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36e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 3
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 24 septembre 1997
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
L'AVION D'ENTRAÎNEMENT À RÉACTION MONITOR |
M. Bob Wood |
LES CANADIENS DE DESCENDANCE CHINOISE |
M. Inky Mark |
LES WARRIORS DE WHITBY |
Mme Judi Longfield |
LA DÉFENSE NATIONALE |
Mme Pierrette Venne |
PLASTIMET |
M. Stan Keyes |
LES CRIMINELS DE GUERRE |
Mme Elinor Caplan |
MÈRE TERESA |
M. Reed Elley |
L'IMMIGRATION |
M. Gary Pillitteri |
L'ALGÉRIE |
M. Daniel Turp |
LE DISCOURS DU TRÔNE |
Mme Marlene Jennings |
L'ÉCONOMIE CANADIENNE |
M. Guy Saint-Julien |
L'ÉQUITÉ SALARIALE |
Mme Angela Vautour |
LA PRINCESSE DIANA |
M. Keith Martin |
L'UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À CHICOUTIMI |
M. Denis Coderre |
LE RÉGIME DES PENSIONS DU CANADA |
Mme Elsie Wayne |
MÈRE TERESA |
Mme Albina Guarnieri |
Le Président |
QUESTIONS ORALES |
LES DÉPENSES PUBLIQUES |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'EMPLOI |
M. Monte Solberg |
L'hon. Paul Martin |
M. Monte Solberg |
L'hon. Paul Martin |
M. Gilles Duceppe |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Gilles Duceppe |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Michel Gauthier |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Michel Gauthier |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'EMPLOI |
Mme Alexa McDonough |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Alexa McDonough |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'hon. Jean J. Charest |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'hon. Jean J. Charest |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE DISCOURS DU TRÔNE |
Mme Deborah Grey |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Deborah Grey |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Pierre Brien |
L'hon. Stéphane Dion |
M. Pierre Brien |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
L'UNITÉ NATIONALE |
M. Rahim Jaffer |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Rahim Jaffer |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE DISCOURS DU TRÔNE |
M. Yvan Loubier |
L'hon. Paul Martin |
M. Yvan Loubier |
L'hon. Paul Martin |
LES SOINS DE SANTÉ |
M. Grant Hill |
L'hon. Allan Rock |
M. Grant Hill |
L'hon. Allan Rock |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Paul Crête |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. Paul Crête |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
L'IMMIGRATION |
M. Carmen Provenzano |
M. Ted McWhinney |
LES PÊCHES |
M. John Duncan |
L'hon. David Anderson |
M. John Duncan |
L'hon. David Anderson |
AFFAIRES COURANTES |
LE RÈGLEMENT |
Le Président |
LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS DU CANADA |
Le Président |
PÉTITIONS |
La Loi sur la santé et la loi sur les drogues |
M. Jim Gouk |
Le système routier national |
M. John Finlay |
Le Code criminel |
M. John Finlay |
Les coopératives |
M. Alex Shepherd |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Peter Adams |
DEMANDES DE DOCUMENTS |
M. Peter Adams |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LE DISCOURS DU TRÔNE |
Reprise du débat sur l'Adresse |
M. Preston Manning |
Motion |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Gilles Duceppe |
Sous-amendement |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Jean J. Charest |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 3
CHAMBRE DES COMMUNES
Le mercredi 24 septembre 1997
La séance est ouverte à 14 heures.
Prière
Le Président: Comme le veut l'usage le mercredi, nous chanterons ô Canada sous la conduite du député d'Etobicoke-Nord.
[Note de la rédaction: Tous les députés de lèvent et chantent ô Canada.]
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
L'AVION D'ENTRAÎNEMENT À RÉACTION MONITOR
M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Monsieur le Président, j'invite tous les députés à assister avec moi ce soir au dévoilement de l'avion d'entraînement à réaction Monitor, au Musée national de l'aviation. Cet aéronef de pointe sera fabriqué à North Bay, en Ontario, dans ma propre circonscription, Nipissing, par la société Canadian Aerospace Group en collaboration avec la société Sikorsky Aircraft. Le projet permettra de créer 140 emplois.
Je suis fier de cette réussite, qui permettra d'utiliser un hangar excédentaire du ministère de la Défense pour fabriquer le premier réacté militaire canadien depuis plus de deux décennies. Le travail ardu de la société Air Base Property, qui s'est prévalu des subventions de rajustement des ministères de l'Industrie et de la Défense nationale du Canada, a porté fruit. Ce partenariat entre cette société, d'une part, et Canadian Aerospace et Sikorsky, d'autre part, implantera une nouvelle industrie aérospatiale canadienne à North Bay.
Je demande à tous les députés de la Chambre de se joindre à moi ce soir à l'aéroport de Rockcliffe, de 18 à 20 heures, pour constater l'avenir de la construction aéronautique militaire au Canada. Des experts de Canadian Aerospace et de Sikorsky seront présents afin d'expliquer ce projet unique. J'espère que tous les députés seront là ce soir.
* * *
LES CANADIENS DE DESCENDANCE CHINOISE
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Ref.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de prendre la parole pour la première fois à la Chambre. Aujourd'hui, le Canada compte plus de 700 000 Canadiens de descendance chinoise, mais cela n'a pas toujours été le cas.
En 1902, une commission royale décidait que les Asiatiques n'étaient pas aptes à recevoir la citoyenneté à part entière, qu'ils choquaient une société libre et qu'ils constituaient une menace pour l'État.
En 1923, le gouvernement libéral de Mackenzie King adoptait la Loi sur l'exclusion, qui mettait temporairement fin à l'immigration chinoise. Les Sino-Canadiens ont qualifié le 1er juillet 1923, date d'entrée en vigueur de cette loi, de journée humiliante.
En 1947, la Loi sur l'exclusion a été abrogée et les Canadiens de descendance chinoise ont obtenu le droit d'être réunis avec leurs familles. Je ne serais pas ici aujourd'hui si cette loi n'avait pas été abrogée.
L'année 1997 marque le 50e anniversaire de l'abrogation de cette loi. Justice ne sera rendue que si le Canada a tiré un enseignement de ce triste moment de l'histoire.
* * *
LES WARRIORS DE WHITBY
Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour souligner la belle victoire du club de crosse junior À de Whitby, les Warriors. En août dernier, les Warriors de Whitby ont remporté la coupe Minto décernée à la meilleure équipe de crosse junior À au Canada.
Après avoir essuyé la défaite à leurs deux premières parties contre les Lakers de Burnaby, les Warriors ont tenu bon et gagné les quatre parties suivantes pour remporter le championnat en six parties.
Les Warriors ont été menés à la victoire par leurs meilleurs compteurs, Paul Sallie, Pat Jones et Gavin Prout, et soutenus par le joueur le plus utile, le gardien de but Mike Wye, dont la performance a été soulignée par un prix.
Les Warriors de Whitby sont dirigés par l'entraîneur Jim Bishop, qui s'occupe de ce sport depuis 51 ans. La victoire de Whitby vaut à M. Bishop sa huitième coupe Minto, 28 ans après qu'il ait conduit les légendaires Green Gaels d'Oshawa à remporter la coupe sept années de suite. La détermination et l'esprit sportif des Warriors de Whitby sont une source d'inspiration pour nous tous.
Tous les députés se joindront sûrement à moi pour féliciter les Warriors de Whitby, champions de la ligne junior A de notre sport national d'été.
* * *
[Français]
LA DÉFENSE NATIONALE
Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, en 1989, la Commission canadienne des droits de la personne ordonnait au ministère de la Défense nationale d'enrôler, au cours des dix années suivantes, un plus grand nombre de femmes. À cette époque, seulement 9,9 p. 100 des militaires canadiens étaient des femmes.
Aujourd'hui, c'est-à-dire huit ans plus tard, cette proportion est demeurée pratiquement inchangée puisque les femmes ne constituent que 10,7 p. 100 des Forces armées canadiennes.
Nous constatons aujourd'hui que le ministère de la Défense nationale n'a rien fait pour recruter des femmes au sein des forces armées. Maintenant, il tente de nous faire croire qu'il se conforme à l'ordre du tribunal des droits de la personne, en mettant sur pied une campagne de recrutement destinée uniquement aux femmes sous le nom d'«Opération Minerve».
Le ministère sait très bien qu'il n'atteindra jamais la pleine intégration des femmes d'ici 1999. Aussi, je n'ai qu'une chose à dire à cet égard: trop peu trop tard.
* * *
[Traduction]
PLASTIMET
M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je profite de cette première journée complète de séance de la 36e législature pour réclamer de nouveau au gouvernement ontarien une enquête publique indépendante sur l'incendie de Plastimet, survenu à Hamilton en juillet.
Le premier ministre conservateur Mike Harris et ses ministres de l'Environnement et de la Santé ont fait volte-face, après s'être engagés à faire une enquête, sous le prétexte pathétique qu'il fallait des preuves de méfait.
Est-il normal que le député provincial de l'endroit ait dû réveiller le ministre de l'Environnement à 3 heures du matin pour que le premier ministre envoie sur les lieux un équipement de surveillance de la qualité de l'air? Pourquoi la province a-t-elle d'abord refusé, avant de finir par l'accepter, l'aide du gouvernement fédéral?
Il y a lieu de se poser des questions sur le respect du code ontarien des incendies, les listes d'inventaire, la sécurité, et la décision d'implanter une usine de recyclage à proximité d'un hôpital, d'écoles et d'une zone résidentielle à forte densité.
Exaspérés par l'écran de fumée derrière lequel le gouvernement Harris se retranche, mes électeurs réclament une enquête publique indépendante pour dissiper tout ce qu'il y a de trouble dans cette affaire et formuler des recommandations qui aideront peut-être à prévenir d'autres catastrophes écologiques comme l'incendie de Plastimet.
* * *
LES CRIMINELS DE GUERRE
Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui à la Chambre sur une question qu'ont à coeur les électeurs de Thornhill ainsi que tous les Canadiens: la poursuite des criminels de guerre.
Les gens de Thornhill, et particulièrement les représentants de la communauté juive, croient que le Canada doit rester vigilant face aux criminels de guerre. Le Canada a l'obligation morale d'expulser ceux qui ont été trouvés coupables de crimes contre l'humanité. Notre pays ne doit pas être vu comme un refuge pour les criminels de guerre, nazis ou autres.
Mes électeurs connaissent l'engagement du gouvernement libéral de retirer la nationalité canadienne aux personnes reconnues coupables de crimes de guerre, et de les expulser.
Le Canada prend enfin les moyens nécessaires. Il en fait maintenant davantage pour démasquer les criminels de guerre nazis que tout autre pays du monde. Depuis 1995, plusieurs mesures d'expulsion ont été prises, et je suis sûr que nous continuerons à poursuivre les criminels de guerre par tous les moyens légaux.
Comme cette question est particulièrement importante pour la communauté juive...
Le Président: Le député de Nanaimo—Cowichan.
* * *
MÈRE TERESA
M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour donner une occasion à la Chambre et aux députés de rendre hommage à la vie et à la mémoire de mère Teresa.
C'est avec beaucoup de tristesse que les Canadiens ont appris son décès. Cette sainte femme était une lueur d'espoir pour les malades et les pauvres qui vivent dans les rues de Calcutta, dont elle cherchait à comprendre les malheurs et à apaiser les souffrances.
Son message à l'humanité était simple: oui, il y a quelqu'un qui s'intéresse au sort des malheureux. C'est un message qui marquera le monde encore longtemps, et c'est sans nul doute l'héritage qu'elle nous laisse.
Depuis le décès de mère Teresa, le flambeau de la bonté éclaire en effet le monde un peu plus faiblement qu'avant.
Je suis sûr que tous les Canadiens se joignent à moi pour rendre grâce de son passage parmi nous. J'invite tous les députés à observer chacun à leur manière un moment de silence pour rendre hommage à la mémoire de mère Teresa et à son héritage de dévouement et de partage.
* * *
L'IMMIGRATION
M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Monsieur le Président, cette année, on a célébré les 100 ans du pont international Whirlpool, qui relie le Canada aux États-Unis.
Cet important événement a renforcé la coopération qui existe entre nos deux grands pays. Il est par conséquent difficile de croire qu'en vertu d'une nouvelle loi américaine en matière d'immigration, tous les Canadiens entrant aux États-Unis ou en sortant devront bientôt remplir un formulaire de renseignements pour l'obtention d'un visa.
La localité que je représente craint beaucoup que cette mesure n'entraîne des embouteillages très longs et ne porte tort aux liens touristiques et commerciaux que nous avons établis au fil des ans, depuis que dure notre coopération.
J'espère donc sincèrement que les modifications proposées visant à exempter de cette obligation les Canadiens, qui chaque année se rendent en grand nombre aux États-Unis, seront adoptées le plus rapidement possible.
En attendant, je demande à notre gouvernement de continuer à faire pression sur nos amis du sud pour qu'ils mettent en oeuvre ces modifications afin que cette loi controversée ne fasse pas de ravages dans les localités frontalières, d'un bout à l'autre du Canada.
* * *
[Français]
L'ALGÉRIE
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, cinq mois après avoir déploré en cette Chambre la guerre civile en Algérie, force nous est de constater que le gouvernement canadien n'a encore fait aucune intervention auprès de la communauté internationale pour rechercher une solution pacifique.
Ce silence a rendu possibles les événements tragiques survenus dans la nuit de lundi à mardi à Benthala en Algérie. Parmi les 200 victimes recensées lors de ce nouveau massacre, la majorité d'entre elles sont des femmes et des enfants.
Devant la multiplication d'actes terroristes en Algérie, cette violence aveugle qui, d'après Amnistie internationale a fait plus de 60 000 victimes au cours des dernières années, le Québec, le Canada et la communauté internationale doivent se faire l'écho des familles endeuillées, en condamnant sans réserve l'utilisation de la violence et en recherchant une solution politique à la crise algérienne.
* * *
LE DISCOURS DU TRÔNE
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, Canadienne de race noire, Québécoise de souche, souche autochtone et souche française, je suis très fière de représenter le comté de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine à la 36e Législature canadienne.
Le discours du Trône prononcé hier est, à mon avis, un discours d'unité nationale.
[Traduction]
Je tiens à signaler à la Chambre et, en particulier, à l'honorable Stéphane Dion, ministre des Affaires intergouvernementales...
[Français]
Le Président: Ma chère collègue, il ne faut pas utiliser le nom des députés, mais simplement celui de leur comté.
Je vous accorde encore quelques secondes.
[Traduction]
Mme Marlene Jennings: Je tiens à signaler à la Chambre que mes électeurs sont ravis des initiatives prises par le gouvernement dans le dossier de l'unité nationale.
Je veux assurer à la Chambre que j'ai l'intention de continuer à faire ma part et à encourager mes électeurs à appuyer activement ces initiatives des plus opportunes et bienvenues.
* * *
[Français]
L'ÉCONOMIE CANADIENNE
M. Guy Saint-Julien (Abitibi, Lib.): Monsieur le Président, la santé de l'économie canadienne ne fait plus de doute.
Le coût de la vie augmente à un rythme très lent et le commerce de détail fait preuve d'une vigueur qui n'a pas été vue depuis des années. Statistique Canada a annoncé que l'indice des prix à la consommation s'est situé à 0,19 p. 100 entre juillet et août, soit le même niveau que pour les deux mois précédents.
Depuis les derniers mois—août 1996 à août 1997—les consommateurs canadiens font face à une moyenne de 1,8 p. 100 d'augmentation du coût de la vie, ce qui demeure assez faible.
Voici de bonnes nouvelles pour les Canadiens et les Canadiennes.
* * *
L'ÉQUITÉ SALARIALE
Mme Angela Vautour (Beauséjour—Petitcodiac, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral a décidé de verser aux cadres de la fonction publique des primes de l'ordre de 12,2 millions de dollars, ceci pendant qu'une somme de près de deux milliards de dollars est due aux 80 000 membres de l'Alliance de la Fonction publique du Canada et que plusieurs familles canadiennes continuent de vivre sur le chômage et dans la pauvreté.
Le gouvernement ne respecte pas sa propre Loi sur l'équité salariale. Pendant que les cadres de la fonction publique bénéficient de primes significatives, plusieurs commis, secrétaires et autres se font encore refuser leurs paiements rétroactifs.
J'espère que le Conseil du Trésor va payer son dû à ces employées et ainsi respecter son engagement envers les membres féminins de la fonction publique et toutes les femmes en général.
Pour corriger cette injustice, nous demandons aussi le dépôt d'un nouveau budget dès cet automne.
* * *
[Traduction]
LA PRINCESSE DIANA
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, la mort nous guette tous; elle est parfois cruelle, mais jamais autant que lorsqu'elle frappe une jeune personne.
Le 31 août dernier, le monde a perdu l'une de ses plus belles âmes en la personne de la princesse Diana. Nous avons tous pleuré. Nous avons déploré non seulement la disparition d'une vie si prometteuse, mais aussi la perte d'une image où chacun de nous se reconnaissait.
Elle nous a montré par l'exemple comment surmonter nos difficultés. Elle nous a enseigné comment puiser en nous-même la force de nous dépasser en aidant les moins fortunés. Diana a défendu la cause des enfants malades, des sidéens et des grands malades incurables. Plus récemment, elle a mis au premier plan de la scène internationale l'horreur des mines terrestres et la tragédie de leurs victimes.
Nous Canadiens tenons à exprimer notre plus vive sympathie et à offrir nos prières à la famille de la princesse et surtout à ses fils, les princes William et Harry.
* * *
[Français]
L'UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À CHICOUTIMI
M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, c'est avec plaisir que j'ai annoncé, au nom du gouvernement du Canada, l'investissement de 750 000 $ sur cinq ans, par l'entremise du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, dans une nouvelle chaire industrielle à l'Université du Québec à Chicoutimi.
Le titulaire de cette chaire, M. Masoud Farzaneh, étudiera les impacts des précipitations givrantes sur les équipements des réseaux de transport d'énergie électrique. Deux partenaires industriels, Hydro-Québec et la société Alcan, ont aussi contribué au financement de cette chaire.
Cette chaire met en évidence le désir du gouvernement libéral à travailler de concert avec nos partenaires industriels, les universités et les organismes provinciaux afin de développer de nouvelles connaissances qui amélioreront le service d'électricité et élimineront les pannes causées par les précipitations givrantes sur les réseaux.
C'est une autre preuve que le Canada est un gage de succès pour tous les Québécois et toutes les Québécoises.
* * *
[Traduction]
LE RÉGIME DES PENSIONS DU CANADA
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, le discours du Trône d'hier a donné aux Canadiens de bonnes raisons de s'inquiéter au sujet de leurs futurs régimes de retraite.
Les Canadiens âgés sont en droit de compter sur une retraite assurée. Les travailleurs des classes moyennes ne peuvent se permettre de payer davantage pour obtenir les mêmes prestations. Les jeunes Canadiens veulent que le RPC leur soit accessible lorsqu'ils en auront besoin.
Le plan des libéraux quant au financement du RPC se traduira par une autre ponction fiscale de onze milliards de dollars si le gouvernement refuse de réduire les cotisations à l'assurance-emploi.
Le gouvernement possède un plan caché en ce qui concerne le régime proposé de prestation aux aînés. Les Canadiens à revenu moyen seront les plus durement touchés. Ce plan attaque de manière disproportionnée les femmes puisque la prestation est déterminée en fonction du revenu familial et il constitue un désincitatif à l'épargne en vue de la retraite.
Je demande au gouvernement de cesser de punir les Canadiens qui ont travaillé et économisé afin de préparer leur retraite et je le prie d'attendre que le régime de prestation aux aînés proposé ait fait l'objet de consultations complètes avant de le mettre en oeuvre.
* * *
MÈRE TERESA
Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Monsieur le Président, plus tôt ce mois-ci, le monde a perdu le guide spirituel du XXe siècle. Le prix Nobel de la paix, Mère Teresa, a mené une vie à contre-courant du monde moderne en nous enseignant que le style de vie ne revêt pas plus d'importance que la vie elle-même.
Elle n'a accumulé aucun bien matériel, elle a fui le pouvoir politique et elle n'a jamais succombé aux compromissions. Elle a consacré toute sa vie au simple but de donner de la nourriture, une éducation, des soins médicaux, de l'amour et de l'espoir aux malades et aux affligés.
Sa notion de la charité ne consistait pas à organiser de fastueuses cérémonies de levée de fonds et à envoyer d'autres personnes se charger du travail ingrat. Non, Mère Teresa prêchait par l'exemple en enlevant elle-même les asticots des blessures béantes des malades.
Aucun être humain n'a autant accompli pour autant de gens, et pour si peu. Mais l'oeuvre de toute une vie, et même le respect dû aux morts, ne l'ont préservée de ceux qui refusent d'écouter son message. Au moins la moitié des articles de presse portant sur la mort de Mère Teresa étaient consacrés à des critiques de sa vie et de ses convictions.
De toute évidence, les millions de personnes qu'elle a inspirées ont encore beaucoup de blessures infestées d'asticots à nettoyer. On se souviendra d'elle simplement et affectueusement sous le nom de Mère.
Le Président: Avant que la période de questions ne commence, je voudrais vous faire part de quelques-uns des projets que les leaders de la Chambre et moi avons élaborés ensemble.
Comme c'est aujourd'hui le premier jour de séance, je vais vous donner à tous un peu de latitude. Cependant, je vous demanderais, au cours des jours et des semaines à venir, de collaborer avec moi pour ce qui suit.
Je compte raccourcir la durée des questions et des réponses par rapport à ce qui se faisait lors de la dernière législature, afin de permettre un plus grand nombre de questions. Ainsi, les déclarations préliminaires de ceux qui posent des questions seront plus brèves. Je demanderais également aux ministres de collaborer en donnant des réponses plus courtes.
[Français]
Alors, nous allons voir ce qui se passera aujourd'hui.
[Traduction]
Nous surveillerons la durée des interventions.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LES DÉPENSES PUBLIQUES
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je retourne à la Chambre, et c'est sans parler de Stornoway.
Dans sa plate-forme électorale, le premier ministre avait promis aux Canadiens d'assurer l'équilibre entre, d'une part, l'augmentation des dépenses et, d'autre part, la réduction de la dette et des impôts. Or, dans le discours du Trône prononcé hier, son gouvernement a mentionné au moins 29 nouvelles mesures entraînant des dépenses, mais pas une seule mesure concrète visant à réduire la dette ou à alléger le fardeau fiscal des contribuables canadiens.
S'agissait-il là d'une simple omission? A-t-il tout bonnement jugé bon de ne pas en toucher un mot dans le discours ou est-ce une indication que le gouvernement libéral compte recommencer à dépenser à tour de bras?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je souhaite la bienvenue à la Chambre au nouveau chef de l'opposition. Nous nous sommes engagés à faire en sorte que le pays connaisse très bientôt un excédent.
Le budget est prévu pour le mois de février. Nous aurons bien le temps d'en reparler, mais il nous faut au préalable éliminer le déficit.
Nous avons dû réduire le catastrophique déficit de 42 milliards de dollars que nous avait légué le Parti conservateur. Chaque année, nous devons consacrer des sommes à certains programmes, vu qu'il existe dans notre société des problèmes dont nous devons nous soucier.
La philosophie libérale n'a pas changé; elle se résume en deux mots: compassion et responsabilité.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, mes collègues et moi trouvons inconcevable que le ministère des Finances accepte que le gouvernement se laisse aller de nouveau à la dépense comme s'il s'agissait de sa principale priorité financière.
Il y a des années que les économistes, tant ceux du ministère que d'ailleurs, font valoir que ce n'est pas en dépensant que le gouvernement fédéral va réduire le chômage et que c'est précisément sa conduite irresponsable en matière de dépenses et d'impôts qui explique que le chômage reste élevé.
Le premier ministre a-t-il simplement oublié à quel point la dette et les taux d'impôt élevés sont des enjeux sérieux, ou bien veut-il faire comprendre à la Chambre qu'il entend faire de l'augmentation des dépenses la principale priorité financière de son gouvernement?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je me plie à votre consigne. La réponse est non.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, il y a dans le discours du Trône 29 propositions d'augmentation des dépenses et absolument rien sur la réduction de la dette ou des impôts.
Si la première priorité du gouvernement est de dépenser davantage, il n'y aura pas d'excédent. Par suite, 50 p. 100 de zéro étant zéro, il n'y aura ni allégement fiscal ni réduction de la dette.
Cette formule des 50 p. 100 ne serait-elle pas qu'un leurre, comme l'était la promesse d'abolition de la TPS faite lors des élections précédentes, pour permettre au gouvernement de faire ce qu'il veut réellement, c'est-à-dire revenir à des dépenses excessives?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, de toute évidence, le chef de l'opposition n'a rien de bien concret à reprocher au gouvernement. Il essaie de trouver une cible sur laquelle il puisse tirer. Nous avons dit très clairement que nous dépenserions plus d'argent lorsque nous aurons un excédent.
Lorsque nous avons été élus, nous avons dit que nous ramènerions le déficit à 3 p. 100 du PIB, mais il semble bien qu'en quatre ans seulement nous l'avons ramené à zéro ou peu s'en faut. Néanmoins il y a des problèmes dans notre société auxquels il faut s'attaquer et nous allons le faire de façon responsable.
Aujourd'hui, les gens du monde entier se tournent vers le Canada, car nous donnons l'exemple d'un pays financièrement responsable, mais en même temps d'un pays qui se préoccupe de ceux qui sont le plus dans le besoin dans notre société.
