. Il suffit de penser que près de 40 p. 100 de la richesse économique annuelle du Canada repose sur les exportations, le commerce extérieur et l'investissement étranger direct.

Depuis 1971, année où notre système d'impôt sur le revenu a été refondu, le Canada met régulièrement à jour ses conventions fiscales. L'un des résultats de cette refonte a été l'élargissement de notre réseau de conventions fiscales. Jusqu'à présent, le Canada a conclu des conventions fiscales avec 64 pays.

Lorsqu'il signe des conventions fiscales avec d'autres pays, le Canada vise deux principaux objectifs: éviter la double imposition et prévenir la fraude fiscale. Les nouvelles conventions fiscales sont fort semblables aux autres conventions déjà conclues par le Canada. Toutefois, elles varient nécessairement d'un pays à l'autre.>

Le projet de loi S-16 garantit l'intégration de nos règles d'impôt sur le revenu, de sorte que nos accords avec le Vietnam, la Croatie et le Chili auront pleine force de loi.

Avant de discuter de certains détails du projet de loi, j'aimerais souligner trois grands avantages qui en découleront.

Tout d'abord, les contribuables sauront qu'un taux d'imposition plafonné aux termes d'un de ces accords ne peut être augmenté sans un préavis important.

Ensuite, les contribuables canadiens qui ont des intérêts commerciaux ou des investissements au Vietnam, en Croatie ou au Chili pourront plus facilement respecter la loi étant donné que les «règles du jeu» seront plus claires.

Enfin, les contribuables qui effectuent des transactions internationales faisant parfois l'objet d'une double imposition bénéficieront de l'élimination presque complète de ce problème.

Dans un monde où les personnes et les capitaux sont de plus en plus mobiles, les conventions de double imposition sont essentielles, car elles permettent d'éviter que les bénéfices soient imposés deux fois. Les 64 conventions fiscales conclues par le Canada, y compris les conventions avec le Vietnam, la Croatie et le Chili, éliminent la double imposition de l'une des deux façon suivantes.

 

. 1520 + -

Elles attribuent des droits d'imposition exclusifs soit au pays de résidence du contribuable, soit au pays d'origine du revenu. Ou, si le revenu est imposable dans les deux pays, elles obligent le pays de résidence à verser au pays d'origine l'impôt payé.

Les conventions de double imposition favorisent souvent l'échange d'information entre les autorités fiscales afin de prévenir la fraude fiscale, ce qui correspond au second objectif de ces conventions, et le projet de loi S-16 n'est pas différent à cet égard.

Le projet de loi S-16 porte aussi sur une autre grande question: la retenue des impôts. Le pays de résidence d'un contribuable peut habituellement retenir l'impôt à un taux de 5, 10 ou 15 p. 100 sur les dividendes et les bénéfices des succursales et à un taux de 10 p. 100 sur les intérêts et les redevances. Dans certains cas, les redevances sur les droits d'auteur, les logiciels, les brevets et le savoir-faire sont exempts à la source.

Aux termes de la convention conclue avec le Vietnam, le taux de retenue sur les dividendes sera réduit à 5 p. 100 pour une société détenant au moins 70 p. 100 du total des voix de cette société; à 10 p. 100 pour une société qui détient entre 25 et 70 p. 100 des voix; et à 15 p. 100 dans tous les autres cas.

De plus, le taux de retenue sur les bénéfices des succursales sera réduit à 5 p. 100. Il sera réduit à 10 p. 100 sur les intérêts et les redevances; et il sera de 7,5 p. 100 sur les droits de services techniques.

Il n'y a pas d'exemption immédiate pour les redevances sur les droits d'auteurs, les logiciels, les brevets et le savoir-faire. Cependant, si le Vietnam conclut des conventions d'exemption avec d'autres pays membres de l'OCDE, les Canadiens bénéficieront automatiquement de la même exemption.

Aux termes de la convention avec la Croatie, le taux de retenue sur les dividendes sera réduit à 5 p. 100 pour une société qui contrôle au moins 10 p. 100 des voix ou qui détient au moins 25 p. 100 du capital. Le taux sera de 15 p. 100 dans tous les autres cas. Les taux de retenue des impôts sur les bénéfices des succursales et sur les redevances et intérêts seront respectivement de 5 p. 100 et de 10 p. 100. À nouveau, il n'y a pas d'exemption pour les intérêts ou les redevances sur les droits d'auteurs, les logiciels, les brevets et le savoir-faire.

Dans la convention avec le Chili, le taux de retenue sur les dividendes sera réduit à 10 p. 100 pour les sociétés détenant au moins 25 p. 100 des voix, et à 15 p. 100 dans tous les autres cas. Un taux de 10 p. 100 s'appliquera aux bénéfices des succursales et, si le Chili s'entend sur un taux de 5 p. 100 avec un autre pays de l'OCDE, ce taux plus bas s'appliquera automatiquement au Canada.

Il y aura également un taux de 15 p. 100 sur les intérêts et les redevances, mais aucune exemption pour les intérêts ou les redevances sur les droits d'auteur, les logiciels, les brevets et le savoir-faire.

J'aimerais aussi discuter d'une autre mesure: les pensions des non-résidents. Le projet de loi S-16 respecte le droit qu'a le Canada d'imposer les pensions et les rentes versées aux non-résidents. Aux termes des conventions conclues avec le Vietnam et la Croatie, les paiements de pensions peuvent être imposés dans les deux pays, le pays d'origine prélevant au maximum 15 p. 100 du total du paiement. Les prestations de sécurité sociale ne seront imposées que par les pays payant ces prestations. En ce qui concerne le Canada et le Chili, les paiements de pensions et de sécurité sociale seront imposés par le pays effectuant ces paiements.

Je voudrais également faire remarquer à mes collègues députés que les gains en capital sur la vente d'immeubles, d'actifs d'entreprise et d'actions dans des sociétés immobilières, ainsi que les intérêts dans des fiducies ou des sociétés de personnes immobilières continueront d'être imposés par le pays où se situent ces biens.

Pour conclure, ce projet de loi procure des avantages très concrets aux Canadiens. Comme il n'y a actuellement pas de conventions fiscales en vigueur avec le Vietnam, la Croatie ou le Chili, celles-ci viendront certainement en aide aux sociétés et particuliers canadiens qui exercent des activités dans ces pays ou qui y détiennent des investissements. Ces conventions permettront non seulement de favoriser l'investissement et le commerce internationaux et d'affermir la position du Canada dans un secteur où le concurrence mondiale est de plus en plus intense, mais elles instaureront pour les investisseurs et les commerçants un climat de certitude et de stabilité qui améliorera sans aucun doute les relations économiques entre le Canada et chacun de ces pays. Ces conventions permettront aussi d'assurer la cohérence des politiques fiscales canadiennes à l'échelle internationale.

J'aimerais également souligner que ce projet de loi n'entraînera de perte de recettes pour aucun des pays concernés.

 

. 1525 + -

Les conventions fiscales font partie des relations internationales normales dans une économie moderne, et leur élargissement s'inscrit dans le cadre des opérations courantes d'un gouvernement responsable. Ce projet de loi constitue un texte législatif important et non controversé, c'est pourquoi j'invite mes collègues députés à l'adopter rapidement.

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je signale tout d'abord à la Chambre que, conformément au consentement unanime obtenu, je partagerai le temps de parole de 40 minutes attribué à l'opposition officielle avec les députés de Langley—Abbotsford, Medicine Hat et New Westminster—Coquitlam—Burnaby, dans cet ordre.

L'opposition officielle appuie le projet de loi S-16, Loi mettant en oeuvre un accord conclu entre le Canada et la République socialiste du Viêtnam, un accord conclu entre le Canada et la République de Croatie et une convention conclue entre le Canada et la République du Chili, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu.

Mon parti, qui est un tenant de la libre entreprise, appuie fermement les mesures de ce genre qui contribuent à éliminer les barrières au commerce et à faciliter la libre circulation des capitaux entre des États commerçants comme le Canada et les trois pays visés par le projet de loi.

Nous avons examiné le projet de loi en détail et l'avons trouvé fondamentalement conforme au modèle de conventions fiscales internationales proposé par l'Organisation de coopération et de développement économiques.

J'appuie les observations de fond faites par le secrétaire parlementaire du ministre des Finances, qui vient tout juste d'expliquer en détail certains des éléments du projet de loi.

Je voudrais cependant soulever une réserve au sujet de ce projet de loi, qui confirme une convention fiscale entre le Canada et la République socialiste du Viêtnam. En principe, c'est une bonne chose de renforcer nos liens commerciaux avec des pays étrangers afin d'accroître notre prospérité et celle des autres pays, mais ce projet de loi nous donne à réfléchir au sujet des politiques étrangère et économique générales de l'actuel gouvernement à l'égard des régimes tyranniques d'autres pays.

Récemment, nous avons eu un exemple du traitement tout en douceur réservé par le Canada à des États étrangers tels que la République socialiste du Viêtnam ou encore l'Indonésie, dont nous parlons à la Chambre depuis quelques jours.

Bien que je ne m'oppose pas à la signature d'une telle convention fiscale avec le Viêtnam, j'aimerais que celle-ci soit plus étroitement liée au respect des droits de la personne et des droits religieux et civils dans des États communistes tels que la République socialiste du Viêtnam.

À mon avis, le fait de promouvoir les échanges commerciaux et de favoriser l'atteinte d'un équilibre financier au moyen de ces conventions fiscales sans aussi insister sur la nécessité de respecter les droits de la personne et d'effectuer des réformes d'ordre politique est insuffisant et ternit la réputation du gouvernement et du Canada.

Cela dit, mes collègues et moi sommes tout à fait opposés au processus qui fait que la mesure législative est désignée comme étant le projet de loi S-16. Pour ceux qui ne connaissent pas très bien la procédure parlementaire, cette mesure est appelée S-16 parce qu'il s'agit d'un projet de loi qui a été déposé au Sénat en mai dernier.

Pourquoi ce projet de loi a-t-il d'abord été déposé au Sénat? Normalement, les projets de loi, en particulier ceux du gouvernement, sont déposés à la Chambre des communes, où ils font l'objet d'une étude et d'un débat avant d'être adoptés puis envoyés à la Chambre haute.

Toutefois, le projet de loi S-16 est un exemple d'une tendance de plus en plus fréquente et préoccupante en vertu de laquelle le gouvernement dépose des mesures législatives au Sénat pour les y faire adopter en premier, avant d'en saisir ensuite la Chambre des communes. À notre avis, il s'agit là d'une atteinte à une convention parlementaire établie de longue date voulant que nous respections de facto la suprématie de la Chambre basse, la Chambre élue, la Chambre démocratiquement légitime, sur ce paradis de nominations par favoritisme appelé le Sénat, pour ce qui est de présenter et d'examiner la première les projets de loi.

 

. 1530 + -

Les projets de loi devraient être présentés, débattus et adoptés à la Chambre et, seulement après, par le Sénat qui, de facto, ne fait que les approuver, et non l'inverse. Au lieu de cela, le gouvernement présente des projets de loi, dont celui-ci, au Sénat, conférant ainsi une légitimité à ce qui en fait est un organe que les Canadiens et l'opposition officielle considèrent de plus en plus comme illégitime. Nous trouvons ça très troublant.

Nous avons demandé au gouvernement lors des négociations que nous avons eues avec les dirigeants à la Chambre et dans nos interventions de respecter la convention parlementaire établie de longue date qui veut que les projet de loi de cette nature, les projets de loi émanant du gouvernement, soient présentés à la Chambre des communes afin que les représentants dûment élus par le peuple puissent les examiner avant d'être présentés au Sénat, et non l'inverse. Mais le gouvernement se refuse à respecter cette convention et d'affirmer l'autorité démocratique de cet endroit par rapport au Sénat.

C'est très regrettable, surtout que le gouvernement n'a pas vraiment de programme législatif. L'économie canadienne connaît un ralentissement, nous avons une dette de près de 600 milliards de dollars, nous avons le taux d'imposition du revenu des particuliers le plus élevé des pays du G7, et le dollar n'a jamais été aussi faible que cet été. Au moment où nous avons d'énormes problèmes à résoudre pour permettre aux Canadiens de subvenir à leurs besoins, que propose le gouvernement dans son programme législatif? Très peu, si ce n'est des projets de loi de pure forme comme celui-ci.

Le gouvernement n'avait aucune raison impérieuse de déposer ce projet de loi, ou tout autre projet de loi semblable, au Sénat avant d'en saisir la Chambre des communes. Le gouvernement n'avait aucune raison impérieuse de le faire, si ce n'est pour légitimer la Chambre haute qui, à l'heure actuelle, paraît de moins en moins légitime aux yeux des Canadiens.

Si je tiens ce discours au sujet du projet de loi S-16, Loi mettant en oeuvre un accord conclu entre le Canada et les Républiques du Viêtnam, de la Croatie et du Chili, c'est qu'une rare occasion historique nous est donnée à la Chambre, celle que nous offre le gouvernement dûment élu de la province de l'Alberta. L'assemblée législative de l'Alberta a décidé de tenir, le 19 octobre prochain, des élections de sénateurs dans cette province. Ces élections ne constituent pas qu'un geste politique purement symbolique et frivole pour la population albertaine.

Le gouvernement de l'Alberta veut que la population de cette province choisisse ses prochains sénateurs, de manière à lancer le processus long et ardu, mais crucial, d'une réforme fondamentale du Sénat. Cette réforme vise à nous doter, ultimement, d'un Sénat élu et responsable, capable d'exercer ses pouvoirs sur la base d'une représentation équitable sinon égale des provinces et des régions, d'examiner des projets de loi comme le projet de loi S-16, des projets de loi ministériels de nature technique comme les conventions fiscales, et cela sur la base d'une légitimité démocratique. D'ici là, il est de la prérogative de cette Chambre, l'assemblée démocratique du Parlement, d'examiner des projets de loi de ce genre avant qu'ils ne se retrouvent dans le paradis du favoritisme qui se trouve à l'autre bout.

Le vice-premier ministre déclarait aujourd'hui que les élections du Sénat en Alberta sont antidémocratiques. Des élections antidémocratiques? Je veux être sûr de bien saisir. Selon son étrange conception tordue et orwellienne des choses, le gouvernement juge non démocratique de tenir des élections, mais démocratique le fait de nommer des personnes à la Chambre haute pour décider de la façon de dépenser l'argent des contribuables et d'utiliser les pouvoirs énormes et parfois coercitifs de l'État. Je ne comprends pas la logique tordue dont font preuve le vice-premier ministre et le gouvernement en déposant des projets de loi semblables et en s'opposant à un effort légitime visant à faciliter la réforme démocratique du Parlement. Le Parti libéral du Canada et le premier ministre se disent favorables à la réforme du Sénat. Je les invite à le prouver en déposant des projets de loi comme celui-ci à la Chambre des communes d'abord.

 

. 1535 + -

Avant que mon temps de parole ne s'achève, je voudrais proposer...

Le vice-président: Le temps de parole du député est écoulé.

M. Jason Kenney: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je propose, avec l'appui du député de Langley—Abbotsford...

Le vice-président: Le député ne peut pas invoquer le Règlement pour présenter une motion. Dans les circonstances, je lui recommande de laisser cette initiative à celui ou celle de ses collègues qui prendra la parole après lui. Je crois que c'est le député de Langley—Abbotsford.

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, vous pouvez être assuré que je ferai une intervention très agréable en parlant du projet de loi S-16, qui vise à mettre en oeuvre un accord conclu entre le Canada et les républiques du Viêtnam, de la Croatie et du Chili.

À mon point de vue, le Parti réformiste a toujours appuyé les mesures le moindrement susceptibles d'alléger le fardeau fiscal des Canadiens. Je suis persuadé que le projet de loi trouvera des appuis.

Cependant, tout comme mon collègue qui vient d'en parler très brièvement, je m'inquiète à propos de la façon dont nous avons été saisis du projet de loi S-16. J'ai soulevé plusieurs fois à la Chambre des questions de privilège et des rappels au Règlement à cet égard. Le privilège que j'évoquais est celui qui est refusé aux députés d'examiner les premiers ces projets de loi aux étapes de la première lecture et de la deuxième lecture, pour ensuite les renvoyer au comité qui décidera peut-être de tenir des audiences à travers le pays s'il est très important d'en discuter avec la population, avant de nous les renvoyer pour les adopter à l'étape de la troisième lecture et les transmettre ensuite au Sénat pour qu'il les examine à son tour.

Je ne comprends vraiment pas pourquoi nous sommes saisis encore une fois d'un projet de loi, le S-16, qui nous arrive à la Chambre après avoir passé d'abord par le Sénat. J'y trouve à redire car il nous faut voir ce qui rend la Chambre des communes efficace tout d'abord. Ce qui la rend efficace, c'est le débat public sur n'importe quelle question, le dialogue de part et d'autre et, bien sûr, la responsabilité. Quand nous nous levons pour voter pour ou contre un projet de loi à la Chambre et que le public est mécontent, nous engageons notre responsabilité. On nous en tiendra responsables aux bureaux de scrutin. Les réactions que nous avons du public ont un caractère démocratique et les projets de loi obtiennent le traitement de filtration dont ils ont besoin quand les comités tiennent des audiences partout dans le pays.

On pourrait par ailleurs voir ce qui entraverait ce processus à la Chambre. Ce qui l'entraverait, c'est un débat après coup, après qu'une mesure a été approuvée par une assemblée de personnes non élues et n'ayant de comptes à rendre à personne qui en a fait l'examen et la renvoie à la Chambre pour la faire approuver sans discussion puisqu'elle a déjà fait l'objet de discussion au Sénat. Nous serions gênés dans notre tâche si les personnes qui saisissent la Chambre de ce genre de projets de loi après leur étude au Sénat n'étaient pas élues, et elles ne le sont pas, et si elles n'avaient aucun compte à rendre à la population du pays, ce qui est bien le cas puisqu'elles ont été nommées au Sénat par favoritisme. Je ne comprends vraiment pas comment un gouvernement puisse prétendre chaque fois à la Chambre que les projets de loi font l'objet d'un processus démocratique alors qu'ils nous arrivent à la Chambre du Sénat sans avoir été débattus d'abord à la Chambre des communes. Il y a quelque chose qui cloche dans ce principe sempiternel que les amis politiques ont un meilleur processus pour légiférer que les membres élus du Parlement.

 

. 1540 + -

Mon collègue de Calgary-Sud-Est a parlé des conséquences des nominations partisanes au Sénat sur les élections qui vont avoir lieu en Alberta. Qu'est-ce que le gouvernement espère gagner en snobant les élections albertaines et en nommant quelqu'un de cette province au Sénat? Quel but pense-t-il atteindre en agissant ainsi?

Je peux dire aux députés ce qu'il va réussir à faire. Il va probablement réussir à n'avoir aucun siège de député dans cette province aux prochaines élections, encore que cela ne fera guère de différence avec la situation présente. Je pense que l'arrogance que cela démontre est révélatrice. C'est peut-être cela.

Quand cela se terminera-t-il? Quand le gouvernement comprendra-t-il que la Chambre des communes est une institution qui légifère sur les affaires des Canadiens? Quand comprendra-t-il enfin que les copains, les bienfaiteurs et les amis du parti ne sont pas réellement responsables, qu'ils ne devraient pas avoir l'initiative des lois et ne devraient pas nous en envoyer? Le Sénat ne devrait pas être chargé du nettoyage des affaires que le gouvernement ne veut pas entreprendre à la Chambre des communes.

La question du Sénat ne va pas disparaître de sitôt. Je peux le garantir à tous les députés. Peu m'importe le contenu du projet de loi, ce qui compte pour moi, c'est que tous les projets de loi devraient émaner de la Chambre des communes.

Le gouvernement semble penser que l'autre endroit, le Sénat, est responsable et qu'il peut faire un certain travail, économisant du temps au gouvernement. Ce n'est pas l'opinion des Canadiens. Si l'on légifère, on doit être responsable de ses actions. Nous ne pouvons pas tout remettre à ce groupe de l'autre côté qui n'a pas de comptes à rendre.

Si les libéraux pensent que cette question ne revêtira pas une grande importance tant qu'ils n'auront pas entrepris la refonte du Sénat, ils se trompent grandement. L'arrogance manifestée est déjà difficile à accepter, mais c'est l'excès de confiance du gouvernement qui va le perdre. Cette question est loin d'être sans importance au pays. Elle préoccupe d'ailleurs beaucoup les gens de ma circonscription.

Les Canadiens veulent une véritable représentation au Sénat, une représentation élue et responsable, et ils l'auront. Si ce n'est pas le gouvernement actuel qui le leur donne, ce pourra être un autre parti et un autre gouvernement.

Cessons de dire que le projet de loi S-16 est tellement important qu'il doit être déposé au Sénat en premier. S'il est si important, il faut commencer par le déposer à la Chambre. Mon collègue a tout à fait raison en ce qui concerne le programme gouvernemental. Il y a toutes sortes de problèmes à régler, les jeunes n'ont pas de travail, le dollar est à son plus faible, les impôts sont beaucoup trop élevés et la dette est énorme. Et que nous propose-t-on en face? Le projet de loi S-16 en provenance du Sénat. Il y a un ministre ici. Il serait temps de faire savoir aux membres du Cabinet que le projet de loi S-16 du Sénat ne se penche pas sur le problème du chômage chez les jeunes.

Passons maintenant à mon amendement. Je propose:  

    Que l'on modifie la motion en enlevant les mots qui suivent «Que» pour les remplacer par le texte suivant:

    Le projet de loi S-16, Loi mettant en oeuvre un accord conclu entre le Canada et la République socialiste du Viêtnam, un accord conclu entre la Canada et la République de Croatie et une convention conclue entre le Canada et la République du Chili en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu ne soit pas lu pour la deuxième fois dès maintenant, mais que l'ordre pour la deuxième lecture soit révoqué et qu'un message soit envoyé au Sénat informant Leurs Honneurs que la Chambre n'acceptera plus de projet de loi présenté par le Sénat jusqu'à ce que le Sénat accepte de lever l'interdiction portant sur les fiches de présence des sénateurs.

 

. 1545 + -

Le vice-président: La présidence prendra en délibéré l'amendement présenté par le député avant de décider s'il est recevable. Je donnerai ma réponse à la Chambre le plus tôt possible.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler du projet de loi S-16. C'est la première fois que j'interviens à la Chambre depuis la reprise de nos travaux. À l'instar de mes collègues, je suis extrêmement déçu par les mesures dont nous sommes saisis dès le début de cette session.

Je veux préciser au départ que je suis tout à fait d'accord avec mon collègue lorsqu'il dit que nous faisons face à un énorme problème de chômage au Canada, à l'heure actuelle. Pourtant, nous voici en train de discuter d'un projet de loi de bien peu d'importance.

Notre monnaie éprouve également des problèmes. En fait, au cas où nos vis-à-vis ne l'auraient pas remarqué, notre dollar a atteint dix nouveaux planchers historiques au cours du mois d'août seulement.

Une voix: Combien?

M. Monte Solberg: Dix nouveaux planchers historiques, c'est incroyable. De quoi parlons-nous maintenant? Un accord sur la double imposition avec le Chili, la Croatie et la République socialiste du Vietnam.

De ce côté-ci, nous nous préoccupons des questions d'impôt, notamment des problèmes de double imposition que le projet de loi est censé régler. Les ministériels pourraient-ils nous dire pourquoi ils ne s'inquiètent pas de la double imposition au Canada? En effet, la TPS s'applique sur les taxes de vente provinciales et sur les taxes sur l'essence au Canada. Pourquoi le gouvernement ne présente-t-il pas un projet de loi qui supprimerait ce type de double imposition? Eh bien non. Ce ne l'intéresse que lorsqu'il s'agit de pays autres que le Canada. Il est vraiment honteux qu'il ait programme législatif aussi maigre.

Mes vis-à-vis ont signalé d'autres questions. Je vais en soulever une également. À l'heure actuelle, les provinces se penchent sur l'union sociale. Le gouvernement fédéral hésite à traiter avec les provinces. Pourtant, ces dernières présentent pour la première fois depuis longtemps une proposition unifiée. Le gouvernement fédéral devrait souscrire à certaines des choses proposées par les provinces. Au lieu de cela, nous étudions le projet de loi C-16. C'est tout à fait incroyable.

Je voudrais m'arrêter sur une question qui a pris de plus en plus d'ampleur durant l'été et qui touche précisément le projet de loi, mais non de la façon dont le gouvernement le voudrait, je le suppose. Je veux parler de l'élection d'un sénateur en Alberta.

Nous voilà saisis d'un projet de loi présenté au Sénat, un projet de loi, je le reconnais, qui n'est pas important, mais qui porte sur les impôts. Lorsqu'un projet de loi est présenté dans une Chambre où il n'y a pas de représentants élus, mais simplement des gens nommés par népotisme politique, je pense alors qu'il est juste de dire que, fondamentalement, il s'agit d'un projet de loi fiscal qui ne s'appuie sur aucune représentation des électeurs. Je suis extrêmement inquiet de voir que nous continuons de laisser cela se produire à la Chambre. Nous l'avons déjà signalé auparavant.

Les représentants de la Chambre basse sont élus alors que ceux de la Chambre haute sont nommés. Ce sont des amis du premier ministre et d'anciens premiers ministres. Ce sont de grands joueurs de hockey dans certains cas, mais ils ne sont pas élus. Ils ne connaissent pas nécessairement bien les questions en jeu et je suis déçu de voir que nous devons une fois de plus faire la leçon au gouvernement au sujet de la démocratie.

Aujourd'hui, un grand démocrate, Nelson Mandela, est intervenu à la Chambre. Il a parlé de démocratie. J'ai jugé qu'il était très ironique que nous ayons Nelson Mandela parmi nous en train de parler de démocratie et que le gouvernement hésite par contre à permettre à la démocratie de s'exprimer en Alberta.

