Publications de la Chambre
Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 173
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 22 avril 2002
1110 |
Les travaux de la Chambre |
Le président suppléant (M. Bélair) |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
La Loi sur le cheval national du Canada |
M. Murray Calder (Dufferin--Peel--Wellington--Grey, Lib.) |
Adoption de la motion |
1115 |
M. Scott Reid (Lanark--Carleton, Alliance canadienne) |
1120 |
1125 |
M. Peter Stoffer (Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore, NPD) |
M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.) |
1130 |
M. Gerald Keddy (South Shore, PC) |
1135 |
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.) |
1140 |
M. Richard Harris (Prince George--Bulkley Valley, Alliance canadienne) |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Richard Harris |
1145 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Joe Jordan |
Suspension de la séance |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Suspension de la séance 11 h 45 |
Reprise de la séance |
Reprise de la séance à midi |
1155 |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
Loi de 2001 modifiant le Code criminel |
M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne) |
1200 |
1205 |
M. Richard Harris (Prince George--Bulkley Valley, Alliance canadienne) |
1210 |
1215 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Richard Harris |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
1220 |
1225 |
1230 |
1235 |
Le vice-président |
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC) |
1240 |
1245 |
1250 |
1255 |
M. Roy Bailey (Souris--Moose Mountain, Alliance canadienne) |
1300 |
1305 |
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC) |
1310 |
M. Roy Bailey |
M. Richard Harris (Prince George--Bulkley Valley, Alliance canadienne) |
M. Roy Bailey |
1315 |
Le vice-président |
Le vice-président |
Le Code criminel |
M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne) |
1320 |
M. Richard Harris (Prince George--Bulkley Valley, Alliance canadienne) |
1325 |
1330 |
M. Gerald Keddy (South Shore, PC) |
1335 |
1340 |
M. Roy Bailey (Souris--Moose Mountain, Alliance canadienne) |
1345 |
1350 |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
1355 |
Le vice-président |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
La Semaine nationale de l'action bénévole |
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.) |
La Semaine de la sensibilisation au don d'organes |
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne) |
1400 |
Les infrastructures |
M. Marcel Proulx (Hull--Aylmer, Lib.) |
L'environnement |
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
Compétences Canada |
Mr. Larry Bagnell (Yukon, Lib.) |
L'environnement |
M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne) |
1405 |
Billy Green |
M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.) |
Le Jour de la Terre |
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne--Blainville, BQ) |
Marion Cunningham |
M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.) |
Les pompiers |
M. Andy Burton (Skeena, Alliance canadienne) |
L'Arménie |
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.) |
1410 |
L'environnement |
M. Peter Stoffer (Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore, NPD) |
Le Sommet des Amériques |
M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ) |
Les affaires étrangères |
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
L'environnement |
M. Gerald Keddy (South Shore, PC) |
La sensibilisation aux dons d'organes |
M. Janko Peric (Cambridge, Lib.) |
1415 |
Vaisakhi |
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne) |
QUESTIONS ORALES |
Le gouvernement du Canada |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne) |
1420 |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
Le Protocole de Kyoto |
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ) |
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ) |
1425 |
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) |
Le commerce |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.) |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) |
La défense nationale |
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Le protocole de Kyoto |
M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne) |
1430 |
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) |
M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne) |
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) |
La défense nationale |
M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
1435 |
M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne) |
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Les infrastructures routières |
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ) |
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.) |
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ) |
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.) |
Les marchés publics |
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne) |
L'hon. Don Boudria (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne) |
L'hon. Don Boudria (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
1440 |
L'âge du consentement à des activités sexuelles |
Mme Judi Longfield (Whitby--Ajax, Lib.) |
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
La fiscalité |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.) |
Le logement |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
Le Président |
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.) |
L'éthique |
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC) |
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.) |
1445 |
Le Service correctionnel du Canada |
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne) |
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.) |
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne) |
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.) |
Le bois d'oeuvre |
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ) |
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.) |
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ) |
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.) |
Le Service correctionnel du Canada |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.) |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
1450 |
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.) |
Le commerce |
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.) |
L'hon. Gar Knutson (secrétaire d'État (Europe centrale et orientale et Moyen-Orient), Lib.) |
La sécurité dans les aéroports |
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne) |
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.) |
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne) |
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.) |
L'industrie du transport aérien |
M. Mario Laframboise (Argenteuil--Papineau--Mirabel, BQ) |
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.) |
L'environnement |
M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.) |
1455 |
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) |
Santé Canada |
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne) |
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.) |
Les pêcheries |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia--Matane, BQ) |
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
Les marchés de l'État |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.) |
L'Agence canadienne des douanes et du revenu |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.) |
La recherche et le développement |
M. Brent St. Denis (Algoma--Manitoulin, Lib.) |
1500 |
L'hon. Maurizio Bevilacqua (secrétaire d'État (Sciences, Recherche et Développement), Lib.) |
Le Président |
Question de privilège |
Le député de Esquimalt—Juan de Fuca |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
Le Président |
1505 |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
1510 |
1515 |
M. David Pratt |
Le Président |
M. John Reynolds |
1520 |
1525 |
1530 |
Le Président |
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ) |
1535 |
1540 |
M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD) |
1545 |
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC) |
1550 |
M. Darrel Stinson |
Le vice-président |
M. Peter MacKay |
M. Richard Harris |
Le vice-président |
M. Peter MacKay |
1555 |
1600 |
M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.) |
M. Keith Martin |
Le vice-président |
M. John Bryden |
M. Vic Toews |
Le vice-président |
M. John Bryden |
1605 |
1610 |
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne) |
1615 |
1620 |
1625 |
Le vice-président |
M. Keith Martin |
1630 |
M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.) |
M. Keith Martin |
1635 |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
M. Keith Martin |
1640 |
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.) |
1645 |
1650 |
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne) |
L'hon. David Collenette |
M. Keith Martin |
L'hon. David Collenette |
1655 |
Le vice-président |
M. Gerald Keddy (South Shore, PC) |
1700 |
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.) |
1705 |
M. Gerald Keddy |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
1710 |
Mme Marlene Catterall |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
AFFAIRES COURANTES |
La Loi sur le système de justice pénale pour adolescents |
M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne) |
Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi |
Le Code criminel |
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne) |
Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi |
1715 |
Loi sur la protection d'espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial |
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne) |
Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi |
La Loi de l'impôt sur le revenu |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi |
M. Peter Adams |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
Les comités de la Chambre |
Procédure et affaires de la Chambre |
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
Adoption de la motion |
1720 |
Pétitions |
Les affaires autochtones |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
M. Gary Lunn |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
Questions au Feuilleton |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
Initiatives ministérielles |
Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
1725 |
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ) |
1730 |
1735 |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
1740 |
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
1745 |
1750 |
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC) |
1755 |
1800 |
1805 |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
M. Dale Johnston |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
M. Joe Jordan |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
MOTION D'AJOURNEMENT |
Les pêcheries |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
1810 |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
1815 |
M. Loyola Hearn |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
M. Geoff Regan |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
La Société Radio-Canada |
M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD) |
1820 |
M. Geoff Regan |
1825 |
M. Yvon Godin |
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Le président suppléant (Mme Bakopanos) |
CANADA
Débats de la Chambre des communes |
|
• |
|
• |
|
• |
|
COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)
Le lundi 22 avril 2002
Présidence de l'honorable Peter Milliken
La séance est ouverte à 11 heures.
Prière
* * *
[Traduction]
Les travaux de la Chambre
[Travaux de la Chambre]
Le président suppléant (M. Bélair): Conformément au paragraphe 81(14) du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la motion qu'elle abordera demain lors de la prise en considération des crédits:
Que le gouvernement dépose immédiatement un projet de loi en vue de protéger les enfants des prédateurs sexuels, comprenant des mesures qui haussent l'âge requis pour le consentement à au moins 16 ans ainsi que des mesures qui interdisent la création ou l'utilisation de productions explicites du point de vue sexuel dans lesquelles des enfants sont exploités, ou des productions semblant représenter ou décrire des enfants en train de se livrer à une activité sexuelle. |
Cette motion, inscrite au nom du député de Regina--Lumsden--Lake Centre, fera l'objet d'un vote. Des exemplaires de la motion sont disponibles au Bureau.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Traduction]
La Loi sur le cheval national du Canada
La Chambre passe à l'étude du projet de loi S-22, Loi portant reconnaissance du cheval canadien comme le cheval national du Canada, dont un comité a fait rapport sans proposition d'amendement.
M. Murray Calder (Dufferin--Peel--Wellington--Grey, Lib.) propose: Que le projet de loi soit agréé.
Le président suppléant (M. Bélair): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Une voix: Avec dissidence.
(La motion est adoptée.)
M. Murray Calder propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.
—Monsieur le Président, je suis honoré de parler à nouveau du projet de loi S-22 qui reconnaîtrait la race connue sous le nom de cheval canadien comme le cheval national du Canada.
J'espère que les députés ont pu se rendre compte par eux-mêmes à quel point ce cheval est superbe lorsque nous avons amené quelques chevaux sur la Colline mercredi dernier. Ce cheval solide mais doux et intelligent est un animal que nous pouvons tous aimer et dont nous pouvons être fiers. Il serait un symbole parfait pour tout le Canada. Comme j'ai beaucoup parlé à l'étape de la deuxième lecture, je serai donc bref pour donner à d'autres députés la chance de conclure le débat sur ce projet de loi aujourd'hui.
Pourquoi le cheval canadien? C'est la seule race qui a été développée au Canada. Toutes les autres races nous viennent d'autres pays. La race qui a été créée au Canada est différente de ses ancêtres européens et s'est adaptée aux dures conditions canadiennes. C'est vraiment notre cheval.
Il a joué un rôle dans l'histoire du Canada depuis son arrivée, au milieu du XVIIe siècle, en provenance des écuries de Louis XIV. Il s'est révélé important non seulement en Nouvelle-France pendant plusieurs siècles, mais aussi ailleurs au Canada, puisqu'il a contribué à la colonisation des Maritimes, de l'Ontario et de l'Ouest. Comme plusieurs députés en ont fait la dure expérience, dans l'Ouest, il s'est gagné nombre d'ardents défenseurs qui sont disposés à soutenir, preuves à l'appui, que ce petit cheval canadien y a également de solides racines.
Le cheval de race canadienne a contribué à façonner notre histoire, notamment en transportant nos troupes à l'occasion de plusieurs guerres. Il a également servi de stock génétique pour la création de plusieurs grandes races chevalines nord-américaines. Par conséquent, sa reconnaissance donne un regain de vigueur à l'ensemble de l'industrie chevaline. À deux reprises, il s'est presque trouvé en voie d'extinction, entre autres dans les années 1970, alors qu'on en comptait moins de 400. La reconnaissance nationale devrait augmenter la popularité de cette race patrimoniale auprès des éleveurs et en assurer la survie.
D'autres pays ont reconnu certaines races chevalines à l'échelon national. Pour n'en citer que quelques-uns, il s'agit entre autres du Mexique, du Pérou, du Brésil, de l'Écosse, de l'Irlande et du Danemark. En tant que Canadiens, nous devrions aussi être fiers de ce qui nous appartient et de ce qui est unique au Canada.
J'ai été impressionné de voir comment ce petit cheval si robuste a rassemblé les Canadiens non seulement de tous les coins du pays, mais aussi de toutes les allégeances politiques. J'ai obtenu l'appui de l'ensemble de la Chambre pour ce projet de loi. En outre, dans le cadre de cette initiative, des éleveurs et des amateurs de chevaux de l'Est et de l'Ouest ont communiqué avec moi et ont établi des contacts entre eux.
Mercredi dernier, j'ai eu le plaisir de faire un tour de voiture à cheval avec le député de Nanaimo--Cowichan. D'autres députés ont mis de côté leurs allégeances partisanes pour exprimer leur enthousiasme pour ce cheval. L'événement qui a eu lieu sur la Colline parlementaire mercredi dernier a été conjointement parrainé par les députés des quatre partis représentés à la Chambre. J'avoue que jusqu'ici, les députés de l'opposition ont grandement contribué au succès de cette mesure législative.
J'ose espérer que, dans un esprit de coopération entre les partis, le projet de loi sera adopté très rapidement.
M. Scott Reid (Lanark--Carleton, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'appuie moi aussi le projet de loi S-22 qui ferait reconnaître le cheval canadien comme cheval national du Canada.
Mes brefs propos se répartiront en quatre volets: premièrement, les projets de loi du Sénat et comment on devrait les traiter à la Chambre; deuxièmement, la valeur des symboles; troisièmement, la race canadienne convient-elle étant donné les races rivales qui veulent aussi être reconnues comme cheval national du Canada; et enfin, les raisons pour lesquelles le cheval canadien mérite de devenir notre race nationale et d'être reconnu à ce titre.
Passons d'abord au premier point. Certains se sont demandé, et il en a été question dans un numéro relativement récent du Hill Times, si les projets de loi du Sénat devaient faire l'objet de débat et d'étude à la Chambre des communes étant donné qu'on saborde de plus en plus les projets de loi et les mesures d'initiative parlementaire à la Chambre.
Les projets de loi d'initiative parlementaire issus de la Chambre sont de moins en moins pris en considération pour diverses raisons. Tout d'abord, le gouvernement est peu disposé à permettre aux députés d'arrière-ban des différents partis de présenter des projets de loi sur des sujets importants aux yeux de leurs électeurs. Malheureusement, un des rares moyens d'obtenir que de tels projets de loi soit étudiés à la Chambre est de les faire émaner du Sénat, lequel n'est pas contrôlé dans une aussi large mesure par le gouvernement. C'est pourquoi le présent projet de loi ne devrait pas être rejeté ou pris en considération pour une autre raison que sa seule valeur intrinsèque, comme un projet de loi de la Chambre des communes. Voilà tout ce qu'il y a à dire sur ce point.
En fait, un projet de loi est un projet de loi. Les fondateurs de notre pays se préoccupaient de la nature des projets de loi issus du Sénat. C'est pourquoi ils ont inclus des restrictions dans notre Constitution. Par exemple, les projets de loi de finances ne peuvent venir du Sénat. Nous devrions respecter leur volonté et établir qu'un projet de loi ne portant pas sur les finances est légitime, qu'il provienne du Sénat ou de la Chambre. Pour régler le problème des trop grandes limites imposées aux initiatives parlementaires, nous devrions choisir de nous pencher sur le Règlement de la Chambre et le comportement des comités de la Chambre, de préférence à toute autre approche.
Je passe maintenant à la question de la valeur des symboles. Certains prétendent que nous ne devrions pas nous inquiéter de savoir si nous allons avoir ou non un cheval national. Je ne suis pas d'accord.
Les députés devraient passer en revue les symboles que nous avons. Nous avons un animal national, le castor. Il fut un temps où cela aurait pu sembler stupide, mais c'est un symbole unificateur. Il nous vient de notre histoire. Le castor tient une place importante dans notre histoire, dans celle de la Nouvelle-France, de la Compagnie de la Baie d'Hudson, de la Compagnie du Nord-Ouest et de la colonisation de l'Ouest.
Nous avons également une feuille nationale, la feuille d'érable. L'érable n'est pas endémique au Canada, mais les Canadiens qui voyagent outre-mer et qui rencontrent des personnes arborant une feuille d'érable sur leur sac à dos savent immédiatement qu'ils sont en présence de Canadiens, qu'ils ont un point commun; ils ressentent une certaine camaraderie. Je ne pense pas qu'il y ait un seul Canadien qui n'ait pas éprouvé un sentiment de fierté en regardant nos athlètes défiler dans le stade de Salt Lake City, arborant une feuille d'érable sur leur blouson. Même si l'arbre n'est pas endémique à l'ensemble du pays, c'est un symbole unificateur.
Troisièmement, nous avons un hymne national. À l'origine, Ô Canada concernait strictement le Québec. Les temps ont changé, et c'est maintenant un symbole unificateur pour tout le Canada. Chacun d'entre nous s'est senti envahi par une vague d'émotion quand nous avons vu hisser le drapeau canadien, la feuille d'érable, à Salt Lake City, pendant que retentissait Ô Canada.
Enfin, nous avons une journée nationale, et je ne vois donc pas pourquoi un cheval national n'aurait pas sa place dans cet ensemble. Selon moi, cela ajouterait à la richesse de nos symboles. Plus grande est la diversité des symboles qui nous unissent, plus grande sera notre unité nationale.
Je veux maintenant traiter de la question des races rivales, des autres chevaux qui pourraient être considérés comme le cheval national du Canada. Il n'y a que deux autres races qui soient originaires du Canada: le poney de Terre-Neuve et le poney de l'île de Sable. Ces deux races sont d'origine canadienne. Bien entendu, ni l'une ni ne se retrouve sur l'ensemble du territoire; c'est particulièrement vrai du poney de l'île de Sable, et ce, en dépit de sa réputation généralisée. Le poney de l'île de Sable n'est pas une race officiellement inscrite, alors que le cheval canadien l'est. C'est la seule race officiellement inscrite qui soit originaire du Canada. C'est un bon argument en faveur de sa désignation comme cheval national.
Certains ont proposé que le mustang soit désigné cheval national du Canada. Le nom officiel du mustang est le mustang américain. Introduit par les Espagnols dans les années 1500, cette race s'est répandue de façon endémique principalement au Mexique et dans le sud-ouest américain. Le Canada, et en particulier les Prairies, est trop froid pour que le mustang puisse y survivre sans une protection humaine. Il serait donc un mauvais choix en tant que cheval national du Canada.
Chose intéressante, le mustang est en partie dérivé du cheval canadien. Durant les années 1860, de nombreux chevaux canadiens utilisés par les deux camps durant la guerre de Sécession se sont échappés, ce qui explique que le mustang américain actuel possède des gênes du cheval canadien, entre autres.
C'est le cas de plusieurs autres espèces de chevaux américains, notamment le Morgan, le Tennessee Walking Horse, l'American Saddlebred, le Missouri Fox Trotter et le Standardbred. Toutes ces races portent des gênes du cheval canadien, ce qui est une bonne raison pour ne désigner aucun d'entre eux comme notre cheval national. Le cheval canadien a cependant exercé une influence considérable et fait donc la fierté des Canadiens.
On me permettra de faire brièvement l'éloge du cheval canadien et de ses qualités. Le cheval canadien a été introduit en Nouvelle-France en 1665, sous le règne de Louis XIV. Contrairement à de nombreuses autres races chevalines répandues au Canada, comme l'American Saddlebred, le Standardbred, le Morgan, le quarter horse américain et l'Appaloosa, qui étaient originaires des États-Unis, le cheval canadien provenait exclusivement du Canada. Physiologiquement, c'est un animal bien adapté aux conditions qui prévalent au Canada. Fort, pas très gros, ce cheval trapu survit bien dans un climat froid. Il est fiable et fort, d'où son surnom de petit cheval de fer.
Pour donner une idée de la vigueur de ce cheval, permettez-moi de lire un extrait d'une lettre envoyée à mon bureau de circonscription. Elle provient d'une personne qui possède quelques chevaux canadiens. Voici ce qu'elle écrit:
En plus de mes deux chevaux canadiens, je possède deux quarter horses américains. Au cours de la dernière année, mes deux quarter horses ont eu de nombreux problèmes de santé, notamment un problème de claudication. Ils vivent dans le même pâturage que mes chevaux canadiens, qui n'ont guère eu plus qu'une égratignure ou un rhume. Mes deux chevaux canadiens se contentent de peu de nourriture et sont fort bien portants, alors que mes quarter horses ont besoin de grandes quantités de grain pour conserver leur poids-santé. |
Je ne suis pas propriétaire de chevaux moi-même, mais j'apprécie le bon caractère du cheval canadien, parce que mes parents s'occupent de chevaux. Ils exploitent une écurie de randonnée thérapeutique au sud d'Ottawa, et il est absolument essentiel d'avoir un cheval à bon caractère pour offrir des randonnées thérapeutiques aux personnes, surtout des enfants, souffrant de déficiences physiques ou mentales et qui tireront des bienfaits de l'interaction avec le cheval, en sachant que le cheval sera discipliné, obéissant et gentil. La relation qu'elles établissent avec le cheval est tout aussi importante que la physiothérapie que leur procure l'équitation.
Ma circonscription compte plusieurs éleveurs. En décembre dernier, j'ai eu le grand plaisir de me promener dans une voiture tirée par deux splendides chevaux canadiens dans le village de Pakenham, le centre d'élevage du cheval canadien.
Je voudrais conclure en citant un autre passage d'une lettre que j'ai reçue à mon bureau de circonscription et dont l'auteur explique pourquoi un Canadien estime que nous devrions honorer ce cheval. Il écrit:
Nous devrions honorer le cheval canadien, qui a mérité d'être reconnu cheval national du Canada. Le cheval canadien représente vraiment ce que les Canadiens devraient tâcher d'être--fort, intelligent, noble, honnête, travailleur et fidèle à ses racines. Le cheval canadien résiste à la maladie et au froid et on n'a pratiquement jamais entendu parler de claudication à son sujet. Après tout, aucun de nous n'est originaire d'Amérique du Nord, nous descendons tous au contraire d'immigrants d'autres pays qui sont venus ici, se sont adaptés, se sont multipliés et ont produit le grand nombre d'excellents habitants de notre pays. Quelle race de cheval pourrait le mieux représenter notre histoire que celle qui en a fait autant? |
M. Peter Stoffer (Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole au nom du Nouveau Parti démocratique fédéral et que je remercie le député de Dufferin--Peel--Wellington--Grey d'avoir proposé cette troisième et dernière lecture.
Tout le monde connaît l'histoire du cheval qui va chez le vétérinaire et se fait dire par celui-ci: «Pourquoi faites-vous cette tête?» Nombre de Canadiens feraient toute une tête si ce projet de loi présenté par le député n'était pas adopté.
Je voudrais remercier rapidement tous les membres du personnel du député qui ont organisé les promenades en voiture sur la Colline du Parlement jeudi dernier. Quiconque a vu ces quatre chevaux canadiens se sont sans doute émerveillés de leur beauté.
Je voudrais également vous transmettre les salutations de M. John Hart et sa famille, du Margaree Centre, au Cap-Breton. Ils ont des chevaux canadiens et tentent de faire valoir cette question depuis de nombreuses années pour qu'elle porte fruit.
En conclusion, je tiens à donner l'assurance au député et à la Chambre qu'ils n'ont rien à craindre du NDP relativement à cette très importante question.
M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, c'est vraiment un honneur pour moi que d'appuyer ce projet de loi. Cela me donne l'occasion d'attirer l'attention de la Chambre sur un phénomène que l'on a observé sur la banquette où je siège à côté du député de Dufferin--Peel--Wellington--Grey. Par pure coïncidence, les trois députés siégeant côte à côte, soit le député de Scarborough-Centre, le député de Dufferin--Peel--Wellington--Grey et moi-même, qui suis député d'Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, ont présenté dans une période de deux semaines des projets de loi traitant de symboles relatifs à l'unité nationale, au Canada.
Le député de Scarborough-Centre, qui est d'origine grecque, a présenté un projet de loi visant à faire respecter le drapeau canadien. C'était très approprié dans son cas, parce que, ne l'oublions pas, la Grèce est le berceau de la civilisation et des libertés, et je considère le député de Scarborough-Centre comme un homme cultivé ayant présenté un projet de loi concernant les symboles du Canada.
Pour ma part, je suis un homme qui s'en tient aux mots, et mon projet de loi propose de modifier le serment de citoyenneté pour mieux traduire les valeurs consacrées par la charte. Mon projet de loi devait être débattu aujourd'hui, mais c'est avec grand plaisir que j'ai échangé cette période avec le député de Dufferin--Peel--Wellington--Grey, de façon que son projet de loi puisse être étudié. Je déplore que mon propre projet de loi ne puisse faire l'objet d'un vote, mais celui du député a maintenant d'excellentes chances d'être adopté.
Le projet de loi à l'étude vise faire du cheval canadien le cheval national du Canada, ce qui est un très important symbole national. Le député de Dufferin--Peel--Wellington--Grey est agriculteur; c'est donc un homme de la terre qui nous propose un projet de loi portant sur un symbole national. Nous avons donc ici un homme de culture, un homme de mots et un homme de la terre, et c'est aujourd'hui l'homme de la terre qui a le haut du pavé.
Les symboles sont d'une importance cruciale, mais le Canada n'en a pas suffisamment. Deux symboles importants s'imposent à l'esprit. L'un est le castor. Une société de pionniers, composée de gens venus des quatre coins du monde pour défricher nos terres, s'est reconnue dans cet animal industrieux et laborieux.
Il y a un deuxième grand symbole. Il a mis du temps à s'implanter, mais c'est maintenant l'un des symboles les plus importants de tous: la feuille d'érable. Elle est le symbole du Canada non parce que le pays est couvert d'érables, mais plutôt à cause du splendide spectacle que nous donnent ces arbres chaque année, avec leurs teintes de jaune, d'or et de rouge, au grand ravissement de tous les Canadiens. Peu importe leurs origines ethniques, peu importe qui ils sont, tous les Canadiens sont enchantés par les couleurs splendides de l'érable. C'est l'un des éléments dans lesquels les Canadiens se reconnaissent.
Nous avons donc un autre symbole, et c'est le cheval canadien. C'est un symbole très judicieux parce que dès que l'on voit un cheval canadien, on tombe en amour avec lui. Non seulement s'agit-il d'une bête superbe, mais encore il incarne ce caractère industrieux et cette pure gentillesse propres aux Canadiens. L'histoire du cheval canadien remonte au temps du roi de France, Louis XIV, qui avait envoyé le premier chargement de chevaux au Canada. Le cheval canadien est devenu une partie intégrante de notre identité nationale. Il était extrêmement opportun de présenter ce projet de loi à la Chambre. Nous avons la chance maintenant de faire reconnaître ce symbole dans la loi. C'est une occasion extraordinaire qui s'offre à nous, et je tiens à féliciter mon collègue pour être parvenu à mener son projet de loi jusqu'ici.
Enfin, j'aimerais souligner que les symboles sont terriblement importants. Nous n'en avons peut-être pas suffisamment au Canada, même si les symboles nationaux sont les choses qui nous permettent d'affirmer notre identité dans ce monde qui, de nos jours, devient de plus en plus dangereux et effrayant.
Il est très important que les Canadiens prennent bien conscience de leur identité au moyen de symboles qui leur sont propres, et les symboles sont très utiles sur ce plan, parce que nous semblons vivre à une époque marquée par le doute et les tourments. Nous sommes témoins de la montée d'une sorte de nationalisme religieux qui s'apprête à heurter de plein fouet les principes de liberté, de démocratie et d'ouverture que notre pays en est venu à représenter. Des symboles comme le cheval canadien, le drapeau canadien, à propos duquel le député de Scarborough-Centre a présenté un projet de loi et, un jour j'espère, un serment qui rendra compte des valeurs canadiennes fondamentales, représentent l'armure dont les Canadiens auront besoin dans les années à venir pour faire face au nationalisme qui menace les valeurs fondamentales qui les unissent.
Ces valeurs, ce sont l'égalité des chances, la liberté de parole, la démocratie, l'observation de la règle de droit et la quête de la reconnaissance des droits de la personne partout dans le monde. Voilà les valeurs qui sont chères aux Canadiens et qu'incarnent nos symboles.
Le projet de loi présenté par le député de Dufferin—Peel—Wellington—Grey nous fait faire un pas de géant. Le cheval canadien est un symbole important et je suis extrêmement fier d'avoir participé au débat aujourd'hui.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi S-22, Loi sur le cheval national du Canada. Encore une fois, je remercie le député de Dufferin--Peel--Wellington--Grey qui est responsable de la présentation à la Chambre de ce projet du Sénat. Ce dossier progresse grâce à l'excellent travail du député et des sénateurs.
Je suis particulièrement content de prendre la parole concernant le projet de loi S-22. En 1990, à New Ross, ville de la Nouvelle-Écosse où je suis né et où j'habite, Allan Hiltz a lancé un programme portant sur les races rares. Dans son musée, il a introduit ou réintroduit le mouton Cottswold, le cochon Berkshire et le cheval canadien.
En 1990, l'achat au Québec de trois chevaux canadiens a porté à cinq le nombre total des chevaux canadiens non seulement en Nouvelle-Écosse, mais dans l'ensemble des provinces maritimes. Il y en avait trois au musée agricole de Ross, un au lieu historique national de Louisbourg et un autre appartenait à Ruthanne Hart, membre fondatrice du district de l'Atlantique de la Société des éleveurs de chevaux canadiens.
Il y a maintenant 3 000 chevaux canadiens en tout au Canada et 250 poulains naissent chaque année. Onze de ces chevaux se trouvent dans la petite collectivité de New Ross, dont huit au musée agricole de Ross.
Le cheval canadien et les autres animaux patrimoniaux font bien sûr partie du patrimoine canadien. Ils nous ramènent aux racines mêmes de notre existence. Une partie des sujets de souche de la race du cheval canadien ont été transportés de France à La Have, dans le comté de Lunenburg, entre 1632 et 1635. Le sang de ces bêtes continue de couler dans les veines de leurs descendants qui ont été introduits au Québec par la suite.
Il est important de se rappeler que la plupart des chevaux qui se trouvaient déjà en Nouvelle-Écosse avant 1632 avaient été capturés au moment où Argall et ses hommes ont envahi les établissements français en Nouvelle-Écosse et brûlé Port Royal. Ils ont volé les chevaux et les ont ramenés avec eux en Nouvelle-Angleterre. Une bonne partie des animaux reproducteurs qui se trouvaient en Nouvelle-Écosse ont été perdus. Ce sont les chevaux qui ont été emmenés à La Have et ceux qui ont par la suite été introduits au Québec qui sont à la base de la race que nous connaissons aujourd'hui.
Je n'ai pas l'intention de m'étendre sur ce sujet très longtemps. Nous voulons tous que ce projet de loi soit adopté le plus rapidement possible. J'aimerais toutefois faire un autre commentaire.
J'ai écouté avec intérêt les propos du député de Lanark--Carleton. J'aimerais apporter quelques corrections à ce qu'il a dit aux fins du compte rendu. Il n'y a pas de poney de l'île de Sable. Je suis allé à l'île de Sable plusieurs fois et j'ai travaillé au large de ses côtes pendant huit ans. Il y a des chevaux de l'île de Sable et ce sont des descendants directs du cheval canadien. Ce sont des chevaux qui ont été capturés en 1755, 1756 et 1757 au moment de la déportation des Acadiens et qui ont alors été transportés dans l'île de Sable. C'est de là que vient la lignée du cheval de l'île de Sable, tout comme celle du cheval canadien d'ailleurs.
En terminant, j'aimerais féliciter de nouveau le député ministériel qui a déposé ce projet de loi. C'est un bon projet de loi et c'est un jour mémorable pour tous les Canadiens.
[Français]
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le Président, depuis son arrivée dans la colonie de la Nouvelle-France, le cheval canadien a été reconnu pour sa force, son endurance, sa vitalité et son bon tempérament. Depuis le début, il a constitué un appui de taille pour les premiers bâtisseurs, pour les premiers fermiers et bûcherons de la nouvelle colonie.
Le cheval canadien a une plus longue histoire que n'importe quelle race chevaline au Canada. Il est arrivé en 1647 des écuries royales du roi Louis XIV. Dès son arrivée, les nombreux attributs de ce cheval si versatile furent découverts très rapidement et devinrent indispensables aux nouveaux Canadiens.
Ce cheval allait être utilisé partout sur le territoire, et surtout sur les fermes, ainsi que pour le transport des personnes et des biens. Il fut également utilisé pour la course.
[Traduction]
Le cheval canadien a eu un impact dans tout le pays et a été employé très tôt, du Manitoba à la Nouvelle-Écosse. Il a également été employé pour les croisements et a aussi acquis une renommée comme monture de guerre et cheval de charge.
Par exemple, au cours de la guerre civile aux États-Unis, des centaines et des milliers de chevaux canadiens ont été achetés pour la guerre et ont malheureusement été laissés morts sur les champs de bataille américains, tout comme sur d'autres, dont ceux de la guerre des Boers.
Un grand nombre de chevaux canadiens ont également été achetés et expédiés aux États-Unis pour être croisés avec des chevaux de trot et des ambleurs, pour les concours hippiques, et un nombre considérable d'entre eux ont même été envoyés aux Antilles.
Malheureusement, la race a presque disparu en raison de sa popularité comme cheval de guerre et cheval de croisement. Ces activités, ainsi que la négligence générale de tous les chevaux, à cause de l'avènement des outils agricoles mécanisés, a presque sonné le glas pour le cheval canadien.
Heureusement, la race connaît actuellement une renaissance. Grâce à une gestion astucieuse de la part des sélectionneurs, aidés par le gouvernement fédéral et celui du Québec, ainsi que par le Equine Research Centre, à Guelph, le nombre de chevaux canadiens augmente. Aujourd'hui, on estime qu'il y en a entre 2 000 et 3 000 dans tout le pays.
Des gens de tout le Canada et des États-Unis redécouvrent actuellement cette race et retombent amoureux du cheval canadien. Désigner le cheval canadien comme symbole national lui attirera le respect et la reconnaissance qu'il a toujours mérités. Le cheval canadien, fort, calme, robuste et intelligent, est un symbole national approprié pour tous les Canadiens.
Pour toutes ces raisons, j'espère que tous les députés se joindront à moi pour appuyer le projet de loi S-22.
M. Richard Harris (Prince George--Bulkley Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je sens l'obligation d'aborder ne serait-ce que brièvement ce projet de loi émanant d'un sénateur. J'en profite pour souligner l'approche dictatoriale qu'adopte le gouvernement à l'endroit des projets de loi d'initiative parlementaire émanant de députés.
Il semble qu'on ait tenté de présenter un projet de loi semblable à celui-ci il y a déjà un certain temps et que cette tentative a vite...
Le président suppléant (M. Bélair): Je regrette, mais le député s'éloigne nettement du sujet à l'étude ce matin. Je vais lui redonner la parole s'il veut bien discuter du cheval canadien.
M. Richard Harris: Certainement, monsieur le Président. Ce projet de loi nous vient d'un sénateur qui tente de faire reconnaître le cheval canadien. Il s'agit d'une mesure très importante.
Voilà pourquoi nos députés vont probablement appuyer le projet de loi. Nous voulons par la même occasion manifester notre mécontentement par rapport à la façon dont le gouvernement traite les projets de loi d'initiative parlementaire qui sont présentés à l'origine à la Chambre.
Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. Bélair): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (M. Bélair): Convoquez les députés.
Après l'appel du timbre:
Le président suppléant (M. Bélair): À la demande du whip en chef du gouvernement, le vote est reporté jusqu'à demain après-midi, à la fin de l'étude des initiatives ministérielles.
M. Joe Jordan: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je demande que nous suspendions la séance jusqu'à midi.
* * *
Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre désire-t-elle suspendre la séance jusqu'à midi?
Des voix: D'accord.
(La séance est suspendue à 11 h 45.)
* * *
La séance reprend à midi.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Initiatives ministérielles]
* * *
[Traduction]
Loi de 2001 modifiant le Code criminel
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 18 avril, de la motion concernant les amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-15A, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois.
M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet de cet amendement présenté par le Sénat. Je vous signale, monsieur le Président, que je partagerai mon temps de parole avec le député de Prince George—Bulkley Valley.
Je suis contre l'amendement proposé par le Sénat. Il vise essentiellement deux buts. Premièrement, il cherche à protéger les gens dont les ordinateurs ont été utilisés à leur insu pour commettre une infraction criminelle liée à la pornographie juvénile. Ces gens ne seraient ni inculpés ni condamnés pour une telle infraction.
Le problème que pose l'amendement du Sénat est que, bien qu'il tente de protéger un tiers innocent contre des poursuites, il se trouve en fait à créer une échappatoire pour les gens qui utilisent sciemment Internet pour commettre une infraction criminelle liée à la pornographie juvénile. Ces gens pourraient se servir de cet amendement comme défense et ainsi échapper à la justice.
Des députés d'en face soutiennent qu'il existe bien d'autres moyens de communication qu'Internet dans lesquels des innocents peuvent être impliqués. J'estime que, dans les cas de pornographie juvénile, il faut que la mens rea soit présente, c'est-à-dire l'intention de commettre une infraction. Il n'est pas nécessaire de le préciser dans la loi. Le danger avec l'amendement sénatorial visant à protéger les innocents, c'est de créer des échappatoires pour les personnes qui ont bel et bien l'intention de se servir d'Internet pour publier de la pornographie juvénile et qui pourraient invoquer cet article pour leur défense.
Je le répète, l'Alliance canadienne s'y oppose pour cette raison. Les articles du Code criminel prévoient déjà l'intention criminelle et il n'est pas nécessaire de le prévoir dans la loi.
L'autre problème que pose l'amendement sénatorial, c'est que l'écrit incriminé risque de ne pas être considéré comme de la pornographie juvénile. Cela revient à la question de la valeur artistique. Cela pose d'énormes difficultés, comme nous avons pu le voir lorsque la Cour suprême du Canada a renvoyé l'affaire Robin Sharpe à la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Le tribunal a jugé que, à certains égards, on ne pouvait pas accuser Robin Sharpe de pornographie juvénile, parce que ses écrits violents avaient une certaine «valeur artistique».
J'ai beaucoup de mal à accepter cela. On s'engage là sur un terrain très glissant et très dangereux. Robin Sharpe a soutenu dès le départ qu'il pouvait invoquer la charte parce qu'on violait sa liberté d'expression, sa liberté d'utiliser ce document à des fins personnelles. Lorsque l'affaire a été renvoyée à la Cour suprême de la Colombie-Britannique, celle-ci est allée un peu plus loin en parlant de valeur artistique.
C'est un domaine dans lequel il faut faire passer les droits de la société avant le droit possible d'une seule personne—et je ne dis même pas que c'est un droit. La pornographie juvénile concerne les membres les plus innocents et les plus vulnérables de notre société, à savoir nos enfants. En tant que parlementaires, nous devons faire preuve de toute la diligence raisonnable pour nous assurer que la loi protège bien nos enfants.
Devant la décision récente de la Cour suprême de la Colombie-Britannique d'acquitter M. Sharpe au nom de la «valeur artistique», nous, en tant que législateurs, devrions nous attacher à ce point et élaborer des mesures législatives claires en vertu desquelles la pornographie juvénile serait une infraction grave. L'excuse, j'appelle cela une excuse, de la valeur artistique ne sera tolérée d'aucune façon, manière ou forme que ce soit.
En tant que législateurs, nous avons le devoir et l'obligation d'assurer que nos enfants sont protégés des prédateurs sexuels. Comme nous l'avons vu dans le passé, la valeur artistique se prête à des interprétations larges. Les personnes que ces interprétations menacent, c'est-à-dire nos enfants, n'ont aucun moyen de se défendre eux-mêmes.
J'espère que le procureur général de la Colombie-Britannique en appellera de la récente décision de la Cour suprême de cette province qui a invoqué la valeur artistique pour acquitter M. Sharpe. Voilà les aspects qui doivent retenir notre attention.
Le Sénat a proposé un sous-amendement en vue d'assurer que la mesure protégerait les tiers innocents. En vérité, cela ne ferait que créer des échappatoires que des gens s'empresseraient d'utiliser, invoquant par exemple qu'ils étaient des tiers innocents alors qu'ils exploitaient les plus vulnérables dans la société par le truchement d'Internet.
C'est pour ces raisons que je voterai contre les sous-amendements sénatoriaux au projet de loi C-15A.
M. Richard Harris (Prince George--Bulkley Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir ce matin pour parler d'un groupe d'amendements venant du Sénat qui portent sur les dispositions du projet de loi C-15A concernant la protection des enfants.
La nouvelle loi va créer une infraction consistant à attirer un enfant au moyen d'un ordinateur. Aux fins de cette infraction, on utiliserait la définition d'enfant du Code criminel du Canada. En conséquence, quiconque tenterait d'attirer une personne de moins de 18 ans au moyen d'Internet à des fins de prostitution, de pornographie juvénile, d'agression sexuelle, d'inceste ou, lorsque l'adulte est en position de confiance, d'attouchement sexuel commettrait une infraction passible d'une peine maximale de cinq ans. L'âge des victimes serait de 16 ans pour l'enlèvement d'un enfant non marié vivant chez ses parents et de 14 ans pour contacts à des fins d'ordre sexuel et incitation à de tels contacts, acte de bestialité en présence de la personne, exhibitionnisme et hébergement.
Le projet de loi crée également des infractions au titre de la transmission, de la mise à la disposition ou de l'exportation de pornographie juvénile au moyen d'un ordinateur, lesquelles infractions sont assorties d'une peine d'emprisonnement maximal de dix ans. Le projet de loi interdirait également à toute personne d'accéder à de la pornographie juvénile au moyen d'Internet au risque d'un emprisonnement maximal de cinq ans. Le matériel pourrait être confisqué si le tribunal juge qu'il s'agit de pornographie juvénile.
Notre parti a du mal à accepter certains amendements du Sénat. Tout d'abord, on a un problème concernant Internet. Comme notre collègue de Saanich--Gulf Islands l'a signalé, l'amendement est beaucoup trop large pour vraiment toucher la cible. De ce fait, les juristes vont essayer de trouver des échappatoires pour ce dernier. Cet amendement serait une invitation ouverte aux gens bien décidés à utiliser un ordinateur pour exporter de la pornographie juvénile, y avoir accès ou en vendre. Ils seraient poussés à s'adresser aux avocats du pays qui veulent se pencher sur cette question pour trouver des échappatoires afin de contester les amendements devant un tribunal.
Nous parlons de gens qui possèdent de la pornographie juvénile, qui en distribuent et qui en produisent. Il est question des êtres les plus abjects, de gens qui cherchent à attirer des enfants pour produire le plus possible de ce type de documents. Si nous voulons cibler ces gens, et en fait nous devons le faire, car ils ruinent la vie d'innombrables personnes, nous ne devons pas avoir une loi qui tire sur tout et sur rien et qui manque la cible. Nous devons viser ces gens avec une mesure législative qu'il est pratiquement impossible de contourner.
Je sais comment fonctionne les lois au Canada. Une personne peut prendre presque n'importe quelle loi et la contourner si elle a l'esprit tortueux. Un avocat capable de convaincre un tribunal que des vessies sont des lanternes serait capable d'établir un précédent grâce à une échappatoire. La modification concernant Internet est d'application beaucoup trop vaste et créerait des échappatoires. Il nous faut une approche plus ciblée.
Deuxièmement, nous ne sommes pas d'accord en ce qui concerne la valeur artistique. Je suis renversé lorsque je pense à la décision Sharpe et aux prétendues expositions artistiques qui ont eu lieu au Musée des beaux-arts. Depuis que je suis à Ottawa, j'ai vu des expositions comportant une connotation sexuelle que la vaste majorité des Canadiens jugeraient tout à fait dégoûtantes. Néanmoins, assez curieusement, les artistes ont réussi à convaincre les personnes idoines que leurs oeuvres avaient une valeur artistique. Il en existe des douzaines d'exemples à Ottawa et au Musée des beaux-arts du Canada.
Pour ce qui est des juges ayant soutenu que le matériel de Sharpe avait une valeur artistique, une commission d'enquête devrait se réunir afin de déterminer s'ils ont la compétence voulue pour exercer leurs fonctions. S'ils étaient des politiciens, on remettrait en question leur aptitude à siéger à la Chambre des communes. Les avocats qui ont réussi à créer une défense fondée sur la prétendue valeur artistique sont une honte pour le Barreau. C'est ce que je pense, et je crois que mon avis est partagé par de nombreux Canadiens.
