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36e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 25
TABLE DES MATIÈRES
Le vendredi 31 octobre 1997
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-16. Deuxième lecture. |
L'hon. David M. Collenette |
Mme Eleni Bakopanos |
M. Jack Ramsay |
M. Richard Marceau |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LE SERVICE CANADIEN DE LA FAUNE |
M. Paul Steckle |
LE JOUR DU SOUVENIR |
M. Peter Goldring |
L'HÔTEL DE LA MONNAIE |
M. Reg Alcock |
LES CLERCS DE SAINT-VIATEUR ET LES SOEURS DE SAINTE-CROIX |
M. Maurice Dumas |
L'IMMIGRATION |
M. Mark Assad |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Mac Harb |
ET LE GAGNANT EST... |
M. Chuck Strahl |
LES BANQUES |
Mme Carolyn Parrish |
LA SOUVERAINETÉ DU QUÉBEC |
M. Maurice Godin |
LE CANADIAN BUSHPLANE HERITAGE CENTRE |
M. Carmen Provenzano |
LA FISCALITÉ |
M. Jim Hart |
L'EMPLOI |
M. Robert D. Nault |
LE PRIX DE L'ESSENCE |
M. Chris Axworthy |
LES COMMISSIONS SCOLAIRES LINGUISTIQUES |
L'hon. Sheila Finestone |
LES PÊCHES |
M. Norman Doyle |
LE DÉFICIT |
M. Maurizio Bevilacqua |
QUESTIONS ORALES |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Chuck Strahl |
L'hon. Herb Gray |
M. Chuck Strahl |
L'hon. Herb Gray |
M. Chuck Strahl |
L'hon. Herb Gray |
M. Jason Kenney |
L'hon. Herb Gray |
M. Jason Kenney |
L'hon. Herb Gray |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Paul Crête |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. Paul Crête |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LA PAUVRETÉ |
M. Bernard Bigras |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. Bernard Bigras |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LE COMMERCE |
M. Bill Blaikie |
L'hon. Sergio Marchi |
M. Bill Blaikie |
L'hon. Sergio Marchi |
LES PÊCHES |
L'hon. Jean J. Charest |
L'hon. Lloyd Axworthy |
L'hon. Jean J. Charest |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Art Hanger |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
M. Art Hanger |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
LA FERMETURE DE LA MINE BC |
M. Odina Desrochers |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. Odina Desrochers |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
L'UNITÉ NATIONALE |
M. Rahim Jaffer |
M. Paul DeVillers |
M. Rahim Jaffer |
M. Paul DeVillers |
L'INDUSTRIE DE L'AMIANTE |
Mme Monique Guay |
L'hon. Sergio Marchi |
Mme Monique Guay |
L'hon. Sergio Marchi |
TAÏWAN |
M. Keith Martin |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Keith Martin |
L'hon. Lloyd Axworthy |
L'INDUSTRIE LAITIÈRE |
Mme Suzanne Tremblay |
L'hon. Lyle Vanclief |
LA JUSTICE |
M. Derek Lee |
Mme Eleni Bakopanos |
L'ACDI |
M. Gurmant Grewal |
Mme Claudette Bradshaw |
M. Gurmant Grewal |
Mme Claudette Bradshaw |
LES PRESTATIONS AUX AÎNÉS |
L'hon. Lorne Nystrom |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
L'hon. Lorne Nystrom |
L'hon. Jim Peterson |
LES PÊCHES |
M. Gerald Keddy |
M. Wayne Easter |
M. Gerald Keddy |
M. Wayne Easter |
L'ACDI |
M. Bill Graham |
Mme Claudette Bradshaw |
L'ÉQUITÉ SALARIALE |
M. Mark Muise |
L'hon. Marcel Massé |
LES CENTRES D'EXCELLENCE |
M. Ian Murray |
L'hon. John Manley |
LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU |
M. Jack Ramsay |
Mme Eleni Bakopanos |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
Mme Louise Hardy |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LA FERMETURE DE LA MINE BC |
M. Paul Crête |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LA LOI SUR LES DOUANES |
M. Stan Dromisky |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
LA CAISSE DE L'ASSURANCE-EMPLOI |
L'hon. Jean J. Charest |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Svend J. Robinson |
L'hon. Lloyd Axworthy |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le président suppléant (M. McClelland) |
PRIVILÈGE |
La période des questions orales |
Mme Suzanne Tremblay |
M. Bob Kilger |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
L'hon. Jean J. Charest |
AFFAIRES COURANTES |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-269. Présentation et première lecture |
M. Art Hanger |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Peter Adams |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-16. Deuxième lecture |
M. Richard Marceau |
M. Chris Axworthy |
M. Peter MacKay |
M. Chuck Cadman |
M. Grant McNally |
M. Mike Scott |
M. Derek Lee |
M. Philip Mayfield |
M. John Richardson |
M. Philip Mayfield |
M. Reed Elley |
Mme Val Meredith |
M. Ken Epp |
M. Philip Mayfield |
M. Bob Kilger |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LA LOI SUR L'ACCÈS À L'INFORMATION |
Projet de loi C-217. Deuxième lecture. |
M. Bob Mills |
M. Richard Marceau |
M. Dick Proctor |
Mme Eleni Bakopanos |
M. Bill Gilmour |
Annexe |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 25
CHAMBRE DES COMMUNES
Le vendredi 31 octobre 1997
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LE CODE CRIMINEL
L'hon. David M. Collenette (au nom de la ministre de la Justice et procureur général du Canada) propose: Que le projet de loi C-16, Loi modifiant le Code criminel et la Loi d'interprétation (arrestation et entrée dans les habitations), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir d'intervenir aujourd'hui en faveur de la motion portant renvoi au Comité de la justice du projet de loi C-16, loi autorisant l'entrée dans une maison d'habitation pour arrestation, aux fins de sa deuxième lecture à la Chambre.
Le projet de loi C-16 permettra aux agents de la paix de pénétrer dans une maison d'habitation en vue d'une arrestation, d'une manière qui sera conforme aux exigences constitutionnelles. Bref, le projet de loi met en place un régime pour permettre aux agents de la paix d'obtenir une autorisation judiciaire avant de pénétrer dans une maison d'habitation en vue d'une arrestation. Le projet de loi prévoit également les circonstances où ces mandats ou autorisations ne seront pas nécessaires.
[Français]
Comme chacun le sait, le 22 mai 1997, la Cour suprême du Canada a rendu une décision ayant des répercussions importantes sur la façon dont les forces policières peuvent exercer leur pouvoir d'arrestation.
Toute la question est de savoir si la common law devrait permettre une arrestation dans une maison d'habitation, si elle n'est pas précédée d'une intervention judiciaire. Dans la décision La Reine c. Feeney, les cinq juges majoritaires concluaient que, compte tenu de la Charte canadienne des droits et libertés, il faut que la police obtienne un mandat d'entrée dans un domicile afin d'arrêter une personne qui s'y trouve.
[Traduction]
Étant donné que le Code criminel ne prescrit pas de façon précise un mécanisme pour obtenir une autorisation judiciaire avant de pénétrer dans une maison d'habitation en vue d'une arrestation, dans une décision majoritaire dans l'affaire de la Reine c. Feeney, la Cour suprême du Canada a proposé que l'on interprète la loi comme si elle contenait une telle disposition jusqu'à ce que le libellé approprié soit adopté. C'est à cette invitation que le Parlement doit répondre aujourd'hui.
[Français]
Je puis vous certifier que l'incertitude engendrée par l'arrêt Feeney sur le plan juridique préoccupait énormément les responsables de l'application de la loi dans l'ensemble du Canada. De fait, les provinces et les territoires ont réagi à l'arrêt Feeney en proposant des solutions temporaires singulièrement différentes pour permettre à la police de s'acquitter de ses fonctions du mieux qu'elle le peut, en tenant compte des nouvelles exigences de la Charte canadienne.
À la demande des procureurs généraux de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, du Canada, de l'Ontario et du Québec, faite quelques jours après le prononcé de l'arrêt Feeney, la Cour suprême a accordé un sursis de six mois, à compter de la date du jugement en ce qui concerne l'application de l'arrêt Feeney. En conséquence, à défaut d'une prorogation du délai, toute modification au Code criminel devrait être apportée au plus tard le 22 novembre 1997, si nous ne voulons pas laisser un vide juridique après cette date.
La ministre de la Justice est prête à collaborer avec les honorables députés de cette Chambre, des deux côtés de la Chambre, je veux insister là-dessus, pour respecter l'échéance fixée par la Cour suprême du Canada.
La ministre de la Justice estime que le projet de loi C-16 comporte un régime d'obtention du mandat d'entrée qui, d'une part, est conçu pour servir les intérêts des personnes chargées de l'application de la loi en donnant à la police le pouvoir d'entrer dans des maisons d'habitation pour arrêter des personnes, avec ou sans mandat d'arrestation et, d'autre part, qui respecte le droit à la vie privée des personnes dans leur maison d'habitation, tel que garanti par la Charte.
Certains membres de la population et certains responsables de l'application de la loi pourraient soutenir que le projet de loi ne va pas assez loin, parce qu'il ne remet pas aux policiers les pouvoirs d'entrée et d'arrestation qu'ils possédaient avant l'arrêt Feeney, je répète, avant l'arrêt Feeney.
[Traduction]
Cependant, étant donné que le jugement dans l'affaire Feeney s'appuie sur des motifs d'ordre constitutionnel, il ne serait pas possible de restaurer le pouvoir que reconnaît la common law d'entrer dans une habitation pour y effectuer une arrestation. À simplement parler, le tribunal a jugé qu'il fallait établir un équilibre entre le droit à l'inviolabilité de la maison d'habitation et le droit de l'État d'y arrêter quelqu'un et que cet équilibre doit être établi par un juge. Si le cadre juridique est suffisamment flexible, il devrait y avoir moyen d'établir un équilibre entre ces droits antagonistes sans mettre en danger la sécurité des Canadiens. C'est précisément ce que fait le projet de loi C-16.
À l'autre bout de la gamme d'opinions, certains prétendront que la Cour suprême a voulu dire que, dans tous les cas, la police devra obtenir un mandat d'arrêt accompagné d'une autorisation de pénétrer dans la maison d'habitation. Selon ce point de vue, la police devrait inculper formellement quelqu'un avant d'obtenir une autorisation d'entrer. Cela ne nous paraît pas nécessaire pour respecter les exigences d'ordre constitutionnel imposées par la Cour suprême.
Ce qui est exigé en vertu de la Constitution, c'est qu'un arbitre impartial décide si l'entrée dans des locaux privés doit être autorisée afin d'y procéder à une arrestation.
De l'avis de la ministre de la Justice, exiger que quelqu'un soit inculpé avant qu'on puisse délivrer un mandat d'entrée mènerait à un régime de délivrance de mandats rigide et inefficace qui nuirait à la bonne administration de la justice au Canada.
[Français]
La ministre de la Justice croit que nous avons trouvé, avec cette législation, un juste milieu. En vertu de cette législation, la police pourrait obtenir l'autorisation judiciaire d'entrer dans une habitation afin d'arrêter une personne qui s'y trouve, sans devoir porter d'accusation à l'égard de cette personne.
En d'autres termes, la législation accordera à la police autant de flexibilité que possible, eu égard aux limites imposées par la Charte.
[Traduction]
Le projet de loi est le fruit de consultations approfondies avec les parties intéressées, comme les procureurs généraux des provinces, la GRC, l'Association canadienne des chefs de police, l'Association canadienne des policiers et l'Association du Barreau canadien.
La mesure à l'étude se présente comme un compromis réaliste entre des positions qui sont dépourvues de la flexibilité nécessaire ou qui sont entachées de défauts d'ordre constitutionnel.
Je voudrais profiter de l'occasion pour passer en revue les différents éléments du projet de loi.
[Français]
Ce projet de loi vise principalement à offrir un régime législatif dans le cadre duquel la police peut demander une autorisation judiciaire d'entrer dans des maisons d'habitation pour procéder à des arrestations. Ce régime prévoit qu'une telle autorisation est nécessaire dans les trois circonstances suivantes.
Premièrement, s'il existe déjà un mandat d'arrestation; dans ce cas un policier peut demander un mandat en vue d'entrer dans une maison d'habitation pour procéder à une arrestation.
Deuxièmement, si aucun mandat d'arrestation n'a été décerné; dans ces circonstances, le policier peut demander un mandat pour entrer dans une maison d'habitation afin de procéder à une arrestation, à condition qu'il ait convaincu le juge ou le juge de paix qu'il existe des motifs de procéder à une arrestation sans mandat, comme l'énonce l'article 495 du Code criminel.
Troisièmement, si un policier demande un mandat en vue d'arrêter une personne en particulier, il peut demander en même temps au juge ou au juge de paix d'inclure dans le mandat une autorisation, pour la police, d'entrer dans une maison d'habitation, en particulier si le policier croit que la personne qui fait l'objet du mandat s'y trouve ou y sera trouvée. L'autorisation serait accordée si, au moment où le mandat d'arrestation est ultérieurement exécuté, le policier possède des motifs raisonnables de croire que la personne qui fait l'objet de ce mandat est présente dans cette maison d'habitation.
[Traduction]
Le projet de loi prévoit une exception et précise bien que l'autorisation judiciaire pour pénétrer dans une maison d'habitation n'est pas nécessaire dans les situations d'urgence. Les agents de la paix ne sont pas toujours en mesure d'obtenir une autorisation judiciaire avant d'entrer dans une maison d'habitation pour arrêter un individu.
Dans l'affaire Feeney, la majorité des juges de la Cour suprême ont reconnu ce fait et confirmé que la common law prévoit le droit d'entrée dans le cas d'une poursuite immédiate.
Étant donné que la Cour suprême du Canada a clairement reconnu l'exception qui existe dans le cas d'une poursuite immédiate où il n'est pas nécessaire d'obtenir un mandat d'entrée, la mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui ne traite pas de cette question sur laquelle elle s'est prononcée de façon concluante. La Cour suprême n'a toutefois pas établi les autres situations où il ne serait pas nécessaire d'obtenir une autorisation judiciaire préalable.
Par conséquent, le projet de loi contient une définition non exhaustive de certaines situations d'urgence où l'entrée dans une habitation aux fins d'arrestation sans autorisation judiciaire préalable est justifiée.
La ministre de la Justice croit qu'il est important que le Parlement précise les situations d'urgence dans lesquelles l'État serait justifié d'entrer dans une maison d'habitation sans mandat d'entrée aux fins d'arrestation.
L'entrée sans mandat serait expressément autorisée si les agents de la paix ont des motifs raisonnables de soupçonner que le fait de prévenir les exposerait ou exposerait d'autres personnes à des lésions corporelles imminentes ou à la mort. L'intégrité de l'être humain est une valeur suffisamment importante pour permettre à l'État d'entrer dans les habitations sans autorisation judiciaire préalable.
De la même manière, l'entrée sera expressément autorisée lorsque les forces policières auront des motifs raisonnables de croire que des éléments de preuve relatifs à la perpétration d'un acte criminel se trouvent dans la maison d'habitation et qu'il est nécessaire d'y pénétrer pour éviter leur destruction imminente. Il s'agit bien de preuves qui risquent d'être détruites si l'arrestation n'a pas lieu avant qu'un mandat d'entrée puisse être obtenu, et non seulement d'information ou de renseignements auxquels l'État voudrait avoir accès.
Le projet de loi contient aussi des dispositions concernant des amendements corrélatifs. Il contient notamment une proposition de modification de la Loi d'interprétation visant à étendre le mécanisme établi dans le Code criminel aux arrestations effectuées conformément à d'autres lois fédérales. Cela s'impose parce que le jugement Feeney insiste sur l'équilibre des intérêts dans les cas d'arrestations effectuées dans des maisons d'habitation qui va bien au-delà de l'application du Code criminel.
Une autre loi fédérale prévoit que des arrestations se fassent au moyen de mandats délivrés conformément à cette même loi. Il faut résoudre le problème causé par le jugement de la Cour suprême dans l'affaire Feeney. La modification que l'on propose d'apporter à la Loi d'interprétation étend le régime du Code criminel à ces lois.
[Français]
Enfin, la législation comporte aussi un préambule qui énonce l'objet de celle-ci et qui établit clairement que la législation ne vise pas à limiter les pouvoirs d'entrée conférés à la police conformément à d'autres lois ou à la common law.
[Traduction]
Compte tenu des contraintes constitutionnelles fixées dans le jugement Feeney et d'autres jugements de la Cour suprême du Canada concernant le droit à la vie privée, le ministre de la Justice estime que ce projet de loi constitue un moyen de s'assurer qu'un bon équilibre des intérêts peut exister sans que la sécurité des Canadiens et la bonne administration de la justice ne soient compromises.
Ce projet de loi crée des instruments qui rehausseront le droit à la vie privée des Canadiens tout en fournissant aux agents de la paix la souplesse dont ils ont besoin pour accomplir leur difficile tâche.
Enfin, la ministre de la Justice encourage tous les députés à appuyer ce projet de loi. Je suis impatiente de collaborer avec les députés pour que la date butoir établie par la Cour suprême soit respectée.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, à mon avis, la ministre de la Justice aurait dû intervenir auprès de la Cour suprême du Canada pour demander une suspension de la décision ou de son application. Elle aurait dû demander un délai de suspension raisonnable afin que nous n'ayons pas à adopter ce projet de loi à toute vapeur et que nous puissions convoquer des témoins des deux camps pour examiner à fond tous les aspects du projet de loi.
Il est arrivé souvent que le ministère de la Justice présente des projets de loi assortis d'échéances qui ont empêché les députés d'exprimer toutes leurs idées et préoccupations sur des projets de loi comme celui-ci, de convoquer des témoins devant le comité permanent afin de déterminer si tous les aspects du projet de loi sont conformes à la Constitution et de donner aux députés des deux côtés de la Chambre l'assurance que le projet de loi fera ce que souhaitent le gouvernement et les Canadiens.
Alors que nous amorçons le débat sur le projet de loi C-16, je souligne qu'il est regrettable que la nouvelle ministre de la Justice semble adopter la même ligne de conduite que celle qu'a suivie son prédécesseur à propos de mesures comme le projet de loi C-45, qui était assorti d'une échéance. Comme les députés de ce côté-ci s'en souviennent, si le projet de loi C-45 avait été présenté à temps, il aurait pu empêcher des individus comme Clifford Olson d'obtenir une couverture médiatique complète devant un juge et un jury.
Ce projet de loi a été présenté avec une échéance, tout comme la mesure législative présentement à l'étude. Nous devrons précipiter les choses pour pouvoir respecter la date limite du 22 novembre. Sinon, comme l'ont souligné les fonctionnaires qui ont organisé la séance d'information pour nous et les médias hier, il pourrait s'ensuivre des problèmes et un report très graves. Il faudrait s'adresser à la Cour suprême pour connaître ce coût.
J'attire votre attention sur l'approche et le modus operandi du gouvernement qui ne conviennent pas au régime parlementaire. Nous devrions disposer de tout le temps voulu pour étudier le projet de loi attentivement. J'espère que nous aurons le temps de le faire et que le projet de loi sera renvoyé à l'autre endroit à temps pour le délai.
Je répète qu'il aurait fallu que ce soit la ministre de la Justice et non le procureur général de la Colombie-Britannique qui intervienne auprès de la Cour suprême du Canada pour demander la suspension. Pourquoi ne pas prévoir une période de 8 ou 10 mois? Pourquoi ne pas nous accorder suffisamment de temps pour que nous puissions exprimer nos préoccupations et examiner le projet de loi avec soin?
Nous sommes en faveur du projet de loi, mais nous déplorons la décision de la Cour suprême, qui a rendu ce projet de loi nécessaire. La décision Feeney sape les pouvoirs traditionnels de la police. Le projet de loi vise à contrer les effets d'une décision qui sape les outils et les pouvoirs traditionnels de la police pour enquêter sur des crimes, pour traduire les criminels devant les tribunaux et, partant, maintenir la sécurité dans la société.
Examinons donc la décision Feeney. C'est une horrible décision quant à son effet sur l'exécution des lois dans notre pays. Que s'est-il produit? Un homme de 84 ans a été battu à mort. Sur la scène du crime, le policier a trouvé du sang partout et il était porté à croire qu'il y en avait sur l'agresseur. Qu'a-t-il fait? Au cours de son enquête, il s'est approché de la résidence de M. Feeney, a frappé à la porte, mais n'a obtenu aucune réponse. Il a ouvert la porte, sans la défoncer, et a trouvé M. Feeney allongé sur le lit, sa chemise couverte de sang.
Le juge Sopinka, s'exprimant au nom de la majorité, a dit que c'était une entrée et une arrestation illégales, ce qui a rendu toutes les preuves inadmissibles au procès.
Quelles conséquences cela a-t-il eues? Cette décision des cinq Canadiens siégeant à la Cour suprême du Canada, selon les avis juridiques entendus, aura pour effet que l'accusé sera libéré.
Quel effet cela aura-t-il sur ce que les Canadiens pensent de leur système judiciaire? Quel effet cela aura-t-il sur les habitants de ce secteur? Que pensent-ils de la décision rendue par les cinq juges, qui ont pour fonction de protéger nos droits et de maintenir la sécurité dans la société?
Il faut toujours trouver un équilibre raisonnable. Je constate que, dans la décision de la Cour suprême, l'article 1 de la Constitution, la disposition d'exemption, n'a pas été invoquée. On n'y a même pas fait allusion. Je me demande pourquoi. Dans cette décision, la majorité des juges ont dit qu'en général le droit à la vie privée de M. Feeney chez lui l'emporte sur le droit de la police.
Que signifie «l'emporte sur le droit de la police»? Quel peut bien être le droit de la police sinon le vôtre et celui de la société? On ne mentionne que le droit de la police, mais cela signifie l'intérêt et la sécurité de la société. En quoi consiste le travail de la police? Quel sont ses devoirs et ses responsabilités? Protéger la société. Comment? En recueillant des preuves suffisantes pour justifier une arrestation afin qu'il y ait une audience complète et équitable devant un tribunal compétent.
Lorsque, dans cette affaire, la majorité des juges a déclaré que le droit à l'intimité de M. Feeney dans son foyer l'emportait sur le droit de la police, elle déclarait en fait qu'il l'emportait sur l'intérêt de la société.
Quel est l'intérêt de la société dans une affaire comme celle-là? Selon la Cour suprême du Canada, que doit faire la police si elle frappe à la porte et qu'il n'y a pas de réponse? Encercler la place et attendre pendant des heures, comme dans l'affaire Kitimat, survenue après cette décision de la Cour suprême. Après cinq heures d'attente, lorsque le mandat est finalement arrivé, les policiers ont constaté que le suspect s'était envolé. C'est des situations comme ça que cherche à éviter le projet de loi.
La décision signifie que la police doit maintenant obtenir un mandat pour entrer dans une habitation, un autre pour procéder à des arrestations dans certaines circonstances et encore un autre pour procéder à des perquisitions. Si la police a un mandat d'entrée mais non de perquisition, elle peut recueillir les éléments de preuve qui sont bien en évidence, mais elle ne peut pas fouiller le grenier, le sous-sol ou les chambres. Elle ne peut que recueillir les éléments de preuve qui sont en évidence. La police devra donc passer par toutes ces formalités excessives.
Le projet de loi donne le pouvoir d'émettre des télémandats. Qu'est-ce qu'un télémandat? C'est quand un policier téléphone à un juge de paix ou à un autre juge au milieu de la nuit et lui dit: «Je suis l'agent Untel et j'ai besoin d'un mandat. Voici les faits. Compte tenu de l'attitude démontrée par la Cour suprême dans sa décision, un système de télémandat résistera-t-il à une contestation aux termes de la Charte? Certainement pas.
Je parle dans l'intérêt de la sécurité de la société. Ne devrions-nous considérer que l'article 1 de la Charte, qui dit que l'intérêt de la société peut l'emporter sur les droits de l'individu, devrait s'appliquer et peut l'être? Allons-nous fermer les yeux sur cette disposition? Je n'ai vu aucune mention de la disposition de dérogation dans la décision de la Cour suprême. Pour une raison ou une autre, la Cour suprême pensait peut-être qu'elle ne s'appliquait pas.
Regardons un peu l'opinion dissidente de madame le juge L'Heureux-Dubé. Qu'a-t-elle dit? Qu'on dit les autres juges de la Cour suprême? Ils ont dit que l'entrée était légale. Ils ont dit que l'arrestation était légale et que les éléments de preuve avaient été recueillis de façon légale.
Si un juge de plus avait été d'accord, nous ne serions pas ici aujourd'hui et nous n'aurions pas besoin de ce projet de loi. Les outils et les pouvoirs dont les agents de la paix disposaient en vertu de la common law avant la décision Feeney seraient encore en vigueur. Les policiers auraient les moyens nécessaires pour agir le plus rapidement possible afin de protéger la société contre une personne qui a brutalement tué un homme de 84 ans.
Oui, nous allons appuyer ce projet de loi. Nous voulons entendre des témoins. Nous voulons comprendre toute la portée de cette mesure législative. Tout le monde appuiera la principe fondamental qui sous-tend ce projet de loi. Nous devons faire quelque chose au sujet de la décision Feeney qui a été rendue par la Cour suprême du Canada.
Toutefois, lorsque nous examinons des projets de loi, nous voulons toujours nous assurer que certains détails y sont inclus. Nous voulons comprendre le projet de loi afin que tous les députés de tous les partis puissent faire des recommandations et proposer des amendements qui, selon eux, le renforceront.
