Publications de la Chambre
Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
36e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 24
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 30 octobre 1997
AFFAIRES COURANTES |
LOI SUR LA SÛRETÉ DES PRODUITS LIÉS À L'EAU POTABLE |
Projet de loi C-14. Présentation et première lecture |
L'hon. Allan Rock |
LA LOI SUR LA MARINE MARCHANDE DU CANADA |
Projet de loi C-15. Présentation et première lecture |
L'hon. David M. Collenette |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-16. Présentation et première lecture |
L'hon. Alfonso Gagliano |
LA LOI SUR LES TÉLÉCOMMUNICATIONS |
Projet de loi C-17. Présentation et première lecture |
L'hon. Alfonso Gagliano |
LA LOI SUR LES DOUANES |
Projet de loi C-18. Présentation et première lecture |
L'hon. Andy Scott |
LA LOI SUR LES ALLOCATIONS DE RETRAITE DES PARLEMENTAIRES |
Projet de loi C-268. Présentation et première lecture |
M. Cliff Breitkreuz |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Peter Adams |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—La conduite avec facultés affaiblies |
M. Dick Harris |
Motion |
M. Hec Clouthier |
M. René Laurin |
M. Bill Blaikie |
Mme Eleni Bakopanos |
M. Bill Blaikie |
M. Philip Mayfield |
M. Richard Marceau |
M. Dick Harris |
Mme Elsie Wayne |
M. Gordon Earle |
M. Michel Guimond |
M. Bill Blaikie |
M. Peter MacKay |
M. Philip Mayfield |
Mme Elsie Wayne |
Mme Deborah Grey |
M. Rey D. Pagtakhan |
M. Peter MacKay |
M. Hec Clouthier |
L'hon. Andy Mitchell |
M. Philip Mayfield |
M. Darrel Stinson |
M. Paul Szabo |
M. Reed Elley |
M. John Cannis |
M. Lynn Myers |
Mme Elinor Caplan |
M. Randy White |
M. Scott Brison |
M. Jay Hill |
M. Jay Hill |
M. Randy White |
M. Paul Szabo |
M. Jay Hill |
M. Jake E. Hoeppner |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LES PRÉPOSÉS AUX SERVICES D'URGENCE |
M. Paul Szabo |
LES ARMES À FEU |
M. Jim Pankiw |
LE TRAVAIL DES ENFANTS |
Mme Sarmite Bulte |
LE 2E ANNIVERSAIRE DU RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS |
M. Stéphane Bergeron |
LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT |
Mme Jean Augustine |
TAMARA OKEYNAN |
M. Dale Johnston |
LE CLUB D'AVIRON DE BROCKVILLE |
M. Joe Jordan |
M. RENÉ LÉVESQUE |
Mme Francine Lalonde |
LE BLOC QUÉBÉCOIS |
M. Denis Coderre |
LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA |
Mme Diane Ablonczy |
LA COMPAGNIE FONOROLA |
M. Denis Paradis |
L'ÉQUITÉ SALARIALE |
M. Gordon Earle |
LE SÉNATEUR JEAN-ROBERT GAUTHIER |
M. Mauril Bélanger |
LES AÎNÉS |
M. Mark Muise |
MIRAMICHI |
M. Charles Hubbard |
L'IVRESSE AU VOLANT |
M. Gurbax Singh Malhi |
QUESTIONS ORALES |
L'ENVIRONNEMENT |
Mme Deborah Grey |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Deborah Grey |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Deborah Grey |
Le très hon. Jean Chrétien |
LA FISCALITÉ |
M. Monte Solberg |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Monte Solberg |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Bernard Bigras |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Bernard Bigras |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Christiane Gagnon |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Christiane Gagnon |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR LES INVESTISSEMENTS |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Sergio Marchi |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Sergio Marchi |
L'ENVIRONNEMENT |
L'hon. Jean J. Charest |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'hon. Jean J. Charest |
Le très hon. Jean Chrétien |
LA LOI ANTITABAC |
M. Grant Hill |
L'hon. Allan Rock |
M. Grant Hill |
L'hon. Allan Rock |
L'ENVIRONNEMENT |
Mme Hélène Alarie |
L'hon. Christine Stewart |
Mme Hélène Alarie |
L'hon. Christine Stewart |
L'AFFAIRE AIRBUS |
M. Jack Ramsay |
L'hon. Andy Scott |
M. Jack Ramsay |
L'hon. Andy Scott |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Daniel Turp |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Daniel Turp |
Le très hon. Jean Chrétien |
LA CHINE |
M. Keith Martin |
L'hon. Lloyd Axworthy |
M. Keith Martin |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LA LOI SUR LE TABAC |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Allan Rock |
LA RECHERCHE MÉDICALE |
Mme Carolyn Bennett |
L'hon. Allan Rock |
LES AÉROPORTS |
M. Cliff Breitkreuz |
L'hon. Andy Mitchell |
M. Cliff Breitkreuz |
L'hon. Sheila Copps |
LE COMMERCE |
M. Bill Blaikie |
L'hon. Sergio Marchi |
M. Bill Blaikie |
L'hon. Sergio Marchi |
LES PÊCHES |
M. Charlie Power |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. Charlie Power |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
Mme Albina Guarnieri |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LES PÊCHES |
M. John Duncan |
L'hon. David Anderson |
LA FONCTION PUBLIQUE |
M. Richard Marceau |
L'hon. Andy Scott |
LA SANTÉ |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
L'hon. Allan Rock |
LES PORTS |
M. Bill Casey |
L'hon. David M. Collenette |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Robert Bertrand |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
L'AGRICULTURE |
M. Jake E. Hoeppner |
L'hon. Ralph E. Goodale |
LES PROGRAMMES JEUNESSE |
M. Stéphan Tremblay |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LE COMMERCE |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Sergio Marchi |
L'ENVIRONNEMENT |
M. John Herron |
L'hon. Christine Stewart |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le Président |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Randy White |
M. Bob Kilger |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
La période des questions |
M. Peter MacKay |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Randy White |
L'hon. Don Boudria |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—La conduite avec facultés affaiblies |
Motion |
M. Jake E. Hoeppner |
M. Keith Martin |
M. Philip Mayfield |
M. Jake E. Hoeppner |
M. Keith Martin |
M. Chuck Strahl |
M. Guy Saint-Julien |
Amendement |
M. John Bryden |
M. Dick Harris |
M. Michel Bellehumeur |
M. John Bryden |
M. Gordon Earle |
Mme Marlene Catterall |
M. Philip Mayfield |
M. Charlie Penson |
M. Paul Szabo |
M. Mark Muise |
M. John Bryden |
M. Philip Mayfield |
Mme Louise Hardy |
M. Roy Bailey |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
Motion |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LE CHÔMAGE À TERRE-NEUVE |
M. Norman Doyle |
Motion |
M. Robert D. Nault |
M. Rob Anders |
M. Mark Muise |
M. Paul Crête |
M. Yvon Godin |
M. Mark Muise |
M. Norman Doyle |
M. Rob Anders |
MOTION D'AJOURNEMENT |
L'agriculture |
M. Lynn Myers |
M. John Harvard |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 24
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 30 octobre 1997
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LOI SUR LA SÛRETÉ DES PRODUITS LIÉS À L'EAU POTABLE
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-14, Loi concernant la sûreté et l'efficacité des produits entrant en contact avec l'eau destinée à la consommation humaine ou utilisés pour la traiter.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)
* * *
LA LOI SUR LA MARINE MARCHANDE DU CANADA
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-15, Loi modifiant la Loi sur la marine marchande du Canada et d'autres lois en conséquence.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)
* * *
LE CODE CRIMINEL
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-16, Loi modifiant le Code criminel et la Loi d'interprétation (arrestation et entrée dans les habitations).
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)
* * *
[Français]
LA LOI SUR LES TÉLÉCOMMUNICATIONS
L'hon. Alfonso Gagliano (au nom du ministre de l'Industrie) demande à présenter le projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la réorganisation et l'aliénation de Téléglobe Canada.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR LES DOUANES
L'hon. Andy Scott (au nom du ministre du Revenu national) demande à présenter le projet de loi C-18, Loi modifiant la Loi sur les douanes et le Code criminel.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
[Traduction]
LA LOI SUR LES ALLOCATIONS DE RETRAITE DES PARLEMENTAIRES
M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-268, Loi modifiant la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires (réduction en raison d'un revenu extérieur).
—Monsieur le Président, ce texte de loi prévoit que les prestations de retraite versées aux anciens sénateurs et députés de la Chambre des communes ou au conjoint ou à un enfant d'un ancien sénateur ou député soient réduites du montant à récuper de la prestation de sécurité de la vieillesse en fonction de l'autre revenu touché par l'intéressé ou le ménage, à compter de 1998.
La disposition de récupération s'appliquerait que le retraité touche ou pas la prestation de sécurité de la vieillesse. Toutefois, le montant à récupérer serait calculé comme s'il s'agissait d'appliquer la disposition de récupération du Programme de sécurité de la vieillesse.
J'attends avec impatience la tenue d'un débat sur ce projet de loi.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)
* * *
[Français]
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.
Le vice-président: Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LA CONDUITE AVEC FACULTÉS AFFAIBLIES
M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.) propose:
Que la chambre demande au gouvernement de présenter, conformément à l'alinéa 68(4)a) du Règlement, une motion tendant à charger un comité législatif d'élaborer et de déposer un projet de loi aux fins de modifier les articles du Code criminel qui traitent de la conduite avec facultés affaiblies, pour a) exercer une plus grande influence préventive et b) faire en sorte que les peines soient à la mesure du sérieux de l'infraction.
—Monsieur le Président, je suis heureux de lancer aujourd'hui ce débat sur une question qu'on peut considérer avec raison comme une tragédie nationale et un mal endémique dans notre pays. Je parle du délit de conduite avec facultés affaiblies, cet acte insensé qui consiste à prendre le volant après avoir consommé de l'alcool, ce qui risque d'avoir de graves conséquences et de briser des vies.
Aujourd'hui, je veux faire prendre conscience que la conduite avec facultés affaiblies est vraiment un crime tragique et insensé. Au sein des gouvernements, on tend à considérer la conduite avec facultés affaiblies comme un problème social ordinaire. Nous devons changer notre façon de penser au sujet de la conduite avec facultés affaiblies. C'est un crime. C'est un crime qu'on pourrait absolument empêcher si seulement le gouvernement le reconnaissait comme tel et donnait l'exemple en prenant des mesures de prévention.
Je veux aussi faire valoir que la conduite avec facultés affaiblies a vraiment atteint des proportions endémiques et qu'elle n'a pas été traitée comme il le conviendrait par le gouvernement fédéral. On constate des changements et des progrès au niveau provincial, mais il y a encore beaucoup à faire pour lutter contre ce crime.
La motion dont nous sommes saisis demande au gouvernement en place de jouer vraiment un rôle de chef de file sur la question de la conduite avec facultés affaiblies en chargeant un comité de présenter un projet de loi présentant des modifications au Code criminel. Le but c'est, d'abord, de dissuader les personnes de prendre le volant après avoir bu et, ensuite, de faire en sorte que les peines pour conduite avec facultés affaiblies soient vraiment à la mesure du sérieux de ce crime.
Permettez-moi de commencer en montrant clairement à la Chambre à quel point la conduite avec facultés affaiblies est devenue répandue dans notre pays, parce qu'on n'a pas fait grand-chose pour prévenir ce comportement.
Savez-vous que, du point de vue statistique, chaque jour, sept jours par semaine, quatre Canadiens et demi sont tués par un chauffeur dont les facultés étaient affaiblies? Pendant le présent débat, deux Canadiens vont périr ainsi et des centaines d'autres seront blessés. Chaque année, au Canada, plus de 1 700 personnes meurent victimes de la conduite avec facultés affaiblies.
En fait, les risques d'être tué par un chauffeur dont les facultés sont affaiblies sont plus de trois fois plus élevés que d'être assassiné. Par ailleurs, tous les jours, plus de 300 Canadiens sont blessés dans des accidents de la route dûs à l'alcool. Autrement dit, toutes les heures, 13 Canadiens sont blessés, soit environ un toutes les cinq minutes. Pendant la durée de mon discours, plus de quatre Canadiens seront blessés dans un accident de la route dû à l'alcool. Beaucoup plus de 100 000 Canadiens sont blessés chaque année par des gens qui prennent le volant après avoir bu.
Au delà de l'impact direct qu'elle a sur les victimes, la tragédie qu'est la conduite avec facultés affaiblies touche la société toute entière. Permettez-moi de vous donner quelques chiffres sur ce qu'elle coûte à notre système de soins de santé.
Selon les chiffres de 1992, au Canada, les sommes dépensées en raison de l'alcool représentaient plus de 40 p. 100 du budget total englouti chaque année par les toxicomanies, leequel s'élève à 19 milliards de dollars, soit 4,1 milliards en productivité perdue, 1,3 milliard pour la répression, et plus de 1,3 milliard en frais de soins de santé directs occasionnés uniquement par les accidents dûs à l'alcool.
Les tribunaux, qui sont déjà engorgés, sont saisis de plus d'affaires concernant la conduite avec facultés affaiblies que de toutes autres genres d'affaires. Les chauffeurs qui choisissent de conduire alors que leurs facultés sont affaiblies sont la cause des retards énormes qui ralentissent les tribunaux. Il n'y a aucune raison valable pour qu'il en soit ainsi. Les gens ne sont pas obligés de prendre le volant après avoir bu. S'ils le font, c'est leur choix délibéré d'enfreindre la loi.
À moins que le gouvernement ne fasse quelque chose à ce sujet, ils continueront. Certaines personnes continueront de conduire et d'être condamnées pour avoir conduit en état d'ivresse. Elles continueront à faire d'innocentes victimes en raison de leur état au volant. Elles continueront de tuer des innocents. Les choses n'ont pas à rester ainsi. Nous pourrions en empêcher en commençant immédiatement.
Les conséquences pour les familles et les amis des victimes de conducteurs ivres ne cessent jamais. Elles doivent vivre le reste de leur vie en sachant que la personne qui leur était chère à été tuée par un conducteur en état d'ivresse. Consommer de l'alcool est peut-être un choix individuel, une affaire privée, mais la minute où une personne qui a bu s'assoit derrière un volant cela devient une affaire publique qui nous concerne tous.
Cela devient une question très personnelle pour la famille et les amis de la victime qui doivent revivre chaque jour la tragédie qui s'est produite le jour où leur être cher à été tué ou blessé par un conducteur ivre.
La conduite en état d'ivresse n'est pas une affaire de parti. On ne peut pas faire de politique avec cette question. J'espère que les députés s'en rendront compte au cours du débat.
La conduite en état d'ivresse n'est pas une question politique, c'est une question criminelle, elle touche le plus grave de tous les crimes lorsqu'elles se traduit par une perte de vie. Malheureusement, les quelques changements qu'ont apportés les gouvernements précédents pour s'attaquer au problème de la conduite avec facultés affaiblies, ne sont pas suffisants et le problème demeure.
Par exemple, en 1985, les conservateurs ont modifié le Code criminel afin d'y inclure les accusations de conduite avec facultés affaiblies ayant causé des lésions corporelles et les accusations de conduite avec facultés affaiblies ayant causé la mort. Cependant, durant les neuf années de régime conservateur qui ont suivi, le problème de la conduite avec facultés affaiblies a continué de prendre de l'ampleur. Ces changements n'étaient donc pas suffisants. Il fallait faire plus, mais rien n'a été fait et le nombre de victimes continue aujourd'hui d'augmenter.
Un autre problème auquel le gouvernement n'a pas prêté attention, c'est comment appliquer le nouvel amendement au Code criminel introduisant la peine avec sursis dans les cas de conduite avec facultés affaiblies. La peine avec sursis signifie qu'une personne qui, conduisant en état d'ébriété, tue une autre personne et ne peut ensuite se payer les services d'un bon avocat, peut quitter le tribunal sans purger un seul jour de prison pour cet acte délibéré d'avoir pris le volant après avoir bu de l'alcool.
Je vous donne un exemple. Le mois dernier à Victoria, en Colombie-Britannique, une mère seule s'est retrouvée paraplégique à vie à cause d'un chauffard qui conduisait en état d'ébriété. Le chauffard en question a été condamné à une peine avec sursis parce que c'était sa première infraction. Il est fort possible qu'il ait déjà conduit dans cet état, mais que n'ayant pas eu d'accident, il ne se soit jamais fait prendre auparavant.
Le juge a cependant statué que parce qu'il s'agissait d'une première infraction, il n'imposerait pas de peine à l'accusé mais seulement du service communautaire. Cet automobiliste en était peut-être à sa première infraction, mais l'accident qu'il a causé a gâché la vie d'une jeune mère. Il a obtenu une seconde chance, mais elle restera paralysée pour le reste de ses jours. Cette femme n'a pas eu de seconde chance; nous devrions nous en souvenir et les juges aussi.
Je voudrais maintenant parler de trois mesures que les gouvernements précédents auraient pu prendre pour réduire le nombre de cas de conduite avec facultés affaiblies, mais qu'ils n'ont malheureusement pas prises.
Premièrement, le Code criminel prévoit une période de deux heures à l'intérieur de laquelle une personne soupçonnée de conduite avec facultés affaiblies peut être contrainte de donner un échantillon de sang ou d'haleine. Ce délai trop court a fait en sorte que des milliers d'accusations justifiées n'ont pu être portées parce que les échantillons de sang ou d'haleine ont été prélevés seulement quelques minutes après la limite légale. Est-ce croyable! en anglais. BPH Parce que le délai était écoulé, la personne n'a pu être déclarée coupable, même si elle l'était. Non seulement la loi est stupide, mais elle empêche les policiers de bien faire leur travail en obtenant des preuves qui assureraient la validité des accusations portées.
Nous devrions nous préoccuper davantage des victimes d'actes criminels que de ceux qui les commettent. Ce ne serait que logique. Pourtant, la limite de deux heures applicable au prélèvement d'échantillons de sang et d'haleine nous en empêche.
La deuxième mesure qui devrait être prise en matière de conduite avec facultés affaiblies est la modification de l'alcoolémie. La limite prévues par le Code criminel est actuellement de 0,08 p. 100, ce qui signifie que le pourcentage d'alcool dans 100 ml de sang doit être supérieur à 0,08 p. 100. Pourtant, des recherches approfondies effectuées au cours des trente dernières années ont démontré que cette limite est trop élevée. Les études démontrent que chez la plupart des automobilistes, une alcoolémie de 0,05 p. 100 est trop élevé. Ces résultats proviennent d'études scientifiques effectuées un peu partout dans le monde.
En abaissant la limite permise de l'alcoolémie, le gouvernement fera clairement comprendre à la population qu'il pratique une politique de tolérance zéro à l'égard des personnes qui choisissent de conduire après avoir consommé de l'alcool et c'est ce qu'il doit faire. Le gouvernement a l'obligation de prendre l'initiative dans ce dossier.
Le troisième domaine où l'on pourrait apporter des changements est celui des peines sanctionnant la conduite avec facultés affaiblies. Voilà un cas où il faut se débarrasser de la perception selon laquelle il ne s'agit que d'un mal social. Le gouvernement n'a pas encore réussi à le faire et les juges non plus.
À l'heure actuelle, la peine pour conduite avec facultés affaiblies peut varier de zéro à 14 ans. Dans la pratique, c'est habituellement de zéro à trois ans et demi. C'est un fait.
On a vu des peines de six, sept ou huit ans, mais elles représentent moins de un pour cent de toutes les peines au cours des dix dernières années. Nous ne progressons pas à grandes enjambées dans ce domaine. Ces peines clémentes ne sont tout simplement pas acceptables.
Par exemple, et ici la question devient plus personnelle, dans ma ville d'origine, Prince-George en Colombie-Britannique, à un coin de rue de chez moi, un conducteur avec facultés affaiblies a tué trois membres de la famille Ciccone en 1995. Avant cet accident, le conducteur en question avait été condamné à maintes reprises pour conduite avec facultés affaiblies et il avait été impliqué dans de nombreux accidents. Le juge lui a donné une peine de trois ans et demi; songez-donc, trois ans et demi pour avoir tué un père et ses deux jeunes enfants. Trois années et demie pour quelqu'un qui, en état d'ébriété, en un instant, a fauché trois vies, alors que cette personne avait déjà un casier judiciaire pour délits liés à la consommation d'alcool. Personne n'oserait dire que cette peine est proportionnelle à la gravité du crime.
Pour le moment, les peines prononcées pour conduite avec facultés affaiblies sont en moyenne équivalentes aux peines pour libelle diffamatoire, possession d'un faux passeport ou trafic de faux billets. Comment pouvons-nous oser justifier que ces peines soient comparables aux peines pour conduite avec facultés affaiblies causant la mort? Cela dépasse l'entendement.
J'ai présenté le projet de loi C-201 lors de la dernière législature. Il prévoyait une peine d'au moins sept ans et d'au plus 14 ans dans le cas d'une conduite en état d'ébriété causant la mort. Il a été rejeté par le gouvernement libéral et par la plupart des députés bloquistes, avec l'aide des députés néo-démocrates. Pour une raison ou pour une autre, ils pouvaient justifier que des peines légères soient imposées aux conducteurs en état d'ébriété qui tuent des gens. Je ne sais pas comment, mais ils pouvaient justifier cela.
Une vaste majorité de Canadiens sont favorables aux recommandations de ce projet de loi, mais le gouvernement libéral, le Bloc et le NPD ont dit: «Non. Nous ne pouvons pas justifier ces recommandations. Qu'on leur donne une tape sur les doigts et qu'on les laisse en liberté.»
Un groupement national de plus de 2,5 millions de partisans, Mothers Against Drunk Driving, MADD Canada, vient de publier un sondage sur les attitudes des Canadiens à l'égard de la conduite en état d'ébriété. Qu'est-ce qui est plus important: la philosophie de quelques députés libéraux, bloquistes ou néo-démocrates qui sont incapables de saisir la gravité de ce crime, ou le sentiment profond des Canadiens? Il faut donner la priorité à la population.
Plus de 85 p. 100 des Canadiens sondés par MADD Canada appuient des modifications au Code criminel qui comprendraient des peines minimales imposées aux conducteurs en état d'ébriété. On a fait fi de cela lorsque le projet de loi C-201 a été rejeté par le gouvernement libéral. Je tiens à remercier les libéraux de l'arrière-ban qui ont eu le courage d'appuyer ce projet de loi, et j'appuie les deux bloquistes qui ont fait de même. Le gouvernement n'a pas été capable d'en faire autant.
Permettez-moi de mentionner quelques autres résultats du sondage réalisé par MADD Canada. Près de 95 p. 100 des Canadiens estiment que toute personne impliquée dans un accident causant la mort ou des blessures graves devrait être tenue par la loi de fournir un échantillon de sang à la demande d'un agent de police. Quatre-vingt-quinze pour cent des Canadiens sont de cet avis, mais l'ancien ministre de la Justice ne partageait pas leur opinion. Cela montre que le Canadien moyen veut qu'on prolonge ou élimine la limite de deux heures. On doit le dire à l'ancien ministre de la Justice.
De plus, trois Canadiens sur quatre veulent qu'on réduise l'alcoolémie à 0,05 p. 100. On l'a fait dans d'autres pays avec beaucoup de succès. Parmi les personnes interrogées, 93,4 p. 100 croient qu'on pourra ainsi rendre nos routes plus sûres.
Étant donné les résultats de cette enquête, on voit clairement que le gouvernement est en mesure de vraiment donner l'exemple aujourd'hui. Tout est en place pour le gouvernement. Il pourrait présenter les modifications que MADD Canada et le Parti réformiste ont recommandées. Nous pourrions faire un premier pas aujourd'hui.
Nous sommes en faveur d'une réduction du taux d'alcoolémie à 0,05 p. 100 et de l'imposition de peines plus sévères à ceux qui sont reconnus coupables de conduite avec facultés affaiblies. Nous croyons aussi qu'il faut établir des peines minimales et prévoir des périodes de retrait du permis de conduire plus longues dans le cas des personnes condamnées pour avoir blessé ou tué des gens alors qu'elles conduisaient en état d'ébriété.
Le Parti réformiste est également en faveur de forcer les récidivistes endurcis à suivre des traitements de réadaptation obligatoires. En cas de peine d'emprisonnement, la personne en cause ne pourra être admissible à une libération conditionnelle que si elle a réussi à se réadapter grâce à des traitements. Ce n'est pas trop demandé lorsqu'on pense à la sécurité de nos familles.
Il est clair qu'il est temps d'arrêter de parler des terribles conséquences de la conduite en état d'ébriété. Le moment est venu d'agir. Le gouvernement peut le faire aujourd'hui. Il est temps de mettre de côté tout sectarisme à la Chambre et d'unir nos efforts dans un combat commun contre le crime qu'est la conduite avec facultés affaiblies.
Est-ce un député néo-démocrate qui rit?
Une voix: Oui.
M. Dick Harris: Il est temps pour nous, y compris les députés néo-démocrates qui trouvent cela amusant, de montrer que nous n'aurons aucune tolérance à l'égard des conducteurs en état d'ébriété. Nous pouvons le faire, si nous le souhaitons.
Il est temps de reconnaître les terribles torts causés par les conducteurs ivres et d'exiger qu'on mette un terme à cela par la voie législative. Oui, c'est possible. Le moment est venu de mettre un terme à la tuerie.
Je demande à tous les députés, notamment nos collègues néo-démocrates qui trouvent le sujet plutôt amusant, de reconnaître leur responsabilité, de se joindre à la lutte contre la conduite en état d'ébriété et d'appuyer cette motion aujourd'hui.
M. Hec Clouthier (Renfrew—Nippissing—Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, je félicite le député de Prince George—Bulkley Valley. Le sujet soulève beaucoup de controverse. J'appuie entièrement ce que le député a déclaré ce matin.
Outre ma qualité de parlementaire, je suis notamment conducteur professionnel de coursier sous harnais. Il est intéressant de souligner que les coursiers ne peuvent monter sur le sulky et conduire un cheval si leur taux d'alcool dans le sang dépasse 0,04. Je m'oppose à tout assouplissement qui porterait ce taux à 0,05. Il doit au moins rester à 0,04.
Ceux qui s'intéressent aux courses de chevaux font très attention et se préoccupent énormément de la santé des chevaux. Je m'inquiète encore plus de la santé des êtres humains et je crois que le taux de 0,04 ne doit pas être dépassé.
Le député a parlé de la participation des avocats. Il faut penser que nous sommes en démocratie. Quand une personne est accusée de conduite avec facultés affaiblies, elle peut plaider sa cause devant un tribunal. C'est de l'argot pour désigner les avocats malins. BPH C'est son droit démocratique. Elle peut engager un avocat très malin pour la défendre. Comment le député pourrait-il améliorer la situation en ce qui trait aux avocats? Le député verrait-il d'un bon oeil l'imposition d'une peine obligatoire?
La question est très difficile parce qu'elle touche les droits de la personne. J'approuve essentiellement l'initiative du député. Je me demande simplement si la motion du député ne pourrait pas également traiter la question des avocats qui interviennent pour sortir des accusés du pétrin.
M. Dick Harris: Monsieur le Président, je remercie le député de son appui.
Le taux de .05 est bien sûr une recommandation de MADD Canada. Si le gouvernement prend l'initiative de constituer ce comité, lors des audiences que tiendra ce dernier, quelqu'un pourrait recommander de fixer le taux à .05 ou .03. Les motifs d'une telle recommandation pourront être exposés au comité, qui pourrait à son tour recommander un taux de .04 peut-être dans son rapport. Je comprends ce que le député a dit et je suis certainement d'accord avec lui.
Quant à la seconde question, à propos du problème que nous constatons actuellement au niveau des tribunaux, on y sent une tendance profonde à tâcher de garder les gens hors de prison. Les tribunaux sont débordés. Les prisons sont pleines. Les gouvernements provinciaux, inspirés par le ministre de la Justice, ont pour principe de ne pas mettre les gens en prison. Voilà pourquoi les juges sont plus enclins à écouter les suggestions d'imposer des peines moindres de sorte que les coupables puissent se prévaloir des dispositions en matière de sentence conditionnelle.
Les juges sont plus préoccupés de se conformer à la ligne de pensée du procureur général de la province ou du ministre de la Justice du pays qui veulent garder les gens hors de prison. Ils semblent plus enclins à la clémence.
Pour remédier à la situation, il faudrait notamment resserrer la latitude dont jouissent les juges. Les peines qu'ils peuvent imposer varient de 0 à 14 ans d'emprisonnement. C'est une large fourchette. Chaque jour, des gens accusés de graves infractions de conduite en état d'ébriété ressortent en liberté des tribunaux parce que les juges se sont contentés de les condamner à deux ans moins un jour, sans donner de motif, ce qui les rend immédiatement admissibles à une sentence conditionnelle.
Dans le cas relevé dans ma circonscription, le juge avait erré dans son jugement. Quand il a prononcé la sentence de trois ans et demi, je me suis adressé aux médias pour dire que le juge avait vraiment fait erreur en rendant son jugement, et j'ai exposé toutes les raisons sur lesquelles j'appuyais mon opinion.
Nous avons également incité la Couronne à en appeler de la sentence, ce qu'elle a fait avec succès. Il se trouve que tous les arguments que la Couronne a fait valoir dans son appel se rapportaient aux erreurs que j'avais dénoncées à propos de la sentence.
La cour d'appel a par conséquent ajouté deux années à la peine d'emprisonnement. Le fait est que les juges ont la possibilité de choisir parmi les précédents que font valoir les avocats de la défense. Dans la majorité des cas, ils retiennent les précédents se situant à la partie inférieure de la fourchette. Nous devons resserrer la latitude dont jouissent les juges en prévoyant des peines minimales.
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, lorsqu'on examine un problème comme celui-ci, l'objectif recherché est de faire en sorte qu'il y ait moins de gens qui soient victimes de ceux qui dépassent les limites ou qui ont causé des accidents en état d'ébriété.
Si on étudiait les statistiques, je pense bien qu'on se rendrait compte que le problème n'est pas dans le fait qu'on doive baisser le taux d'alcoolémie. Combien éviterait-on d'accidents si on baissait le taux d'alcoolémie de 0,08 à 0,07, 0,06 ou 0,05?
Je pense que ceux qui ont causé le plus de dommages par des accidents d'autos après avoir consommé de l'alcool, en règle générale, ce sont des gens qui dépassaient largement la limite permise. Qu'on mette 0,05 ou 0,08, lorsque des personnes tuent des gens avec une automobile alors qu'ils sont en état d'ébriété, en règle générale, ce sont des gens dont le taux d'alcoolémie se situe à 0,20, 0,30 ou 0,35.
Quand bien même on le baisserait de quelques dixièmes de point, ce n'est pas cela qui va régler le problème. Je ne sais pas ce qu'en pense mon collègue réformiste, mais est-ce qu'il a songé à ce qu'on change la peine imposée à ceux qui causent des dommages en état d'ébriété? Je pense, entre autres, au problème des enfants qui jouent avec des allumettes.
Ce n'est pas parce que l'allumette est dangereuse qu'on a proscrit les allumettes, mais on s'organise pour ne pas les mettre à la portée des enfants. De même qu'un poison qui est dans l'armoire à pharmacie, on demande de tenir l'armoire à pharmacie sous clé pour ne pas le mettre à la portée des enfants.
Pourquoi n'y aurait-il pas le même raisonnement face à quelqu'un qui ne sait pas utiliser une automobile, qui n'a pas la sagesse de décider de l'utiliser ou pas, lorsqu'il est en état d'ébriété? On pourrait mettre un sabot, par exemple, pendant un, deux ou trois mois, sur la voiture de cette personne-là, parce qu'elle a conduit en état d'ébriété, même s'il ne s'agissait que de 0,08 p. 100 ou 0,07 p. 100.
Là, on a enlevé la cause immédiate. Quelqu'un qui est en état d'ébriété et qui n'a pas de voiture à sa disposition ne peut pas blesser personne. Si vous lui laissez la possibilité de décider de le faire ou non, il n'a même pas la capacité de jugement pour décider à ce moment-là s'il doit utiliser sa voiture ou non.
J'aimerais savoir si le député a réfléchi dans ce sens-là et j'aimerais qu'il me fasse part de ses remarques, à savoir si on ne devrait pas changer l'approche et faire en sorte que l'on agisse sur ce qui cause l'accident, plutôt que de rendre plus sévère une loi qui fera en sorte qu'on aura plus de criminels, tout en ne réglant pas le problème.
On voit trop de gens aujourd'hui qui ont perdu leur permis de conduire deux, trois, quatre et cinq fois, mais cela n'a pas suffi à les dissuader d'utiliser leur voiture en état d'ébriété. Donc, ce n'est peut-être pas là qu'est la solution. On pourrait les empêcher de l'utiliser avec un sabot de Denver, par exemple. Un homme dont la voiture est dans la cour avec un sabot de Denver pendant trois mois, il pourra se saoûler tant qu'il voudra, il pourra prendre toute la boisson qu'il veut, mais on est certains qu'il ne prendra pas sa voiture, parce que l'autorité aura mis un sabot de Denver dessus, ou un autre moyen. Il faut trouver le moyen de l'empêcher de prendre sa voiture. J'aimerais entendre les commentaires de mon collègue là-dessus.
[Traduction]
M. Dick Harris: Monsieur le Président, pour ce qui est des doutes exprimés par mon collègue quant à l'efficacité d'une baisse du taux d'alcoolémie permis, il a tort. Bien des pays dont la Norvège, la France, le Danemark et certains autres pays européens de même que certains États américains ont baissé à 0,05 le taux d'alcoolémie permis, et on a observé une diminution marqué des cas de conduite avec facultés affaiblies. C'est donc une mesure efficace.
Ce qui cause un accident ou ce qui fait qu'une personne sera reconnue coupable de conduite avec facultés affaiblies, c'est le choix que cette personne fait de prendre le volant. S'il est un cas où nous avons besoin de mesures de dissuasion plus efficaces, c'est bien celui de la conduite avec facultés affaiblies. En fait, des études ont révélé que la principale raison pour laquelle certaines personnes ne boivent pas ou ne prennent pas le volant après avoir bu, c'est qu'elles craignent que la police les arrête et les trouve dans cet état. C'est la principale raison.
Pour répondre à la question du député, il faut des moyens de dissuasion plus efficaces de façon générale, des suspensions de permis de conduire pour la première et la deuxième infraction de conduite avec facultés affaiblies, et même aller jusqu'à la suspension du permis à vie et la confiscation du véhicule. Nous devons envoyer un message clair aux Canadiens pour leur faire comprendre que ce comportement ne sera pas toléré, et le gouvernement peut le faire.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): J'invoque le Règlement, monsieur le Président. J'espérais pouvoir prendre la parole durant la période réservée aux questions et aux observations, mais je tiens à ce qu'il soit absolument clair que le député a tort et qu'aucun député néo-démocrate ne trouve cette question amusante.
Le vice-président: Je suis désolé de ne pas avoir pu permettre au député de poser une question faute de temps. Je suis certain qu'il a un point à faire valoir et qu'il aura l'occasion de le faire plus tard aujourd'hui durant le débat, car il ne s'agit pas vraiment ici d'un rappel au Règlement. Je suis convaincu que le député aura l'occasion de faire valoir son point plus tard, sinon un de ses collègues le fera.
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, si je pouvais avoir le consentement unanime de la Chambre pour faire une intervention de 60 secondes, j'ai fait cette remarque parce que le député a accusé mon parti de ne pas prendre cette question au sérieux. Je crois qu'il faut tirer les choses au clair.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour donner une minute au député?
Des voix: D'accord.
M. Bill Blaikie: Merci. Je tiens simplement à dire clairement que...
M. Philip Mayfield: Il n'y a pas consentement unanime.
Le vice-président: Il n'y a pas consentement unanime. Je suis désolé. Reprise du débat.
[Français]
Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, je veux commencer en félicitant MADD pour l'excellent travail de sensibilisation que cet organisme fait auprès du public canadien au sujet du problème de l'alcool au volant.
Je veux réitérer ce que la ministre de la Justice a dit récemment quand elle a rencontré les représentants de MADD. Elle a dit qu'elle allait soulever la question prochainement, au mois de décembre, quand elle rencontrera à Montréal tous les ministres de la Justice provinciaux.
[Traduction]
Le Parlement a, en vertu de la Constitution, le pouvoir de promulguer des lois de droit pénal. Le député de l'opposition affirme que le gouvernement actuel s'est soustrait à ses responsabilités en ne modifiant pas le Code criminel. Je ferai cependant remarquer que, récemment, soit au printemps dernier, la dernière législature a adopté certaines modifications aux dispositions du Code criminel sur la conduite en état d'ébriété.
Nous avons modifié ces dispositions à plusieurs occasions, notamment pour préciser que la période où il est interdit de conduire ne débute qu'après la sortie de prison du délinquant. À mon avis, c'est là une modification importante.
Le Parlement a aussi précisé que la défense ne peut présenter d'élément de preuve sur la concentration réelle d'alcool dans le sang de l'accusé qui contredisent les résultats du test-haleine que lorsque cet élément de preuve établit un taux d'alcoolémie égal ou inférieur à 80.
En dépit des affirmations du député, le gouvernement a aussi reporté de deux à quatre heures la période au cours de laquelle un agent de police peut demander un mandat pour obtenir un prélèvement de sang lors de certains accidents. Il faut dire les choses comme elles sont.
Nous savons tous que la Constitution reconnaît à chaque province le pouvoir d'adopter des lois relatives au code de la route, à l'émission des permis de conduire et à l'enregistrement des véhicules à moteur sur son territoire. Les provinces ont donc adopté des lois sur la conduite en état d'ébriété. La responsabilité des mesures d'exécution et des poursuites en cas d'infractions au Code criminel a été déléguée aux procureurs généraux de chaque province.
Par conséquent, j'estime qu'il devrait y avoir des consultations intergouvernementales poussées pour parvenir à une bonne compréhension du problème de la conduite en état d'ébriété. Il existe des moyens législatifs de renforcer les acquis enregistrés jusqu'à maintenant.
Je le répète, la ministre de la Justice rencontrera ses collègues et leur présentera les modifications qu'elle suggère d'apporter au Code criminel.
Les statistiques sur la conduite en état d'ébriété, le nombre de décès de conducteurs et les accusations portées au criminel révèlent qu'il y a eu de grands changements dans les habitudes des conducteurs depuis le début des années 1980 et, en passant, que ce sont en très grande majorité des hommes qui conduisent en état d'ébriété.
Les résultats d'un sondage commandé par Mothers Against Drunk Driving rendus publics cette semaine à Ottawa ont confirmé le changement d'attitude de la population face à ceux qui conduisent en état d'ébriété.
En dépit de ces progrès, cependant, les députés savent que les conséquences tragiques de la conduite en état d'ébriété demeurent un fléau au sein de la société canadienne. Je suis d'accord avec le député sur ce point.
[Français]
La Fondation de recherches sur les blessures de la route au Canada est responsable de consigner les données sur les décès des conducteurs à la suite d'un accident de la route pour Transport Canada. Les données proviennent des renseignements fournis par la police et les coroners et, depuis 1987, la base contient les données fournies par toutes les provinces et territoires.
La bonne nouvelle est que, depuis 1987, le pourcentage de conducteurs dont le taux d'alcoolémie dans le sang dépasse 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang diminue constamment. En 1987, les conducteurs ayant un taux d'alcoolémie dans le sang dépassant 80 représentaient 43 p. 100 des décès des conducteurs, à la suite d'un accident de la route. En 1995, ce chiffre était de 35 p. 100 des décès des conducteurs à la suite d'un accident de la route. Mais ce ne sont pas quand même de bonnes nouvelles, et je veux être claire là-dessus. Il ne s'agit pas de valider le fait que cela doive demeurer à 80.
La tragédie des accidents causant la mort des conducteurs ayant un taux d'alcoolémie dépassant 80 ne s'arrête pas là. Certains conducteurs blessés mortellement et dont le taux d'alcoolémie dépasse 80 sont également responsables du décès de leurs passagers ou d'autres personnes qui ne prennent pas place dans leur véhicule. De même, certains conducteurs dont le taux d'alcoolémie dépasse 80 survivent à l'accident, mais leurs passagers et d'autres personnes qui ne prennent pas place dans leur véhicule sont tués. C'est tragique.
Lorsque l'on tient également compte des blessures, la quantité des souffrances humaines au cours des années prend des proportions stupéfiantes et, bien entendu, les personnes bien pensantes se sentent obligées d'agir.
Mais la question importante est la suivante: Que devrons-nous faire? Les causes sont complexes et les solutions à ce grave problème social ne sont pas simples. Étant donné que les conducteurs avec facultés affaiblies ne forment pas un groupe homogène, il n'est pas possible simplement de prévoir des peines plus sévères et de s'attendre à ce que cette simple mesure empêche tous les gens de boire et de conduire.
Il est nécessaire d'adopter un train de mesures, «a holistic approach». Par exemple, les amendes ou l'emprisonnement peuvent décourager la plupart d'entre nous, mais ces mesures auraient moins d'effet quant à certaines personnes ayant une dépendance à l'égard de l'alcool, même si les sanctions étaient sévères. Dans ce cas, l'obligation de suivre un traitement ou d'autres mesures pourraient s'avérer plus efficaces, à notre avis.
[Traduction]
Récemment, la Fondation de recherches sur les blessures de la route a publié une brochure traitant de la conduite avec facultés affaiblies. On y mentionne que le risque d'accident croît de manière exponentielle en fonction de l'augmentation du taux d'alcoolémie. Nous sommes tous d'accord sur ce fait.
Il ne faut donc pas se surprendre que les conducteurs dont le taux d'alcoolémie est très élevé sont de façon disproportionnée responsables des accidents mortels où la consommation d'alcool est un facteur qui entre en considération.
La FRBR énumère un certain nombre de mesures qui pourraient être prises dans le but de réduire le nombre d'accidents de la circulation mortels. La plupart de ces mesures relèvent des gouvernements provinciaux. La FRBR signale que de nombreuses provinces ont déjà commencé à appliquer quelques-unes des mesures qu'elle préconise.
Parmi les idées proposées, mentionnons la possibilité d'imposer des peines proportionnelles au taux d'alcoolémie. La FRBR précise que certains juges appelés à prononcer des peines semblent déjà tenir compte de ce critère dans certains cas.
[Français]
L'ajout de plusieurs autres éléments peut aider à mieux comprendre le problème de la conduite avec facultés affaiblies. Selon la ministre de la Justice, le ministère des Transports prépare un rapport concernant un sondage réalisé par les policiers, en collaboration avec l'Association canadienne des chefs de police, qui permettra de mieux cerner les mesures susceptibles d'aider les policiers dans le cadre des enquêtes concernant les crimes de conduite avec facultés affaiblies.
En août 1997, le ministère des Transports a également commandé une étude à la Fondation pour la recherche sur la dépendance, l'Addictions Research Foundation. On analysera la documentation au sujet des répercussions des divers taux d'alcoolémie sur la capacité de conduire, et l'utilisation d'un taux d'alcoolémie plus bas dans le cas des peines de nature administrative, notamment la suspension des permis de conduire, ou des peines de nature criminelle dans certains pays. Ces renseignements seront sans doute précieux lors de l'examen des options législatives en collaboration avec les provinces.
Il est important de signaler que le ministère des Transports participe depuis plusieurs années à des initiatives de nature non pénale avec les provinces et d'autres partenaires, lancées sous le titre général de Stratégie pour diminuer les incidences de la conduite avec facultés affaiblies, Strategy to Reduce Impaired Driving. Il ne fait pas de doute que des mesures qui ne découlent pas du droit pénal ont d'importantes répercussions sur le problème. De fait, c'est grâce aux efforts combinés des gouvernements, des institutions des secteurs public et privé, des familles et des individus que nous avons pu réaliser le progrès enregistré. Il est très probable que le maintien de cette progression ne résultera pas des initiatives de nature pénale par elles-mêmes.
[Traduction]
Je m'offusque de l'allégation du député de l'opposition, qui soutient que les députés de ce côté-ci de la Chambre n'ont pas le courage de reconnaître cette grande tragédie canadienne ou encore que le gouvernement ne fait rien, comme il le prétend. Nous avons pris des mesures et nous continuerons d'en prendre. La ministre a déjà confirmé l'engagement que le gouvernement a pris auprès des représentants de l'organisation MADD qu'elle a rencontrés cette semaine. Je suis sûre que tous les députés continueront d'encourager la ministre et le gouvernement à prendre les mesures qui s'imposent.
Je répète ce que j'ai déjà dit. Nous nous sommes engagés à prendre les mesures nécessaires.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, c'est avec intérêt que j'ai écouté ce que la députée du gouvernement avait à dire au sujet de l'échange intervenu jusqu'à maintenant entre la personne qui a proposé la motion et le gouvernement. Cela me ramène à quelque chose que j'espérais dire plus tôt.
Si nous voulons un débat impartial et une solution impartiale à ce problème, il nous faut être impartial dans nos propos à ce sujet.
Si j'ai fait tout à l'heure une observation non officielle au sujet de ce qu'avait à dire le député qui a proposé la motion, c'est qu'il avait prononcé une allocution très partisane et avait laissé entendre que les libéraux et les néo-démocrates, notamment, ne se préoccupaient nullement de la tragédie que constitue la conduite en état d'ébriété ni des souffrances, des blessures et des coûts énormes qu'elle représente pour la société canadienne. Puis il a terminé son allocution en nous exhortant tous à être impartial. J'ai trouvé cela comique, tellement c'était pitoyable. Si l'on tient à être impartial à ce sujet, il faut admettre que même si nous pouvons être en désaccord, nous nous préoccupons tous du sort des victimes de la conduite en état d'ébriété.
Je dirai aussi au gouvernement et à quiconque participera au débat là-dessus qu'on ne peut pas exiger un débat impartial lorsqu'on vient de reprocher avec véhémence aux autres partis de ne pas s'intéresser à un problème qui nous touche manifestement tous, mais sur la solution duquel nous pouvons être en désaccord.
Je serais plutôt enclin à approuver ce qu'a dit le député réformiste, mais je m'inscris en faux contre son argumentation et sa prétention que ce problème nous laisse indifférents. C'est absolument faux et grossièrement partisan.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je remercie la secrétaire parlementaire de ses observations.
J'ai toutefois certaines réserves à leur sujet. Je pense que, en tant que Canadiens, nous avons un problème plus général lorsqu'il est question de la conduite en état d'ébriété. En réalité, nous acceptons ce phénomène et nous payons le prix de cette acceptation dans les statistiques alarmantes et tragiques. Selon les statistiques dont je dispose pour la période de 1983 à 1991, plus d'un million de personnes ont été blessées et environ 18 000 ont été tuées pendant ces huit ans. Ce sont des statistiques dignes d'une période de guerre. Si les gens utilisaient des armes ou des produits ou du matériel dangereux, nous trouverions une façon de décourager cette pratique. Culturellement, nous avons toutefois rendu la consommation d'alcool assez acceptable, même pour ceux qui prennent le volant.
Ce que je veux dire, c'est que, contrairement à la députée, je pense qu'en présentant des statistiques et en disant que le gouvernement fait quelque chose pour résoudre le problème, on émousse un peu le sentiment de vive préoccupation qu'il faut communiquer à nos collègues parlementaires, certes, mais aussi à l'ensemble de la population canadienne, pour faire comprendre que l'alcool au volant, c'est inacceptable.
Si une personne veut se saouler à mort, c'est son affaire. Cependant, si elle prend le volant, elle devient une menace et risque non seulement de tuer, mais aussi de blesser quelqu'un, d'occasionner des frais médicaux et de détruire la paix et le bien-être de notre société.
En tant que leaders de nos collectivités, nous devons insister sur le fait qu'il est absolument inacceptable de conduire une voiture après avoir consommé de l'alcool.
J'aimerais que les discours des députés du parti ministériel et des députés de ce côté-ci fassent ressortir ce caractère inacceptable, au lieu de s'appuyer sur des statistiques qui donnent l'impression que nous faisons tout ce qui est possible à cet égard. Le problème fondamental, c'est l'attitude des Canadiens.
Mme Eleni Bakopanos: Monsieur le Président, je ne crois qu'il y ait quoi que ce soit dans mes observations qui donne à penser que le gouvernement trouve les statistiques acceptables, bien au contraire. J'ai voulu dire que notre approche de ce problème grave ne devait pas être partielle, mais globale. Il existe un problème d'alcoolisme dans notre société. Je ne pense pas qu'un seul député trouve acceptable qu'on prenne le volant après avoir bu, au risque de tuer quelqu'un. Aucun député ne serait d'accord. Bien au contraire.
Nous essayons de nous assurer que la démarche dans laquelle nous nous engageons a l'accord des provinces, car, en dernier ressort, c'est à elles qu'il appartiendra d'appliquer ces modifications du Code criminel. Comme je l'ai dit dans mon intervention, la ministre est déterminée à prendre des mesures. Elle a dit à l'organisme MADD lorsqu'elle l'a rencontré la semaine dernière qu'elle soumettrait la question à l'attention de la Chambre.
Le vice-président: Je suis désolé d'interrompre la secrétaire parlementaire, mais la période des questions et observations est terminée.
Reprise du débat.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, la motion à l'étude aujourd'hui, proposée par le Parti réformiste, a pour but d'exiger du gouvernement qu'il présente une motion ayant pour objet la mise sur pied d'un comité législatif devant rédiger un projet de loi. Ce projet de loi porterait sur une modification des dispositions du Code criminel traitant de la conduite avec facultés affaiblies et viserait plus précisément une augmentation de la prévention d'abord, et deuxièmement, s'assurerait que les peines reflètent le sérieux de l'infraction.
Le Bloc québécois, comme tous les Québécois et les Québécoises je pense, reconnaît l'importance du problème soulevé par la motion présentée par mon collègue du Parti réformiste. En effet, la conduite en état d'ébriété est un fléau accablant et on se doit de le combattre de façon efficace. D'un autre côté, il faut faire attention de ne pas tomber dans le sensationnalisme.
