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36e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 216
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 27 avril 1999
AFFAIRES COURANTES |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Peter Adams |
PÉTITIONS |
La pornographie juvénile |
M. Eric Lowther |
Les droits de la personne |
M. Paul Szabo |
Les essais nucléaires |
M. Svend J. Robinson |
Le logement au Nunavik |
M. Guy St-Julien |
Les droits des grands-parents |
M. Jack Ramsay |
La fiscalité |
M. Jack Ramsay |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Peter Adams |
L'hon. Ralph E. Goodale |
L'hon. Ralph E. Goodale |
Mme Eleni Bakopanos |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—Le Kosovo |
Mme Alexa McDonough |
Motion |
M. Gordon Earle |
Amendement |
M. Jean-Paul Marchand |
M. Ted McWhinney |
M. Ted White |
M. Ted McWhinney |
M. Ted White |
M. Bob Mills |
M. Svend J. Robinson |
M. Jean-Paul Marchand |
M. Daniel Turp |
M. Ted McWhinney |
M. André Bachand |
M. Sarkis Assadourian |
M. Gordon Earle |
M. Yvon Godin |
M. Murray Calder |
M. Jean-Paul Marchand |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Ted McWhinney |
M. Daniel Turp |
M. Lynn Myers |
Mme Elinor Caplan |
M. John Bryden |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Preston Manning |
M. Gilles Duceppe |
Mme Alexa McDonough |
M. André Bachand |
M. Jim Hart |
M. Peter Goldring |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
M. René Laurin |
M. John Williams |
M. David Price |
M. Gordon Earle |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
M. Leon E. Benoit |
M. Leon E. Benoit |
M. Clifford Lincoln |
M. Gordon Earle |
M. René Laurin |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LES CADETS DE L'AIR |
M. Bryon Wilfert |
LA LIBERTÉ DE LA PRESSE |
M. Howard Hilstrom |
L'INDUSTRIE MINIÈRE |
L'hon. Charles Caccia |
L'ASSOCIATION INTERNATIONALE DES POMPIERS |
Mme Judi Longfield |
LA LEUCÉMIE |
M. Jim Abbott |
LA VIOLENCE CHEZ LES JEUNES |
M. Gurbax Singh Malhi |
LE GOUVERNEMENT DU QUÉBEC |
M. Nick Discepola |
LES ANCIENS COMBATTANTS |
M. Bob Wood |
LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE |
M. Eric Lowther |
LES JEUNES CONTREVENANTS |
M. Richard Marceau |
LA MINISTRE QUÉBÉCOISE DES RELATIONS INTERNATIONALES |
M. Denis Paradis |
LE CANCER |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
LE LOGEMENT |
Mme Carolyn Parrish |
LA SOCIÉTÉ IBM CANADA |
M. Jim Jones |
LES CANADIAN RADIO MUSIC AWARDS |
M. Mauril Bélanger |
LE SPORT AMATEUR |
M. Stéphane Bergeron |
LE FRASER |
M. Grant McNally |
LES PENSIONS |
Mme Michelle Dockrill |
LE CANCHILD CENTRE |
M. Peter Adams |
QUESTIONS ORALES |
LE KOSOVO |
M. Preston Manning |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Preston Manning |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
M. Preston Manning |
L'hon. Herb Gray |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Lloyd Axworthy |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Daniel Turp |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Daniel Turp |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Lloyd Axworthy |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Lloyd Axworthy |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. Herb Gray |
M. Jim Hart |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
M. Jim Hart |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
LES BOURSES DU MILLÉNAIRE |
M. Bernard Bigras |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. Bernard Bigras |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LE KOSOVO |
M. Bob Mills |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Bob Mills |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LE SANG CONTAMINÉ |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Allan Rock |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Allan Rock |
LA JUSTICE |
M. Eric Lowther |
L'hon. Anne McLellan |
M. Eric Lowther |
L'hon. Anne McLellan |
LE SPORT AMATEUR |
Mme Caroline St-Hilaire |
M. Mauril Bélanger |
L'OTAN |
L'hon. Sheila Finestone |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS |
M. Chuck Cadman |
L'hon. Anne McLellan |
M. Chuck Cadman |
L'hon. Anne McLellan |
LES PENSIONS |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Marcel Massé |
M. Pat Martin |
L'hon. Marcel Massé |
LA SÉCURITÉ DANS LE TRANSPORT AÉRIEN |
M. Bill Casey |
L'hon. David M. Collenette |
M. Bill Casey |
L'hon. David M. Collenette |
LE KOSOVO |
M. Paul Szabo |
L'hon. Lucienne Robillard |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Chuck Strahl |
M. Wayne Easter |
LES JEUNES CONTREVENANTS |
M. Michel Bellehumeur |
L'hon. Anne McLellan |
LES PENSIONS |
Mme Bev Desjarlais |
L'hon. Marcel Massé |
LA DEVCO |
M. Gerald Keddy |
L'hon. Ralph E. Goodale |
LE KOSOVO |
M. John Cannis |
L'hon. Diane Marleau |
LE HOCKEY |
M. John Nunziata |
L'hon. John Manley |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Mike Scott |
L'hon. Jane Stewart |
LE CLONAGE HUMAIN |
Mme Christiane Gagnon |
L'hon. Allan Rock |
LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA |
L'hon. Lorne Nystrom |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
DEVCO |
M. Gerald Keddy |
L'hon. Ralph E. Goodale |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
La période des questions |
M. Jim Hart |
L'hon. Don Boudria |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—La crise au Kosovo |
Motion |
M. Paul Crête |
Mme Monique Guay |
M. John McKay |
M. Jay Hill |
M. Jim Karygiannis |
M. Alex Shepherd |
M. Jim Karygiannis |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Peter Mancini |
M. Jim Karygiannis |
M. John Bryden |
M. Jean-Guy Chrétien |
M. Daniel Turp |
M. Steve Mahoney |
M. Daniel Turp |
M. Jim Karygiannis |
M. Norman Doyle |
M. Jim Karygiannis |
M. Gerald Keddy |
M. Ted White |
M. Ted White |
M. Ken Epp |
M. John Bryden |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
L'HÉPATITE C |
Motion |
M. Greg Thompson |
Mme Elinor Caplan |
M. Gurmant Grewal |
Mme Pauline Picard |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Greg Thompson |
MOTION D'AJOURNEMENT |
L'habitation |
Mme Libby Davies |
Mme Carolyn Parrish |
Le commerce international |
M. Peter Stoffer |
Mme Eleni Bakopanos |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 216
CHAMBRE DES COMMUNES
Le mardi 27 avril 1999
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Français]
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 15 pétitions.
* * *
[Traduction]
PÉTITIONS
LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre une pétition émanant de Canadiens des quatre coins du pays. C'est la plus grosse pétition que la Chambre ait jamais reçue au cours de la 36e législature. Le député de Scarborough-Sud-Ouest et moi-même avons reçu cette liasse de pétitions ce matin.
Ces pétitions ont trait directement à l'appel lancé par les Canadiens des quatre coins du pays qui demandent que toutes les mesures soient prises pour que la possession de pornographie juvénile demeure une infraction criminelle très grave et que la police fédérale soit chargée d'accorder la priorité à l'application de cette loi en vue d'assurer la protection des enfants.
Je terminerai la présentation de cette pétition en lisant la requête que ces pétitionnaires formulent aujourd'hui. Ils demandent au Parlement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que la possession de pornographie juvénile demeure une infraction criminelle grave et que la police fédérale soit chargée d'accorder la priorité à l'application de cette loi en vue de la protection des enfants.
LES DROITS DE LA PERSONNE
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition signée par un bon nombre de Canadiens, y compris des électeurs de la circonscription de Mississauga-Sud que je représente, concernant les droits de la personne.
Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que les violations des droits de la personne universellement reconnus sont monnaie courante dans beaucoup de pays des quatre coins du monde, y compris l'Indonésie et le Kosovo. Ils signalent également que le Canada est reconnu dans le monde comme un grand défenseur des droits de la personne.
Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de continuer à dénoncer ces violations des droits de la personne et de chercher à faire en sorte que les responsables soient traduits en justice.
LES ESSAIS NUCLÉAIRES
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par des habitants de la Colombie-Britannique, y compris des habitants de de ma circonscription, Burnaby—Douglas, et de Halifax, en Nouvelle-Écosse, sur l'autre côte.
Les pétitionnaires s'opposent à la présence de navires propulsés par des réacteurs nucléaires et dotés d'armes nucléaires dans le détroit de Georgia. Ils font remarquer que l'accord autorisant les États-Unis à utiliser le Centre d'expérimentation et d'essais maritimes des Forces canadiennes (CF METR), à Nanoose Bay, a expiré en juin 1996, que la guerre froide est terminée et qu'il s'agit là d'installations qui avaient été prévues du temps de la guerre froide, que ce plan d'intervention en cas d'urgence nucléaire reconnaît le risque d'une telle urgence au CF METR, enfin que le CF METR est situé sur des terres et dans des eaux qui font partie des revendications territoriales de la première nation Nanoose.
Les pétitionnaires demandent dont qu'il soit mis fin à l'entente entre le Canada et les États-Unis, que l'on interdise immédiatement la présence dans les eaux et les ports de la Colombie-Britannique de navires ou d'armes nucléaires. Ils demandent aussi que l'on règle en priorité les revendications territoriales de la première nation Nanoose, et que l'on convertisse le CF METR à des fins pacifiques.
[Français]
LE LOGEMENT AU NUNAVIK
M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais déposer une pétition provenant de la communauté inuit de Quaqtaq au Nunavik.
Selon les pétitionnaires, à l'heure actuelle, 16 à 20 personnes habitent des logements de trois chambres à coucher. Les Inuits trouvent extrêmement troublantes les conditions de logement au Nunavik et considèrent cette situation comme très intolérable. Elle contribue à l'incidence élevée de la tuberculose, des maladies infectieuses et des problèmes sociaux.
Le gouvernement fédéral doit assumer ses obligations en vertu de la Convention de la Baie James et du Nord québécois concernant le logement au Nunavik.
[Traduction]
LES DROITS DES GRANDS-PARENTS
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui deux pétitions à la Chambre.
La première, signée par plus de 200 personnes, demande à la Chambre de modifier la Loi sur le divorce afin de protéger les droits de visite et de garde des grands-parents à l'égard de leurs petits-enfants en cas de divorce.
LA FISCALITÉ
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, ma deuxième pétition est signée par un certain nombre d'habitants de Crowfoot qui demandent au Parlement de réduire les impôts d'au moins 20 p. 100 et d'abolir la TPS.
* * *
[Français]
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui aux questions nos 219, 220 et 223. .[Texte]
Question no 219—M. Rick Borotsik:
À combien évalue-t-on le coût total des 49 assemblées publiques que tient actuellement la Commission canadienne du blé sur les recommandations du juge Willard Estey suite à l'examen de la manutention et du transport du grain?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): La Commission canadienne du blé a organisé 61 réunions en tout dans les Prairies pour lui permettre de mener à bien ses consultations avec les producteurs en matière de transport du grain. Le prix total de ces réunions n'a pas encore été comptabilisé. On estime à 40 000 $ le coût de la location des salles et de la publicité, coûts auxquels devront s'ajouter les frais de déplacement.
Question no 220—M. Rick Borotsik:
Quelle sera la compensation monétaire versée à chaque titulaire de carnet de permis de la Commission canadienne du blé dans le cadre du règlement des plaintes touchant le niveau de service par le CN et le CP, une fois soustraits les frais juridiques engagés par la Commission?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Les dédommagements obtenus à partir du règlement avec le CN ont été répartis entre les comptes de mise en commun de la Commission canadienne du blé. Les frais relatifs aux démarches s'élevaient à 2,7 millions de dollars, dont les frais juridiques. Ce règlement comportait également des dispositions relativement aux abattements sur les tarifs dont les producteurs ont bénéficié dès la campagne 1997-1998 et dont ils bénéficieront pour la durée du règlement. En raison du caractère confidentiel du règlement, le montant de ce règlement n'a pas été rendu public. Le montant du règlement par permis de livraison dépendra de la participation du producteur aux différents comptes de mise en commun.
Le règlement avec le CP est estimé à 15 millions de dollars. Le produit en sera versé à la CCB en 1999 et 2000 et puis réparti aux producteurs par l'intermédiare des comptes de mise en commun. Pour établir le montant de ce règlement, il a été tenu compte des frais juridiques. Le montant du règlement par permis de livraison dépendra de la participation du producteur aux différents comptes de mise en commun.
Question no 223—M. Paul Forseth:
Au sujet des divorces survenus au Canada au cours de chacune des années de 1994 à 1998, le ministère de la Justice pourrait-il indiquer le nombre exact de cas qui ont été réglés hors cours?
Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Le Bureau d'enregistrement des actions en divorce du ministère de la Justice existe depuis qu'a été mise en oeuvre la Loi sur le divorce, en 1968. Le Bureau se donnait essentiellement pour mission d'établir un mécanisme permettant d'informer les tribunaux et les parties de deux demandes de divorce présentées dans des provinces différentes à l'égard du même couple.
À l'aide des règles de compétences énoncées aux paragraphes 3(2) et 3(3) de la Loi sur le divorce, le Bureau informe le tribunal de son droit de procéder aux demandes de divorce présentées.
Les données ci-dessous, recueillies par le Bureau, indiquent par année de calendrier, le nombre de demandes de divorce qui furent accordées sans avoir eu à être entendu par le tribunal: 1994, 66 197; 1995, 66 200; 1996, 58 405; 1997, 56 258; et 1998, 57 335.
[Français]
M. Peter Adams: Monsieur le Président, je suggère que les autres questions soient réservées.
Le Président: Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LE KOSOVO
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD) propose:
Que la Chambre demande au gouvernement d'intensifier et d'accélérer les efforts en vue de trouver une solution diplomatique à la crise au Kosovo en assurant la participation de la Russie et des Nations Unies et d'exhorter l'OTAN à ne pas prendre d'actions qui favoriseraient l'extension du conflit et qui nuiraient à la recherche d'une solution diplomatique.
—Madame la Présidente, en lançant le débat ici ce matin, j'aimerais expliquer pourquoi le Nouveau Parti démocratique a décidé de consacrer cette journée désignée, l'une sur trois environ dans l'année, à l'étude d'une motion sur le Kosovo.
Dans les quelques minutes qui me resteront, puisque j'ai l'intention de partager mon temps avec mon collègue de Halifax-Ouest qui est porte-parole du NPD en matière de défense, j'aimerais préciser ce que cette résolution signifie vraiment par rapport au point critique, à la situation critique à laquelle nous a menée notre tentative en vue de trouver une solution diplomatique rapide et pacifique à l'horrible crise humanitaire qui secoue le Kosovo.
Depuis le début de la crise du Kosovo, en mars 1998 il y a tout juste un an, de 700 000 à 800 000 Kosovars ont été chassés de leur patrie. Environ 400 000 autres, peut-être même davantage, ont été déplacés à l'intérieur du Kosovo. De plus, l'infrastructure civile de la Yougoslavie a subi des dommages énormes par suite des quelque 3 000 frappes aériennes effectuées par les avions de combat de l'OTAN.
Les Canadiens veulent qu'on leur dise, et qu'on leur dise maintenant, que leur gouvernement fait tout ce qu'il peut pour mettre fin à ces hostilités, pour mettre un terme aux atrocités commises par le gouvernement yougoslave de Milosevic ainsi qu'aux agressions militaires. Ils veulent qu'on leur dise que les Albanais du Kosovo pourront retourner vivre dans leur pays en toute sécurité, et qu'ils y trouveront la paix, le confort et la sécurité.
C'est là l'objectif que nous visons. C'est d'ailleurs là l'objectif qui est censé avoir entraîné le Canada dans ce conflit. Nous ne devons pas le perdre de vue dans les jours à venir.
Je peux dire franchement que les membres du Nouveau Parti démocratique, de même que bon nombre d'autres Canadiens, sont très désappointés de la portée et du rythme des efforts diplomatiques engagés jusqu'à maintenant par le gouvernement du Canada. Au lieu de faire preuve de diplomatie franche et créatrice, le gouvernement s'est contenté de reprendre et de suivre les politiques des Américains et les tactiques de l'OTAN.
Lester Pearson aurait profité de la longue tradition du Canada et du rôle de promoteur de la paix qu'a joué notre pays pour faire le consensus autour de solutions pacifiques. Il l'aurait fait même au risque d'offenser les grandes puissances. Au lieu de cela, notre premier ministre s'écrase devant l'OTAN et fait ce qu'on lui demande. Les dernières semaines ont été truffées d'occasions manquées où le Canada aurait pu user de son influence, de façon indépendante, pour promouvoir des initiatives diplomatiques prometteuses, mais il ne l'a pas fait.
Le débat d'aujourd'hui n'a pas pour but de nous permettre de nous lamenter sur nos échecs, nos omissions et nos occasions ratées. C'est plutôt le moment—et c'est l'objet de la motion et du débat d'aujourd'hui—de nous concentrer avec détermination sur ce que le Canada peut maintenant faire, sur ce que le Canada doit maintenant faire, en tant que précurseur, pour jouer un rôle clé dans le règlement diplomatique et pacifique de la crise au Kosovo.
[Français]
Il faut maintenant donner un coup de pouce à la diplomatie. C'est l'objectif de cette motion, c'est l'objectif de ce débat. Il faut concentrer nos efforts sur ce que le Canada peut faire, sur le leadership que le Canada doit assumer pour favoriser l'atteinte d'une solution diplomatique.
[Traduction]
À n'en pas douter, une solution diplomatique existe, même limitée. Ça ne saute pas aux yeux, ce n'est pas garanti, mais la possibilité existe. La possibilité est là, puisqu'il y a des pays qui ont pris des initiatives. L'Italie, l'Allemagne, la Russie et les Nations Unies sont intervenues, et Dieu sait qu'on a besoin de la participation des Nations Unies.
Ironie du sort, depuis des mois le Canada célèbre le fait qu'il a obtenu un siège au Conseil de sécurité des Nations Unies. Pourtant, à la première occasion d'utiliser son influence au Conseil de sécurité pour faire avancer la cause de la paix, le Canada y renonce. On a dit que rien ne peut se faire au Conseil de sécurité. Cependant, ce forum peut toujours être utile et nous devons nous en servir. Il faut absolument que l'ONU se saisisse de cette question, comme elle aurait dû le faire bien avant.
Au cours de la dernière semaine, et plus particulièrement au cours des derniers jours, on a pu constater une évolution prometteuse. Au début du conflit, le Nouveau Parti démocratique a beaucoup insisté pour que le Canada joue un rôle de chef de file et persuade l'OTAN que seule une force véritablement internationale de maintien de la paix était acceptable en Yougoslavie et que l'OTAN ne devait pas insister sur une force dominée par elle comme condition indispensable à l'obtention de la paix. Aujourd'hui, l'OTAN s'est enfin rangée à cette position.
Au début du conflit, il était clair que Milosevic restait inflexible et refusait catégoriquement toute présence internationale au Kosovo. Aujourd'hui, il semble avoir accepté non seulement qu'une présence internationale était nécessaire, mais également que des troupes internationales devaient garantir la sécurité des Kosovars albanais qui seraient rapatriés ou qui étaient restés au Kosovo.
Au début du conflit, le Nouveau Parti démocratique a exhorté le Canada à persuader l'OTAN de s'engager à arrêter les frappes si Milosevic mettait fin aux atrocités et acceptait de se rendre à la table des négociations. Nous ne sommes pas encore arrivés au but, mais nous en approchons lentement. La Russie prend maintenant des initiatives diplomatiques. On observe des signes de brèches dans la détermination des Yougoslaves à poursuivre les atrocités. Le courageux vice-premier ministre de Yougoslavie admet maintenant que son pays doit prendre des initiatives en faveur de la paix.
Il est maintenant temps que le Canada joue un rôle décisif et assuré dans l'intensification et l'accélération de la recherche de solutions diplomatiques et, inversement, qu'il ne fasse rien qui puisse intensifier les mesures militaires au Kosovo.
Le gouvernement a enfin admis que la participation de la Russie était fondamentale. Tous ceux qui suivent l'évolution de la situation au Kosovo savent que la participation de la Russie à la recherche d'une solution diplomatique et pacifique est indispensable. Cela veut dire que, si le gouvernement veut qu'on le prenne au sérieux comme gardien de la paix au Canada et dans le monde entier, le Canada doit absolument faire preuve de leadership et persuader l'OTAN de renoncer à cette folie qu'est l'imposition d'un embargo pétrolier et des blocus militaire et naval, car cela, sans nul doute, ferait disparaître toute possibilité d'une participation de la Russie à la recherche d'une solution.
Il est temps que le gouvernement du Canada fasse preuve de leadership et de courage. Ce n'est pas le moment d'élargir le conflit dans les airs, en mer et au sol. Le Canada ne doit jouer aucun rôle dans un blocus naval mal conçu, qui ne servira qu'à aviver les tensions avec les Russes et les Yougoslaves.
Enfin, nous devons insister pour que le Canada n'envoie pas les chasseurs CF-18 supplémentaires qu'il s'était engagé à fournir. C'est essentiel si nous voulons montrer que nous sommes sérieux lorsque nous disons que l'intensification de l'effort militaire va faire obstacle à la recherche d'une solution diplomatique. Ce serait un geste important, un geste concret qui mettrait en évidence notre engagement à trouver une solution diplomatique à la crise du Kosovo. Comme Canadiens et comme citoyens du monde, nous ne devons pas faire moins.
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui au sujet de cette très importante motion.
Jeudi dernier, j'ai eu l'occasion de me rendre à Winnipeg pour assister aux funérailles d'un très proche parent. Les cérémonies funèbres nous rappellent la dure réalité de la vie et de la mort, ce que nous faisons sur terre et ce que nous accomplissons pendant notre vie.
Durant mon séjour à Winnipeg, j'ai également eu la chance de rendre visite à mon fils qui vit dans cette ville. Mon fils est un bon jeune homme et je ne dis pas cela parce que c'est mon fils mais parce que c'est la vérité. C'est un jeune homme paisible dont je suis très fier.
Pendant que nous étions assis au restaurant, à manger et parler, il m'a dit: «Papa, j'ai été impliqué dans une bagarre il y a quelque temps». Cela m'a beaucoup surpris. J'ai dit: «Tu t'es battu?» Il m'a répondu: «Oui. Je me rendais à la maison et j'ai vu sur mon passage un individu couvert de sang face à un autre, plus costaud, qui le frappait et s'apprêtait à le frapper de nouveau. Je suis intervenu et j'ai dit à l'agresseur que cela n'était pas nécessaire. Je lui ai demandé de se calmer et de rentrer chez lui, en lui disant que tout était terminé.»
Mon fils essayait de rétablir la paix. Il s'est ensuite tourné vers l'individu qui avait été tabassé pour lui dire qu'il était inutile de continuer de se battre et qu'il devrait rentrer chez lui. Celui-ci l'a écouté et est parti. Lorsque mon fils s'est retourné, pensant que tout était terminé, l'agresseur et deux autres individus lui sont tombés dessus. Deux d'entre eux l'ont attaqué de part et d'autre et les trois le retenaient. Il les a regardés et leur a dit: «Vous devez vous y mettre à trois contre un.» Je présume qu'il a égratigné leur image de machos, car un des gars a dit: «Lâchons-le, nous le prendrons un à un.» L'agresseur qui avait roué de coups l'autre gars s'est alors avancé et mon fils, dont les cours de judo qu'il avait suivis dans sa jeunesse lui sont revenus à la mémoire, a eu tôt fait de prendre le dessus. Il a jeté le gars au sol et l'y a maintenu, l'empêchant de bouger. Les autres ont été très surpris, car ils ont dit à mon fils: «Laisse-le se relever et nous nous en irons,» puis ils ont reculé.
J'étais déchiré par des opinions contradictoires à la suite de ce récit. J'ai dit à mon fils: «Jamie, je suis fier de toi. Tu as bien agi. Tu t'es interposé pour essayer d'aider quelqu'un qui était manifestement en détresse.» Toutefois, j'ai également ajouté: «La situation était assez intéressante. Tu as eu de la chance, car qui sait ce qui aurait pu se passer. Ces gens auraient pu avoir des armes sur eux et auraient pu t'attaquer pendant que tu maintenais le gars au sol.» Les risques étaient énormes.
Le fin mot de l'histoire, c'est qu'il devait faire un choix. Il a choisi de courir un risque pour tenter d'aider quelqu'un qui était en détresse, qui était désavantagé et qui se faisait meurtrir et rouer de coups.
Je raconte cette histoire parce qu'elle a des similitudes avec le conflit au Kosovo, dans lequel des gens doivent faire des choix difficiles qui entraînent des risques. C'est ce qui a été fait au début du conflit. À mon avis, personne ne met en doute le motif qui a conduit à une participation au conflit. Nous nous efforçons de venir en aide à des personnes que l'on exploite et nous cherchons à mettre un terme à la souffrance et au bain de sang. Voilà la motivation qui a mené à une participation soutenue au conflit.
Cependant, nous sommes maintenant à un point où nous devons examiner sérieusement ce qui est proposé dans cette motion, c'est-à-dire l'intensification et l'accélération de nos efforts visant à trouver une solution diplomatique—et je souligne le mot diplomatique—à la crise du Kosovo.
Nous savons qu'en diplomatie c'est toujours donnant donnant. Personne ne peut dire: «Voici ce que je veux et si je ne l'obtiens pas, je ne donnerai rien en retour.» En diplomatie, chacune des parties doit faire des concessions. Les gens engagés dans le mouvement syndical le savent. À la table de négociation, il faut faire des concessions de part et d'autre.
Il y a des principes qu'il ne faut enfreindre. Par exemple, dans le cas présent, nous savons qu'il y a des principes en jeu, comme celui de l'autodétermination, notamment. Nous réaffirmons notre attachement à ce principe de base. Mais il reste que dans des négociations et en diplomatie, c'est toujours donnant donnant.
Nous exhortons vivement le gouvernement à prendre les devants dans la recherche d'une solution diplomatique faisant appel à la Russie et aux Nations Unies à cette très grave crise. Aucun d'entre nous ne doute du sérieux de cette crise. Pour s'en convaincre, il suffit de regarder à la télévision les images des populations qui souffrent des deux côtés. Nous voyons leurs souffrances et nous savons que le conflit doit cesser.
Comme je le disais, quand on se rend à des funérailles, on prend très vite conscience qu'en définitive on finit tous de la même façon, étendu sans vie dans un cercueil. Les gens se souviennent alors du bien que nous avons fait, de l'importance déterminante que nous avons eue dans la vie de quelqu'un.
Cela me rappelle un dicton religieux qui dit que si nous avons aidé quelqu'un au cours de notre vie, nous n'aurons pas vécu en vain. C'est l'objectif que nous devons tous essayer d'atteindre, soit venir en aide à quelqu'un pour que, à notre mort, nous n'ayons pas vécu en vain.
Dans le cas qui nous occupe, il s'agit de contribuer à trouver une solution diplomatique à ce conflit, à veiller à ce que rien ne l'aggrave, car cela arrive assez souvent. Cela aurait très bien pu se produire dans la situation où s'est retrouvé mon fils. Le geste qu'il a posé aurait pu intensifier le conflit, mais heureusement, il a su intervenir en calmant les esprits et en appliquant la force nécessaire pour mettre fin à un incident malheureux.
C'est parce que nous voulons que rien ne vienne intensifier ou prolonger le conflit que je propose:
Qu'on modifie la motion en remplaçant les mots «prendre d'actions» par ce qui suit:
«imposer de blocus maritime et à ne pas prendre d'actions»
[Français]
M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, je veux remercier mon collègue pour son discours.
Le député exprime sa sympathie eu égard à la situation désastreuse au Kosovo. Le Nouveau Parti démocratique semble penser que cette crise est une situation qui pourrait être réglée de la manière douce. Mais le député ne peut-il pas reconnaître que M. Milosevic a violé tous les principes humains et les valeurs humaines qu'on puisse imaginer et qu'il se classe parmi les pires tyrans qu'on puisse imaginer?
Reconnaît-il également qu'il faut des mesures extrêmement fortes pour repousser ce chef d'État qui méprise les gens, qui leur enlève leurs droits et qui vide le Kosovo? Ne comprennent-ils pas que cela prend des mesures fortes comme, par exemple, des troupes au sol au Kosovo pour repousser les armées?
Tant et aussi longtemps qu'on ne prendra pas les mesures les plus sévères contre Milosevic et le gouvernement serbe, on ne pourra pas régler ce conflit malheureux.
M. Gordon Earle: Madame la Présidente, je remercie mon collègue de ses commentaires.
[Traduction]
L'exemple que j'ai utilisé de l'intervention de mon fils dans une querelle apporte un élément de réponse. Il est intervenu dans une situation très grave, très dangereuse, où les droits fondamentaux d'une personne étaient brimés. Il a usé de diplomatie pour désamorcer le conflit, au point où il a réussi à convaincre l'une des parties au conflit de quitter les lieux.
La force prend bien des formes et le recours judicieux à des efforts diplomatiques est loin d'être faible. Explorer toutes les avenues diplomatiques n'a rien de faible. J'ai l'impression qu'elles n'ont pas toutes été examinées en détail. Il n'y a rien de mal à chercher une solution diplomatique pour tenter de mettre un terme à cette très grave situation.
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, le député d'Halifax-Ouest, ainsi que la députée d'Halifax d'ailleurs, se sont reportés aux efforts diplomatiques.
Je voudrais savoir si le député s'est penché sur le dernier plan de paix élaboré, soit le plan de paix Simitis communiqué hier par le premier ministre grec.
M. Gordon Earle: Madame la Présidente, je dois admettre que je ne connais pas tous les détails de ce plan, mais nous sommes certainement d'avis qu'il faut prendre en considération tous les efforts qui sont déployés. Nous pensons également qu'il est essentiel d'obtenir le plus de renseignements possible sur tous ces efforts.
Pour ma part, je serais certainement ravi de participer aux discussions sur ces efforts directement avec les ministres canadiens qui tentent de promouvoir ces plans. La question est importante et nous devons tous contribuer autant que possible pour qu'un plan de paix réussisse.
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Madame la Présidente, j'ai écouté attentivement le député et je me demande s'il reçoit de ses électeurs le même genre de lettres que je reçois.
Voici, par exemple, ce que Ken Timewell de ma circonscription m'a écrit: «Je vous exhorte à travailler en vue d'un solution pacifique. La solution humanitaire qu'applique l'OTAN cause trop de destruction et tue trop de monde.» Cet électeur nous invite ensuite à recourir à tout instrument susceptible de favoriser une solution diplomatique.
Le député reçoit-il de nombreuses lettres de ce genre, parce que j'en reçois certainement un grand nombre de ce temps-ci.
M. Gordon Earle: Madame la Présidente, la réponse est oui. À l'instar de nombre de mes collègues, j'en suis sûr, je reçois d'innombrables lettres de Canadiens de tout le pays que la situation inquiète et qui nous exhortent à faire de la paix notre principal objectif dans ce conflit.
Les gens se disent préoccupés par les torts qui sont causés à l'environnement, par la destruction des écoles et des immeubles historiques et par toutes les victimes que fait un conflit de ce genre. Je reçois beaucoup de lettres à cet égard.
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, la motion d'aujourd'hui nous rappelle que, avec la fin de la guerre froide, la paix fondée sur le statu quo qui a duré près d'un demi-siècle est terminée, et nous assistons maintenant à un pas en arrière historique, un anachronisme historique, le retour des conflits ethniques du genre qui existait à la fin du XIXe siècle, jusqu'à la guerre de 1914. Il est paradoxal qu'une nouvelle période de conflits ethniques qui ravive simplement de vieilles querelles commence alors même que se termine la guerre froide.
Pour en venir à l'essence du débat, je dirai que nous faisons partie, pour le meilleur et pour le pire, d'une alliance militaire qui a été conçue pour mettre fin à la guerre froide et qui a très bien fonctionné, si bien que, après la Guerre de Corée, il n'y a eu aucun affrontement direct entre les deux superpuissances ni entre les blocs rivaux. L'alliance existe. L'alliance a demandé que cette action soit prise. En tant que membre de l'alliance, le Canada a accepté les obligations.
Toutefois, cela ne veut pas dire que notre politique étrangère permanente a été mise de côté. Le Canada a toujours mis l'accent sur une diplomatie tranquille plutôt que tapageuse. Nous continuons de nous efforcer de fonctionner par l'intermédiaire de l'autorité internationale que sont les Nations Unies et à laquelle toutes les organisations régionales de sécurité sont soumises et légalement assujetties.
Les efforts continuent. Ils se poursuivent au moyen de la diplomatie discrète. Nous devons tout d'abord agir par le biais du Conseil de sécurité, où il reste possible de s'entendre à l'unanimité sur les mesures à prendre. Les efforts en ce sens se poursuivent. Le ministre des Affaires étrangères se rendra à Moscou plus tard cette semaine.
Si le Conseil de sécurité était dans une impasse, l'adoption d'une résolution de l'union pour la paix par le biais de l'Assemblée générale, qui constituerait un précédent et dont le député de Halifax-Ouest notamment a déjà parlé à la Chambre, demeurerait une possibilité. Il vaut la peine de tenter cet effort supplémentaire et d'aller à Moscou. Ce sera fait. À son retour de Moscou, le ministre des Affaires étrangères fera un arrêt à Athènes.
Depuis 25 ans et notamment au cours des dernières années, le Canada s'est montré particulièrement intéressé à promouvoir des solutions pacifiques dans les Balkans. Nous avons participé à des négociations constantes qui ont parfois semblé déboucher sur une solution et qui, pour des raisons certainement temporaires, ont ensuite semblé échouer.
Nous avons négocié pour que le conflit à Chypre prenne fin, en fonction d'un pays et de deux parlements régionaux peut-être, ou d'une autre structure à l'intérieur de ce pays. Quoi qu'il en soit, nous avons négocié afin qu'une solution soit trouvée. C'est dans ce contexte que le ministre des Affaires étrangères discutera avec le premier ministre de la Grèce de l'ambitieux plan que M. Simitis a lancé.
Le plan proposé par M. Simitis comporte des avantages que ne présentaient pas le plan mis de l'avant par l'Allemagne ou d'autres plans. Il tient compte de ce que seul un membre des Balkans peut peut-être bien comprendre, c'est-à-dire qu'il y a très rarement des droits ou des torts absolus et que la capacité de conférer un caractère diabolique à une opposition n'est pas aussi présente dans les Balkans à la fin du XXe siècle qu'elle pouvait l'être au XIXe siècle ou à une autre période.
En janvier, M. Pangalos, alors ministre des Affaires étrangères de Grèce, a fait allusion à une initiative lancée par les pays des Balkans pour trouver une solution à la situation de quasi-guerre civile qui existait à ce moment en Albanie. Cette solution a été trouvée par deux pays, la Grèce et l'Italie, voisine des pays des Balkans. À l'invitation du gouvernement de l'Albanie, les pays de la région ont envoyé une force pour restaurer la paix et dégager un consensus, qui sert aujourd'hui encore de base de fonctionnement à l'Albanie.
C'est là un précédent qu'il vaudrait la peine de reprendre. Si on agit sous l'autorité des Nations Unies, rien n'empêche cette organisation de désigner l'OTAN comme force de maintien de la paix au Kosovo lorsque les hostilités auront cessé. Cette force serait placée sous l'autorité de l'ONU. Rien n'empêcherait d'inclure dans cette force d'autres pays que ceux de l'OTAN, notamment la Russie, mais il pourrait aussi s'agir d'une force constituée par les pays des Balkans qui, on le conçoit facilement, ne participent pas au conflit. Certains ont déjà formulé cette suggestion. Il y a des membres de l'OTAN qui n'ont pas participé aux combats.
Je sais que les députés de Halifax et de Halifax-Ouest conviendront avec moi que ce sont là des initiatives dignes de mention et que toute nouvelle proposition doit être prise en considération et soumise à l'approbation des Nations Unies.
Il a été question du droit international. À certains moments, je me suis demandé si le conseiller juridique avait été bien consulté. Souvent, au cours de ma carrière, j'ai utilisé l'exemple du président Kennedy et de la crise des missiles à Cuba pour expliquer comment le droit et le pouvoir peuvent aller de pair. Lorsque le président, en sa qualité de commandant en chef, a consulté le conseiller juridique pour lui demander s'il pouvait agir comme il lui était recommandé, ses conseillers lui avaient recommandé de bombarder les missiles russes installés à Cuba. Il a rejeté cette recommandation sur l'avis de son conseiller juridique. Comme nous le savons, le président a opté pour une solution diplomatique pacifique que ses adversaires ont acceptée de bonne grâce.
Il a été question du blocus naval. Je rappelle aux députés que c'est un exemple de politiques qui évoluent. Pendant la crise des missiles cubains, selon l'avis en matière de droit international reçu par le président Kennedy, on ne pouvait recourir à un blocus pacifique que pour interdire l'accès au pays visé par ledit blocus. Les tiers ne peuvent être affectés. Le président Kennedy s'est rangé à cet avis.
Si les députés avaient pris note des déclarations du ministre de la Défense nationale, lesquelles ont été communiquées à l'OTAN, ainsi que de l'opinion exprimée par le président Chirac, laquelle concorde avec l'avis donné au président Kennedy, ils sauraient qu'on ne peut exclure des tiers en recourant à la force dans un blocus pacifique. Cet avis semble avoir été accepté.
Dans ce cas-ci, le débat à la Chambre s'est déroulé de façon constructive sans que l'on cherche à faire la une des journaux. Il faut résoudre ce problème. Il faut revenir à la formule des initiatives canadiennes menées par l'entremise des Nations Unies. Il faut faire le petit effort supplémentaire, parler aux Russes et persuader nos alliés et associés que c'est là la voie à emprunter. Ce processus est présentement en cours, bien que l'on ne l'ait pas claironné dans les médias nationaux.
La Chambre peut avoir l'assurance que nous cherchons à agir par l'entremise des Nations Unies. Nous analyserons toutes les possibilités qui pourraient mener à la paix. Une fois la paix établie, elle devrait être internationale.
Je vais dissiper les craintes de nombreux Canadiens d'origine serbe. Le Canada n'a jamais eu pour politique étrangère ou intérieure de diaboliser un membre de la collectivité. Il est clair que la reconstruction dans les Balkans après l'opération en cours doit inclure la Yougoslavie. On ne veut pas créer un vide au niveau du pouvoir comme ce fut le cas en Allemagne après la fin des hostilités en 1945. En cas de vide, toutes sortes de forces dangereuses viennent le combler. La paix et la stabilité exigent un effort d'intégration et de collaboration par l'entremise des Nations Unies.
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Madame la Présidente, je me demande si le député pourrait répondre aux lettres du type de celles que j'ai mentionnées dans mon intervention.
J'ai une autre lettre venant de M. Ken Timewell, qui s'intéresse beaucoup à cette question. M. Timewell est contre l'action militaire agressive de l'OTAN qui, selon lui, n'a fait qu'ajouter à l'instabilité de la région. Le massacre de milliers d'Albanais par l'armée serbe qui a forcé des centaines de milliers d'autres à fuir leurs maisons est, dit-il, une tragédie. Il ajoute que l'intensification de la crise par les gouvernements occidentaux, avec l'appui de l'OTAN et sans consultation des Nations Unies, est aussi une tragédie qui a multiplié le nombre de réfugiés et fait de nombreuses victimes parmi les civils. M. Timewell nous demande comment nous pouvons justifier notre appui au bombardement illégal de la région par les forces de l'OTAN.
Qu'est-ce que le député répondrait à une lettre pareille d'un de ses électeurs?
M. Ted McWhinney: Madame la Présidente, je reçois des centaines de lettres de gens que cette situation émeut profondément et qui demandent ce que l'on peut faire.
Si nous regardons les choses d'un point de vue positif, tous les partis au Parlement, à mon avis, essaient d'internationaliser l'effort, de raviver le rôle des Nations Unies et de veiller à ce que l'effort de reconstruction qui suivra une solution entièrement diplomatique, ou du moins en partie, sera mené dans un esprit de bonne entente et de compréhension. La politique canadienne n'a jamais été de réduire à néant un ennemi vaincu, s'il y a un ennemi vaincu. La politique canadienne a toujours été une politique de réconciliation. Et ce sera notre politique.
Nous devons reconnaître que la situation des réfugiés, qui a été à l'origine de l'intervention de l'OTAN, reste une partie de la solution.
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, la motion à l'étude aujourd'hui est très logique et je félicite la députée de Halifax de l'avoir présentée. Cette motion nous force à réfléchir à un certain nombre de questions importantes qui gravitent autour du conflit qui sévit dans les Balkans.
Le premier volet de la motion vise à trouver «une solution diplomatique à la crise au Kosovo». J'appuie entièrement cette position et c'est d'ailleurs ce que je préconise depuis le tout début de cette crise qui sévit dans la République fédérale de Yougoslavie. J'ai dit le 12 avril ici même à la Chambre que la seule solution possible à ce conflit est le recours à la négociation. Rien de ce que j'ai entendu depuis ne m'a fait changer d'idée à ce sujet.
La guerre civile qui sévit au Kosovo résulte d'un mélange confus de problèmes historiques, ethniques et politiques. Pour bien comprendre de quoi il s'agit, nous devons aller au-delà des belles paroles qui sont chères aux personnalités publiques.
Les combats qui ont lieu aujourd'hui ne sont pas uniquement attribuables aux politiques de Slobodan Milosevic. Toutefois, il faut reconnaître que pendant dix ans, il n'a rien fait d'autre que d'attiser de vieilles méfiances ethniques. Je ne crois pas non plus que l'appui de l'indépendance du Kosovo soit la solution idéale.
Toute tentative de résolution du conflit actuel doit tenir compte des préoccupations réelles en vue de la sécurité de tous les habitants, à la fois Serbes et Albanais du Kosovo, qui considèrent le Kosovo comme leur patrie. Une solution décrétée qui semblerait favoriser une partie au détriment de l'autre, ne ferait que préparer une autre guerre pour l'avenir.
Aucune guerre n'est vraiment inévitable. Nous pouvons toutefois facilement favoriser la tenue de nouvelles guerres en cherchant à imposer une paix que l'une ou l'autre des parties n'est pas prête à accepter. Notre intervention dans le cas présent ne devrait certes pas en arriver là. J'ai toujours considéré que l'approbation par Belgrade du plan de paix proposé à Rambouillet aurait été une première étape en vue d'une paix négociée plus définitive. La meilleure solution me semble être une autonomie substantielle du Kosovo au sein de la République fédérale de Yougoslavie, assortie de solides garanties pour les minorités ethniques. Cette autonomie ne doit absolument pas être comprise comme une contestation de la souveraineté de la Yougoslavie au Kosovo.
Nous devons faire en sorte que l'OTAN ne combatte pas pour l'avancement de la cause kosovare la plus radicale. Nous ne saurions accepter la création d'un Kosovo indépendant et militant qui serait une source d'instabilité pour ses voisins des années durant. Au contraire, les actions de l'OTAN doivent viser à assurer un règlement pacifique à long terme.
Je ne participe pas au processus d'élaboration des politiques concernant la résolution du conflit au Kosovo. Cette responsabilité incombe au gouvernement. Mais qu'il soit très clair que l'unique but de la campagne aérienne en cours est et doit être la création des conditions nécessaires à un règlement négocié. Il ne saurait être question de faire la guerre pour le plaisir de faire la guerre. Voilà pourquoi nous devons sans cesse demander au gouvernement de donner à la Chambre et aux Canadiens l'assurance que notre participation aux opérations militaires en Yougoslavie s'inscrit dans la réalisation de cet objectif, à savoir une paix négociée.
Je ne suis pas convaincu que le gouvernement se préoccupe vraiment de fournir cette assurance. Les propos que le premier ministre a tenus la semaine dernière comme quoi le Canada avaliserait simplement toute décision de l'OTAN ont de quoi nous laisser très perplexes. Il est à se demander si le gouvernement a vraiment une politique étrangère de son cru. Son refus de permettre un vote libre sur la question dénote un manque d'intérêt à faire intervenir le Parlement dans la poursuite de cette guerre.
Le deuxième aspect de la motion a trait au rôle de la Russie. Tout le monde à la Chambre conviendra que nous ne pouvons pas mettre en place un nouveau système de sécurité européen sans la participation active de la Russie.
Il est indéniable que la Russie ne peut plus faire valoir sa puissance militaire de la même façon que durant la guerre froide. Il est vrai que la Russie dépend de l'aide économique des pays occidentaux et Moscou l'admet. Toutefois, les conditions ne resteront pas toujours les mêmes. La Russie n'est jamais aussi forte qu'elle le voudrait, mais il faut garder à l'esprit qu'elle n'est jamais aussi faible qu'elle le paraît. Nous ne devons pas agir aujourd'hui d'une façon qui pourrait ébranler la volonté de la Russie d'aider à préserver la stabilité de l'Europe dans l'avenir. Toutefois, c'est ce que nous avons déjà fait dans une certaine mesure.
Au cours des cinq dernières années, Moscou s'est opposé à l'élargissement de l'OTAN. Nous avons néanmoins élargi l'alliance. Ce n'était pas une mauvaise décision, mais il faut admettre qu'elle a préoccupé Moscou.
Au cours de cette dernière année, Moscou n'a cessé de déconseiller à l'OTAN d'intervenir au Kosovo, en affirmant que la situation était beaucoup plus compliquée que certains chefs d'État des pays occidentaux nous le laissaient croire. Nous sommes néanmoins intervenus et il est possible que la guerre s'intensifie encore.
La Russie a clairement indiqué qu'elle souhaitait un règlement pacifique du conflit. Le président Eltsine a déclaré publiquement que la Russie n'interviendrait pas. Il a rejeté la demande d'armes de Belgrade. Il n'a pas tenu compte des exigences plus poussées des membres radicaux de la Douma. Il n'a fait aucun effort pour modifier le statut des deux bataillons russes qui servent actuellement auprès de la SFOR en Bosnie.
Certains députés pourraient penser que la Russie n'a pas vraiment quelque chose à faire dans la recherche d'une solution au Kosovo. Je crois exactement le contraire. En raison des actions de l'OTAN, la Russie est la seule grande puissance européenne qui reste en laquelle Belgrade peut avoir confiance pour défendre ses intérêts. Nous devons donc collaborer avec Moscou dans toute la mesure du possible. Nous devons écouter ce qu'elle dit à propos du Kosovo et des Balkans, région qu'elle connaît mieux que quiconque parmi nous.
Hier, le ministre des Affaires étrangères de Russie a déclaré qu'il ne servirait pas de courroie de transmission de nouvelles exigences de la part de l'OTAN ni de Belgrade. Il a dit que la Russie était toute disposée à favoriser un dialogue et à encourager des négociations. Je crois que nous devrions accepter cette offre. La mission de Tchernomyrdine donne à penser que le président Milosevic serait peut-être disposé à négocier. Nous ne devrions pas laisser passer cette occasion. Nous devrions encourager les Russes dans leurs efforts.
Écouter Belgrade ne signifie pas que nous devons accepter ce qu'elle dit. Cela ne nous oblige pas non plus à faire des compromis inacceptables. Pourvu que nous n'abandonnions pas les objectifs moraux et politiques fondamentaux de cette guerre, nous devrions toujours être disposés à écouter. Compte tenu de cela, j'espère que les rencontres que le ministre des Affaires étrangères fera à Moscou, plus tard cette semaine, seront couronnées de succès.
Le troisième aspect de la motion vise à «exhorter l'OTAN à ne pas prendre d'actions qui favoriseraient l'extension du conflit». Je crois que nous pouvons également être d'accord sur ce sentiment. Je suis certain que l'OTAN en conviendrait, compte tenu de ce qui s'est passé le week-end dernier. Cependant, la crainte que les actions de l'OTAN ne risquent de favoriser l'extension du conflit est mal fondée.
Il est curieux que le député de Burnaby—Douglas, un collègue de la motionnaire, ait été le tout premier orateur à appuyer l'envoi de forces terrestres. Il l'a même fait sur un ton strident, voire avec véhémence. Il y a quelques semaines, au comité, il a réclamé haut et fort une invasion terrestre immédiate du Kosovo. Je crains que cela n'entraîne inévitablement une escalade du conflit. En fait, une telle action pourrait changer radicalement la nature et l'objet de la guerre. Par conséquent, nous devons éviter avec soin pareils propos incendiaires ou d'aller dans ce sens.
J'ajouterai que j'estime que la décision de l'OTAN d'imposer un blocus naval à la Yougoslavie tomberait mal en ce moment. Nous n'avons pas assez d'informations à cet égard. Je ne comprends pas le sens d'une décision qui, de façon à peu près certaine, indisposera sérieusement la Russie.
C'est un secret de polichinelle que cette guerre m'inspire un grand nombre de préoccupations. J'ai soulevé bon nombre d'entre elles à la Chambre le jour où les hostilités ont été déclenchées. J'ai répété une foule de ces préoccupations le 12 avril, et je l'ai fait de nouveau aujourd'hui.
J'estime que l'utilisation de la force par l'OTAN pour faire cesser le nettoyage ethnique au Kosovo est une politique légitime. Je crois aussi, comme je l'ai dit clairement aujourd'hui, que nous devons continuer la recherche d'une solution pacifique et négociée. Ce n'est pas vouloir le beurre et l'argent du beurre, c'est simplement la réalité du système international.
La diplomatie doit souvent être appuyée par la menace d'une intervention militaire. J'espère que le ministre des Affaires étrangères aura eu sa leçon. Ce n'est pas en parlant doucement à l'oreille des dirigeants étrangers que l'on gagne de l'influence. Autrement dit, la douceur sans la fermeté est un non-sens sur le plan intellectuel, et ne vaut rien, sur le plan politique.
En conclusion, je réitère mon appui à la motion dont la Chambre est maintenant saisie. À une autre occasion, j'aurais peut-être parlé de certains des sentiments anti-OTAN. Cependant, nous devons nous élever au-dessus de ces querelles pour le bien de la recherche d'une conclusion rapide et heureuse des opérations militaires en cours.
À l'instar de ma collègue, j'exhorte le gouvernement à tenter d'obtenir l'aide de la Russie afin d'élaborer un règlement négocié qui soit conforme à nos valeurs morales et aux intérêts régionaux.
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Madame la Présidente, je suis heureux de constater que le député de Red Deer appuie cette motion, mais je tiens à profiter de l'occasion pour corriger une grave erreur que le député a commise en faisant ses observations ce matin.
Le député a laissé entendre que, à titre de porte-parole du Nouveau Parti démocratique, j'avais convoqué une réunion du Comité des affaires étrangères le 31 mars sur le déploiement immédiat de troupes terrestres au Kosovo.
Le député sait que c'est parfaitement illogique. En fait, la position du Nouveau Parti démocratique est celle que nous défendons aujourd'hui et que mon chef a exposée très clairement tout à l'heure. Nous devons saisir toutes les chances possibles d'arriver à une solution pacifique négociée de ce conflit tragique. Nous devons accélérer nos efforts à cette fin aux Nations Unies, à l'OSCE et ailleurs.
Bien sûr, il faudra garantir la présence sur le terrain d'une force de maintien de la paix capable de protéger les Albanais kosovars qui rentrent dans leurs villages, dans leurs foyers.
Nous avons mentionné aussi que si jamais les efforts diplomatiques, et j'insiste là-dessus, si jamais le genre d'efforts qui ont été proposés, y compris l'importante proposition de paix venant de la Russie, échouaient et que l'épuration ethnique et les atrocités sur le terrain se poursuivaient, dans ce cas et uniquement dans ce cas, nous pourrions envisager une forme de zone sûre.
Je le rappelle au député, c'est la position que nous avons adoptée, mais notre objectif fondamental est de mettre un terme aux bombardements et aux atrocités sur le terrain, de revenir à la table de négociations sous les auspices des Nations Unies et d'arriver à une solution diplomatique qui permette l'atteinte du premier objectif, soit le retour des Albanais kosovars chez eux, dans leurs villages, pour y vivre dans la dignité, la paix et la sécurité.
M. Bob Mills: Madame la Présidente, tous les députés, au comité comme à la Chambre, ont été dégoûtés et révoltés de ce qu'ils ont vu à la télévision et lu dans les journaux au sujet de la purification ethnique, et ils ont voulu réagir.
Notre réaction initiale a été de dire: bombardons-les pour les forcer à reprendre les négociations, et c'était la bonne. Je crois que les cinq partis ont été en faveur de cette politique et ont appuyé une intervention rapide.
Cependant, en réfléchissant à la situation et en songeant à ce que ce serait que d'aller à la guerre contre l'ex-Yougoslavie, que nous revenions sur l'histoire de l'empire ottoman ou sur ce qui s'est passé au cours de la Seconde Guerre mondiale et même de la première, nous avons tous pris conscience de la gravité des événements.
Le Canada n'a pas envoyé de soldats à la guerre en 46 ans, ce qui est long. Aucun d'entre nous n'a pris part aux décisions prises à l'époque. Certains députés qui sont ici depuis longtemps peut-être, mais pas la plupart d'entre nous. À bien y réfléchir, nous avons pris conscience qu'il nous fallait vraiment examiner la situation à fond et répondre à une foule de questions.
Nous devions connaître le mandat, la stratégie de retrait, les risques de pertes humaines dans nos rangs, etc.
C'est là mon attitude depuis le début. Le député m'a sans doute entendu parler de la question. Je le remercie de son intervention. J'ai eu l'impression qu'il appuyait vigoureusement et réclamait une intervention pour mettre fin à l'épuration ethnique au moyen de troupes au sol ou de frappes aériennes, ou par tout autre moyen.
[Français]
M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, je veux proposer à mon honorable collègue la position du Bloc québécois, qui a toujours été en faveur d'une solution diplomatique pour protéger les Kosovars et faire tout ce qui est en notre pouvoir pour faire en sorte que les Kosovars puissent retourner chez eux le plus tôt possible.
Ne pense-t-il pas que, compte tenu de la façon dont a débuté ce conflit, M. Milosevic, cherchant à épurer le peuple kosovar, va continuer de le faire, tant et aussi longtemps que les échanges diplomatiques auront lieu? Autrement dit, ne croit-il pas que la diplomatie favorise M. Milosevic dans sa tentative d'épuration ethnique?
[Traduction]
M. Bob Mills: Madame la Présidente, nous sommes tous dégoûtés par le nettoyage ethnique qui a cours. En étudiant l'histoire de cette région, nous nous apercevons que le nettoyage ethnique est pratiqué depuis longtemps autant par les uns que par les autres.
