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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 1ère Session


HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 55

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 9 février 1998

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES

. 1100

VLE TRANSPORT DU GRAIN
VMotion
VM. Rick Borotsik

. 1105

. 1110

. 1115

. 1120

VM. Stan Keyes

. 1125

. 1130

VM. Roy Bailey

. 1135

. 1140

VM. Dick Proctor

. 1145

. 1150

VM. Steve Mahoney

. 1155

VM. Lee Morrison

. 1200

VQUESTION DE PRIVILÈGE
VLe ministre responsable de la Commission
VLe Président
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VProjet de loi C-4. Étape du rapport
VM. Jay Hill

. 1205

VM. Jake E. Hoeppner
VLA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VL'hon. Don Boudria
VMotion

. 1210

VL'hon. Don Boudria
VMotion
VM. Jay Hill
VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VM. Jake E. Hoeppner

. 1215

. 1220

VMme Rose-Marie Ur

. 1225

. 1230

VM. Roy Bailey

. 1235

. 1240

VM. Garry Breitkreuz

. 1245

. 1250

VM. Charlie Penson

. 1255

VM. Lee Morrison

. 1300

. 1305

VM. Inky Mark

. 1310

VM. Rick Casson

. 1315

. 1320

VM. Derrek Konrad

. 1325

. 1330

VM. Howard Hilstrom

. 1335

. 1340

VM. Bill Blaikie
VM. Lee Morrison

. 1345

VM. Garry Breitkreuz

. 1350

VM. Monte Solberg

. 1355

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLES JEUX OLYMPIQUES DE 1998
VM. John Harvard

. 1400

VROSS REBAGLIATI
VM. John Reynolds
VMAHATMA GANDHI
VMme Karen Kraft Sloan
VLE PROJET TOKAMAK
VM. Stéphane Bergeron
VL'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT
VM. Rick Laliberte
VL'AGRICULTURE
VM. Rick Borotsik

. 1405

VLE REGRETTÉ MARK MACGUIGAN
VM. Ted McWhinney
VLE MOIS DU COEUR
VMme Beth Phinney
VLE SÉNAT
VM. Bill Gilmour
VLE PROJET LE TRAIN DU CANADA
VM. Paul DeVillers
VLA PAUVRETÉ DES ENFANTS
VMme Maud Debien

. 1410

VLA FERME EXPÉRIMENTALE CENTRALE
VMme Marlene Catterall
VL'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT
VM. Charlie Penson
VL'ÉMISSION DE TÉLÉVISION 60 MINUTES
VM. Guy St-Julien
VLE GOUVERNEMENT DU QUÉBEC
VM. Denis Coderre
VLA JUSTICE
VM. John Maloney
VQUESTIONS ORALES

. 1415

VL'IRAK
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Bob Mills
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Bob Mills

. 1420

VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Daniel Turp
VL'hon. Lloyd Axworthy
VM. Daniel Turp

. 1425

VL'hon. Lloyd Axworthy
VMme Alexa McDonough
VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Alexa McDonough
VLe très hon. Jean Chrétien
VL'hon. Jean J. Charest
VLe très hon. Jean Chrétien
VL'hon. Jean J. Charest

. 1430

VLe très hon. Jean Chrétien
VLA FISCALITÉ
VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin
VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin
VLA TEMPÊTE DE VERGLAS
VM. Pierre Brien
VL'hon. Marcel Massé
VM. Pierre Brien
VL'hon. Marcel Massé

. 1435

VLES AFFAIRES INDIENNES
VM. Mike Scott
VL'hon. Jane Stewart
VM. Mike Scott
VLE PROJET DE LOI C-28
VM. Yvan Loubier
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Yvan Loubier
VLe très hon. Jean Chrétien
VLES AFFAIRES INDIENNES
VM. Jack Ramsay

. 1440

VL'hon. Jane Stewart
VM. Jack Ramsay
VL'hon. Jane Stewart
VLES PAIEMENTS DE TRANSFERT AUX PROVINCES
VMme Pauline Picard
VL'hon. Paul Martin
VL'INDUSTRIE DE LA CONSTRUCTION
VM. Lynn Myers
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLES PÊCHES
VM. John Cummins
VL'hon. David Anderson
VM. John Cummins

. 1445

VL'hon. David Anderson
VL'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT
VM. Bill Blaikie
VL'hon. Sergio Marchi
VM. Bill Blaikie
VL'hon. Sergio Marchi
VL'IRAK
VM. André Bachand
VL'hon. Lloyd Axworthy
VM. André Bachand
VL'hon. Lloyd Axworthy

. 1450

VLES BANQUES
VMme Susan Whelan
VL'hon. Jim Peterson
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Jay Hill
VL'hon. Jane Stewart
VLA COMMISSION DE L'IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ
VMme Caroline St-Hilaire
VL'hon. Lucienne Robillard
VL'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT
VMme Judy Wasylycia-Leis

. 1455

VL'hon. Sergio Marchi
VL'IRAK
VM. David Price
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VLES SERVICES DE GARDE D'ENFANTS
VMme Karen Redman
VL'hon. Paul Martin
VLES PÊCHES
VM. Gary Lunn
VL'hon. David Anderson
VLE GAZODUC TRANS-QUÉBEC MARITIMES
VM. Paul Crête
VL'hon. Ralph E. Goodale

. 1500

VL'INVESTISSEMENT
VM. Gordon Earle
VL'hon. Sergio Marchi
VRECOURS AU RÈGLEMENT
VLa période des questions
VM. Randy White
VLE DÉCÈS DE CHARLES BEVERLEY KOESTER
VL'hon. Don Boudria

. 1505

VM. Randy White
VM. Stéphane Bergeron
VM. Bill Blaikie

. 1510

VM. Peter MacKay
VAFFAIRES COURANTES
VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VProcédure et affaires de la Chambre
VM. Peter Adams

. 1515

VLE MOYEN-ORIENT
VL'hon. Don Boudria
VMotion
VL'hon. Don Boudria
VM. Randy White

. 1520

VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VProcédure et affaires de la chambre
VMotion d'adoption
VM. Peter Adams
VPÉTITIONS
VLes armes nucléaires
VMme Elinor Caplan
VLa Loi sur les jeunes contrevenants
VM. Keith Martin
VLes mines antipersonnel
VM. Keith Martin
VL'équité salariale
VM. John Harvard
VLa nudité dans les lieux publics
VM. John Nunziata

. 1525

VLe CRTC
VMme Shaughnessy Cohen
VManickavasagam Suresh
VMme Shaughnessy Cohen
VLe serment d'allégeance
VMme Shaughnessy Cohen
VLa pornographie
VM. John Maloney
VLe Fonds d'indemnisation des agents de sécurité publique
VM. Paul Szabo
VLa nudité dans les lieux publics
VMme Marlene Catterall
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VL'hon. Diane Marleau
VMme Judy Wasylycia-Leis

. 1530

VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VProjet de loi C-4. Étape du rapport
VM. Chuck Strahl

. 1535

. 1540

VM. Maurice Vellacott

. 1545

. 1550

VM. Keith Martin

. 1555

VM. Jack Ramsay

. 1600

. 1605

. 1610

VM. Gary Lunn

. 1615

. 1620

VM. Jean-Guy Chrétien

. 1625

. 1630

VM. Werner Schmidt

. 1635

. 1640

VM. Gordon Earle

. 1645

VM. Ken Epp

. 1650

VM. Wayne Easter

. 1655

VMme Marlene Catterall
VM. Jim Pankiw

. 1700

VM. Pat O'Brien

. 1705

. 1710

VM. Denis Coderre

. 1715

VM. David Chatters

. 1720

. 1725

VM. Paul Bonwick

. 1730

VM. John Harvard

. 1735

. 1740

. 1745

VM. John Reynolds

. 1750

V(Les questions sur les motions du groupe no 4 sont réputées avoir été mises aux voix et les votes par appel nominal, demandés et différés.)

. 1755

VM. Jean-Guy Chrétien
VMotion no 20
VM. Rick Borotsik
VMotion no 21
VM. Jay Hill
VMotion no 22
VM. Garry Breitkreuz
VMotion no 23
VM. Jay Hill
VMotion no 24
VM. Dick Proctor
VMotion no 25
VM. Jay Hill
VMotions nos 26 et 27
VM. Garry Breitkreuz
VMotions nos 28 et 29
VM. Dick Proctor
VMotion no 30
VM. Jay Hill
VMotion no 32
VM. Rick Borotsik
VMotion no 33
VM. Jay Hill
VMotion no 34
VM. Garry Breitkreuz
VMotion no 45
VM. Jay Hill
VMotion no 47

. 1800

. 1805

VM. Rick Borotsik

. 1810

. 1815

VM. Jake E. Hoeppner

. 1820

VM. Wayne Easter

. 1825

. 1830

VLE MOYEN-ORIENT
VLe très hon. Jean Chrétien

. 1835

. 1840

. 1845

VM. Preston Manning

. 1850

. 1855

VM. Gilles Duceppe

. 1900

. 1905

VMme Alexa McDonough

. 1910

. 1915

. 1920

VL'hon. Jean J. Charest

. 1925

. 1930

. 1935

. 1940

VL'hon. Lloyd Axworthy

. 1945

. 1950

VM. Bob Mills

. 1955

. 2000

. 2005

VM. Peter MacKay
VL'hon. Arthur C. Eggleton

. 2010

. 2015

VM. Daniel Turp

. 2020

. 2025

VMme Maud Debien

. 2030

. 2035

VL'hon. Charles Caccia

. 2040

. 2045

VM. Ted McWhinney

. 2050

VM. Dick Proctor

. 2055

. 2100

VMme Libby Davies

. 2105

VL'hon. Sheila Finestone

. 2110

. 2115

VM. Steve Mahoney

. 2120

. 2125

VM. David Price

. 2130

VM. André Bachand

. 2135

. 2140

VMotion
VMme Marlene Catterall

. 2145

. 2150

. 2155

VM. Clifford Lincoln

. 2200

VM. Bob Kilger
VMotion
VM. Art Hanger

. 2205

. 2210

. 2215

. 2220

VM. George Proud

. 2225

. 2230

VM. Paul Crête

. 2235

. 2240

. 2245

. 2250

VM. John Richardson

. 2255

. 2300

VM. John Maloney

. 2305

VM. Gurmant Grewal

. 2310

. 2315

VM. John Williams

. 2320

. 2325

VM. Mark Assad

. 2330

. 2335

VM. Janko Peri«

. 2340

VM. John Duncan

. 2345

. 2350

VM. Peter Goldring

. 2355

VM. Paul DeVillers

. 2400

. 2405

VMme Jean Augustine

. 2410

. 2415

VM. Bill Blaikie

. 2420

. 2425

. 2430

. 2435

VM. Mauril Bélanger

. 2440

. 2445

VM. Bob Speller

. 2450

. 2455

VM. Keith Martin

. 2500

. 2505

VM. Jason Kenney

. 2510

VM. Derek Lee

. 2515

. 2520

VM. Paul Szabo

. 2525

. 2530

VMme Louise Hardy

. 2535

. 2540

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 55


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 9 février 1998

La séance est ouverte à 11 heures



Prière


INITIATIVES PARLEMENTAIRES

 

. 1100 +

[Traduction]

LE TRANSPORT DU GRAIN

 

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) propose:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait, de concert avec les intervenants concernés, faire immédiatement un examen en vue de trouver une solution aux déficiences du système de transport du grain.

 

. 1105 + -

—Monsieur le Président, quelle meilleure façon d'entamer un lundi qu'en prenant la parole à la Chambre des communes. Monsieur le Président, je suis certain qu'après une fin de semaine de repos, vous apprécierez les observations que moi-même et les députés des autres partis d'opposition allons faire.

Malheureusement, la motion dont nous sommes saisis ne fera pas l'objet d'un vote. J'aurais préféré le contraire, mais lorsque j'ai comparu devant le comité, le nombre de motions pouvant faire l'objet d'un vote était limité et celle-ci n'a pas été retenue.

L'objet de cette motion concerne une des principales questions agricoles auxquelles les producteurs canadiens et l'ensemble du commerce canadien feront face, non seulement en 1998 mais au cours des années à venir.

Je présente la motion 225 dont voici le texte:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait, de concert avec les intervenants concernés, faire immédiatement un examen en vue de trouver une solution aux déficiences du système de transport du grain.

Dans mon exposé au comité, j'ai dit que les retards survenus en 1997 dans les envois de céréales, principalement du blé, à des clients internationaux avec lesquels nous avions passé des contrats, avaient entraîné des frais de surestarie de 65 millions de dollars, payés principalement par les producteurs. On estime par ailleurs qu'un montant supplémentaire de 35 millions de dollars a été perdu sous forme de manque à gagner à cause de l'incapacité du Canada de livrer la marchandise. Cela ternit non seulement la réputation des Canadiens de l'Ouest, mais aussi celle de tout le Canada sur les marchés internationaux.

Je voudrais informer la Chambre que cette motion ne représente aucun intérêt partisan. Je ne propose pas que nous modifiions la politique, mais que simplement nous écoutions, à titre de parlementaires, les parties intéressées, que nous rédigions un rapport et le déposions à la Chambre pour examen.

Le 18 décembre 1997, le ministre des Transports a diffusé un communiqué annonçant la nomination du juge Estey à la tête d'une commission d'enquête sur le système de transport et de manutention du grain du Canada. Le choix du moment est très important. En octobre, j'ai présenté une motion au comité. En décembre de la même année, le gouvernement chargeait M. Estey de l'enquête. Il reste cependant des questions et des problèmes à résoudre à cet égard. J'aimerais que le Comité des transports et le Comité de l'agriculture forment un comité mixte de façon à que nous, députés, puissions entendre l'avis des intervenants concernés et faire valoir leurs points de vue à la Chambre dans un rapport distinct.

Je me réjouis de cette nomination. Il y a longtemps que cela aurait dû être fait. Un rapport préliminaire sera présenté d'ici au 31 mai 1998, le rapport final, le 31 décembre 1998 au plus tard.

Le ministre des Transports nommera un conseil consultatif formé de représentants des secteurs de la manutention et du transport du grain afin d'assister M. Estey dans l'examen de cette question. Espérons que le conseil consultatif ne connaîtra pas le même sort qu'a connu le groupe sur la commercialisation du grain de l'Ouest, dont la plupart des recommandations ont été mises de côté par le ministre responsable de la Commission canadienne du blé.

Je me réjouis de ce que le gouvernement ait enfin décidé d'entamer ce processus d'examen. Le malheur est que cela vienne environ deux années trop tard. Cet examen devant se terminer en décembre 1998, il faudra attendre 1999 avant de pouvoir faire quoi que ce soit au sujet des recommandations.

Ceci dit, j'aimerais expliquer ma motion d'aujourd'hui, laquelle a malheureusement été jugée comme ne pouvant pas faire l'objet d'un vote.

Le 25 juillet 1997, les ministres fédéraux des Transports et de l'Agriculture et le ministre responsable de la Commission canadienne du blé ont convoqué un sommet sur le grain à Winnipeg. L'un des principaux objectifs était de mesurer l'intérêt des manutentionnaires et des transporteurs de grain et de voir s'il valait la peine d'engager un processus d'examen global. L'exercice a été productif, mais n'a pas permis de régler les problèmes que pose le système actuel à des milliers d'agriculteurs de l'Ouest. Toutefois, il a été convenu d'examiner la question en 1999. Je ferai humblement remarquer que les agriculteurs canadiens ne peuvent pas se permettre d'attendre deux ans.

En tant que parlementaires, nous avons le rôle et le devoir de commencer immédiatement à entendre en comité les préoccupations de tous les intervenants concernés de sorte à pouvoir nous faire une meilleure idée de la façon de nous attaquer à ce problème.

 

. 1110 + -

Or, je sais comment nous devrions nous y prendre pour résoudre le problème. Et la meilleure façon de faire immédiatement un examen approfondi est de former un comité permanent mixte de l'agriculture, de l'agroalimentaire et des transports, comme le prévoit l'alinéa 108(1)a) du Règlement. Le comité entendrait divers témoins: leaders des milieux agricoles de l'Ouest, dirigeants de sociétés ferroviaires, représentants de la Commission canadienne des grains et de la Commission canadienne du blé, et intervenants des secteurs de l'exploitation et de la réglementation de l'industrie.

Qu'on n'aille pas s'imaginer qu'il s'agit d'un dossier qui n'intéresse que l'Ouest. Ses ramifications s'étendent au Canada tout entier, même si les personnes les plus directement touchées sont celles qui se trouvent à l'ouest de la frontière ontarienne. L'enjeu, c'est la réputation internationale du Canada comme fournisseur d'un des meilleurs produits céréaliers au monde.

Cet examen s'impose à la lumière des changements qui sont intervenus sur les marchés du grain canadien. Depuis l'abandon du tarif du Nid-de-Corbeau, il y a deux ans, les agriculteurs doivent faire preuve d'une plus grande compétitivité. En outre, il faut se rappeler que le parc ferroviaire fédéral de 13 000 wagons-trémie n'a pas encore été vendu, ce qui amène les agriculteurs à se demander pourquoi le gouvernement traîne à le faire. Voilà qui n'est pas pour arranger les choses.

L'examen permettrait d'évaluer l'efficacité du processus, la solidité de la protection que l'on donne aux expéditeurs, le manque de concurrence au niveau des sociétés ferroviaires et les solutions de rechange à apporter. On tiendrait compte des coûts de cet exercice pour tous les intervenants concernés.

Chaque année, le Canada exporte des produits agroalimentaires pour une valeur de 18 à 20 milliards de dollars. Les céréales, les graines oléagineuses et les produits connexes représentent la moitié de ces exportations. Les lacunes observées dans la gestion du système de transport des céréales du Canada ont eu de graves conséquences sur le secteur des exportations du grain canadien et sur l'économie des Prairies.

Les retards enregistrés en 1997 dans la livraison de céréales aux consommateurs internationaux, surtout dans le secteur du blé, ont coûté environ 65 millions de dollars aux agriculteurs en frais de surestarie. Faute de pouvoir expédier les céréales à temps, le Canada a essuyé, estime-t-on, des pertes de l'ordre de 35 millions de dollars au chapitre des ventes. Et il s'agit là d'estimations très prudentes.

Les syndicats du blé des Prairies, par exemple, ont parlé de centaines de millions de dollars de ventes perdues de produits des Prairies. Cela nuit à la réputation non seulement des gens de l'Ouest, mais du Canada dans son ensemble sur le marché international.

Au lieu d'aborder la situation de façon rationnelle face à ce problème, la Commission canadienne du blé a eu plutôt pour réflexe de déposer une plainte contre le CN Rail devant l'Office des transports du Canada, une lutte de force qui ne fait qu'ajouter aux coûts des contribuables et des producteurs alors qu'on aurait pu chercher à résoudre ce problème de façon rationnelle en comité.

J'ai demandé au ministre responsable de la Commission canadienne du blé de laisser tomber la plainte pour que nous puissions procéder à une étude constructive. Il a refusé de le faire. Contrairement à ce que la Commission canadienne du blé et le CN ont fait, l'étude au comité ne consistera pas à rejeter le blâme sur qui que ce soit.

L'audience de l'Office des transports du Canada lie littéralement les mains du gouvernement qui ne peut procéder à cette étude sur le transport du grain. La loi régissant l'Office des transports du Canada prévoit un délai de 120 jours entre la présentation d'une plainte et la tenue d'une audience publique.

Malheureusement, l'office a retardé les audiences publiques à trois reprises depuis la présentation de la plainte et ne compte pas en tenir avant mars 1998.

Je voudrais à nouveau rappeler à la Chambre que cette motion ne défend aucun intérêt partisan. Je ne propose aucune modification de politique. Je propose seulement qu'en tant que parlementaires, nous écoutions les intéressés, que nous rédigions un rapport et le soumettions à la Chambre des communes aux fins d'étude.

Tous les gouvernements provinciaux de l'ouest du pays veulent que l'on procède à cette étude le plus tôt possible. Même le ministre des Transports de la Saskatchewan a déclaré, en ce qui concerne la réaction du gouvernement fédéral dans cette affaire, que le processus prenait beaucoup trop de temps. Tous les intéressés veulent qu'on procède immédiatement à une enquête sur la question.

Le processus des comités est essentiel à notre rôle de parlementaires. Dès le début de la Confédération, la Chambre des communes a créé des comités pour étudier des questions d'importance nationale. Ce n'est qu'une des nombreuses questions importantes pour les Canadiens de l'Ouest et la réputation du Canada. J'espère que ce ne sera pas du temps perdu. Cela devrait au moins permettre d'informer les députés ministériels de la situation. Ainsi, la prochaine fois, ils seront peut-être en mesure d'écouter vraiment les préoccupations des agriculteurs de tout l'Ouest du Canada et de commencer à prendre des initiatives plutôt que de se contenter de réagir aux problèmes.

 

. 1115 + -

Je veux faire part d'un certain nombre de préoccupations. Comme je l'ai dit plus tôt, c'est le juge Estey qui a été chargé d'examiner la question dans l'Ouest du Canada et d'essayer de déterminer les raisons de l'inefficacité du système de transport, et il y en a beaucoup.

Je suis notamment préoccupé par les changements qui sont constamment apportés dans le système de transport ferroviaire. L'abandon de certaines lignes de chemin de fer est une question qui m'inquiète. Ce que nous préconisons, et c'est certainement la position que je défends, c'est que, au lieu d'abandonner des lignes par suite des modifications au réseau jusqu'aux têtes de ligne intérieures, nous ayons davantage de lignes courtes. Ces lignes courtes devraient être accessibles aux entrepreneurs qui veulent développer leur propre marché. Je crois que c'est l'un des enjeux les plus importants que doit étudier notre comité, et la même chose va pour le juge Estey et les groupes qu'il chapeaute.

J'ai une autre grave préoccupation. J'ai ai déjà parlé brièvement. Il s'agit de la question de la volonté politique. Nous reconnaissons que le système de transport du grain pose actuellement, dans l'ouest du Canada, un très important problème. Je n'accuse personne. Divers particuliers et organisations intéressés doivent partager le blâme, parce qu'ils exploitent un système qui ne tient pas compte des progrès des dernières années. C'est un système traditionnel qui n'a pas suivi les développements de l'agriculture dans l'Ouest.

Pour modifier le système, il faudra de la volonté politique. Actuellement, c'est la Commission canadienne du blé qui administre la répartition des wagons. On devrait peut-être se demander si, en fait, il ne vaudrait pas mieux que ce soient les producteurs ou même les sociétés de chemin de fer elles-mêmes qui s'occupent de cet aspect du transport.

Je trouve très étrange que, quand un producteur vend son produit, il reste responsable de ce produit jusqu'à son embarquement sur un navire. Pourtant, il n'a aucun pouvoir sur ce produit. Il faudra de la volonté politique pour apporter les modifications qui permettront d'améliorer l'efficacité du système. Je crois qu'un comité mixte d'Agriculture et Agroalimentaire, d'une part, et des Transports, d'autre part, permettrait au moins d'encourager cette volonté politique non sectaire de faire ce qui est préférable pour les producteurs, ce qui serait certainement mieux pour les producteurs et, en général, pour le commerce extérieur de l'ouest du Canada.

Par ailleurs, le retard du rapport du juge Estey est une autre source de préoccupations. Les répercussions qu'a pour nous le fait que les livraisons sur le marché international se font à la dernière minute nous préoccupent gravement. Si le juge Estey décide de ne présenter son rapport que dans deux ans, nous aurons perdu une occasion merveilleuse de pénétrer d'autres marchés parce que nous aurons été incapables de livrer à temps.

Il y a une autre question concernant le transport, qui n'a pas été abordée et sur laquelle le comité devrait se pencher. Il s'agit de l'impact que le transport ferroviaire va avoir sur les routes municipales dans un avenir pas trop éloigné. Un certain nombre de société privées sont en train de construire d'énormes élévateurs de tête de ligne de l'intérieur, obligeant ainsi les producteurs à expédier leur récolte par camion à de nombreux kilomètres de plus de chez eux que du temps où existaient les autres lignes ferroviaires.

Le problème c'est que les camions à grain endommagent l'infrastructure routière et ce sont les municipalités qui sont responsables de la réfection, de la construction et de l'entretien de ces routes. Je pense qu'il est important que le gouvernement et le comité élaborent une politique à l'égard de l'infrastructure routière et aident à la mettre en oeuvre.

Il y a une autre question qui me préoccupe grandement. Ce sont les audiences mêmes de l'OTC. Comment le juge Estey peut-il s'attendre à un dialogue honnête, ouvert et transparent alors que la Commission canadienne du blé a traduit ces mêmes personnes devant un tribunal quasi judiciaire, réclamant des millions et des millions de dollars? À moins que les audiences de l'OTC ne soient annulées, on ne peut s'attendre à ce que le dialogue soit ouvert et honnête. Cette question devrait faire l'objet d'un débat et être discutée ouvertement par un comité, permettant ainsi aux parlementaires de porter un jugement honnête et de faire part de leur décision à la Chambre.

 

. 1120 + -

Monsieur le Président, je vous remercie et j'espère que ce lundi matin se déroule bien pour vous. J'espère que le reste de la semaine se déroulera tout aussi bien pour vous que pour le reste de la Chambre.

Le vice-président: Je suis sûr que ce sentiment est partagé par tous les députés.

M. Stan Keyes (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je m'étais vraiment imaginé que le député de Brandon—Souris serait très heureux de se lever devant cette Chambre aujourd'hui pour demander le retrait de la motion 225 qui est à toutes fins pratiques devenue inutile à la suite de la sage décision prise par le ministre des Transports de demander une étude approfondie du système de transport et de manutention du grain. Malheureusement, il semble que ce ne soit pas le cas et que le député ait décidé de faire de la politicaillerie, alors que le présent gouvernement tente de trouver des solutions viables, avec la collaboration de toutes les parties en cause.

J'aimerais retourner un peu en arrière. La Loi sur les transports au Canada, adoptée le 1er juillet 1996, a pour but de moderniser et de rationaliser les règlements sur le transport ferroviaire, de promouvoir la formation de services sur courtes distances et d'assurer le maintien de services de transport compétitifs. Cette Loi prévoit une révision des dispositions relatives au transport du grain au cours de l'année 1999. Toutefois, compte tenu des difficultés dont le député a fait mention qui se sont produites au cours des campagnes agricoles de 1996-1997 et des demandes des parties en cause, le ministre des Transports a décidé de hâter le processus de révision.

Le 18 décembre 1997, le ministre des Transports a chargé le juge Willard Estey de cette étude. Le juge Estey est l'un des meilleurs juristes au Canada et le mandat qu'on lui a confié est assez large, ce qui lui permet d'effectuer une revue en profondeur du système. La nomination du juge Estey a été très bien reçue par toutes les parties intéressées, y compris les ministres provinciaux de l'Agriculture et des Transports.

Par exemple, le ministre de la Voirie et du Transport du Manitoba a souligné que les provinces de l'Ouest sont heureuses que le gouvernement fédéral ait nommé le juge Willard Z. Estey parce que son dossier remarquable fait de lui une personne très qualifiée pour examiner les changements qui pourraient être apportés au système de transport et de manutention du grain.

Leroy Larsen du syndicat du blé de la Saskatchewan a déclaré: «C'est exactement le large mandat que nous demandions... Mettons toutes les questions sur la table.»

Ted Allen, le président des United Grain Growers, a dit: «Il faut considérer cela comme une mesure positive.»

Le juge Estey procédera à l'examen en deux temps. Dans un premier temps, il consultera les intéressés pour savoir quels sont les questions et les problèmes. Ce travail est déjà en cours. Le juge Estey fera rapport au ministre sur cette phase de ses travaux le 31 mai 1998.

Je voudrais faire remarquer au député que c'est là une partie importante de l'examen. La deuxième phase commencera lorsque la plainte présentée à l'Office des transports du Canada aura été réglée. La phase deux comprendra la préparation d'un ensemble de recommandations au sujet des questions et des problèmes identifiés à la première phase. On prévoit que le juge Estey remettra au ministre son rapport sur les résultats de la phase deux d'ici la fin de l'année.

Le juge Estey a commencé ses travaux ardemment. Il a déjà fait deux voyages dans l'ouest du Canada où il a rencontré plus de 50 intéressés et il a aussi rencontré les ministres des transports des provinces de l'Ouest. Il prévoit faire plusieurs autres voyages dans les provinces de l'Ouest avec les membres du secrétariat d'examen. Cela garantit que le processus de consultation sera large et que tous les intéressés auront la possibilité de faire connaître leur opinion.

Je conviens avec le député que la consultation est cruciale pour le succès du processus. Si les intéressés ne sont pas consultés, le produit final ne sera pas assez bon pour répondre aux besoins de l'industrie.

Les producteurs sont les experts, les expéditeurs sont les experts, les chemins de fer sont les experts, les compagnies céréalières sont les experts et il en est ainsi dans tout le système. Voilà les gens qui comptent pour cet examen et ce sont les gens que le juge Estey veut absolument rencontrer. Sans leur contribution, l'examen serait un exercice stérile, car il ne servirait pas les besoins de l'ensemble de l'industrie.

Tirant partie des technologies modernes, l'examen du juge Estey aura un site Internet qui permettra à tout le monde de présenter des instances directement au juge. Ainsi, toutes—j'insiste sur le mot toutes—les parties intéressées pourront avoir voix au chapitre sur ce sujet important et tout le monde pourra être entendu.

 

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Avant même l'annonce de cet examen, le ministre des Transports avait pris des mesures pour s'assurer que les difficultés rencontrées au cours de la campagne agricole 1996-1997 ne se répéteront pas. En juillet, le ministre des Transports, ainsi que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et le ministre responsable de la Commission canadienne du blé, se sont réunis avec des représentants de l'industrie pour discuter de plans en prévision de la prochaine campagne agricole.

Le ministre des Transports a invité l'industrie à prendre des mesures pour veiller à ce que le transport des céréales se fasse sans incident. Cette rencontre a donné lieu à l'élaboration d'un plan d'urgence piloté par l'industrie. Ce plan permettra à l'industrie de réagir aux problèmes logistiques qui surgissent, avant qu'ils ne deviennent graves au point de nuire réellement au transport des céréales.

En cernant et en réglant les enjeux avant qu'ils ne deviennent incontrôlables, les dispositions d'urgence feront en sorte que le système ne connaîtra pas les difficultés qu'il a rencontrées en 1996-1997.

Le système a bien répondu à l'invitation du ministre. Nous sommes actuellement à peu près au milieu de la campagne agricole et le système a déjà exporté deux millions de tonnes de céréales de plus qu'à cette période-ci l'année dernière. Il s'agit là d'une bonne nouvelle pour tous et le Canada peut être assuré de maintenir son rôle de chef de file sur les marchés mondiaux des céréales.

Outre le plan d'urgence, cependant, la réalisation encore plus importante du ministre a été le fait qu'il a contribué à amorcer un dialogue parmi les participants de l'industrie, de sorte que tous ont fait porter leurs efforts sur le transport des céréales cette année, au lieu de chercher qui blâmer pour les difficultés de l'année dernière.

Pour trouver des solutions aux problèmes que connaît le système de transport et de manutention du grain du Canada, il faudra compter sur la collaboration de tous les intervenants. Cet examen ne marque que le début. Il faut chercher des solutions afin d'améliorer l'efficacité de l'ensemble du système, à partir du moment où le grain quitte la ferme jusqu'au moment où les navires le transportant quittent le port vers les marchés d'exportation.

Le ministre des Transports a fait un choix judicieux en nommant le juge Willard Estey. Il y avait de nombreux candidats à ce poste, mais peu possédaient des compétences aussi impressionnantes que celles du juge Estey. Ayant siégé à la Cour suprême, le juge Estey maîtrise l'art d'absorber et d'assimiler une mine de renseignements techniques et d'en saisir la signification, tout cela de façon rationnelle.

En tant qu'ex-magistrat, le juge Estey parvient également à examiner, avec la même minutie, chacun des aspects de la question à l'étude avant de rendre jugement. Le juge Estey est novice dans l'industrie céréalière, mais il donne l'impression jusqu'à maintenant de consacrer toute son énergie à cet examen et de travailler avec énormément d'enthousiasme. Les divers intervenants se disent impressionnés par la vigueur et la franchise dont il fait preuve et ils sont contents que le ministre ait nommé une personne aussi qualifiée pour étudier une question aussi importante.

Il ne fait aucun doute que cette question revêt une importance cruciale pour l'économie canadienne. Le ministre des Transports est convaincu que les décisions qui découleront de l'examen du juge Estey nous aideront à créer le système de transport et de manutention du grain le plus rentable et le plus facile à utiliser. Les producteurs canadiens ne méritent rien de moins et ne retireront rien de moins de cet examen.

Je remercie le député qui a proposé cette motion. Au moment où il a présenté sa motion, oui, ces questions le préoccupaient et il pensait que nous pourrions, en tant que comité où tous les partis sont représentés, en discuter. Mais il existe actuellement une commission d'enquête indépendante du processus politique.

Le député n'en est qu'à son premier mandat, mais je comprends qu'il imagine que nous pouvons faire un travail formidable en comité et même saisir deux comités de la question, à l'étape de l'étude en comité. Toutefois, le député constatera, en prenant de l'expérience en politique et en assistant à de nombreuses séances de comité dans les premières étapes de sa carrière politique, que des chasses-gardées commencent à apparaître et que des dissensions commencent à se manifester. Il arrive aussi que tous ne puissent pas se faire entendre parce que le commité manque de temps et parce qu'il y a des limites à ce qu'il peut faire et au montant qu'il peut consacrer à ses déplacements.

Nous sommes confiants que le juge Estey, qui dirige la commission d'enquête, sera en mesure de tenir compte avec impartialité des points de vue de tous les intéressés, notamment à l'aide du site Web, et de trouver une solution qui conviendra à tous les intervenants.

 

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M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir dans le débat sur cette motion d'initiative parlementaire. J'aurais d'ailleurs souhaité que cette motion fasse l'objet d'un vote.

Le député qui vient de parler peut me croire, je ne suis pas ici pour critiquer la nomination du juge Willard Estey. L'argument que je tiens à faire valoir, c'est que le débat actuel a beaucoup trop tardé.

Une maladie a sévi dans l'ouest du Canada, mais il est évident que le gouvernement ne s'en est pas aperçu. Cette maladie a pour nom «terminalisation». À cause de cette maladie, la situation du transport du grain de l'Ouest change tellement rapidement que la nomination de l'honorable juge est pratiquement superflue.

Dans la motion de mon collègue de Brandon—Souris, il y a un mot qui est au coeur du débat. La motion prévoit que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait, de concert avec les intervenants concernés, faire immédiatement un examen.

Je ferai remarquer à la Chambre que, jusqu'à maintenant, les principaux intervenants, les très nombreux intervenants, ceux qui comptent sur le transport du grain pour vivre, n'ont pas été consultés par les sociétés ferroviaires. Ils n'ont pas été consultés non plus par le gouvernement ni par les sociétés céréalières.

Aujourd'hui, les agriculteurs de l'ouest du Canada ont l'impression d'avoir été trahis. En mai dernier, au cours de la campagne électorale, trois députés du gouvernement en place ont proposé qu'une enquête publique fasse la lumière sur la situation.

À ce moment, j'avais prédit que l'enquête n'aurait jamais lieu. Elle n'a pas eu lieu. Il en a été question jusqu'en juillet. Selon une déclaration conjointe des trois députés, à laquelle le député a fait allusion, les choses devaient rentrer dans l'ordre.

Je voudrais que les députés prennent un moment de réflexion. Dans ma circonscription, il y a actuellement un boom pétrolier. Toutefois, la majorité des habitants vivent de l'agriculture.

Compte tenu de ce que mon collègue de Souris—Brandon a dit, si une mesure radicale n'est pas prise d'ici deux ans—et je reviendrai là-dessus un peu plus tard—,des agriculteurs de ma circonscription devront faire transporter leur grain, non pas sur une distance de 100 kilomètres, mais de 100 milles.

Ces gens ne sont plus en affaires. Le juge Estey s'apercevra que les choses sont allées trop loin, trop rapidement et que le gens ne peuvent plus vivre de la terre parce que, à l'heure actuelle,—et j'ai examiné les factures de plusieurs de mes électeurs—presque la moitié du coût total lié au grain est dû uniquement au transport. C'est épouvantable. Nulle part au Canada les agriculteurs ne sont confrontés à des coûts de transport de cet ordre.

Je tiens à rappeler au ministre et aux députés ce qui s'est produit. J'ai ici une formule que j'ai tirée d'un journal de l'Ouest. Elle est ainsi libellée: La déréglementation moins la concurrence égale un monopole. Voici comment ce monopole est apparu.

En Saskatchewan, toutes les lignes du CN ont été échangées avec le CP contre celles du nord de la province. Les embranchements du CP vers le nord de la Saskatchewan ont été échangés contre ceux du sud de la province, ce qui a créé un gigantesque monopole. Voilà la situation existante.

Je ne crois pas vraiment que le ministre des Transports, celui de l'Agriculture et l'unique député ministériel de la province qui est responsable de la Commission canadienne du blé soient même au courant de l'existence d'un tel monopole dans les Prairies. C'est un zéro plus pour les agriculteurs de l'Ouest. Voilà ce qui s'est produit.

Je voudrais aborder un instant la situation dans laquelle se trouve le juge en chef.

 

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Je sais que les sociétés ferroviaires ne m'aiment pas, contrairement aux producteurs, mais ce sont ces derniers qui importent. Or, depuis cinq ans, les administrateurs des sociétés ferroviaires se réunissent à huis clos et ils ont établi un monopole. Il y a le CN dans le nord de la province, sans aucune concurrence, et le CP dans le sud, sans aucune concurrence. Les sociétés céréalières ont décidé où seraient établis les divers terminaux. Les producteurs n'ont aucun choix quant aux acheteurs de leurs grains.

On parle de vivre sous un régime. Ils n'ont pas le choix de l'endroit où ils vont apporter leurs grains, et, dans le cadre de la commercialisation par la Commission canadienne du blé, ils n'ont pas le choix non plus de la façon dont leurs grains seront vendus. La situation dans les Prairies est devenue très grave.

Je voudrais vous donner des éléments d'information que je trouve très importants. Le Parti réformiste propose d'imposer par voie législative un moratoire sur l'abandon d'embranchements à l'ouest de Winnipeg. Qu'est-ce qui presse tant? Les embranchements existent. Ils sont en parfait état. Les élévateurs existent. Ralentissons donc un moment jusqu'à ce que nous nous rendions compte de la maladie que j'ai appelée terminalisation.

Selon l'article 43 de la Loi nationale sur les transports, les embranchements devraient être à l'abri de tout abandon durant au moins trois ans pour donner le temps d'examiner les projets de lignes ferroviaires sur courtes distances et de les mettre en oeuvre. Nous avons pris des mesures trop ambitieuses et trop rapides, et si l'on continue de le faire au rythme actuel, on peut abandonner les projets de ligne ferroviaire sur courtes distances. On en arrive au point où le dossier est clos. Ce ne sont pas les actionnaires ni les sociétés ferroviaires ni les sociétés céréalières, mais les producteurs qui souffriront des conséquences de l'inaction du gouvernement face à l'établissement de ce monopole.

Le CN et le CP publient sporadiquement des avis d'abandon de lignes de chemin de fer. Si cela se produit, aucune ligne de chemin de fer ne sera fonctionnelle dans la moitié ouest de ma circonscription d'ici l'an 2000. Il n'y en aura pas une seule. Tout sera supprimé. Par la même occasion, la plupart des subdivisions sont à vendre et ne seraient pas rentables pour des lignes ferroviaires sur courtes distances à cause de l'abandon des lignes de chemin de fer. Il n'y a pas de place pour le transport routier.

Il y a, dans le journal, une caricature montrant une ligne principale qui est interrompue car toute une série de lignes secondaires qui s'y rattachent ont été fermées. Les lignes sur courtes distances ne sont plus à la mode. Le monopole des chemins de fer et des entreprises céréalières a déjà eu ses effets. La plupart des lignes secondaires sont menacées en Saskatchewan.

Le député de Souris—Brandon a fait allusion à cela, mais je tiens à dire qu'il n'y a pas d'endroit où le réseau routier public soit plus sens dessus dessous qu'en Saskatchewan. Les compagnies ferroviaires et les entreprises céréalières se sont entendues sur une tactique pour éliminer les lignes secondaires le plus rapidement possible et pour concentrer les installations d'entreposage dans les terminaux céréaliers à grande capacité des lignes principales. Cela ne serait pas mauvais si les agriculteurs, les véritables parties concernées, avaient voix au chapitre.

Comme il n'existe pas de concurrence dans le secteur ferroviaire dans l'ouest du Canada, il est faux de prétendre qu'en surveillant le processus d'abandon, on intervient dans le libre marché. Quelle blague! Il n'y a pas de libre marché. Les Canadiens, notamment ceux de l'est de notre pays, reconnaissent sûrement qu'il n'existe pas de libre marché pour les agriculteurs de l'ouest du Canada.

Les exploitations agricoles de grande envergure de l'ouest de notre pays ne se seraient pas développées sans les fonds qui, dans le passé, ont été injectés, à tort ou à raison, dans les chemins de fer.

Compte tenu du temps qu'il me reste, je veux signaler quelque chose que le gouvernement devrait savoir. On a déjà évalué que les émissions dans l'atmosphère que l'on produira pour acheminer les céréales à un terminal seront l'équivalent d'entre trois et huit fois celles produites par le transport ferroviaire. Je crois fermement les conclusions de tous les rapports en ce sens. Il est certainement plus polluant d'acheminer des céréales à des terminaux par le biais de routes qui n'existent pas.

 

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Au moins la moitié des villages de ma circonscription ont totalement disparu depuis 30 ans. À certains endroits, il n'y a plus de vieux magasin, d'élévateur, de bureau de poste ou même de casiers postaux indiquant l'endroit où se trouvaient les localités. Les petites villes qui restent se sont stabilisées et fournissent des services essentiels à l'Ouest. Cependant, bon nombre d'entre elles disparaîtront si nous poursuivons l'abandon généralisé des lignes et la trahison des agriculteurs de l'ouest du Canada.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends aujourd'hui la parole au nom du caucus néo-démocrate au sujet de la motion concernant la crise dans le transport du grain de l'Ouest que propose le député de Brandon—Souris. Nous devons nous efforcer d'y trouver des solutions pratiques.

J'ai entendu le motionnaire regretter que sa motion ne puisse pas faire l'objet d'un vote, mais on peut certes prendre des mesures pour y donner suite. Le gouvernement a trouvé bon de prendre des mesures. Comme des intervenants l'on déjà signalé, le gouvernement a chargé le juge à la retraite Willard Estey d'examiner la crise du transport du grain. Nous nous réjouissons de cette nomination. Le juge Estey est un éminent Canadien et il a été un juriste distingué au niveau de la Cour suprême. Natif de la Saskatchewan, il sait instinctivement à quel point le transport du grain est important pour notre vaste province enclavée.

Dans une entrevue qu'il a récemment accordée au Western Producer, le juge Estey a dit ceci: «Vous savez que ma famille est implantée dans l'Ouest depuis une centaine d'années; je ne me rappelle pas avoir jamais vu les quatre provinces de l'Ouest s'entendre sur quoi que ce soit sauf sur ceci aujourd'hui». Le député de Souris—Moose Mountain a signalé que les quatre provinces s'entendent sur la nécessité d'examiner d'urgence le système de transport du grain.

En 1975, le gouvernement fédéral a chargé une commission royale d'enquête d'examiner le transport ferroviaire des céréales dans l'ouest du Canada. La commission était présidée par un collègue de M. Estey, feu l'honorable juge Emmett Hall. À l'époque, le juge Hall avait été encouragé par les sociétés ferroviaires à s'orienter vers une déréglementation. Il a eu la sagesse de ne pas donner suite à leurs recommandations. Il a insisté pour qu'il y ait une certaine réglementation dans le système du transport du grain.

Nous avons un problème historique, un problème qui se pose à nous depuis les premiers temps de la colonisation agricole de l'Ouest. Les agriculteurs cultivent des céréales qu'ils doivent expédier vers le marché. Pour transporter le grain avec efficacité et efficience dans l'Ouest, qui est enclavé, il faut pouvoir compter sur les chemins de fer, comme d'autres députés l'ont dit.

Les chemins de fer ont en réalité le monopole, ou au moins un duopole, composé du CN et de CP, dans le transport du grain entre l'exploitation agricole et la mer, sur des centaines et des milliers de kilomètres. De l'époque de sir John A. Macdonald jusqu'à nos jours, les sociétés ferroviaires ont toujours eu à leur merci les agriculteurs et les collectivités rurales. Une grande partie de l'histoire de l'ouest du Canada tourne autour des efforts des agriculteurs pour forcer les gouvernements à créer des institutions ou à prendre des règlements pour les protéger des conséquences de ce monopole.

Il y a une vingtaine d'années, M. Hall ne s'est pas laissé convaincre par ceux qui réclamaient la déréglementation du transport ferroviaire. Il savait que la seule chose qui puisse protéger les agriculteurs en pareilles circonstances était une forme ou l'autre de réglementation. Mais les gouvernements de Pierre Elliott Trudeau et de Brian Mulroney, et le gouvernement en place, se sont rendus aux arguments des chemins de fer. Ils ont commencé par renoncer au tarif du Nid-de-Corbeau, qui a été remplacé par la subvention du Nid-de-Corbeau. Puis, cette subvention est disparue au cours de la dernière législature, et les sociétés ferroviaires viennent d'obtenir le feu vert pour abandonner des lignes comme bon leur semble.

Je ne parle pas ici de situations hypothétiques. Je songe à la ligne qui dessert Eston et Elrose. Le député qui m'a précédé a parcouru la Saskatchewan à l'occasion de diverses campagnes électorales. Il connaît sûrement la région d'Elrose, de Dinsmore, de Beechy et d'Estonia.

 

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Dans cette région, les agriculteurs ont dû se mobiliser en décembre pour transporter leur grain, le CN leur ayant dit qu'il n'était pas question de venir le chercher. Permettez-moi de citer la ministre de la Voirie, chargée des transports en Saskatchewan. L'honorable Judy Bradley a déclaré:

    Le refus du CN de négocier de bonne foi avec le West Central Road and Rail Committee, est carrément inadmissible. Des localités vont perdre leur service ferroviaire non parce qu'il n'est pas rentable dans la région, mais parce qu'il ne permet pas de gonfler les bénéfices du CN et des compagnies céréalières. Ce n'est pas une réponse que la Saskatchewan puisse accepter.

Pendant que j'y suis, je félicite mon collègue, le député de Saskatoon—Rosetown—Biggar, qui a souligné que la société West Central R and R a dressé un excellent plan qui garantira la survie du chemin de fer tout en satisfaisant les agriculteurs. Il n'y a aucun motif valable pour que le CN le rejette.

Les provinces des Prairies ont beaucoup souffert à cause des modifications apportées à la réglementation fédérale des transports ferroviaires. On ne se contente pas d'abandonner des chemins de fer, on démantèle également les voies elles-mêmes. C'est une véritable politique de la terre brûlée.

J'ai écouté attentivement les échanges de la semaine dernière entre le député de Cypress Hills—Grasslands et le ministre des Transports. Le député demandait au gouvernement de reporter tout abandon de lignes jusqu'au dépôt du rapport Estey. Le ministre a débité beaucoup de lieux communs et a dit qu'il se pencherait sur la question, mais il avait la conviction que les sociétés ferroviaires n'abusaient pas de la situation.

Rien n'interdit à l'heure actuelle que le gouvernement émette une directive en vertu de laquelle aucun rail de chemin de fer ne sera enlevé d'ici le dépôt du rapport Estey. Tel le vrai problème. Si on abandonne une ligne de chemin de fer, on pourra toujours la remettre en service plus tard. Mais si on enlève les rails, le coût de remise en service deviendra prohibitif et la ligne sera perdue à jamais.

On voit des exemples dans bien des régions de la Saskatchewan et dans d'autres provinces. Les sociétés ferroviaires démantèlent de grandes portions de voies ferrées afin de s'assurer que les chemins de fer à intérêt local ne soient pas rentables, qu'il s'agisse d'Omnitrax ou d'autres concurrents qui voudraient prendre la relève du CN et du CP et transporter le grain à la baie d'Hudson ou ailleurs, jusqu'aux lignes principales. C'est une question fort importante. Le gouvernement pourrait et devrait intervenir immédiatement.

En outre, j'ai parlé de l'abandon du tarif du Nid-de-Corbeau et de la subvention du Nid-de-Corbeau. Nous avons vu ces dernières années que les chemins de fer ont doublé, voire triplé leurs tarifs de transport du grain. Parallèlement, ils ont démantelé les voies ferrées et fait porter aux agriculteurs le coût du transport sur de longues distances.

Ce ne sont pas les seuls frais que doivent payer les agriculteurs. Dans l'ouest du Canada, notamment en Saskatchewan, les routes secondaires—et nous avons l'un des réseaux routiers les plus étendus du monde compte tenu de notre population—n'ont pas été construites pour supporter le poids des très gros camions. Comme l'a souligné le député de Souris—Moose Mountain tout à l'heure, ces routes se détériorent parce qu'il faut transporter les céréales sur des distances toujours plus longues jusqu'aux silos géants.

Nous croyons que, après avoir rencontré brièvement les représentants des gouvernements des quatre provinces de l'Ouest et différents intervenants, M. Estey a bien commencé. Je suis d'accord avec lui lorsqu'il affirme qu'il peut et doit faire son examen parallèlement à l'instruction de la plainte portée par la Commission du blé contre la société ferroviaire. Je ne crois pas, comme le député de Brandon—Souris, que la plainte de la commission doive être retirée. Il est évident que l'étude et l'instruction de la plainte peuvent se faire en même temps.

 

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En terminant, nous demandons à nouveau au gouvernement fédéral de mettre fin au démantèlement des voies ferrées tant que le juge Estey n'aura pas rendu son rapport. Peu importe le contenu de ce rapport d'étude sur le système de transport des céréales, le gouvernement doit faire en sorte qu'une juste part des profits d'un système amélioré puisse être rendue aux agriculteurs, donc à leurs collectivités.

Par ailleurs, nous devons nous demander quelles politiques et quels règlements sont nécessaires dans un contexte monopolistique où il n'y a pas de tradition de concurrence entre les sociétés ferroviaires.

Finalement, d'autres idées présentent un grand intérêt, notamment les droits d'utilisation conjointe des voies et la mise en place de petites sociétés ferroviaires d'intérêt local. Les compagnies de chemin de fer ont souvent fait échec aux efforts déployés par les producteurs de la Saskatchewan pour créer de petites sociétés ferroviaires.

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer à ce débat. Certains de mes collègues m'ont demandé en quoi cette question pouvait bien intéresser un député de la grande métropole de Mississauga. Le transport, qu'il s'agisse du transport du grain ou du réseau ferroviaire, est certes une question importante pour tous les Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

Lorsque je siégeais à l'assemblée législative de l'Ontario, j'ai parrainé un projet de loi d'initiative parlementaire pour essayer d'empêcher la disparition des chemins de fer d'intérêt local, ou CFIL, et d'aider à la prise de contrôle et à la privatisation des CFIL en prévoyant une exemption pour que les exploitants de CFIL ne soient pas assujettis aux obligations de successeur. Mon but était d'éliminer ainsi un problème très grave découlant du fait que les entreprises privées qui essayaient de faire l'acquisition de CFIL se voyaient obligées d'honorer jusqu'à 17 conventions collectives différentes, ce qui rendait le chemin de fer difficile à exploiter de façon rentable. C'est donc là un problème lié à notre réseau ferroviaire qui touche les Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

La production et la commercialisation du grain sont évidemment les secteurs clés de l'économie des Prairies. Ce sont aussi des secteurs importants dans bien d'autres localités partout au Canada.

Comme la majeure partie du grain et des produits du grain vient des Prairies, le système de transport et de manutention du grain doit être aussi efficace et fiable que possible pour réduire au minimum les coûts que doivent assumer les agriculteurs et pour répondre aux besoins des clients. Il s'agit d'un système très complexe qui compte différents intervenants.

Je vais donner ici quelques statistiques concernant le secteur du transport et de la manutention du grain pour aider à placer les choses dans leur contexte.

Il y a actuellement environ 120 000 titulaires de permis délivrés par la Commission canadienne du blé dans l'ouest du Canada. La production moyenne est d'environ 45 millions de tonnes, dont près de 60 p. 100 est exportée. Les agriculteurs transportent leur grain par camion sur une distance moyenne de 15 milles. Il y a environ 1 100 silos primaires répartis entre approximativement 900 points d'expédition dans le pays. Il y a plus de 13 000 milles de lignes de chemin de fer dans l'ouest du Canada, dont quelque 5 000 sont des lignes secondaires servant exclusivement au transport du grain.

Le grain des Prairies est exporté à partir de silos terminus—et pour étayer mon argument selon lequel il s'agit d'une question d'intérêt national—situés à Vancouver, Prince Rupert, Thunder Bay et Churchill. Il y a aussi des silos de transbordement à divers endroits sur le Saint-Laurent.

La réforme du transport du grain est l'une des nombreuses initiatives en matière de transport à avoir été mises en oeuvre au cours des dernières années. Nos politiques en matière de transport du grain doivent être réformées pour quatre grandes raisons.

Il fallait se conformer aux nouvelles règles du commerce mondial, qui imposent d'importantes restrictions relativement aux subventions qui faussent les échanges, comme les paiements en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest.

Une réforme était nécessaire pour créer un environnement d'exploitation moins rigide et mieux adapté et pour encourager l'établissement d'un système plus rapide, moins coûteux et plus efficace dans l'intérêt des agriculteurs, des expéditeurs et des sociétés ferroviaires. J'ajouterai que cela ne veut absolument pas dire, loin de là, qu'on a abandonné les agriculteurs des Prairies.

 

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Il importait aussi d'éliminer la discrimination au niveau des tarifs marchandises liés à la valeur ajoutée, à la diversification et à la croissance économique.

Dans le cadre de la lutte contre le déficit, le gouvernement voulait réduire les dépenses publiques en réorientant les budgets de dépenses vers des priorités liées à la croissance.

La réforme du transport du grain de l'Ouest comportait cinq volets.

Premièrement, les paiements de subventions versés aux sociétés ferroviaires en vertu de la LTGO ont été éliminés le 1er août 1995. Deuxièmement, le cadre législatif et réglementaire a été révisé de façon à favoriser un système plus efficace. Troisièmement, un paiement à titre gracieux de 1,6 milliard de dollars a été versé aux propriétaires de terres agricoles dans les Prairies, afin de tenir compte de l'incidence qu'a pu avoir l'élimination de la subvention sur la valeur des terres. Quatrièmement, un fonds d'adaptation de 300 millions de dollars a été mis sur pied afin d'aider à améliorer l'infrastructure agricole pour les agriculteurs touchés par la mise en commun des frais associés au transport et aussi pour l'industrie de la luzerne déshydratée. Cinquièmement, des garanties nouvelles et supplémentaires de crédits à l'exportation, jusqu'à concurrence d'un milliard de dollars, ont été fournies relativement aux ventes de céréales et aux exportations agroalimentaires à des acheteurs non gouvernementaux.

Le gouvernement s'est aussi retiré du secteur de la répartition des wagons et a confié cette responsabilité à un groupe de l'industrie chargé de l'attribution des wagons. Le gouvernement a encouragé l'industrie à inclure un représentant des producteurs au sein du groupe, de façon à faire participer le secteur privé à l'élaboration de la politique.

Même si la LTGO a été abolie, le gouvernement a continué de réglementer les tarifs marchandises maximums pour les expéditions qui étaient auparavant visées par cette loi.

En plus de procéder à la réforme du transport du grain de l'Ouest, le gouvernement a aussi commercialisé le CN et encouragé le renouveau du transport ferroviaire au Canada, en adoptant la nouvelle Loi sur les transports ferroviaires au Canada. Cette loi a permis de réduire ou d'éliminer les règlements inutiles qui gênaient la capacité des sociétés ferroviaires de soutenir la concurrence. Cette mesure législative a aussi créé un contexte plus commercial pour les chemins de fer et les expéditeurs, y compris les transporteurs sur des lignes secondaires.

Le gouvernement a apporté ces changements majeurs parce qu'il estimait que ceux-ci étaient dans les meilleurs intérêts des agriculteurs, des expéditeurs et des sociétés ferroviaires.

L'un des engagements pris lors de la réforme de la LTGO était de procéder à un examen législatif en 1999, afin d'évaluer l'incidence des dispositions de la Loi sur les transports ferroviaires au Canada, en ce qui a trait à l'efficacité du transport et de la manutention du grain, ainsi qu'au partage des gains réalisés au niveau de l'efficacité.

L'examen permettra aussi de voir s'il y aurait lieu d'éliminer les dispositions relatives aux tarifs maximums.

Le gouvernement a été prié de toutes parts de procéder à un examen hâtif de la situation, principalement en raison des problèmes éprouvés à cette époque-ci l'an dernier dans le transport du grain. Certains intervenants estiment que les difficultés liées à l'acheminement du grain sont symptomatiques de problèmes systémiques qui n'ont pas été réglés par les réformes précédentes.

Notre gouvernement a reconnu la nécessité de soumettre la question du grain à un examen anticipé. Comme on l'a dit, le ministre des Transports a nommé en décembre dernier le juge Willard Estey à la tête d'une commission d'enquête.

Le juge Estey a commencé à consulter les groupes de producteurs, les compagnies céréalières, les chemins de fer, les provinces et les autres parties intéressées ou touchées, qui l'ont reçu avec enthousiasme. Il compte sur l'appui soutenu des représentants des producteurs, de l'industrie et du gouvernement afin de circonscrire les problèmes et de trouver de façon concertée des solutions constructives.

En terminant, je crois que l'on agit actuellement dans le sens de que ce propose le député dans sa motion. Le gouvernement a fait tout son possible pour appuyer les producteurs de l'ouest et le système de transport du grain. Nous avons mis en oeuvre des réformes efficaces.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, la réticence du gouvernement à imposer un moratoire sur les démantèlements en cours d'ici à ce que l'étude menée par M. Estey soit terminée m'inquiète. Je me demande si nous de devrions pas y voir le signe que l'étude elle-même sert en quelque sorte d'écran de fumée destiné à détourner notre attention pendant que s'effectuent les démantèlements.

 

. 1200 + -

N'oublions pas le comité d'experts que le ministre de l'Agriculture d'alors avait chargé d'étudier la commercialisation du grain et la commission canadienne du blé. La première réaction du ministre, quand il a pris connaissance des conclusions de ces experts triés sur le volet, a été de les rejeter d'emblée. «Oubliez ça. Nous allons faire à notre tête.»

Qu'est-ce qui nous dit que le gouvernement n'a pas l'intention de faire le même sort au travail de la commission Estey?

Le Président: La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant terminée, et l'ordre est rayé du Feuilleton.

*  *  *

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE MINISTRE RESPONSABLE DE LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ—DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Comme le député de Prince George—Peace River est parmi nous, je voudrais rendre ma décision avant de passer à l'ordre du jour.

[Français]

Je suis maintenant prêt à aborder le sujet soulevé le mardi 3 février 1998 par le député de Prince George—Peace River au sujet de l'anticipation de la décision de cette Chambre au sujet du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé, par le ministre responsable de la Commission canadienne du blé.

[Traduction]

Je tiens à remercier tous les députés qui ont pris la parole sur cette question. Je remercie également le ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé d'être revenu à la Chambre, le mardi 5 février, pour donner sa version des faits.

Le député de Prince George—Peace River a soutenu que le ministre et ses fonctionnaires ont commis des gestes qui constituent un outrage à la Chambre en tenant une réunion pour discuter de la mise en oeuvre du projet de loi C-4, anticipant ainsi sur la décision de la Chambre et allant aussi à l'encontre des décisions antérieures de la présidence sur des cas d'anticipation.

[Français]

Pour sa part, le ministre a nié avoir anticipé sur le sort du projet de loi C-4 et a affirmé qu'en discutant du projet de loi, il a essayé de faire comprendre clairement que la loi envisagée était encore devant la Chambre et qu'aucune décision définitive n'avait été prise.

[Traduction]

Ayant écouté les deux côtés, la présidence estime qu'elle est en présence d'un désaccord sur les faits. En raison des arguments soumis et vu la réponse du ministre, je dois conclure que, bien qu'il y ait là un sujet de débat, il n'y a pas, à première vue, atteinte au privilège.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 20 novembre 1997, du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement; et des motions nos 4 à 19.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Lorsque le débat sur le quatrième groupe d'amendements au projet de loi C-4 a été ajourné, le 20 novembre 1997, il y a eu accord avec tous les partis pour que, d'office, tous les amendements soient jugés recevables, lus par la présidence, proposés et appuyés. Il était aussi entendu que, à l'issue du débat, les amendements seraient automatiquement mis aux voix et le vote inscrit demandé. La Chambre a alors donné son consentement, et c'est l'entente qui avait cours en novembre.

Je veux m'assurer que l'entente tient toujours, au moment de poursuivre et de terminer le débat sur les amendements des groupes nos 4, 5, 6 et 7.

Le vice-président: Le député a tout à fait raison. L'ordre de la Chambre qui a été adopté valait pour le projet de loi à l'étape du rapport, et il vaut pour la poursuite de l'étape du rapport aujourd'hui. C'est ainsi que la présidence voit les choses et c'est là-dessus qu'elle guidera sa conduite.

En vertu de l'accord conclu le mercredi 19 novembre 1997, toutes les motions du groupe no 4 sont mises au voix si aucun autre député ne souhaite poursuivre le débat sur ce groupe.

 

. 1205 + -

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, avant que je ne parle de ce projet de loi, je voudrais soulever la question de privilège ou un point de fait si l'on veut. Peut-être pourriez-vous me guider au fur et à mesure sur ce que je devrais faire?

Comme les députés le savent, la Commission canadienne du blé m'envoie de belles lettres amicales. Je les apprécie toujours. Le problème, c'est qu'un tas d'agriculteurs dans ma circonscription perdent beaucoup d'argent à cause des frais de transport des marchandises et d'entreposage qu'on vient leur prendre sur leurs chèques.

Dans leur recours collectif, ces agriculteurs soutiennent que le Parlement devrait s'en occuper. Le Parlement n'en a rien fait, mais on sait maintenant que dans une affaire devant les tribunaux les 11, 12 et 13 novembre, au Manitoba, les représentants de la Commission canadienne du blé ont déclaré, sous serment, que la commission n'aurait pas dû déduire de frais de transport, d'entreposage ou de nettoyage des paiements versés à ces agriculteurs.

Cela représente environ 358 000 $ qu'on a déduits. Les députés ne sont pas sans savoir que ce projet de loi transfère la responsabilité du gouvernement aux syndicats. Que dois-je faire pour qu'on règle cette question comme il se doit?

Les tribunaux ont maintenant jugé qu'on avait déduit illégalement ces frais à ces agriculteurs, et pourtant, personne ne veut s'occuper de la question. Comment dois-je procéder?

Dans le cadre de cette même affaire judiciaire, l'agriculteur visé s'est vu confisquer le grain qu'il avait transporté illégalement aux États-Unis.

Le 2 février 1996, un des agriculteurs touchés en Saskatchewan a décidé de poursuivre le ministre du Revenu national et des Douanes sur la même question. Le gouvernement n'a même pas présenté de défense.

On dit très clairement dans ce document que le gouvernement doit présenter à la greffe de la Cour fédérale du Canada, au bureau local d'Ottawa, sa défense contre cette accusation. Il ne l'a jamais fait. Il a reconnu qu'il n'avait aucun argument valable dans cette affaire.

Le gouvernement poursuit toujours des agriculteurs aux termes de la même règle. Comment pouvons-nous adopter un projet de loi à la Chambre alors que la responsabilité est transférée du gouvernement au syndicat des agriculteurs lui-même?

J'ignore comment discuter de ce projet de loi. Je ne sais si je dois d'abord procéder, en tant que simple citoyen, à l'arrestation du Président ou des représentants du gouvernement, ou déposer des accusations criminelles. Comment traiter un projet de loi qui constitue en fait un outrage au tribunal? Le gouvernement n'a pas présenté de défense, mais il continue de poursuivre des agriculteurs.

Je voudrais profiter de votre sagesse pour savoir comment traiter cette question, monsieur le Président.

Le vice-président: La présidence ne doit pas être impliquée dans un conflit juridique. Je suis persuadé que le député et ses électeurs reçoivent d'excellents avis juridiques de gens très compétents et qu'ils continueront de pouvoir compter là-dessus.

Je peux lui garantir que le Parlement ne fait pas un outrage au tribunal en étudiant cette mesure. S'il veut parler du pour et du contre de ce projet de loi, je serai heureux de lui donner la parole à cette fin.

M. Jake E. Hoeppner: Monsieur le Président, je vous remercie de votre conseil. Je me demande s'il est consigné au compte rendu et s'il en sera tenu compte lors d'une étape ultérieure de l'examen de ce projet de loi.

Ce projet de loi fait passer la responsabilité du gouvernement aux syndicats des agriculteurs. Vous êtes en fait vous-même responsable lorsqu'il y a des procédures illégales que ce soit au civil ou au criminel.

Je voulais le faire remarquer à la Chambre pour m'assurer que vous soyiez au courant. Je savais que je pouvais compter sur votre jugement éclairé. Je voudrais qu'il soit consigné au compte rendu que vous avez pris bonne note de la question. Cela dit, j'aborde maintenant le débat sur le projet de loi C-4.

*  *  *

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement; et des motions nos 4 à 19.

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais demander le consentement unanime de la Chambre pour présenter les deux motions suivantes. La première est:  

    Que, sauf conventions contraires, pendant tous les jours désignés conformément à l'article 81 du Règlement, les députés feront leurs présentations tel que spécifié dans l'Ordre spécial respectant les jours désignés établis le 26 septembre 1997.

 

. 1210 + -

Cette motion régit les tours de parole des intervenants pendant la journée d'opposition de demain.

(La motion est adoptée.)

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, après consultation, je propose à la Chambre d'adopter sans débat la motion suivante:  

    Que, le lundi 9 février 1998, à l'heure habituelle de l'ajournement quotidien, les délibérations prévues par l'article 38 du Règlement n'aient pas lieu, mais qu'une motion d'ajournement soit réputée avoir été proposée et que ladite motion soit débattue aux conditions suivantes:

      a) Les députés désireux d'intervenir parleront de l'invitation faite au Canada par les États-Unis d'Amérique de participer à d'éventuelles actions militaires au Moyen-Orient;

      b) Aucun député ne parlera pendant plus de vingt minutes sans période réservée aux questions et aux observations et deux députés pourront partager une période de vingt minutes;

      c) Les motions dilatoires et les vérifications de quorum ne seront pas recevables;

      d) Après épuisement du débat faute d'intervenants, la motion sera réputée avoir été adoptée.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, des éclaircissements seraient peut-être utiles. Le député a dit qu'il y avait eu des consultations. Faut-il en conclure que tous les partis se sont entendus sur la façon dont le débat se déroulera ce soir?

L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je crois que c'est le cas et c'est la raison pour laquelle je demande le consentement, mais les députés peuvent donner leur point de vue personnel. Les leaders à la Chambre se sont réunis il y a environ une heure.

Le vice-président: Le leader du gouvernement à la Chambre a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion maintenant?

Une voix: Non.

Le vice-président: Il n'y a pas unanimité. Nous reprenons le débat. Le député de Portage—Lisgar a la parole.

*  *  *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, je prendrai la parole au sujet du quatrième groupe d'amendments au projet de loi C-4. Ces amendements concernent l'élection, le nombre et les fonctions des administrateurs.

Pourquoi les agriculteurs ne se fient-ils pas à la commission dont les membres sont en partie élus? C'est là le principal problème pour les agriculteurs de l'Ouest. À mon avis, la raison est simple: le ministre et le gouvernement n'ont pas écouté les agriculteurs de l'Ouest. Ils ont rédigé un projet de loi qu'ils veulent leur imposer afin de pouvoir mieux les contrôler pendant peut-être un autre demi-siècle. C'est une chose à laquelle les agriculteurs s'opposent énergiquement.

Le ministre n'est pas à l'écoute. Pourquoi? Moi-même, je n'ai pas de réponse. On sait que le ministre a passé au moins un an et demi à établir le processus de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest, qui devait consister à écouter, puis soumettre des recommandations au ministre sur le contenu du projet de loi.

J'ai suivi le déroulement du processus à la Chambre et dans le public et aucune de ces recommandations n'a jamais été acceptée ou appliquée dans le projet de loi C-4. C'est pour cette raison que les agriculteurs s'y opposent si vivement.

On se demande bien pourquoi le ministre n'est pas à l'écoute. C'est insensé. J'ai écouté le discours qu'il a fait l'autre jour en réponse au député de Prince George—Peace River qui avait soulevé la question de privilège.

La rencontre directe que j'ai tenue le 21 janvier avec les dirigeants de l'industrie agricole, la seule source de plainte dont dispose le Parti réformiste relativement à la soi-disant question de privilège, s'inscrivait dans le cadre d'une approche ouverte, concertée et transparente pour recueillir les opinions des producteurs.

 

. 1215 + -

Selon les comptes rendus de cette réunion, le ministre a exposé à ces agriculteurs le contenu du projet de loi et les aspects qu'il leur faudrait accepter. C'est plus ou moins pour cette raison que les participants ont quitté la réunion avant la fin. À ma connaissance, rares sont ceux qui sont demeurés sur les lieux pour entendre le ministre ou pour formuler leurs doléances.

À mon avis, plutôt que d'écouter, on préfère imposer sa volonté. Or, le gouvernement aurait intérêt à admettre que nous sommes ici pour représenter nos électeurs et non pour représenter Ottawa auprès des populations de nos circonscriptions.

Le ministre a dit encore ceci: «Dans son intervention, mardi dernier, le député de Yorkton—Melville a reconnu qu'il avait justement fait cela le lendemain de ma réunion. Le député de Portage—Lisgar a eu des réunions au sujet des détails du projet de loi C-4 et de nombreux autres réformistes ont fait de même. Leurs réunions extra-parlementaires pour discuter du projet de loi C-4 alors que la Chambre n'a toujours pas terminé son étude de cette mesure ne constituent pas une violation de privilège. Nos vis-à-vis ne sont pas coupables de violation de privilège et il en va de même de votre serviteur».

Le Président vient de statuer que c'est le cas, mais j'aimerais parler des réunions auxquelles j'ai assisté en Saskatchewan et en Alberta. Il y avait 600 personnes à celle de Weyburn. On avait invité le ministre à venir exposer ses vues, mais il n'était pas venu.

Quand on a demandé combien de personnes parmi l'assistance étaient en faveur d'un système de monopole des ventes, personne n'a levé la main. De 80 à 90 p. 100 des agriculteurs ont dit souhaiter un système mixte de commercialisation ou une commission du blé avec participation facultative. Or, il n'y a rien dans ce projet de loi qui permette la participation facultative à la commission du blé. Et c'est ce qui explique que le ministre ait tant de mal à se faire entendre des agriculteurs et à faire adopter cette mesure législative à la Chambre.

À l'issue de la réunion tenue à Yorkton—Melville, un producteur a écrit au ministre pour lui faire savoir que ç'avait été une des réunions les plus instructives auxquelles les agriculteurs de cette région aient jamais assisté. Il s'est déclaré très favorable à ce genre de réunion.

Devant l'absence du ministre et son refus d'entendre leurs doléances, les participants ont tenu un vote pour savoir combien d'entre eux étaient en faveur de la démission du ministre. Plus de 80 p. 100 ont levé la main pour indiquer que le ministre devrait démissionner parce qu'il ne représente pas les intérêts des agriculteurs de l'Ouest. On a depuis lors baptisé ce lieu la place rouge. C'est dire à quel point il se préoccupe de cette question.

J'ignore pourquoi le ministre, au lieu de se mettre à l'écoute des agriculteurs, préfère les poursuivre en justice.

En 1994, un groupe d'agriculteurs avaient exposé leurs doléances au ministre au sujet du blé gelé. Ces agriculteurs lui demandaient de vérifier pourquoi Sask Pool ou la Commission canadienne du blé vendaient le grain à moitié prix au Montana. Le ministre n'a pas réagi après la réunion et n'a jamais rien fait à ce sujet. Voici ce que le ministre a fait.

Il a exercé une confiscation d'une valeur énorme contre un agriculteur qui, dans le cadre d'une manifestation il y a deux ans, avait chargé 50 livres de blé dans sa camionnette pour traverser la frontière et aller en faire don à un club 4-H du Montana. L'agriculteur n'était pas au courant et a continué à se servir de la camionnette pour amener ses enfants à des parties de hockey au Montana. Il a aussi des intérêts dans des terres là-bas. L'ordonnance de confiscation continuait à monter. Sa camionnette d'une demi-tonne faisait l'objet d'une ordonnance de confiscation d'une valeur de 132 000 $.

C'est ainsi que le ministre traite ces agriculteurs de l'Ouest. Il n'est donc pas étonnant que les agriculteurs finissent par ressentir de l'animosité envers le ministre et son gouvernement. C'est signe que la démocratie à Ottawa ne fonctionne tout simplement pas. Quand je vois des agriculteurs mis à l'amende pour avoir transporté 50 livres d'orge aux États-Unis en signe de protestation tandis que d'autres vendent de la marijuana et de la cocaïne dans les rues sans recevoir ni amende ni peine de prison, je trouve qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond.

 

. 1220 + -

Tout ce que ces agriculteurs ont fait, c'est essayer d'obtenir un meilleur prix, de stimuler l'économie et d'assurer un meilleur niveau de vie qu'avant à ceux qui vivent de l'agriculture, mais ils sont mis à l'amende pour cela. C'est de cela qu'il s'agit dans ce projet de loi. Cette mesure est censée modifier la Commission canadienne du blé pour que les agriculteurs puissent profiter davantage de notre système démocratique et aient plus de choix. Or, c'est exactement le contraire.

L'un des anciens commissaires de la Commission du blé a dit, quand on l'a interrogé, que les choses devenaient plus secrètes. Les commissaires de l'ancienne commission avaient au moins le pouvoir de renverser certaines recommandations du ministre ou du Parlement. Or, le ministre aura désormais le pouvoir de congédier et d'embaucher à son bon plaisir. Est-ce démocratique? Ce sont pourtant les changements que fait le gouvernement.

Il est très important que le gouvernement ne fasse pas qu'écouter les agriculteurs de l'Ouest. Si le gouvernement nous impose un système de commercialisation comme celui-ci, qui lui permet de nous obliger à lui vendre notre grain au prix qu'il dicte, pourquoi ne fait-il pas de même avec les REER? C'est la même chose.

Tous les systèmes de commercialisation sont en danger si ce genre de projet de loi est adopté par la Chambre. Il est de la plus haute importance qu'il soit rejeté. Mais, comme les députés libéraux de l'arrière-ban sont sous les ordres de ceux des banquettes de devant, ou du Cabinet, je n'ai aucun espoir que cela puisse arriver. Il faudra donc que, aux prochaines élections fédérales, les agriculteurs de l'Ouest s'arrangent pour qu'on n'élise pas un gouvernement libéral, faute de quoi ils seront dépendants de ce genre de projet de loi pendant le prochain demi-siècle.

C'est la raison pour laquelle ce projet de loi soulève tant d'opposition dans l'Ouest. Il ne s'agit pas seulement de commercialisation du grain, mais également de liberté et de droit à la propriété. C'est ce qui me surprend dans certaines provinces de l'Ouest. Elles sont prêtes à contester la législation sur les armes à feu devant les tribunaux afin de protéger le droit des citoyens à décider d'enregistrer ou non leurs armes à feu. Mais elles n'ont pas le courage de tenir tête au gouvernement fédéral et de lui dire: «Ce grain appartient aux agriculteurs qui l'ont cultivé. Ils ont le droit d'en tirer profit. Ils ont le droit de le vendre au meilleur prix possible.»

C'est comme ça que fonctionne la démocratie. De bas en haut. La démocratie fonctionne lorsque les parlementaires écoutent les gens qui les ont élus. Dans une dictature, c'est l'inverse. Une dictature fonctionne lorsque le gouvernement dicte au peuple quoi faire et comment le faire.

Monsieur le Président, j'espère que vous avez bien écouté et que vous avez pris mes propos au sérieux. J'espère que vous voterez contre votre gouvernement et que vous ferez ce qu'il convient de faire.

Le vice-président: Je suis certain que le député ne voulait pas inciter le Président à indiquer sa préférence pour un côté ou pour l'autre.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, honorables députés, je suis heureuse de pouvoir parler du groupe de motions concernant le projet de loi C-4.

Je ne suis pas une productrice de l'Ouest, je ne suis pas députée de l'Ouest, mais je suis productrice de l'Ontario. J'ai eu le privilège de faire partie du comité lorsqu'il a tenu ses audiences au sujet de la Commission canadienne du blé.

Les motions de ce groupe proposent un certain nombre de méthodes de rechange en ce qui concerne l'organisation sociale de la Commission canadienne du blé. En vertu du projet de loi C-4, il y aurait un conseil d'administration de 15 membres, soit 10 élus par les producteurs et 5, dont le président, nommés par le gouverneur en conseil. Le gouverneur en conseil nommerait le président sur la recommandation du ministre, une fois que celui-ci aura consulté le reste du conseil d'administration.

L'objectif de la loi est de remettre le processus de décision entre les mains des producteurs et je peux en attester. Toutefois, le gouvernement fédéral a de grands intérêts en jeu.

Il continuera de fournir à la Commission canadienne du blé des garanties financières substantielles. C'est de l'argent des contribuables. Il garantira les paiements initiaux. Il garantira les ventes effectuées en vertu du Programme de vente de céréales à crédit. Il continuera de garantir les emprunts courants de 5 à 6 milliards de dollars de la Commission canadienne du blé.

 

. 1225 + -

Quand à la Commission canadienne du blé, elle continuera également de remplir des fonctions de politique gouvernementale, comme délivrer des permis d'exportation. C'est pourquoi le gouvernement doit conserver un rôle direct en nommant le président ainsi qu'une minorité de membres du conseil d'administration.

J'aimerais insister sur le fait que le gouvernement comprend bien l'importance d'une CCB qui soit responsable devant les producteurs.

Le projet de loi C-4 précise déjà que le conseil d'administration, dont les deux tiers des membres devront être élus par les agriculteurs, devra décider de la rémunération du président. La loi précise également que le ministre ne peut pas nommer un président sans d'abord consulter le conseil. Le conseil pourra revoir le rendement du président et recommander sa révocation si ses membres sont d'avis que son rendement est insuffisant.

Le projet de loi C-4 confie au gouverneur en conseil la décision finale concernant la révocation du président. Toutefois, il est bien évident que le conseil d'administration disposerait de plusieurs moyens pour faire connaître son mécontentement et il serait certainement très difficile pour un président de demeurer en fonction sans l'appui du conseil d'administration.

En résumé, on peut dire que les pouvoirs du gouvernement de nommer et de licencier ne réduisent en rien l'influence du conseil d'administration sur le directeur général.

Il y a une autre raison qui justifie les nominations effectuées par le gouvernement au conseil d'administration. Elle a trait aux bonnes pratiques de gestion, qui veulent que certains administrateurs de l'extérieur aient une expérience commerciale dans les domaines de la gestion, des finances et de la mise en marché. On peut y arriver en chargeant le gouverneur en conseil de nommer une minorité d'administrateurs. Il est important de noter que tous les administrateurs, qu'ils soient élus ou nommés, ont un statut égal et qu'ils ont les mêmes fonctions et les mêmes responsabilités.

On peut très bien comprendre le désir de certains de limiter les dépenses des candidats en ce qui a trait aux élections au conseil d'administration et de définir précisément les règles régissant leur élection. Toutefois, ce sont là des points qui devraient être traités dans le règlement et non la loi comme telle. Si on devait inclure ces points dans la loi, il faudrait alors soumettre la question au Parlement chaque fois qu'on voudrait y apporter une modification, par exemple pour augmenter le plafond des dépenses des candidats. Il est beaucoup plus facile de modifier un règlement pour répondre aux situations courantes.

Je voudrais maintenant attirer l'attention de la Chambre sur quelques questions qui ont constamment été posées au comité, tant à Ottawa que lors de ses déplacements dans l'Ouest.

Une des questions les plus fréquemment posées était: La Commission canadienne du blé aura-t-elle davantage de comptes à rendre aux agriculteurs? La réponse est oui. Pour la première fois dans l'histoire, la Commission canadienne du blé sera dirigée par un conseil d'administration. Il y aura en tout 15 administrateurs.

Les agriculteurs auront la mainmise sur leur office de commercialisation en élisant directement 10 de leurs administrateurs, une majorité des deux tiers. Les administrateurs élus exprimeront les opinions des agriculteurs et les décisions de la Commission canadienne du blé seront prises par ceux qui devraient les prendre. On demandera aux administrateurs de rendre des comptes aux producteurs. En fin de compte, si les producteurs ne sont pas satisfaits des activités de la Commission canadienne du blé, ils pourront remplacer les administrateurs au cours d'élections ultérieures.

Une autre question qu'on a posée fréquemment était: Les administrateurs auront-ils entièrement accès à tous les renseignements de la Commission canadienne du blé? Là encore, la réponse est oui. Tous les administrateurs auront un accès complet à toutes les données et à tous les chiffres de la Commission canadienne du blé, y compris, mais sans s'y limiter, aux états financiers entièrement vérifiés. Ils pourront examiner les prix auxquels les céréales sont vendues, les bonifications obtenues, tous les coûts d'exploitation et la mesure dans laquelle la Commission canadienne du blé est efficace.

Forts de leur connaissance complète de la Commission canadienne du blé et de la façon dont elle soutient la concurrence à l'étranger, les administrateurs seront les mieux en mesure d'évaluer les renseignements qui devraient être rendus publics et ceux qui devraient demeurer confidentiels pour des raisons commerciales.

Il importe de noter que le projet de loi C-4 donnera aux agriculteurs un plus grand rôle dans les décisions à venir au sujet de leur système de commercialisation et offrira aux agriculteurs, et non à des bureaucrates, un mécanisme leur permettant de faire de nombreuses innovations de toutes sortes en ce qui concerne la commercialisation.

Malheureusement, comme les amendements proposés dans ce groupe ne contribueront pas à atteindre cet objectif, ils ne peuvent recevoir l'appui du gouvernement.

 

. 1230 + -

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, je suis très fier d'intervenir dans le débat portant sur ce groupe d'amendements au projet de loi C-4.

Quand j'étais dans ma circonscription, pendant le congé de Noël, j'ai décidé de rendre visite à des groupes qui étaient très favorables à la Commission canadienne du blé, et qui le sont restés, dans une certaine mesure, jusqu'à maintenant. J'ai été renversé de constater les différences qui se manifestaient même entre ceux qui croyaient fermement dans le principe de la commission du blé et de constater le sentiment qui se développe dans les Prairies et la raison pour laquelle les agriculteurs appuient les amendements que le Parti réformiste propose d'apporter au projet de loi C-4.

Il y a quelque chose de fondamental qui cloche actuellement avec la Commission canadienne du blé. En complétant le tracé de la lettre C, on obtient un O. Pour de nombreux Canadiens de l'Ouest, il ne s'agit pas de la Commission canadienne du blé, mais de la Commission du blé d'Ottawa. Ils sont d'avis que la commission n'est pas dans les Prairies, dans la région où ils cultivent du grain, mais bien dans la capitale lointaine d'Ottawa qui règle le mode de vie des producteurs des Prairies. Ils ont peut-être raison.

Tout d'abord, c'est Ottawa qui fait les lois régissant la Commission canadienne du blé.

Au cours des débats sur les deux questions concernant les écoles—soit celles du Québec et celles de Terre-Neuve—un député d'en face m'a demandé de quel droit j'osais prendre la parole sur un projet de loi portant sur les écoles de Terre-Neuve. J'inverse la situation aujourd'hui concernant toute décision sur le projet de loi à l'étude.

Un député a dit plus tôt que la mesure sera probablement adoptée. Il suffit de regarder la représentation des régions intéressées par la rédaction de cette mesure. Regardons simplement le nombre des députés qui représentent les producteurs de grain. Je viens d'une région totalement agricole, comme mon collègue qui est déjà intervenu et mon autre collègue qui me suivra vraisemblablement.

Voilà ceux qu'il faudrait écouter. Au lieu de cela, ce sont des gens d'Ottawa qui ont mis en place la Commission canadienne du blé et légifèrent à son égard. Toute modification nécessaire devrait venir de l'Ouest, où se trouvent les producteurs.

Si seulement le gouvernement écoutait—ce qu'il n'a pas fait jusqu'à maintenant—, il suivrait les conseils des députés de ce côté-ci de la Chambre.

Les décisions rendues par les tribunaux depuis deux ans se résument finalement à une déclaration, qui est extrêmement dangereuse. Non seulement cette déclaration est dangereuse, mais elle soulève beaucoup de ressentiment chez les producteurs. Dans tous les procès entre les agriculteurs et la Commission canadienne du blé, cette dernière a conclu son argumentation de la manière suivente. Je prie les députés de bien écouter car je cite plus ou moins ce qui a été dit. La Commission canadienne du blé relève exclusivement du gouvernement du Canada et non des producteurs. C'est ça le jugement qui a été rendu.

Si le gouvernement écoutait ce que nous disons et ce que les autres organismes lui disent, il rédigerait un projet de loi de telle sorte que la commission du blé soit véritablement à l'écoute des producteurs.

La Commission canadienne du blé est contrôlée par Ottawa. Elle est créée par une loi fédérale. Les tribunaux disent qu'elle n'a de comptes à rendre qu'au gouvernement.

Parlons maintenant de la façon dont son conseil d'administration est nommée. Là encore, c'est Ottawa qui nomme ses administrateurs. Les nominations se font ici. Si un administrateur mécontente un tant soit peu le ministre responsable de la commission du blé, il prend la porte.

Qui prend cette décision? Là encore, c'est à Ottawa que cela se fait. Les producteurs n'ont pas un mot à dire à ce sujet.

Ce que j'essaie de dire ici c'est que la nomination des administrateurs de la Commission canadienne du blé ne fait que créer un climat de méfiance dans l'ouest du Canada, et qu'il y a quelque chose qui ne va vraiment pas avec une commission de blé contrôlée par Ottawa.

 

. 1235 + -

Je vais vous donner un exemple. Il y a un projet de plusieurs millions de dollars à l'étude dans ma circonscription. Il concernerait probablement 150 producteurs dans une région où se cultive le meilleur blé dur au monde. Il ne s'en produit pas de meilleur nulle part dans le monde. Plus le blé dur est bon, plus les pâtes sont bonnes.

Ces producteurs voudraient établir une usine de pâtes sur le modèle d'une coopérative fermée. Les producteurs-propriétaires veulent pouvoir cultiver leur blé dur, l'apporter à cette usine et commercialiser leur produit sur le marché nord-américain. Ce projet ne pourrait être viable que si la Commission canadienne du blé s'adaptait à cette possibilité et décidait d'entrer vraiment dans le XXIe siècle. Les gens de l'Ouest ne veulent plus être considérés comme des coupeurs de bois et des puiseurs d'eau. D'après l'ancienne Commission canadienne du blé, il fallait tout sortir de l'Ouest. Or, nous voulons récolter les fruits de nos cultures.

Voilà pourquoi, en Saskatchewan, les producteurs de canola et de graines de colza et de tous les autres grains qui ne sont pas produits sous le régime de la Commission du blé ont une usine dans l'Ouest même pour transformer leurs grains. Ils n'apprécient pas du tout l'idée de clause d'inclusion qui pourrait les amener dans le giron de la commission et fermer leur usine.

Le gouvernement devrait retirer purement et simplement ce projet de loi déjà désuet pour le remanier, car ceux qui appuyaient le projet de loi dans son ensemble il y a quatre mois ne l'appuient plus du tout. Il ne vaut plus rien.

Tant que la Commission canadienne du blé et ses activités ne seront pas soumises à l'examen du vérificateur général, ce soupçon persistera. Il persistera tant et si bien qu'il provoquera de fortes perturbations; si le gouvernement ne le retire pas dès maintenant pour le remanier, la commission s'autodétruira avant même d'entrer dans le siècle à venir.

Nous ne voulons pas détruire la commercialisation des grains. Nous ne sommes plus en 1943, mais en 1998. L'Ouest veut être le producteur de certains de ses propres produits, mais cela lui est impossible tant que la Commission du blé d'Ottawa y fait obstacle.

Le gouvernement provincial de la Saskatchewan a toujours été favorable à ce monopole d'achat, mais quand il a voulu se lancer dans l'élevage du porc, il a constaté que l'orge était sous le contrôle de la Commission du blé; or, pour que son élevage de porcs soit rentable, il fallait que cette céréale échappe au contrôle de la Commission du blé. Cette permission lui fut accordée. Voilà ce qui s'est passé, sinon l'entreprise n'aurait pas été viable.

J'ai parlé de l'esprit d'entreprise des jeunes agriculteurs de la Saskatchewan et des autres provinces des Prairies. Ils répugnent à s'avancer et à prendre des initiatives, car la Commission du blé vient leur couper l'herbe sous les pieds.

Il y a actuellement une cause devant les tribunaux en Saskatchewan qui illustre très bien la situation. Il s'agit d'un groupe d'agriculteurs qui cultive des céréales organiques. Tous les Canadiens devraient écouter cette histoire. Ils cultivent leur grain et veulent le moudre eux-mêmes parce qu'il existe une demande pour ce grain partout en Amérique du Nord. Ils ne le peuvent pas. Ottawa a le bras long et, par sa Commission du blé, a déclaré qu'ils pouvaient moudre leur grain, mais qu'ils devaient payer une pénalité avant de pouvoir le vendre.

Le système est vétuste. Il est complètement dépassé. Il s'agit d'un secteur de plus de six milliards de dollars. Rejetons le projet de loi. Demandons aux producteurs de réformer complètement le système et l'ensemble du Canada en retirera des avantages.

Si le projet de loi est adopté, il n'apportera que des difficultés et des poursuites devant les tribunaux et il poussera certainement des producteurs à abandonner l'agriculture.

 

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M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'ignore si vous avez fréquenté le monde agricole ou si vous en connaissez beaucoup sur l'agriculture et la culture des céréales, mais c'est le sujet de notre débat. Si vous veniez en Saskatchewan voir comment se fait la moisson, vous verriez une très grosse machine appelée moissonneuse-batteuse passer dans les champs pour récolter les céréales.

Je voudrais raconter une petite histoire au sujet de cette machine pour voir si les députés en reconnaissent l'utilité pour nous. À l'avant de la moissonneuse-batteuse, il y a un rabatteur qui ramasse le blé ou l'orge et l'élève jusqu'à un cylindre qui bat les épis. Ces épis sont ensuite convoyés jusqu'au secoueur qui sépare les grains de la paille. Les grains tombent ensuite dans un van, puis sont élevés et emmagasinés.

