TRAN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT
LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 6 juin 2000
Le président (M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.)): Bonjour tout le monde.
Conformément à son ordre de renvoi de la Chambre en date du 1er juin 2000, notre comité examine le projet de loi C-34, Loi modifiant la Loi sur les transports au Canada.
Chers collègues, nous allons entendre ce matin, jusqu'à 10 h 30, les représentants de la Commission canadienne du blé: Ken Ritter, président du conseil d'administration, et Ian McCreary, administrateur.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue devant le Comité permanent des transports. Nous nous attendons à ce que vous nous fassiez un exposé de cinq à huit minutes et nous passerons ensuite aux questions. Dès que vous serez prêts, messieurs, vous pourrez commencer.
M. Ken Ritter (président du conseil d'administration, Commission canadienne du blé): Bonjour.
Je m'appelle Ken Ritter et j'ai à mes côtés M. McCreary, qui vient de vous être présenté.
• 0905
Je suis le producteur-administrateur élu dans le district 4.
J'ai été commissaire à l'Office national des transports du Canada.
Mon collègue, Ian McCreary, est l'administrateur élu dans le
district 6, qui s'étend dans tout le centre de la Saskatchewan. Il
a une maîtrise en économie et tous deux nous avons décidé en toute
connaissance de cause d'être des producteurs.
La Commission canadienne du blé est la plus importante agence au monde de commercialisation d'orge et de blé qui soit contrôlée par les producteurs. Nous constitutions l'un des plus importants exportateurs canadiens et nous sommes l'organisme qui rapportons le plus de devises étrangères au pays. Nous écoulons nos produits dans plus de 70 pays à travers le monde, tout le produit des ventes est restitué aux producteurs de l'Ouest canadien, moins les frais de commercialisation. La CCB écoule entre 20 millions et 30 millions de tonnes de blé et d'orge chaque année, soit 70 p. 100 de la production d'orge et de blé de l'Ouest canadien.
En décembre 1998, le gouvernement fédéral se départissait de la commercialisation de l'orge et du blé en faveur d'un conseil d'administration élu par les producteurs eux-mêmes. Deux tiers des administrateurs de la CCB sont des producteurs, qui ont été élus après avoir mené de dures campagnes durant lesquelles le transport des céréales faisait la une des débats.
La manutention du grain et les réformes du transport constituaient pour le nouveau conseil d'administration la priorité numéro un. Depuis cette première réunion, nous avons travaillé sans relâche avec les organisations agricoles et avec l'industrie. Le transport est une question de premier ordre dans l'économie agricole de l'Ouest canadien, surtout pour les producteurs qui se voient imposer des tarifs de plus en plus élevés. Ces facteurs soulignent le besoin d'un système de transport efficace et rentable si l'on veut que l'agriculture de l'Ouest canadien soit profitable.
L'objectif fondamental de la CCB durant le processus d'examen a consisté à formuler un certain nombre de recommandations destinées à mettre sur pied un système de transport à contrats et concurrentiel qui profite aux agriculteurs. Les changements aux attributions de la CCB sont un élément des réformes envisagées et nous progressons dans ce sens. Le projet de loi C-34 constitue un autre élément à cet ensemble de réformes, que je voudrais maintenant exposer plus en détail.
Avant d'aborder cette discussion, je voudrais d'abord mettre en avant le fait qu'une véritable concurrence entre les chemins de fer représente un élément fondamental d'une réforme efficace des transports. Nous sommes reconnaissants du fait que la priorité soit accordée à une augmentation de la concurrence entre chemins de fer, y compris pour ce qui est des droits améliorés d'exploitation des voies, des lignes de transport régionales et autres modalités d'accès au système ferroviaire dans le cadre de la révision en cours de la LTC. Ces réformes et autres dispositions en guise de protection de l'expéditeur constituent la meilleure garantie que le nouveau système fonctionnera à l'avantage des producteurs.
Dans un communiqué du 10 mai, M. Collenette affirmait que le gouvernement fédéral tenait à s'assurer que toutes les mesures soient prises pour que les agriculteurs de l'Ouest canadien aient accès à un système concurrentiel de transport et manutention et pour que les producteurs bénéficient des gains de productivité enregistrés au fur et à mesure des changements apportés au système. Nous sommes satisfaits de voir par exemple que le projet de plafonner les revenus avalise le principe selon lequel les producteurs sont autorisés à bénéficier de tarifs moins élevés.
Les conclusions de notre enquête sur la tarification, qui ont été appuyées par la suite par l'OTC, montrent bien que les chemins de fer encaissent des revenus excessifs à cause du manque de concurrence entre chemins de fer, au détriment des producteurs. Nous estimons satisfaisantes les modifications apportées à la procédure d'arbitrage des propositions finales. Nous estimons également que le gouvernement fédéral a fait du bon travail en ce qui touche aux réformes concernant l'abandon de lignes secondaires.
Un élément crucial de la nouvelle législation consiste à établir un programme de contrôles permanents de façon à déterminer l'efficacité du système et l'impact des changements sur les parties au système. Ceci est important dans la mesure où, en l'absence d'une prescription législative, ce programme de contrôle serait le seul mécanisme dont disposeraient le gouvernement fédéral et l'industrie pour vérifier que les réformes répondent à leurs objectifs et s'assurer que le système s'est bel et bien amélioré.
Voilà tous les éléments encourageants du projet de loi. Mon collègue, Ian McCreary, va passer en revue les différents amendements qui nous paraissent devoir être apportés à la législation.
M. Ian McCreary (administrateur, Commission canadienne du blé): Merci, Ken.
Le mémoire que vous avez devant vous a déjà été distribué, et je ne le lirai pas en entier. Je vous renvoie tout d'abord au paragraphe qui se trouve au milieu de la page 4.
Le passage d'un plafond des tarifs à un plafond des revenus constitue une réforme majeure. Cette réforme va accorder une certaine latitude en matière de prix qui risque effectivement de faire sortir certains coûts du système. Telle qu'elle est formulée à l'heure actuelle, cette législation risque d'exposer les agriculteurs à des différences de prix contraires à la concurrence. Nous proposons donc d'améliorer la législation grâce à l'amendement que nous présentons ici, qui revient essentiellement à faire un lien entre les tarifs différentiels appliqués au sein du système et ceux qui sont contrôlés en permanence. Nous l'avons précisé au paragraphe 149(3) que vous avez devant vous.
• 0910
La deuxième question que je tiens à évoquer brièvement est
celle du calcul des revenus des chemins de fer. À notre sens,
l'objectif d'un plafond des revenus consiste à garder l'oeil sur
les tarifs de frais ferroviaire en l'absence de concurrence
adéquate en la matière ou lorsque nous en serons arrivés à une
concurrence plus poussée. Dans ce but, il y a un certain nombre de
dispositions qui ont été étudiées dans les groupes de travail
Kroeger, mais il est possible qu'on ait oublié de les formuler dans
la loi.
En premier lieu, le fonds de développement industriel qui figure dans le projet de paragraphe 150(5) crée la possibilité que des fonds versés essentiellement par les compagnies de chemins de fer aux sociétés de manutention des céréales au titre de l'agrandissement des installations puissent être déduits, comme cela est indiqué, des revenus des chemins de fer. Nous considérons qu'il conviendrait d'amender la législation en abrogeant cette disposition.
La deuxième disposition, qui là encore a été étudiée de manière assez détaillée par le groupe de travail sans que cela ne se reflète dans la loi, porte sur le fait que la référence exprès aux droits d'accès et aux wagons à l'encan n'est pas prise en compte dans la loi pour la réglementation du calcul des revenus des chemins de fer. Nous proposons d'amender la loi en faisant expressément référence à cette disposition, comme nous l'avons indiqué en haut de la page 6 de notre mémoire.
Enfin, pour ajuster le plafond des revenus, le projet de loi que nous avons devant nous ce matin parle d'autoriser des ajustements en fonction de la longueur moyenne de transport. À bien des égards, on se réfère ici exclusivement à l'évolution des prix à l'avenir pour le producteur. Il est extrêmement important qu'à l'avenir cette disposition fasse partie de la nouvelle réglementation. On pourra y voir dans quelle mesure le projet de loi répond aux objectifs du gouvernement, qui sont de faire profiter les agriculteurs des avantages de l'intensification de la concurrence.
Nous recommandons fortement que des révisions de tarifs à titre d'indication du rendement soient englobées dans la réglementation mentionnée dans le préambule de ce projet de loi.
Indépendamment des dispositions ainsi proposées et dont nous avons justifié la présence dans notre mémoire, je tiens à préciser que cette législation devrait en principe nous rapprocher de la vision proposée par le gouvernement fédéral d'un système amélioré de la manutention et du transport du grain, compte tenu des changements que nous recommandons.
Au risque de me répéter, il ne s'agit là que d'un élément d'un ensemble. Il s'agit aussi de redéfinir notre rôle en matière de transport du grain et nous allons dans le sens d'une logistique commerciale de notre équipe de gestion.
L'autre élément réside dans la concurrence entre les chemins de fer et dans les dispositions visant à intensifier cette concurrence. Ces discussions significatives doivent avoir lieu. Nous qui sommes les représentants des producteurs, nous devons nous associer à vous, qui êtes les représentants du gouvernement du Canada, pour favoriser une étude dans les meilleurs délais de cette question et pour envisager très sérieusement la nécessité de renforcer la concurrence dans ce domaine.
Cela étant dit, je remercie le comité permanent de m'avoir invité à comparaître. Si vous avez des questions précises à me poser, je suis prêt à y répondre.
Le président: Merci, monsieur McCreary.
Merci, monsieur Ritter, de l'exposé que vous venez de faire devant le comité.
Nous allons passer directement aux questions. Monsieur Bailey, vous avez la parole.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Ritter et monsieur McCreary, d'être venus si tôt ce matin, en pleine possession de vos moyens.
J'ai remarqué que l'un d'entre vous a qualifié de «nouveau» ou de «changé» le rôle de la Commission canadienne du blé. Vous faisiez bien entendu allusion au nombre de membres de la commission qui sont désormais élus.
• 0915
Je vous dirais rapidement en passant que je faisais peut-être
du mauvais esprit, mais je continue à prétendre qu'on avait assez
raison à une certaine époque de parler de la Commission du blé de
l'Ontario plutôt que de la Commission canadienne du blé. En
m'exprimant ainsi, je laissais entendre que personnellement je ne
croyais pas—et je veux encore qu'on me le prouve aujourd'hui—que
la Commission canadienne du blé, qui prend en charge uniquement la
production de l'ouest du Canada, cherche à faire économiser un
maximum d'argent aux agriculteurs en matière de fret, et que ce
faisant...
Reportez-vous aux quatre points qui figurent dans le projet de loi. Lorsqu'on voit, par exemple, que le port de Churchill, pourrait acheminer entre 5 et 8 p. 100 du total et que cela représenterait d'énormes économies, on se retrouve exactement dans cette situation. Ai-je raison de penser ainsi? Avez-vous pour principe lors de chaque vente de chercher absolument à faire économiser un maximum d'argent aux agriculteurs?
M. Ian McCreary: Oui, c'est notre objectif. Au sein de la nouvelle commission, nous avons récemment entrepris d'établir des critères de référence pour mettre l'accent sur ce point en particulier. En fait, les ventes sont évaluées en fonction du rendement obtenu à la ferme, essentiellement dans chaque cas particulier.
M. Roy Bailey: Très rapidement, pouvez-vous nous dire quel est le pourcentage du grain de la Commission canadienne du blé qui est actuellement acheminé par l'intermédiaire des principaux terminaux? Est-ce 80 ou 85 p. 100? Disposez-vous de ces renseignements?
M. Ian McCreary: Monsieur le président, à titre de précision, s'agit-il des principaux terminaux sur terre?
M. Roy Bailey: Oui.
M. Ian McCreary: Je n'ai pas la répartition exacte, parce qu'il est difficile de faire la distinction entre les petits et les gros terminaux. Je peux vous dire que la logistique a évolué considérablement et que tout est susceptible de changer à un moment donné.
Par conséquent, non, je pense qu'un pourcentage de 80 p. 100 serait élevé pour l'instant, mais si l'on adopte une définition assez élargie des principaux terminaux, j'imagine que l'on pourrait s'orienter très rapidement vers ce chiffre.
M. Roy Bailey: Est-ce que la Commission canadienne du blé a prévu ce qui allait se passer au cours des cinq prochaines années en ce qui a trait au nombre de points de livraison des grains?
M. Ian McCreary: Disons que nous avons une assez bonne idée. Bien évidemment, nous nous fions aux indications que nous font parvenir les exploitants de ces installations. À l'heure actuelle, nous avons quelque 800 points de livraison dans l'ouest du Canada. Nos gestionnaires partent du principe que ce nombre diminuera de moitié à très court terme, ce qui devrait nous faire passer dans l'ouest du Canada, pour les installations situées à terre, d'une capacité d'exploitation d'environ six millions de tonnes à une capacité qui sera éventuellement de l'ordre de quatre millions de tonnes et demie.
Par conséquent, si l'on ramène cela à la capacité d'exploitation réelle, qui bien entendu est nettement moins grande que la capacité enregistrée, il y aura donc un changement très considérable du taux de roulement de ces installations et du nombre de cargaisons qui y passeront.
M. Roy Bailey: J'ai une dernière question à poser, monsieur le président.
Ne pensez-vous pas, par conséquent, que l'affectation des wagons et leur capacité d'utilisation—je parle du taux de roulement et de tout ce qui touche aux wagons—seront bien plus faciles désormais et que la livraison et la restitution des wagons se feront dans de bien meilleures conditions que par le passé?
M. Ian McCreary: Pour ce qui est plus précisément des points de livraison, je suis bien d'accord pour dire que sur le plan de la gestion et, à bien des égards, d'un point de vue administratif, les pressions qui s'exercent sur le système vont diminuer à mesure que le nombre de points de livraison va baisser.
Un certain nombre de moyens de commercialisation de rechange ont été mis en place par les groupements de producteurs. Le groupe West Central Road and Rail, par exemple, s'est illustré dans ce domaine. Ce sont des producteurs qui ont investi beaucoup d'argent de leur poche pour mettre en place des services dans le cadre d'un réseau de commercialisation, remplaçant essentiellement des structures par des techniques. Ils ont créé tout un ensemble de nouveaux services pour les producteurs et innové en matière de commercialisation. Il s'agit de s'assurer que tous les nouveaux mécanismes de commercialisation sont en place de façon à pouvoir relever tous les défis.
Le président: Merci, monsieur Bailey.
La parole est à M. Calder. Où est-il passé?
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Excusez-moi, monsieur le président.
• 0920
J'ai entendu dire entre autres par les compagnies de chemins
de fer que dans le cadre de cette procédure on a bien fixé un
plafond mais que d'un autre côté elles ne voient pas où se trouvent
les gains de productivité que doit permettre l'instauration de ce
système, notamment pour ce qui est de la procédure d'appel
d'offres. C'est la procédure d'appel d'offres qui les intéresse,
les 25 p. 100. Elles estiment que la procédure devrait être
purement commerciale et que l'on ne devrait pas en fait se mêler de
l'affectation des wagons.
Je me demande ce qu'en pense la CCB puisque évidemment c'est l'une des raisons... Il est probable qu'elles auraient accepté à contrecoeur cette mesure, mais pour l'instant elles ne la voient pas dans le projet de loi. Il faudrait peut-être qu'on l'incorpore au protocole d'accord. Qu'en pensez-vous?
M. Ian McCreary: Monsieur le président, la commission a défini un programme global. Non seulement les 25 p. 100 que nous avons indiqué feront l'objet d'un appel d'offres lors de l'étape initiale, mais en outre les 75 p. 100 restants feront l'objet d'une procédure purement commerciale s'appuyant sur les forces du marché. Nous prévoyons, par exemple, que ces 75 p. 100 dépendront largement des indications données par les producteurs concernant le lieu de destination de leurs grains. Par conséquent, ce sera probablement le résultat du jeu des forces du marché entre les compagnies et les producteurs.
Il nous faut noter par ailleurs que le plafond des revenus, au sujet duquel les compagnies de chemins de fer ont émis des préoccupations, part d'une structure historique et d'une tarification assez élevée, même lorsqu'on établit ces tarifs en fonction des coûts. Il est certain que la souplesse des tarifs et la façon dont nous entendons commercialiser l'ensemble de notre exploitation peuvent nous permettre de faire baisser les coûts à partir de ce niveau.
Quant aux 25 p. 100, nous avons besoin d'exercer nos activités sur cette partie du marché en tant que spécialiste de la commercialisation pour nous assurer que le système joue son rôle, soit essentiellement celui de lien entre le client et l'agriculteur. Sur le plan commercial, il est indispensable d'avoir un lien entre la mise en marché et le transport, et nous avons défini les secteurs dans lesquels nous devons intervenir pour nous assurer que tout se passe sans heurt. Nous ferons en sorte que cela se reflète dans le protocole d'accord.
M. Ken Ritter: Monsieur Calder, puis-je moi aussi répondre à votre question?
M. Murray Calder: Oui. Allez-y.
M. Ken Ritter: Je pense que le système sur lequel nos critiques ont mis le doigt amène les compagnies de chemins de fer et les entreprises de stockage des grains à déterminer le niveau de la concurrence. Nous disons tout simplement qu'en tant que producteurs nous voulons intervenir et que c'est par l'intermédiaire de la Commission canadienne du blé que nous allons le faire pour nous assurer qu'il y a bien de la concurrence, au seul bénéfice des producteurs.
M. Murray Calder: Très bien. Puisque nous parlons de concurrence, voyez-vous un inconvénient, par conséquent, à ce que la Loi sur la concurrence s'applique à la CCB? Cela pourrait même probablement se faire dans le cadre des dispositions du paragraphe 4(2) de la Loi sur les transports au Canada. Y voyez- vous un inconvénient?
M. Ian McCreary: En matière de concurrence, nous avons l'intention de collaborer avec l'industrie nationale sur des bases commerciales.
Pour ce qui est des liens qu'entretien la Commission canadienne du blé avec la Loi sur la concurrence, nous exerçons un monopole aux yeux de la loi, ce qui confère aux producteurs de grains de l'ouest du Canada un pouvoir commercial sur le marché international qu'ils n'auraient pas autrement. Cette situation découle d'un choix fait en toute connaissance de cause par notre Parlement, ce qui à mon avis présente un grand intérêt pour les agriculteurs. Il y a un certain nombre d'enjeux.
M. Murray Calder: J'aimerais poser une dernière question, monsieur le président.
Je siégeais auparavant au sein de l'Office de commercialisation des producteurs de poulet de l'Ontario. Quelle est l'évolution actuelle de la commission à partir du moment où vous avez désormais 10 ou 15 membres qui sont élus. Quels sont les changements internes qui se sont produits?
M. Ian McCreary: Si le comité veut bien me le permettre, je vais vous compter une petite anecdote à ce sujet, parce qu'on peut penser qu'avec Ken nous représentons éventuellement deux secteurs très différents au sein de la commission. Alors que nous étions invités à une émission de radio de Radio-Canada, on nous a demandé si nous pourrions jamais collaborer. Laissez-moi vous répondre que nous comparaissons aujourd'hui devant vous et que nous avons fait de très gros efforts pour trouver un consensus dans la collectivité agricole. Ce consensus se reflète au sein de la commission.
• 0925
Nous avons bénéficié de l'apport considérable d'un très bon
groupe nommé au sein de la commission, qui possède une grande
qualification, des qualités de gestionnaire et une expérience en
matière de finances d'entreprise. Nous avons tous beaucoup appris
au sein de la commission. Je dirais donc que sur le plan de la
collaboration au sein de la collectivité agricole sur un certain
nombre de questions, et du point de vue de la qualité de la gestion
d'entreprise, l'expérience s'est révélée extraordinaire.
Le président: Merci, monsieur McCreary.
Monsieur Hilstrom, vous avez la parole.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Monsieur Ritter, pensez-vous que la Commission canadienne du blé n'interviendra aucunement pour ce qui est des wagons servant à livrer et à négocier ces 25 p. 100?
M. Ken Ritter: Oh, nous aurons bien sûr un rôle à jouer en la matière. Je crois savoir que la Commission canadienne du blé va négocier l'approvisionnement de tous les wagons dont elle aura besoin, selon les couloirs, dans le cadre de son plan de commercialisation.
M. Howard Hilstrom: Donc, lorsque vous nous dites que vous allez passer à un système commercial, vous n'entendez pas par là que les compagnies de chemins de fer et les sociétés de manutention des grains qui s'approvisionnent effectivement en grains pour les acheminer constitueront la source commerciale en question. La commission du blé conservera le pouvoir de réglementation lui permettant d'affecter les wagons pour ce qui est de ces 25 p. 100.
M. Ken Ritter: Non. Nous affecterons simplement les wagons aux soumissionnaires ayant obtenu les contrats.
M. Howard Hilstrom: Très bien. Pensez-vous que ces forces du marché vont permettre d'exercer une concurrence plus efficace?
M. Ken Ritter: Oui.
M. Howard Hilstrom: Le protocole d'accord est passé entre vous et le gouvernement, ce qui est en fait la même chose. Pourquoi cela se fait-il en secret et pourquoi ne disposons-nous pas dès maintenant de ce protocole?
M. Ken Ritter: Tout d'abord, monsieur Hilstrom, nous et le gouvernement, ce n'est pas la même chose. Nous sommes une organisation contrôlée par des producteurs élus. Nous ne manquons pas de parler au gouvernement en tant qu'organisation autonome.
En second lieu, ce protocole d'accord est, comme son nom l'indique, un accord passé entre deux parties. Nous sommes en train d'arrêter la formulation indiquant clairement quels sont les devoirs, les obligations et les responsabilités de toutes les parties en présence.
M. Howard Hilstrom: Pensez-vous que vous pourriez exercer votre activité si la loi ne vous conférait pas un monopole sur le blé et l'orge?
M. Ken Ritter: À mon avis, si la commission n'avait pas un monopole sur le blé et l'orge, elle n'aurait pratiquement aucune utilité pour les agriculteurs.
M. Howard Hilstrom: Voilà de nombreuses années maintenant que vous négociez avec les chemins de fer le transport des grains de la commission. Pendant toutes ces années, les tarifs de fret ont été bien trop élevés. Pourquoi n'avez-vous pas réussi à faire baisser les tarifs de fret au profit des agriculteurs? C'est vous qui exerciez cette responsabilité—je parle maintenant de la commission du blé. En ce qui vous concerne, vous n'avez été élu que récemment. Par conséquent, pourquoi n'avez-vous pas réussi à obtenir des tarifs de fret plus bas compte tenu du monopole et de tous les autres pouvoirs que vous avez exercés jusqu'à maintenant?
M. Ken Ritter: Monsieur Hilstrom, c'est parce qu'il y avait une tarification prévue par la loi, les tarifs étant fixés par le Parlement.
M. Howard Hilstrom: C'est justement là où je voulais en venir, monsieur Ritter. En raison de cette surréglementation, une loi par ici et une loi par là, on finit par faire en sorte qu'aucune force du marché ne s'exerce plus pour assurer le transport des grains du point A au point B de la façon la plus rentable. Vous venez nous dire aujourd'hui que nous devons conserver ce système très réglementé. C'est ce que vous nous dites.
Monsieur McCreary, on vous a fait dire dans la presse qu'aux termes du protocole d'accord, la commission va s'engager de manière générale à appliquer les nouvelles politiques du gouvernement et à instaurer un système de type plus commercial. Indépendamment du commentaire s'appliquant à la réglementation, prenez-vous en fait l'engagement et avez-vous la volonté de faire en sorte que les appels d'offres sur ces 25 p. 100 fonctionnent et de passer éventuellement à 50 p. 100, puis finalement à 100 p. 100 de contrats concédés sur appels d'offres par la commission?
M. Ian McCreary: Je peux garantir au comité que nous avons la volonté de commercialiser le système de manutention, tel qu'il est défini et au mieux des intérêts des producteurs.
• 0930
Je dirais aussi que conformément à ce qu'ont indiqué les
groupements d'agriculteurs dans le cadre des groupes de travail, le
projet est de commercialiser l'ensemble de l'opération de
manutention. Nous avons fait part de notre intention d'éliminer ce
que l'on pouvait considérer essentiellement comme des rentes de
situation de la part des compagnies de chemins de fer comme des
sociétés de manutention des grains afin de renforcer la dynamique
du système et de faire en sorte que les producteurs soient
effectivement ceux qui affectent les wagons aux opérateurs auxquels
ils ont choisi de confier l'acheminement de leurs grains.
