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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 044
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 5 avril 2001
AFFAIRES COURANTES |
LA CHAMBRE DES COMMUNES |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Derek Lee |
LA SOCIÉTÉ POUR L'EXPANSION DES EXPORTATIONS |
M. Pat O'Brien |
DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES |
M. Bill Graham |
M. John Harvard |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-24. Présentation et première lecture |
L'hon. Anne McLellan |
LA LOI SUR LA SOCIÉTÉ DU CRÉDIT AGRICOLE |
Projet de loi C-25. Présentation et première lecture |
L'hon. Lyle Vanclief |
LA LOI SUR LE DIVORCE |
Projet de loi C-334. Présentation et première lecture |
M. Roger Gallaway |
LA LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES |
Projet de loi C-335. Présentation et première lecture |
M. Bernard Bigras |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-336. Présentation et première lecture |
Mme Pauline Picard |
PÉTITIONS |
VIA Rail |
M. Peter Adams |
Le rein bioartificiel |
M. Peter Adams |
QUESTIONS INSCRITES AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA |
Projet de loi C-9. Étape du rapport. |
Décision de la présidence |
Le Président |
Motions d'amendement |
M. Antoine Dubé |
Motion no 1 |
M. Scott Reid |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Derek Lee |
M. Peter MacKay |
M. Gurmant Grewal |
M. Stéphane Bergeron |
M. John Bryden |
M. Brian Fitzpatrick |
M. Dick Proctor |
M. Bill Blaikie |
M. Ken Epp |
M. Ghislain Lebel |
M. John Duncan |
M. Deepak Obhrai |
Report du vote sur la motion no 1 |
LA LOI D'EXÉCUTION DU BUDGET DE 1997 |
Projet de loi C-17. Deuxième lecture |
M. Ken Epp |
M. Deepak Obhrai |
Mme Bev Desjarlais |
M. Deepak Obhrai |
M. John Duncan |
Report du vote sur la motion. |
LA LOI DE 2000 MODIFIANT L'IMPÔT SUR LE REVENU |
Projet de loi C-22. Deuxième lecture |
M. Deepak Obhrai |
M. Roy Cullen |
Le vice-président |
M. James Moore |
M. Rick Casson |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LES MINES ANTIPERSONNEL |
M. Mac Harb |
LA CONSTITUTION |
M. Roy Bailey |
LA CONSTRUCTION NAVALE |
M. Tony Tirabassi |
LE CANCER DE LA PROSTATE |
M. Yvon Charbonneau |
LA JOURNÉE MONDIALE DE LA SANTÉ |
Mme Jean Augustine |
LE MULTICULTURALISME |
M. Gurmant Grewal |
LA DÉPUTÉE DE CALGARY—NOSE HILL |
Mme Carole-Marie Allard |
LE MOIS DE SENSIBILISATION AU CANCER |
Mme Suzanne Tremblay |
LA CHAMBRE DES COMMUNES |
M. Derek Lee |
LE FESTIVAL DES BERNACHES |
M. James Lunney |
LA CHAMBRE DES COMMUNES |
M. Steve Mahoney |
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES |
M. Pat Martin |
LA CONSTRUCTION NAVALE |
M. Antoine Dubé |
LE CRIME ORGANISÉ |
M. Paul DeVillers |
TERRE-NEUVE |
M. Norman Doyle |
QUESTIONS ORALES |
LE PREMIER MINISTRE |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Brian Tobin |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Brian Tobin |
M. Gilles Duceppe |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Gilles Duceppe |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Michel Gauthier |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Michel Gauthier |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'ENVIRONNEMENT |
Mme Alexa McDonough |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. John Manley |
LE PREMIER MINISTRE |
Le très hon. Joe Clark |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'AGRICULTURE |
Le très hon. Joe Clark |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE COMMERCE |
M. Grant McNally |
M. Pat O'Brien |
M. Grant McNally |
Le très hon. Jean Chrétien |
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES |
M. Pierre Paquette |
M. Pat O'Brien |
M. Pierre Paquette |
M. Pat O'Brien |
L'ÉCONOMIE |
M. Ken Epp |
L'hon. Paul Martin |
M. Ken Epp |
L'hon. Paul Martin |
LES CONVENTIONS FISCALES |
Mme Pauline Picard |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Paul Martin |
L'INDUSTRIE DE LA CONSTRUCTION NAVALE |
M. James Rajotte |
L'hon. Brian Tobin |
M. James Rajotte |
L'hon. Brian Tobin |
LE CRIME ORGANISÉ |
Mme Marlene Jennings |
L'hon. Anne McLellan |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
L'hon. Hedy Fry |
LES EXPORTATIONS D'EAU DOUCE |
M. Bill Blaikie |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE |
M. Bill Casey |
M. Pat O'Brien |
LES EXPORTATIONS D'EAU DOUCE |
M. John Herron |
Le très hon. Jean Chrétien |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Bob Mills |
L'hon. David Anderson |
M. Bob Mills |
L'hon. David Anderson |
LES CONVENTIONS FISCALES |
M. Yvan Loubier |
L'hon. Paul Martin |
M. Yvan Loubier |
Le très hon. Jean Chrétien |
LES TÉLÉCOMMUNICATIONS |
Mme Cheryl Gallant |
L'hon. Sheila Copps |
Mme Cheryl Gallant |
L'hon. Sheila Copps |
L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE |
M. Andy Savoy |
M. Pat O'Brien |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Keith Martin |
L'hon. John Manley |
M. Keith Martin |
L'hon. John Manley |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Bernard Bigras |
L'hon. David Anderson |
LES PÊCHES |
M. Larry Bagnell |
L'hon. Herb Dhaliwal |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Herb Gray |
LES EXPORTATIONS D'EAU DOUCE |
M. Bill Blaikie |
L'hon. David Anderson |
QUESTION DE PRIVILÈGE |
Les observations de la députée |
Mme Diane Ablonczy |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Chuck Strahl |
L'hon. Don Boudria |
LES VOIES ET MOYENS |
Avis de motion |
L'hon. Paul Martin |
L'hon. Ralph Goodale |
AFFAIRES COURANTES |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Citoyenneté et immigration |
M. Derek Lee |
Motion |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI DE 2000 MODIFIANT L'IMPÔT SUR LE REVENU |
Projet de loi C-22. Deuxième lecture |
M. James Moore |
M. Paul Szabo |
M. Roy Cullen |
M. Keith Martin |
M. Paul Szabo |
M. Brian Fitzpatrick |
AFFAIRES COURANTES |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Commerce, différends commerciaux et investissements internationaux |
M. Derek Lee |
Motion |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI DE 2000 MODIFIANT L'IMPÔT SUR LE REVENU |
Projet de loi C-22. Deuxième lecture |
M. Gurmant Grewal |
M. Roy Cullen |
M. John McCallum |
Report du vote sur la motion |
LOI SUR LA FONDATION DU CANADA POUR L'APPUI TECHNOLOGIQUE |
Projet de loi C-4. Troisième lecture |
L'hon. Claudette Bradshaw |
M. Brent St. Denis |
M. David Chatters |
AFFAIRES COURANTES |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Justice et droits de la personne |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR LA FONDATION DU CANADA POUR L'APPUI |
Projet de loi C-4. Troisième lecture |
M. Gurmant Grewal |
M. Serge Cardin |
M. Gerald Keddy |
M. Gerald Keddy |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Motion |
M. Yvon Charbonneau |
M. Keith Martin |
M. Réal Ménard |
M. André Bachand |
M. Stan Keyes |
Report du vote sur la motion |
MOTION D'AJOURNEMENT |
Le développement des ressources humaines |
M. Dick Proctor |
Mme Raymonde Folco |
Les impôts |
M. Grant McNally |
M. Roy Cullen |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 044
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 5 avril 2001
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LA CHAMBRE DES COMMUNES
Le Président: J'ai l'honneur de déposer sur le Bureau le rapport sur le rendement de l'administration de la Chambre des communes pour la période d'avril 1999 à mars 2000.
* * *
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à deux pétitions.
* * *
LA SOCIÉTÉ POUR L'EXPANSION DES EXPORTATIONS
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer aujourd'hui à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport annuel de la Société pour l'expansion des exportations pour l'an 2000.
* * *
[Français]
DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES
M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 34 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, ainsi qu'en espagnol et en portugais, le rapport de la réunion inaugurale du Forum interparlementaire des Amériques, tenue ici, à Ottawa, du 7 au 9 mars 2001.
[Traduction]
Monsieur le Président, vous avez eu l'amabilité de présider l'ouverture de la session à laquelle assistaient une centaine de parlementaires venus de 28 pays pour créer un Forum interparlementaire des Amériques qui nous permettra de communiquer les uns avec les autres dans tout l'hémisphère.
Le Parlement a eu la chance d'accueillir cette réunion extrêmement importante au cours de laquelle nous avons été en mesure de fournir des informations et des conseils aux dirigeants qui participeront à Québec au Sommet des Amériques.
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 34 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, un rapport de l'Association interparlementaire Canada-Royaume-Uni sur une visite faite à Londres au Royaume-Uni, du 4 au 7 mars 2001.
* * *
LE CODE CRIMINEL
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-24, Loi modifiant le code criminel (crime organisé et application de la loi) et d'autres lois en conséquence.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR LA SOCIÉTÉ DU CRÉDIT AGRICOLE
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la Société du crédit agricole et d'autres lois en conséquence.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR LE DIVORCE
M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-334, Loi modifiant la Loi sur le divorce (enfant à charge).
Monsieur le Président, je suis heureux de présenter ce projet de loi qui vise à déclarer qu'un enfant qui est majeur n'est pas un enfant à charge au sens de la Loi sur le divorce du seul fait qu'il poursuit des études secondaires.
Ainsi, un tribunal ne peut, sauf exception, rendre une ordonnance alimentaire au profit d'un enfant qui est majeur afin de couvrir tout ou partie de ses frais relatifs aux études postsecondaires.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
[Français]
LA LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES
M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ) demande à présenter le projet de loi C-335, Loi modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (usage médical de la marijuana).
—Monsieur le Président, je suis heureux de déposer aujourd'hui ce projet de loi qui modifie la Loi réglementant certaines drogues et autres substances afin de permettre la possession, à des fins thérapeutiques, de 30 grammes ou moins de marijuana.
La seule condition qui serait exigée, c'est d'avoir en sa possession un certificat médical. Le but de ce projet de loi est de décriminaliser l'usage médical de la marijuana. Il répond, entre autres, à un jugement de la cour ontarienne qui a été rendu le 31 juillet 2000.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LE CODE CRIMINEL
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) demande à présenter le projet de loi C-336, Loi modifiant le Code criminel (manipulation génétique).
—Monsieur le Président, je suis heureuse de déposer aujourd'hui un projet de loi qui veut modifier le Code criminel en interdisant la manipulation génétique d'une cellule humaine, d'un zygote ou d'un embryon afin d'empêcher le clonage humain. Quiconque commet une telle infraction encourt une amende et un emprisonnement, ou l'une de ces deux peines.
Nous ne sommes pas sans savoir que le rythme des découvertes scientifiques et des avancées techniques dans le domaine des biotechnologies s'est considérablement accéléré au cours des dernières années, forçant le législateur à prendre acte de la situation.
Devant cet état de fait, la presque totalité des pays industrialisés du monde ont pris les bouchées doubles et adopté rapidement, au cours des derniers mois, des mesures législatives pour interdire le clonage humain ou, à tout le moins, encadrer de façon très serrée la recherche génétique. Au Canada, il n'y a rien du tout, c'est le vide juridique. C'est pourquoi je dépose ce projet de loi.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
[Traduction]
PÉTITIONS
VIA RAIL
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais présenter deux autres pétitions provenant de la région de Peterborough et au-delà, notamment Ajax, Durham, Victoria, Haliburton et Brock. Les pétitionnaires réclament le rétablissement du service de VIA Rail entre la ville de Peterborough, le comté de Peterborough et Toronto.
Ils soulignent que le rétablissement de ce service présente d'importants avantages sur les plans de l'écologie et de la santé, en contribuant notamment à réduire les émissions des gaz à effet de serre. Ils font également observer que cette liaison contribuera au renforcement de l'économie de Peterborough en en faisant une destination touristique et éducative et une ville-banlieue, et qu'elle profitera aussi à la région de Toronto dont elle allégera le trafic.
Les deux pétitions demandent le rétablissement du service de VIA Rail entre Peterborough et Toronto.
LE REIN BIOARTIFICIEL
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais présenter une dernière pétition pour le compte des personnes souffrant d'une maladie rénale en phase terminale. Les pétitionnaires rappellent que, bien que la dialyse et les greffes de reins réussies sont des traitements salutaires qui continuent de faire leurs preuves, les dons d'organes demeurent insuffisants pour satisfaire à la demande et les services de dialyse restent inadéquats.
Ils demandent au Parlement d'appuyer le projet de rein bioartificiel qui remplacera la dialyse et la greffe comme traitement pour les personnes souffrant d'une maladie rénale en phase terminale.
* * *
[Français]
QUESTIONS INSCRITES AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.
Le Président: Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA
La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement.
DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE
Le Président: Une motion d'amendement figure au Feuilleton pour l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-9, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales.
[Français]
J'ai considéré attentivement cette motion. Je réalise qu'elle est semblable à une motion qui a été débattue et rejetée au comité. Malgré une certaine appréhension en choisissant la motion, j'ai décidé de laisser le bénéfice du doute au député. Alors, la motion no 1 sera débattue et mise aux voix.
MOTIONS D'AMENDEMENT
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ) propose:
Motion no 1
Que le projet de loi C-9, à l'article 2, soit modifié par substitution, aux lignes 32 à 35, page 1, de ce qui suit:
«officiel sans l'agrément préalable du comité de la Chambre des communes qui traite habituellement des questions électorales, après consultation du comité du Sénat qui traite habituellement de ces questions.»
—Monsieur le Président, cet amendement vise finalement à ce que nous ne soyons pas obligés de consulter ou d'inclure le Sénat dans la modification de la Loi électorale.
Il serait assez paradoxal, en ce qui concerne une loi qui encadre des élections qui s'appliquent aux députés de la Chambre, que des gens non élus soient impliqués. Je tiens à préciser que, personnellement, je n'ai rien contre les individus qui forment l'autre Chambre. Nous rencontrons ces gens assez régulièrement et plusieurs parmi ceux que j'ai rencontrés sont parfois qualifiés et gentils.
Mais il y a une chose à retenir: il ne faut pas oublier qu'ils sont souvent nommés par le premier ministre. Ce premier ministre, qui nomme-t-il? En général, il nomme des gens qu'il connaît bien et dont il reconnaît la valeur du travail, parfois et souvent partisan. La façon de les récompenser pour le travail déjà accompli, c'est de les nommer à l'autre Chambre.
Bien sûr, nous ne pouvons pas éliminer le fait qu'ils ont une expérience certaine dans plusieurs cas, mais parfois, le critère subjectif est laissé à la discrétion du premier ministre. Rappelons le vote que nous avons eu, hier, demandant une enquête publique sur le comportement du premier ministre dans son comté, surtout lorsque nous nous rendons compte que c'est lui-même qui nomme le conseiller en éthique, lequel lui rend des comptes.
Donc, nous pensons que les gens de l'autre Chambre ne devraient pas être consultés là-dessus. Ce sont d'autres gens qui viendraient donner des avis sur la façon de modifier le territoire, les limites des circonscriptions électorales.
Lorsqu'il s'agit d'élection, bien sûr que les députés de l'opposition peuvent s'exprimer, mais si les dés sont pipés à l'avance, si c'est choisi par des amis du premier ministre ou des gens qu'il reconnaît comme lui étant, en principe, sympathiques, ces gens auront tendance à appuyer les recommandations du parti au pouvoir, du parti du premier ministre qui les a nommés.
C'est à cause de cela que je présente cet amendement. C'est par respect pour les personnes, mais en même temps parce que je m'inquiète de la continuité de cette institution qui, à notre avis, est devenue vétuste.
On le sait, ce n'est pas la première fois que nous prenons une telle position. En 1993, c'était un élément de notre plateforme électorale. Nous avons toujours été constants dans cette position depuis que nous sommes ici, soit depuis 1993. Nous nous sommes toujours opposés à ce qu'il y ait des comités mixtes incluant à la fois des gens élus de cette Chambre et des gens non élus, pour débattre, surtout dans ce cas-ci, de questions électorales. La plupart des non-élus ne sont pas eux-mêmes d'anciens députés. Ils n'ont donc pas été confrontés à la réalité électorale et ne savent pas de quoi ils parlent en cette matière, même s'ils ont fait des contributions partisanes à l'élection de l'un ou de l'autre.
C'est pour cela que le Bloc québécois pense que l'amendement que je propose est très pertinent. Monsieur le Président, nous vous remercions de l'avoir accepté afin que nous puissions l'étudier.
Nous invitons les collègues de toutes les formations politiques, surtout celles de l'opposition, à l'appuyer. Je pense particulièrement aux députés de l'Alliance canadienne. Même si on ne partage pas nécessairement leur avis, il reste que le constat est le même: ils souhaitent que les sénateurs soient élus, qu'ils soient soumis à la volonté populaire, alors que nous souhaitons qu'il n'y ait pas de Sénat. À tout le moins, on constate le même problème, c'est que les gens de l'autre Chambre ne sont pas élus.
Je pense qu'il est possible d'espérer l'appui de deux autres formations politiques, soit le Nouveau Parti démocratique et le Parti progressiste-conservateur. Des députés de ces formations ont déjà exprimé l'avis qu'on devrait considérer cela entre élus et consulter la population. Il faudrait avoir des avis parce que, avant tout, nous travaillons pour la population. L'avis de la population est important; elle choisit les élus qui sont ici à la Chambre. Il faut que cela se fasse dans les meilleures conditions possible.
Il faut que les gens soient confiants que ce Parlement fonctionne dans le plus grand esprit démocratique possible. À cet égard, puisqu'il me reste encore quelques minutes, je pourrais ajouter que ce gouvernement se propose comme étant le grand défenseur de la démocratie à l'échelle internationale. On doit admettre qu'il a acquis une certaine réputation dans ce domaine, à tel point que des députés, même ceux de l'opposition, sont appelés à l'occasion pour surveiller des élections dans d'autres pays.
Comme membre du Sous-comité sur les droits de la personne, je sais que le Canada se fait le promoteur des droits de la personne. J'ai parfois de la difficulté à ajouter ma voix à ceux qui disent que le Canada est le champion dans ce domaine, lorsque je vois qu'à l'intérieur, il y a encore des lacunes considérables, notamment au chapitre du financement électoral.
Les règles étant ce qu'elles sont, actuellement, le financement se fait aussi par les grandes entreprises. Nous avons combattu cela longtemps et nous avons dit la dernière fois: «Au moins, limitons cela à 5 000 $ et moins.»
Je veux bien que les gens d'en face ou les gens de cette institution, les ministres surtout et le premier ministre, contribuent, à l'échelle internationale, avec les délégations ou lors d'autres occasions, pour dire que les autres pays devraient fonctionner de façon plus démocratique, que les autres pays devraient respecter davantage les droits de la personne. Cependant, en même temps, il faudrait s'assurer que nous, ici au Canada, soyons vraiment respectueux de cette évolution, de cette affirmation ou de ces conceptions démocratiques.
C'est le sens de l'amendement que je propose ce matin, appuyé par mon collègue, le député de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans. C'est dans ce sens-là qu'on fait cette représentation.
Je remercie à l'avance mes collègues de tous les partis de l'opposition et certains collègues du Parti libéral qui oseront nous appuyer. Souvent, plusieurs m'ont exprimé qu'ils ne sont pas toujours très enchantés, comme ce fut le cas hier soir, de suivre la ligne de parti. Ils sont parfois obligés de désobéir à leurs convictions. Mais dans ce cas-ci, puisqu'il s'agit d'élections, j'espère qu'ils seront fidèles à leurs convictions et à ce qu'ils pensent de la démocratie.
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon collègue, le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière. Par cet amendement et par cette motion, il démontre qu'il est capable d'élargir ses horizons et qu'il est un député très polyvalent. On sait le travail que mon collègue de Lévis-Chutes-de-la-Chaudière fait dans le domaine de la construction navale, sur le plan des chantiers maritimes, non seulement au Québec, mais aussi au Canada. Notre collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière a réussi à obtenir un consensus de tous les propriétaires et de tous les syndicats de chantiers maritimes à la grandeur du Canada.
Je pense que le fait qu'il ait déposé cet amendement au projet de loi C-9, la Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, démontre qu'il est capable d'intervenir sur d'autres sujets. Le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière n'est donc pas un homme d'un seul dossier. C'est un homme polyvalent.
Cela étant dit, dans le peu de temps qui m'est imparti, j'aimerais quand même ajouter, pour les personnes qui nous écoutent et les collègues, ici à la Chambre, qui sont très assidus à ma présentation, que cet amendement est apporté à la page 1 du projet de loi. Il modifie l'article 18.1 de la Loi électorale, pour modifier ou, ni plus ni moins, pour transformer le rôle de l'autre Chambre vis-à-vis de l'adoption de modifications à la Loi électorale. À ce sujet, on parle de la possibilité, pour le directeur général des élections, d'utiliser le vote électronique.
Je siège au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. M. Kingsley a déposé, il y a environ une dizaine de jours, son rapport sur l'élection de la présente législature, c'est-à-dire l'élection générale du 27 novembre 2000. On aura l'occasion d'y revenir et on aura l'occasion de suggérer d'autres amendements concernant la Loi électorale.
Mais je peux dire que dans plusieurs circonscriptions, et comme par hasard dans plusieurs circonscriptions du Québec et de l'Alberta—je ne sais pas si c'est l'effet du hasard; on sait que l'Alberta est largement dominée par les députés de l'Alliance canadienne; et au Québec, encore une fois, le Bloc québécois a eu une majorité de sièges—, c'est là où il y a eu le plus d'accrochages quant au déroulement du scrutin du 27 novembre dernier.
En 10 minutes à peine, je n'ai pas le temps de faire la nomenclature du manque de collaboration de plusieurs directeurs de scrutin et de lieux de votation mésadaptés.
Dans un endroit d'environ 10 pieds carrés, on pouvait y retrouver six ou sept sections de vote. À titre de candidats, en vertu d'une disposition de la Loi électorale, nous pouvons visiter les bureaux de scrutin, serrer la main des représentants de tous les partis, et on pouvait littéralement voir pour qui les gens voteraient. Certains bureaux étaient situés très loin du domicile des personnes âgées, dont la mobilité est parfois réduite, pour, encore une fois, décourager leur vote.
Je dois dire que nous, du Bloc québécois, sommes en train de faire la nomenclature des problématiques de l'élection du 27 novembre 2000, et nous aurons l'occasion d'y revenir. J'ai personnellement avisé M. Kingsley qu'il devra y avoir des améliorations.
Ce projet de loi, déposé par le leader du gouvernement à la Chambre, donne le pouvoir aux directeurs de scrutin d'essayer d'autres types d'expression du vote, nommément le vote électronique. Dans ce projet de loi, il est stipulé que, pour être adopté, il devra y avoir assentiment des deux Chambres, à savoir la Chambre des communes et l'autre Chambre, composée, comme on le sait, de non-élus.
Il n'y a pas de cachette, notre amendement vise à retirer le droit au Sénat—l'autre Chambre—de donner son accord et nous voulons modifier cet accord par une consultation. Nous sommes conscients qu'il y a une différence entre consulter et obtenir l'assentiment. Nous en sommes conscients et c'est à dessein que nous l'avons fait.
Nous l'avons fait sciemment, parce que les 301 députés de cette Chambre, peu importe l'allégeance et peu importe l'étiquette politique, peuvent reconnaître—parfois, cela a été plus serré que dans d'autres cas—que, généralement, les personnes ici présentes ont toutes été élues de façon démocratique par la population du Québec et du Canada.
Contrairement à d'autres pays, personne au Canada et au Québec n'est allé voter, le 27 novembre, avec une mitraillette dans le dos. Les gens ont librement exprimé leur choix. Le résultat est la trente-septième législature. À mon avis, nous, les 301 députés ici, peu importe notre allégeance et peu importe notre étiquette, sommes totalement légitimes.
Le problème, c'est lorsqu'on donne à une Chambre non élue le pouvoir de décider comment les élus seront élus. Je ne sais pas si vous me suivez, je suis en train de me perdre moi-même. Il me semble que j'ai trop utilisé le mot «élu» dans ma phrase, mais je pense que vous me comprenez. Il s'agit de donner à une autre instance nommée—une instance de personnes récompensées, donc une instance non élue—le pouvoir de décider comment les élus seront élus. Cela n'a pas de bon sens.
On devrait les consulter, puisque c'est supposé être une Chambre de sages, une Chambre de personnes qui réfléchissent. Nous savons que, selon la tradition parlementaire britannique, la Chambre des communes représente le bas peuple, le populo. Nous sommes les représentants du populo, tandis que l'autre Chambre représente l'aristocratie, les lords dans le système britannique.
Je regrette, mais j'aime mieux appartenir à la Chambre qui représente le populo, la Chambre qui représente les gens ordinaires, ces gens qui, à tous les quatre ans, peuvent dire: «Tu fais mon affaire, je te garde. Tu ne fais pas mon affaire, je te mets dehors.» C'est cela, la démocratie. C'est pour cela qu'en démocratie, il y a des gouvernements qui se succèdent, qu'il y a une succession d'États.
Il est donc important de retirer à cette autre Chambre ce pouvoir de se prononcer sur le vote électronique.
M. Yvan Loubier: Il faut l'abolir.
M. Michel Guimond: C'est sûr que la solution, comme le dit mon collègue de Saint-Hyacinthe—Bagot, serait de l'abolir. Mais il faut quand même reconnaître que dans le système actuel, lorsque des maisons de sondage interrogent les Québécois, 84 p. 100 d'entre eux sont pour l'abolition du Sénat; dans les autres provinces, on veut avoir un Sénat triple E, un Sénat avec plus de pouvoirs.
Probablement que nous ne verrons pas l'abolition du Sénat de notre vivant. Mais pour nous du Québec, il y aurait une façon d'abolir le Sénat, c'est par la souveraineté du Québec. Quand on deviendra souverains, il n'y aura plus de Sénat, il n'y aura plus de Gouverneur général, il n'y aura plus de lieutenant-gouverneur, ce sera le gouvernement du peuple.
Je sais que le temps me manque, mais on pourrait parler de certaines personnes de l'autre Chambre. Nous, les élus, sommes-nous d'accord pour donner à Mme Lise Bacon, une ancienne ministre du Parti libéral nommée par les libéraux, à M. John Bryden, un sénateur libéral du Nouveau-Brunswick, à M. Ross Fitzpatrick, un «bagman» de la Colombie-Britannique, et la liste serait longue, donner à des non-élus, dis-je, le pouvoir de décider pour nous, les représentants du peuple, ceux qui portent la parole du peuple en cette enceinte?
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui en faveur de l'amendement proposé par mon honorable collègue, le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière.
[Traduction]
Le député suggère que le comité qui examinerait de nouvelles manières de voter, dont l'utilisation d'un système de vote électronique, n'aurait qu'à consulter le Sénat, et que le comité du Sénat ne pourrait exercer un droit de veto sur tout changement proposé à la manière de voter.
C'est une excellente idée. Un amendement semblable, qui, à mon avis, était une bonne idée, a été proposé en comité par des députés du Bloc québécois. L'amendement à l'étude est cependant meilleur que celui qui avait été proposé au moment de l'examen en comité du projet de loi, parce qu'il permet de consulter le comité du Sénat.
Nous pouvons profiter de la sagesse du Sénat. Au départ, le Sénat devait constituer, comme nous le savons tous, une Chambre de second examen objectif. Je pourrais même en fait parler de premier examen objectif, mais il ne s'agit néanmoins que d'un commentaire sobre et non d'un droit de veto. J'estime que le consulter est une démarche plutôt avantageuse.
Toutefois, le fait d'accorder un droit de veto sur les changements, comme le propose l'article pertinent du projet de loi, donnerait à un comité d'une chambre non élue un contrôle réel en vertu de la législation canadienne sur une partie de la loi électorale du pays. C'est là, à mon avis, un précédent que nous ne voulons pas établir. Je devrais plutôt dire que le précédent est déjà établi. Je crois que la possibilité que des gens non élus exercent de plus en plus de contrôle et que nous, parlementaires élus, et par le fait même ceux qui nous ont élus, aient de moins en moins de contrôle sur le programme politique représente une pente bien glissante sur laquelle nous ne voulons pas nous engager. C'est particulièrement vrai en ce qui touche la loi électorale du pays qui constitue la plus sacrée de nos institutions démocratiques.
Je suggèrerais que le Sénat ait un rôle bien plus important et qu'un comité du Sénat devrait avoir un droit de veto sur tout changement à la Loi électorale si les sénateurs étaient élus. Lorsque l'amendement a été déposé en comité, j'ai soulevé le fait que ce serait très avantageux si nous accordions à l'avenir un plus grand pouvoir de contrôle au Sénat une fois qu'il serait élu. Je sais que mes collègues du Bloc québécois et du Nouveau Parti démocratique ne préconisent pas comme moi un Sénat élu plutôt que son abolition. Une deuxième chambre élue jouerait un rôle précieux, surtout si elle était élue selon un processus différent de celui propre à la Chambre des communes.
Bien des pays ont une deuxième chambre élue. Je pense par exemple à la Suisse, aux États-Unis, à l'Australie et à l'Allemagne, qui utilisent des systèmes différents. Nous oublions parfois qu'avant 1867, le Canada uni avait en effet une deuxième chambre élue. À l'époque de la création de la Confédération, un grand nombre de bonnes mesures ont été prises, mais le fait de passer d'une seconde chambre élue à une non élue a peut-être été le plus grand pas en arrière.
Mes collègues du Bloc québécois sont particulièrement sensibles aux problèmes que cause une institution non élue qui dispose d'un droit de veto sur la loi électorale, car le Québec a fait l'expérience, il n'y a pas très longtemps, d'une seconde chambre non élue. Ce n'est que dans les années 60 qu'une modification constitutionnelle a été adoptée en vue d'éliminer cette deuxième chambre non élue au Québec.
J'ai récemment feuilleté un ancien numéro d'un magazine, la version française de MacLeans si je ne m'abuse, publié vers 1965, dans lequel figurait la liste des dix membres de cette deuxième chambre. La liste précisait aussi la date de leur nomination et leur âge. Sur cette liste, il y avait quelqu'un né dans les années 1870, un homme qui était pratiquement aussi vieux que la Confédération elle-même. Il était un membre non élu qui semblait siéger à cette chambre pour la forme. Il se trouve qu'il s'agissait d'un homme d'une grande longévité; sa nomination remontait à une période antédiluvienne et il siégeait toujours dans cette chambre. J'ignore tout de sa fiche de présence et de son état mental, mais il a continué de siéger et, avec un petit groupe de collègues, d'avoir la capacité de bloquer toutes les lois du Québec.
En fait, cette chambre haute a parfois bloqué des lois lorsque ses propres privilèges étaient attaqués. Elle se préoccupait beaucoup de ses privilèges. Je ne pense pas que nous voulions de ce genre de pouvoir, qui existe déjà dans une certaine mesure au Sénat, au Canada. Nous ne voulons pas que les comités exercent ce type de pouvoir pour des affaires qui concernent uniquement la Chambre.
Il est très important d'avoir cette distinction tant que nous serons la seule chambre démocratique au Canada. Tant que notre pays ne pourra pas compter sur une forme de législation référendaire, sur l'initiative des citoyens, tant qu'il n'y aura pas de lois de révocation ou tout autre élément fondamental d'une société démocratique, comme ce que j'ai vu dans les sociétés plus démocratiques, nous n'avons certainement pas besoin d'institutions non élues qui ont un contrôle direct sur les changements pouvant rendre cette institution plus démocratique et faire en sorte que la façon dont les parlementaires sont élus pour siéger dans cette Chambre soit plus démocratique.
Je voudrais revenir brièvement sur la notion du vote électronique et d'autres types de scrutin proposés dans le texte initial du projet de loi. Il s'agit en fait d'une disposition extrêmement utile. Nous devrions envisager la possibilité d'offrir des votes électroniques aux citoyens.
Lorsque je cherchais à me faire élire, un certain nombre de gens ont été incapables de voter parce qu'ils étaient malades, handicapés ou à l'extérieur du pays. Le vote par procuration permet de régler ce problème dans une certaine mesure, mais c'est un système peu commode. Il serait peut-être possible de l'améliorer. Je sais que tous les députés voudraient mettre en oeuvre toutes les mesures visant à permettre aux électeurs de voter plus facilement. L'idée de permettre aux électeurs de se prononcer par voie électronique devrait être encouragée.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je voudrais dire simplement quelques mots en guise d'appui à l'amendement proposé par le député du Bloc québécois. Il vise essentiellement à retirer au Sénat son droit de veto en ce qui concerne les mesures prévues dans le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui et qui porte sur la Loi électorale du Canada.
Accorder au Sénat un droit de veto sur la législation électorale est probablement le pouvoir le plus pervers que nous pourrions confier aux membres de cette institution parce qu'ils ne sont pas élus. Je ne comprends vraiment pas pourquoi le gouvernement tient tant à le faire.
Les membres du Sénat du Canada sont nommés. Le Sénat est une assemblée qui n'est pas démocratique et ses membres ne sont pas élus et n'ont pas de comptes à rendre. Les sénateurs n'ont pas d'électeurs devant qui ils doivent se présenter et ils ne subissent pas l'influence de l'opinion publique. Pourtant, le Sénat a un droit de veto sur la loi électorale de notre pays qui s'applique aux parlementaires qui sont élus et qui ont régulièrement des comptes à rendre à leurs électeurs.
Il s'agit là d'une forme très perverse de démocratie si l'on se fie à la définition de ce qu'est la démocratie. C'est pourquoi j'appuie fermement l'amendement que propose aujourd'hui le Bloc québécois.
Le rôle du Sénat fait depuis longtemps l'objet de discussions. Dans mes cours d'histoire, j'ai appris que, lorsque notre pays a été fondé, chaque province avait une chambre haute et une chambre basse, que ce soit l'Ontario, le Québec, les provinces atlantiques ou l'Île-du-Prince-Édouard. Je pense même que le Manitoba avait deux chambres. Si ma mémoire est fidèle, six ou sept provinces avaient une chambre haute et une chambre basse. Une par une, les chambres hautes ont été abolies. Si je ne m'abuse, le Québec a été la dernière province à abolir sa chambre haute.
[Français]
C'était en 1968. Le Conseil législatif ou le Sénat du Québec a été aboli. C'était la Chambre rouge et elle a été abolie dans la province de Québec. Ce fut le cas dans chaque province canadienne qui avait une deuxième Chambre. Elle a été abolie parce les provinces canadiennes n'avaient pas besoin de deux Chambres.
[Traduction]
Il y a toutefois un anachronisme à la Chambre des communes. Il y a environ une heure, alors que je m'adressais à un forum sur la gestion des affaires publiques ici à Ottawa, il a été question, entre autres, du Sénat.
À l'heure actuelle, nous avons un Sénat non élu. Tous les sondages dont j'ai vu les résultats indiquent qu'environ 5 p. 100 des Canadiens appuient le Sénat et pourtant le gouvernement continue à se croiser les bras. Le débat continue dans l'ensemble du pays sur la question de savoir si on devrait réformer le Sénat, l'élire ou l'abolir.
Au fil des ans il y a eu de nombreuses tentatives en vue de modifier le Sénat, d'élire les sénateurs. Je me souviens du temps, en 1991-1992, juste avant Charlottetown, où il y avait des comités de la Chambre des communes, le comité Beaudoin-Edwards et le comité Beaudoin-Dobbie. La question la plus difficile qui se posait à nous était de décider quoi faire avec le Sénat. C'est la question que nous avons traitée en dernier.
En fin de compte, les trois partis représentés à la Chambre des communes se sont entendus pour réduire les pouvoirs du Sénat, et pour instaurer une représentation égale, non pas pour chaque province, mais pour les cinq régions du pays. Il s'agissait de l'Atlantique, de l'Ontario, du Québec, des Prairies, et de la Colombie-Britannique plus le Nord. La formule aurait donné à chaque région du pays 20 p. 100 des sièges au Sénat.
Ensuite nous avons tous convenu, ce qui était difficile à accepter pour certains néo-démocrates, mais à l'époque j'étais le porte-parole du parti, que le Sénat serait élu, et qu'il serait élu entièrement en fonction de la représentation proportionnelle. Les trois partis étaient d'accord.
Je vois un grand enthousiaste du Parti libéral, originaire d'Hamilton, grincer des dents, mais cela fait partie de l'histoire de la Chambre. S'il consulte la bibliothèque du Parlement, il verra quelle était la position de son parti. À l'époque, il avait pour porte-parole André Ouellet, un ancien ministre des Affaires étrangères et député de Papineau, qui est aujourd'hui à la tête de la Société canadienne des postes. Le Parti libéral, dirigé par l'actuel premier ministre, a appuyé l'idée d'un Sénat élu à la représentation proportionnelle, doté de pouvoirs réduits, représentant à égalité non pas toutes les provinces, mais cinq régions du pays.
Ce qui est arrivé à cette proposition unanime du Parlement est qu'elle a été soumise à cette grande institution canadienne, légèrement antidémocratique, qui s'appelle la conférence des premiers ministres. Le premier ministre Mulroney et les premiers ministres des provinces n'ont pris que quelques minutes avant de rejeter l'idée proposée par la Chambre des communes et ils ont présenté la proposition de l'Accord de Charlottetown qui prévoyait toujours un Sénat nommé avec des pouvoirs réduits et une augmentation du nombre de sièges à la Chambre des communes. C'était là de la bouillie pour les chats que les Canadiens ont refusée.
Encore une fois, nous nous retrouvons à la case départ. Pendant les négociations de l'Accord du lac Meech, on avait aussi tenté de modifier le Sénat. Je crois qu'il avait été proposé à l'époque que le premier ministre nomme les sénateurs à partir d'une liste fournie par les premiers ministres de chaque province. Cela n'a pas été retenu dans l'Accord du lac Meech, mais c'était une des propositions qui avaient été faites à l'époque.
Il y a eu toutes sortes de propositions différentes au sujet du Sénat. Le mouvement en faveur d'un Sénat triple E, qui a vu le jour, en partie, dans l'Ouest du Canada, qui préconisait que chaque province dispose d'un nombre égal de sénateurs. La Chambre des communes et le Sénat auraient des pouvoirs importants et chacun pourrait faire contrepoids à l'autre.
Ce projet ne s'est jamais concrétisé et il ne se réalisera jamais parce que l'Ontario et le Québec, avec leur poids démographique et leurs pouvoirs, ne peuvent accepter, n'ont jamais accepté et n'accepteront jamais un Sénat égal où l'Île-du-Prince-Édouard aurait les mêmes pouvoirs que l'Ontario et où le Nouveau-Brunswick aurait les mêmes pouvoirs que le Québec, pour peu que le Sénat ait quelque pouvoir que ce soit. Si le Sénat n'a pas de pouvoirs, pourquoi même devrait-il exister s'il n'est destiné à devenir qu'une simple chambre de discussion?
Il y a eu toutes sortes de tentatives en vue de réformer et de changer le Sénat. Une autre idée que l'Alliance et le Parti réformiste mettent de l'avant, c'est de commencer à élire, de manière ponctuelle, les sénateurs un à un. Encore une fois, je pense que ce serait une grande erreur. Si nous commencions à élire les sénateurs un à un maintenant, nous nous trouverions à leur conférer des pouvoirs. Nous consacrerions à perpétuité la représentation actuelle au Sénat, qui est extrêmement injuste. Par exemple, la Colombie-Britannique, qui compte environ 3 millions d'habitants, a six sénateurs, alors que le Nouveau-Brunswick, qui compte 500 000 ou 600 000 habitants, en a dix.
Nous nous trouverions aussi à consacrer les pouvoirs existants du Sénat, qui sont presque aussi forts que ceux de la Chambre des communes. Nous consacrerions dans notre constitution une vision qui date des années 1860. Ce n'est pas la vision que nous devons avoir aujourd'hui. C'est une vision qui serait discriminatoire, par exemple, envers l'ouest du Canada, puisque la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba auraient six sénateurs, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse en auraient dix, Terre-Neuve en aurait six, et l'Île-du-Prince-Édouard en aurait quatre.
Pourtant, c'est la position que préconisent beaucoup de députés du Parti réformiste qui veulent que nous commencions à élire des sénateurs de façon ponctuelle, comme les Américains l'ont fait il y a de nombreuses années pour se retrouver en bout de ligne avec un Sénat élu dans ce pays.
Je ne crois pas que beaucoup de Canadiens voudraient ce genre de représentation par province aujourd'hui parce qu'elle ne reflète tout simplement pas la population actuelle. Elle ne reflète pas le nombre important d'habitants en Alberta et en Colombie-Britannique, ni le très petit nombre d'habitants dans certaines provinces de l'Atlantique. Si nous avions un Sénat élu, je ne crois pas que beaucoup de Canadiens voudraient que le Sénat exerce les pouvoirs qu'il a actuellement, qui sont assez forts comparativement à ceux de la Chambre des communes. Il les exerce très rarement aujourd'hui parce qu'il n'a pas de légitimité.
C'est comme un chien qui court après sa queue. C'est un débat sans fin. Il se poursuit sans cesse. Pour avoir un Sénat triple E, nous aurions besoin d'une modification constitutionnelle, qui devrait être appuyée au moins par la Chambre des communes, le Sénat et deux tiers des provinces représentant 50 p. 100 de l'ensemble de la population canadienne. Voilà pourquoi c'est un débat sans fin.
Le premier ministre a à un moment donné envisagé la possibilité d'abolir le Sénat. Selon la biographie de John Crosbie, quand Brian Mulroney a pour la première fois été élu premier ministre, la première chose qu'il voulait faire était d'abolir le Sénat. Il ne l'a jamais fait en raison de la complexité du système actuel.
J'ai bouclé la boucle. En dernière analyse, nous ne réussirons jamais à réformer le Sénat actuel. Jamais le Sénat actuel ne sera élu avec des pouvoirs assez importants pour que celui-ci soit utile.
Si nous élisons le présent Sénat, les coûts ne seront pas limités aux 60 millions de dollars actuels. Lorsqu'il sera légitime, élu et doté de pouvoirs, on peut penser que les coûts du Sénat vont doubler et tripler au fur et à mesure qu'il va se donner des moyens d'agir, parce qu'il est légitime et qu'il a été élu.
À mon avis, nous n'avons pas besoin de deux grands organismes élus et puissants. La façon de faire consiste à abolir le Sénat actuel et à confier le rôle de surveillance à la Chambre des communes en donnant plus de responsabilité au comité parlementaire et en accordant une plus grande indépendance à chacun des députés, en faisant moins souvent appel à des votes de confiance, comme c'est le cas dans la majorité des démocraties parlementaires du monde. C'est l'orientation que nous devrions adopter.
Il est temps que les députés d'arrière-ban expriment leur révolte dans ce dossier. Il est temps que nous nous donnions les moyens d'agir comme parlementaires et que nous disions au gouvernement qu'assez. c'est assez, que nous ne voulons plus que ces non-élus se promènent en prétendant être dotés de tout ce pouvoir alors qu'ils n'ont aucune légitimité, qu'ils ne sont pas issus de la démocratie et qu'ils n'ont pas de comptes à rendre à quiconque au pays.
C'est une honte nationale. C'est choquant. Au nom de la démocratie, modifions cette situation et agissons maintenant. Ce modeste amendement du Bloc constituera un pas dans cette direction en précisant qu'il veut un droit de veto sur le projet de loi électoral. Sinon, nous nous contentons de consulter le Sénat, mais on ne peut y opposer de veto.
Votons en faveur de cette motion. Que le diable emporte les whips de parti. Apportons nous-mêmes ce modeste changement.
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il est toujours intéressant de voir comment la Chambre traite de questions concernant l'autre endroit. Je tiens à préciser ma position et la position qui, je crois, est celle du gouvernement à l'égard de cet amendement.
La Loi électorale actuelle autorise le directeur général des élections à faire des études sur la tenue d'un scrutin, notamment sur de nouvelles manières de voter, concevoir et mettre à l'essai un processus de vote électronique. Ce changement a été apporté à la Loi électorale adoptée l'an dernier par le Parlement.
La plupart des Canadiens reconnaissent que c'est une mesure très utile. Cette mesure permet au directeur des élections de tester de nouveaux modes de scrutin sans avoir à changer la loi au préalable. Il s'agit d'une mesure avant-gardiste et un peu hardie. Le Parlement a décidé de demander l'approbation de la Chambre avant de permettre de tels tests. Je suis sûr que les Canadiens seront d'accord là-dessus.
Lors de l'examen du projet de loi dans l'autre endroit, les sénateurs ont fait remarquer que la loi actuelle les tenait à l'écart des consultations sur les tests en question. Le gouvernement, par l'intermédiaire du ministre, a promis au Sénat que, lorsque le projet de loi y aurait été adopté, le gouvernement proposerait un amendement pour remédier à ce problème.
Le projet de loi à l'étude précise que, avant de procéder à un essai ou de mettre en place un processus, il est nécessaire d'obtenir l'approbation préalable du comité de la Chambre et du comité du Sénat normalement chargés de ces questions.
L'amendement présenté aujourd'hui vise à modifier le processus d'approbation prévu dans le projet de loi. Il obligerait à obtenir l'approbation de la Chambre, mais à seulement consulter le Sénat. C'est un changement qu'il est proposé d'apporter aux dispositions du projet de loi, mais je signale aussi que, à la première lecture qu'on en fait, la motion laisse entendre que la Chambre doit consulter le Sénat avant de donner le feu vert au vote électronique.
Je ne pense pas que ce soit tout à fait ce qu'a voulu l'auteur de la motion. Je ne pense pas qu'on ait voulu imposer des conditions à la Chambre avant qu'elle ne donne son approbation, sauf peut-être celle de consulter le Sénat. Quoi qu'il en soit, l'actuel libellé de l'amendement n'est pas clair là-dessus, du fait de l'absence de la conjonction «et». Je ne m'attarderai pas plus longuement là-dessus, si ce n'est pour rappeler que l'amendement, dans son libellé actuel, risque de ne pas atteindre précisément le but visé par son auteur.
Le Sénat souhaitait cet amendement pour s'assurer que l'on obtiendrait son approbation avant que l'essai ou le projet pilote ne soient approuvés. Comme le savent les députés, le Sénat, cette autre Chambre, tient à jouer un rôle d'institution parlementaire équivalente à la nôtre. Il ne voudrait pas normalement être exclu des questions législatives. Je suppose qu'il ne consentirait jamais à être exclu du processus législatif, mais il a certainement constaté, lorsque le projet de loi a été adopté, qu'il avait été écarté du processus d'approbation qui laisserait le projet-pilote empiéter sur les dispositions législatives électorales actuelles.
C'est de bonne foi que le Sénat a fait cette demande. Le Sénat continue de montrer un vif intérêt au processus électoral. Il veut participer à toute réforme.
On pourrait interviewer des Canadiens, dans la rue, pour leur demander s'ils pensent que la Chambre devrait avoir un droit d'approbation exclusif et que le Sénat devrait être complètement absent de toute réforme de la Loi électorale du Canada. Les Canadiens seraient sans doute nombreux à penser que, même s'ils ne jouent pas un rôle dans les élections elles-mêmes, les sénateurs ont probablement de bons commentaires objectifs à formuler dans le cadre d'un tel processus. À l'heure actuelle, les sénateurs ne jouent absolument aucun rôle dans les élections.
Les députés pourraient prendre ombrage à l'idée que les sénateurs jouent un rôle dans le processus électoral, le Sénat a un rôle à jouer lorsqu'il s'agit du cadre législatif régissant les élections et le droit de vote garanti aux Canadiens en vertu de la charte, qui vise à assurer le fonctionnement adéquat du régime constitutionnel démocratique. Il y a de nombreux sénateurs d'expérience dans l'autre Chambre qui connaissent le processus électoral et qui peuvent intervenir de façon constructive dans ce type de processus d'approbation.
En remplissant sa promesse, le gouvernement est pour ainsi dire assuré que l'amendement du projet de loi, non pas celui proposé par le député, reflète l'engagement donné au moment de l'adoption du projet de loi l'année dernière. Ainsi, pour les autres raisons que j'ai énoncées, je n'appuie pas cet amendement.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je félicite le député du Bloc d'avoir présenté cet amendement. Il s'agit d'une tentative sincère d'améliorer un projet de loi qui a une portée et un contenu plutôt limités. Ce projet de loi fait suite à une décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire la Reine c. Figueroa, qui portait essentiellement sur la définition d'un parti politique et sur l'obligation de présenter un certain nombre de candidats aux élections pour que le nom du parti puisse figurer sur les bulletins de vote.
Le débat actuel dévie vers un sujet plus large. Cette question revêt un intérêt légitime pour de nombreux députés. Le député de Regina—Qu'Appelle prône depuis longtemps l'abolition du Sénat. Il enrichit le débat par ses connaissances et des références historiques. Lui comme d'autres députés ont exprimé leurs préférences à ce sujet.
En tant que député du Parti conservateur, je suis très fier que ce parti soit à l'origine des véritables efforts qui ont été faits pour réformer, améliorer et moderniser le Sénat. Mon parti a soumis des projets d'importance majeure aux Canadiens. L'Accord du lac Meech et l'Accord de Charlottetown traitaient en détail de la question du Sénat.
Des personnes récemment converties à la cause ont soutenu que c'est le Parti conservateur qui a perpétué l'existence du Sénat. Nous avons vraiment tenté de le moderniser. La Grande-Bretagne elle-même, qui est la mère de tous les Parlements, éprouve des difficultés avec sa Chambre haute.
Le député de Régina—Qu'Appelle a également fait référence à l'histoire des provinces, et en particulier celle du Québec, la dernière à avoir tenu un débat sur la question et décidé, dans sa sagesse, d'abolir sa chambre haute.
L'amendement dont nous sommes saisis aujourd'hui est tout à fait justifié. Je me vois cependant obligé de dire, au nom du Parti conservateur, que ce n'est pas la bonne solution. Nous ne devons pas procéder à la pièce, et je ne dis pas cela dans un sens désobligeant. Je ne crois pas que le fait d'empêcher le Sénat d'intervenir à l'égard de certaines lois, tout en l'autorisant à continuer de jouer son rôle à l'égard d'autres lois, constitue la bonne façon de changer le système actuel. Ce n'est pas l'approche que nous prônons.
La question des élections soulève des préoccupations justifiées. Le projet de loi porte sur les élections et, pourtant, les sénateurs n'ont pas à affronter les électeurs.
Toutefois, je ne crois pas que nous devions songer à les exclure tout simplement de ce processus de second examen objectif et d'étude dans le cas de ce projet de loi en particulier.
À titre de député conservateur, je n'hésite pas à m'engager. Mon parti n'a jamais hésité à se pencher sur la meilleure façon de moderniser le Sénat, le cas échéant. Bon nombre de conservateurs, et très certainement bon nombre de sénateurs, se rendent compte que le système actuel ne peut continuer de cahoter sous sa forme actuelle. Ce n'est pas acceptable. C'est une chose que la majorité des Canadiens, que la grande majorité des Canadiens ne peuvent accepter.
Bien que le Sénat ait à mon avis toujours offert un service très acceptable et qu'il continue de le faire, c'est à sa structure que la plupart des Canadiens s'opposent. Je sais bien que ce n'est pas très à la mode, ni très politiquement correct de faire l'éloge des sénateurs, mais bon nombre de sénateurs prennent leur rôle très au sérieux, servent notre pays avec grande distinction et arrivent au Sénat avec des aptitudes précieuses qui donnent beaucoup de valeur à leur participation au Sénat.
Il est tout à fait injuste de prétendre que, puisqu'ils n'ont pas été élus, les sénateurs ne devraient pas siéger à la Chambre haute et diriger les discussions dans des dossiers comme les améliorations à apporter au régime de soins de santé, la justice ou toute autre question qui touche les Canadiens de près.
