FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des pêches et des océans
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 8 avril 2003
Á | 1105 |
Le président (M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.)) |
Á | 1110 |
M. Joël Gionet (président, Association des crabiers acadiens, Nouveau-Brunswick) |
Á | 1115 |
M. Peter Noël (vice-président, Crabiers du Nord-Est Inc.) |
Á | 1120 |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
Á | 1125 |
M. Joël Gionet |
M. Jean-Yves Roy |
M. Joël Gionet |
M. Jean-Yves Roy |
M. Joël Gionet |
M. Jean-Yves Roy |
M. Joël Gionet |
Á | 1130 |
M. Jean-Yves Roy |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD) |
Le président |
M. Joël Gionet |
M. Jean-Yves Roy |
M. Joël Gionet |
Á | 1135 |
Le président |
M. Georges Farrah (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, Lib.) |
M. Joël Gionet |
M. Georges Farrah |
M. Joël Gionet |
Á | 1140 |
M. Georges Farrah |
M. Joël Gionet |
M. Georges Farrah |
M. Joël Gionet |
M. Georges Farrah |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Yvon Godin |
M. Joël Gionet |
M. Yvon Godin |
Á | 1145 |
M. Peter Noël |
M. Yvon Godin |
M. Peter Noël |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. R. John Efford (Bonavista—Trinity—Conception, Lib.) |
Á | 1150 |
M. Peter Noël |
M. R. John Efford |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Peter Noël |
M. Joël Gionet |
M. Peter Noël |
M. R. John Efford |
M. Joël Gionet |
M. Peter Noël |
M. R. John Efford |
Á | 1155 |
Le président |
M. Peter Noël |
M. R. John Efford |
Le président |
M. Daniel Desbois (Association des crabiers de la Baie) |
Le président |
M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.) |
M. Peter Noël |
M. Carmen Provenzano |
M. Paul Boudreau (Regroupement des pêcheurs professionnels des Îles-de-la-Madeleine) |
M. Carmen Provenzano |
M. Doug Cameron (directeur exécutif, «P.E.I. Snow Crab Fishermen Inc.») |
 | 1200 |
M. Carmen Provenzano |
M. Doug Cameron |
M. Joël Gionet |
M. Carmen Provenzano |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Peter Noël |
M. Joël Gionet |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Peter Noël |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Peter Noël |
 | 1205 |
M. Doug Cameron |
Le président |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Yvon Godin |
M. Peter Noël |
M. Yvon Godin |
M. Peter Noël |
M. Yvon Godin |
 | 1210 |
M. Peter Noël |
M. Yvon Godin |
M. Joël Gionet |
Le président |
M. Bill Matthews (Burin—St. George's, Lib.) |
M. Joël Gionet |
M. Bill Matthews |
M. Joël Gionet |
M. Bill Matthews |
 | 1215 |
M. Joël Gionet |
M. Bill Matthews |
M. Peter Noël |
M. Bill Matthews |
M. Peter Noël |
M. Bill Matthews |
M. Peter Noël |
M. Bill Matthews |
Le président |
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne) |
M. Paul Boudreau |
 | 1220 |
M. John Cummins |
Le président |
M. Jean-Yves Roy |
M. Paul Boudreau |
M. John Cummins |
M. Paul Boudreau |
M. John Cummins |
M. Paul Boudreau |
M. John Cummins |
M. Paul Boudreau |
M. John Cummins |
M. Peter Noël |
 | 1225 |
M. John Cummins |
Le président |
M. Peter Noël |
Le président |
M. R. John Efford |
M. Peter Noël |
M. Paul Boudreau |
M. Daniel Desbois |
M. R. John Efford |
M. Peter Noël |
Le président |
M. Jean-Yves Roy |
M. Joël Gionet |
 | 1230 |
M. Jean-Yves Roy |
M. Paul Boudreau |
M. Daniel Desbois |
M. Jean-Yves Roy |
M. Daniel Desbois |
Le président |
M. Georges Farrah |
M. Joël Gionet |
 | 1235 |
Le président |
M. John Cummins |
Le président |
M. John Cummins |
M. Peter Noël |
M. John Cummins |
Le président |
 | 1240 |
M. John Cummins |
Le président |
M. Georges Farrah |
Le président |
M. Georges Farrah |
Le président |
M. Joël Gionet |
Le président |
CANADA
Comité permanent des pêches et des océans |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 8 avril 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1105)
[Traduction]
Le président (M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.)): La séance est ouverte
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement de la Chambre, nous procédons à une étude de la pêche au crabe des neiges. Nous recevons aujourd'hui un certain nombre de personnes et voyons si je peux les présenter correctement.
Nous recevons de l'Association des crabiers acadiens, Joel Gionet, président; de l'Association des crabiers de la Baie, Daniel Desbois et de l'Association des crabiers gaspésiens Inc., Marc Couture, président; nous recevons également de l'Association des crabiers du nord-est Inc. Peter Noel et du Regroupement des pêcheurs professionnels des Îles-de-la-Madeleine, Paul Boudreau. Enfin nous recevons du P.E.I. Snow Crab Fishermen Inc. Doug Cameron.
Bienvenue à tous. Je crois comprendre que deux d'entre vous feront un exposé, MM. Gionet et Noël. Par la suite, de la façon habituelle, les membres du comité vous poseront des questions.
Avant de commencer, messieurs, j'ai deux très petits points pour les membres du comité. Simplement pour vous informer, il y a quelques instants, j'ai déposé notre rapport sur le rôle du gouvernement fédéral en matière d'aquaculture au Canada. Il y a peut-être plusieurs membres du comité qui ne le savent pas—et c'est assez inhabituel pour un comité de sorte que je veux le signaler plus particulièrement—que nous avons quatre opinions dissidentes en annexe à ce rapport. Il est intéressant de voir de qui il s'agit.
Il y a une demi-page officielle d'opinions dissidentes de l'Alliance canadienne; d'opinions dissidentes de 20 pages de M. Cummins, en sa qualité personnelle de député; il y a une autre opinion dissidente concernant surtout des questions de compétences de la part de M. Roy et une autre opinion dissidente au sujet de certaines des choses qui ont été mentionnées au comité. Même si nous ne sommes pas parvenus à obtenir l'unanimité, il s'agit d'un moratoire et je ne pense pas que nous ne soyons si éloignés que cela sur un bon nombre de questions.
Deuxièmement, dès que nous aurons un quorum de neuf membres, monsieur, nous devons régler un point qui concerne notre voyage sur la côte Est. Dès que nous aurons neuf membres ici le greffier m'a demandé de régler très rapidement cette question. Par conséquent, je vais donc vous interrompre, non pas en plein milieu d'une phrase mais probablement à la fin d'un paragraphe si vous êtes toujours en train de parler et nous allons nous occuper de régler cette petite question. Personne ne doit quitter sa chaise ou faire quelque chose d'autre. Nous allons régler l'affaire et vous pourrez ensuite poursuivre votre exposé.
Pour l'instant commençons. Bien sûr il est fort possible—quoique nous espérons qu'il soit peu probable—qu'il y ait neuf personnes ici. Si c'est le cas, nous allons simplement poursuivre nos travaux.
Sur ce, je cède la parole à M. Gionet.
Á (1110)
[Français]
M. Joël Gionet (président, Association des crabiers acadiens, Nouveau-Brunswick): Monsieur le président, membres du comité, bonjour et merci de nous avoir invités à venir vous rencontrer aujourd'hui. Permettez-moi d'abord de nous présenter. Je m'appelle Joël Gionet, et je suis pêcheur et président de l'Association des crabiers acadiens au Nouveau-Brunswick. J'ai à mes côtés des collègues qui représentent les six associations de pêcheurs de crabe semi-hauturiers de la zone 12 du sud du golfe Saint-Laurent. J'aimerais vous les présenter par province.
Je vous présente M. Peter Noël, qui est également du Nouveau-Brunswick; il représente l'Association des crabiers du Nord-Est. Du Québec, il y a Marc Couture, un pêcheur qui représente l'Association des crabiers gaspésiens; M. Daniel Desbois, un pêcheur de l'Association des crabiers de la Baie; et M. Paul Boudreau, qui est le représentant du Regroupement des pêcheurs professionnels des Îles-de-la-Madeleine. Finalement, de l'Île-du-Prince-Édouard, il y a M. Doug Cameron, qui est le représentant de l'association PE Island Snow Crab Fishermen Inc.
À la suite de notre présentation, nous serons heureux de répondre aux questions des membres du comité.
La pêche au crabe des neiges dans la zone 12 a commencé dans les années 1960. À cette époque, les pêcheurs semi-hauturiers ont décidé de réorienter leurs activités vers cette nouvelle espèce qui était peu connue à l'époque. Aujourd'hui, la flottille semi-hauturière compte 160 permis permanents et 806 pêcheurs, y compris les capitaines et les membres d'équipage.
L'industrie de la pêche au crabe dans la zone 12 est unique, parce que les entreprises qui la composent sont des entreprises familiales enracinées dans les communautés côtières. La pêche fournit des emplois à près de 4 000 personnes dans quatre provinces de l'Atlantique: le Nouveau-Brunswick, le Québec, l'Île-du-Prince-Édouard et la Nouvelle-Écosse.
Après avoir connu des débuts difficiles et modestes, l'industrie du crabe du sud du golfe a pris un essor important. Les débarquements ont augmenté de façon constante et ont atteint leur niveau historique le plus élevé en 1982, soit plus de 30 000 tonnes métriques. Cependant, peu après, en 1988, les captures ont rapidement chuté à seulement quelques milliers de tonnes.
Confrontés à l'effondrement complet de leur pêche, la grande majorité des crabiers semi-hauturiers ont volontairement cessé de pêcher. En 1990, l'industrie traditionnelle, dans un effort visant à reconstruire le stock et à en assurer la longévité, a adopté des mesures de conservation importantes qui existent toujours: la vérification indépendante des débarquements; le contrôle des captures du crabe blanc; un programme de quotas individuels; l'instauration d'une croisière scientifique annuelle dans la zone 12; un contrôle très serré de la capacité de pêche.
Je serai très heureux d'élaborer sur ces différentes mesures au cours de la période des questions.
En 1994, lorsque le financement fédéral des programmes scientifiques a pris fin, les pêcheurs de crabe n'ont pas hésité à prendre la relève financière pour assurer le maintien de la croisière et d'une évaluation adéquate des stocks. Entre 1997 et 2001, l'industrie traditionnelle a investi plus de six millions de dollars dans les activités de recherche scientifique, de conservation, de protection et de gestion du stock de crabe.
En 2002, l'industrie a investi près de deux millions de dollars pour ces mêmes activités. Par souci de conservation, entre 1995 et 1999, les pêcheurs de crabe ont appuyé les réductions significatives de leur quota annuel, qui est passé de 20 000 tonnes métriques en 1995 à 12 600 tonnes en 1999.
