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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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36e Législature, 2ième Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 65
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 16 mars 2000
AFFAIRES COURANTES |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Gar Knutson |
Motion |
M. Michel Gauthier |
L'hon. Don Boudria |
M. John Williams |
M. Jay Hill |
M. Bill Blaikie |
M. André Bachand |
M. Stéphane Bergeron |
Mme Elsie Wayne |
Suspension de la séance |
Reprise de la séance |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
L'hon. Don Boudria |
Motion |
CHAMBRE DES COMMUNES |
Le Président |
M. Gilles Duceppe |
Motion |
M. Michel Gauthier |
Amendement |
L'hon. Don Boudria |
M. Jay Hill |
M. René Laurin |
M. Chuck Strahl |
M. Peter Stoffer |
M. John Williams |
M. Bill Blaikie |
Mme Monique Guay |
M. Lynn Myers |
M. Peter Stoffer |
M. Bill Casey |
M. Bob Kilger |
M. Gérard Asselin |
M. Ted McWhinney |
M. Garry Breitkreuz |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LE PARTI LIBÉRAL DU CANADA |
M. Robert Bertrand |
LES FRUCTICULTEURS DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE |
M. Werner Schmidt |
L'ENVIRONNEMENT |
Mme Aileen Carroll |
LA MINE BARAKOVA |
Mme Jean Augustine |
LE GOUVERNEMENT DE L'ONTARIO |
M. Alex Shepherd |
WILLIAM BARKER, VC |
M. Inky Mark |
L'ACCIDENT ROUTIER À SAINT-JEAN-BAPTISTE-DE-NICOLET |
M. Louis Plamondon |
LE PREMIER MINISTRE DU CANADA |
M. Marcel Proulx |
LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Jim Pankiw |
LE CANADA |
M. Peter Stoffer |
LE CONGRÈS DU PARTI LIBÉRAL DU CANADA |
M. René Laurin |
L'ENSEMBLE FOLKLORIQUE MANIGANCE |
M. Claude Drouin |
LES SOINS DE SANTÉ |
M. Norman Doyle |
L'AGRICULTURE |
Mme Rose-Marie Ur |
LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA |
M. Darrel Stinson |
LE QUÉBEC |
M. Maurice Godin |
QUESTIONS ORALES |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Diane Ablonczy |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Diane Ablonczy |
L'hon. Jane Stewart |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Herb Gray |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Herb Gray |
M. Michel Gauthier |
L'hon. Herb Gray |
M. Michel Gauthier |
L'hon. Herb Gray |
LES SOINS DE SANTÉ |
M. Bill Blaikie |
L'hon. Allan Rock |
M. Bill Blaikie |
L'hon. Allan Rock |
LA LOI SUR L'ENREGISTREMENT DES LOBBYISTES |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. John Manley |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. John Manley |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
M. Monte Solberg |
L'hon. Jane Stewart |
M. Monte Solberg |
L'hon. Jane Stewart |
M. Pierre de Savoye |
L'hon. Jane Stewart |
M. Pierre de Savoye |
L'hon. Jane Stewart |
M. Grant Hill |
L'hon. Jane Stewart |
M. Grant Hill |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Suzanne Tremblay |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Suzanne Tremblay |
L'hon. Herb Gray |
M. Werner Schmidt |
L'hon. Jane Stewart |
M. Werner Schmidt |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Caroline St-Hilaire |
L'hon. Jane Stewart |
LA FISCALITÉ |
M. Sarkis Assadourian |
L'hon. Paul Martin |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
M. Charlie Penson |
L'hon. Jane Stewart |
M. Charlie Penson |
L'hon. Jane Stewart |
L'INDUSTRIE |
L'hon. Lorne Nystrom |
L'hon. John Manley |
L'hon. Lorne Nystrom |
L'hon. John Manley |
LES OBLIGATIONS D'ÉPARGNE DU CANADA |
M. Scott Brison |
L'hon. Paul Martin |
M. Scott Brison |
L'hon. Paul Martin |
LA CITOYENNETÉ ET L'IMMIGRATION |
M. Steve Mahoney |
L'hon. Elinor Caplan |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
M. Garry Breitkreuz |
L'hon. Jane Stewart |
M. Louis Plamondon |
L'hon. Jane Stewart |
PATRIMOINE CANADA |
M. Yvon Godin |
L'hon. Sheila Copps |
L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL |
Mme Diane St-Jacques |
L'hon. Maria Minna |
LA JUSTICE |
M. Paul Szabo |
L'hon. Anne McLellan |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
Mme Diane Ablonczy |
L'hon. Jane Stewart |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Gordon Earle |
M. Denis Paradis |
L'AGENCE CANADIENNE POUR LE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL |
Mme Diane St-Jacques |
L'hon. Maria Minna |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le vice-président |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
Le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire |
Mme Hélène Alarie |
L'hon. Don Boudria |
Le vice-président |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Chuck Strahl |
L'hon. Don Boudria |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
Dépôt de documents |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Certains propos tenus à la Chambre |
Mme Marlene Jennings |
Le Comité permanent de l'agriculture et de |
M. Odina Desrochers |
La période des questions |
M. Derrek Konrad |
Le vice-président |
CHAMBRE DES COMMUNES |
Le Président |
Motion |
M. Jay Hill |
M. Rey D. Pagtakhan |
Mme Deborah Grey |
M. John Bryden |
M. Grant McNally |
M. Steve Mahoney |
M. Jay Hill |
M. René Laurin |
M. Rick Borotsik |
M. John Bryden |
M. Stéphane Bergeron |
M. Dennis J. Mills |
M. Garry Breitkreuz |
M. André Bachand |
M. Rey D. Pagtakhan |
M. Jacques Saada |
Mme Elsie Wayne |
M. Greg Thompson |
M. Eugène Bellemare |
M. Walt Lastewka |
M. Grant Hill |
M. Odina Desrochers |
M. Reg Alcock |
M. John Harvard |
Mme Francine Lalonde |
Mme Diane Ablonczy |
M. Paul Szabo |
M. John Bryden |
Mme Diane Ablonczy |
M. Grant Hill |
M. Ghislain Lebel |
Mme Diane Ablonczy |
M. Paul Szabo |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
M. John Bryden |
M. Darrel Stinson |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
M. Michel Gauthier |
Motion |
Suspension de la séance |
Reprise de la séance |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 65
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 16 mars 2000
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à ces pétitions. Je propose:
Que la Chambre passe maintenant à l'ordre du jour.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Hier, on a assisté à une situation un peu particulière où il y a eu, devant cette Chambre, une motion de fond qui remet en cause l'impartialité des services accordés aux parlementaires de notre parti politique, le Bloc québécois.
Les gestes qui ont été posés nous ont conduits à déposer ce qui est la chose la plus grave dans un Parlement, une motion de non-confiance à l'endroit de la Présidence. Alors que ce Parlement fait face à une motion de non-confiance à l'endroit du Président, une chose qui ne s'est pas vue depuis 1956—cela fait 44 ans que dans ce Parlement, il n'y a pas eu une telle motion de déposée—une motion amplement cautionnée par les gestes indécents qui ont été posés par l'administration de la Chambre des communes concernant la confidentialité des services offerts à cette formation politique, hier, on a refusé de débattre de cette motion de fond.
On a préféré, parce que c'est le congrès du Parti libéral qui commence, passer sur le corps du Québec avec le projet de loi C-20. On a voté contre le Québec, hier, dans cette Chambre. Aujourd'hui, pour une deuxième journée, le gouvernement s'apprête à passer au-delà de cette motion. Aujourd'hui, on veut passer à l'ordre du jour comme si de rien n'était. Le Parlement est en crise, la Présidence est en crise, c'est toute l'institution démocratique qui est en crise. Le Parti libéral se sert du Parlement comme d'un instrument partisan à la veille de son congrès.
Qu'est-ce qu'on fait dans ce Parlement? On regarde aller les choses, on va débattre de motions, de projets de loi, comme si de rien n'était. L'institution centenaire qu'est le Parlement est en cause, et on ne débattra pas de la motion du Bloc. Est-ce que les souverainistes dans cette Chambre n'ont plus leur place? Est-ce que les députés qui représentent le Québec—70 p. 100 du Québec est représenté par des souverainistes dans cette Chambre—n'ont plus leur place?
Le fait qu'on s'inquiète de la Présidence, qu'on remette l'institution en question, qu'on soit victimes de quelque chose qui ne s'est jamais vu en termes de partialité des services de la Chambre des communes, cela n'a pas d'importance?
Monsieur le Président, quel message envoyez-vous au Québec? Qu'il est plus important de débattre d'une quelconque motion que de débattre de la question de la Présidence? Est-ce que les députés du Québec qui font partie du gouvernement vont laisser longtemps le droit des Québécois et la démocratie se faire bafouer dans ce Parlement?
Hier, on a eu une discussion. Je vous ai parlé à l'extérieur de la Chambre des communes. Je vous ai soumis respectueusement mon point de vue.
Si le Parlement du Canada n'est pas un instrument partisan au service du Parti libéral, parce que le congrès libéral s'en vient, et si le Parlement du Canada a encore une once de fierté, il me semble que le Président a tous les pouvoirs pour décider que dans cette Chambre, on ne fera pas ce que le gouvernement nous demande de faire, mais on va discuter de quelque chose qui est fondamentale.
Est-ce que la démocratie a encore un sens dans ce pays? Est-ce que les personnes qui sont élues par les citoyens du Québec, de façon tout à fait légitime, ont le droit de parole? Est-ce qu'ils ont le droit de remettre l'institution en question? Est-ce qu'ils ont le droit de vouloir débattre de la question de l'impartialité? Est-ce qu'ils ont le droit de débattre de leurs droits, ou est-ce que c'est plus important de passer aux ordres émanant du gouvernement?
Dans quel pays évoluons-nous? Qu'est-ce qui se passe? Est-ce que le Parlement n'a plus de valeur? Est-ce que les principes parlementaires n'existent plus? Est-ce que, parce qu'on veut se débarrasser des séparatistes dans ce Parlement, une motion de non-confiance à l'endroit de la Présidence n'a pas d'importance? Faisons comme si de rien n'était.
Le Président quitte le fauteuil, vous le remplacez. Vous avez tous les pouvoirs. Vous pouvez décider. Vous, vous pouvez décider qu'on va discuter des vraies affaires. Vous, vous pouvez dire aux citoyens du Québec et du reste du Canada que vous n'accepterez pas que ce Parlement devienne un instrument au service du Parti libéral du Canada. Vous, vous pouvez dire aux citoyens du Canada que vous considérez que l'institution parlementaire est plus importante que le congrès du Parti libéral.
On sait que c'est embêtant pour le gouvernement, on en convient. On sait que ça fait mal. On sait que c'est tannant de se présenter devant les militants libéraux et de leur dire: «Le Parlement est en crise. On a agi de telle sorte que maintenant on va devoir débattre d'une motion.» On sait que c'est lourd, mais c'est grave. Le Parlement n'est pas au service de la partisanerie. Le Parlement est mis en place pour permettre aux parlementaires de débattre démocratiquement.
S'il y a une institution comme celle-là, c'est parce qu'à travers l'histoire, on a compris qu'on ne pouvait pas régler les conflits par la violence et qu'on ne pouvait pas non plus diriger les peuples par une monarchie, par quelqu'un qui décide et qui dicte et où les autres doivent suivre. On a compris qu'il fallait que les représentants du peuple se parlent.
C'est pour cela qu'il y a un tapis vert ici et que cela s'appelle la Chambre des communes. C'est parce qu'un jour on a décidé que les Communes en Angleterre seraient représentées à un endroit où chaque personne aurait droit de parole.
Savez-vous pourquoi il y a une distance comme celle-là entre les bureaux? Parce que c'est la longueur de deux épées, plus un pied, plus une longueur de bras. Vous savez pourquoi? Parce qu'autrefois on se battait dans les parlements. Aujourd'hui, avec le temps et l'histoire, on a fait en sorte qu'il y a maintenant une institution qui permet de régler de façon civilisée les conflits idéologiques.
Les choses doivent se régler d'une façon démocratique. Mais voilà que pour la première fois depuis des années, pour la première fois de mémoire d'homme depuis que ce Parlement existe, on fait un immense pas en arrière. On revient en arrière et on dit aux députés: «Non, dans le Parlement maintenant, c'est le gouvernement qui décide». C'est dérangeant de voir des séparatistes, comme si les séparatistes n'existaient pas au Québec. C'est la moitié de la population et tantôt, avec votre façon d'agir, ce sera les trois quarts de la population du Québec.
Permettez-moi de vous dire qu'il y a un prix politique à payer. Je veux que le Président le sache, je veux que l'institution soit sensibilisée, je veux que les fonctionnaires qui sont ici, qui sont des gens habitués au respect de la démocratie, ces gens n'en reviennent pas—ils n'ont pas le droit de parler mais je sais qu'ils n'en reviennent pas—de la façon cavalière avec laquelle ce gouvernement, de façon partisane, est en train d'asservir le Parlement du Canada. C'est laid ce qui se passe ici. C'est très laid ce qui se passe ici.
Tout le monde est scandalisé. Je suis scandalisé. Les citoyens qui nous écoutent sont scandalisés. Les Québécois sont scandalisés. La démocratie internationale est scandalisée, parce que cela va se savoir.
Je sais qu'il y a des démocrates de l'autre côté, des gens qui m'écoutent actuellement, et je fais appel à leur sens démocratique. Dans certains pays du monde, cela va se savoir que le Parlement du Canada, qui est en contestation de sa Présidence, parce que les droits de toute une formation politique ont été bafoués, ne veut pas discuter de ce problème. On préfère présenter une motion pour passer à l'ordre du jour. On préfère adopter un projet de loi qui va enlever des droits aux Québécois. On préfère se pencher sur une motion du Parti conservateur, qui est très intéressante en soi, je n'en disconviens pas, mais qui n'a aucune commune mesure avec la réalité de ce qui se passe ici.
L'institution parlementaire est en crise. Le Canada est en crise. Et il y a un prix à payer. Je ne peux pas croire que, de l'autre côté, il n'y a pas des personnes qui ne croient pas fondamentalement à ce que je dis.
Tout contestataire de ce pays que je sois, s'il y a une personne ici qui respecte l'institution du Parlement, c'est moi. J'ai fait cent fois le message à mes collègues: il faut respecter le Parlement, parce que lorsqu'on ne se parle plus dans un parlement, lorsqu'on a la conviction qu'on n'a plus rien à exprimer de façon démocratique, il y a un problème, un grave problème.
Aujourd'hui, j'en appelle de la décision du gouvernement. En tant que Président, protecteur de mes droits, protecteur des droits de ce parti politique, protecteur des droits de tous les partis d'opposition, protecteur des droits de tous les députés de cette Chambre qui ne sont pas membres du Conseil des ministres, protecteur aussi du droit de parole des ministres, je vous demande d'exiger, maintenant, du gouvernement, qu'on passe à une affaire beaucoup plus urgente qu'une simple motion, à une motion de fond.
Si vous ne le faites pas, monsieur le Président, non seulement vous nous décevez, non seulement vous nous frappez durement—nous, les séparatistes, on comprendra qu'on n'est pas importants dans ce Parlement, que le vote des milliers et des millions de Québécois qui ont voté pour nous, cela n'a pas d'importance ici à Ottawa, je ne croyais pas qu'on en était rendu là—non seulement, si vous ne nous écoutez pas, vous niez la valeur représentative de tous ces députés qui sont ici, mais en plus, vous laissez passer un message extrêmement triste à la démocratie internationale.
Cela va se savoir qu'au Parlement du Canada, l'institution est en crise et on préfère passer à des motions.
C'est inadmissible, et je comprendrai—je parle en mon nom, pas au nom de mon parti, mais possiblement que les gens me suivront—qu'il n'y a plus rien à faire dans cette institution. Sur toutes les tribunes, avec beaucoup de ferveur, je l'expliquerai aux Québécois. Je sais que des fédéralistes bien pensants vont trouver triste que je puisse le faire, mais je vais le faire sur toutes les tribunes, au Québec, dans toutes les stations de radio, dans tous les médias d'information, j'expliquerai aux citoyens qu'il n'y a plus rien à faire dans le Parlement du Canada. On a beau être élus, on est des citoyens de seconde zone.
À tous ces députés, que vos droits soient floués, cela n'a aucune importance pour la Présidence. On s'occupe de motions quelconques sur la santé, sur autre chose, les affaires courantes. Cela n'a pas d'importance. Le Bloc québécois qui représente les deux tiers du Québec s'est fait flouer. Nos droits ont été bafoués. Nous avons été victimes d'un processus qui nous a coûté cher au plan politique.
On veut se défendre légitimement. On veut expliquer aux citoyens que nous n'avons qu'une seule arme, nous, les souverainistes, dans ce Parlement, c'est de parler, d'expliquer nos points de vue, de confronter nos idées, de confronter le gouvernement.
On comprendra, monsieur le Président, que vous vous faites le complice de cette situation. Vous vous faites le complice, vous, le vice-président de la Chambre, le Président de la Chambre et toutes les personnes qui sont en situation de pouvoir décider, pour faire en sorte—oui, vous pouvez me laisser parler parce que c'est peut-être la dernière fois que je parle dans ce Parlement, j'aime autant vous le dire—d'être le complice d'une basse manoeuvre. La Présidence est devenue au service du Parti libéral. C'est ce qu'on comprendra si vous ne prenez pas de décision.
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai donné beaucoup de latitude à l'honorable député de Roberval dans ses remarques relatives à son recours au Règlement à cause du fait que je dois l'entendre. Je crois toutefois qu'il va un peu trop loin quand il suggère que la Présidence est complice du gouvernement sur cette question.
Le Président est ici pour rendre une décision sur ce recours au Règlement. C'est la raison pour laquelle j'ai écouté l'honorable député. À ce stade-ci, je voudrais continuer à le faire avec les autres députés et rendre une décision. Elle sera rendue dans le contexte de notre pratique et des précédents de cette Chambre que, sans doute, les honorables députés me citeront. Comme il faut continuer, je donne la parole à l'honorable leader du gouvernement à la Chambre.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je ne veux pas parler trop longuement sur cette question puisque c'est un recours au Règlement, ce n'est pas une période de discours. Je me permettrai seulement d'ajouter quelques remarques.
Dans un premier temps, le gouvernement n'a pas l'intention de laisser traîner à l'ordre du jour pendant longtemps une pareille accusation à propos de la Présidence. Ce n'est pas le cas, bien sûr. Le gouvernement veut lui aussi que dans un avenir très rapproché, nous débattions de cette accusation, de cette motion de non-confiance, telle qu'elle est exprimée. Je ne partage pas du tout cette accusation, mais on en reparlera et je suis bien prêt à en débattre.
Toutefois, je pense que vous devez connaître quelques faits. D'une part, j'entends rencontrer les leaders parlementaires des autres partis. Je voudrais fixer une date dans un avenir très rapproché pour qu'on puisse ainsi faire en sorte que la Chambre soit purifiée de cette accusation. Comme je l'ai dit, je ne partage pas du tout l'accusation, mais j'en débattrai le moment venu. Je pense qu'on pourrait le faire dans les prochains jours et je suis prêt à entreprendre une discussion avec les autres leaders parlementaires.
Aujourd'hui, la journée avait déjà été désignée pour le bénéfice d'un des partis de l'opposition, non seulement comme c'est notre coutume, mais aussi dans le respect de nos conventions constitutionnelles en vertu desquelles il y doit y avoir un certain nombre de jours de l'opposition, en l'occurrence sept, avant d'adopter les crédits budgétaires pour payer le salaire de nos employés, les bénéfices aux Canadiens et aux Canadiennes, les prestations sociales et, enfin, tout le reste qu'on doit payer.
Une voix: Faites-nous pleurer.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je m'excuse, mais il y a un expert constitutionnel de l'autre côté qui est en train de nous informer à propos du fonctionnement des journées de l'opposition et de leur importance.
Entre-temps, nous avons l'intention, dans le grand respect de l'institution et de la Présidence, de mettre ce dossier à l'ordre du jour dans un avenir très rapproché, après ma rencontre avec les leaders parlementaires de l'opposition, pour faire en sorte qu'on puisse en débattre pour y mettre fin. J'aimerais toutefois aujourd'hui traiter de la motion proposée par le Parti conservateur, puisque c'est une journée qu'on avait désignée au préalable. Je l'ai même d'ailleurs désignée lundi dernier, on s'en souviendra sans doute.
Voilà ce que je voulais dire à la Présidence, mais je ne veux certainement pas faire traîner ce dossier au Parlement. Quand la motion sera soumise à la Chambre, j'aurai l'occasion moi aussi de faire un grand discours qui ne sera pas du tout semblable à celui qu'on vient d'entendre. Il sera, bien sûr, très différent. Mais je le ferai seulement à ce moment-là, toujours dans le respect des traditions et de la façon dans laquelle nous devons fonctionner.
Entre-temps, je vous soumets que la motion, telle que proposée par le secrétaire parlementaire du premier ministre, est tout à fait en ordre, qu'on devrait tout de suite procéder au vote sur cette motion, faire notre journée de travail aujourd'hui et faire cette rencontre entre les leaders des partis, tel que je viens de le proposer.
[Traduction]
M. John Williams (St. Albert, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur la motion, qui a été présentée après un rappel au Règlement. J'attire votre attention sur le guide de procédure de Marleau et Montpetit, à la page 365, sous le titre «Affaires courantes». Je cite:
Les affaires courantes forment une partie du programme quotidien pendant laquelle certains travaux essentiels sont abordés, ce qui donne aux députés l'occasion de porter diverses questions à l'attention de la Chambre, le plus souvent sans débat.
Nous sommes saisis d'une question présentée par un membre d'un parti politique et nous ne sommes peut-être pas tout à fait à l'aise d'en discuter ici, mais, puisqu'elle est inscrite au Feuilleton, nous devons en débattre.
Revenons à la page 369 du guide Marleau et Montpetit où il est question d'un précédent. Je cite:
Le 13 avril 1987, pour tenter d'escamoter certaines rubriques des Affaires courantes, le secrétaire parlementaire du vice-premier ministre a proposé que la Chambre passe du «Dépôt de documents» aux «Motions», ce qui aurait eu pour effet, si la motion avait été adoptée, de faire tomber toutes les autres rubriques des Affaires courantes. Le Président avait déclaré une motion semblable irrecevable à peine quelques mois plus tôt. Un débat s'est ensuite engagé sur un rappel au Règlement et le Président a reporté sa décision.
C'est exactement ce qui se passe ici aujourd'hui où le gouvernement veut escamoter les Affaires courantes parce que cela fait son affaire, mais ce n'est pas ce que la Chambre souhaite. À mon avis, le précédent que je viens de citer s'applique parfaitement bien à la situation.
Dans sa décision, le président Fraser s'était dit préoccupé et il concluait que la motion pouvait être maintenue, mais pour cette fois-là seulement. Ses paroles sont rapportés ainsi à la page 370 du guide Marleau et Montpetit:
[...] il serait dans le meilleur intérêt de la Chambre de laisser, en l'instance, le gouvernement déposer sa motion [...]
L'article se termine ainsi:
Il précisait aussi que sa décision s'insérait dans une série d'événements auxquels les règles de procédure n'offraient aucune solution et ne devait pas faire jurisprudence.
Cette question s'est posée parce que le programme du gouvernement et celui de la Chambre se trouvaient paralysés du fait de diverses motions et questions qui perturbaient les travaux de la Chambre et empêchaient cette dernière de s'occuper des affaires courantes. Ce n'est pas le cas ici. Le gouvernement peut s'occuper des affaires courantes. Le problème est qu'il ne le veut pas et qu'il refuse de faire face aux questions soulevées par les députés.
J'aimerais attirer votre attention, monsieur le Président, sur le fait que la Chambre des communes a toujours dû se défendre contre la Couronne, le gouvernement. Le président est la personne qui parle en notre nom en tant que députés de la Chambre des communes. Il doit veiller à ce que la Couronne respecte nos droits et privilèges.
Nous avons devant nous une motion visant à empêcher les députés de soulever à la Chambre les questions qu'ils estiment importantes. Nous avons vu le leader du gouvernement à la Chambre et le secrétaire parlementaire du premier ministre, qui représentent le gouvernement, imposer à la Chambre leur programme plutôt que celui de la Chambre. Voilà le problème, monsieur le Président. Votre rôle est de défendre les députés et non pas la Couronne. C'est votre devoir et c'est notre privilège d'exiger que vous le fassiez.
Les députés ministériels ont fait de ce jour un jour désigné et dit qu'il fallait en terminer avec les jours désignés parce que la période des crédits arrivait à terme. Sans chercher très loin, nous savons que ces jours désignés sont les dernières miettes dont nous avons à débattre à la Chambre dans le cadre de l'étude des crédits et leur octroi à la Couronne afin qu'elle puisse poursuivre ses travaux. Ce sont les dernières miettes qu'on nous a laissées pour obliger le gouvernement à rendre des comptes.
Maintenant que la période des crédits tire à sa fin, le gouvernement, après nous avoir refusé le droit de débattre de ces questions durant la période normale des crédits, se trouve contraint de faire une petite place dans son programme et de nous accorder le droit de débattre de quelques miettes.
Ce que je veux dire, c'est que votre devoir, monsieur le Président, est de veiller à ce que la Couronne respecte nos privilèges. La Couronne ne veut pas que nous, députés, débattions de questions susceptibles d'être soulevées dans le cadre des affaires courantes. Je vous demande de déclarer la motion irrecevable.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je serai bref. Pour renforcer ce que mon collègue, le député de St-Albert, vient de dire à propos de ce que nous débattons, je dirai que ce recours au Règlement touche l'essence même de la Chambre.
Il n'y a rien de plus sérieux qu'un parti politique qui présente une motion de censure à l'endroit du président. Je ne peux rien imaginer de plus sérieux. Que moi-même, les députés de mon parti ou de tout autre parti soyons d'accord ou non sur cette motion, cela importe peu. Comment la Chambre peut-elle poursuivre ses travaux tant qu'un nuage noir plane au-dessus d'elle? Nous devons régler cette situation.
Honnêtement, il est déplorable que le gouvernement contourne les affaires courantes comme il l'a fait et qu'il impose sa volonté à ses députés d'arrière-ban, les forçant à faire abstraction de leurs propres droits et privilèges uniquement pour appuyer leur parti et le gouvernement.
Si le gouvernement continue d'agir de la sorte, comme hier et aujourd'hui, je crois qu'il y a lieu que chacun des députés soulève la question de privilège. Ce sont sur nos privilèges que le gouvernement empiète en essayant d'escamoter les affaires courantes de l'ordre du jour pour passer à son programme.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, de très bonnes remarques ont été faites. Je commencerai en disant que, quand—et non pas si—la motion de censure à l'égard de la Présidence arrivera, je n'ai pas l'intention de l'appuyer. Elle n'a, comme l'a souligné le dernier intervenant, aucun rapport avec le sujet dont nous débattons aujourd'hui.
Je pense qu'il y a une sorte de tendance naturelle, et je reconnais au moins au leader du gouvernement à la Chambre le mérite de dire que c'est la journée de l'opposition des conservateurs et que le gouvernement ne veut pas qu'ils perdent leur journée, etc. C'est une façon de voir les choses assez raisonnable. Toutefois, plus j'y pense et plus je vois les choses comme je les voyais hier.
Hier, je présumais que nous réglerions les affaires courantes, puis que nous passerions aux motions et au débat sur la motion de censure à l'égard du Président. Cela ne s'est pas produit, car il y a eu une motion proposant de passer à l'ordre du jour.
Je le répète, c'était dicté par le programme du gouvernement. Ce n'était pas dicté par une urgence quelconque concernant le projet de loi C-20, comme je l'ai dit et redit à la Chambre et au comité, à savoir qu'aucune urgence ne nécessitait que le projet de loi C-20 soit adopté hier. Pour faire preuve de constance dans ma propre vision des choses, je dois dire que cette situation se répète maintenant.
Le leader du gouvernement à la Chambre a laissé entendre que les leaders parlementaires pourraient peut-être se réunir et décider si cette motion pourrait faire l'objet d'un débat. J'ai tout d'abord pensé que c'était peut-être quelque chose dont les leaders parlementaires pouvaient discuter. Étant donné que c'est le gouvernement qui choisit quand il veut que cela soit décidé, je dois dire qu'après réflexion, je ne pense pas que cela soit acceptable.
Qu'est-ce qu'on ferait s'il y avait une véritable atmosphère de non-confiance dans la présidence, ce dont je doute? Cependant, qu'est-ce qu'on ferait si c'est le cas? Est-ce que nous trouverions normal que le gouvernement décide de remettre à plus tard le règlement de cette affaire? Certainement pas.
Je ne pense pas que le gouvernement ait la prérogative de déterminer, en ayant recours à cette manoeuvre procédurale consistant à proposer de passer à l'ordre du jour, quand la Chambre sera saisie de cette affaire qui relève au premier chef de la Chambre et de la présidence, et non du gouvernement.
Ce qui se passe entre la présidence et la Chambre ne regarde pas le gouvernement. C'est strictement à la Chambre et à la présidence d'en décider. Nous avons une procédure pour ce faire. Nous avons les affaires courantes et nous avons les motions et c'est pendant cette périodes que l'on traite des motions.
En ce qui concerne mes collègues du Parti progressiste-conservateur, je sais ce que je ressentirais si je savais que ma journée d'opposition risquait de passer à l'as à cause de ça. Par ailleurs, je pense qu'il est parfaitement légitime de vouloir défendre, pour la postérité, le droit de la Chambre, et non du gouvernement, à gérer ce genre de question, principe qui est plus important que le maintien d'une journée d'opposition.
Cette thèse peut être défendue de façon très convaincante en reprenant certains des arguments qui ont déjà étés présentés, mais également en invoquant le principe selon lequel cette question doit être réglée à la première occasion. C'est quelque chose qui devrait être traité selon un échéancier établi par la Chambre, et non pas par le gouvernement.
Certes, il y a des gens qui disent que c'est la Chambre qui va adopter la motion pour que l'on passe à l'ordre du jour et que la Chambre aura ainsi l'occasion d'avancer cet argument, mais nous savons pertinemment que cet argument a ses limites parce qu'en définitive c'est le gouvernement qui déterminera de faire adopter la motion ou non.
Il y a des occasions où l'on devrait mettre de côté la quasi-fiction politique selon laquelle la volonté de la majorité est la volonté de la Chambre. Il y a des choses qui appartiennent en propre à la Chambre et que la majorité ne peut en décider par le truchement d'un vote. Il s'agit de choses qui ont trait à la Chambre même et aux rapports entre la présidence et la Chambre. J'exhorterais simplement la présidence à prendre cette affaire très au sérieux.
Que ce soit le cas ou simplement une possibilité, je ne crois pas que ce soit dans l'intérêt de la présidence ou de la Chambre de donner cette impression, comme si la présidence ne voyait pas d'un bon oeil que la question soit abordée, alors qu'il n'en est rien, ce me semble. Telle n'est pas l'attitude de la présidence à l'égard de cette motion et tel ne devrait pas être le cas.
Au lieu de donner l'impression que ce débat suscite quelque anxiété, il vaudrait mieux, dans l'intérêt des précédents, de la procédure, des rapports entre la présidence et la Chambre, des prérogatives de la Chambre et, enfin, de l'image de la présidence même, que l'affaire soit débattue à la première période prévue pour cela, c'est-à-dire les affaires courantes. Cela sera peut-être un peu pénible pour les intéressés, mais la démocratie traverse parfois des moments pénibles, comme nous avons pu le constater ces derniers jours, alors que nous avons été privés de sommeil.
[Français]
M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, je serai bref. On a écouté les parlementaires qui se sont prononcés ici. Nous avons eu une grosse semaine, on a voté pendant 36 heures.
Je pense que les deux sujets sont extrêmement importants. D'abord, il faut préserver, comme certains l'ont dit, ce qu'il nous reste de pouvoir en tant que partis d'opposition, soit de présenter des sujets et d'en discuter pendant une journée spécifique. En même temps, il est vrai que la motion de non-confiance à l'égard de la Présidence est un élément fort important aussi.
Je pense qu'on est réchauffés depuis le début de la semaine, donc, pourquoi ne pas faire les deux aujourd'hui? Pourquoi ne pas avoir le consentement de cette Chambre pour siéger ce soir et discuter de la motion présentée par le Bloc québécois? On a siégé pendant plusieurs nuits pour voter sur un projet de loi, pourquoi ne pas faire notre journée de travail, en débattant de notre motion, et continuer ce soir sur ce sujet fort important?
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, il s'agit là d'une suggestion fort intéressante du Parti conservateur, et j'imagine que vous la soumettrez éventuellement à l'attention des députés de cette Chambre.
Mon collègue de Roberval a expliqué de façon très éloquente les raisons philosophiques, historiques et politiques pour lesquelles vous devriez juger irrecevable la motion présentée par le secrétaire parlementaire du premier ministre.
Si j'ai votre attention, monsieur le Président, j'aimerais prendre quelques instants pour évoquer un certain nombre d'arguments plus techniques.
Nous avons eu le temps, ces dernières heures, de consulter attentivement la littérature, dont Erskine May, Beauchesne et Montpetit-Marleau, pour savoir si, effectivement, il y avait quelque chose qui pouvait donner préséance à une motion comme celle qui vient d'être présentée par le gouvernement sur une motion de censure à l'endroit de la Présidence.
Nulle part n'avons-nous trouvé dans la littérature quelque argument pouvant soutenir une décision voulant qu'une motion de retour à l'ordre du jour aurait préséance sur une motion de censure de la Présidence.
Hier, vous avez rendu une décision. D'aucuns pourraient prétendre que cette décision était motivée par le fait que la Chambre était sous le coup d'un ordre qui avait été imposé par le gouvernement dans son double bâillon de lundi sur le projet de loi C-20 et que, conséquemment, puisque c'était cela qui était à l'ordre du jour du gouvernement et puisqu'il devait rester un seul jour de séance pour la troisième lecture, vous n'aviez d'autre choix, contraint par cet ordre de la Chambre, d'accorder voix à la motion du gouvernement d'hier.
Le leader du gouvernement à la Chambre nous servait tout à l'heure un certain nombre d'arguments fallacieux pour expliquer les raisons pour lesquelles nous devrions encore une fois passer aux ordres du gouvernement, alors qu'il y a au Feuilleton une motion de censure à l'endroit de la Présidence.
Il disait: «Nous avons une journée d'opposition. Il en reste seulement quelques-unes. On a peu de temps pour les passer, alors il faut faire vite pour permettre à tous les partis d'avoir leur journée d'opposition.» Ce même gouvernement, qui a bousculé cette Chambre pendant près de quatre semaines pour faire adopter le projet de loi C-20 à toute vapeur, avant le congrès du Parti libéral du Canada, qui s'est donc servi de cette Chambre à des fins purement partisanes, pour faire passer le projet de loi C-20, aurait fort bien pu réserver un certain nombre de jours pour les travaux des subsides. Il ne l'a pas fait. Il a usé de manoeuvres partisanes pour faire plier cette Chambre et faire adopter le projet de loi C-20 conformément à son agenda politique.
Monsieur le Président, je vous disais que nous avions consulté la littérature. Celle-ci dit, et de façon très claire, qu'une motion de censure à l'endroit de la Présidence a priorité sur toute autre affaire. Je pense que le leader du gouvernement à la Chambre a trahi le véritable visage autocratique de ce gouvernement, il y a quelques instants, en disant: «Le gouvernement n'a pas l'intention de laisser traîner cette affaire bien longtemps.» Mais ce n'est pas sa décision. Ce n'est pas une décision qui relève du gouvernement. C'est une décision qui relève de la Présidence. C'est une décision qui relève de la Chambre.
En tant que protecteur des droits de chacun des parlementaires en cette Chambre et en tant que protecteur des droits de l'opposition, de la minorité en cette Chambre, je vous exhorte, monsieur le Président, à juger cette motion présentée par le secrétaire parlementaire du premier ministre comme étant irrecevable à sa face même.
À la lecture de la littérature existante, il n'y a aucune référence, aucune disposition, aucun précédent, aucune jurisprudence qui pourrait laisser entendre que la motion présentée par le secrétaire parlementaire du premier ministre puisse avoir préséance sur la motion de censure.
Cependant, comme je l'ai dit, tout indique que la motion de censure doit avoir préséance sur toute autre affaire, et c'est ce que je vous invite à décider, monsieur le Président.
[Traduction]
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je suis du même avis que le député du NPD et les députés du Bloc.
Nous sommes censés faire partie d'une société démocratique. Nous venons ici, et les gens s'attendent à ce que la démocratie règne à la Chambre des communes. Si une motion de censure est présentée, il est alors indispensable qu'elle fasse l'objet d'un débat et que les deux côtés de la Chambre puissent s'exprimer. Chacun d'entre nous devrait pouvoir se prononcer.
C'est une situation très grave. Si on ne nous permettait pas d'agir de la sorte et d'en discuter, les Canadiens diraient probablement, et, qui sait, c'est peut-être ce que nous voulons, qu'ils vont chasser tous les libéraux du pouvoir aux prochaines élections si nous n'avons pas ici l'occasion de montrer que leur voix a été entendue. C'est certes ce qui va se produire.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, une possibilité d'entente semble vouloir se dessiner. J'aimerais en avoir le libellé exact dans quelques minutes. Toutefois, dans l'immédiat, je peux vous dire que l'idée générale est la suivante. À la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles cet après-midi, la Chambre ne passerait pas à la période des initiatives parlementaires, le débat sur la motion présentée au nom du leader du Bloc québécois débuterait à ce moment-là, le débat prendrait fin à 23 heures et il serait suivi d'une sonnerie d'appel de 15 minutes et d'un vote.
C'est en gros ce qui est envisagé. J'en ferais une motion officielle. Je semble constater que tous sont d'accord avec cette mesure de l'autre côté. Si c'est le cas et qu'il peut y avoir une entente à ce sujet, nous serions disposés à retirer...
Le vice-président: Je vais apporter mon aide dans cette affaire dès maintenant. Je suis fort disposé à suspendre la séance pendant quelques minutes afin de permettre la poursuite des discussions.
La présidence souhaite réfléchir à la décision qu'elle va prendre en tenant compte des présentations faites par le député de Roberval, le député de Prince George—Peace River, le député de Winnipeg—Transcona, le député de Richmond—Arthabasca et le leader du gouvernement à la Chambre.
[Français]
C'est une situation très grave et très sérieuse. La Présidence a pris connaissance de tout ce qui a été dit sur ce sujet et je désire remercier tous les députés pour leur aide.
SUSPENSION DE LA SÉANCE
Le vice-président: Donc, je vais maintenant suspendre la séance jusqu'à l'appel de la Présidence.
(La séance est suspendue à 10 h 48.)
[Traduction]
REPRISE DE LA SÉANCE
La séance reprend à 11 h 10.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des consultations et je crois que la Chambre donnerait le consentement unanime à l'égard de la motion qui suit. Je propose:
Que la motion proposée par M. Knutson (secrétaire parlementaire du premier ministre) plus tôt aujourd'hui soit retirée;
Que la Chambre passe à la motion no 59;
Qu'au plus tard à 18 h 30 aujourd'hui, toutes les questions nécessaires pour disposer de la motion no 59 (Affaires courantes) inscrite au nom de M. Duceppe (Laurier—Sainte-Marie) soient mises aux voix et qu'un ou plusieurs votes par appel nominal soient réputés demandés, à la condition que le ou les votes par appel nominal ne puissent être différés et que la sonnerie d'appel se fasse entendre pendant 15 minutes, et à la condition que les périodes réservées aux déclarations des députés et aux questions orales soient tenues aux heures habituelles;
Si j'ai bien compris, si nous n'avions pas mentionné cela dans la motion, nous aurions pu ne pas avoir de période des questions. Je poursuis:
Que le jour désigné qui devait être tenu aujourd'hui soit remis au vendredi 17 mars 2000, et que tout vote par appel nominal demandé ce jour-là soit différé jusqu'au mardi 21 mars 2000, à la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement.
[Français]
Le vice-président: La Chambre a entendu la proposition de l'honorable leader du gouvernement à la Chambre. Y a-t-il consentement unanime de la Chambre pour qu'il puisse présenter cette motion?
Des voix: D'accord.
M. Michel Gauthier: Monsieur le Président, je suis d'accord avec la motion, mais je veux bien m'assurer qu'il y aura quand même une période de questions orales au moment prévu.
L'hon. Don Boudria: Oui.
M. Michel Gauthier: Très bien, c'est parce que je n'avais pas saisi.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime de la Chambre pour adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
[Traduction]
Le vice-président: Je remercie tous les députés d'avoir collaboré pour arriver à cet arrangement. En ce qui a trait au débat que nous sommes sur le point de commencer, j'exhorte les députés à se conduire dans le respect des meilleures traditions parlementaires. Permettez-moi de citer Redlich, qui a traité d'un tel débat dans son ouvrage The Procedure of the House of Commons. À la page 146, on relève ce qui suit:
Les règles prescrivent la présentation en bonne et due forme d'un avis de motion, selon lequel un vote de censure à l'endroit du Président sera éventuellement proposé. Il va presque sans dire qu'un tel événement est anormal, voire rare, et qu'une telle motion est acceptée par la Chambre uniquement si les circonstances le justifient pleinement. ...l'événement est susceptible de nuire sérieusement à la haute position et à la dignité du Président si, outre le fait que la manière dont il applique les règles peut donner lieu à une contestation lors d'occasions spéciales et importantes, n'importe quel député peut mettre en doute l'autorité du Président quand il le veut et si le Président est appelé à tout moment à devoir justifier ses décisions.
J'invite tous les députés à réfléchir à ces mots.
* * *
[Français]
CHAMBRE DES COMMUNES
LE PRÉSIDENT
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) propose:
Que cette Chambre décide qu'elle n'a plus la confiance en son Président puisqu'elle considère qu'il a fait preuve de partialité en jugeant non fondée la question de privilège soulevée par la députée de Rimouski—Mitis le mercredi 1er mars 2000, et en rejetant le rappel au Règlement du député de Beauharnois—Salaberry au détriment des droits et privilèges de tous les députés et députées de cette Chambre.
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je signale à votre attention que l'honorable chef du Bloc québécois partagera son temps de parole avec le député de Roberval.
M. Gilles Duceppe: Monsieur le Président, je veux tout d'abord faire quelques remarques avant de procéder au fond du sujet.
Je remercie tous les partis d'opposition qui ont fait comprendre au gouvernement qu'il fallait discuter de cette question, peu importe que le congrès du Parti libéral débute aujourd'hui. Je remercie tout particulièrement les députés du Parti progressiste-conservateur qui ont accepté de reporter leur journée d'opposition.
Je pense que c'est là un geste de grand respect envers cette institution. Je ne peux pas nécessairement en dire autant du gouvernement jusqu'à ce jour.
Ma deuxième remarque est celle-ci. Certains ont prétendu qu'on a voulu utiliser cette motion pour retarder les débats sur le projet de loi C-20. C'est tout à fait loufoque; cet argument ne tient pas la route, puisque notre proposition disait que nous devions soumettre deux cas—qui nous semblaient et que nous croyons toujours anormaux quant aux procédures de la Chambre—au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Si cette proposition de la députée de Rimouski—Mitis avait été acceptée, d'aucune façon le débat sur le projet de loi C-20 n'aurait été retardé, nous ne tiendrions même pas ce débat aujourd'hui, et il n'y aurait pas eu de motion. Nous ne sommes pas à la recherche de coupables ou de têtes à faire tomber, mais plutôt à faire en sorte que ce Parlement fonctionne de meilleure façon et que tous les députés s'y sentent égaux, parce qu'ils sont égaux, qu'il n'y en a pas qui sont plus égaux que d'autres. C'est le fond de notre position.
Je rappelle les faits. Voilà que cette lutte sur un projet de loi niant la démocratie au Québec, le projet de loi C-20, soulevant beaucoup de passion, qu'il n'était pas utile de faire adopter à pleine vapeur, si ce n'est du congrès libéral, chacun le sait, cette façon de faire a amené cette Chambre là où on en est.
Non seulement on s'est attaqué à une question remettant en cause la démocratie québécoise, mais par ce fait, on a tout bousculé. C'est le fanatisme poussé loin. Il en va même de la qualité des débats en cette institution et de la possibilité de les avoir.
Voilà donc que nous proposons bon nombre d'amendements, un nombre important. Plusieurs sont refusés et on ne conteste pas cette décision. Cependant, à notre grande surprise, deux amendements sont jugés irrecevables, alors même que nous ne les avions pas déposés. C'est un peu surprenant que d'obtenir un jugement avant d'avoir plaidé la cause. On n'a pu comprendre une telle situation.
Cela remet en question ce principe de base qu'est celui de la plus stricte confidentialité entre des conseillers, avocats travaillant pour les députés, et les députés. Comment se fait-il que la Chambre puisse prendre une décision, être au courant d'un amendement que l'on propose, que l'on pense proposer mais qui ne l'a pas encore été, et qu'on reçoive un jugement. Cela nous semble grave. Nous croyons qu'il faut revoir cette situation.
Le deuxième cas soulevé est celui des quelques 144 amendements que nous avons déposés. Après les avoir déposés, les responsables de la Chambre nous ont dit: «Ce n'est pas recevable puisque vous utilisez le mot souveraineté». Selon eux, c'est un concept mal défini qui n'est pas lié au projet de loi C-20 qui ne parle que de sécession. On a dit, fort bien, on va changer le mot «souveraineté» par celui de «sécession» partout dans ces amendements pour répondre au conseil qu'on nous a donné.
On procède, et c'est le même jugement. Là, on se pose des questions. Ou on nous a mal conseillés, intentionnellement ou pas, mais on a suivi le conseil, et il en va de la qualité des services offerts. Ou on nous a bien conseillés et on ne pensait pas que nous étions pour utiliser le mot «sécession». La logique n'a pas tenu.
La seule logique qui tenait, si tant est qu'on peut appeler ça une logique, c'était de les refuser. Autrement, on risquait de ne pas terminer le projet de loi C-20 cette semaine. Ce qui importe le plus ici pour le gouvernement, ce n'est pas tant ce projet de loi que le congrès du Parti libéral du Canada. On sait bien que le premier ministre veut arriver avec cela dans ses poches plutôt qu'avec les scandales dans la face. On a manqué les deux objectifs.
Voilà pourquoi on a contesté ces deux façons de faire et qu'on a dit au Président: «Il faut absolument revenir sur ces décisions». On a ouvert la porte, comme on l'a toujours fait depuis que nous sommes ici, parce que nous respectons cette institution. Nous avons toujours retenu, comme leçon fondamentale et historique de ce qu'est un parlement, cette maxime utilisée par nos amis anglophones: «We have to agree on how to disagree». On est parfaitement d'accord avec cela.
On n'est pas ici avec comme objectif—ce qui serait un peu futile, même si on aimerait cela—de convaincre les gens à notre point de vue, mais plutôt pour représenter ceux et celles qui nous ont élus. On doit faire cela. On doit mener le débat pour éclairer la situation et faire en sorte que même ceux qui ne sont pas d'accord avec nous comprennent mieux notre point de vue et que la population en soit mieux saisie. Je pense qu'il est éminemment démocratique d'agir ainsi.
On a donc laissé une porte ouverte, qui était de référer cette situation au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Je rappelle que ça ne retardait pas les débats sur le projet de loi C-20, que ça ne rétablissait pas la situation dans le cadre des débats portant sur le projet de loi C-20, mais que ça nous donnait des balises pour faire qu'à l'avenir une telle situation ne se reproduise plus.
Je comprends encore mal pourquoi cette porte a été refermée alors qu'elle était ouverte. Comme je l'ai dit quand j'ai déposé cette motion, jamais je n'aurais souhaité déposer une telle motion, parce que j'ai appris au cours des années à fonctionner avec le Président. Nous avons eu de bonnes relations jusqu'à maintenant. J'espère, malgré tout ce qui s'est passé, que ces relations pourront être rétablies parce que la porte est encore ouverte.
Il en va plus que de votre personne. Il en va de l'institution. Il en va de nos droits. Il en va des droits de tous les députés. Nous ne pouvons admettre que les greffiers, par exemple, puissent rendre un jugement, parce qu'ils connaissent nos intentions en vertu des amendements que l'on pense pouvoir proposer, alors que ce n'est pas le cas pour les ministres. Ils ont leurs conseillers législatifs. On prend connaissance de leurs amendements quand ils apparaissent au Feuilleton.
Il ne saurait y avoir un traitement pour les ministres et un pour les autres députés. Cela me semble fondamental. Je ne dis pas qu'il y a de la malveillance ou non. Je dis qu'il y a un problème et, quand il y a un problème, c'est notre devoir de le régler, d'autant plus si cela laisse planer des doutes sur l'impartialité de l'institution. Ce que l'on veut, c'est de faire en sorte que le climat des débats soit meilleur.