Quelques personnes se sont réunies ce matin dans le foyer du Sénat pour voir comment la communauté médicale pourrait collaborer plus étroitement avec les politiciens, élus et non élus, afin d'améliorer notre système de soins de santé. Le sénateur Kenny, un libéral, a présidé un comité sénatorial dont les travaux avaient débouché sur de nombreuses et excellentes recommandations qui devraient servir de point de départ à l'étude qui vient d'être annoncée et qui sera présidée par l'ancien premier ministre provincial bien connu, M. Roy Romanow.
En un sens, on risque ici de jeter le bébé avec l'eau du bain. Si l'on agit précipitamment pour abolir le Sénat, on risque de perdre une précieuse mine de renseignements, de connaissances et de compétences. Ce serait dommage.
Je m'oppose à l'amendement. Il y a un moment et un endroit pour approfondir la question de la réforme du Sénat et des mesures à prendre pour améliorer l'ensemble de notre système démocratique. Il y a moyen d'améliorer notre système électoral et le processus du vote, qui est à la base de la raison d'être de la Chambre et de notre interaction avec les Canadiens en temps d'élection. Cependant, je n'approuve pas l'approche qui consiste à dénigrer l'ensemble de l'institution et certains de ses membres.
Il y a de récents convertis. L'Alliance canadienne compte maintenant un sénateur. Il est très intéressant de voir à quel point son approche s'est assouplie, maintenant qu'il y a un sénateur parmi les alliancistes. Il faut au moins être de bonne foi quand on discute de cette question. Il a déjà été question de nommer au Sénat des membres du Nouveau Parti démocratique. Les néo-démocrates ont eu le mérite de rester fidèles à l'approche qu'il préconisent à l'égard du Sénat.
L'amendement vise à écarter le Sénat du processus législatif en l'occurrence. Si l'on décide un jour écarter le Sénat, on devrait le faire intégralement, au lieu de l'empêcher de se prononcer sur des projets de loi particuliers, comme le permettrait l'amendement.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, au nom des électeurs de Surrey-Centre, je suis très heureux de participer au débat du projet de loi C-9 à l'étape du rapport.
Le projet de loi C-9 tend à modifier la Loi électorale du Canada et la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales.
Au cours de la dernière session, je suis intervenu dans le débat du projet de loi C-2, qui a été adopté par la Chambre. L'Alliance canadienne, qui s'appelait alors le Parti réformiste, était contre ce projet de loi. Les libéraux devraient avoir honte parce que le projet de loi C-2 renfermait tellement de graves imperfections qu'il en était non seulement non démocratique mais aussi presque antidémocratique. Le projet de loi C-2 donnait au Canada l'air d'une dictature.
Entre autres dispositions spéciales, le projet de loi C-9, qui est une mesure modifiant le projet de loi C-2 adopté pendant la dernière session, stipule que le directeur général des élections peut étudier certaines questions comme des nouvelles manières de voter, par exemple un processus de vote électronique, mais qu'un tel processus ne peut être utilisé sans l'approbation des comités de la Chambre et du Sénat. L'article 2, que nous avons l'intention de modifier, s'énonce ainsi:
Le directeur général des élections peut faire des études sur la tenue d'un scrutin, notamment sur de nouvelles manières de voter, concevoir et mettre à l'essai un processus de vote électronique pour usage à une élection générale ou partielle ultérieure. Tel processus ne peut être utilisé pour un vote officiel sans l'agrément préalable des comités du Sénat et de la Chambre des communes qui traitent habituellement des questions électorales.
Le mot «Sénat» y est inscrit, et c'est pourquoi cet amendement est proposé. Je félicite le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, qui a proposé l'amendement se lisant comme suit:
Que le projet de loi C-9, à l'article 2, soit modifié par substitution, aux lignes 32 à 35, page 1, de ce qui suit:
officiel sans l'agrément préalable du comité de la Chambre des communes qui traite habituellement des questions électorales, après consultation du comité du Sénat qui traite habituellement de ces questions.
L'Alliance canadienne appuie l'amendement puisqu'il supprime du projet de loi le rôle du Sénat. Notre Énoncé de politiques, dont le texte est dicté par les membres de la base de notre parti, dit ceci à l'article 71:
Nous allons soutenir l'élection des sénateurs, qui auront le mandat démocratique d'assumer leurs responsabilités constitutionnelles. Nous allons soutenir la distribution des sièges au Sénat de façon égale, par l'intermédiaire de discussions constitutionnelles avec les provinces et les territoires.
L'Alliance canadienne préconise une réforme du Sénat. Les sénateurs tâchent de faire leur travail du mieux qu'ils peuvent. À titre de coprésident d'un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes, le Comité d'examen de la réglementation, j'ai eu l'occasion de travailler en étroite collaboration avec des sénateurs. Il y a des sénateurs qui travaillent très fort. Les gens de l'autre endroit ont beaucoup de sagesse et nous attendons bien sûr d'eux un second examen objectif.
Cependant, il y a des sénateurs qui souhaitent exercer un droit de veto sur notre Loi électorale, sur la façon dont les Canadiens élisent les députés qui vont les représenter à la plus haute chambre du Canada. Le Sénat veut avoir un droit de veto prévu dans ce projet de loi, et le gouvernement, ce gouvernement libéral faible et arrogant, le lui accorde. C'est un grave problème. Les sénateurs sont élus dans certains autres pays. Notre principal partenaire commercial, les États-Unis, élit ses sénateurs.
L'argument convaincant qui inciterait les députés à appuyer l'amendement, c'est que les sénateurs n'ont pas de comptes à rendre aux électeurs parce qu'ils n'ont pas de circonscription. Ils ne représentent pas d'électeurs. Ils sont nommés par le premier ministre du Canada et c'est généralement à lui qu'ils rendent des comptes.
Je félicite un sénateur de la Colombie-Britannique, le sénateur Gerry St. Germain, qui est prêt à renoncer à son siège de sénateur à condition que le premier ministre nomme un sénateur élu au Sénat. Ce sénateur a fait un geste courageux et je me réjouis de son intention.
Les députés de l'Alliance appuient l'amendement. En vertu de la loi actuelle, il suffit d'obtenir l'approbation du comité de la Chambre des communes. Accorder au directeur général des élections la possibilité d'examiner d'autres possibilités innovatrices pourrait aider à moderniser le processus électoral; c'est une bonne chose, mais il faudrait la limiter aux députés élus qui représentent les Canadiens à la Chambre des communes.
De ce côté de la Chambre, nos oreilles se dressent lorsqu'on entend le mot Sénat, surtout lorsqu'il est question de le laisser intervenir dans le processus électoral. Les libéraux se préparent-ils à inciter le Sénat à rejeter toute idée innovatrice que pourrait proposer le directeur général des élections? Peut-être ne pouvons-nous pas faire confiance au gouvernement libéral. L'Alliance canadienne est d'avis que les électeurs, non pas le gouvernement, devraient décider si un parti ou un candidat mérite un vote.
Puisque tous les partis de l'opposition vont appuyer l'amendement, la balle est maintenant dans le camp des libéraux. S'ils refusent l'amendement, ils montreront encore une fois qu'ils veulent que le projet de loi C-9 soit antidémocratique.
[Français]
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, il me fait grand plaisir d'intervenir sur cette motion d'amendement proposée par mon collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière. Elle m'apparaît tout à fait à point dans le débat actuel.
J'aurai peut-être l'occasion, dans le cadre de mon intervention, de répondre à quelques-unes des assertions avancées par mon collègue de Pictou—Antigonish—Guysborough qui m'apparaissent, en tout respect pour lui, légèrement erronées.
Je pense que la meilleure façon de décrire ce qui s'est passé jusqu'ici et pourquoi nous en sommes actuellement à présenter cet amendement, c'est le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre qui l'a utilisée tout à l'heure dans son propre discours.
Il a évoqué les raisons qui nous avaient amenés à cette disposition de la Loi électorale, dans le cadre du projet de loi C-2, visant à faire en sorte que s'il devait y avoir un essai de nouvelles techniques de vote, cela ne puisse se faire sans que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, lequel est habituellement habilité à étudier de telles questions, ne soit appelé à donner son aval à une telle mise en oeuvre, à un tel projet-pilote.
Tout allait bien. Cet amendement prévu dans le projet de loi C-2 a été adopté. Il a été intégré à la Loi électorale du Canada qui a été utilisée, est-il utile de le rappeler, lors de la dernière élection générale.
Et voilà que dans le cadre du projet de loi C-9 visant à corriger une foule de petites coquilles qui s'étaient glissées, compte tenu de l'empressement avec lequel nous avions adopté le projet de loi C-2, empressement qui—est-il besoin de le rappeler encore une fois—était motivé essentiellement par des considérations politiques de la part du gouvernement, qui voulait faire en sorte d'avoir une loi électorale amendée le plus vite possible pour pouvoir déclencher des élections anticipées—ce qu'il a fait d'ailleurs et ce qui confirme notre point de vue à cet égard—le gouvernement propose un projet de loi, le projet de loi C-9, dis-je, pour corriger une foule de petites coquilles qui s'étaient glissées dans le projet de loi C-2, compte tenu de l'empressement que je viens de décrire, avec lequel nous l'avons adopté, et qui vise à corriger un autre élément du projet de loi, celui-là plus substantiel, compte tenu d'une décision de la cour.
Cela m'amène également à préciser que certaines suggestions avaient été avancées à l'intention du gouvernement, par rapport à l'affaire Figueroa. Le gouvernement a préféré utiliser l'argent des contribuables pour aller devant les tribunaux, et ne pas prendre en considération les points de vue qui avaient été exprimés. Il a été défait devant les tribunaux. Il nous revient maintenant en proposant un amendement plus substantiel pour se conformer à la décision de la cour dans l'affaire Figueroa quant au nombre de candidats que doivent avoir présentés les partis pour que le nom du parti figure sur le bulletin de vote lors d'une élection.
Parmi les amendements techniques, on présente un amendement, l'amendement no 2, qui modifie l'article 18.1 de la Loi électorale du Canada, visant à faire en sorte qu'avant de mettre en place un projet-pilote visant à modifier la façon de voter, le directeur général des élections ne doive pas obtenir que l'assentiment du comité de la Chambre généralement habilité à étudier ce genre de questions, c'est-à-dire le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, mais il doit également obtenir l'aval du comité sénatorial équivalent.
Je vous soumets respectueusement qu'il est assez étonnant qu'on ait à consulter un organisme non élu pour juger de la pertinence, de l'à-propos d'un projet-pilote quelconque pour une élection. Nous avons alors jugé bon de proposer que soit retirée cette référence au Sénat.
Cet amendement que nous avons proposé en comité a été défait, il va sans dire, parce que le leader du gouvernement à la Chambre a invoqué le fait que nous avons un Parlement bicaméral. Nous avons donc deux Chambres, et tant que nous aurons deux Chambres, tant que nous n'en aurons pas décidé autrement—et cela nous ramène au débat auquel faisait référence le député de Régina—Qu'Appelle—il faut prendre acte de la réalité et tenir compte du fait que le Sénat doive se prononcer sur toute législation. Soit.
Ce n'est pas parce que je suis en faveur du Sénat tel qu'il existe actuellement, ou d'une deuxième Chambre à l'intérieur du Parlement canadien, mais je reconnais, néanmoins, que nous devions, jusqu'à nouvel ordre, faire en sorte—comme nous respectons les institutions telles qu'elles existent actuellement—d'intégrer les sénateurs dans l'adoption de toute législation. Mais ce n'est pas ce dont il est question maintenant. Ce dont il est question maintenant, c'est d'une consultation, d'un avis, d'un accord qui est donné pour la mise en oeuvre d'un projet-pilote, d'une nouvelle façon de voter. J'aurai l'occasion, si le temps me le permet, de revenir sur cette question dans quelques instants.
Il s'agit donc simplement d'un avis technique. En quoi un groupe de non-élus serait-il en mesure de donner un avis sur une question comme celle-là? Je vous le demande, Monsieur le Président. Je sais bien que vous n'allez pas me répondre, mais je vous le demande, néanmoins.
On doit se poser la question, ultimement, comme le suggéraient nos collègues de Regina—Qu'Appelle et de Pictou—Antigonish—Guysborough, sur le rôle du Sénat, sur la pertinence de maintenir cette institution. Mais ce n'est pas, dans le cadre du débat actuel, ce qui nous intéresse. L'amendement ne vise pas à exclure les sénateurs du processus législatif. Il vise simplement à obliger le directeur général des élections, lorsqu'il veut mettre en oeuvre de nouvelles méthodes de vote, de consulter celles et ceux qui, élus, sont peut-être en mesure de lui apporter un éclairage pertinent sur la question.
Le leader parlementaire du gouvernement fait le tour de tout le monde présentement et fait un lobby incessant, par les temps qui courent, pour nous convaincre que l'amendement présenté par notre collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière ne dit pas ce qu'il voulait dire.
Je ne sais pas si le leader parlementaire du gouvernement est doté de ce don absolument extraordinaire de pouvoir lire dans les pensées, d'être en mesure de traduire celle de mon collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière au moment où il a rédigé cet amendement et où il l'a présenté à cette Chambre.
Quant à moi, cet amendement dit exactement ce que le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre disait tout à l'heure, c'est-à-dire qu'il vise à faire en sorte que le directeur général des élections, avant de mettre en oeuvre tout projet de nouvelles méthodes de vote, doit d'abord obtenir l'assentiment du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des communes et doit consulter le comité sénatorial équivalent.
La prétention du leader du gouvernement, qui va à l'encontre, je dois dire, de son secrétaire parlementaire, et qui est appuyé semble-t-il par les avis savants des juristes du Conseil privé, serait que cet amendement amènerait le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre à devoir consulter le comité sénatorial équivalent avant de donner son aval au directeur général des élections.
Je soumets respectueusement que je ne sais pas du tout sur la base de quelle version les légistes du Conseil privé en arrivent à cette conclusion. Peut-être s'appuient-ils sur la version anglaise qui, soit dit en passant, est une version traduite puisque la version originale de la motion est la version française.
Dans la ponctuation française, dans une énumération, une virgule remplace un «et». Si nous substituons la virgule dans le texte actuel par un «et», l'amendement est très clair et précis. Il vise à faire en sorte que le directeur général des élections doive obtenir l'aval du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des communes et consulter le comité équivalent du Sénat pour mettre en oeuvre une telle façon de voter proposée par le directeur général des élections.
Malheureusement, le temps me manque, et je n'aurai pas l'occasion d'évoquer ici à la Chambre mon point de vue notamment sur le vote électronique. Cependant, je tiens à dire qu'en tout respect pour l'autre Chambre, nous avons choisi de ne pas l'exclure de ce processus technique, mais de l'intégrer par voie de consultation. C'est pourquoi j'invite tous mes collègues à voter en faveur de cet amendement.
[Traduction]
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, voici une des occasions où ce qui se passe dans cet endroit me laisse quelque peu perplexe parce que, si j'étais député d'opposition, je m'opposerais farouchement à cet amendement.
Au lieu d'accroître les possibilités offertes à l'ensemble du Parlement, en veillant à ce que le gouvernement ne domine pas le Parlement, cet amendement donnerait au gouvernement un pouvoir énorme de décider si oui ou non un vote officiel à l'aide de moyens électroniques aurait lieu.
Dans le projet de loi initial, et dans le projet de loi C-2 initial, il y avait un article, celui que nous débattons actuellement, qui disait essentiellement que le directeur général des élections pouvait mettre à l'essai un processus de vote électronique, mais que, s'il voulait tenir un vote officiel à l'aide de la technologie du vote électronique, il devait au préalable obtenir l'approbation du comité compétent de la Chambre des communes. Soit dit en passant, nous présumons qu'il s'agirait du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
L'amendement proposé au projet de loi C-9 priverait le comité de la Chambre des communes du pouvoir exclusif de décider si un vote officiel aurait lieu à l'aide de moyens électroniques et fait intervenir un comité sénatorial. Selon le projet de loi C-9 actuel, il faudrait obtenir l'autorisation de deux comités. La motion dont la Chambre est saisie nous ferait revenir au projet de loi C-2, en supprimant la disposition relative à l'approbation du comité sénatorial.
Je rappelle qu'il est question ici d'un vote officiel. La disposition mentionne bien un vote officiel. Cela veut dire qu'un candidat sera élu ou défait.
Aux termes de la disposition originale, c'était uniquement le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, un comité toujours dominé par le gouvernement, qui pouvait décider si un processus de vote électronique allait être utilisé pour un vote officiel. Essentiellement, la disposition originale garantissait que le gouvernement donnerait son assentiment si on le lui demandait. Si, toutefois, le gouvernement ne voulait pas entendre parler de l'utilisation d'un processus de vote électronique, disons pour une élection partielle, il pouvait, grâce à sa majorité au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, interdire cette pratique.
C'est ce que je n'arrive pas à comprendre. La modification diminue un peu le pouvoir du gouvernement. Elle l'édulcore, en exigeant aussi l'approbation du comité sénatorial compétent. Ce n'est pas une mauvaise chose, parce que le Sénat n'est pas une assemblée élue et ne subit pas les pressions directes que le gouvernement exerce sur ses propres députés. Dans le cadre des travaux d'un comité permanent, monsieur le Président, il est très difficile pour tous les députés de ne pas respecter la ligne de leur parti. On ne s'attend pas d'ailleurs à ce que les membres du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre le fassent dans ce cas-ci.
Par contre, même si les sénateurs sont nommés par le gouvernement, cela n'a pas d'importance, car il reste que les sénateurs ne sont pas élus et parviennent, lorsqu'ils siègent à un comité, à suivre leur conscience et à user de leur pouvoir discrétionnaire quand vient le temps de se prononcer sur une question extrêmement importante, comme une mesure touchant les représentants du peuple officiellement élus à la Chambre, c'est pourquoi, monsieur le Président, je pense que tous les députés de l'opposition devraient être contre l'amendement.
Je remarque que le député de l'Alliance canadienne qui vient de prendre la parole avant moi a fait une erreur, car il a laissé entendre que tous les députés de l'opposition étaient en faveur de l'amendement qui est proposé par le Bloc québécois. J'ai écouté le discours du député conservateur, et celui-ci était contre.
J'invite les députés de l'opposition à reconsidérer leur position, car à titre de député du parti ministériel, je suis heureux de conférer à mon gouvernement beaucoup de pouvoirs et ainsi de suite, mais je suis très inquiet à l'idée de donner à un gouvernement qui pourrait éventuellement être dirigé par un autre parti quelque contrôle exclusif que ce soit par rapport à la décision d'autoriser ou non un vote officiel selon une manière de voter ou une autre.
Je signale à tous les députés, et j'insiste là-dessus, qu'il est question de l'agrément de comités. Il n'est pas question ici de quelque chose qui est débattue devant toute la Chambre. Il n'est pas question d'un vote à la Chambre ni au Sénat. Nous parlons simplement de l'agrément de comités et, à mon avis, monsieur le Président, le libellé de la disposition dans le projet de loi C-2 d'origine laissait à désirer, car, en gros, la disposition accordait le pouvoir d'agrément à un comité de la Chambre comprenant une majorité de députés du parti ministériel, ce qui en aurait fait, de toute façon, un simple mécanisme d'approbation automatique; l'amendement que le gouvernement propose atténue grandement ce pouvoir et nous donne, dans la mesure du possible, l'assurance qu'il y aura un autre examen et une autre évaluation faits par les parlementaires de l'autre endroit. Je pense que nous pouvons nous fier aux sénateurs, quelle que soit leur affiliation politique d'origine, pour utiliser leur jugement à bon escient au sujet de quelque chose d'aussi important qu'un vote susceptible d'entraîner la venue à la Chambre des communes d'un nouveau député.
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens dans ce débat. Je suis d'accord avec mon collègue du Bloc pour dire qu'il y a quelque chose de tout à fait déplacé dans le fait que le Sénat, sous sa forme actuelle, ait son mot à dire dans l'organisation de notre système électoral.
Certains députés ont affirmé que le Sénat n'avait rien à voir avec le processus électoral. Je crois qu'ils ont tort. Bon nombre des sénateurs qui siègent aujourd'hui à l'autre endroit y ont été nommés parce qu'ils ont eu des contacts directs avec notre processus électoral.
Certains se sont montrés très efficaces pour recueillir des fonds pour certains partis. Ils ont mené de très bonnes campagnes électorales pour certaines personnes clé qui auraient eu du mal à gagner leur siège sans leur aide. C'est la récompense qu'ils ont obtenue du système électoral pour le bon travail qu'ils ont fait pour le parti.
Il a également été dit à la Chambre que le Sénat est le seul groupe de personnes nommées qui ait son mot à dire dans notre système électoral. J'aimerais rappeler aux députés d'en face qu'en se basant sur une nouvelle philosophie d'activisme judiciaire, la Cour suprême du Canada a pris des décisions très importantes sur notre loi électorale. Les Canadiens en ont été choqués. Quatre-vingt-quinze pour cent des Canadiens ont été outrés de voir qu'un prisonnier condamné à vie pourrait avoir le droit de vote, et même à la limite de se présenter à une élection.
Le gouvernement en place a décidé de ne pas faire appel à une mesure de protection déjà prévue dans la constitution, soit la disposition de dérogation. Il n'est donc pas tout à fait juste de prétendre que des gens nommés à leur poste n'ont pas voix au chapitre.
Une bonne partie du débat qui s'est tenu à la Chambre depuis que j'y suis a porté sur une seule question, c'est-à-dire la concentration des pouvoirs dans les mains d'une seule personne ou d'un seul bureau. Qui n'a pas entendu parler de cet aphorisme de Lord Acton au sujet de la corruption? J'ai entendu certains discours très éloquents dans cette Chambre. Il est dommage qu'ils aient été mal interprétés à des fins politiques. Certains ont signalé des expériences historiques où le dicton de lord Acton se révèle vrai.
Les Canadiens tiennent pour acquis que des choses de ce genre ne peuvent se produire ici. Je ne voudrais pas que cela arrive non plus, mais nous aurions tort de faire fi des leçons de l'histoire. Nous devrions mettre en oeuvre des garanties pour nous assurer de ne pas avoir ce type de concentration des pouvoirs.
Une personne pour laquelle j'ai le plus grand respect, Gordon Robertson, a servi sous quatre premiers ministres et a été greffier du Conseil privé. Je pense que nos vis-à-vis connaissent bien M. Robertson. C'est un homme extrêmement respecté. M. Robertson s'inquiète de ce qui se passe au Parlement et de la concentration du pouvoir dans le cabinet du premier ministre. Il a déclaré fondamentalement que nous avions une dictature élue et que le Cabinet n'était devenu rien de plus qu'un groupe de consultation pour le cabinet du premier ministre.
Étant donné ces déclarations, je trouve étranges et déphasées certaines observations de mes collègues néo-démocrates au sujet du Sénat. Si je comprend bien mes collègues néo-démocrates, et ils ont des partisans du côté libéral, ils proposent d'abolir le Sénat. Ils disent qu'un Sénat élu avec une représentation régionale serait bon pour le pays, mais que l'Ontario et le Québec n'accepteraient pas cela. Ils disent qu'il faudrait une modification constitutionnelle pour réformer le Sénat.
Est-ce qu'ils ont déjà pensé au fait qu'il faudrait une modification constitutionnelle pour abolir le Sénat? Si nous devons passer par là, prenons la bonne mesure et non la mauvaise. L'abolition du Sénat sous sa forme actuelle ne ferait que donner plus de pouvoirs au premier ministre. Cela viendrait les compléter.
Il y a deux très bonnes raisons pour lesquelles nous devrions avoir un Sénat élu, indépendant et puissant. Premièrement, il pourrait s'attaquer au problème auquel nous faisons face dans cette enceinte, soit la concentration des pouvoirs entre les mains d'une seule personne. La concentration des pouvoirs conduit à un abus de pouvoir. Il n'y a pas de freins ou contrepoids dans notre système pour éviter cela de façon efficace et c'est vraiment là le dilemme. Tout le monde examine la question et se demande quel type de mécanismes nous avons pour remédier aux abus, mais il n'y en a aucun.
Ce que ferait surtout un Sénat puissant, élu et indépendant, ce serait ajouter un contrepoids à un système qui en a bien besoin, un contrepoids à la concentration du pouvoir.
Je m'étonne que le député du NPD ne reconnaisse pas qu'un Sénat élu représentant équitablement les régions contribuerait de beaucoup à atténuer les régionalismes, l'aliénation et la fragmentation qui affligent notre pays. Les habitants de toutes les régions auraient le sentiment d'avoir une voix puissante et efficace au sein du gouvernement fédéral. Nombre d'habitants des diverses régions du pays estiment, croyez-le ou non, ne pas avoir leur mot à dire sur les affaires de leur pays. Ils n'ont pas leurs entrées au cabinet du premier ministre et ils se sentent exclus.
J'ai des observations à faire sur certains points qui ont été soulevés à la Chambre. Quelqu'un a dit que l'accord de Charlottetown prévoyait un Sénat élu et a laissé entendre que le public avait rejeté l'accord de Charlottetown à cause de cette disposition. Je pense que cette personne a tort. L'accord de Charlottetown, s'il avait été un peu plus long, aurait concurrencé la brique Guerre et paix.
Selon l'accord, une province, et je m'étonne que cette dernière n'ait pas appuyé l'accord, pouvait opposer son veto à tout ce qui concernait la culture. Pour moi, la culture est un domaine très large. Elle concerne sans doute tout ce que nous faisons en tant que parlementaires. Cette proposition reviendrait à donner un fusil chargé à une province. Il y avait quelque chose comme 58 points sur la table des négociations.
M. Derek Lee: Sommes-nous à l'émission Cross Country Check Up? Tenons-nous en au sujet.
M. Brian Fitzpatrick: Exactement. Nous faisons passer un «check up» aux députés ministériels. Nous sommes en train de faire leur éducation. Nous sommes en train de tester leurs facultés d'attention.
Il a été également sous-entendu que nous n'élisions pas les sénateurs. L'alberta a élu un très bon sénateur, M. Waters, un homme remarquable. Les Albertains l'ont élu pour les représenter au Sénat. Le premier ministre albertain en poste à l'époque a eu le courage de respecter la volonté démocratique du peuple albertain.
Dommage que son successeur ignore la procédure. Nous avons en Alberta des gens que les Albertains ont élus pour les représenter au Sénat et qui attendent de se faire le porte-parole des Albertains au Sénat. On refuse à ces gens le droit de représenter les Albertains. Ce sont des gens qui ont travaillé très dur pour le parti d'en face, qui ont recueilli des fonds et qui ont fait de très bonnes choses pour lui. Ce sont ces gens qui ont été élus et qui devraient être au Sénat.
Qu'on le veuille ou non, si le pays veut entrer dans le nouveau siècle avec un bon système de gouvernement, avec un bon système de freins et de contrepoids, il a besoin d'un sénat élu et indépendant. Si nous ne procédons pas à cette réforme nécessaire, je pense qu'un jour nous regretterons de ne pas l'avoir fait quand nous en avions la possibilité.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais moi aussi participer très brièvement au débat sur le projet de loi C-9. J'appuie la modeste proposition présentée par le Bloc dans le but de limiter le pouvoir qu'aurait le Sénat non élu d'exercer son droit de veto en ce qui concerne les élections. Il est impossible de ne pas remarquer l'ironie de la situation: un Sénat élu aurait en quelque sorte le droit de veto sur ce que nous faisons pour faire avancer la démocratie au Canada.
J'ai écouté les interventions de certains des orateurs précédents. Je suis d'accord avec le député qui a parlé juste avant moi du pouvoir presque absolu du cabinet du premier ministre. Il a beaucoup plus de pouvoir que celui du président des États-Unis, qui est assujetti à un système de contrepoids.
Nous sommes au courant des nombreuses tentatives qui ont été faites au fil des ans pour réformer le Sénat, tentatives qui jusqu'à présent se sont toutes soldées par un échec cuisant. Je vois dans cette proposition une tentative très modeste en vue de limiter le pouvoir du Sénat. Elle propose de consulter le Sénat au lieu de lui donner un droit de veto.
Le Bloc a fait une proposition raisonnable. J'ai également écouté avec attention la mise en garde de notre collègue de Pictou—Antigonish—Guysborough contre la manière trop fragmentée dont on procède.
L'inquiétude qu'un certain nombre d'entre nous dans notre parti partageons est que, jusqu'à présent, toutes les tentatives en vue de modifier le Sénat en profondeur et d'élire les sénateurs se sont soldées par des échecs, comme on l'a vu, entre autres, avec les accords de Meech et de Charlottetown. Nous savons qu'il faut faire quelque chose, mais quoi?
De temps à autre, des députés interviennent et abordent la question d'un Sénat élu, demandant au premier ministre, lorsqu'il y a une vacance, s'il acceptera qu'il y ait une élection dans la province où la vacance existe. La réponse est toujours non, et on cite les accords de Meech et de Charlottetown comme justification.
Ce qui est proposé ici est tout simplement une manière modeste de limiter le pouvoir du Sénat. Comme je le disais, il est très ironique que des sénateurs non élus puissent avoir un droit de veto.
Un député ministériel a soulevé la question de savoir s'il existait une conjonction en anglais ou s'il en manquait une. Si c'est là son seul problème, je lui propose de présenter un amendement et de nous laisser poursuivre.
Plus tôt cette semaine, j'ai rencontré un représentant de la Bolivie, un pays que nous considérons normalement comme un pays du tiers monde. Cet homme montrait beaucoup d'intérêt pour notre système politique. Il m'a posé des questions au sujet des élections à la Chambre des communes puis il m'a innocemment demandé comment nos sénateurs étaient élus, et quelle était la durée de leur mandat.
Il est très embarrassant, notamment pour la plupart des parlementaires et probablement pour de nombreux Canadiens, de devoir avouer que nous n'élisons pas nos sénateurs mais que nous les nommons. En fait, ce n'est pas nous qui les nommons, mais le premier ministre.
Mon interlocuteur m'a regardé d'un drôle d'air, comme le font tous les invités étrangers lorsqu'ils apprennent que nous sommes l'un des rares pays dotés d'un système bicaméral, c'est-à-dire d'un système à deux Chambres dont l'une est élue alors que l'autre est nommée par une personne, sans système de freins et contrepoids et sans qu'il soit possible de soumettre les candidatures à l'examen d'un comité.
Le premier ministre peut tout simplement se lever un bon matin et décider que le moment est venu de nommer telle ou telle personne au Sénat. C'est pourquoi des personnes comme Gordon Robertson et Donald Savoie s'inquiètent beaucoup du pouvoir absolu que détient le cabinet du premier ministre et de l'absence presque totale de freins et contrepoids.
Revenons-en à l'amendement, qui est une mesure bien modeste. Elle cherche à contourner la difficulté que constitue notre incapacité de mener à bien une réforme électorale et de nous prononcer sur l'opportunité d'avoir un Sénat. Le député de Regina—Qu'Appelle soulève un excellent argument. Après avoir fait le tour de la question, il est arrivé à la conclusion qu'il fallait abolir le Sénat.
Pour faire suite à ce que disait l'orateur précédent, cela ne ferait qu'accroître les pouvoirs. Si nous avions un système de scrutin majoritaire uninominal à un tour pour certains députés et un système de représentation proportionnelle pour d'autres, nous aurions le meilleur des deux mondes. Mais nous n'aurions ce système que dans une seule chambre, la Chambre des communes.
J'appuie avec enthousiasme le modeste amendement proposé par le Bloc ce matin et j'encourage les autres députés à l'appuyer également.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je voudrais donner mon point de vue sur l'amendement qui nous donne l'occasion de réfléchir de façon générale au rôle de l'autre Chambre, certes, mais aussi de réfléchir sur le paradoxe de la procédure mise en place dans le projet de loi à l'étude, en vertu de laquelle l'autre Chambre pourrait intervenir de façon décisive dans une question concernant le processus électoral.
L'amendement n'exclut pas complètement le Sénat. Il propose de le consulter. C'est approprié. Nous pouvons consulter l'autre Chambre. Nous pouvons consulter les Canadiens. Nous pouvons mener beaucoup de consultations. La question est de savoir si l'autre Chambre, dont les membres sont nommés et non pas élus, devrait intervenir de façon décisive dans une question qui concerne les élections.
Deux arguments peuvent être invoqués à la défense de cet amendement, à mon avis. Le premier concerne le principe démocratique, les élections étant l'expression de la démocratie. Le Sénat, par définition une Chambre dont les membres sont nommés, devrait éviter de se mêler de tout ce qui concerne les élections, ne serait-ce que parce que les sénateurs ne sont pas élus.
Le second concerne une situation qui, je suppose, a toujours existé et qui semble s'aggraver depuis quelques années. Généralement parlant, la loi électorale est le fruit de la réflexion de tous les partis de la Chambre des communes et de l'un de ses comités, ou encore celui de la consultation des partis qui ne sont pas représentés à la Chambre. En confiant un tel mandat au Sénat, nous disons essentiellement que, lorsque tout le travail aura été fait par les cinq partis à la Chambre et que des consultations auront peut-être même été menées avec des partis n'ayant pas été en mesure de faire élire des députés, un rôle décisif sera confié à une chambre où, en réalité, uniquement deux partis sont représentés. Je sais qu'il y a maintenant un sénateur de l'Alliance, mais cela n'affaiblit pas vraiment beaucoup mon plaidoyer.
La réalité, c'est que le Sénat est une chambre constituée de libéraux et de conservateurs. Elle réunit des personnes qui ont été nommées au fil des ans par les partis ayant formé le gouvernement du Canada. Lorsque les libéraux sont au pouvoir, des libéraux sont nommés. Lorsque les conservateurs sont au pouvoir, des conservateurs sont nommés. Il y a parfois une rare exception où un indépendant est nommé. Dans l'ensemble, cependant, le Sénat est une chambre constituée de personnes appartenant aux deux partis politiques qui ont formé le gouvernement au fil des ans.
Comme il y a maintenant cinq partis à la Chambre, il me semble un peu étrange qu'une chambre au sein de laquelle trois des partis ne sont pas représentés puissent se voir confier ce rôle. C'est notamment pourquoi, à mon avis, cet amendement est juste non seulement sur le plan de la procédure, mais aussi sur le plan politique.
J'ai écouté avec intérêt l'apologie du Sénat à laquelle s'est livré le député de Pictou—Antigonish—Guysborough. En conservateur fidèle, il a défendu bon nombre de ses collègues au Sénat. C'est compréhensible, mais il me semble qu'il ne suffit pas de dire, comme il l'a fait, qu'il y a de bonnes personnes au Sénat et qu'elles accomplissent du bon travail. Il y a effectivement de bonnes personnes au Sénat et elles accomplissent du bon boulot. Ce n'est pas le travail qu'elles accomplissent qui est en question, mais bien le rôle qu'elles jouent.
Le Sénat joue au sein de notre démocratie un rôle constitutionnel décisif qui, à notre avis, est inapproprié compte tenu du fait que les sénateurs sont nommés. On trouve partout au pays et dans divers contextes de nombreuses bonnes personnes qui accomplissent du bon travail, mais elles ne possèdent pas le pouvoir constitutionnel des sénateurs, qui sont de bonnes personnes et qui accomplissent du bon travail. S'ils veulent être de bonnes personnes et faire du bon travail, ils peuvent aller le faire ailleurs. Ils peuvent le faire là où ils n'ont pas le pouvoir constitutionnel dont seuls les élus devraient être investis.
Voilà notre thèse, et c'est pourquoi le NPD, et avant lui le CCF, sont depuis tant d'années favorables à l'abolition du Sénat. C'est un affront à nos principes démocratiques que d'avoir au Parlement une assemblée nommée qui possède tant de pouvoir. Je le dis en toute déférence envers les nombreux sénateurs que je connais et qui sont très dévoués envers le pays et effectuent de l'excellent travail. Cela n'a rien à voir avec la thèse que je tâche de faire valoir.
Il se peut que l'abolition du Sénat ne soit pas possible et que nous devrions plutôt nous attacher à le réformer comme beaucoup le préconisent depuis des années. Nous, au NPD, sommes ouverts à cette possibilité. Nous avons appuyé l'Accord du lac Meech et nous avons appuyé l'Accord de Charlottetown même si ces accords n'abolissaient pas le Sénat, mais ils faisaient un bout de chemin pour réformer le Sénat et le rendre plus démocratique; l'Accord du lac Meech le rendait au moins plus ouvert aux suggestions des provinces, et celui de Charlottetown allait même jusqu'à en faire une assemblée élue.
Nous avons appuyé ce genre de réforme du Sénat. Nous ne tenons pas absolument à ce que le Sénat soit aboli, mais nous tenons absolument à ce que le Sénat soit réformé et finisse par devenir une assemblée démocratique plutôt qu'une assemblée nommée.
L'un des paradoxes de l'histoire récente de la politique canadienne, c'est que le parti politique qui tout au long de sa carrière a insisté sur la nécessité de réformer le Sénat, particulièrement dans l'optique de l'aliénation de l'Ouest et des régions, est celui-là même qui, selon moi et de l'avis d'autres personnes, a fait obstacle à la réforme du Sénat à quelques reprises. Bien que certains députés alliancistes souhaitent véritablement une réforme du Sénat, il me semble que si cette réforme allait de l'avant, ce serait un désastre pour eux, car le parti perdrait ainsi son cheval de bataille.
Cela peut être prouvé, car à deux reprises la possibilité de réformer le Sénat s'est présentée. À la rencontre sur l'Accord du lac Meech, les provinces allaient avoir l'occasion de fournir une liste de sénateurs potentiels devant être utilisée par le premier ministre en attendant une véritable réforme du Sénat, afin de presser le gouvernement fédéral à réformer cette institution. Si aucune réforme n'avait lieu, les provinces allaient détenir ainsi à perpétuité le pouvoir d'influencer la nomination des sénateurs. Toutefois, cela ne s'est pas produit. Ce fut une autre occasion pour l'Alliance canadienne de s'indigner. Lors de la rencontre à Charlottetown, nous avons eu une autre occasion.
Je crois qu'il faut le signaler parce que, à moins que quelque chose de dramatique ou de prometteur se produise bientôt, l'histoire de nos institutions démocratiques révélera que ceux qui avaient fait grand cas de la réforme du Sénat seront ceux qui y ont fait obstacle.
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je ne devais pas prendre la parole à ce sujet, mais, après avoir entendu le discours de mon collègue néo-démocrate, je ne peux m'empêcher de répondre à certaines des remarques qu'il a faites. Il dit que c'est nous qui faisons obstacle à la réforme du Sénat, alors que nous avons toujours préconisé une telle réforme. Je n'en crois pas mes oreilles.
J'aimerais tirer les choses au clair une fois pour toutes. Très souvent, lorsque nous parlons d'un Sénat non élu, le premier ministre en particulier aime faire ce que le député de Winnipeg—Transcona vient de faire, soit dire que nous avions le choix et que nous avons rejeté l'Accord de Charlottetown.
Monsieur le Président, je tiens à vous dire et à signaler aux députés de la Chambre et à tous les Canadiens qui ont déjà entendu notre histoire que nous étions contre l'Accord de Charlottetown pour 100 raisons. Malheureusement, les quelques pas timides vers une réforme du Sénat n'étaient pas suffisants pour que nous avalions toutes les saloperies qui nous étaient servies avec ce repas. Non, nous n'étions pas prêts à cela.
En fait, l'accord mentionnait la possibilité d'élections pour le Sénat, mais, si nous l'examinons plus attentivement, nous voyons qu'il ne donnait pas à la population le droit d'élire les sénateurs. C'était une possibilité, mais, si ma mémoire m'est fidèle, l'Accord de Charlottetown disait que les sénateurs pourraient aussi être choisis parmi des listes fournies par les assemblées législatives des provinces. Ce serait là une autre façon d'avoir un Sénat non élu.
Nous maintenons notre position selon laquelle, dans une société moderne comme le Canada, qui se dit une démocratie, nous ne devrions avoir rien de moins qu'un Sénat composé de gens élus par la population qu'ils représentent, tout comme nous sommes envoyés ici par les électeurs de nos circonscriptions. C'est comme cela que les sénateurs devraient être élus. Lorsqu'ils justifient leur opposition à un Sénat élu en disant que nous n'avons pas accepté l'Accord de Charlottetown, le premier ministre et les députés néo-démocrates déforment les faits.
Au sujet du Sénat, j'ajouterai que nous croyons que la Chambre est équilibrée parce qu'elle représente la population du pays. Actuellement, et ce n'est pas d'aujourd'hui, 60 p. 100 des députés représentent le Québec et l'Ontario puisque ces deux provinces comptent 60 p. 100 de la population du pays. Nous acceptons cette situation. C'est la représentation selon la population.
Toutefois, le Sénat compte 24 sénateurs de l'Ontario et 24 du Québec. Combien de sénateurs représentent la Colombie-Britannique, la troisième province la plus populeuse du pays? Six. Est-ce que l'Accord de Charlottetown a corrigé cette anomalie? Non. Non seulement devons-nous supporter le fardeau écrasant de l'autorité législative de deux provinces qui dictent aux autres quoi faire dans le pays, mais nous voyons la même situation au Sénat.
Franchement, il faut changer de système pour prévoir la représentation proportionnelle des provinces au sein du Sénat. Les États-Unis et d'autres pays ont choisi la représentation proportionnelle. Le Maryland et la Californie ont chacun deux sénateurs, ce qui ne se rapporte pas à leurs populations mais témoigne du fait que le rôle du Sénat américain est de trouver un équilibre entre les intérêts des régions et des États et ceux de la majorité prédominante; dans notre cas, ce serait faire contrepoids à la Chambre des communes dont les députés sont issus majoritairement des deux provinces les plus populeuses.
Pour ce qui est de l'amendement donnant au Sénat un contrôle quelconque de la réforme des dispositions législatives électorales, je le qualifie d'oxymoron. Ces sénateurs non élus auront leur mot à dire dans nos élections. Quelle absurdité! Je me contenterai de dire très clairement qu'à mon avis ils devraient être élus. Ils devraient représenter les gens qu'ils sont censés représenter.
Dans le cas de ma province, l'Alberta, 23 députés sur 26 représentent l'Alliance canadienne. C'est la simple réalité. Les Albertains croient aux politiques, aux principes et à l'intégrité de notre parti et ils ont donc voté pour nous.
Pour qui les Albertains ont-ils voté lorsque nous avons tenu des élections sénatoriales? Ils ont choisi deux personnes liées à l'Alliance canadienne, leur accordant une majorité supérieure à celle de tout député de la Chambre des communes. Ce sont nos sénateurs désignés. Les respecte-t-on? Aucunement. Qui le premier ministre nomme-t-il lorsqu'il y a un siège vacant en Alberta?
Je ne veux pas sembler irrespectueux, car je sais que c'est contre le Règlement, mais je le dis sincèrement. J'ai beaucoup de respect pour les sénateurs de notre province. Je connais un peu Tommy Banks. J'ai admiré son travail pendant des années. Il a maintenant été nommé au Sénat et c'est tant mieux pour lui. Je serais très heureux s'il s'était présenté et que les gens avaient voté pour lui. Toutefois, nous avons tenu des élections pour choisir des sénateurs désignés et il ne s'est même pas présenté.
J'ai entendu dire qu'aux États-Unis il fallait remporter une élection pour devenir sénateur. Ici au Canada, c'est le contraire. Pour être nommé sénateur, il faut perdre une élection. Des candidats qui se présentent sous la bannière du parti au pouvoir et qui perdent dans leur circonscription finissent par être élus au Sénat. C'est absurde. Cela ne cadre pas du tout avec les principes de la démocratie moderne.
Il est question d'un Sénat qui équilibre les pouvoirs de cette institution, un Sénat où toutes les provinces seront représentées également par le même nombre de sénateurs. Il est question d'un Sénat élu par les Canadiens. Nous parlons d'un Sénat efficace, ce qui est déjà fondamentalement le cas, selon moi, avec les pouvoirs que le Sénat détient à l'heure actuelle.
J'exhorte fortement les députés, surtout le premier ministre, à bien réfléchir avant de dire que nous avons rejeté la notion d'un Sénat élu, car nous n'avons pas appuyé l'accord de Charlottetown. On ne peut faire avaler à quelqu'un une chose qui n'est pas mangeable en l'enrobant dans un bel emballage. L'emballage était bien attrayant, mais le contenu était vraiment trop difficile à avaler. Les Canadiens ont prouvé que nous avions raison. Ce sont eux qui ont rejeté l'accord de Charlottetown et non nous. Tout ce que nous avons fait, c'est participer au débat.
Lorsque nous parlons du débat sur l'Accord de Charlottetown, je me rappelle que je venais simplement d'être élu candidat pour notre parti à l'époque. J'ai été choisi en juin 1992 pour représenter notre parti au cours des élections fédérales suivantes qui, nous le pensions, auraient lieu peut-être à l'automne. Bien entendu, nous savons que les conservateurs les ont retardées, car tout indiquait qu'ils allaient les perdre et Dieu sait qu'ils les ont perdues.
J'étais un néophyte, un professeur de mathématiques et d'informatique, et on m'a demandé de participer à une tribune dans l'une des villes de ma circonscription pour discuter de l'Accord de Charlottetown. J'étais donc sur l'estrade avec, imaginez, la femme qui jusqu'à récemment était le chef du Parti libéral de l'Alberta. À l'époque, elle s'appelait Nancy Betkowski. Elle était ministre dans le gouvernement conservateur de l'époque en Alberta. Il y avait à côté d'elle Bryan O'Kurley, l'ancien député de Elk Island. Il était, bien entendu, conservateur. Il y avait donc un député conservateur fédéral, une ministre conservatrice provinciale et moi-même.
Dans mon discours d'introduction, qui était l'un de mes premiers discours publics, je me rappelle avoir dit clairement que je n'avais jamais pensé que je verrais le jour où je me retrouverais sur une estrade avec deux autres personnes qui seraient considérées comme des personnes de poids par rapport à moi.
Il se trouve que l'Alliance avait les bonnes idées. Notre parti avait bien analysé l'Accord de Charlottetown. Nous maintenons notre position et, comme le disent les participants à ce bon jeu télévisé, «c'est ma réponse finale».
[Français]
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir, ce matin, de prendre part au débat pour appuyer l'amendement proposé par le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière. Dans la réforme électorale proposée, on dit que le Sénat doit être consulté, ce groupe de sages qui représente plus les intérêts financiers de l'élite économique canadienne que le peuple canadien.
Je pense que ces gens, qui ne sont pas élus, ne devraient pas imposer leur vision de ce que devrait être l'élection des députés de cette Chambre. C'est leur attribuer un pouvoir et une autorité qu'ils n'ont pas légitimement, parce qu'ils ne sont pas élus.
Je ne peux pas non plus passer sous silence la position de mon collègue de l'Alliance qui, lui, souhaite ce que nous appelions, dans l'entente de Charlottetown, le Sénat triple E: élu, efficace, et j'oublie ce que signifie le troisième E.
Je voudrais que le député y pense. Nous, du Bloc québécois, disons qu'il faut abolir le Sénat; il n'a plus sa raison d'être. Le Sénat, c'était valable sous César, dans la Rome antique. Mais je voudrais demander au député, lui qui proclame toute la beauté et la grandeur d'un Sénat élu, ce qui arrive lorsqu'un Sénat élu est opposé, par exemple, à une politique du parti au pouvoir.
Nous, au Québec, l'avons vécu. À un moment donné, au Québec, il y avait un parti indépendantiste au pouvoir, et au fédéral, il y avait 75 députés d'un parti fédéraliste. Les députés fédéralistes disaient: «On représente aussi bien le peuple québécois que les députés de l'Assemblée nationale.» Alors, qu'arrive-t-il lorsqu'un Sénat élu dit aux élus de cette Chambre: «On représente aussi bien les Albertains qui nous ont élus que l'Alliance canadienne qui a eu 23 députés sur 26. On a autant de légitimité que l'Alliance»?
C'est là que les affaires se corsent, que ça devient compliqué, lorsque cette deuxième Chambre élue revendique et se prétend d'une autorité parfois supérieure à l'autorité conférée aux élus de ce Parlement. À ce moment-là, on ne règle pas de problème, on crée des chicanes entre les élus d'ici et les élus de là-bas.
Au Québec, en 1965, on a connu cela aussi. Ce n'est pas une notion qui tombe du ciel. Jusqu'en 1965, on avait aussi un sénat au Québec, qu'on appelait le conseil exécutif; il a été aboli en 1965. Depuis ce temps, jamais personne au Québec n'a demandé le retour de ce sénat provincial qui existait alors. On n'a jamais entendu dire, dans la presse écrite ou ailleurs, que c'était une perte immense pour la démocratie ou pour le peuple du Québec. À toutes fins utiles, cette assemblée de personnes non élues ne représentait en rien les intérêts de la population au quotidien.
Maintenant que mon distingué collègue de l'Alliance, qui nous a fait l'éloge du Sénat triple E, s'est libéré de sa discussion avec son collègue, je lui demanderais de réfléchir à la chose. Il disait qu'en Alberta, 23 députés de l'Alliance avaient été élus, sur un total de 26. Donc, si les sénateurs élus de l'Alberta venaient en contradiction avec les députés élus de l'Alberta, donc les alliancistes, ils pourraient dire, comme Trudeau nous a dit, à nous—lui qui était un élu du Québec envoyé ici—: «Je représente aussi bien les Québécois que le gouvernement du Québec.» Et il nous avait même traité de tribu, et autre chose.
On voit la dichotomie que cela a créé au sein de la population québécoise, entre les fédéralistes et les souverainistes. À ce moment-là, on verrait une semblable scission entre les alliancistes et les «sénatoristes», si on peut les appeler ainsi.
La position du Bloc québécois est donc d'abolir cette institution désuète qui date, comme je le disais, d'avant César et la Rome antique. Cette institution coûte d'ailleurs très cher, rapporte peu et défend très peu ou, du moins, ne représente pas les intérêts quotidiens de la population. Ce sont des gens plus souvent qu'autrement récompensés pour des services rendus.
Je suis d'accord avec le député qui dit qu'aux États-Unis, il faut être élu pour devenir sénateur. Au Canada, pour le devenir, il faut être défait. Un candidat doit s'être présenté dans un comté lors d'une élection et s'être fait casser, renoncer ou renier par la population. C'est alors qu'on devient sénateur. C'est l'historique du Sénat au Canada.
La plupart de ceux qui siègent au Sénat, ce sont des remerciements, des façons de reconnaître des états de service qui, parfois, n'on rien à voir ou à faire avec la gestion administrative d'un État ou d'un pays. C'est une reconnaissance toute simple pour un appui, un coup de pouce, un mot gentil à l'endroit du premier ministre, lors d'une période électorale par exemple, ou une tentative d'influencer la population lors d'un vote et, à ce moment-là, comme récompense, on a une nomination au Sénat.
Par exemple, on a des nominations dans d'autres domaines. J'ai appris que mon adversaire de 1993, celui qui se présentait contre moi dans Chambly, est maintenant président de la Société canadienne des postes. Je me réjouis de sa nomination, c'est un homme compétent. Ce n'est peut-être pas le processus normal pour accéder à ce genre de fonction, mais le hasard fait bien les choses. L'actuel président de la Société canadienne d'hypothèques et de logement est, à mon avis, un homme compétent et je me réjouis de sa nomination.
Par contre, j'en connais beaucoup d'autres qui, eux, n'avaient aucune espèce de compétences en gestion ou quoi que ce soit. Pour les remercier de s'être présentés ou d'être allés carrément à l'abattoir—puisqu'on savait que dans tel ou tel autre comté, les choses étaient perdues d'avance—, on leur disait: «Présentez-vous là et vous aurez votre récompense.» Dépendant, je présume, de la qualification des gens, on les retrouvait à différents niveaux dans des organismes, appareils gouvernementaux ou sociétés de la Couronne. On en voit ici, sur la Colline parlementaire, qui sont adjoints dans des bureaux de ministre et dont la seule qualité est d'avoir perdu une élection.
Nous disons que ce projet de loi, ce changement de la Loi électorale, est nécessaire. Il faut donner de l'autorité au directeur général des élections, qui est un citoyen neutre. Jusqu'à ce jour, sa neutralité n'a jamais été remise en question dans l'exercice de ses fonctions. Il y a beaucoup de lacunes dans la Loi électorale.
Tous les députés ici sont des élus. Comme le disait le député de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, personne n'a été élu ici après avoir fait une campagne électorale à la mitraillette dans son comté. Nous sommes tous des représentants du peuple, démocratiquement élus. Nous avons le droit de siéger en cette enceinte, même si cela ne fait pas toujours plaisir au parti d'en face. L'opposition a le droit d'être là et, dans notre système parlementaire, elle a son importance.