Je vais arrêter, car j'en ai assez dit à ce sujet. Toutefois, je vais présenter une motion. Je propose:
Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot «Que», de ce qui suit: |
«l'amendement numéro 2 apporté par le Sénat au projet de loi C-15A, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois, soit maintenant lu une deuxième fois et agréé; |
Qu'un message soit transmis au Sénat pour informer Leurs Honneurs que cette Chambre n'a pas agréé l'amendement numéro 1b) parce qu’il applique la défense du mérite artistique aux nouvelles infractions présentées par la Loi, ce qui pourrait nuire aux causes relatives à la pornographie juvénile, et que cette Chambre n'a pas agréé l'amendement numéro 1a) apporté par le Sénat au projet de loi C-15A, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois, parce que cet amendement pourrait permettre à des délinquants de se soustraire à leur responsabilité criminelle, même dans des cas ou ils transmettent ou rendent disponible en pleine connaissance de cause de la pornographie juvénile.». |
Le président suppléant (M. Bélair): La présidence prend la question en délibéré et communiquera sa décision un peu plus tard dans la journée.
M. Richard Harris: Monsieur le Président, pourriez-vous préciser ce que vous entendez par «prend la question en délibéré»? S'agit-il, pour la présidence, de décider si la motion est appropriée ou non?
Le président suppléant (M. Bélair): Oui.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, le débat porte sur des amendements apportés au projet de loi C-15A, tendant à modifier le Code criminel, notamment les amendements 1b) et 2 apportés récemment par le Sénat et agréés par la Chambre, et sur le désaccord du gouvernement, signifié par le ministre de la Justice, à l'égard de l'amendement 1a):
parce que cet amendement pourrait permettre à des délinquants de se soustraire à leur responsabilité criminelle, même dans des cas où ils transmettent ou rendent disponible en pleine connaissance de cause de la pornographie juvénile. |
L'amendement 1a) a pour objet de soustraire les fournisseurs de service Internet à toute responsabilité criminelle pour les infractions prévues dans la loi. Ainsi, un fournisseur de compte Internet ne sera pas tenu responsable du matériel illégal affiché sur le site web de son client, le titulaire du compte, et diffusé au moyen de ses installations, ni du matériel illégal reçu à une adresse électronique ou accessible par le truchement d'un compte fourni par ses soins.
Cet amendement est inutile. L'actuelle loi prévoit déjà des mesures de protection à l'intention des fournisseurs de services Internet, interdisant notamment la diffusion et le visionnement de pornographie juvénile en pleine connaissance de cause. En outre, les fournisseurs de service Internet n'ont pas proposé de solution à la situation actuelle. Le problème posé par la teneur néfaste de certains documents diffusés sur Internet prend de l'ampleur et il doit certainement exister un moyen pour les fournisseurs de services de s'assurer que les pages web fournies par leurs soins ne servent pas pour la diffusion de pornographie juvénile.
La pornographie juvénile est extrêmement et spécialement précieuse pour les pédophiles. Témoignant dans le cadre de l'affaire Sharpe, le Dr Peter Collins a défini la pédophilie en ces termes: «[la pédophilie] est l'attirance érotique ou sexuelle pour les enfants pré-adolescents». De même:
La disponibilité généralisée des ordinateurs et de l'Internet a donné lieu à de nouvelles façons de créer des images et de faciliter le stockage, la reproduction et la distribution de pornographie juvénile. |
La détective Waters, qui a également témoigné dans le cadre de cette affaire, «a comparé cette distribution accrue à un raz de marée». Comme l'affirme le Service canadien de renseignements criminels dans son rapport annuel pour l'année 2000:
La distribution de la pornographie juvénile connaît une hausse proportionnelle à l'expansion continue de l'utilisation d'Internet. Les forums que tient la collectivité mondiale dans Internet facilitent la distribution et aggravent le problème. L'utilisation d'Internet aide les distributeurs de pornographie à présenter et à faire valoir leur point de vue. |
Dans le jugement R. c. Sharpe, on peut lire ce qui suit:
Criminaliser la possession de pornographie juvénile peut contribuer à diminuer le marché de cette pornographie et à réduire l'exploitation d'enfants liée à sa production. |
La semaine dernière, grâce au député de Pickering—Ajax—Uxbridge, 37 de nos collègues ont pu entendre des procureurs et le Dr Collins s'exprimer sur ce très important sujet. Ils nous ont dit que les pédophiles pouvaient télécharger des milliers d'images érotiques, et qu'ils le faisaient; le chiffre de 25 000 à 30 000 images n'est pas inhabituel. Comme la Chambre l'a appris la semaine dernière, dans un cas, il était de 400 000.
Les procureurs estiment qu'il n'est pas nécessaire de présenter toutes les images au tribunal et qu'un échantillon représentatif suffirait; en effet, le seul fait de traiter des centaines et des dizaines de milliers d'images immobilise la police et les procureurs. Manquant de ressources, ils sont donc dans l'impossibilité d'arrêter d'autres amateurs notoires de pornographie juvénile. Nous approuvons le raisonnement du gouvernement et nous n'appuierons pas l'amendement du Sénat à cet égard.
Très rapidement, l'amendement no 1c) porte sur la question des personnes condamnées à tort. Tel que le projet de loi est libellé actuellement, c'est-à-dire sans l'amendement du Sénat, le ministre de la Justice peut déléguer une personne, n'importe qui, pour faire enquête dans les cas où il y a pu avoir condamnation injustifiée. L'amendement du Sénat demande que la personne à qui ce pouvoir sera délégué possède de vastes qualifications juridiques. Nous appuyons cet amendement. C'est un amendement d'ordre administratif, et le groupe parlementaire néo-démocrate lui délivre le label du bon ordre administratif.
Pendant le reste de mon intervention, cependant, je parlerai de l'amendement no 1b) prévoyant une exclusion similaire à celle envisagée par la Cour suprême de la Colombie-Britannique devant le jugement rendu dans l'affaire de Robin Sharpe. Grâce à cette mesure, la possession de matériel de valeur artistique, scientifique ou éducative ne constituerait pas une infraction criminelle en vertu de cette loi. Bien que, comme nous l'avons récemment constaté, la notion de valeur artistique puisse poser problème, il se peut que cette exclusion soit nécessaire afin d'assurer la constitutionnalité de la mesure législative et de veiller à ce qu'il y ait concordance entre l'infraction consistant à avoir accès à de la pornographie juvénile en se servant d'Internet et d'autres infractions relatives à la pornographie juvénile. Grâce à cet amendement, on aurait la certitude que cette exclusion figure dans la mesure législative et que du matériel qu'une personne crée ou possède à ces fins ne se traduirait pas par des sanctions pénales.
La question de la valeur artistique a soulevé beaucoup de préoccupations, et c'est ce sur quoi a porté le débat. Voici ce que m'écrivent à ce sujet des électeurs de Palliser.
Hazel Raine dit ce qui suit au sujet de la décision Sharpe:
La décision du juge Duncan Shaw [...] qui a dit que les illustrations de violence sexuelle à l'endroit des enfants produites par John Robin Sharpe ont assez de «valeur artistique» pour la société canadienne est une insulte à la population du pays. Nos enfants sont précieux et nous voulons qu'ils soient par tous les moyens possibles mis à l'abri de matériel à caractère pédophile. On devrait interjeter immédiatement appel de cette décision. |
Elle m'a demandé, en ma qualité de représentant à la Chambre, d' «adopter toutes les mesures nécessaires».
Dans une lettre au ton similaire, Sheryl Van Wert, qui vient aussi de Moose Jaw, déclare ce qui suit:
Cette décision signifie que nous attachons plus d'importance à l'expression artistique qu'à la protection des enfants du Canada--notre avenir. En ma qualité de Canadienne qui espère devenir un jour parent, je vous prie de bien penser à la décision que vous aurez à prendre concernant ce jugement. Veuillez mettre nos prochaines générations à l'abri de ceux qui voudraient détruire leur innocence et nuire à leur sécurité. |
Nous avons ici deux points de vue très clairement différents sur la question. Comme le laissent entendre ces lettres, la défense fondée sur la valeur artistique est un moyen simple pour les pédophiles de se cacher en invoquant la légitimité. C'est là un grand sujet de préoccupation. D'autre part, les personnes pour lesquelles la pornographie juvénile n'est pas une préoccupation de premier plan craignent que nous limitions la liberté d'expression et de parole.
Permettez-moi de lire un extrait d'une pièce écrite il y a quelque temps par la poète officielle du caucus du Nouveau Parti démocratique, la députée de Dartmouth. La pièce s'intitule All Fall Down. Un des personnages de cette pièce, Connors, un intervenant auprès d'enfants exploités sexuellement, tient un monologue au sujet du fonctionnement de l'esprit humain. Il dit:
Comment se protéger soi-même des images qui se bousculent. Comment se protéger des images qui se télescopent dans sa propre tête. Assis sur le lit en train de regarder son épouse se dévêtir, un homme fait sauter sa fille sur ses genoux. Une multitude d'images se télescopent dans sa tête, des pneus d'hiver, la grosse poitrine de la caissière de banque qu'il aimerait bien caresser, les ricanements de sa fille, le bleu sur la cuisse de son épouse, la douceur des joues de sa fille. Pendant un instant fugace, il se demande comment il réagirait si elle avait 15 ans de plus et si elle n'était pas sa fille, puis cette image cède la place au parfum de sa mère, à ses beaux cheveux lustrés, il se voit assis sur ses genoux, se sentant unique au monde, puis soudainement il méprise son épouse et la pensée lui vient de l'étrangler. Il souhaite peut-être mourir lui aussi devant toutes ces nuits, ces semaines, ces années béantes qui se profilent à l'horizon. Et toutes les brèches de sa vie, les occasions ratées qui se dressent derrière lui. Autant de pensées fugaces qui s'envolent comme des oiseaux-mouches. Certaines pensées comme celles-là suffiraient à le faire atterrir en prison si elles sortaient de sa tête, où elles sont pourtant sans danger [...] |
Dans l'affaire Sharpe, en ce qui concerne le moyen de défense fondé sur la valeur artistique, le juge en chef McLachlin écrit au nom de la majorité que «toute valeur artistique objectivement établie, si minime soit-elle, constitue un moyen de défense suffisant». Bien que la juge ajoute que «la question de savoir ce qui peut raisonnablement être considéré comme de l'art est certes difficile et fait depuis toujours réfléchir les philosophes», elle conclut qu'il est nécessaire de maintenir une société dans laquelle «tant qu'il produit de l'art, l'artiste ne devrait tout simplement pas craindre d'être poursuivi» en vertu d'une loi sur la pornographie juvénile.
La décision de la Cour suprême, qui a cherché l'équilibre entre la liberté d'expression et la protection des enfants contre la pornographie dangereuse, a soulevé un tollé général. Rose Dyson, représentant l'organisme Canadiens qui s'inquiètent des divertissements de caractère violent, a déclaré que la défense fondée sur la valeur artistique n'était qu'une faille grande ouverte qui permettrait au plus vil pornographe de prétendre qu'il produit de la littérature.
Les libertaires ont applaudi l'acquittement de M. Sharpe sur tous les chefs d'accusation concernant ses travaux de fiction, arguant principalement que seules des photos ou d'autres documents montrant de «vrais enfants» devraient donner lieu à une poursuite. Selon John Dixon, président de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique:
Les écrits devraient être librement distribués aux adultes, peu importe la nature fantastique ou imaginaire de leur contenu. |
Dans un document rédigé en 1999, l'Association canadienne des libertés civiles disait:
La valeur artistique d'une oeuvre dépend de celui qui l'observe. Comment un instrument aussi rudimentaire que le droit criminel pourrait-il faire la différence entre des efforts artistiques sérieux et ceux qui ne le sont pas? Quel argument peut-on invoquer pour criminaliser une description fictive? |
L'ACLC faisait alors une mise en garde contre la trop grande portée de la loi qui «semble capable de mettre en péril l'art légitime» en essayant de lutter contre les fantaisies pornographiques de quelques «âmes troublées».
D'autre part, selon le professeur de journalisme de l'université Carleton, Klaus Pohle, qui a critiqué des mesures législatives semblables où la propagande haineuse et l'obscénité étaient laissées à la libre interprétation des tribunaux, élaborer une loi à partir d'une définition aussi floue mène tout droit au désastre. Il a déclaré:
N'importe qui peut se lever et dire que n'importe quoi a une valeur artistique. Ce que vous faites en l'occurrence, c'est le procès de la définition de valeur artistique. |
En fait, le professeur d'anglais Paul Delaney, de l'université Simon Fraser, a déclaré sous serment au procès que le talent d'écrivain de M. Sharpe était négligeable et a soutenu que même si une partie de ses écrits recelait une parcelle de valeur artistique:
[...] nous ne laissons pas les conducteurs qui roulent trop vite échapper au châtiment en invoquant l'esthétique d'une intense expérience de quête de sensations fortes. |
Le juge Duncan Shaw s'est rangé du côté de ceux qui considéraient les écrits de M. Sharpe comme de la littérature. Le juge Shaw a déclaré:
Les représentations que fait M. Sharpe de personnes, d'événements, de scènes et d'idées sont raisonnablement bien écrites. Il utilise la parodie et l'allégorie, pas de façon experte, mais il en fait usage... Ses intrigues font montre d'une certaine imagination et sont parfois assez complexes. |
D'un autre côté, dans le jugement rendu à six voix contre trois par la Cour suprême, les dissidents, les juges L'Heureux-Dubé, Gonthier et Bastarache, ont considéré la cause d'un autre oeil. Je voudrais citer quelques-unes des observations qu'ils ont formulées dans leur rapport minoritaire dissident. Ils ont déclaré:
Au sens du par. 163.1(1) du Code criminel, la pornographie juvénile est fondamentalement préjudiciable aux enfants et à la société. [...] La pornographie juvénile est préjudiciable peu importe qu'elle fasse appel à de vrais enfants ou qu'elle soit le fruit de l'imagination. L'article 163.1 a été adopté dans le but de protéger les enfants, lesquels forment l'un des groupes les plus vulnérables de la société. Il s'appuie sur la preuve manifeste du préjudice direct qui résulte de la pornographie juvénile ainsi que sur la crainte raisonnée du législateur que la pornographie juvénile ne cause également un préjudice comportemental. |
Dans leur rapport, les trois juges ajoutent plus loin:
L'inclusion du matériel écrit dans l'infraction de possession de pornographie juvénile n'équivaut pas à la censure des pensées. La mesure législative vise à interdire le matériel que le législateur estime préjudiciable. L'inclusion de l'écrit qui préconise ou conseille la perpétration d'infractions contre des enfants est compatible avec cet objectif car, de par sa nature même, un tel écrit est préjudiciable, peu importe qui en est l'auteur. Selon certains éléments de preuve, ce matériel renforce les distorsions cognitives des pédophiles et la pornographie écrite alimente les fantasmes sexuels des pédophiles et pourrait les inciter à commettre des crimes. |
[...] les avantages de cette mesure l'emportent largement sur toute atteinte à la liberté d'expression et au droit à la vie privée [...] [elle] contribue à prévenir le préjudice causé aux enfants par la production de pornographie juvénile, décourage l'emploi de pornographie juvénile pour initier des enfants, freine l'accumulation de pornographie juvénile par les pédophiles et contribue à la mise en oeuvre d'un régime efficace d'application de la loi. |
En somme, la mesure législative est bénéfique pour l'ensemble de la société en ce qu'elle transmet un message clair qui décourage les comportements antisociaux. Elle n'entrave pas sensiblement le discours ayant une valeur sociale, car il existe un lien très ténu entre la possession de pornographie juvénile et le droit à la liberté d'expression. Tout au plus, elle est coûteuse pour ceux qui s'épanouissent bassement dans la possession de pornographie juvénile. Le droit à la protection contre les fouilles, perquisitions et saisies abusives garanti par l'article 8 de la Charte protège également la vie privée de ceux qui ont de la pornographie juvénile en leur possession. La mesure législative empiète sur la vie privée parce que la réalisation de ses objectifs bénéfiques l'exige. Le droit à la vie privée qui est restreint par la loi est étroitement lié aux effets préjudiciables particuliers de la pornographie juvénile. En outre, les effets bénéfiques de la mesure législative sur le droit à la vie privée des enfants est proportionnel aux effets préjudiciables sur le droit à la vie privée des gens qui ont en leur possession de la pornographie juvénile. |
Ils concluent de la manière suivante:
Il va sans dire que la pornographie juvénile qui comporte l'exploitation sexuelle d'enfants est préjudiciable. De plus, nous avons constaté que les préjudices résultant de la pornographie juvénile vont beaucoup plus loin que l'exploitation directe et physique. Cette forme de pornographie est préjudiciable peu importe qu'elle fasse appel à de vrais enfants ou qu'elle soit le fruit de l'imagination. |
Les juges dissidents écrivent ceci:
Dans l'un et l'autre cas, la pornographie juvénile entretient et communique le même message préjudiciable, déshumanisant et avilissant. |
Lors de la réunion des députés la semaine dernière, nous avons entendu la police et la poursuite dire que le message dégradant et déshumanisant s'appliquait au texte écrit, dans le cas des histoires courtes qui présentent, semble-t-il, des descriptions très frappantes de tous les actes sexuels que l'on puisse imaginer, y compris le viol et le ligotage. On a souligné que quiconque incitait au génocide ou à la haine au Canada ne pouvait invoquer la valeur artistique comme défense. On peut donc se demander pourquoi la valeur artistique peut être légalement invoquée dans une affaire de pornographie juvénile.
Il n'est pas plus justifié d'invoquer la valeur artistique en matière de pornographie juvénile qu'il ne l'est, par exemple, dans une affaire où sont proférées des menaces de mort ou quand quelqu'un provoque une fausse alerte d'incendie dans un cinéma, notamment. Dans ces cas-là, le Parlement a conclu, à bon droit, que le risque couru par le public l'emportait sur tout avantage public lié à la valeur artistique de l'action en cause.
C'est une question très importante. D'excellents arguments peuvent être exprimés d'un côté comme de l'autre, mais je pense qu'il est capital que nous réexaminions toute la question de la valeur artistique, que ce soit par l'entremise du Parlement ou du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Le comité devrait étudier très attentivement la question afin que nous puissions adopter un projet de loi plus complet et plus réfléchi sur la pornographie juvénile. Si nous ne le faisons pas, nos enfants courront toujours un grave danger.
En guise de conclusion, je lirai ce que le Dr Peter Collins a dit la semaine dernière aux 37 députés réunis dans la salle de lecture pour une discussion. Citant le Talmud, le Dr Collins a dit:
Si vous sauvez une vie, c'est comme si vous sauviez le monde. |
Le vice-président: Avant de reprendre le débat, je suis prêt à communiquer à la Chambre la décision de la présidence concernant un amendement présenté un peu plus tôt par le député de Prince George--Bulkley Valley. Reprenons le débat sur l'amendement.
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'ai l'honneur d'intervenir dans ce débat important au nom du Parti progressiste-conservateur et je tiens à féliciter mon collègue de Palliser pour ses observations qui m'ont semblé à la fois très judicieuses et opportunes.
Le débat porte sur une question qui empoisonne l'existence des Canadiens depuis quelques temps, c'est-à-dire depuis ce qu'il est aujourd'hui convenu d'appeler le jugement Sharpe, rendu par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique; ce jugement exempte de poursuites certains types de pornographie juvénile qui pourraient avoir une valeur artistique.
Ce jugement a créé au sein de la société canadienne un profond malaise et un sentiment d'horreur à l'égard de la pornographie juvénile, car cette activité est des plus néfastes au développement de l'enfant dont elle favorise une exploitation lourde de conséquences durables et à long terme sur son développement.
Ce jugement a révélé certaines lacunes, à tout le moins, du système de justice pénale à l'égard de la pornographie juvénile. Le projet de loi C-15A et les amendements faisant l'objet du présent débat concernent directement quelques-unes de ces questions. Pourtant, on pourrait soutenir que le libellé de l'amendement à l'étude et concernant la valeur artistique renforce le jugement Sharpe, lequel est à l'origine des discours véhéments prononcés contre l'utilisation de l'expression «valeur artistique» pour décrire tout document ayant trait à la pornographie juvénile et entraînant un effet aussi nuisible.
J'affirme, au départ, que cet amendement, qui maintient ou préserve le recours à la notion de valeur artistique pour qualifier un document écrit, des photographies ou des images créées par ordinateur, doit être renvoyé pour étude, comme l'a réclamé mon collègue du Manitoba, soit au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, soit à la Chambre. Le ministère de la Justice doit sérieusement s'efforcer de circonscrire avec des paramètres très stricts la notion de valeur artistique, et peut-être en en excluant tout ce qui concernerait la pornographie juvénile.
Comme d'autres mesures proposées à la Chambre, ce projet de loi était entaché d'imperfections. Au départ, le C-15A faisait partie d'un projet de loi omnibus qu'il a fallu scinder. Il a fallu en retrancher des éléments pour constituer un autre projet de loi. Beaucoup de modifications et d'efforts ont été nécessaires pour aboutir au projet de loi dont nous sommes saisis maintenant.
Le gouvernement a accepté un certain nombre de changements recommandés par l'autre Chambre, mais non celui qui porte sur l'élimination de la menace de poursuites contre les fournisseurs de services Internet et les câblodistributeurs. Cette modification est peut-être difficile à comprendre pour bien des gens. Ce qu'elle dit, au fond, c'est qu'on ne peut pas considérer comme coupable ou criminellement responsable le fournisseur qui ne fait que transmettre un contenu pornographique jugé offensant.
La modification proposée s'inspire de précédents mettant en cause des fournisseurs de services téléphoniques ou même de services postaux. Une décision rendue il y a plus de cent ans par la Cour suprême dans une affaire opposant la Electric Dispatch Company de Toronto à la société de téléphone Bell du Canada dit que la notion de transmission concerne l'expéditeur et le destinataire du message, mais non l'intermédiaire qui fournit le dispositif technique permettant la communication. Pierre-Claude Nolin, de l'autre endroit, s'est reporté à cette décision. On pourrait soutenir que le même argument vaut pour les fournisseurs de service Internet.
Si les entreprises agissant simplement comme intermédiaires entre deux ou plusieurs personnes ne font que fournir les moyens de stocker et de transmettre des données numériques pour un tiers, elles peuvent en toute innocence être mêlées à la transmission d'obscénités ou d'autres contenus offensants. Dans ce contexte, on s'attendrait à ce que le juge des faits reconnaisse que la personne qui a transmis de la pornographie juvénile à son insu n'est pas responsable. Cependant, étant donné que le problème est si grave et tellement préjudiciable pour le développement de l'enfant, il faut avoir à ce sujet un libellé à toute épreuve, très précis et clair.
On a proposé un amendement qui permettrait essentiellement d'annuler l'amendement déposé par le Sénat et de soumettre le projet de loi à une nouvelle étude, ce qui serait peut-être une bonne chose. Il semble que la question n'ait pas reçu toute l'attention nécessaire dans le premier cas.
Comme nous l'avons vu dans d'autres dossiers, le Sénat, dans toute sa sagesse, a fait du très bon travail, mais compte tenu des vastes implications que tout cela peut entraîner, nous devrions prendre le temps de nous assurer que tout est correct. Dans cette optique, les députés du Parti progressiste-conservateur sont d'avis que nous ne pouvons pas appuyer l'amendement du Sénat en raison des nouveaux moyens de communications étendus qu'offre Internet. Il est absolument essentiel que la mesure législative soit claire et précise. Elle doit mettre à jour les anciens articles qui portaient sur le même genre d'activités odieuses, c'est-à-dire la dissémination de matériel pornographique exploitant les enfants.
Bon nombre des fournisseurs de service Internet ayant témoigné devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, des sociétés comme AOL Canada, ont clairement appuyé les efforts du gouvernement en vue de restreindre la portée de la pornographie juvénile et sa prolifération sur le réseau et pour en capturer les auteurs.
Je crois qu'il est juste de dire que les responsables de l'industrie reconnaissent qu'ils doivent collaborer et faire tout ce qui est en leur pouvoir pour surveiller les services qu'ils offrent et collaborer avec les services d'application de la loi pour conserver la preuve et la transmettre au besoin aux policiers et autres services d'application de la loi.
Je ne crois pas que le projet de loi ait la force nécessaire pour assurer un juste équilibre entre les intérêts des fournisseurs de service Internet et notre effort omniprésent et précieux à l'égard de la protection des enfants. Le libellé actuel comporte toujours la possibilité d'une responsabilité pouvant être liée à ceux qui participent au blocage ou à l'enlèvement de matériel, et nous sommes d'avis que l'amendement actuel ne fait rien pour éliminer le danger qui pourrait menacer les enfants.
À mon avis, la plupart des fournisseurs de service Internet font de grands efforts pour exercer un contrôle sur leurs propres systèmes, mais on craint toujours que la formulation de la mesure législative les rende vulnérables à ces groupes qui importent la pornographie sur le réseau.
Disons-le clairement: le droit de propriété ne s'applique pas aux bonnes idées et il n'y a pas de gain politique à faire avec ce dossier. Un esprit de collaboration anime les députés de tous les partis, car nous voulons réellement que cette mesure protège nos concitoyens les plus vulnérables et les plus précieux, nos enfants.
D'ailleurs, le Parti progressiste-conservateur reconnaît l'esprit et l'intention du projet de loi. Le député a parlé de Rose Dyson, Canadienne de grande distinction qui a décidé de préconiser la protection des enfants et des Canadiens en général contre les représentations et les actes de violence, notamment sexuelle.
Au cours de la dernière campagne électorale, mon parti a prôné une stratégie nationale contre la pornographie juvénile et les mauvais traitements infligés aux enfants. Le programme comprenait notamment des mesures prévoyant l'enseignement aux enfants de méthodes pour naviguer sans risque sur Internet ainsi qu'une solide formation des policiers chargés de lutter contre la pornographie. Partout au Canada, on déploie actuellement des efforts extraordinaires, au nom des municipalités, des provinces et de la GRC, pour s'attaquer à ce problème toujours grandissant et très nuisible qui se manifeste dans de nombreuses collectivités.
Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui renferme divers éléments visant à protéger la société. Il prévoit aussi une meilleure protection et un plus vaste éventail de peines à l'égard des personnes qui se livrent au harcèlement criminel ou qui désarment un agent de la paix.
Le projet de loi contient aussi une modification très importante qui concerne les personnes condamnées à tort et la possibilité d'obtenir un réexamen de dossier lorsque de nouvelles preuves sont mises au jour ou qu'une erreur judiciaire a été commise.
Il y a eu de nombreux cas où les progrès scientifiques, comme l'utilisation de l'ADN, ont permis d'innocenter des personnes qui avaient été condamnées. Un cas en particulier, celui de Steven Truscott, représente depuis longtemps un véritable abcès pour le système judiciaire canadien. Un auteur très renommé, Julian Sher, vient d'écrire un livre à son sujet qui s'intitule Until You are Dead. Il y parle de la sentence imposée à M. Truscott, condamné pour meurtre à l'âge de 14 ans.
Un juriste réputé et défenseur des personnes accusées à tort, James Lockyer, a présenté une requête en application de l'article 690. Le ministre de la Justice en a été saisi. Le projet de loi à l'étude n'aura cependant aucun effet dans le cas de M. Truscott. Nous implorons donc le ministre de la Justice d'agir rapidement et avec prudence, afin qu'on corrige rapidement cette erreur judiciaire.
Le projet de loi, dans sa forme actuelle, soulève des inquiétudes, surtout en raison de la création d'une échappatoire dans la décision Sharpe, dont de nombreux députés ont parlé. Il y aurait plusieurs façons d'améliorer les mesures de protection des enfants dans le Code criminel, mais ces efforts et ces modifications seront en grande partie inutiles si la police n'a pas l'appui et les ressources nécessaires pour s'attaquer au problème.
Les représentants de la loi, mais aussi les parlementaires, les avocats de la défense et les représentants de l'aide à l'enfance ont une obligation fiduciaire de faire tout ce qu'ils peuvent pour s'attaquer au problème de la pornographie juvenile et des écrits qui dénigrent et dégradent les enfants dans nos collectivités.
Le projet de loi représente un pas dans la bonne direction. Il vise en grande partie à intensifier les efforts en cours et à renforcer les dispositions du Code criminel relatives à la pornographie juvénile. Il n'est pas conçu, cependant, pour assurer l'éradication de ce mal ou pour permettre aux agents de la paix de prendre les mesures nécessaires pour le combattre efficacement.
Tout cela est essentiellement une question de bon sens. Par souci de précision, les modifications proposées dans ce projet de loi devraient viser à protéger davantage les enfants. Un certain nombre de modifications sont proposées au Code criminel dans ce seul projet de loi, ce qui me porte à croire que l'accent n'est peut-être pas mis à la bonne place. À elles seules, les dispositions concernant la pornographie juvénile devraient faire l'objet d'un projet de loi distinct, en raison notamment de la décision rendue dans l'affaire Sharpe. Le ministre de la Justice et la légion d'avocats dont il dispose au sein de son ministère ont justement l'occasion d'examiner cette question et de rédiger un projet de loi précisant de façon très nette et stricte quand un inculpé peut invoquer le mérite artistique pour justifier l'utilisation et la diffusion de matériel de pornographie juvénile.
Le temps presse également. Il ne reste plus tellement de temps pour loger un appel en Colombie-Britannique. Le délai prend fin cette semaine. Le ministre de la Justice ne s'est pas encore officiellement engagé à exercer des pressions sur le procureur général de la Colombie-Britannique et à lui faire clairement savoir non seulement que le gouvernement tient à cet appel, mais qu'il est disposé à y participer en tant qu'intervenant. Comme on a pu le constater par le passé, ce message devrait être lancé dès maintenant. La plupart des Canadiens trouvent la nonchalance du gouvernement dans ce dossier à la fois surprenante et décourageante.
Les personnes reconnues coupables du crime odieux qu'est la pornographie juvénile devraient être punies, et la loi devrait leur être appliquée dans toute sa rigueur. Ceux qui se livrent à une telle activité devraient faire l'objet de mesures de dissuasion plus sévères, et on devrait en faire un exemple.
Il y a quelques jours, on a présenté un projet de loi d'initiative parlementaire qui visait directement à accroître la peine infligée aux personnes reconnues coupables aux termes des articles 152, 153 et 151 du Code criminel. Le Parti progressiste-conservateur accepte et appuie assurément l'intention de projets de loi de ce genre, mais reconnaît, comme tous les Canadiens le reconnaissent, la nécessité de prévoir des définitions très claires dans la loi.
Des amendements qui sont proposés à quelque moment que ce soit visent à dissiper quelque peu la confusion. Mon grand-père disait que les lois pouvaient prêter à une grande confusion. Il disait: «Si on pose un nouveau toit sur la maison, il ne faut pas mettre les nouveaux bardeaux par-dessus les anciens. Il faut en enlever une partie.» Cette métaphore illustre très bien la façon dont nous élaborons les lois à la Chambre.
Beaucoup trop souvent, il me semble, nous entassons des mesures législatives les unes sur les autres, au lieu, dans certains cas, d'en supprimer quelques dispositions qui ne font que brouiller les cartes. Surtout lorsqu'un projet de loi traite de questions aussi fondamentales et aussi claires dans l'esprit des Canadiens, si je ne m'abuse, nous devrions certes élaborer des mesures législatives qui reflètent cette réflexion et cette intention claires.
Dans sa version actuelle, le projet de loi, qui traite des nombreuses questions que j'ai évoquées, dont les erreurs judiciaires, n'est toujours pas très clair, à mon avis. L'amendement, que nous appuyons de tout coeur, traite des erreurs judiciaires et demande au ministre d'établir certains critères à l'égard de ceux qui participeraient au groupe d'examen de ces erreurs judiciaires. Ceux-ci ont une connaissance fondamentale du système de justice pénale et du système lui-même, qu'il s'agisse de juges retraités, d'avocats, d'avocats de la défense ou de la Couronne qui sont membres en règle du barreau provincial, ou encore, ils possèdent une expérience qui apporterait de la crédibilité et une meilleure compréhension au processus d'examen. Nous estimons qu'il s'agit là d'une très bonne initiative pour veiller à ce qu'il n'y ait plus d'erreurs judiciaires lorsque le groupe procède à son examen des éléments de preuve.
Encore une fois, j'appuie certainement les remarques faites par les orateurs précédents concernant la nécessité d'une mesure législative claire pour remplir le trou béant laissé par la décision Sharpe. Il existait d'anciennes dispositions traitant de cette même vile activité, mais il fallait essayer de les moderniser en raison des progrès technologiques, des changements dans la façon dont nous pouvons communiquer des textes et des images. Dans ce projet de loi, les législateurs et le Parlement ont essayé de répondre à ce besoin de modernisation. La diffusion de matériel pornographique exploitant des enfants est peut-être la chose la plus choquante pour nous, celle qui rallie le plus les Canadiens contre un ennemi commun et au sujet de laquelle nous sommes tous d'accord pour dire que nous devons faire davantage.
Quelle autre question pourrait être plus importante pour nous en tant que parlementaires? Il est clair qu'une sensibilisation accrue n'est pas suffisante. Les familles reconnaissent que leurs enfants doivent être protégés. Elles reconnaissent que le monde a changé, qu'il y a en fait des dangers plus grands qui nous guettent à chaque détour. Ce genre de mesure législative que nous avons été chargés d'examiner et d'améliorer nous donne l'occasion d'agir à cet égard.
Deux des trois amendements ne donnent pas le degré de clarté nécessaire. Le Canadien ordinaire s'attend à plus, et nous ne pouvons pas nous soustraire à notre responsabilité. Nous devons saisir toutes les chances que nous avons de faire ce qu'il faut dans un dossier comme celui-ci.
Transmettre ou rendre accessible ce genre de matériel, qu'il s'agisse de vente ou d'exploitation, devrait être une infraction criminelle. On devrait s'efforcer de voir à ce que personne ne soit condamné injustement. C'est un peu paradoxal que nous retrouvions certains éléments liés aux condamnations injustifiées dans ce projet de loi. Les condamnations injustifiées contribuent certainement à miner encore davantage notre système de justice.
Je dirai ceci en terminant. Le Parti progressiste-conservateur appuiera la mesure législative en général, mais pas les amendements, qui, selon nous, vont à l'encontre de l'objectif visé dans ce projet de loi.
M. Roy Bailey (Souris--Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je pense que tout le monde sait pourquoi les drapeaux sur la Colline du Parlement et partout au Canada sont en berne. L'idée que des jeunes gens perdent la vie et répandent leur sang en sol étranger nous attriste tous.
Je me permets cependant d'affirmer qu'en raison de l'inaction du gouvernement il y a deux ou trois ans, lequel n'a pas recouru à la disposition d'exemption pour renverser la décision originale d'un tribunal en Colombie-Britannique, des jeunes enfants ont vu leur vie être gâchée dans chacune des provinces du Canada.
Combien de milliers d'enfants, dont beaucoup d'entre eux sont maintenant âgés de 10, 12 ou 15 ans, sont ainsi devenus victimes d'exploitation. Ils n'auront jamais plus une vie normale. En raison de la protection accordée pour le mérite artistique, nous voilà maintenant disposés à laisser ce genre de crime se perpétuer.
Le député de Palliser a cité certaines des lettres qu'il a reçues. Le plus touchant a été d'écouter des appels téléphoniques et d'entendre la description déchirante de cas d'exploitation rendus possibles en raison d'un jugement qui, prétextant la liberté d'expression et le mérite artistique, permettait à cette calamité de continuer de faire rage dans notre société.
J'ai travaillé dans le milieu de l'enseignement. J'ai fait de l'administration bien avant que nous ayons du personnel de soutien. Je sais ce que c'est de venir en aide à quelqu'un qui a été exploité par un pédophile. Je sais ce que c'est de recevoir des victimes d'inceste. Pourtant, en notre qualité de parlementaires, nous craignons de prendre les mesures qui s'imposent pour protéger ces gens, au cas où nous violerions les libertés civiles de certains individus.
Un geste comme la pornographie est indéfendable. Abraham Lincoln a dit que bien des gens prenaient la défense de la consommation d'alcool et de boissons alcooliques, mais qu'elle était indéfendable.
Je demande à la Chambre de penser à un seul geste en particulier qui, dans toute l'histoire de notre pays, aurait suscité plus de dégoût chez les Canadiens d'un océan à l'autre que cette autorisation qui permet à l'exploitation sexuelle de continuer. Il n'y en a pas. Si nous menions un sondage rapide, nous verrions que plus de 90 p. 100 des gens s'opposent à cet arrêt.
La Chambre des communes est aussi une Cour suprême. Elle devrait agir. La Chambre des communes a préséance sur toute autre mesure ou tout autre tribunal. Nous n'aurions jamais dû permettre qu'une telle situation se produise. Nous n'aurions jamais dû permettre que le Canada soit nommé capitale mondiale de la pornographie, mais pourtant ça s'est produit.
Je suis heureux des observations du député de Palliser et du leader parlementaire des conservateurs. Je comprends leurs motivations. Espérons que nous, députés de ce côté et de l'autre, aurons le courage de dire non seulement que nous allons lutter contre la pornographie, mais aussi que nous allons l'éradiquer totalement. Qu'y a-t-il de mal dans une telle déclaration? Rien du tout.
Même si bien des gens ne se donnent plus la peine de voter, ceux qui tracent un X devant le nom d'un député méritent qu'on leur montre quelle est la valeur du Parlement. Nous devrions leur montrer que nous avons la force, le courage et le sens moral requis pour agir dès maintenant à cet égard.
C'est la pire insulte qu'on ait jamais faite aux Canadiens. Y a-t-il un autre moment dans leur histoire où les Canadiens de tous âges ont reçu une giffle pareille, ont été aussi insultés qu'ils le sont par ce jugement? Vous parlez d'une façon de démoraliser les gens! Vous parlez d'une façon de les dégrader! Il est question de l'ordure la plus grossière, et on dit qu'elle a une certaine valeur artistique.
J'ai huit petits-enfants, dont quatre fréquentent l'université. Mes filles ont déjà été petites. Si on les avait alors touchées ou si on leur avait présenté cette ordure insidieuse et si un gouvernement et un tribunal avaient approuvé cette infamie, cela aurait été inhumain et indigne des Canadiens.
Faisons quelque chose ensemble, les deux côtés de la Chambre! Disons aux Canadiens qu'il ne sortira rien de bon de cela si nous, parlementaires, n'agissons pas! Nous ne pouvons plus laisser cela aux tribunaux. Il nous faut prendre nous-mêmes une décision. Décidons en tant que Canadiens de ne plus accepter des conneries de ce genre!
Que peut-il sortir de bon du jugement qui a été rendu récemment? Rien du tout! Dès maintenant, pendant que nos drapeaux sont en berne, nous, parlementaires, devons couper l'herbe sous le pied aux membres de notre société qui sont des malades. Nous le devons à nos enfants et à nos proches. C'est mon rôle sur cette Terre. Je n'ai pas pour rôle de détruire l'esprit des jeunes. Je n'ai pas pour rôle de dégrader ma société. Mon rôle est de soutenir la société.
Je veux conclure sur le poème que voici:
Nous sommes tous aveugles tant que nous ne voyons pas
Que dans le plan humain
Rien ne vaut la peine d'être fait
Qui ne construit pas l'humain.
Pourquoi construire des cités glorieuses
Si l'homme n'est pas accompli.
Nous construisons le monde en vain
Si le constructeur ne grandit pas lui aussi.
Éradiquons ensemble ce mal du Canada! Tout de suite!
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, je félicite mon ami et collègue de Souris--Moose Mountain qui a exprimé avec beaucoup de conviction et de sincérité ce qu'à mon avis nombre de Canadiens ressentent. De toute évidence, les députés sont stimulés et rassurés de voir que les Canadiens expriment franchement leur horreur à l'égard de cette question.
D'après ses propos, je déduis que le député aimerait que davantage soit fait. J'aimerais que le député confirme qu'il est prêt à appuyer une stratégie nationale de protection des enfants. Cette initiative comprendrait notamment l'élargissement de certaines dispositions du Code criminel pour concentrer nos efforts sur la protection des enfants et donner davantage de pouvoir à la police et à l'appareil judiciaire pour réagir avec fermeté.
Je parle de certains cas où l'on pourrait donner aux juges le pouvoir de déclarer irrecevables certaines preuves déjà utilisées et présentées devant les tribunaux. On pourrait permettre aux magistrats d'imposer des peines minimales obligatoires dans des cas de pornographie juvénile. On pourrait autoriser le prélèvement d'échantillons à des fins d'identification génétique, comme le prévoit le Code criminel pour certaines infractions, à mon avis, nettement moins graves et moins nuisibles que la pornographie juvénile. On pourrait autoriser la modification des règles de divulgation. Ainsi, dans certains cas, la police pourrait présenter un échantillon du matériel offensant plutôt que des piles et des piles de documents et des milliers de pages d'information.
Comme dans d'autres cas, on pourrait permettre aux tribunaux d'imposer des peines créatives de façon à empêcher les contrevenants, les pédophiles et les personnes qui s'adonnent à ces activités d'avoir des contacts avec les enfants. Malheureusement, dans les faits, de nombreuses infractions sont perpétrées par des personnes que les enfants connaissent, des personnes en position de confiance. Les dispositions actuelles du Code criminel empêchent ces personnes de fréquenter les cours d'école et les piscines publiques, mais rien ne les empêche d'avoir des interactions avec les enfants dans une maison d'habitation, là où la plupart de ces infractions sont commises.
Nous pourrions certainement faire davantage, notamment élaborer une stratégie nationale qui aborde quelques-unes de ces questions et d'autres que je n'ai pas le temps de mentionner. Le député aimerait sans doute que la Chambre poursuive cet objectif pour renforcer les efforts des parlementaires en vue de l'éradication de la pornographie juvénile et les rendre plus pertinents.
M. Roy Bailey: Monsieur le Président, tandis que mon honorable collègue décrivait certains événements et certaines mesures que nous pourrions prendre, je songeais au discours de temps de guerre de sir Winston Churchill quand il a dit: «Donnez-nous les outils et nous achèverons le travail». Le député a énuméré plusieurs outils qui sont à notre disposition. Nous pouvons les développer et nous pouvons achever le travail. Ce qui manque, c'est la volonté d'agir.
Nous devons aller dans nos écoles et travailler par le truchement de nos Églises et de nos services sociaux. Cela doit devenir une priorité partout au Canada. Le député a mentionné entre autres les empreintes génétiques et les divulgations. Ce sont là des outils. Mettons-les à contribution et mettons-nous au travail. Nous pouvons et nous pourrons, avec de la détermination, mettre hors-la-loi et interdire complètement ce fléau qu'est la pornographie.
M. Richard Harris (Prince George--Bulkley Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, comme l'a fait remarquer mon collègue, le député de Souris--Moose Mountain, le Canada semble avoir acquis le titre de pays le plus indulgent du monde libre à l'égard de la possession, de la transmission et de la vente de pornographie juvénile. Les chiffres sont renversants. Ils révèlent une augmentation spectaculaire depuis cinq ans. Au cours des cinq dernières années, et depuis 1993, les libéraux ont malheureusement été au pouvoir.
Mon honorable collègue a dit que si nous voulions combattre efficacement ce fléau, nous devions avoir la volonté de le faire. La question à poser au gouvernement est celle de savoir s'il a la volonté de s'élever contre la magistrature et certains de ses jugements insidieux et contre la communauté juridique. Certains juristes semblent prendre un malin plaisir à trouver des échappatoires dans la loi ou dans le Code criminel à propos d'une chose aussi horrible que la pornographie juvénile.
Le gouvernement a-t-il le droit de cibler, et de bien cibler, les gens qui font tout ce qu'ils peuvent pour permettre que cela continue au lieu de procéder simplement au petit bonheur, comme je l'ai dit tout à l'heure dans mon intervention? Il y a des cibles à prendre parmi les gens qui essaient de faire proliférer la pornographie juvénile.