Si quelqu'un avait une moissonneuse-batteuse qui, plutôt que d'emmagasiner le grain, le répandait simplement dans les champs, croyez-vous qu'il conserverait cette machine? Y a-t-il quelqu'un qui garderait une moissonneuse-batteuse qui recueille le grain puis le détruit en le répandant dans les champs? Bien sûr que non. Nous nous débarrasserions immédiatement d'une telle machine parce qu'elle ne serait d'aucune utilité pour la récolte.

Cette illustration s'applique aux gestes posés par le ministre responsable de la Commission canadienne du blé. J'ai choisi mon exemple pour que tout le monde comprenne à quel point nous nous retrouvons dans une situation ridicule.

Depuis quatre ans, le gouvernement et le ministre parcourent les provinces des Prairies et recueillent des propos sages et des renseignements sur la Commission du blé, tout comme la moissonneuse-batteuse cueille les céréales. Après avoir vanné et séparé les propositions ainsi recueillies, le ministre aurait dû incorporer les meilleures dans le projet de loi, mais il a simplement préféré les détruire et présenter à la Chambre une mesure législative tout à fait inacceptable.

Voilà un exemple qui illustre l'inefficacité du processus qu'on applique depuis quatre ans pour tenter de déterminer ce que nous devrions faire avec la Commission canadienne du blé.

Les agriculteurs nous ont fait part de nombreuses bonnes suggestions qui pourraient grandement contribuer à améliorer la commercialisation du grain au Canada, mais leurs idées ont été détruites par le gouvernement, tout comme la moissonneuse-batteuse dans l'exemple que je viens de donner détruit le grain, le rend irrécupérable et le disperse sur le sol.

Ce matin, je voudrais raconter aux députés ce qui s'est produit au cours du dernier mois en Saskatchewan, dans la province où je vis. C'est par hasard que le projet de loi C-4, dont nous sommes saisis aujourd'hui, n'a pas été adopté à toute vapeur à la Chambre. Il devait être adopté et entrer en vigueur avant Noël. Toutefois, comme de nombreuses autres questions urgentes devaient être réglées, son adoption a été retardée.

Cela nous a donné le temps, à nous, les députés, de retourner dans nos circonscriptions au mois de janvier et de demander à nos électeurs ce qu'ils pensaient du projet de loi C-4 et des amendements que nous avions proposés et qui nous avaient été soumis par les agriculteurs. En tant que député, j'ai passé au tamis toutes les suggestions qui nous avaient été faites et proposé des amendements au projet de loi C-4, en espérant que le gouvernement les examine.

Au cours des quatre dernières années, à cause de l'inertie du gouvernement, cette question s'est mise à diviser la collectivité agricole. Ce débat dure au Canada depuis longtemps. Bien des habitants du reste du Canada ne se rendent peut-être pas compte à quel point la question est importante et depuis combien de temps on la fait traîner.

L'incompétence du gouvernement est ressortie dans ce dossier probablement davantage que dans les autres affaires auxquelles je me suis intéressé. Le gouvernement a eu amplement l'occasion de régler ce problème, mais il n'a rien fait. Maintenant que le projet de loi C-4 a été présenté, je voudrais que le ministre réponde à une question. J'espère qu'il se présentera à la Chambre pour le faire. Qui représente-t-il quand il présente ce projet de loi? J'espère que le ministre viendra à la Chambre et qu'il nous dira qui il représente en déposant pareil projet de loi.

 

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La Commission canadienne du blé devrait donner suite aux demandes du plus grand nombre possible de producteurs. Elle n'est pas au service du ministre, du premier ministre ou des bureaucrates. Tel n'est pas son mandat. Et j'ai de bonnes raisons pour tenir pareils propos à cause de ce que j'ai vécu le mois dernier.

Pourquoi apporter à la Commission canadienne du blé des changements que les agriculteurs ne veulent pas? C'est pourquoi je voudrais que le ministre vienne à la Chambre pour répondre à cette question. Qui représente-t-il? À quoi sert d'apporter à la Commission canadienne du blé des modifications que les agriculteurs n'appuient pas?

Quel niveau d'insatisfaction devra-t-il être atteint avant que le ministre ne retire le projet de loi C-4? Faudra-t-il que 51 p. 100 des agriculteurs s'y opposent pour que le ministre le retire ou faudra-t-il que le taux d'opposants soit encore plus élevé, soit 66 p. 100, les deux tiers des agriculteurs, voire 75 p. 100? Faudra-t-il que le taux d'opposants soit de 80 p. 100, voire de 100 p. 100 pour que le ministre retire le projet de loi?

Je considère que c'est une question très importante. J'ai rencontré les agriculteurs de la Saskatchewan. Je leur ai demandé ce qu'ils pensaient du projet de loi C-4. Leur réponse a été sans équivoque. J'ai été plus loin. Je leur ai posé des questions au sujet de certaines des modifications proposées. J'ai proposé des amendements, qui se répartissent en trois simples catégories. J'ai demandé aux agriculteurs ce qu'ils pensaient de ces amendements.

Je vais dire publiquement au ministre ce que la population de la Saskatchewan a dit. J'ai proposé un amendement visant à modifier la Commission canadienne du blé pour qu'elle cesse de veiller à la régularisation du marché et s'occupe plutôt d'assurer le meilleur rendement financier possible aux agriculteurs. L'objectif que vise la commission à l'heure actuelle est périmé. Les agriculteurs n'en veulent pas. Ils veulent plutôt que la commission s'efforce de leur assurer le meilleur rendement financier possible. Cela ne semble-t-il pas raisonnable?

Monsieur le Président, savez-vous combien d'agriculteurs appuient cet amendement? C'est entre 96 et 97 p. 100. Pensons-y un instant. Le fait que le ministre ne tienne aucun compte de ce que 96 ou 97 p. 100 des producteurs sont favorables à cet amendement constitue un simulacre de démocratie, de justice ou de ce que l'on voudra. Je ne peux absolument pas comprendre pourquoi le ministre s'entête alors que le mécontentement suscité par le projet de loi C-4 est tellement grand.

Faut-il que ce soit 51 p. 100 ou 75 p. 100? Et si c'était 96 à 97 p. 100? Tous les Canadiens sont à l'écoute. Faisons quelque chose à propos de cette institution antidémocratique.

J'ai encore beaucoup à dire au sujet de l'assemblée que j'ai tenue dans Yorkton et où 300 agriculteurs impartiaux m'ont suggéré ce que je devais dire à la Chambre. J'ai besoin de temps et je profiterai de toutes les occasions possibles aujourd'hui pour exposer ce qu'ils m'ont recommandé de dire.

Je mets le ministre au défi de venir dire à un moment donné à la Chambre qui il représente. Pourquoi insiste-t-il pour faire adopter ici ce projet de loi qui reçoit si peu d'appui dans la population? Pourquoi n'approuve-t-il pas les amendements qui ont été présentés?

Il est essentiel pour les gens d'avoir confiance dans leur gouvernement, de voir que la démocratie fonctionne effectivement et d'avoir une commission du blé qui est forte pour tous.

 

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Le Président suppléant (M. McClelland): Nous débattons maintenant à l'étape du rapport le groupe no 4, qui a trait aux administrateurs et au président. Il ne serait donc pas mauvais que les députés s'en tiennent un peu plus au sujet.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je relève le défi en prenant la parole au sujet de l'élection des administrateurs de la nouvelle Commission canadienne du blé que propose de créer le ministre.

Toute cette question est d'abord et avant tout une affaire de contrôle, en ce sens que le gouvernement veut pouvoir continuer à nommer cinq administrateurs, soit le tiers des administrateurs de la Commission canadienne du blé. C'est une affaire de contrôle en ce sens que le ministre chargé de la Commission canadienne du blé veut en nommer le premier dirigeant.

Dans ma circonscription, comme dans le reste de l'Ouest, je crois, on parle de choix. On veut avoir le choix, mais le ministre n'écoute pas.

Mon collègue, le député de Yorkton—Melville, vient juste de nous dire à quel point les modifications que l'on propose d'apporter avec le projet de loi C-4 reçoivent peu d'appui. Ce n'est pas la première fois que le Parlement est saisi d'un tel projet de loi. Le projet de loi C-72 est mort au Feuilleton au cours de la dernière législature, lorsque les élections ont été déclenchées. Il n'avait obtenu aucun appui. Le ministre présente un autre projet de loi du même genre, mais encore pire. Il veut que les cultures nouvelles relèvent de la Commission canadienne du blé.

Comment cinq administrateurs nommés par le gouvernement vont-ils réussir à instaurer des changements alors que leur société sera encore une entreprise d'État et un monopole? Si c'est là tout ce que le gouvernement trouve à faire, il erre complètement. C'est un mauvais service à rendre à ceux qui veulent faire appel à la Commission canadienne du blé pour écouler leur produit et accepter un prix moyen.

C'est exactement ce que souhaitent une certaine proportion d'agriculteurs de l'ouest du Canada. Mais il y a aussi beaucoup d'agriculteurs dans l'Ouest qui ne veulent pas avoir recours à la Commission canadienne du blé. Ils veulent pouvoir choisir la façon dont ils commercialisent leurs céréales. Ils n'ont pas ce choix. En réalité, la disposition du projet de loi qui traite de la responsabilité de la Commission canadienne du blé laisse à désirer. On y dit que la Commission a des comptes à rendre au gouvernement, pas aux producteurs.

Mon collègue, le député de Yorkton—Melville, a demandé l'inclusion d'un préambule qui préciserait que l'objectif de la Commission canadienne du blé est de procurer le meilleur rendement financier possible aux producteurs, mais le gouvernement ne veut rien entendre.

Alors que le Parlement est saisi de ce projet de loi, le ministre responsable de la Commission canadienne du blé sait que les propositions d'amendement en ce sens n'ont pas été prises en considération. Nous nous apprêtions à examiner une quarantaine de motions lorsque nous avons interrompu nos travaux pour le congé de Noël. Pendant ce temps, le ministre est en Saskatchewan et rencontre les producteurs pour leur demander qui devraient être nommés au sein du nouveau conseil d'administration. Si ce n'est pas là du mépris pour les travaux du Parlement, je me demande bien ce que c'est. Cela m'empêche de m'acquitter de mes fonctions.

Par ailleurs, un des plus grands partisans de la Commission canadienne du blé est en train de se raviser. Le Sask Pool semble vouloir s'en dissocier. Il déserte le navire parce qu'il se rend compte que la situation change.

Le Western Producer est l'un des principaux journaux que lisent les agriculteurs de l'ouest du Canada. Le 29 janvier dernier, on pouvait y lire le titre suivant: «Manifestation des partisans de la Commission canadienne du blé pour dénoncer les modifications proposées». Un groupe de manifestants étaient à l'extérieur pendant que le ministre tenait sa rencontre clandestine visant à déterminer qui devrait faire partie du nouveau conseil d'administration de la Commission canadienne du blé. Ils scandaient «Goodale doit partir». Ces gens appuient la régularisation du marché. Ils voient des changements qu'ils estiment inacceptables. Rien ne détruira la Commission canadienne du blé plus rapidement qu'un ministre de l'Agriculture qui a l'arrogance de ne pas écouter les producteurs.

Qui a demandé cette mesure législative? Le Parti réformiste a mentionné il y a un certain temps que les agriculteurs devraient avoir un choix quant à la méthode de mise en marché de leur grain, que nous devrions garder la Commission canadienne du blé pour ceux qui veulent s'en servir, mais donner le choix à ceux qui n'en veulent pas. Nous avons également dit que, si nous devions avoir ce choix et si la Commission canadienne du blé devait continuer de fonctionner, un conseil d'administration composé de producteurs et d'agriculteurs serait une bonne idée. Mais les membres de ce conseil devraient être élus pour favoriser la responsabilisation. Le gouvernement ne devrait pas être autorisé à nommer un tiers des directeurs ainsi que le président, car il continuerait ainsi de contrôler la commission. Ce genre de conseil d'administration serait contrôlé par le ministre responsable de la Commission canadienne du blé, ce qui ne convient tout simplement pas aujourd'hui.

 

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C'est une question de responsabilisation. La Russie avait des entreprises commerciales d'État auparavant. Nous avons vu ce que les économies planifiées ont fait dans cette région du monde. Elles ont détruit la capacité des pays de produire suffisamment d'aliments pour nourrir leurs propres habitants, et c'est vers cela que nous nous dirigeons. Le Canada ne suit pas le reste du monde.

L'autre jour, à la Chambre, on a demandé au ministre du Commerce international pourquoi il appuyait l'accord sur les services financiers. Pourquoi appuyer un tel accord? Le ministre du Commerce international est le voisin de banquette du ministre responsable de la Commission canadienne du blé. Pendant qu'il nous expliquait pourquoi le Canada appuyait l'accord sur les services financiers signé à Genève, le ministre responsable de la Commission canadienne du blé était là à regarder son collègue et à l'applaudir jusqu'à ce que ce dernier soulève un point qui ne lui plaisait pas.

En réponse à cette question, le ministre du Commerce international a dit que la récente crise en Asie du Sud-Est et les réunions de l'APEC tenues à Vancouver avaient fait ressortir le besoin d'une transparence accrue relativement au fonctionnement de ces institutions. C'est effectivement ce dont nous avons besoin. Le FMI a dit aux pays de l'Asie du Sud-Est que, s'ils veulent recevoir de l'aide pour transformer leurs économies, ils doivent avoir plus de transparence dans les institutions comme les banques.

Le ministre responsable de la Commission canadienne du blé regardait son collègue, le ministre du Commerce international. Les gens semblaient perplexes. C'est le ministre qui ne veut pas assurer la transparence au sein de la Commission canadienne du blé. Il ne veut pas que le vérificateur général procède à un examen des registres de la Commission. Il ne veut pas que ces registres soient obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information ou de la Loi sur les secrets officiels. Quelle sorte de ministre responsable avons-nous? C'est lui qui va sonner le glas de la Commission canadienne du blé. Il y a des personnes qui ne seraient pas si tristes si cela devait se produire, mais elles sont très rares.

Les agriculteurs de l'Ouest respectent leurs compétences et leurs responsabilités respectives. Certains souhaitent commercialiser leur grain, ce que j'appuie sans réserve. Toutefois, je respecte aussi le désir de ceux qui veulent que la Commission canadienne du blé soit comme un compte commun et qui acceptent un rendement moyen. Il est possible de fonctionner des deux façons, mais pas si nous avons un ministre responsable de la Commission canadienne du blé qui apporte des changements tellement idiots à la Commission qu'il se met à dos tout le secteur agricole de l'Ouest.

Je joins ma voix à celle des protestataires à Regina, qui ont dit que le ministre responsable de la Commission canadienne du blé doit partir si l'on veut qu'une réforme digne de ce nom puisse être apportée à l'ensemble du système de manutention du grain.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet du groupe no 4 de motions se rapportant au projet de loi C-4 à l'étape du rapport. Mon intervention porte d'abord sur l'amendement qui propose que les membres du conseil soient tous élus. C'est ce que réclament presque unanimement les producteurs des Prairies. Le ministre propose que seulement la moitié des membres soient élus.

L'idée que cinq membres soient nommés et que des valets du parti siègent à un conseil qui est censé servir les intérêts des agriculteurs canadiens est absolument répugnante. Dans un tel conseil, il suffirait aux cinq membres nommés, sur lesquels le ministre peut compter, de se gagner l'appui de trois des dix membres élus pour faire ce qu'ils veulent avec la Commission canadienne du blé. Je ne connais pas beaucoup d'organismes qui fonctionnent de cette façon.

 

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Pourquoi le conseil ne serait-il pas élu à 100 p. 100 et habilité à élire ses propres dirigeants? Le ministre a-t-il perdu toute confiance dans la capacité des agriculteurs de gérer leurs propres affaires en raison de sa formation juridique? Les considère-t-il comme de simples serfs qui doivent s'incliner bien bas à l'approche de son éminence ou de ses bureaucrates? Les agriculteurs n'agissent pas de cette façon.

J'ai une petite anecdote personnelle à raconter. Le 20 janvier, j'ai assisté, à Swift Current, à une réunion de céréaliers organisée par la Commission canadienne du blé. La plupart des 200 producteurs présents étaient de chauds partisans, je dirais même des partisans inconditionnels de la commission. Le conférencier principal était M. Lorne Hehn, président de la Commission canadienne du blé.

Quelqu'un dans l'assemblée a proposé que celle-ci se déclare officiellement en faveur du retrait du projet de loi C-4; la très grande majorité des participants ont voté en faveur de la motion. Ces partisans de la commission, à une ou deux personnes près, ne veulent pas de ce projet de loi. Qu'est-ce à dire des résultats des fameuses consultations du ministre auprès des producteurs? Je voudrais bien savoir quels producteurs il a consultés et qu'est-ce qu'ils produisent au juste. Ce n'était sûrement pas des producteurs de grain.

Dans le plus récent sondage postal que j'ai mené auprès de mes électeurs—j'en ai fait une pratique courante car, contrairement aux gens d'en face, j'aime connaître l'opinion de mes électeurs sur les questions d'actualité—je posais une question bien précise, c'est-à-dire: «Voulez-vous que j'appuie le projet de loi C-4 ou que je m'y oppose?»

Les réponses continuent de rentrer. À ce jour, seulement 23 p. 100 des répondants disent souhaiter que je l'appuie. Le ministre sait très bien que la commission jouit d'un appui plus fort dans ma circonscription que n'importe où ailleurs dans l'Ouest. Cet appui ne vise cependant pas le ministre lui-même, ni son projet de loi mal conçu qu'il tente d'imposer de force aux agriculteurs.

Un autre amendement très important, qui aurait pour effet d'assurer le caractère démocratique de la commission, vise à faire en sorte que ce soit un conseil d'administration entièrement élu, et non pas le ministre, qui nomme le président. Les agriculteurs auraient ainsi une véritable influence sur le fonctionnement de la commission. En fin de compte, ce sont ceux qui administreront les affaires courantes de la commission qui prendront les décisions importantes.

Un président ne peut pas vraiment appliquer les directives d'un conseil d'administration élu par les agriculteurs si le ministre peut, à sa discrétion, le démettre de ses fonctions. Cela n'aurait aucun sens. Un président qui serait ainsi responsable devant le ministre ne pourrait pas agir dans les meilleurs intérêts de la Commission ou des producteurs. Il serait forcément à la merci du pouvoir discrétionnaire du ministre.

Je passe maintenant à la motion d'amendement no 18. Les administrateurs et les membres du conseil d'administration devront avoir pour première préoccupation de servir non pas les intérêts de la Commission, mais ceux des agriculteurs.

 

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Un tribunal du Manitoba a statué récemment que le conseil d'administration n'a pas de responsabilité fiduciaire envers les agriculteurs. Le tribunal a clairement dit que le conseil rend compte de ses activités à la Commission. Si nous nous en tenons à ces paramètres, la Commission devra à coup sûr être responsable devant les agriculteurs. Ses membres devront être choisis par les agriculteurs et parmi des agriculteurs. Autrement, nous perpétuerons une situation où la Commission sera l'ultime responsable et n'aura de responsabilité fiduciaire qu'envers le gouvernement.

Dans un tel contexte, la responsabilité de la Commission n'est pas d'obtenir le meilleur prix pour les agriculteurs, mais de vendre le grain en quantité aussi grande que possible et le plus rapidement possible. Voilà une façon plutôt absurde d'exploiter une entreprise commerciale.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler à nouveau du projet de loi C-4. Les agriculteurs de Dauphin—Swan River croient dans la Commission canadienne du blé, mais ils veulent qu'elle rende davantage de comptes. Ils pensent également qu'on doit offrir des options au producteur.

Les agriculteurs de Dauphin—Swan River souhaitent que non seulement la Commission canadienne du blé rende davantage de comptes, mais qu'elle soit également plus souple et plus transparente. Cela voudrait dire modifier le système actuel de nominations gouvernementales pour que tous les administrateurs de la commission soient élus et non simplement 10 sur 15.

La commission doit être davantage assujettie à la Loi sur l'accès à l'information. En d'autres termes, si les gens veulent de l'information, ils devraient avoir le droit de l'obtenir en présentant une demande à cette fin.

La commission devrait également faire l'objet de vérifications par le vérificateur général. Tous les intervenants qui m'ont précédé en ont parlé.

La loi actuelle maintient sans aucun doute les pouvoirs excessifs et l'influence excessive du ministre sur la Commission canadienne du blé, et cela doit changer.

L'agriculture est la pierre angulaire de l'économie de Dauphin—Swan River. Toute l'activité économique de Dauphin—Swan River dépend du bien-être économique des agriculteurs et de la collectivité agricole. Si un agriculteur a de l'argent dans ses poches, il est probable qu'il va le dépenser et que cela va profiter à la collectivité dans son ensemble. Cela va améliorer la vie en général pour tous les Manitobains ruraux vivant dans la circonscription de Dauphin—Swan River.

La leçon à tirer de tout cela, c'est que les gouvernements doivent apprendre à laisser davantage d'argent dans les poches des producteurs et des citoyens. Les administrateurs de la commission doivent faire tout en leur pouvoir pour mettre de l'argent dans les poches des producteurs qu'ils sont censés représenter.

Le 2 février, je me suis absenté de la Chambre pour assister à une réunion à Strathclair, au Manitoba. Elle portait sur la Commission canadienne du blé et le transport du grain. Des agents de la Commission canadienne du blé ainsi que des exportateurs d'autres produits céréaliers et des représentants du chemin de fer de la baie d'Hudson étaient présents à cette réunion.

La modification la plus importante qui s'est produite au cours de la dernière année a été la privatisation du chemin de fer de la baie d'Hudson et du port de Churchill. Comme je l'ai déjà dit à la Chambre, il est intéressant de constater qu'en 1930, le gouvernement avait prévu de transporter le grain en empruntant le plus court trajet vers les marchés et non pas simplement d'Est en Ouest comme cela se fait depuis plus de 60 ans.

C'est la raison pour laquelle on a construit le port de Churchill en 1930, c'est-à-dire il y a bien longtemps. Les distances n'ont pas changé. Aujourd'hui, le port de Churchill est toujours à 1 600 km de moins des marchés européens que Thunder Bay. C'est toujours par le port de Churchill que passent 25 p. 100 de la production canadienne de grain.

 

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Bien que ce soit un fait connu, cela n'a eu aucun impact sur les décisions que la Chambre et la Commission canadienne du blé ont prises ces soixante dernières années au sujet du transport du grain.

Il est difficile de croire que, même aujourd'hui, ces installations sont comme neuves, probablement en raison de leur sous-utilisation. Elles ont une capacité de stockage de 5 millions de boisseaux. Elles peuvent accueillir des navires qui vont en mer, des navires bien trop grands pour les ports de la région de Thunder Bay.

Le 2 février, les représentants de la Commission canadienne du blé réunis à Strathclair ont été absolument ravis d'apprendre aux gens la quantité de grain qui avait été expédiée à partir de ce port l'an dernier: 400 000 tonnes. Si l'on considère que plus de 30 millions de tonnes de grain sont produits dans l'ouest du Canada, 400 000 tonnes, ce n'est pas grand-chose.

Il est incontestable qu'il est moins cher d'expédier les produits agricoles par le port de Churchill. Les agriculteurs ne devraient plus être obligés d'acheminer leur grain ou leurs produits vers un port qui fait augmenter leurs frais de transport et les empêche de maximiser leurs profits. Ils doivent avoir le droit d'expédier leurs produits vers d'autres ports de leur choix. Actuellement, la Commission canadienne du blé le leur interdit.

La cession de la voie ferrée de la Baie d'Hudson à un chemin de fer à intérêt local devrait être considérée comme une bonne nouvelle. Pareillement, la cession du port de Churchill au secteur privé devrait être une bonne nouvelle pour le gouvernement.

Toutes les collectivités situées le long de la ligne secondaire dépendent de la viabilité non seulement de la ligne mais aussi du port. L'économie de la ville de Churchill dépend de l'activité du port. L'été dernier, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec le maire et les membres du conseil municipal de Churchill. Ils m'ont parlé de l'importance du port pour leur ville. S'il n'y avait pas de port, leur ville serait probablement rayée de la carte.

La voie ferrée amène des touristes. Elle amène à Churchill des touristes qui viennent voir le fameux ours polaire représenté sur les pièces de deux dollars. Cela ne peut continuer que si les produits agricoles continuent d'être acheminés vers le nord.

Je vais terminer en disant que le sort de la ligne de chemin de fer de la baie d'Hudson et du port de Churchill est entre les mains de la Commission canadienne du blé à cause des règles qui régissent le transport du grain produit dans les Prairies. L'avenir de ce court tronçon et du port dépend de l'acheminement du grain vers ce port.

À la réunion qui a eu lieu le 2 février à Strathclair, j'ai demandé des explications aux représentants de la Commission canadienne du blé. Si c'est au mieux des intérêts des agriculteurs d'acheminer le grain vers le port de Churchill et si cette proposition est plus rentable pour les agriculteurs, pourquoi alors la Commission canadienne du blé hésite-t-elle à acheminer le grain vers le port de Churchill? J'ai aussi défié les représentants de la commission de doubler ou de tripler leur volume de 1997, qui était de 400 000 tonnes.

Il est clair que la Commission canadienne du blé doit avoir plus de comptes à rendre aux agriculteurs canadiens. Ce projet de loi devra être modifié en profondeur avant que cela ne puisse se produire.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de joindre ma voix à celles de mes collègues à l'occasion du débat sur le projet de loi C-4, plus précisément à propos du quatrième groupe d'amendements.

La Commission canadienne du blé revêt une grande importance dans ma circonscription. À Lethbridge et dans les environs, voire partout dans les Prairies, les gens ont affaire à la commission du blé quotidiennement.

La commission du blé et le gouvernement ont fini par perdre contact avec la réalité. La commission semble oublier à qui il lui faut rendre des comptes et qui elle était censé servir à l'origine.

 

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Que l'on confie à la commission un véritable mandat émanant des producteurs et qu'on l'oblige enfin à rendre des comptes, et on verra la division qui règne actuellement dans ces milieux se dissiper en bonne partie. Les agriculteurs pourront alors reprendre leur vocation première, c'est-à-dire fournir de quoi manger aux Canadiens et à de nombreux autres citoyens du monde et gagner un revenu décent pour faire vivre leurs propres familles.

S'il y a des céréaliers qui souhaitent le démantèlement pur et simple de la Commission canadienne du blé, c'est parce qu'ils en ont assez de constater qu'on s'obstine à ne pas leur rendre des comptes et que les solutions de rechange satisfaisantes font défaut. Nous frisons l'impasse. Ou bien le ministre persiste à ignorer les doléances des producteurs, pendant qu'un certain nombre de céréaliers sont injustement condamnés à payer des amendes et à faire de la prison, ou bien il va retravailler ce projet de loi en lui apportant les importantes modifications que mes collègues ont proposées et donner suite aux recommandations des producteurs et du groupe d'étude de la commercialisation du grain de l'Ouest.

Les producteurs souhaitent que les membres du conseil d'administration soient tous élus. Pourquoi le gouvernement s'entête-t-il à faire la sourde oreille aux voeux de la majorité des agriculteurs? Le gouvernement libéral entend bousculer les règles de la démocratie en favorisant un système de vote auquel participeraient cinq administrateurs qu'il a lui-même nommés. Qu'est-ce que le gouvernement a à craindre d'un conseil d'administration qui se plie à toutes les règles de la démocratie et dont les membres sont tous élus? Si on veut que la voix des agriculteurs se fasse vraiment entendre, il nous faut un conseil d'administration efficace et, pour ce faire, ses membres doivent tous être élus. Avec cinq membres nommés et 10 membres élus, il suffit que 30 p. 100 des membres élus se rangent du côté des membres nommés pour qu'ils aient la majorité.

Le gouvernement a décidé de faire un choix sélectif parmi les recommandations issues du processus de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest, donnant la préférence aux recommandations qui lui conviennent et laissant de côté celles qui répondent aux besoins des producteurs. Le gouvernement libéral refuse d'abandonner la mainmise qu'il a sur la commercialisation du grain. Il est plus que temps que le gouvernement arrête de s'ingérer dans la commercialisation du grain et accordent aux producteurs les options qu'ils réclament depuis longtemps.

Avec le projet de loi C-4, le gouvernement démontre une fois de plus que ce n'est pas pour défendre les intérêts des producteurs qu'il s'occupe de la commercialisation du grain. Il est plus que temps que la commercialisation du grain se fasse avec bon sens, selon des principes de commercialisation sains, de façon à ce que les producteurs obtiennent le meilleur rendement possible pour leurs produits. Dans les autres industries on tolère rarement les monopoles, alors pourquoi les producteurs de grains font-ils exception à la règle? Cela prouve que le gouvernement et son ministre ne connaissent ni le Canada de l'ouest ni le monde des producteurs de grains.

La majorité des regroupements de producteurs opposés au projet de loi C-4 n'ont pas ménagé leurs efforts depuis la dernière fois que la Chambre a débattu cette mesure législative. Pendant le congé de décembre et janvier, nous avons tous assisté à de nombreuses réunions, et une majorité impressionnante de personnes veulent que ce projet de loi soit retiré et retravaillé. La liste des regroupements de producteurs qui n'ont cessé de faire pression sur le ministre pour qu'il prenne les amendements de l'opposition au sérieux est longue. Citons, entre autres, les producteurs de canola du Canada, les producteurs de canola du Manitoba, les producteurs de lin, les producteurs d'avoine, les producteurs de blé d'hiver de l'Alberta et les producteurs d'orge de l'Ouest.

Selon un groupe qui réclame la transparence à la Commission canadienne du blé, les contribuables canadiens, et ceci devrait intéresser tous les contribuables du Canada et non seulement les agriculteurs et les producteurs, ont accumulé une dette de 7 milliards de dollars, par l'entremise de la Commission canadienne du blé, et ont versé des millions de dollars pour soutenir les ventes de céréales à l'étranger afin que cette dette n'augmente pas. Même si la Commission canadienne du blé présente un rapport annuel, qui contient des renseignements limités, comme elle échappe à la Loi sur l'accès à l'information, les contribuables et les agriculteurs sont incapables d'évaluer eux-mêmes les activités et le rendement de la commission. Lorsque les producteurs nous demandent de confirmer ou d'infirmer certaines allégations, nous en sommes incapables, parce que les renseignements sont secrets.

Une analyse détaillée de la dette de 7 milliards et des transactions qui ont mené à cette dette est également réclamée. Le montant dû équivaut à 1 000 $ par famille type au Canada.

Le gouvernement n'a pas prouvé aux producteurs qu'il était prêt à leur être redevable, car il a refusé de créer une commission formée uniquement de membres élus par les producteurs. Il a plutôt insisté pour nommer les membres clés de la commission. En appui à la motion no 7 du groupe 4, je dirais que le projet de loi devrait être amendé afin que tous les membres de la commission soient élus, conformément aux souhaits exprimés par la majorité des agriculteurs. Par conséquent, le paragraphe 3.02(4) visé par la motion susmentionnée serait supprimé, puisqu'il ne serait plus nécessaire de préciser que le fait qu'un administrateur soit nommé ou élu est sans effet sur ses attributions.

Quant à la motion no 8, si le gouvernement refuse de créer une commission dont tous les membres seraient élus, le quorum aux réunions des administrateurs devra être des deux tiers des administrateurs, dont deux fois plus d'administrateurs élus que d'administrateurs nommés.

 

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La nécessité d'une telle motion est évidente mais, si le gouvernement pouvait simplement accepter le principe démocratique qui sous-tend l'idée d'un conseil entièrement élu, nous aurions une résolution qui servirait mieux les intérêts de nos producteurs.

Les amendements du groupe no 4, plus précisément les motions nos 9, 14, 15 et 17, visent à obtenir que l'embauche, la révocation et la supervision du président soient laissées entre les mains d'un conseil élu. Encore une fois, l'enjeu de la démocratie devrait avoir préséance sur les pouvoirs ministériels.

Si le gouvernement pouvait examiner le fonctionnement d'un tel amendement, son sens de la justice et de l'équité l'amènerait inévitablement à conclure que le président de la Commission canadienne du blé serait plus susceptible de rendre des comptes aux producteurs s'il était sous les ordres d'un conseil d'administration élu par les agriculteurs plutôt que sous la férule d'un ministre, celui-ci ne pouvant pas connaître mieux les intérêts des producteurs que les producteurs eux-mêmes. C'est faire insulte aux producteurs que de tirer toute autre conclusion.

Selon la simple logique, qui est le plus près des besoins des producteurs, un conseil d'administration élu, qui doit agir selon les voeux de ses pairs, ou un ministre déconnecté, à Ottawa, dont l'étendue des responsabilités dépasse grandement les intérêts des producteurs et dont certains aspects pourraient même entrer en conflit avec leurs intérêts? Laissons le travail quotidien d'une commission de commercialisation du grain à ceux qui oeuvrent dans le domaine.

Au nombre des amendements étudiés aujourd'hui, la motion no 10 doit être appuyée parce que les exploitations agricoles détenues par des propriétaires de différentes générations constituent la pierre angulaire de la communauté agricole, dans notre beau grand pays. C'est une question de respect et d'équité. Les votes des producteurs qui comptent exclusivement sur leur production agricole pour assurer leur subsistance et qui dépendent de la Commission canadienne du blé pour la mise en marché de leur grain doivent avoir une voix prépondérante, par rapport à ceux dont ce n'est pas le cas.

Pour revenir à la question de la participation du ministre par opposition à la voie démocratique, je veux maintenant parler des motions nos 11 et 12. Il faudrait éviter à tout prix que le ministre puisse avoir la haute main sur le déroulement du processus d'élection des administrateurs de la Commission du blé.

Le 21 janvier 1998, le ministre a montré son mépris de la démocratie à la Chambre des communes quand il a tenu une réunion à Regina pour discuter des règles d'élection des administrateurs du conseil d'administration de la Commission canadienne du blé, selon la proposition du projet de loi C-4. Cela montre bien le peu d'égards qu'il a envers le Parlement, puisque le débat sur le projet de loi n'est pas terminé et qu'il porte sur des amendements visant à déterminer le nombre d'administrateurs à élire.

Un certain nombre des groupes invités à la rencontre de Regina ont plaqué le ministre lorsqu'il a refusé de discuter de modifications au projet de loi C-4, et des agriculteurs protestaient dehors.

On ne peut faire fi de l'importance de la motion no 16. Elle est le principe directeur de la responsabilité en ce qui concerne les relations d'affaires. Le gouvernement libéral aura du mal à nier l'importance morale des modifications proposées dans les motions nos 16 et 19. Tous les députés devraient applaudir la proposition de faire de la Commission canadienne du blé un signataire du Code international de conduite des entreprises d'affaires canadiennes et de demander que les administrateurs et les agents de la commission fassent preuve de vigilance.

Je suis persuadé que tous mes collègues, sans égard à leur affiliation politique, appuieront des modifications qui font appel à des pratiques d'affaires responsables sur les plans moral, social et environnemental. Tout député qui votera contre des modifications aussi justifiées devra s'expliquer longuement devant ses électeurs.

En résumé, le gouvernement libéral a consacré du temps et des efforts considérables pour mettre sur pied un groupe de travail chargé de formuler des recommandations au sujet de l'élaboration du projet de loi C-4. Pourquoi n'a-t-il pas apaisé les doutes des producteurs et écarté les aspects de la Commission canadienne du blé qui suscitent des divisions?

Les familles des régions rurales du Canada, qu'elles soient pour ou contre dans cette question, méritent davantage que cet effort incomplet que représente le projet de loi C-4. Par souci de protéger les intérêts des producteurs canadiens, je recommande qu'on appuie toutes les modifications qui font passer la démocratie avant des pouvoirs ministériels considérables et qui assujettissent la Commission canadienne du blé à un code de conduite des entreprises d'affaires qui la tienne responsable sur les plans moral, social et environnemental.

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole en cette Chambre aujourd'hui en rapport avec les modifications proposées à la Loi sur la Commission canadienne du blé, soit le projet de loi C-4. Nous traitons aujourd'hui des motions du groupe no 4 qui doivent donner aux agriculteurs, les propriétaires des moyens de production—c'est-à-dire les terres et les machines—qui voudraient également devenir propriétaires du produit fini, la chance d'exercer un contrôle sur la seule organisation commerciale qui leur soit accessible, soit la Commission canadienne du blé.

Le gouvernement voudrait nous faire croire que tous les agriculteurs de l'ouest du Canada réclament à cor et à cri l'adhésion à cet organisme monopolistique qu'est la Commission canadienne du blé et qu'ils demandent que cette Commission conserve le contrôle sur la mise en marché. Il voudrait également nous faire croire que les agriculteurs veulent que le gouvernement fédéral maintienne son contrôle sur la commission du blé en nommant le président et quatre des administrateurs. On n'a toutefois pas entendu l'opinion des agriculteurs en ce qui a trait au contrôle qu'ils devraient exercer.

 

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J'aimerais rapporter ici l'histoire d'un de ces agriculteurs pour faire mieux comprendre aux députés ce que certains pensent de cette loi. M. Russ Torkelson, de la région de Weyburn, a décidé de se retirer de la seule façon qu'il lui était possible de le faire. Il ne fait plus la culture d'aucun produit commercialisé par la Commission canadienne du blé sur ses 4 000 acres de terre agricole.

Pourquoi M. Torkelson a-t-il décidé de se retirer du système de la Commission canadienne du blé? Parce qu'il était incapable de gérer ses risques et que ces derniers sont importants. Lorsque l'agriculteur fait les semailles, il n'a aucune idée du prix qu'il pourra tirer de ses récoltes en vertu du système de la Commission, mais il connaît bien les coûts des facteurs de production. Ces derniers varient de 65 à 100 ou même 105 dollars de l'acre, pour une moyenne d'environ 80 dollars de l'acre. Il est donc facile de comprendre ce que cela peut signifier pour le propriétaire de 4 000 acres de terres agricoles. Le coût de ses intrants est de 80 $ par acre, sans compter le coût de la machinerie, des bâtiments, des taxes et de l'entretien. Ce montant inclut les choses simples comme les graines, les engrais, les pesticides, les herbicides et le carburant.

Lorsque la commission fonctionnait comme elle le devait, il y a 30 ou 40 ans, les agriculteurs n'avaient pas besoin d'autant d'engrais qu'aujourd'hui. La terre s'épuise et les agriculteurs doivent remplacer les matières nutritives. Le coût des intrants est donc en augmentation. La Commission canadienne du blé ne semble pas comprendre que cela doit être payé, pourtant, les agriculteurs paient chaque fois qu'ils ensemencent.

Quel est le rendement de la terre? Environ 20 à 25 boisseaux à l'acre. Il faut un rendement valable des investissements. Les agriculteurs ne peuvent pas se permettre plus d'impondérables que ceux qu'ils ont déjà et qui échappent à leur contrôle, et certainement pas en ce qui concerne le prix de leur blé. Les impondérables devraient se limiter au temps, aux infestations et autres choses du genre. Cela ne devrait certainement pas comprendre le prix que les producteurs peuvent espérer pour leur blé. Quel autre genre d'entreprise au Canada fonctionne dans de telles conditions, existe-t-il une autre profession où une personne qui fournit un bien ou un service ne sait pas ce qu'elle va en obtenir? Les agriculteurs ont peu de contrôle, c'est le gouvernement qui décide qui siège au conseil.

Que fait M. Torkelson lorsqu'il cultive ses produits échappant à la Commission canadienne du blé, tel que l'avoine, le canola, le lin, les lentilles, les graines à canaris, etc? Disons en passant que ces cultures pourraient passer sous le contrôle de la Commission canadienne du blé, ce qui laisserait encore moins de contrôle sur les coûts.

Comment commercialise-t-il ces récoltes en l'absence de Commission canadienne? Il passe tout son hiver à vendre sur les marchés de Chicago et de Winnipeg. Il est en contact permanent, par ordinateur. Une fois la dernière récolte faite, il se consacre à la vente de la récolte de l'année prochaine. C'est ainsi qu'il gère ses risques.

Qui sait ce que fait une Commission du blé qui ne court aucun risque? Si le risque incombe au producteur, ce dernier doit être capable de le gérer par le truchement d'un conseil d'administration transparent et complètement responsable. Ce conseil d'administration ne devrait pas être établi par le gouvernement pour le gouvernement.

Quand un agriculteur produit du blé, il n'a aucun contrôle sur les coûts de base, qui sont établis par la Commission du blé et n'ont souvent aucun fondement dans la réalité. Qu'est-ce qu'un coût de base? Il s'agit du coût de transport après la livraison. Les grains peuvent n'avoir jamais quitté l'exploitation agricole si l'agriculteur fonctionne sous un régime de rachat, mais les coûts de base s'appliquent. Cela n'a pas de bon sens pour M. Torkelson.

Comme il ne fonctionne pas sous le régime de la Commission canadienne du blé, M. Torkelson est en mesure de négocier ses propres coûts de base, qui ont été inférieurs à ceux des grains produits sous le régime de la commission. Cette année, rien que pour le lin, ses coûts s'élevaient au dixième de ceux qui ont été établis par la commission. La différence va dans ses poches jusqu'à ce que le fisc aille chercher sa part.

Que peut-il faire d'autre hors de la Commission canadienne du blé? Il peut conclure indépendamment un prix avec un courtier de Winnipeg ou de Chicago. Cela présente un risque, mais c'est au propriétaire qu'il incombe. Il court le risque. Il a déjà couru un risque en faisant ses semailles. Il court maintenant un risque en vendant sa production. C'est sa terre, ses machines agricoles, sa production, son choix, son risque. Il estime que, si les producteurs contrôlaient la Commission canadienne du blé, comme le propose le Parti réformiste, elle pourrait être un véritable agent de vente pour les agriculteurs de l'Ouest. Dans les conditions actuelles, cependant, il a décidé de ne pas participer.

 

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M. Torkelson soutient la concurrence avec succès sur le marché nord-américain des céréales, sur le marché mondial en fait car il est en contact par ordinateur. Dans les conditions actuelles, comme beaucoup d'autres agriculteurs, il estime que la Commission canadienne du blé et les propositions de modification font l'affaire du gouvernement, non des agriculteurs, au service et pour le bien desquels la commission est censée travailler en leur obtenant les meilleurs prix possibles et non une commercialisation ordonnée, quoi que ce soit que cela signifie. Cette expression ne signifie pas grand-chose; la commercialisation ordonnée plutôt que l'obtention d'un bon prix. La commission ne se soucie pas de la façon dont les grains sont vendus; elle se préoccupe plutôt du montant qu'elle peut encaisser.

J'exhorte les ministériels à adopter les amendements du groupe no 4 actuellement à l'étude. C'est à cette condition que les agriculteurs appuieront la commission et participeront volontiers à la production de grains commercialisés par la Commission canadienne du blé.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, nouvellement arrivé à la Chambre, je n'ai pas encore eu beaucoup d'occasions d'intervenir. En le faisant sur le projet de loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé, en particulier sur les dispositions portant sur l'élection des administrateurs et sur les fonctions de ces derniers, permettez-moi de mentionner que ce dossier me touche directement et que je compte faire valoir une opinion personnelle en plus du point de vue de mes électeurs.

J'élève du bétail dans une région qui produit beaucoup de grain. Cette région se situe juste au nord de Winnipeg. Par conséquent, le sujet que je traite aujourd'hui me tient à coeur et peut avoir des répercussions sur mon porte-monnaie, ce qui n'est peut-être pas le cas de nombreux députés, surtout ceux d'en face.

Dans mon coin de pays, les agriculteurs veulent sans contredit le maintien d'une commission du blé. Cependant, ils ne veulent pas être forcés de vendre leurs produits uniquement à la Commission canadienne du blé. J'ai des propositions à faire sur la façon dont ces producteurs devraient être traités et sur le genre de commission que nous devrions mettre à la disposition des agriculteurs de l'ouest du Canada.

Il est un peu difficile de débattre le projet de loi sur la Commission canadienne du blé aujourd'hui, parce que cet organisme est actuellement contesté devant les tribunaux de Winnipeg par M. Dave Bryan, un agriculteur qui invoque la Constitution, de sorte que notre débat est peut-être inutile. Si le tribunal déclare que le fait de forcer les agriculteurs à vendre leur grain à la commission est contraire aux droits constitutionnels des agriculteurs, notre débat aura été inutile, je crois.

Le procureur de la Couronne dans cette affaire est un jeune avocat que je connais depuis quelques années. On a jugé qu'il n'était pas nécessaire de confier la cause à un procureur fédéral de haut niveau.

Pour revenir à l'élection des administrateurs et à leurs fonctions, je rappelle que l'objectif de la Commission canadienne du blé et de ses administrateurs est de veiller à ce que cette entité commerciale maximise le rendement des producteurs. Il est réellement question d'argent ici.

Bien sûr, le ministre chargé de la Commission canadienne du blé et certains de ses collègues d'en face, qui viennent surtout de l'Ontario, représentent leurs agriculteurs. Je ferai remarquer à la Chambre que ces agriculteurs ont produit quelque 1,3 million de tonnes de blé l'an dernier qu'ils n'ont pas expédié outre-mer. Ils ont acheminé ce blé vers des minoteries américaines et canadiennes. Pourquoi ont-ils fait cela?

Je peux montrer aux députés des revues agricoles de l'Ontario qui expliquent clairement que, si le blé n'est pas expédié outre-mer, c'est parce que les producteurs ont obtenu des prix plus avantageux de minoteries américaines et canadiennes. Ils ne veulent pas faire affaire avec la Commission canadienne du blé. Ils ne veulent pas être des administrateurs. Ils ne veulent absolument pas s'occuper de voir à ce que la commission du blé fonctionne bien. Pourquoi la commission du blé est-elle ce qu'elle est aujourd'hui? On se préoccupe de l'élection et des fonctions des administrateurs alors que, en fait, la commission du blé ne sert même pas les Canadiens de l'Ouest et ne veille même pas à maximiser leurs profits.

 

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Je le répète, les agriculteurs de notre région veulent avoir une commission du blé, mais ce qu'ils veulent, en fait, c'est une commission du blé du genre de la nouvelle génération de coopératives dont les membres, les agriculteurs qui font partie de l'organisation, de la commission du blé, des coopératives—appelez cela comme vous voudrez—sont là parce qu'ils veulent en faire partie. Lorsqu'on fait partie d'une organisation parce qu'on veut en faire partie, on s'assure qu'elle fonctionne bien et qu'elle assure des profits optimaux.

Le problème avec la commission du blé et les modifications qui sont présentées aujourd'hui, c'est qu'un nombre important d'agriculteurs ne veulent pas faire partie de la commission du blé. Il s'ensuit d'innombrables contestations judiciaires. J'ai entendu parler aujourd'hui d'un camion d'une demi-tonne à propos duquel Revenu Canada réclame 135 000 $ ou 150 000 $. Une commission du blé de ce genre et l'opposition qu'elle suscite sapent l'énergie des agriculteurs et réduit à néant les profits qu'ils sont censés faire. Voilà de quoi il faudrait parler aujourd'hui. La stimulation à réaliser des profits.

Je le répète, le devoir des administrateurs élus devrait se limiter strictement à maximiser les profits. Les Canadiens de l'Ouest ne font manifestement pas confiance au gouvernement fédéral, à l'Ontario, au Québec et aux autres provinces pour leur dire, en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba et dans une petite partie de la Colombie-Britannique, comment ils devraient gérer leurs exploitations commerciales, agricoles et d'élevage.

Les administrateurs que nous aimerions voir élus seraient choisis par les habitants de l'Ouest pour représenter nos circonscriptions. Aucun d'entre eux ne serait nommé par Ottawa, aucun ne serait nommé en vertu d'un diktat venant d'en haut. Comme je l'ai déjà dit, ce serait les provinces qui décideraient du déroulement des élections, et elles ont vraiment intérêt à être aux commandes de la future commission du blé. C'est le genre d'élections que nous aimerions voir.

Les fonctions des administrateurs seraient déterminées par les provinces de l'Ouest, qui produisent le grain, et non par Ottawa, qui a d'autres intérêts. Je suis convaincu que la commission ne fait tout à l'étranger pour obtenir les meilleurs rendements financiers possibles pour les agriculteurs.

Il n'y a pas de doute que les intérêts étrangers entrent en ligne de compte. Nous savons l'influence qu'exerce le ministre des Affaires étrangères au Manitoba et au sein du gouvernement. C'est même une des principales préoccupations des agriculteurs de l'Ouest. Les décisions ne sont pas uniquement fondées sur des facteurs commerciaux.

Je n'aborderai pas cette question aujourd'hui. Je me contenterai de mentionner l'avoine, dont la Commission canadienne du blé s'occupait auparavant de la commercialisation. Bien des gens se demandent si c'est un désastre depuis que la commission ne commercialise plus l'avoine. J'ai soulevé cette question quand j'ai parcouru ma circonscription. Lorsque la commission a cessé de commercialiser l'avoine, il y a eu un court laps de temps pendant lequel il n'était pas absolument clair que l'objectif de la commercialisation de l'avoine était la maximisation des bénéfices. Mais il n'a fallu attendre que quelques mois pour que la commercialisation se rentabilise et que les profits soient maximisés.

 

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Il n'y a plus personne qui cultive l'avoine de nos jours qui voudrait se réassocier à la Commission canadienne du blé. C'est justement de cela dont je parle, de l'avenir de la Commission du blé. Il faut que celle-ci soit administrée, surveillée, dirigée par les agriculteurs de l'ouest du Canada.

Bon nombre souhaitent le maintien de cette commission de commercialisation. Je puis en donner l'assurance aux députés. Les agriculteurs veulent toutefois maximiser leurs bénéfices.

Le revenu net des agriculteurs de l'Ontario et du Québec est bien plus élevé que celui des agriculteurs du Manitoba, de la Saskatchewan ou de l'Alberta. C'est la preuve qu'une commission de commercialisation de l'industrie laitière—qui est sans doute responsable d'une large part des bénéfices réalisés dans cette partie du pays—peut influer considérablement sur les avantages nets que les agriculteurs retirent, et c'est ce que nous souhaitons dans l'ouest du Canada.

Les provinces des Prairies veulent administrer la Commission canadienne du blé, mais ce n'est pas ce que prévoient les modifications dont nous sommes saisis aujourd'hui.

Les élections vont avoir lieu. De nouveaux membres du conseil d'administration seront élus, mais les fonctions qu'ils finiront par assumer leur seront dictées par Ottawa. Voilà pourquoi les modifications que l'on propose d'apporter à la nouvelle Commission canadienne du blé ne fonctionneront pas. La Commission ne survivra pas plus que quelques années, si elle subsiste.

Ce que j'ai voulu dire tout à l'heure, en parlant d'une Commission canadienne du blé qui serait administrée par des gens de l'Ouest, mais qui verrait ses pouvoirs minés par Ottawa, c'est que les agriculteurs de l'Ouest qui en feraient partie en maximiseraient les bénéfices.

Dans une structure de ce genre, j'imagine fort bien un cartel du blé qui verrait le jour et qui aurait pour effet que les minoteries canadiennes et tout le monde paient le prix maximal. Il n'y aurait pas de querelle interne.

Je suis heureux de participer à ce débat aujourd'hui. Dans une large mesure, il traite des bénéfices que nous réaliserons dans l'Ouest. Je vous en prie, donnez-nous une chance.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir brièvement dans le débat sur la Commission canadienne du blé.

J'ai écouté attentivement le député réformiste, qui est de la même province que moi. J'aimerais bien savoir ce qui anime le Parti réformiste, pourquoi les réformistes éprouvent une telle répugnance envers le Canada et se font si souvent les apologistes des États-Unis et du pouvoir des sociétés multinationales dans tant de domaines.

Nous les avons vus à l'oeuvre l'autre semaine, nous les voyons encore dans le débat d'aujourd'hui. Nous les avons vus la semaine dernière, lorsqu'il a été question de la fusion des banques. Quelle était la position du Parti réformiste face à la fusion de la Banque royale et de la Banque de Montréal...

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais savoir quel est le rapport entre la Loi sur les banques et le débat d'aujourd'hui.

Le vice-président: Je crois que la présidence a fait preuve de beaucoup de laxisme dans l'application de la règle de pertinence. Nous discutons des motions du groupe 4, qui portent sur la gestion des affaires de la Commission canadienne du blé et la nomination de ses administrateurs.

Je suis convaincu que le député de Winnipeg—Transcona voulait se servir de la Loi sur les banques pour en venir à la nomination des administrateurs de la Commission canadienne du blé. J'attends avec impatience qu'il arrive à ce sujet.

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, je ne savais pas qu'il était irrecevable de faire des analogies et d'établir des parallèles entre des positions. Votre décision me rassure.

Pour en revenir à ce que je disais, nous relevons une incohérence dans la position du Parti réformiste dans un domaine de la politique qui concerne la prééminence de l'intérêt public canadien sur l'intérêt des sociétés américaines qui voudraient jouer un rôle dans l'économie canadienne, qu'il s'agisse des banques américaines qui veulent s'implanter plus solidement dans l'économie canadienne ou du rôle accru que voudraient avoir chez nous des sociétés américaines ou d'autres multinationales dans le secteur agroalimentaire.

Comment le Parti réformiste a-t-il réagi dans les deux cas? Ça nous convient. Nous voudrions seulement pouvoir leur vendre un peu de grain sans passer par la commission à un prix beaucoup plus élevé. Ils oublient les enseignements d'une longue expérience. Ils oublient que, autrefois, chacun vendait seul son produit. Et c'est précisément parce que ça ne marchait pas que nous en sommes venus à établir la Commission canadienne du blé. Telles sont les leçons de l'histoire. Voilà que cela dérange encore le Parti réformiste. Un autre de ses députés invoque le Règlement.

 

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M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je demande à la présidence de se prononcer sur la pertinence de l'intervention. Nous venons d'expliquer que 97 p. 100 des agriculteurs appuient l'amendement que j'ai proposé.

Le député s'écarte de l'objet du débat. Il dit des choses qui sont tout à fait hors de propos.

Le vice-président: Les députés peuvent être en désaccord sur ce que dit le député de Winnipeg—Transcona, mais, si la présidence insistait pour que tous les députés qui traitent du projet de loi C-4—et la présidence a l'impression qu'il s'agit d'un débat assez général sur le projet de loi C-4—si la présidence insistait, dis-je, pour que les observations portent sur les amendements à l'étude, il y a déjà un bon moment qu'elle aurait invité des députés à se rasseoir.

Je rappelle que le débat porte sur le projet de loi C-4, et il me semble que le député parle de ce projet de loi. Ses propos ne se rapportent peut-être pas expressément à l'amendement proposé par le député de Yorkton—Melville, mais le groupe 4 comprend une série d'amendements, et je présume que nous allons voir à un moment donné le lien qui s'établit entre ces amendements et l'intervention.

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, cela me fait penser à ce que disait un ancien premier ministre de la Chambre, John Diefenbaker. Il disait que, lorsqu'on lance une pierre, on sait toujours si on a frappé quelqu'un parce qu'on entend des glapissements. Nous avons entendu des glapissements de la part du Parti réformiste. C'est peut-être parce que, à un niveau psychique profond, les réformistes ne sont pas à l'aise avec la façon dont ils ressortent continuellement à la Chambre comme étant les défenseurs des intérêts des entreprises américaines.

En parlant plus précisément de l'amendement qui, je suppose, rendra mes collègues du Parti réformiste plus heureux, je remarque aussi que, en ce qui concerne l'élection des administrateurs de la Commission canadienne du blé, le Parti réformiste veut que les gros agriculteurs aient plus de voix que les petits agriculteurs.

C'est une position intéressante pour un parti qui, au sujet de la réforme du Sénat, ne cesse de répéter que toutes les provinces devraient être représentées également au Sénat. Qu'il s'agisse de l'Île-du-Prince-Édouard ou de l'Ontario, les provinces devraient être toutes sur un pied d'égalité au Sénat.

Qu'advient-il de ce principe lorsqu'il est question des agriculteurs? Qu'advient-il de l'opinion des petits agriculteurs dans le type d'administration que le Parti réformiste aimerait voir à la Commission canadienne du blé? Ce principe semble s'être volatilisé. Peut-être que le prochain réformiste qui prendra la parole pourrait expliquer cela.

Est-ce là une autre façon de montrer comment la politique réformiste coïncide avec les intérêts à long terme des agro-entreprises américaines, qui attendent sans doute avec impatience le jour où il n'y aura plus de petits agriculteurs, où elles pourront acheter un nombre de plus en plus grand de nos fermes? Si les voeux du Parti réformiste étaient exaucés, non seulement les entreprises américaines auraient le pouvoir que leur confère leur statut de propriétaires, mais elles auraient aussi le pouvoir découlant d'un système selon lequel les grandes entreprises auraient plus de voix que les autres pour ce qui est de déterminer la façon dont la Commission canadienne du blé est administrée.

J'ai écouté les réformistes parler de l'abandon de lignes de chemin de fer, et une réflexion m'est venue à l'esprit. Il faut faire attention à ce qu'on demande. Les chemins de fer fonctionnent maintenant avec comme objectif de réaliser des profits, des profits maximums, de toutes les façons possibles, faisant ainsi complètement abstraction de la notion de services et de bien pour la collectivité.

C'est exactement le modèle commercial que le Parti réformiste et d'autres ont prôné pendant 20 ans pour les chemins de fer. Maintenant qu'ils ont obtenu ce qu'ils voulaient, ils n'en veulent plus. Ils commencent à penser comme des néo-démocrates et à se demander pourquoi telle ou telle ligne importante pour la collectivité, notamment les agriculteurs, ne reste pas en service.

Pourquoi ne pas garder telle ou telle ligne en service? C'est parce que nous avons précisément le genre de système de transport ferroviaire que les réformistes ont prôné et obtenu. Les réformistes n'ont qu'eux-mêmes à blâmer.

 

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M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole relativement au projet de loi C-4. J'ai écouté attentivement les propos du député de Winnipeg—Transcona. Nous sommes en 1998, mais le député tient encore un langage des années soixante, accusant les réformistes de servir la cause des capitalistes ou des impérialistes. Le député se lance des théories de conspiration, de collusion avec des sociétés multinationales et transnationales. Plus ça change, plus c'est pareil.

Je vais discuter de points précis du projet de loi, avant d'aborder certaines questions soulevées par le député.

M. Bill Blaikie: Vous feriez mieux de vous en tenir à l'amendement.

M. Monte Solberg: Le député dit que je ferais mieux de m'en tenir à l'amendement. Contrairement à lui, c'est précisément ce que je vais faire.

Le député a soulevé un point dont il est fait mention dans l'amendement. Il a dit, toujours dans le cadre de sa théorie de l'existence d'une conspiration, que le Parti réformiste mène une offensive contre les petits agriculteurs. Il a dit que l'un de nos amendements priverait les petits agriculteurs de leur droit de vote.

En fait, l'amendement vise simplement à protéger les exploitations agricoles multigénérationnelles, c'est-à-dire les fermes où l'on trouve un agriculteur qui exploite l'entreprise avec un ou deux fils. Nous voulons nous assurer que ceux-ci auront tous un droit de vote. Pourquoi le NPD insiste-t-il pour s'en prendre aux fermes familiales? Qu'est-ce que les néo-démocrates ont contre les fermes familiales?

Nous voulons simplement nous assurer qu'un agriculteur à temps partiel, un avocat dans une grande ville, ou même un impérialiste possédant une petite terre à la campagne ne puisse annuler, avec son vote, le vote d'une ferme familiale multigénérationnelle. C'est cela qui nous préoccupe et c'est la raison pour laquelle nous proposons ces amendements.

Je veux parler d'un certain nombre d'autres questions, notamment l'amendement proposé par le député de Prince George—Peace River, dans le nord de la Colombie-Britannique. Le député propose que, à la Commission canadienne du blé, tous les membres du conseil soient élus. Je trouve que cela a beaucoup de bon sens. Je suis étonné que nos amis néo-démocrates, qui sont supposés être de grands populistes, n'aient pas pris la parole à l'appui de la démocratie au sein de la Commission canadienne du blé. Ne croient-ils pas que les agriculteurs devraient être maîtres de leurs propres institutions? Je trouve que cela a beaucoup de bon sens. Pourtant, ni le NPD ni le gouvernement ne souhaitent qu'il en soit ainsi.

Parce qu'il fait l'objet de pressions considérables, le gouvernement est prêt à envisager qu'un certain nombre d'administrateurs puissent être élus, mais cela n'aura sûrement pas pour effet de permettre à la majorité des membres du conseil de voter pour quelque ouverture du conseil que ce soit. Non seulement le gouvernement va-t-il s'assurer qu'un nombre suffisant de membres soient nommés comme le veut la coutume, mais il va insister pour que le président soit nommé par le ministre l'Agriculture.

Je viens d'un région où l'on adhère aux principes de la libre entreprise. Chez nous, les gens croient au marché libre. Dans tous les autres domaines, ils veulent avoir le choix de commercialiser leurs produits comme bon ils l'entendent. Nous voulons avoir le choix. Nombreux sont ceux qui disent vouloir conserver la commission comme un organisme auquel on serait libre d'adhérer.

Quelqu'un parlait de la commission comme d'une coopérative tantôt. Elle n'en est pas une à l'heure actuelle. On n'a pas le choix d'y appartenir ou non. L'adhésion est obligatoire. Si l'on essaie de commercialiser son grain sans passer par la commission, on se retrouve mis aux fers, comme tant d'agriculteurs canadiens l'ont été dans le passé. Je trouve cela parfaitement ridicule. Si nous croyons tant dans les coopératives, faisons de la Commission canadienne du blé une véritable coopérative. Laissons aux gens le choix d'y appartenir ou non.

Ce qu'on nous propose est contraire aux droits naturels traditionnels à la vie, la liberté et la propriété. En ce qui concerne la liberté et la propriété, le gouvernement et la Commission canadienne du blé abrogent ces droits naturels fondamentaux dans le cas qui nous occupe. Cela fâche les gens de l'ouest.

 

. 1355 + -

Non seulement y a-t-il eu de nombreux recours aux tribunaux et de nombreuses protestations, mais nous avons également été témoins de violations de la loi et d'actes de désobéissance civile parce que les agriculteurs en ont assez d'un gouvernement qui ne leur permet pas de nourrir leurs familles.

Certaines personnes regardent de l'autre côté de la frontière ou songent au prix qu'elles pourraient obtenir pour leur grain si on leur permettait de le mettre en marché elles-mêmes et, partant, de nourrir leur famille. Or, le gouvernement le leur interdit et envoie des gens en prison.

Je ne peux pas le croire. Je viens de l'Ouest. Je ne possède pas de ferme, mais j'observe de loin cette situation depuis bon nombre d'années. Lorsque j'effectue des tournées dans ma circonscription, qui se trouve dans le sud de l'Alberta, je constate qu'une forte majorité de gens voudraient avoir le choix d'adhérer ou non à la commission et presque tous, de quelque opinion qu'ils soient, ont de fortes réserves au sujet du projet de loi C-4, qu'ils considèrent comme une mesure rétrograde.

J'aborderai d'autres questions, pour éviter que les députés néo-démocrates ne m'accusent de tenir un discours non pertinent.>Mon collègue, le député de Prince George—Peace River, a présenté une motion vraiment importante qui vise à obliger le président à prendre les dispositions nécessaires pour faire adhérer la Commission canadienne du blé au Code international de conduite des entreprises d'affaires canadiennes.

Pour situer les choses dans leur contexte, le gouvernement a lancé cette idée du code de conduite et a insisté pour que les entreprises d'affaires canadiennes qui désirent faire affaires à l'étranger adhèrent à ce code.

Le gouvernement a-t-il insisté pour que ses organismes en fassent autant? Non. A-t-il dit que la Commission canadienne du blé, qui commercialise des milliards de dollars de grain chaque année dans le monde, devrait adhérer au code de conduite? Non.

Une fois de plus, nous sommes témoins de la vieille politique des deux poids deux mesures. Le gouvernement exige qu'on fasse ce qu'il dit, mais interdit de faire ce qu'il fait. Les agriculteurs comme tous les autres doivent se plier à une norme différente. Si l'expérience nous a appris quelque chose, c'est que les gens d'affaires canadiens ont des normes de conduite plus élevées que le gouvernement. Nous avons pu le constater à de nombreuses reprises.

Le gouvernement affiche cette fois-ci une effronterie inusitée. Il soulève la question. Il encourage les entreprises canadiennes à faire ce que lui-même refuse de faire. C'est incroyable. J'invite instamment les députés à appuyer la motion no 16 du groupe 4.

Pour résumer, je dirai que le projet de loi C-4 est une mesure d'arrière-garde. Les agriculteurs canadiens ont indiqué très clairement qu'ils ne toléreraient pas l'actuelle Commission canadienne du blé. Ils ne se contenteront pas de demi-mesures. Ils veulent voir des changements en profondeur. Ils veulent que le recours à la Commission canadienne du blé soit volontaire. Ils veulent que leurs droits naturels, soit leurs droits à la liberté et à la propriété, soient rétablis. Ces droits naturels passent avant les lois du gouvernement. Nous voulons que ces droits soient rétablis.

Je prie instamment tous mes collègues à la Chambre d'examiner très attentivement les arguments que font valoir non seulement le Parti réformiste, mais aussi les agriculteurs canadiens qui, dans certains cas, sont même prêts à aller en prison pour défendre leurs droits. J'encourage mes collègues à voter en faveur des amendements que le Parti réformiste a présentés parmi ceux du groupe no 4.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES JEUX OLYMPIQUES DE 1998

M. John Harvard (Charleswood—Assiniboine, Lib.): Monsieur le Président, le Canada rêve de médailles d'or.

Je suis fier de prendre aujourd'hui la parole à la Chambre pour féliciter les 153 athlètes canadiens qui composent la délégation d'athlètes de notre pays aux Jeux olympiques d'hiver de 1998 à Nagano. Je sais que tous les députés et tous les Canadiens souhaitent beaucoup de succès à nos athlètes.

Je suis particulièrement heureux de féliciter le premier athlète canadien à être monté sur le podium. Il s'agit de M. Ross Rebagliati, qui a non seulement gagné une médaille d'or sous les couleurs du Canada, mais établi une première dans l'histoire olympique avec un nouveau sport, le slalom en planche à neige.

Je félicite sincèrement tous les athlètes qui représentent le Canada avec autant de grâce et de style. Ils sont de parfaits exemples d'excellence, de persistance, de discipline et de fair-play. Ce sont certainement les ambassadeurs distingués d'un pays distingué.

Je souhaite bonne chance à l'équipe canadienne en rappelant à tous ses membres que leur pays est avec eux.

*  *  *

 

. 1400 + -

ROSS REBAGLIATI

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, en fin de semaine, aux Olympiques de Nagano, Ross Rebagliati, de Whistler, en Colombie-Britannique, un athlète de 26 ans, a remporté la première médaille d'or du Canada à ces jeux. Ross est devenu le premier médaillé d'or de l'histoire olympique dans la discipline de la planche à neige.

La médaille d'or de Ross est plus qu'une réussite personnelle et un numéro dans la course aux médailles du Canada. Cette victoire établit un lien entre Ross et son ami de longue date, Geoff «Lumpy» Leidel, qui est mort le mois dernier dans une avalanche, dans le parc national Kootenay, et à qui Ross a dédié sa médaille.

Il ne s'agit pas seulement d'une médaille d'or pour le Canada, mais d'un hommage à la force de caractère de Ross Rebagliati et d'un symbole d'amitié. Cette médaille devrait servir d'inspiration et rappeler le sens véritable des Jeux olympiques.

Ross est un modèle d'esprit olympique et je le félicite.

*  *  *

MAHATMA GANDHI

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Il y a 50 ans, soit le 30 janvier 1948, le monde perdait un noble citoyen, à la fois chef spirituel et leader du nationalisme indien, Mahatma Gandhi.

Gandhi fut un dirigeant politique qui a démontré concrètement les vertus de la désobéissance civile ou de la résistance passive. Mais, outre ses leçons sur la désobéissance civile, Gandhi a légué à l'humanité son sermon sur les sept péchés sociaux: la politique sans principes, la richesse sans le travail, le commerce dépourvu de morale, l'éducation sans objet, le plaisir sans la conscience, la science dépourvue d'humanité et le culte sans sacrifice.

Si nous savons prêter l'oreille au message de Gandhi, nous qui siégeons à la Chambre sommes mieux préparés à servir notre pays et à bâtir une société compatissante.

*  *  *

[Français]

LE PROJET TOKAMAK

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, il y a déjà plusieurs mois, le gouvernement libéral annonçait la fin projetée de sa contribution de 7,2 millions de dollars au projet Tokamak de Varennes.

Alors que le Québec est encore à se relever de la crise du verglas qui a amené bon nombre de nos concitoyens sinistrés à recourir à des modes de production d'énergie beaucoup plus polluants, tels le bois, le charbon et l'essence, notamment pour les génératrices, on voit le gouvernement ontarien être forcé de fermer des réacteurs CANDU dont la fiabilité, après seulement 15 ans d'existence, fait craindre le pire. Le gouvernement ontarien envisage de ramener la province à l'ère révolue des centrales au charbon, ce qui va à l'encontre des engagements pris par le Canada aux Conférences de Rio et de Kyoto.

La fusion nucléaire que vise à développer le projet Tokamak constitue une alternative propre et sécuritaire à ces sources d'énergie polluantes, toujours financées à coups de milliards de dollars à même les fonds publics fédéraux. Dans cette optique, il est difficile de comprendre l'obstination du gouvernement libéral à vouloir compromettre l'avenir d'un tel projet. Il s'agit d'une économie de bouts de chandelles qui illustre le manque de vision totale de ce gouvernement.

*  *  *

[Traduction]

L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Monsieur le Président, la souveraineté de notre pays est à nouveau menacée par des négociateurs qui, soumis aux caprices des ministres, ne tiennent pas compte de la volonté et des attentes de la population canadienne.

À en croire des porte-parole du gouvernement libéral, l'Accord multilatéral sur l'investissement, l'AMI, ne s'appliquera pas aux entités infranationales, c'est-à-dire, dans le jargon bureaucratique, les provinces, les territoires et leurs administrations.

Le ministre du Commerce international partage cet avis. Il va jusqu'à contredire le consensus au sein de la communauté internationale, qui pense que l'AMI s'appliquera aux provinces canadiennes.

Le ministre est d'accord pour que les institutions financières, les banques notamment, échappent à l'application de l'AMI, mais pas l'environnement. Aux yeux du gouvernement, les bénéfices réalisés par des sociétés étrangères sont-ils plus importants que la protection de notre environnement?

Notre environnement sera menacé si l'AMI permet l'exploitation de nos ressources, et ce sont les Canadiens qui en feront les frais, pas le ministre.

Nous mettons le gouvernement libéral au défi de tenir un véritable débat public sur l'Accord multilatéral sur l'investissement. Les Canadiens seront alors à même de constater combien l'AMI va à l'encontre de leurs intérêts.

*  *  *

L'AGRICULTURE

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour traiter d'une question particulièrement importante tant pour le secteur agricole que pour le commerce international. Les négociations de l'Organisation mondiale du commerce débuteront en 1999 et d'autres pays ont déjà commencé à établir leur plan en ce qui concerne leurs secteurs agricoles. Notre actuel ministre de l'Agriculture a tendance à tout simplement laisser des avocats défendre l'industrie, au lieu d'avoir sa propre politique établie par le ministère, en prévision de l'avenir.

Il est temps que le gouvernement commence à défendre cette industrie qui rapporte de nombreux milliards de dollars. Le gouvernement va-t-il établir un plan significatif sur la situation internationale de notre industrie et sa position concurrentielle sur les marchés agricoles et agroalimentaires mondiaux? Contrairement à ce qui s'est produit concernant l'initiative environnementale du gouvernement à Kyoto, nous ne saurions attendre jusqu'à la dernière minute.

Il est temps d'amorcer un processus de consultation exhaustif avec l'industrie et les consommateurs sur la façon dont le Canada devrait exercer une concurrence sur les marchés étrangers et intérieurs. J'exhorte le gouvernement à commencer à envisager un plan de ce genre.

*  *  *

 

. 1405 + -

LE REGRETTÉ MARK MACGUIGAN

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, Mark MacGuigan, qui est décédé le mois dernier, était philosophe de profession de même qu'avocat. Sa carrière a progressé rapidement dans différents domaines: enseignement du droit à l'université, administration d'université, politique, en tant que simple député pendant 12 ans, puis, en l'espace de quatre autres années, ministre des Affaires étrangères et ministre de la Justice, et enfin, juge de la Division des appels de la Cour fédérale du Canada.

Pendant sa longue maladie, il a poursuivi ses intérêts savants, rédigeant un traité sur le droit et la moralité en 1994 et laissant deux autres manuscrits, sur la politique étrangère et l'administration de la justice, partiellement achevés au moment de sa mort.

Sa vie représente l'effort constant pour concilier un ensemble de valeurs morales fondées sur le droit naturel et les besoins pratiques d'une société canadienne en rapide évolution.

*  *  *

LE MOIS DU COEUR

Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le Président, le mois de février est le Mois du coeur. Les maladies cardiovasculaires demeurent la principale cause de décès et l'une des principales causes d'invalidité au Canada. Plus de 79 000 Canadiens meurent chaque année des suites d'une maladie du coeur ou d'un ACV.

En plus du nombre des victimes, les coûts imputés à l'économie sont également considérables: environ 20 milliards de dollars par année et plus de 6,5 millions de jours d'hospitalisation.

[Français]

Les maladies cardiovasculaires sont un domaine dans lequel nous faisons des progrès considérables. Les maladies du coeur et les accidents cérébrovasculaires sont imputables à notre mode de vie.

[Traduction]

En enrayant le tabagisme et en faisant la promotion de l'activité physique, nous pouvons aider les Canadiens à prévenir la maladie ou à tout le moins à en retarder l'apparition.

En insistant sur la santé du coeur, nous pouvons réduire de façon importante l'incidence de cette maladie. En faisant participer la société dans son ensemble, nous pouvons améliorer...

Le Président: Le député de Nanaïmo—Alberni.

*  *  *

LE SÉNAT

M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.): Monsieur le Président, notre sénateur fantôme du Mexique se pointera à Ottawa demain pour faire acte de présence au Sénat, de façon à pouvoir continuer de tirer son salaire pendant encore deux ans.

Ce sénateur a abusé des contribuables canadiens pendant 31 ans et le gouvernement et le Sénat lui rendent maintenant la vie encore plus facile. Il a été libéré de ses obligations de parti et on lui a même récemment retiré son bureau d'Ottawa. Il n'a même plus de téléphone pour permettre aux gens qu'il est censé représenter de communiquer avec lui.

À quel genre de représentation les Canadiens ont-ils droit lorsqu'on permet à un sénateur de vivre sur les plages du Mexique et de se contenter de faire acte de présence au Sénat une fois par année environ pour avoir le droit de tirer son chèque de paie?

Je pense qu'il est temps de mettre fin à la sieste du sénateur. Le premier ministre doit assumer ses responsabilités et demander à ce sénateur mexicain de quitter le Sénat pour que les Canadiens puissent avoir accès à une représentation légitime à la Chambre haute.

*  *  *

[Français]

LE PROJET LE TRAIN DU CANADA

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, j'encourage cette Chambre à donner son appui au projet d'unité nationale, Le Train du Canada.

En août 1998, 250 jeunes Canadiens et Canadiennes entameront une randonnée d'exploration à travers le Canada. Les délégués participeront aux débats et forums publics et compléteront des activités de service communautaire, pour ne nommer que deux de leurs responsabilités. Forts de cette expérience, ils se rencontreront 25 jours plus tard pour discuter de leur vision de l'avenir du pays.

J'aimerais féliciter les commanditaires corporatifs et individuels, et surtout le Students' Union de l'Université de l'Alberta, pour leur vision et leur enthousiasme. J'encourage les jeunes Canadiens et Canadiennes à participer au projet Le Train du Canada.

[Traduction]

J'exhorte tous les députés à appuyer le projet maintenant, à l'étape préparatoire, et à nouveau au mois d'août, lorsque le Train du Canada passera dans leurs circonscriptions. Les initiatives de ces jeunes gens nous rappellent à tous...

Le Président: La députée de Laval-Est.

*  *  *

[Français]

LA PAUVRETÉ DES ENFANTS

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, les statistiques sur la pauvreté des enfants sont de plus en plus accablantes.

Depuis 1989, le nombre d'enfants pauvres a augmenté de 58 p. 100; le nombre d'enfants issus de familles vivant de l'aide sociale, de 68 p. 100; le nombre d'enfants demeurant dans des logements à prix inabordable, de 48 p. 100; et le nombre d'enfants dont le revenu net des familles est inférieur à 20 000 $, de 45 p. 100.

Nous sommes loin de la résolution adoptée, de façon unanime, par cette Chambre en 1989 visant à mettre fin à la pauvreté des enfants au Canada d'ici l'an 2000. Ces enfants souffrent et ne peuvent même pas espérer avoir le strict minimum pour bien débuter dans la vie. Ils subissent les coupures effectuées par le gouvernement libéral depuis qu'il est au pouvoir.

Le Bloc québécois exhorte le gouvernement fédéral à remettre aux provinces l'argent qui leur est dû, l'argent dont il s'est servi pour améliorer son image comptable et réaliser un surplus budgétaire.

Seules les provinces sont en mesure d'utiliser cet argent...

Le Président: Je regrette d'interompre l'honorable députée. La parole est à la députée d'Ottawa-Ouest—Nepean.

*  *  *

 

. 1410 + -

[Traduction]

LA FERME EXPÉRIMENTALE CENTRALE

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, le secrétaire d'État aux Parcs et le ministre de l'Agriculture ont déclaré la Ferme expérimentale centrale d'Ottawa lieu historique national.

Cela ne veut pas dire que les travaux de cette dernière vont s'arrêter. La ferme va continuer d'évoluer comme elle l'a fait pendant 111 ans, selon un modèle conforme à l'importante contribution qu'elle a faite à l'agriculture au Canada et dans le monde entier.

Elle sera toujours, pour les Canadiens, le témoin visible de l'importance de l'agriculture pour notre développement social et économique.

Les habitants de la région sont fiers de la capitale nationale et de ses institutions. Ils ne manqueront pas, j'en suis sûre, de vouloir prendre part à la planification de l'avenir de la Ferme expérimentale centrale, le nouveau lieu historique national.

*  *  *

L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, des groupes de gauche comme le NPD et le Conseil des Canadiens s'en sont donné à coeur joie aujourd'hui avec la campagne de désinformation sur l'Accord multilatéral sur l'investissement. Ils ont perdu la bataille du libre-échange, et s'en prennent donc maintenant à la libéralisation de l'investissement.

Je sais ce qui les motive et je me demande pourquoi ce gouvernement ne fait rien pour les empêcher de semer la panique. Je demande au ministre du Commerce international d'aller en Colombie-Britannique pour mettre fin à toutes ces allégations au sujet de l'Accord multilatéral sur l'investissement.

Si le gouvernement veut négocier cet accord, il va falloir qu'il l'explique aux gens.

L'investissement est essentiel pour notre développement économique. Il mène aux échanges commerciaux, lesquels mènent à la création d'emplois pour les Canadiens.

Les sociétés Canadiennes qui investissent à l'étranger ont besoin pour leur protection d'un accord sur l'investissement basé sur des règles précises garantissant un traitement national.

Il faut que les Canadiens sachent qu'un bon accord est dans leur intérêt à tous.

*  *  *

[Français]

L'ÉMISSION DE TÉLÉVISION 60 MINUTES

M. Guy St-Julien (Abitibi, Lib.): Monsieur le Président, en fin de semaine, nous avons eu droit à une attaque de la part du réseau américain CBS dans le cadre de l'émission 60 Minutes, concernant les politiques linguistiques en vigueur au Québec.

Qu'on soit d'accord ou non avec les décisions du Québec qui visent la protection et la promotion de la langue française est une chose, mais de là à faire preuve d'autant de subjectivité dans la manière de dénoncer des organismes et réglementations qui doivent, en principe, raffermir les positions des francophones dans le vaste espace de l'Amérique du Nord en est une autre.

Contrairement à ce qui est affirmé tout au long de cette émission, nous ne croyons pas que le Québec veuille être une enclave francophone en Amérique du Nord, pour la simple raison que depuis des décennies, le Québec tente, par tous les moyens possibles, d'assurer un rayonnement de la culture et de langue françaises.

Les responsables de cette émission auraient dû, dans un souci d'objectivité, montrer l'autre côté de la médaille en brossant un tableau complet des efforts collectifs en faveur de la promotion de la culture française en Amérique.

*  *  *

LE GOUVERNEMENT DU QUÉBEC

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à dénoncer avec vigueur la partisanerie dont a fait preuve le premier ministre du Québec, Lucien Bouchard, en fin de semaine, concernant les programmes d'aide du gouvernement canadien dans le cas de sinistres.

Le gouvernement du Québec en met lorsqu'il affirme effrontément que le gouvernement fédéral tente d'éloigner le gouvernement du Québec de son objectif d'éliminer son déficit lorsqu'il refuse d'accéder à la demande du Québec d'assumer les frais encourus pour la reconstruction du réseau hydroélectrique.

Encore une fois, c'est la faute du fédéral si on n'est pas capable d'administrer à Québec.

Il faut être clair. Dès le début, nous avons insisté pour que l'aide aux victimes de cette catastrophe soit fournie aux familles, aux petites et moyennes entreprises, ainsi qu'aux collectivités, et non pas aux grandes sociétés publiques et privées qui sont rentables.

Le premier ministre du Québec veut même en faire un enjeu lors des prochaines élections. Eh bien, nous l'attendons de pied ferme. Qu'il ne se gêne pas, et nous n'aurons même pas à intervenir sur ce sujet.

Allez, monsieur Bouchard, amenez-vous! Les populations des régions touchées vous attendent de pied ferme. Mais soyez prudent, car parfois, l'arroseur risque d'être arrosé.

*  *  *

[Traduction]

LA JUSTICE

M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Monsieur le Président, beaucoup trop souvent, on oublie l'un des éléments les plus importants du système de justice pénale, soit la victime. Beaucoup trop souvent, on entend parler du sort malheureux des victimes oubliées par un système qui tente d'obtenir justice en leur nom. Cela peut paraître bizarre, mais c'est pourtant vrai.

Le Code criminel renferme bien des dispositions visant les victimes, mais ce n'est pas suffisant.

Les dix provinces et les deux territoires ont des lois qui protègent les droits des victimes, mais, encore là, ce n'est pas suffisant. Le temps est venu d'effectuer une étude approfondie de la question et de prendre les mesures qui s'imposent.

Le gouvernement fédéral mènera bientôt, auprès de Canadiens de toutes les régions du pays, de vastes consultations sur la question du traitement réservé aux victimes à l'intérieur du système de justice pénale.

J'invite tous les Canadiens, et en particulier les habitants de la circonscription d'Erie—Lincoln que je représente, à participer à une série de réunions publiques qui aura lieu au printemps et qui traitera de cette question fort importante.

Les résultats de ces consultations seront diffusés sous forme d'un rapport contenant les conclusions et recommandations du comité, après quoi, je continuerai de réclamer l'adoption d'une déclaration des droits des victimes.

Le Canada et les victimes de la criminalité dans la société canadienne demandent des mesures de réparation justes, faisant preuve de sensibilité et de compassion. Ces mesures sont attendues depuis très longtemps.



QUESTIONS ORALES

 

. 1415 + -

[Traduction]

L'IRAK

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, tout au long de notre histoire, nous, les Canadiens, avons montré que nous sommes prêts à prendre toutes les mesures nécessaires pour nous protéger et pour protéger le monde contre les tyrans et les terroristes. Si on demande aux Canadiens s'ils font confiance à Saddam Hussein ou s'ils font confiance aux États-Unis et au Royaume-Uni, ils diront certainement qu'ils font confiance à nos alliés. Toutefois, nous avons encore des questions importantes à poser à notre premier ministre.

Lorsque le président Clinton a téléphoné, a-t-il dit exactement quel serait l'objectif d'une attaque militaire contre Saddam Hussein? L'objectif serait-il de détruire les usines de fabrication d'armes de Saddam Hussein ou s'agirait-il d'une offensive de plus grande envergure?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je me suis entretenu avec le président Clinton et, plus tôt aujourd'hui, avec le premier ministre de la Grande-Bretagne. L'objectif que nous avons tous est de voir à ce que Saddam Hussein respecte les résolutions de l'ONU et cesse de produire des armes biologiques et d'autres armes extrêmement dangereuses.

Nous avons des preuves que l'Irak produit encore de telles armes et nous voulons mettre fin à cela. Nous devons empêcher Saddam Hussein de fabriquer ces armes, sinon ce sera extrêmement dangereux pour tous les pays du monde.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, nous sommes peut-être à la veille d'une guerre. Les chefs d'État du monde entier ont énoncé leur position. Il me semble que le moment est venu pour le premier ministre du Canada de cesser de ménager la chèvre et le chou et de prendre position.

Le premier ministre ira-t-il plus loin que les propos vagues qu'il a tenus jusqu'à maintenant et dira-t-il clairement aux Canadiens s'il est convaincu qu'une intervention militaire est nécessaire pour mettre fin au terrorisme de Saddam Hussein?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme tout le monde, j'espère qu'on trouvera une solution diplomatique au problème. Comme vous le savez tous, beaucoup de gens essaient de persuader Saddam Hussein de changer sa position. Pour qu'il change sa position, nous devons lui montrer de façon non équivoque que, s'il ne change pas sa position, nous serons là pour voir à ce qu'il cesse de produire ces armes absolument inacceptables.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, en 1991, lorsque le Canada a décidé d'appuyer une intervention militaire pour stopper l'invasion du Koweït par l'Irak, la Chambre a débattu la question pendant trois jours, et non pas pendant quelques heures. Elle a débattu une motion du gouvernement réaffirmant notre appui à l'égard d'une intervention par les Nations Unies, débat qui a été suivi d'un vote.

Le débat de ce soir n'est-il que de la frime ou est-ce que le gouvernement compte présenter une vraie motion énonçant une vraie position et tenir ensuite un vote?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons l'intention de tenir un débat pour donner aux députés de la Chambre des communes l'occasion d'exprimer leurs opinions à ce sujet.

Le chef de l'opposition m'a demandé d'énoncer clairement ma position à cet égard. Or, j'ai dit à la Chambre que je voulais d'abord entendre les opinions des députés.

Pour présenter une résolution définitive à ce moment-ci, comme le propose le député, il faudrait que j'énonce la position du gouvernement avant d'avoir entendu l'opposition. Si c'est ce que vous voulez, ce n'est pas ce que vous avez demandé la semaine dernière ni même il y a quelques heures.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre n'a toujours pas répondu à la question. Nous la posons depuis maintenant deux semaines.

Nous connaissons la position du président des États-Unis. Nous connaissons celles du premier ministre de la Grande-Bretagne et de l'Allemagne. Nous sommes au courant de toutes ces positions.

Les Canadiens veulent maintenant savoir en quoi consiste la position du premier ministre. Pourquoi ne veut-il pas nous la préciser? Est-il pour ou contre une intervention militaire?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, si le député avait écouté mon intervention tout à l'heure, il saurait que j'ai dit alors que j'espérais qu'on trouverait une solution diplomatique. En l'absence d'une telle solution, nous voulons être prêts pour nous assurer que Saddam Hussein respecte les résolutions des Nations Unies. C'est une très bonne position.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, nous espérons tous qu'il puisse y avoir une solution diplomatique et nous nous demandons pourquoi le Canada n'a pas joué un rôle dans la recherche de cette solution diplomatique. Cependant, nous avons maintenant dépassé ce stade et il nous faut savoir ce que le premier ministre pense d'une intervention militaire. Il doit faire preuve d'initiative. C'est ce que nous réclamons de sa part, du leadership.

 

. 1420 + -

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je viens d'exprimer une position très claire. Nous voulons trouver une solution diplomatique, mais il est déjà trop tard pour le député.

Lorsque j'ai parlé hier avec le président Clinton et lorsque je me suis entretenu ce matin avec le premier ministre de la Grande-Bretagne, ils m'ont tous deux dit qu'ils croyaient encore dans la possibilité d'une solution diplomatique et que pour y parvenir, il fallait être prêt à agir si l'Irak n'accepte pas cette solution. C'est exactement la position du gouvernement et celle du président des États-Unis et du premier ministre de la Grande-Bretagne.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, historiquement, le Canada a toujours eu, au niveau international, une approche afin de favoriser le règlement des crises par des moyens diplomatiques. On n'a qu'à se référer aux interventions de Lester B. Pearson lors de la crise de Suez et aux nombreuses missions de paix effectuées par l'armée canadienne.

Le premier ministre peut-il nous dire s'il entend intervenir auprès de ses principaux alliés afin de permettre une solution de la crise irakienne par voie diplomatique?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est ce que je souhaite. J'ai eu l'occasion de parler avec M. Blair, avec M. Clinton et avec M. Howard, le premier ministre australien. Tout le monde souhaite une solution diplomatique.

Cependant, on ne sait pas si M. Saddam Hussein va accepter, oui ou non. Nous sommes arrivés à la période où il faut commencer à bâtir une réponse à Saddam Hussein, s'il n'accepte pas les propositions diplomatiques qui lui sont faites à ce moment-ci, aussi bien par la Russie que par la France.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, en 1991, le Canada a participé, sous le contrôle des Nations unies, à la guerre du Golfe.

Si, malheureusement, toute tentative par voie diplomatique échouait, le premier ministre est-il d'avis qu'il serait éminemment souhaitable que toute intervention militaire se fasse sous l'égide des Nations unies?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est souhaitable, et c'est ce que nous souhaitons. Toutefois, à ce moment-ci, la situation est la suivante: Saddam Hussein ne respecte pas les engagements qu'il a pris au moment du cessez-le-feu, et l'intervention militaire de 1991 a été autorisée par les Nations unies.

M. Saddam Hussein a signé un accord de cessez-le-feu et maintenant, il ne le respecte pas. Alors, nous avons l'autorité de procéder, en vertu de la Résolution de 1991, puisque Saddam Hussein ne respecte pas la décision d'alors.

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Le président russe, Boris Eltsine, croit qu'une frappe militaire en Irak en ce moment pourrait dégénérer en conflit mondial. Ces propos sont troublants, d'autant plus qu'ils proviennent d'un pays membre du Conseil de sécurité de l'ONU. Et encore ce matin, à son arrivée à Rome où il est en visite officielle, le président russe a réitéré son appui à une solution diplomatique de la crise irakienne.

Avant de décider de sa position dans l'affaire irakienne, le gouvernement canadien a-t-il cherché à connaître les positions du gouvernement russe qui préconise toujours une solution diplomatique au conflit?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, il y a deux semaines, j'ai eu des entretiens avec M. Primakov, le ministre des Affaires étrangères de la Russie, et nous avons alors longuement discuté de l'Irak. À ce moment-là, il a parlé de la nécessité d'une solution diplomatique. Le premier ministre a dit exactement la même chose. Nous espérons tous pouvoir trouver une solution pacifique à cette situation très difficile. Nous allons continuer d'appuyer les efforts déployés en ce sens et à prendre nous-mêmes des initiatives pour essayer de favoriser un rapprochement.

