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OGGO Rapport du Comité

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INTRODUCTION

1.1             Le présent rapport contient les constatations, les conclusions et les recommandations du Sous-comité sur les questions relatives à l’examen du Bureau du Commissaire à la vie privée que le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires a mis sur pied en octobre dernier.

1.2             Le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires a mis sur pied le Sous-comité comme il s’y était engagé dans son cinquième rapport intitulé étude relative au Bureau du commissaire à la vie privée et déposé auprès du Greffier de la Chambre en juin 2003 :

Concernant les éventuels outrages au Parlement : le Comité demeure très préoccupé par la possibilité que M. Radwanski et certains employés du Commissariat aient commis un outrage au Parlement en mentant délibérément dans leur témoignage devant nous. Cette question est extrêmement grave, et sera considérée par le Comité cet automne, dans une étude qui fera l’examen de la valeur des procédures relatives aux témoignages devant les comités parlementaires, ainsi que des restrictions et des obligations visant les fonctionnaires dans leur relation avec le gouvernement1.

1.3             Le raccourcissement prévu de la session d’automne empêche l’exploration de certains éléments du programme d’étude envisagé au printemps dernier. Cependant, les membres du Comité croient nécessaire de déposer un rapport avant l’ajournement du Parlement afin de régler des préoccupations immédiates concernant la contribution d’un certain nombre d’individus aux audiences ayant débouché sur le cinquième rapport du Comité. Le Sous-comité a examiné de près la question principale dont il a été saisi : la conduite de certain témoins durant les audiences de juin. Au cours de ce travail, il a fait un suivi auprès des témoins dont la conduite fait l’objet du présent rapport. Ceux-ci ont été avisés de l’intention des membres du Sous-comité d’entendre tout autre témoignage dont ils voudraient faire part, mais ils ne se sont pas prévalus de ce privilège.

CONTEXTE

1.4             La préoccupation relative à d’éventuels outrages dont les membres du Comité font état dans leur cinquième rapport prend son origine dans les témoignages du Commissaire à la protection de la vie privée en date des 9 et 13 juin 2003 (à huis clos); d’agents du Commissariat à la protection de la vie privée (CPVP) en date du 12 juin 2003 (à huis clos) et du 17 juin 2003 (à huis clos); et d’agents du Commissariat à l’information qui ont été convoqués à l’audience du 12 juin parce qu’ils étaient au courant de questions liées au CPVP, ainsi que d’allégations du Commissaire en matière de protection de la vie privée. Comme ces témoignages ne concordent pas sur certains points d’intérêt central pour le Comité, il se peut que certains témoins aient sciemment induit le Comité en erreur pendant ces audiences.

1.5             La nécessité de réexaminer les propos de certains témoins et de transformer cette étude en une enquête sur d’éventuels outrages au Parlement découle d’une tradition procédurale de longue date qui établit une catégorie de fautes qui sont essentiellement des attaques contre le Parlement. Ces fautes, qui ont fini par être appelées «  outrages au Parlement  », sont des fautes graves pour deux raisons étroitement liées. D’abord, elles menacent directement l’efficacité du Parlement lui-même en compromettant son aptitude à exercer des fonctions centrales comme étudier les projets de loi et exiger des comptes du gouvernement. Ensuite, en minant l’efficacité du Parlement, ces fautes constituent une attaque contre le processus démocratique lui-même et, lorsqu’elles ont lieu au Canada, menacent directement les intérêts de chaque citoyen ou résident. De même, tous les tribunaux et la plupart des tribunaux administratifs sont dotés de pouvoirs et de mécanismes qui leur permettent de préserver l’intégrité de leurs actes de procédure et de protéger les éléments de preuve qu’ils reçoivent.