Je ne crois pas qu'il soit juste de tout mettre sur le dos d'un seul camp. Il y a bien des enjeux et nous n'avons pas le temps de tous les examiner. Nous devons trouver une façon de rapprocher les deux camps. Nous visons le même objectif que les autres. Nous voulons trouver une solution qui permettra aux Kosovars de regagner le Kosovo.
Le nettoyage ethnique est inadmissible, mais il est quand même pratiqué, comme je le disais dans un discours il y a quelques semaines, dans 21 pays, selon les informations que j'ai pu obtenir.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Madame la Présidente, je dois d'abord faire part de l'appréciation du Bloc québécois aux collègues du Nouveau Parti démocratique qui donnent à nouveau l'occasion à cette Chambre de débattre et de délibérer sur la question du Kosovo.
Les occasions ne seront pas trop nombreuses pour que cette Chambre puisse faire valoir ses opinions, faire connaître les vues de chacun des partis sur cette grave crise, celle qui menace la paix et la sécurité dans la région des Balkans, mais qui menace aussi ou pourrait menacer davantage encore la paix et la sécurité internationales.
Le Bloc québécois est du même avis que le Nouveau Parti démocratique lorsqu'il s'agit de privilégier la voie diplomatique, de privilégier la solution diplomatique à cette crise qui sévit depuis trop longtemps au Kosovo et dans cette région particulièrement touchée des Balkans.
Nous devrions tous vouloir que ce conflit se résolve de façon diplomatique, d'autant que, comme pays, comme peuple des Nations Unies, nous nous sommes engagés à régler les différends de façon diplomatique.
Je vais citer à la Chambre un des buts des Nations Unies, de cette organisation à laquelle réfère le Nouveau Parti démocratique dans sa motion d'aujourd'hui. Dans son premier paragraphe, l'article 1 dit ceci:
Les buts des Nations Unies sont les suivants:
1. Maintenir la paix et la sécurité internationales et à cette fin: prendre des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d'écarter les menaces à la paix [...] et de réprimer tout acte d'agression à une rupture de la paix [...] et réaliser, par des moyens pacifiques, conformément [...] au droit international, l'ajustement ou le règlement de différends ou de situations, de caractère international, susceptibles de mener à une rupture de la paix;
Il faudrait toujours avoir à l'esprit ce but important, ce but essentiel des Nations Unies, et cette Charte, qui devrait guider nos actions communes en la matière.
C'est la raison pour laquelle le Bloc québécois doit appuyer cette motion du Nouveau Parti démocratique. Comme l'a souvent rappelé le député de Burnaby—Douglas lors de ses interventions au Comité permanent des affaires étrangères et dans cette Chambre, et comme l'a rappelé son chef, la solution diplomatique est celle qui pourra mettre fin à un conflit qui a déjà coûté trop de vies humaines parmi les civils. Tous les conflits, quels qu'ils soient, et notamment les conflits armés non internationaux comme se plaît à le rappeler souvent le ministre des Affaires étrangères, donnent lieu, pour l'essentiel, à des morts parmi la population civile.
Le Bloc québécois a d'ailleurs toujours soutenu l'idée que la solution à privilégier était la solution diplomatique. Nous avons appuyé les négociations et les actions qui se déroulaient au sein du Groupe de contact. Nous avons appuyé les négociations de Rambouillet. Nous avons interpellé le gouvernement à plusieurs reprises pour savoir s'il soutenait cette volonté d'obtenir, de l'une et l'autre des parties à ces négociations, un accord qui préviendrait l'utilisation de la force armée.
Nous avons aussi insisté pour que le gouvernement du Canada donne de l'importance à l'accord ou au plan de paix proposé par le ministre des Affaires étrangères de la République fédérale d'Allemagne, parce que pour nous, comme pour d'autres partis, d'autres personnes et beaucoup de citoyens québécois et canadiens, la solution ultime réside dans une paix qui viendra de façon diplomatique.
Aujourd'hui, le Bloc québécois se réjouit que des efforts plus intenses qu'auparavant soient investis dans la négociation diplomatique. Aujourd'hui même, le sous-secrétaire d'État américain, M. Talbott, négocie avec l'envoyé spécial du président russe, M.Tchernomyrdine. Ces négociations pourraient peut-être ouvrir la voie à une solution diplomatique.
Les États membres de l'Union européenne et, principalement, les représentants de la République fédérale d'Allemagne, qui assument la présidence de l'Union pour les six prochains mois, ont aussi mis l'accent sur une solution négociée et diplomatique. Ce avec quoi nous sommes tout à fait d'accord.
Nous sommes aussi tout à fait conscients du rôle important que pourrait jouer le ministre des Affaires étrangères dans les discussions qu'il aura jeudi avec l'envoyé spécial du président russe ainsi qu'avec son ministre des Affaires étrangères. Nous lui souhaitons la meilleure des chances puisque cette initiative mérite d'être appuyée. Elle mérite le soutien de cette Chambre. Nous croyons qu'avec les autres négociations en cours, elle pourrait aboutir à une proposition qui pourrait être présentée devant le Conseil de sécurité des Nations Unies. Parce qu'il faudrait que le Conseil de sécurité des Nations Unies soit l'instance où la question de la paix au Kosovo soit débattue à nouveau.
Le Conseil de sécurité aurait dû et aurait toujours dû être l'instance où se négociait le règlement de ce différend international. Il est dommage que le Conseil ait dû être marginalisé et mis à l'écart d'importantes décisions en ce qui concerne la question du règlement pacifique de ce différend au Kosovo.
Nous sommes d'avis que la solution résidera dans une négociation qui aboutira à un règlement et qui fera en sorte que les Kosovars, qui ont trop souffert pendant ce conflit, se verront donner une voix au chapitre et pourront décider de leur avenir, comme le prévoyait d'ailleurs l'Accord de Rambouillet.
Les Serbes et leurs représentants constateront qu'on ne peut pas ignorer les revendications d'autonomie d'un peuple, qu'on doit vivre avec ces revendications et ne pas les considérer comme inopportunes.
C'est ce qui faisait l'objet des négociations à Rambouillet et c'est ce qui devrait continuer de faire maintenant l'objet de négociations.
Par ailleurs, notre parti a toujours cru que l'on ne devait pas exclure l'utilisation de moyens moins pacifiques en vue d'en arriver à une solution pacifique et négociée. Nous avons soutenu les frappes aériennes et nous continuons à les soutenir pour une seule et unique, mais déterminante, raison. Lorsqu'il est question de mettre fin à l'épuration ethnique, de prévenir un génocide—et peut-être apprendra-t-on dans les semaines à venir qu'il y a eu un génocide au Kosovo; nous ne sommes pas en mesure de le savoir maintenant—et de mettre fin à des crimes de cette nature contre l'humanité, il ne faut pas exclure le recours à la force.
Il va sans dire que ce recours à la force n'est pas le moyen le plus approprié pour régler des différends. J'espère que toutes les négociations en cours aboutiront le plus rapidement possible à ce règlement que nous appelons de nos voeux.
À cet égard, je me joins au député de Burnaby—Douglas pour appuyer une motion qui met l'accent là-dessus et qui invite aussi la Russie à se joindre à une force militaire internationale pour assurer la paix au Kosovo.
Je terminerai en citant Montesquieu. J'aime citer de grands auteurs qui parlent de la paix, de la guerre et du pouvoir. Je le citerai en rappelant qu'il avait un jour écrit dans De l'esprit des lois, que: «C'est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser. Il va jusqu'à ce qu'il trouve des limites. La vertu même a besoin de limites. Pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir».
Ici, le pouvoir politique et de persuasion doit arrêter Milosevic et redonner la liberté au peuple kosovar.
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, l'honorable député comprend bien que le ministre des Affaires étrangères ira en mission spéciale à Moscou vers la fin de cette semaine et qu'il rencontrera plus tard le premier ministre de la Grèce. Le gouvernement veut un élargissement du cercle des intéressés. Celui-ci doit certainement dépasser les limites de l'OTAN.
Est-ce que l'honorable député a eu l'occasion de considérer le plan Simitis, lancé hier par le premier ministre de la Grèce, qui donne l'avantage de mettre l'accent sur les pays voisins du Kosovo? On se souvient de la mission grecque et italienne en Albanie, l'année dernière.
Est-ce que le député donnera son appui et l'appui de son parti au plan Simitis?
M. Daniel Turp: Madame la Présidente, j'apprécie la question du député de Vancouver Quadra.
Ce que je constate, c'est que plusieurs plans de paix convergent dans la même direction. Ces plans de paix veulent voir l'ONU jouer un rôle déterminant dans l'après-crise au Kosovo. Notre parti est d'accord avec l'idée que l'ONU soit placée au centre de la solution de cette crise et que l'on fasse appel à des représentants des Nations Unies lorsqu'il s'agira d'établir une force militaire.
Par ailleurs, il ne faut pas exclure le fait que des pays membres de l'OTAN et des personnes qui appartiennent à ces pays participent à une force de l'ONU, ou qu'il y ait une force conjointe, à moins que l'on constate que les objections russes sont à tel point importantes qu'il faut exclusivement que cette force soit sous l'égide de l'ONU.
Il faut que la Russie soit partie prenante à cette décision. Il faut qu'elle y soit, parce que les forces serbes et le président Milosevic n'auront pas d'autre choix que d'accepter une force à laquelle la Russie aura accepté de participer.
Mais le point central de la solution réside dans le retour de l'ONU dans ce conflit, une décision du Conseil de sécurité et une force qui agira en un temps déterminé pour mettre fin à l'épuration ethnique, pour permettre aux Kosovars de réintégrer le Kosovo et assurer que la région des Balkans puisse retrouver la paix.
En ce sens, je rappelle qu'il y a aussi une proposition allemande de pacte pour la stabilité dans la région des Balkans qui mériterait une considération sérieuse et un appui de tous les États.
M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Madame la Présidente, nous ne disposons pas de beaucoup de temps, mais je tiens à remercier le Nouveau Parti démocratique de permettre à cette Chambre, encore une fois, de continuer de débattre de ce qui se passe au Kosovo. Encore une fois, cette initiative vient de l'opposition.
Dans cette motion et dans l'amendement proposé, on parle beaucoup du blocus ou de l'embargo que l'OTAN et les pays européens ont décidé de décréter. La position néo-démocrate semble sous-entendre qu'il ne faut pas qu'il y ait d'embargo ou de blocus. Essentiellement, c'est pour ne pas faire de peine à la Russie, pour ne pas choquer la Russie. On entend parler encore et encore de la Russie depuis le début du conflit.
Cependant, je rappelle à mes collègues du Nouveau Parti démocratique que le bombardement de la Yougoslavie et du Kosovo a commencé sans qu'on s'occupe vraiment de la Russie. Également, je rappelle que ce qui a été proposé, ce n'est pas un embargo ou un blocus, c'est plutôt une vérification, un contrôle aux frontières, entre autres, celles du Monténégro.
Dans les journaux de ce matin, selon les déclarations de notre propre ministre de la Défense et d'un général allemand, on peut lire qu'aucun bateau ne sera arrêté par la force. On va demander si on peut visiter les navires qui vont livrer de la marchandise à la Yougoslavie, notamment du pétrole.
Le ministre canadien de la Défense nationale et un général allemand ont dit: «Non, non, on ne forcera pas trop.» Encore là, on craint la réaction russe. Le ministre de la Défense va encore plus loin: «On n'arrêtera pas l'exportation de pétrole russe en Yougoslavie.»
On voit qu'il y a une guerre de mots. En plus d'avoir une vraie guerre, on voit qu'il y a une guerre de mots qui, à mon avis, n'est absolument pas crédible. Pourquoi? Parce que, depuis le début, on dit à la Yougoslavie qu'on la bombarderait sans envoyer de troupes terrestres. Maintenant, on dit qu'on impose un embargo, mais qu'on n'arrêtera aucun bateau et que la Russie pourra continuer d'exporter son pétrole.
Dans cette guerre, il y a un problème de crédibilité et un problème d'improvisation. On met beaucoup d'emphase sur la Russie. Notre ministre doit avoir des rencontres, et cela, on se doit de le souligner et de l'apprécier. Après cette rencontre, il y aura probablement une résolution de la Russie au Conseil de sécurité. Ce dernier dira qu'advenant un cessez-le-feu—on ne parlera pas de paix, car ça, c'est toute une négociation—au Kosovo et en Yougoslavie, il y ait une force prise en charge par la Russie sous l'égide de l'ONU. On verra cela rapidement au Conseil de sécurité dans les jours ou les semaines qui viennent.
Et tant mieux si cela peut arrêter cette guerre. De plus en plus, on voit que le bloc yougoslave commence à se fissurer, il commence à y avoir des divisions, un peu comme en cette Chambre. Ici, on commence à mettre des couleurs un peu différentes sur nos premières interventions, sur nos premières déclarations, sur nos premiers communiqués de presse. On voit qu'il y a des divisions dans ce Parlement.
On voit qu'il y a une division à la Chambre et aussi au sein du Parlement yougoslave. Le vice-premier ministre yougoslave—on ne sait pas s'il est crédible ou non—commence à démontrer une ouverture face à un cessez-le-feu unilatéral, à la condition que les troupes soient retirées du Kosovo. On ne parle pas de paix. Une paix fait suite à une négociation. Il y a un traité avec des signatures. Mais on parle au moins d'un cessez-le-feu.
C'est une bonne nouvelle parce qu'on a tellement crié de noms au premier ministre Milosevic. On lui a dit qu'il était responsable de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. Il était donc difficile de trouver un interlocuteur avec lequel l'OTAN pourrait éventuellement signer un accord de paix. Maintenant, on semble avoir trouvé une brèche dans le bloc serbe en vue d'en arriver à une solution pacifique.
Ici, c'est la même chose. Pendant les deux premières semaines de combats, les partis d'opposition, surtout le Nouveau Parti démocratique et le Bloc québécois, avaient des positions assez dures. Ils parlaient de génocide au Kosovo et d'envoi de troupes terrestres. Le député néo-démocrate a corrigé mon confrère réformiste, mais je me souviens moi aussi que les propos étaient assez durs. D'ailleurs, les médias rapportaient que plusieurs partis d'opposition demandaient l'envoi de troupes terrestres. Aujourd'hui, la situation a changé. On parle de diplomatie. C'est vrai que c'est important, on le dit depuis le début.
On devrait modérer les transports de l'OTAN. La guerre au Kosovo est sous l'égide de l'OTAN et, finalement, l'amendement néo-démocrate nous dit que l'OTAN devrait maintenir sa position actuelle et ne pas en faire plus. Quel beau message à lancer à Milosevic! C'est comme de lui dire: «Ne t'inquiète pas, il n'y aura pas de troupes terrestres. On ne t'empêchera pas d'acheter du pétrole ou de la nourriture.» Ce ne sont pas des messages comme ceux-là qu'on doit envoyer. Le message du début était solide et fort. Est-ce qu'on le garde ou non? Si on ne le garde pas, qu'on sorte de là rapidement.
Pour ce qui est de notre fameux blocus ou embargo, je crois que c'est une initiative qui, finalement, ne portera pas fruit parce que, de toute façon, ici même au Canada, en Allemagne et ailleurs dans le monde, on dit que ce n'est pas un véritable blocus et que ce n'est pas un véritable embargo.
On voit maintenant que le Canada accentue les démarches diplomatiques et c'est bien ainsi. Mais qu'est-ce que le Canada a fait avant la guerre? Lors d'une des comparutions du ministre des Affaires étrangères devant le Comité permanent des affaires étrangères, je lui ai demandé quels avaient été les efforts et les gestes que le Canada avait posés au cours d'une période de 9 à 12 mois précédant la guerre. Le ministre est censé nous faire parvenir cette information. Quels ont été les gestes et les efforts diplomatiques du Canada pour prévenir cette guerre?
Présentement, on est en guerre et on accélère maintenant le processus diplomatique. C'est bien, et il faut le faire. Mais qu'est-ce qui a été fait avant? On ne le sait pas. Quel était le rôle du Canada avant la guerre? Le gouvernement a été très silencieux jusqu'à maintenant. On attend encore les documents. Ce n'est pas très crédible, à moins qu'on nous prouve le contraire. On attend cette information.
On met beaucoup l'accent sur la Russie et le Canada veut jouer aussi un rôle important. Le Canada est un agresseur au Kosovo. Alors, il est certain que c'est une tierce partie qui sera capable, on l'espère, de mettre fin à ce conflit.
Hier, le président de la Libye s'en est mêlé. Le Canada a un rôle diplomatique important, mais pas auprès des Serbes. C'est impossible. On est un pays agresseur au Kosovo. On doit donc aller chercher une tierce partie, soit la Russie.
Il faut se demander aussi quel sera la nature du cessez-le-feu qui sera, je l'espère, convenu d'ici quelque temps. Que contiendra le traité de paix? On a toutes sortes d'opinions à la Chambre ainsi que sur la scène internationale. Est-ce que ce sera un protectorat? Est-ce que ce sera un accord du type de celui de Rambouillet? Dans l'annexe de l'Accord de Rambouillet, on prévoyait que trois ans après la signature, les Kosovars auraient eu le droit de s'exprimer sur leur avenir. Voudraient-ils être indépendants, avoir l'autonomie ou un protectorat? Les Serbes ont refusé, car pour eux, le Kosovo fait partie de la Yougoslavie et jamais il ne le laisserait aller. L'autonomie à l'intérieur de la Yougoslavie, c'est une chose. Mais jamais on n'accorderait l'indépendance.
L'accord de Rambouillet avait un élément important qui, à tort ou à raison, froissait les Serbes. Il disait ceci: «Trois ans plus tard, il y aura un référendum et les Kosovars vont décider de leur avenir.» C'est peut-être bien par rapport à ce qu'on veut au Canada, c'est très démocratique, mais le contexte des Balkans est très différent.
Il faut revoir l'ensemble du portrait. On voit qu'il y a beaucoup d'improvisation. Tout le monde reconnaît que ce qui se déroule au Kosovo est tragique. Au fur et à mesure que le conflit se poursuit, on propose des plans de paix, des mesures qui ne sont pas vraiment applicables ou appliquées. On dit qu'il va y avoir des troupes terrestres, puis on dit qu'il n'y en aura pas. Il y a un manque de planification très important.
On espère que ça va se régler très rapidement. Ici, à Ottawa, aujourd'hui, il fait beau, le soleil brille. Mais au Kosovo et en Yougoslavie, les routes, les ponts, les maisons, les aqueducs, les systèmes électriques, tout est détruit. Si la guerre se poursuit encore pendant deux ou trois mois, qu'adviendra-t-il de ces 750 000 réfugiés kosovars en Albanie? L'hiver va venir. Est-ce qu'ils vont passer l'hiver dans de petites tentes? Le pays est détruit.
On devrait arriver très rapidement à un accord de paix. On doit suggérer des moyens efficaces et être crédibles dans les moyens qu'on propose.
[Traduction]
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté attentivement le discours du député, qui siège au Comité des affaires étrangères.
Il y a près de dix ans, le mur de Berlin est tombé et le Traité de Varsovie a cessé d'être appliqué. L'OTAN est maintenant la seule alliance militaire en Europe.
Imaginons-nous dans l'avenir, une fois la crise au Kosovo réglée. Étant donné la disparition du Pacte de Varsovie qui faisait opposition à l'OTAN et à l'ONU, quels changements le député apporterait-il à l'OTAN pour empêcher les membres de l'OTAN d'agir autrement que ce qu'ils auraient fait il y a dix ans, lorsque le Pacte de Varsovie était en vigueur? A-t-il des suggestions à faire pour réformer l'OTAN et l'ONU afin que nous puissions entrer dans le XXIe siècle avec de nouvelles institutions et sans la guerre froide?
[Français]
M. André Bachand: Madame la Présidente, on est en plein conflit, donc, on ne parle pas de restructurer un système ou une organisation. D'ailleurs, comme on l'a vu au Sommet de Washington, on n'a pas vraiment parlé de changements majeurs. Pourquoi? On attend de voir s'il y aura approbation ou condamnation sur la manière dont l'OTAN s'est impliquée dans le conflit au Kosovo. On va faire un «debriefing» par la suite et là on pourra se demander si l'OTAN a joué un rôle correct ou non. On pourra faire les analyses après.
Je rappelle que l'OTAN n'a pas été créée pour ce qu'elle fait présentement au Kosovo. Elle-même a décidé, unilatéralement, sans négociations véritables et sans vraie réflexion, d'agir en force offensive. Elle peut avoir raison. Mais avec son groupuscule de gens, elle s'est modifiée elle-même, sans consultations et sans véritable réflexion.
On pose la question: Que devrait être l'OTAN? L'OTAN n'est plus ce qu'elle était, il y a 50 ans. Elle a complètement changé. Effectivement, on devra revoir les différentes formes d'organisations internationales.
Est-ce que l'OTAN va devenir l'organisation de protection militaire de l'Europe, comme cela semble se dessiner, auquel cas il y aura des forces militaires dans chacun des continents pour assurer une certaine stabilité? Peut-être que oui. Peut-être que non.
On pense à réinventer l'OTAN. Celle-ci a opéré un changement génétique rapide dans la dernière année et a changé. Est-ce qu'on devrait revenir à l'OTAN comme elle était avant ou la garder comme elle est maintenant? C'est peut-être cela, la vraie question.
[Traduction]
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Madame la Présidente, j'ai écouté attentivement le discours du député. Il a émis des réserves concernant la position du NPD dans ce dossier. La position du NPD est cohérente depuis le début. Nous voulons la paix. Cette motion a simplement pour objet de demander au gouvernement d'intensifier et d'accélérer les initiatives diplomatiques qui mèneront à la paix.
Le député s'est aussi dit préoccupé, à juste titre d'ailleurs, par la dévastation et la destruction que connaît la Yougoslavie.
Le député nous a demandé quel genre de message nous envoyons à Milosevic. Pense-t-il que nous n'aurions pas dû envoyer un message fortement imprégné du désir d'établir la paix et d'utiliser tous les moyens diplomatiques possibles pour aboutir à la paix et mettre fin à la destruction?
[Français]
M. André Bachand: Madame la Présidente, le problème, c'est quel genre de message on veut effectivement envoyer à Milosevic.
Au début du conflit, c'était la main de fer, c'était solide, c'était unanime partout. Aujourd'hui, à l'intérieur de ce Parlement, on remet en question les décisions de l'OTAN et de la Communauté européenne sur «un embargo ou un blocus naval». C'est un parti de cette Chambre, par son amendement, qui remet cela en question, à tort ou à raison, qu'importe.
Quel message lançons-nous aujourd'hui? L'OTAN décide d'imposer un embargo ou un blocus, pas très fort, mais il décide quand même de l'annoncer, l'Europe l'appuie. Nous, nous disons: «Non, non, il ne faudrait pas. Pas de blocus naval et pas d'autre intervention, incluant des troupes terrestres.» Quel message donnons-nous quant au sérieux de l'intervention militaire passée, présente et future au Kosovo?
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Madame la Présidente, je vais partager le temps qui m'est alloué avec mon collègue de Regina—Qu'Appelle.
C'est avec une grande tristesse que j'interviens à la Chambre aujourd'hui pour exprimer mes pensées sur l'action que doit prendre le Canada pour répondre à la situation critique qui existe présentement au Kosovo.
Si le NPD aborde cette question aujourd'hui, c'est parce que des milliers de Kosovars se retrouvent démunis, sans logement, sans sécurité et sans recours en raison des actions impensables de leur propre gouvernement.
Le sujet dont nous traitons est complexe et les décisions qui nous font face sont parmi les plus difficiles que notre pays ait dû prendre.
Le NPD a encouragé, depuis le début de cette crise, une résolution par le biais d'efforts diplomatiques. Mais, tragiquement, les efforts initiaux ont échoué. Le président yougoslave, Slobodan Milosevic, avait refusé de participer à un dialogue constructif ou encore de faire des compromis. Il a plutôt continué de faire régner la terreur au Kosovo.
Nous sommes actuellement témoins d'une grave crise humanitaire. Le gouvernement de Milosevic a entrepris une campagne de nettoyage ethnique dans le but de faire fuir les Kosovars de souche albanaise. Des villages sont en flammes, des hommes, des femmes et des enfants tués, des femmes violées. Milosevic semble avoir réussi à faire fuir les Kosovars albanais terrorisés.
Nous pouvons rappeler les horreurs qui ont été commises en Bosnie par Milosevic, où plus de 200 000 personnes sont mortes. Est-ce que nous pouvons permettre à Milosevic de continuer cette catastrophe?
Avec cette tragédie humaine qui s'aggravait de jour en jour, le NPD a reconnu qu'il y a des moments où la communauté mondiale doit réagir aux violations des droits de la personne, non seulement par des mots, mais par des actes. Pour cette raison, le NPD a reconnu l'importance d'intervenir par le biais de frappes militaires. Milosevic devait apprendre que de telles atrocités ne seraient pas tolérées par la communauté internationale.
Avant les frappes aériennes de l'OTAN, 250 000 Kosovars albanais avaient vu leurs maisons brûler devant eux. Si les pays de l'Ouest n'étaient pas intervenus après tant de mises en garde à l'intention de Milosevic, ils auraient envoyé au chef serbe et aux autres tyrans un message qu'il était acceptable de terroriser leurs populations et de violer les droits de la personne sans aucune conséquence.
La décision d'utiliser des frappes aériennes n'est certainement pas une décision facile, mais est-ce que nous devions demeurer muets aux attaques contre l'humanité que Milosevic effectue?
J'aimerais ici rappeler les propos de Tommy Douglas lors de la Seconde Guerre mondiale. Il disait:
[...] lorsqu'un groupe d'anarchistes s'applique à détruire le tissu de loi et de l'ordre sur lequel repose la civilisation humaine, il est alors de mon devoir d'intervenir [...]
Mais le succès des frappes aériennes est maintenant remis en question. Le nettoyage ethnique s'est intensifié et le nombre de réfugiés a augmenté dramatiquement.
Nous devons mettre fin à cette souffrance humaine et venir en aide aux centaines de milliers de Kosovars qui ont vécu dans cette terreur depuis trop longtemps.
C'est pourquoi le NPD, après 35 jours de frappes, propose une solution basée sur cinq éléments.
Le premier est celui-ci: la cessation immédiate des frappes aériennes de l'OTAN, à la condition que le gouvernement serbe accepte de reprendre les négociations et de mettre fin immédiatement aux hostilités contre les Kosovars albanais.
Le deuxième, la tenue de négociations sous les auspices des Nations Unies avec la participation de la Russie.
Le troisième élément: le gouvernement canadien devrait demander la tenue d'une réunion spéciale de l'Assemblée générale des Nations Unies pour discuter de la crise au Kosovo.
Quatrièmement, qu'aucun contingent militaire canadien ne soit envoyé sans qu'un débat n'ait lieu à la Chambre et que les députés aient voté sur la question.
Le cinquième élément: la poursuite des travaux du Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés afin de venir en aide aux réfugiés en Macédoine et en Albanie.
Je vais utiliser ici mon expérience personnelle, car pendant des années, dans les négociations entre les syndicats et les employeurs, nous étions aussi en conflit. Cela revient quasiment au même, car ce sont aussi des conflits. Des conflits, ça se règle toujours à la table de négociations. Cela peut prendre une semaine, deux semaines, un mois, trois mois, mais finalement, il faut retourner à la table de négociations. C'est là que les conflits se règlent.
C'est pour cela que le NPD dit que c'est à la table de négociations que ces conflits vont se régler, parfois en changeant de position. J'utilise un exemple. La journée de la grève, on a une position forte, car c'est ce qu'on veut. De son côté, l'employeur a une position forte et c'est cela qu'il veut. Si on dit: «Il n'y a personne qui va modifier sa position», la grève va continuer. C'est pour cela qu'on ne peut pas avoir une position définitive. Il faut toujours être prêt à la changer.
Les cinq points dont je parlais précédemment mettent en valeur l'importance d'une solution diplomatique. À la suite de nos interventions ici, à la Chambre, le gouvernement a finalement reconnu l'importance des efforts diplomatiques en envoyant le ministre des Affaires étrangères en Russie plus tard cette semaine.
Nous devons déployer tous les efforts pour mettre fin à ce conflit. C'est pour cette raison que nous demandons au gouvernement d'intensifier et d'accélérer les efforts en vue de trouver une solution diplomatique à la crise au Kosovo en assurant la participation de la Russie et des Nations Unies.
Encore une fois, j'utiliserai l'exemple du syndicat. Parfois, on est obligés de faire appel à des médiateurs pour venir aider les deux parties à trouver une solution. La Russie doit être vue comme un médiateur et être capable d'intervenir et de proposer des solutions au présent conflit.
Il faut aussi exhorter l'OTAN à ne pas prendre d'actions qui favoriseraient l'extension du conflit et qui nuiraient à la recherche d'une solution diplomatique.
Je vais utiliser l'exemple du syndicat à nouveau. Lors d'une grève ou d'un lockout, alors qu'on est disposés à trouver des solutions, si quelqu'un propose des solutions extrêmes, parfois, cela empire les choses. On se dit: «Si ça pouvait donc se calmer et arrêter un peu et en venir à la table des négociations.» Même le gouvernement dit la même chose. C'est pour cela qu'aujourd'hui, il faut mettre ces choses en place.
Le climat semble de plus en plus propice à une solution diplomatique. Nous devons lui donner un coup de pouce et créer un climat où la Russie et les Nations Unies puissent jouer un rôle central dans la résolution de ce conflit.
C'est pour cette raison que nous nous opposons si catégoriquement à un embargo naval. Un tel embargo aurait seulement l'effet de rehausser les tensions tout en nuisant à la recherche d'une solution diplomatique.
Le Canada peut offrir un leadership important dans la recherche de solutions diplomatiques à ce conflit. Nos efforts devraient se centrer sur ce type d'intervention immédiatement. Nos efforts doivent maintenant aussi se centrer sur l'aide que nous pouvons accorder à ces dizaines de milliers de réfugiés.
Ceux-ci se retrouvent très souvent séparés de leur famille, ayant parfois vu le massacre de ceux et de celles qui leur sont chers. Dans la sécurité de nos foyers au Canada, nous pouvons difficilement imaginer une telle situation où nous nous retrouverions complètement démunis, sans porte de sortie. Nous devons faire tout ce qui est possible pour mettre fin à cette souffrance.
[Traduction]
Je félicite les milliers de Canadiens qui ont fait des dons en espèces et en nature pour venir en aide aux réfugiés kosovars. Ils ont de nouveau fait la preuve que l'on peut toujours compter sur la générosité des Canadiens en période difficile.
[Français]
J'aimerais aussi souligner les efforts de tous les groupes humanitaires qui apportent, de près ou de loin, leur appui aux réfugiés. C'est par le biais de leurs efforts que nous espérons diminuer l'impact dévastateur des actions de Milosevic.
Finalement, nous devons tourner nos pensées vers les militaires canadiens qui participent avec courage et intégrité à ces opérations. Ce sont eux qui font le plus grand sacrifice et nous leur en sommes reconnaissants. Nous remercions leurs familles pour la compréhension qu'elles apportent à cette situation.
Nous espérons tous que ce conflit se réglera dans les plus brefs délais, afin qu'ils reviennent sains et saufs parmi nous.
[Traduction]
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours du député. Il a demandé, entre autres, comment nous pouvions mettre un terme à cette souffrance humaine. Il a dit que, à son avis, nous devrions retourner à la table de négociation pour résoudre les problèmes. Il veut une approche diplomatique. Il a également dit qu'il ne voulait pas d'autres actions de la part de l'OTAN.
Nous savons déjà que Milosevic ne retournera pas à la table de négociation à moins que nous ayons recours à la force. Il l'a déjà prouvé. Les actions des forces de l'OTAN ont essentiellement coupé à l'armée de Milosevic son approvisionnement en carburant, ce qui fait que ses chars d'assaut ne peuvent plus bouger. Nous avons détruit des ponts, ce qui fait qu'il ne peut plus traverser certaines rivières. Le député croit-il vraiment que, si l'OTAN se retirait à ce moment-ci, Milosevic retournerait à la table pour négocier de bonne foi? Est-ce que c'est ce que croit le député?
M. Yvon Godin: Madame la Présidente, je n'ai jamais dit que nous devrions nous retirer. J'ai dit que nous ne devrions pas intensifier nos efforts.
Si nous mettons un embargo sur le carburant expédié au Kosovo, cela touchera peut-être un autre pays aussi. Nous voudrions plutôt que ce pays participe aux négociations pour la paix. C'est ce qui importe.
Je veux qu'il soit clair que nous n'avons pas parlé de nous retirer. Pour que nous nous retirions, il faudrait que tout le monde arrête. Il faudrait que Milosevic arrête le massacre au Kosovo. En même temps, il nous faudrait cesser les frappes aériennes et retourner à la table de négociation. Autrement, nous ne disons pas que nous devrions nous retirer de la région, mais bien que nous ne devrions pas intensifier nos efforts. C'est ce qui importe. Je veux que ce soit bien clair.
[Français]
M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, j'ai fort apprécié les propos de mon collègue d'Acadie—Bathurst.
Je lui rappellerai aussi qu'en 1755 les Brits ont déporté des Acadiens. À ce moment-là, c'était une situation non négociable. Les Brits, à cette époque, avaient le contrôle de la situation, à un point tel que ceux qui se seraient présentés pour dire qu'ils voulaient négocier la paix dans ce conflit n'auraient jamais été entendus. Les Brits ont réussi à faire cela, justement parce qu'ils avaient le pouvoir et la détermination de le faire.
En voyant la situation se développer au Kosovo, c'est un peu semblable. On peut parler et souhaiter une solution négociée au conflit, mais est-ce que c'est réalisable? Comme mon collègue l'a dit plus tôt, Milosevic est un barbare. Il a semé la terreur au Kosovo. Il a violé les droits de toute une population. Il a, on le sait, exterminé et tué des milliers de personnes. On connaîtra peut-être le nombre de façon plus précise lorsque le conflit sera terminé.
Il me semble que c'est plutôt évident que bien que nous souhaitions une négociation mettant un terme à ce conflit, Milosevic n'est pas là pour négocier.
Son but est d'épurer la population du Kosovo pour réussir à conserver la moitié, le quart ou le tiers du territoire. Évidemment, il souhaiterait l'avoir au complet. Mais il y a une seule solution dans le fond, c'est de maintenir la force contre ce barbare pour qu'on l'oblige à se présenter à la table de négociations. Ce n'est pas avec de beaux souhaits de négociation que cela va se régler.
Mais est-ce qu'il ne trouve pas, justement, que c'est tout à fait semblable, certainement pire que la situation des Acadiens en 1755?
M. Yvon Godin: Madame la Présidente, mon collègue a parlé des Acadiens en 1755. Je voulais en parler dans mon discours, mais j'ai choisi de ne pas le faire. Je ne voudrais jamais que cela se répète de nouveau, parce que les gens de chez nous, bien que nos ancêtres soient partis, parlent encore de 1755, quand les Acadiens ont été renvoyés de leur pays et qu'ils sont arrivés chez nous ici, au Canada, en bateau.
Mais est-ce que la solution, c'est de dire qu'il n'y a aucune limite et qu'on va tout détruire? C'est là où se pose la question. Il y a des frappes présentement, mais combien est-on prêts à en faire? Est-ce que la réussite passe par la destruction de tout un peuple? Je suis d'accord avec mon collègue pour dire que Milosevic est méchant, mais va-t-on détruire son peuple? Est-ce que c'est le peuple qui est méchant ou si c'est lui? C'est là où il faut utiliser notre jugement et dire: «Est-ce qu'on en fait assez?»
Pourtant, la négociation pourrait améliorer les choses, et c'est là, je pense...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je dois malheureusement interrompre l'honorable député, car le temps est expiré.
[Traduction]
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Madame la Présidente, je voudrais souligner l'importance d'un véritable effort en vue de parvenir à un règlement diplomatique de ce malheureux conflit. Par ailleurs, il faut espérer que les initiatives prises par le ministre canadien des Affaires étrangères, les Russes et d'autres porteront fruit. L'important consiste maintenant à s'efforcer d'accélérer les efforts diplomatiques en vue de parvenir à un règlement pacifique du conflit en Yougoslavie et au Kosovo.
Nous nous opposons à ce que fait Milosevic, à ses actes répugnants et barbares. Nous reconnaissons qu'il fallait faire quelque chose pour mettre un terme à ce qu'il inflige à la population du Kosovo. Je crois également que nous devrions permettre à l'ONU d'intensifier son rôle en lui permettant de faire ce qu'elle peut pour obtenir un règlement pacifique du conflit. Des gens souffrent à l'heure actuelle dans cette région du monde. Des gens sont victimes des bombes. Certains meurent ou sont exterminés. Nous devons mettre un terme à cela le plus tôt possible.
Je voudrais examiner toute cette question sous un angle un peu plus humain, si c'est possible. En 1968, je me suis rendu sur les lieux d'une terrible guerre civile au Nigeria, dans la province sécessionniste du Biafra. Ce matin, j'ai repris un extrait du discours que j'avais prononcé à la Chambre, le 26 novembre 1968, il y a un peu plus de 30 ans. Je n'avais alors que 12 ans. J'ai été élu à la Chambre à l'âge de 11 ans.
J'ai passé deux semaines là-bas. J'ai passé une semaine du côté nigérian et une semaine dans la zone de guerre, du côté biafrais. Cette expérience a changé à jamais ma vie et ma façon de voir l'humanité. J'ai vu des gens mourir sous les bombardements. J'ai vu des gens mourir de faim dans des immenses secteurs réservés aux malades dans des camps de réfugiés.
J'étais allé là-bas avec un député libéral du nom de Ralph Stewart. Deux autres députés y étaient allés avant nous, à savoir le conservateur David MacDonald et le néo-démocrate Andrew Brewin. Nous sommes allés là-bas pour essayer d'attirer l'attention du monde sur les souffrances de ces gens-là et la nécessité de leur apporter une aide humanitaire.
Je me souviens d'avoir atterri dans ce qu'on appelait alors le Biafra. À l'époque, les armées nigérianes avaient encerclé la province du Biafra. Il y avait cours une certaine forme de génocide dans lequel des centaines de milliers de personnes ont péri. Nous sommes arrivés sous le couvert de la nuit à bord d'un avion utilisés par les secours chrétiens pour apporter des médicaments. Nous avons atterri sur une petite piste aménagée dans la jungle. J'ai passé sept jours horribles à observer ce qui arrive en temps de guerre.
Je me souviens avoir été pris dans un bombardement et avoir vu des bombes tomber littéralement à quelques mètres de moi. Nous croyions que nous allions mourir, car ces bombes arrivaient de la jungle obscure. Des gens criaient. D'autres disaient leurs prières. D'autres encore pleuraient et couraient dans toutes les directions.
La terreur est difficile à décrire. J'ai relu l'allocution que j'ai présentée à la Chambre, le 26 novembre 1968, au sujet de ce voyage. Le ministre des Affaires extérieures de l'époque, Mitchell Sharp, avait pris la parole immédiatement après moi.
Nous avons notamment vu un hôpital catholique qui venait d'être bombardé. Nous avons aussi vu un hôpital de la Croix-Rouge qui venait d'être bombardé, lui aussi par erreur, selon les autorités militaires de l'époque.
Nous nous sommes également rendus dans de nombreux camps de réfugiés et ce qu'on appelait des centres de ravitaillement et des infirmeries. On y nourrissait les gens à cinq heures du matin, juste avant l'aube, avant le lever du soleil parce que si les bombardiers survolaient cette éclaircie dans la jungle et qu'il s'y trouvait une foule, ils risquaient d'attaquer.
Dans mon discours, j'ai relaté un fait que je n'ai jamais oublié, soit ma visite à un centre de ravitaillement où 3 500 femmes qui étaient enceintes ou qui allaitaient leur enfant venaient chercher la ration quotidienne de pilules de fer et de poisson à laquelle elles avaient droit, le poissant étant un aliment à forte teneur en protéines.
J'ai été très impressionné de vivre cette expérience, d'être pris au milieu d'un raid de bombardement, d'entendre le mitraillage au sol des avions, d'aller jusqu'au front et d'y voir des soldats blessés, d'être suffisamment près pour entendre le ta ta ta ta des mitraillettes dans l'obscurité de la jungle. J'ai souvent pensé que je ne reviendrais pas vivant de cette semaine-là. Je me suis rendu compte à quel point les êtres humains se comportent parfois comme des barbares les uns envers les autres. Il faut tout tenter pour mettre un terme à ce genre de torture et de tourment. Je voulais simplement relater certains souvenirs. J'ai voulu rendre cette situation un peu plus concrète.
Actuellement, ce sont surtout les Kosovars dans les immenses camps de réfugiés qui subissent cette situation. Certains sont en Macédoine, d'autres, en Albanie. De nombreux Kosovars sont encore prisonniers à l'intérieur des frontières de leur province d'origine, la partie de la Serbie d'où ils sont originaires et qu'ils habitent depuis de nombreuses années. Bon nombre sont en train de mourir de faim. Beaucoup sont victimes des armes à feu. Des gens sont exécutés.
Je me souviens, lorsque j'étais au Biafra, dans un hôpital ou une église, un travailleur est sorti de la jungle avec un enfant de quatre ou cinq ans dans les bras. Cet enfant qui s'accrochait à la vie n'était pratiquement plus qu'un squelette. Je n'ai jamais de toute ma vie vu une personne aussi émaciée et maigre que cet enfant.
Cela se produit encore aujourd'hui. Cela se produit en Yougoslavie et cela se produit à cause d'un fou appelé Milosevic. Cela se produit aussi à cause des bombes que l'OTAN lâche sur la Yougoslavie.
Lorsque j'étais dans ces petits villages dans la brousse africaine et que j'entendais les bombes tomber, je me suis rendu compte d'une chose, c'est qu'une bombe ne fait aucune distinction entre un paysan africain très pauvre et un politicien blanc d'un pays occidental. Une bombe ne fait pas de discrimination. Si une personne ne croit pas cela, la réalité s'impose à elle très rapidement lorsqu'elle se retrouve dans un endroit où les bombes pleuvent. Nous avons tous les mêmes peurs.
Ces gens vivent l'enfer sur terre, il n'y a pas de meilleure façon de décrire leur situation. C'est l'enfer sur la terre. Nous devrions appuyer l'initiative lancée aujourd'hui et faire tout ce que nous pouvons pour renforcer l'offensive diplomatique, faire intervenir la Russie, les Nations Unies et les autres pays comme le Canada, qui sont très respectés dans les forums internationaux, afin de lancer une grande offensive diplomatique qui permettra de mettre fin à la tuerie, à la torture, au bain de sang et à cet enfer. C'est ce qu'il faut.
Le Canada devrait aussi faire comprendre qu'il ne veut pas contribuer à l'escalade du conflit en participant au blocus naval. Je ne pense pas que nous devons participer à ce blocus. Cela risque tout simplement de rendre la situation encore plus explosive en créant la possibilité d'un conflit avec la Russie.
Le pétrole qui entre en Yougoslavie vient surtout de Libye et de Russie. Comme l'a dit le président de la France, M. Jacques Chirac, il y a quelques jours, si l'on arrête un pétrolier à destination de cette partie du monde, on commet un acte de guerre. Nous savons quelle est actuellement la situation en Russie. Il n'y a pratiquement pas de gouvernement. La situation est proche de l'anarchie. Il y a les ultranationalistes et les communistes. Le pays est en proie à l'agitation et au chaos économique, si bien qu'un rien pourrait faire qu'il devienne l'élément déclencheur d'un conflit de proportion mondiale.
Nous devons faire tout ce que nous pouvons, absolument tout ce que nous pouvons, pour trouver une solution diplomatique à cette crise. Il y a des gens qui souffrent, d'autres qui meurent.
À l'heure où l'on se parle, il y a un enfant en train de mourir. Une personne a été atteinte par une balle, une autre est mutilée. Il y a des milliers de personnes qui ont faim. Des gens ont perdu leur famille. Il y a des gens qui pleurent. Il y a des gens qui ne sont chez eux nulle part. Leur maison a été détruite. C'est en train d'arriver pour vrai; ce sont des souffrances humaines véritables.
Nous sommes ici dans un Parlement, bien habillés, bien nourris, avec tout ce qu'il nous faut et un foyer qui nous attend. C'est difficile d'imaginer toute la souffrance que ressentent ces êtres. Ce sont des gens comme nous, des êtres humains. Ils sont privés de leurs êtres chers. Ce sont des êtres humains qui souffrent, qui ont mal et meurent et qui voient leurs proches se faire tuer.
La situation est très dangereuse et pourrait dégénérer. Nous avons une bonne réputation dans le monde, depuis l'époque de Lester Pearson et même avant, en tant que pacificateurs. Nous sommes respectés. Nous avons beaucoup d'influence sur le plan diplomatique et nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour faire grandir cette influence, pour nous en servir au cours des heures et des jours qui viennent.
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, je félicite le député de Regina—Qu'Appelle de son intervention. J'ai deux questions à lui poser.
Ne convient-il pas, à la suite des déclarations initiales de l'OTAN sur un blocus naval, que les observations du ministre de la Défense nationale rejoignent de très près celles qu'avait faites l'ancien président Kennedy au sujet de la crise des missiles à Cuba, où il existait une situation semblable sur le plan naval, et que ces déclarations étaient entièrement compatibles avec le droit international? Le gouvernement du Canada est très clair dans son engagement envers le droit international et envers les Nations Unies.
Ne convient-il pas également que, après avoir honoré nos obligations envers l'OTAN, nous augmentons nos efforts, ces derniers jours et ces dernières semaines, pour que les Nations Unies reprennent la question en main?
C'est ce qui explique la mission à Moscou du ministre des Affaires étrangères, la mission en Grèce, la discussion du plan Simitis en vue d'une force internationale plus englobante, qui devra certainement être sur place lorsque la paix sera rétablie.
L'hon. Lorne Nystrom: Madame la Présidente, j'en conviens certainement et je crois que c'est ce que j'ai dit au début de mes observations.
Je suis heureux que des initiatives soient actuellement prises sur le plan diplomatique. Je suis heureux de savoir que notre ministre des Affaires étrangères participera à ces initiatives diplomatiques. Je suis heureux que le secrétaire général des Nations Unies cherche actuellement à participer et à faire participer les Nations Unies à la recherche d'une solution diplomatique à ce qui se passe en Yougoslavie et au Kosovo.
Je suis donc entièrement d'accord sur les propos qu'a tenus le député. Je suis désolé de ne pas avoir été présent à la Chambre, hier, pour la période des questions. Je n'ai aucune idée de ce que le ministre de la Défense nationale a déclaré à la Chambre ou à l'extérieur.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Madame la Présidente, je veux remercier le député de Regina—Qu'Appelle de nous avoir fait part de son expérience au Biafra. C'était très utile pour cette Chambre de l'entendre parler de cette expérience.
D'autres pourraient relater des expériences analogues qu'ils ont vécues au Sierra Leone, au Soudan du Sud, dans le Kurdistan irakien ou turc. On entendrait des récits d'atrocités, de viols et de crimes contre l'humanité qui sont aussi graves dans ces régions et dans ces pays que dans d'autres régions du monde. C'est d'ailleurs ce qui doit nous préoccuper au lendemain de cette crise. Il faut que ces autres crises soient considérées aussi importantes et qu'elles méritent des interventions et des solutions diplomatiques.
J'aime bien aussi quand on souligne la mémoire de Lester B. Pearson parce que je partage une chose avec M. Pearson. Comme l'ancien premier ministre et ministre des Affaires étrangères, j'aime porter des noeuds papillons.
Ma question au député de Regina—Qu'Appelle est la suivante. Dans la motion, il est question de la participation des Nations Unies. Je voudrais savoir précisément ce qu'ont à l'esprit les députés du Nouveau Parti démocratique. Ils savent sans doute que les États-Unis semblent être à l'origine d'une résolution au Conseil de sécurité qui voudrait maintenant que le Conseil soit à nouveau associé à ce différend international.
Est-ce cela qu'ils ont en vue, ou s'agit-il, d'abord et avant tout, d'une participation de l'ONU à une force militaire ou civile internationale au Kosovo.
L'hon. Lorne Nystrom: Madame la Présidente, maintenant, il y a l'initiative des Nations Unies qui est très importante. Le secrétaire général est maintenant en Europe, et il est important d'avoir cette initiative. Nous sommes d'accord avec cela.
[Traduction]
En outre, un jour, il y aura un cessez-le-feu et un règlement, et les hostilités prendront fin dans cette région du monde. Je crois qu'il faudra mettre en place une force internationale de maintien de la paix. Dans notre parti, nous croyons que cette force devrait être sous les auspices des Nations Unies.
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec un collègue.
Au cours des derniers mois, nous avons été témoins de la pire catastrophe humanitaire en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale. Au coeur de l'Europe et à la porte de l'OTAN, les Kosovars ont été forcés d'abandonner leur patrie et ont subi des atrocités inimaginables, non pas à cause de ce qu'ils ont fait mais plutôt en raison de ce qu'ils sont. On rapporte que des hommes ont été arrachés de leurs foyers et abattus, que des femmes ont été violées devant les leurs et que des enfants ont été laissés orphelins.
La motion dont nous sommes saisis prône la recherche d'une solution diplomatique. C'est depuis le début la voie privilégiée et un règlement diplomatique figure toujours dans les objectifs politiques de l'OTAN. Non seulement cette motion ignore ce fait, elle ignore la situation à laquelle nous sommes confrontés.
Après de longs mois d'activité sur les plans politique et diplomatique, le Canada et ses alliés ont choisi de mener des actions militaires. La décision de lancer une attaque militaire en Yougoslavie n'a pas été prise de gaieté de coeur, mais M. Milosevic ne nous laissait pas le choix. Il a constamment refusé de respecter ses engagements. À la onzième heure des négociations de Rambouillet, les Yougoslaves ont tourné le dos à la diplomatie. Mener des actions militaires était dès lors et demeure la bonne décision.
L'alternative, à savoir ne rien faire et laisser M. Milosevic poursuivre sa politique délibérée de répression et de violence ethnique, était tout simplement inacceptable aux yeux du Canada, de l'OTAN et de la communauté internationale. En réagissant comme nous l'avons fait, le Canada et ses alliés ont fait un grand pas vers la réalisation d'un objectif qui a toujours été dans l'intérêt de notre pays, une Europe pacifique et démocratique.
Notre objectif militaire est clair et notre volonté de le voir se réaliser est inébranlable. La campagne de l'OTAN vise à diminuer et à affaiblir les instruments qu'utilise le gouvernement Milosevic contre les civils démunis du Kosovo depuis l'an dernier: les forces militaires, policières et paramilitaires yougoslaves.
Cette mission ne sera pas brève. Il est difficile de faire preuve de patience face à une telle tragédie humanitaire, mais il ne faudrait pas s'écarter de la voie que nous avons choisie. Tous les alliés de l'OTAN ont compris dès le départ que la lutte ne serait pas aisée. Les opérations militaires d'une telle envergure sont rarement faciles, sinon jamais, et nous devons obtenir les résultats voulus au plus tôt, mais cela prendra du temps.
La campagne aérienne a des répercussions sur les forces militaires et policières yougoslaves. La première étape de cette campagne aérienne a permis d'attaquer le système nerveux de la machine de guerre yougoslave, sa défense aérienne et ses réseaux de commande et de contrôle. La deuxième étape doit affaiblir la capacité stratégique globale du régime Milosevic. Cela suppose les frappes contre les forces yougoslaves opérant à l'intérieur et à l'extérieur du Kosovo, l'infrastructure militaire et d'autres biens qui permettent aux forces yougoslaves de procéder à leurs opérations.
Les expériences passées montrent que M. Milosevic ne réagit pas en l'absence de pression. Les opérations de l'OTAN lui font payer le prix de ses actes. En quelques semaines, les attaques de l'OTAN ont détruit plus de la moitié des réserves de combustible de la Yougoslavie et réduit considérablement sa capacité de raffiner le pétrole qui lui reste. Elles ont gravement endommagé ou détruit 16 des sites radar de détection lointaine de la Yougoslavie; elles ont fait disparaître 35 avions d'attaque au sol et la moitié de la flotte de MiG29 Fulcrum de la Serbie. Les terrains d'aviation et les installations de soutien des aéronefs ont été détruits et les principales routes qu'empruntent les forces yougoslaves pour transporter des fournitures au Kosovo et du Kosovo vers d'autres parties du pays ont été endommagées.
Il est important que chacun se rende compte que ces frappes ont réellement des répercussions sur la situation au sol. Les forces yougoslaves ont de la difficulté à se procurer du combustible et des munitions, et elles ont du mal à approvisionner leurs avions et leurs chars. L'OTAN a graduellement intensifié sa campagne aérienne en augmentant la porté et le rythme des opérations, et continuera de cette façon jusqu'à ce que M. Milosevic accepte les exigences légitimes établies par la communauté internationale.
Depuis trois semaines, le Canada et d'autres alliés de l'OTAN ont augmenté le nombre d'aéronefs qu'ils mettent à la disposition de l'OTAN pour la campagne. Les Forces canadiennes jouent un rôle non négligeable dans cette opération et nous sommes très fiers de leurs efforts à cet égard. Notre contribution initiale de six avions de combat CF-18 a été portée à 12, en réponse à la demande de l'OTAN en faveur d'un pouvoir de combat accru. Par suite de la plus récente demande d'avions supplémentaires de l'OTAN, le Canada a annoncé le 17 avril que six autres CF-18 seraient déployés, ce qui porte à 18 le nombre de CF-18 fournis par le Canada.
Les membres des Forces canadiennes jouent également un rôle important à bord des avions AWACS. En plus de guider nos aéronefs vers leurs cibles, ces avions détectent les appareils ennemis.
L'OTAN est en faveur du déploiement de forces terrestres en Yougoslavie pour surveiller l'application d'un éventuel accord de paix dont les conditions seraient semblables à celles convenues au cours des pourparlers de Rambouillet, en février. C'est important de le dire. Cela montre clairement que même si nous sommes actuellement engagés dans des opérations militaires, l'OTAN recherche désespérément une solution diplomatique et se prépare activement au moment où pareille solution sera trouvée. Je pense que c'est important de le mentionner.
Si M. Milosevic choisit la paix et accède aux demandes de la communauté internationale—et nous espérons qu'il le fera—, une force de maintien de la paix et d'application de l'accord sera établie. Comme le gouvernement l'a annoncé au cours du débat à cet égard, le Canada est prêt à fournir entre 500 et 800 militaires à cette fin.
Le week-end dernier, à Washington, l'OTAN a fêté son 50e anniversaire. Les membres de l'alliance ont présenté un front uni et se sont montrés déterminés à mettre fin à la violence au Kosovo. La crise représente un défi fondamental aux valeurs que défend l'OTAN depuis un demi-siècle: la démocratie, les droits de l'homme et la primauté du droit.