M. Howard Hilstrom: Est-ce qu'à votre avis le meilleur moyen d'y parvenir est de procéder par voie de réglementation?
M. Ian McCreary: Je n'ai bien entendu jamais dit cela. D'ailleurs, en tant qu'économiste, je pense qu'à l'avenir le système que nous avons mis en place fera intervenir le jeu des forces du marché, à différents niveaux, d'une manière que l'on n'avait encore jamais vue. Ce sera particulièrement le cas à partir du moment où les livraisons des grains par les producteurs vont déterminer de plus en plus directement l'affectation des wagons à l'échelle du pays.
Le président: Merci, monsieur Hilstrom.
Monsieur McCreary, j'ai une petite question supplémentaire à vous poser. J'espérais que M. Hilstrom serait allé jusqu'au bout. Est-ce que la Commission canadienne du blé a déjà signé un protocole d'accord?
M. Ken Ritter: Non.
M. Roy Bailey: L'avez-vous vu?
Le président: Quand vous préparez-vous à le signer?
M. Ken Ritter: En tant qu'organisation autonome, nous allons procéder de façon à ce que le protocole d'accord, l'accord négocié, soit soumis à...
Le président: Oui, je connais toutes les formalités.
M. Ken Ritter: ... à notre comité directeur des transports, qui à son tour fera une recommandation à la commission dans son ensemble. Cela aura lieu très prochainement.
Le président: À quel stade de la procédure en êtes-vous?
M. Ken Ritter: Nous sommes en voie d'informer notre comité directeur.
M. Roy Bailey: Diable!
M. Ken Ritter: En deux heures, nous en aurons terminé.
Le président: Rendez-vous compte que notre comité a besoin de voir ce protocole d'accord le plus vite possible.
M. Ken Ritter: Oui, nous le comprenons bien et nous tenons compte de vos exigences.
Le président: Merci.
Monsieur Easter.
M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Merci, monsieur le président.
Soyez les bienvenus, messieurs. Je tiens tout d'abord à vous remercier en tant que nouveaux membres élus au sein de la commission en vertu de la nouvelle loi, ce qui nous a permis de réunir des gens qui jusqu'alors étaient à l'opposé les uns des autres, pour ainsi dire. Vous en êtes tous deux de bons exemples. Par ailleurs, il me faut aussi certainement vous féliciter de travailler dans l'intérêt des producteurs et d'unir vos efforts pour chercher au moins à optimiser les rendements obtenus sur le marché par les producteurs primaires, compte tenu de tous les autres éléments en jeu.
Au troisième paragraphe de la page 3 de votre mémoire, vous nous parlez de votre propre enquête sur la tarification. Je remarque que vous n'avez jamais évoqué dans votre mémoire la possibilité de partager les gains de productivité. J'entends un certain nombre de producteurs de l'Ouest nous dire qu'à leur avis il faudrait instaurer une méthode permettant de partager les gains de productivité réalisés par les chemins de fer. Est-ce que Ian ou Ken pourrait nous donner davantage de précisions au sujet de ce qui est résulté en définitive de leur enquête sur la tarification.
J'ai l'impression que lorsqu'on a adopté la législation antérieure, on a pensé que les compagnies de chemins de fer disposaient d'échappatoires qui auraient pu leur permettre d'escroquer les producteurs. L'expérience du passé nous enseigne à mon avis que lorsqu'elles réussissent à trouver une échappatoire, elles optimisent leurs profits au détriment des producteurs. J'aimerais savoir quelles ont été les conclusions de cette enquête sur la tarification.
M. Ian McCreary: L'enquête sur la tarification a démontré que les contributions versées aux compagnies de chemins de fer se sont montées à plus du double des montants recommandés lorsque le gouvernement payait la différence entre l'ancien tarif du Nid-du- Corbeau et le coût intégral du transport des grains. Elle a révélé qu'en conséquence les tarifs ferroviaires avaient dépassé de quelque 5 $ la tonne le tarif qui aurait été pratiqué dans un cadre concurrentiel.
Quant à votre question supplémentaire portant sur la productivité, je répondrais qu'à la page 5 nous avons proposé une politique publique visant à assurer un contrôle permanent et à en annoncer les résultats tout en vérifiant dans quelle mesure les dispositions sur la concurrence jouent leur rôle au sein du système. De toute évidence, si ce contrôle révélait qu'il y a un net décalage, il serait indispensable que les pouvoirs publics fassent quelque chose en présence de cette information.
M. Wayne Easter: La difficulté, toutefois, Ian, c'est d'en arriver à ce point. Vous parlez à la page 3 du programme de contrôle permanent visant à évaluer l'efficacité du nouveau système, les répercussions des changements apportés, etc. Je pense que si l'on parle de 5 $ la tonne, on arrive plus ou moins à un chiffre de 700 millions de dollars, c'est bien ça?
M. Ian McCreary: À 5 $ la tonne, on arrive environ à 200 millions de dollars.
M. Wayne Easter: Très bien, ce sont donc 200 millions de dollars de profits excessifs que les compagnies de chemins de fer ont retirés du système. Toutefois, il est bien beau d'assurer un contrôle, mais voilà déjà un certain temps que l'on parle de tarifs excessifs. Est-ce que cette législation a suffisamment de mordant, toutefois, pour s'opposer efficacement aux compagnies de chemins de fer si elles pratiquent des tarifs trop élevés?
Le contrôle est une chose mais, à mon avis, si vous vous attaquez aux compagnies de chemins de fer sans avoir les pouvoirs ou la compétence vous permettant de le faire efficacement, vous pouvez toujours courir, on vous voit venir de loin.
M. Ian McCreary: Le problème, lorsqu'on veut répondre à cette question, nous l'avons déjà indiqué, c'est que l'une des principales dispositions de ce projet de loi reste à l'état de projet. Il s'agit des dispositions portant sur l'accès à la concurrence. Le groupe de travail qui s'est penché sur la question a effectivement arrêté un projet mûrement réfléchi. Il s'agissait de faire appel à la concurrence pour garantir le partage des gains de productivité. Bien évidemment, on ne retrouve pas ici l'intégralité de cette disposition, de sorte qu'à partir du moment où l'on ne sait pas quels sont les moyens d'intervention publique mis à notre disposition en la matière, le projet que nous présentons constitue un strict minimum visant à s'assurer qu'il y aura un contrôle et que l'on pourra l'analyser publiquement.
Le président: Merci, monsieur Easter.
À l'exception du fait qu'il ne figure pas ici, ce projet doit être revu lorsqu'on réexaminera la LTC, à compter du 1er juillet. C'est bien ça, monsieur McCreary?
M. Ian McCreary: Oui.
[Français]
Le président: Monsieur Guimond, s'il vous plaît.
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Messieurs, j'aimerais savoir à qui appartient le choix du port pour faire sortir le grain. Est-ce que vous avez votre mot à dire à la Commission canadienne du blé? Par exemple, est-il normal, souhaitable, acceptable et réaliste que du blé ou n'importe quel autre produit agricole dont la destination finale est l'Europe de l'Ouest transite par le port de Thunder Bay et le réseau des Grands Lacs? À l'inverse, est-il normal que du grain qui va vers le marché asiatique ou le marché russe transite par le port de Vancouver? Avez-vous votre mot à dire à cet égard et est-ce que la destination a quelque chose à voir avec le choix du port?
[Traduction]
M. Ian McCreary: Monsieur le président, la Commission canadienne du blé ne négocie pas le port avec le client. La mention du port constitue bien évidemment l'une des clauses de tous les contrats de vente. Le critère retenu par la commission, comme l'a indiqué M. Bailey, le premier intervenant qui a posé des questions, est essentiellement celui du rendement total pour le producteur dans l'ouest du Canada.
À ce titre, la commission tient compte des clauses et des conditions du transport océanique dont a besoin le client ainsi que des considérations commerciales sur le territoire du Canada pour s'assurer des meilleures conditions commerciales tout au long du transport des grains, depuis la ferme jusqu'aux installations du client.
M. Michel Guimond: Donc, hier, quand le ministre Goodale nous a répondu que le blé à destination de l'Europe de l'Est transite par Thunder Bay et que le blé du marché asiatique transite par le port de Vancouver, il a carrément parlé à travers son chapeau. Ou bien il nous a donné une information totalement erronée, ou bien il nous a menti, ou bien il ne connaît pas le fonctionnement de la Commission canadienne du blé.
[Traduction]
Le président: Monsieur Guimond, personne ne ment à qui que ce soit. Je pense qu'éventuellement...
[Français]
M. Michel Guimond: Ou bien le ministre Goodale s'est trompé par omission, ou bien il s'est trompé par incompétence. Je vous rappelle qu'en 1995, alors que je faisais partie d'un sous-comité sur l'avenir de la voie maritime du Saint-Laurent présidé par mon collègue Joe Comuzzi de Thunder Bay, un de vos prédécesseurs à la direction de la Commission canadienne du blé nous avait mentionné que le blé du Manitoba dont la destination finale était la Belgique et le Luxembourg transitait par le port de Vancouver, alors que les producteurs du Manitoba sont à quelques heures du port de Thunder Bay. Du blé dont la destination finale est le Luxembourg et la Belgique transite par le port de Vancouver, passe par le canal de Panama et fait presque le tour de la planète. Est-ce normal? Est-ce que vous trouvez cela acceptable?
[Traduction]
M. Ian McCreary: Monsieur le président, je ne suis pas en mesure de vous parler de ce contrat en particulier.
Pour ce qui est des courants d'échange, j'ai précisé que ce sont les impératifs commerciaux qui déterminent les trajets, et je dirais par conséquent qu'on peut prévoir que pour des raisons commerciales les ports de l'est et de l'ouest de l'Europe seront de manière générale davantage attirés par les ports qui sont les plus proches d'eux. Par conséquent, je ne vois aucune incompatibilité entre les déclarations du ministre et les grandes lignes de conduite de notre équipe de gestion que je vous ai exposées aujourd'hui.
Le président: Merci, monsieur Guimond.
Bien entendu, il faut qu'il y ait des courants d'échange, monsieur McCreary, n'est-ce pas?
M. Ian McCreary: Bien évidemment.
Le président: Je veux dire par là que l'on ne dispose que d'une certaine quantité de blé et qu'il n'y a qu'un certain nombre de clients. S'agit-il là d'un courant d'échange?
M. Ian McCreary: Oui. Bien entendu, ce courant d'échange se reflète dans les statistiques et celles-ci sont publiques. Notre équipe chargée des ventes va examiner ces courants d'échange, les possibilités de vente et la meilleure façon d'optimiser les résultats et de minimiser les coûts. Oui, c'est précisément cela.
Le président: Par conséquent, le ministre aura réagi en tenant compte des statistiques qui, de manière générale, montrent que les grains qui vont vers l'Europe passent par l'Est et que les grains qui vont vers l'Orient passent par Vancouver.
M. Ian McCreary: Oui.
Le président: La parole est à M. Sekora.
M. Lou Sekora (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.): Je vous remercie.
J'ai trois questions à poser, mais je vais faire tout d'abord quelques commentaires.
Je suis originaire de Colombie-Britannique, et en fait on expédie bien plus de grains à partir de la Colombie-Britannique qu'on ne devrait en expédier. Des wagons pleins de grains restent quelquefois une ou deux semaines sur une voie de garage alors qu'ils pourraient être utilisés pour le transport d'autres produits.
M. Ian McCreary: Excusez-moi, monsieur le président, mais nous nous sommes penchés sur cette allégation. Elle a été faite à plusieurs reprises. Les statistiques concernant nos taux de roulement, nos stocks, ne la corroborent pas. Il a pu arriver à l'occasion qu'un train reste sur place pour un certain nombre de raisons.
J'ajouterai que certaines de nos opérations faisant l'objet d'un appel d'offres, notamment en ce qui concerne l'orge de brasserie, ont fait l'objet de taux de roulement plus lents. De manière générale, toutefois, si vous considérez le nombre de jours représentés par le transport de nos grains et la durée d'attente dans les ports, il est dans le pire des cas comparable, et dans la plupart des cas remarquable, comparativement à ce qui se passe pour les grains que nous ne prenons pas en charge. Les statistiques tenues par les différents opérateurs ne nous indiquent pas qu'il y a là un problème au sein du système. Il a pu se produire un cas à l'occasion et s'il y a là un problème qu'il nous faut examiner, nous serons heureux de le faire cas par cas.
M. Lou Sekora: Un autre problème qui a été porté à mon attention—je ne sais pas jusqu'à quel point la chose est vraie, vous pourrez peut-être éventuellement me le dire—c'est que les grains et le blé sont entreposés dans ces wagons alors que les expéditeurs de canola ne disposent que d'un certain délai et ont perdu des ventes parce qu'il n'y avait pas de wagons pour transporter le canola.
M. Ian McCreary: Monsieur le président, c'est une excellente question. Des allégations sérieuses ont été faites en ce qui concerne la relation entre le transport des grains de la commission et celui du canola, et je pense qu'il est important de dissiper ces craintes.
On a allégué que les stocks de la commission avaient en quelque sorte bloqué le transport du canola à l'automne 1999. En réalité, jusqu'au mois d'octobre, il y avait 120 tonnes de canola entreposées et seulement deux navires qui attendaient. Par la suite, on a enregistré des expéditions records au mois de novembre. Le total des expéditions ayant passé par les ports au cours de cette période—il s'agit du trafic portuaire—a atteint des niveaux jamais vus. La commission comme les opérateurs extérieurs ont dépassé leurs objectifs à l'exportation. Les opérateurs extérieurs ont en fait encore plus dépassé leurs objectifs que la commission.
Il est vrai que le porte de Vancouver, sur la côte Ouest, a des limitations. Si cela vous intéresse, je pourrai vous donner les chiffres. En novembre, notre part du transport, définie en fonction d'accords négociés à l'avance avec les chemins de fer, a été de 596 000 tonnes. Tout au long de cette période, nous avons expédié 654 000 tonnes. Oh, excusez-moi, il s'agit ici de Thunder Bay.
Pour ce qui est de la côte Ouest, notre part devait être de 1,04 million de tonnes alors que nous avons transporté effectivement 1,16 million de tonnes. Les opérateurs extérieurs à la commission devaient disposer de 400 000 tonnes alors qu'ils ont effectivement transporté 566 000 tonnes. Les deux types d'opérateurs ont donc transporté des quantités records et il est vrai que nous aurions tous aimé pouvoir réaliser davantage de ventes au cours de cette période, parce qu'il y avait des débouchés pour tout le monde. Il n'est pas juste, toutefois, d'affirmer que des expéditions de grains sont restées en plan chez les uns ou chez les autres, parce que ce n'est tout simplement pas corroboré par la réalité.
M. Lou Sekora: Très bien.
J'ai une dernière question à vous poser. Dans les faits, la commission du blé se charge elle-même du transport. N'y a-t-il pas là un conflit d'intérêts? Considérez-vous que cet arrangement est bon et ne préféreriez-vous pas, par exemple, que quelqu'un d'autre se charge du transport et que vous vous contentiez d'être la commission du blé?
M. Ian McCreary: Le transport est un élément essentiel de l'opération de mise en marché. Nous avons beaucoup travaillé avec d'autres expéditeurs en vrac du secteur commercial de l'ouest du Canada, et ces derniers nous ont dit dès le départ: «Ne vous inquiétez pas. Personne ne cherchera jamais à séparer la mise en marché du transport, parce que les deux sont intrinsèquement liés.» Donc, de ce point de vue, nous voyons une très grande complémentarité et, à mesure que nous nous lançons dans des opérations commerciales et que nous devons en fait rendre des comptes aux producteurs, notre rendement dépend du rôle que nous nous sommes attribué dans ce secteur.
Le président: Merci, monsieur Sekora.
M. Lou Sekora: Je vous remercie.
M. Ken Ritter: Puis-je répondre très brièvement à cette question, monsieur le président?
Le président: Allez-y, monsieur Ritter.
M. Ken Ritter: Un système de contrôle est mis en place dans le cadre de ce projet de loi, et nous l'attendons avec intérêt. Notre exploitation n'a rien à envier à celle des autres et nous sommes prêts à ce que ce vérificateur indépendant, qui dans mon esprit sera un contrôleur, nous juge. Nous y sommes tous disposés.
Le président: Merci, monsieur Ritter.
La parole est à M. Proctor.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le président, M. Proctor a proposé d'intervertir les temps de parole parce que nous devons être à la Chambre à 10 heures pendant une quinzaine de minutes. Donc, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je parlerai pendant les cinq minutes qui lui sont imparties et il prendra ensuite mon tour.
Le président: Aucun problème, si M. Proctor est d'accord.
M. Rick Borotsik: Je dois vous dire que la collaboration est parfaite avec le NPD.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Je suis heureux de l'entendre, Rick.
Des voix: Oh, oh!
M. Rick Borotsik: Très bien, ça suffit. Mon temps de parole commence à s'écouler.
Le président: Oui, en effet.
M. Rick Borotsik: Monsieur le président, je tiens à dire à M. Ritter que j'ai vraiment apprécié les commentaires qu'il a faits précisément au sujet du mécanisme de contrôle, et cela me paraît très encourageant pour l'avenir. Il a dit d'ailleurs dans son exposé:
-
Il est important par ailleurs que le mécanisme de contrôle soit
très ouvert et garantisse un maximum de transparence.
Voilà qui me convient parfaitement et je le remercie de ce commentaire.
Cela dit, toutefois, la législation mentionne expressément que la tierce partie qui va effectuer ce contrôle va rendre précisément des comptes aux ministères et aux ministres responsables. J'ai demandé hier si le responsable du contrôle ne devrait pas rendre directement des comptes au Parlement plutôt qu'aux ministres de peur que, et vous m'excuserez d'avoir cette horrible pensée, il n'y ait pas toute la transparence voulue dans les services des ministères.
• 0950
Ne seriez-vous pas d'accord, monsieur Ritter, pour que ce
rapport du contrôleur soit envoyé au Parlement? Ne seriez-vous pas
non seulement d'accord, mais ne seriez-vous pas prêt à appuyer
cette proposition?
Le président: Il ne met certainement pas les mots dans la bouche du témoin.
Des voix: Oh, oh!
M. Rick Borotsik: Non. Je pose simplement la question.
M. Ken Ritter: Nous partons du principe à la CCB que nous sommes prêts à comparer notre exploitation à celle de n'importe quel concurrent. Nous voulons pouvoir le faire publiquement. Je n'ai absolument aucune objection à ce qu'un rapport soit déposé devant le Parlement ou à ce que l'on publie les résultats dans le Globe and Mail ou le National Post.
M. Rick Borotsik: Nous n'avons pas l'intention d'aller aussi loin, monsieur Ritter, mais j'apprécie particulièrement l'appui que vous donnez au Parlement et je vous remercie en effet, parce que ce sera une de nos propositions.
Le président: Toutefois, à titre de précision, Rick—et je ne rajouterai pas cette intervention au temps qui vous est imparti—il y a aussi la question de la confidentialité des accords commerciaux.
Comment réglez-vous la question, monsieur Ritter?
M. Rick Borotsik: Ce n'est pas mon propre temps de parole.
M. Ken Ritter: Nous allons faire une étude globale. En rassemblant toutes ces statistiques et tous ces chiffres, on verra clairement qui profite du système. Nous sommes redevables avant tout envers les producteurs, nous devons nous assurer que ce sont eux qui en bénéficient, et pas d'autres, et nous n'avons pas à nous en excuser.
Le président: Ceci à condition, bien sûr, que le contrôle se fasse de manière globale, mais si le responsable entre dans les détails et communique les informations correspondantes au ministre, il faut éviter que des renseignements commerciaux confidentiels se retrouvent dans le Globe and Mail.
M. Ken Ritter: Oui, bien entendu.
M. Rick Borotsik: J'imagine, monsieur le président, que vous ne mettez pas ici les mots dans la bouche du témoin?
Des voix: Oh, oh!
Le président: Non.
M. Rick Borotsik: Je comprends. Il y a une différence, ici.
Le président: Il s'agit de prendre connaissance de tous les faits.
M. Rick Borotsik: Et nous aimerions le faire.
M. Ken Ritter: Il faut faire nettement la distinction avec ce qui est confidentiel d'un point de vue commercial et ce qui risque de fausser les relations commerciales... Toutes ces questions confidentielles doivent être communiquées au ministre. Toutefois, le rendement global du système, ceux qui en bénéficient et les gains de productivité doivent être totalement transparents.
M. Rick Borotsik: Pour qu'il en soit pris acte, je tiens à mentionner que M. Ritter nous a précisé que la CCB ne voit aucun inconvénient à rendre public ce rapport.
Je propose aussi qu'il y ait un certain mandat lorsque ces mécanismes d'appel d'offres sont communiqués à cette tierce partie, à ce contrôleur indépendant, pour que l'on fasse la distinction entre ce qui est confidentiel et ce qui ne l'est pas. On pourrait le faire dans le cadre de ce mandat, monsieur le président. Ce sont des choses que les ministres ne doivent pas être les seuls à connaître.
J'ai deux autres questions à vous poser. Le protocole d'accord s'est révélé un sujet très sensible autour de cette table, et il m'apparaît très difficile d'aborder toute cette question avec vous, monsieur Ritter, alors que les sociétés de manutention des grains vont venir plus tard, de même que les compagnies de chemins de fer, sans que l'on puisse disposer de ce texte vital. Nous ne savons pas ce que va disposer ce protocole d'accord que vous avez négocié avec le gouvernement au sujet des 25 p. 100 de la production qui va être commercialisée ou soumise à des appels d'offres. Nous ne savons pas quel est votre mandat. Nous ne savons pas quelles sont vos conditions. Bien évidemment, il y a eu une négociation entre vous- même et le ministre Goodale. Nous sommes ici face à l'inconnu.
Pourriez-vous nous dire éventuellement quels sont les principaux éléments de ce protocole d'accord qu'il nous faut connaître avant que les sociétés de manutention des grains viennent nous parler?
Le président: Je vais devoir m'interposer ici, Rick, parce que le problème, c'est que cet accord n'a pas encore été signé. Je ne veux pas, par conséquent, que nos témoins nous disent des choses qui n'auront plus cours lorsque nous en rediscuterons demain.
M. Rick Borotsik: Eh bien, monsieur le président...
Le président: Il y a là un risque que je ne veux pas courir.
M. Rick Borotsik: On nous avait promis ce protocole d'accord vendredi dernier, monsieur le président, et de toute évidence nous ne l'avons pas encore.
Le président: Je le sais, et souvenez-vous que c'est votre président qui, au nom du comité, a fait pression sur le ministre pour qu'il nous fasse parvenir ce protocole d'accord. Par conséquent, je suis de votre côté sur cette question, mais je ne veux pas que l'on discute de ce qui pourrait figurer éventuellement dans un protocole d'accord.
M. Rick Borotsik: Très bien, peut-être, alors, monsieur le président...
Le président: Passer à la question suivante, monsieur Borotsik.
M. Rick Borotsik: Très bien. Merci. C'est ce que je vais faire.
Peut-être pourriez-vous alors me dire quand ce protocole d'accord va être disponible, à votre avis. Vous m'avez dit que l'on suivait la procédure prévue.
Le président: Nous avons déjà traité de cette question. Les témoins nous ont dit que ce serait très bientôt.
M. Rick Borotsik: Non. Ils nous ont dit qu'ils allaient suivre toute la procédure, mais jamais à quelle date ce serait fini. Est- ce pour aujourd'hui? Pour demain? Est-ce que ce sera avant la mise en oeuvre de la loi? C'est d'ailleurs ce qu'avait laissé entendre le ministre—que ça se ferait avant la mise en application de la loi. Est-ce que l'on peut penser que ça se fera à la fin juillet?
M. Ken Ritter: Non. Je pense pouvoir vous dire qu'il faut envisager qu'une décision sera prise cette semaine.
M. Rick Borotsik: Avant la troisième lecture?
M. Ken Ritter: Je ne peux pas être plus précis.
M. Rick Borotsik: Très bien.
Ma dernière question est très brève. Pensez-vous qu'on parvienne un jour à avoir un réseau de transports ferroviaires fonctionnant entièrement selon les règles du marché, sans qu'intervienne la Commission canadienne du blé?
M. Ken Ritter: Je crois pouvoir dire que ce projet de loi introduit un certain nombre de changements. La Commission canadienne du blé représente les agriculteurs et veille au maintien de leur influence en matière de transports.
M. Rick Borotsik: D'après vous, donc, la Commission canadienne du blé sera toujours à même d'influencer les conditions de transport?
M. Ken Ritter: Ce rôle est essentiel si nous voulons pouvoir travailler dans l'intérêt des agriculteurs et leur assurer la meilleure rentabilité.
M. Rick Borotsik: La réponse est donc oui.
Le président: Merci, Rick.
Monsieur Dromisky.
M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président: Avant que vous ne commenciez, permettez-moi une brève intervention.
