SNAS Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Sous-comité sur la sécurité nationale du Comité permanent de la justice et des droits de la personne
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 10 juin 2002
¹ | 1530 |
Le président (M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)) |
¹ | 1535 |
¹ | 1540 |
Le président |
M. Paul E. Kennedy (sous-solliciteur général adjoint principal, Sécurité nationale, ministère du Solliciteur général) |
¹ | 1545 |
Le président |
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne) |
M. Richard Mosley |
M. Kevin Sorenson |
M. Richard Mosley |
M. Kevin Sorenson |
Le président |
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ) |
M. Richard Mosley |
¹ | 1550 |
M. Mario Laframboise |
M. Richard Mosley |
M. Mario Laframboise |
M. Richard Mosley |
M. Mario Laframboise |
M. Richard Mosley |
M. Mario Laframboise |
Le président |
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce--Lachine, Lib.) |
¹ | 1555 |
M. Richard Mosley |
Mme Marlene Jennings |
M. Richard Mosley |
Mme Marlene Jennings |
M. Richard Mosley |
Mme Marlene Jennings |
M. Richard Mosley |
º | 1600 |
Mme Marlene Jennings |
M. Richard Mosley |
Le président |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC) |
M. Richard Mosley |
º | 1605 |
M. Peter MacKay |
M. Richard Mosley |
M. Peter MacKay |
M. Richard Mosley |
º | 1610 |
M. Peter MacKay |
Le président |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
M. Richard Mosley |
º | 1615 |
M. Bryon Wilfert |
Le président |
M. Bryon Wilfert |
M. Richard Mosley |
Le président |
M. Bryon Wilfert |
M. Richard Mosley |
M. Bryon Wilfert |
M. Richard Mosley |
M. Bryon Wilfert |
M. Richard Mosley |
M. Bryon Wilfert |
Le président |
º | 1620 |
M. Richard Mosley |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
º | 1625 |
Le président |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Peter MacKay |
M. Richard Mosley |
º | 1630 |
M. Peter MacKay |
M. Richard Mosley |
M. Peter MacKay |
M. Richard Mosley |
M. Peter MacKay |
M. Richard Mosley |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
CANADA
Sous-comité sur la sécurité nationale du Comité permanent de la justice et des droits de la personne |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le lundi 10 juin 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1530)
[Traduction]
Le président (M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)): Si vous le voulez bien, chers collègues, nous allons commencer la réunion.
Je suis heureux de voir que nous avons un quorum. Dans un sens, nous reprenons notre examen de la proposition visant à recueillir des données statistiques selon les dispositions du projet de loi C-36, la Loi antiterroriste. Nous accueillons aujourd'hui Richard Mosley, qui est sous-ministre adjoint de la Justice, et Paul Kennedy, sous-solliciteur général adjoint principal, du ministère du Solliciteur général.
Notre objectif est d'examiner les plans élaborés par le Ministère concernant l'établissement d'une base de données, le format de celle-ci et le type de données statistiques qui seraient vraisemblablement utilisées par nos collègues de la Chambre au moment de la révision du projet de loi C-36 après trois ans. Ce qui nous intéresse particulièrement, c'est la disposition de temporisation du projet de loi et l'emploi des articles portant sur la mise sous garde préventive et l'investigation dans ce projet de loi.
M. Mosley ou M. Kennedy ont peut-être une déclaration liminaire qui nous donnera quelques indications. Je suis sûr que vous aurez des questions à poser ensuite.
Monsieur Mosley.
M. Richard Mosley (sous-ministre adjoint, Division de la politique en matière de droit pénal et justice communautaire, ministère de la Justice): Merci.
Comme les honorables députés le savent, le projet de loi C-36 contient des dispositions prévoyant des rapports annuels au sujet des deux dispositions auxquelles s'applique la clause de temporisation. Il s'agit des pouvoirs de mise sous garde préventive et d'investigation. Il prévoit également un examen complet de la loi dans sa totalité après trois ans. Nous nous sommes renseignés auprès de nos collègues du service fédéral des poursuites et des dirigeants provinciaux des services de poursuite, et jusqu'ici, autant que nous sachions, ces deux dispositions n'ont pas été utilisées. Les seuls éléments du projet de loi C-36 qui aient été employés jusqu'ici, que je sache, sont les amendements à la Loi sur la preuve au Canada au sujet de la protection de renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables. Il y a eu plusieurs procédures en Cour fédérale au sujet de demandes visant à protéger ces renseignements dans des affaires régies par cette Cour et relevant de la Loi sur la preuve au Canada.
Pour en revenir aux deux pouvoirs spéciaux, les rapports annuels sur ces dispositions garantiront non seulement qu'elles sont utilisées sans abus, dans la mesure où elles seront utilisées, mais aussi aideront le Parlement à déterminer si les dispositions sont toujours nécessaires pour répondre au terrorisme à l'avenir. Comme vous le savez, l'exigence de rapport oblige les procureurs généraux fédéral et provinciaux, le solliciteur général du Canada, et les ministres provinciaux responsables de la police à surveiller la façon dont ces dispositions et les divers éléments associés sont utilisés et à faire rapport à ce sujet.
Pour ce qui est de l'examen après trois ans, la loi ne précise pas de quelle façon il sera effectué, si ce n'est que ce doit être un examen complet de toutes les dispositions relatives au fonctionnement de la Loi. Ce sera alors au Parlement de déterminer quelle sera la forme exacte de cet examen.
Dans le cadre de son plan de mise en oeuvre de la loi, le ministère de la Justice a pris des mesures pour faciliter les rapports annuels et aussi l'examen de la loi. Étant donné que les provinces sont responsables de l'administration de la justice, ce sont surtout elles qui utiliseraient la Loi. Comme le gouvernement fédéral n'a pas de contrôle ou de droit d'accès sur les dossiers des gouvernements provinciaux, il est essentiel de coopérer régulièrement avec eux afin de recueillir les renseignements nécessaires à l'examen. Dans cet esprit, des mesures ont été prises pour mettre sur pied une infrastructure fédérale-provinciale-territoriale en vue de coordonner les questions relatives à la loi.