1.6             C’est parce que les institutions parlementaires doivent se protéger elles-mêmes contre les actes susceptibles de miner leur efficacité que chaque chambre du Parlement a le pouvoir de juger si tel ou tel comportement constitue un outrage. Cette étude est une contribution à ce travail et fait état de questions que les membres du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires estiment mériter l’attention immédiate de la Chambre.

A.        Le concept

1.7             Selon Marleau et Montpetit — auteurs de l’ouvrage contemporain définitif sur la procédure parlementaire au Canada — le concept d’outrage se définit en termes larges comme suit :

Même si elle ne porte atteinte à aucun privilège particulier, toute conduite qui cause préjudice à l’autorité ou à la dignité de la Chambre est considérée comme un outrage au Parlement. L’outrage peut être un acte ou une omission. Il n’est pas nécessaire de faire réellement obstacle au travail de la Chambre ou d’un député; la tendance à produire un tel résultat suffit2.

1.8             Le concept d’outrage est non limitatif, d’où la possibilité que des menaces imprévues contre l’efficacité du Parlement surviennent et que le Parlement doive y remédier. Cependant, dans le cadre de la longue tradition de la procédure parlementaire, un ensemble d’actes relativement précis ont fini par être reconnus comme des outrages. Derek Lee, coprésident du Sous-comité et auteur d’une étude spécialisée sur la capacité du Parlement à convoquer des personnes et à exiger la production de documents et de dossiers, cite la liste d’actes que l’éminente autorité britannique en matière de procédure, Erskine May, a dressée et que voici :

a)refuser de prêter serment ou de s’engager autrement à dire la vérité;
b)refuser de répondre aux questions;
c)refuser de produire des documents en sa possession ou détruire des documents en sa possession dont la production est exigée;
d)prévarication;
e)faire un faux témoignage;
f)supprimer sciemment la vérité;
g)induire en erreur de façon constante un comité;
h)traiter un comité à la légère;
i)faire preuve d’insolence;
j)faire preuve d’impertinence;
k)comparaître en état d’ébriété3.

1.9             Il y a des allégations d’outrage dans tous les parlements et les décisions sont prises au cas par cas. Il est beaucoup plus rare que le concept d’outrage soit réévalué à la lumière des précédents. La plus récente étude majeure par des parlementaires sur le concept d’outrage a été menée au Royaume-Uni par le Standing Joint Committee on Parliamentary Privilege en 19994. Les conclusions de cette étude sont compatibles avec les définitions données ci-dessus puisque un outrage peut être :

tout comportement (y compris des paroles) qui entrave indûment ou vise à entraver indûment l’une ou l’autre chambre ou encore un de ses membres ou de ses agents dans l’exercice de ses fonctions.5

1.10         Ce comité a également observé que les catégories de comportements pouvant constituer un outrage ne sont pas fermées. Cependant, il a dressé une liste de genres d’outrages qui ont fini par être généralement reconnus. C’est une liste plus longue que celle d’Erskine May, mais elle cadre manifestement avec les listes antérieures. Voici les comportements qui y sont énumérés :

interrompre ou perturber les délibérations ou commettre quelque autre écart de conduite en présence de la Chambre ou d’un comité;
attaquer, menacer, entraver ou intimider un membre ou un agent de la Chambre dans l’exercice de ses fonctions;
tenter délibérément d’induire en erreur la Chambre ou un comité (par une déclaration, un élément de preuve ou une pétition);
publier délibérément un compte rendu faux ou trompeur des délibérations d’une Chambre ou d’un comité;
emporter sans autorisation des documents appartenant à la Chambre;
falsifier ou modifier des documents appartenant à la Chambre ou officiellement présentés à un comité de la Chambre;
modifier, supprimer, cacher ou détruire délibérément des documents dont la Chambre ou un comité exige la production;
sans excuse valable, ne pas se présenter devant la Chambre ou un comité après avoir été cité à comparaître;
sans excuse valable, refuser de répondre à une question ou de fournir une information ou de produire des documents dont la Chambre ou un comité exige la production;
sans excuse valable, désobéir à un ordre légal de la Chambre ou d’un comité;
empêcher ou entraver une personne qui exécute un ordre légal de la Chambre ou d’un comité;
corrompre ou tenter de corrompre un parlementaire en vue d’influencer sa conduite dans le cadre des travaux de la Chambre ou d’un comité;
intimider, empêcher ou retenir quelqu’un de témoigner ou de témoigner de façon exhaustive devant la Chambre ou un comité;
corrompre ou tenter de corrompre un témoin;
attaquer, menacer ou désavantager un parlementaire ou un ancien parlementaire à cause de son comportement au Parlement;
divulguer ou publier le contenu d’un rapport ou des témoignages d’un comité spécial avant leur dépôt à la Chambre.

