SNAS Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Sous-comité sur la Sécurité nationale du Comité permanent de la justice et des droits de la personne
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 3 juin 2003
º | 1615 |
Le président (M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)) |
M. Paul E. Kennedy (sous-solliciteur général adjoint principal, Sécurité nationale, ministère du Solliciteur général) |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
º | 1620 |
º | 1625 |
º | 1630 |
Le président |
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne) |
M. Paul E. Kennedy |
º | 1635 |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
º | 1640 |
Le président |
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.) |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
º | 1645 |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
º | 1650 |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Kevin Sorenson |
º | 1655 |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
» | 1700 |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
» | 1705 |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
M. Paul E. Kennedy |
Mme Marlene Jennings |
Le président |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
» | 1710 |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
» | 1715 |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
M. Kevin Sorenson |
M. Paul E. Kennedy |
» | 1720 |
M. Kevin Sorenson |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
M. Paul E. Kennedy |
Le président |
CANADA
Sous-comité sur la Sécurité nationale du Comité permanent de la justice et des droits de la personne |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 3 juin 2003
[Enregistrement électronique]
º (1615)
[Traduction]
Le président (M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)): Chers collègues, nous sommes ici aujourd'hui pour examiner autant que faire se peut le sujet des directives ministérielles données par le Solliciteur général au Service canadien du renseignement de sécurité.
Nous avons avec nous aujourd'hui, à titre de témoin, M. Paul Kennedy, sous-solliciteur général adjoint principal chargé de la sécurité nationale.
Monsieur Kennedy, peut-être y aura-t-il d'autres témoins avec vous, peut-être pas, mais...
M. Paul E. Kennedy (sous-solliciteur général adjoint principal, Sécurité nationale, ministère du Solliciteur général): Oui, je suis accompagné de Joanne Gibb. Cela dit, Joanne ne fera pas de déclaration aujourd'hui, mais je pensais que ce serait une bonne expérience pour elle étant donné qu'elle est analyste principale de la politique au sein de notre direction de la sécurité nationale, histoire de lui donner un avant-goût des affaires parlementaires. Rien ne vaut le fait de plonger dans l'eau pour savoir de quoi il retourne. Ainsi, quand elle sera appelée à comparaître à titre de témoin, elle sera en mesure de vous accorder toute son attention.
Le président: C'est très bien pensé. Merci beaucoup.
Avez-vous une déclaration liminaire à nous faire, monsieur Kennedy?
M. Paul E. Kennedy: Oui, j'en ai une. Nous avons fait parvenir de la documentation au greffier, et je vais la parcourir avec vous. Ce n'est pas très long, mais j'espère que cela servira de cadre contextuel pour nos discussions.
Je sais que le comité connaît assez bien la structure du ministère du Solliciteur général, particulièrement Mme Jennings, et je vais donc vous faire grâce des détails. Grosso modo, notre portefeuille comprend la GRC, le Service canadien du renseignement de sécurité, la Commission des libérations conditionnelles, le Service correctionnel Canada ainsi que le ministère. Comme vous le savez, il existe trois organismes d'examen: la Commission des plaintes du public contre la GRC, le Comité externe d'examen de la GRC et le Bureau de l'enquêteur correctionnel. Bien entendu, le conseiller principal en matière de politiques pour le ministre est le sous-solliciteur général.
Notre rôle, dans ce domaine, celui des activités ministérielles, est de lui prêter assistance notamment en émettant des directives efficaces à l'intention des organismes. À ce sujet, nous avons les directives ministérielles, dont nous allons discuter aujourd'hui. Les directives ministérielles relatives à la fonction du renseignement de sécurité précèdent la création du SCRS tel qu'il existe actuellement.
Le prédécesseur du SCRS était le Service de sécurité de la GRC, et il tombait, lui aussi, sous le coup de la directive ministérielle aux termes du paragraphe 5.(1) de la Loi sur la GRC. En vertu de cette loi, le ministre avait le pouvoir d'émettre des directives, tandis que le commissaire était chargé du contrôle et de la gestion de la GRC. La direction du service de sécurité à l'époque s'intéressait à des questions comme les arrangements de liaison avec l'étranger, l'utilisation des sources humaines et les enquêtes à l'étranger, pour nous citer que ces quelques exemples.