Comme le premier ministre l'a déclaré, le fait est que depuis sept ans, Saddam Hussein refuse de respecter les conditions que lui avaient fixées les Nations Unies et qu'il avait acceptées dans le cadre du cessez-le-feu de 1991. À un moment donné, nous devons être en mesure de dire...

Le Président: La parole est au député de Beauharnois—Salaberry.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, «the fact of the matter», c'est qu'il y a plusieurs alliés du Canada qui ne sont pas favorables à une intervention militaire.

On sait que la France, l'Italie et la Belgique sont toujours opposées à une solution militaire au conflit avec l'Irak. Le Canada, qui est membre de l'OSCE, a-t-il eu des discussions avec ces trois pays qui, tous, croient encore à une solution diplomatique au conflit?

 

. 1425 + -

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes en contact constant avec tous les pays concernés. Comme nous l'avons précisé assez clairement, la chose la plus importante peut-être est d'obtenir le point de vue des députés de tout le Canada. Il s'agit de la consultation la plus importante. Nous devrions avoir la coopération de l'opposition pour ce faire.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, les Canadiens ont réagi avec alarme, ce matin, lorsqu'ils ont entendu la secrétaire d'État des États-Unis annoncer que les Canadiens appuyaient le recours à la force contre l'Irak.

Ma question au premier ministre est la suivante: Est-ce vrai? Dans l'affirmative, pourquoi cet outrage au Parlement qui n'a pas encore débattu cette grave question? Et si ce n'est pas vrai, est-ce que le premier ministre va déposer une plainte officielle auprès du gouvernement américain pour avoir donné une fausse impression de la position du Canada?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, notre position est claire. J'ai dit hier au président des États-Unis, comme je l'ai dit ce matin au premier ministre de la Grande-Bretagne, que je ne voulais pas engager le Canada sans avoir au préalable demandé son avis à la Chambre des communes. Si Mme Albright a dit que j'avais donné mon appui, elle s'est trompée. J'ai dit que je devais consulter la Chambre et c'est ce que je veux faire aujourd'hui.

J'espère que vous n'aurez pas recours à des tactiques de procédure pour m'empêcher de vous consulter. Je veux savoir ce que vous pensez.

À propos, j'ai informé le chef du Parti travailliste anglais de la position du Nouveau Parti démocratique à ce sujet.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, la plupart des pays réclament une diplomatie plus agressive, et non une agression militaire unilatérale. Même le général Norman Schwarzkopf a dit que les bombardements ne donneraient rien. Il serait préférable, pour amener l'Irak à se plier aux inspections onusiennes de ses armes, de relâcher les sanctions commerciales, qui ont déjà tué des centaines de milliers d'innocents.

Pourquoi le Canada ne prend-il pas l'initiative, comme nous l'avons fait dans le cas des mines antipersonnel? Pourquoi ne pas intensifier nos efforts pour parvenir à une solution diplomatique multilatérale par l'intermédiaire de l'ONU?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, cela fait des mois et des semaines que nous essayons de parvenir à une telle solution avec Saddam Hussein. C'est la raison pour laquelle le secrétaire général des Nations Unies demande que l'on respecte la résolution du Conseil de sécurité. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir. Mais à un moment donné il faudra dire à Saddam Hussein: «Respectez les engagements que vous avez pris en 1991 ou gare aux conséquences.» Nous sommes en train de nous préparer à administrer ces conséquences. Lorsque le moment sera venu, il faudra que nous soyons prêts à le faire.

[Français]

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, depuis plus d'une semaine maintenant, mon parti demande au gouvernement un vrai débat à la Chambre des communes sur la question de l'Irak, non pas une session de thérapie de groupe, mais un débat basé sur la position connue du gouvernement et de l'information qu'il est prêt à donner à la Chambre des communes.

Je veux savoir pourquoi le gouvernement a attendu une semaine complète et pourquoi c'est le président des États-Unis qui provoque un débat à la Chambre des communes et non les parlementaires canadiens qui ont droit au respect de cette Chambre pour qu'on puisse entendre la position du gouvernement et non des thérapies de groupe.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons, au cours de la dernière Législature, développé l'habitude de consulter la Chambre des communes avant de prendre une position définitive.

On sait que le chef du Parti conservateur n'était pas trop souvent à la Chambre à l'époque, mais on avait pris cette habitude de consulter la Chambre des communes pour avoir l'opinion de celle-ci avant de prendre position.

Si vous voulez que je prenne position et que j'engage le gouvernement avant de consulter le Parlement, très bien, ce sera facile pour moi. Mais j'offre, avec respect, de consulter l'opposition qui ne veut pas être consultée. Très bien, dites-le, je vais arriver avec une position, et lorsque le gouvernement se sera prononcé, vous voterez pour ou contre. Mais je pensais que vous pourriez contribuer au débat avant qu'on ne prenne une décision.

[Traduction]

Le Président: Une fois de plus, chers collègues, je vous demanderais d'adresser vos remarques à la présidence. Par ailleurs, nous ne sommes pas censés faire allusion à l'absence d'un député.

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, le premier ministre parle du respect pour l'opposition et les autres partis. La première marque de respect serait d'informer la Chambre des communes et les députés, et de donner des séances d'information sur la situation.

Les Américains sont prêts à nous donner des séances d'information, alors que notre propre gouvernement ne l'a pas encore fait. La première marque de respect est d'exposer à la Chambre la position du gouvernement au lieu de proposer une thérapie de groupe à la Chambre des communes.

 

. 1430 + -

Est-ce que le premier ministre pourrait avoir la décence d'informer la Chambre s'il a répondu au président Clinton qu'il préférait que toute action éventuelle se fasse sous l'égide des Nations Unies plutôt qu'à l'initiative unilatérale des Américains? Pourrait-il au moins nous renseigner là-dessus aujourd'hui?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je dirais que les Nations Unies ont autorisé l'action contre Saddam Hussein en 1991. Après l'attaque, il y a eu un accord de cessez-le-feu, et c'est cet accord que Saddam Hussein ne respecte pas. S'il ne respecte pas ses engagements, cela veut dire que nous avons le droit d'intervenir.

De quoi se plaint le député? Nous voulons un débat et il n'en veut pas. La semaine dernière il en réclamait un. J'ai demandé un débat pour ce soir et il ne veut plus. Il devrait faire preuve de plus de cohérence. Il me semble aussi confus que jamais.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, par deux fois la semaine dernière, le ministre des Finances a évité de répondre à une question toute simple. Nous allons donc revenir à la charge.

Comme le ministre des Finances le sait, les surtaxes de 3 et 5 p. 100 ont été imposées à titre de mesures temporaires jusqu'à ce que le budget soit équilibré. Maintenant que le budget est équilibré, quand va-t-il supprimer ces surtaxes de 3 et 5 p. 100?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a déjà exprimé plusieurs fois et très clairement son intention de réduire les impôts. En fait, nous avons déjà réduit les impôts dans les budgets précédents et nous allons continuer de le faire dans les budgets à venir.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, notre question porte très précisément sur les surtaxes de 3 et 5 p. 100. Le gouvernement a conclu un marché avec les Canadiens. Ces derniers ont rempli leur engagement. Ils ont contribué à équilibrer le budget en payant des impôts extraordinairement élevés.

Quand le ministre des Finances remplira-t-il son propre engagement? Quand supprimera-t-il les surtaxes de 3 et 5 p. 100?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement a certes conclu un marché avec les Canadiens. Il s'agit d'un contrat social visant à protéger le patrimoine social de notre pays.

Le NPD, en cherchant à vider de sa substance le système de santé, en ne voulant pas consacrer suffisamment d'argent à la recherche et au développement, en ne voulant pas consacrer suffisamment d'argent à l'éducation, vide de sa substance le système de péréquation. Le Parti réformiste cherche à rompre le contrat social.

*  *  *

[Français]

LA TEMPÊTE DE VERGLAS

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, au sujet de la récente tempête de verglas qui a gravement endommagé le réseau hydroélectrique du Québec qui, comme chacun le sait, est un service public essentiel, le premier ministre avait toujours laissé la porte ouverte à d'éventuelles compensations. Vendredi dernier, nous avons toutefois appris du président du Conseil du Trésor le refus catégorique d'Ottawa de verser des indemnisations.

Ma question s'adresse au premier ministre. Comment le gouvernement fédéral peut-il justifier son refus de dédommager le Québec, alors qu'à partir des mêmes clauses de compensation, il a déjà indemnisé Terre-Neuve et le Manitoba dans des situations quasi identiques?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, en 1984, il est vrai qu'il y a eu une compensation de 1 750 000 $ à Terre-Neuve, mais dans un cas qui était tout à fait différent de celui-ci, à ce moment-là.

En 1988, les mesures directrices ont indiqué très clairement qu'on ne paierait pas pour les utilités publiques et, dans le cas d'Hydro-Québec, il est clair que c'est une grande compagnie. C'est une compagnie qui a clairement la capacité de lever des fonds elle-même. C'est une compagnie qui peut emprunter, y compris sur les marchés internationaux, et c'est une compagnie qui va faire en...

Le Président: L'honorable député de Témiscamingue a maintenant la parole.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, le ministre est en train de nous dire qu'Hydro-Québec va être pénalisée parce qu'elle est bien gérée. Cela n'a pas de bon sens.

Le président du Conseil du Trésor a affirmé, vendredi, qu'Ottawa n'était pas un guichet automatique où on effectuait des retraits n'importe quand.

Le ministre se rend-il compte que les Québécois font des dépôts de plus de 31 milliards de dollars par année dans son guichet automatique et qu'ils sont en droit de s'attendre à être traités correctement et surtout avec équité?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, ce sont des raisons qui sont souvent données mais qui n'ont aucun fondement. Les grandes sociétés comme Alcan, comme Bell Canada n'ont pas été compensées et ne seront pas compensées.

Depuis la ligne directrice de 1988, et à Terre-Neuve et au Manitoba, les compagnies d'électricité n'ont pas été compensées. Lorsqu'on parle de 29 milliards de dollars, le Bloc québécois et le Parti québécois oublient toujours de mentionner qu'en 1993-1994, lorsqu'il y a eu des levées d'impôt au Québec de 29 milliards de dollars, il y a eu des paiements au Québec de 41,9 milliards de dollars. Alors, le vrai trou de 12 milliards de dollars, c'est celui-là.

*  *  *

 

. 1435 + -

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière, nous avons demandé à la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien comment une lettre confidentielle que Bruce Starlight lui avait adressée avait pu se retrouver entre les mains du chef Roy Whitney. Elle a répondu qu'elle l'ignorait.

Il se trouve que le chef Roy Whitney est tellement lié aux libéraux que le ministre des Finances a organisé une activité de levée de fonds lorsque le chef s'est présenté comme candidat et que le premier ministre a été un des orateurs principaux à l'assemblée de mise en candidature de Whitney, en 1993.

Est-ce que tous les libéraux qui ont de bonnes relations ont accès à des renseignements confidentiels et secrets?

Le Président: J'ai un peu de mal à accepter cette question. Je vais la déclarer recevable, mais c'est un cas limite. La ministre peut répondre.

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Non, monsieur le Président.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, lorsque le chef Roy Whitney s'est présenté comme candidat libéral, le ministre des Finances a été l'hôte d'une activité de levée de fonds pour lui, et deux sénateurs étaient présents. Le premier ministre a été l'un des orateurs principaux à l'assemblée de mise en candidature de Whitney. Il a longuement parlé et il a fait l'éloge de son ami, le chef Roy Whitney.

Le mois dernier encore, Whitney accompagnait le premier ministre au cours de la mission commerciale d'Équipe Canada.

Est-ce que c'est pour cette raison que la ministre des Affaires indiennes refuse la tenue d'une enquête de la GRC? Est-ce qu'elle craint que le cabinet du premier ministre ne soit mis en cause?

Le Président: Je déclare la question irrecevable, mais la ministre peut y répondre si elle le souhaite.

*  *  *

[Français]

LE PROJET DE LOI C-28

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, le conseiller en éthique gouvernementale déclarait, la semaine dernière, à propos de l'affaire du projet de loi C-28 du ministre des Finances, et je cite: «La compagnie Canada Steamship Lines m'a indiqué clairement qu'elle n'a aucune intention d'utiliser cette disposition.»

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Le ministre réalise-t-il que cette déclaration du conseiller en éthique confirme très clairement que Canada Steamship Lines, propriété à 100 p. 100 du ministre des Finances, pourrait profiter des avantages du projet de loi C-28 si cette entreprise le souhaitait?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je pense que je vais répondre à cette question, parce qu'on essaie de placer le ministre des Finances en conflit d'intérêts.

Le ministre des Finances a une compagnie, tout le monde le sait, qui lui appartient, qu'il a fondée lui-même, qui est très importante et dont l'administration est entre les mains d'un fiduciaire, comme l'exigent les lois du Parlement. Le ministre des Finances a assuré la Chambre, et je m'en suis assuré moi-même, qu'en aucun moment, la compagnie peut bénéficier de la décision qui a été prise pour attirer des investissements au Canada.

Alors, je pense que poser la question tel que le fait le député, c'est un petit peu malicieux, parce que le ministre des Finances n'a absolument rien à se reprocher.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, s'il y a malice quelque part, c'est d'avoir enfoui une page et demie de modifications à la loi s'adressant au transport maritime international dans un projet de 464 pages. Ça, c'est malicieux de la part du ministre des Finances.

Je lui pose une autre question. Le ministre ne convient-il pas que, jusqu'à présent, il n'a pu faire la démonstration décisive qu'il n'y a pas de conflit ou du moins apparence de conflit d'intérêts entre la législation qu'il a déposée devant cette Chambre et ses propres intérêts comme armateur?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Finances a pris toutes les dispositions nécessaires lorsqu'il est devenu ministre des Finances. Tout le monde savait qu'il était propriétaire de la Canada Steamship Lines.

Nous avons discuté longuement avec les conseillers en éthique pour nous assurer qu'il pouvait être à la fois ministre des Finances, servir très bien le Canada et s'assurer que la compagnie familiale, qu'il a lui-même fondée et qui est un grand succès, puisse fonctionner dans l'intérêt des autres actionnaires sans affecter son rôle de ministre des Finances. Il s'est comporté avec énormément d'intégrité et de dignité depuis qu'il est ministre des Finances du Canada.

*  *  *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, la ministre des Affaires indiennes fournit sans cesse des excuses pour justifier le scandale qui touche son ministère. Les autochtones ordinaires se sentent trahis par la ministre, qui laisse leurs lettres faire l'objet de fuites sans même y donner suite.

 

. 1440 + -

Quelles mesures la ministre a-t-elle prises pour faire enquête sur les accusations de fraude et de corruption portées contre le chef Whitney, dont fait état la lettre qu'elle a reçue de Bruce Starlight?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, une enquête de la GRC est en cours.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière, le vice-premier ministre a dit qu'il envisagerait la possibilité de payer les frais juridiques de Bruce Starlight, compte tenu que la lettre ayant fait l'objet d'une fuite a servi de fondement aux poursuites au civil.

Le gouvernement va-t-il payer les frais juridiques de Bruce Starlight?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, il est inhabituel que le ministère intervienne dans un cas comme celui-ci.

Comme je l'ai déjà mentionné à la Chambre, et comme l'a confirmé le vice-premier ministre, une enquête est en cours au sein du ministère afin de déterminer le cheminement de la lettre. Nous avons discuté du processus avec le commissaire à la protection de la vie privée, qui a dit que notre façon de procéder était raisonnable. Il n'y a pas lieu de prendre une décision relativement à cette question avant que l'enquête ne soit terminée.

*  *  *

[Français]

LES PAIEMENTS DE TRANSFERT AUX PROVINCES

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Les Québécois ont vécu durement les coupures unilatérales faites dans les transferts aux provinces à cause des déficits répétés du fédéral au cours des dernières années. Les services sociaux et de santé ont été affectés partout parce que le fédéral a équilibré son budget sur le dos des provinces.

Le ministre des Finances a-t-il l'intention de se rendre à la demande du Bloc québécois et d'adopter une loi antidéficit pour que, à l'avenir, les provinces n'aient plus à subir les conséquences des déficits fédéraux?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la question de la députée est similaire aux propositions faites par le Parti réformiste et par le Parti conservateur, il y a quelques années. Je vais donner la même réponse.

Dans toutes ces formules, il y a une exemption pour déclin économique ou pour catastrophes. Lorsqu'on regarde différemment ces exemptions, c'est toujours un trou énorme qui rend quasiment nulles ces sortes de formules. Alors, ce n'est pas notre intention. Nous pensons qu'il est beaucoup plus important d'être plus transparents et d'avoir des objectifs très clairs.

*  *  *

[Traduction]

L'INDUSTRIE DE LA CONSTRUCTION

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Un rapport de Développement des ressources humaines Canada faisant suite à une étude de 18 mois portant sur l'économie souterraine dans le secteur de la construction a récemment fait l'objet d'une fuite dans les médias. Quand le ministre rendra-t-il officiellement public ce rapport et que prévoit-il de faire pour mettre un terme aux abus des travailleurs au noir, qui minent les programmes sociaux?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir posé cette question.

Nous avons en effet constitué un groupe de travail formé de représentants du gouvernement et de l'industrie pour examiner la question de l'économie souterraine dans le secteur de la construction. Le rapport est le résultat de l'étude du groupe de travail. Il renferme une description détaillée du fonctionnement de l'économie souterraine et des secteurs où elle sévit. Le groupe de travail s'en servira pour dresser un plan d'action visant à réduire l'activité de l'économie souterraine dans le secteur de la construction.

Des exemplaires du rapport ont été remis aux personnes intéressées, mais je dois avouer que nous ne voulons pas qu'il soit distribué au-delà...

Le Président: La parole est au député de Delta—South Richmond.

*  *  *

LES PÊCHES

M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, en m'accordant une absolution inconditionnelle pour ma participation à une pêche de protestation, le juge provincial de la Colombie-Britannique Howie Thomas a signifié de manière non équivoque que les tribunaux n'appliqueraient pas le programme de pêche commerciale du ministre qui est fondé sur des facteurs raciaux.

Le juge Thomas n'a rien inventé. Il se basait sur de récents arrêts de la Cour suprême du Canada.

Compte tenu de la décision de vendredi dernier, le gouvernement abandonnera-t-il sa politique en matière de pêche commerciale, qui se fonde sur des facteurs raciaux?

L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, après examen du jugement dans lequel le juge a condamné le député, et des commentaires relatifs au jugement en cause, le gouvernement a décidé de ne pas modifier sa stratégie de pêche autochtone parce qu'il estime que les dispositions sur lesquelles elle est fondée sont tout à fait légales et irréprochables.

M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, le ministre ne comprend-il pas que si les tribunaux refusent de poursuivre les pêcheurs qui ont pris part aux activités illégales en cause que tout est fini pour lui? Ne comprend-il pas que, sans l'appui des tribunaux, ce sera le chaos?

Comment le ministre peut-il maintenir une pêche commerciale fondée sur des critères raciaux contre l'avis des tribunaux?

 

. 1445 + -

L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, la question du député se fonde sur de bien curieuses prémisses.

Il dit que les tribunaux poursuivent des gens. Or, les tribunaux ne poursuivent personne, ils déterminent leur culpabilité ou leur innocence et, dans le cas du député, ils l'ont trouvé coupable.

*  *  *

L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international et concerne les mots que le ministre a employés vendredi pour décrire l'attitude des gens à l'égard de la position gouvernementale sur l'AMI, à savoir: «important appui» et «consensus».

Le ministre ne sait-il pas que cela n'est pas vrai? Ne sait-il pas qu'un nombre important et croissant de Canadiens sont très préoccupés par le peu de sens critique dont le gouvernement fait preuve à l'égard de la mondialisation?

Le ministre écoutera-t-il les Canadiens en se retirant des négociations au sujet de l'AMI et en cherchant à obtenir une économie mondiale qui fonctionnera pour les gens et pour l'environnement plutôt que pour les multinationales?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, j'ai dit vendredi que le comité parlementaire avait exprimé un important appui à l'endroit du consensus parlementaire et j'étais absolument dans le vrai.

Le comité recommande en général de poursuivre nos négociations à la table afin de mousser, de protéger et de promouvoir les valeurs et les intérêts des Canadiens et c'est ce que nous allons faire.

J'ai dit maintes fois que nous conclurons l'accord opportun au moment opportun et non pas n'importe quel accord à n'importe quel moment. Le Parti réformiste appuie l'AMI. Le Parti conservateur et le Bloc québécois aussi. Le seul parti qui recommande de «ramasser ses billes et de partir», c'est le NPD. Ce n'est pas comme cela que l'on construit un pays.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, il ne s'agit pas de ramasser ses billes et de partir, mais bien de faire que la mondialisation serve les collectivités et l'environnement et protège les droits des travailleurs et pas seulement ceux des investisseurs comme le fait l'AMI.

Le ministre a fait allusion vendredi à l'OMC. Pourquoi n'essaie-t-il pas de négocier à l'OMC, où il y aura les pays en voie de développement et les gens qui ont une idée de la façon dont les investissements devraient être réglementés dans l'intérêt public, plutôt qu'avec les seuls pays industrialisés, qui semblent malheureusement parler maintenant au seul nom des multinationales?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, c'est exactement ce que nous préconisons.

Le parti du député est contre la formule bilatérale. Il a été contre l'ALE, contre l'ALENA et pour des négociations multilatérales. Maintenant que nous avons un accord multilatéral sur l'investissement, le député dit que cela laisse aussi à désirer.

S'il faut en croire le NPD, il ne reste plus qu'à construire des murs et des barrières et cela n'est manifestement pas dans l'intérêt du Canada.

Nous avons dit aussi que l'affaire sera éventuellement transférée, comme il se doit, à l'OMC, où sont présents les riches et les pauvres, le Nord et le Sud, les noirs et les blancs. C'est ce que nous avons dit et c'est ce que nous continuons à dire.

*  *  *

[Français]

L'IRAK

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, sur la crise irakienne, on entend souvent le nom de l'ONU et du Conseil de sécurité des Nations unies. J'aimerais poser une question au ministre des Affaires étrangères.

Est-ce qu'il pourrait dire à cette Chambre si son gouvernement considère que les résolutions, adoptées par le passé concernant la crise irakienne, légitiment aujourd'hui une intervention militaire en Irak?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, depuis 1991, plusieurs résolutions ont eu pour objet de demander des comptes à l'Irak en cas de violation des accords de cessez-le-feu.

Par exemple, la dernière résolution de ce genre a été adoptée en novembre dernier, lorsque le Conseil de sécurité a été saisi d'une autre violation d'accord qui risquait d'entraîner une menace pour notre sécurité nationale. Cela montre qu'il y a une série de mesures et de décisions prises par les Nations Unies qui appuient la nécessité d'une intervention énergique.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, si je comprends bien, le Conseil de sécurité des Nations unies a encore les résolutions en main pour intervenir au niveau militaire. Donc, des grands pays qui n'osent pas se prononcer aujourd'hui appuient, indirectement, une intervention militaire en Irak.

Est-ce que le ministre et son gouvernement vont demander au Conseil de sécurité des Nations unies de se prononcer à nouveau sur la question irakienne ou ce gouvernement va-t-il se satisfaire d'anciennes résolutions?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, à l'heure actuelle, on discute beaucoup d'une résolution qui pourrait être envisagée.

S'il y a une résolution, elle devra être adoptée et appliquée; elle ne doit pas avoir pour objet de soulever d'autres divisions. Une telle initiative au Conseil de sécurité exige le genre de diplomatie active dont a parlé le premier ministre et que nous appuyons.

*  *  *

 

. 1450 + -

LES BANQUES

Mme Susan Whelan (Essex, Lib.): Monsieur le Président, je représente l'une des nombreuses circonscriptions où des Canadiens sont préoccupés par l'accès à des services bancaires de base. Cette question inquiètent beaucoup de Canadiens, qu'ils vivent dans des régions rurales ou au coeur de Toronto.

Le secrétaire d'État chargé des institutions financières internationales pourrait-il garantir à tous les Canadiens qu'ils continueront d'avoir accès à des services bancaires de base?

L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, je félicite la députée d'Essex pour l'esprit de leadership qu'elle a manifesté afin que la seule banque de Comber, en Ontario, reste ouverte.

L'accès à des services bancaires de base, que ce soit dans les régions rurales de Terre-Neuve ou au centre de Victoria, est une priorité pour le gouvernement. Pour améliorer l'accès des Canadiens à faible revenu, j'ai écrit à l'Association des banquiers canadiens en insistant pour que seulement deux pièces d'identité soient exigées à l'ouverture d'un compte de banque de base, peu importe les antécédents en matière de solvabilité.

Si jamais des services bancaires de base étaient refusés à un Canadien, nous voudrions le savoir.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, les fuites sont tellement nombreuses au ministère des Affaires indiennes que celui-ci commence à ressembler au Titanic.

Les problèmes restent entiers: comment se fait-il que des lettres confidentielles adressées à la ministre, des lettres contenant des allégations de corruption à l'égard de chefs indiens, se soient retrouvées, à la suite de fuites, entre les mains des chefs en cause? On nous apprend aujourd'hui que la ministre a finalement décidé, semble-t-il, d'intervenir et de faire appel à la GRC.

Quand la ministre a-t-elle demandé l'intervention de la GRC? Sur quoi porte l'enquête au juste? Porte-t-elle sur les fuites au ministère ou sur les premières allégations formulées par Bruce Starlight?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, de toute évidence, l'opposition affectionne particulièrement les insinuations et les allégations. Permettez-moi d'expliquer à nouveau les faits à la Chambre.

Premièrement, il est absolument inacceptable que la lettre de M. Starlight se soit retrouvée entre les mains du chef Whitney.

Deuxièmement, la lettre ne lui a pas été transmise par moi ni par un de mes collaborateurs au ministère.

Troisièmement, comme l'idée que la fuite puisse venir de mon ministère me préoccupe, j'ai ordonné la tenue d'une enquête. J'ai examiné cette façon de faire avec le commissaire à la protection de la vie privée, et il a jugé cette démarche raisonnable.

Je pense que ce sont plutôt les députés d'en face qui nous rappellent le Titanic et qui sont en train de sombrer.

*  *  *

[Français]

LA COMMISSION DE L'IMMIGRATION ET DU STATUT DE RÉFUGIÉ

Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, le nombre de nominations gouvernementales augmente considérablement à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

En effet, de 1994 à 1996, durant le mandat libéral, le pourcentage de personnes remplacées avait atteint le cap des 75 p. 100. Selon les chiffres du vérificateur général, il en coûterait 92 000 $ pour former un nouveau commissaire.

Comment la ministre peut-elle justifier que la longévité moyenne du mandat des commissaires soit passée, sous les libéraux, à deux ans et demi seulement, ce qui a coûté aux citoyens environ 15 millions de dollars uniquement pour satisfaire le désir du gouvernement de nommer ses amis à la Commission?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la députée de Longueuil ne possède pas les faits exacts. Nous avons nous-mêmes, comme gouvernement, nommer un comité consultatif, indépendant de la ministre et du gouvernement, ayant pour mandat d'évaluer la compétence des personnes qui postulent pour devenir commissaire.

Depuis ce temps, depuis que le comité a été formé, aucune nomination du gouvernement n'a été faite sans la recommandation explicite de ce comité. Quant au délai ou à la durée du mandat que l'on donne au nouveau commissaire, il est de notoriété publique que la présidente elle-même demande à ce que les nouveaux commissaires...

Le Président: La parole est maintenant à l'honorable député de Winnipeg-Centre-Nord.

*  *  *

[Traduction]

L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, le ministre du Commerce international a parlé d'un consensus au sujet de l'AMI.

Il devrait pourtant savoir qu'il n'y a pas de consensus au sein du Comité de la santé sur la capacité du gouvernement de protéger l'assurance-maladie contre les forces commerciales de l'AMI. Il devrait d'ailleurs savoir que, au Canada, on s'entend de plus en plus pour dire que le gouvernement devrait renoncer à l'AMI avant qu'il n'ait raison de l'assurance-maladie.

Ne serait-ce que pour l'amour de l'assurance-maladie, le ministre du Commerce international reconsidérera-t-il la valeur qu'il semble accorder à l'AMI?

 

. 1455 + -

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, tout accord que le gouvernement envisage de conclure suscite des inquiétudes, ce qui est tout à fait normal. Personne ne devrait toutefois se sentir autorisé à tabler sur ces inquiétudes d'une manière irresponsable et à les aggraver en prétendant que l'AMI entraînera la vente du Canada. C'est exactement ce que fait le parti de la députée.

Les principes directeurs correspondent essentiellement à ceux qui sont énoncés dans le chapitre sur les investissements de l'ALENA. Or, depuis que nous avons signé l'ALENA, le système de soins de santé ne s'est pas...

Le Président: Le député de Compton—Stanstead.

*  *  *

L'IRAK

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale a déclaré la semaine dernière qu'il serait prématuré de discuter de l'état de préparation du Canada.

Moins d'une semaine plus tard, le ministre se sent tout à coup en mesure, avant même d'avoir consulté le Parlement, de recommander au premier ministre d'affecter personnel et matériel militaires canadiens à une frappe contre l'Irak menée par les Américains.

Que peut nous dire aujourd'hui le ministre à propos de notre état de préparation qu'il ne savait pas la semaine dernière?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, dans le livre blanc de 1994, on disait que nous devrions posséder des forces polyvalentes et prêtes au combat; elles le sont.

Il reste au gouvernement à décider s'il convient ou non de les déployer dans les circonstances. Comme le premier ministre l'a dit très clairement, avant de prendre une décision, le gouvernement est tout à fait disposé à entendre les vues des députés de l'opposition sur la question, si seulement on nous donne l'occasion d'en débattre à la Chambre.

*  *  *

LES SERVICES DE GARDE D'ENFANTS

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Lors de la mission commerciale qui a conduit des Canadiennes chefs d'entreprise à Washington l'automne dernier, elles ont été nombreuses à dire que l'un des plus gros obstacles auxquels se butent les femmes chefs d'entreprise sont les frais de garde d'enfants.

Le ministre est-il disposé au moins à étudier la possibilité de rendre les frais de garde déductibles à titre de dépenses engagées afin de générer un revenu?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, il faut bien comprendre que la déduction pour frais de garde d'enfants tient compte de ce qu'il en coûte à toutes les familles où les parents sont tous deux sur le marché du travail, peu importe les circonstances de leur travail. C'est une question d'équité fort importante.

Cela dit, j'ai eu l'occasion de rencontrer, à Vancouver et à Toronto, un certain nombre des femmes chefs d'entreprise qui ont participé à cette mission commerciale, et elles ont soulevé plusieurs points très importants que nous allons dûment prendre en considération.

*  *  *

LES PÊCHES

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Réf.): Monsieur le Président, vendredi, le ministre des Pêches et des Océans a refusé de divulguer les rapports d'observateurs étrangers. Il prétend qu'il ne veut pas enfreindre la loi, mais il n'existe aucune loi qui l'empêche de publier ces rapports.

Pourquoi protège-t-il des navires étrangers, des nations qui déciment nos stocks? Nous demandons au ministre qu'il publie ces rapports sur-le-champ. Quand les obtiendrons-nous?

L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle au député que j'ai offert ces rapports aux membres du comité la semaine dernière. En plus, nous avons fourni, et au comité et à la Chambre, toute l'information qu'ils contiennent sous forme de résumé. L'information que réclame le député est donc déjà disponible.

Le député peut par ailleurs consulter à huis clos, quand il le désire, le texte intégral des rapports des observateurs, que l'article 20 de la Loi sur l'accès à l'information m'empêche de divulguer.

*  *  *

[Français]

LE GAZODUC TRANS-QUÉBEC MARITIMES

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, un contrat de 50 millions de dollars a été octroyé aux sociétés texane Saw Pipes USA et japonaise Kawasaki qui fourniront l'acier nécessaire à la construction du gazoduc sous-marin de 225 kilomètres qui transportera le gaz naturel au Canada. Ce contrat constituait le gros des retombées canadiennes dans ce projet.

Le ministre des Ressources naturelles admettra-t-il que la décision du gouvernement fédéral d'autoriser le projet de Mobil Oil sans permettre l'évaluation du projet Trans-Québec Maritimes qui est promu par des intérêts canadiens a des conséquences économiques désastreuses sur la création d'emplois?

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le contrat dont parle le député a fait l'objet d'amples discussions avec les fournisseurs canadiens possibles. On est arrivés à la conclusion qu'il n'y avait pas, au Canada, de fournisseur en mesure de fournir le matériel correspondant aux spécifications voulues.

Quant à savoir si les gisements extra-côtiers de l'île de Sable profiteront au Canada, cela a été étudié par un groupe indépendant qui est arrivé à la conclusion qu'il ne faisait aucun doute que le projet aurait de grands avantages pour le Canada atlantique et pour l'ensemble du Canada.

*  *  *

 

. 1500 + -

L'INVESTISSEMENT

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement peut-il garantir aux autochtones que l'accord multilatéral sur l'investissement ne donnera pas aux grosses multinationales comme Daishowa un poids démesuré dans les décisions concernant l'accès des peuples autochtones aux ressources naturelles comme le poisson et la forêt?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, les attaques mesquines provenant de ce coin-là empirent à chaque jour. Que nous signions ou non l'AMI en avril et que cet accord soit intégré ou non à l'OMC ne signifie pas que le gouvernement du Canada ou tout autre gouvernement participant cessera d'adopter des lois et des règlements protégeant ses intérêts et ses valeurs propres.

Nous avons donné l'assurance que nous ne signerions qu'un accord multilatéral sur l'investissement acceptable pour le Canada et la communauté mondiale. Rien de moins ne sera acceptable.

Le Président: Ceci met un terme à la période des questions.

*  *  *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, pendant la période des questions, vous avez déclaré irrecevable une question du député de Skeena. J'ai examiné la teneur de la question à plusieurs reprises pendant la période des questions. Je vous renvoie au Règlement annoté de la Chambre des communes, qui stipule:

    Lorsqu'il a pris sa décision sur une question d'ordre, le Président peut la justifier par une déclaration dans laquelle il explique l'article du Règlement ou le texte habilitant sur lequel il se fonde en l'espèce. Après cette déclaration, la question ne peut plus donner lieu à discussion et...

Le Président: Je renvoie le député à 409(7).

Nous passons maintenant aux hommages à un ancien greffier de la Chambre, l'honorable Bev Koester.

*  *  *

LE DÉCÈS DE CHARLES BEVERLEY KOESTER

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous avons appris la semaine dernière la mort subite de M. C. Beverley Koester, ancien greffier de la Chambre des communes. Je voudrais lui rendre brièvement hommage.

M. Koester est né à Regina en 1926 et a fait des études au Collège militaire royal de Roads, à l'Université de la Saskatchewan et à l'Université de l'Alberta. Il a également servi dans la Marine royale canadienne et dans la réserve de la Marine royale canadienne et il portait, au moment de sa retraite, le grade de lieutenant-commandant.

Après avoir enseigné l'histoire, M. Koester s'est joint au personnel de l'assemblée législative de la Saskatchewan, où il a travaillé comme greffier de 1960 à 1969, année où il est devenu professeur à l'Université de Regina.

[Français]

Il dirigeait le Département d'histoire de l'Université lorsque le gouvernement de l'époque l'a invité à devenir greffier adjoint de la Chambre des communes. En 1979, il fut promu au poste de greffier de la Chambre, devenant ainsi mon patron. Il a occupé ce poste jusqu'en 1986, et je peux dire qu'il a été pour moi et, je pense, pour tous les employés de la Chambre des communes, un excellent patron.

 

. 1505 + -

[Traduction]

M. Koester a permis au personnel du bureau de bénéficier de ses connaissances et de sa sagesse d'universitaire, tout en jouant lui-même un rôle de premier plan dans la modernisation de l'administration de la Chambre.

J'ai eu la chance de faire partie de cette administration lorsque M. Koester était ici et de siéger ensuite à la Chambre pendant la seconde moitié de son mandat de greffier. Dans les deux cas, j'ai pu apprécier son discernement et sa prévoyance. M. Koester a tellement bien fait les choses que, lorsqu'il est parti à la retraite, un fonctionnaire de carrière de la Chambre des communes lui a, pour la première fois, succédé.

Au nom des députés ministériels, en mon nom propre en tant qu'ancien membre du personnel et au nom des employés de la Chambre des communes, j'offre mes plus sincères condoléances à l'épouse et aux enfants de M. Koester, qui était un homme remarquable.

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais rendre hommage à Charles Beverley Koester.

Pendant plus de quatre décennies, Charles Beverley Koester a servi les Canadiens à de nombreux postes. Il a entrepris sa carrière dans la Marine royale canadienne et il a servi outre-mer durant la Seconde Guerre mondiale. Il est ensuite devenu greffier à l'Assemblée législative de la Saskatchewan. Après avoir obtenu son doctorat en histoire, il a passé plusieurs années à enseigner dans sa ville natale, à l'Université de Regina. En 1980, il est déménagé à Ottawa pour devenir greffier de la Chambre des communes.

Même si je n'ai pas eu le privilège de le connaître personnellement, à en croire de nombreuses personnes, ses compétences et ses capacités étaient tout à fait remarquables. Il a servi les présidents et les députés avec dévouement et sagesse.

Aujourd'hui, mes collègues réformistes et moi-même nous joignons à nos collègues de tous les partis pour saluer un Canadien remarquable qui a si bien servi son pays. Nous transmettons également nos sincères condoléances à son épouse, Carolyn, et à ses enfants, Elizabeth, Charles, Christopher, James et Kate, ainsi qu'à ses petits-enfants et à ses nombreux amis dans tout le pays.

Je suis persuadé que Bev Koester va beaucoup nous manquer.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui, au nom du Bloc québécois, afin de rendre hommage à M. Charles Beverley Koester, ancien greffier de la Chambre des communes, décédé dernièrement à l'âge de 72 ans.

Né en 1926 à Regina, M. Koester termine ses études au Collège de la Marine royale canadienne à Victoria en 1944. Il entre alors en fonction en Écosse et participe, en 1945, à la libération des villes de Oslo et de Copenhague. Il restera au service de la marine jusqu'en 1960.

C'est d'ailleurs en 1960 qu'il débute sa carrière au service des institutions parlementaires. Greffier à l'assemblée législative de la Saskatchewan de 1960 à 1969, il se retire pour enseigner l'histoire à l'Université de Regina jusqu'en 1975. En 1980, il devient greffier de la Chambre des communes, fonction qu'il occupera jusqu'en 1987. Pendant cette période, il servira sous sept présidents de la Chambre des communes.

Plusieurs des collègues ici en cette Chambre ont eu l'opportunité et le privilège de connaître et de côtoyer M. Koester. Je pense pouvoir dire en leur nom que cette institution vient de perdre un grand homme. Au nom de mes collègues du Bloc québécois, j'aimerais adresser à sa famille et à ses proches mes plus sincères condoléances.

[Traduction]

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, à la fin d'une notice nécrologique pour le regretté Bev Koester, on cite Alfred, Lord Tennyson, qui a dit un jour: «que personne ne gémisse lorsque je prendrai la mer.»

Je tiens à dire à la famille de M. Koester que nous ne sommes pas ici pour violer ses instructions, pour nous plaindre. Nous sommes ici pour rendre hommage à quelqu'un qui a servi la Chambre des communes très bien durant sa présence ici.

Je me rappelle certes de l'époque où M. Koester siégeait au bureau comme greffier. Il m'a assermenté à deux ou trois reprises. Il a bien servi la Chambre. Il a eu une belle carrière dans la marine, le monde universitaire, à la Chambre et à l'Assemblée législative de la Saskatchewan.

Je remarque qu'il a été greffier de la Chambre des communes et greffier de l'Assemblée législative de la Saskatchewan à une époque très intéressante, puisqu'il était greffier en Saskatchewan durant le grand débat sur l'assurance-maladie et greffier à la Chambre des communes lors du fameux incident des cloches et de divers autres événements qui ont entouré le rapatriement de la Constitution au début des années 80.

 

. 1510 + -

Il va nous manquer. Mes collègues néo-démocrates et moi-même adressons nos sincères condoléances à sa famille.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, à l'occasion du décès de M. Charles Beverley Koester, ancien greffier de la Chambre des communes, les députés du Parti progressiste conservateur se joignent aux autres députés à la Chambre pour exprimer leurs condoléances à Mme Koester, à ses enfants et à ses petits-enfants.

Les états de service de M. Koester à la Chambre sont bien connus. En plus de mener une carrière parlementaire, il a également été un érudit et un biographe. Il a écrit une biographie du député conservateur Nicholas Flood Davin. Pour résumer la vie de M. Davin, M. Koester écrivait ces mots éloquents qui s'appliquent bien à lui également:

      ...il a voué ses talents aux problèmes de l'époque; [...] il a voué son énergie, son éloquence, sa sagesse et son expérience à la noble tâche de gouverner; [...] et il a cherché à faire oeuvre de bâtisseur par le truchement du Parlement [...] (en sachant bien que) le gouvernement parlementaire dépend autant de l'institution que de l'individu.

M. Koester a beaucoup apporté à la Chambre des communes tout le temps qu'il y a exercé ses fonctions. Le Parlement a perdu un ami et le pays, un grand homme.

Le Président: Chers collègues, je voudrais, en votre nom, dire quelques mots au sujet de M. Koester, ancien greffier de la Chambre des communes du Canada.

J'ai été député pendant quelques années où il a exercé ses fonctions au Bureau de la Chambre. À plus d'une reprise, j'ai eu à m'adresser au Bureau pour obtenir de l'information. M. Koester a toujours agi en professionnel. Il s'est donné la peine d'écouter le simple député d'arrière-ban que j'étais et de nous faire connaître les usages de la Chambre.

Il va sans dire que c'était un érudit. Je ne voudrais pas le comparer à tous les greffiers, mais parmi ceux que j'ai eu le plaisir de connaître à la Chambre des communes, il était l'un des plus cultivés que j'aie connus.

Il était très respecté à l'intérieur du Commonwealth. Il y a à peine un mois, lors d'une réunion des Présidents de la Chambre des communes des divers pays du Commonwealth, on m'a demandé des nouvelles de M. Koester et de son épouse. j'ai évidemment répondu à ce moment-là qu'il semblait aller très bien.

Il a travaillé au service de la Chambre et a très bien servi les parlementaires que nous sommes. Il manquera beaucoup à notre communauté parlementaire ainsi qu'à ses collègues greffiers, non seulement ici à la Chambre des communes mais partout au Canada car il se mettait à la disposition des greffiers des autres assemblées législatives, étant lui-même issu de celle de la Saskatchewan.

En votre nom, j'assure à sa famille, à ses petits-enfants et à tous ceux à qui ses états de service ont donné tant de raisons d'être fiers, que nous le regretterons beaucoup. Il a été apprécié par ceux d'entre nous qui avons eu le grand honneur de travailler avec lui à la Chambre des communes.



AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le vingt et unième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres et des membres associés du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation.

Avec le consentement de la Chambre, je proposerai l'adoption de ce rapport plus tard aujourd'hui.

*  *  *

 

. 1515 + -

LE MOYEN-ORIENT

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 56(1) du Règlement, je propose:  

    Que, le lundi 9 février 1998, à l'heure habituelle de l'ajournement quotidien, les délibérations prévues par l'article 38 du Règlement n'aient pas lieu, mais qu'une motion d'ajournement soit réputée avoir été proposée et que ladite motion soit débattue aux conditions suivantes:

      a) Les députés désireux d'intervenir parleront de l'invitation faite au Canada par les États-Unis d'Amérique de participer à d'éventuelles actions militaires au Moyen-Orient;

      b) Aucun député ne parlera pendant plus de vingt minutes sans période réservée aux questions et aux observations et deux députés pourront partager une période de vingt minutes;

      c) Les motions dilatoires et les vérifications de quorum ne seront pas recevables;

      d) Après épuisement du débat faute d'intervenants, la motion sera réputée avoir été adoptée.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre la motion veuillent bien se lever.

Et moins de 25 députés s'étant levés:

Le Président: Moins de 25 députés s'étant levés, la motion est adoptée.

(La motion est adoptée.)

M. Randy White: Monsieur le Président, j'ai besoin d'un renseignement avant de demander le consentement unanime de la Chambre pour présenter une motion.

Le leader du gouvernement à la Chambre peut-il préciser si, au cours de ce débat, ce soir, on présentera une motion sur les mesures que le gouvernement entend prendre et si cette motion sera mise aux voix?

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, la seule motion dont la Chambre est saisie est celle que je viens de proposer. Si le député veut en discuter avec moi plus tard, je suis sûr que nous pouvons nous rencontrer cet après-midi. Pour le moment, il n'y a que cette motion qui soit présentée à la Chambre.

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais demander s'il y a unanimité pour que la Chambre considère le débat d'urgence de ce soir comme une procédure normale s'inscrivant dans l'étude d'une initiative ministérielle et que la motion qui sera alors mise à l'étude soit ainsi libellée:

    Que la Chambre appuie les mesures diplomatiques et, au besoin, militaires arrêtées par nos alliés pour mettre fin au terrorisme et à la production d'armes de destruction massive par Saddam Hussein.

 

. 1520 + -

Le Président: Est-ce que le député a le consentement unanime de la Chambre pour présenter sa motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Non.

*  *  *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

 

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre y consent, je propose: Que le 21e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre présenté plus tôt aujourd'hui, soit adopté.

Le Président: Est-ce que le député a le consentement unanime de la Chambre pour présenter sa motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

*  *  *

PÉTITIONS

LES ARMES NUCLÉAIRES

Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre des communes une pétition ayant trait à l'abolition des armes nucléaires. Un des mes électeurs, M. Mark Frank, m'a expressément demandé de déposer cette pétition qui demande au Parlement d'appuyer immédiatement la conclusion, d'ici l'an 2000, d'une convention internationale établissant un calendrier exécutoire pour l'abolition de toutes les armes nucléaires.

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, au nom de la famille de Reena Virk, sauvagement assassinée dans ma circonscription, j'aimerais présenter une pétition signée par plus de 1 500 personnes habitant Victoria et ailleurs en Colombie-Britannique. Les pétitionnaires demandent que le gouvernement apporte des modifications fondamentales à la Loi sur les jeunes contrevenants. Ils pensent que la violence chez les jeunes est un problème de plus en plus important dans notre société et que les jeunes soupçonnés de crimes aussi graves qu'un meurtre, par exemple, devraient être jugés par un tribunal pour adultes. Je ne peux que féliciter la famille de Reena qui essaye de transformer la tragédie insensée de sa mort en une occasion de faire le bien.

LES MINES ANTIPERSONNEL

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, la seconde pétition est signée par le personnel et des élèves de l'école Strawberry Vale Elementary School de Victoria. Les étudiantes Chantelle Johnston, Xana Antonissen et Jenna Galegor ont fait preuve d'initiative en demandant que la production et l'utilisation de mines antipersonnel soient interdites. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter une mesure législative interdisant à tout jamais la production et l'utilisation de mines antipersonnel. Je suis certain qu'ils sont très heureux de savoir que c'est justement ce que le gouvernement a décidé de faire.

L'ÉQUITÉ SALARIALE

M. John Harvard (Charleswood—Assiniboine, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de présenter une pétition au nom de plusieurs douzaines d'habitants de Winnipeg, dont certains se trouvent dans ma circonscription.

Les pétitionnaires aimeraient rappeler à la Chambre que cela fait 12 ans que le Canada a adopté une mesure législative confirmant le principe du salaire égal pour un travail égal et que la Commission canadienne des droits de la personne a convenu que les conclusions d'une étude indépendante étaient raisonnables et exactes.

Les pétitionnaires réclament que cette mesure législative entre en vigueur immédiatement et que les fonctionnaires visés soient remboursés selon les taux recommandés.

LA NUDITÉ DANS LES LIEUX PUBLICS

M. John Nunziata (York-Sud—Weston, Ind.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter la Chambre une pétition signée par 60 000 personnes et concernant la question des seins à nu en Ontario.

En décembre 1996, la cour d'appel de l'Ontario a statué que les dispositions du Code criminel du Canada relativement à la nudité allaient à l'encontre de la Charte des droits et libertés. Il est clair qu'une majorité écrasante de gens en Ontario et dans tout le pays sont opposés au jugement de la cour d'appel. C'est le rôle de ce parlement d'adopter des lois pénales. Ce n'est pas celui des tribunaux, et notamment de la cour d'appel de l'Ontario.

Ces signatures ont été rassemblées par Keep Tops On, KTO, une organisation qui a son siège dans ma circonscription. Les personnes à l'origine de cette pétition, Carol Faraone, Cathy Francavilla, Roxanne James et Erica Kubassek, sont présentes à la tribune. Ces soixante mille signatures viennent s'ajouter aux 40 000 présentées à la Chambre il y a plusieurs semaines, et la campagne pour en recueillir d'autres se poursuit.

Les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada de modifier le Code criminel, notamment les articles 173 et 174 relatifs aux actes indécents et à la nudité dans les lieux publics, et de déclarer clairement que le fait pour une femme de dénuder ses seins en public est un acte indécent.

 

. 1525 + -

LE CRTC

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter trois pétitions.

La première pétition vient de la circonscription de Windsor—St. Clair et demande au gouvernement de revoir la politique du CRTC pour ce qui est la délivrance de licences à des radiodiffuseurs religieux.

MANICKAVASAGAM SURESH

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition vient principalement de la circonscription de Windsor-Ouest et demande au Parlement d'empêcher qu'un certain Suresh, dont ils demandent la remise en liberté immédiate, ne soit pas expulsé.

LE SERMENT D'ALLÉGEANCE

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, la troisième pétition provient aussi de la circonscription de Windsor-Ouest et demande que le Parlement adopte un serment officiel d'allégeance au drapeau, après consultation des Canadiens sur le libellé.

LA PORNOGRAPHIE

M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui une pétition conforme à l'article 36 du Règlement au nom de mes électeurs d'Erie—Lincoln.

Considérant qu'un nombre accru de Canadiens ne peuvent plus tolérer les effets dégradants de l'obscénité et considérant de plus que la pornographie n'est pas acceptable dans nos collectivités, les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter des règles plus précises concernant la catégorisation, la distribution et l'affichage de documents pornographiques.

LE FONDS D'INDEMNISATION DES AGENTS DE SÉCURITÉ PUBLIQUE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter une pétition signée par un certain nombre de Canadiens, certains de ma circonscription de Mississauga-Sud.

Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que les agents de police et les pompiers mettent quotidiennement leur vie en péril dans l'exercice de leurs fonctions et que leurs avantages sociaux prévoient rarement une indemnisation suffisante de leur famille s'ils sont tués en service. Le public porte aussi le deuil des agents et des pompiers tués dans l'exercice de leurs fonctions et il souhaiterait offrir à la famille éprouvée de ces agents une preuve tangible de son appui.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de créer un fonds, le Fonds d'indemnisation des agents de sécurité publique, à l'intention des familles des agents tués dans l'exercice de leurs fonctions.

LA NUDITÉ DANS LES LIEUX PUBLICS

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée par une centaine de mes électeurs qui désirent faire valoir au Parlement que les incidents de nudité explicite font du tort au public, en particulier aux enfants. Les pétitionnaires demandent au Parlement de modifier le Code criminel, notamment les articles 173 et 174, pour préciser qu'une femme qui montre sa poitrine en public commet un acte indécent.

*  *  *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondons aujourd'hui à la question no 45. .[Texte] M. Mark Assad:

    Au sujet du programme d'immunisation de l'Agence canadienne de développement international, ACDI, a) est-ce que l'ACDI a mis un terme à ce programme en septembre 1997, b) si oui, est-ce que le Canada fait le suivi de l'évolution des taux de couverture vaccinale dans les pays affectés par l'abandon du programme, c) à combien estime-t-on le nombre d'enfants qui ne recevront pas de couverture vaccinale l'an prochain à cause de l'abandon du programme et d) quel est statistiquement, chez les enfants, le taux de mortalité due à des maladies évitables par vaccin?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Coopération internationale et ministre responsable de la Francophonie, Lib.): Le Programme canadien international d'immunisation, PCII, administré par l'Association canadienne de santé publique, a pris fin, tel que prévu, en 1997 après une décennie, ayant atteint ses objectifs.

Cela étant dit, l'ACDI n'a pas cessé ses activités en matière d'immunisation. En effet, dès l'été 1996, avant même la fin du PCII, l'ACDI a commencé une collaboration avec l'Organisation mondiale de la santé, OMS pour renforcer les efforts pour l'éradication de la polio en Afrique francophone.

Suite à des consultations auprès de l'OMS, l'ACDI travaille en ce moment au développement d'une contribution additionnelle pour l'immunisation en Afrique, visant le renforcement de l'effort d'éradication de la polio, l'élimination de la rougeole et le renforcement général des programmes d'immunisation.

Les programmes d'immunisation actuels sauvent la vie de plus de trois millions d'enfants chaque année. Mais il reste encore beaucoup à faire. Par exemple en Afrique, on pourrait sauver la vie d'environ 500 000 enfants si ceux-ci étaient vaccinés contre la rougeole, une des six maladies ciblées par les programmes d'immunisation actuels.

Les programmmes d'immunisation sont parmi les interventions de santé publique qui ont le meilleur rapport coût-efficacité. C'est pourquoi le Canada continuera de contribuer au succès des programmes d'immunisation dans le monde. Déjà plus de 80 p. 100 des enfants de la planète sont vaccinés, un taux inespéré il y a même 20 ans. L'éradication de la polio et l'élimination de la rougeole sont en vue; soyez assuré que l'ACDI maintiendra son effort et son appui aux pays les plus démunis.

[Traduction]

M. Peter Adams: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-ce d'accord?

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, avant que nous n'accordions l'autorisation de faire rester les questions au Feuilleton, je voudrais invoquer le Règlement et poser au secrétaire parlementaire une question que j'ai posée par le passé et dont je suis toujours curieuse de connaître la réponse.

Quand pourrai-je obtenir une réponse à une question que j'ai déposée le 23 septembre?

J'avais mentionné ce dossier le 3 décembre, bien après la période de 45 jours à la suite de laquelle nous devrions normalement recevoir une réponse. Nous sommes le 9 février, plus de 100 jours de séance après le dépôt de la question. Je voudrais que le secrétaire parlementaire me donne des éclaircissements au sujet de ce retard. Le dossier était très sérieux. Il s'enquérait des projets du gouvernement et du ministre de la Santé de consacrer 50 millions de dollars à des programmes de sensibilisation et d'autres programmes visant à réduire le tabagisme chez les jeunes.

Je demande des éclaircissements sur ce dossier urgent. Nous avons besoin de ces renseignements.

 

. 1530 + -

M. Peter Adams: Monsieur le Président, je présente toutes mes excuses à la députée car, comme elle l'a dit, elle s'était déjà mise en rapport avec moi à ce sujet. Je la consulterai dans un instant et tâcherai d'examiner ce dossier.

Le président suppléant (M. McClelland): Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

 

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport avec une proposition d'amendement; et des motions nos 4 à 19.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'aborder aujourd'hui le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé, à l'étape du rapport.

J'imagine que les députés d'en face doivent se demander pourquoi un député de la côte ouest, région que ne couvre pas la Commission canadienne du blé, tient à intervenir et débattre de façon vive et animée le projet de loi C-4 et les amendements que propose le Parti réformiste pour tenter de corriger une mesure législative imparfaite à bien des égards.

Je pourrais classer les lacunes du projet de loi de bien des façons différentes, mais permettez-moi de faire une observation préliminaire. Le projet de loi C-4 oublie beaucoup trop d'agriculteurs canadiens. Dans ma circonscription, il y a surtout des éleveurs de vaches laitières et de poulets, qui sont tout de même des agriculteurs, et lorsqu'ils défendent leur point de vue avec vigueur, j'ose espérer que les députés les écoutent.

Ce qui m'attriste, c'est de voir que, si le projet de loi C-4 est adopté à toute vapeur à la Chambre sans être amendé, c'est probablement parce que le Parti libéral ne représente pratiquement aucun agriculteur des régions rurales des Prairies. Si le bonheur est dans l'ignorance, alors les libéraux sont les gens les plus heureux parce qu'ils représentent non pas les agriculteurs canadiens, mais peut-être les bureaucrates qui les ont envoyés ici.

Permettez-moi de vous lire ce que divers journaux écrivent au sujet de ce projet de loi. Je vous en cite un. Voici ce que les agriculteurs sont censés faire pour vendre leur grain: le livrer au silo désigné par la commission, le vendre, le racheter, refaire le trajet en sens inverse, ramener par camion le grain jusqu'à leur propre moulin pour le transformer, puis obtenir un permis d'exportation auprès de la commission du blé avant d'expédier le grain à l'étranger. Quelle belle façon de promouvoir l'esprit d'entreprise. Personne ne peut faire cela, car personne n'a les moyens de le faire. Cette citation est tirée du Globe and Mail. Mais que connaît le Globe and Mail de ce domaine? C'est un journal torontois, il suffit donc de prétendre qu'il n'existe pas.

Que publie un journal d'Edmonton? Il est question de Clay Desrochers, âgé de 24 ans. J'imagine qu'il doit être bien cynique après avoir passé tant de temps dans une prison du Manitoba. On y souligne de plus que s'il avait vendu à peu près la même quantité de cannabis à un enfant d'âge scolaire, il aurait écopé d'environ le même temps que pour la vente de moins de 1 000 $ de blé de l'autre côté de la frontière.

Comme on le souligne dans cet article, la raison pour laquelle on considère que cet affront est si grave c'est que M. Desrochers a eu le culot de commettre un crime contre le gouvernement du Canada, au dire du ministre de la Commission du blé.

L'article poursuit en soulignant que Desrochers est le troisième agriculteur du Manitoba à être condamné à une peine de prison depuis 1996 pour ce que les pays communistes avaient l'habitude d'appeler un crime économique, comme d'abattre un cochon sans permission ou de vendre un chou au marché noir. Quelle honte.

Imaginez maintenant un agriculteur qui fait pousser quelque chose. Imaginez un agriculteur qui achète un lopin de terre avec son propre argent. Il achète les semences, de l'engrais et de l'équipement, et paie tout de sa poche. Il prend le risque. Il examine la température et étudie tous les autres facteurs pertinents. Il est comme la petite poule de l'histoire. Il fait les semailles et assume tous les risques. Il n'y a aucun risque pour le gouvernement du Canada, les contribuables canadiens ou tout autre agriculteur du pays. Le blé pousse. Il y ajoute de l'engrais, il s'en occupe. Il vaporise au besoin. Il fait tout le travail. Il fait la récolte et qu'arrive-t-il alors? Le gouvernement lui dit: Ce n'est pas ton blé. Il n'a pas le droit de faire ce qu'il veut de ce blé. Le blé est régi par la Commission canadienne du blé.

Voici encore un autre article en provenance des Prairies. On y parle du recours à des agents fédéraux pour espionner des citoyens ordinaires, de contrôles fiscaux qu'on utilise pour harceler ses adversaires, de descentes policières au petit matin, d'arrestations arbitraires, de saisies de biens, de ceux qui dressent sans doute une liste d'ennemis ou deux. Qu'est-ce que je suis en train de décrire, la Maison-Blanche sous le régime Nixon, le Kremlin de Brejnev? Non. Il s'agit de la politique agricole des libéraux fédéraux. C'est cela le problème avec le projet de loi.

 

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Pourquoi cette mesure législative n'exige-t-elle pas que le conseil d'administration de la Commission canadienne du blé veille d'abord et avant tout aux intérêts des agriculteurs? Ce n'est pas le cas. Le projet de loi est rédigé de façon telle que la commission est légalement comptable non pas aux agriculteurs, mais bien au conseil d'administration. Comme l'a dit un député qui a pris la parole plus tôt, imaginez que l'on modifie quelque peu le système et que l'on parle d'un groupe autre que les agriculteurs.

Imaginez qu'il s'agisse d'une commission pour les avocats. Je ne fais pas allusion à l'Association du Barreau canadien. Je parle d'une commission dont tous les avocats seraient tenus de faire partie. Cette commission serait contrôlée par le gouvernement, qui nommerait le président du conseil d'administration. Il ne laisserait pas cette responsabilité aux avocats, car après tout, pour qui se prennent-ils? Pour vendre leurs services, les avocats devraient d'abord se présenter devant la commission et demander s'ils peuvent vendre leurs services à telle ou telle agence par l'entremise de ladite commission.

Le gouvernement pourrait prendre les décisions qu'il voudrait mais, de toute façon, les avocats ne pourraient tenir la commission responsable de ses actions, ni poursuivre celle-ci pour conduite inappropriée, étant donné que ladite commission ne serait comptable qu'au ministre des avocats. Cela nous rappelle l'univers de Monty Python.

Si les avocats refusaient de passer par la commission pour vendre leurs services, ils seraient accusés d'enfreindre la loi et passibles d'emprisonnement. Ceux-ci n'auraient donc pas le choix quant à la façon de vendre et de commercialiser leurs services. Ils ne seraient pas libres de commercialiser leurs services comme bon leur semblerait, que ce soit dans leur ville ou au niveau international. Ils ne pourraient accepter de clients de quelque endroit que ce soit. En outre, leur revenu et leur existence dépendraient de la bonne volonté de la commission.

Combien pensent que ce serait une bonne idée? Peut-être n'aurais-je pas dû prendre les avocats comme exemple, parce qu'un grand nombre de personnes aimeraient leur faire des choses pas très gentilles. Néanmoins, combien voudraient accorder de tels pouvoirs au gouvernement fédéral? Pas beaucoup.

J'aimerais faire part à la Chambre d'un exemple qui vient de ma région. Il y a beaucoup d'agriculteurs dans la vallée du Fraser, mais les producteurs de blé sont peu nombreux. Il y a quelques années, un des amis, qui est agriculteur, cultivait du blé dans notre vallée. Cet homme était très innovateur et n'hésitait pas à prendre des risques. En cultivant du blé dans la vallée du Fraser, il se lançait en terre inconnue. Il a fait du bon travail et a produit du blé de qualité. Il a récolté son blé durant l'une de nos rares périodes ensoleillées et il s'est bien débrouillé. Il a ensuite vendu sa récolte à une boulangerie d'Armstrong et a fait pas mal d'argent.

Les coûts associés à ce type d'agriculture dans la vallée du Fraser étaient trop élevés, alors il décida de prendre sa famille et de lever camp, et de s'installer dans une région où la terre agricole était meilleure. Où sont-ils partis? Ils ne sont pas allés s'installer dans les Prairies. Ils ne sont pas allés dans la région de la rivière de la Paix. Cet agriculteur ne voulait pas aller plus loin que McBride. Il a quitté ma circonscription et il est parti s'installer à McBride. Il s'est installé là pour deux raisons.

Premièrement, là-bas, il y a au moins trois jours de plus sans gel que dans la région de la rivière de la Paix. Ensuite, s'il décidait d'aller plus loin que McBride, il aurait été obligé de vendre ses récoltes à la Commission canadienne du blé. Il ne pourrait pas vendre son grain 2 ou 3 dollars de plus le boisseau et il ne pourrait pas vendre son produit à la boulangerie d'Armstrong. S'il était parti s'installer quelques milles plus loin, la Commission canadienne du blé lui serait tombée dessus et lui aurait dit: «Vous vous êtes créé un petit créneau commercial et vous faites un profit. Vous ne pouvez pas faire cela. Vous devez nous vendre vos produits et on vendra votre blé 3 ou 4 dollars de moins le boisseau que vous ne le faites actuellement.» C'est pourquoi il ne pouvait pas aller plus loin que McBride. C'est là qu'il vit actuellement et il y gagne bien sa vie, car c'est un homme qui sait innover, qui travaille fort, qui sait prendre des risques. Mais il sait qu'il ne peut pas aller plus loin, car cela voudrait dire qu'il devrait accepter le monopole du gouvernement et le pire des contrôles de prix exercés par le gouvernement.

Ce type de contrôle a été abandonné dans la plupart des pays de l'Est lorsqu'ils ont laissé tomber le communisme.

 

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Pour une raison ou une autre, au Canada, il est normal de dire aux agriculteurs quoi faire, quand le faire, combien d'argent leur sera versé et que, si quelque chose cloche, ils ne pourront pas obliger la commission à rendre des comptes aux fermiers, puisqu'elle n'a aucune responsabilité directe à leur égard.

Les amendements dont nous sommes saisis aujourd'hui obligeraient davantage la commission à rendre des comptes aux agriculteurs, à obtenir les prix les plus avantageux pour eux et à faire des démarches en leur nom. Cela donnerait un choix aux agriculteurs. Voilà l'objet de ces amendements. J'espère simplement que le gouvernement se prononcera en leur faveur au moment du vote.

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.): Monsieur le Président, je considère comme un privilège de pouvoir intervenir à la Chambre aujourd'hui au nom de nombreux agriculteurs de la circonscription de Wanuskewin, à qui j'ai parlé. J'ai beaucoup appris d'eux.

Je ne suis pas agriculteur, mais j'ai eu l'occasion dans ma jeunesse de travailler dans plusieurs fermes de la région de Quill Lake, en Saskatchewan, soit pendant les semailles, les récoltes et tout au long de l'été, notamment pour débarrasser la terre de cailloux et de racines.

Je suis ravi d'intervenir au nom de nombreux agriculteurs avec qui je me suis entretenu ces dernières semaines. J'ai aussi le privilège d'avoir des collègues qui ont gagné leur vie en cultivant du grain et en récoltant du blé, contrairement à un fort pourcentage des députés d'en face qui ont pris la parole à ce sujet. Ils n'ont pas une connaissance directe des activités dont traite le projet de loi dont nous sommes saisis ou n'y ont jamais pris part directement.

Je voudrais énoncer publiquement la position, la réforme économique ou la politique en matière d'agriculture du Parti réformiste. Dans sa documentation, notre parti reconnaît aux producteurs le droit de prendre leurs propres décisions pour vendre leurs produits et de former ou de diriger des associations de producteurs, y compris des offices de commercialisation, des commissions et des coopératives, et d'y oeuvrer de la manière qui leur semble la plus avantageuse.

Cette dernière partie m'apparaît très importante. On a souligné à plusieurs reprises déjà aujourd'hui l'intérêt des agriculteurs, de ceux qui cultivent, qui travaillent à la sueur de leur front. C'est cet intérêt que font valoir tous les producteurs de grain, ceux de l'ouest du Canada, en particulier.

Je signale aussi que le Parti réformiste veut que les agriculteurs puissent prendre leurs propres décisions sur la commercialisation, qu'ils dirigent, qu'ils structurent, qu'ils participent volontairement. C'est bien différent de l'avis des députés ministériels, qui se pensent mieux avisés que tout le monde.

Mon collègue qui a pris la parole avant moi a fait remarquer cette attitude presque arrogante d'un gouvernement qui pense toujours avoir raison. C'est une insulte aux agriculteurs. C'est leur faire injure de penser que nous en connaissons plus long qu'eux, eux qui produisent, eux qui ont tellement intérêt à ce que leurs produits soient commercialisés correctement.

Les documents réformistes, ajoutons-le, disent que nous sommes favorables à une Commission canadienne du blé qui soit moderne, démocratique et axée sur le marché, avec participation volontaire des agriculteurs.

Aujourd'hui, je veux insister sur le fait que la commission doit être moderne et démocratique, surtout démocratique.

Comme l'ont rapporté les médias à divers endroits, le ministre chargé de la Commission canadienne du blé, Ralph Goodale a tenu une réunion le 21 janvier à Regina pour discuter...

Le président suppléant (M. McClelland): Je rappelle aux députés qu'on ne doit pas désigner les ministres par leur nom, mais par leur titre.

M. Maurice Vellacott: Monsieur le Président, je vous remercie de ce rappel. Le ministre a donc tenu une réunion pour discuter des règles de l'élection des administrateurs de la Commission canadienne du blé, comme il est proposé dans le projet de loi C-4.

Si le ministre avait été là pour discuter des règles sur l'élection de tous les administrateurs de la commission, le réformistes auraient été beaucoup mieux disposés, même si cela aurait été assez présomptueux de sa part.

Il y aurait eu moins de consternation, d'indignation et de colère aux discussions sur les règles de l'élection de tous les administrateurs. Ils auraient été en meilleure position pour apporter des modifications dans l'intérêt des agriculteurs.

Je suis profondément convaincu que la totalité des 15 administrateurs de la commission devraient être élus. En élire seulement dix, comme le C-4 le prévoit, ce n'est pas assez. Si on veut que la voix des agriculteurs se fasse vraiment entendre, il faut absolument qu'ils soient tous élus.

Permettez-moi de vous faire part de mon expérience au sein d'une commission hybride, si je peux dire, partiellement élue et partiellement nommée, en Saskatchewan. C'est là qu'ont eu lieu les premières élections aux conseils de santé, un événement mémorable dans l'histoire du pays.

 

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Chez nous, dans le district de Saskatoon, le plus grand de la province, huit des membres du conseil des services de santé sont élus, et six, nommés. Nous avons un genre de conseil hybride. J'ai ai déjà parlé publiquement en ces termes. Ce n'est pas la première fois, car on connaît ma position depuis un bon moment déjà.

Je ne crois pas qu'un conseil hybride, formé de membres élus et de membres nommés, sert les intérêts des producteurs au mieux. Il constitue plutôt un hybride stérile, comme la mule, hybride femelle de l'âne et de la jument. Il sera improductif.

Je comprends que le ministre responsable de la commission soit obstiné et entêté. Têtu comme une mule, dit-on. Cela a du bon sens quand on songe à la stérilité qui caractérisera, selon moi, le conseil hybride qui sera créé en vertu du projet de loi C-4.

En ce qui concerne le conseil des services de santé du district de Saskatoon, l'idée était que les membres élus du conseil devraient rendre compte aux électeurs de leur quartier. Quant aux membres nommés, leur nomination devait être renouvelée de temps en temps. C'est le gouvernement provincial qui les nommait. Étant donné la nature de cette dynamique, les membres nommés ne pouvaient tout simplement pas se permettre de critiquer aussi librement le gouvernement.

Dans ce cas-là, c'était le gouvernement provincial; dans celui-ci, le fédéral. Les administrateurs nommés ne peuvent pas s'exprimer trop ouvertement et critiquer trop fort la politique de la Commission canadienne du blé et les décisions budgétaires se rapportant à l'efficacité de la commercialisation du blé et d'autres céréales.

Dans le conseil des services de santé du district de Saskatoon aussi les administrateurs nommés risquent de compromettre leur reconduction s'ils exprimaient publiquement leurs préoccupations à propos de questions comme un financement insuffisant. Les membres qui seront nommés, en l'occurrence, seront dans la même situation. Ils n'oseront pas embarrasser le gouvernement fédéral en adoptant une position contraire à l'orientation prévue pour la Commission du blé.

Même si l'on considère qu'une ligne de conduite est dans l'intérêt des agriculteurs et qu'elle a l'appui de l'ensemble de ceux-ci, un membre du conseil d'administration qui a été nommé hésitera à appuyer pareille ligne de conduite si elle fait mal paraître le gouvernement fédéral responsable de sa nomination. Ceux qui sont nommés pour faire partie d'un conseil d'administration se sentent naturellement redevables à celui ou à ceux qui l'ont nommé à ce poste. Comme on dit, qui paie les violons choisit la musique.

Je me souviens qu'avant les élections fédérales de 1993, les libéraux nommaient souvent des candidats, habitude qu'ils ont gardée depuis un certain nombre d'années d'ailleurs. Quelqu'un de la région de Saskatoon a bénéficié d'une nomination et il a été député fédéral. Il s'est fait élire à la Chambre, mais il a été défait par le député réformiste de Saskatoon—Humboldt lors des dernières élections.

On sait très bien que si les électeurs n'ont pas réélu ce député, c'est parce qu'ils avaient l'impression qu'il s'inclinerait toujours devant le gouvernement et le premier ministre responsables de sa nomination.

J'ai de graves inquiétudes et de nombreuses réserves par rapport à un conseil d'administration dont les membres sont nommés, les mêmes que j'avais par rapport au conseil régional de santé de Saskatoon. À mon avis, quelqu'un qui a la capacité et le potentiel de faire partie du conseil d'administration de la Commission du blé devrait avoir à coeur d'obtenir un mandat démocratiquement.

De nombreux membres du conseil régional de santé de Saskatoon ont certainement beaucoup à apporter au conseil. À mon avis, ils devraient plonger sur la scène publique, être choisis par voie démocratique et être ainsi mandatés par la population.

Je ne crois pas que les conseils hybrides qui comprennent des membres élus et d'autres nommés soient dans l'intérêt de la population.

Je crains aussi du fait que les administrateurs ne soient pas protégés s'ils devaient parler et agir librement au nom des agriculteurs. Je pousse loin évidemment. Les réformistes veulent que les administrateurs de la Commission canadienne du blé soient tous élus.

Nous nous inquiétons aussi du fait que la Commission canadienne du blé est tenue d'agir au mieux des intérêts de la commission, ce qui ne veut pas nécessairement dire au mieux des intérêts des agriculteurs.

Si les administrateurs ne sont protégés que s'ils agissent au mieux des intérêts de la commission, toute directive donnée à la CCB par le gouvernement fédéral serait définie comme étant au mieux des intérêts de la commission. Nous savons très bien que ce n'est pas nécessairement le cas.

 

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En conclusion, mon expérience personnelle et mon examen du projet de loi C-4 me portent à croire que tous les administrateurs de la Commission canadienne du blé devraient être élus. Ils devraient avoir pour mandat d'agir au mieux des intérêts des agriculteurs, des producteurs, des hommes, des femmes et des adolescents qui travaillent fort pour produire le grain. Nous avons besoin d'une commission dont les administrateurs sont tous élus.

Le président suppléant (M. McClelland): Avant de donner la parole au prochain député, je voudrais signaler aux députés, aux visiteurs à la tribune et aux téléspectateurs que nous débattons aujourd'hui le projet de loi C-4, qui porte sur la Commission canadienne du blé.

Quarante-huit propositions d'amendement ont été présentées. Elles sont regroupées en six ou sept groupes différents et elles sont débattues groupe par groupe. Les députés doivent donc s'en tenir au groupe dont la Chambre est saisie. De temps à autre, ce ne serait pas la pire chose qui puisse arriver que les députés parlent de nouveau, pendant le débat sur les motions du groupe 4, du fait que c'est ainsi que le président de la Commission canadienne du blé est nommé. Le député d'Esquimalt—Juan de Fuca a la parole pour reprendre le débat en s'en tenant au dont nous sommes saisis.

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, nous vous remercions certainement de votre sage intervention.

C'est un plaisir que de prendre la parole sur le projet de loi C-4, et notamment sur les motions du groupe no 4 dont nous sommes maintenant saisis. Mais je voudrais d'abord y aller d'un court préambule sur le projet de loi C-4.

Il y a très longtemps que nous luttons pour rendre la Commission canadienne du blé plus sensible aux demandes de nos agriculteurs, qui produisent l'un des meilleurs blés du monde.

Le projet de loi C-4—tout particulièrement les dispositions que visent à modifier les motions du groupe no 4—est extrêmement mauvais à notre avis. Il empêchera nos agriculteurs de produire les meilleurs grains, d'obtenir les meilleurs prix et le meilleur rendement.

Le projet de loi et les propositions que présente ici le gouvernement vont, en fait, restreindre et limiter la Commission du blé dans sa capacité de servir les agriculteurs canadiens. C'est extrêmement malheureux, d'autant plus qu'il y a déjà un bon bout de temps que des bonnes solutions constructives ont été soumises au gouvernement, non seulement par notre parti, mais aussi par des membres du secteur agricole. Il est malheureux que le gouvernement refuse d'en tenir compte.

Je tiens à signaler tout de suite quelque chose de très important. Le projet de loi ne prévoit pas une participation volontaire à la Commission canadienne du blé. Les agriculteurs ne sont pas libres d'en faire partie ou non. Je vais faire valoir ici un point, et l'analogie est intéressante.

Les domaines du secteur agricole qui se sont libérés des règles et des règlements limitatifs et contraignants de la Commission du blé se portent-ils plus mal pour autant? Non. En fait, ils se portent beaucoup mieux. Leurs profits augmentent. Leur production s'accroît. Leur capacité d'investir à l'intérieur de leur propre secteur s'améliore. Ils emploient davantage de gens et les Canadiens et le Canada s'en trouvent beaucoup mieux.

Il m'est impossible de comprendre pourquoi le gouvernement ne prendrait pas le taureau par les cornes et n'essaierait pas d'en faire un organisme souple et efficace. Pourquoi ne pas conserver uniquement les règles qui assurent une représentation réelle des agriculteurs? Je voudrais énumérer quelques requêtes des producteurs se rapportant aux motions du groupe 4, dont la plupart ont été proposées par le Parti réformiste.

Des milliers de céréaliculteurs ont dit au gouvernement que la situation monopolistique de la Commission canadienne du blé ne leur plaisait pas du tout. Ils veulent mettre eux-mêmes leurs produits en marché. Le gouvernement refuse. Il s'obstine à maintenir les règles qui gênent et étouffent les producteurs de blé du Canada. C'est malheureux.

J'ignore pourquoi le gouvernement continue de multiplier les règles et les règlements qu'il devrait plutôt essayer d'éliminer. Il y a plus de règles qui restreignent le commerce entre l'est et l'ouest du Canada qu'il y en a qui restreignent le commerce entre le Canada et les États-Unis. Pourquoi empêchons-nous notre secteur privé, en l'occurrence, nos producteurs de blé, de donner le meilleur d'eux-mêmes en leur imposant une réglementation excessive alors que les agriculteurs des autres pays échappent à ces restrictions? C'est tout à fait injuste envers eux. Il est grand temps que le gouvernement écoute les agriculteurs, qui ont été nombreux à se présenter au Comité de l'agriculture pour faire savoir clairement au gouvernement que cette mesure législative, le projet de loi C-4, ne peut pas être adoptée sous sa forme actuelle.

 

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Je veux aussi parler de la possibilité que le conseil d'administration soit élu. Le gouvernement a eu la chance de présenter des amendements au projet de loi C-4, avec le groupe de motions no 4 que nous avons produit pour nous assurer que le conseil d'administration sera élu et que le président de la Commission canadienne du blé devra rendre des comptes aux administrateurs. Ces derniers devront rendre des comptes à la Commission et aux agriculteurs, et non au président ni au gouvernement.

La dernière fois que j'ai vérifié, cette organisation était censée être démocratique. Si le ministre a la haute main sur la commission, ce n'est pas démocratique. La Commission du blé doit être soumise aux décisions d'administrateurs dûment élus par les membres pour les représenter. Tout autre type d'organisation ne serait pas démocratique.

C'est une chose que nous, du Parti réformiste, demandons depuis près de cinq ans. Si le gouvernement nous écoutait, pour faire changement, nous pourrions peut-être tous y gagner, et surtout les agriculteurs de notre pays.

Il est aussi très important que le conseil d'administration ne soit pas soumis à l'autorité du ministre responsable et du ministre des Finances.

On pourrait refuser d'assurer la protection des membres du conseil d'administration s'ils décidaient de parler ou d'agir librement au nom des agriculteurs. Les administrateurs seraient protégés uniquement s'ils agissaient dans l'intérêt de la Commission. Ça commence à ressembler à la mafia. Comment un organisme peut-il exiger de ses administrateurs qu'ils fassent uniquement ce qui plaît à la Commission et non pas aux agriculteurs canadiens, et n'appuient pas les désirs et les besoins de ces derniers? Qui les administrateurs sont-ils censés représenter? Les agriculteurs ou le ministre et le gouvernement?

M. Wayne Easter: Les agriculteurs.

M. Keith Martin: Je suis heureux que les députés ministériels reconnaissent que les membres du conseil d'administration devraient représenter les agriculteurs. Malheureusement, s'il n'est pas amendé, le projet de loi C-4 fera en sorte que le conseil d'administration sera responsable devant le ministre et non pas devant les agriculteurs. En fait, les administrateurs de la Commission canadienne du blé devront se plier à la volonté du ministre et non pas à celle des agriculteurs et seront pris à la gorge par le président et par le ministre.

La Mafia fonctionne de cette façon, mais ce ne devrait pas être le cas de la Commission canadienne du blé.

J'espère que le gouvernement est à l'écoute et qu'il adoptera volontiers les motions du groupe no 4 que le Parti réformiste a présentées. Ces motions sont des mesures sensées, raisonnables, réalistes, qui amélioreront le projet de loi C-4. Ces motions aideront les agriculteurs à être plus efficaces. Les députés peuvent en être fiers et se dire qu'en les adoptant ils feront beaucoup pour les agriculteurs canadiens.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-4 et en particulier au sujet des motions d'amendement du groupe no 4.

Monsieur le Président, je ne sais pas si vous vous y connaissez beaucoup en agriculture, mais je sais que vous en savez long au sujet des grains et de ce qu'on peut en faire. Je vous félicite pour le sens de l'entreprise dont vous avez fait preuve en établissant une boulangerie qui est non seulement une réussite mais qui offre parmi les meilleurs produits que les habitants d'Edmonton puissent savourer.

 

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Je vous félicite, monsieur le Président, d'offrir ce genre de service à tant de monde au sein de notre communauté.

Quand j'examine le projet de loi C-4 et le groupe de motions no 4...

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Malpèque aurait-il l'obligeance de répéter son rappel au Règlement?

M. Wayne Easter: Oui, monsieur le Président. Pourriez-vous lancer une pâtisserie au député pour que nous puissions y goûter et voir si elle mérite autant d'éloges?

Le président suppléant (M. McClelland): J'envisageais sérieusement de remettre en question la pertinence des propos du député de Crowfoot, mais comme son intervention ne m'a pas paru contraire au Règlement, nous reprenons le débat.

M. Jack Ramsay: Monsieur le Président, je me demandais jusqu'où vous me laisseriez filer.

Quoi qu'il en soit, quand j'examine ce projet de loi et les amendements, je cherche un certain équilibre, comme c'est le cas pour toute autre mesure législative ou tout autre amendement. Je me demande si le projet de loi atténue les oppositions qui émanent de toutes parts contre la situation monopolistique qu'occupe la commission du blé. Je n'y vois rien en ce sens, et c'est bien malheureux. Dans ma circonscription, qui est fortement orientée vers l'agriculture, les deux camps qui s'opposent au sujet de la réforme de la Commission canadienne du blé comptent des gens compétents, honnêtes et travailleurs.

Ce qu'il y a de malheureux, c'est qu'en voulant démocratiser la commission, le ministre et son gouvernement s'arrêtent à mi-chemin. Ils autorisent l'élection d'un certain nombre de membres du conseil d'administration, mais tiennent mordicus à conserver le pouvoir de nommer le président. Mais pour quel motif? Pourquoi craignent-ils que le président de la Commission canadienne du blé soit élu? Qu'y a-t-il de mal à cela?

J'aimerais que des députés d'en face nous expliquent pourquoi ils se sont arrêtés en si bon chemin. On s'entend sur toute la question de la réforme de la Commission canadienne du blé, sur l'élection des membres du conseil d'administration par les intervenants du secteur agricole qui ont un intérêt vital, particulier dans cette question, au nom de nous tous qui y avons indirectement un intérêt particulier, puisqu'ils produisent les aliments que nous consommons. Ils génèrent cette nouvelle richesse que le gouvernement accable d'impôts exorbitants année après année. Ce sont sur eux que nos frères et nos soeurs dans le monde comptent pour se procurer les produits alimentaires dont ils ont besoin mais qu'ils ne trouvent pas dans leurs pays.

Pourquoi ne pas aller jusqu'au bout et permettre une démocratisation complète de la Commission canadienne du blé? Ce serait alors les intervenants du secteur agricole eux-mêmes qui seraient responsables. Ils comprennent les problèmes auxquels les agriculteurs sont confrontés pour maintenir leur exploitation en activité.

Le problème réside dans le fait qu'en fin de compte, la Commission canadienne du blé se fiche éperdument de savoir si mon voisin agriculteur doit faire faillite ou pas. Cela lui importe peu. Les agriculteurs cherchent toujours des façons d'améliorer leur propre niveau de vie et de s'assurer que leur marge bénéficiaire est suffisamment importante pour qu'ils puissent faire face à une mauvaise récolte.

Comme tout le monde, ils cherchent une certaine sécurité. Dans le monde entier, les gens cherchent à obtenir plus de sécurité et une plus grande liberté. Les agriculteurs veulent avoir la liberté nécessaire pour garder leur exploitation pour leurs enfants et leurs petits-enfants. Ils souhaitent fonctionner dans un système qui est clair et sans équivoque dans lequel ils peuvent diriger leurs produits vers les marchés où ils obtiendront le meilleur rendement.

 

. 1605 + -

Pourquoi veulent-ils un meilleur rendement? C'est tellement simple. Pour quelles raisons les agriculteurs cherchent-ils le meilleur rendement et le droit de commercialiser leurs produits dans les régions qui leur donnent le meilleur rendement possible? Eh bien tout simplement parce qu'ils veulent subvenir aux besoins de leur famille et de leurs enfants et assurer leur propre sécurité. Si la Commission canadienne du blé est le mécanisme qui devrait leur permettre de faire cela, comment se fait-il que tant d'agriculteurs intéressés ne le reconnaissent pas?

Je me suis entretenu avec des agriculteurs pour ou contre la commission et je leur ai demandé ce qu'ils recherchaient. On constate tout le temps qu'ils cherchent une certaine sécurité pour leur famille en ce qui concerne le maintien de leur exploitation même s'ils peuvent être confrontés à une mauvaise récolte ou au type de problèmes financiers avec lesquels les agriculteurs sont aux prises de temps à autre, alors qu'ils doivent s'adresser à des établissements de crédit pour leur demander de les aider pendant une certaine période, jusqu'à l'automne prochain ou au printemps prochain, selon leur type de récoltes.

Lorsque je regarde les motions du groupe no 4, je constate un manque de démocratie. Cela est tout à fait regrettable. Nous aurions pu parvenir à un équilibre que tout le monde, ou du moins les agriculteurs, aurait appuyé. Je n'ai trouvé personne qui soit contre l'élection du conseil d'administration. Cette idée est un point commun qui pourrait réunir les gens des deux côtés.

La transparence est une autre question. Pourquoi ne pas avoir une vérification complète et transparente de ce que la Commission canadienne du blé fait au nom des agriculteurs? Pourquoi? C'est ce qu'ils veulent. Je n'ai pas entendu un seul agriculteur dire qu'il était contre le fait que le vérificateur général vérifie les comptes de la Commission canadienne du blé comme il le fait dans le cas de tous les autres ministères. Pourquoi ne pas le faire?

Il existe des terrains d'entente sur lesquels nous pourrions avancer. Nous pourrions arriver à un juste milieu qui ne menace pas l'existence de la Commission canadienne du blé. Encore que, si celle-ci ne change pas et ne propose pas de solutions raisonnables pour permettre d'arriver à un juste milieu, elle pourrait bien subir un tort que personne ne désire la voir subir.

Des questions ont été soulevées à propos du monopole que constitue la commission et qui pourrait porter atteinte à certains accords internationaux comme l'accord de libre-échange. Y a-t-il subvention? Peut-on parler de subvention lorsque les éleveurs achètent de l'orge à des prix inférieurs à ceux auquel l'achètent leurs concurrents au sud? Quelle décision rendra un tribunal en cas de contestation? On exerce des pressions afin de contester le monopole que constitue la Commission canadienne du blé.

Nous ne savons pas très bien quelle sera la réponse à ces questions, mais nous devrions prévenir. Si nous tenons à garder en place un office de commercialisation appelé la Commission canadienne du blé, nous devons faire en sorte d'apaiser les inquiétudes des agriculteurs. Le projet de loi C-4 ne le fait pas, ce qui est regrettable car c'est pour nous une occasion d'arriver à un juste milieu. Plusieurs motions du groupe no 4 permettraient de le faire.

Certains de mes collègues ont abordé la question de la création d'un code d'éthique international pour les entreprises canadiennes. Que craint la Commission canadienne du blé? Pourquoi ne veut-elle pas être liée par un code d'éthique international? Y a-t-il quelque chose à redouter, quelque chose à craindre? Quoi? Qu'est-ce que la Commission canadienne du blé a à reprocher à un code d'éthique international pour les entreprises canadiennes, pourquoi ne veut-elle pas être liée par un code d'éthique?

Ce sont toujours les agriculteurs qui paient les pots cassés. Lorsque l'année a été difficile, ils sont seuls, avec ceux qui dépendent d'une société agricole saine, à en subir les conséquences.

 

. 1610 + -

Je parlais à des représentants des deux chemins de fer. Lorsque les agriculteurs chargent leur grain dans un wagons à céréales, si ce wagon reste sur place pendant plus de trois jours, il faut payer une pénalité de 40 dollars par jour. Lorsqu'une grève portuaire s'éternise ou lorsqu'un incident survient qui empêche le grain d'atteindre le marché et que les navires dans le port attendent, tandis que les frais de surestarie s'accumulent, qui en paie les frais? Ce sont les agriculteurs qui assument ces coûts.

Un agriculteur m'a confié: «Qu'est-ce qui ne va pas dans le système? Je dois payer pour le transport de mon grain vers le port, je dois payer pour le nettoyage. On vend les résidus, mais je ne reçois aucune indemnisation.»

Il y a beaucoup de choses qui ne vont pas. Lorsqu'on examine le projet de loi C-4, on se demande s'il établit l'équilibre. Non, il n'en est rien. C'est pour cela que j'encourage tous les députés à réexaminer les amendements que nous avons proposés. Je pense que ces amendements permettent d'établir un certain équilibre.

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Réf.): Monsieur le Président, j'espère que vous me donnerez un peu de latitude puisque ce discours est le premier que je prononce à la Chambre.

Une voix: Où étiez-vous?

M. Gary Lunn: À ceux qui se demandent où j'étais, je répondrais ici même. J'ai préparé quatre discours et j'étais tout à fait prêt à intervenir à la Chambre à au moins trois ou quatre occasions, mais le gouvernement a imposé la clôture et je n'ai pas pu prononcer mon discours.

Certains qui, dans ma circonscription, suivent le présent débat doivent s'étonner que je parle de la Commission canadienne du blé, moi qui suis député de Saanich—Gulf Islands. Je voudrais que mon premier discours soit particulièrement marquant et j'y reviendrai un peu plus tard.

Mais d'abord, j'aimerais sincèrement parler un peu de mon prédécesseur qui a travaillé d'arrache-pied. M. Jack Frazer était très respecté de tous les partis politiques de ma circonscription. J'aimerais rendre hommage à Jack et à son épouse, June, pour son travail intense et pour son dévouement à la Chambre pendant les quatre années qu'il y a passées.

C'est pour moi un honneur de prendre la parole à la Chambre—je suis déjà intervenu plusieurs fois pendant la période des questions—pour représenter les électeurs de Saanich—Gulf Islands qui m'ont élu avec une majorité écrasante, pour faire connaître leur point de vue et m'assurer qu'il en est tenu compte. Je dois admettre que cela a été une expérience très frustrante pour moi car à maintes reprises j'ai été réduit au silence, non seulement ici, mais également au comité. Je trouve extrêmement frustrant de ne pas pouvoir parler à la Chambre pour présenter le point de vue de mes électeurs.