Nous essayons de tenir une élection au Sénat dans cette province. Quelque 600 000 personnes ont voté lors de la dernière élection sénatoriale tenue en Alberta et nous avons effectivement élu un sénateur. Cédant aux énormes pressions du public, Brian Mulroney a fini par admettre Stan Waters, un réformiste, au Sénat. C'est le premier sénateur vraiment responsable qui ait jamais siégé à l'autre Chambre.

 

. 1550 + -

Or, voici que nous nous proposons de répéter l'exploit et comment le premier ministre réagit-il à cette annonce? Il dit que l'élection sénatoriale est une vaste plaisanterie. Voilà ce qu'il pense des Albertains. En matière de plaisanterie, la meilleure que je connaisse c'est l'idée que le gouvernement se fait des Albertains et de la démocratie. La plus vaste plaisanterie, c'est celle qui consiste à répéter séance après séance que, comme nous avons rejeté la proposition d'un Sénat élu inscrite dans l'accord de Charlottetown, il ne saurait être de nouveau question d'élire des sénateurs.

Le premier ministre sait pertinemment qu'il n'en est rien. Certes, nous avons rejeté bien des aspects de l'accord de Charlotte, y compris certaines dispositions relatives au Sénat, mais c'était pour la bonne raison que la proposition ne débouchait pas sur un véritable Sénat triple E, ce que les Albertains appellent de toutes leurs forces.

L'autre jour, un des mes collègues a demandé au premier ministre ce qu'il avait fait au cours des cinq dernières années de son mandat pour promouvoir un Sénat triple E, pour promouvoir un Sénat élu. Il n'a su que répondre. Il n'a rien fait en ce sens pendant tout ce temps, alors qu'il s'agit là de la question constitutionnelle la plus importante, et même non constitutionnelle, car il y va de l'unité nationale pour les Albertains.

Malgré cela, le premier ministre a été incapable de nommer une seule mesure que son gouvernement a prise pour faire avancer le dossier de la réforme du Sénat. Le gouvernement de l'Alberta et les réformistes prennent maintenant les choses en main et, espérons-le, ils mettront le gouvernement légèrement dans l'embarras en lui montrant comment la démocratie est censée fonctionner.

Le 19 octobre, le nom de quatre candidats au poste de sénateur sera inscrit sur les bulletins de vote, lorsque les Albertains se rendront aux urnes dans le cadre de leurs élections municipales. Deux de ces candidats seront choisis et leur nom sera proposé au premier ministre lorsqu'un siège de l'Alberta deviendra vacant au Sénat. Nous avons bon espoir que cette fois-là, le premier ministre accédera aux désirs des Albertains qui, je l'avoue franchement, ont été très insultés l'autre jour, lorsque le premier ministre a pris les devants et, même pendant une élection de sénateurs, a choisi de faire une nomination de faveur au Sénat. C'est absolument dégoûtant.

Pour terminer mes observations, je dirai que les Albertains ne sont pas près d'oublier ce dossier. Nous soulignons que nous travaillons à l'élection de sénateurs depuis bien des années. Un de mes nouveaux collègues, Bert Brown, dont les réformistes ont présenté la candidature l'autre jour, travaille au dossier de la réforme du Sénat depuis 16 ans. Son collègue, Ted Morton, que les réformistes ont également choisi comme candidat à une élection au Sénat, est un politologue et s'efforce depuis longtemps de faire progresser ce dossier.

Nous n'abandonnerons pas. Nous continuerons de harceler le gouvernement à propos non seulement de ce dossier, mais également de ceux qu'il devrait examiner aujourd'hui, soit la réduction des impôts, et non des conventions fiscales réciproques avec d'autres pays. Nous allons le talonner au sujet de la dette.

Nous voulons savoir pourquoi nous ne sommes pas saisis aujourd'hui d'un projet de loi visant à rembourser la dette. Nous voulons savoir pourquoi nous n'examinons pas aujourd'hui un projet de loi traitant de certaines des questions que les provinces ont soulevées dans leurs récentes discussions, à Saskatoon. Nous voulons connaître les réponses à ces questions et nous continuerons de les poser sans relâche.

Nous prévenons le gouvernement que nous sommes prêts à soulever ces questions à cet endroit, même s'il est tellement déconnecté de la réalité des Canadiens que le mieux qu'il trouve à faire en cette première semaine de la rentrée parlementaire, c'est présenter un projet de loi concernant des accords de réciprocité fiscale avec d'autres pays.

Nous estimons que c'est une honte et nous prévenons le gouvernement que nous continuerons de soulever ces questions, malgré les projets de loi de pacotille qu'il nous soumet.

Le vice-président: La présidence est prête à se prononcer sur la recevabilité de l'amendement proposé par le député de Langley—Abbotsford.

Je dois dire que la présidence a de très sérieuses raisons de croire que l'amendement est irrecevable. Je renvoie les députés au commentaire 568 de la 6e édition du Beauchesne, qui est ainsi libellé:

    Une règle absolue prescrit que tout amendement doit se rapporter à la proposition visée.

 

. 1555 + -

La première partie de l'amendement qui est proposé par le député de Langley—Abbotsford se rapporte au projet de loi, mais sa deuxième partie tendrait à orienter le débat sur la question des présences au Sénat, question qui intéresse peut-être de nombreux députés, mais qui n'a rien à voir avec le projet de loi S-16 dont la Chambre est actuellement saisie.

J'attire aussi l'attention du député sur le commentaire 666 de la 6e édition du Beauchesne, qui prévoit ceci—et je sais que le whip de l'opposition officielle connaît bien ce commentaire:

    À l'étape de la deuxième lecture, la Chambre peut être saisie de trois types d'amendements:

    le renvoi à plusieurs mois (trois mois, six mois, etc.),

    l'amendement motivé,

    le renvoi du sujet du projet de loi à un comité.

L'amendement proposé par le député de Langley—Abbotsford ne respecte aucune de ces exigences. Par conséquent, je dois le déclarer irrecevable.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole au sujet du projet de loi S-16.

Le caucus du Parti réformiste appuie le projet de loi S-16. Ce projet de loi est de nature administrative. Il vise à résoudre certaines incompatibilités entre les régimes fiscaux du Canada, du Viêtnam, de la Croatie et du Chili, comme dans le cas des ententes existantes entre le Canada et 64 pays.

Ce projet de loi fait partie des milliers d'ententes réciproques du même ordre qui sont de plus en plus courantes entre les pays et les organisations. Il reflète la constatation de plus en plus répandue selon laquelle la collaboration et la compétition amicale, menée en vertu de règles convenues, sont, à long terme, à l'avantage de tous les joueurs. Quand des gens éclairés apprennent à mener leurs relations économiques selon des règles du jeu bien établies, toutes les sociétés du monde s'en trouvent mieux.

C'est une attitude tout à fait contraire à celle qui caractérisait les anciennes méthodes socialistes et, jusqu'à un certain point, les tendances des gouvernements néo-démocrates du Canada. Les politiques de la convoitise, de l'exclusion, des règles spéciales pour certains joueurs, des quotas, de la réglementation exclusive et de nombreuses autres mesures qui limitent les libertés fondamentales des intervenants du marché sont le propre de ce mode de pensée. Malheureusement, ces idées nuisibles sont encore monnaie courante dans les cercles universitaires de notre pays et sont trop souvent à la base des raisonnements de certains sympathisants néo-démocrates.

Même quand les objectifs sociaux sont les mêmes que les miens, les idées sur les façons judicieuses de les atteindre font toute la différence. Cela va bien au-delà des croyances. Cela repose sur la preuve concrète de ce qui a fonctionné ou pas au fil des ans.

L'an dernier, lors de mon voyage à Moscou, où j'étais allé rencontrer des parlementaires russes, j'ai été attristé de retrouver les mêmes concepts à la base des arguments que j'entendais dans leur douma, qui témoignaient de leurs ressentiments commandant, comme solutions, des pénalités économiques, par exemple des taxes dissuasives.

On dirait que c'est la politique des barrières plutôt que des ententes qui l'emporte. Il ne faut pas s'étonner si les Russes moyens restent toujours pauvres. C'est à cause de leurs idées sur la manière d'améliorer le monde. En fait, ces idées détruisent tout espoir d'y arriver un jour.

Nous avons eu les mêmes problèmes dans notre pays, au cours de notre histoire, à un degré moindre. On en voit encore des traces dans les budgets du présent ministre des Finances. Heureusement, depuis mon élection au Parlement, en 1993, nous avons vu le gouvernement se diriger craintivement vers de meilleurs principes économiques, vers plus d'ouverture, et s'écarter des tendances socialistes. Il y a donc espoir que nous devenions un pays vraiment épris de liberté, où chaque individu aura la chance de participer à l'économie et d'assumer la responsabilité de son bien-être.

Plus les facteurs économiques fondamentaux seront bons au Canada, plus notre société pourra aider les démunis.

Il existe des accords mutuellement avantageux entre des pays, entre des zones économiques provinciales, entre des marchés et des secteurs de main-d'oeuvre. Tous ces accords doivent être marqués par un esprit d'ouverture et d'équité pour éviter toute discrimination.

Le projet de loi met en oeuvre un accord avec trois pays. Or, au Canada même, nous avons encore du chemin à faire; il nous faut toujours conclure des accords entre les provinces pour améliorer le bien-être économique de tous les Canadiens. Si le Canada peut établir les normes les plus élevées pour réglementer une économie qui s'autorenouvelle, les autres pays l'imiteront.

Par exemple, quand des principes de base ont été violés dans l'économie asiatique, les répercussions se sont fait sentir partout dans le monde. Personne n'a été épargné. Toutefois, le projet de loi permet de suivre une tendance opposée et de mettre en place de bons facteurs économiques afin que toute la communauté mondiale progresse et réalise son potentiel humain.

 

. 1600 + -

Un accord équitable est l'objectif à atteindre. La manière d'y parvenir est importante aussi. C'est pourquoi je m'inquiète du précédent que crée ce projet de loi du fait qu'il a d'abord été présenté au Sénat par le gouvernement.

Nous sommes contrariés que ce projet de loi vienne de l'autre endroit. Les ministres du Revenu national et des Finances auraient-ils jugé que la Chambre était trop occupée pour se charger de ce projet de loi dès le départ? Est-ce que le gouvernement a pensé qu'il fallait donner un peu de travail aux gens d'à côté?

Les réformistes croient vraiment que des projets de loi pourraient parfois venir de l'autre endroit, mais seulement si le Sénat était élu, efficace et égal. Jusqu'à maintenant, ces trois caractéristiques ne s'appliquent généralement pas à l'autre endroit.

Cette semaine était la première pour plusieurs nouveaux sénateurs. Mardi, le sénateur Mahovlich a mis son nouveau costume choisi chez Harry Rosen par son acheteur personnel, comme nous l'apprenait l'annonce pleine page parue dans le Globe and Mail. Et il est parti, pensant probablement que l'avenir lui souriait; plus d'entraîneurs qui lui criaient des ordres, pas de ban des pénalités et tout plein de vacances. Comment en vouloir aux sénateurs d'éprouver ce genre de sentiment? Le sénateur Thompson en a bien profité, tout comme beaucoup d'autres.

Si j'étais aussi peu assidu que certains des sénateurs d'aujourd'hui, il faudrait que je me cherche un autre emploi. Mes électeurs me mettraient vite à la porte. Mais les sénateurs n'ont pas d'électeurs. Ils peuvent prétendre le contraire, mais c'est une façon de parler. Je pense que si on demandait à dix personnes choisies au hasard en Ontario de nommer un sénateur de l'Ontario, la plupart auraient beaucoup de mal à le faire. Elles citeraient probablement Alexei Yashin. C'est bien un sénateur, mais il n'est pas membre de l'autre endroit.

Je n'ai pas pris la parole aujourd'hui pour dénoncer tout ce qui ne va pas au Sénat. En fait, il pourrait fort bien être très efficace. Il en a la possibilité si seulement il était réformé. Le sénateur Ghitter l'a très bien dit quand il a prononcé les paroles suivantes: «Point n'est besoin d'abolir le Sénat. Il suffit de le réformer. Faute de quoi, si on maintient le statu quo, la déchéance du Sénat va s'accélérer.»

Au cours de l'année qui vient de s'écouler, j'étais membre du Comité mixte spécial sur la garde et les droits de visite des enfants. Il était composé de sénateurs et de députés de toutes obédiences politiques. Nous avions, et nous avons toujours pour objectif de proposer des changements à la Loi sur le divorce, qui est déséquilibrée. Honnêtement, je dois dire que les sénateurs ont fait un excellent travail.

Beaucoup savent déjà que l'assiduité de la sénatrice Cools à l'autre endroit est très bonne. Son assiduité et son éthique du travail au comité étaient également très bonnes. Je sais que la sénatrice Cools a elle aussi était nommée. Je sais également qu'elle prend son travail très au sérieux. Elle a toujours défendu avec acharnement les plus démunis, qui sont laissés pour compte par le système judiciaire.

La sénatrice Deware est elle aussi un membre du comité qui non seulement a été très assidu, mais qui a apporté beaucoup de compassion et un grand savoir aux travaux du comité.

Malheureusement, ces deux sénatrices semblent être plutôt l'exception que la règle à l'autre endroit. Nous ne connaissons que trop les exploits du sénateur Thompson et son exécrable manque d'assiduité. Nous savons également que le sénateur Lucier est présent à moins de la moitié des séances.

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je sais que le député voudrait bien aborder la question de la présence des sénateurs au Sénat. Je dirai au député que, premièrement, cela n'est pas pertinent à la discussion dans laquelle nous sommes engagés aujourd'hui sur le projet de loi S-16. Deuxièmement, je dois l'informer que c'est contraire au Règlement que de parler en termes irrespectueux de l'autre endroit. Je sais qu'il connaît le Règlement à cet égard. C'est écrit en toutes lettres dans le Règlement.

Le député devrait choisir ses mots soigneusement. Je l'ai laissé parler un peu là-dessus parce qu'il tenait des propos fort élogieux au sujet de certains sénateurs. Il sait que ce sont, comme nous, des parlementaires. Il doit donc éviter de parler de façon irrespectueuse de l'autre endroit.

Je l'invite à ne pas tenir des propos qui pourraient constituer des attaques personnelles contre tout sénateur ou qui pourraient être irrespectueux pour l'autre endroit.

M. Paul Forseth: Monsieur le Président, la semaine dernière, le premier ministre a nommé le sénateur Roche à l'autre endroit. Qui sait, ce sénateur pourrait fort bien faire preuve d'une grande assiduité à l'autre endroit. Il pourrait même être d'une grande utilité lorsque des projets de loi nécessiteront un second examen objectif.

Ce n'est pas là où je voulais en venir. Je voulais plutôt faire ressortir que le premier ministre avait amplement l'occasion d'attendre les élections sénatoriales en Alberta le 19 octobre et de nommer le gagnant. Le sénateur Roche a eu l'occasion de se lancer dans cette course. Ces jours derniers, il a dit qu'il était d'accord sur la réforme du Sénat. Il a également eu l'occasion d'honorer sa parole.

En n'attendant pas l'élection, le premier ministre a en fait dit aux Albertains qu'ils ne comptaient tout simplement pas. D'un revers de la main, le premier ministre a bafoué la démocratie.

 

. 1605 + -

Même l'ex-premier ministre Brian Mulroney a respecté les souhaits des Albertains en 1989 quand il a nommé le sénateur élu Stan Waters. Il a certes protesté au début, mais il a fini par se rendre aux souhaits des Albertains.

Le mot clé est respect. C'est un mot que le premier ministre doit comprendre. Le premier ministre pense peut-être que tout va bien à l'autre endroit, mais il est malheureux qu'il ne se donne pas la peine d'écouter ce que les Canadiens en pensent. Il pourrait même écouter ce que les membres de l'autre endroit ont à dire parce qu'ils croient eux aussi que des changements sont nécessaires.

Les réformistes sont en faveur du progrès; ils veulent améliorer la démocratie et obliger le gouvernement à rendre davantage de comptes. Malgré l'insatisfaction d'un grand nombre de Canadiens, les libéraux tiennent mordicus à maintenir le statu quo. Les Canadiens ne sont pas prêts à accepter ce statu quo, toutefois. Ils croient dans un Canada fort et dans la démocratie. Ils ne croient pas à la vielle approche de gestion descendante perpétuée par les libéraux.

Il est temps que le premier ministre cesse d'écouter son gigantesque ego et fasse ce qu'il faut pour le pays. Si son ego est trop important et s'il est trop fier pour changer, il est peut-être temps qu'il s'en aille et laisse un dirigeant plus inventif et peut-être même un meilleur parti faire du Canada un endroit de fierté où tous peuvent participer plus pleinement.

Je propose:

    Que la motion soit modifiée en supprimant tous les mots qui suivent le mot «que» et en les remplaçant par ce qui suit:

    La Chambre refuse de lire pour la deuxième fois le projet de loi S-16, Loi mettant en oeuvre un accord conclu entre le Canada et la République socialiste du Viêtnam, un accord conclu entre le Canada et la République de Croatie et une convention conclue entre le Canada et la République du Chili, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, parce que le principe du projet de loi ne traite pas de la question d'un Sénat élu présentant un projet de loi que la Chambre trouve inacceptable dans l'environnement politique d'aujourd'hui et, en particulier, parce que la Chambre trouve insultant qu'un sénateur de l'Alberta ait été nommé récemment par le premier ministre avant que les Albertains aient voté pour pourvoir ledit poste aux élections sénatoriales d'octobre prochain.

Le vice-président: Le député de New Westminster—Coquitlam—Burnaby propose un amendement à la Chambre. J'attire encore une fois l'attention du député sur le commentaire 568 de Beauchesne, que voici: «Une règle absolue prescrit que tout amendement doit se rapporter à la proposition visée.»

La présidence regrette, mais l'amendement proposé par le député ne se rapporte pas au principe de ce projet de loi, qui concerne des questions d'imposition et non la modification de la Constitution à l'égard du Sénat du Canada. En conséquence, je dois déclarer l'amendement antiréglementaire.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi concernant les conventions fiscales. Mais avant, j'ouvrirai une parenthèse dans le même sens que ce que disait mon collègue du Parti réformiste tout à l'heure. Ce n'est pas que je veuille minimiser ce projet de loi qui est fort important à mes yeux. Les conventions fiscales, c'est toujours important, et les dispositions qui y sont incluses sont importantes.

Par contre, la dégringolade du dollar canadien, les effets pernicieux de cette dégringolade sur l'économie, les trois mois consécutifs de ralentissement de la croissance économique, la réduction du carnet de commandes des entreprises, tous les indices composés, y compris ceux publiés hier par Statistique Canada pour le mois d'août, nous disent qu'on est dans une période de ralentissement économique. Mais le ministre des Finances récolte, mois après mois, des surplus mirobolants qu'il a faits sur le dos des chômeurs, des personnes malades, des provinces, sauf sur son propre dos.

Au lieu d'utiliser ces surplus pour stimuler la croissance économique, il préfère, de façon tout à fait imprudente, rembourser une partie de la dette, alors qu'il devrait se constituer des réserves et les utiliser tout de suite pour stabiliser l'économie. J'aurais aimé qu'on ait un tel débat en cette Chambre.

 

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Il me semble qu'il est important que dans 10 mois, on ne se retrouve pas avec les effets retardés d'une récession, qu'on ne se retrouve pas en pleine récession avec des milliers d'emplois perdus, parce que le ministre des Finances n'aura pas pris ses responsabilités et n'aura pas utilisé les recettes fiscales à bon escient pour stimuler la croissance économique et la création d'emplois et renverser la tendance qui s'observe depuis les derniers mois.

Cela étant dit, j'aurais aimé qu'on ait ce débat. Mais je vais consacrer les prochaines minutes au projet de loi S-16 que je considère fort important. Il porte sur une convention fiscale, que je définirai un peu plus tard, convention fiscale signée entre le Canada et trois pays, la Croatie, le Chili et le Vietnam.

Qu'est-ce qu'une convention fiscale? C'est un accord conclu entre le Canada et les pays dont j'ai fait mention pour éviter que les entreprises canadiennes, par exemple, qui auraient des filiales dans ces trois pays, en Croatie, au Chili ou au Vietnam, soient imposées deux fois sur leurs profits, sur leur capital ou sur les revenus tirés de ces filiales dans des pays étrangers, lorsque ces profits ou revenus sont rapatriés au Canada.

L'inverse aussi se vérifie. Il y a des entreprises du Chili qui ont des filiales en sol canadien. On évite, avec ces conventions fiscales, qu'il y ait une double taxation sur les mêmes revenus. Cela n'aurait aucun sens, ce serait injuste et dévastateur sur le plan économique et sur le plan de la création d'emplois, autant au Canada qu'en Croatie, au Vietnam ou au Chili.

Le principe des conventions fiscales est tout à fait correct. Cela fait des années que cette pratique existe au Canada et à travers le monde. Il y a plusieurs dizaines de conventions déjà signées entre le Canada et plusieurs pays. Et tout cela est correct.

Le problème survient lorsque les pays avec lesquels on conclut ces accords fiscaux, ces conventions fiscales, ont des taux de taxation tellement différents des nôtres, il y a tellement une grande marge, que si des revenus sont imposés par ce pays-là et qu'ils ne sont pas imposés au Canada, il y a des distorsions terribles sur le plan de la fiscalité. Il y a également des pertes de revenus pour Revenu Canada qui peuvent être considérables.

Prenons par exemple un pays comme La Barbade. La Barbade est un pays qui est considéré comme un paradis fiscal, comme les Bermudes, le Liberia, et ainsi de suite. Dans ces pays, il y a des taux de taxation qui sont tellement insignifiants qu'ils frôlent le zéro. Dans le cas de La Barbade, le maximum de taux d'imposition sur les profits des entreprises est de 2,5 p. 100. À titre d'information, le maximum de taux d'imposition au Canada pour les entreprises est autour de 40 p. 100, entre 25 p. 100 et 40 p. 100, dépendant de la nature de l'activité industrielle et des dépenses fiscales qui s'appliquent à ces entreprises. Mais grosso modo, les taux sont de l'ordre de 25 p. 100 à 40 p. 100.

Alors, quand le Canada signe une convention fiscale avec La Barbade et qu'une entreprise canadienne a une filiale là-bas, qu'elle y réalise des profits et qu'elle est imposée pour ces profits à hauteur de 2,5 p. 100, on rapatrie les profits au Canada et plus rien ne s'applique comme taux de taxation de Revenu Canada à ces profits. Cela n'a aucun sens. Il y a une différence trop grande entre les deux taux de taxation.

Pour les Bahamas, c'est encore pire: le taux de taxation est de zéro. Alors, si le Canada signe une convention fiscale avec les Bahamas, les profits sont imposés à un taux qui frôle le 0 p. 100. Les profits de filiales canadiennes aux Bahamas sont ensuite rapatriés au Canada. Puisque les profits ont déjà été imposés dans ce pays, il n'y a pas de taux de taxation canadien qui s'applique sur ces profits rapatriés d'une filiale vers la maison mère canadienne. Il y a un déséquilibre qui est très grand dans ces circonstances.

C'est pour cela que lorsque le Canada signe une convention fiscale avec un pays, il faut s'assurer que les taux de taxation sont comparables, que Revenu Canada ne perdra pas des revenus fiscaux et que par cette convention fiscale, on n'encouragera pas des entreprises à ouvrir des filiales bidon ou ouvrir des filiales, même si elles ne sont pas bidon, dans ces pays considérés comme des paradis fiscaux, parce que les taux d'imposition y sont tellement faibles et qu'il y a une convention fiscale. On se fait taxer là-bas, on évite la taxation canadienne et c'est un manque à gagner pour Revenu Canada.

 

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Ce manque à gagner pour Revenu Canada, il faut que les citoyens et les citoyennes qui nous écoutent sachent que ce qui n'est pas payé par ces entreprises, dans des distorsions liées à des conventions fiscales de cette nature avec des pays considérés comme des paradis fiscaux, ce sont les citoyens et citoyennes du Québec et du Canada qui doivent combler la différence. Ce sont eux et elles, au Québec comme au Canada, qui doivent payer les impôts que ces entreprises évitent de payer par l'existence de liens ou d'accords de réciprocité en matière de fiscalité que représentent les conventions fiscales.

C'est pour cela qu'il faut éviter de signer de tels accords avec des pays qui ont des taux de taxation qui sont diamétralement différents de nos taux de taxation canadiens.

Depuis que le Bloc québécois a été élu, il y a cinq ans, chaque fois qu'un projet de loi présentant une convention fiscale a été présenté à la Chambre, nous avons toujours pris très au sérieux ces conventions, puisque cela pouvait signifier, en bout de ligne, des pertes fiscales pour le Canada, comblées par des particuliers ou des entreprises québécoises et canadiennes.

Chaque fois, on s'est penchés minutieusement sur la question et on a fait du cas par cas, par convention, pour savoir si les pays impliqués dans ces accords fiscaux avec le Canada étaient des pays qui avaient des taux de taxation comparables.

Dans le cas qui nous préoccupe, c'est-à-dire la Croatie, le Chili et le Vietnam, vérification faite dans International Tax Summaries, 1998, pour ces pays, il semblerait, à première vue, avec une analyse telle que présentée dans ce document et notre propre analyse de la situation, en comparant les taux avec les dépenses fiscales, avec les crédits, et caetera, que les taux de taxation sont passablement comparables entre le Canada et le Chili, le Canada et la Croatie, et le Canada et le Vietnam.

