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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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36e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 237
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 3 juin 1999
AFFAIRES COURANTES |
LES FORCES CANADIENNES |
M. Robert Bertrand |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Peter Adams |
LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU |
Projet de loi C-518. Présentation et première lecture |
M. Ken Epp |
PÉTITIONS |
La fiscalité |
M. Ken Epp |
Les pays pauvres |
M. Peter Adams |
Postes Canada |
M. Peter Adams |
Le Kosovo |
M. Peter Adams |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Peter Adams |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—Le traité conclu avec les Nisga'as |
M. Mike Scott |
Motion |
Mme Marlene Catterall |
Motion |
M. Chuck Strahl |
M. Mike Scott |
L'hon. Jane Stewart |
M. Peter Mancini |
M. Jay Hill |
Amendement |
M. Claude Bachand |
M. David Iftody |
L'hon. Jane Stewart |
M. Mike Scott |
M. Pat Martin |
M. Claude Bachand |
M. Lee Morrison |
M. John Bryden |
Mme Libby Davies |
M. Jim Abbott |
M. David Iftody |
M. Gerald Keddy |
M. Keith Martin |
M. Gerald Keddy |
M. Keith Martin |
M. David Iftody |
M. Pat Martin |
M. John Duncan |
L'hon. Raymond Chan |
M. David Iftody |
M. Pat Martin |
M. Roy Bailey |
M. Mike Scott |
M. Ted McWhinney |
M. John Duncan |
M. Jim Abbott |
M. Lee Morrison |
M. Randy White |
M. Randy White |
M. David Iftody |
M. Gerald Keddy |
M. Derrek Konrad |
M. Pat Martin |
L'hon. Raymond Chan |
M. Pat Martin |
M. Gerald Keddy |
Mme Val Meredith |
M. Myron Thompson |
M. Bernard Patry |
M. Pat Martin |
Mme Val Meredith |
M. David Iftody |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LA KINGSTON COMMUNITY CREDIT UNION |
M. Larry McCormick |
LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA |
M. Leon E. Benoit |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Eugène Bellemare |
LA CROATIE |
Mme Sophia Leung |
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER |
M. Bernard Patry |
LE SOCCER |
M. Grant McNally |
LE DROIT DE VOTE |
M. John Richardson |
LES INONDATIONS AU MANITOBA |
Mme Hélène Alarie |
LE KOSOVO |
M. Ted McWhinney |
LA JUSTICE |
M. Myron Thompson |
LE PARTI QUÉBÉCOIS |
Mme Marlene Jennings |
L'ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE |
M. Bill Blaikie |
LA PLACE TIANANMEN |
Mme Maud Debien |
LE BARREAU DU QUÉBEC |
Mme Eleni Bakopanos |
LES ÉLECTIONS EN ONTARIO |
M. Jim Jones |
LES FRAIS DE SCOLARITÉ |
M. Peter Adams |
LE TRAITÉ DES NISGA'AS |
M. John Reynolds |
LE PARTI LIBÉRAL DU CANADA |
Mme Christiane Gagnon |
LE NOUVEAU MILLÉNAIRE |
M. Rick Laliberte |
QUESTIONS ORALES |
LE KOSOVO |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
LES MARCHÉS DE L'ÉTAT |
M. Chuck Strahl |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Chuck Strahl |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE KOSOVO |
M. Gilles Duceppe |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Gilles Duceppe |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Daniel Turp |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Daniel Turp |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Paul Martin |
Mme Alexa McDonough |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE |
M. Jim Jones |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Jim Jones |
LES SUBVENTIONS GOUVERNEMENTALES |
M. Jason Kenney |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Jason Kenney |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE PROJET DE LOI C-54 |
Mme Francine Lalonde |
L'hon. John Manley |
Mme Francine Lalonde |
L'hon. Stéphane Dion |
LES SUBVENTIONS GOUVERNEMENTALES |
Mme Diane Ablonczy |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Diane Ablonczy |
Le très hon. Jean Chrétien |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Pierre Brien |
L'hon. Stéphane Dion |
M. Pierre Brien |
L'hon. Stéphane Dion |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Mike Scott |
L'hon. Jane Stewart |
M. Mike Scott |
L'hon. Jane Stewart |
LES BOURSES DU MILLÉNAIRE |
M. Michel Gauthier |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Lou Sekora |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA |
M. Randy White |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Randy White |
L'hon. Lawrence MacAulay |
LE LOGEMENT |
Mme Libby Davies |
L'hon. Alfonso Gagliano |
Mme Libby Davies |
L'hon. Alfonso Gagliano |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Bill Matthews |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Bill Matthews |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
M. Paul Szabo |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LA GRC |
M. Jim Abbott |
L'hon. Lawrence MacAulay |
LE TRANSPORT FERROVIAIRE |
L'hon. Martin Cauchon |
LE PREMIER MINISTRE |
M. John Solomon |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'INDUSTRIE DES PÉRIODIQUES |
M. Mark Muise |
M. Mauril Bélanger |
LES TRANSPORTS |
Mme Marlene Jennings |
M. Stan Dromisky |
QUESTION DE PRIVILÈGE |
Le Sous-comité sur l'équité fiscale pour les familles |
M. Monte Solberg |
Le Président |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Randy White |
L'hon. Don Boudria |
M. Bill Blaikie |
M. Gurmant Grewal |
M. John Reynolds |
M. Grant McNally |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné-Le traité conclu avec les Nisga'as |
Motion |
Mme Val Meredith |
M. David Iftody |
M. Leon E. Benoit |
M. John Bryden |
M. David Iftody |
Mme Nancy Karetak-Lindell |
M. Werner Schmidt |
M. Pat Martin |
M. John Bryden |
M. Darrel Stinson |
L'hon. Ethel Blondin-Andrew |
M. Werner Schmidt |
M. Pat Martin |
M. Jim Abbott |
L'hon. Ethel Blondin-Andrew |
Mme Paddy Torsney |
M. Mike Scott |
M. Pat Martin |
M. Allan Kerpan |
Demande et report du vote |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA |
Projet de loi C-405. Deuxième lecture |
M. Raymond Lavigne |
M. Norman Doyle |
Mme Val Meredith |
M. Réal Ménard |
M. Pat Martin |
Mme Marlene Jennings |
M. Stéphane Bergeron |
Mme Paddy Torsney |
M. Clifford Lincoln |
MOTION D'AJOURNEMENT |
La justice |
M. John Reynolds |
Mme Paddy Torsney |
Les marchés de l'État |
M. Jim Jones |
Mme Paddy Torsney |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 237
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 3 juin 1999
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Français]
LES FORCES CANADIENNES
M. Robert Bertrand (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(2) du Règlement, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel du grand prévôt des Forces canadiennes.
* * *
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à quatre pétitions.
* * *
[Traduction]
LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-518, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (déduction des impôts fonciers payés sur une résidence principale).
Monsieur le Président, je suis heureux de présenter ce projet de loi d'initiative parlementaire parce qu'il illustre un des plus grands secteurs qui soient assujettis à une double imposition en ce pays où nous payons un impôt sur des impôts.
Cette mesure législative modifierait la Loi de l'impôt sur le revenu de façon que nous puissions déduire de notre revenu imposable les impôts fonciers que nous payons afin que nous n'ayons plus à remettre au gouvernement fédéral 66 p. 100 du montant correspondant aux taxes municipales que nous acquittons.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
PÉTITIONS
LA FISCALITÉ
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je suis doublement heureux de présenter aujourd'hui cette pétition parce que le premier nom qui y apparaît est celui de ma fille.
Elle fait partie des nombreux Canadiens qui, ayant décidé d'être parents à temps plein, sont victimes de la discrimination exercée par la Loi de l'impôt sur le revenu. sa famille doit payer davantage d'impôts. C'est le prix qu'elle doit payer pour rester à la maison avec nos deux beaux petits-enfants.
C'est avec grand plaisir que je présente cette pétition au nom d'une soixantaine d'électeurs de Regina, en Saskatchewan. Elle a convaincu tous ces gens de signer la pétition et je suis très heureux présenter celle-ci afin de réclamer un peu plus d'équité fiscale à l'endroit des familles dont un des parents reste au foyer pour élever les enfants.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je tiens à signaler à la présidence qu'il n'est pas correct, à mon avis, de la part d'un député de faire consigner au compte rendu le nom des signataires d'une pétition ou de dire qu'il est d'accord avec la pétition qu'il présente, et que le Président a déjà à maintes reprises jugé ces pratiques contraires au Règlement.
Le vice-président: J'écoutais l'intervention du député d'Elk Island et, bien qu'il ait semblé bien disposé à l'égard de la pétition, je ne crois pas qu'il ait exprimé son appui ou son accord. S'il l'avait fait, il aurait été admonesté comme il se doit par la présidence, comme le sait le leader du gouvernement à la Chambre, car la présidence a tendance à admonester les députés qui font cela.
Par ailleurs, je pense que le député d'Elk Island a fait une légère entorse au Règlement en disant qui avait signé la pétition. On ne révèle pas normalement le nom des pétitionnaires. Dans les circonstances cependant, puisqu'il s'agissait de sa fille, la présidence a fermé les yeux sur cette entorse. Le leader du gouvernement à la Chambre a cependant parfaitement raison de signaler qu'il n'est pas correct de faire consigner au compte rendu le nom des pétitionnaires. Si le député d'Elk Island avait nommé quelqu'un d'autre, la présidence l'aurait admonesté et lui aurait reproché comme il se doit d'avoir enfreint le Règlement.
LES PAYS PAUVRES
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole pour présenter une autre pétition de la part d'habitants de Peterborough qui se préoccupent de l'endettement des pays les plus pauvres du monde.
Les pétitionnaires croient qu'il est temps d'annuler l'arriéré des dettes qui dépassent la capacité de rembourser de ces pays. Ils exhortent les dirigeants des pays prêteurs à radier ces dettes d'ici l'an 2000. Ils exhortent aussi le Canada à promouvoir un développement socio-économique durable au lieu d'appuyer les mesures exigées par les institutions financières internationales.
Ils prient donc le Parlement du Canada d'appuyer l'annulation des dettes des pays les plus pauvres et de prendre des mesures efficaces pour les empêcher de s'endetter lourdement.
POSTES CANADA
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une autre pétition concernant les facteurs ruraux.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'abroger le paragraphe 13(5) de la Loi sur la Société canadienne des postes.
LE KOSOVO
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une dernière pétition et, je le rappelle, j'en ai déjà présenté plusieurs à ce sujet.
La pétition vient de citoyens qui s'inquiètent de la participation du Canada à la campagne de bombardement en Yougoslavie. Les pétitionnaires soutiennent que cette campagne ne réussit pas à atteindre l'objectif de venir en aide aux Kosovars et a plutôt l'effet contraire.
Ils demandent au Parlement de mettre fin immédiatement à la participation du Canada à la campagne de bombardement et de travailler dans le but de parvenir à une solution diplomatique avant que plus de vies humaines ne soient inutilement et tragiquement perdues.
* * *
[Français]
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.
Le vice-président: Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LE TRAITÉ CONCLU AVEC LES NISGA'AS
M. Mike Scott (Skeena, Réf.) propose:
Que la Chambre prenne acte du fait qu'un grand nombre des citoyens de la Colombie-Britannique se préoccupent des effets que les traités modernes conclus avec les premières nations et les initiatives visant à leur conférer l'autonomie gouvernementale peuvent avoir sur les droits de la personne, y compris ceux des Autochtones; et qu'à la lumière de faits récents controversés, notamment l'affaire des titulaires de domaines à bail de Musqueam et l'annonce par la bande indienne de Kamloops de son intention d'interdire les syndicats chez elle, la Chambre demande instamment au gouvernement du Canada de déférer l'accord relatif au traité conclu avec les Nisga'as à la Cour suprême du Canada afin qu'elle précise
a) si les termes de l'accord final conclu avec les Nisga'as modifient la Constitution du Canada,
b) si les Nisga'as pourraient invoquer les dispositions de l'accord relatives à l'autonomie gouvernementale pour usurper, réduire ou subroger les droits de la personne chez les Nisga'as tels qu'ils sont définis dans la Charte canadienne des droits et libertés;
et que toute activité concourant à la présentation à la Chambre des communes d'une mesure législative portant ratification de l'accord final conclu avec les Nisga'as soit suspendue jusqu'à ce que la Cour suprême ait statué sur ces deux questions.
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Vous constaterez qu'il y a unanimité pour la motion suivante:
Qu'à la conclusion du présent débat sur la motion de l'opposition, toutes questions nécessaires pour disposer de cette motion soient réputées mises aux voix, le vote par appel nominal soit réputé demandé et différé à mardi, le 8 juin 1999, à la fin de la période prévue pour les ordres émanant du gouvernement.
Le vice-président: L'honorable whip adjoint du gouvernement a-t-elle le consentement unanime de la Chambre pour présenter cette motion?
Des voix: D'accord.
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Lui plaît-il de l'adopter?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je vous informe que les députés réformistes partageront leur temps de parole pendant le débat d'aujourd'hui.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet de cette motion dont la nature est grave et de faire part à la Chambre des raisons pour lesquelles le Parti réformiste l'a proposée.
Premièrement, je voudrais souligner qu'après 130 années d'attente, les Nisga'as peuvent aujourd'hui se réjouir. Le temps est venu pour nous et les Nisga'as de mettre l'histoire de côté et d'aller de l'avant avec le nouvel arrangement conclu avec le gouvernement du Canada et la province de la Colombie-Britannique.
Ce traité est aussi une source de grande controverse en Colombie-Britannique parce que tant le gouvernement provincial que le gouvernement fédéral ont négligé d'écouter les gens de la Colombie-Britannique et d'ailleurs au Canada.
En fait, il y a en Colombie-Britannique un autre traité moderne, l'entente des Sechelt. Il est très intéressant de noter que cette entente est loin de susciter la même controverse que celle des Nisga'as en raison des dispositions sur l'autonomie gouvernementale prévues dans le traité des Nisga'as.
En 1987, l'entente d'autonomie gouvernementale des Sechelt, liant la province de la Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral, entrait en vigueur. Cela s'est fait par voie législative, mais cette autonomie n'est pas inscrite comme un droit des autochtones à l'article 35 de la Constitution. Elle n'est donc pas protégée par la Constitution. Ce n'est pas un troisième ordre de gouvernement en vertu de la Constitution.
Le traité des Nisga'as, ou l'Entente définitive des Nisga'as comme on l'appelle, est surtout une entente sur l'autonomie gouvernementale. Le contraste est intéressant quand on le compare à d'autres traités, les traités numérotés comme on les appelle, ou les traités historiques, parce que ceux-ci ne portent absolument pas sur l'autonomie gouvernementale. Ils portent sur l'échange de terres, l'utilisation des ressources, différentes considérations, monétaires et autres, en échange de la cessions de terres pour le bénéfice de tous les Canadiens. Voilà l'histoire des traités numérotés du Canada.
Le traité des Nisga'as est tout à fait différent. Il s'agit essentiellement d'un accord d'autonomie gouvernementale. C'est un concept relativement nouveau, qui a vu le jour il y a environ deux décennies. L'accord de Charlottetown de 1992 contenait une proposition en ce sens. Le concept d'autonomie gouvernementale constituait l'un des cinq principaux éléments de l'accord.
La population canadienne et notamment celle de la Colombie-Britannique ont rejeté l'accord de Charlottetown. En Colombie-Britannique, l'accord a été rejeté à près de 70 p. 100, mais, fait intéressant, les autochtones de la province l'ont également rejeté dans une proportion à peu près équivalente. Il n'y avait donc pas de clivage entre les autochtones et les non-autochtones. L'opposition à l'accord était commune à l'ensemble de la population de la Colombie-Britannique.
Un des plus éminents intellectuels et spécialistes de la question constitutionnelle au Canada, un homme bien connu de ce côté-ci de la Chambre, a dit des choses très instructives au sujet de l'accord de Charlottetown et de ses dispositions relatives à l'autonomie gouvernementale des autochtones, dans un discours prononcé à Cité Libre à Montréal. Cet homme est Pierre Elliott Trudeau.
Il a fait une mise en garde au sujet d'une autonomie gouvernementale autochtone illimitée n'accordant aucune protection aux autochtones en vertu de la Charte des droits et engendrant une division telle des pouvoirs entre les gouvernements et la création d'un troisième niveau de gouvernement que l'ensemble du système de gouvernement au Canada se retrouverait tôt ou tard dans une situation chaotique.
M. Trudeau a été à la tête du Parti libéral pendant près de deux décennies. Que nous de ce côté-ci fussions ou non d'accord avec ses politiques, nous respections son pouvoir de compréhension et de discernement et son aptitude à parler de la Constitution, dont il a fait l'oeuvre de sa vie. Il avait été professeur de droit et constitutionnaliste avant de siéger au Parlement et de devenir premier ministre.
Après le rejet de l'accord de Charlottetown, on se serait attendu que les libéraux et les autres partis politiques au Canada comprennent que les Canadiens n'approuvaient pas ce concept puisqu'ils avaient voté contre.
Le gouvernement n'a pas compris. Il a immédiatement adopté une politique de reconnaissance du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Cela figurait dans son livre rouge. Tout le monde se souvient du tristement célèbre livre rouge de 1993: 200 pages imprimées en petits caractères que très peu de Canadiens ont lues. Les libéraux se sont servis de leur livre rouge pour justifier la politique de reconnaissance du droit inhérent. Aux termes de cette politique, ils reconnaissent aux peuples autochtones le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Jusqu'au traité avec les Nisga'as, nous ne comprenions pas de quoi il s'agissait.
Je me rappelle que nous avons écrit au ministre de la Justice et au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien en 1993, 1994 et 1995 afin de leur demander ce que cela voulait dire. Nous n'avons jamais obtenu de réponse. On nous a abreuvés de jargon, de paroles farfelues et de truismes, mais nous n'avons pas obtenu de véritable réponse sur ce qu'ils avaient en tête. C'est la même chose avec l'accord relatif au traité conclu avec les Nisga'as, qui va à l'encontre des souhaits des Canadiens de tout le pays, y compris les autochtones, et de ce qu'ils ont signifié expressément par leur vote sur l'Accord de Charlottetown en 1992.
J'aimerais donner certains détails sur la question. Les gouvernements fédéral et provinciaux ont convenu, dans le cadre du traité conclu avec les Nisga'as, de céder à tout jamais les pouvoirs législatifs dans au moins 14 domaines spécifiques. Je rappelle à la Chambre que la Cour suprême du Canada, dans l'affaire de l'hôtel Lord Nelson a dit ceci au sujet de la division des pouvoirs dans la Constitution du Canada en matière de pouvoirs législatifs des gouvernements fédéral et provinciaux. Je cite le juge en chef Rinfret:
Le Parlement du Canada et les corps législatifs des diverses provinces sont souverains dans leur domaine de compétence tel que défini par l'Acte de l'Amérique du nord britannique, mais aucun d'eux n'a les capacités illimitées d'un individu. Il ne peuvent user que des pouvoirs qui leur sont respectivement conférés par les articles 91 et 92 de la Loi et ces pouvoirs doivent apparaître dans l'un de ces articles.
La Constitution du Canada n'appartient ni au Parlement ni aux corps législatifs; elle appartient aux citoyens du pays et est là pour protéger leurs droits.
Le juge en chef Kerwin a également écrit:
L'Acte de l'Amérique du Nord britannique divise les compétences législatives entre le Parlement du Canada et les assemblées législatives des provinces, et ces organes ne peuvent en aucune façon s'entendre sur une division différente de ces compétences. [...] Autoriser une telle entente reviendrait à insérer dans la Loi un pouvoir qui n'y est certes pas énoncé et qu'il ne faudrait pas sous-entendre.
Le jugement de la Cour suprême du Canada, qui était unanime et sans équivoque, prévoit qu'un ordre de gouvernement ne peut céder à un autre ordre de gouvernement ou recevoir de ce dernier les droits et les compétences qui lui sont conférés aux termes des articles 91 et 92 de notre Constitution.
Le gouvernement fédéral n'a pas consulté les Canadiens sur cette question. Il l'a fait une fois, en 1992, mais il n'a pas écouté la réponse. À la suite de la décision unilatérale du gouvernement fédéral, la Colombie-Britannique a consenti à renoncer à cette compétence et ce pouvoir législatifs, ce qui va directement à l'encontre de la décision qu'a rendue la Cour suprême du Canada, en 1950, dans l'arrêt sur l'hôtel Lord Nelson, décision qui n'autorisait pas cette renonciation.
Comment cette décision touche-t-elle les gens ordinaires de la Colombie-Britannique et du reste du Canada? Elle aura des conséquences qui se répercuteront dans tout le pays avant que la poussière ne soit retombée.
Les droits des Nisga'as qui sont prévus dans la Charte sont mis en péril à cause de cette décision. Même si l'entente dit que la Charte s'applique, on dit aussi dans la Charte au sujet des droits et libertés que la garantie ne peut être interprétée comme permettant d'abroger tout traité autochtone ou d'autres droits ou libertés, ou de déroger à ces derniers.
En prévoyant dans la Constitution la possibilité de conclure des ententes sur l'autonomie gouvernementale, le gouvernement a fait du traité conclu avec les Nisga'as un droit autochtone. Il a donc placé le droit autochtone au-dessus des droits des Nisga'as prévus dans la Charte. Cela ne fait absolument aucun doute, et cette décision aura de profondes conséquences pour les Nisga'as à l'avenir.
Nous parlerons plus longuement de cette question aujourd'hui, mais ce qui nous préoccupe, c'est l'initiative anticonstitutionnelle qu'a prise le gouvernement, à l'encontre de la décision rendue par la Cour suprême du Canada en 1950, et la réduction des droits des Nisga'as prévus dans la Charte.
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir poser une question au député, particulièrement en ce qui a trait à sa première assertion qui veut que nous n'ayons pas écouté ou consulté les personnes intéressées.
Le député a-t-il parlé aux Nisga'as qui vivent dans sa circonscription de Skeena? Comment compte-t-il répondre à tous ces gens qui considèrent que c'est un traité plutôt positif?
Est-ce que le député a parlé au maire de la ville de Terrace et aux membres du conseil municipal, qui je le souligne ont même été jusqu'à créer une «semaine de rapprochement avec les Nisga'as» en avril en l'honneur du traité avec les Nisga'as.
A-t-il discuté avec les 133 entreprises de sa circonscription qui appuient le traité? Ces dernières ont même contribué financièrement à la dernière assemblée générale des Nisga'as. A-t-il écouté ce que ces gens avaient à dire? S'il l'a fait, qu'aura-t-il à dire à ces gens qui appuient si activement ce traité?
M. Mike Scott: Monsieur le Président, la ministre demande si j'ai parlé aux Nisga'as. Je l'ai fait à maintes reprises. Il ne sera peut-être pas sans intérêt pour la ministre d'apprendre que le chef Joe Gosnell et moi avons eu un débat télévisé de deux heures sur l'élaboration des traités en 1996, si ma mémoire est fidèle. Il a été diffusé dans tout le nord de la Colombie-Britannique. J'ai aussi discuté avec un grand nombre de propriétaires de petites entreprises chez moi. En fait, je discute avec eux régulièrement.
Je signalerai autre chose pour la gouverne de la ministre. Elle semble penser que les Nisga'as sont un groupe homogène et qu'ils pensent et veulent tous la même chose. Elle devrait reconnaître que 40 p. 100 des Nisga'as n'ont pas appuyé cet accord. Un appui de 60 p. 100 est loin d'être convaincant, pour donner suite à un traité semblable.
La ministre a également posé une question sur l'appui du maire de Terrace. Chez nous, nous savons que le maire de Terrace est un bon libéral, et nous nous attendons à ce qu'il se conforme et appuie tout ce que la ministre et le gouvernement peuvent proposer. Il n'y a rien d'étonnant là-dedans.
M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, Alice avait raison. Les choses sont de plus en plus curieuses, au pays de merveilles.
À lire la résolution proposée par le Parti réformiste, je dois dire que sa profession de foi dans la Cour suprême se compare à la conversion de Paul sur le chemin de Damas.
Je suis à la Chambre depuis deux ans, et je siège depuis aussi longtemps au Comité de la justice. À maintes reprises, les députés réformistes ont affirmé la primauté du Parlement. Ils ont critiqué de façon répétée les renvois à la Cour suprême qui permettent au judiciaire d'interpréter la Charte des droits et libertés. Or, aujourd'hui, ils citent l'ancien premier ministre et chef du Parti libéral comme expert constitutionnel.
La résolution d'aujourd'hui marque-t-elle une réorientation profonde du Parti réformiste et témoigne-t-elle de sa foi envers les juges de la Cour suprême et son interprétation des lois proposées au Parlement, ou a-t-il renoncé au principe de la primauté du Parlement?
M. Mike Scott: Il est intéressant de remarquer que le présent gouvernement et celui qui l'a précédé s'en sont remis chaque fois à la Cour suprême du Canada. Nous savons que, lorsque la Cour suprême rendra son jugement, le gouvernement n'aura pas le courage d'invoquer la disposition de dérogation ni de prendre des mesures fermes pour protéger les droits individuels.
Nous ne demandons pas ici à la Cour suprême de nous débroussailler le terrain en matière de politique sociale ou d'autre chose, ce qui est la première préoccupation que nous avons avec les tribunaux. Nous lui demandons de faire une interprétation judiciaire de la Charte des droits concernant les droits collectifs qu'auront les Nisga'as avant même la mise en oeuvre de ce traité. Ainsi, les Nisga'as et les Canadiens sauront ce que la Cour suprême du Canada perçoit comme conflit potentiel, car conflit il y aura sûrement. Nous voudrions le savoir maintenant et nous croyons que c'est la chose responsable à faire.
Nous voudrions avoir aussi l'interprétation de la Cour suprême du Canada sur la question de savoir s'il s'agit même d'un accord constitutionnel. Il y a à l'heure actuelle, en Colombie-Britannique, quatre contestations judiciaires distinctes, dont trois portent sur la question centrale de savoir si cet accord est seulement constitutionnel. Comment le gouvernement peut-il être responsable et aller de l'avant avant même de connaître le jugement de la Cour suprême sur cette question extrêmement importante?
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, de façon très éloquente, mon collègue de Skeena vient de nous tracer l'historique du traité des Nisga'as et de nous décrire les répercussions qu'il pourrait avoir. Je voudrais profiter de l'occasion pour dénoncer la façon dont le gouvernement a écarté les Canadiens du processus de négociation du traité conclu avec les Nisga'as.
La ministre nous a dit qu'elle avait longuement discuté et négocié avec tout le monde. Je ne partage pas cet avis.
Selon moi, toute l'affaire du traité des Nisga'as est vouée à la catastrophe depuis le début. Le gouvernement fédéral, avec le concours du gouvernement de la Colombie-Britannique, a négocié, signé et veut maintenant ratifier un traité des plus controversés. En limitant la durée du débat sur cette question et en faisant adopter à toute vapeur la législation nécessaire à l'assemblée législative de Victoria, le gouvernement provincial n'a fait qu'aviver la controverse entourant ce traité.
Les dirigeants politiques, les universitaires, les journalistes et les citoyens, tant autochtones que non autochtones, se posent des centaines de questions, mais les réponses, comme d'habitude, se font plutôt rares.
L'expression «gouvernement responsable» revient constamment dans l'histoire de notre nation. On lui donne de nombreuses définitions, mais l'expression revient à dire que le gouvernement est responsable devant les citoyens de la gestion du pays.
Dès le début, les principes de responsabilité et d'imputabilité n'ont pas été appliqués au processus de négociation du traité des Nisga'as. Le traité crée un important précédent qui peut avoir une incidence sur les traités déjà conclus et ceux qui restent à conclure. Il crée un troisième ordre de gouvernement qui est en marge de la Constitution et de la Charte des droits, comme vient de nous le faire remarquer mon collègue. Il autorise l'imposition sans représentation, répartit les droits et les libertés selon des critères ethniques et supprime les droits de propriété des femmes nisga'as vivant sur les terres des Nisga'as.
Ce sont là de très graves conséquences qui requièrent une explication. Quand nous demandons au gouvernement de répondre à ces questions, nous nous faisons traiter de racistes et de prophètes de malheur, entre autres. Les députés d'en face n'hésitent pas à le faire. Ces tactiques de diversion rendent un bien mauvais service aux milliers de Canadiens, Nisga'as comme non-Nisga'as, qui sont directement touchés par le traité.
Il incombe au gouvernement d'informer les Canadiens, ceux du nord de la Colombie-Britannique notamment, des détails du traité et de leur permettre de donner leur avis sur l'utilisation de leurs terres non pas seulement pour un an, ni même dix ans, mais pour toujours.
Quelques bandes voisines des Nisga'as ont des revendications qui chevauchent celles de ces derniers. Ces revendications doivent être réglées avant que le traité soit ratifié. La ministre des Affaires indiennes a été tout sauf comptable durant tout le processus de négociation du traité. Elle a même été irresponsable dans son utilisation de termes comme «autonomie gouvernementale» et «nations autochtones» en réponse à nos questions.
Comme la ministre est maintenant à la Chambre, j'attire son attention sur un article de Dan Gardner qui écrit, dans l'édition du Citizen d'Ottawa du 31 mai 1991, ce qui suit:
Le gouvernement fédéral qualifie les peuples autochtones de «nations». Comme Pierre Trudeau l'a déjà souligné, le mot «nation» est un mot dangereux parce qu'il a deux sens: groupe ethnique et État. Les politiques font allusion au sens de groupe ethnique quand ils parlent des nations autochtones, mais ceux qui les écoutent pensent souvent que ce terme est utilisé au sens d'États autochtones... Ce qu'il faut, c'est une discussion publique franche sur ce qui est offert sur le plan de l'autonomie gouvernementale.
J'ai toujours renoncé à utiliser le terme «première nation» pour deux raisons. D'abord, ce terme laisse entendre que les bandes sont des États distincts à l'intérieur du Canada. Quand on écoute le président de la bande nisga'a, on constate que c'est exactement ce qu'il souhaite. Or, la Constitution ne prévoit aucun mécanisme pour créer un État au sein d'un État. En fait, c'est l'argument dont le gouvernement se sert pour s'opposer, avec raison, à l'indépendance du Québec.
La deuxième raison pour laquelle je n'utilise pas le terme «première nation», c'est parce qu'il fait allusion à une sorte de préséance. En tant que député du Parti réformiste, je souscris pleinement au principe voulant que les Canadiens soient égaux. Je reconnais certes que le terme «première nation» renvoie au fait que les peuples autochtones sont arrivés les premiers, mais d'aucuns pourraient s'en servir pour prétendre avoir préséance en matière constitutionnelle et de droits garantis par la Charte.
Le traité avec les Nisga'as entre dans des domaines sur lesquels les Canadiens ne s'entendent pas. L'accord de Charlottetown abordait l'autonomie gouvernementale de manière aussi floue que ce traité et les Canadiens l'ont rejeté sans aucune hésitation. Au lieu de consulter les Canadiens sur la question, les libéraux font comme ils ont toujours fait quand la question est épineuse, c'est-à-dire que soit ils l'a traitent de façon détournée, soit ils l'imposent sans égard aux conséquences. Ils pensent qu'ils en savent plus que les millions de Canadiens qui ont voté contre l'accord de Charlottetown. Le gouvernement libéral sait mieux que quiconque ce qu'il faut faire et les simples d'esprit que sont les Canadiens n'ont qu'à accepter les changements qui sont apportés à leur vie sans leur consentement. Les Canadiens en ont assez. C'est d'ailleurs de ce ras-le-bol généralisé qu'est né le Parti réformiste.
Le Parti réformiste a pris sur lui de consulter et d'informer les habitants de la Colombie-Britannique. Nous leur avons fait part de nos préoccupations et en retour nous avons reçu des centaines de questions et d'observations. Le commentaire qui revient le plus souvent est qu'ils n'ont pas été suffisamment informés. D'après les renseignements qu'ils ont, ils sont en majorité opposés au traité.
En mars, j'ai fait faire dans ma circonscription un sondage sur un certain nombre de questions dont le traité avec les Nisga'as. À la première question qui était: les habitants de la Colombie-Britannique devraient-ils pouvoir se prononcer sur les principes du traité avec les Nisga'as dans le cadre d'un référendum provincial? 17 p. 100 des répondants ont dit oui, 14 p. 100 ont dit non et 11 p. 100 ne savaient pas.
On leur demandait ensuite comment, en fonction de l'information dont ils disposaient, ils voulaient que leur député fédéral vote quand le traité serait soumis à la ratification du Parlement à Ottawa; 17 p. 100 des répondants veulent que je vote en faveur du traité, 50 p. 100 veulent que je vote contre et 33 p. 100 ne savaient pas.
Ces résultats me disent une ou deux choses. Premièrement, mes électeurs veulent avoir leur mot à dire au sujet du traité. Ils s'opposent à l'adoption du traité et un bon tiers d'entre eux sont indécis parce qu'ils n'ont eu droit qu'à une mise en scène et à de la propagande de la part des gouvernements provincial et fédéral.
L'Assemblée législative de la Colombie-Britannique a récemment ratifié le traité signé avec les Nisga'as. Dans le cadre de l'une des manoeuvres les plus antidémocratiques jamais effectuées à l'extérieur d'Ottawa, le gouvernement du Nouveau Parti démocratique a mis un terme au débat alors que seulement la moitié des dispositions du traité avaient été examinées. Quelque 200 articles n'ont fait l'objet d'aucun débat à l'Assemblée législative provinciale. Nous sommes habitués à la clôture des débats à la Chambre des communes. Les libéraux fédéraux y ont eu recours sans vergogne à 53 reprises depuis 1993.
Pourquoi un gouvernement démocratique s'oppose-t-il à la tenue d'un débat ouvert sur un projet de loi qui modifie de façon définitive la façon dont les revendications territoriales et traités seront négociés au Canada? Je ne puis trouver aucune justification valable et la seule explication qui me vienne à l'esprit est que la question est trop délicate du point de vue politique. C'est sans doute ce qu'il y a de «nouveau» dans le Nouveau Parti démocratique.
On a mis un terme aux négociations. Après le processus de ratification provincial, qui n'a été rien d'autre qu'une mauvaise plaisanterie, le traité a été envoyé à Ottawa pour y être approuvé d'office et donner lieu à une séance de photos. La ministre des Affaires indiennes a cru qu'elle pourrait glisser le traité sous le tapis et le faire adopter en un rien de temps par la Chambre des communes, puisque, après tout, cela ne concerne que la Colombie-Britannique. Où avons-nous déjà vu une situation pareille? Ah oui, lorsque les libéraux ont laissé les enfants, en Colombie-Britannique, à la merci des pornographes.
Les plans de la ministre des Affaires indiennes ont été contrecarrés lorsque les députés de Skeena et Delta—South Richmond ont commencé à poser des questions pointues concernant le secret qui entourait le traité signé avec les Nisga'as. Que s'est-il produit? La ministre a signé le traité avant sa mise à l'écart et le processus a été reporté à l'automne.
Nous nous retrouvons aujourd'hui à débattre le sujet au moment où la Chambre est sur le point de s'ajourner pour l'été et qu'il est fortement question de prorogation. En l'absence de la Chambre, nous voulons que le gouvernement demande à la Cour suprême du Canada de se prononcer sur la constitutionnalité du traité et sur l'application de la Charte des droits et libertés relativement au traité.
À l'instar de la déclaration unilatérale d'indépendance du Québec, le traité signé avec les Nisga'as devrait être soumis à l'interprétation du plus haut tribunal. Cela permettrait d'éclaircir la plupart des questions constitutionnelles que nous avons soulevées avant de débattre de la ratification du projet de loi à la reprise des travaux à l'automne. Ne serait-ce pas faire preuve de responsabilité? Peut-on trouver une solution plus raisonnable?
Enfin, je désire proposer un amendement à notre motion. Je propose:
Qu'on modifie la motion en ajoutant après le mot «instamment», les mots «et vigoureusement».
Le vice-président: L'amendement est recevable. Le débat porte sur l'amendement.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention les propos de mon collègue du Parti réformiste.
Il a donné un certain nombre de statistiques intéressantes, entre autres sur le fait que, en Colombie-Britannique, l'opinion publique semblait s'y opposer.
J'ai deux questions à poser à mon collègue. Est-ce que dans les comtés représentés par des députés réformistes, ces députés ne jouent pas un peu aux agitateurs en conditionnant l'opinion publique dans leurs comtés respectifs en disant que ce traité et la loi à venir sur les Nisga'as sont des choses épouvantables?
J'ai lu beaucoup d'articles de journaux de Colombie-Britannique et je n'ai pas vu une seule remarque positive d'un député réformiste à l'égard du traité nisga'a.
J'ai aussi entendu mon collègue dire qu'il était très représentatif, que les gens de Colombie-Britannique s'objectaient, et que le Parti réformiste représentait bien ces gens-là.
Est-ce qu'il peut faire un parallèle avec les intentions de vote au Canada en faveur du Parti réformiste, où seulement 9 p. 100 des gens voteraient maintenant en faveur de ce parti? N'est-ce pas là une preuve que le Parti réformiste est tout simplement à côté de la voie pour ce qui est des questions autochtones?
[Traduction]
M. Jay Hill: Monsieur le Président, je ne crois pas que nous jouions le rôle d'agitateurs, pour reprendre le terme employé par le député. Je défie le député néo-démocrate de Kamloops de parler de ce traité avec les gens de sa circonscription.
Tout le monde est d'accord sur cette question dans l'ensemble de la Colombie-Britannique, particulièrement dans les régions rurales de la province, où les gens comprennent la question des revendications territoriales et de l'autonomie gouvernementale et tous les problèmes liés au système des réserves au Canada. Les gens ont des opinions très fermes à cet égard et ils n'ont pas peur de les exprimer. Cela est évident lorsqu'on écoute certaines tribunes téléphoniques à la radio en Colombie-Britannique.
L'opposition libérale à Victoria a exprimé ces opinions de façon très énergique durant le peu de temps dont elle a disposé pour débattre cette mesure législative avant que le gouvernement néo-démocrate ne mette fin au débat. Sous la direction de Gordon Campbell, l'opposition libérale a été très ferme pour ce qui est de dénoncer ce traité et le processus qui a conduit à la conclusion de ce traité.
Un certain nombre de mini-référendums ont été tenus dans différentes municipalités. Je n'ai pas tous les détails pertinents à ce sujet et je n'ai pas le temps d'en parler plus longuement, mais la majorité des habitants de la Colombie-Britannique s'opposent à ce traité dans le moment.
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je serai bref parce que je sais que mon collègue du Manitoba voudrait aussi poser une question.
Le député de Skeena se reporte au programme en cinq points dont il était question à l'époque de l'accord de Charlottetown, mais il se trompe encore une fois. Selon les sondages Angus Reid réalisés tout au long de cette année-là, la partie de l'accord concernant les peuples autochtones était justement celle qui recevait le plus d'appuis d'un bout à l'autre du pays.
Une voix: C'est inexact.
M. David Iftody: Monsieur le Président, c'est la vérité.
Je voudrais demander au député si, dans sa circonscription, il y a une ville de 2 500 habitants, et je sais que c'est le cas, à qui, en tant que député du Parti réformiste, il avait promis publiquement de se prononcer de manière à les appuyer, mais à qui il s'opposerait, comme le député de Skeena le fait aujourd'hui?
M. Jay Hill: Monsieur le Président, le député devrait savoir qu'il est souvent difficile pour un député de se prononcer au nom de tous ses électeurs, surtout sur des dossiers controversés. Mais nous, nous faisons des efforts pour découvrir le point de vue de la majorité, alors que les libéraux ne se donneraient jamais tant de peine.
Personnellement, j'ai été élu par les deux tiers des habitants de ma circonscription qui ont pris le temps d'aller voter. Je leur en suis toujours très reconnaissant. C'est l'appui dont j'ai bénéficié aux dernières élections pour devenir député. Il est évident que la majorité de ces électeurs sont opposés à ce traité, tel qu'il est rédigé. C'est pourquoi je le dénonce.
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, à titre de ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien depuis deux ans, j'ai consacré beaucoup de temps pour expliquer le traité avec les Nisga'as aux habitants de la Colombie-Britannique. C'est un traité d'une importance primordiale, pas seulement pour les Nisga'as ou pour les habitants de la Colombie-Britannique, mais pour tous les Canadiens. C'est un traité essentiel. Comme le souligne le Parti réformiste, il est essentiel de parler des préoccupations et des questions légitimes que soulève le traité conclu avec les Nisga'as, ainsi que de la mesure dans laquelle il est appuyé ou non.
Dans les conversations que nous avons au sujet du traité proprement dit, les questions portent essentiellement sur trois aspects particuliers. Les gens nous demandent «Pourquoi conclure des traités?» Ils veulent comprendre ce qu'est le processus de conclusion des traités et pourquoi nous y avons recours. Ils demandent «Pourquoi l'autonomie gouvernementale?» et «Que comprend le traité conclu avec les Nisga'as?» Je ferai de brefs commentaires au sujet de chacune de ces trois questions.
Commençant par «Pourquoi conclure des traités?» Je souligne en passant que ce n'est pas la ministre des Affaires indiennes qui a lancé la notion d'établissement de traités. Cet honneur ne revient pas à la province de Colombie-Britannique ni à Joe Gosnell, président du Conseil des Nisga'as.
Les traités font depuis longtemps partie de l'histoire du Canada. Il faut remonter à l'an 1763 quand, dans une proclamation royale, le roi George a dit qu'il fallait trouver une façon équitable et pratique de travailler avec les indigènes des colonies, dans les Canadas. Heureusement, les chefs et les autochtones partageaient le même sentiment. Ils souhaitaient que l'on trouve une façon équitable et pratique de travailler tous ensemble dans les terres qui portent dorénavant l'appellation de Canada. Au lieu de favoriser des guerres de conquête, ils ont choisi la voie du compromis par l'entremise de la négociation. C'est depuis ce temps que des traités sont établis au Canada.
L'histoire ne s'est pas arrêtée là. Les obligations et les responsabilités prévues dans certains traités au pays sont désormais protégées dans la Constitution. L'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 assure la protection des droits et des obligations en vertu des traités. La Constitution protège aussi tous les droits en vertu des futurs traités qui pourraient, au fil des ans et tel que prévu, être signés avec les premières nations, individuellement ou en groupes.
Nous ne modifions pas la Constitution lorsque nous rédigeons des traités. Nous actualisons l'article 35 de la Constitution. Nous donnons aux premières nations qui n'ont pas encore eu cette prérogative l'occasion de devenir membres à part entière du Canada, dans le plein sens de cette expression selon nos lois.
Parler de lois nous amène à la deuxième question, c'est-à-dire «pourquoi l'autonomie gouvernementale?». Pourquoi avons-nous choisi cette approche? De quoi s'agit-il? Il est évident qu'au début de la colonisation, lorsque les Européens ont négocié avec les premières nations, les chefs, ils savaient qu'ils traitaient avec un gouvernement légitime. George Vancouver, lorsqu'il est arrivé sur les terres des Nisga'as, a été surpris de voir que ceux-ci habitaient des maisons à deux étages et avaient institué une société fort complexe. Il y avait donc un gouvernement, et un gouvernement très efficace, dans les collectivités autochtones, bien avant que nous arrivions ici.
Avec le temps, à mesure que nous sommes devenus majoritaires je suppose, nous avons commencé à penser différemment. Nous avons commencé à croire que notre façon de faire était la meilleure et qu'Ottawa devait prendre les décisions au nom des premières nations. Nous avons estimé que le ministre des Affaires indiennes devait prendre les décisions au nom des premières nations.
Et maintenant, nous avons la Loi sur les indiens. Le Parti réformiste ne croit certainement pas que la Loi sur les indiens est le mécanisme à privilégier pour assurer un avenir positif aux autochtones. Ce n'est pas le cas et elle doit être changée.
Une voix: Il faudrait l'abolir.
L'hon. Jane Stewart: Voilà! Abrogeons cette loi. Comment y parvenir? Nous pouvons le faire en revenant à des relations fondées sur le principe d'un gouvernement communautaire pour les premières nations au même titre que pour les autres Canadiens. C'est extrêmement important pour nous et cela nous donne une occasion de progresser ensemble.
Puisqu'il est question de l'exercice des pouvoirs, disons que les Canadiens comprennent cette idée. Ils veulent que les compétences et les pouvoirs soient clairs. Ils veulent pouvoir mettre en place des tribunes où l'on peut se rencontrer pour résoudre les problèmes. Croyez-moi, personne ne comprend la Loi sur les Indiens. Personne n'accepte que la ministre des Affaires indiennes ait à avaliser les volontés des autochtones ni qu'elle doive leur dire comment utiliser leurs terres. C'est dépassé. C'est inacceptable, et nous pouvons faire mieux. Le traité conclu avec les Nisga'as nous donne simplement l'occasion de faire cela.
Voyons maintenant le traité conclu avec les Nisga'as. Quelle en est sa teneur? Ce traité établit les obligations et responsabilités particulières que nous avons envers les Nisga'as et ce que ces derniers vont nous donner à leur tour.
Nous allons leur fournir des terres, 2 000 kilomètres carrés de terres dont ils seront propriétaires; il ne s'agira pas de réserves—les membres souhaitant changer le système des réserves—mais bien de propriétés en fief simple. À ce titre, le non-assujettissement à l'impôt ne s'appliquera pas à ces terres. Les Nisga'as paieront la taxe de vente provinciale, l'impôt provincial, la taxe de vente fédérale ainsi que l'impôt fédéral. Leurs entreprises paieront de l'impôt sur le revenu des sociétés. Nous délaissons l'ancien système des réserves et nous modernisons nos relations de façon très positive.
Il y a d'ailleurs d'autres aspects, d'autres obligations et responsabilités qui seront retransférés aux Nisga'as. Ils seront habilités à gérer leurs ressources forestières, halieutiques et fauniques. Ils pourront prendre des décisions au sujet de ces ressources et les utiliser plus efficacement qu'ils n'ont jamais pu le faire auparavant. C'est tout à fait sensé. C'est ce qui est clairement prévu dans le traité. Les gens peuvent le lire et comprendre le genre de relations qui sont proposées.
Le régime administratif est établi dans le traité. Il est complexe, peut-être trop complexe pour le Parti réformiste, mais il est là et il est expliqué. Fondamentalement, il y a trois paliers de gouvernement. Il faut bien les comprendre.
Il y a d'abord et avant tout le palier fédéral, avec les lois comme la Constitution, la Charte des droits et libertés et le Code criminel, qui continueront de s'appliquer. Les députés peuvent être certains que nous confirmerons dans la loi habilitante que la Charte s'applique au peuple nisga'a. Ces lois seront maintenues.
Deuxièmement, il y a le palier provincial, qui s'occupe de secteurs comme l'éducation et la santé, et dont les Nisga'as assumeront la responsabilité. Mais soyons clairs: lorsque cela se fera, les Nisga'as devront égaler ou dépasser les lois provinciales. Il n'y a aucune raison de s'inquiéter. Les gens comprendront. Ce sera clair.
Les citoyens qui ne sont pas nisga'a, qui vivent sur le territoire nisga'a et reçoivent des services d'éducation et de santé des Nisga'as auront le droit de se présenter aux élections aux conseils scolaires et aux conseils de santé. Un processus d'appel a été prévu pour leur permettre de s'engager et d'être des participants à part entière dans ces domaines. C'est extrêmement important à comprendre. Le traité établit cela. Il est très clair sur ce point, et il nous fait avancer.
Le troisième palier de gouvernement renvoie directement aux aspects fondamentaux de la vie des Nisga'as eux-mêmes, à leur patrimoine, leur culture et leur langue. Il n'y a aucune loi provinciale ou fédérale sur ces questions. Pourquoi y en aurait-il? Nous ignorons comment protéger leur langue et nous ne connaissons pas leur histoire et leur culture, en tout cas, nous les connaissons bien moins qu'eux. Les Nisga'as assumeront la responsabilité dans ces secteurs pour garantir que leur histoire est vibrante et qu'elle le restera.
Nous avons travaillé très dur à la négociation de cet accord. Nous avons en avons parlé aux citoyens de la Colombie-Britannique. Il existe une entente de principe depuis plusieurs années. Des assemblées publiques ont eu lieu. Les collectivités de la vallée de la Nass appuient cette mesure, qu'elles considèrent comme un important progrès dans la voie de la modernisation de nos relations.
Nous aurons l'occasion de discuter des détails à la Chambre, là où ils devraient l'être. Je continuerai de m'entretenir avec les habitants de la Colombie-Britannique afin d'apaiser leurs préoccupations, qui sont légitimes et auxquelles répond le traité.
En conclusion, je dirai que ce traité, en réglant la question de ces obligations de longue date, apporte une certaine certitude en ce qui a trait aux terres. Il fournit aux collectivités la possibilité de travailler en collaboration plus étroite, aux premières nations de bâtir des liens avec le secteur privé et les municipalités environnantes ainsi que de s'engager pleinement vis-à-vis de ce grand pays qui est le nôtre.
Il permet le développement économique de la province et de la vallée de la Nass et crée de nouvelles possibilités de prospérité et de développement. Finalement, c'est une façon de dire aux premières nations que le Canada se réjouit de les compter au nombre des siens. Les premières nations veulent faire partie du Canada. Elles ne veulent pas quitter ce grand pays. Ce traité est une façon de les faire participer.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, je ne sais pas par où commencer. La ministre fait magnifiquement appel aux émotions. Elle fait toujours appel aux émotions quand elle répond à des questions concernant le traité conclu avec les Nisga'as. Le moment n'est-il pas venu de régler cette affaire? Le moment n'est-il pas venu d'établir de nouvelles relations avec les peuples autochtones? Le moment n'est-il pas venu de tourner la page de cette histoire sombre de notre pays et de partir sur de nouvelles bases?
Certes, tout le monde s'entend là-dessus, mais la ministre ne répond pas aux questions. Elle ne répond pas aux questions d'ordre constitutionnel. Elle ne répond pas aux questions ayant trait à la Charte? Elle ne répond pas à notre question voulant que l'article 25 de la Charte risque d'éclipser les droits des Nisga'as. Elle ne répond pas à la contestation qui a été soulevée en Colombie-Britannique parce que le gouvernement a violé les articles 91 et 92 de la Constitution.
Je n'arrive pas à comprendre pourquoi la ministre ne répond à des questions pourtant précises. Elle se contente de faire appel aux émotions. C'est tout ce qui importe à ses yeux.
Je demande à la ministre pourquoi le gouvernement refuse de soumettre l'accord à la Cour suprême du Canada pour obtenir des précisions quant à sa constitutionnalité et à son statut par rapport à la Charte des droits? Ce sont là deux questions très importantes. Pourquoi la ministre refuse-t-elle de soumettre ce document à la Cour suprême avant sa ratification? Que sont quelques mois de plus au bout de 130 ans, quand il s'agit de confirmer si on a bien agi, si les droits des Nisga'as ne sont pas amoindris et si cet accord est bien compatible avec la Constitution? Que craint-elle?
L'hon. Jane Stewart: Monsieur le Président, nous croyons de notre côté que nous devons respecter les engagements inscrits dans notre Constitution. La Constitution protège les droits issus de traités qui ont déjà été négociés pour les premières nations par le passé ainsi que de ceux qui le seront dans l'avenir.
Nous nous sommes retrouvés devant les tribunaux à quelques reprises. À chaque fois, on nous a dit: «Veuillez prendre vos responsabilités et négocier. Vous pouvez revenir devant nous si vous voulez, mais nous vous répéterons que les autochtones ont des droits au Canada. Toutefois, vous seuls pouvez vous asseoir à la table avec les premières nations, discuter à fond de toutes ces questions et inscrire ces droits dans un traité.»
C'est exactement ce que nous faisons. Il ne s'agit pas d'une question constitutionnelle, mais bien d'une obligation pour le Canada de reconnaître et de protéger les droits des autochtones, tel que prévu par l'article 35 de la Constitution.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais savoir si la ministre est d'accord pour dire que nous sommes témoins ici des derniers soubresauts de ce que l'on peut considérer comme une campagne entreprise il y a environ deux ans au nom du Parti réformiste dans le but d'essayer de discréditer les dirigeants autochtones et, à un niveau qui va bien au-delà du traité avec les Nisga'as, de militer contre tout le dossier de l'autonomie gouvernementale.
Depuis deux ans presque jour pour jour, j'ai vu les députés réformistes essayer ici en Chambre de relier certains exemples isolés de mauvaise administration relevés dans diverses réserves. Ils ont essayé de présenter la situation sur un plan plus vaste, prétendant que les autochtones ne sont pas en mesure d'assumer leur propre administration et qu'on ne devrait pas leur accorder l'autonomie.
Certaines personnes craignent de voir leurs propres droits réduits simplement parce qu'on accorde des droits à un plus vaste groupe de personnes. Ils considèrent que les droits de la personne sont un tout immuable. Dans cette optique, lorsqu'un groupe s'en approprie une trop grande part, il en reste moins pour les autres. C'est ce qu'on entend souvent répéter.
La ministre sait-elle que le Parti réformiste s'est vraiment fait le porte-parole de tout le mouvement anti-autochtone dans l'ouest du Canada, où je vis, et l'initiateur de ce mouvement dans l'ouest du Canada? Il y a toutes sortes de liens que j'aimerais bien établir si j'avais davantage de temps.
