Passer au contenu
Début du contenu

HUMA Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

CHAPITRE VIII

ADMINISTRATION

Au cours de l’examen, nous avons entendu de nombreux points de vue différents sur l’administration de la Loi sur l’équité en matière d’emploi. Essentiellement, ces points de vue se ramènent à trois questions différentes :

 Quel ministère ou organisme devrait assumer la responsabilité principale de l’administration et de l’application de la Loi?
 Comment le partage des responsabilités devrait-il se faire entre les diverses compétences qui jouent actuellement un rôle dans la réalisation de l’équité en matière d’emploi?
 Quelles ressources sont nécessaires pour administrer le système fédéral d’équité en matière d’emploi?

Certaines des réponses figurent dans les autres parties et recommandations du rapport, tandis que d’autres sont traitées plus avant dans la présente partie.

1. Développement des ressources humaines Canada

Dans sa forme actuelle, la Loi sur l’équité en matière d’emploi confie au ministre du Travail la responsabilité d’entreprendre des recherches liées à l’objet de la Loi, de promouvoir celle-ci auprès du grand public et de la lui faire mieux comprendre et de diffuser de l’information concernant la représentation des groupes désignés dans le marché du travail. De plus, le ministre peut publier des directives et dispenser des conseils aux employeurs du secteur privé et aux représentants des salariés. Enfin, le ministre doit déposer devant le Parlement un rapport annuel contenant l’analyse et la consolidation de tous les rapports des employeurs du secteur privé relevant de la compétence fédérale, de même qu’une une évaluation des progrès accomplis.

Pendant les audiences, de nombreux témoins ont mentionné que, selon eux, Développement des ressources humaines Canada (DRHC) et, plus particulièrement, sa Direction générale du travail devaient obtenir les ressources nécessaires pour s’acquitter des fonctions qui leur ont été conférées84. De plus, certaines des recommandations du présent rapport portent sur l’affectation de ressources supplémentaires.

Recommandation 26

Le Comité recommande que le gouvernement accorde à la Direction générale du travail de Développement et ressources humaines Canada des ressources suffisantes pour lui permettre de remplir ses obligations aux termes de la Loi sur l’équité en matière d’emploi.

Le ministre du Travail est également responsable de l’administration du Programme de contrats fédéraux (PCF); son mandat à cet égard est de veiller à ce que le PCF soit exécuté de façon équivalente à la Loi sur l’équité en matière d’emploi. Actuellement, le Ministère estime qu’environ 845 employeurs ayant approximativement 1,1 million d’employés sont des entrepreneurs fédéraux aux fins de l’équité en matière d’emploi. Pour pouvoir soumissionner, ces employeurs sont tenus d’attester de leur engagement à mettre en œuvre des initiatives d’équité en matière d’emploi. Après l’adjudication d’un contrat, ils sont assujettis à un examen de DRHC.

De nombreux témoins ont signalé qu’il existe un écart entre les exigences relatives à l’équité en matière d’emploi qui s’appliquent aux employeurs du secteur relevant de la compétence fédérale et celles qui concernent les entrepreneurs fédéraux. Il ne semble y avoir aucun fondement solide pour évaluer le rendement de ceux-ci en vertu de la Loi. À ce sujet, certains des témoins croient qu’ils n’ont pas un bon rendement, mais le Comité n’a aucun élément de preuve pour confirmer ou infirmer ces affirmations. Certains témoins étaient d’avis que les examens de DRHC ont été menés de façon sporadique par des employés du Ministère qui ont semé la confusion et l’incertitude chez les employeurs. Des employeurs nous ont dit qu’ils ne savent pas ce que l’on attend d’eux sur le plan de l’observation de la loi et qu’il faut accroître leur confiance à l’égard du Programme.

Se rapporter au PCF se fait sporadiquement et semble imprévu, alors que les attentes semblent vagues et le processus, en général désorganisé. […] Par contre, les examens du PCF consistent entièrement en des évaluations quantitatives qui ne tiennent guère compte des autres mesures non qualitatives prises par les employeurs. […] Des employeurs qui s’inscrivent dans le PCF] ont convenu en général qu’il en coûterait trop de s’attendre à ce que les employeurs puissent rendre des comptes chaque année — un examen tous les trois ou quatre ans devrait suffire, mais il faudrait un calendrier fixe. […] En outre, qu’entend-on par conformité ou non-conformité? Comment la mesure-t-on? J’ai soulevé cette dernière question plusieurs fois auprès des représentants du PCF, et personne ne semble savoir ce qu’il faut entendre par non-conformité. Cela pousse à conclure que les examinateurs et leurs collègues du PCF sont aussi mêlés que les employeurs qu’ils examinent. (Mme Kathy Gray, directrice des Services aux employés, Université de la Saskatchewan)85

Au début de notre examen, des fonctionnaires de la Direction générale du travail de DRHC nous ont dit que la ministre du Travail avait promis que le Comité recevrait l’évaluation du Programme de contrats fédéraux. Par la suite, on a demandé au sous‑ministre d’alors de fournir l’information au Comité. Comme celui-ci ne l’a pas reçue avant la préparation du présent rapport, il n’a pas été en mesure d’évaluer pleinement les activités du Programme, mis à part ce que lui ont appris les témoignages.