La Commission Macdonald avait examiné, entre autres, la question des directives ministérielles à la GRC et recommandé l'établissement d'un nouvel organisme civil qui serait sous la houlette du solliciteur général. Quand le SCRS a été créé en 1984, les parlementaires ont fait en sorte que le ministre de l'époque continue d'avoir le pouvoir légal d'émettre des directives au service du renseignement de sécurité et que ce pouvoir soit être inscrit dans la Loi sur le SCRS.
Les principes du contrôle et de la responsabilité ministériels sont en fait au coeur de la démocratie parlementaire canadienne. Si on avait l'occasion de relire les débats qui avaient eu lieu à l'époque, notamment en ce qui a trait aux définitions des menaces pesant sur la sécurité du Canada, on constaterait que l'on s'interrogeait sur la portée de ces menaces, et on avait sciemment rédigé la loi pour qu'elle reste suffisamment vague pour qu'elle puisse s'adapter au contexte actuel. Ainsi, on n'offre pas de définition de l'« espionnage » et autres concepts du genre. En effet, les parlementaires avaient estimé à l'époque qu'il était plus approprié que la question soit traitée par la responsabilité ministérielle, c'est-à-dire que ce serait le ministre qui définirait l'ampleur et la nature de ces concepts au moyen de ses directives.
La Loi sur le SCRS garantit au ministre la pleine connaissance et le pouvoir de direction relativement aux politiques, aux activités et à la gestion du Service. La directive ministérielle est émise conformément au paragraphe 6.(2) de la Loi sur le SCRS; elle balise clairement l'orientation du service et la responsabilité ministérielle. Cela dit, elle offre suffisamment de souplesse opérationnelle, de même qu'elle établit des critères de reddition de comptes aux organismes d'examen, puisque tant le CSARS que l'IG peuvent évaluer les activités du SCRS. Il est clair qu'une copie de toutes les directives ministérielles doit être fournie au CSARS.
Les directives ministérielles offrent, somme toute, un cadre d'orientation et de responsabilité générale. Le directeur approuve les activités opérationnelles quotidiennes, et le ministre doit approuver certaines activités spécifiques, notamment l'utilisation des sources humaines dans les établissements d'enseignement postsecondaire, et le directeur doit consulter le ministre à l'avance sur certaines activités opérationnelles délicates.
Les directives ministérielles sont émises pour diverses raisons. Au départ, lorsque le SCRS a été créé, la plupart des directives du Service de sécurité de la GRC de l'époque se sont immédiatement appliquées au nouvel organisme civil.
Les recommandations faites par les comités parlementaires ont aussi influencé l'orientation du SCRS. Par exemple, en 1990, le Comité spécial d'examen de la Loi sur le SCRS et de la Loi sur les infractions en matière de sécurité rendait public un rapport intitulé Une période de transition mais non de crise, dans lequel il recommandait l'abrogation de l'alinéa 2d) de la Loi sur le SCRS se rapportant aux activités subversives. Cette recommandation, fondée sur une recommandation faite dans le rapport Osbaldeston quelques années auparavant, a accouché d'une directive ministérielle mettant fin aux enquêtes menées en vertu de l'alinéa 2d) de la Loi. Osbaldeston, vous vous en souvenez peut-être, avait recommandé l'élimination de la Direction de l'antisubversion.
Enfin, les directives ministérielles peuvent aussi être émises à la suite de recommandations faites par le CSARS et l'IG. En d'autres mots, ce sont des outils qu'on utilise pour régler les problèmes.
Les directives ministérielles couvrent un large éventail d'activités du SCRS, de l'orientation stratégique aux missions interorganismes, en passant par l'aiguillage des enquêtes, notamment dans des secteurs névralgiques.
Émises en février 2001, les directives ministérielles, y compris la directive relative à la reddition de comptes et la direction opérationnelle du SCRS, témoignaient de la maturation du Service et amorçaient la délégation d'une partie de la responsabilité du ministre au directeur. À titre d'exemple, quand le Service veut modifier un arrangement pris en vertu de l'article 17 et qu'il s'agit d'un arrangement pris avec un gouvernement étranger, l'approbation du ministre n'est plus requise. Le pouvoir d'approbation a été délégué au directeur.