Le Canada et ses alliés recherchent une solution diplomatique. Mais nous sommes réalistes quant aux moyens à prendre pour y parvenir. Les mots ne suffiront pas à ramener M. Milosevic à la raison, et c'est malheureux. Nous avons essayé pendant des mois, mais ce fut peine perdue. L'OTAN veut une solution diplomatique, mais il faut que nous convainquions M. Milosevic de le vouloir aussi. Et pour le convaincre, il faudra plus que des mots.
L'intensification des opérations militaires est destinée à mettre plus de pression sur Belgrade. Faire baisser cette pression n'aiderait aucunement à parvenir à une solution pour le moment. J'aimerais préciser que nous n'avons pas fait une croix sur la diplomatie.
À Washington, les alliés de l'OTAN ont reconnu le rôle que pouvait jouer la Russie dans la mise en place d'une solution diplomatique reposant sur les conditions fixées par l'OTAN et la communauté internationale. Le ministre des Affaires étrangères se rend à Moscou pour discuter de cette question avec les Russes. La voie diplomatique peut être reprise à tout moment, mais cette décision revient à M. Milosevic.
Le continent européen est aujourd'hui confronté à une grave crise. Le Kosovo est un très petit point dans une vaste région tourmentée, un croisement historique de religions et d'ethnies qui a souvent donné naissance à la haine et à la violence. Il est dans l'intérêt national du Canada et de ses alliés d'empêcher que cette région ne sombre plus encore dans l'instabilité. Notre devoir moral nous interdit de rester simplement dans les coulisses à regarder des centaines et des milliers de personnes se faire brutaliser et expulser de chez elles.
Pour ces raisons, nous devons intervenir et mettre fin à la violence au Kosovo. La paix ne sera pas obtenue si nous faisons preuve de faiblesse et si nous perdons le courage de faire valoir nos convictions. Nous devons continuer de soutenir la diplomatie, tout en recourant aux moyens militaires. Les forces du mal qui oeuvrent au Kosovo ne seront pas arrêtées autrement et il importe de le préciser.
Mme Elinor Caplan (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais faire quelques remarques à propos de ce qu'a dit le député. Je suis tout à fait d'accord avec lui et je pense que son discours était excellent.
Effectivement, le monde ne peut rester là à ne rien faire et s'attendre à ce que la paix revienne toute seule. Je suis pacifique. Je pense me faire le porte-parole de tous les habitants de Thornhill en affirmant que nous voulons la paix dans le monde. Toutefois, nous ne pouvons assister sans broncher à la terreur, à l'épuration ethnique, aux viols et aux meurtres, à toute cette violence à laquelle nous assistons dans cette malheureuse partie des Balkans. Nous ne pouvons laisser les dictateurs imposer leurs idées au monde entier sans faire preuve de fermeté et exprimer les valeurs auxquelles les Canadiens sont attachés. Le monde est trop souvent resté immobile et n'a pas su agir de manière à nous rendre fiers. Nous devons nous porter à la défense de la paix et de la sécurité pour les êtres humains; nous devons faire tout ce que nous pouvons de concert avec nos alliés de l'OTAN.
Ceux qui dans le monde désirent la paix sont aujourd'hui unis et espèrent, comme le député l'a dit, que M. Milosevic et les gens dans cette partie du monde où règne la terreur reviendront à la raison, reviendront à la table des négociations et établiront un plan pour le retour des réfugiés au Kosovo, afin que la paix soit rétablie comme nous l'espérons dans cette région où trop de générations ont connu la violence et la haine.
Je félicite le député de son intervention. Je n'ai aucune question à lui poser. Il a tout dit, et de façon très éloquente. Nous avons eu de nombreuses occasions de débattre cette question à la Chambre et je remercie la Chambre de me permettre d'ajouter ces quelques mots.
M. Lynn Myers: Madame la Présidente, je remercie mon collègue d'avoir fait ressortir la nécessité de travailler ensemble de façon efficace pour trouver le genre de solution qui est importante pour cette partie-ci du monde.
Il y a effectivement un problème dans cette région, et nous devons maintenir le cap dans cette importante initiative. Il incombe au gouvernement du Canada de poursuivre ses efforts, et je sais que les Canadiens nous appuient à cet égard, sachant très bien que nous avons adopté la bonne approche et que nous agissons conformément aux valeurs qui nous unissent en tant que nation et qui nous définissent en tant que peuple.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Madame la Présidente, on a beaucoup parlé de droit international dans ce débat. Je signale au député qu'il est arrivé plusieurs fois récemment que des pays prennent des mesures militaires qui sembleraient contrevenir au droit international.
Je cite, par exemple, l'arraisonnement en haute mer d'un chalutier espagnol par le Canada. Cela s'est produit durant la crise de la morue. Le chalutier a été arraisonné parce que les Espagnols pêchaient en haute mer juste en dehors de la zone de pêche canadienne et détruisaient les stocks de morue.
Je me souviens très clairement avoir discuté de l'incident avec un diplomate. Il disait que l'arraisonnement d'un navire en haute mer était une déclaration de guerre.
Nous savons, en rétrospective, que la plupart des pays du monde ont approuvé ce geste et ont reconnu que les pays devaient prendre des mesures, même en haute mer, s'il s'agissait de protéger non seulement leurs propres ressources, mais les ressources du monde entier.
Je signale aussi un autre aspect inhabituel de la situation dans laquelle nous sommes. Il y a encore une représentation diplomatique yougoslave au Canada, même si nous sommes en pleine offensive militaire contre la Serbie.
Ne s'agit-il pas d'une situation où nous devrions envisager de réviser certaines des lois et conventions internationales qui datent essentiellement du XIXe siècle et du début du XXe siècle afin de les adapter aux réalités du nouveau millénaire?
M. Lynn Myers: Madame la Présidente, il nous incombe d'examiner constamment les diverses lois et conventions dans le contexte de la paix mondiale. Notre intervention dans cette région du monde est efficace, et il est important que nous agissions d'une façon qui respecte les valeurs des Canadiens et de nos alliés de l'OTAN. C'est ce qu'il faut faire. C'est ce que les Canadiens attendent de nous, et c'est précisément ce que nous faisons.
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les députés le savent, notre gouvernement a promis de tenir la Chambre et l'ensemble des Canadiens au courant de l'étendue et de la nature de l'engagement du Canada dans la crise humanitaire au Kosovo. Il y a eu régulièrement des séances d'information à l'intention des parlementaires, et nous avons discuté de tous les aspects de la crise au cours de la période des questions et des débats.
La Chambre se souviendra que, avant d'entreprendre quelque opération militaire que ce soit contre le gouvernement de Slobodan Milosevic, l'OTAN avait planifié le déploiement d'une force internationale au Kosovo afin d'instaurer une paix équitable dans cette province troublée. Les députés se souviendront aussi d'avoir débattu en février dernier de la participation du Canada à cette force. Notre participation éventuelle a alors obtenu un large appui de tous les partis.
Je prends aujourd'hui la parole pour informer la Chambre que le Canada a reçu de l'OTAN une requête officielle nous demandant de commencer le déploiement de notre portion des forces d'instauration de la paix dans l'ancienne république yougoslave de Macédoine. Aujourd'hui, nous avons l'intention d'informer l'OTAN que notre gouvernement entend répondre favorablement à cette requête. Mon collègue, le ministre de la Défense nationale, expliquera les détails et l'échéancier de ce déploiement. Environ 800 membres des Forces canadiennes se joindront aux 12 000 soldats de l'OTAN qui ont déjà été mis en place dans l'ancienne république yougoslave de Macédoine afin de se rendre au Kosovo dans le cadre d'un règlement de paix.
[Français]
Je tiens à assurer les honorables députés de cette Chambre que l'objectif de ce déploiement se situe à l'intérieur des limites débattues par la Chambre. Son seul but est d'appuyer l'objectif principal que le Canada et tous nos alliés de l'OTAN poursuivent depuis plusieurs années au Kosovo: une paix juste et équitable, un règlement qui ferait en sorte que les Kosovars puissent vivre de nouveau dans la paix et la sécurité, qui garantit que la machine de guerre responsable de la répression et des atrocités commises à leur égard soit éliminée, et qu'ils puissent enfin retourner chez eux en toute sécurité.
À titre de premier ministre, je suis très fier de constater que les députés, des deux côtés de cette Chambre, se sont prononcés avec éloquence en faveur de ces principes et qu'ils ont donné leur appui à un rôle pour le Canada dans leur mise en application. En tant qu'entité législative, nous avons donné une voix aux valeurs de tolérance et de justice si chères aux Canadiens et aux Canadiennes.
Comme le savent les Canadiens, le gouvernement, en collaboration avec nos alliés de l'OTAN, participe à l'élaboration d'une solution diplomatique à cette crise. C'est pourquoi le ministre des Affaires étrangères se rendra cette semaine à Moscou, afin de rencontrer les représentants de la Russie et le secrétaire général des Nations Unies.
Je pense que la voie militaire et diplomatique dans laquelle s'est engagée l'OTAN nous permettra, à terme, d'arriver à une juste solution à cette crise. Toutefois, je tiens à assurer tous les députés que si l'OTAN devait demander au Canada de déployer ses troupes en vue de missions de combat, nous consulterons cette Chambre avant d'arriver à une décision finale.
[Traduction]
Je profite des quelques minutes qu'il me reste pour rappeler ce qui s'est passé au cours du week-end.
Comme les députés le savent, nous avons renouvelé l'accord de l'OTAN. Dans le débat sur le Kosovo, il a été extrêmement clair que les 19 pays en cause reconnaissaient tous la nécessité de poursuivre les frappes aériennes pour persuader le gouvernement de Belgrade de mettre un terme aux atrocités, aux meurtres et à tous les autres actes condamnables, de retirer ses troupes du Kosovo et d'autoriser le déploiement de troupes internationales.
La semaine dernière, il a été dit que seules des troupes de l'OTAN seraient déployées. Les Canadiens ont entamé des pourparlers pour que ce soit un groupe international qui intervienne, et pas uniquement l'OTAN. C'est la possibilité qui est maintenant à l'étude. Le gouvernement de M. Milosevic doit toutefois respecter les cinq conditions avant que nous arrêtions les frappes aériennes.
Un autre fait est à signaler: tous les pays entourant la Yougoslavie, des pays comme la Bosnie, l'Albanie, la Croatie, ont appuyé les mesures prises par l'OTAN, quand nous nous sommes rencontrés, dimanche matin. Plus tard, nous avons eu une réunion avec le groupe de nations participant au regroupement pour la paix. Le groupe réunit plusieurs des nouvelles républiques de l'ancienne URSS. Les participants ont parlé d'un commun accord, à ma grande satisfaction, de droits de la personne, de droits démocratiques, ainsi de suite. La situation était délicate, parce que six d'entre eux étaient d'anciens membres du politburo. Quelqu'un a fait remarquer combien c'était révélateur des progrès accomplis.
Il était totalement évident que le gouvernement de Milosevic est complètement isolé, politiquement, à l'heure actuelle. Nous devons intensifier les pressions économiques pour qu'il se retire du Kosovo et qu'il permette aux Kosovars de revenir chez eux.
Il y avait beaucoup d'activité. La Chambre a demandé, avec raison, la semaine dernière, que nous proposions la participation des Russes. Tout le monde est d'accord là-dessus. Kofi Annan se rend en Russie cette semaine. Le ministre des Affaires étrangères y sera. Les choses bougent. Il y a eu des discussions avec le président Clinton, dimanche matin. Le président a informé d'abord certains d'entre nous en privé puis l'ensemble des participants de la nature de ces discussions. Il y a au moins des discussions en cours et le désir de la part des Russes de participer à la recherche d'une solution pacifique, comme le premier ministre de la Chine me l'a dit au cours de son séjour au Canada il n'y a pas si longtemps.
Le Canada joue le meilleur rôle qu'il peut assumer. Nous figurons parmi les nombreux pays en cause. Nous accordons la priorité à la recherche d'une solution pacifique. Il est évident qu'aucune solution pacifique n'est possible tant que nous ne persuaderons pas Milosevic d'accepter ce qui a été convenu à Rambouillet. Tous les participants s'étaient entendus à Rambouillet, y compris les Russes. Le différend qui nous opposait et qui nous oppose encore aux Russes, c'est le recours aux frappes aériennes. Après d'innombrables années de négociations et de précédents en Bosnie et ailleurs, nous n'avons pas d'autres choix que de procéder à des frappes aériennes. Selon les renseignements qui nous ont été communiqués, les frappes commencent à ébranler le gouvernement de Belgrade.
Il y a des signes encourageants, comme la déclaration qu'a faite le vice-premier ministre dimanche dernier, qui contredisait assez la position officielle de Belgrade. Nous ne savons pas s'il s'agit d'une autre tactique. Le président Milosevic aime bien avoir recours à ce genre de tactiques pour retarder les choses encore et encore. Comme nous l'avons malheureusement appris, bien avant le début des bombardements, il avait déjà commencé à planifier plus de huit mois auparavant le nettoyage ethnique et l'assassinat des Kosovars albanais.
Nous faisons l'impossible pour trouver une solution pacifique, mais, entre-temps, il faut que tout le monde sache à quel point la détermination des 19 pays est claire et manifeste.
[Français]
Quand je suis parti pour Washington, je pensais qu'il y aurait énormément de divisions et que ça allait être un débat plutôt difficile, mais je me suis rendu rapidement compte que tout le monde était unanime pour dire que ce genre d'activités par le gouvernement de Belgrade devait cesser.
Ce qui est important, c'est que l'OTAN se soit donnée un rôle dans cette mission, parce que cela concerne la stabilité politique de toute l'Europe. Si on ne règle pas ce problème, il y aura des conséquences dans tous les autres pays. J'ai eu des rencontres avec les présidents de pays voisins qui sont déjà énormément affectés par la crise, comme la Bulgarie et la Hongrie. Il y a 300 000 Hongrois dans la province nord de la Yougoslavie.
Toute la tension qui existe et les problèmes auxquels plusieurs des chefs de gouvernement font face est quelque chose d'extrêmement impressionnant.
[Traduction]
Nous avons beaucoup de chance de vivre loin du problème à certains égards, mais la tension est énorme pour les dirigeants des gouvernements plus proches. La situation est très difficile pour les pays dont la population partage la foi des Serbes. La situation est extrêmement difficile à gérer, mais tout le monde a fait preuve de solidarité au sein de l'OTAN et les pays voisins ont clairement indiqué que nous devions poursuivre nos efforts. Espérons que le conflit prendra fin le plus tôt possible. Nous faisons tout ce que nous pouvons sur le front diplomatique.
Les partis à la Chambre des communes n'ont pas tous le même point de vue et c'est normal, mais tous les chefs de partis ont appuyé l'action du gouvernement et des 19 pays membres de l'OTAN. Je voudrais profiter de l'occasion pour remercier encore une fois les députés de leur participation et de leur collaboration.
Le Canada est membre de l'OTAN depuis longtemps. J'ai constaté avec grand plaisir que le président des États-Unis a cité Mike Pearson lorsqu'il a parlé des objectifs de l'OTAN. L'OTAN n'est plus uniquement une organisation de défense. Pour la première fois, elle est intervenue au nom des droits de la personne et pour protéger la dignité des gens, contrairement à ce qu'elle avait fait jusqu'à maintenant. Son intervention a probablement créé une nouvelle situation qui pourrait permettre de prévenir ailleurs dans le monde le genre de situation qui se produit actuellement au Kosovo.
L'OTAN est intervenue au nom de la stabilité en Europe. Nous sommes engagés envers la stabilité en Europe depuis 50 ans. Il est très gratifiant de voir les nouveaux membres de l'OTAN, nommément la République tchèque, la Hongrie et la Pologne, qui ont été plongés dans cette situation dès leur arrivée au sein de l'organisation, intervenir d'office dans le conflit et manifester leur appui à l'effort collectif.
Je tiens à remercier la Chambre. J'ai probablement parlé plus longtemps que le Règlement ne m'y autorise, mais dans la négative je suis prêt à répondre à quelques questions.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Madame la Présidente, j'aimerais remercier le premier ministre de l'annonce qu'il vient de faire à la Chambre. Les députés auront ainsi la possibilité de poser des questions et de faire part de commentaires à ce sujet. J'ai deux questions à poser au premier ministre, mais je voudrais auparavant dire quelques mots.
Tout d'abord, il me semble que la Chambre avait convenu que les trois principaux objectifs poursuivis en Yougoslavie étaient l'objectif moral visant à mettre fin au nettoyage ethnique, l'objectif politique visant à assurer la sécurité des Kosovars dans la région, et l'objectif militaire visant à endommager la capacité militaire des Serbes en vue de les empêcher de poursuivre leurs opérations de purification ethnique et de les forcer à s'asseoir à la table de négociation. Je crois que nous sommes tous d'accord sur ces objectifs globaux.
Ma première question est la suivante: Le premier ministre pourrait-il donner quelques précisions sur la façon dont la mise sur pied de cette force de maintien de la paix pourrait faciliter concrètement l'atteinte de ces objectifs?
Ma deuxième question s'inscrit dans la suite du débat que nous avons tenu à la Chambre il y a quelques semaines. Je crois que nous nous sommes mis d'accord sur le rôle du Canada dans les frappes aériennes menées par l'OTAN. On semblait toutefois accorder beaucoup d'importance, certainement à la Chambre de même que parmi le public je crois, au fait que si le Canada devait élargir sa participation d'une façon ou d'une autre, que ce soit par l'envoi de troupes terrestres ou même l'établissement d'un blocus naval, une motion devrait être présentée à Chambre pour que les députés donnent au gouvernement le mandat de faire ce qu'il se propose de faire et qu'un vote devrait avoir lieu sur cette motion. Ainsi, les Canadiens comprendront la portée des pouvoirs qui seraient conférés au gouvernement. Un tel débat devrait permettre aux députés de poser des questions sur la façon dont la création d'une force de maintien de la paix pourrait permettre de réaliser les objectifs fondamentaux et sur la capacité du Canada d'effectuer la mission que lui confie l'OTAN.
J'aimerais donc par ma seconde question que le premier ministre nous dise si, compte tenu de l'annonce qu'il vient de faire, il compte déposer une motion à la Chambre demandant qu'on lui accorde un mandat précis pour approuver l'élargissement de notre rôle dans les Balkans.
Le très hon. Jean Chrétien: Madame la Présidente, en réponse à la première question, je dirai que cela fait partie d'un plan qui a été établi à la discussion de Rambouillet où il a été décidé que nous devrions envoyer des casques bleus là-bas. D'autres pays ont envoyé leurs Casques bleus. Il y en a 12 000, en fait. Nous n'en avons pas envoyés. En raison de la distance, c'est plus compliqué pour nous; nous avons donc attendu qu'ils soient nécessaires.
Si aucun accord de paix n'intervient entre-temps, ils n'iront pas là-bas, ils ne s'en mêleront pas. Ce ne sont pas des fantassins, mais des Casques bleus. Ils n'entreront là-bas qu'en cas d'accord. Ils seront sur place et seront bien équipés. Ils auront six ou huit hélicoptères de reconnaissance. Pour l'instant, ils viendront en aide aux gens qui assument présentement une tâche humanitaire en Macédoine.
Nous avons eu la chance de nous entretenir avec les Macédoniens. L'économie de la Macédoine est pratiquement tombée à zéro avec 40 ou 45 p. 100 chômage à l'heure actuelle. Les Macédoniens ne peuvent pas accueillir tout le monde. C'est une situation extrêmement compliquée. Je puis garantir à la Chambre que les casques bleus sont là et qu'ils sont prêts à l'action. Si un accord de paix intervient, ils passeront rapidement à l'action.
Je ne crains pas de tenir un vote à la Chambre des communes. La question est de savoir ce qu'il faut faire. Nous pouvons en débattre. Mais nous fonctionnons à l'intérieur d'un système particulier. Je n'ai pas peur d'un vote, car je sais qu'il sera clair. Dans notre système parlementaire, le gouvernement a la confiance de la Chambre. S'il perd la confiance de la Chambre, il y a bien des façons de procéder.
On parle d'un blocus et d'un embargo. Nous avons un navire là-bas. Le chef de l'opposition m'a donné l'impression que les députés voudraient que l'on vote maintenant sur la présence là-bas de ce navire. Est-ce que cela veut dire que la moindre décision des forces armées et du gouvernement devrait faire l'objet d'un vote à la Chambre des communes? Ce n'est pas comme ça que fonctionnent notre démocratie et notre système judiciaire.
Le gouvernement assume le pouvoir exécutif et il a besoin de l'appui et de la confiance de la Chambre des communes. On a déjà procédé ainsi dans le passé. Je crains pour l'avenir de la Chambre des communes si c'est là la meilleure façon de mener une opération. La Grande-Bretagne estimait qu'il n'y avait pas d'espoir, non pas parce que le gouvernement craignait d'être rabroué, lui qui dispose d'une importante majorité, mais bien parce qu'il part du principe qu'il est l'organe exécutif et législatif.
Si le chef du Parti réformiste veut tenir un vote, il peut proposer une motion en ce sens. Le Parti réformiste a encore à présenter deux motions pouvant faire l'objet d'un vote. Si le Parti réformiste le souhaite, on peut tenir un débat à ce sujet demain. Il pourrait rédiger la résolution qu'il veut. Il peut y préciser ce qu'il souhaite et ce qu'il refuse. Il peut aussi se dire d'accord. Nous pourrions voter pour voir qui sont d'accord avec notre ligne de conduite et qui s'y opposent. Le Parti réformiste a cette possibilité.
À titre de représentant de l'organe exécutif du gouvernement, je dois supposer que j'ai la confiance de la Chambre, sinon, le système s'effondrerait. Je ne veux pas m'engager dans une discussion politique, mais je dois dire que nous avons eu plus de débats à ce sujet que jamais auparavant. Je me suis entendu avec tous les partis de l'opposition sur la tenue de débats exploratoires où tout le monde est libre de prendre la parole et d'exprimer son point de vue. Le dernier débat a eu un aspect très positif, car nous sommes arrivés à un accord général.
Notre façon de fonctionner ne prévoit pas la tenue d'un vote sur chaque mesure qui est adoptée. Je n'ai pas établi la distinction entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif pour le simple plaisir de le faire. Dans le cas présent, ce serait plus simple pour moi, car je ne vois pas de forte opposition. Je reste toutefois responsable de la saine administration du système politique canadien.
Le Président: Chers collègues, nous sommes tous conscients que nous discutons actuellement d'une question très importante. Je voudrais simplement soulever un point. Si la Chambre donne son consentement unanime, je vais accepter au moins une question des chefs des autres partis. Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais avoir des précisions du premier ministre sur deux points.
Premièrement, quel sera, de façon plus spécifique, le rôle des troupes qui seront envoyées dans les prochaines heures en Macédoine. On dit que c'est pour le maintien de la paix, mais j'aimerais savoir plus précisément le rôle qu'elles rempliront.
Deuxièmement, nous avons soulevé dans ce débat, il y a environ une dizaine de jours, le fait que l'envoi de troupes dans les Balkans, même pour le maintien de la paix, que ce soit en Macédoine plutôt qu'au Kosovo, pouvait bien s'avérer, à moyen et même à court terme, le premier pas vers une présence militaire avec une mission offensive au Kosovo même. C'est beaucoup moins loin, on en conviendra, de passer par la Macédoine pour aller au Kosovo. Cela demeure inquiétant.
Je me demande pourquoi le premier ministre ne propose pas à la Chambre un débat suivi d'un vote, étant donné que c'est cela qui s'est produit en Allemagne. Cela devrait se produire en République tchèque si elle décidait d'envoyer des troupes. Le premier ministre Jospin a annoncé également que la France se prononcerait par le biais d'un vote.
Je ne comprends pas l'attitude du premier ministre et les raisons invoquées. On ne demande pas un vote sur chacune des tactiques militaires qui pourraient être employées, on every little move. Ce n'est pas ce qu'on demande. On se pose plutôt des questions sur le principe même d'envoyer des troupes au sol.
On nous dit que cette Chambre doit respecter les procédures parlementaires. À chaque jour, on tient des votes après des débats, bien sûr. On débat avant de voter sur une multitude de sujets qui ont bien moins d'importance que de prendre une décision sur l'envoi de troupes, tant pour le maintien de la paix que pour une offensive militaire. Or, il me semble que c'est tout à fait la responsabilité de la Chambre d'avoir un débat suivi d'un vote, comme on le fait pour tant d'autres sujets.
Le très hon. Jean Chrétien: Monsieur le Président, je pensais l'avoir expliqué tantôt, mais je suis heureux de l'expliquer à nouveau. Dans la préparation d'un accord avec Belgrade, il avait été prévu qu'il y aurait des troupes. Nous espérons en arriver à un accord dans les plus brefs délais.
On nous a demandé d'envoyer nos troupes afin d'être prêts. De plus, les troupes qui sont sur les lieux à ce moment-ci en Macédoine servent beaucoup à aider les réfugiés. C'est une des raisons pour lesquelles on nous a demandé d'être là. Nous aurons des hélicoptères qui vont servir éventuellement sur le territoire du Kosovo, mais qui peuvent servir à ce moment-ci pour aider les réfugiés. Les troupes n'iront pas au Kosovo tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas un accord. Si elles doivent éventuellement y aller, j'ai dit que je reviendrais devant la Chambre des communes.
Quant aux autres problèmes, c'est sûr que nous tenons des votes à tous les jours. J'ai toutefois expliqué que pour une question comme celle-là, le système parlementaire est fondé sur la confiance que la Chambre des communes a à l'endroit du gouvernement. Pour opérer dans une situation comme celle-là, nous présumons, étant donné que nous formons le gouvernement, que nous avons l'autorité d'agir jusqu'à ce que nous perdions la confiance de la Chambre.
J'ai également dit qu'on a un mécanisme qui n'existait pas auparavant et qui existe maintenant. Rien n'empêche les partis d'opposition, avec les journées qui leur sont allouées, de poser des questions. Ce n'est pas le gouvernement qui en prend la responsabilité. Nous analyserons la motion et nous voterons. Mais nous présumons que nous avons la confiance des partis. Le Bloc québécois a eu une chance il y a quelques jours. Il aurait pu poser une question très claire, mais il a posé une question ambiguë.
Le lendemain du débat à la Chambre, le Parti réformiste a posé une question étrange sur une motion qui n'avait rien à voir avec la crise au Kosovo, mais qui se référait à un comité qui mène des consultations dans l'Ouest. L'opposition ne veut pas prendre les occasions qu'elle a.
À un moment donné, la question de la confiance à l'endroit du gouvernement sera présentée de façon spécifique. Le 9 juin prochain, des votes se tiendront à la Chambre des communes sur les crédits du ministère de la Défense. La Chambre peut se prononcer contre les crédits du ministère de la Défense. C'est une façon de le faire. L'opposition ne peut pas être contre et pour en même temps. Si elle ne veut pas qu'on le fasse, qu'elle coupe les crédits du ministère de la Défense et on ne pourra pas y aller. Cela deviendrait une question de confiance.
[Traduction]
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je tiens d'abord à souligner à quel point nous sommes ravis de la décision du premier ministre de participer à ce débat aujourd'hui. C'est d'ailleurs dans cet esprit que le NPD a présenté cette motion de l'opposition. Nous voulions avoir l'occasion de discuter plus longuement à la Chambre de ce que nous allons faire pour intensifier et accélérer nos efforts, en tant que pays, en vue de trouver une solution diplomatique, pacifique et rapide à la crise au Kosovo.
Je tiens à répéter encore une fois quelque chose que nous avons déjà dit publiquement à la Chambre et ailleurs, soit que nous croyons qu'il est important de pouvoir voter sur cette question. J'ai de la difficulté à comprendre le raisonnement du premier ministre compte tenu du fait que, pendant la guerre du Golfe, il y a eu six votes à la Chambre sans que personne ne voie cela comme une érosion de la confiance des Canadiens à l'égard du gouvernement ou de sa capacité de faire son travail.
Ma question aujourd'hui ne porte pas sur la tenue d'un vote au sujet de l'intensification possible des efforts militaires. Nous espérons que nous en sommes arrivés à un point où nous ne parlerons plus d'intensifier les efforts militaires, mais bien d'intensifier nos efforts diplomatiques.
La déclaration qu'a faite le premier ministre aujourd'hui au sujet du déploiement de troupes à des fins pacifiques seulement est tout à fait conforme à la position que nous avons énoncée dans notre motion. Évidemment, nous serons très vigilants pour nous assurer que nous ne parlons que d'un déploiement à des fins pacifiques.
Ma question est axée sur la motion présentée à la Chambre par le NPD parce que c'est là l'objet de notre débat. Je me reporte à l'affirmation du premier ministre concernant l'importance vitale de la participation de la Russie à l'élaboration d'une solution pacifique. Celui-ci sait que la Russie a déclaré qu'une telle participation serait impossible si l'OTAN applique un embargo pétrolier et procède éventuellement à un blocus naval.
Dans cet esprit, le premier ministre peut-il donner aujourd'hui aux Canadiens l'assurance que lui-même, au nom du Canada, le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Défense s'opposeront de façon claire et non équivoque à l'adoption de toute mesure semblable?
Nous avons une occasion en or de faire progresser la cause de la paix. Comme le ministre des Affaires étrangères doit se rendre à Moscou dans le cadre de ce que j'estime être une intensification du recours à la voie diplomatique, il pourra mentionner que nous ferons preuve de leadership en veillant à ce que soit respectée la position de la Russie à l'égard de cette question et que nous ne ferons rien pour mettre en péril la possibilité de pouvoir continuer à compter sur la participation de la Russie à l'élaboration d'une solution rapide, pacifique et diplomatique dans ce dossier.
Le très hon. Jean Chrétien: Monsieur le Président, ce n'est pas un blocus. J'ai dit dimanche que nous ne ferions rien pour provoquer les Russes. L'embargo est chose faite. Beaucoup de gens peuvent apporter leur contribution afin que le gouvernement de Milosevic comprenne clairement qu'il se trouve en situation d'isolement économique. Comme je l'ai dit, à quoi sert de bombarder les raffineries si l'on permet que de l'essence arrive du sud par bateau pour remplacer ce qui a été détruit? On ne peut permettre qu'il en soit ainsi.
Sur le plan diplomatique, quand il a d'abord été question collectivement de l'envoi de troupes de l'OTAN seulement, le Canada a été le premier à évoquer un élargissement de la participation. L'embargo sera une décision collective. Ce ne sera pas un blocus. Nous ne comptons pas utiliser des navires militaires pour couler des pétroliers russes. Nous ne parlons que d'embargo.
Les Russes ont eux aussi intérêt à ce que le conflit prenne fin. Ils sont opposés aux frappes aériennes, mais ils appuient l'accord de Rambouillet. Cela ne fait aucun doute. Il est clair que nous devons continuer. Ce n'est pas le moment d'arrêter.
J'ai dit plus tôt que l'on sait que Milosevic a très habilement joué son jeu en acceptant presque des propositions puis en temporisant le temps qu'il lui faut pour faire ce qu'il veut faire. Maintenant, il existe une détermination collective d'obtenir des résultats. Les infrastructures de Milosevic sont sérieusement touchées et leur destruction sera intensifiée. Il est complètement isolé sur le plan politique.
J'ai lu, et les députés ont probablement lu aussi, qu'à Belgrade, on espère que les avions russes viendront au secours de la Yougoslavie. Ces avions ne sont pas là et n'iront pas. Les Russes aimeraient autant que nous que ce conflit soit résolu, mais les cinq conditions doivent être respectées.
Si l'OTAN n'est pas sur place, les Kosovars ne voudront pas rentrer chez eux. C'est bien beau de dire qu'il n'y aura plus de bombardements, mais les Kosovars y réfléchiront à deux fois avant de rentrer. Ils ne rentreront pas dans une région dévastée. Leurs maisons ont été brûlées par les Serbes et leurs villes ont été détruites. Ils sont maintenant en Albanie. Lorsque nous leur demanderons de rentrer chez eux, ils voudront le faire, mais seulement si une certaine sécurité est assurée.
Il y a encore autre chose. Nous devons mettre fin au conflit. Il y a actuellement un groupe armé au Kosovo qui a recours aux armes pour obtenir l'indépendance du Kosovo. C'est un autre aspect du problème qu'il ne faut pas perdre de vue. Nous voulons des casques bleus sur place pour que les habitants du Kosovo puissent rentrer chez eux, vivre une vie normale et profiter des libertés pour lesquelles nous nous battons tous.
[Français]
M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, comme plusieurs de mes collègues l'ont déjà fait, je remercie le premier ministre de prendre le temps de venir à la Chambre. On apprécie énormément son geste.
Aujourd'hui, le premier ministre annonce que le Canada va envoyer des troupes de maintien de la paix en Macédoine, ce qu'on appelait communément des casques bleus. Il ne s'agira pas de casques bleus, parce qu'ils y iront sous l'égide de l'OTAN.
J'aimerais connaître la liste des pays qui ont fait la demande, parce que le premier ministre disait que c'était l'OTAN qui avait demandé l'envoi de troupes et non le Haut-Commissariat aux réfugiés.
Est-ce que le premier ministre pourrait nous signaler l'effort des autres pays? Est-ce que, par cet envoi de troupes à ce stade-ci, le premier ministre annonce une fin rapide des hostilités? Quelle est la justification de l'envoi de troupes de maintien de la paix en Macédoine présentement, demandé par l'OTAN? Si c'est pour aider les réfugiés, la demande aurait peut-être dû parvenir du Haut-Commissariat aux réfugiés.
Maintenant, au sujet du blocus naval, on annonce que ce n'est pas un blocus, ni un embargo, mais simplement une vérification de l'entrée de matériel en Yougoslavie. Comment le premier ministre peut-il caractériser ce qu'on lit dans les journaux de ce matin, à savoir que le ministre de la Défense nationale ainsi qu'un général allemand disaient qu'il n'est pas question d'arraisonner par la force les bateaux qui iraient en Yougoslavie par le Monténégro et qu'il n'est pas question non plus d'arrêter par la force le pétrole provenant de la Russie.
Ma dernière question est la suivante. Le premier ministre exclut-il une force autre que l'OTAN, peut-être sous l'égide de l'ONU avec les Russes, du maintien de la paix au Kosovo?
Le très hon. Jean Chrétien: Monsieur le Président, j'ai expliqué le rôle plus tôt. Les Anglais, les Français, les Italiens et les Américains sont déjà là, tous sous l'égide de l'OTAN.
Ils y sont dans le contexte des préparations pour l'accord qui n'a pas eu lieu à Rambouillet. On nous a demandé d'être présents. Il y avait des discussions, et là, on nous a fait une demande officielle, mais celle-ci vient de l'OTAN.
En ce qui a trait à l'embargo, nous avons demandé aux militaires de préparer un plan. À ce moment-ci, les détails ne sont pas connus. Comme je l'ai expliqué, c'est un embargo, c'est-à-dire qu'on ne va pas employer les armes pour établir un blocus.
À savoir comment cela peut se faire, à ce moment-ci, dans les détails, on ne connaît pas la nature exacte de tous les navires qui s'y rendent. Il y en a qui sont complètement légitimes. Il faut aussi tenir compte du fait qu'il ne faut pas affaiblir plus qu'il ne faut le gouvernement de Monténégro, qui est un gouvernement élu démocratiquement. Le Monténégro est une province très autonome de la Yougoslavie et est plutôt à couteaux tirés avec le gouvernement de Belgrade.
D'un autre côté, il ne faut pas que ces activités soient concentrées au sud, au détriment des actions que nous faisons au nord du Kosovo et dans la région de Belgrade.
Nous souhaitons que la force de paix qui ira au Kosovo soit une force des Nations Unies. C'est notre désir. Je ne sais pas si cela sera possible, mais il faut que ce soit plus que l'OTAN, et nous l'avons dit dans cette Chambre la semaine dernière.
Alors que les mots qui étaient sortis de Bruxelles étaient qu'il fallait n'avoir que des troupes de l'OTAN, je suis personnellement convaincu que pour rendre la présence étrangère plus acceptable en Yougoslavie, il faudra qu'il y ait des Russes et des Ukrainiens.
J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec le président Kuchma. Il y a très peu de gens qui ont des contacts avec le gouvernement de Belgrade, mais le ministre de la Défense et le ministre des Affaires étrangères se sont rendus à Belgrade. Il m'a donné sa version et, parmi les points qu'il a soulevés, j'étais d'accord avec lui qu'il fallait que d'autres pays que les pays de l'OTAN soient impliqués dans une éventuelle force de paix.
[Traduction]
M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, je vais partager le temps qui m'est imparti avec le député d'Edmonton-Est.
Avant de commenter la motion qui nous est présentée aujourd'hui, j'aimerais toucher un mot de ce qu'a dit le premier ministre cet après-midi. Je me réjouis qu'il soit venu à la Chambre nous présenter cette information et qu'il ait donné aux députés et au public canadien un bref cours d'introduction à la politique ainsi qu'un cours sur le pouvoir exécutif du gouvernement à la Chambre.
Je rappelle au premier ministre et à l'exécutif que leur pouvoir de décision s'accompagne de responsabilités. Le gouvernement sera tenu responsable de toute mesure jugée inappropriée par l'opposition officielle et par le peuple canadien.
À cet égard, je suis très préoccupé par le type de troupes qui sont déployées dans les Balkans. Le premier ministre nous a donné très peu de renseignements sur ces troupes. Il a parlé de 800 militaires, mais il a très peu parlé de leur rôle et de leurs missions. Nous savons très peu de choses à ce sujet. Le ministre de la Défense m'assure qu'il va également s'exprimer sur ce sujet.
Ce que je tiens à souligner, c'est que la Chambre convient que le mandat du gouvernement du Canada comprend la prise de décisions, mais il comporte également des responsabilités. Nous allons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour nous assurer que des troupes suffisantes sont déployées et que tous les moyens sont mis en oeuvre. Nous savons tous que ce gouvernement a réduit le potentiel militaire au cours des cinq dernières années, soit depuis son arrivée au pouvoir, et il devra rendre compte de ces faits. Le vérificateur général l'a fait remarquer. Le chef d'état-major de la Défense a également fait remarquer l'insuffisance de notre potentiel actuel, après six ans de règne libéral dans ce pays.
Mais je m'éloigne du sujet. Au nom des électeurs d'Okanagan—Coquihalla j'ai voulu aujourd'hui intervenir dans le débat sur la motion de l'opposition qui dit:
Que la Chambre demande au gouvernement d'intensifier et d'accélérer les efforts en vue de trouver une solution diplomatique à la crise au Kosovo en assurant la participation de la Russie et des Nations Unies et d'exhorter l'OTAN à ne pas prendre d'actions qui favoriseraient l'extension du conflit et qui nuiraient à la recherche d'une solution diplomatique.
Je félicite les membres des Forces canadiennes, particulièrement ceux de l'aviation, qui ont accompli un excellent travail dans le cadre des sorties et des missions qui leur ont été confiées au cours des 35 derniers jours. Tous les Canadiens devraient prendre le temps de les en remercier et de prier pour qu'ils reviennent au Canada rapidement et sains et saufs. Nous souhaitons tous une solution diplomatique à ce conflit.
C'est précisément le problème de cette motion. Elle est libellée de manière à donner l'impression que nous n'avons pas recherché une solution diplomatique. Si je m'en tiens aux journaux que je lis quotidiennement, aux reportages que j'entends et à toute cette kyrielle d'activités qui se déploient autour de Kofi Annan, des ministres de Russie, de notre ministre des Affaires étrangères et des autres parties intéressées, je dirais qu'il ne fait aucun doute que l'activité diplomatique s'est accrue. Le Canada doit afficher sa détermination à ne pas se démarquer de ses alliés de l'OTAN dans cette terrible tragédie que connaît le Kosovo.
La motion laisse supposer que les Russes et l'ONU ont été tenus à l'écart des négociations. J'estime que c'est on ne peut plus faux. En tout cas, je craindrais trop d'envoyer un tel message. Par conséquent, je ne puis souscrire à la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui.
Il importe également de souligner que l'ONU est présente dans les Balkans depuis près d'une décennie, essayant de résoudre divers conflits ethniques et territoriaux. Les activités diplomatiques sont plus intenses à l'heure actuelle, mais elles ont toutefois cours depuis dix ans. Nous avons essayé.
Si les députés néo-démocrates sont d'avis que ce n'est qu'un caprice de l'OTAN qui ne s'appuie sur aucune justification sérieuse, ils se trompent royalement. Il ne faut pas oublier la participation du Canada. Nous avons également des intérêts en jeu. Onze de nos casques bleus ont perdu la vie au cours d'une mission de maintien de la paix dans les Balkans. Je ne le dis pas d'un ton léger. Cela me préoccupe au plus haut point. Vous vous demandez si nous avons un intérêt dans tout cela? Bien entendu, car tous ces gens ne sont pas morts en vain.
L'OTAN a pris une initiative militaire parce que l'ONU n'est pas parvenue à une entente sur une intervention contre la purification ethnique menée par les Serbes au Kosovo. La Russie et la Chine s'opposeraient à une intervention sanctionnée par l'ONU au Conseil de sécurité. Nous le savons très bien. Kofi Annan l'a souligné lui-même.
Il est ridicule de dire que la Russie a été exclue. Nous reconnaissons l'importance de la Russie. Tous les rapports des médias, tout ce que nous entendons démontre bien que tous les intervenants essaient d'engager la Russie. On considère que la Russie pourrait jouer un important rôle de médiateur pour mettre un terme à ce conflit.
J'aimerais rappeler les objectifs aux députés et à mes collègues du Nouveau Parti démocratique. Je ne désapprouve pas les néo-démocrates d'avoir présenté cette motion. Ils l'ont fait dans le but de trouver une solution au conflit. Toutefois, je suis d'avis qu'ils n'ont pas réfléchi longtemps à ce qu'ils nous disent aujourd'hui.
Premièrement, l'OTAN cherche à mettre un terme à ce nettoyage ethnique. Deuxièmement, elle vise le retrait des forces serbes. Troisièmement, les réfugiés devraient pouvoir retourner chez eux au Kosovo. Quatrièmement, les casques bleus de l'OTAN devraient avoir le droit de pénétrer au Kosovo. Cinquièmement, on recherche une solution politique. C'est le cinquième élément dans l'accord de l'OTAN auquel les 19 États membres ont souscrit.
Les frappes aériennes de l'OTAN visent déjà la Yougoslavie afin de réduire la capacité d'agression des forces militaires et paramilitaires du pays. Cette intervention, qui revêt une grande importance, porte fruit. Les faits semblent indiquer que la tactique appliquée est efficace.
Les propos tenus hier par le vice-premier ministre de Yougoslavie indiquent que le pouvoir décisionnel politique de ce pays s'effrite. Nous ne pouvons pas permettre que la même chose se produise de notre côté. L'OTAN doit demeurer déterminée à poursuivre la campagne jusqu'à ce que les dirigeants yougoslaves acceptent un règlement négocié.
Quel genre de message une motion pareille enverra-t-elle à Milosevic? Il apprécierait beaucoup cette motion car elle indiquerait un affaiblissement de la détermination de l'OTAN. Je ne crois pas que ce serait approprié dans le contexte actuel.
Les bombardements aériens, qui sont efficaces, se poursuivent. Nous sommes en train de réduire la capacité de l'armée yougoslave. C'est très important et certains indices permettent de croire qu'un règlement politique est possible.
Le chef de l'opposition a exposé, dans un discours qu'il prononçait le 12 avril dernier, les objectifs pour lesquels il appuierait le gouvernement et l'OTAN: premièrement, sur le plan moral, mettre un terme à l'épuration ethnique; deuxièmement, sur le plan politique, assurer la sécurité aux Kosovars et stabiliser la région par la négociation; et troisièmement, sur le plan militaire, endommager le potentiel militaire de la Yougoslavie afin de réduire sa capacité de poursuivre l'épuration ethnique et d'obliger le gouvernement yougoslave à négocier.
La fin de semaine dernière, j'ai rencontré dans ma circonscription un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale, avec qui j'ai eu une conversation. Il s'agit du lieutenant-colonel Harry Kwarton. Je lui ai demandé ce qu'il pensait de la situation actuelle. Il m'a répondu qu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, nous avions annoncé au monde que nous ne permettrions plus jamais que ce genre de chose se produise. Il a ajouté que nous faisions ce qu'il fallait en intervenant en Yougoslavie et en appuyant l'initiative de l'OTAN. Je crois que nous sommes sur la bonne voie.
Je tiens à féliciter nos troupes et à rappeler encore une fois au gouvernement que je le tiens responsable des décisions qu'il prend. Il ferait bien de s'assurer que les ressources que nous engageons sont suffisantes et qu'elles nous permettront de mener notre mission à terme.
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre part encore une fois, au nom des habitants de ma circonscription, à un débat très important.
Le Canada a, sur le plan de la guerre, une histoire dont il peut être fier. Cependant, notre rôle dans ce conflit est très différent de nos triomphes du début du siècle en Europe. Certes, j'appuie l'envoi de troupes dans le monde, mais j'ai certaines réserves en ce qui concerne notre rôle et le plan à long terme s'il y en a un.
L'opposition officielle est prête à appuyer notre participation à la guerre en Yougoslavie à condition que celle-ci serve à atteindre plusieurs objectifs: l'objectif moral qui consiste à mettre fin à l'épuration ethnique perpétrée par le gouvernement yougoslave; l'objectif politique, qui consiste à créer un foyer sûr pour les Kosovars, en stabilisant, par des négociations pacifiques, les relations entre la République fédérative de Yougoslavie et ses voisins; et les objectifs militaires qui sont de réduire la capacité militaire du gouvernement yougoslave et de réduire sa capacité de pratiquer l'épuration ethnique.
Aucun pays dans l'histoire n'a pu être contraint à la soumission totale par des bombardements et cela ne se produira vraisemblablement jamais. Il est évident, même aux yeux de la plupart des généraux en pantoufles, qu'un plan plus global est nécessaire. Les États-Unis, principal partenaire dans cette mission, savent très bien qu'au XXe siècle, une guerre terrestre serait terriblement effroyable et mortelle.
La force militaire est seulement un outil pour nous permettre d'atteindre nos objectifs. Le Parti réformiste a fait remarquer qu'il était prêt à appuyer l'envoi d'une force militaire et l'engagement de forces canadiennes à condition que le gouvernement démontre à la Chambre que de nouveaux engagements sont nécessaires pour mettre fin à l'épuration ethnique et pour assurer le retour des Kosovars en toute sécurité, et qu'il démontre que les responsabilités attribuées aux Canadiens restent dans les limites des capacités militaires et des lignes directrices de la défense du Canada.
Jusqu'à maintenant, le gouvernement libéral ne s'est pas montré ouvert avec le Parlement et les Canadiens. Les trois débats thématiques sur la crise n'ont été rien de plus qu'une entreprise de relations publiques. Le gouvernement élu du Canada n'a vraiment eu aucun poids dans la balance. Tout récemment, cette question a été soulevée au sujet du déploiement des troupes terrestres. Tout blocus naval signifie aussi une escalade de ce conflit et mérite, à mon avis, l'attention que les troupes terrestres obtiennent.
Le dernier débat a eu lieu le 12 avril, deux semaines après l'engagement des Canadiens dans le conflit. Le gouvernement a informé le Parlement de la participation du Canada aux bombardements après l'envol des avions canadiens. Plus important encore, on n'a jamais tenu de vote au Parlement sur la participation du Canada à la guerre.
De nouveau, le Parlement n'a joué aucun rôle dans la définition des paramètres de notre participation si nous finissons par renforcer un blocus naval de l'OTAN. Nous ne devons pas nous faire croire que le fait d'arrêter des bateaux en haute mer permettra d'éviter une dégradation de la crise. Nous devons avoir des règles d'engagement bien comprises avant de passer à une étape ultérieure de notre participation, au Kosovo ou dans les environs.
Le gouvernement doit changer sa perspective du problème. Il doit tenir le Parlement tout à fait au courant et lui donner son mot à dire. Les Canadiens demandent au gouvernement de donner un rôle au Parlement dans la définition des paramètres et des conditions du maintien ou de l'augmentation de la participation militaire du Canada.
Le Parti réformiste soutient l'usage des frappes en tant que moyen de faire cesser les activités d'épuration ethnique au Kosovo et de forcer M. Milosevic à revenir à la table de négociation. La campagne aérienne a été présentée comme étant la meilleure solution. Il n'aurait été ni admissible ni moralement acceptable de rester les bras croisés pendant que d'autres êtres humains étaient massacrés et chassés de leur maison. On aurait ainsi concédé la victoire au président et donné libre cours à sa soif de plus grandes conquêtes. Cependant, à elles seules, les frappes aériennes ne suffiraient peut-être pas à encourager le désengagement des Serbes.
La race humaine a été témoin d'actes de génocide tout au long de son histoire. Un génocide n'est pas uniquement la conséquence horrible de certaines guerres. Les incidents de génocide ne sont aucunement liés à la guerre. Un génocide est également un échec de l'humanité, le côté obscur d'une civilisation en déroute. Nous devons admettre que, faute d'une intervention au Kosovo, c'est justement ce qui risque de se produire: la destruction de maisons et la mort de familles entières à cause du diktat d'un homme devenu fou.
Il est important pour les groupes qui ont été décimés par des actes de génocide que le monde se souvienne de ces atrocités afin d'apprendre et de comprendre ce qui s'est passé. Les groupes touchés par des actes de génocide veulent seulement qu'on se souvienne d'eux. On ne saurait distinguer les génocides survenus au cours de l'histoire selon leur ampleur et leur portée. Il est bien connu que notre histoire a été témoin d'un holocauste et de nombreuses tentatives de génocide. À mon avis, un génocide devrait être considéré davantage comme un échec de la civilisation qu'une conséquence de la guerre, qu'il s'agisse de la famine en Ukraine, des champs de la mort au Cambodge, de l'Holocauste ou, actuellement, semble-t-il, du Kosovo. J'estime que le Canada devrait marquer le souvenir de ces actes en faisant construire un musée sur les génocides dans le monde.
Il semble que la stratégie collective de l'OTAN commence à avoir un effet. Nous devrions lui donner plus de temps pour faire ses preuves. Quoi qu'il en soit, à mesure que la situation change sur le territoire du Kosovo et que de nouveaux engagements sont envisagés, le gouvernement doit montrer à la Chambre que tout engagement de ce genre répond toujours à l'objectif principal, soit de remédier à la purification technique et à la propension de Milosevic à commettre des génocides.
Nos pilotes et nos soldats méritent des félicitations pour l'excellent travail qu'ils accomplissent. Ils font de leur mieux pour aider à renverser cette vague d'inhumanité. Nous devrions en être fiers.
Les familles des Casques bleus de la force terrestre qui ont été en mission par le passé s'inquiétaient constamment. Les enfants n'avaient aucune idée des horreurs dont leurs parents avaient été témoins et ne comprenaient pas très bien, lorsque leurs parents sont revenus pour de bon, qu'ils aient pu être différents de ce qu'ils avaient été avant de partir. Les syndromes de stress post-traumatique sont graves, débilitants et dévastateurs pour les familles qui cherchent à reprendre leur vie là où elles l'avaient laissée des mois plus tôt.
L'engagement de troupes terrestres par le Canada signifiera sans nul doute que des soldats devront encore une fois affronter ces défis et ces épreuves. Apprenons-nous des expériences passées? Nous devons planifier avec un soin extrême le déploiement de nos troupes.
Selon le Ottawa Citizen, le major-général à la retraite Lewis MacKenzie aurait déclaré il y a quelques semaines:
...nous ne sommes pas en mesure de participer à de longues opérations d'offensive au sol au Kosovo. [...] Depuis 20 ans, les gouvernements libéraux et conservateurs qui se sont succédé ont utilisé la modeste force militaire du Canada comme vache à lait, de sorte que sa capacité opérationnelle est dramatiquement réduite.
Ces observations ont été faites par l'un des chefs militaires du Canada les plus respectés. D'après le général MacKenzie, la capacité des Forces canadiennes d'effectuer de longues opérations terrestres, surtout si loin du Canada, a été sérieusement érodée par le gouvernement.
Entre 1993 et 2000, on aura imposé à la Défense des coupes de 9 milliards de dollars et réduit l'effectif de 18 000 membres. Le moral est au plus bas, surtout parce que les fonds sont consacrés à des interventions visant des changements de sexe et à l'achat de soutiens-gorge de combat. Nos soldats font la queue aux banques d'aliments et ils portent des uniformes de combat d'occasion.
Je ne fais pas la distinction entre l'escalade par terre ou par mer. Qu'il s'agisse d'un blocus ou d'un embargo, une escalade est une escalade et elle suppose des risques et des préoccupations. Il serait assez gênant de mettre nos frégates en service sur la première ligne comme cibles flottantes. Le faire en l'absence d'objectifs ou de plans d'action clairement définis et avec des règles d'engagement mal comprises serait téméraire, à mon avis.
Nous devrions définir clairement le rôle de notre marine avec autant de sérieux que nous le ferions dans le cas des troupes terrestres. Le gouvernement doit permettre aux leaders des militaires canadiens de faire preuve d'une plus grande honnêteté et de franchise. Notre commandement militaire doit pouvoir informer tous les membres de la participation canadienne. Nous comprenons que le caractère délicat et confidentiel de la planification militaire est essentiel, mais nous voudrions qu'il y ait des séances d'information à huis clos. Pour la sécurité de nos troupes, nous devons penser qu'il doit y avoir un équilibre entre le besoin d'information et la divulgation prudente de renseignements et la tenue de débats publics.
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Madame la Présidente, c'est pour moi un plaisir de participer au débat sur la motion à l'étude.
Soyons clairs dès le départ: le Canada et le gouvernement souhaitent la paix. Comme toujours, nous préférons instaurer la paix par des moyens pacifiques.
[Français]
Dans sa recherche de paix et de sécurité, le Canada a toujours préféré emprunter la voie diplomatique.
[Traduction]
Notre patrimoine diplomatique est devenu une tradition que nous cherchons à mettre en valeur à toutes les occasions. Nous en sommes fiers à juste titre.
Cependant, même notre grand homme d'État et diplomate, l'ancien premier ministre Lester Pearson et père du maintien de la paix, comprenait que la force militaire avait un rôle nécessaire à jouer dans l'instauration de la paix et de la sécurité. Pourquoi? Parce que, parfois, les mots et les menaces ne suffisent pas. Pour qu'il y ait des négociations, deux parties doivent être en présence et elles doivent croire les mots et les promesses l'une de l'autre.