L'hon. Jane Stewart: Monsieur le Président, j'aimerais dire une ou deux choses en guise de réponse.
Tout d'abord, il ne fait aucun doute que les gens se posent des questions tout à fait légitimes au sujet du traité avec les Nisga'as. Il faut que nous cernions ces questions et que nous y répondions, ce que nous allons continuer à faire avec l'aide de tous les partis représentés à la Chambre, à l'exception du Parti réformiste.
L'autre chose que j'aimerais souligner est que très souvent, en fait toujours, la manière de faire du Parti réformiste consiste à exposer les problèmes et les questions. Il semble toutefois absolument incapable de présenter une alternative, qu'elle soit unie ou non.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, je veux d'abord commencer mon discours en saluant les Nisga'as qui sont en train d'écouter le débat à la Chambre aujourd'hui, particulièrement le grand chef Gosnell à qui j'ai parlé hier.
Je ne veux pas m'attarder trop longtemps sur le contenu de l'entente car je pense que l'automne prochain nous aurons suffisamment de temps pour l'étudier en profondeur.
Dans le discours d'aujourd'hui portant sur une motion sur laquelle nous devons nous prononcer, il m'apparaît important de m'attarder plutôt sur le cheminement démocratique. Est-ce que la démarche démocratique a été légale et légitime? Je vais surtout m'attarder là-dessus.
Cette démarche, qui a commencé probablement en 1880, fut une longue démarche. En 1996, j'entendais M. Gosnell dire que le canot était finalement arrivé lors de la signature de l'entende de principe. Je pense qu'il avait encore quelques coups d'aviron à donner.
Aujourd'hui, on a aussi un coup d'aviron à donner avec les Nisga'as, justement pour leur permettre de se rendre sur cette terre qu'ils essaient d'avoir en leur possession depuis maintenant plus de cent ans.
Cela a été un cheminement démocratique courageux. Ces gens ont aussi été extrêmement pacifistes. Ils ont toujours voulu arriver à cette terre par la négociation. Ils ont été très courageux et persévérants et, aujourd'hui, ils ont besoin d'un coup de main. Du côté du Bloc québécois, nous sommes naturellement tout à fait prêts à leur donner ce coup de main.
En 1880, les chefs ont commencé à dire: «Nous occupons ces terres depuis des temps immémoriaux.» Ils ont fait des représentations afin que ces terres puissent leur appartenir. Il y a eu presque un siècle de représentations. C'est l'arrêt Calder, en 1973, qui a amené beaucoup de changements. On a reconnu qu'il y avait probablement des titres autochtones qui devaient être acceptés.
J'ai eu le grand privilège de rencontrer M. Calder ici, il y a quelques années. J'ai pu constater que c'était une personne extraordinaire. C'est un Nisga'a et il a, je pense, fait beaucoup avancer la cause de ce peuple.
En 1976, finalement, le gouvernement fédéral a entrepris les négociations. Ce n'est qu'en 1990 que le gouvernement de la Colombie-Britannique s'est joint aux négociations. En 1996, finalement, est arrivée l'entente de principe. C'est là que Joe Gosnell a dit: «Finalement, le canot est arrivé.» Cependant, c'était sans compter sur le Parti réformiste qui, à mon point de vue, tire à coups de canon sur le canot des Nisga'as. Ils ne tiennent absolument pas à ce que ce canot parvienne à destination.
Si je regarde de quelle façon on doit procéder avec le traité qui est devant nous, qui a reçu une signature définitive en août 1998, pour qu'il soit exécutoire, il faut que les trois parties suivent une mécanique bien précise. Il doit y avoir un référendum chez les Nisga'as. Il doit aussi porter la signature d'un ministre de la province et être entériné par l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique. C'est la même chose pour le gouvernement du Canada. Il doit avoir la signature d'un membre du Cabinet fédéral et être entériné par la Chambre des communes.
J'aimerais m'attarder sur le résultat du référendum des Nisga'as qui a été tenu le 10 novembre 1998: 1 451 Nisga'as ont voté en faveur de cette entente définitive; 558 ont voté contre; 356 personnes n'ont pas exercé leur droit de vote et 11 bulletins ont été rejetés. Cela veut dire que 61 p. 100 des électeurs éligibles ont dit oui à ce traité et 23 p. 100 ont dit non. Je rappelle que comme dans toute bonne démocratie, la règle était 50 p. 100 plus un.
Du côté des Nisga'as, le travail a été fait. Une proportion de 70 p. 100 des gens qui sont allés voter ont appuyé ce traité. C'est très important de savoir que non seulement la démarche a été très légale, mais qu'elle a aussi été très légitime.
En Colombie-Britannique, cette étape aussi est passée. Un ministre a signé l'entente au nom du gouvernement de la Colombie-Britannique. L'Assemblée législative de la Colombie-Britannique a aussi voté en faveur. Ici, la signature d'un membre du Cabinet a également eu lieu, on s'en rappelle, la semaine dernière. D'ailleurs, les réformistes en ont fait tout un plat.
Je rappelle que sur le plan juridique, tant que la loi n'a pas été adoptée, le traité ne peut pas être mis en vigueur. Alors, même si la ministre a signé l'entente, le traité ne peut pas être mis en vigueur tant qu'on n'a pas réglé le fond de la question à la Chambre.
J'en viens maintenant à la motion du Parti réformiste. Je ne surprendrai personne en disant que le Bloc québécois sera contre cette motion. Quand on réfère à la Cour suprême, nous, on se retrouve là-dedans, car il n'y a pas tellement longtemps, le ministre de la Justice a référé à la Cour suprême pour empêcher la démarche démocratique, légale et légitime du peuple du Québec. Le ministre de la Justice avait fait la même chose, lors d'un renvoi à la Cour suprême du Canada pour lui demander: «On veut avoir des balises; est-ce que 50 p. 100 plus un, c'est suffisant?» Il y avait plusieurs questions.
C'est précisément la même attitude ici, de référer à la Cour suprême pour briser une démarche démocratique du peuple nisga'a. Alors, naturellement, on ne peut pas être d'accord avec cela.
La motion réfère aussi à des mesures dilatoires. On veut retarder encore une fois l'échéance pour permettre de faire encore plus d'agitation en Colombie-Britannique et pour essayer de torpiller ou de canonner ce fameux canot auquel les Nisga'as tiennent tant.
Nous sommes contre aussi, parce que nous pensons qu'on veut mêler les cartes. Quand on réfère, dans la motion, à la bande de Musqueam et à la bande de Kamloops, ce n'est pas de cela dont on discute dans le traité conclu avec les Nisga'as. Bien sûr, le Parti réformiste veut se servir de ces exemples pour faire dérailler le traité, mais à mon avis, ce sont des dossiers distincts.
J'invite le Parti réformiste à faire comme moi. Je vais me rendre en Colombie-Britannique cet été et je vais aller voir ce qui se passe avec la bande de Musqueam. Mon collègue me dit de venir, je ne sais pas si c'est dans son comté, mais il me fera plaisir de rencontrer, non seulement le conseil de bande, mais aussi les gens qui sont aux prises avec des hausses de taxes importantes.
Mais ce n'est pas suffisant pour faire dérailler le traité des Nisga'as. Il ne faut pas se servir d'exemples où cela va mal, à certains endroits en Colombie-Britannique ou ailleurs au Canada, pour dire qu'on doit maintenant torpiller le traité avec les Nisga'as et le laisser de côté. C'est un autre argument qui fait que le Bloc ne peut pas être d'accord avec la motion.
On est aussi contre le fait que ça demande un amendement constitutionnel. Il y a plusieurs légalistes qui se sont prononcés. Il y en a un ici que j'aimerais citer, pour le bénéfice du hansard. C'est M. Hogg, de l'Université York, qui dit, et je cite:
[Traduction]
En principe, selon moi, il ne serait pas souhaitable de tenir un référendum à chaque fois qu'un traité est conclu avec des autochtones. Les traités ont pour objet de préciser et d'expliciter les droits que les autochtones possèdent depuis avant l'arrivée des Européens. Ces traités sont des documents longs et compliqués qui sont le fruit de plusieurs années de négociations et de nombreux compromis des deux côtés. Il serait très difficile de communiquer toutes ces questions de façon équilibrée dans le cadre d'un référendum provincial.
S'il y avait un référendum et que le traité était rejeté, le problème demeurerait entier pour ce qui est de préciser et d'expliciter les droit des autochtones. Ces derniers seraient alors obligés de s'adresser aux tribunaux pour faire valoir leurs droits à la terre, aux ressources et à l'autonomie gouvernementale. Dans l'affaire Delgamuukw, la Cour suprême du Canada a dit qu'elle était prête à entendre leurs causes, mais qu'il valait mieux que les gouvernements concluent des accords négociés avec les autochtones. Je suis d'accord avec la Cour suprême.
[Français]
Alors, c'est très clair. Si on veut aller contester devant les tribunaux, on n'arrêtera jamais de se promener d'un palier à un autre pour retarder l'importance de ce type de traité. Je pense qu'on ne pourra pas arrêter la marche démocratique des Nisga'as, tout comme on ne pourra pas arrêter la marche démocratique du peuple du Québec.
Ce ne sont pas les cours qui peuvent arrêter les démarches démocratiques de libération des peuples. Ce ne sont pas les armées qui peuvent arrêter cela non plus, et je dirais, à la limite, que ce ne sont même pas les parlements qui peuvent arrêter cela.
C'est un désir fondamental d'un peuple d'en arriver à une plus grande autonomie, et je trouve que les Québécois et le peuple Nisga'a ont beaucoup de similitudes dans cette marge de libéralisation.
En ce sens, je veux dire aux Nisga'as et aux téléspectateurs qui nous écoutent aujourd'hui que le Bloc québécois va appuyer cette marche vers la complète libération de ce peuple, afin qu'il puisse avoir la main-mise sur son propre avenir et ne plus avoir à passer par des parlements et des tribunaux pour régler ses questions fondamentales.
Je dis à Joe Gosnell et au peuple nisga'a de continuer à avironner pour leur canot, et que le Bloc québécois a l'intention de leur donner une petite poussée pour faire en sorte qu'ils puissent prendre possession, une fois pour toutes, des terres qui leur ont toujours appartenu.
[Traduction]
M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, je ne suis pas surpris d'entendre les bloquistes dénoncer cette motion. Cela prouve au moins qu'ils ont de la suite dans les idées et qu'ils sont fidèles à leurs convictions, contrairement à d'autres députés d'en face.
Je voudrais savoir ce que le député pense de la création d'un État miniature à l'intérieur de notre État ou encore de ce que M. Bouchard dirait si on lui accordait, sur un plateau d'argent, toutes les possibilités de gouverner dans tous les champs de compétence, comme nous allons le faire à l'égard des Nisga'as en vertu de ce traité, par exemple en ce qui concerne les pêches, la faune, l'adoption d'enfants, les services de santé, l'aide à la famille et l'éducation.
Le député ne croit-il pas que, si le Québec bénéficiait d'un accord comparable à celui que le gouvernement entend accorder aux Nisga'as, il ne serait pas seulement heureux, mais absolument ravi?
[Français]
M. Claude Bachand: Monsieur le Président, c'est une très bonne question, et je suis très heureux qu'elle soit soulevée.
Le traité des Nisga'as est un traité moderne, mais le premier traité qui a tracé la voie à ce traité moderne, c'est la Convention de la Baie-James. Tout ce que l'honorable collègue vient de dire par rapport à ce qui devrait être dévolu aux autochtones, nous l'avons déjà fait, en 1975, et on l'a fait aussi avec les Naskapis quelques années plus tard.
Il y a, bien sûr, des points de juridiction qui sont dévolus d'un palier de gouvernement, provincial ou fédéral, à un autre palier, qui peut être celui des autochtones. Mais tout cela se fait par des accords, tout comme les ententes qu'il y a aujourd'hui entre les trois paliers de gouvernement, les autochtones, le provincial et le fédéral.
C'est le fédéral ou le provincial qui décide ce qu'il veut attribuer aux autochtones, et c'est tout simplement la reconnaissance que ce sont des gens qui ont une approche et une culture distinctes. Ce n'est pas en faisant des programmes pancanadiens ou panprovinciaux qu'on va satisfaire ces gens qui ont une approche particulière envers leur culture, leur santé et leur éducation.
Je dis à mon honorable collègue que nous l'avons déjà fait, et qu'on voit beaucoup de similitudes avec ce qui se passe du côté des Nisga'as aujourd'hui. Selon moi, la Convention de la Baie-James a été une figure de proue, un phare avec lequel les gens se guident aujourd'hui pour conclure des traités modernes, qui sont très similaires à celui de la Convention de la Baie-James.
[Traduction]
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, il doit y avoir une erreur dans la traduction des propos du député, parce que j'entends constamment le terme «libération», comme si les Nisga'as voulaient une libération dans le même sens que les souverainistes veulent une séparation du reste du Canada.
Dans ce traité, les Nisga'as veulent s'unir. Le traité a strictement pour objet de donner aux Nisga'as un sentiment d'unité culturelle avec le reste du Canada tout en assurant le respect de leur culture. Le pays est la création de trois grands peuples fondateurs: ceux qui parlent anglais, ceux qui parlent français et ceux qui ont un patrimoine autochtone et qui parlent plusieurs langues. Ce sont eux qui nous ont accueillis et qui ont permis aux anglophones et aux francophones de survivre malgré la rigueur du climat.
J'invite mon vis-à-vis à penser que les Nisga'as sont chez eux au Canada. Je rejette son hypothèse voulant que les Nisga'as doivent être libérés. Il n'est pas du tout question de cela.
[Français]
M. Claude Bachand: Monsieur le Président, je veux dire à mon collègue qu'il n'y a pas eu d'erreur d'interprétation. Je maintiens que les Nisga'as, par leur gouvernement—parce qu'il va y avoir un gouvernement nisga'a—vont maintenant se libérer de la grande dépendance qu'ils avaient à l'égard du fédéral.
J'invite le député à lire le rapport de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones. Partout, les peuples autochtones veulent se libérer et avoir leur propre gouvernement. Ils veulent sortir des réserves. Ils veulent avoir le contrôle sur leur vie et que ce soit fini qu'Ottawa prenne des décisions à leur place.
Pour moi, comme pour le Québec, c'est aussi une marche de libération.
[Traduction]
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, lorsque j'ai lu la motion du Parti réformiste dont nous sommes saisis aujourd'hui, la première chose qui m'a frappée, c'est que le programme de ce parti est identique à celui des libéraux de la Colombie-Britannique.
Quel est donc l'objectif de ce programme? Il cherche à diviser les gens, à susciter la peur et l'incertitude. Il sabote le progrès réalisé dans la recherche d'une entente historique avec les Nisga'as. Il crée une diversion, un écran de fumée.
Soyons clairs. Le Parti réformiste ne veut pas que la Cour suprême clarifie ce traité. Les réformistes ont accès à des conseillers juridiques autant que tout autre député ou parti politique. Ils ne souhaitent pas la clarification. Ils veulent détruire le processus démocratique qui permettrait de trouver une issue à la lutte qui dure depuis 111 ans et de signer un traité moderne avec les Nisga'as.
Si les réformistes sont surpris de voir que tous les députés à la Chambre, sauf eux, réagissent si vivement face à la motion, c'est qu'il ne s'agit pas uniquement de la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui, mais bien, comme l'a souligné notre collègue du NPD plus tôt, de l'attaque constante des députés réformistes qui, jour après jour, semaine après semaine et mois après mois, interviennent à la Chambre et dans d'autres forums publics pour détruire, pour renforcer tous les exemples négatifs qu'ils peuvent trouver.
Comment ne pas conclure qu'ils poursuivent un programme politique précis? Ils ne veulent pas clarifier la question ou prendre la mesure appropriée, ils veulent ébranler un processus démocratique et alarmer les gens. Je trouve cela consternant. J'ai assisté à ce phénomène en Colombie-Britannique avec les libéraux provinciaux et je vois maintenant la même chose se produire parce que le programme du Parti réformiste est identique.
On nous dit qu'il s'agit d'une clarification de questions juridiques, une démarche très sérieuse. De nombreux avis juridiques nous disent que, selon l'article 35 de la Constitution, les droits issus de traités conclus avec les autochtones doivent être respectés. Nous savons que l'article 35 porte sur des traités antérieurs et qu'il prévoit une disposition concernant la conclusion de traités à l'avenir. Il est très évident que le traité conclu avec les Nisga'as ne constitue pas une modification de la Constitution. Des avis juridiques, y compris ceux du doyen d'Osgoode Hall et de bien d'autres, l'ont très clairement expliqué, et le Parti réformiste le sait pertinemment.
Dans le débat d'aujourd'hui, on note avec intérêt de ce suit lorsqu'on examine d'autres positions que le Parti réformiste a adoptées. Comment se fait-il que, dans le cas qui nous occupe, les réformistes veulent que la Cour suprême soit saisie de la question, alors que, dans d'autres cas, par exemple, celui de la pornographie juvénile, ils poussaient les hauts cris et disaient que nous ne pouvions pas faire intervenir la Cour suprême, que c'était les pouvoirs et les décisions du Parlement qui comptaient? Tout à coup, il y a deux poids deux mesures.
Comment se fait-il que les réformistes contestent un traité intérieur qui s'insère manifestement dans le cadre juridique de notre Constitution, de la Charte des droits et de toutes nos lois, mais que, lorsqu'il s'agit de traités internationaux comme l'AMI ou l'ALENA, qui constituent un transfert énorme du pouvoir de gouvernements démocratiquement élus à des multinationales, ils demeurent silencieux? Ils ne disent pas un mot. Ils font campagne pour que cette orientation soit respectée. Il n'est guère étonnant que cette motion suscite une réaction très forte. La crédibilité du Parti réformiste est en jeu, et il est incapable de la faire valoir.
J'ai suivi le débat au début de la journée. J'ai entendu le député de Skeena dire que la charte des droits des Nisga'as était en péril. Je me suis demandé ce que cela voulait dire.
Tout d'abord, le député ne l'a jamais expliqué, alors je ne sais pas ce qu'il a voulu dire, mais j'ai trouvé que c'était très paternaliste. Nous avons les Nisga'as qui, par l'intermédiaire de leurs représentants dûment élus, ont participé pleinement à un processus démocratique visant à élaborer ce traité, et voilà qu'un député réformiste nous dit que c'est la charte des droits des Nisga'as eux-mêmes qui est en péril.
Je pense que l'hypocrisie et l'attitude paternaliste manifestées par le Parti réformiste, après tellement de mois et d'années de campagne contre les droits des autochtones et leur autonomie gouvernementale, est vraiment déconcertante.
Soyons clairs. Le traité des Nisga'as ne crée pas de nouveaux droits constitutionnels, ni pour les Nisga'as ni pour quiconque, mais personne n'a vu ses droits bafoués. Je défie le Parti réformiste de me prouver le contraire.
Que fera ce traité? Pour la toute première fois, d'importantes lois provinciales s'appliqueront à des gens qui en étaient auparavant exemptés parce qu'ils étaient assujettis à la loi fédérale sur les Indiens. Ce traité ne crée pas un ordre de gouvernement fondé sur des motifs raciaux. Au contraire, il abolit une relation de dépendance.
Ce traité assure des pouvoirs semblables à ceux d'une municipalité, en vertu de la Constitution. Il est évident que les lois des Nisga'as doivent être conformes à la Charte de droits et libertés et aux normes fédérales et provinciales.
Contrairement à ce qu'ont déclaré les libéraux de la Colombie-Britannique et les réformistes, les Nisga'as qui possèdent des terres dans les territoires Nisga'as paieront des impôts fonciers à la province et les Nisga'as ne peuvent prélever des impôts qu'à ceux qui vivent sur des terres Nisga'as. Les Nisga'as paieront les impôts fédéral et provincial sur le revenu ainsi que les taxes de vente fédérale et provinciale. Que les choses soient claires.
Nous constatons aussi que la motion parle de normes de travail et que celles-ci sont quelque peu amoindries. C'est une chose curieuse de la part du Parti réformiste. En faisant quelques recherches, j'ai trouvé une lettre de Kenneth Georgetti, ancien président de la Fédération des travailleurs de la Colombie-Britannique, datée du 21 avril 1999, qui dit ceci:
Le mouvement ouvrier en Colombie-Britannique approuve entièrement les dispositions relatives aux relations de travail dans l'accord relatif au traité conclu avec les Nisga'as. Tous les droits dans le domaine du travail prévus par la loi fédérale et provinciale sont maintenus. Cela signifie que les organisations syndicales pourront continuer de mener leurs activités dans ces territoires visés par le traité.
D'autre part, M. D.C. Haggard, président de l'IWA-Canada, dit ceci:
Les députés et le public doivent savoir que la Fédération des travailleurs de la Colombie-Britannique s'est fréquemment entretenue avec les Nisga'as au cours des négociations. J'ai assisté à bon nombre de ces réunions.
Il dit encore:
Étant donné que les lois et précédents qui guideront les décisions de ces tribunaux resteront inchangés, le mouvement syndical de la Colombie-Britannique et l'IWA Canada en particulier appuient ces dispositions et le traité proposé.
Ces propos ont été tenus par un représentant du mouvement syndical.
Nous ne devons pas nous méprendre sur la motion d'aujourd'hui. Ce sont les députés du Parti réformiste et le Parti libéral de la Colombie-Britannique qui sont de mèche dans cette affaire comme dans bien d'autres dossiers, je dois dire. Si leur point de vue l'emporte, que se passera-t-il? Si nous suivons la voie qu'ils préconisent, qu'arrivera-t-il? Nous devrons faire face à une plus grande incertitude économique. Nous laisserons en suspens le problème des coûts des revendications territoriales, ce qui nous fera perdre des milliards de dollars en investissement et en développement. De plus, d'importantes questions de revendication territoriale seraient tranchées par les tribunaux et il y aurait toutes sortes de tiraillements, au lieu de négociations démocratiques, ouvertes et transparentes, dans lesquelles les intérêts des tiers sont pris en compte, et où il y a des audiences publiques.
J'en reviens à ce que les députés réformistes ont dit plus tôt et que personne ne s'est donné la peine d'écouter, qu'il n'y a pas eu de consultations. Ils ne peuvent pas être sérieux. Ils devraient voir ce qui s'est passé en Colombie-Britannique. Il y a eu des centaines d'audiences publiques, des débats publics, et les comités de l'assemblée législative se sont déplacés dans toute la province.
Soyons très clairs. Le Parti réformiste sait fort bien que l'accord des Nisga'as n'est pas une modification constitutionnelle. J'exhorte la Chambre à rejeter fermement cette motion. Continuons à protéger les droits de la personne, poursuivons la démarche de réconciliation avec les premières nations et continuons à régler les revendications territoriales par la bonne volonté et la négociation, non au moyen de luttes judiciaires ni de blocages routiers. Allons de l'avant, et rejetons cette motion.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, il faut une grande maîtrise de soi pour participer au débat après avoir entendu le dernier discours et observé également l'attitude des libéraux.
La députée sera peut-être heureuse d'apprendre que, un peu plus tard au courant de la journée, je prononcerai un discours qui décrira exactement la façon dont le mouvement syndical en Colombie-Britannique et en particulier Bob White, au moment où il a quitté le Congrès du travail du Canada, ont complètement tout bousillé, parce qu'ils ne comprenaient pas les répercussions de cette mesure législative sur tout le mouvement syndical.
Toutefois, j'ai une question bien précise à poser à la députée. Elle a choisi de perpétuer le mythe créé par le NPD, à Victoria, selon lequel cette loi ne fait que conférer des pouvoirs similaires à ceux que possèdent les municipalités. S'il était question ici de l'entente conclue avec la bande indienne sechelte, ce serait vrai.
Si elle a raison, la députée peut-elle nous dire quelle autre municipalité a le pouvoir d'accorder la citoyenneté? Quelle autre municipalité a le pouvoir de taxation sans représentation?
Mme Libby Davies: Monsieur le Président, je suis heureux que le député ait manifesté de la retenue. C'est une qualité pour laquelle le Parti réformiste est bien connu. Les députés réformistes sont pleins de retenue.
Je suis quelque peu étonnée que l'on cherche ici à faire valoir que seulement le Parti réformiste comprend l'accord. Il faut oublier les Nisga'as, le NPD, les libéraux, le mouvement syndical et Bob White. Il n'y a que le Parti réformiste qui a relevé les prétendus problèmes que renferme l'accord. Nous sommes tous des gens intelligents. Nous pouvons lire les accords et tirer nos propres conclusions. J'affirme de nouveau que le Parti réformiste poursuit ici un autre objectif.
Pour ce qui est de perpétuer des mythes, c'est ce que fait le Parti réformiste dans le cas de cet accord. Les lois prévues dans cet accord n'enfreignent en rien la Constitution ou la loi provinciale. Elles ont fait l'objet d'une entente dans le cadre d'un processus en bonne et due forme. Elles se situent dans le contexte de la Constitution. Le mythe selon lequel il y a taxation sans représentation est également faux et totalement inexact. Il est très clair que des impôts seront versés. S'il s'agit de non-Nisga'as habitant sur des terres des Nisga'as, les impôts seront versés au gouvernement provincial, et les lois des Nisga'as s'appliqueront aux Nisga'as.
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier de son intervention la députée de la Colombie-Britannique. Je constate à quel point il est réconfortant d'entendre à la Chambre des communes un représentant de la Colombie-Britannique qui s'exprime clairement à ce sujet, comme le fait mon collègue de cette province qui est maintenant assis à côté de moi.
Les gens de la Colombie-Britannique et les Canadiens en général qui suivent ce débat depuis plusieurs mois ont constamment entendu les députés réformistes prétendre qu'ils s'exprimaient au nom des gens de la Colombie-Britannique, ce qui est absolument faux.
La députée s'est fort bien exprimée. De nombreux députés de Colombie-Britannique sont en faveur de cette entente.
La députée a entamé son intervention en énumérant certaines hypothèses pour expliquer cette attitude de la part du Parti réformiste. Cela fait longtemps que nous entendons les réformistes exprimer cette prétention. Le député de Winnipeg l'a fait remarquer lui aussi. Quelles sont les motivations qui poussent les députés réformistes de la Colombie-Britannique à s'opposer à ce traité?
Mme Libby Davies: Monsieur le Président, je pense que le Parti réformiste n'a pas vraiment pour programme de s'occuper de questions de fond en ce qui concerne l'autonomie gouvernementale et les traités modernes. Je pense que le Parti réformiste a l'occasion de jouer un rôle très positif à cet égard. Les députés réformistes ont l'occasion de siéger à la table.
Cependant, comme le député l'a laissé entendre, je pense qu'ils ont un programme politique différent.
Ils se rendent compte qu'il existe des doutes quant à ce qu'ils font à propos de plusieurs autres dossiers, qu'il s'agisse de la fiscalité, des programmes sociaux ou du système d'impôt sur le revenu. Ils exploitent ces doutes et cette crainte qui divise la population. Ils exploitent les émotions des gens et les montent les uns contre les autres. Nous devons intervenir pour dire que nous ne tolérerons pas cela.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, je me réjouis de l'occasion qui m'est donnée ici de parler du traité Nisga'a et de dire quelques mots sur la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Je vais commencer par revenir sur ce que la ministre a dit et que nous ne devons pas oublier. Tout débat est légitime. Nous ne sommes peut-être pas tous d'accord sur la question à l'étude et nos opinions diffèrent peut-être selon la région du Canada dont nous venons, mais tout débat est légitime. Je suis heureux que le présent débat ait lieu et cela, même si je n'approuve pas tout ce qui a été dit aujourd'hui.
La motion traite d'un certain nombre de questions touchant non seulement au traité des Nisga'as, mais aussi à d'autres questions dont il a été question en rapport avec le traité, dont la première nation Musqueam, en Colombie-Britannique, sur laquelle je reviendrai tout à l'heure.
J'ai eu deux fois l'occasion de parler du traité avec des membres de la première nation Nisga'a. J'ai l'intention de me rendre en Colombie-Britannique cet été pour examiner la situation là-bas et pour m'entretenir non seulement avec des membres du conseil tribal Nisga'a, mais aussi avec des Nisga'as et des non-autochtones de la vallée de la Nass et des environs. J'espère pouvoir m'entretenir avec tous les Nisga'as de la région.
Le traité Nisga'a est le premier des temps modernes à être signé en Colombie-Britannique et constitue l'aboutissement d'une longue démarche par laquelle les Nisga'as veulent faire reconnaître leur revendication territoriale. Le traité fournira aux Nisga'as la possibilité d'atteindre à une plus grande autonomie et à une plus grande autosuffisance. Il reconnaît, en outre, leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.
Le Parti progressiste conservateur appuie les initiatives qui visent à atteindre ces objectifs. C'est pourquoi nous avons appuyé un projet de loi comme le C-49, la Loi sur la gestion des terres des premières nations. Ce projet de loi permettra à 14 premières nations d'assumer la gestion des ressources dans les réserves. Il les soustrait aux exigences autoritaires et restrictives de la Loi sur les Indiens, ce qui est poussé encore plus loin dans le traité conclu avec les Nisga'as.
Ce traité couvre une vaste gamme de sujets, puisqu'il accorde aux Nisga'as 2 000 kilomètres carrés de terres, mais aussi une allocation de saumon et une pêche commerciale exclusives aux Nisga'as, ainsi que les compétences nécessaires pour le système judiciaire, la police ainsi que les évaluations et la protection de l'environnement. Par ailleurs, les Nisga'as commenceront à payer des impôts progressivement dans le cadre d'un programme échelonné sur huit et douze ans.
La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui fait expressément mention de la première nation de Musqueam et du problème qui est survenu entre les locataires et la première nation, relativement à des baux conclus avec une tierce partie. Cette question est de toute évidence litigieuse et a beaucoup retenu l'attention.
À titre de membre du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord, j'ai pu écouter les préoccupations des représentants des locataires du parc de Musqueam. Leurs problèmes viennent, dans une large mesure, des tarifs de location fixés dans leur bail. Voilà le genre de problème qui pourrait survenir n'importe où au Canada et qui n'est pas limité aux accords conclus avec les premières nations.
Quand on conclut un bail, il est important de comprendre les répercussions de ce bail. Les locataires du parc de Musqueam font toutefois maintenant face à des obligations financières considérables. De toute évidence, personne ne veut que la même situation se répète sur des terres appartenant aux Nisga'as.
Un différend comme celui de Musqueam est préjudiciable à toutes les parties visées puisque la publicité négative diminue la valeur des terres. C'est un problème pour les locataires et le propriétaire, car le fait de pouvoir louer des terres à une tierce partie est une source de revenu pour les premières nations.
Comme le taux de chômage chez les Nisga'as est d'environ 60 p. 100, j'imagine que toute possibilité de générer des revenus sera prise en considération. En fait, c'est là un des avantages du traité, non seulement pour les Nisga'as, mais aussi pour les collectivités environnantes. Le programme d'indemnisation de 190 millions de dollars devrait entraîner des retombées économiques pour les localités voisines ainsi que pour les Nisga'as.
J'ai des réserves par rapport à certains aspects du traité conclu avec les Nisga'as, comme l'allocation de saumon et la pêche commerciale autorisée pour les membres de cette première nation. J'ai soulevé ces questions lors d'une rencontre avec des représentants des Nisga'as et je comprends qu'une pêche soutenable et équilibrée est clairement dans leur intérêt. Par ailleurs, toutefois, je doute des effets que cette entente aura sur les traités à venir qui seront négociés en Colombie-Britannique et sur l'industrie de la pêche commerciale en général.
Le traité conclu avec les Nisga'as pourrait ne pas servir de modèle pour de futurs traités, mais il n'en servira pas moins de point de référence pour d'autres accords. La première nation de Sechelt a récemment franchi une autre étape vers la conclusion de son propre accord final, lequel est différent à bien des égards du traité conclu avec les Nisga'as.
Il reste qu'au moment de la négociation d'autres traités, on se penchera sur ce que le traité conclu avec les Nisga'as a fait et n'a pas fait et on négociera en fonction de cela. Nous ne savons pas encore quels seront les effets du traité sur la pêche commerciale en Colombie-Britannique, mais nous devons quand même y songer maintenant.
La motion laisse entendre que la possibilité que le traité conclu avec les Nisga'as modifie la Constitution et, partant, qu'il nécessite la tenue d'un référendum en Colombie-Britannique devrait être examinée par la Cour suprême. Je n'ai certes pas les connaissances juridiques nécessaires pour entrer dans les détails relatifs à cette question, mais je suis d'avis que des événements passés pointent dans d'autres directions.
Le Parlement a fait l'objet de critiques pour avoir accordé un plus grand pouvoir aux juges. Il est intéressant que le Parti réformiste, notamment, n'a pas hésité à déclarer, à maintes reprises, que les juges participaient trop à l'élaboration des orientations publiques dans notre pays. Il s'est dit d'avis que les juges n'ont pas à légiférer. Or, dans la motion dont nous sommes maintenant saisis, il demande un renvoi à la Cour suprême. Ne s'agit-il pas là de deux poids deux mesures? Le Parti réformiste s'oppose à ce que la Cour suprême se penche sur les orientations publiques, mais il n'hésite pas à faire appel à cette instance quand il s'agit d'une mesure qui ne lui plaît pas.
Je conclurai en disant que le traité conclu avec les Nisga'as est un pas dans la bonne direction. La Cour suprême a fait clairement valoir dans l'arrêt Delgamuukw que la conclusion d'ententes négociées est la façon de procéder dans le domaine des revendications territoriales. C'est un exemple de ce processus, qui a été reconnu par le gouvernement conservateur dans les années 80 quand le processus était en marche.
Ce sera un débat intéressant quand le projet de loi relatif au traité sera présenté au Parlement. Il me tarde d'en parler à ce moment-là.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, si mon collègue croit que la poursuite des négociations actuelles en vue des traités est une bonne chose, comment explique-t-il le fait que des traités ont été négociés dans des centaines et des centaines de réserves, à l'est des Rocheuses?
Quand on compare la situation des réserves situées à l'est des Rocheuses à celles de la Colombie-Britannique, on constate qu'il n'y a pas, ou pas beaucoup, de différence entre la condition des gens des deux catégories de réserves. On peut donc en déduire que la négociation de traités comme telle ne permet pas l'émancipation politique et économique de ces gens.
M. Clark, le premier ministre de la Colombie-Britannique, a mentionné, avant d'imposer la clôture à l'Assemblée législative, qu'un troisième niveau de gouvernement avait effectivement été créé et que la participation de notre gouvernement serait nécessaire pour la négociation de traités avec les nouveaux niveaux de gouvernement. Ce nouveau troisième niveau, avec l'expansion de la bureaucratie que cela suppose au gouvernement provincial, va coûter très cher, et cet argent serait mieux utilisé s'il servait à aider les autochtones d'une manière plus concrète. Le député est-il d'accord sur ces points?
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, je répondrai d'abord à la deuxième question. Les deux questions sont excellentes et c'est exactement le genre de questions qu'il faut poser dans le débat d'aujourd'hui.
Sur le troisième palier de gouvernement, je suis d'accord avec le député, je crois que nous sommes en train d'établir un troisième palier de gouvernement. Cela va au-delà de ce dont nous avons discuté au Parlement du Canada ou dans le cadre du processus de négociation des traités jusqu'à maintenant. Il ne s'agit pas d'un palier de gouvernement de type municipal, comme ce qui est prévu dans les accords avec les Sechelts et les Musqueams. On va plus loin. Cependant, avant d'aller jusque là, il faut examiner la question en profondeur et avec le plus grand sérieux et nous devons tous savoir exactement de quoi il retourne.
Pour ce qui est de la première question, je ne pense pas que nous puissions juger la situation d'après les traités qui ont été signés ou qui ne l'ont pas été dans l'est du Canada parce qu'il n'y a pas de processus de négociation des traités en place pour tout l'est du Canada. Nous ne pouvons pas juger d'après les traités nos 8, 6, 4 ou 2, mais nous pouvons examiner l'ensemble des collectivités autochtones du Canada.
Selon le député, le problème provient-il du processus de négociation des traités ou du fait qu'il manque à ce processus quelque chose qui permettrait de mettre un point final aux négociations? Ne nous faut-il pas reconnaître que la Loi sur les Indiens, par les restrictions qu'elle impose, est au mieux une loi discriminatoire et au pire une loi permettant d'établir une forme de régime d'apartheid?
Personnellement, je dirais qu'il y a beaucoup plus à reprocher à la Loi sur les Indiens qu'au processus de négociation des traités. Si nous négocions des traités réglant les questions une fois pour toutes, si nous donnons aux premières nations les moyens qui leur permettent d'établir un régime économique susceptible de leur donner une source d'influence afin qu'ils puissent bénéficier des fruits de leur labeur, comme tous les Canadiens, alors, je crois que nous aurons accompli quelque chose.
Les deux questions sont de bonnes questions. Je ne donne pas une réponse complète à la première parce que je crois que nous y reviendrons dans un futur débat.
M. Keith Martin: Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour sa réponse très concise. Le député croit-il que nous pouvons faire disparaître la Loi sur les Indiens et entreprendre un processus d'émancipation et d'indépendance économiques sans nécessairement chercher l'indépendance politique?
M. Gerald Keddy: Monsieur le Président, je ne suis pas certain que nous puissions faire disparaître la Loi sur les Indiens en un tournemain. Je crois que c'est beaucoup plus compliqué que cela. La vraie raison pour laquelle le Parti conservateur a appuyé le projet de loi C-49, c'est parce que celui-ci libère ces premières nations de la Loi sur les Indiens et leur permet d'avoir le contrôle de leurs propres ressources dans leurs réserves, sans dépendre du ministre et sans être assujettis à la Loi sur les Indiens à cet égard.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de parler de la motion qui touche beaucoup les habitants de ma province, la Colombie-Britannique, mais qui, en réalité, aura un impact sur les Canadiens d'un bout à l'autre du pays. L'accord conclu avec les Nisga'as servira de modèle pour la négociation de plus de 120 accords dans ma province et d'autres accords d'un bout à l'autre du pays, à mesure que les traités seront renégociés suite à la conclusion de cet accord.
Je veux féliciter les députés de Skeena et de Wild Rose et mes autres collègues qui ont tant fait pour mettre en relief la situation des autochtones.
Le Canada a créé une situation qui nous a permis d'asservir politiquement les gens les plus pauvres dans le pays. Victimes de manoeuvres politiques, les autochtones sont prisonniers de la Loi sur les Indiens depuis 140 ans.
Notre objectif commun est changer la situation dans laquelle se trouvent depuis trop longtemps les peuples autochtones où qu'ils soient au pays, qu'ils vivent dans les réserves ou hors des réserves. Ils présentent les taux les plus élevés au Canada de suicide, de meurtre, de tuberculose, de diabète, d'appauvrissement social et d'abus envers les enfants. Ce ne sont là que les symptômes d'un problème encore plus profond.
Le problème, c'est qu'on a fait des autochtones les pupilles du gouvernement et du pays. On a poursuivi une politique de ségrégation et de discrimination qui a eu pour effet de tenir les autochtones à l'écart du reste de la société. Nous nous réjouissons que la Constitution comporte des dispositions prévoyant que la culture, la langue et les traditions des autochtones puissent s'exprimer et soient inscrites de ce document.
Il ne saurait être question de revenir à l'époque où la culture, la langue et les droits fondamentaux de ces gens étaient tout simplement bafoués. Or, ce qu'on s'apprête à faire par le truchement du traité conclu avec les Nisga'as ne va pas améliorer les choses, bien au contraire. C'est précisément pour cette raison que le Parti réformiste s'oppose au traité conclu avec les Nisga'as.
Bref, notre objectif commun est d'améliorer la situation épouvantable qui prévaut dans les réserves indiennes, mais là où nous différons, c'est sur les moyens à adopter pour ce faire. Je vais y revenir dans un instant.
J'ai vu des gens qui avaient été violés, tués, et maltraités, des enfants maltraités, tués par balle, attaqués à coups de couteau. Les gens sont pauvres et vivent dans des conditions terribles que je n'avais pas vues depuis que j'ai travaillé en Afrique. La même chose existe dans notre pays, un pays que nous croyons et dont les Nations Unies veulent nous faire croire que c'est le pays du monde où il fait le meilleur vivre. Peut-être est-ce vrai pour une partie de la population, mais certainement pas pour les autochtones.
Nous voulons l'émancipation économique et politique ainsi que l'intégration politique des peuples autochtones. L'émancipation économique ne dépend pas de l'indépendance politique comme le veut l'accord avec les Nisga'as qui crée un nouveau palier de gouvernement. L'un des principaux partisans de l'accord, M. Glen Clark, premier ministre de la Colombie-Britannique, a déclaré à l'assemblée législative que cette entente allait créer un troisième palier de gouvernement.
Nous nous opposons à cette entente qui remet le pouvoir politique et économique entre les mains d'un petit groupe, entre les mains des dirigeants du peuple Nisga'a et non entre les mains des gens de la base. Voici 140 ans que la base autochtone se voit refuser l'accès au pouvoir et à la richesse. Si cette entente passe, elle se le verra encore refuser demain.
Certaines réserves autochtones sont très bien administrées car elles ont à leur tête des dirigeants très puissants, très forts et très justes qui se dévouent pour le peuple. Malheureusement, ce n'est pas le cas de beaucoup de réserves dans le pays. Le vérificateur général a souvent mentionné le sort des autochtones de la base, leurs souffrances et les mauvais traitements que leur font parfois subir leurs dirigeants. Il arrive trop souvent dans ces communautés que les dirigeants autochtones s'emparent des richesses et des ressources qui leur sont fournies par le système et qu'ils ne les partagent pas comme ils le devraient avec leurs gens.
Si nous voulons améliorer la santé et le bien-être des peuples autochtones plutôt que de nous contenter de conclure un traité avec les Nisga'as, nous devrons travailler avec eux et leur donner les outils dont ils ont besoin pour être en mesure de prendre soin d'eux-mêmes. Peu importe si nous sommes autochtones ou non. Pour gagner la fierté et le respect de nous-mêmes dont nous avons besoin pour poursuivre notre tâche, nous devons être utiles à notre famille, à nous-mêmes et à notre société .
Si nous étions des pupilles du gouvernement fédéral, du gouvernement provincial ou de l'administration autochtone et qu'on nous donnait accès à certaines ressources pour la simple raison que nous appartenons à un groupe particulier, et ce sans que nous ayons à travailler pour les obtenir, nous n'en tirerions pas la fierté le respect de nous-mêmes dont nous avons besoin pour poursuivre notre tâche et mettre un peu d'ordre dans ces collectivités. La fierté et le respect de soi naissent de notre aptitude à faire quelque chose pour nous-mêmes, nos familles et la communauté à laquelle nous appartenons. C'est là la chance que les autochtones de la base n'ont pas eue.
Plutôt que d'aller de l'avant avec le traité avec les Nisga'as qui va coûter plus de 500 millions de dollars aux contribuables et qui taxera les ressources restreintes pour mettre sur pied un autre niveau de bureaucratie au sein des gouvernements provinciaux et d'une structure autochtone, ne serait-il pas plus logique d'utiliser cet argent pour améliorer les soins de santé offerts à ces gens et pour leur donner la formation dont ils ont besoin pour participer activement et de façon productive à la vie de leurs collectivités?
Nous ne parlons pas uniquement des gens qui habitent dans les réserves. Nous ne saurions oublier le grand nombre d'autochtones qui sont allés dans les villes à la recherche d'espoir. Ils ont fui les réserves, où ils n'avaient aucun espoir. Cependant, sans les compétences et les outils dont ils ont besoin pour survivre dans les villes, ils se rendent compte qu'ils se retrouvent dans la même situation qu'auparavant, ou dans une situation encore pire.
J'ai imploré la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien pour qu'elle examine ce qui se passe dans les réserves aujourd'hui, pour qu'elle intervienne au nom de ces gens, pour qu'elle réponde à leurs appels à l'aide et pour qu'elle cesse de dire constamment aux autochtones ordinaires de demander de l'aide à la police ou aux dirigeants autochtones, qui, bien souvent, écrasent leurs propres citoyens. Elle doit les aider.
Nous avons investi plus de 7 milliards de dollars dans les questions autochtones. Pourtant, comment ces gens en ont-ils bénéficié? Dans bien des cas, ils sont dans une situation plus pitoyable qu'il y a cinq, dix ou vingt ans. L'argent n'est pas la solution au problème. L'indépendance politique non plus. Le traité conclu avec les Nisga'as n'est pas la solution. La solution consiste à s'assurer que les autochtones aient le pouvoir et la responsabilité de prendre soin d'eux-mêmes et de leurs familles dans leurs collectivités. C'est là que se situent l'opportunité, l'espoir et la chance pour eux de mettre fin à une situation qui embarrasse tout le monde à la Chambre, mais, ce qui est plus important encore, qui est tragique et douloureuse pour les personnes qui la vivent.
Comme l'ont mentionné mon collègue de Skeena et d'autres, le traité conclu avec les Nisga'as comporte beaucoup de lacunes. Il ne protège pas les gens. Il ne leur assure pas le pouvoir. Il ne garantit pas une situation raisonnable pour les autochtones et les autres.
En fin de compte, nous devons travailler ensemble pour bâtir une société plus forte. Si nous sommes divisés, nous échouerons. Ensemble, nous survivrons et nous parviendrons à nos fins. Malheureusement, le traité conclu avec les Nisga'as sépare les autochtones et les autres. Il les place à part. Il ne fera qu'accroître les préjudices dont sont victimes les autochtones. Ce n'est pas une bonne chose et cela doit être changé.
Nous espérons que le gouvernement va réexaminer ce traité. Nous espérons qu'il ne l'adoptera pas. Nous espérons qu'il investira dans les autochtones. Nous espérons qu'il écoutera les autochtones de la base plutôt que leurs chefs. Nous espérons qu'il attribuera à ces chefs l'obligation et la responsabilité de s'assurer que les ressources destinées aux gens seront utilisées pour améliorer leur situation et qu'elles ne seront pas simplement englouties sans profiter aucunement au peuple autochtone.
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour ses observations. Je sais qu'il est déjà intervenu sur ces questions.
Je souligne l'approche globale qu'il adopte dans les discussions sur l'émancipation financière des peuples autochtones en disant que, si l'on se contente de leur donner des ressources, on ne les aide pas, mais on les encourage à l'oisiveté. Il a également mentionné que le résultat de tout cela, c'est que les membres des peuples autochtones se dirigent en masse vers les grandes villes pour y vivre dans l'indigence.
Je voudrais quelques éclaircissements. Le député pourrait-il préciser ce qu'il signifie quand il dit qu'en se contentant de donner des ressources aux peuples autochtones qui vivent dans les réserves, on les incite à l'oisiveté, à la paresse ou à autre chose du genre? Pourrait-il clarifier ce qu'il entendait par là?
Le député est médecin et il a longtemps pratiqué auprès des peuples autochtones. Je me demande s'il pourrait répondre brièvement aux deux questions qui suivent. Pourrait-il nous donner une idée des plans de développement économique qu'il faudrait pour les collectivités des premières nations au Canada? Quelles mesures conseillerait-il aux Canadiens?
M. Keith Martin: Monsieur le Président, je remercie le secrétaire parlementaire de ses questions. Malheureusement, il a mal interprété mes propos au début, mais je vais me faire un plaisir de rectifier.
Quelle que soit la race des personnes en cause, si on donne des choses, on crée un État providence. Ce que nous avons fait, c'est créer un État providence institutionnalisé pour les autochtones en leur donnant certaines choses. Nous devons donner à tous, autochtones et non-autochtones, le pouvoir de subvenir à leurs propres besoins.
Je propose donc que nous veillions à ce que les autochtones aient les compétences, la technologie et les techniques nécessaires pour se débrouiller seuls, et que nous investissions massivement dans les services de santé et l'éducation. C'est de là que nous repartirions, et nous éliminerions la Loi sur les Indiens, qui est raciste. Nous reconnaîtrions aux autochtones et aux non-autochtones les mêmes droits et les mêmes responsabilités.
J'ai abordé deux points: la nécessité d'abroger la Loi sur les Indiens et celle d'investir pour ouvrir des débouchés économiques. Il y en a un troisième: il faut veiller à ce qu'il y ait des possibilités au niveau politique, quelque chose qui ressemble aux pouvoirs municipaux que les non-autochtones peuvent exercer.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Madame la Présidente, si j'ai bien compris le livret expliquant le programme Nouveau départ, le Parti réformiste préconise que les communautés autochtones ressemblent, ou soient structurées plus ou moins comme une municipalité et, si j'ai bien compris le traité avec les Nisga'as, du moins selon mon interprétation, c'est exactement l'objectif que s'étaient fixé les négociateurs. Les Nisga'as auront un gouvernement comparable à une municipalité et seront assujettis à la Constitution canadienne.
Le député peut-il expliquer en quoi le traité avec les Nisga'as ne répond pas à cet objectif qui est de créer une structure similaire à celle d'une municipalité, ce qui serait conforme au manuel du Parti réformiste intitulé Nouveau départ pour les Canadiens?
M. Keith Martin: Madame la Présidente, pour reprendre ce qu'a dit le premier ministre de la Colombie-Britannique, les pouvoirs créent un troisième ordre de gouvernement nouveau. Il ne s'agit clairement pas d'un gouvernement municipal. C'est la province qui donne des pouvoirs aux municipalités. Elle a le droit de les reprendre, ce qui n'est pas le cas dans la situation dont nous parlons.
Les pouvoirs qui seraient accordés aux Nisga'as seraient de l'ordre des pouvoirs provinciaux et fédéraux et qui plus est, en cas de conflit entre les pouvoirs fédéraux, les pouvoirs provinciaux et les pouvoirs des Nisga'as, ce serait ceux des Nisga'as qui prévaudraient. Ce sont les deux exemples les plus clairs que je puisse donner.
L'objectif n'est pas l'indépendance politique. Ce que nous devrions rechercher, c'est l'indépendance économique pour les autochtones par les autochtones, l'émancipation politique et non l'indépendance politique, l'intégration politique avec les non autochtones. Ce n'est qu'en procédant à l'intégration politique et économique des autochtones, tout en garantissant le maintien de leurs droits tel que prévu à l'article 35 de la Constitution, que nous parviendrons à édifier une société viable, fonctionnelle et vivable pour tout le monde à l'avenir.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Madame la Présidente, le défi qui se pose à moi par rapport à la motion de l'opposition officielle est le suivant: comment, en dix minutes, faire le tour d'une question dont je parle depuis 1995?
Je crois que les deux ordres de gouvernement, dans leur hâte d'accepter l'accord relatif au traité avec les Nisga'as, ont manipulé les faits et faussement représenté l'intérêt public. Le gouvernement fédéral impose, à la Colombie-Britannique, un accord qu'il n'a pas voulu s'imposer à lui-même dans le cas du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest. Le gouvernement impose aux Canadiens un accord avec les Nisga'as que les séparatistes du Québec accueilleraient à bras ouverts. Comparez cela à la position fédérale à l'égard de Toronto, une cité-État qu'Ottawa refuse de reconnaître.
Le gouvernement de la Colombie-Britannique, dans sa hâte, laisse des centaines de millions de dollars de transferts fédéraux sur la table à cause d'une entente unilatérale, mal conçue et mal négociée sur le partage fédéral-provincial des coûts pour les traités. Le gouvernement de la Colombie-Britannique est volontairement partie à un accord qui menace l'intégrité fiscale de ses citoyens. L'opposition officielle, tant au palier fédéral que provincial, s'oppose au libellé actuel de l'accord.
La grande ironie dans tout cela, c'est que les partis, quels qu'ils soient, qui prendront le pouvoir auront les mains liées. L'accord final stipule qu'aucune partie, qu'il s'agisse du gouvernement fédéral, du gouvernement provincial ou des Nisga'as, ne peut contester les dispositions de l'accord et que toute modification exigera le consentement des trois parties. Il s'agit d'un veto. L'accord des Nisga'as aura préséance sur toute loi fédérale ou provinciale en cas de différence ou de conflit. Souvenez-vous de Meech. Souvenez-vous de Charlottetown.
En mars 1995, j'ai présenté mon analyse de l'accord du temps avec les Nisga'as largement sous forme d'évaluation des ressources forestières. J'avais estimé les coûts du règlement des revendications territoriales en Colombie-Britannique à 8,5 milliards de dollars. Le ministre provincial des affaires autochtones a déclaré que j'extrapolais des chiffres à partir de diverses sources dans le but d'alarmer les gens. À peine sept mois plus tard, le même ministre déclarait que l'indemnité totale dépasserait les 10 milliards de dollars. N'oubliez pas que, déjà plusieurs mois auparavant, j'avais dit que les coûts atteindraient 8,5 milliards de dollars. Cet aveu avait de quoi nous laisser perplexes, étant donné la déclaration du ministre provincial qui n'inspirait aucunement confiance aux négociateurs. Voici que certains analystes prévoient que les coûts excéderont 20 milliards de dollars.
Les bureaucrates du ministère des Affaires indiennes évoquent tout le travail nécessaire à la négociation de traités, en espérant ainsi ne pas avoir à assumer leurs responsabilités et à défendre les intérêts des autochtones de la base. Ils préfèrent traiter avec les chefs et participer à des événements très médiatisés pendant que la politique continue de l'emporter sur la saine gestion.