Le Bloc québécois appuie les réformistes qui demandent au gouvernement de présenter cette motion. Ce qu'on demande, c'est que cette motion soit renvoyé au comité législatif et là, on fera une étude plus approfondie du problème afin de corriger les infractions reliées à la consommation d'alcool et la conduite d'un véhicule motorisé sous l'influence de l'alcool.
Le Bloc québécois, encore une fois, toujours conscient des graves problèmes qui sont posés par cette situation, est d'avis que l'étude législative doit porter sur le problème dans son ensemble et non pas seulement sur une détermination de peines plus sévères. On ne doit pas limiter le débat simplement aux peines, mais on doit aussi y aller de façon plus large.
Quelques questions pourraient être posées dans le cadre de cette étude en comité. D'abord, je pense que la première question est essentielle. Est-ce qu'une meilleure prévention auprès des citoyens passe nécessairement par un resserrement des conditions d'application des peines prévues au Code criminel? On peut se poser la question, on en discutera, mais c'est une interrogation qu'on se doit d'avoir.
La deuxième question qu'on se doit aussi de se poser, c'est est-ce que l'amélioration du traitement judiciaire, qui, ne l'oublions pas, est de compétence provinciale, ne serait pas la solution à nos problèmes? Ici, on parle d'administration de la justice. Donc, on déborde largement, encore une fois, du simple cas des peines plus sévères.
On peut aussi se poser cette question: Est-ce que les services de police accordent une priorité suffisamment importante au problème de conduite en état d'ébriété? On sait très bien que la haute direction des policiers accorde une cote prioritaire à la conduite avec facultés affaiblies, mais pour le policier ou la policière qui doit lutter sur le terrain contre la conduite avec facultés affaiblies, est-ce que c'est une de ses priorités?
On sait que les policiers sont débordés et qu'ils ont plusieurs appels. Est-ce que la priorité du policier, dans sa voiture de police, est la lutte contre la conduite en état d'ébriété? Je disais que souvent, pour certains policiers, l'application des dispositions du code de la route est une routine un peu plate, qui semble un peu lourde, alors qu'ils voudraient avoir un peu d'action. Donc, on peut se poser la question à ce moment-là.
Il ne faut pas perdre de vue dans ce problème que les services policiers qui, encore une fois, je le dis, relèvent de la compétence des provinces, doivent avoir leur mot à dire. On devrait aussi analyser comment ils verraient une meilleure lutte contre la conduite avec facultés affaiblies. Je ne suis pas convaincu que le simple resserrement des peines réponde aux attentes des policiers.
Il faut aussi se poser la question suivante: quelles sont les causes de la diminution du taux de personnes accusées de conduite avec facultés affaiblies, depuis 1986? Pour vous donner quelques chiffres, en 1996, la police a déclaré 161 805 affaires liées à des infractions aux règlements de la circulation du Code criminel, ce qui représente une diminution de 6,9 p. 100 par rapport à 1995. La même étude reconnaît aussi que la police a accusé 78 894 personnes de conduite avec facultés affaiblies, soit une baisse de 6,2 p. 100 par rapport à 1995.
Quelles sont donc les raisons de cette baisse-là? On peut s'interroger, il y a peut-être des pistes de solutions qu'on pourrait trouver avec l'étude de ces diminutions.
On peut aussi se poser la question, parce que c'est bien de prévenir: est-ce que les programmes de sensibilisation de la population et l'éducation de celle-ci sont adéquats? Est-ce qu'il n'y a pas une meilleure façon encore de sensibiliser les gens aux dangers que représente la conduite avec facultés affaiblies? Est-ce que les techniques de publicité utilisées sont les bonnes? Est-ce qu'un meilleur programme ne devrait pas être mis en place dans les écoles, dans les maisons de jeunes, etc.? Il faut s'interroger.
En conclusion, le Bloc est en faveur de la motion, parce que cela permettra un débat sur la question, et c'est très important, un débat qui doit dépasser largement le simple cadre des peines. On pourra tirer des conclusions qui seront basées sur autre chose que des cas fortement médiatisés. C'est le travail des parlementaires de faire cette étude à tête reposée et refroidie.
[Traduction]
M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention et de son appui.
Il a demandé si nous ne pouvions pas faire plus, en dehors d'alourdir les sanctions. Nous faisons déjà un gros travail d'information dans les écoles et les médias. Nous diffusons constamment une publicité très efficace. À la veille de la période de l'année où la consommation d'alcool est la plus forte, les annonces se feront beaucoup plus fréquentes, de façon à essayer d'amener les Canadiens à ne pas prendre le volant après avoir bu.
Malgré tous nos efforts, le nombre de conducteurs en état d'ébriété augmente toujours. Le nombre d'accidents et de décès est toujours à la hausse.
Nous disons dans la motion que, pour compléter nos efforts de sensibilisation, il faut s'interroger sur l'effet de mesures de dissuasion plus sévères. Comme je l'ai déjà dit, s'il fut jamais un cas où la dissuasion s'impose, c'est bien celui de la conduite avec facultés affaiblies. Les recherches ont montré que la crainte d'être arrêté et inculpé est la principale raison pour laquelle on s'abstient de conduire après avoir consommé de l'alcool.
Si certains continuent de conduire en état d'ébriété, c'est parce qu'ils ne craignent pas d'être inculpés. Les peines sont trop peu sévères. La suspension de leur permis ne les dérange pas, parce qu'ils conduiront quand même, tout comme il n'y a pas de mesure dissuasive assez forte s'ils sont arrêtés alors que leur permis est suspendu.
La dissuasion a un rôle énorme à jouer. Si nous voulons revoir le Code criminel, nous devons être prêts à examiner l'effet de mesures plus vigoureuses de dissuasion tout en poursuivant l'effort de sensibilisation et les mesures de traitement.
Je suis un chaud partisan du traitement obligatoire. Lorsqu'une personne est incarcérée parce qu'elle a un problème d'alcool ou de drogue, le juge doit avoir le pouvoir d'imposer un traitement obligatoire
J'espère avoir répondu aux questions de mon collègue.
[Français]
M. Richard Marceau: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses quelques commentaires.
Il parlait de traitement obligatoire. Oui, le traitement obligatoire est une des choses qu'on devrait peut-être examiner, mais ça va justement dans la ligne de ce que je disais, à savoir qu'il faut aller plus loin que la simple peine. Il y a une question de réhabilitation, mais il y a aussi, et mon collègue l'a mentionné de façon fort pertinente, la question de l'éducation. Il a mentionné la publicité, etc.
Oui, certaines campagnes ont sûrement été efficaces, mais est-ce qu'il n'y a pas une façon de les rendre plus efficaces encore? Cela mérite d'être étudié. Est-ce que les campagnes de prévention dans les écoles et dans différents établissements peuvent être encore plus efficaces? On peut étudier cela aussi.
J'imagine la personne qui est dans un bar, qui prend un coup, qui prend une bière, est-ce qu'elle va se dire: «Je vais prendre une bière. Non, je ne la prendrai pas, parce que l'amende, au lieu d'être de 300 $, est de 500 $?» Je n'en suis pas sûr. Comme je le disais tout à l'heure à mon collègue, cela mérite étude. C'est la raison pour laquelle nous sommes en faveur de cette motion. Étudions le problème, mais étudions-le dans un contexte plus large qui dépasse le simple resserrement des peines imposées.
[Traduction]
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je suis peut-être davantage sensibilisée à cette question que les autres puisque mon père et ma mère, à l'occasion de leur 50e anniversaire de mariage, ont été frappés par deux jeunes hommes en état d'ébriété. Ma mère n'a plus jamais marché toute seule par la suite. Elle a 13 vis au côté. Mon père a été blessé lui aussi. Cette question me préoccupe donc davantage.
De plus, monsieur le Président, vous verrez dans la tribune aujourd'hui une sénatrice dont deux très proches parents ont été tués ici même à Ottawa.
Je dirai au député que nous appuyons cette motion, qu'il doit y avoir une campagne de sensibilisation. Il faut aussi une modification législative afin que ceux qui vendent des boissons alcoolisées à des jeunes reconnaissent que c'est une infraction sérieuse. Il faut modifier la peine à cet égard.
Nous appuyons le député et nous travaillerons avec lui. C'est une question qui me touche de très près, plus que quiconque, à l'exception de la sénatrice qui se trouve à la tribune.
[Français]
M. Richard Marceau: Monsieur le Président, je voudrais simplement dire que je sympathise avec la députée qui a été touchée fortement par quelqu'un qui a conduit, de façon criminelle, en état d'ébriété, et de toute façon je sympathise avec toutes les victimes, toutes les familles touchées par un tel crime. C'est la raison pour laquelle nous disons qu'un tel débat mérite une étude très, très approfondie.
[Traduction]
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, je sais que je parle au nom de mes électeurs en soulevant aujourd'hui la question de la conduite en état d'ébriété.
En guise d'introduction, je voudrais féliciter une de mes électrices, Geraldine Dedrick, la présidente de Mothers Against Drunk Driving pour la région de Halifax, pour son travail. Geraldine Dedrick a elle-même vécu une tragédie en perdant son fils, qui est décédé dans un accident de voiture lié à la conduite en état d'ébriété. C'est un honneur pour moi que de prendre la parole pour appuyer ses efforts et ceux de quantité de gens qui travaillent aujourd'hui pour prévenir de telles tragédies.
C'est une question importante pour la province de la Nouvelle-Écosse. L'actuelle présidente de Mothers Against Drunk Driving est Susan MacAskill, de Windsor, dans la vallée d'Annapolis, en Nouvelle-Écosse. Je la félicite pour son travail.
Tous les jours, les habitants de la circonscription d'Halifax-Ouest risquent leur vie. Tous les jours dans ma circonscription, des gens s'inquiètent du fait qu'une personne qu'ils connaissent conduit en état d'ébriété. C'est la même chose partout dans la province de la Nouvelle-Écosse et d'un bout à l'autre du pays.
Depuis que l'on a modifié le Code criminel pour qu'il traite des personnes qui conduisent avec les facultés affaiblies, on estime que 24 000 Canadiens ont péri aux mains de ceux qui conduisent même s'ils ont les facultés affaiblies par l'alcool. Un million et demi de Canadiens ont été blessés au cours des dix années qui se sont écoulées depuis l'adoption de ces lois. Le nombre des morts et des blessés est comparable à celui d'une guerre. Le gouvernement dispose de deux moyens pour réduire ce carnage.
Mes collègues néo-démocrates et moi-même sommes favorables à l'étude et à l'adoption de mesures législatives qui auraient pour effet de renforcer les moyens de dissuasion et de réduire le nombre des accidents.
Les victimes dont il est ici question ne sont pas des personnes qui ont sacrifié leur vie pour leur pays ou pour un autre idéal élevé, mais qui ont vu leur existence ou leur santé sacrifiée par des automobilistes qui avaient trop bu et qui ont, de ce fait, transformé leur véhicule en une arme terrible et incontrôlable.
Pendant que je prononce ce discours, une personne perdra vraisemblablement la vie à cause de la conduite avec facultés affaiblies. Toutes les cinq minutes en moyenne, plus d'un Canadien est blessé à cause de la conduite avec facultés affaiblies et une personne est tuée toutes les six heures. C'est vraiment scandaleux.
Les décès et les mutilations causées par la conduite avec facultés affaiblies sont les choses les plus graves, mais il ne faut pas oublier les coûts énormes qui en résultent pour le système de soins de santé et les autres effets qui se répercutent sur les contribuables. Ce n'est pas qu'une question de morts et de blessures mais aussi de responsabilité à bien des égards.
La responsabilité se manifeste à plusieurs niveaux, à commencer par celle qui incombe à chaque personne. J'ai choisi de ne pas boire. Je connais plusieurs personnes qui ont pris la même décision. Je connais de nombreuses autres personnes responsables qui boivent à l'occasion et qui ne prendraient jamais le volant d'un véhicule en sachant que le taux d'alcool dans leur sang peut se situer autour de 0,08.
Puis il y a ceux qui boivent à l'occasion et qui choisissent malheureusement de conduire après avoir consommé de l'alcool. On estime que cette décision regrettable est à l'origine d'une mort par jour dans ce pays. Et puis, il y a les récidivistes, qui ont de sérieux problèmes de dépendance et qui sont à l'origine d'une grande partie des accidents.
La communauté a une responsabilité. Les gens se mobilisent de plus en plus pour faire changer les lois. C'est en grande partie grâce à leurs efforts que l'habitude de prendre un verre avant de prendre la route se perd de plus en plus.
Mothers Against Drunk Driving et beaucoup d'autres organisations très engagées ont pris les devants et ont fait une bonne partie de notre travail. C'est ce qui nous permet, à nous législateurs, d'aider à remédier aux problèmes. De leur côté, les propriétaires de débits de boissons alcoolisées prennent des mesures afin d'empêcher la conduite en état d'ébriété et de réduire le nombre d'accidents. Je les félicite de leurs efforts.
Il est fou de penser qu'on peut éliminer entièrement le problème par le seule voie législative. Il est criminel de notre part à nous parlementaires de ne pas faire tout notre possible pour empêcher que des personnes perdent la vie ou soient blessées à la suite d'accidents dus à la conduite en état d'ébriété.
S'il est sensible à l'opinion publique, le gouvernement ne devrait pas craindre de s'attaquer à cette question. Neuf Canadiens sur dix estiment que c'est un problème auquel le gouvernement doit s'attaquer. Près de trois Canadiens sur quatre sont en faveur d'abaisser le taux d'alcool dans le sang de 0,08 à 0,05. Peut-être pourrions-nous même, comme le suggère le député de l'autre côté, le réduire davantage.
Nous ne serions pas les premiers à le faire. De nombreux pays sont en avance sur nous. L'Australie, la Belgique, la Finlande, la Grèce, les Pays-Bas, la Norvège, le Portugal et la France ont tous abaissé les taux légaux à 0,05. Certains gouvernements provinciaux ont montré la voie sur ce plan. À Terre-Neuve, toute personne qui a un taux d'alcool dans le sang supérieur à 0,05 se voit confisquer son permis de conduire pour 24 heures et doit payer 100 $ pour le récupérer.
Je sais que mes électeurs de Halifax-Ouest souhaiteraient qu'on puisse, aux termes de la loi provinciale, en Nouvelle-Écosse, confisquer les automobiles impliquées dans ces délits.
Examinons au comité la possibilité de demander automatiquement des échantillons d'haleine ou de sang aux conducteurs impliqués dans un accident causant des blessures graves ou la mort. Penchons-nous sur la limite actuelle de deux heures pour obtenir un échantillon d'haleine ou de sang. Examinons tous les aspects de la loi fédérale pour faire notre part afin de réduire la conduite avec facultés affaiblies.
N'ayons pas peur d'examiner le Code criminel pour étendre la notion de motifs raisonnables ou probables pour lesquels les agents de la paix peuvent faire enquête sur la scène d'accidents ayant causé la mort ou des blessures graves.
Je sais que l'une des grandes préoccupations dans ma circonscription d'Halifax-Ouest est de savoir à quel point on peut déterminer le rôle que l'alcool joue dans des accidents causant la mort. Examinons des façons de déterminer avec certitude si l'alcool a joué un rôle dans un accident de la circulation qui a causé la mort ou des blessures.
Dans son exposé de principes, l'organisation Mothers Against Drunk Driving dit notamment que même si consommer de l'alcool est un choix personnel, conduire après avoir consommé de l'alcool ou d'autres drogues est de nature publique.
Je voudrais maintenant revenir brièvement sur l'impact de la perte d'un être cher, les répercussions sur les amis et la famille.
Il n'est pas nécessaire que la perte d'un être cher soit causée par l'état d'ébriété d'un conducteur pour comprendre la douleur et les souffrances que doivent supporter les gens. J'ai perdu un neveu âgé de huit ans à la suite d'un grave accident de la circulation. L'alcool n'était pas en cause, mais je me rappelle encore à quel point cet accident a été douloureux. Ce jeune garçon savait que je pratiquais le karaté et il m'a demandé de briser une planche pour lui un jour. Il est venu me voir avec toutes ces grosses planches, des deux par quatre, et il voulait que je les brise. À l'époque, je lui ai dit que je le ferais peut-être un peu plus tard. Ce moment n'est jamais venu, car il a perdu la vie à la suite d'un grave accident de la circulation. Ajoutez à cela, la douleur et les souffrances qu'on ressent lorsque cet accident est causé inutilement par quelqu'un qui a choisi de conduire avec des facultés affaiblies.
Je tiens à dire, en réponse aux observations du député qui a présenté le projet de loi, que les néo-démocrates ne sont pas sérieux face à cette question, mais que nous le sommes. Nous la prenons au sérieux. Nous ne trouvons pas cela amusant. Nous savons à quel point il est important de régler cette question de façon adéquate. C'est pour cette raison que nous appuyons son projet de loi. Prenons des mesures maintenant pour remédier à cette situation.
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Orléans, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt le discours de mon collègue du Nouveau Parti démocratique.
Il y a un bout de phrase qui m'a particulièrement intéressé. Je ne veux pas lui ressasser de mauvais souvenirs, mais je crois que dans cette motion que nous appuyons comme parti, on parle beaucoup de statistiques, de personnes décédées. J'aimerais l'entendre—d'autant plus qu'il a souligné avoir perdu un neveu à l'âge de huit ans—sur les victimes, non pas les victimes immédiates, malheureusement, les victimes qui meurent à la suite d'accidents causés par des personnes en état d'ébriété, ce n'est pas plus acceptable, mais j'aimerais l'entendre sur les victimes éloignées.
Si cette motion est adoptée à la Chambre et renvoyée à un comité parlementaire, j'aimerais que l'on entende les victimes éloignées, donc les familles qui survivent à ces accidents avec des traumatismes psychologiques importants, et les survivants de ces accidents qui survivent avec des traumatismes physiques. J'aimerais donc entendre le député, à savoir s'il considère important que le comité parlementaire se penche sur les victimes plus éloignées des accidents causés par les conducteurs en état d'ébriété.
M. Gordon Earle: Monsieur le Président, je regrette de ne pouvoir parler français assez bien pour répondre à mon collègue en français. Je vais parler en anglais, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
[Traduction]
J'apprécie qu'on me pose cette question, parce que le sujet est très important. Nous devons nous rappeler que les victimes sont non seulement celles qui ont subi les pertes, mais aussi les personnes de l'autre camp, les familles et les amis de ceux qui ont causé l'accident. Ces personnes souffrent elles aussi. Elles sont profondément troublées du fait qu'un ami ou un être cher ait fait autant de tort autour de lui.
Le mieux qu'on puisse faire dans un tel cas est de s'unir et de se soutenir les uns les autres, en tant qu'êtres humains, en reconnaissant qu'il est trop tard pour changer les choses, qu'il ne sert à rien de penser à ce qu'on aurait pu faire ou ne pas faire. Nous devons dépasser ce stade et trouver, dans l'appui que nous offre notre entourage, la force qu'il nous faut pour tenter de régler le problème tel qu'il se présente. Il faudrait prendre toutes les mesures possibles pour réduire ce carnage en s'attaquant à la situation qui est à l'origine de ces tragédies.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je veux faire une observation que le député de Halifax-Ouest voudra peut-être commenter, ou peut-être pas, parce qu'elle porte sur un aspect qu'il n'a pas abordé dans son discours. J'ai réfléchi à la question. Moi et ma famille avons aussi été touchés par une tragédie de ce genre.
L'une des choses dont il faut tenir compte et que je n'ai pas entendu souvent commenter dans des débats comme celui-ci, c'est qu'il faut aller plus loin que toutes les considérations du débat d'aujourd'hui. Tous ces aspects sont importants, mais il faut aussi se demander s'il n'y aurait pas moyen de réorganiser notre monde de manière à ce que les gens ne dépendent pas autant de l'automobile. Les villes et le mode de vie de leurs habitants sont entièrement conçus pour que les les gens succombent à la tentation. Les gens sont ensuite punis pour avoir cédé à cette tentation. Faisons tout pour dissuader les gens d'adopter certains comportements.
Il faut aussi penser que toute la société est centrée sur l'automobile et que cela représente un danger accru. C'est l'un des éléments qu'une stratégie globale à long terme devrait prendre en considération. Si, à long terme, nous pouvions réorganiser nos villes et peut-être même nos lois pour tenir compte de la grandeur des bébits de boissons, de leur emplacement et d'autres facteurs du genre, nous pourrions ainsi espérer réduire le nombre de personnes qui risquent de se trouver sur les autoroutes dans un état inacceptable.
M. Gordon Earle: Monsieur le Président, je remercie mon collègue d'avoir soulevé cette très importante question. Je pense qu'il est vrai que nous avons non seulement organisé notre vie en fonction de l'automobile, mais aussi fait de l'automobile un tel symbole que nous essayons de créer des voitures qui sont de plus en plus puissantes, qui vont de plus en plus vite et qui sont très attrayantes pour les jeunes. Il y a eu, dans la région de Halifax-Dartmouth, un très grave accident qui a causé la mort de deux jeunes. C'était une grosse voiture sport et le jeune chauffeur en a perdu le contrôle tant elle était puissante. Cette tragédie a touché beaucoup de gens.
Je pense que nous devons recentrer nos vies, comme l'a dit mon collègue, de façon à réduire le nombre de tragédies de ce genre et mettre davantage l'accent sur les vraies valeurs nécessaires pour vivre ensemble et travailler ensemble dans l'harmonie.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, c'est avec chagrin que je prends la parole aujourd'hui devant la Chambre pour débattre de cette motion. Comme l'on déjà dit un grand nombre d'intervenants avant moi, rares sont les Canadiens qui n'ont pas été touchés directement ou indirectement par la question de la conduite en état d'ébriété. Nous devons prendre très au sérieux le fait que, en tant que parlementaires, nous sommes appelés à légiférer et que nous avons donc l'occasion de prendre, dans cette Chambre, des mesures préventives pour enrayer ou régler les problèmes qui se posent à notre société.
On a donné beaucoup de chiffres sur les conséquences financières et économiques de ce fléau, mais sa portée émotionnelle est une chose difficile à quantifier. Les résultats d'une enquête menée par l'organisation Mothers Against Drunk Driving nous ont appris qu'entre quatre et cinq personnes mourront aujourd'hui quelque part au Canada dans des accidents causés par l'alcool, et que plus de 300 personnes seront blessées; ce scénario se reproduira demain, après-demain et ainsi de suite. Ce sont des statistiques troublantes qui m'ont frappé, comme elles ont frappé tous les Canadiens j'en suis sûr, lorsqu'elles nous ont été présentées avec tant d'intensité lors de la conférence de presse de Mothers Against Drunk Drivers.
Une autre statistique qui concrétise le phénomène, c'est que plus de 1 700 Canadiens ont été tués l'année dernière et, encore une fois, 1,1 million ont été blessés de 1983 à 1991. En 1995, les conducteurs avec facultés affaiblies ont causé plus de la moitié des 3 300 décès. En fait, il est clair que l'alcool augmente considérablement le risque d'accident chaque fois que quelqu'un prend le volant d'un véhicule automobile, peu importe le degré d'ébriété. Il augmente certainement la gravité des accidents sur l'autoroute causés par des conducteurs avec facultés affaiblies.
Les Canadiens sont témoins d'un trop grand nombre de tragédies quotidiennement. Or, dans ce cas-ci, les tragédies sont en grande partie évitables et on peut au moins en réduire le nombre. Malheureusement, il serait naïf de ma part, et pour tout autre député, de laisser entendre que nous parviendrons à régler entièrement ce problème. Cependant, il appartient sûrement aux députés, aux autorités chargées de l'application des lois et à tous les Canadiens de faire tout leur possible pour lutter contre ce très grave problème.
Lors de la conférence de presse dont j'ai parlé plus tôt, l'association Mothers Against Drunk Drivers a indiqué que, d'après les résultats de son enquête, 80 p. 100 des Canadiens sont en faveur d'un Code criminel plus sévère sur ce point. Je répète que c'est certainement une question qui échappe à tout commentaire partial. Les propos entendus aujourd'hui à la Chambre montrent que nous voulons unanimement nous attaquer à ce problème et le plus tôt possible. J'espère que le gouvernement est sincère lorsqu'il affirme appuyer cette idée. Nous le verrons très bientôt lorsque la motion sera mise aux voix.
Je tiens à préciser que le Parti progressiste conservateur du Canada a déjà manifesté son appui à l'égard de la motion. J'ai écouté attentivement les commentaires de mes collègues de l'opposition et du gouvernement. Il me semble exister un front uni.
Je veux revenir brièvement sur les résultats de l'enquête car ils indiquent que 94 p. 100 des Canadiens croient que la conduite avec facultés affaiblies représente un problème auquel le gouvernement devrait s'attaquer et que trois Canadiens sur quatre sont d'avis que les gouvernements fédéral et provinciaux ne prennent pas suffisamment de mesures en ce sens pour le moment.
En exprimant ce sentiment, les Canadiens ont manifestement dit avoir très peu de tolérance à l'égard de ceux qui décident de prendre le volant en état d'ébriété. Étant donné qu'une grande majorité de Canadiens sont de cet avis, avec raison, j'estime que le gouvernement doit appuyer certaines propositions présentées par Mothers Against Drunk Drivers. Puisqu'une vaste majorité de Canadiens se sont dits favorables à la réduction du taux d'alcoolémie acceptable en vertu du Code criminel, le gouvernement devrait certes prendre des mesures en ce sens.
Quatre-vingt-quatre pour cent des Canadiens appuient également des modifications au Code criminel qui comprendraient une peine minimale d'emprisonnement si une personne est condamnée pour une infraction de conduite en état d'ébriété ayant causé la mort. J'irais plus loin et j'ajouterais à cela une infraction ayant causé des blessures.
Il est bien évident que trop de Canadiens perdent la vie ou sont gravement blessés parce que les lois canadiennes actuelles n'ont pas assez de mordant et ne vont pas assez loin pour agir comme moyen de dissuasion. Cependant, il y a plus.
On peut faire davantage, comme l'ont montré Mothers Against Drunk Drivers et d'autres groupes dans tout le pays, qui, sans disposer des ressources suffisantes, sont allés de l'avant pour tenter de sensibiliser la population. J'estime que la génération qui nous suit aura la possibilité de veiller à ce que ces statistiques très effrayantes et très bouleversantes soient réduites. Les attitudes changent, ce qui devrait encourager tous les députés présents et tous les groupes d'intérêt.
Les conséquences de la conduite en état d'ébriété nous touchent tous d'une manière très importante et très réelle. Le moment est venu de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour régler le problème.
La ministre de la Justice a dit qu'elle attend le dépôt d'un rapport du ministère des Transports, de même qu'une rencontre avec ses homologues des provinces. Je répète que ni le ministère des Transports ni ses homologues des provinces n'ont le pouvoir de modifier le Code criminel.
Il y a 12 mois que Mothers Against Drunk Drivers a rencontré pour la première fois le ministère de la Justice. Entre-temps, rien n'a changé, si ce n'est que les statistiques ont augmenté et qu'un nombre plus élevé de gens ont perdu la vie ou ont été gravement blessés sur les routes canadiennes. Je tiens le gouvernement responsable de ces chiffres.
On a laissé entendre qu'une réforme du Code criminel et du système de justice aurait des répercussions immédiates. J'en conviens. Les propositions qui ont été faites en ce sens seront discutées plus longuement au sein du Comité de la justice.
Pour ce qui est de la motion à l'étude, en gardant à l'esprit mon commentaire selon lequel elle porte sur une question qui mérite d'être examinée dans un esprit objectif, j'espère que les réformistes et les autres députés de la Chambre souscriront à toute initiative visant à s'attaquer efficacement à ce problème, que ce soit au niveau des comités ou par le truchement d'une mesure législative proposée au Sénat par le gouvernement ou le parti de l'opposition, à savoir le Parti progressiste conservateur du Canada. J'ose espérer que le Parti réformiste, notamment, nous appuierait à cet égard.
Mon collègue du Nouveau Parti démocratique a mentionné que la loi canadienne en la matière est déphasée par rapport aux pays progressistes comme l'Australie, la Belgique, la France, le Portugal, la Finlande et bien d'autres. Voilà un argument qui mérite qu'on s'y arrête. Nous vivons dans une société devenue planétaire et il nous faut être attentifs à la façon dont les autres pays s'attaquent à ce problème. Ils ont décidé d'abaisser le taux de concentration d'alcool dans le sang à moins de 80 milligrammes par 100 millilitres de sang.
On a suggéré d'autres solutions dont une révision du Code quant aux motifs raisonnables et probables que les policiers doivent avoir pour procéder à une enquête sur les lieux d'un accident ayant entraîné la mort ou de graves lésions corporelles. Les policiers sont quotidiennement confrontés à ce genre de situation et ils sont chargés de l'importante tâche de veiller à ce que chacun réponde de ses actes. J'estime qu'une révision de l'interprétation à donner à l'expression «motifs raisonnables et probables» serait de nature à les rendre plus efficaces dans ce domaine.
En ce qui concerne l'attitude à l'égard de la conduite avec facultés affaiblies, il faudrait peut-être parler d'homicide commis au volant d'un véhicule automobile, comme le fait le Code criminel, de façon à mieux refléter la gravité de l'accusation. Si l'on établissait des normes en vue de la promulgation d'une déclaration des droits de la victime, on favoriserait certes la participation des victimes à l'étape du procès et on les aiderait à faire mieux comprendre ce qui arrive après l'accident, comment elles s'efforcent de tenir le coup et de continuer à vivre.
C'est pourquoi nous appuyons une norme fondamentale pour une déclaration des droits de la victime qui tiendrait compte non seulement des questions de conduite avec facultés affaiblies, mais de toutes les autres. Il est grand temps qu'on reconnaisse les besoins des victimes dans notre système judiciaire, et j'appuierais des initiatives en ce sens aussi.
Je sais que le temps mis à ma disposition est limité. Je me prononce officiellement en faveur de la motion. Les députés devraient mettre la politique partisane de côté et collaborer à la mise au point d'une nouvelle loi qui contribuera à sauver des vies. Nous devrions pouvoir y arriver en présentant cette question à divers niveaux. Nous le devons à la mémoire des personnes qui ont été tuées sur nos routes et à l'intérêt de la sécurité de tous les Canadiens, de telle sorte que lorsque le groupe Mothers Against Drunk Driving viendra sur la colline, l'année prochaine, le Parlement aura pris une initiative significative.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je remercie le député pour ses observations. Je trouve ses propositions très justes, surtout pour ce qui est de modifier la façon dont nous parlons de ce délit grave.
Le député cite des statistiques. J'ai les mêmes ici, dans ma pile de documents. Beaucoup de Canadiens veulent que le gouvernement fasse quelque chose à cet égard. Ce qui est triste, c'est que le nombre des victimes augmente sans cesse.
Nous avons le devoir de montrer la voie et de nous servir de l'arme qu'est la loi pour démontrer que ce n'est pas acceptable. C'est une arme qui est peut-être un peu difficile à comprendre pour des gens aussi gentils que les Canadiens. Tant que les familles ne parleront pas de la gravité de la conduite avec facultés affaiblies et n'encourageront pas leurs membres à ne pas conduire avec des facultés affaiblies, le problème ne concernera toujours que le gouvernement et d'autres personnes. Ce n'est que lorsque les Canadiens eux-mêmes entreront dans la lutte que nous commencerons à la gagner.
J'ai grandi à une époque où il était normal pour beaucoup de gens de conduire après avoir pris quelques verres. C'est ainsi que trois de mes camarades du secondaire sont devenus des alcooliques avant même de décrocher leur diplôme.
Je ne veux pas parler de tout le problème de l'alcoolisme, mais cela fait quand même partie du problème de la conduite en état d'ébriété. Si l'on accepte le premier, le second suit naturellement.
Je tiens à féliciter le député pour ses observations et à encourager les autres députés à considérer cette affaire comme intéressant tout le monde et pas seulement le législateur.
C'est probablement l'arme qui fera comprendre aux Canadiens que nous comptons prendre cela au sérieux, mais que nous espérons qu'ils commenceront à y faire attention dans leur propre vie.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je vais juste répondre brièvement et remercier le député de ses observations.
Parlant d'arme, je dirais que, véhicule ou mesure législative, la personne qui conduit le véhicule a des facultés affaiblies et cela affecte le résultat.
Je suis d'accord pour dire qu'il vient un moment où nous devons tous unir nos efforts et nous attaquer à ce grave problème. J'ajouterais que ce moment est venu. Il est ici depuis longtemps. J'encourage les députés à appuyer cette motion et à travailler ensemble au sein du comité et dans tout le pays pour voir si l'on peut réduire le nombre des accidents et obtenir des résultats dans un avenir rapproché.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, j'écoute depuis le début de la matinée des députés de tous les partis. Nous allons bientôt entendre un autre Réformiste, mais comme le disait le député conservateur, nous devons laisser la politique de côté.
Je demande qu'il y ait quelque chose dans le système d'enseignement pour aider les jeunes. Les jeunes d'aujourd'hui sont responsables. S'ils connaissaient les statistiques sur les aspects négatifs de la conduite en état d'ivresse, je suis sûre qu'ils travailleraient ensemble à changer les choses.
Dans la société d'aujourd'hui il faut être «cool». Pour les jeunes du niveau secondaire, le bistro c'est cool. Boire de la bière c'est cool. Personne ne semble plus demander: «Quel âge avez-vous? Avez-vous 18 ans?» J'ai vu des jeunes de niveau secondaire à Saint John se promener avec leur caisse de bière.
Il faut accroître les amendes pour la vente d'alcool aux mineurs, mais il faut aussi éduquer les jeunes. Je dis à notre leader parlementaire et à tous ceux qui sont ici, faisons quelque chose pour eux aussi et aidons-les.
Ils ne veulent pas faire de mal aux autres, comme ce qui arrivé à mes parents et à d'autres également. Ils ne veulent pas faire cela, donc aidons-les.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens sur la motion. Bien sûr, la question que nous débattons se situe au-delà de considérations politiques. Nous devons tous veiller à ce que la situation soit corrigée.
Nous répétons depuis des générations qu'il faut enfin faire quelque chose. Nous devons voir à ce que l'on corrige cette situation. Je ne suis pas ici pour critiquer le gouvernement et l'accuser de se croiser les bras depuis des années, parce que des modifications ont été apportées. Il reste toutefois beaucoup à faire pour redresser la situation.
Mon collègue de Cariboo—Chilcotin a déclaré plus tôt qu'on semblait accepter la combinaison alcool-volant à l'heure actuelle, et je dis avec regret qu'il a probablement raison.
En fait, à mon réveil hier matin, j'ai entendu au bulletin de nouvelles d'une station de radio d'Ottawa la blague que voici. À l'heure de la fermeture, un homme sort du bar en titubant et cherche sa voiture en essayant d'ouvrir la portière d'une demi-douzaine de véhicules. Évidemment, à bord de son véhicule, un policier suit la scène. Le parc de stationnement se vide.
Le policier se dirige alors vers l'homme qui essaie toujours de monter dans sa voiture et lui dit: «Je vous demande de subir un test, parce que vous m'inquiétez beaucoup.» L'homme lui répond en riant: «Mais non, je suis sobre. J'agissais comme cela, parce que c'était à mon tour d'attirer l'attention ce soir pour que les autres clients du bar puissent rentrer chez eux.»
Ce n'est pas drôle. Cette blague est typique de celles que l'on entend à la radio depuis 48 heures. Il faut apparemment rire en pensant que tous les clients du bar avaient le droit de conduire avec des facultés affaiblies pour rentrer chez eux.
C'est absolument inacceptable. Tant que la situation ne changera pas au Canada et tant que les gens continueront de rire de blagues de ce genre, nous n'aurons rien fait. Nous pouvons certainement donner l'exemple au Parlement, mais ce genre de blagues nous porte à nous demander «À quoi bon?». Même si nous sommes découragés, nous devons poursuivre nos efforts.
Nous demandons que des modifications soient apportées au Code criminel, afin d'intensifier la prévention et de faire en sorte que les peines soient à la mesure du sérieux de l'infraction. Nous convenons tous à la Chambre que l'infraction est très grave. Il faut nous attaquer au problème et pas nous contenter de compiler des tas de statistiques et dire que tout va bien. Franchement, nous devrions tous avoir honte. La situation s'améliore peut-être, mais elle est loin d'être aussi bonne qu'elle devrait l'être ou encore qu'elle devrait le devenir sous peu.
Il faut comprendre que nous devons assumer les conséquences des gestes que nous posons. C'est ce que nous enseignons à nos enfants lorsqu'ils sont jeunes. Nous leur enseignons à l'école que si l'on fait quelque chose, il faut en subir les conséquences. Il me semble que, bien des fois, ceux qui conduisent en état d'ébriété n'ont pas à vivre avec les conséquences de leur comportement.
Il faut comprendre que nous sommes personnellement responsables du comportement que nous adoptons et des gestes que nous posons. Il s'agit d'un principe de base que nous appuyons tous. Je le répète, c'est ce que nous enseignons. Toutefois, les personnes accusées de conduite avec facultés affaiblies jouent au plus fin et réussissent souvent à se faire disculper ou encore demandent à un avocat réputé de faire en sorte que les chefs d'accusation soient retirés. Ces gens croient-ils ainsi contourner le système? Je n'en suis pas convaincue. Tout cela m'attriste énormément.
Bien des fois, les conducteurs en état d'ébriété n'ont pas eu à faire face à la réalité, à subir les conséquences de leur geste. Si je fais quelque chose, je dois être prêt à en payer le prix. Trop de fois, ce principe n'est tout simplement pas appliqué.
Les organisations Mothers Against Drunk Driving et People Against Impaired Driving et d'autres excellentes coalitions de personnes contre la conduite en état d'ivresse font un travail exceptionnel. Quel est le critère d'admission à des groupes de ce genre? C'est triste à dire, mais pour être membre, il faut d'abord être victime. Quelle façon d'adhérer à un groupe. Quelle tragédie. La douleur de ces gens est encore très vive. Ils ont perdu un être cher dans un accident provoqué par un conducteur en état d'ébriété. Quelle horrible façon d'obtenir le droit de faire partie d'un groupe. C'est tragique.
Nous ne pouvons pas commettre de meurtres. Le Code criminel nous l'interdit. Alors, pourquoi les gens qui conduisent avec des facultés affaiblies réussissent-ils à s'en tirer ou à obtenir une condamnation avec sursis? On dirait qu'ils ont franchi un seuil qui rend la chose acceptable. On ne peut pas tuer, mais il y a des cas où on peut le faire au volant d'une voiture avec des conséquences pas tout à fait aussi pénibles.
Je parle d'expérience. Des groupes comme les Mothers Against Drunk Driving et les People Against Impaired Drivers sont très importants. Il y a bien longtemps, quand j'étais petite, je vivais dans un foyer qui était affligé par l'alcoolisme. J'aurais pu lancer un groupe quand j'avais six, sept ou huit ans appelé KADD, pour Kids Against Drunk Drivers. C'était avant que beaucoup de ces groupes voient le jour.
Je sais à quel point il est pénible de vivre dans un contexte d'alcoolisme. On est terrifié quand, au lit le soir, on entend sonner le téléphone. On ne sait jamais quelle information apportera cet appel.
Mon père est sobre depuis plus de 20 ans. Je m'en réjouis. Il est merveilleux de voir quelqu'un se sortir des griffes de l'alcoolisme. Je sympathise de tout coeur avec les gens qui souffrent à cause de leurs êtres chers. Je suis reconnaissante pour tous les jours où mon père est sobre. Il conduit à jeun, et j'en suis très heureuse.
Je me rappelle m'être promenée en voiture quand j'étais une enfant avec un conducteur en état d'ébriété. J'ai essayé d'échapper à cette ballade, mais que peut-on dire quand on a six ou sept ans? On monte dans la voiture, car c'est ce que les enfants sont supposés faire. Ils sont sensés accompagner leurs parents et faire ce qu'on leur dit de faire.
Je n'oublierai jamais ce virage à gauche malgré les voitures qui arrivaient en face; j'ai crié: «C'était trop risqué. Ne fais pas ça, s'il te plaît.» Il a fait demi-tour en disant: «Et ça, c'était assez risqué pour toi? Faisons-le encore», puis nous retournions à la même intersection.
C'était de la folie. Même si mon père ne savait pas très bien ce qu'il faisait à ce moment-là, à cause de l'état dans lequel il était, il avait un comportement criminel. Nous devons le reconnaître comme tel. Les gens dans cet état doivent en subir les conséquences.
J'ai évoqué tout à l'heure les appels téléphoniques tard le soir. Celui dont je me rappelle le plus clairement est survenu au milieu de la nuit. Le policier a dit à ma mère: «Votre mari a pris un coup. Il roulait sur le pont de la rue Burrard et a frappé une jeune femme à bicyclette.» Je ne me souviens plus exactement de l'âge que j'avais, mais nous avons reçu cet appel quand j'étais en première ou en deuxième année. Dieu merci, la bicyclette de la victime est restée coincée dans le garde-fou du pont et n'a pas basculé dans le ruisseau False. La victime a eu la vie sauve, et je m'en réjouis.
Mais combien de gens n'ont pas cette chance? Ce genre de téléphone au milieu de la nuit change la vie de quelqu'un pour toujours. Comme de raison, ce sont les victimes qui inspirent le plus de sympathie, mais qu'en est-il des enfants des personnes coupables de conduite en état d'ébriété? Cela a changé ma vie à jamais.
J'ai 45 ans. Je n'ai jamais consommé d'alcool parce que, dans mon esprit d'enfant de six ou sept ans, j'ai compris que cela comportait un risque trop épouvantable. Je ne veux pas tenir des propos extrémistes. Je sais qu'il est possible de boire de manière responsable, mais je tiens à parler aujourd'hui non seulement des coûts économiques occasionnés par la conduite avec facultés affaiblies, mais aussi des coûts réels sur le plan humain, des coûts sur le plan émotif dont il a été question tout à l'heure, des souffrances incroyables et des cicatrices que cela laisse à jamais chez quelqu'un parce qu'il est tout simplement impossible de tourner la page.
Le fait d'abaisser le taux d'alcool autorisé dans le sang de 0,08 à 0,05 aidera-t-il? Cela aidera certainement, mais il vaut nettement mieux miser sur la dissuasion et insister sur le fait qu'il est peut-être préférable de décider de ne pas conduire parce qu'on a trop consommé d'alcool. Pourquoi même s'exposer à subir un test d'ivressomètre? N'est-il pas nettement préférable de faire une différence dans la vie des gens en les incitant à ne pas agir ainsi?
Nous encourageons toujours les jeunes à penser à l'avenir. Nous devons les encourager à le faire dans ce domaine plus que dans n'importe quel autre.
Je crois à la tolérance zéro. Vous pouvez, je pense, me traiter d'intolérante, mais je tiens à vous dire que la façon la meilleure et la plus efficace de résoudre la problème de la conduite avec facultés affaiblies, c'est d'appliquer le principe de la tolérance zéro. Si quelqu'un souffle dans l'ivressomètre, qu'il a consommé trop d'alcool, que des accusations sont portées contre lui et qu'il est trouvé coupable, on ne fera pas preuve de tolérance à son endroit.
Il est essentiel que les gouvernements disent qu'ils croient au principe de la tolérance zéro et qu'ils ne laisseront pas les coupables se moquer du système, qu'ils ne les laisseront pas s'en tirer pour qu'ils aillent ensuite s'en vanter à leurs copains, au bar, ou pour qu'ils plaisantent à ce sujet, à la radio, le lendemain matin.
Que dire des victimes? Que dire des mères, des filles, des soeurs, des frères et de tous ceux dont la vie est bouleversée? Il y a tellement de gens dont la vie se trouve chamboulée par ce genre de tragédie.
Vous dites que, si les gens se font prendre une fois, peut-être qu'ils auront assez peur pour ne plus commettre ce genre d'erreur. Je regrette de dire que les statistiques contredisent cet argument. Ce discours ne se veut pas une litanie de statistiques, mais permettez-moi de vous en donner une. En Ontario—et je doute fort qu'il y ait une différence marquée avec n'importe quelle autre province du pays; l'Ontario est plus grande, mais je suis certaine que les pourcentages sont néanmoins les mêmes—65 p. 100 de toutes les suspensions de permis de conduire sont imposées à des conducteurs dont le permis a déjà été suspendu au moins une fois.
Qu'est-ce que cela vous dit au sujet des moyens de dissuasion en vigueur actuellement? Que se passe-t-il maintenant dans notre pays? Ces moyens de dissuasion ne veulent absolument rien dire. Si je sais que j'ai pu m'en sortir une fois, j'ai une chance de m'en sortir une deuxième fois. Nous devons nous assurer que les gens ont tellement peur qu'ils resteront sur la bonne voie.
J'ai visité le pénitencier à sécurité maximale d'Edmonton au printemps il y a deux ans en tant que députée, et je n'oublierai jamais le son de la porte qui s'est renfermée derrière moi. Si j'avais eu des tendances criminelles, le seul son de cette porte qui se refermait derrière moi aurait suffi à me mettre sur la bonne voie. Si j'étais un adolescent ou n'importe quel petit malfaiteur, j'aurais eu assez peur pour revenir sur le droit chemin. Je n'aurais pas voulu être là sans ce gentil monsieur à côté de moi qui avait la clé pour me laisser ressortir.
Ce serait peut-être une bonne chose de faire peur comme cela aux jeunes, parce qu'ils tombent dans la catégorie des personnes les plus touchées par ce problème, et aussi à ceux qui sont plus vieux et qui disent: «Il ne m'est rien arrivé en 27 ans, je ne vois pas pourquoi je me ferais prendre maintenant.» Assurons-nous que les moyens de dissuasion sont assez forts pour que nous ne voyions pas les gens commettre cette même infraction encore et encore. Assurons-nous de ne pas simplement parler de tolérance zéro, mais d'agir en conséquence afin que les gens aient vraiment assez peur pour rester sur la bonne voie. Je crois vraiment que c'est ce qu'il faut faire.
Lorsque les gens se rendront compte de la terreur que ressentent les victimes, lorsque qu'ils se rendront compte de la terreur que ressent l'enfant qui est à la maison et qui se demande quand le téléphone sonnera et qui sera à l'autre bout du fil, c'est cette peur qui convaincra tous les Canadiens de rester sur la bonne voie. Nous devons faire quelque chose pour régler ce problème.
J'implore le gouvernement et tous les députés de l'opposition de ne pas simplement parler de cette question ou la renvoyer à un comité quelconque en disant: «Voyez ce que nous avons fait aujourd'hui.» Passons aux actes.
Je suis encouragée par ce que je crois entendre des deux côtés de la Chambre aujourd'hui. Nous serons peut-être les députés qui auront vraiment fait quelque chose pour sauver des vies.
On ne peut pas laisser les gens penser qu'ils peuvent prendre un ou deux verres de plus et essayer de rentrer à la maison sans se faire prendre par la police. Faisons-leur assez peur pour qu'ils ne conduisent plus avec facultés affaiblies. C'est notre responsabilité. C'est une obligation dont nous devons nous acquitter.
M. Rey D. Pagtakhan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, d'entrée de jeu, je voudrais féliciter la députée pour son discours. Je tiens également à préciser que je souscris à l'objet et à l'essence de la motion. Quand la vie humaine est en jeu, nous devons faire tout ce que nous pouvons.
Je voudrais ajouter mon grain de sel. Quand un problème comme celui-là surgit dans la société, nous devons reconnaître en tout temps qu'il est complexe. À défaut de quoi, nous pourrions adopter une mauvaise approche.
Tout à l'heure, le député de Prince George—Bulkley Valley a dit que le problème n'est toujours pas réglé même si nous avons apporté des changements dans le passé. Je suis d'accord avec lui, mais dire qu'il suffit de modifier le Code criminel, c'est adopter une approche qui comporte de graves lacunes. On pourrait ne pas voir une autre approche qui pourrait être tout aussi efficace, voire davantage.
La députée a brossé un tableau tragique des victimes. Nous compatissons tous à leur tragédie, à la perte qu'elles ont subie.
Je voudrais soulever une question, en toute sincérité. Ne conviendrait-il pas d'intensifier les efforts de sensibilisation. En dépeignant la peine des victimes et ces tragédies, on réussira à convaincre ceux qui seraient tentés de conduire avec les facultés affaiblies à ne pas le faire, car ils seraient conscients de la tragédie que représente la perte de vies humaines. Ce serait peut-être plus efficace que de seulement modifier le Code criminel.
Je soulève cette question pour faire ressortir qu'il ne faudrait pas rejeter une approche intégrée. Je me réjouis que la ministre de la Justice et le gouvernement nous aient donné l'assurance que la ministre a déjà soulevé cette question auprès de ses homologues provinciaux. J'invite le Parti réformiste à appuyer cette initiative du gouvernement, tout comme j'appuie l'objet de cette motion.
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, je voudrais simplement dire merci. Je suis heureuse que le gouvernement s'engage à faire vraiment quelque chose.
Je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit dans mes observations, ni dans celles de quelque autre député d'un côté ou de l'autre, qui laisse entendre que le problème est simple. L'alcoolisme est un problème complexe, nous le savons. Il n'y a rien de simple là-dedans. Mais je crois qu'il n'y a rien de simple non plus dans les effets de la conduite avec facultés affaiblies. Personne n'a prétendu ce matin que c'était simple.
Ce n'est certainement pas simple, mais on ne peut pas écarter le problème sous prétexte qu'il est complexe, qu'il faut travailler sur une foule de choses—ce qui est en partie vrai, car le problème est effectivement très complexe. On ne peut pas prétendre que nous ne devrions pas modifier le Code criminel comme nous le demandons aujourd'hui, ce qui serait toute une première étape.
Lorsque le député parle de sensibilisation de l'opinion, je suis d'accord. Comme enseignante au secondaire, j'ai vu des vidéos horribles. Ils sont efficaces, mais seulement jusqu'à un certain point. Cela tombe dans la catégorie des mesures que nous avons déjà comme moyens de dissuasion.