Le Comité voudrait rappeler à la ministre du Travail que la Loi prévoit ce qui suit :

Le ministre est également chargé de l’administration du Programme de contrats fédéraux pour l’équité en matière d’emploi et, à ce titre, tenu de veiller à ce que les exigences applicables aux entrepreneurs en vertu de ce programme pour ce qui est de la réalisation de l’équité en matière d’emploi soient équivalentes à celles que la présente Loi impose aux employeurs dans ce domaine86.

Nous ne pouvons affirmer avec certitude que cette partie de la Loi a été correctement mise en œuvre.

Recommandation 27

Le Comité recommande :

 Que le ministre du Travail dépose devant le Parlement un rapport annuel sur les activités du Programme de contrats fédéraux, comme il le fait au sujet des employeurs relevant de la compétence fédérale.
 Que la Direction générale du travail prépare un plan d’action contenant des mesures pour faire en sorte que l’administration du Programme de contrats fédéraux soit conforme à l’objet et aux dispositions de la Loi sur l’équité en matière d’emploi, et qu’il le présente au Comité, au plus tard le 1er avril 2003.

2. Secrétariat du Conseil du Trésor

Depuis 1996, la Loi sur l’équité en matière d’emploi s’applique à la fonction publique et, à titre d’employeur de la fonction publique fédérale, le Président du Conseil du Trésor a aussi certaines responsabilités aux termes de la Loi. Le Conseil du Trésor s’est vu confier, en ce qui a trait à la fonction publique, beaucoup de tâches similaires à celles que remplit le ministre du Travail, mais en tant qu’employeur, il a également dû cerner et supprimer des obstacles, instaurer des règles positives et des mesures raisonnables d’adaptation pour les groupes désignés et préparer des plans d’équité en matière d’emploi (tâche qu’il a déléguée aux ministères). La Loi sur l’équité en matière d’emploi prévoit ce qui suit :

Le Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique, chacun agissant dans les limites de ses attributions […] sont chargés des obligations que la présente Loi impose aux employeurs à l’égard des salariés […]87[L’italique est de nous]

Toutefois, à mesure que le rôle du Conseil du Trésor s’est transformé à l’endroit des ministères, sa place dans l’administration de la Loi est devenue de moins en moins claire. Avant l’entrée en vigueur de la Loi actuelle, le Conseil du Trésor appliquait une politique d’équité en matière d’emploi et avait commencé à produire des rapports sur la représentation des groupes désignés au sein de la fonction publique.

L’avenir de politiques et de programmes qui ont appuyé la réalisation de l’équité en matière d’emploi est maintenant compromis, notamment le Programme des mesures positives d’équité en emploi, qui a favorisé le renforcement des capacités institutionnelles, et le programme « Faire place aux changements », qui a été conçu pour assurer la représentation des minorités visibles. La récente annulation du Programme des mesures positives d’équité en emploi a mis fin à ce que le Conseil du Trésor lui‑même appelle un « élément important du programme général du Conseil du Trésor en matière d’équité en emploi pour la fonction publique fédérale ». La nature de ce qui le remplacera est incertaine parce que le Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique (CFP) ont délégué les fonctions du Programme à tous les ministères. La CFP, qui s’occupait de la mise en œuvre des volets du Programme, a déclaré au Comité qu’en vertu de la Loi sur l’équité en matière d’emploi et de l’actuelle politique fédérale sur l’obligation de prendre des mesures d’adaptation, les ministères sont responsables de supprimer les obstacles à l’emploi et de prendre des mesures d’adaptation relatives à leurs employés88. Le président de la Commission de la fonction publique a envoyé une lettre au Comité pour l’informer que la CFP et le Secrétariat du Conseil du Trésor poursuivent les discussions avec les ministères intéressés afin qu’ils envisagent la possibilité de servir de centres d’expertise. La Commission et le Conseil du Trésor élaborent une nouvelle politique pour expliciter l’obligation de prendre des mesures d’adaptation.

Par l’entremise de sa présidente, le Comité a déjà exprimé ses préoccupations dans des lettres adressées à la Présidente du Conseil du Trésor et au président de la Commission de la fonction publique. Nous croyons qu’en l’absence d’un répertoire centralisé d’appareils fonctionnels et de pratiques exemplaires, les gestionnaires de la fonction publique auront désormais la tâche de chercher, au moyen de réseaux d’information, l’aide et les services qui devraient être offerts également à tous les gestionnaires et employés de la fonction publique.