On sait qu'il y a de l'émotion dans les débats, mais malgré toute l'émotion que cela comporte, il faut être certains, pas à 50 p. 100, 60 p. 100 ou 70 p. 100, mais à 100 p. 100 que tous sont égaux ici. Il faut être certains à 100 p. 100 que nos mécanismes sont bons. Et quand on voit que ces mécanismes font défaut, il faut impérativement les corriger. C'est cela que l'on a proposé dans la question de privilège de la députée de Rimouski—Mitis et dans le recours au Règlement de mon collègue de Beauharnois—Salaberry.
Dans les deux cas, on s'interrogeait sur les raisons qui ont amené les députés du Bloc à se sentir et à avoir la certitude d'avoir été traités différemment, sans poser pour autant que c'était malveillant. C'est pour cela que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre aurait pu juger. On aurait pu, dès lundi, décider cela.
Je termine donc ainsi, et mon collègue de Roberval continuera notre plaidoyer pour expliquer la situation. Je vous rappelle, monsieur le Président, en toute amitié, qu'il nous faut régler cette question et que c'est la question qui nous importe. C'est cela qui nous importe.
Le Président: Le débat va se dérouler de la façon suivante: au début, la durée des discours sera de 20 minutes et il y aura 10 minutes de questions et commentaires. Comme il a été entendu plus tôt, l'honorable chef du Bloc québécois va partager son temps avec l'honorable député de Roberval.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, je joins ma voix à celle du chef du Bloc québécois pour remercier les partis d'opposition qui ont accepté et rendu possible ce débat qui est pour nous d'une importance primordiale.
La questions que je voudrais poser au moment où on se parle est: pourquoi y a-t-il un Parlement et pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui? Pourquoi sommes-nous élus pour siéger dans ce Parlement?
Depuis les tout débuts, depuis le début du parlementarisme, le Parlement a été créé, non pas pour servir de caution au gouvernement ou à la monarchie, mais au peuple. Le Parlement remonte beaucoup plus loin que la démocratie; au moment où il y avait la monarchie, on a décidé de réunir des élus du peuple, des représentants, pour faire contrepoids, pour donner des avis—c'est ainsi que cela a commencé—pour dire au roi: «Voici, nous aimons ceci, nous n'aimons pas cela.» C'est la voix du peuple qui s'est exprimée à travers le Parlement.
Jamais, depuis qu'il existe, le Parlement n'a servi de caution au roi, à la monarchie ou au gouvernement. Le Parlement n'est pas là pour appuyer le gouvernement. Le Parlement est là pour permettre l'expression d'idées. Le Parlement est là pour faire contrepoids au pouvoir énorme de l'exécutif. C'est ce qui fait que les membres du Conseil des ministres et le premier ministre doivent quotidiennement s'astreindre à répondre aux questions des élus du peuple. C'est normal, c'est ce qu'on appelle la démocratie, et c'est ce qui fait sa force.
Le gouvernement, avant de prendre des décisions d'importance, doit s'astreindre à un débat public et doit confronter tous les députés du Parlement. C'est ce qui fait que les lois sont bonifiées; c'est la différence fondamentale entre une monarchie ou une dictature, où les décisions se prennent en haut et s'imposent en bas, et une démocratie, où le gouvernement n'a pas tous les pouvoirs. Il a évidemment le pouvoir de diriger les affaires de l'État, mais il doit confronter ce pouvoir à un débat public.
Il y a un prix politique à payer pour un gouvernement quand les décisions se prennent. C'est cela, une démocratie. C'est ce qu'on fait ici. J'espère que les députés de cette Chambre sont bien conscients qu'ils ont la lourde responsabilité d'exprimer des points de vue différents de ceux du gouvernement, entendu que les députés ministériels sont tenus à la solidarité ministérielle.
Les députés de l'opposition sont là pour exprimer des points de vue. C'est pour cela que dans notre société on a réglé les problèmes sans qu'il y ait de bataille. Il n'y a plus de chicane, il n'y a plus de guerre, on ne se bat plus, on débat. On a trouvé une façon civilisée d'exprimer les points de vue.
Que ceux qui sont majoritaires gouvernent, oui, mais qu'ils le fassent en payant le prix politique de leurs actions. Si les actions ne sont pas bonnes, le Parlement en débat. Il ameute la population. Les journalistes font partie intégrante du processus démocratique et font en sorte que nos décisions et nos débats soient connus à l'extérieur. Cela amène le gouvernement à bonifier ses lois, cela limite son champ d'action, cela ne lui donne pas tous les pouvoirs, parce que le Parlement fait contrepoids.
Il y a trois principes qui sous-tendent le Parlement. Le premier, c'est que le Parlement est indépendant face à l'exécutif. Il est tout à fait indépendant. Le Parlement est l'expression de la voix du peuple. Le Parlement n'a pas à servir l'exécutif. Le Parlement n'est pas un outil pour l'exécutif, c'est le contrepoids à l'exécutif. Un deuxième principe veut que le Président soit neutre.
Monsieur le Président, je dois vous le dire sincèrement: vous avez toujours rendu, à mon point de vue, des décisions d'une très haute qualité dans cette Chambre. Je tiens à vous le dire dans ce débat. La Présidence doit garder cette neutralité à tout prix parce que le Président est celui qui me protège. C'est celui que j'interpellais ce matin et à qui je demandais: «Est-ce que notre présence a une signification ici, ou est-ce que cela ne veut rien dire? Parce qu'on est des séparatistes, on n'a pas le droit de s'exprimer?» C'est le Président qui décide de me protéger, de me donner le droit de parole, de me permettre de questionner le gouvernement et de donner mon point de vue. Vous l'avez toujours fait admirablement.
Un troisième principe veut qu'il y ait une confidentialité de ce qui se fait ici. Chaque parti politique a le droit de travailler en toute confidentialité, peut avoir recours aux services des gens qui sont des employés de cette Chambre et qui nous servent admirablement bien. On fait appel au Greffier, au Sergent d'armes, à tout le personnel qui est ici, et on a toujours un service impeccable. On est en droit d'attendre un tel service.
Ceux qui ont une longue carrière dans ce Parlement savent que leur premier devoir, c'est de laisser leurs opinions politiques de côté et d'être aussi généreux à l'endroit d'un séparatiste—même si on est au Parlement fédéral—qu'à l'endroit d'un député du pouvoir. Ils l'ont toujours fait admirablement bien.
Mais voici que s'est produit un problème. Dans ce principe de confidentialité et d'ouverture à un parti politique pour lui permettre de faire ses travaux, voici que des gestes administratifs, qui ont été posés par le passé et auxquels on a concouru de bonne fois, ont fait en sorte que la confidentialité des services du conseiller législatif, qui doit servir les députés, le Bloc, les progressistes-conservateurs, les réformistes, les néo-démocrates et également les libéraux, a été mise en cause.
Les conseillers législatifs doivent faire un travail absolument non partisan, un travail confidentiel. Un conseiller législatif, c'est quelqu'un, on le sait, qui travaille avec désintéressement pour permettre au député d'exprimer son point de vue, de préparer un projet de loi, de rédiger des amendements. Tout cela est du domaine de la stratégie politique et c'est délicat. C'est difficile comme travail. C'est délicat, parce qu'il faut savoir s'abstenir de donner des points de vue. Il faut être un expert au service de toutes les allégeances politiques et c'est un travail difficile.
Mais voilà que l'organisation du travail a fait en sorte que la promiscuité de ces personnes avec des greffiers de la Chambre des communes, plus l'ordinateur qui n'était pas un outil de travail autrefois et qui permet maintenant d'avoir accès à tout ce qui se fait, a fait en sorte que des éléments de la stratégie du Bloc québécois—cela aurait pu être les réformistes, les conservateurs ou les néo-démocrates—ont été utilisés de bonne foi par quelqu'un qui voulait rendre une décision plus rapidement pour accepter ou rejeter des amendements. On sait que c'est la tâche de la Présidence de faire cela et que des gens doivent travailler là-dessus.
Ce que je dis, c'est ceci: malheureusement, il y a un problème qui s'est créé. On s'est aperçu que la promiscuité à laquelle on avait souscrit a fait en sorte que maintenant, la question de la confidentialité n'est plus assurée. Un des principes qui sous-tendent le Parlement est d'avoir le droit d'avoir accès—et je sais que les députés libéraux en face sont tout à fait d'accord avec moi—d'avoir accès, dis-je, à des services non partisans, des services techniques, qui nous aident.
C'est pour cela que je crois que vous devez reconsidérer la décision qui a été rendue, peut-être un peu rapidement, ou peut-être que tous les aspects n'avaient pas été présentés. Je voudrais que vous reconsidériez cette décision, parce qu'elle est fondamentale et qu'elle touche un des principes du Parlement.
Tout le monde va sortir de cette motion la tête plus haute, si vous prenez une des décisions suivantes.
La première: vous devez recréer l'aspect confidentialité, en effectuant des changements dans cette façon de faire qu'on a maintenant et qui ne nous assure plus la confidentialité.
La deuxième: vous devez donner les ressources directement aux partis pour qu'ils puissent avoir leurs conseillers législatifs à eux pour ne plus que leurs données soient à la vue de tout le monde. Ou, encore, nous devrons comprendre que la confidentialité n'est plus une valeur dans ce Parlement, et je sais que ce n'est pas le cas.
Monsieur le Président, je serais très heureux de me faire le promoteur du retrait de cette motion ou de voter contre cette motion, si vous acceptiez, sincèrement, de donner toute sa place au principe de la confidentialité. Il faut procéder à des changements administratifs, ou il faut permettre aux partis d'avoir leurs propres conseillers législatifs ou, encore, il faut confier au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre le soin d'analyser cette question et de faire des recommandations.
C'est ce qu'on vous demande, c'est l'objet de la motion. Je suis certain que, selon votre sagesse habituelle, vous allez considérer notre propos comme étant extrêmement sérieux et comme voulant servir le parlementarisme, et non pas pour faire quoi que ce soit d'autre.
Que la motion soit modifiée en ajoutant, entre les mots «Beauharnois—Salaberry» et «au détriment» ce qui suit:
«, qu'il a soulevé le vendredi 3 mars 2000,»
C'est simplement pour qu'on sache bien que la question a été soulevée à ce moment-là. Je pense que c'est important de l'ajouter. Cela ne change rien sur le fond.
Je vous demande de considérer notre demande avec toute l'ouverture d'esprit qui vous a toujours caractérisé et vous aurez notre confiance sans équivoque. Mais il nous apparaît qu'il faut que quelque chose soit fait pour respecter la confidentialité.
Le Président: L'amendement est recevable.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais pouvoir dire, comme c'est la coutume, qu'il me fait plaisir de participer à ce débat, mais ce serait une exagération, parce qu'il ne peut faire plaisir à un parlementaire de participer à un débat de ce genre.
Ce débat est très sérieux. Pour ma part, je dois dire que non seulement je ne vois pas la nécessité d'avoir ce débat aujourd'hui, mais je crois que le Président a toujours bien agi et a agi de façon tout à fait impartiale dans cette Chambre.
Lorsqu'il a présenté cette motion à la Chambre, le député qui en est l'auteur a dit que les droits et privilèges de tous les députés étaient en jeu, de même que la démocratie et la confiance que tous les députés doivent avoir à l'endroit du Président.
Je suis d'accord avec le député, probablement seulement sur ce point, à savoir que cette motion touche les droits et les privilèges de tous les députés, de même que les principes de la démocratie.
Permettez-moi de parler dans un premier temps de l'objectivité politique et de l'impartialité. Mon but ici n'est pas de revoir les points en litige, mais plutôt de souligner l'impartialité de la démarche et des usages suivis par notre Président.
Dans la décision rendue en mars sur l'objection soulevée par le député de Beauharnois—Salaberry par rapport aux motions sur les amendements relatifs au projet de loi C-20, vous avez souligné que la décision a été prise, et je cite:
[...] strictement du point de vue de la procédure [...] la décision a été prise conformément aux traditions et aux usages de la Chambre.
En ce qui concerne la question de privilège soulevée par la leader parlementaire adjointe du Bloc québécois à la Chambre, sur la question de la confidentialité de l'information entre les conseillers législatifs de la Chambre et les députés, le Président a conclu, et je cite:
[...] que cette confidentialité aurait été respectée et que le texte des motions proposées par l'honorable députée ou par son parti n'a pas été communiqué à des personnes à l'extérieur du secteur du soutien législatif ou à d'autres députés. L'information confidentielle appartenant au Bloc québécois et à certain de ses membres est demeurée complètement et strictement confidentielle.
Certainement, personne ne peut prétendre que les députés des autres formations politiques ont reçu copie de ces motions. J'en ignore toujours le texte.
Monsieur le Président, vous poursuiviez en disant:
En conséquence, il m'est impossible de trouver qu'il y a matière à question de privilège ou que ce geste constitue un outrage à la Chambre.
En d'autres termes les décisions de la Présidence ont été rendues d'une manière qui respecte l'impartialité de votre charge et qui est fondée sur les règles et les usages de la Chambre des communes du Canada.
Les députés diffèrent souvent d'avis sur le fond d'un texte législatif, cela n'est pas anormal. Il y a tout un groupe de gens dans notre société d'ailleurs qui ne font que cela, soit de différer d'avis sur les interprétations des textes législatifs. On les appelle les avocats. C'est leur gagne-pain. Cela n'est donc pas anormal que nous qui faisons les lois puissions avoir parfois des interprétations différentes les uns par rapport aux autres.
Nous pouvons aussi être en désaccord sur la façon dont le Règlement devrait être rédigé, mais il ne saurait y avoir de désaccord sur l'impartialité du Président, sur l'impartialité du personnel qui appuie le Président, et sur l'impartialité des décisions de notre Président.
Bien sûr, nous avons une fière tradition de présidents impartiaux. Vous en êtes un, vos prédécesseurs l'ont été aussi. Comme je me plais à le dire souvent à mes collègues de cette Chambre, il y a plusieurs années que je fréquente cet édifice. J'ai commencé à travailler dans cet édifice le 25 octobre 1966. Plusieurs de mes collègues n'étaient pas vieux quand je suis entré ici pour la première fois.
Même à l'époque où j'avais des fonctions très différentes, je venais dans les tribunes écouter les délibérations et entendre les décisions du Président de l'époque, le regretté Lucien Lamoureux.
J'ai d'ailleurs assisté à ses funérailles, il y a quelque temps, à Aylmer, au Québec. Il représentait la circonscription de Stormont—Dundas, si bien représentée par le whip en chef du gouvernement.
J'ai entendu plus tard les décisions du Président Jerome, ainsi que celles du Président Sauvé, qui est devenue, plus tard, Son Excellence la Gouverneure générale, Mme Jeanne Sauvé, de même que celles du Dr Lloyd Francis, celles de John Bosley, celles de John Fraser et, bien sûr, les vôtres, monsieur le Président. Cela ne veut pas dire que j'étais toujours d'accord avec les décisions du Président. Non, bien au contraire.
De ce côté de la Chambre et de l'autre côté, il y a parfois des décisions qui ne plaisent pas, mais cela ne veut pas dire que les décisions qui ont été rendues et qui ne plaisent pas étaient partisanes à l'endroit de l'autre côté dans le débat en question. Ce n'est pas la même chose. Il faut faire la part des choses dans cette enceinte.
Mme Pauline Picard: Ce n'est pas ça, le problème.
L'hon. Don Boudria: Certains disent que ce n'est pas là le débat, que ce n'est pas le dossier.
En fait, oui, ce l'est, parce que c'est une motion de censure que nous avons devant nous aujourd'hui. Ce n'est pas un débat à savoir si on devrait offrir des privilèges supplémentaires aux députés, obtenir des conseillers législatifs pour chaque formation politique. Ce n'est pas le débat qui est devant nous aujourd'hui. Ce devrait l'être, mais ce n'est pas ce qui est devant nous. Nous avons devant nous une motion de censure à l'endroit de notre Président. C'est de cela dont nous débattons.
Les fonctions de Président de cette Chambre remontent à la création de l'institution. Nous nous inspirons de la tradition britannique qui, elle, existe depuis au moins 1376. À l'époque, comme notre Président l'est aujourd'hui, le Président de la Chambre des communes était son porte-parole auprès de la Couronne.
Il y a quelques jours, les représentants des différentes formations politiques vous ont accompagné, monsieur le Président. Sous votre leadership, nous sommes allés présenter à Son Excellence le discours du Trône grossoyé. La remise de ce discours du Trône est un geste très symbolique, à mon avis, qui nous dit en fait que vous êtes toujours le représentant de cette Chambre auprès de Sa Majesté, et dans le contexte canadien, auprès de Son Excellence le Gouverneur général.
Le premier jour où vous avez pris votre place dans cette Chambre, vous nous avez dit que vous étiez le serviteur de cette Chambre, non son patron. C'est vrai. Vous êtes donc investi des pouvoirs que nous vous donnons, nous toutes et nous tous. Vous avez donc ces pouvoirs que nous vous avons donnés.
Qui plus est, nos traditions parlementaires des dernières années au moins ont changé la méthode d'élection du Président de la Chambre, justement pour rehausser la confiance que nous avons toutes et tous à votre endroit. Vous, monsieur le Président, avez été élu deux fois par bulletin secret par vos pairs en cette Chambre.
Vous n'êtes pas le Président du gouvernement, vous n'êtes pas le Président du Parti libéral, vous n'êtes pas non plus le Président du Parti réformiste ou celui du Bloc québécois. Vous êtes le Président de nous toutes et nous tous. Nous vous avons tous choisi. C'est la position que je prends dans ce débat et j'espère que j'exprime l'avis de tous ceux et celles qui siègent dans cette Chambre et qui voudront peut-être, après mûre réflexion, décider de vous appuyer plus tard aujourd'hui à l'unanimité.
On pourrait peut-être offrir d'autres services aux parlementaires. On pourrait peut-être, dans cette Chambre, décider d'organiser les services législatifs de façon différente, ou peut-être pas. Ce sont toutes des questions importantes...
M. Bob Kilger: Des questions administratives.
L'hon. Don Boudria: ...des questions administratives, comme le dit si bien le whip en chef du gouvernement. On pourrait également changer les règles de la Chambre. Mais le Président ne changera jamais nos règles, il les interprète, il est notre serviteur. C'est à nous de changer les règles et de vous les donner pour les administrer pour nous. C'est comme cela qu'il faut que cela se fasse dans un Parlement.
Au moment où on se parle, une comité de cette Chambre est en train d'étudier des modifications aux règles. Cela a été un peu précipité par toute cette histoire des amendements présentés par centaines à l'étape du rapport mais, en même temps, le comité étudie toutes sortes de changements potentiels aux règles de la Chambre. Il y a aussi le Bureau de régie interne, sur lequel je siège, sur lequel le whip en chef du gouvernement siège, lequel Votre Honneur préside et sur lequel les députés d'autres formations politiques sont présents.
Nous avons là les outils nécessaires, si on le veut, pour augmenter les services aux députés, s'il y a là des lacunes et si le besoin s'en fait sentir. On maintient qu'il y a une sorte de relation avocat-client avec le conseiller législatif. Cela n'est écrit nulle part, mais on peut le maintenir. Ce serait tout à fait correct de décider qu'il en serait ainsi, certainement pas rétroactivement, mais il serait possible de doter chaque parti de son propre conseiller législatif ou de son propre service législatif, qui devrait ensuite être revu par quelqu'un représentant la Présidence. D'accord, si c'est cela qu'on décidait à l'avenir. Je suis prêt à me rallier à ce consensus, s'il y a lieu d'en avoir un, ou en tout cas d'en débattre au Bureau de régie interne, et de changer les règles, si nécessaire.
Mais il ne faudrait pas prendre une lacune, si on en perçoit une dans nos services, comme étant la faute du Président de la Chambre. Je ne suis pas sûr qu'il y ait une lacune de toute façon. Quoi qu'il en soit, ce que nous n'avons pas comme service ici, au Parlement, ce n'est pas le Président qui nous l'a enlevé. Jamais de la vie!
D'ailleurs, vous savez fort bien, monsieur le Président, qu'au début de votre mandat, nous avons resserré, tous ensemble, ceux qui siègent au Bureau de régie interne, les services aux parlementaires; nous avons éliminé certains services. Mais, encore une fois, ce n'est pas vous qui nous les avez enlevés; c'est moi, c'est lui, ce sont les autres qui siègent au Bureau de régie interne et qui représentent nos caucus respectifs.
Vous présidez les réunions, vous dégagez le consensus et, bien sûr, vous et votre personnel, qui est de très haute qualité et qui travaille très fidèlement pour nous, jour et nuit récemment, vous appuie pour mettre en place les services disponibles aux parlementaires, tels qu'adoptés par nous tous et toutes collectivement. Je comprends mal, et je dirais même que je ne comprends pas du tout, pourquoi des lacunes perçues à ce niveau-là pourraient être interprétées comme relevant de votre responsabilité.
Pour résumer très brièvement, je pense, monsieur le Président, et j'ai la ferme conviction que, premièrement, vous rendez des décisions justes. Je suis convaincu que vous ne le faites pas de façon partisane. Vous êtes juste et vous n'êtes pas partisan.
Ce que recherchent certains de nos collègues ne sont pas des sujets de confiance, de non-confiance ou de censure envers la Présidence. Si les parlementaires veulent référer ce dossier à un comité de la Chambre, au Bureau de régie interne ou à un comité ad hoc formé des leaders parlementaires, je me porterai volontaire pour siéger avec mes collègues.
En attendant, je demanderai à la fin de la journée d'aujourd'hui que l'un d'entre eux se lève et, dans un geste symbolique, demande le consentement unanime de la Chambre pour retirer cette motion. En vous donnant ce consentement unanime, monsieur le Président, on ferait en sorte de vous montrer toute la confiance qu'on avait en vous, que moi j'ai toujours en vous, et que j'espère qu'on a tous à votre endroit et dans votre façon de vous acquitter de vos tâches.
[Traduction]
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais attirer l'attention de mon collègue, le leader parlementaire du gouvernement, sur cette question.
En tant que l'opposition officielle de Sa Majesté, le Parti réformiste du Canada estime qu'il s'agit là d'une des questions les plus importantes dont la Chambre puisse être saisie. Un certain nombre de députés ont déjà dit à quel point il importe que la présidence soit impartiale. Il est extrêmement important que nous débattions de la question. La présidence de cet endroit a le devoir de veiller à ce que les droits et les privilèges de tous les députés soient respectés également.
Après en avoir débattu entre eux, les députés réformistes en sont vite venus à la conclusion que le seul moyen de régler cette question était de tenir un vote libre. S'il y a jamais eu une question qui mérite que l'on tienne un vote libre plutôt que de prendre une position unique pour tout le caucus, comme nous le faisons souvent pour d'autres questions, c'est bien celle-ci, compte tenu de l'importance que nous accordons à la présidence.
Le Président a le devoir de veiller à ce que les droits et les privilèges de chacun d'entre nous soient respectés. Nous devrions, tous autant que nous sommes, écouter notre conscience et juger si vous, monsieur le Président, avez toujours agi de façon impartiale au fil des années. Nous en sommes venus à la conclusion que chaque député(e) doit en décider par lui-même ou elle-même.
Le leader parlementaire du gouvernement est-il d'avis que les députés libéraux feront de même?
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, la question de la discipline interne d'un parti est très intéressante. Cependant, je ne vois pas sa pertinence dans le débat actuel.
Nous pourrions discuter pendant longtemps avec les députés d'en face pour déterminer quel parti a révoqué le plus grand nombre de députés. On en voit les conséquences un peu partout dans la dernière rangée, de l'autre côté de la Chambre. Je ne vois vraiment pas ce que ça nous donnerait d'en parler. Je sais que le député est whip de son parti, mais il me pose une question qui s'adresse à un whip et je ne suis pas whip. Peut-être ce dernier participera-t-il plus tard au débat.
La chose primordiale à retenir est de deux ordres. D'abord, il ne faut pas banaliser la question de cette façon. Je ne crois pas que nous devrions agir ainsi. Ensuite, il ne faut pas oublier que le vote a été libre. En fait, il y a eu plusieurs votes. En 1993, les votes étaient tellement libres que nous nous sommes retrouvés avec une égalité, une situation plutôt étrange. Nous avons procédé à plusieurs votes, puis à un vote subséquent, tous aussi libres les uns que les autres, et il en a résulté un excellent choix en déterminant que vous, monsieur le Président, occuperiez le poste de haut rang qui est maintenant le vôtre.
En 1997, une fois de plus, le vote a été non seulement libre, mais secret. Après le compte, nous ne savions même pas qui s'était classé premier ou deuxième. Nous savions seulement qui était le dernier car cette personne a été éliminée du scrutin. Par tous ces votes, nous avons enfin choisi un Président; nous avons fait un choix dont je suis très fier et j'espère que, s'il est impossible d'obtenir l'unanimité, la très grande majorité d'entre nous se diront aussi de cet avis plus tard aujourd'hui.
Voilà la question qui importe dans le présent débat. Nous ne parlons pas du pouvoir respectif des whips. Nous nous demandons si nous accordons notre confiance au Président et j'affirme que, personnellement, je lui accorde ma confiance.
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais que l'honorable leader du gouvernement à la Chambre nous explique ce qu'il entend par ses propos.
Ce que l'on recherche aujourd'hui ce n'est pas d'avoir d'autres services de la part des conseillers législatifs ou des greffiers de la Chambre. Nous avons demandé des changements, parce qu'il s'est produit un fait, une situation où nous avons raison de croire qu'il y a eu un manquement à la confidentialité à laquelle nous nous attendons. Des renseignements sont passés du conseiller législatif au greffier. Dans la décision du Président, il nous a dit que cette situation doit être considérée comme une chose normale, ce à quoi nous n'étions pas habitués auparavant parce que ce n'était pas la situation que nous connaissions.
Le Président nous disant cela, nous ne faisons plus confiance à cette équipe à laquelle nous nous adressons parce qu'on perd la confidentialité dont on a besoin. Il y a donc là un fait, soit celui qu'on nous ait refusé des amendements qu'on avait discuté seulement avec des conseillers législatifs, faisant en sorte que ces renseignements—on en avait de toute évidence la preuve—avaient été transmis à un greffier. C'est donc une occasion où on a une bonne raison de perdre confiance dans le système existant.
D'autre part, si, selon la décision du Président, il est normal que les greffiers travaillent dans le cadre permis avec les conseillers législatifs, on a vu la même situation où on nous a conseillé de changer le mot «souveraineté» pour celui de «sécession». C'est ce que l'on a fait. Si le conseiller législatif travaille conjointement avec le greffier, ils auraient dû être d'accord tous les deux. On a fait ce qu'on nous a demandé et, en bout de la ligne, on nous a refusé au-delà de cent amendements parce qu'on avait fait ce qu'on nous a demandé.
On se dit donc que de temps à autre le greffier travaille en collaboration avec le conseiller législatif et, à d'autres occasions, il semble ne pas le faire. Où sont donc la confidentialité et la confiance auxquelles on a droit? C'est pour cela que l'on a déposé une motion de censure. Je demande au greffier—ce que l'on recherche ce n'est pas la tête du Président—de s'assurer que cette situation ne se reproduira pas. On n'a rien contre la personne du Président actuel, on en a contre les situations qui font en sorte qu'on ne peut plus travailler en toute confiance.
Si le leader du gouvernement est prêt à changer d'opinion là-dessus, je lui ferai remarquer qu'on avait déjà proposé que cette motion soit référée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour qu'on puisse en discuter. Si cela avait été accepté, on n'aurait même pas ce débat aujourd'hui. Toutefois, cela a été refusé.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, cela prend certaines contorsions pour en arriver aux conclusions que je viens d'entendre de la part du député d'en face. La motion de censure nous dit:
Que cette Chambre décide qu'elle n'a plus la confiance en son Président puisqu'elle considère qu'il a fait preuve de partialité [...]
C'est cela qui est dans la motion de censure. Si c'était une motion du même type que celle que nous décrit le député, cela ne serait pas une motion de censure, ce serait autre chose. De la part des députés, on peut facilement formuler une motion qui dirait quelque chose du genre: «Que cette Chambre change sa façon d'avoir des conseillers législatifs ou que cette Chambre change la méthode par laquelle les conseillers législatifs transigent avec le greffier», ou je ne sais trop.
C'est un débat intéressant, mais cela n'a rien à voir avec la motion de censure. C'est pour cela que je vous dis qu'à la fin de la journée, aujourd'hui, on pourrait retirer cette motion de censure, car c'est le mauvais outil.
Si l'objectif est celui que vient de nous décrire le député, j'espère que lui et ses collègues demanderont à la Chambre de la retirer. Ce geste d'unanimité—parce qu'il faut le consentement unanime pour la retirer—exprimerait en lui-même la confiance qu'on vous porte.
Deuxièmement, le député, pour répondre à l'autre partie de sa question, dit: «Ce n'est pas un débat qui vise à obtenir des ressources supplémentaires.» Eh bien, je cite le député de Roberval qui parlait de «donner les ressources nécessaires»; j'écrivais rapidement à mesure qu'il parlait. Peut-être que ce n'était pas le but de la motion telle que proposée par le députée de Laurier—Sainte-Marie, mais celui avec qui il a partagé son discours l'évoquait comme une des raisons pour lesquelles cette motion de censure est là devant nous.
Je conclus en demandant au député de revoir, dans le Compte rendu officiel des débats de la Chambre des communes d'aujourd'hui, ce que disaient ses propres collègues, parce qu'en fait, c'est précisément de cela dont il était question.
Je serai là plus tard aujourd'hui pour affirmer ma confiance en vous, monsieur le Président.
[Traduction]
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, normalement, c'est avec plaisir que je prends la parole. Certes, c'est un honneur pour moi que de prendre la parole aujourd'hui, mais ce n'est certainement pas de gaieté de coeur que je le fais. Néanmoins, nous devons le faire. Je voudrais préciser d'abord que je partagerai mon temps de parole avec le député de St. Albert.
Jusqu'à maintenant, les orateurs ont éludé la vraie question dont nous sommes saisis aujourd'hui. Je ne pense pas vraiment que les députés n'ont pas aimé votre décision à cause de la question relative à la confidentialité qu'on trouve dans la motion. Je ne pense pas que ce soit le cas parce que nous avons eu affaire au même problème dans une législature précédente lorsque le député de Yorkton—Melville a invoqué une question presque identique relativement à la confidentialité du conseil législatif. Il a présenté cette question de façon détaillée à la présidence. Celle-ci a rendu une décision à cet égard à ce moment-là et je n'ai vu aucun député du Bloc pousser les hauts cris sur cette décision. Monsieur le Président, vous avez examiné la question et rendu votre décision puis nous sommes passés à autre chose.
Je pense toujours qu'il faut régler la question de la confidentialité. J'estime que nous devons modifier le Règlement, mais cela peut et doit se faire en comité. La modification peut être ensuite soumise à notre approbation. Je pense que cela peut se faire aisément.
Mais cela ne concerne pas vraiment la question de la confidentialité. Ce n'est pas parce que les greffiers et leurs collaborateurs n'ont pas bien fait leur travail. À mon avis, ils font ce qu'ils ont toujours fait depuis que je siège ici, depuis 1993 chose certaine. Ils ont toujours servi la Chambre avec un professionnalisme incroyable. Je dis cela en tant que député qui est arrivé ici en 1993 sans savoir à quoi s'attendre et qui ne cesse d'être heureux et honoré de pouvoir travailler avec les greffiers et les employés de notre institution. Selon moi, cela n'a rien à voir avec eux.
Ce n'est pas parce que la période des questions est devenue tumultueuse et que les ministres ont cessé de donner des réponses ou quoi que ce soit du genre, même si cela est vrai. Cela n'a rien à voir avec l'indiscipline qu'on constate dans cette enceinte.
Je prétends que nous sommes ici parce que le Parlement devient de plus en plus dysfonctionnel et inutile à cause des actions du gouvernement. C'est ce dont il est question. Aucun député du Bloc ne l'a mentionné, mais cela survient au lendemain de l'adoption envers et contre tous du projet de loi C-20 par le gouvernement qui a recours pour ce faire à une manoeuvre tout à fait antidémocratique. C'est ce qui est en jeu aujourd'hui. C'est une réaction au sentiment d'exaspération des partis d'opposition dans cette enceinte. Même si je n'ai pas des renseignements privilégiés relativement aux réunions en question, je crois que c'est ce dont il est question.
Bref, je crois que le fonctionnement de notre institution repose sur trois choses. Tout d'abord, nous administrons en partie notre institution en nous basant sur des règles. Nous avons des livres de règlements. Nous avons Beauchesne, le Règlement et le nouveau livre de procédure parlementaire rédigé par nos greffiers. Dans une certaine mesure, ce sont les règles qui permettent à notre institution de bien fonctionner. Nous respectons les règles. Nous les interprétons. C'est notamment grâce à cela que la Chambre des communes fonctionne bien.
Ensuite, notre institution est fondée sur la bonne volonté et des accords honorables entre les hommes et les femmes qui siègent ici. C'est pourquoi, monsieur le Président, régulièrement, lorsque des députés interviennent et disent une chose, vous les croyez sur parole comme vous devez le faire, à l'instar de nous tous. C'est la seule façon pour notre institution de fonctionner.
Nous nous fions sur la bonne foi des intéressés. Nous nous réunissons, que ce soit ici, dans vos appartements ou ailleurs, et nous parvenons à des ententes sur la façon de procéder. Toutes les règles que nous pourrions imaginer ne pourraient jamais couvrir toutes les situations possibles de sorte que nous travaillons tous ensemble comme des gens d'honneur se doivent de le faire. C'est la deuxième chose que nous devons faire.
La troisième chose, et la raison pour laquelle nous avons ce débat aujourd'hui, c'est que le gouvernement a l'obligation de gouverner. Il a été élu pour gouverner, cela je le reconnais. Il a également l'obligation de respecter les droits, y compris ceux des petits partis d'opposition à la Chambre des communes. À ce chapitre, il a souvent été pris en défaut. C'est en raison de ce sentiment de frustration que la motion à l'étude a été présentée.
Je pourrais parler encore longtemps de ce sujet, mais j'utiliserai le court temps dont je dispose pour aller directement aux événements survenus dans un passé récent. Je pense ici au débat de l'automne dernier sur l'accord avec les Nisga'as, où l'attribution de temps a été imposée à toutes les étapes de l'étude du projet de loi, portant ainsi atteinte aux droits des partis d'opposition en limitant leur capacité de débattre de la question et de faire valoir leurs préoccupations sur un des accords les plus importants de l'histoire du Canada.
Pour revenir à l'idée de l'entente honorable, je dirai que nous avons finalement réussi à convaincre le gouvernement de laisser le comité se déplacer, parce qu'au départ, il ne devait pas quitter Ottawa. Lorsque le comité a pris la route, nous avons appris qu'il n'entendrait que des témoins triés sur le volet que l'on était allé chercher à des centaines de milles de manière à ce que les voix discordantes et ceux qui rejetaient l'accord ne puissent pas se faire entendre. Le sentiment de frustration a commencé à être vivement ressenti.
Le gouvernement actuel a invoqué l'attribution de temps un nombre record de fois. Il a dépassé de beaucoup le nombre d'attributions de temps imposées par le gouvernement de Brian Mulroney. Depuis son entrée en fonction il y a un peu plus de cinq ans, il a imposé 63 fois l'attribution de temps ou la clôture. Or, pendant les dix ans qu'ils avaient été au pouvoir, les conservateurs ne les avaient imposées que 66 fois. La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui découle de la frustration de ne pas pouvoir tenir de tels débats. C'est honteux certes, mais la cible n'est pas la bonne, à mon avis.
Je songe aux deux mesures législatives fort importantes que le gouvernement a déposées cette année, soit le projet de loi C-20 et le projet de loi C-23. Qu'on soit pour ou contre, il s'agit là de deux projets de loi importants. Je suis en faveur du projet de loi C-20 et j'ai voté pour. Même quand on essaie de s'entendre avec le gouvernement et qu'on lui donne un coup de main pour mettre une mesure législative au point, on cherche toujours le moyen d'exprimer l'opinion de l'opposition. On a exigé que comparaisse une bonne brochette de témoins. On a demandé l'autorisation de sillonner le pays afin de consulter les divers gouvernements provinciaux sur ce qu'on pourrait considérer comme la loi la plus importante que le Parlement ait jamais adoptée en ce qui concerne la séparation ou la sécession d'une province.
Et alors? Le gouvernement pratique le recours systématique à la clôture. Il a recours à la clôture à l'étape de l'étude en comité. Il refuse l'autorisation au comité de se déplacer. Il restreint la liste des témoins. À chaque étape, il nous oblige à se plier à ses règles, car il se croit tout permis parce qu'il détient la majorité. C'est ce qui explique le degré de frustration atteint.
Comment un parti d'opposition peut-il s'acquitter de ses fonctions à toutes les étapes du processus, que ce soit dans cette enceinte ou au sein d'un comité qui est censé être indépendant si le gouvernement, fort de sa majorité, informe les partis minoritaires qui ne pensent pas comme lui qu'ils ne pourront pas faire prévaloir leur position et, qui plus est, qu'ils ne seront même pas entendus? C'est cette frustration accumulée qui nous pousse à débattre de la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui, monsieur le Président. Vous n'y êtes pour rien, en ce qui me concerne. Je serai heureux de voter contre cette motion. Cela ne tient pas à vous ni à la façon dont vous vous acquittez de votre tâche, monsieur le Président. C'est une réaction. C'est le point culminant d'une série de gestes arrogants posés par le gouvernement libéral et ayant contribué à restreindre l'aptitude des partis d'opposition à s'acquitter de leur travail. C'est pour cette raison que, malheureusement, nous sommes ici aujourd'hui.
Je ne suis pas d'accord avec la motion et je voudrais bien que nous ne soyons pas en train d'en débattre. Toutefois, je sais fort bien de quoi elle retourne et personne ne devrait se conter d'histoires. Elle n'a rien à voir avec vous, monsieur le Président, ni avec la cohérence dont vous faites preuve dans l'exercice de vos fonctions. Elle n'a absolument rien à voir avec cela. Elle tient à l'incommensurable frustration que ressentent ceux qui cherchent à traiter avec ce gouvernement.
Que se passe-t-il au sein des comités? Quarante pour cent des rapports qui sont censés être rédigés en comité sont communiqués aux médias avant d'être présentés à la Chambre. Nous avons souvent contesté cette façon de faire. On peut tout aussi bien prendre connaissance de tout le budget dans les journaux avant que celui-ci soit présenté à la Chambre. Des mesures législatives sont remises à d'autres intervenants avant d'être abordées à la Chambre.
Nous avons vu maintes fois le Parlement être traité comme une institution de deuxième ordre au lieu d'une institution de premier ordre comme ce devrait être le cas. Au lieu de traiter les députés et la Chambre avec dignité, le gouvernement se demande s'il peut se servir d'un dossier à des fins de manipulation médiatique. Peut-il forcer l'adoption d'une mesure grâce à sa majorité? C'est une honte.
Je traiterai ici du projet de loi C-23. C'est un autre projet de loi important, que l'on y soit ou non favorable. Pourquoi le gouvernement a-t-il limité le débat? Pourquoi a-t-il limité le nombre de témoins? Pourquoi a-t-il refusé que le comité se déplace? Pourquoi? Parce qu'il ne tolère pas les vues de l'opposition.
En conclusion, monsieur le Président, vous vous rappellerez de ce dicton au sujet des personnes qui ont donné leur vie pour la défense d'une théorie: «Je ne suis peut-être pas d'accord avec votre point de vue, mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous ayez le droit de l'exprimer.» C'est ce qui ne va pas ici à l'heure actuelle. Cela ne tient pas à vous, monsieur le Président. Cela ne tient ni au personnel ni au conseiller législatif. C'est un gouvernement qui a continuellement refusé d'écouter le point de vue d'autrui et d'accorder aux partis minoritaires qui représentent plus de 50 p. 100 des Canadiens l'occasion de faire valoir ces points de vue.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je suis d'accord avec le député du Parti réformiste, qui est originaire de la région où j'ai grandi. Je ne crois pas non plus qu'il s'agisse de vous, monsieur le Président. En fait, je compte rejeter la motion. J'entendais le faire dès qu'elle serait présentée.
Le député de Fraser Valley s'est dit frustré par les actes du gouvernement. Il est membre de l'opposition officielle. Imaginons comment il se sentirait s'il était membre du quatrième parti à la Chambre des communes et qu'il tentait de se faire entendre.
Un des orateurs les plus éloquents de l'histoire de notre pays a débattu le projet de loi C-20. Il s'agit du député de Winnipeg—Transcona. Je crois qu'il parlait au nom de tous les Canadiens lorsqu'il a dit vouloir une prolongation du débat. Beaucoup de gens ont des opinions d'expert et des opinions très judicieuses à propos du projet de loi C-20, mais, bien sûr, ils n'ont pas été autorisés à prendre la parole.
Le député sait également que le gouvernement actuel n'est pas le seul à avoir agi ainsi. De 1984 à 1993, nous avons vu le gouvernement conservateur faire adopter à toute vapeur des projets de loi comme celui sur la TPS, la taxe la plus honnie que le pays ait jamais connue. Il l'a fait adopter précipitamment par la Chambre puis l'ancien premier ministre Brian Mulroney a rempli le Sénat de ses amis. John Buchanan, de la Nouvelle-Écosse, était l'un de ceux qui ont été nommés au Sénat. Sa seule raison d'être là était d'appuyer la TPS.
La frustration que nous, l'opposition, ressentons est bien évidente, mais les simples députés ministériels doivent être terriblement frustrés eux aussi. Le député peut-il nous donner une idée de ce que doivent ressentir les simples députés ministériels lorsque le processus législatif est mené par le gouvernement sous le contrôle du Cabinet du premier ministre, et non pas nécessairement par les parlementaires? Eux non plus n'ont pas la possibilité d'en débattre.
M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, à ce propos, je citerai deux exemples récents qui, s'ils ont irrité ce côté-ci de la Chambre, ont dû rendre fous les députés de ce côté-là de la Chambre. Ces deux exemples sont les suivants.
Le premier exemple, c'une motion présentée par le leader du gouvernement à la Chambre, la motion no 8, qui est restée au Feuilleton un jour ou deux avant que, à ce que l'on s'accorde à dire partout, une quarantaine de simples députés libéraux ne déclarent que cette motion priverait non seulement les partis de l'opposition, mais aussi les membres du gouvernement du côté libéral ne serait-ce que de proposer des amendements aux projets de loi.
Si la motion no 8 avait été adoptée—grâce à Dieu, elle a été retirée après que les députés de tous les côtés de la Chambre, y compris les simples députés libéraux, aient fait pression—elle aurait permis à chaque député de proposer un seul amendement. Imaginez un peu si le leader à la Chambre du NPD avait pu seulement proposer un amendement au projet de loi C-20. Deux des amendements qu'il a proposés d'apporter à ce projet de loi pour l'améliorer ont été adoptés, non pas seulement présentés, mais adoptés. Si la motion no 8 avait été adoptée, elle aurait privé de leur droit tous les députés, à l'exception des membres du Cabinet. Le Cabinet aurait pu faire autant de modifications qu'il voulait. Voilà pour le premier exemple.
L'autre exemple concerne un problème d'actualité dont les journaux ont parlé toute la semaine dernière ou à peu près. Il s'agit de ce qui se passe au comité chargé de l'immigration. Trois problèmes se posent.
Le comité était chargé d'examiner un rapport minoritaire concernant les changements à apporter au système de l'immigration. Les membres avaient convenu, par voie de motion, que le rapport serait considéré comme étant du domaine public. La motion à cette fin avait été adoptée par les membres du comité.
Que s'est-il passé? La présidence a immédiatement proposé que le comité travaille à huis clos, et a refusé la tenue d'un vote sur cette proposition. Même si l'on venait d'adopter une motion à l'effet contraire, le comité a entrepris son examen du rapport à huis clos.
Ensuite, certains documents nous ont été communiqués par le ministère de l'Immigration, faisant état d'un texte de loi sur l'immigration entièrement remanié et indiquant les modalités de la présentation de ce texte à la Chambre, notamment que le ministre approuverait le nouveau projet de loi le 7 mars, alors que, à ce jour, le comité n'avait pas encore déposé son rapport ou ses recommandations. Que s'est-il produit? Le gouvernement a traité le comité avec grand mépris. Il a fait totalement fi des avis exprimés par les députés qui sont membres de ce comité.
Nous avons aujourd'hui ce fameux projet de loi entre les mains. Ce n'est pas un avant-projet de loi. L'affaire est dans le sac. Le moule est coulé. Le gouvernement a traité avec mépris le comité en décidant par avance de la teneur du projet de loi. Il a fait fi des voeux exprimés par le comité, il a obligé ce dernier à siéger à huis clos alors que les membres avaient décidé du contraire et il a foulé aux pieds les droits non seulement des députés de ce côté-ci de la Chambre mais également des députés d'en face.
Ce ne sont là que deux exemples de ce que doivent ressentir les députés d'arrière-ban devant la façon dont ils sont traités par les ministériels.
Le Président: Avant de donner la parole au prochain intervenant, je tiens à préciser à la Chambre que je laisse aux députés toute la latitude possible à l'égard de cette motion. Je crois cependant que les députés devraient au moins essayer de faire un lien avec le sujet dont nous sommes saisis. Je vous accorderai à tous toute la marge de manoeuvre possible, mais je vous demande de revenir sur la piste afin qu'on puisse suivre une certaine ligne de pensée. Comme vous le savez, la motion, que vous avez tous lue, porte sur la confiance envers le Président.
M. John Williams (St. Albert, Réf.): Monsieur le Président, ce n'est certes pas un grand jour pour la Chambre lorsqu'on doit débattre d'une motion comme celle-ci. Vous venez de dire que le débat prend toutes sortes de tangentes; vous avez entendu ce que le côté de l'opposition avait à dire au sujet de l'irritation suscitée par les agissements du gouvernement, de la Couronne, qui s'est manifestée sous forme de non-confiance à votre égard. Pour cette raison, je crois que la motion ne sert pas bien la Chambre. Je veux que vous sachiez, monsieur le Président, que je voterai contre cette motion.
J'ai examiné la question de privilège soulevée par la députée de Rimouski—Mitis. Je n'ai pas constaté que ses privilèges avaient été violés. Nous sommes privilégiés en tant que députés. Nous avons obtenu de la Couronne le droit à la liberté de parole et le droit d'être protégés contre la Couronne et nous vous demandons à vous, en votre qualité de Président, de faire respecter ces droits.
En examinant la question de privilège soulevée par la députée, je n'ai pas trouvé que cette dernière avait démontré que la Couronne, le gouvernement, avait enfreint son droit de parole, ou violé l'un quelconque des droits que nous avons conquis au fil des ans depuis la signature de la Grande Charte au Royaume-Uni.
Comme nous le savons, c'était la première fois que nous réussissions à arracher des pouvoirs à la monarchie en l'obligeant à consulter, à l'époque, les barons et l'aristocratie. Depuis ce temps, c'est l'approbation du peuple que le gouvernement doit obtenir avant de faire quoi que ce soit.
Nous avons beaucoup de privilèges pour nous protéger. Avec l'évolution de la démocratie parlementaire au Royaume-Uni, nous en sommes venus à avoir un Président, un Speaker en anglais, «celui qui parle».
Je voudrais citer le guide de procédure de Marleau et Montpetit, sur l'historique de la présidence à la Chambre. On lit à la page 256:
L'année 1642 marque la fin de l'influence de la Couronne sur le Président; c'est à ce moment-là en effet que Charles 1er, accompagné d'une escorte armée, a traversé la barre de la Chambre, s'est assis dans le fauteuil du Président et a réclamé la reddition de cinq leaders parlementaires accusés de trahison. Tombant à genoux, le Président William Lenthall lui a répondu par ces paroles désormais célèbres qui définissent depuis lors le rôle de la présidence par rapport à la Chambre et à la Couronne:
Qu'il plaise à Votre Majesté, je n'ai d'yeux pour voir et de langue pour parler que selon le bon plaisir de la Chambre, dont je suis ici le serviteur; et j'implore humblement le pardon de Votre Majesté si je ne puis Lui fournir d'autres réponse à ce qu'Elle juge bon de me demander.
Malheureusement, la rubrique se poursuit:
En même temps qu'ils sonnaient le glas de l'influence de la Couronne sur la présidence, les propos du Président Lenthall marquaient le début de l'autorité du gouvernement sur cette dernière.
C'est une déclaration malheureuse parce que le gouvernement ne devrait jamais avoir d'autorité sur la présidence de la Chambre. Il est arrivé que des décisions de la présidence nous exaspèrent, mais ce qui importe, c'est que ces décisions soient justes et qu'elles respectent les droits et les privilèges que nous avons réussi à arracher à la Couronne.