Nous avons été et nous demeurons disposés à négocier. Jusqu'à maintenant, le président Milosevic ne l'est pas. Permettez-moi de rappeler à la Chambre le bilan catastrophique de M. Milosevic pour ce qui est de la volonté de négocier.
En mars 1998, l'ONU a adopté la résolution 1160 invitant toutes les parties à s'entendre sur un règlement pacifique. Cette résolution a été suivie de la résolution 1199, en septembre, exigeant que les deux parties mettent fin aux hostilités et améliorent la situation humanitaire qui se dégradait rapidement dans la région. En octobre 1998, sous la menace de frappes aériennes de l'OTAN, les parties ont conclu un accord qui prévoyait un cessez-le-feu et autorisait une mission d'observation dirigée par l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui devait vérifier le respect de l'accord. L'accord prévoyait également des limites strictes au déploiement des forces de sécurité yougoslaves.
Malheureusement, et cela ne dément pas ce que nous avons vu pendant des années, M. Milosevic a manqué à sa parole. Les forces yougoslaves ont violé le cessez-le-feu, ont réagi de façon disproportionnée aux actions de l'Armée de libération du Kosovo et ont mené une campagne contre des civils au mépris du droit humanitaire international.
En dépit de cette grossière inconduite, nous avons accordé une autre chance aux négociations. Des pourparlers ont vite commencé à Rambouillet, en France, pour en arriver à une solution pacifique par l'équilibre des intérêts et des exigences des parties. L'accord provisoire auquel nous sommes arrivés prévoyait un haut degré d'autonomie pour le Kosovo, mais dans le cadre de la République fédérale de Yougoslavie. À la fin, les Kosovars y ont consenti. Ils ont fait preuve de courage en signant l'accord. Pas M. Milosevic. Les efforts de la onzième heure qu'a déployés l'envoyé américain Richard Holbrooke n'ont rien donné.
Le 24 mars, nous nous sommes rendu compte que la voie diplomatique avait alors fait son temps. En dépit de notre patience et de notre engagement à remuer ciel et terre au plan diplomatique, M. Milosevic n'a pas voulu honorer les accords qu'il avait conclus ni chercher une solution pacifique.
Je viens de relater le long historique de nos efforts diplomatiques pour contrer la tyrannie de Milosevic. Cette crise remet fondamentalement en question les valeurs de la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit. Ce sont là des valeurs que les Canadiens ont défendu en paroles de même qu'en actions au cours des Première et Seconde guerres mondiales, de la Guerre de Corée et, plus récemment, de la guerre du Golfe. Ce sont aussi des valeurs que défend l'OTAN depuis sa création, il y a une cinquantaine d'années.
Nos actions militaires sont justifiées. Nous avons été obligés de recourir à un outil militaire parce que la République fédérale de Yougoslavie a maintes fois violé les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies. Ces tentatives pour forger une paix négociée ont été rejetées avec des résultats catastrophiques pour les habitants du Kosovo. L'assaut non contenu de la police militaire et des forces paramilitaires yougoslaves contre des civils kosovars a créé une catastrophe militaire massive et menace de déstabiliser la région environnante. Il s'agit là d'une politique extrême, calculée et criminelle. Cette politique est absolument injustifiable.
Soyons clairs: l'action militaire contre la République fédérale de Yougoslavie appuie les buts politiques de la communauté internationale. Notre objectif est de susciter le rétablissement d'un Kosovo multiethnique et démocratique où règne la paix et où les gens peuvent vivre en sécurité et jouir comme tout le monde des droits et des libertés humaines universelles. Le Canada et ses alliés sont unis dans la poursuite de cet objectif.
Cet objectif est appuyé par le secrétaire général de l'ONU, l'Union européenne et la Russie. Même les efforts des Russes pour en arriver à un règlement négocié ont mené à de timides concessions et à un mépris flagrant pour le respect des droits fondamentaux de la personne et du droit international. Toutefois, l'alliance tient autant que la Russie à trouver une solution pacifique à la crise au Kosovo et collaborera, dans la mesure du possible, avec la Russie pour atteindre cet objectif.
Nous connaissons tous la mission qui attend mon collègue, le ministre des Affaires étrangères, et nous souhaitons que ses démarches soient fructueuses.
La communauté internationale est unie dans sa nette préférence pour un règlement négocié à cette crise.
Avant de conclure, je voudrais fournir des renseignements supplémentaires sur les derniers développements. Comme le premier ministre vient tout juste de le dire, le Canada a reçu une demande officielle de l'OTAN qui lui demande d'envoyer dans l'ancienne République yougoslave de Macédoine le contingent militaire que nous avions mentionné il y a quelques mois comme notre contribution à la mission internationale de mise en oeuvre de la paix au Kosovo. Nous avons accédé à cette demande.
La force de maintien de la paix du Canada dans l'ancienne République yougoslave de Macédoine sera formée d'au plus 800 militaires et sera équipée d'environ 280 véhicules et de 8 hélicoptères Griffon. Elle sera composée essentiellement d'un escadron de reconnaissance apte à mener des opérations de surveillance et de sécurité au Kosovo. D'ailleurs, nos troupes utiliseront des véhicules figurant parmi le matériel le plus perfectionné au monde, comme le Coyote. Les hélicoptères que j'ai mentionnés rempliront des missions de surveillance aérienne, de transport et d'évacuation sanitaire. S'ajouteront à cette équipe d'environ 600 soldats 200 membres du Génie.
Nos troupes feront partie d'une brigade blindée britannique au sein de la force de réaction rapide des alliés dirigée par l'OTAN. Voilà pourquoi nous envoyons nos soldats en Macédoine. C'est là qu'est postée la brigade britannique. L'intervention de nos troupes viendra compléter les opérations des Britanniques. Nous collaborons déjà avec les Britanniques au sein de la SFOR en Bosnie. Nous entretiendrons avec eux des relations très similaires en Macédoine. Les Britanniques ont déjà des troupes dans cette région et ils comptent sur nous pour aller les appuyer. C'est ce que m'a dit le secrétaire de la Défense du Royaume-Uni lors d'une réunion la semaine dernière.
Il faudra à nos soldats jusqu'à 60 jours, un peu moins nous l'espérons, pour se rendre dans l'ex-république yougoslave de la Macédoine et pour être prêts à intervenir. C'est le temps qu'il faut pour assembler le matériel militaire et les fournitures logistiques nécessaires, pour les acheminer par train à Montréal, puis les expédier par bateau en Europe.
Comme le premier ministre l'a signalé, le contingent des Forces canadiennes fera partie d'une force internationale chargée de mettre en oeuvre l'accord de paix. Autrement dit, ses membres agiront comme gardiens de la paix. Même si un accord de paix n'est pas encore conclu, le déploiement de nos soldats vise actuellement deux objectifs importants. Tout d'abord, il permettra à nos militaires de s'intégrer pleinement à la brigade britannique et de s'entraîner avec ses membres afin de pouvoir agir rapidement et efficacement lorsqu'un accord sera conclu. Deuxièmement, nos militaires pourront aider immédiatement aux opérations humanitaires dans la région, en attendant la conclusion d'un accord de paix et par la suite.
Avec notre campagne militaire, nous accomplissons ce que nous souhaitions faire. Si nous ne faisons rien, ce sont nos frères qui paieront de leur vie. Jusqu'à maintenant, nous avons constaté un mépris de la sécurité humaine impitoyable et inquiétant. Le Canada privilégie toujours la solution diplomatique. Nous avons toujours fait appel à la raison et nous avons toujours essayé d'arriver à la paix sans recourir à la force ou même à la menace d'y recourir.
Même si nous avons acquis une réputation bien méritée de gardiens de la paix, il ne faut pas oublier que nous ne devons jamais hésiter à utiliser davantage la force si c'est nécessaire pour faire régner la paix et assurer le respect des droits de la personne.
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Madame la Présidente, l'honorable ministre parle de troupes en Macédoine et dit que ces troupes seront accompagnées d'hélicoptères Griffon qui feront des opérations de sécurité au Kosovo.
J'aimerais qu'il explique davantage, parce qu'on avait l'impression, d'après les déclarations du premier ministre, que nos troupes allaient être stationnées en Macédoine seulement. On ne parlait pas du Kosovo pour l'instant, mais le ministre dit qu'il y aura des opérations de sécurité au Kosovo.
Est-ce que cela suppose qu'il y aura des incursions sur le territoire du Kosovo? J'aimerais que le ministre de la Défense nationale nous en parle davantage.
[Traduction]
L'hon. Arthur C. Eggleton: Madame la Présidente, tout d'abord, j'ai oublié de vous mentionner au début de mon discours que j'allais partager mon temps de parole avec le député de Lac-Saint-Louis.
En réponse à la question, nous envoyons nos troupes dans l'ancienne république yougoslave de Macédoine, en vue d'un éventuel déploiement au Kosovo dans le cadre d'une mission de maintien de la paix lorsqu'on se sera entendu sur un cessez-le-feu et un accord de paix. Cela a toujours été notre plan. Ce que nous avons dit relativement à l'accord de Rambouillet, c'est que nous aurions une présence militaire internationale au Kosovo pour assurer la paix et la sécurité dans cette région et pour que les Kosovars puissent vivre dans la paix et la sécurité.
Nous prenons des militaires qui sont actuellement au Canada et les envoyons en Macédoine, État voisin du Kosovo, de sorte que lorsque viendra le temps d'entreprendre une mission de maintien de la paix au Kosovo, ils seront déjà là avec les militaires de nombreux autres pays. Il n'y a pas que les Britanniques qui sont là, mais aussi les Français, les Italiens et de nombreux autres. Il y a 12 000 soldats en Macédoine, mais il y en a aussi un certain nombre en Albanie. Ceux-là aussi feront partie de la force de maintien de la paix qui sera envoyée au Kosovo une fois l'accord conclu.
M. Gordon Earle: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je me demande si vous pourriez demander le consentement unanime de la Chambre pour prolonger d'environ cinq minutes la période prévue pour poser des questions au ministre.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député demande le consentement unanime de la Chambre pour prolonger la période de cinq minutes. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
M. John Williams (St. Albert, Réf.): Madame la Présidente, nous avons appris aujourd'hui que les troupes s'approchent de plus en plus.
Nous avons vu la terrible destruction dont ont été victimes des innocents au Kosovo, qui ont été violés et tués, qui ont vu leurs maisons incendiées et leurs moyens de subsistance réduits à néant. Les Canadiens compatissent de tout coeur à leur triste sort.
Pendant que les dirigeants de l'OTAN tergiversaient, pour ensuite commencer les bombardements, Milosevic a poursuivi sa politique de nettoyage ethnique, et la situation empire. Nous apprenons maintenant que les troupes sont arrivées tout à côté, en Macédoine. Il semble que nous nous enlisons un peu plus tous les jours dans des sables mouvants.
Je me demande ce qu'il restera des Kosovars et du Kosovo le jour où nous réussirons enfin à faire sortir Milosevic de cette région afin que les Kosovars puissent recommencer à vivre en paix. Quel est l'échéancier du ministre? Il me semble qu'au rythme désespérément lent où vont les choses sous l'égide de l'OTAN, il ne restera plus rien à sauver.
L'hon. Arthur C. Eggleton: Madame la Présidente, nous partageons avec le député la préoccupation qu'il a exprimée. Nous souhaitons sincèrement mettre fin au conflit le plus rapidement possible par des moyens militaires et diplomatiques. Nous voulons que cette affaire soit réglée le plus rapidement possible.
La campagne aérienne est en voie d'intensification. Des avions supplémentaires seront envoyés dans la région. Les hélicoptères Apache seront bientôt déployés. Dès que la température s'améliorera le nombre de sorties augmentera.
Ce n'est pas que nous voulions cela. Nous préférerions beaucoup que Milosevic vienne s'asseoir à la table pour discuter.
Le plan des opérations aériennes a été élaboré l'automne dernier. Depuis ce temps jusqu'au 24 mars dernier, nous avons consacré tout le temps dont nous disposions à trouver une solution diplomatique à la question. Cependant, nous devons saisir toutes les possibilités qui se présentent pour parvenir à une solution par les voies diplomatiques.
Cependant, jusqu'à maintenant, M. Milosevic n'a pas cédé aux demandes de la communauté internationale, qui exige qu'il fasse sortir ses troupes du Kosovo pour que les Kosovars puissent rentrer chez eux. Ils devront reconstruire leurs maisons. Beaucoup de ces maisons ont été brûlées. Ils auront besoin d'aide pour la reconstruction. En fait, toute la région aura besoin d'aide pour sa reconstruction et pour reprendre la voie du développement économique. Il y aura donc de grands travaux.
Jusqu'à maintenant, M. Milosevic n'a pas cédé. Il ne tient aucun compte de la communauté internationale. Il poursuit son nettoyage ethnique et le massacre de la population du Kosovo. Nous ne pouvons pas rester sans rien faire. Nous devons faire tout ce que nous pouvons sur le plan diplomatique. Nous continuerons d'agir du côté diplomatique, mais, entre-temps, la campagne aérienne sera intensifiée jusqu'à ce que le gouvernement yougoslave vienne à la table et accepte les conditions qui ont été posées. Ensuite, nous pourrons envoyer une force de maintien de la paix dont 800 Canadiens feront partie pour garantir que les Kosovars puissent rentrer dans leur maison en paix et en sécurité.
M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Madame la Présidente, je serais porté à être d'accord avec le ministre, ce qui n'arrive pas tout le temps. Je crois que nous prenons la bonne décision en envoyant des soldats de maintien de la paix sur place. En fait, nous avions déjà discuté de la nécessité de les envoyer dans la région avant la mission pour qu'ils aient le temps de recevoir leur instruction militaire, comme le ministre l'a dit, et qu'ils soient en mesure de mieux fonctionner avec leurs collègues britanniques, avec qui ils seront appelés à travailler.
Quelle instruction militaire les troupes que nous envoyons sur place ont-elles reçue? Ont-elles été formées seulement pour les missions de maintien de la paix? Nos soldats seront-ils prêts à défendre les frontières, par exemple, s'il y a des incursions?
L'hon. Arthur C. Eggleton: Madame la Présidente, j'apprécie les commentaires et le soutien du député de Compton—Stantstead. Je suis particulièrement heureux de l'entendre dire que c'est la voie à suivre.
En ce qui concerne la formation reçue, tous les militaires canadiens affectés outre-mer ou à quelque autre mission ont suivi l'entraînement au combat standard. Le livre blanc de 1994 sur la défense prévoit entre autres la formation de soldats polyvalents et aptes au combat. Ces derniers bénéficient également d'une formation adaptée à la mission et au maintien de la paix.
Comme nous l'avons vu en Bosnie et dans d'autres régions, le maintien de la paix exige de nos jours que nos soldats soient en mesure de se défendre, car il leur arrive de se trouver dans des situations très difficiles. On en a eu un excellent exemple en Bosnie il y a quelques années, dans l'enclave de Medak. Les soldats doivent être aptes au combat parce que le maintien de la paix peut parfois être dangereux. Depuis que le Canada participe à des missions de maintien de la paix, plus de 100 Canadiens y ont laissé leur vie.
Les soldats ont reçu le genre d'entraînement standard qui les rend aptes au combat, une formation axée sur le maintien de la paix et une formation centrée sur la mission. Ils poursuivront leur entraînement pendant leur séjour en Macédoine avec la brigade britannique parce que nous voulons que ces unités travaillent bien ensemble. Les Canadiens seront autonomes. Ce sera une force indépendante, mais elle travaillera en collaboration avec les Britanniques et recevra donc un autre entraînement.
Pour ce qui est des frontières, chacun des pays est responsable des siennes. Nous allons aussi apporter notre aide face au problème des réfugiés partout où nous sommes en mesure de le faire. Nous voudrons certes faire en sorte que les réfugiés soient protégés, ce qui laisse supposer que nous pourrions devoir intervenir. Nous espérons que nous n'aurons pas à recourir à ce genre de mesures de défense. La responsabilité essentielle des frontières incombe à chacun des pays avoisinants.
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Madame la Présidente, ma question sera très brève. En parlant des 800 militaires qui seront déployés, le ministre a dit qu'ils seraient prêts au combat. Cela veut-il dire qu'ils seront armés? En second lieu, d'où viendront ces militaires, de quelle région du pays, de quelle base?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Madame la Présidente, ils seront armés tout comme l'étaient les troupes envoyées en Bosnie et tout comme le sont nos militaires qui sont déployés sur la plupart des théâtres d'opérations de maintien de la paix. Ils seront armés et capables de se défendre si cela se révèle nécessaire.
Ils viendront d'Edmonton, en Alberta. Comme je l'ai déjà dit, ils disposeront de quelque 280 véhicules, lesquels commenceront à être acheminés à Montréal. Ils seront ensuite embarqués à bord d'un navire et envoyés en Europe, puis dans l'ancienne république yougoslave de la Macédoine.
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Compte tenu du caractère urgent découlant de la déclaration du premier ministre, je demande le consentement unanime de la Chambre pour prolonger de cinq minutes la période réservée aux questions et aux observations.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Y a-t-il consentement unanime pour prolonger de cinq minutes la période de questions et observations?
Des voix: D'accord.
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Madame la Présidente, je suis très heureux et je remercie la Chambre d'avoir accepté à l'unanimité de prolonger la période de questions et observations. Nous sommes en présence d'une situation extrêmement délicate, d'une question d'une extrême importance.
Le premier ministre s'est dit d'accord pour que le Canada accélère le conflit dans les Balkans par deux mesures distinctes: premièrement, l'imposition éventuelle d'un embargo et, deuxièmement, l'envoi de soldats canadiens dans la région.
Ma première question s'adresse au ministre de la Défense nationale. Sommes-nous actuellement en guerre? Le gouvernement a-t-il décidé que le Canada est en guerre et, dans la négative, la décision concernant la participation du Canada à la guerre devrait-elle être prise par le pouvoir exécutif ou par le Parlement, tous les députés de la Chambre?
La deuxième question concerne le chef d'état-major de la Défense. Nous envoyons 800 soldats dans cette région. Ils agiront à titre de force de maintien de la paix. C'est ce que le ministre a dit. Toutefois, avec l'accélération du conflit, il est bien possible que ces soldats devront prendre part aux combats avant la fin.
Le ministre a-t-il reçu du chef d'état-major de la Défense, celui qui devra se prononcer sur la capacité de nos soldats et sur la suffisance de leur équipement, l'assurance que s'ils devaient combattre, les soldats canadiens sont aptes à remplir les obligations que l'OTAN porrait leur confier?
L'hon. Arthur C. Eggleton: Madame la Présidente, pour ce qui est de savoir s'il s'agit ou non d'une guerre, je pense que ce l'est pour la plupart des gens. Cependant, il y a des implications légales à utiliser ce terme. Ce terme n'a été utilisé dans ce conflit par aucune des parties. En fait, il n'a pas été utilisé officiellement en Corée. Tout le monde a parlé de guerre dans le conflit en Corée, mais ce n'était pas le terme officiel utilisé. Pas plus que dans le Golfe. Les gens appellent les choses comme ils les voient, mais la situation n'a pas changé à la suite de ce qui a été annoncé aujourd'hui.
Je ne suis pas d'accord pour dire que les mesures que nous avons prises aujourd'hui vont avoir pour effet d'accélérer le conflit. Nous envoyons des troupes pour faire partie d'une mission de maintien de la paix. Nous l'avons bien précisé. Nous avons bien précisé également que si les troupes étaient amenées à faire autre chose, à faire quoi que ce soit d'autre parce que le conflit s'est aggravé et que la situation au sol est devenue beaucoup plus tendue au Kosovo, il y aurait un nouveau débat au Parlement et le gouvernement serait appelé à se prononcer. Cet engagement tient. Les soldats sont envoyés là-bas pour le maintien de la paix. Ce n'est pas ce qui va accélérer le conflit. Ils sont envoyés là-bas en qualité de casques bleus.
Pour ce qui est de ce qu'ils sont capables de faire, ils sont capables de prendre part à des actions plus lourdes que celles que suppose le maintien de la paix étant donné qu'ils sont entraînés au combat.
On peut s'interroger sur les types de préparatifs nécessaires selon notre engagement concret au Kosovo, mais nos stratèges envisagent un certain nombre d'options. Ça ne va pas plus loin vu que la stratégie à ce stade est de poursuivre et d'intensifier la campagne aérienne et d'envoyer les 800 soldats au Kosovo dans le cadre d'une mission de maintien de la paix une fois conclu un accord de cessez-le-feu.
[Français]
M. René Laurin: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je croyais avoir compris qu'il y avait eu consentement unanime pour une prolongation de cinq minutes. Cela fait déjà cinq minutes additionnelles.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Les cinq minutes sont déjà expirées.
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Madame la Présidente, il y a des moments, dans les débats politiques, qui dépassent les frontières de la partisanerie, et je pense que la motion que nous avons devant nous aujourd'hui est un de ces moments.
Je pense exprimer le sentiment de tous ici et certainement le sentiment de tous les Canadiens que notre priorité est la recherche d'une solution de paix durable le plus tôt possible.
Lors de mon intervention de la semaine dernière sur le sujet du Kosovo, de même que celles de beaucoup de collègues, j'avais parlé des plus grandes chances de solution passant par le gouvernement russe et une implication tout à fait proactive de la Russie. Le premier ministre l'a également souligné à plusieurs occasions.
Je félicite donc chaleureusement le ministre des Affaires étrangères qui se rendra bientôt à Moscou pour aller plaider auprès du gouvernement russe la participation proactive de ce dernier vers la recherche d'une solution impliquant les Nations Unies.
Les négociations que le ministre va bientôt entreprendre avec la Russie, de concert avec certains collègues de l'OTAN, et impliquant en même temps le secrétaire général des Nations Unies, pourraient ouvrir la voie à des chances d'une solution réelle et durable. Je pense que c'est la voie de l'avenir dans ce conflit.
[Traduction]
En attendant, nous devons faire tout ce que nous pouvons, avec les pays membres des Nations Unies, pour éviter une escalade du conflit et, notamment, un blocus naval qui réduirait nos chances d'obtenir la coopération de la Russie. Nous devons éviter à tout prix de céder à la tentation de pousser encore plus loin l'intervention de l'OTAN, comme le voudrait notamment la Grande-Bretagne, par l'envoi de troupes au sol. D'ailleurs, je suis heureux qu'au cours du sommet qui s'est tenu la semaine dernière à Washington, les dirigeants de l'OTAN, y compris notre premier ministre, aient rejeté l'idée d'avoir recours à des troupes au sol à des fins militaires.
Je crois cependant que nous sommes tous d'accord pour dire que le Canada doit jouer un rôle de premier plan dans les efforts de maintien de la paix. C'est pourquoi je suis heureux que le premier ministre et le ministre de la Défense nationale aient déclaré aujourd'hui que le Canada entendait préparer ses forces de maintien de la paix à une participation active aux efforts de paix.
Nous devons, plus que jamais, oublier nos divergences d'opinion politiques et appuyer à fond l'initiative du ministre des Affaires étrangères et de ses collègues en vue d'appliquer rapidement des solutions diplomatiques qui pourraient inclure des sanctions économiques et autres, par le truchement des Nations Unies, une solution qui permettrait aux Kosovars qui ont été sauvagement chassés de chez eux de réintégrer de plein droit leurs foyers au Kosovo.
Toute solution devrait assurer une paix durable et nous sommes déterminés à garantir une paix durable en ayant recours à des missions de maintien de la paix et à permettre aux Kosovars de reprendre une existence normale.
J'espère que la force de maintien de la paix sera organisée par les Nations Unies et qu'elle comprendra un éventail varié des pays qui participent habituellement aux opérations de maintien de la paix. Nous devons nous rappeler que toute solution est liée à l'existence d'un plan de reconstruction et de réinstallation des Kosovars dans leurs foyers, ainsi qu'à la réparation des dommages causés par le conflit. Une fois que la paix aura été rétablie, la communauté internationale devra engager des ressources financières massives pour assurer la paix, la reconstruction et le renouvellement du Kosovo et des régions détruites par le conflit.
C'est pourquoi j'espère, comme tous les députés, que l'initiative du ministre des Affaires étrangères portera fruit. J'espère que le ministre et ses homologues de l'OTAN et des autres pays, y compris le secrétaire général des Nations Unies, obtiendront des résultats positifs à Moscou. Bonne chance à eux.
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Madame la Présidente, j'aimerais remercier le député de ses commentaires. Il a parlé de forces de maintien de la paix. Je suis certain qu'il a écouté le ministre en parler également.
En tant que député ministériel, sait-il si les Russes ont été informés de ce rassemblement de troupes? A-t-il le sentiment que cela pourrait mettre en péril les efforts diplomatiques actuels?
M. Clifford Lincoln: Madame la Présidente, je n'ai pas connaissance de faits particuliers, si ce n'est que 12 000 soldats sont déjà en place à des fins de maintien de la paix, tout comme vont l'être nos 800 soldats.
Le premier ministre a confirmé que ces troupes étaient sur place simplement en prévision d'une mission de maintien de la paix au Kosovo. Le ministre des Affaires étrangères doit se rendre à Moscou au cours de la semaine. Je suis certain qu'il assurera aux Russes que tel est l'objectif des troupes qui se trouvent là-bas, y compris les nôtres. Je ne vois pas en quoi la possibilité d'une solution faisant intervenir les Russes pourrait être mise en péril.
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Madame la Présidente, nous parlons depuis maintenant plus d'un mois des problèmes du Kosovo. Je pense qu'il est important de regarder où nous en sommes rendus, parce que le premier ministre vient de déclarer qu'il envoie maintenant des troupes en Macédoine.
Brièvement, le tableau se présente comme ceci. Il y a des réfugiés kosovars qui ont été expulsés du Kosovo. Il y en a maintenant environ 140 000 en Macédoine, 375 000 en Albanie et 75 000 au Monténégro. Certains se sont réfugiés en France et un petit nombre en Angleterre. On estime qu'il y a environ 735 000 Kosovars au total qui ont été poussés hors des frontières de leur pays. De plus, on estime à environ 500 000 à 800 000 le nombre de personnes qui ont été déplacées hors de leurs foyers, mais qui sont toujours à l'intérieur du Kosovo.
Si on considère qu'il y a environ deux millions d'Albanais au Kosovo, c'est plus des trois quarts de la population qui vivent maintenant dans une situation instable.
C'est devant cette situation qu'il faut se demander quelle réaction nous devons offrir comme pays extérieur à ce théâtre de conflit militaire.
On ne peut évidemment rester insensible à la situation, mais il faut se rappeler que ce que nous recherchons, c'est d'abord le rétablissement de la paix. On cherche aussi à empêcher d'autres expulsions des Kosovars à l'extérieur de leur pays. On cherche le rétablissement de la paix. On cherche à ce que les Kosovars expulsés puissent avoir la permission de revenir dans leur pays d'origine et de commencer à reconstruire leur pays.
Donc, on ne peut être contre toute action qui va tendre à réaliser ces objectifs. Le dernier moyen dont on a parlé, c'est un embargo des pays membres de l'OTAN et des pays voisins pour empêcher l'approvisionnement en pétrole de la Serbie.
Évidemment, après avoir bombardé les raffineries de pétrole, après avoir détruit cette capacité de production, si on aboutit à un remplacement de la capacité de production de pétrole par une fourniture venant de l'extérieur, on n'a pas réglé le problème. Il y a même certains pays de l'extérieur qui pourraient en profiter parce que, pour eux, cela devient une nouvelle source d'exportations. Cela pourrait être économiquement intéressant, au pis aller.
On ne parle pas de blocus. Je pense que cela a été clarifié. Faire un blocus serait très dangereux, parce que cela suppose encore là qu'on utiliserait la force militaire contre des bateaux-citernes qui viendraient approvisionner la Serbie. De ces bateaux, il pourrait y avoir des bateaux russes, et les Russes, actuellement, sont sympathiques à la cause des Serbes. Est-ce que nous allons ouvrir de nouveaux fronts? Je pense qu'il faut être très prudents.
Un embargo suppose une acceptation volontaire des pays possiblement ou éventuellement fournisseurs de pétrole. Si la communauté internationale est consciente du danger que le Kosovo représente, celle-ci devrait accepter librement cet embargo et refuser de livrer des marchandises en pétrole à ce pays en conflit.
La meilleure des solutions passe encore par la patience, la diplomatie et la négociation politique.
C'est vrai qu'on se lance des bombes et qu'il y a des combats. Il n'y a pas de combats terrestres, mais il y a des combats aériens. Mais il faut penser qu'après les combats, il faut qu'on fasse un jour la paix. Toute action prise aujourd'hui doit être étudiée et planifiée en fonction de ce qui va se passer suite au conflit.
C'est bien beau d'écraser un peuple et un régime politique, mais d'écraser les sentiments et les émotions d'un peuple, c'est autre chose. Ces gens seront appelés à vivre ensemble après le conflit et à vivre en paix. Les Kosovars et les Serbes devront se regarder les uns les autres et cohabiter. Ils devront vivre quotidiennement les uns à côté des autres et devront entretenir des relations économiques, sociales et politiques. Ces gens devront accepter de vivre en communauté.
Quand on érige deux peuples l'un contre l'autre, on peut soumettre par la force. On peut soumettre physiquement des individus, mais on ne peut pas soumettre leur âme, leur intelligence, leurs sentiments et leurs émotions par la force physique.
On risque d'avoir longtemps des séquelles de ce conflit, de les avoir pendant des années, voire des générations. C'est pourquoi il faut bien mesurer chaque geste, chaque action que l'on pose maintenant afin d'éviter d'aggraver cet état psychologique de peuples qui devront vivre en présence l'un de l'autre après le conflit.
Ce qu'il faut faire, c'est de sauver des vies. Il faut sauver non seulement la vie des Kosovars qui sont actuellement maltraités et expulsés, mais aussi la vie des Serbes. Il y a des Serbes qui sont innocents dans ce conflit. Il y a un président dictateur qui ne veut rien savoir de sa population. Il y a toutefois des Serbes innocents à qui on impose ces actions militaires.
Ce ne sont pas 100 p. 100 des Serbes qui sont prêts à prendre les armes demain matin dans ce conflit. Ces gens-là aussi méritent de vivre. Ces gens-là aussi sont subjugués par un tyran et auront besoin de compréhension et d'aide. Ces vies méritent d'être sauvées autant que celles des Kosovars et celles aussi des autres vies dans les pays voisins.
S'il y avait de l'instabilité dans les Balkans, c'est toute l'Europe qui serait menacée et, éventuellement, les autres pays de la planète pourraient être entraînés dans une guerre mondiale. Il faut donc faire très attention que cet objectif visant actuellement à sauver des vies ne nous précipite pas dans des gestes irréfléchis et une action guerrière qui pourraient nous faire atteindre des objectifs non désirés.
De toute façon, les décisions que l'on prend actuellement sont des décisions très graves. C'est pourquoi aujourd'hui nous avons félicité le premier ministre pour nous avoir informé de la décision du Canada d'envoyer des troupes. Nous sommes ravis que la Chambre en soit la première informée, mais nous considérons que ce n'est pas suffisant
Nous continuons de réclamer de nous exprimer par un vote sur cette action et sur l'envoi des troupes. On ne connaît pas l'avenir.
Que se passera-t-il avec les 600 ou 800 hommes de troupe canadiens qu'on va envoyer en Macédoine dans les semaines qui viennent? Ces gens seront armés; ils risquent d'être attaqués, et cela a déjà commencé. Ce matin, une dépêche publiée dans Le Monde disait: «Les expressions de grogne ou d'hostilités ouvertes contre les pays de l'OTAN se multiplient en Macédoine.»
Un peu plus loin, on ajoutait: «Douze mille hommes de l'OTAN stationnés en Macédoine sont fréquemment la cible de jets de pierres. Le 20 avril, une Jeep des forces françaises a été incendiée dans un village à population serbe.» Cela se passe en Macédoine, cela se passe contre les troupes de l'OTAN.
Qu'est-ce qui nous dit que dans une semaine ou deux...
Le Président: Je m'excuse d'interrompre l'honorable député, mais son temps de parole est expiré. Le député disposera encore de cinq minutes pour des questions et commentaires auxquels il pourra répondre après la période des questions orales.
Nous passons maintenant aux déclarations de députés.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LES CADETS DE L'AIR
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, cette année marque le trentième anniversaire de la création de l'escadron 778 Banshee des Cadets de l'Aviation royale du Canada à Richmond Hill.
Depuis ses débuts en 1969, l'escadron 778 Banshee a toujours été très actif dans la communauté, participant aux diverses activités ou appuyant les oeuvres de charité locales. Ses efforts ont été reconnus en 1988 par la ville de Richmond Hill qui a déclaré l'escadron «Meilleur organisme bénévole» de la communauté.
L'escadron qui comptait 30 cadets à ses débuts, regroupe maintenant 110 membres qui se rendent compte tous les jours que le dur labeur et l'esprit d'équipe entraînent des résultats positifs. Leur devise est «Apprendre, Servir, Avancer».
La participation aux activités apporte beaucoup de satisfaction aux cadets de l'Air. Nos jeunes en retirent une nouvelle optique de la vie et de nombreuses qualités étonnantes.
Le commandant Javed Khan, ses officiers, les membres de l'équipe d'instructeurs ainsi que tous les cadets peuvent être fiers. Je profite donc de l'occasion pour les féliciter. Je leur souhaite beaucoup de succès.
* * *
LA LIBERTÉ DE LA PRESSE
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, la liberté de la presse est à la base même de la démocratie. Je crois toutefois que cet élément essentiel souffre de l'intervention directe du gouvernement fédéral.
Terry Mileswki du réseau anglais de Radio-Canada a osé mentionner une possibilité de faute professionnelle de la part du premier ministre. Le Cabinet du premier ministre s'est plaint et Mileswki a été suspendu. Compte tenu du prix qu'il a dû payer pour avoir faire ce reportage, Mileswki sera-t-il prêt à l'avenir à faire des commentaires négatifs sur le premier ministre?
John Collison, reconnu pour ses critiques véhémentes contre le maire de Winnipeg, a récemment été congédié de son poste d'animateur de talk-show au poste de radio 1290 Fox de Winnipeg. Il a été congédié pour avoir dit que les gestionnaires des postes de radio craignait les représailles du CRTC. M. Collison a dit «J'estime que le CRTC a créé une situation dans laquelle il est fortement recommandé de laisser les libertés civiles à la porte, laissant entendre qu'en se joignant au monde de la radio-diffusion, on doit renoncer à la liberté de conscience, d'expression et de parole».
Je ne suis pas toujours d'accord avec les journalistes quant à leurs opinions ou à leurs reportages. Toutefois, je suis prêt à me battre pour défendre leur droit d'exprimer librement leurs opinions sans subir l'ingérence du gouvernement.
* * *
L'INDUSTRIE MINIÈRE
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, l'arsenic est une substance très dangereuse quand elle entre en contact avec les êtres humains. L'arsenic s'infiltre souvent dans l'eau potable à partir des sites miniers.
À Yellowknife, la mine d'or Giant contient 260 000 tonnes de poussière d'arsenic. Les coûts de nettoyage sont évalués à 100 millions de dollars. Le propriétaire de la mine a demandé la protection de la loi sur la faillite. Qui paiera le nettoyage?
En Ontario, le gouvernement provincial n'a pas su éviter une énorme fuite d'arsenic d'une ancienne mine qui sert d'entrepôt de déchets toxiques, près de Belleville.
C'est clair que, là où la pollution s'est déjà produite, c'est le pollueur qui doit payer. L'industrie minière a une responsabilité envers le public et ne devrait pas laisser les Canadiens payer les dommages causés par ses activités. Elle devrait respecter sa déclaration de Yellowknife et nettoyer ses sites contaminés plutôt que de faire payer cela par les gouvernements et, surtout, par les Canadiens.
* * *
L'ASSOCIATION INTERNATIONALE DES POMPIERS
Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour souhaiter la bienvenue à l'Association internationale des pompiers à Ottawa, où se tient le huitième congrès annuel de la section canadienne.
Les pompiers sont le pilier de nos services d'urgence. Ils sont toujours les premiers rendus sur les lieux. Ils sont toujours prêts à faire tout ce qu'il faudra pour tirer leurs semblables de toute position dangereuse, au péril de leur vie.
Ayant été présidente du service des incendies de Whitby, j'ai eu l'occasion de travailler en étroite collaboration avec ces hommes et ces femmes, et je peux témoigner personnellement de leur professionnalisme, de leur loyauté et de leur volonté d'améliorer la sécurité de leur collectivité.
L'AIP continue à faire pression pour l'adoption de Operation Respond et pour l'établissement d'un organisme d'enquête fédéral qui aiderait à protéger les pompiers contre certains des dangers qu'ils affrontent quotidiennement.
Connus sur la colline pour leur hospitalité, nos pompiers sont venus nous proposer des moyens de rendre nos localités beaucoup plus sûres. Je les remercie de leurs efforts constants et je leur souhaite une bonne fin de séjour à Ottawa.
* * *
LA LEUCÉMIE
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, j'ai récemment eu le plaisir de faire la connaissance d'une personne remarquable de Kootenay—Columbia, une jeune femme qui a surmonté l'adversité et qui est une source d'inspiration pour bien des gens au Canada et dans le monde entier.
Pamela Finnie, qui habite à Golden, en Colombie-Britannique, a reçu un diagnostic de leucémie en 1994, lorsqu'elle avait 10 ans. À cette époque, Pamela trouvait qu'il était difficile de parler de sa maladie avec quiconque. Elle a plutôt exprimé ses sentiments dans un album de coupures, dans des histoires et même dans un livre intitulé My life with Leukemia.
Elle s'est également servi de son talent créateur pour concevoir un jeu de table pour enfants appelé Talking for Tokens. Se rappelant comment elle se sentait lorsqu'on lui avait appris qu'elle avait la leucémie et à quel point il était difficile d'en parler, Pamela a conçu ce jeu afin d'aider d'autres enfants atteints de cancer à exprimer leurs sentiments.
Pamela a maintenant 15 ans et, demain, elle recevra le prix Terry Fox, à l'occasion de la 10e cérémonie annuelle des YTV Achievement Awards. Je sais que je me fais le porte-parole de tous les habitants de Kootenay—Columbia et, j'en suis sûr, de tous les députés à la Chambre lorsque je la remercie pour avoir été une source d'inspiration et pour son courage indéfectible. Félicitations à Pamela.
* * *
LA VIOLENCE CHEZ LES JEUNES
M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, deux adolescents ont tué 13 personnes dans une école secondaire de Littleton, au Colorado. Ceux qui disent qu'une telle tragédie ne peut pas se produire au Canada devraient se rappeler le 6 décembre 1989. Quatorze jeunes femmes ont été tuées à Montréal.
La télévision, le cinéma, les ordinateurs, les jeux vidéo et Internet, tous ces progrès du monde moderne conduisent à un déclin de l'empathie parmi les jeunes d'aujourd'hui. Un contact avec des machines ne saurait remplacer l'interaction humaine. Les entreprises de technologie et les groupes de recherche doivent réexaminer les effets des divers médias de masse sur notre humanité.
Il est temps que le gouvernement mette sur pied d'autres programmes de sensibilisation de la population, en faisait appel aux groupes communautaires, aux écoles, aux services de police et aux organismes bénévoles, pour tenter d'aider les jeunes à être à l'écoute de leurs sentiments et de ceux des autres.
* * *
[Français]
LE GOUVERNEMENT DU QUÉBEC
M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.): Monsieur le Président, ça y est, la campagne référendaire est repartie.
Il y a fort à parier que le gouvernement péquiste pourrait être tenté d'allouer des fonds publics, au cours des prochains mois, afin de faire la promotion de la séparation du Québec du reste du Canada.
Le Québec sera encore confronté à une période d'instabilité politique qui a nécessairement des impacts économiques. Les séparatistes enverront des messages insécurisants pour les investisseurs éventuels.
Mais les Québécois et les Québécoises ne sont pas dupes de ces astuces et mises en scène du Parti québécois. Ils sauront discerner entre les messages de séparation qu'enverra le PQ au cours des prochains mois et ceux d'appel à la coopération lancés par le gouvernement pour améliorer la fédération canadienne.
* * *
[Traduction]
LES ANCIENS COMBATTANTS
M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre aujourd'hui pour rendre hommage à deux anciens combattants respectés qui sont décédés il y a quelques jours, Wallace Pike, de Terre-Neuve, et James A. MacAuley, de l'Île-du-Prince-Édouard. Ces deux hommes étaient les derniers anciens combattants de la Première Guerre mondiale dans leur province respective.
Brigadier à la retraite de l'Armée du Salut, Wallace Pike participa aux côtés d'autres Canadiens à certains des plus violents combats de la Grande Guerre, notamment à Ypres et sur le plateau de Vimy. Il fut forcé de rentrer à Terre-Neuve, des éclats d'obus lui ayant arraché deux doigts de la main droite.
James A. MacAuley s'était enrôlé dans l'armée canadienne deux ans après le début de la Première Guerre mondiale, peu après avoir atteint l'âge de 16 ans. Au cours de l'été 1917, il fut envoyé au front en France, où il passa la majorité du temps dans les tranchées.
Très jeunes, ces deux hommes ont été exposés à la réalité brutale de la guerre. Ils ont sacrifié leur jeunesse pour que nous puissions jouir de la liberté.
Nous disons merci à James et à Wallace. Le Canada se souvient de leur contribution et gardera toujours leur souvenir.
* * *
LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'ai été heureux de présenter aujourd'hui une pétition signée par plus de 100 000 Canadiens qui demandent qu'on fasse respecter la loi canadienne contre la pornographie juvénile. C'est la pétition la plus considérable qui ait été présentée au cours de la présente législature. Le nombre des pétitionnaires est le double de celui de la pétition qui vient au deuxième rang. Ce nombre a été atteint en quelques semaines à peine et des noms continuent d'arriver. La raison, c'est qu'il y a trois mois, un tribunal de la Colombie-Britannique a invalidé une loi interdisant la pornographie juvénile. En février, les libéraux ont rejeté une motion réformiste visant à rétablir cette loi. En attendant, le matériel pornographique entre à profusion en Colombie-Britannique et les causes portées devant les tribunaux sont en suspens.
L'instance devant la cour d'appel a finalement commencé. Combien de temps faudra-t-il attendre encore avant que le gouvernement rétablisse la loi canadienne et cesse d'exposer les enfants à des risques? Les Canadiens disent aux défenseurs de droits additionnels qu'ils vont trop loin quand il devient impossible de protéger les membres les plus vulnérables de la société.
* * *
[Français]
LES JEUNES CONTREVENANTS
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier des jeunes contrevenants, le gouvernement fédéral n'applique d'aucune façon l'avis de sa Cour suprême.
Dans un récente décision, celle-ci nous rappelle que le gouvernement fédéral incarcère beaucoup trop de contrevenants. La Cour souligne notamment que le Canada se distingue, à l'échelle mondiale, par le nombre de personnes qui sont emprisonnées et que le taux d'incarcération par les tribunaux canadiens s'est accru au cours des dernières années.
Pour répondre à ces statistiques, que fait le gouvernement fédéral? Il retire l'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants, qui fonctionne bien, et il dépose un projet de loi qui enverra désormais les adolescents dans l'environnement répressif des prisons pour adultes. Tout cela pour satisfaire la croisade coercitive des réformistes et pour imiter la façon de faire de nos voisins du Sud.
Le Bloc québécois invite la ministre de la Justice à respecter l'avis de la Cour suprême et à permettre au Québec de se soustraire à l'application de son projet de loi sur les jeunes contrevenants.
* * *
LA MINISTRE QUÉBÉCOISE DES RELATIONS INTERNATIONALES
M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, les Québécois sont tannés des référendums et le premier ministre Bouchard nous en promet un autre.
Il a même envoyé en Belgique sa ministre des Relations internationales, Louise Beaudoin. Elle déclarait, dans l'édition du 12 avril dernier du journal Le Soir, et je cite: «Entre le Québec et le Canada, ça s'éloigne.»
Elle poursuivait en soulignant: «Il y a un processus en cours au Canada anglais comme quoi le gouvernement fédéral n'est plus un gouvernement fédéral, mais le gouvernement central. Les provinces ne sont à ce moment-là que des organes consultatifs, à la limite comme n'importe quel autre organisme.»
Madame Beaudoin, revenez vite au pays. La distance vous fait perdre la notion de la réalité canadienne qui en est une de décentralisation, de consensus et de flexibilité.
* * *
[Traduction]
LE CANCER
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, le mois du cancer prend fin sur une note de désespoir et non d'espoir.
Des pompiers sont parmi nous aujourd'hui pour essayer d'amener le gouvernement à minimiser l'exposition à des produits dangereux et cancérigènes. De nouvelles statistiques montrent que le nombre de décès attribuables au cancer du poumon est à la hausse. Cette année, 17 000 Canadiens mourront du cancer du poumon.
Il est tragique de constater qu'on pourrait prévenir ces décès, car neuf sur dix sont causés par le tabagisme, et le tabagisme n'a rien d'un accident. C'est pourquoi les fabricants de tabac consacrent des millions de dollars à la publicité de leurs produits. Nous savons que le taux de tabagisme est à la hausse chez les jeunes, et la publicité y est pour quelque chose.
La vraie question qui se pose à nous aujourd'hui est la suivante: pourquoi le gouvernement fédéral est-il si docile aux pressions de l'industrie? Pourquoi n'écoute-t-il pas les pompiers et ne donne-t-il pas suite à Operation Respond? Pourquoi le gouvernement n'écoute-t-il pas la Société canadienne du cancer et les jeunes, et ne fait-il rien pour lutter contre le tabagisme chez les jeunes?
Au terme du mois du cancer, renouvelons notre engagement à faire tout ce qui est possible pour enrayer cette maladie mortelle.
* * *
LE LOGEMENT
Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour souligner la qualité du programme Abordabilité et Choix Toujours, ou ACT, de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Ce programme, reconnu en 1998 par le Centre des Nations Unies pour les établissements humains, a été choisi comme l'une des 100 meilleures mesures pour améliorer l'environnement.
Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a annoncé récemment l'octroi de 14 subventions d'un maximum de 20 000 $ dans le cadre du programme ACT. Les députés doivent savoir que le ministre a prolongé de trois ans l'application de ce programme, qui aide à rendre le logement plus abordable et à élargir les choix en finançant des projets innovateurs qui illustrent et encouragent la réforme de la réglementation au niveau local.
De nouveau, je félicite la SCHL et ses partenaires du programme ACT, la Fédération canadienne des municipalités, l'Association canadienne des constructeurs d'habitations et l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine.
* * *
LA SOCIÉTÉ IBM CANADA
M. Jim Jones (Markham, PC): Monsieur le Président, la ville de Markham compte plus de 750 entreprises se spécialisant dans la technologie—et leur nombre ne cesse de grandir—ce qui en fait la capitale canadienne de la technologie de pointe. Elle a vu sa réputation croître vendredi dernier lorsque la société IBM Canada a annoncé qu'elle allait construire son nouveau laboratoire de logiciels à Markham.
Ce laboratoire est le plus grand centre de recherche et de développement au Canada et fait travailler 1 500 développeurs de logiciels, ingénieurs en logiciel et employés de soutien. Les employés du laboratoire d'IBM sont actuellement répartis entre trois installations louées dans la région du Grand Toronto.
À partir de l'automne 2001, ils seront tous réunis dans un même magnifique immeuble construit au coût de 125 millions de dollars à Markham. Voilà le plus récent exemple de la contribution positive de la société IBM au Canada.
En 1998 seulement, IBM Canada a investi 250 millions de dollars dans la recherche et le développement et a embauché plus de 3 300 employés permanents. Cette société a un effectif de plus de 17 000 employés permanents au Canada et offre de l'expérience de travail à 800 étudiants.
Appuyons davantage les grandes réalisations d'entreprises comme IBM Canada.
* * *
LES CANADIAN RADIO MUSIC AWARDS
M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, le mois dernier, certains des meilleurs nouveaux artistes du Canada ont été honorés lorsque les Canadian Radio Music Awards ont été remis pendant la Semaine canadienne de la musique.
Étaient en nomination les artistes qui avaient atteint pour la première fois le palmarès, selon le nombre de diffusions de leurs oeuvres à la radio l'an dernier. Les gagnants ont été choisis par les directeurs de programmation, les directeurs musicaux et les animateurs des stations de radio.
Je voudrais féliciter les gagnants de cette année: Melanie Doane; la Matthew Good Band; Bruce Guthro, les Moffats; Heather Nova, VIP; Love Inc.; Justin Gray de la formation 3 Deep; et, bien sûr, Shania Twain.
Encore une fois, j'offre mes félicitations à ces artistes canadiens et j'invite tout le monde à les encourager et à appuyer tous les artistes canadiens dans leur quête du succès et de l'excellence.
* * *
[Français]
LE SPORT AMATEUR
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, une femme remarquable, une citoyenne exemplaire, une entraîneure qui a mené l'équipe canadienne de hockey féminin à une fiche parfaite, qui a dirigé une équipe qui faisait la fierté de tous, voilà qui est Danièle Sauvageau, Québécoise, francophone et compétente.
Mais l'Association canadienne de hockey sur glace la congédie. Qu'est-ce qui cloche? Est-ce parce que Danièle Sauvageau ne vient pas de l'Ouest canadien? Parce qu'elle est francophone? Ou parce que c'est une femme? Une entraîneure québécoise pendant un an, est-ce donc suffisant?
Voilà donc un autre cas d'organisme financé par des fonds de Patrimoine Canada qui se rend coupable de discrimination flagrante, mesquine et inacceptable. Et quel contrôle a-t-on sur cet organisme? Aucun, disent en coeur les braves députés libéraux.
C'est faux! Devant un cas aussi patent de discrimination et d'injustice de la part d'une petite clique misérable, la ministre doit intervenir et couper les vivres, s'il le faut. Et faire le ménage, pendant qu'elle y est.
Les cas de discrimination et d'injustice dans les associations sportives canadiennes subventionnées par les contribuables, ça suffit!
* * *
[Traduction]
LE FRASER
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, dans ma circonscription et dans d'autres circonscriptions de la Colombie-Britannique, les responsables des services d'intervention d'urgence invitent les gens à bien se préparer à toute crue des eaux ou inondation. Si la région est frappée par une longue canicule, une tempête de neige record ou de fortes pluies, cela pourrait causer un important débordement du Fraser.
D'aucuns estiment qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter parce que les digues municipales sont conçues pour résister à une inondation aussi dévastatrice que celles de 1894 et de 1948. Cependant, des dirigeants locaux m'ont dit qu'en raison des compressions plus de 100 kilomètres de digues dans la vallée ont été mal entretenues et ne répondent plus aux normes. Une bonne partie de ces 100 kilomètres se trouvent dans ma circonscription.
Si une inondation survenait maintenant, comment puis-je donner l'assurance à mes électeurs qu'ils recevront l'aide d'urgence que les militaires sont capables de si bien fournir, quand on sait que le gouvernement libéral a fermé la BFC Chilliwack? Des hommes et de l'équipement seront-ils envoyés par avion à partir de l'Alberta jusqu'à l'aéroport Abbotsford, qui pourrait alors être inondé?
Mieux vaut prévenir que guérir. Le gouvernement peut sûrement donner l'assurance aux Britanno-Colombiens qu'il a tout fait pour se préparer à la possibilité d'une inondation et qu'il est prêt à fournir, de manière efficace, l'aide immédiate en cas d'inondation.
* * *
LES PENSIONS
Mme Michelle Dockrill (Bras d'Or—Cape Breton, NPD): Monsieur le Président, le projet de loi C-78 concerne un principe de base, à savoir à qui appartiennent les caisses de retraite? La plupart des Canadiens sont d'accord pour dire que les pensions sont des revenus différés et qu'elles appartiennent aux travailleurs. À une certaine époque, les libéraux le croyaient aussi.
En 1986, une députée libérale a pris la parole sur un projet de loi relatif aux pensions pour dire:
Ces fonds de pensions ne devraient servir qu'à payer des prestations de pensions aux travailleurs qui prennent leur retraite ou qui s'en vont.
Hier soir, cette députée, qui est aujourd'hui ministre du Patrimoine canadien, a montré quel prix on peut attacher à la parole d'un libéral dans l'opposition. Elle aurait pu voter de manière à protéger les droits des membres des forces armées, des fonctionnaires, des membres de la GRC et de leurs familles. Au lieu de cela, elle a voté en faveur du projet de loi qui leur enlève leur surplus afin de le transformer en un compte personnel du ministre des Finances.
La ministre du Patrimoine canadien avait raison en 1986. Les fonds de pensions et tout surplus s'y trouvant appartiennent aux travailleurs. Le gouvernement fédéral devrait montrer l'exemple aux autres employeurs. Au lieu de cela, il fait adopter de force un projet de loi qui foule aux pieds un principe pour lequel les travailleurs se sont battus pendant des décennies.
* * *
LE CANCHILD CENTRE
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais signaler le magnifique travail accompli par le CanChild Centre, un organisme de Hamilton qui se spécialise dans la recherche destinée aux jeunes handicapés.
Créé en 1989, CanChild s'emploie à maximiser la qualité de vie des jeunes handicapés et leurs familles. Son équipe multidisciplinaire entend donner l'exemple en relevant de nouveaux défis en matière de recherche, de pratique, d'élaboration de politiques et d'éducation. L'organisme veut également sensibiliser davantage les consommateurs, les fournisseurs de services, les décideurs et les étudiants.
Les travaux que CanChild a consacrés à la recherche sur les produits ont été traduits dans une douzaine de langues et sont utilisés dans le monde entier.
Je félicite les membres de CanChild pour tout le succès qu'ils remportent en aidant les autres. Cela illustre une fois de plus que les chercheurs canadiens n'ont rien à envier aux autres.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LE KOSOVO
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, ce matin, le premier ministre a informé la Chambre que le Canada engagerait des forces dans une mission de maintien de la paix au Kosovo. La mission viserait à faire respecter un accord de paix, lorsqu'un tel accord aura été conclu avec le gouvernement yougoslave.
Comme on nous demande d'engager des gardiens de la paix dans une mission au Kosovo, le gouvernement suppose-t-il qu'il y aurait bientôt un accord de paix à faire respecter dans cette région?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, nous espérons qu'il y aura un accord de paix et nous travaillons fort pour essayer d'en conclure un. Comme je l'ai dit à la Chambre hier, diverses discussions sont en cours. Il y a un certain nombre d'interventions qui se font actuellement à Moscou.
Des informations venant de Belgrade semblent indiquer que certains dirigeants politiques là-bas seraient prêts à négocier un accord. Nous avons mis en branle un processus diplomatique pour essayer d'obtenir un accord sur les cinq points qui ont été soulevés, et particulièrement pour régler la question fondamentale de la présence d'une force internationale au Kosovo pour protéger les réfugiés. C'est la question clé.