La directive relative à la reddition de comptes énonce les responsabilités et les obligations de rendre compte du Solliciteur général et du directeur. Le ministre fournit un cadre stratégique au SCRS pour faire en sorte que les activités du Service soient conformes aux priorités et aux attentes du gouvernement. À cette fin, le Solliciteur général rend compte des activités du SCRS au Parlement. Le directeur, quant à lui, assure le contrôle de la gestion du Service. Le directeur informe le ministre des réalisations du SCRS ainsi que de toute controverse possible; de même, il est tenu de présenter un rapport annuel au ministre à cet égard.
La directive opérationnelle est stratégique de par sa nature et repose sur cinq principes fondamentaux qui régissent les activités opérationnelles du SCRS. Ces principes sont la primauté du droit, la proportionnalité, les libertés civiques, une approche progressive en matière d'intrusion et un niveau supérieur d'approbation pour les techniques les plus envahissantes.
La directive englobe donc de nombreuses questions opérationnelles, y compris les opérations conjointes, l'utilisation des ressources humaines et la collecte de renseignements à l'étranger, pour ne citer que quelques exemples. Le ministre doit être informé de toute question comportant un risque élevé ou susceptible de porter à controverse.
D'après l'examen du CSARS, le nouveau recueil :
... rationalise passablement l'orientation stratégique du Service par le gouvernement et, de l'avis du Comité, témoigne d'une maturation du cadre légal et juridique qui régit le travail du SCRS. Les directives ministérielles sont désormais considérablement simplifiées et uniformes quant au langage employé et forment un document concis et cohérent. |
En plus du recueil, le ministre émet une directive sur les exigences nationales en matière de renseignements de sécurité. En effet, les exigences nationales sont communiquées annuellement au directeur et contiennent l'orientation générale du gouvernement quant à ce sur quoi le SCRS devrait concentrer ses efforts d'enquête, ainsi que des consignes relatives à la collecte et à l'analyse de renseignements ainsi qu'aux capacités consultatives du Service.
Stratégique, cette directive souligne les priorités du gouvernement pour l'année. Les exigences nationales pour 2003-2004 viennent d'être énoncées. J'en ai des exemplaires avec moi, que nous sommes bien entendu disposés à remettre au comité.
º (1620)
Par souci d'ouverture et de transparence, nous avons fait en sorte que les exigences nationales de cette année soient préparées sous forme de document non classifié. Il s'agit du document qui a été transmis par le ministre à Ward Elcock, dont nous avons fait parvenir des exemplaires au CSARS. J'en ai remis des exemplaires au président si vous désirez en obtenir un. J'ai aussi d'autres exemplaires ici, que vous êtes libres de remettre aux membres de votre comité ordinaire.
Ces documents sont très récents, puisque la loi exige qu'on les remette au CSARS. Si je ne me trompe, les lettres sont datées du 2 juin. Ils ont été officiellement remis au CSARS et approuvés par le président aujourd'hui. C'est donc tout à fait d'actualité. Conscients, comme je l'ai dit, du rôle important que vous avez à jouer, nous vous les avons apportés aussitôt que possible. Je vais rester dans les parages, alors si vous le voulez, vous pouvez prendre le temps de les lire et de me poser des questions.
Par ailleurs, vous constaterez que les directives de cette année relativement aux exigences continuent d'accentuer les thèmes principaux, à savoir le contre-terrorisme, en particulier l'extrémisme sunnite, la prolifération des armes de destruction massive, l'espionnage et les activités influencées par l'étranger, le filtrage de sécurité et la collecte de renseignements de sécurité à l'étranger.
De toute évidence, les exigences ont peu changé au cours des dernières années. Toutefois, depuis les événements du 11 septembre, une attention et une priorité nouvelles ont été accordées à l'importance de maintenir des liaisons et des relations efficaces, comme en témoigne le document.
Comme le veut la pratique, le Service prend ses directives ministérielles et les transforme en politiques opérationnelles que le personnel du SCRS peut appliquer directement. La progression est logique : de la loi aux directives ministérielles aux procédures opérationnelles. Cela garantit une méthode pour faire en sorte que le Service remplit son mandat et ses fonctions comme il se doit.
Le directeur approuve toutes les nouvelles politiques et modifications, lesquelles sont d'abord examinées par le comité des politiques opérationnelles du SCRS. Mes remarques s'inscrivent dans le contexte des documents relatifs à la responsabilité globale que j'ai mentionnée. Ce que vous avez sous les yeux, c'est simplement un document annuel. Le comité interne du SCRS examine tous les changements stratégiques. Le ministère est membre du comité, ce qui nous permet d'examiner les nouvelles politiques et de donner notre point de vue avant que celles-ci ne soient appliquées. Le CSARS examine régulièrement les politiques opérationnelles du SCRS pour faire en sorte qu'elles sont conformes à la Loi sur le SCRS et aux directives ministérielles.