Mon collègue pense-t-il vraiment que le gouvernement a la volonté de s'élever contre certaines des décisions judiciaires et de s'en prendre à certaines des personnes qui se livrent à cette activité?
M. Roy Bailey: Monsieur le Président, j'ignore ce que veulent tous les gens d'en face, mais je compte bien des amis de ce côté et je sais que leur objectif est semblable au mien.
Je me souviens que lorsque j'étais membre d'une assemblée législative provinciale, le premier ministre m'avait rappelé que nous faisions partie du plus haut tribunal de la province, que nous pouvions prendre des décisions qui auraient la préséance et que nous allions le faire. La même chose s'applique dans ce cas-ci. La Chambre est le premier tribunal du pays. En ayant recours à la disposition d'exemption, nous sommes le plus haut tribunal.
Nous ne voulons plus de procédures fades et insipides des gens d'en face. Nous sommes prêts au combat et nous combattrons avec détermination.
N'ayons pas peur de faire du tort à certaines gens, mais pas à nos jeunes. N'ayons pas peur de ruiner des vies, mais pas celles de nos jeunes. N'ayons pas peur de faire souffrir certaines gens, mais pas nos jeunes. Pensons-y. Tout le reste vient après. Passons à l'action. Nous pouvons le faire, si nous le voulons.
Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le vice-président: Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le vice-président: Par conséquent, le vote sur l'amendement est reporté à la fin des initiatives ministérielles demain, le mardi 23 avril.
* * *
Le Code criminel
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 11 avril, de la motion: Que le projet de loi C-15B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu, soit lu pour la troisième fois et adopté, ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.
M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-15B. Ce projet de loi porte sur la cruauté envers les animaux et sur les armes à feu.
À l'Alliance canadienne, nous ne souscrivons en aucune façon à des actes de cruauté envers les animaux. Nous sommes en faveur de sanctions accrues. Cependant, certains craignent que le projet de loi C-15B ne permette aux tribunaux d'interpréter certaines infractions de façon différente. Des agriculteurs, des chasseurs et d'autres producteurs agricoles qui dépendent des animaux pour leur gagne-pain craignent que le fait de faire passer les dispositions portant sur la cruauté envers les animaux de la catégorie générale des infractions contre les biens à un article distinct ne hausse le statut des animaux aux yeux des tribunaux. On peut prétendre que ce n'est pas l'objectif du projet de loi, mais on a exprimé ces craintes.
Je suis en faveur des dispositions du projet de loi C-15B portant sur les armes à feu, même si je suis contre l'enregistrement des armes à feu. Ces dispositions exempteraient les armes d'épaule comme les armes à balles BB et à plombs qui doivent être enregistrées aux termes de notre loi actuelle sur l'enregistrement des armes à feu. Cela montre à quel point la loi C-68 est un échec complet. Le gouvernement avait dit au départ que le projet de loi coûterait des dizaines de millions de dollars. Or, le registre des armes à feu a coûté aux Canadiens quelque 500 millions de dollars. Cela n'a permis en rien de réduire la criminalité. C'est un impôt que doivent supporter les citoyens honnêtes.
Le projet de loi C-15B est un autre cas où le gouvernement met complètement à côté de la plaque. Il présente des amendements, car il se rend compte à quel point il est ridicule que les armes à balles BB doivent être enregistrées. Le système d'enregistrement des armes à feu pose des problèmes dans son ensemble. Le gouvernement devra modifier la loi à de multiples reprises. Au lieu d'essayer de rafistoler la loi après avoir dépensé des centaines de millions de dollars, la meilleure chose que le gouvernement pourrait faire serait d'abroger tout le registre des armes d'épaule. Je comprends pourquoi le gouvernement propose des modifications. J'aurais préféré qu'il abroge tout simplement la loi concernant l'enregistrement des armes à feu.
M. Richard Harris (Prince George--Bulkley Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en parlant sur le projet de loi C-15B, je me concentrerai sur la question des agriculteurs et la façon dont ils seront touchés par l'application du projet de loi dans sa forme actuelle.
Les répercussions du projet de loi sur les agriculteurs sont assez importantes. Comme nous le savons tous, les agriculteurs sont sans cesse aux prises avec des difficultés pour gagner leur vie dans un milieu où abondent les animaux tant domestiques que sauvages. Les agriculteurs doivent composer tous les jours avec les conditions météorologiques, les prix des produits de base, le coût du transport et la mauvaise gestion des politiques agricoles fédérales. La plupart des agriculteurs ajouteraient à ces facteurs certains groupes de protection des animaux.
Certains de ces groupes s'attaquent aux producteurs de bétail qu'ils accusent d'êtres cruels, inhumains, voire barbares. L'organisme appelé People for the Ethical Treatment of Animals, ou PETA, a amorcé une campagne contre les produits laitiers ciblant les écoliers. Les porte-parole de cet organisme disent aux enfants que les producteurs laitiers traitent cruellement leurs vaches. Ces activistes détraqués disent essentiellement aux enfants qu'en buvant du lait, ils participent à la torture infligée aux vaches. Voilà une façon de penser des plus bizarres qu'on puisse imaginer, mais ce n'est pas la seule chose que prêche PETA.
Le projet de loi C-15B, dont nous débattons, modifierait la manière dont le Code criminel traite la cruauté envers les animaux. Notre parti s'entend avec la vaste majorité des Canadiens pour dire que nous avons besoin de pénaliser plus sévèrement ceux qui maltraitent délibérément les animaux et qui font preuve de cruauté à leur égard. Malheureusement, en raison de la manière dont le projet de loi C-15B est actuellement libellé, beaucoup d'éleveurs, d'agriculteurs, de chasseurs et chercheurs risquent d'être l'objet de harcèlement et de poursuites et d'être reconnus coupables de cruauté même s'ils s'occupent correctement de leurs animaux.
Le libellé du projet de loi C-15B donnerait à des groupes comme PETA la possibilité d'intenter des poursuites judiciaires contre des agriculteurs, des chasseurs et des chercheurs qui ne traitent pas leurs animaux de manière cruelle ou abusive. Toutefois, comme les membres de PETA croient l'inverse, le libellé du projet de loi risque de les encourager à porter des accusations. Et ce, non pas parce qu'elles seraient fondées, mais parce que c'est la manière dont pensent ces groupes de lutte contre la cruauté envers les animaux. PETA est ce groupe qui raconte aux écoliers que s'ils boivent du lait, ils participent à la torture des vaches laitières puisque les producteurs laitiers font preuve de cruauté envers leurs vaches. Nous pouvons voir le lien entre l'absurdité et le harcèlement éventuel dont pourraient être l'objet certains membres de notre société à cause de ce groupe.
Les groupes de défense des animaux comme le Fonds international pour la protection des animaux et la Société de protection des animaux de l'Ontario prétendent ne pas avoir l'intention d'invoquer le projet de loi C-15B pour harceler les agriculteurs et les chercheurs. Toutefois, étant donné ce qu'ont fait par le passé des groupes comme PETA et l'Alliance animale du Canada, nous avons peine à croire que leurs partenaires dans le mouvement de défense des droits des animaux ne suivraient pas cette position.
Je vais lire une déclaration faite par Liz White, avocate de l'Alliance animale du Canada, qui prédit ce qui risque d'arriver si le projet de loi C-15B est adopté sous sa forme actuelle. Elle fait une allusion voilée aux intentions du groupe quand elle dit:
Je crains que les gens pensent que ce soit la solution alors que ce n'est qu'un début. Il importe peu de savoir ce que dit la loi si personne ne s'en sert, si personne ne s'adresse aux tribunaux pour en vérifier la portée. Il incombe aux sociétés de protection des animaux et à d'autres groupes de première ligne de voir jusqu'où on peut aller avec cette mesure législative, de mettre à l'épreuve les paramètres de cette dernière et d'avoir le courage et les convictions nécessaires pour porter des accusations. |
Il est manifeste que ces gens ont l'intention de se servir du projet de loi C-15B pour restreindre l'utilisation des animaux en recherche et en agriculture. Les défenseurs des droits des animaux en profiteraient pour s'en prendre aux agriculteurs, aux chercheurs en médecine, aux chasseurs et à toute autre personne qui, à leurs yeux, maltraite un animal.
L'Alliance canadienne réclame deux changements majeurs dans le projet de loi C-15B pour éviter les accusations qui seraient portées pour des motifs frivoles et carrément stupides. Premièrement, il convient de modifier la définition du mot «animal» dans le projet de loi. D'après cette définition, «[animal] s'entend de tout vertébré—à l'exception de l'être humain--et de tout autre animal pouvant ressentir la douleur». Trop vague, cette définition pourrait aisément empêcher les agriculteurs de se débarrasser des ravageurs, et les chercheurs, de mettre au point de nouveaux remèdes pour traiter les maladies. La situation pourrait se compliquer sérieusement, compte tenu de ce que disent certains groupes de défense des animaux.
Deuxièmement, l'Alliance canadienne demande que le projet de loi C-15B protège contre toute poursuite onéreuse et frivole les personnes qui utilisent des animaux à des fins légitimes. Le Code criminel prévoit des dispositions de protection contre les poursuites malveillantes. Mais, comme le projet de loi C-15B retirerait les dispositions relatives à la cruauté envers les animaux de la partie du Code criminel portant sur les infractions contre les biens, cette protection cessera d'exister.
Le ministre de la Justice est habilité à présenter des projets de loi pour renforcer et moderniser les dispositions actuelles du Code criminel relatives à la cruauté contre les animaux, sans menacer les personnes qui utilisent les animaux à des fins légitimes. Il s'y est refusé, pourtant. Il donne l'impression d'avoir fait siens les arguments des défenseurs des droits des animaux. Il a refusé d'être explicite dans le projet de loi C-15B pour s'assurer que les tribunaux ne donneront pas à ces dispositions une interprétation autre que celle voulue par le Parlement.
Nous sommes inquiets. Les libéraux comptent que le projet de loi C-15 ira beaucoup plus loin qu'ils ne l'avouent officiellement. Ce projet de loi cache peut-être quelque chose. Le gouvernement a refusé de protéger les agriculteurs qui, en toute légitimité, utilisent des animaux pour produire du lait et d'autres denrées agricoles, et les chercheurs qui, tout aussi légitimement, se servent des animaux pour trouver de nouveaux remèdes. Le libellé du projet de loi C-15B exposerait de telles personnes au harcèlement de groupes de défense des droits des animaux.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, ce n'est pas sans regret et inquiétude que je prends part au débat sur le projet de loi C-15B, qui porte sur la cruauté envers les animaux. Tous les députés conviennent, j'en suis sûr, que nous avons vraiment besoin de cette loi.
Il y a 100 ans que cette loi n'a pas été mise à jour. La question revêt une grande importance pour notre pays, et le Parlement du Canada doit s'en occuper. Comme je l'ai dit, j'éprouve du regret et de l'inquiétude, car, comme député, agriculteur et chasseur, je ne peux appuyer le projet de loi. Il faut l'améliorer et le moderniser.
Dans le texte à l'étude, on constate que les membres du gouvernement libéral ont complètement manqué à leur devoir. Ils ont totalement renoncé à étudier à fond un problème épineux et complexe de façon à trouver une solution qui soit équitable et équilibrée. Ce n'est pas ce que nous avons ici.
Je n'ai aucune idée de la manière dont les députés libéraux de circonscriptions rurales, les porte-parole de l'agriculture et les membres du comité vont voter. En fait, j'ai une petite idée de ce que sera leur vote, mais j'ignore leur position dans ce dossier. J'ignore pourquoi les députés ministériels ne se sont pas exprimés davantage.
Le projet de loi C-15B est un mauvais projet de loi. Tous ceux qui ont pris le temps de le lire, qui connaissent un peu les questions rurales, la zootechnie et les mesures législatives portant sur la cruauté envers les animaux et tous ceux qui ont une quelconque opinion sur cette affaire ne peuvent l'appuyer. Je ne peux pas m'imaginer qu'on puisse être d'accord avec une telle mesure.
J'ai reçu une lettre de Doug Bacon, président de la Fédération de l'agriculture de la Nouvelle-Écosse. Il m'écrit ce qui suit:
La Fédération de l'agriculture de la Nouvelle-Écosse et ses membres suivent de près le dossier de l'article du projet de loi C-15B qui porte sur la cruauté envers les animaux. Puisqu'une partie importante de l'industrie agricole est basée sur les animaux, la mesure législative proposée pourrait avoir d'importantes répercussions sur nos moyens de subsistance. |
Nous sommes d'accord avec plusieurs aspects de la mesure, y compris la possibilité d'imposer des peines plus sévères pour les mauvais traitements infligés aux animaux, et bien que l'ancienne ministre de la Justice se soit montrée très convaincante et que les amendements qu'elle a proposés étaient adéquats, nous ne sommes pas convaincus [...] |
Tout cela de la part de gens à qui s'adresse la mesure législative. Cette mesure ne vise pas les étudiants universitaires un peu fous qui pourraient lancer un chat par la fenêtre, quoi que ce serait là un horrible délit. La mesure ne vise pas non plus les propriétaires d'animaux de compagnie qui négligent, maltraitent ou torturent leurs protégés chaque jour au pays. Cette mesure vise plutôt les gens qui sont de véritables propriétaires d'animaux.
Je ne sais pas dans quelle catégorie les animaux seraient inscrits une fois le projet de loi adopté. Je sais toutefois dans quelle catégorie ils ne seraient pas inscrits. Ils ne seraient pas compris dans la section portant sur les biens. De quoi s'agit-il alors? Le gouvernement veut les considérer comme des enfants. Ce ne sont pas des enfants, et ils ne sont pas près de le devenir. Il est temps que le gouvernement se réveille et qu'il voit la réalité en face. Il est temps que le gouvernement jette un coup d'oeil réaliste sur cette mesure législative.
La lettre se poursuit:
Il convient d'amender le projet de loi C-15B pour que les pratiques légitimes d'utilisation des animaux ne soient pas visées pour des motifs frivoles. Nous avons besoin de votre appui pour les raisons suivantes: |
1. afin que les dispositions concernant la cruauté envers les animaux soient réinsérées dans la partie XI du Code criminel. Les animaux sont des biens et ce classement n'entrave ni n'empêche des pratiques appropriées de soin des animaux; |
2. si les dispositions concernant la cruauté envers les animaux demeurent dans la partie V.1, il faut en amender le titre pour qu'il dise: Cruauté envers les animaux: Biens privés et publics. |
Si les propriétaires d'animaux de compagnie veulent penser que leurs animaux sont en quelque sorte des biens publics ou qu'ils sont différents des animaux de la ferme ou des animaux domestiques, je n'y vois aucun inconvénient. Le projet de loi devrait prévoir une disposition pour satisfaire ces personnes. Il se trouve que je ne sois pas d'accord à ce sujet, mais j'estime que les animaux ne devraient pas faire partie de la disposition les considérant comme des biens des producteurs, car il s'agit là d'une erreur énorme qui ne fera que donner lieu à des poursuites judiciaires de millions de dollars.
Le dernier amendement dit:
3. que la définition d'« animal » soit amendée en conformité du témoignage de la Criminal Lawyers Association devant le comité permanent. |
M. Bacon ajoute:
Ces modifications n'affaibliront pas la loi, mais serviront à établir clairement dans la loi l'intention de protéger les droits de ceux qui utilisent des animaux, intention que le ministre a déjà communiquée. Nous ne demandons pas que la loi nous réserve un traitement spécial; nous ne demandons qu'une loi qui respectera les pratiques courantes d'utilisation des animaux. |
Le projet de loi a été présenté pour la première fois à la Chambre des communes le 1er décembre 1999, sous le titre de projet de loi C-17, et est demeuré en plan au moment du déclenchement des élections, en octobre 2000. Le Parlement en est actuellement saisi, et il porte le titre de projet de loi C-15B. Il a été étudié par le Comité de la justice, devant lequel ont témoigné un grand nombre d'experts juridiques et de représentants de groupes de défense des droits des animaux et des dirigeants d'organisations représentant les chasseurs, les pêcheurs à la ligne, les trappeurs, les agriculteurs et d'autres personnes intéressées.
Lorsqu'il a présenté de nouveau le projet de loi, le ministre de la Justice a tenu compte des préoccupations des partis d'opposition et des intervenants et a repris des amendements présentés dans le projet de loi C-17 précédent, afin de clarifier les dispositions concernant la cruauté envers les animaux, qui visent ceux qui, volontairement, par négligence, ou sans se soucier des conséquences de leurs actes, causent à un animal une douleur, une souffrance ou une blessure, sans nécessité. En dépit de ces améliorations, d'autres amendements s'imposent avant que le Parti progressiste-conservateur ne puisse appuyer les dispositions relatives aux crimes commis contre les animaux.
Ce n'est pas que la question ne soit pas importante. Ce n'est pas que la question doive être abordée. C'est un mauvais projet de loi. Il ne revient certainement pas aux parlementaires de laisser aux tribunaux le soin de définir ce qu'est la cruauté. Si nous laissions aux tribunaux le soin de la moindre décision au Canada, nous le regretterions. Voilà tout. En tant que représentants des Canadiens et protecteurs des droits des animaux, nous ne pouvons pas retirer les animaux de ferme de la disposition sur les biens. Cela s'avérerait une erreur énorme.
Cette assemblée et celles qui suivront, ainsi que les Canadiens en paieraient le prix. Il serait impossible d'assurer la bonne garde des animaux que possèdent, et je dis cela parce que les animaux sont des biens, les exploitants agricoles au Canada. Il est incontestable que le Parlement doive être saisi du projet de loi, mais celui-ci doit à tout prix être amendé. Il nécessite des améliorations. Nous devons faire en sorte qu'une fois ce projet de loi adopté, car le gouvernement l'adoptera, nous puissions dire qu'il est bon et que nous avons fait ce qu'il fallait.
Je crois que nombre de députés libéraux qui voteront pour le projet de loi rougiront de honte par après.
M. Roy Bailey (Souris--Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, depuis que je me suis exprimé un peu plus tôt sur une partie différente du projet de loi, j'ai eu droit à toutes sortes de réactions. La question ne suscite pas que de la tristesse. Je prends toujours l'avion pour venir ici à un petit aéroport où tout le monde me connaît. Avant de monter à bord de l'appareil, hier, un agent de sécurité a lancé «Assurez-vous que cet homme ne transporte pas de spermophiles.» Tout le monde connaissait cette blague.
Les appels téléphoniques et les lettres que je reçois sont parfois remplis d'humour. J'aimerais en donner quelques exemples à la Chambre, afin de démontrer que les gens vivant entre la rivière Rouge et les Rocheuses ne comprennent pas le problème. Ainsi, une gentille dame m'a téléphoné l'autre jour pour me demander ce que mangent les spermophiles. Je lui ai répondu qu'ils mangent de l'herbe et qu'ils raffolent des récoltes. J'ai ajouté qu'ils adorent les pois chiches. Elle a dit que c'était là la solution au problème. Tout ce qu'on avait à faire, c'était de répandre des pois chiches autour des champs, afin de rassembler à cet endroit tous les spermophiles. Je pense qu'on aurait autant de mal à rassembler des spermophiles qu'à former une meute de chats. Voilà qui donne à la Chambre une idée de ce que les gens savent des événements qui ont cours.
C'est un homme de Vancouver qui m'a fait parvenir par courriel le commentaire le plus intéressant. Selon lui, les spermophiles rendent bien service aux gens de l'endroit étant donné qu'ils ameublissent et aèrent le sol. J'ai dit «Voulez-vous rire de moi?» Il était tout à fait convaincu de son affirmation.
Je me rendais en automobile à l'aéroport lorsque j'ai entendu un représentant de l'Université du Manitoba déclarer que ces petites bestioles empoisonnantes font beaucoup de bien. Quelqu'un a dit qu'elles mangent des souris. C'est peut-être vrai, je ne le sais pas. Toutefois, je peux dire que j'ai franchi des centaines de milles à dos de cheval, d'où je pouvais voir des spermophiles et des souris évoluant dans l'herbe, mais je n'ai pas encore vu un spermophile manger une souris. J'ai parcouru des milles et des milles dans les champs au volant d'un tracteur. J'ai vu des mouettes et différents autres animaux attraper des souris, mais je n'ai jamais vu un spermophile manger une souris. J'ai aussi traîné de vieux greniers de bois avec un tracteur et constaté qu'en dessous de ceux-ci des souris et des spermophiles vivaient en bonne amitié. Après mon arrivée ce matin, j'ai décidé d'appeler des personnes plus âgées que moi, et je n'ai pu en trouver une qui se rappelle avoir vu un spermophile manger une souris.
Tous conviennent que des personnes se livrant à des actes comme ceux décrits par mon collègue, notamment laisser tomber un chat d'une fenêtre, devraient être punies. Le problème que pose le projet de loi, c'est qu'il ne précise pas qui déterminerait qu'un acte a été commis volontairement et sans se soucier des conséquences. Qui prendrait cette décision?
Pendant la fin de semaine, il y a eu une foire commerciale. J'y déambulais depuis un moment lorsqu'un de mes anciens étudiants m'a fait part d'un incident. Les ratons laveurs ont élu domicile dans notre région. J'aurais sans doute dû être au courant, mais je ne savais pas qu'ils pouvaient attirer un chien à un étang ou à une fosse-réservoir et l'y noyer en l'attaquant et en le retournant pour l'empêcher de nager. Le raton laveur est un remarquable nageur. J'ai demandé à mon ancien étudiant ce qu'il avait fait. Il m'a répondu qu'il n'était pas trop loin et qu'il avait fait feu une fois. Il a touché un raton laveur et le chien s'est libéré, puis il a atteint l'autre raton laveur. S'agissait-il là d'un geste posé volontairement et sans se soucier des conséquences? Quelqu'un devra trancher cette question? Quelqu'un devra déterminer si un homme qui cherche à sauver son chien devrait être accusé d'avoir agi volontairement et sans se soucier des conséquences. Je ne pousse pas ici le raisonnement à la limite. Je ne prends pas un exemple qui est totalement hors contexte.
Il est ici question de tout animal pouvant ressentir de la douleur.
L'Alberta est la seule province canadienne à se vanter d'avoir entièrement dératisé son territoire. Comment y est-elle parvenue? Au moyen d'un poison, qui provoque des hémorragies internes mortelles. Allons-nous nous priver du poison le plus efficace que nous ayons jamais eu? C'est une bonne question.
J'ai reçu un appel d'une dame qui a eu des difficultés avec des membres d'un club 4-H à cause d'une chèvre. Le jour des 4-H à la foire d'Armstrong, en Colombie-Britannique, elle montrait comment tailler les sabots d'une chèvre. Lorsque j'étais enfant, j'aimais regarder le maréchal-ferrant tailler les sabots des chevaux. De temps à autre, il lui arrivait de tailler trop profondément, ce qui provoquait des saignements. C'est ce qui s'est passé à la foire. La dame montrait aux membres du club comment tailler les sabots de la chèvre. L'animal a bougé et la dame a taillé un peu trop profondément et a provoqué un saignement. Les gens l'ont aussitôt accusée d'utiliser une pratique cruelle pour les animaux.
Ce projet de loi de portée générale va trop loin. Des députés des rangs d'en face ont déclaré ce qui suit à la Chambre:
...ce qui est légal aujourd'hui dans le cadre d'activités légitimes le sera encore lorsque le projet de loi aura reçu la sanction royale. |
J'aimerais bien le croire, mais si c'est le cas, ne nous contentons pas de promesses et écrivons-le en toutes lettres dans le projet de loi. Toutes les organisations agricoles, en commençant par la Fédération canadienne de l'agriculture, cesseront aussitôt d'être sur la défensive. Elles souhaitent voir adopter des dispositions semblables, mais le projet de loi reste muet à cet égard.
Qui décide de ce qui constitue un acte de cruauté? Beaucoup de gens ont déjà vu des tractions chevalines. Certains considéreraient cela comme un acte cruel. D'autres estiment que le fait d'attraper un veau et de l'attacher par les pattes ou de terrasser un taureau par les cornes, dans le cadre d'un rodéo, constituent des actes cruels. Qui décidera si c'est le cas ou non? Est-ce que ce sera prévu dans le projet de loi ou va-t-on laisser un groupe de lobbyistes en décider?
Je terminerai sur les paroles qui suivent et j'espère que les députés qui voteront pour le projet de loi s'en souviendront toujours. La grande crainte de l'industrie, c'est que les lois pénales tombent sous l'influence de groupes d'intérêts spéciaux, ce qui aurait pour effet de détruire des activités légitimes comme l'industrie agricole et l'activité connexe que constitue la production alimentaire. Comme je l'ai déjà dit, si les députés laissent des groupes de défense des droits des animaux décider, selon leur bon vouloir, des sanctions à imposer et de ce qui constitue un acte de cruauté, c'est toute l'industrie agricole, depuis l'élevage jusqu'au commerce des fourrures, qui est menacée.
Il faut que ce soit dans le projet de loi. Celui-ci doit contenir une disposition aux termes de laquelle les pratiques en matière d'élevage d'animaux qui sont aujourd'hui légitimes le resteront. Si le projet de loi contient une disposition en ce sens, il recevra l'appui de toute l'industrie agricole.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole relativement au sous-amendement proposé par le député de Selkirk—Interlake et appuyé par le député de Medicine Hat. Je pense que l'amendement est réaliste. C'est un bon amendement. Il y a des questions de fond qui doivent être étudiées si l'on renvoie cette mesure au comité, mais je crois sincèrement qu'il faut prévoir une limite de temps en ce qui a trait à cette question.
Chaque jour de nouvelles questions sont soulevées à l'égard du projet de loi et celles-ci justifient un examen par le comité. L'une des questions dont je viens d'être saisi, et qui est très importante, à mon avis, est celle des droits des simples citoyens d'intenter des poursuites. Comme nous le savons, le projet de loi C-15A mettra en place un nouveau système prévoyant un processus de sélection devant un juge, qui déterminera si l'infraction devrait faire l'objet d'un examen par les tribunaux.
Des députés d'en face ont dit que l'audience qui se tiendra prendra la forme d'une audience sommaire. Le plaignant ira devant un juge pour lui présenter les éléments de preuve. Comme les députés le savent, cette façon de faire non seulement serait contraire à la Charte des droits et libertés, mais elle violerait aussi les règles de base de la justice naturelle et de la justice fondamentale. Nous ne pouvons nous rendre à une audience et dire à un juge que nous croyons qu'il existe des preuves suffisantes pour que la question fasse l'objet d'un procès. C'est la même chose qu'une enquête préliminaire. Une dénonciation est recueillie sous serment. L'affaire est présentée à un juge. Celui-ci rend une décision après avoir entendu la poursuite et la défense, si cette dernière souhaite présenter des éléments de preuve, bien qu'elle ne soit pas tenue de le faire.
Nous avons maintenant un tout nouveau processus d'enquête préliminaire qui compliquera les choses. Ceux qui disent que ce processus permettra d'éviter que des gens soient traînés devant les tribunaux ne comprennent pas la nature du processus et ils ne comprennent pas non plus à quel point les groupes radicaux de protection des animaux veulent poursuivre des gens.
Sauf le respect que je leur dois, ces groupes se préoccupent fort peu qu'il y ait déclaration de culpabilité ou non. Dans ma circonscription, un agriculteur, un chasseur, un pêcheur ou tout citoyen qui ferait face à de telles accusations vivrait un stress incroyable. À mon avis, il est tout simplement injuste d'intenter des poursuites criminelles contre ces gens.
Autre point intéressant qui m'a été signalé : nous voulons que la cruauté envers les animaux soit punie très sévèrement. L'Alliance canadienne, pas plus que les autres partis de l'opposition, je crois, ne s'est opposée à ce que les peines soient plus sévères. La décision rendue l'autre jour à Toronto est fort surprenante. Je ne sais pas si les députés ont tous eu l'occasion d'examiner cette décision, mais, en parlant d'un chat qui avait été lentement écorché et mutilé, un juge a affirmé qu'il y avait pire façon de mourir pour un chat. Je me demande si ce juge pourrait décrire à la Chambre, par écrit, la pire façon dont un chat peut mourir. À mon avis, cela illustre bien une partie du problème. Le problème, ce n'est pas que nous nous opposons à des peines plus sévères pour de véritables actes de cruauté, mais bien que les tribunaux n'imposent pas les peines déjà prévues. Dans l'exemple que je viens de donner, le tribunal aurait pu imposer une peine d'emprisonnement de deux ans et demi. L'inculpé s'en est sorti avec une peine correspondant au temps déjà passé en détention, avec, si je ne m'abuse, assignation à domicile.
Nous nous livrons présentement à un exercice futile si les tribunaux eux-mêmes ne reconnaissent pas la gravité de cette infraction. Si le gouvernement désire réagir sérieusement à l'égard des infractions et des vrais cas de cruauté, il doit imposer des peines minimales. Toutefois, ce que nous avons ici n'est qu'une déclaration politique visant à apaiser les organisations de protection des animaux, à leur dire que nous imposons des peines plus sévères et que nous prenons la situation plus au sérieux. Or, quiconque participe au processus judiciaire sait que c'est simplement de la frime. Rien ne se passera. Nous avons vu ce qui est arrivé dans le cas de la conduite avec facultés affaiblies. Nous l'avons vu et revu. Ainsi, à moins que des peines minimales soient imposées, les tribunaux ne réagissent pas au renforcement des peines. C'est aussi simple que cela.
Ce qui se passe maintenant, en l'occurrence la création d'une infraction mixte en plus d'une infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité, est plus troublant encore que la décision rendue par le magistrat de Toronto qui estimait que le fait d'être écorché vif n'était pas la pire façon de mourir pour un chat. S'agit-il alors d'un acte criminel qui pourrait dorénavant permettre à un simple citoyen d'arrêter un concitoyen qui promène un chien portant un collier étrangleur? Le simple citoyen peut-il affirmer qu'un tel traitement est cruel et inhabituel pour un chien et que rien dans la loi ne justifie l'utilisation d'un collier étrangleur? Quelles sont les conséquences qu'entraîne une telle arrestation?
Je constate que mon temps de parole est presque entièrement écoulé. Je m'arrête ici pour le moment.
Le vice-président: Il restera environ trois minutes au député lorsque nous reprendrons le débat.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
La Semaine nationale de l'action bénévole
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, nous célébrons présentement la Semaine nationale de l'action bénévole. Chaque année, pendant une semaine en avril, on rend hommage à ceux qui donnent leur temps et leur énergie à leurs concitoyens.
Dans nos circonscriptions et partout au Canada, une bonne partie de notre qualité de vie dépend de l'engagement et de la présence des bénévoles. Ce sont des gens de tous âges qui viennent en aide à leur prochain. Chaque bénévole a un impact sur la vie de certains Canadiens. On ne peut exagérer l'importance du bénévolat.
De nos jours plus que jamais, les Canadiens ressentent la nécessité de resserrer les liens communautaires. Le bénévolat montre quelle importance nous attachons à ces valeurs bien canadiennes que sont les collectivités, le partage et la responsabilité réciproque.
L'expérience, ça compte; tel est le thème de la Semaine nationale de l'action bénévole pour 2002; il met en évidence le fait que le bénévolat est une façon d'acquérir de l'expérience et d'en faire profiter les autres. La Semaine nationale de l'action bénévole se terminera par une célébration mondiale des journées consacrées au service jeunesse de tous les coins de la planète, du 26 au 28 avril.
* * *
La Semaine de la sensibilisation au don d'organes
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous sommes en pleine Semaine de la sensibilisation au don d'organes, l'occasion parfaite pour réfléchir encore une fois à la vie et au moyen de partager ce cadeau avec d'autres.
Quatre mille Canadiens attendent des dons d'organes et de tissus, chacun ayant ses propres espoirs, ses rêves et ses craintes. Bon nombre d'entre eux vont mourir à moins que des Canadiens ne fassent leur part en signant leur carte de don d'organes. Un seul donneur dont les organes sont sains peut sauver la vie de neuf personnes.
Le nombre d'organes et de tissus requis va décupler au cours des deux prochaines décennies, semble-t-il. Le nombre de donneurs ne suivra pas la courbe, à moins que les Canadiens ne se rallient à la cause. Nous devrions tous faire notre part, ne serait-ce que parce que nous ne savons jamais quand nous pourrions devenir un receveur en attente d'une transplantation. Notre propre vie pourrait être l'une de celles qui seraient sauvées si le nombre de donneurs d'organes et de tissus augmentait.
Je demande aux députés de porter un ruban vert, d'assister à la célébration qui se déroulera sur la Colline mercredi après-midi et, surtout, de signer leur carte de don de vie.
* * *
[Français]
Les infrastructures
M. Marcel Proulx (Hull--Aylmer, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, le secrétaire d'État responsable de Développement économique Canada a annoncé une aide financière d'au-delà de 1,6 million de dollars du gouvernement du Canada pour les travaux d'infrastructures urbains de la nouvelle ville de Gatineau.
Cette aide financière permettra de réaliser la première phase de la revitalisation de l'édifice Connor, laissé vacant depuis 1996, en centre multisport et culturel dans le secteur Hull.
Ce projet permettra notamment une amélioration importante des infrastructures récréatives collectives locales, voire régionales, puisqu'il n'existe pas actuellement en Outaouais d'immeubles adaptés à la pratique du soccer intérieur en toutes saisons.
De nombreuses compétitions d'envergure à l'échelle régionale, provinciale, canadienne, voire internationale pourront se tenir à l'édifice Connor après sa rénovation. Aussi, bon nombre d'institutions scolaires pourront utiliser les plateaux de l'édifice aux fins de leurs activités scolaires et parascolaires. Aussi, cette surface pourra accueillir des événements majeurs, comme le Salon du livre de l'Outaouais.
Voilà un autre exemple concret des actions de notre gouvernement visant à l'amélioration de la qualité de vie des Canadiennes et des Canadiens.
* * *
[Traduction]
L'environnement
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, nous célébrons aujourd'hui le Jour de la Terre, jour où tous les Canadiens pourraient décider de relever le défi et de réduire leur impact sur l'environnement. En cette occasion, aujourd'hui et cette semaine, chacun d'entre nous devrait en profiter pour examiner son comportement, s'évaluer et modifier certaines habitudes. Combinés, tous ces changements auront un impact énorme sur notre environnement.
Au cours des dernières décennies, nous avons été nombreux à réduire notre gaspillage et notre consommation d'énergie alors que les prix de l'essence augmentaient. Au cours des dernières années, nous avons pensé davantage à ce que nous pouvions faire pour améliorer la qualité de l'air que nous respirons et de l'eau dont notre survie dépend.
Nous pouvons faire la différence. Nous devons faire des efforts en vue de continuer de réduire, de réutiliser et de recycler, d'utiliser des composteurs, de marcher, d'aller à vélo et de fermer le robinet lorsque nous nous brossons les dents.
Le Jour de la Terre a été souligné par diverses activités aux quatre coins du pays en fin de semaine. À Burlington, quelque 250 personnes ont fait une différence dans leur environnement local en ramassant des déchets. C'est en pensant à la planète et en agissant dans nos localités que nous ferons une différence.
* * *
Compétences Canada
Mr. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le Président, le 12 avril, j'ai eu le plaisir d'assister aux Olympiades annuelles de la formation professionnelle et technique de Compétences Canada Yukon, à Whitehorse. Ces Olympiades ont permis à des jeunes du Yukon de participer à des épreuves dans des disciplines professionnelles et techniques. Les métiers et les techniques sont essentiels pour l'avenir de notre pays.
Compétences Canada est un organisme bénévole sans but lucratif jouant un rôle primordial dans la promotion de la formation professionnelle et technique en tant que premier choix de carrière auprès des jeunes Canadiens et Canadiennes, dont les compétences et les talents sont essentiels pour notre main-d'oeuvre et notre économie. Je félicite et appuie avec enthousiasme la ministre et le ministère du Développement des ressources humaines pour le parrainage de Compétences Canada.
Je souhaite bonne chance à toutes les équipes provinciales et territoriales qui se joindront à l'équipe du Yukon à l'occasion des Olympiades canadiennes annuelles qui auront lieu à Vancouver, le 30 mai.
* * *
L'environnement
M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui le Jour international de la Terre. Comment le gouvernement réagit-il?
La solution du gouvernement libéral aux problèmes de l'environnement consiste à rechercher les occasions de passer au bulletin télévisé, ce qui, au bout du compte, ne donne rien. Le premier ministre a envoyé des négociateurs à Kyoto pour battre les Américains. Ils n'étaient pas là pour parvenir à un arrangement raisonnable, mais seulement pour marquer un point sur l'oncle Sam. L'environnement et l'économie étaient secondaires.
L'incidence du Protocole de Kyoto sur l'environnement et sur l'économie est inconnue. Les évaluations du ministre sont passées de 5 milliards à 15 milliards de dollars. L'industrie soutient que le montant atteindra probablement 60 milliards de dollars. L'Alliance canadienne est résolue à préserver notre environnement naturel et une économie saine. Nous pouvons faire les deux.
D'après l'OCDE, les pays les plus prospères affichent le degré le plus élevé de durabilité de l'environnement. Le gouvernement doit cesser de poursuivre les caméras et commencer à poursuivre des solutions.
* * *
Billy Green
M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Monsieur le Président, des sondages, des études et des articles ont révélé récemment le manque de connaissances historiques au Canada. C'est décevant.
Je voudrais faire connaître à la Chambre l'histoire remarquable de Billy Green, un inconnu pour certains, mais un héros important de notre histoire. À l'âge de 19 ans, Green a joué un rôle crucial et central dans la bataille de Stoney Creek pendant la guerre de 1812. Après être tombé sur un camp de soldats américains en juin 1813, il a couru sur une distance de plusieurs milles pour informer les Britanniques à Burlington Heights. Green a ensuite dirigé l'embuscade britannique, mettant les Américains en déroute et les forçant à battre en retraite.
Je crois qu'il incombe au gouvernement national de soutenir la promotion de l'histoire du Canada. Malheureusement, il reste des obstacles à surmonter. Il est temps que le gouvernement national finance la production d'histoires comme celle de Billy Green. Il est temps d'embrasser ce passé que nous ne connaissons pas.
* * *
[Français]
Le Jour de la Terre
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne--Blainville, BQ): Monsieur le Président, aujourd'hui est la 32e édition du Jour de la Terre. Célébré par 500 millions de personnes chaque année, ce Jour de la Terre est placé sous le signe de l'eau, à l'instar des Nations Unies, qui ont décrété 2003 Année internationale de l'eau douce.
On estime qu'en 2025, les deux tiers de l'humanité seront dans une situation de contrainte hydrique modérée ou grave.
Le Forum jeunesse du Bloc québécois tenait, il y a deux semaines, son colloque Cap sur l'avenir, portant sur le développement durable, qui fut une réelle réussite. Les réflexions y ont été enrichissantes et les pistes de solutions nombreuses. Le Bloc québécois s'engage à traduire le tout en solutions concrètes.
Comme le disait Antoine de Saint-Exupéry: «Nous n'avons pas hérité le monde de nos parents, nous l'avons emprunté à nos enfants.»
* * *
[Traduction]
Marion Cunningham
M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour féliciter, avec un peu de retard, une électrice d'Ottawa—Vanier qui a célébré récemment son 100e anniversaire de naissance.
Marion Cunningham est née le 10 avril 1902, à Ottawa, où elle a vécu toute sa vie. Elle a grandi près de l'actuelle avenue Laurier et a déménagé quelques fois dans le quartier Côte-de-Sable. Elle a fait ses études au Ottawa Ladies College dans le Glebe. Elle a élevé cinq enfants, Ed, Claire, Corinne, Bill et Diane, et a eu 10 petits-enfants et 13 arrière-petits-enfants. Elle a été pendant longtemps membre de la paroisse St. Joseph.
Elle a passé sa carrière dans la fonction publique, durant laquelle elle a travaillé comme agent administratif au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Elle a également occupé le poste de secrétaire du sous-ministre. Elle a pris sa retraite durant l'année centenaire du Canada, 1967, et, 35 ans plus tard, nous célébrons un autre centenaire, le sien.
C'est avec grand plaisir que je souhaite, avec un peu de retard, un joyeux centième anniversaire de naissance à Mme Cunningham.
* * *
Les pompiers
M. Andy Burton (Skeena, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui à la Chambre pour offrir mes plus sincères remerciements aux pompiers de ma circonscription, celle de Skeena.
La semaine dernière, la ville de Terrace et le district de Kitimat ont rendu hommage aux pompiers qui ont fidèlement servi la population pendant de nombreuses années. Nous avons tous une lourde dette envers les pompiers. Ce n'est qu'après les événements du 11 septembre que bien des gens ont pris conscience de tout ce que comporte leur travail.
Comme c'est le cas dans bien des petites municipalités, nombre de pompiers de ma circonscription ont un emploi à plein temps dans un autre domaine et ils mettent leur vie en danger quand ils interviennent dans des cas d'incendie ou d'accident.
C'est avec un très grand plaisir que je rends hommage à ces pompiers ayant obtenu un prix pour longs états de service pour leur dévouement, leur force, leur courage et leur professionnalisme. Ils ont servi et protégé le public avec honneur et fierté. Au nom des habitants de la circonscription de Skeena, je les remercie.
* * *
L'Arménie
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, selon un article paru dans le Globe and Mail du 18 avril, le gouvernement turc a menacé d'intenter des poursuites contre les producteurs du film Ararat, du cinéaste canadien de réputation internationale Atom Egoyan, si le film affirme que la Turquie a été coupable du génocide des Arméniens, qui a débuté le 24 avril 1915.
La Chambre a désigné la semaine du 20 au 27 avril de chaque année comme la Semaine commémorant l'inhumanité de l'être humain envers son prochain, honorant ainsi les victimes du génocide arménien et toutes les autres victimes de crimes contre l'humanité.
J'exhorte tous les députés à se joindre à moi pour condamner toute tentative que pourrait faire un gouvernement pour brimer la liberté d'expression d'un artiste canadien en général et, en particulier, dans le récit des faits historiques du premier génocide du XXe siècle.
* * *
L'environnement
M. Peter Stoffer (Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, c'est pour moi un grand plaisir de prendre la parole en ce Jour de la Terre pour féliciter tous ceux qui consacrent leur vie à la protection de notre environnement. Je songe à des gens comme Monty Hummel, du Fonds mondial pour la nature, David Suzuki, de la David Suzuki Foundation, et Elizabeth May, du Sierra Club du Canada.
Je suis persuadé que, si ces trois personnalités étaient parmi nous en ce moment, elles conseilleraient au gouvernement de prendre immédiatement trois mesures pour protéger notre environnement: d'abord, mettre un terme aux coupes à blanc; deuxièmement, arrêter de vider nos océans; troisièmement, assainir immédiatement les étangs bitumineux de Sydney. J'en ajouterais une quatrième, au nom du Nouveau Parti démocratique: ratifier le Protocole de Kyoto et signer la Convention sur le droit de la mer.
Je tiens à féliciter le député de Windsor--St. Clair, qui a fait un travail inestimable dans le dossier de l'environnement. Si ce n'était de gens comme lui et le Nouveau Parti démocratique, notre planète serait dans un état encore plus pitoyable.
Je félicite tous ceux qui célèbrent le Jour de la Terre. Continuons à faire du bon travail.
* * *
[Français]
Le Sommet des Amériques
M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, il y a un an jour pour jour prenait fin le Sommet des Amériques à Québec où j'étais moi-même présent. Hormis l'adoption de la Charte démocratique par l'Organisation des États américains, la situation concrète de la démocratie s'est détériorée depuis ce temps, ici et ailleurs.
D'abord, le gouvernement canadien n'a ratifié aucun des traités régionaux relatifs aux droits humains après 12 ans de présence à l'OEA. Et à l'interne, l'adoption par le Canada de certaines lois après les tragiques événements du 11 septembre dernier a montré à quel point sa réputation sur les droits démocratiques était surfaite.