Tout ce que je peux dire au chef de l'opposition, c'est que nous faisons tout en notre pouvoir, de concert avec beaucoup d'autres, pour favoriser la conclusion d'un tel accord.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, s'il n'y a pas de signes concrets montrant que le gouvernement yougoslave est prêt à respecter un accord de paix, à quoi le gouvernement engage-t-il réellement ces troupes?
Si ces troupes terrestres entrent au Kosovo, même après la conclusion d'un accord de paix provisoire, n'est-il pas possible qu'elles se trouvent impliquées dans un conflit armé sérieux et que ce qu'on nous demande de faire en réalité, c'est d'engager des troupes terrestres dans le conflit en Yougoslavie?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, comme le premier ministre l'a dit aujourd'hui, ces 800 soldats sont envoyés là-bas pour exercer des fonctions de maintien de la paix. Ils seront en Macédoine. Ils travailleront avec la brigade britannique. C'est pour cette raison que nous les envoyons à cet endroit précis.
Il y a déjà quelque 12 000 soldats en Macédoine qui attendent d'entrer au Kosovo lorsqu'un accord de paix aura été conclu. Ils auront pour mission de voir à ce que les Kosovars puissent vivre dans la paix et la sécurité.
Il n'y a pas d'autre raison pour leur présence là-bas. Comme le premier ministre l'a dit, si les conditions de ce déploiement étaient modifiées, il y aurait un autre débat à la Chambre.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, ce que nous ne voulons pas, c'est engager 800 soldats canadiens dans une mission de maintien de la paix au Kosovo et se faire dire ensuite par le gouvernement, trois, quatre ou cinq semaines plus tard, que ces soldats sont engagés dans une guerre terrestre parce que l'accord de paix a échoué.
Nous voulons nous assurer que ces soldats sont engagés dans une mission de maintien de la paix et non dans un effort de guerre. Si, ce que le premier ministre veut, c'est l'engagement de forces terrestres canadiennes uniquement dans des activités de maintien de la paix, pourquoi alors ne présente-t-il pas au Parlement une motion claire à cet effet qui ferait l'objet d'un vote?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je vais être très clair. Nous avons déjà eu quatre débats thématiques sur cette question. De façon générale, on a appuyé l'idée d'engager des troupes canadiennes dans des activités de maintien de la paix.
Je ne vois pas en quoi la situation a changé relativement à ce que le premier ministre a dit de façon si éloquente ce matin.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, cela pourrait nous rassurer un peu si ce n'était que ce matin un émissaire américain de haut rang a rencontré le gouvernement russe. Les négociations ont été entravées par l'embargo de l'OTAN qui frappe les navires russes.
L'OTAN adopte une position de non-compromis qui rend difficile, voire même impossible, la négociation d'un accord de paix. Comment cette position de non-compromis de l'OTAN peut-elle un jour contribuer à convaincre les Russes d'intervenir dans la négociation d'un accord de paix?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas sûr de bien comprendre ce que veut dire la députée lorsqu'elle parle de position de non-compromis.
Nous venons tout juste de terminer un sommet de l'OTAN où l'ouverture fondamentale à l'endroit des Russes a été fermement appuyée par tous les pays. Nous avons évoqué la nécessité de constituer une force internationale plus vaste, et non uniquement une force de l'OTAN. Nous avons parlé de l'importance de lancer de grandes initiatives dans la région des Balkans afin de contribuer à la reconstruction.
À mon avis, il n'y a pas de position de non-compromis. Il n'y a cependant pas de compromis sur le principe fondamental qui consiste à garantir la sécurité et les droits de la population du Kosovo.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Nous sommes d'accord, monsieur le Président, mais on ne peut jouer sur les deux tableaux. Le ministre des Affaires étrangères se rendra sous peu en mission diplomatique à Moscou, où il aura été précédé par l'émissaire américain, le secrétaire général de l'ONU et ministre grec des Affaires étrangères.
Le ministre des Affaires étrangères peut-il préciser ce qu'il pourra présenter à Moscou qui n'a pas déjà été offert par les Grecs, les Américains et le secrétaire général de l'ONU en personne?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): En premier lieu, monsieur le Président, j'espère être en mesure de faire valoir le plein appui de la Chambre, qui représente la totalité des Canadiens, à la recherche d'une solution pacifique au conflit. C'est là ce que je souhaite être en mesure d'apporter. J'espère que nous pouvons avoir l'assurance qu'il en sera ainsi, car à l'issue des réunions de Washington nous avons décidé qu'il est important d'amorcer un dialogue.
En particulier, à l'heure actuelle, nous partageons étroitement avec le gouvernement russe la volonté de voir le Conseil de sécurité des Nations Unies jouer un rôle prépondérant dans le cadre des initiatives visant à aboutir à un règlement pacifique du conflit. C'est là une voie que nous pouvons suivre, et nous pouvons travailler à partir de là avec les Russes.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, on apprend, ce matin, dans The Gazette de Montréal que pendant que les pays de l'Union européenne cherchent à mettre en place un embargo pétrolier contre la Yougoslavie, des compagnies américaines vendraient du pétrole à la Yougoslavie. Voilà une situation qui serait complètement absurde.
Le ministre des Affaires étrangères peut-il nous dire si des compagnies pétrolières américaines livrent effectivement du pétrole à la Yougoslavie, à l'encontre et en violation de l'embargo européen?
[Traduction]
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas si c'est le cas, mais le gouvernement américain de même que les États de l'Union européenne voudraient s'assurer que ces produits, qui appuient l'effort de guerre yougoslave, n'arrivent pas jusqu'en Yougoslavie.
L'idée derrière l'embargo que l'OTAN appliquerait serait d'assurer que soit respectée la volonté de ces divers gouvernements lorsque des navires de la marine marchande approcheraient de ce port.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je suis un peu surpris que le ministre ne soit pas au courant.
Il me semble que c'est assez important d'être au courant, parce que si on prend une telle stratégie, si on bombarde les raffineries en Yougoslavie, si nos soldats sont en danger là-bas, parce que l'armée yougoslave a du pétrole pour les combattre, il y a comme un problème.
Le ministre des Affaires étrangères, qui se rendra à Moscou, peut-il nous assurer qu'aucune compagnie canadienne, ou qu'aucune compagnie étrangère ayant des filiales au Canada ne livre du pétrole à la Yougoslavie en violation de l'embargo et de toute la stratégie que devraient avoir les pays de l'OTAN, de façon solidaire? Sinon, c'est ridicule, c'est se tirer dans le pied.
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, selon l'information que nous avons, aucun produit du pétrole n'a été exporté à partir du Canada depuis janvier 1998.
Dans ce cas-ci, le Canada respecte clairement ce que prévoit l'embargo. Nous allons nous assurer que les pays qui adhéreront à l'embargo en respecteront les conditions.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, l'espoir d'une solution diplomatique par l'intermédiaire de la Russie paraît s'atténuer.
Lors d'un entretien à Moscou, ce matin, l'émissaire Tchernomyrdine a répété que la campagne aérienne de l'OTAN devait cesser pour permettre l'ouverture de négociations avec Belgrade. M. Draskovic a semblé faire marche arrière sur ce qu'il a dit hier.
Dans ce contexte, je demande au ministre des Affaires étrangères si le déploiement de forces additionnelles en Macédoine, annoncé par le premier ministre, de même que le rappel de 33 000 réservistes par les États-Unis, n'annonce pas l'envoi imminent de troupes terrestres au Kosovo?
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, comme l'a si bien dit ce matin le chef du Nouveau Parti démocratique, la décision que nous avons prise aujourd'hui de respecter nos engagements pour ce qui est de s'assurer qu'il y ait une force de rétablissement de la paix est une des meilleures preuves que nous souhaitons une solution pacifique du conflit.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, nous croyons aussi que la solution diplomatique est la meilleure, mais le nombre de troupes qui se massent autour des frontières du Kosovo est très important maintenant.
Ce matin, le premier ministre s'est échappé en disant que des hélicoptères pourraient être utilisés au Kosovo. N'a-t-il pas, de la sorte, donné un indice supplémentaire de l'imminence de l'envoi de troupes terrestres au Kosovo?
[Traduction]
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Non, monsieur le Président. Nous les envoyons là-bas à des fins de maintien de la paix. Les hélicoptères serviront aux missions de reconnaissance des militaires canadiens qui seront sur place. Ces militaires, qui seront environ 800, seront stationnés dans la Macédoine voisine. Ils collaboreront là-bas avec les Britanniques. Ils recevront un certain entraînement là-bas afin d'être prêts à entrer au Kosovo dès la conclusion d'un accord de paix.
Entre-temps, ils pourront aussi contribuer à l'effort humanitaire auprès des réfugiés qui sont là-bas. Ils pourront contribuer à protéger ces réfugiés.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.
Le Canada a annoncé l'envoi de 800 militaires qui mettront en oeuvre un accord de paix au Kosovo. Aucun accord de paix n'est toutefois intervenu. L'OTAN a plutôt décrété un embargo, malgré les objections de la Russie.
Le gouvernement croit-il que cette ingérence dans les activités des navires russes, que cette escalade des mesures militaires améliorent les perspectives d'un règlement pacifique?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je pense que le premier ministre a répondu à cette question très succinctement ce matin lorsqu'il a expliqué qu'en imposant un embargo, nous voulons continuer d'exercer des pressions pour obliger le gouvernement Milosevic à entamer des négociations.
Nous éviterons toute provocation. Nous respecterons les règles juridiques et nous avons demandé aux stratèges de l'OTAN de présenter des propositions en ce sens.
Nous faisons ce que j'ai expliqué hier; nous essayons d'adopter une approche équilibrée. Nous poursuivrons les négociations, tout en continuant d'exercer des pressions.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le premier ministre a dit qu'il appuie la mission diplomatique de son ministre des Affaires étrangères à Moscou. Aujourd'hui, il a toutefois expliqué clairement qu'il est en faveur de l'embargo décrété par l'OTAN.
Cela risque de créer des frictions, car la Russie a dit clairement qu'elle ne respectera pas l'embargo décrété par l'OTAN. Comment le premier ministre peut-il prétendre que pareille provocation nous aidera à obtenir la coopération de la Russie en vue de la conclusion d'un accord de paix?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je ne vois pas les choses ainsi. Je tiens à dire à la députée que ce qui est mis en application et ce qui ressort des rencontres au sommet de l'OTAN, c'est l'importance de faire front commun et de continuer d'exercer des pressions sur le régime Milosevic par le biais de la campagne aérienne et en le privant des approvisionnements dont il a besoin pour mener ses activités militaires. Par ailleurs, il est important d'entreprendre des négociations et de faire en sorte que les Russes participent à la recherche d'une solution.
Je puis rendre compte à la députée de discussions que j'ai eues ce matin avec certaines personnes qui sont déjà allées là-bas. Ce ne semble pas être un problème aussi grave pour les Russes que pour le chef du Nouveau Parti démocratique.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, ma question a trait à l'annonce faite ce matin par le premier ministre. Nous espérons tous que le premier ministre présentera un compte rendu complet au Parlement de la réunion de l'OTAN tenue à Washington, comme le premier ministre Blair l'a fait au parlement britannique hier.
Est-ce que des décrets ont été adoptés pour autoriser l'envoi de membres des forces aériennes canadiennes et des gardiens de la paix en Yougoslavie? Sinon, comment leur admissibilité aux prestations d'anciens combattants sera-t-elle déterminée?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il existe des allocations spéciales pour toute personne qui sert dans les Forces armées canadiennes et qui sert outre-mer, ainsi que des dispositions spéciales sur les pensions en cas de blessure. Toutes ces dispositions s'appliquent en l'occurrence.
Si nous envoyons des gardiens de la paix et des membres des forces aériennes dans une zone de combat, nous nous occuperons d'eux du mieux que nous pouvons, cela est indéniable. Nous allons réduire les risques qu'ils courent pendant leur mission et, si par malheur quelque chose leur arrive, nous allons nous occuper d'eux du mieux que nous pouvons.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, selon le personnel du ministre de la Défense et selon le conseiller juridique de la Chambre des communes, le décret adopté et les lois en vigueur sont insuffisants. Nos recherches démontrent que le décret auquel le ministre a fait allusion la semaine dernière ne suffit pas.
Je demande au premier ministre d'adopter un décret avec effet rétroactif pour que nos troupes, tant des forces aériennes que terrestres, soient admissibles aux prestations aux anciens combattants, à leur retour. Ou le gouvernement choisira-t-il de laisser tomber ces militaires comme il a laissé tomber les marins marchands il y a 54 ans?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je peux donner l'assurance à la députée que le ministre de la Défense nationale prendra toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que nos vaillants militaires et membres de nos forces aériennes et navales dans la région reçoivent toutes les prestations auxquelles ils ont droit. Toutes les mesures nécessaires seront prises. La députée peut en avoir l'assurance.
M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, l'opposition officielle offre un appui moral aux 800 militaires dont le gouvernement a engagé la participation aujourd'hui. Les Canadiens devraient tous prier pour leur sécurité et leur prompt retour. Il y a toutefois bon nombre de questions qui se posent.
Les 800 militaires qui se rendront en ex-Yougoslavie travailleront en collaboration avec la 4e Division blindée britannique. Les Canadiens veulent savoir quelle sera la structure établie pour le commandement et le contrôle. Nos militaires seront-ils sous les ordres d'officiers canadiens ou les britanniques auront-ils le contrôle de nos troupes?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il est bien sûr que nos troupes seront sous le commandement direct des Canadiens qui se trouvent sur les lieux. Toutefois, nos militaires feront partie d'une brigade britannique et, à ce titre, ils travailleront donc en étroite collaboration avec les Britanniques.
Les modalités seront définies au fur et à mesure des besoins et nous serons heureux d'en informer les députés dès que possible.
M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, ce sont des questions pressantes sur lesquelles les Canadiens aimeraient bien être informés.
L'une des plus importantes questions qui devraient être précisées aujourd'hui a trait aux règles d'engagement pour cette mission. Les missions effectuées en Somalie et en Bosnie nous ont démontré que les règles d'engagement doivent être établies au Canada, avant le départ des troupes.
Le Canada déterminera-t-il ses propres règles d'engagement ou celles-ci seront-elles définies par l'OTAN? Le ministre de la Défense nous précisera-t-il aujourd'hui en quoi ces règles consisteront?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nous serons soumis aux règles d'engagement de l'OTAN. Nous faisons partie de l'OTAN et nous participons à l'établissement de ces règles. Je serai heureux de fournir ces renseignements au député.
* * *
[Français]
LES BOURSES DU MILLÉNAIRE
M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, hier, à des questions fort précises sur les bourses du millénaire, comme d'habitude, le ministre du Développement des ressources humaines n'a pas répondu.
On sait pourquoi. Les coûts d'administration de la Fondation sont estimés à 5 p. 100 des 300 millions de dollars de bourses versés par année, ce qui veut dire 150 millions de dollars sur 10 ans.
Est-ce que le ministre du Développement des ressources humaines est conscient que l'entêtement du gouvernement fédéral à créer un nouveau dédoublement va faire en sorte d'exclure 50 000 étudiants de bourses de 3 000 $ chacune? Le ministre est-il conscient de cela, ou attend-il que les étudiants viennent le voir pour lui dire?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je n'attends pas cela, je vais bientôt rencontrer les étudiants qui ont demandé à me revoir. Jeudi prochain, j'aurai le plaisir de les voir. Cela me fait toujours plaisir de rencontrer les étudiants.
Ce que je souhaite, cependant, c'est que nous arrivions véritablement à éliminer l'inflexibilité du gouvernement du Québec qui, encore la semaine dernière, revenait sur l'idée du droit de retrait avec pleine compensation, alors que la résolution même adoptée à l'unanimité de l'Assemblée nationale ne parle pas du droit de retrait avec pleine compensation.
C'est le ministre Legault qui est revenu à cela, la semaine dernière, et je peux vous dire que ce que je veux, c'est une entente entre la Fondation et le gouvernement pour aider les étudiants québécois.
M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre peut-il expliquer que dans l'assurance-emploi, même si les fonds proviennent des travailleurs et des employeurs, il refuse de créer une caisse autonome, alors que dans les bourses du millénaire, il donne 2,5 milliards de dollars de fonds publics à une fondation privée pour ne rendre aucun compte? Est-ce qu'on ne nagerait pas dans la pleine contradiction?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je constate encore que les députés du Bloc s'opposent au fait que le Canada ait voulu célébrer le millénaire en aidant les étudiants.
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Pierre S. Pettigrew: Je trouve absolument incroyable qu'on reproche à un gouvernement, devant une économie du savoir et de la connaissance, de vouloir aider les étudiants avec un programme d'une durée de 10 ans pour les aider à parfaire leurs connaissances dans une économie du savoir.
C'est cette inflexibilité, cette idéologie, et cette volonté de début de campagne référendaire qui nuisent aux étudiants québécois.
* * *
[Traduction]
LE KOSOVO
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, en répondant à une autre question, le ministre des Affaires étrangères a dit qu'il ne comprenait pas d'où venait l'expression «aucun compromis». Permettez-moi de lire un passage du communiqué que l'OTAN a transmis le week-end dernier et que le gouvernement a accepté: «Il ne saurait y avoir aucun compromis sur ces conditions», à savoir les cinq conditions imposées par l'OTAN.
Comment le ministre peut-il se rendre à Moscou et négocier, alors qu'il n'est disposé à faire aucun compromis, comme on le dit clairement dans cette déclaration?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, il existe une énorme différence entre disposer d'un ensemble de principes sur lesquels on ne fait aucun compromis et la recherche de moyens pour appliquer ces principes, moyens sur lesquels on peut faire des concessions et des compromis. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, ne sommes pas habitués à faire des compromis sur nos principes. Peut-être le député y est-il habitué, mais pas nous.
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, les députés d'en face ne cessent de tenir des propos équivoques sur ce qu'ils entendent par des embargos et toutes les choses de ce genre. En fin de compte, nous demandons aux Russes de nous aider à trouver une solution pacifique au conflit du Kosovo. La question est évidente. Qu'offrons-nous aux Russes? Quelle aide leur offrons-nous si nous ne sommes pas disposés à déroger à ces conditions? Comment pouvons-nous négocier dans de telles circonstances?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, dans la déclaration qu'il a faite ce matin, le premier ministre a souligné une initiative très importante que le Canada a contribué à créer. Nous avons proposé que la force internationale chargée d'appliquer l'accord ne soit pas uniquement une force de l'OTAN, qu'elle pourrait être plus large. Je crois que cette proposition a été acceptée par les pays membres de l'OTAN qui ont assisté au sommet. Il s'agissait d'un des principaux éléments de discorde dans les négociations précédentes avec les émissaires russes.
Voilà un bon exemple d'une initiative qui nous permettra de discuter de la création d'une force internationale qui appliquerait l'accord et qui disposerait...
Le Président: La députée de Drummond a la parole.
* * *
[Français]
LE SANG CONTAMINÉ
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, le 18 septembre dernier, le gouvernement fédéral annonçait l'injection de 300 millions de dollars dans un nouveau programme pour aider les provinces à défrayer les soins de santé offerts à toutes les victimes du sang contaminé.
Compte tenu que le Québec a déjà un programme analogue qui offre des soins à toutes les victimes du sang contaminé, le ministre entend-il verser au Québec sa juste part des fonds fédéraux sur la base de sa population, soit 75 millions de dollars?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, nous avons déjà offert au Québec sa part de cet argent pour assurer que les services médicaux pour les gens infectés par l'hépatite C soient disponibles.
J'ai déjà envoyé à ma collègue à Québec, la ministre de la Santé, Mme Marois, de la documentation concernant cette proposition. J'attends sa réponse.
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, dans le discours du Trône de 1996, le gouvernement s'est engagé à ne pas mettre en place de nouveaux programmes à frais partagés sans l'accord des provinces, ou, le cas échéant, à accorder un droit de retrait avec pleine compensation.
Dans le cas du programme mis en place pour aider les victimes du sang contaminé, le gouvernement va-t-il respecter enfin son propre engagement de 1996?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, l'honorable députée fait erreur, malheureusement. Cette proposition n'est pas touchée par cet engagement. L'engagement n'est pas pertinent à ce programme.
Ce que nous avons proposé, c'est seulement une approche pour s'assurer que les gens infectés par l'hépatite C soient capables, maintenant et dans le futur, d'avoir accès aux services médicaux nécessaires.
J'ai proposé une certaine approche à Mme Marois, et j'attends sa réponse.
* * *
[Traduction]
LA JUSTICE
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la pétition a été présentée aujourd'hui. Plus de 100 000 Canadiens l'ont signée, ce qui en fait la plus importante pétition présentée au cours de la législature. Les pétitionnaires réclament l'application vigoureuse des dispositions canadiennes contre la pornographie juvénile.
Depuis trois mois, la pornographie juvénile afflue en Colombie-Britannique, et les causes portées devant les tribunaux restent en suspens. Que répond le gouvernement aux 100 000 pétitionnaires qui veulent qu'on protège les enfants contre les pornographes tout de suite, pas demain ni dans un mois, mais tout de suite?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la réponse est nette et claire. Il est dommage que les députés réformistes n'arrêtent pas d'alarmer l'opinion à ce sujet et qu'ils n'adoptent pas un comportement plus responsable.
Notre position sur la pornographie juvénile est claire, tout comme la constitutionnalité de l'article en question. Le député devrait lire notre factum. La question est maintenant devant les tribunaux. Nous croyons que la loi est constitutionnelle et, avec le procureur général de la Colombie-Britannique, nous la défendons.
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement a eu trois mois pour confirmer la loi canadienne. Il a suffi de trois petites semaines pour recueillir les 100 000 signatures de la pétition, alors que le gouvernement n'a rien fait en trois mois. Les pétitionnaires demandent au gouvernement de répondre à la Chambre aujourd'hui: quand allez-vous régler le problème? Ils veulent une solution immédiate.
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, mon parti et le gouvernement respectent la règle du droit. Comme les procureurs généraux de la Colombie-Britannique et de l'Alberta, par exemple, nous comprenons que la bonne solution consiste à défendre la loi actuelle, qui nous semble constitutionnelle.
Le Président: Je demande à tous les députés d'adresser leurs questions et leurs réponses à la présidence.
* * *
[Français]
LE SPORT AMATEUR
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, hier, le premier ministre participait à l'hommage rendu au grand Maurice Richard et louait son immense contribution au développement du hockey au Canada.
Pendant ce temps, à Hockey Canada, on applique un traitement tout à fait particulier et injuste à l'endroit de l'entraîneure Danièle Sauvageau.
Ma question s'adresse au premier ministre. Est-ce que le premier ministre entend poser des questions à Hockey Canada sur les raisons qui motivent le traitement discriminatoire envers l'entraîneure Danièle Sauvageau?
M. Mauril Bélanger (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a respecté ses engagements par rapport au sport amateur en majorant de dix millions annuellement la contribution à cette enveloppe. Effectivement, une partie de l'enveloppe avait pour but d'améliorer la formation d'entraîneur.
De là à dire que le gouvernement doit s'ingérer et aller aussi loin que le voudrait l'opposition, soit de choisir les entraîneurs, nous ne sommes pas prêts à franchir ce pas. Il ne revient pas au gouvernement de s'ingérer dans l'administration interne des équipes nationales.
* * *
[Traduction]
L'OTAN
L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le Président, le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international a déposé à la Chambre un rapport sur les questions relatives au désarmement nucléaire demandant au Canada de prier l'OTAN de revoir le concept stratégique de l'organisation.
Le ministre des Affaires étrangères pourrait-il dire à la Chambre quelles mesures le Canada a prises pour que soit réexaminé le concept stratégique de l'OTAN lors du sommet du week-end dernier?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de Mont-Royal de sa question. Devant toute l'attention accordée au Kosovo, une déclaration très importante faite lors du sommet est passée inaperçue. Les dirigeants de l'OTAN ont convenu que le contrôle des armements et le désarmement constituent un élément essentiel du dispositif de sécurité de l'OTAN. Le communiqué dit clairement que l'on procédera à un réexamen de la politique nucléaire de l'OTAN et nous avons demandé à notre ambassadeur d'entreprendre l'élaboration de recommandations à cet égard. C'est une initiative qu'appuie le Canada.
Je voudrais remercier tous les membres du comité qui ont contribué à la mise en oeuvre de cette initiative très importante.
* * *
LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, dans quelle mesure au juste la Loi sur les jeunes contrevenants protège-t-elle l'identité? Vendredi dernier, à Vancouver, Paul Glover a eu droit à des dommages et intérêts que devront lui verser deux hommes qui l'avaient agressé alors qu'ils étaient encore adolescents. Les médias n'ont pas révélé l'identité des deux hommes en question par crainte de représailles en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants.
La ministre de la Justice pourrait-elle éclaircir un point. La Loi sur les jeunes contrevenants s'applique-t-elle aux affaires civiles et pouvons-nous nous attendre la même chose de la nouvelle loi sur le système de justice pénale pour adolescents?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas l'intention de faire quelque remarque que ce soit au sujet d'une affaire qui est peut-être encore devant les tribunaux.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, Paul Glover n'a jamais soulevé la question de la procédure criminelle. Ce sont les jeunes gens qui l'ont soulevée afin d'échapper à la responsabilité civile. La ministre sait parfaitement que le tribunal civil est le seul auquel les victimes peuvent s'adresser pour obtenir réparation pour la douleur et les souffrances.
Encore une fois, je pose la question à la ministre. La Loi sur les jeunes contrevenants s'applique-t-elle aux tribunaux civils? Il n'y a pas d'appel en instance.
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne ferai aucun commentaire sur les détails de cette affaire. Si le député le veut, je me ferai un plaisir de discuter de cette affaire avec lui en privé.
* * *
LES PENSIONS
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le projet de loi C-78, sur les régimes de pension, est complexe et créera des précédents importants. Pourtant, le gouvernement a imposé la clôture après seulement quatre heures de débat. Quelque 670 000 Canadiens seront directement touchés par cette mesure législative, et beaucoup plus le seront indirectement.
Le président du Conseil du Trésor assurera-t-il à la Chambre aujourd'hui qu'il approuvera la tenue d'audiences prolongées du comité, d'un bout à l'autre du pays? Permettra-t-il aux personnes touchées d'exprimer leurs préoccupations même si leurs représentants élus, ici, à la Chambre des communes, n'auront pas cette chance?
L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, les personnes touchées expriment leurs préoccupations depuis au moins un an. Nous avons négocié avec elles notamment la question de la cogestion des régimes de pension. Les représentants des employés sont parfaitement au courant des enjeux depuis des mois et des mois. Nous en avons discuté avec eux. Nous avons mis cartes sur table.
Je pense que ce qui se trouve dans le projet de loi C-78 est dans l'intérêt des fonctionnaires et des contribuables.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, le président du Conseil du Trésor a insisté ad nauseam sur le droit qu'il a de prendre l'excédent de 30 milliards de dollars du régime de pensions parce que le gouvernement a payé le moins-perçu de 13 milliards de dollars environ au fil des années. Si le régime doit 13 milliards de dollars au gouvernement, pourquoi celui-ci se rembourse-t-il en prenant 30 milliards de dollars? Je pourrais obtenir de meilleures conditions d'un usurier de Las Vegas. J'aurais probablement de meilleures conditions en utilisant ma carte MasterCard de la Banque de Montréal.
Pourquoi le ministre ne prend-il pas 13 milliards de dollars et ne laisse-t-il pas le reste où il est pour verser des prestations de retraite à des retraités méritants?
L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-78 garantit aux fonctionnaires, et continue de leur garantir, toutes les prestations qu'on leur garantissait auparavant. Ces prestations sont toujours garanties, mais leur nombre est accru.
Dans le passé, les fonctionnaires n'ont assumé absolument aucune responsabilité pour le financement du régime. Ce sont les contribuables qui ont pris tous les risques. Ce sont les contribuables qui ont financé tous les déficits. Il s'ensuit donc que les contribuables méritent de profiter de l'excédent.
* * *
LA SÉCURITÉ DANS LE TRANSPORT AÉRIEN
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.
Il y a onze ans, des fonctionnaires de Transports Canada ont déterminé que la tour de contrôle de Kelowna ne satisfaisait pas aux normes minimales de sécurité, parce que les contrôleurs aériens étaient incapables de voir les pistes et les voies de circulation. Un permis temporaire a été délivré pour permettre à la tour de poursuivre ses activités à la condition qu'une nouvelle tour soit construite. Onze ans plus tard, il n'y a toujours pas de nouvelle tour. Le ministre ordonnera-t-il la construction d'une nouvelle tour?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, la société Nav Canada est responsable de la navigation aérienne au pays et de l'évaluation du régime à appliquer dans les circonstances actuelles.
Je devrai m'informer avant de pouvoir répondre à la question que pose le député.
Je tiens à souligner que Transports Canada est absolument résolu à faire de la sécurité, surtout dans notre espace aérien, sa priorité.
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, la sécurité serait donc la priorité. Alors, permettez-moi de lire un extrait du rapport de Transports Canada sur l'aéroport de Kelowna. Il dit: «Étant donné la position et la hauteur de la tour de contrôle, des portions de la piste et des voies de circulation ne sont pas visibles. Le problème s'intensifie. La marge de sécurité est compromise. La visibilité est un grave problème qui menace la sécurité des gens.»
Ce rapport du ministère des Transports est très éloquent. Il nous faut immédiatement une nouvelle tour à Kelowna.
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je prends note des préoccupations du député.
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LE KOSOVO
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.
L'ensemble des Canadiens s'inquiètent du sort des réfugiés du Kosovo, et la ministre sait aussi que de nombreux députés ont reçu des demandes d'électeurs qui ont des parents dans la région.
La ministre peut-elle expliquer à la Chambre les efforts que le gouvernement déploie pour aider les réfugiés du Kosovo, notamment ceux qui ont déjà des parents au Canada?
L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je dois dire que nous ne ménageons aucun effort pour faciliter la réunification des familles. Aujourd'hui, dans le cadre d'un programme spécial qui permet de traiter de façon accélérée les demandes de réunification des familles, nous avons reçu plus de 120 demandes de Canadiens qui ont des parents là-bas, demandes qui pourraient viser 700 personnes.
Je suis heureuse d'annoncer au député que les premiers réfugiés du Kosovo arriveront aujourd'hui. Je suis certaine que les Canadiens les accueilleront comme des membres de notre grande famille.
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, il y a trois ans, le gouvernement fédéral a imposé un moratoire sur l'extraction de gravier du fleuve Fraser afin de protéger les stocks de saumon. Au cours de la dernière semaine, la bande indienne de Cheam s'est affairée à extraire 100 000 tonnes de gravier du Fraser, sans permis et dans une zone protégée.
Hier, la ministre des Affaires indiennes s'est bien mal défendue. Elle aurait dû dire qu'elle n'avait aucune idée de ce qui se passait. Au lieu de cela, elle a dit que les autochtones devraient avoir accès au gravier parce que c'est un droit inhérent.
Pourquoi la ministre appuie-t-elle le principe des deux poids deux mesures? Une série de lignes directrices sévères pour tout le monde qui utilise la rivière, et une autre série de lignes directrices spéciales qui ne semblent s'appliquer qu'aux autochtones.
Le Président: Le secrétaire parlementaire a la parole.
M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, peut-être que si le député n'avait pas parlé d'une voix aussi râpeuse hier, nous l'aurions compris plus clairement.
Dans ce dossier, nous essayons de travailler avec la bande en nous efforçant d'éviter toute confrontation. Nous faisons enquête sur la question du gravier. S'il y a lieu de porter des accusations, nous le ferons. L'affaire fait actuellement l'objet d'une enquête.
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[Français]
LES JEUNES CONTREVENANTS
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, le 23 avril dernier, la Cour suprême stipulait, dans le jugement Gladue, ce qui suit, et je cite: «Au cours des dernières années, le Canada, comparativement à d'autres pays, a enregistré une augmentation alarmante des peines d'emprisonnement.»
La ministre de la Justice admettra-t-elle que son projet de loi sur les jeunes contrevenants, en infligeant des peines plus sévères, fait fi, non seulement de l'important consensus québécois, mais aussi de l'avis de sa propre Cour suprême?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Non, monsieur le Président. En fait, comme le député le sait, notre stratégie en matière de justice pour les jeunes est une stratégie intégrée et équilibrée qui reconnaît le fait que nous incarcérons trop de jeunes dans notre pays. Une fois qu'elle aura été mise en oeuvre, notre stratégie permettra qu'un nombre moins élevé de jeunes soient incarcérés inutilement dans ce pays.
* * *
LES PENSIONS
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, en 1995, le gouvernement libéral a utilisé la guerre du turbot contre l'Espagne pour faire passer en catimini les changements dévastateurs apportés à l'assurance-emploi. Ces changements ont permis au gouvernement fédéral de dépouiller les travailleurs canadiens de 26 milliards de dollars. Le gouvernement libéral se sert maintenant de la guerre au Kosovo pour camoufler l'arnaque de 30 milliards de dollars dont seront victimes les retraités.
Les Canadiens dont les pensions seront touchées par le projet de loi C-78 méritent d'être entendus. Le président du Conseil du Trésor acceptera-t-il de tenir des consultations pancanadiennes ou le gouvernement libéral est-il déterminé à forcer le Parlement à adopter ce projet de loi à la vapeur, pendant que la guerre au Kosovo offre un paravent bien pratique?
L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, cette question a été débattue pendant des mois. Le projet est bien connu. Nous en avons discuté avec les syndicats. Nous avons siégé à la même table. Les syndicats possèdent toute l'information.
En l'occurrence, la question est très claire. Les fonctionnaires ont obtenu toutes les prestations prévues dans la loi. Aucune ne leur a été enlevée. Le gouvernement continue de garantir ces prestations par voie législative. Je le répète, l'excédent de la caisse de retraite a été payé par les contribuables. Il appartient aux contribuables. Il doit être remis aux contribuables.
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LA DEVCO
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, les mineurs de la DEVCO ont été exposés à la poussière et aux gaz dégagés par le charbon, ce qui leur a causé des problèmes de santé tels que les examens médicaux révèlent l'existence de séquelles chez beaucoup d'entre eux. Le Cap-Breton a l'un des taux de cancer les plus élevés au Canada. Le gouvernement ferme maintenant la DEVCO, ce qui laisse les mineurs sans régime d'assurance médicale collective.
Que fera le ministre des Ressources naturelles pour aider les mineurs et leurs familles qui se retrouvent sans l'assurance médicale dont ils auraient grand besoin?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, j'ai souvent énuméré à la Chambre la liste de ce que tout le gouvernement a prévu pour régler diverses questions liées à la DEVCO et dont le coût total s'élève à environ 550 millions de dollars.
Je sais très bien que la période actuelle est très difficile pour la population du Cap-Breton. Nous prenons tous les moyens possibles pour l'aider à traverser cette période.
S'il y a des propositions précises concernant le maintien du programme d'assurance médicale collective qui méritent d'être prises en considération, je serais très intéressé à en connaître les détails et je ferai de mon mieux...
Le Président: Le député de Scarborough-Centre a la parole.
* * *
LE KOSOVO
M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, plus de 600 000 Kosovars ont cherché refuge dans les pays voisins. La moitié d'entre eux ont moins de 18 ans. Pas moins de 400 000 autres Kosovars sont déplacés à l'intérieur même du Kosovo et n'ont pas accès à l'aide internationale.
La ministre de la Coopération internationale peut-elle informer la Chambre sur la situation humanitaire et nous dire dans quelle mesure l'aide internationale répond aux besoins des réfugiés?
L'hon. Diane Marleau (ministre de la Coopération internationale et ministre responsable de la Francophonie, Lib.): Monsieur le Président, les organismes canadiens et internationaux chargés de l'aide humanitaire font de l'excellent travail dans des conditions très difficiles.
Des programmes d'immunisation sont en place. Il y a assez de vivres pour deux semaines, et d'autres vivres sont en route. Mieux encore, la Croix-Rouge internationale a pu accéder au Kosovo pour constater de visu la situation là-bas. Nous espérons vivement que cet organisme pourra bientôt amorcer des opérations de secours pour les personnes déplacées à l'intérieur de la Yougoslavie.
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LE HOCKEY
M. John Nunziata (York-Sud—Weston, Ind.): Monsieur le Président, on demande au gouvernement fédéral d'accorder une aide financière aux équipes de la Ligue nationale de hockey.
Or, la principale cause des difficultés financières de quelques équipes de la LNH, ce sont les salaires des joueurs. Le salaire moyen d'un joueur de la LNH est passé de 250 000 $ à 1 250 000 $ depuis sept ans.
Le gouvernement peut-il nous donner l'assurance que les équipes de la LNH n'obtiendront pas de subventions et qu'elles ne jouiront pas d'un traitement fiscal préférentiel? Le ministre ne convient-il pas que ce n'est pas l'affaire du gouvernement de subventionner des hockeyeurs professionnels grassement payés?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai rencontré aujourd'hui des représentants d'un certain nombre de villes canadiennes ayant une équipe appartenant à une ligue de hockey professionnelle. Je suis heureux de dire au député que personne n'a demandé de subventions pour les hockeyeurs professionnels. Ces représentants ont exprimé une foule de préoccupations au sujet de la valeur que représente pour la collectivité, selon les maires de certaines villes, le fait d'avoir une telle équipe chez eux. Les villes de Calgary, d'Edmonton, d'Ottawa et de Montréal étaient représentées.
J'ai accepté de rencontrer de nouveau les représentants des intéressés afin de songer à ce qui peut être fait pour que nous ne perdions pas toutes nos équipes de hockey.
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LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, la ministre des Affaires indiennes sait que les femmes autochtones ne bénéficient pas des mêmes droits que les Canadiennes ordinaires au pays. Elle sait qu'en cas de rupture du mariage, c'est le plus souvent la femme autochtone qui doit quitter le foyer et qui n'a plus de toit. En pareilles circonstances, c'est aussi souvent elle qui hérite des enfants.
Pourquoi la ministre et le gouvernement ont-ils négocié avec les Nisga'a un traité ne prévoyant rien pour régler ce problème et rendant impossible l'enchâssement de ces droits pour les femmes autochtones dans l'avenir?
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je sais qu'à la suite de discussions avec des femmes autochtones, nous avons prévu dans le projet de loi C-49 des mesures afin de veiller à ce que les codes fonciers tiennent compte des biens matrimoniaux pour ce qui est des femmes de ces 14 premières nations.
À l'heure actuelle, la Loi sur les Indiens parle d'un régime de propriété commune, et les femmes autochtones n'ont pas de possibilités. Nous avons relevé le problème et nous désirons avoir un enquêteur qui nous aidera à régler la question des biens matrimoniaux. Je m'attends à recevoir des commentaires de cet enquêteur et à continuer à faire des progrès dans ce domaine.
* * *
[Français]
LE CLONAGE HUMAIN
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, l'information de ce matin selon laquelle des chercheurs québécois aient réussi à cloner trois chèvres fait ressortir l'urgence de régler la question du clonage humain. Or, le Canada n'a qu'un moratoire sur le clonage humain, tandis que l'Union européenne s'est officiellement prononcée contre cette pratique.
Ma question s'adresse au ministre de la Santé. Le ministre s'engage-t-il à adopter d'ici la fin de la session le projet de loi C-247, portant sur la criminalisation du clonage humain?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il y a quelques années, nous avons commencé un moratoire volontaire sur cette pratique. Celui-ci est présentement toujours en place.
Évidemment, il est nécessaire de faire plus. J'ai déjà entrepris des consultations auprès des experts sur cette question, y compris la présidente de la Commission royale d'enquête.
J'ai l'intention, plus tard cette année, de déposer un projet de loi relatif à ce sujet.
* * *
[Traduction]
LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question porte sur le régime de pensions du Canada.
Le gouvernement sait qu'environ 100 pompiers arpentent les corridors cette semaine dans le cadre d'un exercice de lobbying. Il comprend aussi qu'ils exercent le métier le plus dangereux au pays.
Les pompiers demandent à être admissibles à des prestations réduites du RPC à l'âge de 55 ans et à avoir droit aux prestations complètes à l'âge de 60 ans, au lieu de 60 et de 65 ans, respectivement.
Le ministre du Développement des ressources humaines accepterait-il de proposer une modification au Régime de pensions du Canada afin que les pompiers puissent recevoir les prestations à un plus jeune âge, sans subir de perte financière, en raison du métier dangereux qu'ils exercent?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question et j'en prends bonne note.
J'analyserai la situation car elle est liée à la compétence des provinces et je lui fournirai une réponse.
* * *
DEVCO
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, la fermeture des mines de la Devco au Cap-Breton fait perdre leur emploi à 1 700 mineurs, dont seulement 337 ont droit à une pleine pension.
Dans ces mines, il doit aussi y avoir des travaux d'assainissement qui fourniront de l'emploi aux mineurs de la Devco qui en ont besoin.
Quels plans le ministre des Ressources naturelles a-t-il mis en place pour aider les mineurs à gagner les points nécessaires pour avoir droit à une pleine pension?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, aux termes de la nouvelle proposition que nous avons mise sur la table, le nombre de ceux qui seraient admissibles à une pension est de l'ordre de 340. Ce nombre s'ajoute aux quelque 137 qui ont droit à une pension en vertu des anciennes dispositions et aux 650 qui seront admissibles à des indemnités de départ s'élevant à environ 70 000 $ par personne en moyenne.
En outre, il se peut qu'il y ait des possibilités d'emploi lors des travaux d'assainissement, que nous considérons évidemment comme une initiative importante pour la diversification économique du Cap-Breton.
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
LA PÉRIODE DES QUESTIONS
M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, pendant la période des questions, j'ai interrogé le ministre de la Défense nationale au sujet des règles d'engagement. Il s'est reporté à des lignes directrices établies par l'OTAN.
Le ministre voudrait-il déposer ces lignes directrices à la Chambre cet après-midi?
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le député d'en face sait que la règle ne l'exige pas. Il sait pertinemment que la règle veut que lorsqu'un ministre, et personne d'autre, lit un passage d'un document public, c'est-à-dire un document du gouvernement, il est tenu de le déposer à la Chambre.
Cela n'a rien à voir avec le fait que le ministre ait pu faire allusion à autre chose. C'est une tout autre histoire, et les critères ne s'appliquent pas ici.
Le Président: Je n'ai pas vu le ministre lire un document ni s'y reporter. La demande est donc irrecevable.
M. Randy White: Monsieur le Président, je croyais qu'on répondrait aujourd'hui à la question de privilège soulevée hier.
Le Président: Nous le ferons lorsque le député de Provencher sera présent. Je voudrais entendre aussi sa version des choses. Dès qu'il sera là, nous reviendrons sur la question de privilège.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Français]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LA CRISE AU KOSOVO
La Chambre reprend l'étude de la motion, ainsi que de l'amendement.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, je profite de cette période de questions et commentaires pour féliciter le député de Joliette pour son discours. Il a démontré l'importance d'une position très ferme de l'OTAN et du Canada, pour s'assurer que la situation puisse revenir à la normale en Yougoslavie, mais en même temps, l'importance d'un effort diplomatique très présent.
Je veux lui poser la question suivante. Les étudiants de l'école La Pruchière, dans ma circonscription, m'ont envoyé plus d'une centaine de messages écrits qu'ils ont adressés aux enfants du Kosovo, dans lesquels ils leur transmettent un message d'espoir que la guerre va finir le plus tôt possible et qu'ils vont pouvoir retrouver une vie normale.
Le député de Joliette peut-il me dire si le fait que la Chambre des communes tienne un vote sur la position du Canada dans cette crise et sur la pertinence d'envoyer des soldats ne serait pas un ajout pour permettre aux efforts diplomatiques entrepris par le ministre des Affaires étrangères, par le Canada et par tous les participants à ce conflit d'en arriver à une solution pacifique le plus tôt possible, et ainsi répondre à la demande des enfants de ma circonscription?
M. René Laurin: Monsieur le Président, je remercie mon honorable collègue de nous faire part des désirs exprimés par des étudiants de sa circonscription.
Cela dénote qu'au Québec, nous vivons de l'esprit démocratique de la gouvernance des institutions. Nous voulons vivre pacifiquement, et c'est la préoccupation des enfants, dès leur plus jeune âge. Qu'ils l'expriment aux enfants du Kosovo, cela démontre que les Canadiens et les Québécois en particulier sont un peuple pacifiste qui, même s'ils prennent des moyens comme ceux qu'ils prennent en ce moment, recherchent la paix et la stabilité mondiales.
Dans une situation comme celle-là, un vote serait évidemment nécessaire. On vient de donner un mandat à nos troupes actuellement. On envoie 600 à 800 soldats supposément pour le maintien de la paix, mais on ne sait jamais à quel moment il pourrait y avoir escalade.
Je citais deux rumeurs rapportées par le journal Le Monde aujourd'hui, qui disaient que les 12 000 soldats des forces de l'OTAN qui sont déjà sur place ont reçu des jets de pierres, une Jeep a été brûlée, il y a une quinzaine de jours, et il y a déjà des manifestations d'impatience qui s'expriment. Ces gens-là ne sont pas au Kosovo, ils sont en Macédoine.
Alors, est-ce que nos soldats qui s'en vont là vont être attaqués? Est-ce qu'il y aura violence contre eux? Est-ce qu'ils ont le mandat et l'autorisation de se défendre? Si oui, il semble qu'on l'ait d'après ce que nous a dit le ministre ce matin. Mais s'ils ont le mandat de se défendre contre des attaques d'extrémistes, qui nous dit qu'il n'y aura pas escalade et que cela ne dégénérera pas? Qui nous dit que pour se défendre, ils ne seront pas obligés d'attaquer? Où est la limite, où est la barrière entre la légitime défense, l'attaque et le combat?
C'est donc dire que ces troupes sont peut-être à la toute dernière limite de s'engager dans un combat qui nous mènera on ne sait où. Il serait donc important que la Chambre des communes dise, par un vote précis et clair et un vote très largement majoritaire, à ces personnes qui s'en vont défendre la liberté des peuples et la démocratie: «Vous partez avec l'appui de tous les Canadiens et de tous les Québécois. Ces gens sont derrière vous. Ces gens vous appuient parce qu'ils savent que vous allez défendre la liberté et l'esprit démocratique qui leur est si cher.»
Qu'est-ce que ça prendrait de plus? Le premier ministre nous dit que s'il y avait des changements dans la situation il reviendrait consulter la Chambre et permettrait qu'il y ait un débat. À la fin d'un débat, il ne faut que 15 à 20 minutes pour que la Chambre puisse se prononcer par le biais d'un vote.
Est-ce que ce sont 15 ou 20 minutes qui manquent à l'horaire ou à l'ordre du jour quotidien du premier ministre? Est-ce que c'est ce qui manque à l'ordre du jour des ministres pour qu'ils ne puissent pas le permettre?
On a déjà pris des heures et des heures, jusqu'à 3, 4 ou 5 heures du matin, même jusqu'à 8 heures du matin pour débattre de telles questions. Puisqu'on peut se permettre d'en débattre pendant des heures et des heures, qu'est-ce que cela changerait si on prenait 15 minutes de plus pour voter?
Le premier ministre invoquait la disponibilité, la manoeuvrabilité, sa marge de manoeuvre pour être capable de réagir rapidement dans des cas extrêmes. Est-ce qu'un quart d'heure l'empêcherait de réagir rapidement? La France s'est prononcée par la voix de son premier ministre.
Aujourd'hui, M. Lionel Jospin a assuré les parlementaires que l'hypothèse d'un engagement militaire au sol ne pourrait être envisagée sans que la question ne leur soit soumise. «Dans un tel cas, vous seriez consultés de façon formelle pour autoriser ou non, par un vote, une telle intervention.»
Si la France peut le faire, le Canada le peut. C'est le respect de la démocratie.
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui à la Chambre au sujet de la motion du Nouveau Parti démocratique, qui se lit comme suit:
Que la Chambre demande au gouvernement d'intensifier et d'accélérer les efforts en vue de trouver une solution diplomatique à la crise au Kosovo en assurant la participation de la Russie et des Nations Unies et d'exhorter l'OTAN à ne pas prendre d'actions qui favoriseraient l'extension du conflit et qui nuiraient à la recherche d'une solution diplomatique.
D'emblée, je désire informer cette Chambre et mes collègues du NPD que nous appuierons cette motion.
Nous appuyons cette motion parce qu'elle rejoint en grande partie la position que le Bloc québécois a toujours défendue et encouragée avant et pendant le conflit au Kosovo, soit la solution diplomatique qui intégrerait en son sein les Nations Unies, la Russie, et pourquoi ne pas ajouter la Chine. Il ne faut pas oublier la Chine. Ce pays fait encore partie du Conseil de sécurité de l'ONU et a droit de vote. À elle seule, la Chine pourrait paralyser toute action de l'ONU.
Le Bloc québécois a toujours souhaité que la crise actuelle dans les Balkans se règle sous l'égide des Nations Unies, comme ce fut le cas d'ailleurs lors de l'agression de l'Irak contre le Koweït en 1991. Malheureusement, les liens historiques étroits entre la Russie et la Serbie, de même que les liens politiques privilégiés entre la Yougoslavie et la Chine ont rendu l'avenue diplomatique de plus en plus difficile.
Le présent conflit au Kosovo est l'aboutissement de nombreuses années d'instabilité dans les Balkans, provoquée principalement par un homme, ou je devrais plutôt dire un dictateur, Slobodan Milosevic.
Cela fait plus de dix ans que Milosevic joue avec les nerfs du peuple kosovar et de la communauté internationale. La patience a ses limites. Avant d'en arriver à ce conflit, on conviendra que plusieurs tentatives diplomatiques ont été tentées. Or, c'est depuis plus d'un an que l'impasse diplomatique persistait.
À maintes et maintes reprises, la communauté internationale a tenté d'en venir à une solution diplomatique afin que cessent la guerre et la répression au Kosovo.
On n'a qu'à penser aux Résolutions 1199 et 1203 de l'ONU, de même qu'aux accords du mois d'octobre 1998 entre l'OSCE, l'OTAN et l'ex-Yougoslavie qui n'ont jamais été respectés. Nous pouvons aussi inclure l'accord de Rambouillet. Mais le refus des autorités yougoslaves de signer cet accord a été à l'origine de la guerre déclenchée par l'OTAN contre Milosevic et sa machine de guerre.
Après toutes ces tergiversations, ces discussions et ces négociations, la situation au Kosovo était devenue insoutenable. D'ailleurs, nous le savons très bien maintenant, c'était la stratégie de Milosevic de pouvoir gagner du temps afin de rendre à terme son épuration ethnique au Kosovo.
Or, pour toutes ces raisons, le Bloc québécois a appuyé l'intervention militaire de l'OTAN au Kosovo et en Yougoslavie afin de ne plus laisser pourrir la situation au Kosovo. La situation présente au Kosovo a donné raison au Bloc québécois.
Le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés, le HCR, estime à près de 585 000 le nombre d'Albanais du Kosovo réfugiés dans les pays limitrophes. Soixante-dix mille d'entre eux avaient déjà rejoint ces pays entre mars 1998 et le début des frappes aériennes de l'OTAN, le 24 mars.
Plus de 120 000 réfugiés se trouvent par ailleurs dans des pays non riverains, principalement en Europe, ce qui porte, selon les estimations du HCR, à plus de 700 000 le nombre total de réfugiés du Kosovo depuis mars 1998. C'est sans compter les viols qui ont eu lieu, les atrocités physiques et la souffrance psychologique de tout un peuple.
En regardant ce tableau d'atrocités, il était opportun que le Bloc québécois appuie une intervention de l'OTAN. Ceci ne voulait pas dire de cesser toute initiative diplomatique. La diplomatie va toujours avoir sa place.
C'est en temps de crise qu'on peut voir les forces et faiblesses d'une organisation. À cet égard, la politique étrangère canadienne nous a montré ses faiblesses par son manque de vision et de direction et, par conséquent, son manque de crédibilité.
C'est depuis le 1er janvier dernier que le Canada est membre du Conseil de sécurité de l'ONU. Alors, comment expliquer que le Canada, par son manque d'initiative, n'a pas su intensifier ses efforts afin de donner sa juste place à l'ONU dans ce conflit? Encore une fois, la politique canadienne en matière de relations internationales a été à la remorque des États-Unis et des pays de l'Alliance.
C'est sans compter sur une improvisation incompréhensive. En effet, vendredi dernier, le premier ministre affirmait qu'une solution négociée des Nations Unies au conflit du Kosovo n'était pas envisageable à court terme. Or, trois jours plus tard, le même premier ministre souhaite maintenant une participation de l'ONU à la force internationale qui devra être déployée au Kosovo après la guerre.
Le premier ministre vient peut-être de se rappeler que le Canada fait partie du Conseil de sécurité de l'ONU et qu'il était temps d'utiliser cette position influente afin de trouver une solution diplomatique à ce conflit. Après 34 jours au conflit, le Canada vient de se réveiller.
Le Canada a le devoir de tenter par tous les moyens de remettre entre les mains du Conseil de sécurité un projet d'accord de paix reprenant les principes essentiels de Rambouillet. Ou encore, le ministre des Affaires étrangères pourrait profiter de sa visite vendredi en Russie afin de mettre de l'avant le plan de paix allemand.
Comme le dit un vieil adage: «il faut battre le fer pendant qu'il est chaud». Avec la nouvelle ouverture d'esprit qui semble se dessiner au sein du gouvernement yougoslave, où le vice-premier ministre yougoslave, Vuk Draskovic affirmait que son gouvernement était prêt à accepter un plan de paix prévoyant le déploiement d'une force des Nations Unies au Kosovo, le gouvernement canadien va-t-il avoir la présence d'esprit de faire part de cette proposition à l'OTAN de même qu'au Conseil de sécurité des Nations Unies?
Une brèche semble maintenant s'ouvrir sur le plan diplomatique. Alors, le Canada a le devoir dès maintenant d'intensifier ses pourparlers diplomatiques afin de donner la place qui revient à l'ONU dans ce conflit.
De plus, devant l'exode massif des réfugiés dans les différents camps humanitaires, considérant initialement le chaos humanitaire en plus du détournement par les mafias albanaises de stocks de nourriture, la situation difficile sur le plan politique en Macédoine et au Monténégro et une situation logistiquement difficile en Albanie, le gouvernement canadien va-t-il mettre en place une réflexion approfondie sur les rôles, les responsabilités et la façon, à l'avenir, de coordonner le travail des organismes humanitaires et les militaires?