Monsieur Ritter, vous nous aviez dit que le protocole d'entente nous serait transmis cette semaine. Le comité voudrait bien achever ses travaux cette semaine afin de...
M. Howard Hilstrom: Monsieur le président, j'invoque le règlement pour dire que mes oreilles ne peuvent pas saisir le sens d'un hochement de tête! Était-ce oui ou non?
Le président: Quand?
M. Howard Hilstrom: Je n'ai perçu qu'un léger hochement de tête.
Le président: Je ne lui ai pas encore posé la question.
M. Howard Hilstrom: Ah bon.
Le président: Monsieur Ritter, le comité voudrait achever ses travaux avant la fin de semaine. La semaine prochaine sera consacrée aux étapes suivantes, le projet de loi devant à nouveau être présenté devant la Chambre. Si vous voulez que les agriculteurs et les producteurs que vous représentez puissent bénéficier des mesures prévues dans le texte, il nous faudra ce PE au plus tard demain soir, et non jeudi ou vendredi. Il nous le faut au plus tard demain soir, ou ce qui a été convenu risque de s'évaporer, et cela au détriment des agriculteurs eux-mêmes. C'est aussi simple que cela.
M. Ken Ritter: C'est entendu pour les délais et nous suivrons sur ce point les consignes du comité.
Le président: Je vous en remercie.
Monsieur Dromisky, vous avez la parole.
M. Stan Dromisky: Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir à la question de M. Borotsik et la développer un petit peu. Je sais qu'il vous est difficile d'être impartial sur ce point en raison de votre attachement à l'institution que vous représentez et aux convictions qui animent votre action. À l'intention, cependant, des auditeurs et des téléspectateurs qui assistent à nos délibérations sur le réseau CPAC, je voudrais vous demander quelle serait, selon vous, l'incidence d'une disparition éventuelle de la Commission canadienne du blé sur les divers acteurs, c'est-à-dire les agriculteurs, les divers intermédiaires et, enfin, la clientèle?
M. Ian McCreary: L'auteur de la question reconnaît qu'elle appelle une réponse assez détaillée, comme on peut d'ailleurs le constater en consultant certains documents.
Les producteurs perdraient l'avantage découlant de l'influence que la Commission canadienne du blé est en mesure d'exercer au niveau des prix. Selon certains chercheurs qui se sont penchés sur la question, cela leur rapporte entre 18 $ et 30 $ de plus la tonne. Ajoutons, ce qui est plus important encore, que cela correspond en fait à une différence entre les prix mondiaux et les prix du grain, qui sont plus élevés au Canada. Cela introduirait un risque supplémentaire lié au risque qui existe sur les marchés mondiaux et qui, dans cette hypothèse, serait assumé par les entreprises céréalières. Il y aurait donc aussi une décote par rapport aux prix mondiaux.
Ainsi, en plus des pertes directes subies par les agriculteurs, il y aurait aussi une perte d'influence sur les marchés mondiaux, phénomène étudié par Kraft, Furtan, Tyrchniewicz et d'autres. Les travaux, menés par cette équipe ainsi que par d'autres chercheurs, démontrent que l'intégration du facteur risque réduirait d'autant le prix en vigueur sur les marchés mondiaux et que cela provoquerait une baisse supplémentaire du revenu des producteurs.
M. Stan Dromisky: Oui, mais ce n'est pas tout à fait la question que je vous posais. Je vous demandais de nous parler des divers acteurs de ce secteur. Comment cela affecterait-il les chemins de fer? Comment cela affecterait-il les agriculteurs? Vous ne nous avez pas vraiment donné de réponses précises sur tout cela. Qu'en serait-il, également, des clients? Et des entreprises de stockage? Et des armateurs? Comment chacune de ces catégories d'intervenants serait-elle touchée si la Commission canadienne du blé disparaissait? Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce point, sans...
M. Ken Ritter: Permettez-moi de répondre...
M. Stan Dromisky: Oui.
M. Ken Ritter: ... sans détour car je dis les choses telles qu'elles sont. Comment les diverses catégories d'intervenants seraient-elles affectées?
M. Stan Dromisky: C'est cela.
M. Ken Ritter: Les agriculteurs y perdraient.
M. Stan Dromisky: Bon, voilà le genre de réponse qui nous est très utile.
M. Ken Ritter: Les agriculteurs y perdraient.
M. Stan Dromisky: Entendu.
M. Ken Ritter: Il ne faut pas oublier les producteurs de l'Ouest du Canada partagent leur récolte entre la commission et d'autres acheteurs. Tous les membres du conseil d'administration de la Commission canadienne du blé qui sont également producteurs cultivent certaines céréales destinées à la commission et d'autres qui ne le sont pas. Je tenais à le préciser. Cela montre bien que la commission ne cherche nullement à nuire aux récoltes qui ne lui sont pas destinées, ni à leur production ni à leur commercialisation étant donné que nous faisons de même.
• 1000
Nous estimons que les agriculteurs seraient perdants. Les
chemins de fer seraient mieux à même, étant donné le duopole qu'ils
exercent, d'accroître leurs exigences vis-à-vis des entreprises de
stockage et, aussi, à l'égard des producteurs. Les entreprises de
stockage pourraient, elles aussi, chercher à accroître leurs
bénéfices pour favoriser leurs propres actionnaires. Dans cette
chaîne, tous les intervenants sont en mesure d'agir sur les prix,
sauf les agriculteurs qui se trouvent au bout de la chaîne et qui
seraient obligés d'accepter les conditions qu'on leur dicte. Un tel
état de chose nous semblerait profondément injuste.
M. Stan Dromisky: Merci.
Le président: Merci, monsieur Dromisky.
Monsieur Proctor, vous avez la parole.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci, monsieur le président.
Messieurs, bonjour.
Au départ, lorsque furent annoncés, le 10 mai, le minimum de 25 p. 100 pour les appels d'offre pendant les deux premières années, puis de 50 p. 100 la troisième année, certains craignaient que la commission ne puisse pas atteindre, dans les délais prévus, la barre des 50 p. 100.
Monsieur McCreary, vous avez dit que votre intention, à terme, est de commercialiser l'ensemble de vos opérations. L'objectif des 50 p. 100 à l'horizon 2002-2003, se heurte-t-il à des obstacles d'ordre logistique?
M. Ian McCreary: J'ai indiqué très nettement que notre intention était effectivement de commercialiser le système et nous pouvons déjà faire état d'un certain nombre de contrats commerciaux. Le recours aux appels d'offre n'est qu'un mécanisme parmi d'autres. Dans le cadre de ce projet de loi, nous avons exprimé de nombreuses réserves quant aux pressions qui nous poussent à franchir le seuil des 50 p. 100 et nous maintenons certaines de nos réserves même à l'égard de la barre des 25 p. 100.
Nous n'avons cessé d'expliquer qu'en raison de la nature de nos opérations, et en fonction des analyses que nous avons menées, pour atteindre les 25 p. 100... Cet objectif-là, nous allons l'atteindre.
M. Dick Proctor: Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur les obstacles que pose le passage du cap des 25 p. 100 à celui des 50 p. 100? Sur quel aspect du problème émettez-vous des réserves?
M. Ian McCreary: Dans tout cela, la tâche de la commission est de répondre à un certain nombre d'exigences commerciales dont une est d'assurer que les producteurs ont accès au système. Une autre est de garantir que les petits volumes seront acheminés dans des conditions sensiblement les mêmes que les volumes plus importants. Ces volumes regroupés ne pourront pas nécessairement—cela me semble clair—être acheminés aussi facilement ou à un coût aussi faible si les chargements sont répartis entre plusieurs entreprises céréalières.
J'ajoute que les producteurs, qui ont contribué à l'élaboration de nos propositions, seraient les premiers à reconnaître qu'il existe, chez les intervenants, une extrême diversité de moyens. Nous voulons pouvoir accorder, à tous ces intervenants, un accès concurrentiel au système et, en cela, les appels d'offre pourraient se révéler moins efficace que le système axé sur les producteurs, où il y a, en fait, entre les producteurs et les entreprises céréalières, une sorte de marché intermédiaire qui décide de l'affectation des wagons.
Vous pouvez donc voir qu'il existe effectivement un certain nombre de contraintes d'ordre logistique mais qu'il y a aussi, à un autre niveau, un certain nombre d'occasions commerciales qui risqueraient de nous échapper.
M. Dick Proctor: Merci.
M. Ian McCreary: La commercialisation au sens d'une application des règles ordinaires du commerce est un des éléments de ce dispositif. Nous nous considérons comme une entreprise commerciale. La concurrence et la commercialisation sont ce qui marque notre intervention en tant que partie contractante et nous n'entendons pas que notre action pèse ni sur la dimension commerciale des opérations ni sur la concurrence. Cela ne doit pas nuire, non plus, au jeu normal des responsabilités. Il faut tenir compte de tous ces aspects-là.
M. Dick Proctor: Vous avez également dit que certains producteurs ne profiteront guère des changements introduits. Pourriez-vous préciser, à l'intention du comité, qui sont ces producteurs, où ils se trouvent et nous expliquer pourquoi ils ne seront pas avantagés par nouvelles dispositions?
M. Ian McCreary: Nous assistons à une évolution conceptuelle. En effet, nous passons d'un tarif maximum, c'est-à-dire de la réglementation des taux, à un plafonnement du revenu des sociétés de chemin de fer, c'est-à-dire à une limite calculée en fonction d'un taux moyen pondéré. Cela veut dire que les producteurs qui se situent en haut de la fourchette du taux moyen, par rapport au maximum prévu, bénéficieront moins du changement. Je prévois donc que sous la pression des forces du marché, les acteurs qui payaient déjà relativement cher, auront relativement moins à gagner. D'après certaines études, on pourrait aboutir à une moindre concurrence entre les compagnies de chemin de fer. On n'est pas encore en mesure de prévoir quelles seront au juste les retombées.
Le président: Merci, monsieur Proctor.
Monsieur Easter, vous avez la parole.
M. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.
Vous évoquez, à la page 4 de votre mémoire, la question des tarifs. Hier, nous avons discuté avec le ministre et ses collaborateurs, des différences de tarif entre les lignes secondaires et les lignes principales. Dans votre second paragraphe, vous en parlez vous-même et vous proposez un amendement. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce second paragraphe? Ce qui m'inquiète c'est la différence de tarif entre un seul wagon et le mouvement de multiples wagons, car je ne sais pas si la marge de 3 p. 100 constitue une garantie suffisante. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à cet égard et expliquer au comité les dangers que cela pose. Les fonctionnaires du ministère des Transports n'ont pas été en mesure de nous l'expliquer.
M. Ian McCreary: La différence de tarif, qui, si nous l'avons bien compris, est durablement instaurée, s'applique, pour un même niveau de service, au transport selon qu'il s'agit d'une ligne secondaire ou d'une ligne principale. Les lignes secondaires ne possèdent pas, comme les lignes principales, de ces lieux de regroupement des wagons. Pour les producteurs, le transport par ces lignes secondaires est peut-être le moyen le plus économique d'acheminer leurs marchandises.
Une limite imposée à la différence de prix entre les lignes secondaires et les lignes principales ne constitue peut-être pas une protection suffisante car la différence au niveau des prix se situe essentiellement entre un wagon unique ou un petit lot de wagons, et les blocs de 50 à 100 wagons. Si ces différences de prix devaient se creuser, cela entraînerait peut-être pour les producteurs une augmentation des coûts dépassant les frais d'exploitation effectifs des chemins de fer, et aurait pour résultat de faire supporter ce surcoût aux agriculteurs et aux municipalités rurales.
Autrement dit, à supposer que vous ayez, sur une ligne principale, un lieu de regroupement pouvant accueillir 100 wagons, et que cela n'existe pas sur une ligne secondaire correspondante telle que sur les voies du West Central Road and Rail, on pourrait, théoriquement avoir, en effet, une différence de 3 p. 100 entre les deux avec, cependant, une différence beaucoup plus grande entre le prix applicable à un seul wagon ou à un groupe de cinq wagons, et celui qui s'appliquerait à un bloc de 100 wagons. Même avec cette limite de 3 p. 100, le transport pourrait devenir alors extrêmement onéreux.
M. Wayne Easter: Si j'ai bien compris, afin de pouvoir bénéficier du tarif plus favorable accordé aux blocs de 50 ou 100 wagons, le producteur est presque obligé de transporter son grain jusqu'à un silo situé dans un centre de regroupement, et donc de ne pas utiliser la ligne secondaire la plus proche, ce qui complique beaucoup ses opérations.
M. Ian McCreary: Oui. Il est clair que si la différence de prix entre un seul wagon et un ensemble de wagons est trop grande par rapport au coût effectif, et si l'écart entre le prix et les coûts devait même se creuser afin de faciliter la fermeture des lignes secondaires qui ne possèdent pas de centre de regroupement des wagons, on risque, même avec la marge de 3 p. 100, d'assister effectivement à la fermeture de certaines lignes.
M. Wayne Easter: Mais, monsieur le président, il faut également tenir compte d'un autre acteur, en l'occurrence les entreprises de stockage. Elles aussi ont intérêt à fermer certains de leurs silos situés sur les lignes secondaires afin de rentabiliser davantage les gros silos installés sur les lignes principales. Êtes-vous de cet avis?
M. Ian McCreary: C'est vrai, dans la mesure où elles souhaitent rationaliser leurs opérations afin d'en accroître la rentabilité.
M. Wayne Easter: Monsieur le président, j'ai une dernière question à poser.
D'après vous, la version amendée du projet de loi risque-t-elle de compliquer la situation pour le transport sur de courtes distances, que nous voulons, je pense, favoriser, et sur la capacité de ces compagnies à faire face, au niveau des prix, à la concurrence des grandes lignes? Je crois qu'il faut s'interroger sur cela pour savoir si les petites lignes pourront négocier un arrangement avec les grandes lignes. Pouvez-vous nous en dire quelque chose?
M. Ken Ritter: Dans notre optique, la législation permettrait aux petites lignes de se développer et d'obtenir un tarif de groupe auprès des grandes lignes.
Le président: Monsieur Hilstrom.
M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président.
Monsieur Ritter, pourriez-vous nous dire, en tant que représentant des autres membres du conseil, si vous acceptez que ce PE soit joint au texte plutôt que de simplement circuler parmi les...
Le président: Monsieur Hilstrom, ce document n'est pas joint au texte.
M. Howard Hilstrom: Si je proposais un amendement en ce sens, vous y opposeriez-vous?
M. Lou Sekora: Moi je m'y opposerais.
M. Howard Hilstrom: Vraiment?
Le président: Ce document n'est pas joint au texte. Vous ne pouvez proposer, par amendement, qu'un PE soit joint à un projet de loi, car nous devons nous prononcer sur le projet de loi tel qu'il nous est transmis.
M. Howard Hilstrom: Je voulais simplement voir si je ne devrais pas proposer un amendement et quelles seraient les objections à l'idée d'annexer ce protocole au projet de loi. Je crois que sur ce point la position d'un des principaux intervenants est tout à fait pertinente, mais la décision vous appartient.
Le président: C'est au témoin de répondre.
M. Ken Ritter: Je crois savoir que le protocole d'entente sera rendu public lorsqu'il aura été conclu. Il appartiendra alors au comité et au Parlement de décider de ce qu'ils veulent en faire.
M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président.
Messieurs, je crois qu'il nous faut quelques éclaircissements sur tout cela. Vous vous présentez ici en tant que défenseurs des intérêts des agriculteurs. C'est ce que vous avez dit. D'après vous, la Commission canadienne du blé défend, tous azimuts, les intérêts des agriculteurs.
Mais, n'avez-vous pas également dit que les agriculteurs cultivent aussi d'autres céréales et que, juridiquement, vos responsabilités, au titre de la Loi sur la Commission canadienne du blé, s'exercent uniquement envers les producteurs qui vendent à la commission du blé et de l'orge, mais seulement en ce qui concerne les 30 p. 100 de grain qu'ils ont eux-mêmes cultivés? Ce ne sont que ces gens-là que vous représentez. Et pour un agriculteur donné, vous n'intervenez qu'à hauteur de 30 p. 100 ou 40 p. 100 de sa production. Qui donc représentez-vous, au juste?
M. Ken Ritter: Vous avez raison de dire cela puisqu'en tant qu'administrateur d'une organisation, notre responsabilité principale est envers cette organisation dont nous sommes les fiduciaires. Cela ne fait aucun doute. J'estime, cependant, que si vous vous penchez sur les volumes relevant de la Commission canadienne du blé, vous trouverez, au niveau de la commercialisation ou de la production, que cela dépasse 30 p. 100 et atteint plutôt 70 p. 100.
M. Howard Hilstrom: C'est bien ce que j'essayais de dire. Vous ne représentez pas l'intégralité de la production agricole. En fait, il y a de nombreux agriculteurs que vous ne représentez pas du tout, ou que vous ne représentez que pour une faible part de leur production.
Il me semble que Agricore, la Saskatchewan Wheat Pool et les United Grain Growers semblent ne pas avoir voix au chapitre dans ce débat législatif sur la réforme du transport des grains. Il s'agit, pourtant, d'organisations appartenant aux agriculteurs eux-mêmes. Non seulement assurent-elles le transport de grains relevant de la commission, mais également de grains n'ayant rien à voir avec la commission. Pourquoi ne devraient-elles pas participer davantage à ce débat et être en mesure de négocier directement avec les chemins de fer pour le transport de leur grain? Pourquoi serait-ce nécessairement la Commission canadienne du blé qui s'occupe de tout cela?
M. Ken Ritter: Permettez-moi de répondre et Ian pourra ensuite intervenir.
Les silos appartiennent à des entreprises qui se font concurrence pour stocker le grain des agriculteurs de l'Ouest canadien. Ça, c'est leur rôle et elles savent se faire entendre. Notre rôle, à nous, est de garantir que leurs opérations sont effectivement concurrentielles et conformes aux intérêts des agriculteurs canadiens. Ça, c'est notre rôle.
M. Howard Hilstrom: J'ai une autre question. Pourriez-vous nous expliquer ce qui va arriver à Omnitrax et au port de Churchill si ce projet de loi est adopté, étant donné que la Commission du blé contrôle une grande partie des exportations de grain? Suite à l'adoption de ce texte et en vertu des politiques que vous menez, va-t-on voir davantage de grain transiter par le port de Churchill, et quelle pourrait être l'incidence de ce texte sur ce plan?
M. Ken Ritter: Permettez-moi de vous répondre en disant qu'au cours des deux ou trois dernières années, à peu près chaque boisseau de grain transitant par le port de Churchill était du grain relevant de la commission. Je crois savoir que, l'année dernière, les seules exportations ne relevant pas de la commission ont été une cargaison de pois.
D'après nous, Churchill est le point d'exportation le plus économique pour les agriculteurs. Mais, le système est très compliqué et nos clients ont également voix au chapitre lorsqu'il s'agit de dire où ils voudraient prendre livraison. Nous devons tenir compte des désirs de notre clientèle. Mais si ces mesures sont dans l'intérêt des agriculteurs de l'Ouest, nous y sommes entièrement acquis.
Le président: Monsieur McCreary, avez-vous quelque chose à dire à cet égard?
M. Ian McCreary: Oui, monsieur le président.
Ainsi que mon collègue l'a indiqué, nous avons utilisé le port de Churchill. Jusqu'à l'année dernière, nous en étions les utilisateurs quasi exclusifs. Ce qu'il convient de dire c'est que lorsqu'on décide, comme il incombe à la commission de le faire, que c'est le port de Churchill qui s'impose comme point de transit le plus économique, c'est lui que nous utilisons. Si, sur ce plan-là, les entreprises de stockage prenaient davantage d'importance, alors la question de la propriété des installations deviendrait elle aussi de plus en plus importante. Si nous avons été le principal utilisateur de ce port c'est qu'indépendamment de la question de savoir qui est le propriétaire de telle ou telle installation, ce qui nous intéresse c'est de transporter le grain le plus économiquement possible.
Le rôle que nous serions appelés à jouer lors de la conclusion de contrats de transport nous permettrait de continuer à utiliser le port de Churchill, dans la mesure où cela restait la destination la moins coûteuse, car l'amélioration des installations en ont fait un point de transit encore plus attractif. Il présente de nombreux atouts.
Le président: Monsieur Fontana, vous avez la parole.
M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Monsieur le président, je voudrais que tout le monde comprenne que si nous ne recevons pas le protocole d'entente avant de procéder à l'examen article par article, il n'y aura pas de projet de loi. Je voudrais que cela soit bien compris.
Le président: Bien. Nous nous en sommes expliqués hier avec le ministre.
M. Joe Fontana: Je sais, mais j'entends des sons de cloche différents: peut-être allons-nous le recevoir cette semaine, peut- être la semaine prochaine et, oui, nous avons bien compris la question des délais, et nous allons le rendre public. Mais, en fin de compte, avec Air Canada, on était tombé d'accord, et le protocole d'entente entre le Bureau de la concurrence avait...
Le président: Joe, nous avons déjà parlé de tout cela.
M. Joe Fontana: Je le sais bien, mais les témoins...
Le président: Non, je sais ce qu'il en est. On leur a expliqué tout cela avant que vous n'arriviez.
M. Joe Fontana: Non. Je viens d'entendre M. Ritter dire qu'il essaierait de nous l'obtenir pour cette semaine, mais nous sommes censés entamer l'examen article par article jeudi. J'affirme qu'en ce qui me concerne, sans protocole d'entente, il n'y aura pas de projet de loi.
Monsieur le président, j'aimerais, si vous le voulez bien, revenir à un principe de base. Au niveau des exportations, le coût des transports est un élément fondamental. Si nous n'agissons pas sur les coûts, et je reconnais qu'un certain nombre d'intervenants pèsent sur l'équation, le Canada ne pourra pas vendre ses produits. Si le Canada ne vend pas ses produits, aucun des intervenants—ni les producteurs, ni les chemins de fer, ni les compagnies céréalières—ne gagneront d'argent. Personne ne profiterait d'une telle situation. Je pense, et je crois que nous sommes d'accord sur cela, qu'il va falloir agir de concert afin d'aboutir au meilleur coût possible pour que le Canada puisse vendre sur les marchés mondiaux des produits à des prix compétitifs.
J'ai lu ce que vous avancez à la page 2 de votre mémoire, où vous dites «Le transport est une question de premier ordre dans l'économie agricole de l'Ouest canadien». Je suis d'accord sur ce point. Vous faites également valoir que «L'objet fondamental de la CCB durant le processus d'examen a consisté à formuler un certain nombre de recommandations destinées à mettre sur pied un système de transport à contrats et concurrentiel qui profite aux agriculteurs».
Je n'ai pas une connaissance approfondie de la Commission canadienne du blé, mais je m'y connais un petit peu en matière de transports. Je cherche à comprendre certaines des bases de ce dossier. Si je comprends bien, le prix des transports pour certains grains ne relevant pas de la commission a en fait baissé. Ça, c'est parce qu'il y a un système d'appels d'offre concurrentiels. Les prix ont également baissé pour certains grains relevant de la commission. Je crois même savoir que les tarifs de transport au Canada sont inférieurs dans la plupart des cas à ceux des États- Unis. Le système doit tout de même fonctionner correctement. Y a-t-il ici des avantages et des facteurs d'efficacité susceptibles de profiter à tous les acteurs? Je pense que oui. Il faut pour cela que tout le monde tente, de concert, d'aboutir à des solutions et parvienne à supprimer les obstacles qui freinent l'adoption d'un système encore plus concurrentiel. La tâche n'est pas mince.
• 1020
D'après ce que j'ai pu recueillir de votre témoignage,
monsieur Ritter et monsieur McCreary, le protocole d'entente
envisage, dans un premier temps, de soumettre 25 p. 100 des grains
relevant de la commission à un système de transport à contrats
concurrentiel, et, dans un deuxième temps, d'atteindre le seuil de
50 p. 100. D'après vous, il n'y aura aucune difficulté pour les
25 p. 100, mais il sera difficile d'atteindre la barre des
50 p. 100. Puis, si j'ai bien compris, le passage, pour reprendre
vos propres mots, à un système de transport à contrats
concurrentiel va vous poser des difficultés. Je me demande
pourquoi, si vous pensez vraiment qu'un système concurrentiel est
dans l'intérêt de tout le monde.
M. Ken Ritter: La question est parfaitement pertinente. Permettez-moi d'y répondre de la manière suivante. D'après moi, si le contrôleur ou un analyste indépendant se penche sur les coûts de manutention et de transport des grains relevant de la commission, et les compare aux coûts applicables à d'autres grains, la comparaison nous est favorable. Nous sommes tout à fait partisans d'un système de manutention et de transport concurrentiel. D'après nous, cela correspond aux intérêts des agriculteurs.