Je dis qu'il faut changer et modifier bien des choses. Sûrement que le vote électronique fera partie des changements. Le projet de loi donne le pouvoir d'instituer un vote électronique, mais on peut se poser des questions au sujet d'autres choses. Par exemple, lorsqu'un propriétaire de maison pour personnes âgées en perte d'autonomie a le droit de voter pour tous les résidants de sa bâtisse ou de son hôpital, c'est un peu, à mon avis, fausser la règle démocratique.
Il faudrait peut-être un jour penser à avoir une carte de l'électeur, parce qu'il y a de la substitution de personnes là-dedans comme ça ne se peut pas. Il y a des gens qui—on appelait cela «passer des télégraphes»—vont voter huit, dix, douze ou quinze fois lors d'une même journée de vote. Malheureusement, la loi qui gouvernait la dernière élection était, elle aussi, nouvelle. Elle avait été substantiellement modifiée et, au lieu de faire mieux, on a fait pire.
J'espère qu'à l'avenir on pourra, avec le vote électronique ou d'une autre manière, aller vers le mieux et non vers le pire.
[Traduction]
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le débat d'aujourd'hui est intéressant. Quand on parle de démocratie, la plupart des politiciens ont quelque chose à dire.
J'ai quelques renseignements sur la genèse de ce projet de loi. Il est la conséquence de ce qui est arrivé au Parti communiste du temps où il avait présenté des candidats et de ce qui est arrivé devant les tribunaux. Le parti a été privé de ses biens parce qu'il avait présenté moins de 50 candidats. Selon moi, le gouvernement est allé trop loin.
Il fait tout ce qu'il peut pour avoir le monopole de la vie politique et trouver une manière d'exclure les partis dont il craint qu'ils ne deviennent gênants. Ce n'est pas ça la démocratie. Il n'est pas acceptable que le gouvernement prenne les mesures qu'il prend.
La seule concession qu'ait faite le gouvernement libéral face à la décision des tribunaux dans cette affaire est que maintenant il dit qu'un parti n'a besoin de présenter que 12 candidats pour avoir le statut de parti sur les bulletins de vote. C'est insignifiant quand on pense à tout ce que ça prend pour qu'un parti politique puisse exister.
Il faut que les candidats puissent recueillir des fonds et se mobiliser quand il y a des élections partielles. Il faut qu'ils puissent compter sur un certain actif d'une élection à l'autre, et sur des rentrées continues pour financer leurs activités politiques. Il faut qu'ils puissent mener ces activités sans être entravés par la taille minimum de leur parti fixée par le gouvernement. Tout cela est très antidémocratique.
La question doit être envisagée, non pas du point de vue d'un parti émergeant ou d'un petit parti, mais de celui du public. Le public ne mérite-t-il pas de savoir, d'après l'étiquette, ce que cette personne voudrait que l'étiquette soit?
Rien de tout cela n'est logique si on étudie la question dans un esprit réellement démocratique. Ce n'est logique que si on essaie de limiter le spectre politique et de créer un monopole en politique.
Cela révèle la position et l'attitude du gouvernement sur la gouvernance. Pour moi, qui suis ici depuis huit ans, ce n'est qu'un signe de plus que le gouvernement aime trop être au pouvoir. Il est prêt à rejeter tout ce qui risque de troubler le plaisir qu'il prend à gouverner.
Cela se traduit de bien des façons. J'en arrive à la conclusion que les ministériels, d'arrière-ban ou du Cabinet, sont tellement imperméables aux sentiments d'autrui que, bien souvent, ils ne saisissent même pas d'autres points de vue, ni les conséquences néfastes de certains de leurs actes. Ces conséquences ne se produiront peut-être pas aujourd'hui ou demain, mais elles s'infiltrent peu à peu dans notre société et dans notre soi-disant démocratie, de sorte qu'elles érodent quotidiennement les principes démocratiques fondamentaux, les droits fondamentaux de la personne.
Cette mesure fera l'objet de nouvelles contestations judiciaires. Le gouvernement a tenté de limiter les dépenses de tiers partis au sujet, entre autres, de la publicité. Il s'agit là d'une attitude et d'un positionnement qui visent à accroître le niveau de confort du gouvernement, à renforcer son monopole sur la politique et à exclure la critique.
Le gouvernement est très cohérent dans sa façon d'aborder toutes ces questions. À long terme, lorsque des pressions sont exercées pour que des réformes soient opérées, le statu quo est pire que l'immobilisme. En fait, le statu quo est un recul, car la plupart des autres démocraties occidentales vont de l'avant au lieu de maintenir le statu quo. Lorsque nous nous comparons aux autres en ce qui concerne les principes démocratiques fondamentaux, nous avons beaucoup plus de mal à prouver que notre pays est une vraie démocratie.
Je veux parler d'une chose qui me tient beaucoup à coeur. Au cours de ce débat, des députés ont fait part de leurs expériences concernant l'accord de Charlottetown, des discussions, des opinions et des faits qui ont abouti à cet accord.
En tant que Canadien, j'avais de bonnes raisons en 1992 de réagir à cet accord qui, à mon avis, était imposé par tous les partis politiques représentés à la Chambre et par tous les premiers ministres provinciaux. Nous n'étions pas ici. Nous n'avions qu'un seul député. L'élite de la vie politique canadienne a tenté de forcer les Canadiens à accepter un accord qui aurait changé le pays à jamais et qui aurait fait en sorte qu'il aurait été encore plus difficile d'apporter ensuite des changements efficaces, progressistes et démocratiques. Cependant, nous sommes revenus en arrière même sans le référendum.
Personnellement, j'avais d'excellentes raisons et c'est ce qui m'a incité à sauter dans l'arène politique. Sans cette motivation, je ne me serais jamais présenté comme candidat fédéral et je ne serais pas ici aujourd'hui. C'est aussi simple que cela. Que ce soit une bonne chose ou non, je suis heureux d'être ici.
J'ai trouvé intéressant d'être du côté du non avec des ressources limitées, des fonds que nous avions levés à coups de sacrifices personnels, face au côté du oui dont les coffres étaient bien garnis. Aucune comparaison ne tenait. Si l'on avait mené une vérification judiciaire, on aurait sûrement relevé des affaires louches. Je suis reconnaissant d'avoir pu intervenir dans le débat sur ce projet de loi.
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir au nom des électeurs de Calgary-Est. Je n'avais pas l'intention d'aborder ce projet de loi, mais à mesure que le débat se déroulait et que les députés exprimaient leurs points de vue, je me disais qu'il serait bon que je prenne part au débat.
Les problèmes mentionnés ont de nombreuses ramifications. Les députés de ce côté-ci de la Chambre ont exhorté le gouvernement à examiner de près la façon dont le Parlement fonctionne, dont les élus travaillent et dont le pouvoir est concentré au BPM.
Je voudrais faire valoir deux points. Avant de parler du Sénat et de la façon dont fonctionne notre démocratie, je veux aborder un aspect des élections. Au moment où je signais mon rapport final, la directrice du scrutin m'a signalé qu'elle avait reçu, à l'instar des autres directeurs de scrutin, des plaintes au sujet de certaines observations que le directeur général a faites au sujet des élections dans le cadre de son processus de consultation.
Le directeur général des élections a déclaré qu'il avait discuté avec des scrutateurs et des intervenants clés avant de rédiger son rapport. Malheureusement, il a fait certaines remarques au sujet de scrutateurs qu'il n'avait pas consultés, sans dire d'ailleurs pourquoi il ne les avait pas consultés. Cela a grandement mécontenté les scrutateurs qui n'ont pas été consultés. En mentionnant ici ce problème, j'espère que le directeur général des élections tentera de le régler auprès des scrutateurs en question, qui sont loin d'être contents des observations qu'il a formulées.
Parlons de la démocratie dans notre pays. En 1999, j'ai eu le privilège d'être invité par l'ancien gouverneur général du Canada à participer à une visite d'État dans cinq pays d'Afrique. On m'a indiqué que l'objectif de la visite d'État était de faire la promotion de la démocratie dans ces pays où la démocratie avait du mal à s'enraciner.
En regardant la liste des participants, j'ai constaté que deux sénateurs se joindraient au groupe. Les propos que je tiendrai maintenant n'ont rien à voir avec les deux sénateurs en question, ni avec leur caractère. Je suis convaincu que ce sont des hommes remarquables. Je les connais très bien et je les respecte beaucoup.
Il est ici question de l'institution, non pas des individus. J'ai trouvé extrêmement curieux, et même troublant, d'entreprendre une visite d'État dans d'autres pays pour aller parler de démocratie alors que j'étais accompagné par deux personnes symbolisant ce qui n'est pas de la démocratie en notre pays, des personnes qui siègent en une Chambre, mais qui ne sont pas élues par la population du Canada. Elles sont nommées par un seul individu, à son gré. Comment peut-on parler de démocratie? Cette institution incarne tout le pouvoir concentré entre les mains d'un seul homme.
Nous allons dans d'autres régions du monde expliquer ce qu'est la démocratie et dire comment elle fonctionne chez nous. Il y a là une profonde contradiction. J'ai donc écrit à la gouverneure générale pour lui faire part de cette opinion et lui demander si, lorsque je rencontrerais des parlementaires d'autres pays, je pourrais leur signaler qu'il y a un problème de démocratie, même chez nous, que notre démocratie n'est pas parfaite, que nous avons besoin de réformes nous aussi. Au bout d'un moment, j'ai reçu de la gouverneure générale la permission d'aborder cette question.
À compter de ce moment-là, je me suis assuré, lors de toutes ces rencontres, que les parlementaires comprennent que la démocratie ne fonctionne pas parfaitement au Canada, que le Canada a aussi des problèmes et que les Canadiens réclament une réforme pour que notre démocratie fonctionne pleinement.
Chaque fois que j'ai abordé ce sujet, la réaction des parlementaires d'autres pays a été étonnante; ils ont été interloqués et ils ont écouté de toutes leurs oreilles; ils n'arrivaient pas à croire que le Canada ait une chambre haute dont les membres n'étaient pas élus, mais nommés et, pis encore, nommés par une seule personne. Ils n'arrivaient pas à croire que ce soit possible et que ce soit là le Parlement du Canada. Plus je parlais, plus ils étaient perplexes. Je leur ai dit qu'ils ne devaient pas adopter cette formule. Je leur ai dit que, en jetant les fondements de leur démocratie, ils devaient éviter d'importer ces erreurs, ces lacunes de la démocratie.
Lorsque je rencontre des délégués étrangers en visite dans notre pays, la première chose qu'ils demandent, c'est comment il se fait que nos sénateurs ne sont pas élus. La démocratie, c'est la voix du peuple, pas la voix de l'élite. Cette voix ne peut s'exprimer que par le biais d'élections, pas par celui de nominations.
Il s'agit ici d'une lacune fondamentale de notre démocratie. Voilà pourquoi des Canadiens d'un océan à l'autre demandent une réforme du Parlement afin que celui-ci les représente vraiment.
Les provinces canadiennes ont aussi demandé que leur voix soit entendue. C'est pour cette raison que l'Alberta a procédé à l'élection de deux sénateurs. C'est là le choix des Canadiens.
Un ex-sénateur, M. Ghitter, a démissionné du Sénat parce qu'il avait l'impression que cette institution ne représentait pas la population canadienne. Je le félicite de sa décision. J'espère que c'est pour cette raison qu'il a remis sa démission.
Le sénateur St. Germain fait toujours partie du Sénat, mais il a déclaré publiquement qu'il aimerait être un sénateur élu. Je suis certain que cette idée plairait aux sénateurs. J'ai rencontré des sénateurs très gentils. Il y a d'excellents sénateurs qui travaillent d'arrache-pied. Je suis certain que si tous ces sénateurs se portaient candidats et qu'ils étaient légitimement élus par la population, ils seraient bien plus heureux qu'actuellement de siéger à la Chambre haute.
Voilà les observations que je voulais faire. J'espère que tout ce que les députés disent dans le cadre de ce débat aura des répercussions sur le gouvernement et que celui-ci veillera à réformer le Parlement et à faire en sorte que la voix du peuple y soit entendue.
Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le vice-président: Le vote porte sur la motion no 1. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le vice-président: Convoquez les députés.
Et la sonnerie s'étant arrêtée:
M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'étais clairement désavantagé puisque, comme vous le savez, je suis unilingue anglais. Il n'y avait pas de traduction simultanée et je n'ai pas compris ce qu'a dit le député ministériel. Si vous voulez bien me dire ce qu'il a dit, je pourrais peut-être lui répondre.
Le vice-président: Le whip libéral, au nom du gouvernement, et le député de Crowfoot, au nom de l'opposition officielle, ont pris des chemins différents, mais nous en sommes arrivés au même résultat. Lorsqu'un vote est reporté au prochain jour de séance, et dans ce cas il s'agit d'un vendredi, il est automatiquement reporté au lundi.
Le vote par appel nominal sur la motion no 1 de l'étape du rapport aura donc lieu le lundi 23 avril, à la fin des initiatives ministérielles.
* * *
LA LOI D'EXÉCUTION DU BUDGET DE 1997
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 2 avril, de la motion: Que le projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi d'exécution du budget de 1997 et la Loi sur la gestion des finances publiques, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je vous remercie d'apporter cette précision. Je vous sais gré de compenser pour mes déficiences. Je suis entouré de gens qui font cela pour moi et je l'apprécie vraiment.
Je commencerai par rappeler que le projet de loi C-17, la mesure maintenant à l'étude, vise à modifier la Loi d'exécution du budget de 1997. Il s'agit d'une loi adoptée depuis presque quatre ans, et nous allons maintenant la modifier. Elle avait pour objet d'exécuter le budget de 1997.
Au fil des dernières années, nous avons été saisis de plusieurs de ces projets de loi. Il y a un an environ, nous avons discuté d'un projet de loi d'exécution ayant un effet rétroactif sur dix ans. Il se trouve que les mesures financières du gouvernement sont d'abord annoncées par le ministre des Finances dans un exposé budgétaire, et cela leur donne force de loi. Puis, par la suite, nous les exécutons. Nous imposons des taxes aux contribuables et en percevons le produit. Si le budget prévoit l'octroi de subventions, l'argent est versé et ainsi de suite. Nous finissons éventuellement par adopter les mesures que nous avons mises en application.
Il me semble que le processus à l'égard de certaines de ces mesures pourrait être accéléré. Nous n'aurions pas le problème de gens qui ne savent pas vraiment à quoi s'en tenir dans certains cas.
Je voudrais parler un peu du projet de loi C-17 et plus généralement des budgets et des finances du gouvernement.
Tout d'abord, le projet de loi permet notamment d'augmenter le financement pour la recherche et le développement. Je ne pense pas qu'il y ait bien des Canadiens qui ne reconnaîtraient pas l'importance de la R-D. En fait, au fil des siècles, notre niveau de vie a été haussé grâce à des inventions. Parfois, les découvertes sont faites par accident et, parfois, elles sont le couronnement d'un processus de recherche méthodique qui a duré des années. Enfin, elles sont centrées sur ce qu'il faut faire exactement pour atteindre un objectif donné, par exemple, dans le domaine de la santé.
Il y a bien des décennies, je me souviens d'avoir lu au sujet de Marie Curie qui a inventé les rayons X. Une chose intéressante s'est produite. Elle a mis une source d'uranium dans le même tiroir qu'une pellicule et, surprise, celle-ci s'est obscurcie. Elle en a donc conclu que la radiation provenant de la source avait causé un effet sur la pellicule, ce qui était évidemment une réaction chimique.
Grâce à cette invention, nous pouvons voir ce qui se passe à l'intérieur du corps d'une personne, qu'elle soit malade ou non. Habituellement, bien sûr, on se sert des rayons X pour examiner un blessé ou un malade. Nous pouvons voir ce qu'il en est sans avoir à les opérer. Toutefois, au cours des 40 ou 50 dernières années, il a tout de même souvent été nécessaire de pratiquer une opération chirurgicale pour savoir ce qui se passait vraiment.
Je me souviens aussi d'un événement très important dans ma vie quand, le 1er juillet 1968, je me suis fracturé une cheville. J'accompagnais une bande de garçons à titre de conseiller dans une colonie de vacances pour quelques jours. Pendant une randonnée pédestre, nous avons sauté par-dessus une clôture. Je ne sais pas si ça vous semble plausible, monsieur le Président. Même si cela vous paraît impossible, j'ai bien sauté par-dessus cette clôture. Malheureusement, j'avais la jambe tordue quand j'ai atterri de l'autre côté de la clôture, et ma cheville s'est fracturée, de sorte que j'ai dû rentrer au camp à cloche-pied. Compte tenu de ma corpulence, et j'ai toujours été costaud, le retour au camp a été très pénible. Je pense que la distance à parcourir pour rentrer au camp était tout près d'un kilomètre. J'ai dû parcourir toute cette distance sur une jambe à l'aide d'une béquille de fortune parce que les jeunes garçons ne pouvaient pas me porter. Je suis certain que tout le monde comprend cela.
On m'a dit à l'hôpital qu'ils n'auraient pas à me couper la jambe. Pourtant c'est ce qu'avait suggéré un autre conseiller quand je suis arrivé au camp en clopinant. Il a dit aux autres qui étaient là: «Hé! les gars, allez chercher une hache. Nous devons amputer.» Cela nous a fait rire un peu.
La première chose qu'on a fait à l'hôpital, c'est prendre une radiographie de ma jambe. On a ainsi pu déterminer que ma cheville était fracturée et on m'a fait un plâtre, ce qui s'est avéré extrêmement douloureux. J'ai souffert pendant six semaines dans ce plâtre. Ça a pris presque deux ans avant que ma cheville ne soit complètement guérie. Même lorsque je ne suis pas blessé, mes chevilles doivent toujours travailler assez fort pour porter tout ce poids. Grâce à la recherche, on a été capable de déterminer la nature et la gravité de ma blessure à la cheville sans avoir à ouvrir pour aller voir.
Toutefois, je me souviens de certains cas de gens qui étaient malades ou blessés sans qu'on sache exactement ce qu'ils avaient.
Pour pouvoir poser un diagnostic, il fallait faire ce qu'on appelait à l'époque de la chirurgie exploratoire. Cela se fait encore à l'occasion, mais beaucoup moins qu'avant. La recherche médicale qui nous a donné les radiographies il y a de nombreuses années a évolué depuis ce temps pour nous donner d'autres outils de diagnostic, comme le diagnostic audio, la tomodensitométrie et l'imagerie par résonance magnétique ou IRM. Toutes ces différentes techniques qui permettent de voir ce qui se passe dans le corps d'une personne sont très utiles. Ces techniques sont le résultat d'un processus très minutieux de recherche, de développement et d'essai.
Ce qu'il faut se demander, c'est d'où devrait venir l'argent qui sert à financer cette recherche. J'étais universitaire plus tôt dans ma vie. J'ai fait des études universitaires, et ce furent probablement les plus belles années de ma vie. J'avais plus de temps à ma disposition à cette époque, et je le dis en toute déférence aux pages qui ont beaucoup à faire comme étudiants. J'avais plus de temps pour lire des livres uniquement pour le plaisir que je ne semble en avoir maintenant que je suis passé à la vie adulte et aux responsabilités familiales, avec tous les aspects connexes que cela comporte.
En tant qu'étudiant et, plus tard, enseignant dans un institut technique, j'ai toujours estimé qu'il y avait un cadre se prêtant à l'utilisation de fonds publics pour financer la recherche et le développement. On peut penser, par exemple, au contexte de recherche dans une université, en collaboration peut-être avec le Conseil de recherches médicales du Canada. En Alberta, nous avons de très dynamiques composantes de l'Alberta Research Council à Edmonton et Calgary. Je connais plus expressément celui d'Edmonton, mais il y en a aussi un à Devon. Chacun mène différents travaux de recherche, notamment dans le domaine médical dont j'ai déjà parlé.
Beaucoup de travaux de recherche portent sur la transformation et le raffinage des produits pétroliers en Alberta. Le conseil cherche à trouver des façons plus efficaces d'utiliser l'énergie, afin que nos ressources non renouvelables soient utilisées méticuleusement et que nous ne les épuisions pas.
Ces projets de recherche sont très utiles. Bien que le financement de bon nombre de ces projets par l'entreprise privée soit approprié, et cela se produit en grand, il y a lieu d'utiliser des fonds publics par l'entremise des universités, des conseils de recherche et de la totalité des institutions subventionnaires que nous avons mises sur pied ces dernières années.
Le projet de loi C-17 comprend du nouveau pour la Fondation canadienne pour l'innovation. Alors que celle-ci avait un budget de 500 millions de dollars, selon le mini-budget présenté par le ministre des Finances l'automne dernier, le projet de loi ajoute maintenant 750 millions de dollars, portant le total à quelque 1,25 milliard de dollars pour la recherche. Cette partie du projet de loi est très valable.
Je suis plutôt étonné que vous me signaliez que mon temps de parole achève, monsieur le Président. J'avais l'impression que je disposais de 20 minutes et je suis prêt à parler pendant 20 minutes.
Le président suppléant (M. Price): C'était une intervention de 10 minutes, mais le député partageait son temps avec le député qui a pris la parole avant lui.
M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'ignorais que je partageais mon temps avec un autre député. Je pensais que j'étais le premier à avoir la parole. Puis-je demander à la Chambre son consentement pour qu'on m'accorde 10 minutes de plus? Je n'en suis qu'à la moitié de l'introduction.
Le vice-président: Pour l'information du député d'Elk Island, il partageait son temps avec le député d'Esquimalt—Juan de Fuca. Il resterait normalement à ce dernier quelques minutes pour les questions et observations. Comme il a dû s'absenter, nous avons poursuivi le débat en donnant la parole au député d'Elk Island pour les 10 minutes qui restaient.
Le député d'Elk Island a demandé s'il avait le consentement unanime de la Chambre pour qu'on lui accorde 10 minutes de plus pour mettre fin à ses remarques. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai suivi avec grand intérêt les remarques de mon collègue d'Elk Island. Puisque les députés du côté de la partie gouvernementale refusent de lui laisser le temps de poursuivre, et je ne vois pas de quoi ils ont peur, j'aimerais qu'il profite des cinq minutes qui restent pour dire ce qu'il avait l'intention de dire.
M. Ken Epp: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de venir à ma rescousse, car j'ai quelques inquiétudes à formuler. J'ai donné mon appui à l'idée du financement de la recherche et du développement, surtout de la recherche médicale, qui contribue à améliorer le niveau de vie. Nous devons agir dans ce sens.
Nous devons reconnaître que les Canadiens sont dans une situation désespérée au plan de la recherche et du développement. Ce projet de loi n'aidera en rien la situation. Le gouvernement devrait s'atteler à la tâche.
Injecter des fonds dans la recherche et le développement est un chose, mais il faut aussi créer les conditions propices à une culture de la recherche et du développement. Cette culture s'épanouit dans un contexte universitaire qui rassemble des penseurs et des compétences de haut calibre. Elle s'épanouit dans des établissements de recherche de grande qualité capables d'attirer les meilleurs talents dans le monde.
Nous avons toutefois un problème de taille, ces chercheurs sont rémunérés en dollars canadiens. Le projet de loi prévoit l'octroi d'un montant supplémentaire de 750 millions de dollars, outre les 500 millions prévus initialement, ce qui fait plus que doubler le financement. Mais cela ne sert qu'à compenser le fait que nos chercheurs sont payés en dollars canadiens. Autrement dit, l'augmentation est nécessaire pour nous permettre de concurrencer nos voisins américains, entre autres.
Il est beaucoup question de deniers dans le projet de loi, mais en fait ces dépenses se réduisent à une opération de camouflage de la part du gouvernement. Elles servent à faire oublier les politiques publiques qui ont provoqué la chute dramatique du dollar canadien, nous plaçant ainsi en position de désavantage sur le marché des cerveaux et des compétences dans le monde.
J'ai aussi une observation à faire au sujet de la tenue de livres. Depuis mon élection à la Chambre il y a sept ans ou un peu plus, j'ai trop souvent vu le gouvernement ajouter aux budgets, sans en rendre compte, des dépenses qui ont pour effet de réduire l'excédent de l'exercice financier courant. Aucun entrepreneur canadien ne pourrait procéder de la sorte. Si j'étais propriétaire d'une entreprise de camionnage, je ne pourrais pas me permettre de dire que, puisque j'aurai besoin de dix nouveaux camions au cours des cinq prochaines années, j'en achèterai deux par année au cours des cinq prochaines années, mais que je les imputerai tous au budget de cette année-ci puisque j'ai un excédent, ce qui contribuera en outre à réduire mon impôt sur le revenu.
Les principes comptables ne permettent pas de procéder de la sorte. La Loi de l'impôt sur le revenu ne le permet pas non plus, et pourtant le gouvernement le fait année après année. Cette dépense effectuée en une seule fois et étalée sur les cinq prochaines années est imputée entièrement au budget de l'exercice courant. Nous devrions condamner le ministre des Finances pour avoir recours à ce tour de passe-passe comptable. Le gouvernement y a déjà eu recours trop souvent.
Le gouvernement avait fait la même chose avec les bourses d'études du millénaire. En 1998, le gouvernement a créé le Fonds des bourses d'études du millénaire, doté d'un capital de 3 milliards de dollars, sur lesquels il comptait pour se faire réélire aux élections suivantes. Ça semble avoir marché. Le gouvernement a imputé ce montant au budget de 1998, mais a étalé le montant sur les trois années suivantes. Il n'a cependant rien déboursé, sinon très peu, avant l'année électorale. La majeure partie de l'argent a été dépensée pendant l'année électorale ou pendant la période qui a précédé les élections. Je m'insurge contre cette pratique offensante et qui n'a pas de raison d'être.
En résumé, nous appuyons les objectifs de la Fondation canadienne pour l'innovation. Nous croyons que le gouvernement devrait rendre compte de l'argent qui est dépensé, et pas seulement le comptabiliser durant l'année financière qui se termine. Nous croyons que le gouvernement perd du temps au Parlement en ne présentant pas des projets de loi bien rédigés au départ, ce qui lui éviterait d'avoir à y apporter des amendements par la suite.
Je me réjouis du fait que le ministre se retire de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, quoique je souhaite ardemment que l'office soit assujetti aux vérifications du vérificateur général du Canada.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi d'intervenir au nom du Nouveau Parti démocratique pour participer au débat sur le projet de loi C-17.
Je dois clarifier dès le départ l'objet du débat d'aujourd'hui. Il s'agit d'un projet de loi omnibus antidémocratique et antiparlementaire. Les deux parties du projet de loi n'ont absolument rien à voir entre elles.
La première partie concerne l'attribution de fonds à la Fondation canadienne pour l'innovation. La deuxième prévoit des modifications à la Loi sur la gestion des finances publiques, qui n'a rien à voir avec la Fondation canadienne pour l'innovation. Ce sont deux sujets différents qui devraient faire l'objet de deux projets de loi distincts.
Durant les années au cours desquelles j'ai eu l'honneur de représenter mes électeurs et les Canadiens à la Chambre, j'ai travaillé à un nombre assez important de projets de loi. Actuellement, je suis la porte-parole de mon parti pour ce qui est des questions liées à l'industrie, au transport et à l'infrastructure. J'ai aussi été la porte-parole en ce qui concerne le Conseil du Trésor et le logement. J'ai travaillé à des projets de loi dans ces domaines. J'ai aussi travaillé à des projets de loi qui revêtaient un intérêt particulier pour les électeurs de ma circonscription portant sur une vaste gamme de sujets dont la santé, la justice et les affaires autochtones.
J'ai travaillé à de nombreux projets de loi. Ce qui me préoccupe, c'est que, plus j'étudie des projets de loi, plus je me rends compte que le gouvernement libéral a de plus en plus tendance à présenter des projets de loi omnibus comme celui dont nous sommes saisis. Ce n'est pas rare. Il ne présente pas de tels projets de loi uniquement de temps à autre. C'est devenu courant, même s'il dit que c'est pour de très bonnes raisons.
Le gouvernement libéral ne veut pas laisser le Parlement débattre comme il se doit de ses mesures législatives et les examiner attentivement, alors il regroupe un tas de mesures complètement différentes sur lesquelles il nous fait voter en bloc. Ce n'est pas un processus transparent ni démocratique.
Qu'est-ce qu'il y a de tellement antidémocratique à propos du projet de loi? Comme je le disais, il contient deux parties. La première partie porte sur l'attribution de fonds à la Fondation canadienne pour l'innovation et la deuxième, sur les modifications proposées à la Loi sur la gestion des finances publiques.
Le problème, c'est que nous, du NPD, appuyons la première partie, qui traite de la Fondation canadienne pour l'innovation, mais que nous nous opposons à la deuxième partie, aux modifications proposées à la Loi sur la gestion des finances publiques.
Comme ces deux questions entièrement différentes l'une de l'autre sont incorporées dans un projet de loi, on nous oblige à voter contre un organisme que nous aimons et appuyons, la Fondation canadienne pour l'innovation.
Pour exprimer notre opposition aux modifications que le gouvernement propose d'adopter à la Loi sur la gestion des finances publiques, nous devons voter contre tout le projet de loi. Les députés, non seulement du Nouveau Parti démocratique, mais aussi de tous les partis, ne peuvent pas bien exprimer le point de vue de leurs électeurs s'ils doivent voter sur ces deux questions entièrement différentes l'une de l'autre.
Je vais dire quelques mots au sujet des parties du projet de loi que nous appuierions autrement, avant de passer aux raisons pour lesquelles nous allons nous opposer au projet de loi.
Nous sommes favorables à l'accroissement des fonds consacrés à la Fondation canadienne pour l'innovation. La fondation accomplit un travail important pour soutenir la recherche et le développement dans les universités, dans les hôpitaux, dans les collèges communautaires et dans d'autres organismes publics ou sans but lucratif du Canada.
Le Canada est manifestement en retard sur la plupart des autres pays du G-8 en ce qui concerne la recherche et le développement. Ce retard s'est accentué en raison des compressions massives que le gouvernement a effectuées dans le financement de l'enseignement postsecondaire. La Fondation canadienne pour l'innovation contribue dans une faible mesure à combler le retard qui existe dans la recherche et le développement. Mes collègues du Nouveau Parti démocratique et moi soutenons le travail qu'elle accomplit.
Au Comité de l'industrie, nous avons entendu des représentants des différents secteurs des sciences et de la recherche parler des fonds qui ont enfin été consacrés à la recherche et au développement. J'ai été extrêmement impressionnée par le travail qu'ils ont accompli en si peu de temps pour faire la promotion de la recherche et du développement dans les secteurs des sciences et de la technologie au Canada.
J'ai été passablement impressionnée par le fait que 75 p. 100 des personnes travaillant dans ces différents domaines ont fait leurs études dans des écoles canadiennes. C'est tout à fait impressionnant, je l'admets. Je ne m'en étais pas rendu compte avant de faire partie du Comité de l'industrie.
Nous avons bien fait d'investir dans la recherche et le développement. Ainsi, nous ne risquons pas de faire comme les États-Unis, où seule peut réussir la commercialisation de la recherche, de la science et du développement. Nous allons enfin appuyer ces programmes.
Il aurait cependant mieux valu que le gouvernement fédéral ne mêle pas cette question à d'autres. Nous avons quelques idées sur la façon d'améliorer le fonctionnement de la fondation, et j'espère que nous pourrons les exposer lors de l'étude du projet de loi.
Comme l'a indiqué mon collègue de l'Alliance canadienne, il aurait été utile la fondation soit soumise à une vérification par le vérificateur général. C'est ce que le vérificateur général avait recommandé, mais ce n'est pas le cas. De ce fait, on raconte que le processus ne serait pas transparent.
Je reconnais que des représentants de la fondation ont comparu devant le Comité de l'industrie. Ils s'étaient concertés pour trouver le moyen de mettre en place un processus transparent. Mon collègue allianciste a dit craindre que ne soient dépensés à mauvais escient les fonds publics. Certains pensent que le gouvernement intervient dans leur utilisation. Nous avons donc besoin d'un processus transparent.
Les Canadiens ne font pas confiance, je vous prie de me croire, à notre système démocratique, aux hommes et femmes politiques, au gouvernement et plus spécialement au premier ministre, mais je suis prête à parier gros qu'ils font confiance à l'intégrité du vérificateur général, en tout cas au dernier titulaire de ce poste, et j'espère qu'ils feront confiance à son successeur.
Chose certaine, personne ne critique les rapports du vérificateur général et personne ne remet en cause son intégrité. Les Canadiens font confiance au vérificateur général et à son poste, et j'espère que cela ne changera pas. Nous devrions être disposés à écouter la recommandation du vérificateur général voulant que la fondation soit soumise à un examen. Je le répète, il n'y a pas nécessairement de problème, mais nous devons agir de la sorte pour pouvoir faire confiance au système et nous assurer que les deniers publics sont dépensés judicieusement et dans le respect de la légalité.
La deuxième partie du projet de loi, qui propose des modifications à la Loi sur la gestion des finances publiques, porte sur les règles qui régissent les emprunts par les ministères, les organismes gouvernementaux et certaines sociétés d'État, de façon à assurer une meilleure responsabilité envers le ministère des Finances, ce qui est très bien. On élimine ainsi une échappatoire qui devait disparaître. Par contre, le Nouveau Parti démocratique s'oppose vivement à l'article 6 du projet de loi, celui qui ajoute l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada à la liste des sociétés d'État qui sont soustraites à la Loi sur la gestion des finances publiques.
Mes collègues néo-démocrates et moi ne voulons pas que l'office soit soustrait à l'application de cette loi. Il ne se compare pas à la SRC ou à la Banque du Canada. Il n'a pas besoin d'être indépendant du gouvernement. Selon nous, la société chargée d'investir l'argent durement gagné des retraites des Canadiens ne doit pas échapper à un contrôle démocratique.
Nous avions dit cela quand le gouvernement a créé l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada il y a quelques années et notre position n'a toujours pas changé. C'est l'argent des pensions des Canadiens. C'est l'argent sur lequel de nombreux Canadiens vont compter quand ils seront à la retraite et, dans bien des cas, ce sera même tout l'argent dont ils disposeront.
L'organisme auquel cet argent est confié devrait rendre des comptes aux Canadiens, et non à un office d'investissement dont les membres sont nommés par le gouvernement. Mais ce n'est pas le cas. Les libéraux ont établi l'office de telle façon que les seules personnes à qui on rendra des comptes seront les banquiers de Bay Street. C'est une manière dangereuse de traiter l'argent des pensions que les Canadiens ont durement gagné. Quand mes trois enfants arriveront à l'âge de la retraite, ils repenseront à la façon dont le gouvernement libéral actuel aura traité le Régime de pensions du Canada et diront que c'était une erreur de créer l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada.
Mes collègues et moi sommes d'avis que les fonds de retraite devraient être investis dans des fonds et des investissements éthiques. Comment peut-on justifier que le gouvernement fasse la promotion d'une vie plus saine et lutte contre le tabagisme tout en laissant le RPC investir dans des sociétés productrices de tabac?
Quelle est la logique derrière cela? Comment l'Office peut-il investir dans Talisman, société d'énergie qui, d'après moi, est sûrement en partie responsable du carnage au Soudan à l'heure actuelle?
Je suis scandalisée à l'idée qu'un seul cent de mes cotisations au régime des pensions aille à Talisman, à Imperial Tobacco ou à une autre entreprise du genre. En tant que Canadienne qui cotise au Régime des pensions, je devrais pouvoir dire au gouvernement qu'il ne peut pas investir mes cotisations dans de tels fonds.
Croyez-le ou non, certains d'entre nous sont assez convaincus pour accepter qu'on fasse moins de profits en refusant de vendre notre tabac à la Chine. Même si le marché canadien disparaît parce que nous avons bien fait notre travail de sensibilisation aux risques que présente le tabac pour la santé. Je ne veux pas que nos dollars fassent la promotion du tabac où que ce soit dans le monde.
En terminant, je réitère que mon parti s'oppose au projet de loi, quoique nous appréciions certaines parties de cette mesure législative. Il est extrêmement décourageant de voir que nous ne pouvons pas appuyer l'allocation de sommes à la Fondation canadienne pour l'innovation. Nous ne le pouvons pas parce que nous devons voter sur ce projet de loi dans son intégralité. Même si nous sommes en faveur d'injecter de l'argent dans les sciences, la recherche et le développement, nous voulons absolument que l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada soit démocratiquement tenu de rendre des comptes au Parlement, mais le projet de loi ne prévoit pas cela.
Encore une fois, je suis très déçue que le gouvernement ait présenté ces mesures sous forme de projet de loi omnibus antidémocratique et non parlementaire. Il aurait dû présenter deux ou trois projets de loi distincts pour qu'on puisse voter séparément sur chaque question. Cela témoigne, encore une fois, du profond mépris du gouvernement libéral à l'égard de la démocratie. Je crois que les Canadiens n'accepteront pas cela indéfiniment.
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au nom des électeurs de ma circonscription, celle de Calgary-Est, pour traiter du projet de loi C-17. La députée néo-démocrate a dit, à juste titre, que bien des choses laissent à désirer dans le projet de loi. Nous partageons son point de vue sur bien des questions qu'elles a soulevées aujourd'hui.
Selon elle, le projet de loi est antidémocratique. Je dirai ceci. Le député d'Elk Island, qui a parlé avant elle, exprimait ses réserves au sujet du projet de loi. À cause d'un malentendu, il a cru qu'il disposait de 20 minutes pour parler, ce qui n'était pas le cas. Comme il n'avait pas suffisamment de temps pour faire valoir tous ses arguments, il a demandé le consentement unanime de la Chambre pour pouvoir le faire. Les députés du parti ministériel ont refusé.
De quoi le parti ministériel a-t-il donc peur? C'est ici la Chambre de la démocratie. Les libéraux devraient laisser les gens s'exprimer. Ils forment le parti au pouvoir. Ils devraient prêcher par l'exemple et montrer ce qu'est la démocratie. Si les libéraux refusent à mon collègue le consentement unanime de la Chambre pour qu'il puisse s'exprimer, c'est qu'ils ont peur de quelque chose. Ils craignent que nous puissions montrer ce qui laisse manifestement à désirer. Ils craignent que nous dévoilions cela.
Comme la députée néo-démocrate l'a expliqué très clairement, le projet de loi est antidémocratique parce qu'il comporte deux volets, soit la Loi d'exécution du budget de 1997 et la Loi sur la gestion des finances publiques. La députée a dit, à juste titre, que cela pose un problème pour l'opposition dans son choix des aspects qu'elle souhaite appuyer.
En ce qui concerne la Fondation canadienne pour l'innovation, permettez-moi de citer la position que l'Alliance canadienne a défendue dans son programme électoral lors des dernières élections. Voici ce qu'on lit dans ce programme:
Nous allons nommer un conseiller principal en matière de technologie ayant de l'expérience dans le domaine de la technologie dans le secteur privé, qui devra faire rapport directement au premier ministre. [...] Nous allons réunir les meilleures idées dans le monde des affaires, au sein du gouvernement et des universités pour faciliter le passage à la nouvelle économie et faire du Canada un chef de file mondial. [...] Nous allons accroître le soutien accordé aux conseils subventionnaires de la recherche au Canada et nommer un scientifique en chef du Canada pour coordonner les activités scientifiques dans tous les ministères et veiller à ce que la science et non la politique l'emporte. [...] Nous allons accroître de 500 millions de dollars les sommes consacrées à la recherche et au développement.
L'Alliance canadienne et ses membres reconnaissent l'importance de la technologie et la nécessité de soutenir la recherche avec des deniers publics. Notre nation a réussi dans le passé à fournir au monde d'excellents scientifiques. Tout montre que nous sommes tout à fait capables d'être les meilleurs du monde.
Tous les canadiens sont extrêmement fiers des docteurs Banting et Best qui ont inventé l'insuline utilisée dans le traitement du diabète et qui ont ainsi changé la vie de milliers de gens dans le monde entier. C'est une chose tout à fait louable et le Canada en est très fier à juste titre.
Nous ne manquons pas de cerveaux. Nous ne manquons pas de gens éminents au Canada. Nous reconnaissons avec le gouvernement qu'il devrait soutenir la technologie et la recherche.
Le monde devient de plus en plus petit. Les frontières disparaissent. Nous entrons maintenant dans une ère de mondialisation où il y aura de moins en moins de frontières. Alors que les frontières diminuent, la concurrence s'accroît. Ainsi, les pays qui vont pouvoir profiter de l'innovation et des idées nouvelles sont ceux qui vont progresser.
Le Canada devrait se placer pour pouvoir profiter de la mondialisation dans les années à venir. Si nous ne le faisons pas, un autre pays le fera et, en fin de compte, nous serons perdants. Il serait tragique de ne pas soutenir la recherche et le développement alors que nous pouvons compter sur une main-d'oeuvre aussi intelligente et des gens aussi illustres dans nos universités et dans nos conseils de recherches.
Nous n'avons aucun mal à appuyer la première partie du projet de loi, même si nous nous interrogeons sur le montant. Nous parlons de 500 millions de dollars et le gouvernement parle de 750 millions de dollars. Il y a une légère différence, mais les objectifs sont les mêmes. Nous croyons que notre politique globale qui prévoit une réduction des impôts, une libéralisation accrue des marchés et une ingérence moindre des gouvernements ferait en sorte qu'on investirait plus dans les établissements de recherche de tout le pays en fin de compte.
Comme mon collègue néo-démocrate l'a dit, la deuxième partie du projet de loi, la Loi sur la gestion des finances publiques, est ce sur quoi nous achoppons et la raison pour laquelle nous n'appuierons pas le projet de loi. Si le projet de loi avait été scindé en deux parties, je suis sûr que nous aurions appuyé la Loi d'exécution du budget en ce qu'elle a trait à la Fondation canadienne pour l'innovation. Toutefois, la Loi sur la gestion des finances publiques est problématique pour nous.
Nos réserves sont suscitées par un tas de questions. Pour commencer, le projet de loi a été conçu pour corriger une erreur législative. Il est surprenant qu'avec tous les bureaucrates, tout le personnel de recherche et les énormes ministères dont il dispose, le gouvernement fasse encore des erreurs législatives. Il dépense des milliards et des milliards de dollars et n'est même pas capable de présenter un projet de loi sans erreurs. Il est ensuite obligé de présenter un autre projet de loi pour les corriger. Quand les députés de l'opposition ont l'occasion de signaler ce qui ne va pas, le gouvernement abrège le débat et nous empêche de parler.
Une autre raison pour laquelle nous nous opposons au projet de loi est que l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada serait soustrait à l'application de la Loi sur la gestion des finances publiques. Toutefois, nous aimons le fait qu'il y ait moins d'interventions ministérielles. Nous réclamons sans cesse moins d'interventions de la part du gouvernement et des ministres. À chaque fois qu'il y a intervention du gouvernement, les bonnes intentions du projet de loi sont anéanties par le favoritisme. Les bons programmes déraillent au moment de leur mise en oeuvre du fait des interventions indues des ministres ou du gouvernement.
Nous sommes heureux à chaque fois qu'il y a moins d'interventions ministérielles. L'autre problème est que l'office ne serait pas assujetti à l'examen du vérificateur général. À chaque fois que des fonds publics sont engagés, le vérificateur général devrait avoir le droit d'entreprendre des vérifications. Après tout, les fonds publics sont confiés au gouvernement pour qu'il les utilise à bon escient et la seule personne capable de dire aux Canadiens si leur argent est dépensé à bon escient est le vérificateur général.
Nous attendons toujours avec impatience le rapport du vérificateur général car il ne manque jamais de souligner en quoi le gouvernement manque de prudence lorsqu'il dépense l'argent des contribuables. Le fait que l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada ne serait pas assujetti à la Loi sur la gestion des finances publiques nous inquiète beaucoup. Par ailleurs, le projet de loi priverait le vérificateur général du droit de procéder à des vérifications à l'office et cela est inacceptable.
Comme l'a dit mon collègue néo-démocrate, nous rechignons à appuyer le projet de loi parce qu'il comporte deux parties.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le projet de loi est essentiellement non démocratique. C'est la deuxième fois que je prends la parole aujourd'hui pour dire qu'une mesure législative n'est pas démocratique. Telle est l'essence du gouvernement actuel.
Il y a une phrase célèbre que je vais paraphraser parce que je ne m'en souviens pas de façon exacte. Winston Churchill a dit que la démocratie n'était certes pas facile, mais que c'était le meilleur système de gouvernement que nous ayons. Si nous ne nous efforçons pas de respecter la démocratie, nous allons la perdre.
Ce projet de loi témoigne encore une fois de la maladresse du gouvernement relativement à d'importantes initiatives. Il n'y a rien de plus important que la fonction du Parlement qui consiste à examiner la façon dont les recettes fiscales sont dépensées pour le plus grand bien des contribuables.
Il est difficile d'accepter un projet de loi renfermant deux choses qui n'ont aucun lien entre elles. Il n'était pas nécessaire de regrouper ces questions. Nous aurions pu parler uniquement de la Fondation canadienne pour l'innovation et le faire d'une manière vraiment professionnelle. Nous aurions ensuite pu traiter du reste du projet de loi, ce qui aurait été la bonne façon de procéder.
J'en conclus que le gouvernement se sert de cela comme d'un instrument politique. Il préférerait que l'opposition vote contre, de manière à pouvoir dire que l'opposition est contre la Fondation canadienne pour l'innovation. Ce qui n'est absolument pas le cas. Ce à quoi nous nous opposons, c'est à la façon dont tout cela est arrivé.
En 1997, la Fondation canadienne pour l'innovation a été comprise dans le déficit comme si elle avait été une dette, même si elle n'existait pas à la fin de l'année. Le gouvernement a choisi d'inclure les 800 millions de dollars dans le passif. Pour la troisième année consécutive, on dérogeait complètement aux politiques, principes et méthodes comptables antérieurs, et on allait à l'encontre des directives du Conseil sur la comptabilité et la vérification pour le secteur public.
Le vérificateur général a été gentil. Il a qualifié cette action de mesure comptable inappropriée et de méprise parlementaire. Selon moi, de qualifier une action de mesure comptable inappropriée est une critique très sévère, venant du vérificateur général, alors qu'il est très gentil de parler de méprise parlementaire, puisqu'on continue de répéter les mêmes actions. Ainsi, on ignore la critique qui devrait nous préoccuper au plus haut point. On l'ignore intentionnellement, et pas juste dans ce cas.
Nous avons un ministre de l'Industrie qui annonce un investissement de 750 millions de dollars et on ignore si c'est pour 10 ans, ou dix ans plus ou moins une ou deux années, ou pour une autre période. Le gouvernement veut porter cette somme à son passif à court terme, mais c'est une pratique comptable inappropriée.
Le gouvernement, qui s'efforçait auparavant d'établir la balance des comptes nationaux, afin d'éviter la crise, se trouve maintenant à dépenser 35 milliards de dollars de plus qu'il y a deux ans. Une telle somme, sur un budget de la taille de celui du Canada, représente une très forte augmentation, et une bonne partie de cette somme sort des coffres de l'État à la fin de l'exercice financier, à la faveur de dépenses frénétiques qui échappent à l'examen minutieux qui est normalement effectué en début d'exercice, à l'aide de tous les renseignements utilisés pour la préparation du budget.
Vers la fin de l'exercice financier, les ministres se mettent à annoncer des dépenses avant les autorités parlementaires ou législatives, et ils agissent comme s'ils allaient obtenir du Parlement les sommes désirées, parce que ce dernier n'est qu'un timbre en caoutchouc après tout. C'est comme ça que le gouvernement envisage les choses, et c'est très destructeur.
Au lieu de créer, de soutenir et de promouvoir une institution démocratique, progressive et dynamique, nous allons dans le sens contraire. C'est loin d'être nouveau. Nous n'avons pas eu depuis très longtemps au Canada un gouvernement attaché au principe de la démocratie.
Des motifs historiques expliquent peut-être cette situation. Nous étions un pays beaucoup plus homogène au début de notre histoire. Nous avons toujours été un pays peu populeux occupant un vaste territoire. La gestion des affaires publiques était plus facile et plus consensuelle. Nous étions aussi un pays très centralisé, alors qu'aujourd'hui il est manifeste que la centralisation diminue parce que nous obtenons beaucoup plus de croissance économique de l'extérieur du Canada central.
Quand j'étais jeune, on nous enseignait toujours que notre principale ville était Montréal, et qu'elle était suivie de Toronto, de Vancouver et de Winnipeg. Les choses ont beaucoup changé aujourd'hui. Trois des cinq principales villes financières au Canada se trouvent dans l'ouest du pays. Il y a eu un repositionnement complet de villes comme Montréal et Winnipeg.
Cela a modifié la dynamique du pays beaucoup plus rapidement que ne l'a reconnu jusqu'à maintenant notre bureaucratie centrale ou les gouvernements fédéraux. Nous avons besoin d'un gouvernement qui s'emploie à intégrer des initiatives législatives et d'autres initiatives dans un modèle démocratique moderne et progressiste. Malheureusement, cela ne se produit pas.
Notre parti voudrait qu'un simple amendement soit apporté à la mesure législative. Nous voudrions que le vérificateur général surveille de façon suivie la Fondation canadienne pour l'innovation. Cela n'est pas prévu dans le projet de loi. Malheureusement, cela concorde de nouveau avec l'attitude du gouvernement. Nous apporterions cet amendement au projet de loi, et j'espère que les députés ministériels l'appuieront.
Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre de l'adopter?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le vice-président: Convoquez les députés.
Et la sonnerie s'étant arrêtée:
Le vice-président: Le vote par appel nominal est reporté au lundi 23 avril à la fin de la période prévue pour les initiatives ministérielles.
* * *
LA LOI DE 2000 MODIFIANT L'IMPÔT SUR LE REVENU
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 27 mars, de la motion: Que le projet de loi C-22, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu, certaines lois liées à la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les douanes, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations et une loi liée à la Loi sur la taxe d'accise, soit lu pour une deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis certain que beaucoup de gens seront surpris de me voir prendre la parole pour la troisième fois en moins de deux heures. C'est quelque chose d'assez unique qui se passe à la Chambre. Je rappellerai aux gens que c'est parce que le parti au pouvoir refuse de débattre toutes ces questions et refuse de défendre ses projets de loi. Cela fait que l'étude des projets de loi se déroule plus rapidement parce que l'opposition officielle est le seul parti à se donner la peine de signaler les défauts que présentent les mesures législatives et que le gouvernement refuse de se défendre.
Je suis donc heureux de prendre la parole au nom des électeurs de Calgary-Est pour participer au débat sur le projet de loi C-22, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu, certaines lois liées à la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les douanes, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations et une loi liée à la Loi sur la taxe d'accise. Ce projet de loi, tout comme bien d'autres mesures législatives à caractère fiscal, est un projet de loi omnibus, ce qui veut dire qu'il traite de plusieurs questions à la fois.
Comme l'indique le titre du projet de loi, les lois visées par cette mesure législative comprennent la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pension du Canada et la Loi sur la taxe d'accise. Même si chacune de ces lois mérite qu'on s'y attarde et a des conséquences importantes pour les Canadiens, je voudrais faire quelques remarques sur l'impact de ce projet de loi sur la compétitivité du Canada.
J'ai été nommé président du comité consultatif sur la mondialisation et la concurrence par le chef de l'opposition. Outre son rôle de conseiller, le comité a pour fonction de consulter les dirigeants de l'entreprise, les intellectuels, les organisations non gouvernementales et les Canadiens de toutes les régions au sujet des possibilités et des pièges de la mondialisation pour le Canada.
Les idées foisonnent au sujet de la façon de rendre le Canada plus concurrentiel dans un monde de plus en plus interconnecté. Ces idées doivent être véhiculées au Parlement et dans le secteur public. L'Alliance canadienne veut être le véhicule de ces idées.
Depuis des années, le gouvernement libéral oublie que le Canada perd un terrain précieux au profit de nos voisins du Sud et de nos principaux concurrents internationaux. Nous savons que le nouveau gouvernement américain a été élu en promettant de substantielles réductions de l'impôt sur le revenu et en proposant un plan de réduction ciblé de la dette.