Plusieurs scientifiques sont d'avis que beaucoup de stocks qui ont subi une diminution, tel celui de la morue, ne se reconstruiront jamais. Afin d'éviter un tel désastre, les pêcheurs de crabe collaborent depuis plusieurs années avec les scientifiques du ministère afin de mieux comprendre la population de crabe des neiges. Nous sommes constamment à l'écoute afin de détecter les signaux irréfutables indiquant que le stock pourrait être en difficulté.
Je cède immédiatement la parole à mon collègue Peter Noël.
Á (1115)
[Traduction]
M. Peter Noël (vice-président, Crabiers du Nord-Est Inc.): Ceci m'amène à la raison de notre présence devant vous aujourd'hui. Les six associations de pêcheurs de crabe du Golfe s'inquiètent pour l'avenir de leur industrie. Les pêcheurs craignent également que le ministère ignore les avis de ses propres scientifiques et impose un plan de pêche qui mettrait le crabe en péril, comme c'est le cas dans les autres zones de l'Atlantique.
Devant le désir du ministre d'imposer un nouveau concept de partage permanent, c'est-à-dire qu'il permettrait l'émission de nouveaux permis de pêche permanents pour le crabe des neiges dans la zone 12 à un moment où le ministère n'a pas encore terminé l'intégration des Autochtones, suite à la décision de la Cour suprême dans l'affaire Marshall, nous sommes d'accord avec les scientifiques du ministère qui nous mettent en garde contre toute augmentation d'effort de pêche et nous avons jugé nécessaire de prendre des mesures pour protéger notre moyen de subsistance, des mesures du genre de celles dont nous parlons aujourd'hui.
Depuis 1994, il existe une formule de partage entre les détenteurs de permis permanent, qui sont les membres de nos associations et qui, en très grande majorité, sont détenteurs de permis unique et, les pêcheurs que l'on appelle temporaires qui ont, dans la majorité des cas, des permis pour les autres espèces. Cependant, le partage a lieu seulement lorsque la ressource est abondante. Ce système a bien fonctionné nous sommes en faveur d'un partage en période d'abondance. Pourquoi réveiller le chat qui dort?
Nous croyons fermement que l'addition d'un nouveau permis permanent va à l'encontre des principes de bonne gestion décrit dans la mission du ministère des Pêches et Océans, qui prévoit que la conservation et la protection des ressources doivent être la première priorité du ministère; dans la révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique, qui se base elle aussi sur le principe de la conservation et enfin, dans les recommandations du vérificateur général qui s'inquiète de voir que le ministère répète les erreurs du passé dans la gestion de la pêche.
Dans leur rapport annuel sur l'état des stocks de crabe, déposé en mars 2003, les scientifiques du ministère avertissent le gouvernement que l'état du stock est inquiétant et qu'on doit établir un plan de gestion à long terme fondé sur la conservation et la viabilité. Au même moment, le ministre voudrait augmenter le nombre de permis permanents. Nous croyons fermement que cela serait désastreux pour les stocks.
À court terme, il est possible que les nouveaux arrivants puissent rentabiliser leur pêche sans nuire au stock. Cependant, le danger apparaîtra dans deux ou trois ans lorsque la biomasse aura diminuée de moitié, tel que prévu par les scientifiques, et que ces nouveaux pêcheurs n'auront plus assez de quotas pour rentabiliser leurs opérations. Alors, les pressions viendront de toute part pour essayer de convaincre le ministre de maintenir les quotas de crabe à des niveaux trop élevés pour la santé de la ressource. Cette pression dévastatrice de la surcapacité est bien connue des pêcheurs et peut être vérifiée partout en Atlantique en ce moment même.
Au cours des dernières semaines, les médias nous ont montré beaucoup de pêcheurs qui s'opposent farouchement aux avis des scientifiques qui recommandent des réductions nécessaires de quotas pour protéger les stocks. Par exemple, sur les côtes nord et ouest de Terre-Neuve, les stocks ont diminué de façon marquée d'après les scientifiques.
Les pêcheurs de crabe des neiges traditionnels disposant d'un permis craignent énormément que si le ministre persiste à émettre de nouveaux permis permanents cette année, il ouvre une boîte de Pandore. Comment pourrait-il justifier alors de ne pas en émettre encore l'an prochain et l'année suivante?
Plus il y a de pêcheurs, plus le nombre de manipulations est élevé et plus on endommage la ressource. La recherche scientifique démontre en outre que le crabe est présentement dans un cycle de régénération, avec une grande proportion de jeunes crabes. C'est aussi ce que nous avons vu dans nos bateaux la saison dernière. Ces jeunes crabes sont beaucoup plus fragiles et ils peuvent être détruits s'il y a trop de manipulations. À titre d'exemple, au cours des deux ou trois dernières années les pêcheurs ont remarqué un épuisement inattendu des stocks. Le printemps dernier, il nous a fallu lever 554 000 casiers pour capturer 22 000 tonnes de crabe alors qu'avec le même effort, en 1982, on en capturait 31 600 tonnes.
Á (1120)
L'effondrement de la pêche à la morue est la preuve qu'une intendance responsable est la clé de la gestion d'un stock en déclin. Le crabe est une espèce cyclique; si vous augmentez l'effort de pêche alors que le crabe est encore jeune, le stock pourrait en être affecté de manière permanente.
Il y a quelques semaines, le ministre a annoncé l'attribution de 2 500 permis permanents à Terre-Neuve. Au même moment, nous apprenions à notre grand étonnement, dans le Rapport sur l'état des stocks de 2003 du MPO pour la région de Terre-Neuve et du Labrador, que l'indice de biomasse exploitable, déterminé par les résultats du relevé portant sur des espèces multiples réalisé à l'automne, a diminué de 94 p. 100 de 1988 à 2002, ce qui concorde avec le déclin des PUE commerciales depuis 1998. La répartition spatiale des ressources exploitables ne cesse de se rétrécir depuis 1998.
Le public est certainement en droit de se poser des questions sur les raisons qui ont poussé le ministre à prendre une telle décision.
Je donne la parole à Joël.
M. Joël Gionet: Merci, Peter.
[Français]
Merci.
Donc, nous proposons deux choses. Nous proposons que les pêcheurs d'autres espèces en difficulté continuent d'avoir un accès temporaire à la ressource, mais seulement lorsque l'abondance des stocks permet d'assurer la conservation de la ressource et la stabilité de l'industrie à long terme. Nous proposons aussi que l'on prenne les dispositions nécessaires pour conclure une entente pluriannuelle de cogestion de la pêche au crabe des neiges dans la zone 12 qui encouragera nos entreprises de pêche à continuer à prioriser l'éthique de la conservation de la ressource au nom de tous les Canadiens.
Je tiens à souligner les nombreux appuis que nous recevons, mais je ne mentionnerai que le dernier: la lettre que le Conseil canadien des pêches écrivait au ministre Thibault pour le mettre en garde contre toute augmentation de permis permanents dans la zone 12; vous avez reçu une copie de cette lettre. Une liste exhaustive d'appuis des municipalités, usines et autres intervenants a été déposée auprès du greffier de votre comité.
En terminant, j'aimerais vous lire un passage d'un discours prononcé par le ministre Robert Thibault à Gaspé, à la Deuxième conférence sur les pêches semi-hauturières du sud du golfe du Saint-Laurent:
Pour 2003, les pêches de l’Atlantique sont de nouveau à une croisée de chemins importante. Comment peut-on développer les pêches de l’avenir? Faut-il revenir à une politique paternaliste? Ou faut-il trouver des façons d’évoluer vers la cogestion des pêches, une approche qui donne une voix à tous les participants, particulièrement aux pêcheurs? |
Il continuait en disant:
Que nous soyons membres du gouvernement ou de l’industrie, nous partageons tous le même objectif – des pêches durables axées sur la conservation. La conservation est dans l’intérêt de toutes les parties. Ce n’est pas une idée inventée par Ottawa. C’est plutôt un engagement vis-à-vis de l’avenir des ressources, un engagement que nous devons tous partager. |
Ces paroles sont celles du ministre et non celles des pêcheurs de la zone 12. Si la ressource du crabe de la zone 12 se porte assez bien présentement, ce n'est pas par hasard. C'est parce que les pêcheurs ont été impliqués dans la gestion et parce qu'ils ont investi des millions dans la conservation. Il est donc nécessaire de répéter que le rapport des scientifiques nous met en garde contre un effort accru qui pourrait endommager la ressource de façon irréparable.
Nous espérons que le ministre va résister à la tentation du paternalisme qu'il dénonçait lui-même et qu'il va revenir sur son intention d'imposer un nouveau partage permanent, qui serait désastreux pour la ressource.
Je vous remercie. Nous serons heureux de répondre à toutes vos questions. Merci.
Le président: Merci beaucoup, messieurs, de votre excellente présentation.
Monsieur Roy, vous serez le premier à prendre la parole. Vous avez 10 minutes.
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je voudrais d'abord remercier tous nos témoins de participer à cette séance.
Monsieur Gionet, dans votre présentation, vous nous avez parlé des millions de dollars qui ont été investis par les pêcheurs de votre industrie. Dans une présentation que vous nous aviez déjà faite, vous aviez dit que depuis 1994, vous aviez versé 10 millions de dollars au ministère des Pêches et des Océans pour financer les mesures dont vous nous avez parlé à la page 4. Mais vous avez aussi exprimé le souhait d'élaborer sur les mesures que sont la vérification indépendante des débarquements, le protocole de contrôle du crabe en mue, le programme d'observateurs en mer, et le contrôle serré de la capacité de pêche.
J'aimerais vous donner la chance d'élaborer sur ces mesures, de nous les expliquer, de nous dire comment elles fonctionnement et peut-être d'en évaluer la qualité et le rendement dans la perspective de la conservation de la ressource.
Á (1125)
M. Joël Gionet: Merci beaucoup.
Premièrement, que signifie la vérification indépendante des débarquements de crabe? Cela signifie que quand n'importe quel navire arrive au port, un contrôle de ses prises est effectué. Donc, chaque crabe est contrôlé. Il faut que le bateau appelle trois heures avant son entrée dans le port. À ce moment-là, une personne d'une firme indépendante est engagée pour vérifier chaque débarquement.
Si je veux apporter un crabe à la maison, je dois le peser et on le soustrait de mon contingent annuel. Toutes les prises de chaque personne sont comptabilisées chaque jour. Voilà pour ce qui est de la vérification indépendante.
M. Jean-Yves Roy: Excusez-moi. Par qui ces vérifications sont-elles faites?
M. Joël Gionet: Ces vérifications sont faites par des compagnies privées qui sont à côté de l'industrie. Au Nouveau-Brunswick, c'est Pèse-Pêche. Au Québec, c'est Res-Mar Inc. Ce sont des compagnies indépendantes.
M. Jean-Yves Roy: Est-ce que ces compagnies dépendent directement du ministère?
M. Joël Gionet: Oui, elles dépendent du ministère et elles sont gérées par des conseils d'administration.
M. Jean-Yves Roy: C'est un peu comme si le ministère des Pêches et des Océans leur donnait un contrat.
M. Joël Gionet: C'est cela.
Á (1130)
M. Jean-Yves Roy: Très bien. Vous pouvez continuer.
M. Joël Gionet: Pour ce qui est du contrôle des captures du crabe blanc, vous savez que la préoccupation principale est de protéger les petits crabes qui changent de carapace chaque année pour grossir. C'est un peu comme le homard. C'est à ce moment-là que le crabe est le plus vulnérable.