* * *
L'EMPLOI
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, en février le ministre des Finances disait qu'un taux de chômage de 5 p. 100 était non seulement possible, mais souhaitable. Pourtant, selon son ministère, c'est de la foutaise. On y prévoit 9 p. 100, 8 p. 100 l'an prochain et 7 p. 100 jusqu'en 2015.
Le ministre pourrait-il nous expliquer pour quelle raison il parle d'un taux de chômage de 5 p. 100, alors que son ministère n'est pas de cet avis? Qui a raison et qui a tort?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, c'est le député qui a tort.
Le débat auquel le député faisait allusion était une discussion sur le taux naturel de chômage, le taux qui ferait grimper le taux d'inflation, et il y a là-dessus des divergences d'opinion.
Le gouvernement a dit clairement qu'on ne peut pas appliquer un taux arbitraire, disons un taux de chômage à inflation stationnaire ou TCIS de 8 p. 100, à un pays dont la productivité s'améliore, un pays où les taux d'intérêt sont bas, un pays dont le secteur industriel est devenu maigre et compétitif.
Tout ce que je peux dire au député, c'est que M. Alan Greenspan est d'accord avec moi, et je prendrai son opinion de préférence à celle du député de Medicine Hat.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, au Canada, plusieurs économistes affirment que le taux naturel de chômage à long terme est bien supérieur aux 5 p. 100 dont parle le ministre. Sous le gouvernement actuel, mon fils de 13 ans aura atteint la cinquantaine bien avant que l'on n'approche un tant soit peu de cet objectif de 5 p. 100.
Quand le ministre va-t-il suivre les conseils des véritables créateurs d'emplois et réduire les impôts? Les Canadiens veulent une réduction d'impôt. Je voudrais une réponse de l'aspirant premier ministre, s'il vous plaît.
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, il est bon que le député fasse partie de l'opposition officielle. Pour la première fois, il comprend les réalités politiques du pays.
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Paul Martin: Il se trompe à mon sujet, mais il est vrai que nos vis-à-vis ne formeront jamais le gouvernement.
Permettez-moi de donner quelques chiffres. Sous le premier ministre actuel, au cours des quatre dernières années, les Canadiens ont créé plus de 970 000 nouveaux emplois. Cette année, avec ce même premier ministre, ils en ont créé plus de 260 000, dont la grande majorité dans le secteur privé. Toujours sous le gouvernement actuel, le taux de chômage chez les jeunes a commencé à baisser. Sous le gouvernement actuel...
Des voix: Encore, encore.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, hier, le Gouverneur général a présenté un discours du Trône comportant certains passages absolument touchants, je dirais même lyriques, sur le Canada du XXIe siècle. Pourtant, la réalité est tout autre.
Le premier ministre n'admet-il pas que le discours du Trône consacre sa vision du Canada, une vision où toutes les décisions importantes seront prises à Ottawa et où les provinces seront reléguées au statut de simples succursales d'Ottawa, une vision du Canada du XXIe siècle où le Québec, comme peuple, n'a pas sa place?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, dans le discours du Trône, nous avons parlé à maintes reprises du partenariat que nous voulons avoir avec les provinces. Dans le discours du Trône, nous avons parlé beaucoup de ce que nous voulons faire pour les enfants des familles pauvres au Canada.
Je voudrais faire comprendre à l'ancien chef de l'opposition que lors de la réunion des premiers ministres au mois de juin de l'an dernier, tous les gouvernements provinciaux, tous les premiers ministres provinciaux qui étaient avec moi, y compris le premier ministre du Québec, ont accepté que nous mettions de l'avant notre programme de crédit aux enfants pour aider les familles pauvres. Cela prouve que nous pouvons travailler en partenariat à l'intérieur du Canada.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre utilise le terme «partenariat» parce qu'il croit que c'est un terme populaire, tentant de ramener le contenu que les souverainistes lui ont apporté. Mais on ne se fait pas d'illusion, parce que le premier ministre, quand il parle de partenariat, c'est un partenariat où les décisions politiques se prennent à Ottawa et où on demande aux provinces de les appliquer. On considère les provinces comme de grosses municipalités.
Le premier ministre reconnaît-il que le discours du Trône fait la démonstration manifeste, et plus que jamais d'ailleurs, qu'il existe deux visions diamétralement opposées du Canada: une au Québec qui, depuis Jean Lesage, veut qu'on soit maîtres chez nous, et une dans le reste du Canada, celle de la déclaration de Calgary, dans laquelle les Québécoises et les Québécois sont aussi uniques que les saumons du Pacifique?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le chef du troisième parti oublie que nous avons énormément travaillé en collaboration avec les provinces depuis que nous formons le gouvernement.
Prenons, par exemple, les revendications traditionnelles du Québec sur la main-d'oeuvre. Nous avons conclu une entente avec les gouvernements provinciaux, y inclus celui du Québec.
Pendant longtemps, le gouvernement du Québec et les autres gouvernements se plaignaient de nous voir occuper des domaines où ils ne voulaient pas que nous soyons. C'est pourquoi nous nous sommes retirés des forêts, des mines, du tourisme, du logement social, de la main-d'oeuvre. Nous avons ajusté beaucoup de programmes, mais évidemment, pour quelqu'un qui veut se séparer, il n'y a aucun moyen d'accommodement.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre, hier, dans le discours du Trône, a voulu lancer un appel à la mobilisation pour sauver le Canada, disait-il, sauf que rien de ce qui est écrit dans ce discours-là n'est de nature à plaire au Québec.
Ma question s'adresse au premier ministre. Est-ce qu'il confirme que le concept de société distincte a été enterré une fois pour toutes en ce qui concerne son parti, et qu'on l'a remplacé par la notion de «caractère unique»?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à faire remarquer au député de Roberval qu'il a voté contre la société distincte, ici même à la Chambre des communes.
Je tiens également à faire remarquer au député de Roberval, que, alors qu'il était député provincial, il a voté contre l'Accord du lac Meech à l'Assemblée nationale.
Aujourd'hui, nous avons des termes qui sont acceptables, et par les Québécois et par tous les Canadiens. Ce que les premiers ministres des provinces ont voulu faire, c'est montrer aux Québécois qu'il est possible d'être francophone, de culture française, de vivre au Québec, d'être très fier de ses différences et d'être parfaitement à l'aise à l'intérieur du Canada. Et je suis très content de l'attitude des premiers ministres à ce sujet.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, en échange de bons procédés avec le premier ministre, permettez-moi de lui rappeler que ce n'est pas moi mais lui qui s'est promené à travers le Québec, durant la dernière campagne électorale, pour promettre aux Québécois qu'il vendrait l'idée de la société distincte dans le reste du Canada.
Est-ce que le premier ministre est en train de nous dire qu'encore une fois, il va rééditer son exploit et manquer à son engagement pris devant les électeurs au Québec?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons toujours insisté sur le fait qu'il fallait reconnaître le caractère distinct du Québec à cause de la langue, de la culture, et du Code civil.
La formule que les premiers ministres des provinces ont jugé approprié d'accepter, il y a quelques semaines, est une formule nouvelle qui décrit la réalité québécoise, ce pourquoi nous nous battons toujours, alors que le Bloc québécois, à la Chambre des communes, et le Parti québécois, à l'Assemblée nationale, ont voté contre tout ce qui pouvait accommoder le Québec afin qu'il puisse bien vivre à l'intérieur du Canada.
* * *
[Traduction]
L'EMPLOI
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, j'ai attendu ce moment longtemps. Ma question s'adresse au premier ministre.
Au nom du 1,4 million de chômeurs canadiens, le gouvernement va-t-il s'engager aujourd'hui à établir des échéanciers et des objectifs clairs pour ce qui est de la réduction du chômage? Le gouvernement l'a fait en ce qui concerne la réduction du déficit. Quand va-t-il faire de même dans le cas du chômage et montrer qu'il entend bien redonner du travail aux Canadiens?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je voudrais souhaiter à l'honorable chef du Nouveau Parti démocratique la bienvenue à la Chambre des communes. Je suis heureux qu'elle soit parmi nous. Je sais qu'elle a attendu longtemps et j'espère qu'elle demeurera parmi nous longtemps également.
Je tiens à préciser que nous voulons réduire le chômage et que nous déployons d'énormes efforts à cette fin. En fait, au cours des 46 derniers mois, l'économie canadienne a créé 975 000 nouveaux emplois et le taux de chômage est passé de 11,5 p. 100 à 9 p. 100. Cependant, nous devons poursuivre nos efforts.
Nous devions tout d'abord mettre de l'ordre dans les finances du pays. Il y a quelques années, nous avions un déficit de 42 milliards de dollars et très bientôt, nous aurons réussi à le ramener à zéro. Nous devons le faire pour créer des emplois. Lorsque le taux d'inflation est nul, que les taux d'intérêt sont bas et que le dollar est solide, nous pouvons produire et soutenir la concurrence. C'est de cette façon que nous allons créer des emplois.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, les 155 libéraux qui applaudissent de si bon coeur sont de toute évidence très contents d'eux-mêmes.
Depuis que les libéraux ont promis, dans le dernier discours du Trône, de s'attaquer au chômage chez les jeunes, il y a 26 000 jeunes Canadiens de plus qui n'ont pas pu trouver d'emploi et qui n'ont pas le coeur à la fête.
Voici ma question: le gouvernement va-t-il s'engager aujourd'hui à fixer des objectifs et à établir des échéanciers afin de réduire le chômage? Si la réponse est non, va-t-il admettre qu'il a tout simplement décidé de ne rien faire pour les jeunes qui ont le plus besoin d'aide?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai essayé d'expliquer en quelques mots que nous avons ce qu'il faut pour créer des emplois au Canada. Ce n'est pas en faisant des dépenses que nous allons régler les problèmes du pays. Il faut agir de façon responsable et mettre de l'ordre dans les finances du pays.
Permettez-moi de rappeler certains commentaires que j'ai lus le 10 février dernier. Certains ont prétendu que nous étions allés trop loin et que nous avions consacré trop d'efforts pour recommencer le cycle des dépenses farfelues. C'est pourquoi nous n'allons pas suivre les recommandations du chef du Nouveau Parti démocratique. Nous allons plutôt suivre les conseils de M. Roy Romanow, qui a formulé ses observations devant la Chambre de commerce de la Saskatchewan.
[Français]
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre et elle porte sur l'abus honteux de son gouvernement du système d'assurance-chômage.
Son gouvernement a dit dans le discours du Trône qu'il se préoccupait du chômage en général et du chômage des jeunes. Il pourrait poser un geste dès aujourd'hui en réduisant les cotisations d'assurance-emploi.
C'est ce que la Chambre de commerce du Canada et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante veulent, ainsi que la Chambre de commerce du Québec et le Conseil du patronat.
Pourquoi n'agit-il pas dès aujourd'hui pour cesser cet abus et remettre les gens au travail?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord souhaiter la bienvenue au chef du Parti conservateur qui est revenu sur la banquette avant. Nous sommes contents de le voir et nous pourrons le voir de plus près et plus souvent qu'à la dernière Législature.
Je voudrais dire au chef du Parti conservateur que lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, le fonds de l'assurance-chômage affichait un énorme déficit, parce que le gouvernement conservateur avait été imprudent. Il avait été obligé d'augmenter les cotisations 2 $ à 3,30 $, alors que le chômage augmentait au Canada.
Nous avons réduit les cotisations, qui devaient être de 3,30 $ au 1er janvier 1994 en vertu de la loi adoptée par le gouvernement de son parti, à 2,90 $, et elles seront de 2,80 $ à compter du 1er janvier 1998. Nous les réduisons d'une façon graduelle, mais il faut le faire d'une façon responsable, parce qu'il nous faut encore travailler pour éliminer le gâchis budgétaire que le gouvernement du chef conservateur nous a laissé en 1993.
[Traduction]
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, je remercie le premier ministre qui m'accueille de nouveau à la Chambre pour ses bonnes paroles. Il devrait faire attention lorsqu'il dit souhaiter me voir ici souvent, car, comme le dit un vieux proverbe chinois, ses voeux risquent de se réaliser.
Aujourd'hui, je voudrais donner au premier ministre une belle occasion de faire quelque chose pour nos chômeurs, en particulier les jeunes. Il peut remettre des milliers de Canadiens au travail d'ici quelques semaines en réduisant dès aujourd'hui les primes d'assurance-emploi, un genre d'impôt qui prive les Canadiens de milliards de dollars.
Pour plus de clarté, je pose au premier ministre une question directe et simple. Lui et son gouvernement sont-ils d'avis que le système d'assurance-emploi devrait être utilisé pour réduire le déficit, oui ou non?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous ne voulions pas diriger le pays comme le gouvernement précédent l'avait fait. Il n'avait jamais eu d'excédent dans le fonds d'assurance-chômage. Quand le Canada était aux prises avec une grave dépression en 1991, à l'époque où le nombre de chômeurs était constamment en hausse, les conservateurs ont augmenté les primes d'assurance-chômage qu'ils ont fait passer de 2 à 3,30 $. Nous ne voulons pas agir comme cela.
Nous voulons être des gestionnaires prudents pour que la situation financière du Canada soit saine et les taux d'intérêt, peu élevés. C'est ce que nous avons maintenant et c'est pourquoi nous aurons un taux de croissance de 4 p. 100 cette année. À ce chapitre, nous sommes au premier rang des pays du G7.
* * *
LE DISCOURS DU TRÔNE
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, l'égalité des citoyens et des provinces est devenue un facteur énorme et a joué un rôle important lors de la conférence des premiers ministres à Calgary la semaine dernière. Le terme égalité revenait en effet à cinq reprises dans l'ordre du jour de leurs discussions. Or, hier, nous n'avons entendu employer ce terme pas même une fois dans le discours du Trône. Caractère unique, diversité, toutes sortes de termes, mais pas égalité.
Le premier ministre pourrait-il nous dire pourquoi on a exclu du discours du Trône d'hier toute mention de l'égalité des citoyens et des provinces?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, quand nous disons que nous voulons travailler en partenariat et en collaboration avec les provinces, c'est parce que nous croyons en l'égalité. Voilà exactement ce que nous entendons par là.
Quant à l'égalité des individus, je n'ai aucune leçon à recevoir de la députée d'Edmonton-Nord, car c'est moi qui, en qualité de ministre de la Justice, ai donné la charte des droits à tous les citoyens du Canada pour les rendre égaux.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le concept de l'égalité et le mot «égalité» sont importants. En parlant des ministres de la Justice, je suis étonnée du fait que le ministre de la Justice actuel n'ait pas remarqué l'absence du mot «égalité» dans le discours du Trône et n'ait pas insisté pour qu'il y apparaisse.
Je trouve très étrange que le gouvernement souligne le caractère unique de la société québécoise et la diversité inhérente à notre fédération, mais qu'il omette de mentionner l'égalité.
Si le premier ministre attache tant d'importance à cette question, je voudrais lui poser de nouveau la question suivante: pourquoi ne croit-il pas à l'égalité inhérente de toutes les provinces et de tous les citoyens et pourquoi n'en est-il pas fait mention dans le discours du Trône?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il s'agit d'un principe dont je parle et que je respecte depuis 34 ans, soit depuis que je siège à la Chambre des communes. Je n'ai pas à répéter tous les jours ce qui me semble évident, mais pour rassurer la députée, je rappelle que je suis en faveur de l'égalité des citoyens et en faveur de l'égalité de tous les Canadiens. J'ai toujours défendu le principe de l'égalité au Canada, mais cela ne veut pas dire que la diversité ne peut exister. C'est très important.
L'égalité veut qu'on reconnaisse les gens pour ce qu'ils sont. Au sein d'une famille, l'égalité nous amène parfois à trouver des solutions qui satisfont aux besoins d'une région du Canada mais qui sont inutiles ailleurs au pays. Malgré l'égalité, nous sommes aux prises avec un énorme problème de pauvreté au Canada. Il faut donc que les riches aident les pauvres.
Voilà le principe d'égalité dans lequel nous croyons et qui ne correspond pas à celui du Parti réformiste qui ne se préoccupe pas des pauvres...
Le Président: Le député de Témiscamingue.
[Français]
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
Le discours du Trône nous apprend que le gouvernement fédéral, avec sa marge de manoeuvre imminente, compte intervenir de plus en plus dans les champs de compétence des provinces, notamment dans les domaines de la santé et de l'éducation.
Comment le premier ministre peut-il justifier que son gouvernement compte dorénavant intervenir de plus en plus dans les domaines de l'éducation et de la santé, alors que ces responsabilités appartiennent depuis toujours aux gouvernements des provinces?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le Canada a la chance d'être l'une des fédérations les plus décentralisées au monde, et c'est ce que nous avons fait ensemble, une fédération qui nous vaut une des plus belles qualités de vie qui soit. Et si on y parvient, c'est parce que les deux niveaux de gouvernement, le fédéral et le provincial, apprennent à travailler ensemble et se concentrent sur les compétences qui leur reviennent.
Dans le domaine de la santé, les compétences du gouvernement fédéral sont celles qui sont reconnues dans la Constitution. Il n'y a rien d'anticonstitutionnel à avoir les cinq principes moraux qui sont populaires partout au Canada, y compris au Québec, et qui peuvent ainsi s'appliquer partout au Canada, dans les provinces les plus riches comme dans les moins riches.
Je rappelle à l'honorable député que la province qui profite le plus, per capita, du Transfert social canadien, c'est le Québec.
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, c'est la première fois qu'un gouvernement fédéral indique clairement, aussi clairement son intention de s'immiscer particulièrement dans le secteur de l'éducation.
Le premier ministre, ou son ministre, reconnaît-il que son programme pour mesurer la maturité scolaire des enfants signifie qu'il met son pied dans la porte dans le secteur de l'éducation, avec tout ce que cela comporte comme conséquences: ses programmes fédéraux, son évaluation, ses fonctionnaires, avec en prime des contribuables qui vont encore payer en double pour ce nouveau dédoublement?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je suis toujours sidéré par les excès qu'on peut faire, de ce côté de la Chambre, d'un petit bout de phrase. Pour les gens qui s'amusent dans l'orthodoxie de chacun des mots, c'est très bien; la sémantique, je vous y encourage.
Ce que nous avons commis dans le discours du Trône, hier, c'est de faire profiter l'ensemble des Canadiens de Statistique Canada, qui est parrainé par mon ministère, dans une étude qui est particulière. Il s'agit d'une enquête longitudinale nationale que nous faisons déjà depuis quelques années. Comme nous investissons énormément d'argent dans le bien-être des enfants, il nous apparaît très important de mesurer le progrès qu'ils font pour que, lorsqu'ils arrivent à l'école, ils soient dans la meilleure capacité d'apprendre.
* * *
L'UNITÉ NATIONALE
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, à l'exception du premier ministre Bouchard, qui était absent de la conférence de Calgary, tous les premiers ministres des provinces du Canada ont convenu de soumettre la question de l'unité nationale au peuple canadien.
Est-ce que le premier ministre croit qu'il est acceptable que les Québécois soient les seuls Canadiens qui ne seront pas consultés sur l'unité nationale?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question. À ce moment-ci, les gouvernements provinciaux ont pris la décision collective de tenir une consultation avant d'adopter une résolution à leur assemblée législative.
Pour ce qui est du Québec, ce gouvernement du Québec n'est pas intéressé à consulter les Québécois sur leur vraie participation au sein du Canada. À ce moment-ci, les provinces ont décidé de consulter leurs citoyens avant d'adopter leur résolution. Lorsque le Québec voudra adopter sa résolution, j'invite le gouvernement du Québec à faire la même chose.
Quant à nous, si les résolutions sont adoptées par toutes les provinces, j'ai déjà dit que la Chambre des communes s'est prononcée sur la société distincte, alors, nous serons prêts à nous prononcer sur les mots choisis par les premiers ministres après un débat en cette Chambre. Mais il faut d'abord attendre pour voir ce qui se passera au niveau des provinces qui font leur travail présentement.
[Traduction]
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, M. Bouchard a dit qu'il ne participera à aucune consultation publique. Les accords du lac Meech et de Charlottetown ont échoué parce que les Canadiens n'ont pas été consultés.
Sachant cela, le premier ministre précisera-t-il comment la déclaration de Calgary sera expliquée à la population du Québec et qui le fera?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, sauf le respect que je dois au député, je tiens à lui rappeler que la population a été consultée au sujet de l'accord de Charlottetown. Il y a eu un référendum. Le choix des sénateurs par voie électorale était au nombre des réformes que nous préconisions. Le Parti réformiste a voté contre cet accord.
Pour l'instant, les provinces se penchent sur la question. Le moment venu, nous agirons. Je me suis entretenu avec les premiers ministres des provinces, et ceux-ci mènent—d'une manière très différente et comme ils l'entendent—leurs propres consultations avant de se prononcer sur la question. Nous ne voulons pas refaire ce qui se fait déjà dans les autres provinces.
Pour le moment, il n'y a pas de débat sur la déclaration de Calgary à l'Assemblée nationale. Lorsqu'il y en aura un, j'espère que le gouvernement du Québec consultera la population. Au besoin, nous consulterons peut-être cette dernière, mais pour l'instant, ce n'est pas opportun.
* * *
[Français]
LE DISCOURS DU TRÔNE
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, dans le discours du Trône, le gouvernement prétend être sensible aux problèmes vécus par les familles à faible revenu avec enfants, aux problèmes en éducation et à ceux présents dans le système de santé.
Ma question s'adresse au ministre des Finances. Le ministre des Finances admet-il que les problèmes que le gouvernement identifie dans ces secteurs sont causés essentiellement par les coupures de plus de 40 milliards de dollars qu'il a décidées dans son premier mandat et qu'il compte poursuivre au cours du présent mandat?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, c'est grâce aux efforts de ce gouvernement et d'ailleurs de tous les Canadiens et Canadiennes que maintenant, au point de vue de l'assainissement des finances publiques, le gouvernement canadien a la marge de manoeuvre pour aider les plus démunis de notre société, les enfants pauvres.
D'ailleurs, ce n'est pas seulement dans le discours du Trône qu'on a indiqué nos intentions. Lorsqu'on regarde les derniers budgets, les activités de mon collègue, le ministre du Développement des ressources humaines, ainsi que celles de mes autres collègues, au point de vue du crédit d'impôt pour les enfants, des programmes de stage et de tout ce que le gouvernement a mis en oeuvre pour aider les pauvres de ce pays, c'est très clair que les intentions de notre gouvernement, c'est d'aider les Canadiens et non de les diviser.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, il est rare qu'un bourreau courtise ses victimes, mais c'est ce que le ministre des Finances est en train de faire, car c'est lui le responsable de la pauvreté au Canada.
Justement, le ministre admettra-t-il que ce qu'il propose pour régler les problèmes vécus en santé, en éducation et pour combattre la pauvreté, c'est de couper 42 milliards, plutôt que 48, comme il l'avait prévu initialement? En d'autres mots, la seule solution qu'il propose, c'est de couper six milliards de moins que ce qu'il avait prévu.
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suggère au député d'en face, qui était en face avant les élections, qu'il regarde le premier budget Campeau, lorsque le Parti québécois a pris le pouvoir au Québec, et qu'il regarde maintenant les projections de M. Landry.
Il verra qu'à cause des activités et des initiatives du gouvernement fédéral, M. Landry a au-delà d'un milliard et demi de plus que ce que M. Campeau avait prévu, et cela, pour aider les démunis. Et j'espère que le gouvernement péquiste va utiliser cet argent pour aider les plus démunis du Québec.
* * *
[Traduction]
LES SOINS DE SANTÉ
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, lorsqu'on a demandé récemment au ministre de la Santé où il prendrait l'argent pour financer un programme national d'assurance-médicaments, il a répondu qu'il l'ignorait, mais que c'était vraiment une bonne idée.
Au moment où des malades sont inscrits sur les plus longues listes d'attente de l'histoire, comment peut-on songer à lancer un tout nouveau programme national?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme le sait le député, le premier défi fondamental que nous devons relever avec notre système de soins de santé, c'est faire que les Canadiens reprennent confiance dans le programme d'assurance-maladie que nous avons et sur lequel nous comptons au Canada.
Le gouvernement est fermement résolu non seulement à respecter les cinq principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé, mais encore à collaborer avec nos partenaires provinciaux, les dispensateurs de services et les autres intervenants du système pour ramener la qualité du système canadien de soins de santé au niveau auquel les Canadiens s'attendent et qu'ils méritent.
Il faudra pour cela travailler très fort. Il faudra collaborer avec les provinces, notamment, pour régler des problèmes comme celui des listes d'attente. Il faudra...
Le Président: Le député de Macleod.
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, ils étaient vraiment résolus quand ils ont réduit de 40 p. 100 les transferts au titre des soins de santé et voici qu'ils viennent nous promettre un programme national d'assurance-médicaments sans savoir le moindrement combien il coûtera ni d'où viendra le financement. Ils n'en ont pas la moindre idée.
L'assurance-maladie a été touchée et est mal en point. Pourquoi lancer ainsi un tout nouveau programme alors que l'assurance-maladie elle-même a besoin d'aide?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le député est meilleur médecin que mathématicien. Il sait pertinemment que les réductions effectuées par notre gouvernement étaient loin d'atteindre 40 p. 100.
Ce que j'ai dit à mes partenaires provinciaux, c'est que l'assurance-médicaments est un objectif à long terme parce que notre gouvernement estime que, à longue échéance, les partenaires devraient créer avec nous un système qui permettra à tous les Canadiens d'avoir accès aux médicaments dont ils ont besoin et dont ils ne doivent pas être privés pour une question d'argent.