Sur le plan du processus de négociation, rien n'a été fait par le gouvernement libéral, contrairement au gouvernement du Québec qui a déposé un projet de loi en ce sens, pour permettre aux parlementaires de pouvoir débattre et voter un éventuel accord sur la ZLEA.
Si le Canada tient à un projet d'intégration des Amériques, il faudra replacer les préoccupations démocratiques, sociales, culturelles et environnementales au centre du processus de négociation, tout en remettant l'économie à sa juste et importante place: être au service des peuples des Amériques.
* * *
[Traduction]
Les affaires étrangères
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, depuis un an, un groupe manifeste pacifiquement le vendredi, à l'extérieur de mon bureau de circonscription, pour dénoncer les sanctions contre l'Iraq. Depuis le 11 septembre, cette démonstration publique est impopulaire, mais le groupe persiste, beau temps, mauvais temps.
Compte tenu des événements de septembre, de la détérioration de la situation au Proche-Orient et la position des Américains sur l'Iraq, la cause de ce groupe semble encore moins prometteuse qu'au début. Ce ne devrait pourtant pas être le cas.
Les sanctions n'ont pas fait fléchir Saddam Hussein. Parmi ceux qu'il dirige, ce sont les plus faibles, dont les enfants, qui souffrent le plus de ces sanctions. Autrement dit, les sanctions encouragent les jeunes au bas de la pyramide démographique à devenir des terroristes. La pauvreté et l'ignorance alimentent la violence. Un niveau de vie acceptable et l'instruction alimentent la paix.
Peu importe le traitement accordé à Saddam Hussein, il faut commencer à nourrir et éduquer les enfants iraquiens. Ce sont eux qui, en retour, nous aideront à lutter contre les Saddam Hussein et les terroristes de demain.
* * *
L'environnement
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, tous les écoliers du Canada et du monde entier participent aujourd'hui aux activités du Jour de la Terre: plantation d'arbres, sensibilisation aux dangers des déchets dangereux, à la pollution de l'eau et aux émissions polluantes, et formation en vue de réduire la consommation, par la réutilisation et le recyclage, afin de réduire le tort que nous faisons à l'environnement.
Ce ne sont là que certaines des questions avec lesquelles se familiarisent les écoliers dans le cadre des activités du Jour de la Terre. Six millions de Canadiens se joignent aux 500 millions d'habitants de la planète qui célèbrent le Jour de la Terre.
Le Parti progressiste-conservateur a toujours été reconnu pour sa position en matière d'environnement, en particulier grâce aux efforts qu'il a déployés au sommet de Rio. Mais le gouvernement en place n'a pas donné suite à ces efforts. Le gouvernement libéral a tourné le dos à l'écologie en n'adoptant pas la moindre mesure législative en matière d'environnement.
Le Jour de la Terre nous rappelle à tous que nous sommes responsables de la planète. J'invite tous les Canadiens à y participer pour protéger leur environnement.
* * *
La sensibilisation aux dons d'organes
M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine est la Semaine nationale de sensibilisation à l'importance des dons d'organes. Quatre mille Canadiens sont actuellement inscrits sur des listes d'attente en vue d'une transplantation d'organes et de tissus. Bon nombre d'entre eux mourront si nous ne prenons pas le temps de signer une carte d'autorisation de don d'organes et d'en informer notre famille.
Un seul donneur peut sauver la vie de neuf personnes alors que les tissus d'un autre donneur peuvent accroître la qualité de vie de jusqu'à 40 personnes. Quatre-vingt-dix pour cent des Canadiens appuient le principe du don d'organes et de tissus, mais moins de la moitié d'entre eux ont signé une autorisation à cet effet. Toutefois, le besoin d'organes et de tissus se fait de plus en plus pressant.
J'encourage tous les Canadiens à discuter de cette importante question avec leurs proches et à signer la carte d'autorisation.
* * *
Vaisakhi
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les collectivités sikhes de Toronto et de partout au pays se sont réunies ce week-end pour célébrer le festival annuel du Vaisakhi, qui marque le premier jour solaire de la nouvelle année sikhe.
Vaisakhi est une journée bien spéciale pour les Sikhs. Chaque année, plus de 400 000 Sikhs du Canada se joignent ce jour-là à 20 millions d'adeptes des quatre coins de la planète pour célébrer et reformuler leur engagement envers une discipline spirituelle qui incarne la commémoration de Dieu, la sincérité, le dur labeur, l'égalité de tous, l'humanité, l'espoir et le renouvellement. Une cuisine communautaire sert gratuitement des repas aux gens de toute confession dans tous les temples sikhs, selon les principes fondamentaux du service, de l'humilité et de l'égalité.
L'Alliance canadienne se joint à tous les Canadiens pour féliciter les Sikhs du Canada qui apportent les valeurs qui les rendent plus forts à la culture canadienne, et nous leur souhaitons une très heureuse et prospère nouvelle année.
QUESTIONS ORALES
[Questions orales]
* * *
[Traduction]
Le gouvernement du Canada
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la majorité des Canadiens croient maintenant que le gouvernement fédéral est corrompu. Parlons de corruption.
Les ministres réunissent des fonds secrètement pour leur campagne à la direction, le gouvernement achète des jets de luxe et, tant que le gouvernement n'est pas tenu de rendre des comptes, il sera perçu comme étant corrompu.
Le premier ministre prendra-t-il une mesure, aussi minime soit-elle, pour dissiper cette perception de corruption en tenant enfin sa promesse de nommer un conseiller indépendant en éthique et en intégrité qui relèverait directement du Parlement?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le conseiller en éthique témoigne quatre ou cinq fois par année devant un comité pour présenter un rapport sur les lobbyistes au comité et à la Chambre des communes.
Lorsqu'il conseille le premier ministre sur les responsabilités de ce dernier, il doit parler au premier ministre lui-même. Toutefois, pour les autres questions, il peut passer par le comité de la Chambre, ce qu'il a fait à maintes reprises.
En fait, depuis que le gouvernement est arrivé au pouvoir il y a presque neuf ans, aucun ministre n'a été obligé de démissionner à cause de corruption.
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les statu quo est inacceptable. Des changements s'imposent. Le premier ministre n'a pas ses priorités à la bonne place. Il n'est même pas prêt à prendre les mesures les plus minimes pour que son gouvernement ait davantage de comptes à rendre aux contribuables qui travaillent fort et qui s'interrogent sur le genre de règles qu'il s'impose.
Nous avons maintenant la perception que le ministre des Finances aurait vendu des stratagèmes pour tromper le fisc, et j'ai bien dit «aurait», afin de réunir des fonds pour sa campagne à la direction.
Le premier ministre a-t-il pris des mesures pour établir des règles afin de voir à ce que ces ministres ne compromettent pas leurs rôles au sein du Cabinet dans leur course à le remplacer?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, samedi, le chef de l'opposition était très heureux que nous ayons un Challenger pour l'emmener à Trenton. Je l'ai invité, et il a accepté. Il n'avait aucun scrupule à prendre cet avion pour aller rendre hommage aux soldats là-bas. Je voulais énoncer les faits et mettre un terme à toute cette hypocrisie.
J'ai dit que, oui, il y aurait des lignes directrices. Les gens ont le droit de s'organiser, tout comme les partis de l'opposition, s'il y a une course à la direction. Il y aura un jour une course à la direction. Je ne crois pas rester ici encore 30 ans, alors il est certain que, un de ces jours, un des jeunes qui m'entourent pourra espérer prendre la relève.
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'étais fier de monter à bord du jet Challenger samedi pour aller rendre hommage à ces braves Canadiens. Cependant, cela n'a rien à voir avec la corruption au sein du gouvernement.
Dans mon parti, les membres du cabinet fantôme ont dû démissionner pour être candidats à la direction. Nous serions très heureux si le premier ministre établissait des règles exigeant que tous les dons versés soient déclarés.
Soixante et onze pour cent des Canadiens ont la perception que le gouvernement est corrompu. Quand le premier ministre établira-t-il des règles afin que nous puissions montrer aux Canadiens que nous n'avons absolument rien à cacher relativement à ce que nous faisons à la Chambre?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a pas de course à la direction à ce moment-ci. Je sais que l'autre parti s'est choisi un nouveau chef il y a quelques semaines, et il n'a pas déclaré les noms des donateurs ni les montants des dons. Il ose nous dire de faire quelque chose qu'il ne fait pas lui-même.
Il y aura des règles lorsqu'il y aura une course à la direction. Je l'ai dit à la Chambre des communes de même qu'au caucus. Tout cela se fera en temps utile, probablement très bientôt.
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, grâce à une demande présentée aux termes de la Loi sur l'accès à l'information, nous avons appris que le conseiller en éthique a demandé, en juin 2001, qu'un projet de lettre destinée aux ministres soit rédigé pour leur fournir des lignes directrices sur les activités de financement de leur campagne à la direction du parti.
Le premier ministre peut-il dire aux Canadiens si ce projet de lignes directrices a été communiqué aux ministres qui amassent des fonds pour leur campagne à la direction du parti? Dans la négative, pourquoi n'applique-t-on pas ces lignes directrices?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai reçu une lettre du conseiller en éthique, que je veux rencontrer parce que, à mon avis, il y a des améliorations à y apporter. Les directives seront rendues publiques dès qu'elles seront prêtes. Il m'a été impossible de rencontrer le conseiller la semaine dernière, car il était absent.
J'ai l'intention de le rencontrer et de discuter avec un certain nombre de personnes. J'espère que les directives seront prêtes et pourront être déposées à la Chambre d'ici la fin du mois de mai.
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, selon les documents obtenus en application de la Loi sur l'accès à l'information, le conseiller en éthique aurait rédigé en juin 2001 un projet de lignes directrices concernant le financement des campagnes à la direction. Pourtant, il n'a remis le texte définitif au premier ministre que le 12 avril dernier. Ces lignes directrices étaient prêtes depuis près d'un an.
Pourquoi le premier ministre a-t-il attendu presque un an avant d'obtenir ces lignes directrices et pourquoi n'a-t-il pas rendu ce projet de lignes directrices public l'an dernier?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député vient de dire que la lettre m'a été envoyée le 12 avril dernier. Par conséquent, je n'ai pas pu y donner suite tant que je ne les ai pas reçues. Je les ai obtenues la semaine dernière et j'y donnerai suite d'ici la fin du mois prochain.
* * *
[Français]
Le Protocole de Kyoto
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, en 1997, le Québec et les provinces convenaient tous que l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre devait cesser. L'entente était complète, le Canada devait agir.
Malheureusement, de la parole aux actes, il y a un pas que le Canada n'a pas encore franchi. En effet, alors que les émissions canadiennes augmentent de 20 p. 100, le gouvernement cède aux pressions de certains lobbies et de certains ministres, et recule sur Kyoto.
Est-ce que le premier ministre admettra qu'en refusant de faire porter ces consultations sur les moyens de réduire les émissions de gaz à effet de serre, son gouvernement se ménage une porte de sortie pour remettre en question la ratification même du Protocole de Kyoto?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons dit depuis de nombreux mois que nous voulions consulter les provinces et les personnes intéressées dans ce dossier. Il est très important que nous ayons une coordination avec les provinces pour pouvoir mettre en application un plan de protection de l'atmosphère, par les Canadiens. Le dossier n'est pas terminé.
Ce matin, il y a quelques heures à peine, je discutais de ce problème avec le premier ministre du Japon qui envisage de ratifier l'accord. Eux aussi ont certains problèmes. Nous espérons qu'éventuellement, ici au Canada et au plan international, nous trouverons un terrain d'entente pour permettre la signature par autant de pays possible, y compris le Canada.
M. Gilles Duceppe (Laurier--Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, on n'a rien contre les consultations, mais il ne faut pas qu'elles servent de prétexte à l'inaction. Pour procéder le plus rapidement possible à la mise en oeuvre de Kyoto, encore faut-il que les consultations se fassent sur une proposition concrète, une proposition précise.
Est-ce que le premier ministre peut nous dire si, en vue des consultations, son gouvernement a, oui ou non, soumis une proposition claire de mise en oeuvre de Kyoto, et si oui, laquelle est-elle?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le ministre de l'Environnement et le ministre de l'Énergie travaillent sur ce dossier à ce moment-ci. Ils seront en mesure de présenter des propositions concrètes aux ministres des provinces et des territoires, je l'espère, dans les semaines à venir.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral prend malheureusement prétexte des consultations avec le Québec et les provinces pour retarder la ratification du Protocole de Kyoto. Or, sur le principe, au moment des négociations internationales, tout le monde au Canada s'entendait sur la nécessité de ne pas augmenter les émissions de gaz à effet de serre.
Est-ce que le manque de leadership du gouvernement et son incapacité à faire une proposition claire aux provinces ne laissent pas un espace très grand à certains lobbies qui se servent de certains ministres pour faire reculer le gouvernement sur la ratification de l'entente?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je peux assurer l'honorable député que la position du gouvernement fédéral est claire et que c'est la position de tous les ministres du gouvernement du Canada.
Nous aurons des consultations avec les provinces, avec les territoires, les industries qui sont touchées et le grand public canadien. Par la suite, nous aurons un plan en place où il n'y aura aucun fardeau trop élevé pour telle ou telle région du pays. À ce moment-là, nous serons en position pour prendre une décision sur la ratification.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre de l'Environnement devrait comprendre que pendant que le gouvernement recule dans le dossier de Kyoto ou, au mieux, que les observateurs diront qu'il fait du surplace, entre 1990 et l'an 2000—c'est la période récente; c'était ce gouvernement-ci qui était là—, les émissions de gaz à effet de serre au Canada ont augmenté de 20 p. 100.
Est-ce que le gouvernement réalise que c'est la situation dans laquelle il place tout le monde au moment où l'on se parle?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, l'honorable député a raison. Il y a une augmentation des gaz à effet de serre depuis 1997. Toutefois, il doit aussi savoir que la première période de Kyoto ne commence qu'en 2008. Nous avons quelques années pour mettre en place le plan dont le premier ministre a parlé il y a quelques minutes.
* * *
[Traduction]
Le commerce
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, le ministre des Finances aurait confié au secrétaire du Trésor américain que de très graves problèmes assombrissent les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Il aurait fait mention des droits perçus à la sauvette sur le bois d'oeuvre et de la taxe imposée à la Commission canadienne du blé, deux mesures prises pour des raisons politiques, selon lui.
Les Américains ont besoin de l'approbation du Canada pour acheminer le gaz du Nord par gazoduc. Jusqu'ici, notre gouvernement s'est empressé de coopérer. Le ministre des Finances a-t-il indiqué que le processus d'approbation du gazoduc connaîtrait un ralentissement si les États-Unis persistaient à faire obstacle à nos exportations de bois et de céréales?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, j'ai parlé d'une foule de choses avec le secrétaire du Trésor américain qui, lorsqu'il gravitait dans le monde des affaires, avant de se lancer en politique, avait acquis une bonne connaissance du Canada. Je lui ai indiqué clairement que notre gouvernement allait prendre toutes ses décisions dans l'intérêt du Canada.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, les Américains se disent partisans du libre-échange, mais ils accordent les plus grosses subventions agricoles de l'histoire. Nos ministres canadiens, de leur côté, prétendent ne pas avoir les mêmes moyens. Or, les excédents du gouvernement fédéral atteignent des sommets. Ils sont beaucoup plus élevés qu'on ne l'aurait prévu après les événements du 11 septembre.
Les dirigeants du secteur agricole demandent une somme de 1,2 milliard de dollars pour contrebalancer l'effet de ces subventions. Le ministre des Finances se montrera-t-il plus bienveillant et compatissant en acceptant immédiatement de débloquer cette somme dont les agriculteurs ont si grandement besoin?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le député m'a accompagné à Washington il y a quelques semaines. J'étais heureux qu'il soit avec moi pour transmettre un message à l'industrie et aux politiciens américains concernant les effets de leurs subventions.
Comme je l'ai dit à la Chambre vendredi, notre gouvernement a toujours démontré, et de manière efficace, qu'il étudie tous les moyens possibles pour trouver des ressources et les utiliser au mieux pour aider les agriculteurs canadiens.
* * *
La défense nationale
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC): Monsieur le Président, en ce qui concerne les Canadiens qui sont morts en Afghanistan, selon le mandat de la commission d'enquête, seuls des Canadiens témoigneront. Le pilote américain ou ses commandants, qui connaissent déjà toutes les réponses, ne témoigneront pas.
Si le Canada est assez bon pour être un partenaire des États-Unis dans le conflit, pourquoi n'est-il pas assez bon pour que les Américains expliquent comment nos soldats ont été tués? Le ministre demandera-t-il que les Américains témoignent devant la commission d'enquête canadienne?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, la commission d'enquête a reçu un mandat très complet pour accomplir un travail efficace afin de trouver l'information nécessaire.
Les États-Unis nous ont assuré de leur entière collaboration. Ils auront eux aussi une commission d'enquête. Nous allons également y participer largement. J'estime que nous obtiendrons l'information nécessaire pour déterminer ce qui s'est produit et pour agir afin de réduire les risques qu'une telle tragédie ne se reproduise.
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC): Monsieur le Président, le ministre dit croire que nous obtiendrons l'information, mais cela ne suffit pas. Les Américains eux-mêmes ont cerné la grande question, à savoir si le pilote avait l'autorisation ou non de larguer la bombe. La commission d'enquête canadienne n'aura pas directement accès à quiconque peut répondre à cette question des plus importantes.
Je le répète, le ministre demandera-t-il que le pilote et ses supérieurs témoignent devant la commission d'enquête canadienne?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, la commission d'enquête s'entendra avec ses homologues américains.
M. Rumsfeld, le secrétaire de la Défense, vient de déclarer, il y a moins d'une heure, que toutes ces questions feront l'objet d'une entière collaboration. Je ne prévois pas que nous aurons du mal à obtenir l'information nécessaire pour déterminer ce qui s'est produit et quelles mesures peuvent être prises pour réduire les risques à l'avenir.
* * *
Le protocole de Kyoto
M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre de l'Environnement a promis de soumettre le Protocole de Kyoto à des consultations justes et équitables. Pourtant, le Sierra Club du Canada se targue, sur son site web, d'élaborer dans les coulisses, avec le concours de fonctionnaires (fédéraux), des prévisions économiques réalistes. Il déclare également avoir été invité à contribuer à l'organisation du processus de consultation, à fournir des conseils en matière de relations avec les médias et à participer à la sélection des experts qui seront invités à s'exprimer.
Pourquoi ce groupe bénéficie-t-il d'un tel traitement de faveur?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, tout est possible. Tout le monde est invité à nous faire des recommandations sur l'organisation et la tenue de ces consultations. En tant que ministre, je ne suis pas responsable du site web du Sierra Club du Canada.
M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en fait, nous voulons savoir si le ministre a perdu le contrôle de ce processus. Le ministre de l'Environnement a toujours soutenu qu'il était important de mener des consultations au sujet du Protocole de Kyoto.
Comment peut-il prétendre que ces consultations sont justes et impartiales alors que l'on a demandé à un groupe d'intérêts de contribuer à l'organisation du processus? Nous avons l'impression que les dés sont pipés.
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait le dire aux Albertains avec qui je me suis entretenu depuis quelques semaines, et pas plus tard qu'il y a quelques jours.
Le fait est que nous consultons beaucoup de gens. La question concerne le pays entier, pas une seule région ou un seul secteur. Je veux tout simplement que nos consultations soient des plus fructueuses et qu'elles débouchent sur un véritable consensus canadien quant aux dispositions à prendre et aux modalités d'application.
[Français]
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, selon le ministre de l'Environnement, le gouvernement poursuit des consultations avant de procéder à la ratification du Protocole de Kyoto. La principale question à régler, c'est de savoir si les efforts qu'il faut consentir au Canada pour respecter ce protocole doivent se faire selon une répartition territoriale ou sectorielle.
Puisque le gouvernement est en consultation auprès des provinces pour l'application du Protocole de Kyoto, peut-il nous dire sur quelles bases il les consulte? Sur une répartition territoriale ou sectorielle des efforts? Quelle est sa position?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, nous avons eu plusieurs consultations avec les provinces sur cette question du territoire ou du secteur de l'économie.
Depuis septembre, j'ai eu trois réunions avec les ministres de l'Énergie et de l'Environnement des provinces et des territoires. J'en aurai une autre le mois prochain.
Nous discutons souvent au sujet du meilleur moyen à prendre pour arriver au but que nous poursuivons avec le Protocole de Kyoto. J'attends de l'information des provinces et des territoires. Il n'y a rien de très difficile là-dedans.
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, comment le gouvernement fédéral peut-il expliquer que les pays de l'Union européenne, par exemple, sont beaucoup plus avancés que nous le sommes quant à la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, alors que les conditions impliquaient plusieurs pays différents? Est-ce qu'ici au Canada il n'y a pas un réel manque de leadership et de volonté politique?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, la situation des pays de l'Union européenne est bien différente de celle du Canada.
Par exemple, on sait que les États-Unis se sont retirés du Protocole de Kyoto il y a un an. C'est seulement en février de cette année que nous avons vu les détails du plan américain.
Les Européens n'ont pas les mêmes liens commerciaux que nous avons ici au Canada avec les États-Unis. La situation est totalement différente entre le Canada et l'Europe.
* * *
[Traduction]
La défense nationale
M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous constatons aujourd'hui que 69 p. 100 des Canadiens ne croient pas aux excuses des membres de la jet set d'en face. Personne ne met en doute le fait que le Challenger 604 soit un meilleur avion puisque, après tout, il a 19 ans de moins, il s'appuie sur une meilleure technologie et nous payons à l'avance pour 8 millions de dollars de pièces de rechange. Cela couvre dans une large mesure les réclamations au titre de la garantie.
Ce que les Canadiens veulent vraiment savoir, c'est ceci. Qui, parmi nos vis-à-vis, a ordonné le remplacement immédiat des Challenger au lieu de l'achat des avions gros porteurs et des hélicoptères pour remplacer les Sea King, de l'équipement dont nos forces armées ont vraiment besoin?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, cela n'enlève rien à ces autres projets.
Le projet Sea King va de l'avant. On annoncera le remplacement des Sea King avant la fin de l'année. Entre-temps, les Sea King qui ont été modernisés font un travail remarquable dans le golfe Arabo-Persique.
Les Challenger viennent remplacer deux Challenger plus âgés. Ce ne sont pas des avions de luxe. Ils ont un plus grand rayon d'action et une consommation de carburant moindre. C'est un achat sensé qui a été effectué pour ces raisons.
M. Gerry Ritz (Battlefords--Lloydminster, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la décomposition du contrat, déposée vendredi par le ministre, montre que l'on a prévu pour ces deux nouveaux avions à réaction près de 10 millions de dollars pour de l'instrumentation militaire spéciale. Or, selon les propres rapports du ministère de la Défense nationale, les Challenger actuels sont équipés des instruments les plus modernes à cet égard.
Ne servirait-on pas mieux les intérêts des contribuables canadiens en transférant l'instrumentation actuelle, ou le gouvernement libéral entend-il remiser ces instruments à la manière du système de télécommunications par satellite de 174 millions de dollars qu'il n'a jamais utilisé?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, tout ce matériel ne peut être obtenu d'une autre façon. Il doit être installé pour amener les nouveaux Challenger aux mêmes niveaux que ceux que nous avons déjà.
* * *
[Français]
Les infrastructures routières
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, le journal Le Quotidien du Saguenay--Lac-Saint-Jean, sous la plume de Denis Bouchard, publiait ce qui suit samedi dernier, et je cite: «Le fédéral voulait que Québec s'engage à payer la moitié des coûts de construction d'un 4 voies sur la route 175, c'est fait. Il voulait aussi que Québec lance les études d'impacts environnementaux, c'est fait. Et maintenant, la province demande à Ottawa de respecter la promesse qu'il a formulée 10 fois plutôt qu'une.»
Qu'attend le ministre des Transports pour remplir l'engagement fédéral et annoncer sa participation financière au plus tôt, tel que promis en campagne électorale?
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, nous n'avons pas signé avec la province de Québec l'entente relative au programme pour les autoroutes. L'autoroute dans le comté de la députée et dans celui de mon collègue, le secrétaire parlementaire, qui fait un bon travail pour les intérêts des Québécois dans cette Chambre, est une priorité pour le gouvernement du Québec et aussi pour nous.
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, on sait que le député de Chicoutimi--Le Fjord n'a rien fait depuis les dernières élections. Le temps des excuses et des faux-fuyants est terminé. Le Saguenay--Lac-Saint-Jean veut qu'Ottawa livre les promesses faites par ses ministres et par le député de Chicoutimi--Le Fjord avant l'élection.
Quand le ministre des Transports va-t-il tenir sa promesse et annoncer le montant de sa participation au projet? On n'attend plus que lui!
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je dois informer l'honorable députée qu'il n'y a eu aucun commentaire de sa part avant le discours de mon collègue, le secrétaire parlementaire, au sujet de cette autoroute. C'est lui qui a soulevé le sujet à la Chambre des communes.
* * *
[Traduction]
Les marchés publics
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le Canada est un pays doté d'une petite population. Par conséquent, il a intérêt à ce que les échanges commerciaux reposent sur des règles internationales.
Or, en vertu de l'ALENA, tout marché public de plus de 37 500 $ doit faire l'objet d'un appel d'offres, à moins que le gouvernement n'invoque un cas d'exception. Le gouvernement n'était pas obligé d'enfreindre les règles pour obtenir deux Challenger pour le Cabinet. S'il y avait eu un appel d'offres ouvert et équitable, ces avions auraient probablement été retenus.
Pourquoi le gouvernement a-t-il sacrifié notre autorité morale sur le plan international en faveur du confort douillet des membres du Cabinet?
L'hon. Don Boudria (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a pas eu infraction aux règles.
Le député n'ignore certainement pas qu'une seule compagnie fabrique les avions à réaction canadiens. Il n'y a qu'un seul fabricant pour les Challenger. Il n'y a que quatre avions à réaction. Nous n'allions certainement pas avoir cinq avions différents. Nous avons commandé des appareils canadiens. C'était dans les règles. Nous parlons de technologie de niveau mondial. Nous sommes fiers des travailleurs qui fabriquent cet excellent produit.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est peut-être vrai, mais Travaux publics ne peut enfreindre les règles concernant les marchés publics. Le Canada n'est pas en mesure de soutenir qu'il n'apprécie guère que d'autres gouvernements prennent des mesures unilatérales contrevenant à certaines ententes internationales alors qu'il entache lui-même sa propre réputation en faisant de même.
Le gouvernement a enfreint les règles dans le cas de Cipro et des Challenger. Quel membre du Cabinet a sanctionné cette exception à la règle?
L'hon. Don Boudria (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a pas eu infraction aux règles. Il n'y a pas lieu de parler d'exception aux règles puisqu'il n'y a pas eu infraction. Il n'était pas nécessaire d'obtenir une exception. En fait, ce contrat est exempté de l'application des règles de l'OMC comme de l'ALENA.
* * *
L'âge du consentement à des activités sexuelles
Mme Judi Longfield (Whitby--Ajax, Lib.): Monsieur le Président, depuis les récentes décisions judiciaires concernant la pornographie juvénile, il a beaucoup été question de l'âge du consentement à des activités sexuelles. Le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada peut-il nous dire à quel âge une personne peut légalement consentir à des activités sexuelles au Canada?
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il y a un malentendu au sujet des dispositions du Code criminel concernant l'âge du consentement.
Depuis 1890, l'âge du consentement est, dans la plupart des cas, de 14 ans. Il est cependant de 18 ans dans le cas d'une relation fondée sur l'exploitation, par exemple la prostitution, la pornographie juvénile, ou dans le cas d'une relation fondée sur la confiance ou l'autorité. Toute activité sexuelle non consentie constitue une agression sexuelle, peu importe l'âge. La motion que l'opposition entend présenter demain pourrait proposer de réduire l'âge du consentement de 18 ans à 16 ans. Nous nous y opposons.
* * *
La fiscalité
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je n'ai pas le droit de déduire mes contraventions à la circulation de mon revenu pour les fins de l'impôt. Or, un tribunal a récemment statué que les entreprises peuvent déduire à titre de dépenses d'emploi les amendes, sanctions et autres montants prélevés. C'est scandaleux.
La ministre du Revenu national convient-elle que cette décision annule l'effet dissuasif d'une amende en permettant à une entreprise d'en déduire le montant pour les fins de l'impôt? Va-t-elle demander à son ministère d'examiner la question et de proposer des modifications à la loi, afin d'empêcher les sociétés de déduire le montant de leurs amendes et sanctions de leur revenu imposable? La ministre va-t-elle prendre cet engagement aujourd'hui même?
L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, je suis au courant de la récente décision de la Cour suprême. Je puis donner l'assurance au député, et aux autres qui s'intéressent au sujet, que nous examinons la question à l'heure actuelle. Elle est importante et doit être examinée.
* * *
Le logement
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, des familles canadiennes attendent encore de profiter de l'entente-cadre signée avec les provinces et les territoires l'année dernière. En Colombie-Britannique, les libéraux provinciaux réaffectent au soin des aînés les fonds désespérément requis pour le logement. En Ontario, les gestionnaires privilégient les foyers collectifs et les centres de soins, au détriment des logements abordables. Tout cela est loin de correspondre à l'entente signée.
Le vice-premier ministre est responsable de ce dossier. Pourquoi n'insiste-t-il pas pour obtenir des résultats tangibles en matière de logement abordable et sans but lucratif au lieu de laisser les provinces s'en tirer impunément tout en garnissant les goussets des entrepreneurs? Pourquoi cette entente-cadre...
Le Président: Le vice-premier ministre a la parole.
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre de l'Infrastructure et des Sociétés d'État, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, le gouvernement fédéral est très fier d'avoir engagé 680 millions de dollars supplémentaires dans le dossier du logement social afin que les Canadiens à faible revenu de tous les coins du Canada aient accès à un logement de qualité à bon prix.
Nous continuons de négocier avec l'Ontario. La députée peut être assurée que nous avons l'intention de voir, au mieux de nos possibilités, à ce que le nombre d'unités de logement offertes dans cette province augmente sensiblement.
* * *
L'éthique
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, un sondage dont les résultats ont été publiés aujourd'hui confirme ce que les Canadiens disent depuis longtemps: 69 p. 100 des Canadiens croient que le petit gars de Shawinigan est devenu la grosse légume d'Ottawa.
Le gouvernement fait continuellement passer ses intérêts et ses politiques avant les intérêts des Canadiens. Quand le premier ministre et son gouvernement feront-ils une priorité de l'intégrité et de la reddition de comptes?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis étonné de voir venir une question comme celle-là de ce côté-là de la Chambre.
Notre gouvernement est au pouvoir depuis neuf ans. Aucun des ministres n'a été forcé de démissionner à cause de ce problème, mais nous en avons vu démissionner plus d'une demi-douzaine pendant les quelques années où les conservateurs étaient au pouvoir.
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, le gouvernement nous a donné: des promesses non tenues; des revirements par rapport au livre rouge; la TPS et le libre-échange; le conseiller en éthique; la fin prématurée de l'enquête sur la Somalie; l'APEC; les amis sans abri; les récompenses aux amis; l'étranglement de manifestants et du Parlement; le favoritisme; le népotisme; Gagliano; les scandales du financement du Parti libéral; l'annulation de contrats; l'aéroport Pearson; les hélicoptères; le gaspillage; des VG qui parlent aux murs; des cafouillis de milliards de dollars; des avions à réaction luxueux; des solliciteurs de fonds libéraux véreux; des arrangements louches concernant le terrain de golf de Shawinigan; l'ingérence dans les affaires de la BDC; le mépris de l'éthique, de l'application régulière de la loi et de l'obligation de rendre des comptes. Pourquoi?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suppose que je viens d'entendre un candidat à la direction de son parti. J'aimerais savoir s'il a commencé à recueillir des fonds. À la personne qui est assise juste devant lui, je dis surveillez vos arrières.
* * *
Le Service correctionnel du Canada
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en contradiction directe avec la réponse du solliciteur général il y a une semaine, des douzaines de détenus, et non pas un seul comme il l'avait dit, auraient reçu de CorCan une prime pouvant dans certains cas atteindre 700 $ par semaine.
Je demande donc au solliciteur général combien de détenus exactement ont reçu une prime et à combien elle s'élevait.
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit précédemment à mon collègue, cette décision était inappropriée. Le Service correctionnel du Canada m'a dit que ça ne se reproduirait plus.
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Monsieur le Président, de toute évidence, le solliciteur général n'a pas entendu ma question. Je lui ai demandé combien de détenus avaient reçu une prime et à combien elle s'élevait.
Pendant que des personnes comme Candice Bridgman et ses deux enfants en bas âge pleurent le meurtre d'un époux et d'un père, l'assassin, Denis Smysnuik, reçoit apparemment des milliers de dollars de CorCan. De toute évidence, le gouvernement ne croit pas que le crime ne paie pas.
Comment le solliciteur général peut-il justifier que des détenus, particulièrement des tueurs de l'acabit de Smysnuik, gagnent plus d'argent que beaucoup de travailleurs canadiens honnêtes, sans parler du fait qu'il leur soit permis de gagner de l'argent?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est toute une déclaration que vient de faire mon collègue.
J'ai dit à plusieurs reprises que ce qui s'était passé était inapproprié. Par ailleurs, mon collègue sait pertinemment que je vais comparaître devant le comité permanent ce jeudi. Ce sera le moment opportun de répondre à cette question.
* * *
[Français]
Le bois d'oeuvre
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, alors que les Américains imposent un tarif de 29 p. 100 sur le bois d'oeuvre canadien, le ministre du Commerce international soutient qu'il est encore trop tôt pour mettre de l'avant des programmes d'aide pour soutenir l'industrie du bois d'oeuvre, programmes demandés par les syndicats et par l'industrie.
La position du ministre a de quoi surprendre, quand on sait que plusieurs scieries sont menacées de fermeture et que des milliers d'emplois ont déjà été perdus à la suite de la décision américaine.
Comment le premier ministre peut-il expliquer les propos du ministre du Commerce international?
[Traduction]
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il est clair que le gouvernement ne veut pas prendre de mesure hâtive à cet égard. Il a entrepris de vastes consultations auprès de l'industrie. Il consulte toutes les provinces. Il reste ouvert. Toutes les options sont possibles.
Il se pourrait que les programmes actuels ne suffisent pas et qu'il faille prendre d'autres mesures. La dernière chose que nous voulions faire est de nous précipiter et de commettre une erreur.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, les dossiers changent, mais l'inaction du gouvernement est la même, que ce soit dans le dossier du bois d'oeuvre ou pour le Protocole de Kyoto. Il ne se passe rien avec ce gouvernement.
Le ministre soutient que la situation qui prévaut chez certains producteurs de bois d'oeuvre pourrait dépendre de leurs mauvaises décisions d'affaires, et, par conséquent, il ne reviendrait pas au gouvernement de corriger ces erreurs.
Est-ce que le premier ministre va reconnaître que le ministre du Commerce international est encore une fois en train de se défiler en blâmant l'industrie pour une situation dont elle n'est pas responsable?
[Traduction]
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je pense que le député devrait consulter l'industrie dans sa province. Ses représentants viennent d'écrire au premier ministre lui disant que pour leur part, ils voulaient l'assurer, lui et le ministre responsable, soit le ministre du Commerce international, de leur appui indéfectible. Industrie Québec comprend que le gouvernement fait très bien son travail.
* * *
Le Service correctionnel du Canada
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en vertu du programme de libération d'office, un prisonnier doit être élargi après avoir purgé uniquement les deux tiers de sa peine s'il ne présente pas un risque pour la sécurité du public. Toutefois, il a été prouvé que, l'an dernier, au moins 42 p. 100 des libérations d'office ont été suivies d'une récidive.
Pourquoi le solliciteur général continue-t-il de retourner des prisonniers dans la société avant qu'il soit sécuritaire d'agir de la sorte? Pourquoi les Canadiens viennent-ils toujours en second?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, à mon avis, le député, qui est un ancien procureur général, sait fort bien pourquoi le programme de libération d'office est en place. La réalité, c'est qu'une personne est libérée moyennant des conditions. Sinon, cette personne sera élargie sans condition, sans avoir à rendre de compte à qui que ce soit.
Le gouvernement souhaite exercer un contrôle sur le contrevenant et veiller à ce qu'il soit réintégré dans la société de la façon la plus sécuritaire possible.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous savons qu'aucun contrôle n'est exercé dans les prisons, mais cela ne signifie pas que nous pouvons les libérer dans la nature.
À l'établissement Frontenac, les données révèlent que, historiquement, 66 p. 100 des évasions sont liées à la drogue. Les drogues ont un rôle à jouer dans la majorité des évasions que connaît cette prison.
Si la réadaptation revêt tant d'importance pour le solliciteur général, peut-il nous expliquer pourquoi il n'y a à cet endroit que deux prisonniers bénéficiant d'un traitement à la méthadone et pourquoi il n'y a pas de programme de désintoxication pour les personnes en ayant besoin? S'il se préoccupe de la réadaptation dans les prisons, pourquoi ne fait-il rien à ce sujet?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il est à mon avis injuste de la part de mon collègue de laisser entendre que je ne me préoccupe pas de la toxicomanie dans les pénitenciers. En réalité, s'il est une chose sur laquelle j'ai insisté depuis que je suis devenu solliciteur général, c'est la toxicomanie chez les humains.
De fait, nous tiendrons une conférence internationale à Charlottetown à la fin du mois. Nous voulons que les esprits les plus brillants au monde se penchent sur les problèmes et trouvent des solutions, et c'est ce que fait et ce que continuera de faire le gouvernement.
* * *
Le commerce
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État à l'Europe centrale et orientale et au Moyen-Orient.
Le Canada a toujours entretenu d'excellentes relations commerciales avec les Émirats arabes unis, Dubai notamment. Ma circonscription, St. Catharines, a conclu depuis un an des contrats pour la fourniture de nombreux biens et services. Toutefois, je voudrais savoir si la situation actuelle au Proche-Orient a eu un effet néfaste sur nos relations commerciales et, dans l'affirmative, ce que fait le secrétaire d'État pour y remédier et pour augmenter les échanges avec les Émirats arabes unis.
L'hon. Gar Knutson (secrétaire d'État (Europe centrale et orientale et Moyen-Orient), Lib.): Monsieur le Président, je rentre tout juste de cette région. J'ai appris que le conflit israélo-palestinien constitue certes une grande préoccupation dans tout le monde arabe, mais les pays de la péninsule arabique sont déterminés à augmenter leurs échanges commerciaux avec le Canada.
Ma visite a surtout porté sur les possibilités d'investissement qui s'offrent au Canada dans les domaines de la santé, du tourisme, du logement et de l'éducation, et qui s'ajouteraient aux grands investissements qui ont déjà été faits dans le secteur pétrolier et gazier.
Je félicite le député des efforts qu'il a personnellement déployés pour exploiter ces possibilités au nom de ses électeurs.
* * *
La sécurité dans les aéroports
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les voyageurs doivent acquitter des droits de 24 $ destinés, censément, à assurer la sécurité dans les transports aériens, mais de nombreux aéroports de la Colombie-Britannique exigent déjà 5 $ pour la sécurité, ce qui porte le total à 29 $. Les aéroports prétendent que c'est parce que le gouvernement ne leur donne pas un rond pour les mesures de sécurité. Le gouvernement perçoit ses 24 $, qui sont versés dans les recettes générales.
Les aéroports locaux ne reçoivent pas cet argent, et ils doivent financer les mesures de sécurité au moyen de leur propre prélèvement de 5 $. Pourquoi?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je peux donner au député l'assurance que toutes les recettes perçues pour la sécurité dans les transports aériens sont affectées à cette fin. Elles seront investies dans les mesures de sécurité de tous nos aéroports.
M. James Moore (Port Moody--Coquitlam--Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les autorités aéroportuaires locales ont une autre version des faits. De son immeuble climatisé à Ottawa, le ministre des Finances peut avoir une opinion différente, mais au sol, à l'aéroport de Smithers, les voyageurs doivent payer 5 $ de plus pour la sécurité, parce que le gouvernement ne donne pas à l'aéroport l'argent qu'il prélève pour la sécurité.
Maintenant que le gouvernement a mis en place cette nouvelle taxe et qu'il n'en remet pas le produit aux aéroports, que fera-t-il de ces recettes de 24 $? Va-t-il financer d'autres campagnes de leadership ou va-t-il enfin les affecter aux mesures de sécurité? Que décidera-t-il?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, tout est très clair. Le ministre des Transports et moi avons dit tous les deux que tout l'argent perçu pour la sécurité dans les transports aériens sera investi dans la sécurité, la majeure partie dans les aéroports de tout le pays. Si l'argent n'a pas été reçu, le ministre des Transports et moi allons certainement étudier la question. Toutes ces recettes seront consacrées à la sécurité dans les transports aériens.
* * *
[Français]
L'industrie du transport aérien
M. Mario Laframboise (Argenteuil--Papineau--Mirabel, BQ): Monsieur le Président, la façon de faire d'Air Canada en matière de transport aérien en région devient de plus en plus évidente. Lorsqu'il existe une concurrence qui fonctionne, elle s'arrange pour la tuer. Après avoir créé Jazz et Tango, voilà qu'Air Canada crée la compagnie Zip pour concurrencer directement WestJet, une compagnie régionale de l'Ouest.
Le ministre des Transports est-il conscient que sous le prétexte de la concurrence, Air Canada est en train de tuer cette même concurrence, et qu'en laissant perdurer cet état de fait, il accepte à l'avance que les régions soient à la merci éventuelle d'un seul transporteur aérien?
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, l'honorable député a de bonnes raisons de s'inquiéter. C'est pour cela que nous avons présenté des amendements à la Loi sur la concurrence. Actuellement, il y en a 23 à l'étude au Sénat.
J'espère qu'avec l'adoption de cette législation, on va créer une situation qui va encourager la création de transporteurs aériens, surtout pour les régions.
* * *
[Traduction]
L'environnement
M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.): Monsieur le Président, comme on l'a souligné plus tôt, le gouvernement poursuit des consultations publiques sur une nouvelle politique agricole, mais un nombre croissant de signes indiquent que les émissions de gaz à effet de serre des exploitations agricoles nuisent à notre environnement et accélèrent le changement climatique.
Le ministre de l'Environnement pourrait-il expliquer à la Chambre ce que fait le gouvernement pour aider les agriculteurs à réduire les émissions de gaz à effet de serre?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, la contribution des secteurs agricole et forestier aux prétendus puits de carbone est un élément très important de la politique canadienne. Nous avons réussi à négocier cette question au niveau international et elle est maintenant fermement inscrite dans l'accord de Kyoto.
Nous collaborons actuellement avec des organisations agricoles, les provinces et d'autres, pour que cet accord porte tous ses fruits, afin que les agriculteurs canadiens se rendent compte que, grâce aux bonnes pratiques agricoles qui leur permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre, ils trouveront une autre source de revenus.
* * *
Santé Canada
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les raisins secs contaminés au plomb ont fait sourciller Santé Canada, mais, alors que les États-Unis les ont interdits et que la Grande-Bretagne a fait une mise en garde publique, Santé Canada est demeuré silencieux. Les raisins secs contaminés n'ont pas été retirés du marché. Le public n'était pas au courant tandis que la santé des enfants était menacée.
L'exposition au plomb est liée à la dégradation du quotient intellectuel ainsi qu'à des désordres de l'attention, de la mémoire et du comportement social. Pourquoi Santé Canada n'a-t-il pas averti les Canadiens du danger alors que d'autres pays l'ont fait?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de dire clairement que des mesures sont prises lorsqu'il est déterminé qu'un risque est inacceptable. Dans ce cas particulier, on a procédé à une évaluation des risques et il a été déterminé qu'il n'y avait pas de risque immédiat pour la santé.