Nous faisons un contrôle très serré du crabe blanc. Nous, les pêcheurs, avec la collaboration de Pêches et Océans, avons établi un protocole. Nous avons divisé le golfe Saint-Laurent en milliers de petits morceaux. Chaque fois que les gens capturent plus de 20 p. 100 de crabe blanc dans un secteur, ce secteur est fermé. C'est ce qu'on appelle le protocole du crabe blanc ou du crabe juvénile, qui change de carapace.
Pour ce qui est du programme de quotas individuels, il faut remonter à 1987 ou 1988, alors qu'il y a eu un effondrement de la ressource. Au milieu des années 1980, tous les pêcheurs pêchaient. Il y avait une date d'ouverture et une date de fermeture de la pêche, et c'était au plus fort la poche. Le pêcheur capturait tout ce qu'il pouvait. Naturellement, la ressource s'est effondrée.
À partir de 1989, après l'effondrement du stock, les pêcheurs se sont réunis et se sont dit qu'il fallait faire quelque chose. En premier lieu, ils se sont dit qu'ils allaient établir des quotas individuels. Chaque pêcheur a sa propre part ou son propre contingent. De quelle façon les gens en sont-ils venus à une entente et de quelle façon le partage a-t-il été fait? On a divisé 80 p. 100 du contingent en parts égales. L'autre 20 p. 100 a été attribué selon les prises historiques. Le pêcheur qui avait beaucoup pêché obtenait un quota un peu plus élevé que celui qui avait moins pêché. C'est ainsi qu'on a divisé le contingent.
On parle aussi de l'instauration d'une croisière scientifique annuelle. On collabore avec les scientifiques présentement. Les scientifiques du ministère louent un bateau pour faire une croisière scientifique. Ils font des relevés au chalut. Ils ont ce qu'ils appellent un petit chalut à langouste, ils vont à l'intérieur du golfe Saint-Laurent et ils font des traits de chalut. Les scientifiques décident à quels endroits ils veulent les faire. Je pense qu'ils font chaque année 200 ou 250 coups de chalut. Chaque année, à la fin de la saison de pêche, ils vont en mer pour évaluer la quantité qui reste sur les fonds et le niveau de recrutement pour l'année précédente. C'est au cours de cette croisière scientifique qu'ils déterminent si la biomasse diminue ou augmente, et si le nombre de femelles diminue ou augmente. Cela donne une bonne indication de l'état de santé du stock.
Qu'entend-on par un contrôle serré de la capacité de pêche? Il s'agit de limiter le nombre de pêcheurs. C'est ce qu'on a fait à partir de 1989. J'étais plus jeune à ce moment-là, mais je me souviens qu'il y a beaucoup de gens qui demandaient si on devait éliminer des bateaux. On a préféré établir des quotas individuels et garder le même nombre de bateaux.
À partir de 1989...
Le président: Monsieur Gionet, excusez-moi. Il y a maintenant neuf membres du comité qui sont présents.
[Traduction]
Bien, mesdames et messieurs, concernant notre voyage sur la côte Est, le greffier nous a avisé que certains des témoins qui viennent nous rencontrer, en provenance de collectivités éloignées, devront encourir des dépenses pour le faire. J'aimerais présenter au comité de liaison une demande de budget supplémentaire de l'ordre de 9 600 $ pour les dépenses des témoins. Je dois le faire jeudi pour pouvoir obtenir l'autorisation, sinon nous n'aurons peut-être pas d'autres réunions avant notre départ pour le voyage.
Alors, quelqu'un pourrait-il proposer la demande de budget supplémentaire de 9 600 $?
Une voix: Je le propose.
Le président: Merci.
Monsieur Godin.
[Français]
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le président, au début de la réunion, vous avez dit qu'on était en train de faire une étude sur la pêche au crabe et que vous souhaitiez la bienvenue aux groupes. Est-ce que les autres intervenants pourront participer à cette étude? On sait qu'il y a plusieurs groupes. On dit aujourd'hui qu'il ne devrait pas y avoir de partage permanent, mais je pense que le comité devrait entendre d'autres intervenants. On devrait entendre les deux côtés de la médaille.
[Traduction]
Le président: La réponse à cette question, c'est que le comité n'a pas encore décidé. Une fois que nous aurons attendu les témoins, le comité discutera ensemble de la suite à donner aux travaux, à partir des témoignages que nous aurons entendus.
Merci, monsieur Godin.
(La motion est adoptée)
Le président: Merci.
Monsieur Gionet, nous vous redonnons la parole.
[Français]
M. Joël Gionet: Merci, monsieur Wappel.
Je voudrais continuer à parler d'un contrôle très serré de la capacité de pêche. Il s'agit de limiter l'accès à un certain nombre de bateaux, à un certain nombre de pêcheurs. Je répète que toutes ces mesures ont été mises en place conjointement par l'industrie et le gouvernement du Canada. L'industrie défraye la totalité de ces coûts.
Je pense qu'on est une des rares industries à le faire présentement.
Ce sont les mesures de gestion qu'on a actuellement.
M. Jean-Yves Roy: Si j'ai bien compris, comme le disait mon collègue M. Godin, vous nous dites que l'octroi de nouveaux permis permanents serait extrêmement dangereux pour la conservation de la ressource à long terme. Vous nous dites que cela signifie que lorsque la ressource sera en baisse, il y aura une pression pour le maintien de l'effort de pêche, ce qui mettra la ressource en péril. C'est ce que vous nous dites, n'est-ce pas?
M. Joël Gionet: Exactement, et je vais vous donner un exemple très précis.
Au début des années 1990, lorsqu'on a décidé de remonter le stock après l'effondrement, on pêchait 30, 32 ou 34 p. 100 de la biomasse exploitable. On avait 160 bateaux, et le stock est remonté jusqu'à environ 20 000 tonnes vers 1995.
Il y a deux ans, on a exploité la biomasse à 50 p. 100. L'an passé, on l'a exploitée à 60 p. 100. On sait que depuis deux ans, il y a plus de bateaux. La ressource va donc diminuer. La pêche au crabe est cyclique, comme tout le monde le sait. Lorsque la ressource va diminuer, elle va descendre à un niveau tellement bas que plus personne ne pourra faire ses frais.
Il n'est pas question d'ajouter des permis permanents aujourd'hui, alors que l'intégration des autochtones n'est pas complétée. Le gouvernement nous dit depuis deux ans que les autochtones vont fonctionner comme nous, avec des pourcentages. Quand la ressource augmente, les prises permises augmentent, et quand la ressource diminue, ces prises diminuent. Aujourd'hui, on se rend compte qu'il n'y a rien de fait. Ils ont des contingents fixes, qui augmentent annuellement. On ne sait pas du tout vers quoi on se dirige.
Il faudrait peut-être commencer par régler un problème avant de régler les problèmes de tout le monde. À l'intérieur du golfe du Saint-Laurent, la ressource est grande comme ma main. Il y a trois ou quatre bonnes années sur dix. Je pense qu'il faut y faire attention pour les générations à venir et pour tout le monde.
Á (1135)
Le président: Merci.
Monsieur Farrah, vous avez 10 minutes.
M. Georges Farrah (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, Lib.): Merci, monsieur le président.
C'est à mon tour de vous souhaiter la plus cordiale des bienvenues au comité.
Je veux continuer à parler de la protection de la ressource. Vous dites que la ressource peut être en danger dans une perspective à long terme, à cause de l'augmentation de l'effort de pêche. Je veux que vous nous donniez plus d'explications à ce sujet.
Par exemple, on peut pêcher 1 000 tonnes de crabe avec 100 casiers ou pêcher la même quantité de crabe avec 200 casiers. Vous avez toujours dit que pêcher le même tonnage avec plus de casiers était plus dommageable pour la ressource. Je sais qu'on se pose certaines questions à ce sujet au ministère. J'aimerais que vous nous démontriez scientifiquement que si on met plus de casiers dans l'eau pour pêcher le même tonnage, cela affecte beaucoup plus la viabilité de la ressource que lorsqu'on met moins de casiers pour pêcher la même quantité de crabe.
M. Joël Gionet: C'est facile à comprendre. Le crabe se pêche avec des casiers. On dépose un casier dans le fond de la mer, et le crabe y entre. Pour capturer mon contingent, je dois lever les casiers et mettre le crabe à bord de mon bateau. Dans la cage, il y a de toutes les catégories de crabe: des juvéniles, des bébés, des moyens et des gros. Je fais un tri parce que j'ai une mesure à respecter. J'en conserve une certaine quantité et je remets le reste à la mer. Plus il y a de pêcheurs de crabe, plus il y a de manipulation du crabe, surtout dans des périodes où la biomasse de crabe juvénile est énorme, comme c'est le cas actuellement. Ce serait le pire moment pour ajouter des joueurs, parce qu'on détruirait notre recrutement futur.
M. Georges Farrah: Vous dites que vous n'êtes pas nécessairement opposés à ce que des allocations temporaires soient données à des pêcheurs en difficulté, mais vous êtes contre un accès permanent. Quand vous dites que vous êtes d'accord pour qu'on donne à ces pêcheurs un certain pourcentage, pourvu que la ressource le permette, qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut-il dire que vous êtes d'accord qu'on donne en tout temps une allocation temporaire à des flottilles de pêcheurs en difficulté?
M. Joël Gionet: Nous avons déjà eu une entente de cinq ans avec Pêches et Océans Canada, de 1997 à 2001. En vertu de cette entente, l'industrie traditionnelle avait un seuil, un plancher. Aussitôt que la ressource descendait en bas de ce niveau, il n'y avait plus de joueurs temporaires. Nous préconisons une approche semblable: il y aurait un plancher et il pourrait y avoir du partage. On n'est pas contre le partage quand le stock est bon, et on pense qu'il doit y en avoir un peu, parce qu'il y a certaines espèces qui sont en difficulté et que cela aide beaucoup de gens. Mais si on décrète un partage permanent aujourd'hui, l'an prochain, 2 000 autres joueurs vont demander une allocation temporaire, etc. C'est ce qui nous inquiète énormément.
Je reviens à la question des autochtones. On partage déjà large comme ça avec eux, et on est d'accord. C'est une décision de la Cour suprême, et on est d'accord sur ça. Mais réglons d'abord ce problème, et voyons ensuite à faire autre chose.
Á (1140)
M. Georges Farrah: Pour vous, quel est le seuil acceptable au-delà duquel il doit y avoir du partage?
M. Joël Gionet: Ce n'est pas à moi de le dire. C'est l'ensemble de l'industrie qui doit s'asseoir à une table, en discuter avec les personnes concernées et arriver à une entente ou à un niveau qui convienne aux deux parties.
M. Georges Farrah: J'aimerais poser une dernière question, monsieur le président. En ce qui a trait au partage permanent, je pense qu'une distinction doit être faite entre le partage permanent, que le ministre veut avoir, et les permis permanents.