* * *
[Français]
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
C'est à coups de milliards de dollars que le gouvernement libéral a coupé dans l'assurance-chômage, tout en ignorant les cris d'alarme des chômeurs et des travailleurs saisonniers.
Comment le ministre peut-il justifier qu'il n'y ait rien dans le discours du Trône pour les chômeurs et les travailleurs saisonniers, alors qu'il sait que la caisse d'assurance-chômage va encore une fois réaliser cette année des surplus d'au moins sept milliards de dollars?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il faudra inviter le député à relire le discours du Trône, parce qu'il y a plusieurs références au travail que nous allons faire et que nous faisons depuis un certain temps. Notamment, nous avons annoncé une stratégie de l'emploi-jeunesse qui est extrêmement importante. Nous travaillons très fort du côté du chômage, et vous le savez. Cette stratégie, qui crée des expériences de travail, fonctionne bien.
Nous avons découvert des outils qui fonctionnaient bien et nous allons consolider ces outils et faire encore davantage pour que l'expérience de travail dont ont besoin notamment les jeunes pour faire cette transition de l'école au milieu du travail se passe très bien. Il y a aussi le fonds transitoire de création d'emplois dont 95 millions de dollars sont investis au Québec pour créer des emplois.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, la réponse du ministre nous laisse très bien entrevoir que d'aucune façon il est sensible à la situation des saisonniers et des travailleurs qui arrivent sur le marché du travail.
Ma question n'est pas de savoir ce qu'il fait pour qu'ils retournent sur le marché du travail, c'est ce qu'il fait pour qu'ils soient capables de rester en vie et qu'ils ne passent pas tous à l'aide sociale.
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes très sensibles à la situation que le député décrit et j'apprécierais qu'il écoute la réponse, parce que c'est important qu'il dise à ses électeurs et également aux résidants de son comté quoi faire.
Nous avons mis sur pied un fonds transitoire de création d'emplois. Nous ne croyons pas au support passif du revenu. Ce que nous faisons maintenant, ce sont des mesures actives de création d'emplois, que nous avons d'ailleurs transférées au gouvernement du Québec. Il s'agit de 800 millions de dollars de mesures actives pour créer des emplois et un fonds transitoire de création d'emplois de 95 millions de dollars, au Québec seulement, pour permettre aux gens, justement, non pas de rester sur un revenu passif, mais d'avoir de véritables emplois. C'est ce que veulent nos travailleurs.
* * *
[Traduction]
L'IMMIGRATION
M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères.
Une nouvelle loi américaine obligeant les Canadiens qui entrent aux États-Unis à se soumettre à une inspection longue et indiscrète pourrait avoir des répercussions désastreuses sur le tourisme à Sault Ste. Marie et sur les échanges commerciaux normaux entre notre ville et ses voisines américaines.
Quelles mesures le gouvernement fédéral prend-il pour faire en sorte que les Canadiens continuent d'avoir facilement accès aux États-Unis?
M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, les nouvelles mesures annoncées par les États-Unis sont extrêmement préjudiciables aux Canadiens et à nos échanges commerciaux avec les Américains. Elles vont à l'encontre des initiatives prises par le président des États-Unis et le premier ministre pour éliminer les mesures de contrôle aux frontières et favoriser la libre circulation des personnes et des marchandises. Elles sont probablement contraires aux dispositions de l'ALENA.
Nous tâchons de faire supprimer l'application de ces mesures de contrôle à la frontière canado-américaine. Nous sommes déjà encouragés dans nos efforts par les modifications qu'un sénateur et un membre du Congrès des États-Unis ont proposées à cet égard.
* * *
LES PÊCHES
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le traitement de la crise du saumon du Pacifique par le gouvernement est un fiasco. En fait, le gouvernement gère mal ce dossier depuis quatre ans.
Le ministre des Pêches vient de la Colombie-Britannique. Pourquoi était-il à la pêche à Terre-Neuve à un moment où il aurait dû s'occuper de la crise lorsqu'elle a atteint son paroxysme en Colombie-Britannique?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, l'affirmation du député est inexacte.
La question du traité du saumon est certes importante. Je trouve décevant que le porte-parole du Parti réformiste pour les pêches ait choisi, pour sa première question, de faire une affirmation aussi inexacte, non pertinente et insignifiante.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le discours du Trône est tout à fait muet sur la question du règlement de la crise du saumon du Pacifique. Le gouvernement continue de négliger la Colombie-Britannique.
Le ministre fera-t-il de la conclusion du traité d'ici le 31 janvier prochain la principale priorité de son ministère?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes encore une fois en présence de députés réformistes qui posent des questions sans avoir, de toute évidence, lu ni écouté le discours du Trône.
Or, il se trouve que le gouvernement s'engage très clairement dans le discours du Trône à régler la question de la surpêche étrangère.
Si le porte-parole de l'opposition officielle en matière de pêches connaissait un tant soit peu le problème du traité du saumon du Pacifique, il saurait que tout a commencé quand les pêcheurs de l'Alaska se sont mis à prendre trois fois plus de saumon sockeye en migration vers les rivières Nass et Skeena en Colombie-Britannique qu'ils ne l'avaient fait auparavant conformément au traité.
C'est ça que le député n'a pas compris, et il n'a pas compris que le discours du Trône s'attaque précisément à cette question.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LE RÈGLEMENT
Le Président: J'ai l'honneur de déposer au bureau du greffier la réimpression du Règlement de la Chambre des communes datée de juin 1997.
* * *
[Français]
LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DES ÉLECTIONS DU CANADA
Le Président: J'ai l'honneur de déposer sur le Bureau le rapport de 1997 du Directeur général des élections du Canada sur la 36e élection générale.
Ce rapport est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
* * *
[Traduction]
PÉTITIONS
LA LOI SUR LA SANTÉ ET LA LOI SUR LES DROGUES
M. Jim Gouk (West Kootenay—Okanagan, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter trois pétitions comportant quelques variantes, mais portant sur le même sujet.
Les signataires de chacune des pétitions exhortent le gouvernement à rejeter les modifications proposées à la Loi canadienne sur la santé et à la loi sur les drogues et qui auraient pour effet d'empêcher les gens de choisir volontairement de consommer des compléments alimentaires et des produits d'herboristerie.
LE SYSTÈME ROUTIER NATIONAL
M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, je vous félicite pour votre réélection.
J'ai deux pétitions à présenter aujourd'hui. La première est signée par 30 électeurs de ma circonscription qui prient le Parlement d'exhorter le gouvernement fédéral à unir ses efforts à ceux des gouvernements provinciaux pour que la remise en état du système routier national puisse commencer dès 1997.
LE CODE CRIMINEL
M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par 57 électeurs de ma circonscription.
Ils prient le Parlement d'adopter une loi modifiant le Code criminel, plus précisément les articles 173 et 174, sur les actions indécentes et la nudité dans un lieu public, pour déclarer clairement que le fait, pour une femme, d'exposer ses seins dans un lieu public constitue une action indécente.
LES COOPÉRATIVES
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter aujourd'hui une pétition signée par 57 électeurs de ma circonscription qui vivent dans la coopérative de logement située au 610 de la rue Beatrice.
Ils affirment notamment que le gouvernement du Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement ont entrepris des négociations secrètes avec la province de l'Ontario, que les gens qui possèdent et exploitent des coopératives ont été exclus de ces négociations, et que le gouvernement de l'Ontario a déjà enfreint ses propres ententes avec des coopératives de logement financées par la province.
Ils prient le ministre responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement de suspendre immédiatement les négociations sur le logement social avec la province de l'Ontario et de n'en autoriser la reprise qu'à la condition que le ministre adopte une série de principes énoncés publiquement et établis en tenant compte de l'avis des intervenants du domaine du logement coopératif.
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions demeurent au Feuilleton.
Le Président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
* * *
DEMANDES DE DOCUMENTS
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que tous les avis de motion portant production de documents soient reportés.
Le Président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LE DISCOURS DU TRÔNE
REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 23 septembre, de la motion: Qu'une Adresse soit présentée à Son Excellence le Gouverneur général en réponse au discours qu'il a prononcé à l'ouverture de la session.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole pour ouvrir le débat sur le discours du Trône, mais j'ai d'abord des félicitations sincères à présenter. Je tiens à vous féliciter pour votre réélection à la présidence. Au nom des députés de l'opposition officielle, je vous souhaite la meilleure des chances. Nous vous souhaitons de la patience et de la sagesse pour bien nous guider dans nos délibérations, et nous espérons que l'esprit de démocratie qui s'est manifesté le premier jour où vous avez été élu persistera durant toute la durée de la présente législature. Félicitations, monsieur, au nom de nous tous.
Des voix: Bravo!
[Français]
Nous tenons à féliciter l'honorable député de Laurier—Sainte-Marie, chef du Bloc québécois, ainsi que ses collègues, pour leur élection.
Nous sommes en profond désaccord avec les politiques du Bloc, mais nous respectons le processus démocratique qui a permis l'élection des députés bloquistes à cette Chambre. Nous allons continuer à tenter de les convaincre, eux et leurs électeurs, qu'une véritable réforme de la fédération est possible et préférable à la séparation de la fédération.
[Traduction]
Nous félicitons également la députée de Halifax et nos collègues néo-démocrates. Je demande aussi à la chef du NPD de transmettre nous meilleurs voeux à celle qui l'a précédée, Mme Audrey McLaughlin. Trop souvent, les députés qui quittent volontairement la Chambre après avoir servi les Canadiens pendant de nombreuses années n'ont pas la reconnaissance qu'ils méritent. Je demande aux députés d'applaudir avec moi Mme McLaughlin pour son travail acharné, sa compassion et la contribution qu'elle a apportée au Canada.
Des voix: Bravo!
M. Preston Manning: Je félicite le chef du Parti conservateur et ses collègues. Nous avons échangé des propos acerbes durant la campagne électorale, mais le temps est peut-être venu de faire la paix. Je vais essayer de ne pas lui tendre d'embuscade s'il veut bien faire de même.
Je félicite aussi le premier ministre. Il a une longue carrière en politique. Nous avons bien tenté d'y mettre fin, mais ça n'a pas marché. Le fait d'obtenir un second mandat pour son gouvernement est une chose remarquable et je l'en félicite.
Le soir de l'élection, Jason Moscovitz a dit que le député de Sherbrooke avait remporté le débat des chefs, que le Parti réformiste avait remporté la campagne électorale mais que le premier ministre avait gagné les élections. Nous aurions préféré être à sa place.
Je tiens également à féliciter le premier ministre et sa charmante épouse, Aline, à l'occasion de leur quarantième anniversaire de mariage, qu'ils ont célébré il y a quelques semaines. Quarante ans, c'est long. Le courage de Mme Chrétien sera pour nous une source d'inspiration. Si elle a pu endurer le premier ministre pendant quarante ans, nous serons bien capables de l'endurer quatre années encore.
Je félicite tous les députés élus et réélus et je tiens en particulier à souhaiter la bienvenue et à rendre hommage aux 60 députés réformistes. Quarante d'entre eux ont été réélus et les 20 autres sont des nouveaux venus. Certains d'entre eux, dont trois âgés de moins de 30 ans, comptent parmi les plus jeunes députés à la Chambre. Ces jeunes députés comme ceux qui ont été réélus peuvent compter sur notre soutien. Je suis convaincu qu'ils sauront apporter vigueur et renouveau à cette institution qui montre à l'occasion des signes de vieillissement. J'invite tous les députés à encourager les nouveaux venus et à leur accorder le respect qu'ils méritent. Ces jeunes députés sont bel et bien la garde montante. Nous leur souhaitons la bienvenue à la Chambre des communes.
Je termine en remerciant les électeurs de Calgary-Sud-Ouest. Comme je leur ai souvent dit, le siège que j'occupe ne m'appartient pas. Il n'appartient pas à mon parti. Il appartient à mes électeurs. Je considère que c'est un honneur qu'il me font de me permettre de m'y asseoir, de l'occuper en leur nom et de représenter leurs points de vue.
Je passe maintenant à des choses plus importantes. Le 2 juin, plus de 12 millions de Canadiens ont pris part aux élections fédérales. Une fois les bulletins comptés, les sièges ont été répartis, qu'on le veuille ou non, tels que nous le voyons aujourd'hui à la Chambre. Il me semble important de se demander dès l'abord ce que les Canadiens ont vraiment fait le 2 juin et ce qu'ils ont tenté de nous dire en votant de la sorte.
À mon avis, leur message est quadruple. Premièrement, ils ont réduit la représentation et du parti au pouvoir et de l'opposition officielle: les libéraux et le Bloc ont moins de sièges que lors de la dernière législature. C'est signe de mécontentement. Un mécontentement pas suffisamment grand pour renverser le gouvernement, mais dont ce dernier doit tenir compte.
Deuxièmement, l'électorat a donné un appui accru à trois partis très différents: le Parti réformiste, le NPD et le Parti conservateur. Il y a un message là-dedans. L'électorat est à la recherche d'idées et de personnalités nouvelles pour représenter les différentes réalités qui cohabitent dans ce pays. C'est une chose que les Canadiens veulent voir refléter à la Chambre, pour le meilleur et pour le pire. Il nous incombe de nous assurer qu'il en soit ainsi.
Le troisième message est des plus intéressant. Je pense que lorsque les historiens décriront les élections de 1997, c'est l'une des choses qu'ils feront remarquer. L'électorat canadien a régionalisé la Chambre comme jamais auparavant.
Si on considère les suffrages, alors que le Parti réformiste a obtenu un million de voix à l'est du Manitoba, il n'a remporté des sièges que dans l'Ouest. Le Bloc est exclusivement un parti québécois. Et même au Québec, les suffrages qu'il a obtenu sont régionalisés, provenant principalement de la région à l'est de Montréal. Le NPD est divisé, ayant des députés dans le Canada atlantique et dans l'Ouest, mais aucun provenant du Canada central. Quant aux conservateurs, ils ont remporté 90 p. 100 de leurs sièges à l'est de l'Ontario, en majorité dans la région atlantique. Ils vont continuer à se faire passer pour un parti national alors qu'en fait c'est essentiellement un parti représentant la région atlantique avec en plus un contingent québécois.
En ce qui concerne le gouvernement, deux tiers de ses sièges sont en Ontario et la moitié de ce qui reste au Québec. Bien qu'en théorie ce soit également un parti national, ou qu'il prétende l'être, en fait ce que nous voyons ici c'est un parti de l'Ontario avec un contingent québécois.
S'il y a une leçon à tirer de tout ceci, c'est que notre pays continue de payer le prix de son incapacité de réformer la Chambre haute. En Allemagne, en Australie, aux États-Unis et dans d'autres grandes fédérations du monde, une Chambre haute efficace défend les intérêts régionaux sur la scène fédérale. Faute de cela, on assiste notamment à une régionalisation de la Chambre basse.
Ceux qui pensent que la régionalisation de la Chambre des communes constitue un recul ou une chose qui va nuire à l'unité nationale devraient joindre leurs voix à ceux qui exigent une Chambre haute efficace pour représenter les intérêts régionaux.
La quatrième chose que les Canadiens ont fait en 1997 a été de donner à un parti fédéral vieux de dix ans, qui a ses racines dans l'Ouest et qui en est fier, et qui aspire à devenir un parti vraiment national, la possibilité de former l'opposition officielle et l'alternative au gouvernement.
Alors que nous commençons à assumer ce nouveau rôle et analysons le discours du Trône, nous devons à la population de lui préciser comment nous croyons devoir nous acquitter de ce rôle.
Nous considérons avoir un mandat à deux volets. Il s'agit tout d'abord de demander des comptes au gouvernement, de le féliciter pour les mesures qu'il prend dans l'intérêt national selon nous, mais de le critiquer dans le cas contraire. Ensuite, nous pensons qu'il nous incombe de proposer des solutions de rechange constructives qui vont dans le sens des grands thèmes de l'égalité, de la reddition de comptes et de la responsabilité financière sur lesquels nos députés se sont fait élire.
En ce qui concerne le discours du Trône, je voudrais m'acquitter de ces deux tâches. Je veux féliciter le gouvernement lorsqu'il le mérite. Nous voulons critiquer les aspects de ce discours que nous jugeons inacceptables. Chose plus importante, nous souhaitons présenter des solutions de rechange constructives lorsque nous constatons des lacunes.
Comme on l'a fait remarquer dans le discours du Trône, la 36e législature en est une de transition. C'est la dernière du XXe siècle et la première du XXIe siècle. Ainsi, les gens peuvent se demander dans quelle voie nous allons nous engager. Va-t-on continuer à revenir sur de vieilles idées ou va-t-on se tourner résolument vers l'avenir?
Dans le discours du Trône, on prétend regarder en avant. Il est important de voir la réalité qui se cache derrière les mots.
Je vois une grande analogie historique et politique entre la fin du XIXe siècle et la fin du XXe siècle. À la fin du XIXe siècle, le parti au pouvoir, le Parti conservateur, n'avait plus de leadership, d'idées ni d'énergie. Il était à bout de souffle.
Macdonald, leur guide, n'était plus là. Ceux, moins éclairés quoique bien intentionnés, qui le remplacèrent, furent incapables de bâtir sur les bases qu'il avait posées. Des idées jadis nouvelles, comme l'union fédérale, la politique nationale ou le chemin de fer transcontinental, en étaient alors au statu quo. Comme le disait l'historien Arthur Lower, l'époque de Macdonald a perdu tout son dynamisme après la disparition de son guide.
Tandis qu'un gouvernement exténué continuait de diriger le pays, le Canada lui-même débordait des idées, des énergies et des possibilités nouvelles du XXe siècle et, alors que le gouvernement s'accrochait au passé, les gens commençaient à chercher des moyens d'exprimer leurs frustrations à un gouvernement qui était dépassé. Désireux de voir s'exprimer des idées nouvelles sur la scène fédérale, ils commencèrent à se mettre en quête de nouvelles personnalités et de nouveaux groupes. La personnalité sur laquelle ils fixèrent leur choix fut Sir Wilfrid Laurier et le nouveau groupe de députés qui l'entouraient.
Le discours du trône cite Sir Wilfrid Laurier. Je voudrais moi aussi rappeler au gouvernement ce qu'a dit Wilfrid Laurier à propos du refus d'affronter la réalité: «Un vrai patriote ne fait pas comme l'autruche, il n'ignore pas les faits en se cachant la tête dans le sable, il regarde la situation du pays en face».
Il parlait de la situation financière. Il décrivait le Canada non pas comme un pays dirigé et inspiré par la politique gouvernementale, mais comme un jeune géant enchaîné par la politique gouvernementale.
Il avait eu à l'intention du gouvernement conservateur qui avait été réélu en 1891 avec une majorité réduite, cette remarque: Encore une victoire comme celle-ci et le gouvernement est fini.
Au sujet de la nécessité d'un nouveau départ, il a dit: «Le temps est venu, pour les députés d'en face, de cesser de se vanter et de chanter leurs louanges et, pour l'ensemble des Canadiens, de s'ouvrir les yeux et de constater qu'il faut se détacher de la politique qu'on applique depuis dix ans. Je dis qu'un changement est devenu absolument nécessaire pour le bien-être du pays.»
En parlant de la faiblesse du programme législatif du gouvernement précédent à l'occasion d'un débat sur le discours du Trône, sir Wilfrid Laurier a dit, tout à fait comme aujourd'hui: «Le discours du Trône est un squelette très sec depuis de nombreuses années. Cette année, il est plus sec que jamais et les quelques os qui s'y trouvent s'entrechoquent en une cacophonie de mauvais augure.»
Sur le plan politique, le parallèle me semble évident entre la fin du XIXe siècle et la fin du XXe. Le Parti libéral, qui fut autrefois un grand parti, est en train de s'épuiser. Les grands esprits qui l'ont animé, Laurier, King, Trudeau, sont partis. Les idées autrefois novatrices, comme les changements constitutionnels, l'unité avec statut particulier, l'État providence, la prospérité grâce aux dépenses du gouvernement, toutes ces idées sont obsolètes ou désespérément dépassées.
Hors du Parlement, le Canada est une source vive d'idées, d'enthousiasme, de solutions, mais toutes ces idées trouvent peu d'échos chez les représentants du gouvernement ou dans le discours du Trône. Selon moi, le gouvernement actuel, comme celui des anciens conservateurs qui sont venus après l'époque de Macdonald, est tourné vers le passé et a perdu le contact avec la réalité.
Malgré la vision vers l'avant que semble refléter le langage, le discours du Trône n'éclaire aucunement l'horizon du prochain millénaire. Il ne mentionne pas les forces de l'innovation, du changement et de la réforme qui se manifestent au pays et qui, si elles étaient harnachées, donneraient lieu à une politique nationale capable de propulser le Canada vers le XXIe siècle avec vigueur et optimisme.
En appliquant l'illustre analogie au présent discours du Trône, j'affirme que celui-ci est comme un os sec sans chair, sans muscle, sans nerfs, sans la moelle, le coeur et l'âme qu'il faudrait pour inspirer les Canadiens en prévision du XXIe siècle.
J'emploierai les mots exacts: «Le discours du Trône est un squelette très sec depuis de nombreuses années. Cette année, il est plus sec que jamais et les quelques os qui s'y trouvent s'entrechoquent en une cacophonie de mauvais augure.»
Gardant à l'esprit ce parallèle historique qui donne à réfléchir et cette analogie de Laurier, analysons maintenant le discours du Trône du gouvernement. Nous voulons examiner les os secs. Nous voulons rendre à César ce qui appartient à César. Comme tout cabot pourrait vous le dire, un os sec vaut encore mieux que pas d'os du tout.
Là où nous constatons des faiblesses, nous nous efforcerons non pas de critiquer seulement, mais de présenter de nouvelles idées qui pourront peut-être transformer ces os secs offerts dans le discours du Trône en propositions vibrantes, nouvelles et appropriées à la direction du pays à l'aube du XXIe siècle.
Examinons tout d'abord l'aspect économique. Le gouvernement propose bien peu à cet égard. Il ne mentionne aucun secteur de ressources naturelles. Il ne dit rien au sujet du secteur manufacturier. Il ne traite pas de l'investissement dans la connaissance et la créativité.
Toutes les références à la haute technologie nous ennuient car, malgré les belles paroles, nous ne pouvons même pas obtenir le vote électronique en cette Chambre. Si nous avons foi en ce secteur, nous ne devons pas nous contenter de parler de haute technologie, nous devons la mettre en pratique.
En ce qui concerne l'appui à la reprise économique, le principal argument du discours du Trône sur ce plan, c'est que le déficit est maintenant sous contrôle. Lorsque nous sommes arrivés ici, en 1993, notre diagnostic était que le véhicule financier fédéral avait quatre pneus à plat. Le premier était le déficit, le deuxième les dépenses qu'on ne contrôlait plus, le troisième la dette et le quatrième les taxes et les impôts.
Le gouvernement a presque réparé un de ces quatre pneus, et nous reconnaissons son travail à cet égard, même si nous ne sommes pas d'accord avec la manière dont on a procédé. Nous ne pensons pas que le calendrier était valable, mais au moins un de ces pneus est presque en bon état.
La question est de savoir quoi faire avec les trois autres pneus. Dans le discours du Trône, il n'y a pratiquement rien sur la question du remboursement de la dette, sur le problème de la fiscalité excessive et sur la façon d'éviter que les dépenses ne reviennent à ce qu'elles étaient précédemment.
Où sont, dans ce discours du Trône, les objectifs de réduction de la dette et les objectifs de réduction des taxes et impôts? Où sont les principes qui nous guideront dans ces domaines? Est-ce que le gouvernement a une opinion sur ce que serait la taille idéale de l'administration fédérale, sur ce que serait le montant idéal des recettes qu'il pourrait soustraire à l'économie? Est-ce qu'il a une idée de ce que serait la dette idéale pour un gouvernement comme le nôtre, dans un pays comme le nôtre? Le gouvernement nous dit d'attendre le budget. Pourtant, alors qu'il ne nous dit rien sur ces importantes questions, il n'a pas d'hésitations à nous donner 29 mesures qui entraîneront des dépenses supplémentaires.
Mon collègue, le député de Medicine Hat, a fait circuler un document de travail intitulé: «Beyond a Balanced Budget». Ce qu'il trouve, et nous avons fait le même constat, c'est qu'au cours des trois dernières années il a circulé un peu partout au pays toutes sortes d'idées, que ce soit au sein des cellules de réflexion, parmi les gens d'affaires qui ont dû régler eux-mêmes ces problèmes sans quoi leurs entreprises auraient fait faillite, ou encore chez les jeunes Canadiens qui y ont réfléchi parce que c'est leur avenir qui en dépend. Malheureusement, cet effort de réflexion se reflète très peu dans le programme du gouvernement et dans le discours du Trône.
Mes collègues, dans les débats sur le discours du Trône et sur les projets de loi étudiés à la Chambre, feront tout leur possible pour donner un peu de substance aux paroles stériles sur la restauration de l'économie qui nous sont servies dans ce discours du Trône.
Permettez-moi de toucher un mot sur la sécurité sociale. Le gouvernement—et cela est tout à son honneur—reconnaît que le filet de sécurité que sont nos programmes sociaux s'effiloche, que nous avons des problèmes dans les secteurs de l'assurance maladie, des pensions, de la pauvreté chez les enfants et, à certains égard, de l'éducation. C'est aussi notre avis. Or, le discours du Trône est stérile; il se borne à proposer quelques bricoles administratives pour régler les problèmes touchant ces programmes.