Avant qu'ils votent ce soir, je demande aux députés du Bloc québécois d'examiner à nouveau la question de privilège soulevée par la députée et la décision de la présidence. Je comprends leur colère contre le gouvernement, mais je ne m'attends pas à ce qu'ils reportent cette colère sur vous, monsieur le Président, parce que vous êtes ici pour soutenir nos droits et, tant que vous soutenez nos droits, vous faites votre travail. Je conjure les députés du Bloc québécois d'examiner le privilège qu'ils estiment avoir été violé, d'examiner votre décision, monsieur le Président, et de reconnaître que, comme le dit cette motion, vous avez pris la bonne décision.
Monsieur le Président, vous avez chaque jour le devoir de faire respecter nos droits. Je me rappelle une fois où j'ai pris la parole à la Chambre, au cours de la dernière législature, au sujet d'un projet de loi concernant l'impôt sur le revenu. En 1993, au début de la 35e législature, nous avions modifié le Règlement de manière à envoyer les projets de loi au comité avant la deuxième lecture, l'idée étant que le principe d'un projet de loi pouvait y être débattu, car la deuxième lecture d'un projet de loi concerne le principe de celui-ci. Comme vous le savez, en envoyant un projet de loi au comité avant la deuxième lecture, on pouvait débattre du principe de celui-ci. Toutefois, un projet de loi concernant l'impôt sur le revenu est d'abord visé par une motion de voies et moyens qui se trouve, en fait, à tracer un cercle autour du projet de loi de telle sorte que le principe ne peut pas en être débattu au comité, car il serait illégal qu'il sorte de la motion de voies et moyens. Illégal est le mot, je crois. La présidence avait jugé qu'il était parfaitement légitime de recourir au comité avant la deuxième lecture. J'avais trouvé cela choquant parce que j'estimais que le gouvernement avait gagné, que la présidence avait pris le parti du gouvernement.
Le respect des droits de chacun d'entre nous doit être assuré par vous, monsieur le Président, et si vous nourrissez jamais le moindre doute, vous devez errer en faveur du député en tant qu'individu.
Je me souviens que notre très compétent greffier m'a déjà dit que, au Canada, le système de gouvernement britannique fait que nous avons le gouvernement au Parlement et nous avons le gouvernement de Sa Majesté qui siège dans les banquettes ministérielles, au Conseil privé, au Cabinet. Ils sont aussi des députés et sont chargés de représenter la Couronne à la Chambre. Nous avons vu comment ils ont utilisé leur autorité pour faire inscrire au Feuilleton des motions qui vont de toute évidence à l'encontre des droits de la Chambre. Une motion de ce type a été inscrite en début de matinée. Heureusement, elle a été retirée.
On ne peut que supposer quelle aurait été la décision du Président, mais j'espère que, peu importe sa décision, sa priorité aurait été de défendre les droits des députés contre les représentants de la Couronne qui prennent place sur les banquettes ministérielles.
Comme les députés le savent, nous avons obtenu ces droits à grands frais. Si je ne m'abuse, c'est en 1392 qu'on a littéralement coupé la tête d'un Président à Westminster parce qu'il avait défendu le droit à la liberté d'expression des députés de la Chambre des communes.
Je supplie les députés bloquistes de revoir leur prise de position au sujet de la motion. Je ne crois pas qu'il soit juste qu'ils expriment leur colère envers la Couronne en présentant une motion de censure à votre endroit, monsieur le Président. C'est nettement injuste, car vous êtes là, monsieur le Président, pour défendre nos droits contre la Couronne, et je crois que, dans le cas de cette motion en particulier, vous avez rendu une bonne décision.
Le Président: Je ne veux pas faire de plaisanteries, car il s'agit d'un débat important, mais je suis très heureux que l'on ait cessé de couper la tête des présidents.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour m'opposer à la motion dont la Chambre est saisie et pour expliquer non seulement pourquoi il faut s'y opposer, mais aussi pourquoi elle est inopportune.
Il est évident qu'il y a désaccord entre ceux qui ont présenté la motion et la présidence, mais cela n'a rien d'inhabituel dans le cadre de la vie parlementaire. Monsieur le Président, vous vous souviendrez qu'il m'est arrivé, à moi-même, d'être en désaccord avec la présidence au fil des ans, aussi bien avec la personne qui occupe actuellement le fauteuil qu'avec certains de ses prédécesseurs. Je me souviens d'avoir été en profond désaccord avec le président Fraser lorsque je lui avais demandé d'intervenir afin d'empêcher l'attribution de temps à l'égard d'une motion concernant le libre-échange. Il a interprété d'une autre façon que moi ses responsabilités et ses pouvoirs aux termes du Règlement en vigueur à l'époque. La décision rendue dans ce cas avantageait nettement le gouvernement.
En fait, ce que j'avais exhorté le Président à faire dans ces circonstances aurait, si celui-ci avait accédé à ma demande, été à l'encontre de la volonté du gouvernement. Le Président a toutefois rendu une décision en s'appuyant sur son interprétation des règles, des précédents et des responsabilités de la présidence, laquelle a eu pour conséquence indirecte d'être favorable au gouvernement. Je ne pense pas qu'en rendant cette décision, le Président ait voulu favoriser le gouvernement, mais toutes les décisions de la présidence ont des conséquences indirectes. Elles cadrent avec la stratégie de la personne A ou avec celle de la personne B. Elle cadre avec la stratégie du gouvernement ou avec celle d'un parti d'opposition particulier; cela, c'est incontournable.
Prétendre que, parce qu'une décision particulière avantage un parti plutôt qu'un autre ou un côté de la Chambre par rapport à l'autre, c'est en soi une preuve de partialité, c'est mal comprendre l'idée d'impartialité ou essayer de faire valoir un point de vue politique entièrement différent par le biais d'une contestation de l'impartialité de la présidence.
Je crois qu'on a été malavisé de proposer cette motion. Les motions de ce genre sont rares et elles le sont parce qu'il est effectivement très rare que l'on ait l'impression que le Président a eu une conduite impartiale justifiant pleinement la présentation d'une telle motion. Cette situation s'est déjà produite, mais très rarement et je pense qu'elle devrait se produire encore plus rarement, ou qu'il aurait été préférable de ne jamais présenter cette motion.
Certains ont fait valoir un point important, et il vaut la peine d'en discuter. Ce dont nous sommes saisis est, à certains égards, non seulement la stratégie particulière d'un parti politique qui siège de ce côté-ci de la Chambre, mais vraiment une manifestation d'une frustration grandissante à la Chambre face à la manière dont les travaux sont exécutés depuis quelque temps.
Le leader de l'opposition à la Chambre a parlé longuement, au point que la présidence lui a presque reproché de digresser, de nombreuses choses qui ont frustré l'opposition au Parlement. Mais toutes ces choses devaient être dites pour que la présidence comprenne pourquoi la Chambre est saisie de cette motion. À cet égard, tout cela est pertinent parce qu'une culture semble s'installer au Parlement, selon laquelle il n'est plus possible de retarder l'adoption de mesures législatives au moyen du débat.
Ralentir le processus législatif a pourtant une fonction politique importante. En effet, cette fonction politique consiste à faire obstacle à un gouvernement qui veut agir tellement vite que la population ne saisit pas tout à fait ce qui se passe tant qu'elle n'est pas mise devant le fait accompli. Faire obstacle au gouvernement peut avoir une fonction politique légitime quand ce gouvernement entend légiférer de telle sorte que les membres de la société civile qui s'opposent à ce qu'il fait n'aient pas un mot à dire, que ce soit devant un comité et sur diverses tribunes où les gens peuvent s'exprimer, tant que le projet de loi n'est pas adopté.
Le fait de ralentir le processus législatif est une facette très importante du travail qui incombe aux partis d'opposition. À l'époque où il était possible de retarder une mesure législative en prolongeant le débat, c'était un peu comme si le Parlement se mesurait avec l'opinion publique. L'opposition tardait-elle trop à adopter une mesure? Le temps était-il enfin venu pour elle de cesser de faire de l'obstruction et de permettre l'adoption de cette mesure ou est-ce que l'opposition avait une position et se devait de continuer d'en discuter dans l'espoir de faire changer d'idée au gouvernement?
L'opposition et le gouvernement devaient sonder l'opinion publique. L'opposition pouvait dire qu'elle avait eu son mot à dire et qu'elle était disposée à permettre l'adoption d'une mesure ou le gouvernement pouvait soutenir qu'il devait laisser l'opposition continuer de parler, car beaucoup de gens étaient vraiment furieux et il fallait vraiment bien examiner la question. Cela n'est plus vrai. On ne se préoccupe plus de l'opinion publique.
Nous avons maintenant une culture parlementaire dans le cadre de laquelle lorsqu'une mesure est vraiment importante, nous avons recours à l'attribution de temps immédiatement, c'est-à-dire dans les deux ou trois jours. Deux ou trois exemples me viennent à l'esprit, car, en toute franchise, nous n'avons pas été saisis de beaucoup de mesures législatives vraiment importantes au cours de la présente législature. Notre programme législatif a été plutôt léger. Cependant, il y a eu les modifications apportées au Régime de pensions du Canada, le projet de loi C-20 et deux ou trois autres mesures législatives importantes. La première chose que le gouvernement a faite, c'est d'avoir recours à l'attribution de temps après deux jours de débat.
Nous sommes dans une sorte d'impasse, monsieur le Président. Cela pose un grave problème à l'opposition. Comme on sait que le gouvernement a l'intention ou du moins l'habitude d'avoir recours à l'attribution de temps, certains partis de l'opposition sont forcés d'avoir recours à d'autres formes d'obstruction. Les ministériels nous accusent alors d'obstruction en affirmant que nous ne voulons pas discuter d'un projet de loi et c'est pourquoi ils ont recours à l'attribution de temps. Si nous discutons d'un projet de loi pendant deux ou trois jours, ils disent qu'on y a consacré beaucoup de temps et ils imposent l'attribution de temps. Nous perdons dans les deux cas.
C'est le type d'exaspération que nous ressentons à l'heure actuelle, monsieur le Président. C'est une situation tout à fait injuste. Vous êtes vous-même, monsieur le Président, prisonnier du Règlement de la Chambre. Vous devez vous plier au Règlement de la Chambre et, malheureusement, le Règlement de la Chambre n'est pas toujours établi de la meilleure façon possible. Un grand nombre des règles que les partis d'opposition trouvent les plus exaspérantes et déplaisantes ne sont pas celles qui ont été élaborées par la Chambre, c'est-à-dire avec l'accord de tous les partis, mais celles qui lui ont été imposées par le gouvernement—et des gouvernements antérieurs—qui cherchait à se donner un certain avantage sur l'opposition.
Ces modifications ont des effets cumulatifs. Vous, monsieur le Président, devez faire respecter ces règles, et nous nous retrouvons dans une situation comme celle-ci.
L'origine de la motion, les divergences de vues au sujet du respect du caractère confidentiel de l'information et la question de savoir si le principe du secret professionnel de l'avocat s'applique entre le député et le conseiller juridique ou entre le député et toute l'équipe, voilà autant de questions qu'il faut élucider. Il ne s'agit pas de présumer que les modalités actuelles de fonctionnement sont parfaitement justes à cet égard.
Le Parlement et la Chambre doivent étudier la question de près, car, de toute évidence, certains députés ont du mal à accepter la situation actuelle. Ils voudraient que tout soit étanche, mais il y a beaucoup de fuites d'information entre différentes personnes et différents services. Il ne semble pas y avoir consensus sur la question de savoir si la communication d'information entre le conseiller juridique et les services du greffier et les greffiers des comités va à l'encontre d'un principe quelconque ou s'il s'agit d'une pratique qui s'est établie avec le temps sans qu'on y fasse trop attention, mais qui a des conséquences préjudiciables. Il faut étudier toutes ces questions.
Ce que nous observons aujourd'hui, c'est l'aboutissement d'une exaspération qui grandit dans les partis d'opposition.
Monsieur le Président, vous m'avez entendu dire tout à l'heure que vous êtes prisonnier des règles de la Chambre, et, pour filer la métaphore, ce qui a failli se passer il y a une semaine vous aurait mis en isolement cellulaire. La motion no 8, qui semble vous donner plus de pouvoir quant à la détermination de la recevabilité d'amendements à l'étape du rapport, vous aurait accordé un certain pouvoir. Vous auriez joui d'un certain pouvoir, mais sa portée aurait été limitée. Vous auriez, monsieur le Président, été dans une position bien plus difficile que celle dans laquelle vous vous trouvez maintenant à l'occasion. Je sais que la présidence ne peut pas le dire, mais il n'est pas difficile d'imaginer que la présidence partageait le soulagement de l'opposition que la motion ait été retirée.
À mon avis, la présidence devrait en fait exercer un plus grand pouvoir. Vous me l'avez entendu dire dans le passé. Il faut que la présidence dispose d'un plus grand pouvoir relativement aux amendements à l'étape du rapport, pas d'un pouvoir délimité par le gouvernement, mais d'un pouvoir permettant à la présidence de déterminer ce qui convient à l'étape du rapport. Vous devriez avoir plus de pouvoir relativement à l'attribution de temps.
Si nous pouvions parvenir à une entente en vertu de laquelle la présidence disposerait d'un pouvoir accru, les partis de l'opposition feraient, il me semble, plus confiance au processus parlementaire, sachant que la présidence aurait le pouvoir d'intervenir pour les protéger lorsque le gouvernement abuserait de son pouvoir en recourant de façon malavisée ou illégitime à l'attribution de temps.
Je dis respectueusement que telle n'était pas l'intention. Ce que je dis est conforme à l'esprit de l'intention du comité McGrath qui a recommandé, en 1984-1985, que le Président soit élu par scrutin secret à la Chambre des communes. C'est arrivé pour la première fois en 1986 lorsque le Président Fraser a été élu au 13e tour.
En faisant en sorte que le Président soit élu par tous les députés plutôt que nommé par le gouvernement, on voulait que le Président dispose d'un plus grand pouvoir que ses prédécesseurs. Je dirais, sans vouloir critiquer la Présidence pour le moment, mais pour faire un commentaire d'ordre général—que je n'adresse pas qu'à vous, monsieur le Président, mais également à un de vos prédécessurs—, que je ne crois pas qu'on ait totalement saisi la raison du scrutin secret.
Les Présidents ont déclaré, comme vous l'avez fait et comme l'a fait le Président Fraser avant vous, que pour agir avec plus d'autorité ils avaient besoin de plus de directives et d'un meilleur consensus de la part de la Chambre. Je respecte leur opinion, quoique je maintienne le contraire.
J'ose espérer, étant donné que telle est la position constante de la présidence sur la question, que nous pourrons donner au Président, par une décision de la Chambre ou par une recommandation du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, par exemple, plus de pouvoirs pour protéger les droits et privilèges des partis d'opposition afin qu'on ne puisse pas couper court au débat. J'ose espérer que nous pourrons reconnaître la légitimité de retarder les travaux de la Chambre au moyen d'un débat prolongé plutôt qu'au moyen d'échappatoires procédurières dont on se sert de manière ridicule simplement pour attirer l'attention sur l'impuissance de l'opposition face à un projet de loi donné.
Cela jette le discrédit sur toute la Chambre. Cela jette le discrédit sur le processus démocratique. Ce n'est pas à notre avantage de nous conduire comme des gens qui ne savent pas comment mener leurs affaires ou qui doivent voter de façon continue pendant 48 heures, etc. Cela ne profite à personne, selon moi.
Je terminerai mon intervention en soulignant une autre chose. Malheureusement, ce sont des vestiges parlementaires de ce genre qui attirent l'attention des médias. Nous ne participons pas uniquement d'une culture parlementaire, nous appartenons aussi à une certaine culture des médias.
Si nous débattions intelligemment jour après jour, y aurait-il des gens à la tribune ou ailleurs pour suivre les débats? Y aurait-il quelqu'un pour faire ressortir la justesse de tel ou tel argument au sujet d'un projet de loi, ou pour y faire contrepoids? Cela permettrait d'informer le public de ce qui se passe au Parlement, des bonnes idées qui y sont exprimées et des arguments qui leur sont opposés. Nous pourrions le faire aussi longtemps que nous le voudrions, mais personne ne prêterait attention. Pourtant, dès que nous votons toute la nuit ou que nous avons des prises de bec au sujet de la procédure, nous nous retrouvons tous dans le foyer pour en parler.
Les médias voient dans cet exercice de la démocratie l'équivalent d'un spectacle de lutte. J'ai toujours aimé la lutte, mais pas de ce genre. Je préférerais voir les députés mieux se conduire qu'ils ne l'ont fait et avoir l'assurance que le public nous portera attention lorsque nous nous comporterons comme il faut. Toutefois, ni la présidence ni moi-même n'avons le pouvoir de changer cela et c'est pourquoi nous devons tous y oeuvrer ensemble.
Quoi qu'il en soit, cette motion m'apparaît peu judicieuse. Le renvoi de la question au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, ou une initiative de sa part nous permettrait peut-être d'examiner le traitement des motions lorsqu'elles sont rédigées, les personnes à qui le contenu en est communiqué, l'existence du lien de confidentialité et l'applicabilité du secret professionnel des avocats, etc. Autant de questions qui méritent d'être examinées, mais qui n'ont rien à voir avec le fait de savoir si vous avez, monsieur le Président, agi de façon partiale ou impartiale. Aussi, les députés du Nouveau Parti démocratique ont l'intention de voter contre la motion.
[Français]
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, je veux simplement faire un commentaire et dire que le dépôt de cette motion n'est pas une attaque personnelle à votre endroit, mais bien, je dirais, l'expression d'un malaise profond dans cette Chambre où on a senti que la Présidence était prise en otage par le parti au pouvoir, et cela, c'est inacceptable.
S'il y a une personne ici dans cette Chambre en qui j'ai une confiance unique, c'est vous, monsieur le Président. Parce que jusqu'à maintenant, et cela fait sept ans que je siège ici, vous avez fait preuve de justice face à toutes les décisions qui ont été prises.
Par contre, ce qu'on a senti dernièrement ici à la Chambre, c'est qu'il y avait un changement profond qui était en train de se produire de la part du gouvernement face à votre pouvoir, et cela, c'est inacceptable.
Je tenais donc à faire ce commentaire. Je vous assure que de mon côté, comme députée, si on peut réussir à s'entendre et si on peut restaurer vos pouvoirs, vous pourrez toujours compter sur mon appui.
Par contre, il y a aussi le fait que si on décide de déposer des amendements à un projet de loi et qu'on fait appel à un spécialiste législatif, il faut que cette personne garde nos documents confidentiels. Cela n'a pas de sens que ce soit révélé au grand jour devant tout le monde.
Je suis en train de préparer des amendements pour un projet de loi. Je me demande si je vais faire appel aux conseillers législatifs de cette Chambre, parce que je n'ai pas confiance. Si, comme élue, je ne peux plus avoir confiance aux gens qui sont censés m'aider à produire des amendements ou à travailler sur des projets de loi et que je sente que mon droit comme députée est brimé, ce n'est pas une façon de travailler. Je n'aurai plus le goût de défendre les intérêts de mes électeurs ici dans cette Chambre. Je ne pense pas que c'est ce que mes électeurs recherchent.
Je ne sais pas quelle solution vous allez apporter, mais je pense que, quelque part, il va falloir s'assurer en premier lieu qu'on vous restaure vos pleins pouvoirs et que vous ayez librement le choix et le droit de décider. Deuxièmement, il faut trouver un moyen pour que nous, les députés, reprenions confiance à l'endroit de tous ces gens qui sont censés travailler pour nous ici à la Chambre et pour qu'il n'y ait plus de partisanerie.
[Traduction]
Le Président: Je présume que le député de Winnipeg—Transcona peut faire un commentaire sur le commentaire.
M. Bill Blaikie: Voici ce que j'ai l'intention de faire, monsieur le Président. Je crois que la députée a soulevé un point qui est pertinent au débat et aux raisons pour lesquelles la motion qu'elle semble appuyer devrait être rejetée. Selon la députée, la motion ne vise pas la présidence. La motion ne vous vise pas, monsieur le Président. Elle vise le sentiment qu'éprouve la députée devant ces autres choses qui se sont produites.
Tout ce que je veux dire, c'est que je comprends ce que la députée ressent face à tout ce qui est arrivé et je suis d'accord pour dire qu'il y a des problèmes et qu'on doit les régler. Toutefois, je ne crois pas qu'on puisse le faire en procédant comme nous le faisons. Je suppose que les députés du Bloc tentaient de tirer profit d'une occasion procédurière pour discuter d'une question qui leur tenait à coeur, mais c'est là, à mon avis, un mauvais choix de procédure.
Une motion de censure à l'égard du Président est une mesure que nous devons réserver pour les cas de manque flagrant d'impartialité de la part de la présidence ou autre cas grave. Je ne veux pas dire que les préoccupations du Bloc ne sont pas sérieuses. Toutefois, on tente à mon avis de réaliser la quadrature du cercle en voulant allier les préoccupations soulevées et la décision de blâmer le Président.
Si j'ai bien compris le sentiment de la Chambre, cette motion ne sera pas adoptée. Une fois que la poussière sera retombée, je crois que tout ce que nous aurons réussi à faire aura été d'affaiblir les motions de censure à l'égard de la présidence sans avoir pour autant réglé le problème dont parlait la députée. Nous devrons trouver un nouveau moyen de le régler. Et ce moyen auquel nous aurons recours alors sera celui que nous aurions dû utiliser dès le début.
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de Winnipeg—Transcona pour son discours et ses observations que je qualifierais de sages. Comme la Chambre le sait, il siège à la Chambre depuis fort longtemps et il est très fort en ce genre de choses.
Je voulais lui demander s'il était membre de la World Wrestling Federation puisqu'il a émaillé son discours d'expressions appartenant au domaine de la lutte. Comme cela n'a aucun rapport avec le débat, je n'insisterai pas. Je lui demanderai plutôt, compte tenu de sa longue et distinguée carrière à la Chambre, de nous dire ce qu'il pense des critiques non fondées qui sont adressées au Président.
En passant, monsieur le Président, je voudrais que vous sachiez quelle est ma position dans cette affaire. Vous avez fait une très bonne besogne à la Chambre. C'est une tâche qui n'est pas facile. Il faut de la patience, du jugement et bien d'autres qualités pour amener 301 personnes à se conduire conformément à ce que les Canadiens attendent de la Chambre. Je vous félicite pour l'approche que vous avez adoptée, pour l'attitude que vous manifestez et, par-dessus tout, pour le professionnalisme dont vous faites preuve et l'expérience que vous avez su apporter à ce poste.
Je pense que le député y a fait allusion dans son discours. J'aimerais lui demander si ces critiques adressées au Président n'étaient pas l'expression d'une colère ou d'une frustration mal contenue et si le Président n'était pas une innocente victime. Ce genre de choses peut s'expliquer par toutes sortes de raisons et de mobiles.
Je voulais connaître le point de vue du député à ce sujet. Il rendrait sans doute service à la Chambre en répondant à cette question.
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, premièrement, si le député veut vraiment en savoir plus sur la relation entre la lutte et la politique, ce n'est pas à moi qu'il doit s'adresser, mais au gouverneur du Minnesota.
D'une certaine manière, j'ai répondu à sa question. J'ai dit dans mon intervention qu'à mon avis, le président et d'autres étaient d'accord, à savoir que malheureusement, à cause de cette motion, le président était devenu la cible et qu'au lieu d'exprimer sa frustration on ferait mieux de chercher une solution aux problèmes que posent certains procédés à la Chambre. On a dit, pas moi, mais peut-être d'autres, au sujet du président ou contre lui certaines choses mal avisées et déplacées. On devrait s'en prendre ou bien au gouvernement, dans la mesure où c'est lui le coupable, ou bien à l'ensemble du processus, dans la mesure où nous sommes collectivement responsables de faire en sorte que cet endroit fonctionne mieux qu'il ne le fait.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, comme vous et la Chambre le savez, il y a un monsieur, M. Stanley Knowles, qui a été à la Chambre pendant de nombreuses années. Il respectait probablement plus que ne l'ont jamais fait les autres députés la Chambre, le Règlement de la Chambre et surtout le Président.
Le député de Winnipeg—Transcona connaissait très bien ce monsieur. Pourrait-il nous dire brièvement ce que dirait M. Knowles d'une motion comme celle-ci?
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, j'ai l'habitude de ne pas émettre d'hypothèses sur ce que d'autres personnes feraient dans certaines circonstances, surtout lorsqu'elles ne sont plus avec nous. Sauf tout le respect que je dois à la Chambre, je refuserais de spéculer sur ce que M. Knowles aurait pensé dans ce cas-ci. Je sais qu'il était fortement enclin, au fil des années, à appuyer la présidence et à faire preuve de beaucoup de respect envers le poste de Président. Sachant cela, les gens pourront tirer leurs conclusions.
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, j'utiliserai toute la période. Parfois, nous ne sommes pas très impatients d'aborder certains sujets à la Chambre; parfois, c'est le contraire. Cette fois-ci, je me sens fort privilégié de pouvoir prendre la parole.
Lorsque je suis arrivé ici ce matin, je me suis dit en regardant autour de moi que le milieu dans lequel nous travaillons et la situation dans laquelle nous nous trouvons sont bien étranges, car nous sommes en train de débattre la question de savoir si vous devriez ou non conserver votre poste, monsieur le Président. Il s'agit là d'une question très étrange à débattre. Une telle situation ne se produirait nulle part ailleurs.
Les députés peuvent-ils imaginer les dirigeants de la Banque Royale en train de discuter publiquement de la question de savoir si un employé ou un gestionnaire devrait garder ou non son emploi? Monsieur le Président, pendant que vous siégez ici, on discute de la question de savoir si vous allez conserver votre poste, non seulement devant 301 députés, mais aussi devant des millions de personnes qui regardent le débat. Avant d'aller plus loin, je voudrais dire que nous, du Parti conservateur, estimons que vous devriez garder votre poste, et nous voterons pour que cela se produise.
Il faudrait que les Canadiens sachent à quel point le milieu dans lequel nous travaillons est différent. Au cours des deux dernières journées seulement, nous avons certainement été témoins de situations qui montrent à quel point notre monde diffère du monde normal des travailleurs du secteur privé.
Si les membres du personnel d'une société discutaient publiquement de la question de savoir s'il faut maintenir ou non une personne dans ses fonctions, on les accuserait probablement de violation du droit au respect de la vie privée de cette personne ou d'incitation à la démission. Monsieur le Président, vous pourriez nous accuser d'incitation à la démission si nous étions dans le secteur privé. Voilà qui montre à quel point nous fonctionnons dans un environnement étrange.
Votre travail n'est certainement pas facile. Chaque fois que vous prenez une décision, vous faites automatiquement des déçus. Chacune des décisions que vous prenez fait des déçus. Parfois, vos décisions nous déçoivent. Parfois elles nous remplissent de joie quand vous appuyez notre position. Mais chaque fois que vous prenez une décision, vous en décevez certains, et nous devrions tous le comprendre. Vous ne pouvez jamais rendre tout le monde heureux dans l'exercice de vos fonctions. Votre travail est très difficile.
Quand j'ai été élu pour la première fois à la Chambre, en 1988, nous formions le gouvernement et nous avions énormément de choses à dire concernant le choix du Président à ce moment-là. Le Président était un de nos députés. Même si le Président était un des nôtres du côté ministériel, nous étions sûrement tout aussi déçus de ses décisions tout aussi souvent que l'opposition l'était, mais l'opposition ne s'en rendait peut-être pas compte à l'époque. Je veux simplement faire remarquer que votre travail est difficile et que nous comprenons que vous ne pouvez pas tout le temps plaire à tout le monde.
Je pense également que nous devrions comprendre que toute cette affaire a surgi dans un contexte empreint de beaucoup d'émotion. Je n'approuve pas la position du Bloc québécois ni le principal but de sa présence ici, qui est la séparation du Québec du Canada. Je n'approuve pas cela du tout. Mais je reconnais indiscutablement leur droit d'être ici pour faire valoir leur position.
Je souligne également qu'hier soir, après l'adoption du projet de loi C-20, nous sommes retournés dans le couloir. Pendant que j'étais au téléphone dans le couloir, je regardais les députés bloquistes et j'examinais leur façon de réagir à la décision que nous avions prise.
Je n'ai jamais vu des gens aussi vivement déçus. Ils pleuraient et se réconfortaient en se donnant l'accolade ou en se tenant par la main. Je respecte cela, vraiment, mais j'ai été frappé de voir à quel point leur réaction était émotive. Ce projet de loi était très important pour les députés bloquistes. J'admire leur passion. Je les admire vraiment de pouvoir plaider leur cause avec autant de ferveur et de défendre leur position avec ardeur, même si je m'oppose à cette position.
Quand on adopte un projet de loi touchant la fiscalité, le Régime des pensions du Canada ou les anciens combattants, on ne voit pas les députés retourner dans le couloir, réagir en pleurant et se réconforter en se donnant l'accolade. Quand on parle des hélicoptères ou même de DRHC, cela ne se produit pas. Mais cela s'est produit ici. Ce débat est très émotif et cette motion de censure est liée à toute l'émotion qui entoure ce débat.
Je tiens à dire aux députés bloquistes qu'hier soir, j'ai été vraiment touché de voir à quel point cette question les troublait et que j'admire ce qu'ils font et comment ils le font. Je ne suis pas d'accord avec les bloquistes, mais j'admire leur façon de faire.
C'est une question très grave que nous avons à traiter. Il s'agit d'une accusation très grave. Même si nous participons quotidiennement à des débats à la Chambre des communes, nous ne traitons pas souvent ce genre de question. C'est la première fois que je le fais. En fait, notre débat vise la destitution du Président.
Vous êtres notre chef, notre arbitre, celui qui veille à ce que chacun soit traité équitablement, reçoive sa juste part de temps de parole et ait l'occasion de s'exprimer. Peu importe que vous soyez d'accord ou non avec nos propos, vous vous assurez toujours, comme il est de votre devoir de le faire, que nous ayons la possibilité de parler et que nous soyons traités avec justice. De notre point de vue, il nous semble que vous accomplissez cette tâche.
On nous demande maintenant d'envisager de vous retirer cette tâche. Nous ne sommes pas d'accord. Nous n'approuvons peut-être pas entièrement la décision que vous avez prise dans cette affaire, mais il vous appartient de prendre des décisions et il nous appartient de les respecter. Nous appuyons entièrement votre nomination au poste de Président de la Chambre et nous n'appuierons pas la motion, qui vise à vous relever de vos fonctions.
Revenons sur certains points, par exemple l'émotion dont j'ai déjà parlé. Bien des facteurs nous ont amenés là où nous en sommes aujourd'hui. Il ne s'agit pas d'un seul événement survenu dans le bureau administratif du Président. Il s'agit de l'émotion qui a entouré l'étude du projet de loi C-20. Il s'agit aussi des tactiques que le gouvernement emploie depuis le début de la présente législature pour essayer de limiter le débat, de limiter notre possibilité de présenter des amendements et de nous empêcher de faire notre travail. Outre les émotions, tout cela est aussi à la source de notre irritation.
La situation s'est aggravée à cause de la teneur du projet de loi. Si cette décision avait été prise dans le cadre du dossier des hélicoptères ou de toute autre question, elle n'aurait probablement jamais donné lieu à cette motion de censure. J'espère, monsieur le Président, que vous comprenez à quel point tout cela entre en ligne de compte.
De même, du côté de l'opposition, nous réagissons tous à l'utilisation abusive que le gouvernement fait des règles pour accélérer le débat, prendre des raccourcis et nous restreindre dans notre travail.
Je retrouve à point nommé des notes datant de l'époque où nous formions le gouvernement. Certains députés libéraux avaient été vexés que nous fassions appel à la motion d'attribution du temps. À l'époque où il siégeait du côté de l'opposition, le ministre des Affaires indiennes avait déclaré que les parlementaires élus pour représenter leur électorat ne devraient pas précipiter les choses pour obtenir l'accord de la Chambre. Or c'est précisément ce que fait le gouvernement aujourd'hui. L'actuel ministre des Travaux publics avait déclaré:
On aurait pu en débattre pour donner l'occasion à tous les députés de recevoir des critiques et des commentaires de leurs concitoyens, inciter le public à connaître de quoi on parle, de ce [...] projet de loi qu'on est en train de passer à la vapeur pendant la nuit.
Voilà ce que les libéraux avaient soutenu à propos des conservateurs lorsque ces derniers étaient au pouvoir; pourtant ils ont eu recours à l'attribution du temps 63 fois jusqu'à maintenant, un nombre record, pour faire précisément ce qu'ils nous reprochaient tellement à l'époque où ils siégeaient dans les rangs de l'opposition.
Le gouvernement s'emploie à dénaturer et à exploiter le Règlement, notamment dans le cas du projet de loi C-20 qui suscite tant les passions. Il a interrompu le débat à l'étape de la deuxième lecture. Il a restreint les pouvoirs des comités, a refusé de se déplacer pour prendre le pouls des Canadiens, même si tous ces Canadiens risquent d'en être touchés un jour. Il a cherché à limiter la capacité des députés de présenter des amendements.
Ce projet de loi suscite énormément de passion chez les bloquistes et revêt une importance extrême à leurs yeux. Ils se sentent contrecarrés dans leur action. Ils sont irrités, comme nous tous d'ailleurs, mais ils le ressentent de manière plus aiguë du fait de l'importance du projet de loi. Cela devrait entrer en ligne de compte dans ce débat.
La première question concerne la décision du Président au sujet du respect de la confidentialité de l'information par les conseillers législatifs. Nous ne sommes pas d'accord avec la décision du Président. On ne peut comparer la notion selon laquelle les employés de la Chambre travaillent au sein d'une équipe jouissant du secret et donc ayant accès à des renseignements confidentiels avec le secret professionnel des avocats.
Nous devons tenir des rencontres confidentielles avec les fonctionnaires de la Chambre. Il faut que nous puissions traiter avec eux de façon confidentielle. Nous devons nous attendre à ce que les discussions que nous avons avec eux lors de la rédaction de projets de loi et d'amendements ou pour d'autres raisons soient confidentielles. L'information ne doit pas être communiquée à quelqu'un d'autre dans le service, à un autre parti et surtout pas au public.
Nous soutenons le point de vue du Bloc québécois, mais nous croyons qu'il s'agit d'une question administrative, certainement pas d'un jugement porté à l'endroit du Président au fauteuil. Nous voudrions que ce problème soit réglé. Nous voulons qu'on nous assure que le respect du caractère confidentiel de l'information est une priorité pour la Chambre. C'est ce à quoi nous nous attendons, rien de moins.
Je me demande souvent: s'il s'était agi de renseignements du gouvernement, auraient-ils été communiqués ou présentés de la même façon? Je présume que non, mais j'espère que je me trompe. En ce qui concerne les cas qui ont été signalés à la Chambre par le leader parlementaire du Bloc québécois, nous croyons que des informations secrètes ont été transmises à un trop grand nombre de personnes chargées de fournir des services dans des conditions difficiles. Et j'insiste sur «conditions difficiles». C'est très grave lorsque des renseignements confidentiels sont divulgués. Nous nous adressons aux conseillers juridiques comme si nous étions leurs clients. Nous avons besoin de confidentialité, particulièrement compte tenu des rapports antagonistes que nous avons à la Chambre.
Les membres de notre groupe parlementaire ont reçu par écrit l'assurance des avocats de la Chambre que les consultations restaient confidentielles. Nous espérons évidemment que le Président veillera à ce que cela soit respecté, mais la situation dénoncée aujourd'hui fait planer des doutes sur ces consultations professionnelles. Il est clair que cela entrave la façon de faire notre travail. Quoi qu'il en soit, les recherches du Président sur la question donnent à entendre que ce qui s'est produit est acceptable, mais nous ne souscrivons pas à cette décision. Cependant, le Président a le droit de rendre une telle décision.
Notre parti et notre groupe parlementaire travailleront pour changer le système. Nous utiliserons les pouvoirs dont nous disposons au sein de notre institution pour atteindre notre objectif. Après tout, c'est nous tous ici qui créons les règles. Ce sont nos règles. Ce ne sont pas les règles du Président. Si elles doivent être changées ou appliquées différemment, c'est à nous, ainsi qu'au Président, qu'il incombe de prendre les mesures qui s'imposent. Nous avons les moyens pour ce faire, et nous les emploierons au besoin. En l'occurrence, il n'est pas nécessaire que le Président démissionne, loin de là.
Le remède se trouve dans les travaux des comités et le Bureau de régie interne. Même si nous n'approuvons pas la décision, nous l'acceptons. Nous ne croyons pas qu'il y a une raison suffisante de destituer le Président ni même de le blâmer. Nous sommes contre la motion. Rien ne s'est produit ici qui pourrait justifier le moindrement que le Président perde son poste.
Je le répète, nous n'obtenons pas toujours les décisions que nous voudrions de la part du Président. Les décisions qui sont prises ne nous plaisent pas toujours, mais nous les acceptons. Nous savons que c'est la tâche du Président et qu'il ne peut pas toujours statuer en notre faveur, bien que nous ayons presque toujours raison.
J'ai été élu en 1988 et le Président de l'époque a pris des décisions que nous avons trouvées désagréables, voire quelquefois choquantes, même si nous avions élu le Président, mais nous les avons acceptées de la même manière que nous acceptons les décisions actuelles du Président. Nous savons que ce n'est pas le Président qui écrit le Règlement. Il n'invente pas les pratiques administratives, mais il lui incombe de veiller à ce qu'elles soient correctement appliquées.
J'ai écrit ce discours avant que le projet de loi C-20 ne soit adopté et cela change nombre de choses que j'allais dire. Toutefois, cela ne m'empêche pas de dire que, durant le formidable débat sur le projet de loi C-20—et ce fut une véritable expérience de prendre part à ce débat—le gouvernement a refusé de laisser le comité demander l'opinion des Canadiens du Québec, de la Nouvelle-Écosse et de la Colombie-Britannique.
L'objectif était de respecter le calendrier des libéraux dont le congrès devait commencer hier, aujourd'hui, demain ou autre. L'objectif était que le projet de loi soit adopté avant le congrès des libéraux. Pour cela, ils ont dû bafouer les droits de certains d'entre nous. Ils ont dû bafouer les droits de certains députés bloquistes. Ils ont dû enfreindre quelques règles de la Chambre. À mon avis, cela a été un facteur clé ici et cela n'aurait pas dû se produire, sachant à quel point ce projet de loi est important, particulièrement pour les députés du Bloc.
M. Lynn Myers: Ils pourraient même voter deux fois sur le même amendement.
M. Bill Casey: Nous avons droit à deux votes. Le leader du gouvernement à la Chambre est particulièrement coupable dans ce cas. Il a un devoir particulier au Parlement. C'est un dirigeant de la Chambre et, à ce titre, il a une obligation particulière de veiller à ce que les règles soient respectées. Il a une obligation particulière de ne pas suivre les règles ou les instructions du Cabinet du premier ministre et de protéger la procédure et le mode de fonctionnement de la Chambre. Sinon, la Chambre en paiera le prix, et c'est ce qui se produit ici aujourd'hui. Parce que l'on a fait un usage abusif des règles et parce que l'on a été tenté de prendre des raccourcis et de limiter le processus, nous en payons ici le prix aujourd'hui et vous, monsieur le Président, vous en payez aussi le prix parce que vous devez écouter ce débat.
Pendant la brève période où il a été question du projet de loi C-20, on a adopté des mesures qui ont contribué à limiter les droits des députés, on a foulé aux pieds les droits des Canadiens d'être entendus en comité et on a éliminé d'importants liens qui permettent à cet endroit de fonctionner, tout cela afin que ce projet de loi soit adopté avant le congrès libéral. Je crois vraiment que le Bloc a présenté cette motion dans un moment d'émotion, dans un contexte d'incertitude au moment où nous discutions d'une question qui revêt pour les bloquistes une très grande importance. À mon avis, cela ne se serait pas produit dans le cas d'un autre projet de loi ou de toute autre question que celle qui est abordée dans le projet de loi C-20.
Monsieur le Président, notre parti n'envisagera pas, ne serait-ce que pour un moment, d'appuyer la motion visant à vous faire perdre votre emploi. L'orateur précédent du Bloc a mentionné que cette motion n'était pas dirigée contre vous, monsieur le Président et, à mon avis, c'était là une observation fort pertinente.
Compte tenu du climat émotif et de tous les nuages entourant toute cette question, de l'empressement à rendre des décisions, à recourir à l'allocation du temps et à imposer des restrictions, de l'émotion ressentie par les députés du Bloc, que je ne peux sous-estimer ni minimiser, je vous prie, monsieur le Président, de demander aux députés du Bloc s'ils consentiraient maintenant à retirer cette motion. Ils ont indiqué qu'elle n'est pas dirigée contre vous et qu'elle s'en prend plutôt aux pratiques administratives utilisées dans une circonstance grave. Au lieu de recourir à un vote, je vous prie, monsieur le Président, de demander aux députés du Bloc s'ils sont disposés à retirer cette motion.
[Français]
M. André Bachand: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Mon collègue a demandé aux députés qui ont proposé la motion, par votre entremise, de voir s'ils acceptaient de la retirer.
Ce que je veux dire, c'est que nous, après avoir écouté, dans un premier temps, l'ensemble des parlementaires, incluant ceux du Bloc, on pense sérieusement qu'il n'y a rien qui justifie d'ouvrir davantage la cicatrice que la Présidence doit subir au niveau des traditions. C'est une motion très grave et nous comprenons les arguments de tous et chacun.
Mais je pense qu'après avoir entendu les exposés de tous nos collègues, si, par votre entremise, on ne peut le demander au Bloc, nous, du Parti progressiste-conservateur, aimerions demander à la Chambre, tout en reconnaissant certains problèmes administratifs, que la motion soit retirée.
Je vous pose la question, monsieur le Président, et selon votre réponse, nous demanderons à la Chambre de retirer la motion.
Le Président: Tout d'abord, l'honorable député de Richmond—Arthabaska ne peut pas présenter une telle motion. Deuxièmement, j'aimerais poser une question à l'honorable député de Cumberland—Colchester.
[Traduction]
Je dois comprendre. Le député demande-t-il la permission d'obtenir le consentement unanime de la Chambre? Cherche-t-il à présenter une motion réclamant le consentement unanime? Peut-il répondre à ma question, s'il vous plaît?
M. Bill Casey: Oui, monsieur le Président, je demande le consentement unanime afin que cette motion soit retirée.
Le Président: On peut maintenant mettre la motion aux voix.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je pense que la proposition faite par notre collègue du Parti progressiste-conservateur est animée de bonnes intentions. Je crois pouvoir lui répondre que le chef du Bloc québécois, dans son intervention de ce matin—et je ferai la mienne dans quelques minutes—a indiqué qu'il était tout à fait disposé à retirer cette motion. Mais on ne retirera pas cette motion sans que la Présidence nous ait indiqué qu'elle a l'intention, effectivement, de regarder cette question très attentivement quant au problème que nous avons soulevé et de faire en sorte que celui-ci soit corrigé.
Je pourrai peut-être, dans le cadre de mon intervention, exprimer plus amplement mon point de vue sur la question. Je suis toutefois obligé de vous dire que, dans les circonstances, sans que nous ayons eu quelque engagement que ce soit, nous n'allons pas donner notre consentement pour le retrait de cette motion.
[Traduction]
Le Président: Je vais revenir à cette motion dans quelques secondes mais, en premier lieu, je passe à un rappel au Règlement.
M. Ted McWhinney: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Selon la loi constituant le Parlement, seuls le député qui propose une motion et celui qui l'appuie peuvent la retirer. Il n'est aucunement question de déléguer ces pouvoirs à d'autres députés.
Le Président: Je le répète, il faudrait d'abord le consentement unanime. Avec le consentement unanime, la Chambre peut faire à peu près tout ce qu'elle veut.
[Français]
M. André Bachand: Monsieur le Président, je remercie l'honorable whip du Bloc québécois de l'ouverture dont il a fait preuve. Finalement, la discussion est de savoir si on peut retrouver entre cette Chambre et la Présidence un moyen d'engager des discussions sur les différents points qui ont été soulevés ce matin.
Je suis nouveau au niveau de la politique fédérale, mais je dois dire que cette motion est très importante. Je me rends compte que si on est capables, comme je le disais tantôt, de refermer la cicatrice sur ce qu'on a fait aujourd'hui, et qu'on soit capables, en même temps, de se pencher sur les problèmes que plusieurs parlementaires, dont le whip et le chef du Bloc québécois, ont soulevés, nous pensons que le Parlement regagnerait plusieurs des lettres de noblesse qu'il a perdues depuis le début de la journée.
Finalement, je vous adresse la question suivante: est-ce qu'il y a moyen, selon vous et selon les parlementaires réunis ici aujourd'hui, de passer au coeur du problème en arrêtant de déchirer notre système parlementaire?
M. Gérard Asselin: Monsieur le Président, je ne veux pas faire un recours au Règlement parce que je ne veux pas perdre mon droit de prendre la parole. Je vais vous laisser considérer les rappels au Règlement qu'il y a eus. Je veux m'assurer de ne pas perdre mon tour pour les questions et commentaires suite au discours du député conservateur qui était le dernier à parler dans le cadre de ce débat.
M. Bob Kilger (Stormont—Dundas—Charlottenburgh, Lib.): Monsieur le Président, je vais profiter de cette occasion pour intervenir brièvement sur ce recours au Règlement suite aux commentaires de mon collègue, le whip du Bloc québécois.
Dans un premier temps, quand je suis arrivé ici aujourd'hui, je me suis trouvé dans une journée particulièrement triste au Parlement, dans cette institution dont nous faisons tous partie. Mais au fur et à mesure des interventions de mes collègues de toutes les formations politiques, je commence à retrouver mon enthousiasme et ma confiance dans notre institution, parce qu'on parle de moins en moins de la question de confiance à l'endroit du Président.
Jusqu'à maintenant, on a parlé unanimement de l'appui, de la confiance qu'on vous porte comme Président. On arrive peut-être finalement à identifier de façon plus précise la question qui est débattue aujourd'hui, à savoir qu'il s'agit d'un problème administratif.
J'ose croire que particulièrement ceux et celles qui siègent avec vous au Bureau de régie interne, lequel vous présidez, savent que c'est une des structures à laquelle nous nous adressons pour tenter d'améliorer notre institution, soit au niveau des ressources humaines, du financement additionnel pour enrichir nos services, pour nous donner les moyens de mieux desservir nos commettants et d'être plus sages dans nos travaux à titre de parlementaires.
Mais nous devons reconnaître que la Présidence elle-même ne doit pas et ne peut pas agir de façon unilatérale. À titre de serviteur de la Chambre, le Président se fie à nous, parlementaires, pour lui remettre les valeurs, les règles en vertu desquelles nous allons agir et la façon dont ce Parlement va fonctionner.
[Traduction]
Je sais que nous voulons tous être respectueux les uns envers les autres et partant, envers l'institution. J'estime d'un côté— et je me répète, car c'est important—que la présidence ne peut rien changer unilatéralement.
Je suis impatient d'entendre encore mon collègue, le député de Verchères, à cet égard, car nous en venons finalement ici au coeur de la question. Le débat porte sur une questions administrative ou une lacune administrative, diraient certains. Je ne crois pas que ce soit encore très clair pour personne.
Si l'on m'accordait un peu plus de temps, au cas où je n'avais pas la possibilité de reprendre la parole, je pourrais situer le débat dans une toute autre perspective. Bien que nous ayons tous à l'occasion le privilège d'être priés d'assumer certaines responsabilités—depuis le peu de temps que je siège ici, j'ai eu l'occasion d'être associé avec vous, monsieur le Président, et ce qui est encore plus important—avec tout le respect que je vous dois—avec l'institution, en partageant avec vous cette présidence qui est tellement symbolique de notre institution démocratique. En tant que gardien et serviteur de la Chambre élu à la présidence par nous tous, vos pairs, vous, monsieur le Président, n'avez jamais laissé plané le moindre doute sur vote intégrité, votre impartialité et, surtout, votre passion pour notre Parlement.
Dans cette vie antérieure, j'ai collaboré étroitement avec vos associés, avec les greffiers et les greffières dont la responsabilité est de vous conseiller et de nous conseiller. Je fréquentais aussi religieusement que possible les réunions du matin, au 139-N, et j'en garde un excellent souvenir. J'ai vu les hommes et les femmes qui ont travaillé en notre nom, par votre entremise, afin de permettre à cette institution de fonctionner aussi rondement et avec autant d'efficience et d'efficacité qu'elle le fait. Il est évident qu'ils se parlent. J'ai évolué dans ce milieu et je les ai entendus dire que tel parti voulait faire ceci et que tel autre parti voulait faire cela. Il est évident qu'ils se parlent, mais jamais, pendant les trois années où j'ai été associé à la présidence, n'ai-je eu la preuve ou la moindre indication que des renseignements reçus d'un parti étaient communiqués à un autre parti à la Chambre. Je suis certain qu'il en était ainsi bien des années avant que j'arrive à cet endroit et que cela ne changera jamais, à juste titre d'ailleurs.