Si je comprends bien le ministre, il veut s'assurer qu'un pourcentage du quota lui soit attribué de façon permanente pour que lui, par la suite, puisse le distribuer de façon temporaire. Ça pourrait changer d'année en année, en fonction des pêcheurs qui sont en difficulté. En fin de compte, on revient à l'objectif d'avoir un partage temporaire, parce que ce ne sont pas des permis additionnels qui seront donnés. Le ministre s'accaparera un pourcentage, et il sera permanent.
M. Joël Gionet: Est-ce que je peux répondre?
Je pense, monsieur Farrah, que c'est une façon détournée d'ajouter de nouveaux pêcheurs. Il va y avoir un pêcheur là chaque année, même si ce n'est pas le même pêcheur. Quand le stock aura baissé, quand on se retrouvera avec 5 000, 6 000 ou 7 000 tonnes et avec 100 ou 200 pêcheurs de plus, on aura un problème. Je vais me retrouver assis avec des gens autour d'une table, en train de discuter pour trouver une solution. On n'a pas besoin de ça. L'industrie est en santé et le stock est encore relativement en santé. Il faut y faire attention pour les décennies à venir.
M. Georges Farrah: Dites-vous que si on ne fait pas attention, il pourrait arriver la même chose que dans le cas de la morue?
M. Joël Gionet: Exactement. La morue n'a pas disparu en un an. Elle a disparu sur des décennies. Le crabe est la seule ressource qui reste à l'intérieur du golfe Saint-Laurent qui soit relativement en santé. Ne le détruisez pas.
Merci.
Le président: Monsieur Godin, vous avez cinq minutes.
M. Yvon Godin: Merci, monsieur le président.
J'aimerais aussi vous souhaiter la bienvenue au comité. J'ai quelques questions de clarification.
Tout à l'heure, vous nous avez parlé de Pèse-Pêche et du contrôle des prises des pêcheurs.Quand il y a eu un partage, est-ce que Pèse-Pêche était là pour faire le même contrôle?
M. Joël Gionet: Absolument, oui.
M. Yvon Godin: J'aimerais que vous clarifiiez ce que vous avez dit sur l'intégration des autochtones. Selon vous, c'est comme si on avait ajouté de nouveaux pêcheurs, mais en réalité, pour les autochtones, le gouvernement a acheté des bateaux et remplacé les pêcheurs. Donc, il y a le même nombre de pêcheurs. Si ce n'est pas le cas, j'aimerais avoir des clarifications.
Je sais que dans notre région, par exemple, Pêches et Océans Canada a acheté des permis de pêche à Shippagan et ailleurs pour une valeur d'environ 2,5 millions de dollars, je crois. Certains pêcheurs se sont retirés de la mer, et des autochtones ont pris leur place.
J'aimerais qu'on clarifie ça, parce que quand on parle de l'intégration des autochtones, c'est comme s'il y avait un surplus. Si les autochtones ont une entente à part qui dit qu'il n'y a pas de limite à ce qu'ils peuvent prendre, je pense qu'il y a un problème. Mais j'ai l'impression que le gouvernement fédéral achète des permis de pêche pour remplacer les pêcheurs.
J'aimerais qu'il y ait une clarification là-dessus.
Á (1145)
[Traduction]
M. Peter Noël: Je vais répondre à la question, monsieur Godin.
Au début, lorsque la politique de rachat des permis a été instituée, il devait y avoir une personne qui entre pour une qui sort. Le pourcentage du contingent des Autochtones devait provenir de celui des pêcheurs traditionnels qui acceptaient un rachat volontaire. C'est ce qui est arrivé. À l'heure actuelle, on parle de 5,6 p. 100.
Mais, vous n'avez pas un pêcheur qui entre pour un qui sort. Nous commençons maintenant à voir que là où il y avait un bateau qui essayait de capturer son contingent, vous en avez maintenant trois ou quatre et même, dans certains cas, cinq ou six. Alors, on a créé une augmentation de la capacité de pêche, situation qui ne devrait pas exister et que l'on aurait jamais dû laisser se développer, en partant.
On disait que les Autochtones étaient censés prendre les commandes de ces bateaux après trois ans de formation avec un mentor. Maintenant, nous nous apercevons que ce n'est pas du tout ce qui arrive. Plutôt, ce sont des Blancs qui tentent de convaincre les Autochtones en leur disant de rester à la maison, qu'ils s'occuperaient de cette question pour eux. Nous constatons maintenant que les Autochtones demandent des contingents de plus en plus importants. Si j'étais à la place de ces autres personnes, je dirais aux Autochtones de chercher à obtenir le maximum qu'ils peuvent obtenir pour moi.
C'est ce qui arrive. Il semble y avoir un manque de contrôle de ce côté, du côté de la capacité de pêche.
M. Yvon Godin Vous dites qu'ils ont un contingent et que parfois plus d'un pêcheur peut travailler à capturer ce contingent. Mais ils ont un contingent tout de même.
M. Peter Noël: Oui, ils ont un contingent.
Lorsque vous parlez de contingent, les chiffres sont toujours pareils. Pour un mathématicien, les chiffres sont toujours pareils. Mais ce qui n'est pas pareil, c'est ce qu'il faut pour créer ces chiffres, pour amener ce contingent à terre.
Je vais utiliser un exemple assez simple pour tenter d'illustrer ce point. Imaginez un champ de petits fruits sauvages qui mesure un acre de côté. Habituellement, vous pouvez confier la cueillette à 10 personnes sans détruire les plants. Mais si vous envoyez 1 000 personnes dans ce champ pour faire la cueillette, combien vous restera-t-il de plants à la fin de la journée? Quelle degré de destruction l'écosystème peut-il supporter? Combien de ravages le stock peut-il supporter?
Une partie du contenu de chaque casier additionnel qui est remonté à la surface doit être rejeté à l'eau—crabe trop petit, juvénile, femelle ou, dans certains cas, crabe à carapace molle. Lorsque vous amenez des pêcheurs inexpérimentés dans cette pêche, nous remarquons qu'ils passent beaucoup de temps dans les endroits fréquentés par des crabes à carapace molle, et même les mesures de contrôle qui ont été mises en place par la pêche traditionnelle et l'industrie commencent à être battues en brèche. Elles ne fonctionnent pas comme elles le devraient.
Alors, vous faites du tort au stock. Vous faites des ravages que nous ne voyons pas parce que cela se passe sous l'eau. Il s'agit d'un vaste portrait d'ensemble qu'il me serait difficile de vous décrire dans tous ses détails. Mais après 31 ans d'activités dans cette pêcherie, j'ai appris à reconnaître des choses que l'on devrait prendre en considération et il y a une limite à tout.
[Français]
M. Joël Gionet: J'aimerais apporter une clarification à ce que Peter disait tout à l'heure. Chez nous, nous voyons actuellement que les gens des premières nations se promènent d'une usine à l'autre et vont voir pêcheur après pêcheur en leur disant qu'ils ont des quotas et qu'ils sont prêts à leur en offrir une partie. On a donc un, deux, trois, quatre, cinq, six bateaux.
C'est ce qui se passe au Nouveau-Brunswick actuellement. Même des représentants du gouvernement fédéral annonçaient publiquement dans les journaux, au mois de février, que s'il y avait des pêcheurs qui désiraient faire une offre pour des contingents autochtones, ils le pouvaient, car les autochtones avaient du contingent à faire pêcher. À la lumière de tout ça, on voit que le problème autochtone n'est pas réglé du tout. Merci.
Le président: Vos cinq minutes sont écoulées.
M. Yvon Godin: D'accord.
[Traduction]
Le président: Monsieur Efford.
M. R. John Efford (Bonavista—Trinity—Conception, Lib.): Merci.
J'ai quelques observations et quelques questions parce que je ne suis pas certain que mes amis autour de la table comprennent clairement votre position et ce que vous demandez. Je crois saisir le principal, mais j'ai besoin de vous poser quelques questions.
En tant qu'ex-ministre des Pêches de Terre-Neuve, je suis assez au courant de vos préoccupations et je suis assez au courant de ce qui est arrivé à Terre-Neuve et au Labrador. La seule différence, c'est qu'au début des années 80, je pense, il y avait 59 bateaux de pêche au crabe à Terre-Neuve et au Labrador, alors qu'aujourd'hui, on en compte 3 517—tellement que les stocks ont commencé à montrer des signes très inquiétants. Mais vous avez toujours été très préoccupés par la surveillance, toutes les mesures de contrôle et le rejet en mer. Et vous avez tout à fait raison. Plus il y a de bateaux qui pêchent, plus il se passe de choses. Je suis très au courant de cette question.
Dans le cas des permis temporaires à Terre-Neuve et au Labrador... notre région—la géographie, je veux dire—est beaucoup plus étendue que la vôtre, naturellement. Lorsque Brian Tobin était ministre des Pêches, il a accordé 2 400 permis temporaires à des pêcheurs exploitants de petits bateaux. Il y avait un gel permanent sur tout ce qui dépassait ce chiffre.
Ce que le ministre Thibault a fait la semaine dernière—ou il y a quelque temps—, c'est de rendre ces 2 400 permis permanents. Eh bien, ma position avant cet événement, c'est qu'il n'y a rien de plus permanent que quelque chose de temporaire, parce qu'une fois que vous donnez à un pêcheur un permis pour capturer du poisson, vous ne pouvez plus le lui retirer, qu'il s'agisse du crabe ou de quelque autre espèce—cela n'arrivera jamais. Mais le nombre de poissons qu'ils prennent demeure le même dans leur propre zone.
Dans le cas qui vous concerne, je sais qu'il y a 160 crabiers dans votre association. J'ai deux questions : combien chaque bateau capture-t-il de crabes et combien y a-t-il de permis temporaires dans votre zone 12, autres que les permis permanents, comme vous l'avez dit?
Á (1150)
M. Peter Noël: À l'heure actuelle, les pêcheurs traditionnels travaillent avec un système de points par rapport au total autorisé des captures; le chiffre se situe entre 0,71 et 0,79. Cela fait probablement autour de 125 à 150 tonnes métriques par bateau.
M. R. John Efford: Par année.
M. Peter Noël: Par année, oui, ce qui pourrait être l'équivalent de 275 000 à 300 000 livres pour chaque bateau.
Le président: Veuillez m'excuser; je ne suis pas sûr d'avoir compris. Vous avez dit que lorsque les conditions étaient les meilleures, il y avait des prises totales de 30 000 tonnes métriques.
M. Peter Noël: Oui. C'est pourquoi je dis que nous travaillons avec un système de points de pourcentage par rapport au total autorisé des captures. Alors, lorsque le total autorisé des captures diminue, nos contingents diminuent.
Le président: Oui, mais je pense que M. Efford a demandé qu'arriverait-il si... Je ne comprends pas. Quelle était votre réponse? Je pensais que vous aviez dit 100 000 tonnes métriques ou quelque chose du genre.
M. Peter Noël: Non. C'est 150 tonnes métriques.
Le président: C'est 150 tonnes métriques.