Le programme de sensibilisation qui dure depuis des années, les vidéos qu'on fait voir aux jeunes, les suspensions de permis, les programmes de réadaptation, ce sont autant de mesures qui existent déjà. C'est du déjà vu. Il n'est pas question de prétendre que le problème est simple. Il y a toutes sortes de mesures de dissuasion, et ce n'en est qu'une.
Nous ne nous voulons pas seulement faire modifier le Code criminel. Cela fait partie de tout un train de mesures à envisager. Si le comité a l'occasion d'étudier la question, d'excellentes modifications seront apportées.
Je reconnais sans hésiter qu'il s'agit d'un problème complexe. Le système d'éducation public n'est qu'un des moyens à notre disposition pour faire de la dissuasion.
Une nuit en prison serait un excellent dissuasif, s'il y a un problème et si des accusations sont portées. Ayant visité une prison à titre de députée et ayant travaillé avec des jeunes pendant des années, je peux dire que si j'avais 16 ans, 18 ans ou 24 ans, une nuit en prison aurait un effet dégrisant dans tous les sens du terme. Cela porterait à réfléchir.
Il ne suffit pas d'intégrer certaines mesures dissuasives au Code criminel car, c'est triste à dire, mais beaucoup d'avocats particulièrement malins savent contourner le Code criminel. Il faut aller plus loin que le Code criminel pour dissuader les gens qui ont bu de prendre le volant. C'est la raison d'être des moyens dissuasifs. Il est question de dissuasion dans notre motion pour que les gens évitent, dès le départ, de se mettre dans une situation fâcheuse.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je félicite respectueusement la députée qui a relaté avec passion une expérience personnelle se rattachant au sujet du débat d'aujourd'hui.
Elle parle, je suppose, de moyens dissuasifs généraux et de moyens précis. J'aimerais entendre ses commentaires sur l'idée des mesures de remplacement dans le cas des personnes reconnues coupables par un tribunal.
Que pense-t-elle, par exemple, de l'idée que les juges puissent imposer l'inscription à un programme de traitement à la place d'une peine d'emprisonnement? Nous savons qu'il y a des alcooliques qui n'arrivent pas à se défaire de leur mauvaise habitude. Malheureusement, il y a également des gens qui refusent de suivre des cures de désintoxication. La députée accepterait-elle l'idée qu'un juge puisse obliger un coupable à suivre une cure de désintoxication en remplacement d'une peine d'emprisonnement? Par ailleurs, les réformistes appuieraient-ils une mesure allant dans le même sens si elle provenait du Sénat du Canada?
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, avant de passer à la question elle même, je voudrais parler d'une tendance inquiétante que j'ai constatée. Les députés conservateurs parlent continuellement de projets de loi émanant du Sénat. Nous avons abordé cette question avec le gouvernement et je me demande si nous n'assistons pas à l'apparition d'une tendance, étant donné le nombre élevé de conservateurs qui siègent au Sénat.
Je suis disposée à appuyer quiconque proposera une solution au problème. Puisque les députés sont élus et ont le mandat et l'autorité de siéger à la Chambre des communes, il est légitime que la Chambre soit saisie des projets de loi. Si les sénateurs veulent souscrire à ce point de vue ou s'ils croient devoir présenter une projet de loi quelconque, soit. Ne politisons pas le Sénat plus qu'il ne l'est déjà.
En ce qui concerne la détermination de la peine, les mesures dissuasives et les peines alternatives, ces choses existent déjà dans le système judiciaire et elles ne semblent pas être efficaces. À quoi bon obliger quelqu'un à consacrer trois heures à visionner des vidéos ou autre chose du genre. L'important est de dissuader les gens avant qu'il ne parviennent à ce point. On peut examiner toutes sortes de peines alternatives, mais il ne faut pas laisser les gens aller jusque là. Le députés sait bien ce qui peut arriver lorsqu'on commence à jouer avec le système judiciaire.
Il affirme que ces mesures existent déjà. Or, elles sont inefficaces et il faut aller plus loin. En fait, il faut prendre les délinquants lorsqu'ils sont jeunes et leur faire peur avant même qu'ils n'agissent. Cela me semble bien plus efficace. Je suis convaincue que tout le monde conviendra qu'il est préférable de les prendre lorsqu'ils sont jeunes.
M. Hec Clouthier (Renfrew—Nippissing—Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, je félicite également la députée d'Edmonton-Nord pour la volubilité dont elle a fait preuve dans son discours. Il est regrettable qu'elle ait subi le traumatisme dont elle a parlé, lorsqu'elle était jeune. Je sais de quoi elle parle. J'éprouve une grande empathie à son endroit.
J'aimerais que la députée d'Edmonton-Nord élucide la question de la tolérance zéro. Je sais qu'il est très difficile d'en parler, surtout quand les avocats s'en mêlent ou si on a suffisamment d'argent pour gagner sa cause. Je demanderais néanmoins à ma collègue d'expliciter la question de la tolérance zéro.
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, ce n'est pas une question purement technique ou juridique; ce Parlement, puisqu'il est responsable du Code criminel, doit faire savoir très clairement que toute personne dépassant le seuil de l'ivressomètre, soit 0,08 à l'heure actuelle, devra assumer les conséquences. Il ne convient pas, et on ne devrait pas conseiller, que quelqu'un essaie d'échapper aux conséquences en utilisant les tribunaux de cette façon. On peut parler de droits de la personne et de choses semblables, mais il me semble évident que celui qui enfreint la loi enfreint la loi un point c'est tout.
On peut difficilement être plus près de la tolérance zéro. Si vous dépassez la limite—le député a proposé de la fixer à 0,04 et je pourrais fort bien accepter cela—mais quelle qu'elle soit, au delà de la limite, vous enfreignez la loi. Et si vous enfreignez la loi, vous devez assumer les conséquences. On ne devrait tolérer aucun dépassement de la limite fixée.
L'hon. Andy Mitchell (secrétaire d'État (Parcs), Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir l'occasion d'intervenir dans le débat d'aujourd'hui, qui porte sur un sujet crucial pour nous tous en cette Chambre et pour tous les Canadiens d'un océan à l'autre.
J'aimerais féliciter le député d'en face qui a proposé cette motion. Si le simple fait de discuter de la question aujourd'hui, devant plusieurs milliers de Canadiens je l'espère, incite ne fut-ce qu'un conducteur à réfléchir avant de prendre le volant de sa voiture ce soir, le débat en aurait valu la peine. Bien entendu, toute la question est importante.
Je suis le père d'un jeune de 16 ans qui apprend à conduire. Je sais qu'il est de mon devoir d'essayer de lui faire prendre conscience de la réalité et de sa vulnérabilité, de lui faire saisir l'horreur que trop d'entre nous avons ressentie quand des amis ont été tués ou blessés dans de bêtes accidents de la circulation. Il nous incombe d'essayer de faire comprendre aux jeunes Canadiens que c'est là toute une responsabilité. Tel est le défi qui se pose à tout père dans cette situation, et je sais que c'est le cas de bien des parents: essayer de faire comprendre l'importance de cet acte.
L'alcool au volant, l'abus d'alcool, voilà une tragédie à laquelle sont trop souvent confrontées les familles canadiennes. Je suis tout à fait d'accord avec le principe que sous-tend cette motion, à savoir qu'en tant que Parlement, en tant que société, en tant que citoyens, il nous faut nous attaquer à ce problème et faire des progrès dans ce domaine.
Certains l'ont déjà mentionné au cours du débat tandis que d'autres n'ont pas insisté là-dessus, mais il s'agit là d'un problème complexe. Il comporte de multiples aspects. Nous devons comprendre ce qui amène des gens généralement responsables à faire preuve parfois d'une totale irresponsabilité en ce qui concerne leur consommation d'alcool et les activités auxquelles ils s'adonnent après avoir trop bu, comme prendre le volant.
C'est en effet un problème complexe. Or, à problème complexe, solutions complexes. Parmi ces solutions figurent bien évidemment certaines de celles dont fait état cette motion, comme les modifications à apporter au Code criminel, et puis il y a aussi les peines à infliger, toutes choses très importantes. Certes, la dissuasion est une arme importante, mais le problème, la situation et, par-dessus tout, les solutions ne s'arrêtent pas là, même s'il s'agit d'un aspect important.
Comme je l'ai mentionné dans le préambule en évoquant ma situation personnelle, il nous faut insister sur l'éducation. Nous devons mettre l'accent sur l'éducation. Nous devons faire en sorte que les gens comprennent—et je songe particulièrement aux jeunes qui débutent dans la vie et qui se trouvent confrontés à de nouvelles pressions et à de nouvelles situations—les enjeux et les responsabilités qui leur incombent.
La question de l'application de la loi est importante. Avoir des lois ne sert à rien si l'on n'a pas les moyens de les faire appliquer. Nous ne pouvons dans ce cas espérer une solution.
Il y a aussi l'attitude de la société. Il est absolument essentiel que nous continuions à changer l'attitude de la société en se fondant sur les progrès réalisés depuis une génération. Il n'est plus acceptable de prendre le volant après avoir bu une quantité excessive d'alcool. C'est tout simplement inacceptable. Les gens en société devraient condamner cette pratique.
Il y a peu de temps, alors que je me rendais à une réception, ma fille de neuf ans m'a demandé qui allait être le chauffeur désigné. C'est signe, à mon avis, que la société change et que notre système scolaire essaie de sensibiliser les élèves au problème de l'alcool au volant afin que les futures générations comprennent et fassent preuve de responsabilité. Il s'agit là d'un aspect essentiel des mesures que doit prendre la société pour régler ce problème très difficile.
Il est aussi absolument essentiel que lorsqu'ils s'attaquent à ce problème, les députés sachent qu'il y a dans la société tout une série d'individus et de groupes qui doivent lutter ensemble contre ce problème. De toute évidence, en tant que députés, nous avons un rôle très précis et devons travailler avec nos homologues provinciaux qui sont chargés de faire appliquer les règles et règlements régissant l'alcool au volant.
Comme je l'ai dit, nous devons travailler avec le système d'enseignement pour veiller à faire passer le message. Nous devons collaborer avec des organisations comme MADD et d'autres groupes qui ont fait beaucoup d'efforts pour sensibiliser la population et définir le problème. Nous devons collaborer, dans chacune de nos circonscriptions, avec des groupes spécifiques comme les clubs nautiques et les clubs de motoneige. La conduite en état d'ébriété cause des tragédies semblables à bord d'autres types de véhicules. C'est ensemble que nous devons chercher les solutions.
Les députés ont mentionné que nous, en tant que gouvernement et en tant que société, avons fait des progrès en ce sens. C'est dans les années 20 qu'il est devenu illégal de conduire avec facultés affaiblies. Depuis ce temps, plusieurs modifications ont été apportées au Code criminel pour renforcer les mesures de lutte contre ce comportement et pour augmenter les peines.
J'ai entendu l'autre jour la ministre de la Justice, en réponse à une question, affirmer très clairement à la Chambre qu'elle continuerait à travailler en ce sens. En tant que parlementaires, nous avons en effet un rôle à jouer en ce sens. Nous devons travailler avec le ministère de la Justice et les autres pour trouver des solutions plus efficaces.
Je dois dire que nous connaissons un problème semblable dans bien des coins de ma circonscription, Parry Sound—Muskoka, même s'il s'agit d'une région très particulière. L'été, 60 000 propriétaires de chalets viennent s'ajouter aux 80 000 résidents de la région. Les longues fins de semaine estivales, on peut compter jusqu'à 100 000 ou 150 000 visiteurs. L'idée de s'amuser de façon responsable prend donc toute son importance dans une circonscription comme Parry Sound—Muskoka.
J'ai parlé tout à l'heure de toute la question de la sécurité nautique. Il est surprenant parfois de constater que des gens arrivent dans ma région en étant passés par la 400 sans avoir jamais pensé un instant à consommer de l'alcool avant de prendre le volant. Cependant, ces gens n'hésitent pas une fois rendus sur place à prendre un verre avant de monter à bord de leur bateau et de le conduire. C'est pourquoi je dis que les attitudes sociétales et un changement de ces attitudes sont si importants. On doit juger aussi répréhensible de conduire un bateau à moteur qu'une automobile après avoir consommé de l'alcool. C'est là où l'éducation joue un rôle important. Je suis heureux de noter que dans ma circonscription, Parry Sound—Muskoka, on retrouve une vaste coalition de personnes et de groupes qui se penchent sur toute la question de la sécurité nautique. Il est évident que cette dernière repose dans une large mesure sur la nécessité de ne pas conduire un bateau après avoir consommé de l'alcool.
Il y a deux ans, à la Chambre, un vendredi matin, avec le consentement de tous les partis—le Parti réformiste et son porte-parole en matière de justice avec lequel j'avais eu l'occasion de travailler et le Bloc et son porte-parole dans le domaine—, nous avons adopté des modifications à la Loi sur les contraventions en un jour. Même s'il n'était pas directement question de conduire de bateau avec facultés affaiblies, on traitait de toute la question des règlements et d'une meilleure application de ces derniers sur nos cours d'eau pour assurer la sécurité nautique. Ce n'est là qu'un petit exemple des mesures que nous avons réussi à prendre à la Chambre et une chose qui a eu un effet direct sur Parry Sound—Muskoka et, bien entendu, d'autres circonscriptions où on retrouve de nombreux cours d'eau. J'ai été heureux de jouer un rôle à cet égard. C'était une question sur laquelle mon prédécesseur, Stan Darling, qui avait siégé à la Chambre pendant 21 ans, s'était déjà penché.
Toujours en ce qui concerne les activités récréatives dans une région comme la mienne, durant l'hiver, c'est le problème des motoneiges. Là encore, il s'agit d'un véhicule à moteur que les gens doivent conduire de façon sûre sans avoir bu, c'est évident. En Ontario, la Fédération ontarienne des clubs de motoneige collabore étroitement avec les propriétaires et les clubs de motoneige depuis quelques années pour sensibiliser leurs membres et pour préciser clairement que la conduite d'une motoneige avec facultés affaiblies est inacceptable pour la société. En fait, la fédération a mis en oeuvre un programme de sensibilisation dans le cadre duquel elle travaille avec les clubs et les propriétaires individuels pour veiller à ce que cela ne se produise pas.
Dans une région rurale comme la mienne je dois louer la PPO, la Police provinciale de l'Ontario, les détachements de ma circonscription et les agents de ces détachements qui travaillent diligemment sur la question de l'éducation et de l'application pour essayer de réduire le nombre des tragédies dont on entend trop souvent parler. Je félicite ces agents de leur travail, notamment dans les écoles et dans l'application des règlements. Je sais que le plus souvent ils sont les premiers sur la scène de ces tragédies et ils essaient de leur mieux de résoudre le problème.
Naturellement, dans mon rôle de secrétaire d'État pour les parcs, j'ai la tâche de m'assurer qu'il n'y a pas d'abus d'alcool dans les parcs nationaux. Nos gardiens surveillent de près, le plus souvent en collaboration avec les détachements de police locaux, pour s'assurer que l'alcool est consommé de façon responsable. Il y a des périodes dans l'année où nous jugeons nécessaire d'interdire la consommation d'alcool dans les parcs. En tant que secrétaire d'État pour les parcs, je suis résolu à poursuivre dans cette voie, c'est-à-dire à faire en sorte que nous prévenions l'utilisation abusive d'alcool.
C'est un sujet brûlant pour tout le monde ici. En résumé, je voudrais remercier une fois de plus le député d'en face d'avoir présenté cette motion, car je pense qu'il est important d'avoir ce débat.
Je voudrais laisser à la Chambre un sujet de réflexion. Bien que le contenu de la motion soit bon et décrive une partie de ce que nous devrions faire pour parvenir à une solution, il ne faut pas perdre de vue l'autre partie. Ne perdons pas de vue ce que font les plaisanciers en matière de prévention. N'oublions pas ce que fait la fédération des clubs de motoneigistes de l'Ontario. N'oublions pas ce que fait la Police provinciale de l'Ontario. Ne perdons pas de vue ce que nous devons faire au sein de Parcs Canada pour prévenir l'abus d'alcool. Assurons-nous de traiter de la totalité du problème. Cela ne veut pas dire qu'une partie est moins importante qu'une autre, mais nous devons traiter de la question dans son ensemble.
J'attache beaucoup d'importance à cela, et mes collègues aussi j'en suis sûr. J'espère que nous parviendrons à une solution et que nous ferons des progrès en ce domaine.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je remercie le secrétaire d'État qui a fait certaines observations et qui a inclus dans le débat les accidents impliquant les bateaux de plaisance et les motoneiges. Je comprends très bien la question. Je me promenais dans la baie Howe à bord d'un voilier de 35 pieds, lorsque le conducteur d'un puissant hors-bord a voulu s'amuser en essayant de déterminer jusqu'à quel point il pouvait s'approcher de notre embarcation avant d'être obligé de s'éloigner. Une manoeuvre de ce genre est très dangereuse. Je suis heureux que le secrétaire d'État ait étendu le débat à cette question.
Pendant son discours, le secrétaire d'État a affirmé que les Canadiens jugent inadmissible le fait de conduire avec des facultés affaiblies. Bien des Canadiens pensent ainsi, mais il en reste encore trop qui ne partagent pas cet avis.
Je ne veux pas vous inonder de statistiques, mais mon collègue d'Edmonton a fait observer que plus de 65 p. 100 des personnes accusées de conduite avec facultés affaiblies sont des récidivistes. Il me semble que trop peu de Canadiens comprennent à quel point il est grave de prendre le volant d'une automobile ou d'un bateau après avoir consommé de l'alcool.
Permettez-moi de mettre à l'épreuve le secrétaire d'État en lui posant la question suivante: Le fait de se mettre dans une position où l'on peut menacer, blesser ou tuer une autre personne est-il acceptable dans certaines circonstances? Cela précise un peu mieux les choses. S'il est d'avis, comme moi, que c'est inadmissible peu importe les circonstances, jusqu'où ira-t-il pour prévenir ces situations en insérant certaines dispositions dans la loi pour protéger les Canadiens?
Par exemple, serait-il juste de dire que ceux qui commettent un crime, un homicide, au volant d'un véhicule se le verront confisquer? Cela serait-il acceptable si le coupable a utilisé son véhicule pour commette un crime?
Serait-il raisonnable de dire aux personnes accusées de conduite avec facultés affaiblies qu'elles ne pourront plus jamais conduire? Ces gens ont pris le privilège de conduire et en ont fait un droit. C'est inadmissible. Par conséquent, ils ne pourront plus jamais jouir de ce privilège. Pourrait-on envisager de prendre une telle mesure pour éviter de nouveaux malheurs?
L'hon. Andy Mitchell: Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.
Sur le premier point, je lui dirai franchement que, même s'il y a seulement une personne qui tolère que l'on prenne le volant avec des facultés affaiblies, c'est une personne de trop.
En tant que société et à titre de parlementaires, nous voulons, dans la mesure du possible, faire en sorte que tous les Canadiens jugent cela inacceptable.
Je suis réaliste. J'ignore si nous arriverons un jour à cette intolérance zéro. Si une personne accepte l'alcool au volant, c'est une personne de trop.
Peut-on accepter que quelqu'un menace un semblable en agissant mal, dans ce cas, nous parlons de conduire une embarcation, une voiture ou une motoneige avec des facultés affaiblies? Bien sûr, que non.
Cette question comporte deux éléments qu'il faut traiter. Notre objectif est double. Premièrement, nous disons à celui qui conduit avec des facultés affaiblies qu'il a tort et que, en tant que société, nous allons lui imposer une sanction pour cela. Nous devons le faire. La société dans son ensemble le demande.
Nous voulons aussi faire en sorte que la personne ne conduise pas avec des facultés affaiblies et que toute autre personne en soit empêchée.
Quand j'ai parlé de la nécessité de proposer une solution reposant sur une large base et comportant divers éléments, je visais justement ce double objectif. En tant que société, nous devons expliquer clairement que c'est inacceptable et nous le faisons en prévoyant une sanction aux termes du Code criminel. Ce n'est pourtant pas assez. C'est important, mais il faut faire davantage. Nous devons prendre des mesures pour empêcher qu'un jour quelqu'un prenne le volant d'une automobile ou d'un bateau avec des facultés affaiblies. Nous devons faire ces deux choses. C'est notre objectif.
Je remercie le député pour sa question et pour l'occasion qu'il m'a donnée d'apporter cette précision.
M. Philip Mayfield: Monsieur le Président, je reconnais que tous les efforts de prévention sont excellents. Si cette prévention pouvait être ajoutée dans le lait maternel, je serais d'accord. Nous devrions grandir dans des collectivités où les gens ne conduisent pas après avoir pris de l'alcool. Ce serait merveilleux. Je suis totalement d'accord avec cela. Je suis d'accord avec l'éducation, les attitudes familiales et tous les moyens qui permettent d'y parvenir.
Je voudrais que le député revienne sur les questions que j'ai posées. Dans le cas de ceux qui persistent à violer la loi et à se mettre dans des situations où ils menacent la vie ou la santé d'autrui, le député approuverait-il la confiscation du véhicule dès la première infraction? Serait-il d'accord pour qu'on dise à cette personne qu'elle a abusé de son privilège et qu'elle ne conduira plus parce que c'est ce que prévoient nos règles?
L'hon. Andy Mitchell: Monsieur le Président, je ne suis pas en désaccord avec les propos du député. J'ai souvent dit à la Chambre qu'une des choses importantes que nous devons faire en tant que société, c'est de nous assurer que les gens comprennent que semer la pagaille entraîne des conséquences. Si on prend le volant d'un véhicule ou de quelque autre engin motorisé pendant qu'on est en état d'ébriété, on devrait savoir qu'on va en payer le prix. La société va imposer une sanction, une peine.
J'espère que nous aurons l'occasion, au cours des quelques prochains mois, de discuter du moyen le plus approprié d'imposer cette peine et de la peine qui convient le mieux. Nous devons analyser attentivement cette question. La peine devrait-elle être la même dans tous les cas? Les circonstances sont-elles toutes les mêmes? Peut-être que oui. Peut-être cela devrait-il être laissé à la discrétion des tribunaux. Je n'écarte aucune possibilité.
Je conviens d'emblée avec le député que, si quelqu'un met sciemment une personne en danger en conduisant un véhicule ou tout autre engin motorisé pendant qu'il est en état d'ébriété, la société est en droit de lui imposer une peine. Je crois que la plupart des députés sont d'accord là-dessus.
Le député a exposé diverses options qu'il y a lieu d'examiner. Certaines sont déjà prévues, et il convient d'en examiner d'autres qui pourraient s'y ajouter, ce que nous ferons, je l'espère.
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, avant d'entamer mon discours, j'aimerais informer la présidence que je partagerai mon temps de parole avec le député de Nanaïmo—Cowichan.
C'est pour moi un privilège d'intervenir dans le présent débat pour appuyer la motion présentée par le député de Prince George—Bulkley Valley.
Après avoir étudié la politique et m'être intéressé à la vie politique, tant au Canada que dans le reste du monde, je me suis rendu compte d'une chose. Les gens qui sont élus pour gouverner ou pour être dans l'opposition ont une responsabilité primordiale qui l'emporte sur toute autre. Ils sont responsables de la sécurité et du bien-être de leurs concitoyens respectueux des lois.
C'est précisément cette responsabilité que nous essayons d'honorer aujourd'hui. Nous essayons de formuler une motion pour qu'elle soit adoptée par la Chambre afin de protéger nos concitoyens qui respectent la loi.
Nous savons tous, d'après ce qui a été dit jusqu'à maintenant, que d'un bout à l'autre du pays la tragédie frappe des Canadiens et leurs familles parce que des criminels décident de prendre le volant après avoir bu. Je les appelle des criminels parce que je veux que tout le monde se rende compte d'une chose, à savoir que prendre la décision de boire et de conduire, que ce soit un bateau, une voiture ou un avion, revient à se saisir d'une arme. C'est un acte qui risque de coûter la vie au chauffeur, à ses passagers, aux autres chauffeurs et à leurs passagers, et de marquer à tout jamais leurs parents et leurs amis qui devront faire face à la tragédie, sans parler des témoins innocents qui peuvent être affectés.
Je vais vous raconter une histoire qui m'est arrivée. Je n'avais pas l'intention de le faire. Normalement, avant de raconter une anecdote personnelle, j'aime prévenir les personnes en cause. Je n'ai pas eu le temps de le dire à ma femme, parce que je ne pensais pas donner des détails personnels aujourd'hui. Mais je pense que je dois le faire.
Quand j'avais 23 ans, ma femme en avait alors 18, nous étions en route pour le mariage de mon futur beau-frère. Ma tâche était d'arrêter prendre les fleurs. Un de mes beaux-frères m'accompagnait dans la voiture. Pendant le trajet, une voiture s'est dirigée sur nous. Je conduisais et John, mon beau-frère, était mon passager.
Au moment de l'impact, je me souviens d'avoir vu un petit enfant sortir par la fenêtre de la voiture qui nous a frappés. Je me souviendrai toujours d'avoir vu cet enfant venir frapper le capot de ma voiture. C'est la dernière image dont je me suis souvenu pendant longtemps. J'ai été à l'hôpital pendant neuf mois. Mon pancréas et mon foie ont été déchirés, et ma carrière a changé à jamais.
Comme l'autre conducteur était insuffisamment assuré, ma femme, Cis, a dû faire la cueillette des fraises et des fruits pour pouvoir rester sur la côte—parce que nous venons de l'intérieur—et rester avec moi pendant tout ce temps.
Je n'ai pas vraiment eu l'occasion de parler à l'autre conducteur, qui avait consommé de l'alcool, mais pas suffisamment pour être inculpé de conduite avec facultés affaiblies. L'enfant blessé était son petit-fils. Cet enfant a survécu, après avoir été dans le coma pendant 19 ou 21 jours. Mais il est paraplégique.
Fallait-il que pareil accident survienne? Non. Quand on a posé la question au conducteur, le grand-père, il a dit qu'il ne pouvait expliquer pourquoi il a tourné le volant de sa voiture. La route allait tout droit. Il ne sait pas pourquoi il a tourné. J'ai beaucoup réfléchi à cela. Il avait bu de l'alcool, puis il est parti à la maison avec son petit-fils. Je me suis toujours demandé si l'enfant serait dans une meilleure condition aujourd'hui s'il y avait eu des lois contre ce genre de chose. C'est bien possible. Ce grand-père ne souffrirait peut-être pas comme il le fait sûrement maintenant à la vue de son petit-fils.
Il faut prendre tout cela en considération. Je compatis à la douleur de toutes les familles qui ont connu pareille tragédie. L'an dernier, tout juste à l'extérieur de Vernon, ma ville natale, trois jeunes femmes d'Okanagan—Shuswap ont décidé de retourner chez elles en voiture après une soirée à Kelowna, une ville des environs. Elles n'avaient fait que quelques kilomètres avant de traverser la voie et d'être frappées par un camion transportant des billes de bois. Elles ont été tuées toutes les trois. Maintenant, leurs familles, les amis et leurs proches doivent encaisser le choc. C'est presque impossible d'accepter ce genre de tragédie. Tout cela à cause d'un système judiciaire qui permet aux juges d'interpréter les lois quand il s'agit de conduite avec les facultés affaiblies.
Cela arrive dans ma circonscription, et je sais qu'il en va de même dans d'autres. Cela se produit tous les jours. Comme le député de Prince George—Bulkley Valley l'a déclaré en présentant sa motion, 4,5 Canadiens sont tués chaque jour dans des accidents de la route impliquant un conducteur qui avait bu et des milliers restent paralysés chaque année ou souffrent d'autres séquelles de tels accidents.
La semaine dernière seulement, Mothers Against Drunk Driving était sur la colline. Les membres de cet organisme voulaient sensibiliser la population aux résultats d'un sondage aléatoire qu'il avait commandé. Il est intéressant de constater que, à la question: «Lorsqu'un conducteur est reconnu coupable de conduite en état d'ébriété ayant causé un décès, seriez-vous très en faveur, ou très opposé à ce qu'une peine d'emprisonnement minimale lui soit imposée?», 47,9 p. 100 des personnes ont déclaré qu'elles seraient très en faveur d'une peine d'emprisonnement minimale et 37,6 p. 100 ont déclaré qu'elles seraient en faveur d'une telle peine. Cela veut dire qu'un total de 85,5 p. 100 des gens appuieraient ou appuieraient fortement l'imposition d'une peine d'emprisonnement minimale.
Cela devrait nous donner matière à réflexion à la Chambre des communes. C'est l'opinion des gens qui paient nos salaires. Ce sont ces gens qui comptent sur nous pour adopter les lois qui les protégeront. C'est d'ailleurs notre travail et notre devoir. Je suis convaincu que, si nous travaillons de concert, nous pouvons nous montrer dignes de la confiance de la population.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour ses observations. Je le connais bien et je sais qu'il est un député sincère et qu'il travaille avec zèle.
Dans sa motion, l'opposition propose qu'un comité examine la question de la conduite avec facultés affaiblies. Elle demande deux choses: de meilleurs moyens préventifs et des peines mieux assorties à la gravité de l'infraction. Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de députés qui ne sont pas convaincus que les mesures dissuasives doivent être adaptées à la gravité de l'infraction et que les peines doivent refléter la gravité de l'infraction.
Puisque le député a soulevé la question, je voudrais parler des conséquences. Nous savons qu'environ 45 p. 100 des collisions d'automobiles et les blessures subies lors de ces accidents sont attribuables à des abus d'alcool. Nous savons aussi que c'est le cas de 65 p. 100 des accidents de motoneiges qui entraînent aussi des blessures.
Lorsqu'un conducteur ivre tue un piéton, il cause beaucoup de mal. Au Canada, nos statistiques sur la question ne rendent probablement pas compte de toute la gravité du problème.
Je remercie le député de nous avoir fait part de ses observations. Je crois qu'il devrait nous en dire un peu plus sur le fait que cela touche non seulement les personnes qui abusent de l'alcool et les victimes innocentes des accidents, mais nous tous car nous connaissons tous quelqu'un qui a été touché par de tels accidents qui pourraient être évités.
Peut-être le député voudra-t-il entrer davantage dans le détail et parler de la douleur et de la souffrance des proches des victimes des accidents attribuables à l'abus d'alcool.
M. Darrel Stinson: Monsieur le Président, je remercie le député d'en face de poser la question.
Rares sont aujourd'hui les personnes qui n'ont pas été touchées d'une manière ou d'une autre par l'abus d'alcool.
Les survivants et des victimes en sont marqués pour le reste de leurs jours. Je peux en parler d'expérience. Il ne se passe pas une semaine, ni même deux jours ou deux nuits sans que je pense à cet enfant. Cela ne me quittera jamais. Je devrai vivre avec cela.
Mon épouse doit aussi accepter le fait que sa carrière a changé à partir de ce moment-là. Elle a abandonné un emploi rémunérateur et toute une carrière pour être à mes côtés, à l'hôpital Haney. Nous avons été très touchés, mais ce n'est rien à côté de ce que les grands-parents de l'enfant ont eu à endurer tout le reste de leur vie. Mon beau-frère, John, a aussi été victime de cet accident. Il a subi des blessures à la tête dont il souffre encore aujourd'hui.
Un accident fait donc beaucoup plus de victimes qu'on le croit et on n'entend jamais parler de certaines d'entre elles. Nous n'en tenons pas suffisamment compte dans certaines décisions que nous prenons ici.
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole pour appuyer la motion dont la Chambre est saisie. Cette motion se faisait attendre depuis longtemps. Il y a longtemps que les Canadiens l'appellent de leurs voeux. Elle mérite certainement l'appui des députés deux côtés de la Chambre.
Mon collègue, le député de Prince George—Bulkley Valley, a réussi à faire adopter cette motion à la Chambre au printemps dernier, mais à cause du le déclenchement des élections, elle est restée sans effet. Je demande respectueusement aux députés à la Chambre des communes de faire abstraction de leurs convictions politiques à cet égard et d'adopter la motion.
L'objet du débat transcende toutes les divergences d'opinions politiques que nous pouvons avoir et devrait nous unir dans une cause commune. La motion ne reflète aucun parti politique ni aucune idéologie politique. Elle ne cherche qu'à protéger les Canadiens. On ne demande rien de plus et certainement rien de moins.
Nous avons tous entendu les histoires d'horreur associées à l'ivresse au volant. Certains députés nous ont déjà fait connaître leurs histoires à ce sujet. Le carnage annuel, à la fois absurde et tragique, doit prendre fin.
Il se trouve que j'ai pris il y a plusieurs années la décision de m'abstenir de consommer de l'alcool. Je l'ai fait notamment parce que je ne voulais pas transmettre à mes enfants quelque chose que je pourrais peut-être contrôler, mais qu'ils ne seraient peut-être pas capables de contrôler. Je ne voulais certainement pas me trouver dans la situation où j'aurais causé la mort d'autrui pour avoir conduit avec les facultés affaiblies.
L'abstinence reste la meilleure prévention. Nous avons cependant la liberté de choisir de consommer cette drogue légalisée. Des gens continueront de décider de boire. Malheureusement, certains décideront aussi de conduire en état d'ébriété.
Je n'ai pas l'illusion de croire que, grâce à l'adoption de la motion, les gens cesseront de mourir dans ce genre d'accidents. Cependant, cela contribuera beaucoup à donner à la famille et aux amis des victimes l'impression que le dossier est clos et que justice a été rendue.
Le plus grand mérite de cette initiative résidera peut-être dans son effet dissuasif auprès des nouveaux conducteurs. En effet, ce sont eux qui doivent apprendre assez tôt les périls de la conduite en état d'ivresse. Quant aux récidivistes, malheureusement, seule une mesure de punition comme une peine plus sévère saura leur faire perdre leur habitude.
Des organismes comme les Mothers Against Drunk Driving et les Élèves ontariens contre l'ivresse au volant nous disent qu'on ne peut tolérer plus longtemps le statu quo en matière d'établissement de la peine.
Il y a eu bien trop de drames. Nous avons dû mettre en terre bien trop d'êtres chers. J'ai huit enfants. Chaque fois qu'ils sortent en voiture le soir, je prie le ciel pour qu'ils rentrent sains et saufs. Ce n'est pas que je craigne qu'ils conduisent après avoir bu; ce sont les autres conducteurs qui m'inquiètent.
En 1967, la soeur de ma femme, alors âgée de 21 ans et mariée depuis peu, se rendait en voiture à Victoria avec son mari. Un automobiliste en état d'ébriété a brûlé un stop et a frappé leur voiture dans le côté. Elle a été éjectée, s'est frappée la tête et a subi de graves lésions au cerveau. Elle est restée dans le coma pendant trois mois. Elle a perdu l'usage d'une jambe et d'un bras. Miraculeusement, elle a aujourd'hui recouvré en bonne partie l'usage de ces membres, mais elle souffre toujours des séquelles de cet accident. Son mariage s'est brisé. Elle boite. Elle a des douleurs constantes. Cet automobiliste s'en est tiré avec une amende de 500 $ et de petites remontrances en 1967. C'est totalement inacceptable.
Les personnes qui ont survécu à ce genre d'accident l'ont déjà dit, et il vaut la peine de le répéter, ce ne sont pas les victimes qui devraient écoper.
Voici quelques données qui font ressortir toute la gravité du problème. En 1992, un éditorial du Sun d'Ottawa signalait que plus de 13 000 personnes avaient été tuées ou blessées par un automobiliste en état d'ébriété.
En 1994, 1 414 ont perdu la vie à cause d'un conducteur ivre. C'est à peu près trois fois le nombre de personnes assassinées au Canada chaque année. Mais on pourrait dire que cela revient au même. Quelle différence entre se faire tuer par une arme à feu ou par une voiture conduite par un conducteur ivre?
Qu'on réfléchisse bien à ce chiffre: 1 414. Même si la Chambre était trois fois plus grande, elle ne pourrait pas accueillir tous ces gens. En 1993, 1 315 personnes ont perdu la vie sur les routes de l'Ontario. L'alcool était en cause dans 565 cas.
Permettez-moi de communiquer aux députés d'autres renseignements sur le coût de la conduite avec facultés affaiblies, et non seulement les coûts monétaires, mais aussi les coûts en pertes de vie et en souffrance. Chaque jour, quelque 4,5 Canadiens sont tués par des conducteurs en état d'ébriété, soit une personne toutes les six heures, selon la Fondation de recherches sur les blessures de la route au Canada. Elle a aussi constaté que, en 1995, les conducteurs en état d'ébriété avaient été la cause de plus de la moitié des 3 300 décès survenus sur la route au Canada. Cela signifie que, au Canada, on court trois fois plus de risques d'être tué par un conducteur aux facultés affaiblies qu'à la suite d'un homicide.
Il n'y a pas que les statistiques sur les décès qui sont désolantes. En 1993, Transports Canada a révélé que plus de 300 Canadiens sont blessés chaque jour à la suite d'un accident causé par l'alcool. Qui plus est, pareils décès et blessures ont des répercussions non seulement pour les victimes, mais pour l'ensemble de la société.
En 1989, Transports Canada a évalué que, pour la société, les pertes totalisaient au moins 390 000 $ par accident fatal. Ce montant représente les pertes de revenus, les dommages à la propriété et les coûts connexes liés aux soins de santé.
Nous devons rendre justice aux familles des victimes et infliger des peines plus sévères aux contrevenants. Les députés n'ont pas à me croire sur parole lorsque je leur dis que les Canadiens trouvent la situation inacceptable. Le journal publié récemment par l'organisme MADD et dont mon collègue a parlé fait état de toutes les raisons pour lesquelles les Canadiens estiment que les peines devraient être plus sévères. Les Canadiens se sont prononcés et nous devons, nous parlementaires qui les représentons, agir en conséquence.
Je terminerai sur cette note. J'exhorte encore une fois les députés à faire fi de tout esprit sectaire, à laisser de côté la politicaillerie et à voter en faveur de la motion, dans l'intérêt du pays.
M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je remercie tous les députés qui ont parlé aujourd'hui en faveur de la motion à l'étude. Une motion semblable a été présentée au cours de la dernière législature. J'ai été très honoré de l'appuyer.
Nous avons entendu aujourd'hui le récit de tragédies personnelles très émouvantes. Je suis certain que chacun d'entre nous a quelque souvenir du genre à partager. Un habitant de ma circonscription, M. MacRae, qui travaillait dans la région métropolitaine d'Ottawa, a malheureusement été frappé sur une grande autoroute. Un conducteur aux facultés affaiblies l'a percuté de plein fouet. Il est mort sur le coup. Il a laissé une jeune femme et un enfant en bas âge qui, du jour au lendemain, ont vu leur destin basculer.
Le dernier intervenant vient de donner un exemple d'un incident semblable. La peine infligée s'est limitée, si je me rappelle bien, à une amende de 500 $ et à une légère réprimande. C'est ridicule.
Nous avons un problème. Nous pouvons adopter toutes les lois possibles, mais cela ne suffit pas; il faut aussi les appliquer. C'est là où nous perdons parfois la partie. Récemment, nous avons entendu parler de l'affaire Stuckless dans la région du Grand Toronto. Cet homme a agressé entre 30 et 40 enfants, et on a rien fait d'autre que lui taper sur les doigts.
Était-ce parce qu'il n'existe pas de loi? Non, il existe une loi. Nous avons des lois, mais nous devons aussi faire quelque chose au niveau de l'application de ces lois.
Le député a-t-il des idées à proposer pour assurer l'application de ces lois, pour voir à ce que les sanctions prévues soient bel et bien imposées et pour informer le public que nous avons des lois? Nous pouvons changer les lois. Nous pouvons mettre en oeuvre de nouvelles lois. Nous pouvons présenter des motions. Cependant, si nous ne voyons pas à l'application de ces lois et de ces règles, les tragédies dont l'orateur précédent a parlé continueront de se produire encore et encore. Les coupables s'en tirent avec des réprimandes.
Nous devons envoyer un signal clair aux juges. Ils ont un travail à faire. Nous pouvons apporter tous les changements que nous voulons, mais rien ne se produira si nous ne disons pas clairement aux juges qu'ils doivent appliquer la loi à la lettre.
Le député a-t-il des suggestions à faire concernant l'application des règles et des lois que nous adoptons?
M. Reed Elley: Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question et ses observations. Dans un sens, il a répondu lui-même à sa question. Je suis entièrement d'accord avec lui pour dire que nous avons un système de justice dans notre pays. Nous avons des lois. Nous avons aussi des juges, mais, malheureusement, il arrive très souvent qu'ils n'appliquent pas les lois.
Il faudra que les Canadiens crient fort pour que les choses changent. Il faudra des pressions venant de l'opinion publique, des parlementaires et d'autres groupes pour que les choses changent.
Les lois existent, mais elles ne sont pas appliquées. Nous ne pouvons plus être aussi indulgents. Cela envoie un faux signal aux jeunes Canadiens, soit qu'il n'y a rien de mal à prendre le volant après avoir bu. C'est inacceptable.
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt le député d'en face. C'est un problème très grave qui touche les Canadiens.
En tant qu'ancien président de la police régionale de Waterloo, je peux dire que nous prenions très au sérieux toute la question de la conduite avec facultés affaiblies et les conséquences que cela peut entraîner pour les coupables. Nous avions de bons programme en place, comme le programme RIDE, et d'autres façons d'assurer l'application des lois.
Le député croit-il que, si les services de police d'un bout à l'autre du Canada intensifiaient leurs efforts d'application des lois dans ce domaine, cela contribuerait à atténuer ce problème très dévastateur?
M. Reed Elley: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.
Il ne fait aucun doute que nous devons appuyer nos forces policières. Je me suis entretenu avec des agents de la GRC dans ma circonscription. Ils sont découragés tant par les problèmes de main-d'oeuvre que par les problèmes d'application de la législation concernant la conduite en état d'ébriété. Il n'est pas normal que le système de justice ne punisse pas les gens que les policiers amènent devant la justice au prix de grands efforts.
Le problème est grave. J'abonde volontiers dans le sens de ce que le député a dit. Nous devons appuyer nos policiers.
Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Monsieur le Président, j'estime que notre débat d'aujourd'hui est important parce que je ne crois pas qu'il se trouve une seule personne au Canada—en tout cas, je n'en connais pas une dans ma circonscription de Thornhill—qui soit favorable à l'ivresse au volant. Je ne crois pas que les gens soient d'accord avec l'idée de conduire quand on a bu, que ce soit une automobile ou tout autre véhicule motorisé.
Quand on conduit, on a une obligation; il faut connaître le véhicule que l'on conduit, avoir reçu la formation requise et ne pas avoir les facultés affaiblies. Nous savons que les véhicules automobiles peuvent être meurtriers.
Je tiens à débuter mon intervention en félicitant les mères contre la conduite avec facultés affaiblies, dont l'organisme est mieux connu sous le nom de MADD, pour le superbe travail de conscientisation du public qu'elles ont accompli au fil des ans. Je tiens également à féliciter tous les députés de tous les partis qui ont dit très clairement qu'il s'agit d'une question non partisane.
Dans notre examen de la question de la conduite en état d'ébriété, il est important de se rappeler que, au Canada, le Code criminel n'est pas le seul outil de dissuasion et de châtiment s'appliquant aux personnes ivres qui prennent le volant. Chaque province doit faire sa part. Il incombe aux provinces d'appliquer le Code criminel. Elles sont aussi responsables du réseau routier dans leur territoire.
Pour avoir été députée à l'assemblée législative de l'Ontario pendant 12 ans, je suis consciente des progrès accomplis dans cette province. J'ai aussi été touchée de près par certaines tragédies.
Je siégeais à Queen's Park le jour où l'on a annoncé que le fils de l'actuel trésorier de l'Ontario avait été tué dans un accident où l'alcool était en cause. Même si je n'ai pas toujours partagé les vues du député en question, je peux vous dire que moi et tous les autres membres de l'assemblée législative étions choqués non seulement par cette perte tragique, mais aussi par le fait que celle-ci était inutile et aurait pu être prévenue.
Plus récemment, les médias nous ont appris que le fils d'un ministre provincial en Ontario avait été accusé de conduite en état d'ébriété. Apprendra-t-on un jour?
En plus d'avoir été députée provinciale après avoir siégé à un conseil municipal pendant six années et demie, je suis mère de quatre enfants, dont le plus jeune est maintenant âgé de 25 ans. Je me souviens de ce que j'ai ressenti chaque fois que l'un d'eux a obtenu son permis de conduire. Je me souviens d'avoir discuté avec chacun d'eux de la responsabilité qui leur incombait lorsqu'ils prenaient le volant. Je me souviens d'avoir discuté avec eux de la responsabilité qu'ils avaient lorsqu'ils constataient qu'un de leurs amis n'était pas en état de conduire.
Je me souviens d'avoir discuté avec eux de l'appui qu'ils recevraient de leur famille et amis, en particulier de mon mari et de moi, s'ils prenaient un taxi pour rentrer à la maison au lieu de conduire après avoir consommé de l'alcool.
Je suis d'accord avec ceux et celles qui disent qu'il est possible de prévenir ces tragédies et qu'il faut faire quelque chose. À mon avis, les mesures dissuasives et les peines prévues dans le Code criminel ne sont qu'un élément de la solution.
Il va de soi que l'éducation et le traitement des personnes ayant des problèmes d'alcool font aussi partie de la solution. Le fait d'avoir sensibilisé davantage la population depuis un bon nombre d'années a permis de réaliser des progrès importants. Il ne fait aucun doute que les gens sont plus conscients du problème.
Personnellement, j'ai été très désappointée lorsque les tribunaux ont rejeté la loi ontarienne adoptée par un gouvernement conservateur et portant que si une personne échouait l'alcootest ou refusait de s'y soumettre, elle se voyait automatiquement retirer son permis pour une période de 90 jours. Il s'agissait selon moi d'une bonne loi et d'un bon moyen de dissuasion. Je suis heureuse que le gouvernement porte cette décision en appel. J'espère que la loi sera déclarée constitutionnelle.
Nous devons trouver des moyens de sensibiliser le public à l'importance que les législateurs, les parlementaires et les citoyens intéressés à la sécurité publique accordent à cette grande question.
Je tiens également à souligner à quel point je suis fière de la sensibilité du gouvernement libéral. La ministre de la Justice s'est engagée très clairement à soulever cette question auprès de ses homologues provinciaux. Nous savons que les solliciteurs généraux s'intéressent beaucoup eux aussi à tout le problème de la conduite avec facultés affaiblies. Je suis fière de faire partie d'un gouvernement qui compte des ministres qui ont pris cet engagement.
L'importance de cet engagement en dit long sur la nature de ce pays. Il ne s'agit pas d'un problème qui relève uniquement du Code criminel fédéral. C'est un problème qui exige une stratégie nationale, l'attention de tout le pays et, bien sûr, des discussions et des mesures de la part de toutes les provinces.
Je suis ici depuis peu de temps et j'ai appris qu'il était important de collaborer avec les provinces et d'obtenir leur appui pour les initiatives fédérales. J'estime en outre qu'il y va de l'intérêt national puisque nous sommes une fédération, mais c'est aussi selon moi l'intérêt de cette question qui est en cause.
Je tiens à dire publiquement aujourd'hui que selon moi le consensus n'est pas l'unanimité. Nous n'avons pas besoin de l'unanimité pour passer à l'action. J'estime que nous pouvons poser un autre jalon si nous parvenons à un consensus parmi les partenaires provinciaux chargés de l'application du Code criminel. Nous savons qu'il faut des ressources pour appliquer la loi. S'ils ne réservent pas les ressources nécessaires, nous ne pourrons pas compter sur les mesures d'application qu'il nous faut. Nous avons donc affaire ici à un partenariat.
Nous savons également quelles sont les mesures qui relèvent des provinces. Je n'ai mentionné que l'Ontario, mais je sais que d'autres provinces ont également adopté des mesures. Nous savons à quel point il importe que les provinces puissent partager ces renseignements et que nous parvenions à cibler nos ressources de manière à atteindre le plus efficacement possible notre objectif, qui est la réduction des cas de conduite avec facultés affaiblies, des accidents et des pertes de vie.
Si c'est là l'objectif que nous partageons tous, il importe de pouvoir compter sur la recherche, les données et les renseignements qui nous permettront d'élaborer nos politiques de la façon la plus efficace possible.
Je tiens à faire remarquer que la Fondation de recherche sur les blessures de la route est un service et une base de données qui relèvent de Transports Canada. Ces données sont très importantes car elles nous permettent d'évaluer non seulement nos programmes mais aussi le progrès que nous accomplissons vers notre objectif. Cette fondation réunit des données de toutes les régions du pays, et ces données sont très importantes.
Parallèlement, nous sommes tous au courant du travail de la Fondation de recherche sur l'alcoolisme et la toxicomanie, et encore une fois je pense à l'Ontario. Cette fondation est un chef de file mondial dans le domaine de l'élaboration des politiques, de la recherche, des stratégies de prévention et, oui, du traitement. Voilà un autre élément important de cette question.
Je trouve qu'il importe qu'une affaire de ce genre réunisse tous ces organismes. La mieux placée pour prendre la tête du mouvement est la ministre de la Justice, qui a exprimé son intérêt et s'est engagée à le faire à la Chambre et auprès du groupe MADD, les mères contre la conduite en état d'ébriété.
Je crois aussi que le comité parlementaire des affaires juridiques a un rôle à jouer sur cette question. Les comités permanents peuvent aider à définir le cadre des politiques à considérer et contribuer à réaliser notre objectif de créer une société plus sûre. J'espère que nous aurons la chance, au cours des prochaines années, de discuter de questions de ce genre dans un contexte non partisan.
L'une des choses que j'ai apprises, c'est que, même si tout le monde s'entend sur les buts et les objectifs, nous avons souvent des façons différentes de résoudre les problèmes et d'atteindre les objectifs, parce que nous ne pensons pas de la même manière et n'avons pas la même idéologie. Il importe que tout le monde se souvienne, au cours de ce débat, que nous partageons le même objectif, celui de créer une société où nous serons plus en sécurité, où nous pourrons prévenir les accidents causés par les chauffeurs en état d'ébriété. Nous devons comprendre ceux qui disent que c'est une question complexe.