Je tiens à rassurer la Chambre. On a établi les niveaux de risque en 1995 et depuis, aucun raisin sec ne satisfaisant pas aux normes n'est entré au Canada.
* * *
[Français]
Les pêcheries
M. Jean-Yves Roy (Matapédia--Matane, BQ): Monsieur le Président, comme l'affirme le Conseil pour la conservation des ressources halieutiques dans ses recommandations déposées au ministre des Pêches et des Océans, et je cite: «[...] la prédation exercée par les phoques continue d'être la plus importante source de mortalité du poisson de fond.»
Le ministre des Pêches et des Océans peut-il nous préciser pourquoi il hésite à annoncer ce qui est devenu l'évidence même, c'est-à-dire augmenter le quota de capture des phoques?
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, d'abord, je voudrais remercier le Conseil pour la conservation des ressources halieutiques pour son travail sérieux et les recommandations qu'il fait, de même que le panel des experts sur les phoques. Tous deux m'avisent qu'il pourrait y avoir des problèmes avec la population grandissante des phoques.
J'ai demandé aux gens de mon ministère de faire une étude de population des phoques et de discuter avec les provinces et l'industrie, pour voir à quel niveau on pourrait augmenter les quotas de captures à long terme, afin de répondre à toutes ces exigences.
* * *
[Traduction]
Les marchés de l'État
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, la société Arthur Andersen Inc. a été congédiée par la Ford Motor Company, la FedEx et par le gouvernement américain, mais, aussi incroyable que cela puisse paraître, elle est encore assez bonne pour la Banque du Canada. En fait, sur la recommandation du ministre des Finances, le cabinet fédéral a décidé d'en retenir les services jusqu'en 2005.
Compte tenu de ce que nous savons maintenant d'Andersen et de son implication dans le scandale d'Enron, le gouvernement emboîtera-t-il le pas à une douzaine de sociétés et de gouvernements et écartera-t-il la société Arthur Andersen Inc. de tout marché du gouvernement fédéral?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, des discussions là-dessus ont eu lieu entre des hauts fonctionnaires du ministère des Finances et la Banque du Canada. On ne prévoit pas changer de vérificateur pour le moment.
* * *
L'Agence canadienne des douanes et du revenu
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, l'Agence canadienne des douanes et du revenu a récemment lancé un appel d'offres pour l'approvisionnement en fournitures de tous ses bureaux au Canada. En somme, l'ACDR veut conclure un marché avec un seul et unique fournisseur. Elle se trouve ainsi à écarter presque toutes les petites entreprises de tout le Canada et à garantir des affaires aux filiales de sociétés-mères américaines.
Comment la ministre peut-elle justifier cela compte tenu du fait que le ministère a justement décentralisé ses activités pour favoriser les économies régionales?
L'hon. Elinor Caplan (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, je suis au courant de la situation dont parle le député. L'ACDR explore des façons de s'assurer que ses achats soient les plus économiques possibles, dans l'intérêt non seulement de nos bureaux, mais encore des contribuables.
Cette question est à l'étude parce que nous voulons nous assurer que l'invitation à soumissionner soit juste et que tout le monde ait l'occasion d'approvisionner l'Agence.
* * *
La recherche et le développement
M. Brent St. Denis (Algoma--Manitoulin, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement fait face à des problèmes de plus en plus complexes. Ces questions ont souvent d'importantes répercussions sur notre société et notre économie. Le public attend du gouvernement qu'il ait recours à la science et à la technologie pour assurer la santé, la sécurité et le bien-être des Canadiens.
Le secrétaire d'État pour les sciences, la recherche et le développement pourrait-il nous faire savoir ce que le gouvernement fait pour garantir que le Canada sera en mesure de suivre le rythme rapide de l'évolution technologique et de l'avancement des sciences et de la technologie?
L'hon. Maurizio Bevilacqua (secrétaire d'État (Sciences, Recherche et Développement), Lib.): Monsieur le Président, les experts en matière de sciences et de développement jouent un rôle clef dans le processus décisionnel du gouvernement. En fait, le Canada est l'un des deux seuls pays au monde qui possèdent une politique gouvernementale en matière de conseils sur les sciences et la technologie.
Ce cadre s'appuie sur le travail du Conseil d'experts en sciences et en technologie et on travaille actuellement à sa mise en oeuvre d'un bout à l'autre du gouvernement. En adoptant cette structure, notre pays continue de tirer parti des possibilités offertes par les progrès réalisés dans le domaine des sciences et de la technologie.
Le Président: Le leader du gouvernement à la Chambre soulève la question du privilège.
* * *
Question de privilège
Le député de Esquimalt—Juan de Fuca
[Privilège]
L'hon. Ralph Goodale (leader du gouvernement à la Chambre des communes, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, la Chambre se rappellera l'incident extrêmement troublant survenu mercredi dernier dans cette enceinte, alors qu'un député avait fait un usage non parlementaire de la masse.
J'ai manifesté à ce moment-là l'intention de donner suite à cet affront grave et prémédité à l'ordre et au décorum de la Chambre. Les députés ne peuvent absolument pas passer sous silence cet incident. Nous ne pouvons pas prétendre qu'il ne s'est jamais produit. Il est de notre devoir de réagir. De nombreux députés des deux côtés de la Chambre m'ont parlé en ce sens ces derniers jours. En négligeant, ne serait-ce qu'une seule fois, de défendre la dignité du Parlement, nous nous engagerons sur une pente très glissante. Par conséquent, rien ne saurait justifier le comportement non parlementaire de mercredi dernier.
Monsieur le Président, si vous croyez qu'il y a ici matière à question de privilège, je serais disposé à présenter une motion de circonstance.
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, à la page 122 du Marleau et Montpetit, on dit:
Une plainte sur une question de privilège doit satisfaire à deux conditions pour qu'on puisse l'examiner en priorité sur toute affaire inscrire à l'Ordre du jour. Le Président doit être convaincu, premièrement, qu'il y a eu de prime abord atteinte à un privilège et, deuxièmement, que la question a été soulevée à la première occasion. |
Je prétends que les deux conditions ne sont pas réunies. La masse est le symbole de l'autorité de la Chambre. Le député de Esquimalt--Juan de Fuca l'a soulevée au-dessus de sa tête dans un moment de colère et d'exaspération. Ce que le député a fait était manifestement répréhensible, mais il a présenté immédiatement des excuses à la Chambre et votre serviteur et d'autres députés ont accepté ses excuses.
Je ne suis pas indifférent à ce que d'autres députés de ce côté-là ont fait. Lorsqu'elle était ministre de la Justice, la ministre de la Santé a dû comparaître devant le comité des privilèges et elle a été reconnue coupable d'outrage à la Chambre. Elle a présenté des excuses que nous avons tous acceptées. Je pourrais vous parler d'un certain nombre de questions.
À la page 140 de la vingt-et-unième édition d'Erskine May, on dit:
Dans les cas où le député accusé a dûment présenté des excuses pour son infraction, la motion d'accusation a habituellement été retirée... |
Cet incident s'est produit mercredi dernier. Le leader du gouvernement à la Chambre des communes a eu amplement la chance de soulever cette question et il n'en a rien fait.
Puisque le député a présenté des excuses, je ne pense pas que nous devrions perdre le temps de la Chambre en nous concentrant sur cet incident lui-même. Cependant, cela nous donne la possibilité de discuter les raisons qui peuvent avoir conduit le député à agir comme il l'a fait. Ceux d'entre nous qui connaissent le député vont reconnaître, et je sais que la plupart des députés de ce côté-là seront d'accord là-dessus, que le fait de soulever la masse au-dessus de sa tête ne ressemblait certes pas au député de Esquimalt--Juan de Fuca. L'exaspération face au fonctionnement de notre institution s'accroît de jour en jour. En fait, la motion du ministre peut donner l'occasion à certains de se défouler quelque peu. On en a vraiment besoin.
Le Président: J'hésite à entrer dans une longue argumentation dans ce cas-ci, à ce stade-ci du moins.
[Français]
À mon avis, il s'est passé quelque chose à la Chambre qui est contraire au Règlement de la Chambre.
[Traduction]
À mon avis, le ministre devrait pouvoir présenter sa motion. Je crois qu'il y a matière à la question de privilège. Le ministre a essayé de soulever la question jeudi matin et il a obtenu mon autorisation de reporter son intervention à cause des événements qui étaient survenus mercredi soir. Ainsi, la question n'a pas été soulevée à la première occasion, mais j'ai signalé qu'il n'y aurait pas de problèmes relativement au délai écoulé à cause de ce qui s'est passé jeudi matin.
Ainsi, selon moi, la Chambre peut maintenant être saisie de la motion et j'invite le ministre à la présenter.
L'hon. Ralph Goodale (leader du gouvernement à la Chambre des communes, ministre responsable de la Commission canadienne du blé et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, Lib.): Monsieur le Président, je propose:
Que le député de Esquimalt—Juan de Fuca fasse l'objet d'une suspension de son droit de participer aux travaux de la Chambre jusqu'à ce qu'il comparaisse à la barre de la Chambre pour s'excuser, d'une manière que le Président jugera satisfaisante, de ses gestes qui ont passé outre à l'autorité de la présidence et porté outrage à la Chambre. |
M. John Reynolds (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les autorités en matière de procédure affirment que la masse n'a en soi absolument aucune importance du point de vue de la procédure. Sa présence n'est pas nécessaire pour que la Chambre puisse siéger, et nos droits et privilèges n'en dépendent pas. La masse est le symbole de l'autorité de la Chambre.
Ce dont nous dépendons, de manière concrète, c'est d'un Président juste dans son interprétation des règles de procédure et dans sa protection des droits des députés.
Monsieur le Président, depuis votre élection, vous faites un excellent travail et je suis certain que, lorsque le député de Esquimalt—Juan de Fuca a brandi la masse devant votre fauteuil, sa colère et sa frustration n'étaient pas dirigées contre vous personnellement ni contre l'autorité rattachée à votre charge. Je suis certain que le député a le plus profond respect pour la charge que vous occupez et pour vous personnellement. Votre travail est difficile. Nous devons appuyer notre Président si nous voulons assurer le bon fonctionnement de cet endroit.
Comme vous le savez, monsieur le Président, le premier Président dont l'histoire a gardé la trace est Simon de Montfort, qui aurait présidé ce qu'on a appelé le Parlement fou, réuni à Oxford le 11 juin 1258. Le Parlement fou n'était pas une assemblée populaire. En 1265, le célèbre Parlement de Simon de Montfort inventait le principe de la représentation populaire pour s'opposer à la tyrannie de la cour. Il doit son appellation dérogatoire à ceux dont il cherchait à contrer les abus.
Si le gouvernement libéral ne modifie pas son comportement, monsieur le Président, je crains que vous ne finissiez par avoir à diriger la législature la plus en colère de l'histoire.
Dans l'introduction de son livre intitulé The Friendly Dictatorship, Jeffrey Simpson souligne ce qui suit:
La démocratie parlementaire canadienne, de la façon dont elle a évolué, place plus de pouvoirs entre les mains du premier ministre que toute autre démocratie, bien davantage que n'en exerce le président des États-Unis et aussi beaucoup plus que n'en possèdent les dirigeants politiques d'autres régimes parlementaires. |
Les personnes cherchant à freiner ce très arrogant premier ministre ou à y faire contrepoids sont tout simplement frustrées par les mesures qu'adoptent celui-ci et son gouvernement.
Ce qui s'est produit mercredi dernier peut servir d'avertissement. Nous devons nous attaquer sérieusement à la réforme de cette institution et nous pouvons commencer en éliminant le seul obstacle se trouvant sur notre voie, soit le gouvernement libéral. La colère manifestée par le député de Esquimalt—Juan de Fuca était dirigée contre le gouvernement et les tactiques qu'il a utilisées à l'encontre de la liberté et de la démocratie et, en l'instance, contre l'ingérence dans les initiatives parlementaires.
Pour situer cette affaire en contexte, voici des faits concernant les initiatives parlementaires. Deux cent trente-cinq projets de loi ont été présentés par des députés de tous les partis politiques. Aucun d'entre eux n'a dépassé le stade de la troisième lecture. Seulement deux projets de loi d'initiative parlementaire ont fait l'objet d'un vote à l'étape de la deuxième lecture, soit moins de 1 p. 100 du total. Les deux projets de loi qui se sont rendus à l'étape du comité au cours de la 36e législature ont été rejetés par la majorité libérale au sein du comité. Les libéraux peuvent éviter de se prononcer sur des questions controversées en décrétant qu'elles ne peuvent donner lieu à un vote. D'autre part, s'ils estiment qu'elles peuvent faire l'objet d'un vote, ils adoptent des motions pour les retirer ou les rejeter à l'étape du comité.
En ce qui concerne les projets de loi d'initiative parlementaire venant du Sénat, le gouvernement a montré qu'il respecte davantage le Sénat non élu. Les trois seuls projets de loi à avoir reçu la sanction royale ont été présentés par le Sénat. Il s'agit du projet de loi S-10, concernant le poète officiel du Parlement, du projet de loi S-14, instituant la Journée sir John A. Macdonald et la Journée sir Wilfrid Laurier, ainsi que du projet de loi S-22, concernant le cheval national du Canada. De plus, 481 motions ont été présentées et uniquement cinq ont été adoptées, soit à peine plus de 1 p. 100. Au cours de la présente législature, il y a eu plus de 150 heures de débat à la Chambre au sujet d'initiatives parlementaires, ce qui représente une dépense de 45 millions de dollars en pure perte.
Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre avait jusqu'au 2 avril 2002 pour en venir à une entente et veiller à ce que toutes les questions fassent l'objet d'un vote. En décembre 2001, il a conclu qu'il ne pouvait y parvenir. C'est d'ailleurs le secrétaire parlementaire du premier ministre qui a proposé la motion qui a mis fin à l'étude et anéanti tous les espoirs des simples députés.
N'oublions pas que les initiatives parlementaires sont censées permettre aux députés de voter selon leurs convictions personnelles et les voeux de leurs électeurs. Comme l'a si bien dit mon collègue de Esquimalt—Juan de Fuca, le cabinet du premier ministre a bafoué notre droit le plus important, notre droit de vote.
J'aimerais bien connaître l'avis de la députée libérale de Mississauga-Est là-dessus. Au cours de la dernière législature, son projet de loi sur l'imposition de peines consécutives a été vertement critiqué par ses propres collègues. Ils ont proposé une motion similaire à celle qui a été présentée contre l'initiative du député de Esquimalt—Juan de Fuca, mais grâce à la tenue d'un vote libre, l'amendement a été rejeté. Je reviendrai à la question des votes libres dans un instant, mais je veux terminer de raconter ce qui s'est passé.
Le projet de loi de la députée de Mississauga-Est a survécu à une première attaque et a été renvoyé au comité. Pendant les travaux du comité, ses collègues ont supprimé chacune des dispositions du projet de loi et c'est une feuille vierge qu'ils ont remise à la Chambre lorsqu'ils ont fait rapport. Encore là, grâce à la tenue de votes libres et aux efforts de l'opposition, les dispositions ont été rétablies. Malgré les attaques incessantes qu'il a subies, le projet de loi a réussi à se rendre au Sénat. Les libéraux du Sénat ont réussi là où ceux de la Chambre avaient échoué et le projet de loi a malheureusement été rejeté.
Cette pratique fait monter le niveau d'exaspération à la Chambre, non seulement de ce côté-ci, mais également chez les libéraux. Voilà pourquoi même si des députés de tous les partis ont fait savoir à mon collègue que son geste était répréhensible, et nous en convenons tous, ils comprennent l'irritation que ressent notre collègue.
Si la motion que les libéraux ont proposée pour torpiller le projet de loi du député de Esquimalt--Juan de Fuca a été adoptée, c'était grâce à un vote dicté par le whip. La tradition veut que les initiatives parlementaires fassent l'objet d'un vote libre. La tradition de la masse est importante, mais la tradition du vote libre n'est-elle pas tout aussi importante? Dans le Nouveau Testament, les versets 39 à 42 du chapitre 11 du Livre de Luc nous permettent d'établir une comparaison avec ce genre de comportement:
Mais le Seigneur lui dit: «Vous voilà bien, vous, les Pharisiens! L'extérieur de la coupe et du plat, vous le purifiez, alors que votre intérieur à vous est plein de rapine et de méchanceté! Insensés! Celui qui a fait l'extérieur n'a-t-il pas fait aussi l'intérieur? Donnez plutôt en aumône ce que vous avez, et alors tout sera pur pour vous. Mais malheur à vous, les Pharisiens, qui acquittez la dîme de la menthe, de la rue et de toute plante potagère, et qui délaissez [...]. Il fallait pratiquer ceci, sans omettre cela. |
Dans ce contexte, je suis déconcerté de voir à quel point le gouvernement est obnubilé par cette affaire. En temps normal, il se fiche éperdument des droits et des traditions de cette institution. Son irrespect pour le Parlement, pour ses députés et pour notre électorat est notoire.
Je reviens à la question du vote libre. Si le vote sur la motion pour faire échouer le projet de loi du député était en fait un vote libre, nous de l'opposition aurions moins de motifs de mécontentement. Il y aurait moins de frustration et d'anxiété à la Chambre, si on laissait les députés voter plus librement.
Vous rappelez-vous, monsieur le Président, lorsque mon parti a présenté une motion de crédits qui aurait exigé que le gouvernement accorde une indemnité aux victimes de l'hépatite C, le premier ministre a ordonné un vote partisan et certains députés libéraux, forcés de rejeter la motion, en pleuraient?
Vous rappelez-vous, monsieur le Président, à quel point les députés libéraux étaient embarrassés, particulièrement le ministre des Finances qui a participé à la rédaction du premier livre rouge, lorsque les libéraux ont dû voter contrer la motion de crédits pour mettre en oeuvre une promesse contenue dans le livre rouge? La promesse de nommer un conseiller en éthique indépendant qui fasse directement rapport au Parlement était une bonne idée, mais le premier ministre a ordonné à ses députés de la rejeter parce qu'il n'a jamais pris cette promesse au sérieux.
Voici un autre exemple. Au cours de la 36e législature, mon parti a présenté une motion pour «abandonner, supprimer et abolir» la TPS. Les termes «supprimer, éliminer et abolir» sont entre guillemets parce que ce sont ceux qu'ont utilisés le premier ministre et les autres membres du caucus libéral au cours de la campagne électorale. Encore une fois, les libéraux se sont contredits.
Une voix: Ils n'ont pas bronché.
M. John Reynolds: Comme vient de le mentionner le député, ils n'ont pas bronché.
Pourquoi les députés libéraux acceptent-ils d'être forcés de voter contre des politiques dans lesquelles ils croient? En avril 1998, Preston Manning a raconté une histoire à la Chambre pour expliquer cet état de fait, et je pense qu'elle vaut la peine d'être répétée.
Il était une fois un roi nommé Jean 1er qui régnait sur un château entouré de douves et doté d'un pont-levis. Les habitants du château étaient divisés en deux classes, en l'occurrence les nobles et les dames, qui occupaient les premières banquettes devant le trône du roi, et les paysans, qui occupaient l'arrière-ban. Un jour, un groupe de paysans, ou de gens d'arrière-ban comme on les appelait, sont partis pour travailler aux champs. Après avoir traversé les douves et s'être engagés sur la route, ils ont vu une grotte d'où sortait un énorme dragon crachant du feu et de la fumée. Le feu a brûlé 50 des paysans de ce groupe d'arrière-ban et a fait s'enfuir les autres vers le château.
M. David Pratt: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Nous voulons tous entendre les propos du député. Cependant, je ne vois pas comment ses contes de fée pourraient intéresser la Chambre étant donné la question dont nous sommes saisis.
Le Président: À l'ordre. Le chef de l'opposition raconte une fable en rapport avec l'argument qu'il tente de formuler. Je suis prêt à l'entendre.
M. John Reynolds: Monsieur le Président, je suppose que les libéraux entendent tellement de contes de fée au caucus qu'ils ont du mal à en écouter ici.
Je disais donc que le feu a brûlé 50 de ces gens de l'arrière-ban et que les autres ont fui vers le château. Lorsque le roi Jean a été mis au courant de la terrible tragédie, il a décidé de faire enquête lui-même. Il a demandé l'aide de deux de ses plus fidèles chevaliers, lady Marlene, garde du fouet royal, et lord Goodriavere qui venait à peine d'être nommé à un haut rang grâce à de loyaux services rendus au roi Jean.
En parcourant les lieux de la tragédie et en voyant les 50 corps calcinés, ils observèrent trois choses. Premièrement, ils déplorèrent l'événement; deuxièmement, ils virent le dragon mort d'épuisement; et troisièmement, ils remarquèrent que le feu du dragon avait embrasé une couche de charbon dans la cave d'où la fumée s'échappait toujours.
Lady Marlene était une femme pragmatique; elle constata l'évidence: «Le dragon est mort. Voilà une bonne nouvelle. Allons l'annoncer aux gens de l'arrière-ban.» Lord Goodriavere l'arrêta et, en se tournant vers le roi Jean, déclara: «Je vois dans cela la possibilité de maintenir et d'intensifier notre contrôle sur les paysans. Laissons planer, indirectement bien entendu, l'idée que le dragon vit encore. On pourra donner comme preuve la fumée qui sort de la cave. Annonçons aux gens de l'arrière-ban que, dorénavant, ils ne pourront sortir du château que sur permission du roi et sous la surveillance de lady Marlene et de moi-même, pour leur propre sécurité et protection et pour le bien du château évidemment.»
Le roi Jean trouva l'idée extraordinaire. Ainsi, le mythe du dragon cracheur de feu fut créé pour contrôler l'arrière-ban du royaume.
Comme le dragon de l'histoire, c'est un mythe qu'un gouvernement doive démissionner en cas de rejet d'un projet de loi ou d'une motion d'initiative ministérielle ou en cas d'adoption d'une motion ou d'un amendement émanant de l'opposition. Le mythe est utilisé pour contraindre les députés ministériels, surtout ceux d'arrière-ban, à voter en faveur des projets de loi et des motions d'initiative ministérielle qu'eux et leurs électeurs désapprouvent et à voter contre les motions et les amendements émanant de l'opposition qu'ils approuvent en grande partie.
Nous avons vu cela quand les députés libéraux ont été forcés de voter contre l'indemnisation pour les victimes de l'hépatite C. Nous l'avons vu quand ils ont été forcés de voter contre leur propre promesse de mettre la TPS au rebut. Nous l'avons vu quand ils ont nommé un conseiller en éthique qui relève directement du Parlement. Nous l'avons vu mercredi dernier quand les libéraux ont forcé le retrait d'un projet de loi d' initiative parlementaire au lieu de donner à la Chambre l'occasion de se prononcer sur cette mesure.
En établissant la culpabilité du député de Esquimalt--Juan de Fuca, il est important de comparer ses actions avec d'autres actes inappropriés. Autrement dit, son comportement respecte-t-il les normes que nous avons établies et mérite-t-il la sanction mentionnée dans la motion du gouvernement?
Revenons aux élections qui ont porté pour la première fois le gouvernement actuel au pouvoir. Nulle motion n'a été déposée pour critiquer les députés qui ont promis au public de mettre la TPS au rebut, mais qui ont ensuite décidé de la conserver. Personne de ce côté-là de la Chambre n'a déposé une motion visant à réprimander le premier ministre pour avoir changé d'avis sur le libre-échange. On n'a rien fait à propos des promesses non tenues visant à rétablir la confiance dans un bon gouvernement.
Voilà pourquoi nous voyons aujourd'hui dans les journaux les résultats d'un sondage révélant que 71 p. 100 des Canadiens pensent que le gouvernement est corrompu. Les ministres dans le pétrin pour ne pas avoir dit la vérité ont refusé de démissionner et le premier ministre n'a jamais exercé de pressions pour qu'ils le fassent. Que dire des ministres ou des prétendus candidats à la direction du parti qui ont accepté des contributions de la part d'intérêts anonymes pour financer leur campagne non déclarée à la direction du parti? Que dire de mon grief de prédilection: la clôture et l'attribution de temps? Cette procédure a été appliquée 75 fois, soit plus souvent que sous n'importe quel autre gouvernement de l'histoire de notre grand pays. Cela engendre l'exaspération.
Monsieur le Président, vous avez dénoncé vivement l'utilisation abusive de l'attribution de temps et de la clôture lorsque vous étiez dans l'opposition. Le 19 février 1993, vous avez déclaré:
C'est un véritable scandale. Cela montre bien que le gouvernement n'est pas disposé à écouter les représentants du peuple à la Chambre des communes. Jamais auparavant nous n'avons eu un gouvernement si peu enclin à discuter des projets de loi qu'il présente à la Chambre. [...] J'estime que l'attitude du gouvernement face à l'élaboration des lois est franchement honteuse. Il réduit le temps dont la Chambre dispose pour siéger, puis il applique la clôture pour faire cesser le débat. |
Si je n'étais pas au courant, je pourrais penser que le Président parlait du gouvernement actuel. Il devrait travailler beaucoup plus fort, car la liste des interventions de ce genre de la part du gouvernement actuel est longue comparativement à celle du gouvernement conservateur précédent.
Monsieur le Président, j'ai une autre citation de vous. C'est un bon exemple qui montre à quel point la clôture a exaspéré même un homme patient comme vous-même. Le 23 avril 1993, vous avez dit ceci au sujet de la clôture:
Ce n'est pas, à mon avis, une façon de diriger les travaux du gouvernement. C'est abuser du processus parlementaire. |
Monsieur le Président, je suis d'accord avec vous. Lorsqu'un gouvernement abuse du processus comme il l'a fait dans le cas du projet de loi d'initiative parlementaire de notre collègue de Esquimalt--Juan de Fuca, cela entraîne de l'exaspération. Ce n'est pas une façon de diriger les travaux du Parlement.
Je vais vous donner deux ou trois exemples de plus. Comme les députés s'en rappellent, il y a eu une enquête judiciaire indépendante sur la Somalie. Le ministre de la Défense y a mis fin. Ensuite, le premier ministre a décidé qu'il serait préférable qu'il ne témoigne pas devant la Commission d'enquête sur le sommet de l'APEC. Il y avait également un certain coup de téléphone donné au président de la Banque de développement du Canada. Je suis persuadé que le président va reconnaître que ces actions méritent plus une motion d'outrage au Parlement que les actions du député de Esquimalt--Juan de Fuca.
Mon parti a soulevé la question de privilège à de nombreuses reprises sur des questions importantes qui remettaient en question l'autorité et la dignité de la Chambre, mais aucune mesure n'a été prise. Aucun libéral n'ait intervenu pour soutenir notre institution. Je vais vous donner quelques exemples.
Les députés se rappellent-ils lorsque le ministre du Commerce international a envoyé, le 30 mars 1998, un communiqué de presse intitulé «Marchi rencontre des dirigeants chinois à Beijing et annonce la création du Groupe interparlementaire Canada-Chine»? À l'époque, il n'y avait aucun groupe interparlementaire Canada-Chine. Le ministre a donné l'impression que cette association existait alors que le Parlement ne l'avait pas approuvée. C'est un bel exemple du respect que le gouvernement libéral porte au Parlement.
N'oublions pas la nomination du directeur de la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire par le gouvernement avant même l'adoption d'une loi établissant la fondation. Le gouvernement a-t-il cru que ce point de vue méprisant du processus législatif constituait un affront au Parlement? Pas du tout, il a défendu ses actes.
Je pourrais donner de nombreux autres exemples à la Chambre. Cependant, je vais maintenant attirer votre attention sur des cas impliquant la conduite de députés et que la présidence a jugé fondés à première vue. Au cours de la présente législature seulement, trois questions de privilège ont été soulevées relativement à des ministres. La présidence les a jugées toutes les trois fondées à première vue. En conséquence, elles ont été renvoyées au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Examinons ces trois cas. D'abord, l'actuelle ministre de la Santé, lorsqu'elle était ministre de la Justice, a orchestré une fuite aux médias sur la teneur du projet de loi C-15 avant son dépôt à la Chambre. Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre l'a trouvée coupable d'outrage, mais il n'a pas recommandé qu'elle soit punie. Il s'est contenté de lui adresser un avertissement. Il lui a fait savoir qu'il ne serait pas aussi indulgent si cela devait se produire une autre fois. Comparons cela au cas qui nous occupe. Ce sont tous deux des outrages au Parlement, mais la ministre fédérale n'a pas été punie. On lui a dit de ne pas recommencer. Elle s'est seulement fait légèrement réprimander.
Ensuite, la ministre a fait l'objet de la même accusation de fuite relativement à la teneur du projet de loi C-36. Le comité a conclu qu'il ne pouvait la tenir responsable de la fuite parce qu'il n'a pu déterminer qui s'était rendu coupable de la fuite. Voilà pour la responsabilité ministérielle. La ministre s'en est tirée deux fois sans être punie.
En troisième lieu, le ministre de la Défense a fait des déclarations trompeuses à la Chambre, ce qui est généralement considéré comme un grave manquement. Qu'est-il advenu de cette question de privilège? Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a essentiellement disculpé le ministre, qui s'en est tiré sans la moindre sanction.
Remontons à la 35e législature. Un député bloquiste, M. Jacob, a écrit aux Québécois des forces armées pour les inviter à faire défection et à se joindre à une armée québécoise distincte si les résultats du référendum étaient favorables. Les députés s'en souviennent-ils? Un député réformiste, M. Hart, a pris la parole à la Chambre pour accuser M. Jacob de sédition. Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a étudié la question. La majorité libérale, craignant d'irriter les gens au lendemain d'un référendum, a conclu qu'il n'y avait pas eu outrage et qu'aucune sanction ne s'imposait.
Imaginez un peu. Aux États-Unis, le député aurait été emprisonné dans le couloir de la mort. Au Canada, nous nous indignons davantage de voir quelqu'un s'emparer de la masse. Au moins, le député de Esquimalt--Juan de Fuca a présenté des excuses. M. Jacob ne l'a jamais fait.
Un incident identique s'est produit pendant la 34e législature. Dans un moment d'exaspération aussi, Ian Waddell s'est emparé de la masse au moment où le sergent d'armes l'emportait. Le lendemain, le leader du gouvernement à la Chambre a proposé une motion portant que M. Waddell se présente à la barre de la Chambre pour recevoir les remontrances de la présidence. Si c'était la sanction, pendant la 34e législature, pour avoir touché la masse, pourquoi le leader du gouvernement à la Chambre recommande-t-il cette fois-ci une sanction plus sévère?
M. Geoff Regan: C'est ce qu'il a dit.
M. John Reynolds: Non, ce n'est pas ce qu'il a dit.
M. Geoff Regan: Il a été cité à la barre.
M. John Reynolds: M. Waddell n'a jamais dû se présenter à la barre pour faire des excuses. Il a dû le faire pour recevoir des remontrances, non pour présenter des excuses. C'est bien différent.
Curieusement, M. Waddell venait de la Colombie-Britannique, tout comme mon collègue. Cela devrait montrer aux députés d'en face combien les députés de l'Ouest sont frustrés à l'égard de la Chambre. Ils doivent recourir à ces mesures extrêmes pour montrer leur frustration devant la façon dont ils sont traités à la Chambre.
M. Gary Lunn: Aucun respect.
M. John Reynolds: Le gouvernement n'a aucun respect pour les Canadiens de l'Ouest ou leurs propositions. C'est pourquoi la frustration augmente et ces incidents se produisent.
Lors de la dernière législature, un certain nombre de députés ont critiqué le Président, et leurs critiques ont été rapportées dans les médias. La question portait sur les petits drapeaux canadiens déposés sur les pupitres des députés et que le Président avait ordonné d'enlever. Comme les députés s'en souviennent peut-être, c'est le député de Elk Island qui menait l'attaque. Il a insisté pour être autorisé à garder son drapeau sur son pupitre après que le Président eut jugé que le drapeau était un accessoire. La question a été renvoyée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Les députés accusés d'outrage ont présenté leurs excuses, le comité a accepté ces excuses et aucun châtiment n'a été infligé.
Le député de Esquimalt—Juan de Fuca s'est déjà excusé de sa conduite, mais, pour une raison ou pour une autre, le gouvernement refuse d'accepter ses excuses. Il poursuit la question comme jamais il ne l'a fait. Il est difficile de trouver des cas où un député a fait l'objet d'un châtiment, à moins que nous considérions celui de Louis Riel. Riel a été expulsé de la Chambre à deux reprises parce que la Chambre voyait en lui un hors-la-loi et un criminel. Je ne crois pas que le député de Esquimalt—Juan de Fuca soit un hors-la-loi.
Qu'en est-il du cas de Fred Rose, en 1946? Il a été reconnu coupable et condamné à six ans de prison pour avoir comploté diverses infractions à la Loi sur les secrets officiels. Comme il était en prison et ne pouvait pas participer aux travaux de la Chambre, elle a libéré son siège. Le crime du député de Esquimalt—Juan de Fuca se compare difficilement à ceux de M. Rose.
Or, le député de Esquimalt—Juan de Fuca purge une peine. Au cours de l'été et d'autres périodes, il fait du bénévolat dans des hôpitaux et aide gratuitement des pauvres et des gens défavorisés. Cela nous permet de comprendre à quel point son geste de la semaine dernière était inusité. Il ne l'a fait que parce qu'il était frustré des actions du gouvernement à la Chambre.
Je vais résumer. On ne réclame aucune punition à l'encontre des ministres qui induisent le Parlement en erreur ou qui coulent des projets de loi avant que la Chambre ne les adopte ni à l'encontre d'un député qui essaie d'inciter des militaires à faire défection. Le gouvernement libéral estime que ces gestes ne méritent pas d'être punis. Il estime pourtant que le fait de se saisir de la masse mérite une sanction. Je laisse au public le soin de juger le gouvernement et son leader parlementaire là-dessus.
Voyons voir d'autres comportements que le gouvernement juge acceptables par rapport à celui du député dev Esquimalt--Juan de Fuca. Personne de ce côté-là de la Chambre, sauf peut-être le premier ministre, ne s'est senti insulté lorsque le whip en chef du gouvernement a attaqué nos traditions démocratiques en menaçant les députés de l'opposition membres du Comité permanent des finances et en obligeant ses députés à élire un président dont personne ne voulait.
Et que dire du respect du ministre de l'Environnement à l'égard du travail du Comité permanent de l'environnement et du développement durable sur le projet de loi C-5? Ce projet de loi a été changé du tout au tout. Le comité a fait son travail, et le projet de loi est revenu à la Chambre sous une forme méconnaissable.
Les députés se rappellent-ils de la fois où il a été question de la déclaration de M. Gagliano à la Chambre à l'effet qu'il ne s'était pas immiscé dans les activités des sociétés d'État alors qu'il s'était bel et bien interposé dans l'attribution de contrats de la Société immobilière du Canada quand il était ministre? Les députés de l'autre côté de la Chambre se moquaient éperdument de tout cela. Le comportement éthique des ministres ne signifie absolument rien pour eux.
C'est une tradition à la Chambre que les députés donnent des renseignements véridiques au Parlement. Le gouvernement se préoccupe-t-il de cela? Évidemment pas. Au cas où des députés ne me croiraient pas, j'attire l'attention de la Chambre sur un rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet des déclarations trompeuses du ministre de la Défense nationale.
Les députés se rappelleront que, lorsqu'elle était ministre, la députée de Vancouver-Centre avait déclaré que des croix étaient brûlées sur des pelouses à Prince George. Avons-nous eu une motion comme celle d'aujourd'hui? Y en a-t-il qui pensent que les habitants de Prince George sont plus insultés par ce que le député de Esquimalt--Juan de Fuca a fait avec la masse que par ce que la députée de Vancouver-Centre a fait à la Chambre? J'en doute fort.
Et que dire de la fois où la députée de Thornhill a accusé le député de New Westminster—Coquitlam—Burnaby de trahison? Cela pourrait certainement être considéré comme une remarque irrespectueuse à l'endroit d'un député. La même députée a traité des députés de mon parti de noms que je ne pourrais même pas mentionner à la Chambre parce que ces termes sont antiparlementaires.
Le leader du gouvernement à la Chambre a-t-il rédigé une motion condamnant le député de Scarborough-Sud-Ouest pour avoir dit à un ancien combattant qu'il ne recevrait pas d'aide parce qu'il n'avait pas voté pour le Parti libéral? Nous n'avons jamais vu de motion à ce sujet même si c'était l'un des pires affronts au Parlement qu'il m'ait été donné de voir. Il n'y a jamais eu de motion à ce sujet. Nous avons accepté les excuses du député, et l'affaire était close.
Aurions-nous dû appeler les ministériels à la barre pour leur demander d'expliquer pourquoi ils ont essayé de cacher le rapport du vérificateur général avant les dernières élections, pourquoi ils ont menacé le personnel du commissaire à l'information ou pourquoi ils ont menacé de congédier le chef et le sous-chef d'état-major de la Défense? Si nous l'avons fait, je n'en ai pas eu connaissance.
Les députés pensent-ils que les soldats en Afghanistan sont plus préoccupés par la masse ou par leur besoin d'uniformes adéquats et d'hélicoptères plus sûrs?
Les députés pensent-ils que les travailleurs de l'industrie du bois d'oeuvre qui sont sans emploi sont plus préoccupés par cette question ou par la nécessité de régler le différend commercial qui les touche?
Mon parti a une motion au Feuilleton demandant au gouvernement de présenter une mesure législative pour protéger les enfants contre les prédateurs sexuels, motion qui sera débattue demain. Nous devrions discuter de la façon de protéger nos enfants et de punir les prédateurs, et non étudier une motion visant à punir un de nos députés qui, dans un moment de colère, a soulevé la masse au-dessus de sa tête.
Le député de Esquimalt—Juan de Fuca a eu tort d'agir ainsi. Il s'est excusé. L'affaire devrait être close.
Je dirais que la préoccupation du gouvernement à l'égard du symbolisme de la masse est une question qui devrait plutôt être examinée par les disciples de Freud. Peut-être pourraient-ils expliquer plus clairement pourquoi les ministériels sont si agités aujourd'hui.
Je veux proposer un amendement à la motion. Je propose:
Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot «Que», de ce qui suit: |
«les gestes du député d'Esquimalt-Juan de Fuca ont passé outre à l'autorité de la Présidence et porté outrage à la Chambre et, conformément à la pratique, puisque le député s'en est excusé, aucune autre mesure s'avère nécessaire.». |
Le Président: Reprise du débat sur l'amendement.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, mon propos sera beaucoup plus court que celui du chef de l'Alliance canadienne. La motion qui est devant nous est toute simple. J'écoutais l'honorable chef de l'opposition et j'avais l'impression que la motion était une condamnation à l'endroit du député de Esquimalt--Juan de Fuca, une condamnation l'excluant du Parlement ou le bannissant à jamais, je ne sais trop. Mais non, la motion gouvernementale m'apparaît raisonnable.
On demande à un député de s'excuser d'avoir manipulé un symbole qui est l'autorité même du Président. Cela m'apparaît être un minimum. J'aimerais quand même prendre quelques instants pour donner là-dessus le point de vue de ma formation politique.
Au Bloc québécois, nous ne sommes pas particulièrement en amour avec cette institution qu'est le Parlement canadien, mais il nous semble qu'on doive le respecter, comme on doit respecter tous les parlements du monde. J'ai dit dans cette Chambre, et je le répète pour ceux qui ne l'auraient pas entendu, que lorsqu'on ne respecte plus le Parlement, il n'y a plus que des situations conflictuelles qui peuvent régler les différends.
Je voudrais simplement rappeler à nos distingués collègues que la masse n'est pas l'objet de métal qu'on voit sur le bout de la table qui dérange qui que ce soit. La masse, c'est le symbole de l'autorité du Président. Se présenter devant la masse et l'enlever, c'est dire à celui qui siège devant cette Chambre et qui dirige nos travaux: «Je ne vous reconnais plus l'autorité de siéger comme Président.» D'ailleurs, quand la Chambre siège en comité plénier, en tout premier lieu, on enlève la masse pour la placer sous la table.
Peut-être que des personnes qui nous écoutent diront: «À quoi cela sert-il de s'attacher à des symboles comme celui-ci?» Quand on arrive dans des situations plus difficiles, dans des situations de crise, ce sont les symboles et les traditions qui, au-delà de la sagesse, au-delà des impulsions politiques qu'on peut avoir dans un moment ou un autre, nous disent comment nous comporter.
Dans ce sens, je ne crois pas que, dans les circonstances, le geste ait été approprié. Je ne crois pas que cela ait pu influencer positivement la cause de l'Alliance canadienne que quelqu'un s'amuse à lever la masse et à la remettre à sa place. Cela dénote, à notre avis, un manque de respect envers une institution qui mérite d'être respectée.
C'est vrai que le gouvernement exagère souvent, allant à la limite du Règlement, déposant des motions les unes après les autres afin de bâillonner les travaux de cette Chambre. C'est vrai que les présidents de comités utilisent le maximum de leur autorité pour empêcher que certaines questions se posent ou qu'un travail se fasse. Mais il nous appartient à nous, dans ce contexte, de modifier le Règlement ou d'alerter l'opinion publique en expliquant que le gouvernement, ou l'opposition à certains égards, abuse du Règlement pour empêcher que la démocratie s'exerce.
Il n'y a pas si longtemps, alors que le leader du gouvernement était le député de Glengarry--Prescott--Russell, nous avons revu ensemble les dispositions du Règlement de la Chambre. Personnellement, j'ai travaillé beaucoup dans ce dossier. J'ai fait apporter des changements qui me conviennent et qui ont amélioré la démocratie parlementaire, mais je ne me rappelle pas avoir vu l'Alliance canadienne, ou n'importe quel autre parti, expliquer que la disposition du Règlement dont s'est prévalu le leader du gouvernement était mauvaise. Ce n'est pas parce qu'on en fait un usage excessif à un moment donné qu'il faut faire disparaître non pas l'article du Règlement, mais l'autorité, ou violer les règles fondamentales du Parlement. Cela ne m'apparaît pas être une bonne idée.
Cela étant dit, je ne veux pas qu'on considère le député en cause comme quelqu'un ayant commis un crime contre la personne. Il faut simplement comprendre que son état d'émotivité du moment l'a porté à poser un geste regrettable.
C'est un geste inacceptable, à mon point de vue, parce que s'il fallait que cela se produise chaque fois qu'un parlementaire à la Chambre a des sautes d'humeur ou considère que son privilège a été foulé aux pieds ou que le gouvernement a mal agi, on passerait notre temps à lever la masse, à je ne sais trop quoi faire, ou à lancer des objets. Je ne sais pas, alors, de quoi aurait l'air le Parlement.
On a beau ne pas être en accord avec ce qui se fait ici, on a beau considérer que le gouvernement exagère, on a beau considérer parfois que la présidence rend des décisions inacceptables, à la limite, on peut sortir de la Chambre—ce que l'Alliance a fait—, à la limite, on peut aller rencontrer les personnes pour manifester notre mécontentement.
Toutefois, s'il fallait, chaque fois que celui qui vous parle ne soit pas satisfait des décisions gouvernementales, que j'aille soulever la masse, j'ai l'impression que je ferais approcher mon bureau un peu plus près, parce que ce serait la réalité des choses. Mais cela n'aurait pas de sens. Imaginez qu'on se comporte comme cela et qu'on manifeste nos sautes d'humeur des façons les plus farfelues qui soient chaque fois qu'on n'est pas satisfaits!
Personnellement, je n'apprécie pas ce genre d'excès. Je considère que nous avons d'autres moyens parlementaires, y compris le retrait ou l'abstention. Je considère que la manifestation d'un mécontentement de façon verbale, dans les limites de ce qui est permis, est suffisant. Mais, de grâce, il faut limiter nos excès et nos envies de nous exprimer de toutes les manières inimaginables, sans cela, le Parlement n'en sera plus un, ce sera une foire.