Nous devons redonner ces moyens à la police pour qu'elle puisse assurer la sécurité de notre société et faire face à ceux qui constituent une menace pour la population, en particulier des individus comme M. Feeney. Ce dernier a été reconnu coupable du meurtre d'un homme de 84 ans. Or, il est toujours en liberté et, selon les opinions juridiques émises, il le restera parce que la preuve recueillie après son arrestation n'est pas admissible en justice.
Qu'en pense madame le juge L'Heureux-Dubé? Elle a déclaré quelque chose de très intéressant au sujet de la décision de refuser l'admissibilité de la preuve présentée, même si elle reposait sur une analyse d'ADN. Elle a dit que la police méritait des félicitations, et non pas des reproches, pour ce qu'elle avait fait. Le juge a déclaré ce qui suit:
—il est peut-être temps de rappeler que le respect et la confiance du public envers le système judiciaire dépendent non seulement de la protection contre les abus de la police, mais aussi de la capacité du système de découvrir la vérité et, en définitive, de faire en sorte que justice soit faite dans la mesure du possible.
Appliquons ce test au cas Feeney. Qu'avons-nous en main?
Nous avons une preuve suffisante pour condamner Feeney, ce qu'ont effectivement fait les tribunaux de première instance, pour le meurtre d'un homme de 84 ans.
Je suis d'accord avec madame le juge L'Heureux-Dubé. Elle exprime le bon sens, celui de la grande majorité des Canadiens.
Lorsque le policier est entré dans la roulotte, qu'a-t-il fait de nuisible à qui que ce soit? Quel acte a-t-il commis qui n'ait pas pour but de défendre la sécurité de la société? En quoi a-t-il outrepassé les limites de son obligation et de sa responsabilité de protéger la communauté dans laquelle il vivait et qu'il servait? Qu'est-ce qu'il a fait? Je ne vois rien de si terrible dans ce qu'il a fait, ni rien de mal ou d'inacceptable selon les pratiques normales de la police fondées sur le simple bon sens.
Ce projet de loi a été conçu durant l'été. Il a été présenté trop tard. Il se pourrait qu'il ne soit pas adopté avant la date limite.
Il n'y a pas de définition de ce qu'est une poursuite immédiate dans le projet de loi. On dit que la police aurait pu entrer dans les lieux si une poursuite immédiate avait été en cours. Qu'est-ce que ça veut dire?
Hier, durant la séance d'information, Stephen Bindman, du Citizen d'Ottawa, a demandé plus d'une fois pourquoi on n'a pas inscrit dans le projet de loi une définition de «poursuite immédiate», afin que les policiers sachent à quoi s'en tenir Pourquoi cette définition n'est-elle pas dans le Code criminel. C'est une bonne question. Ça n'y est pas.
Quelle différence y a-t-il entre «hot pursuit» et «fresh pursuit» également rendus par «poursuite continue» dans la version française du Code criminel? Nous ne le savons pas. La police ne le sait pas. Est-ce un précédent? Y a-t-il des précédents en jurisprudence pour leur donner une idée? Nous ne le savons pas.
Dans la mesure où nous ne l'inscrivons pas dans la loi et que nous n'adoptons pas de mesure qui explique ce que veut dire «poursuite immédiate», les tribunaux devront trancher la question. C'est la Cour suprême du Canada qui devra décider de ce qu'est une poursuite immédiate.
Il y a des éléments de jurisprudence à ce sujet, mais pourquoi ne pas l'inscrire dans le Code criminel? Pourquoi ne pas l'inscrire dans la loi afin de dire aux tribunaux ce que les gens entendent par «poursuite immédiate»? Les gens veulent que les policiers aient les moyens de nous protéger contre des criminels comme M. Feeney et d'autres de son espèce, qui s'attaquent à leurs semblables et commettent des agressions, des meurtres, des viols et que sais-je encore.
Cette décision de la Cour suprême du Canada diminue la sécurité de la société en alourdissant la charge de nos policiers.
Le projet de loi essaie de contourner cela ou du moins fournit aux policiers un moyen légal de s'introduire dans un domicile, mais non pas comme ça. Ils devront attendre d'avoir un mandat de perquisition à moins qu'il ne s'agisse d'une poursuite immédiate.
Un mandat d'arrêt pourra aussi leur être nécessaire pour s'introduire dans les lieux. Comme je l'ai indiqué plus tôt, s'ils veulent perquisitionner le domicile au complet, ils devront peut-être obtenir un troisième mandat.
Tout ça a l'air très bien, très beau, fantastique dans une tour d'ivoire, mais que fait-on dans des coins reculés comme en Colombie-Britannique où s'est produit cet incident? Que fait-on dans ces autres régions où il est impossible d'obtenir des télémandats? Que fait-on dans ce cas?
Nous allons appuyer ce projet de loi. Nous voulons y faire un peu de ménage. Nous voulons entendre les deux sons de cloche. Nous voulons entendre les avis des personnes qui s'opposent à la décision de la Cour suprême à l'origine de ce projet de loi. Nous voulons entendre les avis des personnes qui l'appuient. Nous voulons savoir si ce projet de loi arrive vraiment à ce juste milieu qu'exige la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Feeney.
Voilà en gros mes réserves. Voilà en gros ce que je pense de ce projet de loi. Je crois surtout que nous ne devrions pas adopter une mesure législative qui prête à interprétation par les tribunaux. Nous devrions dire aux tribunaux ce que nous voulons que la mesure législative que nous adoptons fasse et ne laisser place à aucune interprétation. Sinon, ce sera toujours à la Cour suprême de décider. Au lieu que les représentants élus du peuple agissent dans l'intérêt des gens, ce sera les tribunaux qui en réalité décideront de la loi.
On n'arrête pas de nous le répéter, et on nous l'a encore dit hier pendant la conférence, ce ne sont pas les élus du peuple qui font la loi. Ce sont neuf personnes nommées à la Cour suprême du Canada qui le font pour nous. Nous avons été clairement prévenus hier que nous devons être très vigilants à cet égard.
Je ferais remarquer qu'un sondage mené par Angus Reid au mois de juillet révèle que plus de la moitié des Canadiens ne font pas plus confiance aux tribunaux qu'au système judiciaire. Je pourrais comprendre s'il s'agissait du système judiciaire dans son ensemble. Nous savons ce qu'ils pensent de la Loi sur les jeunes contrevenants, de l'article 745, et de toutes ces situations ridicules créées par nos lois et notre système judiciaire. Je pourrais comprendre si la majorité avait perdu confiance seulement dans le système judiciaire, juridique, mais ce n'est pas ce qu'indique ce sondage. Les Canadiens ne font plus confiance aux tribunaux.
Qu'est-ce que ça signifie? Qu'ils n'ont plus confiance dans les décisions rendues par les juges. C'est la question que je me suis posée dès que j'ai lu l'affaire Feeney. Est-ce que la décision de la Cour suprême du Canada raffermit ou ébranle la confiance des Canadiens à l'égard des tribunaux et du système judiciaire de ce pays?
Je sais quelle serait la réponse si nous retournions sur la scène du crime et que nous demandions aux voisins de M. Feeney s'ils pensent que cette décision a raffermi ou ébranlé leur confiance à l'égard de notre système judiciaire et des décisions des juges.
La question est très troublante et elle est au coeur même de ce projet de loi et des décisions de la Cour suprême du Canada.
Quant à la nécessité absolue de tout faire pour maintenir la foi et la confiance des Canadiens à l'égard de nos tribunaux et de notre système judiciaire, lorsqu'on lit les jugements et la jurisprudence de la Cour suprême du Canada, on voit pourquoi il y a lieu de s'inquiéter. Les décisions de ce genre rendent la tâche plus difficile aux policiers qui doivent nous protéger et protéger nos familles et nos enfants.
Nous devons donc appuyer ce projet de loi et lutter pour rétablir les pouvoirs et les outils que les policiers ont perdus jusqu'à un certain point. Dans une large mesure, les anciens outils de la common law sont disparus. Pourquoi? La Cour suprême du Canada dit qu'en général, la vie privée des particuliers, la vie privée de M. Feeney et l'inviolabilité de sa maison d'habitation ont préséance sur les intérêts des policiers et de la société, et sur la sécurité de la société. Voilà pourquoi nous discutons de ce projet de loi aujourd'hui.
Le gouvernement recevra l'appui des députés de tous les partis au sujet de cette mesure législative. Tous les députés devraient vouloir protéger l'équilibre essentiel du droit des particuliers et des membres d'une société à une protection policière adéquate, à la protection des tribunaux et à la protection du système judiciaire.
Voilà la sonnette d'alarme que l'on entend. Nous devons prendre soin de bien élaborer nos lois pour indiquer clairement aux tribunaux ce que nous demandons au nom des Canadiens, et non laisser les tribunaux le faire à notre place.
Nous laissons à l'interprétation de chacun certains points comme la poursuite immédiate. Voilà de quoi parlait Stephen Bindman. Pourquoi laisser un doute? Pourquoi ne pas indiquer clairement aux tribunaux, au nom de la population canadienne, ce que signifie la poursuite immédiate selon nous? Où commence la poursuite immédiate et où finit-elle? Comment définit-on une poursuite immédiate? Est-elle plus immédiate qu'une poursuite ordinaire ou une chasse serrée ou est-ce le contraire? Nous ne le savons pas. La police le sait-elle? Les agents de la paix devraient pouvoir ouvrir le Code criminel et voir nettement quels sont leurs pouvoirs. Ils ne le peuvent pas.
Voilà quelques éléments du projet de loi au sujet desquels nous demanderons l'avis des agents de la justice et de certains témoins qui voient les deux facettes de la question devant les tribunaux.
Je termine en répétant encore une fois que je crois sincèrement que le fait même de devoir présenter ce projet de loi est déplorable. J'appuie madame L'Heureux-Dubé qui veut que nos policiers disposent des outils dont ils ont raisonnablement besoin pour faire leur travail.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, je veux commencer mon intervention en disant que je suis heureux d'entendre mon collègue du Parti réformiste dire que dans les questions essentielles que doit prendre une société, il revient aux gens élus démocratiquement, donc, au peuple, d'en décider, et non pas à neuf personnes non élues. Alors, je me devais de souligner ce petit fait.
On discute aujourd'hui de quelque chose de très important qui porte sur l'équilibre entre, d'un côté, le pouvoir de l'État, donc, le pouvoir qu'une société donne à ses policiers, et, de l'autre, les droits et libertés des individus.
Je me dois ici de mentionner que je suis quand même déçu que le gouvernement ait pris autant de temps pour présenter ce projet de loi, parce que la Cour suprême a mis une date buttoir qui est celle du 22 novembre prochain. Lorsqu'on discute d'un enjeu aussi important que l'équilibre entre les droits et libertés d'un individu, ou des individus, et les pouvoirs de l'État, il me semble que cela doit se faire de façon calme, reposée et approfondie.
Ce qui est important ici, et ce que tente de faire le projet de loi, j'y reviendrai un peu plus tard, c'est de clarifier les règles pour les policiers. Je parlais à un procureur de la Couronne émérite hier qui me disait que l'arrêt de la Cour suprême en question, l'arrêt Feeney, avait comme gelé les policiers, parce qu'ils ne connaissaient plus les règles de leur pouvoir. Le projet de loi tente de clarifier ces règles.
Faisons une petite mise en relief des intérêts en jeu dans ce projet de loi. Le projet de loi proposé par le ministre de la Justice s'intéresse à une valeur importante de notre société actuelle qui est le respect de la vie privée. En effet, comme l'a souligné la Cour suprême, les arrestations effectuées dans les maisons d'habitation doivent se faire dans le respect des droits des individus, et plus particulièrement celui qui veut qu'il soit protégé contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives, c'est-à-dire l'article 8 de la Charte des droits et libertés.
L'importance du droit à la vie privée et à la protection de sa propriété n'est pas unique aujourd'hui, et ce n'est pas non plus quelque chose de nouveau. En effet, un jugement britannique de la common law, qui est la base de notre droit criminel datant de 1604, donc, qui a presque maintenant 400 ans, exprime, de la façon suivante, l'importance du respect de la vie privée. Je le cite, en traduisant: «La maison du commun des mortels est son palais.» La protection de la vie privée date maintenant, dans notre société, de plus de quatre siècles.
Dans ce même jugement, qui s'appelait l'affaire Semayne, on impose toutefois une limite au concept de châteaux inviolables. C'est-à-dire que ce n'est pas parce qu'un individu est dans une maison que le pouvoir de l'État s'arrête à la porte. Je cite, en traduisant encore une fois: «Dans toutes les affaires où le Roi est partie, le shérif, si les portes ne sont pas ouvertes, peut s'introduire par bris dans la maison de la partie, soit pour l'arrêter, soit pour exécuter l'acte judiciaire du Roi.»
Donc, la société, à cette époque déjà, reconnaît que les droits et libertés de l'individu relatifs à sa vie privée peuvent être limités lorsque l'intérêt public le requiert, lorsque la sécurité des citoyens nous l'impose. On en revient donc à ce que je disais en introduction, c'est une question d'équilibre.
En revanche, si l'État peut s'autoriser d'agir à l'intérieur de la sphère privée des individus, l'intrusion doit respecter les règles édictées par le droit, que ce soit la common law, que ce soit les lois statutaires, ou encore la Charte. Ces normes furent analysées par la Cour suprême dans le fameux arrêt Feeney, sur lequel il est temps de discuter.
Quels étaient les faits de cet arrêt? D'abord, M. Feeney est suspecté quant au meurtre d'un dénommé Frank Boyle. Après avoir recueilli des témoignages, la police se rend chez Feeney, frappe à la porte et dit: «Police! Police!» Pas de réponse. La police s'introduit donc dans la demeure de Feeney, s'approche de ce dernier et le touche pour le réveiller. Feeney est ainsi arrêté sans mandat et des saisies sont effectuées sur place. Feeney est jugé et est trouvé coupable de meurtre au deuxième degré. Feeney interjette appel pour motif de violation de l'article 8 de la Charte, qui est l'article contre les perquisitions, les fouilles et saisies abusives, et l'article 10 de la Charte, qui est celui du droit à un avocat.
Quels étaient les droits applicables? Premièrement, le droit qui est à la base de notre droit criminel, la common law. Déjà, c'était un enjeu avec lequel nos tribunaux étaient familiers. Il y avait l'affaire Eccles qui, en 1975, traitait du droit relatif aux arrestations dans une maison d'habitation à la suite d'une entrée par force.
La Cour suprême de l'époque précise alors la règle suivante: «On ne peut entrer contre la volonté du tenancier de maison que si: a) il existe des motifs raisonnables et probables de croire que la personne recherchée est sur les lieux; b) une annonce régulière est faite avant d'entrer.» C'est la base, au Canada, c'est le premier arrêt vraiment important que la Cour suprême ait rendu concernant cet enjeu.
En 1986, onze ans plus tard, arrive l'affaire Landry. La Cour suprême stipule «que la police peut entrer sans permission dans une maison pour y effectuer une arrestation sans mandat», selon les conditions de l'affaire Eccles et de l'article 495 du Code criminel qui stipulent, et je cite: «Un agent de la paix peut arrêter sans mandat: a) une personne qui a commis un acte criminel ou qui, d'après ce qu'il croit être des motifs raisonnables, a commis ou est sur le point de commettre un acte criminel.» C'est ce que l'on appelle le critère objectif, parce que, ce qu'on dit, c'est qu'il y a «des motifs raisonnables de croire». C'est subjectif.
En 1990, la Cour suprême arrive avec un critère plus objectif en ajoutant une dernière condition: «pour que l'arrestation sans mandat soit légale, il doit y avoir des motifs raisonnables et probables de l'effectuer». Ce n'est plus seulement «motifs raisonnables de croire», c'est ce que le policier ou la policière eux-mêmes pensent; donc, un homme ou une femme regardant cela à tête refroidie, de façon raisonnable, pourrait être d'accord avec cela. Alors, il y a deux critères: le subjectif et l'objectif.
Ainsi, si on additionne les critères jurisprudentiels, on peut résumer les règles de la common law de la façon suivante: l'arrestation sans mandat effectuée à la suite d'une entrée par la force dans des lieux privés est légale en vertu de la common law si: a) le policier qui l'effectue a des motifs de croire que la personne recherchée est sur les lieux; b) si une annonce régulière est faite; c) si le policier croit qu'il y a des motifs raisonnables d'effectuer l'arrestation—critère subjectif; et, d) s'il existe des motifs raisonnables et probables d'effectuer l'arrestation—critère objectif.
Mais il n'y a pas que la common law. Maintenant, il y a la Charte des droits et libertés. Le droit au respect de la vie privée a pris beaucoup d'importance au Canada depuis l'avènement de la Charte. En effet, je le disais un peu plus tôt, l'article 8 est une disposition qui, maintenant, à travers la Charte, est enchâssée dans la Constitution. Les textes législatifs ne peuvent donc pas empiéter sur cet article, de la même façon qu'ils ne peuvent le faire en vertu de la protection offerte par la common law.
Dans l'affaire Hunter de 1984, la Cour suprême a décidé que les fouilles, les perquisitions et saisies ne pouvaient être effectuées qu'une fois obtenue l'autorisation, c'est-à-dire un mandat, d'un organisme judiciaire indépendant qui a examiné le caractère raisonnable de la fouille ou de la perquisition ou encore de la saisie projetée.
Si on analyse les critères de l'arrêt Hunter et ceux des autres causes à propos de l'article 8 de la Charte, on en arrive à la règle de droit suivante. En vertu de l'article 8 de la Charte, il est présumé que les perquisitions sans mandat, dans des lieux où l'occupant a une attente raisonnable en matière de vie privée, sont abusives. Il incombe à la partie qui fait la perquisition de prouver qu'elle est raisonnable. Les trois conditions pour qu'une perquisition ne soit pas abusive, sont: a) qu'elle doit être autorisée par la loi; b) la loi elle-même ne doit rien avoir d'abusif; et c) la perquisition ne doit pas être effectuée d'une manière abusive.
Dans le cas d'espèce, l'arrestation était illégale, parce que les conditions pour effectuer une arrestation sans mandat, en vertu de l'article 495 du Code criminel, n'étaient pas remplies et parce que les policiers ne peuvent procéder à des arrestations sans mandat dans une maison privée que dans des circonstances exceptionnelles.
Qu'est-ce que la Cour disait dans l'arrêt Feeney à l'époque? «La police ne croyait pas subjectivement qu'il y avait des motifs raisonnables et probables d'arrêter l'appelant avant d'entrer par la force, sans mandat, dans la maison où il dormait». Il s'agit toujours de Feeney ici. «Outre l'incidence de la Charte sur les conditions requises pour effectuer des arrestations sans mandat dans une maison d'habitation, l'absence de croyances subjectives à l'existence de motifs raisonnables indiquait que la police n'aurait pu arrêter l'appelant légalement en vertu de 495 du Code criminel, même s'il s'était trouvé dans un lieu public.»
Or, quel a été l'effet de ce jugement? Il a eu l'effet d'une bombe, je le disais tout à l'heure. Les policiers se sont dit: «Maintenant, qu'est-ce qu'on fait?» Le gouvernement a décidé de présenter ce projet de loi pour clarifier les règles et pour aider au travail des policiers qui est, ne l'oublions pas, un travail d'importance essentielle dans notre société.
Le projet de loi C-16 vise principalement trois modifications: premièrement, permettre aux agents de la paix d'obtenir une autorisation judiciaire pour pénétrer dans une maison d'habitation, et cela s'inscrit dans l'évolution jurisprudentielle de Hunter et de Feeney; deuxièmement, permettre aux agents de la paix de pénétrer dans une maison d'habitation sans autorisation au préalable dans des situations d'urgence et dans les cas où le droit provincial ou fédéral ou la common law prévoit le droit d'entrer; et troisièmement, modifier la Loi d'interprétation.
L'article principal du projet de loi stipule que l'émission d'un mandat d'arrestation permettra la pénétration dans une maison d'habitation par l'agent de la paix, si le juge est convaincu qu'il y a des motifs raisonnables de croire que la personne visée par le mandat d'arrestation se trouve dans l'établissement. C'est le critère subjectif. L'agent de la paix ne peut exécuter le mandat que si lui-même a des motifs de croire que la personne à y arrêter s'y trouve.
L'article 529.1 permet à un juge de délivrer un mandat d'entrée dans une maison d'habitation désignée—c'est important, la maison d'habitation doit être désignée—pour arrestation avec ou sans mandat.
Mais il y a quand même des situations d'urgence—et mes collègues le mentionnaient—où on n'a pas le temps. Dans le feu de l'action, ce n'est pas nécessairement évident d'aller chercher un mandat.
L'article 529.3 du projet de loi permet à un agent de la paix de pénétrer dans une maison d'habitation sans que ne soit émis un mandat, si les conditions des articles 529 et 529.1, c'est-à-dire les éléments subjectifs, sont remplies et que l'urgence de la situation le requiert—on essaie aussi de définir ce qu'est l'urgence de la situation:
a) s'il y a un motif raisonnable de soupçonner [...]
[...] s'il y a un motif raisonnable de soupçonner qu'il est nécessaire de pénétrer pour éviter des lésions corporelles ou une mort imminente, ou en cas d'urgence, s'il y a des motifs raisonnables de croire [...]
[...] que des éléments de preuve sont menacés de destruction imminente.
Donc, les conditions d'urgence sont définies dans le projet de loi.
L'article 529.4 qui est prévu dans le projet de loi C-16 fait mention de l'omission de prévenir, c'est-à-dire que bien que la Cour suprême ait démontré dans l'affaire Feeney qu'il était important que l'agent de la paix se manifeste avant d'entrer dans une maison d'habitation, elle a stipulé dans l'affaire Eccles que cette obligation pouvait être restreinte en cas d'urgence. Ça, c'est le cas du bélier.
On peut prétendre que les cas d'exception prévus à l'article 529 respecteraient les données jurisprudentielles. C'est le cas du bélier.
Je m'arrêterai ici, monsieur le Président, puisqu'on doit passer à chose. Je reprendrai mon exposé après la période des questions orales. Je vous passe donc la parole et je continuerai plus tard.
[Traduction]
Le président suppléant (M. McClelland): Le député aura encore 25 minutes. Comme il est 11 heures, nous passons maintenant aux déclarations de députés.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LE SERVICE CANADIEN DE LA FAUNE
M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Monsieur le Président, le 1er novembre 1997 marque le 50e anniversaire du Service canadien de la faune d'Environnement Canada.
Le Service canadien de la faune, en collaboration avec ses nombreux partenaires, joue un rôle clé dans la préservation du patrimoine naturel du Canada. Au cours de ses 50 ans d'histoire il a réalisé beaucoup de choses et je citerais par exemple la recherche sur les effets des substances toxiques des eaux des Grands Lacs qui a conduit à l'interdiction du DDT; la mise en oeuvre du plan nord-américain de gestion de la sauvagine, un modèle pour la protection de l'habitat dont les projets dans tout le continent protègent des millions d'hectares; les réserves nationales de faune et les sanctuaires d'oiseaux migrateurs qui protègent plus de 11 millions d'hectares de terres. La liste des réalisations est longue.
Le service canadien de la faune aide à protéger une ressource qui tient à coeur aux Canadiens. Des images de la faune canadienne, si variée, figurent sur nos emblèmes et notre monnaie. Ces symboles sont reconnus dans le monde entier, tout comme le Service canadien de la faune qui, depuis un demi siècle, a travaillé à protéger notre patrimoine naturel pour les futures générations.
Je salue les hommes et les femmes de ce service qui ont été et sont encore des pionniers de la conservation de la faune canadienne.
* * *
LE JOUR DU SOUVENIR
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Réf.): «N'oublions pas». Monsieur le Président, le 11 novembre, ces mots résonneront dans tout le pays alors que nous rendrons hommage aux anciens combattants et à ceux et celles qui sont morts à la guerre.
Malheureusement, certains l'oublient le reste de l'année. Mais ce n'est pas le cas des membres du Maple Grove Club de Yarmouth, en Nouvelle-Écosse. Ce club encourage les jeunes à respecter et à connaître les grands sacrifices que les anciens combattants ont faits pour le Canada. Ces jeunes Canadiens extraordinaires assistent à des défilés, visitent les anciens combattants dans les hôpitaux et les foyers pour personnes âgées et font la promotion de l'unité nationale.
La semaine prochaine, nous célébrerons la semaine des Anciens combattants. Je suis fier de rendre hommage aux anciens combattants canadiens en général et au Maple Grove Memorial Club ainsi qu'au professeur Joe Bishara en particulier. Ils n'ont pas oublié.
* * *
L'HÔTEL DE LA MONNAIE
M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour féliciter le ministre des Travaux gouvernementaux qui a annoncé hier qu'une nouvelle usine de placage sera construite à Winnipeg, dans le voisinage de l'Hôtel de la Monnaie.
Ce projet de 30 millions de dollars créera de 100 à 130 emplois dans le secteur de la construction, de même que 30 emplois permanents, étant donné que la Monnaie royale met en place un procédé qu'elle a inventé et fait breveter pour le placage des pièces de monnaie. Cette mesure permettra à la Monnaie royale d'être mieux à même de faire face à la concurrence dans le monde et d'économiser quelque 9,5 millions de dollars par an en frais de fonctionnement.
C'est une victoire pour Winnipeg. C'est une victoire pour la Monnaie royale. C'est une victoire pour le Canada. Je remercie le ministre qui a travaillé ferme pour faire aboutir ce projet.