Je disais récemment qu'il était inutile de dire qu'une question était controversée. Si une question n'est pas controversée, il ne vaut pas la peine d'en parler. Si les solutions étaient simples, nous ne serions pas ici à en débattre. La question serait déjà réglée. Si nous avons ce débat aujourd'hui, c'est que la question est controversée, que les solutions ne sont pas simples et que les contraintes de la politique gouvernementale sont complexes.
J'ai mentionné que la loi adoptée en Ontario avait été rejetée par les tribunaux. Cette loi était bien intentionnée. Le gouvernement provincial avait été prévenu qu'elle serait contestée devant les tribunaux. La partie qui intentait les poursuites a gagné son procès, et la loi a été abrogée.
En tant que législateurs, nous ne devons pas chercher à nous faire du capital politique avec ce genre de questions. Nous ne devons pas dire que la solution est simple. Ces questions sont si importantes pour la société que nous voulons construire qu'il faut les soulever souvent dans des lieux comme celui-ci. Nous devons chercher une solution, écouter les experts, recueillir de l'information d'un peu partout au pays et voir ce qui se fait à l'étranger pour savoir ce qui donne de bons résultats et ce qui ne marche pas.
Personne ne veut payer plus d'impôt, mais tout le monde veut en avoir pour son argent. Il faut utiliser les ressources disponibles de la façon la plus efficace et rentable possible.
Dans le cadre de ce débat aujourd'hui, je veux que mon message soit bien clair. Je crois que les résidents de Thornhill, que j'ai l'honneur de représenter ici, souhaiteraient voir élaborer une stratégie globale, comprenant meilleure éducation, prévention, possibilités de traitement et renforcement des dispositions du Code Criminel de sorte que le but visé, c'est-à-dire réduire la conduite en état d'ébriété à bord de n'importe quel véhicule motorisé, soit atteint.
Je suis heureuse de pouvoir m'exprimer sans partialité politique, au nom des résidents de la circonscription de Thornhill, au sujet d'une question qui revêt de l'importance pour nous tous. Il s'agit, je crois, d'une question que les députés comme tous les Canadiens et Canadiennes prennent à coeur. Trop de tragédies auraient pu être évitées. J'aimerais que les solutions soient simples. Je sais cependant que chacun des députés contribuera à sa façon à l'avancement de cette cause en participant au débat aujourd'hui.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je suis entièrement d'accord avec ce que la député d'en face a dit. Les débats sur des sujets comme celui-ci me dérangent parce qu'ils me touchent personnellement.
J'ai passé plusieurs années, au cours de la dernière session, à élaborer, de concert avec mes collègues, avec des amis et avec des gens de partout au pays, une déclaration nationale des droits des victimes. Celle-ci a fait l'objet d'un projet de loi que nous avons présenté à la Chambre, et le ministre de la Justice de l'époque a donné son appui au projet de loi. Nous avons donné à des millions de Canadiens l'espoir qu'une telle déclaration voit enfin le jour. Le projet de loi a été renvoyé à un comité, où il est resté lettre morte.
À entendre les interventions des membres des divers partis, dont deux en particulier auraient pu faire quelque chose depuis des dizaines d'années dans le dossier de la conduite avec facultés affaiblies s'ils l'avaient voulu, je crains de voir l'histoire se répéter. Il y a de fortes chances que la Chambre appuie unanimement la motion que le Parti réformiste a présentée aujourd'hui. Toutefois, le député pense-t-il vraiment pouvoir faire mettre quelque chose en oeuvre à la Chambre quand, dans le passé, les gouvernements n'ont rien fait?
Mme Elinor Caplan: Je dirai au député que ce n'est pas vrai. Si nous voulons avoir un débat utile sur d'importantes questions comme celle-ci, il est essentiel d'établir clairement les faits.
Nous savons qu'au printemps dernier, lors de la dernière législature, le gouvernement a proposé et adopté plusieurs amendements au Code criminel. Nous savons aussi qu'au cours de la dernière législature, il a fait, dans le domaine de la justice, plusieurs propositions que n'a tout simplement pas appuyées le Parti réformiste, de l'autre côté. J'aimerais rappeler ces propositions.
Les mots ne valent pas grand-chose. Quand nous parlons d'une question non partisane comme celle-ci et que nous voulons avoir l'appui de tous les partis à la Chambre, j'estime que mon collègue du Parti réformiste, qui prétend que rien n'a été fait, devrait être au courant des faits. Pourrait-il nous dire, s'il m'est permis de lui poser une question dans ma réponse, pourquoi le Parti réformiste a voté contre d'importantes initiatives en vue de renforcer la Loi sur les jeunes contrevenants? Pourquoi le Parti réformiste a-t-il voté contre le contrôle des armes à feu alors que le pays tout entier était en faveur? Pourquoi le Parti réformiste a-t-il voté contre le renforcement du contrôle judiciaire de l'inadmissibilité à la libération conditionnelle?
Je suis fière aujourd'hui d'appuyer une initiative dont la ministre de la Justice et le solliciteur général ont fait une priorité pour le gouvernement libéral. Je crois, qu'avec la bonne volonté de tous les partis à la Chambre, nous pouvons faire des progrès, mais quand vous prenez la parole à la Chambre pour donner des informations erronées aux gens qui regardent...
Le président suppléant (M. McClelland): Je rappelle aux députés qu'ils doivent s'adresser les uns aux autres par l'intermédiaire du Président.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, le débat d'aujourd'hui sur l'alcool au volant revêt une très grande importance. Je tiens à féliciter le groupement MADD pour le précieux travail qu'il accomplit à l'échelle nationale. Dans ma propre circonscription, très rares sont les familles qui n'ont pas eu souffrir d'une façon ou d'une autre parce qu'un automobiliste a pris le volant en état d'ébriété. Il faut mettre un frein à cette situation parce que le risque pour les individus et pour la société est grave.
La peine infligée à quiconque est arrêté pour conduite en état d'ébriété est sensiblement plus légère que celle dont est passible celui qui tue quelqu'un avec sa voiture, alors même que le geste initial est identique dans les deux cas. La seule différence, c'est que le premier a eu la chance d'être arrêté avant de tuer quelqu'un. La similitude des deux actes constitue l'un des arguments les plus convaincants en faveur de l'imposition de peines plus sévères, de la mise en oeuvre de mesures plus strictes et d'une application plus vigoureuse des lois en la matière.
J'avais griffonné quelques mots tout à l'heure pour féliciter les parlementaires de ne pas avoir fait preuve de sectarisme politique au cours de ce débat, mais je pense qu'ils n'ont plus leur place. Néanmoins, j'ai bien aimé le débat jusqu'ici, alors que je demanderais que l'on retrouve l'impartialité que commande ce débat sur un sujet on ne peut plus important.
Mme Elinor Caplan: Monsieur le Président, les questions que soulève le député d'en face sur les variations du Code criminel sont exactement du genre de celles qui devraient être analysées non seulement durant le débat, et peut-être durant les travaux d'un comité législatif, mais aussi par la ministre de la Justice et ses collègues de toutes les régions du pays, car ce sont les provinces qui font exécuter le Code criminel.
Je suis en faveur d'un débat impartial à la Chambre. Je l'ai dit durant mes commentaires. Cependant, si l'on me provoque, je rugis. J'espère que les députés d'en face ne s'offusqueront pas si je réponds sur le même ton.
Voilà une question importante pour les députés de tous les partis. J'aimerais, moi aussi, que le débat demeure impartial. Malheureusement, mon collègue d'en face a éliminé cette possibilité.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'accepte les excuses. La question est trop importante pour que l'on fasse de la petite politique de parti, peu importe si une députée a l'impression d'avoir été provoquée. Je pourrais répondre à la longue liste de récriminations qu'elle vient d'énumérer et dire que j'ai été provoqué, moi aussi. Cependant, cela nous éloignerait de l'esprit du débat d'aujourd'hui, dont l'objet est l'un des actes criminels les plus graves, qui tue des milliers et des milliers de Canadiens au pays et, malheureusement, de très jeunes Canadiens trop souvent.
Quelles mesures précises la députée est-elle prête à prendre pour mener à sa juste conclusion le dossier de la conduite avec facultés affaiblies? Quels gestes concrets est-elle prête à poser? Voilà où mon collègue de Langley—Abbotsford voulait en venir. C'est bien beau d'appuyer une motion, mais quelles mesures concrètes le gouvernement entend-il prendre et que cette députée sera disposée à appuyer?
Mme Elinor Caplan: Monsieur le Président, je dis au député d'en face que je suis prête à croire la promesse que la ministre de la Justice vient de faire à l'organisation Mothers Against Drunk Driving, à savoir qu'elle soulèvera la question quand elle rencontrera ses homologues du reste du Canada. Non seulement suis-je prête à la croire sur parole, je suis également prête à lui offrir l'occasion de présenter un rapport à la Chambre. Nous pourrions alors étudier la question dans un forum approprié, le Comité de la justice, par exemple. C'est ce que j'ai dis dans mon discours.
J'aimerais également faire remarquer que nous aurons probablement des opinions divergentes quant aux solutions, car elles sont très complexes. Je pense toutefois que nous sommes tous d'accord sur l'objectif recherché. Je prends l'engagement devant la Chambre de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour lutter contre la conduite en état d'ivresse et pour apporter les modifications à la politique officielle que l'on jugera nécessaires pour atteindre cet objectif. Au nom des électeurs de la circonscription de Thornhill, je considère que c'est une priorité.
M. Randy White: Monsieur le Président, je ne veux pas que la Chambre interprète mal mes propos. Je ne crois pas rabaisser le niveau du débat en posant des questions tout à fait légitimes. Ma question est sérieuse. Comment nous, députés, pouvons-nous arriver à faire bouger le gouvernement sur des questions telles que celle-ci et la question de la déclaration des droits des victimes, des victimes d'autres crimes que l'ivresse au volant?
Les députés de cette Chambre devraient comprendre qu'il nous faut poser des questions car nous ne sommes pas certains que les choses avancent comme elles le devraient. J'aimerais que le député le comprenne.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec mon collègue de Langley—Abbotsford.
Je voudrais tout d'abord faire valoir que, dans le cadre de ce débat, ce qu'il faut reconnaître c'est que des milliers de victimes sont tuées chaque année. Si je ne m'abuse, il y aurait jusqu'à 1 700 victimes de conducteurs en état d'ébriété ou d'accidents où l'alcool est un facteur. J'ai fait remarquer dans mes brèves observations, tout à l'heure, que trop souvent, ce sont des jeunes qui sont impliqués.
Nous approchons rapidement de l'une des pires périodes de l'année pour la conduite en état d'ébriété. Le nombre de cas d'ivresse au volant augmente à la période des fêtes et il en va de même, malheureusement, des décès et des blessures. La période des cérémonies de fin d'études est également critique dans le cas des jeunes.
L'année dernière, un journal de chez moi, le Alaska Highway News, a publié un poème. Je voudrais simplement vous en lire quelques extraits, car cela montre bien le véritable problème.
Je suis allé à une petite fête, maman. Je me suis rappellé tes conseils. Tu m'avais dit de ne pas boire. J'ai donc bu des boissons gazeuses. Je me suis senti fier maman, comme tu me l'avais dit. Je n'ai pas pris le volant en état d'ébriété, maman, même si les autres m'ont dit que je devrais le faire.
Comme je partais, maman, le conducteur d'une autre automobile ne m'a pas vu, et m'a frappé de plein fouet. Tandis que je gisais par terre, maman, j'ai entendu le policier dire que l'autre conducteur était ivre. Maintenant, c'est moi qui paie, maman.
Pourquoi les gens boivent-ils, maman? Cela peut ruiner toute une vie. J'éprouve de fortes douleurs maintenant, comme si on me déchirait avec un couteau. Le gars qui m'a frappé marche, maman, et je ne pense pas que ce soit juste.
Je gis ici, en train de mourir, et tout ce qu'il peut faire, c'est me dévisager. Quelqu'un aurait dû lui dire, maman, de ne pas prendre le volant après avoir bu. Si seulement on l'avait fait, maman, je serais encore en vie.
J'ai de plus en plus de mal à respirer, maman, et j'ai très peur. Ne pleure pas pour moi, maman. Lorsque j'ai eu besoin de toi, tu as toujours été là. J'ai une dernière question, maman, avant de te dire adieu. Je n'ai pas conduit en état d'ébriété, alors pourquoi suis-je celui qui doit mourir?
Cela résume vraiment la question. Ce sont les innocents qui sont sans cesse tués par des conducteurs en état d'ébriété. À mon avis, le gouvernement ou les gouvernements précédents n'ont même pas commencé à s'attaquer comme il se doit à cette question. Il est essentiel que la Chambre donne suite à cette motion.
Les conducteurs ivres réussissent littéralement à tuer sans être inquiétés, sans que cela ait une grande incidence sur leurs terribles habitudes. Nous avons tous entendu les statistiques reprises très souvent au cours du débat d'aujourd'hui. Trop de familles souffrent d'avoir perdu des êtres chers tués par des conducteurs ivres. Trop de conducteurs condamnés pour avoir conduit avec facultés affaiblies reprennent le volant et ne cessent pas pour autant de conduire ivres. Pour certains, même le fait d'avoir tué un enfant ne les arrête pas.
Scott Wilson n'avait que 15 ans lorsqu'il a été tué par un conducteur en état d'ébriété, en 1985. Le conducteur, Owen Bradshaw, a percuté une charrette de foin dans laquelle avaient pris place les joueurs d'une équipe de hockey mineur et un certain nombre de leurs parents et amis. Bradshaw s'est enfui, alors que Scott se mourait et que 18 autres personnes avaient été blessées par cet acte criminel.
Ce n'était pas la première fois qu'il conduisait en état d'ivresse, il avait déjà été condamné deux fois. La première fois il avait été condamné à 175 $ d'amende et la deuxième fois à 30 jours de prison. Pour avoir tué Scott il a été condamné à deux ans de prison, plus un an pour s'être enfui, mais il n'a purgé que le tiers de sa peine de trois ans avant de bénéficier d'une libération conditionnelle en décembre 1987.
On aurait pu penser que sa conscience lui interdirait désormais de conduire après avoir bu, mais il a été de nouveau condamné pour conduite en état d'ébriété en 1991. Pour cette quatrième infraction il a été condamné à six mois de prison et à une interdiction de conduite de trois ans. A-t-il changé? Non. Le jour de son anniversaire, l'an dernier, Bradshaw a reculé sa camionnette dans une voiture de police qui s'était rangée derrière lui. Lors du procès, le procureur a réclamé trois ans de prison, mais le juge ne l'a condamné qu'à neuf mois et recommandé qu'on lui accorde immédiatement des permis temporaires pour qu'il puisse continuer à travailler pendant la journée. Son ex-femme avait déclaré au tribunal que la pension alimentaire qu'il versait lui était indispensable pour nourrir leurs enfants. Il aurait dû penser à sa famille avant de se mettre à boire. Il aurait dû penser à la famille de Scott lorsqu'il a pris sa clé de contact. Il a maintenant été condamné cinq fois pour conduite en état d'ébriété. Combien de fois a-t-il pris le volant en état d'ébriété? Je doute que même lui le sache.
Bradshaw n'est qu'une des nombreuses personnes condamnées pour de multiples infractions de conduite en état d'ébriété qui prennent encore le volant à l'heure actuelle. Ces personnes ne changent pas, même après avoir payé des amendes et purgé des peines d'emprisonnement. Beaucoup continuent de conduire alors que leur permis est suspendu et après avoir bu, en espérant que la police ne les attrapera pas.
Malheureusement, Bradshaw n'est qu'une personne parmi celles-là, mais il n'est même pas le pire exemple. Il y en a de nombreuses autres. Un homme a tué cinq adolescentes à Winnipeg pendant qu'il commettait sa 51e infraction.
Il y a au moins deux types de conducteurs ivres: ceux qui sont condamnés une fois et qui ne prennent plus jamais le volant après avoir bu, et ceux qui sont condamnés, mais qui continuent de conduire avec facultés affaiblies et un taux d'alcoolémie extrêmement élevé. C'est surtout sur le deuxième type, les buveurs invétérés, que nos lois doivent se concentrer. Ils conduisent en état d'ébriété jusqu'à ce qu'ils se blessent ou se tuent ou encore, blessent ou tuent quelqu'un d'autre. Pourtant, ils refusent de changer.
Selon Mothers Against Drunk Driving, 12 p. 100 des conducteurs ivres invétérés ont tué quelque 1 300 Canadiens l'année dernière seulement. Pour ces gens, nous devons examiner une solution de rechange qui épargnera des vies.
D'autres députés ici aujourd'hui ont parlé de la nécessité d'imposer des peines plus sévères, et je suis certes d'accord avec eux. Cependant, je voudrais m'attarder sur un autre moyen de dissuasion en ce qui concerne la conduite en état d'ébriété, moyen qui s'est révélé efficace tant aux États-Unis qu'en Alberta, où il existe depuis 1990. Lundi dernier, j'ai présenté le projet de loi C-266, qui permettrait aux juges de soumettre les conducteurs en état d'ébriété à des programmes d'interrupteur d'allumage. J'estime qu'il s'agit là d'un des moyens de dissuasion que la Chambre devrait étudier sérieusement.
Pour les députés qui n'en ont pas entendu parler, un interrupteur d'allumage est un dispositif électronique muni d'un éthylomètre, d'un micro-ordinateur et d'une mémoire interne qui est reliée à l'allumage et aux autres systèmes de contrôle d'un véhicule. Cet appareil mesure le niveau d'alcool dans le sang du conducteur et empêche le moteur du véhicule de démarrer si la concentration d'alcool dépasse un certain niveau. Autrement dit, l'appareil ne laisse conduire que les personnes sobres.
Il a été démontré que les méthodes de réadaptation et les peines actuelles sont inefficaces pour la plupart des personnes qui persistent à conduire leur véhicule en état d'ébriété. Or, la commande d'allumage contrôlée par alcootest est un moyen rapide et efficace pour dissuader les participants au programme de conduire en état d'ébriété. Le permis de conduire de ces personnes ne leur permet de conduire que les véhicules munis de ce dispositif. Tous les 30 à 60 jours, la mémoire interne de la commande est lue et enregistrée. Le rapport enregistre de façon détaillée chaque utilisation du véhicule, les résultats de tous les tests et toute tentative du participant de se soustraire à l'utilisation du dispositif. Les membres de la famille qui doivent utiliser le véhicule peuvent apprendre à utiliser le dispositif.
Des programmes semblables existent déjà en Alberta, dans 30 États américains et le Québec doit lancer le sien le 1er décembre prochain.
M. Michael Weinerath, professeur à l'université de Winnipeg, a évalué les résultats du programme d'utilisation de la commande d'allumage contrôlée en Alberta. Il est arrivé à la conclusion que les participants du programme ont 4,4 fois moins de risques de commettre une infraction grave en matière de conduite automobile et 3,9 fois moins de risques d'être impliqués dans une collision causant des blessures. La commande d'allumage contrôlée par alcootest apprend aux conducteurs avec facultés affaiblies à modifier leur comportement beaucoup plus efficacement que ne le font des peines d'emprisonnement ou d'autres programmes de traitement. Non seulement le dispositif empêche-t-il les personnes en état d'ébriété de prendre le volant mais, surtout, il leur apprend à éviter elle-mêmes de le faire.
Lorsqu'une personne a besoin de son véhicule pour aller travailler et qu'un juge estime qu'une suspension de permis serait une peine injustifiée, la commande d'allumage contrôlée assure au public une protection supplémentaire.
La police ne peut être omniprésente, mais la commande d'allumage contrôlée peut fonctionner jour et nuit. Dans la plupart des États et provinces, le dispositif est installé pour une période déterminée, mais je crois qu'il existe une meilleure solution. Nous pourrions rendre ce programme obligatoire jusqu'à ce que celui qui conduit avec des facultés affaiblies change son comportement. Certains le font en deux ou trois mois, tandis que d'autres n'y arrivent jamais. Ce sont ces derniers qu'il faut arrêter.
Ceux qui sont reconnus coupables de conduite avec facultés affaiblies, en particulier s'ils ont tué ou blessé quelqu'un, ne devraient pas pouvoir faire démarrer leur voiture, encore moins quand ils ont bu. Si le dispositif de verrouillage les empêche de mettre leur voiture en marche, ils ne risqueront pas de tuer des gens dans la rue. Et s'ils étaient pris à conduire un véhicule sans système de ceinture à interrupteur d'allumage, ils seraient mis en prison.
On ne remet pas une arme mortelle à un psychopathe déjà reconnu coupable de meurtre. Alors pourquoi laisser des conducteurs qui ont prouvé qu'ils ne respectaient pas la vie humaine continuer de conduire avec facultés affaiblies? Nous devions songer à inclure le système de ceinture à interrupteur d'allumage dans les incitatifs. Nous devons cela à Scott Wilson et aux centaines d'autres Canadiens qui sont tués chaque année par des conducteurs aux facultés affaiblies.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je dédie mon intervention à Sheena, qu'un conducteur avec facultés affaiblies nous a enlevée il y a quelques années. Une suspension du permis de conduire a d'ailleurs été imposée à ce conducteur.
Tout d'abord, je félicite MADD Canada, ou Mothers Against Drunk Driving. C'est une organisation de bénévoles engagés à corriger une situation qui est devenue intolérable. Un grand nombre des membres de MADD ont été victimes de problèmes ou de situations comparables à ceux qui ont été évoqués à la Chambre aujourd'hui.
La mission de Madd Canada consiste à mettre un terme à la conduite avec facultés affaiblies et à aider les victimes de ce crime violent. Peut-il y avoir mission plus honorable?
Il suffit de regarder autour de soi et de parler des statistiques liées à la conduite avec facultés affaiblies. Je sais que des chiffres ont déjà été mentionnés à la Chambre, mais je voudrais faire valoir un autre argument, car 4,5 Canadiens sont tués par des conducteurs en état d'ébriété toutes les 24 heures, chaque jour de la semaine. Au Canada, plus de 300 personnes sont blessées à chaque jour dans des accidents de véhicules liés à la consommation d'alcool, soit un Canadien à tous les cinq minutes. De 1983 à 1991, les conducteurs en état d'ébriété ont tué 17 630 Canadiens et en ont blessé 1,1 million.
Si ces décès et ces blessures étaient l'oeuvre de criminels se servant d'armes à feu, de violeurs ou d'autres individus qui commettent des actes répréhensibles, il y a longtemps que nous aurions adopté des lois pour prévenir ce genre d'actes. On se demande pourquoi, après toutes ces années, nous en sommes encore, en 1997, à demander à la Chambre des communes d'agir.
Un peu avant mon discours, je vous ai fait part de ma préoccupation et je veux y revenir. Nous, députés de la Chambre, devons insister sur la prise de mesures de la part du gouvernement, de la part de tous les députés de tous les partis. Toutefois, c'est au gouvernement qu'il incombe de mettre ces mesures en oeuvre. Les Canadiens ne peuvent continuer à attendre, à espérer et à demander que des mesures soient prises par quelqu'un quelque part. Si nous n'agissons pas maintenant, quand le ferons-nous? Et si nous ne le faisons pas ici à la Chambre des communes, où le ferons-nous?
Non seulement le problème de la conduite avec les facultés affaiblies a-t-il profondément touché notre famille, mais j'ai été touché par un certain nombre de tragédies causées par l'alcool avant de devenir député fédéral.
Je me souviens d'une personne qui avait été accusée à plusieurs reprises de conduite en état d'ébriété. Un dimanche, l'homme était encore une fois ivre lorsqu'il avait foncé avec son véhicule dans la clôture en grillage d'une école. À l'époque, j'étais secrétaire-trésorier. L'individu a tué plusieurs jeunes, en plus d'en blesser gravement un certain nombre.
Je me souviens que son avocat avait essayé à maintes reprises en cour de me faire dire que c'était un problème lié à la clôture. C'était la clôture, disait-il, qui n'était pas assez solide pour empêcher le conducteur ivre d'avoir accès à la cour d'école.
Il n'a pas remporté cette cause. Le conducteur a purgé une courte peine d'incarcération. Il est aujourd'hui en liberté, et conduit probablement encore en état d'ébriété.
Je me demandais alors pourquoi on pouvait penser que le problème, c'était la clôture. Pourquoi poursuivre un district scolaire ou une autre instance à cause des actes d'un homme irresponsable? C'est peut-être à ce moment-là que j'ai décidé de faire de la politique, pour changer quelque chose à cette attitude scandaleuse.
Je suis heureux de constater que les députés appuient cette motion. Elle explique bien la situation horrible qui existe au Canada.
Je travaille en ce moment avec un ami qui a perdu son beau-fils. Il va traverser le pays au printemps prochain pour sensibiliser le public au problème de la conduite en état d'ébriété.
Je voudrais vous lire une lettre qu'il m'a envoyée récemment. Le beau-fils de cet ami a été tué par un conducteur qui a pris la fuite et qu'on soupçonnait d'avoir été en état d'ébriété. Nous savons maintenant qu'il était ivre. Cet ami écrit dans sa lettre que rien ne va plus dans nos tribunaux. On ne mentionne pas la cause ni les personnes qui comparaissent. L'inculpé a comparu deux minutes. Il a quitté la salle du tribunal en toute liberté. En somme, on n'a rien dit aux parents. Une autre journée banale pour les tribunaux.
L'inculpé avait déjà été condamné pour conduite avec facultés affaiblies. Les incidents remontaient à 1984. Son permis a été suspendu six fois. Mon ami demande: «Comment a-t-on pu laisser un type comme ça reprendre le volant? Il a fini par tuer mon beau-fils. Il faut modifier la loi. Dans l'état actuel des choses, la loi tolère la conduite en état d'ébriété en permettant à ce lâche de tuer mon fils.» Voilà comment les citoyens réagissent. Je sais ce qu'ils ressentent.
Il faut réaffirmer la position du Parti réformiste là-dessus. Nos convictions ne doivent faire aucun doute.
Le Parti réformiste veut renforcer le Code criminel et d'autres lois fédérales pour lutter contre le fléau de la conduite avec facultés affaiblies. Notre objectif est de renforcer les mesures dissuasives et d'imposer un châtiment qui correspond mieux au crime. Un gouvernement réformiste ramènerait de 0,08 à 0,05 le taux d'alcoolémie toléré. Nous prolongerions ou éliminerions la limite de deux heures pour les prélèvements. Nous imposerions des peines plus lourdes, des amendes plus élevées, des peines de prison et des suspensions de permis plus longues. Nous fixerions des peines minimums et des restrictions plus longues sur la conduite pour les personnes reconnues coupables de conduite avec facultés affaiblies ayant causé la mort ou des blessures. Nous veillerions à ce qu'il n'y ait pas de libération conditionnelle avant que le contrevenant n'ait terminé avec succès un programme de traitement ou de réadaptation. Nous encouragerions les provinces à faire subir l'alcootest à des automobilistes au hasard, à titre de mesure de dissuasion. Nous encouragerions les provinces à saisir et à vendre les véhicules de ceux qui sont trouvés coupables de conduite avec facultés affaiblies pendant que leur permis est suspendu et à verser le produit de ces ventes dans un fonds de lutte contre la conduite avec facultés affaiblies.
J'imagine que l'on tient de tels propos à la Chambre depuis bien des années. Je sais que mes collègues sont sincères. Nous nous sommes penchés sur la question. Nous l'avons examinée avec des groupes d'un océan à l'autre. Le moment est maintenant venu d'agir à la Chambre. Il ne faut pas baisser les bras et renvoyer la question à un comité pour qu'il patauge autour de celle-ci, en espérant que le problème disparaîtra ou que l'on apportera des changements mineurs. Il est grand temps d'agir.
J'encourage mes collègues à exercer les pressions nécessaires sur ceux qui prennent les décisions en cet auguste endroit pour qu'ils empêchent les conducteurs aux facultés affaiblies de faire des victimes.
L'organisme MADD, Mothers Against Drunk Driving, préconise l'adoption d'une déclaration des droits des victimes. J'ai moi aussi étudié la question, non pas dans l'optique des victimes des conducteurs aux facultés affaiblies, mais dans celle des victimes d'autres crimes. Pareille déclaration conviendrait dans un cas comme dans l'autre.
Malheureusement, mon temps est écoulé. Je terminerai en disant qu'il faut exercer une influence sur cet endroit et aller au bout des choses cette fois-ci.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai apprécié les observations du député.
La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui traite expressément de la conduite avec facultés affaiblies et demande au gouvernement de présenter une motion tendant à charger un comité de rédiger un projet de loi qui traitera des mesures de prévention et des peines à la mesure de la gravité de l'infraction. Tous les députés devraient appuyer cette motion et j'espère qu'ils le feront. Elle transcende tout sectarisme politique.
Comme le député est le leader du Parti réformiste à la Chambre, je lui demanderais de nous faire bénéficier de ses conseils éclairés. Cela me coûte, mais je pense que c'est important.
Si la situation évolue comme elle le devrait et que le Comité de la justice se penche sur les mesures de prévention et les peines adéquates, il demandera très certainement l'avis de spécialistes d'un océan à l'autre. La question plus générale de l'abus d'alcool au Canada sera très certainement abordée. Il pourrait ressortir de ces travaux des recommandations pertinentes et importantes qu'il faudra aussi prendre en considération.
Le député appuierait-il ou proposerait-il, au nom du Parti réformiste, un amendement à sa motion qui permettrait à toute autre observation, recommandation ou mesure importante susceptible de découler des travaux du comité d'être renvoyée au comité permanent approprié pour que celui-ci en fasse un examen approfondi? Nous profiterions ainsi de l'élan créé par cette motion.
M. Randy White: Monsieur le Président, je ne vois pas d'objection à renvoyer une motion de la Chambre à un comité pour le charger de faire quelque chose.
On proposera très bientôt à la Chambre un amendement à la motion, approuvé par tous les partis, pour qu'un comité prépare un projet de loi dans un certain délai.
Pour répondre à la question du mieux que je peux, je dirai qu'il nous incombe à nous tous à la Chambre de veiller à ce que ce soit un projet de loi consolidé, complet, qui ne soit pas édulcoré, et qu'il nous soit présenté à la Chambre plus tard cet hiver ou au début du printemps prochain.
C'est ainsi que nous pourrons tous être fiers des mesures que nous prenons, malgré l'opposition que l'on pourrait trouver au Cabinet ou ailleurs.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une brève question à poser à mon collègue. J'ai écouté très attentivement son intervention. Il parlait du système judiciaire. Jamais je ne veux en parler en termes de système de justice, car les gens partout au Canada y voient plutôt un système d'injustice, qui semble être inhérente dans notre système juridique. Il faisait donc remarquer que le système judiciaire d'aujourd'hui ne savait pas tenir les gens responsables de leurs actes.
Pourrait-il élaborer un peu plus sur ce qu'il voulait dire en parlant de la conduite en état d'ébriété et de tous ces auteurs de crimes horribles alors que nous n'avons même pas de déclaration des droits des victimes au Canada pour rendre justice aux victimes de ces crimes?
M. Randy White: Monsieur le Président, je considère en effet que ce qui était autrefois un système de justice est aujourd'hui devenu une industrie juridique. Je le crois profondément.
Pour réussir à tenir les criminels responsables de leurs actes et à rendre le système judiciaire responsable, il faut nous préoccuper des droits des victimes. Il faut cesser de faire passer les droits des criminels avant ceux des victimes. Une fois que nous aurons adopté cet état d'esprit et que nous nous serons engagés dans cette voie, le pays s'en trouvera beaucoup mieux.
M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, la matinée a été très intéressante. Je suis du nombre des députés de ce côté-ci de la Chambre qui appuient très fortement la motion dont nous sommes saisis.
Le temps est venu pour les députés de s'entendre sur une question et de prendre une décision qui obtient l'appui de tous les partis. Cela contribuera non seulement à améliorer la loi, mais aussi à accroître le prestige de la Chambre des communes partout au pays.
Je me suis intéressé ces derniers temps à un certain nombre d'affaires criminelles. J'ai été surpris par les questions que les juges n'ont ni à aborder ni à examiner. S'ils commettent une erreur, ils ne peuvent en être tenus responsables. C'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles notre système juridique nous donne tant de mal.
Auparavant, nous considérions les juges comme des êtres pratiquement infaillibles qui prenaient des décisions que la population était en mesure d'appuyer. Quand nous analysons bon nombre des jugements rendus, nous nous demandons si les criminels ne sont pas ceux qui influent sur les tribunaux et leur imposent leurs volontés. Ont-ils plus de droits devant les tribunaux que les victimes? C'est l'impression que j'ai.
Certaines accusations de conduite avec facultés affaiblies sont presque incroyables. Il y a environ 15 ou 20 ans, des voisins ont vu une de leurs filles et deux de leurs petits-enfants perdre la vie dans un accident de la route sans qu'ils n'en soient responsables et sans que l'alcool n'entre en ligne de compte. Cette famille vit aujourd'hui des souffrances inimaginables. Nous, les députés en cette Chambre, sommes parfois incapables de voir les choses clairement, d'abonder dans le même sens et de comprendre toutes les souffrances qu'éprouvent nos concitoyens.
Mon discours ne sera pas trop long aujourd'hui, car je sais que d'autres députés veulent intervenir dans ce débat. Je souhaite vivement que la Chambre appuie la motion du député pour que nous que nous puissions examiner cette question en fonction de son effet sur les familles.
Je vais partager le temps mis à ma disposition avec un autre député. Veuillez donc avoir l'obligeance de m'arrêter au bout de dix minutes, monsieur le Président.
On considère trop souvent que les tragédies n'arrivent qu'aux autres. Au cours des allocutions prononcées aujourd'hui, j'ai entendu parler pour la première fois d'incidents qui ont marqué des familles ou des députés. Cela a probablement touché tous les députés d'une façon ou d'une autre, même si nous n'en savons rien ou s'il n'y paraît rien à prime abord. Quand je songe au stress émotionnel que cause au sein d'une famille le décès de la mère ou du père, je suis peiné pour les voisins que je rencontre tous les jours, chaque fois que je suis à la maison.
Les accidents causés par des conducteurs dont les facultés sont affaiblies pourraient si facilement être évités. L'homme dont je vous parle qui a conduit avec des facultés affaiblies avait probablement non pas un problème d'alcoolisme, mais des problèmes émotionnels découlant de problèmes financiers.
Souvent, on ne se rend pas compte de la souffrance qui pousse des familles ou plutôt des personnes à boire, comme on dit. Quand elles boivent, elles sont désillusionnées et essaient plus ou moins d'oublier leurs problèmes en sautant dans leur voiture pour aller chez quelqu'un ou au bar le plus proche et c'est là que l'accident se produit.
C'est triste qu'on se rende compte seulement après coup de la souffrance qui a entraîné cette tragédie. On devrait pouvoir évaluer l'incidence de la prévention ou l'effet bénéfique qu'elle pourrait avoir sur cela les tensions que subissent les familles sur le plan affectif et financier. Bien souvent, lorsque l'alcoolisme s'installe dans un ménage, il s'ensuit une mauvaise gestion. Souvent, ça se termine par un accident, que ce soit par suite de conduite avec facultés affaiblies ou d'autre chose.
Cela a été un honneur pour moi de dire quelques mots à la Chambre sur ce sujet. Je tiens à nouveau à exhorter la Chambre à examiner cette motion avec impartialité et à l'appuyer afin qu'il fasse encore mieux vivre au Canada.
[Français]
Le Président: Comme il est 14 h 00, nous allons maintenant procéder aux déclarations des députés. Je donne donc la parole au député de Mississauga-Sud.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LES PRÉPOSÉS AUX SERVICES D'URGENCE
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine, l'Association internationale des pompiers a tenu sa sixième conférence annuelle à Ottawa. Comme par le passé, un élément essentiel de sa visite était de rencontrer les parlementaires pour discuter de questions d'intérêt mutuel.
Plus particulièrement, elle a demandé aux parlementaires de se pencher sur l'établissement d'un fonds de fiducie de bienfaisance enregistré pour les familles des policiers et des pompiers tués dans l'exercice de leurs fonctions.
Les Canadiens sont fort conscients du risque que courent tous les jours ces agents de la sécurité publique en répondant à des situations d'urgence. Lorsque l'un d'entre eux perd la vie dans l'exercice de ses fonctions, nous pleurons tous sa perte.
L'établissement d'un fonds de fiducie de bienfaisance enregistré pourrait constituer une occasion concrète pour les Canadiens de rendre hommage au courage de ces hommes et de ces femmes et d'aider leurs proches dans ces moments difficiles.
J'invite donc tous les députés à songer sérieusement à l'établissement d'un tel fonds pour appuyer les policiers et pompiers du Canada, nos héros de tous les jours, d'un océan à l'autre.
* * *
LES ARMES À FEU
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement libéral a décidé de s'en prendre de nouveau aux propriétaires d'armes à feu respectueux des lois du Canada.
Le ministre des Affaires étrangères a dit publiquement être en faveur de l'adoption d'un traité international sur l'enregistrement et le contrôle des petites armes à feu ainsi que sur la limitation de leur utilisation.
Une fois de plus, le gouvernement libéral rate la cible. Plutôt que de lutter contre l'utilisation des armes à feu à des fins criminelles et de resserrer les contrôles à la frontière pour arrêter le trafic des armes de poing, le ministre préfère continuer de harceler les citoyens canadiens qui respectent les lois, allant même jusqu'à leur interdire l'utilisation de leur propriété privée.
Selon la rumeur, le ministre des Affaires étrangères serait vexé de ne pas avoir reçu le prix Nobel de la paix pour le traité sur les mines anti-personnel. Il ne devrait pas s'inquiéter puisqu'il est un candidat parfait pour le prix remis à celui qui a le plus foulé aux pieds les droits des Canadiens respectueux des lois. C'est honteux.
* * *
LE TRAVAIL DES ENFANTS
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine, à Oslo, à la conférence de l'Organisation internationale du travail, le Canada se joint à 39 pays, à des défenseurs des droits des enfants, à des représentants du monde du travail et à des dirigeants d'organismes multilatéraux, qui se sont réunis pour rédiger un plan d'action sur les mesures que la communauté internationale peut prendre pour protéger les enfants du monde entier contre toute forme d'exploitation par le travail.
Les objectifs du Canada sont clairs. Nous sommes déterminés à faire respecter pleinement les droits des enfants, à améliorer la santé des enfants grâce à de l'eau propre et à une bonne nutrition, et à améliorer l'accès à un enseignement de base de meilleure qualité, particulièrement pour les jeunes filles. Nous sommes aussi déterminés à protéger les enfants contre l'abus, l'exploitation et la violence.
Le financement versé par l'ACDI pour régler le problème de l'exploitation des enfants par le travail est axé sur des mesures préventives mettant l'accent sur la scolarisation, la garde des enfants et le renforcement du rôle des femmes dans la société.
* * *
[Français]
LE 2E ANNIVERSAIRE DU RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS
M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, il y a deux ans aujourd'hui se tenait au Québec un référendum sur la souveraineté. Un pourcentage sans précédent de plus de 93 p. 100 des gens ont voté, et cela, sans qu'aucun incident n'ait été signalé. La démocratie québécoise est exemplaire pour le monde entier.
Malgré ce match quasi nul entre l'option du oui et celle du non, nous avons tous respecté, au Québec, la volonté de 50,6 p. 100 de nos concitoyens et concitoyennes qui ont choisi de donner une dernière chance au régime fédéral canadien.
La réponse du Canada à cette demande ultime de changement des Québécois aura été le plan B, les menaces et le chantage, ainsi que la ridicule et insipide reconnaissance du caractère unique du Québec dans la déclaration de Calgary.
Devant tant de cynisme et de manque de respect, soyez assurés que la prochaine fois sera la bonne. Le peuple québécois va se donner un pays, et il le fera de façon démocratique dans le respect de ses différentes composantes, et dans la sérénité.
* * *
[Traduction]
LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui un jour important dans notre histoire parlementaire. En effet, c'est en ce jour qu'est lancée officiellement l'Association canadienne des parlementaires pour la population et le développement.
Cette association donnera aux parlementaires canadiens une chance unique de sensibiliser davantage les habitants de notre pays aux questions liées à la population et au développement et d'influencer les décisions pour qu'elles soient conformes aux engagements pris lors des conférences internationales et dans la politique étrangère canadienne.
Monsieur le Président, je veux vous remercier ainsi que les hauts fonctionnaires et les parlementaires du Royaume-Uni, de la Bolivie, de l'Asie et toutes les ONG qui ont contribué à faire de ce projet une réalité.
* * *
TAMARA OKEYNAN
M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président, aujourd'hui, dans ma circonscription, Wetaskiwin, la petite Tamara Okeynan sera inhumée dans le lieu de sépulture ancestral de la réserve indienne Hobbema.
Juste avant l'accouchement, ses parents, qui ne possèdent pas d'auto et qui n'ont pas le téléphone, ont essayé de marcher cinq kilomètres pour trouver quelqu'un qui les amènerait à l'hôpital. Malheureusement, la petite Tamara ne devait pas naître à l'hôpital. Le temps a manqué et la mère n'a pas pu accoucher dans une salle aseptisée d'un hôpital, mais l'a fait sur l'accotement d'un chemin de gravier. Pendant deux heures horribles, la mère et le père de Tamara ont vu passer des automobilistes qui sont restés sourds à leurs appels à l'aide.
Nous nous vantons d'être une nation chaleureuse à la fine pointe de la technologie. Pourtant, en dépit des vaillants efforts de ses parents, la vie a quitté la petite Tamara avant qu'elle ait eu la chance de profiter de ce que nous tenons tous pour acquis.
Je voudrais offrir mes condoléances et celles de tous les députés aux parents de Tamara, Paul et Lorna, ainsi qu'à leurs familles, qui n'ont pas pu connaître la petite Tamara.
* * *
LE CLUB D'AVIRON DE BROCKVILLE
M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Monsieur le Président, l'été dernier, cinq jeunes femmes du club d'aviron de Brockville ont affronté des concurrentes de partout dans le monde pour remporter la prestigieuse compétition pour femmes aux régates d'Henly, en Angleterre. À notre tribune aujourd'hui, il y a l'équipe championne composée de Jocelyn Swift, Caroline Vavro, Danielle Ker, Tami McBratney ainsi que de leur barreuse, Crystal Bois D'Enghien et de leur entraîneur, M. Chris Marshall.
Cette équipe championne perpétue la fière tradition du club d'aviron de Brockville et fait honneur à cette ville, à la circonscription de Leeds—Grenville ainsi qu'à tous ceux qui pratiquent l'aviron au Canada.
Ces jeunes femmes donnent à tous les jeunes un très bel exemple de travail d'équipe. Je suis heureux de féliciter ces jeunes athlètes et je leur souhaite tout le succès possible lors de leurs prochaines compétitions.
* * *
[Français]
M. RENÉ LÉVESQUE
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, René Lévesque est décédé le 1er novembre 1987, laissant derrière lui l'amour de tout un peuple, mais aussi un grand vide.
Il a fait redresser la tête aux Canadiens français «nés pour un petit pain», avec son projet de nationalisation de l'électricité. «Nous sommes capables» répétait à la ronde ce ministre, alors libéral et fédéraliste.
Il a transformé le mouvement indépendantiste en un parti politique populaire, le Parti québécois, avec lequel il a pris le pouvoir en 1976 et donné au Québec quelques-unes des lois qui l'ont marqué à jamais: la Loi sur le financement populaire des partis politiques, la Loi 101, la Loi sur le zonage agricole, la Loi sur la santé et sécurité au travail.
Il a eu la douleur de perdre le référendum de 1980, mais la grandeur de respecter le choix démocratique des Québécois, convaincu qu'un jour, ils se donneraient enfin un pays normal.
Comme le disait Félix Leclerc: «Il sera pour nous et pour toujours sur la courte liste des libérateurs de peuples.»
* * *
LE BLOC QUÉBÉCOIS
M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, certaines questions de la part du Bloc cette semaine me laissent un goût amer.
Je parle évidemment des questions concernant M. Deslauriers et des allégations non fondées quant à ses relations avec un groupe de motards criminalisé.
Je salue l'intégrité, la sagesse et la prudence du solliciteur général dans sa façon de répondre aux questions. Les Canadiens et les Canadiennes sont entre bonnes mains avec lui.
Je félicite également le député bloquiste de Chambly, qui a démontré ses convictions profondes, et qui a démontré qu'il est un homme de principe. Il n'est pas tombé sous le joug des tactiques malheureuses de son chef qui a tenté, encore une fois, de faire n'importe quoi pour se donner une raison d'être. Je suis d'accord avec le député de Chambly qui a dit, et je cite: «Je trouve triste des fois de briser des réputations par des questions, des interrogations, qu'on n'aurait peut-être pas besoin d'avoir ou de se poser.»
Je salue son courage. Il sauve la face de son parti aujourd'hui et j'invite le chef du Bloc à consulter son député de Chambly plus souvent.
* * *
[Traduction]
LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, il y a dix ans, un petit groupe de Canadiens qui avaient à coeur l'avenir de leur pays se sont rassemblés, ont discuté, ont voté et ont constitué un nouveau parti, le Parti réformiste du Canada. Moins d'un an plus tard, il récoltait 275 000 voix et, l'année suivante, il a connu un grand succès avec l'élection de son premier député, représentant Beaver River, et de Stan Waters, le premier sénateur élu au Canada.
Le message du Parti réformiste s'est propagé comme un feu de prairie, car les Canadiens voulaient un meilleur gouvernement. Menant la bataille entreprise pour que le gouvernement cesse de dépenser plus que ses moyens le permettent, pour définir un plan permettant d'unifier le pays, pour établir un système de justice solide, et pour amener les politiciens à rendre compte de leurs gestes, le parti a recueilli plus de 2,5 millions de votes et remporté 52 sièges à l'élection de 1993. Constituant aujourd'hui la loyale opposition de Sa Majesté, voués à l'édification d'un Canada meilleur et renouvelé, les réformistes envisagent l'avenir avec fierté, confiance et détermination. Nous saluons aujourd'hui le grand travail et le dévouement de centaines de milliers de...
* * *
[Français]
LA COMPAGNIE FONOROLA
M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, la compagnie Fonorola de Montréal investissait 100 millions de dollars en équipements de fibre optique pour aller de l'avant avec son projet de réseau de télécommunications de 12 000 kilomètres.
Cet investissement permet la création de quelque 150 nouveaux emplois chez Fonorola à Montréal. Ce genre d'investissement résulte de la confiance de nos industries dans la société canadienne. Je souhaite que cela ait un effet boule de neige pour inciter d'autres compagnies à participer activement à la relance économique.
Il me fait plaisir de souligner l'important apport du président de Fonorola, M. Jan Peeters, un citoyen de Bolton-Est, dans mon beau comté de Brome—Missisquoi. Je tiens à le féliciter pour son dynamisme et son travail acharné pour mettre en place un système qui, d'ici 1998, reliera le Canada dans son entier, d'un océan à l'autre.
Voilà qui est bien représentatif des citoyens de Brome—Missisquoi.
* * *
[Traduction]
L'ÉQUITÉ SALARIALE
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, à travail égal, salaire égal, voilà qui semble bien évident. Ce n'est pas le cas cependant, du moins pour ce gouvernement qui continue à nier et à défier sa propre loi.
Aujourd'hui à Halifax, des femmes de ma circonscription se sont unies à d'autres femmes de toutes les régions du pays pour insister que le gouvernement joigne le geste à la parole lorsqu'il est question d'égalité. Les femmes employées dans la fonction publique attendent depuis longtemps le traitement rétroactif qui leur est dû selon la législation sur les droits de la personne et la parité salariale, de manière à ce que le travail qu'elles ont accompli qui est de valeur égale au travail accompli par des hommes soit rémunéré selon le principe de la parité salariale. Le gouvernement aurait dû veiller à ce qu'il en soit ainsi avant de décider de distribuer généreusement 12,1 millions de dollars en primes pour les hauts fonctionnaires.
En 1973, Rosemary Brown écrivait: «Tant que nous n'aurons pas toutes réussi, personne d'entre nous n'aura réussi.».
Tant que le gouvernement n'aura pas réglé cette dette, il continuera à nier l'égalité à toutes les Canadiennes. C'est maintenant, aujourd'hui, qu'il faut le faire, car justice différée est justice refusée.
* * *
[Français]
LE SÉNATEUR JEAN-ROBERT GAUTHIER
M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui marque le 25e anniversaire de vie parlementaire de l'honorable Jean-Robert Gauthier.
Élu pour la première fois, le 30 octobre 1972 au Parlement d'Ottawa, dans la circonscription d'Ottawa—Vanier, Jean-Robert Gauthier fut réélu consécutivement six fois avant d'être nommé à la Chambre haute en 1994.
Grand défenseur des Franco-Ontariens et de la langue française, il a laissé sa marque dans une communauté qui n'éprouve que du respect pour lui.
C'est pour souligner cette contribution que la Fondation franco-ontarienne lançait, hier, le Fonds Jean-Robert-Gauthier. Ce fonds remettra des bourses aux étudiants franco-ontariens ayant fait preuve d'excellence dans la langue française.
J'en profite donc pour féliciter cet homme pour qui j'ai beaucoup d'admiration, l'honorable sénateur Jean-Robert Gauthier.
* * *
[Traduction]
LES AÎNÉS
M. Mark Muise (West Nova, PC): Monsieur le Président, le gouvernement libéral a privé les aînés de leur dignité. Le gouvernement libéral ne voit rien de mal à réduire les prestations de la sécurité de vieillesse, du supplément de revenu garanti et du Régime de pensions du Canada. Le gouvernement libéral, encouragé par ses copains du Parti réformiste, croit qu'il n'y a pas de mal à sabrer dans les paiements de transfert aux provinces et à provoquer ainsi la fermeture d'hôpitaux et la réduction des services.
Au cours des quatre dernières années, les aînés ont été témoins de coupes sans précédent, tandis que le coût de la vie ne cesse de grimper. De plus, les aînés de la Nouvelle-Écosse sont accablés aujourd'hui par la taxe de vente harmonisée, qui fait augmenter considérablement le coût des nécessités de la vie comme le mazout, l'électricité, les services téléphoniques et l'essence.