Après la réunion des ministres responsable de la justice en novembre 2001, un groupe de travail a été constitué pour élaborer un modèle qui sera utilisé pour recueillir les données sur l'utilisation de la loi, particulièrement pour constituer une base uniforme afin de satisfaire aux exigences de rapports annuels concernant les mises sous garde préventive et les audiences d'investigation. Une fois terminés, ces modèles ont été distribués aux différents gouvernements qui doivent à leur tour les redistribuer sur leur territoire. Le travail devrait se faire normalement en collaboration mais les provinces seront libres d'utiliser ou non ces modèles, et certains gouvernements peuvent décider d'adopter une approche différente pour satisfaire aux exigences relatives aux rapports annuels. Nous avons remis des exemplaires du modèle au greffier pour qu'il puisse les distribuer aux membres du comité.
Un comité des sous-ministres a également été mis sur pied, et les questions de coordination liées à la loi seront à l'ordre du jour des réunions des sous-ministres, qui se sont rencontrés encore la semaine dernière au Québec, et aussi à l'ordre du jour des responsables des poursuites, qui se sont réunis en avril, à celui du comité de coordination des hauts fonctionnaires responsables de la justice, qui a eu lieu en mai, et aux réunions ultérieures de ces groupes.
¹ (1535)
Nous avons également élaboré un protocole en collaboration avec les provinces afin d'assurer la coordination des conseils juridiques à la police et la coordination des poursuites pouvant être intentées en vertu de la loi.
La mise en oeuvre du projet de loi C-36 suscite également des questions importantes en ce qui concerne l'information et la diffusion. Pour ce qui est de la formation, nous avons eu plusieurs rencontres avec des juges, des responsables des poursuites, et les services de police. C'étaient généralement des réunions de formation des formateurs réunissant de petits groupes de policiers ou de responsables des poursuites. Par exemple, cette semaine, nous avons une réunion de deux jours avec des responsables des poursuites à Gatineau. Ce seront à la fois des agents fédéraux et provinciaux, qui devront ensuite à leur tour dispenser la formation dans leur zone de compétence respective. En mars, nous avons organisé une session pour la Cour fédérale. Nous avons fait de la formation pour les agents de police en avril, à l'École de la police ici à Ottawa. Nous avons organisé une session pour l'Association canadienne de surveillance civile du maintien de l'ordre. Et nous avons pris la parole à plusieurs conférences professionnelles et universitaires et à des réunions d'associations professionnelles.
Nous avons en outre préparé un vidéo de formation qui a été largement distribué. Le greffier en a des exemplaires, qui ont été ou seront mis à la disposition de tous les membres du sous-comité. Le but de ce film est de contribuer à la formation individuelle des personnes qui doivent arriver à bien comprendre la loi. C'est divisé en modules et l'on peut utiliser les différentes parties du CD-ROM comme on l'entend. C'est en fait un vidéo qui a été mis en format CD-ROM et peut être utilisé selon les besoins.
Nous avons des activités de diffusion qui vont se concentrer sur les communautés intéressées. Par exemple, l'ancien ministre de la Justice a entrepris de préparer une brochure sur les droits fondamentaux en rapport avec le projet de loi C-36, et nous continuons ce travail, en espérant avoir bientôt une ébauche pour tenir des consultations avec les communautés intéressées. Nous avons aussi l'intention de convoquer une table ronde de représentants des communautés religieuses et culturelles canadiennes afin de discuter des problèmes de mise en oeuvre.
Dans un plan de recherche qui a été élaboré, en dehors de la surveillance des activités proprement dites en vertu de la loi, nous proposons d'effectuer une étude des dossiers dans les provinces ou territoires où il y aura eu des litiges en vertu du projet de loi C-36 au cours des trois années à venir. Nous pensons que ces cas devraient être relativement peu nombreux, et l'examen des dossiers permettra de retirer pour chacune des causes, un maximum de renseignements sur la façon dont la loi a été employée et sur les effets produits sur les individus et groupes intéressés.
Nous entreprendrons aussi un examen des structures mises en place dans les provinces et territoires. Ceci montrera surtout comment chacun a réagi au terrorisme et à la loi depuis le 11 septembre. Nous ferions une analyse des tendances criminelles, qui porterait sur les tendances depuis le 11 septembre pour voir s'il y a des anomalies dans les données criminelles, d'après les statistiques sur les infractions ou sur les accusations. Cela permettra de déterminer, en partie, s'il y a eu des effets collatéraux sur les pratiques policières, c'est-à-dire de voir si le fait d'être plus sensibilisé a pu aboutir à un plus grand nombre de rapports d'infractions apparentes, ou à des accusations plus nombreuses.
Nous allons également étudier les conséquences financières du terrorisme au plan social et commercial dans le contexte de l'application du projet de loi C-36. Nous pensons que ces conséquences doivent être plutôt minimes, mais nous allons examiner par exemple la question des coûts associés aux retards à la frontière, à la diminution des déplacements, à la réduction de la consommation et des activités de divertissement, pour voir si ces tendances sont confirmées.
¹ (1540)
De plus, nous voulons créer un groupe de réflexion avec des fonctionnaires de la justice pénale pour effectuer une analyse qualitative afin de voir si leur travail au sein du système judiciaire peut avoir été influencé depuis le 11 septembre.
Ensuite, nous ferons une étude d'impact sur les collectivités touchées. Là aussi, cela permettra, en association avec les brochures et la table ronde, de déterminer quel peut avoir été l'impact sur les individus et les groupes des communautés qui peuvent avoir été touchés par les événements depuis le 11 septembre. Ceci se fera en partenariat avec d'autres ministères, comme Patrimoine canadien, DRHC et CIC.
Finalement, nous envisageons de faire de l'exploration de données, c'est-à-dire en fait d'examiner les banques de données existantes du gouvernement afin d'analyser les changements qui peuvent avoir été enregistrés, comme les expulsions d'immigrants en raison d'activités criminelles, le nombre d'immigrants, le nombre d'audiences, les chiffres de la citoyenneté, les audiences de réfugiés, etc.
Nous évaluons le coût de tout cela à environ 600 000 $ au cours des trois ans à venir. Nous n'avons pas encore les fonds. Cela dépendra d'une demande au Conseil du Trésor au début de l'automne.
Le président: Je vous remercie. Il y a beaucoup plus de choses que je ne le croyais, c'est un bon départ.