Nous savons que l'impôt sur le revenu n'est pas la seule chose qui différencie les fiscalités canadienne et américaine. Les Canadiens paient d'autres impôts qui alourdissent leur fardeau fiscal. Ce fardeau, auquel contribuent les taxes de vente, les charges sociales et d'autres taxes perçues par les divers niveaux de gouvernement, fait que les Canadiens paient un tiers de plus d'impôts que les Américains. Si le Canada ne suit pas l'exemple américain en ce qui concerne la réduction des impôts, notre pays perdra encore du terrain.
Le Mexique, qui est notre principal partenaire de l'ALENA, s'est lui aussi doté d'un plan vigoureux afin de devenir un important centre d'investissements en Amérique du Nord. Le Canada devra affronter une concurrence de plus en plus énergique de la part du Mexique dans le secteur de l'investissement étranger. Le Mexique se trouve dans une situation unique en tant que membre de l'ALENA: il est le seul pays nord-américain à avoir signé un accord de libre-échange avec l'Union européenne et un accord avec le Mercosur, le bloc de libre-échange constitué du Brésil, de l'Argentine, de l'Uruguay et du Chili.
Les défis mexicain et américain ne sont que deux exemples qui montrent que le Canada doit renoncer à adopter des politiques gouvernementales qui nuisent à notre compétitivité.
Lorsque l'actuel ministre des Affaires étrangères était ministre de l'Industrie, même si le fait qu'il représentait le gouvernement limitait sa liberté de parole, il a à plusieurs reprises lancé des avertissements au sujet du nombre de tranches d'imposition de notre régime fiscal et de la compétitivité du Canada.
L'International Institute for Management Development, basé en Suisse, a classé le Canada au 11e rang des économies mondiales les plus compétitives, en recul d'une place par rapport à l'an dernier. Il a bien noté le Canada pour son infrastructure, son cadre juridique et ses ressources humaines, mais l'a mal noté pour sa performance dans le domaine des sciences et de la technologie et pour les impôts. Avant d'en venir au projet de loi qui nous occupe, je voudrais faire remarquer que j'avais, à propos d'un autre projet de loi, salué l'initiative mise en place par le gouvernement à l'appui des sciences et de la technologie.
Il y a des années qu'un grand nombre de compagnies et d'entrepreneurs, parmi les plus prospères, se plaignent de ce que les taux élevés d'imposition pratiqués au Canada nuisent à leur compétitivité dans un monde de plus en plus interconnecté. Des taux élevés d'imposition nuisent aux investissements, à l'innovation et sont une des causes majeures de l'exode de cerveaux que connaît notre pays. On ne cesse de le souligner au gouvernement.
Selon John Cleghorn, ancien président et chef de la direction de la Banque Royale, les taux élevés d'imposition pratiqués au Canada ont détourné l'épargne dans le secteur public au profit de placements plus rentables dans des compagnies et des sociétés sur le marché libre. Selon lui, des taux élevés d'imposition nuisent au niveau de vie des Canadiens, qui se retrouvent avec moins d'argent à dépenser pour leurs familles et pour eux-mêmes.
Les dirigeants d'entreprises et les universitaires s'accordent à dire que le Canada doit avoir une économie plus innovatrice qui lui permette de bien se positionner pour être compétitif sur le marché mondial. Pour réussir, les entreprises canadiennes doivent profiter pleinement des occasions que créera une intégration économique accrue et une augmentation des mouvements transfrontaliers de biens, de services, de technologie, d'idées et de connaissances.
Il appartient principalement aux gestionnaires et aux entrepreneurs canadiens de bâtir une économie plus innovatrice et compétitive. Cependant, le gouvernement a aussi un rôle à jouer. Il peut réduire les impôts. Il peut veiller à ce que les étudiants canadiens soient parmi les plus scolarisés au monde. Il peut créer les conditions nécessaires pour que le Canada soit la destination finale des investissements étrangers directs venant de toutes les régions du globe. Le gouvernement peut et doit faire toutes ces choses, mais malheureusement il ne le fait pas.
Le gouvernement prétend, dans le projet de loi, qu'il a réduit les impôts de 100,5 milliards de dollars sur cinq ans. C'est ce qu'il dit d'après sa liste.
Cependant, examinons un peu la réalité. La réalité c'est que nous devons soustraire la somme de 3,2 milliards de dollars sur cinq ans pour les dépenses relatives aux programmes sociaux. La prestation pour enfants est un programme de dépenses mis en oeuvre par le truchement du régime fiscal, qui représente une augmentation. Ce n'est pas une diminution des impôts, mais une augmentation des dépenses. Cependant, le gouvernement affirme qu'il s'agit d'une réduction des impôts. Il n'admet pas que c'est une hausse. De même, l'indexation est comptabilisée ailleurs.
Ensuite, nous devons soustraire 29,5 milliards de dollars sur les cinq ans pour les augmentations des cotisations au RPC. Nous savons tous que les cotisations au RPC ont augmenté, pourtant, le gouvernement refuse d'admettra qu'il faut en tenir compte dans le calcul des réductions d'impôt et il comptabilise cela séparément. En réalité, lorsqu'on cherche la compétitivité en tout, cela devient un fardeau. Le fardeau vient de la mauvaise gestion du RPC par le gouvernement. J'ai participé au débat sur les cotisations au RPC. Il est intéressant de voir que déjà, lors de la création du RPC, le gouvernement disait la même chose qu'il dit maintenant après 20 ans d'augmentations des cotisations au RPC. Rien n'a changé en 20 ans.
En outre, l'objectif de l'indexation de l'impôt sur le revenu des particuliers est de maintenir à un niveau constant le fardeau fiscal; il ne faut donc pas la considérer comme une réduction des impôts.
Par conséquent, lorsqu'on soustrait tous ces éléments, il ne reste que 47,1 milliards de dollars accordés en réductions des impôts sur cinq ans. Je répète que ce ne sont que 47,1 milliards de dollars sur cinq ans, et non pas 100,5 milliards de dollars, comme le prétend le gouvernement. Les pratiques comptables imaginatives du gouvernement donnent aux Canadiens l'illusion de bénéficier d'un allègement majeur de la fiscalité sur les cinq prochaines années quand il n'en est rien.
Un de mes électeurs m'a téléphoné pour dire qu'il avait été étonné d'entendre dire que le gouvernement avait réduit les impôts, parce que sa paie après impôt avait soudainement diminué et il ne comprenait pas pourquoi. Je l'ai invité à regarder de plus près pour voir si ses cotisations au Régime de pensions du Canada n'avaient pas augmenté. Évidemment, elles avaient augmenté. C'est ce qui explique que sa rémunération nette ait diminué.
La politique actuelle du gouvernement ne favorise pas la compétitivité qui nous permettrait de tirer parti de la mondialisation de l'économie. L'Alliance canadienne a proposé de nouvelles réductions d'impôts qui permettraient aux entreprises canadiennes de tirer le meilleur parti de la situation au XXIe siècle et d'en faire profiter les Canadiens.
M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, malheureusement, je ne suis pas certain que le député d'en face ait lu le budget ou la mise à jour économique. En tout cas, certains éléments semblent lui avoir échappé.
D'abord, la réduction d'impôt de 100 milliards de dollars annoncée dans la mise à jour économique est la plus grande dans toute l'histoire du Canada. Permettez-moi de donner quelques exemples.
Le député d'en face laisse entendre qu'il n'y a pas de réductions réelles ou que les réductions sont minimes. Comme les députés de l'Alliance le font toujours, il parle du Régime de pensions du Canada lorsqu'on parle du budget. Le RPC est un régime contributif, un investissement dans l'avenir. Les employeurs et les employés y versent des contributions. Le député sait bien que ce n'est pas une forme d'impôt. Naturellement, les contributions au RPC ne vont pas au Trésor. Voici un exemple:
Une famille de quatre ayant deux revenus annuels combinés de 60 000 $ a dû verser l'an dernier quelque 5 700 $ en impôt fédéral sur le revenu. L'année prochaine, sa note fiscale diminuera de plus de 1 000 $, soit une réduction de 18 p. 100 pour la première année. En moins de quatre ans, sa note fiscale aura diminué de 34 p. 100.
Dans un autre exemple, une famille de deux enfants, ayant un revenu unique de 40 000 $, verra une réduction de sa note fiscale fédérale de 59 p. 100, ce qui me semble pas mal raisonnable.
Je me demande si le député d'en face se rend compte que, fin juin, les contributions au RPC auront atteint leur maximum, tout comme les cotisations à l'assurance-emploi. Les moindres effets de la hausse des contributions au RPC auront disparu à la fin de juin. Au plan de leur revenu net disponible, les Canadiens bénéficieront donc d'un très bon coup de pouce. Ils auront plus d'argent dans leurs poches et encore plus dans les années qui viennent.
Je me demande si le député a fait ces calculs et s'il comprend que les Canadiens y gagneront.
M. Deepak Obhrai: Monsieur le Président, enfin un député ministériel me pose une question. Je suis intervenu à propos de trois projets de loi et c'est la première fois qu'un député ministériel me pose une question. Quelque chose l'a manifestement poussé à le faire.
Le député d'en face est revenu sur l'observation que j'ai faite en disant que le gouvernement prétendait offrir des allégements fiscaux de 100,5 milliards de dollars alors qu'en réalité ils se chiffreront à 47,1 milliards seulement. Cela est attribuable aussi bien à la hausse de la cotisation au RPC qu'aux autres hausses indirectes que le gouvernement a prévues dans son énoncé économique. Quant aux exemples que le député a évoqués, ils ont trait à des conditions idéales qui concernent un très petit nombre de familles.
Lorsque le député rentre dans sa circonscription, il doit sûrement recevoir comme nous des appels de ses électeurs qui constatent que les retenues d'impôt sur leur chèque de paye ne correspondent pas à ce qu'ont dit les députés ministériels. En fait, les contribuables profitent plutôt des mesures des gouvernements provinciaux comme ceux d'Alberta et d'Ontario qui réduisent les impôts. La hausse du montant net de leur chèque de paye est attribuable aux mesures des gouvernements provinciaux, mais le gouvernement fédéral veut s'en attribuer le mérite.
En fin de compte, nous devrions interroger tous les Canadiens à propos du montant net de leur chèque de paye; ils nous diraient qu'il ne correspond pas à ce que disent les députés ministériels. La réalité est différente. Cela fait penser au programme d'allocation pour frais de chauffage qu'ils ont offert et qui a permis à des détenus de toucher des chèques à cet égard. En même temps, le gouvernement prétendait aider les ménages à faible revenu.
Le vice-président: Avant que le débat ne reprenne, j'ai quelque chose à dire au député d'Elk Island. La dernière fois que j'ai occupé le fauteuil, mardi en fin d'après midi, sauf erreur, le député est intervenu pour faire un rappel au Règlement.
Nous divergions d'opinions sur ce que prévoit le Règlement lorsque le vote sur les motions relatives aux crédits est reporté et sur la question de savoir si le débat aurait dû se poursuivre. Le député d'Elk Island avait raison.
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, depuis la nuit des temps, les citoyens paient des impôts pour financer les services mis à leur disposition. Selon la Genèse, Abraham et Jacob payaient des impôts, sous la forme d'une dîme de 10 p. 100 sur ce qu'ils possédaient.
Plus tard, soit en 1311 et 1312, le concile de Vienne a approuvé que l'on remette au roi de France la dîme perçue sur une période de six ans, pour financer les Croisades. On connaît depuis longtemps l'idée de lever un simple impôt sur le revenu afin d'en affecter les recettes aux coûts d'une guerre.
Personne ne s'est donc étonné quand le gouvernement fédéral a décidé en 1917 d'appliquer temporairement la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu. La loi avait à peine dix pages et son libellé était assez simple. L'obligation de verser l'impôt sur le revenu était prévue au paragraphe 4(1) qui s'énonce comme suit:
Les impôts suivants doivent être répartis, prélevés et payés sur le revenu durant l'année précédente de toute personne ayant son domicile ou son domicile habituel au Canada ou conduisant toutes affaires quelconques au Canada:
a) quatre pour cent sur tout revenu excédant quinze cents dollars, dans le cas de personnes non mariées et de veuves ou veufs sans enfants dépendants, et excédant trois mille dollars dans le cas de toutes autres personnes;
À l'époque, peu de gens faisaient des études universitaires, mais il n'était pas nécessaire de posséder un diplôme pour savoir s'il fallait payer des impôts ou non et, dans l'affirmative, le montant exact à payer.
De nos jours, la Loi de l'impôt sur le revenu est une étude de cas dans la langue de bois. Elle contrevient à l'un des droits les plus fondamentaux des Canadiens, soit celui de savoir et de comprendre les lois auxquelles ils sont assujettis.
Comme dans la plupart des autres pays du Commonwealth, il existe au Canada des mesures législatives qui exigent la publication des lois canadiennes. La Loi sur la publication des lois exige que nos lois soient imprimées et diffusées à la population pour que les Canadiens connaissent la législation.
Tout comme notre système juridique considère depuis longtemps que l'ignorance de la loi ne peut être un moyen de défense, il exige que les citoyens puissent avoir accès aux lois et connaissent ainsi exactement leur libellé. Cela vise également la Loi de l'impôt sur le revenu.
Quand on y pense, tous les citoyens devraient connaître leurs droits et obligations. C'est un principe fondamental dans une véritable démocratie. La Charte canadienne des droits et libertés respecte cette norme.
Sur le site Web du ministère de la Justice, on retrouve la Charte sur sept belles pages qu'on peut télécharger en quelques secondes. Elle renferme un libellé clair et concis. Ainsi, le paragraphe 6(1) dit ceci:
Tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir.
Tout Canadien qui a une troisième année peut comprendre cette phrase et, chose plus importante, ses droits et ses obligations.
Par contre, la Loi de l'impôt sur le revenu est affichée également sur le site Web du ministère de la Justice. Un avertissement dit aux contribuables qui voudraient télécharger ce document que la loi a une taille incroyable de 5,3 mégaoctets, comparativement aux secondes qu'il faut pour télécharger la Charte. On ne peut que supposer que cet avertissement tend à faire en sorte que les utilisateurs puissent faire de la place sur leur unité de disque dur ou se préparer à une longue attente en lisant Guerre et paix ou en fabriquant un navire dans une bouteille.
Lorsqu'ils reçoivent le dossier complet, une grande surprise les attend, et même deux. La première, c'est que la loi n'est pas vraiment rédigée dans une ou l'autre de nos langues officielles. Prenons le cas du paragraphe 2(2), dont voici le début, tel que rédigé en anglais et en français.
En français, cela se lit comme suit: «Le revenu imposable d'un contribuable pour une année d'imposition est son revenu pour l'année, plus les ajouts prévus à la section C, moins les déductions qui y sont permises.»
J'ai choisi l'un des paragraphes les plus simples. Les contribuables qui doivent répondre à la question de base: «Combien dois-je au gouvernement?» ou «How much do I owe?», les Canadiens qui ont investi dans des fonds mutuels ou dans un REER, doivent connaître à fond non seulement le français ésotérique, mais aussi posséder une intelligence suffisamment puissante pour pouvoir suivre la gymnastique logistique des calculs de base. C'est incroyable ce que nous avons reculé depuis 1917.
La version de la Loi de l'impôt sur le revenu qui figure sur le site Web du ministère de la Justice a été mise à jour pour la dernière fois le 31 août 2000. Cela signifie que la version informatique ne contient pas les modifications apportées à la loi à la suite du mini-budget pré-électoral du 18 octobre. Donc, même après avoir pataugé dans des milliers de pages de brouillard linguistique, le contribuable n'aurait toujours pas de réponse claire à la question: «Combien dois-je au gouvernement?»
Heureusement, le secteur privé est prêt à aider. Le problème est que la Loi de l'impôt est tellement compliquée que les livres qui essaient de l'expliquer sont presque aussi épais que cette dernière. Le guide d'Arthur Andersen, intitulé Preparing Your Tax Return, compte 1 264 pages et a un index de 40 pages. Pensons-y bien. Rien que l'index du guide est quatre fois plus long que la loi originale soi-disant temporaire, la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu. C'est pourtant le guide qui fait autorité, celui que l'Agence des douanes et du revenu du Canada utilise pour comprendre la loi qu'elle doit administrer.
Les auteurs de cet ouvrage résument très justement les problèmes concernant la Loi de l'impôt sur le revenu dans l'avertissement du guide que voici:
En raison de la nature complexe de la Loi canadienne de l'impôt sur le revenu, et du fait que relativement peu de ses dispositions ont été interprétées par la Cour de l'impôt, et que certaines de ses dispositions n'ont même pas été interprétées par l'ADRC, il n'a pas été possible de donner des réponses à toutes les questions qui risquent de se poser.
La complexité de la Loi de l'impôt est telle qu'une industrie tout entière existe maintenant pour aider les Canadiens à naviguer dans le champ de mines que la loi est devenue. Les comptables, les guides et les services de déclaration en ligne se multiplient comme de la levure dans un four chaud dans un effort en vue d'aider le contribuable moyen à répondre à cette question toute simple de cinq mots: «Combien dois-je au gouvernement?»
Vu les complexités que le projet de loi C-22 ajoute au régime fiscal, imaginez ce qui se passerait si les autres textes officiels étaient rédigés avec le même degré de complication. Par exemple, combien de victimes de la route y aurait-il si le code de la route était aussi compliqué que la Loi de l'impôt?
Combien de Canadiens ne voyageraient jamais à l'étranger si le formulaire de demande de passeport était presque aussi compliqué à remplir que la déclaration de revenus? Combien de Canadiens écouteraient Peter Mansbridge s'il utilisait dans ses bulletins de nouvelles des expressions alambiquées dignes du langage fiscal? Combien de Canadiens boiraient de l'eau d'une fontaine publique si l'État ne pouvait leur garantir la pureté de cette eau en moins de 120 000 mots?
Non seulement notre code fiscal est-il absurde et complexe, mais je crois aussi que le gouvernement du Canada s'emploie délibérément à le rendre nébuleux pour les Canadiens. Je pense que c'est là un objectif du gouvernement—un objectif caché.
En fait, le soulagement que le Canadien moyen ressent après avoir réussi le tour de force de remplir sa déclaration de revenus apaise probablement la rage qu'il ressent en ayant à travailler huit semaines de plus que son voisin américain pour payer ses impôts fédéraux. Pendant que le ministre des Finances pose pour la galerie et sourit à la Chambre, n'oublions pas que le dernier jour où les Américains travaillent pour payer leurs impôts est le 3 mai, alors que, pour les Canadiens, c'est le 30 juin. C'est peut-être parce qu'ils sont soulagés de pouvoir commencer à travailler pour eux-mêmes le 1er juillet que les Canadiens célèbrent avec autant d'allégresse la Fête du Canada.
Ces impôts ont précipité le dollar canadien dans une spirale descendante. Celui-ci oscille actuellement entre 63 et 64 cents. Les réductions d'impôt que le président Bush envisage aux États-Unis auront des répercussions sur la valeur de notre dollar et elles élargiront encore plus l'écart de revenus entre la classe ouvrière canadienne et celle au sud de nos frontières.
Les députés du parti ministériel continuent de poser pour la galerie et de sourire au sujet des allégements fiscaux prévus dans leur mini-budget, mais ceux-ci ne leur donnent guère le droit de pavoiser. C'est comme prétendre que la Trabant est la meilleure sedan de fabrication est-allemande. C'est peut-être vrai, mais ce n'est guère réconfortant dans un monde où les autres pays font bien mieux.
C'est encore moins réconfortant quand on se rend compte que, toutes proportions gardées, nous payons aujourd'hui beaucoup plus d'impôt fédéraux que nos grands-parents n'en payaient en 1917. En 1917, une famille de deux avec un seul revenu de 3 000 $ payait 120 $ d'impôt. En dollars actuels, c'est à peu près l'équivalent de 1 349 $ d'impôt sur un revenu de 33 373 $.
En 1917, les Canadiens commençaient à payer de l'impôt après avoir gagné, en dollars d'aujourd'hui, près de 16 800 $. De nos jours, sous le gouvernement libéral, les particuliers commencent à payer de l'impôt lorsqu'ils gagnent moins de 8 000 $. Autrement dit, le code des impôts est devenu plus régressif: plus il y a de libéraux, plus il est régressif.
Cette année, une famille canadienne comprenant deux personnes et touchant ce même montant de 33 000 $ paiera 3 422 $ d'impôt sur le revenu après la plus importante réduction d'impôt de l'histoire par le ministre des Finances. C'est donc dire que pour chaque tranche de 3 $ d'impôt en 1917, le contribuable d'aujourd'hui versera 7,61 $.
Quand on y pense, en 1917, le Canada était profondément engagé dans la Grande guerre. Des centaines de milliers de Canadiens combattaient en Europe. Les Canadiens appuyaient et subventionnaient intégralement leur effort patriotique. Leur existence était subventionnée intégralement à l'aide de l'argent des contribuables. Le gouvernement a adopté la Loi de l'impôt de guerre sur le revenu pour financer la guerre et aider ces braves Canadiens.
De nos jours, pendant une période de paix et de stabilité sans précédent, le gouvernement a besoin que la personne moyenne lui verse des impôts deux fois plus élevés uniquement pour maintenir le statu quo, et il n'y arrive même pas très bien ou sans s'endetter.
Cette constatation fait peur et montre vraiment qu'un allégement fiscal véritable s'impose. D'autres pays ont trouvé une solution. Ce n'est pas le cas du gouvernement, mais d'autres pays l'ont fait. L'Irlande notamment a compris que la réduction des impôts se traduit par la croissance de l'emploi, une plus grande compétitivité et un niveau de vie plus élevé. Depuis 1989, le tigre celte a pris le pas sur le Canada tant sur le plan du niveau de vie que sur celui de la compétitivité.
Le gouvernement doit poser deux gestes pour convaincre les jeunes de ma génération de demeurer au Canada et pour y attirer d'autres travailleurs. Il doit simplifier le régime fiscal et réduire les impôts dans l'ensemble.
Il faut simplifier notre régime fiscal parce qu'il permet aux gens de savoir directement combien ils doivent et parce que cette mesure axe le débat non pas sur le libellé de la loi, mais bien sur le montant d'impôt payé. Autrement dit, quelle est la taille du gouvernement et quel montant devons-nous verser pour le faire vivre? C'est un sain débat pour le pays.
Lorsque les gens pourront calculer clairement leur fardeau fiscal réel, ils exigeront des réductions d'impôt avec le même zèle qu'ils mettent maintenant à exiger des budgets équilibrés. Quand ce jour viendra, le gouvernement n'aura d'autre choix que de limiter son appétit vorace pour l'argent des contribuables et d'offrir un allégement fiscal concret. Le même jour, le niveau de vie des Canadiens va augmenter et notre compétitivité à l'échelle internationale sera accrue si le gouvernement fait preuve de ce genre de leadership.
En ma qualité de membre de la génération la plus surimposée et endettée de l'histoire canadienne, je célébrerai ce jour le moment venu. Entre-temps, je continuerai de me prononcer et de parler contre les demi-mesures libérales et les complications accrues du code des impôts du genre de celles que comprend le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui.
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je tiens simplement à dire que c'était le meilleur discours que nous ayons entendu d'un député de cette circonscription depuis environ trois ans.
La fin de semaine dernière, le National Post a publié un long éditorial sur ce que le Canada pourrait faire pour devancer les États-Unis en matière de politique économique. Un certain nombre d'idées générales et novatrices y étaient proposées.
J'aimerais que le député donne son avis à propos d'une idée en particulier, à savoir que les jeunes qui entrent sur le marché du travail ne devraient pas payer d'impôts sur leurs premiers 250 000 $ de revenu pour qu'ils bénéficient d'un bon départ en ce qui concerne la maison, la famille et les études de leurs enfants. Que pense le député de cette idée?
M. James Moore: Monsieur le Président, nous avons besoin d'idées progressistes comme celle consistant à permettre aux contribuables d'amasser 250 000 $ avant qu'ils ne commencent à verser des impôts au ministre des Finances.
Je suis un ancien étudiant. Au lieu de donner aux étudiants une remise pour le mazout domestique qu'ils n'ont pas à payer, dont ils n'ont pas besoin et qu'ils ne méritent pas, pourquoi le gouvernement ne leur accorde-t-il pas une baisse générale d'impôts qui ferait vraiment une différence?
Comme le député de Lethbridge le sait, dans le Canada moderne d'aujourd'hui, un fonctionnaire qui ne connaît rien, qui n'a rien inventé et qui n'a rien créé a plus de pouvoir dans notre économie qu'un Canadien qui créé 10 000 emplois. C'est la réalité, et nous devons la changer.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LES MINES ANTIPERSONNEL
M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada s'est clairement engagé à mettre en oeuvre la Convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel, à aider les survivants de mines antipersonnel et à empêcher que ces dispositifs causent des blessures mortelles dans un avenir parfois éloigné et même plusieurs années après la fin d'un conflit.
L'industrie canadienne joue un rôle important dans cet effort en collaboration avec notre Centre des technologies antimines. Depuis 1981 par exemple, la société Med-Eng d'Ottawa a fourni du matériel pour la protection du personnel chargé de la neutralisation des bombes et du déminage dans plus de 130 pays.
Avec l'assistance de cette société et en collaboration avec le ministère des Affaires étrangères et l'ACDI, le Canada est fier d'avoir donné du matériel de déminage qui servira dans six différents pays touchés par les mines antipersonnel, dont l'Équateur, le Pérou, la Jordanie, le Yémen, la Bulgarie et la Moldavie. La Bosnie-Herzégovine et la Croatie doivent bientôt s'ajouter à la liste.
Tous les Canadiens peuvent être fiers des efforts que nous avons faits pour aider à empêcher que d'autres personnes aient à souffrir à cause des mines antipersonnel.
* * *
LA CONSTITUTION
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il y a eu ce matin à la Chambre un débat intéressant sur les élections canadiennes qui a porté sur le Sénat non élu du Canada, tel qu'il est établi dans la Constitution.
La plupart des Canadiens ignorent qu'il est pratiquement impossible de modifier notre constitution. Seules les provinces du centre peuvent appuyer des changements importants. Tout amendement exige l'appui des deux tiers des provinces et de 50 p. 100 des Canadiens.
Pendant combien de temps encore les Canadiens toléreront-ils une telle centralisation des pouvoirs? Une province plus petite que la mienne pourra-t-elle continuer d'avoir quatre députés élus et quatre sénateurs? Une autre province pourra-t-elle être assurée d'avoir toujours au moins 75 députés au Parlement, quelle qu'en soit la taille?
La Constitution canadienne a d'abord été écrite pour protéger les pouvoirs politiques des provinces du centre du Canada. Le régionalisme est une conséquence directe de ce pouvoir central. La Constitution aurait dû être modifiée depuis longtemps.
* * *
LA CONSTRUCTION NAVALE
M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.): Monsieur le Président, la construction navale et la contribution de cette industrie à l'économie de notre pays sont de la plus haute importance.
Dans ma région du pays, Niagara, dans le sud de l'Ontario, se trouvent la société Port Weller Dry Docks et le canal Welland. Port Weller Dry Docks exploite ses chantiers navals depuis 55 ans et emploie 500 personnes. Les retombées directes et indirectes de l'industrie maritime dans la région de Niagara dépassent le quart de milliard de dollars.
Aujourd'hui, le ministre de l'Industrie a reçu le rapport sur la construction navale et maritime industrielle. Les quatre auteurs de ce rapport ont fait des recommandations pratiques et réalisables pour accroître la compétitivité du secteur de la construction navale et maritime industrielle du Canada et créer des possibilités de croissance. De concert avec tous les intéressés, j'applaudis aux efforts de ceux qui ont fait partie de l'équipe formée de représentants de l'industrie et des travailleurs.
La construction navale constitue une industrie importante et pertinente non seulement pour la région de Niagara, mais encore pour tout le Canada.
* * *
[Français]
LE CANCER DE LA PROSTATE
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le Président, chez les hommes, le cancer de la prostate est le deuxième type le plus courant de cancer, et la deuxième cause en importance de décès dus au cancer.
Toutefois, grâce à une récente percée, facilitée par un financement obtenu de l'Institut de recherche en santé du Canada, le principal organisme fédéral de recherche en santé, il y a de l'espoir dans la lutte contre cette maladie.
En effet, une équipe dirigée par le Dr Simard, du pavillon «Aile T» du Centre de recherche du CHUL, de l'Université Laval, et la Dre Johanna Rommens, de l'Hôpital pour enfants de Toronto, a récemment découvert le gène qui cause cancer de la prostate.
Cette découverte est importante en raison de la difficulté de déterminer des gènes spécifiques qui causent des maladies telles que ce cancer. Bien qu'il soit encore trop tôt pour mettre au point un test génétique visant à dépister ce type de cancer, cette découverte sera un tremplin vers des découvertes supplémentaires très importantes.
[Traduction]
Les Drs Simard et Rommens sont d'authentiques héros canadiens, et je suis fier d'être député d'un gouvernement...
Le Président: La députée d'Etobicoke—Lakeshore a la parole.
* * *
LA JOURNÉE MONDIALE DE LA SANTÉ
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, le 7 avril sera la Journée mondiale de la santé. Le thème de la campagne de sensibilisation de cette année sera la santé mentale. La campagne vise à attirer l'attention des Canadiens sur les défis que représentent les maladies mentales et les troubles du cerveau pour les personnes et les familles concernées.
Les maladies mentales sont la cause d'énormes souffrances, de problèmes d'incapacité et d'une mortalité accrue. On estime que 400 millions de personnes dans le monde souffrent de désordres mentaux et neurologiques. Ces désordres sont souvent liés à des violations des droits humains, à la discrimination, au chômage, à l'exclusion sociale, à la pauvreté, à la honte et au secret.
On pourra résoudre les problèmes de santé mentale dans les collectivités, grâce aux services de santé mentale, à la recherche scientifique et aux politiques du gouvernement en matière de santé.
À l'occasion de la Journée mondiale de la santé, je demande à mes collègues de participer à cette campagne de l'Organisation mondiale de la santé pour faire d'une bonne santé mentale une priorité.
* * *
LE MULTICULTURALISME
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les remarques désobligeantes et les bavures de la ministre de second rang du Multiculturalisme, tombée en défaveur, font entorse à la politique étrangère de son gouvernement.
Lorsqu'elle a porté atteinte à la réputation de Kamloops et de Prince George, elle a aussi comparé la situation en Irlande du Nord aux opérations de nettoyage ethnique au Kosovo et en Macédoine. Elle mine sérieusement les efforts du Canada dans le processus de paix en Irlande du Nord. Le Canada a consacré plus de 5 millions de dollars, puisés à même l'argent des contribuables, aux initiatives de paix dans ce pays. Le premier ministre doit remplacer sa ministre avant qu'elle cause d'autres préjudices. Celle-ci compromet nos efforts internationaux dans le processus de paix.
Elle ne cause pas de tort seulement au pays, mais aussi sur la scène mondiale. Non seulement ses calomnies vont-elles à l'encontre du mandat de son ministère, elles sont aussi contraires au programme du gouvernement en matière d'affaires étrangères.
Le premier ministre ne doit pas déléguer cette ministre querelleuse à la Conférence mondiale des Nations Unies sur le racisme, qui se tiendra en Afrique du Sud.
* * *
[Français]
LA DÉPUTÉE DE CALGARY—NOSE HILL
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): Monsieur le Président, l'opposition officielle est allée trop loin. Mardi dernier, dans cette Chambre, la députée de Calgary—Nose Hill a comparé notre premier ministre à Slobodan Milosevic, le boucher des Balkans. Ancien président de l'ex-Yougoslavie, il doit faire face au Tribunal international pour des accusations de crimes de guerre et de génocide.
De telles insinuations sont inadmissibles. Elles discréditent cette Chambre et notre premier ministre.
Notre premier ministre est un homme intègre qui sert la population canadienne honnêtement depuis plus de 30 ans. Aucun rapprochement ne peut être fait entre lui et Milosevic. La députée a manqué de respect envers lui et envers nos institutions...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. On ne peut pas utiliser les déclarations de députés pour faire des attaques à l'endroit des autres députés. C'est contraire au Règlement.
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LE MOIS DE SENSIBILISATION AU CANCER
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, le printemps ramène à chaque année, et ce, depuis 40 ans, le Mois de sensibilisation au cancer.
Ce 5 avril, Jour de la jonquille, qui en fait durera trois jours, permettra aux Sociétés du cancer d'amasser plusieurs millions de dollars qui serviront principalement à la recherche sur cette maladie.
Au fil des ans, la jonquille, d'allure à la fois frêle et costaude, est devenue le symbole de l'espoir et de la détermination contre le cancer sous toutes ses formes. Cette maladie pourrait frapper, d'ici la fin de l'an 2001, une personne sur trois.
Le mois d'avril est choisi pour sensibiliser la population à cette maladie. C'est ce que fait notamment la Fondation québécoise du cancer qui s'emploie à rendre moins difficile la vie des personnes qui souffrent ou qui sont aux prises avec les séquelles du cancer.
Aussi, au cours des trois prochains jours, arrêtons-nous aux kiosques de la jonquille et répondons généreusement aux campagnes de financement des Sociétés québécoise et canadienne du cancer.
* * *
[Traduction]
LA CHAMBRE DES COMMUNES
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, mardi dernier, nous avons débattu une motion de l'opposition réclamant la tenue d'une enquête publique. La motion a été défaite, mais pendant le débat, quelqu'un a établi une comparaison très regrettable entre Slobodan Milosevic et le premier ministre du Canada.
Il arrive souvent dans le cours des débats que les députés s'emportent au point de personnaliser leurs remarques et de dire des choses qu'ils ne devraient pas dire. C'est un danger qui guette des gens comme nous appelés à passer une bonne partie de leur temps à parler. À l'occasion, nous avons la langue qui fourche. La meilleure façon de réparer une erreur verbale, peu importe la raison de cette erreur, est de faire des excuses verbales, que la Chambre accepte volontiers.
Tous les députés, et tous la Canadiens aussi, j'espère, devraient trouver odieux que l'on compare notre premier ministre à Slobodan Milosevic. Je demande à la députée de réfléchir à ce qu'elle a dit et de faire amende honorable en agissant de la manière habituelle dans ce genre de circonstances, c'est-à-dire en présentant des excuses.
* * *
LE FESTIVAL DES BERNACHES
M. James Lunney (Nanaïmo—Alberni, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis ravi d'annoncer aujourd'hui la tenue d'un événement très spécial dans l'Île de Vancouver. Ce week-end, la zone en bordure de l'océan de Parksville et de Qualicum Beach accueillera le 11e festival annuel des bernaches. Ce festival célèbre l'arrivée de milliers de bernaches noires qui migrent du Mexique jusqu'en Alaska.
L'observation d'oiseaux, les excursions dans la nature, les expositions d'oeuvres d'art, les concours de sculpture sur bois et les conférences données par des spécialistes de la faune sont tous au nombre des festivités.
Le clou du festival de cette année est la désignation officielle de la réserve de la biosphère du mont Arrowsmith. Les Nations Unies ont reconnu officiellement les qualités écologiques uniques du mont Arrowsmith, qui s'élève à 1 817 mètres, du détroit de Georgia, d'une profondeur de 300 mètres, et de nos magnifiques localités côtières.
Cette désignation de biosphère contribuera à favoriser la préservation et le développement responsable. Je félicite les organisateurs du festival, ainsi que M. Glen Jamieson, président de la Mount Arrowsmith Biosphere Foundation, et son équipe, qui ont obtenu que la région soit désignée réserve de la biosphère.
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LA CHAMBRE DES COMMUNES
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le débat dans cet endroit est acrimonieux, en mettant les choses au mieux, mais il a été pire que jamais, mardi. Une députée a voulu comparer notre premier ministre au boucher des Balkans, Slobodan Milosevic.
Cette députée pense peut-être qu'elle n'insulte que les libéraux, mais, en fait, elle insulte tous les Canadiens venus de l'ex-Yougoslavie et les Canadiens en général.
La députée devrait retirer ses paroles et présenter des excuses. Elle a fait preuve d'une absence totale de sens moral, de sensibilité et de compréhension, dans son enthousiasme aveugle pour détruire la réputation de notre premier ministre.
Les Canadiens n'oublieront pas cet exemple dégoûtant d'une députée qui s'avilit et qui avilit son parti et cet endroit en faisant ces observations virulentes. La députée...
Le Président: La présidence est très préoccupée par la teneur de certaines observations. J'exhorte les députés à se rappeler qu'il est interdit de lancer des attaques pendant les déclarations. J'admets que le député n'a nommé personne, mais il s'en est fallu de peu. Je demanderais aux députés de faire preuve de modération.
* * *
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, Postes Canada a annoncé la publication d'un timbre spécial pour célébrer le Sommet des Amériques qui aura lieu à Québec.
Cela est paradoxal, car Postes Canada, qui est l'un de nos services publics, prête le flanc aux contestations rendues possibles par les accords de libre-échange. UPS intente en ce moment des poursuites de 230 millions de dollars pour perte d'occasions d'affaires sous prétexte que Postes Canada est un monopole.
Que s'agit-il de célébrer ici? La perte de notre souveraineté économique? Que représentera le timbre? Peut-être une belle illustration de Hughie en train d'asperger de poivre une bande de jeunes collégiens conviendrait-elle? Ou encore une illustration de l'escouade anti-émeute en train de brutaliser des manifestants pacifiques? Ou bien un camion d'UPS en train de distribuer notre courrier? Ce serait un présage de l'avenir.
Quand Postes Canada va-t-elle arrêter de promouvoir ce qui équivaut à une charte des droits des sociétés commerciales étrangères?
À mon avis, ce n'est rien d'autre que de la mauvaise propagande politique. On se sert d'un timbre pour célébrer un accord commercial qui menace la démocratie.
* * *
[Français]
LA CONSTRUCTION NAVALE
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur le Président, au nom de tous les députés du Bloc québécois, je reçois très positivement le rapport du comité Projet de partenariat national formé par le ministre de l'Industrie, visant à rendre nos chantiers navals plus concurrentiels.
Ce rapport fait suite aux travaux de la Coalition sur la construction navale et à mon projet de loi C-213. C'est une grande victoire pour les députés du Bloc québécois et les autres députés qui m'ont appuyé, ainsi que pour tous les intervenants du secteur maritime.
Même s'il faut se réjouir qu'enfin, le gouvernement veuille faire quelque chose pour que nos chantiers navals deviennent plus concurrentiels face à des pays qui subventionnent cette industrie ou qui conservent des mesures protectionnistes, il faut déplorer le délai de six mois que le ministre se propose de prendre pour disposer des recommandations de ce rapport.
Comme les libéraux nous ont souvent habitués à reporter les choses, j'annonce que je déposerai bientôt un nouveau projet de loi visant à forcer le gouvernement fédéral à agir rapidement et de façon concrète pour aider la construction navale.
* * *
[Traduction]
LE CRIME ORGANISÉ
M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, en octobre dernier, le sous-comité des Communes chargé d'examiner le crime organisé a achevé son étude et publié un rapport sur le crime organisé au Canada.
Je remarque avec plaisir que le projet de loi et les vastes mesures annoncés ce matin par la ministre de la Justice et le solliciteur général donnent suite à plusieurs recommandations importantes du sous-comité.
Notons par exemple les recommandations suivantes: renforcer les dispositions antigang pour donner des outils plus efficaces aux procureurs et aux policiers, protéger contre l'intimidation les jurés, les procureurs, les policiers et les autres membres du système de justice, et encourager une coopération plus poussée et une meilleure mise en commun de l'information entre les divers agents du système de justice et des forces de l'ordre qui participent aux enquêtes sur le crime organisé.
[Français]
Le Parlement et les députés du gouvernement libéral sont engagés dans la lutte contre le crime organisé, et je demande à tous les députés de cette Chambre d'appuyer les mesures annoncées aujourd'hui.
* * *
[Traduction]
TERRE-NEUVE
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, du fait des conditions d'adhésion de Terre-Neuve au Canada, les ports de Terre-Neuve ne relèvent plus de la province, mais du gouvernement du Canada.
Le ministère des Pêches et des Océans a décidé de se dessaisir de 325 installations portuaires dont 136, soit 42 p. 100, sont situées à Terre-Neuve.
Étant donné les difficultés économiques que connaissent de nombreuses localités rurales et côtières, cette décision du gouvernement fédéral n'est pas juste. Si le gouvernement du Canada ne peut pas trouver l'argent nécessaire pour administrer ces ports ou ne veut pas le faire, comment s'attend-il à ce que les administrations portuaires s'en sortent?
Ce furent d'abord les aéroports, à présent, ce sont les ports et si l'on en croit les nouvelles aujourd'hui, demain ce sera les réserves d'eau de la nation. N'y a-t-il rien de sacré aux yeux de ce gouvernement?
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LE PREMIER MINISTRE
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier soir, le premier ministre a ordonné aux députés libéraux de voter contre la volonté de la majorité de leurs électeurs, soit contre la tenue d'une enquête indépendante. Il s'en est pris également aux directeurs de commissions publiques. Il y a quelques semaines, il a ordonné à ses députés de voter contre une promesse qu'ils avaient faite eux-mêmes, soit contre la création d'un poste de commissaire à l'éthique.
Les freins et contrepoids nécessaires pour maintenir la démocratie sont constamment minés par le premier ministre. Ne fera-t-il pas ce qu'il convient de faire en demandant, malgré le vote forcé d'hier, la tenue d'une enquête indépendante afin de regagner la confiance...
Le Président: Le très honorable premier ministre a la parole.
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens en ont assez des attaques personnelles de l'opposition. Ils veulent que l'opposition se concentre sur les vraies affaires du pays.
Les membres de mon caucus ont voté de façon unanime hier. Je n'étais pas présent parce que je voulais qu'ils expriment leur opinion personnelle et je suis très heureux qu'ils aient tous voté comme ils l'ont fait sur cette motion.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il a dit qu'il ne voulait rien avoir à faire avec cela et qu'il voulait que ses députés expriment leur opinion personnelle. Essaie-t-il de nous dire que personne de son cabinet ni personne du bureau du whip n'a communiqué avec les députés pour leur dire de voter contre la volonté de la majorité de leurs électeurs hier soir? Oui ou non? Il n'a eu rien à faire avec cela, le whip n'a eu rien à faire avec cela, et personne n'a dit aux députés comment voter. Est-ce vrai?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai beaucoup de respect pour mes députés et je suis à la tête d'un parti dont je suis très fier.
La seule chose que je voudrais dire au chef de l'opposition, c'est que lorsqu'un député compare le premier ministre du Canada à Milosevic et que le chef de son parti opine du bonnet, c'est la chose la plus honteuse que j'aie entendue.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le premier ministre n'a pas répondu oui ou non, ce qui en dit long aux Canadiens. Encore une fois, il n'a pas répondu.
C'est à M. Gordon Robertson, ancien greffier du Conseil privé, qui a servi sous M. Pearson et M. Trudeau, qu'on doit le code d'éthique. Il a dit récemment que le premier ministre avait abaissé la barre.
Maintenant, en refusant la tenue d'une enquête publique et en ordonnant constamment à ses députés de voter contre la volonté de leurs électeurs, il l'a abaissée davantage. Nous nous demandons jusqu'où cela ira.
Le premier ministre a abaissé la barre en matière d'éthique. Est-ce là l'héritage qu'il sera heureux de laisser aux Canadiens?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, parce que le chef de l'opposition a eu une poussée de fièvre gaffeuse, il a forcé les contribuables de l'Alberta à payer 700 000 $. Puis, le bureau d'avocats qui l'a défendu a versé 70 000 $ à son parti. Deux mois après ce geste posé par le bureau d'avocats, celui-ci a trafiqué les livres pour faire semblant qu'un individu avait donné généreusement 70 000 $ à un chef perdant et à un parti perdant, deux mois après les élections. C'est absolument incroyable, et probablement scandaleux.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est sans parler des 2,5 millions de dollars que les contribuables ont dû payer...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence ne peut entendre la question. La députée d'Edmonton-Nord a la parole.
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, qu'en est-il des 2,5 millions de dollars pour l'affaire Airbus et des 45 millions pour l'aéroport Pearson? C'est toute une somme.
Hier, nous avons posé au ministre de l'Industrie une question au sujet de Jonas Prince. En effet, le ministre est responsable de la Banque de développement du Canada et de la Société pour l'expansion des exportations.
Aujourd'hui, nous voudrions qu'on réponde à ma question. Est-ce que M. Prince ou une de ses entreprises a reçu, directement ou indirectement, du financement d'Industrie Canada, de la Banque de développement du Canada ou de la Société pour l'expansion des exportations?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je serais très heureux d'examiner la question qui a été soulevée et de faire rapport à la Chambre à la première occasion.
Je veux dire à notre vis-à-vis que tout le monde au Canada attend que le chef de l'opposition et le porte-parole de l'Alliance en matière d'affaires étrangères présentent des excuses pour avoir comparé le premier ministre du Canada au boucher des Balkans. On ne peut imaginer pire bassesse. Cela exige des excuses qui devraient être faites sans tarder.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'invite le ministre à rester à l'écoute.
La question était fort simple et portait sur M. Prince ou n'importe laquelle de ses entreprises. Le ministre a déclaré qu'il allait examiner la question. Il a eu 24 heures pour le faire. La même question a été posée hier.
Là encore, il pourrait y avoir des liens. Nous l'ignorons, mais nous voudrions que le ministre se penche là-dessus. Nous ne demandons pas la divulgation de renseignements. Nous voulons seulement que le ministre nous dise si Jonas Prince ou ses entreprises ont reçu directement ou indirectement des fonds du gouvernement.
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, au Musée canadien des civilisations on organise une exposition très importante. Elle porte sur le secteur de la pêche au Canada. Une portion est consacrée à la plus grande expédition de pêche de l'histoire de notre pays à n'avoir rien rapporté. Elle est consacrée au chef de l'opposition officielle.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, une autre contradiction est apparue, hier, dans l'affaire du golf et de l'Auberge Grand-Mère.
Le premier ministre a affirmé à la Chambre qu'il n'aurait lu la convention de septembre 1999 que la semaine dernière. Or, témoignant au Comité permanent de l'industrie, le conseiller en éthique—ou le supposé conseiller en éthique—lorsque je lui ai demandé si le premier ministre était impliqué directement dans la négociation, a répondu: «Oh yes. Oui, il est impliqué directement dans la négociation.»
J'aimerais savoir qui on doit croire, le premier ministre qui nous dit qu'il n'était pas au courant ou le conseiller en éthique qui dit: «Oh yes, il était impliqué directement dans la négociation»?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je l'ai dit clairement et je le répète, le document en question, je ne l'ai vu que la semaine dernière.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Donc, monsieur le Président, le conseiller en éthique ne nous a pas dit tout à fait la vérité, j'imagine.
Mais dans les faits, que le premier ministre ait lu ou pas le document, cela ne change rien, il existe, ce document, et il est signé par sa compagnie. Dans ce document, ce qu'on retrouve, c'est que le premier ministre renonce à ses droits de propriété: c'est donc qu'il en avait; deuxièmement, qu'il offre la garantie du vendeur: c'est donc qu'il avait quelque chose à vendre. Qui plus est, il s'engage à défrayer les frais juridiques de l'acheteur Michaud. Quelle grandeur d'âme!
Si tout cela n'est pas un conflit d'intérêts, comment appelle-t-on ça?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, on appelle ça déposer le document, le contrat de vente qui a eu lieu le 1er novembre 1993. Et à partir de cette journée-là, je n'étais plus propriétaire des parts, je n'avais plus aucun intérêt dans le golf.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le premier ministre n'admettra pas qu'il est plutôt curieux, pour ceux qui nous écoutent et qui ont l'habitude de faire de transactions, qu'une personne qui a vendu un bien en 1993 se retrouve, six ans plus tard, signataire d'un document donnant la garantie du vendeur, promettant d'assumer les frais juridiques et cédant ses droits de propriété?
Comment il nous explique cela?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le plus surprenant, c'est que l'opposition n'ait absolument rien à dire sur l'administration de ce gouvernement.
J'ai signé un contrat le 1er novembre 1993 et je m'étais défait de mes parts.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre se positionne en juge et partie dans cette affaire. Il décide lui-même qu'il n'y a rien là, que l'opposition ne devrait pas s'énerver.
Je lui pose la question suivante. Quand l'opposition possède des documents, dont un contrat signé en 1999 qui l'incrimine jusqu'ici, comment le premier ministre peut-il penser qu'il y a des choses plus importantes que l'intégrité du premier ministre pour tous ceux qui nous écoutent?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens connaissent très bien le premier ministre du Canada. La semaine prochaine, cela fera 38 ans que je sers ce pays comme député.
C'est justement parce que je ne voulais avoir aucun conflit d'intérêts que j'ai vendu mes parts avant de devenir premier ministre, soit quelques jours avant l'assermentation, le 1er novembre 1993.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, dans le passé, le Canada était un leader mondial dans le domaine environnemental.
Mais hier, le ministre de l'Environnement a plus ou moins confirmé que le Canada ne ratifiera pas l'Accord de Kyoto à cause de l'ALENA et à cause de nos échanges commerciaux avec les États-Unis.
Est-ce que le premier ministre peut nous expliquer pourquoi le Canada a changé sa position sur l'Accord de Kyoto?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la position du gouvernement est absolument claire. Nous avons l'intention de mettre en application l'Accord de Kyoto et nous espérons que tous les pays du monde, y compris les Américains, respecteront l'accord qui a été conclu.
Pour notre part, nous croyons que, dans l'Accord de Kyoto, nous avons le droit de compter sur ce que l'on appelle les puits—comme étant un droit au Canada—et d'avoir aussi des crédits pour le fait que nous sommes un très grand exportateur de ressources non polluantes vis-à-vis les États-Unis. Nous voulons que ces crédits soient reconnus pour le Canada, mais nous avons l'intention de respecter l'Accord de Kyoto.
[Traduction]
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je crois que les Canadiens savent reconnaître une volte-face et du verbiage. Cela les inquiète en ce qui concerne le protocole de Kyoto et la protection de nos étendues d'eau.
Lors de la dernière législature, les députés ministériels ont voté en faveur d'une interdiction de l'exportation d'eau en grandes quantités. Hier, le premier ministre a ouvert la voie à la levée de cette interdiction.
Le premier ministre peut-il expliquer sa volte-face au sujet de quelque chose d'aussi fondamentalement important aux yeux des Canadiens que l'eau?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, soyons clairs. Le gouvernement du Canada s'oppose à ce que de grandes quantités d'eau soient puisées de nos principaux systèmes de drainage, point à la ligne. C'est clair.
Le projet de loi C-6, dont est saisi le Parlement, traite du contrôle des eaux limitrophes. Pour ce qui est du contrôle des eaux provinciales, chaque province a pris des mesures à cet égard.
Notre position est claire: de grandes quantités d'eau ne pourront pas être puisées des systèmes de drainage canadiens.
* * *
LE PREMIER MINISTRE
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, la compagnie personnelle du premier ministre doit acquitter les frais engagés par les témoins de M. Michaud dans le cadre de toute enquête.
Hier, pour la première fois dans l'histoire du Canada, un premier ministre a été obligé de rater un vote en raison d'un conflit d'intérêts aux termes des règles parlementaires.
Ma question s'adresse au premier ministre. Au moment où il a signé ce qu'on appelle l'acte de vente, Jonas Prince était-il présent? Le premier ministre acceptera-t-il de déposer son emploi du temps pour cette journée-là?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ne comprends pas. Cet homme siège à la Chambre des communes depuis trop longtemps pour aller ainsi à la pêche en posant des questions qui ne font que ternir la réputation d'autrui. Je pensais qu'il avait un peu de décence, mais il ne fait qu'empirer en vieillissant.
* * *
L'AGRICULTURE
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, hier, le ministre de l'Agriculture a informé le Sénat qu'il conseillait aux habitants de l'Île-du-Prince-Édouard, qui doivent lutter contre les Américains qui interdisent illégalement l'importation des pommes de terres de l'Île-du-Prince-Édouard dans leur pays, de simplement abandonner la production de pommes de terre. Un peu comme s'il disait aux Ontariens de se retirer de l'industrie automobile.