En outre, dans le cas des parlementaires :

accepter un pot-de-vin visant à influencer leur comportement dans le cadre des délibérations de la Chambre ou d’un comité;
enfreindre un ordre de la Chambre;
manquer à une exigence de la Chambre stipulée dans un code de déontologie ou autrement concernant la possession, la déclaration ou l’enregistrement d’intérêts financiers ou la participation à un débat ou à d’autres délibérations6.

1.11         L’importance centrale de l’intégrité ou de l’exhaustivité de l’information fournie au Parlement par les témoins ou les parlementaires ressort clairement de la liste du comité de 1999 comme de celle de Erskine May. Il en est ainsi à cause du rôle primordial de l’information dans les débats et les délibérations qui sont essentiels au travail du Parlement et à l’efficacité de sa contribution au processus démocratique.

B.        Critères essentiels

1.12         Les quatre genres de comportements énumérés dans la liste du comité du Royaume-Uni qui font ressortir le plus clairement l’importance d’une information exacte pour le travail du Parlement sont également ceux qui se rapportent directement aux questions examinées par le Sous-comité. Lorsque la Chambre des communes se penchera sur les constatations et les recommandations relatives au comportement de certains témoins qui ont comparu devant le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires dans le cadre de ses audiences de juin 2003 sur la conduite de l’ancien Commissaire à la protection de la vie privée, les membres du Sous-comité croient qu’elle trouvera les critères suivants d’une importance capitale :

1.L’individu a-t-il délibérément tenté d’induire en erreur la Chambre ou un comité (par une déclaration, un élément de preuve ou une pétition)?
2.L’individu a-t-il falsifié ou modifié ou fait falsifier ou modifier des documents appartenant à la Chambre ou officiellement communiqués à un comité ou à la Chambre?
3.L’individu a-t-il modifié, supprimé, caché ou détruit un document dont la Chambre ou un comité a exigé la production?
4.L’individu a-t-il, sans excuse valable, négligé de se présenter devant la Chambre ou un comité après avoir été cité à comparaître?

CONSTATIONS, CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

1.13         Pendant les audiences de juin 2003, le Comité a entendu des déclarations détaillées d’une personne qui avait déjà fait part à des membres de ses préoccupations concernant certaines pratiques au Commissariat comme il est décrit en détail dans le cinquième rapport du Comité.

1.14         Nous avons également reçu le témoignage d’autres employés du Commissariat à la protection de la vie privée (CPVP) qui étaient en mesure de corroborer les déclarations de la personne précitée sur des points essentiels et qui l’ont fait. Dans certains cas, ces individus ont comparu devant le Comité volontairement. La cohérence entre les témoins corroborants volontaires et ceux qui ont comparu devant le Comité seulement parce que celui-ci leur a demandé de le faire et l’existence de preuves matérielles corroborantes sur certains points essentiels ont grandement contribué à convaincre les membres du Comité de l’exactitude du compte rendu des événements fourni par la personne qui a soulevé des questions au sujet des pratiques en usage au Commissariat à la protection de la vie privée.