Monsieur Kennedy, avez-vous une déclaration à nous faire aujourd'hui?
M. Paul E. Kennedy (sous-solliciteur général adjoint principal, Sécurité nationale, ministère du Solliciteur général): Non, sauf pour dire que le ministère du Solliciteur général travaille avec le ministère de la justice. M. Mosley a pris la tête des opérations pour défendre cette initiative devant le CCHF, le comité des hauts fonctionnaires. Nous travaillons avec lui sur ce point. Je suis très satisfait des progrès, comme vous sans doute.
¹ (1545)
Le président: D'accord, merci.
Nous allons passer aux questions. Monsieur Sorenson.
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Je n'ai pas beaucoup de questions.
Lors de vos rencontres avec les avocats et les juges et les agents de police, a-t-on cité des problèmes concernant des éléments qui auraient pu être oubliés ou y a-t-il eu des questions sur la solidité de la loi dans le cas d'une contestation en vertu de la Charte? Ces rencontres ont-elles fait apparaître de très grandes préoccupations? Je sais que ce sont plutôt des rencontres instructives, mais parfois, lorsqu'on rencontre les personnes qui s'occupent de l'interprétation de la loi dans l'ensemble du pays, d'autres choses peuvent apparaître et il peut y avoir un signal d'alarme. Y a-t-il quelque chose d'important?
M. Richard Mosley: Pas vraiment. C'est une loi très longue, 186 pages à la sanction royale dans cette version imprimée, avec des amendements à 15 lois. On crée une loi tout à fait nouvelle concernant les organismes de bienfaisance. C'est un ensemble législatif très complexe. Ce que les gens nous ont dit jusqu'à présent, c'est surtout qu'ils veulent essayer de maîtriser cette loi, de comprendre son contenu et de savoir ce que les gens pourront invoquer si le problème se présente dans leur zone.
Je crois qu'on s'est interrogé, notamment dans les milieux universitaires, sur les risques de contestations en vertu de la Charte. Dans l'ensemble, les réflexions ont confirmé l'évaluation du gouvernement et du ministère de la Justice selon qui cette loi ne risque pas de faire l'objet de contestations en vertu de la Charte. C'est le genre de choses sur lesquelles on s'est attardé dans les conférences qui ont eu lieu, la question de savoir si un article ou un groupe d'articles risquait d'être contesté avec succès en vertu de la Charte.
M. Kevin Sorenson: Combien de ces colloques avez-vous organisés? Est-ce que c'est quelque chose qui se fait de façon constante? Pendant combien de temps allez-vous poursuivre ces réunions? Est-ce que c'est partout au Canada ou simplement ici? Et combien coûtent ces réunions?
M. Richard Mosley: Je n'ai pas les chiffres ici, mais les coûts peuvent être assez importants car nous assumons les frais de déplacement des personnes que nous faisons venir d'un peu partout au pays. Mais au lieu d'aller nous-mêmes aux quatres coins du Canada présenter ces séances d'information, nous formons des personnels des provinces et territoires qui administreront eux-mêmes la formation une fois rentrés chez eux.
M. Kevin Sorenson: Merci.
Le président: Monsieur Laframboise.
[Français]
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Merci, monsieur le président.
Plus tôt, vous avez dit que toutes les provinces coopèrent mais que ça pourrait être appliqué différemment d'une province à l'autre. Expliquez-moi cela?
[Traduction]
M. Richard Mosley: Ce que j'ai dit en fait, c'est que les provinces pourraient choisir un autre mode de collecte des données. Elles ne seront pas obligées d'utiliser les modèles que nous avons élaborés avec plusieurs des provinces. Je ne veux pas dire que les informations seront différentes d'une province à l'autre, mais simplement qu'elles pourront les recueillir et les présenter d'une manière différente, sous réserve des exigences de la loi. La loi spécifie très précisément le genre d'informations à fournir, mais ce sont les provinces qui détermineront individuellement la façon de collecter et de présenter ces informations. Nous espérons qu'elles se serviront de ces modèles pour que les données soient présentées de façon plus cohérente. Je pense que la plupart des provinces le feront, mais si l'une d'elles décide de rassembler et de présenter les informations autrement, elle pourra choisir. Ceci ne concerne que les opérations en propre des provinces, les activités de leurs services de police et de leurs procureurs. Pour ce qui est des activités de la GRC ou des poursuites fédérales au Canada, ces activités seront normalisées et présentées par le procureur général du Canada et le solliciteur général du Canada.
¹ (1550)
[Français]
M. Mario Laframboise: Vous avez compris que, dans le cas du Québec, il n'y a pas beaucoup de services qui sont rendus par la GRC. La plupart des services sont rendus par les autorités de la province. Vous vous êtes entendus à date. Est-ce que ça va bien avec le Québec?
M. Richard Mosley: Ça va très bien avec le Québec. On n'a pas de problèmes en ce moment.
M. Mario Laframboise: Est-ce que c'est votre organisme qui doit produire le rapport annuel pour le Parlement par la suite? Est-ce vous qui le faites?
[Traduction]
M. Richard Mosley: Au niveau fédéral, le procureur général du Canada et le solliciteur général du Canada déposeront des rapports au Parlement. Au niveau provincial, ce sont les procureurs généraux des provinces et les ministres provinciaux responsables de la police qui devront publier le rapport. Pour respecter la séparation des pouvoirs constitutionnels, ils ne déposeront pas de rapports au Parlement du Canada, mais en vertu de la loi, ils devront publier leurs rapports chaque année. Pour ce qui est de la façon dont ils procéderont, c'est à eux de l'expliquer, mais j'imagine qu'ils suivront les procédures normales qu'utilisent les provinces pour publier les rapports gouvernementaux.
[Français]
M. Mario Laframboise: C'est ma dernière question.
Par rapport au type de renseignements à maintenir dans la banque de données, est-ce que vous vous entendez parfaitement ou y a-t-il eu une certaine divergence par rapport aux renseignements à contrôler?
[Traduction]
M. Richard Mosley: Non.
[Français]
M. Mario Laframboise: Merci.
[Traduction]
Le président: Madame Jennings.
[Français]
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce--Lachine, Lib.): Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Monsieur Mosley, j'imagine que vous avez entendu l'expression conduite en état de négritude?