M. Joe Fontana: Je ne sais pas exactement ce qui est prévu dans le protocole d'entente, mais je crois comprendre que nous recherchons une baisse de 18 p. 100 du tarif des chemins de fer et l'idée me semble bonne. S'il existait une manière de faire encore mieux en amenant tout le monde à collaborer afin d'éliminer les obstacles et réduire encore plus le coût aux producteurs, seriez- vous prêts à l'envisager, sans être obnubilés par l'objectif d'une baisse de 18 p. 100 sur deux ou trois ans? Si tous les partenaires pouvaient accroître leur efficacité et réduire encore davantage les coûts—et je suis d'accord avec vous qu'au niveau des chemins de fer il y aurait des choses à faire, notamment pour en améliorer l'accès—seriez-vous d'accord pour ne même pas attendre trois ans?
Le président: Joe, je vous remercie; vous avez utilisé le temps de parole qui vous était imparti. Nous allons maintenant écouter les réponses.
M. Ken Ritter: Un système commercial concurrentiel permettrait tout cela en effet, mais nous ne voulons pas minimiser les difficultés qui peuvent se présenter. Pour la manutention des grains il y aura plusieurs types de contrat entre les chemins de fer et la commission. Il va falloir prévoir toute une série de contrats qui devront être négociés et appliqués. Mais c'est le meilleur outil commercial que nous ayons si nous voulons réduire les coûts. C'est d'ailleurs pour cela que nous avons retenu cette approche.
Le président: Monsieur McCreary.
M. Ian McCreary: Monsieur le président, l'appel d'offre fait partie de cette approche contractuelle. En réponse à M. Fontana, je tiens à dire que nous avons proposé plusieurs approches commerciales, dont le système des appels d'offre. Il est clair que ce système n'est pas la seule manière de répartir les moyens de transport si l'on veut laisser libre cours aux forces du marché et en même temps réduire les coûts.
Lorsque je dis que nous envisageons effectivement de commercialiser intégralement notre approche en matière de transport, je précise que nous avons pris tout à fait au sérieux ce que le gouvernement avait annoncé au mois de mai il y a un an et que nous avons recherché des solutions qui permettraient cela. Les difficultés ne se situent pas, d'après nous, au niveau de la commercialisation et des pressions exercées pour faire baisser les coûts, mais au niveau des appels d'offre qui ne constituent qu'un des moyens d'accroître la concurrence en matière de transport.
Le président: Certains des membres du comité aimeraient savoir quels seraient les autres outils?
M. Ken Ritter: Notre politique tient compte du fait que les agriculteurs veulent avoir voix au chapitre, ce qui veut dire que les producteurs de grain veulent avoir leur mot à dire au niveau de la manutention et du transport de leur grain. Ainsi, lorsque, après la récolte, je décide de transporter mes grains jusqu'au silo, et que j'ai pris mes dispositions au niveau de la manutention et du transport, la commission tiendra compte de la décision de l'agriculteur lors de l'affectation des wagons. Ainsi, ce sera l'agriculteur qui, par ses choix, va activer la concurrence.
Le président: Nous allons maintenant passer la parole à M. Morrison, puis à M. M. Jackson.
M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Monsieur Ritter, si le président me le permet, j'aimerais vous poser quelques questions au sujet du protocole d'entente.
• 1025
Comme vous le savez, les membres du comité et tous les autres
témoins qui ont comparu s'intéressent de très près à la teneur de
ce document. On nous a dit que nous pourrions le voir une fois
signé. N'est-ce pas un peu prendre les choses à rebours? Pourquoi
ce protocole d'entente, même s'il n'est pas encore sous sa forme
définitive, ne pourrait-il pas être présenté au comité, qui aurait
ainsi l'occasion de l'étudier et de faire des commentaires? Donnez
à nos témoins la possibilité de dire leur mot à cet égard. Je sais
qu'il s'agit d'un accord entre vous et le gouvernement, mais nous
y sommes tous intéressés. Nous sommes tous parties prenantes.
Vous avez dit qu'on pourrait l'annexer au projet de loi. Je veux bien. Mais je ne vois pas pourquoi le comité en tant que représentant des citoyens, ne pourrait pas y jeter un coup d'oeil et le commenter.
Que pensez-vous de cela, monsieur Ritter?
Le président: Avant même de recueillir la réponse du témoin, je dois dire, monsieur Morrison, que nous aurons peut-être l'occasion de le faire. Les deux parties à l'accord sont convenues de nous le faire parvenir dans les meilleurs délais. Nous leur avons indiqué que nous voudrions le voir avant demain soir. Nous ne voulons pas attendre jeudi ou vendredi.
M. Lee Morrison: Mais il sera déjà signé. Pourquoi ne pouvons nous pas le voir avant sa signature et donner notre avis?
Le président: Monsieur Ritter.
M. Ken Ritter: En tant qu'organisation indépendante, nous voudrions disposer d'un délai nous permettant d'examiner ce document dans le détail et de voir un peu les incidences qu'il pourrait avoir sur nos activités. Nous ne pouvons pas simplement recevoir un protocole d'entente et y apposer notre signature. Nous aimerions avoir la possibilité de l'étudier, d'étudier son impact sur notre organisation et sur toutes les parties prenantes. Cette approche me semble à la fois prudente et responsable.
Si nous avons bien compris ce que vous avez dit, vous et le président du comité, ce document doit vous parvenir avant demain soir.
Le président: Ce que M. Morrison vous demande, par contre—et c'est ce que je n'avais pas très bien compris—c'est si vous pensez que le comité devrait pouvoir en prendre connaissance avant sa signature.
M. Ken Ritter: Je n'ai guère d'opinion sur ce point. Il s'agit d'un accord entre le ministre, au nom du gouvernement du Canada, et la Commission canadienne du blé. Ce serait plutôt à vous d'en décider.
Le président: Non, vous représentez la Commission canadienne du blé. Nous demandons à la Commission canadienne du blé si elle accepte de transmettre au comité une copie du protocole d'entente avant sa signature.
M. Ken Ritter: J'imagine que oui.
M. Ian McCreary: Le protocole d'entente est un accord issu de négociations et je ne vois pas très bien comment nous pourrions négocier avec le comité. C'est en cela que je ne vois pas très bien comment nous pourrions procéder.
Le président: Eh bien, monsieur Morrison, c'est comme pour le projet de loi sur la restructuration de l'industrie des transports aériens. Il y a eu des négociations entre le gouvernement et un organisme, et ces négociations ont abouti à un accord. Les parties estimaient que, comme il s'agissait d'un accord issu de négociations, le comité ne devrait pas en avoir connaissance.
Monsieur Morrison, avez-vous d'autres questions à poser?
M. Lee Morrison: Non, j'ai dit ce que j'avais à dire. Je pensais que le comité pourrait utilement examiner le document. Une fois qu'il est signé, si nous l'examinons et que nous y trouvons des choses qui ne nous plaisent pas, cela risque de mettre en péril tout le projet de loi, alors que si nous pouvions le voir en avance, peut-être pourrions-nous, avec notre maladresse habituelle, l'améliorer.
Le président: Vous pourriez peut-être demander à la Commission canadienne du blé de vous intégrer à son équipe de négociation.
Monsieur Jackson, vous avez la parole.
M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le président, il est toujours intéressant de prendre connaissance de quelque chose qui est censé être secret. Un protocole d'entente, cela a un certain parfum d'interdit.
J'ai toujours pensé qu'un accord, surtout un accord conclu avec le gouvernement, porte essentiellement sur des questions de locaux, de personnel et, peut-être, de secrets de fabrication. Rien de ce qui est croustillant n'y figure. Un tel document est toujours longuement débattu et je m'interroge parfois quant au temps que nous lui consacrons. On dirait un accord secret et tout le monde voudrait être au courant du secret.
• 1030
J'ai trois questions à poser. La première c'est que les
agriculteurs sont actuellement en proie à de graves difficultés. Un
nombre croissant d'entre eux vont perdre leur exploitation. Je
crois que cela est dû à la concurrence que nous livrent, sur les
marchés mondiaux, la Chine et l'Europe. Certains de nos propres
agriculteurs sont rentrés, en Europe, dans leur pays d'origine,
pour nous livrer concurrence en matière de cultures céréalières.
Une grande part de la situation est due à l'effondrement des prix,
et notamment du prix des produits agricoles. J'aimerais que nos
témoins nous disent comment cela va nous affecter à l'avenir et
l'incidence que cela pourrait avoir sur nos exportations de grain.
Ma seconde question a trait à la privatisation. Je pense que si le gouvernement participe à tout cela, comme les agriculteurs doivent y participer ainsi que la Commission canadienne du blé, c'est en raison de son expertise. Lorsqu'il s'agit de transporter des choses d'un bout à l'autre du pays, rien ne peut se faire sans un gouvernement qui a des compétences nationales et qui est à même d'arbitrer.
Comme vous le savez, la privatisation s'accommode mal de demi- mesures. Si l'idée est de privatiser le système, il faut que le gouvernement s'en retire. Je sais que beaucoup de personnes réclament la privatisation. Ce qui se passe, cependant, c'est qu'on privatise ce qui est rentable et qu'on confie au gouvernement ce qui ne l'est pas.
Troisièmement, nous vivons à l'époque de l'informatique. Existe-t-il des études sur les grandes lignes et les petites lignes de chemin de fer, qui montrent l'emplacement des silos et les trajets empruntés pour le transport des grains, que ce soit par navire ou par route, et qui indiqueraient clairement comment on pourrait utiliser la technologie afin de parvenir à un système plus intégré et plus efficace?
M. Ken Ritter: Je vais tenter de vous répondre.
La première chose dont vous avez parlé c'était du secret entourant le protocole d'entente. Laissez-moi évoquer brièvement la question. Le gouvernement a élaboré une politique en matière de transports. Le protocole d'entente s'inscrit essentiellement dans le cadre de cette politique. Il n'y a pas vraiment de grand secret.
La seconde question concernait l'avenir de notre clientèle. La culture céréalière de l'Ouest du Canada a-t-elle un avenir? Je crois pouvoir dire qu'il y a de l'espoir. Ce qui est important c'est que la Chine négocie actuellement son entrée à l'Organisation mondiale du commerce. La Chine va être un gros client. Le Moyen-Orient a une forte population et un climat très sec et, là aussi, il y a des besoins à satisfaire.
Il y a essentiellement deux choses, la confiance et la sécurité alimentaire. Plus nous avançons dans la mondialisation, moins les pays acheteurs craindront que les pays fournisseurs bloquent leurs exportations alimentaires pour des raisons stratégiques. D'après moi, cela va entraîner une forte augmentation des exportations céréalières.
Ian, allez-y.
M. Ian McCreary: La dernière idée portait sur les nouvelles occasions qu'offrent le commerce électronique et les échanges d'information dans la perspective d'une plus grande efficacité. Dans le cadre de cet examen, c'est-à-dire au cours des 15 derniers mois, nous n'avons cessé d'émettre des propositions à ce sujet. Nous avons constaté avec regret que les premières recommandations du rapport Estey n'allaient pas dans ce sens, mais nous estimons que la multiplication des flux d'information en matière de transport et de manutention devrait permettre d'accroître l'efficacité et il faudra être attentif aux occasions qui se présentent. C'est ce que nous avons recommandé.
Cela répond-il à vos questions?
M. Ovid Jackson: Vous avez parlé des recommandations du rapport Estey. Un compromis est-il intervenu sur ce plan? Si oui, pourquoi y a-t-il eu un compromis susceptible d'affecter les prix et l'affectation de ces ressources?
M. Ian McCreary: Eh bien, je n'ai pas le rapport sous les yeux, mais je crois me souvenir que cette partie du rapport ne se prononçait pas sur ce point. Je crois savoir que plusieurs des intervenants hésitaient à partager ce genre d'information et à en faciliter la dissémination.
• 1035
Nous sommes entrés en fonction lorsque s'achevait cette partie
de la réforme des transports. Cela semble s'être passé il y a
longtemps, mais c'est à cette époque-là que nous avons débuté. Je
n'ai pas d'autres détails quant aux raisons qui les auraient
poussés à ne pas parler de cela.
M. Ovid Jackson: Vous avez été élu et vous suivez cela de près. Peut-être pourriez-vous vous pencher sur cela à l'avenir.
M. Ian McCreary: Oui, comme je l'ai indiqué, nous nous intéressons effectivement à cela et nous l'avons porté à l'attention de notre équipe de gestion, lui demandant d'étudier les occasions qui pourraient se présenter.
Le président: Merci, monsieur Jackson.
Monsieur McCreary, Monsieur Ritter, je tiens à vous remercier de l'exposé que vous avez présenté au Comité permanent des transports au nom de la Commission canadienne du blé. Je vous remercie d'avoir répondu à nos questions.
M. Ken Ritter: Merci, monsieur le président et messieurs les membres du comité.
Le président: Chers collègues, la séance est suspendue jusqu'à 10 h 45 afin de préparer l'arrivée de nos prochains témoins.
Le président: S'il vous plaît. Nous reprenons nos auditions sur les questions inscrites à l'ordre du jour.
Nous allons maintenant entendre les représentants des sociétés céréalières. Messieurs, vous êtes nombreux, et je vais pour cette raison vous demander de vous présenter vous-mêmes aux membres du comité. Commençons par M. Hawkins.
M. Kerry Hawkins (président-directeur général, Cargill Limited): Bonjour. Je m'appelle Kerry Hawkins et je suis président- directeur général de Cargill Limited.
M. Curt Vossen (président-directeur général, James Richardson International Limited): Curt Vossen. Je suis président de James Richardson International.
M. Brian Hayward (directeur général, United Grain Growers): Brian Hayward, directeur général de l'UGG.
M. Ted Allen (président et président du conseil d'administration des United Grain Growers): Ted Allen, président et président du Conseil d'administration des United Grain Growers.
M. Gordon Cummings (directeur général, coopérative Agricore limitée): Gordon Cummings, directeur général, coopérative Agricore limitée.
M. Neil Silver (président de la coopérative Agricore limitée): Neil Silver, président de la coopérative Agricore.
M. Marvin Wiens (président-directeur général, Saskatchewan Wheat Pool): Marvin Wiens, président et président du Conseil d'administration de la Saskatchewan Wheat Pool.
M. Mayo Schmidt (directeur général, Saskatchewan Wheat Pool): Mayo Schmidt, directeur général de la Saskatchewan Wheat Pool.
Le président: Bienvenu, messieurs, devant le Comité permanent des transports. Nous attendons avec intérêt l'exposé que vous allez nous présenter.
Je devrais préciser que le temps nous est compté et que pour cela vous n'aurez pas l'occasion de présenter chacun un exposé. Je vais par conséquent vous demander de choisir un porte-parole qui présentera l'exposé en votre nom à tous, puis nous passerons aux questions.
Je demande aux membres du comité, lorsqu'ils posent une question, de l'adresser à une personne précise. Si vous cherchez à obtenir une réponse de chacun de ces messieurs, nous ne pourrons pas aboutir. Je vous demande de bien tenir compte de cela.
Le porte-parole de nos témoins sera M. Cummings. Monsieur Cummings, vous avez la parole.
M. Gordon Cummings: Monsieur le président, au lieu d'avoir cinq compagnies présentant chacune un exposé, nous avons tenté d'économiser un peu de temps. Nos trois présidents vont donc intervenir dans un premier temps, puis deux des cinq directeurs généraux prendront la relève.
Nous nous excusons. Hier, nous avons transmis un mémoire par messagerie. Le document semble s'être perdu. Nous devrions le recevoir un peu plus tard. Nous tenons aussi à nous excuser du fait que nous n'avons pas eu le temps d'en préparer une version française.
Je vais maintenant passer la parole à M. Ted Allen, président de United Grain Growers, un des trois agriculteurs qui se trouvent parmi nous.
Le président: Messieurs, vous disposez d'environ dix minutes. Merci.
M. Ted Allen: L'UGG se félicite de cette occasion d'exprimer son point de vue sur le projet de loi C-34, une loi modifiant la Loi sur les transports au Canada.
L'UGG est l'une des plus anciennes et plus importantes entreprises agroalimentaires de l'ouest du Canada. Nos débuts remontent à l'année 1906 lorsque fut créée une coopérative agricole. En 1992, plus de 95 p. 100 de nos délégués agricoles ont avalisé notre transformation en société commerciale par actions. Depuis 1993, les actions de l'UGG sont cotées à la bourse de Toronto. Sur les 15 membres de notre conseil d'administration, 12 sont élus par les agriculteurs. Les orientations de la société continuent à être fixées par nos délégués agricoles lors de notre assemblée annuelle. Les résolutions en ce domaine sont débattues en public.
En novembre 1999, nos délégués agricoles se sont, à la très grande majorité, déclarés en faveur du rapport Estey, estimant que ce document devait servir de base à la réforme du système de transport des grains de l'Ouest. Nous relevons que le gouvernement a effectivement retenu certaines des recommandations de ce rapport. Il convient, cependant, de rappeler que le juge Estey avait bien dit que ses recommandations formaient un tout et que c'est en tant que tout qu'elles devraient être adoptées.
En ce qui concerne le plafonnement du revenu, l'UGG y est favorable. Ce plafonnement procurera aux agriculteurs une réduction sensible des frais de transport, tout en donnant aux expéditeurs et aux transporteurs la possibilité d'offrir de nouvelles conditions de service.
Cela dit, nous voudrions éviter que les chemins de fer pratiquent une discrimination des prix fondée sur la valeur des marchandises transportées. Nous craignons que les chemins de fer décident de faire payer plus cher le transport de marchandises plus coûteuses simplement parce qu'ils savent qu'ils pourront obtenir le prix qu'ils réclament. Si le transport ferroviaire était vraiment concurrentiel, les tarifs seraient liés aux frais de transport d'une marchandise donnée et non pas à la valeur de celle-ci. Il en va ainsi du transport des céréales par route et il devrait également en être ainsi dans les chemins de fer. Nous ne voudrions pas que les chemins de fer imposent, pour le transport des marchandises chères, un tarif supérieur à celui du transport des marchandises de moindre valeur.
En ce qui concerne l'arbitrage au niveau des offres finales, le gouvernement a déposé plusieurs amendements conformes aux conclusions du rapport Estey. Nous sommes partisans de l'amendement voulant que les expéditeurs bénéficient, de la part des transporteurs, d'une obligeance et d'une égalité plus grandes. Nous rappelons que l'UGG a formulé une recommandation en ce sens il y a plusieurs années, à l'époque où des modifications étaient apportées à la Loi sur les transports au Canada, et nous sommes par conséquent heureux que le gouvernement fédéral ait maintenant décidé d'adopter une telle disposition.
Il me semble important, enfin, d'insister sur le fait que ce texte de loi devrait reconnaître l'existence d'un rapport symbiotique entre les agriculteurs, les sociétés céréalières et les chemins de fer. La santé de l'un de ces acteurs exige la santé des deux autres tant il est vrai que la force d'une chaîne dépend entièrement du maillon le plus faible.
Je vous remercie de votre attention.
M. Gordon Cummings: La parole est maintenant à M. Silver.
M. Neil Silver: Monsieur le président, nous sommes ici en tant que représentants d'un groupe de compagnies céréalières. Nous est-il, par conséquent, possible de réunir notre temps de parole et de prendre successivement la parole dans le cadre d'un exposé unique?
Le président: Oui.
M. Neil Silver: Je vous remercie de nous avoir invité à prendre la parole aujourd'hui sur cette question importante.
La première partie de l'exposé sera assurée par M. Wiens et moi-même. Nous sommes des présidents élus, des agriculteurs élus par d'autres agriculteurs qui possèdent et contrôlent nos entreprises céréalières. C'est pour cela que nous comprenons le lien essentiel entre la bonne santé de nos entreprises et la prospérité des agriculteurs.
Nous nous partageons, entre Agricore et la Saskatchewan Wheat Pool, plus de 50 p. 100 de la capacité de manutention des céréales dans l'Ouest du Canada. Nos propriétaires sont les dizaines de milliers d'agriculteurs que nous regroupons, et nous prenons la parole devant vous dans l'intérêt de tous nos adhérents. Les agriculteurs de l'Ouest du Canada attendent avec inquiétude les améliorations qui doivent être apportées aux systèmes de manutention et de transport des grains.
Les agriculteurs risquent gros. Il n'est pas nécessaire de remonter très loin en arrière pour comprendre pourquoi nous sommes ici. L'exemple le plus récent est la panne du système de transport pendant l'hiver de 1996. Le système a cessé de fonctionner cet hiver-là. Il est également tombé en panne en 1993-1994.
• 1055
Ces ruptures ont coûté aux agriculteurs des centaines de
millions de dollars en ventes et en marchés perdus et ont en outre
porté atteinte à la réputation du Canada en tant que fournisseur
fiable de céréales et d'oléagineux de qualité. C'est d'ailleurs
pour cela que nous sommes ici aujourd'hui. Tout le monde savait que
le système avait besoin d'être remis en état. On ne pouvait plus
laisser les choses aller. Nous sommes heureux que le gouvernement
ait décidé de prendre des mesures en ce sens.
Comme vous le savez, depuis plusieurs années déjà, les décideurs n'arrivaient pas à trouver une solution au problème des transports. Aujourd'hui encore, malgré l'étude approfondie du juge Estey et les consultations récemment menées par Arthur Kroeger, l'industrie céréalière de l'Ouest du Canada ne s'entend pas sur les solutions à adopter.
La seule chose—et c'est peut-être la plus importante—dont tout le monde convient c'est du besoin d'instaurer le système le plus efficace et le plus fiable du monde, ce qui est d'ailleurs dans l'intérêt des producteurs. Nous estimons qu'il faut instituer un système de manutention et de transport fondé sur la transparence et les règles ordinaires du commerce afin d'offrir aux agriculteurs un système fiable, efficace et plus économique.
Beaucoup de chiffres ont été cités quant aux avantages que les agriculteurs retireraient d'un système commercial par contraste avec un système soumis à une réglementation étatique. Au bas mot, cela procurerait aux agriculteurs des économies annuelles de plus de 280 millions de dollars, dont 178 millions en raison du plafonnement des revenus. Il s'agit là d'économies qu'ils pourraient réaliser chaque année. Voilà la somme qui pourrait être économisée en accroissant l'efficacité du système actuel. Ce serait un avantage considérable pour les agriculteurs et il conviendrait de leur obtenir sans plus tarder.
Il nous incombe maintenant de réfléchir collectivement aux mesures qui nous sont proposées mais, avant cela, je voudrais attirer l'attention des membres du comité sur le fait que ce projet de loi ne constitue qu'un élément du processus de commercialisation qu'il convient de mettre en oeuvre dans l'intérêt durable des agriculteurs. Il y a tout un autre pan comportant les arrangements commerciaux qui devront être conclus. Nous sommes ici pour vous demander de veiller aussi à cet aspect-là du dossier. L'abaissement des coûts que ces nouvelles mesures devraient procurer aux agriculteurs en accroissant l'efficacité, l'imputabilité et la fiabilité du système va dépendre entièrement des réformes permettant de soumettre les autres pans du système aux règles normales du commerce.
Je parle notamment des relations commerciales qui vont devoir être développées entre les compagnies céréalières, la Commission canadienne du blé et les chemins de fer. Nous parlerons de cela plus en détail à la fin de l'exposé.
En ce qui concerne le projet de loi C-34, nous tenons à dire que nous en sommes de manière générale partisans. Nous estimons aussi, cependant, que certaines de ses dispositions pourraient être améliorées. Nous reconnaissons que le comité a eu très peu de temps et que les gains que les nouvelles mesures proposées procureront dans l'immédiat aux agriculteurs suffisent à justifier l'adoption sans retard de ce projet de loi. Cela dit, étant donné que nous avons l'occasion de modifier les dispositions du projet de loi sans retarder indûment le processus, il y a quelques suggestions que nous aimerions faire.
Nous voudrions maintenant nous livrer à une analyse des dispositions du projet de loi, en souligner les points forts ainsi que les aspects qui pourraient être améliorés.
Je passe maintenant la parole à M. Wiens qui va prononcer cette partie de l'exposé.
M. Marvin Wiens: Merci, Neil et merci à vous monsieur le président, pour cette occasion de comparaître devant votre comité.
Question de me présenter très brièvement, sachez que je suis président et administrateur délégué élu du Saskatchewan Wheat Pool, mais que je suis aussi exploitant agricole spécialisé dans la culture de céréales et d'oléagineux, dans le sud de la Saskatchewan, avec ma femme et ma famille. En fait, nous cultivons énormément de produits différents.
Ce projet de loi comporte quatre grands aspects: les embranchements, le plafonnement des revenus, la rationalisation de l'arbitrage des propositions finales et un nouveau système de surveillance.