En ce qui a trait aux individus, le taux de taxation pour les revenus des particuliers peut varier entre 20 p. 100 et 35 p. 100. Donc, le taux maximum à 35 p. 100, cela ressemble vraisemblablement à ce qu'on fait ici. Pour les entreprises, c'est 35 p. 100 aussi. Donc, on reste dans les normes de taxation comparatives entre le Canada et la Croatie.

Lorsqu'on regarde le Chili, encore une fois, les taux d'imposition maximum sont de 35 p. 100. Donc, c'est vraiment comparable avec le Canada. Il n'y a pas de grosse différence.

En ce qui a trait au Vietnam, les taux varient entre 0 p. 100 et 60 p. 100. Le maximum étant de 60 p. 100, comparé à nous avec nos 35 p. 100 ou 40 p. 100, cette convention serait peut-être, pas en défaveur au niveau des individus, du moins, mais en défaveur du Vietnam. Tout cela dépend des relations et des filiales qui seraient ouvertes au Vietnam par des intérêts canadiens, et vice versa. Grosso modo, comme base d'évaluation de taxation comparative, disons que cette convention fiscale ne pose pas de problèmes et nous appuierons ce projet de loi.

Depuis avril 1994, soit depuis que le Bloc québécois est intervenu pour la première fois sur un projet de loi concernant les conventions fiscales, nous demandons au ministre des Finances et au gouvernement de faire le ménage dans les vieilles conventions fiscales qui existent depuis plusieurs années avec des pays qui ont des taux de taxation diamétralement opposés aux taux de taxation canadiens et, s'il le faut, de mettre ces conventions fiscales de côté, parce qu'elles créent des déséquilibres dans les échanges fiscaux entre le Canada et les pays signataires de ces conventions, qui sont considérés comme des paradis fiscaux.

On a demandé je ne sais combien de fois au ministre des Finances de procéder à un ménage, à une actualisation de ces conventions. Comme je le mentionnais plus tôt, il y a des conventions fiscales signées avec le Liberia, la Barbade et les Bermudes; mais ces pays ont des taux de taxation tellement faibles qu'il y a un véritable manque à gagner pour Revenu Canada. Lorsque des entreprises canadiennes qui ont des filiales dans ces pays font des profits à des taux frôlant le 0 p. 100 ou 2,5 p. 100 alors qu'ici, ce serait entre 25 p. 100 et 40 p. 100, dépendant de la nature de la taxation, il y a une disproportion considérable.

 

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Des distorsions sont créées et il y a aussi un manque à gagner qui peut être considérable pour les particuliers et les entreprises québécoises et canadiennes. Ils doivent combler ce manque à gagner.

Toutes les fois qu'on a demandé au ministre des Finances de faire ce ménage, on a eu une réponse tout à fait détachée et légère, sans préoccupation aucune. C'est comme à chaque fois qu'on lui a demandé de faire une vraie réforme de la fiscalité. Il nous a répondu qu'on avait fait un bon travail, que notre analyse était bien, mais il a complètement mis de côté des changements fondamentaux qui auraient dû être mis en branle dès 1993, après l'élection. Le Parti libéral parlait de grande réforme de la fiscalité avec une auréole d'équité et de justice fiscales. Aussitôt élu, où fut la préoccupation de ce gouvernement pour la justice et l'équité fiscales et pour le ménage qu'on nous avait pourtant promis de faire dans la fiscalité canadienne qui est encore pleine de trous? Elle contient encore ce genre de conventions fiscales avec des pays avec lesquels on ne devrait pas avoir ce genre de conventions parce que c'est très coûteux pour le Canada.

Toutes les fois qu'on a demandé, et même suggéré, au ministre des Finances de revoir ces conventions avec des pays considérés comme des paradis fiscaux, il nous a dit: «Ce n'est pas une urgence.» Il nous a aussi dit: «Au fur et à mesure que le temps va passer, nous allons faire quelques réformes, quelques réformettes à gauche et quelques réformettes à droite.»

Pourtant, il aurait été simple—et on l'avait suggéré au ministre des Finances à l'époque et on a répété notre message à tous les ans, chaque fois qu'on a eu l'occasion de le faire avec d'autres projets de loi concernant les conventions fiscales—de corriger la situation puisque les États-Unis ont été vite sur leurs patins, les pays d'Europe aussi, et ils ont apporté des correctifs, il y a quelques années, à ces disproportions.

Prenons un pays avec lequel le Canada signe une convention fiscale à un taux d'imposition à 2,5 p. 100 comme c'est le cas pour La Barbade, ou à près de 0 p. 100 pour Les Bahamas. Mettons-le à 2,5 p. 100.

Les États-Unis ont réglé le problème en donnant aux entreprises, qui ont déjà payé une partie d'impôt sur les profits réalisés dans des filiales dans des pays comme La Barbade, un crédit d'impôt. Ils donnent un crédit d'impôt aux entreprises américaines qui ont déjà payé 2,5 p. 100 sur leurs profits. On leur donne un crédit équivalent à ce qu'ils ont déjà payé à La Barbade mais elles sont tenues de payer des impôts réguliers au gouvernement américain.

Autrement dit, les entreprises ont payé 10 $ de taxation à La Barbade; aux États-Unis, normalement, elle en paient 40, et 40 moins 10 cela fait 30. Il reste 30 $ à payer en impôt sur les profits des entreprises. On tient déjà compte du montant payé là-bas. Alors on peut continuer à avoir des conventions fiscales avec des pays qui ont des taux de taxation qui sont vraiment plus faibles que les nôtres. On donne un crédit d'impôt aux entreprises qui ont des filiales dans ces pays considérés comme des paradis fiscaux pour la portion, si minime soit-elle, d'impôt qu'elles ont déjà payée à l'étranger, et on leur fait payer ici le plein montant de taxation qu'elles devraient payer normalement.

Ce n'est pas difficile à comprendre, c'est la logique, c'est l'équité. On appelle cela l'équité, la justice fiscale. La justice fiscale consiste à faire payer les montants dus, pas plus, pas moins, mais les montants que les citoyens et les entreprises doivent au gouvernement.

Si une entreprise doit de l'argent au gouvernement mais que, par le truchement d'une filiale dans un pays considéré comme un paradis fiscal, elle ne paye pas sa juste part, c'est le devoir et la responsabilité du ministre des Finances et du gouvernement libéral d'aller récupérer cet argent. Ce n'est pas mettre en péril la survie des entreprises, c'est de faire en sorte que toutes les entreprises soient traitées sur un pied d'égalité.

Une entreprise canadienne qui opère en sol canadien, qui n'a pas de filiale dans un paradis fiscal, paye sa part d'impôt à un taux d'imposition variant de 25 à 40 p. 100. Pourquoi une entreprise qui a ouvert une filiale dans un paradis fiscal ne serait tenue de payer que 2,5 p. 100 ou 0 p. 100? Cela n'a aucun sens.

Il y a des distorsions. Il y a des injustices majeures. D'ailleurs, des représentants d'entreprises nous demandent pourquoi le ministre des Finances n'a pas agi dans ce dossier jusqu'à présent.

 

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Les informations du ministère des Finances sont très parcimonieuses. Le ministère ne tient pas de registre des pertes encourues avec ces conventions fiscales. Ils ne tient pas non plus de registre du nombre d'entreprises créées, à tous les ans, de façon vraiment méticuleuse, dans des pays considérés comme des paradis fiscaux. Mais les informations dont nous disposons nous permettent de croire que rien n'a changé et qu'au contraire, cela s'est accentué.

Prenons uniquement les six grandes banques canadiennes. Elles sont sujettes à plusieurs critiques, mais celle-là est très fondée. Les six grandes banques canadiennes ont 119 filiales à l'étranger, dont 57 sont situées dans les Antilles, là où pullulent, où foisonnent, les paradis fiscaux. Il n'y a pas là une forte concentration de population, ni de richesses. Qu'est-ce que 57 filiales des six grandes banques canadiennes font dans cette région? Des opérations bancaires, j'en suis sûr, mais des opérations bancaires qui justifient qu'on maintienne 57 succursales dans les Antilles? Il y a des questions à se poser.

Il y a de sérieuses questions à se poser. J'ai expliqué plus tôt le mécanisme des paradis fiscaux. Les taux de taxation sont très faibles. On permet la circulation des revenus et des pertes fiscales entre la maison mère et les filiales à l'étranger. Il y a des astuces utilisées pour économiser de l'impôt et peut-être que les banques pratiquent ce genre de choses dans les Antilles. Un nombre de 57 filiales sur 119 à l'étranger se trouvent dans les Antilles. Il faut le faire!

Aux îles Caïmans, l'exemple typique, la situation n'a pas changé, elle a empiré. Vers le milieu des années 1990, soit en 1994-1995, on comptait 28 000 compagnies aux îles Caïmans—un paradis fiscal par excellence—pour 30 000 habitants. C'est pratiquement une compagnie par habitant. On voit que cela n'a pas d'allure et n'a pas de bon sens. Mais ce sont des pays avec lesquels nous entretenons des relations avec des accords fiscaux de cette nature. Cela n'a aucun sens.

C'est pour cette raison qu'on a toujours demandé de faire le ménage là-dedans et d'imposer une règle simple, comme l'ont fait les Américains récemment, c'est-à-dire qu'on ait un impôt à payer au Canada, l'impôt régulier pour toutes les entreprises, et on en tiendra compte par un crédit correspondant à l'impôt déjà payé à l'étranger. S'il est à 15, 20 ou 25 p. 100, eh bien, l'impôt à payer, moins le crédit à 25 p. 100 du taux d'imposition, se rapproche du zéro. Là, ce serait correct. Cela nous permettrait de dire qu'il n'y a pas de problème pour les pays avec lesquels nous avons signé des accords fiscaux s'ils ont le même taux de taxation.

Le crédit équivaut à ce qu'elles ont déjà payé là-bas et l'impôt qu'elles ont à payer ici est égal à zéro lorsqu'on fait le calcul. Mais quand on arrive face à des taux d'imposition vraiment minimes, vraiment ridicules, là, il devrait y avoir une différence à payer pour combler les taux d'imposition plus élevés au Canada afin que ces entreprises ne nous volent pas. Je le répète, ce qu'elles ne paient pas, ce sont les contribuables qui paient pour elles. C'est un vol détourné à partir d'une convention fiscale qui, elle, est légale et permise par le ministre des Finances.

Je me suis souvent posé la question suivante: pourquoi notre ministre des Finances existe s'il ne fait rien, s'il ne révise pas la fiscalité, s'il ne bouche pas les trous de la fiscalité, s'il ne révise pas les conventions fiscales comme on le lui demande, s'il laisse filer des centaines de millions de dollars à l'étranger, comme l'a mentionné le vérificateur général dès 1992? Pourquoi le paie-t-on? Pourquoi est-il là?

La deuxième question que je me suis posé, c'est pourquoi n'agit-il pas? J'ai eu la réponse il y a à peine un an. On la connaissait déjà, mais puisqu'elle est venue de personnes autres que les députés du Bloc québécois, on en a profité et on a fait de la pédagogie avec cette réponse. Pourquoi le ministre des Finances n'agit-il pas face aux pays qui sont des paradis fiscaux face aux trous dont je viens de faire mention? C'est tout simplement parce que depuis 1981, depuis qu'il a fait l'acquisition de la Canada Steamship Lines, il a ouvert dix succursales, dix filiales de cette entreprise à l'étranger. Ces dix filiales se retrouvent aux Bermudes, au Liberia et à La Barbade. Ce sont trois régions considérées comme des paradis fiscaux idéaux.

 

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Avant 1981, avant que le ministre des Finances prenne possession de la Canada Steamship Lines, il n'y en avait pas de ces filiales. Il a organisé ses activités de transport maritime international—parce qu'on sait qu'il est impliqué dans les bateaux, c'est de notoriété publique—en ouvrant des filiales dans des paradis fiscaux, avec des taux de taxation préférentiels, avec un élastique en ce qui touche les politiques environnementales, par exemple. Dans certains de ces pays, on ne respecte pas grand-chose. Il y avait un élastique aussi dans les politiques de main-d'oeuvre. Là-bas, les droits du travail, ce n'est pas nécessairement ce qui pourrait les étrangler.

Le ministre des Finances même, impliqué dans le transport maritime, dans le transport par bateau, le capitaine, a lui-même des filiales de Canada Steamship Lines dans des pays considérés comme des paradis fiscaux. Est-ce qu'il est à la fois juge et partie dans ce dossier? On est en droit de se demander si c'est le cas. La population est aussi en droit de se demander pourquoi on laisse filer des centaines de millions comme cela, dans des pays considérés comme des paradis fiscaux. Pourquoi on laisse planer—et la vérité est là aussi—cela? Pourquoi on continue de maintenir des conventions fiscales avec des pays où les taux de taxation sont tellement ridicules qu'ils frôlent le zéro. Les impôts qui ne sont pas payés par les filiales d'entreprises canadiennes à l'étranger, nous, nous les payons. On paie probablement ceux de la Canada Steamship Lines aussi.

Il y a une injustice dans cela, il y a de l'iniquité. Il y a quelque chose qui m'agace, et qui agace beaucoup la population. De surcroît, le 10 décembre 1997, un projet de loi a été déposé ici, le projet de loi C-28. Je peux vous dire qu'on ne lâchera pas le morceau là-dessus. On a demandé la création d'un comité spécial d'enquête sur le projet de loi C-28.

Pour ceux et celles qui ne se rappellent pas ce que contenait le projet de loi C-28, c'est un petit peu un complément aux paradis fiscaux et aux conventions fiscales signées avec des pays considérés comme des paradis fiscaux.

Le projet de loi C-28 est un gros projet, très volumineux. Lorsqu'il a été déposé en première lecture, le 10 décembre, il est presque passé inaperçu. Par contre, en deuxième lecture, lorsque le débat a commencé, le 2 février 1998, le Bloc québécois a épluché ce projet de loi de plusieurs centaines de pages. On a épluché le projet de loi pour y trouver, vers la fin, un petit paragraphe, pas trop gros, trois petits paragraphes en fait de douze lignes sur plus de 400 pages de texte de loi, pour s'apercevoir qu'il y avait là une modification proposée à la fiscalité, à l'impôt payé par les holdings de compagnies de bateaux. Le ministre des Finances dispose d'un holding de compagnie de bateaux.

Qu'était l'objectif de cette modification? Cela faisait en sorte que les activités de transport maritime international effectuées dans des pays comme le Liberia, Les Bermudes, les Bahamas, etc., là où le ministre des Finances a ses bateaux, a ses compagnies, que les holdings de compagnies de bateaux ne soient pas tenus de payer de l'impôt à Revenu Canada. On ne prévoit aucune poursuite non plus pour cette compagnie, pour les autres non plus, dans le transport maritime international. Il y en a cinq comme cela au Canada, ce n'est pas beaucoup, dont celle du ministre des Finances. Il n'y a aucune possibilité de poursuites rétroactives par Revenu Canada pour impôt impayé par ces entreprises.

Lorsqu'on a mis le doigt là-dessus lors de la deuxième lecture, on nous a dit qu'on était «dans les patates», que ce n'était pas vrai, que c'était faux. Le ministre des Finances a déchiré sa chemise. Par exemple, quand il est sorti de la Chambre, pendant cinq minutes il a eu du mal à s'expliquer. Il bégayait. Ce n'est pas dans son habitude de bégayer. Vous l'avez vu au cours de la période des questions orales, il a tellement d'assurance, il est tellement sûr de lui, il nous envoie promener. Même si tous les indicateurs économiques sont à la baisse, même si tous les analystes parlent de fort ralentissement, même si de plus en plus d'analystes parlent de récession dans un an, pour lui, il n'y a pas de problème, ça va bien.

Depuis avant-hier, les citations qu'il a faites sur les analystes, sur le premier ministre du Québec aussi, M. Bouchard, pendant les périodes de questions orales, sont de vieilles citations qui datent de la rencontre de Saskatoon, il y a un mois. Ce sont de vieilles citations des analystes qui datent d'il y a un mois, lorsque le Bloc québécois a sonné l'alarme en disant: «Attention, la dégringolade du dollar, là, le premier ministre et le ministre des Finances n'ont pas raison de prendre cela à la légère, de jouer au golf et de continuer à dire qu'il n'y a pas de problème, qu'il n'y a pas d'effet pernicieux sur l'économie.»

 

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L'économie risque de ralentir. Les emplois risquent de décroître. Dès le début du mois d'août on disait cela et on nous riait en pleine face. Aujourd'hui, tous les indicateurs sont à la baisse. Trois mois consécutifs de ralentissement économique, de réduction du taux de croissance du PIB, et le ministre des Finances nous cite encore ce que les analystes avaient dit lorsqu'on avait sonné l'alarme.

La situation a évolué depuis ce temps. Les analystes se sont rangés du côté du Bloc québécois. Les analystes ont demandé qu'avec les surplus générés sur le dos de tout le monde, il utilise ces surplus pour, premièrement, réduire les impôts, deuxièmement, augmenter les transferts sociaux et, troisièmement, diminuer les cotisations d'assurance-emploi pour permettre aux entreprises et aux travailleurs d'avoir un répit. Mais non, tout va bien, dit le ministre avec beaucoup d'assurance, il n'y a pas de problème.

Mais le 2 février, lorsqu'on a mis à jour cette apparence de conflit d'intérêts—qui est encore là—le ministre des Finances est sorti de la Chambre et n'avait plus cette assurance. Il n'avait pas beaucoup d'explications à donner dû au fait qu'il parrainait un projet de loi qui donnait des avantages fiscaux et une protection contre tout recours de Revenu Canada quant au paiement des taxes et des impôts par ses filiales de transport maritime dans des pays considérés comme des paradis fiscaux. Il bégayait.

Il nous a référé à Len Farber—je m'en rappelle comme si c'était hier—son grand directeur de la fiscalité, mais je dirais aussi son directeur des basses oeuvres. C'est le même Len Farber qui nous disait qu'il n'y avait pas de problème avec les fiducies familiales dénoncées par le Bloc québécois et dénoncées à nouveau par le vérificateur général il y a deux ans et demi.

Rappelons-nous les deux fiducies familiales qui avaient traversé le Canada pour se retrouver aux États-Unis. Deux fiducies familiales, dont le montant total du capital qu'elles détenaient était évalué à deux milliards de dollars, qui étaient passés du Canada aux États-Unis sans qu'un cent d'impôt ne soit prélevé. Len Farber, grand fiscaliste et grand directeur des basses oeuvres du ministre des Finances, nous a dit qu'il n'y avait pas de problème, que tout s'était fait dans les règles de l'art de la fiscalité, même si on a décidé, le 23 décembre 1990, à minuit, qu'on laissait partir ces deux fiducies sans problème. À la fin du débat, M. Farber se sentait un peu plus petit parce que le ministre des Finances avait été obligé de déposer un projet de loi pour boucher les trous qui avaient permis ce transfert quasi illégal vers les États-Unis de deux fiducies de deux milliards.

Ce même Len Farber nous fut référé par le ministre des Finances pour venir nous expliquer qu'il n'y avait pas de problème avec le projet de loi C-28. Je l'ai rencontré personnellement, avec une autre personne, dans mon bureau au cinquième étage pour nous faire expliquer qu'il pourrait peut-être y avoir un problème un jour.

Un ministre dépose un projet de loi avec une implication pour une entreprise dans un secteur dans lequel il oeuvre au niveau international, et une personne qu'il a référée nous dit qu'il pourrait y avoir un problème, il y aurait peut-être une possibilité de conflit d'intérêts et qu'il faut faire attention. Pour nous, le doute s'installe et l'apparence de conflits d'intérêts est là aussi.

Le ministre nous a ensuite référé à son conseiller en éthique. Ce dernier a témoigné au Comité permanent des finances. Il a non seulement dit qu'il pourrait y avoir apparence de conflit d'intérêts, mais il l'a écrit. On a répété maintes fois qu'il fallait une enquête publique pour rendre service au ministre des Finances. Il fallait enlever toute apparence de conflit d'intérêts parce que maintenir une telle situation n'avait pas de bon sens. Le ministre a toujours dit qu'il n'y avait pas de problème, malgré tous les arguments contraires qui étaient mis sur la table.

Il n'est pas arrivé souvent que les quatre partis d'opposition se soient ligués ensemble. Pourtant, dans ce dossier, il y a eu une conférence de presse commune avec des représentants du Bloc québécois, du Parti réformiste, du Nouveau Parti démocratique et du Parti progressiste-conservateur pour demander cette enquête parce qu'il y avait apparence de conflit d'intérêts.

Non seulement il n'y a pas eu d'enquête mais, même en présentant des motions au Comité permanent des finances pour faire comparaître des témoins de façon à faire toute la lumière sur la portée des dispositions du projet de loi C-28 pour les compagnies de transport maritime du ministre des Finances, les libéraux ont tous voté pour défaire ces motions.

Le ministre et le gouvernement s'obstinent à ne pas voir de conflit d'intérêts ou d'apparence de conflit d'intérêts. Mais le ministre des Finances parraine un projet de loi qui touche le transport maritime international, et il est propriétaire, à 100 p. 100, d'une entreprise de transport maritime international qui oeuvre dans des paradis fiscaux.

 

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Comment voulez-vous qu'il y ait une modification dans la fiscalité? Comment voulez-vous qu'on ait une volonté, de l'autre côté de la Chambre, de réviser les conventions signées avec des pays qui ont des taux de taxation totalement différents des nôtres, des taux très bas, où il se fait des évasions fiscales?

Je pense qu'on a la réponse. Il n'y a pas de volonté. Peut-être qu'on est à la fois juge et partie de l'autre côté. On ne le saura pas tant et aussi longtemps—et il y a toujours un doute dans mon esprit—que l'on n'aura pas élucidé la question du projet de loi C-28, de l'implication et de l'apparence de conflit d'intérêts du ministre des Finances.

Comment voulez-vous qu'un ministre ait le goût de revoir la fiscalité? Cela fait cinq ans qu'on lui demande de réviser l'ensemble de la fiscalité par souci d'équité. Mais il savait qu'en révisant l'ensemble de la fiscalité, on réviserait l'ensemble de la fiscalité s'appliquant aux bateaux et l'ensemble de la fiscalité s'appliquant à nos relations avec les paradis fiscaux. Il était tiède pour réviser la fiscalité.

Lorsqu'on a vu cela, nous, du Bloc québécois, avons produit, dès novembre 1996, deux séries d'études totalisant environ 350 pages d'analyses et de recommandations, des analyses très sérieuses. Nous avons déposé ces analyses qui proposaient des voies de réforme de la fiscalité des particuliers avec un souci d'équité, de justice fiscale et avec le souci aussi d'alléger le fardeau fiscal des particuliers à revenu moyen qui ont écopé, chose qu'il ne faudrait pas oublier, de la grande partie des 20 milliards de dollars de nouveaux impôts imposés par le ministre des Finances depuis qu'il occupe ce poste, c'est-à-dire depuis 1994. Il s'agit de 20 milliards absorbés en grande partie par les particuliers à revenu moyen. Les autres 17 milliards de dollars d'augmentation des taxes et des impôts, ce sont les entreprises du Québec et du Canada qui les ont absorbés.

On avait proposé un document intitulé Fiscalité des particuliers: analyses critiques et recommandations. D'ailleurs, lorsque nous l'avons déposé, le ministre des Finances nous a louangés à la Chambre. Il a dit: «Je loue le travail sérieux de l'opposition quant à la fiscalité des particuliers et le ton avec lequel ils ont abordé ce problème. Je reconnais qu'il y a des problèmes. Je reconnais qu'il y a de bonnes solutions dans ce document.» Ensuite, il a pris le document et il l'a mis dans le fond de son pupitre. On a fait le ménage à la fin de l'été dans son pupitre et c'est passé à la filière 13. Il n'y a pas eu de proposition de réforme de la fiscalité venant de lui.

Ensuite, on a déposé un autre document, Dépenses fiscales corporatives au Canada, qui se voulait une analyse des grandes dépenses fiscales, des grandes échappatoires fiscales utilisées surtout par les grandes entreprises au Canada. Selon nos analyses, certaines étaient désuètes. Certaines étaient dépassées, mais elles coûtaient et elles coûtent encore des milliards de dollars par année au Trésor canadien, ce qui est comblé par les impôts et les taxes des particuliers du Québec et du Canada.

On a proposé d'abolir certaines dépenses fiscales, de prendre ces économies et de les transposer du côté des PME créatrices d'emplois avec justement un volet d'encouragement à la création d'emplois: des allégements fiscaux, par exemple, en ce qui a trait aux taxes sur la masse salariale, des allégements fiscaux pour les entreprises qui créent de l'emploi année après année.

Le ministre des Finances a dit: «Encore un exercice sérieux». Mon oeil, un exercice sérieux! On peut se passer de ses éloges. Ce qu'on veut, c'est de l'action au niveau de la réforme de la fiscalité. Mais l'action n'est jamais venue.

Le ministre des Finances était tellement coincé et il avait tellement honte de ne rien faire, qu'il a décidé de mettre en place le groupe Mintz, un groupe de travail présidé par l'honorable Mintz, un fiscaliste très compétent qui a produit un gros document. Cela devait lui prendre un an, mais finalement, les délais étaient toujours prolongés.

Certaines des recommandations sont correctes. Les autres sont à mettre à la poubelle immédiatement. Mais pour se donner bonne conscience, le ministre des Finances a demandé au groupe Mintz de produire une analyse de la réforme de la fiscalité. Mintz a déposé son rapport l'an dernier. Le ministre des Finances l'a probablement mis sur une tablette ou dans le pupitre. Il lui a réservé le même sort qu'à nos deux analyses sur la fiscalité des particuliers et la fiscalité des corporations.