Le 2 juin, les Néo-Écossais ont fait comprendre au gouvernement libéral qu'il n'était pas acceptable de traiter nos aînés avec tant de mépris. Il est temps que les libéraux mettent fin à leur concours de mesures d'austérité avec le Parti réformiste et qu'ils commencent à reconnaître le désarroi d'un segment de la société canadienne qui grandit rapidement.
Au nom des aînés de West Nova, je vous prie de mettre fin aux compressions.
* * *
MIRAMICHI
M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Monsieur le Président, on annonçait dans le budget de 1994 que la base de Chatham allait fermer. Cela représentait une perte d'un millier d'emplois pour la collectivité de Miramichi, et la disparition de plus de 50 millions de dollars en dépenses gouvernementales annuelles. Cette mesure est survenue à un moment où la collectivité de Miramichi faisait face à un taux de chômage de 25 p. 100 et où elle souffrait déjà gravement d'autres compressions fédérales.
Je suis heureux de signaler aujourd'hui que Miramichi a refusé de baisser les bras devant cette perte. Les autorités locales, la province de Nouveau-Brunswick et notre ancien premier ministre, Frank McKenna, ont déployé de gros efforts pour surmonter les difficultés qui nous assaillaient.
Aujourd'hui, Skypark Miramichi, l'ancienne base de Chatham, accueille plus d'une douzaine de nouvelles entreprises qui se débattent pour survivre. L'été dernier, les logements familiaux ont été convertis en un complexe domiciliaire pour retraités. Des gens de toutes les régions du Canada viennent à Miramichi pour profiter des attraits touristiques de la région et des nombreuses commodités que notre communauté a à offrir.
Les habitants de Miramichi luttent pour surmonter la mauvaise fortune qui s'abat sur eux depuis quelques années et travaillent à bâtir une économie encore meilleure pour notre région.
* * *
L'IVRESSE AU VOLANT
M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton, Lib.): Monsieur le Président, chaque jour, au Canada, des conducteurs ivres causent des tragédies. Selon l'organisation Mothers Against Drunk Driving, chaque jour, plus de quatre Canadiens sont tués dans des accidents liés à la consommation d'alcool.
Même si la décision de consommer de l'alcool est de nature privée, le fait de conduire après avoir consommé de l'alcool ou d'autres drogues est de nature publique. Personne n'est à l'abri des torts que des conducteurs en état d'ébriété peuvent causer aux familles et aux amis. On a pu le constater, en août dernier, lorsque le monde a été témoin des résultats tragiques d'un accident d'automobile, à Paris, dans lequel la princesse de Galles, Diana, a perdu la vie.
Enfin, je voudrais demander à mes collègues de faire de cette question une priorité immédiate.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
L'ENVIRONNEMENT
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière, les libéraux ont déclaré que leur plan concernant les émissions de gaz à effet de serre allait entraîner des coûts. Dans le Globe and Mail d'aujourd'hui, des hauts fonctionnaires du gouvernement disent que ces coûts pourraient, en fait, absorber tout excédent budgétaire éventuel.
Comment le premier ministre compte-t-il payer pour l'entente conclue à Kyoto, en augmentant les impôts ou en pillant l'excédent?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, notre position tient compte de tous les éléments de la proposition. Il n'est pas question d'avoir une politique qui ne traite pas du problème de l'environnement qui menace le monde.
Tous les pays sont invités à apporter leur contribution et le Canada estime qu'il doit le faire. Et nous le ferons de façon responsable. Je suis persuadé que le Canada peut avoir une bonne croissance et en même temps protéger son environnement.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre dit que nous devons apporter une contribution, et c'est ce que nous faisons. Cependant, le sommet de Kyoto approche. Il commencera dans à peine 32 jours et le Canada est le seul pays du G7 qui n'a pas encore fait connaître sa position. Les libéraux ne veulent peut-être pas divulguer leur plan parce que nous saurons alors exactement combien l'entente de Kyoto va nous coûter.
Je demande donc encore une fois au premier ministre si le prix à la pompe va augmenter de 10 ¢, de 20 ¢ ou de 30 ¢ le litre?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les recherchistes de la députée d'Edmonton-Nord sont bien connus pour leur incompétence. Je tiens à dire à nouveau qu'il est typique de la part du Parti réformiste de vouloir agiter un épouvantail.
Nous disons que nous allons agir de façon responsable, que nous devons contribuer à la protection de l'environnement de la planète tout en veillant à ce que le Canada ait une bonne croissance, comme c'est le cas depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, il peut parler de la recherche effectuée par les réformistes aussi longtemps qu'il le veut, mais ces chiffres viennent du Conference Board du Canada.
Les Canadiens en ont assez de ces réponses qui n'en sont pas. Nous sommes à 32 jours de cette conférence et les Canadiens ne savent pas à quoi s'en tenir. Il est honteux que la solidarité ministérielle ait des répercussions sur le prix de l'essence.
Je demande une fois de plus au premier ministre de ne pas se cacher et de ne pas éviter la question, mais d'y répondre. Combien va nous coûter l'entente de Kyoto?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tous les pays du monde vont se rendre à Kyoto. Ils comprennent tous qu'ils doivent apporter leur contribution. Tout le monde, à part le Parti réformiste du Canada, comprend que le problème est grave.
* * *
LA FISCALITÉ
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, nous savons que le premier ministre est prêt à assommer les consommateurs dans l'intérêt de ses amis diplomates, mais quel est le rôle du ministre des Finances dans tout cela? Il semble se faire bien petit. C'est pourtant lui qui contrôle le levier de la machine à taxer. Va-t-il tirer sur le levier ou est-ce la ministre de l'Environnement qui dirige les finances maintenant?
Jusqu'où le ministre poussera-t-il les taxes?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a démontré l'efficacité de son esprit d'équipe. Nous avons réussi à équilibrer les finances en quatre ans. Une petite publication, The Economist, indiquait cette semaine que de tous les pays du G7, le Canada est celui qui gère le mieux ses finances.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, les libéraux poussent les hauts cris lorsque le prix de l'essence fluctue de quelques cents à l'époque de la fête du Travail, mais lorsque le ministre des Finances, ou à moins que ce ne soit la ministre de l'Environnement ou qui que ce soit qui dirige les finances à l'heure actuelle, décide d'augmenter à jamais le prix du litre d'essence de 30 ¢, le gouvernement en impute la responsabilité à Rio, à moins que ce ne soit à Kyoto.
Pourquoi le premier ministre ou le ministre des Finances ne mettent-ils pas un terme à toutes les spéculations? Pourquoi n'écarte-t-il pas immédiatement toute hausse du prix de l'essence?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, voilà une autre invention des réformistes. Comme ils ne peuvent rien trouver de concret, ils se servent de leur piètre imagination et parlent de hausse du prix de l'essence. Les Canadiens savent cependant à quel point les réformistes sont peu sérieux. Ils tentent d'inventer des problèmes. Nous avons suffisamment à faire pour résoudre les vrais problèmes. Nous le faisons d'ailleurs tellement bien que les réformistes doivent en inventer pour s'en prendre au gouvernement.
* * *
[Français]
L'ENVIRONNEMENT
M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
La plupart des pays ont fait connaître leur position quant aux objectifs en matière de réduction de gaz à effet de serre, objectifs qui seront présentés à la conférence de Kyoto qui aura lieu dans quelques semaines.
Compte tenu qu'on ne connaît toujours pas la position du Canada, la question qui se pose maintenant, c'est quand le gouvernement canadien entend-il arrêter définitivement la position qu'il présentera à Kyoto?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, certainement avant la conférence de Kyoto.
M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, compte tenu que la position canadienne doit s'appuyer sur les provinces, puisque c'est un domaine qui relève largement d'elles, quelle stratégie le fédéral entend-il mettre en place pour obtenir un consensus sur la position à défendre à Kyoto et sur son implication et son application par la suite?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est ce que mes ministres font à ce moment-ci. Ils ont rencontré les ministres responsables et nous discutons avec les provinces. Nous discutons avec les secteurs de l'énergie, nous discutons aussi avec le secteur industriel qui veut contribuer, et avec les gens qui soutiennent la protection de l'environnement.
Nous aurons une position qui, nous l'espérons, sera acceptable pour tous les Canadiens.
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
On sait que les provinces canadiennes ne produisent pas toutes la même quantité de gaz à effet de serre. L'Alberta, par exemple, avec 9 p. 100 de la population canadienne, contribue pour 27 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre produites au Canada.
Quelle stratégie le gouvernement fédéral entend-il adopter pour convaincre les provinces les plus récalcitrantes de participer à l'effort collectif en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous discutons avec toutes les provinces qui ont des problèmes. Au Canada, les problèmes ne sont pas toujours exactement les mêmes d'une province à l'autre.
Je pense qu'aussi bien le gouvernement de l'Alberta que les citoyens de la province de l'Alberta veulent apporter leur contribution, parce que les gens responsables savent qu'il est important de s'attaquer à ce problème qui menace bien des gens dans le monde.
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, pour ne pas répéter l'expérience de Rio, comment le gouvernement fédéral va-t-il s'assurer cette fois-ci que toutes les provinces vont adhérer formellement aux objectifs qui auront été fixés à Kyoto, quand on sait qu'après Rio, seul le Québec et la Colombie-Britannique ont donné suite aux ententes?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis un peu déçu que la députée me dise que le gouvernement canadien n'ait pas bien travaillé à Rio, parce que le ministre qui représentait le gouvernement canadien à cette époque, si je ne fais pas erreur, était M. Lucien Bouchard.
* * *
[Traduction]
L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR LES INVESTISSEMENTS
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
Des représentants d'ONG canadiennes qui viennent de rentrer de réunions de l'OCDE à Paris confirment que le texte provisoire de l'accord multilatéral sur les investissements est pratiquement arrêté.
Le gouvernement affirme aux Canadiens que notre régime de santé, nos programmes sociaux, nos normes environnementales et professionnelles, ainsi que notre culture seront protégés, mais à huis clos, à Paris, les négociateurs canadiens ne se sont pas battus pour obtenir une telle protection.
Le premier ministre peut-il confirmer que c'est la raison pour laquelle il n'y a pas eu de progrès sur ces protections essentielles?
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il n'est pas exact de dire que le texte est arrêté.
Comment peut-elle prétendre que les négociations étaient secrètes alors que, la semaine dernière, l'OCDE avait invité plus de 40 organisations internationales, y compris le Conseil des Canadiens?
Certaines personnes voudraient que l'on se coupe du monde: pas de commerce, pas d'investissements, pas de règles et, éventuellement, pas d'emplois.
C'est peut-être sa position, mais ce n'est certainement pas celle du gouvernement, car les Canadiens désirent et méritent beaucoup mieux.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, c'est exactement en raison de l'importance du commerce et de l'investissement que nous avons besoin de règles satisfaisantes, de règles qui répondent aux besoins du Canada.
La semaine dernière, le ministre du Commerce disait à la Chambre qu'il appuyait des engagements fermes en matière de normes professionnelles et environnementales. Aujourd'hui, nous apprenons que l'accord multilatéral sur les investissements ne comporte pas de telles protections.
Est-ce que le premier ministre peut garantir aux Canadiens que son gouvernement refusera de signer un accord multilatéral sur les investissements qui ne comporterait pas de normes obligatoires en ce qui concerne le travail et l'environnement?
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je pense qu'il est juste de dire que le Canada a des normes du travail et des normes environnementales qui sont parmi les plus strictes dans la communauté internationale.
Il est certain que nous n'allons brader ni le travail ni l'environnement. De toute évidence, l'AMI ne sapera pas les lois et règlements que nous avons et qui régissent ces deux domaines.
La députée veut que nous abdiquions et que nous nous retirions des négociations, mais cela ne ferait progresser en rien les intérêts des travailleurs ou ceux de l'environnement. Notre intérêt est de participer, de défendre notre position et nos principes, plutôt que de nous enfuir.
Là encore, c'est peut-être sa position, mais ce n'est pas la nôtre.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, je profite de cette occasion pour corriger le premier ministre qui a dit que M. Bouchard était le ministre de l'Environnement lors de la conférence de Rio. C'était moi. Je regrette de devoir dire que ce n'est un compliment ni pour M. Bouchard ni pour moi.
À en juger par le flou de la position du gouvernement, il doit y avoir beaucoup de brouillard au Cabinet par les temps qui courent. J'aimerais aider les libéraux à y voir plus clair et leur demander si la position qu'ils présenteront à Kyoto sera en faveur d'un système de permis de polluer négociables tel que recommandé par la Commission de coopération environnementale organisée par l'ALENA et dont le ministre de l'Environnement est membre.
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Je crois savoir que le dossier avait été préparé par M. Bouchard et qu'il l'avait donné au député. Je suis désolé de vous avoir associé l'un à l'autre, mais je n'avais pas le choix.
Pour répondre à la question du député, je dirai oui, c'est l'une des choses que nous voulons faire, nous assurer qu'on mette à notre crédit les choses que nous faisons. Très souvent, nos actions aident les autres à régler leurs problèmes et nous essayons de nous en faire attribuer le mérite; ainsi, lorsque nous viendrons à l'aide de quelqu'un, le mérite en reviendra aux Canadiens, comme dans le cas de l'Alberta qui vend du gaz naturel aux Américains pour...
Le Président: Le député de Sherbrooke.
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, de toute évidence, le brouillard ne s'est pas dissipé, le premier ministre n'a pas compris ma question.
Je lui ai demandé si le gouvernement allait proposer la mise en place d'un système de permis de polluer négociables entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, comme l'a recommandé le groupe tripartite sur l'environnement.
Ensuite, est-ce que le gouvernement proposera un système qui nous permettra de faire reconnaître nos efforts dans d'autres pays?
Et enfin, notre position fera-t-elle place aux différences régionales afin que l'Alberta soit traitée équitablement?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je viens de dire que je pense que nous devons faire reconnaître ce que nous faisons pour les autres. Cela ne se limite pas uniquement au Mexique et aux États-Unis. Nous aimerions que cela s'étende à d'autres pays.
Quant à savoir si ça se fera par industrie ou par région, la question est à l'étude.
* * *
LA LOI ANTITABAC
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Santé est en train d'affaiblir la loi antitabac. Cette fois-ci c'est pour accommoder la course automobile, la prochaine fois ce sera pour le tennis, ensuite pour les festivals de jazz, puis pour les épreuves d'équitation.
Le ministre sait pertinemment qu'il est sur la mauvaise voie. Pourquoi a-t-il choisi de se mettre à plat ventre et de ramper devant les grandes compagnies de tabac, au lieu de s'acquitter de ses responsabilités de ministre de la Santé?
L'hon. Allan Rock (Etobicoke-Centre, Lib.): Monsieur le Président, les nouveaux rédacteurs du Parti réformiste rédigent non seulement des textes de fiction, mais ils le font de façon très colorée.
Le député était ici l'an dernier lorsque le gouvernement a déposé puis adopté la loi antitabac la plus sévère du monde occidental. Au cours des cinq prochaines années, des efforts et des sommes considérables seront fournis dans le cadre de cette mesure, de façon à coordonner l'initiative menée à l'échelle du pays pour réduire la consommation de tabac et convaincre les jeunes de ne pas commencer à fumer. Tel est notre objectif.
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, le ministre tient des propos plutôt fermes.
Je vous lis une déclaration faite par le précédent ministre de la Santé: «Quelles que soient les intentions des compagnies de tabac, leurs riches campagnes de publicité atteignent la jeunesse.» Par la suite, les libéraux ont envoyé en sourdine une lettre aux équipes de course automobile juste avant les élections. Pour quelle raison? Pour leur accorder une exemption.
Je suis convaincu que, dans son for intérieur, le ministre de la Santé sait que cela n'est pas correct. Pourquoi n'a-t-il tout simplement pas dit «pas question»?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement respecte ses engagements. Nous avons pris cet engagement et nous allons le tenir.
* * *
[Français]
L'ENVIRONNEMENT
Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de l'Environnement.
On comprend fort bien que la position canadienne dans le contrôle des gaz à effet de serre doit s'appuyer sur les provinces, mais on s'inquiète de ne pas connaître le point de vue du gouvernement fédéral à ce propos.
La ministre de l'Environnement peut-elle nous assurer que la position du gouvernement fédéral en matière de contrôle des gaz à effet de serre ne risque pas de s'apparenter à celle des États-Unis, qui est beaucoup trop modeste, compte tenu des enjeux?
[Traduction]
L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le respect des délais et l'atteinte des objectifs nationaux incombent à tous les intervenants et partenaires. Le gouvernement fédéral devra assumer ses responsabilités, tout comme ses partenaires tels que les entreprises, industries, municipalités et particuliers, dont un bon nombre le font déjà.
[Français]
Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, considérant que les conséquences de l'effet de serre seront particulièrement graves, évidentes et rapides pour ce qui est du fleuve Saint-Laurent, la ministre fédérale entend-elle utiliser cet exemple pour convaincre les pays participants à Kyoto, notamment les États-Unis, de l'urgence d'agir?
[Traduction]
L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, les scientifiques laissent entendre que les répercussions pourraient être énormes pour un grand nombre de secteurs de notre économie. Les changements climatiques pourraient avoir une incidence sur nos ressources naturelles, y compris les forêts, l'eau, les pêches, l'agriculture, ainsi que sur de nombreux autres secteurs.
Notre gouvernement travaillera fort pour sensibiliser les Canadiens à ces questions et pour faire en sorte que nous réagissions de la façon qui convient face à la crise.
* * *
L'AFFAIRE AIRBUS
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, hier, le solliciteur général a dit à la sortie de la Chambre qu'on ne pouvait pas empêcher le sergent d'état-major Fiegenwald de quitter la GRC, mais c'est faux. La Loi sur la GRC contredit son affirmation.
Le gouvernement peut-il me dire ce qui devrait empêcher les Canadiens de croire qu'on cherche encore ainsi à camoufler les faits de l'affaire Airbus?
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens devraient se rendre compte que ce n'est pas du camouflage, parce que toute l'affaire a été traitée, comme il se devait, conformément aux dispositions de la Loi sur la GRC, sans aucune ingérence politique.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, de toute évidence, le solliciteur général ignore tout de la Loi sur la GRC ou des pouvoirs du commissaire.
Le sergent d'état-major Fiegenwald a été forcé de partir. Le gouvernement dit maintenant que le dossier est clos. Qui le gouvernement tiendra-t-il responsable d'avoir bâclé l'affaire contre Brian Mulroney?
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux que citer le communiqué de presse du sergent d'état-major lui-même, qui disait qu'il avait accepté un autre emploi qu'il était très heureux d'avoir obtenu.
* * *
[Français]
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
Le Manuel de gestion des ressources humaines du ministère des Affaires étrangères stipule clairement, et je cite: «Aucun employé du ministère n'est autorisé à accorder des entrevues ou à prononcer des discours sur des sujets prêtant à controverse, à moins d'avoir obtenu une autorisation préalable.»
Qui, dans le gouvernement, a donné l'autorisation à l'ambassadeur Jacques Roy de s'associer au Conseil de l'unité canadienne pour sa tournée de promotion de l'unité nationale au Québec?
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, c'est la pratique d'inviter nos ambassadeurs à l'étranger à venir au Canada nous expliquer toutes les initiatives, les travaux et les réalisations du Canada, pour faire la démonstration de la grande valeur de notre pays et montrer le genre de choses que nous pouvons faire pour le reste du monde.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, comment le gouvernement peut-il expliquer que, en dépit du fait que ce même Manuel du ministère des Affaires étrangères énonce que «la neutralité de la fonction publique revêt une importance fondamentale, et tous les employés ont un intérêt immédiat à la préserver», Jacques Roy s'implique directement dans le combat politique au Québec et au Canada?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux m'empêcher de répondre à cette question, parce qu'il n'y a pas très longtemps, on a exigé des agents généraux du gouvernement du Québec qui ne voulaient pas prêter serment à la cause de quitter leur poste.
On n'a aucune leçon à recevoir du Parti québécois, ni du Bloc québécois.
* * *
[Traduction]
LA CHINE
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, la torture pendant l'emprisonnement de dissidents politiques est toujours pratiquée dans l'ombre de la place Tiananmen. Hier, le président des États-Unis a dit très clairement et carrément au président Jiang Zemin que les Américains étaient absolument consternés par les violations des droits de la personne dans ce pays.
Quand le premier ministre dira-t-il carrément au gouvernement de la Chine que les Canadiens sont consternés par les violations des droits de la personne qui y sont commises actuellement et quelle sera la teneur de son message?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le député sait peut-être que nous avons négocié directement un accord avec le gouvernement chinois pour traiter expressément des violations des droits de la personne. En vertu de cet accord, nous avons tenu avec le président de la Chine deux importantes séances de dialogue au cours desquelles nous avons soulevé la question de la violation des droits de la personne. En fait, au cours de ce dialogue qui a eu lieu il y a deux semaines, nous lui avons remis une liste précise de tous les dissidents politiques et demandé qu'ils soient libérés.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, cela est très bien, mais je me demande si cette mesure suppose de ne pas signer une déclaration des Nations Unies qui reprochait à la Chine ses violations des droits de la personne. C'est la première fois que le Canada n'a pas signé une déclaration de ce genre.
Encore une fois, quelles mesures concrètes le premier ministre va-t-il présenter au président de la Chine pour montrer à la population canadienne que nous, les Canadiens, sommes consternés et dégoûtés par les violations des droits de la personne qui sont commises là-bas en ce moment?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le député sait parfaitement bien que le moyen le plus efficace d'apporter des réformes dans le dossier des droits de la personne est de constituer les ressources nécessaires au sein du gouvernement lui-même et au sein du pays en question.
Ainsi, en vertu de l'accord que nous avons signé, nous aidons à réformer le régime juridique afin de mettre sur pied un programme d'aide juridique pour la formation des juges. Aux termes de l'accord, nous avons la possibilité de nous rendre au Tibet et de traiter directement de la question de la discrimination religieuse. En outre, la Chine vient de signer la convention des Nations Unies sur les droits économiques et sociaux, qui constitue une de nos priorités, soit d'amener la Chine à signer l'accord sur la convention des Nations Unies.
En quatre ou cinq mois, je pense que nous avons pu réaliser...
Le Président: La députée de Drummond.
* * *
[Français]
LA LOI SUR LE TABAC
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre de la Santé a annoncé qu'il s'engageait à déposer des amendements à sa loi antitabac, dans le but de permettre la diffusion du Grand Prix du Canada.
Le ministre peut-il nous dire clairement si oui ou non il s'engage à prendre les mesures nécessaires pour soutenir les autres événements sportifs et culturels?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui au moins la cinquième fois que je précise la position de ce gouvernement sur cette question.
Comme je l'ai dit hier et la semaine dernière, nous avons l'intention de respecter l'engagement que nous avons pris, il y a quelques mois. Nous attendons avec impatience la nouvelle loi sur le tabac du gouvernement du Québec.
* * *
[Traduction]
LA RECHERCHE MÉDICALE
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé.
À mon bureau j'ai un dossier volumineux que m'ont fait tenir des spécialistes de la recherche médicale. Ceux-ci s'inquiètent de ce que le Canada tire beaucoup de l'arrière sur les autres pays membres du G7 en ce qui concerne la recherche médicale.
Qu'est-ce que le ministre de la Santé peut dire à ces gens pour qu'ils ne fuient pas au sud de la frontière où l'on consacre énormément d'argent à la recherche médicale?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement s'est engagé à préserver la réputation mondiale dont jouit la recherche médicale au Canada. Le Conseil de recherches médicales est reconnu dans le monde entier pour son excellence, qui fait l'envie des autres pays et, ces derniers années, le gouvernement a pris des mesures visant à assurer le maintien de cette excellence.
Permettez-moi de mentionner deux de ces mesures. Premièrement, nous avons créé un réseau national de centres d'excellence en matière de recherche médicale et lui avons accordé un financement stable. Deuxièmement, par l'entremise de la Fondation pour l'innovation, nous sommes en train de mettre en place l'infrastructure de la recherche de demain.
Nous ferons encore bien d'autres choses. Nous ferons en sorte de maintenir...
Le Président: La parole est au député de Yellowhead.
* * *
LES AÉROPORTS
M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, en juillet, la cour fédérale a décidé que les aéroports de Jasper et Banff devraient rester en service. Malgré l'ordonnance de la cour, les fonctionnaires de Parcs Canada ont pénalisé des pilotes qui atterrissaient sur ces pistes avec leur appareil.
Le secrétaire d'État responsable de Parcs Canada peut-il expliquer à la Chambre pourquoi ses fonctionnaires ont délibérément enfreint la loi?
L'hon. Andy Mitchell (secrétaire d'État (Parcs), Lib.): Monsieur le Président, Parcs Canada n'a pas enfreint la loi. Ce que la cour a dit, c'est que ces aéroports ne pouvaient pas être fermés. Ils ne l'ont pas été. La question est devant les tribunaux. Disons simplement qu'on ne peut les utiliser tant qu'une décision n'aura pas été rendue. C'est ce à quoi nous avons veillé et ce à quoi nous veillerons.
M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, il y a une injonction de la cour. Pour moi, résister à une injonction, c'est enfreindre la loi.
Depuis que la ministre du Patrimoine canadien a fermé ces aéroports, il y a eu au moins une demi-douzaine d'atterrissages d'urgence. Faut-il qu'il y ait des victimes pour que la ministre du Patrimoine canadien assume pleinement ses responsabilités et crache de l'argent ou bien se défile?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, les gens peuvent atterrir n'importe où en cas d'urgence.
* * *
LE COMMERCE
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.
En répondant à la leader de mon parti un peu plus tôt, il semble que le ministre était prêt à répondre à une question qui ne lui avait pas été posée. S'il a eu le temps de réfléchir à la véritable question, pourrait-il maintenant nous donner sa réponse?
Le ministre peut-il nous dire si oui ou non, à la table de négociation de l'Accord multilatéral sur l'investissement, le Canada insistera pour que soit adopté un noyau de normes obligatoires et coercitives sur le travail et l'environnement? Est-ce que le gouvernement entend, oui ou non, adopter cette position?
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, ce que j'ai dit plus tôt au leader du député, c'est que le Canada et son présent gouvernement possèdent les normes les plus rigoureuses au monde en matière de travail et d'environnement. En outre, les négociateurs canadiens sont absolument disposés à défendre les deux dossiers pour que des normes fassent partie intégrante de l'AMI.
Enfin, c'est justement le but de l'AMI. Nous ne voulons pas que les pays en développement appliquent des normes si faibles qu'ils attireront tous les investissements. L'objectif est d'établir des normes exigeantes et des règlements valables afin que la donne soit équitable pour les deux...
Le Président: Le député de Winnipeg—Transcona a la parole.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, en nous disant que les normes seront intégrées à l'accord, le ministre ne nous dit pas qu'elles seront obligatoires et coercitives.
Il attire notre attention sur le risque de voir les pays en développement adopter des normes moins rigoureuses et disposer ainsi d'un avantage concurrentiel injuste. C'est précisément pourquoi il faut exiger un ensemble fondamental de normes coercitives sur le travail et l'environnement. Voilà pourquoi nous voulons que ce soit la position du gouvernement. Nous voulons savoir si cela est effectivement la position du gouvernement.
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, j'espère qu'il fera aussi des démarches auprès des gouvernements socialistes et du gouvernement travailliste de la Grande-Bretagne pour obtenir que ces 29 pays adoptent des normes rigoureuses sur le travail et l'environnement.
Je souligne aussi au député que les négociations sont déjà en cours. Elles se poursuivront plus activement de janvier à avril. Nous allons insister autant que nous le pourrons.
* * *
LES PÊCHES
M. Charlie Power (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, ma question a trait à l'utilisation absurde des règles par le gouvernement du Canada pour créer délibérément et sciemment du chômage à Terre-Neuve et dans toute la région de l'Atlantique.
La récupération de la fraction des gains dépassant...
Le Président: Je sais que le député veut poser la question de son mieux, mais, comme on a déjà employé le terme «délibérément» deux fois aujourd'hui, j'inviterais le député à s'abstenir de l'employer. Le député peut continuer.
M. Charlie Power: Je regrette, monsieur le Président.
Il existe dans l'administration fédérale des règlements qui ont créé du chômage dans la région de l'Atlantique et plus particulièrement à Terre-Neuve. La récupération, en totalité, de la fraction des gains des pêcheurs dépassant 26 000 $ place les pêcheurs dans la situation où ils doivent tout simplement cesser de pêcher. Cela finit évidemment par entraîner des mises à pied dans l'industrie de la transformation du poisson.
Ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Va-t-il modifier ces règles absurdes, comme l'ont demandé le gouvernement de Terre-Neuve et le syndicat des pêcheurs de Terre-Neuve, afin que les Terre-Neuviens qui peuvent travailler puissent le faire?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous avons examiné la situation des pêcheurs de Terre-Neuve dans le cadre de la réforme générale du régime d'assurance-chômage. Il s'est agi d'une réforme de grande envergure. Nous avons examiné tous les problèmes qu'on nous a signalés. Au premier anniversaire de la mise en oeuvre de cette réforme, on déposera un rapport complet sur tous les aspects du régime.
Nous sommes très fiers de la réforme que nous avons accomplie. Le nouveau régime est mieux adapté au marché du travail de notre pays.
M. Charlie Power (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, le ministre refuse tout simplement de remédier au problème, à moins qu'il n'y soit pas disposé ou qu'il en soit incapable.
Quand les capitaines cessent de sortir leurs bateaux, les pêcheurs cessent de pêcher et les travailleurs d'usine sont mis à pied. L'effet domino crée plus de chômage dans une région du Canada déjà économiquement faible.
Ma question s'adresse au ministre des Pêches et Océans. Dans l'intérêt des travailleurs du secteur de la pêche de Terre-Neuve et du Labrador, fera-t-il tout ce qui est nécessaire pour veiller à ce qu'on modifie ces règles stupides et ridicules?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'ai très bien répondu au député. La réforme se compose de beaucoup d'éléments. Il s'agit d'une réforme générale que notre gouvernement a eu le courage de mener à bien. Le régime antérieur, vieux de 25 ans, ne servait pas bien du tout les Canadiens.
J'assure au député que tous les aspects de la réforme font l'objet d'un examen très attentif de la part du gouvernement.
* * *
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
Les Canadiens handicapés continuent de se heurter à des obstacles particuliers dans leurs efforts en vue de se tailler une place sur le marché du travail et de contribuer à la croissance du Canada en occupant des emplois de longue durée.
Quelles mesures le gouvernement prend-il pour donner aux Canadiens handicapés de meilleures chances de mettre leurs talents au profit de l'industrie canadienne?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée pour cette excellente question.
Notre gouvernement est très déterminé à répondre aux besoins des Canadiens handicapés et à les aider à réintégrer le marché du travail parce que c'est ce qu'ils veulent.
En fait, nous avançons sur tous les fronts. J'attire l'attention de la députée en particulier sur une entente conclue entre le gouvernement du Canada et les provinces sur un nouveau programme d'aide à l'employabilité pour les personnes handicapées, qui remplacera l'ancien PRPI.
Nous avons mis en place des mesures totalisant 70 millions par année pour reconnaître les coûts additionnels liés au fait d'être handicapé et avons créé un fonds de 30 millions de dollars pour aider les personnes handicapées qui veulent travailler.
* * *
LES PÊCHES
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je parie que je sais comment les membres du Congrès américain appellent notre ministre des Pêches et des Océans. Ils l'appellent «notre homme au Canada».
Washington n'a montré aucune volonté de réduire ses prises de saumon sur la côte ouest, et notre ministre est aussi mou qu'une méduse.
Ma question est simple. Pourquoi le ministre continue-t-il de faire la sourde oreille aux pêcheurs canadiens et pourquoi se plie-t-il au moindre désir des Américains?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, si le député s'intéressait vraiment aux pêcheurs de la Colombie-Britannique, il reconnaîtrait que le but du gouvernement est d'obtenir la meilleure entente possible pour ces pêcheurs.
Ce n'est pas de prendre la parole à la Chambre et de faire des remarques qui plairont peut-être aux gens là-bas, mais qui risquent de compromettre les efforts déployés jusqu'à maintenant pour obtenir une entente entre le Canada et les États-Unis afin de faire respecter les intérêts de nos pêcheurs.
* * *
[Français]
LA FONCTION PUBLIQUE
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ma question est très simple et elle s'adresse au premier ministre du Canada.
Est-ce que le premier ministre peut nous dire si les emplois d'importance dans la fonction publique, comme celui de directeur de pénitencier, sont couverts, oui ou non, par un code d'éthique?
[Traduction]
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Je crois que nous avons déjà réglé cette question.
Je crois qu'il a été clairement établi que le Bloc québécois était dans la mauvaise voie. Je tiens à mettre le député en garde en lui rappelant que, lorsqu'il se perd, le chef a l'habitude de congédier le chauffeur.
* * *
LA SANTÉ
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, les Canadiens ont été très déçus de voir le ministre de la Santé plier l'échine devant l'industrie du tabac. Il dit qu'il n'avait pas le choix, mais il l'avait. Il pouvait choisir d'être ministre du Tabac ou ministre de la Santé.
Nous voulons savoir aujourd'hui pourquoi il a penché en faveur du tabac. Plus précisément, accepterait-il de reporter ses modifications prévoyant l'exemption des automobiles de course jusqu'au 4 décembre, date à laquelle l'Union européenne se prononcera sur l'interdiction de la publicité sur le tabac?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la députée réagit comme si la décision était inattendue. La position du gouvernement est pourtant claire depuis bien des mois.
D'abord, nous avons mis en oeuvre la loi antitabac la plus rigoureuse en Occident. Nous l'avons proposée à la Chambre qui l'a adoptée. Ensuite, au salon international du sport automobile à Montréal, nous avons clairement indiqué que nous allions prévoir une exemption dans le cas de commandites. C'est la position du gouvernement.
Nous entendons maintenant mettre en oeuvre la Loi sur le tabac et la stratégie antitabac qui devraient faire en sorte que les jeunes ne commencent pas à fumer.
* * *
LES PORTS
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.
Aux termes du projet de loi C-9, chaque port au Canada sera classé dans une des trois catégories prévues, à une exception près qui est celle du port de Hamilton. Le port de Hamilton est le seul port au Canada non assujetti aux règles.
L'autre jour, au Comité des transports, des fonctionnaires ont déclaré que la décision était strictement politique et n'avait rien à voir avec le projet de loi C-9.
Le ministre peut-il dire à la Chambre et à toutes les administrations portuaires qui sont tenues d'observer les règles quelle pression politique a été exercée et qui a bien pu appliquer cette pression?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le député sait fort bien que le projet de loi fait actuellement l'objet d'une étude en comité.
S'il s'inquiète de la pression politique, il pourra peut-être en exercer un peu lui-même et poser sa question devant le comité, comme il devrait le faire.
* * *
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.
Cette semaine, à Ottawa, le secrétaire général de l'OTAN a dit que la communauté internationale ne devrait pas abandonner la Bosnie ni maintenant, ni en juin lorsque le mandat des forces de stabilisation sous la direction de l'OTAN arrivera à échéance.
Le ministre de la Défense nationale pourrait-il dire à la Chambre ce que le gouvernement compte faire au sujet du maintien de la contribution du Canada dans cette région?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les Forces canadiennes en Bosnie ont beaucoup contribué à ramener la stabilité et la paix dans cette région.
Le travail qu'elles et les alliés ont accompli est énorme, mais il reste encore beaucoup à faire. Plus tard, cet automne, le ministre des Affaires étrangères et moi-même consulterons le Cabinet au sujet d'une prolongation de la présence de nos forces au-delà de janvier et jusqu'à l'échéance du mandat des forces de stabilisation à la fin de juin.
Pour la suite, nous aurons d'autres discussions avec nos alliés. Je me réjouis du fait que deux comités du Parlement se rendront en Bosnie pour constater sur place ce qui s'y passe.
* * *
L'AGRICULTURE
M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai fourni au ministre de l'Agriculture un document américain qui avait fait l'objet d'une fuite et qui montrait que les agriculteurs de l'Ouest ont perdu au moins 1 $ à 1,50 $ le boisseau lorsque l'Alberta Pool et la CCB ont écoulé leur blé fourrager à moitié prix sur le marché américain.
Le ministre pourrait-il expliquer aux agriculteurs de l'ouest du Canada pourquoi le blé de même qualité, vendu sur le même marché et au même moment, valait entre 1 $ et 1,50 $ de plus le boisseau lorsqu'il était exporté par les agriculteurs eux-mêmes que lorsqu'il était écoulé par l'Alberta Pool de l'Alberta ou la CCB...
Le Président: Le ministre de l'Agriculture.
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, le député a déposé une pile de documents assez complexes que j'ai remis à mes fonctionnaires en leur demandant de les analyser.
Nous avons effectué une analyse préliminaire de la question que le député vient de soulever au sujet de la Commission canadienne du blé. Selon les résultats de cette analyse préliminaire, il semblerait que les allégations du député soient sans fondement.
Je compléterai toutefois mon étude et ferai rapport au député si je découvre la preuve du contraire.
* * *
[Français]
LES PROGRAMMES JEUNESSE
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
Le gouvernement fédéral multiplie les programmes destinés aux jeunes. Ce faisant, il chevauche par plus de 120 millions de dollars les programmes jeunesse mis de l'avant par le Québec. C'est le retour en force du gaspillage et des chevauchements.
Si le ministre a tant à coeur les besoins des jeunes, pourquoi ne négocie-t-il pas le transfert vers le Québec des programmes d'emploi, tel que formulé clairement par le consensus québécois, afin que les jeunes puissent bénéficier de programmes à la mesure de leurs besoins?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je trouve regrettable que le député en fasse plus une question de juridiction. Ce qui nous intéresse, c'est la jeunesse. Je pense que ce qui devrait intéresser le député, c'est s'assurer que la jeunesse s'intègre plus facilement au marché du travail.
Nous avons déjà transféré vers le gouvernement du Québec toute la formation de la main-d'oeuvre et les mesures actives. C'est 500 millions de dollars par année que le gouvernement du Québec pourra utiliser par rapport au marché du travail.
Le député devrait également savoir que nous sommes, en ce moment, en train de discuter avec le gouvernement et le ministère de Mme Harel toute élimination de duplication et de chevauchement supplémentaire sur les programmes à la jeunesse.
* * *
[Traduction]
LE COMMERCE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce. Cet après-midi, en voulant complètement éviter la question que nous posions au gouvernement pour tenter de savoir s'il allait ou non appuyer l'inclusion de la disposition exécutoire protégeant la main-d'oeuvre et l'environnement dans l'accord multilatéral sur l'investissement, le ministre a suggéré que nous recrutions des pays sociaux-démocrates pour défendre notre cause.
Je tiens à préciser que, selon le procès-verbal de ces négociations, c'est le Royaume-Uni, fort de l'appui de la France et d'autres pays européens sociaux-démocrates, qui mène cette lutte.
Le ministre acceptera-t-il de répondre à notre question? Le Canada est-il prêt à appuyer l'inclusion de la disposition exécutoire...
Le Président: Le ministre du Commerce international.
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, les négociations ont débuté en 1995. La députée aime bien brandir le procès-verbal d'une rencontre en particulier.
L'autre jour, elle a dit que nous devrions suivre l'exemple des Américains dans le dossier de la main-d'oeuvre. Je lui ferai remarquer que les Américains ne préconisent pas l'adoption d'une disposition exécutoire.
Nous avons bien précisé qu'il est dans l'intérêt du Canada de ne pas se retirer de la table des négociations, mais d'y rester afin d'influer sur le débat et de veiller à ce que les investissements puissent créer des emplois au Canada et partout dans le monde. Nous continuerons de défendre les normes les plus élevées et d'éviter de nous lancer dans un débat...
Le Président: Le député de Fundy—Royal.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, le gouvernement albertain a bien dit qu'il n'appuiera aucun objectif fédéral de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Cela prouve que les provinces ne sont pas toutes du même avis, même si la ministre affirme que le dialogue est ouvert. Un dialogue ouvert n'est manifestement pas synonyme de partenariat plein et entier.
En quoi le manque d'appui des provinces nuit-il à la stratégie de la ministre—si tant est qu'il y en ait une—pour atteindre les objectifs du Canada à Kyoto? Le premier ministre s'engagera-t-il aujourd'hui à soumettre à l'approbation de la Chambre toute position à l'égard du sujet qui sera abordé à Kyoto afin que les Canadiens bénéficient au moins d'une certaine consultation?
L'hon. Christine Stewart (Northumberland, Lib.): Monsieur le Président, au cours du dernier mois, le gouvernement fédéral a eu une centaine d'entretiens avec un large éventail de partenaires sur la question du changement climatique. Nous n'avons cessé de négocier ni de discuter de cette très grave question
À mesure que nous établirons nos objectifs de même que les calendriers et les mesures que leur réalisation exige, nous allons continuer de dialoguer avec tous les partenaires intéressés. Ensemble, nous réussirons à atteindre nos objectifs.
* * *
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de députés et de sénateurs de la Bolivie et du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et de l'Irlande du Nord qui participent à la conférence de l'Association canadienne des parlementaires sur la population et le développement.
Des voix: Bravo!
Le Président: Nous entendrons la question habituelle du jeudi de la part du leader parlementaire du Parti réformiste.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au leader parlementaire de cet autre gouvernement socialiste.
Je voudrais savoir quel est le programme du gouvernement pour le reste de la semaine et pour la semaine suivante.
M. Bob Kilger (Stormont—Dundas, Lib.): Monsieur le Président, le leader parlementaire du gouvernement a dû s'absenter un moment. Je suis sûr que nous pourrons revenir à cette question dans quelques minutes, si les députés le veulent bien.
Le Président: On répondra à cette question dans un instant.
Le député de Pictou—Antogonish—Guysborough a la parole pour invoquer le Règlement.
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
LA PÉRIODE DES QUESTIONS
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement à propos d'une question posée par le député de St. John's-Ouest. Le Président, à sa discrétion, lui a retiré la parole pour avoir employé le mot «délibérément».
Je puis comprendre qu'on réprouve ce terme quand il est employé de façon malicieuse pour accuser une personne d'avoir délibérément induit la Chambre en erreur ou d'avoir délibérément donné une information fausse, mais je crois que le compte rendu montrera que, dans le contexte de la question, il s'agissait de causer délibérément du chômage, et pour cette raison...
Le Président: Je remercie le député. Tout se passe très vite, pendant la période des questions, et, comme on peut le constater cette fois-ci, j'ai tendance à sursauter lorsque j'entends le terme «délibéré». J'ai tendance à intervenir. Je vais me faire un plaisir de vérifier les bleus.
Vous aurez remarqué que, même si j'ai interrompu le député, je lui ai donné ses 35 secondes lorsqu'il a repris la parole. Tous les députés sont certainement d'accord pour laisser à la présidence le droit de faire ces jugements. Mais je commets parfois des erreurs. Si c'en était une, je suis désolé, mais ces choses-là arrivent.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais demander au leader du gouvernement à la Chambre quels seront nos travaux pendant le reste de la semaine et la semaine prochaine, et aussi quelles sont les mesures qui seront présentées au Sénat alors qu'elles devraient être présentées à la Chambre.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le leader de l'opposition officielle de sa question.
Demain, nous étudierons à l'étape de la deuxième lecture le projet de loi C-16, qui donne suite à la décision de la Cour suprême concernant les mandats d'arrestation. J'espère que nous pourrons achever ce débat. Lundi, nous reprendrons le débat sur le projet de loi C-3, après quoi nous passerons au projet de loi C-12, sur la pension de la GRC, au projet de loi C-7, sur le parc du Saguenay, au projet de loi C-17, sur Téléglobe, au projet de loi C-14, sur l'eau potable, et au projet de loi C-15, qui modifie la Loi sur la marine marchande du Canada.
J'ajoute que nous discuterons de la façon habituelle du moment où il conviendra de présenter la motion nous invitant à nous joindre au Sénat pour former un comité spécial chargé d'étudier la garde des enfants et des questions connexes. Il s'agit d'une question qui a été soulevée ici même et à l'autre endroit.
Jeudi prochain sera une journée réservée à l'opposition. Je crois que les travaux que j'ai annoncés nous mèneront jusqu'à jeudi prochain, et j'espère que nous pourrons conclure vendredi prochain par la dernière lecture du projet de loi C-3, si le comité en a terminé l'étude comme je l'espère.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LA CONDUITE AVEC FACULTÉS AFFAIBLIES
La Chambre reprend l'étude de la motion.
Le vice-président: Quand la Chambre est passée à la période des questions, c'était le député de Portage—Lisgar qui avait la parole. Je pense qu'il lui reste quatre minutes environ.
M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, la journée a été intéressante jusqu'à maintenant, non seulement pendant le débat, mais aussi au cours de la période des questions.
Pendant que je songeais à ce que j'allais dire dans ces quatre minutes, j'ai pensé me contenter de faire état de l'aspect tragique de certains des cas de conduite avec facultés affaiblies.
Mon frère, qui est un peu plus jeune que moi, vit le long de la route 3. Un été, ses beaux-parents sont venus le visiter au milieu de la journée pour voir ses cultures. Ils sont partis vers 17 heures et, en roulant sur la route 3, sa belle-mère a vu une boîte de carton dans le fossé. Elle a demandé à son mari d'arrêter pour la ramasser.
Son mari s'est arrêté sur le côté de la route, dans le gravier. Elle était au beau milieu du fossé quand est arrivé un conducteur avec les facultés affaiblies. Ce dernier, voyant la voiture stationnée sur le bord de la route, est passé du côté droit de la voiture, dans le fossé, tuant la belle-mère sur le coup. Elle était au milieu du fossé, pas dans la rue. Cela s'est produit à un demi-mille de chez mon frère.
Toutes les fois que je passe par là, j'en suis tout chose. Combien de fois me suis-je arrêté pour ramasser ou inspecter quelque chose sur le bord de la route ou dans le fossé. Cette tragédie ne s'effacera jamais de mon esprit. Voici donc des gens qui souffriront jusqu'à la fin de leurs jours. Une grand-mère a perdu la vie. Ses petits-enfants étaient au début de l'adolescence ou un peu plus jeunes. Et je sais que ma belle-soeur s'en ressent à chaque fois parce que c'est arrivé à un demi-mille de chez elle. Elle doit passer par là, c'est inévitable.
Ce n'est qu'un exemple parmi les centaines qui se produisent dans notre pays. Cela n'aurait pas dû se produire.
Cet accident aurait pu être évité, ce n'était pas le soir, la nuit n'était pas tombée, c'était durant le jour, en plein jour, et l'homme était si intoxiqué qu'il ne pouvait distinguer la route du fossé. Le conducteur n'a pas été blessé, mais il a tué sur le coup une mère et grand-mère. J'espère que les gens se rendent compte de la peine qu'a ressentie une famille au complet.
J'espère que le débat se poursuivra d'une manière amicale et que nous aborderons le vrai problème et que nous trouverons des solutions.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Ref.): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter mon collègue pour cet excellent et éloquent discours.
La conduite en état d'ébriété constitue, comme mes collègues l'ont signalé, un énorme problème, et aucun des gouvernements qui se sont succédé n'ont proposé de mesure législative capable de le régler de façon satisfaisante. Comme nous le savons, aujourd'hui l'ivresse au volant tue au moins trois personnes par jour et fait plus de 300 blessés tous les jours.
Je sais que l'ivresse au volant est un problème dans sa province comme dans la mienne. Je sais qu'il a vu dans sa circonscription, comme nous dans les nôtres, des conducteurs ivres tuer ou blesser des gens. J'aimerais que mon collègue dise à la Chambre ce qu'il pense que le gouvernement pourrait faire pour essayer de venir à bout de ce très grave problème social.
M. Jake E. Hoeppner: Je remercie mon collègue de sa question. C'est une question très difficile. Lorsque je suis arrivé dans la région où j'ai exploité ma ferme durant 35 ans, l'alcoolisme était un véritable fléau, pas seulement l'ivresse au volant.
Les efforts déployés à l'école comme à la maison et probablement aussi dans le cadre de programmes gouvernementaux font bien comprendre qu'il est grave d'être ivre, que se soit au volant d'une auto ou d'une motoneige ou aux commandes d'une machine agricole. Chez nous, bon nombre d'accidents ne se produisent pas sur la route.
Je me rappelle du cas d'un de mes voisins qui avait bu pas mal ce jour-là et qui a eu des problèmes avec sa presse à fourrage. Il a bien failli y laisser sa peau. Il s'est avancé la tête dans la chambre de compression pendant que le tracteur était en marche, pour essayer de voir ce qui n'allait pas. Tout cela pour dire combien la question est grave quand on n'a pas les idées claires et qu'on ne sait pas vraiment ce que l'on fait.
Il faudrait insister fortement sur ce point auprès des jeunes familles. Nous devons élever nos enfants de façon à les rendre responsables de leurs gestes, qu'il s'agisse d'ivresse ou encore d'obéissance aux représentants de l'ordre. L'éducation vaut son pesant d'or, quand elle est dispensée à peu près correctement dans tous nos foyers et toutes nos écoles.
Il est difficile d'imaginer combien on épargnerait, en argent et en stress émotif, si ce n'était de l'ivresse au volant, que ce soit sur la route, à la ferme ou sur les terrains de sport. De graves accidents sont survenus à bord d'embarcations parce que les pilotes n'étaient pas au commandes du bateau ou n'étaient pas en état de le piloter.
Je vous remercie mon collègue pour sa question. J'espère avoir contribué un tant soit peu au débat.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, le débat d'aujourd'hui, en nous rappelant les tristes tragédies que vivent tant de Canadiens et leurs familles, nous aura fait connaître beaucoup d'émotions.
Il y a un aspect de la question peut-être encore plus troublant que ce dont nous discutons en ce moment et c'est de savoir que tant de gens boivent à un degré ou à un autre. Je suis conscient des graves conséquences de la conduite en état d'ébriété, mais une des difficultés c'est que des gens boivent, qu'ils conduisent pour rentrer chez eux et que certains le font depuis longtemps sans avoir jamais eu d'accident. Si, par hasard, ils voient un accident causé par l'alcool, ils se disent:«C'est bien triste pour eux, mais cela ne m'arrivera pas à moi.»