Les autochtones affichent les pires statistiques au pays. Ils méritent mieux que cela. Les Canadiens en général et les autochtones de la base accordent clairement la priorité aux problèmes sociaux. Toutefois, les discussions sont essentiellement dominées par les universitaires, les avocats, les conseillers, les consultants et ceux qui ont des intérêts personnels à défendre, ce qui fait que l'accent est mis sur une autonomie gouvernementale illimitée.
À la fin de 1996, les négociateurs des Nisga'as ont reconnu que le coût de leurs négociations atteignait jusque-là 31 millions de dollars. Bien des gens concluront que cet argent aurait pu servir à approvisionner plusieurs communautés autochtones en eau potable.
Par le passé, j'ai fait des recommandations très précises aux deux ordres de gouvernement. Contrairement à ce que la ministre peut penser, le Parti réformiste s'emploie à proposer des solutions constructives. Les négociateurs fédéraux et provinciaux ne sont pas touchés par les résultats des négociations locales tenues dans les régions rurales de la Colombie-Britannique, parce qu'ils vivent à Ottawa, en Saskatchewan, à Vancouver ou à Victoria. Les négociateurs devraient au moins travailler dans la région visée et avoir certains liens avec les communautés touchées.
Deuxièmement, il faut boucler la boucle. Contrairement aux attentes de la population, l'accord reconnaît que les autochtones ont des intérêts spéciaux dans des terres publiques autres que les terres visées par le traité des Nisga'as. La population est pourtant convaincue que les autochtones auront les mêmes droits que les autres Canadiens à l'extérieur des terres visées par le traité.
Troisièmement, l'accord devrait mentionner clairement que les Nisga'as seront couverts par la Loi canadienne sur les droits de la personne. Même si la suppression de la plupart des dispositions de la Loi sur les Indiens peut avoir cet effet, il serait utile de préciser de manière non équivoque que la Loi canadienne sur les droits de la personne s'applique. Actuellement, les Indiens assujettis à la Loi sur les Indiens ne peuvent intenter de poursuite pour discrimination en vertu des dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Ils sont exclus.
Je vais parler de certains détails concernant le gouvernement des Nisga'as. L'accord autorise les Nisga'as à rédiger et à adopter leur propre constitution; c'est exactement ce que Lucien Bouchard veut faire et ce que le gouvernement actuel rejette, du moins pour le Québec.
Les pouvoirs de légiférer des Nisga'as sont vastes et ils comprennent: les décisions visant la citoyenneté nisga'a, la culture nisga'a, les projets d'évaluation environnementale visant les biens et les terres des Nisga'a; le maintien de l'ordre public, la paix et la sécurité; l'administration de la justice; le prélèvement des impôts; les forêts, les terres et les ressources; les pêches et la faune; les droits souterrains; la prestation de services sociaux aux Nisga'a; les services de santé dispensés sur les terres des Nisga'a; l'adoption d'enfants nisga'as; les services à l'enfance et à la famille; l'éducation sur les terres nisga'as des citoyens nisga'as depuis le niveau préscolaire jusqu'à la 12e année; l'enseignement postsecondaire à l'intérieur des terres nisga'as; le contrôle de la possession, de la vente ou de la consommation de substances intoxiquantes sur les terres des Nisga'as; les services policiers nisga'as, y compris un conseil de police nisga'a; un tribunal nisga'a chargé d'administrer les lois des Nisga'as et les établissements correctionnels.
Si l'on offrait tout cela à Lucien Bouchard, dirait-il «Non, merci»? Cette liste représente une importante cession de pouvoirs législatifs du Parlement du Canada à ce qui constituera en fait le parlement du gouvernement central des Nisga'as.
En plus de l'assemblée législative des Nisga'as, il y aura une fonction publique pour administrer leurs lois, leurs programmes et leurs institutions. L'entente prévoit la création d'un certain nombre d'offices pour superviser toute une série de questions. Étant donné que la population adulte autochtone sur le territoire des Nisga'as se chiffre à environ 1 200 personnes, on se demande qui ne travaillera pas pour le nouveau gouvernement.
Le nouveau gouvernement aura le pouvoir d'imposer des impôts aux personnes ou aux entreprises qui possèdent des terres ou qui ont un intérêt foncier sur le territoire. Si ces personnes ne sont pas des Nisga'as, elles ne pourront voter lors d'élections visant à former le gouvernement nisga'a, mais elles devront payer des impôts. Voilà un cas classique de taxation sans représentation. Il s'agit même d'une taxation à base raciale.
Evelyn Gillespie, la députée néo-démocrate de Comox Valley à l'assemblée législative provinciale a écrit récemment que l'entente finale avec les Nisga'as donne à ces derniers un gouvernement de type municipal. Elle a affirmé cela en sachant que les gens appuient entièrement les pouvoirs municipaux, comme moi. En réalité, aucun gouvernement municipal n'a quelque statut que ce soit en vertu de la Constitution, alors que les Nisga'as en auront un. Il s'agit du troisième ordre de gouvernement recherché par l'ancien chef de l'Assemblée des premières nations, Ovide Mercredi, et qui a été rejeté par son propre peuple et par une majorité des Canadiens lors du référendum sur l'accord de Charlottetown.
C'est la citoyenneté nisga'a et non le lieu de résidence qui déterminera qui a droit de voter. Cela ne plairait-il pas à Jacques Parizeau? L'entente avec les Nisga'as retient un élément seulement de la Loi sur les Indiens. Il s'agit du pire de ses éléments, celui où l'on définit qui est un Indien. Ce qui est tragique à propos de la Loi sur les Indiens, c'est que les Indiens inscrits sont traités différemment des autres Canadiens par le gouvernement, habituellement à leur propre détriment. Pourquoi voudrait-on perpétuer cette différence de traitement dans la Constitution? Un comité nisga'a examinera les lignées pour protéger les éventuels citoyens. Chose incroyable, c'est cela que nous consacrons dans notre Constitution.
Les Indiens inscrits représentent 2,5 p. 100 de la population de la Colombie-Britannique, et la moitié d'entre eux vivent dans des réserves ou mènent ce qu'on peut considérer vaguement comme un style de vie autochtone traditionnel. Il doit y avoir une meilleure façon de faire les choses.
Qu'est-ce que je ferais? Je vais résumer ainsi. J'estime qu'il faut rendre public le mandat de négocier; indemniser les autochtones pour ce que les tribunaux reconnaissent comme les modestes terres auxquelles ils ont droit à titre d'autochtones; établir des gouvernements autochtones compatibles avec les gouvernements de type municipal, similaires au gouvernement de la bande indienne sechelte; assujettir les Nisga'as et tous les autres autochtones au même régime fiscal que les autres Canadiens; assurer un caractère définitif et certain; et garder les choses simples.
La Nouvelle-Zélande a fini par en avoir assez d'un programme d'action interminable et a fait exactement cela.
L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique), Lib.): Madame la Présidente, j'ai une question à poser au Parti réformiste. Si les réformistes croient tant que cela dans la primauté du droit, s'ils croient dans l'autorité de la Cour suprême du Canada, ils doivent accepter toutes les décisions de la Cour suprême du Canada et pas seulement celles qui font leur affaire.
La Cour suprême a dit que la constitution est légale et les droits des autochtones sont prévus dans la Constitution. Par conséquent, le traité Nisga'a est fondé sur les droits des autochtones que nous devons continuer de négocier, selon les tribunaux. Voilà de quoi retourne le traité Nisga'a.
Le Parti réformiste ne sait-il pas qu'il y a déjà eu une contestation du caractère constitutionnel du traité à la Cour de la Colombie-Britannique et que celle-ci a dit qu'il serait plus opportun pour les tribunaux d'examiner les questions concernant le caractère constitutionnel du traité lorsque tout le dossier législatif sera à leur disposition.
Pourquoi les réformistes parlent-il de renvoyer la question aux tribunaux avant même que nous adoptions le projet de loi reconnaissant le traité? S'ils croient vraiment dans la primauté du droit, pourquoi, alors même que notre Constitution accorde des droits aux autochtones, contestent-ils ces droits, refusent-ils même de reconnaître des droits aux autochtones et veulent-ils supprimer la Loi sur les Indiens et traiter tout le monde de la même manière, niant aux autochtones leurs droits légaux? En autant que je puisse en juger, ils ne sont pas de si grands défenseurs que cela des droits de tous.
M. John Duncan: Madame la Présidente, cette question n'était pas adressée au Parti réformiste, mais bien au député d'Île de Vancouver-Nord. Nous reconnaissons l'existence des droits des autochtones tels que définis par l'article 35 de la Constitution. Nous en sommes très conscients. Personne ne le contestera.
Nous sommes au courant des arrêts rendus par la Cour suprême. Nous sommes également conscients des mythes qui sont propagés par le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial quant à ce qui constitue la teneur des décisions des tribunaux et la nature de leurs effets. Les droits autochtones, la modeste compensation qui a été constamment accordée par la Cour suprême du Canada, sont très différents de ce que l'on retrouve dans des accords comme le traité conclu avec les Nisga'as.
Je signale au député qui a posé cette question que son propre gouvernement a appuyé une variété d'accords. Par exemple, en Colombie-Britannique, la bande de Sechelt dispose de l'autonomie gouvernementale depuis 1985 ou 1986. C'est un gouvernement de niveau municipal. Je n'ai aucune difficulté à souscrire à l'accord conclu avec cette bande. Je pense qu'il est représentatif de ce que veulent les simples autochtones et qu'il fait une grande place à l'obligation de rendre compte et à la démocratie.
Seul le Parti libéral estime, comme le député l'a dit, que l'on peut parvenir à l'égalité en ne traitant pas tout le monde sur un pied d'égalité. Je pense qu'il y a quelque chose qui cloche là-dedans sur le plan des principes. Nous devrions essayer de toutes les manières de rapprocher les gens, pas de les séparer davantage. Je pense que c'est ce qui fait la différence entre l'opposition officielle et le gouvernement en cette matière.
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Madame la Présidente, je fais savoir à la Chambre que je partagerai le temps dont je dispose avec le député de Vancouver Quadra, qui, je le sais, a très hâte de parler du sujet, ce qu'il fera très bien et avec compétence.
Je suis heureux de prendre part au débat sur la motion du député de Skeena. Je n'ai pas pu poser une question au député d'Île de Vancouver-Nord, mais avant de prendre mes notes, je pourrais peut-être faire une observation. Il pourra me répondre plus tard en personne, s'il le désire.
Je veux préciser que le projet de loi que nous étudions à la Chambre, et que vise la motion, n'établit pas du tout un gouvernement fondé sur la race. Il s'agit d'un gouvernement fondé sur la citoyenneté. N'importe qui peut devenir citoyen de la place nisga'a.
Si les députés de Skeena ou de l'Île de Vancouver-Nord veulent devenir des citoyens nisga'as, je peux rencontrer le peuple nisga'a. N'étant pas autochtones eux-mêmes, je peux informer la Chambre que je suis tout à fait disposé à présenter une demande en leur nom s'ils le désirent. Cela leur démontrerait qu'il ne s'agit pas du tout d'un gouvernement fondé sur la race. Si le député de Skeena veut devenir un citoyen nisga'a, je présenterai la demande en son nom aujourd'hui même.
Le député de Skeena, qui a proposé la motion au nom de l'opposition, demande que la Chambre prenne acte du fait que le traité avec les Nisga'as et l'autonomie gouvernementale suscitent des préoccupations en Colombie-Britannique.
Je dirai respectueusement à mon collègue que nous, de ce côté-ci de la Chambre, reconnaissons que les Canadiens de toutes les régions du pays comprennent l'importance de l'accord final conclu avec les Nisga'as. Nous savons que le traité avec les Nisga'as marquera le début d'un nouveau chapitre de l'histoire du Canada. Toutefois, contrairement aux députés d'en face, nous n'essaierons pas de nous accrocher au lambeau de document qui a gouverné notre passé.
Trois des députés d'en face ont employé le terme «raciste» en parlant de la Loi sur les Indiens. Ils ont peut-être raison.
Contrairement aux députés d'en face, nous n'essaierons pas de nous accrocher aux façons de faire du passé, que le Parti réformiste semble quand même se plaire à dénigrer. Nous n'amorcerons cependant pas ce nouveau chapitre de l'histoire du Canada sans tenir compte de ce qui s'est fait dans le passé.
Nous respecterons les droits des individus et des minorités et respectera l'indépendance des organes législatif et judiciaire du gouvernement. C'est pourquoi le gouvernement ne peut pas, de bonne foi, accepter la prémisse sur laquelle est fondée la motion de l'opposition, soit que nous, en tant que législateurs, devrions abdiquer nos responsabilités à l'égard des questions de politique qui façonnent l'histoire du Canada, son identité et son avenir.
Ce serait irresponsable de la part du gouvernement d'enlever le débat sur le traité avec les Nisga'as des mains des représentants élus du Canada pour le confier à la magistrature, une magistrature qui, j'ajouterai, a abondé dans ce sens dans la décision rendue récemment dans l'affaire Delgamuukw. Je demanderais au député de lire les paroles écrites par le juge de la Cour suprême et par d'autres qui ont participé à la rédaction de la décision; ils ont dit que les revendications territoriales doivent être réglées à la table de négociation et non devant les tribunaux.
Le député a parlé des 31 millions de dollars utilisés pour les négociations et a dit, de façon assez stupéfiante, que cet argent aurait dû être utilisé pour des projets d'aqueducs et d'égouts. Je suis entièrement d'accord avec lui. Si c'est honnêtement ce que croit le député, acceptera-t-il de s'opposer à son propre parti et de m'aider aujourd'hui à défaire cette motion qui a pour objet de faire de nouveau appel aux tribunaux? C'est ridicule. Il faut comprendre la vraie nature de la motion de l'opposition, soit le non-respect des valeurs que véhicule la Constitution et que le Parti réformiste ne peut pas, ne veut pas et n'a pas adoptées.
Je rappelle aux députés d'en face la récente décision de M. le juge Williamson de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, dans l'affaire Campbell. Dans ses motifs, il analyse le contexte dans lequel un tribunal pourrait se pencher sur des questions concernant la constitutionnalité du traité conclu avec les Nisga'as. Dans le paragraphe 11 de sa décision, il dit, et je cite: «La mesure législative n'a de validité sur le plan constitutionnel...», et il parle ici de l'accord final conclu avec les Nisga'as, «qu'après que le projet de loi a été adopté par les deux Chambres du Parlement, qu'il a reçu la sanction royale et qu'il est devenu loi.»
En d'autres mots, ce juge dit à la Chambre qu'il respecte la primauté du droit et le Parlement. Pour cette raison, il reconnaît au Parlement le pouvoir voulu de débattre de cette question et d'adopter le projet de loi, après quoi les tribunaux se prononceront. Pourquoi le Parti réformiste veut-il usurper cette décision pertinente en matière de compétence qui a été rendue par le tribunal de la Colombie-Britannique?
M. Lou Sekora: Parce qu'ils sont racistes.
M. David Iftody: Madame la Présidente, dans le paragraphe 11 de sa décision, le juge affirme que...
M. Mike Scott: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Le député de Coquitlam a manifestement employé un langage répréhensible et...
M. Lou Sekora: Vous êtes racistes et vous savez que vous l'êtes.
M. Mike Scott: Madame la Présidente, il s'agit clairement de propos non parlementaires. Je prie la présidente de demander des excuses au député.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Vous avez raison. Je demande au député de retirer ses paroles.
M. Randy White: Madame la Présidente, j'invoque la question de privilège. Non seulement le député de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam a accusé à deux reprises en Chambre un autre député d'être raciste, il l'a fait impunément. Ce genre d'attitude et ces propos sont totalement inacceptables et je vous demande d'expulser le député de la Chambre pour une journée.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Madame la Présidente, je soulève la même question de privilège.
Le ton du débat a été enflammé toute la journée. Lorsque d'autres présidents occupaient le fauteuil, des députés de ce côté-ci de la Chambre ont fait des commentaires au sujet des orateurs néo-démocrates et ont prononcé certains mots, dont une expression vulgaire que je ne répéterai pas. Nous n'avons pas soulevé la question de privilège, parce que nous étions conscients que l'ardeur du débat peut amener les gens à dire certaines choses. Ces propos n'ont pas été consignés dans le compte rendu, même s'ils ont été tenus dans le cadre du débat.
Puisque la présidence n'a pas été amenée à se prononcer sur ces questions, je demande qu'on accorde la même latitude...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): C'était le dernier rappel au Règlement à ce sujet. Le député de Langley—Abbotsford a la parole.
M. Randy White: Madame la Présidente, permettez-moi de replacer la question dans son contexte.
Je crois qu'un ministre vient de dire que nous employons nous-mêmes ce mot. Ce n'est pas le cas. Je vous renvoie, madame la présidente, aux règles de débat de la sixième édition de Beauchesne, plus précisément au commentaire 492, où le mot «raciste» figure parmi les mots interdits.
Le député néo-démocrate qui vient de prendre la parole parlait de quelque chose qui n'est pas en rapport avec le débat dans lequel nous sommes engagés.
Le député de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam a employé ce mot non seulement une fois mais à deux reprises, tout en sachant très bien que même s'il employait un langage antiparlementaire à la Chambre, il lui suffirait de retirer ses paroles lorsqu'on le lui demanderait.
Madame la Présidente, il m'apparaît inacceptable qu'un député répète des mots et que vous lui demandiez de les retirer...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La présidence a fait part de sa décision à ce sujet. Le député d'en face a retiré sa remarque et nous n'irons pas plus loin.
M. Richard M. Harris: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Si je ne m'abuse, lorsqu'un député se lève à la Chambre pour demander la parole, il doit être à son fauteuil.
Le député de Port Coquitlam n'était pas à sa place. Je crois donc que la présidence est en droit d'exiger une nouvelle rétractation, alors que le député occupe son fauteuil. Il a utilisé le mot «raciste» à deux reprises et continue de la faire.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je demanderais au député de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam de bien vouloir retirer officiellement ses remarques, maintenant qu'il est revenu à son fauteuil.
M. Lou Sekora: Madame la Présidente, je retire mes paroles.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Nous pouvons maintenant poursuivre.
M. David Iftody: Madame la Présidente, je vous remercie de cette décision. J'en suis heureux. Je crois que notre collègue de Winnipeg-Nord a fait face au même genre de problème ce matin avec le Parti réformiste.
Des députés réformistes ont utilisé le mot «raciste» à plusieurs reprises à la Chambre en parlant de la Loi sur les Indiens.
M. Richard M. Harris: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement.
Depuis notre arrivée à la Chambre en 1989, aucun membre du Parti réformiste, qui constitue l'opposition officielle, n'a jamais été assez irrespectueux pour traiter qui que ce soit de raciste à la Chambre. C'est là, à mon avis, une insulte de très mauvais goût, et le député...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je crains qu'il ne s'agisse simplement d'une divergence de vues. Nous reprendrons donc le débat. Le secrétaire parlementaire a la parole.
M. David Iftody: Madame la Présidente, je n'ai pas dit qu'un député du Parti réformiste ait traité qui que ce soit de raciste. J'ai laissé entendre, et on peut vérifier le compte rendu, que des réformistes ont dit que la Loi sur les Indiens était raciste. On a employé ce terme à la Chambre. Quoi qu'il en soit, je préférerais, si on me le permet, poursuivre mes observations.
J'ai fait allusion à la décision qu'a rendue la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Dans ses motifs, le juge Williamson a dit au paragraphe 28: «Il est essentiel que les tribunaux respectent le droit du Parlement d'exercer une liberté sans entrave dans la formulation, la présentation, l'amendement et l'adoption de mesures législatives. Cette obligation est aussi importante que le devoir des pouvoirs législatif et exécutif de respecter» et je souligne «l'indépendance du pouvoir judiciaire.»
Les députés d'en face devraient savoir que le contenu d'une mesure législative et de tous les textes législatifs porte sur la détermination de questions constitutionnelles. C'est souvent en s'inspirant de ces textes que le pouvoir judiciaire détermine l'objet de mesures législatives. Les débats de la Chambre seront donc pertinents dans toute décision que les tribunaux seront appelés à rendre au sujet du traité conclu avec les Nisga'as.
En outre, les débats de la Chambre sont importants pour tous les Canadiens. Ils méritent de savoir quelle est la position de leurs députés sur les questions qui touchent le pays. Ne serait-ce que pour cette seule raison, le débat que nous tenons actuellement fera date. Le député de Skeena préférerait-il que ses électeurs n'entendent pas son point de vue en entier sur une entente qui promet de changer la région pour le mieux?
Dans la motion que le député de Skeena a présentée à la Chambre, il laisse entendre qu'il craint que le traité ne soit invoqué pour usurper, réduire ou subroger les droits de la personne chez les Nisga'as. Je dirai au député que, s'il était si préoccupé par les droits des Nisga'as, il pourrait visiter leur région plus souvent. Je sais qu'il doit clarifier les choses devant la Chambre, je le comprends.
Comme je l'ai déjà dit, je serais disposé à lui offrir mes services de médiateur au cours de rencontres entre lui et les Nisga'as qui le désirent. Je suis certain que ces électeurs diraient au député qu'ils veulent se débarrasser des contraintes de la Loi sur les Indiens, ce que mêmes certains de ses collègues approuvent. En fait, les Nisga'as ont dit sans équivoque que leur principal objectif était d'éliminer la Loi sur les Indiens. Ils sont d'accord, nous sommes tous d'accord.
Après plus de 20 ans de négociations, il est important que nous demandions aux avocats de s'éclipser, que nous laissions les tribunaux derrière nous, que nous mettions fin au débat, que nous plions notre tente pour ainsi dire, et que toutes les parties concernées se réunissent et discutent. C'est à la Chambre des communes que nous avons l'intention de le faire. Nous voulons que ce dossier fasse l'objet d'un débat complet, ce que nous aurons l'occasion de faire à l'automne comme nous l'avons déjà dit et promis. Nous exercerons toute la diligence que nos électeurs attendent de nous lorsque nous débattrons ces motions à la Chambre.
Je pense que l'histoire prouvera, après le vote à la Chambre des communes, que ceux qui, pour une raison ou pour une autre, auront voté contre le traité seront jugés par le peuple canadien dans 25 ou 30 ans comme ayant eu tort de s'opposer au traité, que leurs motifs aient été bons ou mauvais.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Madame la Présidente, l'une des plus grosses faussetés c'est que les gens entendent dire que c'est juste un autre type de gouvernement municipal. Ce n'est pas vrai. C'est un autre ordre de gouvernement.
J'aimerais poser la question que les autochtones de ma région me posent. Dans ce traité, est-ce que les autochtones auront les mêmes droits que les autres gouvernements municipaux, c'est-à-dire l'obligation de rendre des comptes et de publier chaque année des états financiers vérifiés ainsi que tous les autres droits dont nous jouissons? Ça ne figure pas dans le traité, n'est-ce pas?
M. David Iftody: Madame la Présidente, on agira avec une diligence raisonnable et on suivra les procédures appropriées pour rendre des comptes. Je rappelle au député que les 14 secteurs de compétence visés dans le traité points du traité relèvent des trois domaines que sont la culture, la langue et l'administration de leurs propres éléments d'actif sur la réserve.
Nous avons dit maintes fois à la Chambre que les lois provinciales et fédérales continuent de s'appliquer à tous les autres domaines législatifs. Le député peut croire que les garanties et les protections seront là.
Si elles étaient le moindrement violées, il serait possible d'en appeler devant la Cour d'appel de la Colombie-Britannique ou devant la Cour fédérale.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Madame la Présidente, le secrétaire parlementaire se montre très préoccupé à l'égard des peuples autochtones, et je suis certain qu'il a des inquiétudes légitimes.
Les bandes Gitksan et Gitanyow ne comptent-elles donc pas? Pourquoi ne règle-t-on pas la situation du chevauchement avant de mettre en oeuvre ce traité? Pourquoi le gouvernement parle-t-il d'une obligation fiduciaire envers les peuples autochtones, sans se préoccuper des bandes Gitksan et Gitanyow qui revendiquent comme leur territoire traditionnel 85 p. 100 du territoire qui est cédé aux Nisga'as en vertu de ce traité?
Je voudrais rappeler au secrétaire parlementaire les paroles de Stewart Philipp, président de l'Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique, qui représente un nombre considérable d'autochtones de sa province. Il a déclaré ceci:
Le raccourci que prend le gouvernement en matière de traité se soldera assurément par des années de procès entre les peuples autochtones et la province. Tant que les questions de chevauchement ne seront pas abordées avec les peuples autochtones, aucun gouvernement n'a le droit de négocier des traités reconnaissant des titres ou des droits de propriété à l'égard d'un territoire. Je suis outré par ces gestes répréhensibles. Le processus de négociation de traités en Colombie-Britannique ne peut durer; il ouvre la voie à de nombreuses contestations judiciaires.
Pourquoi le secrétaire parlementaire ne s'attaque-t-il pas à cette question qui revêt une importance primordiale pour de nombreux peuples autochtones, y compris certains de mes électeurs à qui je parle régulièrement?
M. David Iftody: Monsieur le Président, je trouve extraordinaire que le député s'oppose à 2 500 Nisga'as, qui sont ses électeurs, et appuie les Gitksan Wet'suwet'en et les Gitanyow qui ne le sont pas. N'est-ce pas étrange?
J'ai profité de la dernière semaine de congé pour me rendre en Colombie-Britannique. J'ai examiné la carte de la région avec les Nisga'as et nos avocats. Dans la région des Nisga'as, ces limites sont protégés. Nous nous sommes bien assurés qu'elles n'empiétaient sur les sentiers historiques ou les terrains de pêche ou de chasse d'aucune des parties concernées.
Les Nisga'as se sont dits prêts à discuter avec les Gitksan Wet'suwet'en et les Gitanyow des endroits où il peut y avoir un problème, car il y en a. Ils reconnaissent qu'il existe entre eux des liens historiques. Ils ne le contestent pas. Ils veulent s'asseoir et négocier.Pourquoi le député veut-il diviser ces gens, pour finir encore une fois devant les tribunaux?
M. Mike Scott: Monsieur le Président, je soulève la question de privilège. Le secrétaire parlementaire, dans son intervention, a fait croire aux Canadiens et aux habitants de ma circonscription que les Gitksan et les Gitanyow ne faisaient pas partie de mes électeurs. Or, ils en font bien partie.
Il est très important que le travail que je fais en tant que député soit représenté de façon exacte. Je représente aussi ces gens.
Le vice-président: Je ne pense pas que ce soit vraiment une question de privilège, mais le député a dit ce qu'il avait à dire et c'est enregistré.
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, en guise d'introduction, je vais formuler quelques observations pour rectifier ce qu'on a dit jusqu'à maintenant à la Chambre.
Le traité des Nisga'as n'est pas un cadre qui déterminera les 50 traités qu'il reste à conclure en Colombie-Britannique. C'est un point que le premier ministre de la province a tenté de faire valoir à des fins politiques, mais l'argument n'a pas tenu. Nous reconnaissons que le traité des Nisga'as s'appuie sur des faits historiques particuliers. Tous les autres traités ont leurs circonstances particulières.
Dans le cas du traité des Nisga'as, les principaux facteurs ayant contribué à une conclusion rapide, au cours des trois dernières années, alors qu'il était en préparation depuis 100 ans, sont le leadership extrêmement pragmatique de la partie nisga'a, l'esprit d'accommodement et, je le souligne, l'absence d'intérêts contraires au moment où les négociations battaient leur plein. Mais on a toujours considéré que ce traité et les autres seraient appliqués conformément à la Constitution et à la primauté du droit, et que la procédure juridique normale s'applique.
J'aimerais dire également, au nom du très grand ancien député de Westmount, qu'il n'y avait rien dans la démarche du premier ministre Trudeau qui ait été incompatible avec les droits des autochtones. Au contraire, celui-ci rejetait le nationalisme pathologique dont on a été témoin en Europe, entre les deux guerres mondiales, mais il croyait fermement aux droits des minorités. En fait, les articles 25 et 35 de sa charte des droits, qui a fait école, existent parce qu'il a admis qu'ils devaient s'y trouver. Ce sont les dispositions qui préservent les droits des autochtones déjà reconnus. Il avait anticipé qu'il y aurait lieu de procéder à une révision constitutionnelle ultérieure pour déterminer avec précision leur portée et leurs limites dans des cas concrets.
Permettez-moi de toucher un mot sur l'examen judiciaire. Plus tôt dans le débat, le député de Sydney—Victoria a fait état de paradoxes et de contradictions. Voilà des mois et des mois que j'entends parler des méfaits de l'examen judiciaire et de l'activisme judiciaire. Mon premier livre, je l'ai consacré à l'examen judiciaire et à l'activisme judiciaire. Il est toujours intéressant de voir des gens se convertir sur le chemin de Damas, et je m'en réjouis. Je ne le reprocherais à personne.
Je ferai observer que l'examen judiciaire et l'activisme judiciaires ne sauraient exister isolément. En droit canadien, très rares sont les cas où l'on détermine les paramètres, mais les précédents établis par la Cour internationale de justice ne manquent pas. Lors d'un procès récent au cours duquel j'ai proposé gracieusement mes conseils, le tribunal a établi très clairement, même s'il ne s'agissait que d'un avis consultatif, qu'il lui fallait considérer la qualité d'ester en justice. Il a rejeté une intervention de l'Organisation mondiale de la santé, tout en approuvant celle de l'Assemblée générale des Nations Unies concernant la légalité des armes nucléaires.
De façon plus précise et dans ce contexte, même en cas de litige, il y a des limites à ce que les tribunaux, dans l'exercice de leurs pouvoirs en vue d'assurer la coordination des services gouvernementaux, comme l'exécutif et le législatif, peuvent faire. Dans une décision récente, rendue il est vrai par un seul juge de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, il a été établi à bon droit que l'affaire soulevée à propos du traité conclu avec les Nisga'as était prématurée juridiquement parlant, qu'il n'y avait pas lieu de statuer là-dessus pour l'heure, que la question était sans intérêt pratique et qu'il fallait à tout le moins attendre que les lois fédérale et provinciale pertinentes soient adoptées.
Je ne doute pas que telle serait la position de la Cour suprême du Canada. En fait, lorsque j'ai examiné la motion telle qu'elle est présentée, avec un certain degré d'enthousiasme poétique, je me suis demandé si des tribunaux se prononceraient sur l'usurpation, la réduction ou la subrogation ou toute autre tournure à consonance latine, en l'absence de preuves.
Nous en sommes maintenant à déterminer comment et quand les droits des autochtones seront définis. Nous ne pensons pas que les traités mettent fin à la question. Ils ne constituent que la première étape du développement, qui se fera cas par cas dans des situations concrètes. Ce qui est bon et sensé pour les Nisga'as peut devoir être réexaminé dans le contexte de zones fortement urbanisées telles que Vancouver, Kamloops et Victoria. Ce sera fait dans le cadre du processus de négociation de traités.
Pour ce qui est de la compatibilité ou de la conciliation des traités avec les articles 25 et 35, pour lesquels j'ai un intérêt particulier, le sénateur Perrault et moi avons conseillé le premier ministre Trudeau à ce sujet et nous avons proposé que ces articles soient inclus dans la Charte. Il est toujours envisagé qu'il y aura, selon l'esprit de la common law, un examen cas par cas de faits concrets concernant des problèmes particuliers.
La loi n'est pas immuable. Nous avons dépassé les théories des compartiments constitutionnels fédéral-provincial. Nous reconnaissons, comme l'a dit lord Sankey au Conseil privé il y a 65 ans, que la constitution, telle un arbre, doit constamment s'adapter aux circonstances changeantes.
Cependant, nous ne le faisons pas dans l'abstrait. Nous le faisons dans des cas concrets. Le litige est crucial.
Un certain nombre d'entre nous ont participé aux négociations au Parlement, pour faire fonctionner le Parlement correctement. De nouveaux problèmes ont surgi à propos du projet de loi C-49 après que le comité formé de représentants de tous les partis eut remis un rapport unanime. Nous avons travaillé avec le Sénat et d'autres instances. Le Sénat a avancé une proposition d'amendement du projet de loi C-49, qui reviendra à la Chambre. Cet amendement assure certainement une plus grande compatibilité avec les principes de la common law et la Charte des droits et libertés.
Certains éléments ont été laissés de côté, par exemple la situation des femmes autochtones. Il ne s'agit pas là d'un problème qui se pose concrètement dans le cas des Nisga'as, mais il se posera assurément dans le cas de certains traités dans la région de Vancouver. Je présume que les tribunaux en seront saisis, lorsque des particuliers ou des groupes d'intérêts exprimeront des inquiétudes, et nous aurons une décision.
Tout le processus d'élaboration des traités repose sur le principe de Jeremy Bentham: la loi n'est pas faite par un juge seul, mais par le juge et toutes sortes d'autres personnes. L'élaboration des traités fait intervenir le pouvoir exécutif, le Parlement, l'assemblée législative, qui adopte les lois de mise en oeuvre, et les tribunaux, qui se prononcent au besoin.
Rien de ce qui s'est passé jusqu'à maintenant dans la négociation des droits issus de traités n'est incompatible avec la Constitution. Tous les textes sont conformes à la Constitution et à la Charte des droits et libertés. Il y a les articles 25 et 35, et l'arrangement conclu par tous les députés et le Sénat à propos du projet de loi C-49 après l'audition des instances de groupes très représentatifs de Vancouver. Ces arrangements ont permis de concilier de façon pragmatique les principes généraux avec les grands principes constitutionnels et la primauté du droit.
Je dirais aux députés de l'opposition que leur motion est prématurée. À mon avis, elle fait obstacle au principe de la courtoisie que les tribunaux et les autres instances doivent respecter pour assurer la coordination avec l'exécutif, qui est chargé de négocier les traités. Laissons-le faire son travail. Le Parlement est chargé d'adopter une mesure législative concrète pour mettre en oeuvre le traité.
Une fois la mesure législative adoptée, si l'on peut établir que certains membres ou groupes au sein de la communauté visée sont en situation de conflit d'intérêts, alors nous pourrons en saisir les tribunaux. J'ai toujours affirmé que le ministère de la Justice devrait financer les contestations judiciaires portant sur des questions constitutionnelles d'ordre général. Il le faisait auparavant et a dû mettre fin à cette pratique à cause des compressions budgétaires que le gouvernement a imposées au début de son mandat. Cette pratique pourrait être rétablie. Il s'agit d'une dynamique constante qui rend les lois conformes à la Constitution et à la Charte des droits.
J'invite tous les députés à collaborer à ce processus. Je remercie ceux qui ont participé au débat, même si leurs discours se sont parfois faits âpres. Toutefois, des députés des deux côtés ont admis que ce débat faisait appel aux sentiments et nous tolérons une certaine âpreté lorsque la cause est louable.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une brève question à poser au député. Pourquoi le gouvernement est-il disposé à accorder aux Nisga'as des pouvoirs qu'il refuse de consentir au Québec?
M. Ted McWhinney: Monsieur le Président, le député pose des questions insidieuses qui dépassent certainement la loi ou le traité. La province de Québec, par son gouvernement actuel, demande elle-même certaines mesures qui sont tout à fait contraires à la Constitution selon le gouvernement. Je ne vois aucun parallèle entre ce qui est proposé en vertu du traité avec les Nisga'as et ce que la province de Québec demande selon ce que je comprends.
J'ai déjà dit que le traité des Nisga'as et tous les traités subséquents doivent respecter la Constitution et la primauté du droit. En ce qui concerne les propositions du Québec, nous étions d'avis qu'elles n'étaient pas conformes à la Constitution. C'est pourquoi nous avons déclaré que, s'il y avait un autre référendum sur cette question, nous insisterions pour que la question soit rédigée, et la formulation revue, de façon à faire état de ce fait afin que les gens puissent se prononcer. Si un référendum donne lieu à une réponse affirmative un jour, choisir ou non de réagir sera alors une décision d'ordre politique.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, l'accord des Nisga'as, selon son libellé actuel, donne aux Nisga'as le pouvoir de déterminer leur propre citoyenneté. Je suppose qu'aucun de nous ne voudrait accorder ce même pouvoir au Bloc ou à la faction séparatiste du Québec.
Ma question est identique à celle de mon collègue. De nombreux aspects de l'accord des Nisga'as plairaient beaucoup aux gens du Québec qui veulent voir le Québec devenir un État séparé. Soyons précis. Pourquoi accorder aux Nisga'as la possibilité de déterminer leur propre citoyenneté alors que, si nous recevions la même demande de la part des séparatistes du Québec, et je suis certain que cela surviendrait, nous leur refuserions? Quelle est la différence?
M. Ted McWhinney: Je le répète, monsieur le Président, le traité Nisga'a et tous ceux qui en découlent sont conforment à la Constitution et à la primauté du droit que représente la Constitution. Toute définition de la citoyenneté est sujette à un examen judiciaire et est assujettie à la Constitution et aux autres dispositions constitutionnelles.
Ce que le Québec peut ou ne peut pas proposer est une autre affaire. Cependant, si des propositions allaient à l'encontre de la Constitution canadienne telle qu'elle existe à l'heure actuelle, notre position seraient alors très nette: nous considérerions cela comme une entorse à la Constitution et nous la traiterions en conséquence. Le premier ministre a été très clair là-dessus.
M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, je veux poursuivre la même question soulevée par mes collègues, à savoir que le seul pouvoir dont on se soit enquis jusqu'à maintenant est la citoyenneté. Cependant, le député sait pertinemment qu'une clause du traité avec les Nisga'as prévoit un pouvoir prépondérant, un pouvoir supérieur à celui des provinces et du gouvernement fédéral en ce qui concerne, par exemple, les pêches, la faune, l'adoption, la culture et la langue, les pouvoirs d'expropriation, les services médicaux, les services familiaux et l'éducation. Tout indique qu'il s'agit d'un État. Je le demande à nouveau au député: pourquoi est-il plus ou également acceptable d'avoir un mini-État à l'intérieur du Canada que d'avoir un macro-État à côté du Canada par suite de la séparation du Québec?
M. Ted McWhinney: Monsieur le Président, on emploie encore là un langage coloré, des termes pittoresques. Nous devrions nous en tenir au texte du traité et à l'hypothèse fondamentale que ne contestent pas, soit dit en passant, les Nisga'as, le gouvernement provincial ni le gouvernement fédéral, à savoir que le traité est conforme et est assujetti à la Constitution. La seule chose qui demeure pour ce qui est du gouvernement du Québec, c'est que nous pouvons évaluer ce qui est proposé, mais, si le Québec nous sort de la Constitution, nous reconnaîtrons alors qu'un changement fondamental est survenu. Les deux situations sont aussi différentes que le jour et la nuit.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat d'aujourd'hui. Étant originaire de la Colombie-Britannique, je suis bien conscient de l'ampleur des problèmes que voient de nombreuses personnes dans les revendications territoriales des autochtones, en particulier dans le cas du traité signé avec les Nisga'as et du précédent qu'il va créer pour nous tous.
Plusieurs petites bandes autochtones habitent dans ma circonscription, où il y a également des revendications territoriales. La question n'a pas la même ampleur que dans certaines autres régions, mais un nombre grandissant de mes électeurs, qui viennent autant des régions rurales qu'urbaines, sont préoccupés par les effets qu'auront sur leurs propriétés privées les revendications territoriales autochtones et, en particulier, le traité signé avec les Nisga'as. Mes collègues ont soulevé à la Chambre de nombreux sujets de préoccupation sérieux pour les habitants de ma circonscription. On aurait tort de croire que la question n'est qu'un prétexte à débat pour marquer des points sur le plan politique. La question concerne certains d'entre nous plus étroitement qu'on ne le croit.
Étant donné que je ne vis pas directement dans la région visée par le traité signé avec les Nisga'as, puisque j'habite dans les basses terres du Fraser, j'aborderai la question du point de vue financier. En tant que comptable, je suppose que j'aurais de toute façon examiné cet aspect de la question. Je me suis toujours intéressé de près aux conséquences financières de nombreuses revendications territoriales et pas seulement celles des Nisga'as. La question Nisga'a me préoccupe beaucoup cependant compte tenu des sommes considérables dont il est question entre les gouvernements provincial et fédéral. La chose qui m'inquiète le plus cependant est que personne ne semble connaître de façon précise les modalités du traité.
Comment peut-on, de nos jours, conclure un accord sans en connaître les modalités financières exactes, en particulier lorsque des centaines de millions de dollars, et pas simplement 10 000 $ ou 20 000 $, sont en jeu?
J'aborderai la question selon ma propre conception des problèmes politiques en Colombie-Britannique, où les néo-démocrates forment le gouvernement le plus impopulaire en Amérique du Nord à l'heure actuelle. Ce gouvernement a été élu par 38 p. 100 des électeurs, tout comme les libéraux fédéraux. Ni les néo-démocrates au niveau provincial ni les libéraux au niveau fédéral ne représentent la majorité de la population dans ma province. Aussi, la meilleure façon de s'assurer qu'un gouvernement ait un mandat de l'ensemble de la population compte tenu qu'il n'a été élu que par une minorité...
M. Lou Sekora: Combien de votes ai-je obtenus?
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Le député de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam essaie de me harceler. Les députés peuvent-ils imaginer la scène? Non mais, qu'est-ce que j'ai peur de lui!
M. Lou Sekora: Vous parlez de 38 p. 100 des voix. Présentez les faits tels qu'ils sont.
M. Randy White: Un perdant de Coquitlam est élu député par chance lors d'une élection partielle et il pense que cela me fait peur.
Lorsqu'un gouvernement fédéral ou provincial est porté au pouvoir avec 38 p. 100 des suffrages, il serait avisé de tenir un référendum et d'obtenir un mandat pour agir de la sorte.
M. Lynn Myers: N'avez-vous pas obtenu 6 p. 100 des voix dans Windsor—St. Clair?
M. Randy White: Monsieur le Président, j'ai l'impression que les députés d'en face ne me portent pas dans leur coeur. Vous savez quoi? C'est tout à fait réciproque.
M. David Iftody: Nous vous aimons, Randy.
M. Randy White: Écoutez cela, chers téléspectateurs. Sur les 156 libéraux élus, il y en a cinq qui sont à la Chambre.
Le vice-président: Le leader parlementaire de l'opposition officielle connaît le Règlement et il sait qu'il ne doit pas mentionner l'absence de députés à la Chambre. Il le sait pertinemment. J'ai déjà dû le rappeler à l'ordre pour cela dans le passé et je sais qu'il ne voudrait pas que je le fasse de nouveau.
M. Randy White: Je m'excuse, monsieur le Président. Je sais que je m'emporte à l'occasion sur ce genre de question, mais j'aime que les gens sachent combien de députés sont présents à la Chambre des communes lorsqu'on y discute d'un sujet aussi important que l'accord conclu avec les Nisga'as.
Je voudrais faire ressortir que la seule analyse des coûts de l'accord conclu avec les Nisga'as qui a été mise à la disposition de la population de la Colombie-Britannique sont les estimations officielles des gouvernements provincial et fédéral. Mon collègue de Delta—South Richmond a dit qu'il fallait avoir un document un peu plus objectif sur cet accord. Il a donc demandé à R. M. Richardson and Associates de faire une analyse des coûts du traité avec les Nisga'as pour les contribuables de la colombie-Britannique.
Cette analyse a été rendue publique. Je voudrais simplement faire part à la Chambre de certaines des constatations que l'on trouve dans cette analyse sur l'accord conclu avec les Nisga'as. S'il y a doutes sur l'aspect financier, il serait sûrement prudent pour tout gouvernement et tous les politiques, quel que soit leur parti, de vérifier, notamment s'il y a de grands écarts de chiffres.
Voici ce que le cabinet Richardson and Associates a constaté dans son analyse. Le coût total du traité conclu avec les Nisga'as s'élève à 1,5 milliard de dollars, 1 515 800 000 $ plus exactement, alors que les estimations officielles donnaient le chiffre de 485,8 millions de dollars.
Quelqu'un a dit que le cabinet Richardson and Associates s'est trompé. De combien s'est-il trompé? S'est-il trompé d'un milliard de dollars? S'il s'est trompé de 10 millions de dollars, et il s'agit là de deniers publics, le gouvernement n'a-t-il pas la responsabilité de vérifier?
Nous connaissons tous la feuille de route du NPD en Colombie-Britannique. Il n'en a cure. Il dépense sans compter comme s'il n'y avait pas de lendemain, et, pour le NPD, il n'y en a pas. Il s'en fout. Or, il va y avoir toute une lutte aux prochaines élections fédérales. J'invite le gouvernement libéral à vérifier cet écart d'un milliard de dollars à ce seul poste.
Le gouvernement de la Colombie-Britannique a sous-estimé la valeur des terres publiques, les coûts de construction de la route du territoire des Nisga'as, la régénération forestière, les dépenses provinciales et les coûts d'indemnisation des tiers. Nous ferions mieux d'y réfléchir. Il y a peut-être quelque chose d'erroné, et nous devrions chercher à le savoir.
La valeur des terres non constituées en réserve et conférées par l'entente aux Nisga'as, d'une superficie d'environ 1 930 kilomètres carrés, est évaluée à 406,4 millions de dollars, contre 106,7 millions d'après l'évaluation du gouvernement de la Colombie-Britannique. Il ne s'agit pas d'un écart de 10 000 $ ou de 10 millions, mais d'environ 300 millions de dollars.
Il ne s'agit pas en l'occurrence de veiller à ce que tout le monde soit satisfait et à ce que l'entente soit approuvée, ou de se faire les défenseurs de tel ou tel groupe. Il s'agit plutôt de veiller sur les intérêts de tous les contribuables canadiens, car il y a des montants énormes en jeu. Nous devrions réévaluer la situation. Cette réévaluation ne devrait cependant pas être effectuée par le gouvernement ou par ses fonctionnaires. Elle devrait être effectuée par quelqu'un d'autre. C'est ce que nous avons fait. Nous en sommes arrivés à une évaluation équitable. Cela n'avait rien d'un stratagème politique.
J'invite le gouvernement a écouter ce que nous disons. Cette évaluation établit la valeur des ressources forestières à 268,2 millions, celle des ressources minières à 13,8 millions, celle des ressources hydrauliques à 17,5 millions et celle des ressources halieutiques à 106,9 millions de dollars.
Et la route du territoire des Nisga'as? Elle coûtera au moins 87 millions de dollars, contre 41 millions d'après l'évaluation du gouvernement de la Colombie-Britannique. Le gouvernement libéral est prêt à entériner tout simplement ce traité au nom des jeunes et des aînés vivant d'un revenu fixe qui vont devoir payer la note.
Il y a très peu de députés en face qui suivent attentivement ce débat très important. Tous les députés ministériels devraient être présents à la Chambre pour écouter ce qu'on dit.
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais commenter la question du député à l'intention des quelques députés réformistes qui sont encore ici et qui écoutent.
Le député a dit que les aspects financiers avaient été laissés à l'écart de la motion. Le député de Skeena voulait parler d'autonomie gouvernementale et c'est autour de cela que tourne le débat depuis deux heures.
Je connais le rapport de M. Richardson et j'y ai jeté un coup d'oeil.
À l'examen, je trouve que le témoignage du vérificateur général du Canada devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord ne répondait pas du tout à la question que j'ai posée au sujet de l'évaluation des terres compte tenu de leur superficie et de leur situation très au nord. Je lui ai demandé quelles méthodes comptables seraient utilisées pour arriver à de tels résultats et si le gouvernement du Canada avait respecté ses normes dans ses évaluations. Le témoin entendu par le comité m'a répondu que oui. Nos évaluations sont acceptables selon les fonctionnaires du Bureau du vérificateur général.
Qui le député croit-il, M. Richardson, que je ne connais pas et que probablement personne à la Chambre ne connaît, ou le vérificateur général du Canada? Puisque le député est comptable, peut-il me répondre?
M. Randy White: Monsieur le Président, permettez-moi d'apporter quelques précisions.
Un secrétaire parlementaire à la Chambre fait ce que le gouvernement lui dit de faire. Dans ce cas-ci, le secrétaire parlementaire est ici pour défendre, au nom du gouvernement, l'accord avec les Nisga'as. Pour moi, le fait qu'il y ait sur la table une motion concernant un aspect particulier de cet accord n'est absolument pas pertinent. J'essaie de soulever un point bien précis.
Il ne suffit pas que le vérificateur général joue un rôle dans ce dossier. C'est ce que j'ai dit à l'origine. Mon collègue de Delta—South Richmond a demandé à une firme privée de faire une analyse coût-efficacité. À mon avis, le gouvernement devrait demander à plusieurs firmes privées de faire des analyses coût-efficacité de cet accord.
Il ne suffit pas d'aller dire au vérificateur général qu'il y a une divergence de 5 p. 100. Le député sait-il ce que représente une divergence de 5 p. 100 sur 1 milliard de dollars? Cela représente beaucoup d'argent pour les contribuables canadiens.
Ce que j'essaie de faire comprendre au député et aux quelques libéraux qui écoutent, c'est qu'il y a beaucoup d'argent en jeu. Le gouvernement ne devrait pas simplement accepter d'emblée les chiffres que certains bureaucrates lui donnent relativement au coût de cet accord simplement parce qu'il veut le voir entrer en vigueur. Il ne devrait pas simplement croire le vérificateur général sur parole.
Il devrait faire faire des analyses par diverses organisations. Il en a le temps. Nous avons réussi à faire retarder cette affaire jusqu'à l'automne. Durant l'été, pourquoi ne demande-t-il pas à deux firmes distinctes de faire chacune une analyse coût-efficacité de cet accord? S'il y a effectivement une si grande divergence, ce que je soutiens aujourd'hui, il faut alors interrompre le processus et réévaluer l'accord non seulement du point de vue social ou de toute autre point de vue, mais aussi du point de vue financier.
Cet accord va coûter cher aux habitants de la Colombie-Britannique et à tous les Canadiens, et ses répercussions sur les autres revendications territoriales leur coûteront encore plus cher. L'enjeu est important. Il ne s'agit pas ici d'un débat d'une seule journée sur une motion que nous avons présentée à la Chambre des communes. Le gouvernement a le temps. Pourquoi ne pas faire ce que j'ai dit?
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, le député de Langley—Abbotsford ayant demandé qu'on lui pose une question directe au sujet des points qu'il a soulevés, je me rendrai à sa demande. Ma question porte sur la valeur des terres en question.
Je crois comprendre, et le député de Langley—Abbotsford peut me corriger si j'ai tort, que tous les arbres ont été abattus sur les terres en question. La majorité des terres, soit de 80 à 90 p. 100 de la superficie, ont été exploitées à des fins forestières. La région a été reboisée et une grande partie des arbres sont trop jeunes pour être récoltés. Cela explique en partie pourquoi les sociétés en cause ont donné leur accord à cette transaction. Le député de Langley—Abbotsford peut-il donner des précisions à ce sujet?
M. Randy White: Monsieur le Président, je n'habite pas dans la région, mais un de nos députés me donne l'assurance que les arbres n'ont pas tous été coupés, et je suis sûr que c'est vrai.
M. Gerald Keddy: Il n'y a pas de voie d'accès.
M. Randy White: Monsieur le Président, qu'il y ait ou non une voie d'accès aux terres, nous ne disons jamais, lorsqu'il est question de n'importe quel autre secteur de régénération forestière en Colombie-Britannique, que celui-ci n'a pas de valeur parce qu'il n'y a pas de voie d'accès.
Il faut se pencher sur la valeur des terres lorsqu'il existe une voie d'accès. Comme la plupart des députés libéraux viennent de l'Ontario ou du Québec, je ne sais pas s'ils comprennent qu'en Colombie-Britannique nous utilisons des hélicoptères pour exploiter les forêts dans les régions éloignées. Si des terres sont éloignées, cela ne signifie pas qu'elles ont moins de valeur. Au contraire, elles offrent probablement un plus grand potentiel que les autres.
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de constater qu'aucun député libéral n'a quitté les lieux. Ceux-ci sont tellement peu nombreux qu'on aurait peine à le remarquer.
Permettez-moi d'abord de signaler, relativement à la motion à l'étude en cette journée d'opposition, que dans une cour de justice, les deux parties ont leurs experts. Par conséquent, il faut vraiment faire la part des choses lorsqu'on dit qu'une ou deux opinions reflètent ou non la vérité dans un dossier particulier. Toute la question est là.
La semaine dernière, j'ai assisté à une conférence sur la décision Delgamuukw. La seule certitude qui a découlé de cette conférence est que la décision Delgamuukw ne fournit aucune certitude.
Les services d'experts coûtent très cher, mais ces derniers ne sont pas une denrée rare.
La motion de l'opposition vise à faire en sorte que le gouvernement libéral pose, avant la ratification de l'accord, la question de savoir si le gouvernement du Canada continuera d'être l'autorité suprême après la ratification du traité. L'accord constitue-t-il une modification à la Constitution? Quel est son incidence sur les droits individuels? Nous demandons simplement une précision juridique. Laissons l'accord en suspens en attendant d'obtenir cette clarification. Ce n'est pas tant demander. Cette question a trait au strict minimum que les gens devraient avoir.