Selon le Haut-Commissariat aux réfugiés, il semble y avoir une confusion des rôles entre l'humanitaire et le militaire avec la gestion par l'armée des camps de réfugiés.
Bien sûr, nous nous devons de lever notre chapeau et de remercier l'aide essentielle des militaires dans les différents camps de réfugiés.
La logistique militaire a été essentielle dans l'érection des différents camps de réfugiés. Mais comme l'a affirmé Jacky Mamou, président de Médecins du monde, ce dernier juge «malsaines» ces forces militaires reconverties dans l'humanitaire.
M. Mamou s'inquiète aussi de l'organisation pratique, et je le cite:
Y aura-t-il un coordonnateur de l'OTAN? Se mettront-ils à la disposition du HCR? Qui a la mission de protéger les réfugiés? Voilà le vrai problème.
Et la commissaire européenne à l'aide humanitaire, Emma Bonino, abonde dans le même sens. Voici ce qu'elle avait à dire:
Les militaires peuvent nous aider dans une situation d'urgence, mais nous avons des tâches différentes, la direction et la coordination des activités de secours humanitaires devant revenir aux organismes humanitaires.
Elle a aussi fait mention d'un «certain choc des cultures» entre les employés d'organisations humanitaires et les soldats de l'OTAN.
Le Canada, en tant que membre du Conseil de sécurité des Nations Unies, va-t-il prendre l'initiative de proposer une large réflexion tant au sein des Nations Unies qu'à l'OTAN sur la distribution des rôles et la coordination respectives des activités de secours humanitaires advenant un autre conflit de cette ampleur? Il faut apprendre de ses erreurs et faire en sorte que cette confusion ne se reproduise plus à l'avenir.
Le Canada pourrait, s'il le voulait, être chef de file en matière d'aide humanitaire. Jusqu'à présent, dans le conflit du Kosovo, le Canada s'est contenté du rôle d'impassible fournisseur de troupes et d'avions.
Il est à espérer que les rencontres du ministre des Affaires étrangères du Canada, jeudi et vendredi de cette semaine, avec le secrétaire général de l'ONU et son homologue russe sauront repositionner le Canada comme acteur crédible sur le plan diplomatique mondial.
[Traduction]
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre de nouveau la parole à ce sujet. Je partage mon temps de parole avec le député de Durham. La dernière fois que j'ai abordé cette question, il était une heure du matin. Cette fois-ci, j'interviens à une heure beaucoup plus civilisée et j'espère tenir des propos plus cohérents.
Peu après mon intervention au cours du débat exploratoire précédent, un journaliste m'a demandé ce que je pensais des débats. Je lui ai répondu qu'à mon avis le Parlement avait tenu un débat parce qu'il tenait absolument à faire comme les autres. Non seulement cette opinion ne correspondait pas à celle de mon parti, mais elle ne correspondait pas non plus à l'opinion des autres députés. Je croyais que le premier ministre avait fait justifier sa position par le Parlement et qu'il avait obtenu son approbation pour engager le Canada dans la guerre.
Toutefois, comme nous vivons en démocratie, je persisterai dans ma dissension afin de faire avancer le débat.
La question essentielle qui se pose est de savoir si la guerre au Kosovo peut être considérée comme une guerre juste. Je signale un article de M. Marcus Gee, paru dans le Globe and Mail, qui pose cinq questions: La cause est-elle juste? Les intentions sont-elles bonnes? Avions-nous l'autorité voulue pour déclarer la guerre? Y a-t-il une chance raisonnable de victoire? Les moyens utilisés sont-ils proportionnels au but visé?
Je suis tout à fait disposé à reconnaître, pour les fins du débat, que la cause est juste. De toute évidence, l'objectif avoué de notre engagement est d'assurer la protection des Albanais kosovars. Cela constitue, en soi, une cause juste.
La deuxième question est: les intentions sont-elles bonnes? De toute évidence, il ne s'agit pas d'une guerre de conquête ou d'une vengeance. Il ne semble pas non plus que nous le fassions dans un but stratégique. La guerre n'apportera aux pays membres de l'OTAN aucun avantage évident, si ce n'est celui de rétablir l'harmonie dans cette région très troublée du sud-est de l'Europe. On pourra même faire valoir que l'OTAN a agi de façon désintéressée en tentant de régler d'anciens conflits, qui existent dans cette région du monde depuis des années et qui sont à l'origine de la Première Guerre mondiale et peut-être aussi de la Seconde Guerre mondiale. Je suis prêt à être aussi généreux en ce qui a trait à la question portant sur la pureté des intentions.
Voici la troisième question: la guerre a-t-elle été déclarée sous l'égide d'une autorité appropriée? La réponse est évidemment négative. Le Canada n'a pas encore déclaré la guerre à l'État souverain qu'est la Yougoslavie et aucun autre pays membre de l'OTAN ne l'a fait d'ailleurs. Nous bombardons un pays souverain sans avoir déclaré officiellement la guerre. C'est la première fois depuis plus de 50 ans que nous sommes engagés dans des actions offensives contre un territoire souverain, et nous l'avons fait sans avoir déclaré la guerre.
On ne s'est pas préoccupé non plus des subtilités que présenterait une résolution des Nations Unies. Je suis bien conscient qu'il puisse être difficile d'obtenir une résolution des Nations Unies par le truchement du Conseil de sécurité ou de l'Assemblée générale. Mais, cela étant dit, il me semble qu'on veut jouer sur les deux tableaux. Pour une raison ou pour une autre, on affirme parfois que l'on entend respecter les vues des Nations Unies et qu'on est tout à fait favorable aux Nations Unies, mais quand les vues qui nous sont transmises par le Conseil de sécurité ne nous plaisent pas, nous agissons à notre guise.
C'est une question très importante pour le Canada, notamment parce que nous sommes d'ardents défenseurs des Nations Unies. Contrairement à notre allié américain qui considère les Nations Unies comme un obstacle gênant, nous nous faisons les champions des Nations Unies. Nous avons payé notre écot à temps. Nous avons toujours approuvé les initiatives de maintien de la paix. Nous formulons nos vues par le truchement des Nations Unies.
Or, en ne tenant pas compte de l'importance d'obtenir une résolution des Nations Unies, nous ne tenons pas compte non plus du droit international. Cela aura, pour nous et pour d'autres pays, des répercussions que nous n'avons pas encore prises en considération. Cela affaiblit également notre engagement envers d'autres institutions internationales comme le Tribunal pénal international pour lequel nous nous sommes battus si ardemment. Il semble que nous acceptions d'y avoir recours lorsque c'est profitable pour nous, mais dans le cas contraire, nous l'ignorons.
La question suivante était: Y a-t-il une chance raisonnable de victoire? Je suppose qu'on aurait pu nous convaincre que les premiers jours de bombardement feraient plier M. Milosevic. C'était très mal connaître la détermination des Yougoslaves, la force militaire de M. Milosevic ou la haine interethnique qui règne dans ce pays depuis des centaines d'années. Il se peut également qu'on nous ait servi des slogans qui changent avec le temps.
Les frappes aériennes ne régleront rien. Nous avons pris le contrôle des zones aériennes. En fait, nous avons également le contrôle sur la mer, mais ce qui compte vraiment, c'est ce qui se passe au sol. Il est intéressant de noter qu'avant la tenue du sommet de Washington, on discutait de la pertinence d'envoyer des troupes terrestres. Après le sommet, le ton a clairement changé. On parle maintenant d'imposer un embargo et d'occuper l'espace aérien d'autres pays.
On peut certainement dire que l'embargo imposé en Irak n'a pas été des plus utiles. Ça n'a pas fait fléchir l'Irak. En ce qui a trait à la possibilité d'occuper l'espace aérien et le territoire d'autres pays, et bien nous y avons déjà recours de toute façon, qu'ils soient d'accord ou pas.
La dernière question demandait si les moyens sont proportionnés aux buts visés. Ceux qui ont pris la parole à ce sujet ont parlé de certains des plus grands oxymorons du vingtième siècle, du genre «bombardements pour la paix», «partisans de la guerre pour des raisons humanitaires» ou «tuer pour sauver des vies». La seule lecture de ces expressions suffit pour en souligner l'absurdité.
Voyons le nombre de victimes jusqu'à maintenant. Avant le début des frappes aériennes, on dénombrait environ 2 000 morts dans les deux camps adverses. Les Albanais avaient certainement un nombre de victimes disproportionné, mais les Serbes comptaient aussi des victimes. Après un mois de bombardements, le nombre de victimes est sans doute beaucoup plus élevé que 2 000. Il doit y avoir au moins 2 000 morts chez les seuls Serbes et les Albanais comptent certainement beaucoup plus de 2 000 victimes. Sur les 1,8 million d'Albanais du Kosovo, 1,5 million ont été déplacés.
Plus la guerre se prolongera, plus le nombre des victimes augmentera. Combien de personnes devront encore mourir avant que cette folie ne prenne fin? Combien de victimes faudra-t-il dénombrer avant que le bon sens ne prévale?
L'orateur qui m'a précédé et moi-même avons assisté au déjeuner-prière national la semaine dernière. La conférencière invitée était Mme Kim Phuc. Mme Phuc figure sur une photo classique de la guerre du Viêtnam. Cette photo montre une petite fille de neuf ans qui court vers le photographe en fuyant les bombes au napalm, les vêtements et la peau brûlés.
Mme Phuc a raconté son histoire. Tout le monde avait la larme à l'oeil en l'écoutant raconter les souffrances qu'elle a endurées et la vie qu'elle a connue depuis.
Cette femme est, à certains égards, l'incarnation même des victimes du XXe siècle, de l'ère de la guerre moderne. Mme Phuc, qui est maintenant citoyenne canadienne, vit à Ajax, une communauté située tout juste à l'est de ma circonscription.
J'ai présente à l'esprit, en ce moment même, l'image de Kim Phuc. Avec cette image à l'esprit, je ne parviens pas à trouver une justification à cette guerre.
Je suis forcé de me demander si cette guerre est une guerre juste et si elle est fondée sur de bonnes intentions. A-t-elle été entreprise en vertu d'une autorité suffisante? A-t-elle des chances raisonnables de réussir? Les moyens utilisés sont-ils proportionnés à la situation?
Les députés peuvent-ils répondre à ces cinq questions? Dans l'affirmative, je présume que la guerre doit se poursuivre. Si toutefois nous hésitons à répondre, je crois que nous devrons penser à toutes les Kim Phuc du monde entier.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt ce qu'a dit mon collègue cet après-midi. Il a manifestement mis beaucoup de réflexion, d'énergie et d'efforts dans son intervention sur une question de cette importance.
La position de non-compromis de l'OTAN à l'égard du conflit actuel dans les Balkans, dont il a été question durant la période des questions aujourd'hui, me rappelle la capitulation sans condition, une autre ligne dure adoptée par les alliés durant la Seconde Guerre mondiale.
Ayant étudié l'histoire, autant je crois qu'il était tout à fait juste durant la Seconde Guerre mondiale d'exiger la capitulation sans condition des forces de l'Axe, autant je trouve que la ligne dure adoptée par l'OTAN dans le conflit actuel ne contribue guère à la négociation d'un règlement pacifique.
Le député d'en face pourrait-il nous dire ce qu'il pense de la possibilité que l'OTAN abandonne la ligne dure dans l'espoir d'arriver à un règlement pacifique dans un avenir proche?
M. John McKay: Monsieur le Président, je pense que nous partageons tous les mêmes inquiétudes au sujet de ce conflit pour lequel il n'y pas de solution facile.
Je pensais, à la fin du week-end dernier, qu'à certains égards, l'OTAN était revenue quelque peu sur sa position de non-compromis et allait mettre l'accent sur les initiatives diplomatiques et l'engagement de la Russie. J'étais un peu réconforté.
Cependant, la situation ne s'améliore pas. La stratégie militaire est manifestement d'encercler la Yougoslavie, non pas seulement de la bombarder, mais d'imposer un embargo. Cela m'a un peu réconforté.
Je ne suis pas là-bas. Je ne peux pas savoir ce qui se passe vraiment, mais je suis encouragé par la visite que notre ministre des Affaires étrangères doit faire en Russie cette semaine pour y rencontrer les Russes qui, selon pas mal de gens, sont la clef du règlement de ce conflit.
M. Jim Karygiannis (Scarborough—Agincourt, Lib.): Monsieur le Président, je veux lire quelque chose à mon collègue et lui demander ce qu'il en pense. J'ai reçu aujourd'hui un message électronique adressé à la communauté scientifique. Il se lit comme suit:
Chers collègues,
Je dois vous informer qu'il est maintenant réaliste de craindre le bombardement de l'institut des sciences nucléaires VINCA, à Belgrade. Comme nos attitudes et notre compréhension de la situation sont différentes de celles des politiciens, je préviens la communauté scientifique du désastre qui se produirait si les installations du VINCA—qui compte deux réacteurs nucléaires, un accélérateur et un système de refroidissement à l'ammoniaque, un système de production d'isotopes, etc.—étaient frappées par les tirs.
Je suis sûr que vous prendrez cette information au sérieux. Je vous exhorte à faire tout ce que vous pouvez pour empêcher que cela se produise.
Espérant que nous pourrons bientôt reprendre notre collaboration, je vous assure de toute ma considération,
Yvanka Bozovic,
VINCA Institute of Nuclear Sciences
Il s'agit d'installations nucléaires situées dans Belgrade. Mon collègue, dont la circonscription est très près de la mienne et qui partage beaucoup de mes préoccupations, voudrait-il commenter cette lettre?
M. John McKay: Monsieur le Président, l'essentiel de la proposition de tous les pays de l'OTAN, c'est qu'il s'agit d'une intervention humanitaire dans un pays souverain pour empêcher qu'une catastrophe fondée sur des motifs ethniques, ou un génocide, ne se produise. C'est le nouvel ordre mondial.
L'envers de la médaille, avec le nouvel ordre mondial, c'est que la guerre moderne peut frapper des populations et créer des désastres environnementaux dont les gens frappés par la Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale, la guerre de Corée et même la guerre du Vietnam n'avaient qu'une bien vague idée. Nous avons la capacité d'engendrer une situation qui durerait littéralement des milliers d'années en Yougoslavie.
Mon ami signale le risque qu'une bombe, si elle tombait sur ces installations, soit la cause d'une catastrophe qui s'étendrait dans toute la région et durerait des milliers d'années.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je suis toujours ravi de prendre la parole après mon collègue, le député de Scarborough-Est. Il a parlé de la réunion de la semaine dernière, je crois. Kim Phuc était présente. Je suis d'accord avec lui sur les sentiments qu'ont éprouvés les gens qui l'ont écoutée.
Pour vous rafraîchir la mémoire, c'est elle la petite fille qui se sauvait toute nue après avoir été brûlée au napalm au cours de la Guerre du Vietnam; c'est une photo bien connue. En écoutant son histoire, nous savions tous que nous étions directement engagés dans une campagne voulant que l'on jette des bombes et d'autre matériel de guerre dans le coin de la Serbie.
Je ne crois pas que nous puissions jamais oublier les réalités de la guerre. C'est bien beau de pouvoir s'asseoir devant son téléviseur et de considérer cela comme une démarche stratégique très propre. Notre téléviseur ne nous montre pas toute l'horreur et toute la souffrance des Kosovars ou des Serbes, peu importe le camp, ou des autres qui vivent cette tragédie.
C'est vraiment à contrecoeur que nous traitons toute cette affaire d'agression, la question de savoir si nous sommes agressifs ou si nous essayons d'empêcher qu'un groupe de personnes soit agressé davantage par les siens.
Je reviens de Bruxelles où j'ai participé à la conférence de l'union interparlementaire. Il s'agit d'un groupe de parlementaires venant de 130 pays du monde qui se réunit deux fois par année. Là-bas, la discussion a surtout porté sur le Kosovo.
Cela a été une grande occasion pour moi. Je sais que le Parti réformiste n'aime pas participer à ces choses qu'il considère comme un gaspillage de temps et d'argent, mais j'y ai vu une excellente occasion de m'entretenir avec des parlementaires de cette région du monde. Les Yougoslaves étaient là. La fédération russe était représentée, tout comme la Bulgarie et la plupart des pays voisins de l'ancienne Yougoslavie.
Il est intéressant de s'entretenir avec ces gens-là des conquêtes de l'Histoire. J'en avais déjà eu un avant-goût dans un musée des beaux-arts. Je suis entré voir les différents tableaux. Il y en avait un, très tragique, qui montrait quelqu'un tuant quelqu'un d'autre à coups de couteau.
Au bas de la peinture, on pouvait lire la mention «Guerre au Kosovo, 1825». Cela en dit long sur ce conflit qui semble durer depuis toujours. Il a commencé, je crois, lorsque l'empire ottoman a fait une percée en Europe, s'est ensuite retiré progressivement, puis s'est effondré. Tout cela a engendré un mélange ethnique en Europe, surtout dans la région des Balkans. Les Kosovars sont essentiellement musulmans, tandis que les Serbes sont chrétiens. Cela semble être au coeur du conflit.
Certains Canadiens peuvent trouver cela absurde. Ici, nous tentons de prouver que nous pouvons tous vivre ensemble, malgré nos différences culturelles et nos croyances religieuses. Cela ne semble pourtant pas être le cas dans cette région du monde.
Un autre facteur important dans ce conflit est toute la question de la souveraineté, comme on l'a mentionné à quelques occasions aujourd'hui et dans le cadre d'autres débats. Jusqu'où s'étend la souveraineté? Selon l'orateur précédent, nous n'avons pas attaqué de pays souverain depuis la Seconde Guerre mondiale. C'est probablement vrai.
De nos jours, la population mondiale change au point où elle reconnaît l'existence des droits de la personne. Aux yeux de certains fondamentalistes avoués, les droits de la personne l'emportent sur les droits des pays souverains et sur la façon dont les pays souverains traitent leur population.
Une juriste canadienne est à la tête de la Cour internationale de justice. Il est malheureux que la Cour internationale ne soit pas aussi puissante qu'elle devrait l'être. Nous devons soutenir bien plus les actions de la Cour internationale de justice. Si des gens comme Slobodan Milosevic croyaient être eux-mêmes des victimes de cette guerre et craignaient que les bombes ne tombent sur eux ou, ce qui est encore plus important, s'ils pensaient qu'il existait une cour supérieure, une cour internationale qui traduirait Slobodan Milosevic en justice pour quelques-unes de ses atrocités, ce conflit aurait peut-être pu être tué dans l'oeuf avant qu'il ne devienne totalement hors de contrôle.
Nous et nos partenaires internationaux devons agir plus judicieusement pour apporter une forme de justice dans le monde entier. Nous devons nuancer nos opinions sur la souveraineté au point de ne pas tolérer sa consécration ou le non-respect des droits fondamentaux de la personne dans lesquels nous croyons.
Il est étrange que les pays qui sont les critiques les plus virulents des actions de l'OTAN soient immanquablement aussi ceux qui ont du mal à respecter les droits de la personne. Étrangement, les forces de l'OTAN se sont rassemblées et ont dit essentiellement qu'il était temps d'imposer des limites aux mesures que prend un pays pour procéder à une purification ethnique ou commettre des actes répréhensibles, afin de montrer que nous ne sommes plus disposés à tolérer cela.
Il est regrettable que ces limites aient été dépassées dans le cas qui nous occupe. Il convient que nous agissions en conséquence. C'est regrettable, car, à mon avis, personne ne sort victorieux d'une guerre. Personne ne sort victorieux en détruisant des biens et en consacrant des montants importants à du matériel militaire et d'autres ressources. Tout le monde en sort perdant. Il est déplorable que la communauté internationale ait laissé la situation se détériorer au point où nous devons prendre ces mesures.
Pour ce qui est des bonnes intentions de mes collègues du NPD qui font valoir la nécessité d'une solution diplomatique, je pense qu'il ne fait aucun doute que le Canada, ses partenaires de l'OTAN et d'autres aux Nations Unies ont tenté de parvenir à une solution diplomatique de ce conflit en s'adressant à l'ex-Yougoslavie, de la Bosnie à la Croatie, et ainsi de suite. Cela n'était pas écrit, semble-t-il. Je ne sais pas pourquoi nous semblons être incapables de réfréner le désir de M. Milosevic de procéder à un nettoyage ethnique de ce pays. Je sais que sa règle est «la Serbie aux Serbes» et le seul moyen d'y parvenir est d'éliminer les éléments de sa population qui compromettent cette homogénéité.
C'est pourquoi nous ne pouvons pas laisser M. Milosevic gagner. Le cinquième point est celui qui inquiète tout le monde; il appelle au maintien d'une certaine force lorsque le conflit sera résolu. Il est clair que ces gens devront être réinstallés dans leur pays. Cela va être très coûteux, car leurs maisons ont été détruites. Leurs entreprises n'existent plus. Cela va nécessiter des capitaux importants. Il ne va pas simplement s'agir de dépenses pour des forces militaires ou de maintien de la paix en ex-Yougolavie. Des capitaux vont également être nécessaires pour reconstruire les entreprises, etc. Cela doit être fait, car une question humaine fondamentale est en jeu ici. Nous ne pouvons pas laisser faire le nettoyage ethnique.
Lorsque j'étais en Europe de l'Est, j'ai été surpris lorsque j'ai parlé aux gens, en Pologne, par exemple. Avant la guerre, la société polonaise était multiethnique. Aujourd'hui, elle est homogène. La politique d'Adolf Hitler a été couronnée de succès en Pologne. Il y a maintenant un groupe ethnique homogène là-bas. Nous ne devons pas laisser cela réussir aux yeux du monde.
De plus, c'est une très bonne idée de faire participer les Russes. À la conférence à laquelle j'ai pris part, les Russes ont proposé une motion qui condamnait l'agression par le Canada et les forces de l'OTAN. Monsieur le Président, vous seriez surpris d'apprendre que même s'ils ne sont pas en faveur du conflit militaire actuel, aucun des pays limitrophes de la Yougoslavie n'a appuyé la motion, exception faite de la Russie.
Il est regrettable que nous ayons dû en arriver là. Nous essayons de trouver une solution diplomatique au problème. Les Russes ne sont pas une force aussi importante que certains voudraient le croire. Il convient de rappeler que la Russie est un État qui déclarera probablement faillite cette année. Elle n'a pas remboursé une part importante de sa dette publique, et je me demande dans quelle mesure elle pourrait jouer un rôle déterminant dans le règlement de ce conflit. Cependant, il est toujours bon d'avoir des amis dans son camp.
Le Canada n'a jamais dit qu'il n'y a qu'une force de l'OTAN qui peut être présente dans la région, mais il est certain qu'il doit y avoir une force. Elle doit être armée pour éviter que le conflit recommence et pour permettre une solution de maintien de la paix à long terme.
Il faudra au moins une génération pour venir à bout de ces conflits. Les compétences de nos forces armées au chapitre du maintien de la paix seront très demandées dans cette partie du monde. Je suis heureux de faire partie d'un pays et d'un gouvernement qui appuient cet effort humanitaire. J'espère simplement qu'il sera couronné de succès et qu'il prendra fin sous peu.
M. Jim Karygiannis (Scarborough—Agincourt, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt le député parler de l'Empire ottoman et du nettoyage ethnique que l'on observe aujourd'hui, ainsi que du nettoyage ethnique survenu au fil des ans.
Nul doute qu'il conviendra avec moi que le nettoyage ethnique que l'on observe aujourd'hui a pour antécédent celui qui s'opère depuis 700 ou 800 ans, soit depuis la formation de l'Empire ottoman et le réétablissement à tour de rôle des chrétiens et des musulmans.
Le député conviendra avec moi que le nettoyage ethnique auquel nous assistons aujourd'hui a pour origine le démembrement de l'Empire ottoman au début du siècle. Il y a eu du nettoyage ethnique à ce moment-là; pensons au génocide des Arméniens, des habitants de la région de la mer Noire, etc.
Le député appuiera-t-il une demande de consentement unanime à une déclaration reconnaissant que les Arméniens et les habitants de la région de la mer Noire ont également été victimes de nettoyage ethnique entre 1914 et 1922?
M. Alex Shepherd: Monsieur le Président, je n'entrerai pas dans les détails, mais le problème du nettoyage ethnique, qu'il s'agisse de guerres saintes ou d'autre chose, existe depuis que l'on écrit des livres d'histoire. Cependant, nous devons maintenant aller au-delà de cela.
Nous sommes à l'aube du XXIe siècle. Nous avons sûrement atteint un degré de civilisation jugeant ridicule le nettoyage ethnique. Cela doit cesser et nous ne permettrons pas à des gens comme Slobodan Milosevic de réussir. Il devra apprendre à vivre avec la diversité ethnique, tout comme nous le faisons tous les jours à la Chambre et dans tout le pays. Nous devons en faire la promotion.
Nous devons voir au réétablissement des Kosovars dans leur patrie. En ce qui me concerne, nous devons les réinstaller tous, jusqu'au dernier. Nous devons en faire un exemple pour le monde entier et dire que pareille chose n'arrivera plus.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir la possibilité de participer au débat sur la guerre au Kosovo. Malheureusement, il m'a été impossible de prendre part au débat exploratoire du 12 avril dernier parce que le temps réservé était insuffisant pour permettre à tous les députés intéressés d'intervenir.
On pourrait se demander pourquoi il faut tenir un nouveau débat sur le sujet. Quel est l'objectif du débat d'aujourd'hui? Je ne peux que dire à tous ceux qui s'interrogent que la question préoccupe les Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Il s'agit d'une question qui mérite toute notre attention. Nous devons nous intéresser à cette question et y consacrer temps et énergie.
Nous discutons aujourd'hui de la motion parce que nous savons qu'il nous faut trouver une solution pacifique, diplomatique et politique à une crise qui dure depuis beaucoup trop longtemps. Cette guerre en est aujourd'hui à sa 35e journée. Il y a maintenant 35 jours que l'OTAN a commencé des frappes aériennes en Yougoslavie. Il y a maintenant 35 jours que nous voyons des images de bombardement, de mort, de destruction chaque fois que nous allumons le téléviseur ou que nous ouvrons un journal.
Il n'y a pas que nous, les députés, qui voyons ces images; tous les Canadiens les voient et posent les mêmes questions: Pourquoi? N'y avait-il pas d'autres moyens? Combien de temps cela va-t-il durer? Jusqu'où cela ira-t-il? Que signifie tout cela?
Nous avons été confrontés à cette situation peu après le début des bombardements, alors que nous savions qu'il n'y aurait pas de règlement rapide et que nous ne verrions pas bientôt la fin de cette crise, contrairement à ce que le gouvernement nous promettait ou, du moins, nous donnait à entendre. Peu après, nous avons tous commencé à poser les mêmes questions. Nous devons rendre des comptes aux électeurs de nos circonscriptions et à tous les Canadiens.
À ce moment, beaucoup de Canadiens ont commencé à se demander si nous n'étions pas devant un nouveau Viêt-nam. Les médias ont commencé à évoquer la possibilité d'une Troisième Guerre mondiale. Au départ, je me suis dit que je souffrais de paranoïa et que ce n'était pas possible. Ce ne pouvait être la réalité. Au fil des jours, cependant, cette évocation a fini par dominer dans les conversations au pays.
Nous savons, et je suis convaincue que tous les députés à la Chambre comprennent, que nous devons absolument continuer à chercher une solution pacifique et diplomatique à cette crise.
Nous sommes tous forcés, d'une façon ou d'une autre, de répondre aux questions de jeunes enfants qui voient des images à la télévision et qui se demandent à quoi elles correspondent. Il est de plus en plus difficile de répondre à ces questions et de donner aux jeunes enfants l'assurance qu'ils pourront vivre dans un monde en paix.
Bon nombre ont parlé aujourd'hui de ce qu'ils ont entendu et ressenti au cours des derniers jours et des dernières semaines. Certains ont parlé des images montrant des centaines de milliers de réfugiés qui vivent dans des conditions sordides sans espoir de reintégrer leur patrie.
D'autres ont évoqué les images de gens abandonnés au Kosovo, privés de nourriture et sans espoir. On nous a montré et expliqué les bombardements et leurs effets dévastateurs sur les plans de l'économie, de l'environnement et de la vie même des gens. Ces nouvelles reviennent continuellement et nous essayons de les digérer et de déterminer ce que nous pouvons faire.
Le député de Durham a dit que nous avons essayé des solutions pacifiques, qu'il n'y a pas de solutions pacifiques et qu'il faut vivre avec la situation qui existe. Nous sommes ici pour dire, et nous avons d'ailleurs dit clairement tous les jours depuis que le Parlement a repris ses travaux le 12 avril, qu'il doit exister une solution pacifique, politique et diplomatique.
Nous vu quelques signes et nous avons appris aujourd'hui qu'il y avait des progrès. Le premier ministre a annoncé aujourd'hui que le Canada enverrait 800 soldats pour faire partie d'une mission de maintien de la paix dans la région.
Monsieur le Président, avant que je ne continue, je tiens à signaler tout de suite que je partagerai mon temps de parole avec le député de Sydney—Victoria.
Aujourd'hui, nous avons entendu des nouvelles quelque peu encourageantes. Cependant, en même temps que nous apprenions que le Canada allait participer à une force de maintien de la paix dans la région, nous apprenions aussi que le gouvernement était plus déterminé que jamais à participer à des activités militaires élargies et intensifiées dans cette même région.
Nous avons entendu le premier ministre dire aujourd'hui de façon non équivoque que l'embargo pétrolier aurait lieu. Il a dit cela malgré la possibilité d'une escalade du conflit à cause de la situation impliquant la Russie. Nous n'avons entendu ni le ministre de la Défense nationale ni aucun autre ministériel dire que le gouvernement n'enverrait pas d'autres CF-18 dans la région.
Pendant que le gouvernement parle d'envoyer des troupes de maintien de la paix et de chercher des solutions diplomatiques, rien ne semble indiquer qu'il fait preuve du genre de leadership nécessaire sur la scène diplomatique. La motion d'aujourd'hui dit qu'il faut cesser d'intensifier les efforts militaires et commencer à intensifier les efforts diplomatiques.
Il doit y avoir une solution de rechange. Trente-cinq jours de mort et de destruction et la possibilité que l'agression s'étendent et que cette guerre se poursuive encore pendant longtemps suffisent certainement à nous faire dire à tous qu'il faut trouver une solution diplomatique pacifique. Le gouvernement doit continuer de rechercher cette solution pacifique.
Dès le 31 mars, nous avons dit que le gouvernement devait intensifier ses efforts pour demander la suspension des opérations militaires et en même temps exhorter Milosevic à mettre un terme aux atrocités sur le terrain. Nous sommes intervenus à la Chambre pour inviter le gouvernement à se lever et à manifester un esprit de leadership en faveur de l'unité pour la paix. Aujourd'hui à la Chambre nous invitons le gouvernement à faire preuve de leadership à un moment critique d'un conflit qui s'éternise.
Je tiens à faire état d'une inquiétude qu'entretiennent mes électeurs et les Canadiens en général concernant l'avenir. Pendant que nous nous attaquons à cette situation, pendant que nous cherchons des solutions diplomatiques pacifiques à la crise au Kosovo et que nous exhortons les pays à collaborer pour trouver ces solutions, nous savons aussi qu'il n'est pas trop tôt pour penser à l'avenir et pour faire en sorte que de telles situations ne se reproduisent plus jamais.
Je voudrais citer Marcus Gee, comme le député libéral de Scarborough-Est l'a fait. Cela s'inscrit dans le contexte du double rôle que les Nations Unies doivent jouer et de l'obligation que cela nous impose à nous tous qui allons vers l'avenir.
Ces deux rôles traduisent l'union entre l'ancien principe de l'intégrité des pays et celui de l'intégrité des individus. À partir de cette idée, on voit que l'ONU est chargée de promouvoir et de favoriser le respect des droits de l'homme et les libertés fondamentales pour tous. C'est dans l'optique de ce double objectif à atteindre que nous devons tirer des leçons de la crise au Kosovo.
En notre qualité de Parlement, pays et membre de la communauté internationale, nous devons chercher des solutions diplomatiques de nature pacifique qui garantiront notre capacité à mettre fin aux atrocités perpétrées contre des êtres humains partout sur Terre.
Tous les jours, je dois répondre à des électeurs qui me demandent: En tant que pays, avons-nous deux poids, deux mesures? Est-ce que l'OTAN joue sur deux tableaux? En tant que pays membre de la communauté internationale, comment avons-nous réagi à la situation des Kurdes en Turquie? Comment réagissons-nous à la situation au Timor oriental? Qu'avons-nous fait au Guatemala? Ces questions nous sont constamment posées.
Nous devons absolument mettre un terme à la méthode des deux poids, deux mesures et consacrer toute notre énergie et nos ressources à chercher un mécanisme international qui nous permette de nous acquitter de notre double responsabilité à l'égard de l'intégrité des pays et de celle des individus.
M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole après ma collègue, qui a livré un judicieux discours au sujet du débat délicat, important, et à certains égards sombre, que nous devons tenir aujourd'hui à la Chambre.
Il est important de comprendre les faits passés et de les analyser. Il nous arrive parfois, à l'occasion de débats semblables et en des périodes aussi cruciales, d'oublier l'origine de la situation de l'heure.
Il y a un mois à la Chambre, le gouvernement avait reconnu, en tant que partenaire de l'OTAN, que des atrocités étaient commises ou étaient sur le point d'être commises au Kosovo. Après l'échec des négociations de paix en France, le gouvernement estimait avoir l'obligation, en tant que partenaire de l'OTAN, de faire ce qu'il était possible de faire pour protéger les Albanais de Yougoslavie.
Il y avait de plus en plus de preuves que la situation de ces gens devenait dangereuse. On connaît l'histoire des Balkans, dont la situation politique n'a toujours pas été réglée et où, comme dans de nombreux autres pays, subsistent tragiquement des rancunes et des haines anciennes.
C'est pourquoi le gouvernement, avec l'appui de tous les partis politiques, a engagé le Canada, en tant que pays membre de l'OTAN, dans une campagne de bombardement. Sans vouloir critiquer qui que ce soit, je ne crois pas que nous avions prévu, il y a un mois, que nous bombarderions toujours la Serbie aujourd'hui. Je ne pense pas que les partis à la Chambre qui ont appuyé le gouvernement dans sa résolution croyaient que, 30 jours plus tard, nous lâcherions toujours des bombes sur ces villes.
Personne ne pensait que l'OTAN étendrait ses bombardements au-delà des cibles que nous estimions être, et je crois que tout le monde était d'accord, des cibles militaires. Personne ne croyait que 31 jours après le début des bombardements, au lieu de bombarder des objectifs militaires, nous nous en prendrions à la résidence du président, à tort ou à raison. Personne ne croyait que nous bombarderions des stations de télévision. Personne ne croyait que nous allions bombarder tous les ponts qui traversent le Danube, ou encore que nous sèmerions la destruction comme nous le faisons depuis 31 jours. Sans être plus critique qu'il ne le faut, je crois que personne dans les pays membres de l'OTAN, ni personne à la Chambre n'avait prévu cette immense tragédie qui allait conduire à l'exode massif d'Albanais et à la tuerie qui allait frapper leurs communautés.
La preuve, c'est le simple fait que la communauté internationale n'était pas prête à aider les réfugiés. Il est tout à l'honneur du commissaire aux réfugiés de l'ONU que nous ayons pu depuis limiter quelque peu l'ampleur du drame.
Pendant la première semaine, dans tout le Canada et dans le monde entier, nous nous demandions ce que nous allions faire des réfugiés qui franchissaient la frontière. Les faits donnent à penser qu'aucun membre de l'OTAN, et pas plus le Canada, et aucun député ne s'attendaient à une campagne aussi longue.
Avec le temps, les choses ont commencé à bouger et les positions à évoluer. Je suis fier de dire que, lorsque le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a énoncé les cinq conditions susceptibles, selon lui, de ramener les parties à la table de négociation, mon parti a exhorté le gouvernement à respecter la position que le Canada a toujours adoptée comme artisan de la paix, comme apôtre de la paix et comme diplomate.
Nous avons exhorté le gouvernement à aller plus loin et à évoquer la possibilité qu'on laisse tomber certaines exigences ou qu'on les tempère pour ramener Milosevic à la table; qu'on dise à Milosevic d'arrêter les atrocités sur le terrain et de négocier, moyennant quoi l'OTAN interromprait les bombardements. Nous avons invité le gouvernement à agir dans ce sens tout en maintenant notre appui, car il est important que notre pays souverain puisse agir avec le soutien de la Chambre, comme le premier ministre l'a signalé aujourd'hui.
Il faut toutefois comparer les changements observés sur la scène internationale au ton qui est parfois utilisé à la Chambre, et qui me rend mal à l'aise. Parfois lorsque je nous écoute parler, j'ai l'impression que nous sommes des membres de la grande famille de l'homme qui disent avoir des problèmes avec un de leurs frères. Aujourd'hui, le débat prend un ton paternaliste alors que nous affirmons que nous allons corriger la situation au Kosovo, faire appliquer nos règles et imposer nos volontés et nos cinq conditions. Cela ne correspond pas au rôle qu'a joué notre pays par le passé. Nous avons toujours agi comme intermédiaires entre les populations et les pays affichant ce genre de comportement.
Il faut nous arrêter régulièrement et examiner l'historique des débats que nous tenons à la Chambre, pour déterminer si nous sommes sur la bonne voie, sur celle qui nous permettra d'atteindre notre objectif original, qui était de réagir à la crise humanitaire au Kosovo, que ce soit en collaborant à la création d'un État kosovar indépendant ou à l'envoi de casques bleus comme intermédiaires. Notre but ne consistait pas à faire plier Milosevic ni à ruiner l'économie serbe. Nous voulions que les Kosovars d'origine albanaise puissent vivre en paix dans leur pays.
C'est avec rigueur et détermination que notre parti a, tous les jours, respecté ses obligations aux termes de la Constitution du Canada et ses responsabilités devant le Parlement et proposé au gouvernement des solutions de rechange. Pendant la période des questions et les débats, des débats qui ont duré toute la nuit à la Chambre, nous avons étudié à fond les autres solutions de rechange que le gouvernement pourrait envisager. L'une de ces solutions consiste à amener les Nations Unies à jouer un rôle important dans les négociations de paix visant à résoudre cette crise internationale.
Le rôle de l'OTAN n'est pas et n'a jamais été de se substituer aux Nations Unies à titre d'organe directeur international. Il faut que cela soit bien clair. Cela étant dit, l'OTAN devait intervenir en l'occurrence parce que l'ONU était en quelque sorte paralysée et que nous ne pouvions fermer les yeux sur la situation ni refuser d'intervenir pour des raisons administratives. Lorsqu'il est question de forces de maintien de la paix, une chose doit toutefois être claire. Il faut bien comprendre qu'au chapitre des négociations, les Nations Unies, et non pas l'OTAN, sont la force internationale que tous les pays respectent. Notre parti a insisté et a encouragé le ministre des Affaires étrangères et le premier ministre à transmettre ce message à la table de l'OTAN.
Je suis heureux de dire que les pressions que nous avons exercées en ce sens ont produit des résultats intéressants le week-end dernier. Le Canada a été choisi au sein de l'OTAN, et je pense que nous devrions en être fiers, pour entamer des pourparlers avec les Russes qui jouent un rôle capital dans ce débat.
Le Canada joue en ce moment sur deux tableaux. Nous participons entièrement aux opérations de l'OTAN, mais en même temps, nous recherchons activement une solution diplomatique.
Nous avons déposé cette motion aujourd'hui, parce que nous avons à l'heure actuelle l'impression de souffrir d'un genre de dédoublement de la personnalité. Le Canada a une sorte de potion magique que nous buvons. D'un côté nous disons à la Russie que nous sommes le pays qui peut aider à apporter la paix, mais de l'autre, nous mettons sur pied des conditions qui peuvent justement mettre un frein à ce progrès en disant que nous sommes disposés à appuyer un embargo auquel la Russie s'oppose farouchement. Nous disons que nous voulons ramener la paix en Serbie, mais en même temps, nous disons que nous sommes prêts à envoyer plus d'avions si nécessaire, pour continuer de bombarder les gens que nous aimerions voir à la table de négociation.
Pendant la minute qui me reste, j'aimerais revoir la résolution que mon parti a fièrement déposée à la Chambre des communes, qui demande au gouvernement de redoubler ses efforts pour trouver une solution diplomatique au problème actuel. C'est notre façon de voir les choses.
Il y a des pays qui excellent à la guerre. Nous n'en faisons pas partie. Il y a d'autres pays qui sont plus efficaces pour faire la paix. Nous faisons plutôt partie de ceux-là.
Nous exhortons le gouvernement à redoubler ses efforts en vue de trouver une solution diplomatique à la crise du Kosovo grâce à la participation de la Russie, que tous reconnaissent comme un intervenant clef dans ce conflit, et des Nations Unies à titre d'organisme mondial. En tant que signataires de la Convention sur les droits de l'homme, nous avons un rôle à jouer dans tout cela. Nous ne pouvons certes pas ignorer l'organisme sur lequel nous comptons pour l'appliquer.
Nous demandons au gouvernement de s'assurer de la participation de la Russie et des Nations Unies pour exhorter l'OTAN à ne pas imposer un blocus naval ou prendre toute autre mesure qui ne servirait qu'à empirer le conflit et à empêcher un règlement diplomatique. C'est là l'objet de notre motion. C'est le rôle que nous devons jouer en tant que pays.
M. Jim Karygiannis (Scarborough—Agincourt, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt mon collègue du Nouveau Parti démocratique. Il a fait des remarques intéressantes.
Je me demande simplement s'il pourrait éclaircir un point pour moi. Demande-t-il que l'OTAN mette fin aux bombardements ou demande-t-il que l'OTAN poursuive les bombardements? La motion que son parti a présentée aujourd'hui appuie-t-elle la cessation des bombardements en Yougoslavie?
M. Peter Mancini: Monsieur le Président, à ce moment-ci, nous continuons d'appuyer le gouvernement relativement à la phase initiale de l'opération, et nous comprenons que cela comprend des bombardements.
Toutefois, nous sommes extrêmement hésitants à appuyer toute accélération de nos activités militaires. Je crois que le député sait ce que je veux dire. C'est pourquoi nous l'avons précisé dans la motion. Nous avons d'importantes réserves pour ce qui est de l'organisation d'un blocus naval qui ne peut qu'intensifier les hostilités entre les gens même que nous essayons d'amener à la table de négociation.
Nous avons aussi des préoccupations réelles à l'égard de l'envoi d'autres soldats canadiens. Le premier ministre a parlé aujourd'hui de 800 soldats qui sont prêts à partir au Kosovo. Nous supposons que c'est pour participer à une mission de maintien de la paix, mais c'est quelque chose qui nous préoccupe beaucoup.
Je sais que le ministre des Affaires étrangères, le premier ministre et le député qui a posé la question ne tiennent pas pour acquis l'appui des autres partis à la Chambre, mais cet appui dépend toujours de la poursuite assidue des efforts diplomatiques. Les actions qui ne peuvent qu'intensifier les hostilités n'aideront pas à amener la solution diplomatique que le Canada veut désespérément.
À ce moment-ci, nous continuons d'appuyer le gouvernement et notre engagement initial envers l'OTAN. Nous comprenons que cela veut dire des bombardements dans l'immédiat, mais cela ne veut pas dire l'envoi d'autres avions ni l'organisation d'un blocus qui ne fera qu'intensifier les hostilités.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Mississauga-Ouest.
Plus tôt au cours du débat, le député de Regina—Qu'Appelle a raconté sa visite au Biafra durant la guerre qui a sévi dans ce pays à la fin des années 60. Il a parlé du spectacle insoutenable de gens mourant de faim et souffrant au Biafra, bref des horreurs de la guerre.
Il y a une autre facette à cette histoire parce qu'au moment du conflit au Biafra, j'étais en Grande-Bretagne, à l'Université Leeds, où je faisais des travaux de recherche de troisième cycle. J'étais ami avec deux autres jeunes de mon âge, le milieu de la vingtaine. L'un d'eux était un juif originaire de Londres, et l'autre, un dénommé Bennett Okuwosa. Quand j'ai rencontré ce dernier, il était nigérian. Quand je l'ai vu pour la dernière fois, à la fin de ma scolarité de deux ans, il était biafrais.
Si je précise qu'un de mes deux copains était juif, c'est parce que durant les deux années où je les ai fréquentés, deux guerres ont éclaté: la guerre des six jours en Israël, et la guerre du Biafra au Nigéria. Mon copain juif était, disons, du côté des gagnants, et l'autre, Bennett Okuwosa, du côté des perdants.
Avant ces tragiques événements, nous étions comme les trois mousquetaires. Nous allions jouer au billard, prendre un verre et danser ensemble. Il nous arrivait aussi d'étudier ensemble. Bien que nous venions de milieux très différents, nous avions beaucoup de choses en commun, comme c'est le cas pour d'autres jeunes gens ailleurs dans le monde.
C'est alors que mon copain, que nous avions coutume d'appeler Benno, s'est attaqué au problème de la guerre du Biafra, durant laquelle on a pratiqué du nettoyage ethnique. Les Biafrais étaient sortis du Biafra, qui est une province du Nigéria, et s'étaient répandus dans le reste du Nigéria, où ils occupaient des postes de responsabilité dans l'économie nigériane et la société politique. Cela a suscité beaucoup de ressentiment au sein de la population musulmane.
Le Biafra nous donne un exemple classique des nombreux cas où des conflits religieux éclatent mais ne sont, en fait, que le paravent d'une guerre économique ou la conséquence d'une sujétion économique. C'était le cas au Nigéria. Les Biafrais ont été expulsés de tous les postes et essentiellement chassés du Nigéria pour être renvoyés au Biafra. Ils ont donc décidé de séparer leur province du reste du pays, ce qui a conduit à la guerre civile et à toutes ses horreurs.
Les communications avec le Biafra ont été à toutes fins utiles rompues. Mon ami Benno avait une grosse famille. Au cours du conflit, ses frères, qui occupaient des postes élevés, ont été arrêtés par la police nigériane et sont disparus. Évidemment, il a dû accepter tout au long de la guerre que son peuple souffre terriblement.
Ironiquement, puisqu'il était en sciences agricoles, sa contribution à la guerre a consisté à tenter d'élever des lapins pour le Biafra car la région a dû affronter une terrible pénurie de protéines et une horrible famine. Au bout du compte, je ne pense pas qu'il y soit retourné. La dernière fois que j'ai entendu parler de lui, c'était dans une lettre provenant de Berlin. Je crois qu'il s'est installé en Allemagne et qu'il y a élevé sa famille.
De là, je passe aux événements survenus il y a eu tout juste une semaine lundi. J'ai organisé une assemblée publique dans ma circonscription et j'y ai invité tout le monde à venir exprimer ses sentiments sur le Kosovo. Il y a beaucoup de Canadiens d'origine serbe dans ma circonscription, Wentworth—Burlington, et dans la région environnante. Nous avons eu une réunion ouverte et chargée d'émotion, car, comme on peut l'imaginer, les gens ont exprimé beaucoup de colère et aussi beaucoup d'anxiété et de douleur.
Si j'ai tenu l'assemblée, c'est que je voulais donner aux Canadiens d'origine serbe l'occasion d'exprimer leurs sentiments, car le Canada est un pays démocratique. Il y a eu des observations sur les causes de la guerre et sur le fait que les Kosovars d'origine albanaise avait fait main basse sur la société et sur le Kosovo, et d'autres choses du genre, et que nombre d'entre eux étaient là illégalement, mais ces argumentations n'ont pas eu autant de poids que la terrible angoisse que les Canadiens d'origine serbe éprouvaient non seulement pour leur famille, mais aussi à l'égard de ce qui se passait au Kosovo, dans l'ancienne Yougoslavie. Ou en Yougoslavie, je suppose, car on l'appelle encore comme cela.
Par exemple, un homme m'a demandé ce qui arriverait si le Canada déclarait la guerre à la Serbie, s'il serait alors emprisonné. Une femme s'inquiétait pour son fils qui est dans les Forces armées canadiennes. Qu'arrivera-t-il s'il est envoyé là-bas et qu'il doit combattre des membres de sa famille? On peut imaginer la situation.
Beaucoup étaient inquiets pour les jeunes d'âge militaire qui avaient quitté le pays quelques mois avant que ne commencent les bombardements. Ils savaient que leurs enfants seraient conscrits. En fait, tous les jeunes de 14 ans et plus sont maintenant appelés à joindre les forces militaires en Serbie pour repousser l'invasion. On peut imaginer que la peur est terrible.
C'étaient là des compatriotes canadiens qui souffraient. Ils avaient mal à cause de ce qui se passait dans la mère patrie qu'ils avaient quittée. Il ne fait aucun doute qu'ils sont désormais des Canadiens, mais les liens qui les lient à leur pays d'origine sont forts.
Lorsqu'on voit les choses de cette manière, on se rend compte qu'il ne s'agit pas seulement de cesser les bombardements et d'en venir à une solution diplomatique. Il ne s'agit pas morceler le Kosovo ou d'en faire un État indépendant. Il s'agit de faire en sorte que, tout en nous acheminant vers un règlement de ce conflit, les conditions soient réunies pour que les Kosovars et les Serbes puissent se réconcilier et vivre de nouveau ensemble.
Je pense que le Canada a un rôle indirect à jouer à cet égard parce que nous sommes l'exemple typique d'un pays où la diversité ethnique est tolérée et où des gens ayant fui des conflits qui faisaient rage ailleurs dans le monde peuvent aujourd'hui vivre en harmonie.
Voilà pourquoi, à mon avis, il est très important que le gouvernement et nous tous faisions preuve de beaucoup de prudence quand il s'agit de qualifier la situation au Kosovo. Le Biafra a été nettement victime d'un nettoyage ethnique. Les Biafrais ont été expulsés du reste du Nigéria parce qu'ils étaient chrétiens et les autres musulmans mais, faut-il le préciser, la religion n'était qu'un prétexte. En 1915, dans l'ancien empire ottoman, je crois que les Arméniens ont été expulsés de Turquie pour la bonne raison que le pays était en guerre. Il s'agissait encore d'un cas de nettoyage ethnique. Mais ce ne sont pas nécessairement des cas de génocide. Le génocide est probablement le comble de l'horreur et l'Holocauste a été un génocide. Il ne s'agissait pas d'un simple nettoyage ethnique; on voulait détruire jusqu'au souvenir de ce groupe ethnique en tuant tous ses membres.
Presque tous les pays se sont rendus coupables de nettoyage ethnique à un moment ou à un autre de leur histoire. Je citerai un exemple canadien: les Acadiens au XVIIIe siècle. Les Britanniques ont expulsé tous les jeunes Acadiens de la Nouvelle-Écosse et les ont dispersés sur le littoral américain. La guerre des Boers a débuté au XIXe siècle. Les Britanniques étaient en conflit avec les agriculteurs boers en Afrique du Sud. Ils se sont emparés des femmes et des enfants des agriculteurs boers et les ont enfermés dans des camps de concentration où ils sont morts à la suite de terribles souffrances. Si vous voulez un exemple de génocide, il n'y a qu'à se rappeler ce qu'ont fait les Américains dans l'Ouest des États-Unis, où ils ont systématiquement détruit les provisions alimentaires des autochtones qui sont morts de faim. Il n'y a qu'à se rappeler ce qui s'est passé en Ukraine où, entre les guerres, Staline avait systématiquement détruit les provisions des Ukrainiens. Ça, c'est un génocide.
Le mot génocide est terrible, mais quand on parle de guerre civile et d'expulsion d'une ethnie, presque toutes les nations du monde sont coupables dans une certaine mesure. Nous ne devons pas oublier de faire ces distinctions. Si nous ne les faisons pas, les gens que je rencontre lors des assemblées publiques que j'organise auront l'impression d'être coupables, de porter un poids alors qu'ils ne le méritent pas plus que les Américains, les Britanniques, les Français ou les autres puissances coloniales qui ont pris part à des guerres civiles ou à de terribles actes de répression. Il y a une forme de répression dans l'expulsion d'un groupe ethnique, religieux ou racial. Ces distinctions doivent être claires.
Nous devons maintenant penser aux moyens de rapprocher la communauté serbe, de rapprocher les Serbes et les Kosovars. Je pense que notre pays peut donner l'exemple. Tant que nous sommes prêts en tant que députés et en tant que Canadiens à nous rendre dans nos communautés et à prêter l'oreille aux uns et aux autres, quels que soient les antécédents, la religion ou la langue de chacun, nous donnons l'exemple et nous pouvons espérer qu'il sera suivi après cette guerre.
[Français]
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté mon collègue avec beaucoup d'intérêt, et je dois même admettre que le député de Wentworth—Burlington m'a ému. Il m'a ému, lorsqu'il a fait une rétrospective de l'époque où il était étudiant à Londres avec ses deux ex-collègues, l'un juif et l'autre du Biafra.
Cependant, il s'est écarté abondamment de la motion du Nouveau Parti démocratique qui consiste à demander au gouvernement d'intensifier et d'accélérer les efforts diplomatiques pour régler le plus rapidement possible la crise au Kosovo—si on ne veut pas, à ce moment-ci, la qualifier de guerre—et essayer d'inclure la Russie dans ces négociations diplomatiques.
Je veux demander à mon collègue si, personnellement, il est intervenu au sein du caucus libéral, et dans l'affirmative, quelle proposition a-t-il faite pour amener le premier ministre, le ministre de la Défense nationale, le ministre des Affaires étrangères—qui, incidemment, part ce soir pour rencontrer son homologue russe—à trouver une solution diplomatique? Qu'a-t-il fait personnellement pour inciter son gouvernement à essayer de trouver une solution diplomatique?
On a perdu beaucoup de notre capacité de jouer aux casques bleus, puisque dans cette union avec l'OTAN, le Canada agit au même titre que les États-Unis et les autres pays en envoyant des avions qui ne sont pas là pour faire régner la paix, mais bien pour détruire et frapper.
Mon collègue de Wentworth—Burlington a-t-il agi de façon positive à l'intérieur de son caucus?
[Traduction]
M. John Bryden: Absolument, monsieur le Président. Pour une fois, je vais trahir le secret du caucus. En fait, à la dernière réunion du caucus national, j'ai pris la parole au micro. Devant le premier ministre, le ministre des Affaires étrangères et tous mes collègues, j'ai lancé une exhortation très virulente pour que nous demandions l'aide de la Russie afin de sortir de cette impasse dans les Balkans.
L'une des occasions en or qui s'offrent à nous, c'est de faire participer la Russie. Si la Russie peut être partie au plan de paix, elle sentira renaître la confiance à l'égard du rôle important qu'elle peut jouer dans le monde.