En terminant, lors de la première intervention du parti ministériel, le leader du gouvernement à la Chambre a fait une offre. Il a dit que nous accepterions volontiers, par l'entremise de quelque mécanisme ou accord approuvé par les leaders à la Chambre et les partis, de discuter de la question et de trouver une solution à ce problème ou à ce qui semble actuellement, faute de plus amples renseignements, être un problème d'ordre administratif. Je suis certain que, avec la bonne volonté dont font preuve les hommes et les femmes qui travaillent ici au nom de tous les Canadiens, nous pouvons trouver une solution et relever ce défi administratif.
Le Président: Comme vous en conviendrez, il s'agit d'un curieux rappel au Règlement. Quoi qu'il en soit, je vois que le député de Cumberland—Colchester est debout et qu'il avait la parole, mais je vais ensuite donner la possibilité de s'exprimer au député de Charlevoix. Il aura la chance de poser des questions si nous décidons de continuer.
M. Bill Casey: Monsieur le Président, pour répondre aux préoccupations et veiller à ce que cela ne se reproduise pas, je voudrais apporter un amendement à ma requête voulant que nous envisagions de retirer ce projet de loi par consentement unanime.
Je voudrais ajouter à cette motion qu'on demande au Bureau de régie interne d'examiner en priorité les services juridiques offerts aux députés, et que non seulement cela soit ordonné, mais que tous les partis qui ont souscrit à cette motion s'entendent là-dessus, si cela est accepté.
Le Président: Nous allons traiter cela en deux parties, comme mon collègue d'Edmonton-Sud-Ouest le dit souvent. Le député a-t-il le consentement unanime pour présenter sa motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
[Français]
M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, je désire faire un commentaire à la suite du discours que vient de faire le député conservateur. D'ailleurs, je tiens à remercier les députés du Parti conservateur de nous avoir permis—parce que c'était leur journée d'opposition—de débattre d'une motion qui était inscrite au Feuilleton et à laquelle on a donné la priorité aujourd'hui.
On a beaucoup fait allusion, dans nos précédents discours, à l'émotion ressentie par les députés du Bloc québécois, hier soir, lors du vote sur le projet de loi C-20 en troisième lecture. Je peux vous dire que le député de Beauharnois—Salaberry a travaillé très fort, ainsi que les gens du bureau du leader et l'ensemble des députés du Bloc québécois qui ont lu, relu et ont été informés de l'importance du projet de loi C-20 sur l'avenir du Québec.
Notre préoccupation première est de dire que la décision quant à la rédaction de la question appartient à l'Assemblée nationale, et ensuite, il appartient à la population du Québec de décider de son avenir.
Effectivement, hier, lors de la troisième lecture du projet de loi, les députés du Bloc québécois ont vécu beaucoup d'émotions. La première fois que j'ai voté pour le Parti québécois, c'était en 1970, et par la suite, j'ai toujours voté, lors des élections, pour des partis souverainistes.
Je n'aurais jamais été député fédéral ici, à Ottawa, n'eut été de la formation du Bloc québécois, qui est né de l'échec de l'entente du lac Meech.
Je comprends que les députés de l'Ontario, du Manitoba et d'un peu partout à travers le Canada anglais aient voté en faveur du projet de loi C-20. Ce que j'ai de la difficulté à comprendre, et ce qui m'a ému, c'est d'avoir vu les députés libéraux du Québec voter, avec un grand sourire, pour bâillonner le Québec, le menotter, le cadenasser. Ils disaient aux Québécois: «Vous n'êtes pas assez intelligents pour décider de votre propre avenir.» J'ai trouvé ça difficile.
J'ai mieux compris pourquoi les députés libéraux du Québec avaient voté pour la Constitution de 1982, une Constitution qui n'a été acceptée par aucun des premiers ministres du Québec, autant souverainistes que fédéralistes. Aucun des premiers ministres du Québec n'a accepté cette Constitution. Pourtant, à l'époque, il y avait 74 députés libéraux dans cette Chambre qui ont voté en faveur.
Je comprends mieux depuis hier lorsque j'ai vu des députés libéraux du Québec voter en faveur du projet de loi C-20, le fameux projet sur la clarté. C'est un projet de loi qui va dire: «Est-ce que la question est bonne ou non. Est-ce que la majorité est bonne ou non?» C'est ce qui nous a affectés.
Je veux terminer là-dessus en posant une question au député progressiste-conservateur qui m'a précédé et à qui je réplique. Je sais que le Parti progressiste-conservateur vit une certaine distorsion sur cette question et qu'il est un peu divisé. Est-ce que lui, s'il avait été un député du Québec qui aurait pour seul et unique intérêt de défendre les intérêts des Québécois, aurait voté pour ce projet de loi?
[Traduction]
M. Bill Casey: Monsieur le Président, en toute déférence à l'égard du député, je suis un député de la Nouvelle-Écosse. J'espère représenter les intérêts de ma province dans la façon dont je vote sur ces questions. Je respecte son droit de représenter ses électeurs comme bon lui semble lors des votes. Ce n'est pas ce dont il est question dans le cas de cette motion.
Il a dit dans ses observations que j'avais parlé d'émotions. Je crois que le gouvernement a commis une erreur en ne prévoyant pas à quel point les bloquistes attacheraient de l'importance à cette question. Il aurait dû faire tout en son pouvoir pour s'assurer que les députés aient l'occasion d'intervenir, de faire comparaître des témoins et de participer à ce débat même plus que d'habitude au lieu d'avoir recours à l'attribution de temps, de limiter les réunions du comité et ses déplacements. Toutes sortes de comités se rendent un peu partout. Voilà un comité qui était extrêmement important, surtout pour les bloquistes, et qui n'a absolument pas pu se déplacer. On a ensuite essayé de restreindre notre capacité de présenter des amendements.
Je crois que le gouvernement a commis une erreur dans la façon dont il a abordé la question. Il aurait dû avoir plus d'égards pour les intéressés. De cette façon, le député aurait pu s'assurer de bien faire connaître les préoccupations de ses électeurs et il aurait pu s'acquitter de son travail. Toutefois, à cause des tactiques utilisées, de nombreux députés bloquistes n'ont absolument pas pu faire leur travail pour ce qui est de défendre les intérêts de leurs électeurs.
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, c'est une journée fort intéressante jusqu'à maintenant, ainsi que certains députés l'ont dit.
Je voudrais féliciter les députés du Parti progressiste conservateur d'avoir renoncé volontairement à leur journée de l'opposition et à une question qui les préoccupe vivement pour débattre une motion qu'ils n'appuieront sans doute pas, à l'instar des autres partis.
D'une certaine façon, cela me fait penser à Nelson Mandela et à son principe de la guérison et de la réconciliation après des périodes d'une grande turbulence et de grands tourments intellectuels. Ce fut une expérience exténuante que ce vote qui a duré 24 heures sur 24. Ce fut en quelque sorte un procès par supplice. Nombre de députés ont déjà vécu cela à trois reprises depuis trois ans. On doit donc se demander bien sûr si on peut faire mieux.
Vous avez été très indulgent, monsieur le Président, en ce qui concerne votre privilège et celui de la Chambre en tant qu'institution. Vous auriez pu restreindre le débat en appliquant des critères de pertinence, mais vous avez, si je puis dire, fait preuve d'une grande générosité en permettant que les orateurs s'écartent parfois du sujet.
Permettez-moi, toutefois, d'attirer l'attention de la Chambre sur le point suivant. Nous vouons un immense respect au personnel technique rattaché au bureau de la présidence. Ces gens-là ne sont pas choisis en fonction de leur idéologie ou de leur affiliation politique. Ce sont des gens de carrière, des professionnels, des technocrates. Ils sont au service de la présidence. Ils serviront tout aussi bien les prochains Présidents, quel que soit le parti qui formera le gouvernement. J'estime que cela doit être souligné. Le personnel de la présidence est le prolongement de cette dernière.
Nombre de personnes qui ont occupé le poste de Président ne sont pas des avocats constitutionnels. Il n'y a de raison qu'ils le soient. Ils n'ont pas nécessairement une grande connaissance des précédents parlementaires. Le personnel fournit ces précisions, les antécédents historiques. Il revient alors au Président de décider de l'usage qu'il convient d'en faire. Toutefois, sans ces personnes, le Président ne pourrait remplir ses fonctions. Je crois que tous seront d'accord pour dire que nous n'avons rien à reprocher au personnel technique du bureau du Président et que nous avons toute confiance en lui.
On a parlé de données historiques. Vous-même, monsieur le Président, dans une poussée d'humour, avez parlé de gens qui avaient perdu la tête, de ceux qui vous ont précédé à ce poste. C'était plutôt aux débuts. Cela me rappelle les propos du juge bien connu Oliver Wendell Holmes. Ce dernier a souligné qu'il est révoltant qu'on ne puisse mieux justifier un poste aujourd'hui qu'en disant que c'était ainsi que les choses se passaient au temps de Henri II. Cela remonte à très loin et nous devons plutôt faire preuve de créativité et considérer l'histoire sous un angle dynamique.
Le poste de Président a changé. Il y a très certainement une énorme différence entre la présidence telle qu'elle existait au cours de la période prémoderne, qui pourrait je suppose remonter jusqu'à l'époque du roi Jacques 1er, et celle qui a vu le jour par la suite. La notion de compétition entre la présidence et le gouvernement est démodée. Elle a fait place au développement économique et social, à la guerre civile anglaise qui a opposé deux élites rivales, à la transmission de pouvoirs de l'aristocratie aux grands propriétaires fonciers, et cela a continué par la suite. Les précédents créés au cours de cette période ont donné lieu aux fonctions modernes de la présidence et du Parlement tel que nous le connaissons. Aujourd'hui, le parlement est très différent de ce qu'il était avant que les descendants du royaume de Hanovre ne viennent en Grande-Bretagne et que le système de gouvernement par l'exécutif n'évolue en démocratie responsable. Lorsque Dicey parle de la souveraineté du roi et du Parlement, il parle du Parlement à titre d'institution, du gouvernement, mais le Président en fait partie.
Ce fait est reconnu dans la légitimité accrue accordée à votre charge, monsieur le Président, par le principe d'élection qui, comme chacun sait, est tout à fait récent chez nous. Je pense que cela remonte tout juste à votre prédécesseur immédiat. Mais la légitimité vient surtout des pouvoirs qui vous sont conférés de par tout le régime constitutionnel du pays.
Selon Dicey, ce qui permettait au nouveau Parlement moderne, au nouveau système moderne fondé sur l'équilibre des pouvoirs, de fonctionner, c'était l'observance des règles de jeu constitutionnelles au sein du Parlement par l'opposition et par le gouvernement. La minorité a certes ses droits, mais la majorité a aussi les siens et il appartient au Président de faire en sorte que les affaires de ce pays ne soient pas indûment retardées ou entravées. On lui demande ici de trancher une question.
Comme je l'ai mentionné, au cours des trois dernières années, il est arrivé à trois reprises que des séances marathon durent toute la nuit, au détriment du sommeil des députés, et les choses auraient pu être pires encore. Si on a pu opposer 400 amendements à un projet de deux ou trois pages et de deux ou trois articles, pourquoi pas 4 000 ou 40 000? L'enjeu est donc très concret.
Il faut savoir que d'autres Parlements ont modifié leur procédure à cet égard. La menace que présente le dossier québécois depuis la révolution tranquille a entravé le processus de modernisation et de mise à jour des institutions parlementaires et de la procédure parlementaire, d'où le retard que nous avons pris par rapport à d'autres gouvernements.
Il y a à peu près deux jours, j'ai fait référence dans un autre contexte à Mr. Smith Goes to the Senate. Le grand acteur Jimmy Stewart y parle pendant 22 heures pour faire de l'obstruction parlementaire et empêcher l'adoption d'un projet qu'il estime ignoble. Il n'est plus possible de faire cela au Congrès américain.
Imaginez ce qu'aurait été la Grande-Bretagne de Mme Thatcher ou de Clement Atlee. La Chambre des communes britannique, dont notre système est inspiré même si nous ne sommes plus liés par ses précédents, fonctionnait différemment.
Nous avons dépassé le stade du club des gentilhommes victoriens de la fin du XIXe siècle où le Parlement examinait deux ou trois projets de loi par an. Aujourd'hui, nous examinons des centaines de mesures législatives et tout le monde doit comprendre cela. Les règles parlementaires ont besoin d'être revues et adaptées, de même que le rôle du Président. Dans un sens, je trouve que ce que nous avons fait la semaine dernière est improductif et inefficace.
Si l'on demande «le Président ne jouit-il pas de pouvoirs inhérents eu égard aux amendements et aux projets de loi?», la réponse est oui. Chaque projet de loi, chaque amendement fait l'objet d'un examen minutieux pour s'assurer qu'il n'y a pas d'erreur grammaticale et que les versions française et anglaise correspondent bien.
Je crois aussi, monsieur le Président, bien que je ne vous aie jamais posé la question, que vous exercez un contrôle prudent sur ce qu'on pourrait appeler l'expurgation de la langue ou l'utilisation d'expressions inappropriées. N'est-il pas du ressort du Président de juger que certains amendements font double emploi, qu'ils sont superflus ou sans objet? Peut-on amender un amendement? Je ne suis pas en train de dire que cela concerne le projet de loi sur la clarté, mais plutôt le projet de loi sur l'accord nisga'a pour lequel ont été présentés des amendements proposant, entre autres, de modifier un point-virgule par un deux points. De nos jours, le fonctionnement du parlement moderne et le rôle de la présidence exigent que celle-ci fasse appel à certaines prérogatives, consulte les collaborateurs-experts appropriés et, au besoin, utilise son pouvoir discrétionnaire pour rejeter certaines propositions.
Ce n'est pas un reproche que j'adresse à ceux qui ont participé au grand débat de ces jours-ci. Comme nous l'avons tous reconnu, les passions étaient exacerbées à la Chambre et il est possible que, si c'était à refaire, certains des principaux acteurs, voire tous, agiraient différemment. Quoi qu'il en soit, vu l'esprit dans lequel a été rédigée la motion et la façon dont le débat s'est déroulé, il conviendrait de permettre à tous les partis, dans la période de calme et de réflexion qui suit tout débat, d'envisager sérieusement des moyens de moderniser nos procédures et d'appuyer le Président pour qu'il puisse utiliser de façon constructive ses prérogatives inhérentes. Ne pourrions-nous pas agir différemment?
Il me paraîtrait plus constructif que quelqu'un, ou peut-être le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, fasse des recommandations pour éviter la répétition de ce genre de débat marathon ou encore, comme l'a fait le comité composé de représentants de tous les partis qui est chargé de choisir les projets de loi d'initiative parlementaire, et je crois que cela s'était fait sur votre initiative, monsieur le Président, que l'on fasse des recommandations qui permettent au Président d'inviter les personnes qui parrainent des projets de loi ou qui proposent de nombreux amendements, à faire preuve de modération et à tenir compte du droit de tous les parlementaires et des Canadiens de pouvoir faire adopter des lois rapidement. Y aurait-il possibilité de s'entendre à ce sujet? Je souhaiterais qu'on s'arrête à ces questions.
J'ai constaté que nous n'avons pas tous utilisé les ressources disponibles. Dans le cas du traité nisga'a, par exemple, j'ai été très étonné de constater que le rapport unanime d'un comité parlementaire constitué de représentants de tous les partis a néanmoins été suivi d'un débat marathon au Parlement. Les comités ont été conçus, au départ, comme des délégataires de la responsabilité du Parlement, lequel devait, par voie de conséquence, leur accorder sa confiance et respecter leur jugement. La même chose aurait-elle été possible dans le cas du projet de loi sur la clarté référendaire?
Nous avons tenu un long débat en décembre. Un comité législatif était-il nécessaire? C'est le genre de questions qui peuvent être examinées par tous les partis.
Monsieur le Président, les députés de tous les partis, et je crois que c'est aussi le cas des bloquistes, ont reconnu la légitimité de votre charge et de ses privilèges et ils ont confirmé leur respect pour la conduite que vous et vos fonctionnaires avez adoptée. Nous faisons confiance à la présidence et à ses collaborateurs, y compris les membres du personnel.
Le débat actuel connaîtra une issue fructueuse si tous les partis à la Chambre, y compris les conservateurs, acceptent de suspendre la journée qui devait être consacrée à ces derniers et si vous, monsieur le Président, permettez la tenue d'un débat élargi sur la conduite des affaires du Parlement, qui transcende de beaucoup la question technique contenue dans la motion à l'étude. Nous tirerions ainsi une leçon fructueuse de tout cela.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir formuler quelques observations. Elles prendront plutôt la forme de commentaires, mais j'aimerais savoir ce qu'on en pense.
Quel est l'un des rôles les plus importants que joue le Président de la Chambre des communes?
Je voudrais d'abord expliquer où je veux en venir. En cas de doute dans ses décisions quotidiennes concernant un conflit entre le gouvernement et un député, le Président doit toujours pencher en faveur de la protection du député. Je fais cette supposition en premier lieu.
Pour répondre à ma question, l'un des plus importants rôles que joue le Président est de protéger les droits des députés et de protéger ces députés contre le pouvoir qu'exerce la Couronne, le gouvernement, les personnes qui ont l'autorité. Nous devons toujours respecter ce pouvoir de la présidence. Je respecte votre autorité, monsieur le Président. De même, nous devons toujours veiller à ce que chacun ici soit responsable.
Vous y veillez, monsieur le Président, de bien des façons. Il y a évidemment des décisions que vous prenez quotidiennement à la Chambre lors des débats, de la période de questions et des affaires courantes. Mais il y a aussi des activités qui se déroulent dans les coulisses du Parlement et qui sont aussi très importantes pour les députés. Il y a les services de soutien qui aident les députés à faire leur travail en tant que représentants de leurs électeurs.
Nous nous occupons principalement à la Chambre d'élaborer les lois auxquelles tous les Canadiens doivent se conformer. Pour nous aider à analyser et à rédiger les lois et les amendements, nous, les députés, avons besoin de recherches et de conseils juridiques confidentiels et de bonne qualité. Les rédacteurs législatifs sont principalement utilisés par les députés de l'opposition, car le gouvernement a son propre personnel pour faire le travail. Les députés ne jouissent pas de la confidentialité avec leurs avocats, contrairement au gouvernement qui emploie ses propres avocats.
Depuis 1993, et je crois que le député sera d'accord avec moi, j'ai constaté une dégradation du débat à la Chambre. Nous consacrons beaucoup moins de temps au débat que lorsque je suis arrivé au Parlement. Pourquoi? Parce qu'il y a eu une dégradation du processus démocratique et de l'esprit selon lequel les affaires devraient être menées à la Chambre. Une grande partie de cela est due à l'usage de la manière forte par le gouvernement. Les députés d'opposition ont tenté d'utiliser le Règlement pour veiller à ce que la démocratie soit respectée. La démocratie sert à veiller à ce que les minorités soient entendues. J'utilise le terme «minorité» de façon plutôt impropre, car, dans l'opposition, nous représentons 60 p. 100 des Canadiens.
Je demande au Président de maintenir cette atmosphère de démocratie qui devrait caractériser les débats et les services de soutien de la Chambre. Je ne vois aucune raison valable pour que nous ne puissions pas jouir de la confidentialité avec les rédacteurs législatifs fournis par la Chambre des communes. J'ai entendu toutes sortes d'excuses telles que les partis ont négocié les changements, le personnel de soutien travaille pour la Chambre, etc, mais le bureau du Président est là pour nous protéger et il ne doit pas autoriser de changement dans ce domaine pouvant nuire à la protection et au soutien dont doivent bénéficier les députés.
Je remercie le Bloc d'avoir présenté cette motion. Cela me permet d'exprimer cette préoccupation.
J'ai une autre petite chose à dire. Le récent changement de politique à la Chambre des communes a été réalisé derrière le dos des députés...
Le Président: J'aimerais pouvoir vous accorder plus de temps, mais il n'y a que dix minutes pour les questions et observations et je vais donner la parole au député de Vancouver Quadra.
M. Ted McWhinney: Monsieur le Président, le député a présenté des observations très profondes. Je crois que le Parlement a connu un déclin très marqué depuis que nous avons tous deux été élus ici, lors de la promotion de 1993. Je crois que cela a beaucoup à voir avec les conséquences inattendues, mais prévisibles de la télédiffusion des débats de la Chambre. En mettant ainsi l'accent sur la période des questions, on a fait très nettement perdre à celle-ci son rôle traditionnel pour la transformer en feuilleton des plus intéressants et des plus excitants. Cela a toutefois eu pour effet de détourner l'attention des débats.
Lorsque, en tant qu'universitaire, je venais assister autrefois aux débats, ceux-ci étaient intéressants et animés et, soit dit en passant, beaucoup de députés y participaient. Il faudrait donc y songer. Il s'ensuit logiquement qu'on aurait dû conférer davantage de pouvoir aux comités, sur le modèle des comités français et américains. Je crois que c'est là une réforme qui se fait attendre depuis 50 ans peut-être et qui ne s'est pas faite parce que nous nous sommes concentrés sur d'autres choses.
J'ai une observation à présenter, toutefois, à propos des comités. Le comité chargé d'examiner le projet de loi de clarification était un comité législatif. Or, la présidence peut donner une certaine orientation aux délibération d'un comité législatif. On me dit que les pouvoirs de la présidence n'ont pas vraiment changé au même rythme que le Règlement, mais sont traditionnellement restés en suspens. Je crois que la Chambre serait plutôt disposée à encourager la présidence, quel qu'en soit le titulaire, à exercer plus strictement ces pouvoirs inhérents à la fonction et à ne pas céder à la pratique parlementaire laxiste qui veut en quelque sorte qu'on laisse la Chambre décider parfois de ses propres règles confuses.
Je sais, monsieur le Président, que cela vous a déjà vexé; il y aurait donc peut-être lieu de tirer une leçon du présent débat et d'user de vos pouvoirs. Vous bénéficierez pour cela en cela de l'encouragement et l'appui de la Chambre.
[Français]
Le Président: Je vais maintenant donner la parole au député de Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, mais il ne reste que deux minutes avant la période pour les déclarations de députés.
M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Monsieur le Président, je vais essayer d'être bref. Je suis sûr que j'aurai l'occasion cet après-midi de poser d'autres questions.
Plusieurs ont dit dans cette Chambre que c'était un acte grave en ce qui a trait à la question qui était posée. J'aimerais demander au député de Vancouver—Quadra la question suivante. Ne croit-il pas que c'est justement parce qu'on considère que le Président de la Chambre est très important, et qu'il n'y a que lui qui peut régler le différend qui nous oppose entre le conseiller législatif et les greffiers?
Il n'y a que lui, parce que ces gens-là dépendent de son budget. Il est le patron qui peut décider quand, comment et ce qu'on peut faire. Est-ce que le député est d'accord avec cette affirmation. Lui-même étant un constitutionnaliste, j'aimerais qu'il puisse me dire s'il y a une autre façon, lorsqu'on est au milieu d'un débat sur un projet de loi, lorsqu'on a perdu confiance quant à la façon d'opérer, lorsque le gouvernement ne veut pas retirer le projet de loi, que celle d'en appeler absolument à la Présidence?
M. Ted McWhinney: Je fais très confiance au bureau du Président de la Chambre. Il faut que le Président soit confiant dans l'exercice de ses responsabilités. Il a la compétence et il faut qu'on l'encourage à exercer ses pouvoirs. Jusqu'à maintenant, il y a une attitude d'auto-restriction de la part du Président de la Chambre. Cela existe malheureusement depuis quelques décennies, mais on peut changer cela.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Français]
LE PARTI LIBÉRAL DU CANADA
M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le Président, le Parti libéral du Canada débute aujourd'hui son congrès biennal qui réunira des délégués de toutes les régions de notre pays.
Des femmes et des hommes viendront discuter de l'avenir économique et social du Canada. Ils détermineront des choix et des alternatives pour relever les défis des années 2000.
En somme, on discutera de dossiers qui intéressent la population, les réalités de la vie et, surtout, on proposera et adoptera des moyens pour améliorer la qualité de vie de la population.
Je souhaite donc bonne chance aux organisateurs de cet événement politique important pour notre formation politique, et sans doute que notre gouvernement s'inspirera des propositions de cette fin de semaine pour enrichir son travail.
* * *
[Traduction]
LES FRUCTICULTEURS DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, les fructiculteurs de la Colombie-Britannique connaissent de graves problèmes à cause des bas prix et des fortes dépenses qu'ils doivent faire dans leurs vergers. Afin de soutenir la concurrence sur les marchés internationaux, beaucoup ont commencé à replanter des arbres fruitiers de meilleure qualité et à forte densité.
Deux de mes électeurs comptent parmi ces fructiculteurs, Bill et Sheila Ackerman, qui font de la culture fruitière dans la région de Kelowna depuis 1985. Tant que leur verger ne redeviendra pas productif, Bill et Sheila doivent compter sur des revenus d'appoint.
Or, est-ce que le gouvernement fédéral récompense de leurs efforts les fructiculteurs de la Colombie-Britannique? Non. Par une cruelle décision, les percepteurs d'impôt ont décidé de limiter la déduction des dépenses agricoles admissibles, empêchant les Ackerman de fournir un niveau de vie décent à leur famille.
L'exploitation agricole au Canada est déjà en péril. Des décisions comme celle-là ne feront que contribuer à la faire décliner davantage. Je m'oppose vigoureusement à cette décision et j'invite les ministres de l'Agriculture, des Finances et du Revenu national à annuler cette décision inéquitable.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, un rapport commandé par Environnement Canada révèle que jusqu'à 100 000 oiseaux de mer meurent chaque année dans les eaux mazouteuses au large des côtes de Terre-Neuve. Je suis convaincue que les Canadiens sont aussi fâchés que moi d'apprendre que nos eaux servent pour la vidange de ballast des navires en route pour les États-Unis.
À cause d'une surveillance environnementale complètement inadéquate et d'amendes ridiculement faibles pour les pollueurs, ces navires déversent impunément leurs eaux de cale mazouteuses avant d'entrer en territoire américain. Les compagnies de transport maritime trouvées coupables de polluer les eaux européennes ou américaines peuvent avoir à payer des amendes atteignant un million de dollars. Au Canada, les amendes frappant les rares navires appréhendés s'élèvent en moyenne à un maigre 7 000 $.
Quand donc notre pays se mettra-t-il à faire respecter activement la réglementation en matière de pollution et y consacrera-t-il les fonds nécessaires pour que nos agents chargés de l'appliquer représentent une véritable menace pour ces criminels envers l'environnement? Ces pollueurs ne peuvent causer impunément la mort lente des oiseaux de mer en Europe ou aux États-Unis, mais ils le font chez nous où les amendes ne représentent qu'un élément parmi d'autres du coût d'exploitation. J'invite les députés...
Le vice-président: La députée d'Etobicoke—Lakeshore a la parole.
* * *
LA MINE BARAKOVA
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens sont préoccupés lorsque des catastrophes s'abattent sur des populations dans d'autres régions du monde et sèment la mort. Je prends la parole aujourd'hui pour attirer l'attention de la Chambre sur la tragédie de la mine de Barakova, qui s'est produite samedi dernier, dans l'est de la République d'Ukraine.
L'explosion de la mine de Barakova a été causée par du méthane mêlé à du charbon. Cette horrible tragédie est considérée comme la pire catastrophe industrielle dans le pays depuis son accession à l'indépendance, en 1991. Cette fois-ci, 80 mineurs ont perdu la vie, beaucoup d'autres ont été hospitalisés et leurs familles ont énormément souffert.
Je me joins à mes électeurs de la collectivité ukrainienne et à tous les Canadiens pour adresser mes très sincères condoléances aux survivants et aux familles de ceux qui souffrent à cause de cette catastrophe.
* * *
LE GOUVERNEMENT DE L'ONTARIO
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été heureux de participer à une table ronde qui a eu lieu jeudi dernier, à Coutice, dans ma circonscription. Elle portait sur le développement économique et le transport à Durham. Étaient présents des représentants du secteur agricole, des administrations municipales, des camionneurs, des écologistes et de tous les autres milieux.
Les habitants de Durham en ont assez des reproches incessants du gouvernement Harris, à Queen's Park. Pendant que nous travaillons jusqu'aux petites heures du matin, ici, à Ottawa, l'Assemblée législative de Queen's Park n'a même pas siégé cette année. Nous savons quel gouvernement travaille pour la population et quel autre ne le fait pas.
Les habitants de Durham veulent que le gouvernement Harris s'emploie à résoudre leurs problèmes en matière de soins de santé. Les Canadiens savent que, avec des dépenses totales en santé de plus de 80 milliards de dollars, soit environ 9,2 p. 100 de notre PIB, le Canada est un des pays qui consacre le plus de fonds aux soins de santé.
Le problème, ce ne sont pas les fonds, c'est plutôt la gestion de ces fonds. Une partie du problème de gestion, c'est que le gouvernement Harris puise dans des comptes de fiducie désignés l'argent réservé à la santé et le dépense ailleurs. Les gens de Durham veulent que le gouvernement Harris cesse de faire de la basse politique et qu'il se remette au travail.
* * *
WILLIAM BARKER, VC
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, cette semaine marquait le 70e anniversaire de la mort du héros de guerre le plus décoré du Canada, le lieutenant-colonel William Barker, VC. Aux commandes de son célèbre biplan Sopwith Camel, le lieutenant-colonel William Barker, VC, a descendu 50 avions ennemis au cours de la Première Guerre mondiale.
Né à Dauphin, au Manitoba, en 1894, Barker s'est enrôlé dans le bataillon canadien de fusiliers à cheval en 1914. Il a combattu pendant un an dans les tranchées avant son transfert dans le Royal Flying Corps, où ses efforts lui ont valu la Croix de Victoria.
Il est mort en procédant au vol d'essai d'un avion près de l'aéroport de Rockliffe, à Ottawa, en 1930. Ses funérailles ont été les plus importantes de l'histoire de Toronto, le cortège escorté par plus de 2 000 hommes en uniforme ayant défilé devant au moins 50 000 spectateurs.
Le 1er juin, la ministre du Patrimoine canadien dévoilera une plaque commémorative en son honneur à Dauphin, au Manitoba. Les Snowbird, autre symbole canadien, traverseront le ciel pour marquer cette occasion spéciale. J'invite tous les députés à assister à cet événement historique.
* * *
[Français]
L'ACCIDENT ROUTIER À SAINT-JEAN-BAPTISTE-DE-NICOLET
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Monsieur le Président, ce matin, à Saint-Jean-Baptiste-de-Nicolet, six enfants d'âge préscolaire ont péri dans un accident de la route.
Quatre enfants sont morts au moment de l'impact, un cinquième a succombé pendant son transport à l'hôpital et un autre un peu plus tard. Trois enfants sont encore à l'hôpital, dont deux dans un état critique.
En mon nom, au nom du Bloc québécois et au nom de tous les députés de cette Chambre, j'aimerais offrir mes condoléances les plus sincères aux familles qui sont touchées par cette effroyable catastrophe.
Je voudrais leur dire que nous partageons leur peine et leur souhaitons tout le courage nécessaire pour traverser cette terrible épreuve. J'aimerais également formuler l'espoir que les enfants qui luttent présentement à l'hôpital pour leur survie retrouvent le plus rapidement possible leur pleine santé.
Je voudrais rappeler à toutes les familles qui sont touchées par cet événement tragique que le grand auteur français Alexandre Dumas disait un jour: «Ceux que nous avons aimés et que nous avons perdus ne sont plus où ils étaient, mais ils sont toujours et partout où nous sommes.»
* * *
LE PREMIER MINISTRE DU CANADA
M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.): Monsieur le Président, vous me permettrez de féliciter notre premier ministre pour sa détermination à travailler dans les intérêts des Canadiennes et des Canadiens.
Le projet de loi sur la clarté confirmait en quelque sorte l'opinion exprimée par la Cour suprême qui affirmait sans équivoque qu'une question portant sur l'avenir du Québec devait être claire, de même que ses résultats.
Le gouvernement canadien devait assumer ses responsabilités et c'est précisément ce que nous faisons. On parle ici de notre pays. On parle de son avenir et de notre détermination à le préserver et à l'améliorer. Voilà le défi que le premier ministre et le ministre des Affaires intergouvernementales avaient à relever.
Je veux aujourd'hui saluer le courage, la détermination et le sérieux du travail accompli par notre premier ministre qui dirige un gouvernement fort et une équipe soucieuse de l'avenir de notre pays, le Canada.
* * *
[Traduction]
LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Monsieur le Président, trois enfants canadiens sont illégalement détenus en Californie depuis plus de six mois. Hier, les autorités canadiennes ont rencontré leurs homologues en Californie pour obtenir la garde de ces enfants, mais voilà qu'on les oblige à présenter une demande à un juge de la Californie qui, il faut l'espérer, leur accordera la garde des enfants dans trois semaines.
Il est absolument inacceptable d'ajouter trois autres semaines aux six mois qui sont déjà écoulés, surtout que, pour de jeunes enfants, trois semaines, c'est toute une vie.
Je voudrais que le ministre des Affaires étrangères explique à la Chambre pourquoi il a jugé bon d'intervenir personnellement et directement pour sauver la vie de Stanley Faulder, reconnu de meurtre et emprisonné au Texas, alors qu'il ne lève pas le petit doigt pour aider ces trois enfants canadiens à rentrer chez eux, comme ils le devraient.
* * *
LE CANADA
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, hier, à la Chambre, nous avons adopté un projet de loi historique, le projet de loi C-20, tendant à protéger les intérêts de tous les Canadiens lorsqu'il est possible qu'une province dise souhaiter se séparer du Canada. Cependant, aujourd'hui, un haut fonctionnaire américain de la Défense aurait déclaré que le Canada était le cinquante et unième État américain.
Le ministre canadien de l'Industrie fait part de son souhait d'éliminer les règles sur la participation étrangère dans le plus important de nos secteurs. Le ministre canadien du Commerce international discute encore de la façon de céder notre souveraineté et nos ressources comme l'eau dans le cadre de l'OMC.
Les conservateurs et les réformistes voudraient simplement que les libéraux mettent notre pays en vente encore plus rapidement. Seuls les néo-démocrates comme mes collègues de Halifax-Ouest, Winnipeg—Transcona et Regina—Qu'Appelle défendent les intérêts du Canada. Je voudrais demander aux libéraux qui tiennent leur congrès cette fin de semaine quel drapeau ils vont arborer, le drapeau canadien ou le drapeau américain?
Le vice-président: Le député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore sait que c'est tout à fait contraire au Règlement de brandir des objets à la Chambre.
* * *
[Français]
LE CONGRÈS DU PARTI LIBÉRAL DU CANADA
M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, à défaut de présenter une figure nouvelle à la tête de leur parti, les libéraux fédéraux ont décidé de présenter une image rajeunie de leur membership en invitant des milliers de jeunes à participer à leur congrès national qui se tient cette fin de semaine, à Ottawa.
De prime abord, on ne peut reprocher à un vieux parti de vouloir rajeunir sa base militante en sollicitant l'adhésion de jeunes adultes, étudiants ou travailleurs. Toutefois, lorsque cet objectif amène des organisateurs libéraux à s'adresser à une quarantaine d'étudiants et d'étudiantes du premier cycle du secondaire, âgés de 13, 14 et 15 ans, en leur faisant miroiter un voyage à Ottawa, toutes dépenses payées, et que cela se fait à l'insu des parents et de la direction de l'école, il y a matière à dénonciation parce que cela devient inacceptable et irresponsable.
Grâce à l'initiative du président de l'Association libérale fédérale du comté de Joliette, M. Jean-François Coderre, c'est pourtant ce qui s'est passé dans au moins une école polyvalente de mon comté.
La prochaine étape sera-t-elle celle du recrutement à l'école primaire ou dans les garderies? C'est à se le demander.
* * *
L'ENSEMBLE FOLKLORIQUE MANIGANCE
M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur le Président, en juillet prochain aura lieu la deuxième édition des folkloriades internationales à Tokyo, au Japon. Il s'agit d'un événement international se déroulant sous l'égide de l'UNESCO et du CIO, auquel participeront 73 pays, dont le Canada.
En tout, ce seront 2 000 participants et participantes qui représenteront, par la danse, les éléments culturels de leurs pays respectifs.
Pour cet événement, le Canada sera dignement représenté par l'ensemble folklorique Manigance, de la ville de Sainte-Marie.
Jusqu'à maintenant, cet ensemble a joué un rôle important dans le développement culturel de la région que je représente et est une source de fierté pour tous les Beaucerons et Beauceronnes.
Dorénavant, nous aurons l'opportunité de partager cette fierté bien nourrie avec tous les Canadiens et Canadiennes lors de ce très prestigieux événement international.
Je souhaite à l'ensemble folklorique Manigance la meilleure des chances lors de cet événement, tout en sachant qu'ils seront à la hauteur pour représenter notre pays sur la scène mondiale.
* * *
[Traduction]
LES SOINS DE SANTÉ
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, on a rappelé à de nombreuses reprises au ministre des Finances de ne pas oublier les soins de santé dans son nouveau budget. Or, dans son discours du budget du 28 février, le ministre a précisé que l'enseignement postsecondaire et la santé étaient les plus grandes priorités des Canadiens. Il a ensuite ajouté qu'on allait injecter dans ces deux domaines de façon ponctuelle une somme de 2,5 milliards de dollars répartie sur quatre ans et divisée entre dix provinces.
Dans le cas de Terre-Neuve, cela représente 10 millions de dollars par année pendant quatre ans. Si on affecte la moitié de cette somme aux soins de santé, cela représente 5 millions de dollars par année répartis entre 34 hôpitaux et centres de soins de santé, soit environ le coût d'un médecin par établissement.
Le ministre des Finances n'a pas oublié les soins de santé, mais il est venu bien prêt de le faire. Étant donné que notre système de soins de santé sous-financé est en crise et que nous avons des surplus budgétaires, c'est tout à fait inacceptable.
* * *
L'AGRICULTURE
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, chaque année, le monde entier célèbre la Journée internationale de la femme. Cette année n'a pas fait exception à la règle et j'aimerais attirer votre attention sur le rôle vital des femmes dans nos collectivités rurales et sur leur contribution au secteur agricole du Canada.
Les femmes agricultrices font partie intégrante de la réussite du secteur agricole et agroalimentaire de notre pays. Outre leur bénévolat et leur leadership au sein de la communauté, les femmes des régions rurales jouent un rôle important dans la consolidation de leurs collectivités.
Ces femmes ont contribué à la réussite du secteur agricole que nous connaissons maintenant. Elles contribuent à façonner l'avenir et à améliorer le secteur et les collectivités pour en faire des endroits où il fait bon vivre et travailler. Je les félicite de leur apport à la société.
* * *
LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, aimeriez-vous recevoir une adhésion à un club qui vous donnerait plus de temps pour faire de la musculation et jouer au base-ball et au ping-pong? Il est facile d'appartenir à ce club. Il suffit d'être incarcéré à l'établissement de Drumheller en Alberta.
Le directeur adjoint affirme qu'il accorde plus d'activités de loisirs aux détenus pour qu'ils ne cherchent pas à s'évader. Il y a eu neuf évasions à Drumheller l'an dernier.
Le Service correctionnel du Canada a semble-t-il décidé que les détenus passaient trop de temps à jaser entre eux et à regarder la télévision. Quelle solution le SCC a-t-il proposée? Accorder plus d'avantages aux détenus pour qu'ils ne s'évadent pas. Les fonctionnaires vont même ajouter un gymnase, des outils d'ébénisterie et une salle d'activités. Est-ce que tout cela fait partie de la réadaptation, est-ce que le but est d'aider les prisonniers à trouver des postes de moniteurs de ping-pong à leur sortie?
Qu'est-ce que le ministre entend offrir aux victimes et aux familles des victimes? Les citoyens respectueux des lois doivent souvent refuser des faveurs à leurs enfants pour payer les impôts qui servent à procurer des avantages aux prisonniers.
Aujourd'hui, nous désirons rappeler au solliciteur général que la prison n'est pas censée être un lieu de jeux et de divertissements.
* * *
[Français]
LE QUÉBEC
M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, la bataille parlementaire contre le projet de loi C-20 est terminée. La bataille politique est maintenant commencée.
Le caractère antidémocratique du projet de loi C-20 met en lumière les bas instincts de ce gouvernement qui poursuit son offensive assimilatrice contre le peuple québécois tout en démontrant son incapacité à renouveler un fédéralisme aussi centralisateur que dominateur et gaspilleur.
Par leur soutien à ce projet de loi, les libéraux fédéraux du Québec dévoilent leur vrai visage et démontrent qu'ils sont inféodés aux intérêts du reste du Canada.
L'excellent budget présenté à l'Assemblée nationale cette semaine amorce la délivrance économique du Québec. En poursuivant le combat, sa délivrance sociale et culturelle est pour demain et son émancipation politique est plus que jamais possible.
Ensemble, poursuivons le combat, le combat de la liberté pour le peuple québécois.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre croit qu'être un bon député veut dire donner à sa propre circonscription plus d'argent qu'à toute la province du Manitoba, de la Saskatchewan ou de l'Alberta. Imaginez cela. Son ingérence dans le processus d'octroi des subventions et des contributions de DRHC est précisément ce dont se plaignent les fonctionnaires de ce ministère.
Nous avons un autre document d'information sur les fonds en fiducie dans la circonscription du premier ministre, qui dit ceci: «Il semblerait que cet article de la Loi sur la gestion des finances publiques n'a pas été respecté.» C'est un aveu de culpabilité. Pourquoi n'a-t-on pas fait intervenir les policiers dans cette affaire?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la députée parle des investissements faits dans la circonscription du premier ministre. Les subventions et contributions pour la période en question totalisaient environ 20 millions de dollars.
Regardons un peu certaines circonscriptions réformistes: North Vancouver, 21 millions de dollars; Kelowna, 39 millions de dollars; Edmonton-Est, 45 millions de dollars. La députée veut-elle dire que ces circonscriptions ne méritaient pas de tels investissements?
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, la ministre n'a peut-être tenu compte que des subventions provenant du Fonds transitoire pour la création d'emplois. Par ailleurs, aucun des députés de ces circonscriptions n'était impliqué dans des tractations pour aider des gens à obtenir des subventions.
La ministre a donné son opinion hier, ce qui a probablement été apprécié par un petit nombre de personnes. Non seulement son ministère fait allusion au fait que le non-respect de la loi était pratique courante, mais cette note d'information aussi. Je vais citer ce que dit la note encore une fois: «Il semblerait que cet article de la Loi sur la gestion des finances publiques n'a pas été respecté.» Son ministère croyait qu'il y avait eu infraction à la loi. Il s'en est rendu compte.
Est-ce l'ingérence du premier ministre qui a empêché qu'on fasse intervenir les policiers dans cette affaire?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la députée cite des ébauches de documents. Hier, elle parlait de questions et de réponses préparées par les agents de communications du ministère. Il s'agissait de questions hypothétiques qui n'ont jamais été posées et de réponses hypothétiques qui n'ont jamais été données.
Les employés du ministère du Développement des ressources humaines n'ont jamais reçu la directive de ne pas respecter la loi.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je peux assurer à la ministre que je sais faire la différence entre les mots «draft» et «graft». Je trouve honteux que la ministre continue de dire...
Le vice-président: Je ne sais pas vraiment si la députée a dit «draft» ou «graft». Je suppose qu'elle a dit «draft» et j'espère que c'est le cas. Je sais qu'elle voudra continuer de poser sa question.
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, je vais citer encore une fois ce que disent les propres documents de la ministre. Il n'y a rien d'hypothétique dans cela. Voici ce qu'ils disent: «On nous a dit d'être souples et réceptifs et de ne pas laisser des fonds devenir périmés. On nous dit maintenant que nous devons respecter la Loi sur la gestion des finances publiques.» Et ceci: «Les règles ne sont pas nouvelles. On voit simplement à ce qu'elles soient respectées dorénavant.» Et ceci encore: «Il semblerait que cet article de la Loi sur la gestion des finances publiques n'a pas été respecté.»
La preuve est là, qu'il s'agisse ou non d'une ébauche. Je veux poser la question suivante à la ministre hypothétique...
Le vice-président: Non seulement le langage de la députée d'Edmonton-Nord est déplacé, mais son temps de parole est écoulé. La ministre peut répondre aux allégations contenues dans le préambule si elle le désire.
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le Parti réformiste ne fait que perpétuer la mythologie réformiste. Tout d'abord, les réformistes ont dit aux Canadiens qu'il manquait 3 milliards de dollars. Ce n'est pas vrai. Pourquoi ne l'admettent-ils pas? Puis ils ont dit qu'il manquait 1 milliard de dollars. Ce n'est pas vrai non plus. Pourquoi ne le disent-il pas?
Ce qui est vrai, c'est que le ministère a procédé à une vérification interne, a constaté qu'il pouvait améliorer ses pratiques administratives et est en train de prendre les mesures nécessaires.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, la ministre est toujours impatiente de répondre à des allégations que nous ne faisons pas, mais j'aimerais bien qu'elle réponde à celles que nous avons faites.
Hier, la ministre a refusé de répondre à des questions directes qui faisaient état d'infractions commises par son ministère à la Loi sur la gestion des finances publiques. Nous avons aujourd'hui en main d'autres documents qui montrent que la ministre a été clairement informée que la Loi sur la gestion des finances publiques n'était pas respectée.
Je demande encore une fois à la ministre de nous dire pourquoi son ministère ne respecte pas la loi.
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je rejette encore une fois les accusations de la députée.
Mme Deborah Grey: Peut-être, ma chère, mais vous ne les réfutez pas.
L'hon. Jane Stewart: On remarquera qu'hier la députée d'Edmonton-Nord parlait de filles. Aujourd'hui, elle m'appelle ma chère. Comme le disait quelqu'un pour qui j'ai beaucoup d'amitié, je ne suis pas «votre chère».
Des voix: Oh, oh!
Le vice-président: Je suis certain que la Chambre ne compte pas beaucoup de petits chéris. La députée de Calgary—Nose Hill a la parole.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, la ministre trouve peut-être cela très drôle, mais les Canadiens ne le voient pas ainsi.
Nous avons aussi un document du Conseil du Trésor qui informait la ministre qu'on ne peut pas constituer un fonds de fiducie avec l'argent du Trésor, c'est-à-dire les fonds publics, et qu'on ne peut pas non plus contourner cette règle en ayant recours à un soi-disant fiduciaire. Or, c'est précisément ce qu'a fait le ministère dans la circonscription du premier ministre. Une loi du Parlement a été violée et que fait la ministre? Elle hausse les épaules en disant que ce n'est pas pertinent.
La ministre a-t-elle fermé les yeux parce que cela se passait dans la circonscription du premier ministre?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà parlé à plusieurs reprises des fonds de fiducie dont parle la députée. En fait, j'ai reconnu que, du point de vue administratif, l'employé en cause n'aurait pas dû créer ces fonds de fiducie, mais il a agi de bonne foi, pour permettre à des gens de trouver des emplois.
Si la députée veut dire que ces fonds de fiducie ont été créés pour que quelqu'un en retire un gain personnel, qu'elle nous en fasse la preuve ici même à la Chambre et nous verrons ce qu'il en est.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, hier, le premier ministre a admis que René Fugère l'avait représenté à une ou deux reprises. Cela a nécessité un petit effort de mémoire et surtout une lettre de son propre bureau.
Je demande donc au vice-premier ministre s'il peut confirmer que ce fut une fois ou deux fois, ou est-ce possible que ce fut plutôt trois fois, cinq fois, dix fois peut-être?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la chose importante, c'est que René Fugère n'a jamais été un employé du premier ministre.
Le porte-parole du premier ministre l'a même affirmé au National Post, en mai dernier, quand il a dit: «M. Fugère est un membre actif de l'association libérale du comté qui a, dans le passé, de temps à autre, agi comme bénévole pour représenter le premier ministre à certains événements. C'est tout.»
Et c'est tout, monsieur le Président.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le vice-premier ministre semble aimer les lettres. Je vais lui citer un extrait d'une lettre:
Je vous confirme avoir rencontré M. René Fugère à de multiples reprises depuis mon élection au poste de député de Saint-Maurice en 1994. Celui-ci a participé à de nombreuses activités à titre de représentant du député fédéral de Saint-Maurice et premier ministre du Canada. Ce fait est de notorité publique [...]
C'est signé: Claude Pinard, député de Saint-Maurice—vous avez parlé des députés du PQ, on en parle—et vice-président de l'Assemblée nationale.