Les libéraux ont entretenu des relations plutôt amicales avec les dirigeants autochtones, mais celles-ci n'ont pas toujours bien servi les intérêts individuels des autochtones.
L'une des choses que j'ai apprises, et il n'y a pas si longtemps que je suis ici, c'est que, dans les années 1950, les autochtones ne pouvaient vendre le fruit de leur labeur et garder le produit de la vente. Par exemple, le grain était vendu et l'argent devait être remis au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Et bien entendu cet argent était dépensé par les dirigeants, ce qui prouve que l'évolution n'est pas toujours un processus négatif. À présent ils possèdent ce droit mais auparavant, les chefs et le ministère des Affaires indiennes s'étaient entendus pour que ce droit leur soit dénié.
Tout récemment, le paragraphe 77(1) de la Loi sur les Indiens a été supprimé. C'est la disposition de la Loi sur les Indiens qui interdisait aux membres d'une bande ne vivant pas ordinairement dans une réserve de voter aux élections de leur bande.
Et devinez qui était de mèche avec les chefs et les conseils pour leur refuser ce droit? Eh oui, le ministère des Affaires indiennes. En effet, il est intervenu pour dénier aux membres non-résidents d'une bande le droit de participer à l'élection du gouvernement de leurs réserves. Voilà ce qui s'appelle un déni de démocratie.
Le territoire des Nisga'as compte de nombreux membres qui ne vivent pas dans la réserve. On est en droit de se demander s'ils auraient voté en ce sens ou si leurs droits leur auraient été déniés de la sorte.
Les Indiens assujettis au C-31 qui avaient été jusqu'à présent privés du droit de participer à l'élaboration des politiques qui régissent les réserves auxquelles ils appartiennent ont enfin obtenu le droit de se prononcer sur les questions concernant le gouvernement, l'utilisation des deniers publics, les installations, la gestion des programmes et ainsi de suite. Ils ont enfin voix au chapitre, mais ce droit leur avait été dénié tout simplement parce qu'ils ne faisaient pas partie du groupe de ceux qui vivaient dans la réserve. Nous sommes d'avis qu'il y a tout lieu de régler ce genre de questions dans le cas des Nisga'as.
Le droit de mobilité a été dénié pour la même raison. Ce faisant, on a obligé les Indiens à vivre dans une réserve donnée s'ils voulaient exercer leur droit de voter en qualité de membres de la bande.
J'ajouterais que le vérificateur général se montre critique à l'égard de la mauvaise gestion par le ministère des Affaires étrangères des deniers publiques affectés aux programmes gérés par les bandes. Il dénonce notamment l'absence de cadre législatif et l'absence de mécanismes de reddition des comptes et il reproche au ministère de donner de l'argent aux premières nations et de les laisser se débrouiller. Qui est responsable? C'est le gouvernement libéral.
Les libéraux pensent peut-être que leurs motifs sont incontestables. Ils pensent peut-être que leurs motifs sont excellents. Ils pensent peut-être que leur intégrité est au-delà de tout soupçon. Ils se rassurent peut-être en se disant qu'ils ont agi en toute intégrité, encore que nous nous questionnons là-dessus. Cependant, ce que nous mettons surtout en doute, c'est leur capacité de négocier et de mettre en oeuvre un traité. Le traité conclu avec les Nisga'as en est un exemple.
Je voudrais attirer l'attention des députés sur les remarques faites récemment par le vérificateur général. Dans le chapitre 14 de son rapport sur les Affaires indiennes concernant les revendications territoriales globales, le vérificateur général, au paragraphe 14.16 dit ce qui suit:
Bien que les affaires autochtones et les questions concernant les réserves indiennes relèvent de la compétence du Parlement du Canada, celui-ci a besoin des autorités provinciales et territoriales pour régler des revendications portant sur certaines terres relevant de leur compétence.
Il est vrai que le gouvernement fédéral a l'accord du gouvernement de la Colombie-Britannique en place, mais il n'a pas celui du prochain gouvernement de la Colombie-Britannique. Le gouvernement n'aurait-il pas dû négocier un traité ayant l'appui de tous les partis, un traité que le prochain gouvernement ne cherchera pas à annuler par décision judiciaire, ce qu'il tente déjà de faire, un traité qui jouisse de l'appui de la population et qui ne donne pas matière à regrets. Il me semble qu'il s'agit là d'une question importante qui aurait dû être réglée avant la signature du traité avec les Nisga'as.
L'accord final conclu avec les Nisga'as ne confère pas de droits de propriété aux Nisga'as et n'aborde même pas la question. C'est très important. Pendant près de 130 ans, les gouvernements du Canada ont refusé aux autochtones le droit à la propriété privée sur les terres des réserves. Ils ont été soumis à une approche collectiviste sur le régime de possession qui a été qualifié de traditionnel. Cependant, j'aimerais contester cette position.
Avant l'arrivée des puissances coloniales, les peuples autochtones vivaient dans des sociétés variées, au sein de ce qui est maintenant le Canada. Il y avait dans les prairies des tribus nomades, pour lesquelles la notion de propriété n'existait pas. Pour ces gens, la terre en tant que telle n'avait aucune valeur marchande. Ils se déplaçaient selon les saisons, en suivant le gibier dont dépendait leur survie.
Par conséquent, seule la propriété des articles pouvant les suivre dans leurs déplacements leur importait vraiment. J'aimerais en citer quelques-uns: leurs habitations, qui étaient mobiles, les chevaux, qui leur étaient indispensables, et les bisons, qui se déplaçaient. Si nous examinons les dessins et peintures de l'époque, nous constatons que c'est ce sur quoi ils comptaient. Il n'y a pas de paysages dans leurs peintures. C'est à mon avis très significatif. Personne n'aurait volé, pas plus qu'acheté des terres, car personne n'en possédait, étant donné qu'elles n'avaient aucune valeur intrinsèque pour ces peuples nomades. Elles n'étaient utiles qu'en ce sens qu'elles leur fournissaient la nourriture dont ils avaient besoin. Ni la propriété communautaire ni la propriété en fief simple ne sont des notions traditionnelles pour ces peuples. L'élément important était l'utilisation.
Dans d'autres endroits au pays, les Indiens restaient toujours au même endroit parce que la température y était relativement clémente, que le gibier était abondant et qu'ils pouvaient faire certaines récoltes. Cette société était bien différente. Ces conditions ont permis aux gens de construire des maisons et de créer des collectivités permanentes.
On pourrait dire que ces gens n'étaient pas vraiment intéressés à la possession collective de leurs résidences. C'est important de le souligner. Ce n'est pas parce qu'ils n'avaient pas recours au régime des titres Torrens et qu'ils n'émettaient pas de titres de propriété qu'ils n'avaient aucune notion de la propriété.
Un titre ou acte de propriété permet d'établir la propriété d'un terrain et peut préciser l'étendue ou la superficie, la forme et l'emplacement d'une propriété. Il n'est pas réaliste de parler d'approche collectiviste dans ce cas.
Comme je l'ai souligné précédemment, le système de réserve qui prévoit l'attribution de certaines terres est basé sur le principe de la propriété commune qui, à mon avis, ne s'appuie sur aucun fait historique avéré. Les réserves ont été créées pour servir de refuge contre l'invasion des colons et pour assurer une assise territoriale pour les Indiens et leurs familles. C'est là une mesure importante et essentielle que le gouvernement canadien a adoptée.
Les activités traditionnelles comme la chasse, la pêche et la cueillette, étaient des activités importantes entreprises sur les réserves pour préserver les genres de vie traditionnels dans ce qui était, à l'époque, une économie essentiellement agricole et fondée sur les ressources. L'émergence d'une nouvelle vision dans le contexte d'une société moderne basée non pas sur des activités traditionnelles, mais plutôt sur les opérations commerciales modernes entraîne une vision différente des régimes de possession.
La gestion commune des terres concentre les pouvoirs économiques, de même que les pouvoirs politiques, dans les mains d'un petit groupe de gens qui constituent une élite. Beaucoup d'Indiens de la base commencent à dénoncer les abus de pouvoir et les conflits d'intérêts, le copinage et le manque de transparence dans les réserves, où les terres sont détenues en commun.
Il n'y a pas de doute que la propriété de terres est un outil efficace pour la création et la distribution de richesses au Canada, mais seulement pour ceux qui y ont droit. Le fait que le gouvernement libéral perpétue le principe communautaire, en refusant d'admettre tout autre principe qui permettrait de reconnaître le droit ou le désir des membres d'une bande de détenir individuellement une partie des terres en fief simple, est une lacune majeure non seulement du traité des Nisga'as mais de l'ensemble de la politique actuelle du gouvernement.
Que l'accord final des Nisga'as soit considéré comme un modèle pour les traités ultérieurs de la Colombie-Britannique et qu'on fasse fi de cette lacune fondamentale perpétue une éternelle injustice envers tous les Indiens qui désirent obtenir quelque chose de plus de la vie. Le fait que les intéressés soient coincés dans un système communautaire, sans moyen de s'en sortir ni de connaître la même liberté et les mêmes possibilités que les autres Canadiens, est à mon avis un déni de justice.
La Chambre devrait refuser de donner suite à ce traité. Elle devrait le renvoyer pour examen d'un certain nombre d'éléments que mes collègues et moi-même avons soulignés aujourd'hui.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, tout au long de la journée les députés réformistes ont invoqué des raisons pour que le traité signé avec les Nisga'as soit mis au rancart.
Selon eux, toute mesure visant à accorder aux autochtones leur autonomie gouvernementale et leur émancipation devrait être écartée parce que, pour une raison ou l'autre, les autochtones n'ont pas la maturité voulue, ils sont trop corrompus et gèrent mal leurs fonds. Depuis deux ans, les réformistes citent des cas isolés de mauvaise utilisation de fonds. Ils ont tenté de se servir de ces exemples pour donner des autochtones l'image d'un peuple qui ne mérite pas de contrôler sa propre destinée.
Un autre député a parlé de mauvaise gestion et d'abus et a affirmé parler au nom des autochtones ordinaires. Le Parti réformiste a le culot de se présenter, à la Chambre, comme le défenseur des autochtones.
À l'instar d'autres députés réformistes, le député d'Athabasca déclarait récemment que ce n'est pas parce que nous n'avons pas tué d'Indiens et ne leur avons pas fait la guerre que nous ne les avons pas conquis. Selon le député, c'est parce que nous les avons conquis qu'ils ont accepté de s'entasser dans de petites réserves, dans les régions les plus reculées et désolées du pays. Heureusement, tous les députés réformistes ne pensent pas de cette façon.
Nous avons également entendu M. Herb Grubel, un ancien député, tenir un discours contraire. Il a comparé les Indiens qui vivent dans les réserves autochtones à des habitants des mers du Sud qui seraient entretenus par de riches oncles. D'une part, un réformiste qualifie les autochtones de peuple vaincu vivant sur des terres désolées et sans valeur. À l'opposé, un autre soutient que les autochtones qui vivent dans des réserves sont entretenus aux frais du gouvernement, un peu comme des gens qui vivraient aux frais d'un oncle riche dans une île d'une mer du Sud.
Heureusement, un autre député qui a pris la parole plus récemment s'est efforcé de montrer un peu plus de sensibilité en parlant des difficultés qui frappent les réserves autochtones. J'aimerais parler de cet aspect. Le député a passé en revue certains des véritables problèmes sociaux auxquels des solutions doivent être apportées de toute urgence dans les communautés autochtones.
La situation dans les communautés autochtones est une conséquence prévisible du colonialisme. Les autochtones ont subi le même sort que d'autres peuples de l'histoire récente qui ont été chassés de leurs terres, ont été vaincus et se sont ensuite retrouvés aux prises avec des problèmes d'alcoolisme, de foyers brisés et autres difficultés de ce genre. L'exemple le plus récent est sans doute la situation qui s'est produite en Grande-Bretagne durant la révolution industrielle, où des gens ont été chassés de leurs terres et se sont retrouvés dans des ghettos. Que pense le député de l'analogie entre cette situation et sa propre histoire peut-être?
M. Derrek Konrad: Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention.
Il n'y a pas désaccord sur les faits. Je me suis rendu dans beaucoup de réserves comme arpenteur et comme député. Quand on est allé dans les réserves, il est impossible de contester les faits. Il y a là des choses terribles qui sautent aux yeux. La situation est terrible depuis de très longues années, et, si nous ne faisons rien, elle le restera encore longtemps.
L'une des choses qui se sont produites en Grande-Bretagne, c'est qu'on a modifié les politiques sociales pour permettre aux individus de prendre en main leur propre vie, tandis que l'État leur fournit les moyens de le faire. Ce n'est pas tant sur les faits qu'il y a divergence d'opinions que sur les moyens à prendre.
Il y a une autre situation qui a été réglée en Colombie-Britannique, celle de la bande de Sechelt. Personne ne soulève de question à ce sujet-là. C'est un type de revendication territoriale complètement différent. Le règlement n'a pas de conséquences au plan constitutionnel en ce qui concerne le gouvernement, mais il porte sur les terres mêmes.
En fin de compte, il est juste de dire qu'il n'y a au fond que deux conceptions de notre pays. Les libéraux, les conservateurs, les néo-démocrates et les bloquistes incarnent une façon de concevoir les affaires indiennes. Le Parti réformiste a proposé une conception radicalement différente. Elle permet à l'individualisme de faire une différence dans la vie des autochtones, qui pourraient posséder leurs propres terres.
En guise de conclusion, je signale au député que je compte des autochtones parmi les membres de ma famille. Ils se sont très bien débrouillés, mais ils n'habitent pas dans les réserves. Ils sont propriétaires fonciers, ils sont citoyens de la fédération canadienne, et ils réussissent fort bien.
L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique), Lib.): Monsieur le Président, je crois que le traité avec les Nisga'as représente la chose à faire de la part des Canadiens et du gouvernement canadien en reconnaissance des problèmes qui n'ont pas été réglés depuis l'établissement des premières colonies d'Européens au Canada. Je me permets de citer ce que disaient les chefs nisga'as qui se sont rendus à Victoria en 1887 et qui ont demandé à régler cette question:
Nous ne nous opposons pas à la venue des Blancs sur notre territoire pourvu que cela se fasse de façon juste et en conformité avec les principes britanniques énoncés dans la Proclamation royale. Par conséquent, si, comme nous le pensons, les droits autochtones que nous revendiquons étaient établis par la décision du Conseil privé de Sa Majesté, nous serions disposés à adopter une position modérée et raisonnable.
Ce qui s'est produit, c'est que les Nisga'as ont accepté les immigrants européens qui sont venus s'établir au Canada et en Colombie-Britannique. Les Nisga'as réclamaient un traité pour établir leurs droits et régler diverses questions, mais ils n'ont rien obtenu.
Il est juste que nous reconnaissions ce que la Constitution a prévu et ce que nous devons aux autochtones. Ce traité n'est pas fondé sur des considérations raciales mais sur des droits.
Nous entendons toujours les députés réformistes affirmer que le traité est fondé sur des considérations raciales. Il se trouve cependant que les droits que nous devons reconnaître sont ceux des autochtones, qui forment une race, et que les droits que nous leur restituons sont des droits ancestraux. Ces droits sont fondés sur le fait que les autochtones étaient les premiers occupants du territoire. Ils ont vécu sur ce territoire, et les Européens sont venus s'établir sur leur terres. Ils les ont acceptés, mais leurs droits initiaux n'ont pas été reconnus par le gouvernement de l'époque.
Je trouve que c'est la chose à faire. Nous ne sommes peut-être pas contents de ne pas avoir obtenu tout ce que nous voulions dans ce traité, mais c'est un traité négocié. C'est un traité équilibré. C'est l'avantage des négociations. Les autochtones, les Nisga'as aimeraient avoir beaucoup plus que ce qui est spécifié dans le traité et nous, qui représentons les Canadiens, aimerions avoir beaucoup plus et avoir cédé beaucoup moins. L'avantage des négociations, c'est qu'après tant d'années il faut trouver un compromis. Il faut parvenir à un équilibre.
J'appuie ce traité. Je pense qu'il est bon pour le pays et pour la Colombie-Britannique d'aller de l'avant afin de créer un climat de stabilité. Nous pourrons éliminer l'incertitude et les investissements reviendront en Colombie-Britannique. Les Nisga'as auront la confiance nécessaire pour progresser et s'intégrer dans la société canadienne.
La deuxième chose dont j'aimerais parler est la légalité de l'accord. Le Parti réformiste n'arrête pas de se plaindre et de contester la constitutionnalité de ce traité. Il a essayé de la contester. Il s'est allié au Parti libéral de Colombie-Britannique pour contester le traité.
Monsieur le Président, avant de poursuivre, j'aimerais vous informer que je vais partager mon temps avec le député de Pierrefonds—Dollard.
Le Part réformiste conteste la constitutionnalité du traité même s'il s'est déjà allié au Parti libéral de Colombie-Britannique pour le contester devant la cour de cette province. Le pouvoir judiciaire a déjà déclaré qu'il conviendrait mieux que les tribunaux examinent des questions liées à la constitutionnalité du traité, lorsqu'ils ont accès à tous les textes législatifs pour étudier ces questions. Il n'est donc pas logique que le Parti réformiste nous demande à ce stade-ci de renvoyer cette question à la Cour suprême.
Les réformistes ne cessent de parler de la primauté du droit. Ils croient dans la primauté du droit. Ils croient dans la Constitution. Ils croient dans l'ordre public et, pourtant, ils s'appuient sur la décision de la Cour suprême. Ils croient dans la primauté du droit et dans la Cour suprême. C'est pourquoi ils veulent que cette question soit renvoyée à la Cour suprême. Ils sont sélectifs quant aux décisions de la Cour suprême qu'ils invoquent. Ils sont sélectifs quant aux dispositions de la Constitution qu'ils invoquent.
Parlons des droits autochtones. Ils sont précisés dans la Constitution. Les réformistes disent que nous devrions traiter tout le monde de façon égale. Qu'en est-il de ces droits autochtones, qui sont différents? Ils disent qu'il faut traiter tout le monde de façon égale, que sur la question des Nisga'as, la solution est d'abroger la Loi sur les Indiens et de traiter tout le monde de façon égale, de traiter les Indiens comme des Canadiens, puis tout ira bien.
Avec cette position, les réformistes nient les droits autochtones des Nisga'as. Comment peuvent-ils affirmer deux choses en même temps? Tout d'abord, ils nient les droits des Nisga'as en voulant que tout le monde soit traité de façon égale. Tout le monde n'est pas pareil. Les autochtones ont des droits autochtones. Ils ont des droits qui sont différents des nôtres et qui sont garantis par la Constitution. S'ils ont des droits différents, ils ne peuvent donc pas être traités de la même façon. C'est ce que dit la Constitution. Si les réformistes appuient la décision de la Cour suprême, ils doivent convenir que nous devons conférer des droits différents au Nisga'a.
La Cour suprême a également dit qu'il ne fallait pas lui demander de statuer, car ce serait coûteux. Des procès de ce genre se sont révélés coûteux. La cour a dit que le gouvernement du Canada et les Canadiens devraient négocier avec les autochtones quant à la nature de ces droits autochtones.
Si les réformistes croient en la Cour suprême, s'ils veulent faire valoir la primauté du droit, alors, ils devraient appuyer cette entente. Il s'agit d'un traité négocié entre le gouvernement du Canada, le gouvernement de la Colombie-Britannique et les Nisga'as.
Un député réformiste a dit que le NPD ne représentait pas la population de la Colombie-Britannique, puisqu'il a glissé dans les sondages. C'est encore un gouvernement néo-démocrate qui est à la tête de la Colombie-Britannique. C'est faire preuve d'un mépris total envers la démocratie au Canada que de prétendre que le Canada ou la Colombie-Britannique devraient être gouvernés en fonction des résultats des sondages.
Si nous étions gouvernés en fonction des résultats des sondages, selon un récent sondage, le Parti réformiste ne recevrait l'appui que d'environ 30 p. 100 de la population de la Colombie-Britannique, tandis que le Parti libéral du Canada serait fort de l'appui d'environ 50 p. 100 des habitants de la province. Cela veut-il dire que les députés réformistes à la Chambre ne parlent plus au nom de la population de la Colombie-Britannique, mais que les sept députés libéraux de cette province représentent l'ensemble des habitants de la Colombie-Britannique? Cet argument fausse les données. Les quelque 30 députés réformistes représentent leur circonscription respective de la Colombie-Britannique et les sept députés libéraux représentent leur propre circonscription de la Colombie-Britannique.
Il est temps de ratifier ce traité. Il faut aller de l'avant. Après un siècle de négociations, après un siècle de querelles avec les Nisga'as, le temps est venu d'aller de l'avant.
Les réformistes font erreur lorsqu'ils prétendent que la charte ne s'appliquera pas. La charte des droits s'appliquera même lorsque le traité des Nisga'as sera en vigueur.
Les réformistes ont tort aussi de prétendre que le traité ne protège pas les femmes. La loi sur les relations familiales de la Colombie-Britannique s'appliquera. Les réformistes affirment aussi que les travailleurs ne pourront pas se syndiquer aux termes de ce traité et c'est faux. La législation du travail de la Colombie-Britannique et du Canada s'appliquera.
J'exhorte tous les députés à appuyer le traité des Nisga'as.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais relever un commentaire du député qui est tout à fait neuf. Nous avons entendu aujourd'hui une idée que nous n'avions pas entendue cent fois déjà; je parle de la différence entre traiter tous les gens également et traiter tous les gens exactement de la même façon. L'égalité ne signifie pas traiter tous les gens de la même façon car elle ne tient pas compte des déséquilibres historiques qui peuvent exister. Nous devrions viser l'égalité des chances ou l'accès à l'égalité des chances et pour cela il faudrait peut-être traiter différemment certaines personnes pour les amener au même niveau que tous les autres.
Le juge Murray Sinclair du Manitoba a expliqué la chose très efficacement et très succinctement dans le cadre de l'enquête sur la justice pour les autochtones au Manitoba. Il a affirmé:
Le fait d'appliquer des normes uniformes, des règles communes et un traitement égal à des gens qui ne sont pas égaux constitue en soi une forme de discrimination. Traiter également des gens qui sont inégaux peut entraîner des conséquences défavorables, des difficultés ou même des injustices.
Je tiens à remercier le député qui a soulevé ce point très important car il aide ainsi à réfuter certains arguments de désinformation que des députés ont formulés aujourd'hui.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le discours du député de Richmond au sujet des droits des autochtones.
Vu que les droits des autochtones et les droits établis en vertu de traités sont protégés par la Constitution, que se passe-t-il si on apporte une modification au traité? Faudra-t-il un processus plus rigoureux et plus long pour modifier le traité?
L'hon. Raymond Chan: Monsieur le Président, en réponse à la question du député, je précise que des avis juridiques absolument exhaustifs et complets du ministère de la Justice affirment que ce traité ne viole aucunement la Constitution et qu'il n'est pas nécessaire de modifier la Constitution pour adopter ce traité. Il n'y a pas lieu de remettre en question la constitutionnalité de ce traité.
Autant que je sache, ce traité est conforme à la Constitution et nous devrions pouvoir procéder sans la modifier.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, le député ne répond pas à la question. J'ai demandé si cet accord pouvait être modifié sans recourir à quelque formule d'amendement constitutionnel compliquée. Je voudrais savoir en outre s'il est vrai qu'il faut le consentement de toutes les parties pour modifier cet accord. N'est-il pas vrai que ce traité fera partie de la Constitution conformément à l'article 35 de celle-ci, qui le protégera, et qu'il ne pourra pas être modifié sans que l'on modifie la Constitution?
L'hon. Raymond Chan: Monsieur le Président, à ma connaissance, nos juristes ont dit qu'il était protégé par la Constitution. Ce traité définit les droits autochtones qui sont protégés par la Constitution, mais cela ne veut pas dire qu'il faudra modifier la Constitution pour s'y attaquer.
La Constitution précise notamment les droits de différents peuples. Il n'est pas nécessaire de la modifier. Les tribunaux définissent sans cesse la Constitution au meilleur de leur connaissance, mais nous n'avons jamais eu pour autant à modifier la Constitution.
Je crois que le traité est conforme à la Constitution et que nous ne devons pas à nous inquiéter de son incidence sur la Constitution.
M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): En ce qui concerne cet accord entre la nation Nisga'a, le gouvernement fédéral et le gouvernement de la Colombie-Britannique, le député peut-il nous dire pourquoi les Nisga'as ont pu se prononcer dans le cadre d'un référendum, mais pas les Canadiens de la Colombie-Britannique?
L'hon. Raymond Chan: Monsieur le Président, c'est ainsi que le traité a été négocié. Toutes les parties se sont entendues là-dessus. La population de la Colombie-Britannique, par l'intermédiaire de ses élus, y a consenti. Il n'est donc pas vrai de dire que les Britanno-Colombiens n'ont pas été représentés dans ces négociations. Les Britanno-Colombiens sont aussi représentés ici par des députés, qui parlent en leur nom. C'est ainsi que le Canada est gouverné et non par référendum.
[Français]
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir aujourd'hui d'intervenir sur la motion présentée par l'honorable député de Skeena concernant le traité des Nisga'as.
La conclusion de traités nous donne la chance de prendre un nouveau départ. Les traités signalent notre volonté, en tant que société, d'accepter la responsabilité des erreurs du passé et de les corriger.
De plus, les traités offrent une façon d'apporter des changements positifs et de favoriser l'harmonisation des différences historiques et culturelles afin que nous puissions tous progresser ensemble.
Rassembler nos forces: voilà ce à quoi le gouvernement s'est engagé dans «Rassembler nos forces», le plan d'action du Canada pour les questions autochtones. Nous avons élaboré un plan d'action à titre de première page d'un nouveau chapitre sur la relation entre le gouvernement du Canada et les autochtones. Ce chapitre sera marqué par la volonté de jeter le fondement d'un avenir plus prospère et plus que jamais axé sur la coopération.
Renforcer l'exercice des pouvoirs par les autochtones: La Commission royale estime que le droit d'exercer l'autonomie gouvernementale est un droit acquis pour les nations autochtones. Elle a aussi fait remarquer que l'exercice de compétences étendues par des collectivités locales ne mènerait pas nécessairement à des gouvernements efficaces ou viables à long terme. Le gouvernement fédéral appuie le concept d'autonomie gouvernementale exercé par des nations autochtones ou d'autres grands groupes d'autochtones.
Il reconnaît la nécessité de travailler en étroite collaboration avec les institutions et les organisations autochtones, ainsi qu'avec les autochtones eux-mêmes, dans les initiatives qui vont dans cette direction. Il reconnaît également la nécessité de tenir compte du point de vue des femmes autochtones dans le cadre de ces discussions.
Les autochtones reconnaissent la nécessité d'avoir des institutions et des gouvernements forts, responsables et durables. Il faut donc assurer que les gouvernements et les institutions autochtones ont les pouvoirs, les mécanismes d'obligation de rendre des comptes et la légitimité nécessaires pour garder la confiance et le soutien de leurs électeurs et des autres gouvernements et institutions, ainsi que pour gouverner efficacement.
Le gouvernement du Canada travaillera en étroite collaboration avec les autochtones, de même qu'avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, lorsque cela sera pertinent, afin de faire de cette idéal politique une réalité.
La reconnaissance du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale: Le gouvernement du Canada reconnaît que les autochtones de ce continent étaient dotés de gouvernements autosuffisants et d'économies viables, de langues distinctes, d'une spiritualité puissante et de cultures aussi riches que diverses, et ce, pendant des milliers d'années.
En accord avec les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones, le gouvernement fédéral a reconnu le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale pour les autochtones en tant que droit existant en vertu de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
À l'heure actuelle, il y a environ 80 tables de négociation d'ententes en matière d'autonomie gouvernementale qui regroupent des collectivités inuits et des premières nations avec les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.
Les ministères fédéraux poursuivent leur transfert des responsabilités et des ressources en matière de programmes aux organisations autochtones. La prestation de plus de 80 p. 100 des programmes financés par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien est maintenant assurée par des organisations ou des gouvernements des premières nations.
En avril 1996, l'administration et le financement des centres éducatifs culturels étaient confiés aux premières nations et l'administration du Programme des centres d'amitié autochtones a été transférée à l'Association nationale des centres d'amitié. Par l'entremise d'ententes bilatérales régionales, la responsabilité d'administrer les programmes de soutien à la formation a également été transférée.
Dans le Nord, les gouvernements fédéral et territoriaux ainsi que les organisations autochtones tiennent des discussions, dans le cadre de divers forums tenus à l'échelle de la partie ouest des Territoires du Nord-Ouest, sur les meilleures façons de répondre aux aspirations des autochtones en matière d'autonomie gouvernementale, sur les plans territorial, régional et local.
Les progrès dans l'établissement du Nunavut se poursuivent. Ce nouveau territoire permettra aux Inuits de combler leurs aspirations à un nouveau gouvernement territorial. Au Yukon, le gouvernement fédéral a signé six ententes d'autonomie gouvernementale avec des premières nations et négocie actuellement avec huit autres, pendant que se poursuivent les discussions avec le gouvernement territorial et les premières nations du Yukon au sujet du transfert des derniers pouvoirs de type provincial au territoire.
Il existe dans la plupart des provinces des processus d'autonomie gouvernementale pour les Métis et les autochtones vivant hors des réserves. Dans le cadre de ces processus, le gouvernement est disposé à examiner une variété d'approches à l'autonomie gouvernementale, notamment des institutions d'autonomie gouvernementale, le transfert des programmes et des services ou, encore, les gouvernements populaires.
Toutes ces initiatives fournissent aux autochtones des occasions d'apporter des recommandations quant à la conception et à la prestation des programmes et devraient mener ultimement au contrôle de ces programmes par les gouvernements et les institutions autochtones.
De nouvelles approches adoptées récemment se sont traduites par la conclusion d'accords sur les processus avec le Metis Settlements General Council de l'Alberta, relié aux terres, et avec le Conseil autochtone de Winnipeg, relié au milieu urbain.
Le renforcement de la capacité d'exercer les pouvoirs: Comme l'a souligné la Commission royale d'enquête, de nombreux groupes et nations autochtones ont besoin de soutien pour assumer l'ensemble des responsabilités découlant de l'exercice des pouvoirs, y compris les fonctions législatives, exécutives, judiciaires et administratives.
Le gouvernement fédéral reconnaît que la politique fédérale et le processus de négociation actuels, particulièrement au chapitre du renforcement des capacités, peuvent être améliorés. À cette fin, le gouvernement du Canada entend mettre l'accent sur le renforcement de la capacité à négocier et à mettre en oeuvre l'autonomie gouvernementale.
Le gouvernement est également disposé à étudier, avec les premières nations, la possibilité d'établir des centres de ressources pour l'exercice des pouvoirs. De tels centres aideraient les autochtones à élaborer des modèles d'exercice des pouvoirs, offriraient des conseils sur l'atteinte de consensus communautaires et sur des modalités de règlement des différends, et serviraient de centre de renseignements sur les meilleures pratiques.
Ces centres pourraient aider les autochtones à déterminer les compétences nécessaires. Ils pourraient également jouer un rôle dans le développement de la capacité à gouverner dans des domaines comme la gestion administrative et financière.
Les femmes autochtones et l'autonomie gouvernementale: Le renforcement des capacités signifie également qu'il faut s'assurer que les femmes autochtones participent activement aux consultations et aux prises de décisions touchant les initiatives d'autonomie gouvernementale.
Le gouvernement fédéral reconnaît que les femmes autochtones ont joué traditionnellement un rôle de première importance dans l'histoire des peuples autochtones et accroîtra la participation des femmes dans les processus d'autonomie gouvernementale, en particulier au niveau local. Dans l'esprit de la recommandation de la Commission royale, le gouvernement fédéral examinera la possibilité de fournir des fonds additionnels à cette fin.
La justice autochtone: Le gouvernement poursuivra ses discussions au sujet des orientations qui suivront les activités en matière de justice avec les autochtones. Nous travaillerons en partenariat avec les autochtones pour accroître leur capacité de concevoir, de mettre en oeuvre et de gérer des programmes communautaires d'administration de la justice qui respectent les normes de base dans ce domaine et qui sont pertinents sur le plan culturel.
De plus, nous définirons avec les autochtones des façons différentes de traiter avec le système de justice régulier et les principaux organismes de règlement des différends. Les programmes devront prévoir la participation des femmes à toutes les étapes.
Le perfectionnement professionnel en gestion de l'environnement, des terres et des ressources: Le gouvernement fédéral, en partenariat avec les premières nations, prévoit élaborer et mettre en oeuvre des stratégies de perfectionnement professionnel dans les domaines clés suivants:
La rédaction des lois: il s'agit d'un important élément du renforcement de la capacité législative et exécutive qui permettra aux premières nations de se doter de personnel compétent.
La gestion des terres et de l'environnement: on appuiera les initiatives qui visent à dispenser des programmes autorisés de perfectionnement professionnel.
L'administration des terres et des ressources: des initiatives appuieront le transfert accéléré de la gestion des terres, du registre des terres et des fonctions d'arpentage aux premières nations.
Le soutien communautaire: des initiatives précises de renforcement des capacités viseront à aider les électeurs dans les collectivités autochtones à prendre des décisions éclairées, afin de mieux harmoniser les progrès dans l'exercice des pouvoirs avec la façon dont les membres de la collectivité comprennent les changements qui surviennent.
Ces initiatives renforceront la capacité des premières nations dans les aspects importants de l'exercice des pouvoirs et du développement économique.
Depuis 1701, la Couronne britannique a conclu des traités solennels conçus pour assurer la coexistence pacifique des peuples autochtones et non autochtones. Pendant des siècles et dans diverses régions du pays, des traités ont été signés afin de répondre à des conditions et à des besoins variés.
Les traités entre les peuples autochtones et la Couronne ont constitué la pierre angulaire de leurs relations. L'importance de ces traités a été confirmée par la reconnaissance des droits issus des traités, tant historiques que modernes, et des titres ancestraux définis dans la Loi constitutionnelle de 1982.
Le traité des Nisga'as renferme tous les grands principes du plan d'action du gouvernement fédéral, et c'est pourquoi j'invite cette Chambre à voter contre la motion du député de Skeena.
[Traduction]
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je sais que les ministériels s'y sont intéressés activement et je profite de l'occasion pour demander des précisions concernant le traité avec les Nisga'as.
Est-il exact qu'en vertu du traité, les Nisga'as seront désormais assujettis à tous les impôts fédéraux et provinciaux? Est-il également exact qu'ils seront désormais responsables d'une proportion plus importante du coût des services publics en vue de mettre en place leurs propres sources de revenus?
Vont-ils vraiment recevoir moins d'argent des gouvernements fédéral et provincial pour les services publics? Autrement dit, est-ce que l'autonomie gouvernementale des Nisga'as va vraiment signifier une diminution des dépenses du gouvernement fédéral et une augmentation de ses sources de recettes provenant des impôts?
[Français]
M. Bernard Patry: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question.
Je veux dire simplement que ce traité est le premier traité moderne depuis la Convention de la Baie-James, au Québec, en 1975.
Je sais que dans le Memorandum of Understanding, le MOU, il y avait des modifications à l'effet que la première nation des Nisga'as devra payer des impôts provinciaux après 7 ans et des impôts fédéraux après 11 ans. Il y aura donc effectivement des recettes à ce niveau, ce qui est quand même très important. Cela mettra les premières nations au même niveau que les autres habitants de ce pays.
Quant aux recettes du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial, étant donné qu'il y aura énormément d'argent qui sera dépensé dans cette région, les recettes des deux gouvernements respectifs augmenteront. On considère qu'après une dizaine d'années, cela devrait se chiffrer à environ 25 p. 100 de ce que cela coûte au gouvernement fédéral pour la première nation des Nisga'as.
[Traduction]
M. Pat Martin: Monsieur le Président, de plus, est-il exact que le gouvernement Nisga'a ne pourra pas imposer les non-Nisga'as qui vivent sur des terres appartenant aux Nisga'as? D'après ce que nous avons entendu, c'est assurément une des craintes que répandent partout en Colombie-Britannique ceux qui tentent d'empêcher la mise en oeuvre de ce traité avec les Nisga'as.
Dans le même ordre d'idées, le député sait-il si, au niveau de l'impôt sur le revenu, le gouvernement Nisga'a et ses sociétés seront traités au même titre que n'importe quelle autre municipalité?
[Français]
M. Bernard Patry: Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour sa question.
Les gens qui vivent à l'intérieur des réserves des Nisga'as vont tous être traités de la même façon, que ce soit les autochtones ou les non autochtones. Les corporations appartenant à la réserve ou aux gens qui travaillent sur la réserve des Nisga'as comme telle vont être assujettis aux mêmes lois que les autres.
[Traduction]
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, le député de Winnipeg-Centre a demandé si les lois provinciales ou fédérales auraient préséance sur la législation des Nisga'as. Je veux simplement demander au député ce que l'on entend au paragraphe 32, lorsqu'on dit qu'en cas d'incompatibilité entre l'entente et les dispositions de toute loi adoptée par les Nisga'as, c'est l'entente qui l'emporte.
Le paragraphe 36 dit qu'en cas d'incompatibilité entre une loi adoptée par les Nisga'as en vertu du paragraphe 34 ou 35 et une loi fédérale ou provinciale, c'est la loi adoptée par les Nisga'as qui l'emporte. Le paragraphe 40 fait lui aussi allusion à une incompatibilité.
Je pourrais fournir d'autres exemples. Sauf erreur, il est mentionné 14 fois qu'en cas d'incompatibilité entre une loi adoptée par les Nisga'as en vertu d'un paragraphe donné et une loi fédérale ou provinciale, c'est la loi adoptée par les Nisga'as qui prévaut. Le député peut-il me dire ce que cela signifie?
[Français]
M. Bernard Patry: Monsieur le Président, ce que la députée réformiste oublie de dire, c'est qu'il y a des lois qui seront du ressort de la première nation des Nisga'as, et qu'il y aura aussi des lois provinciales et fédérales. Si la députée veut parler des lois sur l'environnement ou celles relatives au crime, à ce moment-ci, les lois de la première nation des Nisga'as doivent être égales, sinon supérieures aux lois provinciales et fédérales.
Il peut y avoir des modifications à certains égards. Toutefois, si la première nation des Nisga'as décide d'avoir des lois sur l'environnement qui sont supérieures à celles qui existent actuellement au niveau provincial et au fédéral, à ce moment-là il pourra y avoir des différences. Ce seront des différences qui seront à l'honneur de la première nation des Nisga'as.
[Traduction]
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, selon moi, l'interprétation faite de l'article auquel le député réformiste a fait allusion dans sa question est erronée.
Les lois adoptées par les Nisga'as en vertu de la section 1, article 13, auxquelles la députée a fait allusion, sont uniquement les lois qui tombent dans les trois catégories générales de l'entente, laquelle comporte 14 secteurs de compétence ayant trait aux questions de langue, de culture et d'administration des biens.
Compte tenu du fait que nous avons convenu que les lois fédérales et provinciales d'application générale et spéciale s'appliquent au traité conclu avec les Nisga'as, je voudrais savoir si le député croit qu'il y a conflit entre ces lois et le traité. Le député peut-il nous donner des exemples montrant comment ces 14 domaines régis par la loi des Nisga'as s'appliqueraient aux Nisga'as et nous dire quels avantages cela leur procurerait?
[Français]
M. Bernard Patry: Monsieur le Président, je remercie le secrétaire parlementaire de la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien pour sa question.
Effectivement, au niveau des lois qui peuvent être adoptées par la nation Nisga'a, il y en a qui peuvent être nettement supérieures aux lois provinciales ainsi qu'aux lois fédérales. Il peut y avoir des lois sur la conservation de la faune, la pêche ou les produits forestiers.
C'est un avantage et c'est un plus pour les Nisga'as. Ils veulent se prendre en main et c'est l'autonomie gouvernementale qu'on va leur donner. C'est très important. De ce côté-ci de la Chambre, nous leur faisons confiance.
[Traduction]
Le Président: Il est presque 14 heures, et j'estime que la période des questions est maintenant écoulée. Avec votre consentement, nous passerons donc aux déclarations de députés. Il pourrait y avoir quelques déclarations supplémentaires aujourd'hui.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LA KINGSTON COMMUNITY CREDIT UNION
M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui féliciter la Kingston Community Credit Union de ses 42 années d'action et de soutien communautaires.
Cette année, la Kingston Community Credit Union a reçu le prix de l'Ontario Credit Union Charitable Foundation pour ses réalisations exemplaires continues dans la promotion d'activités de bienfaisance visant à améliorer le bien-être social de la population. Par ses dons en argent et en temps, la coopérative de crédit contribue de façon marquée au travail d'organismes et d'établissements comme l'École des beaux-arts de Kingston, Literacy Kingston et la Société Alzheimer.
Je félicite d'une façon particulière le directeur général, G. Blake Halladay, qui a reçu le prix Gary Gilliam reconnaissant la responsabilité sociale pour avoir contribué à faire la promotion d'une coopérative de crédit en tant que solution de rechange d'investissement socialement responsable.
Les coopératives de crédit sont un exemple d'institutions financières qui ne craignent pas d'afficher leur engagement envers la collectivité et qui favorisent des relations mutuelles dans le domaine des investissements sociaux et financiers. Bravo à la Kingston Community Credit Union, une institution financière exemplaire.
* * *
LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, dans deux affaires en Nouvelle-Écosse, le ministre du Développement des ressources humaines enfreint la Loi sur le Régime de pensions du Canada en définissant unilatéralement le mot conjoint aux fins de la loi. Le ministre cite la décision rendue dans l'affaire M. c. H., comme si celle-ci l'autorisait à enfreindre unilatéralement toute loi où figure le mot conjoint.
La décision rendue dans l'affaire M. c. H. concerne le versement d'une pension alimentaire par un particulier dans le cas d'une rupture. Quant à la Loi sur le Régime de pensions du Canada, elle vise des prestations au conjoint qui sont tirées de fonds publics; il s'agit d'une situation tout à fait différente.
La Loi sur le Régime de pensions du Canada stipule que le versement de prestations aux conjoints est limité aux couples dont les conjoints sont de sexe opposé, et la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Egan reconnaît la validité de la loi au regard de la Constitution.
Le ministre fait fi des lois du Canada et des tribunaux pour encourager le versement de prestations d'un régime public à des conjoints qui vivent en dehors des liens du mariage, et cela, au détriment des contribuables. C'est parfaitement inacceptable.
* * *
[Français]
L'ENVIRONNEMENT
M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.): Monsieur le Président, en cette Semaine de l'environnement et à la suite d'une initiative lancée l'an dernier par la ministre de l'Environnement en vue de faire renouveler un engagement personnel des Canadiens et des Canadiennes pour la protection de leur environnement, plus de 43 Éco-collectivités du millénaire oeuvrent actuellement au Canada.
Les Éco-collectivités du millénaire, des groupes de citoyens travaillant au niveau local, nous démontrent que pour obtenir des résultats au niveau national, il faut que des initiatives soient prises à l'échelle locale. Rappelons-nous que la réussite internationale repose sur des engagements au niveau local et que la victoire à l'échelle planétaire ne peut se gagner sans la détermination de chacun et de chacune à la base.
* * *
[Traduction]
LA CROATIE
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, le week-end dernier, dans ma circonscription, j'ai eu le plaisir de participer à la fête annuelle de l'indépendance de la République de la Croatie. J'ai eu l'honneur d'y prendre part en compagnie de l'ambassadeur de la Croatie au Canada et d'un député du Parlement croate.
L'événement a été organisé par le Congrès croate du Canada et par son président, Ivan Curman. Ce groupe fait de l'excellent travail et propose des programmes éducatifs et culturels intéressants aux jeunes, aux adultes et aux aînés.
* * *
[Français]
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Monsieur le Président, la Société canadienne du cancer célèbre et appuie le plus important événement consacré aux survivants du cancer à l'échelle mondiale, soit la Fête de l'espoir, qui aura lieu le 6 juin 1999.
Cette fête bien particulière est un hymne à la vie pour tous ceux et celles qui vivent actuellement ou ont déjà vécu l'expérience du cancer.
C'est une occasion de choix pour souligner le rôle essentiel que jouent la famille et les amis, ainsi que les efforts des professionnels de la santé et des chercheurs en vue d'améliorer la qualité de vie des personnes touchées par le cancer.
Environ un Canadien sur trois aura le cancer au cours de sa vie. Cependant, au fur et à mesure que les traitements et les techniques de dépistage s'améliorent, plus de la moitié des personnes touchées par le cancer se rétablissent complètement et sont en mesure de mener des activités professionnelles, récréatives et familiales tout à fait normales.
À l'occasion de la Fête de l'espoir, soyez à l'écoute. La Société canadienne du cancer organisera une pléiade d'activités en l'honneur de toutes les personnes qui vivent avec le cancer.
* * *
[Traduction]
LE SOCCER
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, imaginez un événement non partisan auquel participent des représentants de tous les partis à la Chambre. Imaginez, monsieur le Président, un esprit de camaraderie, un travail d'équipe et de la bonne volonté que beaucoup croiraient impossible.
Nous avons assisté à un tel événement hier soir. Des députés de tous les partis se sont donnés corps et âme pour accomplir une tâche formidable et vaincre un formidable ennemi. Finalement, cet ennemi s'est avéré n'être pas si formidable que nous le pensions. Oui, une équipe composée de députés de tous les partis a relevé le défi que leur ont lancé les pages et les ont défaits par cinq à zéro dans une partie de soccer.
Le ministre des Affaires intergouvernementales nous a montré qu'il pouvait louvoyer ailleurs qu'à la période des questions en se faufilant entre les défenseurs de l'équipe des pages. Le député de Fraser Valley a fait honneur à son titre en montrant à l'offensive des pages qu'il était incontournable. Le député de Renfrew—Nipissing—Pembroke n'a fait qu'une bouchée de nos vis-à-vis, même si nous ne l'avons pas laissé utiliser son bâton de hockey.
Oui, les pages ont pu voir que le vieil adage qui dit que «le grand âge et la traîtrise viendront toujours à bout de la jeunesse et de l'habileté» avait du vrai.
Le Président: Dans ce cas, la prochaine fois je serai peut-être l'arbitre.
* * *
LE DROIT DE VOTE
M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui est jour d'élections provinciales en Ontario. Je voudrais en profiter pour émettre une réflexion sur la participation aux élections.
L'année de la confédération, seulement 11 p. 100 de la population canadienne était habilitée à voter. Ce n'est qu'en 1921 que le suffrage universel, qui permettait enfin aux femmes de voter, a été adopté. Aujourd'hui, nous pouvons être fiers du fait que 68 p. 100 des Canadiens peuvent voter. Ce pourcentage représente tous les Canadiens de 18 ans et plus.
Au moment où les Ontariens vont voter, je rappelle l'importance de l'exercice du droit de vote. Une élection est le seul moment de démocratie directe: les citoyens ordinaires choisissent ceux qui vont les gouverner.
J'exhorte tous les citoyens de l'Ontario à aller voter.
* * *
[Français]
LES INONDATIONS AU MANITOBA
Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, les agriculteurs et la population de Brandon—Souris au Manitoba subissent les ravages causés par des inondations sans précédent.
Durant le mois de mai, 200 mm de pluie sont tombés, comparativement à une normale de 55 mm, et cela, dans un un sol déjà gonflé de pluie. Pour les fermiers du sud-ouest manitobain, ce fléau s'ajoute aux difficultés vécues par les producteurs de grain qui attendent l'aide du programme ACRA pour continuer de produire.
Qu'on imagine la situation sur une ferme typique de cette région: on attend l'aide gouvernementale pour régler les dettes de l'an dernier pour l'achat de semences, d'engrais et d'intrants avant de semer ce printemps, et voilà que la pluie et les inondations leur tombent dessus. Si les semences ne sont pas faites d'ici le 15 juin, il sera trop tard pour cette année.
Les députés du Bloc québécois compatissent avec la population du sud-ouest manitobain. Après les inondations et le verglas, nous savons la force de l'entraide et de la solidarité, comme le Manitoba nous l'a déjà démontré.
* * *
[Traduction]
LE KOSOVO
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes heureux que le parlement yougoslave ait décidé d'accepter intégralement le plan de paix présenté par le président finlandais Ahtisaari et l'émissaire spécial russe Tchernomyrdine.
Le plan de paix repose sur les principes adoptés hier par le G-8 et concorde pleinement avec la Charte des Nations Unies. Nous saluons les progrès accomplis en vue d'une résolution pacifique du conflit en Yougoslavie.
* * *
LA JUSTICE
M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, au cours des deux dernières semaines, je me suis déplacé d'une province à l'autre et j'ai rencontré des autochtones de la base qui exigent tous une reddition de comptes.
Ils disent craindre les tribunaux, les gouvernements et les privilèges que ces derniers consentent aux chefs de bande. Ils craignent en particulier le traité conclu avec les Nisga'as. Ils pensent que le système judiciaire du Canada a reçu des directives lui enjoignant de condamner les criminels autochtones à des peines différentes de celles qui sont données aux non-autochtones. Compte tenu de la décision Delgamuukw qui crée de l'incertitude au sujet des droits d'utilisation des terres dans le cas des autochtones, ils seront devant les tribunaux pendant de nombreuses années à venir.
Toutes ces décisions nous font progresser vers la création d'un État dans l'État. On établit un ensemble de lois, de droits et de privilèges qui ne valent que pour les Indiens inscrits.
Le gouvernement a pour rôle de traiter également tous les Canadiens, et non d'accorder des droits spéciaux ou des exemptions à quelques privilégiés. Les autochtones de la base estiment que leur niveau de vie s'améliorera lorsqu'ils seront davantage intégrés dans la société canadienne, et non s'ils en sont exclus.
Une loi unique et un seul Canada. Telle devrait être notre devise.
* * *
[Français]
LE PARTI QUÉBÉCOIS
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, on apprenait, hier, que le comité de Bernard Landry tente de ressusciter les études sur la souveraineté du Québec, celles-là même que Lucien Bouchard avait repoussées du revers de la main, pendant la dernière campagne référendaire.
Décidément, Bernard Landry n'a rien appris du dernier référendum québécois. Encore des études qui sont financées à même les fonds publics.
Encore la même aventure qui nuit au Québec, en le plongeant dans un climat d'insécurité politique et économique, parce que de tels gestes envoient des messages confus à l'extérieur du Québec et du Canada.
Encore la même perte de temps et d'énergie dans une aventure dont nous connaissons l'issue.
Les Québécois ont, à deux reprises, réitéré leur volonté de faire partie du Canada. De combien d'études le Parti québécois a-t-il besoin pour comprendre cela?
* * *
[Traduction]
L'ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, la conférence sur le libre-échange qui s'est tenue le week-end dernier a été l'occasion de moult célébrations de la part de ceux qui vantaient ses mérites il y a dix ans.
L'ancien premier ministre Mulroney semble particulièrement heureux et il a effectivement toutes les raisons de se réjouir quand il voit comment ses anciens adversaires libéraux se sont ouvertement inspirés de ses politiques et se sont hâtés de les appliquer aveuglément.
Nous, les néo-démocrates, persistons à croire que l'Accord de libre-échange a été une mauvaise affaire pour le Canada. Un trop grand nombre de bons emplois ont fui vers le Sud. L'inégalité social s'est accrue. Nos programmes sociaux se sont détériorés. Le Canada est de moins en moins un pays souverain et nous sommes toujours soumis aux pressions et aux ordres des États-Unis tandis que notre économie est plus que jamais à la remorque de nos voisins du Sud. Le sort qui a été fait au projet de loi C-55 en est le dernier exemple en date.
L'Accord de libre-échange a peut-être permis à certains d'exporter davantage et de faire plus de profits, mais nous y avons tous perdu au change après avoir vendu notre âme, après avoir raté notre chance de garantir la justice, après avoir raté notre chance de faire les choses autrement dans la partie septentrionale de l'Amérique du Nord.
L'autre soir, M. Mulroney a dit souhaiter un gros Canada, non pas un petit Canada. M. Mulroney ne sait pas apprécier les proportions. Tout compte fait, nous ne serons pas mesurés à l'aune de nos exportations, de notre compétitivité ou de notre aptitude à singer les attitudes et les valeurs américaines. Nous serons jugés sur notre détermination à collaborer ensemble et à nous entraider.
* * *
[Français]
LA PLACE TIANANMEN
Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, il y a dix ans aujourd'hui, des milliers d'étudiants chinois descendaient dans la rue pour manifester leur désir de voir la démocratie s'installer en Chine.
Ils se rassemblèrent pacifiquement sur la place Tiananmen pour témoigner que la Chine n'échappait pas au désir universel de l'humanité: la liberté.
Cette manifestation fut très sévèrement réprimée, au prix de plusieurs vies et avec l'emprisonnement, dans des conditions très difficiles, de nombreux démocrates chinois.
Bien que cette répression ait retardé la démocratisation inéluctable de la Chine, cette manifestation a démontré la volonté irréductible de démocratiser la Chine.
Les étudiants de Tiananmen doivent savoir que leur geste n'a pas été vain, car ils ont été entendus et leur désir de liberté, tôt ou tard, sera réalisé. Grâce à leur courage et à leur détermination, le monde se souviendra toujours de Tiananmen comme le prélude à un temps nouveau, un temps de liberté et de justice.