¹ (1555)
M. Richard Mosley: Bien sûr.
Mme Marlene Jennings: Dans ce cas, vous savez que les communautés ethnoculturelles, notamment les minorités visibles, les communautés de religion islamique, se sont énormément inquiétées de ce projet de loi et ont estimé qu'il y avait, même avant les événements du 11 septembre, divers problèmes d'application de notre législation à cause d'éventuels stéréotypes raciaux. Quand je regarde ce questionnaire, je ne vois pas, compte tenu des informations qui seraient recueillies, comment on pourrait s'assurer qu'on n'a pas ciblé de manière injustifiée certaines personnes en raison de leur origine ethnoculturelle, de leur statut juridique au Canada, de leur apparence physique ou de leur religion. Je crois que c'est un vrai problème.
Quand vous parlez de cet examen des dossiers que vous aurez au cours des trois prochaines années, vous parlez des dossiers de la police? Je sais que de nombreux services de police, même s'ils ne publient pas ces renseignements dans leurs rapports d'incidents ou d'arrestations, ont une petite case où il est mentionné «blanc, noir, autre», etc., et où ils notent Antillais, Vietnamien, Asiatique, Haïtien ou n'importe quoi. J'ai vu ces rapports. J'étais sous-commissaire à l'éthique policière au Québec. Je suis l'un des membres fondateurs de l'une des associations que vous avez mentionnées, la CACOLE, l'Association canadienne de surveillance civile du maintien de l'ordre. Donc j'ai vu ces rapports. J'ai travaillé avec ces rapports pendant des années. Les données sont là, à tort ou à raison, parce que c'est le policier qui note subjectivement l'origine ethnoculturelle de la personne. Cet examen des dossiers va-t-il porter sur les documents des services de police eux-mêmes? Si c'est la SPCUM, la police de Montréal, ou la police de Toronto ou de Chicoutimi, ou la Sûreté du Québec, est-ce qu'il s'agira des rapports de police mêmes? Ou s'agira-t-il de ce que j'appellerais les informations épurées des procureurs généraux et ministres provinciaux responsables de l'application de la loi et du procureur général fédéral et du solliciteur général de la GRC, évidemment, dans leurs rapports annuels? S'il s'agit simplement de ces rapports annuels, nous ne pourrons jamais répondre objectivement aux accusations anecdotiques des personnes qui diront que ces nouvelles mesures ont été appliquées en fonction de certains profils.
M. Richard Mosley: Nous espérons pouvoir avoir accès aux dossiers eux-mêmes.
Mme Marlene Jennings: Pourquoi ne pourriez-vous pas le faire?
M. Richard Mosley: Parce que nous n'avons pas le pouvoir d'obliger les forces de police provinciales ou municipales à nous donner accès à leurs dossiers. Toutefois, en l'occurrence, nous avons des arguments solides pour les convaincre de laisser nos chercheurs avoir accès aux données brutes des dossiers. Le plan de recherche a été élaboré en partie parce qu'on craignait que l'exercice de collecte des données, présentées dans ces modèles, ne donne pas une image complète de la situation. Nous espérons avoir un aperçu complet de la situation pour appuyer l'examen parlementaire par divers moyens, notamment un examen des dossiers, mais aussi la rétroaction des collectivités qui sauront bien si les gens ont le sentiment que les autorités abusent de leurs pouvoirs, des entrevues avec les personnes qui travailleront directement sur ces dossiers et les autres moyens que je vous ai déjà décrits. En fin de compte, et encore une fois, nous pensons que le nombre d'affaires sera en réalité extrêmement restreint, compte tenu des données statistiques, le Parlement devrait avoir une bonne idée de la façon dont la loi a fonctionné.
Mme Marlene Jennings: Bon.
Les forces de police qui relèvent des autorités provinciales ne sont pas la GRC, évidemment, et par conséquent, pour pouvoir avoir accès aux dossiers de ces services de police, vous aurez besoin du consentement des gouvernements provinciaux. Pour ce qui est de la collecte des données, qui est exigée par la loi, les gouvernements pourront procéder comme ils le voudront du moment qu'ils publieront ces informations sous une forme quelconque, par exemple dans un rapport annuel. Est-ce que la question de l'accès aux dossiers policiers concernant les affaires pour lesquelles il devrait y avoir une publication des données fait l'objet de discussion continue avec, par exemple, le procureur général du Québec, pour qu'on puisse revoir la question dans le cas où il serait établi qu'on a eu recours de manière injustifiée au profilage? Est-ce que cela fait partie des discussions continues que le ministère de la Justice a, j'imagine, avec ses homologues provinciaux à propos de l'application de cette loi?
M. Richard Mosley: Ce sera le cas. Je ne peux pas vous dire si la question a déjà été posée, car je n'ai pas participé à toute ces discussions. Cela fera certainement partie des discussions régulières que nous aurons avec ces ministères. Il y a déjà eu des discussions à divers paliers sur différents sujets connexes. Tout ce processus est loin d'être terminé. Comme je vous l'ai déjà dit, nous en sommes encore en train de former le personnel pour qu'il sache ce qu'il y a dans la loi et comment s'en servir dans des circonstances appropriées. Quand nous commencerons à mettre en oeuvre ce plan de recherche, nous discuterons évidemment avec les provinces et territoires des modalités concrètes de sa mise en oeuvre.
º (1600)
Mme Marlene Jennings: Je vais vous expliquer pourquoi vous devriez à mon avis entamer immédiatement ces discussions avec les provinces. Dans ma précédente carrière professionnelle, j'ai présenté à la fin des années 1980 un mémoire dans le cadre d'une enquête publique menée par la Commission des droits de la personne du Québec sur les relations entre la police de Montréal et les minorités visibles, notamment la communauté noire. Dans le cadre de cette enquête publique, la Commission pouvait consulter les dossiers de la police, et sur une période d'environ trois ans, elle a étudié des dossiers concernant quatre types d'accusations criminelles, les voies de fait, les infractions à la paix publique, les méfaits, et j'oublie le quatrième. Les commissaires ont déterminé que si l'on était membre d'une minorité visible, compte tenu de tous les faits mentionnés dans le rapport, on risquait deux ou trois fois plus de ne pas être remis en liberté sur son propre engagement, d'être obligé de comparaître devant un juge et d'être maintenu en détention. Les accusations risquaient d'être plus lourdes et de prendre la forme d'une mise en accusation plutôt que d'une simple citation à comparaître. La Commission a pu prouver tout cela de façon scientifique. Elle a ensuite recommandé que l'étude soit refaite cinq ans plus tard. Mais depuis, personne n'a pu avoir accès à ces dossiers policiers.