Le filet de sécurité sociale exige, selon nous, une nouvelle approche. Il nous faut reconnaître que ce sont les pourvoyeurs de soins de première ligne au pays, c'est-à-dire les mères, les pères, les familles, ainsi que les services gouvernementaux qui sont les plus près des citoyens, qui sont les mailles du filet de sécurité sociale qu'il faut renforcer dans le cadre de la politique gouvernementale. Où reconnaît-on dans le discours du Trône que plusieurs programmes sociaux mis en place par le gouvernement, peu importe les bonnes intentions qui l'animaient, sont tout simplement devenus trop coûteux, ne fonctionnent plus et ne reçoivent même plus l'appui des clients qu'ils sont censés servir?
Le discours du Trône parle des enfants comme s'il s'agissait d'êtres désincarnés n'ayant pas le moindre lien avec les familles. Dans la réalité, ils sont généralement liés à des familles, dont beaucoup sont dans une situation désespérée. Nous sommes d'avis que c'est d'abord à la famille que revient le soin d'un enfant. C'est en améliorant le sort des familles qu'on améliore la politique sociale.
D'ici quelques jours, la députée de Calgary—Nose Hill et d'autres députés réformistes énonceront de nouveaux principes et de nouvelles idées en vue d'une véritable réforme sociale. Nous ne nous contentons pas de critiquer les tentatives que fait le gouvernement pour redresser un État providence qui va de travers. Nous croyons que de nouvelles idées permettant de personnaliser, décentraliser et situer au niveau local la prestation des services sociaux ouvrent une voie d'avenir plus prometteuse à la population. Cela sera notre contribution à ce débat sur le discours du Trône pour ce qui est de la réforme sociale.
En ce qui concerne la justice criminelle, nous lisons ce discours du Trône et nous aimerions savoir ce qui est arrivé au nouveau programme rigoureux que la nouvelle ministre de la Justice a annoncé en août. Elle devait faire quelque chose pour resserrer la Loi sur les jeunes contrevenants. Elle devait revoir le processus de détermination de la peine. Elle devait modifier le système de libération conditionnelle. On ne trouve pourtant pas le moindre mot là-dessus dans le discours du Trône. La mesure prise à l'égard de la détermination de la peine a plutôt relâché le processus au lieu de le resserrer.
Où est la réaction aux besoins qu'ont exprimés les victimes de crimes? Je pense aux familles des victimes de Clifford Olson et à ce qu'elles ont eu à endurer à cause de la disposition qui laisse une lueur d'espoir. Les ministériels n'ont-ils pas ressenti le moindre remords en voyant ces gens qui regardaient Clifford Olson parader devant les caméras pour se rendre à une audience de libération conditionnelle? Ces gens ont toute notre sympathie. Je voudrais leur présenter des excuses au nom d'au moins une partie des membres de cette législature qui n'a pu empêcher qu'ils souffrent ainsi.
Où est la réponse du gouvernement aux familles qui souffrent et qui sont exposées à la violence à cause des lacunes de la Loi sur les jeunes contrevenants, de notre système de libération conditionnelle, de nos tribunaux et de notre système de justice pénale?
Je pense notamment au député de Surrey-Nord, lui-même victime d'un crime, son fils ayant été assassiné, qui a lutté pour se faire élire à la Chambre afin de représenter les victimes.>Ayant fait de la défense des droits des victimes son cheval de bataille sur la scène politique, que trouve-t-il à ce propos dans le discours du Trône? Il y trouve un petit passage de trois ou quatre paragraphes. Il aurait été préférable, Monsieur le premier ministre, de nous dispenser de ce passage au lieu de nous le présenter avec un projet réduit à sa plus simple expression.
Mes collègues réformistes, notamment le député de Crowfoot et d'autres députés intéressés par la réforme de la justice pénale, s'efforceront de remédier à cette lacune du programme législatif du gouvernement en proposant des réformes, particulièrement celles qui accordent la plus haute priorité aux droits des victimes.
En ce qui concerne l'obligation de rendre compte, les députés qui siégeaient à la Chambre en 1993 se rappelleront que le discours du Trône mentionnait à de nombreuses reprises l'intégrité, l'éthique, les conseillers en éthique, les lignes directrices à l'intention des ministres et l'obligation de rendre compte. Nous ne pouvons nous empêcher de remarquer que cet élément est totalement absent du discours du Trône de cette année.
Le gouvernement n'accepte aucunement la responsabilité d'une ingérence politique dans l'enquête sur l'affaire de la Somalie. Il ne reconnaît aucunement sa responsabilité à cet égard et n'accepte aucunement de mettre en oeuvre les recommandations de cette commission d'enquête dont il a mis fin aux travaux.
Nous constatons que le gouvernement n'accepte aucune responsabilité à l'égard des tactiques employées pour faire obstacle aux travaux de la commission d'enquête Krever. Il était tout à fait favorable à cette enquête tant qu'elle examinait les fautes du gouvernement conservateur. Dès que la commission s'est mise à remonter à la période antérieure, le gouvernement y a fait obstruction.
Ce qu'il y a peut-être de plus grave, c'est que nous ne trouvons rien dans le discours du Trône qui obligerait les ministres à être davantage responsables devant la Chambre, et les politiciens en général à l'être davantage devant les Canadiens. Si vous examinez ce qui se passe, non seulement chez nous mais dans presque tous les pays du monde, vous verrez qu'il existe un courant chez les gens ordinaires qui réclament de leurs politiciens un degré accru de responsabilité. Ce phénomène ne s'observe pas uniquement au Canada, mais aussi en Europe de l'Est, en Chine, en Asie. Ce phénomène s'observe dans le monde entier: il s'agit d'une révolution démocratique de la base au sommet.
Or, nous ne voyons dans le discours du Trône aucune lueur de reconnaissance de ce désir de responsabilité, pas même une disposition à examiner certains des mécanismes qui peuvent servir à rendre les gens plus responsables: utiliser davantage les référendums; recourir davantage aux initiatives des citoyens; traiter les pétitions avec respect au lieu de les étaler ici à la Chambre pour les reléguer le lendemain aux oubliettes.
Dans le débat sur le discours du Trône, nous tâcherons notamment d'ajouter au squelette quasi-inexistant de la responsabilité publique une proposition visant à obliger la Chambre et ses députés, non pas seulement nous-mêmes mais tous les députés, à rendre davantage de comptes à la population que nous servons.
Pour terminer, j'aborderai maintenant la question inépuisable de l'unité nationale. Je constate que le gouvernement a apporté quelques modestes retouches à sa conception de l'unité nationale; il s'agit de petits pas, je le soutiens, mais dans la bonne direction.
En 1995, avant le dernier référendum, le gouvernement refusait complètement de contester la légalité d'une sécession unilatérale. Il refusait d'aborder de façon franche et claire les questions pratiques et difficiles qui se posent quand une province décide de faire sécession, des questions comme celle des frontières, de la répartition de la dette, du sort des minorités qui ne veulent pas rester dans la province sécessionniste, et ainsi de suite. Le gouvernement ne voulait non seulement pas inscrire ces questions à son ordre du jour, mais il qualifiait de traîtres à l'effort d'unité ceux qui insistaient pour que l'on s'attaque à ces questions et que l'on en fasse connaître les conséquences aux Québécois.
Jusqu'à récemment, en matière d'unité, le gouvernement avait également mis tous ses oeufs dans le même panier, mais un panier percé. Il comptait sur la clause de la société distincte pour faire bouger l'opinion publique au Québec, malgré le fait que cela avait déjà été tenté et que cette approche ne trouvait pas d'appui ailleurs dans le pays. C'était la position du gouvernement en 1995. Je le répète, nous assistons maintenant à quelques changements modestes.
Le ministre des Affaires intergouvernementales, et c'est tout à son honneur, commence à parler des conséquences regrettables de la sécession, et je le félicite de ses efforts.
Le gouvernement semble accepter certains conseils des premiers ministres des provinces, même si les réponses que le premier ministre a données au cours de la période des questions tout à l'heure nous laissent songeurs. Il nous a toutefois semblé qu'on était plus disposé à reconnaître les lacunes de la clause de la société distincte et à accepter l'opinion des premiers ministres des provinces selon qui il faut modifier à la fois le vocabulaire et le contenu. Il faut modifier l'idée même en l'associant au principe de l'égalité des provinces et en précisant très clairement que toute reconnaissance du caractère unique du Québec ou de quelque autre région—caractère unique que nous applaudissons—ne conférera pas à une province des pouvoirs qui seraient refusés à d'autres.
Ces changements sont beaucoup trop modestes. Ils sont loin de constituer une nouvelle conception solide ou une initiative fédéraliste susceptible d'unir notre pays à l'aube du XXe siècle. C'est bien maigre. Si le gouvernement souhaite étoffer sa stratégie d'unité nationale en lui insufflant un esprit réel, en lui donnant de la substance et de la vigueur, je l'exhorte à commencer à accepter des propositions plus substantielles venant d'autres milieux, à commencer par celles des premiers ministres. Permettez-moi de donner quelques exemples de ces propositions.
Le passage du discours du Trône consacré à l'unité est extrêmement bref. Il se résume à un seul paragraphe qui souligne le travail accompli par les premiers ministres provinciaux à Calgary le 14 septembre. Voici le texte:
Le gouvernement travaillera de près avec les gouvernements provinciaux et territoriaux à bâtir sur ce qu'ont accompli les neuf premiers ministres et les leaders territoriaux la semaine dernière à Calgary, dans le but d'en arriver à la pleine reconnaissance de la diversité propre à la fédération, y inclus du caractère unique de la société québécoise.
Les députés qui ont pris connaissance de la déclaration de Calgary remarqueront le choix qui s'est fait dans le discours du Trône. En effet, il cite ce que les premiers ministres ont dit de la diversité et du caractère unique. Nous n'avons rien contre. Mais il n'est absolument pas question de ce que les premiers ministres ont dit de l'égalité des citoyens et des provinces, ni du sujet auquel sont consacrés les trois quarts du communiqué, soit le processus de consultation qui doit précéder toute proposition sur l'unité nationale.
L'opposition officielle incite le gouvernement fédéral à tenir davantage compte de ce que les premiers ministres provinciaux et les réformistes ont dit au sujet tant de l'égalité que de la participation populaire.
Dans le cadre de principes élaboré par les premiers ministres, on mentionne l'égalité à cinq reprises. Dans le discours du Trône, le gouvernement utilise une centaine d'adjectifs pour décrire le Canada, sans jamais faire mention de l'égalité des citoyens et des provinces.
Si le gouvernement croit être en mesure d'élaborer une position en matière d'unité sans tenir compte du principe de l'égalité des citoyens et des provinces et, pis encore, sans tenir compte des mesures pratiques qui lui permettraient d'appliquer sa position dans le vrai monde, où il lui faudrait respecter le principe de l'égalité dans l'exercice de ses pouvoirs de dépenser et de prélever des impôts, si le gouvernement croit être en mesure de ne pas tenir compte de ce principe, il adoptera une position en matière d'unité que des millions de Canadiens jugeront inacceptable. Pourquoi prendre une telle chance quand il est question d'unité nationale?
Pour que les premiers ministres provinciaux soient pris au sérieux, nous pensons que le gouvernement devrait s'engager plus fermement à consulter la population sur les initiatives relatives à l'unité nationale. Il pourrait s'y prendre de deux façons. Il pourrait tout d'abord assurer la Chambre qu'il respectera les résultats des consultations publiques que les premiers ministres amorcent dans leurs provinces respectives, même s'ils ne correspondent pas à tous les points qui ont été soulevés.
Plus particulièrement, le gouvernement devra répondre une fois pour toutes à la question qu'a posée aujourd'hui le député d'Edmonton—Strathcona: quel rôle jouera le gouvernement pour veiller à ce que le Québec soit saisi et étudie les propositions d'unité nationale qu'élaborera le reste du pays?
Le manque de participation concrète de la part de la population a certes été la plus grande faiblesse des dernières négociations constitutionnelles. Cela a entaché les négociations de 1982. Il ne faut pas penser que seule une poignée de dirigeants politiques du Québec a été écartée des négociations de 1982, car c'est toute la population qui a été tenue à l'écart. Cela a également entaché les négociations de l'Accord du lac Meech et a même mené à l'échec de cette entente.
Ensuite, il y a eu les négociations de Charlottetown. La population pense qu'il s'est agi d'une consultation après coup. Elle estime que le gouvernement a simplement présenté une version améliorée et légèrement différente de l'accord du lac Meech et que M. Spicer s'est déplacé d'un océan à l'autre pour recueillir une foule de recommandations dont on n'a guère tenu compte dans l'accord de Charlottetown.
Dans le dossier de l'unité nationale, nous, Canadiens, sommes comme les membres d'une famille que l'on a entassés dans la voiture familiale pour les mener à une destination, celle d'un Canada uni. Les politiciens et les dirigeants de la vieille école sont toutefois les seuls qui ont pu prendre le volant jusqu'à maintenant. Les Canadiens entassés à l'arrière passent leur temps à demander s'ils sont bientôt arrivés à destination, à un Canada uni.
En quoi a consisté notre expérience? Pendant un certain nombre d'années, nous avons laissé M. Trudeau conduire la voiture. Tout le monde se souvient de M. Trudeau—chauffeur très désinvolte—qui conduisait d'une main, alors que de l'autre il faisait un bras d'honneur à la population de l'Alberta et d'ailleurs. En rétrospective, nous lui avons pardonné. Les Canadiens sur la banquette arrière passaient leur temps à demander s'ils arrivaient à destination, à un Canada uni. Que leur a répondu M. Trudeau? Il leur a dit qu'ils n'étaient pas encore arrivés, mais qu'il restait simplement à franchir la colline constitutionnelle avant d'avoir un Canada uni. Nous avons franchi la colline constitutionnelle, nous avons obtenu la Constitution de 1982, mais nous n'avons pas eu de Canada uni. En réalité, M. Lévesque souffrait du mal des transports sur le siège arrière et il essayait de défoncer la fenêtre à coups de pied.
Nous avons ensuite eu un autre conducteur, le premier ministre Mulroney. Les Canadiens sur la banquette arrière lui demandaient sans cesse s'ils arrivaient enfin à un Canada uni. Il leur a répondu qu'ils n'y étaient pas encore, mais que leur destination était toute proche, au lac Meech. Nous sommes donc arrivés au lac Meech, mais nous ne sommes pas parvenus à un Canada uni. Il a dit que, pour cela, il fallait se rendre à Charlottetown. Nous y sommes allés et nous ne sommes toujours pas parvenus à un Canada uni.
Un peu plus tard, notre actuel premier ministre prend le volant. Il conduit très très lentement. Assis à l'arrière, nous lui demandons si nous sommes arrivés à un Canada uni. Pas de réponse. Le premier ministre s'est endormi au volant et nous avons presque pris le fossé au moment du référendum.
La caractéristique commune à tous ces conducteurs—et tous les députés de sexe masculin comprendront ce que je veux dire—c'est qu'ils ne prennent jamais la peine de s'arrêter pour demander comment ils devraient conduire.
Nous disons qu'il faut le demander aux Canadiens, qui savent très bien où trouver le Canada uni. C'est pourquoi j'implore le premier ministre de consulter davantage la population et de proposer de nouvelles initiatives pour un Canada uni que la Chambre devra certes examiner et bien peser. Ce qui importe encore plus, c'est que les Canadiens participent dès le départ à la démarche car, autrement, ils rejetteront tout projet, aussi bien conçu soit-il.
Quoi d'autre devrait-on trouver dans une initiative pour l'unité nationale qui rejoigne vraiment l'optique de la population? J'estime que, comme les premiers ministres l'ont déjà pressenti, il faut rééquilibrer les pouvoirs et modifier les institutions.
La petite équipe de l'unité nationale de notre caucus s'est justement réunie cette semaine. Nous nous sommes demandé ce que comprendrait notre programme législatif si nous avions à rédiger le discours du Trône et à montrer aux Canadiens que nos propositions d'unité sont valables. Nous avons trouvé de quoi remplir deux pages. Nous aurions un projet de loi qui reconnaîtrait expressément l'égalité des Canadiens des diverses provinces et qui appliquerait ce principe dans l'exercice par le gouvernement fédéral de ses pouvoirs de dépenser et de prélever des impôts. J'aimerais m'attarder un jour à la Chambre sur l'inégalité qui existe au Canada dans l'exercice de ces pouvoirs par le gouvernement fédéral.
Nous aurions un projet de loi qui prévoit des rajustements à la compétence provinciale en matière de ressources naturelles, de formation professionnelle, de services sociaux, de logement, de tourisme. D'accord avec la plupart des gouvernements provinciaux, nous estimons que de simples ententes administratives qui varient d'une province à l'autre et qui n'existent pas dans la moitié des provinces ne constituent pas le moindrement une reconnaissance de la responsabilité provinciale en ces matières.
Nous promulguerions des lois pour renforcer l'union économique canadienne. Où est le projet de loi ministériel visant à établir un mécanisme qui supprimerait les barrières intérieures au commerce? La Chambre a le pouvoir d'adopter ce projet de loi, que les provinces l'appuient ou non.
Où est la mesure législative visant à faciliter l'établissement de normes nationales? La contribution fédérale au coût total des soins de santé est maintenant inférieure à 10 p. 100. Ce sera techniquement et économiquement impossible pour le partenaire minoritaire dans les soins de santé de dicter les normes comme nous le faisions dans le passé. Cela ne veut pas dire que nous n'aurons pas de normes nationales ou que les gens n'en veulent pas, mais nous avons besoin d'un nouveau mécanisme qui permettrait au gouvernement fédéral de faciliter l'établissement de normes nationales que toutes les provinces accepteraient d'appliquer.
Je regarde le discours du Trône et, si j'étais autochtone, je ne prendrais même pas la peine de le lire. Il n'y a rien dans ce texte qui touche vraiment aux problèmes des autochtones. Où est le projet de loi visant à décentraliser d'abord pour finalement abolir le ministère des Affaires indiennes afin de transférer les fonctions et le financement aux administrations autochtones locales? Et où est le projet de loi parallèle? On ne réussira jamais à faire accepter cette mesure par les autochtones à moins qu'il n'y ait un projet de loi parallèle visant à établir des mécanismes pour assurer la responsabilité financière et démocratique dans les réserves.
Où sont les projets de loi et les motions visant à renforcer la sensibilité et la responsabilité des institutions nationales à l'égard des régions? Où est la motion visant à modifier le Règlement de la Chambre pour que le rejet d'une motion ministérielle n'entraîne pas automatiquement la défaite du gouvernement à moins qu'il s'agisse effectivement d'une motion de censure? Cela donnerait à la Chambre la meilleure représentation régionale qu'elle ait jamais eue.
Où est la mesure visant à réformer le Sénat sans devoir nécessairement modifier la Constitution, du moins pour permettre l'élection des sénateurs? Où est la résolution constitutionnelle pour au moins amorcer le processus de réforme constitutionnelle du Sénat? Qu'en est-il de la question de la représentation proportionnelle dans cette enceinte? Où est le projet de loi qui traiterait de cette question? Si la représentation au Sénat était régionale, la représentation à la Chambre pourrait être vraiment proportionnelle, à la différence de la représentation au Sénat.
Où est le projet de loi prévoyant des assemblées constituantes si jamais notre pays décidait de refaire sa Constitution? La Chambre est censée prévoir. Nous ne pouvons pas attendre le jour où les Canadiens décideront de refaire la Constitution pour commencer à mettre en place les mécanismes appropriés. Tout cela doit se faire à l'avance. Il faut d'abord adopter une loi sur les assemblées constituantes. En second lieu, il faut que nous ayons la garantie absolue que la réforme sera soumise à un référendum.
Je suis d'avis que le gouvernement aurait dû faire des propositions à cet égard ou, du moins, qu'il aurait dû promettre de le faire. Ce serait un départ. Nous aurions alors un Canada qui respecte le caractère unique, qui respecte l'égalité. Le Canada disposerait alors des outils pour faciliter les choses. Nous aurions une nouvelle répartition des pouvoirs pour le XXIe siècle. Il n'y a rien de tout cela dans le discours du Trône.
Pour étoffer les stratégies relatives à l'unité nationale, nous voulons savoir s'il y a des initiatives visant à régler les gros problèmes régionaux qui sont si évidents à la Chambre. Si le gouvernement fédéral avait vraiment consulté les Canadiens, il saurait exactement quelles sont nos différences régionales. J'ai dit dès le départ que la composition actuelle de la Chambre reflétait mieux ces différences régionales que celle des législatures précédentes.
J'ai été franchement surpris, quand j'ai pris connaissance du discours du Trône, de constater que les intérêts régionaux du pays ne figuraient pas parmi les gros titres. Où, dans le discours du Trône, est-il question d'une nouvelle initiative économique dans le Canada atlantique qui reconnaîtrait que les stratégies et les subventions du passé n'ont tout simplement pas donné les résultats escomptés? Où sont les stratégies économiques dans le cadre desquelles on se servirait des nouveaux outils que sont l'accroissement du commerce, la suppression des barrières intérieures au commerce, l'expansion du commerce avec la Nouvelle-Angleterre et le fait de faire du Canada atlantique la porte d'entrée du commerce européen avec la communauté américaine? Où sont les partenariats proposés entre les secteur public et privé en vue de construire des routes, des chemins de fer sur courtes distances et des ports à conteneurs? Il n'y a rien dans le discours du Trône au sujet de ces nouvelles idées et rien sur le Canada atlantique.
Par ailleurs, où est la nouvelle stratégie pour le Québec, la troisième voie? Le discours du Trône est muet à cet égard.
[Français]
Il n'y a pas de troisième voie pour le Québec. Il n'y a pas d'option entre la séparation et le fédéralisme actuel. Il n'y a que le rafistolage actuel en matière de division des pouvoirs, mais pas de troisième voie qui permette une véritable réforme de la fédération par le rééquilibre des pouvoirs.
[Traduction]
Sans doute, tous les nouveaux députés ontariens à la Chambre des communes s'attendent à ce que le gouvernement fédéral invite l'Ontario à collaborer pour coordonner leurs politiques financières respectives afin de soutenir la reprise économique dans cette province. Il est tout simplement impensable que le plus gros gouvernement au Canada, c'est-à-dire le gouvernement fédéral, et le gouvernement de la plus grosse province du pays aient des politiques financières en opposition directe ou franchement divergentes. Difficile d'imaginer meilleur moyen d'entraver la reprise économique. L'Ontario ne peut pas adopter comme priorité les allégements fiscaux tandis que le gouvernement fédéral opte, de son côté, pour l'augmentation des dépenses. Le danger, pour les investisseurs, c'est de voir l'Ontario accorder des réductions d'impôts et le gouvernement fédéral se hâter de récupérer l'argent avant même que les contribuables en voient la couleur.
Et qu'en est-il du Nord, nos dernières terres vierges, démographiquement et écologiquement parlant? Il n'y a aucune reconnaissance du Nord, aucune vision pour le Nord. Même Diefenbaker avait une vision pour le Nord. Il ne s'agissait que d'une esquisse de vision, mais au moins il essayait de s'en former une. Le Nord est complètement laissé pour compte, perdu loin, très loin sur la liste de priorités du gouvernement fédéral, sinon complètement oublié.
J'ai gardé le meilleur pour la fin: l'Ouest. Je prierais les députés ministériels d'écouter un instant. Où est-il question du nouvel Ouest et de ce qu'il apporte au Canada du XXIe siècle? Un nouvel acteur commence à exercer son influence sur le bien, la prospérité et l'unité du Canada. La force et la vitalité de cette influence sont comparables à celles du Canada atlantique au XIXe siècle et du Québec et de l'Ontario au XXe siècle. C'est l'influence grandissante de l'Ouest nouveau, cette partie du Canada qui court depuis la limite occidentale de l'Ontario, traverse les plaines et les forêts du Manitoba et de la Saskatchewan, les contreforts de l'Alberta et les Rocheuses majestueuses pour terminer sa course sur la côte du Pacifique, dans cette magnifique province qu'est la Colombie-Britannique.
L'Ouest nouveau a pour principes la liberté d'entreprise, la responsabilité financière, la compassion pour les jeunes, les personnes âgées, les malades et les pauvres, l'égalité des citoyens et des provinces et une démocratie à l'image du bon sens des gens ordinaires.
L'Ouest nouveau manifeste une vitalité et une énergie nouvelles, non seulement pour obtenir qu'on fasse droit à ses griefs de longue date mais aussi pour offrir une nouvelle source d'espoir et d'énergie qui permettra de renforcer l'unité et l'économie de notre pays.
Le parti réformiste est le principal porte-parole de l'Ouest nouveau au Parlement fédéral. Ceux qui croient que ce parti et la nouvelle énergie politique qui anime l'Ouest ne sont que les fruits de la protestation ont 15 ans de retard sur la réalité d'aujourd'hui. L'Ouest peut trouver lui-même la solution à ses griefs régionaux. L'Ouest croit qu'il peut concurrencer les Américains et les battre deux fois sur trois pour peu que les règles du jeu soient équitables. Il en fait d'ailleurs la preuve tous les jours.
Le commerce des pays du bassin du Pacifique représente maintenant le double de celui des pays de l'Atlantique et offre des possibilités illimitées. Le plus important créateur d'emplois dans le secteur privé se trouve maintenant à Calgary et ce n'est pas l'industrie du pétrole et du gaz. Cet exemple peut être reproduit en maints autres endroits au Canada. L'Ouest est prêt à déployer ses idées et ses énergies sur la scène nationale, non seulement pour promouvoir et protéger ses intérêts mais aussi pour contribuer au renouvellement du Canada.