* * *
LE BARREAU DU QUÉBEC
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, je désire souligner le 150e anniversaire du Barreau du Québec et le rôle majeur que les avocats et juristes ont joué au sein de nos institutions parlementaires québécoises.
Rappelons que cet organisme a pour mandat de veiller à la protection des intérêts du public et, en plus, de s'assurer à ce que la population puisse avoir accès à un système de justice crédible et efficace.
[Traduction]
Le Barreau compte actuellement quelque 18 000 avocats, dont 40 p. 100 sont des femmes. C'est à juste titre que nous accordons une très grande importance à notre système judiciaire, vu le rôle central qu'il joue dans notre démocratie florissante.
C'est avec grand plaisir que la ministre de la Justice et procureur général du Canada souhaite bonne chance au Barreau qui se réunit aujourd'hui à Québec.
[Français]
Le Québec compte parmi ses rangs des avocats prestigieux. Nous souhaitons bonne chance au Barreau, afin qu'il perpétue ce souci de recruter des membres de qualité dont bénéficient nos institutions judiciaires.
* * *
[Traduction]
LES ÉLECTIONS EN ONTARIO
M. Jim Jones (Markham, PC): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui le jour des élections en Ontario et les conservateurs ont tout lieu d'être fiers. Le premier ministre Mike Harris a mis fin à une décennie de mauvaise gestion libérale et néo-démocrate. Il a bâti une économie dont la croissance est le double de celle du reste du Canada.
Il a réduit les impôts. Il a consacré aux soins de santé plus de fonds que ne l'a fait aucun autre gouvernement dans l'histoire de l'Ontario. Il a fait dans le domaine de l'éducation des changements qui lui ont valu cette semaine l'approbation du chef libéral Dalton McGuinty. Bref, le premier ministre Harris a tenu les promesses qu'il avait faites en 1995, chose que ne font pas les libéraux en Ontario, que ce soit au niveau fédéral ou provincial.
C'est avec fierté que j'ai fait campagne dans ma circonscription, Markham, pour le ministre du cabinet, député provincial et ancien conseiller municipal, Dave Tsubouchi. Ces derniers mois, le très honorable Joe Clark a recueilli des fonds pour le Parti conservateur de l'Ontario et a ait campagne pour Annamarie Castrilli, Judy Burns et le ministre des Transports, Tony Clement.
Au nom du Parti conservateur du Canada, j'adresse à Mike Harris et aux candidats de son parti tout mes voeux alors qu'ils attendent de connaître le jugement des électeurs de l'Ontario.
* * *
LES FRAIS DE SCOLARITÉ
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis très inquiet de l'augmentation des frais de scolarité dans les collèges et les universités au Canada.
Les frais de scolarité sont pour les étudiants à faible revenu l'un des principaux obstacles aux études supérieures. Même si d'autres frais sont importants, les étudiants et leurs familles sont particulièrement sensibles à l'augmentation des frais de scolarité.
Je félicite le gouvernement fédéral pour les mesures qu'il a prises en vue de s'attaquer à ce problème, y compris la création du Fonds du millénaire, l'octroi de subventions au titre du REEE et les mesures spéciales à l'intention des étudiants à faible revenu. Toutefois, je lui demande instamment de travailler avec les provinces à la réduction systématique des frais de scolarité.
Il s'agit d'un problème national. Nous ne pouvons pas nous permettre de gaspiller le talent et l'énergie de jeunes Canadiens brillants tout simplement parce que leurs familles n'ont pas financièrement les moyens de les aider à poursuivre leurs études.
* * *
LE TRAITÉ DES NISGA'AS
M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, le traité des Nisga'as est un règlement de revendications territoriales d'une valeur de 490 millions de dollars, qui confère des pouvoirs importants en matière d'autonomie gouvernementale et qui donne 2 000 kilomètres carrés de terres à 5 500 membres de la bande nisga'a.
Ce traité comporte quelques aspects inquiétants et douteux sur le plan constitutionnel. Jusqu'à maintenant, le pouvoir gouvernemental du Canada était réparti entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Le traité crée un nouveau niveau de gouvernement, le gouvernement national nisga'a.
Le nouveau gouvernement aura le pouvoir de percevoir des impôts sans être représentatif, en vertu de son existence basée sur la race, et de reconnaître légalement des iniquités à l'endroit des femmes autochtones. Le traité permettra aux Nisga'as d'adopter des lois sur le bois d'oeuvre, l'eau, les pêches et les espèces sauvages.
Le gouvernement néo-démocrate de Colombie-Britannique a précipité l'adoption de ce traité en imposant la clôture à l'Assemblée législative. Voilà maintenant que le gouvernement fédéral voudrait qu'on l'approuve les yeux fermés.
Aujourd'hui, le Parti réformiste exhorte le gouvernement à renvoyer ce traité à la Cour suprême pour qu'elle détermine, avant que nous n'allions plus loin dans l'entreprise de créer des mini-États en Colombie-Britannique, si le traité constitue un amendement à notre Constitution et si les droits individuels sont usurpés par ce gouvernement national.
Si le traité est fondé sur des bases solides, le gouvernement fédéral ne devrait pas craindre la décision de la cour.
* * *
[Français]
LE PARTI LIBÉRAL DU CANADA
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, en accusant les leaders de la région de Québec d'indifférence pour ne pas avoir répondu à l'invitation partisane et improvisée des libéraux, la semaine dernière, le secrétaire d'État à l'Agriculture met au grand jour son manque de leadership.
Par ses déclarations, le ministre se préoccupe davantage de la visibilité de son parti que du développement socioéconomique de la grande région de Québec. Le Bloc québécois travaille plutôt à établir le maintien d'un contact constant avec les acteurs socioéconomiques et communautaires de la grande région. La liberté de participation a bien meilleur goût.
Au lieu de s'attaquer à la présence bloquiste à Ottawa pour expliquer la fragilité des communications, le ministre devrait faire son mea culpa et reconnaître que ce sont les grandes batailles bloquistes qui ont fini par avoir raison de l'ineptie du gouvernement libéral.
Pourtant, ces dossiers sont connus de son gouvernement, tels que la réfection du pont de Québec, le fromage au lait cru, les casinos-croisières, les frais de déglaçage, pour ne nommer que ceux-là.
Où était le député libéral de Bellechasse—Etchemins—Montmagny—L'Islet pour défendre des dossiers...
Le Président: L'honorable député de Rivière Churchill a la parole.
* * *
[Traduction]
LE NOUVEAU MILLÉNAIRE
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Monsieur le Président...
[Note de la rédaction: Le député s'exprime en cri.]
[Traduction]
Je prends aujourd'hui la parole pour rendre hommage à tous les diplômés de l'école secondaire qui célèbrent leur réussite en tant que derniers finissants du millénaire.
Nous désirons encourager tous les jeunes Canadiens à aspirer à une vie bien remplie et pleine de défis, une vie à l'image de l'histoire de notre beau pays.
Le tournant du millénaire marque une étape pour nous tous dans notre vie, et c'est une bonne occasion de réfléchir à la contribution que nous pouvons apporter pour faire de nos collectivités et de nos foyers un meilleur endroit où vivre.
Prions pour que notre mère la Terre puisse nourrir tous nos enfants et ceux qui viendront après eux, et tous nos parents et amis.
[Note de la rédaction: Le député s'exprime en cri.]
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LE KOSOVO
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le Parlement serbe a voté aujourd'hui en faveur de la proposition de paix du G-8 pour le Kosovo. Ce sont certes là des nouvelles encourageantes pour tous les députés, mais il reste un certain nombre de conditions à respecter avant que cette proposition ne puisse être mise en oeuvre.
Le premier ministre dira-t-il à la Chambre si cela constitue vraiment une percée et quelle sera la prochaine étape en vue de la mise en oeuvre de la proposition du G-8?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le chef de l'opposition pour sa question très pertinente.
Oui, c'est une percée, et je suis très heureux d'annoncer que, il y a une minute, le président de la Finlande a fait une déclaration disant que le président Milosevic a accepté la proposition reçue hier. Cela est sujet à vérification. Les autorités militaires de l'OTAN et celles de la Yougoslavie se rencontreront maintenant pour planifier la mise en oeuvre de l'accord ainsi que la cessation des bombardements et le retrait des troupes du Kosovo.
Nous devons faire approuver une résolution aux Nations Unies parce que les troupes qui seront déployées là-bas relèveront des Nations Unies. C'est beaucoup mieux que ce que nous étions obligés de faire auparavant avec l'OTAN.
Rien n'est certain encore parce qu'il arrive parfois des choses qui peuvent arrêter ce genre de processus. Je tiens à remercier le chef de l'opposition et les chefs des autres partis à la Chambre des communes qui ont appuyé l'OTAN dans cette initiative.
Il semblerait que la campagne d'épuration ethnique contre laquelle nous avons lutté prendra fin d'ici quelques heures. Les Kosovars pourront bientôt, je l'espère, rentrer chez eux en toute sécurité et jouir de la liberté et de la prospérité qui suivront cette période difficile qu'ils viennent de traverser.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Défense a montré cette semaine que son niveau d'accès auprès de ceux qui détiennent le pouvoir au sein de l'OTAN était si bas que c'en est gênant, et ce, en dépit du fait que le Canada est un des rares pays qui participent activement à la campagne aérienne de l'OTAN.
Le Canada ne peut évidemment pas se permettre d'être laissé à l'écart, comme le ministre de la Défense l'a été la semaine dernière, de négociations clés avec nos partenaires de l'OTAN ou encore avec les Serbes.
Quelles mesures actives le Canada prend-il pour voir à ce que la proposition du G-8 soit mise en oeuvre le plus rapidement possible?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai expliqué hier que le fait que le secrétaire de la Défense des États-Unis se trouvait en Europe était une simple coïncidence. Il a rencontré certains ministres de la Défense de l'Union européenne, qui étaient en réunion à ce moment-là.
Je tiens à signaler que nous participons aux discussions depuis que notre ministre des Affaires étrangères s'est rendu en Russie et qu'on a commencé à parler de trouver une façon de rétablir la paix dans cette région par l'entremise des Nations Unies. Nous avons participé à l'organisation de la réunion des ministre des Affaires étrangères des pays du G-8 où l'on s'est entendu sur les huit conditions.
Je pense que le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Défense nationale ont tous deux très bien agi dans ce dossier au nom de tous les députés. La solidarité dont nous avons fait preuve ici a contribué à renforcer la solidarité au sein de l'OTAN. Il semblerait que la proposition ait été acceptée par M. Milosevic et approuvée par un vote au Parlement à Belgrade. Nous espérons maintenant que tout se fera rapidement.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, l'acceptation de la proposition du G-8 signifiera vraisemblablement que des soldats canadiens seront déployés sur le terrain au Kosovo au cours des prochaines semaines.
Nous connaissons l'équipement dont nos troupes disposent, mais nous n'avons pas de renseignements précis quant à l'ampleur et à la durée de leur participation à cette mission. Le premier ministre peut-il dire exactement à la Chambre quel sera l'engagement militaire du Canada pour appuyer la mise en oeuvre de la proposition du G-8? Cherchera-t-il à obtenir un mandat de la Chambre à l'appui de cet engagement?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le conseil de l'OTAN se réunit ce soir pour discuter de la mise en oeuvre de l'accord.
Nous nous sommes déjà engagés à envoyer 800 soldats. Certains sont déjà là-bas, et les autres arriveront plus tard. On nous a demandé d'envoyer plus de soldats, mais nous devons d'abord examiner le but de cette demande et quel genre de forces et d'équipement sont nécessaires. Il faudra attendre encore quelques jours avant que nous soyons fixés à cet égard.
Nous voulons apporter la même contribution proportionnelle que dans le passé. Comme il s'agira d'une mission de maintien de la paix, nous informerons la Chambre, et il y aura une séance d'information à ce sujet, comme d'habitude. Heureusement, nos soldats ne s'en vont pas là-bas pour se battre. Je suis très heureux de voir que, encore une fois, les Canadiens participeront à une mission de maintien de la paix.
* * *
LES MARCHÉS DE L'ÉTAT
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, voici pourquoi le premier ministre se trouve entraîné dans une controverse. Un collecteur de fonds du Québec est trouvé coupable de trafic d'influence pour s'être servi de subventions dans le but de faire verser des contributions au Parti libéral. Des criminels condamnés et des escrocs de leur propre aveu obtiennent des millions en subventions, et le propre représentant du premier ministre fait l'objet d'une enquête de la GRC. Nous constatons maintenant que le premier ministre lui-même a des liens étroits avec des amis qui ont obtenu de gros marchés de l'État, qui ont fait d'importantes transactions foncières et qui ont versé de grosses contributions au Parti libéral.
Pourquoi le premier ministre ne peut-il pas voir qu'il y a quelque chose de pourri à Shawinigan?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je dois apprendre au député les nouvelles de Shawinigan. Il y avait une émission hier où les participants se sont dits très heureux que les gens aient compris que le député de Saint-Maurice travaillait pour sa circonscription. Voilà un aspect très intéressant. Je n'ai jamais eu de meilleurs militants pour mon élection que le Parti réformiste.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, le député de Saint-Maurice dit qu'il fait tout simplement son travail de député. Or, il n'entre pas dans les obligations d'un député de faire obtenir des subventions à des gens qui peuvent ajouter aux intérêts personnels du député et contribuer à ses campagnes politiques...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: Veuillez poser directement votre question.
M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, comment diable le premier ministre, qui avait promis de porter l'éthique politique à de nouveaux sommets, s'est-il laissé compromettre d'une façon aussi évidente?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une liste de 25 députés du Parti réformiste qui ont bénéficié du même programme. Selon un vieux dicton, quand on lance de la boue, on perd du terrain; c'est exactement ce qui arrive actuellement au Parti réformiste.
* * *
[Français]
LE KOSOVO
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, nous savons maintenant que le plan de paix du G-8 a été accepté et que la Yougoslavie se rend aux cinq conditions de l'OTAN.
Est-ce que le premier ministre ne croit pas qu'il serait temps que l'OTAN décide d'arrêter immédiatement les bombardements, afin d'éviter de faire de nouvelles victimes civiles en Yougoslavie et faire en sorte de donner l'exemple à la communauté internationale de mettre la diplomatie au premier plan, comme c'est le cas actuellement?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit plus tôt, nous souhaitons que les bombardements cessent dans les plus brefs délais.
Il y aura une réunion des militaires de l'OTAN et des militaires yougoslaves pour s'assurer que l'arrêt des bombardements et le retrait des troupes se fassent. C'est pourquoi il ne faut pas aller plus vite que nécessaire. Il faut s'assurer que tout se fasse dans l'ordre, afin que les Kosovars puissent retourner chez eux très rapidement et de façon sécuritaire.
Je suis très content des développements, et encore une fois, je remercie le chef du Bloc québécois qui a appuyé la position de l'OTAN durant toute cette période, malheureusement pénible mais nécessaire.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, afin de jouer un rôle particulièrement actif sur cette question, le Canada ne devrait-il pas se faire l'initiateur d'une proposition au Conseil de sécurité de l'ONU, afin que l'Organisation des Nations Unies et son Conseil de sécurité acceptent dès maintenant le plan du G-8? Cela ferait en sorte que les troupes qui assureront la paix au Kosovo soient des troupes sous l'égide des Nations Unies.
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères et notre représentant aux Nations Unies travaillent depuis plusieurs semaines pour essayer de trouver une solution.
Comme je le disais plus tôt, il est préférable que nous soyons là-bas sous l'égide des Nations Unies que sous celle de l'OTAN. Mais à cause des veto qui existaient de la part des Russes et des Chinois, il n'était pas possible d'avoir une résolution.
Le travail se poursuit actuellement, le Canada y participe, et nous sommes confiants qu'aucun des pays qui a un droit de veto ne l'utilisera. Heureusement, nous serons en Yougoslavie pour protéger les Kosovars sous l'égide des Nations Unies, ce qui est...
Le Président: Je m'excuse d'interrompre le très honorable premier ministre. L'honorable député de Beauharnois—Salaberry a la parole.
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, non seulement l'accord de paix constitue une véritable lueur d'espoir, mais le Parlement yougoslave, devant sa population, a accepté, par un vote, toutes les conditions fixées par le G-8. C'est un geste extrêmement significatif.
Mais celui qui a signé l'accord de paix demeure une personne accusée devant le Tribunal pénal international.
Ma question s'adresse au premier ministre. Quelle attitude le gouvernement du Canada aura-t-il à l'égard de celui qui est accusé devant le Tribunal pénal international?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'honorable député a employé le mot «accusé». Alors, c'est un accusé. Dans notre système, un accusé n'est pas coupable tant qu'il n'a pas été trouvé coupable.
Il est le président de ce pays, et c'est avec lui que le président de la Finlande et M. Tchernomyrdine, le représentant russe, ont fait affaire.
Ce que nous voulons, c'est nous assurer qu'il respectera cet engagement. L'expérience que nous avons eue avec le président Milosevic, c'est que très souvent, il ne respecte pas la parole donnée.
C'est pourquoi nous démontrons encore de la prudence. Tant que le texte n'aura pas été clairement approuvé et que le processus d'arrêt des bombardements et du retrait des militaires n'aura pas été engagé d'une façon définitive, nous ne prendrons rien pour acquis.
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, l'accord de paix qui vient tout juste d'être approuvé prévoit, dans son article 9, qu'il privilégie:
un pacte de stabilité pour l'Europe du Sud-Est et une large participation internationale afin de faire progresser la démocratie, la prospérité économique ainsi que la stabilité et la coopération internationale.
Est-ce que le Canada entend prendre des mesures précises pour participer à la reconstruction de la région et des Balkans?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères m'informe à ce moment-ci qu'il y aura une réunion des ministres des Affaires étrangères probablement sur ce sujet dès la semaine prochaine, et le Canada y participera.
[Traduction]
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, après cette question, je voudrais poser une question au ministre des Finances.
Les Canadiens sont très réconfortés par les progrès importants des efforts de paix au Kosovo, qui visent notamment à permettre aux Kosovars de réintégrer leurs foyers en sécurité.
Dans les faits cependant, de nombreux foyers ont été détruits, de nombreux villages brûlés et il n'y a pas de récoltes dans les champs.
Le ministre des Finances peut-il nous dire quelles dispositions il a prises pour aider les Kosovars à refaire leur vie et à reconstruire leurs collectivités?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, ma collègue peut certainement répondre à cette question.
Au cours des plus récentes rencontres du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale auxquelles ont participé tous les ministres des Finances, la question de la reconstruction a été examinée. À l'heure actuelle, ces organisations ne sont évidemment pas en mesure d'évaluer la totalité des coûts et des souffrances humaines, mais je puis dire à la députée que la communauté internationale examine cette question de près.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, nous reconnaissons certainement tous qu'il est absolument crucial de ne pas perdre de vue l'objectif initial de notre intervention dans les Balkans, qui était de permettre aux Kosovars de retourner vivre dans leurs foyers en paix et en sécurité et d'y retrouver un certain confort.
Nous ne pouvons laisser ces gens sans nourriture ni abri. Nous ne pouvons pas les abandonner et les laisser assumer seuls l'effort massif de reconstruction qui sera nécessaire.
Une fois encore, le ministre des Finances peut-il nous dire quelles mesures le Canada a prises pour remplir sa part de cette obligation internationale?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit plus tôt, le Canada participera au programme de reconstruction qui suivra notre intervention dans les Balkans. Les ministres des Affaires étrangères tiendront une rencontre pour en discuter. Comme les députés le savent, le ministre de la Coopération internationale s'est rendu en Macédoine au nom du gouvernement canadien. Nous avons accepté d'accueillir des réfugiés. Nous avons tenu nos responsabilités de façon très honorable et tous les Canadiens peuvent en être heureux.
Le Canada entend faire sa part, compte tenu de ses moyens, afin de permettre aux Kosovars de réintégrer leurs foyers dans la paix et la sécurité. Les Canadiens sont prêts à aider, comme ils l'ont toujours fait en pareilles circonstances.
* * *
LE COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE
M. Jim Jones (Markham, PC): Monsieur le Président, aujourd'hui, le premier ministre a rejeté la responsabilité sur sa fiduciaire Debbie Weinstein. Cependant, bien que Debbie Weinstein soit autorisée à s'adresser aux journalistes, la présidente libérale du Comité de l'industrie n'autorise pas ma motion qui vise à faire venir Mme Weinstein pour répondre à nos questions. Le premier ministre prétend qu'il est favorable à un débat ouvert, mais ses pions libéraux nous indiquent l'inverse.
Demandera-t-il donc à sa fiduciaire de se présenter devant le Comité de l'industrie ou laissera-t-il la présidente agir à sa guise?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ne comprends pas pourquoi nos vis-à-vis posent cette question. J'ai fait ce que doit faire tout député qui devient ministre. Il doit placer ses biens entre les mains d'un fiduciaire. Il revient à ce fiduciaire de prendre toutes les décisions et il revient au conseiller en éthique de faire une appréciation. Il a été informé de toutes les opérations. Je ne comprends pas pourquoi ils insistent. Je me suis conformé à toutes les exigences qui touchent les personnes qui tiennent la fonction de ministre.
M. Jim Jones (Markham, PC): Monsieur le Président, le conseiller en éthique, M. Howard Wilson, s'est présenté le mois dernier devant ce comité et il a établi que le Code régissant les conflits d'intérêts relève du Comité de l'industrie. Debbie Weinstein est assujettie à ce code. Monsieur Wilson a également déclaré qu'il revenait à Mme Weinstein de décider si elle souhaitait ou non comparaître devant le comité de l'industrie.
Le premier ministre donnera-t-il des instructions à sa fiduciaire afin qu'elle réponde aux questions d'un organe législatif, basées sur les commentaires qu'elle a faits aux médias?
Le Président: Il ne dépend pas du premier ministre ou de quelque ministre que ce soit de décider qui témoignera à ces comités. La question est irrecevable.
* * *
LES SUBVENTIONS GOUVERNEMENTALES
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, mardi, le premier ministre s'en est pris aux députés de l'opposition qui avaient soulevé la possibilité d'un conflit d'intérêts, mais il semble que ce n'était là que de l'épate. Aujourd'hui, il accuse les députés de l'opposition d'avoir tiré profit de subventions accordées par le ministère du Développement des ressources humaines dans leurs circonscriptions alors que rien ne prouve qu'il y ait eu quelque profit personnel que ce soit de la part d'un député de l'opposition relativement à une subvention.
Le premier ministre nie avoir été propriétaire des actions de la société à numéro en question qui a fait affaire avec MM. Gauthier et Duhaime. Or, le conseiller en éthique a souligné que le code exige qu'il déclare que sa compagnie est actionnaire pour 25 p. 100 dans le club de golf. S'il a un intérêt quelconque, comment pourrait-il ne pas y avoir de conflit d'intérêts?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, au contraire, je crois que lorsqu'un député réformiste obtient une subvention ou qu'il aide ses électeurs à obtenir une subvention, il ne fait que son travail. Il s'assure que ses électeurs tirent profit des programmes que le gouvernement met à leur disposition. Certaines personnes ont dit à juste titre qu'ils n'étaient pas d'accord avec ce système de subventions, mais nous ne devons pas pour autant priver nos électeurs de l'argent qui est mis à leur disposition. À mon avis, c'est exactement ce que j'ai fait à titre de député de Saint-Maurice. Je ne cesse de le répéter. Je respecte les règles depuis 36 ans.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, il est vrai que le premier ministre répète toujours la même chose et qu'il ne répond jamais aux questions. Il ne s'agit pas ici de savoir s'il existe ou non un programme qui offre des subventions qui permettent à certains de se graisser la patte. Il s'agit plutôt de déterminer si le premier ministre a tiré un quelconque bénéfice financier personnel de la transaction relative au terrain de golf de Shawinigan. Il nie être en possession de ces actions, mais rien ne prouve qu'elles aient été vendues. Le certificat de propriété n'a jamais été transféré. Le premier ministre est toujours propriétaire de ces actions et il a donc tiré profit des transactions effectuées.
Comment le premier ministre peut-il continuer de nier qu'il avait un intérêt financier personnel direct ...
Le Président: Le très honorable premier ministre a la parole.
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai vendu mes actions avant de devenir premier ministre. Voilà. Ce jour-là, j'ai remis mes possessions, comme tous les ministres doivent le faire, à un fiduciaire chargé de les administrer. C'est ce que j'ai fait dans ce cas-ci, comme je l'ai toujours fait d'ailleurs.
Je suis toujours étonné de constater que pendant que nous travaillons à résoudre toutes sortes de problèmes importants, ils s'affairent à détruire la réputation de quelqu'un. Je sais que les Canadiens ne sont pas d'accord avec cela.
* * *
[Français]
LE PROJET DE LOI C-54
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre de l'Industrie a défendu le projet de loi C-54 en citant le professeur Jacques Frémont.
Nous avons fait parvenir les réponses du ministre à M. Frémont et voici ce qu'il a répondu: «La distorsion de mes propos est vraiment inacceptable. Incroyable.»
Comment le ministre de l'Industrie peut-il expliquer qu'il en soit rendu à dénaturer les propos d'un éminent professeur pour justifier le coup de force constitutionnel que représente le projet de loi C-54?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il ne veut pas protéger la vie privée des Québécois et des Canadiens.
Des voix: Oh, oh!
L'hon. John Manley: Regardons ce qu'ont dit les groupes Action réseau consommateurs et Option consommateurs du Québec, et je cite: «Nous soutenons sans aucune réserve les principes qui servent d'assises à ce projet. Nous voulons aussi souligner l'importance et la pertinence de l'intervention du gouvernement fédéral au plan canadien et au plan international pour assurer la protection des renseignements personnels concernant les Canadiens.»
Nous allons respecter la loi du Québec. Il y a une responsabilité des deux paliers de gouvernement en ce qui concerne la protection...
Le Président: L'honorable députée de Mercier a la parole.
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, leur option préférée, c'était le retrait.
Le ministre des Affaires intergouvernementales a répondu à son homologue québécois pour lui dire que le projet de loi C-54 ne remet pas en cause «les principes du droit civil du Québec». Hier, le ministre n'a pas osé se lever à la Chambre pour défendre sa position.
Aujourd'hui, est-ce qu'il va nous dire s'il se rend compte que sa position le place en parfaite contradiction avec le Barreau du Québec, la Chambre des notaires du Québec et le Conseil interprofessionnel du Québec?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, dans la lettre que le ministre de l'Industrie a fait parvenir au gouvernement du Québec, il est clairement expliqué en quoi son projet de loi respecte la Constitution canadienne.
D'ailleurs, je défie le Bloc...
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Stéphane Dion: ...de me trouver une fédération qui s'est donnée une bonne loi de protection des renseignements personnels sans que le gouvernement fédéral ne joue un rôle là-dedans.
* * *
[Traduction]
LES SUBVENTIONS GOUVERNEMENTALES
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre n'a jamais vendu le terrain de golf de Grand-Mère, et il le sait depuis 1996.
N'arrive-t-il pas à comprendre que toute transaction qui présente des avantages pour sa propriété, suppose une dépense de fonds publics et fait intervenir son cabinet constitue un conflit d'intérêts flagrant? Est-ce qu'il ne le voit pas?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, hier, le vice-premier ministre a parlé d'un contrat accordé à un soumissionnaire qui offrait d'accomplir des travaux selon les règles convenues entre le gouvernement du Canada et un gouvernement étranger, qui a été choisi par eux et qui proposait un prix inférieur de 2,5 millions de dollars à celui des autres soumissionnaires. Le prix proposé était de 6,5 millions de dollars, alors que le deuxième soumissionnaire proposait 9 millions de dollars.
Le Parti réformiste est d'avis que nous aurions dû accorder le contrat à l'autre soumissionnaire parce que le propriétaire de la société retenue, qui fait du travail pour le gouvernement depuis longtemps...
Le Président: La députée de Calgary—Nose Hill a la parole.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, je me demande pourquoi la réponse n'a absolument rien à voir avec ma question.
La réalité, c'est que le premier ministre a des intérêts financiers dans une propriété, et que des subventions, des prêts et des transactions auxquels lui et son cabinet ont été mêlés de près en ont fait augmenter la valeur.
Je répète donc ma question. Pourquoi le premier ministre n'arrive-t-il pas à voir qu'il y a clairement conflit d'intérêts?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): J'ai vendu mes actions en novembre 1993. Un point, c'est tout.
* * *
[Français]
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, le Bloc québécois a obtenu copie de l'entente signée par les négociateurs du gouvernement fédéral et de la Colombie-Britannique relativement à l'utilisation par le gouvernement américain de la base de Nanoose Bay. Cette entente respectait les préoccupations de la Colombie-Britannique.
Ma question s'adresse au ministre des Affaires intergouvernementales. Comment le ministre peut-il expliquer que cette entente, signée par son gouvernement, ait pu être rejetée du revers de la main par le Cabinet pour céder aux pressions des Américains?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le Bloc se réveille un peu tard.
Le débat a été fait et il a été démontré très clairement qu'il était de la responsabilité du gouvernement du Canada de protéger les intérêts de tous les Canadiens vis-à-vis de la défense canadienne, et que le premier ministre de la province de la Colombie-Britannique n'avait pas raison de vouloir fermer la base de Nanoose Bay. Il fallait exproprier.
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, c'est étrange qu'il ait signé une entente quelques jours avant qui faisait le contraire de ce qu'il vient de dire.
Comment le ministre peut-il expliquer que son gouvernement a choisi de plier devant le gouvernement américain et que, pour lui faire plaisir, il a tout d'abord renié sa signature dans ce document et, deuxièmement, il a poussé son arrogance en allant jusqu'à exproprier la Colombie-Britannique de son propre territoire? Qui le ministre défend-il, les provinces ou le gouvernement américain?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, d'abord, le Bloc est en retard. Tous ces débats ont été faits et ont été discutés. Je ne sais pas où il était quand on a fait cela.
L'entente qu'il croit avoir découverte a été signée par des fonctionnaires. Ce n'est pas une entente entre gouvernements.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le député de Skeena a la parole.
* * *
[Traduction]
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, la plus vieille et la plus respectée des entreprises de construction du Manitoba est à court de 2 millions de dollars. Elle est sur le point de déclarer faillite, à cause de démarches frauduleuses effectuées par le chef Jerry Fontaine de la première nation de Sagkeeng.
La ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien est au courant de la situation. En fait, elle en a été saisie il y a plus d'un an. Elle a promis de l'aide. Elle a promis d'intervenir et de veiller à ce que la société Wing Construction ne soit pas acculée à la faillite.
Le fait que quatre membres de la famille de M. Fontaine travaillent directement ou indirectement pour la ministre l'empêche-t-elle de régler cette affaire?
Le Président: J'autorise la question, parce que les gens travaillent directement avec la ministre.
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Absolument pas, monsieur le Président.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, lorsque le chef Jerry Fontaine s'est porté candidat à la direction du Parti libéral du Manitoba, les ministres d'en face n'ont pas hésité à participer à ses activités de financement. Ils n'ont pas hésité à l'appuyer.
Pourquoi le gouvernement refuse-t-il d'appuyer un bon citoyen, un bon contribuable, qui fait travailler des dizaines de Manitobains? Le gouvernement ne comprend-il pas qu'il a un rôle à jouer dans cette affaire, des responsabilités à assumer? Ou va-t-il tout simplement sacrifier la société Wing Construction?
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de préciser qu'un partenariat commercial avait été créé entre la première nation et cette entreprise de construction. Le partenariat a été dissous.
Des questions restent en suspens. La firme KPMG a été chargée d'examiner les travaux effectués et de proposer un règlement juste et équitable. J'encourage les deux parties à collaborer en ce sens.
* * *
[Français]
LES BOURSES DU MILLÉNAIRE
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales vient de nous dire que l'entente qui a été signée entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de la Colombie-Britannique, relativement à Nanoose Bay, n'était pas valable, parce que signée seulement par des fonctionnaires, et non de gouvernement à gouvernement.
Doit-on comprendre que c'est le même sort qui risque d'arriver à une éventuelle entente qui pourrait survenir entre le facilitateur du ministre du Développement des ressources humaines et le gouvernement du Québec dans le dossier des bourses du millénaire?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir de voir le député de Roberval de bonne humeur aujourd'hui. Il veut apporter un peu d'humour dans nos débats qui, trop souvent, sont lourds de conséquences.
Je peux assurer que le gouvernement du Canada travaille très fort à l'heure actuelle pour s'assurer que les étudiants québécois profiteront des bourses du millénaire. Notre gouvernement s'est engagé dans cette économie du savoir pour que nos étudiants soient capables d'avoir le plus de compétences et le plus de connaissances pour bien performer dans l'économie du savoir.
C'est la volonté de notre gouvernement et je suis très heureux qu'on soit près d'une conclusion dans ce dossier important.
* * *
[Traduction]
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Lou Sekora (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.): Monsieur le Président, selon de nombreux reportages dans les médias, il pourrait y avoir un dénouement du différend qui oppose le Canada et les États-Unis au sujet du saumon du Pacifique.
Le ministre des Affaires étrangères pourrait-il mettre la Chambre au courant des progrès qui ont été accomplis?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir d'informer la Chambre que les négociations ont abouti à un accord sur le saumon du Pacifique.
Le ministre des Pêches et des Océans fera, dans une ou deux heures, une annonce détaillée sur la côte ouest. Cela prouve que lorsque les deux côtés travaillent de concert à la réalisation d'un objectif mutuellement avantageux, dans le cas présent la conservation des stocks de poissons, ils peuvent parvenir à un bon accord.
J'aimerais remercier personnellement Don McRae, notre négociateur en chef, qui travaillait sous les auspices du premier ministre, pour l'excellent travail qu'il a accompli, ainsi que la secrétaire d'État Albright pour son engagement personnel à l'égard de cet accord.
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LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je leur ai finalement trouvé quelque chose à faire à ces gens-là.
L'année dernière, Richard Joyce, détenu dans un pénitencier fédéral, est mort d'une surdose de drogue. Son sang contenait une dose létale de résidus d'héroïne et la détérioration de ses organes était typique d'un usage prolongé de drogue; pourtant il était en prison.
Puisque Richard Joyce a été emprisonné pendant longtemps, pourquoi a-t-il eu accès, à l'intérieur du pénitencier, à des drogues en quantité suffisante pour maintenir son assuétude et même le tuer?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, ne je sais pas si le député vient tout juste de découvrir qu'il y a de la drogue dans les prisons, mais il y en a, c'est un fait.
Des tests effectués en 1995 ont démontré que 39 p. 100 des détenus des pénitenciers fédéraux faisaient usage de drogue. Selon un test effectué il y a un an, le chiffre n'était plus que de 13 p. 100, ce qui représente une diminution de 300 p. 100.
Je peux assurer au député que le problème n'est pas encore réglé et que nous luttons toujours contre la drogue et l'alcool...
Le Président: Le député de Langley—Abbotsford a la parole.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, mon vis-à-vis n'est pas vraiment sérieux. Je sais qu'il y a de la drogue dans cette prison, et partout au pays, depuis bien plus longtemps que les gens d'en face.
Permettez-moi de citer un directeur adjoint du Service correctionnel du Canada qui a dit un jour: «Richard Joyce utilisait régulièrement de l'héroïne à l'établissement de Mission et il vérifiait toujours la qualité de sa drogue avant de le faire.»
Le gouvernement peut-il me dire s'il s'agit d'une mauvaise blague ou s'il comprend vraiment ce que signifie tolérance zéro dans nos prisons au pays?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit à mon collègue, la drogue est présente dans les prisons. Je sais parfaitement bien que nos détenus dans les pénitenciers fédéraux sont aux prises avec des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie. C'est la raison pour laquelle ils sont incarcérés, dans sept cas sur dix.
J'ai demandé à mes agents d'évaluer nos programmes et d'instaurer un programme pour les contrevenants en liberté conditionnelle. À ce moment-là, les toxicomanes dépendants de l'alcool ou de la drogue ont besoin d'un programme quelconque qui les aidera...
Le Président: La députée de Vancouver-Est a la parole.
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LE LOGEMENT
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, à la conférence de la Fédération canadienne des municipalités, demain, la question clé que devront examiner les dirigeants municipaux est le problème des sans-abri et la crise du logement au Canada.
Il y a plus de deux mois que le premier ministre a nommé une ministre des sans-abri, mais pas un seul sans-abri n'a reçu de l'aide. Il n'y a eu aucune intervention, aucun plan, aucun financement.
Qu'est devenu l'engagement du premier ministre et du gouvernement? quel engagement prendra-t-il devant la FMC en matière d'aide au logement et s'engagera-t-il à participer à nouveau à un programme de logement?
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, la ministre du Travail sera présente à la conférence de la Fédération canadienne des municipalités, à Halifax. La ministre s'est déplacée dans tout le pays et continuera de le faire tout l'été, pour écouter les Canadiens, afin que nous puissions mettre sur pied le bon programme.
Entre-temps, je rappelle à la députée que le gouvernement a investi 300 millions de dollars dans le PAREL, qui vise à aider les sans-abri, et que nous avons construit des logements pour eux. Peut-être devrait-elle parler au gouvernement de la Colombie-Britannique, qui ne participe pas au PAREL.
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, j'espère que la ministre des sans-abri sera présente, car, jusqu'ici, elle n'a fait qu'annuler des rencontres.
Un programme comme le PAREL ne vient pas en aide aux personnes sans abri et sans ressources qui vivent dans la rue.
Nous voulons savoir où est l'argent, où est le plan et où sont les stratégies que propose le gouvernement fédéral pour relancer le programme de logement avec la collaboration des provinces et des municipalités?
Je dois rappeler au ministre que la Colombie-Britannique est une des deux provinces qui offrent encore des programmes de logement social, contrairement au gouvernement fédéral.
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je répète que la ministre est présente à la conférence et que nous travaillons sérieusement à ce dossier. Nous prévoyons obtenir un rapport de tous les maires du Canada, de sorte que nous puissions travailler ensemble.
J'ai dit maintes fois à la Chambre que le problème des sans-abri n'est pas seulement un problème fédéral. C'est un problème fédéral, provincial et municipal, et nous devons le régler ensemble. La ministre chargée des sans-abri s'entretient actuellement avec les maires, pour que nous puissions mettre sur pied le bon programme. La députée devrait attendre de prendre connaissance de ce rapport.
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LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Bill Matthews (Burin—St. George's, PC): Monsieur le Président, maintenant qu'on a confirmé la conclusion d'un accord entre le Canada et les États-Unis divisant la pêche du saumon de la côte ouest, le ministre des Pêches et des Océans ou celui des Affaires étrangères pourrait-il dire à la Chambre si cet accord protégera l'avenir des collectivités côtières de la Colombie-Britannique et si la priorité sera accordée aux pêcheurs canadiens en ce qui concerne le saumon du Pacifique?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi d'abord de faire une correction importante. L'accord ne divise pas les collectivités, mais les rapproche. L'accord présente des avantages pour les pêcheurs des deux côtés de la frontière pour ce qui est de conserver et de préserver les stocks de poissons, de permettre des investissements directs et de veiller à ce que les collectivités disposent d'un système ou d'une formule leur assurant la stabilité au cours de la prochaine décennie.
Nos efforts visaient justement à donner aux pêcheurs de la côte ouest, de part et d'autre de la frontière, le sentiment qu'ils avaient un avenir.
M. Bill Matthews (Burin—St. George's, PC): Monsieur le Président, permettez-moi de poser au ministre la question suivante: Le nouvel accord déplacera-t-il le poisson vers le Canada, permettra-t-il de protéger et de reconstituer les stocks de saumon? L'accord prévoit-il la mise en place d'un fonds visant la conservation?
Si l'accord prévoit la mise en place d'un fonds visant la conservation, est-ce qu'on établira des lignes directrices, comme le vérificateur général l'a proposé dans son récent rapport? Le ministre pourrait-il également donner une idée de ce que pourraient être ces lignes directrices sur la conservation?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Pêches et des Océans donnera une séance d'information très détaillée d'ici une heure ou deux, sur la côte ouest. Je peux dire au député que l'accord prévoit la mise en place d'un fonds visant la conservation et de lignes directrices appropriées. Il s'agit d'un accord global et polyvalent qui réunit tous les éléments mis sur la table depuis quatre ou cinq ans.
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LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'ils sont dans le besoin, les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement soit là pour les aider. Lorsque quelqu'un perd son emploi, la dernière chose qu'il veut voir, ce sont des bureaucrates anonymes qui ne réfléchissent pas et se réfugient derrière des règles et un jargon incompréhensible. Les sans-emploi ont besoin de fonctionnaires sensibles et compréhensifs qui leur offrent une aide personnalisée.
Le ministre du Développement des ressources humaines partage-t-il cette vision des choses et, si oui, quelles mesures entend-il prendre pour assurer la qualité des services à tous les Canadiens dans le besoin?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu, le mois dernier, une réunion avec des fonctionnaires de tout le Canada pour discuter de moyens d'améliorer nos programmes sociaux afin que tous les Canadiens aient le meilleur service possible et soient traités avec respect, compassion et sympathie lorsqu'ils s'adressent à nous pour obtenir de l'aide.
Nous travaillons sur plusieurs fronts. Nous voulons redoubler d'efforts pour que nos clients comprennent les règles et les règlements des différents programmes et connaissent leurs droits. Pour aider les personnes qui traversent une période difficile et qui nous doivent de l'argent, le remboursement...
Le Président: Le député de Kootenay—Columbia a la parole.
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LA GRC
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, il ne serait pas faux de dire que le crime organisé, les groupes de motards et la drogue constituent un problème en Colombie-Britannique. Ce sont les libéraux qui ont aboli la police portuaire. Ce sont les libéraux qui ont créé une pénurie de 256 agents de la GRC.
Il y a en ce moment 96 recrues en formation à Regina, mais aucune de ces recrues ne doit être affectée en Colombie-Britannique. Pourquoi?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est là une question de régie interne de la GRC. Le député sait très bien qu'un examen des ressources est en cours et qu'il vise à s'assurer que la GRC utilise efficacement ses ressources et que toutes les ressources pouvant être consacrées à la lutte contre le crime organisé le sont. Je suis convaincu que le député tient à ce que les deniers publics soient dépensés le plus judicieusement possible.
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[Français]
LE TRANSPORT FERROVIAIRE
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, d'ici quelques jours, le train Québec Central reprendra ses opérations avec le soutien des intervenants socioéconomiques locaux et l'appui financier du gouvernement du Québec.
Or, malgré l'engagement personnel du député libéral de Beauce, qui aurait mis son siège en jeu, le gouvernement fédéral refuse toujours de participer financièrement au projet.
Comment le secrétaire d'État au Développement régional explique-t-il son refus, alors que le mandat de son ministère est justement de favoriser le développement économique des régions, incluant celles de la Beauce et de L'Amiante?
L'hon. Martin Cauchon (secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Beauce qui a fait un travail remarquable dans ce dossier et qui, contrairement aux députés du Bloc québécois, a toujours continué à suivre le dossier.
D'ailleurs, la semaine dernière, il y a eu une rencontre de tous les intervenants du milieu concernant le dossier du train Québec Central. Le député de Beauce était là et il m'a fait rapport.
J'aimerais également souligner aux députés du Bloc que jamais nous n'avons refusé de nous immiscer, finalement, dans ce dossier. Essentiellement, ce que nous avons dit au début, c'est qu'il y avait une absence de contrats ferroviaires fermes d'une part, et d'autre part, la participation du gouvernement canadien était beaucoup trop élevée.
Mais si le dossier est reformulé, et tel que l'a mentionné le député de Beauce, il semble être reformulé, nous allons le regarder sérieusement, parce que c'est une question de...
Le Président: L'honorable député de Regina—Lumsden—Lake Centre a la parole.
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[Traduction]
LE PREMIER MINISTRE
M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, le premier ministre a dit avoir vendu, en 1993, ses actions du club de golf à un certain M. Jonas Prince. Toutefois, M. Prince nie posséder ces actions, tout comme le premier ministre d'ailleurs.
L'avocat du premier ministre est en train d'organiser la vente de ces actions, dont la valeur a dû croître maintenant que des millions de dollars des contribuables ont été dépensés près du Club de golf de Grand-Mère. Les Canadiens veulent éclaircir cette affaire.
Le premier ministre déposera-t-il les accords de transaction et la correspondance connexe qui prouvent hors de tout doute qu'il ne possédait pas ces actions au moment où les transactions avec M. Gauthier étaient en cours?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas d'actions. Je les ai vendues.
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L'INDUSTRIE DES PÉRIODIQUES
M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, depuis que le gouvernement a décidé de sacrifier le secteur canadien des périodiques pour apaiser les Américains, nous essayons d'avoir des détails sur la subvention proposée que le gouvernement a dit vouloir employer pour indemniser les périodiques les plus touchés.
Le ministre des Finances peut-il dire aux Canadiens combien coûtera la subvention? Dans le cas contraire, comment le gouvernement peut-il conclure un accord de façon responsable?
M. Mauril Bélanger (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, les discussions sur l'offre de rajustement sont en cours. Dès qu'elles seront terminées et que la ministre aura présenté un rapport au Cabinet, les députés d'en face seront informés du contenu de cette offre.
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LES TRANSPORTS
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.
Certains pays d'Europe sont passés maîtres, à l'échelle mondiale, dans l'intégration de différents modes de transport comme le transport ferroviaire et les liaisons aériennes. Que fait le ministre des Transports pour encourager, au Canada, l'intégration de nos différents modes de transport?
M. Stan Dromisky (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il y a un problème de congestion très délicat et grave dans la plupart de nos grands aéroports, notamment celui de Vancouver, l'aéroport Pearson et l'aéroport de Dorval. Nous avons toutefois commandé une étude sur l'aéroport Pearson en mai 1999. Par ailleurs, nous étudions actuellement la faisabilité de mener une étude semblable à l'aéroport de Dorval. Nous espérons réaliser des progrès à l'égard de ces trois aéroports.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai reçu des avis concernant deux questions de privilège, après quoi nous passerons à la question du jeudi. La première question de privilège que j'entendrai vient du député de Medicine Hat.
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QUESTION DE PRIVILÈGE
LE SOUS-COMITÉ SUR L'ÉQUITÉ FISCALE POUR LES FAMILLES CANADIENNES AVEC DES ENFANTS À CHARGE
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, ma question de privilège a trait à un article paru dans le Star de Toronto aujourd'hui. Dans cet article, on trouve une citation du député de Vaudreuil—Soulanges, qui est président du sous-comité du Comité des finances chargé du revenu familial et du régime fiscal.
Dans cette citation, le président du sous-comité fait des observations sur les résultats d'un rapport qui n'a pas encore été communiqué au Comité des finances. J'estime que cela enfreint directement le Règlement. J'estime que cela porte atteinte à ma capacité de faire mon travail de député.
Je voudrais citer cet article. Le député de Vaudreuil—Soulanges a déclaré:
Nous avons fait cette analyse et je pense que la conclusion générale, c'est que le régime fiscal ne fait pas de discrimination entre les ménages à un et à deux revenus du fait que vous avez des enfants[...]
S'il y a apparence de discrimination dans le régime fiscal, elle est fondée sur deux principes (l'imposition des particuliers et le caractère progressif de l'impôt).
Mon argument, c'est que le processus parlementaire veut que les rapports des sous-comités soient d'abord communiqués au comité auquel ils sont rattachés. Dans le cas présent, le rapport a été divulgué directement aux médias sans que des gens comme moi— c'est-à-dire des membres du Comité des finances—aient eu la chance de le consulter.
J'estime que c'est une atteinte au privilège.
Le Président: Je n'interromps pas le député. La question qu'il présente est sérieuse. Cependant, le député de Vaudreuil—Soulanges n'est pas présent aujourd'hui. Je ne pense pas que le député de Medecine Hat ait dit que cette déclaration a été faite à la Chambre. Est-ce exact?
M. Monte Solberg: C'est exact.
Le Président: J'attendrai d'entendre ce que le député de Vaudreuil—Soulanges a à dire à cet égard, s'il a, bien sûr, tenu de tels propos.
La deuxième question de privilège ne sera pas soulevée.
M. Randy White: Monsieur le Président, cette question sera soulevée de nouveau quand le député reviendra à la Chambre. Voulez-vous entendre d'autres déclarations avant cela ou nous informerez-vous à l'avance pour que nous puissions être présents pour faire d'autres déclarations complétant celle que mon collègue vient de faire?
Le Président: Je vais d'abord écouter ce que le député de Vaudreuil—Soulanges a à dire. S'il y a d'autres renseignements pertinents, je suis disposé à en prendre connaissance, pourvu que le député ait dit ce qu'il est censé avoir dit. Je ne vais pas aller plus loin. Je procéderai une étape à la fois et j'écouterai ce que le député a à dire.
Je m'adresse au député de Mississauga-Sud. Si un complément d'information s'impose, j'en prendrai connaissance après l'intervention du député de Vaudreuil—Soulanges.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, comme le leader à la Chambre doit s'en douter, j'ai aujourd'hui plusieurs questions à lui poser.
Toutefois, avant de me lancer, je tiens à le féliciter d'avoir obtenu son baccalauréat ès arts en histoire de l'Université de Waterloo.
Des voix: Bravo!
M. Randy White: Étant moi-même passé par là, je sais que l'obtention d'un tel diplôme prend beaucoup de temps.
Je lui poserai une question pour mettre à l'épreuve sa connaissance de l'histoire. À son avis, y a-t-il déjà eu trois gouvernements libéraux majoritaires de suite au Canada? Peut-être devrait-il réfléchir à cette question d'histoire.
Le leader du gouvernement à la Chambre peut-il nous dire si la Chambre poursuivra ses travaux au-delà du 11 juin? Nous avons entendu dire qu'elle interromprait ses activités plus tôt que prévu. Nous prévoyions que les travaux se poursuivraient jusqu'au 18 ou au 21 juin. Est-ce que ce sera le cas?
J'aimerais que le député fasse le point au sujet de toutes les mesures législatives qui seront étudiées à la Chambre d'ici la fin de la session.
Le Président: Je ne voudrais pas priver le leader du gouvernement à la Chambre du plaisir de répondre, mais je crois qu'il y a eu trois gouvernements libéraux successifs entre 1935 et 1957. Je pourrais cependant me tromper.
Je tiens aussi à offrir mes félicitations au député. C'est une magnifique réalisation et un bon exemple pour tous les Canadiens.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le leader de l'opposition à la Chambre et tous ses collègues pour leurs applaudissements.
Puisque nous parlons de trois gouvernements libéraux successifs, cela va se reproduire bientôt puisque le nôtre sera réélu aux prochaines élections. Un autre gouvernement libéral va être élu trois fois de suite. Je vais commencer par le programme des travaux pour la semaine qui vient.
Demain, nous étudierons le projet de loi S-22, Loi concernant le précontrôle, aux étapes du rapport et de la troisième lecture, puis le projet de loi S-23, Loi sur le transport aérien. Cela devrait aller assez vite. Ensuite, nous étudierons les amendements proposés par le Sénat concernant le projet de loi C-49, Loi sur la gestion des terres.
Lundi et mardi seront des journées réservées à l'opposition. Je profite de cette occasion pour rappeler à tous mes collègues que mardi est le dernier jour de la période des crédits et que la journée sera donc plus longue que d'habitude, notamment en raison des votes.
À partir de mercredi prochain, j'ai l'intention de commencer à prendre des mesures pour boucler le programme législatif. Voici les grandes lignes.
En supposant que le projet de loi C-55 nous soit renvoyé par le Sénat, et on me dit que c'est fort probable, nous étudierons en priorité les amendements proposés par le Sénat. Nous passerons ensuite au projet de loi C-54. Si un accord est intervenu, nous pourrons alors étudier le projet de loi sur l'ivresse au volant, mais seulement si un accord est intervenu. Je crois comprendre que certains députés ont une opinion différente de ce qui devrait se trouver dans le projet de loi, et nous ne pourrons l'étudier que si nous sommes tous d'accord. Ce projet de loi n'a pas de numéro et il sera probablement déposé dès demain. Il est à espérer que l'on en arrivera à un consensus là dessus.
Nous passerions ensuite à la loi corrective, et il est à souhaiter que cette mesure puisse franchir toutes les étapes assez rapidement. Ceci pourrait nous amener à vendredi de la semaine prochaine.
Pour ce qui est de la semaine suivante, il serait préférable que j'attende la réunion des leaders à la Chambre, qui se tiendra mardi, avant de m'avancer.
Je signale à la présidence que je présente le programme de la fin de la semaine prochaine, au-delà de mercredi, sous toute réserve et qu'il y aura évidemment une réunion des leaders à la Chambre mardi. Je vais m'efforcer de tenir les députés au courant de ce qui va se passer.
Il y a eu des négociations entre les leaders à la Chambre relativement à la marche à suivre, suivant l'évolution de la situation au Kosovo. Le programme pourrait être modifié en fonction de la tournure des événements. J'ai l'intention d'en discuter aussi avec les leaders à la Chambre. Je pourrais peut-être fournir des précisions à la Chambre jeudi prochain, en réponse à une question.