* * *
[Français]
LES CLERCS DE SAINT-VIATEUR ET LES SOEURS DE SAINTE-CROIX
M. Maurice Dumas (Argenteuil—Papineau, BQ): Monsieur le Président, cette année marque le 150e anniversaire de l'arrivée au Québec de deux communautés religieuses venues de France, les clercs de Saint-Viateur et les soeurs de Sainte-Croix.
Parler des clercs de Saint-Viateur, c'est parler de leurs écoles et collèges au Québec et au Canada: Saint-Nicolas d'Ahuntsic, Rigaud, Joliette, Berthierville, Matane, Roberval et Lachute au Québec; Embrun en Ontario; Otterburn et Saint-Pierre-Joly au Manitoba, et j'en passe. C'est parler du père Georges Lindsay, directeur-fondateur du célèbre Festival d'été de Lanaudière; c'est parler de Léo Bonneville, mon ancien professeur, directeur-fondateur de la revue de cinéma Séquence.
Les religieuses de Sainte-Croix se sont d'abord installées à ville Saint-Laurent. Elles y ont dispensé l'enseignement à tous les niveaux, et particulièrement aux jeunes filles, au Collège classique Basile-Moreau.
Dans ma circonscription, elles ont enseigné à Lachute, Brownsburg, Sainte-Scholastique, Saint-Augustin et Saint-Hermas. À ces pionniers et pionnières de l'éducation, mes anciens professeurs, je rends hommage aujourd'hui.
* * *
L'IMMIGRATION
M. Mark Assad (Gatineau, Lib.): Monsieur le Président, en début de semaine, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration rendait public son plan en matière d'immigration pour l'année 1998.
Intitulé «Un Canada plus fort», ce document préconise une hausse des niveaux d'immigration pour la prochaine année, dans la perspective d'un Canada accueillant et fier de la contribution des communautés culturelles désirant venir s'implanter chez nous.
On se doit de saluer les efforts du gouvernement canadien qui s'assure ainsi d'une contribution importante pour l'avenir de notre pays. Il n'y a pas de doute que les intérêts de toute la population canadienne sont bien représentés par le biais d'une telle politique généreuse et appropriée à cette étape-ci de notre histoire canadienne.
* * *
[Traduction]
L'ENVIRONNEMENT
M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, le mois d'octobre marque le premier mois national des maladies environnementales. On a choisi ce mois pour sensibiliser les gens aux maladies causées par des facteurs environnementaux.
Plus de 15 p. 100 des Canadiens sont touchés par des troubles reliés à l'environnement. Des maladies comme les allergies, l'asthme, les migraines et les troubles de comportement chez les enfants ont toutes été reliées à des facteurs environnementaux. Il existe des remèdes efficaces et peu coûteux. Grâce à l'éducation, aux traitements et à la prévention, on peut éliminer ces maladies.
La Société canadienne de la maladie environnementale et sa présidente, Judith Spence, déploient sans cesse des efforts pour sensibiliser les Canadiens aux facteurs reliés à ces maladies acquises.
Tout le monde a le droit d'être en bonne santé. On ne doit pas faire fi du lien entre la santé et l'environnement.
Je félicite la Société canadienne de la maladie environnementale de ses efforts et de l'engagement qu'elle a pris de faire connaître cette importante question de santé.
* * *
ET LE GAGNANT EST...
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, la course au leadership va commencer.
Les voilà partis.
Le ministre des Finances prend de l'avance dès le départ, ruant à gauche et à droite, talonné de très près par le ministre de la Santé, l'Homme Marlboro.
Plus lente à quitter la barrière, la ministre du Patrimoine est entravée dans ses mouvements par le drapeau dans lequel elle s'est drapée.
Au premier virage, le ministre des Finances, toujours en tête, commence à peiner, écrasé par le poids du dossier des pensions tandis que l'Homme Marlboro a perdu beaucoup de terrain, trop occupé à coller sur sa selle des annonces de cigarettes.
Pour sa part, la ministre du Patrimoine trébuche sous le poids du coffre à largesses du gouvernement, s'essoufflant à distribuer des subventions à droite et à gauche.
En entrant dans la ligne opposée, le ministre des Finances se saisit du fouet, cravachant son poulain à la tête et aux oreilles, les petits jeunes dans la foule se mettent à huer à tue-tête et le ministre se déconcentre, oublie de diriger son portefeuille de main de maître comme il avait coutume de le faire.
La ministre du Patrimoine est perdue de vue; elle s'affaire à expliquer aux pilotes que pour améliorer la sécurité, il faut fermer des aéroports.
L'Homme de Marlboro voit ses espoirs s'envoler en fumée.
La course de chevaux n'est même pas finie, mais les contribuables canadiens savent déjà qu'ils y perdront.
* * *
LES BANQUES
Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Monsieur le Président, la Banque de Montréal, la Banque Royale et la Banque Nationale, trois des plus grandes institutions financières du Canada, méritent d'être publiquement reconnues pour avoir accompli du bon travail. Elles ont augmenté le nombre de prêts consentis aux petites et moyennes entreprises d'au moins le tiers de tous les prêts consentis au cours du dernier trimestre.
Comme nous le savons, les prêts aux petites entreprises sont habituellement les plus difficiles à obtenir. Les banques ont toujours considéré qu'elles présentaient un risque extrêmement élevé. Par le passé, jusqu'à 80 p. 100 des petites entreprises ont fait faillite au cours de leurs cinq premières années d'activité. Par conséquent, les banques reconnues préfèrent l'investissement sûr que représentent les grandes entreprises. Cependant, les petites entreprises constituent le secteur de l'emploi qui croît le plus rapidement.
Un rapport rédigé par le Comité de l'industrie en 1995 encourageait toutes les banques à atteindre le ratio d'un tiers en ce qui concerne les prêts aux petites entreprises.
Félicitations à la Banque de Montréal, la Banque Royale et la Banque Nationale du Canada. Elles sont disposées à faire le travail et à mener l'enquête approfondie qui sont nécessaires pour investir en sécurité dans de petites entreprises nouvelles et captivantes dans tout le pays.
* * *
[Français]
LA SOUVERAINETÉ DU QUÉBEC
M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour annoncer à cette Chambre la création de la nouvelle ligne 1-976-CATASTROPHE.
Appuyé par des organismes objectifs et non partisans, comme le Quebec Committee for Canada, ce nouveau service de consultations parapsychiques est conçu pour ceux et celles qui veulent en savoir davantage sur le «delirium antiseparatum», l'équivalent pour la classe politique canadienne de la maladie de la vache folle en Grande-Bretagne.
En vedette cette semaine, les prédictions de nos astrologues à gogo, Michel Demers et Marcel Côté, qui affirment que le reste du Canada serait suicidaire et antidémocratique au point de forcer le Québec à déclarer unilatéralement sa souveraineté, alors qu'on sait tous que le gros bon sens mènera à une entente de partenariat mutuellement bénéfique.
La semaine prochaine sur la ligne 1-976-CATASTROPHE, vous apprendrez qu'après un oui à la souveraineté du Québec, les fédéralistes vont empêcher la terre de tourner et le soleil d'éclairer le Québec.
Call now.
* * *
[Traduction]
LE CANADIAN BUSHPLANE HERITAGE CENTRE
M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole pour rendre hommage à un centre patrimonial de premier ordre dans la circonscription de Sault Ste. Marie. Le Canadian Bushplane Heritage Centre, situé le long de la pittoresque rivière St. Mary, est un musée sans nul autre pareil qui préserve la tradition colorée du pilotage de brousse au Canada.
Le plus récent projet du centre consiste à restaurer trois avions de brousse antiques dans un effort pour recréer l'âge d'or du pilotage de brousse.
Sous la direction compétente du président Ken Lajambe, une équipe dévouée d'employés et de bénévoles exploite le musée, faisant la joie de milliers de visiteurs chaque année. En fait, un éditorialiste bien connu l'a nommé le meilleur musée au Canada.
J'invite tous les députés et les téléspectateurs à ne pas manquer de s'arrêter à Sault Ste. Marie et au Canadian Bushplane Heritage Centre lors de leur prochain voyage dans le nord de l'Ontario.
* * *
LA FISCALITÉ
M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, le moins que l'on puisse dire, c'est que l'atmosphère sur la colline du Parlement est fantomatique en cette journée d'halloween. Rassemblé autour d'une table d'ouïja, le Cabinet espère qu'un esprit bienfaisant approuvera sa nouvelle taxe sur l'essence. L'heure est grave.
Le gouvernement n'est pourtant pas timide en matière fiscale. Confronté à un problème, il lui suffit de concocter une potion et de jeter un sort aux Canadiens en leur imposant une nouvelle taxe.
La solution des libéraux ne s'est pas fait attendre. Les Canadiens respectueux des lois fiscales courbent l'échine, mais les criminels protestent, en hurlant comme des loups un soir de pleine lune. Le premier ministre se félicite même de la TPS tant haïe qu'ont fait adopter les conservateurs. Il déclare que la TPS est excellente. Il lui a redonné vie et conféré une personnalité, comme un autre l'avait fait avec Frankenstein. Le prochain tour qu'il prépare ne sera pas une gâterie pour les PME qui seront saignées par la nouvelle hausse fiscale que représente l'augmentation des cotisations au RPC.
En ce jour d'halloween les Canadiens sont loin de reposer en paix, parce qu'ils sont tourmentés par le ministre des Finances qui sera désormais connu sous le nom de comte Taxula.
* * *
L'EMPLOI
M. Robert D. Nault (Kenora—Rainy River, Lib.): Monsieur le Président, nous avions hérité en 1993 d'un déficit conservateur de 42 milliards de dollars. D'ici l'an prochain, le budget sera équilibré.
Qu'est-ce que cela signifie pour les Canadiens? Cela signifie que nous pouvons alléger le fardeau du remboursement de la dette pour nos enfants et nos petits-enfants. Cela signifie que nous pouvons commencer à réinvestir dans les domaines de politique économique et sociale qui tiennent tant à coeur aux Canadiens, comme la création d'emplois, l'éducation et la santé.
Si les prévisionnistes ne font pas erreur, cela a placé le Canada dans la position enviable d'être au premier rang des pays du G7 en matière de croissance. Cela a créé un environnement propice à la création d'emplois. Un million d'emplois ont été créés au cours de notre premier mandat, et plus d'un quart de million pendant l'année en cours. Et les jeunes Canadiens n'ont pas été aussi nombreux à occuper des emplois depuis près de dix ans.
Voilà un bilan dont on peut être fier. En somme, nous avons mis un terme aux taux d'intérêt écrasants, éliminé le déficit et commencé à rembourser la dette. Plus important, les Canadiens retrouvent des emplois et l'espoir.
C'est sous l'angle humain que l'on apprécie le mieux la lutte contre le déficit. Les chiffres sont abstraits, les emplois sont concrets. Ces quatre années ont apporté un grand changement.
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LE PRIX DE L'ESSENCE
M. Chris Axworthy (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Monsieur le Président, les bénéfices des sociétés gazières sont à la hausse. Les bénéfices de Petro-Canada et de la Compagnie pétrolière impériale ont triplé, affichant au dernier trimestre une augmentation de 103 p. 100; ceux de Shell Canada ont grimpé de 129 p. 100 et ceux de Suncor, de 152 p. 100.
Comme nous le savons tous, les Canadiens se préoccupent depuis déjà un certain temps du prix du carburant à la pompe. Ils comprennent bien que l'augmentation du prix de l'essence ne peut que nuire à l'ensemble de l'économie. Pourtant, le gouvernement fédéral et ses amies, les compagnies pétrolières, nous disent de ne pas nous en faire et de nous réjouir.
Les Canadiens ne sont pas contents de se faire exploiter dans les stations-services. En cette fête des esprits malicieux, on peut dire que les Canadiens se font jouer un bon tour lorsqu'ils vont faire le plein et que les pétrolières profitent de petites douceurs sous forme de bénéfices records.
Quand le gouvernement se décidera-t-il à défendre les Canadiens plutôt que les compagnies pétrolières qui versent des sommes énormes à la caisse électorale du Parti libéral?
* * *
[Français]
LES COMMISSIONS SCOLAIRES LINGUISTIQUES
L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le Président, hier, les membres du comité parlementaire chargé d'étudier l'amendement constitutionnel bilatéral devant faciliter la création des commissions scolaires linguistiques ont eu le plaisir de recevoir comme témoins les ministres québécois des Affaires intergouvernementales et de l'Éducation.
Ils sont venus réitérer un appui sans équivoque à ce projet, et expliquer le raisonnement d'établir deux réseaux linguistiques, un français et un anglais, et l'importance de consolider ces ressources.
[Traduction]
Un large consensus à ce sujet se dégage au Québec depuis trois décennies. Nous formons une fédération souple, en pleine évolution, capable de se moderniser, qui traduit, par conséquent, notre diversité dans la réalité multiculturelle et multiraciale qui est la nôtre. La collaboration entre le gouvernement fédéral et les provinces vise toujours à protéger l'intérêt supérieur des Canadiens, ce qui comprend, bien sûr, tous les Québécois.
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LES PÊCHES
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, l'effondrement du secteur de la pêche à la morue de Terre-Neuve a eu un effet dévastateur sur l'économie de notre province. Toutefois, beaucoup de pêcheurs essaient de tenir le coup en prenant d'autres espèces. C'est ainsi qu'on s'efforce d'établir la pêcherie de phoques.
Toutefois, j'ai appris à la télévision, hier soir, que le Fonds international pour le bien-être des animaux condamne cette pêcherie à coup de messages publicitaires. Inutile de dire qu'elle nuit ainsi à nos efforts de commercialisation en Amérique du Nord et en Europe.
Le gouvernement fédéral réglemente la pêcherie des phoques. Je demande au ministre des Pêches et des Océans de prendre des mesures pour contrecarrer cette campagne publicitaire et de protéger ainsi les efforts des personnes qui essaient de vivre des produits de la mer.
* * *
LE DÉFICIT
M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.): Monsieur le Président, plus tôt ce mois-ci, le ministre des Finances a annoncé que le déficit pour 1996-1997 était finalement de 8,9 milliards de dollars. C'est presque 20 milliards de dollars de moins que l'année précédente et la meilleure amélioration d'une année sur l'autre de toute l'histoire du Canada. Toutefois, rétablir l'équilibre des finances publiques n'est pas une fin en soi. Notre gouvernement a toujours eu pour but d'établir une économie forte et une société solide qui assurent aux Canadiens des possibilités et la sécurité.
Au moment même où notre pays entre dans cette nouvelle ère économique pleine de défis et de choix, il est vital que les Canadiens nous communiquent leurs priorités, leurs valeurs et leurs attentes. En tant que président du Comité permanent des finances, j'encourage les Canadiens à participer aux assemblées publiques que tiennent leurs députés respectifs. Notre comité tient à avoir votre opinion. Faites-nous-la connaître!
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
L'ENVIRONNEMENT
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, vous pouvez vérifier dans le hansard. Cet automne, nous avons demandé littéralement 50 fois au gouvernement de clarifier sa position sur la rencontre de Kyoto. Nous lui avons donné bien des occasions de s'expliquer. Nous croyons que c'est une question légitime. Nous voulons simplement une réponse. C'est pour cette raison que nous avons posé la question 50 fois. Après tout, tous les autres pays du G7 ont déjà rendu publique leur position sur les émissions de gaz à effet de serre, et le compte à rebours avant la conférence de Kyoto est déjà commencé. Celle-ci aura lieu dans 31 jours.
Ma question s'adresse au premier ministre. Quels sont les objectifs des libéraux et combien coûteront-ils aux Canadiens?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a dit très clairement que le gouvernement fera connaître sa position au public et au monde entier avant la rencontre de Kyoto. Nous voulons continuer et terminer nos consultations avec les provinces avant d'arrêter notre position finale.
Il doit être très clair que notre approche consistera à négocier pour les Canadiens un excellent accord qui tiendra compte des besoins de toutes les régions de notre pays. Contrairement au Parti Réformiste, nous prendrons position. Le Parti réformiste se contente de poser des questions et de faire des insinuations, mais jusqu'à maintenant, personne au Canada n'a pu...
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Fraser Valley.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Ça recommence, monsieur le Président. Si les libéraux n'ont pu, à 50 occasions, répondre à la question, c'est à cause de la ligne de conduite qu'ils suivent pour concocter pareille entente. Ils élaborent une position en secret. Il n'y a pas eu de discussion publique à ce sujet. Ils refusent d'attendre que toutes les provinces aient donné leur accord et ils se sont déjà engagés à signer une entente à Kyoto, même si le traité n'est pas encore rédigé.
Cette façon de procéder n'a pas fonctionné lorsque nous avons tenté de régler les problèmes constitutionnels. Pourquoi le premier ministre pense-t-il que les Canadiens donneront leur aval à un accord environnemental qui s'apparente à celui du lac Meech?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député peut-il nous dire pourquoi le Parti réformiste a abandonné sa position de principe, celle selon laquelle il faut accorder autant d'importance aux considérations environnementales qu'à celles d'ordre économique, social et technique? Qu'est-il advenu des principes réformistes? Les réformistes ont-ils renoncé à ces principes? La position du Parti réformiste se résume-t-elle à ce qu'ont fait les censeurs du cabinet du chef réformiste lorsqu'ils ont muselé le porte-parole de leur parti et qu'ils ont assimilé ses propos aux ratés d'un esprit abruti?
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, les réponses du gouvernement qui est censé diriger nos destinées s'affadissent de jour en jour. Chaque jour où le gouvernement esquive la question vient accroître les inquiétudes des contribuables qui redoutent la position qu'il est en train de concocter derrière des portes closes. Selon des études réalisées par le Conference Board, l'entente de Kyoto pourrait coûter des milliers de dollars par année au simple citoyen canadien. L'Association canadienne des producteurs pétroliers nous prévient que le prix à la pompe à essence pourrait augmenter beaucoup.
Je reviens donc à la charge et demande au gouvernement de nous répondre. Les Canadiens ne peuvent attendre que le premier ministre règle toutes les luttes internes au sein de son Cabinet. Combien coûtera l'accord de Kyoto au simple citoyen canadien?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le Parti réformiste orchestre en l'occurrence une campagne de peur. Tous les réformistes ne parlent que d'une chose, les impôts. Ils ignorent toutes les autres solutions qui permettraient de résoudre le problème sans avoir à ralentir l'économie. Pourquoi le Parti réformiste refuse-t-il d'adopter une position qui reconnaît les menaces pour notre santé, pour l'économie de l'Ouest du Canada et pour les futures générations ainsi que les coûts à payer pour cela? Les réformistes n'ont-ils pas à coeur le bien-être de nos enfants et petits-enfants?
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, le vice-premier ministre siège à la Chambre depuis quelques décennies, de sorte qu'il devrait savoir que la tâche de l'opposition consiste à poser des questions et que celle du gouvernement est d'y répondre.
Quand le ministre des Finances était dans l'opposition, il se targuait que les libéraux gèleraient les émissions de gaz carbonique au niveau de 1988 avant l'an 2000. Toutefois, l'homme qui était un militant écologique radical à l'époque ne dit mot sur l'accord de Kyoto. Ma question, qui s'adresse au gouvernement est la suivante. Compte tenu de tout ce que l'on entend au sujet des impôts et des taxes, pourquoi le ministre des Finances n'a-t-il rien dit sur la taxe prévue dans l'accord de Kyoto?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous travaillons en équipe dans cette affaire, contrairement au Parti réformiste. Le député de Kelowna se demande s'il y a un problème et met en doute les recherches scientifiques. Le chef de l'opposition est d'avis qu'il y a un problème, mais il n'aime pas le processus que nous avons adopté pour le régler. Et le porte-parole de son parti est muselé par la police de l'orthodoxie du Parti réformiste et accusé d'être un idiot qui ne sait pas ce qu'il dit.
Oui, les députés réformistes peuvent poser des questions. Mais comme ils prétendent qu'ils formeront le prochain gouvernement, ils ont la responsabilité d'exprimer leur opinion.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, la dernière fois que j'ai vérifié, le gouvernement était censé être responsable, mais nous n'obtenons pas de réponses. Les gens qui nous regardent ne sont pas stupides. Ils savent reconnaître les faux-fuyants partisans.
C'est le ministre des Finances qui a promis, dans le livre rouge de 1993, des réductions des émissions de gaz carbonique encore plus élevées que celles qui sont prévues à Kyoto, mais il n'a encore rien dit publiquement au sujet de l'accord de Kyoto.
Qu'est-ce que le ministre des Finances a dit en privé au sujet de la taxe prévue dans l'accord de Kyoto? Dans quel camp est-il?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, après avoir écouté la question du député, nous savons que même si son parti a célébré son dixième anniversaire cette semaine...
Des voix: Bravo!
L'hon. Herb Gray: Monsieur le Président, qu'ils en profitent maintenant pour applaudir parce qu'ils ne seront plus ici dans dix ans.
* * *
[Français]
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines, responsable de l'assurance-emploi.
Soyons clairs, il y a deux chiffres importants à retenir. En 1997, il y a 35 p. 100 de plus de chômeurs qu'en 1989 et pourtant, il y a 33 p. 100 de moins de prestataires d'assurance-emploi.
Le ministre admettra-t-il enfin que sa réforme va beaucoup trop loin et prive les chômeurs du revenu minimum nécessaire au soutien de leur famille?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la réforme de l'assurance-emploi que nous avons faite était nécessaire et l'ensemble des Canadiens en conviennent parfaitement bien.
La situation était telle que notre système ne convenait absolument plus au marché du travail contemporain. Nous avons donc dû procéder à une réforme extrêmement importante, courageuse, et ce que je peux vous dire, c'est que nous suivons de très près cette réforme pour nous assurer qu'elle continue de bien servir les Canadiens.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, le ministre fait preuve d'un mépris flagrant et inacceptable à l'égard des chômeurs, ceux qui n'ont pas d'argent pour se rendre jusqu'à la fin du mois, qui ne sont pas capables de rejoindre les deux bouts pour nourrir leur famille.
Devant les chiffres publiés hier matin, comment le ministre peut-il être fier de sa réforme, alors que seulement 36 p. 100 des chômeurs touchent des prestations, que le surplus de la caisse d'assurance-emploi atteint 12 milliards de dollars et que les deux tiers des chômeurs crèvent de faim?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il y a évidemment un excès manifeste du côté du parti de l'opposition qui est attaché à un système du passé, un système où on encourageait la dépendance aux fonds de l'État.
Notre réforme privilégie les mesures actives pour réintégrer le marché du travail. Suffit cette façon de voir avec les grands mots, et regardons la situation concrète: vous remarquerez que les chiffres de bien-être social n'ont pas augmenté au Québec depuis notre réforme, contrairement à ce qu'on continue d'affirmer de ce côté-là de la Chambre.
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LA PAUVRETÉ
M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
Il y a quelques semaines, les groupes anti-pauvreté ont lancé un cri d'alarme. Même les femmes du quartier Saint-Michel, dans le propre comté du ministre du Développement des ressources humaines, ont marché dans les rues pour dénoncer la pauvreté grandissante.
Quand le ministre se rendra-t-il enfin compte que ses coupures sans bon sens dans l'assurance-emploi ne font qu'augmenter la pauvreté?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement est très sensible à la situation de la pauvreté. Je suis très fier personnellement de représenter justement une circonscription montréalaise qui rencontre des problèmes de pauvreté. Cela me rend très sensible à cette situation, parce que tous les vendredis après-midi, j'y suis. Je confronte et je vis cette pauvreté avec mes électeurs.
C'est la raison pour laquelle notre gouvernement a fait une priorité d'augmenter le crédit fiscal pour les enfants, de 850 millions de dollars, dans le dernier budget, à partir du 1er janvier 1998, et que nous allons, au cours du prochain mandat, doubler cette somme de 850 millions de dollars pour aider les familles à faible revenu.
M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, eh bien, on va prendre un cas concret.
Prenons le cas de Louise, de Montréal. Elle travaille pendant cinq ans comme commis, et voit son chèque d'assurance-emploi amputé de 27 p. 100 pour avoir pris un congé sans solde de trois mois pour pouvoir s'occuper de sa mère malade.
Qu'est-ce que le ministre peut répondre au problème de Louise?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je peux répondre au problème de Louise par la solution que nous avons apportée au problème de Yolande, de Huguette et de Maryse qui n'étaient pas couvertes par l'ancien système, parce qu'une large proportion du travail à temps partiel est effectué, dans notre économie, par des femmes, et que le système actuel qui est basé sur des heures règle le problème de nombreuses femmes qui travaillent à temps partiel.
Maintenant, c'est à partir de la première heure que ces femmes sont couvertes, et non simplement à partir d'un certain nombre de semaines qu'elles n'arrivaient pas à faire dans le passé.
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[Traduction]
LE COMMERCE
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.
Depuis quelque temps, nous essayons de savoir du ministre si, dans les négociations sur l'AMI, le Canada essaie d'obtenir une série de normes exécutoires et exécutables dans les domaines de la main-d'oeuvre et de l'environnement. Le ministre refuse toujours de nous donner une réponse claire. Peut-il clarifier sa position aujourd'hui? S'il refuse, peut-il au moins nous dire pourquoi? Les Canadiens méritent de savoir quelle est la position du gouvernement du Canada ou pourquoi il refuse de nous la communiquer.
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, depuis que je suis ministre du Commerce international, le député sait que mon ministère a communiqué autant d'information qu'il était possible.
Le député a été informé, son parti aussi de même que tous les porte-parole des partis pour les questions commerciales. Nous avons envoyé des dossiers d'information aux députés. Nous avons déclaré à la Chambre des communes que les plus hautes normes en matière d'environnement et de main-d'oeuvre, de même que d'autres questions capitales feraient partie des discussions sur l'AMI.