Les directives ministérielles reposent sur le principe de la reddition de comptes. Il existe plusieurs mécanismes visant à faire en sorte que les directives ministérielles sont appliquées et observées à la lettre. Représentant vigilant du ministre, l'Inspecteur général du SCRS a un rôle à jouer pour ce qui est de l'examen de la conformité du Service aux directives ministérielles.
Aux termes de la Loi sur le SCRS, le certificat que délivre l'inspecteur général au ministre doit signaler toute action ou décision prise par le SCRS qui contrevient à une directive émise par le Solliciteur général. Conformément à son mandat, le CSARS examine aussi les directives ministérielles. Comme je l'ai dit plus tôt, les récents rapports annuels du CSARS ont évoqué les directives ministérielles ainsi que les exigences nationales annuelles.
Par le passé, le CSARS s'est penché sur l'adéquation de certaines directives, notamment la manière dont le SCRS les avait interprétées dans ses propres politiques et procédures, ainsi que la manière dont elles avaient été appliquées au cas par cas.
En siégeant à divers comités, notamment le comité des politiques opérationnelles, le comité d'examen des demandes de mandat et le comité de ciblage et des exigences, le ministère est en mesure de surveiller la mise en application des directives ministérielles ainsi que la conformité à celles-ci. Le ministre lui-même, dans le cadre de rencontres bilatérales avec le directeur, peut s'assurer du respect de ces directives.
Enfin, le SCRS publie un rapport public annuel faisant état de ses activités de l'année précédente. Par extension, cela confirme que le SCRS observe la directive sur les exigences nationales.
º (1625)
C'est la version la plus récente du recueil des directives ministérielles. Elle date du 15 février 2001, si je ne me trompe. Pour le situer en contexte, le recueil renferme deux directives ministérielles et comprend 20 pages en tout. Si je dis cela, c'est que si vous avez la version AIPRP, vous allez probablement vous demander s'il vous manque des pages. Est-ce que le recueil contient une centaine de pages? En tout, il contient 20 pages.
Les deux directives ministérielles concernent la responsabilité et l'obligation de rendre compte, un document de deux pages, et les opérations du SCRS, document de 18 pages renfermant les annexes A à G. Ces deux directives ministérielles remplacent les 26 directives ministérielles précédentes qui ont été retirées, car il y avait manifestement des chevauchements entre elles.
À l'origine, le recueil a été rendu public en vertu de la Loi sur l'accès à l'information en novembre 2001. Environ 70 p. 100 du document avait été dévoilé à l'époque. Les portions qui n'avaient pas été divulguées contenaient soit un secret du Cabinet, soit des informations sur les méthodes opérationnelles du SCRS, soit des informations se rapportant aux sources humaines et autres choses de cette nature.
La directive ministérielle sur les exigences nationales pour 2003 et 2004, qui porte sur le ciblage, a été rendue publique. Vous avez reçu copie de ce document, qui, comme je l'ai dit, a été dévoilé dans son intégralité.
La directive sur les exigences nationales de l'année dernière, document semblable aux fins de l'AIPRP, représente environ 98 p. 100 du document. En fait, seul un fragment de phrase a été supprimé, mais nous avons néanmoins tenté de faire en sorte que l'essentiel du document vous soit remis, et vous avez entre les mains le document dans son intégralité.
Voilà qui termine mon tour d'horizon des directives ministérielles. Je demeure à votre disposition pour répondre à vos questions.
º (1630)
Le président: Merci infiniment.
Cette séance en particulier pourrait être perçue par certains comme étant peu habituelle, en tous les cas, par le président. Quoi qu'il en soit, vous nous avez fourni bien des informations aujourd'hui, et nous vous en remercions. Le président du comité que je suis a l'impression que le SCRS et le ministère facilitent la tâche du sous-comité, tâche qui nous a été mandatée par notre statut d'élus et par la Chambre. Elle consiste à examiner le travail du SCRS et les organismes connexes contribuant à la sécurité nationale.