Sur ce, passons au groupe d'amendements no 4, dont nous sommes saisis aujourd'hui. Je ne considère pas la question comme concernant uniquement la Commission canadienne du blé, mais comme mettant en jeu la démocratie par opposition à la dictature et les principes d'éthique.

Ces amendements pourraient s'appliquer à tous les ministères du gouvernement. Voilà de quoi il s'agit vraiment. Le gouvernement nous propose ce qu'il considère comme une société d'économie mixte. Je remarque qu'en juillet 1996, après un an d'étude, le groupe de la commercialisation du grain de l'Ouest a proposé que le gouvernement exploite la Commission canadienne du blé comme une entreprise commerciale.

Je participe aux activités du Comité des pêches. Ironiquement, après avoir effectué une tournée du Canada atlantique et de l'ouest canadien, nous avons entendu exactement les mêmes commentaires dans quelque 15 à 20 communautés, que le gouvernement doit exploiter la Commission à la façon d'une entreprise commerciale.

Voici ce que les libéraux suggèrent. Il y aura un conseil élu. Et quelle est leur définition du terme démocratie? Ils permettront l'élection de 10 dirigeants, mais le gouvernement veut nommer cinq de ses valets au conseil d'administration.

Plus important encore, qui vont-ils nommer et à quels postes? C'est ce que je trouve le plus aberrant. Ils vont nommer un président et un président directeur général à cette commission du blé.

 

. 1615 + -

Dans toutes les sociétés que je connais ou avec lesquelles j'ai fait affaire, je reconnais le pouvoir ou l'influence que ces deux postes peuvent avoir sur tout le conseil d'administration. Le gouvernement ne fait rien. Il s'agit toujours d'une dictature. Il n'y a pas de démocratie. C'est ce qui me semble le plus frustrant.

J'exhorte tous les membres à l'écoute à vraiment réfléchir à ce que cela signifie. Notre institution, cette Chambre, représente la démocratie. Je suis ici parce que je crois en la démocratie. Il y a des problèmes partout dans le monde. On les voit surgir lorsqu'un pays tend à la dictature plutôt qu'à la démocratie. Ce que le gouvernement nous propose ici est une dictature absolue et rien de moins. Il va nommer cinq membres en plus du président et du président directeur général. Il va contrôler l'organisme. J'admets que je ne connais pas beaucoup le sujet, mais les agriculteurs n'auront pas leur mot à dire dans la direction choisie. Ce que nous avons là, c'est une dictature.

J'aimerais bien que cette Chambre se rende compte de ce qui se passe. Les quatre derniers intervenants venaient du même parti. La Commission canadienne du blé est probablement l'organisme le plus influent et le plus important des provinces des Prairies. Dans toute notre démocratie, dans toute cette Chambre, qui se lève pour défendre ces provinces? Je n'entends personne du NPD. Je n'entends personne du Parti conservateur, du Parti libéral ou du Bloc. Si certains ont parlé avant les quatre derniers députés qu'on me le dise. Depuis que je suis ici, seul le Parti réformiste à défendu les intérêts des gens de cette région. C'est un projet de loi important pour le Canada. La prochaine partie porte sur l'éthique.

La motion a été présentée par le député de Prince George—Peace River. Il essaie d'incorporer ce que le gouvernement veut absolument.

Le gouvernement veut que toutes les entreprises et les sociétés canadiennes signent le Code international de conduite des entreprises d'affaires canadiennes. C'est logique. Cela paraît simple. Le gouvernement veut que toutes les entreprises signe ce code d'éthique, mais devinez quoi? Pas la Commission canadienne du blé. Non, le gouvernement a les mains dedans. Imaginez s'il fallait qu'elle respecte le code. Nous avons vu l'éthique du gouvernement pendant la période des questions d'aujourd'hui. Mais je n'insisterai pas là-dessus, il me faudrait tout l'après-midi.

En ce qui concerne l'éthique, le gouvernement ne sait pas de quoi il parle. Il voudrait que le secteur privé ait un code d'éthique, mais pas la Commission canadienne du blé. Ce serait terrible, certains de nos gens sont là. Ils ne pourraient jamais respecter ces règles.

Bien que je n'aie pas préparé de discours, contrairement à ce que j'ai fait par le passé, j'estime que le débat que nous tenons est très important. Il porte sur la démocratie et sur la morale. Il concerne une commission qui touchera les provinces des Prairies. La plus importante mesure législative à toucher ces provinces est probablement celle qui traite de la Commission canadienne du blé. Les agriculteurs de ces provinces sont désormais aux prises avec une dictature. Des recommandations ont été faites pour que la commission fonctionne comme une société. Le gouvernement fait totalement abstraction de ces recommandations. Cette attitude est conforme à celle que j'ai observée dans le secteur de la pêche. Nous devons le faire fonctionner comme une entreprise, mais le gouvernement tient à conserver fermement la mainmise sur ce secteur. En nommant le président et premier dirigeant, le gouvernement n'est pas disposé à se départir de ce rôle. C'est honteux.

Les grandes questions sont la démocratie et la morale. J'invite tous les députés à examiner cela sérieusement. Je traiterai plus tard des autres groupes et motions.

 

. 1620 + -

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'interviens dans le cadre du projet de loi C-4, un projet de loi modifiant en profondeur la Commission canadienne du blé.

Bien sûr, le projet de loi tente de rafraîchir—je dis bien «tente»—l'ancienne Commission canadienne du blé qui était, à mon sens, une dictature, du patronage, où on pouvait nommer des bons amis au sein du conseil d'administration, trois, quatre, jusqu'à cinq qui étaient, semble-t-il, assez bien rémunérés puisqu'on frappait souvent aux portes du ministère de l'Agriculture pour occuper ce poste pas tellement prestigieux mais plutôt bien rémunéré.

J'ai dit tout à l'heure qu'on tentait de la rafraîchir puisque, sur les 15 administrateurs, il y en aura 10, soit les deux tiers, qui seront élus au suffrage universel par les producteurs eux-mêmes. S'il y a quelqu'un dans l'Ouest canadien qui est intéressé au bon fonctionnement de la Commission canadienne du blé, ce ne sont pas les gars de l'Île-du-Prince-Édouard, ce ne sont pas les agriculteurs du Québec, mais bien les agriculteurs céréaliers de l'Ouest. Pour une fois, on va les autoriser, à l'aide d'un crayon, à nommer leurs administrateurs, et lorsque ces administrateurs ne feront pas leur affaire, ils pourront les mettre dehors, ces dix-là bien sûr.

Cependant, le gouvernement, dans sa grande sagesse, a cru bon conserver pour lui cinq postes. Quatre seront nommés par le gouverneur en conseil, mais le poste le plus prestigieux, celui qui sera payant, celui qui aura le pouvoir décisionnel, le président-directeur général, sera lui aussi nommé.

Le Bloc québécois fait ici une suggestion fort constructive à ce gouvernement libéral et j'aimerais prendre quelques secondes pour vous en faire la lecture. C'est la motion no 6.

Ce que nous proposons, c'est que le président-directeur général soit nommé après consultation auprès du comité de la Chambre des communes qui étudie normalement les questions relatives à l'agriculture. En clair, qu'est-ce que cela veut dire?

Il y a ici, à la Chambre des communes, le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire qui est dirigé, bien sûr, par un libéral. Il y a huit députés libéraux qui siègent sur ce comité et six députés de l'opposition. Ils ont le contrôle, bien sûr. Ils pourraient nous avaler tout rond, il sont huit contre six et, en plus, il y a le président qui, d'habitude, un peu comme la Cour suprême, penche toujours du même bord, du côté des rouges. Présentement, ils ont le contrôle. Je les respecte de ce côté-là.

Ce poste de président-directeur général sera, j'en fais une prédiction, un bon «patronneux», un bon rouge. De mémoire, en attendant mon tour pour intervenir, plus tôt, je cherchais rapidement des postes-clés qui ont été alloués, depuis que je suis ici, à des députés qui ont siégé dans cette Chambre, des postes bien rémunérés, des postes prestigieux, qui ne nécessitent pas une ré-élection.

J'ai trouvé, bien sûr, l'ancien député d'Ottawa—Vanier, M. Jean-Robert Gauthier, puisque j'ai le droit de nommer son nom, qui siège maintenant comme sénateur dans l'autre Chambre. J'ai aussi en mémoire le député David Berger, de l'ouest de Montréal, qui a cédé son poste à un de nos bons ministres maintenant, un comté sûr pour le Parti libéral. On l'a nommé ambassadeur en Israël.

On appelle cela une tactique pour libérer des comtés. Tout récemment, juste un peu avant les élections, la promesse a été faite, mais on l'a rendue publique après les élections pour ne pas déplaire à l'électorat, mon bon ami du comté de Beauce, Gilles Bernier, député indépendant—vous vous rappelez de lui, il siégeait pas tellement loin de nous ici—donc, Gilles Bernier...

 

. 1625 + -

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Bourassa invoque le Règlement.

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, je trouvais que le député de Frontenac—Mégantic était décent, mais là, je pense qu'il est hors sujet. J'aimerais l'entendre sur le projet de loi C-4 et non sur la litanie des nominations du gouvernement.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Sauf votre respect, ce groupe d'amendements porte sur les nominations à la commission. Le propos du député de Frontenac—Mégantic est pertinent.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Monsieur le Président, j'ai enseigné pendant 27 ans et dans chacune de mes classes, il y avait toujours un étudiant qui cherchait à distraire le professeur. Dans ce groupe de libéraux, il y a le bon député de Bourassa qui ne se comporte pas comme un étudiant normal, mais bien comme quelqu'un d'indiscipliné.

Je vous invite, monsieur le Président, à asseoir votre autorité, et s'il récidive pour distraire des députés d'en face, de l'expulser tout simplement. Cette Chambre n'est pas une bouffonnerie.

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Bourassa invoque à nouveau le Règlement.

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, je crois avoir le droit, autant que n'importe qui, de participer, puisque je parle au nom de mes électeurs. Je pense que le député...

Le président suppléant (M. McClelland): Nous reprenons le débat avec le député de Frontenac—Mégantic.

M. Jean-Guy Chrétien: Monsieur le Président, j'espère que mon temps de parole ne sera pas réduit à cause de telles imbécillités. Je vous remercie, car votre signe de tête semble m'approuver.

J'en étais donc à dire que le Parti libéral a découvert un autre truc, c'est-à-dire de libérer certains comtés plus ou moins sûrs pour des amis qui pourraient prendre la relève. Alors, on les nomme à des postes prestigieux qui sont habituellement mieux rémunérés que la fonction de député, et cela libère le comté.

Je veux justement faire une prédiction: le futur président-directeur général de la future Commission canadienne du blé sera un rouge. Ce rouge siège présentement en face de nous, et il ne connaît probablement pas trop ce qu'est la Commission canadienne du blé. On va payer pendant plusieurs années pour l'instruire et, lorsqu'il commencera à connaître comme il faut la Commission canadienne du blé, il prendra sa retraite bien dorée. Il aura, à ce moment-là, deux bons fonds de pension.

Le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, sur lequel j'ai le vif plaisir de siéger avec plusieurs de mes collègues que je vois présentement dans cette Chambre, est un comité très sérieux, à mon avis. Cela m'étonne que certains députés d'en face, qui siègent sur le même comité avec moi, ne veuillent pas prendre une responsabilité additionnelle et une responsabilité collective pour avoir un mot à dire sur le futur président-directeur général de la Commission canadienne du blé.

Combien d'heures et de semaines le Comité permanent de l'agriculture s'est-il penché sur ce problème? Le Comité tout entier s'est dirigé dans l'Ouest où nous avons visité les quatre provinces. Il n'y a personne dans cette Chambre, parmi les députés j'entends, qui connaisse mieux les problèmes des agriculteurs et de la Commission canadienne du blé que les 12 députés qui siègent présentement au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. C'est une chance inouïe que j'offre à mon collègue de Bourassa d'avoir un peu l'impression que son parti, son premier ministre, lui donne une responsabilité additionnelle. Mais il refuse.

En terminant, je voudrais soulever un dernier point. Traditionnellement, la Commission canadienne du blé relève du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire en titre.

 

. 1630 + -

Je ne sais pas ce qui se passe. Et lorsque le premier ministre, après les élections, a remanié son Cabinet, il a nommé l'ancien ministre de l'Agriculture au poste de ministre des Richesses naturelles. C'est bien. Cependant, il n'a pas cru bon laisser la responsabilité de la Commission canadienne du blé au ministre de l'Agriculture. Pourquoi? Besogne trop lourde? Incompétence? Je vous pose la question à vous, monsieur le Président. J'aimerais avoir une réponse de mes collègues d'en face, ou mieux encore, du ministre des Richesses naturelles.

Pourquoi s'est-il accaparé ce poste, ce rôle de diriger, à l'intérieur du ministère des Richesses naturelles, la Commission canadienne du blé? Il semble que cela ne va pas ensemble. Nous avons un bon ministre de l'Agriculture qui fait son gros possible. Pourquoi ne pas lui laisser tous les outils? Il va travailler pour les agriculteurs de l'Ouest, les producteurs céréaliers, mais quand viendra le temps de parler d'un outil fort important, comme la Commission canadienne du blé, il dira: «Il faudrait aller voir mon collègue, le ministre des Richesses naturelles.»

J'attends cette réponse, monsieur le Président, et je vous invite à demander au parti au pouvoir d'appuyer cette motion au projet de loi C-4 que je qualifie de fort constructive.

[Traduction]

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, je débordais de joie lorsque le député de Crowfoot vous a demandé de lui lancer un petit pain. J'espérais vraiment que vous pourriez le faire, car je voulais l'attraper avant qu'il n'arrive jusqu'à lui. Il semble que ces petits pains sont tout à fait délicieux.

Cet après-midi, je tiens à vous féliciter, monsieur le Président, de reconnaître l'importance de l'agriculture dans l'ouest du Canada. Mais avant de traiter en détail des amendements proposés dans le groupe no 4, je désire rendre hommage aux agriculteurs du Canada.

Les agriculteurs comptent parmi nos gens les plus productifs. > Ils comptent également parmi nos gens les plus fiables. Voilà les gens qui comprennent la morale probablement mieux que quiconque. Voilà les gens qui connaissent la différence entre maîtriser son environnement et être à la merci de l'environnement pour une grande part de ses activités.

Monsieur le Président, combien d'agriculteurs avez-vous vus souffrir des ravages de la nature lorsqu'elle envoie sur leur récolte une averse de grêle ou une tempête de vent ou quoi que ce soit d'autre? Ces gens sont humbles. Ils connaissent la différence entre ce qu'ils peuvent faire et ce que le Créateur peut faire.

Le temps est venu de reconnaître que le milieu agricole produit la nourriture dont nous avons besoin pour vivre et que notre collectivité et notre économie se fondent en grande partie sur le travail des agriculteurs qui labourent la terre, cultivent divers plants et mettent énormément de soin à faire ce qu'ils doivent faire.

Les agriculteurs sont des gens imaginatifs et innovateurs. Ils produisent des variétés qu'il était impossible de cultiver il y a plusieurs années. Ils ont mis au point, par exemple, une variété de blé qui fait l'envie de bien des pays qui n'ont pas le même climat, la même terre et la même technologie pour réaliser ce que nos agriculteurs parviennent à accomplir.

Nous avons mis sur pied la Commission canadienne du blé, chargée de rationaliser la commercialisation de certains produits agricoles, soit le blé et l'orge. Nous allons parler du blé. Du moins, c'est ce que je vais faire. Il s'agit d'un produit très important pour notre industrie agricole.

Nous devons respecter quatre principes si nous voulons une commission solide et capable de gérer la commercialisation d'un produit qui est important non seulement pour le Canada, non seulement pour un grand secteur de l'économie canadienne, mais aussi pour l'ensemble de la communauté internationale. Ce produit est très important pour d'autres pays qui comptent, pour alimenter leurs habitants, sur le blé produit au Canada.

Voici donc les quatre principes: les décisions de la commission doivent toujours être prises en fonction ou dans l'intérêt des agriculteurs. Elles doivent se fonder sur le bon gouvernement et les principes du bon gouvernement. Elles doivent se fonder sur les principes d'une gestion saine. Enfin, les décisions et les activités d'une commission de ce genre doivent être claires, vérifiables et dictées par la prudence, tant au niveau de la gestion des fonds confiés à la commission qu'au niveau de la gestion des produits commercialisés par la commission. Examinons chacun de ces principes à tour de rôle.

 

. 1635 + -

Tout d'abord, est-ce que la commission agit dans l'intérêt des agriculteurs? Ce qu'ils veulent, c'est un juste rendement sur leur production. Ils ne veulent pas de prix exorbitants. Ils ne veulent pas de prix excessivement bas non plus. Ils réclament un juste prix, un prix qui peut se justifier n'importe où, dans n'importe quel pays. Ils veulent un juste prix tant au Canada que sur les marchés internationaux.

Ils veulent aussi autre chose, un revenu qui se maintient. Ils veulent avoir une petite idée de l'évolution du prix du blé et avoir les moyens de gérer les semailles, les récoltes, l'entreposage et la commercialisation de façon à maintenir leur revenu.

Ils réclament encore autre chose. Il ne leur suffit pas de soutenir leur revenu; ils veulent aussi qu'il soit prévisible.

Monsieur le Président, vous savez que, dans votre secteur d'activité, il faut préparer un plan d'entreprise avant de démarrer. On établit un état des liquidités et aussi un plan de commercialisation qui peut s'échelonner sur cinq ans. Le niveau des liquidités de la première année est prévu. On passe ensuite d'une année à l'autre jusqu'à la cinquième. On commence à élaborer les structures de coûts, les augmentations, les recettes et à calculer la rentabilité.

C'est ce que les agriculteurs recherchent. Il est beaucoup plus difficile de faire ce travail en agriculture. Il est néanmoins dans l'intérêt des agriculteurs de le faire. Voilà le premier principe que la commission doit appliquer.

Le deuxième principe est un principe de bon gouvernement. Le souci premier, c'est la démocratie. En démocratie, c'est le scrutin qui détermine qui va faire quoi ou diriger quoi. La personne ou le groupe qui obtient le plus de voix est celui qui remporte la victoire. Ce n'est pas le cas à la Commission canadienne du blé.

Pour une raison quelconque, la structure de gouvernement est établie par nomination. C'est le ministre de l'Agriculture qui détermine ce qui se passe à la commission. À un niveau très théorique, on peut soutenir que c'est démocratique, mais il s'agit en fait d'une dictature à l'intérieur d'une démocratie. C'est assez contradictoire. C'est même carrément contradictoire.

C'est pourquoi tous les députés devraient étudier sérieusement l'amendement proposé par le député de Prince George—Peace River. Je crois qu'il a un point de vue solide à faire valoir.

Quand un projet de loi présenté à la Chambre donne lieu à 48 amendements, comme c'est le cas avec le projet de loi C-4, tous les députés sont en droit de se demander ce qui cloche. Le simple fait que 48 amendements soient proposés porte à se demander si le projet de loi n'est pas mauvais ou farci d'erreurs. À tout le moins, cela soulève une interrogation.

Je me suis arrêté sur les deux premiers principes, soit l'intérêt des agriculteurs et un bon gouvernement. Je doute que la commission agisse dans l'intérêt des agriculteurs. Pour ce qui est du bon gouvernement, la commission n'est pas assujettie à des principes démocratiques ni à des élections.

Le troisième principe est lié à l'application du bon gouvernement. Cette application suppose l'examen des politiques et des principes visés. Pour procéder correctement, il faut assurer l'équité, la justice, la transparence, l'obligation de rendre compte et la responsabilité. Toutes ces caractéristiques doivent y être.

Les politiques de la commission du blé doivent orienter clairement les mesures à prendre. Les règlements doivent être établis de telle sorte que les agriculteurs voient l'esprit d'équité et de justice sur lequel sont fondés la délivrance des carnets de livraison et l'accès aux entrepôts ou au transport, par exemple.

Il doit aussi y avoir des lignes de responsabilité claires. Il n'y a aucune indication en ce sens dans le projet de loi C-4. Aucune ligne de responsabilité n'est clairement établie.

 

. 1640 + -

Si une entreprise non responsable engageait un président non responsable, on dirait: «Quelle entreprise bizarre! On peut vraiment s'en passer et faire des affaires ailleurs.»

À qui est redevable le PDG? Dans ce cas-ci, c'est au ministre.

Je ne vois pas comment un agriculteur qui se respecte se laisserait nommer à ce conseil d'administration. Celui-ci n'a aucun pouvoir. En définitive, c'est le ministre qui a tous les pouvoirs.

M. Wayne Easter: Voilà ce qui cloche.

M. Werner Schmidt: Le président n'a aucune obligation de rendre compte au conseil. Le président rend des comptes au ministre. Il a une double personnalité.

Une voix: Lisez la loi.

M. Werner Schmidt: Il est censé écouter le conseil d'une part, et le ministre d'autre part. Il s'abstiendra de prendre position et se trouvera partagé en deux. Il ne saura pas qui il est. S'il ne prend pas la part du ministre, ce dernier lui dira: Désolé, mais nous n'avons plus besoin de vous. Voilà un élément crucial.

Que se passera-t-il s'il faut prendre des mesures disciplinaires? Qui le fera? La Commission ou le ministre? Ces points ne sont pas clairs.

Et pour la communication d'information? Quel genre d'information la Commission communiquera-t-elle aux agriculteurs? Et au ministre? Quel genre d'information le ministre communiquera-t-il au conseil? Quel genre d'information le conseil communiquera-t-il au président, au ministre, et le ministre au président et ainsi de suite?

Il y a toutes sortes de possibilités de faire de la désinformation, de ne pas fournir suffisamment d'information et de fournir une information sélective afin de produire un certain résultat.

Voilà certaines des choses auxquelles nous trouvons à redire dans le projet de loi.

Il faut bien faire comprendre que les agriculteurs sont de bonnes gens et qu'il faut modifier la loi concernant la Commission canadienne du blé selon les termes des amendements proposés au projet de loi C-4.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai fait une observation et j'aimerais maintenant faire une suggestion. Au lieu de nous crier leurs réactions de l'autre côté de la Chambre lorsqu'un député a la parole, les libéraux devraient simplement prendre la parole et s'exprimer.

Le président suppléant (M. McClelland): Il ne s'agit certes pas d'un rappel au Règlement.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole cet après-midi au sujet des motions nos 4 à 19, qui forment le groupe no 4.

Un député réformiste a dit tout à l'heure que son parti était le seul à défendre les intérêts des agriculteurs. Je tiens à bien préciser que ce n'est pas vrai. Les néo-démocrates ont toujours appuyé les agriculteurs. Nous sommes fiers de défendre les agriculteurs.

Nous avons toujours appuyé la commission du blé parce qu'elle travaille dans l'intérêt supérieur des agriculteurs. En tant qu'organisme d'État, la commission du blé accomplit, depuis 60 ans, un travail admirable pour les agriculteurs.

Le gouvernement propose que le conseil d'administration se compose de 15 membres, dont dix qui seraient élus par les producteurs. Nous reconnaissons que le gouvernement doit continuer à exercer une certaine influence sur la commission du blé si le gouvernement fédéral doit pouvoir continuer de garantir les prix initiaux des céréales.

Nous estimons, toutefois, que si la commission du blé doit avoir un conseil d'administration, les élections doivent absolument être justes. Elles devraient être des élections faites par et pour les agriculteurs. Nous ne voulons pas que la haute finance s'en mêle. De nos jours, la haute finance se mêle de trop de choses. C'est exactement ce qu'on cherche à faire avec l'AMI, à savoir: laisser le champ libre aux sociétés de façon qu'elles dictent leur volonté aux autres. Nous estimons que pour une affaire aussi importante que la commission du blé, cela ne doit pas être le cas.

Des élections justes, c'est un vote par producteur. Le Parti réformiste propose que les grandes exploitations agricoles aient plus de votes que les petites. Nous estimons que c'est antidémocratique et nous ne voulons rien savoir de cela.

Pour que des élections soient justes, il faut que, tout comme dans les campagnes électorales fédérales, les dépenses de campagne des candidats soient limitées, de telle sorte que les riches ne soient pas avantagés. L'argent domine trop de choses aujourd'hui. On ne peut tout simplement pas prendre le dessus lorsqu'on n'a pas d'argent dans ses poches. Nous voulons que les élections soient justes et les dépenses soient limitées.

Pour que des élections soient justes, il faut que les dépenses des tierces parties soient limitées de façon stricte et transparente. Il faut que les choses soient publiques. La transparence est très importante aujourd'hui.

Comme nous le savons, la commission du blé vise une industrie de 6 milliards de dollars. C'est un secteur industriel très important. Certaines entreprises adoreraient mettre la main dessus. Nous ne voudrions pas qu'elles se servent de leurs portefeuilles bien garnis pour influencer l'élection des membres du conseil d'administration. Nous voyons déjà trop d'ingérence de la part des grandes sociétés dans le débat sur la Commission canadienne du blé. Au cours des derniers mois, la commission a été la cible d'attaques répétées orchestrées par certains groupes agricoles, appuyés par des groupes défendant les intérêts des entreprises, dont la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, le Winnipeg Commodity Exchange et Cargo.

 

. 1645 + -

La prétendue coalition contre le projet de loi C-4 essaie de faire par des moyens détournés ce qu'elle n'a pas réussi à faire par le processus démocratique. Par exemple, elle demande que l'orge ne relève plus de la Commission canadienne du blé. Les agriculteurs ont voté sur cette question en 1997 et 63 p. 100 d'entre eux voulaient que l'orge continue de relever de la Commission canadienne du blé. Nous parlons de démocratie. Encore une fois, la démocratie est un système où c'est la majorité qui décide.

Nous disons à ces groupes qui défendent les intérêts des sociétés et au Parti réformiste que le débat sur la Commission canadienne du blé est un débat pour les agriculteurs, et non pour les sociétés qui ne cherchent qu'à accroître leurs profits.

Nous avons également été témoins de la campagne médiatique honteuse menée par la National Citizens Coalition pour discréditer la Commission canadienne du blé. Cette coalition prétend être financée par des Canadiens ordinaires, mais nous croyons que son financement vient plutôt des grandes sociétés. La coalition est une alliée du Parti réformiste. Le chef de la coalition est un ancien député réformiste et un confident du chef de ce parti.

Encore une fois, nous revenons à la question de la justice. S'il doit y avoir des élections pour former le conseil d'administration, nous voulons qu'elles soient justes et qu'elles ne soient pas influencées par les riches sociétés qui sont les amies du Parti réformiste.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais pouvoir dire que je suis heureux d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-4, qui modifie la Loi sur la Commission canadienne du blé, mais ce n'est pas le cas. Je ne suis pas du tout heureux. Ce projet de loi me déplaît beaucoup. Je suis irrité parce qu'il y a beaucoup de députés à la Chambre, notamment la majorité des députés du côté ministériel, qui n'ont jamais à traiter avec la Commission canadienne du blé, mais qui prennent des décisions ayant des répercussions sur des milliers d'agriculteurs de l'Ouest. Ils viennent s'asseoir à la Chambre et rient pendant que nous essayons de porter des questions graves et très importantes à leur attention.

Ce qui m'ennuie aussi, c'est que ces députés sans courage vont voter comme on leur aura dit de voter. Ils n'oseront jamais dire oui aux arguments que les députés de l'Ouest présentent à la défense des agriculteurs de l'Ouest. La Commission du blé ne touche pas les agriculteurs de l'Ontario ou de l'Est. Seuls ceux de l'Ouest sont touchés. Nos vis-à-vis ont le culot d'avouer qu'ils feront ce que leur ministre leur dira de faire et qu'ils n'écouteront même pas nos arguments.

Le projet de loi soulève pourtant beaucoup d'opposition. Ils prétexteront qu'il y a eu un vote et que les deux tiers des agriculteurs se sont prononcés pour demeurer avec la commission. Mais quelle était la question au juste? C'était une question truquée, comme celle du référendum au Québec. On a demandé: Voulez-vous que tous les agriculteurs restent avec la commission ou voulez-vous abolir la commission?

Monsieur le Président, c'est comme si on vous demandait par une chaude journée d'été si vous voulez rester au bord de la piscine ou rester au fond. C'est le choix qu'on nous a donné. Ce n'est pas ce que réclament les agriculteurs. Ce qu'ils veulent, c'est la liberté.

Il n'y a aucune raison pour que la commission du blé ne continue pas de fonctionner même si on donne aux agriculteurs la possibilité de vendre eux-mêmes leur blé lorsqu'ils trouvent un débouché.

Il est ridicule d'affirmer que la commission ne peut pas fonctionner si elle n'a pas le monopole. Les monopoles finissent toujours par étouffer les bons rendements. Les agriculteurs de l'Ouest se sont fait rouler. J'oserais même dire qu'ils ont été violés par le Canada central à maintes reprises et qu'ils en ont plus qu'assez.

Je suppose que c'est une question d'unité. La démocratie ne fonctionne que dans la mesure où ceux qui sont gouvernés donnent leur consentement. Il y a de plus en plus d'agriculteurs dans l'Ouest qui sont tellement écoeurés par les atteintes à leur liberté par le gouvernement central qu'ils sont sur le point de ne plus se laisser gouverner. Ils sont sur le point de se révolter. Pourquoi le gouvernement ne prend-il pas en considération des amendements pleins de bon sens et n'en vient-il pas à la conclusion que ceux-ci sont effectivement très bons et qu'il faut les inclure?

 

. 1650 + -

J'ai grandi dans une ferme de la Saskatchewan. Lorsque j'étais jeune, je me souviens d'avoir entendu mon père dire: «Comment se fait-il que, lorsque j'achète une moissonneuse-batteuse ou un tracteur fabriqué en Ontario, je dois payer les frais de transport de l'Ontario jusqu'à la Saskatchewan, et que si je leur vends mon grain, je dois encore payer le fret de ma ferme jusqu'à l'Ontario?» Pourquoi en est-il ainsi? C'est parce que ceux qui tirent les ficelles, la majorité ici, n'écoutent pas les doléances tout à fait justifiées des agriculteurs de l'Ouest et se contentent de leur dire: «Tant pis pour vous, nous agissons comme bon nous semble.» C'est exactement ce qu'ils font en ce moment. Ils sont assis en face et font preuve d'un manque de respect. Regardez le producteur de pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard. Il n'a rien à foutre de la Commission canadienne du blé. Il est assis en face et il sourit parce qu'il est en mesure...

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député a dit que j'étais un producteur de pommes de terre. Ce n'est pas le cas. J'ai été président du Syndicat national des cultivateurs et j'ai passé 12 ans dans l'ouest cdu pays à m'occuper de cette question. Je n'aime pas que le député se serve à tort de mon nom.

Le président suppléant (M. McClelland): Le député a raison. Je vous prie de vous adresser à la présidence et d'éviter de faire allusion à des traits personnels.

M. Ken Epp: Monsieur le Président, je m'excuse, mais je maintiens qu'il affiche un sourire irrespectueux pendant ce très sérieux débat. C'est un peu comme s'il disait: «Nous sommes majoritaires et nous pouvons faire comme bon nous semble.» Le problème, c'est qu'ils le feront. Quand viendra le temps de passer au vote sur ce projet de loi dans quelques jours, les libéraux, l'un après l'autre, quand on tirera leurs ficelles, ne vont pas écouter cet argument. Je les mets au défi de s'élever contre la recommandation du ministre et de faire ce qu'ils devraient faire, soit voter contre ce projet de loi s'il n'est modifié, ou, mieux encore, voter en faveur de ces propositions d'amendement. Ils n'ont pas le courage de le faire, et je ne pense pas qu'ils le feront.

Il s'agit ici d'une liberté très fondamentale. Si j'ai une vieille voiture à vendre, je peux l'offrir à qui je veux. Je peux fixer son prix à 500 $. Si un acheteur m'offre 400 $, je peux refuser et lui dire que je ne céderai pas ma voiture pour moins de 500 $. Le pauvre agriculteur de l'Ouest ne peut pas vendre son grain au plus offrant. Il doit le vendre à la Commission canadienne du blé, très souvent au prix le plus bas.

J'ai une histoire horrible à vous raconter. Je connais un agriculteur qui doit de l'argent, notamment, à la Société du crédit agricole, un organisme fédéral. La Société du crédit agricole a donc dit à l'agriculteur: «Donnez-nous plus d'argent, sinon nous vous saisissons.» Pendant ce temps, ses greniers étaient pleins de grain. L'agriculteur aurait pu charger ce grain sur son camion et le vendre lui-même presque deux fois le prix que lui aurait payé la commission si cette dernière lui avait émis un quota en disant qu'elle vendrait son grain pour lui.

Au lieu de cela, le grain reste entreposé et le producteur ne peut pas le vendre. La Société du crédit agricole le menace de saisie, et il ne peut pas vendre son grain même s'il a un acheteur et qu'il pourrait tout écouler dès le lendemain s'il avait la simple liberté de le faire. Si cela n'est pas une violation d'une très fondamentale liberté dans notre pays, je ne vois pas qu'est-ce qui l'est.

C'est pourquoi je presse les députés, et je parle en particulier aux députés de l'opposition. Nous, députés de l'opposition, ne disposons pas d'assez de voix pour forcer la main aux libéraux. Nous y parviendrons, mais nous ne sommes pas encore là. Franchement, tant qu'ils seront majoritaires, ils auront le dernier mot. S'ils adoptent ce projet de loi, cela ne rendra pas service aux Canadiens et constituera même un grave affront aux agriculteurs.

Très souvent, ces agriculteurs s'entendent avec différentes associations. Un agriculteur de ma circonscription se spécialise dans la vente de grains de semence. Le grain de semence, plus particulièrement, n'est pas commercialisé par la commission. L'agriculteur en cause devrait pouvoir vendre son grain de semence comme semence, parce que c'est un marché différent.

 

. 1655 + -

Ce produit n'est pas destiné au marché général. Il n'entre pas dans la fabrication des pâtes que vous et moi affectionnons particulièrement, monsieur le Président. Cet agriculteur n'a pu vendre ses graines de semence parce qu'il ne les a pas d'abord vendues par l'entremise de la Commission du blé. On lui a confisqué son camion à la frontière.

Je comprends pourquoi les agriculteurs de l'Ouest sont exaspérés. Les députés peuvent-ils croire que des agriculteurs se font arrêter? Leur crime, c'est d'essayer de vendre un produit qu'ils ont cultivé et qui leur appartient de plein droit. Ils veulent le vendre au plus offrant, au meilleur prix qu'ils peuvent obtenir, ce qui va à l'encontre d'une loi arbitraire et pernicieuse.

Il faut que cela change. Pourquoi ne pourrions-nous pas avoir un système qui permettrait aux agriculteurs désireux de le faire de vendre leur produit par l'entremise de la Commission du blé? Je suis certain qu'il y a un groupe d'agriculteurs fort important et fort nombreux qui opterait pour cette solution.

Ceux qui pourraient trouver un autre débouché à un meilleur prix ou beaucoup plus vaste ou une vente immédiate plutôt qu'une dans deux ou trois mois, pourquoi ne pourraient-ils s'en prévaloir?

J'exhorte les députés d'en face à défendre ce principe, à oublier leur numéro de chien savant qui fait la belle sur commande, à examiner les amendements proposés et à voter en faveur de ceux-ci, à les appuyer parce que...

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai fait preuve d'une certaine patience compte tenu des propos qu'il m'a été donné d'entendre depuis 15 minutes. Deux fois, on m'a accusée de manquer de courage. On m'a accusée d'être un chien savant, et je pense que cela va à l'encontre de l'ordre et du décorum auxquels on peut s'attendre à la Chambre.

Le président suppléant (M. McClelland): Chers collègues, il nous faut faire preuve d'une certaine délicatesse dans nos réflexions sur autrui.

M. Ken Epp: Je m'excuse, monsieur le Président. Disons seulement que je les met au défi de me prouver que j'ai tort.

Voici l'occasion pour le gouvernement de faire ce qu'il convient de faire, de défendre un principe, de reconnaître aux agriculteurs la liberté individuelle d'agir et d'exercer un contrôle sur la commission qu'ils devraient eux-mêmes diriger.

La commission ne devrait pas être dirigée en leur nom, de loin, par Ottawa, avec toutes ses règles arbitraires. Le gouvernement devrait défendre le principe et appuyer les amendements que nous proposons et faire ce qu'il faut.

Le président suppléant (M. McClelland): Je voudrais seulement signaler quelque chose, sans viser personne en particulier, surtout pas le député de Elk Island qui vient de parler.

Nous devons faire très attention, dans nos échanges avec les gens en face de nous, quand nous tenons des propos peu flatteurs. Il faut qu'il soit bien clair que, conformément aux règles de politesse, les mots péjoratifs utilisés ne visent personne en particulier. Reprise du débat.

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Monsieur le Président, pour commencer, j'aimerais faire un commentaire sur la motion no 5 du groupe no 4, dans laquelle on propose que cinq des membres du conseil d'administration de la Commission canadienne du blé soient nommés.

Permettez-moi de faire un brin d'histoire, question d'étayer mon propos. Dans les derniers jours de la campagne électorale de 1993, le Parti progressiste-conservateur a fait plus de 600 nominations motivées par le favoritisme politique.

Le premier ministre actuel s'en donnait à coeur joie, à l'époque, condamnant le favoritisme flagrant auquel se livraient les conservateurs et jurant sur ses grands dieux qu'il n'agirait pas de la sorte, qu'il n'insulterait pas les contribuables canadiens comme le faisait le premier ministre d'alors.

Il a déclaré, durant la campagne de 1993, que les Canadiens verraient une énorme différence une fois que les libéraux seraient au pouvoir. Il a en outre déclaré que les libéraux avaient été élus pour servir les intérêts des Canadiens, pas les leurs.

 

. 1700 + -

Le livre rouge indiquait ce qui suit à l'époque: «Les conservateurs ont également pratiqué le copinage lorsqu'ils ont comblé des milliers de postes au sein des conseils, des commissions et des agences. [...] Un gouvernement libéral veillera à ce que les nominations tiennent compte des compétences.»

Il est d'autant plus étonnant, suite à cette brève rétrospective historique, que quelques années plus tard, en septembre 1997, le premier ministre ait complètement renié cette promesse et changé de discours en annonçant qu'il ne nommerait personne d'autre que des libéraux. Cela va tout à fait à l'encontre des promesses faites verbalement par le premier ministre pendant la campagne électorale et des mesures annoncées dans le livre rouge.

Pour mieux illustrer ce que je veux dire, je vais donner aux députés et aux Canadiens des exemples de nominations faites après les élections de 1993. M. Jean-Robert Gauthier, député libéral d'Ottawa—Vanier, a été nommé au Sénat; M. John Bryden, organisateur libéral du Nouveau-Brunswick qui a travaillé pour le premier ministre à la course à la direction en 1993 et a dirigé les campagnes électorales de M. McKenna, a été nommé au Sénat; Mme Sharon Carstairs, ancien chef libéral et fidèle du premier ministre, a été nommée au Sénat; M. Robert Nixon, ancien chef du Parti libéral de l'Ontario et confident de l'actuel premier ministre, a été nommé président d'Énergie atomique du Canada; M. Royce Frith, ancien Président libéral au Sénat, a été nommé haut-commissaire à la Grande-Bretagne. Je pourrais poursuivre, mais il me faudrait plusieurs jours pour épuiser la liste des nominations politiques libérales et je ne veux pas abuser du temps de la Chambre.

Le conseil d'administration qui est proposé pourrait lui aussi donner lieu à du népotisme politique. C'est pour cette raison que le gouvernement ne veut pas permettre aux agriculteurs de diriger eux-mêmes leur conseil d'administration au sein de la Commission canadienne du blé. Il préfère combler lui-même certains postes pour pouvoir continuer de pratiquer le favoritisme auquel il se livre depuis 1993. Le gouvernement n'a donné aucun signe de vouloir mettre un frein à cette pratique.

Non seulement le ministre responsable de la Commission canadienne du blé propose-t-il de contrôler le conseil d'administration par le biais de nominations, mais le premier dirigeant de la commission serait lui aussi nommé. Le conseil d'administration élu par des agriculteurs n'aurait pas le pouvoir de choisir lui-même son président. C'est le ministre responsable de la Commission canadienne du blé qui aurait ce pouvoir. Cela constitue un véritable affront aux agriculteurs et le gouvernement libéral devrait en avoir honte.

J'ai saisi toutes les occasions qui m'ont été données de parler des amendements au projet de loi C-4, qui porte sur la Commission canadienne du blé. Comme d'habitude, le ministre responsable de ce projet de loi n'est pas ici pour entendre les préoccupations des agriculteurs de l'ouest dont se font le porte-parole les députés qui les représentent.

Au moment où je parle, seuls trois députés libéraux sont présents à la Chambre des communes.

M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Si je ne m'abuse, le Règlement interdit que l'on évoque la présence ou l'absence de députés.

Peut-être, puisqu'il est lancé dans ses critiques, pourrait-il nous expliquer le revirement du chef de son parti et pourquoi celui-ci habite maintenant Stornaway?

Le président suppléant (M. McClelland): Nous traiterons d'abord de l'allusion d'un député à d'autres députés de la Chambre.

 

. 1705 + -

La tradition veut que nous ne mentionnions ni la présence ni l'absence d'autres députés à la Chambre. C'est un fait.

Pour un rappel au Règlement, le député de Yorkton—Melville.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, je pense qu'il serait bon d'expliquer aux téléspectateurs ce qui se passe à la Chambre...

Le président suppléant (M. McClelland): Avec tout le respect que je vous dois, je ne crois pas qu'il s'agisse là d'un rappel au Règlement. Nous sommes ici en train de débattre.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, je pense qu'il faut faire remarquer aux téléspectateurs que nous avons tourné la deuxième lecture. Ce projet de loi n'a pas été lu une deuxième fois. Si une partie du débat semble sans rapport...

Le président suppléant (M. McClelland): Avec tout le respect que je vous dois, il ne s'agit pas là d'un rappel au Règlement.

M. Jim Pankiw: Monsieur le Président, ce que j'essayais de démontrer, c'est que les tentatives les plus valables des députés réformistes pour bien représenter les agriculteurs de nos circonscriptions et faire valoir leurs préoccupations en proposant des modifications à ce projet de loi sont restées lettre morte. Nos demandes en vue d'améliorer ce projet de loi pour le bien des personnes qu'il vise sont accueillies avec mépris, malgré le fait que nous soyons ici pour représenter les agriculteurs.

Je fais allusion à des députés de l'est du Canada qui ne représentent personne qui soit directement visé par ce projet de loi. Le moins qu'ils puissent faire est de ne pas nous traiter avec mépris et d'écouter ce que nous avons à dire au sujet des gens que nous représentons et que ce projet de loi vise directement. Je considère comme un affront la façon dont ces députés se conduisent aujourd'hui à la Chambre des communes.

Une voix: Ce sont des calomnies.

M. Jim Pankiw: Quant à savoir si ce sont des calomnies, comme le prétend le député libéral qui chahute, je me reporte à un texte sur les nominations d'amis du parti. Ce ne sont pas des calomnies, mais des faits. J'ai une liste qui date de 1994. Elle présente en détail les nominations qui tiennent du favoritisme faites par le gouvernement libéral au cours de sa première année au pouvoir. Je pense que c'est très pertinent à la discussion d'aujourd'hui. La conseil d'administration qui sera mis sur pied, si ce projet de loi devient loi, lui offrira d'autres possibilités de nommer ses amis.

Pour illustrer davantage mon propos, je veux parler de M. Robert Wright, principal agent de financement du premier ministre lors du congrès à la direction du parti, en 1984. Il a été nommé négociateur du gouvernement auprès du consortium de développement de l'aéroport Pearson pour l'annulation du contrat de l'aéroport de Toronto.

M. Pat Lavelle, président pour la région de l'Ontario des campagnes à la direction de 1984 et 1990 du premier ministre actuel, a été nommé président de la Banque de développement du Canada.

Ron Langstaffe, demeuré loyal au premier ministre actuel, a dirigé la campagne d'Hedy Fry contre Kim Campbell dans Vancouver-Centre, et a été nommé président de la Société du port de Vancouver.

Raynald Guay, ancien député libéral, a été nommé vice-président du Tribunal canadien du commerce extérieur.

Jim Kinley, candidat libéral deux fois défait, a été nommé lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse.

Patricia Landers, candidate défaite aux élections de 1993 à Saint John, a été nommée au Tribunal d'appel des anciens combattants.

James Palmer, argentier du parti libéral en Alberta, a été nommé au conseil d'administration de la Banque du Canada.

Ethel Cherneski, directrice de campagne à Burnaby en 1993, a été nommée au conseil d'administration de la société Canada Place.

Donna Scott, candidate libérale provinciale dans Mississauga-Sud, a été nommée présidente du Conseil des arts du Canada.

Morris Kaufman, ancien vice-président du Parti libéral, a été nommé au conseil d'administration de VIA Rail. Comme je le disais, je pourrais continuer pendant des jours entiers, mais bien plus importante est l'urgence avec laquelle j'implore la Chambre de ne pas créer un conseil d'administration de plus, donnant ainsi au gouvernement l'occasion d'y nommer ses amis politiques, d'autant plus qu'on peut mettre en doute le bien fondé de ces postes. Ce conseil d'administration devrait être entièrement élu par les agriculteurs. Et il ne devrait pas en être autrement.

 

. 1710 + -

Au nom de tous les producteurs de grain de l'Ouest, je terminerai en exhortant les députés libéraux de l'Est à faire preuve d'un peu de respect pour les propositions faites au nom des agriculteurs que nous représentons et de faire preuve d'un peu moins de dédain à leur égard.

[Français]

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, j'ai essayé de me retenir pendant toutes ces heures d'âneries des députés du Parti réformiste. Ceux qui nous écoutent présentement verront combien il est pathétique de voir des gens élus par une population venir parler de façon disgracieuse de la démocratie. Et en plus, on vient m'insulter en disant que parce que je suis un gars du Québec, je n'ai pas le droit de parler de cette question importante.

[Traduction]

Le vice-président: Le député de Prince George—Peace River, pour un rappel au Règlement.

M. Jay Hill: Monsieur le Président, plus tôt au cours du débat, le député a mis en doute la pertinence des propos du député du Bloc québécois. À propos d'âneries, ce qu'il cherche à avancer actuellement n'a absolument aucun rapport avec les modifications du groupe no 4 proposées au projet de loi C-4.

Le vice-président: Je suis sûr que le député, comme tous les députés présents aujourd'hui, établira un lien entre ses observations et le projet de loi dont la Chambre est saisie. Il semble que ce soit la pratique.

[Français]

Je suis persuadé que l'honorable député de Bourassa procédera de cette façon.

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, je ne faisais que mettre en évidence ce que j'ai entendu dans les quatre derniers discours du Parti réformiste. Chose certaine, je pense que l'ancien producteur du...

[Traduction]

Il y aura peut-être une suite au film «Rocky Horror Picture Show». Nous avons entendu parler de cet endroit où il se passe des choses horribles.

[Français]

Il y a des gens qui viennent me dire ici que, comme député du Québec, je n'ai pas le droit de parler de blé. Il y a des gens qui viennent me dire que, parce que je suis du Québec, je n'ai pas le droit de prendre position sur ce projet de loi. Il y a des gens du Parti réformiste qui disent que, parce que je suis du Québec, je n'ai pas le droit de représenter adéquatement mes électeurs qui participent, par leurs taxes, au financement de la Commission canadienne du blé qui reçoit cinq ou six milliards de dollars. Est-ce que cela veut dire, qu'à partir de maintenant, lorsque l'on parlera de poissons, la gang de la Saskatchewan du Parti réformiste ne pourra pas en parler? Voyons donc! C'est pathétique.

On est en train encore une fois de nous montrer, par cette bande de dinosaures, comment on essaie de diviser, comment, encore une fois, on mise sur les divisions. On vient d'avoir une définition du bloc de l'Ouest. Cette gang-là, ce n'est pas mieux que le Bloc québécois. C'est seulement bon pour faire de la diversion.

Là, on va parler des vraies affaires. Les gens de Bourassa comprennent l'importance du projet de loi C-4. Ils ont compris l'importance de la démocratie. Ils ont compris l'importance de la transparence. Ils ont compris l'importance de ce projet de loi parce que nous, nous prenons position pour les producteurs agricoles.

Chose certaine, lorsque l'on constate qu'au sein de cette Commission, 10 membres sur 15 sont élus par les producteurs, cela veut dire que c'est bon, que c'est extraordinaire. Pour une fois que nous avions quelque chose qui aidait directement les producteurs, le Parti réformiste change encore d'idée, vient encore nous dire des âneries et que c'est le gouvernement qui contrôlera la Commission.

 

. 1715 + -

Non seulement on ne fait que cinq nominations, mais l'ensemble des directeurs peuvent voter le salaire du président et même recommander sa destitution. Ce n'est pas de la démocratie, cela, en majuscules?

On vient brailler encore une fois. Et puisqu'ils ne savent pas quoi dire, ils sortent une liste de nominations. Je suis content qu'elle ait été nommée, cette gang-là, c'est de la compétence. Il n'y a personne du Parti réformiste, parce que personne n'est compétent dans cette gang-là.

La transparence, la démocratie, c'est essentiel. La représentativité, c'est essentiel. Nous avons démontré, par ce projet de loi, pour une fois que nous prenons position pour les producteurs agricoles, on devrait nous applaudir de l'autre côté de cette Chambre. On ne devrait même pas parler d'amendement. On devrait, à l'unanimité, prendre position pour le projet de loi C-4.

Nous avons choisi de prendre position pour les producteurs agricoles. Ils ont choisi de prendre position pour certains lobbys obscurs que je ne connais point. Chose certaine, quand on voit avec quelle transparence cette Commission sera dirigée, à titre de député de Bourassa, je suis extrêmement fier et heureux d'appartenir à ce gouvernement et, d'emblée, je me lèverai pour voter en faveur de ce projet de loi. Les gens de l'autre côté, au lieu de proférer des insultes, au lieu de continuellement salir des réputations, salir des gens dûment nommés qui, par leur compétence, vont apporter quelque chose d'extraordinaire au peuple canadien, devraient se réjouir du projet de loi C-4.

Quand on n'a pas grand-chose à dire, on insulte. Chose certaine, quand on regarde le projet de loi C-4 et qu'on regarde point par point l'importance de ce projet de loi, on devrait tous se lever à l'unanimité et applaudir le ministre et le gouvernement d'avoir pris cette position.

Je prends pour les producteurs, eux, ils prennent pour les lobbys. Mesdames et messieurs qui nous écoutez, vous allez voir, c'est très pathétique. On a remis les pendules à l'heure. Au lieu de sortir encore vos litanies, j'espère que vous allez prendre position pour les producteurs agricoles. Arrêtez de dire continuellement: «Parce que vous êtes de l'Est, vous n'êtes pas capables de nous représenter.» S'il fallait que je me lève chaque fois que je pense que vous êtes incapables de nous représenter, vous ne vous lèveriez pas souvent.

[Traduction]

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre à nouveau la parole dans ce débat sur le projet de loi C-4, car il a une certaine pertinence pour ma famille et moi. J'appartiens à la troisième génération d'une famille d'agriculteurs. Ma famille possède un permis de la Commission canadienne du blé depuis la création de cette commission. Cela me confère une certaine légitimité et une certaine pertinence dans ce débat, contrairement au député qui m'a précédé. Il ignore probablement la différence entre un boisseau de blé et un gallon de sirop d'érable.

La question n'est pas de savoir si un député ou un autre peut prendre la parole. N'importe quel député peut prendre la parole sur n'importe quelle question qui lui plaît. L'important, c'est la légitimité des propos qui sont tenus. Je ne comprends pas tous ces députés.

Ce groupe d'amendements no 4 ne traite que de l'élection des dirigeants de la Commission canadienne du blé.

[Français]

Le vice-président: L'honorable député de Bourassa invoque le Règlement.

M. Denis Coderre: Monsieur le Président, je n'accepterai jamais qu'on mette en doute ma légitimité. J'ai été dûment élu, mes électeurs m'ont élu par plus de 9 000 voix et je n'entends pas...

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai bien écouté les propos de l'honorable député d'Athabasca et il n'a rien dit concernant la légitimité de l'honorable député. Nous pouvons poursuivre le débat.

[Traduction]

M. David Chatters: Monsieur le Président, la question dont nous parlons aujourd'hui à propos du groupe no 4 concerne le choix entre l'élection ou la nomination des administrateurs de la Commission canadienne du blé. J'aimerais que les députés d'en face prennent ce débat un peu plus au sérieux et nous expliquent, à moi, à mes électeurs et aux agriculteurs des Prairies pourquoi on leur refuse ce que les agriculteurs de l'Ontario ont actuellement. Nous demandons la même chose, mais on nous dit que cela ne nous convient pas. Cela convient aux autres, mais il n'y a pas de grand mouvement pour que la Commission canadienne du blé étende sa compétence à l'Ontario.

 

. 1720 + -

Ce que nous faisons valoir au nom des producteurs est très valable. Certains pensent peut-être que le débat commence à être répétitif et qu'il s'écarte parfois de l'élection des administrateurs, mais les esprits, du moins dans ma circonscription, s'échauffent un peu plus chaque jour.

J'étais chez moi pendant la fin de semaine et je viens seulement de revenir à Ottawa cet après-midi. Samedi après-midi, un agriculteur m'a appelé. Il représente la deuxième génération de céréaliculteurs dans la partie nord de ma circonscription, et il a été agriculteur toute sa vie. La Société du crédit agricole, un organisme du gouvernement fédéral, lui a donné 60 jours pour quitter l'exploitation. Voilà deux ans qu'il ne peut pas ensemencer, parce que ses champs sont trop mouillés. Cela m'échauffe vraiment les oreilles lorsque j'entends des gens plaisanter et rire de cette question et de toutes celles qui entourent l'agriculture.

Dans l'avion qui me ramenait à Ottawa, je lisais dans les journaux l'histoire d'un agriculteur du Manitoba, un électeur d'un de mes collègues, qui avait été condamné à 60 jours de prison, à 2500 $ d'amende et à la saisie de son camion de grains d'une valeur de 50 000 $. Pratiquement le même jour, deux hommes ayant violé une femme en Colombie-Britannique ont été condamnés à des services communautaires. L'agriculteur, pour avoir vendu 500 $ de grains, a été mis aux fers, soumis à une fouille à nu et humilié constamment. On ne peut pas s'empêcher de se mettre en colère et de crier à l'iniquité.

Je le répète, j'exhorte les députés d'en face à aborder ce dossier avec un peu plus de sérieux. Qu'on dise haut et clair pourquoi les agriculteurs canadiens ne sauraient avoir une commission du blé dont les administrateurs, élus par les agriculteurs, veillent aux intérêts des agriculteurs et rendent des comptes aux agriculteurs.

Le conseil d'administration doit faire preuve de transparence. Il n'est certainement pas élu. Pour des raisons que j'ignore, le ministre tient mordicus à avoir mainmise sur la commission et son conseil d'administration. Faut-il s'étonner alors que les agriculteurs de l'Ouest restent méfiants et n'aient pas confiance dans la commission?

Les agriculteurs de ma circonscription sont favorables au maintien de la Commission canadienne du blé. Ils ont confiance dans la Commission canadienne du blé et dans son oeuvre auprès des producteurs. Mais, à la lumière des injustices passées, ils préfèrent exercer un contrôle sur la commission. Ils veulent élire ses administrateurs. Ils s'opposent à ce que le ministre et le gouvernement exercent un contrôle sur la commission, et ce, simplement parce que les tribunaux ont statué que la commission n'est pas tenue de rendre des comptes aux agriculteurs. Le fait qu'un agriculteur soit tenu de vendre son blé à la Commission canadienne du blé alors qu'il pourrait obtenir le double du prix s'il le faisait livrer par camion à quelques kilomètres à peu au-delà de la frontière apparaît comme une injustice aux yeux des agriculteurs.

Il y a des agriculteurs qui ont les larmes aux yeux en voyant la ferme familiale disparaître au bout de deux générations. Ils perdent jusqu'à 3 $ sur chaque boisseau de grain vendu parce que la Commission canadienne du blé leur interdit de commercialiser leurs céréales. Cela m'énerve de voir qu'on tourne en dérision cette question. C'est un dossier très sérieux dans ma région. J'estime que ce que demandent mes électeurs, le Parti réformiste et mes collègues n'a rien de déraisonnable ni d'extraordinaire.

J'exhorte donc les députés d'en face à prendre ces considérations au sérieux, à débattre sérieusement cette question et à nous dire franchement pourquoi ils ne consentent pas à accepter un certain nombre de nos propositions de modification. Les agriculteurs auraient alors confiance dans la Commission canadienne du blé et seraient prêts à s'en servir comme outil de commercialisation pour vendre leur grain.

 

. 1725 + -

Si nous poursuivons dans la même voie, si le gouvernement insiste pour maintenir la même position, on va détruire la Commission canadienne du blé.

Déjà, dans mon coin de pays, les agriculteurs se tournent vers d'autres solutions. Ils se tournent vers des cultures qui ne sont pas assujetties à la commission et vers les marchés locaux d'élevage de bétail. Ils se détournent de la Commission canadienne du blé parce que le gouvernement refuse de bouger, de modifier si peu que ce soit sa position sur la Commission canadienne du blé.

Le gouvernement est déraisonnable. Ce type de réponse m'attriste beaucoup. Je termine ici mon intervention.

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Monsieur le Président, mes collègues réformistes voudront peut-être prendre le temps de lire le projet de loi. Cela pourrait épargner certaines de leurs incohérences et de leurs contre-vérités.

Je regarde nos vis-à-vis et je vois des réformistes agissant comme des bloquistes. Je pense que le chef du Parti réformiste a peut-être pris des leçons de M. Bouchard. Chose certaine, les députés de son parti et lui-même prônent le régionalisme aujourd'hui. Il n'est pas question d'un pays dans son ensemble. Les députés de ce côté-ci devraient être en mesure de parler du projet de loi, une mesure qu'ils garantissent à raison de 6 à 7 milliards de dollars par année, alors que nos vis-à-vis voudraient en parler pendant que nous restons ici silencieux.

Je ne suis pas de service aujourd'hui. Je suis arrivé ici par avion un jour plus tôt seulement pour parler de ce projet de loi, parce que je pense qu'il est important pour tous les Canadiens et pas simplement pour les réformistes.

Je pense que les Canadiens, surtout ceux de l'Alberta, du Manitoba et de la Saskatchewan voient clair dans le jeu des réformistes qui ne représentent pas le véritable esprit du Canada.

Je vais m'arrêter sur quelques points pour essayer de corriger certaines inexactitudes et contre-vérités répandues par les réformistes cet après-midi. Il semble, selon les réformistes, qu'il n'y ait absolument aucune représentation au conseil des pêches. Selon eux, ils n'ont absolument aucun droit de parler aux fonctionnaires des pêches. C'est une chose à laquelle notre parti ne souscrira pas.

Je vais aborder deux questions auxquelles on devrait répondre à ce stade-ci. La Commission canadienne du blé va-t-elle rendre davantage de comptes aux agriculteurs? La question est simple. La réponse est oui. Pour la première fois dans l'histoire, la Commission canadienne du blé sera dirigée par le conseil d'administration. Il y aura 15 administrateurs en tout, dont dix seront élus par les producteurs. Le gouvernement n'en pourra nommer que cinq. Compte tenu des 5 ou 6 milliards de dollars que les Canadiens, hommes, femmes et enfants, donnent en garantie, il est normal qu'ils devraient tous avoir un mot à dire en ce qui a trait à la commission du blé.

Les administrateurs auront-ils du pouvoir? Bien sûr qu'ils en auront. Ils ont le pouvoir de fixer le traitement du président directeur général. Le ministre doit être consulté avant la nomination du président directeur général. Le conseil d'administration détient vraiment le pouvoir en cette matière.

La CCB est-elle soumise à une vérification approfondie comme c'est le cas pour les entreprises privées? Combien de fois ai-je entendu au cours des derniers jours les réformistes deviser sur le fait que le vérificateur général ne pouvait pas vérifier les livres de la Commission canadienne du blé? D'autres jours, je les entends s'inquiéter de l'excès de réglementation et de l'interventionnisme gouvernemental et de toute une suite de questions du même genre. Ils continuent de se contredire.

La commission du blé fera l'objet de vérifications approfondies. Un vérificateur externe du secteur privé a été engagé pour effectuer ces vérifications. Il s'agit d'un cabinet de vérificateurs respecté, bien connu au Canada et en Amérique du Nord.

Une autre question dont les députés de l'autre côté de la Chambre aimeraient avoir la réponse pour la rapporter à leurs électeurs est de savoir s'il est nécessaire pour le gouvernement de nommer certains des administrateurs ainsi que le président. À cela je réponds oui bien sûr ett il y a deux raisons pour cela. Tout d'abord, les contribuables canadiens ont appuyé la CCB en lui fournissant des garanties financières totalisant 6 milliards de dollars, lesquelles ne couvrent pas seulement les paiements initiaux, mais également les ventes à crédit.

 

. 1730 + -

M. Jay Hill: Lisez le projet de loi.

M. Paul Bonwick: Ne serait-il pas intéressant pour les députés réformistes de pouvoir retourner chez eux et annoncer que le gouvernement ne garantissent plus leurs prêts et qu'ils ne seront donc plus payés. Songez un peu à l'incertitude que cela pourrait causer sur le marché.

M. Jay Hill: Lisez le projet de loi.

M. Paul Bonwick: J'ai eu le privilège de siéger au comité de l'agriculture et d'entendre tous les témoins. Étant donné que j'ai écouté avec attention, contrairement à certains députés d'en face, je voudrais mentionner certains points susceptibles d'intéresser ces derniers, pour peu qu'ils cessent de rire et de déranger et qu'ils écoutent afin d'apprendre quelque chose.

Les administrateurs de la CCB peuvent-ils effectivement manifester leur désaccord quant au choix du président? Cette question est simple et les agriculteurs ont le droit d'en connaître la réponse. Oui, les administrateurs peuvent s'opposer.

Le gouvernement peut nommer le président, mais seulement après consultation. Une fois que le président a été nommé, les administrateurs ont le droit d'évaluer son rendement et de recommander son renvoi. Ils ont aussi le pouvoir de déterminer son traitement et peuvent fixer celui-ci à un dollar, s'ils le veulent.

Il est évident que le conseil aura plein contrôle sur la Commission canadienne du blé dans son ensemble, sous réserve de l'intervention limitée du ministre.

Plus tôt, j'ai entendu des remarques au sujet du fait que quatre députés du Parti réformiste ont pris la parole un à la suite de l'autre relativement à cette mesure législative. Voilà que les réformistes nous critiquent parce qu'on leur donne l'occasion de traiter l'un après l'autre de cette importante question. Nous leur fournissons la chance de nous faire part de préoccupations légitimes relativement à ce projet de loi sur la Commission canadienne du blé, mais tout ce qu'ils semblent capables de faire c'est de semer une pomme de discorde au pays. Tout ce qui les intéresse c'est de parler de leur petite part du gâteau et de dire que nous ne devrions pas intervenir de quelque façon que ce soit...

Le vice-président: À l'ordre. Le député de Saskatoon—Humboldt invoque le Règlement.

M. Jim Pankiw: Monsieur le Président, le député a dit qu'il nous accordait le privilège de prendre la parole l'un après l'autre pour discuter du projet de loi, mais en fait...

Le vice-président: Je ne pense pas qu'il ait dit cela. Sauf erreur, je crois plutôt qu'il a dit que des députés s'étaient plaints du fait que ce privilège leur avait été accordé. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas un rappel au Règlement.

Je comprends que le député puisse ne pas être d'accord avec les propos de son collègue. Il semble y avoir désaccord relativement à ce projet de loi. Sauf votre respect, il s'agit d'un point de débat et non d'un rappel au Règlement.

M. Paul Bonwick: Monsieur le Président, c'est un peu comme en comité. Ils n'entendent que ce qu'ils veulent bien entendre.

J'aimerais que les producteurs de grain de l'Ouest canadien se rendent compte que c'est un bon projet de loi. Nous avons entendu des centaines de témoins représentant des milliers de personnes.

C'est une bonne mesure législative pour le Canada. La Commission canadienne du blé sera enfin entre les mains des producteurs.

Des voix: Oh, oh.

M. Paul Bonwick: Si les députés réformistes, pour une fois, écoutaient et lisaient les informations, ils pourraient peut-être mieux comprendre au lieu d'essayer de diviser le pays en deux en disant que les députés du Québec ne devraient pas parler de cette question, que les députés de l'Ontario ne devraient pas en parler non plus, pas plus que ceux des Maritimes. C'est un droit garanti au Canada. Nous pouvons tous, en tant que députés, prendre la parole sur ce projet de loi.

M. John Harvard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, un peu plus tôt, le député qui représente une partie de la région de Peace River a dit que c'était une question sérieuse. Je suis tout à fait d'accord avec lui. Les députés réformistes devraient écouter les conseils d'un des leurs. Je pense qu'ils ne considèrent pas cette question très sérieusement. Je pense qu'ils aiment bien mieux s'écouter parler, épater la galerie et se faire bassement du capital politique.

 

. 1735 + -

Je viens d'une province des Prairies. J'estime que je dois m'excuser auprès de tous les députés qui ne vivent pas dans les Prairies, car ce que le Parti réformiste a dit à maintes reprises au cours du présent débat, soit que quiconque ne vit pas dans les Prairies n'a pas le droit de prendre part à ce débat, qu'il a perdu son droit de vote, qu'il n'est plus citoyen à part entière.

Je puis vous dire que, la dernière fois que j'ai vérifié, tous les 301 députés des Communes étaient des citoyens canadiens à part entière à la Chambre. Ils ont le droit de prendre la parole sur n'importe quel sujet, quel que soit leur lieu de résidence, quelle que soit la circonscription qu'ils représentent. Je voudrais dire à tous les députés...

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je tiens à préciser qu'aucun député réformiste n'a agi comme le laisse entendre le député. Nous n'avons pas dit que ces gens n'avaient pas le droit de parole.

Le vice-président: Le député n'est pas sans savoir que, dans le cadre d'un débat, les députés sont libres de livrer leur propre interprétation de ce que d'autres ont dit, sans qu'il n'y ait de rappel au Règlement. Dans les circonstances, nous pourrions peut-être écouter ce que le député a à dire, même s'il devient de plus en plus difficile de l'entendre. Je demanderais aux députés de baisser le ton et de permettre au secrétaire parlementaire de compléter son intervention.

M. John Harvard: Monsieur le Président, je crois que les Canadiens qui ont suivi le débat cet après-midi auront très bien compris le message du Parti réformiste: à moins d'être député représentant une des provinces des Prairies, nous n'avez pas le droit de participer à ce débat.

Je ne peux dire qu'une chose aux réformistes: c'est honteux de votre part. C'est indigne de votre parti de même avoir une pensée aussi horrible. Vous devriez avoir honte. Je m'excuse, monsieur le Président, je adresser mes propos par votre entremise.

Le député d'Elk Island a accusé les ministériels d'agir comme des «chiens savants». C'est l'expression qu'il a utilisée, je crois. Il nous a exhortés à défendre nos principes. Encore une fois, j'aimerais bien que le Parti réformiste suive les conseils qu'ils nous prodigue si libéralement.

J'ai écouté les députés réformistes et tout ce qu'ils disent, ce sont les mêmes vieux arguments éculés de leur parti lorsqu'il s'agit de la Commission canadienne du blé. Ils nous rabâchent les mêmes vieux arguments que la droite utilise depuis des années. Ne serait-il pas rafraîchissant d'entendre une seule fois une pensée nouvelle, une réflexion un peu différente de la part du Parti réformiste? Mais non. Les réformistes sont comme des chiens savants. Ils font toujours le même numéro sans jamais rien y changer.

Encore une chose: les députés réformistes aiment bien affirmer qu'ils sont la voix de l'Ouest dans le débat sur le projet de loi C-4. Je suis prêt à admettre qu'ils représentent quelques agriculteurs—et j'insiste sur le mot «quelques»—, mais ils ne parlent pas au nom de tous les agriculteurs des Prairies.

Il est intéressant de voir que, dans tout le débat sur les avantages et les inconvénients du projet de loi C-4, le Parti réformiste ne parle jamais d'un sondage auprès des agriculteurs. Ils ne font jamais allusion à un sondage Angus Reid ou Gallup ni à aucun autre sondage d'une maison renommée. Lorsqu'il s'agit du soutien de la commission du blé, nous n'entendrons jamais un réformiste citer un sondage, parce qu'ils savent, comme nous tous, que la majorité des agriculteurs des Prairies appuient cet organisme.

 

. 1740 + -

M. Lee Morrison: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Ce type est censé être un secrétaire parlementaire. Il doit avoir une idée de ce qu'il y a dans le projet de loi. Je voudrais bien qu'il nous parle de cela.

Le vice-président: L'honorable secrétaire parlementaire parle des points qui ont été soulevés aujourd'hui au cours du débat. Je sais que, comme tout autre député, il finira par porter son attention sur le contenu du projet de loi et à s'arranger pour que ses observations semblent pertinentes.

M. John Harvard: Monsieur le Président, les réformistes voudraient nous faire croire que les agriculteurs des Prairies contestent en majorité la commission du blé, qu'ils ne veulent rien avoir à faire avec la commission du blé.

Si je me souviens bien, un plébiscite sur l'orge s'est tenu il n'y a pas si longtemps dans les Prairies. L'occasion était belle pour les agriculteurs des Prairies d'embarrasser le gouvernement, d'appuyer le Parti réformiste et de montrer qu'ils ne voulaient rien savoir de la commission du blé en disant qu'ils ne voulaient plus que l'orge soit lié à la commission.

Quels ont été les résultats? Notez que dans tous leurs discours, les réformistes ne disent jamais mot du plébiscite. Je me demande pourquoi. Serait-ce parce que les deux tiers des agriculteurs des Prairies ont montré dans ce plébiscite qu'ils appuyaient la commission du blé Les deux tiers des agriculteurs ont dit qu'ils voulaient que leur orge soit vendu par l'intermédiaire de la Commission canadienne du blé. Tels sont les faits, mais les réformistes n'en parleront jamais.

Les réformistes ne tiennent pas à parler des faits parce que cela n'est jamais dans leur intérêt. Ils disent aussi qu'ils ne sont pas contre la commission du blé, qu'ils veulent seulement avoir droit à la double commercialisation. Ils veulent la commission du blé et la possibilité de vendre le grain à d'autres entreprises céréalières. Que c'est gentil. Si nous adoptions la proposition du Parti réformiste, pouvez-vous imaginer combien de temps durerait la commission du blé? Il ne faut pas oublier que la commission du blé travaille en partenariat avec le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral garantit ses ventes pour plus de 6 milliards de dollars. Aucune autre entreprise céréalière ne peut en dire autant.

Imaginez que nous ayons une double commercialisation: d'un côté, un organisme, une entreprise appelée la Commission canadienne du blé qui bénéficie du soutien de tous les contribuables canadiens et, de l'autre, toutes les autres entreprises qui n'ont pas l'honneur de bénéficier de l'appui du gouvernement fédéral. Combien de temps cela durerait-il Deux ou trois minutes. Je soupçonne que nous nous retrouverions devant les tribunaux. Une situation où une entreprise est favorisée aux dépens des autres est insoutenable.

M. Lee Morrison: Êtes-vous déjà allé dans une ferme

M. John Harvard: J'ai passé les 19 premières années de ma vie sur une ferme. Il se trouve que j'en connais long en matière d'agriculture. Libre au député de me le remettre sous le nez tant qu'il voudra. Le fait est que j'ai vécu de nombreuses années dans une ferme, et j'en suis fier.

M. Jay Hill: Monsieur le Président, je sais que l'on commence à s'échauffer, de part et d'autre de la Chambre, mais je saurais gré au député de bien vouloir au moins adresser ses commentaires à la présidence.

Le vice-président: Je constate que le député avait commencé à le faire après que la présidence lui en ait fait le reproche.

M. John Harvard: Monsieur le Président, c'est le seul bon conseil que j'ai entendu, venant de l'autre côté, de tout l'après-midi.

Un des députés réformistes demandait que j'aborde au moins un aspect du projet de loi. Allons-y. À entendre le Parti réformiste, on serait vite porté à croire, si l'on ne connaissait pas les faits, que la nouvelle Commission canadienne du blé sera encore sous le contrôle du gouvernement fédéral.

 

. 1745 + -

Or, il se trouve que la nouvelle commission aura 15 administrateurs, dont dix seront élus directement par les agriculteurs et cinq seulement seront nommés par le gouvernement. Aux dernières nouvelles, 10 voix sur 15 constituent une majorité pleine et entière. Je penserais que les administrateurs élus par les agriculteurs jouiront de la majorité au sein du conseil. Que l'on ne vienne plus me raconter de sornettes à propos des agriculteurs qui ne pourront pas diriger le conseil alors que le projet de loi C-4 les met aux commandes. Les agriculteurs vont mener le conseil. C'est eux qui vont faire marcher l'affaire, le gouvernement fédéral travaillant en partenariat avec eux.

La plupart des agriculteurs des Prairies qui ont au moins pris connaissance du projet de loi C-4 y voient l'occasion de prendre les commandes de la commission et de la diriger à leur avantage, pas à celui du gouvernement fédéral et encore moins à celui du Parti réformiste.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, il est intéressant de remarquer que le débat dure depuis un bon moment et que, soudain, un certain nombre de libéraux commencent à commenter le projet de loi.

Les propos du secrétaire parlementaire ont été très intéressants. Certains de mes collègues des Prairies ont dit qu'il avait été éjecté par des agriculteurs, en Saskatchewan. Je comprends pourquoi. Il n'a parlé des amendements qu'à la fin de son intervention. Je ne suis pas des Prairies, mais je vais parler de ce projet de loi parce qu'il met en cause les droits des personnes en cause.

Le député de Bourassa est également intervenu. Il a parlé de comportements disgracieux à la Chambre. J'étais ici lorsque nous avons discuté des modifications sur les écoles au Québec et à Terre-Neuve. Les libéraux ont dit bien des fois que les députés réformistes devraient s'abstenir de parler de cela. Cela m'a semblé très déplacé. Je n'ai jamais entendu un seul réformiste prétendre qu'un député d'en face ne pouvait pas parler de certaines choses. Nous voulons seulement nous assurer que les propos des députés d'en face veulent dire quelque chose.

Il faut savoir que le député qui a proposé les amendements en connaît long sur ce dossier, tout comme ses collègues. Nous ne sommes pas ici pour séparer le Canada, mais pour faire en sorte que les Canadiens de l'Ouest, dont nous représentons la majorité, reçoivent de ce gouvernement, à Ottawa, ce à quoi ils ont droit.

Le député de Bourassa a prétendu que nous l'attaquions parce qu'il vient du Québec. Je n'ai jamais rien entendu de plus honteux depuis que je suis de retour pour la nouvelle législature. Je me demande si les bloquistes ne sont pas plus nombreux que les libéraux du Québec parce que les libéraux disent des énormités pareilles. S'ils se demandent pourquoi il y a plus de réformistes que de libéraux dans l'Ouest, c'est à cause d'interventions comme celles du député de Bourassa. Pour reprendre ses propres mots, ses interventions sont disgracieuses.

Le Parti réformiste est à la Chambre pour représenter les agriculteurs de l'ouest du Canada; c'est pourquoi les députés réformistes sont majoritaires dans cette partie du pays. Nous parlons au nom des agriculteurs depuis que notre parti existe. Nous les écoutons aussi, ce que le parti au pouvoir ne fait pas. Le secrétaire parlementaire peut compter sur un fort mécontentement dans l'Ouest. Il peut venir vérifier n'importe quand, le week-end prochain peut-être. Nous allons de nouveau l'accueillir avec des huées.

Le député de Simcoe—Grey a aussi fait quelques observations. Étant de l'Ontario, il parle de nous comme étant des bloquistes qui cachent bien leur jeu. Les libéraux ont peut-être remporté tous les sièges en Ontario, mais ils devraient réfléchir à ce qu'est devenu leur parti dans l'ouest du Canada et au Québec. Ils devraient regarder ce qu'il est advenu de leur parti au Canada atlantique aux dernières élections. Le Parti libéral est présent seulement en Ontario. Les libéraux devraient comprendre que s'ils ne veulent pas écouter les gens de l'ouest du Canada, du Québec ou des provinces atlantiques, ils perdront l'Ontario la prochaine fois. Les Canadiens vont élire le parti qu'ils veulent voir à la tête de leur gouvernement.

 

. 1750 + -

Le député de Simcoe—Grey a parlé de la nomination des administrateurs. Certains amendements proposent l'élection de tous les membres du conseil d'administration. N'est-ce pas inhabituel? Quel député serait disposé à parier que le ministre des Finances approuverait cela? Tous les membres d'un conseil d'administration devraient être élus par ceux qu'ils servent.

Sur le marché, on n'achète pas les actions d'une entreprise qui nomme elle-même ses administrateurs, mais bien les actions des entreprises dont les administrateurs sont élus par les actionnaires. C'est précisément ce que demande ici notre parti. C'est tout à fait sensé du point de vue commercial. Je suis surpris que le ministre des Finances n'ait pas dit qu'il appuie notre proposition d'amendement et qu'il n'ait pas invité ses collègues à se raviser.

Qui pourrait penser que le Parti libéral nommera comme membres du conseil d'administration des gens qui connaissent quelque chose au blé? La semaine dernière, les libéraux ont nommé à la Commission d'appel de l'immigration Anna Terrana, une candidate libérale défaite aux dernières élections. Peu importe ce qu'elle connaît à la chose, elle fait partie de la commission. Il n'y a pas grand-chose à ajouter, n'est-ce pas? Cet exemple est fort éloquent, mais je peux vous en dresser toute une liste, dont la nomination au Sénat de Sharon Carstairs, l'ex-chef libérale du Manitoba. La liste des nominations semblables est sans fin.

Je pense qu'il suffit de n'en donner qu'un exemple au téléspectateur moyen qui suit nos travaux ce soir. Je me réjouis également de la participation au débat des députés de Bourassa et de Simcoe—Grey et du secrétaire parlementaire. Cela donne raison aux Canadiens de l'Ouest qui estiment que les députés libéraux ne comprennent rien à ce qui se passe au Canada. C'est pour cela qu'ils n'obtiennent plus de sièges. Lorsque les Canadiens des autres régions s'en rendront compte, ils vont leur réserver le même traitement.

Mon collègue a proposé une foule d'amendements. Les députés d'en face interviennent, ils s'en prennent à notre droit d'exprimer notre opinion et à notre liberté d'expression, mais ils ne veulent pas parler des amendements.

L'un d'eux propose que l'embauche et le congédiement du président incombent au conseil d'administration, et non pas au ministre. Le président ne doit pas être redevable au ministre, sans compter qu'il est aussi le directeur général. À mon avis, aucun député libéral n'accepterait de faire partie d'un conseil d'administration dont le président et le directeur général peut être nommé par quelqu'un de l'extérieur. Que vont diriger les membres du conseil d'administration Ils ne sont qu'une bande de marionnettes. Tous sont redevables au ministre. Personne d'intègre n'accepterait d'être nommé membre d'un conseil d'administration dont les décisions finales ne sont pas prises par le président et le directeur général, mais bien par un ministre.

On pourrait continuer encore longtemps, mais je pense que c'est inutile. Notre parti prend la parole au nom des Canadiens de l'Ouest, au nom des agriculteurs qui ne veulent pas se faire dicter par un ministre d'Ottawa ce que leur conseil d'administration peut faire ou non. Ils veulent l'assurance que les 15 membres du conseil seront élus. C'est ainsi que cela devrait être.

Je suis certain que tous les Canadiens qui suivent le débat actuel ne comprennent pas pourquoi les libéraux d'en face prennent la parole, pourquoi ils font des observations sur nos motivations à agir d'une certaine manière et pourquoi ils nous accusent d'être anti-Québec dans un débat comme celui-ci. C'est tout simplement ridicule. Je n'ai jamais rien entendu d'aussi...

Une voix: Vous êtes anti-Québec.

M. John Reynolds: Monsieur le Président, le député dit que nous sommes anti-Québec. C'est absolument faux. Le député devrait venir visiter la Colombie-Britannique de temps en temps. Il devrait venir visiter l'ouest du pays. Il devrait savoir que j'ai moi aussi grandi dans la province de Québec et que je la comprends, peut-être pas aussi bien que lui puisqu'il y habite encore, je le lui accorde, mais je puis lui dire qu'il n'y a personne dans notre parti qui soit anti-Québec. Nous sommes pro-Canada. Ses attaques mesquines à l'endroit de notre parti ne vont pas bien loin. Il devrait se demander pourquoi le Bloc québécois a remporté plus de sièges que le Parti libéral au Québec. Il devrait se préoccuper de cet aspect et écouter les interventions des députés dans le débat.

Nous avons proposé de bons amendements; les libéraux devraient se donner la peine de les lire et veiller à les adopter au moment du vote.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Conformément à l'entente conclue le mercredi 19 novembre 1997, toutes les questions portant sur les motions du groupe no 4 sont réputées avoir été mises aux voix et les votes par appel nominal sont réputés avoir été demandés et différés.  

La Chambre passe maintenant aux motions du groupe no 5. Conformément à l'entente conclue le mercredi 19 novembre 1997, toutes les motions du groupe no 5 sont réputées avoir été proposées et appuyées. Ce groupe se compose des motions nos 20 à 30, 32, 33, 34, 45 et 47.

 

. 1755 + -

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ) propose:  

    Motion no 20

    Que le projet de loi C-4, à l'article 4, soit modifié par adjonction, après la ligne 31, page 7, de ce qui suit:

    «(4) Malgré le paragraphe (2), la Commission est assimilée à un ministère au sens de la Loi sur la gestion des finances publiques pour les fins de la Loi sur le vérificateur général.»

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) propose:  

    Motion no 21

    Que le projet de loi C-4, à l'article 5, soit modifié par substitution, aux lignes 32 et 33, page 7, de ce qui suit:

    «5. L'intertitre précédant l'article 5 et l'article 5 sont remplacés par ce qui suit:

    5. La Commission a pour mission d'organiser la commercialisation du grain cultivé au Canada au mieux des intérêts des agriculteurs et de manière à maximiser le rendement pour ces derniers.»

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.) propose:  

    Motion no 22

    Que le projet de loi C-4, à l'article 5, soit modifié par substitution, aux lignes 32 et 33, page 7, de ce qui suit:

    «5. L'intertitre précédant l'article 5 et l'article 5 sont remplacés par ce qui suit:

    5. La Commission a pour mission d'organiser la commercialisation du grain cultivé dans les régions désignées au mieux des intérêts des producteurs.»

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.) propose:  

    Motion no 23

    Que le projet de loi C-4, à l'article 5, soit modifié par substitution, aux lignes 32 et 33, page 7, de ce qui suit:

    «5. L'article 5 et l'intertire qui le précède sont remplacés par ce qui suit:

    5. La Commission a pour mission de procurer le meilleur rendement financier possible aux producteurs de grain du Canada en organisant, d'une manière ordonnée, la commercialisation du grain sur le marché interprovincial et sur celui d'exportation, conformément à la présente loi, pour le compte des producteur de grains. Cette mission doit être sa première priorité dans l'exécution de ses opérations.»

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.) propose:  

    Motion no 24

    Que le projet de loi C-4, à l'article 6, soit modifié

      a) par suppression des lignes 1 à 3, page 8.

      b) par suppression des lignes 23 à 30, page 8.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD) propose:  

    Motion no 25

    Que le projet de loi C- 4, à l'article 6, soit modifié par suppression des lignes 23 à 42, page 8, et aux lignes 1 à 8, page 9.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.) propose:  

    Motion no 26

    Que le projet de loi C-4, à l'article 6, soit modifié par suppression des lignes 1 à 5, page 9.

    Motion no 27

    Que le projet de loi C-4 soit modifié par suppression de l'article 7.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.) propose:  

    Motion no 28

    Que le projet de loi C-4, à l'article 7, soit modifié par substitution, aux lignes 13 et 14, page 9, de ce qui suit:

    «7. L'article 7 de la même loi est remplacé par ce qui suit:

    7. (1) Sous réserve des règlements, la Commission vend et écoule le grain dont elle s'est portée acquéreur en application de la présente loi aux prix qu'elle estime raisonnables afin de remplir sa mission énoncée à l'article 5.

    (1.1) Le paragraphe (1) n'a pas pour effet d'empêcher la Commission de conclure un contrat de vente d'un type de grain à un prix inférieur au prix normal dans le but d'obtenir d'autres ventes du même type de grain qui procureraient le meilleur rendement possible aux producteurs pour ce type de grain sur une période donnée.»

    Motion no 29

    Que le projet de loi C-4, à l'article 7, soit modifié par substitution, aux lignes 20 à 22, page 9, de ce qui suit:

      «de réserve, doivent servir, sauf affectation particulière prévue par la présente loi, à maximiser le rendement de la vente de grain pour les producteurs, selon les modalités que la Commission détermine, notamment des paiements additionnels aux personnes ayant droit à des paiements pour du blé vendu par la Commission au cours de cette même campagne agricole.»

M. Dick Proctor (Palliser, NPD) propose:  

    Motion no 30

    Que le projet de loi C- 4, à l'article 7, soit modifié par substitution, aux lignes 22 à 34, page 9, de ce qui suit:

    «(3) Sont imputées aux crédits affectés par le Parlement, sauf disposition contraire d'une autre partie, les pertes subies par la Commission:

      a) dans le cas des opérations visées à la partie III, à l'égard de toute période de mise en commun fixée en vertu de celle-ci, au cours d'une période de mise en commun à l'essai;

      b) dans le cas des autres opérations prévues par la présente loi, au cours d'une campagne agricole.»

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.) propose:  

    Motion no 32

    Que le projet de loi C-4 soit modifié par adjonction, après la ligne 42, page 9, de ce qui suit:

    «8.1 L'article 9 de la même loi est modifié par adjonction, après l'alinéa 9(1)e) de ce qui suit:

      f) donne les précisions et fournit les renseignements exigés pour les fins de la vérification par le vérificateur général du Canada

      g) produit les documents et fournit les renseignements demandés en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. La Commission demeure une institution fédérale au sens de cette loi.»

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) propose:  

    Motion no 33

    Que le projet de loi C-4, à l'article 10, soit modifié par substitution, aux lignes 3 à 14, page 10, de ce qui suit:

    «10. L'article 18 est abrogé.»

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.) propose:  

    Motion no 34

    Que le projet de loi C-4, à l'article 10, soit modifié par substitution, aux lignes 3 à 14, page 10, de ce qui suit:

    «10. L'intertitre précédant l'article 18 et l'article 18 de la même loi sont abrogés.»

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.) propose:  

    Motion no 45

    Que le projet de loi C-4 soit modifié par adjonction, après la ligne 35, page 21, de ce qui suit:

    «30.1 Le vérificateur général procède à la vérification des opérations de la Commission au cours de la période de cinq ans se terminant le 31 décembre 2002 et détermine si la Commission a rempli sa mission énoncée à l'article 5. Il fait rapport au ministre à cet égard au plus tard le 1er septembre 2003.

    (2) Le ministre fait déposer ce rapport devant les deux chambres du Parlement dans les trois premiers jours de séance suivants de chaque chambre.

    (3) Ce rapport est réputé déféré au comité de la Chambre des communes établi pour examiner les questions relatives à l'agriculture.

    (4) À moins que le comité n'ait fait rapport à la Chambre des commune et que la Chambre n'ait soit agréé ce rapport ou n'en ait agréé une version modifiée, au plus tard le 31 décembre 2003 et que le rapport ou sa version modifiée ne conclue que la Commission a, pour l'essentiel, rempli sa mission au cours de cette période de cinq ans, la présente loi est abrogée à compter du 30 juin 2004.

    (5) S'il estime que le processus visé aux paragraphes (1) à (4) a été retardé par des circonstances d'urgence, le gouverneur en conseil peut, par décret, reporter l'abrogation de la présente loi d'au plus un an.»

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.) propose:  

    Motion no 47

    Que le projet de loi C-4, à l'article 36, soit modifié par suppression des lignes 8 à 24, page 24.

—Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole sur le groupe no 5 des amendements au projet de loi C-4, Loi sur la Commission canadienne du blé.

Je veux faire remarquer dès le départ que beaucoup des observations qui ont été formulées aujourd'hui par le gouvernement montrent bien, comme vient de le signaler le député de Vancouver, à quel point les libéraux comprennent peu leur propre projet de loi. Je crois que les propos que nous avons entendus dans les 30 dernières minutes montrent même qu'ils n'ont pas lu les amendements dont nous sommes censés discuter.

Pour sa part, le secrétaire parlementaire a utilisé ses 10 minutes, il y a un moment, sans jamais faire mention des amendements. Il n'a fait que critiquer vertement les réformistes pour avoir essayé de discuter des questions d'intérêt pour les agriculteurs canadiens.

Comme les autres groupes, le groupe 5 compte un bon nombre d'amendements, 16 ou 17. De toute évidence, personne ne peut tenter de discuter intelligemment de 16 ou 17 amendements importants à un projet de loi en 10 minutes. Je vais toutefois tenter de commenter quelques-uns d'entre eux et de soulever quelques autres points que je trouve pertinents dans le cadre du débat sur le projet de loi C-4.

Dans le groupe no 5, la motion no 22 vise à obliger la Commission canadienne du blé à fonctionner au mieux des intérêts des agriculteurs. Auparavant, sa mission consistait simplement à organiser la commercialisation du grain. Beaucoup de mes collègues l'ont souligné dans leurs présentations aujourd'hui et ils ont aussi mentionné que cet amendement fait suite à un amendement antérieur, celui de la motion no 1 je crois, présentée par mon collègue, le député de Yorkton—Melville, qui propose d'ajouter une préambule au projet de loi pour ouvrir la voie à la mesure législative elle-même; ils ont aussi souligné que la Loi sur la Commission canadienne du blé devrait veiller aux intérêts des producteurs qui sont y assujettis. Cela a du sens.

La motion no 22 que j'ai moi-même proposée au nom de l'opposition officielle ferait exactement cela. Elle obligerait la Commission canadienne du blé à fonctionner au mieux des intérêts des producteurs et pas nécessairement juste à commercialiser du grain, ce qui pourrait entrer directement en conflit avec le meilleur intérêt des producteurs.

Le groupe no 5 contient aussi deux autres motions, les motions nos 28 et 29, proposées par mon collègue de Yorkton—Melville, qui proposent des amendements en profondeur et servent à assurer que la Commission canadienne du blé fonctionne au mieux des intérêts des agriculteurs.

Je digresse pour un moment pour parler d'une question de privilège que j'ai soulevée plus tôt et sur laquelle le Président s'est prononcé. Je ne suis pas ici ce soir, surtout à cette heure tardive, pour débattre de cette décision. Je n'ai même pas le droit de discuter de cette décision. Je suis tout à fait prêt à reconnaître que le Président a rendu une décision sur une question de privilège, mais je veux soulever la question parce que jusqu'ici je n'ai pas eu l'occasion de répondre au déclarations du ministre là-dessus. Le ministre dit qu'il a tenu une réunion à Regina pendant le congé de Noël, à laquelle il a invité des groupes d'agriculteurs, simplement parce qu'il suivait l'exemple du Parti réformiste. Il ne faisait qu'exercer son droit de député de consulter les Canadiens au sujet d'une mesure législative, ce qui est tout à fait compréhensible.