Est-ce que cela ne contredit pas la version du premier ministre et que ce n'est pas plutôt inquiétant pour le gouvernement de voir les activités de M. Fugère dans le Bureau du premier ministre?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ne vois pas de contradiction, parce que René Fugère n'a jamais été un employé du premier ministre.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, hier, le premier ministre a bien admis, avec l'aide qu'on lui a apportée, que René Fugère l'a représenté un certain nombre de fois. Certes, il n'est pas payé, il est à commission, René Fugère. Ce serait «ben l'boutte» s'il avait deux salaires.
Est-ce que le vice-premier ministre va admettre que lorsque René Fugère, un homme très proche du premier ministre qu'il représente partout, intervient à Développement des ressources humaines Canada, ça pèse lourd et c'est assimilé à une intervention politique?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'honorable député a tort quand il suggère que M. Fugère a représenté le premier ministre, quand il a fait certaines enquêtes.
Je pense que lorsqu'il est question de M. Fugère qui a agi comme représentant, c'était comme bénévole et pas comme employé du premier ministre, comme je viens de le dire.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le vice-premier ministre a beau dire ce qu'il voudra, tout le monde dans le comté de Saint-Maurice, c'est de notoriété publique, sait que René Fugère représente le premier ministre régulièrement.
Mais j'ai compris une chose. Lors de la dernière campagne électorale, le premier ministre disait, et je cite: «Lorsqu'un dossier de Saint-Maurice aboutira sur le bureau d'un ministre... Je n'ai pas besoin d'en dire plus.» Il aurait dû dire: «Lorsqu'un dossier de Saint-Maurice aboutira sur le bureau d'un ministre... Je n'ai pas besoin d'en dire plus, c'est René Fugère qui va s'en occuper personnellement.»
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je rejette totalement, au nom du premier ministre, les insinuations sans fondement de l'honorable député.
* * *
[Traduction]
LES SOINS DE SANTÉ
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé.
Comme le ministre de la Santé le sait, le NPD est d'avis que le projet de loi 11 de l'Alberta va à l'encontre de la Loi canadienne sur la santé. Le ministre répugne à aboutir à cette conclusion. Nous avons à ce sujet des avis juridiques que nous sommes prêts à déposer, avec sa collaboration, après la période des questions.
Si, en bout de piste, le ministre n'est pas d'accord avec ces avis juridiques et notre point de vue et qu'il aboutit à la conclusion que, sur un certain plan juridique, il n'y a pas d'infraction à la Loi canadienne sur la santé, est-il disposé à modifier cette dernière afin d'éliminer la menace que fait peser l'Alberta sur le système de soins de santé?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le député sait que je n'ai absolument pas hésité à parler du projet de loi 11. Je me suis rendu à Calgary la semaine dernière et j'y ai déclaré que ce n'est pas la bonne mesure à adopter parce qu'elle ne contribuera pas à régler les problèmes auxquels nous faisons face. Il a été prouvé que le système de soins de santé à but lucratif de l'Alberta se traduit par des listes d'attente plus longues et des coûts plus élevés. De plus, des préoccupations ont été exprimées au sujet de la qualité des soins.
La question de la Loi canadienne sur la santé est fonction de la nature du projet de loi. À l'heure actuelle, le premier ministre parle d'apporter des modifications. Il n'y a pas encore de règlement. Le projet de loi n'est même pas à l'étape de la deuxième lecture. Attendons de voir ce qui va arriver dans le cadre du processus législatif.
Entre-temps, ce n'est pas la bonne chose à faire d'un point de vue de politique, et nous l'avons dit.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, il y a déjà deux semaines que le projet de loi a été déposé. Il y a déjà quatre mois que le premier ministre a fait connaître ses intentions.
Si le processus qu'il voudrait voir fonctionner en Alberta échoue, le ministre de la Santé peut-il donner aux Canadiens l'assurance qu'il est disposé à utiliser ou à renforcer la Loi canadienne sur la santé, comme le recommande une résolution qui sera présentée au congrès libéral en fin de semaine, pour que ce qui se déroule en Alberta ne se transforme pas en un arrêt de mort pour le système de soins de santé?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je peux donner au député et à la Chambre l'assurance que nous adopterons toutes les mesures nécessaires en vue de protéger les principes qui sous-tendent la Loi canadienne sur la santé et le système de soins de santé du Canada. Si le député a en mains des avis juridiques qu'il est prêt à partager avec nous, nous serons heureux d'en prendre connaissance.
Entre-temps, il faut travailler ensemble non seulement pour décourager l'établissement d'un système de soins de santé privé et à but lucratif qui, d'après nous, n'est pas la bonne mesure à adopter, mais aussi pour renforcer le système de soins de santé au Canada. Travaillons ensemble au renouvellement du système de soins de santé pour le XXIe siècle.
* * *
LA LOI SUR L'ENREGISTREMENT DES LOBBYISTES
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre de l'Industrie. La Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, que la GRC est chargée de faire respecter, exige que tous les lobbyistes s'inscrivent auprès du directeur de l'enregistrement. Pourtant, l'ami du premier ministre, M. René Fugère, mène ses activités de lobbying auprès de différents ministères, mais il ne s'est jamais donné la peine de s'enregistrer.
Le premier ministre a dit à la Chambre que, lorsqu'il s'est aperçu que quelque chose ne tournait pas rond chez CITEC, il avait appelé la GRC. Et il a eu raison. Pourquoi le premier ministre ou le ministre de l'Industrie n'ont-ils pas appelé la GRC à propos de René Fugère?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, l'information au sujet des allégations voulant que M. Fugère ne se soit pas enregistré et ait fait du lobbying a été communiquée à la GRC par le directeur de l'enregistrement. C'est ainsi que les choses doivent se passer.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, les infractions à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes sont très graves et sont passibles d'une amende allant jusqu'à 100 000 $ ou d'une peine d'incarcération de deux ans.
D'après le ministre, on aurait communiqué avec la GRC. Voici ma question. Le ministre a-t-il informé la GRC que René Fugère a fait des démarches au sujet de deux hôtels dans la circonscription du premier ministre et qu'il a fait du lobbying auprès de DHRC pour obtenir des fonds pour une scierie dans la circonscription de Champlain?
Nous voudrions savoir quelle information la GRC possède et quand nous pouvons compter obtenir une réponse.
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, la GRC fera enquête, bien entendu. Elle discutera des résultats de l'enquête avec les procureurs du ministère de la Justice, selon le cours normal des choses.
Je ne crois pas que la GRC va consulter la députée sur ce qu'il y a lieu de faire, mais vous pouvez avoir l'assurance, monsieur le Président, que la justice va suivre son cours.
* * *
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, des documents obtenus aux termes de la Loi sur l'accès à l'information montrent que le ministère du Développement des ressources humaines devait produire une explication d'une mauvaise utilisation présumée de fonds relativement à une subvention de 6 millions de dollars du FTCE accordée à Bas Iris, à Montréal. C'était en juin 1998.
La ministre peut-elle dire à la Chambre quelle est la nature de la mauvaise utilisation présumée des fonds et quelle est la réponse du gouvernement?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, tout ce que je puis dire, c'est que, dans le cas de Bas Iris, 1 440 personnes travaillent maintenant à cette entreprise et qu'elles n'y travailleraient sans doute pas sans la conjonction des facteurs que sont le financement du gouvernement fédéral, celui du secteur privé et, je le répète, l'approbation du gouvernement du Québec.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, évidemment, ce que la ministre ne dit pas, c'est que l'argent en cause devait servir à créer 3 000 emplois.
Permettez-moi de citer le document que nous avons obtenu. Il dit ceci:
Veuillez vérifier s'il s'agit de la première fois où il a été question de la mauvaise utilisation des fonds et ce que nous avons fait ou faisons relativement à cette enquête.
C'était il y a deux ans. La ministre dit qu'elle veut faire preuve de transparence. Voici sa chance. La ministre a-t-elle informé la GRC de cette affaire? Sinon, pourquoi?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le député fait allusion à la création de 3 000 emplois par suite d'un investissement fédéral prévu de 8,1 millions de dollars. Quand nous avons découvert qu'en raison de certaines complications, moins d'emplois seraient créés, l'investissement du gouvernement du Canada a été ramené à 5,9 millions de dollars.
[Français]
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, en 1996, le Conseil pour l'unité canadienne a reçu de Développement des ressources humaines Canada 8,4 millions de dollars pour créer des emplois. Son taux de succès fut de 30 p. 100. Pire, les profits du Conseil sont estimés à huit millions de dollars.
La ministre peut-elle nous dire où est passé l'argent et à quoi il a vraiment servi?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je pense que le député veut parler d'un programme intitulé Expérience Canada. Il s'agit d'un programme très important qui encourage des jeunes de partout au Canada à trouver du travail dans d'autres régions de notre pays, cela, pour apprendre à connaître et à apprécier d'autres cultures. Je comprends pourquoi le député ne voit pas cette initiative d'un bon oeil.
[Français]
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, malgré les piètres résultats du Conseil pour l'unité canadienne et ses profits démesurés, en dépit aussi des inquiétudes exprimées par ses fonctionnaires, une nouvelle subvention de neuf millions de dollars vient de lui être accordée.
Sur quelle base la décision d'accorder une nouvelle subvention de neuf millions de dollars a-t-elle été prise?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je puis confirmer que, pour ce dossier, le ministère travaille en collaboration avec le Conseil pour l'unité canadienne afin de répondre aux besoins du programme en question.
Les députés de côté-ci de la Chambre estiment important de donner aux jeunes Canadiens la chance d'aller dans une autre région du Canada pour pouvoir y acquérir une expérience de travail et mieux connaître leur pays.
[Français]
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, une subvention de six millions de dollars a été donnée par Développement des ressources humaines Canada à la compagnie Bas Iris, dans le comté de Anjou—Rivière-des-Prairies. Le propriétaire de cette compagnie a donné 21 000 $ au Parti libéral.
Quel est exactement le lien entre ces deux choses?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, conformément au processus démocratique, les citoyens peuvent faire des contributions à tout parti politique, le nôtre comme le leur. D'ailleurs, si les députés réformistes examinent bien les données, ils constateront que des subventions du Fonds transitoire pour la création d'emplois ont été versées à des entreprises privées qui appuyaient leur parti.
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, il y a beaucoup de favoritisme politique à DRHC. Les six millions de dollars ont été versés juste avant les élections de 1997. Or, dans cette circonscription, la lutte entre les candidats était très serrée. L'industrie du vêtement est intervenue et a recommandé de ne pas appuyer ce projet parce qu'il allait bouleverser l'industrie.
Pourquoi le gouvernement a-t-il préféré faire preuve de générosité envers des libéraux au lieu de tenir compte des plaintes et des préoccupations exprimées par l'industrie du vêtement?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, les interventions de mon ministère visent à assurer le bien-être des Canadiens. Dans ce cas-ci, 1 440 personnes qui étaient autrefois sans emploi ont maintenant un travail.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, le Conseil pour l'unité canadienne a reçu, en 1996, 8,4 millions de dollars. Résultat? Un échec total. Pour le récompenser de sa piètre performance, DRHC lui a donné neuf millions de dollars en 1999.
Ce succès inespéré du Conseil pour l'unité canadienne dans l'obtention de subventions repose-t-il sur la présence dans ce dossier d'un autre ami du premier ministre, en l'occurrence Rémi Bujold?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais répéter encore une fois que, de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes d'avis qu'un programme comme Expérience Canada constitue un investissement très valable.
Je peux confirmer à la députée que les sommes qui ont été accordées dans le cadre de ce programme ont servi à rembourser des dépenses réelles.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, il y a dans ce dossier une étrange coïncidence.
Le vice-président du Conseil pour l'unité canadienne est aussi le vice-président de la firme qui a reçu un contrat du Conseil pour l'unité canadienne.
Une voix: Le club des petits amis.
Mme Suzanne Tremblay: Serions-nous à nouveau en présence d'un deuxième René Fugère qui, cette fois, s'appellerait Rémi Bujold?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est évident que l'honorable députée est contre l'unité nationale, mais c'est une idée que nous ne partageons pas du tout. Nous sommes pour l'unité nationale et nous travaillons dans l'intérêt de tous les Canadiens dans ce dossier.
[Traduction]
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, Bas Iris a reçu 6 millions de dollars des deniers publics, et les principaux responsables de l'industrie du vêtement ont considéré que c'était de la folie. On n'a pas tenu compte du dossier du propriétaire de Iris, pas plus que des avertissements de l'industrie. Il faut croire qu'il y a vraiment des chaussettes qui doivent être subventionnées.
Les 21 190 $ que la société Iris et M. Badia ont donnés au Parti libéral étaient-ils nécessaires pour leur faire obtenir cette subvention?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, selon ce parti, il ne faudrait pas tenir compte des 1 440 personnes qui ont ainsi un emploi.
L'une des choses qui est claire, et je le répète, c'est que les députés de l'autre côté de la Chambre ne croient pas que le gouvernement du Canada devrait collaborer avec les collectivités et les personnes pour leur permettre de jouir des avantages que leur offre notre grand pays. Eh bien, nous, nous pensons différemment.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, peu importe les travailleurs de l'industrie du vêtement qui ont perdu leur emploi par suite de cette subvention.
Les responsables de l'industrie ont indiqué très clairement que bon nombre des travailleurs de l'industrie perdraient leur emploi si Iris obtenait cette subvention. En fait, l'Institut canadien des manufacturiers du vêtement avait prévu que cela causerait la disparition d'emplois partout au pays. Mais Iris a tout de même obtenu cette subvention.
Est-ce cela qu'il en coûte, 21 190 $, pour faire affaire avec le gouvernement?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je rejette les allégations du député. S'il a des preuves qu'il y a eu malversation dans ce dossier, qu'il les fasse connaître.
[Français]
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, dans la saga du Développement des ressources humaines, le premier ministre a reconnu que si, après enquête, il y avait des problèmes sérieux, il faudrait que les sommes soient remboursées.
Le Conseil pour l'unité canadienne est-il au-dessus des règles, ou remboursera-t-il l'argent?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit, toutes les sommes allouées à ce programme ont servi à couvrir les dépenses réelles engagées.
* * *
LA FISCALITÉ
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Ces jours-ci...
[Français]
Des voix: Oh, oh!
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Il y a tellement de bruit que je ne peux pas entendre le député juste à ma droite. C'est incroyable. Moins de bruit, s'il vous plaît. Il faut entendre les questions et les réponses.
[Traduction]
M. Sarkis Assadourian: Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.
Ces jours-ci, des questions ont été soulevées quant à l'impact que l'impôt à taux unique du gouvernement albertain aura sur les gens à revenu moyen. Certains ont laissé entendre que l'impôt à taux unique fera perdre aux gens à revenu moyen une partie des réductions d'impôt auxquelles ils ont droit.
Le ministre pourrait-il expliquer de quoi il retourne au juste avec cet impôt?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la question du député est fort pertinente.
Brad Severin, un éminent fiscaliste albertain, a confirmé l'iniquité du régime albertain. Il a dit, entre autres, qu'en l'an 2001 le contribuable qui gagne 65 000 $ par an paiera 170 $ de plus au titre de l'impôt en vertu du nouveau régime albertain. Comme le fait observer M. Severin, ce ne pourra qu'empirer avec le temps. En l'an 2004, il paiera 440 $ de plus.
La question qu'il faut se poser est la suivante: Pourquoi—
Le vice-président: Je suis sûr que nous aimerions tous entendre la question, mais il y a la limite de temps. Le député de Peace River a la parole.
* * *
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, la ministre de DRHC a octroyé 6 millions de dollars à la compagnie Iris Hosiery au Québec, bien que le président de l'industrie canadienne du prêt-à-porter ait déclaré que cette subvention nuirait à la concurrence dans cette industrie.
Essayons de mettre les choses au point. DRHC subventionne une compagnie pour soi-disant créer des emplois bien qu'on lui dise que cela va obliger des concurrents à fermer leurs portes et donc tuer des emplois dans l'industrie en question. L'a-t-on fait parce que Iris Hosiery était un important bailleur de fonds pour le Parti libéral du Canada? Ou quoi?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Non, monsieur le Président.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, comme par hasard, la compagnie a fait don de 21 000 $.
Écoutez ce que l'ancien ministre du Développement des ressources humaines a dit lorsqu'il a annoncé l'octroi de cette subvention douteuse. Il était sûr que certains diraient que l'annonce sentait terriblement l'approche des élections. C'est exactement cela. Cette subvention pue.
La ministre du Développement des ressources humaines va-t-elle admettre aujourd'hui que l'octroi de cette subvention en 1997 n'avait rien à voir avec la création d'emplois mais tout à voir avec la victoire aux élections?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, on s'attendait à ce que les produits fabriqués par la compagnie Iris Hosiery soient destinés à l'exportation.
Je fais remarquer par ailleurs que le gouvernement du Canada a fourni 16,3 p. 100 du financement et que la compagnie a investi 54,9 millions de dollars. En outre, ce projet était appuyé non seulement par la municipalité locale, mais aussi bien sûr par le gouvernement du Québec.
* * *
L'INDUSTRIE
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.
Récemment, le ministre de l'Industrie aurait déclaré qu'il veut négocier toute la question de la participation étrangère au Canada. Il a également prévu la fin des restrictions sur la participation étrangère dans les lignes aériennes canadiennes, les compagnies de télécommunications et même les banques canadiennes.
Je veux savoir si oui ou non le ministre de l'Industrie parlait au nom du gouvernement du Canada lorsqu'il a fait cette affirmation. Est-ce vraiment la politique du gouvernement à l'heure actuelle?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, c'est inexact. En fait, j'ai déclaré que je m'attendais, comme cela a été le cas durant la dernière ronde de négociations de l'OMC, à ce que les questions touchant les limites à la participation dans le domaine des télécommunications soient probablement abordées.
Il y a un certain intérêt au sein de l'industrie à cet égard également, mais je tiens à préciser que j'ai déclaré, comme le député le laisse entendre, que si nous devions apporter des modifications aux limites quant à la participation étrangère, nous nous attendrions en retour à des concessions de nos partenaires commerciaux.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, le ministre a déclaré qu'il voudrait négocier ces questions.
Il me semble qu'il veut céder notre souveraineté économique dans le cadre de ces négociations. Or, la perte de souveraineté économique entraîne la perte de souveraineté politique au Canada, alors que le premier ministre affirme qu'il veut mettre un terme à l'américanisation de notre pays.
Je veux savoir en quoi la politique du ministre qui consiste à faire des concessions sur cette question lors des négociations cadre avec les propos du premier ministre.
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je pense que la différence entre notre point de vue et celui du NPD, c'est que nous croyons que les Canadiens peuvent réussir sur le marché mondial.
Nous reconnaissons que la mondialisation est une réalité et que nous sommes confrontés à l'évolution des technologies, des structures d'investissement et des modes de fonctionnement dans le monde. Les Canadiens peuvent être gagnants à cet égard. Les Canadiens sortent gagnants dans le secteur des télécommunications. Qu'il s'agisse de compagnies comme Nortel, Newbridge ou d'autres, les emplois sont créés ici, ce qui nous permet de réussir sur ce marché mondial.
C'est la différence. Les barrières que les néo-démocrates voudraient ériger ne fonctionneraient pas. Les emplois disparaîtraient.
* * *
LES OBLIGATIONS D'ÉPARGNE DU CANADA
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, un document interne de la Banque du Canada dit clairement que l'on prévoit privatiser, d'ici 12 à 18 mois, l'administration du programme d'obligations d'épargne du Canada.
Hier, le ministre a dit que cette décision n'avait pas été prise et qu'elle n'était pas envisagée.
Est-ce que le ministre ne disait que la moitié de la vérité? Même si aucune décision finale n'a été prise, est-ce qu'on n'envisage pas effectivement de privatiser et est-ce qu'on n'a pas effectivement pressenti des entreprises à cet égard?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit hier, on examine un certain nombre de possibilités concernant les services de soutien du programme d'obligations d'épargne du Canada, actuellement administrés par la Banque du Canada, par exemple en les fusionnant avec un organisme du ministère des Finances, ou en en impartissant la gérance peut-être au secteur privé mais peut-être aussi aux Travaux publics et à d'autres ministères.
Fondamentalement, on n'envisage pas de privatiser tout le programme. L'impartition constitue certainement une possibilité.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, l'impartition et la privatisation sont passablement similaires, mais il est question en l'occurrence des services de soutien du programme d'obligations d'épargne du Canada.
Le ministre s'engagera-t-il à saisir de cette importante question le Comité permanent des finances pour qu'il en fasse un examen plus approfondi avant qu'une décision finale ne soit prise?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député fait partie du Comité des finances de la Chambre des communes. S'il désire y soulever la question et si le Comité des finances souhaitait faire comparaître devant lui les fonctionnaires compétents, je serais vraiment heureux d'accéder à toute demande à cet égard.
* * *
LA CITOYENNETÉ ET L'IMMIGRATION
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.
Il semble que le gouvernement de Mike Harris, en Ontario, compte imposer une taxe discriminatoire de 925 $ aux Ontariens qui désirent adopter des orphelins à l'étranger.
La ministre peut-elle confirmer que c'est la vérité et nous dire si le gouvernement fédéral participe à ce projet d'imposition d'une taxe à des Ontariens?
L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, j'assure au député que la première fois que j'en ai entendu parler, c'était dans les journaux. Selon la politique fédérale, la taxe d'établissement n'est pas imposée dans le cas d'orphelins immigrants.
En outre, lorsque le nouveau projet de loi sur la citoyenneté sera adopté, les enfants nés à l'étranger qui auront la chance d'être adoptés par des Canadiens entreront au Canada comme citoyens canadiens.
De plus, je dois dire que le premier ministre Harris s'en est pris d'abord aux mères assistées sociales, puis aux squeegees, et il s'en prend maintenant aux orphelins étrangers. J'espère qu'il reviendra sur sa politique.
* * *
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, la ministre a refusé de répondre à une grave allégation de détournement de fonds dans le cas de l'entreprise Bas Iris, de Montréal.
Les agriculteurs de ma circonscription font faillite pour soutenir les habitudes de la ministre. Son propre ministère a soulevé le problème du détournement de fonds dans un document interne.
La ministre peut-elle dire à la Chambre quelle est la nature de ce détournement allégué, et a-t-elle saisi la GRC de ce problème?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, si le député a des détails sur une question dont il voudrait que la GRC soit saisie, qu'il les présente.
Dans le cas de cette entreprise, je veux qu'il soit clair encore une fois que le projet a reçu l'appui du gouvernement du Canada, de la municipalité et du gouvernement du Québec. C'est un député bloquiste qui représentait la circonscription à ce moment-là, et il a appuyé le projet très vigoureusement.
[Français]
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier du Conseil pour l'unité canadienne, M. Gordon Bean, haut fonctionnaire à Développement des ressources humaines Canada, écrivait, dans une lettre, qu'il croyait que malgré tout le personnel disponible, les objectifs de participation pourraient ne pas être atteints. Malgré cela, la ministre verse neuf millions de dollars au Conseil pour l'unité canadienne.
La ministre avouera-t-elle que cet argent ne sert qu'à faire de la propagande fédéraliste et à récompenser les chums du parti?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, mes collègues et moi croyons fermement qu'il faut donner aux jeunes Canadiens la possibilité de voyager au Canada, d'apprendre à connaître le pays, afin de mieux le comprendre et de pouvoir, à leur retour, partager leur expérience avec d'autres, des parents ou des voisins.
Nous savons que cela n'intéresse nullement les députés d'en face. C'est ce qui explique que nous sommes de ce côté-ci et qu'ils sont là.
* * *
[Français]
PATRIMOINE CANADA
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, l'an dernier, Patrimoine Canada n'incluait pas la fête des Acadiens et des Acadiennes dans son calendrier des célébrations nationales.
À la suite de pressions de la communauté acadienne et de la SAANB, la ministre du Patrimoine a présenté des excuses et a apporté des corrections. Cette année, le même problème s'est produit. C'est vraiment du mépris pour les Acadiens.
Ma question est la suivante: Quand la ministre du Patrimoine va-t-elle régler ce problème une fois pour toutes?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais remercier le député, qui a eu la gentillesse de m'informer de l'erreur cette semaine. Dès qu'il m'a informé de l'erreur, je l'ai corrigée.
* * *
L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL
Mme Diane St-Jacques (Shefford, PC): Monsieur le Président, j'ai demandé à la ministre de la Coopération internationale de fournir une liste des sociétés traitant avec l'ACDI qui ont été vérifiées et payées même si leur dossier était incomplet.
Elle a fourni une liste de toutes les sociétés qui ont bénéficié de contrats sans indiquer lesquelles ont reçu un paiement, même si leurs dossiers étaient incomplets.
La ministre a-t-elle quelque chose à cacher? Craint-elle que parmi ces sociétés figurent celles qui ont versé 695 000 $ au parti au pouvoir en 1997 et 1998?
[Traduction]
L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis certaine que la députée se reporte au programme PCI de l'ACDI. Or, aucun projet de l'ACDI ne reçoit de fonds sans qu'une facture ne soit présentée.
* * *
LA JUSTICE
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, chaque année au Canada, des centaines d'enfants naissent avec le syndrome d'alcoolisme foetal ou des lésions cérébrales liées à la consommation d'alcool pendant la grossesse. Certaines provinces ont signalé que la moitié des détenus souffrent de cette tragédie incurable, que l'on peut pourtant empêcher.
La ministre de la Justice pourrait-elle nous dire comment le gouvernement du Canada réagit à ces statistiques vraiment troublantes concernant le syndrome d'alcoolisme foetal?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, permettez-moi de féliciter le député pour la parution récente de son livre intitulé Fetal Alcohol Syndrome: The Real Brain Drain.
Comme le député l'a souligné, le syndrome d'alcoolisme foetal ou les malformations congénitales attribuables à l'alcool sont des anomalies congénitales que l'on peut prévenir. D'ailleurs, les enfants qui naissent avec ces anomalies ont des problèmes de santé tout au long de leur vie, et un trop grand nombre d'entre eux finissent par avoir des démêlés avec la police. C'est pourquoi mon collègue, le ministre de la Santé, et moi travaillons de concert avec les groupes communautaires partout au Canada pour mieux informer la population et élaborer...
Le vice-président: La députée de Calgary—Nose Hill a la parole.
* * *
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, j'ai en main un document émanant du ministère du Développement des ressources humaines, intitulé «Demande urgente—Objet: Bas Iris—projet du Fonds transitoire pour la création d'emplois». On y demande de vérifier si c'est bien la première fois qu'il est question de détournement des fonds publics et d'indiquer les dispositions qui ont été prises ou que l'on s'apprête à prendre pour répondre à cette accusation.
La question posée à la ministre est très simple. Une accusation relative à un détournement des deniers publics a été portée par ses propres services. Les résultats de l'enquête qui a été menée ne nous ont pas été communiqués. La GRC n'a pas été sollicitée, à ce que nous sachions. Nous voulons savoir où en sont les choses à ce stade. Nous voulons également savoir...
Le vice-président: La ministre du Développement des ressources humaines a la parole.
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, qu'il me soit permis de citer un passage d'une lettre concernant le manufacturier de bas Iris et provenant de mon service; on y lit ceci:
[Français]
«Dans ces circonstances, il ne m'apparaît pas utile de recommander quelque modification à l'actuel contrat.»
[Traduction]
Mes collaborateurs se sont penchés sur la question et conclu qu'il était inutile de modifier le contrat.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le Canada est le 51e État américain selon un haut dirigeant de la Défense américaine. Les États-Unis se préparent à déployer un système national de défense anti-missiles qui viole le Traité sur les missiles anti-missiles balistiques, suscite la colère et provoque les autres puissances, et ils s'attendent à ce que notre gouvernement appuie cette mesure.
Le gouvernement va-t-il dire non à cette nouvelle mesure d'escalade de l'armement, non à ce système anti-missiles du gouvernement américain? Va-t-il insister pour que les Nations Unies soient saisies de cette affaire? Ou alors, le gouvernement accepte-t-il volontiers que l'on considère le Canada comme le 51e État américain?
M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, les États-Unis n'ont pas encore pris de décision quant au déploiement d'un système national de défense anti-missiles et n'ont pas officiellement demandé au Canada de participer à ce projet. Par conséquent, la question est entièrement d'ordre politique et nous ne pouvons prendre position pour le moment. Il reste encore trop d'inconnues dans ce dossier.
Je dois ajouter que les États-Unis ont confirmé que le déploiement d'un système national de défense anti-missiles nécessiterait la modification du Traité concernant la limitation des systèmes anti-missiles balistiques signé en 1972. Ils poursuivent leurs discussions avec la Russie à cet égard.
* * *
[Français]
L'AGENCE CANADIENNE POUR LE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL
Mme Diane St-Jacques (Shefford, PC): Monsieur le Président, je crois que la ministre n'a pas compris ma question. Je vais donc la lui répéter.
Je lui parlais d'une liste des sociétés traitant avec l'ACDI qui ont été vérifiées et payées, même si leurs dossiers étaient incomplets.
Elle a fourni une liste de ces sociétés qui ont bénéficié de contrats, sans indiquer lesquelles ont reçu un paiement, même si leurs dossiers étaient incomplets.
La ministre craint-elle que parmi ces sociétés figurent celles qui ont versé 695 000 $ au parti au pouvoir en 1997 et 1998?
[Traduction]
L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, comme je l'ai déjà dit, aucun paiement n'est effectué sans facture à l'appui. Deuxièmement, nous ne versons pas le paiement final aux entreprises qui ne fournissent pas un rapport final satisfaisant. Troisièmement, nous avons adopté une nouvelle méthode de paiement. Une entreprise reçoit un paiement uniquement si elle atteint certains résultats précis établis à l'avance.
J'ai fourni à la députée une liste complète de toutes les entreprises traitant avec l'ACDI.
* * *
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le vice-président: J'attire l'attention des députés sur la présence à la tribune de M. Seamus Brennan, ministre d'État des ministères du Taoiseach et de la Défense et whip en chef du gouvernement d'Irlande.
Des voix: Bravo!
* * *
[Français]
RECOURS AU RÈGLEMENT
LE COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE
Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, ce matin, il y a eu entorse à la démocratie au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Le 15 décembre 1999, le Comité adoptait une motion qui se lit ainsi:
Que le Comité fasse une étude en vue de rendre obligatoire et ce, d'une manière transparente, l'étiquetage des organismes génétiquement modifiés, et fasse rapport à la Chambre à ce sujet.
Contrairement à la décision du Comité, le président, malgré nos demandes répétées, refusait de convoquer le sous-comité de la procédure pour établir un échéancier, pour convoquer les témoins, rédiger un rapport, et caetera. Devant ce refus, j'ai déposé, en février, un avis de motion visant à faire exécuter la décision du Comité de décembre 1999.
Ce matin, nous débutions le débat sur cette motion, mais après une heure, la motion a été mise aux voix, contrairement à l'article 116 du Règlement qui stipule, et je cite:
116. Un comité permanent, spécial ou législatif observe le Règlement de la Chambre dans la mesure où il y est applicable, sauf les dispositions relatives à l'élection de l'Orateur, à l'appui des motions, à la limite du nombre d'interventions et à la durée des discours.
De plus, Marleau-Montpetit ajoute, à la page 855:
De façon générale, les règles régissant les étapes des débats en comité sont identiques à celles de la Chambre des communes. Toutefois, le Règlement soustrait les comités à certaines règles qui s'appliquent à la Chambre, soit celles qui régissent l'élection du Président et l'appui des motions et celles qui limitent le nombre d'interventions qu'un député peut faire au sujet d'une question ainsi que la durée des discours.
La décision du président du Comité est en contravention avec les règles de la Chambre. Pourtant, Marleau-Montpetit stipule, aux pages 856 et 857, et je cite:
Le président dirige les délibérations du comité, donne la parole aux intervenants et s'assure que les délibérations se déroulent conformément aux pratiques et règles établies ainsi qu'à toute autre exigence particulière que le comité peut s'être imposé à lui-même ou avoir imposé à ses membres.
Bien que je n'avais pas fini de parler, le président du comité, encore contrairement aux règles établies de la Chambre et du Comité, a mis immédiatement ma motion aux voix. Toujours selon Marleau-Montpetit:
Toute décision du président d'un comité peut être portée en appel devant ce comité. Il n'est d'appel à la Chambre des décisions d'un président de comité que par voie de rapport du comité.
Normalement, si le président avait bien exécuté ses devoirs de protéger le droit d'expression des parlementaires, il m'aurait laissé terminer mon exposé, surtout que le comité n'avait jamais adopté de règle spéciale limitant le temps des interventions et le temps accordé pour débattre toute motion.
Monsieur le Président, je fais encore une fois appel à votre sens de la démocratie pour intervenir et mettre fin à une situation qui malheureusement se présente trop souvent dans les comités.
Vous devez passer outre à la règle qui veut que vous n'interveniez pas dans les délibérations des comités. Il est déjà arrivé qu'un Président intervienne pour mettre fin à une pratique qui brimait le droit d'expression des parlementaires. Je vais citer le paragraphe 760(4) de la 6e édition de Beauchesne:
760. (4) En 1986, après qu'un député eut contesté à la Chambre la procédure adoptée par le président d'un comité, le président s'est engagé à écrire à tous les présidents de comité afin de leur rappeler que souvent les griefs résolus de façon trop sommaire en comité aboutissaient à la Chambre et prenaient de son temps sous couvert d'une question de privilège (Débats, 9 décembre 1986, p. 1932).
Vous avez la responsabilité, en vertu de l'article 10 du Règlement, d'intervenir pour mettre fin à ce genre de pratique. Il en va de la crédibilité de la Chambre et des comités.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, la députée elle-même nous a dit dans son plaidoyer que le Président de la Chambre n'était pas habilité à renverser une décision de comité, sauf après avoir reçu un rapport de ce comité qui aurait été déposé à la Chambre. En fait, elle nous a elle-même indiqué que son recours au Règlement n'en est clairement pas un.
J'encourage la Présidence à être neutre et objective comme d'habitude et à ne pas s'engager dans cet exercice, puisque la député elle-même a dit que cela serait contre les règles de le faire.
Le vice-président: Je note que l'honorable députée de Louis-Hébert a cité le grand livre que nous avons maintenant, grâce à notre Greffier et aux autres officiers du Bureau qui ont travaillé très fort pour préparer un tel livre pour nous aider. Mais la chose importante qu'elle n'a pas lu dans le livre se trouve à la page 885. Je crois que le leader du gouvernement à la Chambre y a fait référence dans ses remarques, et je cite:
Il est antiréglementaire pour des députés de faire allusion, à la Chambre, aux délibérations de comités ou à des témoignages reçus par eux avant qu'ils n'aient présenté leur rapport à la Chambre.
Je crois qu'il est important que l'honorable députée soulève ces questions concernant les règles dans les comités après la présentation d'un rapport. On peut lire plus loin:
Cette interdiction s'applique aux allusions faites par des députés au cours d'un débat, tout comme pendant la période des questions orales. S'il se produit une irrégularité dans les travaux d'un comité, la Chambre peut seulement en être saisie au moment où on lui en fait rapport.
J'espère qu'après un rapport, s'il y a un problème qui continue, nous pourrons peut-être, à ce moment-là, soulever un recours au Règlement à ce sujet.
Je vais passer aux autres recours au Règlement mais, tout d'abord, il y a la question du jeudi. Le leader parlementaire de l'opposition officielle a la parole.
* * *
[Traduction]
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, à mon avis, il y a eu pas mal d'agitation au cours des sept à dix derniers jours. Il y a eu des heures prolongées ainsi que des séances ininterrompues de 24 heures. Étant donné que l'allocation du temps et tous les autres aspects sont désormais derrière nous, j'espère que nous amorcerons aujourd'hui une nouvelle ère à la Chambre.
Le leader du gouvernement à la Chambre peut-il donner l'ordre du jour du reste de la semaine ainsi que de la semaine prochaine? Pourrait-il, en particulier, s'arrêter sur le fait que plusieurs jours de suite seront réservés à l'opposition la semaine prochaine? Si un jour est consacré à l'opposition mercredi, je me demande s'il prévoit demander que les heures soient prolongées afin que l'on se rapproche davantage d'une période régulière réservée aux subsides et que l'on puisse tenir un bon débat sur la question à l'ordre du jour.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je lirai en premier lieu la déclaration du jeudi et, ensuite, je donnerai volontiers suite à la question très importante soulevée par le leader de l'opposition à la Chambre.
La liste des travaux de la semaine prochaine est effectivement fort simple. Comme l'a évoqué le leader de l'opposition à la Chambre, il reste plusieurs jours de l'opposition à écouler d'ici la fin de la période des subsides. Vendredi, lundi, mardi et mercredi seront tous des jours désignés.
Jeudi prochain, j'espère que nous pourrons entamer l'étude des amendements du Sénat au projet de loi C-6. Je prévois soulever cette question à la réunion des leaders de la Chambre mardi. Quoi qu'il en soit, j'aimerais également entamer l'étude, probablement avant celle du projet de loi C-6, des mesures législatives suivantes: projet de loi C-10, Loi sur les subventions aux municipalités; projet de loi C-12, Loi concernant les modifications au Code du travail, et je crois comprendre que bon nombre de députés ont demandé que l'on aille de l'avant avec ce projet de loi; enfin, le projet de loi C-13, Loi concernant les instituts de recherches en santé.
Pour ce qui est du déroulement des travaux mercredi prochain, étant donné que ce jour-là, comme l'a mentionné le député, le nombre d'heures est un peu moins élevé qu'à l'occasion des autres jours réservés à l'opposition, je serais disposé à négocier avec les autres leaders à la Chambre et à offrir une prolongation afin que la période soit à peu près comparable à celle des autres jours. Il va de soi qu'il faudrait convenir de cette solution par consentement. À mon avis, nous sommes certes disposés à agir de la sorte de ce côté-ci de la Chambre.
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
DÉPÔT DE DOCUMENTS
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, hier, à la Chambre, et de nouveau aujourd'hui, le ministre de la Santé a répondu à des questions sur la conformité du projet de loi 11 de l'Alberta à la Loi canadienne sur la santé: «Si la députée a un avis juridique à ce sujet, je l'invite à en faire part à la Chambre.»
J'ai deux opinions juridiques qui ont été demandées par le Syndicat canadien de la fonction publique. L'une d'elles est de Joseph Arvay et Murray Rankin et elle porte sur un certain nombre de questions se rapportant à la Loi canadienne sur la santé et plus particulièrement au projet de loi 11 proposé en Alberta, la Health Care Protection Act. La deuxième est celle de Steven Shrybman. Il s'agit d'un avis juridique sur les disciplines de l'ALENA concernant l'investissement et les services, et sur les propositions albertaines contenues dans le projet de loi 11 visant à privatiser certains services de santé assurés.
Dans les deux documents, il est dit que le projet de loi 11 va à l'encontre de l'esprit de la Loi canadienne sur la santé. Compte tenu de ce que le ministre de la Santé a dit à la Chambre, je demande le consentement unanime pour déposer les deux documents.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour que les documents soient déposés?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
[Français]
CERTAINS PROPOS TENUS À LA CHAMBRE
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, hier, à la Chambre, pendant que le ministre des Affaires intergouvernementales était en train de faire son discours sur le projet de loi C-20, j'ai été témoin de l'utilisation d'un langage particulièrement offensif, péjoratif, sinon raciste.
Je suis certaine que le député qui a utilisé le terme «bras de nègre»...
Le vice-président: Il est possible que l'honorable député ait utilisé des mots à la Chambre qui n'étaient peut-être pas agréables pour elle, et même peut-être pour d'autres députés, mais le Règlement est très clair: un tel recours au Règlement ou question de privilège doit être soulevé le plus tôt possible. On aurait dû faire cela hier; c'est trop tard aujourd'hui, à mon avis. J'espère que nous pouvons ignorer ce problème aujourd'hui, s'il y en a un, parce qu'il est un peu trop tard pour soulever cette question.
Mme Marlene Jennings: Monsieur le Président, je trouve regrettable que le député de Joliette n'ait pas l'opportunité de retirer ces paroles, parce que je suis certaine qu'il aurait voulu le faire. Mais je...
Le vice-président: L'honorable député de Joliette a sans doute entendu ce que l'honorable députée a dit, et je crois que nous devons considérer ce débat clos pour l'instant.
LE COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE
M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, je sais que tout à l'heure, ma collègue de Louis-Hébert est intervenue sur un recours au Règlement concernant ce qui s'est passé ce matin au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. J'aimerais dire au leader du gouvernement à Chambre que je comprends également qu'on ne peut pas intervenir lorsque le rapport n'est pas complété.
J'aimerais vous indiquer cependant que toute la question qui a été débattue ce matin était relativement à l'ordre du jour. Alors, il est difficile de rédiger un rapport lorsque le président ne respecte même pas les points qui avaient été préalablement adoptés.
La question est la suivante: en date du 15 décembre 1999, le Comité s'était déjà penché et avait adopté majoritairement une décision à laquelle, ce matin, le président en place devait donner l'autorisation à la convocation de témoins pour que ce point soit débattu. Mais ce matin, on a refusé littéralement de débattre de cette question, et c'est important...
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je suis d'accord avec l'honorable député que c'est important, mais les points qu'il soulève sont précisément les mêmes qui ont été soulevés par l'honorable députée de Louis-Hébert.
J'ai déjà rendu une décision sur ce point, à savoir que cela relève du comité. Les comités sont maîtres dans leur propre maison, comme on dit en anglais—je ne sais pas si la traduction est exacte. Mais les comités peuvent prendre des décisions sur ces questions et, quand le rapport sera présenté à la Chambre, après l'étude en comité, on rendra une décision.
Si certains députés ont de la difficulté avec la conduite d'un comité ou de son président ou quelque chose du genre, il faut le soulever au comité, pas ici à la Chambre. Nous ne sommes pas une cour d'appel pour les comités, sauf dans des circonstances très particulières et énumérées dans l'excellent livre qu'on peut lire et consulter pendant tout l'après-midi.
J'encourage l'honorable député à faire cela, au lieu de soulever cette question à la Chambre en ce moment.
[Traduction]
LA PÉRIODE DES QUESTIONS
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'ai deux rappels au Règlement, et ils se rapportent tous les deux à la période des questions d'aujourd'hui.
Plus tôt, vous avez admonesté le député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore parce qu'il avait montré un objet à la Chambre. Par la suite, le député de Mississauga-Sud a posé une question à la ministre de la Justice qui a, en somme, fait de la publicité pour un livre qu'il a écrit. Elle l'a brandi pour que tous puissent le voir et que les caméras le montrent.
Étant donné que le débat d'aujourd'hui sur un rappel au Règlement traite de l'impression qu'on peut avoir que le Président est partial, j'estime que ce nouvel incident doit également être examiné.
Deuxièmement, ces derniers jours, le Président a déclaré irrecevables plusieurs questions de l'opposition officielle au motif qu'elles ne se rapportaient pas à la politique du gouvernement. Aujourd'hui, le député de Brampton-Centre a interrogé le ministre des Finances au sujet de l'adoption, en Alberta, d'un impôt de taux uniforme, sans établir de lien avec la politique gouvernementale.
Ni le questionneur, si je peux utiliser ce terme, ni celui qui lui a répondu n'ont fait un effort. On semble abuser du temps accordé aux députés pour poser des questions d'importance nationale au gouvernement. Cette question aurait dû être refusée et nous aurions dû passer au prochain questionneur afin de pouvoir demander des comptes au gouvernement sur l'utilisation des deniers publics.
Le vice-président: Je suis heureux de pouvoir répondre aux deux rappels au Règlement. Le premier porte sur l'utilisation d'objets. Le député a tout à fait raison de dire que la ministre de la Justice a brandi de façon tout à fait inappropriée le document et la présidence l'a rappelée à l'ordre comme il se doit d'un signe du doigt.
En toute justice, j'avais des doutes lorsque j'ai vu la ministre prendre le livre, mais je pensais qu'elle allait simplement citer des passages, ce qui était tout à fait acceptable bien entendu. Elle n'en a rien fait cependant. Elle n'a fait que le brandir et c'est pourquoi je l'ai pointée du doigt.
Je sais que les députés reculent devant cette perspective. La députée d'Edmonton-Nord a reculé déjà lorsque cela lui est arrivé—ce qui est très rare bien entendu—mais je sais que la ministre de la Justice a ressenti la même nervosité. Elle sait qu'elle avait tort d'agir ainsi. Bien entendu, un drapeau est différent d'un livre. On ne peut lire un drapeau à la Chambre et c'est pourquoi je suis intervenu rapidement. Bien entendu, c'était trop tard pour faire quoi que ce soit d'autre.
En ce qui concerne la deuxième question, le député précise que la présidence aurait peut-être dû être un peu plus vigilante et juger irrecevable la question au sujet de l'impôt au taux uniforme. Cependant, il est juste de dire que le ministre des Finances est exhorté dans les journaux à adopter au niveau fédéral un taux d'imposition uniforme dans le cadre de la politique fiscale nationale et je me suis donc dit qu'une question portant sur l'application d'un taux uniforme d'imposition dans une autre province était peut-être liée à l'adoption possible d'une telle politique au niveau national et c'est la raison pour laquelle j'ai accepté cette question.
Étant donné la nature de la réponse, c'était peut-être peu judicieux, mais le ministre a profité de cette occasion et c'est tout. Je ne peux répondre pour les autres périodes de questions étant donné que je ne suis pas au fauteuil généralement.
Je remercie les députés pour le nombre intéressant de rappels au Règlement cet après-midi et nous allons maintenant passer à l'ordre du jour.
* * *
CHAMBRE DES COMMUNES
LE PRÉSIDENT
La Chambre reprend l'étude de la motion.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps avec ma collègue, la députée d'Edmonton-Nord.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'avais cru comprendre que c'était à un député du Bloc québécois de reprendre le débat après la période des questions orales.
Le Président: Nous suivons le même ordre que celui prévu pour les débats. J'ai la liste devant moi. Le dernier député à avoir pris la parole était un député libéral. C'est maintenant au tour d'un député réformiste. Le Bloc québécois aura son tour en temps et lieu.
[Traduction]
M. Jay Hill: Je participe aujourd'hui à ce débat historique. Ce n'est pas de gaieté de coeur que je le fais, mais ce débat revêt, à mon avis, une importance capitale pour l'avenir de cette institution. Comme je l'ai dit à maintes reprises à cet endroit, une des principales raisons qui m'a incité à me présenter comme candidat, c'est la nécessité de procéder à une réforme parlementaire.
La motion présentée aujourd'hui par le Bloc québécois vise directement les fondements démocratiques sur lesquels la Chambre repose. Depuis mon élection à cet endroit il y a six ans, j'ai vu les droits et les pouvoirs des députés se détériorer systématiquement. Cette lutte de pouvoir est d'autant plus troublante que, dans le cadre de cette législature, le parti ministériel n'a obtenu que de 38 p. 100 des suffrages populaires. Dans un effort afin de protéger sa mince majorité et d'imposer sa volonté législative aux Canadiens, le gouvernement a donné à ses priorités préséance sur la démocratie.
Vous avez le devoir, monsieur le Président, d'empêcher cela. Vous êtes chargé de préserver les traditions et les usages de la Chambre des communes et, sauf le respect que je vous dois, je dois dire que ces traditions se sont détériorées sous votre gouverne.
Des députés de l'opposition ont soulevé la question de privilège à un certain nombre d'occasions. La présidence a rarement jugé leur intervention recevable. Souvent, les députés ont déploré le fait que le gouvernement ait transmis aux médias de l'information qui n'était destinée qu'à la Chambre et ils lui ont reproché de mettre en oeuvre des mesures législatives avant même que le projet de loi visé soit adopté. Cela tourne en dérision et dénature le rôle du Parlement.
La défense contre les atteintes à cette institution qu'est le Parlement a commencé en 1989, bien avant que vous n'occupiez le fauteuil, monsieur le Président. Le 10 octobre 1989, le député de Windsor-Ouest, maintenant vice-premier ministre, a déclaré, concernant la controverse sur la TPS, que c'était clairement mépriser le Parlement que de dénaturer le rôle de cette Chambre. Le Président Fraser a continué en disant, et je cite:
Je veux toutefois que la Chambre comprenne très clairement que si jamais le Président est appelé à examiner de nouveau une situation comme celle-ci, la présidence ne sera pas aussi généreuse.
Le 6 novembre 1997, dans sa décision sur la controverse entourant la mise en place du bureau du régime de pension avant que la loi n'autorise le gouvernement à le faire, le Président actuel a déclaré:
...la présidence reconnaît que c'est une question qui n'est pas sans importance puisqu'elle a trait au rôle des députés en tant que législateurs, un rôle qu'on ne saurait banaliser. Cette manière hautaine de concevoir le processus législatif risque, à la longue, d'engendrer un manque de respect à l'égard de nos conventions et pratiques parlementaires. J'espère que la décision d'aujourd'hui, qui vient au début de cette 36e législature, ne sera pas oubliée par le ministre et ses fonctionnaires et que les ministères et organismes s'en inspireront.