Si nous examinons l'ensemble de la question, les mesures à prendre pour prévenir ces accidents et leurs conséquences, il nous est très difficile, en fin de compte, d'accepter la responsabilité d'un geste que posent un si grand nombre d'entre nous chaque jour.
J'aimerais que le député de Portage—Lisgar nous dise s'il pense qu'il est nécessaire d'alourdir les peines prévues dans le Code criminel pour qu'elles servent d'avertissement et pour que nous comprenions tous la gravité de la conduite avec facultés affaiblies. Ce serait comme dire aux gens qu'ils ne peuvent pas dépasser certaines limites sans en payer le prix. Ce serait peut-être radical, mais ce serait un début de solution à un problème grave.
M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Je remercie le député pour cette question rapide.
J'ignore s'il se souvient du bon vieux temps où on imposait des mesures disciplinaires à la maison et aussi à l'école. Lorsqu'un enseignant nous disciplinait, nous savions que ce n'était rien à côté de ce qui nous attendait à la maison. C'était peut-être un peu dur.
Si les amendes et les peines ne constituent pas des dissuasifs, qu'est-ce qui pourra dissuader de boire et de prendre le volant? À quoi servent donc les amendes si elles ne sont pas des dissuasifs? Il faut des mesures disciplinaires invariables, des peines fixes pour ces infractions. Je ne peux pas les qualifier de crimes, quoique j'imagine que ce sont des crimes contre l'humanité. Le jour où les amendes et les peines seront assez sévères, les gens commenceront à respecter la loi.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, ceci est officiellement mon premier discours.
Je tiens à remercier les habitants de ma circonscription d'Esquimalt—Juan de Fuca de m'avoir permis de les représenter encore une fois à cette Chambre. C'est pour nous tous une très grande responsabilité et un honneur insigne que de pouvoir enfin se retrouver dans cette tribune où nous pouvons lutter pour faire de notre pays un meilleur endroit où vivre. Je sais que nous tous ici en sommes reconnaissants. Je suis très reconnaissant aux habitants d'Esquimalt—Juan de Fuca de me donner cette possibilité.
Je tiens également à remercier mon collègue de Prince George—Bulkley Valley qui s'emploie depuis des années, dans la dernière législature et maintenant dans celle-ci, à faire avancer cette question. Il s'agit peut-être d'une des plus grandes questions sociales transcendant toutes les frontières d'une mer à l'autre. Elle a des conséquences pour la santé, le bien-être et la vie des personnes dans de nombreux secteurs. De fait, elle représente en quelque sorte un fléau silencieux qui sévit au sein de nos collectivités depuis de nombreuses années. Mon collègue de Prince George—Bulkley Valley s'est placé là à l'avant-front, avec notre appui, pour faire avancer ce dossier.
La conduite avec facultés affaiblies est un fléau social qui nous coûte plus de 7 milliards de dollars par année. Comme je l'ai mentionné dans la question à mon collègue, chaque jour, elle tue plus de quatre personnes et en blesse plus de 300. Et le coût social s'étend bien au-delà de ces simples chiffres, car il touche toute la famille.
J'aimerais vous raconter une anecdote. Lorsque je travaillais au service d'urgence d'un hôpital de la circonscription de mon collègue de Prince George—Bulkley Valley, un code bleu a sonné, c'est-à-dire qu'il y avait un cas de grand traumatisme. Une personne est arrivée avec des blessures massives à la tête. Elle était en train de mourir. Nous n'avons pas pu sauver ce jeune homme.
Peu de temps après, nous avons reçu le conducteur de la voiture, qui était en état avancé d'ébriété. Cette personne a refusé de se faire traiter, a refusé de communiquer avec nous, a refusé la prise de sang pour déterminer l'alcoolémie. Au lieu de l'accident, on a vu cette personne essayer de traîner son ami presque mort du côté du conducteur pour que celui-ci soit accusé de l'accident et pour qu'elle-même se retrouve complètement libre.
La police a eu d'énormes difficultés à faire le nécessaire pour parvenir à poursuivre cette personne. Par exemple, elle devait être là au moment de la prise de sang. Il fallait suivre une procédure précise. Il fallait le faire dans les deux heures qui suivaient l'accident. Si l'une quelconque de ces consignes n'était pas respectée, un avocat de la défense m'a dit: «Je suis futé. Un détail technique me suffit pour empêcher ces gars d'être condamnés.» Que faut-il comprendre par là? Quelle sorte de système judiciaire avons-nous dans ce pays s'il permet à quelqu'un d'assassiner son ami en conduisant en état d'ébriété et d'éviter toute condamnation à cause d'un détail technique? Il faut supprimer cette échappatoire.
Ce n'est pas la seule échappatoire. Il y en a plusieurs. Le système judiciaire que nous avons aujourd'hui est plein de petites failles qui permettent aux gens coupables d'assassinat par conduite avec facultés affaiblies d'échapper à la justice. On ne peut continuer ainsi.
Mes collègues du Parti réformiste ont soumis au gouvernement de nombreuses suggestions constructives et je vais en décrire quelques-unes. Je prie l'honorable ministre de la Justice d'en prendre note et de les adopter.
Premièrement, que les prises de sang puissent se faire après plus de deux heures, après quatre heures, par exemple.
Deuxièmement, que le taux d'alcoolémie soit abaissé à 55 milligrammes par décilitre, plutôt que le taux de 80 milligrammes par décilitre qui est en vigueur aujourd'hui, aux fins de la définition de «conduite avec facultés affaiblies».
Troisièmement, lorsqu'il y a un accident de la route grave, qu'il y ait automatiquement une prise de sang.
Quatrièmement, si une personne refuse la prise de sang, qu'une accusation criminelle lui soit imposée pour refus d'accepter. Une personne innocente ne refuserait pas la prise de sang. La seule raison de refuser, c'est qu'on est coupable, n'est-ce pas?
Cinquièmement, qu'on supprime les obstacles empêchant les policiers de faire leur travail.
La conduite avec facultés affaiblies nous donne un petit aperçu des difficultés que nos policiers doivent surmonter pour faire leur travail. Par exemple, si une personne est arrêtée pour conduite avec facultés affaiblies, la poursuite de cette personne exige environ six heures de travail de la part du policier pour préparer la paperasse. C'est six heures de moins qu'il peut consacrer à la patrouille. Six heures de moins qu'il peut consacrer au dépistage et à la poursuite des criminels. Six heures qui pourraient être consacrées plutôt à faire quelque chose de productif et à rendre nos rues plus sûres. Cela ne peut durer. La paperasse sous laquelle les policiers sont enterrés aujourd'hui les empêche de faire leur travail et de rendre nos rues plus sûres.
Sixièmement, il nous faut un charte des droits des victimes.
Notre leader à la Chambre a déposé un projet de loi d'initiative parlementaire visant l'établissement d'une charte des droits des victimes, et le gouvernement l'a rejeté. La création d'une telle charte des droits est une question de justice et d'égards pour les victimes. Depuis trop longtemps, le ministère de la Justice ne tient compte que des droits des criminels et, dans bien des cas, il fait fi des droits des victimes. Cela ne peut plus durer. C'est intolérable.
Nous avons déposé, dans deux législatures de suite, des suggestions constructives, dont deux déclarations des droits des victimes qui permettraient de protéger les victimes pendant les procès. Beaucoup de ces suggestions sont très constructives.
Par exemple, que les victimes soient tenues au courant de toutes les procédures. Que les victimes aient le droit de se faire entendre à toutes les étapes du système judiciaire. Que les victimes en soient avisées lorsque des accusations sont portées et qu'elles en connaissent la nature. Que les victimes aient le droit de se protéger contre l'intimidation. Que les victimes puissent bénéficier d'un congé pour être présentes au procès, sans être pénalisées du point de vue économique. Qu'il n'y ait pas de négociations de plaidoyer et que des accusations ne soient pas retirées sans que la victime en soit avisée. Que les victimes soient informées des services d'aide qui sont à leur disposition.
Il n'y a rien de sorcier dans tout cela. Tout cela repose sur l'équité. Je le répète, ce sont des victimes innocentes qui ont subi des torts et elles n'ont rien à se reprocher. Le moins que nous puissions faire, si nous sommes une société bienveillante et compatissante, c'est d'avoir autant d'égards pour eux que nous en avons pour les criminels.
Mon collègue de Lisgar a parlé d'éducation. Cet aspect demeure trop souvent oublié. Nous devons sensibiliser les enfants très tôt. Le plus tôt on le fera, le mieux ce sera. Nous pourrons obtenir des résultats si l'école les sensibilise non seulement au sujet de l'alcool, mais aussi au sujet des drogues et des autres aspects de la conduite avec facultés affaiblies et de la criminalité. Des programmes d'une remarquable efficacité ont été créés non seulement au Canada mais aussi aux États-Unis.
L'ivresse au volant est une maladie sociale. Les gens font des erreurs. Nous devons cependant avoir le cadre législatif nécessaire pour pouvoir corriger le plus possible cet énorme problème social. Nous ne pouvons plus continuer de l'ignorer.
Nous avons consacré très peu de temps à ce problème au cours de la dernière législature, même s'il a de nombreuses facettes. Il touche de nombreux ministères. C'est quelque chose dont il faut se préoccuper.
Il suffit de voir qui sont les victimes. Ce n'est pas seulement la personne qui subit des blessures dans un accident qui en paie le prix. Sa famille, ses amis et ses proches sont aussi touchés.
J'espère que les députés appuieront l'excellente motion présentée par le député de Prince George—Bukley Valley. Je suis convaincu qu'ils le feront à l'unanimité.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, j'ai bien aimé le débat aujourd'hui parce qu'il est très différent de ceux qui se tiennent habituellement dans cet endroit. Il est chargé d'émotion. Beaucoup d'histoires personnelles sont sorties de l'ombre.
Nous voyons se dégager un consensus non seulement au pays, où il existe depuis assez longtemps, à mon avis, mais aussi à la Chambre des communes. En effet, tous les partis reconnaissent la nécessité de s'attaquer à cette question. J'espère qu'un comité sera constitué à la suite de cette motion des réformistes visant le dépôt d'un projet de loi sévère face à ce grave problème.
Le député a décrit les coûts sociaux, tant financiers que personnels, de ces tragédies pour la société.
Je voudrais raconter une histoire à la Chambre. La première tragédie dont je me souviens est arrivée alors que j'étais très jeune. J'avais environ cinq ans. Nous devions aller à Minnedosa, la ville natale de mon père, pour un enterrement. En fait, il y en avait deux.
Deux de mes cousins, qui avaient obtenu leur diplôme d'études secondaires à Minnedosa, se rendaient à Brandon pour la soirée. Minnedosa n'est pas un grande ville, et les élèves de l'école secondaire de Minnedosa s'étaient donc joints à ceux de l'école secondaire de Brandon pour célébrer cette occasion. Il y avait cinq personnes dans la voiture. La route de Minnedosa à Brandon était toute droite. Malheureusement, un chauffard en état d'ébriété a fait une embardée et a heurté leur voiture de plein fouet. Mes deux cousins ont été tués, de même que les autres passagers de la voiture. Dans une petite ville comme Minnedosa, c'était une vraie tragédie.
Comme c'est souvent le cas, le chauffard s'en est tiré. Cinq jeunes ont été tués, mais le chauffard, pour une raison que j'ignore, s'en est tiré. Je ne sais pas si c'est parce qu'ils sont dans un tel état d'ébriété, mais ces chauffards sont très souvent les seuls à s'en sortir.
La communauté était sous le choc. Ma tante, mon oncle et toute la famille étaient sous le choc. Je me suis toujours demandé si ma tante, qui est décédée récemment, s'en était jamais remise.
Je m'en souviens encore. J'avais cinq ans. Je me rappelle encore tous les cercueils devant l'église. C'était tellement triste. J'étais très jeune et je ne comprenais pas très bien, mais je savais que tous ceux que je connaissais et que j'aimais étaient sous l'effet d'un choc terrible.
C'est en partie ce qui a fait que j'ai décidé, une fois adulte, que je m'abstiendrais de consommer de l'alcool. Je sais que c'est un choix personnel et je ne prétends pas que ce doit être le choix de beaucoup de gens. J'ai pris cette décision en partie pour envoyer un message aux gens que j'aimais. Une consommation irresponsable d'alcool cause des morts, brise des foyers et entraîne des coûts sociaux, et je ne veux pas contribuer au problème. J'ai pris cette décision il y a longtemps. J'ai bu beaucoup de Coca-Cola tandis que ceux qui m'entouraient buvaient autre chose, mais je n'en ai jamais souffert. Tout a commencé en fait à l'âge de cinq ans, lorsque j'ai été confronté à cette première tragédie dans ma vie.
S'il reste une minute, le député pourrait raconter son histoire à nouveau, car je pense que ces témoignages personnels montrent bien la nécessité d'un changement. Il voudra peut-être raconter d'autres histoires de sa vie en tant que médecin, quand il a été confronté à ce terrible crime social.
M. Keith Martin: Monsieur le Président, je remercie mon collègue, notre whip, pour son intervention qui est venue du fond du coeur. Je suis persuadé qu'aucun d'entre nous n'aurait pu exprimer les choses de façon plus éloquente.
En travaillant dans un service d'urgence, j'ai vu beaucoup de gens mourir. Je dois dire ceci. De tous ceux que j'ai vus mourir, les cas les plus tragiques étaient peut-être ceux, surtout des jeunes, qui étaient morts dans un accident de la circulation causé par l'alcool. Un cas me revient à l'esprit. Je travaillais comme interne à un service d'urgence juste avant Noël. Un de mes collègues, un médecin de la salle d'urgence était là. Il est rentré chez lui. Il s'installait à Victoria et faisait venir sa famille. Il se rendait à l'aéroport quand un conducteur ivre a traversé la ligne blanche et l'a tué. On l'a amené à l'urgence une demi-heure plus tard, alors que j'étais encore de service. Il était presque mort. Il a fini par mourir. On n'oublie jamais une chose comme ça.
Je pense qu'il est sage de se rappeler que par une nuit froide, ou toute autre nuit d'ailleurs, un conducteur sur cinq a consommé de l'alcool et qu'un sur 25 est ivre.
[Français]
M. Guy Saint-Julien (Abitibi, Lib.): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Wentworth—Burlington sur la motion de l'opposition à l'étude aujourd'hui, concernant la conduite avec facultés affaiblies. C'est vrai qu'à cause de ce problème, il y a beaucoup de tristesse dans nos familles, aujourd'hui et pour toujours. Ce sujet est d'une grande importance pour tous les Canadiens et Canadiennes.
Nous savons qu'en 1995, selon les statistiques, il y a eu plus de 37 000 cas de conduites avec facultés affaiblies, dont plus de 60, au Canada, ont causé la mort et plus de 500 causant des lésions corporelles. Voilà le triste résumé.
Au Québec, la Société d'assurance automobile du Québec va serrer la vis aux automobilistes. Cette réglementation, qui sera mise en vigueur à compter du 1er décembre, sera une des plus sévères. On sait que la peur de la police et des représailles est ce qui calme le plus les automobilistes. Voilà pourquoi, à partir de cette date, ce sera encore plus sévère pour ceux qui conduisent avec des facultés affaiblies par l'alcool. Les conducteurs qui prennent le volant alors que leur permis est suspendu sont aussi dans la mire du gouvernement du Québec.
Tout le monde souhaite évidemment que l'hécatombe cesse. On dit toujours que ce sont les jeunes conducteurs qui sont le plus impliqués. Eh bien, depuis le 1er juillet de cette année, les jeunes conducteurs titulaires de permis probatoire au Québec ne peuvent plus consommer la moindre goutte d'alcool, sous peine de se voir retirer leur permis de conduire.
Au 1er décembre, le Code de la sécurité routière aura beaucoup plus de dents. Ceux qui seront arrêtés pour la première fois avec les facultés affaiblies se verront enlever leur permis sur-le-champ par les policiers et il sera ensuite révoqué pour un an. Les récidivistes écoperont de plus longues suspensions, c'est-à-dire de 24 à 36 mois, et leur véhicule sera confisqué dès leur arrestation. De plus, ils devront suivre une cure de désintoxication.
Ceux qui en sont à leur première offense devront obligatoirement participer au programme Alcofrein. Auparavant, seuls ceux qui recevaient une ordonnance d'un juge devaient se présenter à une séance de sensibilisation d'une durée de trois heures offerte par le ministère de la Sécurité publique à un coût minime. Les animateurs d'Alcofrein font réaliser les conséquences de leurs actes aux conducteurs fautifs et s'acharnent à détruire les mythes liés à l'alcool.
J'ai pris connaissance, dernièrement, d'un article du journal Le Soleil, publié le 13 septembre 1997, et écrit par Isabelle Mathieu. Le titre est: «Réveillez-vous avant le cauchemar», et j'aimerais en citer quelques extraits.
Imaginez un seul instant que votre dernière soirée un peu arrosée se soit terminée dans un fossé et ait coûté la vie à votre amoureuse. Depuis deux ans, c'est le douloureux scénario qui défile chaque jour dans la tête de Francis Laroche.
Ce jeune homme de Beauport, aujourd'hui âgé de 22 ans, n'a pas oublié et encore moins accepté la tragédie. Il a toutefois consenti à en parler, pour que son histoire serve d'électrochoc à tous les automobilistes qui tentent encore le sort.
Le 2 octobre 1995. 3 h 15. Francis, sa copine de 18 ans, ainsi que trois amis reviennent d'une veillée dans un bar de Sainte-Foy. Francis est au volant, il a bu trois bières durant la soirée et se sent en pleine possession de ses moyens.
«Avant de partir, j'ai dit à mon amie: «Écoute, je vais souffler dans l'alcootest et si je dépasse le 0,08, je vais te donner mes clés, ça va me faire plaisir», se souvient Francis. L'alcootest du bar était hors d'usage ce soir-là.
Alors que les cinq amis circulent sur l'autoroute de la capitale, à la hauteur de Pierre-Bertrand, une voiture change brusquement de voie devant eux. Francis perd le contrôle...
L'amoureuse de Francis depuis un an est décédée et ses trois amis sont blessés. Le jeune homme, qui a une coupure à la tête, se soumet au test des policiers: son taux d'alcoolémie est de 0,11,30 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang de plus que la limite de 0,08.
Francis n'a toutefois aucune difficulté à accomplir les tests symptomatiques, comme marcher en ligne droite. Plus tard, la Couronne ne pourra donc prouver le lien direct entre l'accident et la consommation d'alcool. En mai 1996, Francis Laroche plaide coupable à l'accusation de conduite avec facultés affaiblies. Il écope d'une amende de 500 $ et son permis est suspendu pour un an. «C'est très secondaire, l'amende et le reste, la pire punition, je l'ai eue, c'est la mort de ma blonde», laisse-t-il tomber.
On en entend tous les jours des histoires comme celle-là.
Les procédures judiciaires ont pesé très lourd sur les épaules du jeune homme, dont le dossier était sans tache avant l'accident. «Lorsque j'étais dans les cellules, au Palais de Justice, je ne le croyais pas, je n'arrivais pas à réaliser que j'étais là...», se rappelle-t-il, «et quand je me promenais dans la rue, les gens me regardaient, j'avais l'impression que tout le monde était au courant, je me sentais jugé, même par quelqu'un qui conduit en étant chaud depuis 20 ans.» [...]
Peut-on prévenir? Depuis le début du mois de juin, l'alcool a volé la vie de plus d'une dizaine de personnes sur les routes du Québec. En 1996, 412 personnes sont mortes pour la même raison, pendant que 1 656 étaient grièvement blessées et 6 250 plus légèrement. La Société de l'assurance automobile du Québec a versé 200 millions de dollars en indemnités.
«Les conducteurs délinquants sont une minorité, mais ils font tellement de ravages que c'est seulement d'eux dont on parle», tien à souligner Yvon Lapointe, directeur du Département de la sécurité routière au CAA-Québec. [...]
Les statistiques montrent que les infractions pour conduite avec facultés affaiblies diminuent plus rapidement chez les jeunes que chez les adultes. Conclusion: la prévention fonctionne à merveille chez les jeunes. [...]
En imposant la tolérance zéro pour l'alcool au volant, le gouvernement entend relever le pari qu'après trois ans d'abstinence totale d'alcool imposée lors de la conduite, le jeune conducteur acquiert soudainement des réflexes d'autocontrôle quant à sa consommation. [...]
On parle souvent des jeunes. Et dans le projet de loi du gouvernement du Québec:
[...] les jeunes sont présentés comme un groupe social irresponsable, incapable d'acquérir les attitudes de prudence requises. Or, il faut le rappeler avec force, ce n'est qu'une petite minorité de jeunes qui ont une conduite automobile dangereuse et qui risquent de commettre des accidents. Pour eux, il faut sévir, oui. Mais pas pour les 97,4 p. 100 de jeunes conducteurs qui n'ont pas été impliqués dans un accident avec blessés et qui ont commis, comme seul crime, celui d'être nés après 1972.
On a tous un permis de conduire. Quand on le renouvelle, c'est bien écrit sur la demande: «Est-ce que vous portez des lunettes?» On nous demande aussi si on a quelque maladie. Mais moi, je veux aller plus loin. Cette motion présentée par le Parti réformiste est importante.
Peut-être qu'on peut être d'accord pour 0,03, 0,05, mais moi, je dis toujours, comme c'est le cas pour les jeunes au Québec, en arrivant à une deuxième infraction, le gouvernement du Canada devrait appliquer la tolérance zéro pour plusieurs années pour ceux qui se sont déjà fait prendre.
Il ne faut pas oublier non plus les conducteurs de motoneiges, de tracteurs, de motocyclettes, de bateaux. Il faut aussi permettre aux policiers de faire leur travail. En regardant le permis de conduire de celui qui se fait arrêter, ils pourraient voir le code qui y est inscrit, comme c'est le cas pour le port de lunettes. Il y aurait un code, si la personne a une tolérance zéro. Ce serait peut-être un moyen d'en arriver à ce qu'il y ait moins d'accidents.
On n'ira pas tellement loin. Au mois de septembre—et des accidents, ça arrive toutes les semaines, chez nous, dans la municipalité de Val d'Or—on a perdu un jeune leader, un jeune homme du nom de Jean Godbout qui s'est fait frapper en plein centre-ville de cette municipalité par une personne âgée de plus de 40 ans. C'est un homme marié, père de famille avec deux enfants en bas âge, dont la mère a déjà perdu un fils dans l'accident de la mine Balmoral en Abitibi.
C'est triste pour toutes les familles. Je comprends, et nous comprenons tous qu'on vient de vous enlever ce sur quoi vous comptiez le plus, ceux dont vous êtes proches. Le plus difficile dans ces accidents, c'est de dire au revoir à un ami. Au nom de toutes les familles, je dis qu'il faut que cette tuerie cesse au Canada.
À la suite de discussions, et avec le consentement de tous les partis à la Chambre, je propose:
«Que la motion soit modifiée
a) en supprimant les mots «un comité législatif» et en ajoutant les mots «le Comité permanent de la justice et des droits de la personne»; et
b) en substituant le point à la fin de l'énoncé par un point-virgule, et en ajoutant l'énoncé suivant «et que ledit comité, lorsque avisé, soumette son rapport à la Chambre avant le 15 mai 1998».»
Cet amendement démontre clairement l'engagement commun de tous les députés de cette Chambre.
[Traduction]
Le vice-président: Le vote porte sur l'amendement.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole dans ce débat après le député d'Abitibi. Je suis évidemment d'accord avec sa motion. J'approuve aussi dans l'ensemble la motion originale que nous a proposée le Parti réformiste.
J'aborde cependant la question avec prudence, parce que je ne suis pas très chaud quand j'entends certains arguments en faveur de la prévention de la criminalité. Je constate toutefois que la motion du Parti réformiste est modérée et raisonnable dans son approche.
Mon expérience de la conduite en état d'ébriété est différente de celle du député d'Esquimalt—Juan de Fuca, qui nous a dit que, en tant que médecin, il avait vu les corps mutilés de personnes tuées par des chauffards ivres.
Pour ma part, à titre de journaliste, j'ai non seulement vu des gens blessés et mourant à l'hôpital, mais j'ai vu les conséquences de ces faits à l'extérieur des hôpitaux, dans la famille de la victime et aussi dans celle de la personne ayant commis le crime. Cela m'a amené à prendre conscience qu'il ne faut pas oublier, quand nous traitons de ce problème qu'est la conception et l'application des lois, que les enjeux doivent être pris dans le sens le plus large possible. La condition humaine est un bien vaste contexte et il arrive parfois que chacun de nous n'en voie qu'une facette.
Il y a quelque chose qui ne va pas avec le principe d'augmenter les peines pour la conduite en état d'ébriété. j'admets qu'une peine doit être dissuasive, mais je suis réticent à l'idée d'imposer une peine à la mesure de notre révolte. Les peines deviennent alors une vengeance de l'État, plutôt qu'un mode de dissuasion ou de réadaptation.
Je vous en donne un exemple tiré de ma propre expérience, à l'époque où j'étais encore un jeune journaliste. Le chauffard ivre, un père de famille qui avait de jeunes enfants, faisait depuis des années de gros efforts pour limiter sa consommation d'alcool, et il y arrivait assez bien. Un après-midi alors qu'il rentrait chez lui après avoir ramassé ses enfants à un match de foot, il a eu un accident et l'un de ses enfants a été tué. Il s'était arrêté pour boire dans un bar et était au-dessus de la limite.
Que s'est-il passé alors? En tant que jeune reporter, j'ai vu de très près la tragédie qu'est la mort d'un enfant. Il n'y a rien de plus déchirant que de voir le corps d'un enfant qui vient d'être tué dans un accident. Je ne sais pas pourquoi nous arrivons à supporter la vue d'un adulte mort, mais je ne suis jamais arrivé pendant ma carrière de reporter à ne pas être ému par celle d'un enfant.
Plus tard, j'ai suivi l'histoire et j'ai su que la femme et les enfants de cet homme étaient absolument dévastés, non seulement par la tragédie, mais aussi par la perte possible du soutien de famille. Ils savaient combien il avait essayé de surmonter sa faiblesse, mais qu'en dépit de ses efforts énormes, cette tragédie était arrivée.
Cela me fait penser que lorsque nous parlons de justice, nous ne devons pas oublier que la justice ne doit pas être sans compassion. Je ne voudrais pas que la Chambre adopte une loi qui ne donne pas au juge et aux tribunaux la discrétion de prendre en considération la situation dans son ensemble, de tenir compte non seulement de la victime, un enfant dans le cas présent, mais aussi de la famille de l'accusé, lorsqu'il est certain que le choix de la peine ne sera pas fonction de son effet dissuasif. L'accusé n'avait nullement l'intention de tuer son fils, et ne l'aurait pas fait s'il n'avait pas été victime de sa propre faiblesse.
Par ailleurs, il y a la désintoxication. Nous devons imposer des peines, cela ne fait aucun doute, mais nous devons également appliquer la loi avec compassion.
Il y a bien des critiques valables, mais je crois que le point faible, c'est que, lorsque les juges donnent des peines inadéquates par rapport aux crimes et qu'il n'existe aucune circonstance atténuante comme celles que je viens de décrire, de l'extérieur, la peine n'est absolument pas à la mesure du crime, qu'il s'agisse de conduite avec facultés affaiblies, de meurtre ou d'agression sexuelle.
Il s'est produit un incident récemment à Toronto où un juge a attribué, pour la plus horrible des agressions sexuelles, une peine que la plupart d'entre nous avons jugée bien trop légère.
Il ne suffit pas d'examiner la loi et de demander si nous devrions réviser les peines, comme le propose cette motion. Puisqu'elle est modérée, je ne peux m'y opposer en principe. Nous devons aussi examiner qui sont nos juges et comment ils se comportent.
La société a de sérieuses réserves au sujet du mode de nomination des juges, de leur façon de parvenir à ce poste. Le principe à la base de tout notre système judiciaire, c'est qu'un juge devrait posséder une vaste expérience de la vie, être parfaitement intègre et avoir une longue expérience professionnelle.
La perception assez répandue au pays, c'est que les juges, depuis la Cour suprême jusqu'à la cour provinciale, ne sont peut-être pas tous à la hauteur. Cette situation est peut-être due au processus actuel de nomination des juges. Dans bien des cas, il s'agit de nominations politiques.
Je ne veux pas entrer dans un débat sur le favoritisme. C'est une bonne chose d'une certaine façon mais, dans le cas des juges, j'ai d'énormes réserves face à l'intervention d'un aspect quelconque du processus politique dans leur nomination.
Je dirais à mes collègues que si nous voulons avoir de meilleurs juges et donc de meilleures décisions, que ce soit dans les tribunaux qui jugent les conducteurs en état d'ébriété ou à la Cour suprême, nous devons mettre sur pied un autre système pour la nomination des juges.
Il faudrait peut-être envisager un mécanisme indépendant qui ferait que les nominations viendraient du gouverneur général, par exemple, celui-ci devant examiner les qualités des candidats et décider ultimement lesquels sont les plus capables. Cela permettrait peut-être de relever la qualité des juges et d'avoir des décisions dans les cas de conduite en état d'ivresse, de meurtre ou d'agression qui combinent le bon sens, la dissuasion, la réhabilitation et la compassion si nécessaire; non pas une compassion stupide, non pas une compassion politiquement correcte, mais une compassion juste et mesurée.
Je ne voudrais pas que nos lois et nos tribunaux versent dans la vengeance. Ils sont là pour améliorer la société, pour aider les personnes qui ont de vrais problèmes et pour protéger la société. Ils sont là pour aider non seulement les victimes, mais aussi les accusés.
Ce n'est peut-être pas une position populaire, mais c'est la mienne, monsieur le Président.
M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, mon collègue avait sans doute raison. Ce n'est peut-être pas une position populaire.
Je suis sûr qu'il n'a même pas besoin de regarder la Chambre, il sait très bien où se rangent la plupart des députés sur cette question. Je lui dirais de regarder dehors, dans la population, et il constatera que les gens voient des parodies de justice tous les jours dans les tribunaux du pays et cela de la part de juges nommés qui ont tendance à refléter la philosophie du gouvernement en place, qu'il soit fédéral ou provincial. C'est cela qui ne va pas.
L'ancien ministre de la justice de ce gouvernement a clairement dit à la Chambre, et le hansard en est témoin, que la priorité du système de justice était la réhabilitation et la réinsertion dans la société des coupables de crimes.
Cette façon de voir diffère totalement de ce que mon parti et moi préconisons. Elle va tout à fait à l'encontre de ce que pensent les Canadiens. Les juges souscrivent quotidiennement à cette façon de voir de l'ex-ministre de la Justice. De plus, les peines actuelles traduisent la préoccupation des autorités provinciales et fédérales de réduire les coûts du système carcéral, au détriment des Canadiens, en n'emprisonnant pas ceux qui enfreignent la loi et en les remettant plutôt en liberté pour éviter d'avoir à payer pour les garder en captivité.
Cette approche est fondamentalement erronée. Lorsque quelqu'un commet un crime, il doit en subir les conséquences. Il faut constamment faire des choix dans la vie. Nous faisons certains bons choix et nous progressons dans la vie. Certaines personnes font des choix très mauvais et elles doivent en subir les conséquences.
J'ai tendance à croire—et nous aborderons peut-être la question au sein du Comité de la justice, à un moment ou à un autre pendant l'actuelle législature—que s'il y a une façon de garantir que les juges de notre pays n'aient qu'un objectif en tête, celui de veiller à ce que justice soit vraiment rendue dans leurs décisions, j'espère que nous la découvrirons. J'espère que le député nous aidera à atteindre cet objectif.
Le système actuel ne fonctionne pas. Je ne crois pas que le mode de nomination des juges soit efficace. Il ne correspond pas à ce que souhaitent les Canadiens. Je ne peux pas imaginer un seul instant que les Canadiens soient simplement assoiffés de vengeance; ils veulent, par contre, que justice soit rendue.
M. John Bryden: Monsieur le Président, je répondrai au député d'en face que les Canadiens veulent effectivement que justice soit rendue, mais que, à mon avis, la notion de justice comporte toujours un élément de compassion.
Ce qui m'inquiète dans un débat sur les droits des victimes et le reste, c'est qu'il puisse verser dans toute cette idée de vengeance. Lorsqu'un crime est perpétré et qu'une peine précise est prévue à cet égard, c'est coulé dans le béton. Je pense que nous devons accorder plus de pouvoir discrétionnaire aux juges. Nous devons leur donner la possibilité de faire preuve de compassion.
Je vais me porter à la défense de l'ex-ministre de la Justice, car je pense qu'il a fait des pieds et des mains pour choisir des juges très compétents. J'ai discuté de cette question avec lui.
Je tiens à préciser qu'en critiquant le système, je n'ai pas voulu critiquer le gouvernement ni l'ex-ministre de la Justice. Je voulais dire que des juges nommés par d'anciens gouvernements n'ont certainement pas fait un travail acceptable.
Le système comporte des lacunes. L'ex-ministre de la Justice serait d'accord pour dire qu'il faut trouver une solution plus efficace que celle du levier politique que constitue la nomination des juges pour un gouvernement. J'aimerais que nous ayons un débat en ce sens.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur cette motion de l'opposition officielle, en cette journée d'opposition. Cette motion doit, somme toute, être analysée avec beaucoup de sérieux, compte tenu de l'implication que cela peut avoir dans une société comme celle du Canada et celle du Québec également.
La motion, pour bien centrer le débat, a pour but d'exiger que le gouvernement présente lui-même une motion, en vertu d'un article du Règlement, ayant pour objet la mise sur pied d'un comité législatif. On a vu que le gouvernement a déposé un amendement à cet effet, afin que les mots «comité législatif» soient remplacés par les mots «Comité permanent de la justice et des droits de la personne». À mon avis, c'est une modification qui va de soi, compte tenu que le comité existe déjà. Et compte tenu que le Comité permanent de la justice et des droits de la personne est là pour examiner justement des questions de ce genre, je crois qu'il va de soi également que la modification lui soit soumise. Nous, du Bloc québécois, approuvons cette modification.
Également, afin de circonscrire le délai dont le comité disposera pour étudier cette question, le gouvernement, dans son amendement, souligne que le comité devra soumettre son rapport à la Chambre avant le 15 mai 1998.
De prime abord, on voit que le gouvernement semble avoir une écoute attentive pour la motion que le parti d'opposition a déposée en cette Chambre aujourd'hui, pour que nous étudiions, de façon précise, ce sujet d'actualité.
Pourquoi aujourd'hui s'inquiète-t-on, entre autres, de ce cas-là? Au cours de la semaine dernière, un organisme, un groupe de lobbyistes—et j'utilise le mot lobbyiste non pas dans sa forme négative, au contraire, je pense qu'il existe au Canada et au Québec des lobbies qui font un bon travail—le MADD, Mothers Against Drunk Driving, est venu à la Chambre des communes pour rencontrer les parlementaires. Ils ont remis un rapport qui, somme toute, est très bien fait. Cependant, comme tout groupe de lobby, il faut examiner leur rapport avec un oeil critique, critique positive cependant.
Lorsqu'un groupe de pression de ce genre soumet un sondage effectué dans la population, oui, il faut examiner les résultats, il faut prendre acte de certaines choses mentionnées dans le rapport, mais il faut regarder cela également d'un oeil interrogateur. Il faut se demander exactement comment les questions étaient posées, dans quel but, qui a payé, etc.
Là où je prête une oreille très attentive, c'est que dans ce sondage, on apprend certaines choses qui ont déjà été confirmées par des corps policiers, par des groupes ayant déjà étudié la situation, entre autres, dans un rapport intitulé «L'alcool au volant, un fléau national». Immédiatement, je peux dire à ce groupe de pression et à tous ceux qui nous écoutent que le Bloc québécois considère qu'effectivement, l'alcool au volant est un fléau national. C'est un fléau canadien, c'est un fléau québécois. À titre de législateurs, à titre d'élus, nous devons examiner très sérieusement cette question.
Les principales données de ce document, et c'est important de les rappeler pour que nous ayons une idée assez réaliste de la situation, sont que 94,3 p. 100 des sondés croient que la conduite avec facultés affaiblies est un problème que le gouvernement doit éliminer. Je pense effectivement que c'est normal que le taux soit aussi élevé, compte tenu du sérieux de la question, comme je le disais plus tôt.
Dans ce sondage, on apprend également que 74,7 p. 100 des sondés croient que les mesures prises par les gouvernements provinciaux et fédéral sont insuffisantes pour réduire la conduite avec facultés affaiblies. Peut-être que c'est exact, peut-être que ce ne l'est pas également, mais chose certaine, ça dépend de la question qu'on a posée. Je n'ai pas été sondé dans ce sondage. Vous savez qu'il est facile de faire dire des choses quelquefois aux personnes qui sont au bout du fil, si les questions qui se suivent conduisent l'individu ou la personne qui répond au téléphone sur une piste au lieu d'une autre. Mais il est sûr qu'un pourcentage important de personnes pensent que les gouvernements n'en font pas assez.
Le comité qui sera mis sur pied, si jamais la motion est adoptée par la Chambre, aura, je pense, l'obligation d'examiner très sérieusement cette partie-là. Est-ce que oui, ou non—et on devra y répondre—le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux qui sont responsables de l'administration de la justice font suffisamment d'efforts pour faire une véritable lutte à la conduite avec facultés affaiblies?
Je vais en savoir plus lorsqu'on étudiera la question, mais ce qui est intéressant, c'est que 94,4 p. 100 des gens estiment que les modifications au Code criminel doivent être mises en vigueur, de manière à ce que toute personne impliquée dans un accident entraînant la mort ou des blessures graves soit obligée de donner de son sang à la demande d'un agent, en application de la loi.
Soixante-treize pour cent des personnes sondées appuient une réduction du taux d'alcoolémie de 80 milligrammes par 100 millilitres à 50 milligrammes par 100 millilitres, donc une baisse du taux d'alcoolémie dans le sang de 30 milligrammes. C'est une baisse très importante. Cependant, semble-t-il que plus des deux tiers de la population appuient cette mesure.
Un autre point important, que j'aimerais vérifier, indique que 85 p. 100 des personnes interrogées sont en faveur d'une modification au Code criminel pour augmenter la peine d'emprisonnement minimale pour toute personne ayant causé la mort ou des blessures corporelles. C'est donc dire que quelqu'un qui a un accident impliquant des blessures corporelles ou la mort à un individu aurait automatiquement une peine d'emprisonnement minimale.
Aujourd'hui, on sait que le Code criminel prévoit une peine d'emprisonnement, mais c'est un maximum de cinq ans, et on laisse une certaine discrétion aux juges. Au niveau des juges, j'y reviendrai un peu plus loin.
Il y a un élément qui soulève en moi un gros point d'interrogation, parce que j'ai lu certaines questions du sondage et cela me laisse un petit peu perplexe. Peut-être est-ce véridique, il faudrait le vérifier en comité. On dit que 90,2 p. 100 des personnes sondées appuient l'adoption d'une déclaration des droits des victimes. J'aurais aimé savoir, sur les personnes sondées, quel pourcentage savait ce qu'était une déclaration des droits des victimes et ce que cela incluait.
Chose certaine, la population s'interroge présentement sur une question extrêmement importante, c'est-à-dire l'alcool au volant. On voit, toutes les semaines dans les journaux, des accidents ayant causé des blessures et la mort. On n'a qu'à vérifier avec les différentes sociétés d'automobile, soit au Québec, en Ontario ou dans d'autres provinces, pour voir que les statistiques sont accablantes.
Est-ce que la réalité demande véritablement qu'on incite le législateur à modifier de façon telle les dispositions touchant l'alcool au volant? Peut-être. Peut-être qu'il faut modifier autre chose que la législation. Ce comité, qui sera mis sur pied, pourra faire la lumière sur cela et en faire rapport à la Chambre.
Entre autres, une des questions que je me suis posées, surtout lorsque j'ai rencontré les gens de MADD, c'est ce que font les autres pays, comment cela fonctionne dans d'autres pays au niveau de l'alcool au volant. Les 80 milligrammes par 100 millilitres, lorsque je pratiquais le droit, c'était le taux d'alcoolémie maximum qui était permis dans la législation. C'est cela encore aujourd'hui. Mais lorsque j'ai vu qu'on proposait de le réduire à 50 milligrammes par 100 millilitres, je me suis questionné.
Cependant, j'ai appris, en faisant une vérification, après une étude plus exhaustive du dossier qu'on nous soumettait aujourd'hui, qu'en Australie, en Belgique, en Finlande, en Grèce, aux Pays-Bas, en Norvège, au Portugal et même en France, c'était 50 milligrammes par 100 millilitres. Donc, ce n'est peut-être pas une donnée tellement farfelue. Ce n'est peut-être pas une exagération de considérer, chez nous, au Canada, au Québec, un taux d'alcoolémie moins élevé dans le sang, si cela correspond au désir de la population. J'ai même vu qu'entre le Québec et d'autres provinces du Canada, il y avait même des distinctions au niveau de l'application de cette règle de 80 milligrammes par 100 millilitres dans le sang.
Cependant, tout n'est pas noir et tout n'est pas blanc dans ce dossier. Je pense que ceux qui ont suivi un peu l'évolution du dossier de l'alcool au volant, surtout les avocats, les personnes qui appliquent la législation, savent que depuis 1985, il y a eu une série de modifications au Code criminel pour tenter de solutionner le problème, de dissuader davantage la population, d'insister auprès de la population-cible, ceux qui étaient plus touchés par l'alcool au volant. On a tenté, depuis 1985, de les dissuader, par toutes sortes de manières, dont entre autres par l'augmentation des peines et par une simplification du travail des policiers.
Récemment, on a pu obtenir un échantillon de sang dans certaines circonstances, on a mis certaines balises, tout cela pour tenter d'aider les policiers à accumuler des preuves pour faire avancer les dossiers, pour tenter de dissuader la population de prendre le volant après avoir consommé des boissons alcooliques. Tout cela se fait depuis 1985.
Lors de la 35e Législature, je me souviens que le gouvernement d'en face avait présenté des modifications pour augmenter la peine maximale dans le cas des gens qui avaient un accident avec des facultés affaiblies et qui blessaient ou tuaient un individu, une personne, au cours de l'accident.
Tout cela fait en sorte qu'aujourd'hui, nous devons prendre acte également de ce qui se passe dans le Code criminel, et je pense que ça vaut la peine de le souligner si on veut avoir une idée globale de la situation dans ce domaine. Actuellement, dans le Code criminel, on traite des peines de la façon suivante, et c'est à l'article 255 du Code criminel. On y dit:
(1) Quiconque commet une infraction prévue à l'article 253 ou 254 (conduite avec facultés affaiblies) est coupable d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire ou par mise en accusation [...]
Dans le jargon judiciaire, «procédure sommaire», c'est moins fort que «par acte criminel». Quand quelqu'un est poursuivi pour acte criminel, c'est une offense beaucoup plus sérieuse, la personne doit être représentée par un avocat, etc., tandis que dans le cas de procédure sommaire, on n'est pas obligé d'être présent au moment de la comparution, c'est plus léger comme infraction.
On y dit donc:
[...] est passible:
a) que l'infraction soit poursuivie par mise en accusation ou par procédure sommaire, des peines minimales suivantes:
(i) pour la première infraction, une amende minimale de 300 $,
(ii) pour une seconde infraction, emprisonnement minimal de 14 jours,
(iii) pour chaque infraction subséquente, emprisonnement minimal de 90 jours.
On voit donc qu'il y a une progression, et cela n'existe pas depuis l'adoption de ces règles, ce sont des modifications que le législateur a apportées au cours des années à la suite de certains jugements, à la suite de certains faits qui se sont produits dans ce dossier pour augmenter la peine, et toujours tenter de dissuader la population.
b) si l'infraction est poursuivie par mise en accusation, [...]
[...] d'un emprisonnement maximal de 5 ans.
c) si l'infraction est poursuivie par procédure sommaire, d'un emprisonnement maximal de six mois.
(2) Quiconque commet une infraction prévue à l'alinéa 253a) et cause des lésions corporelles à une personne est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de dix ans.
(3) Quiconque commet une infraction prévue à l'alinéa 253a) et cause la mort d'une autre personne est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de 14 ans.
Comme vous le voyez, il y a une augmentation de la peine si c'est une récidive, si les dommages causés à autrui sont plus élevés, si on blesse gravement ou si, à la suite de l'accident causé par une personne en état d'ébriété, une personne décède, les peines sont sévères.
Ce qu'on demande ou ce qu'on voudrait, je pense, c'est qu'il existe, dans le Code criminel, un minimum. C'est-à-dire qu'une personne qui a un accident avec les facultés affaiblies a, par exemple, un an, deux ans d'emprisonnement; un minimum.
Je vous dis que c'est dangereux; peut-être qu'il faut le faire, je ne dis pas qu'il ne faille pas le faire. Personnellement, aujourd'hui, je vous dis que c'est peut-être dangereux, parce qu'on soutire toute discrétion au tribunal. On enlève toute façon, toute manière d'appréciation qu'un juge, bien informé, qu'un juge qui entend la preuve, qu'un juge qui voit l'accusé, qu'un juge qui connaît tous les faits de l'accident, ne pourrait pas avoir si on met un minimum. Peut-être qu'il faut arriver à cela, mais aujourd'hui, bien malin celui qui pourrait répondre à cette question.
La motion du parti d'opposition nous permettra, si elle est adoptée par la Chambre, de vérifier véritablement si c'est une chose à faire de mettre un minimum pour une infraction semblable. C'est un exemple. Il y a peut-être d'autres choses qu'il faut examiner. Plus tôt, j'entendais un de mes collègues du parti gouvernemental parler des nominations des juges. Oui, il y a peut-être cette partie-là, mais il y a peut-être autre chose, c'est peut-être au niveau de l'éducation des juges.
Par les temps qui courent, j'entends toutes sortes de choses relativement à des commentaires que les juges ont faits à la suite d'un jugement, des commentaires quelquefois pas trop élogieux. Je ne dis pas trop fort que je fais partie de la même confrérie que ces juges, parce que je ne suis pas trop fier des commentaires que ces personnes peuvent avoir faits.
C'est peut-être l'éducation qu'il faut améliorer. Ce n'est peut-être pas nécessairement une augmentation de la peine qu'il faut apporter au Code criminel. Tout cela, encore une fois, on pourra l'étudier en comité. On pourra voir ce qu'il faut exactement toucher.
Cela étant dit, nous, du Bloc québécois, soulevons trois points par rapport à cette motion. Premièrement, on reconnaît l'importance du problème soulevé par la motion présentée par le parti de l'opposition officielle. Oui, cette motion mérite qu'on l'appuie et qu'on l'étudie en comité de façon très sérieuse.
La deuxième chose, c'est que le Bloc québécois appuie la motion telle que modifiée par le gouvernement qui demande de présenter une motion visant la mise sur pied d'un comité permanent où l'on discutera des mesures prévues dans le Code criminel afin de corriger et d'améliorer, si possible, cette législation qui touche les infractions reliées à la consommation d'alcool et la conduite avec facultés affaiblies d'un véhicule motorisé.
Troisièmement, le Bloc québécois, conscient du problème généré par l'ivresse au volant, considère néanmoins que l'étude législative va porter dans son ensemble et non pas uniquement sur la détermination de peines plus sévères. Qu'on s'entende, chez nous, on dit: «Tant qu'à faire la job, on va la faire correctement». On va la faire avec assurance, et si quelqu'un l'examine par la suite, il n'aura rien à dire. C'est la même chose que je voudrai apporter à ce comité. Si le comité est saisi de cette étude, il faudra vérifier, non pas seulement l'augmentation de peines, mais bien l'ensemble du dossier de A à Z.
Il y a cependant une mise en garde que je dois faire à cette Chambre, parce qu'on touchera à l'administration de la justice. L'administration de la justice n'est pas de juridiction fédérale, c'est une juridiction provinciale. Il faudra véritablement être sur nos gardes pour faire la révision de ces dispositions, d'en faire une analyse sérieuse, exhaustive et la plus précise possible, mais dans les sphères de juridiction du fédéral. On ne mettra pas nos grandes pattes dans l'administration de la justice. Cela ne nous regarde pas. Mais le Bloc québécois sera là pour mettre les points sur les i et les barres sur les t si jamais le gouvernement décidait d'aller un petit peu plus loin.
En comité, et je conclurai là-dessus, j'aurai une série de questions à poser aux personnes qui viendront nous exposer leur étude, nous faire part de leurs commentaires relativement à ces infractions et aux modifications que l'on devrait apporter au Code criminel. Mais je pense qu'il faut également que les policiers viennent témoigner, et leur demander ce qu'ils pensent et ce qu'ils désirent avoir comme législation pour voir quels sont les éléments prioritaires.
Étant donné qu'il me reste de moins en moins de temps et que vous me faites signe, en conclusion, je dis que oui, nous sommes en faveur de cette motion, motion modifiée par le gouvernement. Nous sommes d'accord, parce que cela permettra un débat éclairé sur cette question. On pourra ensuite faire rapport à cette Chambre, afin d'avoir la législation la plus sérieuse possible, une législation qui pourra peut-être mettre un frein à ce fléau qui est—encore une fois, nous sommes d'accord avec le terme—un fléau national extrêmement important.
[Traduction]
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue du Bloc. Je n'ai pas souvent l'occasion de féliciter mon collègue du Bloc pour avoir fait, comme c'est le cas aujourd'hui, un excellent discours. La question est d'une telle importance que l'esprit de parti n'a pas sa place dans ce débat. Il faut éviter à tout prix de chercher à se faire du capital politique dans ce dossier.
Comme mon collègue l'a mentionné, il ne s'agit pas simplement d'imposer des peines plus sévères. Non, il ne s'agit pas d'imposer des peines plus sévères. Il s'agit plutôt de trouver une solution qui soit plus équitable envers les victimes, envers quiconque a à souffrir de la tragédie causée par l'alcool au volant. S'il faut pour cela modifier les mécanismes de nomination des juges, qu'on s'attelle à la tâche.