Je ne suis donc pas aussi convaincue que vous que les provinces accepteront d'ouvrir leurs dossiers si c'est pour permettre à des enquêteurs de voir si l'on a catalogué de façon injustifiable des personnes en raison de leur origine ethnoculturelle ou de leur religion. Voilà pourquoi je pense qu'il faudrait entamer le plus tôt possible ces discussions. J'aimerais avoir votre opinion à ce sujet.
M. Richard Mosley: Nous allons poursuivre les discussions avec les provinces dans un avenir proche et je ne manquerai pas de mettre ce sujet au programme.
Le président: Bon.
Nous passons maintenant à M. MacKay, puis à M. Wilfert.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Merci, monsieur le président et merci à MM. Mosley et Kennedy d'être venus nous rencontrer.
Ma première question concerne la durée choisie. Je sais que la question est réglée, mais pensez-vous qu'on aura eu suffisamment de temps pour avoir une idée assez exacte de l'utilisation normale ou éventuellement abusive de ces articles?
J'ai aussi une question d'ordre général à laquelle j'espère que vous pourrez répondre à propos de votre interprétation des données exisitantes sur la procédure d'arrestation préventive et d'investigation car, comme ma collègue, Mme Jennings, je me demande comment tout cela fonctionnera dans la pratique. En vertu des dispositions actuelles du Code criminel, nous avons beaucoup progressé en matière de divulgation, mais je sais qu'il y a encore des cas où la publication des notes des policiers est très controversée dans le contexte d'audiences criminelles. J'aimerais bien savoir comment, d'après vous, nous pourrons garantir une bonne divulgation des détails de ces audiences d'investigation et de cette procédure d'arrestation préventive.
M. Richard Mosley: M. MacKay fait évidemment allusion à une réalité concrète inhérente à tout système dont l'application dépend d'êtres humains. En l'occurrence, nous avons l'avantage d'avoir des informations qui peuvent être recueillies sous divers angles. Il y a celui des services de police. Il y a le rôle du procureur général, qui est essentiel pour l'application de ces deux dispositions en particulier, puisque le consentement du procureur général est requis. Dans les deux cas aussi, il y a l'intervention du tribunal. Nous recueillerons des données concernant ces trois paliers. On pourra recouper les informations recueillies par le procureur général par l'intermédiaire de ses procureurs au Canada et dans chaque province et les informations recueillies par la police, réunies et présentées par le solliciteur général ou le ministre provincial responsable de la police dans une province donnée, et comparer toutes ces informations à celles du dossier du tribunal. Naturellement, le dossier du tribunal est un document public sauf lorsqu'il est scellé dans des circonstances extraordinaires.
Il y aura donc diverses possibilités de comparer toutes ces informations, et on ne s'en remettra pas simplement à ce qui sera déclaré au niveau d'une des trois composantes du système.
º (1605)
M. Peter MacKay: Je vous remercie de cette réponse.
Voici où je veux en venir. Pensez-vous qu'en vertu de cette loi et du réexamen qui est stipulé, et même avec la clause de temporarisation, faute d'un meilleur terme, les participants ou les responsables de l'exécution seront obligés de divulguer complètement leurs informations pour ce réexamen? Vous avez mentionné l'élément très important que constitue la recherche des informations. Si les informations sont dans le dossier du tribunal, elles sont faciles à trouver. Ce qui m'inquiète, ce sont les enquêtes qui ne déboucheront jamais sur des accusations, les enquêtes qui n'entraînent même pas la constitution d'une documentation. Nous sommes dans une zone très floue quand il s'agit de savoir ce que les policiers notent et ce dont ils doivent conserver la trace.
Soit dit en passant, je me demande aussi comment on va obliger les policiers à conserver des dossiers sur des avertissements donnés à des jeunes. C'est le même genre de problème quand on essaie de suivre et de retracer le comportement des agents du maintien de l'ordre qui n'est pas nécessairement noté dans un dossier. J'hésite à me prononcer sur des contrats qui ne sont pas assortis d'une documentation. C'est vraiment au coeur de cette question de responsabilité.
M. Richard Mosley: C'est une remarque très judicieuse. Les exigences statistiques énoncées à l'article 83.31 du Code criminel sont très détaillées--vous les retrouvez aux pages 40 et 41 de la version sanctionnée du projet de loi--et prévoient la possibilité de savoir, par exemple, quand quelqu'un a été arrêté sans mandat et relâché soit avant que le consentement du procureur général soit demandé, soit avant que la personne soit présentée au tribunal. Vous avez cela à l'alinéa 83.31(3)b). Ce sont peut-être les exigences de rapports les plus détaillées qu'on puisse trouver dans une loi concernant les activités des forces policières--du moins c'est mon impression, moi qui m'occupe de ce domaine depuis assez longtemps. Il n'y a donc pas beaucoup de marge pour éviter l'établissement d'un rapport dans le cas d'une intervention auprès d'un individu. Cela suppose, évidemment qu'un rapport soit rédigé, comme il doit l'être en vertu de la loi.
M. Peter MacKay: Je crois que l'énorme majorité, 99 p. 100, des policiers prennent des notes complètes et agissent en toute bonne foi, mais ce dispositif et ce mécanisme d'établissement de rapports reposent en grande partie sur le principe de la divulgation volontaire et de la bonne volonté des agents de la force publique. Vous êtes d'accord?
M. Richard Mosley: Les agents de la force publique doivent établir des rapports pour se conformer à leurs responsabilités légales. Il est clair que s'ils ne le font pas, il y a des recours disciplinaires ou même, dans des cas pertinents, des sanctions plus lourdes. Le plan de recherche dans son ensemble n'est pas censé dépendre de la bonne volonté de quelqu'un à qui l'on demande d'établir un rapport, mais doit au contraire s'appuyer sur la collecte d'information auprès de diverses sources qui, collectivement, devraient nous donner un aperçu complet et exhaustif de la façon dont la loi sera appliquée.