Cela étant, je vous remercie de nouveau. Cela ne signifie pas que tous nos collègues autour de la table trouveront que les choses sont parfaites, mais le volume d'information croissant qui est fourni au sous-comité nous est très utile dans nos délibérations.
Je vais commencer par M. Sorenson pour sept minutes.
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Merci. Je voudrais remercier le sous-solliciteur général adjoint principal d'être venu aujourd'hui. Chaque fois que j'essaie de lui rendre hommage, je l'appelle adjoint du sous-solliciteur plutôt que sous-solliciteur général. Il m'a corrigé par le passé, et je vais donc tâcher de ne pas me tromper cette fois-ci.
Votre comparution ici est opportune. En effet, le SCRS a défrayé la chronique récemment, et d'aucuns se sont posés des questions sur la manière dont le SCRS mène ses activités, notamment ses opérations quotidiennes. Bien entendu, l'affaire Air India est revenue dans l'actualité ces derniers jours, et le SCRS est de nouveau sur la sellette, et les gens se demandent qui est responsable, qui prend des décisions.
Cela dit, avant d'aborder cette question, je veux vous poser une question concernant les directives ministérielles. À quelle fréquence, une moyenne normale, le ministre émet-il une nouvelle directive au directeur du SCRS?
M. Paul E. Kennedy: Nous avons une version AIPRP, et nous pouvons vous la remettre. Les documents sont rédigés maintenant à la lumière de l'expérience acquise depuis 1984. Il est clair que durant les premières années, des difficultés surviennent. C'est un peu la crise de croissance traditionnelle. On analyse la situation et on se rend compte qu'il y a des problèmes ça et là. Certains de ces problèmes sont spécifiques à...
À compter de 2000, ou à peu près, on s'est repenché sur tous ces problèmes et on s'est dit qu'il fallait corriger la structure. C'est ainsi qu'est né ce document sur la reddition de comptes. C'est un document d'envergure qui énonce les principes de la reddition de comptes, c'est-à-dire ce à quoi l'on peut s'attendre de quelqu'un. Il couvre suffisamment de sujets pour que l'on n'ait pas besoin d'en ajouter des nouveaux.
Nous avons maintenant près de 20 ans d'expérience derrière nous, et je pense que nous avons bien défini les relations. Les relations ont été conçues de telle façon que le directeur a l'obligation, comme je l'ai indiqué, de gérer tout ce qui peut prêter à controverse, qui est délicat sur le plan politique, qui comporte des facteurs de risque, soit des choses qui pourraient entacher la réputation du Canada ou de l'institution elle-même, c'est-à-dire le SCRS. Les comportements sont décrits. Au fil des ans, on a beaucoup appris.
À ma connaissance, depuis que nous avons émis les directives en 2001, nous n'avons pas eu à émettre de directives spécifiques. En d'autres termes, les autres directives offrent un bon cadre qui couvre tous les comportements; c'est au directeur qu'il incombe d'être vigilant pour déceler ce qui cloche et le signaler au ministre.
º (1635)
M. Kevin Sorenson: Ces directives faisaient-elles partie de la Loi sur le SCRS en 1984?
M. Paul E. Kennedy: Oui.
M. Kevin Sorenson: Des directives avaient-elles été émises de la même manière à la GRC avant 1985?
M. Paul E. Kennedy: Oui, il y avait des directives en place se rapportant au service de sécurité de la GRC. Durant les premiers jours, nombre de ces directives ont continué à s'appliquer, notamment en ce qui a trait au comportement opérationnel, c'est -à-dire les choses dont nous avons parlé comme les enquête dans des endroits névralgiques. Les universités sont manifestement l'un de ces endroits. Ce sont donc des endroits délicats, et s'il faut s'y rendre pour effectuer un travail ayant trait à la sécurité nationale, on doit généralement obtenir une approbation préalable du ministre. Il y avait un régime en place qui traitait cette question, et il en va de même pour la liaison avec les services de renseignements étrangers. Quand le changement s'est produit en 1984, ces dispositions sont restées en place. Par la suite, elles ont été peaufinées et améliorées. On les a gardées, puis regroupées dans un recueil qui sert de guide pour le Service.