Les dispositions proposées relativement aux embranchements permettront de parvenir à un équilibre raisonnable: les compagnies de chemin de fer pourront abandonner des embranchements qui ne sont pas économiques et d'autres parties pourront acheter ou d'acquérir de toute autre façon les embranchements susceptibles d'être viables pour certaines opérations. Ce faisant, nous serons certains que les embranchements qui ne sont absolument pas rentables seront retirés du service. Les agriculteurs y verront une démarche positive, étant donné que les embranchements dont ils dépendent pour faire transporter leur grain ne seront pas abandonnés sans raison.
• 1100
Le plafonnement des revenus permettra aux agriculteurs de
réduire leurs coûts de transport, du moins à court terme, ce dont
ils ont grandement besoin et qu'ils apprécieront beaucoup. Comme on
vous l'a dit plus tôt, cette disposition permettra de réduire les
coûts de transport d'environ 178 millions de dollars par rapport à
ce que les agriculteurs auraient eu à payer lors de la prochaine
campagne agricole. Nous pensons que les forces commerciales en
présence suffiront à garantir le partage des futurs gains de
productivité.
Par ailleurs, le fait de passer d'une limitation des tarifs au plafonnement des revenus donnera aux sociétés de chemin de fer la souplesse voulue pour rétablir les tarifs qui les intéressent et pour encourager l'utilisation efficace du réseau ferroviaire de même que l'apparition de nouveaux services commerciaux dans ce domaine.
Nous apprécierions beaucoup que les pénalités devant être imposées en cas de dépassement de la limite de revenu soient rendues publics avant l'adoption de la loi.
Nous apprécions beaucoup le libellé de ce projet de loi relativement à l'amélioration et à la rationalisation du recours à l'arbitrage. Il s'agit là d'un mécanisme essentiel sur un marché véritablement commercial, surtout quand on est en présence d'intervenants qui n'ont pas tous le même poids. Grâce à cette disposition, nous aurons la garantie que les éventuels différends seront traités de façon immédiate et absolue. En outre, elle contribuera beaucoup à faire en sorte que les droits et les obligations des parties à un contrat, entre expéditeurs et sociétés ferroviaires, soient respectées et appliquées. Tous les intervenants se réjouissent de cette sauvegarde synonyme de règles du jeu équitables et d'efficacité sur ce marché. Les agriculteurs bénéficieront d'un règlement des différends plus rapide et plus juste, notamment en ce qui a trait au service. Cette partie de la loi envisagée permettra de réels progrès sur ce plan.
Je terminerai en disant un mot de la surveillance. Nous tenons à vous faire part de notre inquiétude à cet égard. Les renseignements exigés dans le cadre de cette initiative risquent d'être très coûteux pour les sociétés céréalières et ce sont finalement les agriculteurs qui en feront les frais sous la forme d'une augmentation des droits imposés par ces sociétés. Nous comprenons bien que le fait de savoir comment se porte le système et comment on pourrait l'améliorer dans l'avenir présente des avantages. Toutefois, donnez-nous la possibilité de vous dire comment on pourrait surveiller ce système, quels indicateurs de rendement on pourrait retenir et comment on pourrait les interpréter.
C'était là nos commentaires sur le projet de loi lui-même. Nous accueillons fort bien les changements que vous entendez apporter à la Loi sur les transports au Canada, car nous y voyons une tentative visant à commercialiser davantage et à améliorer le système de transport des grains. Vous vous en souviendrez, au début de cette présentation, nous avons parlé de la nécessité de commercialiser tout le système de transport et de manutention des grains, et des avantages importants que les agriculteurs pourraient en tirer. Ces avantages seront fonction de la concurrence que se livreront les sociétés ferroviaires. Nous sommes conscients de l'importance que le gouvernement accorde à ce dossier, puisqu'il a accéléré l'étude de la concurrence et de la question de l'accès concurrentiel, à l'occasion de l'examen de la LTC.
Nous tenons à faire remarquer à votre comité que cette mesure législative ne traite de la commercialisation du système que par le biais du plafonnement du revenu. Bien que cette disposition soit très importante—puisqu'elle va permettre aux agriculteurs de voir diminuer leurs coûts de transport et que les sociétés ferroviaires seront davantage en mesure d'offrir des forfaits—à elle seule, elle est loin d'apporter une réponse sérieuse aux problèmes auxquels nous sommes confrontés. En fait, les exploitants agricoles risquent de perdre les avantages qu'ils avaient acquis et nous pourrions être confrontés à un autre écroulement désastreux du système comme en 1996-1997.
La Loi sur les transports n'est qu'un élément de la solution, et nous sommes bien conscients qu'il faudra songer à autre chose. Cependant, nous pensons que cette étape sera déterminante pour que les céréaliculteurs disposent d'un système de transport et de manutention des grains qui soit fiable, peu coûteux et efficace. Nous sommes convaincus que les agriculteurs pourront récupérer 100 millions de dollars de plus par an si nous parvenons à instaurer des relations commerciales efficaces entre la Commission canadienne du blé et les sociétés céréalières. Ce faisant, nous aurions la garantie que notre système de transport et de manutention des grains travaille soit le plus efficace possible pour les agriculteurs.
Nous sommes conscients du peu de temps qui nous est donné et de votre désir d'adopter cette loi à temps pour la prochaine campagne agricole. Nous sommes d'accord avec cela. Cependant, vous devez savoir une chose. Il reste encore à négocier les relations commerciales entre la Commission canadienne du blé et les sociétés céréalières, malgré les multiples requêtes formulées en ce sens par les sociétés céréalières au cours des trois dernières semaines.
Comme nous le disions au début, ce texte de loi nous permettra de régler les problèmes chroniques qui nous affectent, à condition que les négociations avec la Commission canadienne du blé aboutissent. Il est essentiel que ces négociations se fassent de bonne foi, dans le respect des principes commerciaux, et qu'on puisse se rabattre sur un mécanisme d'arbitrage pour régler les questions qui demeureront en suspens. Sinon, les agriculteurs y perdront. Nous ne réglerons rien, les changements législatifs que vous envisagez perdront une grande partie de leur efficacité et nous nous retrouverons de nouveau autour de cette table quand le système se sera écroulé. Cela, c'est inacceptable.
• 1105
Je vais maintenant céder la parole aux pdg des cinq plus
grandes sociétés céréalières du Canada, qui vont vous parler un peu
plus que je ne l'ai fait de la nécessité de pousser la
commercialisation du système de transport et de manutention des
grains.
Le président: Ce sera notre dernière présentation, monsieur Cummings?
M. Gordon Cummings: Nous n'avons que deux pdg et non cinq. M. Hayward parlera le premier et il sera suivi par M. Vossen, si vous nous le permettez.
Le président: Merci.
M. Gordon Cummings: Brian.
M. Brian Hayward: Merci, monsieur le président.
Les agriculteurs canadiens et nos sociétés poursuivent actuellement le même objectif critique, qui est de s'assurer que les changements apportés à notre système soient les plus efficaces possible et permettent aux agriculteurs de réaliser des économies à long terme.
Nous nous réjouissons d'avoir été invités à comparaître devant votre comité pour parler librement de cette mesure législative. Nous estimons que notre participation est non seulement pertinente, mais également nécessaire pour s'assurer que l'industrie canadienne du grain pourra retrouver et améliorer sa position concurrentielle sur les marchés internationaux.
Le groupe que vous avez devant vous représente des sociétés de manutention et de marchandisage de grain qui mettent en oeuvre les moyens logistiques et l'infrastructure nécessaires au traitement de plus de 85 p. 100 des grains de l'Ouest, qui transitent des prairies à des utilisateurs ultimes ailleurs au Canada ou à l'étranger. Les entreprises que nous représentons sont, comme vous le savez, des coopératives d'agriculteurs, des sociétés publiques et des entreprises privées.
Les problèmes chroniques dont est affecté le système de transport ont porté atteinte à la réputation de fournisseur fiable de céréales et d'oléagineux dont le Canada jouissait sur les marchés internationaux. Nos clients traditionnels ont commencé à s'approvisionner de préférence auprès d'autres pays.
Dans le milieu des années 90, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire de l'époque, ainsi que les principaux intervenants de l'industrie des transports et de la manutention du grain, ont formulé une vision pour cette industrie. Celle-ci prévoyait que le Canada disposerait du système le plus efficace et le plus rentable de transport des grains dans le monde, jusqu'aux clients ultimes.
Eh bien, mesdames et messieurs, l'industrie céréalière a relevé le défi et elle a bâti le système en question. Notre groupe de cinq sociétés présentes aujourd'hui a investi plus de 1 milliard de dollars dans de nouvelles installations et technologies, de même que dans des services. Cet investissement nous permettra d'améliorer notre performance, de répondre aux besoins de nos clients ultimes et d'améliorer le rendement des producteurs.
Cependant, l'amélioration de l'efficacité des systèmes ne dépend pas de nos actifs, mais plutôt de la façon dont ils sont utilisés, c'est-à-dire de l'environnement commercial dans lequel nous évoluons. Notre défi à nous tous consiste à optimiser les économies possibles par une réforme du système.
Quels sont, me demanderez-vous, les éléments essentiels à l'optimisation des possibilités s'offrant à nous. Tout d'abord, il convient de jeter les bases d'un environnement commercial au sein duquel évoluent tous les intervenants. L'industrie du grain, qui a fait l'objet de trop nombreuses études pour qu'on les compte, évolue dans un milieu fort complexe. On dénombre énormément de participants, notamment les agriculteurs, les commissions du grain, les sociétés céréalières, les marchandiseurs, les compagnies ferroviaires et les armateurs maritimes. Dans ce milieu complexe, il est essentiel que chacun collabore et fasse preuve de créativité dans ses relations avec les autres pour créer un système lissé permettant d'écouler nos céréales et nos oléagineux vers nos clients.
Comme on vous l'a dit plus tôt, nous sommes généralement d'accord avec les mesures proposées dans cette loi pour améliorer le rendement des exploitations agricoles canadiennes. Nous sommes d'accord avec le plafonnement des revenus et donc avec l'allégement des charges à court terme pour les céréaliculteurs. Nous sommes d'accord avec l'argent investi dans les routes rurales, car il permet d'aider les municipalités à faire face à l'évolution de la demande sur ce plan. Nous sommes d'accord avec la notion d'arbitrage efficace ainsi qu'avec un système facilitant la fermeture des lignes d'embranchement qui ne sont pas rentables, et permettant le transfert des lignes viables à d'autres exploitants en mesure de prouver qu'ils peuvent, sans subvention de la part du gouvernement ni du système de manutention, offrir aux agriculteurs un service amélioré et plus rentable.
Cependant, il est également possible de valoriser davantage le système dans son ensemble, pour le bénéfice des céréaliculteurs, sans qu'il en coûte rien au contribuable canadien. Cette valeur à extraire se trouve dans le système lui-même. D'après certaines évaluations, que vous connaissez bien, il serait question de 100 millions de dollars. On pourrait parvenir à ce gain de productivité en améliorant la commercialisation et en donnant aux sociétés céréalières la possibilité d'optimiser l'exploitation de leurs actifs, pour le plus grand bien de notre industrie, des producteurs et des consommateurs. Cela est d'ailleurs confirmé par la proposition gouvernementale que vous êtes en train d'examiner, puisqu'il est question, tout d'abord, de confier au secteur privé et sur une base commerciale, 25 p. 100 du marché que la Commission canadienne du blé confie aux ports, ce pourcentage devant être porté à 50 p. 100 d'ici 2003.
• 1110
On peut se réjouir de l'unanimité des intervenants qui
estiment que la commercialisation est nécessaire à la réalisation
des gains d'efficacité. Malheureusement, et je vous l'avoue bien
franchement, toutes les années que nous avons consacrées à la
formulation de ce projet de loi ont sérieusement entamé
l'enthousiasme dont les parties devront faire preuve pour entrer
dans les détails de la façon dont notre système devra fonctionner.
Le processus semble avoir incité les parties à la polarisation,
plutôt qu'à la participation à des négociations véritables.
Aujourd'hui, nous sommes venus faire part de notre conviction au Comité permanent des transports: votre rôle ne se limite pas à la rédaction d'un projet de loi. Dans des circonstances normales, vous devriez revoir les amendements proposés à la Loi sur les transports ainsi qu'à la loi sur la Commission canadienne du blé. Cependant, il a été décidé d'opter pour un système davantage commercial, notamment par le truchement d'un mémoire d'entente.
Le Comité des transports doit donc prendre en compte l'ensemble des réformes envisagées, c'est-à-dire celles qui traitent des relations commerciales, dans le cadre de ce processus, et doit veiller à ce qu'elles soient énoncées et mises en oeuvre de façon à optimiser les retombées pour les céréaliculteurs et pour notre industrie dans son entier. À cette fin, nous vous demandons votre appui pour rebâtir la fondation sur laquelle nous pourrons appuyer notre vision d'avenir, vision qui est d'acheminer les grains du producteur au consommateur mieux que dans n'importe quel autre pays.
Nous y parviendrons par le biais d'un dialogue créatif et franc, de même que par des négociations justes et équilibrées entre tous les intervenants. Ce n'est que grâce à des négociations de bonne foi qu'il nous sera possible de réaliser des gains d'efficacité sur le plan de la commercialisation. Sinon, les avantages associés aux autres réformes prévues dans ce texte de loi seront sans effet pour ne pas dire qu'elles auront un impact négatif.
Dans un environnement commercial normal, aucun participant ne peut imposer son diktat aux autres. Or, d'après cette mesure législative, tous les intervenants ne sont pas traités de façon équitable, en fonction de règles du jeu qui sont les mêmes pour tout le monde. Pire encore, contrairement à ce qui se passe dans d'autres milieux commerciaux, il n'existe aucun organisme indépendant auprès de qui demander une interprétation des règles, ni aucun processus d'arbitrage permettant de régler les différends dans le cas des grains régis par la CCB.
Il est inacceptable d'essayer d'entreprendre des négociations commerciales avec un interlocuteur qui jouit d'un monopole légiféré sans qu'il soit possible de recourir à l'arbitrage en cas de désaccord. Comme vous le savez, la Commission canadienne du blé a un monopole légiféré et la loi qui la régit comporte des dispositions lui permettant d'imposer aux compagnies ferroviaires et aux sociétés céréalières de traiter et d'acheminer ses grains de préférence à d'autres.
Dans ces conditions, on ne peut parler de contexte commercial. Nous ne remettons pas en question l'intégrité de la commission actuelle, ni de ses employés, mais nous tenons simplement à souligner que ce texte de loi va maintenir ce déséquilibre dans un avenir prévisible. MM. Estey et Kroeger se sont rendu compte de ce déséquilibre et ont proposé d'apporter des changements à la Loi sur la CCB, pour niveler le terrain de jeu. Pour des raisons que lui seul pourra nous expliquer, le gouvernement n'a pas choisi de revenir sur la Loi sur la Commission canadienne du blé pour en modifier certaines dispositions, comme l'alinéa 28k) qui trouve sa justification dans des événements remontant au temps de la guerre.
M. Goodale a admis ce déséquilibre quand il a déclaré que le mémoire d'entente comprendrait une clause précisant que la Commission canadienne du blé devra d'abord justifier sa position pour invoquer certaines des mesures comprises dans la loi la régissant, comme l'alinéa 28k). Cependant, cela ne suffit pas. Il faut adopter un processus susceptible de créer un équilibre dans un système qui soit davantage commercial. Ce déséquilibre ne sera pas corrigé par le simple fait que la Commission canadienne du blé justifie ces mesures par écrit. À l'instar du mécanisme de règlement des différends par arbitrage, entre les expéditeurs et les compagnies ferroviaires jouissant du duopole, il est à la fois logique et essentiel de pouvoir se rabattre sur un système d'arbitrage exécutoire dans le cas où les sociétés céréalières, indépendamment ou collectivement, ne parviendraient pas à résoudre leurs différends commerciaux avec la Commission canadienne du blé, qui jouit d'un statut de monopole.
Le président: Monsieur Hayward, nous allons devoir vous interrompre. Il nous reste environ une minute pour conclure avec ce groupe.
Messieurs, je vous laisse le soin de décider comment nous allons procéder.
M. Brian Hayward: Eh bien, très franchement...
M. Gordon Cummings: Pourquoi ne pas nous permettre d'aller jusqu'à la conclusion? J'avais cru comprendre que nous aurions cinq créneaux de huit minutes chacun, pour un total de 40 minutes. Nous sommes bien en deçà.
Le président: Non. Nous nous sommes mal compris alors, monsieur Cummings. Quand vous comparaissez en tant que groupe, vous disposez en général de huit à dix minutes pour tout le groupe. Jusqu'ici, vous avez utilisé 25 minutes.
M. Gordon Cummings: Parfait.
Le président: Je vous donne une minute pour conclure afin que nous ayons le temps de vous poser des questions.
M. Gordon Cummings: Alors vas-y, Curt!
M. Brian Hayward: Je vais prendre deux secondes, après quoi je rendrai la parole à Curt.
Nous avons demandé au gouvernement de participer à la formulation du mémoire d'entente, parce que nous estimons qu'il faut s'appuyer sur un processus équilibré pour énoncer les lignes directrices commerciales et fixer les règles du jeu, avant d'instaurer un système commercial. On retrouve ici deux éléments clés. D'abord, il faut pouvoir compter sur un processus d'arbitrage, puis il faut nous reconnaître le statut d'expéditeur de grain.
• 1115
Le seul moyen de nous doter d'un système responsable sera de
compter sur toute la gamme des outils de gestion, pour fonctionner
et prendre des décisions. Si l'on amoindrit cet aspect, on
amoindrira automatiquement le niveau de responsabilité.
Ce que je voulais dire, c'est que nous avons essayé d'être partie à la rédaction du mémoire d'entente, mais en vain. Nous voulons d'un système d'arbitrage et nous voulons être reconnus comme étant les expéditeurs de référence.
M. Curt Vossen: Nous devons prendre part à la discussion et à la négociation sur le mémoire d'entente. Je pense d'ailleurs que M. Ritter a bien souligné, dans sa conclusion, qu'il serait tout à fait inapproprié qu'un organisme commercial comme la Commission canadienne du blé signe un mémoire d'entente sans y avoir réfléchi et sans en avoir envisagé les conséquences sur ses activités.
Nous nous trouvons essentiellement dans la même situation que la Commission. Nous demandons à bénéficier du même régime, à participer activement—pour que le mémoire d'entente aboutisse et que la loi qui en découle aboutisse également—aux négociations, à la discussion ainsi qu'à la formulation du mémoire d'entente, parce que dans ce cas en particulier, c'est au niveau du détail que les choses accrochent.
Le président: Messieurs, je vous remercie beaucoup pour vos excellentes présentations. Nous apprécions beaucoup votre participation.
Nous allons tout de suite passer aux questions en commençant par M. Bailey.
M. Roy Bailey: Merci, monsieur le président.
Il convient, je crois de préciser, que les témoins que nous avons devant nous représentent des sociétés qui traitent plus de 90 p. 100—et je ne crois pas me tromper en disant cela—de toutes les céréales, oléagineux et autres grains. Nous devons donc admettre qu'ils ont un rôle très important à jouer.
Hier, en Chambre, M. Goodale qui est responsable de la Commission canadienne du blé, a dit qu'il s'engageait à consulter les principaux intervenants. Alors dites-moi—et j'ai quelques petites questions très brèves à vous poser—si vous n'êtes pas un des principaux intervenants, j'aimerais savoir qui l'est. Par ailleurs, si vous en êtes un, alors je suppose que vous êtes au courant de ce qui se passe avec le mémoire d'entente et avec l'organisme de surveillance. Je sais bien que vous ne l'êtes pas, mais je veux vous faire réagir à cet égard.
Deuxièmement, j'aimerais que quelqu'un me donne une définition, pour notre comité, de ce que vous entendez par «produit de qualité supérieure». Je pense savoir ce dont il est question. Par ailleurs, il faudrait nous expliquer pourquoi les sociétés ferroviaires pourraient exiger plus cher pour le transport de ce genre de produits.
Troisièmement, et n'importe lequel d'entre vous pourra répondre à cette question, vous avez employé des termes—vous n'êtes pas les premiers à le faire—comme «efficace», «fiable» et ainsi de suite pour décrire le système de transport. Quelqu'un d'autre, tout comme vous, a mentionné qu'il serait possible d'économiser au moins 100 millions de dollars. Précisons bien que ces 100 millions d'économies supplémentaires ne découleront pas de ce qui est proposé dans le projet de loi C-34, mais alors que proposez-vous et veuillez être un peu plus précis à ce sujet?
Enfin, s'agissant des lignes secondaires—je saisis à cet égard une chance que j'attends depuis longtemps—on peut dire que vous êtes largement responsables du fait qu'elles se retrouvent maintenant sur le marché parce que vous avez fermé des élévateurs. Ma question est celle-ci. Puisque vos sociétés ont fermé des élévateurs à grain le long des lignes secondaires, parce que vous réalisez davantage de bénéfices dans les grands centres, qu'est-ce qui vous permet de penser que ces mêmes lignes secondaires, passant à côté d'élévateurs fermés, pourraient être rentables maintenant, alors qu'elles ne l'étaient pas avant, ou devrais-je dire qu'elles l'étaient moins?
Voilà mes quatre questions, monsieur le président.
Le président: Monsieur Cummings.
M. Gordon Cummings: Pour procéder dans l'ordre, M. Vossen pourrait commencer par répondre à la première question sur le mémoire d'entente.
M. Curt Vossen: Le problème, ici, c'est que nous ne savons absolument rien du contenu du mémoire d'entente. Nous avons demandé au ministre de nous admettre dans le processus. Nous nous sommes rendu disponibles à très court préavis et avons indiqué que nous étions prêts à collaborer pleinement avec la Commission canadienne du blé et avec le gouvernement pour rédiger et négocier ce mémoire d'entente. Jusqu'ici, personne ne nous a répondu sur cet aspect. Cela nous inquiète beaucoup, parce que nous pensons que ce mémoire est déterminant pour la commercialisation.
Nous devons être bien clairs. Le fait de soumettre 25 p. 100 du marché au processus d'appel d'offres ne change rien dans la façon dont les wagons vont être distribués. Ce n'est pas de la commercialisation. Cela n'est pas différent de ce qui s'est fait dans le passé.
M. Gordon Cummings: Monsieur Allen.
M. Ted Allen: Pour ce qui est de la valeur du produit, voici ce qui nous inquiète. Si le canola se vend 400 $ la tonne et que l'orge fourragère en vaut 100 $ la tonne, d'après le scénario actuel, les compagnies ferroviaires pourraient imposer un tarif beaucoup plus élevé pour transporter le canola, simplement parce que le produit a une plus grande valeur et toutes autres choses étant égales par ailleurs. Nous pensons que cela se ramène essentiellement à de l'interfinancement.
M. Roy Bailey: Si nous analysons le fait que...
Le président: Monsieur Bailey, vous avez déjà posé quatre questions.
M. Gordon Cummings: Monsieur Silver va répondre à la troisième.
M. Neil Silver: Je vais essayer de vous expliquer un peu plus précisément comment nous pensons extraire 100 millions de dollars supplémentaires du système.
Avant tout, il faut comprendre que nous avons effectué beaucoup de recherches sur tout ce scénario au cours de l'hiver dernier, quand notre organisation a été saisie de ce dossier. Nous avons testé ce scénario à l'échelle du pays auprès de propriétaires membres de notre organisation, c'est-à-dire d'agriculteurs de l'Ouest.
Tout d'abord, nous allons tirer davantage du marché. Grâce à nos nouvelles installations qui sont en mesure de charger des trains entiers en peu de temps, nous pensons qu'il sera possible de faire venir les trains très rapidement des prairies vers les élévateurs terminus et de les renvoyer dans les prairies, dans un délai aussi court que sept jours. Ce faisant, on rentabilise énormément les installations.
Il est également possible de réaliser d'autres gains en profitant des «marchés à plus-value». C'est dans les mois suivant une récolte qu'on peut obtenir le prix maximum pour nos produits et nous nous sommes dit qu'en augmentant la capacité du système, grâce à des trains qui feraient la navette à cette époque, il nous serait possible, d'après nos calculs, d'obtenir environ 25 $ de plus à la tonne. Si nous y parvenions, eh bien les agriculteurs récupéreraient alors beaucoup d'argent.
Le deuxième élément de tout notre raisonnement tient au resserrement de la concurrence, surtout dans le genre de situations où les compagnies d'élévateurs facturent les agriculteurs pour le traitement des grains. Pour conclure des accords contractuels de commercialisation dans un système d'appel d'offres, il faut dire que nous serions d'abord en situation de concurrence par rapport à la Commission canadienne du blé. Deuxièmement, nous soumissionnerions les uns contre les autres pour attirer les céréaliculteurs vers nos installations respectives. Ce faisant, nous assisterions à une diminution marquée des tarifs ce qui nous permettrait de dégager 25 autres millions de dollars.