º (1610)
M. Peter MacKay: Vous avez raison, je m'excuse. La bonne volonté n'est peut-être pas le bon terme, il s'agit plutôt de professionnalisme et de respect de ces exigences. Mais encore une fois, ce qui m'inquiète par-dessus tout, c'est que nous abordons ici des domaines policiers totalement nouveaux qui n'existaient pas auparavant. Je suis sûr que vous êtes d'accord. Même à l'heure actuelle, avec les exigences de divulgation découlant de la jurisprudence et les nouvelles dispositions du Code criminel, il y a malheureusement encore des cas d'invididus véreux. Si de telles situations menacent le système, cet examen sera extrêmement important pour établir si l'on doit continuer d'utiliser ces nouveaux pouvoirs et s'ils sont justifiés, compte tenu des chiffres et des données qui sont censés être recueillis.
Merci.
Le président: Merci.
Monsieur Wilfert.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je suis désolé d'avoir raté le début de votre exposé, mais dans ce projet de loi, nous essayons de trouver un équilibre entre l'intérêt public et l'intérêt des particuliers. Il y a une expression qui revient sans cesse, c'est le facteur de responsabilité. J'imagine que vous connaissez bien la législation américaine. Pourriez-vous très brièvement nous dire où il y a divergence et où il y a convergence dans nos deux démarches sur cette question, où il y a une responsabilité auprès du Congrès aux États-Unis et auprès du Parlement dans notre cas?
J'ai aussi une ou deux questions précises sur la coordination entre les gouvernements fédéral et provinciaux.
M. Richard Mosley: Il y a des similitudes entre ce projet de loi, la Patriot Act aux États-Unis et la loi analogue du Royaume-Uni. Dès que le projet de loi C-36 a été présenté au Parlement, nous avons établi un tableau comparatif que nous avons communiqué au comité permanent. Nous serions heureux de vous transmettre une version à jour de ce tableau si vous souhaitez comparer de plus près les deux lois.
Il y a dans la loi américaine une clause de temporarisation concernant les dispositifs d'écoute. La loi américaine n'a pas de dispositions strictement comparables aux deux dispositions auxquelles s'applique la clause de temporarisation du projet de loi C-36, mais les Américains avaient et ont toujours des mécanismes analogues dans leur loi d'application générale. Ils ont par exemple une disposition concernant les audiences d'investigation. Les Américains recueillent les informations dans le contexte d'un grand jury, qui peut procéder ensuite à une mise en accusation. En octroyant l'immunité et en levant le droit de recours au cinquième amendement des individus, on oblige les témoins à comparaître et à témoigner devant ces grands jurys à l'appui d'une enquête et d'une poursuite. C'est une façon différente d'atteindre le même objectif que celui qui est recherché avec le mécanisme d'audience d'investigation dans le projet de loi C-36.
Les Américains ont aussi des procédures en vertu desquelles ils peuvent appréhender et détenir des individus pendant certaines périodes. Ils peuvent le faire par exemple en vertu de leur loi sur l'immigration. Ces dispositions ont été adoptées sous forme d'amendements à la Patriot Act américaine. On peut garder des personnes en tant que témoins essentiels, et s'est fait depuis le 11 septembre.
Donc, les dispositions de leur loi ne sont pas rigoureusement identiques à celles du projet de loi C-36 ou de nos autres lois d'application générale, mais elles ont grosso modo le même but.
º (1615)
M. Bryon Wilfert: Merci.
Monsieur le président, j'aimerais bien avoir un exemplaire de cette comparaison.
Le président: Vous parlez du document où il y a des comparaisons avec la loi américaine?
M. Bryon Wilfert: Oui.
M. Richard Mosley: Avec les lois américaine et britannique. Nous avons une version à jour de ce document que nous nous ferons un plaisir de communiquer à votre attaché de recherche.
Le président: À M. Wilfert d'abord, mais notre attaché de recherche aimerait beaucoup lui aussi jeter un coup d'oeil sur ce document.
Merci, monsieur Wilfert.
M. Bryon Wilfert: Merci.
Le projet de loi stipule que le Parlement, un comité ou quelque chose d'autre, procédera à un réexamen complet des dispositions et du fonctionnement de cette loi au bout de trois ans. Tous les rapports annuels des divers services de police seront-ils regroupés en un rapport consolidé? Y aura-t-il une coordination pour examiner le contenu de chacun de ces rapports? Il pourrait très bien y avoir plus de 20 rapports. Y aura-t-il un mécanisme de regroupement ou de contrôle d'ensemble pour que toutes ces informations soient présentées sous une forme reconnaissable?
M. Richard Mosley: On s'est entendu pour comparer les notes sur ces rapports. Les provinces ne sont pas obligées de partager leurs rapports avec le gouvernement fédéral, mais lors de nos entretiens avec les fonctionnaires provinciaux, il a été entendu que ces informations seront échangées avant que les rapports soient publiés. Je pense que la majorité de ces rapports seront des rapports «néant», c'est-à-dire qu'il n'y aura simplement rien à dire.
M. Bryon Wilfert: C'est un simple espoir.
M. Richard Mosley: Il faut l'espérer.
M. Bryon Wilfert: Mais dans le pire des cas, si vous n'échangez pas ces informations avec le gouvernement fédéral, en théorie... Nous avons connu le problème dans le passé lorsque des informations n'ont pas été communiquées ou se sont égarées. Alors quand vous dites qu'une partie de ces informations seront partagées, au moins avant d'être publiées, qui va les recevoir?
M. Richard Mosley: Je parlais spécifiquement des rapports exigés par la loi. Il y a déjà eu énormément de partage d'informations sur les pratiques exemplaires concernant les réactions dans la foulée du 11 septembre, et cela va se poursuivre. Cet échange est permanent et s'effectue dans un esprit de coopération et de collaboration mutuelles. Pour ce qui est des rapports particuliers, c'est à chaque ministre, et non aux cadres supérieurs, qu'il incombera de veiller à ce que le rapport soit établi. J'imagine que nous en discuterons avant qu'ils soient déposés au Parlement au niveau fédéral ou publiés au niveau provincial.