J'ai personnellement soulevé la question concernant la Commission canadienne du blé le 3 février 1998. Rien n'a été fait.
Le président de la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire a été nommé avant que la loi établissant la fondation ne soit adoptée. La question a été soulevée par la députée de Calgary—Nose Hill dans le cadre d'une question de privilège, et le Président n'a rien fait.
Il n'y a pas si longtemps de cela, le 30 mars 1998, le ministre du Commerce international a publié un communiqué de presse intitulé «Marchi rencontre des dirigeants chinois à Beijing et annonce la création du Groupe interparlementaire Canada-Chine». Or, à l'époque, il n'y avait pas de groupe interparlementaire Canada-Chine. Le ministre donnait ainsi à un milliard de Chinois en Chine l'impression que l'association existait bel et bien, alors que le Parlement n'avait pas encore approuvé sa création. La question a été soulevée et la décision rendue par le Président le 6 novembre 1997 portait là-dessus. Rien n'a été fait.
Le 20 avril 1999, une fuite due au gouvernement concernant la réponse du gouvernement à un rapport du Comité permanent des affaires étrangères a fait l'objet d'une question à la Chambre. Le lendemain, le leader du gouvernement à la Chambre s'est excusé pour cette fuite et a assuré la Chambre que la chose ne se reproduirait plus.
Or, le lendemain de la présentation de ces excuses, le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien se levait en Chambre et citait un extrait des délibérations d'une réunion à huis clos. Et ils sont légion les cas de rapports de comité qui sont divulgués impunément.
Ainsi, le premier ministre a annoncé la date du budget de cette année à l'extérieur de la Chambre. À ma connaissance, c'est un précédent. Cette nouvelle a toujours été annoncée à la Chambre.
Le cas le plus récent est la fuite au sujet du projet de loi C-23. La loi visant à moderniser le régime d'avantages a été remis à EGALE avant qu'elle ne soit déposée à la Chambre, de sorte que ce groupe d'intérêts a pu publier une analyse détaillée du projet de loi avant même que le porte-parole de mon parti en la matière ait même vu le projet de loi. Le député a soulevé la question et le Président, à mon avis, n'en a pas tenu compte.
Des députés de tous les partis ont fait part de la frustration ressentie, du côté de l'opposition, devant les procédés du gouvernement. Je pense bien que c'est ce que l'on a voulu exprimer au moyen de cette motion.
Chaque fois, le Président a discouru sur l'intégrité de l'institution parlementaire, pourtant il n'est jamais intervenu pour protéger cette même intégrité. À deux occasions seulement, le Président a jugé opportun d'admettre la gravité d'une question de privilège qui avait été soulevée. L'une d'entre elles concernait l'ancien député de Charlesbourg et la formation d'une milice québécoise et l'autre blâmait deux députés de l'opposition officielle pour avoir publiquement critiqué le Président.
À diverses reprises, le Président a eu l'occasion de se porter à la défense de l'intégrité de la Chambre, et à mon avis il ne l'a pas fait.
Chacun des députés ici présents sera amené ce soir à prendre une décision qui lui sera très personnelle. Dans un premier temps, nous devrons décider si nous voterons strictement sur la motion, ou bien si nous voterons sur l'impression que nous avons de l'impartialité et de la neutralité dont le Président aurait fait preuve ou non quand il occupait le fauteuil.
En second lieu, si les députés décident que le vote n'est pas limité à la seule teneur de la motion dont la Chambre est saisie, ils devront s'en remettre à leur conscience pour décider s'ils voteront en faveur de la motion de blâme du Président, s'ils accorderont leur soutien à ce dernier, ou encore s'ils s'abstiendront de s'exprimer.
En troisième lieu, chacun des députés devra décider pour son propre compte, advenant qu'il choisisse de voter en faveur de la motion de blâme, si son mécontentement est suscité davantage par les agissements du Président que par les abus de pouvoir dont s'est rendu coupable le gouvernement et l'incapacité du Président de les empêcher.
Comme je le disais un peu plus tôt dans le cadre de ce débat, j'exhorte les députés à accorder le plus grand sérieux à cette affaire. Je suis persuadé que c'est déjà le cas. Je demande instamment à tous de voter librement, selon leur conscience. Chaque député devra faire son propre examen de conscience car la question est d'une importance primordiale pour notre institution.
M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Monsieur le Président, je suis stupéfait par ce qu'a dit le whip du Parti réformiste. Il a dit que pendant le vote, nous devrions juger le président sur la base de son mandat depuis son élection.
Je mets en garde le Parti réformiste. La motion dont nous sommes saisis est très claire sur la période sur laquelle nous devrions nous fonder. Nous devons nous fonder sur ce qui s'est passé entre le 1er mars, date vers laquelle le Bloc québécois a soulevé sa question de privilège et le 13 mars, date à laquelle le président a rendu sa décision. C'est sur la base de ce qui s'est passé durant cette période que nous devrions voter. Je préviens les députés qu'ils doivent agir avec prudence. Aller au-delà de la lettre de la motion risque de créer un précédent dangereux. Ce serait faire preuve de malhonnêteté envers nous même ou de malhonnêteté intellectuelle. Ce serait nous laisser guider par l'émotion et non pas par la raison.
La Chambre est un endroit où l'on débat et où l'on peut exposer ses idées. Cependant, voter sur la base du mandat qui a été confié au Président après son élection et non pas sur la base de ce qui s'est passé durant la période dont il est question dans la motion serait créer un précédent dangereux. Je demande aux députés de ne pas faire cela. Nous pouvons voter comme nous voulons, mais faisons-le intelligemment sur la base de la décision dont il est question dans la motion dont nous sommes saisis. Comment le député explique-t-il cela?
M. Jay Hill: Monsieur le Président, si le député d'en face avait écouté mes observations, il aurait su la réponse avant de faire son intervention.
Je ne prends pas la chose à la légère du tout et je ne pense pas que la Chambre le fasse non plus. C'est ce n'est pas une procédure normale. C'est même une procédure rarissime, et pour cause.
Je soutiens ce que j'ai dit. Je crois que les députés votent différemment sur différents sujets à la Chambre. Cependant, il nous incombe à chacun d'entre nous de voter selon notre conscience et d'expliquer notre geste à nos électeurs le moment venu.
Je rejette l'idée que tout ce que nous pouvons faire c'est débattre strictement la teneur de la motion. Si tel était le cas, si nous n'étions ici que pour juger la teneur de la motion dont nous sommes saisis, ce que nous ferions à mon avis, c'est désavouer toutes les règles que la présidence a jamais établies ainsi que nos avis à cet égard, que nous soyons favorables ou non à ces décisions.
Je ne veux pas qu'on en vienne à une situation où n'importe quel parti présentera, à tout bout de champ, une motion semblable. C'est sérieux. On ne peut pas présenter une motion de censure à l'égard du Président chaque fois qu'on est insatisfait de sa décision sur une question de privilège ou un rappel au Règlement. C'est trop grave.
Tous les députés savent cela, car, si je ne m'abuse, la dernière fois que cela s'est produit remonte à 1956, il y a fort longtemps. C'est pourquoi j'ai dit dans mon discours qu'il nous incombe à chacun d'entre nous de voter selon notre conscience ce soir, de prendre cette question très au sérieux, de bien comprendre pourquoi nous allons voter dans un sens ou dans l'autre et d'être prêts, s'il s'agit vraiment d'un vote libre, à défendre notre position auprès de nos collègues de tous les partis et, plus que tout, auprès de nos électeurs.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole pour intervenir dans le débat de la motion d'aujourd'hui et plus particulièrement pour vous remercier d'occuper le fauteuil. Cela me paraît important. Ce qu'il y a de plus important à cet égard, c'est le fait que vous occupez le fauteuil et que vous, probablement plus que quiconque, comprenez que le débat ne porte pas sur deux petites décisions particulières. Le sujet de la discussion est plus vaste, comme mon collègue vient de le mentionner. Je pense que nous tous, et vous spécialement, devrions comprendre toute l'ampleur du sujet dont nous discutons.
Je commencerai par dire que j'apprécie les opinions de tout le monde sur le sujet. Cela transcende certainement l'esprit de parti. Je sais que nos caucus en ont discuté longuement. Tout le monde à la Chambre doit y consacrer une attention particulière. En fait, le leader parlementaire de mon parti a dit ce matin dans son intervention que le grand sujet dont il est question en l'occurrence, c'est l'arrogance du gouvernement. Il pense que, parce que le gouvernement a pu donner un peu trop libre cours à son pouvoir en imposant trop la clôture et en pratiquant trop l'attribution de temps aux débats, il faudrait peut-être songer à modifier le Règlement. Je comprends cela et je respecte cette opinion.
Or, monsieur le Président, la motion vous concerne. Vous le savez, je le sais et c'est pourquoi vous avez occupé le fauteuil toute la journée.
Je vais revenir plusieurs années en arrière, monsieur le Président. Vous et moi siégeons à la Chambre depuis plusieurs années. Vous vous rappellerez, quand je suis entrée à la Chambre en 1989, nous avons tous deux siégé sous un Président différent, le Président Fraser, que j'ai beaucoup apprécié. Je n'ai pas pu en faire toujours à ma tête. J'étais traitée à l'époque comme députée indépendante, mais je me rappelle que John Fraser m'a fait entrer dans son bureau et m'a dit: «Vous avez été bel et bien élue, et même si vous siégez comme députée indépendante, je dois vous respecter et vous traiter en conséquence.»
Vous vous êtes présenté à la présidence après les élections de 1993 et, je crois que nous pouvons être honnêtes, vous et moi savons exactement pourquoi vous occupez la présidence. Il y a eu des discussions à l'époque; chacun avait un droit de vote et nous vous avons appuyé. Je ne me plains pas de tout ce que vous avez fait depuis. Franchement, je ne peux même pas imaginer que quelqu'un veuille votre poste. Je ne sais pas pourquoi vous vous êtes présenté, mais vous l'avez fait et avez présidé deux législatures très bizarres, en raison surtout de la question de la séparation. Il y a eu des débats très houleux à la Chambre depuis que vous en êtes devenu le Président.
Mis à part tout cela, je crois que nous devons examiner certaines des décisions que vous avez prises. Je ne vais pas citer de larges pans du hansard, car je veux parler du fond du coeur. Je pourrais remonter à l'époque précédant le différend sur le drapeau où j'étais encore députée indépendante et la seule représentante de mon parti et où il n'était même pas permis de remettre en question les décisions du Président.
Vous et moi, monsieur le Président, si l'on remonte en arrière, nous souviendrons d'une entrevue que j'ai donnée, au cours de laquelle on m'a demandé si je pensais que le Président était mené par les libéraux. Je me souviens d'avoir répondu qu'il peut sembler, en effet, que le Président est parfois sous le joug du gouvernement. Vous ne vous rappellerez que trop que, lorsque j'ai pris l'avion, plus tard, ce jour-là, vous avez suivi ma piste jusqu'en Alberta et vous m'avez cherchée toute la fin de semaine, et vous vous souviendrez de ce que vous m'avez dit, monsieur le Président, le jour où je suis revenue.
Aujourd'hui, pas tellement d'années plus tard, on dirait que c'est le règne du laisser-faire et que c'est devenu très public. On a publié des entrevues d'une page sur vous et sur des décisions que vous avez prises. Je ne crois pas juste qu'on puisse tout bonnement se plaindre de ce que la présidence ait pris une décision qui nous soit défavorable. Dieu sait que vous avez maintes fois pris une décision qui m'était défavorable et que vous aviez amplement le droit de le faire. Je respecte cela, monsieur le Président. Vous êtes obligé de le faire parfois parce que j'ai la langue bien pendue et que je suis espiègle. Je respecte cela. Vous le savez et je salue cela. Cela ne me donne pas le droit de dire que ce n'est pas juste et que, comme la présidence a été sévère à mon endroit, je vais proposer une motion de blâme. C'est ridicule et cela ne peut pas arriver tous les deux mardis.
Vous vous souviendrez aussi, monsieur le Président, de la fameuse querelle des drapeaux. Je ne veux pas donner dans les accessoires. Je ne tiens pas à me parer ni à faire du chichi, mais cela m'est allé droit au coeur lorsque quelqu'un qui s'était d'abord beaucoup trop longtemps trompé sur cette question a dit que je ne pouvais pas afficher le drapeau. Je suis fière de mon drapeau, bon sang, et je veux pouvoir le crier sur tous les toits. Mais je ne veux pas que quelqu'un qui se trouve à ne pas aimer mon drapeau puisse faire la loi ici et vous obliger à me dire que je ne peux pas être fière de mon drapeau. Telle était la querelle en question. Vous vous en souvenez. Nous sommes probablement tous contents d'en être sortis.
Ce qu'il y a probablement de plus dangereux et de plus effrayant, c'est que nos conseillers juridiques ont été muselés. Ni vous ni moi ne sommes juristes, monsieur le Président, mais nous savons que, lorsque les juristes font le serment de garder le secret professionnel, ils sont sérieux. Je crois que non seulement vos décisions compromettent nos rapports avec les conseillers législatifs, ces avocats qui sont des gens fiers et dévoués qui servent la Chambre des communes du mieux qu'ils le peuvent, mais que ces avocats eux-mêmes sont probablement torturés en ce moment en pensant au serment d'avocat qu'ils ont fait. Je crois que vos décisions les ont compromis aux aussi.
Monsieur le Président, diriez-vous à un médecin à la Chambre des communes qu'il ne peut pas respecter le serment d'Hippocrate? Vous savez que cela ne se ferait pas, monsieur le Président. Vous savez que, lorsque Shaughnessy Cohen s'est effondrée au milieu de nous, nous avons tous été profondément affectés. Comment pourriez-vous dire à un médecin de ne pas intervenir? Comment, dans ce cas, pouvez-vous dire à un avocat que le serment de condifentialité ne compte plus, que l'esprit de parti l'emporte sur ce serment? Tout cela a de quoi nous faire peur et est porteur d'un danger.
Je termine ici parce que nous n'avons pas beaucoup de temps et je voudrais donner à d'autres la possibilité d'intervenir. Monsieur le Président, je sais que, comme moi, vous êtes conscient de la gravité de la question. J'ai aussi de graves préoccupations au sujet du respect des droits démocratiques de tous les députés, peu importe à quel parti ils appartiennent, et vous devriez aussi vous inquiéter.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais faire remarquer que la députée rappelle la question des drapeaux. Je m'en souviens très bien également. Elle s'en sert comme d'un exemple d'une mauvaise décision de votre part. Je suppose que c'est ce qu'elle laisse entendre. De toute façon, c'est très certainement une décision avec laquelle elle n'est pas d'accord. Je ne sais pas exactement ce qu'elle remet en question, mais elle se sert de cet exemple pour mettre en doute votre intégrité à titre de Président.
Monsieur le Président, j'étais présent lorsque vous avez rendu votre décision sur le différend des drapeaux, et j'étais d'accord avec vous.
Que pouvons-nous dire? Devons-nous remettre en question votre droit de siéger au fauteuil? Devons-nous mettre votre intégrité en doute uniquement parce que les députés d'en face ne sont pas d'accord avec vous alors que nous, de ce côté-ci de la Chambre, sommes d'accord avec vous? Quoi qu'il en soit, lorsqu'on est juge ou arbitre et qu'on tente de rendre des décisions qui concernent des êtres humains, pas uniquement dans cette Chambre mais partout au pays, les choses ne sont jamais aussi claires. Il y a toujours des conflits possibles.
J'aimerais que la députée nous dise pourquoi elle soulève la décision que vous avez prise sur la question des drapeaux, et avec laquelle elle n'était pas d'accord, comme un exemple tendant à prouver que vous ne devriez pas occuper la présidence à l'heure actuelle?
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, bien sûr, vous savez également que ce n'était là qu'un exemple.
Je vais tenter de répondre le plus brièvement et le plus clairement possible. Je suis née un 1er juillet, ce qui me rend particulièrement fière. Je ne partageais donc pas votre opinion, mais je n'ai pas présenté une motion de censure contre le Président. Je pensais l'avoir dit clairement dans mon allocution. Vous avez tranché toutes sortes de questions sur lesquelles je n'étais pas d'accord avec vous. Qu'est-ce que cela peut bien faire? Certains sont d'accord, d'autres non. C'est très bien ainsi. Le député d'en face peut certes avoir son opinion et dire qu'il était d'accord avec vous. C'est fantastique. Je n'étais pas d'accord avec vous. J'ai eu mon mot à dire. Les choses ne se sont pas passées comme je l'aurais voulu. Tant pis. Je respecte cela.
Ce que j'ai mentionné au sujet de la décision sur le drapeau, c'est que vous avez usé de faux-fuyants pendant trois semaines. Vous vous êtes probablement donné plus de mal que nous tous. Je ne sais plus si c'était trois semaines, mais cela a paru long. Qui suis-je pour vous donner des conseils? Mais si vous en demandiez, je dirais probablement que la décision la plus rapide est toujours la meilleure. Je ne parle pas nécessairement d'une décision prise sous l'impulsion du moment, mais plutôt d'une décision réfléchie.
Je présume que je devrais retourner à l'école secondaire, monsieur le Président. Vous savez que, si des élèves étaient turbulents, nous ne pourrions pas leur dire de rester tranquilles pendant un moment et que nous reviendrions après les vacances de Pâques. Vous savez que, si nous devons décider de les punir ou non, ils nous respecteront davantage comme enseignants si nous réfléchissons avant de prendre une ferme décision. Nous le savons.
Le différend au sujet du drapeau n'était qu'un exemple. Ce n'était peut-être pas le meilleur, mais c'est celui auquel je songeais, car il se trouve que j'adore les deux drapeaux canadiens installés de chaque côté de vous. Ils sont magnifiques.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, je sais que nous discutons aujourd'hui d'une question très grave. Ce débat est empreint d'émotivité, et nous revenons sur diverses décisions que vous avez rendues.
En fait, nous sommes trois personnes à avoir pratiqué autrefois la même profession, celle d'enseignant. Au jour le jour, il y a des règles à appliquer et il y a quelqu'un qui est chargé de rendre des décisions ou d'appliquer les règles à l'égard des diverses équipes ou des différents camps. Que pense la députée de l'application équitable des règles envers tous les groupes, qu'il s'agisse de différents partis à cet endroit ou de deux équipes lors d'une manifestation sportive? En quoi cela pourrait-il intervenir dans le débat actuel et dans la perception que l'on a de l'application équitable des règles envers les députés de tous les camps?
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, quelqu'un trouve cela dégoûtant. Quelqu'un me trouve dégoûtante. Je pense qu'il a certainement droit à son opinion. Ce qui est sûr, c'est que cette question est bien plus importante que l'opinion que quelqu'un peut avoir de moi.
Revenons-en à l'application des règles. Nous savons que les règles doivent s'appliquer de part et d'autre. Le député a été entraîneur. L'autre jour, dans mon bureau, un jeune de Niagara Falls me parlait des jours glorieux du député à titre d'entraîneur de football. On sait aussi que si des jeunes d'une équipe se comportent mal ou se montrent insolents et qu'on ne les réprimande pas, ils vont former une mauvaise équipe et probablement afficher des résultats plutôt désastreux.
Pour en revenir au respect personnel, je me souviens de l'époque où j'étais entraîneur; c'est facile de dénigrer les autres, mais les filles de l'école Dewberry qui faisaient partie de mon équipe de volley-ball savaient fort bien que si elles faisaient quelque chose de mal et que Miss Grey leur avait dit qu'en pareil cas, elle les enverrait aux douches, elles avaient intérêt à ne pas plaisanter. Elles savaient parfaitement à quoi s'attendre. On ne peut pas favoriser un camp au détriment de l'autre. Cela ne fonctionne pas.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je vais utiliser les 20 minutes qui me sont imparties. Je suis sûr que les députés d'en face seront heureux d'apprendre cela.
Le débat est très intéressant. Certains députés se présentent comme de grands défenseurs du processus démocratique qui a cours dans cette enceinte. Ils font valoir qu'ils ne vous attaquent pas personnellement pour des considérations partisanes qui les amèneraient à s'en prendre au gouvernement par des moyens détournés. C'est le refrain que j'entends depuis le début de la séance et je trouve cette attitude très remarquable. Je n'aurais jamais pu imaginer pareil subterfuge.
Sachant que la motion de censure envers le Président émane du parti qui a vu rejeter tous les amendements qu'il avait proposés au projet de loi C-20, le projet de loi sur la clarté, ce qui le rend furieux, il nous est facile de comprendre la raison d'être de ce débat. Monsieur le Président, au lieu de débattre la question que le cinquième parti voulait soulever aujourd'hui à l'occasion d'une journée d'opposition consacrée à la situation des soins de santé au Canada, il a été convenu, à l'issue de négociations entre les leaders de la Chambre, de retarder ce débat d'une journée et de débattre plutôt cette motion concernant la façon dont vous vous acquittez de votre tâche. Je ne puis pas m'empêcher de rire quand j'entends ces gens-là insister sur le fait qu'il ne s'agit pas d'un débat partisan. Il ne fait aucun doute que c'est bel et bien un débat partisan.
En guise de préparation à ce poste, je me suis entretenu avec d'excellents présidents de l'assemblée législative provinciale. Vous vous souvenez sans doute du Président Edighoffer, un monsieur très bien qui a servi l'Ontario de façon exceptionnel à titre de président. Il y a eu aussi le Président Warner. Le Président Edighoffer était, bien sûr, membre du caucus libéral quand il a été élu et a ensuite occupé les fonctions de président. Il va de soi qu'il faut alors se tenir à l'écart de toutes les activités du caucus qui sont de nature partisane. Le Président Warner était un député du Nouveau Parti démocratique lorsqu'il a été élu, à l'époque du premier ministre Rae, et lui aussi s'est retiré du caucus parce qu'aucun président ne doit même connaître les politiques ou programmes que va présenter le gouvernement.
Nous attendons beaucoup de nos présidents à la Chambre et dans les assemblées législatives provinciales, et c'est notre droit. Je me suis demandé comment je pourrais définir ce que nous attendons du Président. Plutôt que de chercher à réinventer la roue, je me suis mis à la tâche et ai trouvé quelque chose qui, selon moi, résume tout. En 1986, le chef de l'opposition de l'époque, le très honorable John Turner, a déclaré:
Vous savez ce que nous exigeons de vous, monsieur le Président. La perfection! Nous exigeons de l'équité, de l'indépendance, de l'esprit de décision, de la patience, de la logique, un bon sens de l'humour, le maintien des traditions de la Chambre, la connaissance des règles et la capacité de sentir nos changements d'humeurs et de ton à mesure que nos journées avancent.
C'est une définition juste de ce que la Chambre attend de son Président.
Toutefois, l'autre aspect de la question, c'est que ce n'est pas vous, monsieur le Président, qui faites le Règlement. C'est nous. Par le processus mis en place, la Chambre des communes établit le Règlement. Nous avons un processus selon lequel le Règlement est approuvé par la Chambre des communes. Je sais que vous conviendriez que, outre les qualités que vous possédez, l'équité, l'indépendance, la logique, le bon sens de l'humour, vous êtes en réalité un serviteur de la Chambre des communes. En conséquence, vous devez faire votre travail de façon aussi impartiale que possible et ne pas vous laisser aller à des sentiments partisans personnels qui dépouilleraient de leurs droits des personnes se trouvant en position minoritaire.
Si je dit cela, c'est parce que je trouve vraiment intéressant que les députés d'en face soient intervenus pour dire que le gouvernement est autoritaire, que si nous avons ce débat c'est parce que nous avons eu trop de motions d'attribution de temps et qu'ils n'aiment pas la façon de procéder du gouvernement. Monsieur le Président, qu'est-ce que cela a à voir avec vous?
À mon avis, cela prouve que ce n'est rien d'autre qu'un subterfuge et une façon de dire qu'il sont furieux d'avoir perdu un projet de loi, un vote, une motion et 400 amendements ou ce que c'est. Ils ne peuvent plus s'en prendre au gouvernement—pour une raison d'ailleurs intéressante—et donc ils s'en prennent au président.
Un député réformiste a récemment dit que le gouvernement n'avait obtenu que 38 p. 100 des suffrages populaires. Quand j'ai été élu en 1987, sous le gouvernement de David Peterson, c'est à peu près le pourcentage de voix que nous avons eu en Ontario. Quand il y a cinq partis, ce n'est pas la faute du gouvernement si les députés de l'opposition n'arrivent pas à s'entendre. Ce n'est pas la faute du gouvernement s'ils ne semblent pas pouvoir s'entendre sur des politiques et si nous avons ce que certains appellent un «Parlement pizza» avec cinq partis d'opposition. Le fait est que, sur 301 sièges, nous en avons 157 et que cela constitue une majorité. Le parti qui vient après nous a 58 sièges.
Je comprends l'exaspération de l'opposition car le mandat qui nous a été confié nous l'a été, non pas par vous, monsieur le Président, non par votre bureau et non pas par les greffiers au bureau ou le personnel. Je dis cela car s'en prendre à vous, monsieur le Président, en présentant cette motion de censure à l'égard du président, du personnel et des greffiers au bureau, est un subterfuge et une façon de s'en prendre au gouvernement. Je trouve l'initiative particulièrement désobligeante et parfaitement injustifiée.
J'avoue être étonné qu'elle soit le fait des bloquistes. S'il est une chose qui m'ait franchement impressionné et étonné dans cette enceinte, abstraction faite de la question du séparatisme du Québec, c'est bien le fait que les membres du Bloc, avec lesquels il m'a été donné de collaborer à différents comités, savent faire preuve de compassion, qu'ils ne craignent pas d'abattre de la besogne et qu'ils travaillent avec coeur. En fait, j'ai eu l'occasion d'en observer quelques-uns lors de déplacements à l'étranger. Je ne les ai pas vu prêcher en faveur de leur idées séparatistes, par exemple à Strasbourg, en France, où nous nous trouvions pour assister à une réunion du Conseil de l'Europe. Je trouve qu'ils font d'excellents députés et qu'ils contribuent utilement au fonctionnement de cette institution et à l'avancement de nos travaux.
Dans un accès de colère, ou par caprice, je ne saurai l'expliquer autrement car les idées et les moyens leur manquaient d'enrayer l'appareil gouvernemental, les bloquistes ont décidé que, ne pouvant s'en prendre aux ministériels, ils allaient s'attaquer au personnel. Comment en sommes-nous arrivés là?
La députée de Rimouski—Mitis s'inquiétait que 700 motions avaient été jugées conformes, bien que, selon les bloquistes, deux d'entre elles ne l'aient pas vraiment été et aient donc été rejetées. Il y avait plus d'un millier de motions. Nous serions encore à voter ce soir.
Je voudrais que vous, monsieur le Président, ou quelqu'un d'autre dans cette enceinte, me dise que nos électeurs nous ont élus à cette institution pour que nous nous levions à tour de rôle de 18 heures, le soir, à 6 heures, le lendemain matin, et de 6 heures le matin à 18 heures le soir, trois jours d'affilée, 24 heures sur 24, pour voter sur des motions tendant à modifier un point-virgule par un deux points.
On ne saurait qualifier cela de démocratie. Ce n'est pas ainsi qu'un pays doit être gouverné. Dieu seul sait à quel point votre tâche est difficile, monsieur le Président, que celle de diriger 301 députés dont la conduite peut s'avérer désordonnée par moments par simple sectarisme. C'est un sport sanglant et nous en sommes tous conscients. La tâche est difficile. Il y a une certaine vérité dans le vieux dicton: «Si vous réussissez ici, vous réussirez n'importe où.»
Vous avez une tâche vraiment ingrate. Vous tâchez de maintenir l'ordre, de maintenir le cap et de trouver des moyens d'y parvenir. Il ne s'agit pas de donner des ordres à qui que ce soit, pas au gouvernement ni à l'opposition. Les députés à la Chambre ont plus de liberté qu'on en a dans n'importe quelle institution dans le monde.
Les députés du Bloc ont dit que leurs privilèges avaient été violés parce que leurs amendements n'avaient pas été acceptés. Il y a une chose dont s'accompagnent les privilèges au Canada. Cela s'appelle les responsabilités. Le projet de loi se compose de trois articles et tient en une page et demie. Je comprends la ferveur, la passion et le désir des bloquistes de faire sortir leur province de la Confédération. Tous les Canadiens comprennent cela. Ils comprennent également que cela représente une position minoritaire aujourd'hui au Québec.
Tous les sondages révèlent que le désir et l'intérêt voués au séparatisme n'ont jamais été aussi faibles, mais je comprends cela probablement davantage que je le comprenais il y a trois ans quand je suis entré à la Chambre. Je le répète, je les respecte pour bon nombre des choses qu'ils font dans un effort pour être de véritables députés à la Chambre. Je soutiens cependant qu'il n'est pas responsable de proposer plus de 1 000 amendements à un projet de loi qui se compose de trois articles et qui tient en une page et demie. La plupart de ces amendements, la vaste majorité d'entre eux, étaient ou bien superflus ou bien n'avaient aucune substance.
C'est sans conteste un message clair disant «Nous ne pouvons l'emporter, alors comment pouvons-nous leur rendre la situation aussi pénible que possible.» Je ne sais pas ce qu'il en coûte pour faire fonctionner cet endroit. À certains égards, je trouve que cet argument est dépourvu de pertinence. On nous envoie ici et si cela coûte cher, c'est le prix à payer. Mais c'est un tel gaspillage.
Nous avons vécu cette situation avec le Parti réformiste qui a adopté la même démarche dans le cas du Traité nisga'a. Je comprenais sa passion. Ce n'est pas votre faute, monsieur le Président, si les réformistes avaient 471 amendements et ce n'est pas votre faute non plus s'ils n'ont pas réussi à en faire adopter un. Dieu sait que je n'ai jamais beaucoup appuyé les politiques du Parti réformiste, mais je ne les ai pas vus piquer une colère et présenter une motion de censure à l'endroit du Président uniquement parce qu'ils n'ont pas réussi à faire adopter leurs 471 amendements. Ils ont accusé le coup. Ils sont rentrés dans l'ouest du Canada, en Colombie-Britannique et dans tous les endroits d'où ils viennent et ils ont mené la bataille à l'échelon local.
C'est ainsi que fonctionne la démocratie au Parlement. À mon avis, on abuse de vous monsieur. On abuse de vos suppléants et de votre personnel.
Il y a trois types de députés ici. Les députés d'en face auront peut-être du mal à le croire, mais je ne suis pas à proprement parler un député ministériel. Je suis un député qui appuie le gouvernement. Il y a une différence. Les députés ministériels sont les membres du Cabinet. Le premier ministre et son Cabinet constituent effectivement le gouvernement. Le reste d'entre nous qui sommes élus comme libéraux choisissons d'appuyer ou non le gouvernement. C'est le rôle que nous jouons.
Nous entendons les députés d'en face réclamer des votes libres et dire qu'il n'y a pas assez de votes libres à la Chambre. Je n'ai jamais fait partie d'un gouvernement où il y a eu plus d'occasions de tenir des votes libres, et où il y a eu plus de possibilités au sein des caucus et des comités d'apporter des changements.
Le processus démocratique est ici franchement fort remarquable. Je dis cela depuis les banquettes arrière, d'où certains pourraient prétendre que par temps clair je pourrais parfois avoir de la difficulté à voir le Président. La réalité, c'est que le processus est en place pour que les députés, y compris les députés d'en face, puissent apporter leur contribution.
Il est à peine passé 16 heures. On me signale qu'au cours d'une conférence de presse tenue dans l'enceinte parlementaire à 15 h 30 aujourd'hui, le porte-parole en matière de citoyenneté et d'immigration a rendu public un rapport sur l'immigration et la question des immigrants illégaux, qui a été rédigé par le comité de la citoyenneté et de l'immigration, mais qui n'est pas encore terminé ni approuvé.
Je trouve cela incompréhensible et ignoble. C'est un manque de respect à votre endroit, Monsieur, ainsi qu'à l'endroit du comité, des traditions de la Chambre des communes et de tous ceux qui nous y ont précédés. Il a simplement déclaré qu'il n'aimait pas ce rapport. Savez-vous pourquoi? Parce qu'il ne s'est jamais présenté aux réunions pour participer à la rédaction de ce rapport. Il le rend public et accuse le comité de ne pas l'écouter. C'est fondamentalement incorrect et enfantin, mais c'est la réalité.
J'entends les députés qui se lèvent, qui vous parlent de cette question. Ils disent que les choses se sont détériorées ici. C'est très intéressant. Il y a des députés de l'opposition. Certains appuient le gouvernement et certains en font partie. Cela a toujours été. Nous avons tous un rôle à jouer.
Pendant cinq ans, j'ai siégé dans l'opposition face à un gouvernement que je considérais arrogant. Je pensais que c'était un gouvernement qui n'était pas à l'écoute, qui avait été élu par accident. J'ai passé ces cinq années à l'assemblée législative de l'Ontario, face au gouvernement néo-démocrate. Je me souviens d'avoir pensé que, si la population avait l'occasion de voter de nouveau au lendemain même des élections, elle n'aurait jamais donné le pouvoir à ces gens. La population ne croyait pas que cela allait arriver.
L'hon. Lorne Nystrom: Il faut respecter la population.
M. Steve Mahoney: Cette observation est juste. Je la leur renvoie: il faut respecter la population. Des députés affirment que nous n'avons que 38 p. 100 des votes. Je regrette, mais nous avons 157 sièges sur un total de 301. Que cela plaise ou non au député, une telle situation s'appelle une majorité. Qu'on utilise les mathématiques anciennes ou le calcul moderne, cela correspond à une majorité et nous formons le gouvernement. Il ne s'agit pas de dire que nous formons le gouvernement et que nous allons donc faire ce qui nous plaît. Il s'agit de dire que nous sommes le gouvernement et que nous avons...
M. Odina Desrochers: Vous êtes tellement idiot.
M. Steve Mahoney: Quelle remarque merveilleuse. Nous avons en cette enceinte une députée qui a qualifié une ministre de «fille» hier et qui, aujourd'hui, emploie à l'égard de cette ministre le terme de «chère». Et maintenant, un député me crie que je suis idiot. Je suppose que mes anciens professeurs seraient d'accord avec cette affirmation. Dans certaines circonstances, mon père et ma mère auraient aussi été d'accord avec cela et mon épouse, qui se trouve présentement à la tribune, serait sans doute souvent de cet avis.
En sommes-nous réduits à cela? Est-ce que la qualité de notre débat a atteint le niveau des remarques comme «Vous êtes idiot»? Que se passe-t-il? Les députés savent sûrement que peu d'entre nous sont plus farouchement partisans que moi parfois.
M. Stéphane Bergeron: Est-ce possible?
M. Steve Mahoney: Ce n'est probablement pas possible, cependant, j'aime bien penser que, de ce côté comme de l'autre, je respecterais cette institution et ses règles.
Nous connaissons la différence et nous savons pourquoi nous n'en venons pas aux coups ici, quoique nous avons passé très près à quelques reprises. La distance entre le premier ministre et le chef de l'opposition équivaut à la distance entre deux personnes armées d'épées dont les extrémités se touchent à peine. Pourquoi? Le symbolisme de cette situation en dit long sur le Canada. Nous ne nous trucidons pas les uns les autres. Nos armes sont nos cerveaux. Malheureusement, toutes les armes ne sont pas aussi efficaces les unes que les autres, mais nos armes à nous, ce sont nos esprits, et nos munitions, ce sont nos paroles. Voilà pourquoi le débat est tellement animé ici. Voilà pourquoi on fait tellement preuve d'esprit partisan ici. Parce que c'est comme cela que nous combattons. C'est comme cela que nous luttons pour défendre les intérêts des gens qui nous ont choisis pour les représenter ici.
J'ai reçu l'autre jour, à mon bureau, un message électronique d'un de mes électeurs que je n'ai jamais rencontré à propos d'un article paru récemment dans le journal dans lequel on s'en prenait plutôt injustement à mon style et ainsi de suite. Cet électeur écrivait ceci: «Je ne suis pas d'accord avec le journaliste. Je veux que mon député soit entendu. Continuez!» Je vais continuer. Cela ne fait aucun doute.
Mais je dois dire que c'est une attaque des plus répréhensibles contre vous, monsieur le Président. C'est une attaque répréhensible contre les services du greffier, contre le personnel de la Chambre et contre l'institution elle-même pour laquelle nous donnerions tous notre vie. Nous le savons. Beaucoup ont donné leur vie pour elle. Nous célébrons le courage de nos anciens combattants lorsque nous les accueillons ici. Nous continuerons de lutter pour protéger ce principe démocratique.
Les députés qui n'aiment pas ce qu'ils voient ne devraient pas s'en prendre à la présidence. Ils veulent tuer le messager, qui fait seulement son travail. Il serait plus juste qu'ils s'attaquent plutôt à nous, et nous saurons nous défendre.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, de toute évidence, il m'est pratiquement impossible de réfuter en une minute une diatribe de 20 minutes, mais je vais quand même essayer.
Le député de Mississauga-Ouest a réprimandé les députés de l'opposition pour avoir traité d'autres députés de «fille» ou quelque chose comme ça. Pourtant, il a lui-même traité un de mes collègues d'«enfantin», de «répréhensible» et d'«ignoble», entre autres. Je lui remets cela sous le nez.
Le député a dit que la motion présentée par le Bloc québécois constitue une attaque contre le personnel et les greffiers au bureau. Je n'interprète pas la motion de cette façon. Quel passage de la motion exprime quelque chose de négatif à l'égard des greffiers pour qui j'ai le plus grand respect?
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je voudrais répondre au député, car je crois qu'il a posé une bonne question. Lorsqu'elle a soulevé la question de privilège, la députée de Rimouski—Mitis a dit que le greffier principal adjoint a envoyé une lettre au bureau, etc. Elle se disait préoccupée, si j'ai bien compris, par le rejet de 700 amendements. Deux de ces amendements n'avaient jamais été officiellement présentés.
Si je comprends toujours bien, les employés travaillaient à partir de leur base de données parce qu'ils avaient préparé ces amendements avec la députée. Ils n'ont pas lu les amendements ligne par ligne, je crois, pour tous les vérifier. Deux d'entre eux n'étaient pas inclus dans le nombre total présenté. Je crois qu'ils ont probablement fait une erreur. Mais cela justifie-t-il qu'on les attaque? Certainement pas.
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, le député de Mississauga-Ouest parle de respect de nos institutions et de respect du peuple, comme s'il était l'incarnation du respect. Mais qu'est-ce qui est le plus irrespectueux, si ce n'est que d'empêcher les représentants du peuple de s'exprimer?
Lorsque les députés du Bloc québécois n'ont pu s'exprimer à la Chambre, comment pouvaient-ils le faire autrement sinon que par des gestes et en créant des situations pour alerter le public et le peuple qui n'avait pas le droit de parole par l'intermédiaire de ses représentants dans cette Chambre?
On a voté pendant 40 heures. Si on avait permis 40 heures de plus de témoignages devant le comité, il y aurait eu au moins 40 témoins de plus qui auraient pu se faire entendre.
C'est ça que les libéraux n'ont pas voulu entendre. Le Parti libéral a voulu se servir de nos institutions et parfois même de la Présidence pour justifier son action.
[Traduction]
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je suppose que si nous disposions de 80 heures de plus, nous pourrions faire comparaître plus de témoins.
Pendant combien de temps encore les députés veulent-ils débattre de la question de la souveraineté? Je peux leur dire que les gens de ma circonscription, comme le reste de la population du Canada, y compris le Québec, en ont ras-le-bol. Le projet de loi apporte quelque clarté. Qui peut s'y opposer? Qui peut contester une question qui se résume à ceci: Voulez-vous, oui ou non, vous séparer du Canada?
Le projet de loi comporte trois articles, il fait une page et demie en tout. A-t-on besoin de 1 000 amendements pour clarifier ce dossier? N'est-il pas suffisamment clair qu'il s'agit là d'une manoeuvre du Bloc québécois visant à bousiller l'appareil gouvernemental?
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, je voudrais ramener le débat dans sa juste perspective.
Les médias ont laissé entendre dernièrement que le discours du député de Missauga-Ouest manquait de substance. Je déclare fermement et publiquement qu'on dénote un peu de substance dans le discours du député.
Pour ma part, je respecte non seulement la présidence, non seulement la fonction, mais vous, monsieur le Président, en tant que personne. Je profite de l'occasion pour l'affirmer sans ambages. J'abonde dans le sens de mon parti.
Monsieur le Président, vous avez un travail excessivement difficile, sinon impossible, à accomplir. Votre charge exige la sagesse d'un Salomon et vous aurez du mal à satisfaire tous et chacun des députés de la Chambre. Je vous présente, monsieur le Président, mes respects au nom de mon parti.
Le député a essayé de donner une tournure partisane au fait que le Parti progressiste conservateur ait cédé sa journée d'opposition pour qu'il soit possible de débattre cette motion. J'aimerais apporter quelques précisions car, très franchement, nous avons cédé notre journée d'opposition pour qu'il soit possible de débattre de cette motion. Nous l'avons fait parce que nous estimons nécessaire de nous débarrasser de cette motion et je voudrais...
Le Président: Le député de Mississauga-Ouest a la parole.
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, le député d'en face sera heureux d'apprendre que ce n'est pas après le 5e parti que j'en ai dans le cas qui nous préoccupe. Ce qui m'inquiète, c'est que l'on abuse du système tout cela parce que le Bloc n'a pas réussi à faire échouer cette mesure législative.
Que les députés du Bloc ne soient pas d'accord sur le projet de loi, c'est leur droit en tant que parlementaires élus, et je le respecte. Mais encore une fois, quand on perd dans cet endroit, on a perdu. C'est ainsi que les choses fonctionnent. C'est la réalité. Ils ne peuvent pas revenir à la charge et dire que, puisque nous avons perdu et que nous ne pouvons pas nous en prendre au gouvernement, nous allons nous en prendre au Président. Cela ne se fait pas.
M. Rick Borotsik: Répondez à la question.
M. Steve Mahoney: J'y ai répondu. Ce n'est pas après le député de Brandon—Souris que j'en ai. Qu'il prenne du Valium et qu'il se calme.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais faire un commentaire à l'intention du député de Mississauga-Ouest qui n'était pas présent au moment où vous avez rendu votre décision sur la question des drapeaux sur les pupitres, soulevée par la députée d'Edmonton-Nord...
M. Steve Mahoney: Si, j'étais présent.
M. John Bryden: De toute façon, cette question a été soulevée par la députée d'Edmonton-Nord à titre d'exemple tendant à démontrer pourquoi la Chambre ne devrait plus avoir confiance en vous par suite de la décision que vous avez prise dans ce cas.
J'aimerais rappeler aux Canadiens ce qui est arrivé dans ce cas précis, lorsque vous avez rendu votre décision interdisant les drapeaux sur les pupitres. Je me souviens très bien avoir vu le député de Medicine Hat jeter par terre le drapeau qui était sur son pupitre. Ce drapeau est par la suite resté pendant un certain temps sur le plancher de la Chambre, sur le tapis sur lequel les gens circulent.
Je me rappelle m'être dit alors que la décision que vous aviez prise, monsieur le Président, était très sage puisqu'il avait été décidé de ne pas permettre les drapeaux sur les pupitres pour ne pas encourager les députés à avoir recours à notre symbole national pour des fins partisanes. C'était une excellente décision.
De plus, je me rends compte que ce parti, pas le Bloc Québécois parce que je reconnais leur droit de déposer cette motion en signe de protestation, le Parti réformiste ne fait pas la différence entre une attaque contre le gouvernement et une attaque contre le parlement. Dans le cas de la décision rendue dans l'affaire des drapeaux, le Parti réformiste attaquait le Parlement. Encore une fois aujourd'hui, nous voyons le Parti réformiste vous attaquer personnellement, monsieur le Président, alors que c'est contre le gouvernement qu'ils en ont vraiment. Ils ne sont pas satisfaits du gouvernement, mais ils ont du mal à faire la distinction et c'est bien dommage.
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je remercie le cinquième parti d'avoir renoncé à sa journée d'opposition pour nous permettre de discuter de cette motion. Si cela contribue à calmer le député et à réduire sa pression artérielle, je m'en réjouis.
Le député a parlé du débat sur le drapeau. J'étais alors présent à cet endroit. C'était au début d'une législature.
Certains députés parlent du décorum à cet endroit. Voyons ce qui s'est passé.
Je me souviens d'un député bloquiste qui a pris son fauteuil et quitté cet endroit. Il a apporté son fauteuil dans sa circonscription. Pour le décorum, on repassera! Bon sang, les jeunes s'emparent du mobilier!
Je me souviens de députés d'en face qui portaient des sombreros mexicains et qui dansaient ou se trémoussaient à l'extérieur. Je ne sais pas contre quoi ils protestaient.
Certains ont peint le drapeau canadien sur une auto qu'ils ont conduite partout sur la colline du Parlement.
C'étaient des parlementaires. Je pense que les Canadiens sont un peu gênés. Ils sont embarrassés par le genre de situation insensée dont ils sont témoins à cet endroit. Je trouve honteux que le Bloc québécois veuille faire peser le blâme sur vous, Monsieur.
[Français]
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, dans un débat aussi grave, aussi important, aussi solennel, j'ai été surpris d'entendre des propos qu'on aurait pu qualifier du niveau de batailles de ruelles.
J'ai été également surpris d'entendre dans cette Chambre des propos qui avaient pour effet de banaliser, de minimiser, de sous-estimer la démarche entreprise aujourd'hui par le Bloc québécois.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais, d'entrée de jeu, simplement ouvrir une petite parenthèse. J'entendais le député de Mississauga-Ouest dire que les électeurs de son comté sont tannés, qu'ils ne peuvent plus supporter d'entendre parler de Constitution et de la place du Québec à l'intérieur ou à l'extérieur de ce pays.
Il y a peu de pays dans le monde qui peuvent dire qu'une de ses composantes originelles, une de ses provinces, un de ses peuples fondateurs a été exclu et est toujours exclu d'une réforme constitutionnelle qui, dans notre cas, a eu lieu en 1982. Peu de pays dans le monde peuvent se gratifier, si je puis dire ainsi, de ce triste record ou de cette triste performance, à savoir qu'ils excluent volontairement et veulent maintenir à l'extérieur de leur Constitution un peuple complet, un des peuples fondateurs du pays, une des provinces fondatrices de la fédération canadienne.
Cela étant dit, j'aimerais revenir au coeur du débat. Ce matin, j'ai entendu un collègue dire: «Monsieur le Président, nous sommes là pour savoir si nous voulons ou ne voulons pas vous faire perdre votre emploi.» Comme s'il n'était question ici que de l'emploi d'une personne, en l'occurrence vous-même, dans la fonction de Président de la Chambre des communes.
On a dit que c'était la responsabilité du Président de prendre des décisions et que c'était notre responsabilité, comme parlementaires, de se conformer à ces décisions. Au cours de presque sept années que nous avons passées ensemble dans cette Chambre, vous avez à l'occasion rendu des décisions qui nous étaient favorables. En d'autres occasions, vous avez rendu des décisions qui nous étaient défavorables.
À tout moment, nous avons accepté ces décisions, comme c'est notre devoir de le faire, parce que nous avons toujours eu une profonde confiance en vous et en l'institution que vous représentez à titre de Président de la Chambre des communes.
Certains, dont le député de Mississauga-Ouest, ont voulu établir un lien très direct entre cette motion de censure à l'endroit de la Présidence et le projet de loi C-20. Je pense que le chef du Bloc québécois a indiqué clairement—mais manifestement, le député de Mississauga-Ouest n'écoutait pas, ce matin, le discours du chef du Bloc québécois, et n'a donc pas entendu cet élément—qu'un tel lien entre le projet de loi C-20 et la motion de censure qui est actuellement débattue ne pouvait être établi puisque, si vous aviez rendu une décision à l'effet qu'il y avait, prima facie, atteinte aux privilèges des parlementaires dans la question des amendements—j'y reviendrai un peu plus tard—et que, conséquemment, vous aviez entendu ou accepté que la députée de Rimouski—Mitis puisse déposer sa motion, la question serait maintenant devant le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.
Bien avant que nous ayons adopté le projet de loi C-20, cette question aurait été renvoyée au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, et nous ne serions pas aujourd'hui en train de discuter d'une motion de censure à l'endroit de la Présidence. Il ne peut donc d'aucune façon être établi par des esprits mal pensants qu'il y aurait un lien entre cette motion de censure et tout le débat entourant le projet de loi C-20.
Il appert que l'incident auquel nous faisons référence, c'est-à-dire le fait que le Bloc québécois ait déposé, travaillé, préparé, avec les conseillers législatifs, un certain nombre d'amendements en prévision de l'étape du rapport ait donné lieu à cette interprétation, parce que certains semblent penser que c'était beaucoup trop pour un projet de loi qui contenait seulement trois articles.