Il n'y a pas de volonté politique de l'autre côté de la Chambre de réformer la fiscalité, pour les raisons que j'ai évoquées plus tôt. Je vois aller le ministre des Finances depuis cinq ans; s'il y a quelqu'un qui le suit comme son ombre, c'est bien moi.

 

. 1645 + -

Je vois qu'il s'est laissé aller. La conjoncture était bonne, il faisait du surf, il planait sur la croissance économique. Les revenus rentraient—les entreprises et les particuliers ont versé 37 milliards de dollars de taxes et d'impôts de plus dans les coffres fédéraux depuis quatre ans et demi—et il les encaissait. Il encaissait les surplus de la caisse de l'assurance-emploi, soit six milliards de dollars par année depuis trois ans et demi.

Il continue d'ailleurs à le faire, et il veut que ce soit légal. Il demandera au Conseil des ministres d'être complice du vol qualifié qu'il fait dans la caisse de l'assurance-emploi. Il a coupé l'aide aux pauvres, aux malades. Il a coupé dans tous les transferts fédéraux aux provinces, des milliards et des milliards de dollars et, en 2003, il aura coupé 42 milliards de dollars dans les transferts aux provinces pour financer l'aide sociale, l'éducation supérieure et la santé.

Il a empoché. Tout le monde s'est sacrifié: les malades, les plus démunis, les personnes du troisième âge, les étudiants, les moins fortunés, alors que lui encaissait. La machine à piastres, c'est sa machine. Les plus pauvres, les transferts pour la santé, il coupait à ce niveau et c'est cela sa saine gestion des finances publiques.

Il aurait pu faire des choses positives plutôt que de gérer la décroissance pour arriver exactement au même résultat. Il y a cinq ans, lorsqu'on le lui a demandé—et c'était d'ailleurs un élément de notre plate-forme électorale—il aurait pu réviser toute la fiscalité. Il aurait pu boucher les trous de la fiscalité au niveau des paradis fiscaux. Il aurait pu revoir les accords de réciprocité, c'est-à-dire les conventions fiscales avec les pays considérés comme des paradis fiscaux. Il aurait pu éviter de voter en faveur de lois pour favoriser le transport maritime international, secteur où il est présent. Il aurait pu faire un tas de choses positives en faveur de l'emploi, de l'équité, de la justice fiscale.

Mais non, le ministre des Finances s'est laissé aller à la conjoncture. L'argent rentrait, tout allait bien. Il avait l'air d'un bon gestionnaire, alors qu'il est un des plus piètres que nous ayons connus. Par le passé, la conjoncture n'était pas aussi favorable aux ministres des Finances. Par le passé, nous avions des ministres des Finances moins draconiens, moins sauvages que celui-là. Ils n'auraient pas osé aller enlever de l'argent aux personnes malades, aux chômeurs, aux personnes qui touchent des prestations d'aide sociale et aux étudiants les moins fortunés. Il y avait un respect à ce moment-là, que le ministre des Finances n'a plus pour personne.

Le projet de loi S-16 est un bon projet de loi en soi parce que les pays qui sont impliqués ont des taux de taxation comparables. Toutefois, cela nous a permis—et nous le ferons toutes les fois que nous aurons l'occasion de le faire—de dénoncer l'inertie et les mensonges de ce gouvernement ainsi que les mesures qui n'ont pas été prises mais qui auraient pu l'être pour améliorer le sort des citoyens et des citoyennes du Québec et du Canada. Ce sont des mesures qui peuvent encore être prises à l'heure actuelle parce qu'on pourrait utiliser à bon escient les surplus générés plutôt que de rembourser une partie de la dette, dans un environnement très incertain à l'heure actuelle.

Je rappelle qu'on n'est pas contre le remboursement de la dette. Quand on aura un environnement plus certain, nous serons les premiers à préconiser qu'une bonne partie des surplus serve à rembourser la dette. Mais, à l'heure actuelle, on a eu trois mois consécutifs de ralentissement économique. L'indice composé de Statistique Canada nous indique qu'il y a eu une croissance nulle au mois d'août, du jamais vu depuis deux ans. Il y a aussi les carnets de commandes qui diminuent auprès des entreprises et les emplois qui commencent à stagner dans le secteur commercial.

Il me semble que toutes ces données, conjuguées avec le fait que la Banque du Canada, de façon tout à fait débile, a augmenté, d'un coup, de 1 p. 100 les taux d'intérêt, le 27 août, créant un choc considérable dans l'économie qui était déjà affaiblie par trois mois consécutifs de décroissance, de baisse du taux de croissance du PIB, font en sorte qu'on a tous les ingrédients pour connaître un fort ralentissement dans les prochains mois. Il ne faudrait pas que les gens oublient qu'un fort ralentissement de l'économie veut dire moins de création d'emplois, des pertes d'emplois, des pertes de richesses et des pertes au niveau des rentrées fiscales du gouvernement. Cela veut dire, en bout de ligne, qu'on sera dans la dèche.

Le ministre des Finances a des surplus qui rentrent à l'heure actuelle, alors qu'il les utilise pour stimuler la croissance économique. Qu'il fasse au moins ce bon geste puisque, depuis cinq ans, il n'en a pas fait un qui vaille la peine. Qu'on lui donne un certain honneur, qu'il prenne donc au sérieux notre demande de budget spécial. Qu'il envisage donc d'utiliser des surplus pour stimuler la croissance économique intérieure en diminuant les impôts pour les individus à revenus moyens, qui ont payé beaucoup depuis quatre ans, en diminuant les taux de cotisation à la caisse de l'assurance-emploi pour donner un répit aux entreprises et aux travailleurs qui, eux, ont plus que payé leur part depuis les dernières années.

 

. 1650 + -

Qu'il se rende donc à l'unanimité des premiers ministres des provinces. Ces derniers lui demandent de réinvestir ce qu'il a piqué honteusement dans les transferts fédéraux aux provinces pour financer l'aide sociale, l'éducation supérieure et la santé. C'est tout ce qu'on lui demande.

Cela étant dit, le projet de loi S-16 aura notre aval.

[Traduction]

Le vice-président: Avant de donner la parole au député de Palliser, conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la question qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir: le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest—L'hépatite C.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux d'être de retour à la Chambre et je suis également heureux de prendre la parole après mon érudit collègue du Bloc. J'ai écouté son intervention et ses recommandations avec beaucoup d'intérêt et je conseille au ministre des Finances et à nos vis-à-vis d'y réfléchir sérieusement.

Je veux également m'associer avec la plupart des autres députés qui sont intervenus dans le débat sur le projet de loi S—16 et ont mentionné sa futilité relative devant les importants besoins financiers et autres dont nous devrions discuter à la Chambre des communes.

Sans doute comme beaucoup d'autres députés, j'ai tenu quelques assemblées pour savoir ce qui préoccupait les électeurs de Palliser avant de revenir au Parlement. Nous avons parlé de différents sujets.

Nous avons parlé de la faiblesse du dollar, de la crise en agriculture, de l'utilisation des excédents budgétaires du gouvernement fédéral, du fait que le Canada est pratiquement le seul pays de l'OCDE qui n'a pas de système de transport national, de la récente hausse des taux d'intérêt, du manque de fonds fédéraux dans l'assurance-maladie, de l'utilisation de l'excédent de la caisse d'assurance-emploi et du péage Tobin. Je peux vous affirmer que personne ne m'a parlé des traités fiscaux entre le Canada et la république socialiste du Viêtnam, la république de Croatie et la république du Chili.

Le projet de loi est bien anodin en comparaison des sujets dont les Canadiens voudraient nous entendre parler cet après-midi. Je sais que c'est au gouvernement qu'il incombe de proposer les projets de loi et je lui donnerai le bénéfice du doute en disant qu'il s'agit peut-être de questions administratives laissées en plan en juin dernier et qui doivent être réglées. Les membres de mon groupe parlementaire espèrent assurément que le gouvernement ne tardera pas à présenter des projets de loi plus substantiels.

Nous allons donner notre appui au projet de loi S-16. Vous appuyons cette mesure qui porte sur les conventions fiscales parce qu'elle évitera la double imposition et préviendra l'évasion fiscale. Les règles des conventions sur la fiscalité doivent être approuvées par voie législative pour qu'elles priment les lois nationales, et les conventions obéissent aux modèles proposés par l'OCDE pour les conventions relatives à la double imposition.

Le projet de loi est fort semblable à plusieurs conventions fiscales proposées au Parlement ces dernières années, notamment les projets de loi S-9 et C-10. Malheureusement, le S-9 est cette mesure inique adoptée au cours de la 35e législature et dont le gouvernement et le Parti réformiste ont été de fervents partisans et promoteurs. Ce projet de loi accorde des allégements fiscaux considérables aux Canadiens qui font des dons à des organismes de charité américains et à des universités américaines.

Il est vrai qu'il y a réciprocité, mais ce n'est pas très équitable, car nous avons 25 000 étudiants canadiens aux États-Unis contre seulement quelques milliers d'Américains qui viennent chez nous pour faire des études supérieures. C'est là un énorme avantage fiscal qui est consenti aux contribuables nantis. À cela s'ajoutaient des impôts fonciers aux États-Unis remontant jusqu'en 1987 et qui ont été payés non par les Américains, mais par le gouvernement canadien. C'était là un bref rappel des graves lacunes du projet de loi S-9. Le projet de loi S-16 a été étudié par le Comité des affaires étrangères du Sénat et il en a été fait rapport au Sénat sans proposition d'amendement.

Comme je l'ai déjà dit, les conventions fiscales en cause sont conclues entre le Canada et la République du Vietnam, la République de Croatie et la République du Chili. Actuellement, nous n'avons pas de traités fiscaux avec ces trois pays.

 

. 1655 + -

La raison pour laquelle le gouvernement estime que cette mesure législative est nécessaire, c'est que les dispositions des accords respectifs sont parfois différentes des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu et qu'il est impérieux que l'on perçoive tous les impôts qui sont dus. Ces accords auront préséance sur la Loi de l'impôt sur le revenu.

De plus, les conventions fiscales sont nécessaires pour éviter la double imposition et empêcher l'évasion fiscale. Ils apportent aussi une certitude fiscale aux particuliers et aux sociétés qui font des affaires à l'étranger, de même qu'aux étrangers qui font des affaires au Canada, et à ceux qui reçoivent des revenus du Canada mais vivent à l'étranger.

Les prestations de pension des pays respectifs sont traitées de la façon suivante: le Viêtnam et la Croatie retiennent un montant limité à 15 p. 100, tandis que le Chili laisse l'imposition au pays qui verse la pension.

Les paiements de sécurité sociale en vertu des dispositions des conventions fiscales ne sont imposables que dans le pays qui les verse et cela en vertu de la loi de ce pays.

Pour éviter la double imposition, chacune des conventions contient des règles particulières qui, dans le cas du Canada, mentionnent une exemption pour certains dividendes reçus de filiales étrangères et dans d'autres cas un crédit. Une exception est la convention avec le Viêtnam, qui contient une disposition dite d'exemption fiscale qui fait que les pays plus développés n'imposent pas certains incitatifs prévus par les lois des pays moins développés. Ce sera apparemment une disposition de durée limitée.

Ces conventions prévoient l'échange de renseignements fiscaux entre les services du revenu des pays respectifs, pour les aider à combattre la fraude et l'évasion fiscales. Le problème, c'est que les conventions prévoient l'échange de renseignements, mais ne disent pas qu'il doit se faire. Par exemple, les particuliers et les entreprises qui prennent des libertés avec le régime fiscal courent le risque que les autorités fiscales en soient informées, mais ce n'est pas sûr.

Même si nous appuyons les initiatives visant à créer de meilleurs contrôles sur les questions concernant les renseignements fiscaux entre ces pays, nous encourageons le gouvernement à aller plus loin et à s'intéresser à tous les investissements qui ne sont pas déclarés, ainsi qu'au niveau d'évasion fiscale qui en résulte.

Je voudrais profiter du fait que j'ai la parole pour mentionner la taxe Tobin sur les transactions en devises qui pourrait être utilisée dans ce domaine. En effet, il s'agit de secteurs de l'économie internationale qui exigent une surveillance et un contrôle actifs. Nous en sommes convaincus. Le commerce international et les investissements ont plus de chance de croître dans le cadre d'un soigneux processus de prévision et de planification à long terme. L'incertitude causée par la turbulence actuelle sur les marchés financiers et les répercussions qu'elle entraîne sur les taux d'intérêt nationaux et la valeur des monnaies sont trop coûteuses. Le défi le plus important que nous avons à relever est de régulariser les marchés financiers pour ralentir le rythme et réduire quelque peu leurs pouvoirs.

On a beaucoup parlé de la taxe Tobin. Je prendrai quelques minutes pour faire quelques commentaires à ce sujet. La taxe Tobin porte le nom de James Tobin, un économiste ayant remporté un prix Nobel, qui a été le premier à proposer d'imposer une taxe sur les transactions de change, laquelle serait appliquée de façon uniforme par tous les grands pays. Je crois qu'il proposait de prélever un montant assez minime, moins de 0,5 p. 100, sur toutes les transactions de change afin d'empêcher la spéculation sur la fluctuation des monnaies.

Le taux proposé était suffisamment faible pour ne pas avoir d'effet important sur les investissements à long terme, dont le rendement est supérieur, tout en permettant de réduire les gains des spéculateurs déplaçant des sommes d'argent faramineuses d'un bout à l'autre de la planète en cherchant à tirer profit des moindres variations des cours.

Nous pourrions nous demander pourquoi l'appui à l'égard de cette taxe va croissant. L'intérêt a beaucoup augmenté à la lumière de l'accroissement rapide des transactions de change et de la déréglementation financière au cours des dix dernières années. Nous croyons que, à l'heure actuelle, environ 1,5 billion de dollars américains changent de mains tous les jours sur les marchés non contrôlés et moins de 5 p. 100 de ces activités ont trait au commerce de biens et de services. Les 95 p. 100 qui restent représentent des activités spéculatives alors que les spéculateurs tirent profit des fluctuations des taux de change et des différentiels de taux d'intérêt à l'échelle internationale.

 

. 1700 + -

Comme on l'a vu cet été dans notre propre pays, ce genre de spéculation financière bouleverse complètement les budgets nationaux, la planification économique et la répartition des ressources.

Les gouvernements et les citoyens sont de plus en plus frustrés par les mouvements fantaisistes, souvent irrationnels, sur les marchés financiers mondiaux, qui ont une telle influence sur les économies nationales et ils cherchent des moyens de contrer cette spéculation improductive et préjudiciable.

Un impôt uniforme sur les opérations de change découragerait la spéculation en imposant une petite taxe sur ces opérations. Cela réduirait la volatilité des fluctuations du taux de change et assurerait aux exportateurs, aux importateurs et aux investisseurs à long terme un taux de change plus stable moyennant le paiement d'une taxe.

La taxe donnerait aux gouvernements plus d'autonomie pour ce qui est d'arrêter les politiques budgétaire et monétaire nationales en rendant possible des écarts plus importants entre les taux d'intérêt à court terme sur les différentes devises. Une telle taxe renforcerait la capacité qu'ont les banques centrales d'intervenir pour modifier les tendances sur les marchés de change. Si l'on réduisait le volume global des opérations de change, les banques centrales n'auraient pas besoin de moyens financiers aussi importants pour intervenir sur le marché.

Cette taxe générerait des recettes, des sommes fort importantes selon toutes les estimations. Les hypothèses varient quant au taux réel de la taxe, à la réduction du nombre de transactions, au montant des transactions échappant à la taxe et quant aux transactions qui devraient être exonérées; cependant, à titre d'exemple, en supposant un taux prudent de 0,2 p. 100 et des transactions d'une valeur de 75 billions de dollars américains, la taxe générerait environ 150 milliards de dollars par an de recettes. Étant donné l'affaiblissement des engagements à l'égard de l'aide bilatérale au développement dans le monde, cette taxe produirait d'importantes ressources pour le soutien au développement humain durable.

L'introduction d'une telle taxe pose deux problèmes politiques essentiels. Premièrement, les grands pays devraient s'entendre pour appliquer une taxe uniforme. Deuxièmement, il faudrait s'entendre sur la perception et la répartition des recettes fiscales.

Les pays en développement ont toujours été plus vulnérables à la volatilité des taux de change, mais, pour la première fois, on note une convergence d'intérêt entre les pays industrialisés et les pays en développement qui veulent tous une plus grande autonomie gouvernementale et une intervention plus efficace des banques centrales.

Les gouvernements nationaux, dont le nôtre, et les institutions internationales sont de plus en plus pressés d'appuyer une taxe Tobin par des coalitions d'organisations non gouvernementales représentant les syndicats, les Églises, l'environnement, les femmes, les jeunes, les personnes âgées et les groupes de défense des pauvres qui cherchent à rétablir un certain contrôle démocratique de leurs économies nationales.

Peut-être plus significatif encore est le fait que beaucoup de gouvernements accusent un important déficit, affrontent un électorat fermement opposé aux impôts et cherchent de nouvelles sources de recettes fiscales qui ne soient pas politiquement suicidaires. Une telle taxe minimale ne frappera pas l'ensemble de la population dans ce cas, mais Bay Street et Wall Street.

La perspective d'une nouvelle source de revenus sera probablement la principale motivation derrière un accord sur la mise en oeuvre de la taxe.

La perception et la répartition des recettes fiscales posent un problème beaucoup plus délicat. Il faudrait que le taux soit le même sur tous les marchés. Il faudrait aussi s'entendre sur les transactions qui seraient assujetties à la taxe. L'observation dépendrait des banques et des institutions du marché. Il serait certes possible de dépister l'activité puisque le secteur financier dispose de la technologie raffinée que cela exige, mais l'exécution relèverait des grandes puissances économiques et des institutions financières internationales.

Il y aurait certes une forte résistance de la part des membres des secteurs financiers, dont certains ont déjà commencé à dénigrer cette proposition. Ce n'est pas étonnant. Il se peut que des membres de la communauté financière appuient la taxe; toutefois, le nombre de transactions sur les marchés et la vitesse à laquelle elles se produisent rendent les affaires plus risquées. En effet, la spéculation peut autant rapporter de grands profits que causer de grandes pertes, tel le fiasco de la Barings Bank, il y a deux ans.

Des gens d'affaires expérimentés reconnaîtront peut-être la valeur du risque plus limité associé aux marchés plus stables et proposeront, sinon la proposition Tobin, du moins d'autres stratégies pour limiter la volatilité du système monétaire international actuel.

Ce que nous appuyons et recommandons, c'est une taxe qui permettra de freiner la spéculation au niveau du marché des changes et qui, en tant que proposition innovatrice et juste, contribuera à rétablir le contrôle démocratique sur nos économies nationales et à générer des recettes substantielles pour la construction d'un avenir durable.

Les gouvernements du monde entier, l'ONU, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale devraient tous prendre les mesures qui s'imposent pour percevoir une taxe qui permette de freiner au plus tôt la spéculation au niveau du marché des devises.

 

. 1705 + -

Enfin, la taxe devrait être administrée par une structure démocratique responsable comme on en trouve aux Nations Unies et son produit devrait être affecté à du véritable développement social.

Je termine là-dessus en signalant que notre caucus appuie entièrement le projet de loi S-16.

[Français]

M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui sur le projet de loi S-16, adopté par le Sénat le 2 juin 1998.

Ce projet de loi veut mettre en oeuvre des accords entre le Canada et les deux pays suivants: la République socialiste du Vietnam et la Croatie, ainsi qu'une convention conclue entre le Canada et la République du Chili, pour éviter les doubles impositions et prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu.

Comme l'a mentionné mon collègue du Bloc québécois dans son exposé, notre parti ne s'opposera pas aux conventions fiscales signées entre le Canada et les trois pays que je viens de nommer, dans la mesure où ces traités visent à assurer un traitement fiscal juste et équitable aux personnes, ainsi qu'à encourager le commerce et les investissements entre les pays. Je précise que le terme «personnes» comprend les personnes physiques, les sociétés, les fiducies et tout autre groupement de personnes.

Étant donné que les pays concernés dans ce projet de loi ont un taux de taxation quasi similaire à celui du Canada, je ne me prononcerai donc pas contre ce projet de loi. Mais je veux profiter du temps qui m'est imparti pour parler, dans un même contexte, des conventions fiscales en vigueur entre le Canada et certains autres pays.

Si les conventions fiscales évitent d'imposer deux fois les revenus à des personnes, elles sont, dans certains et nombreux cas, sources de problèmes et sources d'évasions fiscales. Il faut donc être prudent et s'assurer que ces traités n'ouvrent pas la porte à l'évasion fiscale abusive. Pour cela, il faut limiter les conventions fiscales aux pays dont les taux de taxation sont comparables à ceux du Canada.

Si les conventions fiscales évitent d'imposer deux fois les revenus à des personnes, elles sont, dans certains cas, sources problèmes et favorisent d'importantes évasions. En effet, si les traités les plus récents qui s'inspirent du modèle élaboré par l'OCDE sont relativement standards, par contre, le Canada a des conventions fiscales plus anciennes avec des pays qui sont qualifiés de paradis fiscaux en raison des taux d'imposition faibles, voire nuls, sur le revenu des personnes et des entreprises.

À ce sujet, rappelons que depuis 1992, le vérificateur général du Canada a soulevé le sujet à plusieurs reprises. J'aimerais ici citer ce qu'il écrivait dans son rapport de 1992:

    Une filiale des Antilles néerlandaises d'une compagnie canadienne avait un actif de 865 millions et un revenu de 92 millions non assujettis aux règles du revenu étranger.

    Bien que le revenu de la filiale étrangère n'ait pas été imposé à un taux semblable au taux canadien, il peut être transféré à la société mère canadienne en tant que dividende exonéré.

Le vérificateur continue:

    Le revenu étranger n'est pas assujetti à l'impôt quand il entre au Canada mais donne droit au crédit d'impôt fédéral sur les dividendes versés aux actionnaires canadiens.

 

. 1710 + -

Il conclut ainsi:

    La société mère canadienne a engagé des frais de financement pour son investissement dans sa filiale et, ainsi, a pu déclarer au Canada une perte fiscale de 29 millions de dollars.

Quelle honte! Je pourrais rappeler ici d'autres cas semblables au gouvernement, mais ce serait parler dans l'oreille d'un sourd.

Il y a un autre danger dans certaines conventions fiscales: celui de pouvoir changer les règles d'imposition en faveur d'amis du pouvoir et/ou de gens au pouvoir eux-mêmes. Ici, je fais allusion au projet de loi C-28. Rappelons-nous que le ministre des Finances est à la fois juge et partie dans ce projet de loi qui, s'il est sanctionné, rapportera des millions de dollars à sa compagnie, la Canada Steamship Lines.

Une ruse scandaleuse qui a été découverte par mon collègue de Saint-Hyacinthe—Bagot. Rappelons-nous que tous les partis d'opposition ont appuyé le Bloc dans ce dossier dit «les petits bateaux de la CSL».

Le ministre des Finances devrait défendre les intérêts des contribuables canadiens comme il défend très bien ses propres intérêts.

Les conventions fiscales ainsi que la manipulation des lois coûtent des milliards de dollars à nos contribuables et ce sont ces milliards de dollars de revenus qui s'envolent au détriment de la population.

On devrait s'attendre plutôt à ce qu'un gouvernement sérieux et responsable consacre des ressources importantes à l'évaluation, à l'ajustement et à la renégociation des conventions fiscales qui posent problème, surtout celles avec les pays qui représentent les plus grands risques de pertes fiscales pour le Canada.

Pourtant, devinez combien de fonctionnaires travaillent sur les conventions fiscales au ministère des Finances? S'agit-il de 100, 25, 12? Non. En fait, il n'y en a qu'un seul. Un seul fonctionnaire s'occupe des traités fiscaux au ministère des Finances, mais par chance, il travaille à temps plein.

Je me mets pas en doute la compétence et le sérieux de ce fonctionnaire. On déplore qu'il soit le seul au Canada à gérer une soixantaine de conventions ainsi qu'à travailler sur une trentaine d'autres à venir, alors que des centaines de millions, voire des milliards de dollars, sont en jeu.

Il est donc question ici d'un gouvernement qui ferme les yeux et se bouche les oreilles devant des fuites potentielles de centaines de millions de dollars d'impôts impayés.

C'est très grave, puisque c'est l'intégrité de tout le système fiscal qui est en cause, de même que la réputation du Canada qui est perçue comme une passoire avec de très grands trous. C'est inquiétant.

Avec les milliards de dollars que le ministre des Finances a coupés dans les transferts aux provinces pour les hôpitaux, les écoles et l'aide sociale, les citoyens honnêtes qui paient leurs impôts à Ottawa demandent et exigent du gouvernement qu'au moins tout le monde paie sa juste part d'impôt.

Les conventions fiscales ont aussi le mérite, dans certains cas, de s'appliquer aux artistes canadiens et québécois qui se produisent partout à l'étranger et même à nos sportifs, comme les joueurs de hockey ou les athlètes, qui gagnent leur vie à l'étranger.

Par contre, on sait que les conventions fiscales ne datent pas d'aujourd'hui. Elles ont toujours existé et vont toujours demeurer, voire s'intensifier, avec la mondialisation.

Les conventions fiscales établissent ce qu'on appelle une réciprocité du traitement fiscal, dans la mesure où les taux d'imposition des sociétés canadiennes et ceux des autres pays avec qui le Canada a signé ces conventions sont équivalents ou à peu près comparables.

 

. 1715 + -

En terminant, je répète que le Bloc québécois est favorable aux traités fiscaux signés entre le Canada et les autres pays, lorsque ces traités visent à assurer un traitement fiscal juste et équitable des résidants et des non-résidants, et ainsi encourager le commerce et les investissements entre les pays.