1.15         Plusieurs conclusions clés découlant de ce témoignage et présentées en détail dans le cinquième rapport du Comité ont été contredites par tel ou tel témoin. Les voici :

1.a)Une lettre envoyée par l’ancien Commissaire à la protection de la vie privée au sous-ministre de la Justice le 2 août 2002 a été réimprimée avec un paragraphe en moins, puis timbrée du 2 août 2002, date de l’original et ce, sur l’instruction de M. Radwanski, alors Commissaire à la protection de la vie privée.
 b)La lettre falsifiée se trouvait dans une documentation communiquée au Comité avec une lettre signée par le directeur exécutif, M. Julien Deslisle, en date du 21 mars 2003.
 c)La lettre d’accompagnement n’indiquait pas que la lettre falsifiée avait été modifiée, mais simplement qu’il s’agissait d’une «  copie d’une lettre du 2 août 2002 (Radwanski—Rosenberg) concernant le rapport du groupe de travail sur l’accès à l’information  ».
 d)Plusieurs individus ont exprimé à M. Radwanski des préoccupations concernant l’envoi au Comité d’une lettre modifiée et au moins un individu a suggéré que la lettre serve de base à une note d’information à l’intention du Comité. Les préoccupations et l’option d’une note d’information ont été rejetées par M. Radwanski.
2.La documentation du 21 mars 2003 contenait également des demandes de remboursement de dépenses fournies en réponse à une demande formulée par M. John Bryden, député, à la réunion du Comité du 18 mars 2003. Selon la lettre, il s’agissait d’une «  copie des demandes de remboursement de dépenses du 1er avril 2001 au 18 mars 2003  ». Les noms figurant sur les demandes de remboursement originellement fournies par le Commissaire à la protection de la vie privée avaient été biffés. Selon la copie obtenue par la suite des demandes de remboursement sans biffures, les dépenses avaient souvent été engagées en rapport avec des déjeuners de travail entre M. Radwanski et Mme Donna Vallières, directrice générale, Politique stratégique et Communications. En outre, les demandes avaient été soigneusement examinées avant d’être communiquées au Comité et, sur quatre d’entre elles, des données avaient été masquées à l’aide d’un matériau correcteur. Ces modifications correspondaient à des suggestions de M. Radwanski. Au moins une des biffures — celle relative à des escales à Honolulu en route pour la Nouvelle-Zélande — a été faite sur l’ordre exprès de M. Radwanski.
3.Pour aller au fond des diverses allégations faites devant le Comité, il fallait que les pratiques de gestion financière et de dotation en personnel en usage au CPVP fassent l’objet d’une enquête particulière de la vérificatrice générale et de la Commission de la fonction publique. Une de ces allégations portait, entre autres, qu’il régnait au CPVP une atmosphère de peur et d’intimidation comme en ferait foi cette réunion de gestion qui a eu lieu pendant l’enquête que le Comité a menée en juin et où M. Radwanski aurait déclaré que s’il découvrait l’identité du «  mouchard  », c’en serait fait de sa carrière dans la fonction publique.

1Le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires, cinquième rapport, Étude relative au Bureau du commissaire à la vie privée, juin 2003, p. 20.
2Robert Marleau et Camille Montpetit, La procédure et les usages de la Chambre des communes, Chambre des communes, Ottawa, 2000, p. 52.
3Derek Lee, LL.B., député, The Power of Parliamentary Houses to Send for Persons, Papers & Records: A Sourcebook on the Law and Precedent of parliamentary Subpoena Powers for Canadian and Other Houses, University of Toronto Press, Inc., Toronto, 1999, p. 180.
4Grande-Bretagne, Standing Joint Committee of the House of Lords and the House of Commons on Parliamentary Privilege, First Report, mars 1999. Accessible en ligne à : http://www.publications.parliament.uk/pa/jt199899/jtselect/jtpriv/43/4302.htm.
5Ibid., chapitre 6, p. 1.
6Ibid., p. 2.