Le discours du Trône ne va pas dans le sens de l'esprit qui anime l'Ouest. Il ne met pas cet esprit au service de l'intérêt national et laisse passer une occasion unique de harnacher, en cette fin ce siècle, une énergie et une vigueur qui permettraient d'unir notre pays et de le doter d'une économie dynamique.
Je termine en commentant une fois de plus un discours du Trône stérile. Peut-être certains se contenteraient de pas grand-chose. J'en vois un exemple chez un député. Cependant, d'autres parmi nous ne sont pas satisfaits. Certains de nous voudraient quelque chose de plus substantiel, de plus profond, de plus complet, de plus grand; nous voulons un discours qui ait de la chair, du muscle, du coeur et de l'âme; nous voulons que le XXe siècle se termine en beauté, et non pas en queue de poisson comme ce discours du trône le présage.
Je ne crois pas, sauf preuve du contraire, que le gouvernement soit à la hauteur. Pour nous autres députés de la Chambre—je ne parle pas seulement des députés réformistes, mais d'autres députés, y compris certains ministériels d'arrière-ban qui savent que ce je dis est vrai—le pari est de reconnaître les réalités que le gouvernement lui n'a pas reconnues. Nous devons consulter les sources que le gouvernement n'a pas consultées. Nous devons parler au nom de ceux que le gouvernement n'a pas écoutés. Nous devons représenter les valeurs que le gouvernement n'a pas représentées. Nous devons poursuivre les idées que le gouvernement a refusé d'accepter. Nous devons proposer des politiques que le gouvernement n'a pas élaborées. Nous devons inspirer l'espoir que le gouvernement n'a pas su donner de sorte que le XXIe siècle soit le siècle du Canada.
Que le passage suivant soit ajouté à l'Adresse: «et cette Chambre déplore que votre gouvernement propose un programme législatif embourbé dans le passé, déconnecté du présent et incapable de faire entrer les Canadiens dans le XXIe siècle avec prévoyance et vigueur.»
Le Président: Il s'agit d'un amendement au discours du Trône proposé par le chef de l'opposition.
[Français]
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous amorçons cette semaine ce qui sera la dernière Législature de ce siècle et la première du nouveau millénaire.
Je vous félicite de votre élection et tiens à vous exprimer ma très haute considération. Par vos fonctions, vous donnez à cette Chambre le décorum et la dignité qui lui conviennent et vous représentez les grandes traditions et responsabilités historiques.
Au nombre des responsabilités que vous assumez si bien, on retrouve celle qui consiste à fermer les microphones lorsqu'ils doivent l'être. Je vous donne l'assurance, monsieur le Président, que mon parti et moi vous appuierons sans réserve dans cette tâche, ainsi que dans toutes les autres attributions de votre poste très important.
Je tiens aussi à féliciter l'honorable députée de Parkdale—High Park pour son allocution à titre de motionnaire de l'Adresse en réponse au discours du Trône, ainsi que l'honorable député de Beauce pour son allocution à titre de second motionnaire. Je peux vous dire que je suis très fier des discours de ces deux députés qui commencent vraiment leur carrière du bon pied. Je leur prédis un très bel avenir à la Chambre des communes.
Il y a eu des élections générales depuis la dernière fois où je me suis levé dans cette Chambre. J'ai été élu député pour la onzième fois. Les électeurs de Saint-Maurice m'ont appuyé pour la dixième fois et la confiance qu'ils me témoignent est une source d'inspiration dans ma vie politique. Ils m'ont appris que les gens sont ce qui compte le plus en politique.
Ce que j'ai appris en marchant dans les rues de Shawinigan, en dînant avec des familles d'agriculteurs, en parlant avec des travailleurs dans les usines, a enrichi mon expérience à titre de député et de premier ministre. Les gens de Saint-Maurice veulent un gouvernement qui les écoute et les respecte, et c'est ce genre de gouvernement que j'entends diriger.
[Traduction]
De façon bien appropriée, la législature s'ouvre au moment où prend fin un autre magnifique été canadien. Nos agriculteurs font leurs récoltes et les jeunes reprennent le chemin de l'école. Cet automne, les Canadiens, et en particulier les jeunes Canadiens, commenceront à récolter ce que nous avons semé ensemble au cours des quatre dernières années.
Lorsque j'ai pris la parole à la Chambre en janvier 1994, de nombreux conjoncturistes prévoyaient de maigres récoltes dans l'avenir. Dans le débat sur l'adresse en réponse au discours du Trône, j'ai alors dit que toutes les mesures que nous prendrions viseraient «à rebâtir notre vitalité économique afin que tous les Canadiens soient capables de réaliser leur plein potentiel».
Nous pouvons aujourd'hui dire que nous n'avions pas besoin des sondages pour nous rendre compte que la plupart des Canadiens avaient des doutes quant à notre capacité de maîtriser les énormes déficits qui avaient profondément miné l'économie canadienne et notre confiance en nos moyens.
Qui aurait alors cru que le Canada créerait 974 000 emplois entre octobre 1993 et septembre 1997? Qui aurait pu prévoir que les taux d'intérêt canadiens tomberaient bien en deçà des taux américains, l'écart se creusant même jusqu'à 3,75 points pour le taux préférentiel?
Qui aurait alors cru que le taux d'inflation serait inférieur à 2 p. 100, que le taux de croissance approcherait les 4 p. 100, et que nous afficherions le taux de création d'emplois le plus élevé parmi les pays du G7? Qui aurait alors cru que, quatre ans plus tard, tous les conjoncturistes internationaux s'accorderaient pour prévoir que le Canada affichera la meilleure performance économique des pays du G7 à l'aube du nouveau millénaire?
Qui aurait alors cru que, à l'automne 1997, je me joindrais aux premiers ministres provinciaux dans un esprit de collaboration pour discuter des meilleurs moyens de venir en aide aux jeunes, pour améliorer notre système de soins de santé et pour renforcer nos mesures sociales en période d'équilibre budgétaire?
Les Canadiens ont accompli beaucoup de choses pour eux-mêmes et pour leurs concitoyens en travaillant ensemble, en faisant preuve d'audace et en surmontant la peur et le désespoir. Nous avons renoué avec notre vitalité économique. Comme le gouverneur de la Banque du Canada l'a déclaré la semaine dernière: «Le Canada est aujourd'hui en meilleure position pour relever les grands défis économiques de l'avenir qu'il ne l'avait été depuis de nombreuses années.» Il a ajouté que «potentiellement, l'économie canadienne a tout ce dont elle a besoin pour connaître une longue période de croissance soutenue en termes de production et d'emploi, c'est-à-dire une hausse de productivité et une amélioration de la qualité de vie.»
Le moment est maintenant venu pour les Canadiens de donner leur pleine mesure. De se tourner vers l'avenir. D'investir judicieusement et de manière stratégique dans les personnes et les idées. De bâtir des assises solides pour l'avenir du Canada.
Au cours de la campagne électorale et dans le discours du Trône, nous avons énoncé clairement nos priorités. Nous investirons dans les enfants, notre ressource la plus précieuse. Nous investirons dans le savoir pour préparer la jeunesse canadienne en fonction des technologies et de la société axée sur l'information. Nous collaborerons étroitement avec les provinces pour renforcer notre système de soins de santé en donnant suite aux excellentes suggestions faites par le Forum national sur la santé.
Notre pays a investi dans l'assurance-maladie il y a exactement 30 ans. Je siégeais alors à la Chambre. Cela a rapporté gros aux Canadiens, à leur économie, et même sur le plan de notre identité. En renforçant et en modernisant l'assurance-maladie pour répondre à de nouveaux besoins, nous tirerons encore plus d'avantages de notre système de soins de santé au XXIe siècle.
Avec votre permission, monsieur le Président, je signale la présence à la tribune du ministre des Finances qui a proposé le régime d'assurance-maladie, M. Sharp.
Des voix: Bravo!
Le très hon. Jean Chrétien: Monsieur le Président, au début de la campagne électorale, nous avons déclaré que nous investirions une partie de notre dividende budgétaire dans les soins de santé.
Nous déposerons un projet de loi pour majorer les transferts aux provinces et donner suite à la recommandation du Forum national sur la santé de relever à 12,5 milliards de dollars le plancher des transferts en espèces. Cela veut donc dire que les provinces recevront 700 millions de dollars de plus en 1998-1999 que ce qui est prévu dans le budget. En 1999-2000, elles recevront 1,4 milliard de dollars de plus que ne le prévoit le budget. Le Canada restera le meilleur pays au monde pour la qualité de vie parce qu'il se soucie de sa population. Ce sont là des paroles que nous n'avons pas entendu le chef de l'opposition prononcer dans son discours de cet après-midi.
Nous travaillerons d'arrache-pied pour poursuivre le renforcement de notre économie, pour continuer à créer un climat encore plus propice à la création d'emplois et à la croissance économique soutenue.
Aujourd'hui, je tiens à rendre hommage au ministre des Finances pour ses remarquables réalisations dans la gestion de nos finances. Et je tiens à dire à la Chambre que jamais plus nous ne permettrons qu'un gouvernement perde la maîtrise des finances du pays. Nous avons déjà commencé à réduire la dette en proportion de la taille de notre économie. D'ici 1998-1999, le gouvernement présentera un budget équilibré pour la première fois en près de 30 ans.
En conjuguant nos efforts avec les députés, les provinces et, surtout, avec les Canadiens et Canadiennes, nous parvenons à éliminer un déficit qui pesait très lourd sur notre avenir. Désormais, les problèmes actuels ne doivent plus être légués aux générations futures. Désormais, nous n'aurons plus à subir de déficits écrasants qui empêchent le gouvernement de répondre aux besoins véritables des personnes. Désormais, personne ne pourra plus dire que le Canada est un pays en faillite qu'il serait préférable de quitter. Désormais, les critiques ne pourront plus prétendre que le fédéralisme canadien ne fonctionne pas.
Le Canada fonctionne tellement bien que les dirigeants d'un peu partout dans le monde parlent du miracle canadien et du Canada comme d'un modèle à suivre. Une nouvelle vague d'optimisme déferle sur le Canada. Les Canadiens ont recommencé à rêver et le défi lancé à cette législature est de se montrer à la hauteur de ces rêves.
Nous devons maintenant progresser ensemble vers un nouveau millénaire. Beaucoup de députés sont des nouveaux venus à la Chambre. Ma longue expérience m'autorise à vous dire que vous trouverez l'expérience extrêmement gratifiante, difficile par moments mais finalement très satisfaisante. Certains se plaisent à dénigrer le Parlement, mais ils ont tort.
Au cours des ans, j'ai pu constater jusqu'où des simples députés pouvaient faire avancer des causes auxquelles ils s'intéressent, avec leurs électeurs et tous les Canadiens. Depuis quatre ans, notre gouvernement a assoupli le processus parlementaire plus que jamais par le passé en ce qui concerne les projets de loi d'initiative parlementaire, les travaux des comités et la participation au débat parlementaire. Nous continuerons dans le même sens.
La situation actuelle est bien meilleure que lorsque je suis devenu député. Même à titre de simple député, j'ai réussi à faire adopter un projet de loi d'initiative parlementaire modifiant le nom de la Trans-Canada Airlines. Pour y parvenir, j'ai travaillé avec des collègues des deux côtés de la Chambre. J'ai demandé à certains de m'aider en la bouclant, simplement, et nous avons apporté ce changement. Nous avons tous partagé ce succès.
Lorsque je suis monté pour la première fois à bord d'un avion d'Air Canada, je pouvais me dire que le nouveau député de Saint-Maurice avait compté un peu dans le choix de ce nouveau nom. Nombre de députés vivront des moments semblables à titre personnel ou en tant que membre d'une grande législature.
[Français]
Permettez-moi de vous dire ce que nous pouvons accomplir ensemble, en tant que Canadiens et parlementaires. Lorsque je suis entré au Parlement pour la première fois, le Canada faisait face à un grave problème de pauvreté chez les aînés. Malgré le climat de prospérité, un grand nombre d'aînés étaient quant à eux victimes de l'inflation ou du fait qu'il leur avait été impossible d'épargner suffisamment pendant les années de guerre et de dépression.
Il s'agissait d'un énorme défi à relever et nous avons partagé la responsabilité de le résoudre. Le gouvernement fédéral avait bien son propre mécanisme de pensions de la vieillesse, mais les provinces étaient, quant à elles, principalement responsables en matière de santé, de bien-être et de logement.
Le gouvernement du Canada a travaillé de concert avec les provinces et a pu s'attaquer aux problèmes de la pauvreté des aînés grâce à la souplesse et à la créativité de notre régime fédéral. Nous avons alors démontré que nous avons plus en commun que nous ne voulons l'admettre, et que nos différences sont moins importantes que nous le laissons croire. La Saskatchewan a ouvert la voie en matière d'assurance-santé, le Québec a oeuvré efficacement dans le domaine des pensions, tandis que l'Ontario et le Nouveau-Brunswick ont innové en matière de logement. C'est toutefois le gouvernement du Canada qui a imprimé la direction nationale nécessaire pour faire en sorte que la créativité déployée individuellement par les provinces bénéficie à tous les Canadiens et à toutes les Canadiennes.
Aujourd'hui, le taux de pauvreté chez les aînés représente moins du tiers de ce qu'il était, il y a à peine une génération. Lorsque les Nations unies affirment que le Canada est le pays où l'on vit le mieux, une des raisons est parce que nos aînés vivent maintenant plus longtemps et dans une plus grande aisance financière. Au cours de ce mandat, notre gouvernement assurera la sécurité des aînés pour l'avenir. Dès cet automne, nous déposerons un projet de loi relatif à la viabilité du Régime de pensions du Canada et de la Prestation aux aînés. Le Canada deviendra ainsi le premier pays du G-7 dont le régime public de pensions sera viable et abordable à l'aube du nouveau millénaire.
[Traduction]
Tout comme nous avons été en mesure de régler les problèmes relatifs à la santé et à la pauvreté des aînés, nous devons aujourd'hui nous attaquer à un problème auquel fait face une nouvelle génération de Canadiens. Il s'agit de la génération à laquelle nous léguerons le Canada au début du nouveau millénaire, nos enfants et nos petits-enfants. Le jugement qu'ils porteront sur notre génération dépendra de la façon dont nous les aurons préparés en fonction du XXIe siècle.
Les campagnes électorales sont captivantes, pour moi comme pour nous tous, parce qu'elles nous donnent l'occasion de rencontrer des Canadiens de tous les milieux. Mon épouse a observé que je suis encore plus captivé lorsque je discute avec des jeunes. Les aspirations et les rêves de la jeunesse canadienne sont pour moi une source d'inspiration, mais, lors des récentes campagnes, j'ai trop entendu la peur se mêler à leurs rêves.
Permettez-moi de dire en toute franchise que nous avons beaucoup de travail à faire. Avec la crise budgétaire qui tire à sa fin, notre gouvernement a une plus grande marge de manoeuvre.
Comme le ministre des Finances l'a déclaré dans son dernier budget, «un gouvernement libéré du fardeau du déficit n'est pas un gouvernement libéré de ses responsabilités. C'est, tout au contraire, un gouvernement capable de mieux s'en acquitter.»
Notre plus importante responsabilité est celle que nous avons envers les jeunes, l'avenir même du Canada. Lorsque je revois l'espoir quelque peu troublé qui brillait dans les yeux des jeunes gens que j'ai rencontrés cet été, je suis encore plus déterminé à faire en sorte que notre gouvernement ne se défile pas devant ses responsabilités et ses possibilités.
Je sais, comme nous le savons tous, que la pauvreté est ce qui nuit le plus à un bon départ dans la vie, que ce soit dans une collectivité autochtone ou en plein coeur de Vancouver, de Toronto, de Montréal ou de Halifax. L'amour parental, le soutien familial et des collectivités saines sont certes des antidotes aux blessures qu'inflige la pauvreté, mais ce n'est pas assez. La population a également besoin de notre aide. En investissant dès à présent dans le bien-être des enfants d'aujourd'hui, nous renforcerons à long terme le tissu social et économique de notre société. Ensemble, les gouvernements fédéral et provinciaux doivent intervenir par le biais du système national de prestations pour enfants dont nous avons entrepris l'élaboration.
Au cours de cette législature, nous promettons de faire des efforts additionnels pour répondre aux besoins des familles à faible revenu qui ont des enfants. Nous y parviendrons en augmentant la prestation fiscale pour enfants et en collaborant avec les provinces à mesure qu'elles investiront dans les services à l'enfance. Les enfants doivent demeurer prioritaires dans notre plan d'action national, et nous devons faire en sorte qu'ils connaissent un bon départ vers un avenir prometteur, et ce, quelles que soient leurs origines et l'endroit où ils vivent. Connaître un bon départ, c'est bien, mais cela ne garantit pas la victoire ni même que l'athlète terminera la course.
Aujourd'hui, les jeunes Canadiens sont plus instruits qu'à toute autre époque de notre histoire. Mais un trop grand nombre d'entre eux ne terminent pas leurs études ou n'arrivent pas à trouver du travail. Le chômage chez les jeunes est trop élevé.
Le secteur privé a créé près d'un million d'emplois au cours des quatre dernières années. Toutefois, notre société se doit d'en faire davantage pour créer de nouveaux emplois pour les jeunes. Nous aborderons ce sujet et bien d'autres à la réunion des premiers ministres cet automne.
Nous intensifierons nos efforts en faveur des premiers emplois pour les jeunes par le biais des programmes de stages et des emplois d'été. Nous lancerons au secteur privé le défi de former les jeunes Canadiens pour les aider à jouer un rôle de premier plan dans la société de l'information. Nous élaborerons avec les provinces un programme national de mentorat et, en partenariat avec les provinces et les collectivités, améliorerons les possibilités d'acquisition de compétences et d'expérience professionnelle offertes à jeunesse à risque.
Meilleure sera l'instruction des jeunes, meilleures seront leurs chances de trouver un emploi. Nous lancerons au parents, aux collectivités, aux écoles et aux gouvernements provinciaux le défi d'encourager les jeunes à poursuivre leurs études.
Dans ma famille, tout ce que mes parents arrivaient à épargner était destiné à l'éducation des enfants. Pour mes parents, l'herbe était toujours plus verte de l'autre côté de la clôture et, pour eux, l'instruction était le meilleur moyen à la disposition de leurs enfants pour connaître un avenir meilleur. Même si j'ai parfois été un élève difficile, mes parents n'ont jamais dévié de leur rêve, ni pour moi, ni pour mes frères et soeurs qui étaient des élèves nettement plus faciles. La détermination de mes parents et la confiance qu'ils plaçaient dans notre instruction est ce qui nous a donné les moyens de franchir la clôture. Aujourd'hui, c'est aux parents, aux collectivités et aux gouvernements qu'il appartient de faire en sorte que les obstacles qui se dressent devant les jeunes Canadiens ne les empêchent pas de franchir la clôture.
La lutte contre le déficit n'avait pas pour objectif de nous permettre de célébrer nos réalisations budgétaires. Nous avons entrepris cette lutte pour alléger le fardeau de la dette qui pèse sur l'avenir d'une génération entière; nous avons entrepris cette lutte pour réduire nos versements aux institutions bancaires et pour commencer à investir dans l'avenir de la jeunesse. Et c'est précisément ce que nous allons faire.
Nous, de ce côté de la Chambre, ne pensons pas que le rôle du gouvernement doit être celui qui était le sien au XIXe siècle, soit un État qui se contente du laissez-faire et n'intervient qu'en cas d'urgence.
Nous pensons plutôt que le gouvernement du XXIe siècle doit être un partenaire efficace dont le rôle consiste à effectuer des investissements judicieux et stratégiques dans des domaines d'une réelle importance pour la prospérité future de notre pays. Le savoir et l'apprentissage comptent parmi les plus importants de ces domaines. Ils représentent la clé de l'emploi et de la croissance au cours des prochaines années.
C'est la raison pour laquelle nous avons annoncé, dans notre dernier budget, la mise sur pied de la Fondation canadienne pour l'innovation. À titre de dividende de notre gestion rigoureuse des finances publiques, nous avons effectué un investissement unique de 800 millions de dollars destinés à rebâtir l'infrastructure de recherche de nos universités et de nos hôpitaux d'enseignement.
Bien que je n'aie pas l'intention de révéler le contenu de la mise à jour financière du ministre des Finances, qui sera rendue publique à la mi-octobre, ce n'est un secret pour personne que, grâce à l'excellent travail du ministre des Finances, notre situation financière en 1997-1998 est bien meilleure que les prévisions initiales.
Par conséquent, je m'attends à ce que, dans les semaines qui suivront la mise à jour financière du ministre des Finances, nous soyons en mesure de tirer parti d'un autre dividende de notre saine gestion budgétaire et d'annoncer les détails d'un autre investissement unique dans le domaine de l'apprentissage et des connaissances, semblable à ce que nous avons fait l'an dernier en mettant sur pied la Fondation canadienne pour l'innovation, mais sur une plus grande échelle.
Cette fois-ci, le but de cet investissement dans notre avenir sera d'abolir les obstacles à l'enseignement postsecondaire. Il ne pourrait y avoir ni plus grand projet canadien en vue du prochain millénaire ni meilleur rôle pour le gouvernement que celui d'aider les jeunes Canadiens à se préparer à entrer dans la société axée sur l'information du siècle prochain.
Ainsi, notre projet du millénaire le plus important sera la mise sur pied d'un fonds des bourses d'études du millénaire, autonome du gouvernement. Les recettes de ce fonds récompenseront l'excellence académique et se traduiront chaque année par des milliers de bourses d'études, dès l'an 2000, pour aider des Canadiens et des Canadiennes à revenu faible et modeste à poursuivre des études collégiales et universitaires.
Nous participerons en étroite collaboration avec les partenaires appropriés à la conception proprement dite de ce fonds. Ce n'est peut-être pas un monument fait de mortier et de brique, mais les Canadiens de demain pourront en constater les effets partout où ils tourneront le regard.
J'espère que cela aura les mêmes répercussions en faveur de notre économie et de notre pays que celles qu'avait eues pour la fin du XXe siècle l'investissement consenti après la Seconde Guerre mondiale en faveur de l'enseignement postsecondaire pour les soldats qui rentraient au pays.
Sur une note plus personnelle, j'espère que, pour des milliers et des milliers de jeunes Canadiens, cela pourra faire, à une époque différente, ce que mes parents ont été en mesure de faire pour moi ainsi que pour mes frères et soeurs.
[Français]
En plus de cette dotation unique, le gouvernement effectuera d'autres changements au Programme canadien de prêts aux étudiants et augmentera l'aide aux étudiants avec personnes à charge. Avec ces mesures et d'autres qui seront élaborées au cours des prochains mois, en collaboration avec les provinces, nous pourrons poursuivre le progrès amorcé dans le dernier budget pour nous attaquer au problème de l'escalade des coûts des études postsecondaires et de l'endettement des étudiants.
Quand j'étais jeune, j'ai dû quitter la maison pour poursuivre mes études dans un pensionnat. Les petites villes ne disposaient pas alors des ressources nécessaires pour soutenir des établissements d'enseignement supérieur. Ce qu'il y a de merveilleux avec les technologies modernes, c'est que même les collectivités les plus éloignées peuvent maintenant être en communication avec nos meilleures institutions. Le Réseau scolaire, RESCOL, mis au point par le ministère de l'Industrie, permet aux écoles de présenter la même information simultanément à Whitehorse et Weyburn, à Victoria et Victoriaville. Bill Gates a déclaré que le RESCOL est «le meilleur programme au monde lorsqu'il s'agit de permettre aux enfants d'élargir leurs horizons en utilisant l'ordinateur». Nous savons que nous sommes capables de continuer, que nous pouvons faire davantage et nous allons faire davantage.
Lors de mes déplacements au Canada durant les quatre dernières années, j'ai pu observer comment les technologies nouvelles renforcent le Canada rural. Dans notre programme électoral, nous promettions d'aider le Canada rural à adapter de nouvelles technologies et nous respecterons cet engagement. Il est extrêmement important de savoir que, d'ici l'an 2000, notre grand pays, avec ses millions de kilomètres carrés, sera le pays le plus «branché» de la planète. Les distances auront alors beaucoup moins d'importance et nous nous apercevrons que les différences ne sont pas nécessairement source de division. La technologie est un univers de promesses, mais elle doit avoir une âme.
Cet été, j'ai été déconcerté de lire les résultats d'une enquête indiquant que les jeunes Canadiens se connaissent très peu entre eux et qu'ils savent très peu de choses sur nos réalisations collectives. Selon l'enquête, dans toutes les provinces à l'exception du Québec, un plus grand nombre de jeunes Canadiens pensent que Neil Armstrong, et non Marc Garneau, est le premier astronaute canadien. Seulement 28 p. 100 des jeunes Québécois savent que John A. Macdonald a été le premier premier ministre du Canada, alors que 78 p. 100 d'entre eux ont identifié correctement Wilfrid Laurier comme le premier premier ministre francophone. Trop souvent, nous oublions ou nous ignorons tout ce que nous avons accompli ensemble. Il est inacceptable que les jeunes Canadiens en sachent autant sur les ordinateurs et si peu sur leur pays.
[Traduction]
C'est une des raisons pour lesquelles, à l'avenir, nos mesures en faveur de la jeunesse mettront l'accent sur les échanges. Je ne connaissais pas vraiment le Canada avant d'aller rencontrer, chez eux, des gens de la Saskatchewan, avant d'avoir fait du ski dans les Rocheuses ou d'avoir marché dans la toundra arctique ou d'avoir joué au billard sur l'île Fogo, à Terre-Neuve, ou d'avoir parlé autour d'un feu de camp avec des aînés autochtones.