Mais attention, il ne faut pas que ces traités ouvrent la porte à l'évasion fiscale abusive.

[Traduction]

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, ce projet de loi permet au Canada de ratifier des conventions fiscales avec le Viêtnam, la Croatie et le Chili. Il s'inscrit dans un processus très important qui est conforme à notre position de pays en quête de débouchés dans une économie mondiale. De plus, il répond aux défis auxquels nous sommes confrontés dans un monde où la mondialisation de l'économie et les forces du commerce international menacent l'intégrité des frontières nationales sur le plan économique.

À bien des égards, il est extrêmement important que nous nous empressions de ratifier ce genre de conventions fiscales afin d'empêcher des entreprises, surtout à l'échelle internationale, de ne pas payer leurs impôts comme il se doit. Et du même souffle, on élimine la double imposition. Compte tenu du fait que la nation en tant qu'État est de plus en plus gênée dans l'exercice de sa capacité d'imposition, ce genre de convention revêt une très grande importance.

En ce qui concerne les enjeux commerciaux, bien des députés présents à la Chambre aujourd'hui se rappelleront qu'en 1988 notre parti, le Parti progressiste conservateur, et le gouvernement de Brian Mulroney ont été le fer de lance de l'initiative en faveur du libre-échange au Canada et qu'ils ont consulté ouvertement la population canadienne en tenant des élections générales. Nous avons engagé un dialogue on ne peut plus franc avec le public. Les progressistes conservateurs sont sortis victorieux et le Canada aussi, car cela a permis depuis lors d'entretenir des relations commerciales ouvertes aux quatre coins du monde.

Nous ne saurions, avec un pays de moins de 30 millions d'habitants, prospérer, intensifier notre croissance économique et créer encore plus d'emplois si nous ne sommes pas disposés à saisir les possibilités qu'offre un marché mondial sans entraves. Je suis fier de pouvoir dire que c'est notre parti qui a mis le Canada sur la bonne route. Nous appuyons donc le projet de loi S-16.

Je voudrais aussi revenir brièvement sur le fait que ce projet de loi a été présenté à l'autre endroit. Je sais qu'il y a eu passablement d'échanges sur le fait qu'on présente à l'autre endroit des mesures comme le S-16.

Je tiens pour ma part à féliciter l'autre endroit et à souligner qu'on y trouve un énorme réservoir de talents, surtout lorsqu'il s'agit d'étudier des mesure à caractère extrêmement technique comme une projet de loi sur des conventions fiscales. À dire vrai, ce serait faire affront au contribuable canadien que de ne pas mettre à profit l'autre chambre en lui confiant le travail très important qu'elle est capable d'accomplir. Le Sénat a un important bagage de talents et de compétences que nous aurions grand tort de ne pas exploiter.

Le Canada est un pays commerçant. L'an dernier, nos exportations ont totalisé quelque 344 milliards de dollars et nos importations 329 milliards. La majeure partie de nos échanges se fait avec les États-Unis. Bien entendu, il est très important de continuer à chercher à améliorer nos relations commerciales avec notre partenaire le plus important, les États-Unis. Cela dit, il est de la plus haute importance également que nous poursuivions notre travail pour renforcer nos relations avec d'autres pays, comme le Viêtnam, la Croatie et le Chili.

 

. 1720 + -

Il est intéressant qu'il y ait maintenant, à cause des barrières interprovinciales au sein même du Canada, plus de barrières tarifaires entre Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse qu'il n'y en a entre la Nouvelle-Écosse et le Chili. Cela témoigne du vice fondamental de toute la politique des barrières commerciales interprovinciales qui, encore une fois, privent les Canadiens de la possibilité d'acquérir un avantage comparatif ici même dans leur pays, mais ça, c'est une autre histoire.

La question du commerce a été fort importante dernièrement, notamment à cause de la tourmente qui a secoué le marché mondial des devises tout récemment. Il a été bien commode pour le gouvernement de blâmer la baisse des prix des matières premières et la crise asiatique pour la faiblesse du dollar canadien, mais les causes sont bien plus profondes que cela.

Nous devons reconnaître que la valeur du dollar canadien est en baisse depuis 30 ans et que des changements structuraux sont nécessaires au Canada. Ces changements concernent des questions liées à la productivité comme, notamment, les barrières commerciales interprovinciales, le fait que nos impôts sur le revenu soient les plus élevés parmi tous les pays du G7, le fait que nous ayons un fardeau réglementaire qui dépasse celui de bon nombre de nos principaux partenaires commerciaux.

Ces questions-là seront de plus en plus évidentes dans l'avenir. Quand nous conclurons des traités fiscaux à l'avenir, il faudra reconnaître que nos taux d'imposition ne doivent pas dépasser ceux de nos partenaires. Nous menottons les producteurs, les entrepreneurs et les particuliers au Canada. Nous les empêchons de produire, d'exploiter au maximum leurs possibilités et de soutenir la concurrence internationale, et c'est inacceptable.

En 1988, le gouvernement progressiste conservateur a permis aux Canadiens de se lancer à la conquête des marchés mondiaux. Cette courageuse politique a été suivie de changements structuraux dans l'économie canadienne qui comprenaient la suppression de la taxe sur les ventes des fabricants et la déréglementation des secteurs des transports et des services financiers. C'étaient des changements structuraux nécessaires à ce moment-là et qui ont été couronnés de succès. Je demande au gouvernement de poursuivre ces changements structuraux, d'imiter le gouvernement précédent en prenant de courageuses initiatives de changement et de continuer sur la voie que les Canadiens doivent suivre.

Il ne suffit pas d'ouvrir les marchés mondiaux aux Canadiens. Il nous faut veiller à ce que nos politiques économiques intérieures assurent le développement du genre d'économie produisant l'expertise et l'excellence entrepreneuriales requises non seulement pour soutenir la concurrence, mais pour réussir dans un environnement mondial. Nous devons prendre des mesures pour rendre plus juste l'impôt des entreprises et l'impôt des particuliers au Canada et pour abaisser nos taux d'imposition.

Le rapport Mintz, sur l'impôt sur les sociétés, a été présenté il y a quelques mois. Il s'agit d'un document extrêmement bien rédigé. Il porte sur la question complexe de l'impôt des sociétés dans une optique globale et rationnelle. J'espère que le gouvernement accordera à ce rapport toute l'attention qu'il mérite et finira par simplifier le régime fiscal et abaisser les taux d'imposition.

Les Canadiens ne peuvent pas soutenir la concurrence avec succès s'ils ont les mains liés par des taux d'imposition élevés, un abus de règlements, des barrières commerciales interprovinciales et des politiques économiques interventionnistes, ce qui n'est ni réaliste ni soutenable dans le contexte mondial moderne. Nous devons continuer de faire en sorte que les Canadiens et les sociétés étrangères qui s'implantent au Canada paient tous leurs impôts. Nous devons rendre ces impôts plus justes et simplifier le régime fiscal pour éviter aux Canadiens et aux entreprises de devoir embaucher des comptables uniquement pour traiter avec leur propre gouvernement.

 

. 1725 + -

Notre parti demeurera partisan d'un accès accru aux marchés mondiaux. Je reconnais que les députés du gouvernement libéral sont de nouveaux convertis au libre-échange. Beaucoup de nos vis-à-vis ont lutté avec férocité contre l'accord de libre-échange en 1988. Cependant, je les félicite d'avoir bien assimilé les leçons que nous leur avons enseignées et d'avoir beaucoup progressé sur la voie des politiques économiques sensées.

Je les invite à continuer à faire ce qu'ils font si bien depuis quelques années pour aborder le XXIe siècle avec les politiques économiques réalistes et nécessaires que, selon certains, seul le Parti conservateur pouvait mettre en oeuvre.

Voilà pourquoi il est important d'élire périodiquement un gouvernement conservateur, afin que ce genre de mesure soit présentée, même si elle n'est adoptée que par le gouvernement suivant. La seule chose pire qui aurait pu se produire, c'est que les libéraux n'adoptent pas nos politiques de manière aussi flagrante et éhontée et qu'ils y substituent des politiques de leur cru. En réalité, le gouvernement libéral d'en face a été un gouvernement aux idées valables et originales, mais malheureusement, ses idées originales sont rarement valables, et ses idées valables sont rarement originales.

Il est encourageant de constater les progrès que le gouvernement a accomplis, même au chapitre de la réduction du déficit. C'est un problème auquel nous nous étions attaqués très clairement en réduisant le déficit de moitié, à titre de pourcentage du PIB, pendant la période où notre parti a été au pouvoir et en ramenant la croissance des dépenses de programmes de 15 à 0 p. 100.

Voilà le genre de courage dont a fait preuve le dernier gouvernement conservateur avant que la responsabilité financière devienne une idée en vogue. En 1979, Joe Clark a présenté un budget qui a été rejeté parce qu'il témoignait d'une trop grande responsabilité financière pour l'époque. De nos jours, même les néo-démocrates parlent de responsabilité financière. C'est devenu une expression à la mode.

Quoi qu'il en soit, nous n'avons aucune réserve par rapport au projet de loi S-16 et nous allons aujourd'hui l'appuyer. Nous espérons seulement que nous continuerons de voir, à l'avenir, non seulement des projets de loi pour la mise en oeuvre de conventions fiscales, mais aussi des changements structurels à l'économie canadienne qui permettront aux Canadiens d'être concurrentiels à l'étranger et de non seulement soutenir la concurrence, mais aussi de réussir et d'être prospères à l'aube du XXIe siècle.

M. Bob Kilger: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Il y a eu des discussions avec tous les partis; aussi, avec la coopération de tous, le député d'Esquimalt—Juan de Fuca pourrait être le dernier intervenant à parler du projet de loi et il terminerait ses observations au plus tard à 17 h 35. Si cela semble acceptable à tous les députés, nous passerions ensuite au débat et nous demanderions que la question soit alors mise aux voix.

Le vice-président: Comprenons-nous bien. Je présume que le vote porterait sur la motion, et il est entendu qu'il n'y aurait pas de questions ni d'observations à la fin de l'intervention du député d'Esquimalt—Juan de Fuca.

Les députés sont-ils d'accord pour suivre la ligne de conduite proposée par le whip en chef du gouvernement?

Des voix: D'accord.

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans le débat du projet de loi S-16, visant à mettre en oeuvre un accord en matière de double imposition avec le Viêtnam, la Croatie et le Chili. C'est une mesure très importante.

La double imposition a souvent été perçue comme un véritable handicap pour notre secteur privé. La suppression de la double imposition permet également aux pays en voie de développement en particulier de se forger une économie plus solide pour l'avenir. Cela permet également aux entreprises établies à l'étranger de fonctionner efficacement.

L'élimination de la double imposition a finalement pour effet de réduire réellement les niveaux d'imposition pour le secteur privé de sorte qu'il puisse s'implanter efficacement dans d'autres pays. Nous devrions tâcher de veiller à ce que l'imposition se pratique dans un pays seulement plutôt que dans deux.

 

. 1730 + -

Dans le cas de l'Afrique du Sud, l'élimination de la double imposition il y a quelques années a été très bénéfique et a contribué à stimuler de façon très réelle les investissements dans de pays. Tout cela se résume à un moyen de stimuler le développement dans les pays en voie de développement, et cela vient également en aide aux plus démunis dans ces pays.

Le gouvernement doit par ailleurs s'attaquer à la fiscalité ici même. Comme nous le savons, les taux d'imposition au Canada constituent peut-être le plus grand obstacle à la compétitivité de notre secteur privé. Quand on compare notre situation à celle qui existe aux États-Unis, on constate que le revenu net des couples avec deux revenus y est de 44 p. 100 supérieur à celui d'un couple équivalent au Canada.

Les entreprises ont à supporter un taux d'imposition qui est plus élevé d'au moins 13 p. 100 au Canada. Cela handicape notre secteur privé dans ses efforts pour soutenir la concurrence du secteur privé de nos voisins du Sud et a pour résultat de contribuer à l'exode des cerveaux et d'empêcher notre secteur privé d'être aussi dynamique qu'il pourrait l'être.

J'inviterais le gouvernement à examiner l'énorme fatras de règlements qui handicapent notre secteur privé. Nous continuons d'ajouter règlement par-dessus règlement sans prendre le temps d'examiner si ces règlements sont bien nécessaires. Ce serait merveilleux si le comité des finances créait un sous-comité et mettait à contribution le secteur privé et son expérience pour examiner les règlements existant déjà dans les recueils pour en éliminer ceux qui sont inutiles. Cela améliorerait grandement la souplesse et l'efficacité du secteur privé. ainsi, le secteur privé pourrait engager plus de personnel et être de plus en plus compétitif dans l'économie mondiale.

Nous devons nous attarder davantage sur la recherche et le développement. La recherche et le développement constituent la pierre angulaire et le fondement de notre économie. Pour le moment, nous sommes au fond du baril par rapport à l'ensemble des pays de l'OCDE.

L'éducation a besoin d'améliorations. Nous devons chercher dynamiquement le moyen d'assurer une meilleure correspondance entre l'éducation et les besoins de notre économie, dans les années à venir. Je demande au gouvernement de collaborer avec ses homologues provinciaux à mettre sur pied un groupe d'analystes chargé de s'assurer que nos institutions postsecondaires et nos étudiants puissent mieux comprendre les besoins de l'avenir et acquérir les compétences voulues.

On pourrait aussi s'inspirer de l'expérience européenne en fait de stages d'apprentissage, pour les compétences qui ne s'acquièrent pas à l'université, afin que les jeunes aient les compétences techniques dont nous aurons besoin. Nul besoin d'aller à l'université dans ce cas. On a actuellement désespérément besoin de compétences techniques, dans notre pays, et nous en aurons encore besoin dans le futur. Le gouvernement peut certainement jouer un rôle de chef de file auprès des gouvernements provinciaux pour créer les institutions qui pourraient donner aux jeunes qui sortent de l'école les compétences techniques voulues.

Ce projet de loi nous vient du Sénat. Notre parti a beaucoup parlé du Sénat et de son désir de démocratiser cette institution, désir que partagent beaucoup de députés à la Chambre. Dernièrement, le premier ministre a nommé de nouveaux sénateurs. Si le propre de la démocratie consiste en la possibilité pour le peuple d'élire ses représentants, le Sénat échoue à cet égard.

Il y a bien des gens de valeur au Sénat, mais il y en a aussi quelques-uns qui n'en font pas autant qu'ils devraient. Ce serait avantageux pour tous les sénateurs, et surtout pour les bons sénateurs, que le Sénat soit une assemblée élue. Si nous avions des sénateurs élus d'un bout à l'autre du pays, les meilleurs et les plus brillants pourraient se présenter à ces postes. Les Canadiens pourraient alors décider de ce qu'ils veulent. Notre Sénat n'en serait que plus fort. Il constituerait alors une vraie Chambre de seconde réflexion et les sénateurs pourraient collaborer avec les députés pour donner les meilleures lois aux Canadiens.

En terminant, avec l'appui du député de Surrey-Nord, je propose l'amendement qui suit:

    Qu'on modifie la motion en supprimant tous les mots après le mot «Que» pour les remplacer par ce qui suit:

      «la Chambre décline de lire pour la deuxième fois le projet de loi S-16, Loi mettant en oeuvre un accord conclu entre le Canada et la République socialiste du Viêtnam, un accord conclu entre le Canada et la République de Croatie et une convention conclue entre le Canada et la République du Chili, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, puisque le principe du projet de loi proposé par le Sénat non élu ne traite pas la question du refus du premier ministre de respecter les droits démocratiques des Albertains quand il a nommé un ancien député conservateur au Sénat.»

 

. 1735 + -

Le vice-président: Je donnerais bien des points au député d'Esquimalt—Juan de Fuca et à ses collègues pour leur ténacité, mais je crains que cette motion soit visée par les deux décisions que j'ai déjà rendues aujourd'hui sur sa recevabilité. Au cas où le député n'aurait pas entendu ces décisions, je le renvoie au commentaire 568 de Beauchesne, qui est le suivant:

    Une règle absolue prescrit que tout amendement doit se rapporter à la proposition visée.

Je crains que l'amendement proposé par le député ne porte pas sur le fond du projet de loi. Il n'a rien à voir avec la fiscalité. Il semble plutôt se rapporter à la provenance du projet de loi qui, selon l'avis de la présidence, n'a aucune pertinence aux termes de la prescription du commentaire de Beauchesne. Par conséquent, je déclare l'amendement irrecevable.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 1er mai, de la motion: Que le projet de loi C-251, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (peines consécutives), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le vice-président: Étant donné l'intérêt manifesté par les députés qui veulent commenter le projet de loi, la présidence aimerait, avant d'annoncer la reprise du débat, signaler à la Chambre l'ordre dans lequel elle a l'intention de donner la parole aux députés en vue du débat d'aujourd'hui. Cela ne lésera en rien ceux qui s'inscriront plus tard. Si cette liste pose des problèmes et que les députés veulent la modifier, la présidence est prête à en discuter avec eux.

J'ai l'intention de donner la parole à la députée de Whitby—Ajax, au député de Berthier—Montcalm, à la députée de Lambton—Kent—Middlesex, au député de Surrey-Nord, au député de Pickering—Ajax—Uxbridge, au député de West Nova, et au secrétaire parlementaire du solliciteur général, dans cet ordre.

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que j'offre mon appui à ma collègue de Mississauga-Est.

C'est la troisième fois que ma collègue saisit la Chambre du système actuel des peines concurrentes dans le cas des prédateurs en série. Elle mérite qu'on la félicite pour sa persévérance et son dévouement à cette cause. Le moment est venu pour nous de régler cette question sans plus tarder.

Ma collègue a réussi grâce aux 166 députés de tous les partis qui ont signé son projet de loi de façon à ce qu'il puisse faire l'objet d'un vote. Ils méritent qu'on les félicite pour avoir pris une position si marquée.

Le projet de loi C-251, intitulé «Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (peines consécutives)» prévoit l'imposition de peines consécutives lorsqu'une personne commet des infractions multiples en série.

 

. 1740 + -

Ce projet de loi vise à rendre nos rues plus sûres pour tous les Canadiens. Il s'agit de punir les auteurs de crimes graves de telle façon que leurs peines reflètent exactement la gravité de leurs crimes.

Ce projet de loi tend également à rétablir la confiance de la population dans notre système de justice pénale. Il y a un dicton très populaire selon lequel pour que justice soit faite, il faut qu'il y ait aussi apparence de justice. Lorsqu'un tueur ou un violeur en série se voit imposer une peine comme s'il avait commis un seul crime, on ne donne pas l'impression de faire justice et ainsi, justice n'est pas rendue.

Lorsqu'un système conçu pour protéger la population perd tout crédit ainsi que le respect et la confiance de la population, il faut prendre des mesures pour remédier à la situation. Ce projet de loi vise à accorder le respect voulu aux victimes ainsi qu'à leur famille dont on sous-estime tant les souffrances.

Je crois que la principale fonction de notre système de justice pénale est de prévenir les crimes et de protéger la société. Malheureusement, le système ne peut protéger tout le monde tout le temps. Certaines personnes deviennent des victimes. Cependant, lorsqu'un délinquant est arrêté et condamné, il faut lui imposer certaines peines.

Il y a des points de vue divergents au sujet de l'objectif d'une peine criminelle. Selon moi, l'opinion la plus répandue dans le domaine de la justice et des services correctionnels c'est qu'on doit assurer la réadaptation du délinquant pour qu'il ne commette pas un autre crime à sa sortie de prison, car on ne peut emprisonner tout le monde à perpétuité. Cependant, c'est là un point de vue tellement étroit qu'il fait fi d'autres aspects essentiels. Il est très rarement question de punition.

Dans le cas des tueurs et des violeurs en série, je pense que la plupart des Canadiens ne sont pas intéressés par une réadaptation. Ils ne veulent pas que ces gens recouvrent la liberté. Je suis d'accord avec eux.

Les Canadiens doivent pouvoir exprimer leur indignation et condamner de tels actes de violence. Or, notre système actuel de détermination des peines imposées aux récidivistes ne répond pas à ce besoin.

Les peines concurrentes équivalent à une seule peine pour de multiples crimes. Comment dissuader des criminels de commettre d'autres atrocités lorsqu'ils ont commis leur première?

Pour dire les choses crûment, au Canada, on accorde une ristourne sur la quantité aux violeurs et aux tueurs en série. Le système actuel de détermination de la peine fait peu de cas de la vie humaine. On ne tient pratiquement aucun compte de la vie des victimes.

La majeure partie des choses que je dis ont déjà été signalées à la Chambre, mais elles méritent d'être répétées. Pour le tribunal, la douleur et les souffrances ainsi que la mort d'une deuxième, d'une troisième ou d'une onzième victime n'ont aucune importance. On applique invariablement la peine minimale, même dans le cas des tueurs les plus invétérés.

La plupart des meurtriers et des auteurs d'infractions sexuelles multiples retournent souvent dans la société sans que la collectivité ne l'apprenne par les médias ou en soit prévenue. Les procès et les condamnations attirent l'attention des gens, qui se bercent habituellement de l'illusion qu'une peine d'emprisonnement à perpétuité est bien cela, parce qu'ils l'ont lu dans le journal du matin.

Mais une peine d'emprisonnement à perpétuité n'est pas à perpétuité. Dix ans plus tard, les gens découvrent la vérité. La Commission des libérations conditionnelles n'a pas assez rendu justice et a oublié les victimes, comme si elles n'existaient plus, uniquement pour libérer un lit destiné au prochain tueur en série.

Mais les Canadiens saisissent progressivement cette supercherie qu'est la notion de peine d'emprisonnement à perpétuité. La moitié des personnes condamnées pour meurtre au deuxième degré sont censées purger une peine d'emprisonnement à perpétuité, mais sont libérées moins de 12 ans plus tard. Pour les meurtres au premier degré, la durée médiane se situe habituellement à 14 ans. À perpétuité signifie uniquement à perpétuité pour la victime de meurtre qui n'est plus là pour protester contre son châtiment et qui ne sera jamais admissible à une libération.

Ma propre famille connaît fort bien les conséquences de la perte d'un être cher et sait que l'auteur de ce crime, le gars qui a enlevé la vie à un policier dans la fleur de l'âge, laissant seuls sa femme et ses trois enfants, sera admissible à une libération conditionnelle d'ici l'an prochain. Kitty et ses enfants ne verront jamais plus Vernon. À perpétuité a signifié à perpétuité pour Vernon.

Le meurtrier a imposé une peine à perpétuité à la famille de la victime. Cette famille a perdu à tout jamais ses illusions réconfortantes sur la sécurité des lieux publics. Elle doit composer avec la dure réalité que l'unique loi qui la protège est celle de la moyenne, de la probabilité qu'aucun des prédateurs qui se promènent dans nos collectivités ne s'en prendra de nouveau à elle.

 

. 1745 + -

En réalité, les juges ont déjà le pouvoir d'imposer des peines consécutives mais, malheureusement, ils ne le font pas. C'est très regrettable, car non seulement sont-ils chargés d'appliquer la loi de façon équitable et impartiale, mais ils devraient rendre des décisions qui reflètent les intérêts et les valeurs de la collectivité. Les juges disent que c'est ce qu'ils font lorsqu'ils se prononcent sur des questions de nudité et d'obscénité publiques. Pourquoi n'en font-ils pas autant lorsqu'ils condamnent des violeurs et des meurtriers en série?

Il appartient aux parlementaires et aux législateurs de lancer le message que les tribunaux omettent, soit que les prédateurs seront punis, sévèrement punis. Un prédateur ne peut compter sur aucune circonstance atténuante et ne devrait pas être réadapté. Quoi qu'en disent les thérapeutes, la présence d'un prédateur dans une collectivité n'a rien de rassurant pour les gens. Les prédateurs doivent être gardés derrière les barreaux en permanence.

Certaines personnes soutiennent que l'imposition de peines consécutives ne sert que la vengeance. Si un prédateur sait qu'il passera le reste de sa vie en prison, sans aucune chance de libération conditionnelle, et qu'il mourra derrière les barreaux, il y pensera à deux fois avant d'agir. Si la perspective de peines consécutives ne réussit pas à dissuader, elle contribuera du moins à exprimer toute la répulsion, l'horreur et l'indignation de la population canadienne. Elle démontrera également aux familles et aux amis d'une victime que le gouvernement se préoccupe d'eux.

Ces deux raisons, prises ensemble ou individuellement, suffisent à justifier l'imposition de peines consécutives. Nos institutions sont à l'écoute des avocats, des lobbyistes, des détenus et de leurs défenseurs. Les criminels peuvent toujours compter sur le système, qui laisse tomber les victimes. La victime d'un meurtre n'a ni représentant, ni lobbyiste ni avocat pour la défendre car elle est morte. La famille des victimes et les personnes qui reconnaissent le caractère injuste et obscène de l'actuel système sont les seules à dénoncer la perte des droits des victimes.

Pourquoi les criminels en série jouissent-ils de ristournes sur la quantité? Ils peuvent commettre deux meurtres, et même trois ou quatre meurtres pour le prix d'un. Il faut mettre un terme à cela. Chaque vie a sa valeur propre et les peines imposées devraient refléter la valeur de chaque vie. Dans l'état actuel des choses, la seconde victime n'a aucune valeur. En somme, les meurtriers et les violeurs jouissent d'un tarif dégressif sur le volume. À l'heure actuelle, le meurtre prémédité, peu importe le nombre de victimes, mérite à son auteur une prétendue peine d'emprisonnement à perpétuité de 25 ans. La période d'inadmissibilité d'un violeur à une libération conditionnelle n'excède jamais sept ans, peu importe le nombre de ses victimes.