Je pense que c'est tout pour le moment. Je suis certain que nous attendons tous avec impatience la réélection d'un troisième gouvernement libéral consécutif sous le leadership compétent du premier ministre.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Madame la Présidente, je tiens à féliciter le leader du gouvernement à la Chambre de ses succès universitaires. Mon seul point de désaccord avec lui porte sur l'enthousiasme évident et peu justifié qu'il manifeste pour un troisième mandat libéral.
Étant donné la controverse qui a éclaté récemment au sujet de l'imposition de la taxe d'entrée aux réfugiés et aux immigrants, le leader du gouvernement peut-il nous dire si le gouvernement envisage de proposer un projet de loi pour soustraire les réfugiés à cette taxe?
M. Gurmant Grewal: Rappel au Règlement.
M. Bill Blaikie: J'interviens dans le cadre de question du jeudi, madame la Présidente. Le député pourrait peut-être invoquer le Règlement lorsque j'aurai terminé.
Y aura-t-il aussi un projet de loi sur les exportations d'eau? Il s'agit d'une autre promesse du gouvernement.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député de Winnipeg—Transcona invoque le Règlement. Nous allons en terminer avec ce rappel au Règlement, et nous reviendrons au député. Le leader du gouvernement à la Chambre a la parole.
L'hon. Don Boudria: Madame la Présidente, en ce qui concerne les exportations d'eau, il se pourrait qu'un projet de loi soit présenté avant l'ajournement de la session. Il y a encore une bonne chance que nous puissions préparer le texte à temps pour le présenter.
Quant à l'autre question, celle de la taxe d'entrée, il n'y a bien sûr aucune taxe d'entrée au Canada. Tous les députés l'admettent. Si le député veut parler de la taxe d'établissement, il n'y a aucune proposition prévoyant la présentation d'un projet de loi avant l'ajournement.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je crois savoir que, selon la procédure de la Chambre, la question du jeudi est posée par l'opposition officielle. La dernière fois, j'ai remarqué qu'une autre question du jeudi avait été posée. Puisque tel est le cas, j'aimerais aussi poser une question au leader du gouvernement à la Chambre; si l'étude du projet de loi C-49 n'est pas terminée, pendant combien de temps poursuivrons-nous et pendant combien de temps étudierons-nous la Loi corrective?
L'hon. Don Boudria: Madame la Présidente, nous allons étudier le projet de loi C-49 demain, les amendements du Sénat et les amendements à la Loi corrective, vendredi prochain. Le gouvernement peut difficilement dire combien de temps il faudra à l'opposition pour parachever l'étude d'un projet de loi, mais nous espérons que ce sera fait aussi rapidement que possible.
M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Madame la Présidente, puisque la question du jeudi se prolonge, j'aimerais demander au leader du gouvernement à la Chambre ce qui est advenu de la Loi sur les jeunes contrevenants. Le gouvernement s'est vanté de proposer une nouvelle loi, des millions de dollars ont été consacrés à la publicité et la mesure législative semble avoir disparu du programme gouvernemental.
L'hon. Don Boudria: Madame la Présidente, elle est très certainement inscrite à notre programme. Le projet de loi C-68, Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, a été débattu à quatre reprises consécutives à la Chambre des communes. La Chambre et tous les Canadiens se rappelleront la longue obstruction de certains députés d'en face. Je suis prêt à renvoyer la question au comité immédiatement si les députés d'en face accordent leur consentement unanime.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je donne la parole au député de Dewdney—Alouette au sujet d'un autre rappel au Règlement, mais je crains que ce ne soit le dernier que j'autoriserai, car il revient habituellement au leader de l'opposition de poser les questions.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Madame la Présidente, mon rappel au Règlement fait suite à celui du député de Winnipeg. Il concerne la taxe d'entrée qu'il a mentionnée, ou le droit d'établissement, comme le leader de la Chambre se plaît à la désigner. Cette question a été soulevée en comité hier. Les membres du comité ont fait valoir un argument convaincant, mais les libéraux étaient absents pour le vote. Le gouvernement sera-t-il incité à agir sur cette question très importante?
L'hon. Don Boudria: Madame la Présidente, c'est justement à quoi servent les délibérations en comité.
M. John Reynolds: Madame la Présidente, le leader du gouvernement à la Chambre a dit que, s'il y avait consentement unanime, nous pourrions renvoyer la Loi sur les jeunes contrevenants à un comité. Je demande le consentement unanime pour qu'il soit renvoyé à un comité.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Randy White: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. J'espère que l'enjeu ne vous a pas échappé. Nous avions déjà la question du jeudi et voici que nous avons une deuxième période des questions. Vous m'obligeriez, madame la Présidente, en demandant aux greffiers comment nous allons procéder. Si nous prolongeons la période des questions pour que le leader du gouvernement à la Chambre puisse poser des questions, nous voulons être bien préparés. Mes collègues sont prêts à poser des questions. Nous voulons des précisions et nous demandons au leader du gouvernement à la Chambre de ne pas s'éloigner parce que nous avons beaucoup de questions à poser.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je rappelle au député que j'ai déjà précisé que, selon l'usage, le leader jouit du privilège de poser la question du jeudi. Aujourd'hui, nous avons fait des exceptions. J'espère que le député comprend que ce n'est pas la façon habituelle de procéder.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ-LE TRAITÉ CONCLU AVEC LES NISGA'AS
La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Madame la Présidente, j'ai le privilège aujourd'hui de pouvoir intervenir pour tenter de clarifier l'accord final conclu avec les Nisga'as que le gouvernement a déjà approuvé. Je crains que le gouvernement n'imite le gouvernement provincial néo-démocrate et ne restreigne le débat, en ayant recours à l'attribution de temps ou à la clôture, quand la Chambre sera saisie de la question à l'automne.
Cela m'afflige de constater que les gouvernements de Colombie-Britannique et d'Ottawa semblent réticents à examiner véritablement cet accord et à tenter de répondre aux graves questions que se posent les habitants de la Colombie-Britannique et que devraient se poser tous les Canadiens.
La préoccupation que nos avons en Colombie-Britannique est que l'accord final avec les Nisga'as, qui établit un précédent, aura des ramifications dont devraient avoir conscience les Canadiens de tout le pays.
Nous avons déjà le Traité no 8 en Alberta. On parle de réexaminer ce traité. Il se peut que des traités qui ont été adoptés et qui sont en place depuis de nombreuses années doivent être modifiés à cause de l'accord final qui a été conclu avec le peuple Nisga'a.
Ce qui préoccupe également les habitants de la Colombie-Britannique, c'est que l'accord conclu avec les Nisga'as constituera un modèle pour 60 autres traités en cours de négociation. Cependant, il faut comprendre que ces 60 accords en cours de négociation ne reflètent pas le nombre total de collectivités qui tentent de parvenir à des accords. Il existe un grand nombre de collectivités autochtones. La première nation de ma circonscription ne prend pas part à des négociations en vue d'un traité, car ce n'est pas le processus qu'elle souhaite suivre. Il n'est pas question de seulement 60 traités, mais de bien plus.
Même si ce traité n'a pas encore été ratifié par la Chambre, ce qui l'assujettirait à l'article 35 de la Constitution, quatre poursuites judiciaires sont déjà engagées.
D'aucuns diront que cela préoccupe seulement les non-autochtones. Eh bien, non justement. La bande de Gitanyow, qui est située tout au nord, a intenté une poursuite contre les Nisga'as et contre ce traité, affirmant que les Nisga'as se sont emparés d'au moins 84 p. 100 de son territoire traditionnel dans la vallée de la Nass. Ainsi donc, 84 p. 100 des terres revendiquées par une autre première nation sont visées dans cet accord.
Au dire d'un leader de la bande de Gitanyow, on s'inquiète de ce que les Nisga'as n'aient jamais été tenus de prouver l'étendue de leur titre afin de résoudre les chevauchements que l'on observe dans les revendications territoriales. On estime qu'il s'agit là d'une violation du droit autochtone et de la politique fédérale.
Selon un autre, ce n'est pas bien de sacrifier les droits de propriété d'une nation en vue de conclure un traité avec une autre.
Donc, ce n'est pas seulement des non-autochtones mais également des autochtones qui traînent les Nisga'as devant les tribunaux dans l'espoir de résoudre certains points qui ne sont pas clairs et de régler certains différends qu'a déjà suscités ce traité.
Le Parti réformiste est fortement convaincu qu'il y a tout lieu de soumettre aux tribunaux les points qui ne sont pas clairs dans cet accord avant que la Chambre ne songe à le ratifier. Comment peut-on ratifier un accord quand quatre poursuites judiciaires sont engagées concernant sa légalité et les terres visées? Comment peut-on ratifier un accord qui fait l'objet de quatre poursuites judiciaires?
Si nous avons présenté cette motion à la Chambre aujourd'hui, c'est précisément qu'il y a encore une foule de questions d'ordre constitutionnel et juridique à clarifier.
Quand nous avons soulevé cette question à la Chambre ces derniers mois, la ministre des Affaires indienne et du Nord canadien a prétendu que le gouvernement nisga'a serait assujetti à la Charte des droits et libertés. Or, ce n'est pas tout à fait ce que dit l'accord final avec les Nisga'as.
Selon cet accord, la Charte canadienne des droits et libertés s'applique au gouvernement nisga'a pour toutes les questions relevant de sa compétence, compte tenu de la nature libre et démocratique du gouvernement nisga'a décrite dans l'accord.
Si cet accord reconnaît la Charte des droits, pourquoi cette dernière précision? Pourquoi ne pas dire seulement que la Charte des droits et libertés s'applique au gouvernement nisga'a?
À mon avis, l'explication est très simple. Le gouvernement veut laisser cette ambiguïté dans l'accord pour que les tribunaux comprennent bien que l'on s'attend d'eux à ce qu'ils traitent le peuple Nisga'a différemment et qu'ils n'appliquent pas la Charte des droits comme ils le feraient dans le cas d'un autre Canadien. La seule explication que je vois, c'est que le gouvernement veut forcer les tribunaux à appliquer différemment la Charte des droits au peuple nisga'a.
Dans le cadre de mes anciennes fonctions, j'ai connu beaucoup de collectivités autochtones qui assumaient leurs responsabilités. J'observais comment 11 localités autochtones du nord de l'Alberta, dans le contexte du conseil indien régional du Petit lac des Esclaves, ont assumé la responsabilité de l'éducation et des soins de santé fournis à leurs membres et coopéré pour assurer un bon gouvernement régional à la collectivité. Cependant, on n'a jamais eu besoin de la protection de la Constitution pour ce faire. On n'a pas ressenti le besoin d'instituer un autre niveau de gouvernement. Ces collectivités ont fourni ces services avec succès, durant de nombreuses années, sans qu'il ait jamais été nécessaire d'instituer un autre niveau de gouvernement.
En Colombie-Britannique, nous avons vu un certain nombre de cas où les localités autochtones ont obtenu plus de pouvoir dans l'administration de leurs programmes et de la collectivité et n'ont pas été dignes de leurs responsabilités. Je parle des bandes de Musqueam et de Semiahmoo. Dans les deux cas, elles ont été injustes envers les membres non autochtones de la collectivité.
La bande de Musqueam a haussé les loyers magistralement et sans raison. Une personne a reçu la bande de Musqueam une facture de 73 000 $ pour 18 mois de loyer. Même si leurs loyers montaient en flèche, la valeur réelle des terres et de leurs biens plongeait. Ils n'avaient plus aucune valeur.
Tout cela parce que les gouvernements provincial et fédéral permettaient à la population autochtone de faire complètement fi de la justice et de l'équité pour les non-autochtones.
C'est aussi arrivé dans ma propre localité, où neuf habitants non autochtones ont perdu leur maison. Après 40 ou 50 ans, ils ont perdu leur maison sans aucune indemnisation. Ils ont été chassés. Je me demande si on aurait permis une telle chose si c'était un blanc anglo-saxon qui avait pris cette décision.
Le traité final avec les Nisga'as laisse trop de questions sans réponse. L'incertitude qui entoure la légalité du traité et le gouvernement dont se doteront les Nisga'as doit être dissipée par les tribunaux avant que l'accord ne soit ratifié par la Chambre. Personne ne peut prédire ce que seront la réaction et les décisions des tribunaux.
Je suppose que lorsque le premier ministre a participé à l'élaboration de la Charte des droits et libertés il y a de nombreuses années, il n'a jamais pensé que les pédophiles auraient un jour le droit de posséder de la pornographie juvénile. J'estime que nous ne pouvons pas laisser une telle incertitude et une telle ambiguïté dans cet accord. Nous ne pourrons pas le ratifier. Il faut que nous soyons plus sûrs de ce qu'il signifie et des conséquences qu'il aura pour l'ensemble du pays. J'ose penser que les parlementaires et le peuple canadien en général ont le droit de savoir quelles seront les ramifications juridiques de l'accord avant que le Parlement ne le ratifie.
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Madame la Présidente, je remercie la députée pour ses interventions et son intérêt à cet égard. Je tiens à signaler un certain nombre d'inexactitudes que j'ai relevées dans ses observations et, puis, à lui poser une question.
D'abord, elle mentionne les premières nations Gitksan, Wet'suwet'en et Gitanyow en parlant d'empiétement. Ces problèmes ont été prévus, il y a des années de cela, et font partie de l'article 33 de l'accord. J'attire l'attention de la députée sur cet article. Il y est dit que rien dans cet accord ne nuira aux droits existants des autres peuples autochtones. La députée n'a donc aucune raison de s'inquiéter.
Ensuite, ce n'est pas un document constitutionnel au même titre que la Loi sur le Manitoba, qui fait maintenant partie de la Constitution canadienne. La députée interprète mal l'article 35 où il est dit qu'il reconnaît les droits existants des autochtones du Canada. Il s'ensuit donc qu'un amendement constitutionnel est inutile. Si les parties voulait modifier l'accord comme cela est envisagé aux paragraphes 37 et 38, le gouvernement fédéral peut le faire au moyen d'un décret. Il est absolument faux et farfelu de laisser entendre à la Chambre qu'un amendement constitutionnel s'impose.
Quant à la façon de procéder pour les affaires judiciaires, un de ses principaux juges, le juge Campbell, de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, a affirmé à juste titre que ce traité devrait être débattu à la Chambre des communes et au Parlement avant que tout militantisme judiciaire ne soit autorisé.
Nous mettons encore là à jour les contradictions du Parti réformiste. La députée a soulevé la question de la pornographie juvénile et le Parti réformiste voulait passer outre aux jugements des tribunaux et régler l'affaire au Parlement. Et voici qu'il veut recourir aux tribunaux pour court-circuiter le Parlement.
Si j'arrivais à contenter raisonnablement la députée en usant du critère de la personne raisonnable et en convainquant des électeurs de Surrey, sa circonscription, que ce document ne nécessite pas un amendement constitutionnel et que la charte s'applique bien comme il est spécifié dans l'accord, la députée ferait-elle ce qu'elle doit, c'est-à-dire représenter ses électeurs et appuyer ici le marché au cours du débat qui aura lieu à l'automne, lorsque la Chambre sera saisie du document?
Mme Val Meredith: Monsieur le Président, je remercie le député d'en face de certaines de ses observations. Comme lui et ses collègues d'en face n'ont pas l'habitude de le faire, le député ne sait probablement pas que je communique régulièrement avec les électeurs de ma circonscription pour leur demander ce qu'ils pensent des différentes mesures législatives. Je leur ai demandé ce qu'ils pensaient de l'accord conclu avec les Nisga'as, et je vais les consulter de nouveau lorsque la Chambre sera saisie de cet accord. Je tiens compte de leurs suggestions et de leurs idées.
Quant à savoir s'il s'agit ou non d'une modification constitutionnelle, il y a là matière à débat. Certains disent qu'on ne veut pas d'une modification constitutionnelle directe, mais que cela finira par faire indirectement partie de la Constitution et qu'il sera impossible de changer l'accord au moyen d'un décret.
Le député embellit la réalité lorsqu'il laisse entendre que le gouvernement peut modifier l'accord à sa guise au moyen d'un décret. Il n'en est rien. Il faudra l'accord des trois parties pour qu'un changement soit apporté. Or, comme dans le cas de l'accord Canada-Québec en matière d'immigration, par exemple, il est souvent impossible d'amener deux parties à modifier un accord si le changement en question fait perdre à l'une d'elles bon nombre de ses avantages.
Le député dit que les droits reconnus par la Charte s'appliqueront, mais pourquoi ajoute-t-on cet addenda concernant l'application de la charte des droits s'il ne signifie rien? S'il est là, c'est qu'il signifie quelque chose. S'il ne signifie rien, il devrait être supprimé.
À mon avis, les Britanno-Colombiens et les Canadiens veulent que les choses soient claires. Ils veulent savoir ce que cela signifie au juste. C'est une chose que de demander des éclaircissements à la Cour suprême et aux tribunaux avant de légiférer et c'en est une autre de demander aux tribunaux de rendre des décisions à cause de l'ambiguïté et des zones grises que le gouvernement a laissé subsister dans les lois.
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Madame la Présidente, jusqu'à présent dans le débat, nous avons entendu les députés réformistes aborder avec sérieux des questions importantes concernant la constitutionnalité de l'entente avec les Nisga'as, les quatre poursuites judiciaires intentées pour tâcher d'empêcher l'adoption de l'entente et de nombreuses autres questions de fond.
Par ailleurs, en suivant le débat, j'ai entendu les députés du parti ministériel et du Nouveau Parti démocratique passer la majeure partie de leur temps à attaquer le Parti réformiste sans répondre aux questions qui leur étaient posées à la fin de leur intervention. Je trouve vraiment choquant le niveau de débat assuré par ces deux partis en particulier.
Les libéraux s'attachent surtout à contester les motifs dont s'inspirent la position du Parti réformiste sur l'entente et la motion qu'il a proposée aujourd'hui. Nous avons entendu les libéraux se répandre en belles paroles chargées d'émotion mais plutôt dénuées de substance. Quant aux députés du Nouveau Parti démocratique, ils semblaient déterminés à défendre le processus non démocratique de leurs collègues provinciaux de la Colombie-Britannique, et cela m'inquiète.
Je suis étonné et abasourdi par ce que j'ai entendu de la part des libéraux et des néo-démocrates. Le gouvernement pense qu'il peut régler un problème d'inégalité en consacrant une inégalité accrue dans la Constitution. Il me semble incompréhensible qu'on tente de remédier à une inégalité en consacrant dans la loi une autre inégalité. C'est pourtant ce que l'entente fera à plusieurs égards si elle est adoptée.
L'inégalité éventuelle qu'elle créera quand il s'agira de diviser les biens en cas de divorce est un gros problème que pose ce texte législatif. Il est vraiment troublant de penser qu'ils croient pouvoir remédier aux inégalités en en consacrant d'autres. Je trouve cela inquiétant.
Je me reporterai au processus du groupe de travail autochtone et au rapport auxquels j'ai participé dans ma circonscription depuis un an ou un an et demi. Le groupe de travail autochtone a été établi, sous ma présidence, pour recueillir le point de vue des simples autochtones sur leurs préoccupations relativement à ce que les gouvernements font pour eux.
De ces gens-là, j'ai obtenu neuf recommandations. J'aurai pu en mettre bien plus dans le rapport, mais je voulais que le rapport soit lu par la ministre. Je dois dire que la ministre a rencontré le groupe de travail et qu'elle a entendu ce que nous avions à dire. Ces recommandations qui viennent des simples autochtones portent sur les choses qui les préoccupent le plus dans leur vie quotidienne et représentent les mesures qui sont le plus susceptibles d'améliorer cette dernière.
Je vais expliquer rapidement chacune de ces neufs recommandations. Je poserai la question de savoir si elles figurent dans l'accord conclu avec les Nisga'as. Je demanderai si les recommandations et les solutions proposées par les autochtones figurent dans l'accord conclu avec les Nisga'as. Ainsi, nous pourrons déterminer si cet accord répond vraiment aux préoccupations des simples autochtones.
Je commencerai par expliquer très brièvement le processus. C'est un processus en trois étapes. La première a été une consultation privée où tous les propos recueillis ont été gardés secrets. Cette étape s'est déroulée dans la plus stricte confidentialité, à moins d'une entente avec la personne consultée.
La deuxième étape a pris la forme d'un questionnaire qui a été adressé à toutes les réserves et localités situées près des réserves dans ma circonscription.
La troisième étape du processus de consultation a pris la forme de réunions publiques où certains éléments mis en lumière au cours des premières étapes ont été discutés publiquement. Environ 70 autochtones ont assisté à la réunion publique tenue à St. Paul. Il y a eu une excellente discussion sur certains éléments clés.
Je passe en revue les recommandations en précisant si elles sont incluses dans l'accord avec les Nisga'as. La première recommandation porte sur la responsabilité financière. Il était recommandé: «Que le gouvernement impose aux administrateurs de bandes et d'établissements la production de rapports financiers plus complets et plus transparents, et que ces rapports puissent être consultés par tous les membres de la collectivité et la population en général». Cette recommandation visait les lacunes dans la responsabilisation financière, ce qui est le sujet de préoccupation le plus souvent mentionné au cours des consultations.
Est-ce que l'accord avec les Nisga'as garantit la production de rapports financiers complets et transparents accessibles à la population? Non. Il est clair que la première recommandation ne se retrouve pas dans l'accord.
La deuxième recommandation du groupe de travail autochtone est la suivante: «Que le gouvernement apporte un meilleur soutien en gestion financière aux conseillers et administrateurs autochtones afin d'assurer l'adoption de saines pratiques de gestion financière dans les réserves et établissements autochtones».
Cette recommandation veut dire que les dirigeants ont besoin d'un soutien pour mieux gérer. Il s'agit d'un élément connexe à la première recommandation, mais précisant le genre de soutien recherché. Une personne a dit:
Les problèmes dans les réserves découlent d'un système qui, à une certaine époque, empêchait les gens de quitter les réserves et, à une autre époque, les laissait crever de faim.
Ces paroles sont de George Forsyth, administrateur de la bande d'Onion Lake. Il a ajouté:
On ne peut pas passer d'un système où les gens étaient surveillés dans tous leurs gestes à un système où tous sont complètement livrés à eux-mêmes et s'attendre à ce que la responsabilisation soit totale. On aurait dû passer de la mainmise totale à un système avec une certaine forme d'encadrement, mais, dans l'état actuel des choses, on ne s'est pas préparé à instaurer une culture de responsabilisation.
Est-ce que l'accord avec les Nisga'as répond à la préoccupation que traduit cette recommandation? Non.
La troisième recommandation, qui porte de nouveau sur la responsabilité financière, précise que le gouvernement, en collaboration avec les conseillers et les administrateurs, doit veiller à ce que les membres des bandes et des établissements soient consultés de façon efficace et régulière. En d'autres mots, il faut que les gens les plus touchés par l'intervention du gouvernement, les membres des réserves, participent régulièrement aux activités afin que le processus soit ouvert et transparent et qu'ils sachent ce qui se passe.
L'accord conclu avec les Nisga'as respecte-t-il ce critère? La réponse est non. Nous avons eu connaissance de situations forts inquiétantes, dont une où un membre d'une bande a déclaré pendant une rencontre publique que sa bande n'avait pas convoqué de réunion depuis sept ans. C'est un problème. Rien dans cet accord ne prévoit une consultation suivie et ouverte sur le plan de la responsabilité financière.
Un autre membre a dit qu'une solution pourrait consister à exiger que les bandes tiennent des réunions où les gens établiraient les prévisions budgétaires et les approuveraient. Quelle bonne idée. Quel excellent principe. Un budget qui serait effectivement approuvé d'avance. C'est plein de bon sens. Rien dans cet accord ne prévoit l'obligation d'agir de la sorte.
La quatrième recommandation a trait à la responsabilité démocratique, une énorme préoccupation de la part des gens entendus par les membres du groupe de travail autochtone de Lakeland. Le gouvernement doit établir un organisme sans lien de dépendance ou nommer un ombudsman chargé de prendre connaissance des préoccupations confidentielles des autochtones canadiens et d'y donner suite.
La recommandation porte sur un aspect que les participants ont souligné assez souvent. Lorsque les choses ne vont pas comme elles le devraient, les membres des réserves estiment qu'ils n'ont personne à qui s'adresser. Ils ne peuvent faire appel au conseil, car il est lui-même à l'origine du problème. Il devrait y avoir un ombudsman indépendant et disponible qui pourrait appeler les gens ou les inviter à son bureau pour discuter du problème.
Le cinquième secteur de responsabilité a trait à la tenue d'élections équitables. Encore une fois, qu'y a-t-il dans cet accord pour garantir la tenue d'élections équitables?
En conclusion, il est manifeste que l'accord conclu avec les Nisga'as ne tient pas compte des préoccupations qui ont été exprimées par les membres du groupe de travail autochtone. Cette constatation m'amène à me demander si la situation des Nisga'as va s'améliorer, et ma réponse est non.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Madame la Présidente, je comprends les préoccupations exprimées par mon collègue d'en face. Cependant, je lui dirai que ce n'est pas dans le traité lui-même qu'on doit prévoir des mécanismes relatifs à la responsabilité, au processus électoral et à l'intégrité, mais bien dans la mesure législative qui suivra.
À mon avis, les questions du député réformiste sont prématurées. Elles se rapportent davantage à la mesure législative dont nous serons saisis dans six mois, ou peut-être à des lois complètement différentes. Je donnerai comme exemple la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels. Ce sont là des lois dont on pourrait se servir pour régler le genre de problèmes que le député a mentionné.
M. Leon E. Benoît: Madame la Présidente, le député vient d'exprimer encore d'autres préoccupations à l'égard de la façon dont les choses se font maintenant. Je crois qu'il serait le premier à reconnaître que rien n'indique que l'accord avec les Nisga'as aidera à régler ces problèmes. Cet accord n'améliorera pas la situation.
Je suis entièrement d'accord avec le député. Il est vrai que je me suis peut-être écarté quelque peu de la motion à l'étude aujourd'hui, mais j'ai soulevé des problèmes qui sont directement liés à l'accord avec les Nisga'as. Comment cet accord améliorera-t-il la vie de tous les jours des autochtones de la base? Je ne vois tout simplement pas comment.
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Madame la Présidente, je renvoie encore une fois le député au chapitre 1, article 13 relativement à toutes les lois fédérales et provinciales qui ne sont pas nommées et aux 14 secteurs énumérés dans l'entente. Ces lois continueront de s'appliquer aux peuples autochtones de la vallée de la Nass, de la même façon que c'est le cas actuellement.
Je signale aussi au député qu'il se trompe en ce qui a trait aux dispositions sur l'égalité. Nous avons dit à maintes reprises à la Chambre, en réponse à des questions de l'opposition, que l'article 15 de la Charte des droits et libertés garantit ces droits, tant pour les hommes que pour les femmes.
Des groupes de femmes qui ont étudié le libellé de la Charte des droits et libertés craignaient que celui-ci ne soit pas assez clair. L'article 28 dit que les droits prévus dans la charte sont garantis également aux personnes des deux sexes. Plus loin, le paragraphe 35(4) a été ajouté à la demande du lobby des femmes autochtones en 1981-1982, lors de la conférence visant à apporter des modifications pour fournir de telles garanties. Les garanties sont là et le député est dans l'erreur.
Le député s'est rendu dans certaines réserves, comme d'autres membres de son caucus l'ont fait au cours des deux ou trois dernières années, et c'est tout à leur honneur. Toutefois, je l'invite à venir dans la vallée de la Nass. S'il le souhaite, je suis prêt à jouer le rôle d'intermédiaire afin qu'il puisse rencontrer des membres des Nisga'as. Il pourrait visiter la région et rencontrer ces Nisga'as, peut-être d'une façon plus approfondie que son collègue le député de Skeena. Il pourrait ensuite informer le reste de son caucus de ce qu'il aurait constaté. Je pense qu'une telle visite aurait pour effet d'atténuer les préoccupations du député et de le réconforter. Est-il prêt à relever le défi et à rendre visite aux Nisga'as cet été?
M. Leon E. Benoit: Madame la Présidente, j'adorerais cela. C'est une très belle invitation. Si c'est possible, je vais certainement l'accepter.
Je dois cependant rappeler au député que j'ai environ 30 000 autochtones dans ma circonscription. Je suis allé dans des réserves. Je sais quelles sont les conditions qui y règnent. J'ai entendu le point de vue de ces autochtones tout au long des délibérations du groupe de travail sur les autochtones à peu près tous les jours de la semaine à mon bureau. Ils ont besoin d'aide. Les choses ne vont pas bien dans les réserves. Les dirigeants ne rendent pas de comptes. L'argent ne se rend pas jusqu'à ceux à qui il est destiné. Ma première responsabilité, je l'ai envers ces gens, et c'est là-dessus que mon attention va se porter.
En ce qui concerne l'inégalité, j'ai une lettre intéressante de Jack Gosnell, président du Conseil tribal des Nisga'as. Il s'agit d'une réponse à la lettre du député réformiste d'Okanagan—Shuswap.
La lettre répond à la question suivante: Comment protégerez-vous les droits de propriété que possèdent les autres femmes canadiennes en cas de rupture de mariage? C'est une question qui m'inquiète. La réponse est très brève. Je vais me contenter d'une courte citation des propos de M. Gosnell: «Nous n'avons pas encore établi la nature de l'intérêt individuel des Nisga'as à l'égard de la résidence.» Voilà ce que dit M. Gosnell lui-même. Comment le député d'en face peut-il prétendre donner l'assurance que les droits à l'égalité seront protégés?
Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse de participer aujourd'hui au débat sur la motion proposée par le député de Skeena. Je partagerai le temps qui m'est accordé avec le député de Wentworth—Burlington.
Je suis heureuse, parce que j'ai l'occasion de corriger certains faits erronés qu'a mentionnés le député qui, de toute évidence, ne comprend pas en quoi consiste l'accord définitif conclu avec les Nisga'as.
Je tiens à lui rappeler les raisons pour lesquelles le Canada a signé ce traité avec la Colombie-Britannique et les Nisga'as. Grâce à la ratification du traité des Nisga'as, le Canada pourra enfin tourner la page sur l'un des chapitres les moins reluisants de l'histoire de notre pays. Nous mettrons enfin un terme au processus de négociation de traités avec les Nisga'as, qui traîne depuis l'époque de la Reine Victoria.
Je signale à mes collègues que les traités n'ont rien de nouveau pour notre pays. En fait, cette année, nous célébrons le centenaire du traité no 8. Toutefois, même si des traités sont négociés avec de nombreuses premières nations, la plupart des autochtones de la Colombie-Britannique n'avaient pas signé de traités avec les gouvernements coloniaux. Si l'on fait exception du traité no 8 qui s'applique jusqu'au nord-est de la Colombie-Britannique et aux 14 traités Douglas qui s'appliquent à l'extrémité sud de l'île de Vancouver, on peut dire que la majorité des premières nations de la Colombie-Britannique n'ont jamais signé de traités concernant les terres et les ressources qu'elles réclamaient et n'ont jamais renoncé à diriger leur propre destinée.
Dès les premiers moments de leur existence en tant que nation, les Nisga'as ont lutté vaillamment pour que ces droits soient reconnus et respectés. Six ans après l'entrée de la Colombie-Britannique dans la Confédération, les chefs des Nisga'as ont entrepris un processus de règlement négocié de leur revendication territoriale et ont cherché à conclure un traité qui reconnaisse le droit des Nisga'as à l'autonomie gouvernementale.
Depuis 1887, année où ils se sont rendus pour la première fois à Victoria pour faire reconnaître leur titre autochtone, jusqu'à 1913, année où ils ont envoyé une pétition au Conseil privé de Londres pour régler leur revendication territoriale, puis à 1973, année où la Cour suprême du Canada a reconnu la primauté des droits autochtones relatifs aux terres et aux ressources, six générations de Nisga'as ont attendu patiemment que leur revendication soit prise en considération. À l'aube d'un nouveau millénaire, il nous faut faire en sorte que la septième génération voit les espoirs et les rêves des anciens se réaliser et qu'elle puisse bénéficier des avantages découlant des droits qui leur sont déniés depuis tant d'années.
Il n'est que juste qu'au moment où le Canada se prépare à dire adieu au XXe siècle nous établissions de nouvelles relations avec les Nisga'as et tous les autres peuples autochtones. Des relations fondées sur la confiance, le respect mutuel et la réconciliation. Des relations qui reconnaissent les erreurs du passé et réparent les torts. Des relations qui reconnaissent que ce n'est qu'ensemble que nous pouvons nous réaliser en tant nation. Tel est l'objectif ultime de l'accord final conclu avec les Nisga'as. C'est une étape cruciale vers de meilleures perspectives d'avenir.
La ratification de cet accord ouvrira un nouveau chapitre de l'histoire du Canada dont pourront être fiers nos enfants et nos petits-enfants. Nous entrons dans une nouvelle ère de relations entre gouvernements qui respecteront enfin et à tout jamais les droits des Nisga'as à se gouverner eux-mêmes sur les terres qui leur appartiennent.
Je précise que nous parlons ici d'un gouvernement fondé sur les droits et non pas sur la race comme certains voudraient le faire croire.
En 1973, la Cour suprême a conclu dans le jugement qu'elle a rendu dans l'affaire Calder et qui fait jurisprudence que le titre autochtone était un droit légal. Cette décision historique a abouti à la reconnaissance et à la confirmation des droits issus des traités, historiques et contemporains, ainsi que du titre autochtone en vertu de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
Les droits issus des traités et les titres autochtones sont inscrits dans la loi fondamentale du pays. Ces droits ont été reconfirmés à plusieurs reprises par les tribunaux.
La décision la plus récente, rendue dans l'affaire Delgamuukw, souligne la nécessité de négocier des accords pour améliorer nos relations avec les peuples autochtones. Delgamuukw a compris sur quoi était fondée l'idée des droits autochtones: quand les Européens sont arrivés en Amérique du Nord, les peuples autochtones avaient déjà fondé des communautés et avaient des cultures distinctes comme ils en ont toujours eu pendant des siècles. L'indéniable et irréversible réalité, c'est que la présence sur ce territoire avant l'arrivée des Européens leur a conféré un statut et des droits en tant que premiers habitants de ce pays.
Le gouvernement a officiellement reconnu le droit inhérent des peuples autochtones à l'autonomie gouvernementale. L'accord final conclu avec les Nisga'as reflète l'engagement à l'égard de nouvelles relations et de la négociation d'une solution juste et durable à la revendication territoriale de longue date du peuple Nisga'a.
Le mot important ici est «juste». Cet accord négocié établit un équilibre entre les intérêts de toutes les parties et fournit d'importants avantages économiques aux Nisga'as et à leurs voisins. L'accord final précise comment les lois fédérales, provinciales et nisga'as seront appliquées concurremment de manière à se compléter entre elles. Il établit un cadre de relations pacifiques et respectueuses qui gouvernera la vie de tous les habitants des terres nisga'as.
Je puis assurer à la Chambre qu'il y a plus que des idéaux en jeu. Les droits de tous les habitants des terres nisga'as seront ainsi protégés et mis en valeur. Tous ceux qui vivent dans ces terres continueront à profiter des mêmes droits et libertés reconnus par la Charte canadienne. Ils continueront tous à être assujettis au Code criminel du Canada. Les lois fédérales et provinciales en vigueur pour tous les habitants de la Colombie-Britannique s'appliqueront également à tous les habitants des établissements autochtones. Personne ne pourrait réclamer des dispositions qui soient plus justes et plus équilibrées.
Il est également essentiel de comprendre que le traité des Nisga'as conviendra à la nation nisga'a, mais pas nécessairement à d'autres premières nations. C'est un traité unique, qui reflète les besoins et les intérêts uniques des Nisga'as. Il concilie la réalité canadienne moderne avec les aspirations traditionnelles du peuple nisga'a.
L'accord final des Nisga'as, conclu après des années de négociations et de consultations exhaustives, établit clairement, aux yeux de tous, les droits des Nisga'as protégés en vertu de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Outre le fait qu'il comporte un accord sur les terres et les questions financières, il donne des pouvoirs d'autonomie gouvernementale aux Nisga'as sur des questions qui relèvent de leur culture, qui sont propres à leur collectivité et qui sont essentielles pour les opérations de leur gouvernement. Il établit leurs pouvoirs de protéger et de promouvoir la langue et la culture nisga'a et de sauvegarder les sites patrimoniaux. Il leur permet de construire des écoles, des centres de soins de santé, des routes, des systèmes d'égout et d'autres infrastructures selon des normes comparables à celles qui s'appliquent aux autres collectivités du nord-ouest de la Colombie-Britannique.
Le traité comprendra des dispositions pour réglementer la pêche des Nisga'as, la gestion de la faune et des forêts, ainsi que les questions environnementales sur les terres Nisga'as. Les Nisga'as utiliseront, développeront et géreront ces terres et leurs ressources afin de créer des richesses qui resteront en Colombie-Britannique et seront investies localement en biens et services.
Le traité des Nisga'as sera le premier traité des temps modernes en Colombie-Britannique. Il est enfin temps de se mettre au travail pour régler les traités dans cette province. Des traités ont été négociés presque partout ailleurs au Canada depuis le moment où les Européens sont venus s'installer au pays. Les traités font partie de notre histoire et du processus qui a conduit à la naissance de notre pays.
Le temps des discussions et des négociations est révolu. Après plus d'un siècle d'attente de justice, le temps est venu d'accorder au peuple Nisga'a les droits qui lui reviennent. Ce faisant, nous renouvellerons la fédération en incluant entièrement le peuple Nisga'a. Je demande donc instamment à la Chambre de voter contre la motion.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Madame la Présidente, la députée a utilisé le mot «tous» dans un certain nombre de ses affirmations. Il y a un cas en particulier qui a piqué ma curiosité. Sauf erreur, elle a dit que tous les gens qui vivent sur le territoire des Nisga'as seraient protégés par la Charte canadienne des droits et libertés.
La députée pourrait-elle définir ce qu'elle entend par «tous» dans cet exemple? Est-ce que le droit de tous aux termes de la Charte des droits et libertés inclut le droit de voter pour former le conseil des Nisga'as dans le cas de gens qui ne sont pas des Nisga'as mais qui habitent sur le territoire des Nisga'as?
Mme Nancy Karetak-Lindell: Madame la Présidente, pour répondre, je dois me reporter à l'accord sur nos propres revendications territoriales. Nous avons conclu un accord de revendication territoriale. En tant qu'autochtone du Nunavut, je puis voter sur des questions ayant trait aux revendications territoriales du Nunavut, mais les gens qui ne sont pas concernés par ces revendications territoriales ne peuvent voter à ce sujet. L'accord sur les revendications territoriales concerne précisément les autochtones du Nunavut.
Quand il s'agit des lois canadiennes, des municipalités et du gouvernement territorial, tous peuvent voter. Ce droit existe en fonction du territoire. En tant qu'autochtone de plein droit, je puis voter sur certains éléments de l'accord sur les revendications territoriales du Nunavut qui me concernent en tant qu'autochtone.
M. Werner Schmidt: Madame la Présidente, la question ne portait pas sur le fait de voter sur quoi que ce soit. J'ai posé une question précise: quelqu'un qui habite sur le territoire des Nisga'as sans être un Nisga'a peut-il voter pour un membre du conseil appelé à gouverner ce territoire?
Mme Nancy Karetak-Lindell: Madame la Présidente, si je prends pour exemple ma propre revendication territoriale, je suppose qu'ils auront les mêmes règles pour élire leur conseil de bande que celles que nous avons pour élire nos conseils municipaux.
Quand les gens disent qu'ils n'ont pas les mêmes droits que les autochtones, ils reconnaissent parfois que nous avons des droits distincts qui vont au-delà du droit canadien. Je rappelle au député que nous sommes quand même Canadiens et que nous sommes assujettis aux lois du Canada. La Charte canadienne des droits et libertés s'applique à tous les Canadiens.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Madame la Présidente, je tiens à remercier la députée du Nunavut d'avoir soulevé une question sur laquelle je pense que tous les Canadiens s'entendent facilement. L'accord final avec les Nisga'as tourne la page d'un chapitre de notre histoire que bien des Canadiens aimeraient enfouir dans le passé.
Plus on se rapproche de l'autonomie gouvernementale des autochtones, plus les groupes extrémistes de droite accélèrent leur campagne d'un bout à l'autre du Canada pour essayer d'enterrer tout ce qui pourrait ressembler à l'autonomie gouvernementale.
La députée du Nunavut sait-elle que le mouvement anti-Indiens qui s'appelle B.C. FIRE a été organisé en Colombie-Britannique par un membre du personnel d'un député réformiste, une personne qui travaillait ici sur la Colline pour le Parti réformiste, qui était payée par le parti, en fait par le gouvernement? Cette personne a donné sa démission ici pour aller en Colombie-Britannique organiser B.C. FIRE, le mouvement anti-Indien de la province, et travaille à plein temps pour défaire toute entente du genre de celle conclue avec les Nisga'as. La députée était-elle au courant de ce fait?
Mme Nancy Karetak-Lindell: Madame la Présidente, non, je n'en étais pas au courant, mais je suis attristée d'entendre parler de tels incidents. Nous avons tendance à oublier le rôle que les autochtones ont joué dans notre histoire, lorsque les Européens sont venus dans notre pays.
Comme l'environnement est très difficile pour les habitants de ma région, je peux dire honnêtement que, n'eût été de l'aide des autochtones, les gens qui se sont établis dans ce nouveau pays auraient eu encore plus de mal à survivre.
J'oserais dire qu'il est difficile d'imaginer le sort d'autrui lorsqu'on n'a jamais connu un tel sort.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Madame la Présidente, je dois dire que c'est pour moi un honneur que de prendre le relais de la députée du Nunavut, car j'estime que ses observations sont très pertinentes dans le débat d'aujourd'hui. J'espère que certaines de mes observations sauront compléter les siennes.
Permettez-moi d'abord de souligner que la motion dont la Chambre est saisie est fort prématurée, car elle soulève des questions au sujet du traité conclu avec les Nisga'as, alors que le Parlement est censé examiner des projets de loi.
Habituellement, un gouvernement conclut un traité, avec des autochtones ou avec un pays étranger, et le Parlement est chargé d'en examiner le texte et de le ratifier dans une mesure législative.
Nous ne pouvons pas vraiment examiner les préoccupations soulevées par les réformistes tant que la Chambre ne sera pas saisie d'une mesure législative. Je serai alors tout disposé à examiner ces préoccupations.
Avant d'entamer mes observations, je devrais préciser que, contrairement à ce qu'affirme le député néo-démocrate, je ne crois pas que ce soit le radicalisme qui motive les députés du Parti réformiste. Je siège depuis assez longtemps au Comité des affaires autochtones pour pouvoir déclarer à la Chambre que tous les membres du comité, qu'ils soient députés du gouvernement ou de l'opposition, partagent une véritable préoccupation à l'égard du bien-être des autochtones de tout le pays.
Si je m'oppose à la motion sur le traité avec les Nisga'as aujourd'hui, ce n'est pas parce que je la trouve prématurée. Je pense sincèrement que les députés réformistes, quand ils cherchent à résoudre les problèmes qui se posent de façon très manifeste dans certaines collectivités autochtones de leurs collectivités, abordent mal ces problèmes.
Je dois l'admettre, il y a deux ans, je me suis moi-même attaqué à la question de l'autonomie gouvernementale des autochtones avec beau coup d'inquiétude. Mais j'en suis venu à la conclusion, surtout après avoir entendu des centaines de témoins qui ont comparu devant le Comité des affaires autochtones, que l'autonomie gouvernementale ouvre une voie très prometteuse.
On s'est reporté à maintes reprises aujourd'hui à ce que disent les tribunaux concernant les droits issus des traités et autre chose du genre. Je ne crois pas vraiment qu'il revienne aux tribunaux de déterminer l'esprit qui doit animer ce pays. En ce qui a trait aux dispositions concernant les autochtones, je préfère me reporter à la Constitution et à la Charte des droits pour essayer de comprendre le raisonnement de mes prédécesseurs lorsqu'ils ont accordé ces droits spéciaux aux peuples autochtones.
J'ai donc conclu, sans trop de difficulté je dois dire, que le Canada avait réellement trois grands peuples fondateurs. Bien sûr, nous entendons souvent les députés bloquistes dire qu'un de ces peuples fondateurs était formé de ceux qui parlaient français et qui ont établi la Nouvelle-France.
Un autre peuple fondateur désigne certainement les Anglais qui sont venus s'installer d'abord dans les 13 colonies, puis au Canada.
L'autre peuple fondateur était celui des autochtones. Nous ne devons pas oublier qu'il n'y aurait ni Canadiens francophones, ni Canadiens anglophones si les autochtones n'avaient pas montré à nos ancêtres comment vivre dans la nature.
C'est en ce sens que ces gens sont encore avec nous et occupent une place si importante. C'est leur fusion avec la nature, l'esprit matérialisé du Canada, qui leur vaut une place spéciale au sein de notre société, reconnue dans la Constitution.
Cette place spéciale qui se reflète dans la Constitution est liée au territoire. La raison pour laquelle la Constitution parle de traités et la raison pour laquelle nous parlons d'un traité avec les Nisga'as, c'est que, pour exprimer le lien culturel et historique des diverses nations autochtones avec le territoire, le Canada et la nature, nous devons le décrire en terme de lieu physique où ils vivaient et où ils vivent encore.
Je rappelle à la Chambre que ce sont les peuples autochtones du Canada qui choisissent de vivre aux frontières de notre pays, qui choisissent d'être les gardiens de la nature. Même si je suis un Canadien urbain, peu importe si je suis francophone, anglophone ou allophone naturalisé Canadien, il importe que je sache que quelqu'un prend soin de la forêt et vit en symbiose avec la forêt, les lacs et les couchers de soleil comme je ne pourrais jamais le faire.
C'est ce rôle incroyable que les autochtones jouent, cette contribution fondamentale qu'ils apportent à notre société, qu'ils soient dans l'Arctique, l'Ouest, le Nord ou ailleurs.
Il y a des problèmes terribles d'interprétation de la Constitution et de notre relation avec les autochtones dans certaines mesures législatives qui ont suivi l'adoption de la Charte des droits. Je veux parler plus précisément de ce qui était le projet de loi C-31, qui est devenu loi en 1985.
Pour régler un problème touchant les femmes qui perdaient leur statut lorsqu'elles quittaient les réserves, lorsqu'elles se mariaient avec quelqu'un qui n'habitait pas une réserve, on a créé un autre problème, qui devrait être le centre d'attention de l'opposition dans ce genre de débat. C'est le problème qui consiste à définir les autochtones strictement en fonction de la race et non en fonction de leur lien avec la nature sauvage ou de leur lien avec leur propre culture et leur propre langue.
Au cours des cinq années qui ont suivi l'adoption de cette loi, c'est-à-dire entre 1985 et 1991, je crois que 98 000 personnes de plus sont devenues des autochtones, certains dans ma propre collectivité. On a fait des autochtones de gens qui n'avaient aucun lien réel ni aucun souvenir d'un lien avec une bande, avec un bout de territoire ou avec la nature sauvage. Ces gens n'étaient pas différents des autres gens de ma collectivité, et pourtant, parce qu'ils venaient de recevoir le statut d'Indien de plein droit, ils se voyaient soudainement accorder des privilèges—soins médicaux, éducation et autres—que les autres Canadiens n'ont pas.
Nous avons maintenant un mécanisme archaïque selon lequel on donne à des gens le statut d'Indien de plein droit en se fondant sur un questionnaire obscur qui montre qu'ils ont eu un ancêtre autochtone il y a peut-être quatre ou cinq générations.
Je trouve que cela n'est pas correct et aussi que cela coûte très cher. Le gouvernement n'a pas fait d'étude depuis 1991, mais, cette année-là, il a été clairement établi que, seulement pour les services de santé non assurés, il en coûtait 122 millions de dollars pour servir ces Canadiens qui étaient soudainement devenus des Indiens de plein droit, sans avoir de lien avec la nature sauvage ni avec leur propre culture.
Une crise menace parce que la Cour suprême a jugé que tous les autochtones de plein droit peuvent revenir dans les réserves ou dans la bande dont ils se réclament et participer aux élections. Cela change tout.
Il y a là-bas des gens qui ont décidé de vivre dans les réserves, qui ont décidé de vivre dans les bois, d'être les gardiens de la faune et de veiller sur l'environnement. Ce sont des gens responsables. Mais voici que des gens qui n'ont rien à voir avec eux peuvent avoir les mêmes droits qu'eux d'abattre le gibier, de pêcher le poisson et de voter aux élections de la bande. J'estime que cela constitue une menace importante pour la culture et l'identité autochtones et que c'est de cela qu'il faudrait débattre. Un traité est le seul moyen de remercier les Nisga'as d'être restés sur leurs terres, d'être restés dans les forêts et les montagnes et d'avoir pris soin de ces montagnes pendant des générations. Avec ce traité, nous allons nous assurer que les Nisga'as continuent à faire cela. Nous voulons être sûrs que le traité protège les droits de tous les Canadiens et les droits des membres de la collectivité. C'est la bonne voie à suivre en définitive.
Il faut réexaminer la loi qui a créé les autochtones assujettis au C-31 qui touchent de l'argent sans motif valable. Beaucoup des gens visés par ce projet de loi ont un diplôme universitaire. Ils ont un emploi. Certains travaillent en fait pour la fonction publique, et pourtant, leurs enfants bénéficie de la gratuité scolaire et d'avantages spéciaux. Cela nous empêche d'aider les autochtones qui méritent vraiment d'être aidés parce qu'ils font quelque chose de spécial pour notre pays. Je parle des autochtones qui ont décidé de rester dans les aires de nature sauvage.
Je vois que mon temps de parole est écoulé. Je suis heureux de pouvoir présenter ces observations même si la motion elle-même ne dit rien des véritables préoccupations.
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Madame la Présidente, je dois dire que je suis d'accord, à propos du projet de loi C-31. Il a fait tout un gâchis.
Mais venons-en à l'accord avec les Nisga'as. Une partie du discours du député portait là-dessus. Il y avait 6 000 Nisga'as qui avaient le droit de voter, mais il n'a été permis qu'à 2 376 d'entre eux de le faire. Comme beaucoup de Nisga'as n'ont pas pu voter, nous nous retrouvons avec un problème: des Nisga'as sont maintenant poursuivis devant les tribunaux par d'autres Nisga'as.
Je voudrais que le député, la Chambre et tous ceux qui suivent ces délibérations comprennent que les libéraux de la Colombie-Britannique portent l'affaire devant les tribunaux eux aussi. Je tiens à ce que tous sachent que ces libéraux trouvent à redire à l'accord, que ce ne sont pas seulement les réformistes qui ont des réserves.
Les bandes voisines commencent aussi à entamer des poursuites, disant que leurs terres leur ont été volées par les Nisga'as. Je suis persuadé que la députée du Nunavut va le comprendre également. Ces questions sont toujours devant les tribunaux, qui n'ont pas rendu leurs décisions. Pourtant, le gouvernement s'entête à présenter ce projet de loi à la Chambre.
Le député veut-il dire qu'il est acceptable de prendre à l'un pour donner à l'autre sans que la loi s'applique régulièrement?
M. John Bryden: Madame la Présidente, je ne vois pas au juste quelle est la question.
En dernier recours, c'est le Parlement qui décide, et c'est l'une des raisons pour lesquelles la motion m'inspire des réserves. Elle fait appel à la Cour suprême pour lui demander la permission de légiférer. Or, nous savons que, si la loi est adoptée à l'encontre de la Constitution, elle ne tardera pas à être annulée.
En fin de compte, chaque fois qu'on essaie de faire quelque chose pour quelqu'un, il y a fatalement des gens qui s'opposent. Le vrai problème ici, ce n'est pas la Constitution. Je ne crois pas non plus que ce soit le principe de l'accord avec les Nisga'as ou de l'autonomie gouvernementale des autochtones. Le vrai problème, ce sont ces autres mesures comme le projet de loi C-31. Je crois vraiment qu'il faut le revoir.
L'hon. Ethel Blondin-Andrew (secrétaire d'État (Enfance et Jeunesse), Lib.): Madame la Présidente, je veux féliciter le gouvernement et la ministre pour le travail accompli relativement à l'accord avec les Nisga'as. Je félicite aussi les résidants du territoire des Nisga'as qui ont été animés durant toute leur vie d'une volonté de conclure cet accord. Ces personnes méritent notre respect et notre gratitude.
Je veux simplement faire allusion au projet de loi C-31 dans le contexte des remarques formulées par le député. Il s'agit d'un processus très compliqué. Il peut y avoir 13 catégories d'Indiens en vertu des différentes lois. C'est un système qui a été conçu et appliqué par les hommes. Ce système comporte des failles, notamment le problème de ceux qui pourraient avoir le statut d'Indien, mais ne le méritent peut-être pas. Nous ne le savons pas. Je ne le sais pas, parce que j'ai traité un grand nombre de demandes.
J'ai été adoptée à l'âge de neuf ans. J'ai perdu mon statut. Mon grand-père avait signé le traité no 11 à titre de chef. J'ai perdu mon statut parce que j'ai été adoptée par une famille non soumise à un traité, une famille dont les membres n'avaient pas le statut d'Indien. Il m'a fallu beaucoup de temps pour ravoir mon statut.