Mais c'est sans doute sur le plan de l'entreposage que les gains seraient les plus intéressants. Dans un système fonctionnant à la manière dont nous l'imaginons, le grain serait livré de façon ordonnée et il n'arriverait que lorsqu'un navire serait à quai ou qu'une vente aurait été conclue. Ainsi, on économiserait énormément en frais d'entreposage, frais qui constituent l'essentiel des coûts actuels et qui se chiffrent à quelque 80 millions de dollars. Nous nous sommes dit que nous réaliserions 50 p. 100 d'économie, soit 40 millions de dollars, dont les céréaliculteurs bénéficieraient directement.
De plus, si le système fonctionnait effectivement comme nous l'envisageons, il n'y aurait plus de redevance de stationnement, ce qui est très courant dans notre domaine. À ce titre, nous pourrions économiser 12 à 13 millions de dollars.
Voilà donc les avantages que nous envisageons, mais que nous risquons de ne pas pouvoir pleinement réaliser. Voilà pourquoi nous aimerions pouvoir disposer d'un processus d'arbitrage qui nous permettrait de régler les éventuels problèmes.
Le président: Merci.
M. Gordon Cummings: Mayo.
M. Mayo Schmidt: Je m'appelle Mayo Schmidt et je suis pdg de la Saskatchewan Wheat Pool.
Nous fondant sur l'intention déclarée du gouvernement de commercialiser le système et sur le fait que les céréaliculteurs préfèrent livrer leur grain à des élévateurs terminus à haut rendement, qui leur rapportent plus, notre industrie a investi 1,2 milliard de dollars au cours des trois dernières années dans la modernisation de notre système afin de profiter de ces changements et d'être concurrentielle à l'échelle internationale.
Pour ce qui est de notre organisation seulement, nous passons de 395 emplacements au Canada à 150. Il convient de faire remarquer que nous versons des primes de transport relativement élevées aux producteurs pour qu'ils livrent leurs grains à des élévateurs terminus à haut rendement pour qu'ils puissent profiter des gains d'efficacité réalisés entre le point d'origine et le port de destination.
Le président: Merci, messieurs.
Monsieur Easter.
M. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.
Ted, dans votre exposé vous avez dit craindre que les tarifs- marchandises soient fondés sur la valeur des produits et non sur les coûts. Eh bien, c'est le genre de préoccupations que certains d'entre nous partagent. Est-ce que le projet de loi permet de régler ce problème, comme vous le souhaiteriez et, dans la négative, quelles modifications devrions-nous apporter pour que tel soit le cas?
M. Ted Allen: Le plafonnement du revenu est un grand pas dans cette direction. Comme je le disais, nous pensons que deux autres éléments doivent intervenir pour rendre le système encore plus efficace.
M. Wayne Easter: Et vous dites que cet autre élément c'est la commercialisation.
M. Ted Allen: Je réagissais simplement à ce que vous aviez dit, c'est-à-dire qu'il ne faut pas que les tarifs soient plus élevés pour des produits de valeur plus élevée.
M. Wayne Easter: Cela m'amène à ma deuxième question, c'est-à- dire la surveillance et le rôle du ministre. Je suppose que vous avez reçu la documentation à cet égard. L'organisme qui serait mis en place par une entité tierce et indépendante du secteur privé serait chargé d'évaluer plusieurs choses, des bénéfices pour les agriculteurs aux répercussions sur l'efficacité des sociétés ferroviaires, entre autres.
On ne trouve nulle part ailleurs le genre de procédures de surveillance proposées par le ministre. C'est une bonne idée, mais qui ne repose sur rien. Pensez-vous que le gouvernement, le ministre des Transports, puisse mettre en oeuvre un système de surveillance efficace selon le scénario actuel? Comment faire progresser cette idée?
Vous savez qu'il est délicat de négocier avec les sociétés ferroviaires, entre autres. En cas de problème, comment parvenir à respecter ce scénario? Ne sommes-nous pas en train de rêver en technicolor?
M. Brian Hayward: D'abord, dans notre exposé, nous avons soulevé le problème de l'examen de la LTC. Nous ne sommes pas vraiment rentrés dans le détail à cet égard, parce que ce n'est pas ce qui est demandé à la Chambre, celle-ci devant plutôt s'intéresser aux différences de tarifs d'un produit à l'autre et à la surveillance. Quant à nous, le mieux serait d'instaurer une relation dynamique, compétitive, entre les deux compagnies ferroviaires. Ce faisant, la surveillance ne serait plus qu'un simple contrôle et l'exercice serait alors dénué de sens.
Nous estimons que la solution consiste à instaurer la concurrence entre les compagnies ferroviaires.
M. Gordon Cummings: On ne parle pas beaucoup, ici, de ce que va permettre la surveillance. Nous avons proposé aux fonctionnaires de Transports Canada, qui ont été les premiers à nous informer à ce sujet, de raisonner chacun de notre côté pour déterminer ce qui pourrait constituer des tâches de surveillance raisonnables. M. Migie nous a remerciés pour cette intervention. Nous avons maintenant un comité de l'Association des élévateurs à grain de l'Ouest qui essaie de préparer un document sur la façon de rendre la surveillance efficace.
Je pense pouvoir dire que nous sommes du même avis que celui exposé par la Commission canadienne du blé, plus tôt ce matin, à savoir qu'il faut d'abord définir ce qu'il convient de surveiller. Au bout du compte, nous voulons savoir si nous sommes parvenus à faire diminuer les prix de transport, si nous sommes plus rentables et si nous sommes parvenus à acheminer plus de grain dans le système, selon les besoins. À ce stade, on pourra espérer avoir démontré que un système davantage commercialisé nous permettra de parvenir à ces fins, mais pour cela il nous faudra nous doter d'un système de surveillance et nous sommes prêts également à collaborer sur ce plan pour que les choses soient bien faites, d'une façon qui nous permette de profiter des gains réalisés.
M. Wayne Easter: Je veux parler, troisièmement, de la capacité des sociétés céréalières de faire profiter financièrement les producteurs.
• 1130
Les producteurs se plaignent souvent des tarifs-élévateurs par
rapport aux tarifs-marchandises. J'ai entendu dire que les
élévateurs à haut rendement réalisaient une surcapitalisation
considérable. Ce faisant, le problème de la mise en place de lignes
secondaires ne tient pas aux sociétés ferroviaires. C'est ce que me
disent les producteurs et j'aimerais entendre votre avis à ce
sujet. Dans tous les cas, les producteurs arrivent à faire
acheminer leur grain. Le problème en fait, ce sont les sociétés
céréalières, qui sont surcapitalisées, qui ont des intérêts directs
dans les élévateurs à haut rendement. Or, pour attirer les grains
vers ce genre d'élévateurs, dès qu'il est proposé d'abandonner une
ligne secondaire, les sociétés céréalières rasent les élévateurs
avec des boutoirs et empêchent ainsi l'apparition d'une
exploitation de lignes secondaires.
Que pensez-vous de cela?
M. Curt Vossen: C'est assez intéressant. Nous avons participé à toutes ces discussions au fil des ans et je pense pouvoir vous dire, au nom de mes collègues, que toute cette question de la rationalisation des élévateurs et des lignes secondaires tient à la demande et non à l'offre.
Les premiers qui ont construit des élévateurs à haut rendement dans l'Ouest du pays étaient des producteurs. Par exemple, ce fut le cas de l'élévateur terminus de Weyburn Inland. Même si ses opérations ont pris du temps à décoller, il nous a bien fallu constater qu'elles ont réussi en fin de compte parce qu'elles intéressaient les clients, c'est-à-dire les céréaliculteurs.
Nous avons réagi à cela. La rationalisation de notre système n'est pas une initiative indépendante, mais une réaction à la demande de nos clients, soit les agriculteurs.
Ce faisant, ceux qui désirent monter une installation le long d'une ligne ferroviaire sur courte distance—et beaucoup d'entre nous l'ont fait—n'ont qu'une chose à faire: investir. Il est possible de rentabiliser les lignes secondaires, de faire en sorte qu'elles soient efficaces sur un plan économique... Tout le monde l'a fait, tous les groupes d'agriculteurs, toutes les municipalités. Beaucoup l'ont fait. On trouve actuellement en Saskatchewan plusieurs exemples d'élévateurs à haut rendement que possèdent et exploitent des agriculteurs, certains le long de lignes secondaires. Ce faisant, il est possible de rentabiliser ce genre de lignes, parce que quelqu'un a commencé par investir dans l'efficacité. Voilà comment on peut parvenir à rentabiliser et à maintenir une ligne secondaire.
Le président: Merci, monsieur Easter.
Monsieur Hilstrom.
M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président.
D'après vos exposés, on a l'impression que vous êtes frustrés par le fait que ce projet de loi pourrait être bien meilleur ou que les changements qu'il apporte ne sont pas essentiels. Je suis d'accord avec vous: plutôt que d'effectuer une révision complète du moteur, on s'est contenté de changer les bougies.
Ce qui m'inquiète c'est qu'au bout du compte, on ne résoudra rien, parce que la Commission canadienne du blé donne une définition du terme «commercial» qui est différente de la vôtre. Dites-moi si c'est les cas ou pas et si vous en avez parlé avec la Commission.
Je céderai le reste de mon temps à M. Hawkins pour lui donner la possibilité d'interroger Cargill à propos de son exposé et de ses remarques.
Le président: C'est très gentil de votre part, monsieur Hilstrom. Malheureusement, vous n'êtes pas le président.
M. Howard Hilstrom: Je posais simplement la question. Que pense-t-il de ça?
Le président: Vous pouvez effectivement poser une question, monsieur Hilstrom, mais...
M. Howard Hilstrom: Puis-je poser une question à M. Hawkins?
Le président: Bien sûr.
M. Howard Hilstrom: Que pense-t-il de la définition que la Commission canadienne du blé et son organisation donnent du mot «commercial» et que pense-t-il des modifications proposées dans la LTC.
Le président: Voilà une question mieux formulée.
M. Michel Guimond: C'est même une bonne question.
M. Kerry Hawkins: Merci pour cette question.
Il est très difficile de parler de commercialisation, d'un véritable système commercial, quand on a à faire à un monopole. Cependant, je pense que nous parviendrons à bâtir un système commercial acceptable si la Commission canadienne du blé et les sociétés céréalières sont disposées à s'asseoir et à négocier de bonne foi sur la façon de procéder dans le détail. Si on ne s'assoit pas pour négocier, malheureusement, je pense que ça ne fonctionnera pas et il nous faudra alors nous demander ce qu'il adviendra par la suite. La possibilité existe, mais encore faut-il s'asseoir et négocier.
Tout à l'heure, nous vous disions que nous avons contacté la Commission ainsi que M. Goodale, il y a un mois, pour leur demander de lancer un tel processus. Nous arriverons très vite au 1er août. Il ne nous reste plus de temps et il y a encore beaucoup de détails à régler. Ce qui nous préoccupe, c'est que nous sommes invités à prendre part à ce genre d'audiences, mais que nous n'avons pas encore reçu d'invitation pour nous asseoir à la table des négociations. Nous demandons qu'il soit clairement indiqué dans le mémoire d'entente que nous sommes un partenaire de bonne foi, disposé à négocier avec la Commission canadienne du blé sur les aspects commerciaux du système. J'insiste: nous adressons cette requête au ministre et à la Commission et nous demandons qu'on en fasse une déclaration de principes dans le mémoire d'entente. C'est très important pour nous.
Le président: Merci, monsieur Hawkins.
J'ai une requête à formuler. Il y a quelqu'un, dans la salle, qui a un téléphone cellulaire et je lui demanderais d'en couper la sonnerie. C'est très gênant pour les membres du comité et pour les témoins.
Monsieur Calder.
M. Murray Calder: Merci, monsieur le président.
Nous sommes aux pièces avec ce projet de loi, parce qu'il faut qu'il soit soumis à la Chambre avant la fin de la session pour être mis en oeuvre le 1er août et en vue de la campagne agricole de cette année.
Il y a une chose que je veux mentionner très vite, puisque nous sommes pris par le temps. On parle de plafonnement du revenu, mais on se demande encore ce qu'il va en être de la concurrence et des gains d'efficacité dans le système. C'est un aspect dont je parle régulièrement. Je pense ici au processus d'appel d'offres—25 p. 100 maintenant et 50 p. 100 d'ici 2003. Je me dis que tous ceux qui gravitent dans le domaine de la manutention des grains croient dans un système d'appel d'offres, sauf peut-être des organisations comme la CCB qui pourraient toujours dire: «Vous savez, nous avons essayé, mais ça n'a pas fonctionné».
Cela étant, on envisage maintenant d'adopter un système de surveillance. Mais comment ce système va-t-il nous garantir que tel ne sera pas le cas? Comment voyez-vous les choses à cet égard? Est- ce qu'il faudrait mentionner quelque chose dans ce sens dans le mémoire d'entente? Devrait-on, par exemple, confier à l'un des commissaires visés par la LTC la responsabilité de surveiller l'évolution des choses? Nous avons fait la même chose dans l'industrie du transport aérien, quand nous avons décidé de nommer un commissaire pour s'occuper des plaintes des clients des compagnies aériennes. Nous pourrions peut-être adopter une formule du genre.
Enfin, pensez-vous que la Loi sur la concurrence pourrait s'appliquer à la CCB? Nous pourrions le faire en invoquant le paragraphe 4(2) de la Loi sur les transports au Canada. Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de cela?
M. Brian Hayward: J'ai notamment indiqué—mais je ne me rappelle pas si je l'ai fait dans mon exposé—que nous ne réclamons pas de préciser, dans le mémoire d'entente, toutes les procédures de fonctionnement. Dans notre demande officielle, nous avons réclamé que le mémoire d'entente renferme une déclaration de principes sur plusieurs éléments qui devraient préciser la façon dont les relations fonctionneront entre la Commission canadienne du blé et les sociétés céréalières, pas uniquement en ce qui concerne les problèmes de transport, mais également sur le plan de la relation contractuelle et du marchandisage.
M. Murray Calder: Mais il sera également précisé, dans cette déclaration de principes, quelle orientation on va prendre et comment les choses seront faites.
M. Brian Hayward: Oui, et pour tout vous dire, nous nous en remettons à vous pour indiquer comment établir cette orientation ou comment y parvenir. Ce ne sera peut-être par le biais d'un amendement au projet de loi dont vous êtes saisi, mais il pourrait s'agir d'une lettre à part. Le mémoire d'entente serait un accord bilatéral conclu entre le ministre et la Commission canadienne du blé, mais il serait toujours possible de rédiger une lettre d'entente, sur le côté, unissant la Commission canadienne du blé et les principales sociétés céréalières ou les autres parties intéressées, lettre dans laquelle on indiquerait la tenue des négociations à propos d'un cadre contractuel.
Si l'on veut nous tenir responsables, il faut le faire en regard d'un contrat bien particulier. Il existe des formes de contrats normatifs dans le commerce du grain, ailleurs dans le monde. Tout ce que nous demandons c'est de disposer d'un contrat en fonction duquel la CCB, les sociétés céréalières et les compagnies de chemin de fer pourront faire affaires.
À cet égard, nous recommandons à titre de dispositif de surveillance de mettre en oeuvre un mécanisme d'arbitrage, plutôt que de nommer un commissaire. Là encore, il existe des méthodes normalisées ailleurs dans le monde, méthodes qui s'articulent autour d'un processus d'arbitrage. Ainsi, si nous devenons les expéditeurs de référence en vertu du nouveau système, une entente contractuelle devra survenir entre les compagnies de chemin de fer et les sociétés céréalières, lesquelles pourront se rabattre sur un mécanisme d'arbitrage qui, dès lors, fera office de mécanisme de surveillance.
M. Gordon Cummings: Permettez-moi, monsieur le président, d'explorer davantage cette question.
Nous ne voulons pas d'un système de surveillance qui serve à constater un échec. Personne ne veut de cela. Vous examinez cette question cette semaine, sachez que nous apprécions tout le temps que vous investissez dans cet exercice, mais on ne peut pas raisonnablement s'attendre à ce que les députés essaient de réparer le système toutes les semaines. Il ne serait pas plus raisonnable de vous demander de consigner par écrit toutes les règles dans le moindre détail, d'établir les contrats et de surveiller le fonctionnement du système.
Nous ne pensons pas, en toute honnêteté, qu'il soit nécessaire de modifier la Loi sur la concurrence pour intégrer la Commission canadienne du blé, mais deux déclarations simples dans le mémoire d'entente. D'abord, pour dire que la Commission canadienne du blé et les sociétés céréalières devront entreprendre des négociations de bonne foi pour arrêter les règles en fonction desquelles elles fonctionneront. Deuxièmement, il faudra préciser qu'en cas de désaccord, il y aura un arbitrage obligatoire, comme cela se fait toujours dans le monde du commerce.
Vous voulez savoir quelle est la solution? Eh bien, la solution consiste à garantir une interaction commerciale véritable, pas uniquement entre maintenant et le 1er août, mais en permanence. Ainsi, nous pensons que le mémoire d'entente devrait indiquer très précisément que personne en particulier ne pourra imposer de règle, que personne ne pourra imposer son point de vue, surtout pas une entité qui jouit d'un monopole légiféré. Il faudrait plutôt préciser qu'il y aura des négociations commerciales normales, conduites de bonne foi et qu'en cas de différence d'opinion honnête, les parties devront recourir à un arbitrage obligatoire. Voilà qui, selon nous, pourrait régler le problème.
Le président: Merci, monsieur Calder.
M. Murray Calder: Merci.
Le président: Monsieur Asselin.
[Français]
M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Ma question s'adresse au président de Cargill, M. Hawkins.
On se préoccupe beaucoup de l'avenir des producteurs de produits céréaliers, que ce soit le grain ou un autre produit. On parle beaucoup du secteur ouest du Canada, mais il y a cette année un élément qui va avoir pour effet direct de faire augmenter les coûts de production. Il s'agit de l'augmentation des prix du gaz et du diesel.
Également, on parle beaucoup du coût du transport. On a des infrastructures au Canada et au Québec. Là je fais allusion à la voie maritime du Saint-Laurent. Je trouve inadmissible qu'un producteur du Manitoba entrepose son grain dans les élévateurs de Vancouver et que ce grain revienne par la suite à Montréal. On augmente encore une fois les coûts. Bien sûr, le grain est entreposé en direction des futurs clients, mais il arrive très souvent qu'on produise dans un secteur, qu'on entrepose le produit à Vancouver et qu'on le fasse ensuite remonter le Saint-Laurent en direction de Montréal. Au Québec, la voie maritime du Saint-Laurent est actuellement sous-utilisée.
Ma question est un peu dans ce sens-là. Quand Cargill s'est installé sur la voie maritime du Saint-Laurent... Je pense par exemple à Port-Cartier et à Baie-Comeau. Je demeure à Baie-Comeau bien que je sois député du comté de Charlevoix. Je sais qu'à Baie-Comeau, on est présentement en lock-out et j'espère que cette partie de conflit de travail se réglera dans les meilleurs délais.
Monsieur le président de Cargill, vous avez des élévateurs à grain sur la voie maritime du Saint-Laurent. Est-ce que ce projet de loi aura pour effet de diminuer le trafic maritime de votre entreprise? Quels seraient ses effets à court et à moyen terme, en termes de pertes d'emplois et de fermetures possibles d'entreprises ou d'élévateurs à grain sur la voie maritime du Saint-Laurent?
M. Kerry Hawkins: Merci, monsieur.
[Traduction]
Le problème, dans le cas de l'orge, pour commencer par celui- ci, c'est qu'il faut se préparer à expédier ce produit vers les marchés clients qui sont à l'extérieur du Canada, essentiellement en Asie. Ainsi, on ne peut pas contraindre les producteurs d'orge à livrer leurs produits ailleurs que là où ils le veulent et, comme vous le savez, le Saint-Laurent est maintenant une voie secondaire servant à l'exportation des grains américains ailleurs que sur le continent nord-américain.
Je ne vais pas vous rabâcher le genre de discours que j'ai prononcé il y a quatre ans à propos de la mort de la Voie maritime du Saint-Laurent qui nous inquiète tous. Le Canada est de moins en moins en mesure d'exporter par la voie maritime, surtout depuis que les laquiers sont désarmés et qu'ils le demeureront. Mais c'est un autre problème et je ne vais pas vous ennuyer avec cela.
Ce que nous essayons de faire, dans le cadre d'un environnement compétitif—en commun avec la Commission canadienne du blé—c'est d'acheminer les grains vers des points d'exportation, le long d'une ligne de moindre résistance, de moindre coût, moyennant un rendement maximum pour les différents acteurs. Cela nous a été très difficile ces derniers jours, parce que nous n'avons plus, depuis quelques années déjà, les marchés d'Europe de l'Est et d'Europe de l'Ouest. Nous ne pouvons plus, par exemple, exporter de canola vers la CEE à cause du problème des OGM.
• 1145
Prenons les oléagineux, le canola par exemple. Eh bien, les
marchés du canola sont le Mexique, la Chine et le Japon. Les autres
pays ne sont que des acheteurs relativement petits. Voilà le genre
de contradictions que nous essayons de régler.
Nous essayons de mettre en oeuvre un système efficace grâce auquel nous pourrons exporter davantage par la voie maritime. Si vous libéralisiez le système—et là, je m'avance—pour le rendre pleinement commercial pendant deux ou trois ans et si vous disiez: «nous allons faire en sorte que les choses fonctionnent de la sorte pour voir quels seront les résultats au bout du compte», je suis intimement convaincu que nous disposerions alors d'un système beaucoup plus efficace que celui que nous avons aujourd'hui. Je pense que nous pourrions augmenter d'au moins 15 à 20 p. 100 notre capacité d'exportation. Le système coûterait moins chers et il rapporterait plus aux agriculteurs.
Mais voilà, nous sommes en train d'aborder le problème par petits bouts. C'est très bien, mais c'est un compromis politique avec lequel nous sommes tenus de vivre. En revanche, on pourrait laisser le système aller de lui-même, permettre aux exploitants des élévateurs de faire ce qu'ils font de mieux, c'est-à-dire exploiter leurs entreprises. On pourrait permettre aux compagnies ferroviaires de faire ce qu'elles font de mieux, c'est-à-dire exploiter les chemins de fer. On pourrait permettre à la Commission canadienne du blé de faire ce qu'elle fait très bien, c'est-à-dire vendre nos produits sur les marchés mondiaux. On pourrait nous permettre de faire notre part, à chacun de nous, pour optimiser nos capacités plutôt que de tolérer que les uns et les autres se mêlent des affaires de tout le monde. Voilà le problème auquel nous sommes confrontés.
Ce serait une expérience intéressante mais, pour l'instant, la privatisation ne concernera que 25 p. 100 du système—50 p. 100 peut-on espérer à terme—et nous allons voir comment tout cela fonctionne.
Le président: Merci, monsieur Hawkins.
Monsieur Dromisky.
M. Stan Dromisky: Je vais poser plusieurs questions, mais je ne m'attends pas à des réponses très élaborées.
Tout d'abord, voyons la situation des élévateurs à Thunder Bay. Je viens de là-bas et il y a plusieurs compagnies d'élévateurs dans la région. Est-ce que la concurrence existe vraiment entre ces élévateurs qui sont situés sur les berges du Lac Supérieur?
M. Brian Hayward: Oui.
M. Gordon Cummings: Continuez, Brian. La concurrence est amplement suffisante.
M. Brian Hayward: Je ne sais pas par où commencer.
Tous les jours, dans ma société, nous essayons de faire tourner davantage nos installations. J'espère, bien franchement, que vous comprenez ce dont il est question ici: établir les règles du jeu avant de lancer la partie de hockey, parce qu'une fois que nous serons sur la glace, nous avons bien l'intention de plaquer les gars d'en face aussi brutalement que nous le pourrons.
M. Stan Dromisky: Je le comprends.
M. Brian Hayward: Donc, nous sommes concurrentiels.
M. Stan Dromisky: Vous parlez d'une partie de hockey et de règles pour un jeu qui est visible, sur la patinoire. Mais quand on se retrouve dans les vestiaires, ce sont des règles différentes qui s'appliquent et il ne fait aucun doute qu'il y a des choses qui se passent là aussi.
Si vous voulez parvenir à être efficace et à abaisser les coûts, comme vous le dites—puisque vous avez parlé de 100 millions de dollars—je suis certain que vous envisagez bien d'autres stratégies pour accroître votre efficacité. Peu importe qu'il s'agisse de moderniser votre infrastructure, votre équipement, de dégraisser vos effectifs ou que sais-je encore... Il y a bien des approches différentes appliquées par les compagnies d'élévateurs et pas uniquement à Thunder Bay. Est-ce que ce projet de loi est absolument essentiel pour vous permettre de réaliser les gains d'efficacité dont tout le monde parle?