Je suis fière d'appuyer le projet de loi C-251 et j'invite les autres députés du caucus libéral et les députés d'en face à en faire autant.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de la députée de Mississauga-Est.

Tout d'abord, je veux, moi aussi, la féliciter pour ce projet de loi, puisqu'il ouvre un volet du Code criminel qui traite de la criminalité. Il est important de s'y pencher, de vérifier certaines choses et, sans doute, d'aller dans le même sens que la députée.

Je tiens à dire tout de suite que je suis favorable au projet et à ce qu'on l'étudie en comité de façon très sérieuse pour voir—je vais l'expliquer en détail un peu plus tard—si ce projet de loi s'inscrit bien dans le Code criminel, dans la jurisprudence et dans la façon de faire au Canada, et en particulier au Québec.

Le projet de loi prévoit, pour ceux qui nous écoutent, l'imposition de sentences consécutives pour l'auteur d'une agression sexuelle qui a commis une autre infraction basée sur les mêmes faits ou qui purge à ce moment-là une autre sentence.

De plus, le projet de loi vise à modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Cette modification va faire en sorte que les condamnés à perpétuité pour meurtre au premier degré et au deuxième degré ne seront pas admissibles à la libération conditionnelle avant d'avoir purgé le tiers de la peine prévue, jusqu'à concurrence de sept ans, pour une autre infraction basée sur les mêmes faits. Dans les cas de récidive de meurtre, le temps d'épreuve s'additionne pour chacun des meurtres.

Tout cela est très technique, mais ceux qui connaissent un peu le Code criminel ont sûrement pu décortiquer un peu ce que j'ai dit. Je vais tenter de le faire de façon plus compréhensible au cours du temps qui m'est alloué.

 

. 1750 + -

L'importance de l'infraction visée est un des éléments que je prends en considération lorsque j'étudie un projet de loi, surtout lorsqu'il émane d'un député. J'essaie de voir ce qu'on vise exactement. Dans ce projet de loi, on vise les crimes les plus horribles. Donc, immédiatement, tous les députés en cette Chambre doivent y prêter une oreille extrêmement attentive.

Si le meurtre a pour conséquence de nous voler la vie, l'agression sexuelle souille la personne pour le reste de sa vie. Il faut regarder cette infraction d'un oeil très avisé et tenter de voir le parallèle existant entre différentes infractions criminelles.

Ainsi, les sentences octroyées pour ces crimes doivent refléter la gravité de l'offense, eu égard aux circonstances. Le problème d'imposer une sentence juste et adéquate réside dans la difficulté de s'assurer que celle-ci respecte les caractéristiques de l'individu qui a commis l'acte, qu'elle protège les intérêts de la collectivité qui dépendent, en grande partie, des valeurs acceptées par la société à une époque donnée, et, enfin, qu'elles satisfassent aux besoins de la protection et de la réparation de la victime.

Lors de la détermination de la sentence, le juge doit veiller à ce qu'elle soit proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité de l'auteur. Le projet de loi C-251 soulève une question fondamentale: le droit pénal canadien traite-t-il adéquatement des infractions d'agression sexuelle et de meurtres selon l'importance qu'on leur accorde? C'est une question extrêmement importante et on se doit d'y répondre.

À cet effet, je veux informer la Chambre que je travaille actuellement—parce que je trouve aussi très important toutes les infractions à caractère sexuel—sur un projet de loi qui rejoint un petit peu celui de la députée. J'espère qu'on me renverra l'ascenseur et qu'elle m'appuiera dans cette démarche. Je travaille également afin que les juges puissent prendre en compte les lésions psychologiques des victimes au moment de l'imposition de la sentence.

Cela étant dit, je pense que, effectivement, on peut faire mieux encore que ce qui existe aujourd'hui lorsqu'il s'agit d'imposer des sentences dans les cas d'infractions à caractère sexuel, compte tenu de leur importance.

Cependant, à l'heure actuelle, le Code criminel prévoit déjà la possibilité pour un juge d'ordonner qu'un individu purge consécutivement sa période d'emprisonnement. Il s'agit de l'article 718.3(4) du Code criminel. Cependant, c'est un article qui traite des peines en général. On ne traite pas spécifiquement de l'agression sexuelle. C'est sans doute ce qui a motivé la députée de présenter le projet de loi C-251.

Sans doute qu'elle a raison. Sans doute qu'il faut ajouter ce point précis d'agression sexuelle pour que les juges aient la possibilité—non pas la possibilité parce qu'avec le projet de loi c'est une obligation que l'on crée—mais plutôt que les juges aient l'obligation de donner des peines consécutives. Quand je dis qu'il faut voir si cela s'insère bien dans le Code criminel ou dans la jurisprudence et dans la façon de faire au Canada, il faut vraiment voir si ce projet de loi n'enlève pas aux juges une certaine discrétion qu'ils ont à l'heure actuelle.

À première vue, très sincèrement et très honnêtement, on devrait ajouter «agression sexuelle» pour donner à la population un signe important montrant qu'on prend en considération le sérieux des infractions à caractère sexuel, compte tenu qu'on en voit à tous les jours, de leur l'importance et compte tenu également que ce sont bien souvent des enfants qui sont touchés par ces crimes haineux et qu'ils sont marqués pour le reste de leur vie. En bout de ligne, la société paie pour cela, que ce soit sur le plan psychologique, médical ou autre.

On pourrait inclure très spécifiquement dans cet article des dispositions sur les agressions sexuelles pour obliger les juges à donner une peine consécutive et non pas concurrente, comme cela arrive à l'occasion. Toutefois, si on fait cela, on enlève un certain pouvoir discrétionnaire aux tribunaux.

 

. 1755 + -

C'est à cet égard que je m'interroge. Je suis favorable au projet de loi. Je veux qu'on l'étudie très sérieusement en comité, dans son ensemble, pour voir, dans l'application réelle des modifications proposées par la députée, si, en bout de ligne, on n'empêche pas le bon fonctionnement de tout le processus judiciaire et si on ne fait pas un manquement au pouvoir discrétionnaire que les juges ont à l'heure actuelle.

Si on regarde ce qui se passe dans les tribunaux canadiens, québécois, ontariens et autres, lorsqu'il s'agit d'agressions sexuelles et d'agressions à caractère sexuel sur des enfants, des femmes ou des mineurs, je pense que les juges ne prennent pas cela suffisamment au sérieux. Il y a des cas où certains commentaires des juges nous a laissés très songeurs et on peut se questionner effectivement sur la sentence qui a été accordée par les juges.

Le mérite de cette modification, c'est qu'on serait assurés que les juges pourraient évaluer au niveau de la sentence, mais lorsqu'il y a plus qu'un chef d'infraction, il faudrait que les juges donnent des peines consécutives. Ainsi, on serait assurés que le prévenu «ferait tout son temps», comme on dit dans le jargon du droit.

Le Bloc québécois considère que les infractions contre la personne ne doivent pas être prises à la légère. Notre système pénal doit aborder les cas d'agression sexuelle et de meurtre selon leur importance réelle. Nous considérons également que l'établissement d'une règle relative aux peines consécutives à propos des agressions sexuelles mérite d'être étudiée au Comité permanent de la justice et que cette étude devrait être faite à la lumière de notre souci de ne pas limiter indûment les pouvoirs discrétionnaires des tribunaux.

Ces derniers demeurent les mieux placés pour analyser les cas d'espèce, mais je pense que parfois, il faut forcer la main de la justice. On le fait de temps à autre dans certains projets de loi. C'est d'ailleurs notre devoir et même notre obligation à titre de législateurs de le faire.

Le Bloc québécois veut néanmoins mettre en garde—et ce n'est pas nécessairement la députée mais beaucoup plus les réformistes qui ont tendance à le faire—ceux qui pourraient être tentés de vouloir légiférer en s'inspirant d'un cas exceptionnel, entre autres, et non pas moins tragique, c'est-à-dire celui de Clifford Olson. Il faut éviter de juger un système judiciaire dans son ensemble sur la base de quelques cas d'exception.

Encore une fois, je le répète, si on regarde le système judiciaire au Canada dans son ensemble, c'est un système qui fonctionne bien. C'est un bon système. Naturellement, on peut tenter de l'améliorer, et je pense que le projet de loi C-251 va dans la bonne direction dans le but d'améliorer le système de justice dans ce pays.

C'est pourquoi j'offre toute ma collaboration en comité pour faire adopter ce projet de loi ou peut-être même l'améliorer s'il le faut.

[Traduction]

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse cet après-midi de dire que j'appuie tout à fait le projet de loi C-251 et de rendre hommage aux efforts de notre collègue, la députée de Mississauga-Est. À mon avis, ce projet de loi rend un fier service aux Canadiens et je suis heureuse qu'il ait été désigné comme une affaire devant faire l'objet d'un vote.

La sincérité et le dévouement de notre collègue en ce qui concerne les questions de justice et de détermination de la peine et le travail avec les victimes de la criminalité sont reconnues et appréciées. Tous les Canadiens devraient admirer sa persévérance à vouloir sensibiliser le public à ce problème, son dévouement et son engagement à aider les victimes de la criminalité.

Comme les députés le savent, le projet de loi C-251 prévoit l'imposition de peines consécutives pour l'auteur d'une agression sexuelle qui a commis une autre infraction basée sur les mêmes faits ou qui purge à ce moment-là une autre peine.

Comme l'indique clairement le sommaire:

      ...la personne condamnée à l'emprisonnement à perpétuité pour meurtre au premier ou au deuxième degré n'est pas admissible à la libération conditionnelle avant d'avoir purgé, en plus du temps d'épreuve prévu pour le meurtre, le tiers—jusqu'à concurrence de sept ans—de la peine prévue pour une autre infraction basée sur les mêmes faits ou de la peine qu'elle purge déjà. Dans le cas de récidive de meurtre, le temps d'épreuve s'additionne pour chaque meurtre—je répète, s'additionne pour chaque meurtre.

 

. 1800 + -

À mon avis, si l'on commet un crime, il faut en payer le prix. Il est important de faire remarquer que les groupes de défense des victimes et l'Association canadienne des policiers appuient tous ce projet de loi.

En tant que citoyenne du Canada et députée, je connais parfaitement les services considérables que rendent les hommes et les femmes chargés de faire appliquer la loi et de protéger et de défendre nos vies, notre liberté et nos biens. Nous leur rendons hommage et nous les encourageons.

Les agents chargés d'exécuter la loi sont les fonctionnaires les plus altruistes et les plus dévoués de la société. Nous l'avons entendu maintes et maintes fois, les agents chargés d'exécuter la loi mettent leur vie en jeu chaque jour dans le cadre de leurs fonctions.

Les gens devraient réfléchir sérieusement à cette affirmation. Les citoyens qu'ils protègent devraient être conscients que, bien souvent, les agents chargés d'exécuter la loi se sentent impuissants. Ils doivent travailler à l'intérieur des limites d'un système de justice pénale parfois trop inefficace et trop technique devant la variété de crimes qui se commettent dans notre société. Malheureusement, il arrive à l'occasion que ces gens fassent le sacrifice de leur vie pour ceux et celles qu'ils protègent. Ils savent que le projet de loi C-251 les aiderait à garder les criminels endurcis derrière les barreaux. En qualité de députée, je veux essayer de leur donner les outils dont ils ont besoin.

Chaque jour, nous voyons la preuve que nous vivons dans un monde moins que parfait, aux prises avec de nombreux problèmes comme la pauvreté, l'injustice, la maladie, la guerre et, bien sûr, la criminalité.

Les sceptiques diront qu'il n'y a rien là de nouveau, que ces problèmes sont inhérents à la condition humaine et ne disparaîtront pas tant qu'il y aura des hommes et des femmes sur la terre. Dépassés par l'ampleur des dilemmes de ce monde et devenus fatalistes, ils restent amorphes et ne font rien en justifiant platement leur apathie par le fait qu'ils ne sont que des hommes ou des femmes et ne peuvent pas, à eux seuls, changer le monde.

La députée de Mississauga-Est a entrepris d'agir et j'ajouterai qu'elle fait du bon travail. Sans les actions individuelles, les problèmes continueront d'empirer et de plus en plus de gens tomberont victimes des criminels. Il n'y a pas de plus grande satisfaction que celle que procure le sentiment d'avoir contribué dans la société, d'avoir apporté de l'aide autour de soi. Le travail qui donne l'occasion de ressentir cette satisfaction consiste à faire observer la loi.

Grâce au projet de loi C-251, les Canadiens et les victimes de crimes auront peut-être une plus grande tranquillité d'esprit. Cette mesure corrigera le laxisme honteux dont bénéficient les violeurs et les meurtriers, puisqu'elle prévoit l'imposition de peines consécutives. Elle propose le changement raisonnable et nécessaire que demandent les principaux groupes de victimes.

Le projet de loi C-251 poursuit trois objectifs importants: réduire les souffrances des familles des victimes, redonner de la vraisemblance aux peines imposées et cesser d'exposer des vies sous prétexte que des auteurs de meurtres multiples ou des tueurs en série ne récidiveront pas.

Qu'est-ce qu'un châtiment? C'est une mesure de dissuasion imposée à celui qui a déjà commis un crime. Les quatre buts du châtiment qui sont généralement reconnus consistent à dissuader, punir, neutraliser et réadapter.

Depuis 20 ans, dans de nombreux États américains, on impose de moins en moins des peines d'une durée indéterminée. Dans un rapport de 592 pages paru en 1987, la Commission canadienne sur la détermination de la peine a fait état de nombreux écarts non justifiés dans les sentences prononcées par des juges ayant adopté des méthodes différentes dans des cas similaires.

 

. 1805 + -

Le projet de loi est important, justement parce qu'il propose d'imposer moins de peines d'une durée indéterminée. Cela semble traduire une baisse de confiance dans la réadaptation devant résulter de la punition et dans les commissions des libérations conditionnelles qui décident quand un détenu devrait recouvrer sa liberté.

Au moment d'imposer une peine à celui qui a commis de multiples infractions au Canada, l'accent est mis sur la peine globale qui relève de la discrétion du juge. Certaines infractions, surtout les évasions et l'inobservation des conditions d'une condamnation avec sursis, exigent l'imposition de peines consécutives en vertu du paragraphe 718.3(5) du Code criminel du Canada. Cependant, l'accent reste sur la peine globale.

Le projet de loi C-251 améliorerait cette situation. Comme l'a dit ma collègue de Mississauga-Est au cours du débat du 4 juin 1996:

    Les peines concurrentes font peu de cas de la vie des victimes individuelles. Les souffrances, les peines et la mort de la deuxième, de la troisième ou de la onzième victime n'ont pas de conséquences pour les tribunaux.

Je me demande si nous pourrions appliquer des peines de ce genre dans le cas d'une contravention de stationnement. Que nous en obtenions une ou dix, les tribunaux jugeraient-ils bon de nous imposer une amende pour une seulement?

En outre, les familles doivent continuer de participer aux audiences portant sur la libération conditionnelle, en revivant constamment la douleur, l'angoisse et la souffrance causées par la perte d'un être cher. Soutenons les victimes de crime. Appuyons nos agents de la paix. Nous, en tant que députés, avons un rôle important à jouer en raison du privilège exceptionnel que nos électeurs nous ont accordé.

Modifier et améliorer la loi fait partie intégrante de ce rôle, et chacun de nous le prend très au sérieux. C'est pourquoi les initiatives parlementaires revêtent une importance cruciale pour l'exécution efficace de ce rôle. Chaque député a la possibilité, sans subir les contraintes de son parti, d'exprimer ses vues et ses préoccupations au nom de ses électeurs, de faire parler sa conscience et de s'efforcer véritablement d'apporter des changements positifs.

C'est dans cet esprit que j'exhorte tous les députés à appuyer le projet de loi C-251 et le travail exceptionnel qu'a accompli notre collègue de Mississauga-Est.

M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Madame la Présidente, je me réjouis de prendre la parole au sujet du projet de loi C-251, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.

J'admire la ténacité de la députée de Mississauga-Est à l'égard de ce projet de loi. C'est en effet la troisième fois que la députée essaie de mener ce projet de loi à terme. Elle a signalé qu'elle avait l'appui de 166 députés de tous les partis représentés à la Chambre. Cela semblerait suffisant pour avoir la majorité, mais je ne retiendrai pas mon souffle. Nous avons vu comment les députés du gouvernement oublient vite conscience et bon sens lorsqu'ils se font dire quoi faire par les banquettes ministérielles.

En 1993, les libéraux ont fait campagne en promettant de donner plus de poids aux députés de l'arrière-ban en leur accordant un plus grand rôle dans la rédaction des projets de loi. On devait permettre davantage de votes libres. Près de cinq années plus tard, aucun projet de loi d'initiative parlementaire concernant la justice criminelle n'a encore été adopté. La Chambre comprendra dès lors mon scepticisme.

La Chambre comprendra aussi mon inquiétude à l'égard de l'incohérence de la députée de Mississauga-Est et de nombre de ses collègues d'en face. En 1995, lorsqu'ils ont voté en faveur du projet de loi C-41 sur la condamnation avec sursis, on suppose qu'ils ont fait ce que le ministre de la Justice leur a dit de faire.

Pas plus tard que la semaine dernière, un autre délinquant sexuel n'a été condamné à aucune peine d'emprisonnement après avoir été reconnu coupable d'aggression sexuelle et de séquestration. Ce n'est là qu'un seul des cas les plus récents. Beaucoup d'autres délinquants sexuels ont bénéficié du projet de loi C-41, le projet de loi libéral de libération sans problème.

D'un côté, l'auteure du projet de loi dont nous sommes saisis demande des peines plus sévères pour les délinquants sexuels, mais, de l'autre côté, elle semble dire qu'il est correct que les délinquants sexuels purgent leur peine à la maison. Pas étonnant que les Canadiens aient perdu confiance dans leurs politiciens.

Lorsque ce projet de loi a été débattu ici la dernière fois, le député qui était alors le secrétaire parlementaire du solliciteur général a bien cerné le problème pour les députés ministériels. Il a dit ceci:

    Je crains toutefois que le projet de loi C-251, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, ne retire à nos tribunaux leur marge de manoeuvre et leur pouvoir discrétionnaire et n'ajoute à la charge déjà lourde qu'assument les organismes correctionnels à l'égard de l'administration de la peine.

 

. 1810 + -

Il semble se préoccuper du coût administratif du fait de garder les contrevenants violents en prison. Nous espérons seulement que le ministre des Finances se dirait tout aussi préoccupé par le coût de l'administration de la TPS.

Plus tard, le secrétaire parlementaire de l'époque a dit:

    Les modifications qui sont proposées font toutefois appel à des mesures punitives qui excèdent de loin les restrictions actuellement prévues dans le Code criminel et dans la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, et compromettent les libertés garanties par la Charte, comme je l'ai mentionné.

Je suis d'avis que le mot liberté n'a pas sa place dans les discussions sur les sanctions relatives à des activités criminelles. Encore une fois, les libéraux affichent cette peur de la Charte qui les paralyse.

Plus loin, l'ex-secrétaire a ajouté:

      ...à l'heure actuelle, le projet de loi dont nous sommes saisis n'est pas dans l'intérêt des Canadiens

C'est une réponse typique des libéraux selon laquelle ce gouvernement sait tout et les Canadiens sont trop stupides pour décider par eux-mêmes.

Le secrétaire parlementaire occupait la banquette d'en avant. Dans cette enceinte, il n'y a guère de votes libres du côté du gouvernement. Il n'y a guère de possibilités qu'un simple député, même du côté du gouvernement, joue un rôle de premier plan dans la rédaction d'une mesure législative nécessaire.

Le secrétaire parlementaire a de nouveau invoqué la Charte pour justifier le non-respect de la volonté et des besoins des Canadiens. Fait à remarquer, il n'a pas expliqué pourquoi la Charte protège nos criminels les plus abominables contre les peines consécutives. Autre fait à remarquer, il a déclaré que ces propositions n'étaient pas dans l'intérêt des Canadiens.

Il est proposé dans le projet de loi C-251 que les contrevenants condamnés pour une agression sexuelle et une autre infraction reçoivent des peines consécutives. Ainsi, les meurtriers ne seraient pas admissibles à une libération conditionnelle jusqu'à ce qu'ils aient purgé la totalité de la peine infligée pour le meurtre et un minimum donné de l'autre peine.

Le secrétaire parlementaire a parlé de l'intérêt des Canadiens. J'estime qu'il ne pense qu'à l'intérêt des criminels. Il ne pense certainement pas à celui des victimes de ces crimes ni à la sécurité de nos collectivités.

Pas plus tard que la semaine dernière, des experts ont sévèrement critiqué, dans une autre étude universitaire sur la violence sexuelle, notre système de justice pénale pour le motif qu'il ne se préoccupait pas sérieusement de cette question. Il s'intéresse plus aux intérêts des criminels qu'aux besoins des victimes ou à la sécurité publique. Selon l'étude, on inflige une peine de plus deux ans à seulement 13 p. 100 des agresseurs d'enfants et pour seulement 30 p. 100 des agressions sexuelles Dans le cas des voleurs, 53 p. 100 d'entre eux reçoivent une peine de plus de deux ans. Les enfants et les femmes sont le plus souvent victimes des infractions à caractère sexuel, mais le gouvernement ne fait pas grand-chose pour remédier à cette anomalie. Ce projet de loi d'initiative parlementaire contribuera peut-être à y remédier.

L'imposition de peines consécutives encouragerait notre système de justice à poursuivre les délinquants pour toutes leurs infractions. Trop souvent, les procureurs de la Couronne poursuivent l'accusé sur un ou deux chefs d'accusation seulement. Comme le procès se solde habituellement par un peine cumulative, il n'y a rien à gagner à poursuivre l'accusé pour de multiples infractions, mais il en résulte un grave simulacre de justice et une injustice au moment de la libération conditionnelle.

La libération conditionnelle est basée strictement sur les condamnations. Par exemple, Larry Takahashi a obtenu une libération conditionnelle de jour même s'il avait avoué avoir agressé sexuellement jusqu'à 30 femmes et même si la police croyait qu'il en avait commis une centaine d'agressions sexuelles. Aux yeux du système de libération conditionnelle, il était coupable de onze agressions sexuelles contre sept femmes. Quand il s'est agi d'examiner son dossier pour voir s'il était admissible à libération conditionnelle de jour, on a tenu compte uniquement des condamnations.

L'imposition de peines consécutives instaurera un élément de vérité dans l'établissement de la peine. On fera la distinction entre les auteurs de multiples infractions et l'auteur d'une seule infraction. L'établissement de la peine aura un caractère plus honnête. À l'heure actuelle, les juges imposent une peine d'une année de prison, par exemple, pour une agression sexuelle. Les victimes et le public croient à tort que le coupable passera réellement une année en détention, mais, comme nous le savons tous, la libération conditionnelle s'applique à toutes les infractions.

Les délinquants comme celui de cet exemple sortent au bout de quelques jours ou de quelques mois. Les juges disent qu'ils font leur travail en appliquant la peine appropriée au crime, mais le système de libération conditionnelle intervient et les fonctionnaires doivent faire sortir le prisonnier aussi tôt que la loi le permet.

Le système de libération conditionnelle dit que les fonctionnaires ne font qu'accomplir leur devoir en suivant les règles en matière de libération, mais les peines ne correspondent plus à la réalité. Bien peu, s'il en est, purgent toute la peine de prison imposée par le tribunal. Même les plus affreux meurtriers obtiennent une révision de leur peine d'emprisonnement à perpétuité après 15 ans, en vertu de l'article 745 du Code criminel. Un tueur d'enfants notoire dont je tairai le nom à la Chambre a tué onze enfants mais a été condamné comme s'il en avait tué seulement un.

Au moment où nous parlons, une audition en vertu de l'article 745 est en cours à Vancouver dans le cas d'un homme qui, après avoir tué trois clients d'un bar, s'est rendu à un détachement de la GRC où il a tué le constable en service. Lui aussi a été condamné comme s'il avait enlevé une vie seulement.

 

. 1815 + -

Permettez-moi d'ajouter que ce meurtrier aurait, paraît-il, tiré sur un autre agent du poste de police, mais qu'aucune accusation n'aurait jamais été portée contre lui à cet égard, car cela n'aurait rien changé à la peine infligée. Voici le message que l'on envoie aux criminels: Commettez autant de meurtres que vous le voulez, il n'y a que le premier qui compte. Les autres restent impunis. Voici le message que l'on envoie aux victimes: Il n'y a que la première vie qui compte, les autres n'ont aucune importance.

Pour ce qui est des dispositions du projet de loi C-251, je me demande pourquoi la députée en a limité la portée à l'article 271 qui concerne les agressions sexuelles. Si son projet de loi est adopté, je me demande ce qu'il adviendra d'un contrevenant qui a enfreint l'article 272 en commettant une agression sexuelle avec une arme et qui s'est rendu coupable d'autres infractions. La Couronne intentera-t-elle des poursuites par rapport à l'infraction moins grave de simple agression sexuelle dans l'espoir que la peine s'ajoutera à celle prévue pour les autres crimes ou intentera-t-elle des poursuites en vertu de l'article 272, dans l'espoir que la peine infligée pour cette seule infraction respectera l'objectif de notre société? Les procureurs de la Couronne pourraient être appelés à devenir des parieurs professionnels devant nos tribunaux.

Je me demande aussi pourquoi la députée propose de limiter son projet de loi aux cas d'agression sexuelle et de meurtre. Elle n'inclut pas les homicides involontaires, les cas où une arme à feu a été utilisée pour perpétrer un crime ni les voies de fait graves.

En résumé, je vais appuyer la mesure proposée par la députée, mais je me demande vraiment si les collègues de son parti auront le courage de voter selon leur conscience au lieu de simplement suivre les consignes provenant des banquettes ministérielles.