Le député doit aussi admettre que le Canada, étant l'un des 29 pays en cause, doit bien sûr respecter le processus et qu'il doit aussi consulter les gouvernements provinciaux, puisqu'il s'agit évidemment d'un domaine à responsabilité partagée.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, d'autres pays ont déclaré publiquement qu'ils chercheraient à obtenir des normes exécutoires exécutables en matière de main-d'oeuvre et d'environnement lors des négociations. Pourquoi le gouvernement du Canada ne veut-il pas s'unir à d'autres gouvernements, comme celui du Royaume-Uni et d'autres gouvernements socio-démocrates d'Europe pour obtenir de telles normes?
Le ministre a parlé de plus hautes normes et de normes minimales. Nous voulons savoir s'il veut obtenir des normes exécutoires et exécutables? Utilisera-t-il les mots exécutoires et exécutables? Est-il contre de telles normes ou y est-il favorable? Nous attendons une réponse à cette question.
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le député affirme que le gouvernement du Canada ne veut pas prendre d'engagement sur les normes dont il parle. C'est une supposition fautive.
J'ai déclaré au député qu'il n'y avait aucun Canadien et aucun parti politique à la Chambre qui souhaitait une détérioration de notre environnement ou des droits des travailleurs.
La question, c'est qu'il s'agit de négociations entre 29 pays. Le Canada réclame les normes les plus élevées. La situation évolue et nous devons parvenir à un consensus. C'est exactement ce que nous ferons en dépit de tous les éclats du députés ou de ses bas...
Le président suppléant (M. McClelland): La parole est au député de Sherbrooke.
* * *
LES PÊCHES
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, ma question porte sur le différend entre le Canada et les États-Unis concernant le saumon du Pacifique.
Le gouvernement saura que, dans ce traité, le principe de l'équité est un principe clé, tout comme celui de la conservation. Je voudrais savoir si le gouvernement demandera aux envoyés, MM. Ruckelhaus et Strangway, de faire des recommandations aux gouvernements sur la possibilité de mettre en place un mécanisme de règlement des différends et de proposer aussi des options relativement à un mécanisme ayant force exécutoire comme moyen de mettre fin à l'impasse sur le principe de l'équité?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, aux termes du mandat que nous avons négocié avec les Américains, les envoyés spéciaux peuvent recommander tout ce qu'ils veulent. Si, d'après leurs consultations, ils jugent bon de recommander diverses mesures, dont un mécanisme de règlement des différends, les gouvernements du Canada et des États-Unis voudront évidemment répondre à ces recommandations.
Le mandat des envoyés permet à ceux-ci de recommander quoi que ce soit que le député voudrait leur suggérer.
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, sauf le respect que je dois au ministre, sa réponse est une bonne indication de ce qui ne va pas en ce qui concerne la position du gouvernement dans ce dossier. Il ne semble pas vouloir faire preuve de leadership sur le plan politique. En fait, il a rencontré les envoyés hier, et cette réunion ne nous a rien appris. Il n'y a rien de nouveau sur la table.
Je voudrais savoir quand le gouvernement va enfin faire preuve de fermeté au nom des familles de la côte ouest de la Colombie-Britannique qui souffrent à cause de ce différend. Va-t-il, oui ou non, demander aux envoyés de présenter un rapport provisoire lorsqu'ils rencontreront le premier ministre et le président Clinton à l'occasion de la conférence de l'APEC? Quand le gouvernement fera-t-il preuve de fermeté au nom des habitants de la Colombie-Britannique, au lieu de ne pas se soucier d'eux comme le font les réformistes?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le degré élevé d'agitation dont fait preuve le député montre simplement qu'il ne comprend absolument pas comment on peut en arriver à une solution.
La solution que nous trouverons devra être appuyée par toutes les parties concernées. Le député ne cesse de parler de la nécessité de répondre aux préoccupations des collectivités de pêche sur la côte ouest. C'est exactement ce que nous faisons. Nous leur donnons la possibilité de contribuer à la recherche d'une solution à ces problèmes. Nous travaillons directement avec les collectivités au lieu d'adopter l'approche élitiste descendante préconisée par le chef du Parti conservateur.
* * *
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, en faisant référence à la non-divulgation d'un incident impliquant un missile, le ministre de la Défense déclarait plus tôt cette semaine que si l'incident avait causé des dommages corporels ou des pertes matérielles, il aurait évidemment été rendu public. Le 7 septembre 1995, des soldats du Royal 22e en Croatie ont incendié leur propre mess, apparemment dans le but de dissimuler un vol de matériel vidéo. Des biens ont été volés et endommagés. Pourquoi la population n'en a-t-elle jamais été informée?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, cet incident remonte à 1995, longtemps avant que je ne devienne ministre de la Défense. Je ne sais pas comment les choses se faisaient à ce moment, mais aujourd'hui nous communiquons le plus d'information possible au public. Bien entendu, il se produit dans des forces armées de la taille de la nôtre de nombreux incidents qui ne présentent aucun intérêt public.
Toutefois, lorsqu'il y a des dommages corporels ou des pertes matérielles, le public en est informé.
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, la communication d'information et l'enquête au sujet de cet incident se poursuivent toujours et ne semblent pas devoir prendre fin. Je crois que le ministre doit, à l'instar de ses prédécesseurs, être très bien informé de ce qui s'est passé.
J'ai en ma possession des documents obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Ils font état d'une suite d'incidents survenus entre les 7 et 9 septembre, au cours desquels des biens ont été volés et un incendie criminel aurait été allumé.
Je rappelle encore une fois au ministre que des biens ont été volés et endommagés. Pourquoi aucune accusation criminelle n'a-t-elle été portée? Selon le ministre...
Le président suppléant (M. McClelland): Le ministre de la Défense nationale.
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les réformistes grattent vraiment les fonds de tiroir. Ils remontent plusieurs années en arrière. Si le député veut bien nous communiquer la documentation qu'il a en main, je serai heureux de la faire examiner et il aura une réponse.
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[Français]
LA FERMETURE DE LA MINE BC
M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
Aujourd'hui, c'est le dernier jour de travail à la mine BC de Thetford Mines. Demain matin, les 300 travailleurs seront en chômage. Un travailleur s'exprimait ainsi, et je cite: «À soir, je sors mon vieux linge, pas de prime de séparation, pas d'aide du gouvernement.»
Le ministre peut-il faire le point sur l'évolution du dossier depuis sa rencontre de mercredi dernier avec les travailleurs?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes évidemment très sensibles à la situation de ces travailleurs qui, après de très nombreuses années parfois à l'emploi de la mine, perdent leur emploi à cause de la fermeture de la mine.
C'est la raison pour laquelle mon ministère, dès la fin de septembre, a rencontré, à la fois l'employeur et les représentants des travailleurs, et que nous avons mis sur pied, avec beaucoup de rapidité et d'efficacité, de 2,5 à 3 millions de dollars de mesures actives pour les aider à réintégrer le marché du travail.
J'ai rencontré les représentants des travailleurs, mercredi dernier, et ils m'ont dit que ce que le Bloc demandait, un programme PATA, ils n'en voulaient pas.
M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, doit-on comprendre que le ministre abandonne les travailleurs à leur sort, les condamnant ainsi à l'indigence au terme de leurs prestations d'assurance-emploi?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous avons mis sur pied un certain nombre de mesures actives pour les aider à réintégrer le marché du travail, et il y a un Fonds transitoire de création d'emplois pour aider à dynamiser le marché de l'emploi.
Nous allons faire tout en notre possible pour permettre à ces gens de vraiment pouvoir donner le meilleur d'eux-mêmes, parce que nous ne croyons pas que nous puissions sous-estimer ces travailleurs qui sont encore capables de contribuer considérablement à l'économie régionale.
* * *
[Traduction]
L'UNITÉ NATIONALE
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, au début de cette législature, le premier ministre a promis aux Canadiens qu'il n'écarterait pas la possibilité de consulter les Québécois au sujet de la déclaration de Calgary.
Le premier ministre va-t-il dire aux Canadiens ce qui arrive à ce processus de consultation au Québec?
M. Paul DeVillers (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada estime que la déclaration de Calgary constitue un pas important pour la question de l'unité canadienne. Il s'agit d'une initiative provinciale, prise par les provinces. Toutes les provinces, à l'exception du Québec, ont travaillé à la mise en place de ce processus de consultation. Pour ce qui est du Québec, le gouvernement du Canada n'a pris aucune décision quant à la consultation du Québec, mais c'est une possibilité.
[Français]
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre s'est engagé devant ce Parlement à envisager de présenter la déclaration de Calgary à la population québécoise.
Cela fait plus d'un mois qu'il a pris cet engagement. Le premier ministre a-t-il maintenant des plans concrets pour mener des consultations au Québec?
M. Paul DeVillers (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je viens de répondre qu'en ce moment, le gouvernement, le premier ministre n'a pas de plans concrets, mais il y a toujours des possibilités.
* * *
L'INDUSTRIE DE L'AMIANTE
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.
Il y a plus d'un mois déjà, le gouvernement québécois, les trois centrales syndicales et les dirigeants de l'industrie de l'amiante faisaient front commun pour demander au gouvernement fédéral de déposer une plainte devant l'OMC relativement au bannissement de l'amiante en France.
Quand le ministre entend-il déposer une plainte devant l'Organisation mondiale du commerce pour venir en aide aux 2 000 travailleurs de l'amiante?
[Traduction]
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, la députée doit savoir que le gouvernement fédéral a assumé un rôle de chef de file dans le dossier de l'amiante. Non seulement nous avons fait des démarches auprès des gouvernements français, britannique et autres en Europe, mais nous avons organisé récemment la conférence internationale, en collaboration avec le gouvernement du Québec et l'industrie de l'amiante.
La députée devrait savoir également que, avant et après son voyage en France, le premier ministre nous disait par l'intermédiaire de ses fonctionnaires de ne pas chercher à nous adresser à l'OMC à ce moment-là.
[Français]
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, on sait que l'Angleterre risque de suivre l'exemple de la France en interdisant l'amiante sur son territoire.
Qu'entend faire le ministre pour tenter d'empêcher l'Angleterre d'imiter la France?
[Traduction]
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, durant son voyage en Grande-Bretagne, le premier ministre a discuté de cette question avec son homologue, le premier ministre Blair, et a été ferme en présentant son point de vue. J'ai rencontré le haut-commissaire de Grande-Bretagne au Canada, il y a quelques semaines. Nous avons aussi transmis des renseignements d'ordre technique et invité des représentants de Grande-Bretagne et le secrétaire d'État français à la Santé à visiter le Canada pour établir avec précision, à des fins d'exportation, l'information que nous possédons. Nous avons agi avec détermination sur cette question.
Par ailleurs, nous envisageons toujours la possibilité de nous présenter devant l'organisation mondiale du commerce pour faire...
Le président suppléant (M. McClelland): Le député d'Esquimalt—Juan de Fuca.
* * *
TAÏWAN
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, la Chine sera au sommet de l'APEC qui doit avoir lieu à Vancouver le mois prochain.
Taïwan, pays démocratique ami du Canada, n'a pas été autorisé par ce pays à participer au sommet de l'APEC, à Vancouver, le mois prochain.
Pourquoi Taïwan s'est-il vu refuser l'accès à cet important sommet économique?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, la déclaration du député est inexacte. Taïwan assistera au sommet de l'APEC.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement est copain copain avec la Chine. Il ne s'est pas élevé contre les violations flagrantes des droits de la personne qui ont lieu dans ce pays et il s'est opposé, à maintes occasions, à l'intégration de Taïwan au Canada.
Je demande donc une nouvelle fois si le gouvernement reçoit ses ordres de Beijing ou si le Canada a une politique étrangère indépendante.
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, notre politique étrangère est indépendante et efficace. L'essentiel est qu'elle donne des résultats.
Je conteste les affirmations du député. La vérité c'est que nous avons soulevé la question des droits de la personne avec les dirigeants chinois à maintes reprises et que nous sommes parvenus à obtenir la tenue de pourparlers annuels sur les droits de la personne avec les Chinois; c'est pour nous une occasion, que n'ont pas la plupart des pays, d'avoir des entretiens directs concernant un certain nombre de problèmes relatifs aux droits de la personne. Je suis convaincu que ce dialogue sera fructueux.
* * *
[Français]
L'INDUSTRIE LAITIÈRE
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.
Parce qu'il n'est pas soumis au contrôle des importations, le mélange d'huile, de beurre et de sucre est importé de façon plus massive. Cette situation entraînera, pour l'année 1997-1998, des pertes de 50 millions pour nos producteurs laitiers canadiens, et cela va en augmentant.
Le ministre de l'Agriculture peut-il nous dire quand il passera aux actes pour que cesse rapidement cette situation qui pénalise lourdement l'industrie laitière québécoise et canadienne?
[Traduction]
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, il y aura un peu d'action cet après-midi à 14 heures car je rencontrerai alors l'exécutif national des Producteurs laitiers du Canada pour discuter de la question. Ce ne sera pas notre première rencontre.
Des discussions ont lieu à ce sujet avec les ministères des Finances, du Commerce international, de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, ainsi qu'avec Revenu Canada. Nous collaborerons de notre mieux avec l'industrie laitière dans ce dossier.
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LA JUSTICE
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice.
Comment se fait-il que nos tribunaux n'acceptent pas les conséquences dévastatrices et traumatiques des agressions sexuelles et des viols sur les jeunes victimes?
Notre collectivité de l'Ontario est révoltée de voir que ce genre de crime puisse être traité avec un tel laxisme, comme on a pu le constater encore récemment avec le cas de Stuckless, qui a été condamné à deux ans de prison pour l'agression de nombreux enfants.
Comment une peine aussi légère peut-elle protéger nos jeunes et dissuader les agresseurs en puissance, et comment la ministre de la Justice va-t-elle combler les lacunes de notre système de détermination des peines?
Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais, comme tous les députés, j'en suis sûre, présenter mes condoléances à la famille et aux amis de Martin Kruze. Il a eu une vie difficile et il a eu le courage de rendre cette affaire publique.
En ce moment, l'acte criminel d'agression sexuelle est punissable d'une peine maximale de 10 ans de prison, tandis que la peine maximale pour voies de fait graves est l'emprisonnement à perpétuité.
Le problème n'est pas la loi, la loi existe. Le problème c'est son application.
L'affaire fait actuellement l'objet d'un appel.
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L'ACDI
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, les politiques et le rendement de l'ACDI témoignent de la nécessité d'une transparence et d'une responsabilité beaucoup plus grandes encore.
En 1996, l'ACDI a recommandé la création d'un comité consultatif chargé d'examiner l'efficacité de l'aide, composé de membres venant de l'intérieur et de l'extérieur de l'organisme. C'était il y a plus de trois ans.
Le gouvernement peut-il nous dire pourquoi ce comité n'a pas été formé et pendant combien de temps encore ce parti continuera d'user de l'ACDI à des fins partisanes?
Mme Claudette Bradshaw (secrétaire parlementaire du ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, je prends bonne note de la question, je la transmettrai à la ministre et nous veillerons à ce qu'elle ne demeure pas sans réponse.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens veulent que le système ait des comptes à rendre. Le bureau du vérificateur général du Canada a formé plus de 120 vérificateurs de 45 pays différents. L'ACDI n'a eu recours à leurs services qu'une seule fois et la vérification a révélé que les fonds n'avaient pas été utilisés aux fins prévues au départ.
La ministre peut-elle expliquer aux Canadiens pourquoi l'ACDI ne fait pas appel à ces vérificateurs?
Mme Claudette Bradshaw (secrétaire parlementaire du ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, je puis assurer le député que, dès que la ministre sera de retour lundi matin, nous serons en mesure de lui fournir une réponse.
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LES PRESTATIONS AUX AÎNÉS
L'hon. Lorne Nystrom (Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
Le Régime de pensions du Canada est un élément important du revenu de retraite. Il y a également la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti. Ces deux programmes sont liés et ils sont censés être modifiés.
Ainsi, pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas déposé une mesure législative sur la prestation aux aînés qui va remplacer la Sécurité de la vieillesse pour que, en toute équité, les Canadiens et le Parlement puissent étudier tout le programme en même temps? Le ministre est-il en train de nous dire que lorsque les personnes âgées reviendront de chez lui en cette soirée de l'Halloween, elles feront mieux de vérifier s'il n'y a pas de lames de rasoir dans leurs pommes?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je croyais que la question s'adressait à mon collègue des Finances.
Au Comité des finances l'autre jour, nous avons eu un long débat sur les avantages de la réforme du Régime de pensions du Canada. Nous avons examiné un certain nombre d'aspects, et je pense que nous nous en sortons fort bien.
L'hon. Lorne Nystrom (Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, c'est la réponse la plus faible que j'aie entendue au cours de la présente législature.
Quand le gouvernement va-t-il présenter le projet de loi sur la prestation aux aînés afin que nous puissions ce que cela comporte? Cette prestation et le RPC sont liés. En effet, le RPC représente environ 25 p. 100 du revenu de retraite et il est basé sur une pension de vieillesse universelle.
Le gouvernement cherche toujours à abolir la pension de vieillesse universelle. A-t-il peur de déposer le projet de loi voulu à cause de pressions des personnes âgées?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Bien au contraire, monsieur le Président. Nous sommes très heureux des mesures que nous avons pu présenter, car elles seront avantageuses pour 75 p. 100 des aînés. Quatre-vingt-dix pour cent des femmes âgées seules vont en profiter. Nous en sommes fiers. Il s'agit d'un programme viable.
Nous croyons qu'il est équitable. Nous sommes impatients de présenter la mesure législative nécessaire pour que tous les Canadiens en viennent à la même conclusion que nous.
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LES PÊCHES
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, le gouvernement a autorisé une pêche d'interception du saumon sur la côte est et sur la côte ouest du Canada. Nous sommes aux prises avec une crise immédiate des stocks sur les deux côtes. En cette période de crise, pourquoi le gouvernement continue-t-il de céder les écloseries de saumon de la Nouvelle-Écosse?
Ces écloseries soutiennent le saumon de la Nouvelle-Écosse, qui est menacé par la pêche d'interception que le gouvernement autorise.
M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, il est bien connu depuis quelque temps que le gouvernement céderait les écloseries de poisson. Nous l'avons fait avec la consultation des collectivités de pêche.
On a maintenu les écloseries de poisson en élaborant un partenariat, dans certains cas, avec le gouvernement provincial et dans d'autres, avec les associations de pêche.
Nous espérons continuer d'utiliser ces écloseries à l'avenir et de les maintenir en activité par des accords de partenariat de ce genre.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, en raison des pluies acides, le saumon pluribermarin, c'est-à-dire qui a passé plusieurs années en mer, ne remonte plus bon nombre des rivières de saumon dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.
Le ministère des Pêches et des Océans a dit à maintes reprises à la Chambre qu'il est chargé de la conservation. Le ministère nie-t-il maintenant assumer cette responsabilité?
M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, au moment où le gouvernement a pris des mesures pour remettre de l'ordre dans ses finances, il a dû pratiquer des compressions dans certains secteurs.
La conservation dans le secteur de la pêche demeure une priorité du gouvernement fédéral. Nous avons pu agir d'une manière financièrement responsable, tout en maintenant la conservation et en garantissant l'existence des écloseries à l'avenir, grâce aux ententes que nous avons pu conclure.
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L'ACDI
M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire parlementaire de la ministre responsable de l'ACDI.
Malgré l'aide humanitaire que la communauté internationale consent à la Corée du Nord, que dirige le gouvernement le plus répressif de la planète, la population y meurt de faim.
Quel est l'état de la situation en Corée du Nord et quelles mesures le Canada prend-il pour fournir de l'aide, conformément à son rôle traditionnel de principal fournisseur d'aide alimentaire d'ordre humanitaire?
Mme Claudette Bradshaw (secrétaire parlementaire du ministre de la Coopération internationale): Monsieur le Président, cette situation est regrettable. Le Canada a déjà fourni du blé, des lentilles et du poisson pour une valeur de plus de dix millions de dollars, afin d'aider à nourrir la population de la Corée du Nord.
Malheureusement, la récolte dans ce pays s'annonce très mauvaise cette année encore à cause de la sécheresse. Les responsables du Programme alimentaire mondial sont en train d'évaluer cette récolte et d'établir les besoins alimentaires du pays pour l'année prochaine.
Quand les besoins précis seront connus, nous déciderons quelle autre contribution le Canada devrait faire pour s'attaquer au problème humanitaire qui persiste...
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de West Nova a la parole.
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L'ÉQUITÉ SALARIALE
M. Mark Muise (West Nova, PC): Monsieur le Président, l'attente se poursuit pour des milliers d'employées faiblement rémunérées de la fonction publique dans tout le Canada. Malgré les tactiques brutales de la négociatrice en chef, Mary Eberts, l'agent spécial surpayé du gouvernement libéral, les négociations ont apparemment repris entre l'Alliance de la Fonction publique du Canada et le Conseil du Trésor.
Étant donné le prétendu attachement du gouvernement à l'équité salariale, le président du Conseil du Trésor détendra-t-il l'atmosphère en s'engageant à conclure avec les fonctionnaires un règlement négocié qui soit équitable envers toutes les parties?
L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, c'est une question qu'on a posée plusieurs fois déjà. La position du gouvernement est bien connue.
Il a augmenté son offre de 500 millions de dollars au cours des huit derniers mois. Nous avons montré à maintes reprises que nous aimerions en arriver à un règlement négocié aussitôt que possible.
* * *
LES CENTRES D'EXCELLENCE
M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Les centres d'excellence innovateurs ont été conçus pour encourager la coopération entre les entreprises, les universités et les collèges.
Le ministre pourrait-il dire à la Chambre si ces centres ont réussi à atteindre leurs buts?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, les centres d'excellence sont une réalisation canadienne remarquable. Ils ont réussi à créer 14 réseaux établis d'un bout à l'autre du Canada, qui relient 1 000 chercheurs, 48 universités, 405 entreprises et 175 autres organismes, et regroupent 1 400 étudiants, 500 boursiers engagés dans la recherche post-doctorale et 1 200 membres de personnel de recherche et technique. Ils ont eu des retombées dans divers secteurs industriels en plus de créer la possibilité de retenir au Canada les meilleurs chercheurs canadiens.
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LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, la loi C-68 est un vrai gâchis. Quatre provinces et deux territoires le contestent devant les tribunaux. Quatre gouvernements provinciaux ont refusé d'en appliquer les dispositions concernant les armes à feu. Ils soutiennent que, si le gouvernement fédéral veut accuser et emprisonner les agriculteurs et les propriétaires de ranch qui n'ont pas enregistré leurs armes à feu , il est libre de le faire, mais qu'ils ne s'en occuperont pas pour lui. Les coûts augmentent en flèche et le gouvernement ne parvient pas à respecter l'échéancier.
La ministre de la Justice acceptera-t-elle de retirer tout simplement les dispositions visant les armes à feu que contient cette mesure?
Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la position du Parti réformiste et celle du gouvernement à ce sujet sont très claires. La réponse est non.
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LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.
À la Conférence des femmes de Beijing, le gouvernement du Canada avait promis de contribuer au financement de la Conférence des femmes de l'APEC. À moins de trois semaines du début de cette conférence, le gouvernement n'a encore fourni aucune ressource financière.
Le ministre respectera-t-il l'engagement qui a été pris et veillera-t-il à ce que les fonds soient versés, afin que les organisateurs n'aient pas à annuler la conférence, comme ce fut le cas avec la conférence des autochtones, qui a été annulée, faute de fonds.
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, nous avons versé une contribution financière pour le Sommet populaire. Il revient cependant aux organisateurs de distribuer les fonds comme ils l'entendent.
* * *
[Français]
LA FERMETURE DE LA MINE BC
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
Le ministre nous a dit, ce matin, que le syndicat ne voulait pas du programme PATA dans le cas de la mine d'amiante. Or, dans une lettre qui lui a été transmise hier, le 30 octobre, le président du syndicat disait, et je cite:
Tout PATA modifié, amélioré, «dénormé», pour reprendre différentes expressions entendues jusqu'à maintenant par divers intervenants, pourrait sans aucun doute répondre aux attentes de nos travailleurs.
Est-ce que le ministre est prêt, oui ou non, à donner suite à la volonté des travailleurs?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'ai rencontré des représentants des travailleurs, mercredi après-midi, et ils m'ont dit clairement, dans mon bureau, en me regardant droit dans les yeux, qu'un PATA ne les intéressait pas.
Alors, ne me demandez pas de leur offrir quelque chose qu'ils m'ont déjà dit qui ne les intéressait pas. La lettre d'hier, je ne l'ai pas vue encore. Je la considérerai lorsqu'elle me sera parvenue. Si le syndicat préfère faire affaire avec le Bloc plutôt qu'avec moi, il n'y a pas de problème. Ils vont voir le genre de services que ces gens peuvent donner.
* * *
[Traduction]
LA LOI SUR LES DOUANES
M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Monsieur le Président, hier, le solliciteur général a déposé un projet de loi qui donnera aux agents des douanes le pouvoir de détenir et d'arrêter des personnes pour des infractions au Code criminel.
Compte tenu du fait que nos frontières sont traversées plus de 100 millions de fois par année, le ministre du Revenu national croit-il vraiment que le projet de loi rendra nos collectivités canadiennes plus sûres? Le cas échéant, de quelle manière?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-18 a été déposé hier à la Chambre. Il conférera des pouvoirs supplémentaires aux agents des douanes.
Je suis certain que tous les députés appuieront cette mesure législative, car elle permet aux agents des douanes d'arrêter et de détenir des gens qui pourraient être impliqués dans des actes criminels comme la conduite avec facultés affaiblies, l'enlèvement d'enfants ou la possession de biens volés ou encore des gens qui font l'objet de mandats d'arrestation.