Il ne s'agit pas simplement d'un projet de loi contenant trois articles, il s'agit d'un projet de loi touchant l'essence même de la démocratie québécoise, un projet de loi touchant l'avenir même du Québec à l'intérieur ou à l'extérieur du Canada, ou même l'avenir de tout autre province, puisque le gouvernement a voulu que l'on croie qu'il s'agissait d'un projet de loi pouvant concerner l'ensemble des provinces canadiennes, un projet de loi concernant l'avenir de quelque province que ce soit de ce pays, à l'intérieur ou à l'extérieur du Canada.
Ce n'est pas simplement un projet de loi de trois articles; c'est un projet de loi fondamental, probablement l'un des projets de loi les plus fondamentaux sur lesquels il nous aura été donné de nous prononcer à la Chambre. En dépit de cela, le gouvernement a bousculé la Chambre en accélérant chacune des étapes. Il n'y a aucune étape qui aura été complétée dans des délais normaux et raisonnables. Elles ont toutes été franchies dans un délai accéléré.
On a imposé un bâillon en deuxième lecture. On a voulu imposer un bâillon en comité pour limiter son travail. N'ayant pu le faire en comité, on a imposé le bâillon à la Chambre, et on a fait la même chose à l'étape du rapport et de la troisième lecture, où on a imposé un double bâillon.
Comme j'allais le dire, il s'est avéré que dans le cadre de ce projet de loi, nous avons préparé, avec les conseillers législatifs, un certain nombre d'amendements, et nous en avons déposé un certain nombre. Soudain, ô surprise, nous réalisons que parmi les amendements que nous avions préparés avec le conseiller législatif, deux qui n'avaient même pas été déposés, avaient été jugés irrecevables. Quelle surprise!
Il y a eu une deuxième surprise: un certain nombre d'autres amendements que nous avions déposés ont été jugés irrecevables en fonction de critères techniques. Par exemple, le projet de loi faisant référence à la sécession, l'utilisation du terme «souveraineté» dépassait le cadre du projet de loi. Nous sommes retournés à la table de travail, nous avons changé le mot «souveraineté» pour le mot «sécession» pour faire plaisir au gouvernement libéral et, surprise, ces amendements sont de nouveau rejetés.
On comprendra que nous nous sommes interrogés sur ce que j'appellerais l'impartialité dont nous avons fait l'objet pendant tout le processus. Par ailleurs, nous nous sommes interrogés sur le lien de confidentialité qui doit exister entre les députés et le conseiller législatif. Cela nous apparaissait être à ce point important que nous en avons fait l'objet d'une question de privilège. Pourquoi? Parce que nous étions convaincus qu'il y avait quelque chose de rompue, de brisée, dans le lien de confidentialité.
Nous avons appris que cette modification administrative avait été apportée il y a environ trois ans par la direction de la Chambre. Comme député de cette Chambre, je n'en n'avais jamais été informé. Qui plus est, je suis également membre du Bureau de régie interne. Quoique je n'ai pas l'habitude de manquer beaucoup de réunions du Bureau de régie interne, je n'ai jamais eu vent du fait que l'on avait changé cette relation privilégiée avocat-client, cette relation confidentielle entre les conseillers législatifs et les députés. Quelque part, quelqu'un avait décidé de faire en sorte que dorénavant les conseillers législatifs devaient partager leur connaissance des amendements avec les greffiers.
Je dois vous dire que le choc est un peu dur parce qu'il y a deux poids, deux mesures dans cette Chambre. Lorsque le gouvernement inscrit des amendements au Feuilleton, est-ce qu'il les soumet aux greffiers avant qu'ils soient inscrits? Mais non. Pourquoi les députés de la Chambre devraient-ils faire en sorte que les amendements qu'ils préparent avec les conseillers législatifs doivent être partagés avec les greffiers? Pourquoi est-ce que ce lien de confidentialité exclusif avocat-client, conseiller législatif-député, a-t-il été rompu, et pour quelle raison? Cela, nous ne le savons pas.
Ce que l'on sait par exemple, c'est que lorsqu'on a soulevé cette question de privilège à la Chambre, la Présidence s'est penchée sur la question. Vous êtes revenu en nous disant, et vous me permettrez de vous citer:
Il m'est impossible de trouver qu'il y a matière à question de privilège ou que ce geste constitue un outrage à la Chambre.
Vous avez poursuivi en disant:
Les députés doivent comprendre que les conseillers législatifs de la Chambre ne travaillent pas en vase clos. Il n'existe pas de base de données réservée au conseiller législatif, comme l'honorable député semble le croire. La base de données législative est à la disposition de toute personne exerçant des fonctions de soutien à l'activité législative.
J'en reviens à ma question. Pourquoi le gouvernement pourrait-il déposer des amendements au Feuilleton, sans avoir à partager la connaissance de ceux-ci avec les greffiers? Je me pose la question suivante: avant que cette modification administrative, dont, comme député et membre du Bureau de régie interne je n'avais jamais entendue parler, sinon quelques jours avant que tous ces incidents surviennent, soit établie, ou avant même—allons plus loin—que l'ordinateur fasse partie des outils de travail de cette Chambre, avant même que les conseillers législatifs puissent enregistrer dans des bases de données les ébauches d'amendements, comment cela fonctionnait-il ici?
Est-ce que je dois comprendre de votre décision, qu'autrefois, les greffiers se glissaient subrepticement dans l'environnement de travail des conseillers législatifs, ouvraient la filière, fouillaient dans les dossiers des conseillers législatifs pour savoir ce qui s'y trouvait, quels amendements avaient été préparés, pour qui, et à quelles fins?
Il m'apparaît que, sinon pour vouloir accélérer et faciliter leur travail durant la nuit qui a suivi le dépôt de nos amendements, il n'y a pas d'autres raisons qui puissent justifier qu'un greffier aille fouiller dans la base de données, sorte les données—n'ayant pas à tout retaper à la mitaine, comme on dit—prenne ce qui est déjà là, réimprime le tout sous un nouveau format, et c'est réglé, final bâton, comme on dit par chez nous.
C'est sûr que cela a peut-être un effet facilitateur sur le travail des greffiers, mais autrefois, quand on fonctionnait à la mitaine, et je vous pose la question, jusqu'où allaient les greffiers pour faciliter leur travail? Allaient-ils jusqu'à fouiller dans la filière des conseillers législatifs?
On me dit que c'est un changement qui a été apporté, il y a environ trois ans seulement. Vous ne pouvez pas prétendre que c'est quelque chose qui s'est toujours fait.
Dès lors que quelque chose de fondamental comme le lien de confiance qui doit exister entre chaque député et les conseillers législatifs est rompu, vous comprendrez qu'il y a quelque chose là de plus important, de plus grave, de plus lourd de conséquences qu'une simple décision rendue par la Présidence à laquelle on doit se conformer.
Par votre décision, vous avez validé, si je puis dire, la pratique existante qui nous a amenés, nous, à soulever une question de privilège. Monsieur le Président, pour des raisons que je m'explique mal, il vous est apparu que, prima facie, il n'y avait pas là atteinte aux privilèges des députés de cette Chambre, alors que nous étions profondément convaincus du contraire.
Nous avons pensé avoir fait la démonstration éloquente de ce bris du lien de confiance, de cette confidentialité qui doit animer les relations entre députés et conseillers législatifs. Vous avez plutôt validé cette nouvelle pratique administrative par la décision que vous avez rendue, décision qui nous a profondément bouleversés, pour les raisons que j'invoquais tout à l'heure.
Si nous ne pouvons plus être convaincus que le travail que nous faisons avec les conseillers législatifs ne servira pas à autre chose, vous comprendrez qu'on peut s'interroger très sérieusement. Les raisons pour lesquelles nous nous interrogeons sont qu'il y a d'autres projets de loi devant cette Chambre et que nous sommes à travailler sur un certain nombre d'amendements.
Or, nous avons pu entendre le leader du gouvernement à la Chambre dire, dans une déclaration: «À la lumière de ce qui se passe avec le projet de loi C-20 et ce qui s'en vient avec le projet de loi C-3, il vaut mieux prendre des mesures.» C'est ce qui l'avait amené à déposer sa fameuse motion no 8. Ayant dû faire marche arrière sur la motion no 8, il a maintenant fait inscrire la motion no 9 au Feuilleton. Il prévoit à l'avance, parce qu'il sait, dit-il, ce qui s'en vient avec le projet de loi C-3.
Comment le leader du gouvernement à la Chambre peut-il prétendre savoir ce qui s'en vient?
Vous comprendrez qu'à la lumière des événements qui sont survenus ces derniers jours et ces dernières semaines, compte tenu de ce qui s'est passé avec les deux amendements du Bloc québécois et compte tenu de ce qui s'est passé avec les autres amendements qui ont été jugés irrecevables, après que nous ayons reformulé le tout, il est inquiétant d'entendre le leader du gouvernement à la Chambre dire: «Nous savons ce qui s'en vient avec tel ou tel projet de loi.»
Comment peut-il savoir cela? Comment peut-il savoir ce qui s'en vient, si ce n'est parce que quelqu'un, quelque part, aurait pu l'en informer?
Le lien de confiance est rompu. Monsieur le Président, ce n'est pas une décision comme une autre que vous avez rendue sur la question de privilège de ma collègue de Rimouski—Mitis. Ce n'est pas de gaieté de coeur, et je tiens à vous le dire immédiatement, que le chef du Bloc québécois a déposé cette motion de censure à l'endroit de la Présidence.
Vous me connaissez suffisamment pour savoir que j'ai un profond respect pour votre personne et que j'ai un profond respect de la fonction qui est la vôtre. Vous savez que j'ai ce respect à votre égard et à l'égard de cette fonction. Mais vous savez également que si nous faisons cela aujourd'hui, ce n'est pas comme le disait, de façon tout à fait odieuse, le député de Mississauga-Ouest, «pour satisfaire un agenda politique quelconque». Ce n'est pas ce que nous sommes en train de faire ici.
Vouloir réduire ce qui se passe actuellement à une simple manoeuvre ou manigance du Bloc québécois parce que nous sommes frustrés de n'avoir pu battre le projet de loi C-20 est indigne d'un collègue de cette Chambre. Ce n'est pas l'objet de notre intervention d'aujourd'hui.
On dit qu'avec des si on va à Paris et qu'avec des ça on reste là, mais je réitère que si vous aviez accepté, tout simplement, que ma collègue de Rimouski—Mitis présente sa motion et que celle-ci soit débattue, il y a bien longtemps que nous aurions cessé de parler de cette question, sinon au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre où on l'aurait analysée. Cette question mérite en effet d'être analysée. En prenant la décision de ne pas l'accepter, vous avez balayé cette question du revers de la main, alors qu'il s'agit d'un lien fondamental, d'un lien de confiance qui a été définitivement rompu.
Peut-être n'est-il pas trop tard, mais je veux que vous sachiez, contrairement à ce que certains pouvaient affirmer, que maintenant la question n'est pas de savoir si on veut vous dégommer ou pas. Compte tenu de la décision prise, compte tenu de ce qui s'est passé et qui est très préoccupant, je m'inquiète de ce que disait le leader du gouvernement à la Chambre. Il disait: «On sait ce qui s'en vient.» Mais comment peut-il savoir ce qui s'en vient? Vous voyez, la confiance est brisée.
Nous n'avons eu d'autre choix, et je dois vous dire que c'est avec le coeur déchiré, que de présenter cette motion de censure. J'ose espérer que d'ici la fin de la journée surviendra quelque chose qui pourrait nous éviter de nous prononcer là-dessus, sans quoi mes collègues et moi-même n'aurons d'autre choix que de nous lever dans cette Chambre et de voter en faveur de cette motion. Ce serait très difficile à faire, mais nous n'aurions d'autre choix que de le faire.
[Traduction]
M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur d'en être à mon troisième mandat à la Chambre. J'ai toujours estimé que cela était le plus grand honneur que j'aie eu dans ma vie.
J'ai toujours considéré que la Chambre constituait le conseil d'administration du pays, la salle du conseil du Canada. C'est la salle où nous nous réunissons pour tâcher de bâtir un Canada meilleur. Monsieur le Président, vous êtes le président de ce conseil d'administration. Il ne s'agit pas du conseil du premier ministre, ni du conseil du Parti libéral, ni du conseil du Bloc québécois. Il s'agit du conseil d'administration du Canada.
Depuis six ans, il y a quelque chose de différent à la Chambre. Dans le cadre du processus démocratique, des députés dûment élus de la province de Québec sont venus ici pour dire qu'ils n'y sont pas pour bâtir le Canada mais pour entamer l'édification d'un pays séparé appelé Québec. Il y a eu des moments où j'ai trouvé très difficile de m'adapter à cette situation, mais j'ai toujours tâché de mon mieux de travailler avec les députés du Bloc québécois dans certains dossiers sociaux où j'estimais que nous étions sur la même longueur d'onde et où ils ont accompli du bon travail pour le bien du Canada tout entier.
La semaine dernière, au cours du débat sur le projet de loi C-20, le Bloc québécois a proposé un millier d'amendements.
Si vous aviez été équitable, monsieur le Président, vous en auriez déclaré un grand nombre irrecevables. Vous avez soumis tout le conseil d'administration du Canada à l'exercice du droit de ces députés de présenter toutes leurs motions. Pour résumer, je tiens à dire que cette décision a ratifié votre équité envers la Chambre et que je continue de vous appuyer.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je voudrais dire deux choses par rapport à l'intervention de mon honorable collègue. Tout d'abord, je pense qu'il n'est pas tout à fait exact et qu'il n'est pas tout à fait correct de prétendre que les députés du Bloc québécois ne sont pas ici pour construire un meilleur Canada. Nous sommes ici pour, bien sûr, faire la promotion de la souveraineté du Québec, c'est notre motivation fondamentale. Mais nous sommes également ici pour défendre les intérêts des Québécoises et des Québécois à l'intérieur du Canada, dans l'intervalle qui nous sépare de la souveraineté.
Et jamais il ne nous est venu à l'idée de faire en sorte que le Canada soit un moins bon pays et que nous ayons à contribuer à faire en sorte que le Canada soit un moins bon pays, parce que nous voulons maintenir des liens très étroits avec le reste du Canada et nous n'avons aucun avantage à faire en sorte que le Canada ne soit pas, ou qu'on veuille présenter le Canada comme n'étant pas un bon pays.
Cela étant dit, sur la question elle-même de notre collègue, je pense qu'il mêle un certain nombre de choses lorsqu'il vous dit que vous avez fait preuve d'équité et de justice en acceptant un certain nombre d'amendements, quelque 300 amendements du Bloc québécois, au projet de loi C-20. Mais comment auriez-vous pu faire autrement que d'accepter ces propositions d'amendement? De quel droit auriez-vous pu refuser des amendements tout à fait acceptables et recevables? Tout simplement parce qu'ils viennent du Bloc québécois? Cela aurait été le seul argument qui vous aurait permis de les refuser?
Je ne fais pas référence à ceux que vous avez dûment acceptés, en dépit des évaluations tout à fait subjectives et partisanes que certains collègue peuvent en faire. Je ne parle pas de cela. Je parle de ceux qui ont été refusés sans même avoir été déposés, et ceux qui ont été refusés, qu'on a corrigés, à la suggestion même des gens qui les avaient refusés, et qui nous ont été de nouveau refusés.
Alors, s'il ne peut pas comprendre cela, au lieu de hurler, il devrait peut-être écouter.
[Traduction]
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement l'intervention du député bloquiste. Je suis souvent en désaccord avec ce qu'il dit à la Chambre, mais cette fois-ci je l'approuve et voterai probablement en faveur de la motion. Il ne s'agit pas ici d'une question partisane. Je crois que nous devons l'examiner dans cette optique, parce que le Président de la Chambre...
Des voix: Oh, oh!
M. Garry Breitkreuz: Je renvoie ceux qui font des sifflets à mon intervention précédente. J'aimerais faire une proposition utile.
Le greffier de la Chambre et le légiste et conseiller parlementaire sont tous deux nommés par le gouvernement, par décret du gouverneur en conseil. Ils sont nommés par le Cabinet du premier ministre. À mon avis, ces postes devraient être comblés de la même façon que le poste de Président de la Chambre. Les noms des candidats pourraient être soumis à la Chambre et approuvés à une majorité des deux tiers des voix.
J'aimerais savoir si mon collègue bloquiste trouve un aspect positif dans ma proposition. La confidentialité et le secret professionnel des avocats sont en cause ici et posent un problème au Président. Je crois faire ici une suggestion positive et je pense que nous devons régler certains de ces problèmes.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, mon collègue du Parti réformiste vient de soulever une question fort importante.
Effectivement, dans ce pays qui se veut un modèle de démocratie, mais qui a bafoué comme on ne l'a jamais fait la démocratie parlementaire pour faire adopter un projet de loi nébuleux sur la clarté, un projet de loi visant à protéger les Québécoises et Québécois contre eux-mêmes, selon les dires du gouvernement d'en face, nous avons dans ce pays qu'est le Canada un système démocratique pour le moins étrange, en ce sens que le directeur général des élections est nommé par le parti au pouvoir, les directeurs de scrutin dans chacune des circonscriptions du Canada sont nommés par le parti au pouvoir, et le Greffier et le greffier principal adjoint de la Chambre sont nommés par le parti au pouvoir.
Il y a un certain nombre de responsables d'agences gouvernementales qui sont également nommés par le parti au pouvoir. Mais, dans certains cas, le parti au pouvoir a la décence de faire semblant de consulter les formations politiques en cette Chambre. En tient-il véritablement compte? Ça, c'est une autre question. Mais au moins, il y a une consultation.
Peut-être serait-il maintenant temps d'entreprendre des consultations plus poussées avec les différentes formations politiques de la Chambre pour la nomination des principaux officiers de cette Chambre.
M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, j'ai un bref commentaire à faire. Si on a le temps, certains de mes collègues interviendront sur la motion comme telle.
Monsieur le Président, vous pouvez dormir tranquille, je n'ai rien entendu de grave à votre sujet ou à l'endroit de la Présidence. Pour une motion aussi importante, utilisée très rarement dans un parlement, ce n'est pas fort. Je pose la question à mon honorable collègue du Bloc québécois par votre entremise: en anglais on dirait «where is the beef?» par rapport à la motion qui concerne la Présidence.
J'ai beaucoup de respect pour le whip, et il a fait un bon discours. Effectivement, il y a une problématique qui a été soulevée que personne ne pourrait nier, mais de là à faire la relation avec vous, dans une motion aussi extraordinaire qui a préséance sur tout, j'aimerais que le whip m'explique, ainsi qu'à ceux qui nous écoutent et qui appellent à mon bureau: «Qu'est-ce qui se passe présentement?
Je demande au whip de m'éclairer.
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, en réponse au commentaire de mon collègue du Parti progressiste-conservateur, je voudrais dire que je trouve que son intervention n'était pas très forte non plus.
Il devrait savoir, ce qui ne semble pas être le cas, que les députés des partis d'opposition ont fort peu de recours en cette Chambre. J'entendais le leader parlementaire du Nouveau Parti démocratique dire ce matin: «Oui, le problème soulevé par les députés du Bloc québécois est sérieux, mais ce n'est pas la bonne solution.»
Je suis d'accord avec lui. On a proposé une autre solution avant ça. On a proposé de renvoyer toute cette question au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre et le Président a dit non. Que nous reste-t-il comme pouvoir après ça?
Il n'y a pas d'autres solutions pour nous, parlementaires, membres d'un parti de l'opposition, une fois que le lien fondamental de confidentialité et de confiance avec certains membres du personnel de la Chambre est rompu et que le Président dit que tout cela est correct, qu'il n'y a pas de problème, qu'on n'en parlera pas et qu'on n'essaiera pas de trouver une solution, que de dire que le Président, selon nous, n'a pas rendu une bonne décision et que, conséquemment, nous ne pouvons avoir confiance en la décision qu'il a rendue.
Que nous reste-t-il comme pouvoir? Peut-être que le très brillant et très éminent collègue de Richmond—Arthabaska saura me trouver une réponse parlementaire à cette question.
[Traduction]
M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet de la motion dont nous sommes saisis et j'aimerais ramener le débat sur la motion elle-même. Je partagerai mon temps de parole avec le député de Brossard—La Prairie. La motion no 59, présentée par le député de Laurier—Sainte-Marie, stipule:
Que cette Chambre décide qu'elle n'a plus confiance en son Président puisqu'elle considère qu'il a fait preuve de partialité en jugeant non fondée la question de privilège soulevée par la députée de Rimouski—Mitis le mercredi 1er mars 2000, et en rejetant le rappel au Règlement du député de Beauharnois—Salaberry au détriment des droits et privilèges de tous les députés et députées de cette Chambre.
La motion de censure à l'égard du Président de la Chambre repose donc sur deux éléments. Il y a d'abord la déclaration selon laquelle «cette Chambre décide qu'elle n'a plus confiance en son Président [...] au détriment des droits et privilèges de tous les députés et députées de cette Chambre». Je réponds sans équivoque que vous avez toujours eu ma confiance, monsieur le Président, me s'il est arrivé de temps à autre que je ne sois pas d'accord avec votre interprétation des règles et vos décisions en la matière. De plus, j'affirme avec autant de confiance que mes droits et privilèges n'ont pas été touchés de façon négative.
Je souscris à votre décision du 13 mars sur la question de privilège soulevée le 1er mars par le leader parlementaire adjoint du Bloc québécois. C'est cette décision de votre part, monsieur le Président, dont on se sert notamment pour appuyer la motion de blâme dont nous sommes saisis. Le Bloc québécois n'a sans aucun doute pas apprécié particulièrement votre décision, mais je prétends que le fait qu'on n'aime pas une décision ne veut pas dire que vous avez fait preuve de partialité lorsque vous avez rendu votre décision.
Si on acceptait cette motion de blâme en fonction de cela, on souscrirait en fait à une contestation de votre décision, chose qui est clairement interdite par le Règlement de la Chambre. Je vais lire ce qu'on dit à l'article 10 du Règlement de la Chambre des communes, à la page 6:
L'Orateur maintient l'ordre et le décorum et décide des questions d'ordre. En décidant d'une question d'ordre ou de pratique, l'Orateur indique l'article du Règlement ou l'autorité applicable en l'espèce. Aucun débat n'est permis sur une décision de ce genre, qui ne peut faire l'objet d'aucun appel à la Chambre.
Accepter cette motion de blâme à partir de cela reviendrait à dire, en fait, que la députée de Rimouski—Mitis qui a soulevé au départ la question de privilège avait une impartialité et une sagesse supérieures au Président.
Je prétends que vous continuez à avoir une compétence et une sagesse supérieures. Je crois aussi que vous avez toujours été impartial. Pour ces motifs, je prétends en toute déférence que la motion de blâme dont nous sommes saisis est sans fondement et devrait être rejetée.
Je tiens à dire à mes collègues, par votre entremise, monsieur le Président, que cette approche peut-être non intentionnelle de la part du Bloc québécois de recourir à cette motion, même si cela constitue une façon imaginative de reprendre le débat sur le projet de loi sur la clarté qui a été adopté en troisième lecture à la Chambre hier et qui a maintenant été renvoyé au Sénat, même si c'est un moyen d'attirer l'attention sur d'autres questions, conteste la décision du Président, le serviteur de la Chambre. Il est clair que le fait de permettre cela violerait notre Règlement.
Le Règlement est là et vise à maintenir le décorum et la dignité à la Chambre. Sans cela, ce serait le chaos. Pour ces mêmes raisons, la Chambre devrait rejeter le second point de la motion de censure en rejetant le rappel au Règlement du député de Beauharnois—Salaberry. En effet, l'auteur de la motion de censure a déclaré, en ouvrant le débat, que nous devrions réexaminer cette décision. Cela indique clairement une intention de contester la décision.
J'aimerais rappeler, monsieur le Président, quelle était votre décision sur la question, telle qu'on peut la lire à la page 4376 du hansard du 13 mars:
En l'occurrence, je note que cette confidentialité aurait été respectée et que le texte des motions proposées par l'honorable députée ou par son parti n'a pas été communiqué à des personnes à l'extérieur du secteur du soutien législatif ou à d'autres députés. L'information confidentielle appartenant au Bloc québécois et à certains de ses membres est demeurée complètement et strictement confidentielle. En conséquence, il m'est impossible de trouver qu'il y a matière à question de privilège ou que ce geste constitue un outrage à la Chambre.
Votre décision était juste et impartiale et elle mérite l'appui et la confiance de tous les députés selon les meilleures traditions de notre démocratie parlementaire et conformément à l'article 10 du Règlement. Une décision du Président ne devrait pas faire l'objet d'un appel à la Chambre.
J'aimerais maintenant examiner l'argument soulevé par le chef du Parti réformiste à la Chambre dans le débat sur la motion de censure dont nous sommes saisis. Il a déclaré que la motion de censure n'était pas une question de confidentialité, ni de performance des greffiers et du conseiller législatif de la Chambre. Le leader parlementaire du Parti réformiste a poursuivi en prétendant que la motion de censure résultait du fait que le gouvernement s'était trompé sur le compte du Bloc en ce qui concerne le projet de loi C-20.
Le whip du Parti réformiste soutient également qu'il devrait y avoir un vote libre étant donné que nous déterminons la confiance que nous accordons au Président en nous fondant sur son rendement depuis qu'il a été élu à la présidence il y a quelques années par la Chambre.
Permettez-moi de rappeler à mes collègues que la motion de censure sur laquelle nous devons voter est très précise quant aux deux éléments sur lesquels nous devons nous prononcer. Ce sont la décision du Président, à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure, ainsi que le moment où a été rendue la décision mentionnée auparavant au sujet de la question de privilège et du rappel au Règlement, soit aux alentours du 1er mars 2000.
Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il serait malavisé de fonder son vote sur une période allant au-delà de celle qui est précisée dans la motion de censure. Ce serait de la témérité de la pire espèce dans la tradition de la démocratie parlementaire. Ce serait de la vindicte. Ce serait une caricature de notre conscience humaine.
Je terminerai en citant The Procedure of the House of Commons de Joseph Redlich. Voici ce qu'il dit de la question d'un vote de censure à l'endroit du Président:
Il y a à peine lieu de préciser qu'une telle situation est anormale et se produit très rarement et que la Chambre ne recourrait à une telle motion que si les circonstances le justifiaient pleinement... Elle semblerait sérieusement saper le poste illustre et la dignité du Président si, outre le fait qu'elle prête flanc à la contestation de son application du Règlement dans des occasions spéciales importantes, elle permettait à chaque député de remettre en question l'autorité du Président quand il le veut, et si ce dernier pouvait en tout temps être appelé à défendre la justesse de ses décisions.
Je lance un appel à mes collègues. Faisons preuve d'une diligence et d'une prudence raisonnables. Votons en nous fondant sur la raison, sur nos règles et règlements établis et sur la sagesse. Faisons appel à notre bonne volonté. Je vous rappelle que c'est grâce à l'électorat canadien que nous sommes ici à la Chambre. Utilisons notre présence ici avec sagesse, de façon à ce que les générations actuelles et futures puissent être fières de notre comportement dans cette Chambre sacrée. Monsieur le Président, je continue d'avoir confiance en vous.
[Français]
M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.): Monsieur le Président, le débat actuel porte sur une motion de censure, de non-confiance, à l'endroit de la Présidence. Cette motion émane du Bloc québécois.
Or, de nombreuses déclarations faites par mes collègues du Bloc m'inciteraient à croire que cette initiative n'est qu'un prétexte pour continuer à débattre d'un projet de loi dont la Chambre a déjà disposé. Un projet de loi dont je considère qu'il renforce mes droits, mes prérogatives et mes obligations à titre d'élu de ce Parlement. Un projet de loi éminemment démocratique, n'en déplaise à mes collègues d'en face.
Il y a quelques secondes à peine, le whip du Bloc québécois arguait qu'il était là pour défendre les intérêts des Québécois. Cela tombe bien, moi aussi.
Mon propos n'est pas de refaire un débat terminé dans le respect absolu de toutes nos règles démocratiques et parlementaires, mais plutôt de relier cette question politique à la motion qui est devant nous aujourd'hui.
Je m'explique. Dans l'allocution qu'il prononçait ce matin, le chef du Bloc disait, et je cite: «Le premier ministre veut arriver au congrès de son parti avec le projet de loi C-20, le projet de loi sur la clarté, dans ses poches plutôt que des scandales dans la face.» Je croyais que l'on débattait de la Présidence, non du premier ministre.
Ce même député déclarait en outre, à propos de la Présidence, et je cite encore une fois: «Je ne dis pas qu'il y a malveillance, je dis qu'il y a un problème.» Mais déposer une motion de non-confiance à l'endroit de la Présidence, c'est affirmer qu'elle a manqué d'intégrité, qu'elle a été malveillante. La contradiction même dans les termes du chef du Bloc est flagrante.
Son motif n'est donc pas la qualité de la Présidence mais plutôt la bataille politique. La motion de non-confiance à l'endroit de la Présidence n'est qu'un instrument au service d'une cause politique.
Alors comment peut-on encore se réclamer de la démocratie quand on est prêt à détourner, pour des fins politiques, le symbole même de cette démocratie qu'est le Parlement du Canada, et donc sa Présidence?
Le député de Joliette a renforcé encore ce matin cette impression extrêmement désagréable où, pour le Bloc, la fin semblerait justifier les moyens. Le député de Joliette a dit, et je le cite: «Ce n'est pas un manque de confiance envers le Président.»
Ce n'est pas un manque de confiance envers le Président, mais on propose une motion de non-confiance à l'endroit du Président. C'est l'incohérence faite homme.
On peut contester, bien sûr, les décisions de la Présidence, mais je ne crois pas que ce soit là une raison pour contester son intégrité. Notre Parlement est une institution éminemment respectable, mais elle est le produit d'êtres humains. Elle est gérée par des êtres humains. Elle est donc faillible. Elle est donc perfectible, par définition même.
Parmi les nombreuses responsabilités dont nous héritons quand nous avons le privilège d'être élus, il y a celle de constamment viser à l'amélioration de notre institution dans le respect de tous les députés qui la composent, dans la dignité et au-dessus du simple débat partisan.
Nous venons de passer près de 40 heures à voter sur des amendements. Indépendamment de leur contenu, cette démarche est absolument insensée. C'est la deuxième fois en quelques mois que tous les députés sont pris en otage. Certainement que le fonctionnement de notre institution est perfectible.
Le droit, pour les parlementaires, pour tous les parlementaires, de délibérer, est un droit fondamental. Mais de retarder systématiquement les travaux de cette façon n'est pas un droit. Il s'agit d'une pratique, une pratique qui révèle d'énormes faiblesses, une pratique, pas un droit, une pratique qu'il faut beaucoup mieux encadrer.
Si l'on me parle de réfléchir à un meilleur fonctionnement de cette Chambre, je dis oui. Si l'on me parle de réfléchir à la préservation des droits démocratiques de tous les parlementaires en cette Chambre, je dis oui. Mais si l'on me dit que pour ce faire, il faille censurer la Présidence, alors là, je dis non.
Ce matin, le député de Roberval exprimait son respect de l'institution canadienne. Je l'invite, dans cet esprit-là, à contribuer au retrait de cette motion qui ne sert personne et qui n'est pas propice au respect et à la dignité de la Chambre des communes et de sa Présidence. À défaut de se faire, je n'aurai pas le choix, par intégrité et par respect de l'institution, que de voter contre cette motion.
[Traduction]
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je dirai d'abord et avant tout que je tiens à ce que nos collègues du Bloc comprennent que nous voulons que les Québécois fassent partie du Canada. Nous savons que la situation est très émotive, vraiment, mais je tiens à dire que nous, de notre parti, avons beaucoup de respect pour vous, monsieur le Président. Je ne peux pas croire qu'on propose à la Chambre une motion de blâme contre vous, monsieur le Président, contre un de nos greffiers ou contre un de nos gens. Je ne peux pas le croire.
Je comprends que la situation soulève les passions. Je comprends qu'il y a un long débat, qu'il y a eu un long débat et qu'il continuera certainement à y avoir un long débat à l'avenir. Mais nous tenons à ce que vous sachiez, monsieur le Président, que nous vous respectons.
Personnellement, je puis dire que lorsque nous n'étions que deux de mon parti, soit Jean Charest et moi-même, je ne serais probablement jamais restée si cela n'avait pas été de vous, monsieur le Président. Vous m'avez encouragée à rester en me rappelant que mes gens m'avait élue, et vous m'avez traitée avec justice. Vous nous traitez tous avec respect. Voilà de quoi il retourne. Oui, s'il y a eu une erreur et si nous n'approuvons peut-être pas toutes vos décisions, c'est la vie. Vous n'approuvez pas vous-même toutes les questions que nous posons et je peux comprendre cela.
Voilà certes de quoi tout cela retourne. C'est le processus démocratique qui veut cela et nos collègues doivent le comprendre.
Je demande à nos collègues de retirer cette motion de blâme. Cette motion n'est pas la chose à faire. Je leur demande d'y songer tout de suite. Oui, nous voulons qu'ils puissent participer au débat. Ils auraient peut-être dû pouvoir débattre des 1 000 amendements, mais je ne puis pas être d'accord avec la présentation d'une motion de blâme contre la présidence. Je n'y donnerai pas mon accord, et mes collègues non plus. Je leur demande de retirer la motion.
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, je suis d'accord avec ma collège de Saint John et tous les autres membres de mon caucus. Nous vous appuyons.
Nous reconnaissons que ce débat résulte avant tout de la frustration que ressentent les députés bloquistes concernant le projet de loi C-20. Nous convenons tous de la sensibilité du Bloc à l'égard de cette question. Elle s'est manifestée tout au long du débat sous la forme d'irritation, entre autres. Cette irritation a atteint un degré élevé. Je suis d'avis que la motion découle de cette irritation, ni plus ni moins.
C'est cette même irritation que nous ressentons tous, et je sais que vous, monsieur le Président, l'avez ressentie quand vous étiez simple député. J'ai eu l'occasion aujourd'hui de revoir votre carrière de parlementaire. Vous êtes comme n'importe lequel d'entre nous. Vous avez travaillé pour être à la Chambre et y représenter vos électeurs. Je pense que vous avez fait un excellent travail.
J'ai siégé avec vous au cours d'une autre législature, monsieur le Président. Je suppose que nous avons beaucoup en commun. Nous savons ce que c'est que d'être simple député du côté du gouvernement. Selon mon expérience, il est probablement plus frustrant d'être simple député du gouvernement que d'être simple député de l'opposition. C'est un travail frustrant, peu importe le côté où l'on siège.
Ce que nous avons en commun, vous et moi, c'est que nous avons travaillé pour être ici. Vous n'étiez pas à la Chambre pendant un mandat après votre défaite aux élections générales de 1984, quand votre parti n'était pas très populaire. Je ne pense pas que c'était une défaite personnelle, mais vous avez eu le courage de vous présenter de nouveau et vous êtes revenu à la Chambre. J'ai fait la même chose en 1993. J'ai été défait, mais je suis revenu à la Chambre en 1997. Peu de gens peuvent faire cela. La plupart d'entre nous ne livrons pas cette lutte pour gagner notre place ici, notre droit de siéger à la Chambre et de défendre les intérêts de nos électeurs, de défendre nos convictions.
Dans la plupart des cas, je pense que nous nous en sortons relativement bien. Comme l'ont rappelé les différents députés tout au long de la journée, notre pays est l'un des rares où règne une véritable démocratie. Nous aurions probablement assez de nos dix doigts pour compter les véritables démocraties du monde. Il n'y a qu'une poignée de pays dans cette situation. Ils sont très peu nombreux. Tous les soirs, aux informations, il est question de pays où règne la guerre civile, où les décisions sont prises à la pointe du fusil et où il n'y a pas de véritable démocratie.
Nous avons tout lieu d'être fiers de notre institution. Chez moi, ma femme, ma famille, mes enfants sont parfois découragés devant nos agissements dans cette enceinte. Cela date de l'époque à laquelle vous, moi et tous les autres avons été élus à la Chambre.
Nous exerçons un dur métier. Nous avons pour seule arme la parole. Il arrive que nous ayons des exercices. J'ai moi-même de l'entraînement, parce que nous défendons nos convictions.
Il nous arrive de ne pas être d'accord les uns avec les autres, et vous, monsieur le Président, en avez été témoin plus d'une fois. Nous nous en prenons à un ministériel ou vice versa, et, quand c'est terminé, nous sortons de cette enceinte, nous nous serrons la main ou nous donnons une tape sur l'épaule, et nous nous y remettons dès le lendemain, car c'est la tradition et nous la respectons. Nous utilisons comme il se doit le droit d'agir de la sorte dans cette enceinte.
Monsieur le Président, vous n'êtes qu'un arbitre. Vous avez hérité de la mission la plus difficile à la Chambre. Il n'est pas aisé d'être premier ministre. Il n'est guère plus aisé d'être le chef de l'opposition, ou le chef du quatrième ou cinquième parti de la Chambre. Mais c'est plus facile que présider nos débats. Nous vous choisissons comme arbitre de cet endroit et nous exigeons que vous soyez parfait. Nous espérons que vous allez toujours prendre la décision que nous attendons. Nous voulons toujours avoir raison, mais c'est rarement le cas et vous, monsieur le Président, simple mortel, vous faites de votre mieux pour arbitrer dans ce contexte délicat. Jour après jour, vous y parvenez aussi bien que tout autre président avant vous, y compris le président Fraser que vous respectez énormément et que j'ai vu à l'oeuvre car j'ai siégé durant sa présidence.
Vous êtes élu par les députés. J'ai été élu par les gens de ma circonscription et mon mandat est de prendre la parole en cette enceinte pour dire ce que je pense. Ils m'ont donné le droit et le privilège de parler en leur nom. Nous vous avons accordé le privilège, si l'on peut dire, d'occuper le fauteuil et d'arbitrer les échanges intenses de ce forum.
Vous avec entendu aujourd'hui des propos que je n'aurais peut-être pas pu endurer. En fait, je sais que je n'aurais pas pu le faire.
Une voix: Vous en auriez été incapable, je vous l'assure.
M. Greg Thompson: Monsieur le Président, le président de notre groupe parlementaire me dit souvent que si je n'aime pas ce qu'il fait, je peux prendre sa place, mais je ne le pourrais pas. Ma personnalité ne se prête pas à une tâche d'arbitre.
Monsieur le Président, vous êtes sans défense. Ici, nos armes sont nos paroles. Nous dépassons parfois les limites en employant des mots non parlementaires ou en lançant des flèches à gauche et à droite. Votre tâche n'est donc pas facile; on voudrait que vous soyez parfait, mais personne n'est parfait.
Certains débats tenus à la Chambre au fil des ans ont mis les présidents dans l'embarras. Durant le débat sur le pipeline, en 1956, une motion semblable à celle d'aujourd'hui a été présentée et a eu un effet désastreux pour le décorum parlementaire et le rôle du président.
On se rappellera de l'étude du projet de loi omnibus qui a créé le Programme énergétique national. La sonnerie s'est fait entendre pendant 16 jours. Le Président de la Chambre s'est retrouvé dans une position très problématique. À ce moment-là, il y avait du mécontentement de ce côté-ci de la Chambre. Le Parti conservateur a eu recours à cette arme, et le timbre a sonné sans arrêt pendant 16 jours. La question a été finalement réglée.
Cet incident est survenu à cause de l'exaspération ressentie de ce côté-ci de la Chambre. Les députés ont utilisé le Règlement afin de transmettre leur message. Nous l'avons vu à la Chambre à quelques reprises. Au cours du débat sur le traité relatif aux Nisga'a, le Parti réformiste a présenté une multitude d'amendements, forçant la Chambre à voter nuit et jour pendant 48 heures, mais le projet de loi a tout de même été adopté.
De toute évidence, le Bloc a recouru à la même tactique cette semaine pour le projet de loi C-20. Il a présenté quelque 400 amendements sur lesquels il nous a fallu voter pendant 36 heures.
Il a eu recours à des tactiques qui se sont finalement retournées contre lui. Mais je pense qu'il n'aurait pas dû s'en prendre à la présidence. Il a recours au Règlement tel qu'il existe. S'il y a une lacune dans le Règlement, c'est, je suppose, qu'il y a trop de choses à l'ordre du jour, ce qui rend possible l'erreur humaine, et qu'on surtaxe la capacité législative des greffiers, qui doivent faire respecter la procédure et s'occuper des questions dont la Chambre est saisie.
Nous devons rendre compte. L'erreur humaine ne sera jamais complètement supprimée. Nous ne sommes que mortels. Nous sommes tous humains.
Monsieur le Président, nous vous appuyons. Je pense que la Chambre vous appuie et que cette question figure à l'ordre du jour uniquement à cause de l'insatisfaction de ceux qui l'ont présentée, ni plus ni moins. Nous voulons que vous conserviez votre poste. En fin de compte, je pense que vous constaterez qu'une forte majorité de députés vous appuie.
[Français]
M. Eugène Bellemare (secrétaire parlementaire de la ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, j'ai un commentaire concernant la motion de censure présenté à l'endroit du Président de la Chambre.
Je dois d'abord vous dire que je vous ai toujours reconnu comme étant une personne distinguée, excessivement polie à la Chambre, juste, impartiale et faisant preuve de sagesse.
J'imagine que les députés du Bloc québécois étaient excessivement frustrés concernant le projet de loi C-20 qui parlait de clarté.
M. René Laurin: Cela n'a rien à voir.
M. Eugène Bellemare: J'aimerais démontrer que lorsque vous avez refusé certains amendements des députés du Bloc québécois vous avez sûrement fait preuve de sagesse.
Je n'ai pas la liste des amendements que vous avez refusés, mais si je me fie à ceux que vous avez acceptés, j'aimerais en citer quelques-uns pour démontrer à quel point le Bloc québécois était ridicule.
Des amendements disaient: «Que la présente loi entre en vigueur le 1er février 2005»; «Que la présente loi entre en vigueur le 1er avril 2005»; «Que la présente loi entre en vigueur le 1er mai 2005»; «Que la présente loi entre en vigueur le 1er juin...»
Mme Suzanne Tremblay: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai demandé si quelqu'un voulait poser une question ou faire un commentaire. Un seul député s'est levé, soit le député de Carleton—Gloucester, et je l'ai reconnu. Peut-être y en avait-il d'autres. Comme il reste cinq minutes, j'allais lui donner deux minutes et demie et deux minutes pour la réponse, parce qu'il n'y avait personne d'autre qui s'était levé.
Pour cette raison, il lui reste environ 26 secondes.
M. Eugène Bellemare: Monsieur le Président, je ne pourrai jamais terminer en 26 secondes, mais je comprends bien les sautes d'humeur d'enfants gâtés du Bloc québécois.
Des voix: Oh, oh!
M. Eugène Bellemare: Ces amendements disaient donc: «Que la présente loi entre en vigueur...»
Mme Suzanne Tremblay: Un instant! Ça va faire les niaiseries! Le député doit arrêter de nous insulter, et tout de suite à part de cela.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.
[Traduction]
M. Greg Thompson: Monsieur le Président, je ne sais trop quoi répondre à cela si ce n'est que nous sommes devant un cas qui illustre parfaitement bien à quel point votre travail peut parfois être difficile.
J'espère que nous pouvons mettre fin au débat de manière civilisée. Je sais que les esprits sont échauffés. Il a été très sage pour la Chambre de tenir ce débat aujourd'hui, ce qui permet d'évacuer un peu la vapeur.
Dans les familles, les organisations et les entreprises, nous savons que l'on s'occupe des problèmes lorsqu'ils surgissent. Ce qui est bien dans ce débat, c'est que tous les députés, bloquistes, libéraux, conservateurs, néo-démocrates et réformistes peuvent prendre la parole et exprimer le fond de leur pensée, avant de reprendre les travaux de la Chambre.
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui avec fierté et avec aussi une certaine déception. Je suis sûr qu'il y a beaucoup de députés qui savent que je vous connais depuis très longtemps, probablement depuis plus longtemps que quiconque à la Chambre. Je vous ai connu lorsque vous étiez enseignant et administrateur. Je vous ai côtoyé lors de nombreuses élections, y compris la première fois que vous avez été élu président de cette Chambre et la deuxième fois, quatre ans plus tard.
Monsieur le Président, je sais que vous êtes responsable de près de 1 400 employés, d'un budget important et de la gestion de la Chambre. Les greffiers et tout le personnel qui gravite autour d'eux pour assurer le bon fonctionnement de la Chambre relèvent aussi de vous.
Monsieur le Président, je reconnais que bien des fois vous avez rappelé la Chambre à l'ordre, non pas pour votre bien personnel, mais pour celui des députés. Souvent, vous nous avez demandé de revenir à l'ordre du jour.
Je sais que, personnellement, vous aimez accorder autant de liberté que possible aux députés et aux gens de la Chambre et qu'il arrive parfois que nous en tirions profit à notre désavantage.
Il est dommage que la députée d'Edmonton-Nord ne soit pas ici en ce moment, mais la députée de Saint John a souligné plus tôt que vous étiez personnellement un grand adepte de la démocratie et de la liberté. Vous appuyez, plus que quiconque, les moins favoris, les minorités et les partis ne comptant qu'un ou deux députés, pour que tout le monde ait la possibilité de parler, de prendre part au débat et de participer aux activités de cette institution. Vous le faites sans tenir compte des chiffres, mais en vous basant sur les personnes qui représentent une région, un district de ce pays. Je remercie la députée de Saint John de ses commentaires.
Vous avez tenté pendant des années d'améliorer le décorum à la Chambre en travaillant avec les députés de tous les partis pour rappeler la raison pour laquelle nous sommes ici, c'est-à-dire pour servir les Canadiens.
Lorsque vous étiez simple député, vous avez été appelé à présider bon nombre de comités, quel que soit le gouvernement au pouvoir, parce que les partis respectaient vos qualités et vos aptitudes à remplir adéquatement le mandat d'un comité.
À titre de Président, vous n'êtes pas ici pour favoriser un parti plutôt qu'un autre. Vous êtes ici pour promouvoir le débat. Je sais que vous insistez pour que les attaques soient portées contre les questions à l'étude et jamais à titre personnel.
Monsieur le Président, je sais que vous avez beaucoup de respect pour notre institution, la Chambre des communes. Je sais que vous croyez très fermement dans l'importance d'un bon débat et du travail d'équipe entre les divers partis et les services du greffier et dans la nécessité pour de nombreuses personnes de collaborer pour veiller à ce que la Chambre des communes fonctionne bien. Je sais que bien des fois, vous examinez les précédents à la Chambre et vous en servez comme guide. Vous protégez également notre merveilleuse institution non seulement pour aujourd'hui, mais pour demain et de nombreuses années à venir, dans le but de protéger notre pays, le Canada.
Monsieur le Président, des députés ont signalé aujourd'hui que vous avez tranché en faveur du Parti réformiste parfois et d'autres fois non. Je sais que cela s'applique au Bloc québécois également. Comme notre collègue de Saint John l'a déclaré, vous avez fait la même chose pour les autres partis. Des fois vous leur donnez raison et d'autres fois non. Il en va de même pour le gouvernement. Je crois que c'est la raison pour laquelle vous occupez le fauteuil.
Pour moi c'est justement parce que vous êtes impartial et respectez la Chambre et le Règlement de la Chambre, que nous voulons que vous restiez en fonctions. Monsieur le Président, c'est la raison pour laquelle je trouve cette motion de non-confiance tout à fait scandaleuse et très décevante. Même si certains ont dit que ce n'est pas une attaque personnelle contre votre intégrité, j'ai bien peur que ce soit le cas. Cela me déçoit beaucoup.
Je connais votre patience et votre équité, monsieur le Président. Je suis désolé et je voudrais probablement m'excuser du fait que l'opposition ait profité de l'occasion pour vous discréditer simplement parce qu'elle essaie de s'en prendre au gouvernement, sans raison valable.
Avant de conclure, j'ai oublié de mentionner que j'allais partager mon temps de parole avec mon collègue de Winnipeg—Sud.
Monsieur le Président, je voudrais que vous sachiez que j'ai pleinement confiance dans votre capacité de vous acquitter des fonctions de Président de la Chambre pour que nous, en tant que Canadiens, puissions représenter les 301 circonscriptions. Nous représentons les Canadiens et nous allons le faire au mieux de nos compétences en tant qu'êtres humains, dans l'intérêt de notre pays, le Canada.
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, j'admire le député de St. Catherines. Je crois qu'il a eu le comportement d'un bon député calme. Il a de toute évidence montré qu'il entretient une relation amicale avec le Président.
Selon moi, le problème concerne vraiment le conseiller législatif. Il est à l'origine de la question dont est saisie la Chambre. Le député pense-t-il que le conseiller législatif devrait être tenu au secret professionnel avec les députés dont il a obtenu des documents? Je crois qu'il s'agit d'un privilège très spécial, qui semble avoir un peu souffert en raison de cet incident.
Le député peut-il parler du secret professionnel des avocats dans le cas du conseiller législatif?