J'appuie le projet de loi parce qu'il constitue un bon début. Il y a certainement encore beaucoup à faire pour protéger suffisamment nos collectivités. Il y a certainement encore beaucoup à faire pour montrer une honnêteté absolue envers l'ensemble des Canadiens. Il y a certainement encore beaucoup à faire pour tenir compte des intérêts des victimes. Malgré cela, j'exhorte tous les députés à appuyer ce projet de loi.

[Français]

M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui pour donner mon appui à ce projet de loi méritoire, projet de loi pour lequel la députée de Mississauga-Est a lutté pendant des années et qui est nécessaire pour notre société.

[Traduction]

La députée a tenté à trois reprises déjà de faire adopter ce projet de loi ou du moins d'obtenir qu'il soit reconnu et examiné en profondeur par le Parlement. C'est pour moi un honneur de connaître cette députée, qui souscrit à l'idée qui veut que lorsqu'on ne réussit pas la première fois, on tente sa chance encore et encore.

C'est pourquoi je prends la parole une fois de plus au sujet de cette question, pour signaler que la Chambre semble être d'accord pour que la question fasse l'objet d'un débat approfondi non seulement ici mais également au Comité de la justice.

J'invite les députés à voir la chose autrement que comme une question partisane. Nous pouvons nous livrer aux joutes habituelles qui ont lieu à la Chambre. Nous avons tous des points de vue différents et les dynamiques varient certainement d'une circonscription à l'autre. Mais nous sommes certainement tous d'accord sur la valeur d'une vie humaine.

Ce projet de loi propose carrément, que ce soit dans le domaine de la justice pénale ou dans celui de la compréhension sociale de l'humanité, de respecter et de ne pas dénigrer la valeur de chaque être humain.

Les députés qui m'ont précédé, dont la députée de Whitby—Ajax, ont longuement parlé des problèmes propres au système actuel, qui permet aux meurtriers en série de commettre des crimes à rabais.

[Français]

Je suis content de voir que le porte-parole du Bloc québécois s'est aussi prononcé sur la question des infractions criminelles à caractère sexuel. Je suis tout à fait d'accord avec ce député, et je souhaite que cela aboutira, dans le futur, à un projet de loi dont la Chambre pourra être fière et sur lequel on pourra travailler tous ensemble pour trouver un meilleur système de justice criminelle.

 

. 1820 + -

[Traduction]

Cet été, des hommes et des femmes qui représentent ceux qui oeuvrent en première ligne au Canada se sont réunis à au moins trois endroits du pays pour commémorer le décès d'un des leurs. Dans ma circonscription, Pickering—Ajax—Uxbridge, nous avons pleuré la perte tragique du détective William Hancox.

Je ne sais pas si nous avons eu l'occasion de nous y arrêter, mais je voudrais prendre le temps de citer cette personne à la Chambre des communes et parler des grands efforts qu'il a déployés pour préserver la sécurité dans notre pays.

Je sais que certains des meilleurs représentants des policiers au Canada se trouvent actuellement dans la tribune. Ils sont ici non pas seulement pour prendre connaissance de l'issue du projet de loi mais parce qu'il existe un lien entre la nécessité d'assurer la sécurité publique, celle de chaque personne et la définition du contrat social sur lequel toute cette question semble reposer.

Pour toutes ces raisons, je félicite ma collègue, la députée de Mississauga-Est, pour ses tentatives. J'applaudis les efforts des nombreux groupes de défense des droits des victimes au Canada qui réclament énergiquement le droit de se faire entendre, mais qui nous demandent surtout d'éviter de jouer le jeu de la politique, de ne pas diviser pour régner ou encore de ne pas nous cacher derrière certaines lois, coutumes ou traditions.

Le bon sens commande à cette Chambre de tenir compte de l'importance qu'elle exerce sur la sécurité des individus et sur la valeur de la vie. Le statu quo n'est pas acceptable et c'est dans cette optique que le Sous-comité des affaires émanant des députés a décidé, dans sa sagesse, de déclarer que ce projet de loi pourrait faire l'objet d'un vote.

Ce projet de loi mérite certainement d'être examiné par le Comité de la justice. J'ai certaines réserves quant au renvoi du projet de loi et j'aimerais obtenir des précisions sur une déclaration faite par la présidence un peu plus tôt voulant que le projet de loi soit renvoyé au comité des finances. Avec l'appui du député de Huron-Bruce, j'aimerais obtenir le consentement unanime de la Chambre pour demander que le projet de loi soit renvoyé au comité de la justice plutôt qu'au comité des finances.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Pour la gouverne du député, je précise que le projet de loi sera renvoyé au comité de la justice et non au comité des finances comme il le croyait.

M. Dan McTeague: Je vous remercie de cette précision. Je reconnais l'importance de ce projet de loi et nous voulons nous assurer qu'il n'y a absolument aucune équivoque et que ce projet de loi sera bien étudié par le comité approprié.

Je ne crois pas que ce projet de loi traite de vengeance, ni de punition. Je ne crois pas non plus qu'il ait été rédigé par esprit de vengeance. Je suis plutôt d'avis qu'il traite précisément de la valeur que nous dans cette Chambre et à titre de Canadiens donnons à la vie humaine.

Comme je l'ai souligné précédemment, le projet de loi lui-même a évolué à partir de certains commentaires qui ont été formulés. Il est facile de parler de certains cas du genre de ceux de Clifford Olson ou de Paul Bernardo ou encore de Denis Lortie, mais il importe d'approfondir davantage la place de la victime dans le cadre du système actuel.

Comme je l'ai souligné plus tôt, le statu quo n'est pas une solution acceptable. Mon honorable collègue de Whitby—Ajax a souligné que les criminels reconnus coupables de meurtres au deuxième degré qui sont condamnés à la détention à vie sont remis en liberté après moins de 12 ans. Le temps médian dans les cas de meurtres au premier degré est de 14 ans seulement.

Je suis persuadé que toute personne saine d'esprit reconnaît que la vie humaine vaut plus que ces durées d'emprisonnement ridicules. Voilà pourquoi, à mon avis, le moment est venu pour nous, parlementaires, de reconnaître l'énorme fossé qui sépare le bon sens, la perception du public et l'avis de nombreux légalistes qui se sont prononcés sur la question.

 

. 1825 + -

Puisqu'il s'agit de faire en sorte que notre système de détermination de la peine tient compte de la gravité des crimes commis, il semble tout à fait raisonnable que la personne qui commet un meurtre, un viol et une agression se voit infliger une peine de prison dans chaque cas.

Il ne s'agit pas simplement de dissuader quelqu'un de commettre un crime. Il faut également veiller à ce qu'une infraction commise à l'égard d'un être innocent soit traitée en conséquence. Nul besoin pour cela de lier les mains des juges. J'ai vu l'année dernière à Burnaby, en Colombie-Britannique, en compagnie de mon collègue et de bien d'autres députés de la Chambre le triste résultat de l'article 745 qui a permis à un Clifford Olson de manipuler le système. Le juge n'avait pas à coeur de s'assurer que cet individu passe le reste de ses jours en prison.

Il ne s'agit pas de reconsidérer la peine de mort. C'est plutôt une étape importante vers la modernisation de notre système judiciaire afin qu'il prenne en compte la souffrance des victimes, l'affliction de leurs familles et le bon sens de la population canadienne en général.

[Français]

Je suis très fier d'être ici aujourd'hui. Comme je l'ai dit la dernière fois, lorsque je me suis prononcé sur le projet de loi C-274 de la députée de Mississauga-Est, cette question reviendra à la Chambre tant et aussi longtemps que celle-ci ne sera pas prête à y acquiescer d'une façon positive.

[Traduction]

Je puis assurer les députés que c'est un bon projet de loi. Il mérite notre appui. Appuyons-le. Renvoyons le projet de loi au comité et protégeons ainsi les Canadiens.

M. Chuck Cadman: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je voudrais simplement apporter une correction aux propos de l'orateur précédent. Il a parlé de Burnaby. Il s'agit plutôt de Surrey. Surrey est ma ville et je ne saurais passer la chose sous silence.

M. Mark Muise (West Nova, PC): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre aujourd'hui la parole sur le projet de loi C-251, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.

Ce projet de loi constitue une mesure extrêmement importante, et je salue la députée de Mississauga-Est, qui a présenté ce projet de loi malgré l'opposition de son propre gouvernement. Nous avons besoin de plus d'esprit d'initiative et de liberté de pensée, tant chez les libéraux que chez les réformistes, au lieu de la surveillance constante des troupes par leurs dirigeants respectifs.

Espérons que la députée de Mississauga-Est n'aura pas à subir la même colère des dirigeants libéraux que les députés de North Vancouver et de Nanaïmo—Alberni, en septembre, à Banff.

Le projet de loi C-251 arrive à point, si l'on pense à la manière dont le gouvernement libéral a traité les diverses questions de justice abordées cette semaine à la Chambre. Hier, nous avons entendu la secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice défendre la disposition de la lueur d'espoir en se proclamant fière d'être une libérale au coeur tendre.

Mardi, nous avons vu les libéraux se lever les uns après les autres pour défendre le projet de loi C-68, la loi du faux espoir, en laissant entendre que les propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi étaient des éléments d'une vaste conspiration de droite. Je suis néanmoins encouragé de voir une députée des banquettes libérales se lever pour défendre ses convictions avec ce projet de loi. Je sais qu'elle a travaillé très fort au cours des dernières années pour obtenir la présentation finale de cette mesure sous la forme d'une motion devant faire l'objet d'un vote. Elle a déjà dit, par le passé, que le projet de loi C-251 se fondait sur trois principes simples: éviter une attitude inhumaine, faire preuve de plus d'humanité à l'égard des victimes et certes nous protéger contre les personnes qui enfreignent la loi.

Mes collègues du caucus progressiste conservateur et moi-même partageons les profondes préoccupations de la députée quant aux difficultés que représente, pour les victimes d'actes criminel, le fait d'avoir à faire face au système de justice pénale, sachant combien c'est facile pour elles de perdre espoir. Le porte-parole de notre parti pour les questions touchant la justice et le solliciteur général, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough, a proposé un certain nombre d'initiatives solides pour veiller à ce que nos lois tiennent davantage compte des besoins des victimes et de leurs familles.

 

. 1830 + -

Les parlementaires ont maintenant l'occasion d'appuyer cette importante mesure législative pour aider à améliorer notre système de justice, à rétablir la confiance des Canadiens dans le système et, chose plus importante, pour mieux protéger la société contre des délinquants violents. Ce sont des propositions très constructives que la députée fait.

Le projet de loi C-251 prévoit des peines reflétant vraiment la gravité des crimes commis, ce qui est important. Il s'agit d'un amendement au Code criminel très bref, très direct et facile à comprendre. C'est une chose que tous les députés devraient encourager.

En ce qui concerne la question des agressions sexuelles et l'article 271 du Code criminel, le besoin de cet amendement se fait vraiment sentir. Il faut que les peines imposées par les juges soient purgées de façon consécutive pour que la punition reflète la gravité du crime.

À l'heure actuelle, ces genres de peines peuvent être purgées de façon concurrente. C'est-à-dire que si une personne commet plus d'une infraction ou si elle est accusée en même temps d'agression sexuelle et d'autres infractions comme une introduction par effraction, un vol ou des voies de fait, les peines imposées sont purgées en même temps. En termes plus simples, c'est un peu comme si une personne avait obtenu des prêts de trois institutions financières différentes, mais qu'elle ne devait en rembourser qu'un seul.

Les principes de détermination de la peine sont établis dans le Code criminel du Canada. L'article 718 du code précise ce que les législateurs ont essayé de faire dans le passé et ce qu'ils ont voulu insérer dans les principes régissant la détermination de la peine.

L'article 718.1 dit ceci: «La peine est proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant.» On précise ensuite les principes en question et on dit qu'il faut parvenir à un équilibre entre le besoin de l'amendement et de la réadaptation du détenu et le principe plus important qu'est la protection de la société.

On peut lire plus loin dans le Code criminel: «l'obligation d'éviter l'excès de nature ou de durée dans l'infliction de peines consécutives. Essayez d'expliquer cela à une victime de crime violent. Essayez d'expliquer cela à ceux qui ont perdu des êtres chers ou qui ont vu des êtres chers être attaqués, battus ou tués.

Il faut repenser les principes de détermination de la peine. La mesure proposée par la députée fait justement cela de façon constructive.

Le projet de loi C-251 accroîtrait la capacité des juges d'imposer des peines équitables. Personne ne devrait s'en sortir facilement dans notre système de justice. Malheureusement, c'est exactement ce qui se produit beaucoup trop souvent. Nous permettons à des délinquants sexuels et d'autres délinquants coupables de plusieurs crimes de purger toutes leurs peines en même temps. C'est tout à fait absurde.

[Français]

Le nom de Clifford Olson est mentionné à beaucoup trop de reprises à la Chambre des communes et je frémis seulement à mentionner le nom de cet homme. Il s'agit là d'un individu qui a tué onze enfants et qui purge une seule peine d'emprisonnement à perpétuité. Il devrait purger onze peines d'emprisonnement à perpétuité.

Le témoignage manipulateur et intéressé qu'il a donné, lors de son audience prévue en vertu de l'article 745 du Code criminel, est un pur scandale et une honte pour tout le Canada, et en particulier pour notre système de justice.

Aucune peine ne pourra jamais traduire tout l'odieux des crimes que ce déchet a commis. Il y a vraiment de quoi être alarmiste et réactionnaire lorsqu'on entend parler des circonstances particulières qui entourent quelques-uns de ces crimes. Toutefois, il faut aborder la détermination de la peine après mûre réflexion. Il faut tout de même faire preuve de bon sens.

Dans le cas d'individus comme Olson et Bernardo, il est absolument ridicule de laisser entendre qu'une peine allant de 15 ans jusqu'à une peine à perpétuité est un châtiment raisonnable.

[Traduction]

Voilà pourquoi mon collègue, le porte-parole du Parti progressiste conservateur en matière de justice, continue de lutter pour faire abroger l'article 745, la disposition de la lueur d'espoir. Voilà pourquoi nous appuyons les efforts des autres députés, comme celui de la Colombie-Britannique hier, en vue de faire abroger la disposition de la lueur d'espoir.

 

. 1835 + -

Je fais appel à tous les députés, depuis la députée de Mississauga-Est jusqu'aux députés du Bloc et aux députés du NPD pour qu'ils se joignent à nous dans notre lutte pour faire supprimer cette disposition peu judicieuse du Code criminel.

Les principes dont s'inspire le projet de loi sont complètement inutiles tant que l'article 745 continue de figurer au Code criminel. Je crois que chacune des vies innocentes qui ont été enlevées mérite qu'on lui reconnaisse au moins la valeur d'une peine consécutive. Il faudrait imposer à l'auteur de crimes multiples une peine appropriée pour chacune de ces infractions, si elles sont commises à un moment différent et dans des circonstances différentes. Ce principe reflète l'opinion de la plupart de mes électeurs et de la plupart des Canadiens.

Le projet de loi C-251 applique ce principe en respectant le simple bon sens. Voilà pourquoi j'appuie la députée de Mississauga-Est et son projet de loi.

[Français]

J'ai l'énorme fierté de le faire. Je reconnais l'importance de la cohérence dans les sentences. Je suis d'avis que le système judiciaire ne devrait pas affaiblir l'aptitude de la société à se protéger et à démontrer sa répugnance face aux crimes de violence.

[Traduction]

La deuxième disposition du projet de loi C-251 modifie l'article 120 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Elle prévoit que les personnes condamnées pour meurtre au premier ou au deuxième degré purgent toute la partie de leur peine où elles n'ont pas droit à la libération conditionnelle plus une peine équivalent au tiers ou un maximum de sept ans, selon la moindre des deux.

Comme la première disposition du projet de loi C-251, il s'agit d'un moyen innovateur de s'assurer que les peines sont vraiment purgées. Il y a des moments et des circonstances où le juge devrait imposer une peine qui reflète vraiment la gravité du crime. Si le juge dit 25 ans, ce devrait être 25 ans. Un point, c'est tout. Le délinquant et la société auraient davantage confiance dans le système de justice. Les peines cumulatives jouent une rôle très important lorsqu'il s'agit d'admissibilité à la libération conditionnelle.

Le projet de loi C-251 serait la meilleure manière de traiter les doubles meurtres. La famille de la seconde victime est forcée de constater que le système ne rend pas justice à celle-ci lorsque la peine est purgée concurremment.

Au nom du Parti progressiste conservateur, j'appuie ce projet de loi et j'espère que tous les députés appuieront les efforts de la députée de Mississauga-Est.

[Français]

M. Jacques Saada (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, avec le peu de temps qui reste, il va m'être extrêmement difficile d'entrer dans le détail de la présentation que j'aurais souhaité faire. Mais je voudrais quand même vous parler très brièvement du projet de loi C-251.

Avant même d'entrer dans le sujet, j'aimerais souligner le respect que j'ai pour le travail qui a été accompli par ma collègue qui présente ce projet de loi. C'est un travail qui résulte d'une réflexion très profonde, un travail qui mérite effectivement ce respect.

Il est évident qu'elle et moi sommes animés par le même souci que la sécurité du public doit être prépondérante et primordiale dans toutes nos considérations. Les Canadiens et Canadiennes se sentent en sécurité chez eux, et c'est le principal élément qui doit guider notre réflexion.

À ce sujet, j'aimerais citer très brièvement un chiffre qui a été retranscrit par le Centre international pour la prévention de la criminalité, qui, dans son dernier rapport dit, et je cite: «Lorsqu'on demande, parmi les aspects suivants, quels sont ceux qui donnent un sens à votre sentiment d'être Canadiens, 88 p. 100 des premiers répondants rangent le sentiment d'appartenir à une société en sécurité parmi les neuf aspects les plus importants».

Je ne pourrai pas appuyer ce projet de loi pour des raisons que j'aurai aimé avoir le temps de développer, mais j'en donne très brièvement la substance.

Tout d'abord, je crois qu'au sein du public canadien, il s'est créé un mythe autour de ce qu'on appelle une condamnation à perpétuité.

 

. 1840 + -

[Traduction]

Qu'est-ce que cela veut dire? En cas de meurtre au premier degré ou de meurtre au deuxième degré répété, la peine obligatoire est l'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie que le délinquant sera soumis au contrôle et à la surveillance des autorités correctionnelles pour le reste de sa vie. Cela signifie que l'auteur d'un meurtre multiple n'a pas droit au recours en révision pour la réduction de la partie de sa peine où il est inadmissible à une libération conditionnelle. Cela signifie que l'admissibilité à une libération conditionnelle après 25 ans n'est pas une garantie automatique de libération du pénitencier.

[Français]

Je comprends que le temps est déjà écoulé. Je souhaite avoir l'occasion de poursuivre.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Pour rassurer tout de suite le secrétaire parlementaire, la prochaine fois que ce projet de loi sera étudié à la Chambre, il disposera de sept minutes en début de débat, s'il le souhaite.

La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.



MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

L'HÉPATITE C

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Madame la Présidente, je prends la parole pour interroger à nouveau le ministre de la Santé au sujet d'une question que je lui ai posée en juin, avant les vacances d'été, concernant les victimes de l'hépatite C.

Une majorité de Canadiens sont très bouleversés par la détermination du gouvernement de n'indemniser que les victimes de 1986 à 1990. Nous estimons que c'est carrément inacceptable. C'est inacceptable pour plusieurs raisons mais, surtout, parce que les victimes infectées avant 1986, et même certaines qui l'ont été après 1990, sont toutes des victimes innocentes du scandale du sang contaminé.

Je reviens à la recommandation du juge Krever, qui a dit qu'il faudrait indemniser toutes les victimes, en raison d'une faute commise sur bien des plans. Je ne donnerai que quelques exemples de cela.

L'un de ces exemples est que nous avons effectivement apporté dans notre pays du sang qui provenait du système carcéral des États-Unis. Qu'on y pense. Des Canadiens malades ont reçu du sang donné par des détenus des États-Unis. Or, nous savons, je crois, ce qui se passe dans les prisons. Je vous ferai grâce des détails. Des Canadiens ont contracté l'hépatite C en raison de cette erreur même et de toutes les autres difficultés associées à ce dossier.

Le gouvernement maintient fermement sa position qu'il n'indemnisera pas ces innocentes victimes infectées avant 1986 ou après 1990. C'est bien commode. Le seul motif que le ministre puisse donner, c'est que les années 1986 à 1990 sont celles à propos desquelles nous ne pourrions fort vraisemblablement pas nous défendre si l'affaire devait être tranchée par les tribunaux. Autrement dit, le gouvernement aurait beaucoup de mal à défendre sa position en ce qui concerne cette période.

Une victime qui a contracté l'hépatite C le 31 décembre 1995 ne serait pas indemnisée. Par contre, une victime qui l'a contractée un jour plus tard, le 1er janvier 1986, serait indemnisée. C'est tout à fait bizarre et carrément inacceptable. De ce côté-ci de la Chambre, nous poursuivrons ainsi que de nombreux Canadiens notre combat en vue d'obtenir des mesures d'indemnisation équitables. Toutes les victimes devraient être indemnisées.

Nous rejetons souvent le blâme sur le ministre de la Santé. Je serai généreuse envers lui et dirai à sa décharge qu'il a très probablement fait tout ce qu'il pouvait en conseil des ministres pour obtenir que ces victimes soient indemnisées. En fin de compte, la responsabilité incombe au gouvernement, au chef du gouvernement, le premier ministre.

Il est trop facile pour le premier ministre de se réfugier dans le rôle du petit gars de Shawinigan. Tout glisse sur lui comme l'eau sur les plumes d'un canard. On dirait du Téflon. Le premier ministre est fait de Téflon des pieds à la tête.

 

. 1845 + -

Le premier ministre ne peut-il pas prendre un peu de recul et réfléchir à la gravité de la question? La compassion et la nécessité d'indemniser toutes les victimes...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je crains que le temps de parole de la députée ne soit écoulé.

Mme Elinor Caplan (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, je ferai remarquer au député que sa question du 10 juin portait sur les tests administrés aux donneurs de plasma.

Je souligne également que tous les Canadiens, y compris les députés, sont malheureux quand ils apprennent qu'une de leurs connaissances contracte une maladie sans avoir commis la moindre faute, qu'il s'agisse du cancer, d'une maladie cardiaque, de la sclérose en plaques ou du diabète.

Il faut comprendre que, lorsque des Canadiens tombent malades, les valeurs inscrites dans la Loi canadienne sur la santé prévoient que nous leur donnions des soins et l'accès à des traitements dans l'espoir d'une guérison. C'est l'objet de la Loi canadienne sur la santé.

Je voulais répondre à la question que le député a posée le 10 juin, concernant les tests de dépistage de l'hépatite C auxquels les donneurs de plasma ont été soumis de 1990 à 1993. Je tenais à lui faire remarquer qu'une distinction essentielle s'impose dès qu'on aborde cette question. C'est la distinction entre les tests administrés aux donneurs de sang qui sera directement distribué aux personnes ayant besoin d'une transfusion, et ceux qui sont administrés aux donneurs de plasma, lequel est envoyé à une usine de traitement pour être fractionné en dérivés tels que les facteurs de coagulation, l'immunoglobuline et l'albumine.

En 1990, une preuve scientifique a été clairement établie que les tests administrés aux donneurs de sang frais destiné aux transfusions...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je présente mes excuses à la secrétaire parlementaire, mais son temps est écoulé.

[Français]

La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 48.)  

ANNEXE

Allocution

de

M. Nelson Mandela,

Président de la République sud-africaine,

devant les deux Chambres

du Parlement

à la

Chambre des communes, à Ottawa

le

jeudi 24 septembre 1998

 

. 1040 + -

ALLOCUTION
de
M. Nelson Mandela,
Président de la République sud-africaine,
devant les deux Chambres
du Parlement
à la
Chambre des communes, à Ottawa
le
jeudi 24 septembre 1998

Le très honorable Jean Chrétien, Premier Ministre du Canada, l'honorable Gildas L. Molgat, Président du Sénat, et l'honorable Gilbert Parent, Président de la Chambre des communes, souhaitent la bienvenue à M. Nelson Mandela et à Madame Graca Machel.

L'hon. Gilbert Parent (Président de la Chambre des communes): Chers collègues de la Chambre et du Sénat, distingués visiteurs, le premier ministre du Canada, M. Jean Chrétien.

[Français]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président de la Chambre des communes, monsieur le Président du Sénat, chers collègues de la Chambre des communes et du Sénat, mesdames et messieurs.

[Traduction]

Monsieur le Président, chers collègues, mesdames et messieurs, j'ai l'honneur de souhaiter la bienvenue au Canada et au Parlement au président de la République sud-africaine, Monsieur Nelson Mendela, et à Madame Graca Machel.

Monsieur le président, il y a huit ans, lorsque vous vous êtes adressé pour la première fois à ce Parlement, vous veniez d'être libéré après 27 ans d'emprisonnement. L'apartheid sévissait encore en Afrique du Sud et votre pays était au ban de la communauté des nations. Fraîchement sorti de prison, vous étiez au coeur de la lutte héroïque dont l'issue était encore incertaine, mais qui allait renverser le régime de l'apartheid et mettre un terme à l'héritage honteux de l'exclusion raciale, de la domination par la minorité et de l'injustice institutionnalisée.

Aujourd'hui, cette page est tournée. Votre pays s'est doté d'une nouvelle constitution non raciale assortie d'une charte des droits. La gestion des affaires publiques fait l'objet de débats vigoureux en onze langues officielles non seulement au parlement national de Cape Town, mais aussi dans les neuf capitales provinciales. Une Afrique du Sud unie et démocratique est rentrée dans le giron des nations. Sous votre conduite, elle joue un rôle vital et digne de respect sur la scène internationale.