Cependant, je trouve que tout cela est de la foutaise. D'après les groupes d'agriculteurs qui ont assisté à la réunion, le ministre n'avait pas du tout l'intention de les consulter au sujet du projet de loi.

 

. 1800 + -

Son intention était de parler du mode d'élection des administrateurs, du conseil d'administration. En d'autres termes, une fois le projet de loi C-4 adopté, des règlements devront être proposés comme chaque fois qu'un projet de loi est adopté. Il était là simplement pour obtenir leur participation à l'établissement du règlement.

Ce que je me demande—et je pense que la question est pertinente—c'est comment un ministre ait pu faire croire que le projet de loi était déjà adopté. Nous n'allons pas parler des amendements concernant le nombre d'administrateurs qui devraient être élus au lieu d'être nommés. Nous ne voulons pas parler de cette question. Nous voulons parler de la façon dont se fait l'élection.

Je pense que ce n'est pas correct, et je crois que la plupart des agriculteurs pensent la même chose. C'est pourquoi la majorité des organisations agricoles représentées à cette réunion sont sorties absolument écoeurées. Un autre groupe—je crois que c'était le Syndicat national des cultivateurs—protestait à l'extérieur de l'immeuble où se tenait la réunion.

J'aurais une dernière observation à formuler pendant le temps qui me reste. Selon mes calculs, 19 réformistes, quatre libéraux, un bloquiste et un ou deux néo-démocrates ont participé au débat d'aujourd'hui sur les amendements du groupe 4. Le député conservateur dit qu'il est intervenu. Oui, comme moi. Il a parlé en novembre, lorsque nous avons ajourné le débat sur les amendements du groupe 4. Je faisais référence à aujourd'hui. Je pense que les chiffres que j'ai cités sont assez exacts.

Nous de ce côté-ci de la Chambre ne disons pas que les députés ministériels devraient se taire, qu'ils ne devraient pas parler des modifications de fond. Au contraire. Seuls quatre d'entre eux ont pris la parole. Comme je l'ai déjà dit, l'un d'eux, en l'occurence le secrétaire parlementaire, n'a fait aucune allusion aux modifications. Il n'a fait que tempêter contre ces sacrés réformistes et la façon qu'ils ont de faire perdre le temps de la Chambre à discuter de lois et de projets de loi. Quelle idée farfelue de venir ici pour discuter de lois et de projets de loi. Quelle audace de notre part. Quelle idée absurde.

Je pourrais continuer longtemps, monsieur le Président, mais je crois que je n'ai que deux minutes et demie.

Alors, je termine mon bref discours sur la motion no 32, un discours beaucoup trop bref d'ailleurs, en demandant quel serait l'effet de la motion 32 si elle était adoptée. Si les honorables députés prenaient la peine de la lire comme il faut, de la comprendre, de comprendre les arguments des producteurs de l'Ouest sur cette question, s'il votaient sur les modifications d'une façon logique et non pas d'une façon partisane, la motion 32 ferait en sorte que la Commission canadienne du blé relève du vérificateur général, qui pourrait ainsi procéder à une vérification.

Chose intéressante, à la Une du Hill Times d'aujourd'hui, on trouve un article sur la façon dont le vérificateur général a demandé de vérifier la nouvelle caisse du RPC qu'on va créer aux termes du projet de loi C-2. De plus, il veut vérifier la Commission canadienne du blé aux termes du projet de loi C-4. C'est exactement ce que permettrait cet amendement réformiste.

De plus, il assujettirait la Commission canadienne du blé à la Loi sur l'accès à l'information, de sorte qu'il y aurait une véritable transparence. Les agriculteurs de l'Ouest—dont un grand nombre se retrouvent dans nos rangs du côté réformiste—pourraient ainsi voir ce que la Commission canadienne du blé fait. Ils pourraient transmettre des demandes d'information et voir exactement les décisions prises par la Commission canadienne du blé. Je crois que cela est tout à fait sensé.

 

. 1805 + -

Je pense que lorsque viendra le vote à l'étape du rapport sur les amendements, on va s'apercevoir que les chiens savants d'en face—comme ils se sont déjà qualifiés eux-mêmes ce soir, je ne fais donc que répéter leurs propos—rejetteront ces amendements de fond sans vraiment y réfléchir, du simple fait qu'on leur a dit de voter ainsi.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, je ressens une certaine fébrilité en parlant du projet de loi C-4. Il y a déjà un bon bout de temps que ce projet de loi a été déposé à la Chambre pour la première fois; c'était en novembre. J'emploie le mot fébrilité parce que je siège au Comité de l'agriculture et de l'agroalimentaire; or, le gouvernement considérait déjà, à cette date, que le comité devait examiner d'urgence le projet de loi pour qu'il puisse être adopté avant les vacances de Noël. Le gouvernement aurait ensuite pu examiner les propositions en vue de l'élection de 10 des 15 membres du conseil d'administration de la commission. Nous sommes maintenant en février et je me demande pourquoi il était tellement urgent que le comité examine le projet de loi.

Le comité a demandé une fois de plus à parler au ministre responsable de la Commission canadienne du blé. Nous l'avons invité à comparaître pour qu'il entende ce que nous ont dit de nombreux témoins au sujet de leurs inquiétudes et des amendements qu'ils souhaitaient voir apporter au projet de loi. Malheureusement, le ministre n'a pas pu comparaître devant le comité car il était urgent de renvoyer le projet de loi à la Chambre.

Nous avons également tenté d'établir une comparaison entre la Commission ontarienne de commercialisation du blé et la Commission canadienne du blé pour voir si d'autres solutions s'offraient au gouvernement et aux administrateurs relativement au fonctionnement de la Commission canadienne du blé. Encore une fois, le temps manquait car le projet de loi devait être envoyé à la Chambre.

Je craignais que nous n'ayons trop attendu en poursuivant les travaux jusqu'en février et même au-delà.

Je respecte beaucoup les députés ministériels et le processus législatif. Je sais pertinemment que les projets de loi qui sont adoptés ne sont pas toujours parfaits et que même les lois en vigueur sont modifiées. Malheureusement, le temps porte atteinte à certaines lois qui doivent être mises à jour pour répondre aux exigences du XXIe siècle.

Il nous incombe en tant que parlementaires et législateurs, et en particulier au gouvernement qui a présenté le projet de loi à l'étude, de veiller à en faire la meilleure mesure législative possible. Dans le cas présent, nous devons veiller de notre mieux aux intérêts du client, ou du producteur.

Quelque 48 amendements sont proposés au projet de loi. Certains sont bons et l'amélioreront. Je parlerai de certains d'entre eux.

J'ai déposé deux des amendements de ce groupe, qui en contient de nombreux très bons. J'espère que le gouvernement écoutera et que tous les partis appuieront certaines de ces propositions afin d'améliorer le projet de loi.

Je ne suis pas naïf au point de croire que le projet de loi ne sera pas adopté. Il le sera. Le gouvernement dispose d'une majorité et souhaite faire adopter ce projet de loi. Il sera adopté, mais auparavant il pourrait être amélioré. Les deux motions que j'ai présentées permettraient de l'améliorer.

 

. 1810 + -

L'une est la motion no 21. Permettez-moi d'apporter quelques éclaircissements. Cet amendement dit que la Commission a pour mission d'organiser la commercialisation du grain cultivé au Canada aux mieux des intérêts des agriculteurs et de manière à maximiser le rendement pour ces derniers. C'est un bon amendement. Loin de contrecarrer la mesure législative proposée par le gouvernement, il lui est complémentaire.

Je n'arrive pas à croire que le gouvernement ne puisse pas comprendre que la Commission canadienne du blé est là pour servir les intérêts des producteurs et non ceux de la Commission, ni ceux du gouvernement du Canada, ni ceux du ministre responsable de la Commission, ni ceux d'un pdg inconnu qui sera nommé par le gouvernement. Elle doit servir les producteurs. Pourquoi ne pas préciser dans la loi qu'elle doit veiller à ce que les producteurs tirent le profit maximum de leur récolte

Cet amendement précise le mandat de la Commission canadienne du blé. Au lieu d'agir au mieux des intérêts de la Commission, cette dernière a pour mission d'organiser la commercialisation du grain cultivé au Canada au mieux des intérêts des agriculteurs et de manière à maximiser le rendement pour ces derniers. Est-ce que ce n'est pas sensé? C'est un bon amendement. Je pense qu'il se passe d'explications. Après tout, la Commission canadienne du blé devrait être au service des agriculteurs, et non au service de la Commission.

Une analyse récente de l'histoire de la Commission canadienne du blé résume très bien la raison d'être originale de cette dernière. Jusqu'à la Deuxième Guerre mondiale, la Commission était un organisme gouvernemental ayant pour mandat de servir au mieux les intérêts des producteurs.

Sa mission première était de garantir un prix de base pour le blé, en fixant le prix qu'elle était prête à payer et les paiements d'acompte, et en laissant les forces du marché déterminer si les producteurs allaient vendre leur récolte sur le marché libre ou à la Commission. Ne s'est-elle pas éloignée de son mandat original? Si oui, pourquoi? La question mérite d'être posée.

Dans ce groupe, il y a un autre amendement que j'ai proposé. Il s'agit de la motion no 33, qui porte sur l'article 18 de la Loi. Elle concerne les directives données par le ministre et non par la Commission. Il est essentiel que cet article soit abrogé car il donne au gouverneur en conseil le pouvoir de donner des directives à la commission sur sa façon de mener ses opérations, d'utiliser ses pouvoirs et de s'acquitter de ses devoirs.

Je crois que si le ministre responsable de la Commission canadienne du blé veut vraiment avoir une commission transparente et démocratique qui rende des comptes, la commission doit alors avoir les pleins pouvoirs sur ses opérations. Dans le cas contraire, les modifications démocratiques prévues aux termes du projet de loi C-4 ne sont que des modifications de forme. Je ne pourrai jamais assez le souligner. La commission doit être indépendante pour pouvoir offrir les services nécessaires aux producteurs canadiens.

Il y a deux ou trois autres questions touchées par ce groupe de motions. Il renferme un certain nombre d'amendements. Comme le député qui m'a précédé l'a signalé, malheureusement, le temps nous presse. On ne peut parler de toutes ces questions comme plusieurs d'entre nous voudraient le faire. Là encore, je souhaite que le gouvernement donne suite à ces bons amendements et je le prie de le faire, car on pourra ainsi améliorer le projet de loi.

Je trouve très intéressant qu'on puisse déposer un projet de loi qui, fondamentalement, déplaît à tout le monde. Des députés libéraux ont affirmé que c'est une bonne mesure législative et que tout le monde l'appuie, comme en témoigne le plébiscite sur l'orge, parce qu'ils ont entendu ce que disaient les uns et les autres.

Le fait est que j'écoute les gens. Je les ai entendus et il est vrai qu'un certain nombre de personnes veulent maintenir la Commission canadienne du blé exactement comme elle est à l'heure actuelle, sans modification. Cela montre probablement que nous devons entrer dans le XXIe siècle. On doit modifier la commission. Des changements s'imposent. Il faut l'adapter au marché mondial que nous avons maintenant par rapport à ce qui existait en 1943.

À ce sujet, le ministre responsable de la Commission canadienne du blé a réussi à présenter une mesure législative qui déplaît à tout le monde. Même ceux qui veulent conserver la commission n'aiment pas cette mesure. Même ceux qui ne veulent pas se débarrasser de la commission n'aiment pas cette mesure.

La majorité des agriculteurs qui souhaitent une certaine souplesse, qui réclament certaines options, n'aiment pas cette mesure. Cela fait ressortir la nécessité de prêter attention aux amendements rationnels et de le faire logiquement. Ne le faites pas uniquement parce qu'un ministre dit tenir à cette mesure législative. Écoutez, lisez, regardez autour de vous, et accordez votre appui à certaines propositions de modification. Le projet de loi ne pourra que s'en trouver amélioré.

 

. 1815 + -

Il y a deux autres aspects à considérer dans ce groupe de motions. L'un a trait à l'élimination du fonds de réserve. Nous sommes favorables à l'élimination du fonds de réserve pour la bonne raison qu'il apparaît à nos yeux comme un subterfuge auquel le gouvernement a recours pour se soustraire à l'un des piliers de la Commission canadienne du blé, à savoir les acomptes garantis à la livraison.

Il s'agit également d'une taxe dépourvue de tout paramètre qui ne permet pas au client, au producteur, d'en prévoir les répercussions. Un fonds de réserve, ça peut être un montant qui se situe entre 500 millions et un milliard de dollars, perçu auprès des agriculteurs, pour telle ou telle fin. On peut donc s'en passer. Ce que le gouvernement cherche par ce moyen, c'est de conserver son influence sur la commission, par le truchement des administrateurs et du président directeur général.

Enfin, il y a la question de l'accès à l'information. On ne compte qu'un seul autre organisme dont l'accès à l'information est soumis à des restrictions aussi sévères et c'est le SCRS. Rien ne justifie que le producteur ne puisse pas avoir accès à l'information émanant d'un organisme qui lui appartient. S'il n'y a rien à cacher, ne cachons rien. Cette mesure législative devrait garantir l'accès à l'information.

Je vous remercie de l'indulgence dont vous avez fait preuve, monsieur le Président. J'aurais aimé disposer de plus de temps encore mais il reste le groupe no 6.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir à nouveau dans le débat à propos de ce groupe de motions.

Certaines motions du groupe no 5 ont trait au vérificateur général et à un agent d'information travaillant au sein de la Commission canadienne du blé. Monsieur le Président, je ne sais pas si vous avez déjà connu un de ces matins où, en vous réveillant, vous avez le sentiment que tout vous sourira. Une fois que vous avez pris le petit-déjeuner, rien ne se passe comme vous l'auriez souhaité.

Il y a environ trois ans, j'ai présenté un projet de loi d'initiative parlementaire qui aurait donné au vérificateur général l'autorité sur la Commission canadienne du blé. Le projet de loi ne pouvait pas faire l'objet d'un vote, mais il a donné lieu à un débat à la Chambre. Je crois me rappeler que tous les députés libéraux qui sont intervenus dans le débat à la Chambre se sont prononcés contre le projet de loi. Ils ne voulaient pas que la Commission fasse l'objet d'une vérification de la part du vérificateur général.

Ce matin, lorsque j'ai consulté un journal d'Ottawa, j'ai vu que le vérificateur général avait dit espérer qu'on le nomme vérificateur pour la Commission canadienne du blé de sorte qu'il puisse, en vertu du projet de loi C-4, travailler à réformer la Commission. C'est exactement ce que je disais il y a quatre ans. C'est ce qui aurait dû se produire. Cela aurait obligé la Commission à rendre des comptes et aurait permis à cette institution d'inspirer une certaine confiance.

On a déjà entendu une grande partie de ce que j'avais à dire au sujet de la Commission et au sujet des réformes qu'on devrait y avoir apportées. Je voudrais maintenant citer quelques observations de la part de quelqu'un qui n'appartient pas au secteur agricole, mais qui est un auteur pigiste de Calgary, George Koch. J'espère que certains d'entre vous ont lu cet article. Voici ce qu'il écrit:

    Les agriculteurs n'ont aucun moyen de savoir si la Commission du blé fait bien son travail, car elle fonctionne en secret. Ils n'ont aucun autre recours du genre médiateur ou ombudsman contre des décisions apparemment incompétentes, abusives ou frauduleuses.

    Contrairement à n'importe quel autre intervenant dans l'économie moderne de marché, les agriculteurs n'ont pas non plus accès à des fournisseurs de services concurrents.

C'est ce que souhaitent les agriculteurs. Ils veulent avoir le choix.

    Ceux qui se dérobent illégalement à l'autorité de la Commission se voient arrêtés par des hommes armés vêtus de noir, conduits les fers aux pieds devant les tribunaux et accusés de délits punissables de prison.

Voilà ce à quoi les agriculteurs s'opposent. Ils veulent bénéficier du même genre de traitement que les agriculteurs vivant dans d'autres régions du pays, comme en Ontario où ils dirigent leur propre commission. L'auteur poursuit:

    C'est ce qui est arrivé à une centaine d'agriculteurs de l'Ouest jusqu'à maintenant. Clayton Desrochers, un jeune agriculteur de Baldur, au Manitoba, qui avait exporté ses céréales en dépit de la Commission du blé, a dû récemment passer son anniversaire de naissance en prison. Le directeur de la commercialisation de la Commission canadienne du blé, Brian White, compare les gens comme ce monsieur Desrochers aux libres penseurs du Montana.

    Pouvez-vous vous imaginer un représentant de la Commission du blé qui fait ce genre de déclarations au sujet d'un agriculteur qui tente de sauver sa ferme? Ce jeune homme voulait gagner quelques dollars supplémentaires, parce qu'il pouvait obtenir pour l'orge qu'il écoulait sur le marché américain le double du prix que la commission était prête à lui verser. Pourquoi un homme devrait-il perdre sa ferme et s'inscrire à l'aide sociale au lieu d'obtenir un meilleur prix pour le produit qu'il a à vendre?

    Cet homme poursuit en ces mots:

    La commission du blé a été affublée de plusieurs épithètes: secrète, irresponsable, arrogante, impitoyable et incompétente. Mais l'affaire au Manitoba s'est attaquée au coeur du problème. Si la commission du blé n'est pas convaincue d'avoir à représenter sérieusement les intérêts des agriculteurs et ne peut y être obligée, pourquoi existe-t-elle?

 

. 1820 + -

Pourquoi avons-nous une commission du blé si elle ne représente pas les agriculteurs? Ces derniers temps, les agriculteurs ont cru bon de s'adresser aux tribunaux pour rendre le système plus juste et équitable, pour défendre leurs intérêts et obliger le gouvernement et la commission du blé à modifier leur comportement envers eux.

Aujourd'hui, j'ai été abasourdi d'entendre, pendant la période des questions, le ministre des Pêches et des Océans déclarer que la décision rendue en Colombie-Britannique au sujet de la pêche pratiquée par les autochtones ne s'appliquait pas à la Chambre, que le gouvernement ne se rendrait pas à la décision prise par le juge ou le tribunal, que la décision rendue ne touchait pas à la Chambre des communes. Comment expliquer cela? La Chambre des communes serait-elle au-dessus de la loi qui règne dans ce pays? C'est stupéfiant.

Dans son ouvrage intitulé Government Liability Assimilating Crown and Subject, le professeur Peter Hogg, C.R., dit qu'on a toujours présumé, en droit public anglo-canadien, que la Couronne, c'est-à-dire le gouvernement, doit se plier aux mêmes lois que tout le monde. C'est d'ailleurs un élément primordial du Rule of Law de Dicey, qui traduit une théorie politique selon laquelle le gouvernement doit se plier à la loi et pas à n'importe quelle loi, mais à la même loi qui s'applique aux citoyens ordinaires. Un régime spécial pour le gouvernement ne peut que mener à la tyrannie. Cela correspond exactement à la situation que nous vivons.

M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Monsieur le Président, le député a pris hors contexte ce que disait aujourd'hui le ministre des Pêches et Océans. Il est clair que ce que le ministre a dit...

Le président suppléant (M. McClelland): Ce n'est certainement pas un rappel au Règlement.

M. Jake E. Hoeppner: Monsieur le Président, si j'ai mal interprété ce qu'a dit le ministre, j'aimerais que le gouvernement s'explique. Lorsqu'un gouvernement ou un ministre ne respecte pas la décision d'un tribunal, c'est qu'il se prétend au-dessus de la loi. C'est ce qui est si grave au sujet de cette déclaration à la Chambre. Je sais qu'il y a une centaine de cas devant les tribunaux actuellement.

Donc, s'il y avait un jugement innocentant ces agriculteurs, le gouvernement pourrait simplement dire: «Nous n'avons pas à respecter la loi. Vous irez en prison tout de même. Vous n'avez toujours pas le droit de commercialiser votre blé.» Que se passe-t-il? Est-ce la démocratie?

Dans les amendements qu'il propose au projet de loi, le député de Prince George, en Colombie-Britannique a essayé d'assurer la responsabilité en disant que la Commission canadienne du blé devait fonctionner sous la gouverne du vérificateur général et de la loi sur l'accès à l'information, lesquels devraient pouvoir intervenir dans l'application de cette loi. Cela ferait très plaisir aux agriculteurs. Cela leur rendrait leur confiance en la Commission canadienne du blé. La majorité des agriculteurs veulent cela. Ils veulent la possibilité de vendre leur blé au meilleur prix possible.

 

. 1825 + -

Si cela n'est pas réalisable dans ce projet de loi, je crois que la Commission canadienne du blé suscitera encore plus de divisions et que les agriculteurs seront encore plus nombreux à s'y opposer. Elle se détruira probablement elle-même. Lorsque j'ai tenu ma première conférence de presse, il y a environ quatre ans, j'ai dit que les agriculteurs de ma circonscription venaient me voir pour se plaindre de la Commission canadienne du blé.

Tous ce qu'ils voulaient, c'est que le gouvernement ou un organisme examine ces allégations pour déterminer s'ils avaient raison ou tort. Ils ne voulaient pas se débarrasser de la commission; ils voulaient qu'elle soit tenue de rendre des comptes.

J'ai demandé au solliciteur général de le faire et les députés savent ce qu'il est advenu de cela. Les agriculteurs ont déposé des plaintes auprès de la GRC dans leurs localités. Leurs plaintes ont été stoppées à un niveau supérieur de la hiérarchie, pour une raison ou pour une autre.

Ils avaient la preuve qu'on avait défalqué des frais de transport, d'élévateur et de nettoyage sur leurs céréales à destination de Thunder Bay, alors qu'elles n'avaient jamais été expédiées à Thunder Bay. Elles avaient été expédiées directement aux États-Unis, à une dizaine de milles de la frontière.

Nous découvrons maintenant que, non seulement des frais leur avaient été imposés à l'origine, mais on leur en a imposé pour le programme de rachat, encore une fois, des frais de transport, de nettoyage et d'élévateur jusqu'à Thunder Bay. Ces agriculteurs ont perdu 40 $ sur une tonne de céréales, ce qui représente plus d'un dollar le boisseau.

C'est la raison pour laquelle nous, du Parti réformiste, voulons que la Commission canadienne du blé rende des comptes. Nous ne voulons pas détruire la commission; nous voulons qu'elle soit obligée de rendre des comptes aux agriculteurs.

Qu'y a-t-il de mal à élire 15 administrateurs au lieu de 10? Qu'y a-t-il de mal à ce que les agriculteurs soient autorisés à recruter leur propre directeur général et à faire fonctionner la commission comme ils l'entendent? Qu'y a-t-il de mal à cela? N'est-ce pas ainsi que la démocratie devrait fonctionner?

Je suis effrayé de voir qu'un secteur de notre économie est traité de la sorte. Les agriculteurs n'ont pas les recours qui sont à la disposition des autres.

Quelques vendeurs d'automobiles de ma circonscription m'ont dit que si nous ne mettions pas fin à ce système stupide où les agriculteurs ne peuvent pas vendre leurs céréales au meilleur prix, ils allaient eux-mêmes commencer à protester. Si nous ne pouvions pas vendre nos automobiles au prix le plus avantageux ou si nous ne pouvions pas accepter de reprendre le véhicule dont un client veut se débarrasser, nous ne respecterions pas la loi. Nous lancerions une campagne de désobéissance civile.

Nous ne voulons pas en arriver là. Nous voulons un système démocratique qui traite tout le monde sur le même pied. C'est tout ce que réclament les agriculteurs de l'Ouest. Ils veulent de l'efficience. Ils veulent qu'on leur rende des comptes. Ils veulent payer leurs impôts. Ils veulent un travail qui leur rapporte de quoi vivre. Ils veulent être traités équitablement.

Les agriculteurs canadiens sont les plus efficients et les plus productifs au monde dans leur secteur. Ils sont arrivés là sans avoir la liberté de vendre leurs produits au prix le plus avantageux pour eux.

Imaginons un peu ce qu'ils pourraient faire s'ils pouvaient vendre leur grain au prix le plus élevé qui leur est offert? Que ne pourraient-ils pas faire s'ils avaient une commission du blé qui doit leur rendant des comptes, qui veille sur leurs intérêts et qui ouvre ses livres au vérificateur général pour y dépister les pratiques douteuses et les irrégularités?

Il y a quatre ans, lorsque j'ai demandé au vérificateur général de me donner une idée de ce que les contribuables payaient au titre du service de la dette, il ne l'a pas pu.

Il n'avait aucun moyen de vérifier dans les livres de la Commission canadienne du blé quel était le taux d'intérêt. Ce qui m'a le plus frappé lorsque je me suis entretenu avec le vérificateur général pour savoir pourquoi il lui était impossible de consulter les livres, c'est qu'il ne savait pas, mais qu'il devait cependant signer les vérifications comptables de la Commission canadienne du blé pour les certifier correctes. Il ne pouvait pas examiner les livres, mais sa signature devait confirmer l'exactitude des vérifications faites par d'autres.

Je peux très bien comprendre pourquoi le vérificateur général est venu dire ce matin qu'il aimerait bien être nommé vérificateur de la Commission canadienne du blé. C'est la voie à suivre. C'est ce qui est proposé dans les amendements mis de l'avant. J'exhorte les députés à voter pour la réforme de la commission du blé en faisant entrer cet organisme dans le mandat du vérificateur général et du commissaire à l'information.

 

. 1830 + -

Le Président: La motion d'ajournement est adoptée d'office, conformément à l'ordre adopté aujourd'hui.

*  *  *

LE MOYEN-ORIENT

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je souligne que nous faisons les choses différemment au Canada. Notre pays est le seul qui, avant de prendre une décision dans ce dossier, consulte la Chambre des communes. En Grande-Bretagne, la Chambre a été informée de la décision sans qu'il y ait un débat. C'est la même chose ailleurs. Il n'y a pas eu de débat aux États-Unis. Au Canada, il y a un débat ce soir. Je vais écouter les opinions des députés, je ferai rapport au Cabinet demain et une décision sera prise.

Ce soir, nous nous penchons sur une question qui revêt une importance vitale, tant à l'échelle nationale qu'internationale. C'est pourquoi il faut entendre les représentants élus de la population. Les Canadiens doivent connaître notre position. J'ai hâte d'entendre les points de vue de mes collègues parlementaires. Leurs opinions nous aideront à prendre une décision éclairée.

La responsabilité du Canada ce soir est sobre et solennelle. Elle doit traduire la détermination de la communauté internationale et sa capacité de résister à la provocation.

Le gouvernement joint la voix du Canada à celle d'autres pays pour demander à Saddam Hussein de se plier pleinement à la résolution 687 du Conseil de sécurité des Nations Unies et à toutes les autres résolutions du Conseil de sécurité qui ont été adoptées à l'égard de l'Irak depuis 1991. L'Irak doit le faire ou s'exposer à de graves conséquences.

Ce soir, je tiens à expliquer clairement aux Canadiens pourquoi nous sommes d'avis que leur gouvernement devrait appuyer une action militaire si Saddam Hussein ne se conforme pas. Cette perspective n'a rien de réjouissant.

Le Canada ne s'empresse jamais de recourir à la force. Nous n'approuvons pas à la légère les mesures militaires. Pour nous, il s'agit toujours d'un dernier recours. En cas de différends, nous avons l'habitude de travailler pour éviter que la situation dégénère en conflit et pour promouvoir une solution pacifique. D'ailleurs, une solution diplomatique à cette crise est de loin celle que nous préférons.

En même temps, le Canada ne se contente jamais de regarder passivement ce qui se passe sur la scène mondiale. Jusqu'à maintenant, nous avons été un acteur dynamique dans le monde et ce rôle suppose une responsabilité.

Sur les questions fondamentales de paix et de sécurité, nous n'hésitons jamais à prendre partie. À preuve, des milliers de Canadiens ont donné leur vie au cours du siècle. C'est pourquoi nous sommes un pays membre de l'OTAN. C'est aussi pour cette raison que nous avons aidé à rédiger la Déclaration universelle des droits de l'homme et à la faire ratifier, il y a 50 ans. C'est pourquoi nous avons favorisé la conclusion d'une convention internationale interdisant les mines antipersonnel, il y a à peine deux mois.

[Français]

S'il y a une chose que les Canadiens et Canadiennes ne peuvent pas sanctionner, c'est qu'on se moque de la volonté clairement exprimée du Conseil de sécurité des Nations unies. Et s'il y a une question sur laquelle le Conseil de sécurité s'est clairement prononcée, c'est sur la menace que Saddam Hussein représente pour ses voisins et pour le monde entier avec des armes de destruction massive, nucléaires, chimiques et biologiques.

À la lumière du bilan de Saddam Hussein, cela ne surprend personne. Quel type de dirigeant peut s'engager volontairement dans une guerre de terreur contre sa propre population?

 

. 1835 + -

Quelle mission civilisée peut-on accomplir en massacrant des dizaines de milliers de Kurdes et en détruisant complètement des villages entiers? Quelle était la logique d'envahir le Koweït si cela a eu pour conséquence de faire fondre sur son pays la plus puissante alliance militaire mise sur pied depuis la Deuxième Guerre mondiale?

Et qu'est-ce que cela nous amène à penser des valeurs humaines de cet homme qui est à nouveau prêt à faire courir ce risque à son peuple dans le seul but de protéger l'ouvrage terrible qu'il poursuit pour la mise au point d'armes chimiques et biologiques?

Bien entendu, rien ne nous garantit qu'une intervention forte et décisive mettra un terme à la menace qu'il représente pour la sécurité internationale. Mais ses actions passées montrent que si nous n'intervenons pas, si nous ne lui tenons pas tête, cela aura pour effet de l'inciter à commettre d'autres atrocités, à prolonger un règne de terreur sur sa propre population, ses voisins et le monde entier. Sur cela, il n'y a aucun doute.

La détermination de Saddam à mettre au point et à utiliser des armes de destruction massive, notamment les armes chimiques, est bien documentée. Quiconque doute du sérieux de la menace qu'il représente n'a qu'à se rappeler qu'il a utilisé ces armes contre sa propre population. Tout aussi bien documentés sont ses efforts soutenus pour contrer les initiatives de la Commission spéciale des Nations unies, la CSNU, qui a été mise sur pied par les Nations unies pour assurer le respect de la Résolution 687 du Conseil de sécurité.

[Traduction]

L'objet de la résolution est clair. Saddam Hussein doit accepter inconditionnellement que toutes les armes de destruction massive soient détruites, enlevées ou neutralisées sous supervision internationale. Les sanctions économiques contre l'Irak seront maintenues jusqu'à ce que la Commission spéciale des Nations Unies sur l'Irak confirme que cela a été fait.

C'était là une condition du cessez-le-feu qui a mis fin à la guerre du Golfe. Saddam Hussein a accepté par écrit de donner un droit d'entrée et d'accès à la CSNU dans ses inspections. Toutefois, dès le début, il a manqué à cet engagement. L'accès qu'il a refusé dernièrement aux soi-disant sites présidentiels n'est que le plus récent exemple.

J'aimerais maintenant rendre hommage au travail remarquable qui a été accompli par la CSNU dans un climat de provocations incessantes. Saddam Hussein a trouvé en ces hommes et ces femmes qui sont des experts dans leurs domaines des adversaires résolus. Affrontant mensonges et menaces pendant sept ans, ils ont accompli un brillant travail de détectives. Ils ont découvert que le programme de production d'armes nucléaires, chimiques et biologiques était beaucoup plus avancé que nous ne l'avions craint ou que Saddam Hussein lui-même ne voulait l'admettre.

Grâce à la CSNU et à l'Agence internationale de l'énergie atomique, le programme bien financé d'armes nucléaires de pointe de Saddam Hussein a, pour ainsi dire, disparu. Grâce à la CSNU, toutes les armes chimiques et les installations de production connues de telles armes en Irak ont été détruites. Grâce à la CSNU, tous les équipements et toutes les installations ayant un lien avec les armes biologiques ont été détruits. La CSNU a supervisé la destruction de 38 000 armes chimiques et de 480 000 litres d'agents chimiques actifs. Quiconque a des doutes sur la gravité de cette menace devrait se rappeler que la CSNU a découvert que l'Irak avait produit 8 400 litres d'anthrax. Cent kilogrammes de l'agent responsable de l'anthrax jetés du sommet d'un immeuble élevé dans une zone densément peuplée pourraient causer la mort de millions de gens.

 

. 1840 + -

[Français]

Les mensonges, les tromperies et, en particulier, l'obstruction auxquels Saddam s'est livré empêchent la Commission spéciale de confirmer si l'Irak a bel et bien détruit toutes ses armes de destruction massive. La communauté internationale doit être rassurée sur ce point par la Commission spéciale. Mais la Commission n'accorde aucune confiance aux promesses de Saddam.

Pendant sept ans, il a menti, résisté et tenté de dissimuler la vérité. Toutes les occasions lui ont été offertes de respecter les accords internationaux et ses obligations. Mais rien n'a réussi à l'inciter à se conformer volontairement, pas même la possibilité de voir lever les sanctions économiques qui font mal à la population irakienne. Ce jeu de cache-cache meurtrier a assez duré.

Permettez-moi de réitérer que le gouvernement privilégie toujours une solution diplomatique. Et, à cette fin, nous demeurons en communication avec nos alliés. Une intervention militaire n'est pas imminente. Mais ne vous y trompez pas, le bilan de Saddam montre qu'il ne respectera pas les solutions diplomatiques tant et aussi longtemps qu'elles ne seront pas assorties d'une menace d'intervention ou d'une intervention. Le moindre signe de faiblesse ou d'hésitation de notre part sera interprété comme une incitation.

[Traduction]

C'est pourquoi, si les choses en viennent là, nous croyons qu'une frappe militaire contre l'Irak serait justifiée pour assurer le respect de la résolution 687 et de toutes les autres résolutions du Conseil de sécurité concernant l'Irak.

Le Canada ne peut pas ne pas prendre position dans un moment pareil. Nos alliés, les États-Unis en tête, ont demandé que nous appuyons une telle mission. Ils ont sollicité notre appui militaire et non des troupes. Toutefois, il s'ensuivrait une présence canadienne dans les mesures contre Saddam Hussein. Cela signifierait que nos forces armées appuieraient matériellement les actions de cette initiative multinationale. Cela voudrait dire que, si tous les autres moyens échouaient et si des mesures étaient prises pour faire respecter la volonté du Conseil de sécurité, le Canada serait du nombre. Il ne serait pas seul, dans les coulisses.

Telle est la décision que nous devons prendre. Le choix est clair. Il est dicté par les responsabilités de la citoyenneté internationale, par les exigences de la sécurité internationale et par la compréhension de l'histoire du monde au cours du XXe siècle.

Ce soir, nous entendrons des députés de tous les partis. Leurs idées sont importantes et elles aideront le Cabinet à prendre demain sa décision.

Des moments comme celui-ci ne sont jamais faciles. Ils demandent un engagement profond, une évaluation honnête et un respect de toutes les opinions, y compris celles que nous ne partageons pas. Les décisions importantes sont rarement faciles à prendre. Nous pouvons seulement espérer que nous les prendrons avec toute la sagesse et la compréhension qu'elles méritent et avec la détermination de les mener à bien.

 

. 1845 + -

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais commencer par définir la question dont la Chambre est saisie, telle que la conçoit l'opposition officielle. La question est de savoir si le Canada doit accepter ou rejeter l'invitation qui lui a été faite par les États-Unis de participer à d'éventuelles interventions militaires au Moyen-Orient afin d'enrayer le terrorisme et de mettre fin à la production d'armes de destruction massive à laquelle s'adonne Saddam Hussein.

La question n'est pas de savoir si nous sommes en faveur d'un effort diplomatique de la plus grande envergure possible pour forcer la main à Saddam Hussein. Chacun d'entre nous ici, à la Chambre, est en faveur d'un effort diplomatique de la plus grande envergure. Il s'agit de savoir quoi faire si les efforts diplomatiques échouent, s'il y aurait lieu à ce moment de participer à une intervention militaire.

Je suis certain que, d'ici la fin de la soirée, nous allons voir que cette question peut être examinée du point de vue politique. Elle peut également l'être du point de vue économique et du point de vue militaire. Mais, dans les trois cas, l'opposition officielle veut s'assurer que ce soient les dimensions humaine et morale qui aient préséance dans notre esprit.

Si Saddam Hussein continue à fabriquer des armes chimiques et biologiques et qu'il décide un jour de les utiliser, le prix à payer en vies humaines et en souffrance sera incalculable.

Le député de Red Deer, entre autres, s'arrêtera plus longuement sur ce point tout à l'heure. Pour l'instant, je me contenterai de citer une statistique qui fait froid dans le dos. Au moment où Saddam Hussein a recommencé à refuser de coopérer avec la commission spéciale de l'ONU, les inspecteurs de l'ONU étaient à la recherche de 25 ogives armées de 40 gallons de toxines tels que les agents responsables de l'anthrax et du botulisme, qui peuvent l'un et l'autre tuer jusqu'à un million de personnes.

Pour se convaincre que Saddam Hussein est prêt à utiliser de telles armes, comme le disait le premier ministre, il suffit de se rappeler l'usage qu'il a fait d'armes chimiques et biologiques contre les forces iraniennes lors de la guerre Iran-Irak, en 1980. Il a même utilisé des gaz toxiques contre des habitants de son propre pays, les Kurdes du nord, tout de suite après avoir été défait dans la guerre du Golfe.

Il ne fait aucun doute, à notre avis. Il coûterait extrêmement cher en souffrances humaines de laisser Saddam Hussein poursuivre impunément ses activités. Par contre, l'intervention militaire visant à contrer Saddam Hussein aura aussi un prix, un coût humain.

En 1991, M. Mulroney, qui était alors premier ministre, avait faire remarquer à la Chambre que Saddam Hussein s'était montré d'une tolérance sans borne en ce qui concerne la souffrance de son peuple. On peut s'attendre à ce qu'il se serve de femmes et d'enfants comme boucliers humains pour protéger des objectifs éventuels.

Si intervention militaire il y a, la vie des militaires participants sera en danger. Si le Parlement décidait que le Canada doit participer à une intervention militaire, cela pourrait entraîner des pertes de vies canadiennes.

La dimension humaine et morale de la question doit primer avant toute autre chose. Je suis personnellement convaincu que, du point de vue moral, les pertes de vie humaines peuvent uniquement être justifiées si elles permettent d'en sauver un plus grand nombre. C'est la seule justification morale de la peine capitale. C'est aussi la seule justification morale des pertes de vies découlant d'interventions militaires. C'est véritablement de cette question morale dont nous discutons ce soir.

Les risques que des civils iraquiens innocents et des membres des forces armées du Canada et des pays alliés soient tués l'emportent-ils sur les risques que des civils innocents et des militaires soient plus tard tués si nous ne faisons rien?

Je m'en voudrais de ne pas souligner le caractère insatisfaisant du débat sur la motion dont nous sommes saisis. Voici comment on aurait dû procéder afin que le débat soit utile et éclaire véritablement les Canadiens et le gouvernement.

Premièrement, tous les députés de la Chambre auraient dû être informés de façon complète par le premier ministre, le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Défense nationale. Une période de questions aurait ensuite dû suivre, afin d'avoir toutes les données pertinentes en main avant la tenue du débat.

C'est le gros bon sens. On obtient tous les faits dans le cadre d'un contre-interrogatoire, pour ensuite en débattre. Je ne comprends vraiment pas pourquoi les règles et procédures de la Chambre continuent de défier le gros bon sens.

On pourrait ainsi amorcer un véritable débat, au lieu de discuter d'une vague motion comme celle dont nous sommes saisis. Le débat porterait sur une véritable position à laquelle s'oppose le gouvernement, mais pouvant faire l'objet d'un amendement par des députés de la Chambre, et sur laquelle on voterait à la fin de la journée.

 

. 1850 + -

Le premier ministre justifie ce manque de leadership en disant qu'il veut consulter d'abord avant d'énoncer sa position. Un bon homme d'État aurait énoncé une position représentant le meilleur jugement du gouvernement et aurait été prêt à la modifier en fonction des points soulevés par les députés de la Chambre.

Ainsi, en l'absence de leadership de la part du gouvernement, il incombe aux députés de ce côté-ci de la Chambre de combler le vide. Nous invitons donc les députés de tous les partis de l'opposition à apporter une contribution à ce débat, et je dis cela très sincèrement.

Étant donné la préoccupation historique des socio-démocrates à la Chambre à l'égard des conséquences humaines et sociales de toute intervention militaire, nous nous attendons à ce que les députés du NPD apportent une contribution importante à ce débat de ce point de vue.

Étant donné que les progressistes-conservateurs étaient au pouvoir au moment de la guerre du Golfe, nous nous attendons à ce que les députés conservateurs apportent une contribution importante à ce débat en analysant cette expérience, c'est-à-dire ce qui a bien fonctionné et ce qui n'a pas bien fonctionné, et en appliquant le résultat de cette analyse à la situation actuelle.

Quant à l'opposition officielle, notre principale contribution sera la suivante. Depuis 1993, nous avons insisté en comité et à la Chambre pour que le Parlement élabore des critères précis afin de l'aider à décider comment le Canada devrait répondre à des demandes de participation à des opérations militaires multilatérales afin d'établir ou de maintenir la paix dans le monde. Nous avons fait cette demande relativement à notre participation en Bosnie, et nous la faisons encore ce soir.

Selon nous, il y a au moins six critères qui devraient être respectés avant que le Canada ne s'engage à répondre à des demandes de participation à des initiatives militaires multilatérales pour empêcher ou éliminer des menaces à la paix.

Premièrement, le Parlement devrait être convaincu qu'il existe une grave menace internationale et que les efforts diplomatiques en vue de résoudre le problème ont échoué.

Dans le cas qui nous occupe, il ne fait pas de doute que Saddam Hussein et sa capacité de fabrication d'armes constituent une grave menace internationale et que, jusqu'à maintenant, les efforts diplomatiques n'ont pas résolu le problème. Ce critère est donc respecté.

Deuxièmement, le Parlement devrait être convaincu que, dans la mesure du possible, l'intervention militaire envisagée bénéficie d'un appui multinational.

Dans le cas présent, l'intervention envisagée bénéficie de l'appui multinational de nos principaux alliés, notamment les États-Unis et le Royaume-Uni. Ce critère est donc respecté.

Troisièmement, le gouvernement devrait être convaincu qu'il existe un plan applicable et une stratégie d'intervention militaire pour résoudre le problème. Nous comptons sur le gouvernement pour donner au Parlement l'assurance que ce plan et cette stratégie existent bien. Il n'a encore donné aucune indication en ce sens. Nous espérons qu'il pourra le faire avant la fin de la soirée. Ce critère n'a pas encore été respecté.

Quatrièmement, le Parlement doit être convaincu que tout plan d'intervention militaire comprend une mission bien définie et une définition claire du rôle du Canada. Nous attendons du gouvernement quelques éléments d'information là-dessus ce soir. Il ne les a pas encore donnés. Peut-être le fera-t-il avant la fin de la soirée. Ce critère n'a pas encore été respecté.

Cinquièmement, le Parlement doit avoir la conviction que le rôle qu'on veut confier au Canada correspond à nos moyens financiers et militaires. Nous attendons des éléments d'information à ce sujet ce soir. Jusqu'à maintenant, ce critère n'a pas été satisfait.

Sixièmement, le Parlement doit avoir l'assurance qu'il existe une structure de commandement et de contrôle satisfaisante pour le Canada. Là encore, nous espérons obtenir des renseignements sur cette structure ce soir. Le gouvernement n'a encore rien dit à ce sujet. Ce critère n'a pas encore été satisfait.

Comme la gravité de la menace est un fait établi et que la nécessité d'une intervention est évidente, voici l'opinion que l'opposition officielle veut communiquer au gouvernement. Elle comprend cinq points.

Premièrement, le Canada a l'obligation de soutenir ses alliés pour mettre un terme au terrorisme pratiqué par Saddam Hussein.

Deuxièmement, notre soutien doit être militaire autant que moral et politique.

Troisièmement, le but des opérations militaires doit être de stopper l'exploitation des usines d'armement de Saddam Hussein et de permettre aux inspecteurs de l'ONU de faire leur travail.

Quatrièmement, les parlementaires doivent prendre la décision politique d'accorder leur soutien. Nous devons ensuite laisser le ministère de la Défense formuler des recommandations sur la forme et l'importance de notre soutien militaire.

 

. 1855 + -

Cinquièmement, en pareil cas, il est important d'établir clairement, d'entrée de jeu, les raisons pour lesquelles on agit comme on le fait. Si nous appuyons une intervention militaire, c'est parce que nous avons l'obligation morale de le faire et qu'il est dans l'intérêt de notre pays de mettre un terme au terrorisme et à la production d'armes de destruction massive.

En terminant, je reviens sur le fait que, pour avoir un sens, le présent débat devrait se terminer par la mise aux voix d'une motion proposant la ligne de conduite à suivre. Étant donné que le gouvernement n'a pas présenté pareille motion, je voudrais demander le consentement unanime de la Chambre pour que nous revenions aux initiatives ministérielles et que la Chambre continue de siéger au-delà du moment habituel de l'ajournement quotidien pour prendre en considération une motion modifiable pouvant faire l'objet d'un vote ainsi libellée:

    Que la Chambre appuie les interventions diplomatiques et, au besoin, militaires de nos alliés en vue de mettre un terme au terrorisme et à la production d'armes de destruction massive par Saddam Hussein.

Le Président: Un député demande le consentement unanime pour présenter une motion. Y a-t-il consentement unanime pour qu'il la présente?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Il n'a pas le consentement de la Chambre.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, il est toujours difficile d'intervenir dans le cadre d'un débat sur l'opportunité de participer à un conflit armé. On aimerait tous ne pas en être rendus là.

L'atteinte de la paix par le processus diplomatique doit toujours être l'objectif de tous. D'ailleurs, les Québécois et les Canadiens peuvent être fiers de leur contribution historique à cet égard. La tradition canadienne a toujours été de tenter de trouver des solutions pacifiques aux conflits internationaux. L'approche canadienne a toujours été de favoriser le règlement des crises par des moyens diplomatiques.

J'en veux pour preuve, notamment, les interventions de M. Lester B. Pearson dans la crise de Suez, qui lui a d'ailleurs valu le prix Nobel de la paix, et les nombreuses missions de paix de l'armée canadienne depuis 1990, en Bosnie, en Haïti, et la présence canadienne au Moyen-Orient, en Égypte et à Chypre.

La solution ne semble malheureusement pas si évidente et facile dans le cas de l'Irak. Une guerre pourrait poindre à l'horizon. Hier, le président américain s'est entretenu avec le premier ministre afin de demander l'appui du Canada dans son opération militaire contre l'Irak. Un porte-parole de la Maison-Blanche a même affirmé qu'il y a entente sur le fait que le Canada et les États-Unis devraient agir de concert si le recours à la force devenait nécessaire.

Ici, à Ottawa, un porte-parole du ministère de la Défense indiquait que l'armée canadienne se préparait en prévision de son implication possible en vue de soutenir et d'apporter un apport logistique aux forces américaines.

On se souviendra qu'à la suite de la guerre du Golfe, en 1991, le Conseil de sécurité des Nations unies a imposé à l'Irak la destruction de toutes ses armes chimiques, bactériologiques et, si elles existent, nucléaires. La communauté internationale est en faveur évidemment du respect des résolutions de l'ONU imposées à l'Irak, notamment la Résolution 687 eu égard à l'élimination de toutes ses armes de destruction massive.

Selon nous, l'Irak, avec Saddam Hussein à sa tête, constitue toujours une menace potentielle pour la sécurité mondiale, surtout si on lui laisse les capacités de fabriquer ou de développer des armes chimiques ou bactériologiques. Le refus de l'Irak de permettre aux inspecteurs de l'ONU de faire leur travail menace donc la sécurité internationale.

 

. 1900 + -

La communauté internationale, il va sans dire, est à bout de patience devant le manque de collaboration de l'Irak. Les Américains et les Britanniques pourraient donc s'apprêter à agir militairement contre l'Irak.

La question que les parlementaires québécois et canadiens de cette Chambre doivent se poser n'est donc pas de savoir si l'on appuie ou non les résolutions de l'ONU ou si l'on condamne l'Irak ou non. La question est bien plutôt de savoir comment faire respecter les résolutions de l'ONU, comment mettre fin à ce danger qui menace tout le Moyen-Orient, sinon toute la planète.

Pour solutionner la crise, le Bloc privilégie toujours une solution diplomatique. Nous sommes de ceux et celles qui croient que la voie diplomatique n'a pas été épuisée. De tels efforts diplomatiques sont présentement toujours privilégiés, notamment par des alliés telles la France, la Belgique, l'Italie, et également la Russie.

Tous les acteurs de la communauté internationale souhaitent une résolution diplomatique de la présente crise. Le Canada doit intervenir, non seulement aux Nations unies, mais également à l'OTAN, et également à l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.

Pour y arriver, il faudrait que le gouvernement de Saddam Hussein accepte cependant que les inspecteurs de l'ONU chargés du désarmement de l'Irak aient accès sans restriction à la soixantaine de sites dits sensibles qui sont actuellement interdits d'accès par Bagdad.

Si les efforts diplomatiques en cours avec l'Irak devaient avorter, pour nous, du Bloc québécois, le Canada devrait insister pour que la frappe militaire contre l'Irak soit autorisée par le Conseil de sécurité des Nations unies.

Étant donné que c'est par des résolutions du Conseil de sécurité que l'ONU mène ses missions d'inspection et de surveillance en Irak, si une solution diplomatique est hors d'atteinte pour régler la crise, ce devrait être également par le biais de cette même instance qu'il serait souhaitable qu'une action militaire soit autorisée.

Avant toute intervention militaire en Irak, nous, du Bloc québécois, croyons qu'il devrait y avoir un débat devant le Conseil de sécurité des Nations unies. Le processus employé par le Conseil de sécurité de l'ONU afin de traiter des questions relatives à la paix et à la sécurité est habituellement en deux temps.

Premièrement, si la paix internationale est menacée, le Conseil de sécurité de l'ONU peut décréter des sanctions économiques que tous les membres sont tenus d'appliquer. Tel est le sens de l'embargo contre l'Irak, et la levée des sanctions contre l'Irak est conditionnelle à la destruction inconditionnelle de toutes ses armes chimiques.

Deuxièmement, si ces sanctions ne suffisent pas, le Conseil peut décider d'une action militaire, comme il l'a fait à deux reprises, soit en 1950, lors de la guerre de Corée, ou en 1991, lors de la guerre du golfe Persique.

C'est donc par le biais de résolutions du Conseil de sécurité que toutes les actions contre l'Irak ont été prises. Nous, du Bloc, sommes d'avis que l'on devrait agir de la même manière aujourd'hui, parce qu'il importe que le plus grand nombre de pays se prononce et appuie toute intervention, et plus particulièrement, toute intervention militaire. Le poids de cet appui est un poids moral incontestable. C'est la seule façon d'impliquer également les pays du Moyen-Orient, et surtout les pays arabes.

Pensons à l'importance de l'appui de la Russie. Le président russe, Boris Eltsine, a servi deux sérieux avertissements, la semaine dernière, à l'effet qu'une attaque américaine pourrait déclencher une guerre mondiale. Encore ce matin, le président Eltsine a réitéré son appui à une solution diplomatique de la crise irakienne.

L'offensive militaire américaine hors du cadre de l'ONU pourrait également attirer un fort courant de sympathie en faveur de l'Irak au sein du monde arabe. Ce n'est certes pas le résultat que nous souhaitons et que nous recherchons. Il importe donc de s'assurer que le processus diplomatique suive son cours et que le Conseil de sécurité débatte de la question et soit saisi de la proposition de toute intervention militaire que nous ne rejetons pas, de notre côté, a priori.

Le président américain, Bill Clinton, a demandé hier au premier ministre une participation canadienne dans le cadre de l'opération militaire contre l'Irak qui se limiterait au domaine du transport et des équipes de recherche et de sauvetage. Les États-Unis n'auraient pas demandé la participation de soldats ni d'avions de combat, à ce que l'on sache.

 

. 1905 + -

Une participation militaire canadienne de type offensif semble pour l'instant hors de question. Il n'en demeure pas moins que c'est une participation à une intervention armée.

Dans tout le débat sur la crise, le Canada n'a pas vraisemblablement pris le leadership auquel on s'attendait. Le Canada a plutôt opté pour l'attentisme. Les libéraux ne respectent pas le rôle historique que jouait le Canada au niveau international, j'en parlais précédemment, du temps de M. Lester B. Pearson, que joue encore le Canada et qu'a joué le Canada plus récemment par l'initiative du ministre des Affaires étrangères au sujet du traité sur les mines antipersonnel.

Le Canada aurait pu consulter ses alliés de l'Europe au sein de l'Organisation pour la sécurité et la coopération de l'Europe ainsi que de l'OTAN en vue d'explorer les pistes de solution diplomatique. Le gouvernement canadien a plutôt choisi d'attendre d'être sollicité par les Américains.

Les libéraux, me semble-t-il, doivent maintenir la tradition qu'avait établie et renforcée Pearson et qui a inspiré celle, plus récemment, du ministre des Affaires étrangères. Le premier ministre nous a indiqué aujourd'hui qu'il désirait nous consulter avant de dévoiler la position du Canada dans ce dossier.

C'est là une opération et des débats que nous avons eus au cours des dernières années sur la question d'Haïti, sur la question de la Bosnie, sur la question de l'utilisation des missiles Cruise sur le territoire canadien. Je crois que ces initiatives permettent effectivement à l'ensemble des parlementaires de participer au débat et d'apporter leurs éléments de solution, leurs suggestions au gouvernement, afin que celui-ci puisse prendre la position la plus éclairée.

Il est normal que le premier ministre, dans ce cas-ci, désire nous consulter, mais plus important, nous devrions pouvoir voter lorsque le gouvernement aura pris position. En cela, je rappelle ce qui s'est passé en novembre 1990 et en janvier 1991, toujours au sujet de l'Irak quand, à deux reprises ici en cette Chambre—et je me souviens que le Parti libéral a fortement insisté, à l'époque, afin de pouvoir procéder à un vote pour que tous les parlementaires puissent s'exprimer et que le gouvernement tienne compte d'un vote pris par l'ensemble des parlementaires de cette Chambre avant que toute intervention armée soit déclenchée.

Il me semble que les arguments qui valaient en novembre 1990 et en janvier 1991 sont toujours de mise aujourd'hui, ont toujours une même valeur, une valeur morale qui éclairera la position du Canada auprès de ses alliés.

La Chambre devra donc, selon nous, être de nouveau consultée et tenir un vote formel sur la position, et cela, avant que la guerre ne débute, si telle était malheureusement la seule issue, et je pense que tout le monde partage mon avis à cet égard.

Cette consultation d'aujourd'hui, pour le Bloc québécois, n'est donc qu'une première étape dans le processus qui établira définitivement la position d'une participation du Canada à une action contre le régime de Saddam Hussein.

En résumé, il faut privilégier la voie diplomatique, consulter nos alliés, proposer des éléments de solution à nos alliés, en saisir le Conseil de sécurité des Nations unies et, si une intervention militaire s'avère nécessaire, il serait éminemment souhaitable que celle-ci se déroule sous l'égide des Nations unies.

[Traduction]

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, la question de la crise militaire et humanitaire qui perdure en Irak mérite d'être examinée soigneusement par tous les parlementaires et la population canadienne dans son ensemble. Disons-le clairement, les Canadiens sont un peuple fier qui s'est distingué dans le passé en jouant un rôle de chef de file dans la recherche de solutions pacifiques aux problèmes mondiaux.

D'entrée de jeu, je dirai que le gouvernement canadien a le devoir de veiller à ce que ses politiques soient conformes au statut de pays indépendant, souverain dont jouit le Canada. À cet égard, beaucoup de Canadiens se sont inquiétés d'entendre la secrétaire d'État américain dire aujourd'hui que le Canada était en faveur d'une intervention militaire massive en Irak.

 

. 1910 + -

En deuxième lieu, le gouvernement du Canada a la responsabilité d'adopter une politique susceptible d'obtenir un maximum d'appuis au sein de la communauté internationale.

En troisième lieu, et c'est peut-être l'élément le plus important, le gouvernement a la responsabilité d'adopter une politique qui réussira vraiment à trouver une solution au problème qui assaille la communauté internationale et la population de l'Irak aujourd'hui.

Le NPD est d'avis qu'une intervention militaire massive en Irak, telle que proposée par les États-Unis, serait insupportable à bien des égards. D'abord, une telle intervention ne recevra vraisemblablement pas de larges appuis à l'échelle internationale. Elle se traduira par la mort certaine ou la mutilation d'un grand nombre de civils innocents.

Avant d'expliquer les raisons pour lesquelles nous estimons que le Canada devrait refuser de participer à un bombardement militaire massif, je voudrais que deux choses soient bien claires. D'abord, le NPD reconnaît pleinement que Saddam Hussein est un dictateur brutal et un violateur des droits de la personne. Qu'il n'y ait aucun doute à cet égard. En second lieu, le NPD a toujours fermement et publiquement appuyé, sans équivoque, les résolutions des Nations Unies interdisant à l'Irak d'acheter, de fabriquer et d'utiliser des armes chimiques et biologiques. Le fait qu'un pays, quel qu'il soit, obtienne ou déploie de telles armes de destruction massive est déplorable. C'est inacceptable. C'est vraiment répugnant sur le plan moral.

Selon nous, et je crois que nous avons intérêt à ne pas l'oublier, la fabrication, la prolifération ou l'utilisation d'armes nucléaires est également mauvaise et inacceptable. Nous ne devons pas perdre de vue la menace qu'elles représentent pour la sécurité mondiale et le défi qu'elles posent à l'humanité.

Il y a cinq raisons, que je voudrais expliquer, pour lesquelles le Nouveau Parti démocratique s'oppose à l'intervention militaire massive proposée par les États-Unis. Il faut bien comprendre que la secrétaire d'État américaine a parlé d'une intervention substantielle, soutenue et massive. C'est le plan d'action établi.

Premièrement, tous les moyens diplomatiques nécessaires à la résolution pacifique de la crise n'ont pas été épuisés. Le fait de qualifier le dirigeant iraquien de tyran et de despote, aussi juste et gratifiant que cela puisse être, n'aide en rien à trouver une solution véritable à la crise. On pourrait même affirmer que cela nous éloigne de notre objectif et de notre obligation.

Quelle est notre obligation? Nous devons trouver un moyen d'amener l'Irak à autoriser l'inspection de ses armements par les Nations Unies et la destruction de ses armes chimiques et biologiques mortelles, mais il nous incombe également d'alléger les souffrances de centaines de milliers de civils iraquiens qui sont victimes d'une campagne prolongée de sanctions économiques.

N'oublions pas que des centaines de milliers de civils iraquiens sont déjà morts. L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture estime qu'un enfant meurt tous les dix minutes en Irak à cause de ces sanctions.

Je crois que le monde attend du Canada qu'il fasse preuve du même leadership que celui qu'il a démontré au sujet des mines terrestres. Nous devons nous rappeler, avec beaucoup de fierté, que le Canada a pris l'initiative et qu'il a relevé le défi. Notre pays a fait preuve de leadership, non pas à l'invitation des États-Unis d'Amérique, mais à leur encontre pour obtenir la signature d'un traité d'interdiction des mines terrestres.

J'ai été très heureuse d'offrir à la Chambre mes félicitations au gouvernement canadien lorsqu'il a pris cette initiative. Le monde attend du Canada qu'il fasse preuve encore une fois de leadership. Ne restons pas dans l'ombre, mais prenons l'initiative une fois de plus. Les Canadiens n'en attendent pas moins de nous.

 

. 1915 + -

Pour cela, nous devons nous montrer nettement plus agressifs, nous devons poursuivre une politique voulant qu'en échange de concessions de l'Irak afin de permettre l'inspection et la destruction des armes, soient établis des objectifs et un calendrier raisonnables et applicables de relâchement, voire d'élimination des sanctions.

La proposition des Russes qui permettrait l'inspection de certains sites présidentiels dont l'accès est actuellement restreint, vaut la peine d'être examinée avec soin.

En échange de preuves de bonne volonté, de progrès concrets, l'Irak devrait se voir autoriser à vendre de plus grandes quantités de pétrole afin d'obtenir les vivres et les fournitures médicales nécessaires pour la survie même des hommes, femmes et enfants de ce pays. N'oublions pas que, durant les années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, notre objectif était de limiter la taille et les capacités des forces armées allemandes et japonaises, et non pas de pousser délibérément les Allemands et les Japonais à la famine et à la maladie.

Deuxièmement, je pense que les Canadiens préfèrent vraiment les solutions multilatérales à ces crises internationales.

[Français]

Il est faux de prétendre que les États-Unis sont à la tête d'une large coalition internationale. La France et la Russie, qui siègent au Conseil de sécurité des Nations unies, s'opposent à l'intervention militaire proposée par les Américains. Les 22 membres de la Ligue arabe rejettent également cette proposition.

La grande majorité des membres de la communauté internationale sont contre une telle action. Pourquoi? Parce qu'une opération militaire dans la région pourrait avoir des conséquences inattendues et indésirables.

L'offensive militaire pilotée par les États-Unis démontre l'importance d'avoir une armée permanente des Nations unies, une armée vraiment multilatérale et indépendante.

[Traduction]

Troisièmement, ce n'est probablement pas au moyen d'une offensive militaire que l'on atteindra les objectifs politiques ou stratégiques visés. Il convient de noter que même le général Norman Schwarzkopf, qui a dirigé les troupes américaines lors de la guerre du Golfe, a émis de sérieux doutes quant à la sagesse de lancer une telle attaque aérienne.

Les raids lancés par les Américains ont en fait renforcé la position de Saddam Hussein au pouvoir, uni son peuple et entravé son programme d'armement seulement sur une base temporaire. Nous sommes donc extrêmement sceptiques quant à l'utilité à long terme d'une telle intervention militaire, surtout quand nous pesons les risques potentiels que pose un regain d'instabilité dans la région.

Quatrièmement, les soi-disant frappes de précision et les dégâts limités qu'elles entraînent pour la population civile sont du jargon militaire qui n'a aucun sens. Ces euphémismes ne font que cacher la très grande possibilité que beaucoup de vies soient perdues et que des milliers de civils soient blessés.

Je voudrais vous lire brièvement un extrait d'une lettre qui est parvenue à mon bureau aujourd'hui. On y dit que les bombes intelligentes ne seront pas plus intelligentes cette fois-ci. Il y a ceux qui appuient une intervention militaire plutôt que des initiatives diplomatiques.

S'il est vrai que Saddam Hussein accumule et cache des armes chimiques et biologiques, comme cela semble être le cas, il est vraiment terrifiant d'imaginer les répercussions que le fait de lancer des missiles contre ces sites pourraient avoir. La dispersion de produits chimiques mortels dans la région avoisinante, qui s'ensuivrait, est sûrement un prix trop élevé à payer sur le plan humain pour obtenir des résultats très discutables.

Cinquièmement et enfin, le Canada devrait chercher à adopter une position sur cette question, qui contribue à la réduction des tensions internationales au lieu de les attiser. Nous devrions certainement essayer de trouver des solutions pacifiques à de telles crises internationales. Le Canada devrait établir une position indépendante de celle de nos voisins du Sud, comme il l'a fait si courageusement dans le cas des mines terrestres.

 

. 1920 + -

La Chambre peut-elle me dire si cela dépasse notre imagination de trouver une solution à cette impasse qui évite un très grand nombre de pertes humaines et la destruction d'infrastructures iraquiennes essentielles? Je demande aux députés de réfléchir aux 600 000 enfants iraquiens qui, selon les Nations Unies, sont morts depuis l'imposition de sanctions, il y a cinq ans.

On lit aujourd'hui dans les journaux que l'objectif américain est de détruire les centrales électriques qui alimentent les Irakuiens en électricité. Je demande à mes collègues de penser aux conséquences qu'un tel événement a eu récemment pour un grand nombre de nos électeurs. Voulons-nous vraiment infliger ce genre de calamité à une population civile qui a déjà connu tellement de souffrances et de tourments, attribuables tant aux politiques de son gouvernement qu'au régime de sanctions qu'on leur impose?

En conclusion, les sages ont raison de conseiller la prudence et une réflexion approfondie. Ce soir, je supplie le premier ministre d'intensifier les efforts pour parvenir à une solution diplomatique et pour trouver une solution pacifique à cette terrible impasse. Sans aucun doute, le Canada doit se ranger du côté de ceux qui cherchent à résoudre cette crise par la voie de la négociation et du bon sens. Il n'y a rien à gagner à long terme avec une stratégie de provocations et de menaces.

Je termine en citant les paroles d'un autre Canadien qui m'a écrit aujourd'hui: «Les dernières années du millénaire ne devraient pas être témoins d'un autre conflit armé majeur qui viendrait encore alourdir le sinistre bilan de notre siècle. En tant que puissance intermédiaire respectée, le Canada devrait s'en tenir à son rôle de maintien de la paix, déjà largement reconnu dans le monde.»

[Français]

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'anticipation que nous participons enfin à un débat, ce soir, au Parlement canadien, sur une décision qui est très solennelle dans la vie d'un pays, une décision qui pèse très lourd sur les épaules de ceux et celles qui, directement ou indirectement, ont à décider de la vie d'autres personnes.

Nous nous sommes beaucoup préoccupés, nous, du Parti progressiste-conservateur, de l'évolution de ce conflit, d'autant plus qu'il y a environ une semaine et demie, le président américain avait une conversation avec le premier ministre du Canada. À ce moment-là, j'ai interpellé le gouvernement, dès l'ouverture de la session parlementaire, dans le but de permettre à ce Parlement et, par le biais du Parlement, au peuple canadien, de participer pleinement au débat et à la décision que nous devons prendre sur la participation canadienne à ce conflit potentiel.

J'ai pris la peine, il y a plus d'une semaine, d'écrire au premier ministre du Canada pour lui demander de faire une déclaration à la Chambre des communes afin de nous dire, à nous, parlementaires, et au peuple canadien, quelle était la position de son gouvernement et de partager avec nous l'information disponible, non seulement pour son gouvernement, mais d'élaborer aussi sur la position de nos alliés, incluant, pour être très précis, la déclaration de la ministre des Affaires étrangères des États-Unis, Mme Madeleine Albright qui, depuis plusieurs jours, disait et répétait à chaque occasion, et je cite: «Time is running out».

 

. 1925 + -

Ceux et celles qui sont familiers avec le langage diplomatique et les moyens utilisés par les gouvernements ne pouvaient pas faire autrement que de s'interroger sur la signification de ces mots et chercher à en comprendre les conséquences.

J'ai donc pris la peine, non seulement d'écrire au premier ministre, mais également de lui téléphoner, ce dimanche, à la veille de l'ouverture de la session parlementaire, pour lui demander deux choses: une déclaration de son gouvernement à la Chambre des communes et une deuxième requête qui est consistante avec les recommandations d'un comité parlementaire, c'est-à-dire la mise sur pied d'un comité conjoint de la Chambre et du Sénat afin que nous puissions entendre, dans un contexte qui s'y prête, le ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Défense nationale et celui qui va diriger, sur le plan militaire, les troupes canadiennes, le chef d'état-major. Malheureusement, on a frappé un mur; on a eu un refus catégorique.

Aujourd'hui, je le dis à regret, on est placés devant une situation que je ne peux décrire autrement que d'assez absurde, où le gouvernement nous dit qu'il ne peut prendre de position tant qu'il n'a pas entendu le Parlement canadien.

Devons-nous en conclure que le gouvernement du Canada n'a donc pas eu de position sur ce conflit-là et n'a toujours pas de position jusqu'à ce jour? Avons-nous atteint un tel point d'absurdité que le gouvernement élu par la population canadienne, qui a joué traditionnellement un rôle important dans ces affaires, n'a donc aucune position sur cette affaire jusqu'à ce jour? Si c'est le cas, on est tombés de haut. On est tombés pas mal bas en termes de notre situation sur le plan international.

[Traduction]

Le Parti progressiste conservateur du Canada préférerait un solution pacifique et diplomatique à cette crise internationale. Il n'est pas inutile de le répéter aujourd'hui. Il importe au contraire de le rappeler. Nous devrions en faire autant chaque fois que nous le jugeons nécessaire, que ce soit à titre de Canadiens ou à titre de citoyens de cette planète.

Si cela se révèle impossible à cause du refus de Saddam Hussein de permettre à l'ONU de remplir sa mission, nous croyons que le Canada doit appuyer pleinement toute action militaire entreprise, sous les auspices des Nations Unies, par nos alliés traditionnels en vue de détruire les armes irakiennes capables de tuer des millions de personnes. Telle est notre position.

Le président des États-Unis s'est entretenu avec le premier ministre il y a plus d'une semaine et demie. J'ai alors demandé au premier ministre de faire une déclaration exhaustive à la Chambre des communes, d'expliquer la position de son gouvernement, de nous faire part des informations qu'il avait à sa disposition, de faire encore davantage en nous aidant à interpréter la position des autres pays qui jouent un rôle majeur dans l'affaire.

Ainsi, Madeleine Albright, secrétaire d'État américaine, a répété à plusieurs reprises que le temps presse. Pour toute personne un tant soit peu au fait de la diplomatie et des moyens dont disposent les pays, il s'agissait là d'une déclaration très significative. Mais personne ne nous a dit ce qu'il fallait en déduire. Le gouvernement ne nous a pas encore expliqué exactement ce que les Américains entendaient par là.

Le gouvernement a tardé jusqu'à aujourd'hui pour rendre publique sa position. C'est le comble de l'absurdité. Si j'ai bien compris, le gouvernement a dit vouloir consulter la Chambre des communes avant d'adopter une position. Est-ce à dire que, face à ce conflit, le Canada n'avait pas de position jusqu'à ce jour? Au chapitre des affaires internationales, c'est donc un triste jour pour le Canada que de découvrir que, alors que nous avons su jouer un rôle essentiel en 1991 lorsqu'il s'est agi de convaincre le gouvernement américain d'oeuvrer sous les ordres de l'ONU, nous avons renoncé à toute tenteative de faire jouer notre influence cette fois-ci.

 

. 1930 + -

Il y a plus d'une semaine, j'ai moi-même demandé au premier ministre, par lettre et par téléphone, de faire une déclaration à la Chambre et de constituer un comité parlementaire pour entendre le ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Défense nationale et le chef d'état-major. Nous avons fait cette recommandation parce qu'elle était conforme au rapport du comité déposé en 1994, et qui avait été approuvé par la majorité des libéraux membres du comité, qui précise très clairement que, dans de telles circonstances, le ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Défense nationale et le chef d'état-major devraient faire rapport à un comité permanent. Cela n'a rien de nouveau. Ce rapport a été déposé en 1994. Le gouvernement a fait un pied de nez au Parlement et à sa propre majorité au comité, choisissant une fois de plus de revenir sur sa promesse.

Ce débat soulève de nombreuses questions. Nous devons nous demander quels sont les enjeux. Quelle est la meilleure façon de faire face à cette dangereuse situation? Quelles forces et quelles installations seront nécessaires au cas d'une intervention militaire? Quel serait l'objectif d'une attaque et combien de temps faudrait-il pour l'atteindre? L'appui du Parlement est-il nécessaire?

J'aimerais profiter de cette occasion pour répondre à ces questions. D'abord, quels sont les enjeux. Ce qui est en jeu, c'est un impératif moral, la paix et la sécurité; la paix et la sécurité du monde entier, et non seulement de ceux qui vivent dans des pays paisibles comme le Canada et qui ont le privilège d'être citoyens de ce pays, mais également, comme l'ont dit les autres chefs à la Chambre aujourd'hui, la paix et la sécurité des autres êtres humains avec lesquels nous partageons notre planète.

Quelle est la meilleure façon de régler cette situation? Comme je l'ai dit clairement, la position du Parti progressiste-conservateur du Canada, c'est que la démocratie doit évidemment être la première option. Toutefois, si la diplomatie échoue, le recours à la force devient alors justifié.

À notre avis, la démocratie échoue si Saddam Hussein n'accepte qu'un nombre limité d'emplacements soient inspectés. La résolution 687 du Conseil de sécurité établit les conditions que l'Irak doit respecter dans le cadre du cessez-le-feu de la guerre du Golf. Il est clair dans cette résolution que le cessez-le-feu est conditionnel à une inspection, sanctionnée par l'ONU, des emplacements d'armes de l'Irak.

Je veux citer le paragraphe 8 de la résolution 687 parce qu'il est très clair à cet égard. Il est ainsi libellé:

      ...décide que l'Irak doit accepter inconditionnellement que soient détruits, enlevés ou neutralisés, sous supervision internationale, toutes les armes chimiques et biologiques et tous les stocks d'agents, ainsi que tous les sous-systèmes et composants et toutes les installations de recherche-développement, d'appui et de production dans ces domaines.

La résolution est très détaillée, mais elle est très claire.

Il est donc très clair, d'après les conditions du cessez-le-feu, que, si l'Irak continue de violer les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies concernant l'inspection de ses emplacements d'armes, le recours à la force contre l'Irak pour détruire ses armes biologiques, chimiques et nucléaires est justifié.

Toutefois, on ne peut savoir clairement, d'après les réponses que le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères ont données à la Chambre des communes aujourd'hui, quels efforts diplomatiques ces derniers ont entrepris pour résoudre le conflit qui existe actuellement entre les membres du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Le ministre des Affaires étrangères a fait un aveu très troublant aujourd'hui à la Chambre des communes lorsqu'on lui a demandé si nous devrions ou non renouveler nos efforts du côté de l'ONU. Il a été obligé d'admettre à la Chambre aujourd'hui que, si nous faisions cela, nous risquions de créer une division au sein même du Conseil du sécurité de l'ONU.

Prétendre que ce problème n'existe pas ne le fera pas disparaître. C'est un aveu très grave de la part du ministre, et c'est quelque chose que la Chambre et les Canadiens doivent savoir avant de prendre une décision sur l'avenir des hommes et des femmes qui seront impliqués dans ce conflit.

Quelle serait la position du Canada si la Russie et la Chine continuaient d'être d'avis qu'il ne devrait pas y avoir d'intervention? Appuierons-nous nos alliés traditionnels dans une action militaire ou y serons-nous opposés?

Une autre question est quelles forces sont nécessaires et quelles forces le Canada peut-il fournir. On ne sait pas au juste pour le moment quelles demandes sont faites. À l'heure actuelle, seuls la Grande-Bretagne et les États-Unis se sont engagés à une participation militaire, tandis que l'Allemagne a promis d'offrir tout son soutien politique et l'utilisation de bases aériennes.

Bien sûr, le monde ne peut être tenu en otage par Saddam Hussein et son arsenal d'armes biologiques.

 

. 1935 + -

Cependant, tous les pays en cause doivent savoir clairement quels sont les objectifs d'une frappe militaire en Irak et les résultats que donnera cette frappe. Il est temps d'être clair à cet égard.

Certains pensent peut-être que cela n'est pas important. L'histoire abonde d'exemples de pays qui se sont engagés dans des conflits qu'ils croyaient temporaires, régionaux, limités dans le temps et l'espace, mais dont ils ne pouvaient plus se sortir. Nul besoin de rappeler aux députés l'expérience qu'a été le Vietnam pour les Américains. Pourtant, certains semblent déjà avoir oublié. Pourquoi? Parce qu'il faut établir clairement dès le départ l'objectif que nous poursuivons. Nous n'avons pas encore entendu exactement en quoi il consiste. Le comité mixte contribuerait à définir et à clarifier cette position. J'espère toujours que le gouvernement entendra raison et qu'il créera ce comité mixte.

Qu'offrirons-nous sur le plan des effectifs? Le gouvernement a réduit les forces du Canada d'environ 25 % depuis 1994. Ce n'est pas une coïncidence si le président américain n'en demande pas plus. Il sait parfaitement bien que le Canada ne peut offrir plus que ce qu'il demande. Dans quel état est le matériel militaire du Canada? Ce sont toutes des questions que nous devons poser.

Quel objectif poursuivrons-nous? Je vois deux objectifs évidents. Il faudrait détruire les dispositifs de défense aérienne de l'Irak et de nombreuses armes que nous avons identifiées.

Nous devons savoir quelle position le gouvernement adoptera si des bombardements militaires ont lieu et s'étendent à un vaste secteur. Ce sont toutes des questions auxquelles il faut répondre. Nous savons également qu'il ne reste plus beaucoup de temps.

Je veux savoir si oui ou non le Parlement du Canada participera à ce débat. En 1991, il y a eu 71 heures de débats et trois débats à la Chambre des communes. Nous avons tiré de grandes leçons de l'expérience de 1991.

Le ministre des Affaires étrangères essaie de m'interpeller. C'est une heureuse coïncidence. Je vais lui citer les débats de 1990. Un député de l'époque disait: «Alors, si nous commençons tout-à-coup à déployer des troupes et à leur donner des règles d'engagement ou un mandat qui excèdent la définition claire donnée par l'ONU, nous risquons également d'enlever à cet organisme l'occasion de montrer que c'est là que doivent se prendre les décisions.» C'est ce que disait le député qui est maintenant ministre des Affaires étrangères. C'est ce qu'il pensait à l'époque.

Voici une autre citation. Un député disait: «Est-ce qu'une nation, quelle que soit sa taille, a le droit de décider quand elle peut faire usage de la force à des fins d'invasion? [...] cette décision ne devrait pas être unilatérale.» C'était le même ministre, comme en témoigne le hansard du 24 septembre 1990. Je regrette qu'il ne soit pas aussi communicatif aujourd'hui.

C'est un moment très important dans la vie de notre législature et les Canadiens méritent des réponses à de nombreuses questions. Notre parti va continuer à demander que l'on nous fournisse autant d'information que possible.

[Français]

Nous allons continuer à presser le gouvernement afin qu'il réponde aux questions et qu'on cesse cette espèce d'absurdités que j'ai de la difficulté à m'expliquer. Je ne comprends pas ce que ce gouvernement a à cacher.

Pourquoi ne pas mettre sur pied le comité? Pourquoi ne pas faire une déclaration à la Chambre des communes? Ce n'est pas comme si ces enjeux-là étaient partisans, ils ne le sont pas. On vient de vivre des moments de crise. Quand arrivent des moments de crise, que ce soit pour le chef du Bloc québécois, le chef du Parti réformiste, ou le chef du Nouveau Parti démocratique, ce ne sont pas des débats partisans. Pourtant, le gouvernement s'enferme dans des espèces d'ornières qui, franchement, sont difficiles à expliquer.

[Traduction]

Étant donné les conditions extraordinaires dans lesquelles nous sommes, et étant donné que le gouvernement n'a pas été très communicatif, je voudrais terminer mes remarques en demandant le consentement unanime pour pouvoir présenter la motion suivante:

    Que les délibérations soient suspendues immédiatement pour permettre au premier ministre de répondre aux questions des députés de tous les partis pendant les trente prochaines minutes.

 

. 1940 + -

Le Président: Nous avons une autre motion sollicitant le consentement unanime face à une mesure particulière. Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour que la motion soit présentée?

Des voix: Non.

Le Président: Il n'a pas consentement unanime de la Chambre.> Reprenons le débat.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais d'abord dire au nom du gouvernement combien nous avons apprécié les commentaires qui ont été présentés par les chefs des divers partis, à l'exception du dernier orateur, qui à mon avis ont tous traité la question de façon franche, essayant de comprendre les points qui sont réellement en cause, au lieu de s'engager dans le genre de basse politique partisane qui nous a été présentée au cours des 20 dernières minutes.

Il est malheureux de constater qu'un parti qui a autrefois eu tant de poids en est rendu à s'apitoyer sur le sort que les Canadiens leur ont infligé au cours des deux dernières élections et qu'il n'est plus prêt à traiter sérieusement des questions à l'étude.

Laissez-moi souligner un simple fait que le chef de l'opposition, qui semble avoir été frappé d'amnésie soudaine, a oublié. Lorsqu'il faisait partie du Cabinet, le premier ministre précédent et son gouvernement ont pris la décision de déployer des troupes et n'a pas pensé à demander l'opinion du Parlement avant 12 semaines. Maintenant, tout d'un coup, il se présente à nous avec un air indigné, des larmes de crocodile à l'oeil pour nous dire: «Oh mon Dieu, nous devons débattre de cette question ce soir et ça vous a pris toute une journée pour vous y mettre.»

C'est là une grande marque d'hypocrisie de la part d'un député qui n'a aucun intérêt et aucun engagement à faire participer le Parlement. Voilà le problème.

Même pendant ces événements, alors que les autres partis d'opposition ont eu le bon sens de demander des séances d'information et les ont obtenues, les députés conservateurs n'ont pas réussi à en faire autant. Nous les avons appelés pour leur demander ce qu'ils étaient prêts à faire. Ils ne nous ont jamais rappelés.

Quant à la question d'un comité mixte, je tiens à rappeler au député, qui ne fréquente pas le Parlement très assidûment, que nous avons des comités permanents des affaires étrangères et de la défense qui se réunissent régulièrement. Ils ont eux aussi demandé des séances d'information, qu'ils obtiendront. Il serait utile que le député soit parmi nous un peu plus souvent pour savoir ce qui se passe. Il ne se tromperait pas sur les faits.

Certaines des questions sont légitimes et parfaitement de mise. Disons tout d'abord un mot de la position fondamentale du Canada en cette matière. Il ne s'agit pas simplement d'emboîter le pas aux États-Unis, ni, je le dit au chef du Nouveau Parti démocratique, de nous rallier à l'opinion du leader travailliste du Royaume-Uni, qui a demandé la coopération du Canada. Il s'agit de savoir si nous, qui sommes un pays indépendant, pouvons faire un choix en fonction de notre intérêt national fondamental.

Je dirais qu'il est dans notre intérêt national fondamental, comme les députés l'ont expliqué à la Chambre, d'affirmer clairement que Saddam Hussein et le gouvernement iraquien, par leur refus de respecter la résolution sur le cessez-le-feu et leur persistance à continuer de fabriquer et peut-être aussi de développer des armes de destruction de masse et à se doter d'armes biologiques, représentent un danger indéniable et imminent pour les Canadiens comme pour tous les autres habitants de la planète.

Nous devons donc trouver le moyen de barrer la route à Saddam Hussein. L'histoire nous a montré qu'il ne se laissait arrêter par aucune considération morale. Il ne tient pas compte des contraintes du monde civilisé normal.

J'ai passé dix jours en Irak à négocier la libération d'otages canadiens dans les années 80. C'est un endroit menaçant. Plus important, c'est un endroit où le gouvernement n'est pas moral.

En utilisant des armes biologiques et chimiques contre les Kurdes, contre son propre peuple, contre un minorité de son peuple, Saddam Hussein a montré à quel point il pouvait être dangereux. Lui laisser ces armes de destruction massive, c'est faire courir à tous un danger évident et immédiat. Nous devons intervenir. Plusieurs députés ont demandé pourquoi le Canada n'était pas plus diplomatique. Je puis dire que nous avons beaucoup fait au plan de la diplomatie.

 

. 1945 + -

Avant Noël, je suis allé dans presque tous les grands pays arabes du Moyen-Orient pour m'y entretenir, d'un côté, du processus de paix, et de l'autre, de la situation de l'Irak, et essayer de trouver des solutions, essayer par l'intermédiaire du monde arabe de jeter des ponts et de faire comprendre à l'Irak l'attitude à adopter.

Nous avons pris des mesures aux Nations Unies pour appuyer très clairement l'assouplissement de l'embargo économique. Nous avons appuyé l'intention du secrétaire général de hausser les limites de mise en oeuvre du programme du pétrole pour la paix de telle sorte que nous puissions fournir de l'argent, de l'aide et des ressources aux enfants de l'Irak et aux Irakuiens en général.

Le problème, c'est que Saddam Hussein ne veut pas jouer le jeu. Il ne reconnaît pas cela. Nous pourrions résoudre le problème diplomatique en dix secondes si Saddam Hussein respectait seulement ses obligations. C'est tout. Il a signé un document, il en a accepté les conditions et il pourrait détenir demain la solution définitive si seulement il respectait ses engagements, mais il ne veut pas le faire.

Depuis sept ans, on a assisté à un enchaînement de provocations, un refus de respecter ces conditions, jusqu'à ce que la Commission spéciale, non pas des États-Unis ni du Royaume-Uni, mais des Nations Unies elles-mêmes, précise par écrit que la capacité de Saddam Hussein de continuer à fabriquer des armes biologiques et chimiques l'inquiétait beaucoup. Si rien n'est fait, cette capacité se développera pleinement et non seulement il l'utilisera à ses propres fins, mais il la transmettra aux autres États terroristes et mal intentionnés.

Il vient donc un temps où une décision doit être prise. Même en ce moment, nous poursuivons nos efforts auprès des Nations Unies pour essayer d'obtenir que le Conseil de sécurité adopte une autre résolution qui permettrait tant la motivation des Irakuiens que l'assouplissement des sanctions.

Lorsque le chef conservateur se moque de l'idée que nous ne voulons pas accentuer ni exagérer le risque, je me demande dans quel monde à l'envers il vit? Je ne comprends pas de quoi il parle. Il veut que nous montrions sciemment qu'il y a une cassure. Il veut que le Canada prenne l'initiative de dire qu'il n'y a pas d'accord. Nous devrions travailler d'arrache-pied dans les jours qui viennent pour tâcher d'obtenir cette entente, travailler en collaboration avec les intéressés pour proposer au Conseil de sécurité le genre de résolution qui pourrait donner des résultats. C'est ce que je disais aujourd'hui. Tâchons de faire ce qui est pratique et utile.

Il y a une chose que la Chambre devrait prendre en considération. Cela revient à ce que le premier ministre a dit. Il s'agit de décisions difficiles à prendre. Le chef de l'opposition a dit la même chose. Cela ne sourit à personne. Il y a une chose que nous pourrions faire dans le cadre de l'initiative diplomatique qui peut s'imposer, c'est de faire preuve de solidarité, de montrer que nous sommes totalement résolus, chez les pays civilisés, à défendre des principes et des idéaux fondamentaux. C'est ainsi que nous devons agir.

Il nous faut faire savoir à Saddam Hussein que nous sommes prêts à prendre les mesures nécessaires pour protéger la vie des Canadiens, la vie des habitants du Moyen-Orient et celle des habitants du monde entier.

On a fait remarquer que nous avions pris l'initiative en ce qui a trait aux mines terrestres. C'est vrai, pour une raison fondamentale. Il s'agissait d'un système d'armement qui présentait clairement un danger pour la vie de civils innocents. Il n'y a aucune différence véritable en l'occurrence. Nous avons affaire à un individu ou à un gouvernement qui est en train de mettre au point et de produire des armes de destruction massive, du genre le plus diabolique, qui peuvent être déchaînées contre les habitants du monde. Nous devons donc prendre des mesures pour nous assurer qu'elles ne serviront pas.

Tout comme pour les mines terrestres, nous voulons éliminer les armes biologiques et les armes chimiques. Nous voulons que l'Irak respecte la convention qu'il a signée et nous voulons trouver un moyen de faire respecter dans le monde entier un principe fondamental selon lequel on ne doit pas se servir de pareilles armes contre des innocents. Voilà le dilemme auquel nous sommes confrontés.

Je suis certes parfaitement d'accord avec ceux qui sont intervenus jusqu'à présent et qui ont dit que nous devrions également tenir compte des répercussions que cette initiative pourrait avoir. Voilà pourquoi nous en discutons aujourd'hui à la Chambre. Ce n'est pas ici, comme l'a laissé entendre un député, que le Parlement se prononcera. Nous consultons la Chambre. Le chef de l'opposition le sait bien. Je l'invite à consulter les précédents. Il sait que, sur des dossiers comme celui de la Bosnie, nous avons eu des débats complets et des séances d'information au Comité permanent des affaires étrangères de la Chambre des communes et au Comité de la défense nationale. Nous avons tenu des débats à la Chambre.

Au bout du compte, cependant, c'est au gouvernement du Canada qu'il incombe de prendre la décision finale. Nous invitons les députés à discuter de la question à la Chambre, mais nous devrons en définitive prendre la décision. Le premier ministre l'a dit au cours de la période des questions d'aujourd'hui. Nous sommes ici, d'abord, pour savoir quels sont les points de vue des habitants du pays sur ce que doit être la décision, sur son sens général.

 

. 1950 + -

Nous pouvons certainement travailler de concert avec le Parlement de différentes façons, et nous l'avons fait dans le passé, mais nous ne pouvons abdiquer la responsabilité de prendre une décision, ainsi que le premier ministre l'a dit, décision sur laquelle le Cabinet se penchera demain.

Nous allons toutefois maintenir le dialogue et l'échange d'informations pour veiller à ce que le Parlement participe pleinement à la suite des événements.

Il ne faut pas présumer—j'ai été un peu ébranlé par les observations du chef de l'opposition durant la période des questions— que nous sommes à un doigt de la guerre. J'espère bien que non. Je pense même qu'il ne faut pas sombrer dans le chauvinisme dans ce cas.

Ce qu'il faut dire, c'est que nous voulons éviter la guerre à tout prix. Par ailleurs, nous devons veiller à ce que cette guerre ne soit pas déclenchée par l'utilisation d'armes chimiques ou biologiques. C'est pourquoi nous devons prendre position afin de prévenir une telle issue le plus efficacement possible.

Compte tenu de l'appui que nous avons obtenu jusqu'à maintenant, à l'exception du Parti conservateur, nous estimons qu'au moment de discuter de la question au Cabinet nous serons mieux au fait du point de vue des Canadiens et de ce qu'ils souhaitent que nous fassions.

Le Parlement est vraiment la tribune où ce genre de décision doit être examinée. Nous maintiendrons cet engagement.

À mon avis, quelle que soit la décision que prendront demain le premier ministre et le Cabinet en réponse à la demande dont ils sont saisis, nous disposerons encore de temps. Inutile de nous énerver en pensant que nous devons tout à coup nous précipiter aux barricades.

Nous sommes prêts à dire à Saddam Hussein que nous serons en mesure d'appuyer une intervention militaire si nous y sommes contraints parce qu'ils nous aura poussés jusqu'à l'extrême limite.

Entre-temps, je pense que la solidarité et l'unité dont feront preuve les pays occidentaux contribueront grandement à l'obtention d'une solution plus pacifique. Je peux me tromper. Je pourrais être forcé de dire que, malheureusement, cela n'a pas fonctionné parce que nous vivons dans un monde imparfait, habité par des êtres imparfaits. Nul n'est plus imparfait que Saddam Hussein dans ce genre de situation.

Consacrons donc notre attention et nos efforts à la recherche d'un consensus qui, nous l'espérons, résultera du débat parlementaire actuel, afin de permettre au Canada de continuer de jouer un rôle dans le règlement du conflit et d'assumer le leadership dont il est capable. Nous aimerions avoir un plus grand rôle de chef de file à jouer en faisant partie du Conseil de sécurité. Nous espérons que les parlementaires nous aideront à atteindre cet objectif l'automne prochain.