Le premier ministre rencontrera le président Bush à Québec. Lui fera-t-il savoir qu'il doit lever l'interdiction illégale qui frappe les pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard? Le premier ministre reviendra-t-il à la Chambre avec l'assurance que les agriculteurs de l'Île-du-Prince-Édouard pourront exporter leurs pommes de terre cette année?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Enfin, monsieur le Président. Je voudrais informer le chef du cinquième parti, qui est payé 300 000 $ par année, soit deux fois plus que le premier ministre, que le premier point à l'ordre du jour de la rencontre que j'ai eue avec le président à Washington a été l'agriculture, notamment deux problèmes, le blé, mais en tout premier lieu, les pommes de terres de l'Île-du-Prince-Édouard.
* * *
LE COMMERCE
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le premier ministre et son ministre du Commerce international sont fondamentalement en désaccord en ce qui concerne l'établissement d'un lien entre l'énergie et le bois d'oeuvre.
Le premier ministre songe maintenant à imposer une taxe sur le pétrole et le gaz vendus aux États-Unis. Le ministre du Commerce international soutient pour sa part que les deux questions doivent être traitées séparément.
Qui parle au nom du gouvernement dans ce dossier?
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le Canada n'a pas pour tradition d'établir des liens entre divers secteurs.
Comme l'a souvent dit le ministre du Commerce international, nous avons une excellente cause dans le dossier du bois d'oeuvre, mais nous aimerions néanmoins qu'il y ait un bien meilleur climat dans le domaine des échanges commerciaux avec les États-Unis, qui se disent favorables au libre-échange.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est le premier ministre lui-même qui a invoqué la possibilité d'établir un lien.
Hier, le premier ministre a traité le président Bush de «cow-boy naïf». Ce n'est pas en insultant le président des États-Unis que nous réussirons à obtenir la coopération de ce pays. En envisageant de lier le bois d'oeuvre aux exportations d'énergie, le premier ministre soulève de nombreuses questions.
J'ai une question à lui poser. Va-t-il imposer une taxe d'exportation sur l'énergie, à la manière du programme énergétique national?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est inexact; je n'ai jamais dit cela au sujet du président. Je le respecte beaucoup.
Le Canada a signé un accord de libre-échange avec les Américains. Nous voulons pratiquer le libre-échange non seulement dans le secteur des ressources, mais aussi en agriculture et dans le secteur du bois d'oeuvre.
* * *
[Français]
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, dans le cadre des négociations de la Zone de libre-échange des Amériques, le gouvernement canadien consulte différents groupes d'affaires sur la position canadienne et l'état des négociations par l'entremise de groupes de consultations sectorielles du commerce extérieur, ce qu'on appelle les SAGITS.
Le ministre des Affaires étrangères peut-il confirmer que des représentants du milieu des affaires ont eu accès aux textes de la négociation de la Zone de libre-échange des Amériques, les mêmes textes auxquels ni la population ni les parlementaires n'ont accès?
[Traduction]
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait bien, le ministre du Commerce international a tenu de vastes consultations à ce sujet. Il a rencontré à de nombreuses reprises les ministres provinciaux, il a également rencontré les représentants du secteur du bois d'oeuvre de toutes les régions du Canada. La question a également fait l'objet d'une série d'audiences parlementaires spéciales.
Le Canada s'est fait le champion de la transparence dans ce dossier et le ministre exerce actuellement des pressions en faveur de la transparence à Buenos Aires.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, je pense que le secrétaire parlementaire n'a pas compris la question.
La question est de savoir si des groupes du milieu des affaires ont eu accès, dans le cadre de groupes de consultation, aux textes qu'il refuse de nous rendre publics.
Comment peut-il expliquer que ces gens d'affaires aient eu les textes et que nous n'ayons pas droit à ces textes, ni la population canadienne et québécoise?
[Traduction]
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, si le député a une preuve qu'il désire me communiquer après la période des questions, je serais très heureux d'en prendre connaissance et d'aborder la question auprès des fonctionnaires responsables du commerce.
La majeure partie de l'information citée par l'opposition provient, d'après ce que j'ai entendu aujourd'hui, du Globe and Mail et du Star de Toronto.
* * *
L'ÉCONOMIE
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la politique financière du gouvernement dessert les Canadiens. En 1997, notre productivité augmentait au rythme de 2,3 p. 100. Aujourd'hui, ce taux est à peine la moitié de ce qu'il était alors. Cela signifie que notre niveau de vie est en baisse, tout comme notre dollar.
Quelles mesures le ministre des Finances va-t-il prendre pour renverser ces tendances inquiétantes?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, on pourrait peut-être tout simplement commencer par éclairer la lanterne du député.
Le fait est que notre productivité a commencé à augmenter en 1997, pas à diminuer. Si le député veut d'autres indicateurs, je pourrais lui dire que notre valeur nationale nette atteint aujourd'hui un niveau record. Le revenu personnel disponible est en hausse.
Le fait est que la situation économique des Canadiens s'améliore. Le député a tort.
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je parle du taux de croissance. Le ministre parle de productivité. Le taux de croissance canadien est fantastiquement inférieur à celui des Américains. Statistique Canada nous a donné ce renseignement cette semaine.
Le taux de croissance des Américains est presque quatre fois le nôtre. Cela signifie que, dans la course économique, ils filent sur huit cylindres alors que nous nous traînons avec seulement deux cylindres. Notre économie manque d'accélération.
Que va faire le ministre pour que nous ne restions pas à la traîne derrière les Américains...
Le Président: Le ministre des Finances a la parole.
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député a tort. S'il parle de productivité, le fait est que notre productivité est à la hausse. Elle a commencé à augmenter en 1996 et en 1997 après presque une décennie de déclin; elle a commencé à remonter la pente sous la direction de notre gouvernement.
Si le député parle de croissance économique, eh bien mon Dieu, on prévoit que notre croissance sera beaucoup plus forte cette année que celle des États-Unis. Au cours des quatre dernières années, nous avons créé presque deux fois plus d'emplois que les États-Unis.
Le seul taux de croissance qui décline régulièrement est celui de la popularité de l'Alliance canadienne.
* * *
[Français]
LES CONVENTIONS FISCALES
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, en début de mandat, alors que la morale gouvernementale était moins élastique, le ministre des Finances devait se retirer du Cabinet à toutes les fois où il était question de construction navale.
Aujourd'hui, on permet au ministre des Finances de traiter de la question des paradis fiscaux sans aucune retenue.
Comment le ministre peut-il justifier qu'il intervienne dans ce dossier, alors qu'il possède 11 compagnies dans des paradis fiscaux, dont huit à La Barbade? Comment peut-on être plus en conflit d'intérêts que ça?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je répète que le ministre des Finances s'est conformé à toutes les règles qui existaient lorsqu'il est devenu ministre des Finances.
C'est un homme extrêmement honorable et, encore une fois, le seul intérêt du Bloc, parce que lui aussi baisse en popularité, c'est d'essayer de détruire des personnalités.
Mais j'ai complètement confiance en mon ministre des Finances et il a la confiance de tout le caucus du Parti libéral.
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, il est de notoriété publique que le ministre des Finances profite, par le biais de huit de ses compagnies, de la Convention fiscale entre La Barbade et le Canada.
Quelle crédibilité peut avoir le ministre qui traite directement d'un dossier dans lequel il est personnellement impliqué par l'entremise de huit de ses compagnies?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, l'entente, le traité avec La Barbade fut entériné en 1980; c'est bien avant mon temps.
Cela étant dit, le Canada a été un chef de file dans tout ce mouvement pour éliminer les pratiques fiscales dommageables. C'est le Canada, à l'OCDE, qui a été un des chefs de file. Parmi les ministres des Finances de l'hémisphère occidental, c'est le Canada qui est en train de le faire, et nous allons réussir à éliminer ces pratiques.
* * *
[Traduction]
L'INDUSTRIE DE LA CONSTRUCTION NAVALE
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre de l'Industrie a réagi aujourd'hui à un rapport sur l'avenir de l'industrie de la construction navale au Canada en écartant l'idée de subventionner cette industrie.
Puisque le ministre s'est fermement engagé à ne pas subventionner l'industrie de la construction navale, pourrait-il expliquer pourquoi le gouvernement fédéral n'a pas combattu la loi américaine appelée Jones Act, non assujettie à l'ALENA, afin de permettre aux entreprises canadiennes de construction navale de pénétrer le marché américain?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, l'Alliance canadienne peut bien parler de fournir de fortes subventions à l'industrie de la construction navale, mais, pour notre part, nous pensons que cette industrie est capable de faire montre d'innovation en utilisant les nouvelles technologies, la formation et l'accès au marché pour se tailler un créneau qui profitera aux travailleurs canadiens.
Nous ne partageons pas l'attitude défaitiste des députés de l'Alliance canadienne qui pensent qu'on ne peut faire des affaires qu'avec des subventions. Nous ne sommes pas de cet avis.
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): C'est tout un revirement d'opinion, monsieur le Président.
Lors de sa dernière campagne électorale provinciale à Terre-Neuve, le ministre de l'Industrie avait dit aux travailleurs de la construction navale que si son gouvernement ne rendait pas cette industrie autonome, ils pourraient lui attacher des plaques d'acier aux chevilles et le jeter du bout du quai. Cela fait déjà cinq ans. Il est maintenant ministre fédéral de l'Industrie et il n'a toujours pas de plan.
Le ministre va-t-il produire un plan ou va-t-il s'en retourner sur le quai?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Ce n'est pas ce que j'ai dit, monsieur le Président, mais je peux imaginer un bon usage pour quelques plaques d'acier et à quelles chevilles on devrait les attacher.
Un groupe de travail formé par le gouvernement fédéral a produit son rapport aujourd'hui. Les membres du groupe de travail ont fait de l'excellent travail en nous soumettant des recommandations utiles et une série d'options pour améliorer la qualité et la productivité de notre industrie de la construction navale. Nous allons analyser soigneusement le rapport et faire rapport à la Chambre au moment opportun.
* * *
LE CRIME ORGANISÉ
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, les risques que le crime organisé pose pour nos familles, nos entreprises et nos fermes ainsi que pour la sécurité de nos collectivités sont notoires pour les électeurs de ma circonscription et de Brossard—La Prairie, dont le député s'est beaucoup et très longtemps investi dans ce dossier. Tous les Québécois en sont bien conscients.
La ministre de la Justice pourrait-elle expliquer à la Chambre en quoi les dispositions annoncées par ses bons soins, de concert avec le solliciteur général, amélioreront et renforceront la lutte contre le crime organisé?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, après consultation de nos homologues provinciaux et territoriaux, de la police, des procureurs et du sous-comité chargé du crime organisé, mon collègue, le solliciteur général, et moi avons décidé de prendre de nouvelles dispositions plus intensives et avons annoncé la mise à disposition de nouvelles ressources pour lutter contre le crime organisé.
Entre autres choses, ces nouvelles dispositions cibleront l'adhésion à une organisation criminelle, protégeront mieux contre l'intimidation ceux qui travaillent pour le système judiciaire, simplifieront la définition dans la loi de la notion d'organisation criminelle et élargiront les pouvoirs dont disposent les forces de l'ordre pour saisir les produits de la criminalité.
Nous faisons clairement savoir que le gouvernement est du côté de la police et des procureures, qui sont...
Le Président: Je donne la parole à la députée de Winnipeg-Centre-Nord.
* * *
L'ASSURANCE-EMPLOI
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, aujourd'hui est un grand jour pour les femmes. Kelly Lesiuk, de Winnipeg, a obtenu gain de cause devant les tribunaux relativement à une contestation, fondée sur la charte, au sujet d'une disposition de l'assurance-emploi. C'est une victoire pour les femmes et les travailleurs à temps partiel.
Le juge Salhany a rendu une décision voulant que la disposition du régime d'assurance-emploi selon laquelle les travailleurs doivent accumuler 700 heures travaillées afin d'être admissibles à des prestations est inconstitutionnelle et qu'elle porte atteinte à la dignité des femmes.
Ma question d'adresse à la ministre responsable de la Situation de la femme. Va-t-elle promettre aux Canadiennes de se battre afin de transposer cette décision en mesure législative et...
Le Président: La secrétaire d'État à la Situation de la femme a la parole.
L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, ce gouvernement a toujours défendu avec ardeur le droit des femmes à améliorer leur situation économique. Nous avons toujours lutté pour que les femmes puissent participer au marché du travail et jouir des avantages leur permettant de faire des choix. Nous continuerons dans cette voie.
* * *
LES EXPORTATIONS D'EAU DOUCE
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, mardi dernier à la Chambre, le très honorable premier ministre a affirmé que l'eau ne faisait pas partie de l'ALENA. À peine quelques jours auparavant, le ministre de l'Environnement se disait préoccupé du plan du premier ministre Grimes en vue d'exporter l'eau du lac Gisborne, à Terre-Neuve, prétendant qu'en raison de l'ALENA, cela engagerait le reste du pays d'une façon qu'il jugeait inacceptable.
J'aimerais que le premier ministre ou le ministre de l'Environnement nous explique cette contradiction. Le premier ministre affirme que l'eau est exclue de l'accord, alors que le ministre de l'Environnement se préoccupe des conséquences du projet du lac Gisborne sur l'ALENA. Quelle est la politique du gouvernement sur cette question?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je sais pertinemment qu'en 1993, avant de signer l'ALENA, mon gouvernement a exigé des Américains et des Mexicains que l'eau soit exclue de l'entente.
Tant les Américains que les Mexicains ont accepté, à ce moment-là, pour que l'accord puisse être signé. C'est une victoire très importante que nous avons remportée pendant la semaine suivant notre arrivée au pouvoir.
* * *
L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, le gouvernement veut faire croire à l'industrie du bois d'oeuvre que c'est le calme avant la tempête, alors qu'on est en pleine tempête. Dans quatre mois, tous les chargements de bois d'oeuvre que nous exportons aujourd'hui aux États-Unis pourraient être assujettis à des droits compensateurs et antidumping appliqués rétroactivement à lundi dernier.
L'imposition possible de quatre mois de droits rétroactifs paralyserait ou fermerait des scieries partout au Canada. Que fait le gouvernement pour alerter les scieries du danger? Qu'est-ce qu'il fait pour limiter les dégâts?
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le député sait que, de concert avec son homologue le représentant américain au commerce, M. Zoellick, le ministre du Commerce international a proposé d'envoyer un émissaire. Il plaide pour cette façon de procéder aujourd'hui, à Buenos Aires.
En fait, le Canada a besoin d'adopter une approche pancanadienne dans ce dossier. Le libre-échange est la solution. C'est ce que nous avons maintenant. Si seulement les Américains ne se contentaient pas de dire qu'ils sont des libre-échangistes et l'étaient vraiment, tout serait parfait.
* * *
LES EXPORTATIONS D'EAU DOUCE
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, les Canadiens veulent vendre aux États-Unis des pommes de terre et du bois d'oeuvre, mais pas de l'eau en vrac.
Le premier ministre serait-il prêt à se lever à la Chambre pour nier les commentaires voulant que son gouvernement envisage l'exportation massive d'eau? De plus, pourrait-il rassurer les Canadiens en disant qu'il ne compromettra pas leur patrimoine naturel et déclarer une fois pour toutes que l'eau du Canada n'est pas à vendre?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est précisément parce que le Parti conservateur n'a pas inscrit cela dans l'ALENA que nous avons dû y voir pendant la dernière semaine de 1993. Si nous n'avions apporté aucune modification, l'eau aurait fait partie de l'ALENA et nous aurions peut-être été forcés d'en vendre.
Grâce à l'intervention rapide d'un tout nouveau gouvernement, dans les semaines qui ont suivi son assermentation, nous avons bloqué cette échappatoire.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le gouvernement continue de se vanter, disant qu'il dépense pour réduire les émissions de carbone, mais il est bien loin d'avoir atteint l'objectif fixé à Kyoto, peu importe le nouvel enthousiasme que notre premier ministre vert semble démontrer.
Ma question s'adresse au ministre de l'Environnement et ne porte pas sur les dépenses. Elle se rapporte à l'engagement. Le gouvernement est-il vraiment déterminé à respecter l'engagement de Kyoto et à atteindre la cible de 6 p. 100 sous les niveaux de 1990 d'ici l'an 2008?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, faisant fi du fait que l'Alliance canadienne était contre l'engagement de Kyoto, le premier ministre a accepté, et permettez-moi de répéter ici mes propos d'hier pour les députés de l'Alliance et le chef du Nouveau Parti démocratique qui, de toute évidence, ne savent pas ce qui a été dit à la Chambre hier. Je cite:
Quoi qu'il en soit, comme le premier ministre l'a dit clairement hier et dans des déclarations antérieures, le Canada s'est engagé à respecter le protocole de Kyoto. Nous voulons mettre en oeuvre ses dispositions et nous exhortons les autres pays à faire de même.
En réponse à une deuxième question, j'ai ajouté:
Nous voulons que l'accord de Kyoto soit mis en vigueur. Nous voulons certes nous assurer d'avoir des puits, car ils contribuent fortement à réduire les émissions de gaz à effet de serre...
Le Président: Le député de Red Deer a la parole.
M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous nous préoccupons tous de l'environnement, mais la question porte sur la reddition de comptes. Le protocole de Kyoto a été négocié en catimini. Aucune position publique n'a été adoptée avant le sommet de Kyoto. Aucune analyse des coûts-avantages n'a été faite.
À l'heure actuelle, le Canada et l'énergie du Canada subissent de nouvelles pressions. Le gouvernement va-t-il prendre la bonne mesure cette fois et procéder à des consultations nationales transparentes sur la question du changement climatique?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Il peut être assuré que je vais rencontrer les ministres de l'Environnement des provinces et des territoires très bientôt. Nous discuterons notamment du changement climatique.
Je sais que le ministre des Ressources naturelles en fera autant. Je sais que bien d'autres ministres fédéraux et premiers ministres du Canada discutent de ces questions lorsqu'ils se rencontrent.
* * *
[Français]
LES CONVENTIONS FISCALES
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, il est bien connu que 11 des compagnies que possède le ministre des Finances sont installées dans des paradis fiscaux, dont huit à La Barbade, et qu'il profite, par conséquent, des avantages de la convention fiscale qui existe entre le gouvernement de La Barbade et le gouvernement du Canada.
Si le ministre des Finances est sérieux lorsqu'il dit qu'il faut éliminer les paradis fiscaux, est-il prêt à poser un geste concret qui est de sa responsabilité, soit d'abolir la convention fiscale qui existe entre le Canada et La Barbade, tel que l'exige l'OCDE?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, c'est très clair que, suite aux délibérations à l'OCDE et aux autres négociations que nous avons eues au sein du G-7 et ailleurs, il faut procéder de façon multilatérale et non pas unilatérale.
C'est la position du Canada et celle de tous les autres grands pays. C'est la seule façon pour nous d'arriver à réussir à éliminer ces pratiques fiscales dommageables.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, quelle crédibilité a le ministre des Finances lorsqu'il a huit compagnies à La Barbade et que nous lui demandons quelque chose qui est du ressort de ses responsabilités, soit d'abolir la convention fiscale canadienne signée avec le gouvernement de La Barbade, dont il profite, dont ses compagnies profitent?
La lutte aux paradis fiscaux, j'en conviens. Tout le monde doit lutter contre les paradis fiscaux. Mais la convention fiscale canadienne, signée par le gouvernement du Canada et le gouvernement de La Barbade, il peut l'abolir immédiatement.
Va-t-il abolir cette convention, oui ou non?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je l'ai dit, les attaques personnelles de cette façon à la Chambre, c'est tout simplement dégoûtant.
Nous sommes ici pour servir le peuple. Nous avons un ministre des Finances qui est considéré comme l'un des meilleurs dans le monde. Cela fait huit ans qu'il est ministre des Finances et il a la confiance non seulement de mon parti mais de tous les Canadiens.
M. Yvan Loubier: C'est «cheap», c'est un «cheap shot». C'est malhonnête, c'est dégoûtant.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. L'honorable députée de Renfrew—Nipissing—Pembroke a la parole et nous voulons entendre sa question.
* * *
[Traduction]
LES TÉLÉCOMMUNICATIONS
Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans un monde où il existe 500 canaux numériques, les Canadiens nous disent qu'ils veulent avoir le choix sur le plan télévisuel. La politique gouvernementale actuelle oblige les téléspectateurs à s'abonner à des services télévisuels et à payer pour des canaux qu'ils ne veulent pas; pour voir les émissions qu'ils souhaitent, les téléspectateurs doivent en effet payer pour avoir accès à une foule de canaux.
Puisque la technologie existe, la ministre du Patrimoine canadien prendra-t-elle dès maintenant des mesures afin que les consommateurs n'aient à payer que pour les canaux qu'ils souhaitent au lieu d'avoir à payer pour ceux qu'ils ne veulent pas?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a absolument rien qui oblige un consommateur à s'abonner à un service de câblodistribution.
Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ma question complémentaire s'adresse au ministre de l'Industrie. Comme il est évidemment dans l'intérêt des Canadiens que la Loi sur la radiodiffusion et la Loi sur les télécommunications relèvent d'un seul ministre, le ministre va-t-il prendre dès maintenant des mesures afin de garantir que l'avenir de la Loi sur la radiodiffusion et de la Loi sur les télécommunications soit déterminé par les forces du marché et non par l'idée erronée selon laquelle le gouvernement devrait choisir les gagnants et les perdants dans un monde où il existe 500 canaux?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis surprise qu'une députée d'un parti dont la majorité de la députation vient de l'Alberta s'oppose à la politique qui a créé des milliers d'emplois dans cette province.
Depuis quatre ans, les investissements dans la télévision albertaine sont passés de 50 millions à 200 millions de dollars par année, justement grâce au Fonds canadien de télévision et aux investissements visionnaires que le gouvernement a faits, de concert avec le secteur privé.
Je regrette que le parti de la députée s'oppose à la création d'emplois dans le secteur de la télévision, car, de ce côté-ci, nous appuyons les milliers de personnes...
Le Président: Le député de Tobique—Mactaquac a la parole.
* * *
L'INDUSTRIE DU BOIS D'OEUVRE
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Monsieur le Président, de nombreux électeurs de ma circonscription dépendent du bois d'oeuvre pour gagner leur vie. Au Nouveau-Brunswick, un emploi sur huit se trouve dans le secteur du bois d'oeuvre. Quelque 40 localités du Canada atlantique comptent presque exclusivement sur le bois d'oeuvre, qui constitue leur principale industrie.
Les producteurs de bois d'oeuvre du Canada atlantique sont très préoccupés par la demande de droits anti-dumping qui a récemment été déposée aux États-Unis. Ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international. Que fait le gouvernement pour préserver le libre-échange du bois d'oeuvre dans le Canada atlantique?
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue et tous les collègues libéraux du Canada atlantique qui ont travaillé avec tant de vigueur dans ce dossier.
Comme le député le sait, le ministre se trouve actuellement à Buenos Aires pour discuter de la question d'un envoyé, ce qui constitue une bonne façon de progresser dans ce dossier. Nous continuerons de lutter en faveur du libre accès au marché pour le bois d'oeuvre de la région de l'Atlantique, mais dans le cadre d'un libre accès pour tout le bois d'oeuvre canadien, comme le prévoit l'accord.
Alan Greenspan, président de la Réserve fédérale, a fait une mise en garde, hier, contre le protectionnisme sur le bois d'oeuvre et tout le reste.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis rentré le mois dernier d'un voyage au Soudan et j'ai présenté un plan de paix en 14 points, car ce pays s'éloigne de la paix plutôt que de s'en rapprocher.
Le ministre des Affaires étrangères va-t-il travailler avec nos partenaires internationaux et exiger que le gouvernement du Soudan et l'armée populaire de libération du Soudan adoptent un cessez-le-feu immédiat et autorisent l'accès intégral et libre de tous les envois de secours dans le Sud?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi tout d'abord de souligner le rapport utile que le député m'a remis après sa visite. Je m'attends aussi à recevoir des rapports des autres députés qui étaient du voyage.
Deuxièmement, j'ai rencontré récemment le sénateur Lois Wilson, qui est l'envoyé spécial du ministre des Affaires étrangères pour le Soudan, afin de m'assurer qu'elle continue de s'intéresser à la situation, au moment où nous cherchons à appuyer les efforts consentis pour encourager une solution pacifique du conflit.
La tragédie qui frappe la population du Soudan est en toute franchise stupéfiante et...
Le Président: Le député d'Esquimalt—Juan de Fuca a la parole.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je tiens à attirer l'attention sur une autre question encore plus cruciale qui est urgente parce qu'elle met en péril la vie de près d'un million de personnes. Il y a une famine imminente dans le Sud. On s'attend à ce qu'un million de personnes meurent au cours du prochain mois.
Le ministre des Affaires étrangères va-t-il demander à nos partenaires internationaux de redoubler d'efforts afin de veiller à ce que les habitants du Sud aient accès de toute urgence à des aliments? Le programme alimentaire mondial des Nations Unies a dit qu'il s'apprête à diffuser des communiqués pour parler du décompte des morts. Nous ne pouvons attendre. Le ministre va-t-il demander à nos partenaires internationaux de fournir des aliments?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je tiens d'abord à souligner que c'est une bonne question. Deuxièmement, nous poursuivons nos efforts en vue d'encourager l'Autorité intergouvernementale pour le développement à prendre les mesures voulues pour favoriser une résolution pacifique de la situation au Soudan. Ma collègue, la ministre responsable de l'ACDI, appuie également des efforts ayant pour objet de veiller à ce qu'il y ait des provisions suffisantes.
La vérité, c'est qu'une guerre civile est en cours et qu'il y a des morts et des blessés. C'est une situation qui appelle une solution de la part des pays du monde.
* * *
[Français]
L'ENVIRONNEMENT
M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Monsieur le Président, le Canada a refusé de signer la déclaration de Montréal sur les gaz à effet de serre.
Hier, le ministre de l'Environnement affirmait que ce refus de signer venait du fait que le Canada était l'hôte et qu'il était d'usage de ne pas se prononcer sur des questions qui ne sont pas à l'ordre du jour.
Or, après vérification au ministère des Affaires étrangères, on apprend que cette décision n'est pas une question de protocole, mais une décision purement politique.
Est-ce que la décision politique du Canada ne démontre pas que, lentement mais sûrement, le Canada n'appuie plus le protocole de Kyoto?
[Traduction]
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, un paragraphe du communiqué des 34 pays des Amériques qui se sont réunis à Montréal traitait des changements climatiques.
Cela dit, les pays de l'Amérique latine ont fait une déclaration séparée, ce qui est certainement leur droit. J'ai dit à ce moment-là que nous n'avions pas vraiment à nous en formaliser, mais comme nous présidions la rencontre, nous ne pouvions pas intervenir.
En ce qui concerne la deuxième partie de la question du député, je me demande s'il a écouté la réponse que j'ai donnée hier lorsque j'ai dit au député de Rosemont—Petite-Patrie que le premier ministre avait dit clairement...
Le Président: Le député de Yukon a la parole.
* * *
LES PÊCHES
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le Président, les Américains pratiquent la surpêche du saumon. Ces dernières années, le nombre de saumons de la rivière Yukon qui réussissent à atteindre le Yukon a diminué de façon radicale. L'an dernier, la situation était si grave que la pêche a été interdite à certains endroits.
Depuis le début des années 1980, le gouvernement canadien négocie avec les États-Unis l'établissement d'un cadre de gestion du saumon de la rivière Yukon.
Le ministre des Pêches et des Océans peut-il informer la Chambre et mes électeurs du Yukon des progrès réalisés dans les discussions bilatérales avec les États-Unis?
L'hon. Herb Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'annoncer aujourd'hui, après 16 ans de négociations, que les États-Unis et le Canada sont parvenus à une entente sur le saumon du Yukon.
Cette question est un irritant de longue date pour le Canada. C'est une excellente nouvelle pour le saumon du Yukon, dont la survie était menacée. L'entente stipule clairement le nombre de prises ainsi que les mesures de conservation et d'accroissement des stocks de saumon du Yukon. Le traité est merveilleux pour le saumon ainsi que pour les villages de pêcheurs du Nord.
Le Président: Le député de Calgary-Centre a la parole.
Des voix: Bravo!
Des voix: Oh, oh!
Le Président: Je sais qu'il y a beaucoup de concurrence, mais la présidence doit parfois faire des choix difficiles.
* * *
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, le député de Winnipeg—Transcona et moi vous remercions. Ma question s'adresse au vice-premier ministre.
Dans les recommandations qu'il a faites au gouvernement, le conseiller en éthique propose d'éliminer les échappatoires qui permettent aux ministres de faire sans vergogne des démarches auprès des sociétés d'État.
Le gouvernement proposera-t-il des modifications à la loi qui empêcheraient toute ingérence dans les affaires des sociétés d'État et rendraient le conseiller en éthique directement responsable devant le Parlement et non simplement devant le premier ministre?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je considérerai les observations de notre collègue comme une démarche de sa part.
Le Président: C'est bien tentant, mais la période des questions est terminée. Nous entendrons le député de Winnipeg—Transcona un autre jour.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: Avec le consentement unanime de la Chambre, nous pouvons poursuivre. Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
* * *
LES EXPORTATIONS D'EAU DOUCE
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'espère que personne n'a pensé que j'essayais de cacher au Président la vision de l'ancien premier ministre.
Ma question s'adresse au ministre de l'Environnement. Étant donné que le premier ministre a dit de ne pas s'inquiéter en ce qui a trait à l'ALENA et à l'eau, je me demande si le ministre de l'Environnement est maintenant disposé à se rétracter au sujet des préoccupations qu'il a exprimées il y a une semaine concernant le plan du premier ministre Grimes à Terre-Neuve.
L'ALENA ne pose-t-il toujours pas de problème? Le premier ministre a-t-il changé d'idée?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, il est clair que le député n'a pas compris l'importance de s'assurer que l'eau ne sera pas considérée comme un produit commercial aux termes de l'ALENA ou de tout autre accord commercial.
Nous devons éviter de nous retrouver, soit par inadvertance ou pour toute autre raison, dans une situation où l'eau serait visée par les dispositions de l'ALENA. Nous avons un accord avec les provinces et les territoires à cet effet. Nous avons aussi une loi à la Chambre, le projet de loi C-6, qui porte sur les eaux frontalières.
Il est certain que nous devons suivre à la lettre les procédures que nous avons nous-mêmes établies.
* * *
QUESTION DE PRIVILÈGE
LES OBSERVATIONS DE LA DÉPUTÉE
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, certains se sont inquiétés de propos que j'ai tenus mardi au cours du débat sur la motion de l'Alliance. La motion proposait une enquête indépendante sur les tractations commerciales du premier ministre concernant un hôtel et un terrain de golf dans sa circonscription.
À mon grand regret, j'ai cité un article portant sur la Yougoslavie et les abus de pouvoir dont s'est rendu coupable l'ancien président, Slobodan Milosevic. Je regrette sincèrement de m'être laissée aller à ce genre de réflexion. C'est une erreur de jugement de ma part, et j'en suis vraiment désolée.
À tous ceux qui ont été blessés ou offensés par mes propos, je présente mes excuses sincères.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, si le leader à la Chambre refuse de répondre à la première question, j'ai une question complémentaire à lui poser.
Quels sont les travaux prévus pour le reste de la journée et demain? Après le congé de Pâques, aurons-nous la possibilité de discuter du bois d'oeuvre et d'autres problèmes importants concernant les ressources naturelles? Aurons-nous cette chance? Le ministre peut-il nous le dire?
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de répondre à ce qui est certainement la question la plus sensée qui ait été posée aujourd'hui.
Cet après-midi, nous poursuivrons l'étude du projet de loi C-22, portant sur les modifications de l'impôt sur le revenu proposées par le très excellent ministre des Finances. Nous passerons ensuite au projet de loi C-4, qui concerne la Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable. Demain, j'espère que nous franchirons les étapes du rapport et de la troisième lecture du projet de loi C-12, qui modifie la Loi sur les juges.
Le lundi 23 avril, nous mettrons à l'étude le projet de loi C-13, qui apporte des modifications d'ordre technique à la TPS. Nous passerons ensuite au projet de loi sur le crime organisé, qui a été présenté aujourd'hui.
Le mardi 24 avril sera réservé à l'opposition. Les députés pourraient en profiter pour soulever des questions comme celle du bois d'oeuvre, comme ils auraient pu le faire mardi dernier, autre journée d'opposition. Elle a cependant été consacrée à des questions moins importantes.
Le mercredi 25 avril, nous commencerons par la troisième lecture du projet de loi C-9, qui modifie la Loi électorale du Canada.
* * *
[Français]
LES VOIES ET MOYENS
AVIS DE MOTION
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 83(1) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer un avis de motion des voies et moyens visant à mettre en oeuvre certaines mesures touchant les produits du tabac. Je dépose aussi, aujourd'hui, des notes explicatives.
Je demande que l'étude de la motion soit inscrite à l'ordre du jour.
[Traduction]
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 83(1) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer un avis de motion des voies et moyens concernant la gestion à long terme des déchets de combustible nucléaire. Je demande que l'étude de la motion soit inscrite à l'ordre du jour.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
CITOYENNETÉ ET IMMIGRATION
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des consultations, et je crois que vous trouverez qu'il y a consentement unanime pour que la Chambre soit saisie maintenant de la motion suivante concernant une autorisation de voyager. L'autorisation s'applique à un seul comité. Donc, je propose:
Que le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration soit autorisé à voyager à Vancouver, Winnipeg, Toronto et Montréal du 29 avril au 4 mai 2001 relativement au projet de loi C-11, que le personnel nécessaire accompagne le comité et que le comité soit autorisé à télédiffuser ses audiences publiques.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime de la Chambre pour que le secrétaire parlementaire présente la motion?
Des voix: D'accord.
Le Président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI DE 2000 MODIFIANT L'IMPÔT SUR LE REVENU
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-22, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu, certaines lois liées à la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les douanes, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations et une loi liée à la Loi sur la taxe d'accise, soit lu pour une deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous en étions à l'étape des questions et observations. J'ai quasiment terminé mes observations, et je suis prêt à répondre aux questions.
Je veux toutefois rappeler au gouvernement le problème de la fuite des cerveaux et les complications supplémentaires que le projet de loi C-22 représente en matière d'impôt. Je vais donner à la Chambre l'exemple de ma propre famille.
Mon beau-frère habite en Louisiane. Ma soeur vit à Atlanta. Ils font partie de l'exode des cerveaux. Au XIXe siècle, au temps de l'exode des Loyalistes qui se rendaient au Canada par le chemin de fer clandestin, ces derniers chantaient une chanson. Elle était intitulée Follow the Drinking Ground. Le refrain qu'ils chantaient en choeur disait ceci:
Adieu mon vieux maître
Ne me cherche pas
Je pars pour le Canada
Où l'on ne connaît point de maître
C'est le refrain de la chanson qu'ils chantaient en chemin vers le Canada car au Canada tout le monde était libre.
Depuis, les choses ont bien changé. Le chemin de fer clandestin est devenu une autoroute qui conduit vers le Sud les plus brillants de nos concitoyens. Ils quittent leur pays attirés par des perspectives d'emploi plus alléchantes.
Ma propre soeur en est le parfait exemple. Elle a un diplôme en communication en français de l'Université Simon Fraser et elle travaille en Louisiane où elle aide les entreprises canadiennes qui essaient de vendre des produits canadiens au pays des bayous. C'est une Canadienne qui gagne sa vie aux États-Unis parce que son propre pays ne la traite pas comme elle aimerait que le gouvernement traite ses sujets les plus brillants.
L'environnement est meilleur aux États-Unis pour soutenir et favoriser les sujets les plus brillants. Les Américains traitent les jeunes comme une ressource.
Au Canada, nous n'en faisons rien. Tous les jours, à la Chambre des communes, le ministre des Finances se vante du fait que le Canada a un budget équilibré, mais il ne rend pas hommage aux gens qui ont permis d'équilibrer le budget, aux jeunes, aux chefs d'entreprise, à nos gens les plus brillants, aux propriétaires de petites entreprises, aux familles, aux gens qui ont fait des sacrifices, à ceux qui oeuvrent dans des départements d'universités comme la petite institution où je suis allé, la University of Northern British Columbia dont toute la structure financière est en crise à cause du gouvernement.
Beaucoup de choses expliquent que nous ayons un budget équilibré, allant des hôpitaux qui ferment leurs portes à cause du gouvernement jusqu'aux petites entreprises qui sont surimposées. Le gouvernement ne cesse de prendre les mauvaises décisions. Il prend sans cesse de mauvaises décisions financières au détriment des petites entreprises et il dit que c'est grâce à son travail et à ses décisions que notre budget est équilibré au Canada. Or, en réalité, il n'y est pour rien. Nous avons un budget équilibré pour toute une série de raisons qui ne dépendent aucunement du gouvernement. Le ministre des Finances et le premier ministre ne nomment pas Alan Greenspan. Ils ne décident pas des taux de croissance économique aux États-Unis. Ils se sont opposés au libre-échange. Ils ont augmenté les impôts. Ils accroissent les charges sociales, qui suppriment des emplois, ainsi que les cotisations au Régime de pensions du Canada. Ils forcent nos gens les plus brillants à partir du pays.
Ils se vantent d'avoir équilibré le budget et ils s'enorgueillissent de projets de loi comme le projet de loi C-22 dont nous discutons aujourd'hui, mais ce projet de loi va dans la mauvaise direction. Il ne fait que compliquer notre régime fiscal. Il fait en sorte qu'il soit peu probable que des chefs d'entreprise, des constructeurs et le reste, veuillent rester au Canada parce qu'ils voient que le Canada deviendra dans 20 ou 30 ans un pays dans lequel ils veulent vivre. C'est inadmissible.
Je voudrais voir le jour où nous reviendrons à ce refrain des gens qui empruntaient le chemin de fer clandestin dans lequel le Canada est décrit comme le pays de la libre entreprise, où nous pourrons à nouveau chanter ce refrain et en être fiers. Je vais rappeler à la Chambre ce refrain pour la gouverne des ministériels qui viennent de se joindre à nous. Voici:
Adieu mon vieux maître,
Ne me cherche pas.
Je pars pour le Canada.
Où l'on ne connaît point de maître.
Nous avons besoin de liberté économique et politique. Nous n'en avons pas. Pourtant, nous le méritons, car dans la négative, nous ne faisons que sacrifier notre avenir.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, avant la période des questions, le député disait ce qu'il pensait de la suggestion d'exonérer de tout impôt la première tranche de revenu de 250 000 $. Je crois que le député a répondu que c'était là le genre de progressivité que nous devrions avoir.
Cela m'amène à réfléchir sur la question de la progressivité dans notre système fiscal. Pour la gouverne des députés, la progressivité est un principe selon lequel la capacité de payer est fondamentale. Cela veut dire qu'à mesure que notre revenu augmente et franchit certains seuils, le taux d'imposition devrait augmenter lui aussi.
Le député de Calgary-Sud-Est a un jour expliqué à la Chambre qu'un taux d'imposition unique ou uniforme constituait un impôt progressiste car plus on gagnerait d'argent plus on paierait d'impôt. C'est assez intéressant. C'est mathématiquement vrai, mais ce n'est pas de la progressivité.
Le député pourrait-il expliquer comment il se fait qu'il préconise la progressivité dans notre système d'impôt sur le revenu tandis que son parti continue de soutenir que nous ne devrions pas avoir différents taux d'imposition en fonction du revenu? Son parti prétend que nous devrions au contraire réduire le taux d'imposition de sorte que les contribuables à revenu élevé paient moins d'impôt en vertu d'un taux d'imposition uniforme ou unique et se trouvent en fait à payer le même taux d'imposition que les Canadiens à faible et à moyen revenu.
M. James Moore: Monsieur le Président, voilà ce qui se produit en politique, lorsqu'un débat de cette nature est réduit à des échanges de phrases passe-partout qui sont censées résumer la philosophie économique.
La progressivité dont parle le député est insensée. Il s'imagine qu'elle consiste à faire des ponctions progressivement plus importantes dans nos revenus. Pour nous, la progressivité consiste à favoriser l'économie, récompenser les meilleurs et les plus forts, et permettre aux travailleurs de conserver une plus grosse part de leurs gains, pour qu'ils puissent s'offrir un avenir meilleur. C'est cela, la progressivité.
Bien qu'il soit boiteux et qu'il n'ait à peu près jamais été confirmé dans les administrations où il a été mis en pratique, il ne faut pas oublier le principe économique, avancé dans Das Kapital, selon lequel plus on travaille fort, plus on construit, plus on emploie de travailleurs, plus on innove et plus l'on a le sens de l'entrepreneurship, plus l'État doit sévir. Eh oui, il s'en trouve pour le préconiser.
En tant que jeune Canadien, je pense, et j'espère ne pas être le seul, que c'est être plutôt progressiste que de soutenir que plus le risque est grand, plus les chances de succès sont grandes, que plus l'on emploie de travailleurs, plus l'on devient ingénieux et créatif, que plus les sacrifices sont grands, plus l'État reconnaît les mérites de celui qui les fait et se félicite de le compter parmi les siens, au lieu de chercher à le punir et à lui prendre de l'argent pour le donner à la ministre d'État chargée du Multiculturalisme. Car ce n'est pas cela la progressivité.
Or les libéraux semblent entendre par progressivité le prélèvement par le gouvernement de sommes progressivement plus fortes auprès des entrepreneurs en bâtiments, des producteurs, des chefs d'entreprises et des personnes qui font tourner l'économie. Je conseillerais au ministre des Finances de se rapprocher des petites entreprises et de les rassurer quant à leur importance pour le Canada, dont elles contribuent à la productivité. Elles créent des emplois et font tourner l'économie, et le gouvernement devrait les récompenser pour avoir excellé dans leur domaine, et non pas les punir.
M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas d'accord avec le député de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam. La passion et l'énergie qui animaient l'ancien député de cette circonscription me manquent. Je trouve étrangement paradoxal qu'un député dise à la Chambre que cette réduction d'impôt de 100 milliards de dollars ne va pas plaire aux Canadiens parce que ça va compliquer les choses.
J'en reviens à l'impôt forfaitaire ou uniforme. Ce que cela fait, c'est alléger le fardeau fiscal des Canadiens à revenu élevé et alourdir celui des Canadiens à revenu moyen. À l'approche de la campagne électorale, l'Alliance a changé le taux pour 17 et 25 p. 100. Nous ne savons pas très bien où va les mener leur impôt forfaitaire, mais j'ai l'impression que les gens s'en moquent un peu.
Le député a parlé de la complexité du système d'imposition. Nous reconnaissons tous, je crois, que la Loi de l'impôt sur le revenu est compliquée.
Toutefois, à supposer que l'Alliance canadienne introduise un impôt forfaitaire ou un impôt uniforme, cela veut-il dire que l'on ne pourrait plus déduire par exemple les cotisations à des REER, les frais médicaux au-delà d'un certain montant ou certains dons à des organismes de bienfaisance? Ou cela veut-il dire que les Canadiens n'auraient qu'à prendre un chiffre et le multiplier par 17 ou 25?
Beaucoup de Canadiens pensent que c'est tout ce qu'ils auraient à faire. Cependant, plusieurs collègues du député disent que non. Que les mêmes déductions seront permises parce que c'est ce que les Canadiens veulent, c'est ce à quoi ils s'attendent. Je me demande si le député pourrait nous donner des précisions à ce sujet.
M. James Moore: Monsieur le Président, en plus de l'aspect de la progressivité, cela touche également ce dont je parlais plus tôt sur les contorsions visant à déformer la position d'un parti politique.
Le taux d'imposition unique n'est pas un impôt uniforme. Il y a une grande différence. Il y a également une grande différence entre un allégement fiscal de 47,1 milliards de dollars, comme c'est le cas actuellement, et un allégement de 100 milliards. Il ne tient pas compte du Régime de pensions du Canada. C'est ce que les Canadiens ne comprennent pas.
Il a parlé du député qui représentait autrefois ma circonscription, disant qu'il lui manquait. Ce n'est toutefois pas l'opinion des 70 p. 100 des électeurs de ma circonscription qui n'ont pas voté pour lui.
Cela montre bien la façon de compter des libéraux. Il ne s'agit pas d'un allégement fiscal de 100 milliards, mais plutôt de 47 milliards. Il y a un montant net de base. Le montant net ne suffit pas. De jeunes Canadiens quittent toujours le pays. Des commerces continuent de fermer leurs portes. La situation n'est pas meilleure dans les provinces. L'État providence prend de l'importance.
Franchement, j'aimerais voir des budgets beaucoup moins importants dans bon nombre de ministères.
M. Paul Szabo: Lesquels?
M. James Moore: Le député me demande d'en nommer un. Je pense que la secrétaire d'État au multiculturalisme, par exemple, ne devrait pas avoir un budget aussi important. Voilà un exemple.
M. Paul Szabo: Pourquoi?
M. James Moore: Parce qu'elle ne le mérite pas.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-22. Cela m'intrigue de voir les différentes approches tant de ce côté-ci que de l'autre côté de la Chambre.
J'ai écouté certains des commentaires qui ont été faits au sujet de la structure fiscale. Notre parti préconise une structure fiscale progressiste au lieu de la structure punitive que nous avons actuellement.
Pourquoi faut-il que plus notre revenu est élevé plus il se fait gruger par les impôts? Notre parti a toujours défendu la capacité des gens de s'occuper eux-mêmes de leurs affaires, et il préconise une structure fiscale équitable qui ferait qu'on impose les gens au même taux au fil des ans. Avec le système que nous proposons, plus on a un revenu élevé, plus on verse des impôts élevés, mais cela ne veut pas dire que le taux d'imposition augmente.
Ce qu'on ne sait pas bien non plus de notre parti, c'est qu'il est en faveur d'une amélioration marquée de la santé et du bien-être des plus démunis. Comment y parviendrions-nous? Simplement en augmentant la part du revenu non imposable. C'est une mesure progressiste, innovatrice et créative.
Si le gouvernement veut vraiment aider les gens les plus démunis, il examinerait le taux unique d'imposition que nous avons proposé et la façon dont nous avons articulé notre affaire. Il comprendrait alors que cette mesure équilibrée aiderait les moins favorisés tout en laissant aux innovateurs les outils dont ils ont besoin pour s'exprimer.
Lorsque les députés parlent aux dirigeants de PME dans leurs circonscriptions, il y a un commentaire qui revient toujours. Ils trouvent que le gouvernement leur arrache trop d'argent. Les PME créent des emplois et innovent, elles sont le principal moteur de la croissance économique dans notre pays.
Les Canadiens nous demandent pourquoi le gouvernement n'écoute pas. Depuis des années, à l'échelle fédérale et provinciale, des rapports ont été produits et des comités ont été mis sur pied. Tous les rapports sont unanimes. Les Canadiens veulent pouvoir subvenir à leurs besoins, payer leur juste part d'impôts, non pas une part excessive. Les entreprises veulent faire suffisamment d'argent pour créer des emplois, effectuer de la recherche et du développement et prendre part à des mesures qui contribuent à renforcer l'économie et qui nous permettent de détenir des programmes sociaux solides.
L'un des mythes qui persistent au sujet de la droite, c'est qu'elle ne se préoccupe pas des gens, contrairement à la gauche, qu'elle se préoccupe seulement des riches, tandis que la gauche se préoccupe des pauvres. C'est tout à fait insensé.
Nous avons démontré, et cela a été prouvé au fil des ans, que les budgets présentés par le Nouveau Parti démocratique ont été catastrophiques et que leurs chiffres ne collaient pas. Au lieu d'aider les pauvres de notre société, ils leur causeraient du tort. Ils hausseraient les impôts à un point tel que la capacité de fonctionner du secteur privé s'en trouverait restreinte. Cela mène à un exode des cerveaux et des entreprises canadiennes. Nos entreprises ne sont plus capables d'être à la fine pointe de leur domaine.
Certains diraient que nous devons augmenter les impôts encore davantage. Jetons un coup d'oeil sur les modèles européens, la Suède, la Norvège, la Suisse et les pays qui sont depuis toujours les bastions du socialisme, des pays qui sont considérés par la gauche socialiste comme le summum de la pensée économique. Non seulement ils ont affaibli et détruit leurs programmes sociaux, ils ont également détruit l'âme de leur pays et gravement compromis leur économie. L'histoire l'a prouvé.
J'invite les députés du NPD à écouter très attentivement et à consulter leurs livres d'histoire. Ils devraient passer à l'Alliance canadienne, comme tous les autres députés devraient le faire, et prendre connaissance des batailles que nous livrons depuis très longtemps. L'ancien chef du Parti réformiste était aux premières lignes et il mérite beaucoup de crédit pour cela.
Lorsque je me suis joint au parti en 1993, c'était principalement parce que je m'inquiétais vivement de la situation de nos programmes sociaux. Je n'avais pas songé à me joindre au NPD. J'ai choisi le Parti réformiste. Pourquoi? Parce que le Parti réformiste avait énoncé des solutions économiques positives, pour nous permettre d'avoir des taux d'impôt équitables et moins élevés, afin que le secteur privé puisse générer des fonds et prendre de l'expansion. Cela aurait aussi fourni les fonds nécessaires à l'application de nos programmes sociaux.
Une économie saine et un secteur privé sain donnent des programmes sociaux vigoureux. Après tout, le meilleur programme social qu'une personne puisse avoir, c'est un emploi. Nous devons faire en sorte que le secteur privé soit fort, dynamique et concurrentiel, tout en ayant des programmes sociaux solides et dynamiques, ciblés et équitables. Lorsque nous aurons atteint cet objectif, nous aurons réalisé un juste équilibre.
Les téléspectateurs qui suivent le débat, aussi bien que les députés de tous les partis auront compris que nous avons poursuivi cet objectif durant toutes nos carrières professionnelles ici.
Il suffit de voir l'écart qui existe entre la fiscalité canadienne et la fiscalité américaine pour en constater les effets. Nous avons entendu parler de l'exode des cerveaux, et de la fuite des entreprises, mais notre société est aux prises avec un autre problème, plus subtil et peut-être plus insidieux, dont nous n'avons peut-être pas entendu parler, il s'agit des conséquences de la fiscalité lourde sur l'âme de notre pays.
Les taux d'impôt punitifs érodent le désir profond, qui nous anime tous, de chercher à améliorer notre situation. La fiscalité punitive détruit la capacité d'innover dont chaque pays a besoin pour être concurrentiel sur la scène mondiale. N'oublions pas que nous nous concurrençons non seulement entre nous et les provinces entre elles, mais, ce qui est encore plus important, nous livrons concurrence aux autres pays. À mesure que tomberont les barrières commerciales, ce qui est une bonne chose, nous devrons trouver nos niches et les mettre à profit avec plus de détermination.
Je voudrais aussi revenir sur la question du taux d'impôt unique, non pas un taux d'impôt uniforme mais un taux d'impôt unique, qui abaisse et simplifie l'impôt tout en permettant aux contribuables de continuer de bénéficier de nombreuses déductions déjà en vigueur.
Je voudrais également proposer, et cela à titre personnel, de réduire le taux de la TPS. Le gouvernement n'a jamais envisagé d'abaisser le taux de la TPS, bien qu'il ait promis de le faire, ni de simplifier cette taxe. Une des principales plaintes que nous entendons tous dans nos circonscriptions concerne la trop grande complexité de la TPS. Les seuls frais liés à la gestion de la taxe absorbent environ le tiers des recettes qu'elle génère. Le système n'est pas efficace.
J'implore le gouvernement d'envisager des façons de simplifier la taxe, d'instituer une comptabilisation annuelle unique, d'en généraliser l'application et d'abaisser le taux de la taxe de 2 p. 100.
Quant aux charges sociales, il est facile de voir que les cotisations à l'assurance-emploi versées par les entreprises ne sont qu'un autre forme d'impôt. Le gouvernement a réalisé des milliards de dollars de surplus au chapitre de l'AE et, comme nous l'avons fait à maintes reprises, nous répétons que ces surplus doivent être remis aux Canadiens et aux entreprises qui les emploient.
Sous ses allures de programme social, l'AE est aussi un impôt. D'une façon générale, les charges sociales sont une autre forme d'impôt. Nous pouvons veiller à ce que les cotisations à l'AE soient équitables et réorganiser le régime pour qu'il constitue une véritable police d'assurance.
Je voudrais aussi parler de la question des dons de bienfaisance. Il existe une théorie selon laquelle plus les taux d'imposition sont élevés, plus le montant des impôts à payer est élevé et plus les contribuables veulent faire des dons afin d'avoir droit à des avantages fiscaux. La réalité est tout autre. En fait, c'est le contraire. Des études très intéressantes réalisées aux États-Unis ont prouvé que c'est le montant d'argent qui reste après l'impôt qui détermine le montant des dons.