M. Peter Noël: Ce qui est l'équivalent de 300 000 livres.
M. Joël Gionet: C'est le meilleur résultat.
M. Peter Noël: C'est le mieux que vous puissiez faire dans les meilleures conditions s'appliquant au stock.
M. R. John Efford: C'est la même chose à Terre-Neuve. La deuxième partie de ma question portait sur les permis temporaires. Combien d'autres permis, temporaires ou autres, y a-t-il à part les 160 que vous avez?
[Français]
M. Joël Gionet: Je pense qu'on ne connaît pas vraiment le nombre exact.
[Traduction]
M. Peter Noël: Il y en a un certain nombre, mais nous ne savons pas exactement combien. La partie du contingent qui est retirée au profit des participants temporaires est donnée à leur association, ou syndicat, comme vous l'appelez, après quoi, le syndicat répartit le contingent. Les gens mettent leur nom dans un chapeau et tirent au sort; ensuite, on leur dit de réunir quatre pêcheurs et d'aller pêcher ce contingent. Souvent, le contingent est vendu à quelqu'un d'autre et les pêcheurs restent à la maison.
M. R. John Efford: Je comprends très clairement ce que vous dites. Je respecte et je comprends vos préoccupations, et avec raison, parce que s'il y a un endroit au Canada ou dans le monde où nous avons—et je n'utiliserai pas les mots que j'utiliserais dans un autre milieu—perturbé la pêche, c'est bien à Terre-Neuve et au Labrador; nous avons tout détruit. Les deux seules pêches où il reste encore quelques signes de santé sont la pêche à la crevette et la pêche au crabe. Maintenant, dans nos nombreuses régions de Terre-Neuve, et en particulier sur la côte Ouest et dans la zone 2J au large du Labrador, dans le golfe, nous avons des problèmes réels.
La conservation est la mesure clé. Nous ne pouvons nous permettre de détruire cette ressource.
Je n'ai pas besoin d'autres questions ou réponses parce que je comprends toutes les questions qui entourent la pêche. Je ne savais simplement pas combien il y avait de pêcheurs.
Alors, vraiment, si on regarde les contingents qu'ils ont, ils peuvent avoir 500 pêcheurs au lieu de 100. Vous avez tout a fait raison, plus il y a de casiers dans l'eau, plus il y a de rejets et plus on fait du tort aux crabes à carapace molle—nous les appelons crabes mous alors que, vous, vous les appelez crabes blancs, je pense.
C'est une inquiétude que nous avons dans la région de M. Matthew, sur la côte Sud. L'an dernier, il y avait beaucoup de crabes à carapace molle. Ils sont vraiment préoccupés par la possibilité que ce stock éprouve des difficultés du fait que les pêcheurs ne les manipulent pas de manière appropriée.
Merci, monsieur le président.
Á (1155)
Le président: Merci, monsieur Efford.
M. Peter Noël: Il s'agit d'une pêche à faibles répercussions écologiques, mais lorsque vous augmentez la capacité, vous en faites une pêche à répercussions écologiques élevées.
M. R. John Efford: C'est la même chose à Terre-Neuve.
Le président: Est-ce que d'autres membres du comité ont des questions?
Monsieur Provenzano.
Je suis désolé, monsieur Desbois, vous vouliez faire un commentaire?
[Français]
M. Daniel Desbois (Association des crabiers de la Baie): J'aurais aimé renchérir sur ce que M. Efford a dit. Depuis 1994, la zone 12 a été morcelée. Il y a déjà eu une augmentation de la capacité de pêche quand on a créé les sous-zones 12A, 12B, 12C, 12D et 12E, ainsi que la zone 25/26. Des pêcheurs permanents ont été ajoutés dans ce qui était anciennement la zone 12, qui a été fragmentée.
[Traduction]
Le président: Monsieur Provenzano.
M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Oui, monsieur le président.
J'essaie de comprendre la question des pêcheurs titulaires d'un permis temporaire. Comment détermine-t-on qui obtiendra un permis temporaire? Est-ce une loterie? Quel est le système en place?
M. Peter Noël: Au cours des cinq dernières années, depuis la dernière entente de cogestion et depuis que le partage temporaire a été rendu plus actif, c'est un système de loterie. Tous les membres du syndicat de la pêche côtière mettent leur nom dans un chapeau et le nombre de noms qu'ils veulent tirer est décidé d'avance. Ensuite, tout le reste s'ensuit.
M. Carmen Provenzano: Faut-il remplir certaines conditions pour pouvoir participer à cette loterie? Si je voulais m'inscrire à cette loterie pour voir si j'étais choisi et si j'obtenais un certain contingent, et qu'ensuite, je le vendais ou l'attribuais, est-ce que ce serait possible ou y a-t-il des conditions qui font que je doive être un pêcheur authentique capable de pratiquer cette pêche?
[Français]
M. Paul Boudreau (Regroupement des pêcheurs professionnels des Îles-de-la-Madeleine): C'est Pêches et Océans Canada qui s'en occupe, et cela se fait différemment dans la région du golfe et dans la région du Québec. Au niveau du Québec, on identifie les pêcheurs qui sont le plus en difficulté et on fait des groupes, puis on donne une allocation à un groupe de pêcheurs, qui se divisent une partie de cette allocation par la suite.
Cela va par ordre de priorité, mais c'est le ministère qui détermine les groupes cibles, et il donne une partie des contingents à des groupes comme ceux-là.
[Traduction]
M. Carmen Provenzano: J'aimerais revenir encore une fois à la question de l'attribution des permis. On laisse entendre que lorsque des permis temporaires sont accordés, les chances de ne pas voir ce permis temporaire renouveler sont minces. Je ne comprends pas pourquoi. Il s'agit d'un permis temporaire. Est-ce que la personne qui est choisie par loterie ne comprend pas que le permis est temporaire et qu'il peut ne pas être renouvelé pour des contingents subséquents? Quel est le problème ici?
Ai-je mal compris? On semble dire que nous avons affaire à une situation où une fois que des permis temporaires ont été accordés, vous ne pouvez les reprendre.
Le président: Rien n'est plus permanent que le temporaire.
M. Carmen Provenzano: Non, mais j'essaie de voir s'il n'y a pas un vide, un manque, une carence dans le processus d'attribution de ces permis temporaires, qui fait qu'on n'explique pas clairement à quelqu'un qui reçoit ce permis temporaire qu'il pourrait n'être valable que pour cette saison-là.
Où est le problème ici?
M. Doug Cameron (directeur exécutif, «P.E.I. Snow Crab Fishermen Inc.»): Monsieur, dans le système que nous utilisons à l'île-du-Prince-Édouard... Je vais vous donner l'exemple de l'an dernier. Les pêcheurs titulaires d'un permis temporaires de l'Î.-P.-É. ont eu droit à 281 tonnes métriques, et l'instrument qui a été utilisé est la « P.E.I. Fishermen's Association ». Ils ont subdivisé les 281 tonnes métriques en fractions de cinq tonnes. Alors, environ 50 personnes ont profité de la loterie. Ensuite, 12 bateaux ont pratiqué la pêche. Un groupe de quatre pêcheurs se réunissaient sur un même bateau pour capturer ces cinq tonnes.
Si vous avez été chanceux dans la loterie cette année ou les années antérieures, votre nom est retiré de la liste, de sorte que la prochaine fois, vous n'en profiterez pas jusqu'à ce que le cycle complet soit terminé.
 (1200)
M. Carmen Provenzano: Un de mes collègues a dit qu'il n'y avait rien de plus permanent qu'un permis temporaire. D'après ce que vous venez juste de dire, il n'y a pas du tout de permanence qui se rattache à ce permis temporaire. Êtes-vous d'accord avec moi?
M. Doug Cameron: Je suis d'accord avec vous.
M. Carmen Provenzano: Alors, le problème, c'est le contingent. C'est le contingent attribué au groupe de titulaires de permis temporaires, dont la composition varie d'une année à l'autre. Est-ce exact?
M. Doug Cameron: Nous ne sommes pas absolument...
[Français]
M. Joël Gionet: Est-ce que je peux intervenir? Je vais vous expliquer le problème qu'on a actuellement au niveau des permis temporaires. La question des permis temporaires est arrivée sur le tapis en 1994, quand le ministère a décidé de prendre une part du contingent et de la redistribuer temporairement à d'autres pêcheurs . Cela a fonctionné pendant deux ou trois ans, puis ça s'est arrêté. Ensuite, à partir de 2000, 2001 ou 2002, le ministère a repris cette stratégie de prendre une part du contingent et de la distribuer temporairement.
Il faut dire que ce ne sont pas les pêcheurs qui ont reçu l'allocation, mais les associations de pêcheurs. Aujourd'hui, ces associations clament haut et fort qu'elles ont maintenant un historique de pêche et qu'elles désirent que cet historique de pêche devienne permanent, année après année. Voilà le problème qu'on a actuellement.
[Traduction]
M. Carmen Provenzano: Thank you. Je comprends le problème.
Le président: Merci.
Nous allons commencer le deuxième tour, et comme nous avons beaucoup de temps, je vais en profiter pour poser quelques questions.
Prenons l'année 2002. à combien se sont chiffrées les prises totales pour 2002?
M. Peter Noël: Le total autorisé des captures était de 22 000 tonnes métriques, monsieur.
Le président: Non, pas le total autorisé, mais les prises réelles.
M. Peter Noël: Les prises réelles du côté des pêcheurs traditionnels ont été de 19 000...
Le président: Non, les prises totales pour tout le monde.
M. Joël Gionet: Elles ont été de 21 850 tonnes métriques.
Le président: Et quelle part de ces prises totales revenait aux pêcheurs traditionnels?
M. Peter Noël: On parle de 19 700 tonnes métriques et des poussières, monsieur...
[Français]
M. Joël Gionet: Cela inclut les autochtones.
[Traduction]
M. Peter Noël: ...y compris les gens des Premières nations.
Le président: Très bien. Quelle est la durée de la saison de pêche?
M. Peter Noël: La pêche a débuté le 13 avril et s'est terminée le 15 août. Deux bateaux ont tardé à capturer leur contingent, mais la plupart des contingents ont été capturés au cours des cinq premières semaines de la pêche. Après cela, la plus grande partie de la flotte a été encore active pendant environ 10 à 12 semaines dans la pêcherie.
Le président: Alors, si nous disions que la pêche a duré environ 12 semaines, cela se rapprocherait assez bien de la vérité?
M. Peter Noël: Oui.
Le président: Quel est le revenu brut annuel moyen que procure chacun des 160 permis permanents?
M. Peter Noël: La moyenne au cours des 10 dernières années se situe probablement entre 500 000 $ et 600 000 $, monsieur.
M. Joël Gionet: Brut.
Le président: C'est le revenu brut. J'ai demandé qu'on me donne le revenu brut.
M. Joël Gionet: C'est le revenu brut. Il y a cinq à six personnes à bord de chaque bateau, et c'est...
[Français]
En réalité, ce sont des petites et moyennes entreprises. Il y a cinq ou six employés par bateau, et notre revenu est d'environ 500 000 $ ou 600 000 $ brut dans les meilleures années. La moitié de ce montant va aux salaires et 20 p. 100 va aux paiements; il reste donc de 15 à 20 p. 100. Voilà le chiffre réel.