En attendant, nous ferons tout notre possible et nous ne ménagerons aucune ressource pour trouver une solution. Dans le cadre du débat de ce soir, il faut dire clairement au gouvernement iraquien et au président Saddam Hussein que nous appuyons les Nations Unies ainsi que les résolutions adoptées dès 1990, puis en 1991 et jusqu'en novembre dernier, résolutions stipulant que tout manquement par les Irakuiens aux engagements pris dans l'accord de cessez-le feu de 1991 constitue une menace à la sécurité et à la paix internationales.

À un moment, nous avons cherché un mandat que le chef des conservateurs a été heureux de me fournir. Je me réjouis qu'il l'ait fait. Cela m'a évité de le chercher. Cela vaut toujours. Le Conseil de sécurité a, jusqu'en novembre, adopté des résolutions disant que tout manquement aux accords conclus en 1991 constitue une menace flagrante à la paix et à la sécurité; par conséquent, le Conseil de sécurité et ses décisions des sept dernières années nous fournissent le mandat voulu.

Attendons de voir ce que le Conseil de sécurité fera cette semaine alors que le Royaume-Uni et d'autres pays comme le nôtre tenteront de trouver une solution pour renforcer cette position et pour donner aussi aux Irakuiens le genre d'encouragement dont ils ont besoin, encouragement qui pourrait prendre la forme d'une modification de l'embargo ou des sanctions, pour qu'on en arrive à une solution.

C'est peut-être la démarche diplomatique la plus équilibrée que l'on puisse adopter, celle qui consiste à brandir la carotte et le bâton en même temps; nous devons, en l'occurrence, brandir les deux, car c'est le seul langage que comprend Saddam Hussein.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, je crois que l'esprit de parti n'a pas sa place ce soir. Il convient d'éviter les petites querelles auxquelles nous sommes toujours exposés et de poser un geste bénéfique pour le Canada. Je crois qu'il est de notre devoir ici ce soir de présenter clairement les faits afin que les Canadiens puissent comprendre quels sont les enjeux et quelle est la véritable menace.

Je crois que nous avons une obligation morale et politique envers les Canadiens, qui nous oblige à leur faire savoir de quoi il retourne au juste. Je voudrais ajouter à ce que nous savons déjà l'information que j'ai réunie de diverses sources, notamment à l'occasion de séances de breffage. Cette information provient du ministère des Affaires étrangères du Canada, des ministères des affaires étrangères et des ambassadeurs d'autres pays ainsi que de simples citoyens canadiens avec qui je me suis entretenu. Je veux aborder la question d'un point de vue moral, à savoir en dégageant ce qui est bien pour le Canada, pour les Canadiens et pour la Chambre.

 

. 1955 + -

Après avoir écouté la déclaration du chef de mon parti, je crois qu'il aurait été préférable d'avoir une séance de breffage complète pour tous les députés. Nous aurions pu avoir une période de questions et de réponses de la durée nécessaire. Nous aurions pu gérer la situation et permettre à chacun de présenter la position de son parti. C'est une façon de faire qu'il faudrait envisager d'adopter une prochaine fois. Aujourd'hui, il est important de communiquer l'information concernant une situation extrêmement grave pour les Canadiens et pour le monde étant donné que nous sommes confrontés à Saddam Hussein.

On demande souvent quel type d'homme est Saddam Hussein. Je ne suis pas convaincu que nous ne soyons pas devant un nouveau 1938 et un nouveau Hitler. Je crois que Saddam Hussein est aussi dangereux que Hitler et qu'il mérite tout autant d'être pris au sérieux. Il a déjà utilisé des armes biologiques et chimiques contre son propre peuple et contre ses ennemis. L'utilisation de ces armes ne semble pas être pour lui un cas de conscience.

Revenons à l'histoire. En 1975, il a signé un pacte de non-agression avec l'Iran. Pourtant, en 1980, il a envahi ce pays et la guerre a commencé. La guerre Iran-Irak a duré huit ans et la mort d'un million d'Iraniens et d'Irakuiens n'a pas semblé émouvoir Saddam Hussein outre mesure. Il a utilisé des armes chimiques contre des soldats iraniens et contre son propre peuple. Il a accepté le cessez-le-feu de l'ONU, mais il ne lui a pas fallu longtemps avant de décider d'aller plus loin. Il a travaillé sur l'uranium enrichi et sur des armes biologiques et chimiques. Le 2 août 1990, lorsqu'il a envahi le Koweit, il a encore donné une idée du genre d'homme qu'il est réellement: un individu assoiffé de pouvoir.

En faisant ce retour historique, je me rends compte que nous nous étions engagés à l'époque. Je crois que les Canadiens étaient fiers de la participation de leur pays, parce que nous luttions contre une personne qui représentait une menace pour la société. Nous savons comment il gouvernait son pays. Il a même tué certains membres de sa famille. Il tue les dissidents. Il tue les ministres. Il tue les minorités kurdes. Nous savons comment il agit. Je me pose des questions quand j'entends des gens demander s'il est vraiment dangereux. Le danger que représente une personne comme Saddam Hussein ne fait aucun doute dans mon esprit.

Il convient d'examiner le bilan de l'UNSCOM. J'ai mis pas mal de temps à analyser les renseignements que l'UNSCOM nous a livrés au cours des sept dernières années et demie. J'ai discuté avec 12 ambassadeurs et leur ai demandé ce qu'ils pensaient des rapports de l'UNSCOM. J'en ai parlé à nos propres spécialistes. J'ai discuté avec des Américains, des Britanniques, des Français et des Russes.

Que dire de l'UNSCOM? Les armes existent-elles vraiment? Je crois que nous avons tous pris connaissance des faits et des statistiques. Je pourrais en parler longtemps, mais cela ne sera pas nécessaire. Nous devons cependant signaler aux Canadiens que l'UNSCOM nous apprend que ces gens possèdent des armes, que les antécédents, les faits et les chiffres ne mentent pas. Ce n'est pas une histoire inventée ou créée par les Américains, comme certains l'ont prétendu. Les faits et les chiffres sont éloquents. J'ai discuté avec des représentants d'au moins 12 pays—le ministre a probablement eu des entretiens avec de nombreux autres—et tous s'entendent pour dire que les armes existent bel et bien.

Il a été établi que 38 000 tonnes d'armes chimiques ont été détruites. Cet individu produisait ces armes et elles ont été détruites. Il y a 480 000 litres d'agents chimiques servant à produire des armes chimiques. Ces agents ont été produits. C'est lui qui organisé ça. Voilà le genre de personne à qui nous avons affaire.

 

. 2000 + -

L'UNSCOM a confirmé l'existence de gaz neurotoxique VX fabriqué à l'échelle industrielle, la production de quatre tonnes de VX. Il suffit d'une goutte pour tuer quelqu'un. Or, il a fait produire ces agents chimiques et il en connaît l'existence.

Il y a toute une liste d'autres substances, dont 8 400 litres d'anthrax et 19 000 litres de toxines botuliques. Les faits sont accablants. Il y a des gens sur le terrain, en Irak, qui affirment que ces substances s'y trouvent. Que faut-il de plus pour comprendre le danger que présente cet individu?

Je n'ai que quelques réflexions à ajouter. La Grande-Bretagne a été stupéfaite et horrifiée par la quantité d'armes chimiques et biologiques qui se trouvent en territoire iraquien. C'est en de tels termes que les britanniques ont décrit leur réaction. Ils ont été stupéfaits d'apprendre que de tels stocks aient pu être constituée et ils auraient souhaité que des mesures soient prises plus tôt.

J'ai parlé aux Israéliens. Quant aux Russes, leur position est assez simple. Ils recherchent, comme nous tous, une solution pacifique. L'idéal serait effectivement une solution pacifique. Tout le monde est d'accord. Mais si ce n'était pas possible, à qui avons-nous affaire? Comment est Saddam Hussein? C'est cela qu'il faut savoir.

Les Russes disent que leur plus grande crainte est de voir le conflit se généraliser. Ils s'inquiètent de la forme qu'il prendra et de ce que les Irakuiens subiront à revivre une guerre qu'ils ont déjà vécue. Nous partageons tous ces préoccupations. Personne d'entre nous n'est indifférent. Nous n'avons rien contre le peuple iraquien ni l'État arabe. C'est contre Saddam Hussein, ce dictateur fou, que nous nous battons. Voilà qui est l'ennemi.

La Turquie a déjà été confrontée à différentes formes d'instabilité et de terrorisme. Elle a dû accepter toutes sortes de réfugiés à cause de ce dictateur. Les Iraniens sont extrêmement inquiets. Ils éprouvent beaucoup de sympathie envers les Irakuiens, ceux-là mêmes qu'ils ont combattus, mais ils n'ont aucune sympathie pour Saddam Hussein. Ils le connaissent et, quand on leur demande, ils confirment le genre d'individu qu'est Saddam Hussein.

Il n'est pas question de définir à quel point cet homme est dangereux. Nous reconnaissons tous qu'il est dangereux. Nous arrivons à analyser les véritables menaces terroristes et les solutions que s'offrent vraiment à nous.

Encore une fois, je paraphrase notre chef qui soutient qu'un meurtre ne peut être justifié moralement que si ce meurtre sauve des vies. C'est la question que nous devons poser. Si nous prenons la première option et laissons cet homme se moquer des résolutions des Nations Unies et de nos alliés, nous l'autorisons à poursuivre la production de ces armes. Il continuera d'élaborer des vecteurs. Son esprit malade continuera de planifier comment étendre son pouvoir au-delà des limites de son pays.

Que signifie tout cela? D'une part, il terrorise la population de son pays. D'autre part, il terrorise les pays voisins. Peut-il nous faire du tort? Son terrorisme pourrait-il aller jusqu'à déstabiliser notre civilisation? C'est possible. Ce n'est pas fantaisiste. Ce n'est pas de la science fiction. C'est réaliste.

Si nous n'agissons pas maintenant, à quel genre de menace serons-nous confrontés plus tard? Nous pouvons tous imaginer facilement—on en voit au cinéma—comment nos économies et nos pays pourraient être déstabilisés par le terrorisme.

Notre deuxième option consiste à exiger de Saddam Hussein qu'il respecte les règles établies en 1991 par les Nations Unies, selon lesquelles il devait autoriser l'inspection complète de toutes les bases qui peuvent exister en Irak, sans la moindre exception ou entente particulière. Il doit se conformer à ces conditions. Pas de marchés, pas d'autres options. Tout doit être inspecté.

 

. 2005 + -

Ensuite, toutes les armes de destruction massive doivent être détruites. Nous ne pouvons laisser un État, un tel bandit posséder ce genre d'armes. C'est tout simplement trop risqué. Si nous tolérons une telle situation, nous allons en payer le prix plus tard.

Il va de soi que nous sommes en faveur d'une solution diplomatique. Nous souhaitons de tout coeur que ce soit possible. Nous voulons que tous ceux et celles qui estiment pouvoir aider à trouver une solution se manifestent. Nous voulons que Saddam Hussein sachent qu'il nous a poussés à bout et que la seule solution pour lui consiste à se conformer aux résolutions des Nations Unies. Il ne peut faire marche arrière et nous refaire le coup dans six mois. Il est allé trop loin cette fois-ci. Il a trop produit. Il a trop d'armes. Il représente un danger pour le monde tel que nous le connaissons.

Le moment est venu de lui envoyer le message par les voies diplomatiques. Si ces démarches échouent, nous n'aurons d'autre solution que de recourir à la force pour le contraindre à se conformer aux résolutions. Je suis convaincu que le recours à la force maintenant permettra de sauver des vies dans l'avenir. Compte tenu de ce que j'ai appris et entendu relativement à ce dossier, je suis convaincu de ce que je dis.

Nous ne pouvons adopter la politique de l'autruche. Nous ne pouvons faire semblant qu'il n'y a pas de problème. Nous ne pouvons dire que Saddam Hussein va peut-être se comporter correctement. Nous ne pouvons dire qu'il ne va peut-être pas se servir de ces armes. Il va s'en servir. Il va continuer à en produire, et c'est pourquoi le moment est venu d'agir.

Nous n'avons pas le choix. Le moment est venu de dire ce que nous pensons, de faire connaître notre position, de nous affirmer. Aussi difficile que cela puisse paraître, nous devons mettre fin au régime de terreur de Saddam Hussein. La terreur doit cesser. Le moment est venu pour le Canada et pour les Canadiens de défendre leurs croyances, de faire front avec leurs alliés. Plus il y aura de nations qui le feront, mieux ce sera.

Je pense que tous ici devraient être d'accord, mais il faut prendre position, il faut s'affirmer. Le moment est venu de le faire. Il ne fait aucun doute que notre parti s'est engagé à travailler à cette fin. Ce n'est pas le moment de faire de la politique partisane. C'est le moment de faire ce qui est bon pour le Canada. C'est ce que les Canadiens souhaitent nous voir faire ici ce soir.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Le ministre des Affaires étrangères a indiqué qu'aucun député du Parti progressiste-conservateur ne lui a demandé, pas plus qu'à son cabinet ou à celui du premier ministre, de lui organiser une séance d'information.

C'est tout à fait faux. Il est très facile de prouver cela en vérifiant les registres du cabinet du premier ministre dans lesquels on peut voir qu'une telle séance d'information a été demandée non pas à une seule, mais à plusieurs reprises, par le chef du Parti progressiste-conservateur ainsi que par d'autres députés. Il s'agit-là d'une inexactitude flagrante.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Ce n'est pas un rappel au Règlement. On reprend donc le débat avec le ministre de la Défense nationale.

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Madame la Présidente, je pense que nous devrions oublier les détails dont le député parlait à l'instant pour passer aux questions sérieuses dont nous sommes saisis ce soir. La prolifération d'armes chimiques et biologiques est un des grands sujets touchant la sécurité à notre époque.

Dans le passé, lorsqu'on pensait aux armes de destruction massive, ce sont les armes nucléaires qui nous venaient à l'esprit. Durant la guerre froide, il est certain que cette menace nous guettait constamment. Cette menace, bien qu'elle soit grandement diminuée, pèse toujours sur nous. Il existe toujours beaucoup de ces armes sur la planète. Entre temps, nous sommes témoins d'une menace grandissante due aux armes chimiques et biologiques qui sont fabriquées et entreposées. Nulle part ailleurs ce n'est plus évident qu'en Irak.

 

. 2010 + -

On s'en est servi dans le cadre de la guerre entre l'Iran et l'Irak. On s'en est servi contre les Kurdes. Saddam Hussein a montré très clairement qu'il était prêt à utiliser ce type d'armes. Comme on l'a dit ce soir, c'est un homme extrêmement dangereux. On peut s'attendre à ce qu'il continue de continuer de fabriquer et d'utiliser ce type d'armes.

En fait, la Commission d'inspection des Nations Unies a trouvé à de nombreuses reprises un certain nombre de précurseurs de ce type d'agents biologiques et chimiques. Ces produits devaient être détruits, mais il continue à essayer de les fabriquer pour accumuler ce type d'armes.

Il refuse, à l'heure actuelle, de permettre à ce groupe d'inspection de vérifier un certain nombre d'endroits clés. Il a, pour une raison ou une autre, décidé de construire plus de 40 nouveaux palais, en plus de ceux qui existaient auparavant. Ils ont une superficie totale supérieure à celle de nombreuses villes du monde. C'est le type de camouflage auquel il se livre pour pouvoir continuer à fabriquer ces armes de destruction massive.

Les faits sont indéniables. Le danger dans la région immédiate, le danger pour la sécurité du monde, est tout à fait évident. Ainsi, quelques gouttes de certains de ces agents peuvent, en fait, tuer des milliers, voire des millions de personnes. Contrairement aux armes nucléaires, ces armes n'exigent pas de vecteurs sophistiqués. On peut les utiliser de nombreuses façons, notamment en les glissant dans des porte-documents. Ce sont de nombreuses méthodes que cet homme n'hésitera pas à utiliser s'il juge nécessaire d'avoir recours à ce type d'armes. C'est un homme extrêmement dangereux et on ne peut pas lui permettre de continuer à développer des armes de ce genre.

La résolution des Nations Unies est très claire. Son pays et lui-même doivent respecter cette résolution. Nous ne pouvons laisser tomber cette obligation. Nous voulons qu'on utilise tous les moyens diplomatiques à notre disposition pour le forcer à respecter cette résolution. On ne peut laisser faire. La crédibilité de la communauté internationale serait grandement endommagée si on le faisait. Comment d'autres résolutions adoptées à l'avenir pour empêcher la prolifération des armes de destruction massive pourraient-elles avoir du poids, si nous ne mettons pas en vigueur celle-ci et si nous ne veillons pas à ce qu'on la respecte?

Il affirme qu'il va maintenant permettre certaines inspections supplémentaires, mais qu'il ne se pliera pas à toutes les dispositions de la résolution. Comme les Britanniques l'ont constaté en 1939, on ne peut apaiser des dictateurs. On ne peut s'attendre à contrôler cette situation en se pliant à ses conditions. Il faut poser les conditions de la communauté internationale. On doit veiller à l'application de la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. La crédibilité des Nations Unies est importante et c'est ce qui est en jeu dans ce cas-ci.

Nous poursuivons nos efforts en vue de parvenir à une solution diplomatique. La présence manifeste de forces militaires, notamment des porte-avions et divers autres aéronefs et bâtiments qui se regroupent sous l'autorité des États-Unis et du Royaume-Uni et les efforts d'autres pays alliés constituent une manifestation de solidarité qui, espérons-le, aboutiront à une résolution diplomatique.

Nous espérons évidemment que ce sera le cas et nous devons déployer tous les efforts possibles pour aboutir à une résolution pacifique et diplomatique de la crise. Dans le cas contraire, nous devons être prêts à accepter le recours à la force militaire pour assurer le respect des résolutions des Nations Unies.

Le chef de l'opposition a clairement déclaré dans son discours qu'il fallait éviter les pertes de vies et qu'il y en avait eu beaucoup dans cette région du monde pendant de la guerre du Golfe. La vie de son propre peuple était constamment menacée et des gens mouraient continuellement en Irak. La situation terrible que connaît la population iraquienne menace sa survie.

 

. 2015 + -

Nous ne voulons pas qu'il y ait d'autres pertes de vie, mais si cela est nécessaire pour sauver la vie d'autres personnes, il faudra envisager l'intervention militaire, aussi difficile qu'une telle décision puisse être. Si la voie diplomatique se révèle inefficace, nous devrons nous préparer à une intervention militaire.

Le Canada ne peut pas demeurer passif pendant que ses alliés tenteront de faire appliquer les résolutions des Nations Unies. Nous devons prendre part à leur effort. Le débat de ce soir vise justement à déterminer si le Canada doit s'y associer. Le gouvernement prendra une décision sous peu à ce sujet et une fois la décision prise, nous poursuivrons le dialogue avec nos alliés.

Sommes-nous en mesure de le faire? Oui. Le livre blanc de 1994 sur la défense indiquait que le Canada dispose de troupes polyvalentes prêtes au combat. Ces troupes sont prêtes et capables de jouer un rôle de soutien dans la crise iraquienne. Les États-Unis, qui dirigent l'effort allié, nous ont demandé ce type d'aide. Le Canada est capable de fournir du personnel et du matériel de soutien prêts au combat.

Le chef de l'opposition a demandé des précisions au sujet de l'ampleur de notre effort de soutien. Il sera nécessaire de poursuivre les discussions avec les alliés à ce sujet afin de connaître la nature précise de la mission et la façon dont le Canada pourra jouer un rôle de soutien en coordination avec les efforts des autres pays alliés. Si le gouvernement décide de participer à une intervention militaire, il faudra examiner la question plus en profondeur pour déterminer précisément la façon dont nous le ferons.

Ce soir, nous devons prendre la décision de faire respecter la résolution des Nations Unies, obliger Saddam Hussein et son pays à se plier à cette résolution et nous assurer que les armes chimiques et biologiques de destruction massive soient retirées et détruites, comme il se doit, afin qu'elles ne représentent plus une menace pour les populations de cette région du monde et du monde entier.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Madame la Présidente, je vous informe d'abord que je partagerai mon temps de parole avec la députée de Laval-Est.

Nous sommes conviés ce soir à un débat qui porte sur l'invitation au Canada, par les États-Unis, de participer à des interventions militaires au Moyen-Orient. Si le Bloc québécois considère essentielle la participation du Parlement à un débat, il demeure que les conditions dans lesquelles se déroule le débat de ce soir ne laissent guère de doutes sur l'orientation, voire la décision, que le gouvernement paraît déjà avoir prise en la matière.

Le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères ont d'ailleurs été, ce soir, trop peu loquaces lorsqu'il s'est agi d'informer les députés de cette Chambre sur les démarches qu'ils ont entreprises pour favoriser une solution pacifique au différend qui oppose l'Irak à la communauté internationale et n'ont pas su informer convenablement cette Chambre sur les fondements sur lesquels reposerait son intervention, comme celle des États-Unis.

D'ailleurs, le ministre des Affaires étrangères, plus tôt, dans son allocution, laissait entendre que les députés de cette Chambre, que les membres du Comité des affaires étrangères et du commerce international, ainsi que ceux du Comité de la défense nationale avaient été invités à participer à des séances d'information et de discussions sur la situation en Irak.

 

. 2020 + -

Depuis mon élection et ma participation aux travaux du Comité des affaires étrangères et du commerce international, je n'ai aucunement été invité à participer à de telles séances. Le ministre des Affaires étrangères, par conséquent, laisse entendre que des consultations ont eu lieu, alors que de telles consultations n'ont pas eu lieu.

En raison de cette absence de consultation des parlementaires, du manque d'information évident en la matière, nous avons des questions à poser au gouvernement, des questions qui n'ont pas encore obtenu de réponse, qui doivent obtenir une réponse avant, au nom des Québécois que nous représentons, que nous prenions position dans ce débat.

La première chose qui préoccupe le Bloc québécois est bien l'absence de participation réelle du Canada à un processus visant à convaincre l'Irak, par une véritable voie pacifique, d'assurer le respect des résolutions du Conseil de sécurité, et notamment la Résolution 687 qui veut et oblige l'Irak à ne pas produire et à détruire tous les stocks d'armement qu'il a à sa disposition.

Encore là, malgré les propositions ou les propos tenus par le ministre des Affaires étrangères à la Chambre, ce soir, aussi éloquent qu'ait pu être son discours, celui-ci n'a pas su démontrer, pas plus que celui du premier ministre, d'ailleurs, que le Canada avait contribué à ce jour à un effort diplomatique suffisamment soutenu à cette fin. Il nous a toutefois confirmé, en quelque sorte, qu'il laisse le soin à d'autres États de rechercher une telle solution pacifique.

Il ne suffit pas de parler aux États-Unis, d'entendre la requête du président américain. Il ne suffit pas non plus de donner un coup de fil au premier ministre du Royaume-Uni, ou de parler à des interlocuteurs australiens.

Il importe que le Canada, s'il veut réellement chercher une solution pacifique, s'intéresse aux positions que d'autres alliés ont exprimées en la matière. Il devrait savoir et se préoccuper du fait que plusieurs de ses alliés, qui participent comme lui aux travaux de l'OTAN et de l'OSCE, comme la France, la Belgique et l'Italie, ont des réserves très sérieuses sur l'intervention militaire des États-Unis ou d'autres puissances qui voudraient appuyer une telle intervention militaire, sans parler d'ailleurs de la résistance qu'offrent deux autres membres du Conseil de sécurité, la Russie et la Chine. Il ne suffit pas, comme l'a rappelé le ministre des Affaires étrangères durant la période des questions orales aujourd'hui, que des consultations aient eu lieu il y a deux semaines avec le ministre russe des Affaires étrangères pour que nous soyons satisfaits des efforts du Canada pour rechercher une solution diplomatique.

Le Canada doit aussi et surtout dirions-nous aujourd'hui joindre sa voix à ceux qui cherchent, d'abord et avant tout, une solution diplomatique, s'investir davantage qu'il ne le fait à trouver un moyen pacifique de régler le différend qui oppose l'Irak et la communauté internationale.

Nous plaidons, par conséquent, pour un effort plus soutenu que jamais devant un conflit qui perdure depuis plusieurs années, dont l'intervention militaire ne paraît pas imminente, et qui requerrait alors des États qui sont de bonne foi qu'ils s'investissent davantage dans la recherche d'une solution pacifique au règlement de ce différend.

Le second élément sur lequel le Bloc québécois doit obtenir des informations, sur lequel tous les députés de cette Chambre devraient obtenir une information satisfaisante, est celui qui devrait amener le gouvernement à faire connaître les fondements juridiques sur lesquels l'intervention militaire serait fondée. Il est évident que l'intervention des États-Unis, du Canada et d'une coalition d'États peut avoir un fondement moral, un fondement politique.

 

. 2025 + -

Personne ne conteste le fait, sauf ceux qui n'ont pas compris et n'ont pas lu convenablement les résolutions du Conseil de sécurité, que l'Irak, par ses actions depuis plusieurs années, viole l'esprit et la lettre des résolutions du Conseil de sécurité. Il y a donc un fondement évident à une intervention qui résulterait de l'absence de solutions diplomatiques et du refus de l'Irak de vouloir régler diplomatiquement ce conflit.

L'autorité morale de ceux qui voudraient assurer le respect des décisions du Conseil de sécurité est également indéniable. Nous ne contestons pas qu'il existe une telle autorité morale et politique et que le fondement moral et politique en la matière est incontestable. Mais que dire du fondement juridique de l'intervention qui est proposée par les États-Unis et qui semble être voulue également par le Canada, à défaut d'un règlement pacifique et diplomatique du différend?

Le ministre des Affaires étrangères, dans son intervention, il y a quelques minutes, laissait entendre que ce fondement réside dans une résolution en vertu de laquelle toute violation des obligations de l'Irak en vertu de la Résolution 687 du Conseil de sécurité constituerait une menace à la sécurité et à la paix internationale et ouvrirait, par conséquent, la voix à une intervention de nature militaire.

Cette affirmation n'a pas été suffisamment expliquée et documentée par le ministre des Affaires étrangères et certains prétendent qu'il faut une autre intervention du Conseil de sécurité. Il faut que ce Conseil autorise expressément l'utilisation de la force pour assurer le respect des résolutions que les États-Unis et d'autres pays considèrent violées par l'Irak.

Nous souhaitons que le gouvernement éclaire le Parlement et les députés de cette Chambre sur les véritables fondements juridiques de l'intervention et nous indique s'il a des avis juridiques, s'il a en sa possession des opinions juridiques ou si des opinions juridiques lui ont été fournies par ceux qui souhaitent cette intervention, notamment les États-Unis, de façon à ce que la Chambre soit convaincue que le gouvernement du Canada, en s'engageant dans une telle intervention, ne viole pas le droit international et ne diminue pas l'autorité des Nations unies. Si l'intervention militaire des États-Unis, à laquelle participerait le Canada, diminuerait l'autorité des Nations unies, cette décision pourrait être très mauvaise pour l'avenir de cette organisation.

Comme d'autres, le Bloc québécois croit que Saddam Hussein a violé les obligations internationales en vertu des résolutions des Nations unies. C'est un chef d'État qui, sans doute, mérite d'être condamné pour ses actions. Mais, comme le disait Henry Kissinger, un diplomate fort connu, en citant un proverbe espagnol, et je le cite: «Traveller, there are no roads. Roads are made by walking.»

Le gouvernement du Canada n'a pas...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Excusez-moi, le temps du député est écoulé. La parole est maintenant à l'honorable députée de Laval-Est.

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Madame la Présidente, le débat que nous tenons ce soir, dans le cadre d'une guerre appréhendée contre l'Irak, n'est certes pas facile. Il importe d'évaluer toutes les répercussions de la décision que s'apprête à prendre le gouvernement canadien dans ce conflit.

La demande faite hier par les États-Unis au gouvernement canadien d'appuyer une intervention militaire contre l'Irak est lourde de conséquences. Cette intervention prendrait, selon toute vraisemblance et pour le moment, la forme d'une aide dans les domaines du transport et des équipes de recherche et de sauvetage.

 

. 2030 + -

La position du Bloc québécois est sans équivoque. Nous favorisons d'abord la résolution de ce conflit par voie diplomatique et dans le respect intégral de l'application des résolutions onusiennes. Le président de la République irakienne, Saddam Hussein, doit donc respecter les résolutions de l'ONU qui l'enjoignent de démanteler totalement son arsenal de destruction massive. Tous les efforts diplomatiques doivent être tentés afin d'éviter cette catastrophe.

Dans l'éventualité où la résolution du conflit suivrait la voie de l'action militaire, le Bloc québécois est d'avis que c'est avec l'assentiment du Conseil de sécurité que cette décision devrait se prendre, comme ce fut le cas en 1991. Car c'est au Conseil de sécurité de l'ONU que sont traitées les questions relatives à la paix et à la sécurité mondiale.

Décidant d'agir sans l'approbation du Conseil de sécurité, le Canada enverrait le message que l'on peut se passer de l'ONU et se mettre en position de non-respect du droit et des traités internationaux.

Mais advenant le cas où les Nations unies, par l'entremise du Conseil de sécurité, consentiraient à une intervention militaire, il faudrait dès lors s'interroger sur la nature de la contribution militaire du gouvernement canadien. Serait-elle du même type que celle fournie lors du conflit de 1991, ou plutôt de caractère offensif? C'est là un autre débat tout aussi important qui devrait se faire en cette Chambre. Je souhaite évidemment ne pas avoir à me rendre à cette étape.

Donc, dans la réponse que le Canada devra donner sous peu aux États-Unis, le Bloc québécois croit fermement que le Canada se doit d'exiger que toute action militaire soit d'abord et avant tout autorisée par le Conseil de sécurité de l'ONU. Le Canada se doit de protéger la crédibilité, l'autorité et la suprématie de l'ONU, seule autorité en la matière.

Afin de bien comprendre les débats qui ont lieu aujourd'hui, il faut se rappeler que c'est à la suite de la guerre du Golfe que le Conseil de sécurité de l'ONU a ordonné à l'Irak la destruction inconditionnelle de toutes ses armes de destruction massive, qu'elles soient chimiques, bactériologiques ou encore des missiles balistiques.

L'Irak, en plus du non-respect de plus d'une trentaine de résolutions onusiennes adoptées à son endroit, provoquera le déclenchement des hostilités en refusant l'accès aux inspecteurs de la Commission spéciale de l'ONU chargée de faire ces inspections et de détruire les stocks d'armes visés sur le sol irakien de certains sites présidentiels.

Mais dans les faits, le débat spécial de ce soir porte essentiellement sur deux choses: préserver la paix et favoriser le désarmement à l'échelle mondiale.

Par tradition, la politique étrangère canadienne poursuit des objectifs qui favorisent la paix. Depuis des décennies, le Canada s'efforce de présenter à la face du monde une image vouée au maintien de la paix et de la sécurité. Nos Casques bleus envoyés sur les lieux de nombreux conflits ont entrepris de se mettre au service et au maintien de la paix mondiale. C'est ainsi qu'offrir des ressources défensives pour la résolution du conflit irakien mettrait en péril toutes les actions que le Canada s'est évertué à promouvoir en ce domaine.

Le Canada, avec le succès qu'il a remporté lors de la Convention sur les mines antipersonnel, a joué un rôle de leader en ce qui a trait au désarmement. Comme nous l'avons déjà dit à la Chambre, la ratification de ce traité n'a pas réglé et ne réglera pas la problématique du désarmement. Il reste beaucoup à faire en la matière, ne serait-ce par exemple qu'en ce qui concerne les armes lourdes et classiques, portatives ou légères. Mais soulignons que la participation active du Canada à un conflit armé serait, encore une fois, aller à contresens des objectifs poursuivis depuis des années.

Il faut cependant noter que le Canada n'est pas blanc comme neige dans le domaine du désarmement. Ainsi, on peut lire, dans le Rapport annuel sur les exportations de marchandises militaires du Canada, qu'en 1996, les exportations canadiennes de matériel militaire destiné à des pays tels l'Indonésie, la Chine, l'Inde et l'Algérie se sont accrues.

 

. 2035 + -

Bien que la valeur globale des exportations canadiennes de matériel militaire ait diminué au cours de l'année 1996, on peut indiquer que les exportations destinées aux pays à faible ou moyen revenu ont, à toutes fins pratiques, doublé durant cette même période, passant de 8 p. 100 à 14 p. 100. Ces chiffres témoignent présentement qu'il reste beaucoup à faire, même au Canada, pour désarmer la planète et amorcer une paix mondiale véritable.

Dans le conflit qui nous préoccupe, les négociations doivent donc s'intensifier et, à ce titre, le Bloc québécois considère que le gouvernement canadien n'a pas fait tous les efforts nécessaires. Ces négociations doivent donc s'intensifier pour en arriver à un règlement négocié. L'ordre mondial ne peut se permettre un conflit comme celui qui s'annonce, des hostilités qui pourraient dégénérer et avoir des conséquences inimaginables pour les populations, l'Irak, comme on le sait, privilégiant la défense de son territoire par des armes bactériologiques et chimiques. Ces armes, rappelons-le, sont peu coûteuses à produire et, contrairement aux armes nucléaires, requièrent peu d'espace pour l'entreposage, pouvant ainsi être facilement dissimulées. Ce sont des armes aveugles dont les effets touchent, sans avertissement, les civils innocents aussi bien que les militaires.

Mais le problème que nous rencontrons aujourd'hui en Irak pourrait un jour se poser avec les puissances montantes des pays en voie de développement. Nous savons même que certains gouvernements cherchent à acquérir ou possèdent déjà cette technologie qui leur donne une capacité dissuasive peu coûteuse et qui pourrait être utilisée sans ménagement, n'importe où dans le monde et contre n'importe quelle population.

En terminant, je considère que l'éventualité d'un conflit avec l'Irak est très grave. Je souhaite qu'il soit résolu en regard du partage du fardeau, si c'est la décision de l'ONU uniquement. Mais je voudrais, et c'est là la position fondamentale du Bloc québécois, que ce soit fait plutôt en fonction du partage de la paix et des efforts diplomatiques pour l'atteindre.

[Traduction]

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Madame la Présidente, je partagerai mon temps avec le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, le député de Vancouver Quadra.

Le débat repose jusqu'ici sur l'hypothèse que Saddam Hussein aura recours aux armes biologiques et qu'il doit donc être mis hors d'état de nuire. Avant de faire une telle supposition et de décider sur l'action à entreprendre, nous devons examiner les faits et la gravité de la situation.

Premièrement, il ne faut pas oublier que c'est Saddam Hussein qui a déclaré la guerre à l'Iran, une guerre qui a duré dix ans. C'est Saddam Hussein qui a été l'instigateur de la crise du Golfe en 1989 et en 1990. Nous avons affaire à un homme agressif, dangereux et imprévisible. Il n'y a aucun doute là-dessus.

Il faut aussi souligner qu'aucune résolution n'a été présentée par le Conseil de sécurité des Nations Unis demandant que les États-Unis ou un autre gouvernement déclenchent une guerre en 1998. Le Conseil de sécurité n'a donné en aucune façon mandat à un pays de déclencher la guerre, encore moins les membres des Nations Unies, l'assemblée générale.

L'autre hypothèse est que l'Irak est le seul pays de la communauté des nations à posséder des armes biologiques. Qui produit ces armes? D'où viennent-elles? Les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, l'Inde ou la Chine ont-elles jamais dit qu'elles ne possédaient pas de telles armes? Je ne me souviens pas qu'elles l'aient fait.

D'après moi, la communauté des nations a deux options. La première est de s'abaisser au niveau de l'adversaire et de combattre le feu par le feu. Cette solution ne semble guère appropriée dans ce cas, vu qu'aucun coup de feu n'a été tiré. L'autre est de chercher des solutions diplomatiques avec en tête l'objectif à long terme de donner aux Irakuiens la possibilité de remplacer le leader actuel.

L'histoire nous a appris que chaque fois que nous lui déclarons la guerre, M. Hussein en sort plus fort car son peuple lui apporte son soutien. En outre, chaque fois que nous déclarons la guerre, le monde islamique y voit une menace de la part du monde occidental. Chaque fois que nous déclarons la guerre, nous aidons Saddam Hussein. Chaque fois que nous déclarons la guerre, nous solidifions l'appui que lui accorde son entourage et nous polarisons l'opinion publique mondiale. Il semble que, au lieu d'aller en guerre encore une fois, nous devrions trouver des moyens de creuser un fossé entre la population et les dirigeants militaires.

 

. 2040 + -

Pourquoi ne pas abandonner l'imposition de sanctions, qui a été vaine? Les sanctions n'ont donné aucun résultat. Elles n'ont servi qu'à renforcer le soutien de la base envers Saddam Hussein en Irak et qu'à créer des difficultés pour la population civile.

Pourquoi pénaliser la population civile? Pourquoi ne pas laisser l'Irak vendre son pétrole sur le marché? Avec l'abondance, la qualité de vie des civils s'améliorerait. Avec une meilleure qualité de vie, les Irakuiens se rétabliraient un jour ou l'autre, au point où ils pourraient remplacer le régime militaire actuel. Cela s'est produit ailleurs. C'est certes une meilleure perspective que de bombarder, détruire et tuer des dizaines de milliers de civils innocents.

Il est intéressant de noter et digne de consigner au compte rendu les observations qu'a faites Anton Kuerti, pianiste de concert Canadien de renommée mondiale. Il a exprimé son opinion sur la situation en Irak dans une lettre adressée au Globe and Mail et publiée samedi dernier:

    Triste paradoxe, nous voyons le pays qui possède le plus vaste arsenal d'armes de destruction massive au monde chercher à interdire à un autre pays d'acquérir son propre arsenal relativement négligeable.

    Évidemment, 20 000 armes entre les mains de personnes saines peuvent, à court terme, être moins dangereuses qu'une seule arme entre les mains d'un fou, mais cela ne rend pas les armes sécuritaires ou moralement tolérables. Nous n'avons pas oublié qui les ont utilisées les premiers. Seuls les États ayant renoncé aux armes capables d'exterminer des peuples entiers ont le droit d'insister pour que les autres pays en fassent autant.

    Ce qui est encore plus ironique, c'est de voir un pays qui refuse de payer sa cotisation aux Nations Unies et qui sabote l'initiative mondiale visant à interdire les mines terrestres invoquer une résolution périmée des Nations Unies pour justifier ses raids de bombardement imminents, malgré le fait que presque tous les États représentés au Conseil de sécurité s'opposent à cette nouvelle attaque. [...] Tout comme le manquement à l'application régulière de la loi ternit l'image de tout le système juridique, le scénario qui se déroule menace non seulement de détruire davantage l'Irak et tout espoir de paix au Moyen-Orient, mais aussi d'anéantir le peu d'autorité morale et de respect qui restent encore à l'ONU. Si l'ONU devient un outil que peut manipuler un pays pour justifier ses actes illégaux, elle ne sera plus d'aucune utilité.

Bien que très grave, la situation ne devrait pas être réglée au moyen d'un conflit armé. Nous devrions multiplier les démarches diplomatiques de concert avec les autorités françaises, italiennes et russes, qui participent actuellement à des négociations diplomatiques avec l'Irak. La solution ne se trouve pas dans la guerre. L'Occident a de bonnes raisons de reconsidérer son attitude envers l'Irak et la gravité de la situation rend cette démarche nécessaire et urgente.

Ce soir, deux réformistes ont affirmé qu'il n'existait qu'une seule raison morale de tuer, c'est d'éviter toute perte ultérieure de vies. Ce raisonnement est effroyable, parce qu'on semble justifier l'assassinat de milliers d'innocents civils par la simple hypothèse que des armes meurtrières pourraient être utilisées à une date ultérieure.

Si l'on suit ce raisonnement, on pourrait déclarer la guerre à tous les pays qui possèdent des armes de destruction massive afin d'éviter toute perte ultérieure de vies. C'est toute une perspective à envisager. La moralité du Parti réformiste mènerait au rétablissement de la peine capitale. L'État tue une personne pour la punir d'avoir commis un acte similaire. Ce serait là un bel exemple de barbarisme qu'un État moderne pourrait donner à une société.

 

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M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Madame la Présidente, le premier ministre s'est engagé à consulter la Chambre des communes avant d'impliquer le Canada dans toute action autre que diplomatique dans la présente crise en Irak. C'est ce qu'il a fait, et je pense qu'il vaut la peine de souligner que c'est un changement progressiste dans la façon dont le Parlement assume ses responsabilités.

Selon la constitution américaine, le président doit agir en consultation avec le Congrès, mais on voit de plus en plus le président prendre seul la décision d'avoir recours à la force armée. Je crois que le Canada est le seul pays, au nombre de ceux qui s'intéressent à cette question, où le Parlement a été consulté. Je crois que c'est un précédent qui augure bien pour l'avenir.

On a parlé un peu des événements de 1991. Il vaut la peine de préciser que, même s'il y avait eu un long débat au Parlement, la décision d'envoyer nos militaires là-bas était prise depuis trois mois quand le débat a eu lieu. Quand nous recevons un appel à 5 heures du matin nous demandant de participer à une intervention militaire, nous disons tout simplement qu'il nous faut consulter le Parlement. C'est notre façon de faire. C'est notre nouvelle façon de faire, et nous remercions le premier ministre d'avoir adopté cette position.

On a discuté des pouvoirs légaux des États-Unis et, par le fait même, des pouvoirs de leurs alliés ou de ceux qui s'associeront à leur intervention pouvant mener à l'emploi de la force contre l'Irak. Certains ont dit qu'il fallait s'adresser au Conseil de sécurité pour obtenir une résolution plus récente.

Je ne crois pas qu'il faille interpréter ainsi la situation du point de vue juridique. En fait, l'opération menée dans le Golfe était un cas assez spécial. Elle avait été entreprise, pour ce qui est du Canada, par un gouvernement antérieur à celui-ci et, du côté des États-Unis, par le président précédent. On est alors intervenu dans un contexte un peu différent de celui des opérations classiques de l'ONU, c'est-à-dire de maintien de la paix et de pacification. Pour ces opérations, on a recours à des forces de l'ONU qui relèvent du secrétaire général de l'ONU et qui doivent lui rendre des comptes.

En fait, une série de résolutions générales déléguant l'autorité au commandant en chef des forces américaines et le rendant responsable devant le président des États-Unis avaient été adoptées. Je dis que c'était une mesure inhabituelle, mais que cette série de résolutions constitue un fondement juridique dont on peut raisonnablement dire qu'il peut servir de base à l'intervention envisagée maintenant.

Personnellement, je recommanderais que, dans la mesure du possible, le Conseil de sécurité adopte une nouvelle résolution, mais je ne pense pas que ce soit légalement nécessaire, et il ne faut pas perdre de vue qu'un veto est toujours possible. Il est intolérable que le droit de veto puisse être exercé pour bloquer une intervention collective pour laquelle il y a consensus. C'est l'argument que nous avions avancé, avec d'autres pays, en 1950, à l'occasion de la guerre de Corée lorsque l'Assemblée générale avait adopté la résolution d'unité pour la paix, mesure constitutionnelle jamais vue auparavant. Je pense que le fondement juridique existe.

Comme nous le savons, le Canada a joué le rôle du maintien de la paix, rôle maintenant classique mais qui a été conçu par celui qui était notre ministre des Affaires étrangères à l'époque, Lester Pearson. Il est à tout jamais associé à son nom. Nous croyons en ce rôle. Nous avons tendance à éviter le recours à la force. Notre rôle dans la guerre du Golfe a été limité à celui de services armés auxiliaires avec interdiction de participer à des opérations de recherche et de destruction.

Il est intéressant de remarquer que, dans sa requête, le président des États-Unis nous a demandé de faire exactement cela et rien de plus. Des opérations de recherche et de sauvetage, assurer le transport, et rien de plus. Je pense que c'est à notre avantage, et ce n'est pas quelque chose que nous avons demandé. Cela veut dire que les problèmes associés au recours à la force armée, et relevant du droit de la guerre, n'existent pas en ce qui concerne les opérations canadiennes.

En se fondant sur les résolutions, les États-Unis n'opèrent pas dans le vide. La loi de base qui régit actuellement les Nations Unies est soumise au droit général de la guerre et aux règles habituelles du droit international. L'une de ces règles est bien sûr que l'on doit d'abord épuiser tous les moyens diplomatiques, tous les recours pacifiques, toutes les mesures coercitives les moins extrêmes. Les États-Unis le savent. Nous le savons.

 

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Le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères nous ont assuré que les activités diplomatiques allaient se poursuivre. C'est la première obligation. C'est seulement après que l'on aura épuisé toutes les options diplomatiques que l'on peut avoir recours à d'autres options pouvant inclure l'emploi des forces armées. Si l'on a recours aux forces armées, on doit suivre le principe d'économie. Toutes les parties à la guerre du Golfe étaient au courant de cela et toutes celles qui pourraient participer à une action éventuelle devraient le savoir.

En particulier, en raison de l'évolution du droit international et de la conscience juridique, la situation n'est plus la même qu'en 1991. Les protocoles de Genève de 1978, qui s'ajoutent aux protocoles de Genève de 1925, fixent des règles strictes en ce qui concerne la force aérienne, lorsque des cibles civiles sont touchées par accident lors de la poursuite d'objectifs militaires, et ils s'appliquent même si ni l'Irak ni les États-Unis ne les ont ratifiés. Le droit international applique les règles générales.

Je dis cela simplement pour rappeler que même si l'on envisage de passer à l'étape post-diplomatique, on n'est pas pour autant dans une situation de vide juridique. Nous en sommes conscients. Nos alliés en sont conscients. Nous allons poursuivre nos négociations diplomatiques pour le rappeler clairement si d'autres options sont envisagées.

Pour résumer, je ne pense pas qu'il soit nécessaire de demander une nouvelle résolution du Conseil de sécurité. Je pense que les résolutions générales adoptées en 1991 et leur interprétation et application par la suite offrent une bonne base, mais qu'il serait préférable d'obtenir une nouvelle résolution. Je suis heureux que notre ministre des Affaires étrangères se soit engagé à poursuivre dans cette voie.

Comme je l'ai dit, s'il devenait nécessaire d'utiliser la force, le rôle du Canada, à la demande des États-Unis, se limiterait à des opérations de soutien. Toutefois, même pour des rôles allant plus loin que cela, les règles du droit de la guerre s'appliquent, il n'y a pas de vide juridique.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec la députée de Vancouver-Est.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais féliciter le député de Davenport, le doyen de la Chambre, pour les profondes observations qu'il a formulées il y a quelques instants. J'ose espérer que le premier ministre a prêté une oreille attentive à cette invitation à déployer encore davantage d'efforts diplomatiques avant que toute mesure ne soit adoptée demain au Cabinet, vu que le premier ministre a mentionné qu'il allait suivre attentivement le débat de ce soir. Le député de Davenport avait des choses très importantes à dire au premier ministre.

Le débat de ce soir revêt une très grande importance. On m'informe qu'il y a des jeunes Canadiens qui sont massés devant cet édifice pour manifester silencieusement à l'occasion de la crise iraquienne. Il est clair que les Canadiens sont concernés par ce débat.

Plus tôt dans la soirée, le chef de notre parti a exposé les raisons pour lesquelles toute action militaire proposée par les États-Unis contre l'Irak est téméraire et peu judicieuse. Elle a expliqué pourquoi le Canda devait éviter de commettre l'erreur fatale d'accepter de participer à une telle opération à ce moment-ci.

Le premier point qui me préoccupe concerne le rôle du Parlement, plus particulièrement notre rôle en tant que législateurs dans un pays souverain qui doit être maître de ses décisions. La secrétaire d'État américaine, Mme Albright, a dit hier soir que les Canadiens l'appuyaient. Nous tient-elle pour acquis? A-t-elle été mal citée? Ou bien sait-elle quelque chose qui nous a été caché?

Le Canada est un pays souverain. Nous devons prendre nous-mêmes les décisions qui nous concernent, qu'il s'agisse de l'accord multilatéral sur les investissements, de notre politique en matière de défense ou de questions touchant la paix et la sécurité dans un monde de plus en plus incertain.

Notre parti est d'avis qu'il nous faut donner une autre chance à la diplomatie. Le Canada jouit d'une longue et honorable tradition de pays épris de diplomatie, comme on l'a mentionné tout à l'heure. Nous venons de parrainer un traité international sur l'élimination des mines antipersonnel. Nous l'avons fait même si notre voisin du Sud ne l'a ni approuvé ni signé. Ce fut un moment dont nous pouvons à juste titre être fiers.

Pourquoi alors nous hâter de donner notre aval à cette aventure militaire peu judicieuse que nous proposent les Américains?

 

. 2055 + -

Pourquoi les Américains ont-ils un tel besoin de notre appui? Malgré ce que les autres partis ont prétendu ce soir, les États-Unis ne jouissent pas de très larges appuis pour une intervention militaire contre l'Irak en ce moment. Les Français s'y opposent, tout comme les Russes et les Chinois. Fait crucial, les pays arabes du Moyen-Orient s'y opposent aussi.

En 1991, il existait une authentique coalition contre Saddam Hussein. Aujourd'hui, il n'y en a aucune. Les États-Unis envisagent une intervention radicale sans grand soutien de la communauté internationale. On peut se demander quel concours de circonstances aux États-Unis pousse les Américains à frapper dès maintenant.

On nous a parlé ce soir de la participation de l'ONU, sans avancer beaucoup de preuves, comme le député bloquiste vient de le signaler. La plupart des déclarations sur la situation en Irak viennent de Washington et non de New York, siège de l'ONU. Cela nous inquiète.

Quelles que soient les raisons qui poussent le président Clinton à envisager une intervention militaire, je crois qu'il souhaite obtenir l'approbation et l'appui du Canada parce que nous avons dans la communauté internationale la réputation d'être un citoyen du monde honnête. C'est pourquoi il nous courtise.

Je me permets de souligner encore ce que le député de Halifax a dit de Saddam Hussein. Saddam Hussein est un dictateur qui n'a aucun respect pour les droits de la personne. Elle a déclaré que nous avions clairement et formellement appuyé les résolutions des Nations Unies interdisant à l'Irak d'acquérir, de fabriquer ou d'utiliser des armes nucléaires, biologiques ou chimiques. Cette interdiction est entièrement conforme à notre politique d'opposition à la fabrication, la prolifération et l'utilisation d'armes nucléaires. La position de notre parti est connue à cet égard et ne laisse aucune ambiguïté.

Le caractère répugnant de Saddam Hussein ne soulève pas d'interrogation, mais ce n'est vraiment pas l'essentiel ici. La question qu'il faut se poser est la suivante: Pourquoi le Canada participerait-il encore à une attaque militaire contre l'Irak? C'est supposément pour trouver un moyen d'assurer que l'Irak observe les résolutions des Nations Unies concernant l'inspection et la destruction des armes chimiques et biologiques du pays.

C'est la composition des équipes des Nations Unies chargées d'effectuer les inspections en Irak qui semble faire problème. Il est clair que les Irakuiens voient la présence américaine à la tête des équipes d'inspection comme étant de la provocation. Il devrait sûrement être possible de prévoir une disposition voulant que les États-Unis et l'Irak s'entendent sur la composition des équipes pour que l'inspection se poursuive. Est-ce que le Canada ne pourrait pas jouer un rôle diplomatique à cet égard? Il faut se demander si la reprise des bombardements permettra vraiment de réaliser l'objectif fixé.

Le Comité central mennonite du Canada, organisation religieuse respectée qui est active depuis longtemps en Irak, a écrit au premier ministre que l'organisation doutait qu'un autre bombardement contre l'Irak se solderait par un respect des résolutions. C'était l'objet de la lettre envoyée au premier ministre à la fin de la semaine dernière, dont voici un passage:

    L'action militaire a apparemment pour objet de forcer l'Irak à observer les résolutions des Nations Unies, soit d'obliger l'Irak à détruire toutes les armes de destruction massive. Mais dans des déclarations faites plus tôt cette semaine, William Cohen, secrétaire à la Défense des États-Unis, a bien fait comprendre qu'une intervention armée n'apporterait pas de solution au problème du refus de l'Irak d'observer l'entente conclue. Nous devons donc nous demander pourquoi on songe si sérieusement à adopter ces mesures et pourquoi le Canada serait prêt à y accorder un appui moral ou un appui plus considérable encore.

Dans ces circonstances, notre caucus ne peut que reprendre l'appel du Comité central mennonite qui a imploré par écrit le premier ministre et son gouvernement de chercher des solutions diplomatiques pour régler cette crise.

La guerre du Golfe en 1991 et les sept années d'interventions armées et de menaces qui ont suivi n'ont rien fait pour atténuer les tensions entre l'Irak et l'Ouest. L'approche adoptée par les États-Unis a en fait permis à Saddam Hussein de renforcer sa prise sur le pouvoir en se présentant comme une victime d'agression de la part des États-Unis.

On craint qu'une nouvelle intervention armée ne ferait que permettre à Saddam Hussein de jouer de nouveau cette même carte. Il n'y a pas que les Églises et les groupes pacifistes qui voient la situation de cet oeil. Permettez-moi de citer le général Norman Schwarzkopf auquel quelqu'un a fait référence un peu plus tôt ce soir.

Le général a affirmé au journal britannique, le Guardian, que de nouveaux bombardements sur l'Irak n'auraient aucun effet sur le refus de Hussein d'obtempérer au régime de désarmement imposé à l'Irak par les Nations Unies après la guerre du Golfe de 1991. Schwarzkopf a prévenu que si les Américains décidaient de bombarder l'Irak, ils pourraient bien anéantir du même coup la fragile coalition internationale qui a appuyé les sanctions contre l'Irak.

Nous, de ce caucus, sommes très sceptiques et avons du mal à croire que de nouvelles interventions militaires pourraient avoir des effets positifs. Cela ne fera qu'entraîner davantage de morts et de souffrance chez des gens qui ont déjà souffert beaucoup. Plutôt que d'affaiblir Hussein, ces mesures ne feraient que le raffermir dans sa position.

 

. 2100 + -

Je réitère que les membres de notre caucus sont d'avis que nous ne devrions pas avoir recours aux bombardements pour l'instant, que le Canada ne devrait pas se rallier maintenant à la demande des États-Unis. Nous devrions redoubler d'efforts, donner à la diplomatie une chance véritable de réussir et chercher une solution multilatérale.

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Madame la Présidente, je suis heureuse de participer au débat, car c'en est un qui a beaucoup d'importance.

Dans la motion présentée aujourd'hui, il s'agit de décider si nous devrions accepter l'invitation faite par les États-Unis de participer à d'éventuelles actions militaires au Moyen-Orient. La question que chacun d'entre nous doit se poser est de savoir si les actions militaires proposées résoudront véritablement le problème auquel on fait face en Irak et au Moyen-Orient. Est-ce qu'elles serviront à quoi que ce soit.

Plus tôt dans le débat, notre chef, la députée de Halifax, et le député de Palliser ont dit que la réponse du NPD était un non catégorique. Nous disons non parce que nous comprenons ce que cela veut dire; nous avons vu les traces laissées dans la région par les conflits militaires auxquels nous avons participé. L'action militaire passée a causé la mort d'un nombre incalculable de civils. Nous nous préoccupons beaucoup également des conséquences écologiques d'une explosion des installations et des entrepôts d'armes chimiques, biologiques et biochimiques mortelles.

Aujourd'hui, la plus grande organisation pacifiste, l'Alliance canadienne pour la paix, a, dans un communiqué, exhorté les parlementaires à rejeter l'invitation des Américains à participer à une intervention militaire massive. Elle sait, à l'instar d'un nombre croissant de Canadiens, que le recours précipité à ce genre de folie militaire signifie que l'on n'a pas consacré assez d'énergies, de travail et d'efforts aux processus diplomatiques, qui sont loin d'avoir été épuisés. Quand on examine l'histoire de la guerre du Golfe et la situation dans le golfe Persique, on constate malheureusement que le Canada a participé au processus international, trahissant ainsi l'engagement que nous avons pris, depuis la guerre du Golfe de 1991, de promouvoir un processus de paix régional.

S'il y a un enseignement à tirer de la guerre du Golfe, c'est bien le tragique héritage de cette guerre tel que représenté par les 600 000 enfants qui en sont morts. Quelque 1,2 million de civils sont morts de malnutrition et la santé d'un autre 4 millions est menacée. Ils sont gravement malnutris à cause des sanctions.

Les conventions de Genève interdisent la destruction des systèmes vitaux pour les civils. Durant la guerre du Golfe, 84 p. 100 de ces infrastructures, composées notamment de centrales électriques, de systèmes d'adduction d'eau et d'égouts, ont été détruites. Or, ce sont des nécessités essentielles pour la vie humaine. Tel est le véritable héritage du conflit militaire en Irak et au Moyen Orient.

Nous devons poser la question à la Chambre des communes: Pourquoi le gouvernement canadien peut-il seulement songer à nous engager encore sur cette voie? En écoutant le débat d'aujourd'hui, nous avons été consternés par la position du Parti réformiste. Ce parti est d'avis, pour l'essentiel, qu'on peut tuer des gens, qu'on peut s'engager dans un conflit armé si cela a pour effet de régler la question. Nous rejetons cette façon de penser que propose le Parti réformiste.

Nous devons nous demander pourquoi le gouvernement américain favorise une solution militaire unilatérale. Est-ce pour détourner l'attention de ses affaires internes ou cela fait-il vraiment partie d'une campagne menée, de façon croissante, par les marchands de canons et ceux qui profitent de la mort de civils, pour affirmer le contrôle et la suprématie militaire américaine? Nous sommes, nous aussi, responsables de la crise actuelle parce que le gouvernement canadien autorise des exportations militaires de plus d'un milliard de dollars dans la région du conflit.

 

. 2105 + -

Nous devons faire comprendre à tous qu'une intervention militaire ne réglera pas le problème et qu'elle ne fera qu'aggraver le conflit. Nous devons donc rejeter l'invitation de M. Clinton. Les Canadiens doivent être fermes dans leur position et amener les Américains à s'éloigner de la possibilité d'une autre guerre du Golfe.

Nous devons faire cela en appuyant activement les Nations Unies et les efforts multilatéraux en vue de trouver des solutions diplomatiques pratiques. Nous devons amener d'autres pays, pas seulement les États-Unis, à participer au processus d'inspection et mettre fin à la domination des Américains à cet égard.

Le dossier du Canada lui donne la crédibilité nécessaire pour atteindre ce genre d'objectif. Nous avons vu cela avec le travail qui s'est fait sur les mines terrestres. Nous avons vu que nous avons la crédibilité nécessaire pour chercher une solution de rechange au conflit armé.

En venant ici pour participer à ce débat ce soir, je pensais à la guerre du Golfe. Durant cette guerre, des jeunes avaient monté une tente de la paix devant l'hôtel de ville de Vancouver, parce qu'ils étaient tellement peinés de ce qu'ils voyaient comme l'intensification d'un conflit armé qu'ils ne voulaient pas et dans lequel les dirigeants de notre pays étaient en train de nous engager.

Nous devons nous demander aujourd'hui ce que nous enseignons à nos enfants. En tant que Canadiens, sommes-nous vraiment prêts à travailler pour le désarmement mondial et pour la sécurité mondiale ou allons-nous participer, avec le gouvernement américain, à l'intensification de ce conflit? L'horreur de la guerre est ressentie par ceux qui voient mourir leurs proches et qui survivent à la destruction de leurs foyers et de leurs localités.

N'oublions pas que le dictateur vers qui cette action est dirigée ne perd pas de son pouvoir et devient même encore plus fort. Nous avons besoin d'une démarche diplomatique agressive. Nous avons besoin de négociations fermes, par exemple, pour encourager l'Irak à se plier aux règles en acceptant de mettre fin, en suivant un échéancier établi, aux sanctions économiques. Nous devrions faire partie d'une effort des moyennes puissances pour trouver des solutions diplomatiques.

J'ai une question à poser au premier ministre. Le gouvernement a-t-il le courage de travailler à la recherche d'une solution pacifique? Est-il prêt à travailler pour le désarmement mondial? Le gouvernement du Canada courra-t-il vers la pente glissante de la destruction humaine fondée sur le pouvoir militaire?

Nous, les néo-démocrates, implorons le gouvernement d'arrêter, de compter jusqu'à dix, de mettre un terme à cette folie et d'étouffer cette menace de guerre. Ni le Canada, ni les habitants de l'Irak, ni la sécurité mondiale ne s'en porteront mieux. C'est pourquoi il faut rejeter cette motion et cette invitation.

L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Madame la Présidente, je partagerai le temps qui m'est accordé avec le député de Mississauga-Ouest. Les États-Unis ont officiellement demandé l'aide du Canada dans une éventuelle frappe aérienne contre l'Irak qui viserait à obliger ce pays à se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Les États-Unis n'ont pas demandé de troupes de combat, mais ils ont demandé un soutien militaire d'un autre ordre. Avant d'accorder quelque soutien militaire ou de prendre quelque mesure qui pourraient en découler et dans l'espoir de protéger des victimes innocentes, nous devons examiner attentivement les répercussions d'une éventuelle frappe aérienne.

Le Canada a donné l'exemple en mettant à contribution ses forces de maintien de la paix et par les initiatives qu'il prend, comme l'élimination des mines antipersonnel, afin d'assurer la liberté dans le monde et de permettre aux enfants de courir. Il poursuivra ses efforts en ce sens pour éviter que des victimes innocentes soient persécutées par quelque force que ce soit dans de nombreux pays du monde.

Il est toutefois dans notre intérêt et dans celui des personnes directement touchées de rechercher une solution diplomatique réaliste pour résoudre le problème. Si les efforts diplomatiques échouent, il nous faut agir consciencieusement, comme un pays qui croit à la paix, à l'ordre et au gouvernement responsable. Nous devons appuyer les Nations Unies afin de protéger la vie d'innocents.

La fabrication d'armes nucléaires par l'Irak et la mise au point constante d'armes de guerre bactériologique par celle qu'on a appelée «Dr Germ» ne sauraient être prises à la légère par les Nations Unies, le Canada et aucun autre pays.

En s'appuyant uniquement sur les précédents, il est impossible aux Nations Unies de ne rien faire ou de laisser Saddam Hussein continuer de produire des armes de destruction massive.

 

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Nous avons affaire à un homme dénué de conscience. Saddam Hussein est un dirigeant qui a exercé des répressions contre ses propres citoyens et qui s'est attaqué brutalement aux habitants des pays voisins. Nous ne pouvons donc pas rester naïvement à ne rien faire dans l'espoir que sa production d'armes nucléaires n'aie pas de répercussions graves ailleurs dans le monde.

Nous ne devons pas perdre de vue les agressions gratuites et inconsidérées de Saddam Hussein. Il a utilisé des armes chimiques contre sa propre population en Irak en 1988 avec un complet mépris pour la vie humaine.

En 1991, Saddam Hussein a lancé des missiles Scud contre l'Arabie saoudite et contre Israël. Au dire de tous, il continue de produire des outils de destruction et les moyens de les lancer. D'autres pays sont coupables par association, parce qu'ils l'aident à s'approvisionner. Tout cela se fait en violation directe des résolutions explicites du Conseil de sécurité de l'ONU.

Israël a essuyé 39 attaques de missiles Scud pendant la guerre du Golfe. Ses habitants ont dû porter des masques à gaz. C'était traumatisant. Les principaux inspecteurs d'armement des Nations Unies rapportent qu'Israël constitue une cible potentielle des missiles irakiens qui, cette fois-ci, seraient munis d'ogives chimiques capables de tuer une proportion importante de ses habitants et peut-être de ceux des pays voisins également.

La possibilité d'une telle attaque est absolument effrayante. Le monde n'a jamais été confronté à pareille menace, à une forme aussi horrible de dévastation.

C'est pour ces raisons que nous devons appeler tous les pays du monde à forcer Saddam Hussein à respecter les résolutions des Nations Unies. Il faut que la communauté internationale, le Canada y compris, affronte l'Irak et mette fin à ses menées; c'est une nécessité pour tous ceux qui se préoccupent de la paix et de la sécurité mondiales.

J'étais à la synagogue ce matin, à 7 h 30, à prier pour le repos de l'âme de ma soeur, Joan Abbey Pass, et de mon oncle, Nathan Cummings. Un jeune homme, David Schneiderman, était aussi là à prier pour le repos de l'âme de son père. Il a lu un poème que je trouve fort à propos dans la situation grave qui est la nôtre ce soir. Ce poème s'intitule: «Pourquoi prions-nous?» et est tiré de «When Bad Things Happen to Good People», de Harold Kushner. Le voici:

      Nous ne pouvons pas simplement Te prier, ô Dieu, de mettre fin à la guerre
      Car nous savons que Tu as créé le monde de telle sorte
      Que l'Homme doit trouver lui-même le chemin de la paix
      En lui-même et avec son voisin.

      Nous ne pouvons pas simplement Te prier, ô Dieu, de mettre fin à la famine
      Car Tu nous as donné les ressources nécessaires
      Pour nourrir le monde entier
      À la condition d'en user avec sagesse.

      Nous ne pouvons pas Te prier, ô Dieu, d'éradiquer les préjugés
      Car Tu nous a déjà donné des yeux
      Pour voir le bien dans tous
      À la condition de savoir regarder.

      Nous ne pouvons pas simplement Te prier, ô Dieu, de mettre fin au désespoir
      Car Tu nous as déjà donné le pouvoir
      De supprimer les favelles et de communiquer l'espoir
      À la condition d'en user convenablement.

      Nous ne pouvons pas simplement Te prier, ô Dieu, de mettre fin à la maladie
      Car Tu nous as déjà donné l'intelligence
      nécessaire pour trouver les remèdes
      À la condition d'en user de manière constructive.

      Par conséquent, nous Te prions donc, ô Dieu
      De nous donner la force, la détermination et la volonté
      D'agir au lieu de nous contenter de prier;
      De devenir au lieu de nous contenter de souhaiter.

Je crois que la secrétaire d'État des États-Unis Madeleine Albright a très bien décrit Saddam Hussein lorsqu'elle l'a qualifié de menteur et d'obstructionniste. J'aimerais qu'il écoute et qu'il lise cette prière et la mette en pratique. Lorsqu'elle a parlé de son attitude devant les inspections, elle a dit qu'il avait menti, temporisé, fait de l'obstruction et qu'il avait essayé de tromper.

Notre ministre des Affaires étrangères et notre premier ministre ont déclaré que, jusqu'à maintenant, la conduite du gouvernement iraquien n'était pas acceptable. Nous tenons tous à ce que le Moyen-Orient connaisse la stabilité à long terme et nous voulons tous que cette région connaisse la sécurité et une situation économique florissante pour le plus grand bien de tous ceux qui choisissent d'y vivre. Par conséquent, nous devons trouver le moyen d'appliquer des pressions internationales efficaces sur Saddam Hussein, de le faire cesser de faire de l'obstruction systématique contre les inspections des Nations Unies, de l'amener à respecter les Nations Unies et de cesser de produire d'horribles armes de mort.

Au bout du compte, c'est le Moyen-Orient arabe qui est le plus exposé aux dangers des armes de destruction massive. Nous devons donc appuyer les États-Unis afin d'assurer la paix et la sécurité dans le monde, pour nous et pour les prochaines générations. Espérons que Saddam Hussein reviendra à la raison et arrêtons les quelques pays qui lui vendent des armes. Laissons notre diplomatie suivre son cours dans l'intérêt de l'humanité.

 

. 2115 + -

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, tout d'abord, je tiens à dire que, contrairement aux autres occasions où j'ai pris la parole à la Chambre depuis le peu de temps que j'y siège, ce n'est pas avec joie que je participe au débat de ce soir. D'ailleurs, ce n'est pas tant un débat qu'une occasion d'exprimer clairement nos sentiments, en tant que parlementaires, et d'assumer pleinement nos responsabilités. Je suis convaincu qu'il n'y a personne ici qui aime particulièrement le sujet dont nous parlons.

Le premier ministre faisait remarquer que nous pouvons au moins discuter de la question avant qu'une décision ne soit prise. Certains pourront s'inscrire en faux contre ces propos, mais je crois que c'est effectivement le cas. C'est d'ailleurs un des nombreux principes qui distinguent les Canadiens.

C'est là une des caractéristiques propres au Canada. Selon une anecdote, la distance qui sépare les banquettes ministérielles des banquettes de l'opposition correspond à l'écart qu'il y aurait entre deux personnes qui se tiendraient face à face à la lisière des banquettes en tenant chacune à bout de bras une épée pointée dans la direction de l'autre et dont l'extrémité toucherait à peine celle de l'autre. Cette anecdote illustre le fait que nous ne sommes pas un peuple belliqueux et que nous préférons régler nos différends dans des endroits comme celui-ci, que nos armes sont notre intelligence, nos munitions nos paroles et que nos victimes sont souvent nos idées et non pas des gens. Du même coup, nous remportons nos victoires avec des idées et, dans certains cas, par leur mise en oeuvre.

Nous ne sommes pas un peuple au tempérament belliqueux. Nous tentons le plus souvent de parvenir à un consensus, à une solution de compromis et nous recherchons toujours l'accord négocié. Je crois que, de façon générale nous continuerons de vivre conformément à ces principes canadiens fondamentaux. La diplomatie est la principale affaire du Canada et de ses représentants partout dans le monde.

Toutefois, lorsque nous y sommes contraints, lorsqu'il est impossible de parvenir à un consensus et à une solution de compromis et que la négociation n'aboutit à rien, il arrive que pour faire respecter nos principes et notre mode de vie nous soyons obligés de prendre des décisions difficiles. Malheureusement, la grande démocratie qu'est le Canada se trouve précisément dans cette situation.

Avant de déterminer le contenu du message que j'entendais livrer à la Chambre des communes et aux Canadiens ce soir, et en particulier à mes électeurs, j'ai consulté une de mes bonnes amies, la députée de Thornhill, au sujet de certaines questions. Elle me disait qu'il y a sept ans, des résidents de sa circonscription regardaient un reportage du réseau CNN qui montrait des gens regroupés dans des abris et portant des masques à gaz pendant que Tel Aviv était la cible de missiles Scud.

Nous savons évidemment tous qu'Israël est une des principales cibles de Saddam Hussein. Ma collègue me disait qu'il y a des gens dans sa circonscription, et je me suis dit qu'il y en avait probablement aussi dans la mienne, où se trouve la synagogue Shaarei, qui suivaient ce reportage et qui s'inquiétaient d'amis et de parents en danger. Aujourd'hui, sept ans plus tard, ces gens sont témoins de la même situation, ou presque, et voient des gens faire la queue pour obtenir des masques à gaz.

Je trouve incroyable qu'en 1998, dans un monde si petit, des civils soient obligés de faire la queue pour obtenir des masques à gaz en prévision d'une guerre chimique. Comment pouvons-nous tolérer cela? Comme je l'ai dit, lorsque le compromis a échoué, nous devons examiner une solution de rechange.

 

. 2120 + -

Je me suis également entretenu avec un bon ami, un chauffeur de taxi d'Ottawa. Il s'appelle Mel. Mel est originaire du Liban. Il m'a souligné que le Liban devient le champ de bataille de bon nombre des guerres qui ont lieu au Moyen-Orient et m'a décrit la terrible injustice, la douleur, le massacre, la mort et la souffrance qui existent dans son pays. Il m'a imploré de dire à la Chambre: «Je vous supplie tous d'arrêter le massacre.» C'est facile à dire. Dans un monde idéal, nous aimerions tous pouvoir le faire, que ce soit au Moyen-Orient, en Irlande ou ailleurs dans ce monde. J'ai dit à Mel: «Je ne suis pas sûr de savoir comment.»

Est-ce qu'une action militaire mettra un terme à cela? Seulement si elle est unie, seulement si elle est forte et seulement si toutes les autres possibilités que sont la diplomatie, le compromis et le consensus ont échoué et que nous nous unissions pour régler ce problème une fois pour toutes.

Nous sommes dans un partenariat. Nous ne pouvons pas jouer sur les deux tableaux. Nous ne pouvons pas appartenir à l'OTAN et compter sur la protection des forces de l'OTAN et celle des États-Unis, compter sur nos relations avec eux, puis, lorsque surgit la perspective d'un conflit, dire: «Désolés, mais nous n'allons tout simplement pas participer à cela.»

Ce que le président Clinton a apparemment demandé, nous dit-on, c'est du soutien. Il ne veut pas de soldats à envoyer sur la ligne de front. Je le déplore, mais je crains que ce jour n'arrive. Je présume que, en réalité, c'est fort possible.

Le fait est qu'il y a des hommes et des femmes qui ont lutté contre la tyrannie dans notre pays, des grands-pères, des parents, des tantes et des oncles de bon nombre d'entre nous ici présents, qui sont morts pour la démocratie, pour les principes que sont le consensus, le compromis et les règlements négociés.

Cela est très bien lorsque nous parlons de périodes de paix. Nous ne parlons pas ici d'une grève ou d'une négociation collective. Nous parlons d'une personne qui refuse tout simplement, après qu'on lui ait donné toutes les chances raisonnables, de respecter non pas un diktat de Bill Clinton, non pas un diktat du premier ministre ou du Royaume-Uni, mais une résolution des Nations Unies qui dit clairement que les armes chimiques devraient être interdites. Il refuse d'accorder à des équipes indépendantes des Nations Unies un accès à des endroits où nous craignons qu'il entrepose ces armes.

S'en servira-t-il? À mon avis, cela ne fait absolument aucun doute. Si nous, en tant que société libre, courbons l'échine devant cette tyrannie, toutes les autres possibilités ayant échoué, nous rendons un très mauvais service à nos enfants, qui placent leur confiance en nous dans la prise de ces décisions. J'espère et je prie que ce sont les bonnes décisions.

Mais finalement, outre les principes dont j'ai parlé, je crois qu'il est un principe canadien solide, clair et concis auquel nous devons nous conformer, à savoir que nous devons soutenir nos amis, les appuyer—pas en toutes choses, pas si nous estimons qu'ils ont tort. Mais dans ce cas, la preuve est irréfutable.

La scène mondiale est si petite que tout le monde peut voir que Saddam Hussein est prêt à n'importe quel moment—nous ignorons lequel—à recourir sans scrupules à n'importe quelle arme—nous ne savons pas laquelle. Vivre dans un monde comme celui-là est très effrayant.

À ceux qui parlent en toute sincérité, je dirai que je ne doute pas un instant de leur sincérité, de leur passion, de leur aspiration à la paix. Je ne doute pas que personne parmi nous ne souhaite voir son pays aller à la guerre. Je ne pense pas que qui que ce soit dans cette assemblée soit en faveur de la guerre. Je crois que nous devons faire abstraction de toute passion et continuer de discuter, mais je crois aussi que nous devrons à un moment donné reconnaître que Saddam Hussein n'écoute pas et que nous sommes en train de compromettre la sécurité non seulement du Moyen-Orient, d'Israël et du Liban, mais aussi celle du Canada.

 

. 2125 + -

Personnellement, je ne resterai pas là à ne rien faire et à prier pour que nous continuions d'avoir des réunions et des discussions. Je pense que la décision que prendront demain le premier ministre et le cabinet sera extrêmement importante, et je l'appuie sans réserve.

[Français]

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec mon collègue de Richmond—Arthabaska.

[Traduction]

C'est avec un certain regret que j'interviens aujourd'hui à la Chambre, parce que le gouvernement du Canada a accepté d'envoyer nos troupes dans une zone de conflit. Ne vous y trompez pas. J'ai appris des leçons que ce siècle nous a enseignées. Je comprends que lorsqu'on permet à la tyrannie de régner, le monde entier est en danger. Ce n'est pas la décision du gouvernement qui offense les Canadiens, mais bien la façon dont elle a été prise.

La semaine dernière, à la Chambre, mon parti a présenté une motion pour tenir un débat à la Chambre sur la possibilité ou non pour le Canada de participer à une intervention militaire menée par les États-Unis contre l'Irak. Le gouvernement a rejeté la motion en considérant que la question était hypothétique. Le ministre des Affaires étrangères est même allé dire sur les ondes de la télévision nationale qu'on ne pouvait prendre une décision tant qu'on ne savait pas ce qui était décidé. Ce sont des paroles comme celles-là qui donnent confiance à tous les Canadiens.

Nous savons maintenant ce qui a été décidé. Malheureusement pour la Chambre et chose plus importante, malheureusement pour tous les Canadiens, la décision n'est pas venue du cabinet du premier ministre, mais bien directement de la Maison Blanche, à Washington. Comme tous les Canadiens le savent, c'est parce que le président Clinton a téléphoné au premier ministre pour lui demander une faveur que nous discutons à la Chambre du rôle de notre nation.

Ce n'est pas parce que le premier ministre a compris la semaine dernière qu'il y avait une situation de plus en plus dangereuse dans le golfe Persique qui pourrait toucher la vie de jeunes Canadiens. Ce n'est pas parce que le premier ministre a été prévoyant que nous sommes ici. Ce n'est pas non plus parce qu'il veut défendre ce qu'il croit être juste. Nous sommes ici parce que le président Bill Clinton a demandé au premier ministre de lui faire une faveur.

Nous sommes heureux que le premier ministre ait finalement compris que le Canada devait jouer un rôle, que des dangers se posent dans le monde entier et qu'il ait décidé d'acquiescer à la demande du président. Notre seule préoccupation, c'est que les dirigeants du Canada n'ont pas la compréhension voulue et le courage nécessaire pour garantir aux Canadiens en quoi consistera notre rôle.

Le débat de ce soir est un excellent exemple de la façon dont le gouvernement libéral ne respecte tout simplement pas les gens qu'il représente. Nous sommes en plein débat sur la décision la plus importante qu'un gouvernement pourra jamais prendre, à savoir la décision d'envoyer des jeunes hommes et des jeunes femmes risquer leur vie. Rappelez-vous que le gouvernement a donné suite à la demande américaine parce qu'il y a un danger dans la région, il y a une menace de guerre. Même si c'est une pensée terrible, il faut savoir qu'en cas de guerre, des gens risquent de mourir.

Le gouvernement estime que la question est suffisamment grave pour justifier que l'on mette la vie de Canadiens en danger, mais pas suffisamment pour que la motion sujet du débat de ce soir fasse l'objet d'un vote. Il estime qu'elle est suffisamment grave pour permettre aux députés de poser des questions aux ministres, mais il ne trouve pas que mettre la vie de jeunes Canadiens en danger soit suffisamment important pour s'assurer qu'il y ait au moins 20 députés présents à la Chambre pour débattre cette question.

Je me suis levé pour poser des questions sur l'état de préparation du Canada en vue de cette mission. Je voulais demander au gouvernement de quelles forces il disposait et si elles étaient prêtes à partir. J'ai tellement de questions à poser au gouvernement, mais il ne veut pas me répondre. Par exemple, le Livre blanc sur la défense proposait que les forces canadiennes comprennent un quartier général de force opérationnelle interarmées et un groupe opérationnel maritime, trois groupements tactique et un groupe-brigade, un escadron de chasseurs et un escadron d'aéronefs de transport. Je voulais demander au gouvernement s'il avait donné suite à ces recommandations et si ces forces étaient en place, mais il n'y a personne chez les ministériels capable de me donner une réponse.

 

. 2130 + -

Je voulais demander si nous disposions de forces terrestres suffisantes et, dans l'affirmative, de quelles unités s'agirait-il? Disposons-nous de forces aériennes et, dans l'affirmative, de quelles unités s'agirait-il? Disposons-nous de forces navales et, dans l'affirmative, de quelles unités s'agirait-il? Il n'y a personne du côté des ministériels pour répondre à mes questions, et pourtant, elles sont pertinentes.

Par exemple, quel est l'état de notre défense contre les agents chimiques et biologiques? Possédons-nous un antidote à l'anthrax et au gaz VX? Combien de membres des forces canadiennes ont récemment suivi un cours sur la guerre dans le désert? Quelle est l'étendue de notre défense contre les armes chimiques et biologiques?

Ce n'est pas pour faire peur aux Canadiens que je soulève ces questions, c'est pour que le gouvernement puisse rassurer nos militaires et leurs familles en leur disant que le gouvernement du Canada fait attention à eux et qu'il prendra toutes les mesures nécessaires pour qu'ils courent le moins de danger possible. Je me demande pourquoi le premier ministre n'a pas rappelé à la Chambre que la première fois où des gaz toxiques ont été employés, c'était contre des militaires canadiens, au cours de la Première Guerre mondiale.

Nous enverrions maintenant des militaires dans une région parce que Saddam Hussein a des armes chimiques et biologiques. J'espère que le gouvernement comprend bien la responsabilité qui lui incombe. Nous savons quand même que ce sont des décisions difficiles pour le gouvernement libéral. Le téléphone du président a réduit les délais. Nous n'avons pas le temps de sonder l'opinion publique. On nous a posé une question que le premier ministre ne peut pas éluder. Il ne peut pas faire l'autruche non plus. Il devra prendre une décision et agir en conséquence.

Nous ne pouvons nous dérober, il faut adopter une position de principe. Le gouvernement libéral n'en a pas l'habitude. C'est nouveau pour lui, surtout s'il faut pour cela se ranger du côté de la Grande-Bretagne et des États-Unis.

Je vais essayer de me rendre utile. Je suggère que nous facilitions les choses pour le gouvernement. Il n'est pas nécessaire qu'il manifeste son appui aux États-Unis. Il peut se contenter de dire qu'il appuie les Nations Unies, la primauté du droit et les principes propres aux États civilisés et responsables.

L'Irak est un agresseur. Ce pays a été puni en 1991, et il n'a toujours pas réintégré la communauté internationale, parce qu'il refuse de respecter ses obligations en vertu des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. Ces résolutions sont toujours en vigueur.

La décision du gouvernement ne devrait donc pas être si difficile à prendre. Le Canada peut décider de se ranger dans le camp de ceux qui prennent au sérieux les résolutions que l'ONU a adoptées à l'égard de l'Irak en 1991, y compris la mise en oeuvre de ces résolutions, ou alors, dans le camp de ceux qui veulent minimiser l'importance des Nations Unies.

Le fait d'adhérer aux principes n'accroîtra pas trop et ne diminuera guère notre rôle sur le plan militaire. Après tout, on nous a demandé de contribuer relativement modestement aux efforts déployés et à l'appui manifesté en faveur du respect intégral des résolutions du Conseil de sécurité.

Le gouvernement actuel est-il prêt à prendre ces résolutions au sérieux ou est-il disposé à les voir constamment ignorées?

De ce côté-ci de la Chambre, nous n'avons jamais trop compris si, de l'avis des libéraux, il vaut toujours mieux détourner le regard, si le Canada devrait se ranger dans le camp de ceux qui, face à l'illégalité, préconisent l'attente et les pourparlers et qui, face à de véritables difficultés, s'enfoncent la tête dans le sable. Si c'était le cas, cela expliquerait la politique que les libéraux ont antérieurement adoptée dans ce dossier.

Après tout, c'est le premier ministre qui, lorsqu'il était chef de l'opposition, a demandé le rapatriement de tous les soldats canadiens dès qu'il y a eu les premiers tirs pendant la guerre du Golfe, en 1991. J'espère qu'il conservera le courage dont il fait montre aujourd'hui si les efforts diplomatiques échouent et qu'il y a de nouveau des tirs. Il aura besoin de courage. Tout le Canada et tous les pays du monde en auront besoin parce qu'il est impossible de savoir comment Saddam réagira à partir du moment où l'on procédera à des tirs. C'est précisément pour cette raison que le Canada doit intervenir.

L'adhésion à un principe est toutefois une tâche complètement nouvelle pour le chef du Parti libéral. Cependant, s'il tient bon, mon parti sera son allié, et tous ceux qui ont à coeur la justice se rangeront à ses côtés; il constatera la solidité de sa prise de position.

Alors que le Canada s'engage dans ce périple avec ses alliés, je profite de l'occasion pour donner, à tous ceux qui ont à coeur la paix dans la circonscription de Compton—Stanstead, au Québec, au Canada et dans le monde entier, l'assurance que nous n'avons pas oublié les leçons du présent siècle. Lorsqu'on laisse la tyrannie s'installer, le monde entier est en danger. Lorsque la liberté est menacée, il faut intervenir. Nous devons croire que le Canada est dans le bon camp.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, je débuterai en couvrant très rapidement trois grands points.

 

. 2135 + -

Premièrement, la question du débat ce soir. Essentiellement, ce n'est pas un débat, puisqu'il n'y a pas de confrontation d'idées. Cela ressemble plus à un confessionnal où chacun doit dire ses petits péchés et ce qu'il pense de la question de l'Irak. Nous sommes extrêmement déçus.

Depuis le 1er février, nous avons demandé d'avoir des rencontres avec le ministre des Affaires étrangères—cela s'est fait le dimanche 1er février—avec le ministre de la Défense, ainsi qu'avec le premier ministre. On nous l'a refusé en disant qu'il n'y avait pas de crise. On a aussi demandé un débat d'urgence en Chambre; cela a été refusé.

On l'a vu dans la déclaration du premier ministre; ce soir, on nous dit: «On a besoin de vous, les parlementaires. Le Parlement ne sait pas quoi faire, n'a pas de position, alors, on a besoin de vous.» C'était l'objectif du débat de ce soir.

Lorsque le premier ministre s'est mis à parler, cela ressemblait plus à une déclaration de guerre qu'à autre chose. C'était une position officielle disant que le Canada allait appuyer les États-Unis—pas l'ONU—les États-Unis, pour une intervention armée en Irak. Si on lit les déclarations de guerre des dernières cent années, cela ressemble à ce que le premier ministre a dit. Il a dit: «Je n'ai pas de position, j'ai besoin de vous.»

Quand le député de Sherbrooke disait que le gouvernement n'avait pas de position, le ministre des Affaires étrangères disait qu'il n'avait pas écouté ce qu'avait dit le premier ministre, qu'il avait une position. Quand le ministre des Affaires étrangères a pris la parole, il a dit: «On n'a pas de position, on a besoin de vous.» Je pense que ce gouvernement a vraiment un réel problème de crédibilité, surtout sur la scène internationale.

Je vais lire une citation, c'est une traduction cependant, de ce que disait le ministre des Affaires étrangères, alors qu'il était dans l'opposition. Il demandait au gouvernement de l'époque «l'assurance que le gouvernement n'engagerait aucune action offensive ou ne supporterait aucune action offensive tant et aussi longtemps qu'il n'y aurait pas un consentement en cette Chambre et que ce ne serait pas sous l'égide des Nations unies».

Lorsqu'on parle du consentement de la Chambre, il faut être capable de voter sur quelque chose. Mais je vais y revenir plus loin. Lorsqu'on parle des Nations unies, on entend dire que la fameuse Résolution 687 donne libre cours à toute intervention. Aujourd'hui, j'ai posé une question à la Chambre à ce sujet, pour savoir quelle était l'interprétation que le ministre des Affaires étrangères en faisait.

Je vous le rappelle, cette résolution a été adoptée le 3 avril 1991. Ce n'est pas une nouvelle résolution. C'est une résolution qui est évaluée tous les six mois, mais ce n'est pas une nouvelle résolution. C'est la résolution qui demandait, entre autres, de faire en sorte que tous les pays quittent l'Irak et le Koweït.

La résolution dit que «tous les pays doivent quitter l'Irak et le Koweït, que l'intégrité du territoire est reconnue et doit maintenant être maintenue». C'est une très longue résolution qui dit qu'on a le droit d'intervenir. Mais dans cette résolution, les cinq grands pays, les pays qui siègent au Conseil de sécurité des Nations unies, étaient tous d'accord: la Chine, la France, la Russie, l'Angleterre et les États-Unis. Aujourd'hui, la Chine, la France et la Russie ne sont pas d'accord.

Alors, avant de dire qu'on va se servir de cette résolution pour intervenir en Irak, il faudrait peut-être savoir ce que, au niveau diplomatique, les Russes, les Français et les Chinois vont faire. Vont-ils présenter, dans les jours qui viennent, une résolution au Conseil de sécurité demandant de modifier la Résolution 687?

Aujourd'hui, nous avons posé des questions au ministre des Affaires étrangères. Il ne semble pas être au courant. Il dit: «Oui, mais vous savez, c'est difficile.» On semble dire qu'il faut se dépêcher à envahir l'Irak, à donner une leçon à Saddam Hussein, parce que la Résolution 687 risque de ne plus être en vigueur ou risque d'être modifiée.

Ce que nous voulons encore, c'est que le gouvernement puisse s'asseoir avec les parlementaires. On a appris ce soir que le Comité des affaires étrangères serait saisi de la question demain.

Encore là, j'ouvre une petite parenthèse. On nous a dit que demain après-midi, le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international pourrait en discuter, que nous aurions une séance d'information sur la question de l'Irak. Ce soir, le premier ministre nous a dit que le Cabinet prendrait position demain matin. Le Comité des affaires étrangères va avoir une séance d'information, alors que le gouvernement aura pris position. Cela fonctionne à l'envers. C'est à l'envers sans bon sens. Ce n'est pas crédible.

Notre position n'a pas changé. Nous appuyons la position du gouvernement. Vous n'en avez pas, mais celle que vous êtes censé avoir, on va l'appuyer. Nous, nous avons une position.

 

. 2140 + -

Ce qu'on demande, c'est peut-être de partager les informations et, à ce moment-là, vous aurez le consentement de cette Chambre. Mais présentement, vous ne l'avez pas.

Alors, sur la question de la résolution, j'aimerais qu'on fasse attention de la citer. J'aimerais aussi que le ministre des Affaires étrangères prenne une position très claire par rapport à la Chine, à la Russie et à la France. Lorsqu'il parle à ses homologues de ces trois pays, qu'il leur demande s'ils vont changer la Résolution 687, ou si c'est seulement de la diplomatie, de la belle publicité, du marketing.

Ce soir, je ne suis pas sûr que la diplomatie soit le fort du ministre des Affaires étrangères, en tout cas, pas aujourd'hui. Tout de suite après son discours, qui a suivi celui de l'honorable député de Sherbrooke, avez-vous vu sa réaction? Est-ce que c'est cela, de la diplomatie? Pour reprendre une expression de chez nous, il a poigné les nerfs. Il a poigné les nerfs sur un débat qui n'en est pas un à la Chambre. Que va-t-il faire au Conseil de sécurité? Que va-t-il faire lorsqu'il va s'adresser à la Chine et à la Russie?

Nous, on ne demande que de collaborer. On l'a fait. Mon chef l'a fait, dimanche 1er février, en appelant le premier ministre. Le député de Compton—Stanstead a logé des appels au bureau du ministre de la Défense nationale. On a fait des appels dimanche, le 1er février, mais malheureusement, le ministre était à l'extérieur pour affaires, on le comprend. Donc, on a été incapables de joindre qui que ce soit et, lundi, ce qu'on nous a dit, c'est que c'était plus ou moins pressant, mais qu'on pouvait nous rencontrer si nous le voulions. Les États-Unis ont été plus rapides que le gouvernement du Canada à nous demander si on était intéressés à avoir une séance d'information. Alors, je crois qu'il y a des problèmes.