Le député n'a pas commis un geste d'une gravité telle qu'il faille le châtier à jamais. Cependant, à notre point de vue, le député a commis une erreur de jugement qui ne devrait pas se produire.
D'autre part, le gouvernement demande simplement au député de se présenter à l'entrée de la Chambre, de s'excuser officiellement, parce que le geste posé est officiel. Le député s'est présenté en avant et a levé la masse. C'est officiel, cela s'est passé devant tout le monde, alors, le député doit poser un geste très officiel et s'excuser.
À cet égard, le gouvernement m'apparaît extrêmement raisonnable. Le député devrait l'être également. Et s'il est un parlementaire de qualité—ce que je pense qu'il est—, il devrait faire comme je ferais si la chose se présentait dans mon cas. Il me semble que je me présenterais et que je dirais: «Oui, monsieur le Président, on va mettre fin à cela. On ne perdra pas de temps. J'ai exagéré, j'ai outrepassé mes droits. Je le reconnais. C'était sous l'impulsion du moment. Je m'en excuse et je demande à mes pairs de m'excuser.»
Le gouvernement est raisonnable dans sa demande. Notre collègue devrait être raisonnable dans sa façon d'agir. ll ne gagnera ni sur le plan du prestige personnel ni sur le plan de l'histoire. Il ne gagnera pas non plus en grandeur en essayant de se défiler de ses responsabilités. Je crois que la situation est en train de se régler de la bonne façon, et, personnellement, c'est pour cela que j'appuierai la motion telle que déposée par le gouvernement.
M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais poursuivre dans la même veine que mon collègue de Roberval. Si on regarde la situation de notre collègue, le député de Esquimalt--Juan de Fuca, on demande qu'il soit suspendu de la Chambre:
[...] jusqu'à ce qu'il comparaisse à la barre de la Chambre pour s'excuser, d'une manière que le Président jugera satisfaisante, de ses gestes qui ont passé outre à l'autorité de la Présidence et porté outrage à la Chambre. |
Dans un sens, cela me fait plaisir de parler à ce sujet, mais d'un autre côté, j'éprouve également du regret. Quand on est dans l'opposition, les choses deviennent parfois frustrantes. Je suis même prêt à dire que pour les députés d'arrière-ban du gouvernement, c'est parfois également frustrant pour eux.
Dans ce cas-ci, il y avait un projet de loi d'initiative parlementaire. J'ai beaucoup de respect pour ce qui touche individuellement un député. Quand on regarde une motion ou un projet de loi émanant d'un député, il faut que cela ait un sens à la Chambre des communes, autant que pour moi la masse a un sens pour la Chambre des communes. Elle représente l'autorité du Président.
Quand on voit le gouvernement agir comme il le fait, par exemple en présentant un amendement à une motion ou à un projet de loi émanant des députés, cela amène de la frustration. C'est regrettable, mais je pense que cela ne devrait pas justifier le geste de notre collègue de l'Alliance canadienne. Ce n'est pas une raison pour s'emparer de la masse et de la lever devant le Président.
Il y a eu des occasions où j'étais frustré—je pense que c'est simplement arrivé une fois ou deux depuis que je suis député à la Chambre—, mais cela ne m'a pas amené pas à poser des gestes que je pourrais regretter ou dont il faudrait que je m'excuse. Quand de tels gestes sont posés, il faut en payer le prix. Il est donc souhaitable que le député de l'Alliance canadienne fasse lui-même des excuses sans être poussé à le faire.
Il y a une façon de régler le problème. Si on n'est pas heureux de la façon que cela se passe à la Chambre à l'occasion d'une motion ou d'un projet de loi présenté par un député, on peut soulever cette question au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour essayer de trouver une solution au problème. Il faut le faire d'une façon démocratique afin de trouver une solution satisfaisante pour les députés de la Chambre des communes.
Un amendement a été présenté à la motion du gouvernement.
[Traduction]
L'amendement dit ceci:
«les gestes du député d'Esquimalt--Juan de Fuca ont passé outre à l'autorité de la Présidence et porté outrage à la Chambre et, conformément à la pratique, puisque le député s'en est excusé, aucune autre mesure s'avère nécessaire.». |
[Français]
Ce n'est pas cela qui est la tradition, parce que le Président a déjà de l'autorité. Dans La procédure et les usages de la Chambre des Communes, on peut lire ce qui suit:
Le 30 octobre 1991, furieux d'avoir raté un vote, Ian Waddell (Port Moody--Coquitlam) tenta de s'emparer de la masse au moment où le sergent d'armes quittait la salle à la fin de la séance. |
Il ne l'a même pas touchée. Il «tenta» de la prendre. Je continue la lecture:
Ce geste a été jugé comme une tentative de faire obstruction à la Chambre, ainsi qu'un défi au pouvoir du Président de suspendre la séance. Après avoir constaté qu'il y avait, de prime abord, atteinte au privilège, une motion a été adoptée voulant que le député soit appelé à la barre et admonesté par le Président (Débats , 30 octobre 1991, p. 4269-4270; 31 octobre 1991, p. 4271-4285 et 4309-4310). En tant que député, il aurait pu être réprimandé à sa place, ce qui aurait été la coutume. |
Cela aurait été dans la tradition évoquée par l'Alliance canadienne. Je poursuis:
Mais dans ce cas, la motion adoptée par la Chambre précisait que le député devait se présenter à la barre. |
Je pense que dans ce cas-ci, c'est la seule chose respectable à faire, à savoir que le député se présente à la barre et fasse des excuses honorables. À ce moment-là, je pense que tout retournerait dans l'ordre.
[Traduction]
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Monsieur le Président, c'est avec regret que je participe à ce débat. J'estime que nous avons dépassé de loin les limites de ce qu'il aurait convenu de faire pour régler cette question à la Chambre.
Il ne fait aucun doute que la masse est d'une importance incontestable sur le plan de la procédure, et les députés qui m'ont précédé n'ont pas manqué de le souligner. L'incident de mercredi dernier a été, à proprement parler, un outrage à la Chambre qui s'en est trouvée discréditée.
Je ne tiens pas à donner dans le discours partisan, au contraire du chef et leader parlementaire de l'opposition officielle, et, je m'empresse d'ajouter, ancien président de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique. Pourtant, il a fait référence à l'ancien gouvernement progressiste-conservateur dont il a d'ailleurs fait partie à une époque, avant d'entreprendre son légendaire vagabondage politique.
Il n'a bien entendu pas manqué de faire référence à certaines actions qu'il a reprochées au gouvernement, tout comme son arrogance d'ailleurs. Le mot est fort, mais approprié, compte tenu de l'incident qui a incité le député de Esquimalt--Juan de Fuca à poser son geste. Pourtant, la justification ambivalente de ce geste, fournie par le dernier intervenant de l'Alliance, nous a considérablement écarté du sujet.
La défense la plus connue est bien sûr d'accuser l'accusateur. Il ne fait qu'envenimer les choses en tentant de présenter la cause comme étant légitime et justifiant la fin. Comme les députés le savent, nous manquons à notre serment lorsque nous jetons le discrédit sur la Chambre.
Nous pourrions tous facilement relever certains revirements au sein de son propre parti, de même que certaines promesses faites au public d'accroître le niveau de décorum dans cet endroit. Rappelons-nous leur refus de tirer les pensions qui leur étaient offertes, leur refus des avantages conférés à leur poste, leur rejet de la résidence de Stornoway que personne n'allait habiter, pas même le député qui a fait part de ses remarques à la Chambre, leur refus de circuler dans une limousine conduite par un chauffeur et leur prétention d'accroître le décorum à la Chambre, la danse des sombreros à l'extérieur du Sénat, les vieux tacots décorés de drapeaux du Canada qui faisaient le tour des immeubles du Parlement, les drapeaux lancés sur le plancher de la Chambre des communes et tout le reste. Les membres de ce parti n'aiment pas qu'on parle de tout cela parce que cela fait parti de leur histoire ancienne, de l'histoire des réformistes réformés. Toutefois, c'est bien réel.
Je m'empresse d'ajouter que certains de leurs propres députés ont été chassés du caucus pour avoir fait des remarques considérées comme peu convenables. Ces derniers ont demandé à réintégrer les rangs du parti et on leur a demandé de faire des excuses publiques, mais les mêmes normes ne sont pas appliquées maintenant. Il semble que cette norme ne soit plus appropriée maintenant. Lorsqu'un de leurs propres députés est accusé, il ne devrait pas faire amende honorable.
Je ne voudrais pas laisser croire que j'excuse ou que j'appuie le fait que le gouvernement a rejeté le projet de loi d'initiative parlementaire qui fait l'objet de tout ce débat. Il n'aurait pas dû faire cela, mais ce n'est pas là une forme appropriée de protestation.
M. Darrel Stinson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'écoutais le député, qui a dit que nous avions lancé un drapeau sur le plancher. Cela est tout à fait faux. Il s'agissait du livre rouge et celui-ci méritait d'être jeté au plancher.
Le vice-président: Je fais respectueusement remarquer au député d'Okanagan—Shuswap que ce n'est pas un rappel au Règlement. C'est un point de débat et le débat va se poursuivre. Cela dit, j'espère sincèrement que le débat va se tenir conformément à la belle tradition parlementaire que nous sommes tous capables de respecter. Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a la parole.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je suppose que le député va maintenant me demander de le rencontrer à l'extérieur, dans la plus pure tradition parlementaire.
Je reviens à la question dont nous discutions...
M. Richard Harris: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis d'accord avec vous. Je pense que ce débat peut se dérouler d'une façon civilisée, qui favorise le respect dû à notre institution. Il va de soi que la dernière remarque formulée par le député de Pictou—Antigonish—Guysborough est inappropriée. Celui-ci devrait retirer son propos et s'excuser.
Le vice-président: Je n'ai rien entendu qui, à mon avis, serait non parlementaire. Ce n'est pas un rappel au Règlement. Cela dit, je suis un homme très patient et j'exhorte encore une fois la Chambre à se montrer à la hauteur relativement à cette question de privilège, afin que le débat puisse reprendre.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, la question dont la Chambre et le Parlement sont saisis est de savoir comment il faut réagir face à une inconduite grave à la Chambre.
En faisant preuve d'une familiarité exagérée à l'endroit de la masse, le député de Esquimalt--Juan de Fuca a transgressé les règles. Il ne faut pas ici confondre cause et outrage. Il y a à coup sûr une présomption d'outrage qui justifie l'adoption de la motion à cet égard. Nous sommes confrontés à une situation particulièrement sérieuse, qui ne s'est produite que rarement au cours de l'histoire de ce Parlement. Cette Chambre comme d'autres parlements ont toujours considéré comme une inconduite grave et comme un outrage le fait de s'emparer de la masse.
Ce geste est un affront non seulement envers les députés mais envers les symboles importants de la Chambre et du pays. Le parti du député avait fait grand cas de l'instauration d'un nouveau décorum lorsqu'il est arrivé au Parlement. Or, le comportement du député va à l'encontre de cet engagement public de son parti. Son geste était aussi grave que le fait de marcher sur un drapeau, de s'emparer du marteau d'un juge pendant une audience en cour ou d'arracher l'insigne d'un policier dans l'exercice de ses fonctions.
Je renvoie la présidence, comme d'autres l'ont peut-être fait avant moi, à l'affaire Waddell survenue le 31 octobre 1991, dont il est fait mention à la page 4721 du hansard. La Chambre pourra sans aucun doute consulter intégralement le compte rendu de cette affaire, qui avait abouti à la convocation de M. Waddell à la barre. J'estime que cette décision était avisée et qu'elle constitue un précédent pour la présidence. La Chambre pourrait devenir un lieu d'anarchie si ce genre de comportement était toléré impunément.
Je suis le premier à reconnaître que le député de Esquimalt--Juan de Fuca a rapidement présenté des excuses sincères. Comme d'autres députés, je l'ai pressé de présenter des excuses et j'étais présent à la Chambre lorsqu'il l'a fait. Néanmoins, compte tenu de la gravité de la situation et du fait que peu de députés se trouvaient présents à la Chambre à ce moment-là, il serait indiqué que le député présente de nouveau ses excuses.
Je trouve par ailleurs inquiétant, comme d'autres sans doute, que de nombreuses déclarations ont été faites à l'extérieur de cet endroit, notamment sous forme de courrier des lecteurs. On a dit que cet acte avait été prémédité, qu'il était planifié et s'inscrivait dans une stratégie.
Il y a un autre précédent. Je fais allusion à l'affaire Heseltine, au Royaume-Uni, au cours de laquelle un député, que les médias ont par la suite baptisé Tarzan, a saisi la masse et, selon certains comptes rendus, l'a fait pivoter au-dessus de sa tête.
Un reportage de la BBC signale le fait avec plus d'exactitude. Ce reportage offre peut-être une solution de rechange à la Chambre des communes. Ce bref reportage renferme ce qui suit:
D'un geste mémorable, Michael Heseltine a saisi la masse au terme d'un débat particulièrement animé [à la Chambre des communes], en 1976. |
La soirée du 27 mai a été particulièrement riche en événements à la Chambre des communes. Le gouvernement tentait de faire adopter son projet de loi sur les industries de la construction aéronautique et navale. |
Le projet de loi était vivement critiqué et Michael Heseltine dirigeait l'opposition conservatrice. Le vote sur l'amendement avait été lié et rejeté à cause du vote du Président. La motion principale du gouvernement--au cours d'un vote que l'on se serait attendu à voir également lié--a été adoptée par le gouvernement travailliste. |
Certains des députés travaillistes gallois ont alors entonné «The Red Flag». Heseltine, enragé par le chant traditionnel du Parti travailliste, s'est emparé de la masse et l'a brandie au-dessus de sa tête. |
Il a été retenu par Jim Prior, qui a replacé la masse et a quitté la Chambre. Le Président a suspendu la séance jusqu'au lendemain. |
Le lendemain matin, Michael Heseltine a présenté des excuses sans réserve pour son comportement. |
Je souligne l'expression «sans réserve». De véritables excuses et une contrition sincère épargneraient à la Chambre et aux contribuables beaucoup d'ennuis et les frais qu'entraîneraient les travaux d'un comité. Le député de Esquimalt--Juan de Fuca ne devrait donc pas se donner des airs de martyr. Il a présenté ce que je considère être des excuses opportunes et sincères. Je ne vois rien qui l'empêche de recommencer.
Toutefois, on a souvent entendu de piètres déclarations d'excuse qui n'ont pas l'air sincères ou qui ne traduisent pas suffisamment de remords. Je crains que les propos que le député a tenus pour expliquer son geste et les observations qu'il a faites à cet égard ne diminuent les excuses qu'il avait d'abord présentées.
Le député de Esquimalt—Juan de Fuca est un député intelligent, instruit et compétent, qui a grandement contribué aux travaux de la Chambre auparavant. Entre manifester de façon légitime contre les décisions d'un parti et faire preuve de mépris envers la Chambre, il sait qu'il y a une distinction à faire.
Je ne mets aucunement en doute les émotions et la colère qu'il éprouvait, mais je crois que son geste était délibéré et planifié. En laissant libre cours à sa colère, il a dépassé les limites acceptables à la Chambre. Je le répète, son geste semblait avoir quelque chose de délibéré. Quitter la Chambre pour signifier son mécontentement est une chose, s'emparer de la masse en est une autre.
J'exhorte donc le député d'exorciser le mépris qu'il ressent afin que nous puissions de nouveau nous concentrer sur ce gouvernement inique. C'est notre travail. Au lieu de hurler sa vertueuse indignation, il devrait se montrer humble et repentant.
Le député se doit de comprendre que son geste a porté atteinte à l'ensemble de la Chambre des communes, aux députés, aux électeurs, à la Couronne et à la présidence de la Chambre. Voilà pourquoi il nous est absolument impossible de l'appuyer.
Il y a un certain respect qui s'impose. La motion qui oblige le député à se rendre à la barre pour présenter des excuses à ses collègues n'a rien de déraisonnable. Par conséquent, pour toutes les raisons qui ont été mentionnées, nous appuyons la motion sous sa forme originale, et non la motion amendée.
M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, si le député de Esquimalt—Juan de Fuca s'est senti offusqué le jour où il s'est emparé de la masse, je dois lui dire que le député de Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot s'est senti encore plus offusqué, et il n'a pas saisi la masse pour autant, car moi aussi j'ai perdu mon projet de loi ce jour-là, et entièrement, tandis que le député de Esquimalt—Juan de Fuca a au moins eu la consolation de voir son projet de loi être renvoyé à un comité.
Lorsque j'ai perdu mon projet de loi, quelques heures à peine avant l'excès de colère manifesté par le député de Esquimalt—Juan de Fuca, j'ai demandé le consentement unanime de la Chambre et ce parti, l'Alliance canadienne, monsieur le Président...
M. Keith Martin: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député tient des propos incorrects. Le projet de loi n'a pas été renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, et c'est là une partie du problème. Il devait être renvoyé, mais il a été bloqué...
Le vice-président: Je vous rappelle respectueusement encore une fois que ceci n'est pas un rappel au Règlement. C'est une réplique pour rétablir des faits, agréablement ou autrement. Les députés auront éventuellement l'occasion d'intervenir.
M. John Bryden: Monsieur le Président, le hansard prouvera l'exactitude de mes observations. Je reviendrai plus tard dans mon discours sur ce qu'il est advenu du projet de loi du député.
Monsieur le Président, si je peux continuer, j'avais présenté un projet de loi à la Chambre quelques heures à peine avant celui du député de Esquimalt—Juan de Fuca, un projet de loi qui aurait changé le serment de citoyenneté afin qu'il rende compte des valeurs de la Charte des droits et libertés. Lorsque j'ai demandé le consentement unanime des partis, l'Alliance a tourné mon projet de loi en ridicule.
Permettez-moi de vous brosser un tableau de la situation, monsieur le Président. Il existe assurément un problème au niveau des initiatives parlementaires. Le système est dysfonctionnel. Cela ne fait aucun doute. Dans mon cas particulier, j'avais travaillé pendant sept ans afin de présenter un projet de loi visant à modifier le serment de citoyenneté de manière à ce qu'il tienne compte des valeurs des Canadiens. Et finalement, à la loterie parlementaire, monsieur le Président...
M. Vic Toews: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. On vient de prétendre que les députés de l'Alliance canadienne ont tourné un projet de loi en ridicule. Le député devrait préciser de qui il s'agit exactement, parce que c'est une atteinte contre moi, en tant que député, et contre l'ordre de la Chambre.
Le vice-président: Je le répète, la présidence n'est pas là pour déchiffrer les propos des députés, mais pour entendre le débat. Quand le moment sera venu, les députés, des deux côtés de la Chambre, prendront la parole et pourront présenter leur version des faits tels qu'ils les voient.
M. John Bryden: Monsieur le Président, c'est une vieille manoeuvre. Quand les députés de l'opposition ne veulent pas entendre la vérité, ils interrompent le discours afin de déstabiliser l'intervenant. Eh bien, je vais poursuivre et si le député n'aime pas l'expression «tourné en ridicule», il n'a qu'à écouter l'enregistrement. J'ai enregistré les débats de la Chambre des communes et on peut très clairement entendre les invectives qui m'ont interrompu alors que je prononçais mon discours. Plus tard, je pourrais identifier les individus en cause, mais ça ne nous servirait pas à grand-chose.
Revenons au problème des initiatives parlementaires, car le processus est dysfonctionnel. Il n'y a pas que l'opposition qui trouve que ça ne va pas et qu'il faut changer les choses.
Je vais donner à la Chambre une idée de ce qui est arrivé à mon projet de loi. Mon projet de loi, auquel je travaillais depuis sept ans, a finalement été tiré au sort. C'est un système de loterie et seul le hasard détermine si un projet de loi d'initiative parlementaire sera choisi et présenté à la Chambre. Les députés peuvent attendre des années, comme je l'ai fait, avant que leur projet de loi ne soit choisi par tirage au sort. Il est ensuite soumis au comité des initiatives parlementaires.
L'un des problèmes, l'un des renseignements trompeurs qui circulent sur la question est la notion que le comité des initiatives parlementaires, qui détermine si un projet de loi ou une motion d'initiative parlementaire fera l'objet d'un vote ou non, est dominé par les libéraux. Il n'en est rien. Il est dominé par l'opposition. Il n'y a que deux libéraux parmi les membres du comité et il y a quatre députés de l'opposition.
Quand j'ai comparu devant le comité pour voir si oui ou non mon projet de loi ferait l'objet d'un vote, c'est-à-dire s'il serait pleinement débattu, s'il suivrait tout le processus habituel, s'il serait pris en considération par mes collègues et s'il avait la moindre chance de devenir loi, je savais qu'il n'y avait aucun espoir. Le fait est que le comité des initiatives parlementaires ne laisse passer aucun projet de loi libéral. Depuis le début de la présente législature, le comité des initiatives parlementaires a jugé que 16 projets de loi et motions feraient l'objet d'un vote et seuls deux étaient des initiatives libérales, 14 étaient des initiatives de l'opposition.
Je savais que j'étais cuit et que mon projet de loi n'irait nulle part. C'était d'autant plus dommage que j'y proposais des changements au serment de citoyenneté. J'y proposais des changements susceptibles de provoquer des réticences chez certains députés. J'ai dit, par exemple, que les Canadiens sont unis par les cinq principes de la charte. Des députés de certains partis à la Chambre auraient beaucoup de difficulté à accepter cette affirmation.
Le Comité des initiatives parlementaires est ainsi structuré qu'il suffit d'une seule personne pour rejeter un projet de loi au moment de déterminer s'il peut faire l'objet d'un vote. Le comité travaille aussi en secret, de sorte que je n'ai qu'une certitude, et c'est que lorsque j'ai comparu devant le comité et que je l'ai exhorté à faire en sorte que mon projet de loi puisse être soumis à un vote, les deux députés libéraux du comité auraient été favorables à cette mesure, mais elle n'a pas été adoptée. Je ne sais pas quelle tournure a pris le débat final, mais nous savons que ce sont des députés de l'opposition qui ont fait en sorte qu'il ne puisse faire l'objet d'un vote.
C'est une énorme déception. Des députés consacrent beaucoup de temps et d'énergie à l'élaboration d'une mesure semblable et, même si elle ne donne pas les résultats escomptés en bout de piste, ils aimeraient au moins qu'il y ait un débat. Dans mon cas, je n'ai eu droit qu'à un débat d'une heure. Lorsqu'un projet de loi d'initiative parlementaire n'est pas choisi pour un vote, il est présenté à la Chambre, les intervenants en discutent pendant une heure, le député a droit à une intervention de 20 minutes, puis le projet de loi meurt au Feuilleton. Il disparaît.
Le mercredi dont nous parlons, étant donné que c'était le 20e anniversaire de la Charte des droits et libertés, j'ai pensé qu'il conviendrait d'intervenir à la Chambre et de demander le consentement unanime pour que mon projet de loi puisse faire l'objet d'un vote. Essentiellement, mon projet de loi modifierait le serment de citoyenneté et dirait que les Canadiens sont unis par l'égalité des chances, la liberté de parole, la démocratie, la règle de droit et le respect des droits de la personne. J'estimais qu'il était tout à fait séant de faire une telle déclaration à ce moment-là. Je suis intervenu afin de demander le consentement unanime et, comme je l'ai dit, la majorité des députés de l'Alliance canadienne étaient à la Chambre, pour une bonne raison allant dans le sens de leurs intérêts comme on l'a vu, de sorte que mon projet de loi a été rejeté.
Je suis désolé. Il se peut qu'ils n'aiment pas ces propos, mais c'est ce qui s'est produit à cette occasion. Ce fut une grande déception et j'ai terminé mon intervention, mais jamais je n'aurais pu penser, même dans mes rêves les plus fous, à poser le geste que le député de Esquimalt—Juan de fuca a posé à peine quelques heures plus tard. Dans son cas, son projet de loi avait été choisi pour faire l'objet d'un vote.
Tout ce qui s'est produit dans le cas de ce projet de loi, c'est que la Chambre a été saisie d'une motion prévoyant qu'au lieu de renvoyer cette mesure législative au comité de la justice, on allait la renvoyer à un comité existant qui examinait déjà la question des drogues et de leur usage. Rappelons que mon projet de loi portait sur le serment de citoyenneté. Celui du député de Esquimalt--Juan de Fuca visait à décriminaliser la simple possession de marihuana.
Les députés peuvent imaginer mes sentiments lorsque j'ai vu tous les alliancistes prêts pour cela. Il y avait une motion ministérielle ici et lorsqu'elle a été adoptée, le député de Esquimalt--Juan de Fuca s'est levé et il était dans mon champ de vision. Les Canadiens devraient savoir qu'il ne s'est pas contenté de toucher la masse. Il l'a prise dans ses mains et l'a soulevée au-dessus de sa tête en prétendant que le Canada n'était plus une démocratie.
J'avais honte, car peu importe les circonstances, si je ne peux faire avancer mes dossiers à la Chambre et ne peux obtenir ce que je veux pour les Canadiens, je vais quand même toujours respecter la Chambre. Les députés ne peuvent tourner le dos à la démocratie en agissant comme le député de Esquimalt--Juan de Fuca l'a fait.
Je tiens à dire que j'appuie la motion du gouvernement. Je ne peux accepter que le député de Esquimalt--Juan de Fuca ait été tellement pris par ses émotions qu'il a dû agir comme il l'a fait. J'éprouvais les mêmes sentiments et je ne me suis pas senti obligé de faire cela.
Parfois, dans cette enceinte, nous nous laissons prendre à notre propre rhétorique. Je pense que le Président devrait savoir que le député de Esquimalt--Juan de Fuca et d'autres députés de l'opposition ont tenu une conférence de presse la veille. J'ai pu la voir sur la Chaîne parlementaire. Ils ont discuté du fait que les initiatives parlementaires ne fonctionnaient pas bien et que les députés de l'opposition avaient du mal à faire avancer leurs mesures législatives. Ils ont parlé du projet de loi du député de Esquimalt--Juan de Fuca et du fait que la Chambre était saisie d'une motion qui risquait de l'entraîner dans une autre voie.
À ceux d'entre nous qui ont l'habitude de la politique, il me semblait qu'il y avait une sorte d'effort concerté cette journée-là avant que le député de Esquimalt--Juan de Fuca ne se lève à la Chambre et ne vienne se saisir de la masse.
Je signale en outre que, lorsque j'ai présenté mes observations et sollicité le consentement unanime de la Chambre au cours de la période des affaires courantes, j'ai été étonné de voir que tous les députés alliancistes étaient présents à la Chambre. Je ne veux dénigrer personne, mais il ne faudrait peut-être pas se surprendre de la protestation officielle, non seulement du député de Esquimalt--Juan de Fuca, mais encore de la plupart des députés alliancistes, qui sont sortis après qu'il eut posé son geste.
Il ne fait aucun doute qu'il faut corriger la situation concernant les initiatives parlementaires. Elle est insuffisante à l'heure actuelle. La possibilité pour les députés d'arrière-ban de faire adopter des projets de loi est à peu près nulle, mais cela ne dépend pas seulement du gouvernement. Cela vient aussi du fait que les initiatives parlementaires sont teintées de politique partisane. Cela fait partie du problème au Comité sur les inititiatives parlementaires.
Il faut trouver le moyen de faire qu'aucun d'entre nous ne puisse, en fait, profiter des initiatives parlementaires pour aider ou nuire à un parti politique. Tous ici, lorsque nous présentons un projet de loi, nous y mettons tout notre coeur. Je ne doute nullement de la sincérité du député de Esquimalt--Juan de Fuca dans son attachement à son projet de loi et dans ce qu'il essayait de faire. Je conteste seulement la façon dont il a exprimé sa frustration.
Le problème doit être résolu. Les divers leaders parlementaires doivent y travailler ensemble. Je crois savoir que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre examine la question à l'heure actuelle. En ce qui me concerne, le comité devrait trouver une solution absolument non partisane. Il devrait faire que tous les projets de loi tirés fassent l'objet d'un vote. Cela résoudrait automatiquement le problème.
Ce qu'il faut retenir, au bout du compte, c'est qu'on ne peut pas faire valoir des initiatives parlementaires, on ne peut pas faire valoir les droits des députés de l'arrière-ban en manquant de respect à l'institution du Parlement. Lorsqu'on manque de respect aux symboles de l'institution du Parlement, on se fait du tort à soi-même et on en fait aussi à tous les Canadiens.
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, mercredi dernier, j'ai soulevé la masse qui se trouve devant nous. J'ai dit à ce moment-là que le Canada n'était plus une démocratie. En soulevant la masse, j'ai commis un acte de désobéissance civile, prémédité à froid, mais non pas un acte de colère. Je l'ai fait pour illustrer la violation fondamentale des droits de tous les députés et, par extension, de tous les Canadiens.
Mercredi dernier, le gouvernement a foulé aux pieds notre droit de vote, lequel constitue cette ligne rouge ténue qui sépare le Canada des dictatures et du fascisme. Mercredi dernier, le gouvernement a franchi cette ligne.
Il ne s'agit pas aujourd'hui de l'objet du projet de loi, mais bien de la démocratie. Il s'agit du droit de chacun des députés, qu'ils soient de l'opposition ou du gouvernement, de jouer le rôle qui nous incombe et de faire état de la volonté de nos électeurs et de la nation canadienne. Mercredi dernier, le gouvernement a foulé aux pieds ce droit fondamental.
Ce jour-là, j'ai dû choisir entre plusieurs solutions: me taire et laisser le gouvernement piétiner les droits fondamentaux des Canadiens et des députés; lui permettre sans mot dire de présenter un amendement ayant pour effet de couler une initiative parlementaire et de la faire mourir au Feuilleton; ou dénoncer neuf années de violations des droits démocratiques fondamentaux des députés et des Canadiens par un gouvernement qui a transformé notre pays en dictature.
Beaucoup de députés, tous partis confondus, n'ont pas ménagé leurs efforts pour proposer au gouvernement moult solutions visant à démocratiser les travaux de la Chambre, nous permettre de lutter pour ce qui est juste, défendre les intérêts de nos électeurs et plaider en faveur du Canada et de nos concitoyens.
Le gouvernement rogne notre pouvoir depuis neuf ans de façon évidente et parfois, au moyen d'un tour de passe-passe, il nous empêche de faire notre travail de député. On nous a retiré nos droits; maintenant ça suffit. Il est grand temps que les députés élèvent la voix. Il faut dire au gouvernement que nous n'acceptons plus, que nous ne tolérons plus les violations continuelles de nos droits fondamentaux à titre de Canadiens et de députés. Le temps est venu de nous lever et de déclarer que dorénavant il n'est plus question d'enfreindre les droits de nos électeurs.
Monsieur le Président, j'ai enfreint la tradition de la Chambre et, avec tout le respect que je vous porte à titre personnel et à titre de Président, je vous prie de m'en excuser. Néanmoins, je ne regrette nullement d'avoir soulevé la masse pour attirer l'attention sur la violation des droits des Canadiens. Je vous explique ce qui s'est produit.
Il y a quatre ans, par suite de la fermeture de certains tribunaux dans ma province, en Colombie-Britannique, j'ai commencé à élaborer un projet de loi qui décriminaliserait la simple possession de marijuana. Cette mesure législative ne l'aurait pas légalisée, ce à quoi je m'oppose. Cependant, elle aurait décriminalisé la possession de marijuana pour permettre de sauver des vies et d'économiser de l'argent de sorte que nos tribunaux deviennent plus efficaces.
Mon projet de loi a notamment été soutenu par plusieurs groupes de policiers, par l'Association médicale canadienne et par des groupes confessionnels. Il a été choisi pour faire l'objet d'un vote à la Chambre. Toutefois, à l'étape de la seconde lecture, le gouvernement a présenté un amendement pour le torpiller.
Le gouvernement sait très bien que les initiatives parlementaires font l'objet d'un vote libre. C'est le dernier rempart de la démocratie. C'est le dernier endroit où nous pouvons proposer des solutions, nous battre pour des idées et être innovateurs. Pourtant, le gouvernement présente sournoisement une motion disant que mon projet de loi ne franchira pas la prochaine étape, qu'il ne sera pas renvoyé à un comité et que la Chambre ne se prononcera pas à ce sujet. Le gouvernement a obligé ses députés à adopter une motion visant à torpiller mon projet de loi d'initiative parlementaire qui avait été choisi pour faire l'objet d'un vote.
C'est une violation flagrante de nos droits démocratiques. C'est le coup final porté au coeur des initiatives parlementaires, le dernier rempart de la démocratie au Parlement.
Cette question touche les députés de toutes les formations politiques. Si j'ai agi comme je l'ai fait, c'était pour montrer le piteux état des initiatives parlementaires. De 239 projets de loi d'initiative parlementaire présentés à la Chambre, seulement cinq ont été choisis pour faire l'objet d'un vote et aucun d'entre eux n'émanait des ministériels. Seulement deux se sont rendus aussi loin que mon projet de loi l'était il y a un peu plus d'une semaine. Aucun ne s'est rendu à l'étape du comité.
Comme le député de Mississauga-Est le sait, quand un projet de loi se rend à l'étape du comité, le gouvernement fait voter pour enlever chaque mot, chaque lettre et chaque apostrophe du projet de loi présenté à la Chambre, de manière à le détruire. Il s'agit là d'une violation flagrante des droits des députés de présenter des initiatives parlementaires. Il en coûte 45 millions de dollars. Peut-on imaginer ce qu'on peut faire avec 45 millions de dollars? Tous les tomodensitomètres et les appareils d'imagerie par résonance magnétique que nous pourrions acheter et toutes les infirmières que nous pourrions embaucher pour soigner les malades au lieu de gaspiller cet argent au nom du simulacre de démocratie que la Chambre est devenue.
Le gouvernement aime parler des comités où l'on fait soi-disant du bon travail. Les comités ne servent à rien d'autre qu'à occuper les députés du Parlement. Cela est tragique, compte tenu de l'immense sagesse collective de la Chambre. Chaque député a des talents et des compétences qui peuvent bénéficier aux Canadiens. Les comités sont censés être des endroits où de telles compétences sont mises à profit. Les choses se passent ainsi dans d'autres pays. Le problème avec nos comités est qu'ils servent à occuper les députés et à nous maintenir dans la stupidité. Le gouvernement les contrôle. Le secrétaire parlementaire, nommé par le cabinet du premier ministre, intervient de manière à obliger les députés ministériels à s'en tenir aux souhaits du gouvernement, au détriment de ce que les députés souhaitent collectivement.
Le gouvernement choisit le président de chaque comité. Il ne permet pas aux membres d'un comité de choisir le meilleur candidat parmi eux. N'est-ce pas là une violation des droits des Canadiens?
Des voix: Oui, certes.
M. Keith Martin: Ça l'est certainement.
C'est un mythe de dire que nous avons la possibilité de voter librement à la Chambre. Chacun sait que les votes sont dictés, mais est-ce juste, est-ce raisonnable? En fait, le gouvernement a décidé que chaque vote tenu en cette Chambre est un vote de confiance envers le gouvernement et c'est un abus total de cette loi. Mis à part les votes sur les projets de loi financiers, qui concernent la base même du programme qui a porté le gouvernement au pouvoir, les votes ne sont nullement des votes de confiance. De quoi le gouvernement libéral a-t-il peur pour devoir forcer ainsi ses députés à voter selon les volontés du cabinet du premier ministre et non pas selon ce que veulent leurs électeurs? Les libéraux ont peur de la démocratie.
Les débats à la Chambre ont-ils un sens? Non. Ils ne signifient rien parce que le programme du gouvernement ressemble à du pablum et les mesures législatives présentées à la Chambre n'ont rien à voir avec ce qui préoccupe vraiment les Canadiens. Les Canadiens veulent des emplois, de bons soins de santé, de l'éducation et la sécurité dans leurs rues. Ils veulent une démocratie. Ils veulent que leur argent soit bien dépensé et ils veulent un environnement sain. Ces questions sont-elles soulevées à la Chambre? Non.
Pourquoi la Chambre n'est-elle jamais saisie de projets de loi de fond traitant des nombreuses questions qui préoccupent les Canadiens? Parce que les libéraux obtiennent un appui de 49 p. 100 dans les sondages, ils se conduisent comme des amas de lard opaques et amorphes. Ils se conduisent ainsi parce qu'ils savent bien qu'ils n'ont pas besoin d'agir. Ils ont décidé de ne rien défendre.
Ce gouvernement est mené par les sondages et non par l'intérêt public. Ce gouvernement sert les intérêts du cabinet du premier ministre et non ceux de la population.
Le gouvernement veut me mettre sur la sellette pour avoir soulevé la masse et enfreint une tradition de la Chambre. Il faudrait plutôt juger le gouvernement pour sa mauvaise gestion des affaires publiques, sa mauvaise gestion de la Chambre et la violation des droits fondamentaux de tous les Canadiens.
Pourquoi le gouvernement ne fait-il pas ce qu'il faut pour assurer la durabilité du régime de soins de santé? Pourquoi laisse-t-il des gens souffrir en silence ou mourir sur des listes d'attente? Cela ne constitue-t-il pas un crime beaucoup plus grave que le fait de parler de la babiole qui est devant nous? N'est-il pas beaucoup plus grave de laisser l'accord sur le bois d'oeuvre expirer sans prévoir de plan d'action, et laisser des dizaines de milliers de personnes perdre leur emploi et de petites collectivités disparaître en Colombie-Britannique?
Le gouvernement n'a-t-il pas commis un crime beaucoup plus grave en laissant la valeur de notre monnaie tomber de 73¢ à 63¢, tout en prétendant ne rien pouvoir y faire? N'est-ce pas là un crime beaucoup plus grave puisqu'en agissant de la sorte le gouvernement a privé les Canadiens de leur bien-être et causé des pertes d'emplois?
N'est-ce pas un crime beaucoup plus grave d'acheter de nouveaux avions Challenger alors que nos militaires utilisent des hélicoptères Sea King qui s'écrasent et mettent la vie de nos soldats en danger? N'est-il pas beaucoup plus grave de ne pas avoir de politique cohérente en matière de défense et d'affaires étrangères de sorte que nos soldats puissent faire leur travail?
Au moment où notre population vieillit, n'est-ce pas un plus grand crime que personne, au sein du gouvernement, ne tente d'assurer la durabilité du régime de pensions à l'intention des personnes qui n'ont qu'un revenu fixe et devront souffrir en silence? Ces gens souffriront pendant que le gouvernement refuse de s'attaquer au problème démographique qui créera des pressions non seulement sur nos programmes sociaux, mais sur l'économie même, dont dépend le bien-être de ce pays. Parce que le gouvernement refuse de s'attaquer rapidement à ce problème urgent, des personnes âgées souffriront, nos programmes sociaux s'écrouleront et notre économie ne sera plus que l'ombre de ce qu'elle pourrait être. Ce sont là les conséquences de l'inaction du gouvernement.
N'est-ce pas un plus grand crime que les ministres soient pris en sandwich entre l'alliance impie des mandarins nommés par le cabinet du premier ministre et le cabinet même du premier ministre? Je me demande si le public sait que les hauts fonctionnaires sont nommés par le premier ministre de sorte qu'aucun des ministres ne puisse faire preuve d'innovation à son ministère. Ils sont forcés d'être les porte-parole du cabinet du premier ministre.
Beaucoup de ministres ont beaucoup de talents, mais on les empêche de s'en servir, car s'ils essaient d'innover, le cabinet du premier ministre leur tombe dessus à bras raccourcis. Ils recevront cet appel téléphonique fatidique leur intimant l'ordre de se taire et de ne plus essayer de prendre des initiatives.
Les députés ministériels d'arrière-ban sont également affligés par la violation autoritaire de leurs droits de la part du premier ministre. Le cabinet du premier ministre a transformé notre institution autrefois démocratique en son jouet privé. Le cabinet du premier ministre, composé de larbins du premier ministre non élus, irresponsables et invisibles, utilise le pays, la Chambre et l'argent des contribuables à son propre avantage.
J'espère que le public comprend qu'en soulevant ainsi la masse, j'ai voulu que nous tous de ce côté-ci et, je l'espère, de l'autre côté dénoncions le fait que nous ne vivons plus en démocratie.
Il en coûte un demi-million de dollars par année aux contribuables canadiens pour nous envoyer siéger dans cette institution. C'est un grand honneur. Les Canadiens nous font confiance pour que nous prenions leur défense, pour que nous nous battions pour leurs causes, pour que nous luttions pour ce qu'ils veulent faire et pour que nous remédiions aux grands problèmes qui les préoccupent. Malheureusement, nous ne pouvons pas faire notre travail et ce n'est pas...
Une voix: Cela n'excuse pas votre comportement.
Des voix: Oh, oh!
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Il semblerait que beaucoup d'entre vous aient hâte de participer, mais je vous demanderais simplement d'être un petit peu plus patients. Je resterai là et nous prendrons le temps qu'il faudra.
M. Keith Martin: Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai perturbé les travaux de la Chambre. La semaine dernière, j'ai violé les traditions de la Chambre, ce dont je me suis immédiatement excusé auprès de vous personnellement, par respect non seulement pour votre charge, mais aussi pour vous en tant que personne que je respecte.
Toutefois je prétends, et les Canadiens d'un bout à l'autre du pays le savent pertinemment, qu'une violation bien plus grave se perpétue dans notre pays, la violation par le gouvernement de notre droit démocratique le plus élémentaire, le droit de vote. Le gouvernement, plus précisément le cabinet du premier ministre, a lié les poings et les pieds des députés de telle manière que nous sommes incapables de faire quoi que ce soit de constructif pour le bien public. Nous sommes devenus des machines à voter, et les députés d'en face devraient être tout aussi affligés que nous par cette situation.
L'occasion est donnée à tous les députés, quel que soit leur parti, et même aux ministériels, de se lever et de dire qu'ils en ont assez, de prendre la défense de la démocratie, d'agir selon leur conscience, de défendre leurs électeurs et notre pays. Si tous les députés le faisaient, nous nous déferions à tout jamais du contrôle qu'exerce le cabinet du premier ministre sur la Chambre et nous démocratiserions la Chambre pour le bien de tous les députés, quelle que soit leur appartenance politique, de sorte qu'un jour cette institution puisse être véritablement démocratique, un lieu où nous pourrions mettre nos talents de députés, talents dont les députés ne sont pas dépourvus, mon Dieu, au service des Canadiens, du Canada et de l'avenir.
Si nous ne prenons pas la défense de la démocratie, nous serons nos propres victimes. Nous ferons partie du problème. Nous ne serons pas amis de la démocratie, nous en serons les ennemis et, insidieusement, nous deviendrons amis de ce comportement fasciste, dictatorial, antidémocratique et draconien qui fera de notre pays l'ombre de ce qu'il pourrait être.
J'accuse le gouvernement d'être antidémocratique. J'accuse le gouvernement d'être dictatorial. J'accuse le gouvernement d'être fasciste.
M. John Bryden (Ancaster--Dundas--Flamborough--Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, la confusion mentale qui a poussé le député de Esquimalt—Juan de Fuca à prendre la masse est illustrée dans une petite phrase de son discours, soit celle où il a dit que le Parlement était un semblant de démocratie. C'est ce que le député a dit. Cette remarque montre la confusion qui existe dans l'esprit d'un grand nombre de députés de l'Alliance canadienne lorsqu'ils s'en prennent au gouvernement, comme le font tous les députés de l'opposition. On ne s'attend pas à ce que l'opposition aime le gouvernement, mais lorsqu'elle s'en prend au gouvernement, l'opposition attaque très souvent le Parlement. C'est cela qui est si mauvais.