C'est une autre mesure importante que le gouvernement a prise pour améliorer la sécurité publique et pour faire en sorte que nos rues et nos foyers soient sûrs. Je suis très fier de ce que le gouvernement a fait.
* * *
[Français]
LA CAISSE DE L'ASSURANCE-EMPLOI
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines qui est venu témoigner devant le Comité permanent des finances, l'autre soir, avec son collègue, le ministre des Finances.
Pour la première fois, le ministre des Finances, devant le comité, a admis que le gouvernement utilisait le fonds de l'assurance-emploi dans le but de réduire le déficit du gouvernement canadien. Le ministre a une responsabilité eu égard au fonds.
J'aimerais savoir pour quelle raison, lui, il accepte que son gouvernement utilise l'argent des travailleurs et des travailleuses, l'argent de l'assurance-emploi dans le but de réduire le déficit canadien?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, ce que le ministre des Finances a reconnu l'autre jour, c'est que nous avions une attitude très responsable par rapport à la caisse de l'assurance-emploi.
Vous vous souviendrez que sous le gouvernement auquel appartenait le chef conservateur, il y avait eu un surplus de 2 milliards dans la caisse de l'assurance-emploi qui s'était transformé soudainement en un déficit de 6 milliards. Le gouvernement d'alors a dû augmenter les cotisations de 30 p. 100, au pire moment de la récession, ce qui a créé davantage de chômage.
Nous avons une autre approche qui est beaucoup plus responsable.
* * *
[Traduction]
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Plus tôt cette semaine, le gouvernement chinois a abrogé la législation de Hong Kong garantissant la liberté d'association aux travailleurs. Pendant que Wei Jing Sheng croupit en prison, les droits de la personne sont bafoués au Tibet et ailleurs et la Chine continue d'appliquer sa politique béotienne à l'égard de Taiwan.
Compte tenu surtout de l'abstention honteuse du Canada à l'égard de la Chine au Comité des droits de l'homme des Nations Unies, le ministre condamnera-t-il la récente suppression des droits des travailleurs à Hong Kong? Et assurera-t-il à la Chambre que le premier ministre soulèvera auprès du président de la Chine la situation effroyable des droits de la personne dans ce pays?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le député est mal informé. Nous ne nous sommes pas abstenus. En fait, nous avons voté en faveur de la résolution concernant la Chine. Le député devrait corriger sa version des faits.
Comme je l'ai expliqué tout à l'heure à la Chambre, nous avons convenu d'un arrangement très particulier avec les Chinois, c'est-à-dire que nous avons convenu d'engager un dialogue permanent concernant les droits de la personne sur une base régulière. Grâce à ce mécanisme, nous pouvons désormais aborder avec la Chine la question des prisonniers politiques.
Nous avons soulevé des questions sur le Tibet et sur Hong Kong. En fait, nous investissons directement en Chine dans des programmes visant à améliorer le système juridique de façon à venir en aide aux femmes et à améliorer l'acceptation des ONG...
Le Président suppléant (M. McClelland): Ceci met fin à la période des questions.
* * *
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le président suppléant (M. McClelland): Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de M. Tom Spencer, député du Parlement européen.
Des voix: Bravo!
* * *
[Français]
PRIVILÈGE
LA PÉRIODE DES QUESTIONS ORALES
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre pour déposer une lettre qui a été adressée à M. Pierre Pettigrew, parce que M. Pettigrew a induit la Chambre en erreur.
Le ministre du Développement des ressources humaines a reçu une lettre du syndicat qui veut mettre par écrit la suite des discussions. De façon à éviter toute équivoque, ils ont mis par écrit ce dont ils ont discuté avec le ministre, lors de la rencontre. Ils ont bel et bien discuté d'un programme PATA amélioré. La lettre a été adressée au ministre, et il a induit la Chambre en erreur.
Je demande le consentement unanime pour déposer la lettre qui a été adressée à M. Pettigrew.
M. Bob Kilger (Stormont—Dundas, Lib.): Monsieur le Président, avec tout le respect que je dois à ma collègue d'en face, je crois que, tout d'abord—et je vois le ministre du Développement des ressources humaines, il voudra peut-être prendre part à ce débat—le fait de dire que le ministre a induit la Chambre en erreur, je crois que c'est vraiment antiparlementaire.
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Oui, monsieur le Président, il y a une marge. La députée de Rimouski—Mitis peut très bien avoir une lettre en date du 30 octobre qui m'est adressée, mais je peux vous assurer d'une chose, c'est que je n'ai en aucun cas induit cette Chambre en erreur lorsque j'ai dit que je n'avais pas encore lu cette lettre.
Il y a tout de même des limites à prétendre des choses de cet ordre-là. Puisqu'on prétend des choses ici, à l'effet que j'aurais induit la Chambre en erreur, je veux vous dire que je n'ai absolument pas induit la Chambre en erreur.
Je crois que la députée de Rimouski—Mitis devrait s'excuser pour avoir dit ce qu'elle vient de dire.
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, je peux peut-être contribuer à éclaircir le débat, pour faire avancer les choses.
La députée, sur une question de privilège ou un recours au Règlement, demande qu'on puisse déposer une lettre qui a été envoyée au ministre. Je suis persuadé que le ministre n'a aucune espèce d'objection à ce qu'on rende publique une lettre, par transparence, à tous les députés de la Chambre, ce qui va nous aider à faire avancer le débat.
Une voix: C'est une autre question.
L'hon. Jean J. Charest: Non, non. Le député dit que c'est une autre question, c'est la question fondamentale.
On demande le consentement unanime. Au nom des députés de mon parti, j'offre le consentement de notre parti. C'est la première question qui est posée à la Chambre, c'est la question à laquelle on doit répondre.
Je vois mal le ministre dire, après ce qu'il vient de nous dire maintenant, qu'il s'opposerait au dépôt d'une lettre par consentement unanime. Ce serait une contradiction totale.
[Traduction]
Le président suppléant (M. McClelland): À l'ordre. La députée de Rimouski—Mitis demande le consentement unanime pour déposer une lettre. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. McClelland): La députée peut déposer la lettre.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LE CODE CRIMINEL
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-269, Loi modifiant le Code criminel (absence de libération conditionnelle en cas de condamnation à l'emprisonnement à perpétuité).
—Monsieur le Président, je suis heureux de déposer de nouveau ce projet de loi d'initiative parlementaire. Le projet de loi modifie certaines dispositions du Code criminel relativement à l'emprisonnement à perpétuité. Il supprimera toute possibilité de libération conditionnelle, de libération anticipée et d'admissibilité à la libération conditionnelle pour tout criminel condamné à l'emprisonnement à perpétuité.
Pour les familles des victimes, le fait de savoir que le délinquant ne sera plus jamais libre constituera un soulagement et la fin d'un triste chapitre de leur vie.
Ce projet de loi fait clairement savoir aux meurtriers que s'ils tuent quelqu'un, ils seront enfermés pour le reste de leur vie. Un emprisonnement à vie sera vraiment un emprisonnement à vie.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)
* * *
[Français]
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.
Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Français]
LE CODE CRIMINEL
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-16, Loi modifiant le Code criminel et la Loi d'interprétation (arrestation et entrée dans les habitations), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
Le président suppléant (M. McClelland): L'honorable député de Charlesbourg dispose encore d'environ 25 minutes pour terminer son discours.
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ne vous inquiétez pas, je ne prendrai nullement les 25 minutes qui restent. Je poursuis le débat où j'en étais après cette courte interruption.
Après avoir fait un survol des principales dispositions du projet de loi en question, le projet de loi C-16, il est important maintenant de dire que nous avons certaines réserves sur le projet de loi en question.
D'abord, il sera nécessaire de discuter des pouvoirs «discrétionnaires» octroyés aux agents de la paix par rapport aux motifs raisonnables et probables de croire. Il y a une discussion de fond qui doit être faite concernant ce fait-là.
On veut aussi entendre et donner la possibilité—on ne veut pas être pressés par le gouvernement—aux deux côtés de se faire entendre. Comme je le disais tout à l'heure, c'est important de le répéter, on parle ici d'un débat fondamental et d'équilibre entre les droits et libertés des individus, d'un côté, et les pouvoirs de l'État, de l'autre. C'est un débat qui doit se faire de façon reposée et approfondie. Alors, nous voulons entendre les partisans des deux côtés, ceux qui sont en faveur de ce projet de loi, pour qu'ils nous disent pour quelles raisons ils le sont, et ceux qui s'y opposent. Il sera aussi très important d'entendre ceux et celles qui, sur le terrain, auront à appliquer cette loi, c'est-à-dire les policiers de tout le Canada.
Considérant le respect que le Bloc québécois accorde à la vie privée, considérant que l'État se doit, pour répondre à des situations qui le requièrent, d'agir dans la sphère privée des individus pour protéger l'intérêt du public et l'intérêt public, considérant toutefois que l'action de l'État est subordonnée aux règles édictées par la Charte des droits et libertés, et plus précisément, dans le cas qui nous concerne, l'article 8 de cette Charte, considérant l'importance des modifications proposées pour la bonne administration de la justice, considérant le jugement de la Cour suprême dans l'affaire Feeney et l'étude de la jurisprudence dans le domaine en question, et considérant que les modifications proposées semblent—je dis bien «semblent», et ce sera à vérifier—répondre aux exigences de la jurisprudence, nous, du Bloc québécois, sommes en faveur du projet de loi C-16. Et c'est là-dessus que je termine.
[Traduction]
M. Chris Axworthy (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi C-16 et pour exprimer le point de vue du Nouveau Parti démocratique.
Je veux ajouter ma voix à celles des autres députés qui ont fait des remarques au sujet de la vitesse avec laquelle le gouvernement veut faire adopter ce projet de loi à la Chambre des communes. Je donnerai plus de détails à ce sujet dans un instant, mais ce n'est pas là une façon très efficace de procéder à une réforme du droit, particulièrement du droit pénal, à cause des inquiétudes que les Canadiens ont, avec raison, relativement à leur sécurité à la maison et dans leurs collectivités.
Je veux féliciter la secrétaire parlementaire pour avoir expliqué clairement les dispositions du projet de loi C-16. Ceux qui regardaient le débat et ceux qui liront le compte rendu n'auront aucun doute sur ce que le gouvernement tente de faire exactement.
Le projet de loi est une réponse à la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Feeney. Les modifications proposées au Code criminel permettrait aux policiers d'obtenir un mandat d'un juge pour entrer dans une résidence privée afin d'arrêter ou d'appréhender une personne. Le projet de loi vise aussi à préciser que l'autorisation d'un juge n'est pas nécessaire dans des circonstances urgentes où l'obtention d'un mandat n'est pas pratique.
Dans l'affaire Feeney, la Cour suprême a jugé que, afin de protéger les droits des Canadiens à la vie privée en vertu de la Charte, les policiers devaient obtenir un mandat avant d'entrer dans une résidence privée pour arrêter ou appréhender une personne. Évidemment, la décision a fait naître certaines inquiétudes chez les policiers d'un bout à l'autre du Canada et les organisations représentant les victimes, qui craignent que la sécurité publique ne soit compromise dans certaines circonstances à cause du délai suggéré par la Cour suprême du Canada pour l'obtention d'un mandat pour entrer dans une habitation.
Dans tout le Canada, les milieux chargés de l'application de la loi ainsi que de nombreux Canadiens qui se préoccupent de leur sécurité ont fait part de leurs inquiétudes.
En général, avant de pénétrer dans une habitation pour arrêter quelqu'un, les policiers obtiennent un mandat les autorisant à s'y introduire. L'objet de cette loi est d'énoncer la marche à suivre pour obtenir un tel mandat. Elle permet également à la police d'obtenir un mandat par téléphone ou par tout autre moyen de télécommunication lorsqu'il lui est simplement impossible de se présenter devant un juge.
Elle simplifie et facilite également les formalités nécessaires pour obtenir un mandat et elle sera particulièrement utile, selon le gouvernement, à ceux qui travaillent dans des régions isolées, ou lorsqu'il serait impossible à la fois de surveiller un suspect et de se présenter devant un juge pour demander un mandat.
Elle n'aura aucun effet sur la disposition qui permet à un policier ou autre agent de la paix de s'introduire dans une habitation pour arrêter un suspect en cas de poursuite immédiate.
La question est de savoir si cette mesure établit un équilibre raisonnable entre les pouvoirs conférés à la police pour assurer notre sécurité et les droits des Canadiens à la vie privée. Le gouvernement prétend, bien sûr, que c'est le cas. Nous devrons attendre pour voir ce que la Cour suprême du Canada décidera à cet égard.
Un autre problème se présente, qui provient du fait que l'on veut faire adopter cette mesure à toute vapeur sans donner à la Chambre le temps qu'il lui faut pour bien examiner ces dispositions.
J'ai trouvé intéressant d'entendre le Parti réformiste féliciter le procureur général de la Colombie-Britannique du succès de la démarche qu'il a menée pour demander à la Cour suprême du Canada de reporter sa décision de six mois pour que le Parlement puisse intervenir et pour dissiper l'incertitude qui règne dans les milieux chargés de l'application de la loi. Ce n'est certainement pas tous les jours que l'on peut entendre le Parti réformiste féliciter le procureur général de la Colombie-Britannique. Je tiens à souligner ce geste de sa part.
À l'origine de la mesure dont nous sommes saisis il y a l'affaire Feeney. Nous approchons de la date limite. Je crois que le 22 novembre est la date butoir pour l'adoption de cette loi conformément à la recommandation de la Cour suprême du Canada. Comme je l'ai dit à maintes reprises, nous ne disposons pas de beaucoup de temps pour nous pencher sur les dispositions particulières et voir si cette mesure répond bel et bien aux préoccupations soulevées par la Cour suprême du Canada. Nous ne disposons pas de beaucoup de temps pour confirmer que cette mesure permettra aux forces de police de toutes les régions du Canada de faire leur travail effectivement.
Nous savons qu'il est parfois arrivé à la Cour suprême d'arguer que la façon dont on procédait avant la Charte n'est plus appropriée compte tenu des dispositions de la Charte. C'est un de ces exemples. Il sert à nous rappeler qu'il serait préférable que le gouvernement adopte une approche plus holistique et plus complète à l'égard de la réforme du droit criminel et qu'il examine un certain nombre de questions qu'ont soulevées la Cour suprême et d'autres tribunaux en ce qui concerne l'application du droit criminel compte tenu de la Charte des droits et libertés.
L'Association des policiers a émis entre autres certaines réserves à propos de cette mesure législative. On aurait pu tenir compte de ces réserves si nous avions eu le temps d'examiner les dispositions de cette mesure législative en profondeur. La police a certaines réserves au sujet de l'autorisation légale de s'introduire dans un domicile au moment où le mandat est émis. Comme nous le savons, il n'est pas toujours possible de savoir exactement où une personne qui s'est évadée de prison ou d'une maison de transition peut se trouver. Pourtant, il est clair qu'il est dans l'intérêt public que la personne en question soit appréhendée dans les meilleurs délais. Il faudrait examiner plus en détail dans quelle mesure cette mesure législative permet ou non de le faire.
Nous savons aussi qu'on reproche à cette mesure législative de ne pas définir ce qui constitue une situation d'urgence. Quand est-il approprié pour la police de procéder comme avant dans une situation d'urgence où elle n'a d'autre choix que d'appréhender immédiatement un individu? Dans l'incertitude, la police ne saura pas toujours quelles sont ses responsabilités ou comment agir au mieux pour protéger le public dans certaines circonstances.
Il aurait peut-être été préférable, par ailleurs, d'inscrire dans le préambule des dispositions qui préciseraient la réponse du gouvernement si l'article 1 était contesté en vertu de la charte.
Il y a d'autres dispositions que le comité aurait pu étudier plus à fond si le projet de loi avait été présenté un peu plus tôt. C'est clair que nous devons réagir à l'affaire Feeney et aux déclarations de la Cour suprême du Canada suggérant que le Parlement agisse. Le gouvernement a réagi en adoptant le projet de loi C-16. Comme on l'a dit précédemment, cette réponse à la Cour suprême a l'appui de tous les partis.
Je veux simplement signaler que, si cette mesure nous avait été présentée plus rapidement, nous aurions eu plus de chances de résoudre les problèmes qui pourraient éventuellement se poser. Ces préoccupations ont été formulées par les associations de policiers des quatre coins du pays, qui sont responsables de faire appliquer cette mesure législative et de protéger les Canadiens dans leurs maisons et dans leurs villes.
Certaines facettes du droit pénal ne peuvent être modifiées que globalement. Nous ne pouvons pas savoir en tous points ce que l'avenir nous réserve. Nous ne pouvons deviner ce que la Cour suprême du Canada jugera bon de modifier à cause des répercussions de la charte sur le droit pénal.
En tant que Canadiens, nous méritons une réforme du droit pénal plus cohérente, plus informée et plus tournée vers l'avenir que ce que nous avons eu jusqu'à maintenant durant la présente législature ou la précédente. Il est possible de prévoir l'avenir sur bien des points, et on peut aussi examiner ce qu'a dit la Cour suprême du Canada.
Ce serait mieux pour tout le monde si le gouvernement prenait cette réforme du droit pénal plus au sérieux et agissait plus globalement.
Cela étant dit, nous allons voter en faveur de ce projet de loi.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour commenter, au nom du Parti progressiste-conservateur, un projet de loi présenté à la Chambre en vue de modifier le Code criminel et la Loi d'interprétation, et plus précisément les dispositions concernant les mandats d'arrêt et l'autorisation de pénétrer dans une maison d'habitation.
Le projet de loi C-16 a pour principal objectif d'autoriser les agents de la paix à pénétrer dans une maison pour y arrêter un individu. Cette mesure législative fait suite au jugement rendu par la Cour suprême du Canada, le 22 mai 1997, dans l'affaire La reine c. Feeney. La Cour suprême a jugé que, en règle générale, la police avait besoin d'un mandat d'arrêt pour entrer dans un domicile privé dans le but de procéder à une arrestation.
Cette décision allait à l'encontre de la jurisprudence établie jusqu'alors et selon laquelle un agent de police n'avait pas besoin de se procurer un mandat d'arrêt pour pénétrer dans un domicile afin d'y arrêter une personne s'il était convaincu de l'existence de motifs raisonnables et plausibles pour procéder à son arrestation ou si, avant de pénétrer dans le domicile, il prévenait l'accusé que l'autorisation et les motifs faisaient partie du processus normal.
La Cour suprême du Canada a jugé que, dans cette situation, le droit constitutionnel des Canadiens à la vie privée n'était pas suffisamment protégé.
Les tribunaux font une interprétation très large de la Charte et, dans le cas précis, les agents de police se voient empêcher de faire leur travail et de procéder à des arrestations. Il ne fait aucun doute que cette décision inquiète la police et les organisations de défense des victimes qui craignent que la sécurité du public ne soit mise en danger, dans certaines circonstances, en raison des retards occasionnés par l'obligation de demander un mandat d'arrêt.
Bien des députés sont intervenus au sujet de ce projet de loi. J'ai écouté attentivement les commentaires des partis de l'opposition et ceux du gouvernement. Les divers points de vue ont un impact important sur la question.
Un des aspects qui m'inquiètent est celui de la poursuite immédiate dans une situation où une personne soupçonnée d'un crime grave est poursuivie dans un lieu d'habitation ou de travail; je m'interroge sur la capacité des policiers de mener leur tâche à bien et d'effectuer l'arrestation. D'autres éléments se rattachant à celui-ci m'inquiètent aussi, soit la protection de la preuve et la protection du public par les mesures de prévention qu'il incombe aux policiers de mettre en oeuvre dans l'exercice de leurs fonctions quotidiennes.
Le procureur général de la Colombie-Britannique s'est joint à d'autres provinces et au gouvernement fédéral pour demander et obtenir que la Cour suprême du Canada suspende pendant six mois le jugement Feeney afin que le Parlement ait le temps d'examiner ses effets et de remplir le vide laissé par la cause La Reine c. Feeney.
Entre temps, les policiers se trouvent dans une impasse par rapport à cette question et ils attendent avec impatience que le gouvernement pose des gestes et leur donne des lignes directrices définitives à ce sujet.
Nous étudions aujourd'hui la réponse du gouvernement à la décision de la Cour suprême. Je reconnais essentiellement—et je veux que ce soit clairement inscrit au compte rendu—que le gouvernement a adopté une position valable par rapport à cette décision. C'est sa façon d'essayer de combler le vide laissé par la cause La Reine c. Feeney. Toutefois, je voudrais faire quelques remarques sur ce projet de loi dont j'appuie le principe.
On ne peut pas permettre que l'arrêt Feeney fasse jurisprudence, car alors nous aurions des moyens moins efficaces pour arrêter des personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction.
Avant de traiter des conséquences de fond du projet de loi, je voudrais exposer à la Chambre et au gouvernement, avec le plus grand respect, une de mes inquiétudes. La réponse du gouvernement a été plutôt longue à venir vu la gravité de la situation. La Cour suprême avait accordé six mois et cela me parait suffisant. Bien sûr, il y a eu les élections, mais les affaires courantes doivent se poursuivre, même en période électorale. J'ajouterais qu'une question qui a autant d'importance pour les organismes chargés de faire appliquer la loi devrait être réglée dans les délais impartis.
Dans un communiqué du 30 octobre 1997, la ministre de la Justice disait que le projet de loi «reflète un équilibre raisonnable entre les pouvoirs conférés aux policiers pour assurer notre sécurité et le droit au respect de la vie privée des Canadiens».
Je suis heureux d'entendre cela de la part de la ministre vu les conséquences fondamentales du projet de loi C-16, en particulier sur les droits des Canadiens. J'espère que la ministre prendra en considération la nécessité pour le comité de la justice de discuter ouvertement des conséquences du projet de loi. Selon toute vraisemblance, le comité sera saisi de cette mesure dès la semaine prochaine. Voilà qui m'encourage.
À vrai dire, je ne suis pas sûr que la Chambre aura le temps, en 11 jours de séance bien comptés, d'adopter la mesure législative et de remplir la promesse faite aux Canadiens d'agir de façon prudente et responsable dans leur intérêt. Mais nous avons l'habitude de mettre les bouchées doubles quand ça urge et je suis convaincu que nous allons y parvenir à temps.
J'estime que ce projet de loi devrait faire l'objet d'une étude approfondie en comité. C'est pourquoi je soulève la question du retard. Je crois savoir que la ministre et ses hauts fonctionnaires sont prêts à entendre la réaction des partis d'opposition et des témoins qui se présenteront devant le comité de la justice.
Parmi ces témoins devraient figurer, à mon avis, l'Association canadienne des policiers, les différents ordres des avocats au pays ainsi que des avocats de la Couronne, qui auront l'occasion de témoigner, d'exprimer leurs précieux avis concernant le projet de loi et de formuler des propositions sur les moyens d'améliorer cette mesure législative.
C'est le lieu et le moment de faire en sorte que ce projet de loi soit de nature à combler le vide auquel j'ai fait allusion tout à l'heure à propos de l'affaire Feeney, et nous devrions tout mettre en oeuvre pour y parvenir du premier coup.
Pour que le comité permanent de la justice arrive à ses fins, c'est, je le répète, une affaire de temps et j'espère que nous réussirons à faire le nécessaire avant la date-butoir du 22 novembre.
En présentant le projet de loi aujourd'hui et en tenant le débat de deuxième lecture, il serait facile de montrer à la Cour suprême que le Parlement a déjà entrepris une étude sérieuse en ce qui concerne le travail à accomplir. On pourrait demander une suspension au besoin, et il y a des précédents pour cela. Cela s'est déjà produit. Nous pourrions, en fait, devoir présenter cette requête si le Comité de la justice n'a pas suffisamment de temps ou si les témoins n'ont pas assez de temps pour parler de cette question.
Je veux m'arrêter brièvement sur le projet de loi et ses objectifs. Que fait ce projet de loi et que devrait-il faire? Je pense que tout le monde s'entend pour dire que ce projet de loi devrait d'abord et avant tout aider à protéger et à servir la collectivité. On doit également reconnaître que les policiers, les simples agents, ceux qui sont sur le terrain, doivent recevoir l'aide voulue lorsque vient le temps d'effectuer une arrestation et de s'acquitter de leurs fonctions.
Est-ce que le projet de loi C-16 fait tout cela? Accomplit-il cela et peut-on l'améliorer? Là encore, ce sont des questions auxquelles les membres du Comité de la justice et, on peut l'espérer, les témoins devant le comité vont nous aider à répondre.
J'ai eu l'occasion de m'occuper d'un certain nombre d'affaires où il était question de mandats de perquisition et de droits individuels, et l'équilibre auquel on doit parvenir entre la protection du public d'une part et ces droits d'autre part, était toujours en jeu. Chose certaine, on doit examiner très sérieusement toute mesure législative qui porte sur des arrestations, alors que des policiers entrent dans des maisons privées ou des lieux d'affaires pour effectuer ces arrestations.
Il est évident que dans le cas d'entreprises la protection de la vie privée n'est pas la même que dans le cas d'une habitation privée. Cependant, du fait des nombreuses situations auxquelles ils sont confrontés quotidiennement, il faut donner aux policiers toute la latitude possible. Nous ne devons jamais oublier que les agents de police veulent être guidés par le Code criminel du Canada et par les législateurs qui contribuent à son évolution.
Les préoccupations précises que j'ai soulevées au début de mon exposé au sujet des poursuites immédiates feront l'objet, je l'espère, d'une discussion animée au sein du comité.