L'histoire du Canada a produit un effet semblable dans mon coeur et dans ma façon de penser à mesure que j'ai découvert sa richesse. J'ai été profondément ému d'apprendre qu'il y a plus de 150 ans, soit lorsque la religion et la race étaient à l'origine de conflits partout ailleurs dans le monde, ici, au Canada, Robert Baldwin démissionnait de son siège au Parlement du Canada-Uni pour que son collègue, Louis-Hippolyte Lafontaine puisse se faire élire pour représenter le coeur du Canada anglais.
Lafontaine est devenu le député francophone catholique d'une circonscription largement protestante et d'expression anglaise. En travaillant ensemble, Baldwin et Lafontaine nous auront donné un gouvernement responsable.
Combien de jeunes Canadiens savent qu'il y a un peu plus d'un siècle, à une époque où le monde était aux prises avec des guerres de religion, le Canada, un pays qui comptait pourtant une forte majorité de protestants et de Britanniques, élisait le premier premier ministre francophone catholique de son histoire? Et qu'il a eu le bon sens de réélire Laurier pour trois autres mandats, un objectif raisonnable pour tout premier ministre, il me semble.
Nous devons trouver des moyens pour aider les jeunes à connaître ce qu'ils ont en commun, à apprendre ce que nous avons accompli ensemble, et à éprouver de la fierté envers les grandes réalisations de leur pays. Le gouvernement du Canada travaillera avec nos grands musées, avec d'autres institutions fédérales et provinciales ainsi qu'avec des organismes bénévoles pour élaborer des moyens d'approfondir les connaissances des Canadiens sur ce que nous avons accompli ensemble.
Nous avons bâti un pays étonnant, respecté et même envié du monde entier. Cet automne, les représentants de plus de cent pays viendront à Ottawa signer un traité interdisant à jamais l'utilisation de mines antipersonnel. Je suis fier que ce soit ce gouvernement qui en ait pris l'initiative en 1994. Je suis fier de mon gouvernement qui, par l'entremise du ministre des Affaires étrangères, a refusé d'accepter un traité diminué. Le ministre des Affaires étrangères mérite toutes nos félicitations.
Nous avons travaillé avec ceux qui pensent comme nous et prouvé que le Canada peut faire une différence dans le monde. Lors d'une réunion internationale à laquelle j'ai récemment participé, un chef d'État m'a confié que seul le Canada aurait pu jouer ce rôle de premier plan dans la lutte contre les mines antipersonnel. Par ailleurs, je suis amplement d'accord avec le commentaire émis récemment par le député de l'opposition d'Esquimalt—Saanich, un médecin qui sait à quel point les mines antipersonnel mutilent un corps humain et qui a travaillé avec nous pour obtenir cette interdiction. Il a déclaré à des journalistes que le traité sur les mines antipersonnel marque «le début d'une nouvelle ère pour la politique étrangère canadienne, soit celle où nous utilisons notre force morale à des fins humanitaires. Ce traité sauvera des milliers de vies humaines.»
Cette force morale nous vient de ce que nous sommes, de tout ce que nous avons accompli ensemble et des valeurs que nous partageons. Les Canadiens ont manifesté cette force lors des inondations au Saguenay et au Manitoba. Que nous ayons été debout sur les digues ou observateur de la force torrentielle des flots, c'est en Canadiens que nous avons partagé ces expériences.
Notre gouvernement ressent cette force morale dans tout ce qu'il entreprend. C'est la raison pour laquelle la promotion et le renforcement de l'unité canadienne représentent un dossier que nous aborderons sous l'éclairage le plus large et le plus complet possible. Chaque fois que nous cherchons à réaliser les aspirations supérieures des Canadiens, nous contribuons à rendre le Canada plus uni.
[Français]
Je salue l'initiative prise à Calgary par les premiers ministres provinciaux et les leaders des territoires. Il s'agit d'une affirmation constructive et positive des valeurs importantes qui décrivent ce qu'est le Canada et ce qui nous rend canadiens.
Elle présente un message clé, soit que le fait français est une partie fondamentale de l'identité canadienne. À ce titre, le caractère unique de la société québécoise par sa majorité d'expression française, sa culture et sa tradition de droit civil est essentiel au bien-être du Canada. Cette dimension française est une partie essentielle de mon identité, elle a contribué à mon développement, elle m'a apporté la force et m'a procuré mon identité propre. Elle a fait de moi le Canadien que je suis devenu.
Je salue l'engagement pris par les premiers ministres de donner voix à ces valeurs en faisant participer les populations de leurs provinces au renforcement de l'unité de notre pays.
Le message adressé aux Québécois et aux Canadiens d'expression française, de fait, à tous les Canadiens, est un message d'ouverture et un message de solidarité. C'est un message qui doit être entendu.
Je salue l'approche très constructive mise de l'avant par les chefs du Parti réformiste, du Parti conservateur et du Nouveau Parti démocratique sur cette question.
Je demande aux Québécois et aux Québécoises d'entendre le message de Calgary et de s'unir pour y donner suite. Les mots de Calgary doivent être pris pour ce qu'ils sont: un message rassembleur qui arrive à point pour être entendu de tous. C'est un autre pas important pour bâtir la compréhension mutuelle et la confiance. Il ne faudrait pas y voir plus.
Comme ce document n'a pas de portée constitutionnelle ou juridique, je demande aux Canadiens de ne pas se laisser entraîner dans des analyses légalistes d'un énoncé de valeurs. Le jour pourrait venir—j'espère qu'il viendra, et il viendra lorsque nous aurons un gouvernement au Québec qui veut travailler dans l'intérêt des Québécois qui veulent rester au Canada, et c'est la majorité—où il y aura un texte légal ou constitutionnel qui pourra être considéré comme tel. Les mots de Calgary tentent d'exprimer les valeurs canadiennes qui importent et c'est ainsi qu'ils devraient être reçus.
Je promets à tous les Canadiens que nous sommes ouverts à toutes les bonnes idées pour renforcer l'unité de notre pays. Nous invitons d'ailleurs tous les partis d'opposition à soumettre leurs idées, et nous aurons l'occasion d'en discuter dans cette Chambre ou dans les comités. Mais jamais nous ne nous laisserons tenir en otages par des demandes qui diminuent ou qui nient à chaque citoyen canadien les bénéfices de sa citoyenneté et de notre existence en tant que nation indépendante, reconnue comme telle aux Nations unies.
Nous continuerons d'être francs et ouverts sur les conséquences de ce que proposent ceux qui veulent la partition du Canada. La clarté ne provoque pas la peur. La clarté, c'est l'ennemi de la peur. Et notre ennemi, c'est la confusion. Dans la clarté des choses, je suis convaincu que les Québécois et les autres Canadiens resteront ensemble, car c'est le meilleur choix qu'ils puissent faire pour eux-mêmes et pour leurs enfants. Comme je l'ai souligné aujourd'hui, nous nous sommes engagés à travailler en collaboration et en partenariat avec tous ceux qui, de bonne foi, veulent réaliser le formidable potentiel qui attend le Canada et les Canadiens.
Nos atouts, notre détermination et nos récents succès nous ont bien placés pour développer notre potentiel de nouvelle manière et relever les nouveaux défis d'un nouveau siècle.
[Traduction]
Au début du siècle, notre pays était un petit pays, nous n'avions pas de drapeau, nous n'avions pas notre propre citoyenneté. Terre-Neuve ne faisait même pas partie de notre pays. L'Alberta et la Saskatchewan n'étaient pas encore des provinces. Les quartiers défavorisés de Montréal et de Halifax affichaient un taux de mortalité infantile plus élevé que ce qu'on retrouve aujourd'hui dans les quartiers défavorisés de Calcutta, là même où Mère Teresa a oeuvré.
Bien peu de Canadiens avaient rencontré d'autres Canadiens qui vivaient à plus de cinquante milles de distance. Dans les Prairies, les nouveaux colons vivaient isolés au cours des longs hivers sans savoir qu'ils étaient assis sur de riches gisements pétroliers. Pourtant, nous savions que l'avenir s'ouvrait devant nous.
Au début du siècle, Laurier exprimait ce rêve d'avenir lorsqu'il a déclaré:
Il y a trois ans en Angleterre, j'ai visité un de ces modèles d'architecture gothique que la main du génie, guidée par une foi inébranlable, a su façonner dans un tout harmonieux. La cathédrale était faite de granit, de chêne et de marbre. Elle représente l'image de la nation que je veux devenir. Je veux que le marbre demeure le marbre; que le granit demeure le granit; que le chêne demeure le chêne. Je veux réunir tous ces éléments et bâtir une nation qui deviendra une grande puissance du monde.
Nous avons bâti ce pays et nous continuons d'en façonner les éléments. Les jeunes le feront à leur tour au prochain siècle. Leur architecture sera nouvelle mais demeurera canadienne. Cette grandeur aura acquis un sens nouveau mais demeurera canadienne.
Aujourd'hui, on a retrouvé au Canada la merveilleuse sensation de vivre dans un pays en mouvement, un pays qui a son importance, un pays qui rêve encore. Pendant trop longtemps, pour trop de Canadiens et de Canadiennes, le Canada semblait être en panne. Mais aujourd'hui, des Canadiens de tous les coins du pays, des Canadiens ensemble, font des choix en fonction du prochain millénaire.
Je promets aux Canadiens que cette législature et ce gouvernement seront à la hauteur de leurs rêves et de leurs aspirations. Avec toutes nos énergies, avec l'appui de nos collègues et de nos compatriotes canadiens, nous maintiendrons l'unité de notre magnifique pays, ce Canada, notre Canada. Et ensemble, nous entrerons dans le nouveau millénaire dans un pays prospère, tolérant, généreux, solidaire et moderne.
Notre pays sera un modèle pour le monde. Nous avons tous le très grand honneur de siéger au Parlement canadien. Pour bien des pays, le Canada est le pays rêvé. Lorsque nous voyageons de par le monde, nous nous rendons compte que nous faisons l'envie du monde entier. Des millions et des millions d'habitants de tous les coins de la planète sacrifieraient tout ce qu'ils ont pour partager notre citoyenneté. Voilà pourquoi il est de notre devoir à tous d'unir nos efforts pour rendre notre pays encore plus magnifique et pour léguer à nos enfants et à nos petits-enfants le meilleur pays au monde.
Des voix: Bravo!
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, permettez-moi d'abord de vous féliciter pour votre élection à la Présidence. Je veux vous assurer que le Bloc québécois interviendra toujours en cette Chambre dans le plus profond respect de cette institution, comme nous l'avons fait par le passé.
À la suite de la dernière élection, nous nous retrouvons dans un Parlement éclaté, un Parlement qui reflète le vrai visage du Canada. Pour sa part, le Bloc québécois se retrouve comme le principal parti du Québec, comme la voix principale du Québec à Ottawa. Quarante-quatre députés constituant la majorité de la députation au Québec, dans les faits, 60 p. 100 de la députation, voilà ce que représente le Bloc québécois.
Et justement, en parlant du vrai visage du Canada, nous en avons eu un exemple éloquent hier, lors du discours du Trône. Deux constats principaux peuvent se dégager des intentions du gouvernement libéral.
Le premier constat n'est pas surprenant: la poursuite du plan B du gouvernement, de la ligne dure envers le Québec. Je reviendrai d'ailleurs plus tard sur ce premier constat.
Un deuxième constat s'impose: après avoir mené une lutte au déficit sur le dos des chômeuses, des chômeurs et des plus démunis en sabrant sauvagement dans les transferts aux provinces pour la santé, l'éducation et dans l'assurance-chômage, ce gouvernement a maintenant le culot, voire l'indécence, de se servir des surplus générés par ses propres compressions pour s'ingérer dans des domaines relevant des provinces.
C'est clairement la visibilité à des fins politiques, au lieu de l'efficacité pour les citoyens. Voilà où ce deuxième constat, par son objectif, rejoint notre premier constat.
La lutte au déficit de ce gouvernement a bouleversé la vie de milliers de citoyennes et de citoyens par ses coupures à l'assurance-chômage, ses coupures à l'aide sociale imposées aux provinces et par ses compressions dans les transferts pour la santé et l'éducation.
Plutôt que de réparer les torts qu'il a causés, ce gouvernement n'est préoccupé que d'une seule chose, c'est d'utiliser l'argent ainsi économisé pour accroître sa visibilité à des fins carrément politiques.
Si je devais résumer en une phrase le discours sur ces politiques gouvernementales, je dirais que c'est une grosse feuille d'érable rouge qu'on nous propose.
Dans son discours, le gouvernement nous convie à un grand débat sur l'après-déficit zéro. Les libéraux proposent que la moitié du surplus soit accordée à la dette et à la réduction d'impôt. L'autre moitié, elle, servirait à abuser de son pouvoir de dépenser dans des domaines de compétences exclusives aux provinces.
Après avoir lui-même causé de nombreux problèmes sociaux, ce gouvernement veut s'ériger en sauveur. Ce gouvernement aura coupé 42 milliards dans les programmes sociaux, dans la santé, dans l'éducation, dans l'aide sociale, donc, forcé la fermeture d'hôpitaux, rejeté vers l'aide sociale des milliers de travailleurs et de travailleuses exclus de l'assurance-emploi, et entraîné des coupures sévères dans les écoles.
Les surplus de l'après-déficit zéro ne devraient pas servir à de la propagande fédéraliste, mais devraient passer d'abord et avant tout par le rétablissement des transferts aux provinces pour les programmes sociaux. Concrètement, cela veut dire plus d'argent dans les hôpitaux, plus d'argent dans les CLSC. Cela veut dire aussi plus de professeurs, plus de services pour les étudiants.
En second lieu, les surplus doivent servir à relancer l'emploi par une baisse ciblée des taxes sur la masse salariale. Notre plate-forme électorale propose d'utiliser le surplus de la caisse d'assurance-emploi pour, d'une part, baisser d'au moins 35c. les cotisations d'assurance-emploi et, d'autre part, réinvestir 2,5 milliards pour bonifier l'aide aux chômeurs, notamment les chômeurs saisonniers.
Ne pas remettre le surplus annuel d'environ sept milliards de dollars à la caisse d'assurance-emploi, un surplus dérobé aux travailleurs et aux chômeurs, c'est carrément un détournement de fonds. Les propositions que j'émets actuellement ont fait consensus parmi les premiers ministres des provinces à Saint Andrews récemment.
Ensuite, il faut utiliser les surplus pour mener la lutte contre la pauvreté. Et cela passe par l'amélioration du régime d'assurance-emploi, compte tenu des coupures sauvages faites depuis cinq ans, particulièrement auprès des travailleurs saisonniers.
Enfin, longtemps dû, le remboursement pour l'harmonisation de la TPS de deux milliards qui a été accordé aux Maritimes, mais pas au Québec, une demande du Québec que tous les premiers ministres provinciaux ont également appuyée lors de la rencontre de Saint Andrews. Et c'est seulement après avoir rempli ces obligations que le gouvernement fédéral devrait envisager des baisses d'impôt ou de rembourser la dette.
Mais au lieu de réparer les dégâts causés par ses politiques, voilà que le gouvernement nous annonce que maintenant, il va utiliser sa marge de manoeuvre pour empiéter systématiquement dans des champs de compétence des provinces. Le pire empiétement jamais vu dans l'histoire du Canada. Même Pierre Elliott Trudeau n'a jamais osé se rendre aussi loin. C'est donc peu dire.
Le gouvernement confirme son ingérence dans le domaine de la santé, notamment par la création d'un régime d'assurance-médicaments, alors que le Québec a déjà son propre régime.
De plus, après avoir mis plus de 30 ans pour se retirer partiellement du domaine de la formation de la main-d'oeuvre, voilà que le même gouvernement libéral, six mois après, maintient, confirme et accentue son implication dans le domaine de la formation des jeunes.
Une des seules nouveautés que contient ce discours, c'est que le gouvernement fédéral annonce que, dorénavant, il va s'immiscer directement dans l'éducation, en disant vouloir, et je le cite: «mesurer la maturité scolaire de nos enfants» via un petit feuillet anodin dans toutes les chaumières. À quand les normes nationales dans l'éducation? À quand les examens nationaux dans l'éducation?
Je dis à ce gouvernement: jamais le gouvernement fédéral ne mettra les pieds dans les écoles du Québec. Jamais!
Mais ces actions et ces politiques ne sont que parties d'une stratégie plus large qui s'inscrit dans le premier constat que nous avons dressé: la poursuite plus agressive que jamais du plan B du gouvernement. C'est la suite logique des dernières élections où l'on a pu assister à des attaques répétitives envers le Québec, envers ses politiciens et envers ses institutions démocratiques.
L'idéologie dominante dans le reste du Canada s'éloigne plus que jamais des demandes historiques et des aspirations historiques du Québec. Un durcissement encouragé de façon irresponsable par le discours du Parti réformiste, les faits et gestes du Parti libéral du Canada et par les silences complices du chef du Parti conservateur. Quant au NPD, il a toujours ignoré la question nationale québécoise, et c'est d'ailleurs pourquoi les Québécois et les Québécoises ont toujours ignoré le NPD.
Tranquillement, mais sûrement, à coups de profils psychologiques, de règles démocratiques variables, de sites Internet haineux et d'encouragements à la partition, l'opinion publique du reste du Canada se réfugie dans des croyances collectives où on voit apparaître de vieux relents de colonialisme envers le Québec, nous réduisant à une simple entité folklorique.
Une attitude qui se reflète de façon manifeste dans le discours du Trône du gouvernement. Jamais auparavant, dans un discours du Trône, a-t-on menacé aussi directement le Québec dans son droit à décider de son avenir.
D'autre part, le gouvernement libéral laisse tomber l'engagement solennel du référendum de reconnaître le Québec comme société distincte, après l'avoir traduit dans une motion adoptée par la Chambre des communes, après l'avoir répété dans un engagement électoral dans son deuxième livre rouge.
Ce gouvernement dilue encore la reconnaissance du peuple québécois et embrasse la définition de la déclaration de Calgary, soit le «caractère unique de la société québécoise», unique comme les saumons de la Colombie-Britannique, et sans amendements constitutionnels.
Lorsqu'on analyse en profondeur cette entente, on comprend aisément pourquoi le premier ministre et le ministre des Affaires intergouvernementales l'ont aussi bien accueillie: cela n'a jamais été aussi bas pour le Québec. Plusieurs experts s'entendent: c'est beaucoup moins que Meech et même moins que Charlottetown.
Les fédéralistes se sont plutôt rapidement réjouis des récents sondages sur cette entente. Je leur suggérerais de calmer quelque peu leurs ardeurs, car plus les Québécois connaîtront le contenu de cette entente, plus l'appui s'en ressentira. Déjà, dans le reste du Canada, des voix commencent à s'élever pour dire qu'on a trop donné au Québec. Manifestement, le scénario de Charlottetown risque fort de se reproduire.
Le seul message envoyé au Québec dans ce discours du Trône, c'est «contentez-vous du Canada à la sauce Calgary, sinon, c'est le Plan B qui va s'appliquer».
Pour défendre l'unité nationale, le gouvernement a même le culot d'affirmer le caractère bilingue de ce pays, quand la réalité, on le sait, est tout autre: un taux effarant d'assimilation des francophones hors Québec, une Constitution de ce pays qui n'a même jamais été traduite en français depuis 1982, et il y a quelques semaines, la fermeture déguisée du seul hôpital francophone de l'Ontario, l'hôpital Montfort. C'est ça, le caractère bilingue du Canada.
[Traduction]
Je n'ai que deux mots à dire au reste du Canada à propos de la rencontre des premiers ministres à Calgary. Oubliez l'entente de Calgary. Le Québec ne l'acceptera jamais.
[Français]
Le Bloc québécois n'a jamais dérogé de ses principes de base. Plus que jamais, nous jugeons que la souveraineté est nécessaire. L'impasse constitutionnelle persiste toujours et encore plus depuis la déclaration de Calgary. La principale raison d'être du Bloc québécois est claire: faire progresser le projet souverainiste tout en défendant ardemment les intérêts du Québec.
Et durant ce prochain mandat, la défense des intérêts du Québec devra passer par la défense des institutions démocratiques du Québec. En venant à Ottawa, nous savions que ce serait dur, que les échanges seraient rudes. Mais jamais n'aurions-nous pensé devoir défendre la démocratie, jamais n'aurions-nous pensé que le gouvernement fédéral descendrait aussi bas pour remettre en cause les fondements mêmes de la démocratie.
Ce meilleur pays au monde se comporte comme une puissance impériale méprisant son ignorante colonie qui a osé s'affirmer un peu trop le soir du 30 octobre 1995. Une colonie qu'il faudrait certes psychanalyser, je suppose, comme le député de Don Valley-Ouest nous l'a si bien démontré avec sa pseudo-psychanalyse du premier ministre du Québec. Plusieurs pourraient aussi rajouter que ceux qui ont voté oui ne savaient ce qu'ils faisaient, mais pour ceux qui ont voté non, tout était clair et limpide.
Pourtant, les règles qui ont primé lors de ces deux derniers référendums ont été acceptées par tous les partis, incluant le gouvernement fédéral. Un gouvernement fédéral qui a accepté Terre-Neuve, rappelons-le, dans la Confédération lors d'un vote serré lors d'un deuxième référendum. Remettre en cause ces règles maintenant dénote la mauvaise foi manifeste et surtout un profond mépris face à la quasi-victoire du oui au dernier référendum.
Mais regardons de plus près ces règles que le premier ministre tente de discréditer à l'aide de son homme de main, le ministre des Affaires intergouvernementales.
Du côté du Québec, tous les dirigeants politiques de la société québécoise s'entendent sur les règles qui doivent régir l'accession du Québec à sa pleine souveraineté. Il y a clairement un consensus québécois sur cette question, un consensus que le gouvernement fédéral refuse de reconnaître.
Ce consensus repose sur trois principes fondamentaux: en premier lieu, l'existence du peuple québécois; puis, le respect des règles démocratiques de base; et enfin, l'intégrité du territoire québécois. Tous les premiers ministres du Québec, fédéralistes ou souverainistes, de Daniel Johnson père à Robert Bourassa, se sont toujours élevés en défenseur de ces trois principes.
Pour leur part, dans leur panique post-référendaire, les fédéralistes, faute d'argument, s'attaquent au processus en tentant de le discréditer par tous les moyens possibles. Mais ce faisant, ils discréditent eux-mêmes la démocratie au Canada en méprisant les règles de base de la démocratie. Partition, renvoi à la Cour suprême, remise en question de la règle de la majorité simple, référendum pancanadien, toutes les menaces et les peurs y passent.
Sous l'impulsion du Parti réformiste, le Parti libéral du Canada a choisi la fuite vers l'avant. On remet tout en question dans le but presque avoué de faire peur aux Québécois et aux Québécoises, dans le but évident de nous dire: «Vous ne serez jamais capables, vous autres, les Québécois et les Québécoises.» On assiste à une véritable surenchère sur le dos du peuple québécois.
Bien qu'inacceptables, ces attaques contre les institutions démocratiques du Québec ne sont pas le véritable problème. Bien qu'irresponsables et dangereuses, ces menaces de partition, de charcutage du territoire québécois, ne sont pas le véritable problème. Bien qu'absurde et révoltant, ce renvoi à la Cour suprême pour nier aux Québécoises et aux Québécois le droit de décider démocratiquement de leur avenir n'est pas le véritable problème.
Le véritable problème réside dans le refus obstiné, voire aveugle, de reconnaître l'existence même du peuple québécois. Voilà le véritable problème, véritable problème qui mène à tous ces excès antidémocratiques qu'on tente de justifier hypocritement sous le couvert de la légalité et de la clarté. Voilà la cause de tout le blocage. C'est là la pierre d'achoppement de tout le discours du Parti libéral du Canada, la non-reconnaissance de l'existence du peuple québécois, un peuple différent du peuple canadien.
Ce faisant, ces ténors fédéralistes ne font qu'endosser le refus du chef de l'opposition officielle dans son entêtement à nier l'existence du peuple québécois comme un des deux peuples fondateurs du Canada de 1867.
Les Canadiens forment un peuple. Les autochtones forment des peuples. Les gens partout à travers le monde forment des peuples. Pourquoi, si c'est si bon pour les autres, ce serait si mauvais pour les Québécois et les Québécoises?
Je m'adresse plus particulièrement aux députés québécois de cette Chambre qui, au-delà de leurs fonctions, sont des citoyens et des citoyennes qui doivent croire au respect de la démocratie, et surtout en l'existence du peuple québécois.
Nous vous exhortons à refuser d'embarquer dans cette fuite vers l'avant de ce gouvernement qui refuse de reconnaître l'existence du peuple québécois et son libre choix de décider de son avenir.
En conclusion, permettez-moi quelques réflexions sur l'avenir du Canada. Le gouvernement, dans son discours du Trône, promet un avenir brillant pour le Canada du troisième millénaire. Il nous invite même à fêter par anticipation cette réussite à venir. Notre lecture de la réalité est tout autre.
Selon nous, le Canada est à la croisée des chemins. Il est placé devant l'alternative suivante: ou bien le gouvernement fédéral demeure fidèle à ses traditions de tolérance, d'ouverture et d'esprit démocratique, des traditions incarnées, entre autres, par Lester B. Pearson. Alors, le gouvernement reconnaîtra comme il se doit, au Québec, le droit de décider lui-même de son avenir, sur la base des règles démocratiques qui font partie du patrimoine commun au peuple canadien et au peuple québécois.