M. Walt Lastewka: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question et de ses observations.
Je ne suis pas avocat. Je suis par contre un bon équipier. Je sais que les greffiers, les conseillers législatifs et les conseillers juridiques doivent tous travailler ensemble pour le député, pour moi-même et pour tous les autres députés. Je crois que les discussions d'aujourd'hui et les commentaires qu'ont reçus nos greffiers, nos conseillers juridiques et nos législateurs nous auront rendus plus forts. Je crois que ces personnes doivent travailler ensemble pour que nous devenions plus forts.
[Français]
M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, il est difficile d'entendre les propos du député d'en face dans le contexte que l'on vit actuellement, puisque tout au long de son plaidoyer—je dis bien, tout au long de son plaidoyer—il a parlé de choses du passé.
Il a parlé de belles réalisations qui ont été faites, mais il a oublié une chose essentielle, c'est-à-dire de discuter de la question sur laquelle on se penche aujourd'hui. J'aimerais connaître son opinion là-dessus.
Depuis ce matin, les libéraux essaient de détourner le débat d'aujourd'hui. Ce débat est complètement indépendant de ce qui s'est passé hier soir lors du vote qui a été remporté par les libéraux.
Par contre, ce débat-ci s'inscrit dans le processus qui a mené au vote d'hier soir. Normalement, il aurait dû être fait avant l'adoption du projet de loi en troisième lecture. Toutefois, on sait quelle décision a été rendue. On a bulldozé la démocratie pour adopter le projet de loi C-20 de façon à ce que les libéraux puissent, en fin de semaine, se glorifier avec cette triste page d'histoire de la démocratie.
J'aimerais savoir du député d'en face s'il est d'accord pour qu'en l'an 2000, pas en 1940 ni en 1950, on ne puisse plus compter sur des gens qui doivent faire un travail équitable pour que ces données demeurent confidentielles et qu'elles ne soient pas mises entre les mains d'intérêts partisans.
[Traduction]
M. Walt Lastewka: Monsieur le Président, comme je le disais plus tôt, c'est ici que j'ai débuté ma carrière de parlementaire, en 1993. Au fil des années, j'ai appris à comprendre et à respecter le greffier, les greffiers au bureau, le conseiller juridique et le Président, parce qu'ils font ce qu'il faut pour cette institution et pour les Canadiens que nous représentons. Monsieur le Président, vous conservez toute ma confiance.
M. Reg Alcock (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à vous dire à quel point je suis heureux de participer à ce débat. Plus tôt ce matin, j'ignorais que la question figurerait à l'ordre du jour et j'ai dû faire des pieds et des mains pour pouvoir être ici. J'y tenais cependant, car j'accorde beaucoup d'importance à cette question.
J'ai été élu pour la première fois en 1988 à l'Assemblée législative du Manitoba, alors que notre parti ne comptait qu'un député à la Chambre. Puis, du jour au lendemain, nous sommes devenus l'opposition officielle, un peu comme cela s'est passé dans le cas du Parti réformiste. Nommé leader à la Chambre, j'ai dû apprendre et comprendre très rapidement le Règlement, la procédure, les précédents et l'histoire de la Chambre, pour bien en maîtriser les mécanismes.
J'écoutais, plus tôt aujourd'hui, la députée d'Edmonton-Nord livrer son discours et elle a fait, vers la fin, une observation intéressante lorsqu'elle a dit être préoccupée par le recul des droits démocratiques à la Chambre. Je ne me rappelle pas exactement les termes qu'elle a employés, mais c'était, en substance, ce qu'elle disait. Je suis d'accord avec elle. J'estime qu'il y a effectivement un problème. Il ne date pas d'hier. Cette situation dure depuis 30 ans. Certains, qui s'y connaissent mieux que moi, pourraient même remonter plus loin en arrière.
Je porte un intérêt particulier à la façon dont se font les communications dans le monde et j'attribue le problème actuel à la rapidité des progrès dans le monde et aux exigences auxquelles la Chambre est soumise. La Chambre a beaucoup résisté aux changements et cela nous a amenés, entre autres choses, à modifier certaines de nos façons de faire pour répondre aux exigences de rapidité du monde extérieur, mais sans procéder à une réforme intérieure de nos institutions. Je crois que nous devons le faire. C'est une question que j'étudie et sur laquelle j'écris. C'est une question dont je vais parler beaucoup plus. Je voulais juste la mentionner. Il se cache un enjeu important derrière cela.
Je suis secrétaire parlementaire du ministre des Affaires intergouvernementales et je me sentais mal à l'aise d'aller au comité et de proposer la motion d'attribution de temps pour ses travaux. Cela me mettait mal à l'aise. Je ne crois pas que ce soit la meilleure façon de faire dans une démocratie, mais je l'ai fait. Personne ne m'a dit de le faire, mais je l'ai fait.
Je me suis levé et j'ai voté pour l'attribution de temps chaque fois qu'elle était proposée, car je crois qu'il y a quelque chose qui cloche dans cet endroit. Cependant, si c'est la situation dans laquelle nous nous trouvons, si c'est la situation qu'on a créée et si c'est la situation que nous devons endurer, alors je vais appuyer les mesures que nous devons prendre en ce moment pour que cet endroit fonctionne.
Une des raisons pour lesquelles j'ai appuyé si fortement les députés du Bloc québécois, c'est qu'ils ont dit que cet endroit ne fonctionnait pas comme il le devrait. On ne disait pas: «Débattons ensemble des propositions pour voir si nous pouvons trouver un moyen constructif de bâtir un meilleur pays.» On disait plutôt: «Nous n'allons jamais accepter cela. Peu importe ce que vous faites, ce que vous dites, ce que vous proposez ou combien de temps vous vous acharnez. Cela ne changera rien. Tout ce que nous allons faire, c'est de l'obstruction.»
J'ai donc appuyé cela et j'ai fait des choses qui, je l'espère, permettront d'apporter une réforme au cours des deux prochaines années. Il faudra peut-être attendre plus longtemps. Notre estimé greffier aura une meilleure idée du temps qu'il faudra pour faire bouger le monstre. À mon avis, il y a lieu de procéder à une refonte du mode de fonctionnement de la Chambre.
Cela étant dit, je tiens à souligner à tous les députés qu'il n'appartient pas à la présidence d'y voir. C'est notre responsabilité. Nous devons le faire. L'arbitre n'énonce pas les règles du jeu.
Un autre aspect est à mon avis intéressant. Lorsque j'ai exercé les fonctions de leader parlementaire, c'était au sein d'une Chambre où le Président était nommé par le gouvernement, et on avait toujours le sentiment que celui-ci faisait réellement partie de l'autre équipe. Pendant la période au cours de laquelle j'ai fait partie de la Chambre, le Président était l'honorable Denis Rocan, que vous connaissez, je crois, monsieur le Président. C'est devenu un de mes bons amis car il était très impartial dans la façon d'exercer sa tâche, même s'il était nommé par le gouvernement au pouvoir.
Ce n'est pas ici le cas. Le Président est notre Président, non pas celui du gouvernement, mais bien celui de l'ensemble des députés. Nous l'avons élu. En réalité, si je me rappelle monsieur le Président, en 1993, vous vous êtes présenté contre des libéraux de sorte que vous avez été élu par nous tous. Des députés de tous les partis à la Chambre vous ont élu.
Je tiens à souligner aux députés d'en face que nous ne sommes pas d'accord avec tout ce que vous faites. J'ai entendu plus d'un député de ce côté-ci exprimer un peu d'agacement. Cela arrive. Comme le dit souvent le premier ministre, si la gauche est en colère contre nous et si la droite l'est aussi, c'est peut-être parce que nous faisons ce qu'il faut.
Il n'est pas facile de surveiller des gens fringants. Il n'est pas facile de faire fonctionner cet endroit car il faut s'en remettre à des perceptions. Il y a un ensemble de règles et de pratiques, mais le Président est apte à comprendre la Chambre sur le plan organique. Si je devais vous faire un reproche, monsieur le Président, ce serait celui d'avoir parfois accordé trop de latitude à un député pour se rétracter et de tenter de lui donner la possibilité de faire amende honorable après avoir transgressé le Règlement. Toutefois, je pense que chaque fois que vous avez agi de la sorte, vous l'avez fait parce que vous respectez la Chambre et ce qu'elle représente.
C'est un différend entre le Bloc et le gouvernement dans ce cas particulier. Nous ne nous attendons pas à ce que le Président règle ce différend. Tout ce qu'il peut faire, c'est jouer un rôle d'arbitre. Nous ne nous attendons pas à ce qu'il règle ces problèmes. Nous fixons les règles. La Chambre fixe les règles. Le pays fixe les règles à la Chambre. Ce n'est pas au Président à le faire.
J'espère, monsieur le Président, que nous aurons la possibilité ces prochaines années de débattre de l'évolution de la Chambre, de ses règles et de son fonctionnement.
Je n'ai que peu d'expérience dans ce domaine. Je tiens, monsieur le Président, à vous exprimer mon appui et mon entière confiance. Je regrette beaucoup que nous ayons à débattre de cette motion aujourd'hui.
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, je ne comptais pas venir à la Chambre cet après-midi. J'étais occupé à mon bureau, dans l'édifice de la Confédération, mais la télévision...
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je veux simplement savoir si le député est à l'étape du débat ou à celle des questions et commentaires?
Le Président: Il s'agit de questions et commentaires.
[Traduction]
M. John Harvard: Je suis à l'étape des questions et des observations. Monsieur le Président, j'ai entendu ce qui se disait et je suis venu faire une observation.
Premièrement, je voudrais dire que la Chambre doit savoir que je me considère comme un bon ami du Président. Lui et moi avons habité ensemble pendant cinq ans. Lui et moi partagions un condominium avec d'autres personnes à Ottawa. Je connais l'homme qui occupe le fauteuil. Je le respecte. Je le considère comme un ami personnel. Quand il a été élu à la présidence de la Chambre la première fois en 1993, j'ai voté pour lui. J'ai de nouveau voté pour lui en 1997. Je connais cet homme. Je sais qu'il est juste. Je le respecte. Je sais qu'il fait son travail aussi bien que quiconque.
En tant que député et en tant que son ami, ai-je toujours été d'accord sur toutes les décisions qu'il a rendues? Non. Je pense que mon ami, le Président, est parfois trop indulgent avec nous tous, je m'attendrais parfois à ce qu'il soit un peu plus sévère.
C'est un bon arbitre. Il arbitre bien. Je trouve très étrange que dans cette motion de censure figure la mention «partialité», que le bon Président soit accusé d'impartialité. Il n'y a pas une goutte de partialité dans ses veines.
Voici ce que je n'arrive pas à comprendre. Le Président a accepté 410 motions ayant trait au projet de loi sur la clarté. Qu'est-ce à dire? Pour ma part, j'en conclus que le Président a fait tout en son pouvoir pour accepter toutes les motions et tous les amendements recevables afin de permettre au Bloc québécois dans ce cas-ci, à l'opposition, le parrain de...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'aimerais entendre encore le député, mais je dois céder la parole au député de Winnipeg-Sud pour lui permettre de faire une observation.
M. Reg Alcock: Monsieur le Président, je vais être très bref. Je crois que la députée du Bloc québécois a aussi une question.
Je partage tout à fait les propos du député. C'est le député de Charleswood St. James—Assiniboia qui m'a présenté au Président et m'a conseillé quand j'étais à me demander qui je devrais choisir comme Président. C'était un vote tout ce qu'il y a de plus ouvert. Je me suis toujours félicité du choix que j'avais fait.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ce que je trouve troublant dans les propos du député, avec lequel j'ai travaillé et pour lequel j'ai beaucoup de respect, c'est qu'il ne parle pas de la question.
Je sais que son intelligence est assez grande pour qu'il reconnaisse qu'il y a une question, mais il a choisi de ne pas en parler, et cela me trouble. La question est qu'il y a eu un changement dans les rapports entre les députés et le conseiller législatif. C'est cela la question. C'est un changement dont on n'a pas eu connaissance.
C'est peut-être un changement fait de bonne foi, mais on a le droit de le considérer comme étant une atteinte à nos privilèges de députés, parce qu'on a le droit de savoir, quand on fait affaire avec un conseiller législatif, que ce soit sur un projet de loi privé ou quand on travaille sur des amendements dans un comité, on a le droit de savoir qu'il est le seul qui va en être saisi jusqu'au moment où l'amendement sera inscrit au Feuilleton.
[Traduction]
M. Reg Alcock: Monsieur le Président, la députée a raison. Elle a le droit de savoir, le droit de soulever la question de privilège et d'espérer une décision de la Chambre. C'est établi. Mais, mécontents de cette décision, les bloquistes agiront-ils désormais et systématiquement de la sorte? Quand on perd, perd et reperd, faut-il brûler le Président sur un bûcher? Je n'y comprends rien. C'est un problème concret qu'il nous incombe à nous, et pas au Président, de régler.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Macleod.
Il n'est pas aisé de participer à ce débat, et vous, monsieur le Président, mieux que quiconque, êtes à même de le comprendre. D'ailleurs, je le dis d'emblée, nous reconnaissons tous que votre situation est inconfortable du fait de ce débat. Je ne pense pas me tromper en affirmant que, pour la plupart d'entre nous, voire tous, nous vous apprécions beaucoup sur le plan personnel et que nous sommes vraiment désolés que cette motion ait été présentée.
La motion qui a malheureusement été déposée concerne un point bien précis et rend difficile à tous les partis de la Chambre de cerner avec exactitude l'objet du débat. La motion porte sur une décision concernant la question de privilège soulevée par une députée du Bloc et la décision de rejeter un rappel au Règlement soulevé par un autre bloquiste, et ce n'est que vers la fin qu'il est indiqué que cela s'est fait au détriment des droits et privilèges de l'ensemble des députés.
J'aurais aimé qu'on mette moins l'accent sur deux décisions spécifiques. Je suis d'accord avec les députés du côté du gouvernement et les autres qui ont très justement fait remarquer que si nous utilisons nos privilèges de députés pour présenter des motions simplement pour montrer notre mécontentement lorsque le Président ne statue pas en notre faveur, la Chambre ne pourra plus fonctionner. Ce serait totalement inacceptable autant pour les députés que pour la démocratie elle-même. C'est l'une des observations que je voulais faire concernant cette question.
On note, dans ce débat et dans les commentaires qui ont été faits, le sentiment que les députés n'ont peut-être pas entièrement confiance en votre impartialité, par moments, monsieur le Président. Je crois que de tels commentaires ont été faits. Je ne vous connais pas personnellement, mais étant donné les six années où j'ai eu affaire à vous, je sais que vous seriez plutôt enclin à prendre ces préoccupations très au sérieux. J'espère que vous les prendrez dans l'esprit même où elles ont été présentées et que vous voudrez bien examiner si elles sont quelque peu fondées, car, bien entendu, aucun de nous n'est désintéressé, n'est-ce pas?
Nous avons tous nos propres opinions et les députés ont des opinions très fortes. Nous ne craignons pas de les exprimer par moments. C'est pourquoi nous devons nous en remettre à vous, monsieur le Président, comme arbitre, pour faire preuve de sagesse, de grâce et d'équité afin de veiller à ce que les affaires de la Chambre soient menées avec crédibilité à nos yeux et à ceux de tous les Canadiens.
Nous ne sommes pas les seuls concernés. Vous n'êtes certainement pas le seul visé. Le débat concerne l'ensemble des Canadiens, notre démocratie et le Parlement. Nous sommes les acteurs d'un drame qui revêt une importance pour nous tous, dans un contexte plus général. Je sais que vous en êtes conscient, parce que je vous ai entendu parler et que je sais que vous connaissez fort bien l'histoire de notre pays et ses conventions parlementaires. Je pense toutefois qu'il importe de mentionner l'existence d'un certain malaise par rapport à l'équité et à l'impartialité, et je sais que vous prendrez cette question très au sérieux.
La question de privilège qui a été soulevée relativement aux conseillers législatifs me préoccupe moi aussi. Lorsque mon collègue, le député de Surrey, a soulevé cette question à la Chambre, j'ai aussi fait des observations à ce sujet. Je voudrais vous faire part des inquiétudes de nombreux députés par rapport aux conseillers législatifs. Elles sont de deux ordres.
Tout d'abord, à titre de professionnels, ils ont le droit et le devoir d'agir de manière à respecter le secret professionnel qui lie un avocat à son client sans craindre d'être pénalisés, de faire l'objet de censure ou de ne pas être traités équitablement s'ils insistent pour agir de la sorte. C'est extrêmement important, et je pense que la question ne devrait pas en rester là pour le moment. Il faut vraiment pousser plus loin l'examen de cette question afin de régler le problème.
L'autre élément important dans cette affaire—et je sais que vous connaissez mon opinion sur la question, mais je veux l'expliquer brièvement—est le volet de votre décision qui concerne le travail d'équipe. Je pense que, si un membre de l'équipe est un député qui possède de l'information capitale pour pouvoir s'acquitter de ses fonctions de parlementaire et que cette information est communiquée à d'autres à son insu et sans son consentement, l'argument du travail d'équipe ne tient absolument pas. En toute déférence, je pense que cet élément de votre décision ne m'a pas paru logique et je crois que c'est une question brûlante qui ne va pas disparaître. On doit la régler d'une façon équitable pour tout le monde.
En tant que députée qui vous respecte et respecte notre institution et la démocratie, je tiens à dire que la question qui a lancé le débat sur la motion d'aujourd'hui doit être abordée d'une autre façon.
Nous avons entendu de nombreuses opinions et vous avez de nombreux fervents défenseurs, ce qui est bon. Je suis persuadée que c'est très constructif pour vous, alors que vous évaluez ce débat. Il s'agit en fait de savoir si cette motion mérite l'appui des députés. Je tiens à dire que ce n'est pas une question partisane, certainement pas pour moi. Il n'est pas question de l'opposition ou du gouvernement, ni du Bloc ou du Parti réformiste ou de tout autre parti. Il s'agit en fait de savoir si nous sommes prêts à nous soumettre à votre autorité sachant que, dans une certaine mesure, c'est une décision qui ne peut pas être prise à la légère ou pour des motifs personnels.
Nous faisons tous partie d'un caucus, et nous sommes en désaccord avec nos collègues de temps à autre. Comme vous le savez bien, nous exprimons même parfois notre désaccord avec nos chefs. Ce doit être fait avec humilité, élégance et bon sens et de façon équilibrée, en tenant compte des besoins de l'organisation.
Votre rôle est absolument essentiel à la Chambre des communes. Nous apprécions que, dans bien des cas, vous agissez avec compétence, élégance et patience, en gardant votre bonne humeur. Selon moi, ce débat a peut-être permis de faire connaître certaines choses et de porter à votre attention peut-être certaines des préoccupations des députés. Je pense que les députés qui ont eu le courage de participer au débat doivent être félicités. C'est extrêmement difficile à faire à cause du grand respect que nous vouons à votre fonction et à vous-même.
Je tiens à dire que, même si cela a été un exercice parfois douloureux, cela a conduit à un débat sain et nous a permis d'apprendre certaines choses. J'espère que ces observations seront utiles aux députés et à vous-même dans le cadre de la question dont nous discutons.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, les députés ont soulevé une foule de points intéressants. Le député devrait se demander s'il vaut mieux que le Règlement soit appliqué à la lettre de façon tout à fait rigide en toutes choses ou que la présidence fasse preuve de souplesse, compte tenu que son objectif est que la Chambre travaille efficacement. Je pense que tous connaissent le dicton selon lequel il ne faut pas demander n'importe quoi, car on risque de l'obtenir.
Ce qui m'inquiète en tant que simple député, c'est que si nous continuons d'abuser des droits et des privilèges qui nous sont conférés à la Chambre, nous allons être forcés de faire des réformes et de resserrer le Règlement de sorte que les droits et privilèges des députés ordinaires s'en trouveront diminués.
Je demande simplement au député de dire si, en fin de compte, la décision de la présidence dans cette affaire a été sage et dans l'intérêt de la Chambre.
Mme Diane Ablonczy: Monsieur le Président, le député présente des arguments percutants. Cependant, je lui dirai que le mot rigidité est peut-être un peu trop fort. Lorsque des rappels au Règlement et des questions de privilège sont portés à l'attention de la présidence, les précédents sont toujours consultés. Le Beauchesne est cité dans presque tous les cas, tant par ceux qui soulèvent les questions que par le Président, lorsqu'il leur répond ou rend sa décision.
Il faut assurer une certaine cohérence. Nous ne pouvons pas faire les choses d'une manière un jour et d'une autre manière le lendemain au gré des circonstances. Il faut un certain ordre et il faut pouvoir justifier ce qui est fait.
Le député dit qu'il veut s'assurer que la Chambre peut bien fonctionner. À cela, je répliquerai simplement en lui demandant pour qui? Nous n'approuvons pas certains gestes posés par le Bloc, mais les bloquistes participent au processus démocratique et eux aussi doivent pouvoir compter sur le bon fonctionnement de la Chambre et l'application régulière des processus. Nous devons être justes à cet égard.
Le député m'a un peu fait peur lorsqu'il a dit que nous serions forcés de modifier les règles. Cela m'a paru être une menace à peine voilée. Compte tenu de la majorité du gouvernement et de certaines manoeuvres tentés par les ministériels ces derniers jours, peut-être n'était-ce pas une bonne idée d'évoquer de tels changements au cours du présent débat.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, ma question est très directe. Cette motion met expressément en doute l'impartialité du président qu'elle accuse d'avoir fait preuve de partialité dans une décision et probablement dans d'autres décisions. Autrement dit, on accuse le président d'être partisan parce qu'ici rien de ce qui est partial ne peut être autre chose que partisan.
J'aimerais demander à la députée qui vient d'intervenir si c'est vraiment ce qu'elle veut dire. En appuyant cette motion, veut-elle veut dire qu'elle a perdu confiance dans la capacité du président de se montrer impartial et si en fait elle l'accuse d'être partisan?
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, comme il le fait souvent, le député va droit au but. Ma réponse à cela est simple, je pense qu'il y a dans ce débat des signes indiquant que cette question d'impartialité cause une certaine gêne. Je l'ai dit dans mon intervention.
À mon avis, le Président n'a pas fait preuve d'un degré de partialité qui justifie un blâme total de la part de la Chambre. C'est pourquoi j'ai dit que, bien que ce débat soit positif, il est probablement trop limité à ce stade pour justifier que les députés votent en faveur de cette motion. J'espère avoir répondu à la question du député.
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, je suis également un peu peiné de devoir définir mon propre niveau de confiance face au président de cette Chambre. Je considère le président comme étant l'arbitre qui doit décider des règles à respecter.
Je me rappelle très bien que l'une des premières choses que j'ai faites lorsque je suis arrivé ici en 1993 a été de rencontrer les divers candidats au poste de président, dont vous-mêmes. J'ai eu la chance de m'entretenir avec vous d'une question que je considérais comme très importante. J'ai tenté de voir si vous seriez impartial ou non. Nous m'avez convaincu que c'était très important à ce moment-là. Je suis prêt à admettre que j'ai voté en votre faveur. C'était un vote secret et personne ne sait donc pour qui j'ai voté, mais c'est ce que j'ai fait.
Je dois avouer que je me sens un peu frustré face à certains des processus démocratiques de la Chambre récemment. Je n'ai pas apprécié tout le processus du débat, de l'attribution de temps et de la restriction imposée aux travaux des comités dans le dossier du projet de loi C-20, le projet de loi sur la clarté. Je crois que des erreurs ont été commises des deux côtés. Il y a eu de l'obstruction à la Chambre. Je ne sais pas comment j'aurais réagi à cette obstruction si j'avais été du côté du gouvernement. J'ai également constaté que certaines choses ont été faites précipitamment et plus durement que nécessaire.
En ce qui touche le fonctionnement de la Chambre, il y a eu récemment deux importants projets de loi qui ont entraîné beaucoup de pression de la part de l'opposition. Notre parti a exercé ces pressions dans le dossier des Nisga'as pour faire part de nos préoccupations quand à la façon dont ce projet de loi avait été traité. Le Bloc a fait la même chose dans le cas du projet de loi C-20. Il a fait appel à toutes les mesures possibles pour faire part de son mécontentement face à ce projet de loi.
Il ne s'agit pas toutefois de déterminer si la forte opposition qui peut se manifester peut être étouffée d'une façon ou d'une autre. Ce n'est pas non plus une question d'amitié ou d'admiration personnelle pour le Président. À mon avis, la question se résume à savoir si les conseillers juridiques, ces fonctionnaires qui sont là pour nous aider à organiser nos affaires et nous conseiller sur les amendements pour qu'ils soient recevables sur le plan de la forme peuvent accomplir leur travail si les députés ne leur font pas confiance. Je crois, comme mon collègue qui vient de parler, que c'est là l'enjeu central.
Je ne suis pas avocat. Je suis un peu au courant du secret professionnel des avocats. Je suis médecin, et je connais fort bien le secret qui doit entourer les consultations médicales. Je sais que si j'avais manqué à cette obligation lorsque j'exerçais la médecine, les sanctions auraient si sévères que je n'aurais pas pu continuer à exercer ma profession. Je ne vois pas de différence entre la relation d'un avocat avec son client et celle, tout à fait sacrée, d'un médecin avec son patient.
Je crois que, comme médecin, je n'avais qu'un moyen de divulguer de l'information sur mon patient et c'était d'obtenir sa permission écrite et datée. Alors, je pouvais communiquer l'information à l'équipe soignante, à des spécialistes, à des techniciens qui faisaient les tests sanguins ou autres et à des infirmières de la salle d'opération. C'est là la seule façon pour moi de partager cette information. Si le patient me fournissait une preuve documentaire, je pouvais alors, et seulement alors, envoyer les dossiers à un avocat.
Je crois que le conseiller des services du greffier devrait avoir la permission directe et spécifique du député pour lequel il travaille de diffuser l'information à toute l'équipe. La permission devrait être très explicite.
Il arrive parfois que l'équipe doive connaître chaque détail de ce qui est proposé. Il arrive parfois qu'une simple signature d'approbation ne convienne pas, que, pour des raisons de stratégie ou autres, l'information ne devrait pas être connue de toute l'équipe.
Le coeur du problème, ce n'est pas le projet de loi C-20, ni le traité nisga'a ni tous les mécanismes dont nous disposons pour manifester notre mécontentement, mais cette question elle-même. Le conseiller législatif peut-il être efficace s'il partage la moindre information avec toute l'équipe? Je ne le crois pas.
J'estime que le conseiller législatif devra cesser d'exercer ces fonctions et respecter son serment professionnel si c'est ce qu'on attend de lui. Je demande que cela soit examiné non seulement par la présidence, mais aussi par les greffiers eux-mêmes, par les personnes qui dirigent les affaires de la Chambre. Je crois que ce jugement doit être réexaminé et revu. Je crois qu'un nouvel examen de ce jugement en particulier sera sain.
Je réitérerai ma confiance dans la présidence lorsque nous voterons ce soir. Je ne dis pas cela pour me faire bien voir de la présidence, mais seulement parce que je trouve que la présidence a été partiale lorsqu'il le fallait et impartiale lorsque l'impartialité s'imposait. Je le dis sincèrement à la présidence et aux services du greffier. Je me réjouis de pouvoir le faire ici.
[Français]
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, j'ai malheureusement manqué le début du discours du député qui m'a précédé. Je crois avoir entendu la dernière moitié et je trouve cela très bien.
Puisqu'on est dans ce genre de débat, est-ce que le rôle du Président ne serait pas, jusqu'à un certain point, d'assurer un certain respect de la démocratie?
Je m'explique. Ce n'est pas parce que quatre cannibales décident de manger le cinquième que c'est démocratique. Ce n'est pas forcément parce que la majorité le décide que tout est démocratique.
Autrefois, les bâillons étaient des mesures exceptionnelles. Maintenant, le bâillon est rendu la règle. Il n'y a plus un projet de loi qu'on adopte dans ce Parlement sans qu'il y ait un bâillon qui soit imposé.
Je demande au député qui vient de parler s'il ne voit pas dans le rôle du Président une possibilité d'intervention à ce niveau. Et je sais qu'il y a une contrepartie à cela. Je voudrais qu'il me l'explique.
M. Grant Hill: Monsieur le Président, pour moi, l'enjeu ici n'est pas le Président, mais le conseiller législatif. Si le conseiller législatif a le privilège de se pencher sur les circonstances de ce cas, à mon avis, il est nécessaire de réviser le Règlement.
J'ai confiance dans la Présidence dans le cas en question, mais je pense qu'il est nécessaire d'avoir un lien spécial avec le conseiller législatif.
[Traduction]
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, mon collègue a abordé un sujet qui me tient à coeur, à savoir le secret professionnel de l'avocat qui existe entre les conseillers législatifs et les députés. Si les conseillers législatifs reçoivent des ordres ou des directives non seulement d'un député mais aussi de quelqu'un d'autre quant à l'information qui doit être partagée et quand et où, cela crée clairement un conflit d'intérêts car ils recevraient des directives de deux sources différentes qui servent deux intérêts différents.
Qu'est-ce que cela représente pour lui en tant que député? Quelle incidence pense-t-il que cela peut avoir sur sa confiance dans la relation de travail qu'il aurait avec un conseiller législatif et sur sa confiance en l'aide et en la qualité de l'avis qu'il reçoit dans des circonstances où cette personne...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le député de Macleod a la parole.
M. Grant Hill: Monsieur le Président, cela va au coeur de la question. En fait, cela me ferait hésiter à utiliser les services des conseillers juridiques à la Chambre. J'envisagerais soigneusement le recours aux services de conseillers juridiques à l'extérieur de la Chambre. Ce serait épouvantable si nos conseillers juridiques disparaissaient parce qu'il va sans dire qu'ils possèdent l'expérience, connaissent le contexte et ont la compétence voulue pour tenir compte de tous les aspects des lois, ce qu'on ne peut attendre normalement d'un avocat.
Personnellement, je n'apprécierais pas du tout que les deux côtés examinent les mesures législatives de cette façon.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Wentworth—Burlington.
Je voudrais participer aussi au débat, car j'ai écouté tous les arguments qui ont été soulevés. Je pourrais commencer par répondre à la députée de Calgary—Nose Hill qui, en réponse à une question que je lui avais posée, a laissé entendre que je m'opposais à la réforme de la Chambre. Je tiens à réitérer ma déclaration à son intention.
Je disais que cette réforme serait nécessaire dans la mesure où elle ne limiterait pas davantage les droits et les privilèges des députés. Je pense que cela diffère d'une réforme de la Chambre pour apporter des modifications qui favoriseraient notre productivité. L'idée est que nous sommes tous des députés. Nous avons des droits et des privilèges. Je voudrais que tous les députés, peu importe leur allégeance, puissent tirer le maximum de ces droits et de ces privilèges.
Ce que j'essayais de dire, c'est que nous avons amplement l'occasion d'abuser de nos droits et privilèges en cette enceinte. Nous pouvons présenter littéralement des centaines de motions à l'étape du rapport. Nous pouvons pratiquement interrompre les travaux de la Chambre. Nous pouvons inscrire au Feuilleton des avis de motion portant adoption de rapports des comité. Tous les jours, lorsqu'un projet de loi doit faire l'objet d'un débat, un député peut se lever et, parce qu'il a présenté une telle motion d'adoption, gaspiller le temps de la Chambre en parlant de tout ce qui peut se trouver dans un rapport de comité. Il peut ainsi virtuellement bloquer les travaux de la Chambre.
S'ils le voulaient vraiment, la plupart des députés pourraient trouver des motifs valables d'invoquer le Règlement, de soulever la question de privilège ou de demander des informations, simplement pour retarder les travaux de la Chambre. De toute évidence, nous n'avons pas intérêt à le faire. Tous les députés ont avantage à utiliser le temps et les ressources de la Chambre le plus judicieusement possible. Nous sommes jugés collectivement d'après ce que nous faisons durant le temps qui nous est alloué en cet endroit.
La motion dont nous sommes saisis traite d'une grave question. Je reconnais que l'allégation est sérieuse. Je reconnais qu'il faut étudier la situation de près, mais je me demande s'il n'y aurait pas lieu de placer les arguments formulés dans deux contextes différents. L'un est la question de savoir si les arguments soulevés par ceux qui souhaitent des changements à la Chambre découlent davantage des objections qu'ils ont à l'endroit du parti ministériel et des stratégies que le gouvernement applique dans l'exercice de l'autorité dont il est le dépositaire, plutôt que des problèmes que leur pose le fonctionnement de notre institution parlementaire comme telle.
L'autre aspect consiste à déterminer si nous examinons les règles que nous suivrons de façon générale dans nos rapports avec le conseiller juridique, la Direction des journaux et les autres ressources dont nous disposons, plutôt que ce cas particulier. Dans le cas qui nous occupe, nous devons nous arrêter au fond du problème, à la question qui nous occupe et à la stratégie qui a été appliquée.
Quand j'ai appris que la Chambre serait saisie de plusieurs centaines de motions à l'étape du rapport du projet de loi C-20, j'ai tout de suite compris, et tous les autres comme moi, qu'il s'agissait d'une tentative de ligoter la Chambre et de lui imposer une certaine façon de faire.
Si un millier d'amendements avaient été présentés, nous en aurions eu pour trois jours entiers. Tout cela n'aurait eu pour résultat que de forcer tous les députés et le personnel de soutien à rester sur place. Comme je n'étais pas sûr que cette façon de faire était la bonne, j'ai consulté le Beauchesne. Je n'ai pas consulté le nouvel ouvrage, mais j'ai examiné les commentaires de Beauchesne sur les motions à l'étape du rapport. Selon le Beauchesne, les motions à l'étape du rapport ont pour objet de permettre aux députés qui ne font pas partie du comité de participer au processus d'étude d'un projet de loi et d'influer sur son contenu. C'est l'une des raisons pour laquelle nous pouvons présenter des motions à l'étape du rapport.
J'ai regardé ce sur quoi nous votions et me suis demandé comment c'était possible. Il y avait des motions portant sur des questions de ponctuation; il y avait littéralement ces centaines de motions qui visaient à changer la même chose ou à ajouter un mot ici et là et qui n'avaient rien à voir avec le fond du projet de loi. Je pensais que la présidence aurait peut-être pu dire simplement que ces motions étaient contraires à l'objectif de l'étape du rapport et les juger irrecevables.
Je ne vois pas à quoi cela peut servir d'essayer de retarder les travaux de la Chambre comme moyen de protestation parce que c'est toujours le gouvernement qui va avoir raison. Dans une situation de gouvernement majoritaire, c'est ce qui arrive.
Les événements qui se sont déroulés ici ont probablement connu le meilleur dénouement possible, tant pour la Chambre des communes elle-même que pour les Canadiens.
Monsieur le Président, je suis député depuis six ou sept ans et j'ai toujours trouvé que votre sagesse, votre perspicacité et votre désir de ne pas appliquer les règles de façon rigide mais d'essayer plutôt de nous aider à être de meilleurs parlementaires nous ont toujours bien servis. Vous pouvez compter sur mon appui.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à mon collègue de Mississauga—Sud et elle sera très simple.
La majorité des parlementaires de cette Chambre croient profondément à la nécessité de la confidentialité dans certaines relations professionnelles.
Ce que je veux demander à mon collègue, c'est ceci: est-ce qu'il croit que la confidentialité est essentielle au rôle de parlementaire que nous avons à jouer? Dans un deuxième temps, est-ce qu'il croit que dans le rôle de la Présidence, il devrait veiller à ce que cette confidentialité soit restaurée si, effectivement, on peut démontrer qu'elle est questionnable?
[Traduction]
M. Paul Szabo: Monsieur le Président, c'est une bonne question. La députée souhaite un système rigide, ce qui n'est pas dans l'intérêt de la Chambre.
Si la députée abordait franchement la question, on aurait tôt fait de constater que l'intervention du Bloc québécois se voulait une démonstration. Il ne s'agissait pas d'un effort constructif en vue d'améliorer la mesure législative.
Je souscris au principe du maintien de la confidentialité et à l'esprit dans lequel nos règles sont établies, mais quand des députés, à titre individuel ou collectivement, recourent abusivement aux règles du Parlement ou abusent des privilèges du Parlement, je m'attends à ce que le Président et les autres responsables mettent tout en oeuvre pour limiter les dégâts.
[Français]
M. André Bachand: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je m'excuse auprès de mon collègue, je serai très bref. Il reste quelques minutes à cette journée consacrée à la motion. J'aimerais demander, pour éviter de diviser le Parlement sur cette question, de diviser les règles parlementaires qui nous unissent, si, quelques minutes avant la fin de cette période, le Bloc pouvait retirer sa motion...
Une voix: Non.
M. André Bachand: ...puisque tout a été dit, pour qu'ensuite, on puisse passer à autre chose.
Mme Suzanne Tremblay: Non.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, j'ai beaucoup de respect pour mes collègues bloquistes. À mon avis, ils sont les meilleurs députés de l'opposition, parce qu'ils comprennent bien les questions parlementaires de la Chambre des communes.
Je trouve triste qu'ils aient choisi cette méthode de protestation contre le résultat du projet de loi C-20.
Les protestations, dans une démocratie, sont très importantes et à mon avis, c'est à-propos, pour les bloquistes, de faire cette protestation. Ce que je ne comprends pas, c'est la position réformiste.
[Traduction]
Je peux comprendre pourquoi le Bloc souhaite présenter cette motion et l'appuyer au moment du vote. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi le Parti réformiste dit qu'il l'appuiera. Bien qu'une protestation soit tout à fait un droit dans une démocratie, et je comprends pourquoi le Bloc souhaite protester, le Parti réformiste semble croire qu'étant en colère contre le gouvernement pour diverses décisions qu'il a prises, il peut s'en prendre au Parlement plutôt qu'au gouvernement.
Il est habituel à la Chambre que le Parti réformiste confonde ce que fait le gouvernement avec ce que fait le Président. C'est très triste. Comme je l'ai mentionné plus tôt, le débat sur le drapeau en constitue un exemple classique. Les députés du Parti réformiste s'en sont pris à la présidence et au Parlement lorsqu'il s'est agi de déterminer s'ils pouvaient placer un drapeau sur leur pupitre. Je me rappellerai toujours le moment où l'esprit de parti a réellement eu des conséquences sur nos symboles mêmes. Nos symboles sont le drapeau et ce Parlement, ainsi que votre position, monsieur le Président. Je me rappellerai toujours le jour où le député de Medicine Hat a jeté le drapeau canadien à terre parce qu'il n'était pas d'accord avec votre décision.
J'implore le Parti réformiste de ne pas s'en prendre au Parlement par l'intermédiaire du Président, de ne pas s'en prendre à l'institution qui est le fondement même de notre démocratie et de laisser le Bloc québécois mener leur propre protestation. Toutefois, j'exhorte le Parti réformiste à voter contre cette motion.
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, je dis tout de suite que je suis membre du Parti réformiste et que j'en suis fier. Je tiens à expliquer au député que je n'ai pas du tout appuyé cette motion. Je sais que beaucoup de mes collègues ne voteront pas en sa faveur. Je voulais seulement que cela soit clair.
M. John Bryden: Monsieur le Président, je suis enchanté d'entendre le député d'en face. À mon avis, nous devrions voter sur cette motion selon notre conscience, et j'espère que le Parti réformiste et tous les autres partis, dont le Parti libéral, voteront selon leur conscience sur cette question.
[Français]
M. Michel Guimond: Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre pour donner la possibilité à ma collègue de Laval-Centre d'avoir une courte période de questions et commentaires d'une durée maximale de cinq minutes.
[Traduction]
Le Président: Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, je me contenterai de faire un commentaire.
Le troisième millénaire commence dans cette Chambre de bien triste façon. L'image de la démocratie dans une société développée comme la nôtre, du moins c'est ce qu'on prétend, a été ternie par l'adoption, hier soir, du projet de loi C-20 en troisième lecture. Comme si ce n'est pas assez, on se retrouve aujourd'hui avec une motion de non-confiance à l'endroit du Président.
Il est clair que cela ne fait pas l'affaire du gouvernement, et on peut le comprendre. Pourquoi cette motion?
Cette motion se retrouve devant cette Chambre suite à un jugement rendu par la Présidence sur une question de privilège déposée par la députée de Rimouski—Mitis qui traitait du manque de confidentialité entre les parlementaires et les conseillers législatifs. Le droit à la confidentialité est un droit fondamental pour tout parlementaire. Si ce droit n'existe pas alors que tous les parlementaires croient qu'il existe, il y a un problème. C'est un peu comme le droit de veto du Québec.
Nous avons cru pendant des années que le Québec avait ce droit de veto. Le Québec a été confronté à la dure réalité. Le Québec n'a pas, n'a pas eu et n'aura jamais de droit de veto dans le Canada que nous connaissons aujourd'hui.
Je sais qu'il n'a pas été facile pour le chef du Bloc québécois de déposer cette motion le 13 mars dernier. Je ne connais personne dans mon parti qui aurait pu la déposer de gaieté de coeur.
Je siège dans cette Chambre, comme un certain nombre de mes collègues, depuis le 17 janvier 1994. Je me rappelle très bien de votre première élection à la Présidence. Vous avez été choisi par vos pairs. En vous élisant, cette Chambre accordait toute sa confiance en la qualité de votre jugement. C'est le jugement d'un parlementaire d'expérience capable de s'élever au-dessus de la mêlée et de servir les intérêts supérieurs de la démocratie qui se trouvent représentés par chacun et chacune des 301 députés élus démocratiquement pour siéger dans cette enceinte.
Tout au long de mon expérience de parlementaire, j'ai été à même d'apprécier souvent la qualité de votre jugement comme Président, sa mesure et sa clarté. Bien sûr, vous n'avez pas toujours fait plaisir à tout le monde, mais tout le monde sait qu'il est impossible et, au demeurant, peut-être pas toujours souhaitable, de tenter de faire plaisir à tout le monde et à son père et, je pourrais dire, à ses pairs.
Monsieur le Président, je peux facilement imaginer jusqu'à quel point la situation à laquelle vous êtes confronté doit être difficile, mais je crois également que c'est dans les situations difficiles que l'on peut se dépasser.
Ce que je vous demande, c'est de reconnaître l'importance de la confidentialité pour mener à bien et dans le meilleur intérêt de la population canadienne et québécoise les échanges professionnels entre les parlementaires et leurs conseillers.
Je vous demande, à titre de premier et de plus important serviteur du Parlement de restaurer cette confidentialité.
Une saine démocratie parlementaire exige cette restauration. Chacun et chacune d'entre nous aura la certitude d'être outillé pour servir au mieux l'intérêt des gens qui nous ont élus.
En vous rendant à cette demande, que je sais agréée par tous les parlementaires de bonne foi qui siègent des deux côtés de cette Chambre, vous démontrerez que vous êtes un grand Président et que votre objectif le plus important est d'assurer à chacun de vos députés les services appropriés à leurs fonctions.
Vous en avez la responsabilité, vous en avez le pouvoir, et je crois sincèrement que votre décision renforcera la confiance de cette Chambre en votre Présidence, puisqu'elle ne laissera subsister aucun doute sur les coudées franches qui doivent être les vôtres dans l'exercice de vos fonctions.
Par votre geste courageux, vous démontrerez qu'il n'y a, dans ce Parlement, qu'une seule classe de députés, des hommes et des femmes capables d'assumer, au mieux de leurs compétences, les responsabilités qui sont les leurs. Vous êtes le mandataire de la démocratie parlementaire et je sais que vous saurez en faire la preuve éclatante.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. On pourrait peut-être obtenir le consentement unanime de la Chambre pour la motion suivante. Je propose:
Que la motion no 59 soit retirée et remplacée par la motion suivante:
Que la question de la confidentialité du travail du conseiller législatif soit étudiée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, que les différentes hypothèses de solutions, à savoir
a) la restructuration du service pour assurer de la confidentialité, ou
b) la réaffectation des ressources actuelles aux différents partis politiques pour qu'ils assurent eux-mêmes leurs propres services de conseillers législatifs
soient analysées par le Comité et qu'un rapport apportant des solutions concrètes soit déposé à la Chambre avant le 1er juin 2000.
Si nous obtenions le consentement unanime, je pense que nous pourrions nous prononcer sur cette motion.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Compte tenu du sérieux de cette motion et pour que tous les députés la saisissent bien, je me demande si on ne pourrait pas la répéter une autre fois, parce qu'il y en a peut-être qui n'écoutaient pas tout à fait fidèlement. Cela m'apparaît tout à fait correct, mais je pense que pour être doublement sûrs de notre coup, je suggère qu'on répète la motion.
M. Michel Gauthier: Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre pour la motion suivante:
Que la motion no 59 soit retirée et remplacée par la suivante:
Que la question de la confidentialité du travail du conseiller législatif soit étudiée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, que les différentes hypothèses de solutions, à savoir
a) la restructuration du service pour assurer une meilleure confidentialité, ou
b) la réaffectation des ressources actuelles aux différents partis politiques pour qu'ils assurent eux-mêmes leurs propres services de conseillers législatifs
soient analysées par le Comité et qu'un rapport apportant des solutions concrètes soit déposé à la Chambre avant le 1er juin 2000.
[Traduction]
Le Président: Le député a-t-il la permission de présenter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Paul Szabo: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je crois que la question dont nous sommes saisis est très importante et je crois que le leader du gouvernement à la Chambre a demandé au député de répéter la motion afin que les députés puissent comprendre clairement que la solution proposée est le fruit d'une entente entre tous les partis. Je crois que le député qui a dit non n'était pas à la Chambre lorsque la motion a été lue et, comme c'est important, je demanderais que la motion soit lue de nouveau afin qu'on s'assure que le député en question n'a pas mal compris.
Le Président: Ce sera selon les voeux de la Chambre. Les députés veulent-ils que la motion soit lue de nouveau? Le député de Mississauga-Sud demande qu'elle soit lue de nouveau pour une raison quelconque.
[Français]
M. Michel Gauthier: Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre pour la motion suivante:
Que la motion no 59 soit retirée et remplacée par la suivante:
Que la question de la confidentialité du travail du conseiller législatif soit étudiée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, que les différentes hypothèses de solutions, à savoir:
a) la restructuration du service pour assurer de la confidentialité, ou
b) la réaffectation des ressources actuelles aux différents partis politiques pour qu'ils assurent eux-mêmes leurs propres services de conseillers législatifs
soient analysées par le Comité et qu'un rapport apportant des solutions concrètes soit déposé à la Chambre avant le 1er juin 2000.
[Traduction]
M. Philip Mayfield: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai entendu la motion trois fois. Je voudrais que le leader du gouvernement à la Chambre m'assure que cette motion sera prise au sérieux et qu'elle ne sera pas simplement mise de côté de sorte que nous nous retrouverions dans la même position qu'avant.
Si le leader du gouvernement à la Chambre peut me donner ce genre de garantie, je n'empêcherai pas que cette motion soit proposée.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, ce n'est pas ma motion, mais je suis disposé à assurer l'entière coopération du côté ministériel pour que le comité fasse rapport sur la question à la date dite, soit le 1er juin. Il était question d'une date plus proche de nous dans la motion antérieure, mais deux leaders parlementaires, dont moi, ont proposé qu'elle soit repoussée pour être en mesure de tenir cet engagement. Donc, la réponse est oui.
M. Philip Mayfield: Monsieur le Président, je voudrais que ce soit plus clair que cela. J'aimerais savoir si le gouvernement s'engage à...
SUSPENSION DE LA SÉANCE
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Nous sommes en train de négocier en pleine séance. Tout le monde semble un peu se sentir bousculé. Je suspends la séance pendant cinq minutes. Après cela, je vous demanderai de quoi il retourne et, s'il le faut, nous tiendrons un vote. Vous avez cinq minutes pour vous entendre.
(La séance est suspendue à 18 h 46.)
REPRISE DE LA SÉANCE
(La séance reprend à 18 h 50.)
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, le député voulait savoir plus tôt si le gouvernement était prêt à collaborer de manière à produire un rapport le 1er juin au plus tard pour améliorer les services de conseil parlementaire sur les deux points différents, tel qu'il est dit dans la motion qui vient tout juste d'être lue. Je suis prêt à prendre cet engagement au nom du gouvernement.
Le Président: Le député de Roberval demande le consentement unanime pour présenter une motion. Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre?
Des voix: D'accord.
Le Président: La Chambre a entendu les termes de la motion. Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
Le Président: Le député de Beauharnois—Salaberry vient de m'informer qu'il ne pourra présenter sa motion durant l'heure réservée aux initiatives parlementaires le vendredi 17 mars 2000.
[Français]
Comme il n'a pas été possible de procéder à un échange de position sur la liste de priorité, je demande au greffier de reporter cette affaire au bas de la liste de priorités du Feuilleton.
[Traduction]
L'heure réservée aux initiatives parlementaires sera donc annulée et la Chambre poursuivra les travaux qu'elle aura été en train de faire avant l'heure réservée aux initiatives parlementaires.
Comme il est 18 h 56, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 56.)