J'ai parlé de pays et de gens qui souffrent. Nous devons nous rendre compte que les Russes souffrent aussi, actuellement, et pas seulement du point de vue économique; ils souffrent parce que la fin du siècle est bien dure pour eux. Nous devons leur donner une chance de retrouver leur dignité. Ils peuvent retrouver leur dignité en jouant un rôle important dans le rétablissement de la paix dans cette région. Voilà ce que j'ai dit à la réunion de notre caucus national, mercredi dernier.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, tout d'abord, je veux dire à mon collègue que les distinctions qu'il fait entre épuration ethnique et génocide sont peut-être utiles, mais je n'en reviens pas de son appréciation de la situation arménienne, l'autre jour, à la Chambre. J'aimerais bien qu'il nous indique si, oui ou non, il considère qu'il y a eu génocide en Arménie au début du siècle.
Mais ma question porte sur le rôle de l'ONU. Puisqu'il est disposé à parler de ce qui s'est passé à son caucus, pourrait-il nous dire jusqu'à quel point il a été question du rôle de l'ONU? Quelle position a-t-il personnellement sur l'importance d'associer l'ONU à tout règlement de ce différend en Yougoslavie?
[Traduction]
M. John Bryden: Monsieur le Président, je peux seulement parler de ce que j'ai dit. Je ne peux pas parler de ce que d'autres ont dit.
Je voudrais reprendre le thème de la purification ethnique. Il est extrêmement important de faire la distinction entre purification ethnique et génocide. Il est très difficile de pardonner un génocide, quelles que soient les circonstances.
Étant donné que, tout au long de l'histoire, qui remonte à l'époque des Grecs et des Romains, et même avant, un grand nombre de pays se sont rendus coupables d'une forme ou d'une autre de purification ethnique, après la guerre, les Serbes, les Canadiens d'origine serbe et les Kosovars pourront au moins comprendre que rien de ce qui s'est passé au Kosovo, aussi horrible que cela puisse être, ne diffère de ce qui s'est passé dans des pays et des sociétés du monde entier depuis les débuts de l'histoire.
C'est lorsque nous employons un terme trop fort que nous rendons pratiquement impossible une communication entre les peuples après la guerre. C'est alors que la haine devient ancrée. Elle est déjà suffisamment présente dans les Balkans. Nous devons trouver un moyen d'amener les gens à cesser de se haïr les uns les autres.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, quant au dernier commentaire sur les moyens de faire en sorte que les gens cessent de se haïr, j'ai entendu Henry Kissinger, je crois, dire un jour que ce n'était probablement pas un scénario possible dans cette partie des Balkans. La haine est profondément ancrée dans l'âme, le coeur et l'esprit des gens dans cette région. J'aimerais qu'en brandissant les valeurs canadiennes, nous puissions leur faire passer ce message: arrêtez de vous haïr. J'aimerais que ce soit aussi simple que ça, mais je crains que ce ne le soit pas.
Je félicite la députée d'Halifax et le Nouveau Parti démocratique d'avoir pris une position que je juge sincèrement responsable et d'avoir utilisé de manière intelligente cette journée d'opposition. Nous avons eu ici des exemples de motions présentées qui, franchement, n'ont eu d'autre rôle que d'épater la galerie en épousant certaines causes philosophiques ou en essayant d'embarrasser le gouvernement. Je ne pense pas que cette motion soit du même ordre.
Cette motion dit que le gouvernement devrait intensifier et accélérer ses efforts en vue de trouver une solution diplomatique. Qui d'entre nous ne souhaite pas cela? Qui au sein de la population de notre grand pays ne souhaite pas cela?
La mission que va entreprendre le ministre plus tard au cours de la semaine et qui comprendra des entretiens avec les Russes et d'autres avec le secrétaire général des Nations Unies, constitue un effort dans ce sens. Il s'agit de trouver une réponse à une question à laquelle j'ai parfois du mal à répondre lorsque mes électeurs m'appellent: Comment en sommes-nous arrivés là?
Nous devons nous pencher sur le passé pour tenter de comprendre pourquoi et comment les choses se sont produites et pourquoi nous sommes ici à en discuter aujourd'hui. Il est très responsable de la part d'un parti d'opposition de demander au gouvernement d'intensifier ses efforts en vue de trouver une solution diplomatique à une crise de ce genre. J'espère moi aussi que cela se produira. Toutefois, je crois qu'il est également responsable de notre part d'exhorter l'OTAN à ne pas pousser la campagne au-delà de la situation actuelle afin de nous permettre d'essayer de trouver une solution diplomatique au conflit.
Cela dit, nous ne pouvons pas non plus jouer à l'autruche. J'ai trouvé très intéressants les propos de mon collègue de Hamilton—Wentworth qui a parlé d'une assemblée publique qu'il a tenue dans sa circonscription. Je me suis demandé de quoi aurait l'air une assemblée publique au Kosovo. Je me suis demandé ce que penseraient d'une assemblée publique les gens qui ont été chassés de leurs demeures, qui ont vu mourir leur père, leur mari ou leurs fils, et il ne s'agit pas de pur tapage publicitaire puisque nous avons entendu des réfugiés raconter qu'ils avaient vu leur mères ou leurs filles être violées en présence de leurs familles.
Je crois qu'ils seraient tellement étonnés de ce processus démocratique que mon collègue a mis en application dans sa circonscription qu'ils ne sauraient comment réagir. Ils ne pourraient pas imaginer une façon de décrire l'horreur et la douleur.
Tout en cherchant à trouver des solutions pacifiques et diplomatiques, nous devons nous demander comment nous en sommes arrivés là.
En 1949, un homme que tous les Canadiens et tous les députés doivent considérer comme l'un des plus grands hommes de notre siècle, notre ancien premier ministre Lester Pearson, a reçu un prix Nobel. Il a signé un accord avec 11 autres pays pour former une alliance appelée Organisation du Traité de l'Atlantique Nord. Cette organisation compte maintenant 19 membres.
Quel était le rôle de cette organisation? S'agissait-il simplement d'une belle façade, après la fin de la guerre, d'une occasion de nous rencontrer une fois par année pour un barbecue? Je ne le pense pas.
Ces 12 pays, qui sont maintenant 19, étaient conscients de diverses menaces qui planaient sur le monde. La plus évidente, en 1949, devait être la propagation du communisme. Nous avons vu ce qu'il est advenu du mur. Il a été érigé. Il s'est effondré. Nous avons vu un pays éclater. Nous avons vu ce qui est arrivé, au plan économique et idéologique et dans toute la société, à un pays qui aurait pu et aurait dû être et qui a peut-être été et pourrait redevenir un grand pays, la Russie.
Notre point de vue est peut-être partial, mais c'est le parti pris auquel nous croyons tous, celui de la démocratie. Voici un peuple qui a été placé dans une position terrible à cause de la propagation du communisme et de l'attitude militariste qui s'est installé chez lui. Ce pays se retrouve dans la misère. L'OTAN a été mise sur pied pour surveiller la propagation du communisme.
Tito a été à la barre en Yougoslavie et l'armée était là. J'ai pu le constater personnellement en 1990, lorsque j'ai fait partie, en tant que député provincial, d'une délégation parlementaire chargée d'observer les toutes premières élections tenues en Croatie depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Il y avait pourtant encore des soldats armés qui surveillaient les boîtes de scrutin et tentaient d'intimider les électeurs qui allaient voter. Les soldats se tenaient là, immobiles.
Lorsque je me suis approché des soldats armés pour accrocher une épinglette du Canada à leur veste, certains Croates n'en revenaient pas. Ils étaient ébahis. En y réfléchissant bien, je me dis que je devais être un peu cinglé à l'époque. De toute façon, je voulais poser un geste amical envers ces gens. Les Croates qui faisaient la queue pour aller voter pour la première fois depuis la guerre avaient les larmes aux yeux. C'est vraiment l'une des expériences politiques les plus merveilleuses et les plus émouvantes que j'ai vécues.
À l'instar de la plupart des députés, je suis plutôt gâté. Pensez au pays où nous vivons. Pensez à ce que je dis souvent à la Chambre, au fait que nos têtes sont nos armes, du moins nous l'espérons. Nos munitions sont les injures que nous nous lançons. Nous ne tuons personne. Enfin, c'est à espérer. Il y a des jours où certains ont sûrement envie de tuer quelqu'un, mais, en général, nous ne sommes pas de nature violente.
Pourtant, voici que nous participons à ce qui correspond à une intervention militaire, peu importe comment nous l'appelons. C'est une guerre contre un régime. Je ne considère pas qu'il s'agit d'une guerre contre la nation serbe, même si je dois admettre qu'il y aura certainement des Serbes qui seront blessés ou tués pendant ce conflit. C'est une terrible tragédie, mais nous ne pouvons pas refuser d'intervenir.
Je me demande ce que diraient les Canadiens si le Canada, membre de l'OTAN depuis 50 ans, reculait et déclarait que nous n'interviendrons pas dans ce conflit, que, quand tout allait bien, nous avons bien aimé l'expérience et les conférences, mais que nous ne voulons pas participer à cette opération. Je ne vois pas comment nous pourrions, en toute conscience, décider de ne pas participer.
À l'instar des Canadiens en général et des députés en particulier, j'espère vivement que ce qui est arrivé aujourd'hui ne dégénérera pas dans l'utilisation de nos soldats pour le combat actif. Cela peut encore arriver, mais nous espérons que non. Ils sont là-bas. Ils sont censés aller appliquer un accord de paix. J'espère que notre ministre et notre premier ministre pourront s'entretenir avec les Russes et faire ce que propose le NPD et ce que nous souhaiterions tous, c'est-à-dire voir si la Russie ne pourrait pas mettre en oeuvre un accord de paix avec ce régime de façon à mettre fin aux combats et à la tuerie.
Nos gens pourront alors faire ce qu'ils ont été entraînés à faire, à savoir maintenir une paix durable dans cette partie du monde, aider les Kosovars à se réadapter, à rentrer et à refaire leur vie. Je sais que nous prions tous pour que cela arrive et il est à espérer que c'est ce qui arrivera dans un avenir pas trop lointain.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, je veux demander à notre éloquent collègue s'il pourrait répondre à la question que j'ai posée à son prédécesseur, soit celle sur le rôle des Nations Unies et sur les discussions relatives à ce rôle lors des réunions de leur caucus ou sur ce qu'en pensent et en disent leurs militants lors des réunions publiques.
J'aimerais savoir jusqu'à quel point il considère important la participation de l'ONU à toute solution du différend ainsi que le rapport que l'ONU et l'OTAN devraient avoir dans ce règlement du différend au Kosovo.
[Traduction]
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, l'ONU devrait participer. J'espère qu'à la suite des rencontres que notre ministre aura avec les Russes et avec le secrétaire général de l'ONU, nous pourrons compter sur leur participation.
Nous devons toutefois être réalistes et comprendre que l'OTAN joue un rôle très précis et un peu différent de celui des Nations Unies. Le théâtre d'opérations des Nations Unies, c'est le monde entier. Il n'en est pas de même de l'OTAN. Le théâtre d'opérations de l'OTAN vise l'Europe et les Amériques. Il ne vise pas l'Asie, l'Afrique ou le Moyen-Orient.
Si l'OTAN pouvait intervenir et que la Chine et la Russie étaient disposées à coopérer dans la négociation d'un accord de paix, ce serait tout à fait opportun. Il est à souhaiter que c'est ce qui résultera des efforts que déploiera notre ministre en se rendant là-bas et en rencontrant les personnes concernées.
Il serait préférable, si c'est possible, que les forces de l'OTAN mettent en application un accord de paix, mais il faut d'abord conclure un tel accord. Tant que la Russie ne s'en mêlera pas et qu'elle ne sera pas disposée à participer aux négociations, j'ai bien peur que l'ONU ne se marginalise à cause d'un ou deux de ses membres. Il est à souhaiter que nous assistions à une véritable participation des Nations Unies au cours des prochaines semaines.
M. Jim Karygiannis (Scarborough—Agincourt, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais que le député fasse une ou deux observations, non pas sur ce qui se passe en Serbie ou à Belgrade, mais sur le traitement que nous accordons à nos concitoyens.
J'attire l'attention du député sur le sort d'une mère et d'un père, Zorka et Milan Lavrnja, qui se sont rendus au bureau de l'immigration canadienne à Bucarest. Leur fils demandait à immigrer au Canada. Ce sont des citoyens canadiens. Ils détenaient des passeports canadiens et pourtant ils se sont fait dire: «Bien sûr, vous êtes Canadiens, mais nous ne voulons pas nous occuper de vous.»
Ne favorisons-nous pas à la Chambre de meilleures relations et de meilleures communications au sein de nos collectivités? Que se passe-t-il quand un fonctionnaire canadien en poste à l'étranger, à l'ambassade canadienne à Bucarest par exemple, dit cela à un citoyen canadien? Le député de Mississauga pourrait-il me dire ce qu'il pense au juste du traitement que nous accordons aux citoyens canadiens d'origine serbe?
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, si un fonctionnaire du Canada faisait une telle observation et qu'on pouvait le prouver, il serait congédié purement et simplement.
[Français]
M. Daniel Turp: Monsieur le Président, j'ai une autre question pour notre collègue qui semble s'intéresser beaucoup au rôle de l'OTAN dans ce conflit.
Aujourd'hui, le secrétaire d'État américain à la Défense, William Cohen, a affirmé que la force militaire internationale devrait être dirigée par l'OTAN. Que pense le député libéral de cette affirmation?
[Traduction]
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, certains cherchent à diaboliser le rôle des Américains dans ce conflit. Je dirai simplement que l'OTAN possède une constitution et un mandat. Ce dernier précise très clairement la responsabilité de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord; c'est un pour tous et tous pour un si un pays membre est attaqué.
Il faut reconnaître que les Américains représentent l'intervenant le plus important et sans doute le plus dominant juste en raison de leur influence économique et de leur puissance militaire. Le Canada peut et devrait jouer un rôle, et les ministres de la Défense nationale et des Affaires étrangères y voient fort bien sur la scène internationale en cherchant exactement à faire ce que demande la motion, soit essayer de trouver une solution pacifique et collaborer avec la Russie, qui peut effectivement servir de catalyseur dans la recherche d'une solution.
À mon avis, les Américains exerceraient peu ou pas d'influence auprès de M. Milosevic, ce qui n'est pas le cas des Russes. Nous savons que les militaires russes ont fourni des armes aux militaires serbes au fil des ans. Cela ne pose pas de problème. C'est un arrangement légitime, un marché commercial. Nous savons cependant qu'ils entretiennent des liens.
Il ne faut pas chercher à diaboliser les Américains et à faire de cet enjeu une question partisane ou conflictuelle. Si ce n'est pas ce que voulait dire le député, je m'en excuse, mais c'est la façon dont j'ai interprété son intervention. Le gouvernement canadien a plutôt pour rôle de travailler de concert avec les Américains qui sont partenaire dans l'OTAN et d'essayer de trouver une solution dans le cadre de rencontres avec les Russes et aux Nations Unies.
[Français]
Le président suppléant (M. McClelland): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Vancouver-Est, L'habitation; l'honorable député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, Le commerce international.
[Traduction]
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, tout d'abord j'aimerais vous signaler que je partagerai mon temps de parole avec le député de South Shore.
En ma qualité de porte-parole du Parti conservateur en matière d'immigration, j'aimerais dire quelques mots sur la tragédie humaine qui se déroule au Kosovo. Tous les jours nous voyons à la télévision une marée d'Albanais qui fuient le Kosovo, leur patrie, laissant derrière eux leurs villages en flammes, leurs amis et leurs parents que les forces de sécurité serbes ont soit enlevés soit exécutés.
Ces dernières années, nous avons été témoins de scènes semblables en Croatie et en Bosnie, mais la vitesse et l'ampleur de l'exode actuel captivent l'attention du monde.
La motion d'aujourd'hui parle d'une éventuelle solution diplomatique. Je pense pouvoir dire sans me tromper que notre parti appuiera la motion. C'est une excellente motion et j'espère sincèrement qu'elle est réalisable. En attendant, j'aimerais parler de deux aspects de la crise, à savoir la situation des réfugiées et la situation militaire.
En ce qui concerne les réfugiés kosovars, nous sommes très heureux que le Canada se soit dit prêt à en accepter 5 000 et ait pris les dispositions nécessaires pour accueillir ces malheureux. En tant que pays dont la participation dans ce conflit est motivée par des préoccupations humanitaires, nous ne pouvions pas faire moins.
L'autre situation qui nous préoccupe concerne notre position militaire dans tout cela. Il est regrettable que nous n'ayons pas pu débattre la question avant que notre aviation ait été engagée dans les hostilités. Le résultat est que maintenant nous sommes partie prenante dans un conflit militaire outre mer. De nombreux experts militaires pensent que cela conduira inévitablement à la participation de nos troupes terrestres.
Notre parti s'inquiète de la façon dont nous semblons nous être engagés dans ce conflit sans penser aux conséquences à long terme. Je sais qu'il n'y a pas eu de déclaration de guerre officielle, mais de part et d'autre les gens tirent et se font tirer dessus.
Je n'ai pas besoin de rappeler à la Chambre que cette région de l'Europe a empêché de nombreuses divisions nazies d'avancer durant la Seconde Guerre mondiale, dans un terrible affrontement d'usure où d'horribles atrocités ont été commises de tous les côtés.
Nous avons eu des exemples de purification ethnique en Croatie et en Bosnie, où toutes les parties sont à blâmer et ont versé du sang.
Nous faisons confiance au professionnalisme de nos forces armées, mais je crains que, par la faute du gouvernement, nos effectifs militaires ne soient grandement réduits. En outre, ils n'ont pas le matériel nécessaire pour s'acquitter de la mission qu'on va probablement leur confier.
Nous ne pouvons pas jouer à la guerre. L'OTAN est maintenant engagée. Il ne reste guère d'autre choix que d'aller jusqu'au bout de nos engagements. Au Vietnam, par exemple, nous avons vu ce que c'était que faire une guerre où c'était la Maison Blanche et non le Pentagone qui décidait des cibles quotidiennes. Résultat, la guerre a duré des années. Peu importe que nous appelions ceci un conflit ou une guerre, nos objectifs doivent être clairs et nous devons avoir la volonté de faire ce qui est nécessaire.
Il ne faut pas oublier que les dirigeants yougoslaves recourront sans pitié à leurs forces militaires et paramilitaires; nous ne devons donc pas mettre en danger la vie de nos soldats en ne leur donnant pas tous les moyens d'accomplir leur mission.
Il est triste que le Canada, autrefois un leader en matière d'affaires internationales, un champion des opérations de maintien de la paix des Nations Unies, soit pris aujourd'hui dans ce conflit. Toutefois, les dés ne sont pas jetés et nous devons prendre très très au sérieux nos rôles diplomatique, humanitaire et militaire au Kosovo.
Le Canada a la stature et la réputation voulues pour influer sur les événements, comme il l'a fait durant la guerre du Golfe et plus récemment en Croatie. Toutefois, lorsque ces événements ont eu lieu, le Canada avait non seulement la stature mais aussi la volonté d'agir. Or, rien n'indique que le gouvernement actuel soit capable de faire preuve du même leadership. D'après ce que nous savons des discussions qui ont eu lieu au sein de l'OTAN, les États membres ont décidé de déclencher une campagne de frappes aériennes et le Canada a tout simplement décidé de suivre.
Selon le premier ministre, si d'autres pays décident d'engager des troupes au sol, le Canada ne s'y opposera pas. Ce n'est pas ce que j'appelle une politique étrangère musclée. Cela équivaut à pas de politique étrangère du tout. En annonçant l'envoi de 800 gardiens de la paix dans la région, nous pousserons encore plus loin notre engagement. Notre participation possible à l'embargo naval risque aussi de compliquer notre situation, surtout si la marine yougoslave décide de riposter.
En attendant, nous pouvons prendre un certain nombre de mesures afin de réaffirmer notre leadership en regard de la crise au Kosovo. Premièrement, nous devons travailler sérieusement avec la Russie, qui est la seule puissance à entretenir des communications directes avec les dirigeants serbes. N'oublions pas que des forces intérieures en Russie poussent ce pays à intervenir dans le conflit. Aucun pays n'est mieux préparé que le Canada pour aider la Russie à jouer un rôle constructif, mais rien n'indique que le Canada ait pris des mesures concrètes à cette fin.
Il est rassurant que le ministre des Affaires étrangères se rende à Moscou, mais a-t-il des propositions précises à faire, notamment au sujet de l'embargo naval ou d'une résolution des Nations Unies au sujet du type de force de sécurité internationale qui pourrait aider les réfugiés à regagner leurs foyers en toute sécurité?
Deuxièmement, le Canada fait partie de la plupart des organisations internationales qui participeront à l'élaboration du règlement politique de la crise au Kosovo, une fois la guerre terminée. Nous devrions nous occuper dès maintenant des questions humanitaires, de la reconstruction et de la question de la sécurité. Lorsque le conflit sera terminé, notre devrons avoir pour objectif de rendre l'Europe du Sud plus stable qu'elle ne l'était avant le début du conflit.
Troisièmement, le gouvernement devrait prendre clairement position au sujet de l'engagement de troupes au sol. Il ne l'a pas encore fait. À défaut d'un règlement diplomatique, il me semble que l'engagement de troupes au sol sera nécessaire pour mener à terme l'action engagée par des attaques aériennes. Le premier ministre est cependant demeuré timide à ce sujet et son attitude mine la confiance envers la position du Canada à cet égard.
Enfin, le gouvernement du Canada devrait donner l'exemple en jouant franc-jeu avec la population et les parlements des pays membres de l'OTAN. Le conflit sera vraisemblablement long et riche en images et en nouvelles troublantes. Au départ, l'opinion publique était plutôt favorable, croyant avoir affaire à une cause humanitaire. Mais du moment qu'il y a des morts des deux côtés, on commence à s'interroger sur la stratégie de l'OTAN, surtout en ce qui concerne l'éventuel envoi de troupes au sol. Il y a un monde entre soutenir des objectifs humanitaires et soutenir la stratégie de l'OTAN.
Le meilleur moyen de se gagner la confiance du public, c'est par la transparence, la clarté et la vérité. Les Canadiens sont de bonnes gens qui méritent un bon leadership dans cette crise, un bien meilleur leadership que celui que nous avons vu à l'oeuvre jusqu'ici. Il est temps que le gouvernement tienne des débats parlementaires sur ces questions avant que nos troupes soient envoyées dans une zone de conflit. Il est temps que le gouvernement clarifie nos objectifs et les moyens dont nous disposerons dans l'accomplissement des divers rôles que nous aurons à jouer dans le conflit qui s'intensifie. En somme, nous devrions débattre de notre devoir, le définir et le remplir avec toute la détermination et toute la fierté dont nous avons su faire preuve dans les crises qui ont jalonné notre histoire.
En ce qui concerne la motion d'aujourd'hui, je suis tout à fait favorable à la poursuite d'efforts diplomatiques vigoureux de la part du Canada. De plus, j'estime qu'il est essentiel que la Russie, allié de longue date de la Serbie, participe à la recherche d'une solution à ce conflit. Toute solution doit cependant passer par le retour des réfugiés dans leur pays, sous la protection d'une force internationale—de préférence onusienne—de maintien de la paix.
Le Kosovo brûle. Des régions de la Serbie sont en ruines. Certes, l'OTAN ne saurait laisser tomber ce qu'elle a entrepris. Par contre, aucun pays n'a envie de s'engager dans une guerre terrestre qui risque de s'éterniser. Voilà pourquoi je suis sûr que tous les pays membres de l'OTAN accueilleraient favorablement une solution raisonnable qui mettrait fin aux combats et permettrait aux réfugiés de rentrer chez eux.
M. Jim Karygiannis (Scarborough—Agincourt, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt les propos du député d'en face. D'une part, il a dit que l'envoi de forces terrestres était inévitable et que nous devons le faire. D'autre part, il a dit que les Nations Unies pourraient être une force de maintien de la paix internationale. Je ne sais pas s'il appuie l'envoi de forces terrestres ou non. Je me demande s'il propose à la Chambre d'envoyer des forces terrestres maintenant, après 35 jours de bombardements qui n'ont rien donné. Milosevic ne semble pas vouloir retraiter. Nous avons entendu le vice-premier ministre yougoslave, qui est membre du parti de l'opposition, dire que nous devions faire quelque chose.
Le député d'en face dit que nous sommes en guerre. Le député ne connaît manifestement pas l'histoire de cette région du monde. Il devrait l'étudier.
Je l'invite à ouvrir son livre d'histoire et à lire ce qui s'est passé dans cette région du monde avant de venir à la Chambre dire au gouvernement ce qu'il doit faire. Le déploiement de forces terrestres là-bas se traduira par des pertes de vies de notre côté. Je me demande si le député d'en face veut être le premier à revenir dans un sac à dépouille.
M. Norman Doyle: Monsieur le Président, je veux préciser que je ne crois pas que le député et moi nous soyons affrontés dans le débat. Il s'agissait de quelqu'un d'autre.
Tout d'abord, je dirai que nous appuyons l'OTAN. Le Canada est l'un des 19 pays membres de l'OTAN et nous appuyons la campagne de bombardement en cours. Nous appuyons l'envoi de troupes au sol si cela est nécessaire. De toute évidence, nous devrions appuyer d'abord et avant tout tous les efforts diplomatiques déployés par le gouvernement pour faire en sorte que nous n'ayons pas à envoyer nos soldats participer à une mission au sol.
Cependant, je crois qu'il serait très important que le gouvernement précise ses objectifs dans cette guerre. Quelles sont, selon lui, les conséquences à long terme de ce conflit? Quelle est notre stratégie, par exemple, dans le cadre d'un blocus maritime si la marine yougoslave décide de riposter? Ce sont des questions auxquelles on n'a pas répondu.
Comme je l'ai fait remarquer au député, il y a une différence entre l'appui d'objectifs humanitaires et l'appui de la stratégie de l'OTAN, mais je pense que le gouvernement est affligé d'un déplorable manque de leadership. Il n'a pas encore précisé ses buts ou ses objectifs à long terme dans cette guerre, pas plus qu'il n'a précisé sa stratégie si des troupes terrestres étaient nécessaires. Lorsque le temps viendra, notre parti appuiera l'envoi de troupes terrestres s'il n'y a aucune autre option.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, je suis tenté de revenir sur les questions et observations que nous avons entendues précédemment, mais je vais m'en tenir au discours que j'ai très soigneusement rédigé. J'espère que les parlementaires qui sont dans cette enceinte auront des questions intelligentes à me poser par la suite.
Hier, le premier ministre Tony Blair s'est adressé au Parlement britannique pendant une heure et demie et, durant ce temps, a répondu aux questions des députés sur le rôle de la Grande-Bretagne en Yougoslavie. Aujourd'hui, le premier ministre du Canada a tenu une conférence de presse pour informer les Canadiens et les parlementaires canadiens que nous enverrions des gardiens de la paix dans les Balkans. Les Canadiens devraient réfléchir quelques instants à cette comparaison: une séance d'information d'une heure et demie par opposition à une conférence de presse.
Le gouvernement a délibérément laissé le Parlement à l'écart du processus d'information et n'a pas été franc et ouvert envers les parlementaires. Le premier ministre a au moins essayé de corriger ce déséquilibre aujourd'hui. Je félicite les libéraux pour ce changement de tactique parce que cela met le gouvernement dans une position où il est plus responsable de ses actes.
Il y a beaucoup de questions à soulever concernant la façon dont le gouvernement a traité cet important dossier. Il est temps que le premier ministre définisse clairement l'objectif du Canada dans cette campagne et, ce qui est plus important encore, le rôle que nous jouons au sein de l'OTAN et l'interaction entre le premier ministre et nos alliés de l'OTAN. Il faut se demander ce qui est arrivé au leadership dont le Canada avait l'habitude de faire preuve dans ce domaine. Je dirais que non seulement le Canada n'est pas écouté par ses alliés de l'OTAN, mais, pire encore, qu'il suit ces derniers aveuglément.
Les objectifs du Canada ne sont pas clairs. Notre stratégie n'est pas claire. Et on dirait maintenant que le premier ministre envoie nos soldats au champ de bataille sans objectif précis et sans stratégie en vue d'atteindre ce vague but. J'ose espérer que le premier ministre sera enfin tenu responsable de décisions aussi mal conçues et aussi carrément antimilitaires que l'annulation du contrat d'achat d'hélicoptères. En tant que représentant de soldats et de pilotes canadiens, j'ai honte que nous puissions songer de façon aussi inconsidérée à envoyer des pilotes canadiens faire la guerre à bord d'avions et d'hélicoptères qui sont plus âgés que les pilotes qui sont aux commandes de ces appareils.
Récemment, le ministre de la Défense a déclaré qu'il était sur le point de conclure des marchés. Je tiens à dire, aux fins du compte rendu, que des expressions vagues comme «nous sommes sur le point de conclure des marchés» n'auront aucune signification pour les pilotes obligés d'être aux commandes d'hélicoptères dangereux. J'ose dire qu'elles n'auront aucun sens non plus pour les troupes qui dépendront de ces hélicoptères.
Les objectifs de cette guerre sont vagues, la stratégie est déficiente et la participation importante du Canada dans la prise de décisions qui entraîneront tôt ou tard la mort de soldats canadiens est douteuse.
Lorsque l'OTAN est entrée dans cette guerre, le président des États-Unis a déclaré que son pays ne déploierait pas de forces terrestres. Où était le point de vue respecté du Canada? A-t-on bien écouté le Canada? Nous sommes-nous plaints de la stupidité totale de cette tactique? Les Canadiens savent que la voix du Canada n'a pas été entendue. Ils savent également qu'on ne demande pas l'opinion du Canada. Nos soldats sont en guerre contre une puissance militaire chevronnée, alors que notre gouvernement est, à tout le moins, antimilitaire et au pire irresponsable lorsqu'il s'agit de la vie de nos soldats.
À mon avis, le débat que nous tenons ne porte pas sur ce que le Canada devrait faire. Il s'agit de savoir si la vie de Canadiens sera sacrifiée parce que le gouvernement les envoie faire la guerre sans entraînement approprié et, pire encore, sans matériel convenable.
En tant que parlementaire, j'accepte la responsabilité qui incombe aux parlementaires et aux gouvernements de prendre des décisions difficiles. Je peux même accepter que le gouvernement se laisse aveuglément mener par le bout du nez. Ce que je ne peux pas accepter, et qu'aucun parlementaire ne devrait accepter, c'est qu'on confie à nos soldats un travail pour lequel ils ont reçu un entraînement, mais qu'ils n'ont pas les outils pour mener à bien.
Des dizaines de milliers de soldats canadiens sont morts dans des guerres à l'étranger pour assurer aux Canadiens que les décisions qui touchent nos soldats seront prises par des généraux canadiens et par les Canadiens eux-mêmes. J'espère que ces soldats ne sont pas morts pour rien.
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, je n'ai pas eu la chance d'intervenir sur cette question au cours des débats précédents. Malheureusement, je n'avais pas réussi à m'inscrire sur la liste des intervenants.
J'ai cru bon d'aborder la question d'un angle différent, aujourd'hui, en parlant des préoccupations exprimées par mes électeurs, pour ou contre l'intervention militaire.
J'ai reçu une lettre d'un homme âgé qui s'inquiétait de la base aérienne d'Aviano, à savoir si elle était protégée ou non contre d'éventuels missiles de Milosevic. J'ai reçu des lettres affirmant que cette intervention de l'OTAN était tout à fait illégale et qu'elle ne devrait pas avoir lieu.
Certaines personnes ont eu des réactions affectives très fortes. Je dois dire toutefois que, dans l'ensemble, la réaction du public n'a pas été très forte malgré la gravité de la question. La semaine dernière, en faisant le tour des émissions-débats à la radio, dans la région de Vancouver, nous n'avons pas entendu un seul appel sur la question. Malgré la gravité de cette affaire et le fait que le Canada participe à ce conflit international, on dirait que le citoyen moyen croit que c'est trop loin de chez lui, que c'est une chose dont il ne vaut pas la peine de s'inquiéter. Je reçois plus de lettres au sujet des impôts que paient les familles, de problèmes avec le système d'immigration ou de questions de justice que je n'en reçois au sujet de la situation au Kosovo.
Néanmoins, certains expriment des sentiments très forts. Je veux faire part à la Chambre de certains commentaires qui m'ont été communiqués. C'est frustrant pour moi, qui ai voyagé passablement, de n'avoir jamais visité la région où a lieu ce conflit. Aucun de mes électeurs qui m'ont écrit n'y est allé non plus. C'est difficile dans ce cas de bien trier l'information et d'être sûr de se former une impression juste de ce qui se passe exactement au Kosovo.
Il y a peut-être une chose sur laquelle tout le monde s'entend, c'est que ce conflit couvait depuis très longtemps. Sans vouloir attribuer la faute à qui que ce soit ou déterminer les responsabilités de chacun, il me semble utile de préciser que ce conflit ne date pas d'hier. Peut-être les arguments qui veulent que notre intervention ne servira pas à résoudre le problème ne sont-ils pas dénués de sens. Il se peut même que cela envenime les choses.
Il est frustrant de n'y être jamais allé. Il aurait été utile et certainement intéressant d'entendre des commentaires de députés ayant vécu là-bas ou ayant de la famille dans cette région. On aurait ainsi pu obtenir des renseignements privilégiés sur la façon dont les gens se sentent dans ce pays.
Pendant l'une des séances d'information qui ont eu lieu au Comité de la défense la semaine dernière, j'ai posé une question sur le nombre de réfugiés et sur la progression du problème. Y a-t-il dix fois plus de réfugiés maintenant qu'il y a six mois? On m'a répondu qu'il y avait eu une importante augmentation du nombre de réfugiés, mais que cela n'était pas attribuable aux bombardements mais plutôt aux activités policières visant à chasser les gens de chez eux. À mon avis, cela est indirectement lié aux bombardements. Les bombardements ont poussé les policiers à redoubler d'ardeur pour faire sortir les gens de chez eux.
Je n'ai pas eu la chance d'interroger moi-même les témoins et de pousser la question plus loin. Tout cela a également trait à la frustration de ne pas mieux connaître la région et de ne pas être tout à fait certain que les renseignements dont nous disposons sont justes.
Je vous lirai certains passages de lettres que j'ai reçues à ce sujet, pour vous faire part des préoccupations des gens de ma circonscription. M. Ken Moir a écrit que:
Ces gens-là vivent dans la terreur alors que les bombardements se poursuivent. Les bombardements ne donnent pas les résultats escomptés. Le recours à l'infanterie entraînerait des coûts énormes et on ne devrait même pas y songer.
À mon avis, un assaut d'infanterie serait le préambule d'une Troisième Guerre mondiale. Laissons nos députés réfléchir à cette probabilité impensable et se demander sagement comment le Canada procéderait, soit au sein de l'OTAN soit à l'extérieur de l'OTAN. Je crois que [le premier ministre] n'est pas le chef dont nous avons un urgent besoin en ce moment [...] Où est Lester Pearson quand on a besoin de lui? Mon opinion se fonde sur l'expérience que j'ai vécue en Europe au cours de la Seconde Guerre mondiale, de 1943 à 1945.
Voilà ce que m'a écrit quelqu'un que la situation inquiète.
Une dame, Victoria Hogan, qui m'écrit souvent, m'a envoyé par courrier électronique la note suivante qu'elle a adressée au ministre de la Défense:
L'affirmation voulant que 78 p. 100 des Canadiens approuvent les bombardements en Yougoslavie ne reflète pas mon opinion. Si on m'avait interrogée, j'aurais certainement dit NON, comme des centaines de personnes que je connais d'ailleurs. En fait, aujourd'hui, au réseau national de télévision, la chroniqueuse Barbara Yaffe du Sun de Vancouver a déclaré que les médias avaient présenté la version d'un seul côté du conflit en Yougoslavie, ce qui pourrait bien expliquer cette prétendue opinion de la majorité. J'avais pensé cela dès le début, mais Barbara a eu assez de courage pour le dire à la télévision nationale.
Mme Hogan exprime ensuite son opposition à ce qui se passe, en grande partie comme l'a fait Ken Moir, et elle nous demande d'intensifier nos efforts diplomatiques.
Reconnaissons au NPD le mérite de faire justement cette demande dans la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui. Je vais relire la motion pour ceux qui ne l'auraient pas entendue: « Que la Chambre demande au gouvernement d'intensifier et d'accélérer les efforts en vue de trouver une solution diplomatique à la crise au Kosovo en assurant la participation de la Russie et des Nations Unies et d'exhorter l'OTAN à ne pas prendre d'actions qui favoriseraient l'extension du conflit et qui nuiraient à la recherche d'une solution diplomatique».
Il est difficile de ne pas être d'accord avec cette motion. Elle a reçu un grand appui ici aujourd'hui.
Pour revenir à ma correspondance, j'ai reçu un courrier électronique adressé au premier ministre par Nenad Gajic, une personne originaire de la région de la Yougoslavie, je suppose, qui protestait fortement contre la déclaration de guerre de l'OTAN, et par conséquent du Canada, contre la République fédérale de Yougoslavie.
Vous avez agi de façon unilatérale dans cette affaire. Vous avez entraîné le Canada dans une attaque contre un pays souverain qui ne l'avait pas agressé.
La situation semble bien différente aux yeux d'une personne originaire de cette région, qui en est d'ailleurs très troublée. Je sais que d'autres députés ont reçu des courriers électroniques similaires, envoyés par des personnes qui sont venues au Canada comme réfugiés ou comme immigrants et qui pensent que le Canada a eu entièrement tort de déclarer la guerre.
Enfin, j'aimerais mentionner M. Ken Timewell, qui m'écrit régulièrement au sujet de la paix ou de conflits dans le monde. J'ai reçu une lettre de lui, datée du 17 avril.
Je viens juste de rentrer de vacances à l'étranger et j'apprends que le gouvernement canadien appuie activement les bombardements de l'OTAN qui visent des cibles serbes dans les Balkans et qui sont dirigés par les États-Unis. Pire encore, on me dit que les cinq principaux partis politiques au Canada appuient cette intervention militaire illégale. C'est vraiment un triste moment de notre histoire.
M. Timewell ajoute ensuite qu'il n'appuie pas l'intervention militaire agressive des membres de l'OTAN et qu'il ne voit pas ce qu'elle peut produire d'autre qu'une instabilité accrue dans la région.
Il m'a écrit de nouveau quelques jours plus tard et nous avons aussi eu plusieurs entretiens téléphoniques. Cet homme se préoccupait beaucoup de cette question. Il voulait que je fasse part de ses vives inquiétudes à la Chambre, ce que je suis heureux de faire aujourd'hui.
Nous avons discuté longuement de la question de savoir s'il avait une connaissance approfondie de la région. Dans sa deuxième lettre, il m'a écrit ceci:
Contrairement à vous, je n'ai peut-être pas une vaste connaissance de l'histoire récente des Balkans, mais je travaille fort pour me renseigner sur le sujet.
Il ajoute ensuite que, même s'il ne connaît pas la région à fond, il reste opposé à ce genre de conflit et il ne veut vraiment pas que nous nous en mêlions. Il nous encourage ensuite à participer aux efforts diplomatiques. Cela nous ramène à l'objectif de la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Je fais état de certaines des préoccupations qui ont été soulevées. Je dois dire que j'ai reçu davantage de lettres qui dénoncent la situation actuelle que je n'en ai reçu qui l'approuvent. Comme je l'ai mentionné au début de mon intervention, en écoutant les tribunes radiophoniques et en lisant le courrier des lecteurs dans les journaux, on constate qu'il n'y a pas eu beaucoup de réaction de la population.
Je ne sais pas si d'autres députés ont aussi constaté cela dans leur circonscription. Nous avons certes reçu des lettres d'électeurs, mais la population en général ne semble pas avoir réagi.
C'est à peu près tout ce que j'avais à dire officiellement aujourd'hui. J'entendrai volontiers les réactions des députés à ce que j'ai dit aujourd'hui. S'il y a des questions, je répondrai volontiers.
Le président suppléant (M. McClelland): Avant de passer aux observations et questions, le député de North Vancouver peut-il me dire s'il a l'intention de parler pendant dix ou 20 minutes? Va-t-il partager le temps mis à sa disposition avec un autre député?
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, je veux prendre dix minutes pour mon allocution et cinq pour des questions et observations.
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, à l'instar de mon collègue, le député de North Vancouver, je reçois beaucoup de réactions d'électeurs sur cette question. Ils sont très préoccupés par ce qui arrive à l'heure actuelle. J'ai eu droit aussi à un éventail complet de réactions.
Certains m'ont demandé pourquoi j'employais l'argent des contribuables à bombarder là-bas leurs parents. Les gens qui ont de la famille là-bas sont très inquiets. Leurs parents ne prennent pas nécessairement partie dans le conflit initial, mais ils sont tous dans la ligne de feu qui vient d'en haut.
À l'opposé, d'autres se demandent comment il se fait qu'on appelle le monde entier à résoudre un conflit intérieur de leur pays. Ce sont là des questions dont l'examen exige que nous élargissions le débat. Nous devons essayer de voir si nous pouvons y trouver une solution à ces problèmes.
Je crains bien que le gouvernement n'agisse pas de façon très judicieuse. Peu importe ce que nous ferons au Canada, il est très important que nous puissions compter sur le consensus et le soutien de notre peuple. Cela ne peut venir que de la tenue d'un débat et d'un vote sur une question d'une très grande importance.
Nous savons que le gouvernement n'aime pas qu'on discute de sujets controversés. Il y a un jour ou deux, le gouvernement a invoqué de façon fort disgracieuse l'attribution de temps pour un débat sur une question qu'il ne souhaite pas voir débattre trop largement, car il risque d'y avoir du mécontentement. Il a donc eu recours aux dispositions sur l'attribution de temps: nous n'allons pas discuter, nous allons simplement passer à l'action et dire à nos gens comment voter.
Je déplore aussi que nos députés ne puissent pas se prononcer sur la participation du Canada. C'est une erreur. Nous devrions pouvoir dire que nous appuyons nos troupes, si nous les envoyons participer à des opérations. Ou nous devrions pouvoir dire que, pour d'excellentes raisons, nous n'allons pas les envoyer. Tout cela n'est possible qu'avec un débat ouvert et honnête qui se termine par un vote.
Je suis navré de ce qui se passe au Kosovo. J'appuie sans réserve la motion à l'étude. Selon moi, nous devrions régler les problèmes comme ceux-ci par des débats et des votes, et non avec des balles, des sacs à dépouilles ou des bombes. Je sais que c'est là notre dilemme. Nous sommes en présence du président Milosevic qui tient mordicus à attiser ce conflit.
Comme certains membres de ma famille ont eu à souffrir des agissements de pareils dictateurs et de personnes qui n'attachent aucun prix à la vie d'autrui, j'éprouve une vive sympathie pour ceux qui sont chassés de chez eux et de leur pays. C'est exactement ce qui est arrivé à ma famille, il y a à peine 70 ans. Je me souviens, tout jeune, d'avoir entendu des membres de ma famille, mes grands-parents et d'autres en parler. C'est tout à fait pénible.
Lorsque j'ai entendu parler de ces gens et des atrocités qu'ils subissaient, je me suis tout de suite posé la même question que le reste du monde: Que pouvons-nous faire pour mettre fin à cette tuerie? Que pouvons-nous faire pour mettre un terme à ce nettoyage ethnique, comme on l'appelle?
Quelle expression mal appropriée. Cela salit en quelque sorte le mot «nettoyage». J'aimerais qu'on trouve une meilleure façon d'exprimer ce concept. C'est vraiment épouvantable et affreux ce qui se passe là-bas et ce serait bien si nous pouvions persuader le président de ce pays de mettre fin aux hostilités et de reprendre les négociations. C'est ce que nous espérons tous.
Mais que faire avec une personne qui dit: «Non, nous ne négocierons pas. Nous avons établi notre plan d'action et nous allons l'appliquer.» Partons-nous en guerre contre cette personne, qui devra alors assumer les conséquences de ses actes? J'imagine que c'est la seule option qui reste. Dans le cas qui nous intéresse aujourd'hui, nous devons collaborer avec tous les autres pays du monde pour protéger la vie de ceux qui sont si injustement attaqués.
Mon fils a passé un peu de temps dans cette région du monde et peut vous raconter des histoires d'horreur sur les atrocités qui y sont commises. Il y a de ces choses tellement épouvantables que nous évitons d'en parler, notamment des sévices infligés aux femmes et aux enfants.
C'est exactement le sort qu'a connu ma famille lorsque certains de ses membres ont été attaqués. Trois des frères de mon grand-père ont été abattus. Ce jour-là, mon grand-père a dit: «Je crois que nous allons partir.» Ils avaient échappé eux-mêmes aux balles. Ils ont fui, à cause des atrocités commises contre leurs parents et leurs amis.
C'est ce qui se produit actuellement au Kosovo. Les habitants fuient un ennemi et un attaquant terrible et impitoyable. J'ai beaucoup de compassion pour ces gens.
S'il n'en tenait qu'à moi, j'offrirais toute l'aide possible aux gens qui fuient. Cela devrait se faire directement dans la province du Kosovo. Nos troupes pourraient peut-être établir une zone de sécurité dans cette région du pays ou prendre des arrangements avec des provinces voisines et satisfaire aux besoins de ces gens.
Je ne sais pas si les députés peuvent s'imaginer la situation. Nous tenons pour acquis tout ce qui rend notre vie agréable. Ce qui a le plus frappé mon fils, c'est ce que cette région du monde ressemble beaucoup à la nôtre. Les maisons sont pareilles. Les rues des villages et des villes sont pareilles. La seule différence, quand on y regarde de plus près, c'est que les maisons sont criblées de trous laissées par les balles.
Il est vraiment épouvantable de penser que demain nous pourrions être expulsés de chez nous. Nous n'aurions plus de lit où dormir. Nous n'aurions plus le confort auquel nous sommes tellement habitués. Nous nous retrouverions à l'extérieur. Si nous avions de la chance, nous serions sous une tente. Sinon, nous serions en pleine nature, sans nourriture, sans eau, sans abri.
Certains réfugiés sont malades ou blessés. J'aimerais vraiment que le Canada fasse preuve de leadership. Nous avons la réputation d'être des gardiens de la paix et de prendre soin de gens avec humanité. J'aimerais que le Canada intensifie ses efforts dans ce domaine pour au moins satisfaire aux besoins physiques immédiats des gens qui ont échappé aux ravages de cette attaque.
Je sais qu'il y a beaucoup d'organisations non gouvernementales qui travaillent là-bas. J'encourage notre gouvernement à les appuyer car je pense qu'elles dispensent ce genre d'aide de manière très efficace. Du moins, les organisations que je connais. Elles sont sur place. Elles tendent une main secourable et amicale à ces gens, et c'est exactement ce qu'il faut que nous fassions.
En attendant, nous devrions réellement étudier très sérieusement ce que nous pouvons faire, comme le propose la motion, pour forcer la main à M. Milosevic et le ramener à la table des négociations pour parler de ses projets et de ce que nos pouvons faire pour régler le problème et mettre fin aux atrocités qui sont commises.
Je ne suis pas en mesure de juger des tactiques militaires auxquelles on a recours car je ne suis pas un stratège militaire, mais je suis convaincu qu'il faut faire quelque chose et j'encourage le Canada à intensifier ses efforts diplomatiques.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, bien que je respecte le député d'en face et que je partage certaines de ses vues, je me dois de lui faire remarquer une chose. Il a réclamé un débat. Or, à ce qu'il me semble, nous sommes en plein débat. C'est un débat où au moins ce député estime ne pas parler au nom du gouvernement, mais plutôt au nom du pays, car je parle au nom du pays.
Qu'il y ait un vote ou non à la fin de ce débat, ce qui importe c'est que nous soyons ici en notre qualité de député, en fait les rares personnes au pays à pouvoir s'exprimer sincèrement, à pouvoir parler au nom des électeurs de la situation qui a actuellement cours au Kosovo.
Le député a fait allusion à l'absence de vote et je me dois de réagir à cette remarque, sans vouloir pour autant que ce débat ne prenne une allure par trop partisane. Malheureusement, son chef passe son temps à se plaindre de l'absence de vote dans ce genre de débat.
Nous ne sommes pas les États-Unis. Aux États-Unis, le président peut déclarer unilatéralement la guerre. Il est le chef des forces armées et il n'a pas de comptes à rendre au Congrès. C'est vrai qu'aux États-Unis, il peut faire un bon bout de chemin avant qu'il n'ait plus d'argent pour poursuivre la guerre. Mais au Canada, notre dirigeant, s'il se lance dans une entreprise militaire, qu'il s'agisse d'une guerre déclarée ou pas, est toujours à la merci de la Chambre qui peut à tout moment lui retirer sa confiance par un vote. Aux États-Unis, on ne peut se débarrasser du président qu'en recourant au processus de destitution, s'il décide de se lancer dans une aventure militaire de quelque nature que ce soit, comme la guerre du Vietnam par exemple. Mais ici, la Chambre peut toujours voter le renvoi du gouvernement.
La réalité, toutefois, c'est que quand vient le moment pour les députés de décider de la politique à suivre en période de conflit, qu'il s'agisse d'une guerre ou d'un différend diplomatique, nous ne pouvons faire des choix éclairés si nous ne sommes pas présents à la table des négociations de l'OTAN, si nous n'avons pas les mêmes informations que le premier ministre.
Le premier ministre est branché sur les services de renseignements. Le ministre des Affaires étrangères a des entretiens avec les Russes. Tout cela à propos de ce que nous ferons ou non demain, qu'il s'agisse d'envoyer une frégate en mer pour faire appliquer l'embargo ou bien de recourir aux troupes de combat ou aux forces de maintien de la paix.
On ne peut nous demander à nous, députés, qui ne sommes pas présents à la table des négociations de décider de l'avenir de la nation. Nous ne pouvons être à la table des négociations, comme nous l'avons vu, parce qu'un député du Parti conservateur a posé à la Chambre des questions concernant la divulgation d'opérations secrètes en Yougoslavie, ce qui, théoriquement, pourrait mettre en danger les membres de nos forces. Tant que nous ne pouvons garantir que les députés garderont les secrets qui leur sont confiés, nous ne pourrons avoir un vote dans cette Chambre parce que nous pourrons pas avoir toutes les informations.
M. Ken Epp: Monsieur le Président, pour une raison ou une autre, je crois encore que le fondement de la démocratie, son essence même, est le vote populaire. Je crois que nous avons tous été envoyés ici par des Canadiens qui ont voté pour nous, et nous prenons les décisions à la Chambre au moyen d'un vote. Je trouve une certaine ironie à notre situation actuelle, alors que nous traitons d'une question aussi importante.
L'une des choses qui comptent beaucoup pour moi est le fait que ces gens qui sont maintenant déployés en Macédoine, afin d'être prêts à entrer en guerre terrestre, sont des soldats de ma circonscription. Je devrais être capable d'en débattre et de voter sur la question de savoir si nous les engagerons, au péril de leur vie, de leur santé et de leur sécurité. Étant leur représentant à la Chambre des communes, l'instance suprême au pays, je devrais avoir le pouvoir de m'exprimer en leur nom au moyen d'un vote. Je ne crois pas que je changerai d'idée là-dessus.
C'est sûr que le député d'en face a fait valoir des arguments assez puissants. S'il peut me convaincre que, de son côté, tous les députés d'arrière-ban, qui votent du côté du gouvernement parce qu'il le faut, connaissent à fond toutes les questions, je trouverai peut-être que son argument a un peu plus de poids.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 30, j'ai le devoir d'informer la Chambre que le débat sur la motion est terminé.
La Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
L'HÉPATITE C
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC) propose:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour trouver un règlement équitable et humanitaire à l'intention des personnes qui ont été infectées par le virus de l'hépatite C à cause du système de distribution des produits sanguins et pour financer des programmes de recherche, d'éducation et de soutien afin de détecter d'autres troubles de saignement héréditaires, et surtout la maladie de Willebrand.
—Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet de cette question, qui arrive à point nommé. Je rappelle à la Chambre qu'il y aura un an demain que nous avons voté au sujet du programme d'indemnisation de toutes les victimes de l'hépatite C. La Chambre avait alors adopté la motion suivante:
Que la Chambre exhorte le gouvernement à donner suite à la recommandation du juge Horace Krever d'indemniser toutes les personnes qui ont contracté l'hépatite C à partir de sang contaminé.
La difficulté tient évidemment au fait que le gouvernement ne reconnaît que les personnes contaminées entre 1986 et 1990. C'est la raison pour laquelle je présente cette motion. Les personnes contaminées avant ou après cette période méritent tout autant d'être indemnisées que les personnes contaminées durant la période d'admissibilité. Le gouvernement a délibérément retenu une période très courte. Cette décision a créé des problèmes.
J'ai toujours cru, et c'est sans doute le cas de la plupart d'entre nous, que le Canada est un pays très juste et généreux. Il y a quelque chose de terriblement mal à concevoir un programme d'indemnisation qui ne s'applique pas à toutes les victimes.
Je voudrais citer des chiffres, simplement pour illustrer à quel point les Canadiens sont généreux. En tant que peuple, groupe et pays, nous sommes fortement en faveur d'une indemnisation de toutes les victimes. Il y a des statistiques, mais les statistiques n'expliquent pas tout. Je suis le premier à reconnaître qu'aucun gouvernement ne devrait fonder ses décisions exclusivement sur l'opinion publique, car il y a d'autres facteurs à prendre en considération. Je crois cependant que ces statistiques donnent une idée de ce que pensent les Canadiens.
Selon ces chiffres, 89 p. 100 des Canadiens sont en faveur d'une aide financière à toutes les personnes affectées gravement par l'hépatite C après avoir reçu des transfusions de sang contaminé; 83 p. 100 des Canadiens estiment injuste que les personnes contaminées avant 1986 ne soient pas admissibles à une indemnisation. Seulement 9 p. 100 des répondants ont jugé cela équitable.
L'indemnisation reçoit un appui à peu près unanime à la grandeur du pays. Ainsi, le taux d'appui atteint 88 p. 100 en Ontario, 93 p. 100 au Québec, 87 p. 100 en Colombie-Britannique, 84 p. 100 dans les Prairies et 95 p. 100 dans la région de l'Atlantique. Les statistiques concernant le taux d'appui des Canadiens en faveur d'une indemnisation de toutes les victimes sont des plus convaincantes.
Je cite directement le rapport du juge Krever; dans le volume 3, à la page 1168, le juge Krever dit:
Les mesures prises par une société pour atténuer les répercussions d'une tragédie sur ses membres permettent d'évaluer la compassion dont elle fait preuve.