Par ces gestes, il redeviendra un modèle à l'échelle mondiale, avec lequel le Québec souverain pourra bâtir un véritable partenariat. Non pas un semblant de partenariat où le Québec se retrouverait le simple exécutant des décisions d'Ottawa, mais un partenariat fructueux entre deux pays souverains. C'est la voie de la raison, c'est la voie du bon sens.
Ou bien le gouvernement se laisse aller à la dérive démocratique qui commence déjà à se manifester, poussée notamment par la phobie anti-souverainiste du premier ministre et de son ministre des Affaires intergouvernementales. Et alors, la porte est grande ouverte à tous les dérapages, à tous les glissements vers la hargne, vers les intolérances de toute nature, vers des comportements qui n'ont plus rien à voir avec la démocratie. Cette voie mène au cul-de-sac.
Malheureusement, c'est pourtant cette deuxième alternative qui s'exprime le plus fortement à l'heure actuelle, à cause d'un premier ministre aveuglé et enivré par les arabesques et l'arrogance de son ministre des Affaires intergouvernementales. C'est regrettable, car j'ai la conviction profonde qu'à la longue, le peuple canadien, en qui j'ai profondément confiance, ne l'acceptera pas. Le prix politique qu'aura à payer ce gouvernement pour avoir avili ses propres institutions sera très lourd.
Les députés du Bloc québécois resteront fidèles aux traditions démocratiques du Canada de Lester B. Pearson. Nous continuerons de respecter cette Chambre même si plusieurs, du côté du gouvernement, chercheront à l'avilir, à la mettre au service de leurs obsessions anti-souverainistes, comme ils tentent actuellement de le faire avec la Cour suprême. Même s'ils s'entêtent à poursuivre dans cette voie sans issue, ceci n'empêchera pas le Québec à poursuivre sa marche vers la souveraineté, et je nous souhaite, à toutes les Québécoises et à tous les Québécois, un pays pour l'an 2000.
Qu'on modifie l'amendement en ajoutant, après les mots «programme législatif» ce qui suit:
«qui nie l'existence du peuple québécois et sa culture, qui reflète une fois de plus la vision centralisatrice du gouvernement en confirmant et en accentuant sa présence dans les champs de compétences provinciales, telles que les programmes sociaux, la santé et particulièrement l'éducation, et qui est»
Le Président: L'amendement est recevable. Nous disposons maintenant de quelques minutes pour des questions et commentaires. S'il y a des questions ou commentaires, ça va, sinon, je passe.
Puisqu'il n'y a ni question ni commentaire, je cède maintenant la parole au chef du Nouveau Parti démocratique, l'honorable députée de Halifax.
[Traduction]
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, alors que je me lève dans cette enceinte pour la toute première fois, je désire vous féliciter d'avoir été réélu à titre de président pour continuer à servir vos 300 collègues. C'est sans aucun doute un honneur, mais également une tâche intimidante.
[Français]
Je veux aussi féliciter et remercier les autres candidats à la Présidence.
[Traduction]
Je sais, monsieur le Président, qu'il est de votre devoir de créer un climat politique empreint de respect et des conditions de travail propices pour tous les députés qui ont été élus à ce grand Parlement canadien pour servir l'intérêt public. Je sais également qu'il incombe au président de se préoccuper des conditions de travail de tous les employés qui servent le Parlement sur la colline et aux alentours.
Je dois dire qu'au cours de ces dix-huit derniers mois, pendant lesquels j'ai été chef du Nouveau parti démocratique sans avoir de siège au Parlement, j'ai été le témoin frustré et horrifié de la détérioration de la situation de certaines des personnes qui nous servent ici sur la colline. En particulier, le spectacle de centaines d'agents de sécurité en lock-out me remplit de consternation.
Monsieur le Président, je sais que ce n'est pas parce que vous n'avez pas fait votre travail, mais bien parce que le gouvernement était prêt, non seulement à tolérer, mais même à former puis à embaucher des travailleurs de remplacement à la place d'employés qui gagnaient tout juste le salaire minimum et qui, bientôt, atteindront le premier anniversaire de leur lock-out les privant de leur emploi sur la colline du Parlement.
J'espère que le fait que ces gardes de sécurité seraient sur le point de considérer une nouvelle convention est un signe d'amélioration. J'espère qu'à l'approche de cet anniversaire de lock-out, nous pourrons plutôt célébrer un règlement honnête de la situation pour ces travailleurs et leur famille.
Je suis heureuse d'avoir enfin pris place à la Chambre des communes et je suis heureuse aussi d'être entourée de 20 collègues néo-démocrates. Il est vrai que les trois quarts du caucus, moi y compris, sont nouveaux ici. À ce titre, monsieur le Président, nous nous tournerons souvent vers vous pour des directives et des conseils. J'espère que nous pourrons compter sur votre patience lors de notre apprentissage des règles et procédures de la Chambre.
En regardant qui se trouve ici, cet après-midi, je sais qu'il manque une personne qui m'était chère, une personne très spéciale, non seulement pour les néo-démocrates, mais pour tous les parlementaires, passés et présents. Je suis triste que Stanley Knowles n'ait pas vécu jusqu'ici et ne soit pas en mesure de voir le retour à la Chambre des communes du parti qu'il a aidé à fonder. C'est pour nous une célébration à la fois douce et amère.
Nombre d'entre nous ont appris la nouvelle de la mort de Stanley alors que nous arrivions à Ottawa pour notre premier caucus, en juin. Nous regretterons tous beaucoup Stanley Knowles, sa chaleur, son humour, son attachement indéfectible à la justice et à l'égalité, et sa connaissance inégalée des règles et procédures de cette assemblée.
Nous nous souvenons tous que Stanley s'est battu toute sa vie pour que les travailleurs aient des pensions décentes. Stanley ne se serait jamais laissé berner par des euphémismes comme «prestations pour personnes âgées» qui voudraient nous faire croire qu'une réduction massive des prestations de pension sont une amélioration. Nous nous engageons aujourd'hui à honorer la mémoire de Stanley en combattant toute nouvelle détérioration de la protection de nos personnes âgées. Je profite de l'occasion pour rendre hommage à l'extraordinaire contribution de Stanley Knowles à la Chambre des communes, à mon parti et à la population du Canada.
Le jour des funérailles de Stanley Knowles, un de ses amis de longue date s'est présenté à mon bureau. Il venait me porter deux livres écrits en collaboration par Stanley et mon père, qui était venu travailler à Ottawa à titre de premier recherchiste du caucus du CCF, au début des années 40. Ces livres présentaient une formule plus démocratique pour le Canada.
Je me sens plus humble après avoir pris connaissance de ces livres, et j'admets que cela m'a motivée à prendre toute la place qui me revient à la Chambre des communes, à continuer cette lutte pour un Canada plus démocratique, plus social-démocratique. Je suis née à Ottawa, parce que mes parents avaient décidé de venir s'installer ici, pour participer à ce mouvement social-démocratique. Mais c'est bien sûr à Halifax que j'ai passé la plus grande partie de ma vie, et Halifax est donc la circonscription que j'ai le privilège de représenter ici, au Parlement du Canada. Je me permets ici de prendre un moment pour parler à la Chambre de ma circonscription.
On dit souvent de Halifax que c'est un peu une circonscription baromètre. Je dois dire que je ne l'ai jamais vraiment cru avant les élections du 2 juin. J'ai su que c'était bien une circonscription baromètre quand j'ai appris que les électeurs des quatre circonscriptions fédérales de la région de Halifax avaient élu des néo-démocrates pour les représenter à la prochaine législature.
Halifax est une ville moderne en pleine croissance, mais elle est encore caractérisée par la générosité et l'ouverture des petites villes agricoles ou des villages de pêcheurs. Nos traditions maritimes sont bien connues, ainsi que le courage de nos militaires, hommes et femmes, qui servent à l'étranger, ou l'ingéniosité de nos forces armées et de leur personnel civil, pour relever de nouveaux défis.
Moins connue, peut-être, est notre riche diversité ethnique sur le plan culturel à Halifax, tout comme dans l'ensemble de la Nouvelle-Écosse. Nous redécouvrons avec passion l'histoire des autochtones de la Nouvelle-Écosse, les Micmacs, celle de notre population noire, et notamment la fière collectivité qu'était Africville, celle des communautés acadiennes et leur vaillante lutte pour le maintien de leur langue et de leur culture, celle des nombreuses personnes qui sont entrées au Canada en passant par le port de Halifax, dont un grand nombre par le quai 21, certaines s'installant à Halifax même et d'autres poursuivant leur route. Tous ces gens ont choisi le Canada comme patrie d'adoption.
Cette diversité—je tiens à le souligner—se reflète très bien dans le caucus que j'aurai l'honneur de diriger au cours de la présente législature.
[Français]
Il est composé, notamment, des premiers députés acadiens à faire partie d'un caucus néo-démocrate et d'un député autochtone des Prairies.
[Traduction]
Nous comptons le premier député afro-canadien de la région de l'Atlantique à siéger au Parlement, plusieurs députés issus de familles immigrées de fraîche date et, j'ajouterai, le plus grand nombre de femmes à occuper un poste au sein du caucus néo-démocrate de toute l'histoire de notre parti. Mon prédécesseur, la députée de Yukon, a servi à la Chambre avec dignité et dévouement dans des circonstances autrement plus difficiles puisqu'elle était la seule femme dans un caucus qui comptait neuf membres. Je pense que l'on peut dire que le seul caucus qui ait jamais failli atteindre l'équilibre des sexes au Parlement, c'est bien le précédent caucus conservateur. Mais, à ma connaissance, personne ne recommande pareille formule d'équilibre des sexes.
Ces dernières années, les Canadiens ont été témoins d'une explosion de l'expression culturelle et de réalisations culturelles dans ma province, la Nouvelle-Écosse, qu'il s'agisse de musique acadienne et celtique, de danse écossaise, d'humour atlantique et que sais-je encore. Qui d'entre nous n'aime pas, non sans la redouter, l'émission « This Hour has 22 Minutes», nos merveilleux arts visuels, nos films primés, notre théâtre dynamique et nos remarquables dramaturges, telles ma collègue, la députée de Dartmouth, ou de superbes écrivains comme Anne-Marie Macdonald, un des fleurons du Cap-Breton, auteure du roman épique Fall on Your Knees. Permettez-moi de citer un de mes passages préférés: «Il n'y a rien qui soit aussi bénéfique pour la lucidité des idées que la vue de la mer par temps clair. Cela aère l'esprit, calme les nerfs et purge l'âme.» C'est peut-être cette inspiration née de l'océan qui explique l'éruption de la découverte de soi à laquelle on assiste ces temps-ci dans la région de l'Atlantique. Maintenant, cette paisible révolution de la région de l'Atlantique crée une onde de choc dans le milieu politique.
Mes collègues et moi-même sommes conscients de l'ampleur de notre responsabilité puisque notre mandat émane des souffrances et de l'espoir. Je tiens à dire à mes électeurs et à tous les Canadiens, aux Canadiens de l'Atlantique, que nous ne les laisserons pas tomber au cours de la présente législature.
S'il est une réalité que les Canadiens comprennent et qui a été cyniquement oubliée dans ce discours du Trône, c'est qu'ils sont beaucoup trop nombreux à avoir vu leur situation se détériorer désespérément. Les emplois disparaissent, la qualité de vie diminue, les soins de santé et l'éducation dépérissent, des institutions nationales comme Radio-Canada sont assaillies, on accorde des exemptions fiscales pour les repas d'affaires, mais on augmente les taxes sur les biens essentiels des familles et enfin, l'accord multilatéral sur les investissements menace notre souveraineté nationale.
Il est agréable de constater que les premiers ministres provinciaux et les leaders territoriaux se sont engagés à honorer la déclaration sur l'unité faite à Calgary au début du mois. Cependant, je dois ajouter que le Canada dépasse largement l'envergure d'une Constitution et que la notion d'égalité entre les provinces est beaucoup moins cruciale que l'égalité fondamentale entre les Canadiens, c'est-à-dire leur égalité à titre de citoyens, leur égalité devant la loi, l'égalité d'accès aux services et l'égalité des chances pour tous. Aggraver nos inégalités ne servira qu'à réjouir ceux qui cherchent à nous diviser.
[Français]
Pour capter les coeurs et l'esprit des gens du Québec, nous devons prouver que le Canada peut bien fonctionner, encore une fois; que le Canada peut, encore une fois, devenir un pays où règnent la sécurité économique, des communautés solides, des occasions intéressantes et une véritable charité humaine.
Ce Parlement doit être axé sur la reconstruction de ce Canada. Sinon, le prochain Parlement risque d'être axé sur un pays beaucoup plus petit et beaucoup plus triste.
[Traduction]
Si le gouvernement est disposé à s'attaquer à toute la question de l'unité, au lieu de se concentrer sur le programme étroit de ceux qui cherchent à diviser le Canada, nous travaillerons de concert avec lui pour atteindre les objectifs que nous partageons, soit la compassion, la solidarité et l'unité. Cependant, pour ce faire, le gouvernement doit repenser sérieusement ses orientations et renouveler son engagement à respecter les véritables priorités des Canadiens.
Au cours de la campagne électorale, nous avions promis que pas une seule semaine ne se passerait à la Chambre des communes sans que les députés néo-démocrates luttent en faveur de la priorité urgente des Canadiens, notamment la création d'emplois. Je souhaite seulement que le premier ministre consacrera autant d'attention à la création d'emplois qu'il en consacre à la nomination de sénateurs.
Examinons les faits: pendant 82 mois consécutifs, le taux de chômage a dépassé 9 p. 100 et 1,4 million d'enfants ont vécu dans la pauvreté. La protection offerte par le régime d'assurance-chômage est tombée à un niveau inférieur à celle de l'État de l'Alabama, ce qui entraîne d'immenses privations, tandis que la caisse d'assurance-chômage enregistre un excédent énorme et croissant. Les personnes qui ont un emploi souffrent constamment d'insécurité car, de plus en plus, l'économie est faite d'emplois à temps partiel, mal rémunérés et sans avantages sociaux.
Les femmes sont les plus vulnérables. Il n'est pas surprenant que le gouvernement ait abandonné les femmes. La première promesse du livre rouge de 1993 qu'il a violée, c'est celle de la création d'un programme national de garderies. Les familles et les enfants du Canada attendent encore.
Voyons comment le gouvernement traite ses propres fonctionnaires féminins. Il refuse encore d'honorer la dette de 2 milliards de dollars qu'il a à l'égard de 80 000 Canadiennes au titre de l'équité en matière d'emploi. Les collectivités autochtones de tout le pays ont un besoin criant de développement économique et d'emplois et pendant ce temps le gouvernement fait traîner la mise en oeuvre des recommandations de la Commission royale.
Un taux réel de chômage de 25 p. 100 chez les jeunes mine l'avenir de notre pays. Les libéraux ont fait beaucoup de belles promesses, mais le fait est qu'il y a, à l'heure actuelle, 20 000 jeunes de plus au chômage qu'à la même époque l'année dernière.
Le programme qu'on a annoncé à nouveau dans le discours du Trône d'hier n'aura aucune incidence positive pour les 410 000 jeunes chômeurs.
[Français]
Toute une génération de nos jeunes terminent leurs études sans être récompensés avec une offre d'emploi décente, mais ils se retrouvent avec une dette massive de 25 000 $ en moyenne.
[Traduction]
Que se passe-t-il vraiment avec l'assurance-maladie? La bonne nouvelle, c'est qu'un système de soins de santé à deux vitesses n'est plus une menace au Canada et la mauvaise nouvelle, c'est que ce système est déjà une réalité. On doit cela aux compressions massives du ministre des Finances, qui ne sont en rien annulées par les belles annonces creuses d'hier.
Qui en fait les frais? Les familles qui sont frappées par la maladie et surtout, une fois de plus, les femmes; en effet, ceux qui prodiguent les soins de santé sont maintenant, pour la plupart, des travailleurs occasionnels, les auxiliaires familiaux et les bénévoles étant forcés de prendre la relève tandis qu'on sabre dans les services.
Alors que les gens souffrent, que les familles éprouvent toutes sortes de difficultés et que la vie des patients est en danger, pourquoi n'y a-t-il pas de débat sur ce qu'on doit faire des dividendes financiers?
Les néo-démocrates lutteront sans relâche afin que le gouvernement s'engage véritablement à améliorer les soins de santé, qu'il ne s'en tienne pas à de vagues lieux communs, mais qu'il s'engage sérieusement à offrir des soins à domicile complets de même qu'un régime d'assurance-médicaments et qu'il rejette de manière non équivoque le régime de soins de santé à deux niveaux en vigueur aux États-Unis.
Où va le gouvernement dans le dossier environnemental? À en juger par le discours du Trône d'hier, la réponse succincte est nulle part. L'espèce la plus menacée au Canada est celle des politiciens libéraux fédéraux désireux de prendre leurs responsabilités pour protéger notre environnement naturel.
Il convient toutefois d'être justes. Il y a un engagement gouvernemental ferme dont nous nous réjouissons. Je veux rendre à César ce qui revient à César. Le Canada a joué un rôle capital dans l'adoption de la résolution visant à éliminer les stocks de mines terrestres à l'échelle mondiale.
Je pense que le gouvernement aura l'humilité de reconnaître le travail accompli par de nombreux Canadiens qui ont exercé des pressions sur les autorités gouvernementales de notre pays et d'ailleurs et qui, partant, ont été à l'origine de cet important succès. Je sais que tous les parlementaires se joindront à moi pour souligner la contribution exceptionnelle de Diana, la regrettée princesse de Galles, aux efforts du Canada.
Le traité qui sera signé ici à Ottawa constituera un légitime hommage à sa mémoire et à ce qu'elle nous a légué. Tous les Canadiens peuvent être fiers de cette réalisation. Mon parti s'engage aujourd'hui à poursuivre les objectifs du traité et à débarrasser le monde de toutes les armes de guerre inhumaines.
Le Président: J'imagine que le chef du Nouveau Parti démocratique est en train de récapituler.
Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, je voudrais demander le consentement unanime pour conclure. Je sais que le temps est limité et je respecte cela.
Voilà les valeurs qui sont chères à mon parti, des valeurs que nous défendrons au cours de la prochaine législature, pour donner à nos enfants le meilleur départ possible dans la vie: l'éducation et des perspectives d'emploi pour nos jeunes, des pensions raisonnables pour nos aînés, un régime d'assurance-maladie universel, l'éradication systématique de la pauvreté, un environnement sain pour les futures générations ainsi que des collectivités dynamiques et sûres.
Quiconque a des doutes sur le puissant esprit de partage qui anime les collectivités canadiennes n'a qu'à se souvenir des inondations qui ont frappé un si grand nombre de citoyens du Saguenay durant l'été de 1996, et d'autres du sud du Manitoba, le printemps dernier. Il suffit de se souvenir des objectifs communs poursuivis dans ces collectivités et de la vague de solidarité qui a déferlé sur notre pays, dans un élan de compassion et de coopération.
Les membres de mon caucus invitent le gouvernement à honorer cet esprit, à s'en inspirer, à le perpétuer et à bâtir le pays que le Canada peut certainement devenir.
Des voix: Bravo!
L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, cela me rappelle la première journée de mon retour à la Chambre. Je me disais que j'étais entouré de progressistes conservateurs. Quel contraste avec la dernière législature.
Nous sommes très heureux d'être de retour au Parlement et de retrouver la voix que nous avions perdue ces dernières années.
[Français]
Je veux, monsieur le Président, commencer par vous offrir mes sincères félicitations, non seulement de ma part, mais de la part de mon caucus, le Parti progressiste-conservateur, et vous réitérer notre collaboration dans l'exécution de vos fonctions qui sont très importantes pour le fonctionnement de la Chambre.
Je veux également offrir mes félicitations aux chefs des autres partis qui se sont fait réélire chacun dans leur circonscription et qui auront l'occasion de croiser le fer avec l'ensemble des députés dans ce Parlement.
Je veux aussi ajouter mes mots de chaleureuses félicitations à ceux et celles qui se sont fait élire et réélire, en particulier aux nouveaux parlementaires, à ceux et celles qui arrivent ici pour la première fois et qui vont vivre une expérience extraordinaire.
Je ne veux pas manquer l'occasion de remercier du fond du coeur les gens de la circonscription de Sherbrooke, Fleurimont et Lennoxville qui m'ont réélu pour la quatrième fois. Je dois vous dire que je suis très très endetté envers ces gens. Ce sont des gens extraordinaires. J'ai eu le grand privilège de les représenter depuis plusieurs années. J'essaie, et je pense que je reflète un peu ce qu'ils sont, et eux reflètent beaucoup ce que je représente également.
À ces gens-là, je redis mes remerciements très très sincères et mon intention de les servir avec beaucoup de dévouement et d'énergie.
[Traduction]
Une campagne électorale donne l'occasion aux habitants d'un pays de s'arrêter pour réfléchir, examiner ce qui a été fait et songer à ce qui s'en vient. C'est précisément ce que la dernière campagne nous a permis de faire. Au cours des trois ans et demi ou quatre ans qui ont précédé, les membres de mon parti et moi-même en avons appris beaucoup sur le Canada, sur nos possibilités et sur notre volonté d'aller de l'avant.
Depuis deux ans et au cours de la période électorale, plusieurs choses m'ont frappé au sujet de notre pays et il vaut la peine que je les mentionne aujourd'hui. Au-delà des murs du Parlement, au-delà des lignes de parti, au-delà des discours, le Canada présente de nombreux avantages dont il faut parler. Cela a toujours été le cas, d'ailleurs.
Ce qui pourrait étonner certains députés, je voudrais prendre un instant pour parler des succès que nous remportons face à nos déficits et nos dettes.
Il existe un solide consensus au Canada voulant que les gouvernements équilibrent leurs budgets et établissent leurs priorités comme il faut. Ce consensus est si fort que les néo-démocrates de la Saskatchewan, les libéraux des provinces de l'Atlantique, le Parti québécois à Québec et même, qui l'eût cru, le Parti libéral du Canada, disent d'une même voix, que nous devons vraiment équilibrer nos budgets.
Ils ont beau vouloir refaire l'histoire et dire que tout est la faute du gouvernement précédent, qu'ils n'ont rien eu à voir avec ces problèmes, ils oublient de mentionner, tant ils ont une mémoire sélective, qu'ils nous avaient légué, à notre arrivée au pouvoir en 1984, une dette nationale qui avait augmenté d'au moins 1 000 p. 100 sous l'administration du gouvernement libéral dont le premier ministre actuel faisait partie. Mais ils ont une mémoire bien sélective.
Notre pays affiche également une excellente performance au chapitre du commerce international. Dieu merci, nous avons conclu des accords commerciaux. Après avoir fait campagne sur le thème du libre-échange et remporté les élections de 1988, nous avons en effet conclu l'Accord de libre-échange qui a permis à notre pays d'accroître de 100 p. 100 ses exportations de marchandises aux États-Unis.
Nous nous sommes battus et avons conclu l'Accord de libre-échange nord-américain. Se rappellent-ils que ceux qui siègent maintenant sur les banquettes ministérielles sont les mêmes qui nous ont combattus avec acharnement à propos de l'Accord de libre-échange? Or, que voyons-nous aujourd'hui? Un premier ministre décidé à voyager à l'étranger pour accroître nos échanges commerciaux avec d'autres pays.
Il est maintenant tout fier de parler de ses nouveaux « amigos», au Chili. Il veut conclure des accords avec l'Argentine. Il veut en conclure avec Israël. Il n'en a jamais assez. Et pourtant, ils nous ont livré une lutte acharnée sur cette question.
Il est quand même bon de savoir que, si ce n'avait été des accords commerciaux que nous avons conclus et pour lesquels nous nous sommes battus, l'économie canadienne n'aurait pas connu de croissance. Notre économie intérieure est mal en point depuis quatre ans. Sous l'administration du premier ministre actuel, l'économie nationale du Canada a été mal en point et nous aurions subi une récession si ce n'avait été des accords commerciaux que nous avons signés et pour lesquels nous nous sommes battus en 1988 et en 1993.
Il fallait voir le premier ministre et les libéraux se lever au cours de la période des questions pour applaudir le bilan éclatant du gouvernement. Voici un gouvernement qui a connu la plus longue période de chômage élevé au Canada—82 mois d'affilée d'un chômage supérieur à 9 p. 100—depuis la dépression des années 30. Voilà ce qu'ils applaudissaient cet après-midi.
Qu'applaudissaient-ils encore? Il y a aujourd'hui au Canada plus d'enfants pauvres que lorsque les libéraux ont pris le pouvoir. Quoi d'autre encore? Par la faute du gouvernement, les Canadiens sont plus pauvres aujourd'hui qu'en 1993.
Les Canadiens ont vu leur revenu diminuer de 1,3 p. 100. Et pourtant, les libéraux, le ministre des Finances et le premier ministre lui-même se plaisent à citer l'OCDE: «Notre situation est meilleure que celle de tel ou tel autre pays». Peut-être devraient-ils aller voir ce qui se passe dans le Canada atlantique. Peut-être devraient-ils oublier un peu l'OCDE, Paris, la Suède ou la Norvège.
S'ils passaient un peu plus de temps dans le Canada atlantique et dans l'Ouest, ils comprendraient peut-être pourquoi si peu de Canadiens applaudissent lorsqu'ils parlent de leur bilan.