Je ne sais pas ce qu'en pense le député de Esquimalt—Juan de Fuca, mais je crois que le Parlement du Canada est le meilleur au monde. Le Canada a la meilleure démocratie au monde. Je suis le premier à critiquer mon gouvernement de ce côté-ci. Je ne suis pas toujours d'accord avec ce que le gouvernement fait, mais ici, dans cette enceinte, nous avons la liberté de critiquer le gouvernement, de travailler afin que des changements soient apportés, et ce plus que dans tout autre démocratie ou parlement au monde.
Le fait que le député s'en soit pris au Parlement alors qu'il en voulait au gouvernement, en plus d'avoir aussi dit que c'est le gouvernement qui le punissait pour s'être emparé de la masse, montre encore une fois qu'il est confus. Ce n'est pas le gouvernement qui a été offensé par son geste, mais bien le Parlement. Ce ne sont pas les traditions du Parlement qui ont été bafouées, mais le Parlement lui-même. Ce n'est pas seulement le leader du gouvernement à la Chambre qui était outré. Je puis assurer aux députés que si le leader du gouvernement à la Chambre n'avait pas soulevé sa question de privilège, je l'aurais fait. Et si je ne l'avais pas fait un député de l'opposition l'aurait fait. Nous avons entendu l'opposition sur cette question. Le Bloc québécois et le Parti conservateur partagent le même point de vue.
Je pense vraiment que le député de Esquimalt—Juan de Fuca doit essayer de comprendre que même s'il peut en vouloir au gouvernement, il ne doit pas s'en prendre au Parlement.
M. Keith Martin: Monsieur le Président, le député d'en face devrait réécouter ce qu'il vient de dire. Il a dit que nous avions la plus grande démocratie dans le monde. En fait, le député a dit assez éloquemment que son projet de loi d'initiative parlementaire avait été torpillé. Il a fait la preuve que son projet de loi d'initiative parlementaire, qui aurait dû pouvoir faire l'objet d'un vote et d'une étude équitable, a été torpillé parce que le Parlement canadien n'est plus démocratique.
Le député a fait valoir, quoique sans le vouloir, l'argument que je tente de faire ressortir, à savoir qu'il ne s'agit pas de moi ni de l'opposition. Il s'agit de tous les députés et, notamment, de ceux qui siègent de l'autre côté. De tous les projets de loi d'initiative parlementaire qui ont été présentés, aucun de ceux qui ont été proposés par des députés ministériels n'ont pu faire l'objet d'un vote. C'est toute une violation de leurs droits comme des nôtres.
Tous les députés devraient comprendre que ce sont nos droits démocratiques qui sont en cause. Ce sont les droits démocratiques de nos électeurs et de tous les Canadiens qui sont en cause. Cela concerne notre capacité de voter. Cela concerne notre capacité de faire notre travail de député. Telle est l'essence des droits les plus purs et les plus fondamentaux.
Voilà de quoi il s'agit. Nous protestons contre une violation fondamentale de nos droits. L'essence des projets de loi importe peu. Ce qui importe davantage, c'est essentiellement le fait que les droits des députés, de toutes les personnes ici présentes, sont violés depuis neuf ans. Ces violations sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus graves.
Le député est en outre complètement déconnecté du public. Les Canadiens s'attendent désespérément à ce que le Parlement soit démocratisé. À preuve, les journaux nous ont appris aujourd'hui que 69 p. 100 des Canadiens estiment que le Parlement est corrompu. Je ne dirais pas que c'est un endroit corrompu. Ce n'est tout simplement pas une démocratie, mais une dictature.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, je regrette vivement de devoir dire sincèrement au député de Esquimalt--Juan de Fuca que ses interventions à la Chambre cet après-midi sont indignes de lui. Au fil des ans, je l'ai souvent entendu intervenir à la Chambre et je pense qu'il déroge à ses habitudes.
Cela me rappelle l'histoire du couple qui assistait à un défilé auquel prenait part leur fils. Se tournant vers son mari, la femme dit: «Regarde, personne ne marque le pas, sauf mon fils, John.» C'est ce qui se passe ici.
Je voudrais rappeler officiellement le cas Waddell. C'était un débat marquant. Une telle situation n'est pas monnaie courante. Le cas s'est produit il y a environ 11 ans et impliquait Ian Waddell, député de Vancouver--Kingsway. Il y a des différences qualitatives entre ce cas et celui que nous étudions cet après-midi. Je tiens à le dire publiquement.
Dans le cas de Ian Waddell, c'était une séance en soirée. Les leaders à la Chambre étant partis, leurs remplaçants ont décidé de faire brièvement retentir le timbre et de tenir un vote éclair. Ian Waddell et Jim Fulton, député de Skeena, suivaient les travaux à la télévision dans l'édifice de la Confédération. Ils ont couru à la Chambre pour aller voter. Mais le timbre a retenti brièvement et les deux députés n'ont pas eu l'occasion de se prononcer sur une question très importante, concernant l'imposition des personnes âgées.
M. Waddell a demandé à la présidence de revenir à son siège afin que les deux députés puissent voter. Bien sûr, l'argument de M. Waddell était solide. Un des droits fondamentaux dont bénéficie un parlementaire est la capacité de voter à la Chambre. Le député était frustré, parce qu'on lui avait retiré son droit de vote.
M. Waddell a présenté des excuses. Il a été appelé à la barre. C'était de la pure frustration. Son geste n'était prémédité. Cet après-midi, le député de Esquimalt--Juan de Fuca a dit à la Chambre que son geste était prémédité.
Je termine simplement en disant que les propos que nous avons entendus cet après-midi sont indignes du député de Esquimalt--Juan de Fuca.
M. Keith Martin: Monsieur le Président, je suis heureux que le député ait fait valoir mon argument très éloquemment en faisant un parallèle entre mon cas et celui de M. Waddell. Le droit de vote de M. Waddell a été violé. Mercredi dernier, les droits de non seulement un député, mais de tous les députés ont été violés, en ce sens que nous n'avons pas pu voter. C'est là le problème. Je suis heureux que le député s'en rende compte.
Je ferai valoir un autre argument. Ce député et bien d'autres députés qui participent à ce débat sont à contre-courant de la population. La population est notre patron. Le fait est que le Parlement est devenu le domaine du cabinet du premier ministre. L'argent du contribuable, l'argent que la population donne à la Chambre et à cette institution, est utilisé par le cabinet du premier ministre pour son propre bénéfice.
Je présente une demande. En Grande-Bretagne, Oliver Cromwell avait demandé qu'on retire la masse. Il avait dit: «Enlevez-moi cette babiole, vous ne constituez plus un parlement.» Il l'a fait car, à ce moment-là, la Grande-Bretagne n'avait pas de parlement. Il n'y avait pas de fonctionnaires. Personne ne travaillait pour le bien public. Les députés agissaient pour leur propre bien.
Ici, nous n'avons pas une institution où les députés agissent dans leur propre intérêt. Nous avons un cabinet du premier ministre qui dirige la Chambre comme une dictature. Voilà le problème fondamental que nous avons.
J'implore tous les députés d'avoir le cran et le courage de défendre la démocratie, de défendre les droits de leurs électeurs, de défendre leurs propres droits et de voter contre les efforts du gouvernement de me blâmer, non pas parce que je n'ai fait rien de mal, car j'ai mal agi. J'ai soulevé la masse et c'était un geste prémédité.
Tous les députés devraient voter en faveur de l'amendement et contre la proposition du gouvernement. Ainsi, tous les députés diront au cabinet du premier ministre que nous n'en pouvons plus, que nous en avons assez de cette absence de démocratie, que nous en avons assez de cette dictature, et que nous irons de l'avant et bâtirons cette institution avec l'aide des Canadiens et à jamais pour les Canadiens.
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, c'est le coeur gros que j'interviens aujourd'hui. J'ai beaucoup d'ancienneté à la Chambre des communes, ayant été député de façon intermittente au cours des 28 dernières années. J'étais ici mercredi dernier lorsque le député de Esquimalt—Juan de Fuca s'est emparé de la masse. J'ai été pétrifié d'horreur. J'ai senti que l'on me portait atteinte comme député.
À mon avis, il faut tenter de donner un certain ton de gravité à ce débat. J'interviens aujourd'hui en raison de l'insouciance du chef de l'opposition qui a pris la parole il y a quelques heures ou il y a quelques minutes pour faire état de la colère de son collègue, dont il dit qu'il est désolé, et mentionner que nous devrions laisser tomber ce sujet.
J'ai beaucoup de respect pour le chef de l'opposition. Nous avons été collègues à la Chambre pendant de nombreuses années, ce qui nous reporte au début des années 1970. Comme quelqu'un l'a souligné, il a présidé l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique. À mon avis, il a accompli un travail remarquable comme chef de l'opposition pendant que son parti traversait une période très difficile. Je suis très déçu du fait qu'il cherche à justifier le comportement du député de Esquimalt—Juan de Fuca.
Ce qui m'agace cet après-midi, c'est l'indifférence et le nombrilisme dont a fait preuve le député de Esquimalt—Juan de Fuca. Ce n'est pas la revendication qui est au coeur du débat, mais bien la façon dont le député a témoigné de son mécontentement.
Il nous est tous arrivé de ressentir du mécontentement. Nous avons tous été contrariés. La politique relève d'un jeu difficile. Un ancien premier ministre britannique du XVIIIe siècle a dit de la politique qu'elle était un «mât de cocagne». Nous essayons toujours de faire valoir notre point de vue, de nous rendre jusqu'au bout de notre argumentation mais, pour une raison ou pour une autre, nous n'y arrivons jamais. C'est frustrant, mais peu importe la frustration ressentie par des députés, nous nous devons de respecter les traditions fondamentales de cet endroit.
Le député de Esquimalt—Juan de Fuca a dit cet après-midi que le fait de renvoyer à un comité le sujet abordé dans son projet de loi portait atteinte aux droits de tous les députés. Vraiment? Cela n'a pas porté atteinte à mes droits. De quel droit le député s'exprime-t-il en mon nom?
Monsieur le Président, vous ou votre collègue étiez au fauteuil. Avez-vous décrété que la procédure n'était pas recevable? Non. C'est la volonté démocratique de la Chambre qui a fait en sorte que le projet de loi a été renvoyé au comité.
Le député se sentait peut-être lésé, mais s'il y a eu accroc au décorum ou infraction au Règlement, c'était au Président de le dénoncer. Le député de Esquimalt--Juan de Fuca n'avait pas à intervenir pour défendre le privilège parlementaire et l'intégrité de la Chambre. Ce n'est pas son rôle. Il peut exprimer son mécontentement, mais ne peut bafouer nos droits à tous. C'est ce qu'il a fait en soulevant la masse.
La masse est un objet symbolique. Elle symbolise les privilèges dont nous jouissons en tant que députés. Permettez-moi de citer la 19e édition de l'ouvrage d'Esrkine May:
Le privilège parlementaire est la somme des droits particuliers dont jouit chaque Chambre, collectivement, en tant que partie constitutive de la Haute Cour qu'est le Parlement, dont jouissent aussi les membres de chaque Chambre, individuellement, et faute desquels il leur serait impossible de s'acquitter de leurs fonctions. Aucun autre organisme, ni citoyen, n'a de droits équivalents. Ainsi, le privilège, bien qu'il fasse partie intégrante du droit, est dans une certaine mesure une exception à la loi générale. |
Nous parlons ici de quelque chose qui nous a été légué d'une génération à l'autre et qui constitue une exception à la loi, quelque chose dont nous jouissons en tant que députés, le privilège.
Au paragraphe 1 du commentaire 108 de la quatrième édition de l'ouvrage de Beauchesne, on peut lire:
Tout acte qu'un tribunal considère comme un outrage constitue une violation de privilège s'il est commis contre le Parlement, par exemple la désobéissance intentionnelle ou le manque de respect évident aux règles, règlements, formes de procédure valides, ou à la dignité et à l'autorité de la Chambre, soit par des propos ou un comportement désordonnés, méprisants ou insolents, soit par une conduite déréglée, soit enfin par un simple manquement à ses ordres. |
Le député de Esquimalt--Juan de Fuca s'est emparé de la masse. Cet après-midi, le député de Roberval a expliqué la situation avec une certaine éloquence, parlant de la masse et de ce qu'elle symbolise. Pour en revenir à la 19e édition d'Erskine May, on lit à la page 229, à propos du Président:
Le Président est accompagné par la masse royale, symbole de son autorité. Elle est portée devant lui, lorsqu'il se rend à la Chambre et la quitte, ainsi que dans des circonstances officielles, par le sergent d'armes de la Chambre des communes, et elle est placée sur le bureau [...] |
Les principales caractéristiques des fonctions du Président de la Chambre des communes sont l'autorité et l'impartialité.
Monsieur le Président, la masse vous symbolise, et vous êtes notre serviteur à tous, car vous avez été élu démocratiquement par nous tous pour arbitrer nos délibérations. Il ne m'appartient pas, monsieur le Président, de contester votre jugement. Dans ce cas, ni vous ni votre collaborateur à la présidence n'avez trouvé à redire à la procédure. Le député oui. Il s'est senti lésé, et je comprends son indignation, mais ce n'est pas un prétexte pour faire outrage au fondement même de nos institutions parlementaires, monsieur le Président, ce que symbolise la masse qui vous représente, vous, le Président, et nous tous avec nos privilèges. Il n'a pas ce droit, et il doit présenter des excuses.
Il pourrait dire qu'il s'est déjà excusé. Le 17 avril, il a pris la parole pour dire ceci:
Je m'excuse cependant à la Chambre d'avoir touché la Masse. J'ai agi sous l'impulsion du moment et pour montrer qu'on avait porté atteinte à la démocratie en détruisant quatre années de travail et en mettant en péril la vie de certaines personnes. J'ai fait cela pour faire valoir un point. Je n'aurais pas dû et je tiens à m'en excuser. |
C'est ce qu'il a dit le 17 avril, mais il a pris la parole aujourd'hui et a dit que son geste était prémédité. Était-il sincère lorsqu'il a parlé le 17 avril ou était-il sincère aujourd'hui? Je dirais que ce n'est qu'en appelant le député à la barre de la Chambre, devant tous les députés assemblés, que nous l'amènerons à nous faire part de ses véritables sentiments sur cette affaire et à nous présenter des excuses sincères, parce qu'il ne l'a certainement pas fait aujourd'hui. Il a essentiellement dit plus tôt qu'il s'excusait, mais a poursuivi en disant qu'il ne regrettait pas son geste.
Il y a beaucoup de propos contradictoires en politique. Cela fait partie du jeu. Cependant, lorsqu'il est question de privilège, lorsqu'il est question des droits fondamentaux des députés, lorsqu'il est question des symboles fondamentaux de la démocratie, nous ne pouvons pas tenir un double langage.
Ou le député s'excuse sans réserves, ou il dit qu'il ne regrette pas son geste. Que pense-t-il vraiment? À mon avis, ce n'est qu'en l'appelant à la barre de la Chambre que nous connaîtrons la vérité.
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai beaucoup apprécié les commentaires du ministre. Je me suis rendu compte combien le pauvre homme pouvait être éloigné de la réalité et combien il n'avait rien compris de ce qui s'était passé mercredi dernier.
J'aimerais préciser ma position sur mes excuses pour l'éclairer et pour informer la Chambre. J'ai présenté mes excuses au Président pour avoir violé les traditions de la Chambre. Le fait de présenter des excuses à vous, monsieur le Président, et aux députés de la Chambre n'a rien à voir avec le fait de ne pas regretter d'avoir saisi la masse. La différence, c'est que le ministre a mis en évidence la raison fondamentale pour laquelle la masse avait été prise. Elle a été prise, comme il l'a mentionné, parce que les droits fondamentaux des députés ont été violés.
J'aimerais que le ministre nous dise s'il croit que la masse représente la base du Parlement ou s'il croit que le droit des députés de voter est un droit beaucoup plus important et un fondement beaucoup plus important de cette Chambre.
L'hon. David Collenette: Monsieur le Président, je crois que le député ne comprend vraiment pas ce qui se passe ici. Ce n'est pas moi qui fais l'objet d'accusations, mais bien lui.
Il y a quelques minutes, j'ai parlé des traditions parlementaires, du symbolisme de la masse qui représente votre autorité et le fait que nous avons tous été dûment élus et que nous jouissons de privilèges parlementaires qui remontent à près de mille ans. Si le député ne comprend pas ces données fondamentales, c'est que le problème est beaucoup plus grave.
M. Keith Martin: Monsieur le Président, voici venu le temps des questions et observations sur le discours du ministre, et j'ai parfaitement le droit de lui poser des questions. Le ministre devrait agir correctement et donner des réponses aux questions qui lui sont posées, au lieu d'essayer de les éviter, parce que cela va droit au coeur de la question. Je vais donc poser encore une fois une question très simple au ministre des Transports.
Le ministre a mentionné dans son discours qu'il est convaincu que le fondement même de la Chambre, les choses les plus importantes dans cette enceinte sont les droits fondamentaux des députés. Ce sont ces droits que nous devons faire respecter, en notre qualité de députés. Je poserai donc cette question au ministre encore une fois. Croit-il que la masse soit le fondement du Parlement et qu'il faille la faire respecter, ou n'est-il pas plutôt d'avis que l'on devrait observer une tradition démocratique et un droit beaucoup plus important, celui de voter? Qu'est-ce qui compte le plus, la masse ou le droit de voter?
L'hon. David Collenette: Monsieur le Président, encore une fois le député ne comprend pas. La Chambre a décidé, après délibération, de renvoyer un projet de loi à un comité. Le député n'était pas d'accord avec cette décision. Il s'est objecté. Mais cela se produit couramment. La Chambre est divisée sur presque toutes les questions. C'est ça, la démocratie parlementaire.
Le député aurait eu un meilleur argument s'il avait dit qu'on l'avait empêché de voter, comme l'a indiqué notre collègue de Winnipeg à propos de l'affaire Waddell, où M. Waddell avait prétendu qu'il n'avait pas eu le temps de voter. Même là, le Président de l'époque avait jugé qu'il avait porté atteinte au privilège parlementaire et il avait été convoqué à la barre de la Chambre.
Le député a eu l'occasion d'exprimer son point de vue. Il a eu la chance de voter, comme tous les députés. Comme je l'ai dit plus tôt dans mon discours, nous avons affaire ici à un cas de nombrilisme. Parce que le député estime qu'il a travaillé fort pour une cause ou sur un projet de loi particulier, comme bien d'autres gens le font également, il croit avoir le droit d'imposer sa volonté à la majorité. Il n'a pas ce droit. La démocratie le lui interdit. C'est un principe fondamental de la démocratie.
Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement, ce soir: l'honorable député de Acadie--Bathurst, La Société Radio-Canada; l'honorable député de St. John's-Ouest, Les pêches.
Nous reprenons le débat sur la question de privilège. Le député de South Shore a la parole.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, on a soulevé un certain nombre de points à la Chambre aujourd'hui et je voudrais en ajouter plusieurs.
J'ai écouté attentivement le débat et il y a beaucoup de points que j'aurais souhaité ne pas entendre. Cependant, la question est grave. Malheureusement, je n'étais pas présent pour participer au vote la semaine dernière, puisque j'étais aux Pays-Bas pour assister à une importante rencontre internationale sur la biodiversité des forêts. Tous les participants à cette rencontre, y compris les ministres, ont eu la possibilité d'intervenir et cela parce qu'il y avait des règles claires, tout comme c'est le cas dans cette enceinte.
J'ai beaucoup entendu parler des droits des parlementaires, qu'il s'agisse du droit de vote ou qu'il s'agisse de savoir si la masse a plus de droits que les parlementaires. En toute franchise, la question, c'est que le décorum est un droit du Parlement. Il y a des règles dans cette enceinte. Lorsque le Parlement britannique et beaucoup d'autres parlements dans le monde entier ont été établis au départ, les pupitres des ministériels étaient séparés de ceux de l'opposition par un espace représentant la longueur de deux épées afin qu'aucun député d'un côté ou de l'autre de la Chambre ne puisse être attaqué. Nous avons des règles pour ne pas régler nos comptes à l'extérieur d'ici. Nous n'avons plus de duels de nos jours. La raison pour laquelle nous avons des règles, c'est pour prévenir les guerres dans notre pays.
C'est le décorum qui est en jeu en l'occurrence. Le député a violé les règles et il a certes agi de façon contraire au décorum. Il l'a fait d'une façon qui a relégué au second plan la question importante qu'il essayait de soulever.
Nous sommes dégoûtés et consternés par le débat d'aujourd'hui. Le débat ne porte plus sur la décision du gouvernement d'étouffer les initiatives parlementaires. Toute l'attention est centrée sur le député de Esquimalt--Juan de Fuca. C'est une erreur. On ne peut s'excuser puis chercher à expliquer son geste. Lorsqu'on est désolé, on n'essaie pas de justifier ses actions. On présente des excuses, un point c'est tout.
L'affaire est grave. Le député a pris la masse, puis s'est immédiatement excusé, pour faire volte-face le lendemain en disant que son geste était prémédité. Je suppose que ses excuses n'étaient pas très sincères si son geste était prémédité. Le député est sorti de la Chambre.
Il ne peut pas représenter ses électeurs et les Canadiens à l'extérieur de la Chambre. Trop de parlementaires croient pouvoir représenter les Canadiens dans les journaux. Trop de parlementaires croient pouvoir représenter leurs électeurs en contestant la présidence, en refusant de présenter des excuses et en se faisant expulser de la Chambre.
En rapport avec ce débat, je voudrais proposer quelque chose à la présidence. Lorsque des députés sont expulsés de la Chambre, ils devraient emprunter la porte d'en arrière au lieu d'aller tout de suite dans le hall donner un point de presse à toute une ribambelle de journalistes. Si des députés ne peuvent pas reconnaître officiellement ici qu'ils ont commis une erreur, s'en excuser sans détour et passer à autre chose, ils devraient se demander pourquoi ils siègent ici.
Il y a une raison encore plus évidente pour laquelle nous avons des règles. J'ai assisté à un long débat aujourd'hui. J'ai entendu parler de bois d'oeuvre, de techniques médicales et d'hélicoptères. Il me semble que les députés réformistes et d'autres députés se sont déjà prononcés ici contre l'acquisition d'hélicoptères. Je n'approuve pas leur position, mais je ne les ai pas empêchés de voter en ce sens.
J'étais d'accord avec le projet de loi d'initiative parlementaire. Si j'avais été ici et que j'avais pu voter, je l'aurais appuyé. Si je comprends bien, tous les partis d'opposition sans exception ont appuyé le député; pourtant, tous ne se disent pas en faveur d'actions dirigées contre la masse. Dans le présent contexte, il est important d'examiner attentivement les événements qui se sont produits.
De toute évidence, le député a enfreint les règles de la Chambre. Il a présenté des excuses et désire maintenant débattre la question. Pour ma part, je n'ai pas l'intention de continuer à en discuter. Nous avons des affaires plus importantes à traiter.
À plusieurs reprises au cours du débat, il a été question des sommes consacrées aux travaux du Parlement et des comités. On parle de grosses sommes. En effet, il faut de l'argent pour faire fonctionner le Parlement. La démocratie n'est pas bon marché. La plupart des démocraties dans le monde sont nées au prix de terribles effusions de sang et de graves conflits armés.
Si le député désire représenter ses électeurs, je lui recommande de s'avancer et de présenter des excuses pour que nous puissions mettre l'incident derrière nous et poursuivre nos travaux. J'ai entendu bien des commentaires au sujet de l'utilisation de l'argent des contribuables. J'estime que, tant que le député n'aura pas présenté d'excuses, il devrait renoncer à son salaire de parlementaire. Voilà à quoi servent les deniers publics.
À titre de parlementaires, nous vivons une double vie. D'une part, nous sommes des représentants fédéraux au Parlement du Canada, et d'autre part, nous représentons une circonscription. Un député peut faire la moitié du travail de parlementaire, mais l'autre moitié doit se faire sur place, au Parlement.
Je propose que nous considérions l'incident clos. Nous savons tous que le député de Esquimalt--Juan de Fuca peut faire du bon travail en cette enceinte. Ce débat porte sur une question accessoire. C'est une erreur qui nous a fait dévier de la véritable question, à savoir ce qui a donné lieu au débat pour commencer.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Madame la Présidente, il est surprenant de voir que le député de Esquimalt—Juan de Fuca veut s'enfoncer encore davantage aujourd'hui. Je ne sais pas s'il a besoin d'une autre pelle. Il est en train de perdre le respect de députés qui le tenaient en haute estime.
Le député doit s'être procuré une vieille copie du film Mr. Smith Goes to Washington, parce que son comportement s'y apparente. On croirait regarder une reprise de piètre qualité.
Ce qui m'a vraiment choqué, et j'aimerais que le député de South Shore me dise ce qu'il en pense, c'est que le député de Esquimalt—Juan de Fuca a été jusqu'à dire que le Canada était un pays fasciste. Nous associons le fascisme à l'Espagne de Franco, à l'Italie de Mussolini et à l'Allemagne de Hitler. Comment un député peut-il en toute conscience comparer notre pays à ces régimes fascistes?
J'ai eu des projets de loi d'initiative parlementaire qui se sont rendus à l'étape de la deuxième lecture avant que la Chambre ne soit dissoute, et je n'ai pu obtenir que ces mesures fassent l'objet d'un vote au cours de la législature suivante. Je comprends la frustration que le député peut ressentir. La réalité, c'est que nous sommes une institution démocratique. Nous sommes ici et nous avons un gouvernement majoritaire. Un grand nombre de Canadiens ont voté pour le gouvernement. C'est la manifestation ultime d'une démocratie.
Si les autres partis étaient représentatifs de l'ensemble de la population, ils compteraient un plus grand nombre de députés. Ils n'auraient pas obtenu seulement 12 p. 100 des voix. Ce sont les autres partis qui forment le groupe minoritaire.
En ce qui a trait à cette mesure législative, il y a un certain nombre de députés qui ne l'approuvent pas, qui ne croient pas qu'il faille décriminaliser la marijuana. Certaines des personnes que j'ai vu voter contre cette mesure allaient dans l'autre sens. Elles voulaient avoir l'occasion de rejeter cette mesure ici même à la Chambre.
Un certain nombre de députés se sont rangés du côté du député de Esquimalt—Juan de Fuca. Cela signifie-t-il qu'ils ont eux aussi été fouettés? Tout cela est une perte de temps ridicule. Je souhaite que le député de Esquimalt—Juan de Fuca prenne le temps de s'asseoir et de réfléchir. Ramenons l'ordre à la Chambre et concentrons-nous sur nos obligations envers les Canadiens.
M. Gerald Keddy: Madame la Présidente, le député de Durham a demandé qu'on commente les propos sur le fascisme. Je crois que les paroles en question ont été prononcées dans le feu de l'action et j'espère que le député de Esquimalt--Juan de Fuca n'était pas vraiment sérieux. Je crois sincèrement qu'il ne l'était pas, mais je n'aurai pas la prétention de répondre à sa place, étant donné que ce n'est pas du tout mon rôle à la Chambre.
La question de fond que le député a soulevée par rapport aux initiatives parlementaires est très frustrante. Elle l'est doublement lorsque le gouvernement est majoritaire. Les votes sont dictés par le whip et il nous est plus difficile de faire adopter des projets de loi. Nous comprenons tous cela.
Je suis d'accord avec l'argument voulant que le débat se transforme en une véritable perte de temps. On n'insiste plus sur l'objectif premier de la motion, mais sur le député de Esquimalt--Juan de Fuca. C'est faire fausse route, et je suis fort heureux de me rasseoir et de ne plus participer au débat sur cette question.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui appuient l'amendement veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Convoquez les députés.
Et le timbre s'étant fait entendre:
Mme Marlene Catterall: Madame la Présidente, je crois que vous obtiendrez le consentement unanime pour reporter le vote par appel nominal.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
* * *
[Traduction]
La Loi sur le système de justice pénale pour adolescents
M. Gary Lunn (Saanich--Gulf Islands, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-444, Loi modifiant la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents.
--Madame la Présidente, je suis heureux de présenter le projet de loi d'initiative parlementaire qui vise à modifier la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents. Les crimes contre la propriété figurent parmi les infractions les plus répandues dans notre société. Mon projet de loi vise à assurer un juste équilibre entre la nécessité de punir les jeunes qui commettent ce type d'infraction et le fait que de nombreux jeunes contrevenants ne récidivent pas s'ils obtiennent l'aide dont ils ont besoin.
Mon projet de loi propose les mesures suivantes: premièrement, imposer un couvre-feu obligatoire pour tous les jeunes contrevenants condamnés pour entrée par effraction ou invasion de domicile, jusqu'à l'âge de 18 ans, pour une durée d'au moins un an et d'au plus trois ans; deuxièmement, imposer aux récidivistes une peine d'emprisonnement obligatoire d'au moins 30 ans; troisièmement, obliger le parent ou le tuteur d'un jeune contrevenant qui manque aux conditions de sa probation à rapporter le fait, sous peine d'infraction criminelle.
Le projet de loi tient compte du fait que, sans mécanisme d'application de la loi, de nombreuses violations des conditions de probation ne sont pas rapportées et, par voie de conséquence, les jeunes n'obtiennent pas l'aide dont ils ont besoin. Le projet de loi viserait à assurer un juste équilibre entre la punition et la réadaptation. J'encourage tous les députés à appuyer ce projet de loi et à me faire part de leurs questions et préoccupations.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
Le Code criminel
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-445, Loi modifiant le Code criminel (protection de l'enfant avant sa naissance).
--Madame la Présidente, le syndrome d'alcoolisation foetale est l'un des problèmes les plus dévastateurs dans notre pays à l'heure actuelle. Des dizaines de milliers d'enfants naissent avec ce problème, qui pourrait être évité. En fait, le syndrome d'alcoolisation foetale est la principale cause de lésions cérébrales évitables chez les enfants.
Le projet de loi vise à prévenir le syndrome d'alcoolisation foetale en faisant en sorte qu'une femme enceinte qui consomme des substances nuisibles pour son foetus et qui refuse toute forme de traitement puisse être placée contre son gré dans un établissement de traitement, pour sa propre protection, mais surtout pour la protection de son foetus. Le projet de loi vise uniquement les femmes qui ont choisi de mener leur grossesse à terme et n'a rien à voir avec l'avortement.
Ce projet de loi repose sur le pouvoir qu'ont les médecins de placer dans des établissements de traitement, si nécessaire et contre leur volonté, des personnes qui sont dangereuses pour elles-mêmes ou pour leur entourage. Le projet de loi donnerait aux dispensateurs de soins et au personnel médical, en particulier les médecins, le pouvoir d'agir de la sorte pour la protection de la femme et pour faire en sorte qu'aucun enfant ne naisse avec ce terrible problème que constitue le syndrome d'alcoolisation foetale.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
Loi sur la protection d'espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial
M. Keith Martin (Esquimalt--Juan de Fuca, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-446, Loi modifiant la Loi sur la protection d'espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial.
--Madame la Présidente, le Canada est reconnu comme l'un des grands centres de trafic des espèces en péril dans le monde. En fait, les Canadiens seraient sûrement choqués d'apprendre cela. En tolérant la situation, nous contribuons à la disparition d'espèces menacées provenant des quatre coins du monde, notamment du tigre de Sibérie, du tigre de Bengale, du rhinocéros de Java, et j'en passe.
Le projet de loi porte sur le contrôle du commerce international des espèces sauvages. Il prévoit des licences d'importation et d'exportation dans le but de garantir que le pays autorisant l'échange commercial émette des licences. Il veille à ce que la protection accordée aux espèces sauvages en transit soit améliorée et à ce que les soins appropriés soient offerts. Il exige la tenue de registres complets, conformément à nos obligations aux termes de la CITES. Il prévoit le marquage obligatoire des spécimens importés et exportés. Il prévoit aussi la création, au sein du ministère de l'Environnement, d'une organisation chargée de veiller au respect des obligations que nous avons contractées aux termes de la Convention sur le commerce international des espèces menacées d'extinction.
Ce projet de loi nous aidera grandement à respecter nos obligations aux termes de la CITES. Il nous aidera aussi à mettre un terme à cette situation intolérable qui fait du Canada l'un des éléments contribuant au trafic des espèces menacées.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
La Loi de l'impôt sur le revenu
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) demande à présenter le projet de loi C-447, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu.
--Madame la Présidente, le projet de loi vise à modifier la Loi de l'impôt sur le revenu pour faire en sorte que les amendes et les prélèvements visant les entreprises ne soient plus déductibles d'impôt.
Le projet de loi trouve son origine dans un arrêt de la Cour suprême qui a permis que les amendes et les prélèvements imposés aux entreprises soient déductibles d'impôt puisque celles-ci ont fait l'objet des amendes et des prélèvements en cause en exerçant leur activité et en tentant d'obtenir un revenu.
La plupart des Canadiens conviendront que le Parlement n'a jamais eu l'intention de permettre une telle situation. L'amende n'aurait plus d'effet dissuasif si elle pouvait être déductible d'impôt. Je ne puis déduire de mon revenu mes contraventions pour stationnement interdit. Nous ne croyons pas qu'une entreprise devrait pouvoir déduire une amende de son revenu.
J'espère que le projet de loi sera largement appuyé par les députés.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
M. Peter Adams: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je vous serais reconnaissant de bien vouloir demander le consentement unanime pour que l'on revienne à la présentation de rapports de comités. J'ai un rapport dont les autres partis connaissent l'existence.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
* * *
Les comités de la Chambre
Procédure et affaires de la Chambre
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter le 52e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres et des membres associés de quelques comités.
Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption du rapport maintenant.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
Pétitions
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Madame la Présidente, j'ai l'insigne honneur de présenter une pétition importante signée par des milliers d'autochtones du Manitoba.
Les pétitionnaires rejettent le projet de gouvernance proposé par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, car ils le considèrent comme une tentative à peine voilée de réduire, voire d'anéantir leurs droits inhérents et les droits que leur confèrent les traités.
Les pétitionnaires soulignent en outre que le soi-disant processus de consultation entourant ce projet de gouvernance des premières nations est une fumisterie. Ils ne sont pas convaincus que ce processus corresponde véritablement à la définition officielle de la notion de «vastes consultations». Et ils comptent bien faire signer cette pétition par beaucoup plus de personnes que le ministre ne réussira à joindre pendant son processus de consultation.
M. Gary Lunn: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Quand je suis intervenu au sujet de mon projet de loi, j'ai apparemment parlé d'une peine maximale de 30 ans. J'ai voulu dire 30 jours. Je demande le consentement unanime de la Chambre pour modifier le compte rendu en ce sens.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Très bien.
* * *
[Français]
Questions au Feuilleton
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je suggère que toutes les questions soient réservées.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
Initiatives ministérielles
[Initiatives ministérielles]
* * *
[Traduction]
Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-15B, Loi modifiant le Code criminel (cruauté envers les animaux et armes à feu) et la Loi sur les armes à feu, soit lu pour la troisième fois et adopté; et de l'amendement; et du sous-amendement.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Madame la Présidente, l'amendement propose de renvoyer le projet de loi au comité qui devra en faire rapport dans un certain délai. Cette motion s'impose afin d'ajouter foi aux paroles de l'ancienne ministre de la Justice qui a dit que ce qui est légitime aujourd'hui sera légal demain en vertu du projet de loi.
On a signalé un certain nombre de problèmes qui suscitent de l'inquiétude. Il y a tout d'abord l'ampleur de l'infraction et l'élimination de moyens de défense très précis dans le cadre de la loi. J'ai entendu des gens dire maintes et maintes fois que les moyens de défense prévus à l'article 8 sont maintenant applicables et que les moyens de défense prévus à l'article 429 ne sont plus nécessaires. Or, les moyens de défense prévus à l'article 8 ont toujours été applicables. En ce qui concerne ces infractions particulières concernant la propriété, l'article 429 établit certains moyens de défense précis. On les a prévus pour une certaine raison.
Si nous éliminons ces moyens de défense à l'égard d'infractions concernant les animaux, il s'est clairement produit un changement substantiel. Pour faire en sorte que cela n'arrive pas, et comme l'ancienne ministre l'a dit elle-même il y a quelque temps, c'est-à-dire que ce qui est légitime aujourd'hui sera légal demain, nous avons besoin que ces moyens de défense figurent dans la nouvelle partie où se trouveront ces infractions.
Autre point: lorsqu'une personne est inculpée d'une infraction au Code criminel, il faut que les choses soient claires. L'infraction même doit être claire. Inculper une personne en vertu du Code criminel lorsque l'infraction n'est pas claire, ce n'est pas respecter les principes de la justice, ni rendre service à l'administration de la justice. Cette infraction-ci n'est pas claire, et les défenses qu'on peut invoquer ne sont pas claires non plus.
Je le réaffirme, l'Alliance canadienne est favorable à des peines plus lourdes pour punir la cruauté envers les animaux, mais nous sommes très inquiets à l'idée qu'on puisse créer une responsabilité criminelle là où il n'y en a aucune. Le gouvernement a tendance à proposer des lois qui font bon marché de la notion d'intention coupable, pourtant nécessaire pour obtenir une condamnation. En latin, c'est l'expression mens rea qui traduit cette notion. Dans notre régime parlementaire et notre système de justice, l'intention coupable est un élément essentiel pour tout acte criminel. Il faut que cela soit clair.
Un dernier point pour finir. Des personnalités éminentes comme Pierre Berton ont fait valoir avec éloquence que le projet de loi nuira à nos chercheurs scientifiques. Les progrès que nous avons accomplis dans les soins de santé n'ont pas été sans mal, et il a fallu se servir des animaux. Nous voulons qu'on puisse continuer à utiliser les animaux pour mieux préserver la santé des Canadiens. Nous ne voulons pas qu'ils soient utilisés de façon cruelle ou inacceptable. Les spécialistes de la santé et les chercheurs doivent pouvoir compter sur la protection de la loi.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Avant la reprise du débat, je tiens à m'assurer que tous ont compris que, tout à l'heure, le vote a été reporté à la demande du leader du gouvernement à la Chambre. Précisons qu'il a été reporté à demain soir, après l'ordre du jour.
[Français]
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Madame la Présidente, je prends la parole aujourd'hui pour établir la position du Bloc québécois sur le présent sous-amendement.
Nous sommes d'avis qu'il est grand temps d'agir dans le dossier de la cruauté envers les animaux, mais pas si cela signifie de le faire de manière précipitée.
Il est vrai que la cruauté envers les animaux est un problème sérieux qui mérite que nous nous y attardions. Nous l'avons dit, ce sont des actes d'une violence horrible commis volontairement, alors que les animaux ne peuvent pas se défendre et ne peuvent pas faire reconnaître leurs droits.
Il faut dire que le Bloc québécois est contre le projet de loi C-15B pour deux principales raisons, à savoir le manque de protection pour les activités légitimes envers les animaux et parce que d'importants pouvoirs sont retirés au contrôleur des armes à feu.
Cela étant dit, nous sommes favorables au sous-amendement qui vise à établir une limite de temps pour l'étude approfondie des dispositions du projet de loi C-15B concernant les moyens de défense. Bien que nous soyons favorables à la création d'une nouvelle partie qui institue un concept innovateur changeant la notion d'animal en tant que bien, nous sommes opposés à ce que cela entraîne des répercussions importantes et négatives pour tous ceux qui oeuvrent légitimement dans le domaine de l'élevage, de la chasse et de la recherche.
La modification est importante, mais elle ne doit pas se faire au détriment des autres. Il est vrai que nous ne regarderons plus les animaux de la même façon qu'avant. Je ne voudrais pas, par contre, que cette innovation change la vie de ceux qui oeuvrent depuis un grand nombre d'années à l'élevage, à la recherche scientifique ou au domaine sportif.
C'est ainsi que le sous-amendement vient établir un échéancier pour que le Comité permanent de la justice et des droits de la personne fasse rapport à la Chambre en ce qui a trait à l'étude approfondie de l'article 8 du projet de loi C-15B.
Le Bloc québécois est favorable à ce sous-amendement en ce qu'il établit une éventualité raisonnable de revoir avec soin et minutie l'article 8 du projet de loi C-15B. Cet article définit les balises de la protection des activités légitimes dans le domaine de l'industrie animalière.
Le projet de loi C-15B suscite de vives controverses. Une de ces controverses est le manque flagrant de protection de ces activités légitimes de l'industrie animalière. Comme nous l'avons déjà dit, nous ne pouvons appuyer le projet de loi C-15B tel qu'il est présentement rédigé.
Les moyens de défense spécifiques prévus à l'article 429 du Code criminel, qui protègent actuellement et explicitement les éleveurs, les chasseurs, l'industrie animalière et les chercheurs, ne se retrouvent pas dans la nouvelle partie V.1 du Code criminel.
Le but premier de ce projet de loi aurait dû être l'augmentation des peines pour toute activité répréhensible et violente. D'ailleurs, le terme «cruauté» est clair à cet effet. À une offense cruelle, la sanction doit être assez sévère pour dissuader ceux qui y songent. Or, ce n'est pas le cas dans le projet de loi C-15B, car l'ensemble des actes violents, qu'il soit question de cruauté ou non, sont visés. Cela est inacceptable.
En comité, on nous a dit que ce n'était pas de l'intention du gouvernement de priver les activités légitimes de l'élevage, de la chasse et de la recherche de la protection à laquelle elles ont droit. Or, la protection est prévue expressément à l'article 429 du Code criminel actuel, mais ne l'est pas à l'article 8 du projet de loi.
Je me demande alors pourquoi lesdites protections de l'article 429 du Code criminel ne sont pas réitérées à la nouvelles partie V.1 du Code criminel. Ce n'est tout simplement pas logique.
À plusieurs occasions, lors des audiences du comité, on a présenté plusieurs amendements à cet effet. Ils ont tous été rejetés. Il est donc temps de revenir et regarder spécifiquement ces moyens de défense prévus, et qui devraient être prévus à l'article 8.
Nous pouvons nous poser des questions sur le véritable intérêt qui dirige le gouvernement actuellement. Pourquoi ne pas reprendre ce qui est là depuis fort longtemps?
Le Bloc québécois a déposé des amendements à cet effet, mais ils ont tous été rejetés, comme je l'ai mentionné précédemment. Nous sommes d'avis qu'il est essentiel de protéger les animaux et qu'il existe une urgence certaine face à cette situation. Néanmoins, il est important de prendre les mesures appropriées et prudentes pour parvenir à satisfaire tous les intervenants. Cela est possible et réalisable.
Comme je l'ai dit précédemment, nous sommes en faveur de la création d'une nouvelle partie au Code criminel qui se consacrera désormais à la protection des animaux, en leur accordant une nouvelle dénomination et une nouvelle valeur légale. Nous ne pouvons, par contre, accepter que cela se fasse en ne respectant pas les modalités de protection qui s'appliquent actuellement, les droits de défense prévus à l'article 429 du Code criminel.
Ceci équivaut à ne pas respecter les hommes et les femmes qui oeuvrent dans ce domaine depuis de nombreuses années. Le fait de ne pas inclure un moyen de défense qui est en vigueur présentement est déconcertant et inquiétant.
Est-ce que cela veut dire que nous ne pouvons plus nous fier à nos lois? Est-ce que cela veut dire que des activités normales deviendront bientôt illégales? Selon ce que nous lisons, oui, c'est le cas.
Je m'interroge ainsi sur la vision que le gouvernement a choisie. Si cela veut dire que nos activités légitimes deviennent désormais fragiles, je suis inquiet. Je suis inquiet et déçu. Il me semble que nous possédons aujourd'hui tous les outils nécessaires pour créer une méthode qui punirait les délinquants, tout en protégeant les éleveurs, les chasseurs et les chercheurs. D'après ce que je vois, cela est loin d'être complet et global, comme cela peut l'être.