De 1982 à 1989, la tranche d'imposition la plus élevée a chuté considérablement aux États-Unis. Après impôt, ces contribuables ont eu beaucoup plus d'argent dans leurs poches. Il y a eu une hausse de 29 p. 100 des dons faits par ces contribuables. Cela représente un montant impressionnant.
En ces temps où les gens ont de moins en moins d'argent et où les organisations non gouvernementales doivent de plus en plus se financer elles-mêmes, n'est-il pas tout simplement juste et équitable que le gouvernement leur donne une chance de subvenir à leurs besoins? N'est-il pas juste que des organisations comme la Société canadienne du cancer, la Fondation de diabète juvénile Canada et d'autres aient la possibilité de recueillir des fonds auprès de la population et que les donateurs puissent en profiter?
On ne peut tout simplement pas, d'une main, retirer les fonds de ces organisations non gouvernementales et, de l'autre, leur enlever toute capacité de réunir elles-mêmes des fonds. Le gouvernement devrait examiner ce qu'ils ont fait aux États-Unis pour permettre aux gens d'augmenter leurs dons. L'idée c'est que les gens aient plus d'argent dans leurs poches au bout du compte.
Le gouvernement pourrait aussi permettre aux ONG et à leurs donateurs de profiter du même avantage fiscal que celui qu'on accorde aux donateurs des partis politiques. Pourquoi est-ce que celui qui fait un don au Parti libéral ou à l'Alliance canadienne reçoit un avantage fiscal supérieur à celui qui fait un don équivalent à la Société canadienne du cancer?
Nous devrions assurer l'équité fiscale, veiller à ce que celui qui donne à une ONG profite du même avantage que s'il contribuait à un parti politique. J'invite le gouvernement à se pencher sur ces questions. Il s'agit d'un travail fort innovateur. Les gens du Canada qui se fient sur ces organisations non gouvernementales et caritatives profiteront énormément d'une mesure si novatrice de la part du gouvernement.
En cette époque où les nouvelles richesses sont nombreuses, le gouvernement pourrait aussi autoriser les gens de la tranche supérieure de revenus à créer des fondations. Les fondations peuvent être une source considérable de fonds pour les organismes caritatifs et autres organisations non gouvernementales. Pourquoi le gouvernement n'envisage-t-il pas des dispositions fiscales permettant aux contribuables de créer leur propre fondation? Il aurait ainsi un contrôle, une mainmise et je dirais même un moyen efficace de garantir que l'argent profite bien à ceux qui en ont besoin.
Les incitatifs fiscaux en matière d'énergie sont une autre innovation. L'an dernier, les États-Unis ont innové considérablement dans leur budget en prévoyant ce genre d'incitatif, notamment pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Une grande partie de ces avantages réside dans le fait que le contribuable peut choisir d'investir dans des combustibles non fossiles et des utilisations de l'énergie qui ne produisent pas de gaz à effet de serre, ce qui est à l'avantage de l'environnement, mais aussi du contribuable lui-même.
J'invite donc le gouvernement à examiner les mesures prises par les États-Unis. L'énergie solaire, de nouveaux modes de chauffage résidentiel, des voitures hybrides qui ne consomment pas de carburants fossiles, tous ces moyens plus écologiques donneraient aux contribuables et aux producteurs une incitation fiscale qui réduirait la demande de combustibles fossiles.
Notre demande d'énergie va beaucoup augmenter. Nous allons devoir trouver, d'une façon ou d'une autre, de nouvelles sources d'énergie. Le nucléaire est propre, mais il a des inconvénients évidents. Les combustibles fossiles ne sont pas inépuisables. Comme les émissions de gaz à effet de serre ne feront qu'augmenter, nous devons examiner des solutions de rechange pour résoudre. Nous pourrions grandement améliorer notre environnement en envisageant l'adoption d'incitatifs fiscaux comme ceux qui ont été mis en place aux États-Unis.
Au chapitre de l'éducation, j'encouragerais simplement le gouvernement à examiner une autre proposition émanant de ce côté-ci, un système de remboursement des prêts en fonction du revenu. De nos jours, les étudiants ont de plus en plus de difficulté à trouver l'argent pour payer leurs études.
Je suis médecin, mais je n'aurais pas pu fréquenter une faculté de médecine si les coûts avaient été ce qu'ils sont de nos jours. Les frais de scolarité à mon alma mater dépassent maintenant les 12 000 $ par année. Dans le contexte socio-économique où j'ai grandi, ma famille n'aurait jamais eu les moyens de composer avec de tels frais. Bien des étudiants au Canada se trouvent dans cette situation.
Nous sommes actuellement témoins d'une situation très dangereuse, une situation où les facultés professionnelles deviennent l'apanage des riches. Dans le cadre d'une étude récente, on a examiné le revenu familial net dans diverses écoles. Je vais prendre l'université Western Ontario comme exemple. On a constaté que, au cours des quatre ou cinq dernières années, le revenu familial moyen est passé de 60 000 $ à plus de 120 000 $ dans le cas des étudiants admis à la faculté de médecine de l'université Western Ontario. Cette tendance se vérifie partout au Canada et aussi dans d'autres facultés professionnelles comme les facultés de droit et de dentisterie.
Les gens des groupes socio-économiques inférieurs se heurtent maintenant à un obstacle économique énorme lorsqu'ils veulent accéder à des facultés professionnelles. L'accès aux facultés professionnelles ne dépend pas du mérite ou de la compétence des candidats. De plus en plus, il dépend des revenus de leurs parents. C'est une question capitale que l'on doit régler maintenant. Il en va de l'équité fondamentale dans un pays comme le nôtre qui se targue de traiter également tous ses citoyens, quelle que soit leur situation socio-économique.
La situation ne va que s'aggraver. C'est pourquoi j'invite le premier ministre à convoquer de toute urgence les ministres de l'Éducation du pays pour se pencher sur la question.
Un autre problème concerne le manque d'enseignants et de professeurs universitaires tant aujourd'hui que dans l'avenir. Dans tout le pays, on remarque une pénurie qui ne fera qu'empirer. La situation est si sérieuse que des universités et d'autres établissements postsecondaires ont lancé un appel à l'aide. Nous devons trouver des moyens novateurs pour former et garder ceux qui peuvent enseigner et travailler dans nos institutions postsecondaires. Un enseignant ne se forme pas du jour au lendemain. Il faut au moins sept ans pour le faire.
J'invite le premier ministre à soulever la question à une conférence des premiers ministres dès que possible. Il faudra bien des années pour régler ce problème, mais nous devons le faire pour le bien de nos jeunes et de notre économie. L'économie repose sur le recrutement et l'embauche de travailleurs compétents. Si nous ne pouvons pas former des travailleurs compétents, nous allons condamner notre économie à un sort dont nous n'avons pas idée actuellement.
Enfin, je voudrais parler de la question de l'obligation de rendre compte. Mes collègues ont soulevé cette question à maintes reprises. Un simple député libéral a formulé une solution avec laquelle on pourrait difficilement être en désaccord. Il a dit de façon assez intelligente, à l'instar de mes collègues, que nous ne savons comment notre argent est dépensé.
Nous devons connaître les sommes d'argent qui entrent dans le système, où elles sont dépensées et ce que ça donne. Qu'elles soient investies dans les soins de santé, dans l'agriculture ou dans l'environnement, il faut pouvoir mesurer les résultats, et il y a des moyens de le faire.
Chaque ministère devrait avoir un tableau de ventilation des dépenses afin que le sous-ministre puisse, si on lui demande, expliquer où est allé l'argent, comment il a été dépensé et ce qu'on a obtenu en retour. C'est ce que nous et le public voulons. Si on veut bâtir une fonction publique efficace, on doit faire cela.
C'est précisément ce qu'a demandé le greffier du Conseil privé au gouvernement. Il a demandé que l'on procède de toute urgence à une étude approfondie de notre fonction publique et de la façon de la rendre plus efficiente. Nos vaillants fonctionnaires ont aussi un urgent besoin d'une telle étude. Il faut absolument trouver des moyens d'innover et de permettre aux fonctionnaires de faire le meilleur usage possible de leur intelligence et de leurs incroyables talents.
Je reviens à ce qu'a fait M. Gore, alors qu'il était vice-président. Le président Clinton lui avait demandé de rajeunir l'administration publique. M. Gore a fait quelque chose que j'ai trouvé assez original. Il a dit aux fonctionnaires qu'ils avaient carte blanche pour trouver les bonnes solutions, mais qu'ils devaient respecter certaines restrictions, et il leur a donné une carte énumérant ces restrictions.
Nous devons donner plus de pouvoirs à nos fonctionnaires, augmenter leur efficience et les rendre plus responsables. Il faut rationaliser la fonction publique afin qu'elle travaille de manière efficiente pour le bien collectif.
Mon temps est écoulé et je vais conclure en disant que le projet de loi, s'il va dans la bonne direction, aurait dû être déposé il y a trois ans.
M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Madame la Présidente, dans son intervention, le député a parlé entre autres choses de la différence entre l'avantage fiscal offert pour les dons aux partis politiques et celui qui est consenti pour les dons de charité. C'est une question dont nous discutons depuis un certain temps.
J'ai fait un calcul rapide. Le député sait probablement que, si un contribuable verse un don de 1 400 $ à un parti politique, son remboursement d'impôt, tout bien considéré, sera de 500 $, puisque le plafond est fixé à ce montant. Si le même contribuable donne ses 1 400 $ à un organisme caritatif, il a droit à un crédit d'impôt de 17 p. 100 sur la première tranche de 200 $ et de 25 p. 100 sur la deuxième tranche de 200 $. Si on tient compte également de l'impôt provincial sur le revenu calculé au niveau fédéral, on constate que le contribuable qui verse ses 1 400 $ à un organisme de charité a droit à un remboursement plus généreux que s'il les donne à un parti politique.
Il n'est pas si évident que cela que les dons aux partis politiques sont plus avantageux que les dons de charité. À partir d'un certain montant, les avantages des dons de charité continuent d'augmenter tandis que ceux des dons aux partis politiques plafonnent à 500 $.
Selon moi, il y a des raisons pour que le taux de crédit d'impôt sur la première tranche de 200 $ des dons aux partis politiques soit plus élevé. Je crois comprendre, d'après les discussions qui ont abouti à la création de ce crédit, que celui-ci doit donner à tous les Canadiens la possibilité de se porter candidat au niveau fédéral et de recueillir des fonds pour disputer une élection fédérale. Comme le député le sait, il coûte très cher de se présenter aux élections. On a besoin de 60 000 $ à 70 000 $ pour mener une campagne.
C'est une proposition très coûteuse. Ce crédit encourage les contribuables à participer au processus démocratique, de sorte que tous les Canadiens, peu importe leur condition sociale et économique, aient l'occasion de se présenter lors d'une élection. Je dis cela à titre d'information pour le député.
La question que je veux poser est liée à celle-ci, puisque le député parle d'équité et de fiscalité progressiste.
Il faut peut-être faire une différence entre impôt progressiste et progressivité. Le collègue du député qui avait la parole avant moi a dit qu'en défiscalisant un contribuable ayant un revenu de 250 000 dollars, on l'encouragerait à investir.
On a décrit cela comme étant le type de progressivité qu'on aimerait voir au Canada. Si l'Alliance parle de progressivité, non pas de taxation progressiste, comme élément souhaitable de notre système fiscal, le député pourrait-il aider la Chambre à comprendre comment son parti peut aussi proposer un taux d'imposition uniforme ou unique qui allégerait le fardeau fiscal des contribuables à revenu élevé et alourdirait celui des contribuables à revenu moyen? Je vois dans cela tout le contraire de la progressivité.
M. Keith Martin: Madame la Présidente, la plupart des Canadiens n'ont pas 1 400 $ à donner à une oeuvre de bienfaisance ou à un parti politique. Le député pourrait peut-être faire comprendre au Cabinet que le gouvernement devrait accroître le montant des avantages fiscaux consentis aux contribuables qui font un don de 200 $ ou moins, parce que la plupart des gens font des dons de 200 $ et non de 1 400 $.
En ce qui concerne la structure fiscale, permettez-moi de signaler que les déductions et les avantages fiscaux que nous préconisons sont progressistes. La structure fiscale actuelle est punitive. Le gouvernement prélève plus d'impôts à mesure que le contribuable fait plus d'argent.
On a pu constater au Royaume-Uni, avant l'époque de Margaret Thatcher, les répercussions qu'une telle structure peut avoir sur une économie. Avant l'élection de Mme Thatcher, la structure fiscale en Angleterre était similaire à la nôtre. Le député dirait qu'elle était progressiste, mais elle était en fait punitive. Cette structure a ravagé l'économie britannique. Mme Thatcher a réduit les taxes et les impôts et a réussi à relancer l'économie.
L'Irlande est un autre exemple. Elle avait une structure fiscale punitive, comme la nôtre, comparativement à la nouvelle structure plus progressiste qui a été adoptée.
Le gouvernement emploie également des méthodes sournoises pour aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables. J'attire l'attention de la Chambre sur un point très important. D'une main, le gouvernement verse de l'argent à nos militaires et, de l'autre, il le reprend en augmentant le loyer des logements des soldats mariés et en imposant aux soldats des coûts supplémentaires. Il reprend d'une main encore plus que ce qu'il donne de l'autre.
Voilà le sort que le gouvernement réserve à nos militaires. C'est honteux. Ces hommes et ces femmes mettent leur vie en danger pour nous protéger et le gouvernement est en train de les rouler. J'en parlerai à nouveau au ministre de la Défense nationale dès que possible. J'ai déjà soulevé cette question à plusieurs occasions par le passé. J'invite le député à défendre nos militaires devant son caucus, car nous suivrons ce dossier de près.
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, Alliance canadienne): Madame la Présidente, avant de passer à ma question, je ferai un commentaire au sujet de propos préalables. Dans les années 80, la politique fiscale des États-Unis consistait à réduire les impôts, à les simplifier et à les uniformiser de façon marquée. C'est ce qu'il est convenu d'appeler l'hypothèse de l'efficience du marché des capitaux. Aujourd'hui, les États-Unis représentent de 35 à 40 p. 100 du PIB mondial avec 5 p. 100 de la population de l'univers. Peu importe que nous parlions d'automobiles, de bois d'oeuvre ou d'autres choses, le Canada est très tributaire d'une économie saine et robuste aux États-Unis. J'aimerais que le Canada bénéficie de ce genre de croissance économique et qu'il ait la population correspondante.
Nous ne comptons que 30 millions d'habitants. Les États-Unis en ont 300 millions. Nous oublions souvent cet aspect. Notre population n'augmente pas et nous n'avons pas un très grand marché. Nous devons essayer de trouver une façon de créer un marché au pays.
Mon collègue a soulevé un point avec lequel je ne suis pas très familier. Je lui demande d'éclairer la Chambre à ce sujet.
En Saskatchewan, la fondation Bill Gates a versé quelque 20 millions de dollars. L'argent a été versé dans les collectivités éloignées de la Saskatchewan rurale, qui comprend beaucoup de collectivités des premières nations, afin de fournir des ordinateurs et permettre à des particuliers de se brancher à Internet. Le gouvernement en parle beaucoup, mais nous avons très peu de preuves d'une action concrète de sa part. Toutefois, M. Gates et sa fondation ont fait de cette idée une réalité en Saskatchewan.
Je m'intéresse de très près à l'idée des fondations. Au lieu d'avoir des bureaucrates et un gouvernement qui déterminent et dictent où va l'argent, nous pourrions faire appel à ces gens ayant fait la preuve qu'ils peuvent créer de la richesse et produire des biens et services pour faire bouger l'économie. Compter sur des gens comme M. Gates, M. Buffett ou quelqu'un d'autre de semblable qui a une fondation et qui prend ce genre de décision dans notre économie pourrait faire bouger des choses. Je suis très intéressé à obtenir les observations du député à ce sujet. Peut-être pourrait-il nous dire comment ce projet de loi encouragera ce genre de développement dans notre pays.
M. Keith Martin: Madame la Présidente, le fait est que nous n'avons pas ce type de structure fiscale. Ce projet de loi ne prévoit pas ce type de mesure fiscale. Le député cite l'exemple très intéressant de ce mécène américain qui a décidé de faire don d'une somme substantielle aux gens de notre pays.
Nous laissons passer une source formidable d'idées, d'énergie et d'argent qui nous permettrait de venir en aide aux plus nécessiteux. Beaucoup de gens qui ont gagné des fortunes dans les affaires aimeraient faire quelque chose. Ce sont des gens manifestement très intelligents, qui réussissent bien, et qui pourraient mettre leurs compétences au service du public par l'intermédiaire de leurs fondations. Le gouvernement n'a rien à faire. Il doit seulement leur donner la possibilité de le faire.
Je prépare actuellement un projet de loi d'initiative parlementaire à ce sujet. Quand je le présenterai, j'espère que tous les députés à la Chambre l'appuieront.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
COMMERCE, DIFFÉRENDS COMMERCIAUX ET INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Certaines consultations ont actuellement lieu qui m'autorisent à demander le consentement unanime de la Chambre pour proposer une motion concernant les déplacements du comité. Vous constaterez, je pense, qu'il y a consentement unanime pour proposer la motion suivante:
Que le Sous-comité du commerce, des différends commerciaux et des investissements internationaux soit autorisé à entreprendre une étude des relations économiques du Canada avec l'Europe; et que, de plus, le Comité approuve un projet de budget afin que huit (8) membres du Sous-comité, accompagnés du personnel nécessaire, se rendent à Paris, Genève, Berlin et Bruxelles du 22 avril au 5 mai 2001.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Les députés ont entendu la motion. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI DE 2000 MODIFIANT L'IMPÔT SUR LE REVENU
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-22, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu, certaines lois liées à la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les douanes, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations et une loi liée à la Loi sur la taxe d'accise, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Madame la Présidente, au nom des électeurs de Surrey-Centre, je tiens à exprimer notre opposition au projet de loi C-22, au moyen duquel le gouvernement libéral se propose de modifier la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les douanes, la Loi sur la taxe d'accise et bien d'autres lois.
Un peu plus tôt ce matin, j'ai fait part de mon opposition aux changements proposés par les libéraux au projet de loi C-9, modifiant la Loi électorale du Canada. Cette loi crée un système électoral à deux paliers qui, entre autres choses, nuit aux petits partis politiques. Les libéraux sapent la démocratie avec ce projet de loi. Nous ne saurions y consentir.
Voilà maintenant que le projet de loi C-22 vise à modifier la Loi de l'impôt sur le revenu et certaines lois qui lui sont liées, dont il avait été question dans le projet de loi C-43, pour mettre en place des éléments cruciaux des deux derniers budgets. Ce projet de loi comporte 31 amendements concernant un certain nombre de déductions fiscales et leurs définitions.
Il y a trois grandes raisons pour lesquelles l'opposition officielle et mes électeurs s'opposent au projet de loi. Premièrement, le projet de loi néglige le problème posé par l'énorme complexité du code des impôts, lequel est déjà passablement lourd. Au contraire, il y contribue.
Deuxièmement, il fait du tort aux familles, en particulier aux familles à revenu unique.
Troisièmement, les baisses d'impôts prévues dans le projet de loi sont très loin de correspondre à celles proposées par l'Alliance canadienne et à ce que le gouvernement doit faire pour accroître notre productivité, notre position concurrentielle et notre niveau de vie. Je vais développer ces trois points en commençant par parler de la complexité du projet de loi.
Le gouvernement devrait simplifier le régime fiscal et élargir l'assiette fiscale. Il serait plus facile d'accorder des baisses d'impôts à l'ensemble des Canadiens, ce qui serait beaucoup plus avantageux pour tous. Si le régime fiscal était plus simple et comportait moins d'exemptions, des éclaircissements ne seraient pas nécessaires.
Les nombreuses modifications prévues dans le projet de loi accroissent l'énorme complexité de la Loi de l'impôt sur le revenu. Plutôt que de simplifier la loi, comme le ferait l'Alliance canadienne, les libéraux conservent un régime fiscal coûteux et complexe.
Une autre raison pour laquelle je m'oppose au projet de loi tient au fait que les mesures qu'il propose pour améliorer la situation fiscale des familles consistent en des réductions minimales d'impôts. Aucune mesure n'est prise pour régler l'inégalité qui existe depuis longtemps entre les familles à revenu unique et celles à double revenu. Le projet de loi a pour effet d'accroître cette inégalité en augmentant la déduction pour frais de garde dont peuvent seulement bénéficier les familles à revenu élevé ou à double revenu.
En outre, le projet de loi mine l'aspect juridique du mariage. En substituant le terme conjoint de fait à époux, il inclut les conjoints de même sexe.
Même avec les changements proposés dans le projet de loi, les Canadiens continueront de payer beaucoup trop d'argent en impôts. Le mini-budget devait réduire les impôts de 100,5 milliards de dollars en cinq ans. Cependant, voici plutôt ce qui se passera. C'est un peu technique, mais je vais tout de même vous donner quelques détails.
De la prétendue réduction de 100,5 milliards de dollars, il faut soustraire 3,2 milliards sur cinq ans pour les dépenses sociales, particulièrement celles qui portent sur l'indemnité de garde d'enfants. Cette indemnité constitue un programme de dépenses offert par l'entremise du système fiscal. Il ne faut pas confondre l'augmentation à ce chapitre avec une réduction d'impôts. Il s'agit plutôt d'une augmentation de dépenses. Les données ci-dessus ne tiennent pas compte de l'indexation puisque cette dernière est calculée séparément.
Il faut ensuite soustraire 29,5 milliards sur cinq ans pour les augmentations des cotisations au RPC. Puis, il faut soustraire 20,7 milliards sur cinq ans pour les augmentations d'impôts annulées, soit l'indexation. L'indexation de l'impôt sur le revenu des particuliers doit permettre de maintenir le fardeau fiscal à un niveau constant et elle ne devrait donc pas être considérée comme une réduction d'impôts.
Aussi, lorsqu'on tient compte de toutes ces déductions, l'allégement fiscal net n'est plus que de 47,5 milliards et il s'étale sur cinq ans. Il n'entre pas en vigueur immédiatement.
En réalité, le programme d'allégement fiscal proposé par les libéraux en l'an 2000 ne vaut en fait que la moitié de ce qu'ils prétendent et la moitié de ce que l'Alliance canadienne a proposé au cours de la période électorale.
C'est ce qu'on découvre quand on se permet de faire quelques calculs et qu'on se penche sur les détails. C'est ce à quoi on peut s'attendre en matière d'allégement fiscal par comparaison avec l'image qu'en donnent les libéraux dans leur propagande. Tout ce que le gouvernement fait dans ce dossier c'est de jeter de la poudre aux yeux.
Le projet de loi C-22 est un document de plus de 500 pages. Je le lirai plus tard car cela prendra trop de temps. Les libéraux disent que le projet de loi porte sur des mesures administratives et des mesures de mise en pratique. Ils disent qu'il met en oeuvre des réductions d'impôt d'environ 100 milliards de dollars sur cinq ans. Comme je l'ai démontré, ce n'est pas le cas. Ces réductions seront moitié moins élevées.
Plus on examine le projet de loi, plus on y trouve de problèmes. Plus les Canadiens examinent le projet de loi, plus ils le trouvent complexe. Je vais prendre le temps d'aborder quelques-uns de ses éléments.
Le projet de loi comporte 31 mesures principales. L'une d'entre elles concerne les acteurs non-résidants. Elle a pour objet d'appliquer une nouvelle retenue d'impôt de 23 p. 100 aux paiements faits aux acteurs non-résidants et à leurs sociétés, mais permet à ces acteurs et sociétés de choisir de payer plutôt l'impôt régulier prévu par la partie I sur les gains nets. Cette mesure à elle seule fait du tort à ma belle province, la Colombie-Britannique, où l'on tourne de plus en plus de films, ce qui contribue au bien-être de ma province.
Le ministère fédéral de la Citoyenneté et de l'Immigration a également imposé des restrictions à l'octroi de visas aux gens qui désirent venir au Canada pour faire des films et pour faire le meilleur usage des beaux paysages de la Colombie-Britannique et de ses installations. Cela fait du tort à la Colombie-Britannique. Ces gens iront donc dans d'autres pays pour tourner des films. Pourquoi viendraient-ils faire des films en Colombie-Britannique? Beaucoup de gens espèrent que l'industrie cinématographique contribuera à la prospérité de ma province.
Le projet de loi traite des partenariats à responsabilité limitée, des règles relatives aux biens de remplacement, des types de propriétés qui seront examinés, des règles concernant la couverture de l'excédent de pertes et d'un impôt sur le capital. Un impôt sur le capital supplémentaire serait également prélevé sur les compagnies d'assurance-vie. Les pertes des filiales étrangères serviraient à déterminer le revenu des filiales ou du revenu accumulé pour un exercice donné. Il traite d'une filiale étrangère appartenant à un partenariat contrôlant simultanément une chaîne de sociétés et sa propre mise. Il traite des dépenses de publicité dans de périodiques et de magazines canadiens et américains. Il traite aussi des fiducies et du traitement fiscal ou de la distribution des biens d'une fiducie canadienne à un bénéficiaire non résident. Il traite en outre des fiducies de fonds communs de placement, des REER et des régimes de revenu de retraite rectifié.
Quand on étudie le projet de loi en détail, on constate qu'il présente d'autres complexités et d'autres situations anti-familiales.
Il y a la question de la migration des contribuables, soit la capacité d'imposer les gains des immigrants. Cela influera sur l'image du pays qui sera montrée aux futurs immigrants.
En ce qui concerne les filiales de banques étrangères, il y aurait un crédit à l'investissement de 15 p. 100 pour certaines activités d'exploration minière. Mentionnons aussi les dépenses d'exploration et de développement étrangères, la valeur des biens du secteur des ressources appartenant à des étrangers. Il imposerait une restriction de 30 p. 100 à la déduction annuelle de nouvelles dépenses d'exploration et de développement étrangères.
Il y a bien d'autres points. En voici un, à savoir le crédit d'impôt étranger pour les ententes de partage des frais de production de gaz et de pétrole. Un autre concerne les dettes en devises faibles où le projet de loi prévoit limiter la déductibilité des frais d'intérêts et ajuster les gains et pertes sur change relativement aux dettes en devises faibles et aux opérations de couverture connexe.
Ce projet de loi renferme une foule de dispositions qui vont rendre très compliqué le code fiscal.
En ce qui concerne la capitalisation restreinte, le projet de loi réduit le rapport dettes-capitaux propres acceptable de 3:1 à 2:1 et il élimine l'exemption accordée aux fabricants d'aéronefs et de pièces d'aéronefs.
En ce qui concerne les cotisations au RPC sur le revenu d'un travail indépendant, il permet la déduction du revenu d'entreprise de la moitié des cotisations payables au RPC sur le revenu d'un travail indépendant. L'autre moitié des cotisations continue de donner droit au crédit d'impôt pour cotisations au RPC.
Voici un article sur les étudiants et les bourses d'études et de perfectionnement. L'exemption est augmentée de 3 500 $ pour les bourses d'études ou de perfectionnement reçues par un contribuable relativement à son inscription dans un programme pour lequel il peut demander le crédit d'impôt pour études.
En voici un autre sur le crédit d'impôt pour études. Le projet de loi double les montants mensuels sur lesquels est fondé le crédit accordé aux étudiants à temps plein et à temps partiel, pour qu'ils atteignent 400 $ et 120 $ respectivement.
Il touche aussi le crédit d'impôt pour frais médicaux.
Il ne laisse aucun domaine qui ne soit pas affecté; les familles, les aidants naturels, les crédits d'impôt pour la déficience mentale ou physique, les déductions pour frais de garde d'enfants, etc. Par conséquent, je présume que ce projet de loi ne touchera pas seulement les familles, mais aussi toutes ces personnes et les travailleurs à faible revenu.
L'Association minière du Canada appuie certains aspects de ce projet de loi. Elle appuie la définition de bien minier et pourtant elle n'a pas été mise au courant des changements avant que l'opposition officielle ne communique avec elle. Elle n'a pas été consultée. Elle a appris par nous que le gouvernement avait l'intention de modifier la définition de bien minier.
Ce gouvernement agit en coulisse. S'il avait été sincère, il aurait sûrement communiqué avec les intéressés et divers groupes au Canada. Il aurait écouté les Canadiens. Il aurait compris que les Canadiens veulent que des crédits d'impôt entrent en application plus tôt qu'en 2005.
Le projet de loi garantit que les exemptions personnelles de base passeront à un minimum de 8 000 $ d'ici 2004. Les crédits et les allégements fiscaux prévus par le projet de loi sont un pas dans la bonne direction, mais un bien petit pas.
On s'est efforcé pour réduire le taux d'inclusion des gains en capital, la surtaxe visant à éliminer le déficit et les taux marginaux, pour hausser les seuils de revenu marginal et pour resserrer d'autres règles sur les déductions. Le projet de loi augmenterait et clarifierait le crédit d'impôt pour déficience mentale ou physique.
On y trouve du bon et du mauvais.
En guise de conclusion, je ferai remarquer que les députés alliancistes rétabliraient la confiance des Canadiens dans le caractère équitable du régime fiscal canadien en simplifiant ce régime. Nous rétablirions l'indexation et nous irions vers un régime fiscal plus simple fondé sur un taux d'imposition unique qui veillerait à ce que tous les Canadiens payent moins d'impôts. Nous sommes d'avis que tous les Canadiens dont le revenu est supérieur à un certain seuil devraient contribuer au coût des services que le gouvernement met à leur disposition et dont nous bénéficions tous, peu importe notre revenu.
Nous espérons que le gouvernement prendra en considération les amendements proposés et les témoignages entendus au comité. À ce moment-ci, l'Alliance canadienne ne compte pas appuyer ce projet de loi.
M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Madame la Présidente, le député de Surrey-Centre et son collègue qui l'a précédé prétendent, je crois, que les Canadiens ne seront pas très heureux des mesures fiscales proposées, car même s'il s'agit d'une réduction d'impôt de 100 milliards de dollars, tout cela va compliquer les choses. Bien entendu, même leurs propres propositions fiscales ne vont pas simplifier le régime, comme ils l'ont avoué dans cette enceinte.
Même si nous reconnaissons tous qu'une simplification du régime fiscal peut être un bon objectif, en toute déférence, je crois que le député met à côté de la plaque. Les Canadiens veulent un allégement de leur fardeau fiscal. Ils sont heureux de cet allégement qui est le plus important dans l'histoire de notre pays.
Ensuite, le député de Surrey-Centre, ainsi que certains autres de ses collègues, ont prétendu que l'allégement du fardeau fiscal n'équivaut pas vraiment à 100 milliards de dollars, qu'il est bien inférieur à cela. Il prétend, par exemple, que les augmentations des cotisations au Régime de pensions du Canada devraient être déduites de ce montant. À l'instar des Canadiens, il sait que le Régime de pensions du Canada est un régime de pensions auquel cotisent les employés et les employeurs et dans lequel les Canadiens investissent pour assurer leur bien-être futur au moment de la retraite. Il ne s'agit pas d'un impôt. Les cotisations ne viennent pas grossir le Trésor public. Les cotisations ne sont pas, n'ont jamais été et ne seront jamais un impôt. Le député sait que cette affirmation est hypocrite au mieux.
Le député affirme également que la réindexation du régime fiscal ne permet pas vraiment d'économiser de l'impôt. J'ai utilisé quelques exemples plus tôt. Prenons une famille avec deux enfants dans laquelle un seul des deux conjoints travaille et qui a un revenu de 40 000 $. Lorsque toutes les mesures de cet allégement fiscal seront entrées en vigueur, son fardeau fiscal au niveau fédéral sera réduit de 59 p. 100. Ainsi, les intéressés paieront 59 p. 100 de moins d'impôt sur le revenu au niveau fédéral que ce qu'ils verseraient en l'absence de ces mesures. Il est tout à fait incroyable d'affirmer qu'il ne s'agit pas d'un allégement du fardeau fiscal.
Je voudrais poser cette question au député de Surrey-Centre. Avant ce budget, les députés alliancistes sont intervenus sans cesse à la Chambre pour dire que le gouvernement libéral avait accru les impôts une multitude de fois. Or, nous n'avons pas du tout augmenté les impôts. Ils disaient en fait que nous avions augmenté les impôts car nous n'avions pas réindexé le régime fiscal. Je pense que c'était leur position. Lorsqu'on leur demandait de nommer les augmentations d'impôt, ils en étaient incapables car les impôts n'avaient pas été augmentés.
Comment peuvent-ils maintenant prétendre qu'en réindexant le régime fiscal nous ne réduisons pas les impôts, alors que l'absence de réindexation représentait une hausse auparavant? Le député pourrait-il nous expliquer cela?
M. Gurmant Grewal: Madame la Présidente, le député a parlé du projet de loi plus tôt. J'ai écouté ce qu'il a dit et j'ai l'intention de répondre à certains des arguments qu'il a formulés dans son discours.
Mon collègue insiste pour dire que le projet de loi simplifie la Loi de l'impôt sur le revenu et diverses autres lois. Dans ce cas, pourquoi a-t-il fallu proposer ces amendements? La Loi de l'impôt sur le revenu est très compliquée. Le nouveau projet de loi, qui compte plus de 500 pages, la complique encore davantage.
Le député soutient que le projet de loi contient des allégements d'impôts considérables. J'estime que c'est trop peu, trop tard. Il a louangé les réductions d'impôt accordées par le gouvernement. Selon lui, il s'agit de la plus forte baisse d'impôts de l'histoire canadienne. Je ne suis pas de cet avis.
Je rappelle au député que la baisse d'impôt que propose le gouvernement n'est pas une véritable baisse. J'ai démontré, par des calculs, que cette réduction représente moins de la moitié de ce que dit le gouvernement et qu'elle s'étale sur un certain nombre d'années. Je rappelle au député que la plus forte hausse d'impôt de l'histoire canadienne s'est produite sous le gouvernement libéral actuel.
Mon collègue m'a demandé de citer un exemple. Les cotisations du Régime de pensions du Canada ont subi une hausse de 73 p. 100. C'est la plus forte augmentation d'impôt de l'histoire canadienne.
C'est l'Alliance canadienne qui, la première, a dénoncé le non-ajustement des tranches d'imposition au taux d'inflation. Le gouvernement nous a finalement écoutés. Quand je m'adresse à mes électeurs, je leur dis que non seulement nous talonnons les libéraux mais que nous les éclairons depuis longtemps. Nous montrons la voie et les libéraux suivent. Mais ils n'écoutent pas. Ils ne comprennent pas. De temps à autre, ils nous volent des idées, mais nous aimerions bien qu'ils le fassent plus souvent. Malheureusement, ils ne font pas ce qu'il faut.
Diverses hausses d'impôts, notamment par les charges sociales, prouvent que l'impôt a augmenté. J'ai mentionné le RPC. Le député a dit que le RPC est un régime indépendant du gouvernement. Si c'est le cas, pourquoi le gouvernement s'est-il approprié l'excédent du RPC? Les cotisations des employeurs et des employés au RPC auraient dû être abaissées.
Je crois que le député n'a pas bien saisi. Il devrait tenir compte de ce fait. C'est pourquoi notre parti a proposé ces amendements. Le gouvernement devrait écouter les Canadiens; cela contribuerait sans doute à simplifier notre Loi de l'impôt sur le revenu et diverses autres formes d'impôt.
M. John McCallum (Markham, Lib.): Madame la Présidente, je me suis précipité à la Chambre pour poser une question, car je ne peux approuver la majeure partie des propos que le député vient de tenir. En fait, ma question comporte trois volets.
D'abord, je n'arrive pas à comprendre ce qu'on pourrait appeler l'ingratitude de l'opposition devant ce que le monde entier a décrit comme les réductions d'impôt extrêmement opportunes, les plus importantes dans l'histoire du Canada, qu'ont louangées le FMI et l'OCDE, entre autres, et qui sont entrées en vigueur exactement au bon moment, le 1er janvier de cette année. Ensuite, je voudrais poser une question concernant les plaintes du député au sujet des cotisations au Régime de pensions du Canada et de son indexation. Enfin, je voudrais l'interroger au sujet des propositions de l'Alliance. Si je puis me le permettre, je vais aborder ces questions très brièvement.
Les États-Unis parlent actuellement de réductions d'impôt, des réductions que le gouvernement canadien a mises en oeuvre exactement au bon moment, au moment du ralentissement.
Une voix: Mais pas sur cinq ans.
M. John McCallum: Sur cinq ans, mais la première année, les réductions d'impôt sont massives. Avec les contributions du gouvernement fédéral et des provinces, elles représentent 1,5 p.100 du PIB, ce qui constitue un montant astronomique, un des plus élevés dans les pays du G-7. Aucun autre pays n'a réduit ses impôts à un moment aussi opportun.
On peut se demander si le choix aussi opportun de ce moment peut être attribué à la chance, aux judicieux conseils que les économistes du secteur privé ont donnés l'année dernière, ou à la vive intelligence du ministre des Finances. Je vais laisser à l'opposition le soin d'en décider. Quelle qu'en soit la raison, ces réductions d'impôt ont été effectuées juste au bon moment, juste au moment où le médecin les avait ordonnées, juste au moment où l'économie a commencé à ralentir.
Ma première question est la suivante: pourquoi le député n'est-il pas heureux de ce minutage parfait?
Pour être bref, je ne parlerai pas du Régime de pensions du Canada, madame la Présidente.
Mon collègue d'en face prétend que le programme de l'Alliance est supérieur à celui des libéraux, qui vient de nous donner la plus grosse baisse d'impôt dans l'histoire du Canada. Je serais le premier à reconnaître que les baisses d'impôt promises par l'Alliance sont plus grosses que les nôtres. Sauf qu'elles posent un double problème. En ce qui concerne les réductions d'impôt de l'Alliance, selon les fonctionnaires du ministère des Finances et les économistes des banques—pas moi, car, en bon politicien, je suis un peu biaisé—, si nous avions adopté un taux d'imposition uniforme ou unique et procédé à des baisses d'impôt en conséquence, nous aurions fait un trou de 18 milliards de dollars dans notre budget. Le député pourrait-il nous expliquer ce qu'il aurait fait de ce trou?
Le seul moyen pour s'en sortir aurait été d'effectuer des compressions draconiennes dans les dépenses, y compris dans les programmes essentiels, parce que cette somme de 18 milliards de dollars excède les dépenses prétendument frivoles que nous imputent les députés de l'Alliance. Les compressions auraient visé des programmes de dépenses essentiels, ce qui aurait causé un ralentissement économique encore plus accentué que celui que l'on connaît. De plus, le programme de l'Alliance, avec son taux d'imposition uniforme, nous aurait imposé d'un seul coup le régime fiscal le plus inégal et le plus injuste de tout le monde occidental.
Je demande donc au député de dire pourquoi il ne reconnaît pas le fait que ces mesures que nous prenons arrivent à point. Comment explique-t-il le fait que les réductions d'impôt plus importantes proposées par l'Alliance auraient soit créé un trou de 18 milliards de dollars, ou nécessité des compressions draconiennes dans des programmes sociaux essentiels, dont celui des soins de santé?
M. Gurmant Grewal: Madame la Présidente, je remercie le député, un ancien économiste et banquier, pour sa question en trois volets. Cependant, il me reste peu de temps de parole et je pense qu'il a parlé de l'économie globale. Il me faudrait probablement six heures pour répondre entièrement à sa question.
Cependant, je suis content qu'il ait posé cette question et reconnu que les baisses d'impôt prévues par l'Alliance étaient plus importantes que celles de son parti, et les plus grosses dans l'histoire du Canada. Je le félicite d'avoir eu l'honnêteté de reconnaître ce fait. Lorsqu'un député libéral dit que les baisses d'impôt que nous proposions sont plus grosses que celles de son parti, je prends cela comme un compliment.
Il a parlé ensuite du trou de 18 milliards de dollars. Toutefois, je rappelle au député, un économiste ayant un énorme bagage d'expérience dans le domaine des banques, que nous éliminerions le gaspillage gouvernemental et que nous réduirions les dépenses du gouvernement. Le député sait que pour chaque tranche d'un dollar, un montant de neuf cents est gaspillé par le gouvernement. Le montant dont il parle est réduit de ce seul fait de façon marquée si l'on tient compte des 9 p. 100 des 142 milliards de dollars de recettes du gouvernement qui disparaissent en gaspillage.
Il a parlé d'imposition et d'autres choses. Je rappelle au député que c'est son parti qui gouverne le pays depuis fort longtemps. C'est son parti qui a beaucoup contribué à l'endettement du pays et 42 cents de chaque tranche de un dollar sont consacrés au remboursement de la dette. Les libéraux sont responsables de nous avoir placés dans une situation désavantageuse sur le plan économique.
Arrêtons nous à la faiblesse du dollar. Le député conviendra avec moi que c'est ce gouvernement qui est responsable du fléchissement de notre dollar, de la hausse de nos taxes et de l'augmentation de notre dette. En particulier, l'impôt sur les revenus des particuliers au Canada est le plus élevé des pays du G-7, même après l'allégement fiscal accordé par le gouvernement.
Le député devrait songer sérieusement à reconnaître que l'allégement fiscal consenti par le gouvernement est insuffisant. Étant donné que c'est un spécialiste de ce domaine, je l'exhorte à exercer des pressions auprès du gouvernement, à conseiller au gouvernement de réduire les impôts, non pas dans cinq ans, non pas de la moitié de ce qu'ils nous disent, mais bien du juste montant que méritent les Canadiens.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): C'était le dernier député à prendre la parole au sujet du projet de loi. Toutefois, j'ai vu plus tôt trois députés se lever pour poser des questions. Ai-je le consentement unanime pour permettre à ces trois députés de poser leurs questions?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Gurmant Grewal: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Ce fut un débat très intéressant et nous avons eu une réaction encourageante de la part de tous les députés. Il est très bon que tous les députés participent à la discussion.
Dans cet esprit, je souligne que les députés de l'Alliance canadienne n'ont pas refusé ce consentement. Je vous prie de demander de nouveau le consentement unanime de la Chambre, car l'Alliance canadienne acceptera de prolonger la période des questions et observations.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Malheureusement, il n'y a pas eu consentement unanime. Je tiens donc pour acquis que nous demanderons le vote.
M. Brian Fitzpatrick: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je voulais simplement rendre hommage à un Canadien qui a remporté le prix Nobel de la paix, Robert Mundell, qui ne partagerait pas du tout l'avis de mon éminent collègue...
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Convoquez les députés.
Et la sonnerie s'étant arrêtée:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le vote par appel nominal sur la motion est reporté.
* * *
[Français]
LOI SUR LA FONDATION DU CANADA POUR L'APPUI TECHNOLOGIQUE AU DÉVELOPPEMENT DURABLE
L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.) propose: Que le projet de loi C-4, Loi créant une fondation chargée de pourvoir au financement de l'appui technologique au développement durable, soit lu pour la troisième fois et adopté.
M. Brent St. Denis (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer au débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-4, Loi visant à la création d'une fondation ayant pour objectif de financer l'appui technologique au développement durable.
[Traduction]
Le développement durable est un développement équilibré, une approche qui évite les compromis difficiles à faire. Il ne sacrifie pas une de nos valeurs essentielles au profit d'une autre. Les objectifs sont complexes et loin d'être simples: par exemple, on ne parle pas simplement d'énergie électrique, mais d'énergie non polluante; on vise la croissance de l'industrialisation, mais sans préjudices environnementaux.
Les trente dernières années nous ont montré qu'il est possible d'atteindre cet équilibre. Il suffit de penser à la réduction des émissions des automobiles, à la réduction de la pollution atmosphérique, à l'amélioration du rendement énergétique et aux nouvelles technologies de récupération améliorée du pétrole qui nous permettent de tirer davantage de pétrole des vieux puits tout en réduisant les empreintes sur l'environnement.
Dans tous les cas, le facteur commun a été l'innovation: une conception nouvelle, des technologies innovatrices qui transforment l'équation, des technologies efficaces, des prix abordables et propres à assurer un développement durable. L'innovation a aidé notre société à progresser, et elle continuera de la faire à l'avenir.
Le projet de loi C-4 porte sur ce type d'innovation. Il est fort simple. Il autoriserait la création de la Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable, dont le rôle serait d'administrer un fonds de développement durable de 100 millions de dollars annoncé dans le budget de 2000.
Au départ, la fondation s'intéresserait surtout aux changements climatiques et à la pollution atmosphérique, car ce sont là les deux grands défis environnementaux de notre époque, à plus forte raison après ce qui vient de se passer aux États-Unis. Sous la rubrique des changements climatiques, la fondation s'attardera au développement de technologies pour ralentir, stopper et même atténuer ces changements, par exemple des technologies pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, pour réduire l'intensité des émissions des systèmes énergétiques au carbone, pour accroître l'efficacité énergétique, pour capter, utiliser et stocker le gaz carbonique.
Sous la rubrique de la pollution atmosphérique, la fondation fera porter ses efforts sur le développement de technologies pour réduire la teneur en contaminants de l'air que nous respirons: composés organiques volatils, oxydes d'azote, particules, etc.
Par sa nature même, l'innovation technologique est un travail hasardeux, une oeuvre de pionnier qui comporte toujours un risque. Il est particulièrement important que nous arrivions à la proportion idéale entre les intrants et les extrants, entre les investissements et les résultats.
Tout d'abord, le projet de loi exige que la fondation accorde son soutien financier surtout aux efforts de coopération plutôt qu'à des projets réalisés par des entités isolées. Cette disposition montre l'accent mis sur le travail d'équipe dans tout le projet de loi. Elle permettrait aussi de s'assurer que les fonds iront à des projets qui auront fait l'objet d'un examen technique et qui auront été approuvés par des pairs.
Deuxièmement, la fondation planifierait ses activités de façon à ce qu'elles concordent avec les activités relatives aux changements climatiques et à la pollution de l'air menées dans le cadre des programmes mis en place par les gouvernements fédéral et provinciaux, et de façon à ce qu'elles les complètent.
En outre, en vertu des conditions des accords de financement, la fondation serait tenue d'utiliser les fonds pour attirer des investissements d'autres sources afin de faire démarrer le projet, non pas de le réaliser. La fondation financerait 50 p. 100 des coûts admissibles d'un projet, mais en aucun cas plus de 33 p. 100 en moyenne des coûts admissibles d'un programme. Cette disposition est compatible avec la promotion d'un travail d'équipe. Elle va dans le sens de la maxime qui veut que le signe de succès d'un projet repose sur la volonté de ses promoteurs d'investir une partie de leur argent.
J'en viens maintenant à un autre aspect de la fondation créée par ce projet de loi: les arrangements administratifs. La mesure dans laquelle les avances de fonds permettent de faire avancer la cause du développement durable dépend ultimement d'un bon ciblage, d'une bonne gestion et d'une bonne administration. Le système proposé dans le projet de loi pour l'administration de la fondation respecte cette exigence.
Le projet de loi exigerait que la fondation soit indépendante du gouvernement. Les députés verront que la structure administrative de la fondation proposée dans ce projet de loi respecte cette condition. Essentiellement, il y a deux composantes.
Une composante serait un conseil d'administration, composé d'administrateurs, qui serait responsable de la gestion et des services de la fondation et exercerait ses pouvoirs conformément au règlement de la fondation.
La deuxième composante serait un comité composé d'intervenants, de clients possibles et d'autres parties mandatées, soit des membres de la fondation, comme on les appelle. Leur rôle serait analogue à celui des actionnaires d'une entreprise privée en ce sens qu'ils examineraient et commenteraient les activités de la fondation.
Des 15 administrateurs du conseil, sept seraient nommés par le gouvernement et huit par les membres de la fondation. Aucun des administrateurs et des membres de la fondation ne proviendrait du gouvernement.
Adapter la forme à la fonction est un principe reconnu de conception intelligente, et c'est le cas en l'occurrence. La fonction ultime de l'organisme est le développement durable, un processus reposant sur une vision large plutôt que sur des perspectives étroites. Cela s'applique tout à fait à l'élaboration des techniques de développement durable. Elles doivent être efficaces, avoir une incidence minime sur l'environnement et être peu coûteuses. La structure de gouvernance proposée dans le projet de loi est adaptée au mandat et garante de l'équilibre.
[Français]
Ensemble, les membres du conseil d'administration et de la Fondation représenteront l'expérience et les compétences de chaque secteur oeuvrant dans la création et l'application des technologies du développement durable: le secteur public, le secteur privé, le milieu universitaire et les organismes à but non lucratif.
Les membres des deux composantes proviendront de toutes les régions du Canada afin d'assurer une représentation équilibrée sur le plan géographique.
[Traduction]
Le projet de loi prévoit également des mesures en vue d'assurer la diligence raisonnable et la responsabilité, exigeant que la fondation mette sur pied des mesures de contrôle au chapitre des finances et de la gestion et nomme un contrôleur indépendant pour vérifier l'efficacité de ces contrôles. La fondation doit soumettre un rapport annuel au ministre des Ressources naturelles, aux membres de la fondation et au public. Le rapport doit inclure une évaluation des résultats obtenus grâce au financement des projets et être déposé au Parlement.
Les conditions précises liées à la gestion du fonds seront établies dans le cadre d'un accord de financement entre le gouvernement du Canada et la fondation. Le vérificateur général du Canada examinera cet accord de financement de près.
Pour permettre la mise en oeuvre du fonds d'appui technologique au développement durable le plus rapidement possible, le projet de loi C-4 renferme également une clause restrictive qui prévoit que le gouverneur en conseil peut désigner une fondation du secteur privé qui devra servir de fondation aux termes des dispositions de la loi.
La loi précise que dans ce cas, les actifs et les passifs de la fondation du secteur privé seront transférés à la fondation et son conseil d'administration ainsi que son affiliation collective disparaîtront, ce qui devrait déclencher la nomination du conseil de direction et des membres de la fondation tel que prévu dans la loi.
Ces clauses restrictives constituent également des clauses de réserve, c'est-à-dire une certaine assurance contre les chambardements de programmes qui pourraient se produire au cours de la phase de développement. Dans le cas de retards administratifs ou autres dans le processus, ces clauses permettraient au gouvernement de remplir ses promesses à l'égard de la mise sur pied de ce fonds.
Je voudrais faire l'historique du projet de loi pour la gouverne des députés. Cette mesure législative est le fruit de plus de deux années de consultations très larges et tout à fait transparentes auprès des provinces, des municipalités, du secteur privé, des établissements universitaires et des organisations non gouvernementales.
Tous les secteurs de la société canadienne ont été consultés durant cette période de deux ans et la Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable est le produit de ce processus. Toutefois, cela ne s'est pas arrêté là. La consultation s'est poursuivie après la présentation du projet de loi à la Chambre le 2 février. Nous avons eu l'occasion de discuter du projet de loi en détail avec les administrateurs de fondations privées. Nous avons reconnu qu'une ou deux questions reliées aux rôles des membres et au calendrier de leurs réunions pouvaient être clarifiés. Nous avons donc préparé des modifications au projet de loi pour apporter ces éclaircissements.
Nous avons présenté le projet de loi et les modifications au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand nord et des ressources naturelles. Après un débat constructif et animé, le projet de loi et les modifications visant à le clarifier ont été approuvés. À l'étape du rapport, nous avons discuté de sept autres amendements proposés. De ce nombre, un amendement de forme consécutif a été adopté pour veiller à la cohérence de tous les amendements dans tout le projet de loi.
[Français]
Je tiens à profiter de l'occasion qui m'est donnée pour remercier de leur contribution les députés de tous les partis de cette Chambre. Le projet de loi C-4 est un projet amélioré grâce à ce constructif débat.
[Traduction]
En conclusion, je rappelle ce que le ministre des Ressources naturelles a dit à la Chambre à d'autres occasions. Il a dit que nous ne pouvions nous fier à la technologie seule pour relever les défis du changement climatique et de l'assainissement de l'air ou pour parvenir au développement durable, qui est une question d'équilibre, mais que nous devions pouvoir compter sur un flot constant de nouvelles technologies, de technologies efficaces, de technologies abordables et de technologies reliées au développement durable pour pouvoir réussir.