M. Brian Hayward: Comme le petit voyant de mon micro est encore allumé, je vais garder la parole.
Il y a beaucoup de bonnes choses dans le projet de loi, comme le plafonnement des tarifs, les mesures prises pour les céréaliculteurs, le recours à l'arbitrage, etc., comme je le disais. L'élément essentiel qui est absent pour l'instant, c'est la nature des relations entre les sociétés céréalières, les compagnies de chemin de fer et la Commission canadienne du blé, les relations commerciales de fond—les relations contractuelles, dans les échanges commerciaux quotidiens.
On trouve ici deux éléments clés. Au risque de me répéter, je dirais que nous avons besoin d'un système d'arbitrage indépendant, comme cela se fait normalement dans le commerce des grains partout dans le monde. Deuxièmement, pour que nous soyons vraiment responsables, ce qui, je crois, est l'intention de la Chambre et du gouvernement, nous devons être les expéditeurs de référence, en particulier pour les marchés accordés par voie d'appels d'offres. Il est tout à fait illogique qu'il y ait soumission mais que la fourniture des wagons soit négociée par quelqu'un d'autre et que nous appliquions un système d'allocation. Comme M. Wiens le disait, nous allons nous retrouver de nouveau autour de cette table quand le système se sera effondré, si nous n'arrivons pas à trouver la bonne formule d'ici là. Nous ne voulons plus revenir ici.
M. Stan Dromisky: À Thunder Bay, vous faites une chose tout à fait particulière qui ne se fait pas dans le port de Vancouver. Je ne sais pas quelle expression vous employez pour la décrire, mais je dirais que vous regroupez les grains au niveau d'un même élévateur. Ainsi, les navires peuvent venir au pied de l'élévateur et charger tout ce qu'ils peuvent. Le grain provient de plusieurs sociétés et il est regroupé dans un seul et même élévateur. Le navire n'a pas besoin de faire trois ou quatre arrêts pour charger ses soutes, ce qui coûte très cher et qui rapporte donc moins aux céréaliculteurs. Si vous êtes tellement préoccupés par le sort des agriculteurs, pourquoi ne faites-vous pas la même chose à Vancouver?
M. Curt Vossen: Nous le faisons. Nous le faisons déjà à Vancouver. La seule différence c'est que, récemment, il a été décidé de ne pas regrouper les grains hors-commission, surtout le canola. Mais les grains des commissions sont regroupés à Vancouver comme à Thunder Bay.
M. Stan Dromisky: Donc vous faites la même chose.
M. Curt Vossen: Oui.
M. Stan Dromisky: Cela veut dire que vous collaborez entre vous, puisque vous regroupez les grains dans certains élévateurs.
M. Curt Vossen: Tout à fait.
M. Stan Dromisky: Très bien. Je vous remercie.
Le président: Dick Proctor.
M. Dick Proctor: Merci beaucoup.
Dans votre exposé, vous avez dit qu'il fallait vous mentionner dans le mémoire d'entente entre la Commission canadienne du blé et le gouvernement. Par ailleurs, les représentants de la Commission canadienne du blé nous ont dit, tout à l'heure, que cela devrait être fait demain après-midi. Combien de temps vous faudra-t-il pour examiner ce mémoire d'entente ou pour être consultés avant que celui-ci ne soit publié?
M. Neil Silver: Ce que nous voulons surtout, c'est avoir la possibilité de consulter ce mémoire. C'est très frustrant d'être assis ici, devant votre comité, sans savoir ce qu'il contient.
M. Wayne Easter: Nous savons ce que vous ressentez.
M. Gordon Cummings: De plus, Dick, les choses sont très simples. Est-ce que ce mémoire précisera que les sociétés céréalières et la Commission canadienne du blé devront conduire des négociations suivies de bonne foi? Est-ce qu'il précisera qu'en cas d'incapacité de régler des différends il faudra recourir à l'arbitrage obligatoire? Si tel est le cas, nous en serons très heureux. Dans le cas contraire, nous serons très en colère parce que cela voudra dire que nous devrons composer avec un monopole garanti par la loi, suivant des règles du jeu qui ne seront pas équitables.
Pour que les règles du jeu soient équitables dans l'industrie du grain nous avons recours à l'arbitrage, tout comme le Parlement l'a fait pour mettre sur un pied d'égalité les expéditeurs et les sociétés ferroviaires. Ce serait donc une façon très logique de procéder, façon que vous-même et le Comité des transports connaissez sans doute très bien. La question est donc de savoir si l'on pourra compter sur ces deux éléments clés?
M. Dick Proctor: Avez-vous eu des échanges avec les deux parties à la négociation pour savoir s'il y a des chances que ces deux éléments se retrouvent dans le mémoire d'entente?
M. Gordon Cummings: Il y a trois semaines, environ, les cinq pdg sont venus ici pour passer une heure avec les trois ministres concernés pour bien leur rappeler à quel point cela était nécessaire. Nous ne savons pas ce que cette démarche a donné.
M. Dick Proctor: Vous ne savez pas, pour l'instant, si vous allez être consultés, ni quand vous pourriez l'être?
M. Gordon Cummings: Je pense que nous savons assez bien à quoi nous en tenir. Le communiqué a été publié le 10 mai. Nous sommes le 6 juin et on ne nous a pas encore demandé notre avis sur les détails de l'accord contractuel. Il ne faut pas oublier que vous voulez que ces modalités contractuelles soient en place dans 54 jours d'ici.
M. Dick Proctor: C'est exact.
M. Gordon Cummings: Eh bien, rien n'a été négocié entre nous et la Commission canadienne du blé à propos d'un contrat que nous devrions mettre en oeuvre dans 54 jours, et nous ne savons même pas quelles règles vont s'appliquer après cela.
M. Dick Proctor: Merci.
Passons rapidement à autre chose. Aujourd'hui, il a été beaucoup question d'un système entièrement commercialisé, pour optimiser notamment les profits des producteurs. Nous avons ici devant nous cinq sociétés céréalières. Alors, projetons-nous dans le temps, dans cinq ans d'ici, où il n'y en aura peut-être plus que deux ou trois. Si on envisageait le même avenir pour les compagnies de chemin de fer, il n'en resterait peut-être plus qu'une, à moins que les deux ne fusionnent avec des chemins de fer américains. Si l'on retenait ce genre de scénario, pensez-vous que le système commercialisé dont vous parlez aujourd'hui serait viable pendant quelques années pour les producteurs?
M. Mayo Schmidt: Le plus important, selon moi, c'est de voir ce qui se passe au sud de la frontière par comparaison à ce qui se passe chez nous, pour déterminer dans quelle mesure notre industrie est compétitive? Évidemment il y a des multinationales.
Dans le passé, j'ai travaillé pour ConAgra et pour General Mills et j'ai passé toute ma carrière dans des multinationales. Figurez-vous qu'elles étudient les sociétés canadiennes et qu'elles ont l'intention, à un moment donné, d'être très présentes dans les prairies canadiennes.
• 1155
Il est impératif de tenir compte du milliard deux cent
millions de dollars que ces organismes ont investi au cours des
trois dernières années et de se dire que nous avons non seulement
l'intention de permettre aux céréaliculteurs de faire de l'argent,
mais que nous voulons avoir un chiffre d'affaires raisonnable pour
payer les installations qui seront profitables aux producteurs.
Dans le scénario que nous évoquons, tout le monde est gagnant, puisqu'il est question de mettre sur pied un système commercial grâce auquel nous pourrons réaliser des gains d'efficacité au niveau des compagnies ferroviaires, des sociétés céréalières et de la Commission canadienne du blé pour en faire profiter les producteurs. Ainsi, personne ne sera perdant dans l'opération et c'est le Canada tout entier qui y gagnera.
Nous estimons qu'il est extrêmement important, au sortir de cette réunion, d'avoir instauré un système en regard duquel les entreprises comme la nôtre se sentiront poussées à investir dans l'avenir. Si nous échouons sur ce plan nous enverrons un message très clair aux compagnies de transformation et de manutention de grain comme la nôtre. Où allons-nous dépenser notre argent dans l'avenir et quel genre d'investissement allons-nous réaliser pour favoriser l'essor de l'agriculture au Canada?
Aujourd'hui, nous sommes en quête d'indicateurs et de signaux économiques clairs, établissant que nous pourrons pleinement participer aux débouchés s'offrant au Canada pour promouvoir notre système et l'avantage que nous représentons par rapport à d'autres pays.
M. Curt Vossen: Je vais ajouter une chose qui, je crois, présente un certain intérêt. La Commission canadienne du blé a pour mission d'octroyer des permis, pour le compte des producteurs et du gouvernement, aux installations de manutention du grain dans l'Ouest. Dans le dernier rapport de la Commission, de décembre 1999, on constate qu'elle a octroyé 30 permis à des compagnies de traitement des grains dans l'Ouest, dont la plupart existaient déjà il y a cinq ou dix ans. On a assisté à une prolifération de sociétés du genre, dont beaucoup sont détenues par des producteurs et par des propriétaires locaux.
En outre, toujours dans le même rapport, on apprend que plus de 75 négociants en grain, détenteurs de permis dans l'Ouest, achètent directement leurs produits auprès d'agriculteurs et offrent différentes options de tarification et de concurrence. De plus, on a recensé toute une myriade de participants, qui ne disposent d'aucun permis octroyé par la Commission canadienne du blé: des céréaliculteurs qui ont leurs propres camions, aux consommateurs locaux, en passant par des parcs d'engraissement et les provenderies, qui offrent tout un éventail de possibilités.
La question n'est donc pas de savoir s'il restera cinq sociétés ou deux. Nous représentons les cinq plus grandes, mais nous ne sommes pas seuls, je puis vous le garantir. Les agriculteurs peuvent recourir à bien d'autres solutions, notamment à des installations que possèdent des sociétés locales et qui n'ont pas d'envergure multinationale, ni même nationale ou régionale.
Enfin, le Bureau de la concurrence, qui contrôle de très près nos activités, et qui a d'ailleurs récemment effectué une enquête pour le compte de la SARM, a conclu à l'existence d'une saine et ferme concurrence. Je suis certain que le bureau n'hésiterait pas à intervenir s'il avait l'impression que tel n'est pas le cas.
M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président. Nos cinq témoins nous ont fait des exposés fort intéressants. En revanche, j'ai un peu de mal à savoir quelle est leur position exactement, parce que j'ai entendu beaucoup de commentaires différents tout à l'heure.
Je m'adresse ici au principal porte-parole. Quand MM. Estey et Kroeger ont préparé leurs rapports, je crois savoir que les cinq grandes sociétés céréalières—et bien d'autres—ont participé à l'étape préliminaire, surtout dans le cas du rapport Kroeger. Est- ce que les sociétés céréalières ont été consultées à l'étape de la rédaction de cette mesure législative qui devrait être adoptée et mise en oeuvre au début de la prochaine campagne agricole? Est-ce qu'on a invité les sociétés céréalières à apporter leur contribution à cette mesure? C'est une simple question.
M. Gordon Cummings: Nous avons participé aux rapports Kroeger et Estey. Durant l'hiver, nous sommes intervenus auprès des ministres, de députés et de la fonction publique pour essayer de leur faire comprendre ce que nous recherchons. Personne ne nous a demandé notre avis.
M. Rick Borotsik: Fouillons un peu cela, si vous le voulez bien. Avez-vous retrouvé une partie quelconque de vos exposés dans ce projet de loi?
M. Gordon Cummings: Peut-être en ce qui concerne le plafonnement des revenus.
M. Rick Borotsik: Eh bien, le plafonnement des revenus était une des recommandations du rapport Kroeger.
M. Gordon Cummings: Il est possible que certaines des choses que nous avons présentées aux commissions Estey et Kroeger se soient retrouvées dans les recommandations de leurs rapports et qu'on les trouve maintenant dans cette mesure. C'est certain.
• 1200
Pour ce qui est de la transformation de notre système en
système commercial, et de la mise en oeuvre de règles commerciales
à long terme qui puissent fonctionner, nous avons fait plusieurs
suggestions. Comme la loi concerne essentiellement l'aspect
transport, nous n'avons pas encore couvert le reste. C'est pour
cela que nous sommes tellement inquiets à propos du mémoire
d'entente et que nous sommes désolés de ne pas trouver de
dispositions sur l'arbitrage dans ce texte.
Vous pourriez faire en sorte que nous soyons clairement mentionnés comme les expéditeurs de référence. C'est faisable.
Le président: Oui, parce que cela ne fait pas partie de la loi.
Monsieur Easter.
M. Rick Borotsik: J'ai écoulé mes cinq minutes?
Le président: Le temps passe vite quand on s'amuse.
M. Rick Borotsik: J'aimerais être inscrit pour le tour suivant.
M. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.
A-t-on un exemplaire de la présentation de la Commission canadienne du blé, ce matin?
M. Gordon Cummings: Nous étions tous là, nous l'avons entendue.
M. Wayne Easter: Certes, mais ce serait mieux de l'avoir par écrit.
Je veux revenir sur un aspect que j'ai soulevé plus tôt avec M. Allen, sur les tarifs-marchandises qui seraient fondés sur les prix de vente des produits et non sur la valeur, ce qui préoccupe la plupart des groupes. Certains de ceux avec qui je me suis entretenu au téléphone croient qu'il faudrait en revenir au système de partage des revenus ou des gains de productivité, système qui était en place avant 1992. Cependant, ce n'est certainement pas imaginable, du moins pas pour l'instant.
Dans l'exposé de la Commission canadienne du blé, il est question d'un amendement. Vous l'avez devant vous. Je vais vous le lire, mais ce serait peut-être déraisonnable de vous demander ce que vous en pensez.
-
149.(3) Aucune compagnie de chemin de fer régie ne sera autorisée
à fixer des tarifs par wagon ou par wagons multiples, ou aucun
autre tarif différentiel tels que la différence entre ces
prestations soit supérieure à la différence de prix selon la
prestation, comme le prévoit l'Office des transports.
Que pensez-vous de cela? Vous avez sûrement la même position que les autres relativement au partage des gains de productivité. Comment nous dépatouiller avec cela sans en revenir aux conditions d'avant 1992? Comment administrer la chose entre-temps? Comme je vous le disais, ce qui m'inquiète, c'est que l'organisme de surveillance n'ait pas les pouvoirs nécessaires pour faire respecter les règles du jeu et je m'inquiète aussi que le système ne soit pas entièrement commercialisé à ce stade. Cet amendement va-t-il nous permettre de tendre vers le genre de protection dont nous avons besoin?
M. Ted Allen: Je dois vous dire que l'amendement a l'effet contraire. Même la terminologie que vous utilisez—contrôler, réglementer—pourrait nous porter à croire que nous régressons plutôt que de progresser à cet égard. Toutes les sociétés ici présentes disent que nous devons passer à un environnement davantage commercial pour permettre aux participants de dégager le maximum d'économies, et que nous devons instaurer le plus de concurrence possible pour que ces économies soient réparties de façon équitable entre tous les acteurs.
Le plafonnement des revenus revient à dire que nous doutons que le secteur ferroviaire est aussi concurrentiel que nous l'aimerions et qu'il faut donc imposer certains paramètres à l'intérieur desquels celui-ci devra évoluer. Personnellement, je dirais qu'il y a un autre paramètre que nous devrions retrouver ici. Cependant, vous parlez de contrôle et de réglementation, deux termes contradictoires dans un environnement commercial.
M. Wayne Easter: Quelqu'un d'autre?
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Easter.
Monsieur Morrison.
M. Lee Morrison: Messieurs, je me rappelle avoir joué les Cassandre il y a cinq ans et avoir fait une mise en garde: j'avais dit que, dans l'avenir, nous compterions trop d'élévateurs terminus à terre et qu'ils seraient trop utilisés. Eh bien, je pense que nous en sommes là. J'aimerais obtenir vos réactions à cet égard.
J'aimerais également parler plus particulièrement des sociétés qui sont présentes dans ma région. Il s'agit des sociétés de M. Wiens et de M. Vossen.
Vous avez dit qu'un système de contrôle ordonnancé est indésirable et que vous préférez un système d'approvisionnement sur demande. Or, j'ai l'impression que dans le sud-ouest de la Saskatchewan, on a bien à faire à un système de contrôle ordonnancé avec les petits silos en bois, avec les nombreux petits points de livraison. Ces lignes secondaires sont bouchonnées parce que vous sous-utilisez les lignes principales. C'est ainsi que je vois les choses. Vous vous prévalez pleinement de vos attributions de matériel remorqué sur les lignes principales et mes petits points de livraison demeurent bouchonnés pendant que des semaines. Quant à moi, il s'agit là d'un système de contrôle ordonnancé. Vous contraignez artificiellement les gens à acheminer leurs grains vers les élévateurs terminus situés le long d'une ligne principale.
Voyez-vous quelque chose, dans ce projet de loi C-34, qui permettrait d'améliorer cette situation, de débloquer ces petits points de livraison, plutôt que d'appliquer un tel système de contrôle ordonnancé? Dans ce genre de système vous dites «Écoutez les gars, si vous voulez livrer du grain, il y a un seul endroit où vous pouvez aller. Vous devrez l'emmener aux élévateurs terminus». Pouvez-vous répondre à cela?
M. Marvin Wiens: Vous avez donné un excellent exemple, monsieur Morrison, et j'aimerais vous répondre.
Dans nos régions, c'est-à-dire la pointe sud-ouest de la Saskatchewan, le réseau de lignes secondaires est encore très largement en place. Les agriculteurs ont décidé de se servir de ces lignes secondaires pour acheminer leurs grains vers la ligne principale, en particulier vers certains points où des élévateurs terminus ont été construits. Cela est en partie le résultat du problème que vous avez énoncé, c'est-à-dire le manque de wagons céréaliers.
Toutefois, pour rentabiliser le système de manutention des grains et permettre l'acheminement rapide et efficace des produits vers les marchés, la Commission canadienne du blé verse des primes pour encourager le regroupement de wagons en certains emplacements. Les agriculteurs sont intéressés par ces primes qu'ils empochent en partie. Ainsi, ils établissent la différence entre le coût que représente pour eux le fait de laisser leurs grains dans des wagons sur une ligne secondaire et ce que cela leur rapporte en contrepartie, puisqu'ils disposent de cet argent quand ils se tournent vers les grands élévateurs terminus. Ils ont déjà pris leur décision quand ils ont acheté leurs propres camions. Très souvent, ils ont eux-mêmes investi dans les élévateurs terminus situés le long des lignes principales.
Il est donc très difficile de prétendre que le maintien d'un réseau de lignes secondaires va coûter cher aux agriculteurs à long terme. Les agriculteurs ont déjà pris ce genre de décisions, puisqu'ils essaient de demeurer compétitifs et de rester en affaires.
M. Lee Morrison: Je ne pense pas que les agriculteurs aient vraiment le choix. Dans un système parfaitement commercialisé où les agriculteurs auraient vraiment le choix, vous feriez sortir le grain de ces petits points de livraison. Vous découvririez ensuite, par le jeu du marché, où les céréaliculteurs veulent effectivement envoyer leur grain.
Pour l'instant, ils n'ont pas le choix parce que les points situés le long des lignes secondaires sont continuellement encombrés. Le réseau de transport est véritablement constipé. Qu'ils le veuillent ou non, ils doivent aller livrer leur grain aux élévateurs terminus.
Ouvrez donc ces points de livraison. Allez livrer le grain là- bas, quand il vous arrive et vous verrez, dans un système parfaitement concurrentiel, s'il n'est pas économiquement plus avantageux pour les céréaliculteurs d'aller livrer là-bas où de se tourner vers des élévateurs terminus sous-utilisés, situés le long de la ligne principale, parce qu'il y a des stimulants pour cela. Autrement dit, qu'est-ce que l'agriculteur doit préférer: une livraison tout à côté de chez lui, qui va lui permettre d'économiser beaucoup d'argent ou une livraison le long de la ligne principale qui ne lui rapportera que la valeur des stimulants financiers? Je suis sûr que l'agriculteur dans ce cas pourra faire un choix.
M. Curt Vossen: J'aimerais vous répondre.
Il y a déjà plusieurs années que je participe à ce débat, avec des clients et d'autres. J'ai l'impression qu'il y a une différence entre les beaux discours et la réalité. Je n'ai jamais vu personne construire un élévateur de 4 000 tonnes comportant un emplacement de 10 wagons—pas un producteur, pas un défenseur de lignes secondaires, pas un défenseur d'installations à haut rendement situées sur les lignes principales.
• 1210
Le but ultime est de pouvoir exploiter du mieux possible les
actifs dont on dispose—et l'on sait que la capacité ferroviaire a
toujours été un facteur limitatif de notre système dans l'ouest du
Canada. Il est donc logique de chercher à regrouper les
attributions du matériel remorqué pour pouvoir les exploiter plus
rapidement, plus efficacement quand on offre d'autres services.
Aujourd'hui, les agriculteurs ne peuvent pas... Dans le passé, la plupart d'entre eux utilisaient des tracteurs à deux roues motrices. Aujourd'hui, ils ont des tracteurs à quatre roues motrices. La majorité d'entre eux ont des moissonneuses batteuses munies d'une cabine. Rares sont ceux qui convoient eux-mêmes leurs marchandises. Ils retiennent les services de routiers qui utilisent des trains doubles de type B pour livrer les grains. Ils ont évolué alors que nous, nous semblons avoir un problème à répondre à une simple question: «Qu'est-ce qui est commercial et qu'est-ce qui est efficace, qu'est-ce qui est beau discours et qu'est-ce qui est nostalgie?»
Je suis très heureux, comme mes homologues ici présents, de continuer à exploiter nos installations, même si beaucoup sont très dépréciées. Il est tout à fait logique pour nous d'agir ainsi sur un plan économique, mais nos clients se sont exprimés et M. Wiens nous a dit qu'ils ont déjà fait leur choix quand ils ont acheté leurs camions.
Le président: Monsieur Proctor.
M. Dick Proctor: Merci beaucoup.
J'avais une question à vous poser relativement à l'arbitrage des propositions finales. Tout le monde—les ministres hier, la Commission canadienne du blé ce matin et vous-même maintenant—nous a déclaré être emballé par les recommandations contenues dans le projet de loi C-34.
Canadien national est loin d'être ravi de cette mesure et ses représentants prétendent que, si d'importants changements n'étaient pas apportés à ce projet de loi, nous n'aurons pas le genre de décisions positives après un arbitrage, qui est pourtant prévu dans ce texte.
Je ne sais pas à qui adresser ma question, mais j'aimerais de toute façon que quelqu'un y réponde. Nous allons donc entendre le point de vue de Canadien national cet après-midi et nous pourrons certainement poser cette question à ce moment-là, mais pour l'instant, j'aimerais entendre le point de vue des sociétés céréalières au sujet du recours à l'arbitrage.
M. Gordon Cummings: Nous sommes effectivement favorables à cette proposition, monsieur Proctor. Je sais que les sociétés de chemin de fer, et surtout le CN, craignent que s'il y avait une seule grande cause à arbitrer, l'arbitre pourrait ne pas être suffisamment informé.
Or, dans cette mesure, il est prévu que si les deux parties le désirent, elles pourront retenir les services de trois et non d'un seul arbitre. Nous avons parlé en détail de cette chose-là à l'occasion des consultations d'Arthur Kroeger, et en sommes venus à la conclusion que le recours possible à trois arbitres est un compromis raisonnable dans les causes complexes. Nous-mêmes, comme tous les autres, souhaiterions sûrement pouvoir nous en remettre à des gens qui soient au courant de nos réalités dans le cadre d'une cause complexe.
M. Dick Proctor: Très bien.
M. Gordon Cummings: Même si le CN a certaines réserves, nous estimons que les dispositions actuelles sont suffisantes, puisque les parties à un différend pourront recourir à trois arbitres, ce qui est un progrès par rapport à la loi actuelle.
M. Dick Proctor: Ainsi, vous pensez que les réserves du CN ne sont pas justifiées, aux vues de la loi...?
M. Gordon Cummings: J'exprimerais cela de façon légèrement différente. Toute personne qui va en arbitrage veut avoir la certitude d'être véritablement entendue, c'est-à-dire que la cause sera décidée sur les faits, par une personne compétente. Je pense que tous ici, préférerions pouvoir nous en remettre à trois arbitres et pas à un seul, pour bénéficier d'une bonne audition, si nous avions un différend complexe avec une compagnie ferroviaire. Le plus frustrant, en arbitrage, c'est d'être frappé d'une décision qui n'est pas fondée sur la logique. C'est cela que craint le CN et nous sommes d'accord avec lui.