Je veux mentionner deux petites choses en terminant, pour ne pas prendre trop de temps. J'aimerais faire une autre citation. Je sais que le ministre des Affaires étrangères n'aime pas tellement cela, mais je vais en faire une. En février 1992, après le conflit, le ministre, qui était alors député, disait: «Il importe que le Canada ait une politique dans ce domaine. Il importe que les Canadiens sachent quelle politique adoptera le gouvernement fédéral lorsqu'il sera engagé dans de grandes initiatives internationales. Il est crucial que nous sachions quels buts, objectifs, valeurs, motivent et colorent ce genre d'initiatives. Il ne s'agit pas seulement de réagir de façon machinale, il s'agit de faire des choix, d'apporter des jugements et de tenir un bon débat public.»

Je pense que le ministre avait une chance aujourd'hui d'agir conformément à ce qu'il disait en 1990, 1991 et en 1992. Il ne le fait pas et c'est très malheureux.

[Traduction]

Monsieur le Président, je demande le consentement unanime pour présenter la motion suivante:  

    Que, lorsque le gouvernement du Canada aura arrêté sa décision sur la réponse qu'il fera à la demande du président des États-Unis d'aide dans la crise iraquienne, le premier ministre annonce cette décision à la Chambre des communes au moyen d'une déclaration ministérielle et, tout de suite après, qu'il tienne une période de questions spéciale ne dépassant pas 45 minutes pour que tous les partis puissent poser des questions.

[Français]

Pourquoi? C'est que nous aimerions avoir l'assurance du gouvernement et du premier ministre que, avant que M. Clinton, M. Blair ou je ne sais trop qui soit informé de la position canadienne, les députés de cette Chambre le soient, et que si le gouvernement veut avoir le consentement de cette Chambre, comme souhaité par le passé par le député de Winnipeg-Centre-Sud, aujourd'hui ministre des Affaires étrangères, qu'il présente cette motion devant la Chambre et qu'elle fasse l'objet d'un débat et d'un vote. Alors, un peu de solidarité et un peu de travail parlementaire ne feront pas de tort.

[Traduction]

Le vice-président: Le député de Richmond—Arthabaska a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Je regrette, il n'y a pas consentement unanime.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, il va sans dire que la Chambre tient un important débat ce soir. Pour ma part, je voudrais souligner que je suis très fière que nous tenions ce débat.

Nous avons été confrontés au même problème en 1991.

 

. 2145 + -

Le député de Richmond—Arthabaska ne semble pas en être conscient. Son chef, qui faisait pourtant partie du Cabinet à l'époque, ne semble pas l'avoir informé que le gouvernement d'alors s'était engagé à envoyer des troupes au combat armé sans une seule seconde de débat à la Chambre.

Le débat ne s'est tenu que 12 jours après que le prédécesseur du chef du Parti conservateur à la Chambre des communes, lequel était ministre à l'époque, eut pris cet engagement. Le chef du Parti conservateur devrait donc s'abstenir de tenir ce genre de propos aujourd'hui, à moins qu'il ne veuille réécrire l'histoire.

Il n'y a pas de doute que c'est une horrible décision à prendre pour un gouvernement, car un conflit militaire met en péril la vie de ses citoyens. C'est une horrible décision, car lorsque l'on sort les armes il y a des victimes.

C'est une horrible décision car, alors que l'on envisage la possibilité de bombarder l'Irak, nous savons que certaines des bombes détruiront des armes chimiques et biologiques et que cette destruction risque de libérer des substances dangereuses.

C'est une horrible décision car, lorsque l'on se lance dans une entreprise comme celle-là, on ne sait jusqu'où les choses iront, quels autres conflits cela risque de déclencher.

Tous les électeurs qui m'ont appelé aujourd'hui, à un près, m'ont dit à propos du débat de ce soir: essayez de faire en sorte que le Canada continue ses efforts en vue d'une solution diplomatique. Je pense que la Chambre sait, sans aucun doute, que c'est la solution préférée. Je pense qu'il ne fait aucun doute que c'est la solution préférée de notre gouvernement. Mais il arrive un moment où les initiatives diplomatiques exigent que nous prouvions à l'autre côté que nous sommes résolus à agir si elles ne conduisent pas au résultat voulu.

Laissez-moi vous dire comment je vois la situation. Peu après la guerre du Golfe, en 1991, les Nations Unies ont imposé des sanctions économiques à l'Irak en plaçant entre les mains de Saddam Hussein la possibilités de lever ces sanctions, la possibilité d'avoir de nouveau des aliments, des médicaments, des produits économiques en Irak. L'ONU a imposé une seule condition: l'élimination et la destruction complète de toutes les armes de destruction massive existant en Irak.

Depuis 1991, la possibilité de faire lever les sanctions économiques, la possibilité de reprendre le commerce et de profiter des avantages économiques que cela donnerait à la population d'Irak est clairement entre les mains du dirigeant iraquien, Saddam Hussein. Plutôt que de collaborer avec les Nations Unies pour assurer l'identification, la destruction et l'élimination de ces armes, il a menti, il a nié et il a défié la volonté des nations du monde, telle qu'elle s'exprime dans les résolutions des Nations Unies.

Nous savons qu'il existe une quantité énorme d'armes biologiques, chimiques et nucléaires en Irak, grâce à la détermination d'une force multinationale des Nations Unies qui est sur place et qui s'efforce de faire respecter la résolution de 1991. Cependant, sept ans après cette résolution, l'Irak refuse toujours l'accès à des sites comme, imaginez un peu, une usine de trois kilomètres sur six kilomètres capable de produire 50 000 litres d'anthrax, de botulinum et d'autres armes destructrices.

 

. 2150 + -

Nous avons dit que des millions de personnes pouvaient être tuées par un missile transportant ce genre d'armes chimiques et biologiques. Ce que nous n'avons pas encore dit, c'est que ces armes ne connaissent pas les frontières. Le botulinum et l'anthrax ne limitent pas leurs effets aux populations que l'on prévoyait décimer à l'origine, sans détruire les biens, je le précise. À mon sens, il s'agit là d'un type d'arme très obscène car on s'attaque délibérément à la vie humaine en épargnant la propriété.

Je crois que le Canada n'a pas le choix, il doit faire savoir à l'Irak et à Saddam Hussein que le monde fera appliquer la résolution des Nations Unies. Nous poursuivrons nos efforts diplomatiques, mais, au bout du compte, nous ne permettrons pas que se poursuive cette accumulation d'armes mortelles. Au moment de prendre notre décision, j'espère que notre réflexion ne porte pas seulement sur le court terme. J'espère sincèrement que nous n'aurons jamais à appliquer cette décision, mais j'espère aussi que nous pourrons voir plus loin que tout cela. Je pense que tous les Canadiens sont fiers du leadership dont fait preuve le Canada depuis tout juste un an pour interdire, au niveau mondial, la production, l'utilisation et la vente de mines terrestres.

La situation en Irak nous oblige à nous poser d'autres questions très délicates et nous fait comprendre que le problème que pose l'Irak ne se réglera pas seulement en Irak. Nous devons déterminer pourquoi et comment on a fourni, et qui a fourni, les produits chimiques et les ingrédients qui ont permis à Saddam Hussein d'amasser tout un arsenal d'armes meurtrières.

Si nous prenons le débat de ce soir au sérieux et si le monde entier prend la situation en Irak au sérieux, il faut alors nous demander dans quels autres pays sont entreposées des armes chimiques, biologiques et nucléaires. Si ces armes représentent une telle menace en Irak, comment allons-nous réagir à la menace qu'elles posent ailleurs dans le monde? Il faut nous demander quelles armes sont accumulées ailleurs dans le monde, souvent avec la complicité de pays qui veulent aujourd'hui régler la situation en Irak.

Enfin, il faut que le Canada exerce son influence morale sur les dernières tentatives de négociations diplomatiques qui ont une chance, du moins espérons-le, de réussir. Il faut qu'un pays comme le Canada, et non seulement les grandes puissances, participent à cette démarche. Nous n'avons jamais été une force impériale. Nous n'avons jamais été une force militaire capable d'anéantir et de dominer d'autres nations. Nous avons toujours représenté une force moyenne, la voix de la raison dans les affaires internationales.

J'espère que, en participant à cette dernière tentative de solution diplomatique, nous transmettrons un message important aux autres États.

J'aurais une dernière requête à présenter au gouvernement. On s'inquiète encore des répercussions que les armes chimiques ont pu avoir sur la santé personnelle et la sécurité de nos militaires qui ont servi pendant la guerre du Golfe en 1991.

 

. 2155 + -

Avant d'envoyer nos troupes au Moyen-Orient, si cela devenait inévitable, j'aimerais bien que le ministre de la Défense ait un plan d'action pour protéger la santé de nos militaires et veiller à ce qu'ils reçoivent tous les soins nécessaires à leur retour s'ils ont été exposés à certaines substances nocives au Moyen-Orient. Je suis heureuse d'avoir eu l'occasion de participer au débat de ce soir.

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais d'abord remercier le premier ministre d'avoir permis la tenue de ce débat et d'avoir donné à des députés comme moi l'occasion d'exprimer librement leurs opinions et de parler selon leur conscience.

Certes, je ne partage pas nécessairement l'opinion majoritaire de mon parti, mais il me faut exprimer mon point de vue. Une question se pose.

[Français]

Devrions-nous ou non participer à une opération militaire conduite par les États-Unis et leur fournir l'aide logistique demandée?

S'il y a un consensus au sein de ce débat, c'est qu'on ne peut aucunement tolérer la dictature, la brutalité, la sauvagerie et la lâcheté de Saddam Hussein et ses contraventions systématiques contre les droits de la personne, surtout ceux du peuple kurde. On ne peut tolérer que Saddam Hussein et le gouvernement de l'Irak continuent avec impunité à défier tant les résolutions que les équipes d'inspection des Nations unies. On ne peut tolérer que l'Irak et son gouvernement continuent de produire des armements biologiques et chimiques aptes à détruire des populations par millions dans le monde.

Mais s'il y a un consensus complet au sujet de la dictature de l'Irak et celle de Saddam Hussein, il y a certainement un manque de consensus aussi sur les moyens à utiliser pour convaincre le dictateur irakien et son gouvernement à suivre la voie de la démocratie et de la raison et à obéir aux résolutions des Nations unies.

[Traduction]

Malheureusement, je dois admettre, et ce n'est pas de gaîté de coeur, que les États-Unis sont devenus peu à peu le Lone Ranger du nouvel ordre mondial. J'ai beau adorer les États-Unis et les Américains, n'empêche qu'on dirait que depuis Eisenhower et à l'exception du bref interlude de Jimmy Carter, les présidents américains ont tous accusé un net penchant pour la méthode O.K. Corral, avec la conviction que les États-Unis ne peuvent avoir tort.

Le problème, c'est que leur politique belliqueuse a eu des répercussions de beaucoup plus sérieuses pour l'ordre mondial que n'en a eu la fusillade d'O.K. Corral. Il y a eu le débarquement à la baie des Cochons sous le président Kennedy, la guerre du Vietnam sous le président Johnson et l'extension du conflit vietnamien avec les bombardements massifs du Laos et du Cambodge sous Nixon, la brève accalmie sous Jimmy Carter et l'invasion de Grenade sous le président Reagan. Et puis il y a eu bien sûr l'Irangate. Plus récemment, sous le président Bush, ce fut Panama et la guerre du Golfe en 1991.

À écouter les nouvelles, il me semble que le président Clinton et ses conseillers s'apprêtent eux aussi au combat, impatients d'en découdre, cette fois-ci, avec l'Irak.

Il faut rendre justice au président Bush. L'Irak avait envahi un pays voisin et les Nations Unies avaient donné leur appui sans réserves à l'opération militaire destinée à libérer le Koweït.

[Français]

Plusieurs pays du monde arabe avaient appuyé le déploiement dans le Golfe, et l'Arabie Saoudite avait accepté l'utilisation de son territoire à cette fin.

[Traduction]

La réalité d'aujourd'hui est bien différente. L'Irak ne menace pas d'envahir un voisin, il n'en a plus les moyens. L'activité diplomatique bat son plein et des pays importants comme la Russie et la France, qui sont membres du Conseil de sécurité, sont très actifs dans ce dossier.

 

. 2200 + -

L'appui n'est pas net, ni à l'ONU, ni dans le monde en général ni certainement dans le monde arabe. L'Arabie saoudite refuse pour l'instant que son territoire serve à quelque opération militaire que ce soit.

[Français]

Les seuls pays qui appuient les États-Unis sont le Royaume-Uni qui, traditionnellement, joue le rôle d'amitié particulière avec les États-Unis, et de façon partielle, l'Allemagne. Pourquoi, dans les circonstances, devrions-nous accepter de participer à une opération militaire éventuelle?

[Traduction]

Le temps est à la prudence. J'appuie mon collègue de Davenport qui exhortait à la prudence, à la retenue et à la poursuite des activités et des pressions diplomatiques dans lesquelles nous devrions avoir un rôle important à jouer. Nous ne devrions pas participer à quelque bombardement ou intervention militaire que ce soit, massive ou autre, qui d'après les avis des experts, ne changera rien à la réalité et ne permettra pas de déloger Saddam Hussein. Cela ne fera que provoquer des tensions internationales et entraîner la perte d'un très grand nombre de vies humaines.

Nous devrions également nous demander si les États-Unis ont vraiment besoin de notre appui logistique pour mener cette mission à bien. Les États-Unis sont une superpuissance possédant ses propres systèmes militaires et logistiques et ils n'ont pas besoin de nous. Ce dont ils ont besoin est d'un nom de plus sur leur courte liste d'épicerie; ils aimeraient bien ajouter un autre pays aux deux autres qui les appuient déjà pour leur donner plus de poids.

Compte tenu des conditions actuelles, on devrait plutôt suivre l'exemple que nous a donné Lester B. Pearson. Je me souviens clairement qu'il a dit personnellement en territoire américain au président Johnson au cours de la guerre du Vietnam que cette opération militaire était contraire au bon sens et qu'elle ne respectait ni la vie humaine, ni l'opinion mondiale.

Je demande au premier ministre et au ministre des Affaires étrangères de dire au président Clinton que sa demande est prématurée et que toutes les solutions diplomatiques n'ont pas été explorées. Compte tenu de la crédibilité que nous avons au niveau international, nous devrions en profiter pour diriger l'effort diplomatique face à l'Irak. Nous devrions nous joindre à la Russie, à la France, à l'Allemagne et aux autres pour leur demander de respecter l'ordre mondial. Je demande avec instance que l'on fasse preuve de prudence et de retenue et qu'on continue d'exercer des pressions politiques.

La réponse que nous devrions donner au président Clinton est que tant que toutes ces options n'ont pas été explorées et épuisées, nous nous devons de remettre toute intervention à plus tard. Pour l'instant, nous devrions dire non.

M. Bob Kilger (Stormont—Dundas, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des pourparlers entre les représentants de tous les partis à la Chambre et vous devriez obtenir le consentement à l'égard de la motion suivante:  

    Que pour la durée du débat sur la motion maintenant devant la Chambre, la présidence n'acceptera pas de demande proposant des motions du consentement unanime.

[Français]

Le vice-président: Le whip du gouvernement a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer cette motion?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, je me lève aujourd'hui pour appuyer la prise de mesures déterminées et énergiques visant à forcer Saddam Hussein à observer les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

J'espère surtout que les efforts diplomatiques aboutiront au règlement de cette crise. Toutefois, en cas d'échec de la diplomatie, le Canada est moralement obligé d'appuyer ses alliés dans une attaque militaire contre Saddam Hussein.

 

. 2205 + -

J'ai écouté les discours prononcés à la Chambre ce soir par de nombreux députés. Celui qui me vient d'abord à l'esprit est celui de la députée néo-démocrate de Vancouver-Est, qui a jugé inapproprié d'appuyer la motion proposée et les efforts de nos alliés, les États-Unis et le Royaume-Uni, pour faire observer la résolution.

Le monde devient de plus en plus dangereux. Compte tenu des événements qui se déroulent sur la scène mondiale, il est clair que la liste des conflits s'allonge avec les années.

J'ai récemment conversé avec d'anciens militaires qui m'ont signalé certains aspects concernant des conflits qui se déroulent dans le monde. Il revient à ceux qui ne sont pas à l'origine de ces conflits de défendre fermement une position, de se tenir prêts à intervenir et d'aider ceux qui peuvent être en position de faiblesse face à un agresseur.

Selon la députée néo-démocrate, aucune mesure ne devrait être prise. La députée de Vancouver-Est devrait échanger quelques idées avec son collègue de Saskatoon—Rosetown—Biggar, qui a récemment été agressé un soir dans la rue, pendant qu'il rentrait paisiblement chez lui, à Ottawa.

Il faut mettre un terme aux agressions, tant au Canada, dans sa propre collectivité, qu'à l'échelle mondiale. Il faut qu'un bon service policier efficace et bien armé soit en mesure de faire face à toute situation qui risque de compromettre ou de menacer la paix. De même, il faut qu'une armée soit bien équipée pour traiter avec ceux qui compromettent la paix à l'échelle internationale.

Je crois que le Canada a un rôle à jouer, avec nos alliés, pour tenir en échec certains individus, à l'échelle internationale, qui choisiront d'imposer leur volonté à d'autres. Je crois que le Canada a l'obligation morale de faire cela, que nous devons fournir un appui militaire et politique, que nous devons mettre un terme, avec nos alliés, au terrorisme à l'échelle internationale.

Il ne fait pas de doute que notre gouvernement a la responsabilité d'expliquer bien clairement à tous les Canadiens la situation à laquelle nous sommes confrontés. Nous avons reçu un appel à l'aide de nos alliés. Je sais que, jusqu'à maintenant, le gouvernement n'a pas pris d'engagement à l'égard d'une intervention en Irak et qu'il examine encore la question. Je crois qu'il est important que le gouvernement canadien prenne position et exprime son appui à l'égard d'une intervention contre Saddam Hussein.

Je me souviens de la situation en 1991, lorsque le Canada a appuyé nos alliés de l'OTAN dans une intervention visant à mettre fin au conflit. Il fallait arrêter Saddam Hussein. Je me souviens que beaucoup de membres de la communauté arabe dans notre pays s'inquiétaient du fait que le Canada semblait appuyer les États-Unis, qui, eux, appuyaient Israël. Cela n'avait rien à voir avec la situation. Il s'agissait d'un agresseur qui tentait d'imposer sa volonté à d'autres.

Je crois qu'on doit expliquer clairement à nos amis arabes pourquoi le Canada a appuyé les États-Unis et les autres pays membres de l'OTAN dans cette attaque contre Saddam Hussein. C'est uniquement parce que le Canada avait l'obligation morale de le faire, de débarrasser le monde d'une menace à la paix mondiale.

 

. 2210 + -

Deuxièmement, il est important que les immigrants au Canada venant de cette région comprennent bien que les mesures prises contre un homme comme Saddam Hussein n'ont pas pour but de punir les habitants de la région ou même les Irakiens, mais visent un despote qui cherche à troubler la paix. Saddam Hussein n'a fait aucun effort pour épargner ses propres citoyens en exerçant des exactions contre eux, en violant leurs droits humains et même en les détruisant.

Encore une fois, j'encourage le gouvernement libéral à adopter une position énergique. Je sais qu'il délibérera ce soir et demain à ce sujet. Il nous incombe à nous tous de faire connaître notre opinion comme il l'a demandé et de lui donner notre soutien.

Il est intéressant de noter que le gouvernement britannique a tenu ce débat il y a quelques semaines. En lisant dans le hansard le compte rendu des réactions à la situation en Irak telle que révélée par le rapport de l'ONU sur l'accumulation des divers armements de la part de Saddam Hussein, j'ai constaté que le gouvernement avait fait connaître très clairement la position qu'il allait adopter. Il a invité les députés à poser des questions; il a invité tous les partis de l'opposition à lui poser très légitimement toutes leurs questions.

Ici, au Canada, le gouvernement a décidé de procéder autrement. Quoi qu'il en soit, l'attitude du gouvernement britannique témoigne d'une transparence beaucoup plus grande. Elle invite à offrir un soutien plus grand de façon très opportune. Elle dissipe certainement les craintes de ceux qui peuvent avoir des questions qui restent sans réponse dans le débat actuel. Le cabinet britannique s'est prêté à cette procédure et a fait toute la lumière sur la question. Le débat a été public.

Dès le début, le gouvernement britannique, même s'il avait déployé des troupes et avait un porte-avions dans le Golfe et un autre en route, était toujours favorable au règlement diplomatique de la crise. C'est important.

Il m'apparaît nécessaire que le Canada se range aux côtés des États-Unis et du Royaume-Uni pour les appuyer. Je crois que l'Allemagne s'est aussi ralliée. Saddam Hussein fera bien d'y penser à deux fois s'il veut barrer la route aux inspecteurs de l'ONU. Il devra y réfléchir et ouvrir sa porte. Je crois que c'est là le but de cet effort commun.

Saddam Hussein doit aussi être très conscient que, s'il rejette la demande de nos alliés, il devra faire face à une intervention musclée. Il est beaucoup plus facile de convaincre un dictateur d'obtempérer si on a un porte-avions près de ses côtes et si la menace est immédiate.

Je sais que nous avons la possibilité de déployer nos militaires pour appuyer nos alliés. Je ne suis pas un expert, mais j'ai l'impression que nous avons des troupes très bien équipées dans certains secteurs. Je crois qu'il faut proposer ces troupes. Je suis persuadé que, lorsque le gouvernement prendra sa décision, il le fera en ce sens. Je crois que c'est ce qui va se passer.

 

. 2215 + -

Selon certains, on nous a demandé de nous plier à tous les caprices des Américains. Je voudrais répondre à cette thèse que nous avons entendue quelques fois, une fois du côté du gouvernement et une ou deux fois de ce côté-là. Ceux qui défendent ce point de vue prétendent que le président Clinton cherche à détourner l'attention de ses problèmes intérieurs.

Cela s'est dit au cours du débat au Parlement britannique. Il a été évident que les parlementaires britanniques ne partageaient pas ce point de vue. Le premier ministre Blair et le secrétaire d'État ont dit clairement que la menace était immédiate et qu'elle pesait sur la région et peut-être sur toute l'Europe. Qui peut affirmer qu'un terroriste ne déplacera pas ces armes de destruction massive qui peuvent être facilement amenées en Grande-Bretagne?

Cette question a fait l'objet d'un débat et la réponse disait que Saddam Hussein interdisait à l'équipe d'inspecteurs de l'ONU composées d'Anglais, d'Américains et d'autres personnes, l'accès aux installations soupçonnées d'entreposer certaines substances qui pourraient servir dans le cadre d'une guerre biologique ou chimique. C'était là le problème. On craignait que Saddam Hussein cache d'autres choses aux inspecteurs. Cela n'a aucun rapport avec les problèmes de Clinton aux États-Unis.

Il existe maintenant d'autres éléments qui tendent à prouver que Saddam Hussein constitue une menace pour le monde. Les nations ne font pas que soutenir les Américains, mais aussi le respect des résolutions de l'ONU. Elles font front uni contre un terroriste.

Le Parti réformiste s'est nettement opposée aux précédentes demandes de soutien militaire faites par les États-Unis. Lorsque le président Clinton a demandé à notre premier ministre une aide militaire pour Haïti, nous avons refusé. Pourquoi? Parce que le mandat n'était pas clair. Les règles d'engagement étaient fumeuses et il n'y avait pas de plan de retrait. Les troupes ne sont plus là-bas, maintenant. La situation dans le pays est toujours aussi désespérée. Le chef de l'Opposition officielle a clairement rappelé au gouvernement la nécessité d'un plan, la nécessité d'un mandat précis et d'un contrôle strict sur le déroulement des opérations.

Nous ne disons pas qu'il faut obéir à la baguette aux ordres des Américains. La situation est bien différente de celle en Haïti. La menace est bien plus grande. Il est nécessaire d'avoir un ensemble précis de règles d'engagement, un plan. C'est une chose que nous faisons valoir au gouvernement, car ainsi il pourrait expliquer la situation clairement à la population.

Il est évident que notre soutien à une action militaire ne serait pas simplement une réponse à une demande américaine. Nous irions nous joindre aux Américains, au Britanniques, aux Allemands et aux autres alliés pour nous dresser devant un agresseur terroriste. Nous appuyons l'action lorsqu'elle est nécessaire. Dans le cas présent, une action est nécessaire.

Il appartient au Canada de faire front avec les autres face à un dictateur, face au terrorisme.

 

. 2220 + -

Nous devons démontrer à Saddam Hussein et à tous les Saddam du monde que, lorsque la communauté internationale établit des limites, ce n'est pas simplement pour la forme. Tout le monde admet, même au sud de la frontière, qu'une décision doit être respectée.

Je ne pense pas qu'il serait dans l'intérêt de la communauté internationale que l'on rie d'elle dans son dos parce qu'elle est incapable de faire respecter ses décisions ou n'en a pas la volonté. Il faut que l'on sache que nous pouvons agir si nécessaire.

Nos troupes se sont déjà souvent battues pour la démocratie et la liberté. J'ai eu l'occasion de me rendre en Europe avec des anciens combattants et de les écouter décrire leur expérience, leur dévouement, leur loyauté et leur détermination. Je sais que des députés d'en face ont pris part à de telles excursions. Il est effectivement très émouvant d'écouter des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et d'autres conflits. Moi qui ne suis pas allé à la guerre, je suis ému à les entendre parce qu'ils ont combattu pour la liberté.

Tout au long de l'histoire du Canada, les Forces canadiennes ont montré qu'elles avaient pris l'engagement extraordinaire de défendre la liberté. Chaque fois qu'on a fait appel à nos soldats, ils ont répondu avec une bravoure et une compétence remarquables. Nos forces ont accompli un travail exceptionnel dans la guerre du Golfe, en 1991. Depuis, elles ont acquis beaucoup d'expérience dans des missions de maintien de la paix outre-mer. Je pense à la mission en Bosnie, à laquelle plusieurs milliers de nos soldats ont participé. Ils ont servi avec professionnalisme et beaucoup de compétence. Nous pouvons être très fiers de leurs actions.

Contrairement à ce que les députés du Parti conservateur ont laissé entendre à la Chambre ce soir, je suis tout à fait confiant que nos militaires sauront se montrer à la hauteur. Ils connaissent leurs limites et ils savent ce qu'ils peuvent accomplir. Ils ont l'habitude de dépasser nos attentes. Ils n'agiront pas autrement au cours de cette mission.

Bref, nous souhaitons avant tout une solution diplomatique à ce conflit. Toutefois, nous sommes moralement obligés d'appuyer nos alliés s'il le faut. Nous ne devons pas permettre à des dictateurs de se moquer de la communauté internationale. Nos soldats sont capables d'intervenir et ils sont prêts à le faire. Prouvons à Saddam Hussein que nous ne tolérerons pas son terrorisme.

Ainsi unis, montrons que notre appui sera militaire aussi bien que moral et politique.

M. George Proud (secrétaire parlementaire du ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Broadview—Greenwood.

Depuis que je siège à la Chambre, c'est la deuxième fois que je prends la parole dans un débat portant sur la même personne, visant à déterminer si le Canada devrait offrir sa participation militaire dans cette situation en Irak. Nous avons tenu un débat en 1991 et nous récidivons ce soir. Je n'ai pas changé d'avis depuis. J'estimais à l'époque que nous aurions dû aller plus loin et je crois ce soir que nous devons, si toutes les autres options échouent, offrir notre participation.

Depuis l'effondrement du mur de Berlin en 1989, les Forces canadiennes jouent un rôle de plus en plus important dans la promotion de la paix et de la sécurité internationales. Elles ont participé à un nombre sans précédent d'opérations de maintien de la paix au cours de cette période. Nous nous engageons peut-être dans une opération de plus.

Comme nous le savons tous, l'Irak a refusé de laisser les autorités américaines et, plus tard, toute l'équipe des Nations Unies, effectuer des inspections d'armes. On ne saurait minimiser l'importance de ce refus.

 

. 2225 + -

Comme condition d'un accord de cessez-le-feu entre l'Irak et les forces de coalition dans la guerre du Golfe, la commission spéciale onusienne, la CSNU, a été créée pour superviser, en partie, la destruction des armes nucléaires, biologiques et chimiques de l'Irak.

Outre cette première destruction de l'arsenal de l'Irak, la force devait élaborer un plan à long terme pour surveiller et vérifier si l'Irak continuait de respecter l'engagement à ne pas utiliser, concevoir, construire ou acquérir des armes ou du matériel interdits. Ces envoyés ont accompli leur tâche jusqu'à ce jour, ou du moins jusqu'à ce que M. Hussein refuse de les laisser entrer en Irak.

L'Irak doit continuer de laisser les équipes d'inspection des armes mener leurs enquêtes. Saddam Hussein a montré, par le passé, qu'il n'avait aucun respect pour les normes et les lois de la communauté internationale. Son refus d'autoriser les inspections exigées est clairement un test pour vérifier si nous sommes vraiment déterminés à maintenir la paix dans cette région.

S'il peut persister à refuser et quand même échapper à toute réprimande, il continuera à reconstruire en secret son arsenal militaire. Ce n'est pas la première fois qu'il essaie d'empêcher ces inspections. Personnellement, je ne crois pas que ce sera la dernière. C'est pourquoi nous ne pouvons pas permettre que cela continue. On ne peut permettre à un homme qui a un sens moral comme le sien de créer des armes de destruction massive. Avec le Koweït, on a bien vu quelles étaient ses intentions.

Le potentiel de destruction humaine est immense. Un homme comme Hussein ne crée pas de telles armes uniquement à des fins de dissuasion. Il a l'intention de s'en servir.

Les options qui s'offrent à nous sont simples. Nous pourrions ne rien faire. Le monde peut laisser faire et laisser Hussein rebâtir son arsenal, mais alors, il ne faudra pas nous surprendre quand il attaquera de nouveau un pays étranger. Ce sera de notre faute.

Laissez-moi vous dire que, la prochaine fois, les victimes et les morts seront innombrables. Énormément d'innocents mourront. Quand nous assisterons au prochain conflit, nous aurons l'impression que la guerre du Golfe n'était qu'un jeu d'enfant par comparaison. Je soupçonne que, s'il n'utilise pas d'armes chimiques, biologiques ou nucléaires à la première offensive, ce sera sans doute pour s'en servir en représailles à la première attaque contre ses troupes.

Ne rien faire n'est pas un choix envisageable. En agissant maintenant, nous éviterons peut-être la mort de millions d'innocents. Il y a toujours un risque de blessures ou même de pertes de vies chez les civils, mais je suis sûr que les victimes seraient quand même moins nombreuses que si nous ne faisons rien.

Nous devons nous souvenir que nous considérons la vie humaine comme plus importante que tout le reste. Nous ne sommes pas sûrs que Saddam Hussein partage cette conviction. Si on lui permet d'attaquer, qui sait combien de vies innocentes seront en jeu? Je crois vraiment que nous aurions tout à fait raison d'agir maintenant, puisqu'il a violé les conditions de l'accord de cessez-le-feu.

Il convient également de souligner que l'intervention militaire n'est pas toujours la meilleure riposte. La situation actuelle couvait depuis un certain temps déjà. En fait, certains affirment que cela remonte au cessez-le-feu signé le 27 février 1991. Tous les efforts possibles ont été déployés pour résoudre ce problème très ardu. Il est impératif d'utiliser tous les moyens diplomatiques possibles avant d'avoir recours à la force.

Malheureusement, jusqu'ici les efforts diplomatiques se sont révélés inefficaces. Une solution diplomatique demeure toujours possible, mais nous ne pouvons pas demeurer impassibles devant le refus de Hussein. C'est pourquoi nous ne devons pas écarter la possibilité d'une intervention militaire. C'est pour cette raison que nous discutons ce soir de la participation du Canada à une possible action militaire contre l'Irak.

L'autre question est de savoir si une attaque dirigée par les États-Unis est justifiée ou si nous ne devrions pas plutôt attendre l'autorisation des Nations Unies. Ma réponse est que l'Irak viole l'accord signé sous les auspices des Nations Unies. Cet accord doit être respecté et, en ce sens, nous possédons déjà l'autorité voulue pour agir.

Une intervention militaire pose aux Canadiens d'autres questions que la seule question de sa nécessité. Nous devons aussi nous demander si nos forces armées sont prêtes et capables de participer à une telle mission, et jusqu'à quel point. Le plus important n'est pas seulement de savoir si nos forces sont prêtes et capables, mais si elles doivent l'être. Il ne suffit pas de dire que nos forces armées peuvent participer à des missions à l'étranger. Nous devons pouvoir dire qu'elles sont prêtes au combat en tout temps.

C'est un aspect important. Il existe une différence marquée entre une force de maintien de la paix, et certains croient que c'est la seule chose que désirent les Canadiens, et des forces prêtes au combat, ce dont a besoin le Canada.

Une mission de maintien de la paix consiste traditionnellement à envoyer des troupes pour maintenir une paix déjà établie. À l'origine, les missions de maintien de la paix ne comportaient guère plus que des troupes terrestres et, parfois un soutien aérien. Ces missions ne faisaient pas intervenir les trois éléments de nos forces armées.

Des forces prêtes au combat doivent pouvoir riposter rapidement à n'importe quel type de menace militaire et pouvoir intégrer les trois éléments des forces armées afin d'organiser une formidable contre-attaque. Cela signifie que nous devons assurer le maintien de nos forces aériennes, de nos forces maritimes et de nos forces terrestres. Cela inclut la fourniture de l'équipement nécessaire pour qu'elles s'acquittent des rôles qui leur sont assignés.

 

. 2230 + -

Même le maintien de la paix a changé de façon spectaculaire au fil des ans. Dans les missions modernes, chaque élément est indispensable à la mission d'ensemble. À divers moments, pendant nos missions en ex-Yougoslavie, les trois éléments de nos forces étaient engagés. Donc, même le maintien de la paix exige des forces polyvalentes et aptes au combat.

J'aimerais souligner les réalisations de nos forces. Au Rwanda, elles ont prêté main forte et ont fait leur possible pour répondre à la crise humanitaire. Même si elles n'ont pas pu empêcher les bains de sang, nos forces, en dépit de leur effectif minuscule, ont sauvé des milliers de vie.

Elles ont continué à aider la communauté internationale à faire face au tragique conflit qui a déchiré les Balkans. Comme je le disais plus tôt, leur contribution militaire a pris la forme d'interventions terrestres, aériennes et maritimes, ainsi que de toute une variété d'activités humanitaires.

En Haïti, elles ont aidé à stabiliser une situation très précaire, et ont lancé une variété de projets humanitaires à l'échelle du pays. Elles ont dirigé une intervention multinationale en Afrique centrale pour y assurer la livraison de l'aide humanitaire, jouant ainsi un rôle de catalyseur qui a permis de dénouer l'impasse empêchant le retour des réfugiés parqués dans des camps depuis deux ans.

En même temps, les forces armées canadiennes ont continué à jouer leur rôle traditionnel dans leur propre pays, assurant des opérations de recherche et de sauvetage pendant les inondations du Saguenay et de la rivière Rouge, et plus récemment, pendant la tempête de verglas dans l'est de l'Ontario, le Québec et le Nouveau-Brunswick.

Comme je le disais plus tôt, en relevant ces défis, aussi nombreux que variés, les Forces canadiennes ont prouvé qu'elles étaient prêtes à répondre aux besoins de leur pays, et capables de le faire, et qu'elles pouvaient mener à bien les opérations de paix qui leur étaient confiées sur la scène internationale. À mes yeux, nos forces sont polyvalentes et aptes au combat.

Il faut résoudre la situation en Irak. Si les efforts diplomatiques échouent, nous devons non seulement envisager le recours à la force, mais également nous assurer que, contraint par la force, l'Irak se conforme aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Si tout échoue, il faudra arrêter l'Irak et il faudra que le Canada participe à une telle opération.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, d'entrée de jeu, je veux souligner la pertinence de la consultation du Parlement aujourd'hui sur cette question très importante. C'est un débat d'urgence sur une possible intervention canadienne en Irak.

Étant député ici depuis 1993, je vois qu'il y a une progression dans l'attitude du gouvernement, et je tiens à le signaler. Quant à moi, c'est effectivement très important que le Parlement soit formellement consulté avant que le gouvernement ne prenne position, évidemment lorsqu'il n'y a pas une urgence à court terme qui nous oblige à une décision très rapide. Dans la situation actuelle et dans des situations semblables, je pense qu'il est important que le gouvernement prenne le temps d'entendre ce que tous les partis pensent de la situation.

Contrairement aux questions de politique interne, souvent, c'est dans la force des consensus qui se dégagent autour de tels débats que la position du gouvernement canadien aurait une force encore plus grande en matière de politique internationale.

Effectivement, cette attitude qu'on retrouve dans la consultation du Parlement aujourd'hui sur cette question importante, l'intervention en Irak, il faudrait qu'elle se répète aussi dans la position qui sera adoptée par le gouvernement canadien.

Rappelons que la situation actuelle résulte de la guerre du Golfe. Comme résultat de cette guerre, l'Irak s'est vu imposer par l'ONU des conditions assez sévères de destruction d'armes, de répondre à des exigences afin de s'assurer que la guerre ne puisse pas reprendre et qu'on ne se retrouve pas dans une situation identique à celle qui existait antérieurement.

Cette position a été prise par l'ONU. Elle est sous la responsabilité du Conseil de sécurité de l'ONU. Je crois qu'il faut s'assurer de respecter ces autorités. L'Organisation des nations unies est une organisation qui, lors de crises internationales comme celle-là, peut être un outil intéressant, un outil important dans la solution des crises, pour autant qu'on reconnaisse son pouvoir et que, chaque fois qu'on est en situation de crise, on ne décide pas d'agir à côté et, de cette façon, mettre à nu son impuissance.

 

. 2235 + -

Il faudra donc que la position du gouvernement tienne compte de cette exigence, du respect de l'Organisation des Nations unies. Dans le passé diplomatique du Canada—on pourrait remonter jusqu'à la crise de Suez—il y a toujours eu des gestes qui ont été posés par le gouvernement canadien en respectant le plus possible, je pense, l'autorité morale de l'ONU, à tout le moins. Je crois qu'à l'occasion on ne l'a pas fait. On aurait dû le faire et on devrait en tirer des conclusions.

On peut se poser la question aujourd'hui à savoir pourquoi on est encore devant un tel problème à la suite de la guerre du Golfe. Pendant cette guerre, des milliers de personnes sont mortes. Je crois que lorsqu'on sacrifie des vies humaines dans une guerre, quelles que soient les motivations de l'une et l'autre parties, les perdants sont finalement ceux qui sont décédés ainsi que les familles qui ont à vivre ces pertes.

Donc, dans un débat comme celui d'aujourd'hui, il faut faire très attention de ne pas avoir des attitudes triomphalistes ou de penser qu'on a toutes les solutions très facilement. C'est modeste de s'assurer que les gestes que l'on va poser sont les bons, qu'on prenne le temps de les poser et qu'on fasse très attention de ne pas poser des gestes qui, sous le coup de la colère ou dans le but de démontrer sa force, auraient des répercussions très négatives.

Il faut donc, dans le cas de la crise relative à l'Irak, que tous les efforts diplomatiques soient déployés. On retrouve effectivement, dans la communauté internationale, plusieurs acteurs qui souhaitent qu'on aille à l'extrême limite des efforts diplomatiques, que l'on fasse preuve d'originalité et que l'on se serve aussi de tous les pays qui peuvent avoir une relation plus facile que certains autres avec l'Irak. En ce sens, il serait important qu'on se donne le temps d'épuiser tous les efforts diplomatiques avant qu'il y ait une intervention. Même au moment où on ferait le constat que tous les efforts diplomatiques n'auraient pas donné de résultats satisfaisants, je pense qu'il faudrait revenir devant le Parlement pour être certains que la position qui sera prise tienne compte de l'ensemble des éléments connus.

Je crois que personne en cette Chambre ne nie le fait que l'Irak doit se conformer aux résolutions de l'ONU et doit satisfaire aux conditions qui lui ont été signifiées, parce qu'il y va de la paix internationale que l'on respecte encore les mandats que l' Organisation des Nations unies a reçus et dont elle a la responsabilité de réaliser. Donc, elle est là pour être le porte-parole du concert des nations et, de cette façon, je crois qu'on doit s'assurer que ce qui a été décidé par rapport à l'Irak soit respecté. Personne ne conteste cela.

On peut, par contre, vouloir s'assurer qu'il n'y aura pas de sanctions comme des frappes militaires qui auront des résultats évidemment très pénibles, entre autres, pour la population civile. C'est très rare qu'on réussisse à poser des gestes de guerre sans qu'il n'y ait des perdants au niveau des civils. Je pense qu'il faudra faire très attention à cette question.

Comment peut-on s'assurer que les accords seront respectés au bout du compte et qu'on sortira de la dynamique actuelle d'opposition entre un pays comme l'Irak, qui est une puissance relative, face à un géant comme les États-Unis, pour qu'on ne revienne pas périodiquement, à tous les quatre ou cinq ans, avec une crise comme celle que nous avons devant nous? Il y a des leçons à tirer du passé. Qu'est-ce qui fait que la guerre du Golfe n'a pas abouti à des résultats concluants et qu'est-ce qui motive l'Irak à avoir l'attitude actuelle? Je pense que c'est important d'essayer de comprendre cette perception, les motivations profondes d'un pays comme l'Irak, pour que les solutions trouvées pour régler la crise aillent vraiment au fond des problèmes et ne soient pas superficielles.

Il y a donc des acteurs objectifs qui doivent être utilisés dans cette offensive diplomatique—je pense particulièrement à tous les pays arabes, à la Russie, ainsi qu'à tous ceux qui ont des liens particuliers possibles du côté de l'Irak, qui ont eu des contacts plus directs—pour faire valoir des arguments afin que l'Irak en vienne à respecter les conditions de l'ONU.

 

. 2240 + -

Le Bloc québécois a soulevé la pertinence de la position qui sera prise par le gouvernement, probablement demain ou au cours des prochains jours, à l'effet qu'elle soit réévaluée plus tard si les efforts diplomatiques ne donnent pas les résultats escomptés. Je ne crois pas qu'il faille tout de suite se peinturer dans le coin et avoir une attitude définitive qui nous mènerait nécessairement dans une spirale aboutissant automatiquement aux frappes militaires.

Même si les soldats canadiens n'étaient pas directement engagés dans la bataille, il n'empêche que le Canada, s'il donne son accord aux frappes, doit aussi en accepter les conséquences. L'appui peut avoir des résultats concrets, aider à ce que la négociation débloque, mais cela peut aussi mener aux frappes elles-mêmes, avec les résultats qu'on verra en terme d'efficacité militaire, mais aussi en terme d'impact sur les populations civiles.

Ce sont tous ces éléments qu'il faut prendre en considération lorsqu'on étudie la situation actuelle. Il me paraît important de préciser quelque chose. On dit que les États-Unis prétendent avoir le droit d'intervenir, sans nécessairement retourner devant le Conseil de sécurité. Lorsqu'on analyse de façon plus précise les conditions posées à l'Irak par le Conseil de sécurité de l'ONU, la situation actuelle voulant que soit accordé automatiquement un droit de réplique militaire n'est pas incluse.

Je crois qu'avant de prendre une position définitive, le Canada devrait tenir compte de cette situation et s'assurer que lorsqu'il donnera son appui aux frappes, on aura obtenu le mandat du Conseil de sécurité de l'ONU et que ce dernier aura constaté qu'on a satisfait à toutes les conditions.

Monsieur le Président, je vois que vous me faites signe, je vais donc conclure en disant qu'avant d'avoir une prise de position définitive sur cette question...

Le vice-président: Je m'excuse. Vous disposiez de 20 minutes.

M. Paul Crête: Je vous remercie, monsieur le Président. C'est ce que je pensais initialement. Cela va me permettre d'étaler un peu plus mon argument au sujet de cette situation.

Dans la situation actuelle, lorsqu'on regarde les positions adoptées par la communauté internationale, d'un côté, on a le Royaume-Uni, par exemple, qui s'est clairement rangé du côté des Américains dans cette crise. C'est l'allié le plus solide de Washington.

Par contre, la France n'est pas chaude pour participer à une opération militaire contre l'Irak. Elle continue d'exercer des pressions diplomatiques sur l'Irak pour qu'il cède et permette l'accès inconditionnel de tous ses sites.

Il y a peut-être une porte d'entrée qui pourrait être utilisée en bout de ligne. Est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir une sorte de task force des pays ayant une attitude semblable à celle de la France pour intervenir, pour servir de médiateurs dans la situation actuelle, pour en venir à trouver une solution qui ne soit pas la frappe militaire?

Pour ce qui est de la Russie, on dit que le président Eltsine, de son côté, s'oppose vigoureusement à une action militaire contre l'Irak et fait des déclarations qui peuvent paraître un peu intempestives par rapport à la possibilité d'une troisième guerre mondiale. Cela nous donne quand même, à la limite extrême, les impacts que cela peut avoir d'aller trop rapidement dans une autorisation de mener une attaque américaine.

Il y a la Chine aussi qui s'oppose à toute action militaire contre l'Irak. Les pays arabes s'opposent en majorité à une action militaire. Ce sont des acteurs qui peuvent être importants dans la situation actuelle.

Je pense qu'on a encore le temps. On a une période de quelques semaines où il pourrait y avoir une offensive diplomatique, mais plus originale, dans le futur, et demander qu'il y ait vraiment une concertation de ceux qui souhaitent qu'on puisse éviter une attaque militaire, et qu'on puisse vraiment regarder le fond de la question.

Au début de ma présentation, je disais que c'était intéressant que le gouvernement consulte le Parlement avant de prendre une position définitive. Si, effectivement, le gouvernement a la sagesse de trouver le consensus qui peut résulter du débat qu'on a ici, ce qui peut ne pas paraître évident à première vue, regardons-le en détail.

Par exemple, le Nouveau Parti démocratique s'est opposé à ce qu'il y ait une possible intervention militaire.

 

. 2245 + -

Le Nouveau Parti démocratique ne serait-il pas prêt à entreprendre la démarche de mener une offensive diplomatique et de faire un nouveau débat lorsque celle-ci aura été complétée? Si les résultats ne sont pas là, il pourra, à ce moment-là, reconsidérer sa position en fonction des efforts qui auront été faits et des résultats atteints.

En même temps, le Parti réformiste dit très rapidement être prêt à appuyer les Américains. Moi, je l'invite à se rallier à un consensus qui voudrait plutôt que l'on déploie, au maximum, l'effort diplomatique et qu'ensuite, si on n'a pas atteint les résultats voulus, on en arrive à un consensus sur la nécessité d'une frappe. En ce qui concerne les conservateurs, c'est un peu la même attitude.

Je comprends que la position des libéraux, présentée actuellement, n'est pas nécessairement celle du Parti libéral mais celle du gouvernement, représentée par le discours du premier ministre au début du débat. Je pense qu'il y a là des conditions intéressantes pour en arriver à un résultat acceptable qui reflète vraiment la volonté des parlementaires canadiens et, par le fait même, la position des citoyens du Canada.

En ce sens, toutes les positions qui ont été présentées ici pourraient se retrouver dans un consensus qui ressemblerait un peu à la position du Bloc québécois, c'est-à-dire les frappes si nécessaires, mais qu'elles soient décidées par le Conseil de sécurité de l'ONU après qu'il ait fait le constat que tous les efforts diplomatiques ont été menés sans que les résultats ne soient atteints. Il faudrait surtout qu'il y ait un nouveau débat avant de décider de l'appui militaire du Canada à l'intervention en Irak, parce qu'à ce moment-là, on saura si oui ou non la frappe est voulue par le Conseil de sécurité de l'ONU, et si oui ou non, il y a eu un constat d'échec de la part de l'ensemble des intervenants du concert des nations.

Peut-être que trois semaines après que les efforts auront été déployés, on aura trouvé une solution. Peut-être que l'on n'en trouvera pas et que les pays qui, aujourd'hui, sont contre la frappe militaire, en arriveront à la conclusion qu'elle est nécessaire parce qu'il n'y a pas moyen de faire autrement. Cela pourrait, à ce moment-là, encore une fois, donner une dernière chance à la paix.

J'en viens à ma conclusion qui ne prendra que quelques minutes. Je crois qu'il faut aborder cette question avec beaucoup de modestie, un grand respect de la vie humaine, la foi dans les outils diplomatiques qu'on s'est donnés et en évitant évidemment la naïveté. Nous sommes dans une situation où il y a un passé qui a existé, une réalité qui est vécue sur le terrain et une nécessité aussi de trouver des compromis. Si l'objectif réel est de permettre l'inspection de tous les sites, est-ce qu'un compromis possible ne serait pas que cette inspection puisse être faite par des représentants de nations qui soient acceptables aux deux parties? Est-ce qu'il n'y a pas une voie d'avenir de ce côté-là?

Pour avoir vu un peu les scènes qui ont résulté de la guerre du Golfe, où une bataille militaire a été remportée par les Américains, je pense que ce doit être en fonction des humains qui ont été touchés par cette guerre qu'il faut définir, en premier lieu, la position canadienne. Il faut se demander, selon les gestes que nous allons poser, quelle est la façon dont on peut s'assurer que le peuple de l'Irak, les gens qui vivent dans ce pays, ait le plus de chance de se bâtir, à l'avenir, une vie raisonnable, une vie de qualité et de sortir de cette menace constante d'intervention militaire.

Je ne suis pas en train de faire le procès des Américains ou des Irakiens. Je suis, par contre, en train de constater qu'il y a, au milieu de ce champ de bataille, une population qui vit dans ce pays-là et qui n'est pas nécessairement responsable des actes posés par le gouvernement irakien. Je pense que c'est le tamis essentiel à travers lequel la position du gouvernement du Canada doit être définie.

 

. 2250 + -

Je souhaite que tous les partis en arrivent au consensus que le Bloc québécois propose et que je résume ainsi: des frappes si nécessaire, après que cela aura été décidé par le Conseil de sécurité des Nations unies et après qu'on aura fait le constat de l'échec de tous les efforts diplomatiques; qu'on ait la chance ici, dans un second débat, lorsqu'on aura fait l'analyse de tous les efforts faits, de voir si, oui ou non, ces frappes sont nécessaires.

J'invite cette Chambre et le gouvernement à avoir cette attitude responsable pour que le Canada en sorte grandi en terme de réputation internationale. Surtout, que les populations qui peuvent être touchées par l'impact d'une frappe militaire ou par le fait de trouver une solution diplomatique pacifique puissent dire que les parlementaires qui ont eu à en débattre dans les différents parlements du monde ont eu une attitude responsable. C'est ce que je souhaite dans ce Parlement.

[Traduction]

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de prendre part à ce débat.

Aujourd'hui on nous demande d'envisager des actions capables de stopper un homme déchaîné, un homme dangereux qui se moque de la communauté internationale, un homme qui n'a que du mépris pour la paix et la stabilité internationales. Le monde doit agir.

Nous avons l'obligation morale d'apporter une réponse raisonnable aux actes déplorables et méprisants de Saddam Hussein. Sinon, ce sont nos enfants et nos petits-enfants qui auront à déplorer notre irrésolution.

Le Canada s'est toujours fait le champion de la liberté et de la décence, de la paix et de la sécurité. Les Canadiens reconnaissent depuis longtemps le fait que la défense du Canada ne s'arrête pas à nos frontières. Pas plus que ses intérêts. Habitant une nation marchande, un pays multiculturel et donc ouvert aux peuples du monde, et persuadés que leur destin est d'oeuvrer pour un monde pacifique, stable et prospère, les Canadiens sont essentiellement des internationalistes.

Nous le prouvons encore aujourd'hui. Nous devons manifester notre appui aux efforts internationaux en vue d'obliger le gouvernement iraquien à se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies. Nous devons être prêts à recourir aux Forces canadiennes pour montrer à Saddam Hussein que son attitude est totalement inacceptable.

Les hommes et les femmes qui sont membres des Forces canadiennes ont joué un rôle actif et majeur dans diverses missions au Moyen-Orient. Ils ont contribué à la paix et à la sécurité internationales à de nombreuses occasions et une fois de plus ils doivent relever le défi.

Je voudrais insister sur deux points importants. Premièrement, toutes les missions que nous avons effectuées au Moyen-Orient se sont déroulées sous les auspices des Nations Unies. Nous n'avons jamais déployé nos forces pour défendre les intérêts de quelque pays que ce soit.

Monsieur le Président, je dois m'arrêter ici pour souligner que je vais partager le temps qui m'est alloué avec le député d'Érié—Lincoln.

Autrement dit, nous n'avons envoyé nos forces au Moyen-Orient que pour appuyer notre contribution traditionnelle au maintien de la paix et de la sécurité. Cette fois-ci, si le besoin se fait sentir, nous devrons appuyer l'effort international pour nous assurer que le gouvernement de l'Irak respecte les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Deuxièmement, lorsque nous sommes intervenus au Moyen-Orient, nous avons accompli quelque chose. Nous nous sommes mérité le respect de nos alliés et des autres membres des Nations Unies. Dans la grande diversité de missions que nous avons accomplies dans cette partie du monde, nous avons aidé à défendre la cause de la paix et du caractère sacré du droit international.

Les membres des Forces canadiennes ont prouvé maintes fois qu'ils étaient tout à fait capables d'agir de concert avec les meilleures forces armées au monde. Jamais ne s'en est-on mieux rendu compte qu'au cours de la guerre du golfe Persique en 1991. La marine canadienne a prouvé qu'elle était capable de réagir rapidement et de manière efficace. Sans aucun préavis, notre personnel naval et aérien a travaillé sans relâche pour préparer les navires et les hélicoptères de façon qu'ils puissent partir en mission en un temps record. C'est un exemple de ce que le commandant de la Force opérationnelle canadienne a qualifié de «bon vieil esprit pionnier des Canadiens».

Une fois les hostilités commencées, les navires canadiens étaient chargées de la protection des forces logistiques de la coalition dans le golfe. Je dois souligner que le commandant de la Force opérationnelle canadienne a été le seul officier non américain à recevoir un commandement important en temps de guerre.

 

. 2255 + -

Que le Canada ait assumé le contrôle tactique de la force logistique de coalition, composée de bâtiments de quelque 11 pays, prouve le respect que la marine canadienne a acquis auprès des partenaires de la coalition durant les opérations dans le golfe Persique.

Le Canada a aussi envoyé 26 chasseurs F-18 dans le Golfe. Appelés «Desert Cats», ces chasseurs ont accompli toute une série de missions et démontré encore une fois les compétences et la flexibilité des Forces canadiennes. Plus tard, nous avons déployé tout un hôpital de campagne dans la région afin de traiter les blessés des forces de coalition et les prisonniers de guerre irakiens.

Le déploiement canadien dans le cadre de la guerre du Golfe a été un triomphe sur le plan logistique. En très peu de temps, nous avons assemblé une force aux talents variés et l'avons déployée à l'autre bout du monde. Au total, plus de 4 500 Canadiens ont contribué au succès de la mission de coalition. Les membres des forces ont fait une différence.

La performance des Forces canadiennes durant la guerre du Golfe a été tout simplement remarquable. Leur contribution a été nettement supérieure à leur nombre et à leur équipement—un hommage à leur formation, leurs talents et leur ingéniosité. Ils ont eu droit à des louanges de la part de leurs partenaires de la coalition.

Nos hommes et nos femmes ont servi avec professionnalisme, dévouement et courage afin de soutenir les Nations Unies et de défendre les valeurs et les intérêts du Canada.

Mais ce n'est pas seulement dans le golfe Persique que les Forces armées canadiennes ont montré de quoi elles étaient capables. Le Canada se distingue depuis longtemps par sa participation aux opérations de maintien de la paix au Moyen-Orient.

Dans les années 50, au début de nos efforts de maintien de la paix, le Canada s'était joint à un vaste effort multinational des Nations Unies en vue d'instaurer la paix au Moyen-Orient. Cela fait maintenant plus de quatre décennies que le Canada maintient une présence essentielle au sein des opérations de maintien de la paix au Moyen-Orient. Certaines missions ont été de courte durée, quelques mois seulement, d'autres durent encore.

Le Canada a participé entre autres missions à la première et à la deuxième forces d'urgence des Nations Unies. Nous avons participé au Groupe d'observation des Nations Unies au Liban. Nous avons également apporté notre concours à la Force d'observation des Nations Unies au Yémen et à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban, et nous avons aussi pris part au Groupe d'observateurs militaires des Nations Unies pour l'Iran et l'Irak.

Le Canada fait partie depuis longtemps, soit depuis 1954, de l'Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve ou ONUST. Les membres des Forces canadiennes chargés de cette mission doivent surveiller, superviser et observer les accords de cessez-le-feu et servir d'observateurs militaires sur le plateau du Golan, au Sud-Liban et au Sinaï.

Depuis 1974, nous faisons partie de la Force des Nations Unies chargée d'observer le dégagement ou FNUOD. Nous avons encore des soldats qui servent sur le plateau du Golan entre Israël et la Syrie. Ils offrent un soutien logistique de seconde ligne à la FNUOD. Le Canada offre également des détachements de communications à toutes les unités de la FNUOD.

Depuis 1991, le Canada participe aussi à la Mission d'observation des Nations Unies pour l'Irak et le Koweït, ou MONUIK, dont le mandat est de surveiller la frontière entre l'Irak et le Koweït. Le Canada aide à cette tâche par l'entremise de ses observateurs militaires pour les Nations Unies.

Le Canada participe également à la Force multinationale d'interception, ou FMI, qui surveille l'application des diverses résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies au sujet de l'importation et de l'exportation de produits iraquiens, notamment le pétrole.

Depuis 1991, quatre de nos navires de guerre ont passé de trois à cinq mois dans le golfe Persique. Notre contribution la plus récente a été l'envoi du NCSM Regina dans le golfe Persique où il a patrouillé du 3 avril au 9 juillet 1997.

Les Forces canadiennes contribuaient encore à la Commission spéciale des Nations Unies sur l'Irak, jusqu'à ce que Saddam Hussein mette un terme à ses travaux. La CSNU est chargée de l'inspection et de la destruction des missiles balistiques de l'Irak, ainsi que de ses installations chimiques, nucléaires et biologiques.

Nous croyons qu'on ne doit pas mettre un terme aux travaux de la commission. On doit les poursuivre afin de dire clairement à Saddam Hussein et, en fait, au monde entier, qu'on ne tolérera pas que quiconque défie ainsi les Nations Unies. C'est un mépris flagrant pour les idéaux que nous défendons, et les armes de destruction massive que nous avons en horreur posent une menace bien réelle. Nous devons prendre des mesures pour reprendre ces inspections et s'assurer un accès complet.

 

. 2300 + -

Nous devons faire preuve de fermeté et montrer clairement à Saddam Hussein que nous ne céderons jamais à ses menaces malicieuses et à ses actes de défi. Nous devons lui montrer que l'intransigeance est inacceptable et lui faire comprendre que la seule option, c'est que le gouvernement de l'Irak se conforme entièrement aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Comme notre brillant dossier en témoigne, le Canada n'est jamais resté muet sur les questions importantes. La question importante dans le moment, c'est que le monde est tenu en otage par la forme de défi la plus destructrice. Mais nous ne devons pas reculer devant ce défi. Le Canada a joué un rôle important dans les efforts multilatéraux en vue d'apporter la paix au Moyen-Orient. Nous devons perpétuer cette tradition en appuyant les initiatives actuelles et futures pour stopper ceux qui continueraient de menacer et de déstabiliser cette région et, en fait, le monde entier.

M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur de prendre part ce soir au débat sur l'invitation lancée par les États-Unis au Canada de participer à une éventuelle intervention militaire au Moyen-Orient. Et ce débat a lieu, j'insiste là-dessus, avant que le gouvernement ne prenne une décision.

Il faut avancer des arguments solides et bien raisonnés, car les conséquences sont considérables.

Il arrive que les critiques s'interrogent sur le rôle des députés, disant qu'ils font bien peu pour mériter leur rémunération. Je dis à ces détracteurs qu'ils n'ont qu'à bien se tenir. Nous discutons ce soir du rôle du Canada dans cette crise imminente avec l'Irak. Nous envisageons la participation des hommes et femmes bien entraînés, loyaux et braves de nos forces armées, et, ce qui est tout aussi important, l'impact sur leurs familles—femmes, enfants, mères, pères, soeurs et frères.

N'oublions pas non plus la population civile innocente de l'Irak qui pourrait souffrir à cause des égarements de leur dirigeant. Ne perdons pas de vue les coûts humains de la guerre, ni ses coûts économiques et écologiques.

C'est une lourde responsabilité d'engager le Canada à participer à une intervention militaire dans l'actuelle crise du Golfe, un engagement qui risque de menacer la sécurité mondiale, de mener à la guerre, peut-être même à un troisième guerre mondiale, si on en croit le discours russe. C'est une responsabilité très lourde.

Le Canada a fait une contribution considérable à la guerre du Golfe, à l'hiver de 1991; 3 837 hommes et 237 femmes s'y sont distingués. Nous sommes heureux que ce conflit n'ait fait parmi les nôtres aucune victime, aucun prisonnier. Je me demande ce soir si nous aurons autant de chance la deuxième fois.

Comment en sommes-nous arrivés encore une fois au bord de la guerre?

De façon générale, la communauté internationale a appuyé les États-Unis dans leurs efforts pour amener l'Irak à respecter les accords et les ordres qui ont marqué la fin de la guerre du Golfe, en 1991. Plus récemment, les États-Unis ont eu du mal à rallier leurs anciens alliés de la guerre du Golfe autour d'une stratégie militaire faisant appel à d'autres frappes aériennes.

L'Irak a provoqué cette récente vague de tension en refusant de répondre aux demandes des équipes d'inspection d'armement de l'ONU tant qu'elles comporteraient des membres américains. Après plusieurs semaines d'échanges verbaux avec l'Irak, l'ONU a abandonné à la mi-novembre et a retiré ses équipes de ce pays.

Après des négociations auxquelles participaient la Russie, la France et d'autres pays, les inspecteurs sont retournés en Irak, mais ont continué à faire face à des tracasseries quotidiennes. Les inspecteurs cherchent à vérifier l'existence d'armes de destruction massive, de nature biologique, chimique ou nucléaire.

Baghdad estime que le processus d'inspection des armements prend beaucoup trop de temps. Les Irakuiens accusent d'espionnage les membres américains des équipes multinationales d'inspection.

Tans que les inspections d'armement ne seront pas terminées, l'ONU ne lèvera pas les sanctions économiques contre l'Irak. Ces barrières commerciales sont en place depuis août 1990, lorsque l'Irak a envahi le Koweït. Nous en sommes arrivés à une impasse.

Que craignons-nous? Nous craignons Saddam Hussein, un dictateur, le chef d'un régime qui n'a aucun respect pour les droits de la personne et les valeurs humaines et qui a brutalisé ses propres citoyens, en allant jusqu'à utiliser des gaz toxiques contre les dissidents kurdes, et qui n'a aucune hésitation à compromettre encore une fois la sécurité des citoyens irakiens à ses propres fins. Nous craignons un régime qui aurait, dit-on, fait l'essai d'agents microbiens sur des prisonniers et qui refuse aux inspecteurs de l'ONU l'accès à ses installations pour dissiper ces allégations.

Nous craignons un régime qui a lancé un programme d'armes biologiques et qui aurait, dit-on, accumulé un arsenal d'armes biologiques, constituées de virus mortels, de bactéries et de toxines mortelles, dont les victimes connaîtraient une mort horrible, et un régime qui refuse aux inspecteurs d'armement de l'ONU de faire leur travail pour dissiper de telles allégations.

Nous craignons un régime contre lequel pèsent depuis des années des soupçons voulant qu'il se livre à la production d'armes de destruction massive et qui, là encore, refuse de laisser les inspecteurs d'armement de l'ONU poursuivre leur travail pour confirmer l'inexistence de telles armes.

Qu'on ne s'y trompe pas, la diplomatie reste la solution préférée plutôt que le recours à la force militaire pour mettre fin à la crise, et la solution que nous espérons voir adopter. Le Canada jouit d'une réputation enviable et bien méritée en tant qu'artisan de la paix. Le rôle de guerrier est peut-être un peu contraire à la tradition de Lester Pearson, mais nous sommes capables d'attaquer et nous ne nous déroberons pas à notre devoir.

 

. 2305 + -

Nous ne devons rien oublier dans le cadre de nos délibérations. Y a-t-il des compromis et des positions que nous avons omis d'examiner? L'ONU pourrait-elle envisager de lever les sanctions à caractère humanitaire qui ont malheureusement beaucoup nui à la population civile d'Irak et qui ont rendu infirmes ou même tué d'innombrables hommes, femmes et enfants, bilan dont je suis peu fier.

Pouvons-nous prendre cette mesure sans remettre en question la détermination, la résolution et l'unité des forces exhortant Hussein à respecter les résolutions des Nations Unies que nous jugeons si nécessaires? Sommes-nous d'ailleurs convaincus qu'elles sont si nécessaires? Le Canada peut-il jouer un rôle actif dans la négociation d'une solution satisfaisante pour tous? Nous avons déjà accompli beaucoup de choses, mais pouvons-nous faire encore plus? Pouvons-nous travailler plus fort pour éviter ce conflit imminent, pour promouvoir un règlement pacifique? Toutes les solutions diplomatiques doivent être analysées et scrutées à la loupe. Toutefois, si elles échouent, il faudra appuyer l'action militaire menée sous les auspices des Nations Unies.

Le Canada respecte les Nations Unies. Le Canada respecte le droit international. Le Canada respecte les accords signés aux termes des traités de l'ONU et des accords internationaux. Malheureusement, Saddam Hussein ne respecte rien de tout cela. Selon la résolution 687 du Conseil de sécurité des Nations Unies qui a été adoptée en 1991 et qui fixe les conditions du cessez-le-feu mettant fin à la guerre du Golfe, l'Irak est obligé d'accepter que soient détruits, enlevés ou neutralisés toutes les armes nucléaires, chimiques et biologiques et tous les missiles balistiques d'une portée de plus de 150 kilomètres, ainsi que toutes les installations de recherche-développement, d'appui et de production dans ces domaines, et doit s'engager à ne mettre au point aucune arme de ce genre à l'avenir. On pourrait dire que ce n'est pas terriblement difficile à respecter.

En dépit des constantes manoeuvres de duperie, de dissimulation, de harcèlement et d'obstruction de la part de l'Irak, la Commission spéciale des Nations Unies, la CSNU, a réussi à détruire 38 000 armes chimiques, 480 000 litres d'agent d'arme chimique actif, 48 missiles opérationnels, 6 lance-missiles, 30 cônes de charge spéciaux pour les armes chimiques et biologiques et des centaines de pièces d'équipement de production de la guerre chimique. L'Irak a d'abord prétendu qu'une bonne partie était destinée à des fins pacifiques, mais a fini par admettre son but réel.

L'Irak a prétendu que le projet de gaz neurotoxique VX était un échec. La CSNU a découvert que l'Irak pouvait produire du VX à l'échelle industrielle et en avait produit quatre tonnes. On travaillait aussi sur de nombreux autres agents, tels le sarin, le tabun et l'ypérite. Je pourrais citer encore et encore d'autres exemples de violation flagrante par l'Irak des conditions du cessez-le-feu.

La CSNU craint que l'Irak ait encore des missiles de type Scud équipés de cônes de charge chimiques et biologique. D'importants éléments de missile, des cônes de charges et des agents propulsifs n'ont pas été retrouvés ni 17 tonnes de milieux de croissance pour des agents de guerre bactériologique, soit suffisamment pour produire plus de trois fois plus d'agents du charbon que l'Irak reconnaît avoir. Des éléments clés du matériel de production de la guerre chimique manquent aussi à l'appel.

La question est de savoir si on peut faire confiance à Hussein. La réponse est terriblement évidente. Comme l'a dit le ministre des Affaires étrangères, il y a un danger évident et imminent. La violation flagrante des résolutions des Nations Unies et du droit international est intolérable, inacceptable et doit cesser. Si Saddam Hussein refuse de respecter les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, il devra être tenu responsable des mesures qui seront prises.

Nous cherchons instamment un compromis, un règlement négocié, une solution diplomatique. Oui, nous souhaitons éviter la guerre et nous devons ardemment tendre à y arriver. Si cela n'est pas possible, Hussein doit savoir que le Canada restera uni aux forces de l'ONU. Nous devons être prêts à agir et, s'il le faut, nous agirons.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens dans le débat au nom de la population de Surrey Central et à titre de porte-parole adjoint de l'opposition officielle pour les questions d'affaires étrangères. Je partagerai le temps dont je dispose avec le député de St. Albert. À partir de maintenant, tous mes collègues vont partager leur temps de parole.

Aujourd'hui, la question qui se pose, c'est celle-ci: devons-nous accepter ou rejeter l'offre des États-Unis et que devons-nous faire si des efforts diplomatiques raisonnables échouent? Cette grave question a de nombreuses ramifications: politiques, économiques, militaires et, par-dessus tout, humaines et morales.

La rareté des faits sur lesquels nous pouvons nous fonder dans le débat de ce soir constitue une difficulté dont nous devons être conscients.

 

. 2310 + -

Nous avons besoin de davantage d'information de la part de notre gouvernement pour pouvoir discuter à fond du sujet.

Nous parlons du terrorisme, des mensonges et des trahisons incessants de Saddam Hussein, un homme qui a tenté avec constance de déstabiliser le golfe Persique.

Le Canada est intervenu dans le golfe Persique en 1990 dans le cadre d'une mission internationale autorisée par une résolution adoptée par le Conseil de sécurité des Nations Unies après l'agression iraquienne.

Nous avons appuyé de nombreuses sanctions internationales contre l'Irak. En 1991, nous avons participé à une force multinationale qui a défait l'Irak et lui a imposé des conditions de paix.

En octobre 1997, l'Irak a expulsé les membres américains des équipes d'inspection des Nations Unies sur son territoire. Elle rompait ainsi les conditions de paix.

J'ai une longue liste de données historiques, mais puisque le temps m'est compté, je vais l'abréger.

Le mois dernier, 72 sites ont été interdits aux équipes d'inspection. Quatorze de ces sites ont été inspectés depuis. Nous savons qu'il y a 40 sites en Irak qui ont été déclarés palais présidentiels depuis la guerre du Golfe. Dans un pays qui a vu sa richesse réduite à sa portion congrue depuis la guerre, on peut difficilement concevoir que ces sites cachent autre chose que des armes.

Il a été confirmé que l'Irak a fabriqué et stocké des armes chimiques et bactériologiques. L'Irak détient des stocks importants d'anthrax, du gaz neurotoxique VX, de botulinum et d'anflatoxine. Ces produits sont tellement dangereux que je ne peux même pas prononcer leur nom. Je sais cependant qu'ils peuvent tuer des millions de personnes.

Saddam a employé des armes chimiques contre son propre peuple, les Kurdes, pendant la guerre Iran-Irak, de 1980 à 1988. En 1989, l'ambassadeur d'Irak au Koweït a dit que l'Irak avait de l'uranium enrichi. Le monde a des motifs raisonnables de croire que Saddam utilisera ces armes.

Dans le passé, les activités de l'Irak ont souvent visé à déstabiliser la paix. L'Irak a envahi l'Iran et le Koweït et il a attaqué Israël. Nous, les Canadiens, n'avons rien contre le peuple iraquien. Nous savons qu'il est victime de Saddam Hussein, de ses armes, de sa dictature, des sanctions des Nations Unies et de la guerre.

Nous avons à coeur le respect de la vie et nous nous préoccupons des souffrances infligées aux humains, car il y a des être humains dans les deux camps, que l'Irak soit attaqué ou non. Nous savons aussi que la vie de soldats canadiens sera en jeu si nous nous engageons à offrir un soutien militaire.

Nous devons évaluer soigneusement si le risque éventuel l'emporterait sur l'importance de l'enjeu. Cela aurait pu être fait si le gouvernement libéral avait fait preuve de leadership et s'il avait pris position. Il aurait ensuite pu modifier celle-ci à l'issue du débat.

Le chef de l'opposition officielle a dû combler cette lacune. Avant que nous nous engagions à offrir notre soutien, nous devons vérifier si nous respectons les six critères mentionnés par notre chef. Jusqu'à maintenant, nous en satisfaisons trois.

Premièrement, la menace qui pèse à l'échelle internationale est sérieuse, et les efforts diplomatiques semblent échouer. Deuxièmement, plusieurs pays appuient une intervention militaire. Troisièmement, nous pouvons jouer un rôle de nature financière et militaire, mais nous ne savons pas encore si le gouvernement est convaincu du bien-fondé de la stratégie. En quoi consistent la mission et le plan prévus pour une intervention militaire et quelle est la structure de commandement et de contrôle? Est-ce satisfaisant?

Ce qui est certain, c'est que le gouvernement doit nous informer davantage. Le Canada doit donner son appui et offrir sa coopération comme on le lui a demandé, afin de veiller à ce que l'Irak continue de se conformer à la résolution 687 des Nations Unies qu'il s'est engagé à respecter à la suite de la guerre dans le golfe Persique.

Nous appuyons un règlement diplomatique de la crise avec l'Irak. C'est là le plan A. Il faut déployer tous les efforts possibles pour garantir la recherche d'une solution diplomatique. S'ils échouent, nous devons recourir au plan B, celui qui prévoit une intervention militaire.

 

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Nous voulons une solution qui permettra d'éviter toute effusion de sang, toute perte de vies humaines, la douleur et les souffrances. C'est le plan A. En déclarant que nous appuyons le plan B, nous envoyons un message ferme à l'Irak, à savoir que nous sommons ses dirigeants de négocier une solution diplomatique, équitable et pacifique, à défaut de quoi nous réglerons la crise par une intervention militaire.

Il est encore possible que le conflit se règle par voie diplomatique. Le lieutenant-général Amer al-Saadi a déclaré que les discussions ont été constructives, très ouvertes et réalistes et, partant, qu'il plaidait pour un autre sursis.

Nous devrions avoir la certitude qu'il reste assez de temps pour que ces pourparlers se poursuivent et qu'ils se terminent avant une intervention militaire. J'espère que Saddam Hussein cédera aux pressions militaires et qu'il fera marche arrière. J'espère sincèrement qu'il le fera, du moins pour le bien des innocents.

L'Irak cessera de produire des armes de destruction soit par les voies diplomatiques, soit par la force.

J'appuie fermement l'obligation canadienne de veiller à ce que l'Irak respecte à la lettre la résolution prise par les Nations Unies à son endroit.

Le Canada a une longue tradition de chef de file mondial dans le maintien et le rétablissement de la paix. Nous avons largement contribué à la négociation de règlements diplomatiques partout dans le monde. Nous avons toujours participé aux missions internationales les plus importantes. Récemment, nous avons joué un rôle dont nous pouvons être fiers. En effet, nous avons été le fer de lance de la conclusion d'un traité international interdisant les mines terrestres. De plus, nous avons pris part à des missions au Rwanda, en Haïti et en Bosnie.

Le monde sait que le Canada est un pays pacifique, compatissant et diplomate. Si nous appuyons les États-Unis, la Grande-Bretagne et nos alliés dans le golfe Persique, comme on nous l'a demandé, le monde en prendra note. En tant que pays, nous tenons à toujours appuyer fermement nos alliés traditionnels.

Les États-Unis nous ont demandé de fournir notre soutien dans le transport ainsi que dans les opérations de recherche et de sauvetage, à titre de non-combattants. Ce devrait être aux experts militaires de décider et non aux politiciens.

Tout en s'engageant à fournir le soutien demandé, le Canada devrait continuer de faire pression en faveur d'une solution diplomatique et de faire preuve de leadership.

M. John Williams (St. Albert, Réf.): Monsieur le Président, je me demande souvent pourquoi, toutes les quelques années, nous devons débattre la plus grave des questions qui se posent à une démocratie. Il s'agit évidemment de savoir s'il faut envoyer nos militaires, hommes et femmes, défendre les principes qui nous tiennent à coeur.

Nous croyons en la démocratie, qui se définit évidemment comme étant le droit d'un peuple de choisir son propre gouvernement. Nous savons qu'il n'y a pas de démocratie en Irak. Les Irakuiens n'ont pas le droit de choisir leur gouvernement. Mais cela ne justifie pas que nous nous joignons à une aventure militaire qui se déroule à l'autre bout du monde.

Nous croyons en la liberté de parole et en la liberté d'expression. Nous savons qu'il n'y en a pas en Irak aujourd'hui. Mais, là encore, cela ne suffit pas pour justifier notre participation à une aventure militaire là-bas.

Nous croyons en la liberté individuelle et en des chances d'avancement pour tous, et nous savons que les Irakuiens aujourd'hui ne jouissent d'aucune liberté. Ils n'ont aucun avenir. La vie en Irak est plutôt triste. Mais, là encore je ne vois pas en cela, en tant que Canadien, une raison justifiant notre participation à une aventure militaire là-bas.

Nous attendons de nos chefs qu'ils servent leur peuple. Saddam Hussein est un dictateur qui ne sert pas l'intérêt de son peuple. Il exploite et opprime son peuple. Il est responsable de la famine que subissent les enfants dans son pays, et c'est cela qui nous préoccupe.

Nous avons le droit de nous protéger, et de protéger nos familles et nos enfants. Lorsque les nôtres sont menacés, nous sommes en droit de nous défendre.

Saddam Hussein a montré auparavant qu'il était capable de frapper. Il s'est attaqué à son propre peuple. Il s'est attaqué à un pays étranger. Nous en avons été témoins lors de l'invasion du Koweït. Nous l'avons vu lorsqu'il a lancé des missiles Scud sur Israël. Malheureusement, il a également montré qu'il veut se donner la capacité de répéter ces agressions en refusant de respecter la résolution 687 de l'ONU.

 

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Il a continué de mettre au point des armes biologiques, chimiques et peut-être même nucléaires. Il pourrait nous attaquer avec ces armes. C'est pourquoi nous devons être inquiets, c'est pourquoi nous devons penser à nous défendre, même si nous sommes à l'autre bout de la terre. Malheureusement, des armes de ce genre peuvent être transportées très facilement. Nous ne sommes pas à l'abri. Cependant, il faut commencer par le commencement.

On doit avoir recours en premier lieu à une diplomatie musclée qui nous éloigne de la guerre plutôt que de nous en rapprocher. Malheureusement, je vois des efforts diplomatiques déployés aujourd'hui pour justifier le recours à la force, non pour l'éviter, lorsque j'entends les paroles de la secrétaire d'État américaine qui a promis et garanti qu'à moins d'un règlement dans un avenir très rapproché, on aura recours à la force.

Je peux comprendre l'exaspération des États-Unis qui essaient de mettre en vigueur la résolution no 687 des Nations Unies pour enlever les armes de destruction massive à l'Irak. Je félicite nos voisins et amis du Sud qui déploient tant d'efforts pour protéger le monde libre depuis quelques décennies, et qui prennent les moyens pour veiller à ce que l'Irak se plie à cette résolution. Je sais qu'ils en sont arrivés à une impasse. Je sais que leur mission est un échec jusqu'à maintenant.

Il faut se rappeler que c'est une résolution des Nations Unies et non des États-Unis qu'on doit mettre en vigueur.

Alors que nous discutons de guerre et de paix à la Chambre ce soir, je me demande si on en débat ce soir également aux Nations Unies. Malheureusement, à ma connaissance, la réponse est non. Notre ministre des Affaires étrangères essaie-t-il d'obtenir aux Nations Unies des appuis pour une attaque contre l'Irak? Malheureusement, la réponse est non. Les Américains exhortent-ils les Nations Unies et les Pays arabes à appliquer davantage encore de pressions sur l'Irak pour que les Irakuiens constatent qu'ils sont dans l'erreur et se plient à la résolution pour éviter ainsi toute confrontation? Il semble que non malheureusement.

Si nous sommes si inquiets dans cette région du monde, quelles sont les craintes des voisins de l'Irak? Je sais qu'ils en ont certaines. Manifestement, pour que les Nations Unies jouent bien leur rôle, nous devrions pouvoir nous attendre à beaucoup plus d'appuis pour l'entreprise militaire envisagée que la seule coalition réunie jusqu'à maintenant.

Lorsque je pense aux Nations Unies, je me dis que les institutions internationales ont un rôle à jouer dans le monde. Si on ne tient pas compte de ces institutions, elles deviennent désuètes et la situation mondiale devient plus dangereuse.

Si nos organismes internationaux ne fonctionnent pas, il faut les restaurer et non pas les ignorer, les contourner ou les mettre au rancart. Il faut les rétablir.

Je crois que nous devrions entendre une voix nous invitant à la prudence ce soir. Lorsque nous sommes menacés, nous avons le droit de riposter. Nous devrions utiliser la force seulement lorsque nous y sommes contraints et attaquer seulement pour répondre à une attaque.

Aujourd'hui, nous sommes menacés par la présence d'armes de destruction massive en Irak. Avant d'utiliser la force et d'attaquer l'Irak pour régler ce problème, je crois que les États-Unis, le Canada, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et tous les autres pays qui croient dans la démocratie et qui dénoncent la dictature, où que ce soit dans le monde, devraient s'assurer auprès des Nations Unies de l'appui du monde entier avant de passer à la prochaine étape fatidique. Cette étape n'entraîne pas uniquement une attaque contre l'Irak, mais aussi la situation qui surviendra ensuite si Saddam Hussein y survit et décide de riposter.

Nous devons penser à cela car nous savons que cet homme est dangereux.

 

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Nous savons qu'il est prêt à jeter ses troupes dans la mêlée et à tout sacrifier pour atteindre ses objectifs personnels. Nous savons aussi que si nous éliminons une partie seulement des armes chimiques et biologiques dont dispose Saddam Hussein et qu'il survit, il se battra à nouveau tôt ou tard.

Le monde sera plus sûr lorsque Saddam Hussein ne sera plus là, mais je crois aussi que le monde sera plus sûr lorsque l'Occident démocratique saura travailler dans le cadre des institutions internationales, en faveur de la paix et non pas pour la guerre.

Au moment où nous envisageons la possibilité d'une guerre, j'espère que tous les dirigeants de tous les pays occidentaux et de toutes les démocraties qui s'efforcent de servir les peuples pensent avant tout à la paix et non pas à engager leurs populations dans une autre aventure militaire dont l'issue est loin d'être certaine.

Soyons prudents. Je disais plus tôt qu'il faut menacer lorsqu'on est menacé. Nous pouvons utiliser la force lorsque nous y sommes contraints et attaquer lorsque nous sommes attaqués. Nous devons cependant être prudents et bien réfléchir. En définitive, la diplomatie, lorsqu'elle fonctionne, est toujours la meilleure solution.

[Français]

M. Mark Assad (Gatineau, Lib.): Monsieur le Président, je veux vous aviser que je partagerai mon temps de parole avec mon collègue, le député de Cambridge.

Ce soir, le débat porte sur la question de savoir si le Canada devrait faire partie d'une action pour bombarder de nouveau l'Irak.

Je me rappelle, il y a sept ans, on a eu un débat ici à la Chambre, à peu près à la même époque, en janvier. On avait appuyé les Nations unies parce qu'à l'époque, c'était une mission de la communauté des nations de la planète. C'était une résolution des Nations unies pour défendre le Koweït contre l'agression de l'Irak. On a vu le résultat de cela et les séquelles qui ont suivi.

Maintenant, les États-Unis demandent au Canada de se joindre à la Grande-Bretagne et à l'Allemagne pour agir contre l'Irak. La chose n'est pas trop claire, parce qu'on sait très bien que plusieurs pays qui ont fait partie de cet effort en 1991 ne sont plus là. Ces pays voudraient que ce soit davantage un effort des Nations unies, non seulement des États-Unis avec quelques partenaires.

On parle des moyens diplomatiques qui ne fonctionnent pas. Je voudrais juste souligner ce qui est arrivé depuis quelques années avec les moyens diplomatiques que les États-Unis nient.

Premièrement, des enquêteurs se sont rendus en Irak et ils ont réussi à découvrir au-delà de 2 000 infractions qu'ils ont pu corriger, deux fois plus que la guerre avec l'Irak en 1991. On se pose la question: pourquoi cette tentative d'accélérer les choses à ce point, quand on sait qu'on dispose de moyens pacifiques faisant qu'il n'y aurait pas de gens de tués comme en 1991, ou qu'il n'y aurait pas de séquelles comme celles qu'ils vivent depuis 1991, qui sont néfastes pour les enfants de cette partie du monde.

L'ambassadeur des États-Unis aux Nations unies, M. Richardson, a dit qu'il perdait patience. C'est curieux qu'un homme qui est censé prôner toutes les avenues pour la paix, surtout de prendre les moyens diplomatiques pour trouver une résolution, dise qu'il perd patience.

Il me semble que lorsqu'on traite avec des cas aussi importants que la vie de milliers de personnes, on ne devrait jamais perdre patience. On devrait, autant que possible, trouver des moyens diplomatiques pour empêcher un autre massacre que celui qu'on a vu en 1991 contre l'Irak, contre les enfants surtout.

 

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Ce que je voudrais porter à l'attention, non seulement de mes collègues ici, à la Chambre, mais aussi de nos téléspectateurs, c'est où est la consistance de notre politique. Le Canada a l'image dans le monde d'un pays pacifique qui trouve des solutions. Même à l'intérieur de notre pays, on a beaucoup de tolérance, on négocie et on trouve des solutions.

On se pose la question de savoir quelles résolutions sont les plus importantes aux Nations unies. Pourtant, elles devraient toutes être sur le même pied d'égalité; toutes les résolutions sont importantes. Mais au même moment, il y a une multitude de résolutions qui ont été adoptées par le Conseil de sécurité et même par l'assemblée générale, comme la Résolution 242 qui concerne le Moyen-Orient et les Résolutions 338 et 425 qui touchent plus particulièrement l'intégrité et l'indépendance du Liban, c'est-à-dire que les forces étrangères qui sont au Liban, comme la Syrie et les forces israéliennes, devraient se retirer. Cela fait des années que ces résolutions ont été adoptées par les Nations unies et, curieusement, les Nations unies ou la Grande-Bretagne ne se pressent pas pour dire à ces agresseurs qui sont au Liban qu'il y a une résolution et qu'ils doivent quitter. Donc, on se pose la question.

Les résolutions qui se rapportaient à l'île de Chypre, au sud du Liban, à la côte ouest et à Gaza, dans lesquelles on demandait qu'il n'y ait pas d'installations sur ces territoires, eh bien, aujourd'hui encore, ces résolutions ne sont pas appliquées. Donc, on se pose la question. Si toutes les résolutions sont d'importance égale, pourquoi a-t-on laissé se détériorer la situation au Moyen-Orient depuis au-delà de 30 ans? Pensez-vous que les pays du Moyen-Orient ne regardent pas curieusement les États-Unis, la Grande-Bretagne et d'autres pays d'Europe qui sont prêts à aller bombarder avec des forces énormes? Mais il y a d'autres résolutions qu'ils ignorent totalement.

Le Canada est reconnu comme étant un pays pacifique, qui envoie des soldats pour maintenir la paix. Voilà notre rôle. On devrait faire partie d'une mission diplomatique. On ne devrait pas faire partie d'une mission qui veut amener la destruction encore dans cette partie du monde qui n'a connu que cela depuis au-delà de 30 ans. Il faut tenir compte que le rôle du Canada est un rôle que les pays du monde admirent et on devrait toujours utiliser des moyens diplomatiques pour trouver une solution. On ne devrait pas choisir des résolutions qui font l'affaire de certains pays.

Depuis trop longtemps, au Moyen-Orient, les gens ont peu confiance que l'Ouest veut vraiment régler leurs problèmes. Est-ce surprenant qu'ils soient inquiets de nos intentions? Quels sont les pays du monde qui ont vendu des armes de destruction massive à l'Irak dans le passé quand il menait une guerre contre l'Iran? Quels sont les pays qui ont vendu ces armes? C'est sûr que ce n'est pas l'Irak ou d'autres pays du Moyen-Orient qui avaient les moyens de fabriquer de telles armes. Les fournisseurs d'armes au Moyen-Orient étaient des pays de l'Ouest, y inclus la Grande-Bretagne et les États-Unis.

Pourtant là, on vire de bord. On veut sélectionner certaines résolutions des Nations unies et aller de nouveau essayer de détruire leur pays. Pensons à la destruction des derniers sept ou huit ans, aux enfants qui ont souffert, à l'embargo contre l'Irak, il y a toujours des limites.

 

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Il est très difficile de convaincre les gens du Moyen-Orient que les pays de l'Ouest veulent la paix quand ils voient le contraire. C'est un point de vue qu'il faut étudier de nouveau. On devrait dire que toutes les résolutions des Nations unies doivent être mises en application au Moyen-Orient et ne pas les sélectionner.

Je vais terminer en disant que tout ce que les États-Unis veulent obtenir du Canada, c'est d'utiliser notre nom. Partout dans le monde, nous sommes respectés, les gens nous font confiance. Pourquoi veut-on perdre cette confiance que les gens ont en nous? Les États-Unis savent très bien qu'un pays de 29 millions n'a pas d'armes de destruction comme celles qu'ils possèdent. On sait très bien qu'ils ne comptent pas sur nos armes pour régler les problèmes au Moyen-Orient, surtout en Irak.

Je suis convaincu qu'avec le temps et par des voies diplomatiques, des types comme Saddam Hussein, qui sont des monstres qui ont été créés par l'Ouest, ce sera leur propre population qui mettra fin à des dictateurs et des tyrans de la sorte.

Que le Canada garde son nom, qu'il garde sa réputation comme étant un pays de paix et qu'il ne fasse pas partie de missions de destruction.

[Traduction]

M. Janko Peri«(Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, je félicite mon collègue de Gatineau de nous avoir rappelé qui a appuyé l'Irak dans sa guerre contre l'Iran.

Je suis heureux de prendre part à ce débat sur la récente invitation faite au Canada par les États-Unis d'Amérique de participer à d'éventuelles actions militaires au Moyen-Orient. Certes, je comprends ce que nos voisins et alliés américains demandent, mais j'estime ne pas disposer de toutes les informations nécessaires pour que je puisse donner mon aval à ce qui nous est demandé.

Dans le passé, j'ai souscrit aux demandes visant à faire participer le Canada à des missions de maintien de la paix, mais il ne s'agit pas ici d'un mission de maintien de la paix. C'est plutôt une action militaire unilatérale menée par les États-Unis contre l'Irak, avec l'appui de la Grande-Bretagne.

Contrairement à la guerre du Golfe d'il y a sept ans, l'opération militaire proposée n'est pas une riposte à l'invasion d'un autre pays par l'Irak. En fait, quand l'Irak a envahi le Koweït en 1990, les États-Unis ont attendu six mois pour mener la coalition contre Saddam Hussein.

Pourquoi se précipiter dans ce cas-ci alors que des solutions diplomatiques sont encore possibles? Il y a sept ans, les États arabes voisins ont appuyé l'offensive militaire contre l'Irak. Cette fois-ci, ces mêmes États arabes, qui sont les plus menacées si l'Irak continue de stocker des armes chimiques et d'autres armes de destruction massive, n'appuient pas l'intervention militaire.

Il est clair que ce n'est pas un effort international sanctionné par les Nations Unies. La France, un important pays d'Europe qui, il y a sept ans, s'est associé à la coalition contre l'Irak, est plutôt réticente à l'idée d'une éventuelle intervention militaire. La Russie et la Chine, deux grands pays et membres importants du Conseil de sécurité, ont ces derniers jours fait des déclarations nettement défavorables au déclenchement d'une guerre contre l'Irak.