Comme nous le savons par expérience, c'est un domaine dans lequel on peut réduire la gravité des problèmes les plus sérieux en ayant recours aux investissements, aux efforts et aux compétences nécessaires au moment voulu et en les ciblant bien. Il s'agit de la bonne mesure législative visant les bonnes cibles au bon moment. J'exhorte les députés à adopter rapidement cette mesure législative.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: le député de Palliser, Le développement des ressources humaines; le député de Dewdney—Alouette, La fiscalité.
M. David Chatters (Athabasca, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec le député de Surrey-Centre. Je remercie le député d'en face pour son intervention bien sentie. Il m'a beaucoup touché.
Je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-4 encore une fois. Comme pour les autres étapes du projet de loi, je tiens tout d'abord à dire que je souscris à l'idée de réunir des experts des technologies propres. Notre parti appuie la notion de la création d'une fondation en amenant le secteur privé à faire des investissements relativement importants, au fil des ans, grâce à des partenariats, pour contribuer au développement de technologies nouvelles.
C'est une notion qui est digne de notre appui. Notre parti était disposé à appuyer le projet de loi, à la condition qu'y soit apporté un tout petit changement, un seul amendement qui facilitera la transparence et la reddition de comptes. Le gouvernement nous l'a malheureusement refusé à l'étape du rapport. Il y a évidemment lieu de se demander pourquoi. Cela m'incite à croire que les préoccupations que j'ai exprimées au sujet du projet de loi sont fondées et qu'il existe une raison pour laquelle le gouvernement voudrait éviter la transparence.
Le projet de loi fait suite à un processus lancé il y a trois ans, en décembre 1997, à la signature du protocole de Kyoto, quand le Canada s'est engagé à réduire de 6 p. 100 en deçà des niveaux de 1990 les émissions de gaz à effet de serre pour la période de 2008 à 2012.
De nombreux experts croient qu'il est impossible ou infaisable de mener à bien une réduction aussi draconienne, l'objectif de 6 p. 100 représentant une réduction d'environ 25 p. 100 des niveaux des émissions projetés pour 2008-2012, à supposer que rien ne change dans les tendances relatives aux émissions de gaz à effet de serre.
Pour compliquer davantage ces projections, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté constamment au Canada ces dernières années, atteignant un niveau beaucoup plus élevé que prévu.
En dépit de ces complications, le gouvernement continue de vouloir remplir les engagements qu'il a pris à Kyoto, en adoptant diverses mesures. Prenons par exemple le plan d'action 2000, dans lequel le gouvernement a proposé diverses mesures stratégiques pour s'acquitter de ses engagements de Kyoto.
Le hic, c'est que le plan vise seulement à réduire de 65 millions de tonnes par an les émissions au cours de la période visée par les engagements, soit de 2008 à 2012. Cela ne représente que le tiers de ce qui avait été promis à Kyoto.
Nous avons eu une bonne discussion ce matin au comité avec le Secrétariat du changement climatique. Il est clairement apparu que le gouvernement aurait beaucoup de mal à atteindre ne serait-ce que le tiers de ce qu'il a promis à Kyoto. Il est de plus en plus clair que le changement climatique, peu importe à quel point il dépend des activités humaines, est inévitable. Le gouvernement devrait, dans une certaine mesure, chercher à aider les Canadiens à s'y adapter plutôt que perpétuer le mythe selon lequel les engagements pris à Kyoto vont l'empêcher, renverser la tendance et sauver le monde.
En septembre 2000, Environnement Canada a signalé que les Nations Unies avaient révélé qu'au Canada, en 1998, les émissions de gaz à effet de serre étaient de 13 p. 100 supérieures à celles de 1990. Ces niveaux augmentent de façon constante, en raison de facteurs comme l'utilisation plus grande du charbon pour la production d'électricité. Si les prix du gaz naturel demeurent élevés—nous en avons certes vu la preuve en Alberta—je pense que le charbon risque d'être utilisé encore plus qu'il ne l'est actuellement. Si le Canada continue d'agir comme à son habitude, il est fort possible que l'écart entre les émissions prévues et l'objectif fixé à Kyoto s'élèvera à 26 p. 100 ou à un taux bien supérieur.
Selon des documents du gouvernement concernant le projet de loi, le Canada est un chef de file mondial dans de nombreuses technologies concernant les changements climatiques et l'efficacité énergétique, et commence à se doter de forces dans d'autres secteurs. C'est une expression que le ministre emploie fréquemment au comité et à la Chambre. Si cela est le cas, je dois donc me demander pourquoi le Canada compte autant sur les puits et sur les crédits de pollution dans sa stratégie à l'égard de Kyoto. Si nous ajoutons l'augmentation des niveaux d'émissions au fait que le protocole de Kyoto a pratiquement échoué sur la question des puits d'oxyde de carbone, il est évident qu'il reste beaucoup à faire avant que le Canada ne puisse se considérer sur le point de réduire considérablement ses émissions.
Le Canada a de sérieux problèmes, et de sérieux problèmes exigent des solutions sérieuses. Si le projet de loi C-4 pose les assises d'une partie importante du plan du gouvernement en matière de changements climatiques, alors nous avons tous des problèmes. Le gouvernement devrait présenter un plan solide, justiciable, transparent et responsable, qui se traduira par des assises. Ce plan devrait apporter des avantages réels aux Canadiens, contrairement au projet de loi actuel, qui permettrait de récolter des fruits énormes, et je ne parle pas d'arbres, mais de nominations politiques.
Le projet de loi comporte un certain nombre de problèmes que j'espérais voir étudier en comité ou à l'étape du rapport à la Chambre. Par exemple, je suis particulièrement préoccupé par la question de la reddition de comptes et des pratiques en matière de présentation de rapports de la fondation. J'aimerais vraiment que le vérificateur général ait accès aux registres comptables de la fondation. Le vérificateur général devrait effectuer régulièrement des vérifications afin d'assurer que la fondation est administrée de façon raisonnable et responsable.
Dans l'état actuel des choses, je suppose qu'au lieu de voir le vérificateur général vérifier les registres comptables de la fondation, nous verrons la fondation adopter les normes éprouvées que le gouvernement suit en matière de comptabilité. Les députés me pardonneront de ne pas me réjouir à cette idée. Après tout, le vérificateur général a vérifié les états financiers du gouvernement du Canada chaque année depuis 10 ans.
Au cours de cette période, le gouvernement a échoué sept fois à l'examen. À trois reprises seulement le vérificateur général a-t-il pu donner la note de passage au gouvernement pour la tenue de la comptabilité. Comme moyenne, ça n'est pas très fort. C'est même encore pire si nous remontons plus loin que dix ans. L'ancien vérificateur général n'a pu émettre une opinion nette qu'une fois pendant son mandat de dix ans.
Si le gouvernement soumet cette fondation à des normes semblables, nous n'en avons pas fini avec la mauvaise gestion et le cafouillage. Nous savons tous à quel point ces députés sont portés à dépenser les fonds publics sans requérir le moindre cadre ni la moindre autorisation, voire sans laisser la moindre trace. J'aurais espéré qu'ils aient tiré une leçon.
Personne ne met en question l'intention du projet de loi. Elle est sérieuse. J'appuierais la création d'un organisme faisant la promotion du développement de nouvelles technologies à l'appui du développement durable, notamment au plan des changements climatiques et de la qualité de l'air.
Le Canada a de sérieux défis à relever au plan des changements climatiques. Puisque le gouvernement s'est déjà engagé dans une certaine voie, il serait temps d'aboutir à des résultats plutôt que de nous contenter d'en parler.
Les descriptions de l'objet de ce projet de loi lui prêtent toutes sortes d'intentions glorieuses. Par exemple, le fonds encouragera l'innovation en aidant les entreprises à mettre au point de nouvelles technologies et à les commercialiser; le fonds viendra compléter d'autres programmes fédéraux, mettra à profit les efforts visant à trouver des partenaires étrangers et fera la promotion d'une utilisation efficace des ressources et des technologies.
Selon le gouvernement, les nouvelles technologies créées par ce fonds permettront aux Canadiens de tirer profit de la situation engendrée par le changement climatique. Encore une fois, je dois émettre des réserves au sujet du projet de loi. Le gouvernement permet l'utilisation de l'argent des contribuables selon des critères très vagues. Est-ce ce qu'il entend par création de débouchés?
J'avais cru comprendre que les débouchés créés devaient servir au développement de nouvelles technologies dont bénéficieraient tous les Canadiens, et non pas à avantager les amis du gouvernement avec l'argent des contribuables canadiens.
La fondation comptera 15 membres. Les 15 membres de la fondation sont nommés en premier; 7 sont nommés par le gouverneur en conseil, et ces derniers nomment ensuite les 8 autres membres. Le président et 6 membres du conseil sont ensuite nommés par le gouverneur en conseil et ces 7 personnes nomment à leur tour 8 autres membres au sein du conseil. Ainsi, la fondation et le conseil comptent chacun 15 membres et 14 de leurs 30 membres sont nommés par le Cabinet.
Le président et les administrateurs sont nommés pour une durée de cinq ans et les administrateurs et les membres peuvent être reconduits dans leurs fonctions pour un autre mandat et plus. Ces postes ont l'apparence de planques. Si quelqu'un compte un ami au bon endroit, il peut être nommé au sein de la fondation.
Ce processus comporte deux aspects inquiétants. Tout comme le président, les administrateurs et les membres sont nommés par le gouverneur en conseil, ceux-ci peuvent également faire l'objet d'une révocation motivée de la part du gouverneur en conseil. Je signale que le texte parle de «révocation motivée» et non pas de «révocation justifiée».
Si les membres de la fondation sont maintenus en fonctions selon le bon vouloir du Cabinet ou du premier ministre, quelles chances y a-t-il pour qu'ils prennent jamais une décision indépendante? Par exemple, que se passera-t-il si le président prend une décision raisonnable, mais mal reçue, et refuse une subvention à un ami du premier ministre? Sera-t-il révoqué?
Que se passera-t-il si un administrateur recommande qu'un projet soit refusé mais que le président est un ami des libéraux? Y aurait-il matière à révocation motivée? Prenons le cas d'un membre qui ferait un très mauvais travail mais qui serait un proche ami du premier ministre ou d'un membre du Conseil privé. Ce membre conserverait-il son emploi et son traitement et pourrait-il n'être démis de ses fonctions que par le premier ministre?
Nous avons certainement entendu évoquer récemment de nombreux exemples de la façon dont le premier ministre peut exercer son influence sur ceux qu'il nomme personnellement.
Je n'apprendrais rien à personne en évoquant l'affaire du président de la Banque de développement du Canada et l'affaire du cafouillage d'un milliard de dollars à Développement des ressources humaines Canada, où l'ingérence des ministres a fait attribuer de l'argent à des circonscriptions et à des organismes qui ne répondaient pas aux critères du programme. Ces affaires sont passablement bien connues de tout le monde à la Chambre et, je crois bien, de tout le monde d'un bout à l'autre du pays.
Nous avions espéré que le projet de loi comporterait au moins quelques sauvegardes contre cette pratique, mais elles en sont malheureusement absentes.
Une autre inquiétude concernant la composition du conseil d'administration de la fondation a trait aux dispositions relatives à la compétence de son président. Le projet de loi dit que les administrateurs sont censés être choisis en fonction de leur compétence et de façon à assurer, au sein du conseil d'administration, la représentation des spécialistes de la mise au point et de la mise à l'épreuve des techniques favorisant le développement durable. Il est cependant curieux de constater que le projet de loi ne prévoit rien du genre concernant le choix du président.
Il me semble que le projet de loi laisse la porte grande ouverte au favoritisme et attend simplement qu'un ami du premier ministre fasse son apparition.
J'ai également quelques réserves à faire concernant la façon dont les administrateurs de la fondation seront rémunérés pour leurs contributions. Le projet de loi dit que les administrateurs peuvent recevoir la rémunération fixée par le règlement administratif et ont droit d'être indemnisés des frais de déplacement et de séjour entraînés par l'exercice de leurs fonctions.
Si le conseil d'administration établit son propre règlement administratif, où sont les freins contre les rémunérations déraisonnables? Cela a l'air d'une merveilleuse possibilité pour les copains nommés par le gouvernement de s'assurer une bonne petite source nouvelle d'argent.
La Chambre se rappellera Ted Weatherhill et son compte de dépenses. C'est le fonctionnaire qui avait fait payer par les contribuables canadiens 21 000 $ de frais de déplacement en trois ans. Il avait certainement droit à une indemnisation raisonnable pour les dépenses occasionnées par le travail qu'il effectuait pour le gouvernement. La même situation pourrait se produire dans le cas de cette fondation. Ces dépenses peuvent difficilement être considérées comme raisonnables par quiconque. Même les libéraux, qui ont renvoyé cet homme en raison de l'excès qu'il a commis, ont convenu que les dépenses n'étaient pas raisonnables.
Au moins, le projet de loi C-4 traite du salaire des administrateurs, quoiqu'il ne précise pas le salaire du président ni la façon dont il sera déterminé. Très honnêtement, étant donné que le gouvernement aime bien lancer de l'argent à ses amis, je ne laisserais pas cette question au hasard.
Au début de mon intervention, j'ai fait part de mes préoccupations concernant les opérations financières de la fondation. Je voudrais en dire plus long à ce sujet. Ce projet de loi est terriblement vague à l'égard des opérations financières de la fondation. Je dois me demander comment la fondation entend assurer sa viabilité financière sans puiser continuellement dans le Trésor public.
Le projet de loi stipule que le conseil doit établir, en matière de placement, des principes, normes et méthodes sur le modèle de ceux qu'une personne prudente mettrait en oeuvre dans la gestion d'un portefeuille de placements afin, d'une part, d'éviter des risques de perte indus et, d'autre part, d'assurer un juste rendement. Je me demande si ces normes en matière d'investissement seront identiques à celles propres au Régime de pensions du Canada. Si oui, la stabilité financière de la fondation est condamnée.
Le 15 février 2001, le fonds du Régime de pensions du Canada, comportant 41,6 millions de dollars en avoirs investis principalement dans des obligations, a enregistré des pertes de 453 millions de dollars à la bourse au troisième trimestre.
Par l'entremise du projet de loi dont la Chambre est actuellement saisie, le gouvernement tente d'empêcher un examen public sur le rendement du fonds du Régime de pensions du Canada. Il me semble que ce fonds, qui renferme des milliards de dollars appartenant aux contribuables, est juste un petit peu trop gros pour que l'on puisse le cacher sous le tapis. Il y ferait une grosse bosse difficile à ne pas remarquer.
Si c'est là l'approche que la fondation va suivre, nous ferions mieux d'aller nous acheter des masques à gaz car la science et la technologie relatives au changement climatique feront peu de progrès.
Ce projet de loi présente beaucoup de problèmes graves. J'aimerais savoir pourquoi nous avons besoin de cette nouvelle bureaucratie onéreuse et pro-libérale, alors qu'il existe tellement d'organismes de financement qui pourraient atteindre les mêmes objectifs.
Il y a des groupes de promotion du développement régional qui reçoivent des fonds du fédéral et qui sont dirigés par des administrateurs locaux qui approuvent les investissements à haut risque et accordent des prêts. Il y a aussi la Banque de développement du Canada. Tous ces organismes sont placés sous le contrôle du vérificateur général du Canada. Ils pourraient assumer les responsabilités de la fondation et éviter la création de ce coûteux désastre bureaucratique.
Bien que je sois certain que le premier ministre aimerait s'assurer que ses amis puissent prendre une retraite heureuse, quand il s'agit de l'argent des contribuables, j'aimerais voir une meilleure garantie que cet organisme sera responsable, transparent, ouvert et obligé de rendre des comptes que celle qui se trouve dans cette mesure législative qui prête à confusion.
Avant que mes collègues d'en face ne m'accusent d'être anti-écologie, j'aimerais citer la politique de l'Alliance canadienne, qui se lit comme suit:
Nous sommes déterminés à protéger et à préserver l'environnement naturel et les espèces menacées du Canada, et à assurer le développement durable de nos ressources naturelles abondantes, dans l'intérêt des générations actuelles et futures. Nous allons établir un équilibre entre la protection de l'environnement et le développement économique, notamment par la formation de partenariats avec les gouvernements provinciaux, le secteur privé, les établissements d'enseignement et le grand public, encourageant des progrès véritables dans le domaine de la protection de l'environnement.
Clairement, l'Alliance canadienne est entièrement en faveur de mesures visant à assurer la salubrité de l'air en ayant recours à de nouvelles technologies. Toutefois, comme je l'ai déjà mentionné, cette fondation risque de donner lieu à tellement de favoritisme qu'elle n'accomplira rien de bon.
L'Alliance canadienne croit, comme l'a d'ailleurs dit le vérificateur général dans son dernier rapport au Parlement, que les organismes, les commissions et les agences du gouvernement doivent être dotés d'un personnel compétent et d'expérience nommé selon un processus ouvert, responsable et fondé sur le principe du mérite. Franchement, je ne vois aucun mérite dans ce projet de loi et dans la fondation qu'il va créer.
C'est en raison de ce manque de mérite que je viens de démontrer que je voterai contre cette mesure législative. J'exhorte les autres députés de la Chambre à en faire autant.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
JUSTICE ET DROITS DE LA PERSONNE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Des négociations ont eu lieu au sujet de modifications à apporter au rapport du Comité de la justice déposé à la Chambre un peu plus tôt cette semaine.
Il y aurait consentement unanime pour que le premier rapport du Comité permanent de la justice et des droits de la personne soit modifié de sorte que la mention «ligne 16 à la page 26» soit remplacée par la mention «ligne 9 à la page 25» et que la mention «ligne 2 à la page 41» soit remplacée par la mention «ligne 9 à la page 40» en anglais et par la mention «ligne 6 à la page 40» en français.
Je remercie d'avance les députés de chacun des partis d'opposition.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI SUR LA FONDATION DU CANADA POUR L'APPUI TECHNOLOGIQUE AU DÉVELOPPEMENT DURABLE
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-4, Loi créant une fondation chargée de pourvoir au financement de l'appui technologique au développement durable, soit lu pour la troisième fois et adopté.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Madame la Présidente, les habitants de Surrey-Centre sont heureux que je participe au débat d'aujourd'hui concernant la création d'une fondation chargée de pourvoir au financement de l'appui technologique au développement durable.
Dans le budget fédéral de 2000, les libéraux ont annoncé qu'ils créeraient une fondation pour l'appui technologique au développement durable. Ils lui ont accordé 100 millions de dollars de financement initial. Ils proposent qu'une fondation soit chargée de la gestion des fonds en question. Durant le débat aujourd'hui, nous avons été déçus d'apprendre que le comité n'est pas parvenu à obtenir que les livres de la fondation soient placés sous le contrôle du vérificateur général du Canada.
Je vais brièvement récapituler les fonctions de la fondation. Elle est censée être indépendante du gouvernement. Elle doit être gérée comme un organisme sans but lucratif et administrer les fonds versés principalement à des projets consacrés à la réduction des gaz à effet de serre et à l'amélioration de la qualité de l'air.
La fondation versera les fonds projet par projet. Elle acceptera des propositions issues de partenariats existants ou nouveaux avec des créateurs de technologies, des fournisseurs et des utilisateurs, des universités, des organismes sans but lucratif et d'autres organismes comme des associations industrielles et des instituts de recherches. Le gouvernement avait initialement prévu que la fondation serait en place en mars 2001.
Les gens de Surrey-Centre appuient cette initiative. Nous croyons que c'est un domaine où notre gouvernement devrait être le chef de file. J'oserais dire que les députés de tous les côtés à la Chambre veulent protéger l'environnement du Canada et apporter leur contribution aux projets portant sur la réduction des gaz à effet de serre et l'amélioration de la qualité de l'air. C'est certainement ce que nos enfants souhaitent. C'est ce que nous souhaitons pour nos enfants et nos petits-enfants.
La politique de l'Alliance canadienne appuie ce genre d'initiative sur le développement durable. Je veux que l'on comprenne bien notre politique. Nous sommes déterminés à protéger et à préserver l'environnement naturel et les espèces menacées du Canada, et à assurer le développement durable de nos ressources naturelles abondantes, dans l'intérêt des générations actuelles et futures.
Nous allons établir un équilibre entre la protection de l'environnement et le développement économique, notamment par la formation de partenariats avec les gouvernements provinciaux, le secteur privé, les établissements d'enseignement et le grand public, encourageant des progrès véritables dans le domaine de la protection de l'environnement. Voilà la politique que nous nous sommes engagés à mettre en oeuvre lorsque nous formerons le prochain gouvernement.
Le gouvernement libéral a mal géré notre environnement et il n'a pas réussi à assurer un développement durable. Ce gouvernement libéral faible a signé des traités internationaux, dont ceux de Kyoto, de Beijing et de Rio, sans toutefois avoir l'intention de donner suite à ces engagements.
Le gouvernement a pris des décisions fondées sur des considérations politiques alors qu'elles auraient dû être fondées sur des considérations scientifiques. La conservation des stocks de poisson repose sur des considérations politiques, et non pas sur des preuves ou des études scientifiques. L'innocuité de l'hormone de croissance bovine a été établie à la suite d'ingérence et de pressions politiques et non pas à la lumière de recherches et de preuves scientifiques.
Le gouvernement est trop occupé à recueillir des votes et il préfère dénigrer les politiques de l'Alliance canadienne plutôt que de laisser les principes et les preuves scientifiques guider les efforts visant à protéger notre environnement et plutôt que de respecter nos engagements internationaux.
Depuis 1993, les libéraux promettent aux Canadiens qu'ils vont faire adopter un projet de loi sur les espèces en péril, projet de loi qui est mort deux fois au Feuilleton. Après sept ou huit ans, où en sommes-nous? Les libéraux promettent de faire adopter un autre projet de loi.
Le projet de loi sur les espèces en péril qu'ils proposent est une atteinte aux droits des propriétaires canadiens. Ils veulent confisquer des biens sans indemniser leurs propriétaires. C'est difficile à croire. C'est tellement non démocratique que cela en devient antidémocratique, c'est toutefois là un sujet dont nous reparlerons un autre jour.
Depuis 1993, ce gouvernement libéral faible et sans vision d'avenir n'a vraiment pris aucune initiative à l'égard de notre environnement et du développement durable. D'autres pays ont adopté des lois et sont nettement plus avancés. Même les Nations Unies ont un bureau du développement durable, mais les libéraux font en sorte que le Canada se retrouve encore à la fin du peloton.
Le projet de loi a en fait été présenté dans le cadre du budget 2000, il y a presque un an maintenant. Aujourd'hui, après un an pendant lequel il n'a rien fait, le gouvernement veut que le projet de loi soit adopté le plus rapidement possible par la Chambre des communes et le Sénat et qu'il reçoive la sanction royale afin de pouvoir donner 100 millions de dollars. S'agit-il d'un simple cas de mauvaise gestion ou de la façon habituelle de fonctionner du gouvernement? Il n'a que faire des débats à la Chambre. Il n'hésite pas à recourir à la clôture ou à l'attribution de temps pour faire adopter de force ses projets de loi.
Quoi qu'il en soit, il importe de mentionner que l'opposition officielle veut appuyer le projet de loi aujourd'hui, mais qu'elle tient toutefois à ce que certaines modifications y soient apportées. Nous aurions bien voulu appuyer le projet de loi il y a un an, mais le gouvernement a décidé de le présenter seulement cette année, soit au moins un an en retard, selon le calendrier du budget libéral de 2000, voire sept ou huit ans trop tard, selon une promesse du livre rouge.
Voici quelques suggestions que nous offrons aux libéraux au sujet du projet de loi. Nos suggestions n'ont vraiment rien à voir avec l'aspect développement durable du projet de loi. Les modifications nécessaires n'ont rien à voir avec les projets liés à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ou à l'amélioration de la qualité de l'air.
Nos amendements concernent plutôt l'arrogance du Parti libéral. Les Canadiens n'aiment pas du tout le népotisme qui est la négation de la transparence et de l'obligation de rendre compte.
Permettez-moi de lire un simple extrait de la politique de l'Alliance canadienne:
Nous croyons qu'une fonction publique non partisane, un appareil judiciaire indépendant et la direction compétente des commissions, conseils et organismes gouvernementaux sont essentiels à la démocratie. Nous allons donc veiller à ce que les nominations à ces postes soient faites par un processus ouvert et responsable, fondé sur le mérite.
Les libéraux proposent de transformer la fondation du développement durable en assiette au beurre pour leurs amis. La population de Surrey-Centre et moi sommes consternés. Nous sommes tellement déçus que le gouvernement transforme une telle initiative visant à appuyer des projets liés à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et à l'amélioration de la qualité de l'air en une sorte d'assiette au beurre pour les libéraux.
Les libéraux essaient de faire en sorte que le président et un nombre minoritaire d'administrateurs et de membres soient nommés par le gouverneur en conseil. Ils nommeraient ensuite les autres membres pour compléter le conseil de 15 membres. Il est évident que la fondation servira à placer les amis du régime. Quand les libéraux entreront-ils vraiment dans le nouveau millénaire et mettront-ils un terme à ces pratiques du XVIIe siècle qui consistent à nommer des copains? Quand renonceront-ils à leur politique d'exclusion? Quand arrêteront-ils d'appliquer leurs systèmes qui privent certains de leurs droits?
Si on applique une définition stricte, le favoritisme pratiqué par le gouvernement tient du fascisme. Lorsqu'elle formera le prochain gouvernement, l'Alliance canadienne mettra un terme à ce genre de chose.
La création d'une fondation du développement durable est réclamée par tous les Canadiens depuis des années. Les libéraux en font l'enjeu de luttes politiques. C'est scandaleux.
Permettez-moi de dire maintenant un mot de la vérification de la fondation. S'il est vrai que la fondation doit remettre un rapport annuel au Parlement, elle nommera toutefois ses propres vérificateurs et il lui appartiendra de donner l'approbation finale aux rapports financiers avant leur publication. Le projet de loi ne fixe aucune règle sur l'admissibilité au poste de vérificateur, mais le gouvernement refuse de permettre au vérificateur général du Canada d'examiner les livres de la fondation.
Ce refus n'est pas étonnant. Le vérificateur général a vertement critiqué les pratiques du gouvernement. Le vérificateur sortant a fait passer un mauvais quart d'heure aux libéraux. Son dernier rapport a probablement été le plus cinglant. Chaque nouveau rapport du vérificateur général sur la mauvaise administration du gouvernement fédéral est pire que le précédent.
L'opposition officielle veut que l'on règle ces questions, à savoir qui fera la vérification de la fondation et comment on procédera aux nominations à cette fondation. Nous demandons au gouvernement d'étudier attentivement ces questions. Ce sont là de bonnes suggestions non partisanes. Nous ne laisserons pas les libéraux balayer ces questions du revers de la main. Compte tenu de ces deux points, nous devons nous opposer au projet de loi, même si nous ne voulions pas avoir à faire cela.
L'environnement est la chose la plus importante dont devrait s'occuper la Chambre des communes. Les débats sur l'environnement portent en fait sur l'avenir de la race humaine sur cette planète. Tous les autres sujets dont on discute à la Chambre ne souffrent pas la comparaison avec ce sujet important. Le projet de loi C-4 rend bien compte des faiblesses du gouvernement sur la question du développement durable.
Je souligne également que le gouvernement ne précise pas où sera situé le siège de la fondation. Il remet actuellement en question l'avenir de l'Institut international du développement durable, à Winnipeg. Nous avons déjà un institut du développement durable, et son avenir est menacé.
J'ai participé au débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi et j'ai porté une oreille attentive aux remarques de mon collègue, le député de Winnipeg-Centre. Il éprouve de sérieuses inquiétudes au sujet du programme caché du gouvernement libéral concernant l'avenir de l'institut du développement durable dans sa circonscription. Je partage ses inquiétudes.
L'institut a été créé il y a plusieurs années et il a vu son financement diminuer année après année, au point de ne plus être l'ombre de ce qu'il était. Il fut un temps où l'institut comptait 140 employés et occupait son propre immeuble. Il occupe désormais un très petit bureau et comprend probablement une poignée de gens, au troisième étage d'un immeuble à bureau anonyme au centre-ville de Winnipeg. Nous nous demandons si le gouvernement ne l'a pas déjà complètement oublié en tant qu'institut de développement durable. Les libéraux menacent peut-être de faire disparaître ce qu'il reste de l'Institut international du développement durable.
Nous devons comparer le chiffre de 100 millions de dollars prévu dans le projet de loi C-4 par les libéraux pour le développement durable au montant de 1,3 milliard de dollars que le gouvernement attribue à un programme très étroit et fixe, un paiement unique pour compenser les coûts de l'énergie auxquels doivent faire face les Canadiens. Le gouvernement a raté la cible dans ce cas-là également, en expédiant des chèques à des étudiants, des prisonniers, à des députés et à des Canadiens décédés, mais non aux personnes qui règlent la note de chauffage.
Pour en revenir à l'institut de Winnipeg, s'il y a 100 millions de dollars à dépenser, pourquoi le gouvernement ne redonnerait-il pas à l'institut son ancienne stature, soit celle d'un centre de recherche de pointe et d'une bibliothèque de consultation de renommée mondiale pour quiconque s'intéresse à la notion de conservation de l'énergie ou de développement durable? Pourquoi ne pas faire de l'installation de Winnipeg un centre d'excellence situé en plein coeur du Canada, et ne pas devenir des chefs de file mondiaux afin de pouvoir exporter la technologie.
En conclusion, nous sommes de nouveau devant un cas où les libéraux adoptent une initiative, une mesure que tout le monde voudrait appuyer, soit la création d'une fondation pour le développement durable, mais que font-ils? Ils en font un nid de favoritisme et ils empêchent le vérificateur général de vérifier les livres. Ils veulent contrôler les 100 millions de dollars qu'ils accordent à la fondation sans que qui que ce soit d'autre puisse savoir quels donateurs du Parti libéral reçoivent le gros des 100 millions de dollars.
Ce serait renversant si ce n'était pas si triste. Les gens de Surrey-Centre désireux d'appuyer la création de la Fondation pour le développement durable ne veulent pas appuyer le projet de loi en raison de la façon dont les libéraux s'en servent pour faire de la politique. Si les libéraux sont disposés à faire disparaître les lacunes et les éléments de corruption qu'ils ont intégrés dans le projet de loi, nous serons alors on ne peut plus heureux de l'appuyer.
[Français]
M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Madame la Présidente, pourquoi cette loi créant une fondation chargée de pourvoir au financement de l'appui technologique au développement durable? La question se pose. Pourquoi la création d'une fondation, mais surtout, pourquoi la création d'une fondation extérieure au gouvernement? Je crois qu'il est pertinent de se poser ces questions, surtout que, depuis hier, il y a eu deux événements qui m'ont porté à réfléchir au pourquoi de cette fondation.
Le premier événement s'est produit hier, lors du débat sur le projet de loi C-209, présenté par mon éminente collègue de Jonquière, à laquelle je voue un respect énorme pour ses qualités de tête et de coeur. La députée de Jonquière présentait un projet de loi proposant de créer un crédit d'impôt pour favoriser le transport en commun.
Le secrétaire parlementaire du ministre des Finances, dans sa réplique, a dit que c'était une excellente initiative de la part de la députée. J'ai été très surpris lorsque j'ai entendu ces paroles, et je me suis dit: «C'est merveilleux, c'est un bon départ.» Mais cela n'a pas duré.
Cela n'a pas duré tellement longtemps, puisque le député s'est tout de suite mis à vanter les mérites de toutes les politiques du gouvernement touchant l'environnement, la qualité de l'air et ainsi de suite, les millions, les centaines de millions de dollars, voire les milliards de dollars investis dans ces domaines, pour dire, à toutes fins utiles, que non, il n'appuierait pas se projet de loi, parce que c'est trop simple.
Mais c'est justement à cause de la simplicité du projet de loi C-209 qu'on pouvait voir l'importance et les impacts importants que cela pourrait avoir sur les changements climatiques, donc sur le développement durable.
Au cours de ma vie politique antérieure, en tant que conseiller municipal à Sherbrooke, j'ai siégé pendant plusieurs années comme membre de la Commission de transport de la région sherbrookoise. Je me suis aperçu que, lorsqu'il y avait des études sur l'impact du transport routier—des véhicules automobiles versus celui des autobus et du transport en commun en général—l'impact était important.
Selon les cycles économiques, l'achalandage bougeait en fonction des subventions qui étaient accordées au transport en commun. Bien sûr, il y avait des subventions d'opération et des subventions d'immobilisation.
On favorisait, bien sûr, l'achalandage, mais il dépendait aussi du cycle économique. Quand les subventions commençaient à diminuer, quand le prix des autos diminuait ou si on consentait des rabais de 0 p. 100 pour le transport et 0 p. 100 d'intérêt, les gens désertaient le transport en commun.
Le gouvernement, au lieu de créer une fondation et d'y mettre des millions de dollars, aurait pu ou devrait favoriser le projet de loi de ma collègue de Jonquière pour faire en sorte d'augmenter l'achalandage. J'ai vu que le secrétaire parlementaire du ministre des Finances était loin de comprendre le principe de la saucisse Hygrade, qui dit: «Plus le monde en mange...
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Plus le monde en mange, plus ils viennent en chercher.
M. Serge Cardin: Même moi, je l'ai oublié. J'ai un blanc de mémoire.
Une voix: Plus il y en a, plus le monde en mange.
M. Serge Cardin: C'est cela, plus il y en a, plus le monde en mange. C'est la même chose pour le transport en commun. Il faut favoriser l'utilisation du transport en commun et faire en sorte que le gouvernement, lors de l'étude du projet de loi C-209 qui va bientôt être discuté à nouveau à la Chambre, y aille en investissant dans cette initiative.
Un autre élément m'a surpris. Ce matin, lors de la séance du Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles, comparaissait le secrétaire parlementaire. Il parlait des changements climatiques. Nous avons également entendu parler du protocole de Kyoto.
Le gouvernement dit vouloir encore investir des centaines de millions, dit même investir des milliards dans certains secteurs. Il va encore investir 100 millions de dollars dans la Fondation. Mais quand nous regardons les résultats sur la base de 1990, nous devions atteindre des diminutions importantes de gaz à effet de serre. Cependant, aujourd'hui, sur la base de 1990, il y a eu une augmentation de 13 p. 100. Non seulement n'avons-nous pas diminué, mais nous avons augmenté nos émissions de 13 p. 100, et cela après avoir entendu le gouvernement nous dire qu'il avait investi des sommes colossales pour favoriser le développement durable.
On ne prévoit une diminution que d'un tiers des objectifs fixés en 1997 pour les années 2008 et 2012. On s'aperçoit donc, d'un côté, que le gouvernement refuse les initiatives aussi petites soient-elles mais combien performantes en ce qui concerne les changements climatiques et, de l'autre, avec les centaines de millions, voire les milliards qu'il a dépensés, il n'a pas réussi à stabiliser tout au moins les émissions de gaz à effet de serre, mais a tout simplement réussi à les augmenter.
La Loi créant la Fondation suscite plusieurs questions autres que les constatations que nous venons de faire dans un temps quand même relativement court. En moins de 24 heures, nous nous apercevons que le gouvernement a deux langages, mais n'obtient pas de résultat d'aucune façon.
Bien sûr, le Bloc québécois est contre la création de cette fondation à cause de nombreux éléments parce que cela suscite évidemment plusieurs préoccupations sur lesquelles je vais revenir. Je pourrais les énumérer rapidement.
Il y a premièrement la question du partage des compétences et également le fait que le Québec possède déjà une fondation. Il y a aussi le fait qu'il y ait une concentration du ou des pouvoirs et le fait que le projet de loi soit relativement vague en termes de définitions, des définitions que je qualifierais de risquées. Ce l'est également au niveau des expressions utilisées. Il y a aussi un écart vraiment important entre les recommandations de la table de concertation et le contenu du projet de loi.
Évidemment, si nous parlons de la Fondation comme telle, il faut dire que l'objectif est noble. Le développement durable, l'émission des gaz à effet de serre, leur réduction, la qualité de l'air, c'est noble comme mission mais, de toute évidence, ce n'est pas l'outil qu'il nous faudrait pour arriver à ces résultats.
Si nous regardons la situation du Québec, je disais tout à l'heure qu'il y avait effectivement un préoccupation quant au partage des compétences. Il semble qu'il ne s'agisse là que d'une façon détournée pour le fédéral de s'immiscer dans les champs de compétences des provinces.
Malheureusement, le projet de loi a aussi une très large portée qui risque de permettre au gouvernement fédéral d'investir dans un domaine de compétence québécoise et dans celui des autres provinces.
Évidemment, à première vue, les représentants des autres provinces pourraient être favorables au projet de loi. Eux ne s'offusquent jamais de voir le gouvernement fédéral s'immiscer dans leurs pouvoirs et gérer les affaires pour eux, mais pour ce qui est du Québec, c'est inacceptable.
Lors de l'étude en comité, on avait préparé des amendements qui demandaient effectivement le retrait du Québec de cette fondation, avec pleine compensation, parce que le Québec a déjà une fondation, soit la Fondation d'action québécoise pour le développement durable. Le gouvernement a investi près de 45 millions dans cette fondation.
Je voudrais ouvrir une parenthèse. Tantôt, je parlais des discussions que nous avions eues au Comité permanent des ressources naturelles, ce matin, au sujet de l'Entente de Kyoto. On parlait de 13 p. 100 d'augmentation des émissions de gaz à effet de serre pour le Canada, mais de toutes les provinces, c'est le Québec qui a eu la plus faible augmentation, soit 7 p. 100 seulement de ces émissions. C'est pratiquement près de sept fois moins que la province qui a eu la plus forte augmentation.
On considère donc que la fondation est performante. Si elle avait quelque 25 millions de dollars de plus pour promouvoir des technologies, les résultats seraient encore plus concluants.
En ce qui nous concerne, la fondation, c'est réglé, nous n'en avons pas besoin. Nous avons tout simplement besoin d'argent parce que les besoins sont aussi au Québec. On peut aussi se demander pourquoi une fondation à l'extérieur du gouvernement; le gouvernement n'aurait plus aucune responsabilité ou presque pas de responsabilité en regard de cette fondation. Automatiquement, il y a aussi l'élément de concentration des pouvoirs.
La fondation peut s'occuper de ses propres choses elle-même, mais on sait qu'il y a toujours un lien important avec le gouvernement—non pas avec le Parlement—, parce que c'est le gouvernement, à toutes fins pratiques, qui nomme les 15 administrateurs. Le projet de loi nous dit que les sept premiers sont nommés par le gouvernement, les huit autres le sont par les administrateurs eux-mêmes. On sait qu'en bout de ligne, c'est le gouvernement qui nommera les 15 administrateurs.
Aujourd'hui, certaines personnes m'ont rappelé que lorsque le gouvernement, le premier ministre en particulier, commence à créer des fondations ou des agences avec des administrateurs nommés par lui-même, on s'aperçoit qu'il fait un peu des cadeaux à ses amis. S'il a beaucoup de cadeaux à donner avant de partir, on peut peut-être penser à son départ imminent.
Ce sont donc encore 15 amis qu'il pourra présenter au conseil d'administration, 15 qui, à toutes fins pratiques, vont répondre encore au gouvernement. Le gouvernement a même le droit de les révoquer quand il le veut pour les raisons qu'il peut avancer.
Le projet de loi demeure passablement vague en ce qui concerne la définition de «travaux admissibles». Des travaux admissibles pour améliorer la qualité de l'air, est-ce que cela veut dire qu'ils vont aussi financer des travaux portant sur les technologies nucléaires, par exemple? Rien ne nous l'interdirait, bien que cela aille à l'encontre de l'Entente de Kyoto, et rien ne nous indique le contraire.
Qui va élaborer indirectement les critères d'admissibilité? C'est aussi le gouvernement, mais jamais la fondation n'aura de comptes à rendre au Parlement. C'est dans cette optique qu'un amendement important avait été présenté. Il demandait que le vérificateur général puisse procéder à la vérification de cette fondation pour évaluer la performance, en termes d'objectifs, la façon dont l'argent est distribué et si c'est rentable de le faire ainsi.
Avant que cet amendement soit déposé, il y avait même eu une demande à l'effet d'inviter le vérificateur général comme témoin au Comité permanent des ressources naturelles.
On voit évidemment la pertinence que cette visite aurait eue pour ce qui est de l'élaboration des différents articles et des modifications à apporter au projet de loi. Dans plusieurs dossiers, le vérificateur général a souvent dénoncé le fait que les gens qui sont nommés par le premier ministre ou le gouvernement le sont plus souvent par partisanerie qu'en fonction de leur compétence. Le risque demeure autant.
Le vérificateur général, qui se serait présenté comme témoin, qui aurait évalué le projet de loi, aurait pu déjà, avant le fait accompli, élaborer certaines pistes évitant justement ces quasi-conflits qui peuvent exister entre le gouvernement et une fondation dite indépendante.
Mme Jocelyne Girard-Bujold: La transparence.
M. Serge Cardin: Oui, comme le dit mon éminente collègue et députée de Jonquière, c'est une question de transparence. À ce moment-là, il aurait pu évidemment y en avoir.
Le Bloc québécois, pour ces différentes considérations, sera contre le projet de loi. On aurait pu, à la limite, être favorable si l'ensemble de nos amendements qui avaient été proposés au comité avaient été acceptés. D'une manière ou d'une autre, étant donné que, pour une partie, ils n'avaient pas été acceptés au comité, il s'avérait déjà à l'époque que nous serions contre ce projet de loi. Le Québec a sa propre fondation. Tout ce qu'on serait prêts à accepter, c'est un transfert des sommes disponibles pour la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre pour assurer un développement durable.
[Traduction]
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Madame la Présidente, avant de me lancer dans le débat, je voudrai invoquer le Règlement. Vous m'avez accordé la parole plus tôt et je ne suis pas intervenu parce que le député bloquiste n'avait pas mis son nom sur la liste des intervenants. Je crois que c'est moi qui devais avoir la parole.
J'aimerais avoir mes 15 minutes. Je suis le seul député de l'opposition à avoir proposé un amendement au projet de loi. Je pense avoir quelque chose à apporter au débat. Je demande le consentement unanime de la Chambre pour terminer mon intervention.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que le député sache que nous ne sommes pas à la fin du débat. Nous ne sommes qu'à la première série d'interventions. Le député aura ce qu'il reste de temps des deux minutes ou de la minute lorsque le projet de loi reviendra devant la Chambre.
Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Gerald Keddy: Madame la Présidente, je prendrai mes deux minutes pour vous remercier d'avoir posé la question. Si nous avons la possibilité de débattre du projet de loi lorsqu'il reviendra à la Chambre, j'utiliserai certainement mes 40 minutes à ce moment-là.
Une voix: C'est vingt minutes.
M. Gerald Keddy: Nous n'aurons que 20 minutes. Quelque chose ne va pas. Nous sommes sur une pente savonneuse.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Je voudrais apporter une clarification sur le rappel au Règlement. Qu'il soit bien clair qu'il n'y a pas de liste. C'est une entente à l'amiable entre les leaders parlementaires. Il est vrai qu'il existe une rotation sur laquelle se sont entendus les leaders parlementaires.
Il est également vrai que le député bloquiste n'a pas demandé la parole au même moment, mais il l'a demandée et c'était son tour. Il pouvait parler pendant 40 minutes s'il le voulait. Le député aura 20 minutes au début de la prochaine série d'interventions.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Madame la Présidente, je crois qu'il me reste environ 30 secondes pour faire quelques commentaires à ce sujet. Ce serait très certainement une erreur de ma part que de ne pas tirer entièrement profit de la minute et demie à laquelle j'ai droit aujourd'hui pour parler ne serait-ce que brièvement du projet de loi qui fait l'objet de ce débat.
Je comprends que nous devrons en discuter de nouveau plus tard, que nous devrons écourter nos notes quelque peu et que nous aurons une nouvelle chance de nous faire entendre.
Il y a bon nombre d'aspects du projet de loi C-4 que le Parti conservateur est prêt à appuyer. Le développement durable et la réduction des gaz à effet de serre sont sans contredit des projets que tous les députés sont prêts à appuyer.
Malheureusement, il y a la mesure législative elle-même. C'est la façon dont elle a été rédigée. C'est la façon dont elle a été conçue. C'est le fait qu'elle ne contient pas de disposition de temporisation. C'est le fait qu'elle ne prévoit pas de mesure de reddition de compte. C'est aussi le fait que le vérificateur général n'a pas le droit de se pencher sur les livres.
Il y a un certain nombre de lacunes dans cette mesure législative qui auraient pu être corrigées en comité et à l'étape du rapport. Les députés ministériels ne l'ont pas fait. Cette mesure est meilleure maintenant qu'elle ne l'était au départ. Elle fait un travail légèrement meilleur, mais elle ne va pas jusqu'au bout. Dans cette optique, nous ne pouvons certainement pas l'appuyer. Si j'ai bien compris, les autres partis d'opposition ne sont pas prêts à l'appuyer non plus.
Je serai très heureux de continuer à discuter de ce sujet une autre fois.
[Français]
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Comme il est 17 h 30, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) propose:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager l'opportunité d'interdire à quiconque de vendre des boissons alcoolisées au Canada si les contenants utilisés pour la vente ne portent pas une étiquette bien en vue indiquant lisiblement ce qui suit: «AVERTISSEMENT: La consommation d'alcool pendant la grossesse peut causer des malformations congénitales.»
—Madame la Présidente, c'est un grand honneur pour moi de présenter à la Chambre cet après-midi une motion exhortant le gouvernement à envisager de faire apposer des étiquettes sur les contenants de boissons alcoolisées afin de s'attaquer à une tragédie évitable dans notre société à l'heure actuelle, à savoir le syndrome d'alcoolisme foetal.
[Français]
C'est un plaisir, aujourd'hui, de disposer de cette période de temps, à la Chambre, pour discuter d'un sujet très important dans notre société. Cette motion demande au gouvernement d'exiger l'imposition d'étiquettes d'avertissement sur les produits alcoolisés dans le cadre d'une stratégie exhaustive de lutte contre le syndrome d'alcoolisme foetal.
[Traduction]
Je voudrais tout d'abord remercier certaines personnes pour le travail qui a été fait en préparation du débat de ce soir.
Tout d'abord, je voudrais remercier les membres du sous-comité multipartite de la Chambre d'avoir accepté que cette motion fasse l'objet d'un vote.
Ensuite, je voudrais rendre un hommage spécial à un député qui consacre depuis longtemps de grands efforts aux questions touchant le syndrome d'alcoolisme foetal et qui a été en fait le premier à demander l'apposition d'étiquettes sur les contenants de boissons alcoolisées au Canada. Je veux parler plus particulièrement du travail du député de Mississauga-Sud. Je pense qu'il est très important de reconnaître le travail de ce député car, en fait, il donne l'exemple à la Chambre depuis de nombreuses années en réclamant avec véhémence des programmes de sensibilisation au sujet du syndrome d'alcoolisme foetal et l'apposition d'étiquettes sur les contenants de boissons alcoolisées.
Vous êtes sans doute au courant du travail du député dans ce domaine, madame la Présidente, en raison du livre qu'il a écrit. Je parle plus particulièrement de Fetal Alcohol Syndrome: The Real Brain Drain, et de la campagne «Drink Smart Canada» qu'il a lancée. On fait, dans les deux cas, état des problèmes de santé qui sont attribuables directement ou indirectement à l'alcool.
Je veux mentionner le travail que le député de Mississauga-Sud a accompli dans cette enceinte relativement à cette question. Je ne suis pas la première à soulever cette question ici. Le député de Mississauga-Sud l'a fait précédemment sous la forme d'un projet de loi qui a été présenté à la Chambre et dont le Comité permanent de la santé a été saisi il y a deux législatures de cela.
Je tiens à préciser aux fins du compte rendu que nous marchons sur les traces d'autres gens qui travaillent à cette question et que cela doit être reconnu.
Je tiens également à remercier les députés de tous les partis pour leur appui. Nous avons eu droit aujourd'hui à l'appui et aux encouragements des représentants de chacun des partis représentés à la Chambre. Je pense que les bases d'une approche neutre à l'égard d'une question très importante sont maintenant posées. J'espère que la société et le Parlement pourront arriver à accomplir une chose qui, jusqu'à récemment, semblait impossible.
Le député de Mississauga-Sud n'est pas le seul à avoir poursuivi cette idée à la Chambre; un comité permanent de la Chambre l'a poursuivie activement en 1992. Je fais référence en particulier à une étude détaillée réalisée par le Comité permanent de la santé et du bien-être social, intitulée «Le syndrome d'alcoolisme foetal, une tragédie évitable».
Dans ce rapport, le comité recommandait entre autres d'apposer des étiquettes sur les contenants de boissons alcoolisées afin de mettre en garde les consommateurs contre les risques de malformations congénitales que peut entraîner la consommation d'alcool pendant la grossesse. Ce document, d'une grande utilité, a jeté la lumière sur un problème très grave dans la société actuelle. Il a fait l'objet d'un appui considérable de la part du public, et l'idée d'apposer des avertissements sur les contenants de boissons alcoolisées a suscité beaucoup d'intérêt.
Au cours de la dernière décennie, un grand nombre de députés et d'activistes se sont employés à sensibiliser le public à ce problème. Nous devons reconnaître le travail accompli par les professionnels, les bénévoles et autres intervenants qui oeuvrent, depuis de nombreuses années déjà, dans un premier temps pour que soit reconnu le syndrome d'alcoolisme foetal, et ensuite pour que soient mis en place des programmes d'aide aux individus et aux familles aux prises avec cette maladie.
Beaucoup d'autres personnes ont contribué à sensibiliser les enseignants et les professionnels, et d'autres encore se sont consacrées à l'information de la population. Ils ont été nombreux les groupes à faire campagne en faveur de l'étiquetage des boissons alcooliques pour sensibiliser les consommateurs.
C'est de cela dont il s'agit aujourd'hui. Nous savons que la solution qu'il est proposé d'apporter à ce très grave problème dans notre société n'est pas une fin en soi. Nous y voyons un élément d'une grande stratégie à visée pédagogique, destinée à nous aider à affronter un grave problème au Canada, celui du syndrome d'alcoolisme foetal.
On a voulu savoir pourquoi j'ai soulevé la question aujourd'hui. Je m'en explique en donnant un petit historique. Je commencerai par rappeler que l'initiative s'inscrit dans le droit fil du travail que j'ai commencé à l'époque où j'étais députée de l'assemblée législative manitobaine, et qu'elle fait suite aux efforts de la province en vue d'imposer l'étiquetage des boissons alcoolisées. Cette initiative m'avait fait comprendre à quel point il était difficile d'imposer cet étiquetage au seul niveau provincial, m'étant fait dire pratiquement dès le début du débat qu'une stratégie nationale s'imposait.
Certaines administrations ont entrepris d'étiqueter les contenants des boissons alcoolisées. Je voudrais à cet égard saluer le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest qui ont imposé une certaine forme d'étiquetage au début des années 90. Ils avaient rapidement compris qu'il fallait informer les femmes des dangers de la consommation d'alcool pendant la grossesse et leur dire que cela pouvait causer des malformations congénitales et le syndrome d'alcoolisme foetal.
Au Manitoba, nous n'avons pas gagné la bataille de l'étiquetage, mais nous avons au moins obtenu que des messages paraissent sur les sacs de papier brun dans lesquels sont placés les bouteilles de spiritueux. C'était un premier pas. J'espérais poursuivre la bataille ici. C'est formidable de pouvoir reprendre le travail entamé par d'autres.
D'autre part, je me sens une obligation de représenter mes électeurs au sujet d'un dossier aussi important que le syndrome d'alcoolisme foetal. Aucune communauté n'échappe aux effets de ce syndrome. Certaines communautés ont une incidence plus élevée que d'autres. Dans certaines parties de ma circonscription, Winnipeg-Nord-Centre, l'incidence du syndrome d'alcoolisme foetal est très élevée.
Ce phénomène est directement lié à la pauvreté, au désespoir, à la dépression, au chômage, aux piètres conditions économiques, au mauvais logement et à la mauvaise alimentation. Ces conditions reflètent la situation démographique qui prévaut dans ma circonscription. Elles favorisent une hausse de l'incidence de l'alcoolisme et du syndrome d'alcoolisme foetal.
Je crois que j'exprime, à la Chambre, la volonté de mes électeurs qui veulent que je continue de m'attaquer à ce problème.
Ma circonscription compte de nombreuses organisations qui travaillent très fort dans le cadre de projets innovateurs qui aident à changer les choses petit à petit. Leur contribution doit être reconnue. Nous devons, en tant que députés, faire ce que nous pouvons pour reconnaître leurs efforts.