D'après les observations de mon collègue d'en face, j'en conclus qu'il est, tout comme moi, d'avis qu'en matière de justice il faut faire preuve de compassion. On ne peut faire preuve de compassion dans les tribunaux que si on donne plus de pouvoirs discrétionnaires aux juges et on ne peut donner plus de pouvoirs discrétionnaires aux juges que s'il s'agit de juges compétents.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Monsieur le Président, avec les compliments que le député du gouvernement m'a adressés, je serais porté à dire qu'il y a sûrement anguille sous roche, comme on dit souvent au Québec.
Mme Raymonde Folco: Il est généreux.
M. Michel Bellehumeur: Il est généreux. Peut-être qu'il est généreux, mais peut-être qu'il est plus réaliste que vous, madame.
Cependant, plus sérieusement, pour avoir déjà travaillé au Comité de la justice avec le collègue qui vient de faire ces commentaires, je sais qu'on a mis de côté, de part et d'autre, à quelques reprises, pour faire avancer certains dossiers, nos allégeances politiques et nos petites préoccupations très partisanes. On l'a fait dans différents dossiers et je suis encore prêt à le faire aujourd'hui pour ce dossier qui mérite toute l'attention des députés du Parlement.
Avant de répondre à sa dernière question, il a fait allusion aux nominations des juges. Effectivement, au Bloc québécois, nous sommes de ceux qui pensent que toutes les nominations des juges devraient se faire de façon beaucoup plus éclairée, de façon beaucoup plus transparente. On l'a d'ailleurs demandé lors de la nomination du juge de la Cour suprême, le dernier qui a été nommé. On n'a pas été entendus, mais j'espère que le député fera son petit bout de chemin au sein du gouvernement pour que, éventuellement, on ait une loi sur la nomination des juges, pour qu'elle soit faite de façon beaucoup plus transparente et que cela ne se limite pas au petit bureau du premier ministre qui décide, par un trait de plume, qui sera juge à la Cour suprême ou à la Cour supérieure, puisqu'il s'agit de fonctions extrêmement importantes.
Je pense qu'ils vont progresser et qu'ils vont venir nous rejoindre, comme dans bien d'autres dossiers, étant donné que le Bloc, et le Québec dans son ensemble, semble être, dans certains dossiers, 15, 20 et même 30 années d'avance sur les gens d'en face.
Cela étant dit, pour la dernière question relative à la compassion que les juges peuvent exercer lorsqu'il n'y a pas de minimum, oui, on peut utiliser le terme de compassion. On peut également utiliser un terme d'appréciation. Je pense que si on met un minimum, dans quelque disposition législative que ce soit, je conçois avec vous qu'il y a des législations qui méritent un minimum, mais on a en tête qu'en mettant un minimum, on enlève toute possibilité à un juge d'apprécier les faits qui sont devant lui.
Moi, je n'aimerais pas être sur le banc, entendre une situation, entendre des témoins, entendre même les victimes. Parfois, les victimes ne sont pas tout le temps de l'extrême côté. Ce n'est pas blanc ou noir, comme je le disais tout à l'heure. Je me mets à la place du juge. Avoir un minimum et dire: «Écoutez, monsieur, je suis obligé de vous condamner à deux ans de prison, parce que la loi m'y oblige. Cependant, si c'était comme dans le bon vieux temps, je vous donnerais peut-être juste six mois, je vous donnerais peut-être la possibilité d'aller vous faire soigner dans tel institut, parce que vous avez un problème grave en ce qui concerne l'alcool, parce que vous avez des enfants.» On oublie cela aussi.
Parfois, il y a des familles de cinq, six ou sept enfants qui peuvent peut-être dépendre d'un individu. Est-ce que c'est rendre service à la société, est-ce que c'est rendre service à la population que d'envoyer un individu «en dedans», comme on dit dans le bon jargon, et de laisser les cinq ou six personnes à l'aide sociale? Est-ce que c'est la finalité qu'on veut obtenir par des modifications? Si c'est cela, vous allez me perdre, je ne serai pas de ceux-là.
Il faut étudier la question très sérieusement pour tenter de permettre aux juges d'avoir une bonne appréciation, mais d'envoyer un signal clair, également, à la population pour dire que non, ce n'est pas acceptable de prendre le volant avec des facultés affaiblies.
Oui, je vous suis là-dessus; oui, vous allez me retrouver sur votre chemin, à côté de vous, pour faire avancer ce dossier, mais je pense qu'il faut le faire de façon réfléchie et analyser la situation avec minutie pour avoir la législation la plus adéquate possible pour combattre efficacement ce fléau.
Je ne suis pas sûr qu'en mettant un minimum de un, deux ou trois ans, nous atteindrons l'objectif, parce qu'aucune étude ne m'a été montrée, aucune étude n'a été déposée où on fait un lien direct qu'en augmentant la peine on diminue le taux de récidive, on diminue les dossiers de conduites avec facultés affaiblies, de vol ou de toute autre chose.
Je pense que je suis plus de la génération qui mise véritablement sur la réinsertion sociale, sur la prévention et sur l'éducation.
[Traduction]
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, je souscris aux observations formulées par mon collègue du Bloc québécois. Il est très important de ne pas dévier de l'objet de cette motion en s'arrêtant à la question des juges et de leur nomination.
Certes, le député d'en face a évoqué des motifs légitimes pour qu'on fasse preuve de compassion dans l'administration de la justice, mais les exemples qu'il a donnés ne représentent que la minorité des cas tragiques causés par l'alcool au volant. À mon avis, il y a tout lieu pour la Chambre d'adopter cette motion et de la renvoyer à un comité où ces questions seront débattues.
Il faut nous garder de nous perdre dans le débat. Le déplacer à un autre niveau en traitant du mode de nomination des juges, c'est là une tout autre question.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Monsieur le Président, je pense qu'il ne faut pas dévier de l'étude de la motion. Mais à ce stade-ci, je n'exclus rien. Si on veut véritablement faire une étude sérieuse de la problématique que nous avons devant nous cet après-midi, il ne faut pas exclure quoi que ce soit.
Est-ce que les juges sont les personnes qu'on doit éduquer? Est-ce que c'est la façon de nommer les juges qui est la solution au problème? Est-ce que c'est d'augmenter les peines? Est-ce que c'est l'éducation? Est-ce que c'est permettre aux législations provinciales d'intervenir plus adéquatement sur tel ou tel sujet? Moi, à ce stade-ci, je n'exclus rien.
Il reviendra au comité de faire son travail de façon très autonome et très professionnelle, comme le Comité de la justice et des droits de la personne l'a démontré à quelques reprises. Lorsque tous les partis se mettaient ensemble et laissaient la partisanerie de côté, on a réussi de grandes choses. Je pense qu'on serait capables, encore une fois, d'étudier de façon très adéquate cette problématique et de soumettre un rapport très précis à cette Chambre.
Mais pour répondre au député, oui, il faut effectivement garder l'objectif très précis, qui est ce que nous devons apporter au Code criminel, si on doit apporter quelque chose, pour atteindre l'objectif ultime qui est de mettre un terme au fléau de l'alcool au volant. S'il faut toucher aux juges, on y touchera. S'il faut toucher à autre chose, on y touchera également. On vous en fera rapport, monsieur le Président, et je suis sûr que vous serez de notre côté.
[Traduction]
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, j'informe la Chambre que je partagerai mon temps de parole avec le député de Mississauga-Sud.
Je suis très heureuse de pouvoir traiter de cette motion. À mon avis, il n'y a personne à la Chambre qui n'a pas été touché par la tragédie qu'est la mort d'un proche causée par un conducteur en état d'ébriété.
Imaginons seulement qu'on entende parler d'une amie chère, d'une femme qui oeuvre dans la collectivité, qui vient en aide à autrui, qui est une source d'inspiration pour toute sa famille et pour tous ceux qui la connaissent, et qui disparaît soudainement de la surface de la terre parce qu'un conducteur ivre roulant sur une route secondaire a surgi sur la route principale et est allé foncer sur la voiture de cette femme. Il n'y a personne parmi nous qui n'a pas connu l'expérience d'apprendre une telle nouvelle et, face à l'absurdité de cette tragédie, au sentiment d'impuissance que nous avons éprouvé, notre première réaction a été, je crois, d'être déterminés à faire quelque chose contre cela.
Je tiens à féliciter MADD, Mothers Against Drunk Driving. J'estime que ces femmes ont fait un travail absolument phénoménal au cours de la semaine qui s'est écoulée, en rencontrant des députés, en nous informant et en proposant les mesures qu'elles estiment nécessaires pour atténuer le fléau qui s'abat sur notre population, pour réduire le nombre de personnes de tous âges qui sont victimes de conducteurs en état d'ébriété.
Elles ont accompli un travail énorme pour sensibiliser la population. Elles ont accompli un travail énorme pour sonder l'opinion publique et dire clairement aux députés que les Canadiens d'un océan à l'autre veulent que des mesures sérieuses soient prises à cet égard dans un avenir rapproché.
Il s'agit là d'une question dans laquelle j'ai des antécédents. Lorsque j'étais présidente de l'Association des municipalités de l'Ontario, j'ai eu le privilège de travailler aux côtés du procureur général de l'époque, l'honorable Roy McMurtry. Nous avons mis sur pied un programme destiné aux municipalités de toute l'Ontario pour qu'elles élaborent des programmes d'action communautaire sur la conduite en état d'ébriété. J'ai mis sur pied un programme dans la ville d'Ottawa.
Les choses ont beaucoup changé depuis le début des années 80. Les attitudes ont beaucoup changé. À cette époque-là, mes enfants étaient adolescents ou au tout début de la vingtaine. J'ai trouvé très encourageant de voir que des jeunes venaient à une partie chez moi avec leur sac de couchage au cas où ils boiraient trop pour rentrer chez eux en voiture ou que leurs amis leur déconseilleraient de conduire.
Je me souviens d'une époque où nous avions un ami alcoolique. Cet ami venait nous voir régulièrement. Nous essayions de le soutenir. Je me suis rendu compte tout à coup que chaque fois qu'il nous rendait visite en voiture, la vie de mes enfants et d'autres enfants de ma rue était en danger. À un moment donné, j'ai demandé à Ron, mon mari, de le reconduire chez lui et de mettre sa voiture hors d'état afin qu'il ne puisse plus jamais la conduire. Je lui ai dit que je ne le laisserais plus jamais venir chez moi et risquer ainsi la vie de quelqu'un d'autre.
Le chapeau du distributeur de sa voiture est longtemps resté sur le dessus de notre réfrigérateur. J'ai le plaisir de vous dire qu'il n'a pas pris un verre depuis 20 ans.
Si je vous raconte cette histoire, c'est que lorsque j'ai fait partie du groupe de travail de la région sur la conduite avec facultés affaiblies, j'ai notamment appris que nous avions affaire à un problème d'alcoolisme. Cinquante p. 100 des premières infractions relatives à la conduite d'un véhicule sont commises par des alcooliques. Cela finit souvent tragiquement. Des vies sont perdues.
Je crois important de régler le problème au début. La première fois que quelqu'un est arrêté et reconnu coupable, il faut prendre tout de suite des mesures sérieuses. Il faut reconnaître que, dans la moitié des cas, on a affaire à un alcoolique. Si l'on ne s'attaque pas au problème d'alcoolisme de cette personne, il y aura une deuxième et une troisième fois, puis ce sera la tragédie.
C'est très important car, la deuxième fois que quelqu'un est reconnu coupable de conduite avec facultés affaiblies, il y a 90 p. 100 de chances qu'il soit alcoolique. Quatre-vingt-dix p. 100 des récidivistes sont alcooliques. La perte du permis ou une peine de prison ne suffisent pas à garantir qu'une personne ne conduira pas de nouveau en état d'ébriété.
Il faut lutter contre l'alcoolisme, et sérieusement. Nous devons veiller à ce que la personne qui a été condamnée une première fois ne reprenne pas le volant avant d'avoir réglé son problème d'alcool. C'est une étape cruciale si nous voulons prévenir ces drames.
Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas s'occuper de l'autre aspect, de ce qu'il faut faire lorsqu'un drame survient. Nous devons prendre des mesures beaucoup plus vigoureuses à cet égard. C'est ce que nous faisons, mais nous interviendrons toujours après coup, après le drame, après le décès, à moins de prendre des mesures préventives.
Nous devons régler le problème avant que l'infraction ne soit commise. Il y a par exemple la responsabilité que mes enfants et leurs amis assument mutuellement.
Nous ne devons pas faire croire que c'est un problème sans importance, acceptable dans notre société. Chacun de nous doit assumer la responsabilité de faire face à un ami, si difficile cela puisse-t-il être, et de lui dire: «Je suis désolé, mais je ne vais pas te laisser monter dans ta voiture. Je ne viens pas avec toi si tu insistes pour conduire.» Voilà le genre de responsabilité que nous devons tous assumer. C'est pourquoi la dernière discussion a été très intéressante. La solution n'est pas simplement de rendre les lois plus sévères. Nous voulons tous prévenir les drames plutôt que sévir une fois qu'ils ont eu lieu. Nous espérons ne jamais avoir à sévir. C'est pourquoi il faut que différents efforts se conjuguent: Code criminel, autorités provinciales, efforts au niveau local et dans nos propres familles.
Nous connaissons sans doute tous une personne alcoolique, dans la famille, parmi les amis ou au travail. Chaque fois que nous fermons les yeux et refusons de confronter le problème de l'alcool au volant, nous contribuons aux tragédies dont nous parlons aujourd'hui. Nous devons aussi assumer notre responsabilité.
Nous devons aussi surmonter une difficulté. La formation des juges en fait partie. Nous avons l'habitude de dire qu'il faut éduquer les jeunes et que, cela fait, nous aurons réglé le problème. Il faut penser que les jeunes prennent des habitudes de conduite quelque part. Éduquer les jeunes pour régler un problème que nous avons créé est une belle façon de contourner notre responsabilité.
Il y a des habitudes à changer—et je doute que les tribunaux aient rattrapé l'opinion publique à cet égard—, mais une personne n'est peut-être pas responsable d'une décision qu'elle prend quand elle est sous l'influence de l'alcool, mais elle est responsable de sa décision de boire. À mon avis, quand on prend cette décision, on décide du coup de tout ce qu'on va faire après le premier verre.
Nous avons vu que l'état d'ébriété a été invoqué devant les tribunaux comme excuse pour le viol d'une femme de 78 ans et nous avons entendu des gens dire: «J'étais trop ivre pour savoir ce que je faisais quand j'ai pris le volant.» Je regrette, mais de telles excuses sont maintenant inacceptables. On accepte la responsabilité de ses actes quand on décide de boire.
C'est une responsabilité personnelle que chacun d'entre nous doit assumer. Oui, nous devons modifier les lois et amener tous les paliers de gouvernement à combiner leurs efforts, afin de poursuivre et d'intensifier notre lutte contre la consommation abusive d'alcool et d'autres drogues partout dans la société, qui est la source de la plupart de ces tragédies.
Je ne pensais jamais avoir l'occasion de le dire, mais je suis reconnaissante envers le Parti réformiste d'avoir proposé cette motion aujourd'hui. J'ai hâte que cette motion soit étudiée en comité, où le gouvernement fédéral au moins pourra assumer sa responsabilité. Nous pourrons aussi élaborer une initiative importante avec les provinces, les collectivités et tous les Canadiens, afin d'atténuer cette tragédie. Toutefois, je doute que nous fassions disparaître le problème.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je remercie la députée de l'intervention qu'elle vient de faire et de l'esprit dans lequel elle a abordé le sujet. Ce fut une journée fertile en émotions pour nous tous qui nous préoccupons de cette question.
Nous avons entendu utiliser des termes comme vengeance, qui n'est pas acceptable ici. Je suis porté à être d'accord. On lit dans la Bible: «À moi la vengeance, dit le Seigneur.» On n'a donc pas à se préoccuper de cet aspect des choses.
Il faut bien cependant fixer une limite. Je crois qu'à bien des égards, la conduite avec facultés affaiblies paraît encore acceptable à beaucoup trop de Canadiens. Je voudrais savoir comment nous pourrions fixer une limite d'une façon si radicale que les gens comprennent que l'ivresse au volant n'est pas acceptable.
Je connais une famille qui a perdu un jeune homme parce que son ami conduisait en état d'ébriété. Le jeune conducteur a été condamné à la prison pour homicide involontaire. Cette affaire a causé du chagrin dans deux familles. Il doit peut-être en être ainsi.
J'aimerais que la députée me dise ce qu'elle pense de la proposition suivante. On devrait peut-être fixer comme limite que, si l'on conduit en état d'ébriété, on perd le droit de conduire pour toujours. Si l'on tue quelqu'un alors que l'on conduit avec facultés affaiblies, on commet un crime analogue au meurtre. Une des choses que l'on perd, c'est son véhicule, l'arme du crime. La députée serait-elle d'accord pour fixer ainsi la limite? Alors les gens comprendront peut-être que l'ivresse au volant n'est pas acceptable.
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, je suppose que le thème de mon discours était qu'il faut tirer la ligne beaucoup plus tôt dans le processus qui conduit une personne à tuer une autre personne sur la route.
Quelqu'un savait que le jeune homme dont le député a parlé avait bu et n'a rien fait pour l'empêcher de prendre le volant. Ce que nous avons suggéré, c'est que cette question soit renvoyée à un comité.
On a fait des recherches approfondies et on a demandé l'avis d'experts, de victimes, de représentants du système judiciaire et d'autres personnes qui s'intéressent à cette question afin de trouver la solution la plus efficace.
Le député veut la même chose que moi. Nous voulons la solution la plus efficace. J'espère qu'il me pardonnera si je ne saute pas aux conclusions. J'espère que l'examen de cette question par le Comité de la justice donnera d'excellents résultats et que nous recevrons de très bonnes recommandations.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, la députée d'Ottawa-Ouest—Nepean a relaté des expériences personnelles, et je crois que nous en avons tous. Chaque député qui a pris la parole aujourd'hui à la Chambre a relaté une tragédie.
Je sais qu'elle a parlé d'une amélioration de la situation, mais je me demande parfois si la situation s'est vraiment améliorée. Il y a, dans ma circonscription, une famille qui a vécu une expérience très tragique. L'histoire concerne une femme du nom de Joanne Perrotta. Son frère et son père étaient tous deux des alcooliques invétérés. En 1989, son frère a pris le volant un soir après avoir bu beaucoup et a perdu la vie lorsque son véhicule est entré en collision avec un camion de transport. Puis, Joanne, qui ne buvait pas du tout, travaillait tard un soir. Elle a été tuée en rentrant à la maison lorsqu'un conducteur avec facultés affaiblies l'a heurtée par le travers.
L'année suivante, son père était au volant de sa voiture alors qu'il était ivre, comme il l'avait fait si souvent, et il a frappé un motocycliste, qui a perdu la vie dans l'accident. La même tragédie ne cessait de se répéter dans cette famille.
Je sais que la sensibilisation du public est un aspect très important. Je me demande si la députée serait d'accord avec moi pour dire que des sanctions sévères pour ces gens qui ne semblent pas vouloir renoncer à leurs mauvaises habitudes seraient en fait une bonne façon d'essayer de régler le problème.
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, le député confirme ce que j'ai dit.
Ce qu'il faut comprendre, c'est que l'alcoolisme est la cause fondamentale de la plupart de ces tragédies. Nous devons donc nous attaquer à ce problème. Le fait de savoir qu'il risque d'être condamné à une peine de trois à six mois d'emprisonnement et de perdre son permis de conduire ne parviendra pas à dissuader un alcoolique. Cela ne fonctionne pas.
Nous devons nous attaquer au problème de l'alcoolisme. Avant d'être de nouveau autorisé à conduire, un alcoolique devrait être sobre depuis un certain temps afin qu'on puisse dire qu'il ne boit plus. Il ne faut pas oublier non plus qu'il y a probablement des centaines de personnes qui connaissaient ces conducteurs, qui savaient qu'ils conduisaient régulièrement en état d'ébriété et qui n'ont rien fait.
Le président suppléant (M. McClelland): En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir: le député de Waterloo—Wellington—L'agriculture.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'aborder la motion à l'étude aujourd'hui, car elle a trait à une question encore plus générale à laquelle tous les députés sont très sensibles. En effet, l'alcoolisme, ses répercussions et son omniprésence dans notre société constituent, à mon avis, l'une des plus graves questions qu'un Parlement peut avoir à régler.
Dans la motion dont nous sommes saisis, on demande au gouvernement de charger un comité de la Chambre d'examiner les questions relatives aux mesures de dissuasion et à la pertinence des peines imposées aux personnes reconnues coupables de conduite avec facultés affaiblies.
La conduite en état d'ébriété est un problème qui ne date pas d'hier. Nous avons tellement entendu de statistiques à ce sujet que la population et les parlementaires sont devenus, je crois, insensibles à la gravité du problème.
Je voudrais faire part aux députés de quelques données ayant trait aux méfaits de l'alcool: plus de 19 000 décès par année; 45 p. 100 de toutes les collisions automobiles; 30 p. 100 des incendies; 30 p. 100 des suicides; 60 p. 100 des homicides; 50 p. 100 des cas de violence familiale; 65 p. 100 des collisions de motoneiges; une famille disloquée sur six; 30 p. 100 des noyades; 5 p. 100 des malformations congénitales; 65 p. 100 des cas d'enfants maltraités; 40 p. 100 des chutes causant des blessures; 50 p. 100 des urgences dans les hôpitaux. Et plus de 15 milliards de dollars de soins de santé supplémentaires, de programmes sociaux, de procédures judiciaires et de pertes de productivité, aux frais des contribuables. Dans tous les cas que je viens d'énumérer, l'alcool est directement ou indirectement responsable.
Je voudrais rendre hommage à l'organisation Mothers Against Drunk Driving, qui s'occupe depuis longtemps de sensibilisation à la consommation d'alcool. L'un des fondateurs de MADD, M. John Bates, est un très bon ami à moi qui m'appuie sur les questions liées à l'alcool. Cette organisation est venue récemment sur la colline. Elle a fait de l'excellent travail. À mon avis, c'est essentiellement grâce à ses efforts que ce dossier reçoit enfin l'attention voulue à la Chambre. Je la félicite et je la remercie de son excellent travail au nom de tous les Canadiens.
Ce n'est pas une question simple. Une chose est sûre, et tous devraient comprendre qu'il est impossible de croire que quiconque puisse voter contre la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui. Les Canadiens devraient toujours s'attendre à ce que leurs représentants étudient à fond les questions qui leur sont soumises afin de s'assurer que le maximum soit fait pour dissuader des comportements comme la conduite avec facultés affaiblies. Les Canadiens devraient également s'attendre à ce que les peines pour les infractions criminelles soient constamment mises à jour. C'est à cela qu'ils s'attendent de nous. Cette motion ne fait pas autre chose que demander simplement aux parlementaires de demander à leur tour au Comité de la justice d'examiner la question et de présenter à la Chambre un projet de loi prévoyant les modifications qui conviennent.
Je vais certainement appuyer la motion. J'estime qu'elle transcende la politique et l'esprit de parti. Je crois et j'espère que tous les parlementaires vont appuyer unanimement la motion pour que nous puissions amorcer le processus de règlement d'un plus large éventail de problèmes liés à l'alcool au Canada.
J'ai donné une liste des conséquences directes et indirectes du mauvais usage de l'alcool. Je voudrais m'arrêter un peu plus longuement sur certaines autres. Dans les statistiques contenues dans le rapport de 1995 que j'ai reçu du Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies, le CCLAT, j'ai vu qu'il y avait 19 000 décès par année.
J'ai été frappé par le cas de cette personne en état d'ébriété au volant d'un véhicule automobile qui a tué un piéton innocent. Le décès de ce piéton a été attribué à un traumatisme et pas à l'alcool. Lorsque je vois des statistiques se rapportant à la consommation d'alcool, je dois me poser certaines questions, par exemple, les décès directs et indirects sont-ils inclus dans les chiffres? Je crois que les chiffres sont beaucoup plus élevés que ce que quiconque est prêt à publier.
Qu'on songe à la violence familiale par exemple. Il y a environ un an, il y a eu une conférence spéciale sur la colline du Parlement. Elle était coparrainée par Santé Canada, l'organisme équivalent aux États-Unis et le Comité canadien d'action sur le statut de la femme. On évalue le coût de la violence familiale et conjugale au Canada à 2,1 milliards de dollars. Imaginez un peu toutes les possibilités si nous pouvions mettre fin à ce fléau.
Je crois que la violence en milieu familial est assimilable à la conduite en état d'ébriété en ce sens que nous y avons été désensibilisés. Ce sont des maux entièrement évitables. Ils sont tout à fait irresponsables et tout à fait contraires aux valeurs familiales et canadiennes auxquelles nous sommes si attachés et pourtant, nous ne faisons rien pour y mettre fin. Nous tolérons ces maux pour Dieu sait quelles raisons, mais ils doivent disparaître. Nous pouvons faire mieux. Nous devons faire mieux.
Un divorce sur six est attribuable à l'alcoolisme. Quelqu'un s'est-il déjà interrogé sur les répercussions profondes des divorces? L'Institut Vanier estime que le taux de divorce est à 50 p. 100, mais Statistique Canada dit que ce n'est pas le cas; il n'est que de 33 p. 100.
Ils ont cependant tous oublié que plus d'un million de couples vivant en union libre échappent aux statistiques. Soixante-quinze pour cent des couples vivant en union libre se séparent après cinq ans et dans 60 p. 100 des cas, il y a des enfants. Les véritables victimes des ruptures de couple sont les enfants. Or les statistiques révèlent qu'un cas de rupture sur six est imputable directement à un problème d'alcool.
Parlons maintenant des malformations congénitales. Le syndrome d'alcoolisme foetal est responsable de 5 p. 100 des malformations congénitales. Il coûte au système de santé canadien environ 1,2 milliard de dollars par année en soins de santé supplémentaires, soins spécialisés et coûts sociaux associés au syndrome d'alcoolisme foetal.
Nous pourrions facilement financer une réduction d'impôt aux Canadiens en réglant certains de ces problèmes. Nous ne pouvons pas gagner sur tous les tableaux. Nous ne pouvons pas agir de façon irresponsable et dépenser des milliards de dollars pour notre insouciance et notre irresponsabilité et, par ailleurs, espérer pouvoir agir dans d'autres domaines.
Nous avons des moyens de réaliser de bonnes choses au Canada, mais nous devons trouver de nouvelles façons de faire et établir une nouvelle priorité pour tous les Canadiens afin de ne plus être insensibles à ce genre de choses.
Outre l'objet de la motion, je voudrais parler de deux autres sujets. Le premier est la présence d'étiquettes de mise en garde sur les contenants de boissons alcoolisées. Les boissons alcoolisées sont les seuls produits de consommation au Canada qui peuvent être nuisibles pour la santé s'ils sont mal utilisés et qui ne comportent aucune mise en garde sur l'emballage. Les contenants de comprimés mettent en garde contre la consommation de spiritueux lorsqu'on prend le médicament, mais il n'y a rien du genre sur les bouteilles d'alcool. C'est insensé. La Chambre est saisie d'un projet de loi et j'espère que les députés l'appuieront.
Le dernier sujet que je veux aborder est le programme Drink Smart Canada. On me permettra de lire le message que diffuse le programme: Si vous êtes en compagnie d'un ami, d'un parent ou d'une connaissance qui consomme de l'alcool et constitue un risque pour lui-même ou une autre personne, intervenez de façon appropriée pour l'empêcher de devenir lui aussi une statistique tragique.
Nous avons tous un rôle à jouer à cet égard. J'appuie cette motion avec enthousiasme et je remercie les députés qui l'ont présentée.
M. Mark Muise (West Nova, PC): Monsieur le Président, l'alcool au volant est un problème très grave. C'est un problème à l'origine de beaucoup de difficultés pour les familles. Il cause des difficultés financières. Il cause des difficultés pour la société.
Je voudrais vous rapporter une histoire qu'on m'a racontée et qui va vous donner une idée de l'ampleur du problème. On m'a raconté qu'un jeune homme avait quitté la maison un soir après avoir bu. Il a eu un accident et deux personnes ont été tuées. Quand il est sorti du coma, on a dû lui annoncer que les deux personnes qui avaient trouvé la mort ce soir là étaient ses parents. Quand on m'a raconté cette histoire, ça m'a donné des frissons et j'ai vraiment compris l'étendue du problème.
J'appuie l'organisation Mothers Against Drunk Driving et j'appuie cette motion. Je remercie le député de l'avoir présentée.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, pendant la période des questions, en répondant à une question de l'opposition, le ministre de la Santé a dit que le Canada avait l'une des lois antitabac les plus sévères du monde. Il a aussi dit que le gouvernement, Santé Canada, avait l'intention de consacrer 100 millions de dollars à la lutte contre le tabagisme au cours des quelques prochaines années.
Le tabac n'a jamais tué personne sur la route. Le tabac n'a jamais brisé des familles. Le tabac n'a jamais conduit une personne à en battre une autre. Et pourtant, le gouvernement, comme tous les gouvernements d'ailleurs, pas seulement le gouvernement libéral actuel, mais aussi le gouvernement qui l'a précédé, Santé Canada a toute une division et un nombre incalculable d'employés qui se concentrent sur la prévention du tabagisme.
Je me demande si le député de Mississauga-Sud voudrait bien nous dire pourquoi Santé Canada n'investit pas au moins une somme équivalente pour combattre l'alcoolisme. Pourquoi n'avons-nous pas une loi stricte anti-alcool?
M. Paul Szabo: Monsieur le Président, je ne peux pas répondre à la place du ministre de la Santé, ou de Santé Canada, mais je crois que le député soulève un point intéressant. Tous les parlementaires doivent participer à la définition des priorités du gouvernement. Cette motion a relevé le débat et nous permettra ainsi d'obtenir l'attention désirée.
Ce qu'il nous faut faire, c'est démontrer que nous ne sommes plus insensibles au problème et que nous sommes prêts à partir de ce principe au sujet de la conduite avec facultés affaiblies, tout en tenant compte des répercussions plus larges que peut avoir l'abus d'alcool, étant donné ses effets marqués et sa présence dans tous les milieux.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens ont généralement tendance à croire que la consommation d'alcool est un comportement acceptable. La plupart des gens ne se font pas prendre et, quand ça arrive, c'est une malchance pour la personne en question—et ça n'arrive qu'aux autres.
Au Parti réformiste, nous avons une opinion assez sévère au sujet de la conduite en état d'ébriété. J'aimerais que certains de mes collègues libéraux se manifestent, et qu'ils nous disent ce qu'il faudrait, d'après eux, pour empêcher les gens de prendre le volant après avoir bu—pour changer cette attitude.
On peut faire des miracles pour sensibiliser les gens, mais ceux qui veulent boire continueront à le faire. Comment faire pour les dissuader? Comme je le disais, on pourrait leur retirer leur permis de conduire à vie. On pourrait leur enlever leur véhicule, leur enlever le droit de posséder un véhicule.
Personne n'a le courage de dire que ce sont des mesures de ce genre qu'il faut prendre. Je crois que le comité doit pouvoir se fonder sur des propositions tirées du présent débat, quant aux mesures qui permettraient d'empêcher les gens de prendre le volant quand ils sont saouls.
M. Paul Szabo: Monsieur le Président, je comprends la frustration du député. Nous sommes tous frustrés, et ce, du fait que l'application de la loi est du ressort des provinces. Mais je pense que c'est justement le genre de travail que la motion demande au comité de faire, à savoir étudier cette question, et je pense que c'est juste.
Je demanderais toutefois à tous les députés de rester ouverts aux mesures préventives par opposition aux mesures réactives prises une fois que le problème est survenu. On ne rappellera jamais assez la valeur de l'éducation du public. On ne dira jamais assez combien les groupes comme MADD sont utiles. En Colombie-Britannique, il y a un bon groupe, le groupe de M. Art Steinmann, qui est un service d'éducation sur l'alcool et les drogues. Il est excellent. Ces gens travaillent d'arrache-pied sans faire d'éclat.
Nous devons travailler avec eux et les appuyer afin que tous les Canadiens puissent faire part de leur opinion et nous accorder l'appui dont nous avons besoin pour faire notre travail et pour influencer le recours non seulement à la punition et aux mesures dissuasives, mais aussi à l'éducation.
Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Madame la Présidente, je prends la parole pour appuyer la motion. Je suis, à bien des égards, très émue de commenter cette dernière aujourd'hui.
L'intoxication ne devrait jamais être une excuse. Elle ne devrait pas servir d'excuse à l'agression sexuelle, à la mort ou au meurtre. Aucun taux d'alcoolémie ne devrait servir d'excuse.
Je pense que personne ne devrait avoir le droit de prendre le volant après avoir bu. Ma position est dure: il n'y a pas de taux acceptable. On ne peut pas boire et conduire, un point c'est tout.
Aussi longtemps que nous permettrons aux chauffeurs de boire, les tragédies dont nous sommes témoins depuis 30 ou 40 ans se reproduiront. Quand une personne boit, son jugement est faussé. Elle n'est plus en mesure de décider si elle devrait conduire ou non. Si elle devrait prendre un autre verre, ou 10 autres verres, et prendre le volant. Personne ne devrait avoir la moindre discrétion en la matière.
En ce qui concerne la prévention, si nous voulons instaurer des mesures préventives, nous devons le faire à tous les niveaux.
Il existait au Yukon un programme de responsabilisation et d'incitation à la réussite pour les jeunes, mais j'ai appris aujourd'hui que le gouvernement fédéral l'avait aboli. Il s'adressait à une région du Yukon où le pourcentage de jeunes conduisant avec les facultés affaiblies est très élevé. Les autorités ne peuvent plus avoir recours à cette stratégie pour prévenir la conduite avec facultés affaiblies ou les autres abus liés à la consommation d'alcool.
Des statistiques nationales nous montrent que les hommes de 25 à 35 ans sont les plus susceptibles de conduire en état d'ébriété. Nous ne devrions donc pas autoriser la publicité qui idéalise la consommation d'alcool et les modes de vie où chacun est heureux à condition d'avoir une bouteille de bière à ses côtés.
En ce qui concerne notre système judiciaire, je crois que nos juges devraient jouir d'un pouvoir discrétionnaire. J'aimerais dire «Oui, retirons-leur leurs véhicules et nous résoudrons le problème», mais le reste de la famille peut compter sur le véhicule en question ou l'emploi de quelqu'un peut en dépendre. En procédant ainsi, on causerait donc des souffrances à ceux qui ne devraient pas être victimes du choix de celui qui conduit avec les facultés affaiblies.
Notre système judiciaire devrait comporter un processus de nomination des juges. Si nous voulons leur accorder la discrétion, nous devons savoir à qui nous l'accordons et comment ces gens sont parvenus à ces postes de confiance.
En ce qui concerne l'application de la loi, nous devons nous assurer que les agents de la GRC ne laissent pas partir leurs amis lorsqu'ils les arrêtent au volant en état d'ébriété. Nous devons nous assurer que les agents de la GRC sont assez nombreux à l'heure de pointe de la conduite avec facultés affaiblies, soit entre 18 heures le soir et 3 heures le matin, et qu'ils sont sur place pour arrêter les conducteurs délinquants.
Dans ma ville, à Whitehorse, deux agents de la GRC sont en devoir toute la nuit. Cela ne suffit pas pour prévenir le problème de la conduite avec facultés affaiblies compte tenu des autres responsabilités de ces agents. Si nous sommes sérieux au sujet de la prévention, nous devons être disposés à fournir à la GRC toutes les ressources dont elle a besoin pour s'attaquer au problème.
Lorsque j'étais adolescente au Yukon, il était encore permis de boire en public. Il était légal de boire et de conduire une automobile. Il y a à peine 20 ans de cela. L'attitude de la population a changé du tout au tout depuis. On ne peut plus boire en public et on ne peut plus conduire en état d'ébriété. Cependant, il est encore très courant, comme ailleurs au Canada, qu'on considère normal de conduire et de boire.
Je félicite ma collègue d'en face d'avoir décrit le courage qu'il lui a fallu pour prendre une position ferme et ne pas laisser son ami boire et conduire. C'est en faisant cela dans nos vies quotidiennes que nous parviendrons à des changements.
Je crois également que lorsqu'une personne a violé les règles, lorsqu'elle a conduit en état d'ébriété plus d'une fois, il n'est plus nécessaire d'être indulgent à son égard. À ce moment-là, nous devrions peut-être confisquer le véhicule ou prévoir une amende importante et il ne devrait pas y avoir d'échappatoire juridique permettant à quelqu'un de se soustraire à ses responsabilités.
Je vais terminer avec ma propre histoire sur cette question. Au Yukon, au début des années 70, l'atmosphère était différente. J'étais à bord d'un bateau avec mon père qui avait bu. Le bateau a chaviré. Après avoir vu mon père se noyer, j'ai nagé jusqu'à la rive. Ma mère s'est ainsi retrouvée à élever huit enfants avec le salaire d'un emploi à temps partiel. La conduite en état d'ébriété n'est pas une statistique pour moi. Je pensais qu'après de nombreuses années, on pouvait réussir à surmonter un traumatisme de cette nature. Ce n'est pas facile et c'est un souvenir qui vous reste.
Je suis honorée d'avoir l'occasion d'intervenir dans ce débat. C'est notre chance de dire à nos concitoyens que nous allons prendre cette question très au sérieux et que nous n'allons pas permettre la conduite avec facultés affaiblies. Toute personne qui boit et conduit un véhicule motorisé est responsable de ses actions. Nous la tiendrons responsable, mais nous ferons également preuve de compassion. Je crois que c'est la raison pour laquelle nous sommes ici.
Pour ces raisons, j'appuie cette motion.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Madame la Présidente, c'est avec intérêt que j'ai écouté la discussion et le député d'en face lorsqu'il nous a donné des détails sur ce que l'alcool coûte aux Canadiens chaque année. Il me semble que, si nous jetions cette substance aux orties, notre déficit disparaîtrait en très peu de temps.
Je ne doute nullement de l'authenticité des statistiques. Je crois qu'elles sont vraies.
Ce qui me dérange plus que toute autre chose lorsque j'écoute le débat, c'est d'entendre les mots «nous devons faire preuve de compassion». Je suis une personne pleine de compassion, mais, au cours de ma vie, j'ai dû ramasser des enfants morts sur la scène d'un accident ou me rendre aux domiciles d'adolescents qui avaient été tués. Il est très difficile de faire preuve de compassion lorsqu'on voit la personne qui a commis le crime, qui a causé la mort, comparaître devant les tribunaux et, en un rien de temps, être libérée après avoir payé une amende minimale et s'être vu imposer une peine minimale.
Ce qui me dérange, c'est d'écouter un adolescent qui a été accusé d'avoir conduit en état d'ébriété dire: «Je me demande qui sera le juge. J'aimerais bien que ce soit tel ou tel juge, car il n'est pas aussi sévère que les autres.» Cela me rappelle les cowboys qui se mettaient en rang pour obtenir un cheval. Ils voulaient un cheval docile parce qu'il était plus facile à monter.
Nous devons être plus conscients de la question dont nous sommes saisis. Les personnes qui l'ont portée à notre attention sont venues ici en tant que groupe de pression. Elles ne sont pas venues demander de l'argent au gouvernement, contrairement à ce que font la plupart des groupes de pression. Elles ne sont rien venues demander, mais elles veulent que nous examinions honnêtement ce problème, qui est une honte nationale. Elles l'ont appelé une tragédie nationale. C'est une honte et les Canadiens ne peuvent plus la tolérer.
Lorsqu'on demande aux gens ce qu'ils pensent des tribunaux, ils disent qu'ils les respectent de moins en moins chaque jour, en raison des jugements qu'ils rendent. Dans ma voiture, en venant à la Chambre, j'entendais un rapport sur une personne qui avait été frappée à mort. La police a retrouvé la trace de l'auteur, a suivi la traînée de sang et l'a arrêté. Cependant, l'affaire a été rejetée par les tribunaux sous prétexte que l'on n'avait pas suivi une procédure convenable lors de la perquisition. Voilà le genre de décision qui révolte les Canadiens. Les décisions relatives aux abus d'alcool sont souvent dans cette catégorie.
Abraham Lincoln disait que l'alcool avait de nombreux défenseurs, mais que personne n'avait encore trouvé une défense.
Lorsque la motion sera étudiée en comité, nous devrons nous faire l'écho de ce que nous disent nos électeurs. Inutile de s'occuper de trop près des questions juridiques, ce qui importe c'est ce que nos électeurs ont à dire. Ils appuieront la résolution à l'étude dans leur très grande majorité et avec beaucoup d'enthousiasme.
On peut bien dire que c'est un accident qui n'est pas vraiment de la faute du conducteur vu qu'il n'était pas maître de lui-même, mais il n'en reste pas moins qu'il savait ce qu'il faisait lorsqu'il a commencé à boire. Il savait bien à ce moment-là qu'il pouvait se faire du tort ou faire du tort à d'autres. Je ne pense pas que les Canadiens vont continuer à tolérer que les tribunaux utilisent cette excuse et permettent aux auteurs de tels crimes de rester en liberté.
Je voyageais en Saskatchewan, l'autre jour, lorsque j'ai entendu aux nouvelles que deux jeunes femmes avaient été abattues dans une station service, la nuit. J'en ai été bouleversé. L'auteur de ce double crime est toujours en liberté sur les routes de Saskatchewan. Les gens de cette ville sont exacerbés par la décision du tribunal.
Le tribunal dit que ces individus n'étaient pas vraiment responsables. Ils auraient dû être tenus responsables quand ils ont commencé à boire. Ils doivent être tenus responsables des actes qu'ils ont commis.
J'espère qu'à l'étape de l'étude en comité on ne laissera pas les coeurs tendres bousiller l'objectif de cette motion. J'espère qu'on ne tolérera rien qui puisse empêcher que justice ne soit rendue à la population canadienne dans un domaine qui revêt une telle importance.
Je sais d'expérience qu'il nous faut une charte des droits des victimes. Tout le monde semble avoir des droits de nos jours. Qu'en est-il des droits des victimes? Qu'est-ce qui nous fait si peur quand on parle des droits des victimes? Pourquoi avons-nous si peur de la mère qui a perdu un enfant de trois ans?
Il faut se rappeler que tous les jours l'alcool au volant fait plus de quatre victimes innocentes. Supposons qu'au cours des 300 prochains jours un député soit tué tous les jours. Pensons-y bien. Sommes-nous plus importants que nos électeurs? Pas le moins du monde.
J'irais plus loin. Si quatre d'entre nous étaient tués dans un accident de la circulation, si nous étions fauchés par un automobiliste ivre et si, la semaine suivante, quatre autres étaient encore tués, nous nous hâterions de trouver des mesures beaucoup plus drastiques que celle que propose le groupement MADD.
Gardons-nous de nous croire supérieurs à nos électeurs. Ça nous arrive quelquefois, je pense. Mes électeurs sont importants pour moi. Je sais quel est leur avis à ce sujet. Tous les journaux de ma circonscription ont fait paraître mon article en faveur de MADD. Il m'a valu de très bons commentaires.
Ils veulent quelque chose de plus que ce que nous avons maintenant. Si l'étude du comité ne produit aucun changement, rien de plus que ce que nous avons maintenant, nous aurons échoué lamentablement. Nous devons montrer aux Canadiens que nous prenons les choses au sérieux. Nous sommes le tribunal suprême. Nous prenons les décisions, et les tribunaux les exécutent.
Je ne dis pas qu'il faut interdire aux juges d'être cléments. Je dis qu'il faut lancer un message clair. Or, celui que nous lançons maintenant n'est pas très bon. À titre de législateurs, mettons le plus possible l'accent sur cette question et que la Chambre en obtienne un peu de crédit. Nous gagnerons rapidement le respect si la motion est adoptée et si nous faisons plus que ce à quoi, malheureusement, je m'attends.
J'appuierai la motion, et j'espère que nous obtiendrons en fin de compte de bons résultats.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Comme il est 17 h 15, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix toutes les questions nécessaires pour disposer de l'étude des crédits.
La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
[Français]
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La mise aux voix porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter cet amendement?
Des voix: D'accord.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je déclare l'amendement adopté.
(L'amendement est adopté.)
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La prochaine mise aux voix porte sur la motion principale, telle qu'amendée.
[Traduction]
Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.) propose:
Que, conformément à l'alinéa 68(4)a) du Règlement, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne soit chargé d'élaborer et de déposer un projet de loi aux fins de modifier les articles du Code criminel qui traitent de la conduite avec facultés affaiblies, pour a) exercer une plus grande influence préventive et b) faire en sorte que les peines soient à la mesure du sérieux de l'infraction.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le ministre a-t-il le consentement unanime pour proposer la motion?
Des voix: D'accord.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La motion est adoptée.
(La motion est adoptée.)
[Français]
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Est-on d'accord pour dire qu'il est 17 h 30, pour qu'on puisse poursuivre avec les travaux de la Chambre immédiatement?
Des voix: D'accord.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Comme il est 17 h 20, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
LE CHÔMAGE À TERRE-NEUVE
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC) propose:
Que, de l'avis de la Chambre, un comité spécial devrait être former pour étudier le problème de chômage aigu à Terre-Neuve et au Labrador.
—Madame la Présidente, ce n'est pas de gaieté de coeur que je prends la parole aujourd'hui pour présenter ma motion d'initiative parlementaire demandant à la Chambre d'établir un comité spécial pour étudier le problème de chômage aigu à Terre-Neuve et au Labrador.
Le taux de chômage à Terre-Neuve est l'un des échecs les plus flagrants de la Confédération canadienne. Je ne me fais pas d'illusions en pensant que le seul fait de présenter cette motion va régler le problème du chômage à Terre-Neuve et au Labrador, mais il faut bien commencer quelque part, et j'ai promis aux électeurs de St. John's-Est, dont beaucoup sont sans emploi, que j'exprimerais leurs préoccupations aujourd'hui à la Chambre des communes.
Chaque sondage qui a été fait à Terre-Neuve et au Labrador a révélé que le chômage est le problème le plus pressant. Au moment où nous parlons du problème du chômage à Terre-Neuve et au Labrador aujourd'hui, l'économie canadienne reprend de la vigueur, mais la situation semble pire que jamais à Terre-Neuve.
Dans le moment, à Terre-Neuve, notre population diminue au rythme d'environ 7 500 personnes par année. Cela peut ne pas sembler grave dans le contexte canadien, mais, lorsqu'on considère que la province de Terre-Neuve et du Labrador ne compte qu'un demi-million d'habitants, c'est très grave de perdre 7 500 personnes par année. Cela a un effet dévastateur sur le bien-être collectif de la population.
Il y a quelques semaines à peine, j'ai assisté à une réunion sur une petite île, l'île Bell, au large de la côte, dans ma circonscription, pas très loin de St. John's. On y trouvait une ville minière très prospère depuis la fin des années 1800 jusqu'en 1966, je crois, lorsque les activités d'exploitation minière ont pris fin là-bas.
Jusqu'à récemment, l'île comptait une population de 10 000 à 12 000 habitants. Ce chiffre est tombé à 3 500. J'ai rencontré le maire de l'île, Gary Gosine, qui m'a dit que, presque chaque jour, il pouvait voir des maisons qui se vidaient parce que les gens s'en allaient ailleurs. Les gens n'ont pas d'emplois là-bas, et c'est pourquoi la population de cette petite île est passée de 5 200 ou 5 300 à 3 500 en très peu de temps.
Notre population diminue au rythme de 7 500 personnes par année, ce qui est dévastateur pour une province qui ne compte qu'un demi-million d'habitants.
Le problème du chômage à Terre-Neuve a été étudié maintes et maintes fois. Quand je siégeais à l'Assemblée législative de Terre-Neuve, nous avons institué une commission royale d'enquête pour examiner le problème. Il n'y avait pas de solutions évidentes pour résoudre rapidement le problème à ce moment-là. Notre économie est largement fondée sur les ressources naturelles, comme vous le savez, soit le poisson, les minéraux et les produits de papier. C'est une économie fondée sur les ressources et axée sur les exportations.
La nouvelle économie mondialisée est fondée sur la connaissance. Nous avons certes une industrie de haute technologie à Terre-Neuve, mais elle est très modeste. Malgré tout, nous avons quelques petites entreprises qui exportent leur savoir-faire en ingénierie dans le secteur de l'exploitation du pétrole et du gaz en mer. Cependant, la croissance dans ces secteurs est de loin insuffisante pour compenser les pertes à Terre-Neuve et au Labrador.
Deux secteurs ont été vraiment durement touchés depuis un certain nombre d'années: ce sont l'industrie de la pêche et le secteur public. La pêche à la morue du Nord est dans un piteux état. Quelque 30 000 pêcheurs et travailleurs d'usine doivent s'en remettre à la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique. Les fonds de cette stratégie servent surtout à mettre du pain sur la table.
Comme le vérificateur général l'a fait remarquer récemment dans son rapport, les millions de dollars qui ont été consacrés à la formation en vertu de ce programme n'ont absolument rien donné. La plupart des pêcheurs et des travailleurs d'usine étaient comme en attente. Ils attendaient que la morue revienne, et n'étaient donc pas vraiment intéressés à partir.
De nombreux pêcheurs, notamment ceux de la vieille génération, ont commencé à pêcher il y a 25, 30 ou 35 ans. Ils avaient peu d'instruction. Lorsque la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique a été lancée, bon nombre se sont retrouvés dans la situation où ils devaient d'abord obtenir un diplôme d'études secondaires avant de pouvoir accéder aux différents instituts de formation technique où ils étaient censés s'inscrire.
J'ai toujours trouvé aberrant que des fonctionnaires s'attendent à ce que des gens qui pratiquent la pêche depuis 25 ou 30 ans et qui ont fait des études limitées se recyclent tout à coup pour obtenir un diplôme d'études secondaires, pour accéder à un institut de formation technique et pour s'asseoir devant un ordinateur. Dans quel but? Je n'en sais rien. Beaucoup d'argent a été dépensé pour différents programmes de formation, et il faut donner raison au vérificateur général, aux pêcheurs et aux autres qui ont dit que c'était un gaspillage de fonds.