La nécessité pour tous les services policiers d'intervenir dans les cas de violence familiale donnera de meilleurs résultats lorsque la question aura été entièrement débattue. Les agents de police sont appelés quotidiennement à intervenir dans des situations de violence familiale. Ils doivent recevoir tout le soutien et toute l'aide nécessaires s'ils veulent lutter efficacement contre ce très grave problème dans notre pays.
Les perquisitions de drogues constituent également un autre domaine où le projet de loi aura une incidence. Les agents de police sont aux prises avec une épidémie d'utilisation de drogues dans tout le pays. Ils doivent obtenir le pouvoir discrétionnaire voulu pour pénétrer dans une habitation ou dans des endroits où l'on soupçonne que des drogues se trouvent.
Les policiers travaillent toujours dans un environnement tendu et le public accorde de plus en plus d'attention aux policiers et au travail qui leur est confié. Par le passé, j'ai vu les policiers faire preuve d'un très bon jugement et agir de façon responsable et conforme à la loi dans la majorité des cas.
Cela étant dit, les principes qui sous-tendent ce projet de loi sont raisonnables. À l'heure actuelle, les agents de police dans tout le pays travaillent dans le cadre d'un système qui est quelque peu encombrant et inefficace, sans pouvoir s'appuyer sur une disposition précise du Code criminel. Certaines propositions faites dans ce projet de loi clarifieraient certes cette situation et aideraient les policiers à accomplir leur travail plus rapidement, avec la certitude d'agir conformément à la loi.
Il conviendrait cependant, à mon avis, d'apporter certaines modifications au projet de loi, notamment en ce qui concerne la possibilité accordée aux policiers qui demandent un mandat d'arrêt et l'autorisation de pénétrer dans une maison d'habitation de donner au juge la description de la demeure dans laquelle ils veulent pénétrer pour procéder à une arrestation. Ils ne disposent pas toujours de ce genre d'information. Cela dépend d'ailleurs de l'urgence de la situation; le policier peut être à la poursuite d'une personne ou se trouver devant une situation d'urgence nécessitant une intervention immédiate pour prévenir les risques de blessure et empêcher que l'on cache ou fasse disparaître des preuves matérielles. Le projet de loi de traite pas adéquatement de cet aspect.
Je reconnais que l'on peut avoir une idée de l'endroit où doit se trouver le suspect, mais ce n'est pas toujours facile. Dans l'intérêt du public, je ne peux pas croire que l'arrestation d'un criminel présumé dans des circonstances où la police avait des motifs probables et raisonnables de croire qu'une infraction était en train d'être commise ne l'emporte pas sur des préoccupations concernant l'entrée dans une planque ou un local de contact où le criminel cache des produits de la criminalité, de la drogue ou des armes qui ont peut-être servi à commettre l'infraction.
Autre sujet de préoccupation: les ressources à la disposition des policiers pour exécuter un mandat de perquisition. Le projet de loi ne dit rien, vraiment, de la disponibilité d'un juge ou d'un juge de paix pour émettre un mandat d'arrêt. Il s'agit là, selon moi, d'une omission flagrante. Conférer des pouvoirs sans donner les moyens de les exercer, cela ne vaut pas cher. Si nous avons une procédure précise pour l'obtention d'un mandat de perquisition, mais que nous n'avons pas les juges ou les juges de paix nécessaires pour signer les formules et permettre aux policiers d'exécuter ces mandats, cela ne donne absolument rien.
Une autre question découlant du jugement même, et à laquelle le projet de loi C-16 essaie de répondre, est la définition plus précise de ce que l'on a appelé une situation d'urgence dans le jugement majoritaire rendu dans l'affaire Feeney. On ne sait pas trop, à ce stade-ci, ce que l'on entend par situation d'urgence. Je pense que les services policiers souhaitent que cette expression soit définie d'une façon plus précise.
Comme c'est le cas pour toute mesure législative, le projet de loi va faire l'objet de contestations judiciaires. Il va de soi que le gouvernement ne peut se contenter de réagir et doit s'efforcer de prévoir toutes les contestations possibles en vertu de la Charte. Dans ce contexte, il importe de clarifier la définition de situation d'urgence.
Un autre point a trait à la mention de plusieurs habitations dans un mandat de perquisition ou d'entrée. La Loi d'interprétation semble sous-entendre que le singulier signifie aussi le pluriel et inversement dans le projet de loi. Toutefois, je pense que la possibilité de mentionner plusieurs habitations ou cachettes d'un suspect est encore vague.
En conclusion, le Parti conservateur appuie le projet de loi. La ministre de la Justice a adopté la bonne attitude en proposant des solutions en temps opportun, au cours de la présente séance. Cela dit, je vous renvoie à mes remarques antérieures au sujet du travail effectué jusqu'à maintenant pour que cette mesure législative soit finalement adoptée à la Chambre. J'entretiens certaines préoccupations à cet égard.
De toute évidence, le gouvernement fédéral a une énorme obligation en ce qui a trait au Code criminel du Canada. La ministre de la Justice est incontestablement le principal intervenant lorsqu'il s'agit d'apporter des modifications à celui-ci.
J'ai hâte de pouvoir influer directement sur la version définitive du projet de loi et de travailler avec mes collègues de la Chambre, afin que le projet de loi C-16 soit adopté et qu'il soit très efficace pour ce qui est de faire en sorte que les policiers puissent faire leur travail et rendre nos rues plus sûres.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Dewdney—Alouette.
Arrivé à la Chambre depuis peu, je suis renversé par la façon dont cette institution fonctionne. Hier la ministre a déposé un projet de loi en réponse à un jugement que la Cour suprême a rendu en mai dernier. Pour rédiger cette réponse, il aura donc fallu plus cinq mois au ministère de la Justice, malgré toutes les ressources dont il dispose. Or, les parlementaires ne disposent que d'une journée pour étudier la mesure, saisir toutes ses répercussions et tenter de faire des observations sensées. Il n'est pas étonnant que les Canadiens s'interrogent souvent sur les travaux de la Chambre. Cela explique peut-être aussi pourquoi les tribunaux veulent tant remettre en question notre pouvoir législatif au Canada.
Il y a seulement quelques années, les tribunaux se limitaient encore à interpréter les lois, alors qu'aujourd'hui, ils semblent les faire. Jusque là, légiférer était pourtant le rôle de la Chambre.
Au cours de la dernière législature, l'ancien ministre de la Justice avait la réputation de légiférer sous l'effet de la panique. Il laissait souvent quelques jours à peine pour l'adoption de projets de loi cruciaux. Les Canadiens et moi-même en attendions davantage de la part de la ministre de la Justice actuelle. Comme de nombreux simples députés libéraux l'ont mentionné, les bureaucrates non élus du cabinet du premier ministre prennent en réalité toutes les décisions.
Il se peut que la ministre de la Justice ne gère pas elle-même son agenda et qu'elle ait été contrainte à ces jeux politiques qui consistent à déposer un projet de loi dans des délais déraisonnables, de sorte que ces mesures ne fassent pas l'objet d'une étude et d'une consultation sérieuses. Nous ne pouvons qu'espérer que le gouvernement ait assez de décence pour renvoyer ce projet de loi au comité et nous donner vraiment l'occasion de l'étudier et de faire valoir nos inquiétudes à son sujet.
Je constate que le projet de loi est presque entièrement une réaction au jugement Feeney, mais je me demande à quel point il sera utile pour trancher une prochaine affaire du même genre que l'affaire Feeney. Selon le jugement majoritaire dans l'affaire Feeney, la police n'avait aucun motif raisonnable et probable d'arrêter M. Feeney avant de pénétrer chez lui.
Je me demande alors: comment la demande formelle visant à obtenir un mandat qui permettrait de pénétrer dans une maison d'habitation pour y arrêter quelqu'un pourrait-elle être accueillie s'il n'y avait pas de tels motifs pour faire cette arrestation? De nombreux critiques se sont ralliés à l'opinion minoritaire, mais il reste que la majorité des juges a statué que la police avait tort de pénétrer sans mandat dans une maison d'habitation dans ces circonstances.
Ma deuxième réserve concerne la paperasserie administrative que l'on impose aux agents de police. Pour diverses raisons, je passe beaucoup de temps avec les policiers de ma collectivité depuis quelques années. À des intervalles de quelques mois, je tiens à accompagner une patrouille de nuit pendant un week-end. Si seulement les citoyens savaient ce qui se passe dans leurs rues pendant qu'ils sont au lit.
Il serait peut-être bon qu'un plus grand nombre de juges et de législateurs fassent comme moi avant de rendre des décisions stupides ou de rédiger des lois tout de travers. Ils en viendraient peut-être à apprécier les situations auxquelles les policiers sont confrontés. Ceux-ci ont constamment à faire face à des menaces et à prendre instantanément des décisions pour maintenir la sécurité dans nos rues.
Au moins, ce projet de loi renferme des dispositions prévoyant des télémandats. Il n'inondera pas les policiers de paperasse. Il faut espérer que dans les localités éloignées et dans les circonstances où le temps ne le permet pas, le téléphone aidera les membres de nos forces policières qui sont déjà surchargés de travail et trop peu nombreux.
Je ne connais pas les télémandats, mais j'espère qu'ils donneront la satisfaction qu'on en attend. Je ne peux m'empêcher de me demander si les juges de paix n'hésiteront pas plus à accorder des mandats par téléphone plutôt que d'accéder à la demande d'un agent de police qui se présente en personne devant lui avec les documents appropriés.
Nous devrions également nous demander à quel point on peut avoir accès à des juges de paix au cours de la nuit alors que les policiers travaillent à protéger le public et ont besoin de ces mandats d'entrée dans les maisons d'habitation pour y procéder à des arrestations. J'aimerais en savoir davantage sur la façon dont les télémandats fonctionneront dans la pratique.
De toute façon, à la suite de cette mesure, les policiers devront maintenant se préoccuper d'obtenir une autorisation en bonne et due forme pour entrer dans une maison d'habitation afin d'y effectuer une arrestation. Ils devront tout probablement obtenir une autorisation distincte pour y effectuer une perquisition aussi. Ils auront peut-être dû commencer par obtenir un mandat d'arrêt de base, soit donc jusqu'à trois mandats uniquement pour faire traduire un prévenu devant les tribunaux. Après avoir dépensé tant de temps et d'efforts pour assujettir le prévenu au processus juridique, les policiers et nos communautés continueront d'être étonnés de voir avec quelle rapidité le prévenu pourra être remis en liberté sous caution.
Je me demande également si les policiers se prévaudront réellement de ces dispositions relatives aux mandats. Une fois qu'ils ont obtenu un mandat et qu'ils sont entrés dans une maison d'habitation, rien ne garantit que le prévenu s'y trouvera. Exécuter le mandat révélera probablement l'intérêt que la police porte au prévenu. Dans bien des cas, cela lui fera comprendre qu'il devrait disparaître. Dans certains cas, les policiers seront mis en danger lorsque des prévenus désespérés se prépareront à résister à leur arrestation.
Je crains en outre que, dans de nombreux cas, les policiers décideront peut-être d'attendre que les prévenus se trouvent à l'extérieur de chez eux avant de les arrêter. Ce retard à les arrêter pourrait donner lieu à la perpétration d'autres crimes par le prévenu. Nous pouvons certainement voir à quel point notre souci de protéger les droits des criminels donne lieu à des obligations accrues pour nos policiers et à une menace accrue pour notre propre sécurité.
Il faut par ailleurs se demander ce qu'il advient d'autres affaires en instance devant les tribunaux. Nous savons que le jugement rendu dans l'affaire Feeney prend force de loi à partir de la date où il a été prononcé. On ne sait pas encore si, dans les autres causes portées devant les tribunaux avant même l'affaire Feeney, des arrestations seront jugées illégales et des preuves, inadmissibles. On ne sait même pas si des causes portées devant les tribunaux depuis l'affaire Feeney seront visées par ce projet de loi.
Pour une raison quelconque, j'ai bien l'impression que notre appareil judiciaire actuel sera tout aussi enclin à traiter d'autres contrevenants comme M. Feeney a été traité, du moins ceux qui ont commis des crimes et qui ont eu affaire à la police avant l'adoption de cette mesure législative. Autrement, il se trouvera des coeurs sensibles pour crier à l'injustice et dénoncer le fait que seul M. Fenney aura obtenu un traitement aussi clément et controversé.
Les députés s'en seront rendu compte, la Cour suprême a relevé certaines lacunes intéressantes dans notre loi. Le projet de loi dont nous sommes saisis vise à combler ces lacunes, qui doivent être analysées et examinées à fond. Je voudrais rappeler à ceux qui nous écoutent que, dans l'affaire Feeney, un homme de 85 ans a été battu à mort. Le prévenu pourrait ne jamais avoir à payer pour le crime horrible qu'il a commis.
Si nous ne parvenons pas à corriger ces incohérences dans notre loi, ce simulacre de justice risque de se répéter. Cela oblige tous les députés à assumer une très lourde responsabilité.
Je le répète, j'espère que le gouvernement finira par comprendre et qu'il nous donnera l'occasion de corriger ces défauts de la loi. La ministre a connu un mauvais départ en attendant si longtemps avant de présenter son projet de loi et en voulant aujourd'hui le faire adopter rapidement. Il ne reste que trois semaines avant la date limite fixée par la Cour suprême pour adopter une loi et la Chambre fait relâche au cours d'une de ces trois semaines-là. Je ne sais pas si la population comprendra la situation, mais c'est très malheureux.
J'ai rencontré la famille de la victime dans l'affaire Feeney. Je doute qu'un seul député puisse commencer à comprendre la façon dont cette décision l'a touchée. Pensez-y bien: un tueur condamné, qui a été retrouvé maculé du sang d'un être qui vous était cher, pourrait s'en sortir sans être puni, parce que les agents de police ont été incapables de le réveiller, tant il était ivre, avant d'entrer dans son habitation pour l'arrêter.
Voilà un exemple classique de la façon dont notre système judiciaire pénalise les victimes; un exemple classique de la façon dont notre système judiciaire est devenu l'otage de ceux qui vivent dans une tour d'ivoire, très loin de la réalité de la vie quotidienne au Canada.
Faut-il se surprendre que la majorité des Canadiens ont perdu toute confiance dans les tribunaux?
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, nous allons appuyer le projet de loi C-16, mais le fait qu'on doive présenter un tel projet de loi est symptomatique d'un problème plus grave, soit celui que pose l'ensemble du système de justice, comme vient de le dire mon collègue.
Le gouvernement dit souvent que les choses vont bien, que la criminalité est à la baisse et que la situation semble s'améliorer. Ce n'est tout simplement pas vrai.
Lorsque j'étais enseignant, nous avions un test infaillible pour déterminer si un enseignant était bon: si l'on était prêt à confier son propre enfant à un enseignant, c'est qu'il était bon.
L'épreuve décisive pour les Canadiens, c'est l'efficacité du système de justice. Les Canadiens vont-ils se féliciter de cette décision et l'accepter facilement? Certainement pas dans l'affaire Feeney.
Je ne crois pas que les Canadiens se sentent plus en sécurité aujourd'hui qu'hier. Notre système de justice pose beaucoup de problèmes et c'est ce que nous disent les Canadiens.
La parodie ici, c'est que Feeney ne sera pas puni. Comme vient de le dire mon collègue, le député de Crowfoot, la collectivité dans laquelle vit Feeney ne se sent certes pas plus en sécurité. Ces gens-là n'ont certes pas l'impression que le système de justice fonctionne bien dans leur coin de pays.
Ce qui est troublant dans cette affaire, c'est le problème plus important que soulève le système de justice dans son ensemble. En fait, dans son opinion dissidente dans l'affaire Feeney, madame le juge L'Heureux-Dubé affirme que l'arrestation sans mandat était justifiée étant donné qu'un meurtre très violent avait été perpétré, que l'arrestation avait eu lieu dans un champ et qu'il était extrêmement peu pratique d'obtenir un mandat d'arrestation ou de perquisition. L'arrestation s'est faite au beau milieu d'une poursuite continue et directe, et on pouvait raisonnablement craindre que le tueur ne s'adonne à d'autres actes de violence. Nous estimons que cette épreuve devrait valoir dans tous les cas.
Je voudrais relater deux histoires que m'ont racontées des habitants de ma circonscription au sujet de leurs difficultés avec le système de justice.
L'une de ces histoires est celle d'un homme dont le fils a malheureusement été au nombre des victimes de Clifford Olson. Il vit, comme moi, à Maple Ridge, la plus grande localité de ma circonscription.
Lorsque j'avais 18 ans, je vivais à Coquitlam, une localité où Clifford Olson a rôdé. En fait, cet été-là, j'ai donné des cours d'enseignement biblique dans le complexe immobilier où vivait Olson. Une de ses victimes était un jeune homme de 18 ans. J'avais alors 18 ans. Je me souviens de la peur qui s'est emparée de ma collectivité lorsque cet homme a commis ses crimes odieux. Cette peur s'est emparée non seulement de ma collectivité, mais aussi des localités environnantes et de l'ensemble du pays.
J'ai vu la douleur et l'angoisse dans le visage d'un homme dont la vie a été bouleversée à jamais. M. Ray King m'a parlé juste avant le procès grotesque qui a eu lieu à Vancouver. Il m'a dit tout ce qu'il avait vécu. Il a perdu son fils. On lui a ravi son fils. Toute sa vie a été ruinée. Pendant 15 ans, il est resté plutôt silencieux, mais il commence maintenant à parler au nom des victimes de crimes. Il demande que l'on réforme le système de justice.
Nous ne pouvons perdre de vue les victimes. Si c'était le cas, nous perdrions de vue la raison d'être de notre système de justice, c'est-à-dire la protection de notre société, la protection des Canadiens.
Nous avons été témoins du manque de prévoyance et de vision quand le projet de loi C-45 a été présenté par le gouvernement en 1996, seulement huit jours avant la fin de la séance d'été. Si l'on avait fait preuve de plus de prévoyance et de clairvoyance pour régler les problèmes du système judiciaire, cette question aurait pu être soulevée plus tôt, de sorte que M. King et les autres victimes n'auraient pas eu à subir tout ce qui s'est produit à Vancouver. Ils n'auraient pas été forcés de revivre leur peine et leur angoisse. C'est vraiment le signe que tout ne tourne pas rond dans notre système.
Nous appuyons le projet de loi C-16. Nous appuyons la politique. Nous appuyons les policiers pour qu'ils puissent faire leur travail, qu'ils disposent des outils leur permettant de faire leur travail, de procéder à des arrestations, de protéger la société.
Je voudrais vous parler brièvement d'un autre cas mettant en cause un de mes électeurs qui est venu me voir pour me faire part des problèmes qu'il a eus avec le système judiciaire. Son père a été brutalement tué par son propre demi-frère au début des années 80. C'était un acte terrible, atroce. L'accusé a été condamné pour meurtre au premier degré. Ce criminel est passé d'une institution à sécurité maximale à une institution à sécurité moyenne, puis à une institution à sécurité minimale; M. McGillvary est maintenant confronté au fait que la personne ayant perpétré ce crime a été placée dans une institution qui se trouve à seulement 20 minutes de chez lui. Ce détenu, ce criminel, qui a tué le père de M. McGillvary, a aussi menacé la vie de ce dernier. Or, il est placé dans une institution à sécurité minimale qui se trouve à seulement 20 minutes de chez M. McGillvary et d'où il peut s'évader plus facilement.
Je connais un autre cas mettant en cause une institution à sécurité minimale se trouvant à cinq minutes de chez moi. Il y a quelques années, des détenus se sont évadés de cette institution et ont perpétré un meurtre à Seattle. Espérons que ce n'est pas là un endroit dont les gens peuvent sortir chaque jour, mais il reste que M. McGillvary a peur. Il a fait des démarches pour demander des changements. Il a peur, avec raison, mais on lui a offert du counseling pour l'aider à vaincre sa peur irrationnelle. Je ne vois rien d'irrationnel dans cela. Pas du tout.
Posons-nous la question ultime. Que ferions-nous si nous étions à la place de M. McGillvary? Nous aurions tout aussi peur que lui. Nous nous demandons qui détient la clé du système de justice pénale. On a dit à M. McGillvary que ce serait difficile de transférer ce détenu parce que ce dernier pourrait intenter des poursuites contre les services correctionnels et qu'il aurait de bonnes chances de gagner.
Qui détient la clé dans ce cas? Le système de justice devrait pouvoir mettre un détenu à l'endroit qu'il juge le plus approprié. Nous avons besoin d'un équilibre, et il ne faut pas oublier les victimes. ous appuyons ce projet de loi, mais nous tenons à signaler que le gouvernement doit écouter les Canadiens qui réclament une réforme importante du système de justice pénale, rétablir un certain équilibre, imposer des peines proportionnelles aux crimes commis et redonner confiance aux Canadiens dans le système de justice pénale.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au député. J'ai bien écouté son intervention. Il est important de nous souvenir que c'est une décision de la Cour suprême du Canada qui est à l'origine du projet de loi et du débat que nous avons en ce moment.
Les Canadiens doivent se demander qui est le gardien de leur système de justice pénale. À mon avis, c'est le Parlement qui est le gardien de ce système, pas la Cour suprême. Nous respectons la Cour suprême, mais, actuellement, la méthode de nomination des juges ne laisse à la population aucun moyen de les tenir responsables des décisions qu'ils rendent. Nous savons que, de temps à autre, certaines nominations semblent teintées de favoritisme politique.
Nous comprenons certainement que nous, les parlementaires élus, avons des comptes à rendre à nos électeurs. C'est nous qui élaborons les lois, qui les adoptons et les modifions, et nous devons donc rendre compte à la population des décisions que nous prenons à cet égard.
Le député est-il prêt à reconnaître qu'une grosse partie du problème découlant de l'arrêt Feeney c'est que la population devra subir les conséquences de cette décision tout à fait inacceptable de la Cour suprême du Canada qui n'a aucun compte à rendre?
N'y aurait-il pas quelque chose de pervers dans toute cette histoire et ne faudrait-il pas changer certaines choses?
M. Grant McNally: Monsieur le Président, je remercie le député de Skeena pour sa question.
Je dirai que oui, notre système a de sérieuses failles. Les électeurs nous ont confié le mandat d'adopter des lois et nous devons leur rendre des comptes. Cependant, les déséquilibres apparaissent clairement dans des décisions comme celle dont il est ici question. Les conclusions de la Cour suprême auraient dû être fondées sur le bon sens, mais elle ne l'ont pas été. De plus en plus de Canadiens se demandent pourquoi le tribunal est arrivé à sa décision dans une affaire dont la conclusion tombait tellement sous le sens.
Il existe un groupe d'agents non élus qui interprètent les lois et rendent des décisions qui semblent de plus en plus éloignées de ce que la majorité des Canadiens qualifieraient de raisonnable. Il faut réformer le système et trouver des moyens plus responsables de nommer les juges pour qu'ils puissent être tenus de rendre des comptes sur leurs décisions. Nous respectons la Cour suprême, mais dans des cas comme celui dont nous parlons, nous devons nous interroger sur ses décisions.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, on a déjà pratiquement tout dit ce qu'il y avait à dire pour décrire le contexte dans lequel est présentée cette mesure législative. Je veux remercier d'avance les députés de tous les partis représentés à la Chambre de collaborer avec nous en permettant que cette question soit renvoyée dès aujourd'hui à un comité, où elle pourra faire l'objet d'un examen plus approfondi.
Il y a toutefois une question particulière que j'aimerais soulever. À titre de préambule, nombre de députés se demandent pourquoi nous devons parfois, à la Chambre, modifier certaines mesures législatives à cause de décisions rendues par la Cour suprême du Canada. Cela ne devrait surprendre personne. Depuis l'inclusion de la Charte dans notre Constitution, nous avons dû adapter certaines de nos lois en fonction des conseils et des interprétations de ce tribunal. C'était inévitable.
En tant que législateur, je souhaiterais que, lorsque la Cour suprême examine ce genre de question, elle évalue l'impact de sa décision sur la procédure en matière criminelle au Canada. Dans ce cas, je suppose qu'elle ne voulait pas rendre de décision, et les avocats du gouvernement ont été obligés de retourner et de demander un délai de six mois. Nous sommes maintenant à la fin de ce délai de six mois et nous essayons de corriger le problème.
Je regrette que les paradigmes à l'intérieur desquels nous devons travailler pour corriger ce problème soient imposés par les tribunaux. Je préférerais que nous retournions à la case départ pour concevoir une procédure qui, de l'avis de tous, serait conforme à la Charte et juste envers les Canadiens. Nous aurons probablement une chance de nous pencher sur certaines de ces questions à l'étape de l'étude en comité.
Pour être bref, je vais passer immédiatement à la question dont je veux parler. À cause de cette décision, il y a un trou béant dans la procédure en matière criminelle relativement à l'entrée, par les policiers, dans une résidence privée pour arrêter une personne ou recueillir des éléments de preuve.
Avant cette décision, avant de s'introduire dans une habitation sans mandat dans le but d'arrêter quelqu'un, les agents de la paix devaient avoir des motifs raisonnables de croire qu'ils pouvaient arrêter une personne dans l'habitation, une personne qu'ils étaient en droit d'arrêter. Cette personne devait être coupable ou présumée coupable d'un acte criminel.
En outre, en plus de posséder des motifs raisonnables, les agents de la paix ont dû s'annoncer, par exemple en cognant à la porte et en s'identifiant avant d'entrer. C'est ainsi que l'on a procédé pendant presque 100 ans, selon ce qui est appelé le critère Landry. Les résultats semblent avoir été assez satisfaisants.