[Traduction]
Le président: Dans votre exposé, vous avez dit qu'il y avait 806 pêcheurs.
M. Joël Gionet: Oui.
Le président: Je comprends cela. Je n'ai pas de problème avec le fait que vous fassiez plus d'argent. J'essaie simplement de réunir tous les faits de manière à pouvoir comprendre ce qui se passe.
Maintenant, à combien exactement s'élevaient les prises des pêcheurs titulaires d'un permis temporaire en 2002?
M. Peter Noël: Cela dépend à combien s'élevait le contingent qu'ils avaient, monsieur, et quels étaient les prix...
Le président: Je ne voulais pas faire le calcul. Cela ressemble à quelque chose comme 2 000 tonnes métriques.
M. Peter Noël: Environ 2 000 tonnes métriques.
 (1205)
M. Doug Cameron: C'était 2 181.
Le président: Alors, 2 181 tonnes métriques. Et vous ne savez pas exactement entre combien de pêcheurs ces 2 181 tonnes métriques ont été divisées.
Est-ce qu'il s'agissait d'une année moyenne, d'une bonne année ou d'une mauvaise année? Je sais que la meilleure année, c'était 30 000...
M. Joël Gionet: C'était la meilleure.
Le président: Et comme c'est une pêche cyclique, on peut s'attendre qu'il y aura un diminution.
M. Peter Noël: Lorsque notre pêche donne un moins bon rendement, la pêche en Alaska, elle, semble être meilleure et nos prix baissent avec la diminution du stock.
Le président: Je pense que M. Provenzano a mis le doigt sur ce qui semble être le problème: trop de gens s'en mêlent.
Je veux vous féliciter pour les efforts entrepris par votre association du point de vue scientifique. Il est agréable de voir que des personnes du privé investissent autant d'argent—ce n'est pas négligeable—dans la recherche scientifique. Je pense que c'est très important.
Je voulais vous demander, que signifie «suffisamment abondant» dans vos solutions? Numéro un, vous voulez permettre l'accès à la ressource aux pêcheurs titulaires d'un permis temporaire uniquement lorsque le stock est suffisamment abondant. Que signifie «suffisamment abondant»?
[Français]
M. Joël Gionet: Je peux répondre à cela. Pour notre part, nous préconisons une entente de cogestion à long terme sur cinq ou neuf ans avec un plancher pour l'industrie traditionnelle, soit un plancher de contingent. Nous avons soumis une proposition initiale à Pêches et Océans Canada le 24 janvier. On nous a répondu que notre proposition, malgré ses qualités, ne comportait pas de partage permanent et que, par conséquent, ça n'allait nulle part.
Nous voulons élaborer conjointement avec le gouvernement une entente pluriannuelle de cogestion qui permettrait aux deux parties de s'asseoir et de négocier ce plancher. Je ne peux pas donner plus de détails sur ce que je veux; à mon avis, cela se fait à la table de négociations et les deux parties doivent faire preuve de bonne foi.
[Traduction]
Le président: Alors, la réponse, c'est que vous n'avez pas de chiffres à nous donner en tonnes métriques à l'heure actuelle. Vous voudriez travailler avec le MPO pour vous entendre avec lui sur la définition à donner à l'expression « suffisamment abondant ». Est-ce bien ce que vous dites?
M. Joël Gionet: Oui.
Le président: Bien. Merci.
Allez-y, monsieur Godin.
[Français]
M. Yvon Godin: Merci, monsieur le président.
Si j'ai bien compris, les autochtones allaient voir les pêcheurs traditionnels et faisaient des ententes avec eux sur les contingents.
Vous avez dit également que les pêcheurs ayant des permis temporaires s'entendaient eux aussi avec les pêcheurs traditionnels au sujet de leurs quotas. C'est exact?
M. Peter Noël: En effet, ça peut arriver.
M. Yvon Godin: Sont-ils nombreux à le faire?
M. Peter Noël: J'ai n'ai pas ces chiffres; ils sont entre les mains de l'Union des pêcheurs des Maritimes. Je ne sais pas comment ils ont structuré leur système.
M. Yvon Godin: Vous n'avez pas de chiffres qui portent sur cela?
 (1210)
M. Peter Noël: Non.
M. Yvon Godin: D'accord. C'était ma question.
D'autre part, on a entendu dire que les pêcheurs traditionnels, les pêcheurs temporaires et Pêches et Océans avaient conclu une entente de cinq ans. Selon vos dires, lorsque le contingent est suffisamment élevé, vous êtes disposés à partager.
Pour le bénéfice de chacun, je vais faire un petit retour en arrière. Quand cette entente a été conclue, les pêcheurs traditionnels--corrigez-moi si je fais erreur--se sont d'abord opposés à tout partage, et tout le monde s'est retrouvé dans la rue.
Je me rappelle que ça a été plutôt rough à Shippagan et à Caraquet. La police s'en est mêlée et toute la communauté s'est retrouvée sens dessus dessous. Je me rappelle aussi que Frank McKenna, qui était alors premier ministre du Nouveau-Brunswick, avait dit: « Vive l'Acadie!» Il s'en allait en mer parce que... [Note de la rédaction: inaudible].
Je me rappelle bien la fin de l'entente. Rien n'a été concédé de bon gré; il y a eu des négociations ardues, et tout le monde a subi beaucoup de pression, y compris la communauté, les familles et ainsi de suite. J'aimerais entendre votre côté de l'histoire.
Encore une fois, vous me corrigerez si je fais erreur, mais je crois me souvenir que dans le cadre de cette entente, de l'argent avait été mis de côté. Comme vous le savez, les employés d'usine vous appuyaient; or, cette fois-ci, malgré ce que vous dites, j'ai pu constater que les usines ne vous appuient pas toutes.
Ces gens-là étaient dans la rue. Quelqu'un--je ne sais pas si c'est Pêches et Océans--avait fait une promesse; à ce sujet, j'aimerais entendre votre côté de l'histoire. En principe, 15¢ seraient mis de côté, étant donné que la pêche ne se fait pas pendant 12 semaines mais pendant six ou sept semaines. Les pêcheurs vont en mer, puis aussitôt qu'ils ont leur quota, ils reviennent. Il ne s'agit donc pas exactement de 12 ou 15 semaines. En fait, l'argent avait été mis de côté pour aider les employés d'usine à cumuler le nombre de semaines requis pour être admissibles à l'assurance-emploi.
Ensuite, une organisation a contesté cela, et la cause s'est rendue en cour. On a dit que Pêches et Océans n'avait pas le droit de forcer les pêcheurs à donner de l'argent pour aider des employés d'usine. Je ne sais pas si tout cela avait été prévu dans une entente qui aurait été par la suite déclarée illégale. Il reste que les employés d'usine ont dû laisser tomber cet arrangement qui leur permettait de cumuler leurs semaines réglementaires dans la communauté.
M. Joël Gionet: Je ne veux pas donner trop de détails sur ce cas parce qu'il est en cour présentement. Je peux néanmoins vous dire que c'est le vérificateur général du Canada lui-même qui, dans son rapport de 1999, a dit que ce n'était pas légal.
Enfin, pour ce qui est de la dernière entente, disons qu'elle comportait à la fois des aspects positifs et négatifs. À mon avis, les pêcheurs veulent aujourd'hui en signer une autre.
Merci.
[Traduction]
Le président: Merci.
Monsieur Matthews.
M. Bill Matthews (Burin—St. George's, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence. Je dois reconnaître que j'ai trouvé leur témoignage particulièrement intéressant et éclairant. Peut-être que le ministre devrait assister à certaines de ces rencontres. Pour être bien franc avec vous, peut-être en apprendrait-il un peu sur les pressions de pêche, sur le nombre de casiers et sur ce que ces derniers font à la ressource. Je sais que le ministre est occupé et qu'il n'a pas le temps de participer à beaucoup de séances comme celle-ci, mais...
Votre préoccupation, c'est le fait que le ministre impose un concept de partage permanent—le fait qu'il crée plus de permis permanents dans la zone 12—, n'est-ce pas?
M. Joël Gionet: Oui.
M. Bill Matthews: Quelle est la raison pour laquelle le ministre envisage un partage permanent dans la zone 12? Pouvez-vous me le dire de manière que je puisse comprendre? Je veux comprendre pourquoi.
[Français]
M. Joël Gionet: Nous ne le savons pas vraiment. Je vous dirai franchement que j'en suis encore à me demander pourquoi le ministre veut faire cela. Est-ce qu'il veut se faire des amis ou des ennemis? Nous n'en savons rien.
[Traduction]
M. Bill Matthews: Je ne pense pas que le ministre se soit levé un bon matin et qu'il ait dit: «Je pense que je vais imposer une entente de partage permanent dans la zone 12». Je me demande simplement ce qui fait qu'on a envisagé cette solution. De toute évidence, quelque chose a amené cela.
 (1215)
[Français]
M. Joël Gionet: Je pense que c'est dû aux pressions politiques exercées par tous les autres pêcheurs. Comme vous le savez, il y a une quantité énorme de pêcheurs. Le homard en Atlantique est en chute libre dans nombre de secteurs, de même que la morue. En fait, c'est le cas pour toutes les espèces.
D'après moi, les pressions exercées au niveau du ministère doivent être énormes. Le message de ces gens-là est que la ressource est très abondante et qu'on doit la partager.
[Traduction]
M. Bill Matthews: Alors, vous me dites que dans le contexte d'une décision prochaine dans le cas de la pêche à la morue, par suite de laquelle les gens risquent de perdre le droit de pêcher la morue, en partie ou en totalité, ce concept de partage permettrait de remplacer le revenu tiré de la pêche à la morue. On estime que la ressource de crabes est suffisamment abondante pour permettre à ces gens de gagner leur vie en pêchant le crabe. Est-ce ce que vous dites?
M. Peter Noël: Ce n'est pas seulement les pêcheurs de morue. Il y a eu des rachats de permis à partir de 1991 lorsque le moratoire a été imposé. Beaucoup de pêcheurs de morue ont quitté le métier; ils ne sont plus là. À cette époque, il y avait environ 64 permis de pêche côtière à la morue actifs dans le golf du Saint-Laurent. Maintenant, depuis que le moratoire a été imposé, il y en a plus de 600. Cela m'apparaît très étrange.
Mais lorsque vous regardez les faits, que vous regardez qui réclame du crabe et pourquoi, on constate qu'il s'agit d'un ensemble de facteurs socio-économiques.
Mon ami ici me dit qu'il subit beaucoup de pression en provenance... et vous savez que n'importe quel député de la côte Est subit des pressions dans sa circonscription dans une certaine mesure. Il y a des pressions qui peuvent être exercées lorsque les pêcheurs n'ont pas connu une bonne année.
Ce que l'on a observé au cours de toutes ces années, c'est qu'il n'y a pas eu d'efforts pour rajeunir d'autres stocks comme ceux qui ont été entrepris dans la zone 12 par les pêcheurs traditionnels et l'industrie. Plutôt que de ralentir leur activité pour que la pêche puisse durer plus longtemps, ils l'ont augmentée. J'ai l'impression qu'ils ont vu que notre ressource était en très bonne santé et qu'ils se sont dits qu'ils viendraient chercher leur part.