M. Bryon Wilfert: Merci beaucoup.
Le président: D'autres membres du comité peuvent avoir un deuxième tour. Il nous reste du temps. J'ai quelques questions à poser moi-même.
En particulier--c'est vraiment un peu tiré par les cheveux--votre ébauche de document de rapport, qui est en fait je suppose le document que vous avez préparé puis envoyé maintenant aux provinces, traite aux points 34 et 35 du paragraphe 83.3(6). C'est un paragraphe de la loi que j'avais déjà remarqué. Il n'a pas été révisé, je comprends bien pourquoi et je vais l'expliquer. Il s'agit de la mise sous garde préventive et de l'éventuelle remise en liberté avec engagement. Elle dit qu'une personne placée sous garde doit être présentée à un juge provincial dans un délai de 24 heures. C'est le paragraphe 83.3(6). L'alinéa a) précise 24 heures, mais l'alinéa b) prévoit une exception en disant que, si un juge de la cour provinciale n'est pas disponible, ce doit être fait le plus tôt possible. Donc, on a l'option de faire comparaître la personne devant un juge dans un délai de 24 heures, mais s'il n'y a pas de juge disponible, il faut le faire le plus tôt possible. C'est ce «le plus tôt possible» qui me dérange, étant donné que le public peut être extrêmement sensible aux questions de libertés civiles liées à ces mises sous garde. J'aurais aimé que l'on rédige quelque chose d'un peu plus précis que «le plus tôt possible», sachant que nous ne soucions pas tellement de la bonne foi des policiers mais plutôt des problèmes de mauvaise foi.
Je m'inquiétais en pensant à des cas au Canada où la police déciderait simplement de frapper fort et ne pouvait pas trouver de juge provincial dans les 24 heures. La personne arrêtée pourrait en fait être mise sous garde en vertu de ces articles pour n'être remise en liberté que deux ou trois jours plus tard, après la fin de semaine, qu'un juge soit disponible dans les 24 heures ou pas. Je pense qu'il aurait mieux valu demander dans le questionnaire si la personne était restée en détention au-delà des 24 heures, parce que j'ai toujours trouvé que c'était trop flou. Je regrette qu'il soit possible de garder quelqu'un pendant plus de 24 heures sans le faire comparaître devant un juge. Ça aurait pu être noté. Apparemment, il n'y a pas d'endroit où dire, oups, pardon, nous n'avons pas pu trouver de juge provincial. Bien sûr, je suppose que dans les zones urbaines, il y a beaucoup de juges provinciaux disponibles.
Pouvez-vous simplement prendre note de ce problème que je viens d'exposer? C'est une question de libertés civiles.
º (1620)
M. Richard Mosley: Je voudrais simplement préciser que c'est uniquement pour tenir compte de la réalité géographique du Canada. En fait, je trouve que ce terme est plutôt plus fort que l'expression que l'on trouve souvent dans le Code, «dès que cela est matériellement possible», qui donne un peu plus de latitude, à mon avis. «Le plus tôt possible» veut dire dès que l'on peut matériellement trouver un juge devant lequel faire comparaître la personne. Mais je voudrais attirer votre attention sur le point 35: «Temps écoulé entre l'arrestation et la comparution devant le juge: x heures». Est-ce que cela ne répond pas à votre question?
Le président: Peut-être que oui. Si l'on indique le nombre d'heures exact là, alors oui. C'est juste.
La deuxième observation que je voulais faire est celle-ci: les forces de police ou les provinces ont-elles abordé la question des coûts administratifs d'observation pour tout cela avec le gouvernement fédéral? On m'a posé la question. A l'extérieur, on réagit parfois en considérant que c'est du domaine fédéral, le terrorisme fait partie des compétences du gouvernement fédéral. Cela nous a été imposé. Nous devons travailler selon les indications des autorités fédérales, et nous n'avions réservé aucune ressource pour cela. Est-ce que la question a été soulevée auprès du ministère de la Justice ou du ministère du Solliciteur général?
M. Paul E. Kennedy: Je peux essayer de répondre à cela. Vous parlez non pas de l'administration des questionnaires, mais de l'administration de la loi. On a demandé à mes fonctionnaires d'examiner la question. Nous sommes en train de préparer des modèles, comme nos collègues provinciaux, pour voir quels seraient les coûts exacts, le cas échéant. Certains chefs de police ont déclaré publiquement qu'ils voudraient x millions de dollars pour assurer ces fonctions. Je reviens cependant au commentaire de mon collègue M. Mosley qui disait qu'en réalité, dans le domaine du terrorisme, si l'on se place uniquement de ce point de vue, les renseignements auxquels on aurait accès et qui permettraient d'entreprendre une investigation et de la mener à bien, viendraient principalement de preuves qui se trouvent en possession du gouvernement fédéral, et non au gouvernement provincial. Je ne sais donc pas vraiment dans quelle mesure nos collègues provinciaux et municipaux seraient touchés par cet aspect-là de la question.
Il y a eu beaucoup d'angoisse immédiatement après le 11 septembre, naturellement. Au fur et à mesure que le temps passe, nous pensons que les autorités fédérales vont mettre en place des procédures permettant d'identifier et de surveiller ces personnes et de faire des enquêtes à leur sujet. À mon avis, le rôle des provinces sera différent et ce sera plutôt un rôle de première intervention, dans lequel nous pouvons les aider et où nos collègues provinciaux seront probablement les premiers sur le terrain. Il y a des dispositions financières distinctes pour cela par le biais de l'OCIPEP, le Bureau de la protection de l'infrastructure essentielle et de la protection civile, où, en consultation avec eux, nous mettons de l'argent et de la formation à la disposition de nos collègues provinciaux pour qu'ils puissent jouer un rôle.
Il y a une différence, d'après moi, entre le rôle qu'ils pensent avoir à jouer et la réalité proprement dite, c'est-à-dire quels seront les organismes qui assureront l'administration, les investigations et l'exécution de cette loi. Mais la question a été soulevée.
º (1625)
Le président: Merci.
Monsieur Sorenson.
M. Kevin Sorenson: Il s'agit de la confidentialité du rapport et l'on dit ici «protégé lorsque que complété», mais est ce que le SCRS a accès à cela? Je ne sais pas s'il y aurait là des renseignements susceptibles de les aider.