Il y a beaucoup de personnes dans cette situation. J'aimerais connaître l'opinion du député relativement à ces personnes, qui sont des autochtones, qui sont issus d'un milieu autochtone, dont les parents s'adonnaient peut-être au piégeage, à la chasse ou à la pêche, mais qui ne sont pas inscrits. Il ne s'agit que d'une question d'ordre technique. Ces personnes ont perdu leur statut d'Indien ou d'autochtone parce qu'elles n'étaient pas inscrites. Qu'en est-il de ces personnes?
M. John Bryden: Madame la Présidente, le projet de loi C-31 devait redonner le statut d'Indien à quelque 10 000 personnes. Il n'a pas accordé le statut d'Indien à environ 120 000 ou 130 000 personnes.
Je ne veux pas remettre en question l'objet original du projet de loi C-31, mais malheureusement, comme bien d'autres bonnes choses, il a eu des conséquences qui me semblent, à titre d'observateur indépendant de la communauté autochtone, nuire énormément aux autochtones.
Je fais remarquer également que, dans des localités comme Winnipeg, les nombreux autochtones vivant en milieu urbain souffrent de pauvreté et sont traités différemment en raison simplement de leur race. C'est mal. Il nous faut revoir cette mesure législative et l'améliorer tout en préservant son objet original.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Madame la Présidente, je suis très heureux des propos qu'a tenus le député d'en face, qui félicitait le peuple Nisga'a pour le travail qu'il a accompli.
Je voudrais également rendre un hommage particulier au député qui a pris la parole il y a une minute. J'ai beaucoup apprécié de voir élever le niveau du débat à des questions qui dépassent le simple contenu du traité. La question va beaucoup plus loin et le député l'a reconnu et en a tenu compte.
Je tiens par ailleurs à me dissocier complètement de ce que disait un député, je crois que c'était le député de Winnipeg-Centre, à savoir que mes collègues et moi-même serions associés à B.C. FIRE Nous n'entretenons aucun lien, sous quelque forme que ce soit, avec cet organisme.
Le député a également parlé d'un homme qui aurait déjà travaillé pour un député. Je tiens à préciser qu'il ne travaille pas pour ce député et que ni moi ni aucun de mes collègues, autant que je sache, ne sommes associés à cette organisation. Je tenais à le signaler parce que je suis profondément touché par la façon dont les autochtones ont été traités au Canada.
La députée de Western Arctic a parlé avec beaucoup de sincérité et je l'en félicite. J'ai rencontré un certain nombre d'autochtones et ils n'ont pas obtenu de traité. Le peuple Nisga'a n'a pas de traité. Je crois qu'il devrait en avoir un. Les Nisga'as ont négocié, et bien négocié, pendant de nombreuses années. En fait, ils ont peut-être même trop bien négocié sur certains points, mais c'est là une autre question.
J'irai au-delà des facteurs de complication que sont le différend au sujet des frontières, le fait que trois bandes se disputent le même territoire, que l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique a tourné en dérision le processus démocratique en mettant un terme au débat et qu'il subsiste des doutes sur le plan constitutionnel. Je ne veux pas trop m'engager sur ce terrain parce que ces questions ne constituent pas notre sujet d'intérêt premier. J'abonde dans le sens du secrétaire parlementaire lorsqu'il dit qu'il n'est probablement pas nécessaire de modifier la Constitution. C'est très possible. Je crois que le conflit se situe entre les dispositions constitutionnelles actuelles et les dispositions du traité. Les choses ne sont pas claires pour l'instant. La question est devant les tribunaux.
J'insisterai surtout sur la démocratie et la citoyenneté. Tout d'abord, je veux parler de la démocratie et de la responsabilisation. Je mettrai en parallèle la démocratie et la responsabilisation en démocratie. Pour moi, une démocratie a quatre caractéristiques.
Le premier principe d'une bonne organisation démocratique, c'est que les gouvernés assument un contrôle réel sur leurs dirigeants. Cela signifie que les gouvernés doivent être représentés et que leurs représentants sont choisis dans le cadre d'élections. La fonction de représentant ne doit pas se transmettre par hérédité. C'est un concept très intéressant.
Je crois que c'est en 1215 que la Grande Charte a été adoptée et qu'il a été déclaré que le roi Jean, je crois que c'était lui, n'était pas monarque de droit divin. Depuis cette époque, rien dans notre système démocratique ne permet de croire que, dans un système de gouvernement, quelqu'un a le droit d'occuper un poste simplement parce que ce poste est héréditaire. Tout le système démocratique au Canada repose sur une notion simple: une personne, un vote.
Cette notion renvoie à la notion d'égalité de tous les citoyens. Nous sommes différents. Madame la Présidente, vous et moi sommes différents. Je suis différent de tous les autres députés, mais, devant les lois du Canada et la Constitution qui nous régit dans cette noble institution, nous sommes tous égaux. À mon sens, c'est souhaitable.
Le deuxième principe, c'est que l'information doit circuler de façon claire et précise afin que le public puisse savoir ce qui se passe dans les dossiers qui l'intéressent. Par exemple, dans le cas du conflit qui sévit actuellement au Kosovo, il est essentiel pour nous de disposer de renseignements précis et complets pour pouvoir prendre des décisions éclairées.
Le troisième principe, c'est qu'on doit avoir régulièrement l'occasion de se prononcer par voie de scrutin sur les gens qui doivent nous diriger. C'est le cas ici à la Chambre. Il est important qu'il en soit ainsi. On dira que ces trois principes se trouvent déjà dans le traité et je ne voudrais pas prétendre le contraire. Toutefois, j'ai plus de difficulté en ce qui a trait au quatrième principe qui prévoit la tenue d'un vote libre.
Il y a un certain problème à ce niveau dans le traité parce que nous faisons affaire avec un très petit gouvernement qui a des pouvoirs très étendus. Le conseil des Nisga'as aura de très vastes pouvoirs et il lui sera difficile de tenir un vote libre et honnête.
J'aimerais vous citer une analyse qui a été effectuée par Gordon Gibson. J'aimerais donner quelques détails.
Les petites administrations ayant de vastes pouvoirs peuvent en arriver à exercer un certain contrôle sur les citoyens, et non l'inverse... L'approche descendante est parfois plus facile dans les situations de moindre importance. C'est là un phénomène universel qui n'a rien à voir avec les traits de culture.
Le gouvernement Nisga'a que l'on propose constituerait une petite administration et elle aurait des pouvoirs étendus. De quoi s'agit-il? Puisque la majorité des ressources financières devraient passer par le gouvernement nisga'a, dans le cadre des dispositions du traité, les gens dépendront en grande partie du gouvernement dont ils deviendront les obligés. Cette dépendance ne s'exercera pas uniquement au niveau des services municipaux, mais également dans les dossiers qui revêtent une importance vive et immédiate pour les personnes en cause. Je pense par exemple au logement, à l'aide sociale ou même à l'emploi.
L'État nisga'a contrôlera tant de choses. La santé et l'éducation seront sans doute des services offerts à tous, mais le droit à l'enseignement supérieur et à des soins de santé très spéciaux restera discrétionnaire. Les citoyens de ce territoire seront fortement incités à marcher main dans la main avec ceux qui détiennent le pouvoir pour se tirer d'affaire.
La question de la responsabilité démocratique prend de l'ampleur du fait que le gouvernement des Nisga'as utilisera l'argent des autres, sous forme de paiements de transfert fédéraux et provinciaux versés à l'État nisga'a. Est-ce là une médisance à l'endroit des Nisga'as? Pas du tout. Quand les contribuables d'une collectivité acquittent les factures, ils peuvent exercer un contrôle rigoureux sur leur gouvernement, et cela vaut pour nous comme pour tout le monde. Au contraire, lorsque les factures sont acquittées par des gens de l'extérieur, les résidents ont plutôt tendance à conspirer avec le gouvernement local afin de profiter au maximum des ressources externes au lieu d'utiliser à bon escient celles dont ils disposent.
Madame la Présidente, vous le savez comme nous tous, les gens gèrent leur argent avec un peu plus d'attention que celui des autres. Il y a bien des exceptions, mais c'est la règle générale.
Tom Flanagan de l'Université de Calgary exprime très bien cette vérité quand il dit: «Comme il n'y a pas d'imposition sans représentation, il y a peu de chances qu'il y ait une bonne représentation sans une imposition totale». L'une ne va pas sans l'autre. Il en va de même de la responsabilité démocratique. J'ai effleuré à peine la question de la démocratie.
Je voudrais maintenant toucher un mot sur la citoyenneté. Dans le traité conclu avec les Nisga'as, la citoyenneté s'appuie sur l'hérédité et non sur la résidence. Le droit de vote également. Seuls les citoyens nisga'as ont le droit de voter. En vertu de ce traité, le droit de voter est fondé sur la naissance. C'est une chose qui n'existe nulle part ailleurs au Canada. Dans tout le reste du Canada, le droit de voter est fondé sur le lieu de résidence. C'est un principe fondamental.
Il y a des Nisga'as qui vivent sur la réserve et d'autres qui vivent en dehors. Les deux groupes ont le droit de voter. Toutefois, les Nisga'as qui vivent en dehors de la réserve ne peuvent voter que pour trois conseillers, alors qu'il y a trente conseillers. Si l'on compare les Nisga'as qui vivent sur la réserve et ceux qui vivent en dehors, la représentation est disproportionnée. En fait, cela crée deux classes de citoyens nisga'as.
Ce n'est pas tout. D'autres droits et privilèges dont ne jouissent pas les autres Canadiens sont accordés au peuple nisga'a sur la base de la Constitution. Cela fait trois classes de citoyens: deux classes de Nisga'as et une autre classe formée des autres Canadiens. Nous devrions tous être égaux devant la loi. Nous ne devrions pas créer des classes de citoyens.
C'est seulement le commencement. J'encourage la Chambre à examiner très sérieusement ces questions. Elles sont fondamentales et sont à la base des mesures à prendre pour assurer à tous les Canadiens le droit de vote, le droit d'être représentés de façon égale et responsable et de contrôler leurs propres affaires.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Madame la Présidente, le député a débuté son intervention en tentant de se distancier de BC FIRE, le mouvement haineux ou anti-autochtone de la Colombie-Britannique.
Lors d'une interview sur le réseau de langue anglaise de Radio-Canada, la journaliste Carol Off interviewait Mel Smith, l'auteur de Our Home or Native Land?: What Government's Aboriginal Policy is Doing to Canada. Cet ouvrage est devenu la bible du mouvement anti-autochtone de la Colombie-Britannique et il est souvent cité par le Parti réformiste. En fait, le Parti réformiste a engagé Mel Smith pour diriger les audiences de son groupe de travail sur les autochtones.
Mme Off dit: «En fait, beaucoup d'organisateurs de F.I.R.E ont des liens avec les réformistes. Brian Richard se présente aux prochaines élections fédérales sous la bannière du Parti réformiste (il s'agissait des élections de 1997). Greg Hollingsworth était rémunéré par le Parti réformiste jusqu'à ce qu'il parte pour lancer B.C. FIRE. Georgeanne Sanders, qui était activiste dans la vallée de l'Okanagan et qui avait un rôle actif dans B.C. FIRE, est membre du Parti réformiste. Marcia Gilbert et Judy Kilgour, qui sont des membres importants du mouvement anti-autochtone, sont également membres du Parti réformiste. Preston Manning n'a annoncé la politique sur les autochtones du Parti réformiste que le mois dernier, mais elle ressemble de manière frappante à la politique de B.C. FIRE.»
Carol Off est une journaliste crédible du réseau de langue anglaise de Radio-Canada. Elle a trouvé lors de ses recherches nombre d'exemples de liens directs du Parti réformiste avec le mouvement haineux, c'est-à-dire avec les gens qui encouragent la haine en Colombie-Britannique. Je ne dis pas que c'est le Parti réformiste qui encourage la haine; je dis qu'il est lié de façon intrinsèque aux gens qui encouragent la haine. Nous savons tous qu'il est beaucoup plus facile d'encourager la haine que d'encourager la tolérance
M. Werner Schmidt: Madame la Présidente, je regrette tant le ton de voix du député que la teneur de ses propos. Il se peut qu'il y ait des gens dans le Parti réformiste qui aient des contacts. Je n'ai pas dit ça dans mon introduction.
Dans ce pays, nous sommes libres, libres de parler et libres de nous associer. Je parlais en mon nom propre. Je veux qu'il soit parfaitement clair que je n'ai absolument aucun lien avec le mouvement FIRE. Je n'ai aucunement l'intention de m'y associer de près ou de loin. Je tiens également à souligner que les députés du Parti réformiste, soit à titre individuel soit en tant que parti, ne sont pas contre un règlement à l'amiable de la question des revendications territoriales et de l'autonomie gouvernementale que réclament les autochtones du Canada. Nous y tenons autant que quiconque.
Nous tenons à ce que le Canada soit un pays uni où tous les citoyens sont égaux et jouissent des mêmes droits et des mêmes privilèges. Nous craignons fort que si nous ne controns pas l'élaboration de principes et la prise de décisions qui, comme je le disais plus tôt, auront pour conséquence, que ce soit du fait de leur adaptation, de leur application ou de leur interprétation, la création de trois ou quatre classes différentes de Canadiens, nous n'allions tout droit vers un conflit du genre de celui dont nous venons d'être témoins en Asie centrale.
Je crains beaucoup cela. Il ne sert à rien de montrer du doigt des personnes qui ont tenu des propos outranciers. J'exhorte le député de Winnipeg-Centre ainsi que tous les députés à se rappeler que nous sommes ici pour essayer d'établir une solide relation de coopération nous permettant d'édifier un pays fort, une collectivité forte et libre de toute crainte dans laquelle nous pouvons nous entraider et même parvenir à nous aimer. Cette invitation s'adresse également à mon collègue.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Madame la Présidente, tout comme le Parti réformiste, je me sens très privilégié de pouvoir soulever cette question à la Chambre.
J'estime qu'il s'agit d'une question extrêmement importante pour tous les Canadiens, notamment pour ceux de la Colombie-Britannique. Comme ce traité finira par servir de modèle pendant un certain temps, il aura forcément des répercussions énormes sur la négociation d'autres traités à venir et sur la renégociation de traités qui sont actuellement en vigueur au Canada.
Je voudrais que les députés se reportent à 1993, année de ma première élection à la Chambre. Lorsque mes collègues et moi sommes arrivés à Ottawa, nous étions tous remplis d'enthousiasme, prêts à foncer et à débattre des questions importantes au nom de nos électeurs. Une surprise nous attendait. On nous a informés que nous ne pouvions pas débattre ou contester certaines questions. On nous a dit que c'était contraire à la rectitude politique.
Le ministère fédéral qui m'a immédiatement incité à me poser des questions, comme c'est le cas pour beaucoup de mes collègues, j'en suis sûr, c'est le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Nous étions conscients de bon nombre des graves problèmes qu'éprouvaient les autochtones dans les réserves et à l'extérieur. Rectitude politique ou non, nous étions déterminés à apporter des changements positifs. Nous étions déterminés à nous exprimer sur les questions concernant les autochtones et les réserves, le plus grand problème étant la reddition de comptes.
Je vais revenir un instant sur les propos de l'orateur qui m'a précédé. Malheureusement, à cette époque-là, certains députés ont choisi de considérer notre détermination à apporter ces changements positifs d'une manière très négative et d'imputer des motifs à mes collègues réformistes et à moi. C'était un geste désespéré et déplorable. De nombreuses questions nécessitaient et nécessitent toujours un dialogue ouvert, honnête et franc. C'est dans ce genre de dialogue que nous nous sommes engagés aujourd'hui, avec quelques écarts mineurs des deux côtés de l'enjeu.
À notre arrivée à la Chambre, nous voulions savoir où s'en allait l'argent des contribuables. Nous savions que quelque 9 milliards de dollars s'engouffraient chaque année dans des programmes fédéraux et provinciaux en tous genres, prétendument pour soutenir nos peuples autochtones et métis. Nous voulions donc savoir pourquoi on voyait tant de pauvreté, d'un bout à l'autre du Canada, pourquoi les gens vivaient dans des conditions aussi déplorables et pourquoi tant de nos compatriotes autochtones croupissaient en prison. En tant que porte-parole du Parti réformiste pour les questions relatives au ministère du solliciteur général, je sais que 17 p. 100 des détenus étaient autochtones en 1998, contre 11 p. 100 en 1991-1992. Pourquoi voyons-nous tant de désespoir et de toxicomanie, et des taux de suicide aussi élevés, dans les réserves? Que se passe-t-il?
Plus nous posons de questions sur ces problèmes, plus nous recevons d'appels téléphoniques à mon bureau de ce que j'appelle des autochtones de la base, qui posent de plus en plus de questions sur des problèmes touchant leur réserve, des problèmes qui existaient dans mon ancienne circonscription, Kootenay-Est, et qui se retrouvent maintenant dans Kootenay—Columbia.
Finalement, j'ai accepté de tenir une assemblée publique en novembre dernier. J'y ai invité la ministre et des fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Bien sûr, j'ai aussi invité les cinq chefs de bande de ma circonscription et leurs conseils. Aucun d'eux ne s'est présenté. Des autochtones des cinq bandes de la circonscription étaient présents. Ils se sont exprimés avec dignité, réclamant des modifications en vue de l'adoption d'un système plus démocratique et plus responsable face à ses membres.
À titre de politicien, je dois avouer que je me sens obligé de m'excuser pour les actions de tous les gouvernements précédents au cours des 130 dernières années et pour leur échec dans les dossiers autochtones. Ces échecs ont entraîné des conséquences qui sont évidentes pour quiconque se préoccupe un tant soit peu de la situation qui règne à l'heure actuelle dans les réserves du Canada.
En toute sincérité, je considère de mon devoir en tant que député et en tant que citoyen canadien de réparer les erreurs qui ont été commises et de remettre les choses sur la bonne voie. Malheureusement, nous étudions aujourd'hui la question des Nisga'as, et, à mon avis, ce n'est pas avec cet accord qu'on réglera la question, loin de là.
Je suis très fier des réalisations de mon bureau et du Parti réformiste. Nous sommes toujours prêts à promouvoir des changements positifs pour les peuples autochtones du Canada. Nous parlerons donc de cette entente avec les Nisga'as.
Les représentants du gouvernement fédéral et de la Colombie-Britannique ont négocié une entente de revendication territoriale avec les chefs des Nisga'as. Cette entente a été conclue le 4 octobre 1998 et ratifiée par le peuple Nisga'a au début de novembre. Elle doit maintenant être ratifiée par le gouvernement fédéral et l'assemblée législative de la Colombie-Britannique.
Les citoyens de la Colombie-Britannique n'ont pas été invités à participer au processus de négociation et ils n'ont pas non plus eu la chance de dire quoi que ce soit en ce qui a trait à la formulation du traité, et ce à une exception près. Je pense par exemple au moment où les industries fondées sur les ressources et les plaisanciers ont été consultés à la toute fin du processus qui durait depuis 20 ans. Malheureusement, même ces intervenants non autochtones ont été repoussés lorsque Glen Clark a décidé d'en venir rapidement à une conclusion.
Une fois les modalité établies, le gouvernement de la Colombie-Britannique s'est opposé à la tenue d'un référendum provincial sur l'accord. Il ne voulait pas que la population s'exprime. Les Nisga'as ont tenu un référendum. Mais il semble que l'opinion des non-Nisga'as ne compte pas, comme nous l'avons entendu à la Chambre plus tôt.
Selon un récent sondage, 62 p. 100 des habitants de la Colombie-Britannique ont l'impression de ne pas avoir été bien informés sur cette question, la plus importante que leur province ait eu à faire face depuis son entrée dans la Confédération. Ayant effectué un sondage dans ma circonscription, je peux dire que, sur plus de 1 000 répondants, 76 p. 100 s'opposent à ce que leur député, moi-même, se prononce en faveur du traité avec les Nisga'as tel qu'il est rédigé à l'heure actuelle. Plutôt que d'expliquer franchement les dispositions de ce traité, le gouvernement de la Colombie-Britannique a consacré 6 millions de dollars à une campagne de publicité visant à promouvoir le traité.
Malheureusement, de nombreux discours livrés aujourd'hui par les députés du Parti libéral et même d'autres partis, même s'ils étaient bien intentionnés, ont mis davantage l'accent sur les émotions que sur les faits. Encore une fois, mon objectif et celui de mon parti consiste, comme l'a mentionné le député de Kelowna dans ses observations, à assurer un règlement complet et juste de ces questions.
La situation actuelle ne peut plus durer, mais le traité avec les Nisga'as n'améliorera pas les choses. Voici en fait ce que le traité cède au peuple Nisga'a: plus de 2 000 kilomètres carrés de terres dans le nord-ouest de la Colombie-Britannique; le pouvoir de légiférer dans de nombreux domaines et, dans bien des cas, ces lois auront préséance sur les lois provinciales et fédérales; des dispositions sur l'autonomie gouvernementale qui vont nettement au-delà des pouvoirs dont disposent habituellement les gouvernements municipaux; les droits sur les pêches et d'autres ressources naturelles, y compris des droits exclusifs concernant les minéraux et la faune; le droit de gérer la faune sur un territoire cinq fois plus grand que les 2 000 kilomètres carrés, soit un territoire qui est presque le double de la superficie de l'Île-du-Prince-Édouard.
Regardons un peu les renseignements qui intéressent particulièrement les membres des gouvernements municipaux. Les dispositions relatives à l'autonomie gouvernementale figurant dans le traité des Nisga'as sont-elles comparables ou supérieures aux pouvoirs accordés aux municipalités, comme le prétendent les opposants au traité?
Permettez-moi tout d'abord de faire quelques observations au sujet de l'autonomie gouvernementale. Je le répète, j'appuie l'autonomie gouvernementale à laquelle aspirent les autochtones. Je crois que les communautés autochtones devraient pouvoir gérer leurs propres affaires, tout comme les municipalités.
La nation sechelte a tracé la voie en réussissant à concilier tous les intérêts autochtones selon un modèle municipal. Je ferai une brève digression pour poser la question suivante: l'entente de principe conclue avec la nation sechelte pose-t-elle certains problèmes ou renferme-t-elle certaines incohérences? Bien sûr, mais les problèmes peuvent être corrigés. Le traité des Nisga'as est complètement différent de l'entente conclue avec la nation sechelte.
Aux termes de la Constitution du Canada, seuls les gouvernements fédéral et provinciaux ont le pouvoir de faire des lois et ce pouvoir ne peut être transféré à un troisième ordre de gouvernement. Comme certains de mes collègues l'ont signalé, à 14 endroits différents, le traité donne aux Nisga'as un pouvoir spécial qui leur permettra d'intervenir dans certains domaines, leurs décisions ayant la prépondérance sur les lois fédérales et provinciales.
Le secrétaire parlementaire réfute cette allégation. Voilà précisément pourquoi nous voulons que le traité soit renvoyé à la Cour suprême, tout comme l'a été la question du droit de sécession du Québec.
Nous demandons au gouvernement de prendre la mesure qui s'impose et de renvoyer ce traité à la Cour suprême avant qu'il ne soit gravé dans la pierre et consacré dans la Constitution, afin de déterminer qui du secrétaire parlementaire ou de notre parti a raison. C'est la mesure raisonnable et responsable à prendre.
[Français]
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de West Vancouver—Sunshine Coast, La justice; l'honorable député de Markham, Les marchés de l'État.
[Traduction]
L'hon. Ethel Blondin-Andrew (secrétaire d'État (Enfance et Jeunesse), Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté les interventions des deux députés d'en face avec attention et, je crois, avec discernement. J'ai l'impression que, au plan politique, nous appartenons à des écoles de pensée bien différentes. Nous ne sommes pas du même parti. De toute évidence, nous n'avons pas les mêmes grands principes ni les mêmes convictions.
Selon moi, le Canada devrait se réjouir de l'accord des Nisga'as. Ces députés devraient susciter une attitude de générosité à l'endroit de ces gens, des Nisga'as, qui ont demandé bien plus qu'ils n'obtiennent. Ils ne reçoivent que 10 p. 100 des terres qu'ils ont réclamées. Cela ne représente que 10 p. 100 de leur territoire traditionnel. Les Nisga'as ont cédé beaucoup.
Cet accord-là n'a pas été conclu du jour au lendemain. Depuis plus de 20 ans, des gens comme Joe Gosnell y travaillent, et de nombreux dirigeants, anciens et Nisga'as ne seront plus ici pour célébrer le règlement de cette revendication. Ils ne seront pas ici parce que le processus n'est pas achevé. Nous n'en sommes pas là parce qu'il y a des divergences de vues au sujet de notre interprétation de l'autonomie gouvernementale, des droits autochtones garantis par la Constitution, du statut juridique et unique des autochtones, de leur relation avec la Couronne et de l'aspect fiduciaire.
De toute évidence, notre conception de la démocratie est bien différente de celle des députés d'en face. Le député d'en face croit-il qu'il n'y a qu'une seule sorte de démocratie? Est-ce une démocratie formée sur le modèle de la civilisation occidentale? Est-ce une démocratie ethnocentrique et eurocentrique? Est-elle fondée sur une sécession imposée par la loi parce que nous croyons que notre façon de faire est meilleure que la leur, que nous sommes les seuls à avoir raison, que nous avons trouvé l'attitude suprême et que nous savons ce qui est bon pour ces gens?
Les lois traditionnelles peuvent peut-être nous éclairer à ce sujet. J'ai vécu dans une collectivité dirigée par un gouvernement traditionnel; je l'ai vu à l'oeuvre et je sais qu'il fonctionne.
Pourquoi les députés ont-ils peur que les Nisga'as réussissent? Ces derniers pourraient fort bien leur faire la leçon car ils ont le leadership nécessaire pour réussir. Ils peuvent être équitables, judicieux, généreux, communautaires et charitables, comme ils l'ont été. Bien des millionnaires ont accumulé leur fortune sur leur territoire. Bien peu d'entre eux...
Le président suppléant (M. McClelland): Je regrette, mais je vais devoir interrompre la députée.
M. Jim Abbott: Monsieur le Président, je suis d'accord avec la secrétaire parlementaire, mais nous abordons les choses sous un angle différent.
Je reconnais que la démocratie comme je la conçois prévaut à Hong Kong, en Angleterre, en Australie et en Autriche. La démocratie est un ensemble de valeurs où les droits individuels ont un statut particulier par rapport aux droits collectifs. Ce dont la secrétaire parlementaire a parlé à l'égard des autochtones sont des droits collectifs. Il y a des points de convergence entre les droits collectifs et les droits individuels.
À mon avis, l'accord avec les Sechelt est loin d'être parfait, mais au moins c'est un modèle qui marche et dont nous devrions nous inspirer.
Je souhaite que nous trouvions une solution permanente plutôt que des solutions temporaires qui empêchent les plaies de se refermer.
J'ai fait un sondage a été fait dans ma circonscription et je peux dire à la secrétaire parlementaire que 71 p. 100 des électeurs ne veulent pas que je vote en faveur de l'accord; 79 p. 100 estiment qu'ils n'ont pas été assez bien informés au sujet de l'accord; et 92 p. 100 jugent que cet accord n'est pas juste pour le reste des Canadiens.
Ce qui me préoccupe au plus haut point, c'est que l'accord a été adopté à toute vapeur à Victoria et qu'il sera sans aucun doute adopté de la même manière ici. L'accord sera imposé de force aux gens qui n'en veulent pas, ne l'acceptent pas et ne veulent pas l'appliquer. Nous n'avons pas de solution.
L'accord n'est rien de plus que la solution imposée par les bureaucrates, l'élite politique des Nisga'as et les dirigeants politiques d'Ottawa. Aucune solution qui ne jouit pas d'un large soutien public ne saurait être acceptée. L'accord signé en Colombie-Britannique ne reçoit pas un large soutien au sein de la population.
Mme Paddy Torsney (secrétaire parlementaire de la ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, certains parlent de responsabilité financière. Je voudrais attirer l'attention des députés sur le fait que l'accord final et l'accord fiscal et de financement connexe comportent des dispositions qui obligent le gouvernement nisga'a à rendre des comptes. La Constitution nisga'a impose des obligations spécifiques aux gouvernements nisga'as pour ce qui est de rendre des comptes aux citoyens pour les fonds reçus et les dépenses engagées.
Conformément à l'accord fiscal et de financement, la nation nisga'a est tenue de rédiger et de fournir des comptes et des états financiers vérifiés au gouvernement fédéral et/ou au gouvernement de la Colombie-Britannique. Les états financiers doivent respecter les normes comptables généralement acceptées et peuvent être vérifiés par le vérificateur général. Les parties vont établir un comité de financement tripartite qui examinera l'application des dispositions fiscales et de financement. L'approche adoptée dans cet accord assure que les premières nations recevront des comptes pour les fonds qu'elles auront fournis à leurs membres et aux gouvernements d'où viendra une partie de ces fonds. Tels sont les faits.
C'est avec beaucoup de plaisir que je prends la parole sur cette motion du député de Skeena. Cette motion ne me surprend pas. Le député ne fait qu'exposer encore une fois la position bien connue et maintes fois affirmée de son parti quant aux peuples autochtones du Canada. Sa motion témoigne d'un manque total de compréhension du traité conclu avec les Nisga'as et des principes fondamentaux qui le sous-tendent. Soyons clairs!
En ratifiant le traité, le Canada s'assurera une société plus forte et plus juste, une société où les Nisga'as se sentiront finalement chez eux sur leur territoire, une société où les autochtones et les non-autochtones travailleront ensemble à construire un avenir meilleur pour tous les Canadiens. C'est ainsi que nous faisons les choses au Canada: nous nous employons ensemble à résoudre nos différends pacifiquement. Le traité comporte de nombreuses qualités.
Je pense qu'il faut peut-être rappeler les êtres exceptionnels qui, par leur grande détermination, ont fait en sorte que nous discutons de ces questions aujourd'hui. Depuis quelque 10 000 ans, les Nisga'as vivent dans la vallée de la Nass, dans le nord-ouest de la Colombie-Britannique, cette terre de sommets enneigés, de lacs alimentés par les glaciers, de forêts anciennes et de roches volcaniques. Les Nisga'as disent de la vallée de la Nass que c'est la source de vie commune de leur peuple.
Les rapports que les Nisga'as entretenaient depuis toujours avec leur terre ont été perturbés par l'arrivée du capitaine George Vancouver en 1793. À l'époque, les Nisga'as étaient environ 30 000 et ils étaient un peuple de commerçants et d'entrepreneurs. Leur société était sophistiquée. Ces êtres prospères vivaient dans des maisons de deux étages, au sein de collectivités bien établies et organisées. Ils respectaient un code de conduite rigoureux, transmis de génération en génération, au fil des siècles.
L'arrivée des Européens a mis un terme à ce mode de vie. Ce que les premiers colons ont plutôt légué, c'est une sorte de paternalisme dont nous sommes peut-être témoins chez les députés d'en face. Depuis 200 ans, les Nisga'as ont vu leurs terres, celles qu'ils avaient déjà utilisées librement, servir à des fins qui n'étaient pas les leurs. On les a empêchés de pratiquer publiquement leur religion. Leurs enfants ont été envoyés dans des pensionnats éloignés. Ils ont perdu leur langue et leur culture.
Pourtant, même si leurs systèmes politique, économique et social ont été supprimés, ce qui a porté grandement atteinte à leur dignité, les Nisga'as n'ont jamais abandonné la lutte pour réclamer leurs droits et leurs terres. De génération en génération, les dirigeants nisga'as ont persévéré, donnant à leur peuple l'assurance qu'un jour justice serait rendue. Nous avons enfin remis les choses en place. Nous avons fait ce qui s'imposait pour le peuple nisga'a.
Avec la ratification de ce traité, les Nisga'as pourront enfin gérer leurs ressources et s'occuper de leurs affaires. Ils pourront aspirer à l'autonomie gouvernementale et ils auront une base foncière sur laquelle exercer cette autonomie. Tous les Canadiens comprennent qu'il est nécessaire et utile d'inclure des dispositions sur l'autonomie gouvernementale dans les traités conclus non seulement avec les Nisga'as, mais aussi avec les nombreuses autres premières nations qui attendent cette occasion.
Évidemment, cela suppose qu'on reconnaît d'abord la signification des droits inhérents. C'est très précis. La Constitution est la plus importante loi de notre pays. Elle énonce ce qui différencie les Canadiens des citoyens des autres pays. Notre Constitution reconnaît le patrimoine multiculturel des Canadiens et protège leurs droits culturels. En outre, elle reconnaît et protège les droits des autochtones du Canada en tant que premiers occupants de cette terre.
Les autochtones occupaient le continent bien avant l'arrivée des explorateurs des autres continents en Amérique du Nord. Pendant des milliers d'années avant la fondation du Canada, ils se sont dotés de leur propre forme de gouvernement. Aujourd'hui, nous tirons mêmes des enseignements de leurs expériences. Nous adoptons certaines de leurs coutumes, comme une meilleure façon de traiter les questions judiciaires, d'élever les enfants, de traiter l'environnement. Ces gens-là ont beaucoup à nous apprendre.
Leur rôle spécial au Canada, c'est que le gouvernement croit que les peuples autochtones ont le droit de se gouverner eux-mêmes dans un cadre moderne. Ce traité concerne sans équivoque des droits, il n'est pas une affaire de race, comme d'aucuns l'ont prétendu.
La Cour suprême a statué dans l'arrêt Calder de 1973 que les titres autochtones existaient comme droits légaux au Canada. Cette décision historique a mené à l'affirmation des droits ancestraux et issus des traités qui figurent maintenant à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
Notre Constitution et nos tribunaux affirment que les droits ancestraux et issus des traités des autochtones existent. Ils déclarent sans équivoque que ces droits sont réels et qu'ils doivent être respectés.
Les tribunaux ont fait valoir tout aussi clairement que ces droits doivent être négociés et non pas faire l'objet de litiges. Dans un de ses plus récents arrêts, la Cour suprême du Canada a confirmé que les titres autochtones existent et elle a souligné que nous devrions négocier des règlements pour remplir l'objet de l'article 35. Comme le juge Lamer l'a si bien dit: «Nous sommes tous ici pour rester.»
La conclusion de traités nous permet de concilier, dans un cadre moderne, les droits préexistants des peuples autochtones et l'établissement de la souveraineté de la Couronne. Elle témoigne de notre volonté à tous en tant que membres de la société de régler nos grands différends historiques et culturels par la négociation et les compromis.
La négociation des traités est un processus, comme la députée de Western Arctic l'a signalé. C'est un processus où l'on fait des compromis pour trouver des solutions locales à des problèmes locaux. C'est un processus qui établit une compréhension commune de la façon dont les autochtones et les non-autochtones peuvent coexister et atteindre des buts communs.
Il mène à un règlement juste, abordable et honorable qui satisfait toutes les parties, assurant la stabilité et créant des possibilités pour tous ceux qui habitent sur les terres revendiquées ou près de ces terres. Au niveau le plus fondamental, un traité est un pont qui permet de bâtir une nouvelle relation entre les premiers habitants de notre pays et ceux qui ont suivi.
Il a fallu beaucoup de temps. Cette relation est fondée sur la confiance, la reconnaissance, le respect et la responsabilité. C'est une relation qui fait ressortir les avantages communs du partage. Les éléments clés du traité montrent bien ces avantages.
Le traité avec les Nisga'as est le premier du genre au Canada. Il porte à la fois sur les revendications territoriales et sur l'autonomie gouvernementale. Il règle de façon définitive et complète toutes les revendications des Nisga'as. Il reconnaît un territoire d'environ 2 000 kilomètres carrés dans la vallée de la rivière Nass comme étant le territoire des Nisga'as et établit un gouvernement central nisga'a qui a compétence à l'égard des questions internes et propres à leur culture. Les Nisga'as posséderont les droits de superficie et les droits d'exploitation du sous-sol sur leur territoire et auront droit à une part des stocks de saumon de la rivière Nass et de la récolte de gibier dans la région.
Le traité assure aux Nisga'as un transfert financier de 190 millions de dollars payable sur 15 ans. Ces fonds stimuleront l'économie locale et favoriseront le développement économique. Des emplois seront créés. Les Nisga'as seront capables de renforcer leur infrastructure et leurs services communautaires pour les amener au même niveau que ceux dont jouissent les autres Canadiens. Ils se sortiront du cycle de la dépendance créé par 100 ans d'assujettissement à la Loi sur les Indiens.
Au fur et à mesure que les Nisga'as prendront en mains la gestion et l'aménagement de leurs ressources foncières, ils constitueront des collectivités autonomes et autosuffisantes. En comptant sur une base de ressources sur laquelle asseoir leur économie, ces gens fiers et réagissant remarquablement bien réussiront à briser le cycle de la dépendance et à se libérer du piège de la pauvreté qui a tant porté atteinte à leur dignité. Les Nisga'as connaîtront de nouveau la satisfaction qu'apporte l'autonomie, situation que chacun d'entre nous a eu la chance de vivre. Ils seront de nouveau en mesure de contribuer pleinement à la vie de leurs collectivités et du pays.
Le changement le plus profond tient peut-être au fait que, après avoir tenté pendant des décennies de négocier leur place au Canada, les Nisga'as pourront enfin participer sur une base égale à la vie de la société, parler leur langue, enseigner leurs traditions, régir de nouveau leurs propres activités et, comme tous les autres Canadiens, essayer de concrétiser leurs espoirs et leurs rêves.
Les non-autochtones de Colombie-Britannique constateront aussi que des avantages appréciables découlent de ce règlement. La négociation de traités se traduira par l'apparition d'un climat de certitude dans la vallée de la Nass. Les traités préciseront qui peut se livrer à l'exploitation forestière et minière et à la pêche et à quel endroit on peut le faire. Cela signifie certes que des entreprises pourront investir dans la région en toute confiance et donner de l'essor à un potentiel économique inexploité de nombreux milliards de dollars. Cela signifie que les autochtones et les non-autochtones pourront tirer parti d'occasions d'affaires sans avoir à se préoccuper de différends concernant les droits relatifs au territoire et aux ressources.
Les Nisga'as et leurs voisins seront les bénéficiaires directs du règlement monétaire prévu dans le traité. Cet apport de nouveaux fonds donnera à l'économie des collectivités nisga'as et des alentours une impulsion dont elle avait grandement besoin.
Pour la première fois dans l'histoire de la province, un groupe autochtone a accepter de laisser tomber les exemptions fiscales en vigueur. Le traité prévoit la disparition graduelle des exemptions de la taxe de vente et de l'impôt sur le revenu. Au bout de la période de transition, les Nisga'as verseront les mêmes impôts et taxes que les autres Canadiens.
Avec le temps, la nation nisga'a versera une partie des recettes qu'elle perçoit pour contrebalancer les transferts qu'elle reçoit d'autres niveaux de gouvernement au titre de programmes et de services. On prévoit que l'effet conjugué des impôts payés par les citoyens nisga'as et des recettes perçues par le gouvernement nisga'a représenteront le quart des besoins budgétaires annuels de la nation nisga'a d'ici 15 ans à peine.
Les non-autochtones peuvent aussi être assurés que leurs droits et leurs libertés seront également respectés et maintenus. Le traité stipule que le Code criminel, la Charte canadienne des droits et libertés, de même que les autres lois fédérales et provinciales d'application générale continueront de s'appliquer, protégeant ainsi les droits constitutionnels de tous les Canadiens.
Le traité stipule aussi que les gouvernements nisga'as tiendront compte des droits et des besoins de tous les habitants du territoire, y compris les autres Canadiens qui habitent sur le territoire des Nisga'as. Les non-autochtones qui y vivent pourront se porter candidats et voter quand il s'agit d'institutions publiques nisga'as comme les commissions scolaires et les conseils de santé.
L'importance du traité des Nisga'as dépasse de beaucoup les frontières de la Colombie-Britannique. Il représente un pas, modeste mais important, dans la voie d'un meilleur Canada, meilleur pour les Nisga'as, meilleur pour les autochtones et meilleur pour moi et tous mes électeurs.
La ratification du traité des Nisga'as servira de jalon sur notre chemin vers le prochain millénaire. Il servira de lien, de pont reliant notre passé à notre présent et à notre avenir collectif. Il permettra de régler les questions en suspens, d'établir une relation nouvelle et de créer un continuum d'espoir et de possibilités pour les générations à venir.
Pour toutes les bonnes raisons, nous allons finalement prendre la bonne décision. Les députés ne devraient jamais laisser une motion comme celle-ci faire obstacle à cette noble entreprise.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, j'ai prêté une oreille attentive aux propos de la députée. Nous sommes tout à fait d'accord à propos de l'échec de la politique canadienne envers les autochtones. Cet échec incombe surtout au Parti libéral et aux gouvernements libéraux qui se sont succédé presque sans interruption depuis 1867. Les députés d'en face devraient assumer leur responsabilité, qui n'est pas mince, face à l'égard de cet échec.
À propos du coût inhérent au gouvernement des Nisga'as, la députée a affirmé qu'au bout de 15 ans les Nisga'as, grâce aux recettes internes perçues, seront en mesure de rembourser environ 25 p. 100 du coût annuel, soit quelque 32 millions de dollars par an, pour gouverner une population de quelque 2 000 habitants.
Est-ce que la députée a une idée de ce que ce gouvernement coûtera par habitant? Selon elle, est-ce conforme à la situation des autres gouvernements au Canada?
Qu'est-ce que la députée a à dire aux 40 p. 100 de Nisga'as qui n'approuvent pas cet accord? Qu'est-ce qu'elle a à dire aux gens qui nous regardent aujourd'hui, aux gens de Skeena, aux Gitanyow, aux Gitksan et aux Tahltan, qui s'inquiètent du fait que la question des chevauchements ne soit pas réglée avant que le gouvernement fédéral ne signe cet accord et ne signifie sa ferme intention de ratifier la mesure dans le courant de l'automne? Qu'est-ce qu'elle a à dire aux autochtones de Skeena qui nous regardent aujourd'hui et envers lesquels le gouvernement a également une obligation à titre de fiduciaire?
Mme Paddy Torsney: Monsieur le Président, si quelqu'un peut répondre aux gens de Skeena, c'est bien le député. C'est lui qui conteste la constitutionnalité devant les tribunaux de Colombie-Britannique. Le député utilise la Chambre pour mener sa poursuite devant les tribunaux. C'est lui qui tient un double langage.
Il demande quelle est notre politique concernant la question des peuples autochtones. Je lui renvoie la question. Les réformistes n'ont jamais été clairs à ce sujet. Ils n'ont jamais eu d'autres propos que des paroles paternalistes et autres adjectifs en «iste», que je ne répéterai pas maintenant, mais auxquels nous pensons tous.
Le vice-président (M. McClelland): La députée ne devrait pas essayer de les dire par la bande non plus.
M. Mike Scott: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais qu'il soit bien clair que la députée a indiqué, lors de son intervention, que je menais une contestation judiciaire en Colombie-Britannique. Je ne mène aucune contestation judiciaire pour quoi que ce soit.
Le vice-président (M. McClelland): Il ne s'agit pas d'un recours au Règlement, mais d'une question de débat.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je remercie la députée pour le niveau et le contenu de son discours. Elle a ainsi contribué à élever la qualité du débat d'aujourd'hui. Je la remercie d'avoir rappelé certains faits étonnants que nous devrions garder en mémoire.
Ces gens ont vécu pendant 10 000 ans dans la vallée de la Nass avec leur mode de gouvernement, leurs valeurs culturelles, etc. En comparaison de ces 10 000 ans, 100 ans de persécution et de génocide culturel peuvent sembler une période relativement courte et c'est peut-être pourquoi ces gens font preuve d'autant de stoïcisme et de patience.
Je m'attarderai à ce que disait la députée, à savoir que nous faisons preuve d'une arrogance propre aux blancs et d'eurocentrisme en pensant que le système parlementaire britannique est le seul mode de gouvernement valable. Voici une anecdote.
J'ai participé à la ronde d'audiences des autochtones à Charlottetown. Je siégeais avec un groupe de femmes autochtones. Une de ces femmes a dit que dans sa culture et sa communauté, les femmes ne pouvaient être candidates au poste de chef. Tout le monde a secoué la tête et a trouvé cela inacceptable. Cette femme a ensuite ajouté que les hommes n'avaient pas le droit de voter. En quelque sorte, ces gens ont trouvé, au cours des siècles, une façon très intéressante d'obliger les chefs à rendre des comptes. Ce n'est là qu'un exemple.
En guise de clarification, j'ai une question pour la députée. Elle a apporté un certain nombre d'éclaircissements au sujet de la fiscalité, entre autres, pour mettre fin aux rumeurs alarmistes et à la désinformation qui ont cours en Colombie-Britannique et partout dans l'Ouest canadien.
Est-il vrai que le gouvernement et les entreprises Nisga'as seront assujettis au même traitement fiscal qu'une municipalité? Est-il vrai que le gouvernement Nisga'a ne pourra pas imposer les résidents non Nisga'as sur les terres Nisga'as? Enfin, est-il vrai que le pouvoir d'imposition des Nisga'as ne limitera ni ne supplantera les pouvoirs d'imposition des gouvernements fédéral et provincial? La députée peut-elle éclairer la Chambre à ce sujet?
Mme Paddy Torsney: Monsieur le Président, nous sommes tous, à quelques exceptions près, des immigrants dans ce pays. La question dont nous parlons est une question tout à fait fondamentale puisqu'il s'agit des droits de la personne.
Le député de Winnipeg-Centre a bien précisé sa position. Il croit et soutient qu'il existe une meilleure façon de procéder que celle utilisée par le passé. Son respect pour les droits de la personne est évident.
Nous devons tirer des enseignements des peuples qui étaient là avant nous, qui sont à l'origine de la création de ce merveilleux pays, aujourd'hui le pays où il fait meilleur vivre. Nous devons respecter ces peuples, veiller à ce qu'ils jouissent des mêmes droits que les autres Canadiens de poursuivre leurs rêves, de s'autogouverner, de pratiquer leur religion et d'avoir leur propre culture.
Le député de Winnipeg-Centre a tout à fait raison en ce qui concerne la question de l'imposition.
M. Allan Kerpan (Blackstrap, Réf.): Monsieur le Président, la députée a longuement parlé de la responsabilité financière. L'an dernier, la Bande indienne de Saulteaux, dans ma province, la Saskatchewan, a dépensé en déplacements plus d'argent que le cabinet provincial tout entier.
La question que je pose à la députée est très simple. Quelles sont les garanties dans cette entente qui nous permettraient à moi ainsi qu'à mes collègues et au reste des Canadiens d'être sûrs que ce genre de choses ne se produira pas?
Mme Paddy Torsney: Monsieur le Président, la question c'est de savoir ce qui rendrait le député d'en face et son parti à l'aise au sujet de cette entente. Il conviendrait peut-être de rajuster toute leur attitude. Ils sont originaires d'un endroit où l'on ne respecte pas les autochtones. C'est très clair que ces gens ne seront jamais à l'aise avec des ententes qui assurent le respect de la culture de ces gens et la possibilité pour eux d'aller au bout de leurs rêves.
Si le député avait écouté mon introduction, il saurait que j'ai parlé des systèmes mis en place pour assurer la transparence financière.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 15, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, toutes les questions nécessaires pour disposer de l'étude de la motion sont mises aux voix, et le vote par appel nominal est demandé et reporté au mardi 8 juin 1999, à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles.
L'hon. Lyle Vanclief: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais que vous demandiez le consentement unanime de la Chambre pour que nous considérions qu'il est 17 h 30 et que nous commencions l'étude des initiatives parlementaires.
Le président suppléant (M. McClelland): Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a demandé le consentement unanime de la Chambre pour que nous considérions qu'il est 17 h 30. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il n'y a pas consentement unanime, la séance est suspendue jusqu'à l'appel de la présidence.
M. Allan Kerpan: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je ne savais pas que la séance serait suspendue pour les 15 prochaines minutes. Se passe-t-il aujourd'hui quelque chose que je ne saurais pas? J'avais cru comprendre que ce serait moi qui aurait la parole durant les 15 dernières minutes de la période normale disponible.
Le président suppléant (M. McClelland): La période prévue pour le débat se terminait à 17 h 15 et, conformément à un ordre adopté plus tôt aujourd'hui, le débat a été interrompu à 17 h 15. C'est pourquoi le débat est terminé et c'est pourquoi le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a demandé le consentement unanime de la Chambre pour que nous considérions qu'il est 17 h 30 afin que nous puissions commencer le débat sur l'initiative parlementaire.
[Français]
M. Réal Ménard: Monsieur le Président, je pense que vous pourriez vérifier à nouveau pour voir s'il y a consentement pour que nous puissions aborder maintenant les affaires émanant des députés.
[Traduction]
Le président suppléant (M. McClelland): C'est une excellente idée. Nous reprenons depuis le début.
L'hon. Lyle Vanclief: Monsieur le Président, je propose de nouveau à la présidence de demander s'il y a consentement unanime de la Chambre, et nous pourrions l'obtenir cette fois-ci, pour dire qu'il est 17 h 30 et pour passer à l'étude des initiatives parlementaires.
Le président suppléant (M. McClelland): Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire demande le consentement unanime de la Chambre pour dire qu'il est 17 h 30. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Français]
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA
M. Raymond Lavigne (Verdun—Saint-Henri, Lib.) propose: Que le projet de loi C-405, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (bulletins de vote), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Monsieur le Président, je remercie les membres du comité et les députés de cette Chambre de me permettre de débattre du projet de loi C-405, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (bulletins de vote).
J'ai déposé ce projet de loi au mois de mai 1998, afin de contrer les mauvaises intentions de certaines personnes. Comme beaucoup le savent, certaines personnes malicieuses vont présenter un candidat ayant un nom similaire ou identique à un autre. Par exemple, en 1988, dans le comté de Verdun—Saint-Paul dans lequel je me présentais, il y avait, sur les bulletins de vote, le nom d'un candidat portant le nom de Lavergne. Il s'agissait d'un représentant du Parti vert, et cette personne a récolté beaucoup de voix.
En 1993, le même parti avait un candidat dont le nom n'avait aucune similitude avec tous les autres. Ce parti est allé chercher très peu de votes.
En 1997, dans le comté d'Outremont, un des candidats avait un nom semblable à celui du député qui représentait ce comté au moment de l'élection. Heureusement, les gens avaient confiance en ce député et ils l'ont réélu sans trop de problèmes.
Aujourd'hui, dans le cadre des élections provinciales en Ontario, dans le comté de Casselman, il y a deux candidats qui ont des noms similaires. L'un se nomme Jean-Marc Lalonde, et l'autre, Alain Lalonde. Quand on voit des choses comme celles-là, on peut s'imaginer qu'il y a des gens qui veulent, soit réduire la majorité du candidat, soit l'éliminer de la carte.
Je pense que c'est injuste vis-à-vis une personne qui travaille d'arrache-pied pour représenter un parti politique de voir certaines personnes faire de telles choses. C'est pour cela que j'ai déposé un projet de loi pour contrer ces comportements malicieux que l'on retrouve dans tous les comtés du Canada.
J'irai plus loin en disant qu'on devrait imprimer les photos des candidats sur les bulletins de vote, et je vais dire pourquoi. Après que j'aie déposé mon projet de loi au mois de mai, le Carrefour d'éducation pour l'alphabétisation m'a écrit une lettre me demandant de modifier le projet de loi en y ajoutant un paragraphe qui stipulerait que les candidats devraient avoir leur photo sur les bulletins de vote.
J'explique pourquoi. Comme on le sait, les gens analphabètes ont de la difficulté à voter. Je me rappelle qu'en 1980, j'avais aidé une dame pour une organisation représentant des gens qui étaient déficients intellectuels. À ce moment-là, il y avait approximativement 18 personnes déficientes intellectuelles au sein de l'organisme. En l'espace de 19 ans, nous avons sorti des maisons 150 personnes déficientes intellectuelles qui étaient cachées dans une chambre parce que les familles avaient peur de les montrer.
Si on savait combien de gens analphabètes ne vont pas voter. Ils sont gênés parce qu'ils ne savent pas lire. Avec une photo, ce serait simple.
Dans ma campagne électorale de 1997, je faisais du porte-à-porte et des gens me disaient: «M. Lavigne, malheureusement, je n'irai pas voter. Ce n'est pas parce que je ne veux pas voter pour vous. J'aimerais le faire. Je pourrais voter pour vous s'il y avait votre photo, mais je ne sais pas lire, je ne sais pas où aller.» Je leur disais: «Vous n'avez qu'à choisir le troisième nom sur le bulletin de vote». On me répondait: «Oui, mais qu'arrive-t-il si je me trompe et que je choisisse le quatrième candidat?» S'il y avait eu des photos, tous ces gens auraient eu le même droit que les autres d'aller voter.
Les handicapés du Québec et du Canada ont beaucoup de services. Justement, il y a quelques mois, j'ai formé une association avec de jeunes avocats, que le gouvernement du Canada a financé, pour donner la chance aux gens handicapés de connaître leurs droits. On a même ouvert un bureau, au Canada, pour donner des informations aux personnes handicapées afin qu'elles connaissent leurs droits. Les analphabètes ont, comme nous, le droit de vote. Le gouvernement du Canada doit leur donner cette chance.
Le projet de loi que je présente vise, bien sûr, à contrer les mauvais coups ou les mauvaises intentions de certaines personnes, soit pour réduire la marge d'un candidat ou pour l'éliminer complètement, mais je pense qu'on doit pousser encore plus loin et le rendre accessible à tout le monde.