C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. Tout le monde en veut une partie. Mais parfois, tout ce qui brille n'est pas or. Cette ressource est tellement délicate. À mes yeux, l'avenir des vingt prochaines années se jouera cette année.
M. Bill Matthews: Alors, ce que vous craignez, c'est de voir le crabe subir le même sort que la morue et de vous retrouver devant rien.
M. Peter Noël: Nous avons moins de bateaux, 130 bateaux. Nous avons amené le stock au bord de la ruine. Je l'ai vu moi-même. Et j'y ai participé. Alors nous avons décidé qu'il était temps de faire quelque chose.
Maintenant, n'allez pas vous imaginer que nous étions tous heureux. Si vous connaissez les pêcheurs de votre propre région—et je connais ceux de la mienne—, eh bien, nous ne voulons pas arrêter de pêcher. Mais nous devons examiner la situation avec notre raison et voir la lumière, relever nos manches et régler le problème. Notre industrie était malade et nous devions la soigner. Et nous l'avons fait. C'est quelque chose qui n'a pas été fait dans le reste du pays. Lorsque nous voyons les avances délibérées pour... Les chiffres ne signifient pas grand-chose. Mais les données... Plus tôt, nous parlions de l'effort, pour ramener ces contingents sur la terre ferme. Combien de branches de cet arbre allons-nous devoir briser pour avoir l'arbre? Nous n'allons prendre que la branche du haut.
C'est compliqué, mais j'espère avoir répondu à votre question.
M. Bill Matthews: Vous l'avez fait. Je voulais juste comprendre ce qui est à l'origine de tout cela. Il nous faut le comprendre. Et pour cela, nous devons savoir ce qui est à l'origine de cette mesure. C'est pourquoi j'ai posé la question.
M. Peter Noël: Après les efforts que nous avons mis dans cette pêcherie depuis 1989 dans le but de la rebâtir et de la rajeunir et pour essayer de garder nos entreprises florissantes, l'an dernier nous avons vu l'industrie traditionnelle en arriver au point où les choses commençaient à aller assez bien. Chaque fois qu'il se passe quelque chose qui risque de provoquer des changements importants dans ce système, ce qui nous vient à l'esprit, c'est quel effet cela aura sur nous?
M. Bill Matthews: Est-ce que quelqu'un...
Le président: Je suis désolé, monsieur Matthews, mais votre temps est écoulé. Je vous redonnerai la parole dans un autre tour.
Monsieur Cummins.
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président. Veuillez excuser mon retard.
Monsieur le président, vous avez posé plus tôt certaines questions qui m'ont paru très intéressantes concernant le revenu brut. Pour poursuivre dans cette veine, il serait intéressant de savoir quel est l'investissement qu'une personne doit consentir. Je me demande si quelqu'un pourrait me donner une évaluation même grossière de la valeur d'un bateau, du permis et des engins nécessaires pour qu'un membre de votre association puisse prendre part à cette pêche.
[Français]
M. Paul Boudreau: Selon les années, on investit entre 50 000 $ et 75 000 $ par pêcheur, directement au niveau des sciences, pour le pesage à quai, pour tous les programmes dont on a parlé tout à l'heure et pour le paiement des permis de pêche. Cela représente entre 50 000 $ et 75 000 $, selon les années et les quotas.
 (1220)
[Traduction]
M. John Cummins: Le point que je veux...
Le président: Une seconde, que nous puissions clarifier les choses.
Monsieur Roy.
[Français]
M. Jean-Yves Roy: C'étaient la valeur des navires et l'investissement.
M. Paul Boudreau: La pêche est faite par des navires, ce qui représente de 1,2 million à 1,5 million de dollars. Il faut penser que c'est une pêche semi-hauturière, où il faut se déplacer beaucoup. Quand on évalue le TPA et le stock, on le fait à la grandeur du golfe. Il faut donc que les pêcheurs soient en mesure de se déplacer pour couvrir tout le golfe afin d'être capables de pêcher. Il est bien important que cette pêche soit faite par des semi-hauturiers. Sinon, il y aurait des efforts de pêche dans des zones spécifiques, ce qui serait très dangereux pour la survie du stock.
[Traduction]
M. John Cummins: Est-ce que le chiffre de 1,2 à 1,5 million de dollars représente la valeur du bateau? Quelle serait la valeur du permis pour ce bateau?
[Français]
M. Paul Boudreau: Ces dernières années, la valeur des permis était entre 1 million et 1,5 million de dollars pour ceux qui achetaient les bateaux. Quand le ministère a commencé à vouloir acheter des bateaux, la valeur des permis a augmenté sensiblement. Les offres du ministère pour les permis sont d'environ 2 millions de dollars en moyenne par permis, à cause du rachat pour les autochtones.
Mais il faut penser que la demande de permis pour les autochtones de la part du ministère est beaucoup plus élevée que l'offre. À ce moment-là, le ministère paie pour retirer son permis à quelqu'un, pour enlever son entreprise à quelqu'un, pour retirer quelqu'un du domaine de la pêche. Souvent, ce sont des pères de famille qui vendent, alors qu'ils auraient pu avoir de la relève, etc. Bien sûr, cela fait augmenter la valeur des permis, mais c'est une augmentation artificielle. Les permis vont sûrement descendre à un niveau plus bas quand la demande sera moins forte sur le marché.
[Traduction]
M. John Cummins: À combien estimez-vous la valeur des engins de pêche nécessaires pour participer à cette pêche?
[Français]
M. Paul Boudreau: La valeur des engins de pêche dépend des bateaux, mais on peut considérer qu'elle varie de 50 000 $ à 75 000 $.
[Traduction]
M. John Cummins: Alors, essentiellement, le bateau, le permis et les engins de pêche valent autour de 2,2 à 3 millions de dollars.
[Français]
M. Paul Boudreau: Oui, mais il faut considérer que quelqu'un qui est obligé d'acheter son permis ne pourra pas nécessairement acheter un bateau neuf en même temps. Il sera obligé de pêcher avec un vieux bateau, parce qu'il ne pourrait pas rentabiliser à la fois un permis et un bateau neuf. Il faut aussi penser qu'il y a beaucoup de gens qui sont la relève de la pêche et qui sont maintenant obligés d'acheter les permis, contrairement à ce que c'était il y a plusieurs années. Avant, les pêcheurs avaient tous reçu gratuitement leur permis.
[Traduction]
M. John Cummins: Le point que je veux faire valoir, c'est qu'il faut un investissement substantiel pour participer à cette pêche. Alors, si vous examinez le revenu net du capitaine, de celui qui est propriétaire du bateau, du permis et des engins de pêche, il semblerait qu'il touche un rendement de peut-être 5 p. 100 par année pour son investissement. Si le revenu net après les dépenses s'élève à, disons, 150 000 $, il gagne 150 000 $ sur un investissement net de près de 3 millions de dollars dans certains cas. Est-ce bien cela?
M. Peter Noël: Au cours des dernières années, quelques jeunes ont fait leur entrée dans la pêche au coût de 2,5 millions de dollars—et parfois plus. Si vous prenez en considération le fait que ces chiffres concernent des entreprises déjà établies et que, dans les systèmes de financement normaux, vous devez frapper à la porte des banques pour obtenir des sommes aussi élevées, vous devez faire face à des paiements annuels s'élevant à près de 500 000 $ juste pour payer le capital et les intérêts. Une fois que cette pêche commencera à décliner, nous allons voir quelques scènes pénibles, surtout lorsque les prix du marché normal se situent autour de 1,2 à 1,3 million de dollars. Depuis que l'on a entrepris le rachat volontaire dans le cadre de l'entente consécutive au jugement Marshall, les prix ont triplé.
 (1225)
M. John Cummins: Merci.
Le président: Merci, monsieur Cummins.
Les 160 titulaires de permis permanents ou les pêcheurs traditionnels n'ont pas payé 1 million de dollars par permis, n'est-ce pas?
M. Peter Noël: Non.
Le président: Non. Alors, nous parlons des nouveaux venus.
Très bien, merci.
Monsieur Efford.
M. R. John Efford: J'ai juste quelques points rapides à souligner.
De toutes ces discussions que nous avons eues ce matin, je crois comprendre que le problème, ce n'est pas combien d'argent les gens gagnent, ou comment il en coûte pour bâtir un bateau, ou combien il en coûte pour payer l'équipage d'un bateau, mais la cogestion avec le ministre et le MPO—peu importe qui s'adonne à être ministre—et la conservation et la protection de la ressource à long terme.
Un point n'était pas clair pour moi. Dans le cas des Autochtones, ai-je bien compris qu'ils reçoivent un certain contingent de crabes et qu'ils en prennent beaucoup plus que ce qui est autorisé et qu'ils peuvent envoyer plus de bateaux de pêche pour capturer la même quantité de crabes?
Pouvez-vous me donner une brève explication?
M. Peter Noël: Ce que nous avons vu, c'est ce qui a été rapporté. Comme je l'ai dit plus tôt, ce n'est pas vraiment la même chose que ce qui a été attribué. Ce n'est pas le fait qu'il y a un bateau qui entre dans la pêche et un autre qui en sort, un pêcheur qui entre et un autre qui sort, parce qu'il y a des endroits où le contingent d'un seul bateau est divisé en six, sept ou huit parts par les pêcheurs non traditionnels, qui vont pêcher ce contingent pour le compte des Autochtones. Et ils ne montrent pas aux Autochtones à pêcher. Dans beaucoup de cas, on ne cesse de réclamer plus de crabes.
[Français]
M. Paul Boudreau: Notre principal problème est qu'on est en train de négocier une entente de cogestion et que le ministre a retiré de la négociation l'accès temporaire ou permanent. Le ministre a décidé, avant de négocier, que c'était un accès permanent à la pêche qu'il voulait. À ce moment-ci, on ne peut même pas négocier ça dans le cadre du programme. C'est le noeud du problème. Le ministre a exclu du mandat du négociateur la négociation de l'accès.
M. Daniel Desbois: Je voudrais aussi ajouter que les autochtones ont reçu plus de quotas qu'on n'en avait racheté. Il n'y a que 5 p. 100 des quotas qui ont été rachetés, et cette année, ils en ont probablement 15 p. 100. Les autochtones reçoivent donc près de 10 p. 100 de plus que ce qui a été racheté.
[Traduction]
M. R. John Efford: Ma dernière question pour la journée, c'est si vous pouvez nous dire combien de permis permanents vous craignez que le ministre accorde. Y a-t-il un chiffre?
M. Peter Noël: Eh bien, monsieur, si vous examinez les demandes qui nous sont faites, nous en voyons plus de 2 000.
Le président: Merci, monsieur Efford.
Monsieur Roy.
[Français]
M. Jean-Yves Roy: Merci, monsieur le président.
On a répondu en partie à ma question, mais j'en avais une dernière.