Je pense en particulier à l'école David Livingstone, située dans ma circonscription. Cette école se trouve au coeur des quartiers défavorisés, où les problèmes économiques et sociaux sont les plus aigus. Cette école a décidé de lancer un programme conçu pour aider à identifier le problème du SAF et de créer d'autres programmes qui répondent aux besoins des enfants. Il n'y a pas de livres d'école. Il n'y a pas beaucoup d'aide là-bas qui facilite le travail auprès des enfants atteints du syndrome d'alcoolisme foetal. Toutefois, ces initiatives font la différence. Je tenais à souligner le travail de l'école David Livingstone et de sa directrice, Angeline Ramkissoon.
L'autre raison pour laquelle j'aborde le sujet devant la Chambre aujourd'hui est de nature très personnelle. J'ai un fils handicapé, âgé de 16 ans. On a diagnostiqué chez lui une rare déficience génétique lorsqu'il avait 3 ans. En raison de ce handicap, il a de graves difficultés d'apprentissage, il souffre d'un grand retard de développement et il subit des crises épileptiques incontrôlables.
Dans mon cas, le handicap de mon enfant n'est pas lié au syndrome d'alcoolisme foetal. En tant que parent qui vis avec un enfant handicapé et qui s'en occupe, je me dis chaque jour que nous devons faire tout ce que nous pouvons à la Chambre pour aider les parents, les familles et les enfants qui font face à un handicap.
Quand nous pensons au présent débat et au travail qui y est associé, nous devons nous rappeler que nous nous exprimons au nom de bien des familles qui doivent relever quotidiennement des défis très difficiles et que nous devons faire notre part.
Il est parfois difficile de séparer nos vies personnelle et politique. Je ne crois pas que je le puisse. Je pense que ma vie personnelle, c'est ma vie politique. Les problèmes auxquels je suis confrontée chaque jour et l'expérience que j'ai acquise en m'occupant de mon fils ont fait de moi une députée plus efficace et m'ont poussée à me pencher sur des dossiers comme celui-ci.
En veillant aux besoins de mon fils Nick, j'ai appris notamment que nous devons faire tout ce que nous pouvons pour aider les enfants handicapés, mais que nous devons aussi, chaque fois que possible, trouver des façons de prévenir les handicaps, lorsqu'ils peuvent l'être.
Aujourd'hui, nous parlons d'un handicap qui peut tout à fait être prévenu. Que cela soit clair. Le syndrome d'alcoolisme foetal peut être prévenu. Il est causé par le fait qu'une femme enceinte consomme de l'alcool.
Si nous pouvons enseigner aux femmes enceintes les précautions qu'elles doivent prendre pour empêcher que leur enfant soit atteint du syndrome d'alcoolisme foetal, nous rendrons un grand service. Nous ne prétendons pas que nous éliminerons le syndrome d'alcoolisme foetal ni que tout enfant né avec un handicap souffre du syndrome d'alcoolisme foetal.
Ce que nous disons, c'est qu'il y a un lien entre le fait de consommer de l'alcool durant la grossesse et le syndrome d'alcoolisme foetal. Si nous réussissons à sensibiliser les femmes enceintes aux dangers de consommer de l'alcool, nous aurons fait une grande différence. Même si on réussissait à protéger un seul bébé du syndrome d'alcoolisme foetal en faisant adopter une mesure aussi banale que l'étiquetage des bouteilles de boissons alcoolisées, nous aurions servi nos électeurs et tous les Canadiens.
Il y a tellement de choses à dire sur le syndrome d'alcoolisme foetal, et je sais que d'autres députés vont en parler aussi aujourd'hui. J'espère que le député de Mississauga-Sud aura l'occasion d'intervenir, car il connaît très bien le sujet.
Nous parlons d'un syndrome qui désigne un ensemble d'anomalies extrêmement débilitantes chez des enfants dont la mère a abusé de l'alcool durant sa grossesse. Il est la cause principale des retards du développement. On ne sait pas exactement combien de personnes en sont atteintes, mais on estime que cette maladie pourrait toucher trois nouveau-nés sur 1 000.
Le nombre de victimes augmente de façon significative si l'on ajoute les anomalies dues au syndrome de Lemoine et Jones, un syndrome associé au syndrome d'alcoolisme foetal. Cette maladie est incurable. Elle cause des dommages irréversibles. Toutefois, elle peut être éradiquée grâce à la prévention.
Je demande à la Chambre de continuer le travail amorcé par d'autres avant moi qui ont essayé de faire valoir l'importance, dans le cadre d'une stratégie complète sur le syndrome d'alcoolisme foetal, de mettre en garde les futures mères en apposant sur les bouteilles de boissons alcoolisées des étiquettes énonçant les risques associés à la consommation de ces boissons. Cela ne semble pas très compliqué, surtout lorsqu'on pense que des étiquettes sont obligatoires aux États-Unis depuis plus de 10 ans. Le gouvernement américain exige depuis 1989 que tous les contenants de boissons alcoolisées soient étiquetés. Cette décision n'a pas entraîné de graves conséquences. L'industrie des boissons alcoolisées est toujours vivante et prospère. Cependant, les gens en prennent note. Toutes les réactions que nous avons entendues au sujet de cette décision sont positives.
Les personnes non alcooliques et les femmes enceintes en prennent note. Les personnes qui, autrement, ne sauraient pas qu'il existe un lien entre la consommation d'alcool pendant la grossesse et le syndrome d'alcoolisme foetal en prennent note. Cela est utile, et cela fait une différence. C'est là l'objet du débat d'aujourd'hui
Le député de Mississauga-Sud m'a transmis une citation très importante qui dit tout. Voici ce qu'a écrit Denny Boyd, l'auteur d'un article paru dans le numéro du Sun de Vancouver du 27 novembre 1995:
Les étiquettes apposées sur les contenants de boissons alcoolisées visent à servir de phare, qui met les consommateurs en garde contre un danger imminent.
Cet article ne dit-il pas tout? Nous sommes un phare qui lance un avertissement, qui sonne l'alarme sur les dangers de la consommation d'alcool pendant la grossesse.
Nous tentons de faire une différence et il est fort possible que nous puissions en faire une. Ces quelques dernières années, depuis que le député de Mississauga-Sud et d'autres députés travaillent à ce dossier, la population est plus consciente du syndrome d'alcoolisme foetal et des conséquences qu'il peut avoir pour nous tous. Nous savons que la société devra dépenser des millions de dollars pour s'occuper d'un enfant atteint du syndrome d'alcoolisme foetal. Nous savons également qu'il existe un lien entre le syndrome d'alcoolisme foetal et la délinquance juvénile.
On sait que, dans probablement plus de la moitié des cas de délinquance juvénile dont on s'occupe couramment, il y a un lien direct avec des handicaps. Certains de ces handicaps sont liés au syndrome d'alcoolisme foetal. Si l'on comprend les répercussions sur la société, est-ce qu'on ne devrait pas prendre des mesures qui permettent de faire une différence?
C'est précisément ce que nous proposons aujourd'hui. J'ai hâte d'entendre ce que diront les députés de tous les partis sur la valeur de la motion et de savoir si nous pouvons poursuivre le travail entrepris par le député de Mississauga-Sud.
Nous devrions l'envisager non seulement parce que c'est logique et dans l'intérêt général, mais aussi parce que nous avons l'appui de plusieurs milliers de Canadiens d'un bout à l'autre du pays.
Un récent sondage a révélé qu'un grand nombre de Canadiens étaient favorables à l'idée d'apposer de telles étiquettes sur les contenants de boissons alcoolisées. Selon un sondage Environics qui a été mené pour Santé Canada et dont les résultats ont été rendus publics en janvier 2000, 90 p. 100 des Canadiens acceptent l'idée d'apposer des étiquettes de mise en garde et les deux tiers des gens interrogés l'ont approuvée fortement. Le rapport du sondage conclut qu'il y a un appui important dans la population en faveur d'initiatives visant à renseigner les gens sur le syndrome d'alcoolisme foetal, dont l'apposition d'étiquettes de mise en garde sur les produits alcoolisés.
Nous pouvons compter sur l'appui des Canadiens, y compris les responsables des provinces et des territoires. De même, nous pouvons compter sur l'engagement et le dévouement des députés. Il serait regrettable de rater cette occasion. Il faudrait agir dès aujourd'hui.
[Français]
M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, c'est un grand plaisir pour moi de prendre la parole dans le débat sur la motion M-155 qui se lit ainsi:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager l'opportunité d'interdire à quiconque de vendre des boissons alcoolisées au Canada si les contenants utilisés pour la vente ne portent pas une étiquette bien en vue indiquant lisiblement ce qui suit: «AVERTISSEMENT: La consommation d'alcool pendant la grossesse peut causer des malformations congénitales.»
D'entrée de jeu, je voudrais féliciter très sincèrement notre collègue de Winnipeg-Centre-Nord de nous avoir saisis de cette motion.
[Traduction]
Avant d'aborder la motion elle-même, je désire reconnaître les efforts déployés depuis longtemps par mon collègue, le député de Mississauga-Sud. Les députés des deux côtés de la Chambre savent qu'il s'intéresse à cette question depuis de nombreuses années. Il a ardemment lutté contre le syndrome d'alcoolisme foetal. Je le félicite pour sa ténacité.
[Français]
D'ailleurs, cette ténacité s'est reflétée dans certains engagements pris par le premier ministre dans son Adresse en réponse au discours du Trône, le 31 janvier dernier.
[Traduction]
Je suis heureux d'appuyer la motion. Je conviens qu'il faudrait envisager l'apposition d'étiquettes de mise en garde sur les boissons alcoolisées. Le Yukon, l'Australie et certains États des États-Unis l'exigent à l'heure actuelle. Bien que des recherches démontrent que ce n'est pas la manière la plus efficace d'atteindre les groupes qui risquent grandement de consommer trop d'alcool, je crois qu'il est opportun de scruter ces constatations.
[Français]
Toutefois, l'apposition d'étiquettes de mise en garde sur les boisons alcoolisées ne doit pas être considérée de manière isolée. Cette forme d'étiquetage et de mise en garde doit s'inscrire dans une stratégie globale de lutte contre l'abus de l'alcool, lequel peut mener au syndrome d'alcoolisme foetal et aux effets de l'alcool sur le foetus. Une stratégie globale efficace doit elle-même comprendre plusieurs éléments: campagnes de sensibilisation, recherches, approches axées sur la préparation à la vie et programmes de prévention des toxicomanies.
Permettez-moi de mentionner rapidement ce que fait le gouvernement du Canada pour contrer la tragédie qu'est le syndrome d'alcoolisme foetal.
Des mesures très variées ont déjà été mises en oeuvre, sont en train de l'être au Canada, pour lutter contre ce syndrome. Elles comprennent de vastes tentatives et de nombreux programmes pour éduquer le public au sujet des dangers de la consommation de boissons alcoolisées pendant la grossesse.
Le 28 janvier 2000, une initiative de lutte contre le syndrome d'alcoolisme foetal et les effets de l'alcool sur le foetus a été dotée de 11 millions de dollars pour trois ans. C'est une annonce que nous avons faite à ce moment-là, le programme est en cours. Cette initiative s'appuie sur l'excellent travail déjà effectué dans les provinces, les territoires, les communautés, par des groupes de parents et des groupes de soutien.
[Traduction]
Le financement de 11 millions de dollars sert à intensifier les activités dans un certain nombre de domaines, dont les suivants: sensibilisation et éducation du public; surveillance; identification et diagnostic précoces; formation et développement des capacités pour lutter contre le syndrome d'alcoolisme foetal et les effets de l'alcool sur le foetus; coordination; intégration des services; et fonds destinés à des projets stratégiques.
Santé Canada a créé le Comité consultatif national sur le syndrome d'alcoolisme foetal et les effets de l'alcool sur le foetus, chargé de lui fournir une expertise et des avis stratégiques indépendants sur le syndrome d'alcoolisme foetal et les effets de l'alcool sur le foetus, en plus de promouvoir la collaboration et les partenariats entre les disciplines et les secteurs.
[Français]
Santé Canada travaille aussi avec les provinces et les territoires à l'élaboration d'une campagne nationale d'éducation et de sensibilisation du public à ce syndrome et aux effets de l'alcool sur le foetus. Le lancement simultané d'une affiche et d'une brochure est prévu pour le mois de mai.
[Traduction]
En outre, la Direction générale de la santé des premières nations et des Inuits est en train de concevoir une campagne de sensibilisation du public au syndrome d'alcoolisme foetal et aux effets de l'alcool sur le foetus s'adressant aux premières nations et aux Inuits d'une façon respectueuse de leurs cultures.
[Français]
Afin que les femmes enceintes aux prises avec des problèmes de toxicomanies aient accès à des traitements appropriés, Santé Canada fournit aussi des fonds aux provinces et aux territoires par le truchement du Programme de traitement et de réadaptation en matière d'alcoolisme et de toxicomanie. Au moyen de ce programme, Santé Canada fait aussi la promotion de pratiques idéales, évalue des programmes modèles et diffuse de l'information de pointe.
Santé Canada fournit aussi un financement au Centre canadien de lutte contre les toxicomanies afin d'améliorer le service national d'information, ainsi que le projet de formation en direct concernant ce syndrome et les effets de l'alcool sur le foetus et cela, à l'intention des travailleurs et travailleuses de première ligne du Programme canadien de nutrition prénatale et du Programme d'action communautaire pour les enfants.
[Traduction]
Santé Canada effectuera, en collaboration avec les principaux intervenants, un sondage national auprès des médecins afin de déterminer quelles sont leurs connaissances, leurs croyances et leurs attitudes actuelles relativement au syndrome d'alcoolisme foetal et à son diagnostic. La Direction de la santé des premières nations et des Inuits, de Santé Canada, travaille avec le Comité de la santé des Indiens et des Inuits de la Société canadienne de pédiatrie à déterminer les critères de diagnostic. Cette information servira de base aux initiatives en matière de politiques et d'éducation à l'intention des professionnels de la santé.
Enfin, Santé Canada tiendra, à l'automne 2001, un forum national visant à élaborer un plan d'action national relatif au syndrome d'alcoolisme foetal et aux effets de l'alcool sur le foetus, auquel participeront des représentants des divers secteurs intéressés, comme l'éducation et l'enseignement, les services correctionnels et les services sociaux, et des divers ordres de gouvernement au Canada.
[Français]
Ce ne sont là qu'un certain nombre des nombreuses initiatives qui donnent quand même un aperçu assez important des mesures prises au Canada pour lutter contre ce syndrome. Bien que Santé Canada reconnaisse que la majorité des adultes canadiens consomment de l'alcool d'une manière qui n'est pas nuisible à leur santé, c'est nous qui devons veiller, au nom des enfants canadiens, à combattre ce grave problème.
Si cette motion est adoptée par le gouvernement, comme nous le souhaitons, la prise en considération par la Chambre des communes du souhait exprimé par la motion M-155 peut sans doute contribuer à cette prise de conscience et à l'amélioration de la situation dans une bonne mesure.
[Traduction]
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir dans le débat de cette motion très importante, la motion M-155. Je félicite la députée de Winnipeg-Centre-Nord et le député de Mississauga de nous en avoir saisis.
Le syndrome d'alcoolisme foetal est une des raisons pour lesquelles des enfants subissent des lésions cérébrales in utero. C'est la principale cause de lésions cérébrales évitables au Canada. C'est extraordinaire. Dans certaines localités, les taux sont très élevés et excèdent 12 enfants pour 1 000. Cela entraîne des coûts de 350 000 $ par enfant jusqu'à l'âge de 18 ans, sans parler de l'énorme coût humain pour les personnes et les familles touchées.
Je signale que ce n'est pas uniquement à cause de l'alcool que des enfants naissent avec des lésions cérébrales. D'autres substances, comme la colle, l'essence et les drogues illicites peuvent empoisonner le cerveau d'un foetus durant sa croissance et, dans bien des cas, le dommage est irréversible. Nous devons donc examiner cette question dans un contexte beaucoup plus large.
Je suis d'accord avec le secrétaire parlementaire pour dire que la preuve est faite que l'étiquetage constitue une solution. Cependant, j'exhorte fermement le gouvernement à examiner la question dans un contexte plus large pour voir comment nous pouvons prévenir plus efficacement l'abus de substances intoxicantes et l'incidence du syndrome d'alcoolisme foetal et de l'effet de l'alcool sur le foetus. Je le répète, le dommage est attribuable non seulement à l'alcool, mais aussi à la colle, à l'essence et aux drogues illicites.
Dans mon expérience médicale, toutes les femmes enceintes que j'ai rencontrées et qui consommaient ces substances nocives savaient très bien qu'elles causeraient du tort au bébé. Elles le savaient toutes. Des filles de 15 ans accompagnées des personnes qui s'occupaient d'elles m'ont dit qu'elles se moquaient bien de ce qui arriverait à leur bébé. Si le bébé était mignon, elles le garderaient, sinon elles l'abandonneraient. Quand on leur demandait si ça les dérangeait que ces produits chimiques soient nocifs pour leur bébé, elles répondaient qu'elles s'en moquaient.
Le problème n'est pas qu'elles ne sont pas au courant mais plutôt qu'elles ont beaucoup d'autres problèmes. Dans l'ensemble, l'alcool consommé par les femmes enceintes qui vont accoucher d'enfants atteints du syndrome d'alcoolisme foetal ou souffrant des effets de l'alcoolisme foetal est produit chez elles. On met des pelures de pommes de terre, de la levure et quelques autres ingrédients dans une grande cuve, on laisse fermenter et ça donne une espèce de bière. C'est ce qu'elles boivent, pas des produits de marque achetés à la régie des alcools.
Que pouvons-nous faire pour lutter contre l'alcoolisme et réduire l'incidence du SAF et de l'EAF? La nouvelle technologie médicale indique très clairement que les substances présentes dans les voies nerveuses du cerveau y tournent en rond. Il faut donc agir au niveau des voies nerveuses du cerveau des drogués.
Il faut les enlever du milieu où ils se trouvent. Les nouveaux instruments médicaux fonctionnent très bien, tout comme le counselling et les cures de désintoxication traditionnelles. Certains modèles européens, particulièrement en Suisse et aux Pays-Bas, ont un taux de guérison de 60 p. 100 après un an pour les toxicomanes, particulièrement les consommateurs invétérés de stupéfiants. C'est absolument extraordinaire.
Je sais d'expérience que bien des choses que nous faisons aujourd'hui ne donneront rien. Elles ne s'attaquent pas aux problèmes d'une façon concrète. J'encourage donc le gouvernement à collaborer avec ses homologues provinciaux et à étudier les modèles européens qui ont un taux de succès élevé. Leur approche efficace comprend non seulement des cures de désintoxication, des séances de counselling et des thérapies médicales, mais aussi la formation à un métier, le fait de travailler et de se trouver dans un environnement sûr, loin du milieu des drogues dans lequel ces personnes vivaient.
Parlons de prévention et du programme Bon départ. Ce programme a débuté en 1998. Et il marche. Non seulement il est rentable du point de vue financier, il a entraîné une réduction spectaculaire des toxicomanies. Il va contribuer à réduire l'incidence du syndrome de l'alcoolisme foetal. Il y aura moins de risques que le bébé que porte une femme soit handicapé par le SAF ou l'EFA ou d'autres sortes de lésions au cerveau.
J'ai présenté un projet de loi qui permettrait aux tribunaux d'envoyer dans des établissements de traitement, contre leur gré, les femmes qui consomment des substances dangereuses pour le foetus. Ce n'est pas un projet de loi sur l'avortement et ne s'appliquerait que lorsqu'elles désirent porter leur grossesse à terme. Si elles ont refusé tout traitement à maintes reprises et qu'elles sont saines d'esprit, elles peuvent être envoyées dans un centre de traitement contre leur gré.
Cela se compare à ce que nous faisons pour les patients psychiatriques qui constituent un danger pour eux-mêmes ou pour autrui. Ce n'est pas une mesure punitive à l'encontre des femmes, mais un dernier effort pour éviter que les foetus ne souffrent du syndrome et des effets de l'alcoolisme foetal. Lorsque j'ai proposé ce projet de loi, ce que j'ai fait trois fois au cours de trois législatures, ceux qui se sont vraiment prononcés en faveur de cette mesure sont les personnes qui travaillent avec des enfants affectés par le syndrome et les effets de l'alcoolisme foetal et avec les familles touchées.
La députée néo-démocrate a fort bien décrit les questions sociales qui gravitent autour de ces problèmes. Elle a parfaitement raison. Dans beaucoup de collectivités autochtones où on trouve des taux extrêmement élevés de cas de syndrome et d'effets de l'alcoolisme foetal, nous devons trouver comment leur procurer le meilleur programme social de tous, c'est-à-dire des emplois.
Hélas, notre pays a décidé de mettre les autochtones à part. Nous avons décidé de les traiter différemment en appliquant une Loi sur les Indiens qui crée une forme d'apartheid au Canada. Cela a beaucoup nui à ces collectivités. Elles se sont effritées de l'intérieur, elles ont été incapables de prendre leur destinée en main et d'exploiter les possibilités économiques qui devraient être à leur portée.
Ces taux élevés de chômage et de pauvreté ont contribué à la forte prévalence du syndrome et des effets de l'alcoolisme foetal observée dans certaines collectivités. Matthew Coon Come, grand chef des premières nations, a fait des déclarations très lucides qui devraient être appuyées afin que les collectivités mettent de l'ordre chez elles et que les dirigeants autochtones prennent les mesures voulues. Ce serait un changement bienvenu dans bien des localités, et nous serions certainement d'accord.
Nous devons aborder la question de la toxicomanie et de l'alcoolisme de façon beaucoup plus large. Il faut faire de la prévention grâce au programme Bon départ. Nous devons recourir aux nouveaux traitements qui existent aujourd'hui, comme le modèle européen, qui comprend la désintoxication, le counseling, le traitement médical, la formation professionnelle et l'isolement prolongé des toxicomanes par rapport au milieu où ils consommaient drogues ou alcool.
Ce dernier élément est fort important, car nous savons que, si un toxicomane se retrouve dans le milieu où il consommait des drogues ou de l'alcool, une réaction chimique se produit dans le cerveau par association, et il est tenté de recommencer à consommer comme avant. Il nous faut examiner soigneusement les projets de loi d'initiative parlementaire qui ont été présentés sur le sujet.
Il faut aussi tenir compte du cas de Mme M., dans la province de la députée néo-démocrate. Il s'agit du cas d'une jeune femme qui avait deux enfants handicapés mentaux en raison de son habitude d'inhaler des vapeurs de colle. Elle a été placée dans un établissement de traitement contre sa volonté. Son internement a été contesté devant les tribunaux et, après une certaine période, elle a été remise en liberté. Cependant, elle ne consommait plus de drogue et elle a pu remettre sa vie en ordre. Elle a eu un enfant, qui était son premier enfant n'ayant pas subi de lésion au cerveau.
Lorsqu'on lui a demandé si la courte période qu'elle avait passée dans un établissement de traitement, même contre sa volonté, avait été bénéfique, elle a répondu oui. Elle a déclaré que c'était probablement ce qui avait été le plus déterminant pour lui éviter de mettre au monde un autre enfant ayant subi des lésions irréversibles au cerveau.
Je ne peux qu'exhorter la Chambre à examiner la question à la lumière de ce qui se passe dans notre système judiciaire. Nous savons en effet que près de 50 p. 100 des individus incarcérés dans nos pénitenciers ont une forme ou une autre de syndrome d'alcoolisme foetal ou d'effets de l'alcoolisme foetal. Ces individus ont de graves problèmes de capacités intellectuelles. Ils éprouvent énormément de difficulté à acquérir les compétences nécessaires pour s'intégrer à la société. Par conséquent, beaucoup d'entre eux tombent dans le crime, se retrouvent devant les tribunaux puis au pénitencier et ne parviennent pas à se sortir de ce cycle.
C'est là un défi pour la société actuelle que nous n'avons pas tenté de régler avec méthode. Cependant, les ministres de la Justice et de la Santé peuvent relever ce défi en collaborant avec leurs homologues des provinces.
C'est un problème auquel il faudra s'attaquer dans le cadre d'une stratégie nationale associant les provinces, le gouvernement du Canada et les collectivités. Je suis très heureux de la motion et je félicite la députée néo-démocrate et tous les autres députés qui ont attiré l'attention de la Chambre sur les problèmes liés au syndrome d'alcoolisme foetal ou aux effets de l'alcoolisme foetal ainsi que sur certains sujets de préoccupation et certains défis auxquels nous devons nous attaquer pour régler ce grave problème.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Madame la Présidente, je voudrais, dans un premier temps, joindre ma voix, un peu comme l'ont fait tous mes collègues, pour féliciter et remercier la députée de Winnipeg-Centre-Nord, que je connais bien, car je partage avec elle les travaux du Comité permanent de la santé.
Je sais que c'est une femme qui a toujours placé le mieux-être de la population de son comté, et celui de la population canadienne dans une plus large mesure, au centre de ses préoccupations. Son pragmatisme, évidemment, l'amène à vouloir agir concrètement sur une problématique importante pour les enfants.
Je vais reprendre une expression de notre collègue de l'Alliance canadienne qui disait que nous sommes «les gardiens des enfants», d'une certaine manière, puisque la problématique dont nous débattons est, bien sûr, préjudiciable pour les mères, mais elle l'est davantage pour les enfants.
Je crois que nous avons une responsabilité, comme parlementaires, soit celle de nous assurer d'aller au bout de ce que nous pouvons faire dans le domaine de la prévention.
La motion de la députée de Winnipeg-Centre-Nord est intéressante, parce qu'elle nous oblige à réfléchir sur l'équilibre qui doit exister, dans les moyens législatifs qui s'offrent à nous, entre la coercition et la prévention.
Nous sommes dans une période de la vie des travaux de la Chambre où nous réfléchissons beaucoup sur ces questions. Vendredi dernier, un autre député du NPD proposait que l'on fasse du mois de mai un mois dédié à la prévention de l'hépatite. Il nous rappelait qu'il y avait sept formes d'hépatites et qu'une des façons d'éviter l'hépatite, c'était, bien sûr, l'information.
Aujourd'hui, sa collègue de Winnipeg-Centre-Nord prend le relais pour nous rappeler que le syndrome d'alcoolisme foetal peut être évité.
Nous connaissons tous des citoyens qui sont éprouvés par le sort. Il y a des gens qui peuvent être paralytiques cérébraux, d'autres qui peuvent être atteints d'un diabète sévère; il y a des gens qui ont des maladies du coeur. Bien sûr, c'est quelque chose qui est éprouvant sur le plan personnel, mais la différence, peut-être avec le syndrome d'alcoolisme foetal, c'est que d'une certaine manière, c'est induit d'un comportement.
Ce comportement peut être évité si nous mettons tout en oeuvre, socialement, pour qu'il y ait un maximum d'informations qui circulent à l'endroit de celles qui, les premières, ont la responsabilité, bien sûr, puisque ce sont elles qui donnent la vie, qui portent les enfants et, bien sûr, ce sont les femmes. Je ne prétends pas qu'elles ont la responsabilité exclusive.
Je veux rejoindre la députée de Winnipeg-Centre-Nord; je crois que nous avons des circonscriptions assez semblables. Ma circonscription est au centre de Montréal, au centre-est en fait, pour être plus précis. Moi aussi, dans ma circonscription, l'indice de défavorisation est plus élevé. C'est un quartier industriel qui a connu, au début des années 1980, un important processus de désindustrialisation.
Je ne sais pas si on s'en rappelle, mais au début des années 1980, il y a eu une grosse crise dans le secteur des chantiers navals. Il y a eu une grosse crise dans les industries traditionnelles liées au textile et à la métallurgie, qu'on appelait «le secteur mou», et il y a eu une grosse crise dans l'industrie de la chaussure.
Ces trois secteurs étaient très centraux dans la vie économique du comté de Hochelaga—Maisonneuve. C'est un comté où il y a un indice de défavorisation. C'est clair que le syndrome d'alcoolisme foetal, on le retrouve davantage dans des milieux où sévit la pauvreté. À cet égard, on peut se poser des questions, comme parlementaires, à savoir qu'est-ce qui fait que dans certaines communautés, la pauvreté est plus présente qu'ailleurs.
Il y a bien sûr des variables personnelles, il y a des variables liées au profil manufacturier, au profil économique de nos circonscriptions. Mais dans la vie d'un individu, parfois cela va mal; on en vient à perdre confiance dans le système. Je dirais qu'il y a parfois des grossesses non désirées. Il y a des gens qui, dans leur vie, planifient les grossesses, souhaitent avoir un enfant, et cela vient donner un sens à la vie. Je crois que c'est certainement le cas pour une majorité de gens.
Il y a probablement des circonstances dans la vie où lorsqu'une grossesse est imposée, lorsqu'elle n'est pas désirée, lorsqu'elle est inopinée, une femme peut être tentée par l'alcool. Quand ça va mal, quand on est en situation de dépression, quand on a des facteurs dans la vie nous faisant perdre confiance, quand on est dans un milieu où, comme individu, on n'est pas valorisé, malheureusement il peut arriver que l'alcool soit un refuge. C'est une situation qui est possible. C'est là où la proposition de notre collègue de Winnipeg-Centre-Nord prend tout son sens.
Dans mes discours, j'aime toujours donner des exemples. Personne ici, comme député, ne pourrait présenter un projet de loi visant à forcer quelqu'un à réussir sa vie. De façon législative, on ne peut pas forcer les gens à réussir leur vie. Comme parlementaires, ce que nous pouvons faire, c'est donner des outils et de la formation pour que les gens soient le mieux équipés pour traverser la vie, particulièrement lorsqu'il y a des épreuves, en ayant le maximum de ressources.
Ce que la députée de Winnipeg-Centre-Nord nous invite à faire, c'est le constat, c'est le pari, c'est la voie de l'information. Quelquefois, des femmes enceintes peuvent être moins bien informées. Si elles ont cet avertissement sur des boissons alcoolisées—vin, bière ou autres spiritueux—, on peut penser que ce sera dissuasif d'en consommer avec trop d'abondance.
Je rejoins le secrétaire parlementaire, le député de Anjou—Rivière-des-Prairies, lorsqu'il nous rappelait qu'il faut situer cette motion dans un ensemble de moyens. Je suis heureux d'apprendre qu'au mois de mai aura lieu le lancement d'une brochure et d'un poster qui débouchera sur une campagne d'information. Je pense que le cumul de ces moyens peut nous permettre de vaincre le syndrome de l'alcoolisme foetal.
Je vois qu'il ne me reste que trois minutes. Je me suis engagé à ne prendre que huit minutes car je sais qu'il y a des tractations entre les partis pour laisser plus de temps à notre collègue de Winnipeg-Centre-Nord.
Je vais donc conclure en félicitant notre collègue et en demandant un vote unanime sur cette motion.
M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Madame le Présidente, je vais être bref moi aussi. La qualité des orateurs qui m'ont précédé fait en sorte qu'il ne serait peut-être pas nécessaire de parler.
D'emblée, je pense qu'il faut féliciter la députée de Winnipeg-Centre-Nord ainsi que le député de Mississauga-Sud pour leur sensibilisation à ce sujet depuis plusieurs années. Cela fait maintenant neuf ou dix ans qu'un comité a fait rapport sur le syndrome de l'alcoolisme foetal. C'était la recommandation no 5. Cette recommandation portait sur l'étiquetage.
D'autres mesures avaient été présentées aussi à ce moment-là. Certaines ont été mises en application il y a seulement quelques mois ou quelques années. On sait que le gouvernement est lent, c'est pour cela que les partis d'opposition doivent pousser un peu.
Dieu merci, il s'est fait autre chose. Le gouvernement a aidé dans une certaine mesure, mais il faut aussi dire que l'industrie, à partir de ce rapport ou d'autres rapports, est entrée dans le jeu de la sensibilisation et de l'éducation.
On a vu les fabricants de bière et de vin, les monopoles d'État comme la SAQ au Québec prendre une part de leurs revenus, minime bien sûr, pour sensibiliser les gens à l'effet de l'alcool, de façon globale. Que ce soit de la part des gouvernements provinciaux, qui contrôlent leurs régies des alcools, du pouvoir législatif ici à Ottawa ou de l'industrie privée, depuis quelques années, on voit une meilleure sensibilisation. Cependant, il reste une question qui est somme toute assez importante, c'est l'étiquetage.
Il ne faut pas, bien sûr, entrer dans une folie d'étiquetage et faire en sorte qu'une bouteille de bière ou de vin se retrouve avec un paquet de mises en garde. À un moment donné, la qualité de la mise en garde perd de son efficacité s'il y en a trop.
Cependant, il n'y a rien de mieux que de commencer par le début. Si quelqu'un est sensibilisé au syndrome d'alcoolisme foetal, il risque d'être sensibilisé aux effets globaux de l'alcool pour le reste de sa vie. Si une personne est moins sensibilisée à l'effet que l'alcool peut avoir sur l'enfant qu'elle porte, eh bien, avec une bonne éducation et aussi avec un étiquetage adéquat, d'autres vont le lui rappeler.
Quand on voit une étiquette, on se dit: «Aie!» Mais lorsqu'une personne à côté de nous porte un enfant, on va lui dire: «Eh bien, fais attention.» Moi, j'ai la chance d'avoir un ange, un enfant, un garçon; c'est un ange. Il ne me venait pas en tête d'offrir un verre de vin à ma conjointe pendant sa grossesse. Si elle avait pris un verre de vin, elle n'aurait pas eu un enfant souffrant du syndrome, ce n'est pas cela, mais au moins il y a une sensibilisation. Si tout le monde est sensibilisé, nous entendrons moins souvent ceci: «Allez, un petit verre, ça ne cause pas de problème.» Mais parfois, nous ne connaissons pas l'effet de l'alcool sur la personne. Encore là, il ne faut pas paniquer. Ce n'est pas un verre qui cause le syndrome. Tout cela fait partie de l'aspect de la sensibilisation.
C'est pour cela que l'étiquetage qui se fait aux États-Unis, on l'a dit tout à l'heure, qu'est-ce que cela ferait? Bien sûr, l'industrie a peur, et c'est normal. Lorsque nous voyons d'autres folies législatives, je pense que l'industrie a lieu de s'alarmer.
Cela étant dit, l'étiquetage que l'industrie fait déjà pour l'exportation pourrait très bien se faire à la maison. Quel plus beau message à lancer aux gens que de leur dire que les parlementaires, dans une motion présentée par la députée de Winnipeg-Centre-Nord, vont, d'une certaine façon, pousser le gouvernement à prendre ce fait en considération. Il faut se croiser les doigts pour faire en sorte que le «M» de la motion devienne un «C» et que cela aboutisse à un vrai projet de loi que la Chambre pourra étudier très rapidement.
Je m'arrête là-dessus. Je remercie ma collègue du Nouveau Parti démocratique de son initiative. À propos du Nouveau Parti démocratique—je parle souvent en bien des autres partis—mais le NPD, nous le voyons encore ce soir, c'est un peu la conscience sociale du pays. Nous sommes bien contents qu'il soit là.
[Traduction]
M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, la députée de Winnipeg-Centre-Nord a énuméré ceux qui se sont dévoués pour sensibiliser les gens à l'importance de la modération dans la consommation d'alcool. En toute justice, je dois préciser qu'elle a oublié un groupe, l'Association des brasseurs du Canada.
À eux seuls, les avertissements sur les contenants de boissons alcoolisées ne vont pas mettre fin au grave problème du syndrome d'alcoolisme foetal. En fait, des recherches ont démontré que 98 p. 100 des femmes en âge de procréer connaissent déjà le lien entre l'abus d'alcool et le syndrome d'alcoolisme foetal. Elles sont au courant.
Il y a une brasserie dans ma circonscription. De nombreux députés ont aussi des brasseries dans leurs circonscriptions. Je crois même que le secrétaire du ministre des Finances, le député d'Etobicoke-Nord, représente une circonscription où il y a deux brasseries. Nous n'allons pas nous excuser de cela car, depuis 1987, l'Association des brasseurs du Canada et les brasseries qui en sont membres ont consacré plus de 100 millions de dollars à des campagnes d'information sur l'importance de la modération dans la consommation d'alcool.
En plus des grandes campagnes fortement médiatisées, les brasseries fournissent du financement et d'autres ressources à toute une gamme d'organisations partenaires qui font de la recherche sur l'alcool, de la consultation, ainsi que la présentation de programmes d'éducation et de sensibilisation.
Il ne suffit pas d'apposer des étiquettes d'avertissement sur les bouteilles. Il faut aussi compter sur tout le travail que font les responsables, ces organisations comme l'Association des brasseurs du Canada.
Pensons par exemple au programme Motherisk du Hospital for Sick Children de Toronto. L'Association des brasseurs du Canada parraine la ligne d'aide gratuite et nationale de Motherisk sur l'abus d'alcool et de substances, au numéro 1-877-FAS-INFO, où ceux qui téléphonent peuvent obtenir des informations factuelles sur l'effet que peuvent avoir l'alcool et les drogues sur un foetus en cours de développement.
Il y a le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies. Des fonds sont fournis au centre de ressources pour la lutte contre le syndrome de l'alcoolisme foetal du Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme, qui distribue des informations sur le SAF aux travailleurs de la santé, aux parents et aux enfants.
L'Association des brasseurs du Canada a donné des fonds au Collège des médecins de famille du Canada pour un projet appelé «Risques associés à la consommation d'alcool: évaluation et intervention », l'ARAI. Ce projet met à la disposition des médecins de famille les outils nécessaires pour identifier les patients les plus à risque. Ils sont ainsi davantage en mesure d'aider les patients ayant des problèmes liées à la consommation d'alcool.
L'association a parrainé le programme «Caring Together» de la Native Physicians Association of Canada, qui a produit toute une série d'affiches, de vidéos et de guides sur le SAF ainsi qu'un jeu interactif à l'intention des jeunes autochtones, qui utilise des symboles et des enseignements traditionnels pour décrire le mode de vie et les problèmes de santé des autochtones—non pas seulement une étiquette sur une bouteille, mais des symboles traditionnels pour mieux faire comprendre le problème aux communautés autochtones.
L'Association des brasseurs du Canada a mis au point, en collaboration avec Jeunes conducteurs du Canada, un message vidéo mettant en garde les jeunes conducteurs des risques de l'alcool au volant. Nous avons tous vu ce message. Plus de 40 000 nouveaux conducteurs canadiens voient chaque année ce message diffusé par des pilotes de course automobile professionnels.
L'Association a formé un partenariat avec l'Université de Moncton et l'Université du Nouveau-Brunswick afin de mettre au point sur Internet, à l'intention des établissements scolaires, des activités pour éduquer les adolescents et les sensibiliser aux problèmes de l'alcool.
L'ABC est partenaire dans un projet de logiciel de formation axée sur l'utilisation sécuritaire d'une embarcation de plaisance. Dans ses messages, l'ABC encourage un comportement responsable et elle exhorte les gens qui doivent conduire une automobile ou une embarcation à ne pas consommer d'alcool. Parmi les autres partenaires, mentionnons Bombardier et Shell Canada. Il s'agit d'un travail d'équipe. Tous les intéressés livrent un message.
Depuis 1982, les brasseurs canadiens et leurs homologues américains ont financé l'Alcohol Beverage Medical Research Foundation. Cette fondation, qui est associée à l'université Johns Hopkins, offre des subventions aux chercheurs qui étudient les répercussions médicales, sociales et comportementales de la consommation d'alcool. La fondation a versé plus de 30 millions de dollars pour financer 480 projets de recherche ici au Canada et aux États-Unis.
Que dire de la campagne «Stand up. Speak out. Be heard»? Cette campagne publique d'information sur l'alcool de plusieurs millions de dollars visait particulièrement les jeunes. Les jeunes Canadiens qui ont élaboré les concepts et les messages de cette campagne ont su toucher directement ceux qui appartenaient à leur groupe d'âge.
Je veux qu'il reste du temps à la fin du débat pour que nous ayons l'occasion de voter sur cette question. Je vais conclure sur ces paroles. Elles sont du président directeur général de l'Association des brasseurs du Canada, Sandy Morrison:
Nous travaillons avec bien des gens qui ont à coeur de transmettre à ceux qui en ont besoin de l'information importante sur les comportements responsables. D'un point de vue très humain et personnel, ces gens font toute une différence.
D'un point de vue très humain et personnel, ces gens font toute une différence.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Convoquez les députés.
Et la sonnerie s'étant arrêtée:
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le vote par appel nominal sur la motion est reporté au lundi 23 avril, à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Madame la Présidente, je voudrais parler d'un échange que j'ai eu avec la ministre du Développement des ressources humaines, le 23 mars. Je lui ai exprimé mon inquiétude au sujet du régime de paiement de prestations d'invalidité, dans le cadre du RPC, qui défavorise tellement les Canadiens que des avocats interviennent de plus en plus pour les aider à affronter ce régime très injuste.
J'ai dit à la ministre que certains de ces avocats s'étaient fait harceler par le passé. Dans sa réponse, la ministre m'a demandé gentiment de lui fournir des renseignements sur mes allégations. Cela n'a pas été nécessaire, car le Bureau du commissaire des tribunaux de révision a écrit presque immédiatement une lettre disant que, depuis les deux ans et demi qu'il occupait son poste, aucun avocat n'avait été exclu.
Cependant, il a ajouté qu'un témoin avait été exclu l'automne dernier, en Alberta. Une personne atteinte de sclérose en plaques et de graves handicaps intellectuels avait réclamé plusieurs fois son représentant. On ne savait pas au juste si le représentant était un avocat. La cause a duré six mois. Le bureau du commissaire n'a pas encore donné de réponse à cette personne. De toute évidence, il faut immédiatement entendre la cause de nouveau.
Pendant les quelques minutes dont je dispose, je voudrais brosser un tableau plus général du régime de paiement de prestations d'invalidité accordées dans le cadre du RPC et expliquer pourquoi des avocats interviennent dans le régime. Je soutiens que c'est parce que le régime fonctionne manifestement au détriment des Canadiens ordinaires.
Deux cent mille Canadiens ont vu leur demande rejetée depuis cinq ans parce que leur formulaire était incomplet ou qu'il manquait des renseignements médicaux ou qu'il y avait une mésentente relativement aux critères de base d'un formulaire très complexe.
Les lignes directrices ont de plus été modifiées en 1995. Elles ont été rendues plus restrictives. Je vais vous donner un exemple. On supposait que les gens âgés de plus de 55 ans avant 1995 considérés comme incapables d'exercer les fonctions de leur emploi étaient également considérés comme incapables d'exercer les fonctions de tout autre emploi. Cette disposition a maintenant été supprimée, et cette possibilité n'existe plus.
Des gens qui ont cotisé au RPC durant toute leur vie active pourraient soudainement en avoir besoin, mais ils n'y auront pas accès. Cette modification a été apportée parce qu'elle permettra de faire des économies. Selon les estimations, les économies s'élèveraient à 1 milliard de dollars en 2005.
Quand la rentabilité entre en conflit avec la compassion et la justice sociale pour les Canadiens, c'est la rentabilité qui l'emporte à tout coup. C'est un problème national.
Les Canadiens âgés sont souvent très fiers. Ils hésitent à parler de leurs infirmités. Nous avons des professionnels de la santé incompétents qui ne comprennent tout simplement pas tous les faits. Nous manquons de ressources pécuniaires qui nous permettraient de faire passer des tests professionnels pour régler ce problème.
Il n'y a pas de dispositions gouvernementales pour les appels, les formulaires et des choses semblables. La plupart des gens qui essuient un refus peuvent rarement s'adresser à un arbitre, puisqu'il n'y a pas d'argent pour eux. Le régime d'invalidité du RPC est un véritable labyrinthe qui manque totalement de transparence. Je suis convaincu que tous les députés ont des problèmes avec cela dans leur circonscription. C'est une situation absolument inacceptable.
Le parti que je représente va se battre pour des changements progressifs à cet égard. Nous allons avoir gain de cause, non pas pour nous-mêmes, mais pour les Canadiens handicapés d'un océan à l'autre.
[Français]
Mme Raymonde Folco (secrétaire parlementaire de la ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, permettez-moi de remercier le député de Palliser pour la question qu'il a posée à la ministre du Développement des ressources humaines, il y a quelques jours.
[Traduction]
Je signale au député que le bureau du commissaire des tribunaux de révision est un organisme quasi-judiciaire qui fonctionne indépendamment du ministère du Développement des ressources humaines. Autrement dit, il est sans aucun lien de dépendance. Il supervise le travail des tribunaux de révision qui entendent les appels des clients du Régime de pensions du Canada ou de la Sécurité de la vieillesse dont les demandes ont été rejetées. Il s'agit, si je ne m'abuse, des clients dont a parlé le député.
Le gouvernement du Canada applique la loi régissant le Régime de pensions du Canada lorsqu'il doit décider de l'admissibilité aux prestations d'invalidité. Cette définition n'a pas changé depuis 1996. Elle n'est ni plus ni moins rigoureuse. En fait, la loi précise que la personne doit souffrir d'une invalidité grave et prolongée l'empêchant de poursuivre une activité professionnelle régulière. C'est ce qu'exige la loi.
Les évaluateurs médicaux du Régime de pensions du Canada examinent attentivement toutes les demandes, y compris toute nouvelle information, pour s'assurer que les requérants sont effectivement admissibles aux prestations d'invalidité.
[Français]
Au cours des dernières années, le ministère du Développement des ressources humaines a pris des mesures pour améliorer l'administration du Programme de prestations d'invalidité du RPC.
Le ministère, d'une part, a plus que doublé l'effectif chargé des évaluations médicales pour être en mesure de prendre des décisions plus rapidement. Également, il a considérablement augmenté le nombre de juges nommés au comité d'appel et a augmenté le nombre d'audiences pour accélérer le traitement des appels.
Il n'est pas nécessaire que les demandeurs de prestations d'invalidité du RPC...
[Traduction]
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Le député de Dewdney—Alouette a la parole.
LES IMPÔTS
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Madame la Présidente, ma question fait suite à la réponse à une question que j'ai posée en février concernant l'allocation pour frais de chauffage pour les habitants de la Colombie-Britannique. Je voulais savoir pourquoi de nombreuses personnes qui n'auraient pas dû recevoir cette allocation l'ont obtenue, tandis que beaucoup des personnes qui devaient la recevoir ne l'ont pas obtenue.
Surtout, je voudrais laisser les électeurs de ma circonscription s'adresser directement à la secrétaire parlementaire et au gouvernement sur cette question. J'ai reçu des lettres et, plutôt que d'utiliser mes propres mots, je citerai leurs auteurs.
Ainsi, un électeur a écrit ceci sur ce sujet particulier:
Je vous écris pour vous exprimer mon indignation à propos de l'allocation sur le gaz naturel qu'ont reçue certains citoyens canadiens. Je suis furieux d'apprendre que des chèques d'allocation ont été envoyés à des enfants, des prisonniers et des personnes qui ne chauffent même pas au gaz naturel. Le gouvernement aurait dû envoyer ces allocations seulement aux gens qui ont acheté du gaz naturel.
Voilà une idée innovatrice. La lettre poursuit:
Le manque de planification et de réflexion dans la mise en oeuvre de ce programme dépasse mon entendement et je n'ai plus beaucoup confiance dans les gens que nous avons élus pour dépenser sagement l'argent que nous avons durement gagné. Je vous écris ce courriel dans l'espoir que vous puissiez exprimer mes préoccupations et mon indignation au Parlement. Nos élus doivent savoir que les honnêtes travailleurs canadiens en ont réellement assez de ce non-sens et de ce gaspillage. Le bon sens doit prévaloir.
Je suis d'accord avec cet électeur.
Un autre écrit ceci:
Je suis en colère et je veux que le gouvernement le sache.
J'en ai assez d'entendre continuellement que le prix de telle ou telle chose a grimpé. Je n'ai pas eu d'augmentation de salaire décente depuis des années. Je gagne ma vie et je n'ai jamais compté sur l'aide du gouvernement de quelque façon que ce soit—je n'ai jamais demandé de prestations d'aide sociale ou d'assurance chômage. Je cotise au régime depuis mon adolescence et j'ai 52 ans aujourd'hui. Je travaille fort et je suis honnête—point.
Bref, je ne pense pas que les nouveaux critères d'admissibilité à ce crédit soient justes—mais je suis seulement—un des nombreux habitants de ce pays.
Deux autres personnes m'ont écrit ce qui suit:
Je tiens à vous faire remarquer que nous, les Canadiens, sommes furieux de constater la négligence du gouvernement du Canada qui envoie des crédits pour la hausse des coûts de chauffage domestique à seulement certaines catégories de Canadiens.
Ils continuent à exprimer leur frustration.
Une autre personne a écrit:
Je suis scandalisé de voir le gouvernement libéral dépenser des millions de dollars, apparemment pour aider les Canadiens à faire face à la hausse des coûts de chauffage domestique au gaz naturel. Le fait d'envoyer des chèques à ceux qui reçoivent des remboursements de TPS et qui sont en prison, à des enfants ou encore à ceux qui chauffent leur résidence au moyen de combustibles de remplacement, mais pas de gaz naturel est le comble de la stupidité. Sous prétexte que j'ai un revenu d'environ 32 000 $, je n'ai pas droit au remboursement de TPS, mais je dois chauffer ma maison comme tout le monde. Je n'utilise plus le gaz naturel dans mon foyer, je garde le thermostat à 15 degrés et je m'habille chaudement, parce que je ne peux pas me permettre des coûts de chauffage trop élevés. Cela me rend furieux de penser que je paie pour garder en prison des délinquants violents et qu'en plus vous leur donnez de l'argent de poche pendant je m'évertue à joindre les deux bouts.
J'ai reçu de nombreuses lettres d'électeurs de ma circonscription. Ils veulent savoir ce qui s'est passé avec ce programme. Au départ, celui-ci était peut-être une bonne idée, mais sa gestion a suscité de grandes préoccupations chez un bon nombre des de gens dans ma circonscription et ailleurs au pays. Nous aimerions obtenir une réponse de la part du gouvernement.
M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Madame la Présidente, le député se souviendra que, l'automne dernier, le gouvernement a indiqué qu'il aiderait les Canadiens qui s'apprêtaient à subir une hausse importante des coûts de l'énergie durant l'hiver. Les coûts ont effectivement grimpé, surtout ceux du gaz naturel.
Le gouvernement s'est alors trouvé dans la situation où il a dû verser une allocation aux Canadiens non pas pour l'hiver prochain, mais pour l'hiver qui vient de se terminer, car nous avons jugé que c'est cet hiver que la hausse du prix du gaz naturel serait la plus marquée.
Quant au moyen de faire parvenir cette aide aux Canadiens, le gouvernement ne disposait en fait que d'un seul véhicule et c'était d'aligner l'allocation sur la TPS. Ceux qui avaient été admissibles au remboursement de la TPS en 1999 ont reçu 125 $ par personne et 250 $ par foyer. Onze millions de Canadiens ont profité de ce programme à un coût unique de 1,3 milliard de dollars. Je suis convaincu que le député n'a pas lu toutes les lettres de ceux qui ont reçu des chèques, mais il sont 11 millions à avoir reçu cette aide.
Le problème auquel faisait face le gouvernement était que l'examen de diverses solutions de rechange engendrerait énormément de paperasse. Il fallait prévoir la vérification des formulaires. Quelqu'un aurait pu affirmer avoir payé sa facture de chauffage, mais il aurait quand même fallu vérifier. Il y aurait des tonnes de paperasse. Sur les crédits de 1,3 milliard de dollars octroyés, il aurait pu arriver que 700 millions seulement soient véritablement utilisés pour les besoins et les objectifs énoncés dans le programme.
Le gouvernement savait que sa méthode n'était pas parfaite. Il y avait des risques, certes. Toutefois, nous sommes confiants que la plupart des Canadiens qui étaient dans le besoin ont bénéficié du programme. Ceux qui avaient dit ne pas payer de facture de chauffage finiront bien par devoir verser un remboursement à leur propriétaire. Nous avons utilisé le meilleur instrument dont nous disposions afin d'assurer que les Canadiens auraient de l'aide au cours de l'hiver dernier et non pas l'hiver prochain.
[Français]
Le président suppléant (Mme Bakopanos): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 43.)