Je pense toutefois que ce système va fonctionner. Je ne pense pas qu'il sera nécessaire, pour cet aspect-là, de recourir à la surveillance pour montrer que les choses fonctionnent. Je pense qu'on a un peu exagéré les inquiétudes.
Cela étant, nous nous serons trompés si tout un ensemble de causes importantes devait être confié à un seul arbitre. Mais je ne pense pas que c'est ce qui va se passer.
M. Dick Proctor: Merci.
Le président: Monsieur Borotsik, vous avez cinq minutes.
M. Rick Borotsik: Merci.
Je veux revenir sur la question de l'arbitrage. Il existe actuellement un système d'arbitrage dans le cas des chemins de fer. C'est exact?
M. Gordon Cummings: Oui.
M. Rick Borotsik: Si, dans le cadre de votre système d'arbitrage des propositions finales, un arbitre rend une décision contre les expéditeurs, vous avez d'autres recours. Je me trompe? Vous n'avez pas forcément à vous plier à la décision arbitrale. En fait, vous pouvez vous tourner vers une autre compagnie ferroviaire, même vers un autre mode de transport. Je me trompe, monsieur Cummings?
M. Gordon Cummings: Le plus souvent, dans notre situation, nous sommes captifs d'un expéditeur à un moment donné, ainsi...
M. Rick Borotsik: Pas toujours. En fait, j'affirmerais que les gens autour de cette table sont rarement captifs d'un expéditeur.
M. Gordon Cummings: Disons que le débat ne porte pas là dessus.
M. Rick Borotsik: Le débat, c'est que vous voulez disposer d'un système d'arbitrage des propositions finales dans le cas de la Commission canadienne du blé, mais que vous aimeriez appliquer les décisions rendues à votre avantage dans vos tractations avec les sociétés ferroviaires. N'y a-t-il pas une certaine inégalité là dedans. Vous ne voyez pas ce que je veux dire?
M. Gordon Cummings: Ce qui est certain, c'est que pendant toutes ces années on a reconnu l'existence d'un déséquilibre de pouvoir entre les deux compagnies de chemin de fer et les expéditeurs, ce qui nous a amenés à réclamer la législation des APF pour rééquilibrer les choses.
Il est évident qu'aucune société céréalière ne pourrait survivre si elle tournait le dos à la Commission canadienne du blé dont la part de marché des grains commerciaux représente 60 à 65 p. 100. Nous n'avons donc pas d'autres choix que de traiter avec la CCB.
M. Rick Borotsik: C'est un monopole.
M. Gordon Cummings: Nous avons là un joueur qui est incontournable. Nous ne pouvons pas, sous prétexte que nous désapprouvons les conditions, tourner le dos à la CCB, alors qu'il est normal, dans le commerce, de pouvoir dire: «Je n'aime pas ces conditions, je vais voir ailleurs ce qui se passe». Dans ce cas, il n'y a personne ailleurs, parce que la Commission canadienne du blé est un monopole. Voilà pourquoi j'estime raisonnable que le gouvernement impose un arbitrage obligatoire en cas de différend entre les sociétés céréalières et la CCB.
M. Rick Borotsik: À la façon dont je vois les choses, monsieur Cummings, Agricore semble approuver cette mesure législative et y apporter son appui. Il est toujours possible que d'autres sociétés céréalières aient des sentiments mitigés à son égard.
J'ai entendu deux choses. D'abord, il a été question d'un arbitrage indépendant avec lequel je ne suis pas forcément en désaccord, je vous l'avoue. Deuxièmement, il y a la question de l'expéditeur de référence. Ce statut change toute la philosophie des transports des grains dans l'Ouest. Et nous n'y parviendrons pas par voie de législation, monsieur Cummings. Je suis sûr que vous serez d'accord avec cela.
M. Gordon Cummings: Voyons ce qu'en pensent d'autres organisations qui ont un point de vue différent. Nous avons peut- être émis des communiqués de presse faisant état de positions différentes, mais nous sommes ici ensemble. Nous avons fait un exposé commun, tous les cinq; il s'agit d'une présentation unanime.
Pour ce qui est de nos deux demandes, je suis heureux de voir que vous êtes favorable à celle concernant l'arbitrage. J'espère d'ailleurs que tout le monde autour de cette table appuiera aussi cette proposition.
Pour ce qui est du statut d'expéditeur de référence, il est évident que c'est notre cas pour les grains hors-commission. En revanche, on ne sait pas exactement qui, de nous ou de la Commission canadienne du blé, est l'expéditeur de référence pour les grains de la Commission. Ce que nous prétendons—surtout que cette loi favorise le passage à un système d'appel d'offres commercial—c'est qu'il faudrait au moins indiquer que nous sommes l'expéditeur de référence.
M. Rick Borotsik: Pour les 25 p. 100.
M. Gordon Cummings: Pour les 25 p. 100.
M. Rick Borotsik: Pour les 25 à 50 p. 100, vous voudriez être désigné expéditeur de référence.
M. Gordon Cummings: Il faut que ce soit clair.
M. Rick Borotsik: Je ne pense pas que la Commission canadienne du blé se soit rangée à cette idée et l'ait acceptée. Récemment, j'ai appris...
M. Gordon Cummings: C'est vrai, je crois que c'est en partie ainsi qu'on passe à un système commercial...
M. Rick Borotsik: Fort bonne remarque.
M. Gordon Cummings: ... et qu'on en arrive à un équilibre entre un secteur concurrentiel, l'industrie, les sociétés céréalières...
M. Rick Borotsik: Très bonne remarque.
J'ai une autre question.
Le président: Oh, il vous reste beaucoup de temps.
M. Rick Borotsik: Ah, fort bien j'ai du temps cette fois-ci. Cela veut dire que, la dernière fois, vous m'avez coupé de façon prématurée, n'est-ce pas? Ça va bien.
La Commission canadienne du blé... Je vais vous poser cette question pour ma propre information. Nous avons sans doute les gens qui connaissent le mieux l'industrie, ici. L'année dernière, nous avons perdu les ventes de canola. Si vous étiez dans l'audience ce matin, vous aurez entendu la Commission canadienne du blé dire que tel ne fut pas le cas. On nous a dit que la capacité était là, que les choses tournent bien et qu'il y avait eu beaucoup de mouvements dans le cas du canola. Pourriez-vous me dire très rapidement s'il y a eu un problème de transport pour ce produit? Très honnêtement, c'est un produit qui a beaucoup rapporté à l'occasion—peut-être pas autant de nos jours. Quel fut le problème? Pour la Commission canadienne du blé, il ne semble pas y en avoir eu.
M. Neil Silver: Monsieur le président, permettez-moi d'essayer de répondre en premier, et Gordon pourra le faire ensuite.
Il faut comprendre comment fonctionne tout le système: il y a l'attribution du matériel remorqué et les ventes...
M. Rick Borotsik: Je comprends.
M. Neil Silver: ... et le processus s'enclenche bien avant que l'événement se produise. Donc, quand nous travaillons sur les débouchés commerciaux et sur les ventes à l'automne, nous sommes en fait très en avance. C'est tout à fait logique. La vérité, c'est que les débouchés se présentent à l'automne. Tout est réservé d'avance.
Le problème est dû au système, pas nécessairement aux acteurs. Il a fait ce qu'on attendait de lui, qu'il s'agisse des grains de la Commission ou des autres. Si vous avez la possibilité de faire passer vos grains dans le système très tôt, vous en profitez, peu importe de quel côté de l'équation vous vous trouvez. Le problème tient en partie aux éléments que j'ai recensés et qui nous permettraient de réaliser des économies de 100 millions de dollars. Dans le cas d'un véritable système d'approvisionnement sur demande, vous ajustez l'approvisionnement sur l'arrivée du navire à quai et vous ne faites rien avant. Vous ne surchargez pas le système avec des inventaires inutiles qui ne bougent pas.
M. Rick Borotsik: Alors, quel était le problème? Est-ce qu'il y avait des inventaires inutiles qui étaient entreposés dans le système?
M. Gordon Cummings: C'était le cas.
M. Rick Borotsik: Et ils encombraient le système?
M. Gordon Cummings: Revenons-en à août 1999. À cette époque, M. Hayward représentait la société céréalière au CAPG. Des prévisions avaient été faites pour les expéditions de l'automne, surtout pour le mois d'octobre, et l'on avait établi combien de grain commission et hors-commission allait être acheminé vers la côte Ouest. La Commission canadienne du blé avait prévu d'envoyer 1,2 million de tonnes en octobre. Brian, qui nous représentait tous, est allé voir les porte-parole de la Commission canadienne du blé pour leur dire: «Êtes-vous absolument certain d'envoyer 1,2 million de tonnes en octobre? C'est un très gros volume». Ils lui ont répondu: «Tout à fait, c'est exactement ce que nous allons envoyer».
• 1220
Pour la deuxième année de suite, nous avons ouvert Prince
Rupert et la Commission canadienne du blé a chargé 650 000 tonnes
sur les bateaux. En fait, la Commission avait envoyé 550 000 tonnes
de grain à Vancouver et à Prince Rupert pour le mois d'octobre, et
rempli des espaces qui auraient sinon été occupés par du canola.
Plus tard, nous avons évalué ce que cela aurait pu représenter dans le cadre d'un système commercial approvisionné à partir d'élévateurs à grain à haut rendement. Nous en sommes arrivés à la conclusion que nous aurions pu expédier et vendre 200 000 tonnes de canola. Le temps de faire ce constat et de faire venir ce volume, on était fin novembre et le marché chinois n'était plus preneur. Cela montre que ce problème est limité au mois d'octobre. La Commission avait prévu d'expédier 1,2 million de tonnes et elle n'en a expédié que 650 000. En novembre, elle a bien expédié ce qu'elle avait prévu et ce n'est qu'en janvier qu'elle a finalement dépassé ses prévisions.
M. Rick Borotsik: Monsieur Cummings, le projet de loi C-34 ne changera rien à ces conditions.
M. Gordon Cummings: Voilà pourquoi nous réclamons un système commercial, un système qui permettra des échanges réciproques véritables entre les parties, qu'il sera possible d'arbitrer. C'est ce que nous avons obtenu en fin de compte, mais vous ne pouviez pas l'accepter.
M. Rick Borotsik: Merci.
Le président: En avez-vous terminé, Rick?
M. Rick Borotsik: Tiens donc, il me reste du temps?
Le président: Non, non.
M. Rick Borotsik: Eh bien, non, cela me va. Merci.
Le président: Pour conclure, monsieur Morrison, il vous reste deux ou trois minutes.
M. Lee Morrison: J'aimerais poursuivre mon entretien avec M. Vossen.
Peu importe qu'un agriculteur utilise un train double de type B ou son propre camion. Il paie de toute façon. C'est lui qui paie, personne d'autre. Ce que je voulais dire, et je ne pense pas avoir été compris, c'est que l'agriculteur devrait avoir la possibilité de faire le choix commercial de livrer ou non au silos en bois d'à- côté ou à un élévateur de tête de ligne de l'intérieur. Pour l'instant, il n'a pas le choix, les dés sont pipés puisqu'il n'y a plus de place dans les élévateurs secondaires. Pourtant, les gens aimeraient y livrer leur grain. Mais ils ne le peuvent pas. Voilà pourquoi je dis que nous avons à faire à un système de contrôle ordonnancé. Vous contraignez les céréaliculteurs à livrer aux élévateurs terminus le long des lignes principales.
Je vais vous poser une question que j'ai déjà posée, de façon indirecte, lors de la dernière série. Selon vous, disposez-vous d'un surcroît d'installations? Y a-t-il trop d'élévateurs terminus en fonction du volume de produits? De façon plus générale, j'aimerais savoir l'effet éventuel que le projet de loi C-34 pourrait avoir sur les livraisons et sur les attributions de matériel remorqué pour livrer aux silos secondaires?
M. Curt Vossen: Je vais vous replacer tout ça en contexte. On compte environ un millier de points de livraison pour les grains dans l'Ouest du Canada: des structures en bois, des vieilles structures de chargement à wagon unique et des structures en béton à plusieurs points de chargement. Parmi toutes les structures déjà bâties ou en construction, ainsi que dont l'érection est annoncée, 140 sur le millier que cela représente, appartiennent à la catégorie qu'on définit généralement comme celle des élévateurs terminus, capables de charger plusieurs wagons à la fois, c'est-à- dire 50 ou plus, grâce auxquels il est possible de charger plusieurs wagons ou d'escompter les chargements de wagons uniques.
Est-ce que 140 c'est beaucoup? Eh bien, avec 32 millions de tonnes qui transitent dans le système, on peut se dire que c'est sans doute insuffisant quand on considère le rendement projeté sur le capital investi. Y a-t-il trop de points de livraison pour que cela soit économiquement viable? Très certainement. Un millier, c'est beaucoup.
Selon toute vraisemblance, le marché—dans une situation commerciale normale—va évoluer dans le sens de ce qui est commercialement faisable pour les participants, c'est-à-dire que les installations les moins rentables seront fermées et que de nouvelles accepteront un volume plus élevé. Est-ce que c'est forcer la chose? Depuis des années que je suis dans ce milieu, je n'ai jamais contraint un client à aller ailleurs. Nous utilisons les camions pour transporter le grain livré dans nos petits emplacements. J'ai de l'espace dans ces petits silos.
• 1225
Je reconnais qu'à l'occasion des clients me reprochent de ne
plus avoir la possibilité de continuer à livrer directement leur
grain au silo voisin. Je leur réponds: «Sur quelle planète vivez-
vous?», parce que vous êtes en train de parler des 10 p. 100
restant du volume que vous voulez livrer au silo du coin, alors que
c'est en livrant aux grandes installations que vous empochez les
véritables gains d'efficacité. Vous faites livrer 90 p. 100 de
votre grain dans ces grandes installations et vous voulez, en plus,
avoir la commodité d'un système de remplacement, d'une sorte de
système secondaire, sous la forme de ces installations-là.
Laissons donc jouer la raison économique.
M. Lee Morrison: Eh bien, je crois que nous ne parviendrons jamais...
M. Gordon Cummings: Puis-je ajouter une chose, monsieur Morrison? Puis-je finir de répondre à votre question?
M. Lee Morrison: Oui.
M. Gordon Cummings: Jamais, au cours des 52 dernières semaines, nous n'avons utilisé tous nos wagons. Jamais, au cours des 52 dernières semaines, nous n'avons versé de redevance de stationnement importante et nous n'avons jamais fait attendre deux navires pendant très longtemps. La vérité, c'est que les céréaliculteurs veulent livrer plus de grain qu'on ne peut en vendre. Ainsi, quand on parle d'embouteillage, ce sont en fait les céréaliculteurs qui créent le problème parce qu'ils veulent livrer un volume supérieur à ce que le marché est prêt à absorber.
Deuxièmement, vous vouliez savoir si nous avions trop construit. Sachez que les vieilles structures en bois de l'Ouest canadien étaient utilisées quatre fois par an. Cela étant, il conviendrait davantage de parler de construction excessive dans leur cas, parce que le système actuel, lui, peut absorber huit à dix rotations par an.
Y aura-t-il un excédent de capacité dans un système compétitif? Très certainement. C'est le cas depuis les années 20. C'est la nature même de la concurrence entre les sociétés céréalières, par rapport à un système réglementé et monopolistique qui s'efforce de réaliser un équilibre.
Jusque là à dire qu'il s'agit là d'un système de contrôle ordonnancé, je serais d'accord avec vous dans la mesure où les céréaliculteurs veulent faire passer plus de grain dans le système...
M. Lee Morrison: Oh, oh.
M. Gordon Cummings: ... que le système peut en accepter. Vous avez tout à fait raison. En revanche, dans votre région, si Curt n'est pas concurrentiel et qu'il n'accepte pas votre grain pour le transporter de même que celui de Sask Pool, il va perdre sa part de marché. Cela étant, la concurrence est la garantie que le grain est traité de façon équitable.
Je suis d'accord avec vous; pendant toute l'année, les céréaliculteurs veulent livrer plus de grain que le marché ne peut en absorber. Mais c'est la nature du système.
Le président: Merci, Lee.
M. Lee Morrison: Une autre petite rapide?
Le président: Rapide!
M. Lee Morrison: Certainement.
Je vous concède qu'il y a concurrence, mais si vous regardiez la chose depuis la base, vous verriez qu'elle se présente sous une forme que vous n'apprécieriez certainement pas, surtout si vous saviez ce qui se passe. Les gens sont tellement en colère contre les élévateurs de Curt, parce qu'ils n'acceptent pas leur grain, qu'ils se tournent vers les élévateurs terminus de M. Wiens, ou vice-versa. Vous vous échangez donc vos clients. Ils sont en colère parce que les points de livraison locaux sont congestionnés et que ceux-ci ne peuvent pas accepter leur grain, alors qu'il y a beaucoup de place dans les installations en béton. Alors, c'est là qu'ils vont. Ils court-circuiteront l'élévateur terminus d'une compagnie ayant refusé de leur offrir le service pour aller à un autre élévateur du même genre qui leur offrira ce qu'ils recherchent. J'ai déjà vu cela.
M. Curt Vossen: Pour bien vous montrer comment le système a évolué, surtout dans votre région, monsieur Morrison... Votre région est réputée pour son blé rouge de printemps de grande qualité ainsi que pour son blé de mouture. Notre marché pour ce genre de produits, dans cette région—et notre société est très présente dans cette partie des prairies—a complètement changé. On nous demande maintenant d'expédier une grande partie de ce produit non pas vers l'est et vers l'ouest, mais vers le sud, vers les minoteries américaines qui recherchent ce produit et qui sont prêtes à payer un surcoût pour l'obtenir. Cependant, elles sont disposées à acheter ce genre de produits à condition que les tarifs ferroviaires soient compétitifs, c'est-à-dire pour des trains de 25 à 50 wagons, voire plus.
Ainsi, pour avoir accès à ce marché en pleine expansion, très palpable mais en pleine évolution, il nous faut avoir accès à ce genre de service et offrir cette fonctionnalité aux clients qui nous achètent le grain. Sinon, nous ne sommes pas partants.
Nous avons transporté les grains de cette région, par rail, jusqu'en des lieux situés au Manitoba, pour les regrouper avec d'autres produits à destination des États-Unis ou du Mexique. Nous avons pu profiter des décisions arbitrales en matière de transport parce que nos installations nous confèrent une certaine souplesse.
Que doit-on faire pour cela? Eh bien, il faut appliquer les normes d'exportation à ce service national. On ne fait pas passer un seul wagon à la fois dans une installation de 4 000 tonnes. C'est ainsi qu'évolue le marché et nous nous adaptons.
Le président: Merci, monsieur Vossen.
Une dernière question à M. Easter.
M. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.
Je vais en revenir en partie sur ce que disait Lee. Je pense qu'il y a très certainement une différence d'opinion quant à savoir s'il s'agit d'un système réagissant à la demande ou d'un système de contrôle ordonnancé, mais une chose est sûre: il en va certainement de l'intérêt de sociétés céréalières, qui possèdent des élévateurs à haut rendement, de laisser de côté les élévateurs situés sur les lignes secondaires.
Pour commencer, j'aimerais que vous nous disiez quelle est votre position à propos des lignes secondaires en général.
• 1230
Deuxièmement, à propos des 100 millions de dollars d'économies
supplémentaires qu'on pourrait réaliser sur le système—je crois,
Gordon, que c'est vous qui en avez parlé—est-ce que vous parlez de
100 millions d'économies sur le transport par chemin de fer ou
d'économies sur les coûts d'ensemble? Je me pose la question pour
le producteur, parce que s'il s'agit d'économies réalisées sur le
transport ferroviaire et qu'il doit acheter un camion—comme Lee
l'a dit un peu plus tôt—pour livrer son grain à 50 ou 80 miles de
son exploitation, il ne fait aucune économie ou du moins très peu.
En revanche, l'économie est réalisée sur le chemin de fer. Le coût
le plus important, pour un producteur, est celui qu'il doit payer
pour faire transporter ses produits de son exploitation au point
d'exportation.
Cela étant posé, où va-t-on chercher ces 100 millions d'économies?
M. Neil Silver: En vérité, c'est tout le système qui est concerné. Il y a plusieurs éléments qui interviennent. La décision d'un agriculteur de l'Ouest canadien qui veut vendre son blé ou son orge, dépendra de la meilleure offre. Peu importe la distance qui le sépare du premier élévateur. Vous allez voir de plus en plus que ce sont les sociétés céréalières qui viennent chez le céréaliculteurs, plutôt que l'inverse. Et quand tel est le cas, peu lui importe de savoir où se retrouvera ce grain, dans quelle installation il sera entreposé, dans la mesure où le prix lui convient.
Si les améliorations apportées au système, grâce à un investissement d'un milliard de dollars dans de nouvelles installations, nous permet de réaliser le genre d'économies que je vous mentionnais ce matin, et si ces économies sont réinvesties dans le système, parce que nous sommes une industrie très compétitive, il est certain que c'est l'exploitant agricole qui en profitera directement.
M. Wayne Easter: Et les lignes secondaires, qu'en pensez-vous: quelle est la position de vos sociétés?
M. Gordon Cummings: Eh bien, nous avons tous investi dans ce genre de lignes. Pour ce qui est d'Agricore, sachez que nous avons sans doute été les premiers à avoir des installations sur les lignes ferroviaires sur courte distance dans l'ouest du Canada, à proximité de Stettler, en Alberta. Si l'exploitation de ce genre de lignes nous paraît logique et qu'on peut envisager un service à long terme, nous serons prêts à investir sur la base des mouvements projetés qui, comme vous le disiez, se traduirait par une diminution globale des coûts pour l'agriculteur. Nous sommes conscients, de notre côté, que si nous positionnons mal nos installations, les céréaliculteurs ne nous livreront pas. Il faut être compétitif.
M. Marvin Wiens: J'aimerais ajouter un mot ou deux à propos des lignes sur courte distance et du réseau de lignes secondaires.
Nous sommes tout à fait d'accord avec ce que vient de dire M. Cummings. Nous incitons les céréaliculteurs et les exploitants de lignes sur courte distance à bien analyser la question pour être certains d'investir dans des réseaux qui seront viables à long terme. Quant à nous, en qualité de céréaliculteurs de l'Ouest, nous estimons qu'investir à court terme dans des lignes sur courte distance qui ne seraient pas viables, que cela reviendrait à jeter de l'argent par la fenêtre. Autrement dit nous nous demandons si, le cas échéant, il n'aurait pas été mieux que le gouvernement ou d'autres investissent dans le réseau routier?
Nous sommes donc d'accord avec le maintien de lignes ferroviaires sur courte distance quand cela est logique et économique, mais nous examinons l'aspect économique dans chaque cas de figure avant de prendre une décision.
Le président: Monsieur Cummings, vous avez une minute pour conclure.
M. Gordon Cummings: Merci, je l'apprécie.
Les mesures dont nous avons parlées aujourd'hui pour commercialiser le système—par l'adoption d'un arbitrage obligatoire et équitable et par la confirmation de notre statut d'expéditeur de référence—sont, quant à nous, essentielles pour mettre en oeuvre le genre de système qui répondra aux besoins du Canada.
J'espère nous être bien fait comprendre: sans ce genre de mesure, nous estimons que ce texte de loi sera incomplet et déséquilibré. Nous croyons que la meilleure chose que puisse faire votre comité consisterait à préciser le contenu du projet de loi pour indiquer que les sociétés céréalières sont des expéditeurs de référence, du moins pour ce qui est des appels d'offres, et pour que la question de l'arbitrage soit visée dans le mémoire d'entente. Nous ne doutons pas que vous ferez ce qu'il faut pour veiller à ce que le dépôt de ce projet de loi ne soit pas retardé au point où vous seriez confronté à une autre crise dans l'industrie du transport des grains.
Pour terminer, je rappellerai que, selon messieurs Goodale et Vanclief, le défi immédiat—pour la Commission canadienne du blé, les sociétés céréalières et les compagnies ferroviaires—consiste à s'unir pour travailler au bénéfice des céréaliculteurs. Nous pensons qu'ils ont raison en cela et que notre proposition permettra de parvenir à cet objectif. Nous vous demandons votre aide pour que l'industrie des grains de l'Ouest du Canada ainsi que tous ceux qui y participent puisse se mobiliser au service des agriculteurs.
Je vous demanderai de régler deux problèmes pour terminer: l'arbitrage et le statut d'expéditeur de référence.
Merci du temps que vous nous avez consacré.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Cummings.
Merci, messieurs, pour cet excellent exposé. Merci d'avoir répondu à toutes nos questions. Nous l'apprécions.
Chers collègues, cette pièce va être fermée jusqu'à la reprise de nos travaux, à 15 h 30. Nous ajournons jusque-là.