Je l'ai déjà dit et je le répète: le fait de ne pas inclure les moyens de défense du paragraphe 429(2) du Code criminel dans la nouvelle partie V.1 aura pour effet de priver de la protection actuellement accordée ceux qui légitimement et légalement tuent des animaux ou leur causent de la douleur.
Or, l'article 429 du Code criminel stipule que la justification ou l'excuse légale et l'apparence de droit accordent une protection spécifique à quiconque participe à une activité légitime et légale. Je crois qu'il est essentiel d'incorporer ces balises précises dans les dispositions de la partie V.1 du Code criminel.
Selon l'ancienne ministre de la Justice, le paragraphe 8(3) du Code criminel devrait recevoir application. Je n'en crois rien. Une telle affirmation fait preuve d'une intention incomplète et nettement insuffisante. Toujours selon les intervenants du ministère de la Justice, il paraîtrait que les défenses de justification ou d'excuse légale ou d'apparence de droit sont implicites à l'article 8. C'est complètement illogique. On ne peut passer de modalités spécifiques et expresses pour une application implicite, sans causer de heurts.
C'est pourquoi le Bloc québécois insiste sur le fait qu'il faut donc absolument réitérer spécifiquement ces moyens de défense, actuellement énoncés au Code criminel, dans la nouvelle partie V.1 du Code criminel. De plus, nous sommes d'avis que le fait de retourner à l'étude de cet aspect en comité est de bonne augure.
Cette révision s'imposait depuis fort longtemps. Alors, pourquoi être hâtif et désordonné lorsque vient le temps d'agir? Il faut donc étudier tous les tenants et aboutissants des nouvelles dispositions dans le but de s'assurer que la portée du projet de loi C-15B est logique par sa nature. Il est également nécessaire d'agir de la sorte pour s'assurer que le projet de loi C-15B répond véritablement aux besoins de toutes les parties.
C'est ainsi que nous favorisons la mise en place d'une protection accrue à l'égard des animaux, de même que l'incorporation explicite de la protection des activités légitimes de l'industrie animalière, sportive et de recherche.
Il nous semble évident que le projet de loi C-15B, en vertu de son libellé actuel, causera des inconvénients sérieux aux éleveurs, aux chasseurs, aux chercheurs médicaux et scientifiques et à toute l'industrie animalière. Il faudra donc agir de façon complètement démocratique en comité, afin de faire valoir tous les tenants et aboutissants de cette problématique qu'est la cruauté envers les animaux.
Il y aurait lieu de réévaluer les données qui entourent ce phénomène de violence intolérable. Il faudra alors nous assurer qu'il ne pourra y avoir d'interprétations conflictuelles possibles des nouvelles dispositions.
C'est notre rôle de parlementaires qui le veut ainsi. Le fait de demander au comité de se prononcer avant la période estivale démontre que nous faisons preuve de diligence en tant que parlementaires, puisque nous considérons ce fléau comme nécessitant notre intervention de façon sérieuse et urgente.
Je demande à ce gouvernement, au ministre de la Justice, ainsi qu'à son secrétaire parlementaire de regarder et d'accepter cette motion pour qu'on puisse étudier de façon concrète les moyens de défense que je demande d'inclure explicitement, qui n'enlèvent rien audit projet de loi, mais qui sécuriseront tous les intervenants de l'industrie animalière.
[Traduction]
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Madame la Présidente, j'ai l'intention de faire quelques brèves remarques sur le sous-amendement proposé par le député de Selkirk--Interkake portant que le comité devrait faire rapport à la Chambre au plus tard le 21 juin.
Le projet de loi C-15B a été étudié en comité. Le Nouveau Parti démocratique s'est prononcé en faveur de cette mesure. Nous avons appuyé la mesure législative déposée par le gouvernement en vue de modifier les articles du Code criminel portant sur la cruauté envers les animaux et les articles de la Loi sur les armes à feu qui rendent l'administration de la loi et du système d'enregistrement des armes à feu plus facile d'accès.
Les dispositions du projet de loi C-15B portant sur la cruauté envers les animaux retireraient les infractions portant sur la cruauté envers les animaux de la section des crimes contre la propriété du Code criminel et créeraient une section distincte à cet effet. C'est un changement conceptuel que notre caucus a appuyé tout au cours du processus. Au lieu de traiter les crimes contre les animaux comme des crimes contre les biens, le projet de loi conférerait un statut particulier aux animaux, les considérant comme des créatures capables de sentir la douleur.
Les préoccupations portant sur les répercussions possibles du projet de loi C-15B sur les électeurs des régions rurales et du Nord ont été en grande partie apaisées au cours de l'étude qui en a été faite. Les amendements proposés par l'ancienne ministre de la Justice et appuyés par le caucus du NPD tenaient compte des préoccupations soulevées par les agriculteurs, les pêcheurs, les chasseurs et les trappeurs qui craignaient de faire l'objet de poursuites frivoles ou de harcèlement. Aux termes du projet de loi C-15B, ils auraient droit à bon nombre des défenses qui leur sont conférées par le code actuel.
Un bon nombre des groupes de défense des animaux se préoccupent de la formulation du texte portant sur l'abandon des animaux. Les amendements proposés dernièrement par le gouvernement parlaient d'intention et d'imprudence. Selon la Société protectrice des animaux, cela rendrait difficile la poursuite pour une accusation d'abandon.
Le projet de loi C-15B n'aurait pas de conséquence sur les pratiques ordinaires de l'industrie, ni sur l'utilisation légitime des produits animaliers par la société. Aux termes du projet de loi, les services de police et les sociétés pour la prévention de la cruauté envers les animaux seraient en mesure de poursuivre plus facilement les délits de cruauté envers les animaux.
La partie du projet de loi qui porte sur la Loi sur les armes à feu modifie le système d'enregistrement des armes à feu. Les modifications proposées visent à rendre le système plus accessible et mieux adapté aux demandes des utilisateurs. Divers groupes de lobbyistes ont protesté vivement, disant qu'un tel système ne devrait même pas exister. Cependant, le groupe des utilisateurs d'armes à feu, groupe consultatif formé par le gouvernement, a semblé satisfait des modifications et des améliorations apportées au système. D'autre part, la Coalition pour le contrôle des armes à feu ne s'est pas opposée aux amendements.
Quand le Comité de l'agriculture s'est rendu au Nouveau-Brunswick, le mois dernier, nous avons eu l'occasion de visiter le centre d'enregistrement des armes à feu à Miramichi. Nous avons eu le plaisir de voir à l'écran l'image du député de Selkirk--Interlake. Nous avons été heureux d'apprendre que sa demande était agréée et que son permis avait été mis à la poste la veille. Je suis certain qu'il le montre avec fierté à tous ses amis de Selkirk--Interlake.
Je termine sur une note triste et troublante en rappelant la décision rendue la semaine dernière par un tribunal de Toronto. Deux jeunes gens ont obtenu ce qui semble être, comme l'éditorial du Globe and Mail l'a signalé, des sentences extraordinairement bénignes pour avoir tué et mutilé un chat, et avoir enregistré le tout sur bande vidéo à des fins artistiques. Les défenseurs des animaux ont été scandalisés de voir qu'un de ces jeunes a reçu une peine d'emprisonnement de 90 jours à purger les fins de semaine et que l'autre était libre en raison du temps déjà passé en prison. On pense en général que le juge aurait pu être plus sévère. Les deux jeunes reconnus coupables savaient parfaitement ce qu'ils faisaient quand ils ont volé un chat de compagnie en bonne santé et lui ont infligé des souffrances indescriptibles en l'écorchant vif, en le disséquant et en lui exorbitant un oeil.
Il était aussi évident au tribunal que les deux accusés n'étaient aucunement gênés par la loi dans sa forme actuelle. Celle-ci remonte à 110 ans. La peine d'emprisonnement maximale pour un acte de cruauté envers les animaux, aux termes de cette loi, est de six mois.
Voici ce qui est écrit dans l'éditorial du Globe and Mail d'aujourd'hui:
Le projet de loi C-15B, qui a franchi l'étape de la deuxième lecture à la Chambre des communes, porterait cette peine maximale à cinq ans. Il prévoit également l'interdiction à vie de posséder un animal et une amende maximale de 10 000 $. |
Ces modifications utiles, attendues depuis longtemps, dénotent un changement radical dans l'attitude du public à l'égard des animaux au cours de la dernière décennie. De plus, il est bien prouvé que la cruauté envers les animaux n'est pas un crime banal, mais une première manifestation d'un comportement plus grave et plus aberrant. |
Mais on ne le dirait pas, d'après la résistance qu'opposent certains députés alliancistes et conservateurs au projet de loi. Pour eux, ces nouvelles mesures législatives sont une atteinte sinistre aux droits des agriculteurs, des exploitants de ranchs, des chasseurs et des autres personnes respectueuses des lois qui sont en contact avec des animaux. |
C'est faux. Selon les modifications proposées, la cruauté envers les animaux fera l'objet d'une section précise du Code criminel. Et au cas où les critiques l'aurait oublié, pour qu'il y ait crime, il doit y avoir intention. |
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, plusieurs déclarations ont été faites par les députés au cours de la dernière semaine de débat. Je suis heureux de pouvoir apporter quelques éclaircissements.
Premièrement, je parlerai du statut des animaux en tant que biens. L'un des députés a dit que, aux termes du Code criminel, les animaux étaient traités comme un bien. Le député a dit qu'enlever les dispositions concernant la cruauté de l'article du Code criminel portant sur les biens conférerait un statut élevé, voire même des droits, aux animaux.
En fonction du droit constitutionnel, ce sont les provinces plutôt que le fédéral qui sont responsables du droit de propriété et des droits civils. Rien dans le projet de loi C-15B ne modifierait la législation ou les règles de la common law régissant les biens, qui, pour la plupart, ont été élaborées par les provinces.
La capacité des êtres humains de posséder des animaux est bien établie dans la common law. Rien dans le projet de loi C-15B ne modifierait le statut des animaux en tant que bien. Enlever ces dispositions d'une partie du Code pour les mettre dans une autre partie ne modifierait pas le statut des animaux. Il est tout à fait trompeur de suggérer que le statut des animaux serait rehaussé.
Il est extrêmement important de souligner que la loi dit que la société a intérêt à protéger tous les animaux, qu'ils appartiennent à quelqu'un ou non, contre la douleur, la souffrance et les blessures infligées sans nécessité ou contre la négligence criminelle. Cela n'a rien de nouveau. C'est dans le Code criminel depuis 1953. Le Code renferme des dispositions concernant la cruauté depuis 1892.
Les importantes modifications apportées par le projet de loi C-15B en ce qui concerne la cruauté envers les animaux sont doubles. Elles renforceraient les peines. Et elles réorganiseraient les dispositions afin de tenir compte des aspects physiques et mentaux des infractions relatives à la cruauté intentionnelle et à la négligence criminelle.
Deuxièmement, je vais parler de la notion voulant que le projet de loi C-15B entraverait la lutte antiparasitaire et l'industrie en général. Il a beaucoup été question de cela aujourd'hui à la Chambre. On a dit que le projet de loi C-15B empêcherait les agriculteurs d'empoisonner ou de tuer les parasites. Les critères pour établir la responsabilité aux termes du projet de loi C-15B ne changeraient pas même si les dispositions étaient réorganisées et modernisées. Les dispositions concernant l'élimination ou l'empoisonnement d'animaux sans excuse légitime seraient maintenues. Les excuses légitimes seraient maintenues, car tuer des animaux, entre autres, pour se nourrir ou parce qu'ils sont des parasites est depuis longtemps admis par la common law et continue à être admis par la jurisprudence, les lois, les règlements, les codes de conduite et autres.
Il est également inexact de dire que les agriculteurs ne pourraient pas tuer les animaux blessés pour mettre fin à leurs souffrances. Aux termes du projet de loi C-15B, les critères de responsabilité ne seraient pas modifiés. Le projet de loi C-15B ne rendrait pas illégales les pratiques qui, actuellement, répondent aux exigences de la loi en ce qui concerne la souffrance et la douleur gratuites ou la négligence criminelle.
Troisièmement, je parlerai du critère applicable à la négligence. Un député a dit qu'en vertu du projet de loi C-15B, le critère serait celui de la négligence civile. Ce n'est pas vrai. Le paragraphe 182.3(2) précise expressément qu'il s'agit de négligence criminelle. Il précise que le comportement de l'accusé doit s'écarter de façon marquée du comportement normal qu'une personne prudente adopterait dans des circonstances similaires. La Cour suprême du Canada a dit expressément que, dans toute situation où il existe une possibilité d'emprisonnement, la Constitution exige que l'on adopte un critère de négligence criminelle plutôt que de négligence civile.
Quatrièmement, je vais parler de la prétendue vulnérabilité des gens aux poursuites vexatoires. Des députés ont prétendu que le projet de loi C-15B rendrait l'industrie plus vulnérable aux poursuites vexatoires de la part des activistes pour la protection des droits des animaux. Parallèlement, ils se sont plaints du fait que le mécanisme de sélection proposé dans le projet de loi C-15A exposera les personnes accusées aux coûts liés à l'embauche d'un avocat.
On ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre. Le Code criminel comprend présentement bon nombre de mécanismes de sécurité permettant au substitut du procureur général d'intervenir et, au besoin, de suspendre une poursuite entreprise par une personne autre qu'un agent de la paix ou un fonctionnaire.
Le projet de loi C-15A accorde cette protection à un stade beaucoup plus précoce du processus, même avant que soient portées des accusations contre la personne susceptible d'être en cause. Ce processus n'est pas une instruction préliminaire. C'est un processus de sélection dans le cadre duquel le juge ou un juge désigné doit avoir la conviction qu'il y a des motifs suffisants d'agir avant que l'accusé soit même tenu de se présenter au tribunal.
Ce processus oblige le substitut du procureur général à évaluer dans les meilleurs délais la vigueur de la cause et à recommander au juge d'aller de l'avant dans cette affaire uniquement s'il y a des motifs suffisants de le faire. Un des aspects importants dont le substitut du procureur général tiendra compte au moment de faire sa recommandation au tribunal, c'est celui de savoir s'il est ou non dans l'intérêt du public d'aller de l'avant, un aspect très important.
Ensuite, je traiterai de ce qui a été dit au sujet de l'article 429 et de son absence, de l'idée selon laquelle il n'y a pas eu de défenses fondées sur le paragraphe 429(2) dans les cas de cruauté, parce que leur existence même empêche l'État d'intenter des poursuites.
Les représentants de la Canadian Criminal Lawyers Association ont confirmé dans leur témoignage devant le comité que supprimer la disposition sur la cruauté de la partie XI du Code criminel n'enlèverait aucun moyen de défense dont disposent les accusés. Tous les moyens de défense prévus dans le paragraphe 429(2), qui pourraient concerner les cas de cruauté envers les animaux et être accessibles aux termes du paragraphe 429(2), sont tout autant accessibles en vertu du paragraphe 8(3) du Code criminel.
Il est tout simplement faux de dire que l'existence de moyens de défense met obstacle aux poursuites. La jurisprudence a clairement confirmé qu'il n'incombe pas à la poursuite de réfuter tous les moyens de défense pertinents dans son argumentation. Une fois que la poursuite a confirmé tous les éléments de l'infraction hors de tout doute raisonnable, l'accusé a le fardeau de soulever un doute sur un des éléments de l'infraction. Si l'accusé le fait, la poursuite doit alors réfuter le moyen de défense hors de tout doute raisonnable. Cela est très important.
La dernière question dont je voudrais parler concerne la définition d'«animal». Cette définition ne figure pas dans les dispositions actuelles concernant la cruauté envers les animaux. Actuellement, les tribunaux sont libres d'interpréter ce terme dans son sens habituel, d'où une interprétation suffisamment large pour que le terme comprenne la majorité, sinon la totalité, du monde animal et, certes, de nombreux invertébrés. Une définition est insérée dans le projet de loi par souci de clarté.
D'un point de vue scientifique, les vertébrés sont généralement considérés comme étant dotés de systèmes nerveux suffisamment développés pour qu'ils ressentent de la douleur. En tant que groupe, ils bénéficient donc tous de la protection de la loi. Mais certains invertébrés possèdent un système nerveux développé et peuvent donc eux aussi ressentir de la douleur.
Il serait arbitraire de priver certains animaux d'une protection permanente et absolue parce qu'ils sont classés dans la catégorie des invertébrés. Le projet de loi C-15B crée un mécanisme qui permet à la poursuite d'agir dans les cas appropriés. Le fardeau qui doit incomber à la poursuite est d'établir la preuve hors de tout doute raisonnable.
Au Canada, trois provinces possèdent dans leur loi respective une définition d'«animal» plus large que celle qu'on trouve dans le projet de loi C-15B. Jusqu'ici, rien n'indique que la définition utilisée dans ces provinces a entraîné un recours abusif à la loi.
Je suis très heureux d'avoir pu corriger quelques-unes des informations présentées au cours du débat.
M. Peter MacKay (Pictou--Antigonish--Guysborough, PC): Madame la Présidente, je saisis l'occasion de corriger certaines des inexactitudes lancées par le secrétaire parlementaire qui, je me permets de l'ajouter, représente une circonscription rurale. Je dois dire que j'ai été très surpris de sa ténacité à protéger la mesure législative extrêmement interventionniste de son gouvernement, qui aura des effets pervers sur nombre de gens concernés par l'élevage des animaux.
Dans sa définition juridique, il a utilisé plusieurs maximes juridiques que je décrirais comme étant tout à fait évidentes. Il a dit que les poursuites seraient laissées à la discrétion des procureurs. Évidemment. Il a dit que la justification ou l'excuse légale et l'apparence de droit n'auraient pas à être réfutées par la poursuite. Bien évidemment. Le fait est qu'en retirant les animaux de l'article du Code criminel visant les biens, on retire le moyen de défense explicitement énoncé dans les dispositions actuelles du Code criminel délimitant la justification ou l'excuse légale et l'apparence de droit pour les utilisateurs d'animaux et les intervenants de l'industrie animalière, un moyen de défense sacro-saint.
Il est juste de dire que la position du gouvernement vise encore une fois à élargir le fossé entre le Canada rural et urbain. Je parlerais d'une différence culturelle de comportement à l'égard des animaux.
Le Parti progressiste-conservateur estime que nous avons absolument besoin d'une mesure législative visant à protéger les animaux. Dans ce sens, nous devons à tout prix mettre à jour et moderniser certaines dispositions du Code criminel. Toutefois, il est tout à fait honteux d'affirmer qu'il faut aller jusqu'à cesser de traiter les animaux comme des biens. Les animaux sont beaucoup mieux protégés en vertu de cette définition du mot «biens», car, en effet, qui d'autre que les propriétaires d'animaux et les intervenants de l'industrie animalière, dont le gagne-pain dépend des animaux, a un plus grand intérêt dans la protection des animaux?
Je suis surpris de voir l'appui que cette mesure reçoit de la part de députés comme celui de Malpeque et d'autres députés ministériels qui représentent des circonscriptions rurales. Ils doivent se sentir très mal à l'aise de voir le whip leur ordonner de voter en faveur de la mesure législative. C'est pourtant un scénario que nous avons vu se répéter maintes et maintes fois.
La question de la cruauté en est une qui suscite de vives émotions, une qui fait réagir fortement la plupart des Canadiens sinon tous. Les exemples qu'on a donnés d'animaux qui ont été traînés derrière des voitures, grillés sur le barbecue ou écorchés vifs sont choquants pour tout le monde. Certains groupes d'intérêts et certains ministériels ont monté une campagne très efficace pour dépeindre quiconque s'oppose à cette mesure législative comme étant en faveur de la cruauté envers les animaux. C'est absolument faux et tout à fait contraire aux déclarations que j'ai faites.
Les gens du ministère de la Justice qui ont rédigé cette mesure législative ont été très habiles pour faire valoir leur point en laissant entendre que cette mesure n'aura aucune incidence et que les poursuites continueront de se faire de la même façon qu'avant. Il n'y a rien qu'on ne puisse pas faire, que ce soit du point de vue de l'intention, du point de vue des pouvoirs des policiers, du point de vue des poursuites ou du point de vue de ceux qui veulent accroître la protection des animaux, en laissant ces dispositions, plus les amendements, dans la partie du Code criminel portant sur les biens.
Cette mesure sans précédent visant à retirer les animaux de la partie concernant les biens ouvre une boîte de Pandore qui met en danger les chasseurs, les agriculteurs, les scientifiques et tous ceux qui gagnent leur vie en travaillant avec les animaux. Je dirais que cette mesure vise particulièrement les agriculteurs qui s'adonnent à certaines pratiques comme le marquage au fer et la castration.
Nous devons être très honnêtes. Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur le fait que les animaux sont une source de nourriture et doivent donc être abattus à l'occasion. Il y a des rites religieux qui exigent le sacrifice d'animaux. Je m'empresserais d'ajouter que la recherche scientifique constitue souvent une violation des droits d'un animal. Cependant, voyons cela de façon très pragmatique: c'est pour le bien de la population en général.
Je le dis sans sarcasme aucun; nous sommes au sommet de la chaîne alimentaire. Des scientifiques cherchent de nouveaux traitements et de nouveaux remèdes à des maladies humaines. Ils s'adonnent à certaines expériences génétiques dans l'espoir de guérir certaines des horribles maladies qui frappent l'homme. Il faut accorder une certaine priorité à ces actes très légitimes et très légaux.
L'aspect de la propriété des animaux et de l'usage qu'on en fait ont été très importants tout au long du débat. Nous avons entendu un certain nombre d'intervenants du secteur industriel de même que des députés d'en face qui ont fait valoir leur point de vue de façon très stridente. L'article important qui permet à l'heure actuelle que soient posés des actes ayant une justification légale ou un prétexte légal ou l'apparence de la légalité demeure, comme il se doit, dans la partie concernant la propriété.
Nous partageons les préoccupations exprimées par des Canadiens sur le peu de sévérité des peines qui sont parfois imposées. J'insiste à nouveau sur le fait qu'il faut alourdir les peines et permettre aux juges d'imposer des peines qui reflètent davantage l'horreur qu'inspire aux Canadiens la violence faite aux animaux et aux humains. Comme l'ont dit d'autres députés, il existe manifestement un lien entre la violence faite aux animaux et celle qui est faite aux humains. On commence par agresser des animaux et on agresse ensuite des humains. C'est indéniable.
Si nous voulons vraiment dissuader les criminels et protéger la population, il nous faut un plus grand éventail de peines. On peut l'obtenir et on l'obtient effectivement grâce à des parties du projet de loi, mais j'estime que cela nuit à tout le processus. On le voit encore et encore. C'est peut-être pour cela que l'ancienne ministre de la Justice qualifiait son propre ministère de pire étude d'avocats au monde, parce qu'il n'arrive pas à bien formuler le projet de loi. Celui-ci ne semble pas tenir compte des intérêts des Canadiens des régions rurales, qui doivent travailler tous les jours avec des animaux.
Ne nous leurrons pas sur ce qui arrivera si la Couronne ou un intervenant du secteur privé intentent des poursuites contre un particulier qui s'adonne légitimement à des activités qui pourraient être considérées comme cruelles pour des animaux, tel le marquage au fer. Cette personne sera aux prises avec un système qui peut durer des mois et coûter des centaines sinon des milliers de dollars. Des délais pareils et une telle ingérence dans le gagne-pain d'une personne pourraient fort bien mener celle-ci à la faillite et à la perte de sa réputation.
N'allons pas dire que le système de justice fonctionnait bien. Les avocats de l'aide juridique ont fait grève. Des procès ont été annulés pour cause de retards. Le nombre des procès en attente est énorme. Cela pourrait fort bien déboucher sur une nouvelle exacerbation des erreurs judiciaires souvent dénoncées.
La question perturbe énormément beaucoup de députés, surtout des circonscriptions rurales, qui doivent décider s'ils vont voter en faveur de ce projet de loi et avaler sans mot dire l'élément empoisonné qu'il contient, à mon sens, en se bouchant le nez, ou s'ils exprimeront leurs préoccupations légitimes à cet égard. C'est ce que je m'emploie à faire, au nom du Parti progressiste-conservateur et d'une circonscription rurale.
Nous serions ravis de souscrire à certains des éléments légitimes et dignes d'intérêt que contient ce projet de loi. Toutefois, nombre d'associations ayant comparu devant le comité, dont la Fédération canadienne de l'agriculture et autres porte-parole des agriculteurs canadiens, ont soutenu que le projet de loi les placera dans une situation intenable. Il les empêchera de poursuivre des activités jusque-là jugées normales et légales.
C'est avec grand regret que j'annonce, au nom de mon parti, que nous ne pouvons pas voter pour ce projet de loi sous sa forme actuelle. Nous souhaitons vivement qu'il soit donné suite à cet amendement proposant le renvoi du projet de loi à un comité. Nous pourrions entendre à nouveau les intervenants, et surtout les intervenants agricoles pour lesquels ce projet de loi aura des conséquences des plus néfastes.
C'est ce que nous devrions faire. Nous devrions prendre le temps d'élaborer un bon projet de loi. Le gouvernement interrompt constamment le débat et empêche l'expression de préoccupations légitimes. Voilà pourquoi j'encourage les députés à voter en faveur de cet amendement et à se donner ainsi la possibilité de reprendre l'étude de ce projet de loi au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La question porte sur le sous-amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter le sous-amendement?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui sont en faveur veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Convoquez les députés.
M. Dale Johnston: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Vous constaterez qu'il y a consentement unanime de la Chambre pour que le vote sur le sous-amendement soit reporté à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles, demain.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): D'accord?
Des voix: D'accord.
M. Joe Jordan: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je vous prie de demander le consentement unanime de la Chambre pour faire comme s'il était 18 h 30 et passer au débat d'ajournement.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): D'accord?
Des voix: D'accord.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Ajournement]
* * *
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
* * *
[Traduction]
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Madame la Présidente, encore une fois, il n'est pas surprenant que la question soit celle de la surpêche dans les eaux du nez et de la queue des Grands Bancs, et celles du Bonnet flamand. Malheureusement, peu importe ce que je dirai à cette étape, la secrétaire parlementaire va se lever et lire un texte rédigé d'avance. Quelle que soit la route que j'emprunte, j'obtiendrai la même réponse et c'est bien regrettable.
À mesure que les temps changent et que nous obtenons plus d'information à ce sujet, non seulement la Chambre, mais les gens de tout le pays commencent à constater qu'il existe une province appelée Terre-Neuve-et-Labrador. L'une des principales industries de cette province est celle des pêches. Il y a plus de dix ans, la province a été pratiquement dévastée à cause de la récolte excessive d'une ressource qui avait assuré la subsistance de cette province depuis que John Cabot l'avait redécouverte en 1497.
Des abus flagrants se commettent régulièrement sur le nez et la queue du Grand Banc et sur le Bonnet flamand. Pour ceux qui ne savent pas de quoi il est question quand je parle de nez et de queue et de bonnet flamand, je signale que nous avons un plateau continental au large de Terre-Neuve-et-Labrador. Quand la limite de la zone économique a été portée à 200 milles, une partie du plateau continental s'étendait malheureusement au-delà de cette limite de 200 milles.
Il existe deux avancées appelées le nez et la queue du Grand Banc, juste au coeur du champ de pêche le plus lucratif au monde. Un peu à l'extérieur de cette zone se trouve un plateau connu sous le nom de Bonnet flamand, qui est lui aussi une zone de pêche très prolifique. C'était autrefois une extraordinaire zone de pêche à la morue et, ces dernières années, c'est devenu un formidable champ de pêche à la crevette. On n'y trouvait pas de crevette il y a quelques années. Cependant, certains croient qu'à cause de l'activité accrue dans le nord, la crevette a été amenée dans la zone du Bonnet flamand par les courants océaniques.
Des abus flagrants s'y commettent, et nous ne faisons pas grand-chose à ce sujet. Nous laissons l'OPANO, l'organisme de réglementation, l'Organisation des pêches de l'Atlantique nord-ouest, administrer la région. Elle ne fait pas un bon travail. Nous payons la moitié des coûts de l'OPANO. Nous sommes les principaux bénéficiaires de la ressource, mais, apparemment, nous n'avons absolument aucun mot à dire. L'OPANO est impuissante.
Lorsque nous avons constaté que certains bateaux commettaient des abus, nous n'avons pu rien faire pour les en empêcher. Nous avons dû les renvoyer dans leur pays en espérant que le gouvernement du pays d'immatriculation puisse leur imposer un châtiment. Parfois cela arrive, et parfois non.
Notre surveillance, qui constitue le problème que j'ai soulevé, est très faible. Nous avons un seul patrouilleur. Nous avons une excellente surveillance aérienne assurée par des compagnies aériennes provinciales, à la fine pointe de la technologie, mais elles couvrent seulement certaines zones à certains moments. C'est dans les champs de pêche que nous avons besoin d'une véritable surveillance sur le terrain et qu'il nous faut pouvoir monter à bord des bateaux pour signifier des citations. Nous ne savons pas ce qui se passe, parce que le ministère des Pêches et des Océans ne rend pas publique ce genre d'information. Nous savons seulement qu'un bateau se trouve parfois dans la zone et que c'est la seule protection que nous ayons.
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais d'abord remercier le député de St. John's-Ouest d'avoir soulevé cette importante question. La surpêche étrangère préoccupe non seulement les Canadiens de la région de l'Atlantique, mais encore l'ensemble des Canadiens. Je sais que le député s'intéresse à la position du gouvernement et aux mesures qu'il prend. Je vais donc lui faire connaître la position du gouvernement.
Le Canada s'inquiète de plus en plus du niveau actuel de non-respect de la réglementation de l'OPANO par les bateaux de pêche étrangers dans la zone régie par cet organisme. À l'occasion de la plus récente réunion de l'OPANO, à Helsingor, au Danemark, le Canada a présenté des informations détaillées sur le non-respect croissant de la réglementation de l'OPANO par des bateaux de certains pays membres de cet organisme. Cette information se fonde sur une évaluation détaillée que le personnel du ministère des Pêches et des Océans a faite des rapports fournis par des observateurs embarqués à bord des bateaux de pêche étrangers.
Mis à part les rapports des observateurs, le Canada a maintenu son vaste programme de surveillance dans la zone réglementée par l'OPANO: surveillance aérienne, abordage en mer et inspections menées par des agents des pêches canadiens en leur qualité d'inspecteurs de l'OPANO. Ces activités de surveillance exigent des ressources appréciables du gouvernement du Canada, mais je suis convaincu que mon collègue conviendra que l'information recueillie est précieuse pour évaluer la nature et l'ampleur des problèmes de dérogation aux règlements.
Le programme de surveillance aérienne du ministère des Pêches et des Océans est assuré aux termes d'un marché conclu entre le ministère et Provincial Airlines Limited, PAL, de St. John's, à Terre-Neuve. Il s'agit d'un programme de surveillance aérienne des pêches de calibre mondial, et il fait appel à des technologies de pointe pour contrôler, observer et consigner les activités des bâtiments de pêche étrangers.
Les membres du Comité permanent des pêches et des océans ont récemment eu l'occasion de visiter les installations de Provincial Airlines à Halifax. Je crois savoir qu'ils ont été très impressionnés par les capacités de l'appareil et l'efficacité globale du programme. Je suis heureux d'ajouter que des ressources supplémentaires ont été débloquées récemment par le gouvernement pour qu'on puisse utiliser davantage les appareils de PAL sur les deux côtes.
La surveillance aérienne par le Canada de même que l'exigence de l'OPANO portant sur le repérage par satellite des bateaux de pêche permet au Canada de surveiller de près le nombre de bateaux de pêche étrangers circulant dans la zone de réglementation de l'OPANO ainsi que les mouvements et les activités de pêche de ces navires.
En plus de la surveillance aérienne et du repérage par satellite, il doit y avoir une surveillance par des observateurs indépendants des bateaux des pays membres de l'OPANO qui pêchent dans la zone de réglementation. Les rapports fournis par ces observateurs fournissent des renseignements très importants sur le respect des règles et mesures de conservation établies par l'OPANO. Les responsables canadiens ont revu et analysé soigneusement ces rapports pour déterminer les tendances et les questions de non-conformité et ils continueront de le faire.
Les zones de couverture des patrouilleurs sont un autre élément clé de notre programme global de surveillance et d'application de l'OPANO. Un de nos gros navires hauturiers, le Leonard J. Cowley, est actuellement affecté aux patrouilles de l'OPANO. Les agents de pêche canadiens, agissant à titre d'inspecteurs de l'OPANO, montent à bord des navires de pêche étrangers et font des inspections en vue de s'assurer du respect des règles. Les renseignements fournis par les rapports des observateurs et la surveillance aérienne nous permettent de faire ces inspections de façon rentable et stratégique.
Comme les députés peuvent le constater, le gouvernement fait des efforts dans ce sens. Cette question continue de nous préoccuper et le ministère des Pêches et des Océans poursuivra ses efforts dans ce sens.
M. Loyola Hearn: Madame la Présidente, je ne veux pas disputailler parce que la question va au-delà de l'esprit de parti, mais je rappelle que, oui, le Canada a renseigné l'OPANO, mais l'OPANO lui a fait un pied de nez. Elle a rejeté les recommandations du Canada.
Le député a parlé des rapports des observateurs, qui sont placés à bord du navire par le pays propriétaire. Ils font rapport à leurs propres pays. Nous recevons des exemplaires de ces rapports, en retard la plupart du temps, une fois qu'ils sont classés, quand ils le sont. Deux infractions ont trait au retard de classement et au fait qu'aucun rapport n'est classé. La situation est grave. Les observateurs ne sont pas indépendants. Ils dépendent du pays au compte duquel se fait la pêche.
Il y a une surveillance aérienne, mais elle ne couvre qu'une partie du lieu de pêche. Il n'y a absolument aucune surveillance dans la partie nord des eaux. Oui, on prend de bonnes mesures, mais on reste seulement en surface. Il faut bâtir sur les mesures prises.
Pour ce qui est des citations et des arraisonnements, il est difficile de savoir s'il y en a, parce que les Pêches ne communiquent aucun renseignement. Pourquoi faire tant de secret? Si l'on fait du bon travail, on devrait le dire à la population et on devrait bâtir sur...
Le président suppléant (Mme Bakopanos): L'honorable secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes a la parole.
M. Geoff Regan: Madame la Présidente, je suis sensible aux points soulevés par le député et j'aimerais conclure en ajoutant quelques points.
Les fonctionnaires canadiens ont examiné et continueront d'examiner cette question et à lire et analyser les rapports sur les bateaux rédigés par des observateurs. J'ai mentionné que ce processus soulevait des inquiétudes. Il est important que le gouvernement s'engage, avec ses homologues de l'OPANO, à tenter de renforcer les mesures existantes. J'ignore si le député préconise une action unilatérale. Si tel est le cas, il pourrait peut-être nous fournir plus de précisions qu'il n'en a données ce soir. Je ne l'ai pas entendu dire ce que le gouvernement devrait faire, selon lui. Je pense que, s'il veut se plaindre du gouvernement, il est très important qu'il dise exactement quelles mesures celui-ci devrait prendre.
Outre le Leonard J. Cowley, d'autres bateaux de la Garde côtière canadienne sont parfois utilisés pour les patrouilles pour le compte de l'OPANO. Le ministère des Pêches et des Océans a aussi conclu une entente avec le ministère de la Défense nationale en vertu de laquelle des navires de guerre effectuent...
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le député de Acadie—Bathurst a la parole.
* * *
[Français]
M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole au sujet du lock-out de Radio-Canada, non pas que je sois content que ce soit arrivé.
Il est regrettable que depuis le 25 mars dernier, la société d'État de Radio-Canada ait choisi de mettre ses employés en lock-out, privant ainsi tous les gens du Québec et de l'est du pays, de la région de Moncton et de ma région, de la voix de Radio-Canada, de notre radio et notre télévision francophones et anglophones.
Ce qui est d'autant plus regrettable dans tout cela, c'est qu'après qu'on ait eu demandé à la ministre du Patrimoine canadien de réclamer de la société d'État Radio-Canada le retour au travail de ses employés, elle nous a répondu ce qui suit:
Monsieur le Président, cela fait deux semaines qu'on est en période de lock-out et je sais que tous les auditeurs francophones manquent beaucoup la programmation. |
J'encourage les deux parties à s'engager directement dans une bonne négociation. |
Une des deux parties était à la table des négociations et voulait négocier. Mais la Société Radio-Canada avait décidé que si ses employés s'ouvraient la bouche et parlaient, en d'autres mots, s'ils utilisaient leur droit d'expression en tant que Canadiens et Canadiennes, qu'elle quitterait la table et mettrait fin à toute négociation.
La semaine dernière ou il y a deux semaines, on a vu cela ici, au Parlement. Les travailleurs et les travailleuses de Radio-Canada du Québec et du Nouveau-Brunswick sont venus ici pour manifester et pour dire à leur gouvernement qu'ils voulaient retourner au travail. Cependant, Radio-Canada a choisi de se retirer de la table de négociations. C'est un manque de respect de la démocratie canadienne.
Selon la Charte canadienne des droits et libertés, les gens ont un droit d'expression dans ce pays. Ils ne doivent pas être soumis à une dictature comme Radio-Canada leur impose, en faisant du chantage, en disant: «Si tu te sers de ta démocratie, on va se retirer de la table des négociations; on va arrêter les négociations.»
Quand on demande au gouvernement de se mêler du conflit, il dit: «Non. Bien non. Ils sont en négociation, laissons-les tranquilles.»
Toutefois, quand les employés de Postes Canada ne parlaient que de faire la grève, le Parlement a adopté une loi à la Chambre des communes à savoir que si ces employés faisaient la grève, ils seraient forcés de retourner au travail. Il s'agissait alors de travailleurs.
Mais comme il s'agit maintenant de la société d'État de Radio-Canada—parce que c'est une société du gouvernement—, le gouvernement ne veut pas dire à cet employeur, à la société Radio-Canada, de retourner au moins à la table jusqu'à la fin des négociations. Elle les punit, parce qu'elle est en train de gagner de l'argent à nous faire entendre à nous, les gens du Québec et de l'Est, de la musique et à nous faire voir des reportages qui viennent d'ailleurs. C'est ce que la Société Radio-Canada est en train de faire. Elle fait de l'argent sur le dos de ses travailleurs et travailleuses.
J'aimerais savoir de la secrétaire parlementaire ou du représentant du gouvernement comment il pourrait défendre Radio-Canada ce soir. S'il avait l'habilité de défendre Radio-Canada, comment pourrait-il s'organiser pour le faire et ainsi se gagner du respect ici à la Chambre et au Canada, alors que Radio-Canada a refusé de négocier, parce que des gens sont venus parler à leurs représentants, ici à Ottawa?
C'est inacceptable. J'aimerais voir mon collègue de l'autre côté de la Chambre défendre Radio-Canada, une société d'État qui appartient aux payeurs de taxes de ce pays.
M. Geoff Regan: Madame la Présidente, j'aimerais remercier mon collègue, le député de Acadie--Bathurst, de sa question. Je suis heureux de lui répondre au nom de la ministre du Patrimoine canadien.
[Traduction]
Comme les députés le savent, la Société Radio-Canada est un organisme autonome qui est responsable de sa propre administration et de ses propres activités. Cela veut dire qu'elle est seule responsable de la négociation des conventions collectives avec ses employés. Le gouvernement du Canada ne peut pas intervenir et ne le fera pas. Radio-Canada et le Syndicat des Communications de Radio-Canada sont actuellement à la table de négociation et négocient de bonne foi. Nous espérons que les parties en arriveront à une nouvelle convention collective très bientôt.
D'ici à ce qu'une telle convention collective soit conclue, je me rends compte que bien des Canadiens sont très malheureux de ne pas avoir le service qu'ils en sont venus à attendre de Radio-Canada. La SRC est une institution très chère à des millions de Canadiens qui comptent sur elle pour leur fournir des émissions d'information, sans parler des autres émissions et des sports. Comme c'est la saison des éliminatoires de hockey, beaucoup de Canadiens ressentent sans doute de façon plus aiguë les effets de ce conflit de travail.
La SRC est peut-être l'instrument de culture le plus puissant au Canada, celui qui réussit le mieux à unir les Canadiens d'un océan à l'autre. Elle est effectivement la voix de notre pays et joue donc un rôle unique et précieux dans notre société.
Nous espérons que Radio-Canada et le Syndicat des communications de Radio-Canada en viendront très rapidement à une entente satisfaisante pour les deux parties, afin que l'ensemble des Canadiens puissent de nouveau compter sur cette institution cruciale qui est au coeur de leurs activités quotidiennes.
Radio-Canada dessert les Canadiens depuis 1936. Il s'agit d'une société d'État régie par la Loi sur la radiodiffusion de 1991 et soumise à la réglementation du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes. La Société Radio-Canada est également soumise au Code canadien du travail, à la Loi sur l'équité en matière d'emploi, à la Loi canadienne sur les droits de la personne, ainsi de suite. Elle respecte toutes ses obligations, et se doit de respecter toutes ses obligations, à titre d'employeur fédéral.
Parmi les services qu'elle offre, mentionnons quatre réseaux nationaux de radiodiffusion, CBC Radio One et CBC Radio Two en anglais et la Radio de Radio-Canada et la Chaîne culturelle FM en français, qui diffusent des émissions d'information et d'intérêt général ainsi que des émissions culturelles et de musique classique; deux réseaux nationaux de télédiffusion, CBC Television et Radio-Canada Télé; ainsi que deux chaînes de télévision spécialisées et autonomes, CBC Newsworld en anglais et le Réseau de l'information en français, qui diffusent des émissions de nouvelles et d'actualité 24 heures par jour, 7 jours par semaine.
En tant que principale institution culturelle, la Société Radio-Canada touche la vie des Canadiens tous les jours. En tant que diffuseur national, elle offre des services en français, en anglais et dans huit langues autochtones et doit rendre des comptes à tous les Canadiens.
La Société Radio-Canada a pris certaines orientations stratégiques visant à lui permettre de bien gérer ses affaires et d'être perçue comme une société bien gérée, oeuvrant dans l'intérêt de ses actionnaires, les Canadiens. La Société Radio-Canada a fait cet effort pour offrir une programmation de grande qualité sur ses réseaux anglais et français. Elle vise également à générer de fortes rentrées d'argent qu'elle compte réinvestir dans sa programmation de base en optimisant ses autres avoirs et en améliorant son fonctionnement.
Cet organisme est la voix du Canada.
[Français]
M. Yvon Godin: Madame la Présidente, j'aime la manière qu'a mon collègue de défendre Radio-Canada pour les bons services rendus aux Canadiens.
Mon collègue de l'autre côté de la Chambre ne sait peut-être pas que de Québec jusqu'à l'Atlantique, seulement 51 p. 100 des travailleurs et des travailleuses de Radio-Canada sont à plein temps. Parmi les employés de Radio-Canada de l'Ontario jusqu'en Colombie-Britannique et dans les Territoires du Nord-Ouest, 71 p. 100 sont à plein temps. Ils dépendent pourtant du même président de Radio-Canada. Pourquoi y a-t-il une telle différence?
Si le gouvernement n'a pas un mot à dire dans ce dossier, j'aurais mieux aimé que mon collègue ne défende pas Radio-Canada. Mais il se lève pour défendre Radio-Canada plutôt que de dire: «Non, retournez à la table des négociations et négociez une convention collective qui serait de bonne foi pour tous les Canadiens et Canadiennes.»
M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, comme je l'ai déjà dit, j'ai hâte de voir un accord entre Radio-Canada et ses employés et je suis content de voir qu'ils négocient. Je crois qu'ils sont présentement à la table de négociations et j'espère qu'ils en viendront à un accord bientôt. Je suis confiant qu'ils vont arriver à un tel accord.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée.
[Traduction]
La Chambre s'ajourne donc jusqu'à 10 heures, demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 28.)