Vous avez parlé de l'état des stocks, mais très brièvement. Vous nous avez dit que nous étions sur la pente descendante du cycle. J'ai regardé ce que vous nous aviez déjà fourni concernant l'état des stocks en 2003. Vous parlez d'une diminution de 35 p. 100 du nombre de femelles, d'une diminution de la taille des femelles, d'une diminution de 35 p. 100 de la production totale d'oeufs. Ça veut dire qu'à l'heure actuelle, d'après ce que vous nous dites, la ressource est sur une pente descendante. Dans le cycle de sept ans, où se situe-t-on à peu près en ce moment?
M. Joël Gionet: On est d'accord avec les scientifiques du ministère pour dire que pour le printemps 2003, le printemps 2004 et le printemps 2005, ça ira. Il y a des juvéniles actuellement. Mais après l'année 2005, il y aura un manque de juvéniles. On prévoit que la prochaine remontée aura lieu seulement à partir de 2015. Il y aura donc une période où il y aura un creux énorme.
En ce qui concerne les femelles, s'il y a 35 p. 100 de moins de femelles sur les fonds, la prochaine remontée du stock va diminuer de 35 p. 100. Donc, on ne verra peut-être jamais plus 20 000 tonnes ou 22 000 tonnes de contingent. C'est ça qui nous inquiète.
 (1230)
M. Jean-Yves Roy: Quel est le seuil de rentabilité pour quelqu'un qui vient d'acheter son bateau ou qui l'a seulement depuis quelques années?
Si le contingent diminue en termes de livres, ça veut dire que l'ensemble des pêcheurs vont voir leur quota diminuer. Quel serait le seuil de non-rentabilité de quelqu'un qui vient de se procurer un navire et qui est obligé de faire des remboursements? Quel serait le seuil, en livres, à partir duquel ce ne serait plus rentable?
M. Paul Boudreau: J'ai participé à une étude économique en 1996, avant l'entente de cogestion qu'il y a eu à ce moment-là. Étant donné les prix qui sont demandés aujourd'hui sur le marché et l'état du stock, d'après les scientifiques, les permis sont aujourd'hui surévalués. C'est bien évident que celui qui achète un permis à la valeur marchande d'aujourd'hui ne pourra pas passer à travers le creux.
La meilleure preuve de ça, c'est qu'actuellement, on ne peut pas se faire financer sur le marché conventionnel pour acheter un permis. Il faut que quelqu'un puisse faire une mise de fonds très importante, parce que si on veut se faire financer sur le marché bancaire pour acheter un permis, on ne peut pas obtenir de tels montants. Les institutions financières n'acceptent pas d'accorder un financement aussi élevé.
M. Daniel Desbois: Je voulais aussi vous rappeler, monsieur Roy, qu'il n'y a plus rien de gratuit, même pas les transferts de permis entre père et fils. Les permis sont évalués à leur valeur marchande. Ça fait de grosses sommes à transférer, et on n'a pas un sou à donner au père pour son fonds de retraite. Ce sont des sommes qui vont de 500 000 $ à 800 000 $.
M. Jean-Yves Roy: Vous seriez donc d'accord quant à la demande d'un crédit d'impôt, comme ça se fait en agriculture?
M. Daniel Desbois: Bien sûr que oui.
Le président: Monsieur Farrah, allez-y.
M. Georges Farrah: J'ai seulement une question. Je voudrais revenir sur le plan de cogestion que vous avez signé et qui a été reconduit temporairement l'an dernier pour être renégocié au cours de l'année. Comment ce plan de cogestion a-t-il fonctionné entre 1997 et 2001? Je sais qu'à un moment donné, il y a eu des problèmes de perception ou de confiance à l'égard du ministère, à cause de bris de conditions, peut-être. Donc, j'aimerais avoir le portrait global de la situation.
M. Joël Gionet: En 1997, le contexte était différent. Comme M. Godin le disait, il y a eu une crise dans la péninsule au printemps 1996, et cette crise a été valable, à mon avis. Le stock s'était effondré en 1989, et les pêcheurs avaient mis la main à la pâte et reconstruit le stock. Mais lorsqu'est venu le temps de récolter le fruit de nos efforts, le ministère a décidé de partager le stock avec les autres. Il est donc normal, monsieur Godin, qu'il y ait eu une crise dans la péninsule acadienne au printemps 1996.
Après cette crise, en 1997, une entente a été signée, mais à la dernière minute, Pêches et Océans est venu nous voir et nous a dit: «C'est le deal; take it or leave it.» À ce moment-là, on a signé. Il n'y a pas eu de négociations vraiment fortes à la table. Les négociations ont été assez courtes.
On a poursuivi l'entente de cogestion la première année, la deuxième année et la troisième année. La quatrième année, au mois de septembre 1999, est venu le jugement Marshall de la Cour suprême. Dans notre entente de cogestion, il y avait un article qui prévoyait du contingent pour les autochtones, mais ce n'était pas assez.
Donc, nous nous sommes assis avec le ministère et nous avons dit que nous ne voulions pas que les citoyens canadiens paient et que nous ne voulions pas d'argent. Nous avons dit au ministère de prendre le tonnage dont il avait besoin pour les autochtones et de nous le rendre l'année suivante, tonne pour tonne, sachant que le stock allait remonter. C'était une sorte de prêt.
On a signé des documents, puis l'année suivante, le ministère a refusé de nous le redonner, car il voulait le donner à d'autres. C'est comme ça que la dernière entente s'est terminée.
Plus tard, le ministère a décidé de nous le verser en argent. À ce moment-là, le prix du crabe était de 2,80 $ la livre. Tous les pêcheurs pensaient recevoir 2,80 $, mais on nous a offert seulement 2 $. La dernière entente s'est vraiment mal terminée. À la fin de cette entente, on a demandé à plusieurs reprises un médiateur pour régler les conflits. Cela n'a pas fonctionné. Le ministère n'a jamais voulu nommer un médiateur. On est aujourd'hui en 2003 et on n'a toujours pas d'entente.
Voilà l'histoire de l'entente de 1997-2001.
 (1235)
Le président: Y a-t-il d'autres questions?
[Traduction]
Monsieur Cummins.
M. John Cummins: Ce que je voulais faire ressortir avec les questions que j'ai posées auparavant, c'est qu'on procède ici à un investissement considérable et que le rendement de cet investissement n'est pas énorme. Encore une fois, pour continuer sur la question que le président a soulevée, ce que l'on n'a pas dit ici, c'est que, comme dans le cas de toute entreprise, vous devez remplacer de l'équipement; vous devez remplacer les bateaux et les engins de pêche. Alors, si vous faites de l'argent vous devez le réinvestir dans l'industrie. Je pense qu'il faut le dire. Je ne pense pas qu'il y ait de désaccord sur cette question de l'autre côté de la table.
Le président: Il s'agit d'une belle et longue question. Dites oui tout simplement.
M. John Cummins: C'est l'énoncé d'un fait qui doit être reconnu ici.
M. Peter Noël: Monsieur, juste pour vous donner un petit exemple, le bateau que j'exploite est âgé de 34 ans. Je le garde à flot. Je n'ai pas cessé de le réparer et de remplacer des pièces au cours des cinq ou six dernières années. Nous avons pensé en construire un autre, mais avec toute l'incertitude qui plane sur notre avenir, nous avons peur de prendre une telle décision. Nous savons que remplacer un bateau de 65 pieds coûte de 1,4 à 1,5 million de dollars. Avant de s'engager dans une telle aventure, il faut y penser à deux fois et s'assurer de prendre la bonne décision.
Comme Joel l'a dit plus tôt, nous sommes des entreprises et ces entreprises ont une fonction. Lorsque vous faites le décompte final, 50 à 60 p. 100 des revenus sont consacrés à la main-d'oeuvre et à l'exploitation et peut-être 10 p. 100 sont réservés à l'entretien, sur une base permanente. Un nouveau venu doit consacrer 30 à 35 p. 100 du revenu brut juste pour le service de la dette. Il faut que l'avenir s'annonce plus prometteur pour nous inciter à cesser de rafistoler notre vieux bateau. Pourtant, de nouveaux bateaux ont fait leur apparition dans la pêcherie au cours des dernières années et il s'agit d'un investissement qui varie de 1 à 2 millions de dollars. Il y a des personnes qui peuvent profiter d'un deuxième permis.
M. John Cummins: Il y a quelques années, je suis tombé sur certains documents par le biais de la Loi sur l'accès à l'information. Je vais tenter de les retracer pour vous. L'essentiel du commentaire d'un responsable du MPO—et cela ne concernait pas cette pêche en particulier—c'était que les pêcheurs faisaient de l'argent. Le responsable du ministère ne comprenait pas tout à fait. Il pensait que si des gens font de l'argent, c'est qu'il doit certainement y avoir quelque chose qui ne va pas. Ils ont cherché à faire exactement ce qu'ils essaient de faire maintenant—diviser et redistribuer le ressource plutôt que de dire: «Nous sommes devant une réussite ici parce que des gens font un salaire décent».
Je vais essayer de trouver ces documents parce que je pense que vous allez trouver intéressantes les observations du responsable.
Le président: J'espère que vous allez partager cette information avec nous, parce qu'il ne fait aucun doute que cela nous intéresse.
 (1240)
M. John Cummins: Très certainement, monsieur le président.
Le président: Messieurs, je veux vous remercier beaucoup de votre exposé. Je pense qu'il était excellent. Vous avez très bien défendu votre point.
Comme vous l'avez entendu dans la réponse que j'ai donnée à la question de M. Godin, notre comité se réunira, discutera de la question et décidera s'il veut entendre d'autres témoignages et, si tel est le cas, de qui. Nous vous laisserons savoir quelles seront notre décision et nos intentions.
Je tiens à vous assurer que quelle que soit la décision que nous prendrons, nous la prendrons rapidement. Nous n'allons pas nous éterniser sur cette question. Nous allons en discuter très prochainement et, ensuite, nous allons prendre notre décision et vous en aviser.
Je veux juste vous remercier, tous, d'être venus faire part de vos préoccupations à notre comité. Merci beaucoup.
M. Georges Farrah: Avons-nous une réunion jeudi?
Le président: Oui, une réunion est prévue jeudi. Nous allons donner des instructions à nos attachés de recherche au sujet du rapport sur les espèces envahissantes. Je ne pense pas que cela prenne deux heures, alors, nous pourrions mettre cette question à l'ordre du jour de jeudi, de manière que nous puissions discuter de la suite à lui donner. Nous pourrions également saisir cette occasion pour traiter de quelques autres questions, dont la pêche au saumon sur la côte Ouest.
M. Georges Farrah: Le ministre prendra une décision très prochainement sur la question du crabe dans la zone 12...
Le président: Peut-être est-ce alors une bonne idée d'en discuter jeudi.
[Français]
M. Joël Gionet: Au nom de l'industrie et au nom de tous les pêcheurs, je vous remercie énormément, monsieur le président et membres du comité, de nous avoir permis d'exposer notre point de vue. Nous espérons que vous allez faire un suivi. Si vous voulez qu'on revienne, on peut le faire n'importe quand. Merci beaucoup.
[Traduction]
Le président: Merci. Thank you.
La séance est levée.