Je me demande si le scénario suivant est pertinent. Disons qu'une personne est soupçonnée de viol ou de vol d'une banque. Trois semaines plus tard, la victime voit l'auteur du crime. Elle ne sait pas quel est son nom mais elle l'a vu. Elle se rend chez la police et dit «J'ai vu la personne qui m'a violée» ou «J'ai vu la personne qui a volé la banque».
Selon les anciennes règles, le policier aurait dit «Allons le chercher» et, si la personne se trouvait dans une habitation, la police s'y serait introduite. Selon la présente mesure, l'agent de la paix doit obtenir un mandat si l'accusé se trouve dans une habitation, même si ce n'est pas la sienne.
La seule difficulté est le fait que dans la marche à suivre que nous avons élaborée dans le projet de loi pour l'obtention d'un mandat, il faut connaître et indiquer le nom de l'accusé. Dans mon scénario, nous n'avons pas de nom. Nous avons un signalement. Nous savons que la personne est là, mais nous ne savons pas son nom. Donc, avec cette mesure, nous ne pouvons pas obtenir un mandat et l'agent de la paix ne peut pas s'introduire dans l'habitation. En théorie, l'accusé pourrait y rester pendant 30 ans pendant que nous essayons de trouver un moyen de nous introduire dans l'habitation.
Voilà une difficulté que peut présenter cette mesure. Nous aurons l'occasion d'en discuter en temps et lieu. Je suis sûr que mes collègues participeront avec bonne volonté. J'aurai d'autres observations à faire au sujet de cette mesure à l'étape du comité.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, Frank Boyle a été assassiné à Likely, une localité située à environ une heure de route, pour qui conduit rapidement et sans frapper de chevreuil, de Williams Lake où j'habite. La localité est située le long de la rivière Quesnel, qui prend sa source dans le lac Quesnel. C'est une communauté isolée.
Une de mes tâches les plus importantes, en tant que député de Cariboo—Chilcotin, est d'obtenir l'installation des lignes téléphoniques jusqu'aux résidences de mes électeurs, afin qu'ils puissent s'abonner au téléphone.
Ma question concerne les télémandats. Je suis heureux que le député ait soulevé la question des mandats. La mesure législative fonctionnerait probablement bien dans une ville, où les rues sont tracées et où les maisons ont des adresses. Mais comment des télémandats peuvent-ils être efficaces dans des endroits où il n'y a que des cabanes, des roulottes et des habitations au fond des bois? Des gens vivent ainsi depuis longtemps. Les gens vivant dans des endroits isolés sont encouragés à ne pas prendre eux-mêmes en main l'application de la loi comme ils ont été obligés de le faire à cause de l'insuffisance des ressources policières et parce qu'ils n'avaient pas de moyen de communiquer avec la police.
Comment des télémandats pourront-ils être efficaces lorsque les policiers qui sont chargés d'une enquête ne réussissent pas à joindre le juge de paix, le juge et même leur propre quartier général à cause de l'isolement des localités?
Il semble que nous ayons affaire une fois de plus à une mesure législative qui sépare les résidents des régions rurales de ceux des régions urbaines. Le député a-t-il quelque chose à dire au sujet des télémandats et de leur efficacité dans des cas comme celui qui est survenu à Likely?
M. Derek Lee: Monsieur le Président, le député soulève une question intéressante. Nous devrons évidemment nous assurer, à l'étape de l'étude en comité, que le projet de loi est conçu de manière à pouvoir s'appliquer efficacement. Le comité et les parties intéressées consulteront les services de police. Qu'il s'agisse d'autorisations par téléphone, de télémandats ou quoi encore, nous devrons nous assurer que, lorsque le projet de loi reviendra à la Chambre, il puisse s'appliquer et il réponde aux attentes du député.
Je suis prêt à travailler en ce sens et j'espère que c'est aussi le cas de mon collègue.
M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-16.
Avant tout, je veux remercier la ministre de la Justice et les fonctionnaires de son ministère pour avoir réagi sur cette question avec autant de rapidité et dans une perspective aussi large. Je veux aussi remercier l'ancien ministre de la Justice pour tout le leadership dont il a fait preuve au cours de notre premier mandat.
Notre programme visant à assurer aux Canadiens qu'ils sont en sécurité dans leurs foyers et dans leurs villes a été remarquablement fructueux. Nous avons notamment modifié le mode de détermination de la peine, adopté un nouveau système national pour détecter les agresseurs sexuels d'enfants, modifié la Loi sur les jeunes contrevenants et resserré les contrôles concernant les armes à feu.
La démarche du gouvernement libéral dans le domaine de la justice est axée sur la prévention. Le principe de base est la prévention. C'est pourquoi nous avons établi le Conseil national de la prévention du crime, qui continue à étudier ce qui entraîne les enfants dans la délinquance et ce qu'on peut faire pour empêcher que cela se produise.
Nous avons financé une campagne nationale contre la violence familiale. Nous avons aussi amélioré les engagements à garder la paix afin de les rendre plus efficaces, pour qu'ils garantissent que les agresseurs ne s'approcheront pas des femmes et des enfants. Pour protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle, nous avons présenté une mesure législative prévoyant des mesures sévères contre les souteneurs qui incitent des enfants à se prostituer et contre leurs clients, ainsi que des mesures permettant de poursuivre les Canadiens qui profitent de la prostitution enfantine à l'étranger.
La criminalité, ce n'est pas une question simple. L'attitude des libéraux cherche à éviter de répandre la peur et d'adopter des solutions simplistes comme on en propose souvent à la Chambre, par exemple fouetter les petits criminels et jeter de plus en plus de gens en prison pour de plus longues périodes. Une telle politique ne peut pas fonctionner.
Venons-en à la raison de notre présence ici aujourd'hui. Le projet de loi vise à remédier à un défaut de procédure dans notre système judiciaire, un défaut qui mine petit à petit la portée de l'article 8 de la Charte. Cet article porte sur l'un des droits légaux fondamentaux des Canadiens pour lequel beaucoup de gens dans d'autres pays se battent encore. C'est le même droit que beaucoup de gens exercent quand ils veulent se défendre. Je rappelle aux députés que cet article dit: «Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.»
Dans l'affaire Feeney, la question s'est posée de savoir si la police canadienne devait avoir ou non l'entière discrétion de s'introduire dans un domicile simplement parce qu'elle enquêtait sur un incident et si elle devait être autorisée, si elle trouvait par hasard des pièces à conviction, à procéder à une arrestation sans tenir compte de l'article 8 de la Charte. Dans cette affaire, le policier n'a pas cru avoir des motifs raisonnables et plausibles de s'introduire de force dans le domicile. La cour a donc jugé que la loi ne permettait pas à la police de faire son travail et de protéger les droits à la vie privée d'un citoyen. Je crois que les députés sont généralement d'accord là-dessus.
Nos adversaires estiment peut-être que nos conclusions ne sont pas vraiment fondées. Toutefois, ce projet de loi n'ajoute rien et n'ôte rien aux pouvoirs de la police. Il a pour but de clarifier le processus de façon à protéger les droits légaux que nos adversaires tiennent pour acquis.
La procédure sera dorénavant claire. Un policier pourra demander en personne ou par téléphone à un juge ou à un juge de paix de lui délivrer un mandat l'autorisant à pénétrer dans une maison d'habitation pour procéder à l'arrestation d'une personne, si le juge est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de croire que la personne en question s'y trouve, ou l'autorisant à pénétrer dans une maison d'habitation pour procéder à l'arrestation d'une personne que le mandat nomme ou permet d'identifier si le juge ou le juge de paix est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de procéder à une arrestation et de croire que la personne se trouve dans la maison d'habitation.
Le projet de loi permettrait aussi au juge qui émet un mandat d'arrestation d'autoriser l'entrée dans une maison d'habitation s'il est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de croire que la personne faisant l'objet du mandat se trouve ou se trouvera dans cette maison.
Après avoir entendu cette explication, quelques-uns diront que les agents de la paix n'auront pas le temps d'obtenir un mandat dans certains cas. Nous avons prévu cela. Le projet de loi permettra aux agents de la paix de pénétrer dans une maison d'habitation sans mandat si l'urgence de la situation rend difficile l'obtention du mandat. Il s'agirait par exemple, mais pas exclusivement, de situations où il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu'il est nécessaire de pénétrer dans la maison d'habitation pour éviter à une personne des lésions corporelles imminentes ou la mort, ou des motifs raisonnables de croire que l'entrée est nécessaire pour prévenir la perte ou la destruction imminente d'éléments de preuve. Globalement, le projet de loi parvient à un juste équilibre entre les pouvoirs que doivent avoir les policiers pour faire leur travail et la protection des droits fondamentaux inscrits dans la charte.
Le gouvernement a consulté les procureurs généraux des provinces, la Gendarmerie Royale du Canada, l'Association canadienne des chefs de police, l'Association canadienne des policiers et l'Association du Barreau canadien pour préparer ce projet de loi. Je suis heureux de voir qu'il existe à la Chambre un assez large consensus en faveur de ce projet de loi. Je vous en suis vraiment reconnaissant.
Le gouvernement travaille sans arrêt pour assurer la sécurité des citoyens dans leurs maisons et dans leurs rues. Nous continuerons de lutter pour sauvegarder le droit des Canadiens à bénéficier du meilleur système de justice au monde.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je remercie le secrétaire parlementaire de ses remarques. J'ai une question qui concerne directement M. Feeney et les éléments de preuves.
Le projet de loi dont nous sommes saisis permettra-t-il que M. Feeney soit jugé à nouveau en utilisant les preuves rejetées par la Cour suprême ou sera-t-il libéré parce que les preuves ne sont pas admissibles?
Il ne fait aucun doute aux yeux de tout le monde que M. Feeney est coupable. On a trouvé le sang de sa victime sur ses mains. Si on ne peut s'en servir la prochaine fois qu'il comparaîtra devant un tribunal, à quoi ça rime? Ce serait un déni de justice. Justice ne serait pas faite. La loi doit être au service de la justice et pas uniquement au service du système juridique.
Le gouvernement va-t-il inclure des dispositions rétroactives permettant que M. Feeney soit à nouveau jugé sur la foi des preuves fournies par la police pour établir sa culpabilité?
M. John Richardson: Monsieur le Président, les questions soulevées par le député sont fondées. Je pense que le comité est l'endroit où le député et ses collègues réformistes pourront poser leurs questions et voir s'il est possible de parvenir à un consensus. Leurs recommandations sont valables.
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une question pour le député.
En parlant aux Canadiens, je me rends compte depuis quelque temps qu'ils considèrent qu'il y a trois groupes intouchables dans notre société, des groupes sur lesquels ils n'ont guère d'influence. L'un serait la presse, le deuxième serait les banques et le troisième, le judiciaire.
Le député a-t-il une idée de la façon dont nous pourrions réformer réellement le système judiciaire pour qu'il soit plus responsable devant la population et pour qu'il applique la loi telle qu'elle a été conçue dans cette Chambre?
L'affaire qui a donné naissance à cette mesure législative illustre parfaitement ce que je veux dire. Le judiciaire semble se placer au-dessus des lois du pays, et les Canadiens n'ont plus confiance en lui. Nous devrions renverser cette tendance. Est-ce que le député a des suggestions sur les changements que nous pourrions apporter?
M. John Richardson: Monsieur le Président, notre système judiciaire existe depuis si longtemps qu'il faudrait y réfléchir longuement et sérieusement avant de proposer des modifications.
Je ne suis pas juriste et je n'ai pas de formation en droit. Toutefois, je pense que si certains députés avaient des idées qui seraient appuyées par une solide logique, la population canadienne pourrait appuyer des changements.
Pour l'instant, je n'ai pas de réponse à lui donner.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, il ne me reste que quelques minutes pour me prononcer sur cette question. Je me contenterai donc de formuler quelques observations, quitte à y revenir à l'étape de la troisième lecture si l'occasion s'offre à moi.
Je voudrais revenir sur certains points qui ont été évoqués à propos de la modification proposée au Code criminel concernant les pouvoirs d'arrestation et d'entrée dans les habitations. Je voudrais aussi commenter certains commentaires des députés d'en face.
Il faut clairement faire comprendre au départ qu'il ne s'agit pas de chinoiseries juridiques, mais d'une loi qui touche les droits et la protection des Canadiens.
Quand la Chambre se met en tête d'instituer des lois qui ne résisteront pas à une interprétation des tribunaux, cela crée un problème. Ce n'est pas aux tribunaux mais plutôt à la Chambre qu'il incombe de bien libeller un texte de loi, de faire en sorte que le texte ne soit pas rédigé de façon que les tribunaux puissent se méprendre sur notre intention. Il incombe donc à la Chambre de veiller à ce que le projet de loi C-16 indique très clairement que son objet est de protéger la population canadienne et non pas d'aider les criminels à échapper à la justice.
J'ai entendu le député d'en face affirmer que c'est à l'étape de l'étude en comité qu'il faut aborder les questions comme celle touchant les préoccupations qui diffèrent selon que l'on habite une région urbaine ou une région rurale par exemple. Selon lui, c'est en comité que ce genre de questions a sa place.
Or, d'après mon expérience, les comités ne se prêtent pas toujours facilement aux suggestions. Ils n'accueillent pas toujours à bras ouverts ceux et celles qui insistent pour que l'on soit clair, que l'on soit précis, que l'on veille à ce que les mots utilisés expriment bien ce que la population espère trouver dans le texte de loi. Il nous incombe de participer à ces comités en ayant l'esprit ouvert, et non un esprit de parti, de sorte que le produit final soit très clair.
Nous en avons été témoins dans d'autres lois adoptées à la Chambre au cours de la législature précédente. Prenons par exemple les peines autres que l'emprisonnement. Parce que nous n'avons pas précisé clairement notre intention, bien que certains voulaient le faire, au sujet des personnes que ces peines devaient viser, des délinquants dangereux ayant commis des infractions graves sont libérés dans la société sans être incarcérés.
J'ai bon espoir que cette 36e législature sera différente, qu'elle permettra d'apporter des modifications réelles aux projets de loi soumis à l'étude des comités, de sorte que le produit final soit le meilleur possible, qu'il ne soit pas contesté devant la Cour suprême du Canada et ne nous soit pas renvoyé pour que nous y apportions des modifications qui auraient dû être faites la première fois.
J'espère que les éléments de preuve qui ont été retenus et obtenus illégalement pourront servir au cours du prochain procès devant les tribunaux. J'espère que le comité s'assurera que cette protection existe pour la population canadienne. J'espère que, dans le cas des députés préoccupés par le fait que les gens des régions rurales n'ont pas la même possibilité de faire délivrer des télémandats, ces préoccupations seront examinées attentivement et sérieusement, de sorte qu'aucun Canadien ne soit privé des avantages qui pourront découler de cette modification proposée dans le projet de loi C-16.
Je tiens à souligner à tous les députés de tous les partis que le Parlement devrait manifester, au sein du comité, une volonté de tenir un débat ouvert et honnête et de bien accueillir les propositions susceptibles d'améliorer le projet de loi.
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je vais faire quelques observations générales sur ce projet de loi. Il est très important pour nous en tant que Canadiens et réformistes que notre système juridique fonctionne bien et qu'on puisse compter sur la disponibilité des preuves, ce qui, selon moi, est le fondement même de ce projet de loi. Il s'agit de s'assurer que les preuves sont admissibles et qu'un policier peut faire son devoir.
Il est vrai qu'en cas de présumée infraction, on ne veut pas incarcérer à tort une personne qui est innocente. Mais en même temps, on doit être certain que la personne coupable sera reconnue coupable, condamnée et punie pour que notre société soit protégée. Il est très important pour nos tribunaux, pour notre système juridique, de ne pas se tromper afin que les innocents soient reconnus comme tels et que les coupables soient bien condamnés. Il est essentiel d'avoir un système qui répond à ce besoin.
Nous exhortons fortement le gouvernement à prendre des mesures. Nous espérons sincèrement que le comité s'acquittera de son travail pour que notre système juridique dont les gens s'inquiètent tant puisse bien fonctionner, pour que nous puissions rétablir la confiance que les gens n'ont plus dans ce système.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques remarques. Je veux apporter ces précisions, car je sais à quel point les gens de Likely sont inquiets de ce qui est arrivé à l'un de leurs voisins, M. Boyle. Il y a eu simulacre de justice. On a pris un homme avec du sang littéralement sur les mains et on l'a libéré. Il y a plus que de l'indignation à Likely et dans la circonscription de Cariboo—Chilcotin au sujet de ce qui s'est produit.
Il y a longtemps, un avocat m'a dit que le système juridique n'avait rien à voir avec la justice, qu'il s'agissait plutôt de conserver un ensemble raffiné de règles. Dans ce cas-ci, les règles n'ont pas servi la justice. Il ne faut pas être un génie pour comprendre qu'il y a eu deni de justice. C'est ce qui s'est produit dans ce cas-ci. J'exhorte le Parlement à examiner les besoins en matière de justice et les besoins des Canadiens plutôt que de mettre l'accent sur le système juridique et ceux qui le soutiennent et le font fonctionner. Tant que nous n'aurons pas fait cela, les gens mépriseront notre système juridique et, souvent, avec raison.
J'exhorte le Parlement et le Comité de la justice qui va examiner ce projet de loi à se rappeler que nos lois doivent servir à protéger les Canadiens. Elles sont censées donner à la police les outils voulus pour offrir cette protection. Elles sont là pour demander des comptes à ceux qui ont violé la loi, qui ont commis des actes répréhensibles, qui ont porté préjudice à leurs concitoyens, qui ont refusé à leurs concitoyens la justice à laquelle ils ont le droit de s'attendre. Il faut faire plus que de maintenir les règles. Il s'agit de garder à l'esprit ce qui est juste.
On doit rendre justice. Dans l'intérêt de la collectivité de Likely, dans l'intérêt de M. Boyle qui a perdu la vie, j'exhorte le gouvernement à tenir compte d'abord et avant tout des besoins des Canadiens qui recherchent la justice et veulent un système qui rend justice aux gens.
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. McClelland): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois et envoyé à un comité.)
M. Bob Kilger (Stormont—Dundas, Lib.): Monsieur le Président, je crois que si vous le demandiez, vous obtiendriez le consentement unanime de la Chambre pour dire qu'il est 13 h 30 et passer directement aux initiatives parlementaires, étant donné que le député est présent et prêt à commencer.
Le président suppléant (M. McClelland): Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 13 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
LA LOI SUR L'ACCÈS À L'INFORMATION
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.) propose: Que le projet de loi C-217, Loi modifiant la Loi sur l'accès à l'information (divulgation des résultats des sondages d'opinion), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Monsieur le Président, la plupart des Canadiens sont convaincus d'habiter le meilleur pays du monde. Ils sont fiers de notre pays. Toutefois, la majorité d'entre eux conviendraient que le statu quo est inacceptable. Nous ne pouvons continuer à agir comme nous l'avons toujours fait. Aujourd'hui, d'un bout à l'autre du pays, les Canadiens veulent un gouvernement plus ouvert et responsable.
Un gouvernement ouvert est celui où l'information circule librement entre lui et les citoyens. C'est un gouvernement qui informe sa population, au lieu de la manipuler. Dans un gouvernement ouvert, les recettes fiscales serviraient à ordonner des sondages pour que les Canadiens expriment leurs opinions, de sorte que tout le monde ait accès à l'information en temps voulu.
Les Canadiens veulent avoir facilement accès aux résultats de tels sondages et ils refusent de se soumettre à de nombreuses tracasseries administratives et à une série d'exigences pour y parvenir. Toutes ces difficultés ne feront que décourager la population de vouloir connaître les résultats des sondages.
Contrairement au Parlement dirigé par le Parti conservateur, qui était très secret, le Parlement actuel s'est montré plus disposé à rendre transparent le processus gouvernemental. Je pense que le gouvernement reconnaît que des changements s'imposent pour que les Canadiens soient satisfaits. Le gouvernement est sûrement d'avis également que les Canadiens ne devraient jamais avoir à se trouver dans la situation, comme cela est arrivé pendant les années Mulroney, où le Commissaire à l'information doit poursuivre le premier ministre devant les tribunaux pour faire publier l'information obtenue au moyen de sondages payés par les fonds publics.
Il faudra longtemps aux Canadiens pour oublier le régime de terreur établi par le gouvernement Mulroney et par l'administration cachottière qui existait à l'époque. Le gouvernement actuel ne souhaite sûrement pas rétablir ce genre de régime. Il ne veut évidemment pas laisser ce genre de souvenir dans la mémoire des Canadiens.
Il ne fait aucun doute pour moi que ce genre de gouvernement occulte qui était si répandu auparavant doit être changé, et rapidement. Les Canadiens n'accepteront plus d'avoir ce genre de confiance aveugle dans les politiciens. L'expérience leur a appris qu'ils ne peuvent pas avoir confiance dans les politiciens qui leur demandent de leur faire confiance.
Il n'est tout simplement pas acceptable que des politiciens rendent publique de façon sélective de l'information importante, surtout quand le public a payé pour ces sondages d'opinion. Il est tout aussi inacceptable que le gouvernement se contente d'avancer des idées qu'il a obtenues par voie de sondages.
Nous avons récemment été témoins d'un exemple parfait de ce genre de comportement. Le 29 octobre, Hugh Windsor décrivait dans un article du Globe and Mail un exemple de ce que les Canadiens ne sauraient accepter.
Je vais citer des passages de cet article et le commenter, car le fait qu'il a été publié il y a deux jours seulement vient tellement à point. Il montre vraiment tout l'intérêt de la mesure à l'étude.
Je vais en situer le contexte. C'est à propos du ministre des Finances qui, comme nous le savons tous, a horreur d'être critiqué et est prêt à aller loin pour éviter la critique.
L'article porte sur l'harmonisation de la TPS et des taxes provinciales. Le ministre ne voulait pas prendre de décision sans avoir fait faire d'innombrables sondages et de nombreuses études auprès de groupes cibles. Tout cela aux frais des contribuables canadiens. Naturellement, un certain nombre de personnes voulaient connaître les résultats de ces sondages et de ces consultations.
Autre problème, le ministre avait confié à ses amis politiques ce sondage qui a coûté des centaines de milliers de dollars. David Herke, ex-organisateur de la campagne d'investiture du ministre, a réalisé la plupart des sondages, avec la collaboration d'Elly Alboim, ex-journaliste de Radio-Canada. Une fois les sondages et les consultations terminés, le ministre a décidé que les résultats ne devaient pas être rendus publics.
Dans son article, M. Windsor demande très clairement comment les opinions des Canadiens sur les taxes et les impôts peuvent être considérées comme des secrets d'État? Le ministre aurait répondu que ces renseignements pouvaient être préjudiciables au bon gouvernement et au bon déroulement des activités des gouvernements fédéral et provinciaux. Il a ajouté qu'ils pouvaient être matériellement préjudiciables aux intérêts financiers, et ainsi de suite. Ce sont là les raisons pour lesquelles les résultats de ces sondages ne pouvaient pas être publiés selon lui.
Eh bien, selon le commissaire à l'information, ni le pays ni les relations provinciales n'étaient menacés. Le ministre a ensuite demandé que l'information soit rendue publique.
Rien que pour montrer jusqu'où peut aller le ministre des Finances, sachez qu'il a retenu les services d'un avocat pour contester la décision du commissaire à l'information de publier les résultats de sondages qui avaient été payés par la population canadienne. Cette obstruction a duré 18 mois. Finalement, son avocat lui a dit qu'il ne pouvait pas bloquer plus longtemps la publication de ces résultats et qu'il perdrait cette cause s'il décidait de la porter devant un tribunal, et il lui a conseillé de publier l'information.
C'est donc avec 18 mois de retard qu'ont été publiés les résultats de sondages qui avaient été payés par les contribuables canadiens. Que contenaient-ils de tellement préjudiciable? Voici ce que disent les résultats:
[Ils] ne seront pas considérés comme un graissage de pattes ni un gaspillage de l'argent des contribuables si la réforme est perçue comme un exercice politique sans rapport avec l'amélioration de la fiscalité. La question est politique, non de fond. Rien ne prouve que les gens estiment nécessaire de réformer la TPS. La réforme de la TPS ne soulagera en rien les consommateurs. Elle a l'air d'avoir été faite à la pièce. Elle désorientera encore plus le secteur industriel et exigera une bureaucratie plus lourde. L'engagement à l'égard de la TPS doit être considéré comme une question politique plutôt qu'une question de fond. Le mieux serait probablement d'avouer franchement qu'on ne peut pas tenir la promesse faite plutôt que de prétendre qu'on l'a tenue.
C'est ce que les partis de l'opposition ont fait valoir à la Chambre au sujet de la TPS harmonisée. Le ministre a toutefois gardé secrets pendant 18 mois les résultats de ce sondage d'opinion parce qu'ils allaient politiquement à l'encontre de ce qu'il tentait de faire. De toute évidence, si le contribuable paie pour pareil sondage, il a le droit d'en connaître les conclusions. Cependant, si un parti politique veut faire des sondages, il a parfaitement le droit de garder leurs résultats secrets parce que c'est lui qui paie la note.
Comme je l'ai dit, le gouvernement actuel n'a pas été aussi secret que son prédécesseur, mais, quand on examine la réalité, il y a vraiment lieu de s'interroger sur toute la notion de transparence gouvernementale dont il est question dans le livre rouge.
Je sais que des députés d'en face diront que le projet de loi C-217 est inutile et qu'ils n'ont absolument pas l'intention d'empêcher la divulgation des conclusions de sondages. Ce que nous disons toutefois, c'est que, pour garantir cela, lorsque n'importe quel ministère, agence ou organisme fédéral commande des sondages d'opinion payés par la Chambre, leurs conclusions devraient être rendues publiques.