Bien des personnes visées ont attendu une relance de la pêche, mais en vain. La réalité, c'est que la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique tire aujourd'hui à sa fin. La grande majorité de ceux qui y ont participé ne savent absolument pas ce qu'ils feront ensuite. Ils ont tenu bon, mais il me semble qu'ils seront maintenant livrés à leur propre sort.
Les députés ont dit à la Chambre que cette stratégie était une erreur, et qu'on aurait dû y mettre un terme plus tôt. Je reconnais que cette stratégie aurait pu être bien plus efficace. Elle aurait pu inciter les gens à quitter ce secteur par le biais d'un rachat de permis et d'un programme de mise à la retraite anticipée. Les fonds destinés à la formation auraient dû être versés à ceux qui étaient suffisamment jeunes ou enthousiastes pour aller de l'avant et entreprendre une nouvelle carrière. La stratégie aurait pu encourager les gens à quitter l'industrie.
Mais surtout, et c'est ce que je me suis évertué à dire, le gouvernement fédéral aurait pu être brutalement honnête avec les gens et ne pas leur donner l'impression que leurs perspectives d'avenir dans le secteur des pêches étaient excellentes. Au lieu de cela, des milliers de gens se verront bientôt privés de leur revenu alors qu'ils n'ont pas repris la pêche, ils ne se sont pas recyclés pour la nouvelle économie dans laquelle nous sommes maintenant engagés, ils n'ont pas les moyens de déménager ailleurs pour trouver du travail et ils n'ont que l'aide sociale pour toute perspective d'avenir.
Des centaines de personnes se présentent chaque semaine à mon bureau de circonscription à Saint John's. Je me rappelle ce que le premier ministre, lors d'un forum de discussion, a dit à une chômeuse en quête d'un emploi. D'une façon cavalière, le premier ministre lui a dit qu'elle devrait peut-être déménager ailleurs au Canada. Or, le premier ministre qui tenait ces propos à cette femme venait de mettre fin au programme d'aide à la mobilité. Ceux qui sont aux prises avec le chômage se voient maintenant confrontés à la perspective d'avoir à rester là où ils sont parce qu'ils n'ont pas d'argent pour aller s'établir ailleurs.
À Terre-Neuve, le secteur public joue un rôle très important dans l'économie de la province, un rôle probablement beaucoup plus grand qu'il ne devrait. Les paiements de transfert fédéraux au titre de la santé et de l'éducation représentent à peu près la moitié du budget provincial. Nous recevons notre part des paiements de péréquation. Le programme d'assurance-chômage fournit un revenu à un grand nombre de travailleurs saisonniers.
Lorsque le gouvernement fédéral a décidé il y a quelque temps d'assainir les finances publiques, ce fut désastreux pour l'économie terre-neuvienne, car les transferts fédéraux au gouvernement provincial ont diminué radicalement, et le gouvernement provincial a évidemment commencé à faire des coupes pour compenser la réduction des paiements de transfert du gouvernement fédéral.
Le gouvernement provincial s'est déchargé des coupes sur les municipalités qui, à leur tour, ont appliqué toutes sortes de compressions qui ont, encore une fois, eu un effet dévastateur sur l'économie. Les mises à pied effectuées à tous les niveaux du secteur public ont non seulement réduit les services, mais aussi inondé le marché du travail d'une main-d'oeuvre des plus qualifiées. C'est ce qui explique le peu de succès que remporte le Parti libéral au Canada atlantique. Ce parti n'a vraiment pas montré à la population qu'il se préoccupait de ses problèmes de chômage.
Nous ne pouvons imposer dans la région atlantique une dynamique comme celle qui anime l'économie de la région centrale ou de l'ouest du Canada. Cela n'aurait aucun sens.
Nous pouvons parler du problème éternellement, mais qu'allons-nous faire pour le régler? J'ai quelques suggestions, mais je risque de m'opposer à certaines attitudes de droite qui sont affichées à l'occasion à la Chambre. D'abord, nous ne pouvons abandonner d'un coup la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique. Cela ne peut se faire en l'absence d'un programme de transition. On ne peut jeter 30 000 personnes à la rue, sans rien à faire et nulle part où aller.
Il faut un programme de rachat des permis et des programmes de formation qui permettent de décrocher des emplois qui existent vraiment. Il faut un généreux programme de retraite. Si ces initiatives se situent au-delà de ce qu'on considère normal, tant pis. Comme le Québec est à sa façon une société distincte, Terre-Neuve, compte tenu du contexte économique avec lequel nous devons composer, se distingue aussi. L'autre solution consiste à ne rien faire et à s'exposer à d'innombrables troubles sociaux.
À l'instar des autres provinces, Terre-Neuve a besoin d'un meilleur arrangement en vertu du programme de péréquation. Il nous faut un meilleur arrangement dans la Confédération, en particulier, au chapitre de la péréquation. L'arrangement actuel nous empêche de crever de faim, mais il nous maintient aussi dans la pauvreté.
On a beaucoup parlé de la mine de nickel de la baie Voisey, à Terre-Neuve. Je crois fermement que cette mine sera un franc succès lorsqu'elle sera pleinement exploitée. Elle vaut des milliards de dollars.
Il ne faut jamais oublier que pour chaque dollar que Terre-Neuve perçoit en impôts et en redevances, on soustrait un dollar de nos paiements de péréquation. Pour gagner un dollar, il faut d'abord percevoir 1 milliard de dollars par année en recettes additionnelles rien que pour compenser la réduction de nos paiements de péréquation.
Dans le cas d'Hibernia, nous avions une entente spéciale de gestion prévoyant que nous ne perdions que 70c. de péréquation. C'est un bon début. Il nous faut une meilleure formule que cela pour arriver jamais à prendre le dessus et à survivre seuls. La formule doit être étendue à tous les grands travaux d'exploitation des ressources. En théorie, nous avons beaucoup de ressources à Terre-Neuve et au Labrador. Avec l'arrangement actuel, nous ne serons jamais en mesure de sortir de la pauvreté où nous sommes.
Je me rends compte que le temps mis à ma disposition est expiré. Peut-être aurai-je plus tard l'occasion de dire encore quelques mots à ce sujet. Je suis heureuse d'avoir pu m'exprimer dans ce dossier.
M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, avec la motion à l'étude, on demande au gouvernement de consacrer des ressources à l'étude du problème du chômage à Terre-Neuve et au Labrador. Je tiens à citer à nouveau la motion afin que les personnes qui nous regardent aujourd'hui en comprennent l'objet.
Que, de l'avis de la Chambre, un comité spécial devrait être formé pour étudier le problème du chômage aigu à Terre-Neuve et au Labrador.
Je tiens à assurer au député que le gouvernement est au courant de ce problème très grave et reconnaît la nécessité de solutions structurelles à long terme. Personne de ce côté-ci de la Chambre ne contestera, je crois, qu'il faut vraiment tenir compte des disparités régionales.
Historiquement, mon parti est celui qui s'est attaqué le plus sérieusement aux problèmes régionaux que le député voudrait que nous examinions.
Des études passées nous ont conduits à une réforme de l'assurance-emploi, la première réforme majeure en 25 ans. Nous savions que nous devions faire davantage en fait de mesures de soutien actif. Nous savions que nous devions investir dans les gens qui avaient investi dans eux-mêmes. Nous savions qu'aider les Canadiens à retourner sur le marché du travail était la seule solution aux problèmes du Canada atlantique et ce sont là les objectifs de la réforme de l'assurance-emploi.
J'estime qu'il est tout à fait normal de comprendre un problème avant de s'y attaquer, qu'il y a un temps pour étudier et un temps pour passer à l'action. Le gouvernement croit qu'il est temps d'agir. Et, justement, nous agissons en partenariat avec les gouvernements provinciaux.
Ces dix dernières années, beaucoup d'études, générales autant que pointues, ont été faites sur le chômage à Terre-Neuve et au Labrador. Il y a eu notamment—et le député l'a mentionnée—la commission royale d'enquête du gouvernement de Terre-Neuve connue sous le nom de commission House vers la fin des années 1980. Cette enquête a donné une analyse complète de la situation économique de la province et est devenue le fondement du plan économique stratégique de celle-ci. Ce plan est encore suivi.
Aujourd'hui, je veux parler de certaines des choses que nous avons faites pour amoindrir le problème. D'après mes propres observations, la population de la circonscription du député est probablement plus intéressée aux solutions que nous pouvons apporter qu'aux discours que nous pouvons prononcer sur ses problèmes. Plutôt que de refaire une fois de plus le tour de la question, nous préférons faire un meilleur usage de nos ressources et aider la population de Terre-Neuve et du Labrador à retourner sur le marché du travail. C'est pourquoi, en 1997-1998, le gouvernement investira 89 millions de dollars dans des mesures d'emploi actives à Terre-Neuve et au Labrador.
Nous parlons ici de suppléments de revenu ciblés, de subventions salariales ciblées, de partenariats axés sur la création d'emploi, d'aide à l'emploi autonome, de compétences, de prêts et d'octrois. Toutefois, nous avons également appris qu'il est plus important que jamais de collaborer étroitement avec les provinces.
Grâce à l'accord de développement du marché du travail que nous avons conclu avec la province, les deux ordres de gouvernement cogéreront les programmes qui redonneront du travail aux Terre-Neuviens. L'accord propose des solutions conçues à Terre-Neuve spécialement en fonction des circonstances particulières qui caractérisent l'économie de Terre-Neuve. Dans le cadre de ce genre de partenariat, on reconnaît que chacun a quelque chose à offrir et qu'aucune solution n'est possible sans la collaboration des deux ordres de gouvernement.
L'un des éléments de la réforme de l'assurance-emploi, dont nous avons entendu parler un peu à la Chambre, mais que je tenais à signaler, fonctionne particulièrement bien à Terre-Neuve et au Labrador. Il s'agit du fonds transitoire de création d'emplois, un programme d'une valeur approximative de 300 millions de dollars que nous avons lancé en juillet 1996. Cette initiative commence à avoir des répercussions à Terre-Neuve et au Labrador. Le fonds requiert la participation du secteur privé, des gouvernements provinciaux et municipaux de même que des groupes communautaires.
À l'instar de l'accord de développement du marché du travail, le fonds fonctionne bien, parce qu'il repose sur le concept du partenariat. Au 14 octobre, le fonds transitoire de création d'emplois avait versé 26 millions de dollars à 70 projets à Terre-Neuve et au Labrador. Cet argent a permis d'amasser 85 millions de dollars additionnels.
La question qu'on nous pose toujours à cette Chambre est la suivante: tout cet argent a-t-il servi à créer des emplois? Bien sûr que si. Jusqu'à maintenant, le fonds transitoire de création d'emplois a créé quelque 2 016 emplois à Terre-Neuve et au Labrador.
Afin d'avoir une idée plus concrète des emplois créés, prenons seulement un exemple parmi tous les projets qui ont permis à 2 016 personnes de trouver de l'emploi grâce au fonds transitoire de création d'emplois. Il s'agit du service de diagnostic Millennium. Nous avons aidé à créer 46 emplois permanents à temps plein dans ce seul service. Certaines des personnes qui y travaillent vivent probablement dans la circonscription de mon collègue. Millennium est en train d'établir un établissement privé d'analyse du sang. Cet établissement fournira des services à la Canadian Blood Bank Corporation et il a d'ambitieux projets d'exportation. D'autres emplois seront probablement créés dans l'avenir.
Il ne s'agit pas de programmes de création de travail. Ces programmes embauchent du personnel médical, des techniciens de laboratoire et du personnel de soutien, c'est-à-dire précisément le genre de travailleurs dont Terre-Neuve a besoin dans un monde de technologie de pointe. Ce sont des emplois bien rémunérés.
Je pourrais continuer à parler encore longtemps car de nombreux sujets pourraient être abordés ensemble, mais je ne veux pas m'attarder aux réussites. Je voudrais parler de ce que nous devrons faire à l'avenir.
L'autre programme qui a eu du succès est l'Agence de promotion économique du Canada atlantique. En 1996, l'Agence déclarait qu'elle avait créé ou sauvé 82 000 emplois à plein temps de longue durée. La motion du député semble vouloir dire que le gouvernement du Canada ne sait pas quoi faire, alors que les faits témoignent du contraire.
Les 46 personnes de St. John's qui ont eu les nouveaux emplois, ou ce qui se passe avec les 2016 autres, ou les 82 000 que nous avons sauvés, disent à cette Chambre que le problème n'est plus de trouver des données, le problème est de trouver des emplois. Nous ne voulons plus attendre. Nous avons les renseignements dont nous avons besoin et nous ne ferons des études que sur des sujets précis lorsque le besoin s'en fera sentir.
Par exemple, M. Eugene Harrigan, chef associé du Développement des ressources humaines pour la région de l'Ontario, fera une enquête des conséquences de la suppression de la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique sur les clients du programme, leurs collectivités et les finances provinciales. Cela aidera le gouvernement et nos partenaires à trouver des solutions progressistes.
Nous avons des programmes qui ont du succès et nous avons des résultats. La situation évolue. Maintenant que, plus que jamais, nous travaillons en collaboration avec les provinces, la situation va évoluer de façon encore plus positive.
Dans le peu de temps dont je disposais, j'ai donné à la Chambre des exemples concrets de la façon dont des particuliers et des sociétés reprennent du service. Je voudrais remercier les travailleurs de ces programmes qui essaient d'aider des régions défavorisées comme Terre-Neuve et le Labrador. Je voudrais insister sur le fait que nous sommes sur la bonne voie. Les gens doivent être patients et doivent donner à ces programmes la possibilité de fonctionner.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je ne suis à la Chambre que depuis peu et je ne sais pas combien de fois j'ai entendu prononcer le mot «étude».
Je voudrais faire la lecture de la motion proposée par le député de St. John's-Est et dont nous sommes saisis aujourd'hui:
Que, de l'avis de la Chambre, un comité spécial devrait être formé pour étudier le problème de chômage aigu à Terre-Neuve et au Labrador.
Toute une nouveauté! On parle d'étudier encore une fois le problème. Voyons voir cette histoire des études.
D'abord et avant tout, il y a un comité permanent qui examine les questions touchant les pêches. Le gouvernement de Terre-Neuve vient de terminer une analyse de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique et des problèmes propres à Terre-Neuve. Il y a en face de nous le gouvernement qui déclare que la solution ne passe pas par d'autres études, ce qui ne l'a pas empêché de recruter M. Eugene Harrigan pour aller effectuer une étude sur la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique au moment même où le vérificateur général publiait sa propre étude sur le sujet. Ça fait déjà quatre études.
On n'a entendu personne du Parti conservateur s'excuser d'avoir mis en oeuvre le PARPMN ou Plan d'adaptation et de redressement de la pêche de la morue du Nord. Non, aucune excuse de leur part. C'est vrai qu'ils faisaient la paire. John Crosbie et son chef actuel, Curly, faisaient équipe. Curly, qui était le ministre de l'Environnement, n'avait que faire des études qui prédisaient l'effondrement des stocks de poisson. John Crosbie savait à l'époque...
M. Mark Muise (West Nova, PC): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je pense qu'il convient de faire montre d'un peu de respect envers les personnes dont on parle à la Chambre. Je crois que cela n'est que justice, et je vous demanderais de vous prononcer là-dessus.
Le vice-président: Je présume que le député de Calgary-Ouest parlait du député de Sherbrooke. Si c'est le cas, je crois qu'il voudra bien préférer le titre de député de Sherbrooke à tout autre nom.
M. Rob Anders: Monsieur le Président, comme je disais, le chef du cinquième parti faisait équipe avec John Crosbie pour camoufler le désastre provoqué par la surpêche dans l'Atlantique. Les conservateurs étaient plus que désireux de fermer les yeux sur la situation et de la cacher à tous les habitants des provinces atlantiques.
À cette époque, M. Crosbie savait que si la pêche continuait à ce rythme, les stocks de poisson de l'Atlantique seraient compromis, mais il savait qu'en la limitant, c'est sa réélection qui serait compromise. Cela lui aurait coûté des votes dans le Canada atlantique. Il a donc laissé faire.
Le chef du cinquième parti—certaines personnes l'appellent Curly—est allé de l'avant sans tenir compte de la situation. Les deux faisaient vraiment une belle équipe.
Le ministère des Pêches et des Océans a ensuite formulé des recommandations qui ont été mises de côté. Il y a eu une autre étude.
Les études se sont multipliées. D'ailleurs, je peux dire que les gouvernement conservateurs et libéraux savent comment faire des études. De cela, je suis certain. Je n'hésite pas à le dire. Cependant, je pense que la population du Canada atlantique commence à en avoir assez des études. Elle a été étudiée sous toutes les coutures. Toutes les études qu'il fallait ont été faites. La population attend maintenant quelques éléments de solution.
Voyons ce que les hommes politiques du Canada atlantique qui se retirent ont à dire au sujet d'une solution au problème.
Voyons la question des impôts. Le Canada atlantique, y compris Terre-Neuve, d'où le député est originaire, paie les impôts les plus élevés de toutes les régions du Canada. Il conviendrait de se demander si ces impôts sont si élevés parce qu'ils servent à payer le premier ministre provincial le mieux rémunéré du Canada. N'est-ce pas? Brian Tobin touche 150 000 $ par année. Il est le premier ministre le mieux rémunéré du Canada et la population de sa province paie les impôts les plus élevés du Canada. Il y a lieu de se demander s'il y a un lien entre les deux, d'autant plus que les Terre-Neuviens lui paient une pension de 3,4 millions de dollars, en plus de son salaire de premier ministre de Terre-Neuve. En définitive, c'est peut-être à cela que servent nos impôts.
Voyons un peu ce que le bon libéral Frank McKenna avait à dire à ce sujet. En se retirant de la vie politique, il a déclaré: «Réduisons les impôts.» Le gouvernement fédéral gaspille de l'argent au Canada atlantique depuis des années. Pourquoi ne pas économiser, au lieu de financer un éventail de programmes qui ne semblent rien faire pour réduire le taux de chômage? Depuis deux décennies, ces programmes ne donnent aucun résultat. Pourquoi ne pas réduire les impôts Canadiens de la région atlantique? Cela pourrait vraiment créer des emplois et stimuler la croissance.
En fait, une autre étude pourrait s'ajouter à toutes celles que les conservateurs voudraient entreprendre. À l'Université de Moncton, les professeurs Donald Savoie et Maurice Beaudin se sont penchés sur l'Agence de promotion économique du Canada atlantique. Ils ont conclu que l'assurance-chômage avait étouffé l'esprit d'entrepreneur au Canada atlantique.
Encore une fois, je crains de devoir me reporter à ce que les conservateurs ont fait à cet égard. Sous leur gouvernement, les gens pouvaient travailler pendant dix semaines et toucher des prestations pendant 42 semaines à Terre-Neuve. Il est tout à fait irréaliste de croire qu'une telle politique gouvernementale ne tue pas l'esprit d'entrepreneur. Mais c'était la politique des conservateurs et elle a eu raison de l'esprit d'entrepreneur.
Nous avons vu aussi ce que les libéraux d'en face ont fait avec la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique. Ils ont tenu pour acquis qu'en subventionnant les gens pour qu'ils continuent de pêcher ou pour qu'ils ne pêchent pas quand les pêcheurs étaient trop nombreux, compte tenu de la technologie des marchés à l'époque, cela réglerait le problème. Non, cela n'a pas réglé le problème de la surpêche, parce que les permis d'un grand nombre de ces pêcheurs n'ont toujours pas été retirés. Nous revoici donc à la case départ. C'est toujours la même rengaine. Il n'y a pas de solution conservatrice ou libérale.
Nous pouvons toujours regarder ce que la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a dit de la région. Peter O'Brien, le directeur pour le Canada atlantique, et le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Frank McKenna...
[Français]
M. Mark Muise: Monsieur le Président, j'invoque la question de privilège.
Je crois que le député devrait cesser de blâmer le passé et nous aider à trouver des mesures constructives pour les gens de Terre-Neuve. C'est mon point, monsieur le Président.
Le vice-président: Je regrette, mais je ne crois pas que ce soit une question de privilège ou un recours au Règlement. C'est un point de débat.
[Traduction]
M. Rob Anders: Monsieur le Président, on reconnaît bien là les conservateurs. Eux qui ont causé le problème, eux qui ont allumé l'incendie, maintenant qu'ils se font critiquer, que font-ils? Ils y voient une question de privilège au lieu d'une divergence de vues. Nous avons peu de sympathie pour eux.
Le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Frank McKenna, a dit que le gouvernement fédéral devrait cesser de distribuer des subventions aux entreprises de la région de l'Atlantique et utiliser l'argent ainsi économisée pour stimuler les entreprises de la région en diminuant les taux d'impôt. Cela me paraît très logique. Si j'exploitais une entreprise dans la région de l'Atlantique et que je devais y payer les taux d'impôt les plus élevés du pays, je songerais certainement à déménager si je le pouvais, car à quoi bon garder une entreprise dans la région si c'est pour y être accablé d'impôts?
Les deux partis sont complices, en effet. Voyons certaines des mesures fiscales que ces deux merveilleux gouvernements, le conservateur et le libéral, ont imposées aux habitants de la région de l'Atlantique. À l'heure actuelle, le gouvernement fédéral et son ministre des Finances sont très heureux du surplus de taxes payées en guise de cotisations à l'assurance-emploi. Ils jouissent en effet d'un surplus de 15 milliards de dollars dont ils ont vampirisés l'économie canadienne, et ils se vantent d'avoir équilibré le budget. Ils l'ont fait aux dépens des gens qui ne peuvent trouver de travail à cause des cotisations élevées à l'assurance-emploi.
La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a réclamé encore une fois une réduction de 25 p. 100 des cotisations à l'assurance-emploi en soutenant que cela permettrait de créer plus d'emplois. Même les études du ministère des Finances révèlent que les charges sociales élevées limitent la création d'emplois. Mais non, nous n'entendons pas les conservateurs préconiser ces solutions. À la place, ils disent que le député devrait se tenir tranquille et ne pas parler de leurs tristes réalisations passées. Ils n'avaient pas de solutions à l'époque et ils n'en ont pas plus maintenant. Tout ce qu'ils peuvent proposer, c'est une étude. Malheureusement, ce n'est pas une étude qui va réduire les cotisations.
Autre chose qui nous attend en ce qui concerne les charges sociales, c'est le Régime de pensions du Canada. Le gouvernement va soutirer 11 milliards de dollars aux Canadiens en leur imposant une taxe de 9,9 p. 100, aussi bien dire 10 p. 100, et il en est fier. Il pense qu'en quelque sorte, cela va permettre de créer des emplois dans la région de l'Atlantique. Surprise, surprise. Encore une fois c'est un programme gouvernemental voué à l'échec, qui ne créera pas d'emplois dans la région de l'Atlantique. Ce n'est pas en faisant payer plus d'impôts que l'on crée des emplois.
Finalement, tout bien considéré, qu'avons-nous exactement? Nous avons des conservateurs dont les ministres du gouvernement précédent ont ignoré les études environnementales. Nous avons des gens qui ont maintenu des impôts élevés. Des gens qui se sont assuré des pensions de plusieurs millions de dollars en soutirant de l'argent aux Canadiens.
Nous nous tournons ensuite vers les libéraux, de l'autre côté, dans l'espoir d'une solution. Là, nous avons la taxe de vente harmonisée. Le gouvernement libéral a pensé qu'il serait avantageux d'augmenter la taxe sur la valeur ajoutée. Il a maintenu des cotisations à l'assurance-emploi élevées en puisant 15 milliards de plus qu'il n'aurait dû, pensant que cela allait faire du bien. Il a ensuite augmenté les cotisations au Régime de pensions du Canada, ce qui va lui rapporter 11 milliards de dollars.
Qu'il s'agisse des conservateurs ou des libéraux, il est toujours question d'études et d'augmentation des taxes. Les conservateurs veulent une étude spéciale, un comité spécial pour examiner cette question. Les libéraux ont engagé Eugene Harrigan pour régler le problème qu'ils ont créé avec leur stratégie du poisson de fond de l'Atlantique. Les deux partis proposent toujours de nouvelles études coûteuses; les deux partis augmentent les taxes et les maintiennent à un niveau élevé et s'attendent à ce qu'en quelque sorte, le problème se règle.
[Français]
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, je vous félicite d'avoir bien nommé mon comté qui regroupe effectivement quatre municipalités régionales de comté.
Je suis très heureux de prendre la parole sur cette motion du député de St. John's-Est qui dit:
Que, de l'avis de la Chambre, un comité spécial devrait être formé pour étudier le problème de chômage aigu à Terre-Neuve et au Labrador.
Je pense qu'on peut reconnaître la démarche du député qui veut attirer l'attention de la Chambre sur les problèmes de chômage qui existent dans la région qu'il représente, et c'est pleinement justifié.
Quand on examine la demande un peu plus à fond, on peut se demander en même temps si le problème du chômage au Canada n'est pas beaucoup plus large que celui-là. Si je pense à tout le Québec, particulièrement à la région de l'est du Québec qui me concerne, c'est-à-dire le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, comme c'est le cas pour tout le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, et pas seulement les questions des territoires, mais des catégories comme les jeunes ou les travailleurs âgés de 50 ou 55 ans qui sont touchés par les changements technologiques qui se produisent dans nos entreprises, on se rend compte finalement que ce n'est peut-être pas un comité spécial sur l'emploi que ça prend au Canada, mais plutôt une priorité nationale du gouvernement canadien.
On nous a rabattu les oreilles pendant quatre ans sur la nécessité de la lutte au déficit que tout le monde reconnaissait. Présentement, le problème numéro un au Canada, c'est le chômage, c'est le fait qu'on ne réussisse pas à donner des emplois aux gens qui sont disponibles pour les occuper, soit parce qu'on n'a pas d'adéquation entre leur formation et celle requise pour les emplois, soit qu'on n'en génère tout simplement pas suffisamment parce que les gains de productivité de notre société retournent souvent dans les poches des gens qui ont plus d'argent et peu souvent dans celles des gens qui auraient besoin d'argent pour pouvoir créer des emplois.
Donc, en ce qui concerne la bonne volonté du député, j'aurais tendance à dire qu'il faudrait la généraliser. Le problème du chômage au Canada n'est pas le résultat de la loi naturelle. Il faut se rappeler que les Maritimes, à la fin du XIXe siècle, étaient une région autonome.
Est-ce que c'est le résultat des jeux de pouvoir? Je pense que oui. Il faut regarder comment le Canada a été construit. Il y a 25 ou 30 ans, il y a eu une entente assez claire au Canada. On voulait développer l'Ontario pour que cette province ait le secteur manufacturier et des emplois. Quant aux gens des Maritimes et du Québec qui fournissent les ressources naturelles, comme on ne peut pas les faire travailler à l'année, parce qu'on ne leur donne pas une politique de diversification de leur économie régionale, on leur a donné des paiements de transfert. Cela a fonctionné pas si mal jusqu'à ce qu'on décide de fermer le robinet sur les paiements de transfert.
On fonctionne à l'envers dans ce pays. Au lieu de dire qu'on allait diversifier les économies des régions qui dépendent des ressources naturelles et, ensuite, on resserrera les normes, si nécessaire, on a décidé de resserrer les normes et de ne pas diversifier l'économie régionale.
Cela a donné les résultats qu'on connaît aujourd'hui. On est sur le bord de la catastrophe sociale. Il y a des gens, dans nos comtés, qui n'ont pas la formation pour les emplois disponibles, qui en cherchent, qui sont malheureux. Ils ne peuvent plus maintenant avoir suffisamment de semaines pour l'assurance-emploi pour pouvoir faire le tour de l'horloge. On se retrouve avec ce qu'on appelle le trou du printemps, le fait que pendant 10 ou 15 semaines, les gens n'auront pas de revenu.
Comment pourrait-on contrer cette situation? Il me semble que la première chose, c'est qu'il y ait un engagement politique clair, net et précis du gouvernement fédéral pour faire de la lutte au chômage une priorité.
Il y a des recommandations qui sont faites en ce sens. Il faut se rappeler que le Comité du développement des ressources humaines de ce même Parlement, il y a deux semaines, a adopté une résolution pour dire au Comité des finances et au ministre des Finances: votre priorité pour la préparation du prochain budget doit être l'emploi et l'assurance-emploi. Une majorité des députés de l'opposition ont gagné ce débat; donc, le Comité du développement des ressources humaines devra transmettre cette demande, cette prérogative, au Comité des finances. Je pense qu'il faut donner des suites à cela.
Donc, la proposition qui est devant nous aujourd'hui, malheureusement, ne peut faire l'objet d'un vote. Je souhaiterais qu'il y ait beaucoup plus de motions sur lesquelles les députés puissent voter. On aurait pu l'amender à partir de la recommandation du Comité des ressources humaines et en faire la volonté du Parlement, que le gouvernement fédéral décide que sa priorité pour la prochaine année, lorsqu'il concoctera son budget, soit la lutte au chômage.
Si on faisait un choix comme celui-là, si c'était ça qui était mis sur la table, automatiquement, cela déclencherait la nécessité de développer des politiques de diversification de nos économies régionales. Cela voudrait dire que, comme on donne priorité à l'emploi, pour l'ensemble canadien, il y aura quelque chose pour faire que les travailleurs forestiers qui n'ont plus de travail en forêt puissent en avoir dans la transformation du bois. On devrait avoir des programmes d'aide aux entreprises pour développer ces nouveaux produits qui peuvent être vendus sur le marché américain, sur le marché européen et ailleurs.
Cela veut dire que dans le domaine laitier, on pourrait accentuer encore la possibilité d'exporter notre lait, de créer de nouveaux produits, d'avoir des créneaux spécialisés. Cela veut dire que dans le secteur touristique, on pourrait transformer le programme que le gouvernement fédéral vient de créer.
On vient de créer un fonds de 500 millions de dollars pour aider les grands centres touristiques à être encore meilleurs au plan international. Cela donne des résultats intéressants où des centres existent déjà, comme à Mont-Tremblant.
Moi, comme député d'une région où le tourisme est en train de prendre de l'ampleur, où on n'a pas nécessairement des infrastructures existantes, je vous dis que ce dont on a besoin, ce sont des programmes plus flexibles qui répondront aux besoins de ces régions.
Si le gouvernement fédéral donnait la priorité à l'emploi, on n'aurait plus besoin de motion comme celle d'aujourd'hui, parce que ça deviendrait la volonté de tout l'appareil gouvernemental. Cela voudrait dire que lorsqu'on ferait des politiques d'achat du gouvernement, on vérifierait si les retombées sont correctes, suffisantes et correspondantes à ce que chaque région du Canada paie en impôts.
Demain matin, si on faisait un profil de cela, la région de la Capitale nationale, l'Ontario, on verrait qu'ils reçoivent pas mal leur part de ces programmes. Quand on vient chez nous, essayez, avec une de vos PME, de vous inscrire sur le système informatisé d'offres de service et de réussir à décrocher un contrat du ministère de la Défense nationale. C'est toute une expérience parce que, souvent, il existe déjà beaucoup de contacts, des gens qui ont les soumissions depuis deux, trois, dix, vingt ou trente ans, et c'est la personne qui aura le contrat qui écrit l'appel d'offres finalement. Ça va pas mal mieux pour décrocher le contrat, à ce moment-là.
Ce sont des gestes comme ceux-là, de tous ordres, qui devraient être mis de l'avant par le gouvernement. Pour cela, il faut un engagement du premier ministre et du gouvernement pour que la lutte au chômage devienne leur priorité, et que dans dix ans, on évalue les Québécois, les Canadiens et on verra où on en est rendu à ce moment-là.
Le plus rapidement possible, au cours du présent mandat, il faut évaluer comment on utilise nos ressources humaines. Est-ce qu'on met à profit tout le potentiel de nos jeunes? Est-ce qu'on met à profit le potentiel de ceux qui, dans la génération des 30 ans, ont été obligés de marcher de contrat en contrat? C'est une autre particularité de la question du chômage. Il faut regarder aussi comment on peut accorder d'autres formes de revenu aux gens qui n'ont pas un revenu suffisant dans l'emploi actuel, annuellement.
Il y a deux semaines, on a été avisés à l'effet que les travailleurs indépendants augmentaient de façon fantastique au Québec et au Canada. Il y a de plus en plus de gens qui travaillent à titre personnel, qui n'ont pas nécessairement d'employeur. Ces gens ne sont pas admissibles à l'assurance-emploi.
Pourquoi ne ferait-on pas preuve d'originalité pour leur permettre de devenir admissibles et, de cette façon, leur donner la chance de continuer à travailler dans ces secteurs, de développer leur entrepreneurship, et en même temps, d'avoir un filet social qui les protège en cas de pertes d'emploi ou de manque de contrats?
On est donc devant une motion de bonne volonté, qui présente un problème qui existe dans les régions dont le député fait mention. Mais c'est aussi un problème qui existe à la grandeur du Canada.
Je me permets de dire que les gens de l'ouest du Canada n'ont pas de jugement à faire quant à la façon dont les gens de l'est du Canada ou d'autres parties ont fait les choses. Ce qu'on vit aujourd'hui, ce procès, on pourrait le faire de toutes les façons. On pourrait examiner les subventions sur le transport du grain, par exemple, qu'il y a eues pendant plusieurs années dans l'Ouest. Je pense qu'il n'y a pas de jugement de ce type à faire. Il faut plutôt regarder comment on s'assure que chaque gouvernement, pendant qu'on est dans le système, a la maîtrise de ses outils, comment on pourrait avoir un appareil gouvernemental qui soit plus rapide pour répondre aux demandes.
Je conclus là-dessus. Tant que le gouvernement fédéral mettra en place des choses comme la Stratégie Jeunesse en parallèle avec les mêmes programmes existants dans une province et qu'on obligera le jeune entrepreneur à cogner à deux portes en même temps pour trouver une réponse à ses problèmes, on n'est pas sur la bonne voie. La bonne voie, c'est clair et net, il faut que les champs de juridiction soient clairs, que les marchés économiques soient largement ouverts et il faut qu'on fasse confiance au potentiel des gens de nos régions.
Ce n'est pas à Ottawa que sont les solutions au chômage, c'est dans chacune des régions du Québec et du Canada. Ces solutions, il faut que les gens puissent les mettre sur la table et qu'elles soient écoutées, qu'on en fasse une priorité et qu'on soit évalués sur la façon dont on répond à cette priorité. C'est le défi qu'on lance à l'actuel gouvernement.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour appuyer la motion M-177 qui se lit comme suit:
Que, de l'avis de la Chambre, un comité spécial devrait être formé pour étudier le problème de chômage aigu à Terre-Neuve et au Labrador.
En même temps, j'aimerais ajouter le Nouveau-Brunswick, le Québec, la Nouvelle-Écosse et même, pour aller plus loin, la Colombie-Britannique, dans le Pacifique, avec tous les problèmes qu'ils connaissent dans le secteur de la pêche.
Avant d'aller plus loin avec mon discours, j'aimerais faire quelques commentaires à mon collègue du Parti réformiste. Il a parlé de Frank McKenna en disant qu'on devrait écouter ce que Frank McKenna a dit.
[Traduction]
Je vais le dire dans sa langue pour qu'il n'ait pas à écouter l'interprétation. Pendant les dix années où M. Frank McKenna a été au pouvoir au Nouveau-Brunswick, jamais je ne l'ai entendu dire qu'il n'avait pas besoin des programmes du fédéral. Et tout à coup, dans la semaine qui a suivi sa démission, il a déclaré qu'il n'avait pas besoin de ces programmes et qu'il fallait réduire la taxe. Peut-être est-ce parce qu'il cherche à obtenir l'appui du Parti réformiste dans l'Ouest au cas où il voudrait devenir premier ministre du pays. Je peux toutefois affirmer à la Chambre qu'il n'a jamais rien dit de la sorte quand il était au pouvoir.
Lorsque le Parti réformiste parle de réduire les impôts et reproche au gouvernement de trop dépenser, il n'est vraiment pas bien placé. S'il voulait vraiment économiser l'argent des contribuables, il devrait s'en tenir aux promesses faites par son chef qui avait dit avant les élections qu'il ne s'installerait pas à Stornoway et qu'il ne se servirait pas de la limousine. Aujourd'hui, il est installé à Stornoway aux frais des contribuables. Et qui plus est, il a eu besoin de 100 000 $ pour rénover Stornoway,
[Français]
Il est clair que le taux de chômage à Terre-Neuve et au Labrador a atteint des niveaux critiques malgré les promesses de ce gouvernement d'investir dans la formation de la main-d'oeuvre et de la restructuration économique.
Comme les conservateurs avant eux, les libéraux ont coupé dans les services sociaux et enlevé la réglementation de l'industrie. Le résultat? Les riches sont devenus plus riches, mais les gens ordinaires souffrent encore.
[Traduction]
Les libéraux ont été élus sur des promesses d'espoir, mais ils ont ensuite adopté pour position que nous ne pouvions plus nous permettre les services qui tiennent à coeur aux Canadiens. Ils disent maintenant que le chômage et l'insécurité économique sont des choses de la vie, et que nous devons les accepter.
[Français]
Accepter l'insécurité qui accompagne le taux de chômage n'est pas acceptable. Jamais le NPD n'acceptera la vision libérale qui est insensible à la souffrance des gens. Jamais le NPD n'acceptera qu'il n'y a plus rien à faire pour les travailleurs et les travailleuses de ce pays.
Récemment, dans son premier discours dans la région depuis l'élection qui a réduit la présence libérale de 31 à 11 sièges pour la région Atlantique, le premier ministre a eu l'audace de dire que les coupures étaient inévitables et que les gens de l'Atlantique allaient le remercier. Le remercier?
Je doute que les milliers de chômeurs soient prêts à remercier le premier ministre pour des coupures qui les ont plongés dans la plus grande misère.
Dans son discours, le premier ministre a aussi admis que les provinces de l'Atlantique ont été celles qui ont le plus souffert en raison des coupures fédérales. Il a dit que parce que nous dépendions plus du gouvernement fédéral que les autres régions du pays, nous avons été pénalisés, naturellement.
Quand ce gouvernement va-t-il se réveiller et réaliser que ce sont des communautés au complet qui souffrent en raison de l'inaction des libéraux? Les problèmes présents à Terre-Neuve sont des problèmes que nous connaissons aussi dans ma région du Nouveau-Brunswick. Les gens veulent travailler, mais ils ne trouvent pas d'emploi, parce que l'économie de la région ne s'est pas remise de la crise des pêches.
Le programme TAGS devait enrayer ce problème et permettre de réinvestir dans la main-d'oeuvre, de soutenir financièrement les communautés, afin de diversifier l'économie et alléger la souffrance. Mais comme toute chose entreprise par les libéraux, c'était seulement une approche réactive qui n'avait aucune vision à long terme.
La mauvaise gestion du programme était tellement hors de contrôle, que des chèques ont été distribués à des personnes qui étaient décédées depuis déjà un certain temps. Si une entreprise privée avait géré son entreprise comme l'a fait le gouvernement, elle aurait fermé ses portes, et cela n'aurait pas pris de temps.
Aujourd'hui, le gouvernement arrive et dit: «Désolé, mesdames et messieurs, mais nos ressources financières sont à sec et nous devons arrêter le programme, faute d'argent.» Est-ce qu'un gouvernement peut se permettre une réponse comme celle-là quand ces gens ont payé des impôts depuis des années et consacré leur temps au développement économique de leur localité? Surtout lorsque la crise que ces gens vivent est toujours due à la mauvaise gestion du gouvernement.
Eh bien, assez, c'est assez. Ce n'est pas la petite vie que les gens veulent. Ils demandent seulement de travailler pour vivre convenablement.
[Traduction]
La Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique n'a rien fait pour tirer parti des forces de la région de l'Atlantique—de la ténacité, de la détermination et du savoir-faire des pêcheurs ainsi que de la culture et du patrimoine des collectivités qui vivent de la pêche ou de leur volonté de survivre.
[Français]
Comme représentants élus, nous devons apporter des critiques constructives à ce type de programmes gouvernementaux. C'est notre responsabilité de dire: «Monsieur le premier ministre, ce n'est pas suffisant d'aider nos amis les banquiers, il faut aussi penser au p'tit monde.»
Ce dont les gens de l'Atlantique ont besoin, c'est une approche pro-active qui s'attarde aux problèmes structuraux qui sont présents au sein des économies régionales. C'est pour cette raison que la mise sur pied d'un comité parlementaire examinant la crise du chômage est si importante. C'est le premier pas vers une approche pro-active qui présente les problèmes fondamentaux de la région, au lieu de placer des band-aids sur les préoccupations véritables des communautés.
Les gens de Terre-Neuve ont aussi besoin de projets à court terme pour remplacer le vide laissé à la fin du programme TAGS. Ils ont besoin d'un programme de retraite anticipée pour les travailleurs plus âgés qui n'auront probablement pas l'occasion de réintégrer le marché du travail. Cela vaut aussi pour les gens du Nouveau-Brunswick, de la Gaspésie et de la Nouvelle-Écosse.
Le NPD croit que nous devons attaquer le sérieux problème du chômage dès maintenant. Il est possible de mettre sur pied des politiques de création d'emplois valables à long terme avec des salaires adéquats pour les familles. Nous croyons qu'une politique de plein emploi doit être la première priorité du gouvernement.
Comme nous le savons déjà, la création d'emplois s'affiche toujours comme la préoccupation principale des Canadiennes et des Canadiens. Nous croyons qu'il doit y avoir une approche plus équilibrée que ce que proposent les libéraux, les conservateurs et les réformistes. Leurs approches sont irresponsables, car ils oublient toujours quel sera l'impact de leur politique au sein d'une petite communauté de l'Atlantique.
Ils nous proposent des choses qui font toujours l'affaire des banquiers de Toronto en oubliant les pêcheurs de Harbour Grace.
Il y a une autre façon de reconnaître la souffrance des gens et qui propose des solutions pour qu'elle disparaisse. Le problème de Terre-Neuve n'est pas un problème isolé. Nous devons confronter les vrais problèmes qui troublent la région Atlantique. Ce gouvernement doit avoir le courage de mettre de l'avant des mesures pro-actives à court et à long terme.
Les gens de Terre-Neuve méritent d'avoir un gouvernement courageux qui est à leur écoute. Est-ce que ce gouvernement peut répondre à leurs attentes et à leurs besoins?
[Traduction]
M. Mark Muise (West Nova, PC): Monsieur le Président, j'appuie l'idée d'une étude du problème que pose le programme de l'assurance-emploi, comme le proposait mon collègue de St. John's-Est, mais je trouve qu'une telle étude devrait s'appliquer à l'ensemble de la région de l'Atlantique.
Beaucoup d'habitants de ma circonscription, West Nova, travaillent dans le secteur des ressources, ce qui signifie qu'ils ont des emplois saisonniers. Les modifications négatives apportées au programme d'assurance-emploi ont eu des répercussions graves et même dramatiques sur notre économie locale. Si l'on réduisait les charges sociales, en particulier les cotisations d'assurance-emploi, les entreprises seraient plus en mesure de créer de l'emploi. La région serait donc moins dépendante du programme d'assurance-emploi, ce qui serait tout à son avantage.
Le vice-président: Je dois informer la Chambre que si le député de St. John's-Est prend la parole maintenant, il mettra fin au débat.
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, je remercie tous les députés de leur participation à ce débat.
Je dis à nouveau que le problème du chômage à Terre-Neuve est dévastateur. Le taux officiel de chômage est plus élevé à Terre-Neuve que n'importe où au Canada. Depuis bon nombre d'années, il se situe à 20 ou 21 p. 100. Mais en réalité, dans bien des collectivités à Terre-Neuve et au Labrador, le taux réel est de 60, 70 et même 75 p. 100. Des collectivités disparaissent le long de la côte de Terre-Neuve, ce qui entraîne de graves troubles sociaux pour les gens. C'est un problème qui nous accable et qui est à l'ordre du jour depuis bien des années, mais il ne se règle jamais.
Je peux comprendre les observations du député ministériel. Je sais bien que la moitié du budget provincial de Terre-Neuve et du Labrador provient des paiements de transfert du gouvernement fédéral. Nous en sommes très conscients et très reconnaissants. J'ai entendu beaucoup de belles paroles déjà, mais je crois que, pour régler ce problème dévastateur, il nous faut des solutions innovatrices. Nous avons besoin de solutions innovatrices. Nous devons examiner le problème en soi.
Il y a quelques minutes, le député de Calgary-Ouest s'est levé pour parler de ce problème comme s'il s'agissait d'une farce. Si le député de Calgary-Ouest croit qu'un taux de chômage de 20 p. 100 à Terre-Neuve est drôle, il devrait y réfléchir de nouveau, car cela n'a rien de drôle. Le député, lui, est drôle, mais la situation ne l'est pas.
Le député de Calgary-Ouest n'a rien d'autre à contribuer au débat. Il a osé dire aux Terre-Neuviens de déménager et aux habitants du Canada atlantique qu'ils devraient de quitter.
Le vice-président: Le député de Calgary-Ouest soulève la question de privilège.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, jamais je n'ai dit pendant mon discours que les habitants du Canada atlantique devraient déménager.
Le vice-président: À l'ordre. Je regrette, mais ce n'est pas une question de privilège. Le député de St. John's-Est.
M. Norman Doyle: Monsieur le Président, le député de Calgary-Ouest pense peut-être que c'est une blague, mais je peux lui affirmer qu'il n'en est rien.
Il y a quelques instants, il a dit dans son discours que le plus petit violon joue pour le Canada atlantique. Quelle observation terrible à faire aux gens qui quittent Terre-Neuve en grand nombre chaque année. Environ 7 500 personnes quittent Terre-Neuve chaque année. Tout ce que le député de Calgary-Ouest du Parti réformiste a à dire, c'est que le plus petit violon joue pour le Canada atlantique. Quelle observation honteuse. Le député rougit, mais lorsqu'il retournera à son bureau et qu'il recevra un appel de son chef, il sera encore plus rouge. Quelle observation terrible à faire.
Si le chef du Parti réformiste s'en était chargé lui-même, au lieu de coûter des millions de dollars aux contribuables du Canada, nous aurions peut-être pu donner quelque chose aux chômeurs de Terre-Neuve et du Labrador.
Nous pouvons entendre toutes ces blagues des réformistes au sujet du problème du chômage dans la région de l'Atlantique, mais nous n'entendons pas de solutions créatives.
Je sais que le temps presse, mais je le répète, une solution créative consisterait à modifier la formule de péréquation pour Terre-Neuve pour que nous puissions profiter de certaines des industries primaires que nous avons. Nous attendons que la baie Voisey soit mise en valeur. Cette industrie vaut des milliards et des milliards de dollars. Nous devons comprendre que nous allons devoir céder un dollar en paiement de péréquation pour tout dollar que nous percevons en impôts et droits.
En résumé, si on appliquait une formule de péréquation plus juste à Terre-Neuve, en ce qui concerne les industries du secteur primaire, notre situation serait bien meilleure.
[Français]
Le vice-président: La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée, et l'ordre est rayé du Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
L'AGRICULTURE
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, ma circonscription, Waterloo—Wellington, est un mélange de régions rurales, urbaines et suburbaines. Environ 30 p. 100 de la richesse de ma circonscription vient de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Inutile de dire que l'agriculture est très importante pour le bien-être économique des gens de Waterloo—Wellington.
Les agriculteurs de tout le pays s'inquiètent vivement de notre système de gestion de l'offre et de ce qui pourrait lui arriver. Au fil des ans, les agriculteurs ont fini par se fier au régime de gestion de l'offre pour assurer la rentabilité de l'exploitation familiale.
Il s'agit d'un système qui a donné la stabilité à l'agriculture dans tout le Canada et qui a donc assuré aux agriculteurs un taux de rendement raisonnable.
Il s'en trouve toujours pour vouloir se débarrasser du régime de gestion de l'offre. Il est donc important que le gouvernement fédéral prenne l'initiative de protéger les intérêts des agriculteurs en protégeant autant que possible le régime de gestion de l'offre.
Cette protection n'est souvent accordée que par réaction. Ainsi, le gouvernement devra défendre notre régime devant un tribunal parce que les Américains l'ont contesté. Le gouvernement doit aussi prendre les devants. Par conséquent, la prochaine réunion de l'Organisation mondiale du commerce sera cruciale dans ce dossier.
Le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire aurait-il l'obligeance de dire exactement ce que le gouvernement fera à cette réunion pour maintenir un régime de gestion de l'offre viable et solide?
M. John Harvard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de Waterloo—Wellington de poser la question. Je sais que le député a l'appui solide de ses électeurs, qui comptent sur un bon système de gestion de l'offre.
Lorsque les libéraux ont pris le pouvoir, en 1993, les négociations de l'Uruguay Round étaient sur le point d'aboutir. La protection des secteurs soumis à la gestion de l'offre était au coeur de ces négociations. Nous avons agi promptement et de façon décisive afin d'obtenir une protection tarifaire très substantielle pour ces secteurs, protection qui a permis que la gestion de l'offre se poursuive efficacement au Canada.
Nous avons défendu notre droit d'imposer ces tarifs douaniers que les États-Unis nous contestaient dans le cadre de l'ALENA. Nous avons gagné cette cause parce que les gouvernements fédéral et provincial et le secteur industriel ont fait front commun.
Nous demandons le même genre de collaboration en prévision de la prochaine ronde de négociations de l'OMC en matière agricole. Nous collaborons étroitement avec tous les intervenants afin de cerner les intérêts du secteur agroalimentaire canadien. Nous allons défendre ces intérêts dans la position canadienne quand les négociations commenceront en 1999.
Notre force réside dans une position claire et unifiée représentant les intérêts de toutes les composantes du système agroalimentaire canadien. En coopération avec l'industrie et les provinces, c'est exactement le genre de position que nous voulons élaborer à temps pour les négociations de l'OMC en 1999.
[Français]
Le vice-président: La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 25.)