Le Comité croit fermement que le gouvernement fédéral, en tant que responsable de l’adoption de la Loi sur l’équité en matière d’emploi, et le Secrétariat du Conseil du Trésor, en tant qu’employeur de la fonction publique, ont l’obligation d’ouvrir la voie et de donner l’exemple. C’est en tant qu’employeur que le Conseil du Trésor négocie les conventions collectives au nom de tous les ministères et, manifestement, il conserverait une certaine responsabilité en vertu de la Loi. De plus, ni la délégation de la gestion aux ministères ni leur acceptation de responsabilités accrues au titre de l’équité en matière d’emploi ne nous font douter qu’à l’instar des employeurs du secteur privé, l’administration centrale de la fonction publique devrait être tenue de veiller à l’observation de la Loi. Malgré la disposition relative à la délégation et à la sous‑délégation de pouvoirs aux ministères, le Comité croit que le Conseil du Trésor ne devrait pas pouvoir jouer sur deux tableaux.

L’un des principes sous-jacents du rapport était la réalisation de l’équité dans son sens le plus large — l’application de la Loi également à tous les employeurs. La fonction publique fédérale ne devrait pas faire exception. Afin de clarifier les rôles et responsabilités du Secrétariat du Conseil du Trésor, nous avons recommandé ailleurs dans le rapport que le ministre du Travail assume la responsabilité de la compilation et de l’analyse des progrès accomplis ainsi que de la présentation de rapports à cet égard, tâches qu’exécutaient anciennement le Conseil du Trésor. Nous avons aussi recommandé que le ministre du Travail assume la même fonction quand il s’agit d’employeurs distincts qui font également partie du gouvernement du Canada.

Recommandation 28

Le Comité recommande :

 Qu’en tant qu’employeur de la fonction publique, le Conseil du Trésor demeure responsable de tous les programmes, politiques et mesures au sein des ministères et organismes fédéraux en ce qui a trait à la Loi sur l’équité en matière d’emploi.
 Que, dans les cas où il a délégué des pouvoirs en vertu de la Loi (notamment la disposition relative aux mesures positives pour les personnes handicapées) aux ministères et organismes, le Conseil du Trésor instaure des mesures efficaces pour faire en sorte que les politiques et programmes d’équité en matière d’emploi soient mis en place dans les ministères, et qu’il dépose devant le Comité, au plus tard le 1er avril 2003, un plan d’action précisant les mesures instaurées et les moyens par lesquels elles seront surveillées.

3. Commission canadienne des droits de la personne

La Commission canadienne des droits de la personne a reçu le mandat de surveiller et d’assurer l’application de la Loi au moyen de vérifications sur place. En 1995, la Loi a prévu la création d’un Tribunal de l’équité en matière d’emploi afin d’assurer l’application finale de la Loi au besoin. Nous avons traité des efforts déployés par la Commission pour mener ses activités dans différentes parties du présent rapport. Nous avons par exemple recommandé que la Commission soit dotée de plus de ressources pour s’acquitter de ses fonctions de vérification et d’application de la Loi.

Pendant nos audiences, plusieurs témoins nous ont mentionné que de nombreuses fonctions déléguées à la Commission et à DRHC devraient être regroupées et confiées à un nouveau commissariat à l’équité en matière d’emploi. Ils ont soutenu que cette solution permettrait une plus grande uniformité dans l’administration du programme d’équité en matière d’emploi dans l’ensemble des secteurs public et privé. Certains membres du Comité appuient cette position. Toutefois, la plupart des membres croient que la structure actuelle d’exécution de l’équité en matière d’emploi à laquelle seraient apportées les modifications recommandées dans le présent rapport pourrait être plus étroitement intégrée et mieux coordonnée.

Recommandation 29

Le Comité recommande que la Direction générale du travail du ministère du Développement des ressources humaines du Canada, le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission canadienne des droits de la personne travaillent en collaboration plus étroite afin d’assurer l’application uniforme de l’équité en matière d’emploi dans les secteurs public et privé, et que la Direction générale du travail de DRHC assume la responsabilité première de l’administration du programme, de l’élaboration des politiques, de la réalisation d’analyses des groupes désignés au sein de l’effectif et de la production de rapports consolidés sur l’équité en matière d’emploi.

Certains membres du Comité ne croient pas que la présente recommandation suffise à assurer une plus grande uniformité dans l’administration de l’équité en matière d’emploi. Ils proposent donc d’envisager l’instauration d’un commissaire ou d’une commission de l’équité en matière d’emploi, dont la mission, le mandat et les activités feraient l’objet d’un examen de la part du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées.


84 Selon le rapport provisoire d’une évaluation du Programme légiféré d’équité en matière d’emploi (PLEME) rédigé par Price Waterhouse Coopers Consulting, le nombre d’employés chargés de l’exécution du PLEME représente aujourd’hui le tiers de ce qu’il a déjà été.
85 RHPH, Témoignages (11:45), réunion n° 51, 26 février 2002.
86 Loi sur l’équité en matière d’emploi, 1995, paragraphe 42(2).
87 Loi sur l’équité en matière d’emploi, 1995, paragraphe 4(4).
88 Lettre de M. Scott Serson, président de la Fonction publique du Canada, 10 avril 2002.