Je connais une foule d'arguments que certains feront probablement valoir pour dire que le projet de loi est inutile. Je ne pense pas devoir les énumérer un à un; je me contenterai de signaler que de nombreux députés libéraux ont pris la parole à la Chambre pour dire que les résultats des sondages devraient être publics et que le ministère de la Justice allait modifier en ce sens la Loi sur l'accès à l'information. Depuis 1994, on nous promet des changements en profondeur aux dispositions concernant l'accès à l'information. Nous les attendons toujours.
Lorsqu'un ministre agit comme je l'ai expliqué, on constate à quel point le gouvernement actuel est devenu vieux jeu et réfractaire au changement.
Voyons chacune des modifications apportées par le Conseil du Trésor. Il y a sept grands points. Je puis fournir cette information à quiconque souhaite en obtenir copie. La clé, c'est que les gros titres disent sans doute tout: «Les règles des libéraux sur les sondages sont très semblables à celles des conservateurs. Les libéraux permettent toujours que les sondages restent secrets.» Cela n'est pas conforme à la promesse des libéraux relativement à la transparence du gouvernement.
Je prie aujourd'hui le gouvernement de permettre que les sondages fassent l'objet d'une demande de divulgation; que cela soit fait dans un délai raisonnable, non pas dans un délai de 90 jours, mais de 15 jours à partir du moment où le sondage a été commandé, s'il est payé avec des fonds publics; que les sondages soient présentés au Président de la Chambre; que ce dernier ait le pouvoir de divulguer les résultats du sondage en temps opportun; et que le public ait le droit de connaître les résultats.
C'est l'élément essentiel du projet de loi. Telles sont les raisons qui motivent le projet de loi. Je pense que le gouvernement aura du mal à justifier aux Canadiens, qui demandent davantage de comptes au gouvernement, que les résultats d'un sondage payé par eux devraient rester secrets.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, vous me prenez un peu par surprise, car j'étais convaincu que c'était ma collègue libérale qui allait intervenir. Mais il me fait plaisir de commencer.
La motion à l'étude aujourd'hui est assez intéressante, car elle touche un des principes même de notre pays, c'est-à-dire la démocratie. Un des principes en démocratie qui est très simple, c'est que c'est le peuple, par ses représentants élus, qui doit contrôler les dépenses de son gouvernement. C'est la base de la démocratie.
Dans la même veine, si l'argent des contribuables est dépensé, ces derniers ont le droit de savoir comment il est dépensé. Cela va encore dans le contrôle démocratique du gouvernement. C'est une question qui est très simple, c'est une question de transparence.
Or, aujourd'hui, on sait très bien quel rôle les sondages jouent dans notre société. Les sondages jouent un rôle important, certains diront même trop. Mais le fait est que le rôle qu'ils jouent est important, car non seulement ils fournissent des informations qualitatives, mais aussi quantitatives sur des sujets très précis. C'est un instrument dont se sert le gouvernement pour orienter ses politiques, car tous les gouvernements sont influencés par les sondages.
Or, si le but recherché par le gouvernement à travers ces sondages est d'orienter cette politique, l'information recueillie par les sondages devrait être partagée avec tous les élus qui doivent, eux aussi, être «éclairés», parce que non seulement le gouvernement doit bien faire, mais les élus, ici en cette Chambre, doivent aussi, pour faire leur travail de parlementaires, pour faire leur travail d'opposition, être aussi éclairés que le gouvernement, que l'équipe d'en face.
Mais il y a une problématique qui s'ajoute à cette question, et c'est celle de l'unité nationale, car on sait ce que ce gouvernement fait avec les sondages qu'il effectue au Québec. On s'en sert pour connaître les peurs des Québécois, les petites bibittes. Non seulement on a dépensé l'argent des Québécois pour connaître leurs peurs, leurs petites bibittes, mais on s'en sert pour le plan B et pour retourner les informations qui ont été recueillies dans ces sondages contre les Québécois, contre ceux-là mêmes qui ont payé de leurs poches ces sondages. C'est carrément inacceptable. On s'en sert pour nourrir une campagne de peur, afin de fausser le jeu démocratique.
On se souviendra qu'il y a deux ans, hier, le Québec a tenu un référendum. Ce référendum a donné lieu à des discussions passionnées, des discussions serrées, mais des discussions sereines. Je pense qu'avec 93 p. 100 de participation à ce référendum, on a été un exemple de démocratie pour le monde entier. On en est fiers. On nous accuse souvent de déchirer notre chemise, eh bien là, maintenant, on se pète les bretelles, et on a raison de le faire.
Qu'a-t-on vu depuis ce référendum? On a vu une campagne de peur du fédéral, on a vu le plan B, on a détourné la démocratie vers des non-élus, on annonce des cataclysmes si les Québécois se prennent en main, le ciel va nous tomber sur la tête.
Il est tout à fait normal que les Québécois sachent ce qu'ils paient. Il est bon pour les Québécois qu'il sachent que l'argent qu'ils paient de leurs poches sert à quelque chose qui va contre leurs intérêts. La moindre des choses, en démocratie, c'est que les élus contrôlent les dépenses du gouvernement, et que ce que le gouvernement fait avec l'argent soit connu.
Donc, si le gouvernement décide de dépenser des millions et des millions de dollars pour des sondages qui, quelquefois, sont complètement gaga, on devrait pouvoir le dire ici, à la Chambre des communes, pour démontrer qu'il est heureux que le ridicule ne tue pas, parce qu'il n'y aurait plus beaucoup de députés dans le parti gouvernemental.
Tout ce que l'on veut dire, et c'est l'essentiel à retenir, c'est que le gouvernement dépense l'argent des Québécois pour ensuite le réutiliser contre eux en nourrissant des campagnes de peur.
C'est la raison pour laquelle le Bloc québécois appuie avec passion et avec toute sa force la motion présentée par notre collègue réformiste.
[Traduction]
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir dans le débat de cet après-midi. Je commence en remerciant le député libéral qui m'a donné la possibilité de prendre la parole afin de pouvoir retourner dans ma circonscription cet après-midi.
Le débat est intéressant. Il ne fait absolument aucun doute que le gouvernement pourrait et devrait faire beaucoup plus pour rendre publics les résultats des sondages payés par les contribuables. Comme le député de l'opposition officielle l'a rappelé, le ministre des Finances a fait des pieds et des mains pour cacher les résultats du sondage de 1996 sur la taxe sur les produits et services. Il a notamment retenu les services d'un avocat de pratique privée pour tenter de soustraire les données au public. Il est clair que ce genre de comportement est tout à fait inacceptable dans une société libre et démocratique.
Il va sans dire que notre parti appuie tout changement à cet égard. Nous reconnaissons aussi que nous vivons dans un monde réel. Le projet de loi d'initiative parlementaire semble utopique au premier abord. Ce n'est pas étonnant puisqu'il a été produit par un parti politique âgé de 10 ans et un jour, si je me fie à ce que j'ai lu dans le journal. Pourtant, pour un parti aussi jeune, il a parfois des opinions et des attitudes très vieillottes. C'est aussi un parti qui a toujours refusé de s'avancer sur la scène provinciale.
Dans ma province, la Saskatchewan, le Parti réformiste s'est acoquiné avec le Parti de la Saskatchewan, un ridicule mélange de conservateurs et de libéraux. La même chose se produit en Colombie-Britannique. On comprend pourquoi.
Le chef de l'opposition officielle a de toute évidence étudié l'histoire politique. Il se souvient de ce qui est arrivé au parti politique de son père, le Crédit social de l'Alberta. Il sait ce que sont devenus le Crédit social de la Colombie-Britannique et le Crédit social fédéral. Lorsque Peter Lougheed est arrivé en Alberta, le parti créditiste a disparu. Au cours de la dernière décennie, nous avons assisté à la disparition du Crédit social de la Colombie-Britannique et, sauf erreur, aucun député créditiste n'a siégé à l'assemblée législative de cette province depuis 1979.
Le député de Stornoway ne veut pas voir l'histoire se répéter et c'est pourquoi il ne prend pas le risque de faire élire son parti sur la scène provinciale ou dans les territoires. Il essaie de rester aussi blanc que neige. Ce n'est pas la façon de faire des députés de mon caucus ni celle de mon parti. Je suis très fier de représenter un parti politique qui présente des candidats aussi bien sur la scène fédérale que provinciale et parfois même au niveau municipal. Les textes constitutifs de notre parti stipulent d'ailleurs que toute personne qui est membre du Nouveau Parti démocratique d'une province ou d'un territoire est automatiquement membre du Nouveau Parti démocratique fédéral.
Je voudrais parler brièvement de la façon dont nous faisons les choses en Saskatchewan, pour qu'on comprenne bien. Au cours des années 80, le gouvernement Devine, qui a certainement été le pire gouvernement de l'histoire de la Saskatchewan sinon du Canada, a abusé de façon flagrante des sondages d'opinion publique, comme mon collègue le faisait remarquer au sujet du gouvernement Mulroney. En 1993, le gouvernement de la Saskatchewan a effectué une importante réforme. Je crois que les changements apportés étaient justifiés et j'espère que les députés ministériels m'écoutent, car ces changements étaient des mesures raisonnables.
En Saskatchewan, depuis quatre ans, le gouvernement publie quatre fois par année toute l'information pertinente aux sondages effectués pour son compte pendant le trimestre précédent. Cette information contient tous les rapports des maisons de sondage, y compris les questions posées et les réponses obtenues.
Le gouvernement diffuse cette information gratuitement aux médias, aux partis d'opposition et, je présume, au président de l'assemblée législative. Les autres utilisateurs, dont les particuliers et les entreprises, peuvent obtenir les renseignements moyennant un léger montant. La seule documentation que le gouvernement ne publie pas concerne les questions relatives à la recherche sur les marchés et les prix commerciaux dans le cas des sociétés d'État, par exemple.
Le gouvernement fédéral devrait rendre le système beaucoup plus transparent. Il existe des raisons légitimes pour lesquelles la publication des résultats d'un sondage effectué par le gouvernement devrait être précédée d'un délai raisonnable, 90 jours par exemple.
Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais parler du projet de loi C-217, qui modifie la Loi sur l'accès à l'information en ce qui concerne la divulgation des résultats des sondages d'opinion.
Je suis offusquée d'entendre le député réformiste dire que ces contrats sont accordés à des soi-disant amis du premier ministre. Ça montre encore une fois que le Parti réformiste ne comprend pas qu'il existe des façons impartiales de procéder à la Chambre.
Je tiens à dire tout de suite que je suis fermement convaincue que les Canadiens devraient avoir plus facilement accès aux renseignements administratifs, à quelques exceptions près et dans des cas bien précis. À mon avis l'accès à la plupart des renseignements administratifs est la pierre angulaire de la démocratie.
Le gouvernement appuie le droit d'accès des Canadiens aux renseignements administratifs, sauf dans certains cas précis où les raisons de sécurité, l'application de la loi et la confidentialité des renseignements communiqués au gouvernement par les compagnies l'interdisent.
Les Canadiens ne toléreraient pas un gouvernement qui ne leur permettrait pas d'avoir facilement accès aux renseignements administratifs. Je pense qu'il est essentiel que le gouvernement fasse preuve d'ouverture s'il veut que les Canadiens lui fassent confiance et nous respectent en tant que politiciens et en tant que leurs représentants à la Chambre.
Je voudrais parler de certains amendements à la Loi sur l'accès à l'information proposés dans ce projet de loi et expliquer pourquoi j'ai certaines réserves à l'égard de cette mesure législative.
[Français]
Pour bien faire comprendre les commentaires et les réserves que ce projet de loi suscite dans mon esprit, je dois vous donner des précisions sur les modifications qu'il se propose d'adopter à la Loi sur l'accès à l'information.
La loi modifiée exigerait que les ministères, directions, bureaux, conseils, commissions, offices, services, personnes morales et autres organismes constitués par une loi du Parlement, ou conformément à celle-ci, ou par une proclamation, un décret ou tout autre texte pris par le gouverneur en conseil ou sous son autorité, qui ont fait faire un sondage d'opinion, en avisent le ministre désigné et le Président de la Chambre des communes sans délai.
Il me semble que la modification s'appliquerait aux sociétés de la Couronne, à la Commission des relations de travail du Canada, à la Commission des droits de la personne et aux divers organismes du gouvernement fédéral. Mais je peux me tromper, et c'est bien ce qui m'inquiète.
En définissant comme il le fait les institutions qui sont visées par la modification projetée, ce projet de loi va complètement à l'encontre de la façon dont la Loi sur l'accès à l'information est structurée. La loi s'applique en effet à toutes les institutions gouvernementales énumérées à l'annexe, soit environ 140 entités.
Cette liste a pour but de déterminer clairement les organismes ou entités auxquels la loi s'applique et, partant, d'exclure les autres. S'écarter de ce type de désignation risque de créer de l'incertitude sur la question de savoir si la loi s'applique à une institution donnée et d'ouvrir la voie à des contestations judiciaires pour faire trancher la question.
Il pourrait résulter du projet de loi C-217 que des institutions qui n'étaient pas assujetties à la loi jusqu'à maintenant, comme Postes Canada, le deviennent du fait de cette modification particulière apportée par l'ajout de l'article 5.1. Bref, il ne me paraît pas du tout désirable d'introduire, dans une même loi, deux façons de déterminer les institutions auxquelles elles s'appliquent, fut-ce dans deux parties différentes.
[Traduction]
Une autre facette du projet de loi C-217 me semble poser un problème évident du point de vue juridique. La Loi sur l'accès à l'information crée actuellement un cadre législatif en vertu duquel une personne peut présenter officiellement une demande d'information moyennant des frais minimes. L'information est alors fournie dans un délai précisé dans la loi, à moins qu'une ou plusieurs des exceptions définies dans la loi s'appliquent et que le demandeur se voie refuser l'accès à certains des renseignements qu'il demande.
Je prends la peine de décrire ce processus pour illustrer le fait que la loi n'oblige aucun ministère ou ministre à fournir de l'information au public s'il n'y a pas de demande officielle. En effet, cette loi ne vise pas à remplacer les moyens existants d'obtenir des renseignements du gouvernement, comme l'indique l'article 2 de la loi. Elle offre un moyen supplémentaire d'obtenir des renseignements du gouvernement en présentant une demande officielle.
Alors quel serait l'effet du projet de loi C-217? Cette mesure créerait une anomalie dans la Loi sur l'accès à l'information en obligeant les ministres à faire connaître à la Chambre les résultats des sondages d'opinion publique sans qu'on ait eu à respecter le cadre obligatoire pour l'obtention d'informations en vertu de la loi.
[Français]
Même en admettant qu'il est défendable de créer un nouveau régime, différent du régime actuel de la Loi sur l'accès à l'information, je vois pour ma part encore un autre problème engendré par les dispositions proposées. Le projet de loi oblige le ministre à fournir le rapport des résultats d'un sondage d'opinion public à la Chambre ou au commissaire dans les 15 jours de la fin du sondage. À mon avis, l'analyse des résultats d'un sondage d'opinion effectué sur une grande échelle risque fort de demander plus de 15 jours.
[Traduction]
Par ailleurs, l'obligation de prévenir le ministre et le président de la Chambre des communes de tout sondage d'opinion et d'en déposer le rapport au Parlement ou auprès du commissaire à l'information et de le publier dans la Gazette du Canada me pose un problème. À mon avis, c'est un peu exagéré.
La définition d'un sondage d'opinion m'inquiète, car je la trouve beaucoup trop large. Elle inclurait les recherches quantitatives et qualitatives menées auprès du public à l'aide d'un questionnaire prédéterminé ou d'une entrevue structurée. Ce genre de recherche serait, en grande partie, de peu d'intérêt pour le public.
Considérant le projet de loi sous un autre angle, j'estime qu'une loi existante ne doit être modifiée que s'il y a un problème qui doit être réglé. Et j'insiste sur ce point. J'irais même plus loin et je dirais que le problème doit être important et que le projet de loi ne doit proposer qu'une seule modification. Si le problème n'est pas particulièrement important, bien que réel, je pense alors que l'on devrait attendre pour le régler que la loi fasse l'objet d'un remaniement en profondeur. Je ne suis pas convaincue que l'amendement proposé réglerait un problème important.
Je crois savoir que la loi prévoit déjà l'accès aux sondages d'opinion. Plus exactement, l'article 4 de la loi prévoit que tout le monde a droit à l'accès aux documents relevant d'une institution fédérale. Dans la mesure où les sondages d'opinion font partie de ces documents, ils sont couverts par la loi.
Si les résultats de certains sondages ne sont pas rendus publics, c'est que, dans certaines circonstances, on a invoqué un intérêt légitime qui va à l'encontre de la présomption d'accès. Il faut souligner que la loi établit un équilibre complexe et délicat entre une variété d'intérêts et je crains que, en la modifiant pour régler un problème précis et de portée limitée, on ne détruise cet équilibre.
[Français]
Ajoutons à cela que les tribunaux ont déjà été appelés à se prononcer sur l'application de la Loi sur l'accès à l'information aux sondages d'opinion publique. La Section de première instance de la Cour fédérale s'est en effet prononcée sur la question de la communication des résultats d'une recherche de l'opinion publique dans l'affaire Commissaire à l'information c. Premier ministre, où il était question d'un sondage d'opinion publique demandé dans le cadre d'une précédente négociation constitutionnelle. La Cour avait ordonné la communication au demandeur des documents, parce qu'elle n'était pas convaincue que la communication des résultats du sondage nuirait au gouvernement.
Outre l'article 4 de la loi et la décision de la Cour fédérale, il existe une troisième raison pour me demander quel problème sérieux ce projet de loi contribuerait à régler.
Le secrétariat du Conseil du Trésor a émis des lignes directrices pour la communication des résultats de sondages par les institutions fédérales. En gros, il est recommandé aux ministères de faire tout leur possible pour divulguer les résultats des recherches d'opinion publique en dehors du cadre formel et des mécanismes prévus par la Loi sur l'accès à l'information.
[Traduction]
Cela ne veut pas dire que la question peut se passer d'un examen. En effet, la divulgation des résultats des sondages d'opinion est une des questions qu'étudie actuellement le ministère de la Justice pour évaluer la nécessité d'examiner la loi.
À mon avis, le projet de loi C-217 n'est pas nécessaire. La Loi sur l'accès à l'information prévoit déjà un droit d'accès aux sondages d'opinion. La jurisprudence offre des directives au gouvernement sur la divulgation de ces sondages. Il existe une politique gouvernementale sur la divulgation des résultats des sondages.
En outre, cette question est en train d'être examinée, en même temps que d'autres questions liées à la loi tout entière.
Étant donné tout cela, je ne pense pas qu'il convienne ou qu'il soit nécessaire d'apporter une modification ponctuelle sur la question précise des sondages d'opinion. n outre, je suis contrariée par le fait que le projet de loi introduirait de nouvelles dispositions nombreuses sur la présentation de rapports, s'éloignant de la définition d'institutions gouvernementales que donne la loi, de sorte qu'il risquerait de s'appliquer à des sondages dont l'intérêt public est très limité.
M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de parler du projet de loi de mon collègue, qui porte sur l'accès à l'information et la divulgation des résultats de sondages.
Il se résume à un principe bien élémentaire. Si un sondage d'opinion est payé à même les deniers publics, la population devrait avoir accès aux résultats de ce sondage. C'est très simple.
Mon collègue précise aussi un point important: si un parti politique commande un sondage, celui-ci est privé. Si le sondage est payé par des fonds privés, on ne devrait pas avoir accès aux résultats du sondage. Cependant, si l'argent des contribuables sert à payer un sondage, la population devrait certainement avoir le droit de demander les résultats.
Nous entendons souvent parler d'un gouvernement responsable, surtout en période électorale. Le présent gouvernement, qui est censément responsable, fait tout ce qu'il peut pour supprimer l'accès à l'information non seulement dans le cas des sondages d'opinion, mais aussi dans bien d'autres domaines.
Le noeud du problème est la manipulation. Lorsque le ministre des Finances peut retarder pendant des mois et des mois la divulgation d'informations et détruire ensuite les résultats d'un sondage d'opinion, il fait de la manipulation. Voilà ce que nous tentons de prévenir.
Peu importe leur allégeance politique, les députés conviendront que cette façon de faire est incorrecte. Nous demandons l'accès entièrement libre à toute l'information. Il n'y a rien de clandestin dans tout cela. Nous demandons un gouvernement transparent.
Voilà pourquoi les Canadiens sont si désabusés. Ils ne tiennent pas cet endroit en haute estime. En notre qualité de politiciens, nous sommes collectivement classés au bas de l'échelle, après les charlatans de tous acabits, à cause du cynisme, malheureusement fondé dans bien des cas.
Les Canadiens payent leurs impôts. Ils acceptent volontiers de le faire s'ils sont convaincus que l'argent est bien dépensé et qu'ils peuvent savoir comment il est dépensé. Cependant, nous n'avons pas le droit de le savoir.
Le gouvernement n'est pas prêt à changer. On entend souvent le premier ministre parler d'entrer dans le prochain millénaire, alors allons-y. Faisons progresser la Chambre, et l'autre aussi par la même occasion, de sorte que nous ayons un système de gouvernement qui fonctionne pour le bien des Canadiens. Cela ne fonctionne pas si nous avons les mains attachées dans le dos.
Ce projet de loi d'initiative parlementaire n'est pas le seul à traiter de la Loi sur l'accès à l'information. Au dernier compte il y en avait quatre. Mon collègue a présenté celui-ci, j'en ai un sur les sociétés d'État. Le gouvernement lui-même a deux projets de loi sur ce sujet. Des deux côtés de la Chambre on se préoccupe de l'accès à l'information.
J'ai été heureux d'entendre la députée d'en face dire qu'il pourrait y avoir un examen. Je pense qu'il est plus que temps que nous ayons un examen du fonctionnement de la Loi sur l'accès à l'information.
La députée disait aussi que l'accès à l'information est un élément clé de la démocratie. Si elle pense réellement cela, j'espère qu'on va le faciliter, non le restreindre.
En résumé, je pense que c'est un très bon projet de loi. De ce fait, j'aimerais demander le consentement unanime de la Chambre pour faire de ce projet de loi un article soumis à un vote.
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Nanaïmo—Alberni a demandé le consentement unanime pour faire de ce projet de loi un article soumis à un vote. Y a-t-il consentement unanime?
Une voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Il n'y a pas consentement unanime.
Traditionnellement, l'auteur du projet de loi a droit a cinq minutes supplémentaires de débat.
M. Bob Mills: Monsieur le Président, pour résumer ce que nous avons entendu—et nous en avons entendu de belles—on est allé encore plus loin qu'à la dernière session dans l'affirmation que, ce qu'il nous fallait, c'était un retour en arrière, un gouvernement plus interventionniste, un contrôle plus serré de la part du gouvernement, moins de possibilités d'accès offertes à la population et moins de comptes à rendre.
En 1994, à l'occasion de l'étude d'un projet de loi semblable, un ministériel a pris la parole et a tenu les propos suivants: «Nous allons étendre l'accès à l'information, corriger les lacunes et améliorer le système. Nous allons procéder à une étude au cours des 12 prochains mois et le ministre de la Justice va présenter une nouvelle mesure législative dans les 12 mois qui suivront». C'était en 1994.
Or, voici maintenant que les ministériels ont l'audace d'affirmer qu'il y a encore des éléments valables, qu'il s'agit de rendre le gouvernement plus transparent, mais qu'ils n'appuieront aucune initiative du genre avant d'avoir terminé leur étude.
Pendant combien de temps encore nous tiendront-ils ce langage? Leur étude risque de durer jusqu'au XXIe siècle. J'espère que les Canadiens vont les soumettre à un examen approfondi en l'an 2001 ou avant.
Le gouvernement se paie de mots. Certains partis d'opposition se paient de mots. Il est très intéressant de noter que certains partis d'opposition qui se prononcent en faveur de modifications de nature à obliger le gouvernement à rendre compte de ses actes devant la population parlent encore comme s'ils étaient dans les années soixante.
Nous n'avons pas fait beaucoup de progrès, à mon avis. Un ministre des Finances fait faire un sondage par un ancien membre de l'équipe qui l'a aidé durant sa course au leadership en 1990, lequel reçoit en retour des centaines de milliers de dollars puisés dans les poches des contribuables. Il n'y a rien de mal à cela. Il trouve moyen de garder les résultats secrets pendant 18 mois parce qu'il ne serait pas politiquement correct de les divulguer. Donc, il agit ainsi à des fins politiques. Il décide de rendre le sondage public quand son avocat lui dit qu'il n'aurait aucune chance s'il portait sa cause devant un tribunal, que Mulroney l'avait fait et avait perdu malgré de bons arguments. Il a dit que le ministre allait contester la décision même si ses motifs étaient strictement politiques.
À mes yeux, ce n'est pas joli-joli. Il est clair que le gouvernement n'a que faire de l'accessibilité et de la responsabilisation si c'est pour permettre aux contribuables de connaître l'usage qu'il fait de leur argent.
Bref, c'est ce qui nous a amenés ici. Nous sommes venus ici parce que nous estimions qu'il était temps de s'attaquer au statu quo. La population canadienne souhaite que ça change, et le débat d'aujourd'hui illustre encore une fois la nécessité de modifier le mode de fonctionnement de la Chambre.
Le président suppléant (M. McClelland): L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée, et l'article est rayé du Feuilleton.
Comme il est 14 h 10, la Chambre s'ajourne à 11 heures lundi prochain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.