S'il s'agissait d'un effort international sanctionné par les Nations Unies, j'appuierais plus volontiers notre participation à l'opération. Je partage les frustrations de nos alliés, les Américains et les Britanniques, qui n'ont pas réussi à régler la situation iraquienne par les voies diplomatiques. Je partage leurs préoccupations vis-à-vis d'un fou comme Saddam Hussein qui stocke des armes de destruction massive. Je conviens que le monde doit faire quelque chose pour régler le problème, mais il serait préférable que le monde s'entende sur une action commune.

 

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Après tout, les bombes que les États-Unis et la Grande-Bretagne proposent de larguer sur les armes chimiques et biologiques ne serviront-elles pas justement à libérer ces mêmes produits chimiques dans l'atmosphère, blessant ou tuant des civils innocents, particulièrement des enfants? Peut-être pourrions-nous essayer d'autres mesures avant d'entreprendre une intervention militaire.

Il semble que certains des États arabes tentent actuellement de négocier une entente par laquelle une seconde équipe d'inspection de l'ONU, une équipe qui ne serait pas aussi offensante pour le gouvernement iraquien, pourrait être nommée pour faire l'inspection des sites auxquels l'équipe dirigée par les Américains n'a pas accès. Ce pourrait être là une autre mesure diplomatique à envisager.

Cependant, je crois fermement que la décision de lancer une attaque contre l'Irak devrait être prise par le Conseil de sécurité des Nations Unies et non par la Maison-Blanche. Nous vivons dans un monde où les actions d'un pays peuvent avoir des répercussions sur la vie d'un grand nombre de gens. Malheureusement, il ne semble pas y avoir vraiment consensus entre nos alliés à ce sujet.

Ce matin, j'ai reçu copie d'une lettre adressée au premier ministre par l'Islamic Humanitarian Service, dont le siège social se trouve dans ma circonscription. Selon la lettre, les attaques militaires envisagées ne feraient pas de mal personnellement au tyran Saddam Hussein. Toutefois, elles feraient sans doute de nombreuses victimes parmi les civils innocents. Au cours des derniers jours, le ministre français des Affaires étrangères a fait le même genre de commentaires. La famine et la maladie s'aggraveront alors que Saddam Hussein continuera de vivre dans le confort.

Ils ont tout à fait raison. Les gens ordinaires ont souffert depuis la guerre du Golfe en 1991, mais Saddam Hussein vit toujours dans le luxe.

L'Islamic Humanitarian Service a supplié le premier ministre de ne pas céder aux caprices des États-Unis. Ce groupement demande que le Canada poursuive une politique étrangère indépendante et qu'il reste en dehors de ce conflit. C'est là un message que j'ai entendu toute la journée de la part des électeurs de ma circonscription, Cambridge. Je partage leur opinion.

Ne nous pressons pas d'envoyer nos braves militaires à la guerre avant d'avoir épuisé toutes les solutions diplomatiques possibles. Si le Conseil de sécurité des Nations Unies ne prend pas la décision d'appliquer la force militaire contre l'Irak, le Canada ne devrait pas envoyer de troupes ou avoir une participation quelconque, ni pour le pétrole ni pour quoi que ce soit d'autre.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le Canada a l'obligation d'aider ses alliés à mettre fin à l'action terroriste de Saddam Hussein. En général, les Canadiens n'ont pas vraiment idée des armes de destruction massive qui, nous en avons la confirmation des Nations Unies, existent encore en Irak, ceci bien que les unités d'inspection des Nations Unies aient détruit 480 000 litres d'agents utilisés dans la production d'armes chimiques, 30 cones de charge chimiques, 38 000 armes chimiques et bactériologiques, 690 tonnes d'agents chimiques et 3 000 tonnes d'ingrédients entrant dans la fabrication d'armes chimiques.

Il y a trois mois, les inspecteurs des Nations Unies ont rapporté qu'il y avait encore 200 sites soupçonnés d'abriter des installations pour la production d'armes chimiques et bactériologiques. De ce nombre, 100 seraient des installations pour la fabrication d'armes bactériologiques, 80 des installations pour la fabrication d'armes chimiques et 20 des installations pour la fabrication d'armes nucléaires.

Les inspecteurs des Nations Unies ont aussi confirmé l'existence d'installations pour la fabrication à l'échelle industrielle de gaz neurotoxique VX, de quatre tonnes de ce gaz—dont une goutte peut être mortelle—, de stocks d'anthrax, de botulinum, d'aflatoxine, et d'installations pour la production d'armes bactériologiques à Al Hake.

 

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Le 14 novembre, le président Clinton des États-Unis a dit au sujet des équipes d'inspection que «ces inspecteurs discrets ont détruit plus d'armes de destruction massive au cours des six dernières années que pendant la guerre du Golfe.»

Je pourrais en dire plus à ce sujet, mais je crois qu'il est clair que Saddam Hussein est un terroriste qui fabrique des armes de destruction massive et qui est prêt à les utiliser. Nous savons qu'il est prêt à le faire. Il s'est servi d'agents chimiques contre les Iraniens et les gens de son propre pays.

Même si nous préférons une solution diplomatique, il est peut-être bon de revenir un peu en arrière et de réfléchir à ce qu'avait déclaré Winston Churchill en 1938:

    Si nous ne tenons pas tête aux dictateurs maintenant, nous ne faisons que préparer le jour où nous aurons à leur tenir tête dans des conditions beaucoup plus pénibles. Il y a deux ans, on aurait pu agir en toute sécurité, il y a trois ans, avec facilité, il y a quatre ans, un simple message aurait peut-être suffi à rectifier la position, mais où en serons-nous dans un an?

C'était en 1938. Nous savons ce qui est arrivé en 1939.

Au Royaume-Uni, il y a environ deux semaines, il a été signalé à la Chambre des communes que Saddam Hussein avait maintenant suffisamment d'anthrax pour remplir deux têtes explosives par semaine. Il continue de recevoir des pièces de missiles et pourrait bientôt pouvoir fabriquer des missiles de longue portée. Cela ne laisse aucune place au compromis. La diplomatie ne donnera des résultats que si Saddam Hussein cesse de violer les règles établies.

Lorsque je parle d'engager les forces canadiennes pour appuyer nos alliés afin de mettre un terme au terrorisme, je le fais en pensant à nos soldats et à leurs familles, à des gens comme les membres de l'escadre 19 des forces canadiennes à Comox, dans ma circonscription. Nos militaires sont prêts à exécuter les missions qui leur sont confiées par le Canada.

Il y a un message clair dans tout cela pour les Canadiens. Nous devons donner à nos militaires les ressources dont ils ont besoin pour exécuter les missions que nous leur confions. De temps en temps, ces missions peuvent faire appel à notre potentiel de combat.

Je reconnais qu'il existe des inquiétudes qu'on peut qualifier de généralisées au sein de nos forces armées, et nous ne devrions pas enterrer ces inquiétudes dans ce genre de débat.

Certains membres qualifiés des forces canadiennes, dans des catégories comme les pilotes et les techniciens, partent plus vite qu'on ne peut les remplacer à cause du recrutement actif que fait le secteur privé et de la rémunération considérablement plus élevée qu'il offre. Il règne un sentiment d'inquiétude et d'incertitude au sujet de l'efficacité future de nos forces armées et de la viabilité de certains groupes professionnels militaires. La réduction continue des effectifs a amené les gens à croire que la situation risque de s'aggraver encore.

Les déploiements fréquents dans des théâtres d'opération dangereux et difficiles, loin des conjoints et des enfants, ont eu un effet néfaste sur les individus et les familles. Je crois que, si nous devons demander à nos militaires professionnels d'exécuter des opérations de combat, le Canada leur doit de leur donner les ressources nécessaires pour faire leur travail. Cela devrait être notre mise en garde.>Nos militaires risquent leur vie et ils ont besoin de notre appui collectif. Ils le méritent.

Je dois me demander pourquoi Saddam Hussein produirait quatre tonnes de gaz neurotoxique VX lorsqu'une goutte peut tuer? Pourquoi produirait-il 8 400 litres d'anthrax lorsque moins d'un millionième de gramme peut tuer?

Pourquoi Saddam Hussein, en dépit du fait que l'Irak avait signé un traité de non-prolifération des armes nucléaires, s'était-il mis en position de produire une bombe nucléaire avant 1993 si la guerre du Golfe n'était pas intervenue?

 

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Pourquoi Saddam Hussein a-t-il refusé de donner un état de ses missiles jusqu'en 1996, cinq ans après la date prévue? Et pourquoi continue-t-il de fournir à l'équipe d'inspection de l'ONU des rapports contradictoires et pas fiables sur ses armes chimiques et biologiques?

Nous savons tous que, lorsque tout échoue, c'est à l'armée d'entrer en action. La situation actuelle en Irak pourrait conduire à des situations très désagréables que tout le monde préférerait éviter. Nous avons l'obligation morale d'arrêter le terrorisme, et c'est d'ailleurs dans l'intérêt national. L'armée est l'instrument et l'agent de dernier recours, que l'on emploie lorsque la diplomatie échoue.

Il n'y a pas de doute que nous sommes confrontés à une grave menace internationale. Nous devons chercher à fermer les fabriques d'armes de Saddam Hussein et à permettre le travail des inspecteurs de l'ONU.

J'ai du mal à conclure mes observations, car cela me donne des papillons dans l'estomac. Si seulement le monde n'était peuplé que de gens raisonnables qui accepteraient des solutions raisonnables. Hélas, l'histoire nous prouve que le monde n'est pas ainsi. C'est pour cela que l'armée et les traditions de l'armée ont tant d'importance.

Il est bien plus facile pour nous de débattre de cette question à la Chambre que ce n'est pour une famille de dire au revoir à un militaire qui part pour une mission de combat. Espérons que nous n'en viendrons pas là, mais préparons-nous tout de même.

M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer à ce débat sur le rôle possible des Forces canadiennes dans une intervention contre l'Irak. En tant que porte-parole de l'opposition officielle de Sa Majesté sur les questions relatives aux affaires des anciens combattants, et comme j'ai moi-même été militaire, je comprends bien la nature du problème de la participation des Forces canadiennes à une intervention en Irak.

Le Canada a été peuplé par des immigrants des quatre coins du globe. Quel pays est mieux placé que le Canada pour défendre la paix dans le monde? Le Canada a été l'un des premiers pays à adhérer aux Nations Unies. Nous suscitons l'admiration de presque tous les pays du monde pour le rôle de maintien de la paix que nous jouons dans les conflits internationaux. Et nous avons joué ce rôle malgré l'insuffisance flagrante du financement de nos forces militaires.

Nos forces ont été admirables au cours de la première guerre du Golfe. Nos Forces armées canadiennes sont prêtes, capables et disposées à servir encore une fois, dans l'honneur et la distinction. Le Canada est disposé à soutenir les États-Unis et la Grande-Bretagne dans leur défense des intérêts liés à la sécurité mondiale. Notre voisin du Sud est depuis longtemps l'un des grands défenseurs de la paix mondiale, et il mérite notre respect et notre soutien, mais voyons d'abord les critères qui devraient déterminer notre décision de participer à une offensive.

Nous avons besoin de critères pour déterminer comment le Canada devrait réagir quand on lui demande de participer à des opérations militaires pour établir ou maintenir la paix dans le monde, soit les efforts diplomatiques pour régler le problème ont échoué; plusieurs pays sont en faveur d'une intervention militaire; il y a une stratégie militaire réalisable qui permettrait de régler le conflit; le plan prévoit une définition claire du rôle du Canada; nous avons la capacité d'assumer ce rôle; il existe une structure de commandement et de contrôle satisfaisante pour le Canada.

Le Canada a le devoir de soutenir ses alliés dans leur effort pour mettre un terme au terrorisme de Saddam Hussein. Nous devrions offrir un soutien militaire ainsi que moral et politique. Nos actions militaires devraient viser à détruire la capacité de Saddam Hussein de fabriquer des armes et à permettre aux inspecteurs de l'ONU de faire leur travail. En tant que parlementaires, nous devrions prendre la décision politique d'apporter notre soutien. Nous devrions ensuite laisser le ministère de la Défense formuler les recommandations concernant la forme et l'ampleur de notre soutien militaire. La raison pour laquelle nous appuyons une intervention militaire est l'obligation morale que nous avons d'arrêter le terrorisme et la guerre menée contre des civils innocents, obligation qui par ailleurs est dans l'intérêt de notre pays.

 

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Nous ne devons pas perdre de vue que les Forces canadiennes risquent une fois de plus d'être exposées à des contaminants chimiques et biologiques pendant l'escalade du conflit et que cela peut avoir des effets prolongés importants sur leur santé.

Demandez à Louise Richard quels dangers inconnus vous attendent sur les champs de bataille de la région du golfe. Louise était membre des Forces canadiennes pendant le premier conflit du Golfe et, aujourd'hui, au tout début de la trentaine, elle est rendue invalide par de multiples problèmes de santé dont on pense qu'ils constituent le syndrome de la guerre du Golfe. Bien que Louise reconnaisse qu'il existe des risques nécessaires quand on participe à une bataille, elle est déçue que le gouvernement actuel soit incapable de venir en aide aux anciens combattants qui se retrouvent avec des problèmes.

Beaucoup de nos anciens combattants de la guerre du Golfe doivent compter sur d'autres pays pour se faire soigner. Cela ne doit pas se reproduire. Si nous décidons d'envoyer nos hommes et nos femmes sur le champ de bataille, nous devons également accepter la responsabilité de leur santé et de leur bien-être quand ils reviennent au Canada. Mme Richard, qui souffre des séquelles de la guerre du Golfe, estime quand même qu'il faut prendre des risques pour mettre fin aux actions d'un tyran.

L'Irak, vaincu pendant la guerre du Golfe, avait commis des crimes contre ses citoyens et les citoyens d'autres pays. Il fallait l'arrêter. La cessation des hostilités avaient comme conditions, entre autres, qu'il accepte la surveillance et la destruction de ses armes de destruction massive. De toute évidence, Saddam ne s'est pas conformé à cette exigence et cache tout un arsenal d'ogives, notamment des armes chimiques et bactériologiques. Par le passé, Saddam a utilisé ces armes chimiques pour tuer des citoyens de son pays et d'autres pays. Il faut détruire les armes et supprimer la capacité d'en produire davantage, sinon une menace planera à jamais sur d'autres pays.

Il m'apparaît très clairement qu'une inspection efficace des armes chimiques et biologiques ne pouvait être effectuée sans des observateurs des États-Unis. J'estime que la fierté politique devrait céder le pas à l'évitement de l'escalade d'un conflit militaire généralisé. La seule exception à ce point de vue interviendrait lorsque l'évitement d'un conflit militaire généralisé engendrerait des efforts infructueux d'apaisement comme ceux dont a si bien fait état Neville Chamberlain, de l'Angleterre, avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Nous avons appris qu'aucun papier brandi n'arrête des hommes comme Saddam Hussein et Hitler.

Saddam n'obéit qu'à la force des armes et à la puissance. Il ne se soumettra qu'à ces dernières.

Nous n'avons qu'à nous rappeler la menace du passé récent et le carnage provoqué par ce tyran belliqueux il y a à peine sept ans. Seule la volonté conjuguée de deux douzaines de pays a rogné sa puissance militaire et l'a renvoyé chez lui, mais elle a laissé intacte sa menace d'utiliser des armes chimiques et biologiques. Ces armes étaient censées être inspectées et détruites, mais Saddam est intervenu encore une fois. Il s'agit là de la menace que Saddam pourrait faire monter à nouveau au point de menacer encore une fois la région.

Le legs de Saddam en 1991, lors de la guerre des guerres, se résume à plus de 100 000 morts, des champs de pétrole incendiés, des villes en ruines, son pays en lambeaux. Pourtant, sept ans plus tard, le monde risque d'affronter davantage. Au nom de la paix mondiale, le Canada doit faire sa part pour contribuer à anéantir cette menace qui pèse sur les pays de la terre.

[Français]

M. Paul DeVillers (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je veux indiquer que je partagerai mon temps de parole avec la députée d'Etobicoke—Lakeshore.

J'ai le plaisir de participer, ce soir, au débat sur la possibilité de la participation canadienne à une intervention militaire dirigée contre l'Irak. Je suis persuadé que mes commettants estiment que ce débat est d'une importance certaine compte tenu des enjeux au plan international.

Situons ce débat dans son contexte historique. Le Canada n'a pas eu à décider s'il devait intervenir, militairement ou non, dans cette région du monde depuis la guerre du golfe Persique en 1991.

 

. 2400 + -

[Traduction]

En 1991, une coalition internationale a attaqué l'Irak après l'invasion de ce pays dans le royaume voisin du Koweït. Le Canada a dépêché trois navires, 24 chasseurs-bombardiers CF-18, un avion ravitailleur Boeing 707 et 1 830 soldats des Forces canadiennes. Comme de nombreux Canadiens, je crois que cette attaque était une mesure visant en grande partie à protéger l'approvisionnement mondial en pétrole.

Il faut se demander pourquoi nous sommes aujourd'hui dans la même situation qu'en 1991. Pourquoi envisageons-nous la possibilité de dépêcher des troupes en Irak? La réponse saute aux yeux. L'Irak affiche de nouveau son irrespect à l'égard des normes internationales.

Il y a pourtant quelques distinctions à faire. Tout le monde sait que les États-Unis ont avantage à détourner l'attention de ses problèmes intérieurs vers un autre conflit. Personnellement, je ne peux donner mon accord si ces considérations politiques sont l'unique raison pour exposer des soldats canadiens et dépenser l'argent consacré aux Forces canadiennes.

Il ne faut pas oublier que la raison d'être de cette situation, c'est le refus de l'Irak de collaborer avec un organisme des Nations Unies. L'établissement de cet organisme avait été prévu comme condition de la fin de la guerre du Golfe persique. L'Irak viole cette condition, et le pire, c'est que ce pays compromet des vies partout dans le monde en produisant des armes biologiques.

Le Star de Toronto a fait paraître une analyse intéressante sur le sujet. Selon ce journal, l'Irak a dû renoncer à des recettes pétrolières totalisant plus de 100 milliards de dollars depuis le milieu de 1991, à cause de son refus de collaborer avec le programme subventionné par les Nations Unies et visant la destruction de sa capacité de produire des armes de destruction massive.

Pourquoi un pays se priverait-il de recettes de cet ordre, surtout un pays où, d'après certaines organisations, un enfant meurt toutes les dix minutes de malnutrition et de maladie? Il faut en déduire que le refus de permettre au personnel de l'ONU d'effectuer ses inspections vaut plus que des millions de dollars et plus que la vie de ces enfants. Si c'est le cas, cela constitue une perspective à glacer le sang de tous les habitants de la terre.

La Commission des Nations Unies chargée du désarmement de l'Irak a trouvé des preuves troublantes des intentions de l'Irak touchant la production et l'accumulation d'armes biologiques. Comme on le rapporte dans la Chronique de l'ONU, la commission spéciale a trouvé des preuves que l'Irak avait obtenu ou cherchait à obtenir de l'équipement et du matériel nécessaires à la production d'armes biologiques. L'Irak a été incapable de fournir une justification non militaire pour cet équipement et ce matériel.

Le 1er juillet 1995, l'Irak a avoué avoir établi un programme offensif d'armes biologiques, prévoyant la fabrication et le stockage de grandes quantités d'agents toxiques. La commission a également constaté que l'Irak n'avait pas produit de comptabilité fiable de ses armes biologiques. Tant que l'Irak n'aura pas fourni une telle comptabilité, la CSNU ne pourra pas remplir complètement le mandat que lui a confié le Conseil de sécurité.

L'Irak a refusé pendant plusieurs mois aux inspecteurs de l'ONU de poursuivre leurs enquêtes. Il soutient qu'il a détruit tout le matériel nécessaire pour produire des armes biologiques en l'enfouissant dans le désert, mais a refusé de permettre aux inspecteurs de la CSNU d'inspecter les sites où on le soupçonne de se livrer à des programmes d'armement illégaux.

L'Irak a exprimé son refus en alléguant que les membres américains de l'équipe de l'ONU se livraient à des activités illicites d'espionnage pour le compte des États-Unis. Étant donné les preuves établies par la commission spéciale, ce refus est suspect. Voilà le contexte historique de la situation.

Je passe maintenant au contexte politique du rôle que le Canada pourrait jouer. Il y a plusieurs questions que je voudrais aborder brièvement. Tout d'abord, il est clair qu'il est dans l'intérêt supérieur de tout le monde de trouver une solution diplomatique à ce conflit. Il est important de montrer au gouvernement iraquien que le monde appuie la commission mandatée par l'ONU, mais la nationalité des inspecteurs ne constitue pas une bonne raison de mettre en danger la vie de militaires canadiens ni d'approuver des dépenses militaires canadiennes. Je suggère plutôt de relever le bluff des Irakuiens et des Américains et d'envoyer d'autres inspecteurs.

 

. 2405 + -

Je crois comprendre que la Ligue arabe, la Russie et d'autres organismes influents s'efforcent de mettre au point une solution diplomatique. Je crois fermement que nous ne pouvons pas, en toute bonne conscience, aller plus loin dans la voie d'un conflit armé sans avoir épuisé tous les recours diplomatiques.

[Français]

Deuxièmement, je tiens à discuter brièvement du mandat exact des forces canadiennes. Les États-Unis ne font que demander un appui logistique de la part des forces canadiennes, ni plus ni moins. De toute évidence, les États-Unis cherchent plutôt à accroître la légitimité d'une intervention militaire. Comme en 1991, la contribution canadienne ne sera pas constituée d'innombrables armes et de machines de guerre.

Depuis le Livre blanc, les Forces armées canadiennes ont misé sur leur rôle de force de maintien de la paix. En participant à ce conflit, quel genre de message enverrions-nous? Est-ce la façon dont nous voulons dépenser notre budget de défense? Je n'ai guère de réponses à ces questions, mais elles sont d'une pertinence certaine dans le débat actuel entourant la participation canadienne envisagée dans le golfe Persique.

Je ne peux insister suffisamment sur le fait que la communauté des nations, dont le Canada fait partie, doit miser sur une solution négociée à l'impasse actuelle à défaut de quoi nous devrons envisager une intervention armée.

Je tiens à souligner que le manque d'unanimité chez les pays arabes quant à une intervention militaire en Irak exige que le Canada réfléchisse bien à ses options dans le règlement de ce conflit. La prudence est donc de mise.

Les Canadiens, je l'ai déjà souligné plus tôt, reconnaissent que le régime de Saddam Hussein cultive de sombres desseins. D'aucuns réprouvent la manufacture d'armes à destruction massive, biologiques ou autres, à laquelle se livre Saddam Hussein. L'objectif est sans conteste, mais les moyens, eux, portent à réfléchir.

Certains commettants ont communiqué avec moi afin de me faire part de leurs inquiétudes par rapport à ce qui se déroule sur l'échiquier politique au Moyen-Orient. Tout en partageant l'objectif d'empêcher la manufacture et le stockage des armes à destruction massive, les uns s'inquiètent qu'une intervention militaire déclenchera une conflagration dépassant les bornes du Moyen-Orient. Les autres s'interrogent quant à l'efficacité des différentes mesures envisagées par la communauté internationale pour enrayer la manufacture et le stockage d'armes à destruction massive.

Je comprends ces inquiétudes. Je le répète, il se peut qu'une intervention militaire soit nécessaire, mais la situation actuelle exige que l'on se livre à un exercice de réflexion des plus sérieux. J'espère que ce présent débat saura bien nous guider dans les choix que nous aurons à faire.

[Traduction]

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre part au débat sur la participation possible des troupes canadiennes à une attaque militaire contre l'Irak.

Hier, le président Clinton a demandé au Canada d'appuyer cette initiative en fournissant des services de transports et de recherche et sauvetage.

L'intervention de nos forces armées dans une telle situation préoccupe grandement tous les Canadiens. Je suis contente que le gouvernement ait décidé de tenir un débat sur cette crise.

Tout au long de notre histoire, le Canada a toujours entretenu avec les États-Unis des rapports fondés sur le partenariat et la collaboration. Nous avons toujours été d'un grand soutien à nos amis et voisins américains. En 1991, au sein du contingent des Nations Unies, les troupes canadiennes ont fourni du soutien logistique pendant la guerre du Golfe contre l'Irak et Saddam Hussein.

Nous sommes une nation à caractère humanitaire et nous avons toujours cherché à régler les conflits mondiaux au moyen de solutions pacifiques. Grâce à notre humanisme et à notre ferme appui au processus de paix, nous avons pu servir de modèle aux autres pays du monde entier.

 

. 2410 + -

En cette année où nous célébrons le cinquantième anniversaire de la déclaration universelle des droits de l'homme, nous voyons un chef d'État bafouer les droits fondamentaux de son peuple.

Le débat de ce soir a trait également aux droits de la personne. Les Canadiens accordent énormément d'importance et de respect aux êtres humains et à leur droit de vivre dans la dignité. Le fait qu'un individu puisse agir à l'encontre de ce principe inquiète de nombreux Canadiens. Nous comprenons à quel point il peut être décourageant d'avoir à traiter avec Saddam Hussein, qui possède des armes chimiques et biologiques, des armes de destruction massive, et qui refuse de se plier à la résolution 687 adoptée par le Conseil de sécurité des Nations Unies en avril 1991.

La guerre est une menace fondamentale pour la vie humaine et tous les efforts doivent être faits pour que cette menace ne se réalise pas. Qu'il s'agisse des histoires que racontent nos parents ou nos grands-parents ou qu'il s'agisse d'émissions de télévision ou de livres d'histoire, tout nous rappelle les souffrances horribles que la guerre fait subir aux hommes.

Dans Etobicoke—Lakeshore, des personnes originaires des diverses régions du globe qui sont dévastées par la guerre m'ont parlé des horreurs de la guerre et de son incidence sur la vie humaine. Elles ont elles-mêmes connu les conséquences de la guerre, l'angoisse, la souffrance énorme pour les familles.

La décision de recourir à des moyens militaires pour résoudre le problème de Saddam Hussein ne doit pas être prise à la légère.

Au cours de ma récente visite en Bosnie en tant que membre du Comité permanent des affaires étrangères et du Commerce international, j'ai vu la dégradation environnementale qu'a subie ce pays. Il faudra du temps avant que ce pays soit nettoyé des quelque trois millions de mines antipersonnel qui s'y trouvent.

Du 2 au 4 décembre 1997, le Canada a joué un rôle de chef de file dans l'interdiction des mines antipersonnel. Nous reconnaissons que ces armes de guerre causent de grands torts physiques et émotionnels aux personnes qui en sont victimes. Nous savons que des centaines de civils ont eu à subir les affres de la guerre du Golfe, en 1991. À l'heure actuelle, beaucoup souffrent terriblement de malnutrition et vivent dans de mauvaises conditions par suite de l'embargo.

Ces conséquences de la guerre sont réelles et les pays peuvent décider de les prévenir. Il incombe à la communauté internationale de prendre l'initiative de trouver des moyens non violents de résoudre les crises qui ont cours dans le monde.

Il incombe au Canada d'assurer un leadership moral. Notre pays peut jouer son rôle en cherchant avec ténacité à emprunter toutes les avenues de la diplomatie dans le cadre de l'ONU. Il faut pour cela envisager un large éventail de possibilités qui s'offrent aux gouvernements et aux organismes non gouvernementaux.

Il faut s'inspirer de l'exemple du Mahatma Gandhi et de Martin Luther King qui ont fait face aux conflits par des moyens pacifiques.

La paix au Moyen-Orient est à l'avant-plan de la politique étrangère du Canada. Nous avons oeuvré pour la paix dans cette région par des moyens non militaires. Nous ignorons les conséquences à long terme d'une frappe militaire contre l'Irak pour le processus de paix dans la région. Nous ne savons pas non plus si l'intervention militaire atteindra ses objectifs, c'est-à-dire débarrasser le monde de Saddam Hussein et de ses armes de destruction de masse.

Il y a le problème du respect de la résolution de l'ONU, de l'autorisation d'inspecter les endroits où ces armes sont conservées. Peut-être devrions-nous trouver un moyen pour que d'autres inspecteurs se chargent de l'inspection.

Je me demande si nous avons épuisé tous les moyens pacifiques. Avez-nous utilisé tous les moyens à notre disposition? Avons-nous participé à toutes les mesures possibles pour régler la crise? La guerre coûte cher. Avant d'agir, il faut examiner le prix à payer.

 

. 2415 + -

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je me souviens d'une histoire que racontait un ancien député lorsque nous discutions de la course aux armements nucléaires au début des années 80. L'ancien député de Saskatoon-Est, le père Bob Ogle, avait l'habitude de raconter une histoire concernant deux hommes dans une pièce pleine d'essence. L'un d'eux avait deux allumettes, et l'autre, qui en avait trois, se pensait en sécurité.

Je pense qu'il y a pour nous une leçon à tirer de cette histoire. Lorsque nous nous engageons dans un conflit ou que nous envisageons de nous engager dans un conflit qui a le potentiel de celui-ci, nous devons prendre conscience qu'il pourrait s'agir d'un conflit où, quelle que soit l'issue, il n'y aura pas de gagnants et de perdants, mais où il n'y aura plutôt que des perdants si nous choisissons la guerre comme solution de rechange à la diplomatie.

Cela étant dit, je voudrais revenir sur une idée très sérieuse et constructive qui a été avancée tout à l'heure par un de mes collègues, le député de Palliser, mais aussi par certains députés libéraux. Avons-nous bien épuisé toutes les solutions diplomatiques, en l'occurrence? Si je ne m'abuse, il me semble que le problème vient, dans une large mesure, du refus de l'Irak de laisser les inspecteurs américains accéder à ses installations.

Vaut-il la peine de déclencher une guerre à cause de la composition de ces équipes d'inspecteurs? N'est-il pas possible que les Américains marchent sur leur orgueil, ce qui nous permettrait alors de mettre Saddam Hussein au pied du mur en lui disant que, si ce sont les Américains le problème, nous formerons des équipes d'inspecteurs où il n'y aura aucun Américain? Nous pourrions alors voir ce qu'il fait et s'il existe une option qui n'a pas été sérieusement étudiée parce que les Américains font une affaire purement personnelle de la participation de leurs représentants aux équipes d'inspection.

Le gouvernement du Canada et les autres gouvernements aussi doivent examiner cette option. J'ai été heureux d'entendre quelqu'un du parti ministériel dire cela. Il me semble que ce pourrait être là un élément de solution qui mérite d'être étudié plus à fond.

J'ai attendu jusqu'aux petites heures pour intervenir et faire certaines observations. Tout d'abord, je crois que c'est un sujet sur lequel des personnes de bonne volonté—ce qui inclut bien sûr les députés—peuvent être en désaccord parce que, en dernière analyse, c'est une question de jugement. Il est très difficile de se former une opinion sur ce que devrait faire le gouvernement. La position du NPD a été énoncée très clairement par le chef du parti plus tôt aujourd'hui.

Ce soir, je voudrais expliquer ce que cette affaire n'est pas. Il n'est pas question ici de loyauté ni d'appréciation personnelle de la participation du Canada à des conflits passés ni de sentiments personnels envers les Forces armées canadiennes ou du rôle qu'elles ont joué dans des conflits antérieurs ou des missions de maintien de la paix. J'ai entendu des députés faire des déclarations en ce sens et je les comprends. La participation de l'armée canadienne à des guerres ou à des missions de maintien de la paix a suscité un fort sentiment de fierté. Cependant, il ne faudrait pas donner à entendre que ceux qui critiquent la participation du Canada à une opération militaire manquent de loyauté ou de reconnaissance envers l'armée.

Bien au contraire. Je suis convaincu que, partout au Canada, des anciens combattants, comme tout le monde, discutent entre eux de la décision à prendre. Je suis convaincu que vous pouvez trouver des anciens combattants qui estiment que le gouvernement fait ce qu'il doit faire et d'autres qui pensent le contraire. Il se trouvera sans doute des anciens combattants de la guerre du Golfe qui seront d'un avis, et d'autres, de l'avis inverse.

 

. 2420 + -

Ce n'est donc pas une question de loyauté ou de respect envers ces institutions ou ces conflits passés. En fait, comme on l'a dit à quelques reprises, le général américain qui a commandé les troupes américaines au cours de la guerre du Golfe en 1991 a exprimé de sérieuses réserves au sujet de l'opportunité de bombarder l'Irak et il a soulevé la question de savoir, comme d'autres l'ont fait, si cela serait efficace ou non et si, à certains égards, c'était jouer le jeu de Saddam Hussein.

J'ajouterai que ce n'est pas, du point de vue du NPD, adopter une position fondée sur un pacifisme qui ne se pose pas de questions, bien que certains d'entre nous, au sein de notre parti ou d'autres, puissent défendre une position strictement pacifiste. Le député qui vient de parler a fait allusion à Mahatma Gandhi. Je suis convaincu que ce dernier, qui était un pacifiste intégral, n'aurait eu que faire de la position du gouvernement ou de celle des Américains à cet égard.

Mais il ne s'agit pas de cette position-là aujourd'hui. Comme les députés le savent, nous avons voté dans le passé en faveur de la participation des troupes canadiennes à diverses missions, comme en Haïti, au Rwanda et ailleurs, où elles étaient susceptibles de s'engager dans des combats ou d'autres activités militaires. Nous n'avons pas reculé devant une telle possibilité quand nous avons estimé que l'intérêt supérieur du pays concerné ou de la paix était en cause.

Encore une fois, ce dont nous débattons réellement ici, c'est la position adoptée par les Américains à ce stade, que le gouvernement semble prêt à approuver, même s'il fait mine de soumettre la question à la Chambre. Nous nous sommes en quelque sorte réveillés ce matin pour entendre le secrétaire d'État américain, Madame Albright, dire essentiellement que le Canada avait déjà donné son accord. Je me réjouis de ce débat, mais il est difficile de croire que le gouvernement y participe l'esprit ouvert, que les choses ne sont pas déjà bien en train.

C'est une question de jugement, et le NPD estime que la proposition des États-Unis n'est pas justifiée et qu'elle mérite d'être critiquée d'autant plus qu'elle est arrogante, comme c'est souvent le cas. Je m'explique.

Ce genre de position pourrait me sembler plus crédible si elle était assortie d'une sorte de mea culpa, d'un peu d'histoire, de la reconnaissance du rôle qu'a joué l'Ouest dans tout cela. On pourrait noter plusieurs faits de façon à ce que finalement quelqu'un argue que le Canada devrait participer à un bombardement de l'Irak.

Je voudrais noter plusieurs faits. Premièrement, c'est l'Ouest qui a armé l'Irak. Je me rappelle qu'à une certaine période de ma carrière parlementaire, l'Ouest encourageait l'Irak quand il était en guerre contre l'Iran. Il n'était pas question alors des terribles crimes de Saddam Hussein. Il n'était pas question alors du danger d'armer ce fou de dictateur et il l'était autant que maintenant. La seule différence est qu'il faisait alors ce que nous voulions. Je dis ça au sens de l'Ouest. Aujourd'hui, il ne le fait plus.

 

. 2425 + -

On ne peut s'empêcher de voir une certaine hypocrisie dans tout cela. Nous devons faire preuve d'une attitude plus constante envers des gens comme Saddam Hussein et non pas simplement jouer le jeu de la politique lorsque cela fait notre affaire. Nous fermons les yeux sur ce qu'il est, puis lorsque cela ne répond plus à nos besoins, nous faisons de l'homme une description plus fidèle et parfois même, quand cela nous arrange, nous en dressons un portrait exagéré.

J'ai entendu beaucoup de députés, en particulier des réformistes, dire qu'il fallait faire confiance à nos alliés. Pourquoi devrions-nous avoir une absolue confiance en nos alliés? Ce n'est pas là une tradition canadienne. Ce n'est pas ainsi qu'a agi Lester Pearson lorsqu'il a interrogé le président Johnson au sujet de la guerre du Vietnam. Aurions-nous dû faire confiance à nos alliés au Cambodge, au Vietnam, au Panama et dans diverses autres situations? Le seul fait que nous soyons alliés des États-Unis au sein de l'OTAN ne nous oblige pas à être leur allié inconditionnel en tout et à partager leur point de vue sur tous les problèmes qui surviennent dans le monde. Le seul cas où le Canada ne se comporte pas en allié inconditionnel des États-Unis est celui de Cuba.

On ne peut pas affirmer sans aucun esprit critique que nous devons tout simplement faire confiance à nos alliés. Si nous sommes des alliés et de bons amis, nous devons pouvoir poser des questions difficiles, comme le font des amis entre eux, et notamment demander si une intervention militaire est la meilleure solution.

Il est beaucoup question de l'importance des Nations Unies. Je me sentirais beaucoup plus à l'aise si les Nations Unies avaient invité le Canada à participer, mais ce n'est pas le cas. L'invitation vient des États-Unis. L'appel ne vient pas du secrétaire général des Nations Unies, mais du président Clinton.

Sept ans après la guerre du Golfe, nous nous retrouvons exactement dans la même situation. L'Organisation des Nations Unies n'est pas plus forte. On peut même dire qu'elle est plus faible qu'il y a sept ans. À l'époque, nous savions tous que l'ONU n'avait pas les ressources nécessaires pour agir seule et qu'elle devait, à toutes fins utiles, faire faire son travail par d'autres, en l'occurrence une coalition qui n'existe plus aujourd'hui parce que l'entente qui la liait à l'époque n'existe plus non plus. Il est important de se rappeler ce fait lorsque le gouvernement essaie de nous donner l'impression qu'il suit tout simplement la volonté des Nations Unies sur la base des résolutions relatives au cessez-le-feu qui ont été adoptées à la suite du conflit de 1991. De toute évidence, l'entente qui existait alors est inexistante au Conseil de sécurité des Nations Unies et ailleurs dans le monde aujourd'hui.

Parlons de l'ONU. Une chose qu'il faudrait faire, et à laquelle le gouvernement aurait pu travailler ces dernières années, c'est renforcer l'ONU. Je suis sûr que le gouvernement y songe mais le fait est qu'aucune proposition sérieuse de réforme des Nations Unies n'a jusqu'ici été faite qui aurait permis à l'organisme d'être en mesure d'intervenir auprès de pays et de dirigeants comme Saddam Hussein qui ont osé violer ses résolutions.

C'est ce qui fait que sept plus tard nous nous trouvons encore devant un organisme si faible que les États-Unis se sont crus appelés à à jouer le rôle que les Nations Unies auraient dû assumer.

Or, ce n'est pas Saddam Hussein et ses semblables qui ont à eux seuls affaibli l'ONU. Bien sûr, désobéir à l'ONU est un geste déplorable. Mais ce qui est également déplorable c'est l'attitude qu'ont adoptée les États-Unis, qui depuis une quinzaine d'année affaiblissent l'ONU en refusant systématiquement de verser les sommes qu'ils doivent au fonds des Nations Unies.

Les Nations Unies sont critiquées ici et là et pour de multiples raisons. Il ne manquerait plus que des gens qui cherchent à obliger Saddam Hussein à se conformer aux résolutions des Nations Unies pour clamer le grand amour qu'ils vouent à l'ONU.

 

. 2430 + -

Je pourrais comprendre un tel geste de la part du Canada, car je pense que le respect que le Canada porte aux Nations Unies ne s'est jamais démenti. Je ne suis pas toujours d'accord avec les positions adoptées, mais nous avons toujours appuyé les Nations Unies. On ne peut pas en dire autant des États-Unis.

Ne tolérons pas chez nos amis les Américains d'autres marques de pharisaïsme vis-à-vis des Nations-Unies car, à mon avis, c'est le pays qui a le plus critiqué l'ONU.

Soit, les résolutions des Nations Unies doivent être respectées. On ne peut pas s'empêcher de penser que certaines résolutions sont plus importantes que d'autres, que certaines résolutions doivent absolument être respectées. D'autres résolutions restent parfois oubliées pendant des décennies, sans qu'il y ait de mobilisation de la communauté internationale pour les faire appliquer.

Je le dis une fois de plus, il faut traiter ces questions avec un peu d'humilité, de manière à éviter le chauvinisme et l'absence de réserve qui nous caractérisent dès que nous nous lançons dans une entreprise de ce genre. Tout d'un coup, notre camp, notre civilisation, ne peut pas avoir tort puisque nous avons toujours tout fait comme il le fallait et que nous n'avons jamais rien fait de mal—puisque nous sommes les bons.

Je crois vraiment que nous sommes les bons, si nous nous comparons à Saddam Hussein, mais nous devons penser que nous avons contribué de différentes manières à créer la situation actuelle.

Prenons la question du respect des jugements des tribunaux internationaux ou des résolutions de l'ONU. Une décision a été rendue par un tribunal international sur les armes nucléaires. Les nations du club nucléaire du monde s'en font-elles pour autant? Les armes nucléaires ont été jugées criminelles, mais rien n'a été fait sur ce plan.

Le tribunal international a aussi jugé que le minage des installations portuaires, au Nicaragua, était illégale. Les États-Unis se sont-ils retirés de l'entreprise et ont-ils cessé leurs activités au Nicaragua?

La liste des circonstances où les États-Unis ont eux-mêmes manqué de respect à l'égard de résolutions de l'ONU et d'autres jugements internationaux rendus à leur endroit est terriblement longue.

Cela ne veut pas dire que ce que les États-Unis veulent faire au sujet de l'Irak est mauvais à première vue ou en principe. Tout ce que je demande, c'est de faire preuve d'un peu plus d'humilité sur ces questions et d'admettre que, quand il s'agit de respecter des décisions internationales, l'attitude des Américains fait qu'ils sont mal placés pour lancer la première pierre.

Il y a un certains nombre d'autres facteurs à considérer. Pensons à la position des Kurdes. Toute résolution relative à l'Irak doit tenir compte de la réalité kurde, mais le gouvernement du Canada ne fait rien à ce propos. Pourquoi? À cause de la Turquie, notre alliée de l'OTAN, qui ne veut pas tenir compte de l'existence du peuple kurde.

Nous avons les mains liées en ce qui a trait aux Kurdes, de telle sorte que les Kurdes, qu'ils soient en Irak, en Iran ou en Turquie, sont persécutés. Enfin, en ce qui a trait aux armes de destruction massive, l'Irak n'est pas le seul pays à en posséder. Il y a plusieurs pays qui possèdent des armes de destruction massive.

Nous devons pouvoir compter sur un programme de contrôle global des armements qui traiterait de toute cette question, parce que je suis persuadé qu'il ne suffit pas de larguer des bombes sur tous les pays qui possèdent des armes de destruction massive et que cela ne les fera pas disparaître.

Ce n'est pas la solution idéale et ça pourrait bien ne pas être une solution envisageable non plus du point de vue scientifique, mais je ne suis vraiment pas un expert dans ce domaine. Si on a emmagasiné de l'anthrax quelque part, je ne suis pas certain que le fait de larguer une bombe puisse régler quoi que ce soit.

Selon moi, lorsqu'on lance une bombe, les choses explosent et sont disséminées un peu partout. L'idée de disséminer de l'anthrax et tous ces autres produits un peu partout en larguant une bombe ne me semble pas être la solution idéale. Nous pourrions facilement nous lancer ainsi dans une aventure dont nous ne connaissons pas l'envergure.

 

. 2435 + -

C'est pourquoi toutes les autres possibilités doivent être étudiées avant de songer à une intervention militaire. Nous du NPD ne croyons pas que cela a été fait et c'est ce qui explique pourquoi nous avons adopté cette position aujourd'hui.

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, au cours des journées qui ont précédé ce débat consultatif, j'ai eu l'occasion de discuter avec certains de mes électeurs de la participation éventuelle du Canada à une intervention militaire contre Saddam Hussein.

Je peux avancer de façon catégorique qu'ils sont unanimes pour dire, comme l'ont fait les intervenants dans le débat de ce soir à la Chambre, qu'ils préfèrent le recours aux voies diplomatiques pour régler ce problème. Nous voulons parvenir à une solution négociée et pacifique. La population désire ardemment que nous intensifions nos efforts tant bilatéraux que multilatéraux, entre autres, au sein des Nations Unies ou du Conseil de sécurité. En tant que pays, et par l'intermédiaire de nos représentants, le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères, qui ont une excellente réputation dans le monde, nous devrions nous servir de l'influence que nous avons pour promouvoir le recours à la diplomatie en vue de régler ce problème de façon satisfaisante.

Au cours de mes discussions, il m'a été fait des suggestions. L'une des recommandations les plus imaginatives que j'ai entendues est que le premier ministre offre les services du ministre des Affaires étrangères, à titre d'intermédiaire honnête auprès de Bagdad, à un pays plus aligné sur l'Irak. Une telle proposition repose sur la réputation considérable dont jouissent le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères, spécialement ces derniers mois, depuis la signature du traité sur les mines antipersonnel. J'ai accepté de faire part de cette suggestion à qui de droit.

Cette deuxième suggestion m'a été faite par plusieurs personnes, à savoir que le Canada encourage la suspension ou la réduction des sanctions qui frappent actuellement l'Irak. Le ministre a dit ce soir que c'était l'une des possibilités envisagées par les Nations Unies.

L'une des suggestions qui est revenue le plus souvent ce soir est que nous devrions étudier la composition des équipes d'inspection. Nous pourrions chercher à savoir s'il est possible de remédier à ce manque de respect des résolutions des Nations Unies et des ententes auxquelles l'Irak est partie en modifiant la composition des équipes d'inspection afin qu'elle soit plus acceptable pour l'Irak.

Ces suggestions ont été déjà faites ce soir, mais je voulais les répéter parce qu'elles viennent de mes électeurs.

La deuxième conclusion à laquelle on en est arrivé au cours des discussions est qu'il est préférable que la participation canadienne soit sous l'égide des Nations Unies, qu'en tant que pays nous ne devrions participer à une frappe militaire contre Saddam Hussein que si les Nations Unies nous le demandaient. Je dois admettre au premier abord que d'aucuns pourraient être portés à souscrire à cette motion ainsi libellée, et il se pourrait bien que je le fasse encore. Mais quand on examine la situation qui prévaut, cela devient moins évident.

 

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Par exemple, depuis 1991, pas plus tard qu'en novembre 1997, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté des résolutions stipulant, pour l'essentiel, que le non-respect de l'Irak était inacceptable, voire qu'il constituait une menace. Depuis plusieurs semaines, la secrétaire d'État américaine, Mme Albright, fait de nombreuses visites à l'étranger afin d'obtenir des appuis à une intervention militaire dirigée par les États-Unis. En fait, le chef du Parti progressiste conservateur a cité assez clairement la secrétaire d'État, qui aurait dit que le temps commençait à manquer.

Les médias ont parlé à profusion de cette question ces dernières semaines. Il serait très difficile de ne pas connaître les intentions des Américains.

Nous avons entendu ce soir de nombreux députés dire que nous ne devrions pas participer, à moins que ce soit à la demande expresse des Nations Unies. Je dirais que c'est peut-être une solution un tantinet facile. Les personnes membres du Conseil de sécurité ou qui gravitent autour du Conseil de sécurité sont intelligentes. Elles sont sérieuses. Elles connaissent les affaires internationales et les affaires courantes. Il est difficile de croire que ceux qui constituent le Conseil de sécurité laisseraient les États-Unis aller de l'avant, sans rien dire, s'ils n'étaient pas d'accord.

Ils n'ont pas dit non. Ils n'ont pas dit aux États-Unis d'arrêter les bruits de bottes et de cesser de préparer une intervention militaire. Essentiellement, ils sont restés silencieux. On peut penser que, à tout le moins, le Conseil de sécurité des Nations Unies donne son accord tacite.

Il y a, en français, une expression très à-propos: «Qui ne dit mot consent.» Voilà la situation devant laquelle nous nous trouvons.

Les Nations Unies ne disent rien alors que les Américains préparent une attaque, tout à fait explicitement et ouvertement, accompagnée de tentatives de la part de la secrétaire d'État pour chercher de l'appui. En ne dénonçant pas cette situation, en ne disant pas: «Nous ne sommes pas prêts à laisser les Américains diriger une offensive», le Conseil l'approuve. C'est peut-être une façon un peu tordue de voir les choses, mais je pense que c'est une interprétation logique.

Une chose qui est ressortie des débats, c'est que si une action, même militaire, devient inévitable, la majorité estime que, oui, à regret et malheureusement, le Canada devrait participer. Ce n'est pas une position unanime. Il y en a qui pense que nous ne devrions pas nous en mêler, mais en gros, la position est: «Oui, malheureusement.»

Si le moment arrive, en tant que nation nous devons respecter nos propres obligations, nos obligations internationales, et peut-être même nos obligations morales.

Le Canada n'est pas un pays neutre. Nous nous sommes très souvent rangés du côté de nos alliés. En temps de paix, nous nous retrouvons avec eux au sein d'alliances stratégiques, nous participons à des missions de maintien de la paix et le reste. En temps de guerre, nous nous battons à leurs côtés pour défendre nos valeurs fondamentales communes. Je crois que ces valeurs incluent la capacité de vivre dans une sécurité relative, en tout cas à l'abri de la menace que font peser les armes biologiques et chimiques entre les mains d'un homme comme Saddam Hussein.

J'ai commencé en disant que la voie diplomatique faisait l'unanimité. En écoutant les interventions de ce soir, il m'a semblé également qu'il y avait unanimité sur la nécessité de retirer à Saddam Hussein la capacité d'utiliser les armes biologiques et chimiques. Nous pouvons avoir des vues divergentes sur la façon d'y parvenir, mais tous les députés pensent qu'il faut le faire.

Nous sommes devant une progression de moyens: d'abord la persuasion morale, ensuite les sanctions, ensuite la voie diplomatique. Quelle voie nous reste-t-il si ces moyens ne donnent pas les résultats attendus? Il y a la menace du recours à la force et, finalement, le recours à la force.

 

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Nous n'en sommes pas encore là, mais je crois parler pour la majorité des électeurs de ma circonscription en disant que, lorsque vient le moment de faire des menaces et de recourir à la force, le Canada doit être solidaire de ses alliés et des États-Unis.

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Monsieur le Président, il n'est jamais facile d'entrer en guerre, notamment pour un pays comme le Canada, qui est connu mondialement pour être un pays pacifique, qui promouvoit la paix, un pays connu mondialement pour ses récentes négociations concernant les mines terrestres, un pays et un drapeau qui sont respectés dans le monde pour leurs casques bleus.

On nous demande ce soir de débattre la question de savoir si le Canada devrait appuyer un effort international pour envoyer un message à Saddam Hussein, un message selon lequel le monde actuel n'accepte pas la conduite que Saddam Hussein a adoptée par ses violations des droits de la personne, par ses tromperies, ses tricheries et ses mensonges devant la Commission spéciale des Nations Unies qui faisait enquête sur ses armes de destruction massive, un message selon lequel le monde actuel, les Nations Unies et tous les pays du monde n'acceptent pas sa conduite.

La communauté internationale n'aurait pas pu mieux choisir en demandant son aide au Canada, un pays qui a réagi par le passé au terrorisme dans les guerres mondiales, en Corée, dans le conflit du Golfe et par ses efforts de maintien de la paix dans le monde. Nous avons réagi et nous continuons toujours de réagir à une conduite de la sorte.

On a présenté cette demande certainement en raison de ce que nous sommes et de ce que nous représentons, parce que nous ajouterons de la légitimité à un effort international. C'est effectivement le cas et nous devrions en être fiers. Nous devrions être fiers des efforts que des Canadiens ont déployés avant nous pour instaurer la paix dans le monde. D'autres pays diront certainement que, si le Canada participe, ceux qui soutiennent que Saddam Hussein doit être vaincu ont sûrement une certaine légitimité.

J'ai écouté le débat ce soir et, comme le député d'Ottawa—Vanier, je me suis entretenu avec de nombreux électeurs, au cours de la semaine dernière, pour recueillir leurs idées sur la question. Dans la circonscription de Haldimand—Norfolk—Brant, ces idées rejoignent beaucoup celles que nous avons entendues ici à Ottawa. Les messages sont mitigés. En fait, si on regarde dans la presse, on peut comprendre pourquoi les Canadiens sont préoccupés et déroutés à propos des véritables enjeux, car, à mon avis, ils n'ont pas été débattus convenablement. On n'a pas raconté aux Canadiens toute l'histoire au sujet de certaines des atrocités qu'a commises Saddam Hussein.

Certains prétendent que les actions que nous prendrons peut-être au cours des quelques prochaines semaines ou prochains mois ne feront rien pour nuire à Saddam Hussein. Ils diront qu'elles ne réussiront qu'à nuire à la population irakienne. Est-ce pire que les atrocités de Saddam Hussein contre son propre peuple?

 

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C'est le débat que beaucoup de mes électeurs ont eu. Serait-il pire de tenter de régler la situation militairement avec les dommages collatéraux que cela va entraîner du fait que Saddam Hussein met devant ses établissements militaires des hommes et des femmes qui servent de boucliers contre toute attaque, ou serait-il préférable de le laisser poursuivre ses activités comme il l'a fait dans les années 80 avec les Kurdes? C'est une question difficile.

L'année dernière, le Comité des droits de l'homme des Nations Unies a condamné les violations massives des droits de l'homme en Irak. Il a fait remarquer que c'était le pire pays du monde pour ce qui est des disparitions. Plus de 16 000 personnes ont disparu en Irak.

L'Irak n'a pas les mêmes lois qu'au Canada et il n'a pas les mêmes traditions non plus. Les Irakuiens n'ont pas le droit d'association. Ils n'ont pas le droit de dire ce qu'ils pensent de leurs dirigeants. Ils n'ont pas une opposition comme ici à la Chambre. Ils n'ont pas le droit de s'opposer au régime, car s'ils le faisaient, ils disparaîtraient ou seraient tués.

On estime que dans les années 80, lorsque Saddam Hussein a fait campagne contre les Kurdes, quelque 50 000 à 100 000 Kurdes sont morts, notamment des femmes et des enfants. Des villages entiers, de petits villages ruraux, ont disparu. Est-ce le genre de personne que nous voulons à la tête d'un pays de ce monde, dans ce village planétaire? Je ne pense pas.

Pourquoi en sommes-nous là? Pourquoi cet accroissement de l'arsenal militaire dans le Golfe? Parce qu'on a trompé la Commission spéciale des Nations Unies qu'on a créée après la guerre du Golfe pour examiner les activités de Saddam Hussein, pour trouver les armes de destruction massive et pour superviser leur démantèlement, et on a ainsi empêché la commission de s'acquitter de son travail. Nous aboutissons à une impasse. Faisons-nous ce que la plupart d'entre nous souhaiteraient, c'est-à-dire négocier une entente? Dans l'affirmative, pouvons-nous lui faire confiance?

Nous avons négocié une entente après la guerre du Golfe. Les Nations Unies ont été les promoteurs d'un règlement. Saddam Hussein leur a assuré qu'il leur dirait où étaient ses armes. Il a promis de ne jamais se lancer dans une guerre biologique ou chimique. On constate qu'il ne tient pas parole. Comment pouvons-nous avoir confiance dans un règlement négocié avec cet homme?

La Commission spéciale des Nations Unies a réussi à détruire 38 000 armes chimiques, 480 000 litres d'agents d'armes chimiques actifs, 48 missiles opérationnels, 6 lance-missiles et 30 ogives spéciales, qu'on aurait pu utiliser pour des armes biologiques. Cela a de quoi effrayer.

La menace que cet homme fait peser sur le monde m'effraie. Je suis persuadé qu'il en va de même d'un certain nombre de Canadiens. C'est pourquoi je crois que nous devons prendre des mesures. Nous devons dire clairement au monde que c'est un comportement inacceptable. Je pense que le Canada est le mieux placé pour le faire et pour apporter sa contribution.

 

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M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec mon collègue, le député de Calgary-Sud-Est.

Nous discutons d'un sujet difficile. Personne d'entre nous à la Chambre ne peut prendre à la légère un débat à l'issue duquel nous pourrions prendre une décision qui pourrait coûter des vies humaines.

La situation à laquelle nous sommes confrontés aujourd'hui diffère complètement de ce qui s'est produit en 1991 lors de la guerre du Golfe, ou de la première guerre du Golfe, si nous voulons l'appeler ainsi. Les paramètres ne sont pas aussi clairs et la situation est plus nébuleuse. La menace que présente la situation n'est pas aussi nette. Nous avons néanmoins des décisions à prendre. Devrions-nous rester ou aller sur place? Devrions-nous bombarder ou non? Devrions-nous demander aux Nations Unies d'adopter une certaine ligne de conduite ou appuyer nos alliés, les États-Unis?

Les États-Unis n'auraient pas dû solliciter publiquement notre appui s'ils doutaient de l'obtenir. Il est clair qu'ils croient qu'ils obtiendront un certain appui d'une certaine façon. Cet appui sera tout probablement modeste et revêtira un caractère symbolique en vue d'assurer notre soutien moral aux États-Unis.

Comme nous avons cependant des décisions à prendre, abordons donc les questions comme elles se présentent. Il est certain que Saddam Hussein possède des armes chimiques et biologiques. Cela ne fait aucun doute. Il s'agit de savoir comment nous en débarrasser.

Tout cet exercice doit avoir pour objectif de permettre aux inspecteurs de l'ONU d'avoir un accès sans entrave aux sites irakiens. Il s'agit de savoir comment nous allons nous y prendre pour ce faire.

Les États-Unis veulent bombarder l'Irak en cas d'échec de la diplomatie. Examinons certaines considérations.

Si l'on bombarde une usine qui fabrique du gaz VX ou sarin, on libère dans l'atmosphère du gaz neurotoxique qui causera la mort de milliers, voire de centaines de milliers de personnes. Ce serait catastrophique. Le pire scénario n'est vraiment pas réjouissant. Cela aurait aussi un effet polarisateur dans la population du pays et il s'ensuivrait probablement un accroissement des appuis à Saddam Hussein. Les appuis dont il jouit dans son pays se renforceraient alors, comme ce fut le cas en 1991.

De plus, cela mettrait un terme aux inspections de la CSNU en Irak. Nous pouvons en avoir la certitude. La CSNU a accompli un travail exceptionnel en déterminant la présence d'armes nucléaires ainsi que d'armes chimiques et bactériologiques. Cela nous a permis de nous en débarrasser. Ces inspections prendraient fin s'il y avait un bombardement.

Il faut que les effets d'un bombardement soient plus avantageux que les inconvénients, c'est-à-dire la polarisation des appuis en Irak; la polarisation de la population contre la communauté internationale; le risque de causer une énorme catastrophe en libérant des gaz neurotoxiques VX et sarin, ainsi que des armes biologiques et chimiques; le durcissement des positions aux Nations Unies et la fin de l'inspection des armements en Irak.

Si l'on procède à un bombardement, il faut que celui-ci ne vise que des cibles militaires. Il faut éviter de causer des torts indirects à la population civile.

Si nous voulons que la diplomatie prévale, il y a quelque chose d'important qui nous échappe en l'occurrence. Les pays arabes devraient participer aux efforts diplomatiques. En fait, le secrétaire général de la Ligue arabe a dit très clairement qu'il appuierait les initiatives diplomatiques, que celles-ci étaient préférables. La ligue s'opposait évidemment à tout projet de bombardement. Qu'on les prenne au mot et qu'on demande à la Ligue des États arabes de rassembler un groupe de diplomates et de dépêcher ces gens à Baghdad pour qu'ils essaient d'organiser une solution diplomatique.

On pourrait faire des compromis. L'une des plaintes de Saddam Hussein était que les inspections des armes étaient toutes faites par des Américains et des Britanniques. L'un des compromis qu'on pourrait facilement faire consisterait à faire appel à d'autres inspecteurs, en plus de ceux des États-Unis et du Royaume-Uni, par exemple des représentants des pays arabes. Cela ajouterait un élément d'impartialité aux yeux des Irakuiens et éliminerait donc cet argument.

Nous devrions aussi non pas mettre fin aux sanctions mais appuyer un échange de pétrole contre des vivres afin que les Irakuiens puissent sortir quelque peu de la terrible situation qu'ils endurent depuis si longtemps. Un échange de pétrole contre des vivres et des médicaments montrerait clairement aux Irakuiens que la communauté internationale comprend leur situation, mais qu'elle est contre le régime qui les brutalise plus que toute autre chose. Nul n'est besoin de rappeler à la Chambre que c'est chez le peuple iraquien lui-même que le régime brutal de Saddam Hussein fait le plus grand nombre de victimes.

 

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Les États-Unis nous ont demandé notre appui, qui est probablement un appui périphérique. Nous pouvons fournir cet appui si toutes les initiatives diplomatiques possible ont échoué.

Il y a des contradictions dans notre politique étrangère. Nous sommes tous désireux d'appuyer la résolution 687 de l'ONU. En même temps, nous ne tenons pas compte des autres résolutions de l'ONU au Moyen-Orient. Nous fermons les yeux sur la présence illégale de soldats israéliens dans le sud du Liban, qui auraient dû être chassés il y a longtemps. Nous ne tenons pas compte des résolutions de l'ONU concernant les régions partagées par les Palestiniens et les Israéliens. Nous ne tenons pas compte des résolutions des Nations Unies concernant la Cisjordanie, la bande de Gaza et Jérusalem.

Si nous voulons être constants et équitables non seulement envers nous-mêmes, mais aussi envers le monde entier, en particulier, envers la communauté arabe, nous devons appuyer également toutes les résolutions des Nations Unies. Nous ne pouvons, d'une part, appuyer la résolution 687 mais, d'autre part, fermer les yeux sur une autre résolution des Nations Unies concernant le Moyen-Orient. Si nous voulons que l'on nous trouve équitables, nous devons appuyer toutes les résolutions des Nations Unies également et équitablement. Nous aurons alors la réputation d'être un acteur beaucoup plus juste au Moyen-Orient.

Un des problèmes que soulève le Moyen-Orient, c'est que, même si la plupart des pays qui en font partie méprisent ou, à tout le moins, craignent Saddam Hussein, ils se méfient de l'Ouest, avec raison d'ailleurs, à cause de l'incapacité de sa politique étrangère de corriger d'insignes situations qui se produisent à l'heure actuelle au Moyen-Orient.

Au bout du compte, la solution définitive au problème de Saddam Hussein doit venir de l'intérieur. La solution politique est celle qui mettra fin au régime de Saddam Hussein. Elle doit venir des partis d'opposition qui existent encore en Irak.

Les Irakuiens devront comprendre que le bombardement, le cas échéant, vise à appuyer leur lutte contre le régime de Saddam Hussein. Il est également important que la communauté arabe soit d'accord avec les mesures que nous prendrons. Nous devons faire en sorte que toutes les initiatives diplomatiques soient utilisées et que la communauté arabe participe étroitement au processus décisionnel. Sinon, toute décision sera considérée comme une autre intervention insensible de l'Occident dans les problèmes du Moyen-Orient.

Il est important pour nous de comprendre le rôle du Canada. Ce rôle est double. Nous devons appuyer notre voisin, les États-Unis. Nous recevons beaucoup de lui et nous manifestons notre reconnaissance en étant de véritables partenaires dans des actions militaires. Toutefois, comme on l'a déjà dit maintes fois, il faut chercher une solution diplomatique avant de recourir à la solution militaire.

Nous pouvons faire preuve de leadership en nous efforçant de présenter, par l'intermédiaire des Nations Unies, une demande très claire et spécifique à la Ligue arabe pour qu'elle agisse de médiateur dans l'embarras où nous sommes à l'heure actuelle, afin d'assurer que des inspecteurs d'armes puissent se rendre en Irak. Nous pourrions expliquer très clairement aux pays arabes qu'une attaque chimique, nucléaire ou biologique iraquienne sur Israël ferait des victimes en Syrie, au Liban, chez les Palestiniens et chez les Jordaniens.

Je me rends compte que le temps file, mais j'implore notre pays, notre ministre des Affaires étrangères et notre premier ministre d'inciter les Américains à rechercher agressivement une solution diplomatique, pour que nous assumions le rôle de leadership qui est le nôtre aux Nations Unies et auprès de la Ligue arable, afin que l'on continue de chercher une solution diplomatique et d'autres moyens novateurs d'amener la communauté arabe à trouver une solution diplomatique avant que la solution militaire ne devienne notre seule option.

 

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M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je me réjouis de pouvoir participer à ce débat de mise en garde, d'autant plus que j'ai moi-même proposé à la Chambre une motion concernant l'Irak. La motion no 279 prévoit ce qui suit:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait appuyer la formation d'un tribunal criminel international visant à poursuivre Saddam Hussein et tous les autres dirigeants iraquiens qui sont responsables de crimes contre l'humanité, y compris le recours illégitime à la force, les crimes qui contreviennent à la Convention de Genève et le génocide.

Je voudrais tout d'abord expliquer pourquoi j'ai présenté ma motion. Les auditeurs auront entendu de nombreux députés parler ce soir de considérations géopolitiques, de guerre et de paix, de politique étrangère américaine et des relations de cette politique avec l'ONU. Mais je crains que trop de gens ne s'aperçoivent pas à quel point le régime auquel nous avons affaire est sans scrupule et tyrannique. On pourrait peut-être même aller jusqu'à dire que c'est le plus méchant et le plus tyrannique sur toute la surface du globe.

Par le passé, des dirigeants mondiaux ont établi un parallèle entre Saddam Hussein et d'autres incarnations du mal politique et moral de notre siècle, comme Adolf Hitler. Ces comparaisons ne sont pas tout à fait déplacées.

Si je dis tout cela, c'est parce qu'il importe de bien savoir à qui nous avons affaire. Comme on l'a dit, le régime de Saddam Hussein a été responsable de la mort, de l'exécution et de la torture de centaines de milliers de ses propres civils et de centaines de milliers de ressortissants d'autres pays comme l'Iran et le Koweït et peut-être aussi des territoires en litige du Kurdistan.

L'ONU a réprimandé le gouvernement iraquien à cause de son affreux bilan au chapitre des droits de la personne. D'anciens prisonniers ont témoigné de la pratique de diverses techniques de torture: fers rouges, chocs électriques aux organes génitaux et à d'autres parties du corps, coups, brûlures, suspension à des ventilateurs rotatifs au plafond, brûlures à l'acide, viol, rupture de membres, refus de nourriture et d'eau, menaces de viol ou autres sévices sur des parents.

Les forces de sécurité de l'Irak ont tué beaucoup des victimes de tortures et mutilé leur corps avant de les rendre à leur famille. Ils ont aussi exigé que les familles des victimes paient pour l'exécution de celles-ci. Voilà à quel régime nous avons affaire. C'est un régime avec lequel on ne peut raisonner.

Un grand nombre de députés ont déclaré que nous devions épuiser tous les recours diplomatiques. Personne un tant soit peu rationnel ne trouverait à redire à cela. Le problème est que ça fait maintenant sept ans que le monde civilisé essaie de faire appliquer la résolution 687 du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui exige la destruction de toutes les armes de destruction massive et des installations pour la production de ces armes en Irak.

Ça fait sept ans que le régime de Saddam Hussein ment délibérément, esquive, déconcerte et refuse de coopérer en respectant l'ordre de civilisation internationale de la résolution du Conseil de sécurité adoptée à l'unanimité.

Les Nations Unies, les États-Unis, les puissances européennes, les voisins arabes de l'Irak, et le Canada en tant que puissance moyenne, ont tous longtemps et par tous les moyens essayé de trouver une solution diplomatique et pacifique à ce qui pourrait être un conflit dévastateur et violent.

 

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La solution diplomatique a échoué et c'est pourquoi nous en sommes là aujourd'hui. J'insiste sur ce point parce que de nombreuses personnes qui ont exprimé beaucoup de réticences à voir le Canada offrir ne serait-ce qu'une participation symbolique à l'action militaire, aux côtés des États-Unis, continuent de jouer à l'autruche en insistant sur la nécessité d'une solution diplomatique. Ces gens ne semblent pas vouloir reconnaître qu'on a essayé la voie diplomatique à maintes reprises, mais que ce moyen s'est révélé inefficace.

Je citerai, par exemple, les propos d'un membre de l'équipe de la CSNU chargé d'enquêter sur la présence d'armes en Irak. Cet homme a récemment rendu compte au Conseil de sécurité des Nations Unies des discussions qu'il a eues avec le vice-premier ministre de l'Irak, M. Tariz Aziz.

Il a déclaré que ces pourparlers ont été caractérisés, dès le début, par de longues déclarations des Irakuiens, qui n'ont même pas invité leurs vis-à-vis à répliquer. Ils ne voulaient rien savoir.

Les Irakuiens ont dénigré la CSNU et ses fonctionnaires professionnels et ont tenté d'attribuer toute la responsabilité, passée et présente, à la CSNU, alléguant que le désarmement était terminé et que les sanctions contre l'Irak demeuraient néanmoins en vigueur. Le vice-premier ministre a longuement insisté sur le fait que l'Irak s'était débarrassé depuis longtemps de toutes ses armes de destruction massive et du matériel connexe et que son pays n'avait plus les moyens de les produire.

Voilà le genre de diplomatie à laquelle se heurtent les Nations Unies lorsqu'elles font affaire avec l'Irak. Elles ne peuvent pas pratiquer une diplomatie en face d'un mur de pierre. L'ONU ne peut pas exercer sa diplomatie avec un tyran qui refuse de négocier. On ne peut avoir recours à la diplomatie avec un tyran qui n'accorde aucune valeur à la vie de son propre peuple.

Saddam Hussein ne comprend qu'une chose et une seule, c'est la force, qu'il utilise sans pitié contre son propre peuple.

Mettons une chose au point. Ce n'est pas d'une menace théorique dont il est question. Contrairement à ce que certains députés plus colorés voudraient nous faire croire, ce ne sont pas les Américains qui essaient de se montrer menaçants.

Il est question d'un tyran fou qui contrôle des armes qui pourraient tuer des millions de civils innocents dans le cadre d'attaques terroristes. D'autres députés ont parlé de preuves établies qui montrent que l'Irak a toujours en sa possession des armes chimiques et biologiques.

Selon le rapport du 4 février, il existe 38 000 armes chimiques, 480 000 litres d'agent pour ogives chimiques actives, 6 lance-missiles mobiles Scud, 19 lance-missiles, 30 ogives chimiques spéciales, des centaines d'autres ogives chimiques et conventionnelles, des centaines d'articles servant à la fabrication d'armes chimiques, 690 tonnes d'agents d'armes chimiques, 3 000 tonnes de précurseurs et d'ingrédients d'armes chimiques et un super canon d'une portée de 1 000 kilomètres.

Tous les observateurs ont confirmé l'existence d'installations de production de gaz neurotoxique VX à l'échelle industrielle et la production de quatre tonnes de VX, dont une goutte suffit à tuer. On a découvert 19 000 libres de botulinum, 8 400 litres d'anthrax et 2 000 litres d'aflatoxine. Je ne sais même pas ce que sont ces choses, mais on m'a dit que tous ces produits sont extrêmement meurtriers.

Je veux terminer en disant ceci. Si nous ne nous joignons pas à nos alliés pour intervenir avec force face au refus de ce tyran d'obéir à l'ordre international, sommes-nous prêts, en tant que Canadiens attachés à la paix, à nous réveiller un jour, dans un avenir pas trop lointain, et à entendre aux nouvelles télévisées que Tel Aviv, Jérusalem, Téhéran ou la ville de Koweït ont été décimées par des armes biologiques mortelles lancées par l'Irak? Sommes-nous prêts à accepter ce sort?

Je prétends que non et c'est pourquoi je crois que la chose la plus pacifique à faire, c'est d'appuyer nos alliés qui veulent intervenir avec force une fois qu'on aura déterminé que tous les moyens diplomatiques pour régler cette crise ont été épuisés.

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir formuler quelques observations ce soir, dans le cadre de ce débat qui, nous l'espérons, reflétera les idées des Canadiens sur ce que nous devons faire relativement à cette action coercitive contre l'Irak.

 

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La toile de fond de ce débat, c'est la guerre de l'Irak qui a fait suite à l'invasion du Koweït par ce pays, et le cessez-le-feu qui a suivi, qui exigeait la destruction de toute arme nucléaire, chimique ou biologique. Les inspecteurs de l'ONU ont pris possession d'un certain nombre d'armes ainsi visées et les ont détruites, notamment 480 000 litres de substances chimiques, dont on a parlé, entre autres, au cours du débat de ce soir.

En passant, je partage mon temps de parole avec le député de Mississauga-Sud.

Le travail que nous avions à faire à la suite de la guerre en Irak n'est pas terminé. L'Irak a fait de l'obstruction, s'est obstiné et a empêché l'achèvement des travaux. Nous vivons maintenant dans un monde où nous ne pouvons pas tolérer la présence de telles armes entre les mains de ceux qui risquent de menacer la paix mondiale. Nul besoin de souligner que l'Irak a non seulement conçu de telles armes, il les a utilisées sur son territoire et a menacé de les utiliser dans d'autres pays.

Devant ces menaces de l'Irak et l'absence totale de confiance dans son leadership, la communauté mondiale est déterminée à éliminer ces armes. La question est de savoir comment et quel devrait être le rôle du Canada. Nous ne sommes pas en position de ne rien faire. Le Canada est non seulement membre des Nations Unies, mais également membre de l'OTAN et du Commonwealth. Il fait déjà partie de ces alliances. Lorsque nos partenaires des Nations Unies, de l'OTAN et du Commonwealth parviennent à un consensus sur un objectif commun essentiel, nous devons nous rallier à eux. Il est maintenant reconnu que l'instauration et le maintien de la paix à l'échelle internationale font partie intégrante de notre nouvel ordre mondial. Ils sont indispensables à la stabilité de la planète.

Voici ma courte liste des mesures que le Canada devrait prendre et que je présente au nom de mes électeurs. Le gouvernement doit être en mesure d'accepter ou de vérifier les dernières donnés rassemblées par les Nations Unies et ses alliés. Le Canada et ses alliés ont investi considérablement dans des biens visant à rassembler des données. Même si l'on ne rendra pas publiques la plupart de ces données afin de protéger leur méthode de collecte et leur provenance, celles-ci seront à la disposition des députés qui doivent prendre les décisions et donner aux Canadiens l'assurance qu'ils ont fait ce qu'il fallait.

Nous devons nous assurer que tous les initiatives des Nations Unies et tous les efforts diplomatiques sont terminés. Il se pourrait fort bien que les dirigeants iraquiens jouent une autre partie de poker dans les prochains jours ou semaines. Personnellement, je préférerais gagner une partie de poker qu'une offensive militaire. C'est seulement après cela que nous devrions décider d'appuyer les alliés dans une offensive militaire. Cela serait conforme à l'histoire du Canada, à plus d'un siècle d'histoire où le Canada a participé à des alliances de cette nature.

En tant que membre de cette alliance, le Canada doit faire en sorte que ce que fait l'alliance soit conforme aux objectifs des Nations Unies et ne viole pas les règles établies par l'ONU. Nous devons prêter notre concours à l'alliance dans la mesure de nos moyens et des demandes qui nous sont faites.

Nous devons maintenir notre position au sein de l'alliance. Nous devons y adhérer fermement si nous voulons y laisser notre empreinte. Souvenons-nous que le Canada a mis des années à perfectionner ses méthodes d'intervention sur le plan international. Il nous arrive parfois d'y exceller. Nous ne devons rater aucune occasion d'influencer la façon dont l'alliance s'acquitte de sa tâche dans ce domaine.

Cet effort en vue de faire respecter la loi doit être limité et faire l'objet de restrictions presque à coup sûr. Dès qu'on s'engage dans une action militaire, son contrôle risque de nous échapper. Je ne saurais accepter que nous nous engagions dans une telle action s'il y a risque matériel qu'elle prenne une ampleur que les partenaires n'avaient pas soupçonnée.

 

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Je veux faire valoir encore trois points. D'abord, cette action coercitive ne doit pas être considérée comme un exercice unique. Il y a ici un message pour tous les pays qui oseraient faire fi des règles modernes en évolution de l'ordre international. Tout cela est important pour l'avenir collectif de la planète.

Ensuite, les objectifs de toute action coercitive doivent être militaires. Dans une action comme celle-ci, il y aura sans doute des engagements militaires à terre et des opérations spéciales pour atteindre les objectifs de l'action. Toutefois, j'estime que les Canadiens n'accepteront pas, rejetteront en fait, toute opération de l'alliance qui mettrait en danger la vie de civils.

Enfin, il sera très difficile de remplacer l'autorité en Irak sans laisser un vide au niveau du pouvoir. À mon sens, un tel vide dans cette région est presque aussi dangereux pour l'ordre mondial que la situation actuelle.

Où en serions-nous si personne n'avait rien fait? Allons-nous attendre humblement le coup qui viendra inévitablement, accompagné de violence et d'instabilité? Je ne crois pas que nous voulions attendre humblement. Je crois que nous voulons agir au plan international.

Je ne crois pas que nous ne puissions rien faire. Nous devons, en tant que Canadiens, agir de façon aussi responsable que nous l'avons fait dans le passé. On nous demande maintenant d'agir pour protéger l'ordre international en collaboration avec nos partenaires. Aux conditions que j'ai esquissées ce soir, les Canadiens sont prêts à faire cela. Je ne crois pas qu'ils aient beaucoup le choix.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer à ce débat à caractère consultatif sur une question dont les députés ont démontré clairement depuis sept heures qu'elle revêtait une grande importance pour le Canada. C'est une question qu'il ne faut pas prendre à la légère, car elle a trait à une menace pour la paix mondiale.

Les députés ont été très clairs. J'ai écrit beaucoup de notes, que j'ai modifiées souvent au cours des dernières heures. Je vais renoncer à un certain nombre de points que je voulais aborder, car je crois qu'ils ont déjà été bien développés par certains députés, dont le député de Scarborough—Rouge River.

Le président des États-Unis a demandé au Canada de fournir un appui non tactique. Il importe de comprendre que la demande a trait à un appui de nature non tactique.

Le premier ministre s'est engagé à consulter la Chambre avant de prendre une décision avec son Cabinet. Je veux commencer par remercier le premier ministre d'avoir donné à tous les députés la chance d'exprimer leurs propres opinions et celles de leurs électeurs.

J'ai reçu aujourd'hui un fax d'une de mes électrices, Mme Janis Alton, qui m'a souvent écrit au sujet de questions liées à la paix et à la sécurité internationales ainsi qu'aux droits de la personne. Mme Alton a abordé certains points dont les Canadiens voudraient probablement qu'ils soient exprimer à la Chambre.

Il y a beaucoup de questions qui restent sans réponse. Ce qui est important dans ce débat, ce n'est pas nécessairement de répondre à ces questions, mais bien de voir à ce qu'elles soient posées et analysées de façon approfondie dans le processus décisionnel.

Mme Alton s'oppose catégoriquement à toute action militaire. Elle disait ceci dans son fax: «Bien que les dirigeants de l'Irak continuent de refuser de se conformer à un ordre du Conseil de sécurité concernant l'inspection et la destruction de leurs emplacements d'armes, en même temps, sa société civile n'a pas voix au chapitre.»

Elle poursuit en parlant des droits de la personne et de la situation difficile que vivent les civils. C'est certainement là un aspect important. Les Canadiens veulent cette assurance. Cela fait partie de la décision. Je crois que tous les députés espèrent qu'on donnera toute la protection et la considération nécessaire aux innocentes victimes afin que le genre de choses qu'on peut seulement imaginer ne se produise pas.

 

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Mme Alton conclut aussi que l'action militaire ne devrait être entreprise qu'avec la sanction du Conseil de sécurité. On a fait remarquer à plusieurs reprises aujourd'hui que seulement deux des membres du Conseil de sécurité, qui en compte cinq, ont donné leur appui jusqu'à maintenant.

La question est de savoir si les raisons invoquées par les autres membres, soit la France, l'Allemagne et la Russie, pour ne pas avoir encore appuyé l'intervention militaire, sont des raisons importantes qu'il faut explorer avant de se résoudre à prendre d'autres mesures. Mme Alton a laissé entendre qu'il importait de soulever le problème de l'absence d'unanimité au Conseil de sécurité.

Un certain nombre de mes électeurs m'ont parlé de la question des États-Unis. C'est l'accusation que cela est une action unilatérale américaine, et le Canada ne devrait pas être bousculé et manipulé.

Ce genre d'attitude n'a probablement pas sa place dans le processus décisionnel. Il s'agit de questions fondamentales de paix et de sécurité mondiale, de questions fort importantes, et c'est faire preuve d'un léger manque de perspicacité que de laisser entendre que, d'une certaine façon, il s'agit d'une action unilatérale.

Il ne fait pas de doute que Saddam Hussein n'a pas respecté la résolution 687 d'avril 1991, ni celles qui ont été adoptées par la suite. Il ne faut pas oublier qu'en matière de paix et de sécurité, le Canada n'a jamais été un spectateur. Des milliers et des milliers de Canadiens ont perdu la vie pour préserver la paix dans le monde. Le Canada a joué un rôle de chef de file, il a appuyé les Nations Unies.

Le Conseil de sécurité lui-même a dit très clairement que, à son avis, Saddam Hussein présentait une menace pour les pays voisins comme la Turquie, la Syrie, Israël, l'Égypte, l'Arabie Saoudite et l'Iran. À énumérer ces pays, on ne peut s'empêcher de songer à la multitude des conflits dont ils ont été le théâtre pendant de longues années et à la volatilité de la situation. Le problème est d'une extrême gravité.

Il y a la question des garanties. Bien sûr, il n'est pas certain que la frappe militaire aura les résultats recherchés, mais il faut alors se demander: si toutes les avenues diplomatiques ont été essayées à l'entière satisfaction de tous et qu'on ne fait plus rien en suite, qu'arrivera-t-il?

C'est une excellente question. Que se passera-t-il? Je crois que l'ONU pense que le refus de se conformer à une de ses résolutions n'est pas une position passive. Cela est considéré comme une menace, une menace réelle à la paix mondiale.

Dans l'accord de cessez-le-feu, Saddam Hussein a accepté que son pays soit sous surveillance internationale, qu'il détruise, retire ou rende inoffensives ses armes de destruction massive et que des sanctions économiques s'appliqueraient tant que ces conditions ne seraient pas respectées.

Comme beaucoup de députés l'ont signalé, c'est la CSNU, la Commission spéciale des Nations Unies mise sur pied en vertu de la résolution 687 du Conseil de sécurité, qui doit assurer le respect de ces conditions. Nombre de députés ont décrit ses responsabilités. L'organisme n'a pas pu faire son travail. Cela n'est pas sans importance, car il représente les intérêts de tous les membres de l'ONU.

 

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Il s'agit de l'organisme de surveillance qui devra veiller sur les choses. Tout à l'heure, un député a donné une liste assez longue des armes chimiques, des missiles, des lance-missiles et des autres têtes explosives que la CSNU a réussi à détruire jusqu'à maintenant. Pourtant, il y en a encore beaucoup. Elles représentent une menace sérieuse.

Avant de venir à la Chambre aujourd'hui, j'ai consulté l'Internet. Je voulais voir ce que disait CNN. Selon une des manchettes, les fonctionnaires de la Défense auraient déclaré lundi que les États-Unis envoyaient une force terrestre pouvant compter jusqu'à 3 000 soldats au Koweit parce que les tensions créées par l'impasse concernant les inspections s'étaient accrues. La secrétaire d'État, Madeleine Albright, a déclaré que les États-Unis avaient le pouvoir, la responsabilité, les moyens et la volonté de lancer une opération militaire d'envergure contre l'Irak si les efforts de la diplomatie n'aboutissent pas. Ce sont là des mots très forts et personne ne peut douter de la détermination des États-Unis dans leur lutte contre Saddam Hussein.

En terminant, je tiens à demander au premier ministre—et je crois que tous les députés m'appuient—d'épuiser toutes les voies de la diplomatie. Nous avons besoin d'être rassurés. Deuxièmement, je demande que tous les efforts soient faits pour obtenir le soutien du Conseil de sécurité des Nations Unies. C'est là un élément très important. Troisièmement, nous devons obtenir l'assurance que les civils seront protégés dans toute la mesure du possible. Enfin, nous devrons faire tout ce qui peut être fait pour protéger nos troupes si jamais elles devaient participer à un conflit.

La question est très grave et je crois que la Chambre a dit très clairement que nous n'aurons pas le choix si les efforts diplomatiques n'aboutissent pas.

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, j'en suis à mon premier mandat à la Chambre des communes et je ne m'attendais pas à avoir à débattre de la participation du Canada à une guerre.

Pendant la campagne électorale, j'ai eu à répondre à de nombreuses questions, mais pas une seule au sujet de la guerre. Qu'est-ce qui nous prépare à un débat sur un tel sujet et aux conséquences qu'il peut avoir? J'imagine que c'est notre humanisme et notre désir de paix qui nous guident.

Le Canada devrait se ranger du côté de ceux qui veulent tenter de régler ce conflit au moyen de négociations et de mesures diplomatiques. Nous n'avons rien à gagner à long terme d'une stratégie de provocation et des menaces. Je me joins à un habitant du Yukon, Rod Snow, avec qui je viens de m'entretenir et qui s'oppose à toute offensive. Ce serait reconnaître l'échec total des leaders mondiaux. Je ne voudrais pas en arriver là.

Nous devons examiner la situation d'un oeil extrêmement critique, en nous fondant sur ce que nous savons. Il est très difficile de prendre des décisions en fonction de ce que nous ne savons pas. En ma qualité de parlementaire, je n'ai pas été informée par le gouvernement. Aucun représentant des Nations Unies n'est venu nous mettre au courant. Je ne sais pas de quels renseignements nous disposons sur les armes. Existent-elles toujours en Irak? Les inspecteurs des Nations Unies n'ont pas pu aller voir et le confirmer.

Que savons-nous de notre armée canadienne? Est-elle prête? On vient de nous dire qu'après avoir aidé la population touchée par la tempête de verglas et les inondations, son budget est épuisé, elle manque de personnel, elle est menacée de compressions supplémentaires, elle manque de fonds, on a à peine de quoi lui acheter des casques, lui accorder des salaires décents et des logements de base. Nous donnons très peu à nos soldats et, par ailleurs, nous leur demandons de donner leur vie pour nous.

Nous ne savons pas ce que cette intervention coûtera financièrement au Canada. Est-ce illimité? Pourrons-nous abandonner en cours de route? Question plus importante, pouvons-nous nous permettre le coût humain?

Que savons-nous de l'Irak? Nous savons qu'il est dirigé par un dictateur, Saddam Hussein, qui viole régulièrement les droits de la personne et assassine ses propres citoyens. Nous n'avons aucune raison de croire que ce serait mieux pour nous que ce soit nous, plutôt que lui, qui le fasse. Ce n'est pas une raison suffisante pour que nous participions à une attaque aérienne conjointe.

 

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Nous avons que, tous les jours, des veuves et des enfants de la guerre du Golfe meurent littéralement de faim. Il n'y a que très peu de médicaments. Les villes tombent en ruines; les jeunes et les personnes âgées vivent dans l'ombre des sanctions que nous avons imposées. Il se peut que l'Irak possède des armes biologiques et des armes de destruction massive, mais il n'est pas le seul.

J'aimerais savoir qui fournit des armes à ce dictateur. qui lui vend des armes? Là encore, les inspecteurs des Nations Unies n'ont pas pu finir leur travail.

Notre objectif ultime est bien entendu la paix. Ce qu'il faut faire pour l'atteindre est permettre aux inspecteurs des Nations Unies de pénétrer en Irak. Si nous nous associons à l'opération envisagée par les États-Unis, et non par les Nation Unies, si nous sommes les premiers à attaquer, la paix ne se fera pas.

Ce qui ferait le plus de dégâts ce seraient les bombardements. Nous savons que les bombes ne sont pas précises. Nous savons qui seraient sous les bombes: des familles, des mères, des pères, des enfants, des gens qui ont déjà souffert, qui sont déjà sous-alimentés et qui vivent sous la domination d'un dictateur brutal.

Depuis quelques jours j'entends dire que c'est une question de principes. Nos principes seraient en cause. Je crois surtout que des vies sont en cause. Avant qu'on se décide à utiliser des armes meurtrières, avant que l'on ne condamne à mort de nombreux civils et avant que l'on expose nos soldats à une guerre pour laquelle ils ne sont peut-être pas bien préparés, nous devons faire le maximum d'efforts pour que les inspecteurs puissent faire leur travail en Irak.

Cette guerre n'aura pas de vainqueur. Toutefois, nous disposons de temps et d'options. Nous n'avons pas nécessairement à entrer en guerre. Nous n'avons pas à nous laisser pousser, notamment vu la brièveté des délais, du 29 janvier à aujourd'hui. La pression monte pour que l'on se joigne au contingent, mais rien ne nous y oblige.

Ce que nous devons faire, c'est nous assurer qu'il y ait une équipe d'inspecteurs sans Américains, sans Britanniques et peut-être sans Canadiens, mais des inspecteurs qui seraient acceptés par l'Irak et feraient leur travail. Nous pourrions alléger les sanctions inhumaines qui font souffrir la population civile et utiliser cela comme carotte pour permettre l'entrée des inspecteurs dans le pays.

J'ai entendu quelqu'un dire que le Canada avait l'obligation de se joindre à ses alliés et de partir en guerre. Toutefois, rien ne nous oblige à commencer une guerre ou à nous lancer dans une guerre, alors que nous savons que la majorité des souffrances seront pour la population civile. La situation a évolué et les civils tués sont maintenant considérés comme des dommages collatéraux. Ce n'est pas vu comme ce que c'est réellement: la torture et la mort.

Ce à quoi nous faisons face, c'est la possibilité de dommages de la part de Saddam Hussein et la possibilité d'une menace. Je répète que d'autres pays ont des armes de destruction massive. La menace peut être évitée par des voies diplomatiques. En tant que dirigeants du pays et parlementaires, nous devons voir à que les voies diplomatiques soient suivies.

Nous sommes confrontés à des souffrances certaines, par comparaison à une éventuelle menace venant de l'Irak. Nous sommes certains qu'il y aura des souffrances et de la destruction si nous nous joignons aux États-Unis pour bombarder les Irakiens, parce que c'est la population qui souffrira. Saddam Hussein a prouvé qu'il était capable de survivre à tout. Cependant, les plus vulnérables ne survivront pas et souffriront davantage.

Nous sommes aussi confrontés à l'inconnu qui suivra les bombardements. Il y aura une conflagration dans la région. Elle risque de s'enflammer, de se répandre et de durer pendant des années.

Avant tout, nous devons chercher une solution humaine, c'est-à-dire la solution qui fait le moins de mal et le plus de bien.

En terminant, je remercie le Président, les pages et le greffier qui ont assuré la tenue de ce débat jusqu'à la fin, ainsi que les députés qui ont été présents jusque tard dans la soirée. Nous espérons que ce débat ne sera jamais répété et qu'il restera le seul du genre au cours de notre vie.

 

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Le président suppléant (M. McClelland): La motion d'ajournement est maintenant adoptée d'office. En conséquence, conformément à l'ordre adopté aujourd'hui, la Chambre s'ajourne à 10 heures aujourd'hui, aux termes du paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 1 h 40.)