[Traduction]
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, je suis très heureux de dire quelques mots au sujet du projet de loi, au nom de mon parti. Je suis convaincu que l'auteur du projet de loi est bien intentionné. Cependant, nous devons nous demander si c'est la voie que nous voulons emprunter au Canada.
L'utilisation de symboles colorés pour identifier les divers partis politiques sur les bulletins de vote est très répandue dans bien des pays du tiers monde. Dans certains pays, la photo du candidat est sans doute reproduite près de son nom sur le bulletin. Ce serait logique dans les pays où le taux d'analphabétisme est élevé. Ce serait aussi logique dans les pays où il existe une multitude de langues et dialectes locaux ou tribaux et où même quelqu'un d'instruit pourrait s'y perdre.
Le Canada n'est pas un pays du tiers monde. Chez nous, le taux d'alphabétisation est élevé et nous n'avons que deux langues officielles. Par conséquent, nous ne voyons pas l'utilité de cette modification à la Loi électorale du Canada.
De même, je soumets au député que le libellé de la modification proposée laisse place à beaucoup d'interprétation subjective. Qui décide quels noms sont assez similaires pour prêter à confusion sur les bulletins de vote? Y aura-t-il un test de similarité? Il ne l'a pas précisé. Si les candidats ratent le test, n'obtiennent pas qu'on reproduise leur photo sur les bulletins de vote et perdent les élections par une très faible marge, auront-ils un motif pour déclarer le scrutin nul et non avenu? Que se passerait-il si des jumeaux décidaient de se présenter pour deux partis différents? Dans ce cas, la photo ne ferait qu'ajouter à la confusion.
L'autre facteur très valable est sociologique. Bien des études ont démontré que les gens photogéniques suscitent une réaction plus favorable que ceux qui sont moins beaux. Supposons qu'il s'agit d'individus brillants et pleins d'entrain, qui savent s'exprimer et qui sont sensibilisés aux préoccupations de la population, mais qui sont d'apparence ordinaire et pas vraiment beaux comme l'est le député? Qu'arriverait-il alors? En publiant leur photo, on nuirait à leurs chances d'être élus.
Il faut aussi tenir compte de l'avantage énorme dont bénéficie déjà dans une campagne électorale le titulaire du poste. Nous en sommes tous très conscients. Un titulaire bénéficie en général d'un avantage de 20 ou 25 p. 100 dans une campagne électorale. En publiant sa photo sur le bulletin de vote, on ne ferait qu'accentuer cet avantage. Je me demande si le député en conviendra. Si un aspirant est plutôt d'apparence ordinaire, la publication de sa photo ne peut que lui nuire. Cela ne peut que réduire ses chances d'être élu. Je voudrais bien que le député prenne la parole au cours du présent débat pour me dire ce qu'il pense de ces petits problèmes.
En termes clairs, je ne vois pas l'urgence de procéder à ce changement. Nous risquerions d'ouvrir une boîte de Pandore de problèmes potentiels en adoptant ce projet de loi. Compte tenu de la situation exposée par le député, nous n'avons d'autre choix que de voter contre son projet de loi. Au cours du présent débat, le député répondra peut-être aux préoccupations dont je lui ai fait part aujourd'hui et nous verrons.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je prends la parole sur le projet de loi C-405, dans lequel sont proposées des modifications à la Loi électorale du Canada. Je dois souligner qu'il y a une grande confusion dans ce projet de loi. Dans le sommaire, on lit que la photo de chaque candidat apparaîtra sur les bulletins de vote, à côté du nom du candidat. Cela signifie que chacun des députés devra envoyer sa photo et que les bulletins de vote comprendront les photos de tous les candidats.
Or, l'article 2 du projet de loi prévoit que la photo des candidats sera apposée sur les bulletins uniquement si deux candidats ou plus ont un nom identique ou des noms similaires. Si nous trouvons que le projet de loi n'est pas clair, imaginez la difficulté qu'éprouveront les employés d'Élections Canada pour déterminer si les photos de tous les candidats devront figurer sur les bulletins.
En présentant une telle mesure, on laisse également entendre que les électeurs ne sont pas assez intelligents pour identifier le candidat de leur choix. Comme nous le savons tous, le nom du parti figure à côté de chacun des candidats sur les bulletins de vote. S'il y a une similitude de noms ou si un candidat porte le même nom qu'un autre, on sait au moins quel parti chacun des candidats représente. C'est ce qui différencie les candidats.
On ouvre la porte aux abus. Au cours d'élections passées, deux John Turner se sont présentés dans la même circonscription. Ce n'est pas accidentel. Je crois que l'un d'eux représentait le Parti rhinocéros, qui a tendance à ne pas prendre au sérieux le processus électoral Je m'inquiète un peu aussi de la possibilité que les photos envoyées ne représentent pas toujours le visage des candidats. Qu'est-ce qu'une photo d'un candidat. D'aucuns pourraient en profiter pour tourner en dérision le processus électoral, qui est très sérieux.
Je ne vois pas en quoi cela se justifie. Je ne vois pas en quoi l'ajout d'une photo permettrait de différencier les candidats mieux que ne le fait l'indication du parti politique.
Il y a aussi un autre aspect qu'il faut prendre en considération. Que cela nous plaise ou non, si seulement deux personnes ont leur photo sur un bulletin de vote où figurent le nom de six à treize candidats, on attire davantage l'attention sur les deux qui ont leur photo. Notre processus électoral doit être juste et équitable pour tous les candidats et il ne doit pas en privilégier un par rapport aux autres. Si deux personnes avaient leur photo sur le bulletin de vote, cela attirerait automatiquement l'attention sur elles et il se pourrait qu'on ne prête pas attention aux autres candidats. Je ne pense pas que nous voulions nous engager dans cette voie. À mon avis, il serait dangereux d'agir de la sorte.
S'il n'y a pas vraiment de problème, pourquoi changer notre façon de faire. Élections Canada travaille très fort pour faire en sorte que les bulletins de vote soient clairs et que les noms y soient inscrits en ordre alphabétique. Je le répète, il peut s'ensuivre des problèmes si quelqu'un veut tirer avantage de la situation. J'ai entendu dire que quelqu'un avait fait inscrire sur un bulletin de vote la mention «aucun d'entre eux», précédée de quelques z. Nous devons veiller à ne pas encourager pareille attitude qui tourne en ridicule le processus électoral.
Élections Canada utilise déjà diverses méthodes pour clarifier les choses, par exemple, comme je l'ai déjà dit, l'ordre alphabétique, les initiales et l'allégeance politique. Si tout cela n'est pas suffisamment clair, un candidat peut aussi inscrire sa profession sur le bulletin de vote.
Il y a de nombreuses façons d'identifier clairement les candidats. Le fait de mettre une photo sur le bulletin de vote ne serait pas utile et que cela rendrait le processus injuste. Je vais donc voter contre cette initiative parlementaire, et j'encourage les députés à faire de même.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Madame la Présidente, je veux d'abord féliciter le député de Verdun—Saint-Henri pour son initiative.
Je crois qu'il est tout à fait fondé de se préoccuper de la saine et pleine participation de nos concitoyens au choix des gouvernants. En ce sens, je comprends qu'il veuille s'assurer que tous ceux qui votent le font de façon éclairée.
Nous croyons cependant qu'une difficulté se pose. Nous croyons que le projet de loi, tel que libellé, confère un avantage indu à certaines catégories de candidats.
Comme le député l'a mentionné dans son discours préliminaire, si les bulletins de vote renfermaient la photo de tous les candidats et candidates, je crois que le député recevrait certainement, sinon l'unanimité, certainement beaucoup d'appuis, et il aurait sans aucun doute l'appui des collègues du Bloc. Nous représentons des circonscriptions où nous savons que certains de nos concitoyens sont analphabètes, pour toutes sortes de raisons liées à des parcours de vie qu'il nous faut respecter.
Profitons de l'heureuse initiative de notre collègue pour rendre hommage à nos concitoyens qui s'engagent dans ces processus de scolarisation et d'alphabétisation. Ils ont tout notre appui, parce que nous savons que ce n'est pas facile.
J'invite le député à réfléchir à la possibilité de déposer un amendement, de telle sorte que tous les candidats et candidates puissent avoir leur photo sur le bulletin de vote. Je crois qu'il rendrait un service à la démocratie et que tous les parlementaires lui en seraient reconnaissants.
Il est très important de s'assurer que nos concitoyens et nos concitoyennes participent au processus démocratique. Autour de la planète, il y a plusieurs pays où, malheureusement, la possibilité d'élire des dirigeants et des dirigeantes n'est pas un droit reconnu.
Beaucoup de gens de par le monde souhaiteraient être à notre place, nous qui pouvons, de façon régulière, périodique, tous les quatre ou cinq ans, porter notre attention sur la vie publique, sur la chose publique et nous y associer, à un moment très important, qui est celui de choisir les personnes qui vont nous représenter dans les institutions démocratiques, ici à la Chambre des communes. Évidemment, c'est un principe que nous pourrions appliquer à beaucoup d'autres institutions.
Je crois que le député soulève une question importante, c'est tout à son honneur de le faire, et nous l'en remercions. Je veux rappeler que nous sommes fiers, car au Québec—il est, comme moi, un député du Québec; son voisin de banquette est également un député du Québec—nous avons une tradition démocratique extrêmement enracinée. Le premier Parlement en Amérique du Nord a été l'Assemblée nationale.
Lors du dernier référendum, peu importe que nous ayons été pour le camp du oui ou celui du non, nous devons trouver une commune réjouissance dans le fait que plus de 90 p. 100 de nos concitoyens se sont prévalus de leur droit de vote.
Quand nous occupons des postes électifs, comme c'est le cas pour le député de Verdun—Saint-Henri, pour moi et pour l'ensemble des parlementaires, nous avons tous intérêt à ce que les gens participent massivement au scrutin. Il n'y a pas de doute que ce que propose le député, c'est-à-dire d'ajouter sur le bulletin de vote la photo à côté nom, est une mesure éclairée qui permet aux gens d'avoir la meilleure information possible sur les gens qui briguent les suffrages.
Je l'invite donc à considérer un élargissement du projet de loi. Je suis certain que je me fais le porte-parole de mes collègues du Bloc québécois en disant que nous serons heureux d'appuyer une initiative comme celle-là.
[Traduction]
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Madame la Présidente, je ne prévoyais pas intervenir aujourd'hui au sujet de ce projet de loi, mais il y a un aspect que je tiens à faire ressortir et qui n'a pas été mentionné par les autres députés.
J'ai moi aussi des réserves au sujet de la présence des photographies sur le bulletin de vote. Je ne suis pas d'accord avec le député du Bloc qui vient de dire qu'il ne verrait probablement pas là un trop grand problème si toutes les personnes dont le nom figure sur le bulletin y avaient aussi leur photographie. Ce que j'ai à dire constituerait un bon argument pour qu'aucune des deux solutions ne soit retenue. La photo de chacun des candidats ne devrait pas figurer sur le bulletin, pas plus que la photo de seulement deux candidats lorsqu'ils ont un nom très semblable.
Si des gens ne savent pas à quoi ressemble leur candidat ou s'ils s'intéressent peu à la politique ou n'ont pas porté attention aux dépliants et documents qui ont été déposés à leur porte, il est tout à fait possible qu'ils fondent leur choix sur l'allure de la personne.
Tous conviendraient, j'en suis sûr, que ce serait fondement inacceptable. Il existe toutes sortes de préjugés, qu'il s'agisse de préjugés raciaux ou encore de parti pris contre l'autre sexe ou la présence des femmes en politique. Mon nom pourrait être celui d'un homme ou d'une femme. De nombreuses personnes des deux sexes portent le même nom que moi.
Il pourrait y avoir deux personne portant le même prénom, l'un étant un homme et l'autre, une femme. Le choix exercé pourrait tenir simplement au fait que quelqu'un n'aime pas la présence des femmes en politique. Cet électeur voterait pour l'homme, sans tenir compte des qualités de l'un ou l'autre.
Des voix: Oh, oh!
M. Pat Martin: Mes vis-à-vis rigolent. Il y a certainement des gens qui pensent ainsi, qui ont des préjugés contre les femmes en politique. Ils peuvent très bien voter en fonction du sexe du candidat. Je dis simplement que c'est une possibilité et il convient de le mentionner ici.
Il y a d'autres facteurs comme l'origine ethnique. Il y a des gens victimes de préjugés en raison de leur race, des membres de minorités visibles. Peu importe les mérites ou les qualités de ces gens, s'ils portent un turban, même si leur nom est semblable à celui de leur opposant, il y a des gens qui auront des préjugés négatifs à leur endroit.
Et les personnes handicapées? Quelqu'un comme Stephen Hawking n'aurait pas beaucoup de chances auprès des électeurs qui estiment que les personnes handicapées ne peuvent pas les représenter aussi bien que d'autres personnes. Nous savons tous que quelqu'un comme Stephen Hawking serait un grand atout en politique.
Il existe des moyens de retoucher avantageusement des photographies. Toutes sortes d'études ont été faites sur les réactions des gens devant la beauté physique. Prenez un athlète olympique de 30 ans ayant un beau visage et le même nom qu'une personne bedonnante, d'âge moyen et me ressemblant. Cet athlète aurait un net avantage sur cette personne. Si c'était moi, je trouverais cela frustrant, car je pense faire un meilleur député qu'un athlète.
Pour ces raisons, je suis contre l'idée, même si je comprends qu'elle a été proposée avec les meilleures intentions du monde et la volonté d'améliorer le système. Notre parti ne pourrait pas voter pour ce projet de loi dans sa forme actuelle parce qu'il existe indéniablement des préjugés fondés sur l'apparence physique.
[Français]
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Madame la Présidente, il me fait plaisir d'appuyer le projet de loi de mon collègue de Verdun—Saint-Henri.
Ce projet de loi traite d'un vrai problème dans notre société canadienne. On reconnaît qu'il existe un taux d'analphabétisme extrêmement élevé et d'ailleurs inacceptable pour un pays industrialisé, un pays qui se vante d'être un des meilleurs au monde pour la qualité de vie. Malgré cela, nous avons un réel problème. Il y a des gens qui ne savent pas lire ou qui ont de la difficulté à lire.
[Traduction]
Je veux assurer au député de St. John's-Est, qui n'est pas à la Chambre dans le moment, mais qui a participé au débat sur ce projet de loi...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je dois rappeler à la députée que nous ne devons pas faire de remarques au sujet de la présence ou de l'absence des députés à la Chambre.
Mme Marlene Jennings: Madame la Présidente, ce n'était pas là une remarque désobligeante. Le député de St. John's-Est a dit que, s'il y avait des photos sur les bulletins de vote, cela pourrait causer des problèmes à une personne qui n'a pas une belle apparence. Je veux lui assurer qu'il paraît très bien. C'est la première chose que je voulais dire.
Je veux assurer au député néo-démocrate qu'il paraît très bien aussi. En fait, je crois que tous les députés qui sont à la Chambre aujourd'hui, ou qui n'y sont pas mais qui auraient le droit d'y être, paraissent bien. Le député d'Hochelaga—Maisonneuve paraît bien.
Toutefois, le député néo-démocrate a fait ressortir le fait que cela pourrait entraîner de la discrimination fondée sur la race, le sexe ou l'apparence d'une personne. Il a raison. Il y a peut-être des gens qui, en voyant une photo, décideront de ne pas voter pour un candidat parce que c'est une femme ou une personne âgée, parce qu'il est trop jeune, parce qu'il est noir ou qu'il appartient à une autre minorité visible ou parce qu'il est autochtone.
Heureusement, nous avons un système où nous avons des panneaux publicitaires. Je puis assurer au député qu'il serait incroyable qu'un des électeurs de ma circonscription qui ont voté dans une proportion de 59 p. 100 en faveur de Marlene Jennings n'ait pas su que Marlene Jennings est une Canadienne noire, c'est-à-dire que je suis une femme et d'origine africaine. Cela aurait été très difficile. J'avais des affiches partout dans la circonscription. Il aurait fallu que cet électeur souffre de cécité et n'ait pas d'amis ou de parents avec qui communiquer tout au long de la campagne pour ne pas savoir, d'abord, que je suis une femme et, deuxièmement, une Noire; bref, que j'appartient à une minorité visible.
J'ose espérer aussi que nous avons fait suffisamment de progrès au Canada pour que, sans égard au niveau d'instruction, la vaste majorité des Canadiens votent pour le meilleur candidat, pour le candidat qui représente le parti qui incarne leurs valeurs. Je pense que c'est effectivement le cas. Nous avons d'ailleurs de plus en plus de diversité au sein de la Chambre des communes.
Nous avons un plus grand nombre de femmes députées au sein de cette 36e législature que nous n'en ayons jamais vu depuis 130 ans qu'existe notre Confédération.
Nous avons une plus grande diversité de représentation de groupes d'âges, des jeunes députés, des députés d'âge moyen—groupe auquel je pense appartenir—et des députés plus âgés et plus murs.
Nous avons une plus grande diversité de représentation sous l'angle des origines ethnoculturelles. Il y a 20 ans seulement, il aurait été très difficile de trouver à la Chambre un député dont le nom ne soit pas Tremblay ou James ou Brown. Je n'aurais peut-être pas dû utiliser le nom de Brown; disons McKinney ou Smith.
La Chambre actuelle démontre bien l'ouverture de notre société canadienne, de la capacité des électeurs canadiens de voir, au-delà de l'apparence physique d'une personne, son expérience et ses valeurs de même que la politique du parti que cette personne représente.
[Français]
Dans ma circonscription, il y a une diversité au niveau socioéconomique. Le taux des résidants qui vivent sur l'assistance sociale est assez perturbant. Également, un certain taux de ces résidants sont des analphabètes, et il y en a plusieurs parmi eux qui ont voté pour moi, malgré ou peut-être à cause du fait—je l'ignore—que je suis une femme, que je suis d'âge moyen et que je vienne d'une minorité visible. Ces gens-là ont peut-être pensé qu'à cause de ma propre diversité, justement, je pouvais comprendre les problématiques qu'ils vivent actuellement.
Je pense qu'un point important a été soulevé ici à la Chambre, c'est que le projet de loi, dans sa forme actuelle, peut effectivement causer une difficulté, et c'est le fait qu'il n'exige les photographies sur les bulletins de vote que dans les cas où les noms de deux ou plusieurs candidats peuvent prêter à confusion. Je crois que les bulletins de vote devraient comporter les photographies de tous les candidats et candidates, comme l'a d'ailleurs mentionné le député de Hochelaga—Maisonneuve.
Je peux assurer tous les députés qui sont ici à la Chambre présentement que le député qui a déposé ce projet de loi—que j'appuie, d'ailleurs—a l'intention, s'il réussit à lui faire passer l'étape du débat en deuxième lecture et si son projet de loi est renvoyé en comité, de présenter un amendement pour s'assurer, justement, que tous les candidats aient leur photo sur le bulletin de vote.
De nombreuses associations et maints organismes à but non lucratif travaillent sur la question de l'analphabétisme au Canada, et plus particulièrement au Québec. Nous avons d'excellentes organisations, dont le Regroupement des associations de l'analphabétisme, Literacy Partners in Quebec, et j'en passe. J'espère qu'ils ne seront pas insultés du fait que je ne les nomme pas tous.
J'ai consulté plusieurs d'entre eux sur ce point, et je peux vous dire que tous les gens que j'ai consultés, qui travaillent du lundi au vendredi et souvent les fins de semaine avec les analphabètes, appuient d'une voix commune l'idée d'avoir la photo de chaque candidat sur les bulletins de scrutin.
Je vais revenir sur le point soulevé par l'honorable député du NPD. Doit-on avoir peur que notre photo paraisse sur un bulletin de vote, quand on n'a pas peur de voir notre photo sur des babillards qui, parfois, sont de 10 pieds par 11 pieds, ou de 15 pieds par 10 pieds de hauteur?
Si on vivait à l'époque où la grande majorité des gens n'avaient même pas le droit de vote, dans le temps du féodalisme, on aurait peut-être peur d'avoir notre photo. Mais à ce moment-là, ce serait plutôt l'ignorance qui nous dirait que notre image imprimée sur un papier peut nous apporter de la malchance.
Je crois que tous les partis de cette Chambre devraient appuyer ce projet de loi. Si, comme je le souhaite, le projet de loi est renvoyé en comité, nous devons être confiants qu'un amendement serait adopté pour assurer que les photos de tous les candidats apparaissent sur le bulletin de vote.
Je remercie tous les députés à la Chambre pour leur patience et leur compréhension et je félicite l'honorable député de Verdun—Saint-Henri.
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Madame la Présidente, nous étions en train de discuter des possibilités d'amender ce projet de loi dont les motifs me semblent tout à fait louables et justifiables dans la mesure où, effectivement, comme ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine l'a bien indiqué, c'est un plus pour la démocratie que de permettre aux citoyennes et citoyens d'avoir le maximum d'informations quant aux candidats et candidates qui sont en lice.
Il n'y a pas de doute que les motifs qui sous-tendent ce projet de loi sont tout à fait acceptables et méritent qu'on les appuie. Cependant, le libellé du projet de loi nous apparaît un peu problématique dans son état actuel, puisqu'on ne veut mettre la photo des candidates et des candidats que si le nom de deux ou de plusieurs ceux-ci est identique.
Cela pose évidemment un problème pour les autres candidats et candidates qui n'auraient pas leur photo sur le bulletin de vote. D'une certaine façon, c'est presque les placer dans une position où ils ne combattent pas à armes égales puisque certains candidats et candidates pourraient être identifiés sur le bulletin de vote par leur physionomie, alors que d'autres ne le seraient pas.
À partir du moment où, durant une campagne électorale,—et on sait à quel point c'est important—il est possible de voir, sur les poteaux de téléphone ou sur les balcons, la physionomie des candidates et candidats, le fait d'avoir uniquement quelques photos sur un bulletin de vote désavantagerait ceux dont la photo n'y apparaîtrait pas.
Tel que libellé à l'heure actuelle, le projet de loi nous apparaît totalement inacceptable. Cependant, j'imagine qu'il serait possible d'en arriver à proposer un amendement, soit au niveau du comité, soit à l'étape du rapport ou, pourquoi pas, aujourd'hui même, s'il y a le consentement unanime. Je ferai, à la fin de mon allocution, une proposition à cet effet. Je serai en cela appuyé par mon collègue de Hochelaga—Maisonneuve, que j'invite à regagner son fauteuil afin qu'il puisse effectivement m'appuyer à cet égard.
Je disais tout à l'heure que les motifs de ce projet de loi sont tout à fait louables parce que plus on a d'informations sur les candidates et candidats, mieux on est en mesure de faire un choix éclairé. C'est vrai bien sûr dans le cas des candidates et candidats dont le nom peut porter à confusion.
Par exemple, prenons simplement mon prénom, Stéphane. Pour beaucoup d'anglophones, Stéphane est un prénom de femme parce que ça se termine comme Suzanne ou Joanne. Je me souviens que quelques jours après avoir été élu, je recevais du courrier de partout à travers le Canada où on m'identifiait comme «Mrs. Stéphane Bergeron». Pour ceux et celles qui n'étaient pas tout à fait certains, ils ajoutaient même un «i» à mon prénom, en indiquant «Mrs. Stéphanie Bergeron», parce qu'ils étaient convaincus qu'il y avait une erreur dans mon prénom.
Pour beaucoup d'anglophones, mon prénom en est un féminin. Pour les quelques concitoyens et concitoyennes anglophones de ma circonscription—ils ne sont pas très nombreux—cela peut effectivement poser un problème. J'imagine que cela peut être le cas pour un très grand nombre de candidates et candidats qui se présentent à une élection et dont le nom peut porter à confusion.
Par ailleurs, cette idée d'avoir sur le bulletin de vote la physionomie des candidates et candidats est une excellente idée pour nos concitoyennes et concitoyens qui, malheureusement, sont analphabètes et ont beaucoup plus de difficultés à reconnaître la forme des lettres latines telles que nous les connaissons et qui, conséquemment, se voient désavantagés par rapport aux autres électeurs et électrices qui doivent faire un choix le jour du scrutin.
Il ne fait aucun doute que ce projet de loi est intéressant. Mais effectivement, comme je le signalais, les dispositions, telles que présentées dans le projet de loi, nous apparaissent totalement inacceptables.
Conséquemment, j'aimerais proposer un amendement, et j'invite tous mes collègues à l'appuyer. Je propose:
Tous les candidats et candidates doivent être identifiés sur le bulletin de vote au moyen d'une photo de grandeur approximative de 3 cm par 1,8 cm, prise dans l'année précédant le jour des présentations.
Il est important de préciser que cet amendement, rédigé soigneusement par mon collègue de Hochelaga—Maisonneuve, que je présente avec son appui, est tout à fait en concordance avec l'article 1 du projet de loi.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Malheureusement, à cette étape du débat, l'amendement que j'ai devant moi ne peut être acceptable dans sa forme.
M. Stéphane Bergeron: Madame la Présidente, pourrais-je vous demander, dans toute votre sagesse, la raison pour laquelle vous considérez que cet amendement est irrecevable dans sa forme, puisque, s'il y a consentement unanime, il est certainement recevable au niveau de la procédure?
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je vais prendre l'amendement en délibéré pour bien l'étudier et je rendrai une décision avant la fin de cette heure-ci.
M. Stéphane Bergeron: Madame la Présidente, je ne veux pas prolonger indûment le débat, sinon pour dire que vous aurez l'occasion de vous pencher sur le libellé de l'amendement tel que proposé. Je pense que ce n'est pas faire injure à notre collègue de Verdun—Saint-Henri que d'amender ce projet de loi.
Par les hochements de tête que nous observons devant nous, la plupart des collègues de cette Chambre semblent effectivement d'accord avec l'idée selon laquelle la photo de tous les candidats et de toutes les candidates devrait apparaître sur le bulletin de vote, et non seulement la photo des candidats et candidates dont le nom serait semblable.
Conséquemment, je soumets respectueusement à mon collègue de Verdun—Saint-Henri que c'est par un geste d'ouverture que son projet de loi, amendé par un parti d'opposition, pourrait, le cas échéant, rallier l'ensemble des partis de cette Chambre.
[Traduction]
Mme Paddy Torsney (secrétaire parlementaire de la ministre de l'Environnement, Lib.): Madame la Présidente, cela montre seulement qu'il y a une complexité de problèmes. Nous avons un grand nombre de personnes à la Chambre dont le nom n'est pas propre à un homme ou à une femme.
[Français]
Comme mon collègue d'en face, qui reçoit de nombreuses lettres adressées à «Madame Bergeron», j'ai reçu beaucoup de lettres adressées à «Monsieur Torsney». Et moi, je n'ai pas un nom très commun au Canada; il n'y a que ma famille qui porte ce nom, parce que mes parents ont immigré au Canada.
[Traduction]
Je suis heureuse de prendre part au débat sur le projet de loi C-405 qui a été parrainé par le député de Verdun—Saint-Henri. Pour ma part, je suis favorable à tout ce qui peut être fait pour améliorer le taux de participation au processus électoral, pour aider les gens qui souffrent de handicaps physiques ou dont les capacités de lecture et d'écriture sont déficientes. Cette initiative vise à améliorer l'accès, surtout dans le cas des personnes qui accusent une inhabilité à lire.
L'accessibilité est un principe fondamental qui s'applique à tous dans notre système électoral. Les questions soulevées ici sont très importantes.
La Loi électorale du Canada a été modifiée à plusieurs reprises ces dernières années. Les bureaux de scrutin le jour des élections, le bureau du directeur des élections et les bureaux de scrutin par anticipation ont pour mandat d'être accessibles de plain-pied. Certes, Élections Canada ne satisfait pas entièrement à la norme d'accessibilité, mais 97 p. 100 de ses bureaux offrent l'accès de plain-pied aux électeurs handicapés.
En 1993, le projet de loi C-114 a étendu l'utilisation du vote par bulletins de vote spéciaux à tous les électeurs, permettant ainsi aux électeurs souffrant d'une déficience physique de voter par la poste. Élections Canada a adopté des mesures pour aider les électeurs qui ont du mal à comprendre l'anglais ou le français. La documentation traitant du processus électoral a été publiée en 24 langues lors des dernières élections générales. On encourage les directeurs des élections à nommer des fonctionnaires électoraux multilingues afin qu'ils puissent fournir des renseignements dans plusieurs langues, surtout dans les régions urbaines, là où vivent des gens de diverses origines ethniques.
D'autres mesures et nouvelles techniques ont été adoptées pour répondre aux besoins particuliers des personnes hospitalisées et des électeurs atteints de déficiences visuelles et auditives. On a proposé des bureaux de scrutin mobiles, des bulletins de vote en braille, la présence d'interprètes gestuels dans les bureaux de scrutin et une ligne spéciale pour les électeurs atteints de déficiences auditives. Les électeurs qui ont du mal à lire font partie de ceux qui ont des besoins particuliers. Nous devons trouver un moyen de leur venir en aide.
Le député de Verdun—Saint-Henri a proposé d'ajouter la photo des candidats. Nous nous sommes déjà penchés sur cette question ainsi que sur la possibilité d'ajouter le logo des partis sur les bulletins de vote.
En 1991, la Commission royale d'enquête sur la réforme électorale et le financement des partis a recommandé que le logo ou les initiales des partis soit imprimés sur les bulletins de vote et qu'il y ait des affiches portant les photos des candidats dans les bureaux de scrutin. Qui sait quelles conséquences tout cela aurait pu avoir pour nous.
Par suite de l'élection générale de 1993, le Directeur général des élections, qui est un homme charmant, a recommandé dans l'annexe de son rapport déposé au Parlement en 1996 que le logo des partis enregistrés soit imprimé à l'encre noire sur le côté gauche du bulletin, devant le nom du candidat.
Dans un rapport du mois de juin 1998 sur la Loi électorale du Canada, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a exprimé bon nombre de réserves quand à cette recommandation. Certains députés n'étaient pas d'avis que l'utilisation des logos pourrait permettre d'accroître la participation des électeurs analphabètes. D'autres ont repris les préoccupations soulevées par le Directeur général des élections relativement aux difficultés techniques que représentait l'ajout du logo ou de la photo des candidats sur le bulletin de vote, demandant même si la photo devrait être en couleur ou en noir et blanc. Le comité de la Chambre n'est pas arrivé à un consensus sur la question.
Il y a bon nombre de facteurs dont il faut tenir compte dans le dossier à l'étude. Il n'existe pas d'études empiriques. Nous ne savons pas si le taux de participation des personnes qui ont des difficultés de lecture est plus faible que celui de l'ensemble des Canadiens. Il n'est pas évident que les personnes qui ont du mal à lire et ne votent pas voteraient davantage s'il y avait des photos sur les bulletins.
Il est difficile de se prononcer, comme beaucoup de députés l'ont dit, sans faire plus de recherches sur l'influence que l'utilisation de photos pourrait avoir sur le choix que l'électeur fait entre les différents candidats. Cela fausserait-il les choix? Aurions-nous été élus ou non? Ce n'est pas clair. Cette mesure pourrait fort bien avoir pour conséquence imprévue une influence sur les habitudes des électeurs qui tiendrait à certaines difficultés à l'égard de membres des divers partis.
Certains diront que c'est impossible, mais j'avais de grandes affiches, ma photo a paru dans les journaux, et il y a eu de moi une foule de photos dans des documents. Pourtant, des gens m'ont dit que leur parent, leur ami ou une connaissance avait voté pour moi expressément parce que j'étais libérale et que je n'étais pas une femme. Qui sait? Je peux dire à tous ceux qui suivent les délibérations que je suis bel et bien une femme.
L'utilisation de photographies sur les bulletins de vote pourrait être avantageuse pour les électeurs qui veulent voter pour un candidat reconnaissable, sans égard à son affiliation politique. Mais elle ne ferait rien pour ceux qui veulent avant tout voter pour un parti.
Plusieurs questions demeurent sans réponse. Combien coûterait cette proposition? Quel en serait l'incidence sur le calendrier électoral? Sa mise en oeuvre revêt-elle une dimension technique?
Soyons clairs. L'impression des bulletins ne peut commencer qu'après la date limite pour les mises en candidature, soit le jour 21. L'ouverture des bureaux de scrutin par anticipation commence 10 jours après la clôture des mises en candidature, soit les jours 10, 9 et 7. Par conséquent tous les bulletins doivent être imprimés et distribués en 10 jours. Ce serait beaucoup demander alors que les délais sont déjà très courts.
L'impression serait en outre compliquée par l'ajout de photos, sans parler du fait qu'il faudrait probablement modifier les bulletins.
Comme l'a dit le député d'en face, il faudrait fixer des règles concernant la qualité de l'impression, le format, la taille et l'emplacement des photos. Il faudrait également donner à Élections Canada la responsabilité de voir à ce que les règles soient appliquées, faute de quoi nous risquerions tous de souffrir d'un manque d'équité.
Élections Canada n'a pas encore eu l'occasion de répondre à toutes ces questions. Nous savons déjà que les 36 jours que dure la campagne électorale ne laissent pas grand place pour ajouter des étapes supplémentaires au processus.
Le projet de loi C-405 ne nous donne pas beaucoup de paramètres. Il faut que nous étudions ces questions de près et que nous voyons quelles sont les autres options.
Par exemple, dans les Territoires du Nord-Ouest, les photos des candidats sont affichées dans tous les bureaux de vote. À premier abord cela pourrait être la solution au problème soulevé par le député d'en face.
Aucune proposition ne devrait être exclue ou adoptée sans consultation préalable des organismes représentant les personnes qui ont du mal à lire. Ces organismes sont plus à même de trouver les solutions. Il nous faut une solution ascendante. Il faut mener d'autres analyses.
Nous appuyons tous à la Chambre les question d'accessibilité. En ce qui concerne le fait d'encourager un plus grand nombre de gens de divers milieux à participer, nous appuyons tous cela, je l'espère, et nous nous attachons chaque jour à faire tomber ces obstacles, mais il est nécessaire de mener d'autres analyses.
Je rappellerai aux députés que le leader du gouvernement à la Chambre présentera une loi pour modifier la Loi électorale du Canada dans un proche avenir. Peut-être cette question pourrait-elle être abordée à ce moment-là par le député d'en face et par tous les députés de la Chambre?
[Français]
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Madame la Présidente, j'appuie le projet de loi de mon collègue. Je comprends les constatations et les contraintes qui ont été mises en valeur par différents députés de l'opposition, et même de notre parti, à l'effet que la photo de tous les candidats devrait apparaître sur les bulletins de vote, et je pense que c'est un élément très valable.
Mais pour la question d'ensemble, je pense qu'il faut d'abord penser aux gens de la société qui sont défavorisés d'une façon ou d'une autre. C'est bien de dire: «Nous sommes tous pour l'accès», mais ensuite, quand on dit: «Il y a beaucoup de contraintes», je réalise que ce n'est pas quelque chose de facile à mettre en place. Mais en même temps, c'est pourquoi nous avons des comités de la Chambre. Si ce projet de loi, comme je l'espère, passe l'étape de la deuxième lecture, il ira en comité, et le comité pourra convoquer des représentants d'Élections Canada pour débattre des modalités.
Je ne vois pas, par exemple, pourquoi les photos officielles des députés qui paraissent sur les affiches ne pourraient pas être les mêmes photos qu'on mettrait sur les bulletins de vote. En fait, c'est une constatation logique.
Aujourd'hui, le fait est qu'Élections Canada dépense 8,6 millions de dollars pour des pamphlets qui sont envoyés aux organismes qui s'occupent des analphabètes. Mais qui sait si ces organismes sont en contact avec tous les analphabètes. J'en ai rencontré moi-même et, souvent, c'est une question de fierté individuelle.
[Traduction]
La fierté individuelle. Combien de gens souhaitent appartenir à ces organisations de toute façon? Lorsqu'ils le souhaitent, comment ces organisations parviennent-elles à atteindre ces gens qui ne savent pas lire?
Même si Élections Canada envoie des dépliants à ces organisations, même si Élections Canada a recours à toutes sortes de systèmes pour essayer de rejoindre les analphabètes, il y a certainement des gens qu'elle ne rejoint pas. Des gens sont venus me voir à des rencontres.
Lors d'une rencontre à laquelle ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce et moi assistions, une dame nous a dit qu'elle avait peur de prendre l'autobus. Elle avait évité tous les endroits publics jusqu'à l'âge de 35 ou 40 ans. Son orgueil l'empêchait d'accomplir les choses quotidiennes et ordinaires que nous tenons pour acquis. Un jour, l'idée lui est venue de faire partie d'une association. Elle s'est inscrite dans une école à un âge très avancé. Elle a même essayé de cacher à ses propres enfants qu'elle était analphabète.
De telles gens ne prennent pas d'initiatives. Si nous pouvons les aider de quelque manière que ce soit, si nous pouvons employer ces 8,6 millions de dollars pour apposer des photos sur les bulletins de vote, il sera alors simple de décider si elles devraient être en noir et blanc ou en couleur. Nous l'avons fait pour les permis de conduire. Au Québec, nous avons pris une telle décision à l'égard des cartes d'assurance-santé.
Je ne vois rien de mal à décider si la photo devrait être en couleur ou en noir et blanc, combien elle coûterait, quels devraient être les critères d'utilisation des photos, si elles devraient dater d'au plus un an ou être récentes. Nous le faisons pour les passeports. Nous n'envoyons pas n'importe quelle photo au bureau des passeports. Les photos doivent être estampillées et certifiées. Je ne crois pas que le coût serait exorbitant.
Je doute que le coût soit supérieur au montant de presque 9 millions de dollars qu'Élections Canada dépense aujourd'hui pour conseiller les analphabètes.
Le projet de loi que parraine mon collègue vaut la peine d'être renvoyé au comité. C'est précisément ce qu'il demande. Il ne prétend pas que son projet de loi est parfait ou qu'aucune question reste sans réponse. Il va sans dire que, comme dans tout changement, il y a des questions qui sont sans réponse, ce qui ne veut pas dire qu'elles sont insolubles.
Le député demande que la Chambre se prononce majoritairement en faveur du renvoi de la motion au comité. Ainsi, le comité pourra tenir des audiences, pourra faire témoigner des représentants d'Élections Canada et d'organisations s'occupant des personnes analphabètes et handicapées.
Le projet de loi de mon collègue mérite notre appui. Je l'appuie sans réserve. Des amendements pourront être apportés en comité. Le député pourra même proposer des amendements, ce qu'il se propose d'ailleurs de faire.
J'ai discuté avec mon collègue de ce qu'il souhaite faire. Il ne veut pas d'amendements à la pièce à cette étape-ci. Il préfère entendre d'abord ce que les témoins auront à dire au cours des audiences. Si un ou plusieurs amendements sont proposés, il est prêt à les étudier, parce qu'il est très ouvert, dans la mesure où le principe du projet de loi est préservé.
Compte tenu de cela, je tiens à réitérer mon appui à l'égard du projet de loi parrainé par le député de Verdun—Saint-Henri.
[Français]
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je voudrais revenir sur l'amendement présenté plus tôt par l'honorable député de Verchères—Les-Patriotes.
L'honorable député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer cet amendement?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
LA JUSTICE
M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Madame la Présidente, le 12 mars dernier, j'ai demandé à la ministre de la Justice et au vice-premier ministre des précisions au sujet de la nouvelle loi canadienne sur le système de justice pénale pour les adolescents qui avait été présentée la veille. De toute évidence, nous avions de nombreuses réserves au sujet de ce projet de loi. La population n'avait pas tellement eu l'occasion de l'examiner, mais nous éprouvions certaines inquiétudes et nous voulions obtenir des précisions. Nous voulions aussi que l'étude du projet de loi aille de l'avant.
Aujourd'hui, nous avons été très déçus lorsque le leader du gouvernement à la Chambre a laissé entendre que la Chambre pourrait ajourner plus tôt que ne le prévoit le calendrier régulier, parce que le gouvernement n'a plus grand-chose au programme législatif et qu'il songe à ajourner les travaux de la Chambre dès vendredi de la semaine prochaine. Pourtant, lorsque j'ai demandé au leader du gouvernement à la Chambre pourquoi il ne mettait pas à l'étude le projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, il a déclaré que l'opposition faisait de l'obstruction.
J'ai trouvé sa réponse fort intéressante. J'ai fait une petite recherche. Je sais que certains de mes collègues ont déjà abordé le projet de loi. Nous avons fait connaître notre point de vue et mon collègue de Surrey-Nord, qui nourrit de grandes réserves au sujet de ce projet de loi, a participé au débat comme bien d'autres. Il reste que, depuis la présentation de ce projet de loi, l'opposition n'a eu l'occasion d'en débattre que pendant quatre heures, soit 240 minutes.
Le projet de loi a été amorcé par le gouvernement il y a plus de cinq ans. C'est une mesure à laquelle tenaient les libéraux et il leur a fallu cinq ans pour la présenter à la Chambre. Trois mois plus tard, nous en avons peu parlé. Nous voulons certes que le projet de loi soit renvoyé à un comité. Nous désirons que de nombreux changements y soient apportés, mais le gouvernement semble prendre tout son temps.
Les libéraux parlent beaucoup et effectuent beaucoup de relations publiques. Ils ont consacré jusqu'à maintenant environ 5 millions de dollars en publicité à cet égard. Pourtant, le document diffusé précise que le gouvernement du Canada établira un plan de mise en oeuvre d'une durée de cinq ou six ans. Les libéraux ont eu cinq ans pour y penser. Ils parlent maintenant de prendre cinq ou six ans pour le mettre en oeuvre.
Les libéraux font grand cas dans leur publicité du fait qu'ils ont engagé 206 millions de dollars sur une période de trois ans pour la Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents.
La Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents est censée être financée à parts égales par le gouvernement fédéral et les provinces. Le gouvernement ne règle en moyenne qu'environ 30 p. 100 des coûts liés aux jeunes contrevenants au Canada. C'est là le problème. C'est un manque de financement. On ne se préoccupe pas vraiment de ce qui se passe de nos jours dans la société.
À l'heure actuelle, dans la collectivité d'où je viens dans le lower mainland de la Colombie-Britannique, une personne meurt tout les jours d'une surdose. Pourtant, le gouvernement ne donne pas d'argent pour résoudre ce problème. Je ne sais pas quelles sont les statistiques à Toronto, à Montréal et dans d'autres grandes villes, mais elles sont élevées. La Colombie-Britannique est une des capitales en matière de drogues, et c'est très sérieux.
Le gouvernement parle d'argent, mais il ne l'affecte pas là où sont les besoins. Il est trop lent à fournir des fonds.
Les libéraux sont passés maîtres dans l'art de parler de la Loi sur les jeunes contrevenants, de la façon dont ils l'appliqueront et de ce qu'ils feront pour les jeunes, mais leurs paroles ne sont suivies ni de mesures concrètes ni d'injection de fonds. Ils savent comment dépenser de l'argent auprès des entreprises de relations publiques pour donner l'impression qu'ils font un bon travail.
Les libéraux dépensent des centaines de millions de dollars pour enregistrer les armes à feu au Canada, en fait surtout dans les régions rurales puisque les armes à feu sont depuis longtemps enregistrées au Canada. Le gouvernement dépense des centaines de millions de dollars dans ce but, mais il s'occupe très peu du problème des drogues. Il dépense très peu pour les jeunes contrevenants.
Nous avons entendu parler aujourd'hui du cas de ce jeune homme de 18 ans qui devra passer sept ans en prison pour avoir brutalement assassiné une jeune fille à Victoria. Je crois que la plupart des Canadiens désapprouvent cette sentence. Si le projet de loi à l'étude avait été présenté il y a un an ou deux, je crois que ce jeune homme se serait retrouvé dans une situation différente. Il aurait été traité comme un adulte, se serait vu infliger la sentence réservée à un adulte et aurait purgé une longue peine d'emprisonnement pour un crime aussi grave, comme ce devrait être le cas.
Le gouvernement ne consacre pas d'argent à la réadaptation. Il n'a pas voulu assujettir les jeunes contrevenants de 10 à 12 ans au projet de loi. Toutes les provinces, qu'elles aient des gouvernements néo-démocrate, conservateur ou libéral, le souhaitaient pourtant, parce qu'elles veulent pouvoir réadapter ces jeunes contrevenants et s'assurer qu'ils ne retombent pas dans la criminalité. Le gouvernement refuse de le faire parce qu'il ne veut pas dépenser d'argent.
Le Canada est aux prises avec un grave problème de criminalité. Les jeunes posent également un sérieux problème, mais le gouvernement, qui aime beaucoup les relations publiques, prend très peu de mesures concrètes. C'est bien regrettable pour les familles et pour nos enfants.
J'espère que le gouvernement se donnera la peine d'examiner la situation durant les vacances d'été et qu'au retour il agira selon la volonté de la population et s'attaquera au problème de la criminalité juvénile.
Mme Paddy Torsney (secrétaire parlementaire de la ministre de l'Environnement, Lib.): Madame la Présidente, les commentaires du député m'ont beaucoup distraite, parce que j'ai bien des choses à dire. Nous devons nous assurer qu'aucun crime n'est commis et qu'il n'y a jamais de victime. Nous devons inclure certains éléments comme la prestation fiscale pour enfants. Nous devons investir dans nos jeunes et veiller à leur assurer des lendemains plus sains au lieu des solutions chimériques tirées de la drogue.
En répondant au député d'en face, j'aimerais clarifier les règles qui régissent la publication des noms car sa question portait sur ce point.
En vertu du projet de loi C-68, la publication des noms continuera d'être permise dans tous les cas où les adolescents seront assujettis à une peine applicable aux adultes. La publication sera interdite lorsque un adolescent sera assujetti à une peine applicable aux adolescents, à moins que la peine en question ne soit attribuée pour une infraction désignée, par exemple un meurtre. Dans ce cas, l'interdiction de publier le nom ne s'appliquerait pas.
Toutefois, il y a deux cas où le nom d'un adolescent qui se voit infliger une peine spécifique ne peut être publié: le premier, quand le procureur général ne requiert pas une peine applicable aux adultes, le deuxième lorsque, à la demande de l'adolescent ou du procureur général, le juge décide d'interdire la publication du nom de l'adolescent sur la base de l'importance de réinsérer l'adolescent dans la société et de l'intérêt public. Ces règles permettront aux juges de prendre en considération la situation particulière de l'adolescent.
Il est important de noter que la publication du nom sera autorisée quand elle est nécessaire pour appréhender un adolescent dangereux et recherché pour une infraction grave. Le gouvernement croit en un système de justice ouvert. Toutefois, nous ne devons pas oublier que les adolescents sont plus vulnérables que les adultes. Leurs chances de réinsertion dans la société sont plus grandes.
La publication du nom d'un adolescent est interdite lorsque l'adolescent en question se voit infliger une peine pour une infraction non désignée. Toutefois, si la gravité de l'infraction est telle que l'adolescent se voit infliger une peine applicable aux adultes, les règles applicables aux adultes doivent également s'appliquer aux adolescents, y compris la publication des noms.
LES MARCHÉS DE L'ÉTAT
M. Jim Jones (Markham, PC): Madame la Présidente, ce n'est pas un grand plaisir pour moi de prendre la parole sur cette question, à l'occasion du débat sur la motion d'ajournement de ce soir, parce que le premier ministre continue à éluder les questions, à éviter d'y répondre et à reporter les réponses à plus tard quant aux motifs qui justifient que près de 9 millions de dollars de subventions, prêts et marchés soient réservés à quelques personnes choisies—un criminel, un spécialiste de la fraude, et le plus gros contributeur à la campagne du premier ministre aux dernières élections fédérales.
Le premier ministre a l'arrogance de prendre la parole à la Chambre cet après-midi pour dire que ces manoeuvres fumeuses l'aideront à se faire réélire.
Je ne crois pas que les gens de Saint-Maurice soient si impressionnés du fait que le cabinet du premier ministre est intervenu pour aider un criminel reconnu. Yvon Duhaime reçoit près de 900 000 $ en subventions et en prêts. Je ne crois pas que les gens soient impressionnés de voir qu'une personne qui est connue pour ne pas payer ses impôts et pour ne pas rembourser ses créanciers puisse se bourrer les poches avec leur argent.
N'oublions pas que l'hôtel qui appartient à M. Duhaime, depuis qu'il l'a acheté d'une société de portefeuille dans laquelle le premier ministre a des intérêts, avait de graves difficultés financières avant de commencer à bénéficier des largesses du premier ministre.
Le conseiller en affaires de Montréal, Yvon Plante, M.B.A., affirme dans un rapport en date du 27 mars 1997 que l'Auberge Grand-Mère accusait une dette à long terme de 1,49 million de dollars, soit de 350 000 $ trop lourde; était à court de 250 000 $ dans son fonds de roulement et avait besoin d'un investissement de 350 000 $; avait accumulé pour 330 204 $ de factures impayées, somme considérée par M. Plante comme trois fois trop lourde pour une entreprise de cette taille; avait des paiements hypothécaires à date fixe totalisant en moyenne plus de 210 000 $ par année entre 1998 et 2002, paiements que M. Plante qualifiait d'incroyables compte tenu de la situation financière de l'entreprise à l'époque; n'avait aucun comptable bien formé, n'avait aucun budget; n'avait aucun système normalisé de tenue de livres, à tel point que la direction ne pouvait pas fournir un étant financier mensuel des recettes et dépenses de l'entreprise.
En outre, dans le rapport final qu'il a présenté au gouvernement du Québec, le 8 mai 1998, M. Plante conclut que l'Auberge de Grand-Mère n'avait aucunement amélioré, en un an, son système de comptabilité ni sa planification budgétaire.
Si quelqu'un ayant le même dossier que Yvon Duhaime et l'Auberge de Grand-Mère sollicitait un prêt d'une banque ou d'investisseurs privés, on lui rirait au nez. Et pourtant, le premier ministre semble croire que c'est là un bonne dépense publique pour sa circonscription.
Une bonne dépense pour des criminels comme Yvon Duhaime? Oui. Une bonne dépenses pour des faussaires notoires comme Pierre Thibault? Oui. Une bonne dépense pour des donateurs du Parti libéral comme Claude Gauthier? Tout à fait. Est-ce une bonne dépense pour la circonscription de Saint-Maurice? Si l'on en juge par le taux de chômage élevé et la pauvreté qui sévissent dans cette région du Québec, la politique qui consiste à accorder des faveurs en échange d'autres faveurs ne semble guère efficace.
La secrétaire parlementaire va sans doute prendre la parole et dire que l'octroi d'un contrat de l'ACDI de 6,3 millions de dollars s'est fait selon les règles.
Si c'est vrai, je mets le gouvernement au défi de le prouver en rendant publics tous les documents liés à l'adjudication du contrat. La société Markham Electric, une entreprise de ma circonscription qui n'a pas obtenu le contrat le l'ACDI accordé plutôt à l'entreprise de M. Gauthier serait certainement contente d'obtenir une réponse détaillée. Les contribuables aimeraient certainement savoir s'il faut, pour obtenir des contrats de plusieurs millions de dollars, verser des dons de 43 000 $ pour financer la campagne du premier ministre et le Parti libéral du Canada.
Personne ne veut ternir indûment le nom du premier ministre, mais si tout s'est fait selon les règles, laissons-le rendre publics tous les documents liés à l'octroi de fonds et demandons au vérificateur général d'examiner les contrats en question.
Mme Paddy Torsney (secrétaire parlementaire de la ministre de l'Environnement, Lib.): Madame la Présidente, si seulement il n'y avait pas tant de députés qui sont prêts à salir le nom du premier ministre. Pourquoi ne répètent-ils pas à l'extérieur de la Chambre tout ce qu'ils disent ici?
Je vais tirer les choses au clair. Il s'agit d'un marché entre le gouvernement du Mali et une entreprise canadienne. Il a été accordé à la suite d'un appel d'offres. Ce processus tient compte de la qualité des services fournis par l'entreprise afin d'assurer les meilleurs résultats possibles pour les habitants du Mali, qui est un des pays les plus pauvres du monde. Le processus de sélection accorde la plus grande priorité au coût des offres afin d'assurer l'utilisation la plus judicieuse possible de l'argent des contribuables.
Pour une raison ou une autre, les députés de l'opposition ont choisi de ne pas tenir compte de ces faits. J'estime que les députés devraient crier au scandale si le contrat avait été attribué à un autre soumissionnaire puisque cela aurait augmenté d'au moins 2,5 millions de dollars le coût pour les contribuables canadiens.
Le débat ne peut porter sur une affaire de favoritisme puisque le comité de sélection était composé de deux représentants du gouvernement du Mali, d'un expert canadien indépendant spécialisé dans les projets en matière d'électricité et d'un porte-parole de l'ACDI, à titre d'observateur. La responsabilité du choix du contractant incombait à ces représentants, et non au porte-parole de l'ACDI, dont la fonction consistait uniquement à veiller à la transparence et à l'intégrité du processus.
Cette responsabilité n'incombait sûrement pas à la ministre responsable de l'ACDI, qui a été informée du choix après que la décision définitive eut été prise. Le soumissionnaire le plus bas a obtenu le contrat et l'opposition n'a pu trouver une seule preuve à l'appui de ses accusations ridicules. Elle préfère salir la réputation d'un homme qui sert son pays depuis 35 ans.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 32.)