M. Paul E. Kennedy: Je peux parler au nom du ministère du Solliciteur général. Je ne sais pas quels seraient les renseignements intéressants pour le SCRS dans ce questionnaire. Il est clair qu'il y a des discussions entre le SCRS et les diverses forces de police lorsque c'est nécessaire. Le SCRS a des pouvoirs en vertu de la loi qui le régit--je crois que c'est en vertu de l'alinéa 19)2)a)--partager des renseignements relatifs à la sécurité nationale lorsqu'ils peuvent indiquer qu'un acte criminel va être commis. C'est le lien, parce qu'à différents stades, le terrorisme est lié à des activités criminelles. Je ne vois vraiment rien d'intéressant là. Espérons que les renseignements dont ils disposent sont un peu plus profonds que ce qui apparaît ici. Si les polices municipales ou provinciales ont quelque chose d'intéressant, elles le communiquent soit au SCRS, soit à la GRC, qui pourrait collaborer avec le service de renseignement.
Le président: Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay: Pour continuer dans cette veine--et c'est peut-être très éloigné et un peu hypothétique--est-ce qu'une opération partagée ou conjointe à laquelle nos alliés pourraient participer, principalement les Américains, serait couverte par cette collecte de renseignements? Pouvez-vous envisager un cas où l'on refuserait de communiquer les renseignements, en pensant bien sûr à l'importance de la confidentialité et au fait qu'il ne faut pas compromettre les investigations dont certaines peuvent être très longues? J'essaie de voir quelle peut être l'étendue des renseignements recueillis et si la CIA ou le FBI pourraient s'exclure de ces dispositions lorsqu'ils travaillent en collaboration avec une force de police canadienne.
M. Richard Mosley: Les exigences de la loi par rapport aux données ne sont pas propres à tel ou tel cas individuel, il y a donc peu de chance que des renseignements importants au plan opérationnel figurent dans ces modèles de données. En dehors de cela, je ne peux vraiment pas faire de commentaires sur votre question, sauf en vous renvoyant aux amendements à la Loi sur la preuve au Canada qui prévoit des mécanismes pour protéger l'information dont la divulgation pourrait être préjudiciable pour la défense nationale, la sécurité nationale et les relations internationales.
º (1630)
M. Peter MacKay: Je déduis donc de votre réponse--et je sais que tout cela est un peu sybillin--que vous devez admettre qu'il pourrait y avoir de vastes opérations dans lesquelles un grand nombre de personnes seraient à la poursuite d'une cellule terroriste et qui pourraient avoir un impact majeur sur les données quantitatives. Si cela était exclu, je pense que les renseignements figurant dans les rapports pourraient en être faussés.
M. Richard Mosley: Je ne vois pas vraiment pourquoi on exclurait les données quantitatives. Il pourrait y avoir à la rigueur un problème dans le cas d'un examen des dossiers, et il pourrait y avoir des sensibilités particulières, pour des raisons de sécurité nationale, à l'idée de donner accès à nos chercheurs à un dossier particulier. Dans ces circonstances, le problème pourrait se poser.
M. Peter MacKay: C'est bien.
Finalement, et je pense que le président y a fait allusion, il y a la question de la formation. En dehors des ressources--et je vois que l'on nous a donné un CD vidéo--a-t-on déjà distribué ce genre de renseignements aux forces de police pour leur donner une formation et un manuel pour démarrer le processus? Est-ce que ça déjà été fait?
M. Richard Mosley: Non, pas pour ce qui est d'un manuel, mais il y a déjà eu des programmes de formation pour la police, par exemple, la session de trois jours en avril à l'École de police du Canada.
M. Peter MacKay: Merci.
M. Richard Mosley: De plus, le vidéo qui est maintenant sur ce CD a été lancé à la réunion de l'Association canadienne des chefs de police en janvier.
M. Paul E. Kennedy: Au fait, je félicite mes collègues, c'est un bon CD. Vous devriez le regarder. Lorsqu'il y a une nouvelle loi, on doit toujours faire des efforts au fil des années pour arriver à lui donner une forme conviviale qui soit vraiment utile aux gens et ne reste pas sur les tablettes. Mes collègues de la GRC qui travaillent avec le ministère de la Justice ont fait un excellent travail avec ce CD. Si vous le mettez, il ne va pas vous endormir--je pense que ça va vous intéresser, pendant un moment en tout cas.
Le président: Pour remettre tout cela dans un contexte pratique, le fait qu'il n'y ait pas eu d'incidents déclarés relatifs à l'emploi de ces alinéas veut dire que soit, il ne se passe absolument rien, soit il se passe quelque chose mais il n'a pas été nécessaire de conclure une investigation par une mise sous garde ou une audience. Je pense que nous devrons entrer davantage dans les détails, mais nous verrons en temps et lieu. Ces articles ne seront utilisés sans doute que si le moment est venu d'éviter un incident ou d'agir rapidement. Nous ne sommes pas encore arrivés à ce stade pratique dans aucune des situations potentielles existantes.
M. Paul E. Kennedy: C'est une excellente observation. Pour revenir à l'une des questions de M. MacKay, quant à savoir si la période de trois ans était appropriée ou pas, il est clair que si l'on n'examine que la loi, ce seront les événements qui détermineront s'il est nécessaire d'y avoir recours. Le gouvernement du Canada a entrepris des activités en rapport avec les menaces terroristes depuis un certain temps, sinon nous n'aurions pas eu de service de renseignements doté d'un mandat dans ce domaine. Naturellement, il y a les dispositions que l'on utilise deux ou trois fois par an en vertu de la Loi sur l'immigration, pour expulser des personnes dont la présence ne nous paraît pas souhaitable. Je crois qu'il faut replacer cette loi dans le contexte approprié. Ce sont de nouveaux pouvoirs et instruments mis à la disposition de l'État, si jamais une situation atteint un stade de crise. S'il y a des moyens plus faciles de le faire, on les utilise. Je crois que M. Elcock a expliqué, lorsqu'il a comparu, ce continuum de recours dont dispose l'État, jusqu'aux plus intrusifs, qui seraient certains des éléments de cet ensemble.
Le président: Très bien.
Chers collègues, c'est suffisant. Je vous remercie messieurs Mosley et Kennedy.
La séance est maintenant levée.