Les Canadiens ont aussi vu sabrer unilatéralement et sans consultation les fonds consacrés aux soins de santé et aux programmes sociaux. Une réduction sans précédent de 40 p. 100 du financement. Y a-t-il eu la moindre consultation?
À propos, que faisait-on alors de la grande notion d'un partenariat redécouvert?
Au cours de la campagne électorale, les libéraux ont dû revenir sur leur décision à l'égard des soins de santé parce que le système canadien a des ratés. Le système canadien d'assurance maladie est mal en point. Il est malade. Sa survie est menacée par les décisions du gouvernement et du premier ministre et par un manque de leadership. Les libéraux devront en répondre au cours de la présente législature.
Le discours du Trône donnait l'occasion au gouvernement de dire sur quoi il veut mettre l'accent au cours du prochain siècle, cette nouvelle ère qu'il se plaît à monter en épingle. En fait, vous vous souviendrez, monsieur le Président, que nous avons tenu une campagne électorale—et c'est une première, à ma connaissance—pour permettre au premier ministre du pays de rédiger le discours du Trône. «J'ai besoin de tout l'été», a-t-il dit. Pourquoi le premier ministre déclenche-t-il des élections au cours de la troisième année de notre mandat? Parce qu'il doit rédiger un discours du Trône. Je ne sais pas qui a rédigé le discours du Trône, mais j'espère que le rédacteur est payé au nombre de mots et non d'idées.
Nous nous attendions à un programme pour le pays. Qu'avons-nous eu à la place? Les voeux pieux habituels. Combien de fois faut-il redécouvrir le problème du chômage chez les jeunes? Les libéraux viennent de découvrir qu'il y a du chômage chez les jeunes et se demandent pourquoi ils n'y ont pas pensé avant. Discours après discours, budget après budget, ils nous servent les mêmes mots insignifiants et ne proposent rien de concret sauf une mesure annoncée il y a quelques jours, soit un programme de stages de 90 millions de dollars pour 3 000 jeunes Canadiens.
Environ un demi-million de jeunes Canadiens sont au chômage. Je crois que leur nombre dépasse les 400 000. Que les parents de jeunes chômeurs peuvent leur dire de prendre espoir, car dans 136 ans, à ce rythme, le gouvernement libéral leur procurera un stage à chacun d'eux. Quelle grande initiative du gouvernement libéral.
Nous nous attendions à tout le moins à ce que le gouvernement prenne acte du message lancé pendant la campagne électorale, qu'il dise: «Nous avons compris. Nous avons entendu.» Plusieurs messages ont été lancés durant la campagne. Le premier ministre et moi sommes d'accord sur au moins l'un d'eux. En effet, le premier ministre n'a pas été reporté au pouvoir avec la majorité qu'il espérait. Il n'a certainement pas obtenu un vaste appui dans toutes les régions du pays.
[Français]
S'il y a une chose que le premier ministre et le gouvernement libéral ont dû comprendre, c'est qu'ils n'ont certainement pas reçu le mandat qu'ils espéraient et dont ils parlaient tant au début de la campagne électorale. Il y a donc un message qui leur a été envoyé.
Sauf qu'il faut se poser la question suivante: est-ce que le message a été compris? Pensez-vous, à la lecture du discours du Trône, que ce gouvernement a accepté et reconnu le message envoyé par la population canadienne? J'ai cherché dans le discours du Trône et je ne peux faire autrement que de conclure que la réponse est non. Ils n'ont rien compris. La preuve, c'est qu'on s'attendait à un plan d'action national, un plan qui établirait des priorités, qui allait nous dire de quelle façon on allait entrer dans ce nouveau siècle.
Qu'a-t-on eu à la place? On a eu droit à un gouvernement qui vient se repentir, qui vient nous annoncer qu'il réinvestira de l'argent dans les programmes. Les députés voudront le remarquer, dans quels programmes le gouvernement réinvestira-t-il? Imaginez-vous, il réinvestira dans la santé, après l'avoir coupée de 35 p. 100. Il réinvestira dans les programmes d'emplois d'été pour étudiants, après les avoir coupés. On réinvestira dans la culture, après avoir coupé. On réinvestira dans l'éducation postsecondaire, qu'ils ont coupée.
Il y a quelques minutes, on a vu un spectacle extraordinaire. J'étais ici en 1995, et lors du budget de 1995, le ministre des Finances s'est levé de son siège et a annoncé qu'il coupait le programme de bourses à l'excellence pour les étudiants. Cela se passait en 1995. Et savez-vous ce qui est arrivé, monsieur le Président? Je vois la députée de Rimouski, qui était là également, et le chef du Bloc québécois. Ils se sont tous levés, comme cet après-midi, et ils ont tous applaudi le ministre des Finances. Cet après-midi, le premier ministre annonce un nouveau programme de bourses. Devinez quoi? Ils se sont tous levés en même temps et ils ont tous applaudi encore une fois.
Je les reconnais bien. Nous, on n'applaudissait pas, parce que cela nous déchirait le coeur de voir qu'un bon programme comme celui-là était annulé. Mais qu'est-ce qui a changé entre-temps? Il y a des milliers d'étudiants qui se sont fait couper un support financier essentiel pour poursuivre leurs études. Pourquoi? Parce que le gouvernement ne voyait pas assez loin, pas plus loin que le bout de son nez, et n'était pas capable de fixer ses propres priorités.
Ce qui n'a pas changé, c'est l'asservissement des députés libéraux d'arrière-ban qui se lèvent, qui applaudissent leur ministre des Finances, leur premier ministre, et qui vont encore les applaudir demain, après demain et la journée d'après.
Ce qui explique pourquoi dans l'Atlantique, justement, il y en avait 31 sur 32 lors de la dernière Législature et que les gens de l'Atlantique ont dit: «On en a assez d'entendre la même chanson, on a le goût d'avoir des gens qui vont parler pour nous, incluant les députés du Parti progressiste-conservateur qui sont dans le caucus progressiste-conservateur». Ils vont parler, eux, pour les gens de l'Atlantique puisqu'on a eu le silence pendant les dernières années.
C'est ce même gouvernement qui, maintenant, annonce qu'il va réinvestir, qui parle de partenariat. Mais s'il comprend le sens du vrai partenariat, qu'attend-il, ce gouvernement, pour faire un partenariat dans le domaine de la santé, pour faire de la cogestion de notre fédération?
[Traduction]
Dans le domaine de l'assurance maladie, le gouvernement a eu l'occasion de montrer qu'il favorisait le partenariat plutôt que les mesures unilatérales. Il n'est pas trop tard. Le gouvernement pourrait encore discuter avec les provinces afin de s'entendre sur des normes nationales dans le domaine de l'assurance maladie. Rien dans la Constitution ne dit que les normes doivent être établies par Ottawa et appliquées par Ottawa.
Permettez-moi de dire un secret au premier ministre. Sa position sur l'assurance maladie est insoutenable. Il ne peut pas imposer aux provinces des réductions de 35 p. 100 et leur dire ensuite que c'est lui qui prendra les décisions. Cela ne fonctionnera pas. Le pire dans cela, ce n'est pas que le gouvernement du premier ministre ou que les gouvernements provinciaux souffriront de cette situation. Ce sont les Canadiens dans les salles d'attente et sur les listes d'attente qui souffrent du manque de leadership du premier ministre dans ce dossier. Ce sont eux qui paient la note.
Nous sommes impatients de voir ce partenariat dont parle le premier ministre. Nous espérons que, cette fois, ce mot aura une plus grande signification que la dernière fois qu'il a été prononcé. Il en est de même pour la pauvreté chez les enfants ou encore pour la politique concernant les jeunes. Le premier ministre nous a invité à lui donner des idées sur ce que nous ferions pour les jeunes Canadiens. Je l'invite aujourd'hui à regarder le programme que nous avons présenté durant la dernière campagne électorale.
Nous parlions d'une politique pour les jeunes avec un objectif clair, c'est-à-dire que chaque jeune Canadien devrait être soit à l'école, en formation, au travail ou en train de faire du service communautaire. Le gouvernement national peut faire quelque chose d'utile à cet égard. Vous, monsieur, avec le pouvoir de changer la façon dont le régime d'assurance-emploi s'applique aux jeunes. Vous n'avez pas besoin de demander la permission à qui que ce soit. Tout ce que vous avez à faire, c'est travailler avec les provinces...
Le vive-président: À l'ordre. Je sais que le député a beaucoup d'expérience à la Chambre. Je sais qu'il voulait s'adresser à moi. Je l'invite à le faire, en tout temps.
L'hon. Jean J. Charest: Je serai très heureux de m'adresser à la présidence, monsieur le Président.
Comme je le disais, le premier ministre a l'occasion d'agir. Nous espérons qu'il est sincère lorsqu'il se dit prêt à accepter les conseils. Il peut modifier le régime d'assurance-emploi et prendre la bonne voie. Il n'a pas besoin de s'immiscer dans des domaines de compétence provinciale. Nous devrions tous reconnaître d'emblée que l'éducation et la formation relèvent des provinces, mais que le premier ministre exerce un certain contrôle. Le contrôle de l'assurance-emploi a des répercussions sur les décisions que prennent les jeunes dans le domaine de l'éducation et de la formation. Le régime d'assurance-emploi doit être mis au service des objectifs que nous visons dans le domaine de l'éducation et de la formation.
La même chose est vraie pour ce qui est des questions touchant les autochtones du Canada. Je suis heureux de constater que, dans le discours du Trône, on a mentionné le rapport de la commission royale d'enquête. Je n'approuve pas tout ce que contient ce rapport, mais le Canada ne peut continuer de nier un sujet qui comptera parmi les dossiers les plus importants au cours du prochain siècle et par lequel nos valeurs seront mises à l'épreuve.
La partie la plus décevante a trait aux emplois et aux impôts. Le gouvernement aurait pu faire quelque chose. Il aurait pu faire savoir qu'il avait tiré des enseignements des 30 dernières années. Mais qu'est-ce que le gouvernement libéral nous dit maintenant que nous sommes devant la perspective d'un excédent? Il nous dit qu'il a de l'argent, que nous sommes arrivés à la terre promise, que le bon temps est revenu. Le premier ministre et son gouvernement disent qu'ils vont dépenser cet argent parce qu'ils n'ont tiré aucune leçon des 30 dernières années.
Le gouvernement fonctionne en suivant quelques principes constants. Le premier, c'est que, lorsqu'il y a un problème, le gouvernement doit intervenir. Le deuxième, c'est que si un gouvernement doit intervenir, ce doit être le gouvernement fédéral: «C'est nous qui devons intervenir et personne d'autre.» Le troisième principe, c'est que s'il y a un problème, il faut dépenser de l'argent. C'est la philosophie libérale. C'est plutôt bien tourné. Je suppose qu'il est écrit sur la porte du premier ministre: «Si vous envoyez de l'argent, nous le dépenserons.» C'est comme cela que les choses se passent.
Parlons du véritable bilan du gouvernement, ce même bilan dont le gouvernement se félicitait cet après-midi. Le pays qui nous sert vraiment de point de comparaison se trouve au sud de nos frontières. Ce n'est pas la référence parfaite, mais le premier ministre pourrait peut-être nous expliquer pourquoi le taux de chômage est moitié moindre aux États-Unis de ce qu'il est au Canada. Comment se fait-il que, aux États-Unis, le revenu réel disponible a augmenté de 11 p. 100 au cours des deux dernières années, alors qu'il a chuté de 1,6 p. 100 pendant que les libéraux étaient au pouvoir? Les libéraux vont-ils faire porter le blâme aux conservateurs? Bien sûr. Quand quelque chose ne tourne pas rond avec le gouvernement actuel, c'est la faute du gouvernement précédent.
S'il y a création d'emploi, si les livres balancent, si les taux d'intérêts sont bas et si l'inflation est faible, c'est grâce aux libéraux. C'est du moins ce que les libéraux voudraient faire avaler aux Canadiens. Je crois qu'ils verront bien que tout cela ne veut pas dire grand-chose.
Le gouvernement aurait pu organiser les choses différemment pour le pays. Pour ce qui est des impôts, le gouvernement ne devrait pas aller de l'avant avec cette façon éhontée qu'il a de dépouiller les Canadiens qui travaillent, les travailleurs à faible revenu, en utilisant le fonds d'assurance-emploi pour réduire le déficit.
Aujourd'hui, j'ai posé la question à la Chambre: «Oui ou non, utilise-t-on la caisse de l'assurance-emploi pour réduire le déficit?» Impossible d'obtenir une réponse directe, mais on connaît la vraie réponse. Le gouvernement rembourse le déficit sur le dos des travailleurs, des petites entreprises et des chômeurs, en particulier des jeunes chômeurs du Canada. Si le gouvernement voulait vraiment faire quelque chose aujourd'hui, il pourrait réduire les cotisations de 25 p. 100.
Le gouvernement écoute-t-il? Non, il chahute. Je ne suis peut-être pas convaincant. Peut-être suis-je trop sectaire. Les députés pensent-ils que la Chambre de commerce du Canada est trop sectaire? Pensent-ils que le Conseil du patronat est trop sectaire? Je ne le crois pas. J'espère que le gouvernement finira par apprendre.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je demande que le chef du Parti conservateur se voie accorder le même privilège que celui dont a bénéficié le chef du Nouveau Parti démocratique et qu'avec le consentement unanime de la Chambre, il puisse terminer ses observations.
Le vice-président: Y a-t-il unanimité pour que le député termine ses observations?
Des voix: D'accord.
L'hon. Jean J. Charest: Monsieur le Président, le gouvernement parle d'impôts. Il parle de commerce. Il ne cesse de parler de rétablir l'équilibre de la fédération.
[Français]
On va rééquilibrer les responsabilités dans la fédération. Et on le sait, le chef de l'opposition officielle veut faire une décentralisation massive. Sauf qu'il y a des domaines aussi où on doit renforcer les pouvoirs du gouvernement national, parce que vider le gouvernement fédéral de toutes ses responsabilités, ce n'est pas cela la réponse pour garder le pays uni.
[Traduction]
Si le gouvernement national était convaincu qu'il faut vraiment rééquilibrer la fédération, il parlerait également des secteurs où il devrait renforcer ses pouvoirs. Qu'on le croie ou non, mon parti, celui qui a fondé le pays, le parti de sir John A. Macdonald, le parti qui était à la Chambre pendant les bonnes comme les mauvaises périodes, sait également qu'un gouvernement central fort dans les secteurs où il devrait être fort est le meilleur gage d'unité de notre pays.
Encore une fois, je donnerai un conseil à mon collègue. Si le gouvernement croyait véritablement à la puissance du leadership, il ferait preuve d'un peu de leadership sur le chapitre du commerce interprovincial. Comment se fait-il que les échanges sont plus libres entre le Canada et les États-Unis et entre le Canada et le Mexique qu'entre le Manitoba et la Nouvelle-Écosse? Les échanges sont plus libres entre l'Ontario et l'Ohio qu'entre les provinces canadiennes.
Le premier ministre effectuera un autre voyage avec Équipe Canada en janvier. Puis-je lui faire une humble suggestion? Lorsqu'il reviendra au Canada, pourquoi ne réunit-il pas les premiers ministres et n'organise-t-il pas une tournée d'Équipe Canada dans notre pays?
Le gouvernement fédéral peut fixer aux provinces un délai d'un an pour conclure avec lui un accord sur le commerce interprovincial prévoyant un mécanisme de règlement des différends. Qui s'y opposerait? Certainement pas le gouvernement du Québec qui, au référendum de 1995, a défendu, sous le slogan du partenariat, l'union économique avec le Canada. Ce ne sont sûrement pas les signataires des accords commerciaux avec les États-Unis et le Mexique, qui prévoient aussi des mécanismes de règlement des différends. Pourquoi ne pourrions-nous pas avoir un tel accord au Canada et créer des emplois en même temps? C'est aussi une des raisons qui justifient fortement ce leadership. Voilà donc certaines des idées auxquelles nous croyons.
Dans le domaine de l'assurance maladie, nous sommes d'avis que le gouvernement doit agir très rapidement. Nous espérons qu'il profitera de la conférence des premiers ministres pour proposer un pacte en matière d'assurance maladie et reconnaître que le programme en ce domaine au Canada ne sera pas un programme national tant que le gouvernement national ne jouera pas son rôle. Il est facile de porter toutes sortes d'accusations contre les provinces. Mais elles seront là et les Canadiens seront confrontés à l'incertitude en matière d'assurance maladie jusqu'à ce que le gouvernement national manifeste un véritable leadership, et non un refus obstiné. Ce leadership en matière d'assurance maladie inclut la reconnaissance de normes nationales, un pacte, un accord avec les provinces visant l'application des normes et aussi un mécanisme de règlement des différends.
Dans le domaine de l'éducation et de la formation, le gouvernement devrait montrer la voie en faisant preuve d'un certain leadership pour ce qui est des examens de sciences et de mathématiques, en installant des systèmes informatiques dans les écoles, bref en faisant tout ce qui est en son pouvoir afin d'assurer l'accès à l'éducation postsecondaire ainsi qu'il semble vouloir le dire aujourd'hui. Franchement, excusez-nous si nous sommes un peu négatifs, mais nous avons déjà entendu ça et c'est le contraire qui a été fait.
La réforme des pensions sera aussi très importante. Le premier ministre sait que les Canadiens sont très inquiets et ils devraient l'être. Le gouvernement a un objectif secret. Pour dire les choses sans détour, il propose une réforme des pensions qui va terriblement affecter les Canadiens de la classe moyenne. La classe moyenne va se faire avoir par le gouvernement. Les Canadiens de la classe moyenne seront touchés. Les gens qui ont épargné de l'argent pour leur retraite vont se le voir retirer par les députés libéraux.
Nous voulons que le gouvernement dise les choses comme elles sont. Nous sommes prêts à débattre de la réforme, mais nous voulons la vérité. Dans quelle mesure cette réforme va-t-elle affecter les femmes seules? Dans quelle mesure va-t-elle affecter les femmes mariées dont le revenu est calculé en fonction du revenu familial, et non du revenu individuel? Dans quelle mesure va-t-elle affecter la décision d'épargner des Canadiens? Aurons-nous un système qui les incitera à ne pas épargner, à ne pas planifier vu que, s'ils le font, le gouvernement leur retirera leur argent?
Pour ce qui est du RPC, nous continuons avec hésitation à appuyer l'augmentation des cotisations. C'est une charge sociale. Cependant, nous croyons également qu'une augmentation des cotisations doit être compensée par une réduction d'impôt. Autrement, c'est 11 à 12 milliards de dollars de moins pour l'économie.
[Français]
Finalement,—ne soyez pas trop optimistes quand je dis «finalement» et ça irait plus vite si je n'étais pas interrompu, mais j'ai tout mon temps—sur la question de l'unité du pays, le premier ministre aura peut-être pris connaissance de la lettre que j'ai fait parvenir aux premiers ministres provinciaux, leur exprimant le point de vue de mon parti sur la question de l'unité canadienne. Le premier ministre sait, en passant, que cette question, pour nous, n'est pas une question de partisanerie. On en a fait la preuve, je pense, lors du référendum de 1995 et par la suite.
Ce que je veux surtout partager avec le premier ministre aujourd'hui, c'est la nécessité, l'importance d'un leadership au niveau national, parce qu'on a beau demander aux premiers ministres provinciaux de porter le ballon, il n'y a qu'un seul premier ministre. Il n'y a qu'un seul gouvernement national et un seul Parlement national. On ne peut les remplacer. On ne peut demander aux premiers ministres provinciaux de se substituer à la volonté d'un gouvernement national.
J'aurais espéré qu'on tourne la page sur la période post-Meech, et qu'on entreprenne enfin la mise en oeuvre d'un plan d'action national, un plan canadien. Tant qu'on n'en arrivera pas au moins à s'entendre sur un plan d'action commun, on est à la merci du gouvernement du Québec dont l'intention avouée est de briser le Canada. Et on réagit à ce qu'ils font.
L'espoir que je place dans ce Parlement et dans ce gouvernement, c'est qu'ils puissent définir ce plan d'action. Personne ne s'attend à ce qu'on livre de grandes solutions du jour au lendemain. Personne ne s'attend non plus à ce qu'on livre des amendements constitutionnels. Mais ce à quoi on s'attend, c'est que ce premier ministre puisse au moins s'entendre avec les premiers ministres provinciaux sur un plan d'action commun.
Je vous fais une mise en garde: un plan d'action qui est trop centré sur le Québec, comme c'est le cas en ce moment à la suite de la déclaration de Calgary, est voué à un échec parce que les démagogues ailleurs au pays vont sauter là-dessus pour dire, encore une fois, que c'est le Québec qui domine le pays, alors que les Québécois et les Québécoises, en passant, ne se réveillent pas tous les matins en se demandant s'ils sont une société distincte. Ils n'ont pas à se poser la question, ils le sont, point.
En passant, ils n'ont de permission à demander à personne pour l'être non plus. Sauf que le rééquilibrage des pouvoirs, le pouvoir fédéral de dépenser, les nouveaux mécanismes de coopération, cela touche les Québécois et les Québécoises, cela touche les gens de l'Ouest, comme ceux de l'Atlantique et de l'Ontario.
On va avancer dans la mesure où on peut avancer ensemble. C'en est une des leçons. On n'a pas besoin de faire mille choses, on a juste à faire un plan d'action ciblé, qui met l'accent sur trois ou quatre priorités. La seule personne qui peut faire cela, c'est le premier ministre du pays. Mais notre premier ministre, malheureusement, ne semble pas enclin à le faire.
[Traduction]
Le premier ministre n'est pas sans savoir que dans la salle dans laquelle il réunit son Cabinet on retrouve une inscription sur le mur devant lui. La prochaine fois que le Cabinet se réunira, j'espère que ses collègues et lui-même prendront le temps de la lire. Elle est tirée du livre des proverbes. On y dit ceci: «Faute de vision, le peuple vit sans frein.» La peur de l'échec dans ce domaine de l'unité canadienne n'est pas une excuse.
Les plans B sont de bien belles choses, mais permettez-moi de dire au premier ministre que les libéraux peuvent suivre tous les plans B qu'ils veulent et se battre avec le chef de l'opposition pour savoir qui sera le fossoyeur du Canada, mais qu'en ce qui concerne notre parti et en ce qui a trait au Canada, l'échec n'est pas une option et ne le sera jamais.
Nous sommes heureux et honorés de siéger à la Chambre pour offrir notre contribution au débat national. Nous comptons bien bâtir, continuer à bâtir un merveilleux pays et offrir à nos enfants encore davantage que ce que nos propres parents nous ont laissé. C'est ce sur quoi on jugera ce Parlement.
Un passeport constitue un important symbole de toutes les mesures et de toutes les décisions qu'un gouvernement peut prendre. Si on s'arrête un instant à penser à ce que nous avons réalisé ensemble en tant que Canadiens au cours des 130 dernières années, de Sir John A. Macdonald à Laurier, sans oublier MM. Diefenbaker, Trudeau, Mulroney, etc., la réalisation qui symbolise le mieux ce que nous avons accompli ensemble, c'est la valeur du passeport canadien que nous transmettrons à nos enfants.
Qui aurait pensé il y a 130 ans, lorsqu'on a fondé ce pays, que grâce au travail de ces générations d'hommes et de femmes, nous serions en mesure de transmettre à nos enfants de nos jours ce qui est considéré comme le meilleur passeport de tous, dans un monde marqué au coin de la mondialisation où les gens voyagent plus que jamais...
Le vice-président: L'honorable whip du Parti réformiste invoque le Règlement.
M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, lorsque les chefs de parti parlent, il est entendu que nous ne voulons pas être pressés par le temps. Si je ne m'abuse, le chef du Nouveau Parti démocratique a dépassé de deux ou trois minutes son temps de parole pour conclure ses observations.
Quand le chef du Parti conservateur a demandé s'il pouvait, lui aussi, prolonger son discours de deux ou trois minutes, cela a eu pour résultat de doubler le temps alloué à son intervention. Je pense qu'il est temps de conclure. Nous avons déjà dépassé la période prescrite de 15 à 20 minutes. Je vous prierais de bien vouloir lui demander de conclure.
Le vice-président: Le député n'a pas invoqué le Règlement. Il ne fait que présenter son point de vue. La Chambre a prolongé la durée de l'intervention du député sans lui imposer de limite. Le député a exprimé son point de vue au sujet de la prolongation accordée, mais vu les circonstances, je redonne la parole au député de Sherbrooke.
L'hon. Jean J. Charest: Monsieur le Président, le député pourrait partir à sa guise. Il n'est pas tenu de rester assis et de supporter cela. Je comprends combien cela doit être difficile pour lui d'entendre tout cela, mais il n'y a pas de problème. Je ne veux pas m'éterniser là-dessus. Si ça ne lui plaît pas, il n'a qu'à quitter les lieux.
Comme je le disais, une des grandes réalisations de ce pays en cette ère de mondialisation, particulièrement en ces temps que nous traversons, c'est le fait que, en tant que Canadiens, nous sommes plus que jamais présents partout dans le monde. Nous transmettons à nos enfants ce passeport qui est un bien on ne peut plus précieux. Voilà une chose sur laquelle nous, le Parlement, avons un effet des plus direct. J'espère que chacun d'entre nous ici prendra un engagement, léguera ce passeport et pourra bénéficier des avantages qu'il y a à partager une des plus grandes citoyennetés au monde, la canadienne.
Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté le mardi 23 septembre 1997, la Chambre s'ajourne à 10 heures, demain.
(La séance est levée à 18 h 17.)