Plus loin, à la page 1187, il dit ceci:
Jusqu'ici, le traitement que nous avons réservé aux victimes de préjudices liés au sang n'a pas été équitable. Après avoir subi, pendant des années, des pertes financières catastrophiques, de nombreuses personnes infectées par le VIH à la suite de transfusions de sang ou de produits sanguins, ou les membres survivants de leurs familles, ont finalement reçu une aide financière. D'autres Canadiens...
Il s'agit des victimes de l'hépatite C.
qui ont également été victimes de préjudices à la suite d'une thérapie sanguine n'ont reçu aucune indemnité. Pourtant, les besoins des victimes sont analogues, indépendamment de la cause du préjudice et de la possibilité d'établir la faute. On ne saurait, à mon avis, justifier l'indemnisation de certaines victimes dans le besoin et la refuser à d'autres.
Je pense que les Canadiens sont tout à fait d'accord avec le juge Krever. On ne peut justifier un plan d'indemnisation qui exclut certaines victimes. Pensons aux dates, 1986 à 1990. Cela signifie que les victimes infectées par suite d'une transfusion sanguine le 31 décembre 1985 ne seraient pas indemnisées. Le lendemain, le 1er janvier 1986, elles le seraient.
Par quelle logique perverse peut-on en venir à croire qu'un tel plan serait jugé acceptable par la population canadienne? Il n'est pas acceptable. À la Chambre, nous l'avons combattu pendant des mois pour cette raison même.
Il y aura un an demain, les libéraux ont appuyé un plan qui est discriminatoire envers les victimes accidentelles de l'hépatite C. Pourquoi l'ont-ils fait? Ils n'ont fait que céder aux pressions exercées par le premier ministre. Ils l'ont tous fait.
Une voix: Y compris le ministre de la Santé.
M. Greg Thompson: Le ministre de la Santé aussi. Ils savaient tous parfaitement bien que c'était injuste.
Mme Elinor Caplan: Ce n'est pas vrai.
M. Greg Thompson: Monsieur le Président, la secrétaire parlementaire du ministre de la Santé aura l'occasion de prendre la parole, mais je lui rappelle que c'est vrai. Ils se sont pliés aux désirs du premier ministre.
Demain, sur la colline du Parlement, il y aura un petit rassemblement. Il sera organisé par un jeune homme appelé Joey Haché, qui a sillonné le Canada à bicyclette, l'année dernière, pour tenter de sensibiliser l'opinion publique à cette question.
Je vais lire un passage de l'avis, mais je n'entends pas le brandir:
Le mercredi 28 avril, à midi, sur les marches du Parlement... pas de rassemblement... seulement une déclaration. Je demande à tous les députés d'opposition de se joindre à moi pendant cinq minutes pour montrer aux victimes de partout au Canada qu'elles n'ont pas été oubliées. Pouvons-nous encore compter sur votre appui contre les libéraux?
Il peut compter sur l'appui des députés de ce côté-ci de la Chambre. Je crois qu'il peut probablement compter aussi sur l'appui de certains députés d'en face qui ont trouvé bien difficile de devoir appuyer une mesure à laquelle ils ne croyaient pas. Ils ont eu une année pour y réfléchir.
Ce qui est stupide à propos de la position du gouvernement, c'est qu'il affirme que, puisqu'il n'a pas les moyens d'indemniser toutes les victimes, il en indemnisera quelques-unes. Selon moi, cette position est dictée davantage par le ministre des Finances que par le ministre de la Santé. À maintes reprises, pendant la période des questions, j'ai demandé que le vrai ministre de la Santé se lève. Les députés savent-ils quel ministre aurait dû se lever alors? Le ministre des Finances, car c'est lui qui tient les cordons de la bourse. C'est lui plutôt que le ministre de la Santé qui a déterminé qui serait indemnisé. C'est tellement ridicule qu'on ait annoncé que 1,1 milliard de dollars serait versé, mais seulement à ceux qui avaient été contaminés entre 1986 et 1990.
Certains députés ont parlé aujourd'hui des hélicoptères. Or, c'est ce même gouvernement qui a annulé le contrat visant l'acquisition d'hélicoptères qui étaient pourtant nécessaires. Il a annulé un accord juridique ayant force exécutoire et cela a coûté 750 millions de dollars aux contribuables canadiens. Pas un seul hélicoptère n'a été construit. Cette question revient hanter la Chambre de temps à autres, mais aujourd'hui c'est justement parce que notre débat porte notamment sur des événements internationaux. Le gouvernement a annulé l'accord, réglant uniquement les frais juridiques, pour se soustraire à un marché. C'est incroyable.
Le gouvernement a fait la même chose dans le cas de l'aéroport Pearson. Les Torontois ont de la difficulté maintenant parce qu'il y a un manque de leadership au gouvernement concernant l'agrandissement de l'aéroport Pearson. Qu'a fait le gouvernement dans ce cas? Il a annulé le contrat. Cela a coûté plus d'un milliard de dollars aux contribuables canadiens, simplement pour annuler un contrat ayant force exécutoire dont le gouvernement ne voulait pas.
À eux seuls, ces deux contrats représentent environ 1,75 milliard de dollars. Toutefois, aux fins de la discussion, nous pouvons dire 2 milliards de dollars, puisque le gouvernement ne cesse d'ajouter à la facture de l'aéroport Pearson. Nous ne savons toujours pas comment tout cela va se régler.
Le gouvernement affirme qu'il ne peut pas indemniser les victimes de l'hépatite C, mais rien ne l'empêche de mener une vendetta politique contre quelque groupe que ce soit, et à n'importe quel prix. Il n'a pas à parler de l'indemnisation d'innocents Canadiens. La question revient au premier ministre. Il n'est pas trop tard pour agir.
On pourrait logiquement se demander pourquoi cet infâme dossier serait de nouveau réintroduit à la Chambre des communes. N'en a-t-on pas suffisamment parlé l'année dernière? Nous n'avons pas fait le tour de la question et ce dossier resurgira sans arrêt tant que le gouvernement ne l'aura pas réglé de façon satisfaisante. Les députés entendront des commentaires de ce genre de notre part de temps à autres. Nous continuerons de présenter des motions et d'avoir recours au Règlement pour rappeler au gouvernement qu'il a mal agi.
Il suffit de lire certaines coupures de journaux pour se rendre compte de l'incompétence des libéraux dans ce dossier. La Croix-Rouge, qui a pourtant eu sa part de problèmes, dit que toutes les victimes devraient être indemnisées. La manchette du Globe and Mail du 19 septembre dernier disait: «L'indemnisation des victimes du sang contaminé est exclue: l'offre d'Ottawa visant à améliorer les soins de santé est accueillie avec mépris».
La question a même été débattue au Sénat, cette chambre du second examen objectif que nous sommes toujours prêts à critiquer, qui a recommandé l'indemnisation de toutes les victimes. Et que s'est-il passé? Certaines provinces ont pris leurs propres mesures. Ces gouvernements ont fait preuve de leadership. Le gouvernement de l'Ontario a reconnu que ces gens avaient subi une injustice et il a indemnisé toutes les victimes de cette province.
En décembre dernier, j'ai invité le Nouveau-Brunswick a faire de même. Le 16 décembre 1998, j'ai rencontré à ce sujet le premier ministre Thériault et sa ministre de la Santé, Mme Breau. J'ai avancé l'idée qu'ils devraient indemniser toutes les victimes ou au moins accorder provisoirement une indemnisation en attendant qu'une entente soit conclue.
L'autre fait déplorable, à propos de l'indemnisation annoncée, c'est que pas une seule victime n'a encore reçu un sou. Nous sommes maintenant plongés dans de longues procédures parce que le gouvernement actuel a mal géré le dossier.
Nous disons que les provinces doivent agir seules. Elles doivent, unilatéralement, imiter l'exemple de l'Ontario. Nous voudrions que la même chose se passe dans toutes les provinces. Si elles doivent assumer le leadership, qu'il en soit ainsi. Le gouvernement fédéral refuse de le faire et il n'a pas fait preuve du moindre leadership.
En toute justice, il faut dire que nous avons tous été déçus que l'indemnisation annoncée soit limitée aux personnes contaminées entre 1986 et 1990. Nous voulons que toutes les victimes soient indemnisées. J'ai hâte d'entendre la suite du débat sur la motion.
Mme Elinor Caplan (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole pour débattre de cette motion qui a été présentée à la Chambre pour la première fois en 1997. Je dois dire au député d'en face qui l'a présentée que beaucoup de choses se sont passées depuis.
J'aimerais profiter de cette occasion pour parler de cette question fort importante et pour rappeler à la Chambre l'initiative prise par le gouvernement fédéral et, plus particulièrement, par le ministre de la Santé en ce qui concerne la question de l'hépatite C.
Certes, la situation des Canadiens qui ont contracté l'hépatite C par l'intermédiaire du système d'approvisionnement en sang suscite en nous un élan irrésistible de sympathie et de compassion. Ces personnes étaient soit malades soit blessées et avaient besoin d'une transfusion. Elles se sont alors tournées vers le système d'approvisionnement en sang. Le juge Krever a dit très justement dans son rapport final que le système d'approvisionnement en sang n'avait fait qu'aggraver leurs problèmes, car le sang qu'elles ont reçu était contaminé par l'hépatite C.
En 1998, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé ont mis 1,1 milliard de dollars sur la table pour régler les poursuites et les réclamations judiciaires pour la période allant de 1986 à 1990. Nous savons d'après le débat qui a eu lieu à la Chambre que si on a choisi cette période c'est que tant le juge Krever que les spécialistes de la politique gouvernementale ont établi que si on avait pris des décisions différentes en 1986, les résultats n'auraient pas été les mêmes. Nous savons qu'il est toujours difficile de juger de ces questions. Mais au Canada des décisions ont été prises qui n'étaient pas conformes aux normes internationales établies en 1986.
En décembre, un accord de principe a été conclu par les négociateurs. On me dit que des progrès énormes ont été faits en vue de finaliser la proposition de règlement qui sera soumise à l'approbation des tribunaux. C'est un gros progrès dans ce dossier qui est aussi délicat qu'important. Nous pensons que, quel que soit le règlement proposé, il revient aux tribunaux de déterminer si cela est juste. C'est le fondement de la politique du gouvernement: équité et compassion.
Quels que soient les détails du règlement, le gouvernement est persuadé que ces négociations ont été la meilleure façon de procéder, étant donné que ces questions doivent être résolues par des tribunaux et que le Canadiens souhaitent une résolution complète et responsable de la question.
J'ai eu le privilège de tenir une fonction officielle pendant près de 20 ans, dont douze ans au niveau provincial, soit cinq ans au gouvernement et sept ans dans l'opposition. Je souhaite dire aux députés d'en face que faire partie de l'opposition leur offre le luxe de pouvoir être quelque peu irresponsables. Pour mener une bonne politique gouvernementale, un gouvernement doit faire preuve de responsabilité dans les décisions qu'il propose. À mon avis, le gouvernement a fait preuve de responsabilité et de compassion dans son approche de la question.
Conformément à la tradition canadienne de compromis modéré, nous résoudrons de façon responsable les questions difficiles du passé liées à l'hépatite C.
Au bout du compte, ce règlement négocié devrait, sur le plan financier, apporter un certain réconfort à bon nombre de personnes qui ont contracté l'hépatite C par le biais du système d'approvisionnement en sang.
Toutefois, le gouvernement fédéral a dû adopter un point de vue plus large et à plus long terme. L'hépatite C est une maladie encore assez récente pour les communautés scientifique et médicale. Le gouvernement a pris des mesures décisives.
En septembre dernier, le ministre de la Santé a annoncé un programme fédéral global, y compris l'octroi de fonds pour la recherche médicale, le soutien communautaire, la sensibilisation du public, l'amélioration des mécanismes de détection des maladies et du travail de recherche visant à retracer ceux qui ne sauraient peut-être pas encore qu'ils ont contracté le virus de l'hépatite C. Le ministre de la Santé a annoncé une proposition qui prévoit le versement d'un important paiement de transfert aux provinces et aux territoires et qui vise à faire en sorte que le système de santé de chaque province réponde le plus rapidement et le mieux possible aux besoins en matière de santé des personnes infectées.
Ce ne fut pas une tâche facile. Il convient de rappeler que le gouvernement fédéral a dû faire preuve de leadership pour que cette question reçoive l'attention qui lui a été accordée et pour que nous soyons là où nous en sommes aujourd'hui, alors que nous tentons de régler les poursuites des personnes infectées entre 1986 et 1990 et de dispenser des services de santé à ceux qui ont été infectés en dehors de cette période. Si d'autres décisions avaient été prises, les résultats auraient peut-être été différents.
L'investissement du gouvernement fédéral à l'égard des victimes de l'hépatite C est maintenant considérable et il totalise plus d'un milliard de dollars. Cependant, l'engagement du gouvernement fédéral à ce chapitre ne se mesure pas seulement sur le plan monétaire. Les initiatives gouvernementales témoignent aussi de l'engagement du gouvernement à favoriser l'accroissement des connaissances et les progrès scientifiques et à encourager l'établissement de nouvelles relations productives tout en préservant et en respectant le rôle des autorités fédérales en matière de santé et de soins.
Je voudrais prendre quelques minutes pour passer en revue certains succès que le leadership du gouvernement fédéral a permis d'obtenir dans le dossier de l'hépatite C, en l'espace de quelques années seulement. Nous reconnaissons tous qu'il reste des choses à faire, mais nous ne prenons pas suffisamment le temps de reconnaître ce qui a été accompli.
Tout d'abord, permettez-moi de souligner que, comme dans toute chose au Canada, il a fallu la collaboration des différents paliers de compétence. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont travaillé en étroite collaboration pour que la mise en place d'un nouveau système d'approvisionnement en sang, un système qui inspirerait confiance aux Canadiens, se fasse le plus rondement possible et que le sang et les produits sanguins au Canada soient aussi sûrs qu'ils peuvent l'être.
De son côté, le gouvernement fédéral a joué un rôle de premier plan dans ce qui a été une transition très réussie. Un élément clé de ce succès a été d'amener tous les gouvernements à s'entendre pour que la sécurité du système soit la première priorité. C'est là un grand succès. C'est un changement majeur.
Les 125 millions de dollars d'argent frais accordés pour la fonction fédérale de réglementation et de surveillance de la maladie ainsi que l'enveloppe pouvant atteindre 50 millions pour aider les provinces à dépister les personnes infectées par l'hépatite C démontrent clairement que le gouvernement fédéral tient à ce que ces activités disposent de ressources suffisantes.
Le gouvernement fédéral a reconnu que les personnes infectées par l'hépatite C n'ont peut-être pas toujours un accès raisonnable aux services de santé dont ils pourraient avoir besoin au fil des ans. Les nouveaux fonds devraient aider à régler ce problème. Le ministre de la Santé a offert 300 millions de dollars aux provinces et aux territoires pour payer les services médicaux dont les personnes atteintes de l'hépatite C auront besoin au cours des 20 prochaines années et pour concentrer notre attention sur la recherche de solutions aux problèmes associés à la maladie. Les provinces et les territoires n'ont pas encore tous répondu.
Nous avons aussi pris des mesures pour combler le besoin en information et en soutien. Nous ne pouvions pas attendre que les travaux de recherche aient atteint par eux-mêmes leur vitesse de croisière. Pour cette raison, le ministre fédéral de la Santé a déclaré qu'il réserverait 50 millions de dollars pour la recherche sur l'hépatite C au cours des cinq prochaines années parce que nous avons besoin de réponses pour pouvoir aider les personnes touchées par cette maladie.
Je suis heureuse de signaler que le gouvernement fédéral finance des initiatives visant à informer les professionnels de la santé et les Canadiens au sujet de l'hépatite C. Tout cela montre que nos efforts sont efficaces.
Enfin, nous savons que beaucoup de personnes souffrant d'invalidité présentent des demandes pour obtenir des prestations du Régime de pensions du Canada comme source importante de revenu. Ces gens ont toutes sortes de handicaps, mais nous savons tous, d'après le travail que nous faisons dans nos circonscriptions, que le processus de détermination de l'admissibilité aux prestations d'invalidité du RPC est très exhaustif. Cela veut dire que c'est difficile.
Les préposés au règlement des demandes du RPC examinent chaque cas pour déterminer si le handicap empêche vraiment la personne d'occuper n'importe quel emploi. Pour s'assurer que les préposés au règlement des demandes connaissent bien l'hépatite C et ses effets, Développement des ressources humaines Canada a donné une formation bien précise à ces préposés. Les personnes souffrant d'hépatite C auront désormais affaire à des préposés au règlement des demandes qui sont sensibles à leur situation et qui comprennent cette maladie. C'est quelque chose dont nous ne parlons pas, mais c'est très important.
Ce sont là des activités qui nécessitent le genre d'engagement que nous avons vu de la part du gouvernement fédéral. Sans cet engagement, l'approche globale adoptée à l'égard du problème de l'hépatite C ne serait pas aussi bien appuyée qu'elle ne l'est aujourd'hui.
La dernière remarque que je ferai à ce sujet aujourd'hui dans le cadre du débat sur cette importante motion, c'est que, à mon avis, non seulement les mesures prises par le gouvernement fédéral sont adéquates sur le plan de la politique, mais c'était vraiment la chose à faire.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la motion M-273 dont nous discutons aujourd'hui est noble et devrait recueillir l'appui de tous les partis à la Chambre, sauf celui des libéraux, bien sûr.
Comme nous le savons, ils n'ont pas accordé leur appui à ce genre de motion il y a exactement un an demain. Joey Haché était présent ce jour-là. Joey est une jeune victime du sang contaminé. Il était à la tribune pendant que les libéraux se prononçaient contre le fait de l'indemniser pour sa maladie. Il y a un an, les Canadiens ont été témoins d'un vote très important à la Chambre sur une question qui ne peut être qualifiée que de tragique.
C'est le gouvernement fédéral qui contrôlait le système canadien de distribution des produits sanguins qui ont infecté quelque 60 000 Canadiens. Nous avons forcé la Chambre à mettre cette question aux voix en raison de la position dépourvue de compassion du ministre de la Santé. Au début, il voulait clore le dossier et n'indemniser personne. Aujourd'hui, après une résistance de près d'un an, il accepte d'indemniser environ 20 000 victimes du sang contaminé.
L'an dernier, 1 200 de ces victimes sont mortes. Beaucoup de victimes sont déjà décédées. C'est comme si le ministre de la Santé tergiversait afin que le plus grand nombre possible de victimes meurent avant qu'il se voie finalement dans l'obligation de puiser dans les coffres de l'État l'argent des contribuables que lui et son collègue, le ministre des Finances, ont pris sur les chèques de paye des Canadiens pour indemniser les victimes qui ont lutté pour demeurer en vie sans aucune aide du gouvernement libéral.
Bon nombre de députés de ce côté-ci de la Chambre étaient très tristes, très émus et très en colère lorsque le vote a eu lieu à la Chambre. Nous savions que les libéraux se prononceraient contre l'indemnisation des Canadiens infectés par du sang contaminé dont la distribution relevait du gouvernement fédéral. Nous étions frustrés de ce côté-ci de la Chambre, mais nous avons tenté de convaincre les libéraux de permettre à la Chambre des communes d'agir comme il convient.
En face, on versait des larmes d'une autre sorte. Les députés libéraux de l'arrière-ban pleuraient ouvertement car, même si leurs électeurs et eux-mêmes estimaient qu'ils devaient venir en aide aux personnes infectées par le sang contaminé, ils devaient voter contre l'aide à ces Canadiens. Si ces députés libéraux ne votaient pas comme on leur avait dit de voter, le premier ministre s'assurerait qu'ils soient punis.
Il n'y aura pas de vote libre à la Chambre tant et aussi longtemps qu'un parti politique traditionnel du genre de celui d'en face aura la majorité des sièges à la Chambre.
Les libéraux ne veulent même pas que les séances des comités parlementaires soient télévisées. Pourquoi? Parce qu'ils veulent que les Canadiens en sachent le moins possible à propos de cet endroit. Ils veulent cacher la façon dont ils forcent les leurs à voter et à gouverner.
Les Canadiens connaissent l'attitude dictatoriale du premier ministre et le manque de compassion dont le gouvernement a fait preuve à l'égard des Canadiens. Nous le savons parce qu'il continue de dépenser l'argent des impôts et qu'il refuse de nous accorder un allégement fiscal même si le budget est excédentaire. Les familles canadiennes n'ont jamais été autant imposées que par le présent gouvernement.
À l'heure actuelle, à l'extérieur de la Chambre, des Canadiens travaillent à une solution de rechange aux partis politiques traditionnels. Cette solution de rechange sera vraiment démocratique et mettra fin aux gouvernements formés par des partis qui parlent de démocratie, mais qui n'ont plus rien de démocratique une fois au pouvoir.
Depuis son élection, le gouvernement a réduit de 23 milliards de dollars le budget des soins de santé et de l'éducation. Le gouvernement a refusé de supprimer le gaspillage et le chevauchement des dépenses fédérales. Il a déjà dépensé 450 millions de dollars sur un système d'enregistrement des armes à feu dont le coût est estimé à 1,2 milliard de dollars. Les libéraux semblent prendre de l'argent à la santé et à l'éducation pour financer le très contestable système d'enregistrement des armes à feu. En fait, le gouvernement devrait mettre l'accent sur l'éducation et les soins de santé dont nos enfants ont besoin.
M. Wayne Easter: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Le député d'en face n'est-il pas obligé de s'en tenir au sujet? Il doit rêver qu'il faisait partie du caucus libéral plutôt que du caucus réformiste lorsque tous ces députés ont été rappelés à l'ordre à cause de leurs indiscrétions.
Le président suppléant (M. McClelland): Cela ne relève certes pas du recours au Règlement. Le député de Surrey-Centre s'en est tenu et s'en tient au sujet. Le sujet tourne en rond et il fait partie du cercle.
M. Gurmant Grewal: Monsieur le Président, mon intervention est tout à fait pertinente; j'explique ce que le gouvernement est censé faire, mais ne fait pas. En fait, il prend dans les secteurs de la santé et de l'éducation de l'argent qu'il devrait consacrer aux enfants et aux familles. Autrement dit, le gouvernement ne s'est pas donné les bonnes priorités. Par exemple, il dépense des millions de dollars pour distribuer des drapeaux gratuitement.
Le gouvernement libéral a dépensé 3 milliards de dollars pour aider 40 000 pêcheurs qui se sont retrouvés sans emploi à cause de sa mauvaise gestion de l'industrie des pêches sur la côte est.
Pourquoi les libéraux ne dépenseraient-ils pas de l'argent pour aider les 40 000 survivants de l'hépatite C, qui voient maintenant leur vie menacée à cause du système d'approvisionnement sanguin géré par le gouvernement fédéral?
Je pourrais donner de nombreux autres exemples, mais j'ai peu de temps pour décrire le bilan honteux du gouvernement qui est à l'origine de la motion dont la Chambre est saisie. Le gouvernement libéral a retenu le juge Krever devant les tribunaux pour l'empêcher de rendre compte aux Canadiens de ce qu'il avait appris durant son enquête. Le ministre de la Santé a refusé au juge Krever l'accès à des documents cruciaux, mais ce dernier a néanmoins continué son combat et a refusé de céder. Il a présenté son rapport à la Chambre, mais le gouvernement libéral n'en a à toutes fins utiles pas tenu compte.
L'Ontario et le Québec sont prêts à indemniser toutes les victimes de l'hépatite C. À l'opposé, le ministre de la Santé du gouvernement libéral indemnise seulement ses amis qui oeuvrent dans le secteur juridique en leur donnant les moyens d'intenter des poursuites judiciaires au nom des victimes. Ces dernières doivent leur payer leurs honoraires, afin d'obtenir une indemnisation du gouvernement fédéral, ce même gouvernement qui les a infectées en leur donnant du sang contaminé.
L'opposition officielle a demandé d'indemniser, avant qu'il ne soit trop tard, toutes les victimes du sang contaminé, qui ont besoin d'aide dès maintenant. Mon parti continuera d'exiger un fonds d'assurance sans égard à la responsabilité pour toutes les victimes. Je rappelle d'ailleurs aux chahuteurs d'en face, au cas où ils l'auraient oublié, que c'était une des recommandations du juge Krever.
Quelque 87 p. 100 des Canadiens croient que les gouvernements provinciaux et fédéral ont l'obligation morale d'indemniser ces victimes et 72 p. 100 des Canadiens croient qu'il est injuste d'indemniser les personnes séropositives et les sidéens mais de refuser l'indemnisation aux victimes de l'hépatite C.
Au sujet de la deuxième partie de la motion, je dirais qu'il existe un certain nombre de maladies que nous pourrions tenter de dépister et de traiter, y compris la maladie de Willebrand. Nous devrions nous intéresser à ces maladies.
Le député qui a proposé cette motion sait sûrement que jamais les libéraux ne tiendront compte de sa proposition. Le gouvernement libéral est complètement dépourvu de compassion et manque de largeur de vues.
Ces maladies et ces troubles de saignement devraient tous faire l'objet de recherches. Je parle d'un contexte plus large. Nous devrions mener les meilleures recherches possibles pour nous attaquer à ces maladies et les faire disparaître de notre système de distribution des produits sanguins. Nous pourrions faire de grands progrès, mais il nous faudrait un plan d'action et des objectifs à long terme. Nous savons que les libéraux n'ont aucun projet en tête et ne veulent rien faire.
En conclusion, la motion dont nous sommes saisis n'est qu'un voeu pieux. Les Canadiens savent que les libéraux s'y opposeront, feront traîner les choses en longueur, s'entêteront et se débattront avant de faire preuve de compassion et d'indemniser les victimes qui ont reçu du sang contaminé provenant du système d'approvisionnement sanguin contrôlé par le gouvernement.
[Français]
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, aujourd'hui, il est triste que nous devions débattre une fois de plus d'un tel sujet. Cela fait plus d'un an que le juge Krever a déposé son rapport. Ce sera l'anniversaire demain et rien n'est réglé jusqu'à maintenant pour les victimes de l'hépatite C.
La motion du député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, qui a été déposée en novembre 1997, soit quelques jours seulement après le dépôt du rapport Krever, est encore d'actualité car elle recommandait une indemnisation de toutes les victimes du sang contaminé.
La motion qui est à l'étude ce soir se lit comme suit:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour trouver un règlement équitable et humanitaire à l'intention des personnes qui ont été infectées par le virus de l'hépatite C à cause du système de distribution des produits sanguins et pour financer des programmes de recherche, d'éducation et de soutien afin de détecter d'autres troubles de saignement héréditaires, et surtout la maladie de Willebrand.
On en est encore à débattre d'une motion qui est d'actualité, un an après le dépôt du rapport du juge Krever. C'est cela qui est triste.
Après le dépôt du rapport, le gouvernement a, en mars 1998, après avoir voté contre une motion de l'opposition qui demandait l'indemnisation de toutes les victimes de l'hépatite C, accordé une indemnisation de 1,1 milliard de dollars aux personnes qui ont contracté l'hépatite C entre le 1er janvier 1986 et le 1er juillet 1990, parce qu'il ne reconnaissait pas son erreur, ni avant ou après ces dates.
Plus d'un an après cette annonce, il est encore triste de voir que cette motion a toujours son sens—triste mais vrai—car il n'y a toujours pas d'indemnisation juste et équitable pour toutes les victimes de l'hépatite C qui ont été contaminées par ce sang. Comme le disent les victimes de l'hépatite C: «Ce sang pourri qui nous a été injecté.»
La motion M-273 demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour trouver un règlement équitable et humanitaire à l'intention des personnes qui ont été infectées par le virus de l'hépatite C. Dans ce sens, un premier pas pourrait être fait, soit le transfert au gouvernement du Québec de sa part du 300 millions de dollars, annoncé en septembre dernier, afin de permettre l'indemnisation de toutes les personnes qui ont été victimes, sans égard à la date.
Si on faisait ce transfert de 300 millions de dollars au prorata de la population, on pourrait dire, au Québec, qu'on a eu la juste part de ce montant.
Pour faire un historique, le Québec et l'Ontario jugeaient que l'offre gouvernementale était incomplète et ces deux provinces ont annoncé qu'ils étendraient le programme de compensation à toutes les victimes, sans égard à la date. En septembre 1998, le gouvernement fédéral annonçait qu'une somme de 300 millions de dollars serait accordée pour assurer les frais médicaux des victimes infectées par le système d'approvisionnement en sang.
Or, comme il existe déjà un programme de couverture des frais médicaux pour le Québec, le gouvernement du Québec a demandé que sa part puisse servir à étendre l'offre d'indemnisation, parce qu'on se souvient que le gouvernement fédéral ne reconnaît pas les victimes infectées avant 1986 et après 1990.
Comme le Québec offre déjà les frais médicaux et comme le gouvernement fédéral a annoncé un montant de 300 millions de dollars, le Québec voudrait avoir sa part pour être capable d'indemniser toutes les victimes, soit celles infectées avant 1986 et après 1990, sans égard à la date, puisque, actuellement, il assume déjà les frais médicaux.
Cette demande s'appuie sur la résolution de ce gouvernement, annoncée dans le discours du Trône de 1996, de ne plus utiliser son pouvoir de dépenser pour créer des programmes dans les champs de compétence provinciale sans l'accord des provinces. Cette résolution prévoyait aussi un droit de retrait avec compensation.
Mais voilà que la formule de partage des sommes entre les provinces, qui a toujours utilisé le critère de la population pour calculer la part de chaque province, ne tient plus. Au lieu de recevoir 75 millions de dollars, soit 25 p. 100 des 300 millions de dollars comme le prévoit la formule normale, le fédéral n'est disposé à offrir au Québec que 45 millions de dollars, soit 15 p. 100 du total.
C'est une modification qui a pris tout le monde par surprise. Ni le gouvernement du Québec, ni les victimes ou les organismes qui leur viennent en aide, comme la Société de l'hémophilie, section Québec, ne s'expliquent pourquoi la part du Québec ne correspond pas à son poids démographique, soit 25 p. 100 de la population.
Pour en arriver à ce chiffre, le gouvernement fédéral se serait basé sur des études épidémiologiques. Cette façon de faire est très aléatoire, puisque l'hépatite C est difficile à déceler, plusieurs personnes pouvant être atteintes sans le savoir, sans que les symptômes ne se soient déjà manifestés.
En se basant sur ce genre de calculs, on risque de graves erreurs qui, en bout de ligne, viendront encore pénaliser les victimes qui attendent une forme d'indemnisation pour améliorer, tant que faire se peut, leur condition et leur qualité de vie.
C'est la raison pour laquelle tant la Société canadienne de l'hémophilie que le gouvernement du Québec ont l'intention de faire pression sur Ottawa pour que la formule de calcul reste comme elle était, basée sur la population. De cette façon, les victimes d'avant 1986 et celles d'après 1990 pourront compter sur un montant de 75 millions de dollars au lieu de 42 millions de dollars.
Il y a maintenant plus d'un an que l'offre pour les victimes d'entre 1986 et 1990 a été annoncée. Nous savons maintenant ce que contient cette entente et nous attendons toujours qu'elle soit approuvée par les tribunaux. Mais déjà, selon la Société canadienne de l'hépatite C, elle est qualifiée d'inacceptable. Nous attendons aussi le résultat des négociations de la Croix-Rouge avec ses créanciers pour voir combien l'organisme pourra offrir aux victimes.
Une chose est certaine, le dossier est loin d'être clos.
La motion du député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest demande aussi au gouvernement de financer des programmes de recherche, d'éducation et de soutien afin de détecter d'autres troubles de saignement héréditaires, et surtout la maladie de Willebrand.
L'annonce de septembre 1998 comprenait aussi une partie de recherche; 50 millions de dollars sur cinq ans serviront à la prévention, la sensibilisation et la recherche sur l'hépatite C et les autres maladies connexes. On reconnaîtra que 50 millions, c'est un minimum, et qu'il reste beaucoup à faire pour bien comprendre et traiter ces maladies.
En conclusion, beaucoup reste à faire pour celles et ceux qui ont vu leur vie basculer à cause d'un système d'approvisionnement sanguin déficient. On fait appel aux sentiments de compassion des gens pour ceux qui ont vécu cette tragédie nationale, afin qu'ils soient indemnisés comme il se doit. Le but n'est pas de trouver un ou des coupables, mais bien davantage que justice soit rendue à toutes les victimes de cette tragédie d'une envergure sans précédent.
Ce gouvernement se targue d'être le gardien de la sécurité du système sanguin au Canada. Il peut et doit prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que toutes les victimes du scandale du sang contaminé soient traitées de façon juste et équitable.
[Traduction]
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat sur la motion qu'a présentée le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, et qui arrive à point nommé.
Il est vrai qu'il y a environ un an, nous avons dû faire face à une situation des plus déplorables, qui sera consignée dans les annales comme un chapitre très sombre dans l'histoire de notre pays. Joey Haché et d'autres victimes de l'hépatite C se trouvaient à la tribune et suivaient les délibérations lorsque le gouvernement a obligé tous les députés du Parti libéral à la Chambre à voter contre une motion qui aurait garanti un régime d'indemnisation juste et équitable pour toutes les victimes de l'hépatite C.
La secrétaire parlementaire du ministre de la Santé a parlé des succès remportés dans ce dossier. J'ai du mal à y trouver des succès. Je ne ressens que honte et embarras parce que le gouvernement n'a pas su faire ce qu'il convenait face à une question d'ordre moral et n'a pas respecté les dispositions de la loi, telles que nous les comprenons, pour veiller à ce que tous les Canadiens puissent avoir accès à des produits sanguins, à des médicaments, à des aliments et à des appareils médicaux sans danger, hors de tout doute raisonnable.
La secrétaire parlementaire a évoqué plusieurs mesures qui, selon elle, témoignent de ces succès. Elle a souligné qu'un montant d'indemnisation de 1,1 milliard de dollars a été prévu pour les victimes infectées au cours de la période de 1986 à 1990. Elle a omis de mentionner que pas un sou sur ce montant n'a encore été versé.
Il y a un mois environ, nous avons reçu un communiqué des organismes qui défendent les victimes de l'hépatite C, soit un an jour pour jour après que le gouvernement eut pris sa décision très arbitraire et fort regrettable de n'indemniser que les victimes infectées entre 1986 et 1990. La Société canadienne d'hémophilie nous a rappelé que cela fait un an que cette indemnisation a été promis. Erma Chapman, la directrice de la Société canadienne d'hémophilie, a clairement affirmé qu'aucune somme d'argent n'a encore été versée aux victimes. Elle a déclaré: «Il y a des personnes gravement malades qui devraient être traitées de toute urgence mais n'ont pas les ressources financières pour ce faire. Le virus de l'hépatite C peut causer de graves dommages au foie pouvant entraîner la mort. Nous exhortons le gouvernement fédéral de trouver un moyen d'accélérer l'aide financière pour les malades qui ont grandement besoin d'un traitement et de soins dans leur lutte contre l'hépatite C. Des victimes sont mortes en attendant l'aide de leur gouvernement.»
En ce qui concerne d'abord les prétendues réussites dont se vante le gouvernement dans ce domaine, je dirais que le gouvernement n'a pas réussi à trouver un processus d'indemnisation qui soit de nature à apporter une forme d'aide quelconque aux victimes de l'hépatite C.
On a ensuite parlé de l'engagement financier du gouvernement pour aider les gouvernements provinciaux à répondre aux besoins médicaux des victimes de l'hépatite C, pour aider les groupes communautaires dans leurs campagnes de sensibilisation et pour mettre en place des mécanismes qui assurent une certaine qualité de vie aux victimes de l'hépatite C. Or, très peu de choses ont été faites à cet égard. Je fais notamment allusion au fait que le 8 septembre 1998 le ministre de la Santé avait clairement annoncé un programme de 50 millions de dollars qui devait être consacré à la prévention de l'hépatite C, à des programmes communautaires de soutien et à la recherche. Ce programme n'a toujours pas vu le jour. Pas un sou de ces 50 millions de dollars n'a été donné aux organismes communautaires et aux groupes de soutien des victimes pour garantir que le système assure un soutien qui en vaille la peine en cette époque de crise.
Le gouvernement s'est aussi targué d'un autre prétendu succès, soit ses mesures pour assurer la mise en place de systèmes de réglementation adéquats et efficaces pour garantir absolument que des tragédies de ce genre ne se produisent plus jamais. Durant toute l'année écoulée depuis la dernière fois que nous avons abordé cette question critique, nous n'avons rien vu, à part de nombreuses preuves que le gouvernement n'a pas appris sa leçon après cette tragédie du sang et qu'il n'a pas donné suite au moindre conseil du juge Krever, qui lui a demandé clairement de reconnaître qu'il faisait erreur et de s'engager dans un processus de réglementation actif, et non passif, à l'égard du sang, des aliments et des drogues.
Pour un simple observateur, il semblerait presque que le gouvernement a oublié les leçons du passé, qu'il a décidé de passer outre aux recommandations du juge Krever, parce qu'il n'a pas montré un iota d'intérêt pour la mise sur pied d'un processus de réglementation ferme, actif et intensif concernant toutes ces questions critiques relatives à la santé et à la sécurité humaines.
Nous venons de terminer quatre mois d'audiences sur les dons d'organes et de tissus et les transplantations. Ce fut très décevant pour nous d'apprendre que le gouvernement n'avait rien appris du juge Krever et qu'il n'était pas disposé à appliquer les recommandations du rapport Krever quand il a été question des organes et des tissus. Les Canadiens se rendent bien compte que le sang n'est pas différent des organes et des tissus. Il faut dans tous les cas utiliser des mesures intrusives qui exigent des précautions supplémentaires. Pourtant, le gouvernement refuse d'adopter une approche proactive quand il s'agit de la sécurité des Canadiens. Il a déposé un cadre de gestion des risques en ce qui concerne les organes et les tissus, suggérant que, en dépit de tous les enseignements tirés de l'affaire du sang contaminé, il est des circonstances où le gouvernement ne peut être tenu responsable. Pour la première fois, en dépit des recommandations du rapport Krever, le gouvernement parle de la possibilité de se dérober à sa responsabilité de veiller à la sécurité des Canadiens en ce qui concerne toutes les questions régies par la Loi sur les aliments et les drogues.
Je ne vois pas de signe de succès là-dedans. Mes collègues du Nouveau Parti démocratique et moi-même en sommes quittes pour continuer de soulever cette question et d'essayer de persuader le gouvernement de rouvrir ce regrettable chapitre de l'histoire de notre société.
Beaucoup de choses se sont passées depuis que Joey Haché et d'autres, assis à la tribune, suivaient il y a un an les développements, notamment un important documentaire préparé en janvier 1999 par le Fifth Estate à propos des graves problèmes que posaient l'envoi dans ce pays de sang prélevé sur des prisonniers aux États-Unis et l'absence de précautions du gouvernement.
Cela confirme ce que disait le rapport Krever sur les gestes déplorables du gouvernement et sur sa négligence absolue en ce qui concerne sa responsabilité de veiller à la sécurité des produits sanguins. Cela devrait suffire à faire prendre conscience au gouvernement de la nécessité de rouvrir ce dossier et de chercher un moyen d'indemniser toutes les victimes de l'hépatite C, étant donné que c'est sa faute, puisqu'il n'a pas assumé ses responsabilités en conformité de nos lois.
J'utiliserai les mêmes mots que le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Est, qui a cité le juge Krever: «Les mesures prises par une société pour atténuer les répercussions d'une tragédie sur ses membres permettent d'évaluer la compassion dont elle fait preuve.»
Gardant ces mots-là à l'esprit, nous demandons aujourd'hui au gouvernement de faire preuve de la compassion et du leadership auxquels s'attendent les Canadiens de la part de leur gouvernement national envers les victimes de tragédies et de désastres. Nous exhortons le gouvernement à prendre les mesures qui s'imposent pour veiller à ce que les victimes de l'hépatite C dans ce tragique épisode soient indemnisées également.
Ce n'est qu'en adoptant des mesures correctives pour garantir que pareille situation ne se reproduira plus qu'en tant que nation nous pourrons aller de l'avant avec confiance, avec un sentiment de justice digne des traditions canadiennes.
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, je voudrais remercier tous les partis et députés siégeant de ce côté-ci qui appuient ma motion. C'est encourageant de voir le Bloc, le Parti réformiste, le NPD et le Parti conservateur s'entendre sur quelque chose. J'espère que les Canadiens l'ont remarqué.
On peut toujours savoir quand le gouvernement ressent de la nervosité parce que les députés ministériels parlent alors sans arrêt et tentent de déranger les orateurs pendant qu'ils soulèvent une question qui agace le gouvernement. Nous avons amorcé ce débat en rappelant aux Canadiens qu'il y a un an exactement, tous les députés libéraux, y compris ceux qui sont présents maintenant, ont refusé d'indemniser d'innocentes victimes de l'hépatite C. Si je siégeais en face et si j'avais fait la même chose, je serais extrêmement nerveux. En fait, la plupart d'entre nous se cacheraient sous leur pupitre après avoir fait une telle chose.
Le Parti libéral est le seul qui puisse se contredire du tout au tout dans un dossier comme celui-ci et revenir le défendre à la Chambre. Il n'y a pas un seul autre parti qui puisse faire la même chose. C'est exactement ce qu'il est en train de faire. Les libéraux se sont contredits car ils se présentent toujours comme les défenseurs des mal nantis, des pauvres, des malades, sauf quand il faut faire quelque chose. Dans le cas présent, ils ont refusé de faire quoi que ce soit pour un groupe d'innocentes victimes.
Je ne nierai pas que la secrétaire parlementaire est une personne tout à fait décente en dehors de la Chambre, voire même compatissante. Mais on aurait dit qu'elle se prenait pour un comptable dans son discours. Pourquoi? Parce que c'est son avocat qui l'a rédigé. Qui est son avocat? Allan Rock. Qui est Allan Rock? Le ministre de la Santé. C'est du charabia bureaucratique. Est-ce une expression parlementaire? Je suppose que dans le cas présent, ça doit l'être car ce n'est rien d'autre.
On peut voir d'après la grimace des libéraux qu'ils ne sont pas contents que nous ayons ressuscité cette triste affaire car ils n'y jouent pas le beau rôle. Ils n'y jouent toujours pas le beau rôle maintenant et elle ne va pas disparaître comme par enchantement. Elle ne va pas mourir de sa mort naturelle. Pourquoi? Parce que de ce côté-ci de la Chambre nous allons voir à ce qu'elle ne meure pas. Nous n'allons pas la laisser sombrer lentement dans l'oubli. C'est une question importante que les Canadiens veulent voir réglée. Les victimes veulent que justice soit faite.
Je vais passer en revue quelques faits.
C'est un fait que le gouvernement fédéral ne s'est pas correctement acquitté de ses fonctions en tant qu'organisme de réglementation chargé du système d'approvisionnement en sang. Cela signifie qu'il n'a pas surveillé de près les activités de la Croix-Rouge.
C'est un fait que le gouvernement fédéral a réagi trop lentement à la possible présence du virus du sida dans le sang et qu'il a minimisé à tort, pour les Canadiens, les risques de contamination du système d'approvisionnement en sang.
C'est un fait que les provinces qui ont financé le programme de la Croix-Rouge n'ont pas fourni suffisamment d'argent en temps opportun pour financer les tests scientifiques qui auraient permis de détecter les échantillons de sang contaminés par le virus du sida ou de l'hépatite C.
C'est un fait que les provinces n'ont pas pris toutes les mesures qui auraient pu permettre de retracer les gens qui avaient reçu du sang contaminé et qui, ne sachant pas qu'ils étaient atteints du sida, l'ont transmis sans le savoir à leurs partenaires sexuels. La même situation s'applique à l'hépatite C.
C'est un fait que la Croix-Rouge a pris des mesures inadéquates pour mettre en oeuvre un programme de dépistage qui aurait pu empêcher les donneurs à risque, tels que les hommes homosexuels sexuellement actifs de donner du sang. Et ce n'est pas tout. La Croix-Rouge a permis à du sang contaminé en provenance de prisons américaines d'entrer au pays.
C'est un fait que la Croix-Rouge n'a pas agi assez vite pour remplacer les stocks de produits sanguins contaminés servant aux hémophiles par des produits nouveaux, traités à la chaleur, qui étaient sans danger. Elle n'a vraiment pas de quoi se vanter de la façon dont elle a traité ces victimes.
Tant que toutes les victimes n'auront pas été indemnisées, nous continuerons de ce côté-ci de la Chambre à nous battre pour ces gens. Le gouvernement devra bien un jour réparer ses erreurs.
Le président suppléant (M. McClelland): La période consacrée aux initiatives parlementaires est maintenant terminée et l'article est rayé du Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
L'HABITATION
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, des milliers d'électeurs de ma circonscription, Vancouver-Est, subissent encore de terribles pertes financières et personnelles à cause de copropriétés qui prennent l'eau. Malheureusement, l'inaction des libéraux fédéraux dans ce dossier a aggravé la crise.
L'inaction et le désintérêt des libéraux sont inacceptables. Faut-il s'étonner que les Britanno-Colombiens se sentent aliénés? Apparemment, il n'y a aucune aide, aucune mesure, aucun soutien réel en vue.
Je tiens à dire aujourd'hui que nous n'accepterons pas cela. Nous allons continuer d'exiger du gouvernement fédéral qu'il rende justice aux millions de résidents de la Colombie-Britannique qui sont touchés par cette crise. Nous menons cette lutte depuis longtemps.
En juillet 1998, puis en décembre de la même année, j'ai écrit au ministre pour demander que le gouvernement appuie de toute urgence l'allégement fiscal et le remboursement de la TPS recommandés par la commission Barrett et la Condominium Owners Association of B.C. Jusqu'à maintenant, le gouvernement fédéral a rejeté ces recommandations.
En mars de cette année, la ministre des Affaires municipales de la Colombie-Britannique est venue à Ottawa pour exercer des pressions sur le gouvernement fédéral afin qu'il participe au programme de prêts de la Colombie-Britannique pour la reconstruction. Elle a essuyé un refus du gouvernement fédéral.
Le 17 mars, j'ai interrogé le ministre des Travaux publics à la Chambre et lui ai demandé pourquoi diable le gouvernement fédéral proposait à la Colombie-Britannique des prêts à un taux d'intérêt si élevé que la province ferait mieux de se financer sur le marché. Au lieu d'admettre que l'offre était au mieux hypocrite, le ministre fédéral a dit que la question méritait une étude plus approfondie.
Malgré tous ces efforts et malgré les vrais besoins de milliers de propriétaires désespérés, le gouvernement fédéral n'a toujours rien fait. Dire du bout des lèvres qu'on est désolé n'aide en rien à faire les réparations nécessaires pour que ces propriétaires rétablissent leur situation. Le gouvernement fédéral a même refusé de s'associer à la province pour aider les coopératives d'habitation qui sont aux prises avec les mêmes problèmes, et dont les logements ont souvent été construits avec l'aide de programmes fédéraux.
Le 24 avril, le gouvernement de la Colombie-Britannique a annoncé que les coopératives d'habitation pouvaient demander l'aide de la province. De toute évidence, le gouvernement provincial aide à résoudre ce grave problème, mais où donc est passé le gouvernement fédéral?
Le gouvernement libéral à Ottawa a laissé tomber des milliers de propriétaires dont les appartements en copropriété ont des fuites et qui voient se dégrader leur bien. C'est un sinistre stratagème qui, une fois de plus, relègue au dernier rang les intérêts des Canadiens de l'Ouest.
Je demande au gouvernement fédéral, une fois pour toutes, de donner son appui et de participer de façon responsable au programme pour aider ces propriétaires dont les appartements ont des fuites.
Mme Carolyn Parrish (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, comme le ministre responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement l'a déjà mentionné à la Chambre, le gouvernement se préoccupe beaucoup des difficultés qu'éprouvent de nombreux propriétaires de logements en copropriété endommagés par l'humidité en Colombie-Britannique.
Il revient à la province d'établir des codes du bâtiment et aux municipalités d'effectuer des inspections et de veiller au respect de ces codes.
En tant qu'organisme responsable du logement à l'échelle nationale, la SCHL collabore avec divers autres intervenants à la recherche, la conception, la construction et la réglementation en matière d'habitation, pour déterminer quelles sont les améliorations à apporter aux pratiques de conception et de construction afin que de tels problèmes liés à l'humidité ne se reproduisent jamais.
Plus tôt cette année, la commission Barrett a formulé, dans son rapport, un vaste éventail de recommandations visant à améliorer la situation des propriétaires de logements en copropriété. Elle demandait que la SCHL double le financement du Programme d'aide à la remise en état des logements en Colombie-Britannique, ce que le gouvernement a fait pour l'exercice 1998-1999. En plus d'accroître le financement du PAREL, le gouvernement du Canada a offert de verser un préfinancement de 75 millions de dollars au fonds de reconstruction que le député d'en face a mentionné.
La SCHL cherche également à régler le problème que soulève notre programme d'assurance-prêt hypothécaire aux termes de la Loi nationale sur l'habitation. Certains des propriétaires des unités endommagées par l'humidité avaient souscrit une telle assurance-prêt hypothécaire. Ils peuvent donc choisir entre diverses options financières. Leurs demandes seront évaluées par les prêteurs autorisés et la SCHL au cas par cas.
En plus d'aider les propriétaires qui ont actuellement un prêt assuré aux termes de la LNH, la SCHL a négocié avec l'office de protection des propriétaires de la Colombie-Britannique, afin que la province offre un programme d'assurance-prêt hypothécaire.
Je souligne que, selon la position du gouvernement, l'octroi d'un allégement fiscal ou d'une subvention fiscale, comme le propose la commission Barrett, n'est pas jugé équitable à l'égard de tous les Canadiens.
LE COMMERCE INTERNATIONAL
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureux, en tant qu'ancien habitant de la Colombie-Britannique, de revenir au cours du débat d'ajournement de ce soir sur une question que j'ai déjà posée à la Chambre. Le 25 mars dernier, j'ai posé la question suivante:
...au cours de la dernière année, les marchands de bois canadiens ont pu exporter vers les États-Unis sans devoir payer de droits américains des produits de bois dégrossi à valeur ajoutée qui servent à la finition extérieure des édifices.
La semaine dernière, les douanes américaines ont annoncé qu'elles prévoyaient reclassifier ces produits dégrossis et en limiter rigoureusement les importations, ce qui fait peser des risques sur des milliers d'emplois en Colombie-Britannique.
Le gouvernement s'engagera-t-il à lutter dès aujourd'hui contre cette tentative évidente d'infraction aux règles tarifaires internationales, à garantir aux producteurs canadiens qu'ils pourront continuer de vendre leurs produits sur le marché américain et à protéger les emplois forestiers en Colombie-Britannique?
Voici la réponse obtenue du ministre du Commerce international qui a dit, en versant quelques larmes de crocodiles:
...nous n'accepterons pas cette décision des Américains.[...] Nous la contesterons.
Pendant une seconde, il a eu l'air de Churchill: «Nous nous battrons sur les plages, nous nous battrons dans les tranchées, nous nous battrons jusqu'au bout».
Honnêtement, nous pourrions appliquer cela aux arbres de Noël exportés de la Nouvelle-Écosse. Nous pourrions parler du différend que nous avons avec l'Alaska et les États-Unis au sujet du saumon.
Il est évident que les États-Unis ne respectent pas le Canada lorsqu'il s'agit d'accords ou de décisions quelconques en matière de commerce international. Ils nous prennent pour un chien de poche et nous marchent sur les pieds. Le bois dégrossi est un exemple classique de cela.
Le gouvernement a essayé de faire adopter le projet de loi C-55 et regardez tous les remous que cela a causés. Il est tout à fait clair que le ministre actuel du Commerce international n'a absolument aucune influence auprès du gouvernement américain, car ce dernier ne cesse de nous marcher sur les pieds.
Ce que je suggère à la secrétaire parlementaire qui répondra à cette question, c'est que le ministre du Commerce international, au lieu de se préoccuper de son prochain poste, devrait plutôt se concentrer sur les emplois au Canada et sur les exportations canadiennes afin de protéger ces emplois, particulièrement dans la région côtière et la région intérieure de la Colombie-Britannique.
Quand le gouvernement se décidera-t-il enfin à défendre les intérêts des travailleurs canadiens et des villes canadiennes, spécialement en ce qui a trait à l'industrie du bois d'oeuvre? En tant qu'ancien résident de la Colombie-Britannique, je dois dire que c'est une province absolument magnifique. Tout comme en Nouvelle-Écosse, ces gens ont le droit de vivre et de travailler, d'exploiter les ressources et de les exporter partout dans le monde, pas seulement aux États-Unis.
Nous méritons le respect. Notre gouvernement devrait se battre avec plus d'acharnement pour les habitants de la Colombie-Britannique.
Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, depuis plus de 17 ans l'industrie américaine du bois d'oeuvre, qui a de l'influence sur le plan politique, demande à son gouvernement d'adopter des mesures pour limiter l'accès des Canadiens au marché américain du bois d'oeuvre. Sur ce point, le député a raison.
Toutefois, le député ne sait peut-être pas que le Canada est sorti vainqueur, en 1994, du plus récent différend l'opposant aux États-Unis en ce qui concerne le bois d'oeuvre. Nous ne sommes donc pas des chiens de poche.
C'est cette défaite et la menace subséquente de l'industrie américaine d'entreprendre de nouvelles démarches pour obtenir le versement de droits compensateurs qui ont mené à l'accord sur le bois d'oeuvre. L'industrie et les provinces désiraient éviter une nouvelle et longue bataille juridique à l'aboutissement incertain, d'où leur appui à l'accord sur le bois d'oeuvre conclu en 1996 avec les États-Unis.
Je peux affirmer au député que le gouvernement se préoccupe au plus haut point des mesures du service américain des douanes visant à reclassifier des produits du bois qui sont présentement exemptés de l'accord sur le bois d'oeuvre. Comme le ministre l'a dit, nous ne ménageons aucun effort afin de nous opposer à ces reclassifications.
Je signale au député que les fonctionnaires canadiens et américains ont tenu la semaine dernière une réunion dans le cadre du mécanisme de règlement des différents prévu dans l'accord sur le bois d'oeuvre. Nous avons dit pourquoi nous nous opposons à la proposition des États-Unis de reclassifier le bois non dégrossi. De plus, nous avons déjà signalé notre intention de soumettre cette question à l'Organisation mondiale des douanes.
Le député sait sans doute que nous contestons déjà devant l'Organisation mondiale des douanes la reclassification des montants perforés par les douanes américaines.
Soyons clairs. Le gouvernement s'opposera vigoureusement à toute tentative des États-Unis d'élargir unilatéralement l'application de l'accord sur le bois d'oeuvre.
[Français]
Le président suppléant (M. McClelland): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 14 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 41.)