Les Canadiens sont fiers d'avoir été associés à la lutte contre l'apartheid et d'avoir appuyé votre transition vers la démocratie. La cause anti-apartheid transcendait les clivages politiques, et tous mes prédécesseurs y ont adhéré. À commencer par le premier ministre John Diefenbaker, qui a exprimé sa position à la Conférence du Commonwealth de 1961 à la suite de quoi l'Afrique du Sud s'est retirée de cette organisation, en passant par les gouvernements des premiers ministres Pearson, Trudeau et Mulroney.

Cette position de nos gouvernements reflétait l'opinion de la population canadienne, c'est-à-dire des Canadiens de tous les milieux qui appuyaient le mouvement contre l'apartheid individuellement et par l'entremise de leurs Églises, de leurs syndicats, de leurs associations professionnelles et des organisations non gouvernementales.

[Français]

Votre retour au Canada, après huit années mouvementées, est l'occasion pour les Canadiens qui partageaient votre vision d'une société libre, non raciale et démocratique, de célébrer l'évolution profonde et irréversible qui s'est produite dans votre pays. En plus, et c'est tout aussi important pour nous, c'est une occasion de rendre hommage au rôle déterminant que vous avez vous-même joué dans la réalisation paisible et harmonieuse de cette transformation tout à fait remarquable.

Au nom de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes, je tiens à vous exprimer notre admiration pour la manière pacifique dont vous avez transformé votre pays en profondeur et pour l'esprit de tolérance et de réconciliation qui a guidé cette transformation.

[Traduction]

En libérant l'Afrique du Sud de ses liens, vous avez aussi libéré son immense potentiel au service de la paix et de la stabilité dans le monde. En l'espace de quelques années, depuis que vous êtes président, l'Afrique du Sud a repris la place qui lui revient au sein de l'ONU, de l'OUA et de l'Organisation mondiale du commerce.

 

. 1045 + -

Votre pays est devenu un partenaire vital dans la promotion de la sécurité dans le monde. Et il est tout à fait approprié que le Commonwealth, qui avait fermé ses portes à l'ancienne Afrique du Sud, tienne la prochaine réunion des dirigeants dans la nouvelle Afrique du Sud, sous votre présidence.

Dans le même esprit qui a inspiré notre appui à votre lutte historique, aujourd'hui nos deux pays travaillent ensemble à faire régner la paix et la justice dans le monde, à instituer une cour pénale internationale, à mettre fin à l'exploitation du travail des enfants, à étendre le traité de non-prolifération. Et, bien sûr, à titre de partenaires de la toute première heure, au processus d'Ottawa et à l'interdiction internationale des mines antipersonnel.

Tout comme les Canadiens ont aidé à mettre fin au régime de l'apartheid, nous aidons maintenant à bâtir la nouvelle Afrique du Sud. Ainsi, nous travaillons à améliorer l'accessibilité et la qualité de l'éducation et à rétablir le système d'administration de la justice. Nous tirons le meilleur parti des technologies de l'information pour relier les jeunes Sud-Africains à notre Rescol. Et nous multiplions les liens commerciaux entre nos pays. Or, ces liens sont un élément vital du développement économique de l'Afrique du Sud. Le fait que vous soyez accompagné d'une délégation commerciale impressionnante et les importantes réunions d'affaires que vous tiendrez au Canada en témoignent.

[Français]

Monsieur le Président, si les Canadiens s'intéressent autant à l'Afrique du Sud, ce n'est pas seulement en raison des luttes du passé, mais aussi des espoirs qu'offre son avenir—l'avenir de l'humanité.

Après un siècle de conflits et de génocides, nous croyons que le seul espoir qui nous est permis est d'apprendre à vivre ensemble dans l'harmonie et la tolérance. En Afrique du Sud, vous travaillez à édifier une société sur ces principes. Vous rejetez la séparation fondée sur la race, la langue ou la religion. Vous avez commencé à abattre les murs de la haine et à bâtir les ponts de la compréhension. Une nouvelle société pour un nouveau millénaire. Une société plurilingue et multi-ethnique. Une société qui puise sa force dans la diversité, et dont l'âme et l'inspiration prennent racine dans le sentiment de notre humanité commune.

Au Canada, à notre façon bien modeste, nous avons tenté d'en faire autant. Mais sans ce lourd poids de l'histoire qui a pesé sur votre pays pendant une bonne partie de notre siècle. Nous partageons les mêmes buts et les mêmes valeurs, sinon les mêmes expériences.

Si, après des décennies de haine et d'oppression, vous parvenez à bâtir une société nouvelle, alors nous pouvons espérer des lendemains un peu meilleurs pour ce monde affligé à la veille d'un nouveau millénaire.

[Traduction]

Voilà assurément l'inspiration que l'Afrique du Sud offre aujourd'hui au monde. Et celle que vous offrez vous-même. On dit souvent que le monde d'aujourd'hui compte trop peu de héros.

C'est peut-être vrai. Mais aujourd'hui, nous sommes en présence d'un véritable héros de notre temps. Rares sont ceux qui, à notre époque, voire au cours des siècles, ont incarné comme vous l'esprit de liberté qui habite en chacun de nous.

 

. 1050 + -

Votre lutte a été une inspiration pour tous les hommes et femmes épris de liberté. Mais, en un sens, le courage, l'optimisme et la générosité d'esprit que vous démontrés une fois votre lutte terminée ont été encore plus inspirants. Vous nous avez enseigné que la souffrance ne conduit pas seulement à l'amertume et à la désillusion, mais aussi à la sagesse et à la compassion. Et à un monde meilleur.

Mesdames et messieurs, j'ai l'honneur de vous présenter le dirigeant de son pays, l'homme d'État de son continent et un héros pour le monde entier, le président Nelson Mandela.

M. Nelson Mandela (Président de la République sud-africaine): Monsieur le Président, honorable premier ministre, excellences, mesdames et messieurs, hier, j'avais l'honneur de m'adresser au Congrès des États-Unis d'Amérique. Vu la chaleur de la réception qui m'a été faite, j'ai confié aux membres du Congrès un de mes anciens rêves.

Je leur ai dit que l'un de mes rêves les plus chers avait été de devenir champion du monde de boxe dans la catégorie des poids lourds. Je leur ai dit que leur réception avait été si chaleureuse que je me sentais euphorique au point de penser à défier le champion en titre, Evander Holyfield. Je peux répéter cette confidence, car la réception que j'ai reçue ici n'est pas moins chaleureuse que celle que j'ai reçue hier.

Je sais que les étrangers sont rarement invités à s'adresser à cette auguste institution de la démocratie canadienne qui a produit des leaders de renommée internationale.

Que l'on m'accorde cet honneur deux fois en huit ans ne peut être interprété que comme un hommage de la population canadienne, à qui nous devons tant, à la population d'Afrique du Sud, ainsi qu'une expression du partenariat qui existe entre nous.

Lorsque je me suis adressé à vous en 1990, c'était en tant que combattant pour la liberté, en tant qu'individu toujours privé de la citoyenneté de son propre pays, en tant que personne cherchant votre appui pour parvenir à effectuer une transition irréversible vers la démocratie.

 

. 1055 + -

Je m'adresse à vous aujourd'hui en tant que représentant élu du peuple sud-africain pour vous remercier encore une fois de nous avoir aidé à mettre fin à notre oppression, pour l'aide que vous nous avez apportée pendant notre transition et à présent pour votre partenariat dans l'édification d'une vie meilleure pour tous les Sud-Africains. Nous vous serons à jamais redevables.

Certes, nous avons encore un bon bout de chemin à faire avant que ne soit réalisée notre vision d'une vie meilleure pour tous, mais il s'est opéré une grande transformation en Afrique du Sud depuis 1990 et de solides assises ont été établies.

L'expérience de tous les peuples enseigne que la sécurité et la stabilité de notre démocratie ne seront assurées que si nous réussissons à unir ceux qui étaient engagés dans un conflit et que si nos libertés nouvelles contribuent à une amélioration des conditions de vie de notre peuple.

En ce 24 septembre, l'Afrique du Sud célèbre un des ses jours nationaux les plus importants. En effet, le Jour du patrimoine vise à souligner la riche diversité de notre peuple. Au moment où je vous parle, des représentants de toutes les communautés ethniques, culturelles et linguistiques sont rassemblés à l'occasion d'une conférence qui a pour objet de donner une forme institutionnelle à notre engagement constitutionnel en faveur de la promotion et du respect des droits des communautés.

Pour que le souvenir de l'injustice historique et des violations des droits de la personne cesse de créer des obstacles à l'unité nationale, la Commission de la vérité et de la réconciliation nous a aidés à faire face à notre terrible passé. Quelque pénible et imparfait qu'il ait été, le processus nous a conduit, dépassant toutes nos espérances, vers une compréhension commune de notre histoire.

Si nous mettons encore l'accent sur l'union des divers secteurs de notre société, c'est que l'unité et la collaboration de toutes les structures de notre société sont essentielles à la reconstruction et au développement de notre société, lesquels auront pour effet de faire disparaître l'héritage de pauvreté et d'inégalité que nous a légué l'apartheid.

Il y a bien sûr des différences entre nous, comme c'est le cas dans toutes les sociétés démocratiques, tout particulièrement dans une société comme la nôtre qui émerge d'un passé difficile, mais on arrive à les aplanir grâce au respect accordé à notre nouvelle démocratie et à un appui global des politiques gouvernementales.

Nous avons tout d'abord réalisé d'importants progrès dans l'atteinte de notre objectif de fournir les commodités de base, électricité, eau potable, installations sanitaires, logements et écoles, à des millions de gens qui n'y avaient toujours pas accès.

Nos politiques économiques ont permis de mettre fin à des années de stagnation et de faire naître une croissance soutenue depuis 1994, en plus d'accroître notre productivité et le nombre de nos exportations grâce à l'orientation que nous donnons à l'économie dans un environnement de concurrence mondiale.

Nous connaissons des problèmes et des défis très sérieux. Ce qui importe toutefois, c'est que nous y faisons face et que nous sommes confiants de pouvoir les résoudre.

Par exemple, nos politiques nous permettent de créer des emplois, mais pas en nombre suffisant. C'est pourquoi le gouvernement, les travailleurs et les commerces s'unissent pour mettre au point une stratégie en vue de la création d'emplois, en préparation pour un Sommet présidentiel sur l'emploi qui se tiendra le mois prochain.

 

. 1100 + -

Au fur et à mesure que nous démocratisons notre société, créant de nouvelles institutions et en transformant d'anciennes, nous cherchons à éliminer la corruption. Les institutions du nouvel ordre démocratique prennent des mesures pour l'éliminer dans notre société. Nous avons entre autres nommé une importante commission dirigée par un juge qui a le mandat de démasquer et de déraciner la corruption dans la fonction publique et de saisir les produits de ces activités criminelles.

Le taux de criminalité est toujours beaucoup trop élevé, mais nous avons réussi à faire tourner le vent en adoptant une stratégie nationale détaillée qui prévoit entre autres la restructuration d'une force policière qui ne cherchait auparavant qu'à protéger les intérêts de la minorité et à réprimer la résistance.

S'il est vrai que notre gouvernement a fait certaines erreurs par manque d'expérience, il est également vrai que nous avons accompli beaucoup plus que l'ancien gouvernement pour notre peuple.

Nous savons qu'il reste énormément à faire. Ce qui importe, c'est que notre nation soit plus que jamais unie et déterminée à réussir et que nous ayons des amis comme le Canada pour partenaires.

Le Canada nous a été d'un appui considérable pour une grande partie de nos réalisations et l'est encore pour ce que nous sommes en train de construire.

Depuis les élections démocratiques, nos relations avec le Canada ont pris une allure nouvelle et dynamique et ne cessent de s'intensifier. Lorsque nous avons rédigé notre nouvelle constitution démocratique, nous nous sommes grandement inspirés de l'expérience canadienne.

Je voudrais profiter de cette occasion pour remercier le gouvernement du Canada pour l'assistance technique fournie à notre pays par l'intermédiaire de l'Agence canadienne de développement international et le Centre de recherches pour le développement international. Cette assistance nous a été très profitable dans les secteurs qui influent sur la transformation, en particulier, les sciences et la technologie, l'enseignement, la législation du travail et les tribunaux. Nous comptons bien que cette assistance se poursuivra.

Le fait que, depuis 1994, les échanges commerciaux entre nos pays ont triplé pour s'établir à près d'un milliard de dollars canadiens montre à quel point les relations entre nos deux pays se sont intensifiées. Elles devraient s'intensifier encore. Des représentants du secteur privé et du gouvernement qui s'occupent de questions économiques nous accompagnent dans ce voyage. Nous espérons que, réciproquement, le Canada enverra bientôt une équipe en Afrique du Sud.

Je suis également accompagné de représentants du secteur de la sécurité, venus chercher de l'aide pour la mise en oeuvre de notre stratégie de lutte contre la criminalité, ainsi que d'autres représentants du secteur de la santé.

Dans tous ces secteurs où nous avons des affinités et des aspirations communes, nous bénéficions non seulement de votre aide financière, mais aussi de votre compétence et de votre expérience.

 

. 1105 + -

Monsieur le Président, juste avant de me présenter à la Chambre aujourd'hui, j'ai eu l'honneur de dévoiler, à votre Monument des droits de la personne, une plaque en l'honneur de John Humphrey, auteur de la première version de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Je voudrais, si vous me le permettez, rendre hommage à cet homme qui a contribué à façonner la philosophie centrale de votre pays et qui s'est consacré à la défense des droits de la personne partout dans le monde.

Votre pays et le mien unissent leurs efforts et prennent des mesures concrètes pour faire respecter les droits que nous appuyons.

Nous pensons notamment au travail acharné effectué par le Canada et d'autres pays pour faire ratifier la convention interdisant les mines antipersonnel. Nous étions très fiers, en décembre dernier, d'être le troisième pays, après le Canada et la Norvège, à signer la convention, ici même, à Ottawa.

Le Canada et l'Afrique du Sud ont également joué un rôle dans l'adoption récente du Code criminel international.

L'Afrique du Sud est de plus en plus souvent appelée à participer à des opérations de maintien de la paix en Afrique australe et partout sur le continent africain. Nous sommes disposés à faire tout en notre pouvoir, avec les ressources limitées à notre disposition, dans le cadre d'organisations multilatérales, que ce soit les Nations Unies, le Commonwealth, le mouvement des non-alignés, l'Organisation de l'unité africaine ou la Communauté pour le développement de l'Afrique australe.

Nous croyons en un nouvel ordre international plus humain où les différends, bien qu'inévitables, ne seront pas et ne devront pas être réglés par la force des armes. Nous aspirons au règlement pacifique des différends, car c'est la seule façon pour l'humanité de prospérer.

C'est dans ce contexte que l'Afrique du Sud a été appelée, ces derniers jours, à participer à une initiative régionale conjointe de sécurité visant à assurer un certain degré de paix et de stabilité afin d'aider le gouvernement démocratiquement élu d'un pays voisin, à la demande de ce dernier.

Encore là, nous voyons le Canada comme un partenaire. Nous reconnaissons Lester Pearson comme étant le fondateur du maintien de la paix tel que nous le connaissons aujourd'hui, grâce à son intervention novatrice dans la crise du canal de Suez.

De la même façon, nous reconnaissons le travail exceptionnel que le Canada fait dans ce domaine depuis de nombreuses années, que ce soit à Chypre, en Bosnie, en Somalie ou, plus récemment, dans le cadre du processus de désarmement en Irlande du Nord.

Monsieur le Président, le bilan internationaliste du Canada nous permet de croire que vous comprenez et partagez notre vision d'une renaissance africaine. Si l'histoire a décrété que notre continent, à la fin du XXe siècle, jouerait un rôle marginal dans les affaires mondiales, nous savons que nous sommes maîtres de notre destinée. Toutefois, nous savons aussi que cette renaissance ne dépend pas seulement de nos efforts puisque les problèmes auxquels nous sommes confrontés découlent de conditions qu'une nation à elle seule ne peut pas contrôler.

 

. 1110 + -

En fait, nous savons que le Canada a également été touché par les difficultés économiques que connaissent actuellement certains pays. Dans le monde interdépendant où nous vivons, riches et pauvres, forts et faibles, tous partagent un destin commun qui fait en sorte que personne ne peut jouir, de façon isolée, d'une prospérité et d'une stabilité durables.

Les leçons difficiles que nous tirons de l'économie mondiale ont été au centre des discussions lors du sommet du Mouvement des pays non alignés qui a eu lieu à Durban, dans notre pays, au début du mois. La communauté internationale ne peut fermer les yeux sur cette réalité. On a enfin lancé le débat tant attendu sur le système commercial et financier mondial.

Nous vous exhortons à vous joindre à nous pour chercher à modifier le système et ses institutions de façon à répondre aux besoins du développement et à défendre les intérêts des pauvres.

Nous nous trouverons ainsi à affirmer un des principes fondamentaux de toute société humaine, soit que notre bien-être à chacun dépend de celui des autres. Dans le monde d'aujourd'hui, cela s'applique autant aux pays qu'aux individus.

Monsieur le Président, mesdames et messieurs, ce discours est en quelque sorte un adieu. Je suis profondément reconnaissant d'avoir pu, avant de me retirer de la vie publique, visiter une deuxième fois un peuple qui a fait siennes nos aspirations. Vous avez insisté pour que les droits que le monde déclare être universels soient aussi les droits de tous les Sud-Africains.

Cependant, bien que ce soit un adieu personnel et, dans un certain sens, une fin, je sais pertinemment que c'est aussi le début d'une nouvelle relation, d'une relation plus profonde entre nos deux peuples.

Ce fut un plaisir, monsieur le Président, honorable premier ministre, mesdames et messieurs, et je vous remercie du plus profond de mon coeur.

Des voix: Bravo!

 

. 1115 + -

L'hon. Gildas Molgat (Président du Sénat): Monsieur le président et madame Machel, monsieur le Premier ministre et madame Chrétien, monsieur le juge en chef et madame, monsieur le Président, chers collègues parlementaires, mesdames et messieurs.

Monsieur le président, aucune parole ne pourra, mieux que les applaudissements que vous avez entendus ce matin, exprimer la profondeur des sentiments qu'ont les Canadiens à votre endroit.

Au nom des sénateurs du Canada, je tiens à vous remercier, votre Excellence, de nous honorer encore une fois de votre présence au Canada et d'avoir accepté de prendre la parole devant les deux Chambres réunies de notre Parlement.

Il y a un peu plus de huit ans, le 18 juin 1990, vous avez pris la parole ici-même à titre de vice-président du Congrès national africain. Alors que vous veniez d'être libéré d'une prison sud-africaine, vous êtes venu nous rencontrer pour nous demander de continuer à vous appuyer au cours des étapes finales de ce grand combat que votre peuple et vous-même avez livré contre l'apartheid et les autres formes de racisme et de discrimination. Comme vous l'aviez dit ce jour-là, votre message était très simple: il fallait faire de l'Afrique du Sud un pays uni, démocratique et non fondé sur les différences raciales.

[Français]

Le Canada lui-même n'ignore pas combien il est difficile de demeurer «un pays uni, démocratique et non racial». C'est grâce à vos qualités d'homme d'État et à la sagesse et la modération des habitants et des chefs d'Afrique du Sud que vous représentez, si vous avez pu faire d'énormes progrès vers le but que vous et vos compatriotes vous êtes fixés. Peut-être seriez-vous disposer à nous prêter conseils?

[Traduction]

Il y a dix ans, il semblait inévitable que la lutte contre le racisme institutionnalisé n'entraîne des violences et une dure guerre civile qui allait déchirer l'Afrique du Sud et laisser le pays amèrement divisé, prostré et aux prises avec des régimes antidémocratiques. C'est malheureusement ce qui s'est produit dans trop de pays qui ont dû payer terriblement cher pour se libérer d'un régime oppressif, uniquement pour retomber aux mains d'une autre puissance encore plus tyrannique.

Il y a huit ans, votre discours à notre Parlement nous avait donné l'espoir que l'Afrique du Sud échappe à un tel sort. On voyait que vos 27 années passées en prison ne vous avaient pas rendu amer. Cela vous avait plutôt conféré la sagesse et la détermination qu'il fallait pour utiliser votre immense prestige en Afrique du Sud, au Congrès national africain et dans le monde entier de manière à obtenir, par la médiation et la négociation, une Afrique du Sud unie, démocratique et non fondée sur les différences raciales.

Les thèmes de la guérison, de la réconciliation et de la reconstruction ont été largement mis à l'honneur au cours de votre inauguration à titre de président de l'Afrique du Sud. À l'époque, vous veniez de conclure un pacte et, monsieur le président, vous avez déclaré que vous vouliez:

      «...édifier une société dans laquelle tous les Sud-Africains, tant de race noire que de race blanche, seront capables de marcher la tête haute, sans aucune crainte et confiants dans leur droit inaliénable à la dignité humaine—une nation arc-en-ciel en paix avec elle-même et avec le monde.»

 

. 1120 + -

C'était là des paroles émouvantes, monsieur le président.

[Français]

Dans les années qui ont suivi votre arrivée au pouvoir, le gouvernement que vous dirigez a tenu compte de ce noble idéal, mais ce ne fut pas facile, c'était un énorme défi.

[Traduction]

Les choses n'ont pas été faciles. Transformer des structures politiques racistes, répressives et seulement en partie démocratiques où les pouvoirs internes se retrouvent entre les mains de quelques privilégiés a posé un très grand défi.

En outre, les changements politiques révolutionnaires suscitent dans la population l'espoir irréaliste de grandes améliorations sociales et économiques instantanées. Il est difficile de combler les attentes. Pourtant, avec le temps, avec votre engagement personnel profond et celui d'autres personnes comme vous, avec le soutien d'une très grande partie de votre peuple, vous apportez des changements profonds et durables dans les conditions de vie et les structures sociales de votre pays.

Vous faites plus que des pas de géant dans les affaires intérieures, vous donnez un exemple au monde. Vous exercez une influence modératrice dans le monde.

Sous votre présidence, l'Afrique du Sud est devenue un pilier de la stabilité et de la paix sur le continent africain. Au nom du Sénat du Canada, je vous remercie de partager avec nous vos connaissances sur les progrès que l'Afrique du Sud accomplit ainsi que vos vues sur la situation mondiale.

Les Canadiens se réjouissent de voir l'Afrique du Sud redevenir un participant actif du Commonwealth, des Nations Unies et d'autres organisations internationales. Nous sommes extrêmement heureux d'assister à un rapprochement constant entre nos deux pays, rapprochement dont témoigne très bien votre magnifique discours de ce matin.

[Français]

Merci d'être venu au Canada.

[Traduction]

Monsieur le président, soyez assuré que vous êtes ici au milieu d'amis.

Des voix: Bravo!

M. le Président Parent: Monsieur le président, Madame Machel, Madame Chrétien, chers collègues de la Chambre des communes et du Sénat, distingués invités...

[Français]

Les Canadiens, quels que soient leur âge et leurs occupations, ont toujours eu une grande affinité avec l'Afrique du Sud et ceux qui la peuplent.

[Traduction]

Monsieur le président, vous avez dit:

    «Je chéris l'idéal d'une société libre et démocratique dans laquelle tous les êtres humains vivraient dans l'harmonie et dans l'égalité des chances. C'est un idéal pour lequel je vis et que j'ai bon espoir de réaliser. Mais, s'il le faut, je suis prêt à mourir pour l'atteindre.»

Ni les épreuves que vous avez endurées au cours de dizaines d'années d'emprisonnement, ni les fastes du pouvoir que vous avez connus ces dernières années ne vous ont éloigné de cet idéal.

 

. 1125 + -

Les jeunes de l'Afrique du Sud ont été les premiers à partager avec vous leur idéalisme, leur enthousiasme et leur volonté de se sacrifier pour cette cause. Cependant, votre réputation a eu tôt fait de se répandre à l'étranger, et des jeunes du monde entier vous ont rendu hommage en vous nommant président honoraire des syndicats d'étudiants de leurs universités et de leurs collèges.

[Français]

Bien d'autres honneurs ont suivi, notamment le prix Nobel de la paix.

Mais surtout, ce qui vous vaut notre admiration, votre Excellence, c'est que vous n'avez jamais trahi cet idéal que vous avez fait vôtre.

[Traduction]

Monsieur le président, vous auriez pu prêcher et pratiquer la politique de la vengeance et du châtiment, mais, au lieu de cela, monsieur, vous avez employé votre énergie et votre influence à favoriser le processus de rétablissement et de réconciliation.

Monsieur le président, vous avez opté pour la voie de la réforme politique comme moyen de susciter un changement pacifique dans le coeur et l'esprit des gens, ainsi que dans la société. C'est le message que vous avez livré au Parlement canadien il y a huit ans, et c'est l'engagement que vous avez pris lorsque vous avez accédé à la présidence de l'Afrique du Sud. Monsieur, vous avez tenu parole.

Je pèse bien mes mots. Vous nous faites honneur, à nous tous qui sommes ici aujourd'hui. Vous faites honneur à la population canadienne. Vous faites honneur à la Chambre des communes.

Lorsque les historiens relateront les événements du XXe siècle, à côté des noms de géants, comme Mahatma Gandhi et Martin Luther King Jr., qui ont fait avancer les causes de la paix et de la démocratie, ils inscriront celui de Nelson Mandela.

Nous remercions Dieu de nous avoir donné Nelson Mandela. Vous avez rendu le monde meilleur, monsieur, et nous vous en sommes reconnaissants.

Des voix: Bravo!