Nombre d'entre elles ont dû être réexprimées sous forme de politiques opérationnelles. Nous avions en quelque sorte des documents fourre-tout, et nous nous sommes dit qu'il était temps de rationaliser les choses. Certains documents ont été spécifiques à des cas, et les événements n'allaient pas se reproduire. D'autres, en revanche, ont dû être repris dans des politiques opérationnelles qui sont actuellement en vigueur au sein d'une organisation qui est arrivée à maturation. C'est ce qui nous a fait réfléchir et décidé de mettre au point une structure. On a dit au directeur quelles étaient ses responsabilités générales, ce à quoi on s'attendait de sa part, et on lui a donné une plus grande marge de manoeuvre, ainsi que les critères régissant les rapports avec le ministre.
Le document qui est publié annuellement est celui que je viens de vous remettre, et il s'agit des exigences de ciblage annuel. Une des préoccupations naturelles des gens est que si leur service de renseignements recueille des informations, il faut que ce soit dans le but de conseiller le gouvernement du Canada. Le service ne doit pas être un agent qui ne répond qu'à lui-même. En dernière analyse, la reddition de comptes, c'est faire en sorte que le gouvernement soit celui qui décide de ce qui est important. Il s'agit d'un outil de gestion du risque, car on n'aura pas les ressources suffisantes pour réagir à toutes les menaces possibles. On doit être en mesure d'aller voir les échelons supérieurs pour leur dire ce que le gouvernement veut que l'on fasse. C'est ce qui est exprimé dans ce document émis par le ministre à l'intention du directeur, dans lequel il lui précise les activités sur lesquelles il devrait concentrer les efforts du service. Cela dit, quelque chose peut très bien survenir dans le courant de l'année, et on s'attend évidemment à ce que le service puisse y réagir, mais l'orientation principale doit rester la même.
M. Kevin Sorenson: Hier, j'ai vu une émission sur le SCRS, et on a expliqué que le SCRS a eu différents directeurs, comment ils sont arrivés et comment ils sont repartis. Dans ce documentaire, il a été en partie question de l'obligation de rendre compte du directeur. En dernière analyse, tout doit converger vers la responsabilité ministérielle, n'est-ce pas?
Nous avons vu des directeurs du SCRS à qui l'on a montré la porte de sortie pour une raison ou une autre. Mais selon les documents qui m'ont été remis ici aujourd'hui, le directeur, sous la direction du ministre, assure le contrôle et la gestion du Service et de toutes les questions connexes. Le directeur est responsable, mais n'empêche qu'il y ait une responsabilité ministérielle qui a préséance sur tout cela.
Supposons qu'il y a une menace ou qu'un problème survient, qui détermine s'il faut changer—je ne veux pas utiliser le mot « mandat » parce que je comprends que le SCRS a un mandat global se rapportant à la sécurité du pays. Qui déciderait si l'émission d'une nouvelle directive s'impose pour réagir à une nouvelle menace? Est-ce en fonction de la menace, est-ce à la suite de quelque chose de soudain comme le 11 septembre? A-t-on émis une nouvelle directive immédiatement après le 11 septembre?
M. Paul E. Kennedy: Non. Les exigences tiennent compte du contexte mondial, c.-à-d. de la situation de par le monde au moment où le document a été rédigé. Le directeur, comme ses employés, est chargé d'évaluer continuellement l'environnement pour voir si quelque chose qui survient pourrait être défini comme une menace aux termes de l'article 2. Le but est d'être souple. Ce n'est pas coulé dans le béton, c.-à-d. qu'on ne dicte pas tout ce qu'il faut faire. Pour ce qui est de son mandat, le Service s'en tient aux définitions prévues à l'article 2 de la Loi, pas uniquement aux critères que nous avons établis pour vous ici.
Si une nouvelle menace survient, le Service l'évalue. La procédure normale pour évaluer les menaces commence par le bas en remontant. Celles que nous avons évoquées dans le document se situent à ce niveau-ci et sont déjà connues du public. Quand quelque chose de nouveau est détecté, on analyse normalement ce qui est du domaine public ou ce que prévoient les accords d'échange d'information avec un autre pays. L'information arrive, puis elle est examinée par ce que l'on appelle le CARC. Il s'agit d'un comité chargé de l'évaluation des cibles et de l'analyse. L'information passe par différents niveaux, le premier niveau, le deuxième et le troisième, chaque niveau correspondant au niveau de connaissance de la question et du niveau des techniques d'intrusion.
Au premier niveau, il s'agit d'information provenant de ce que l'on appelle des sources ouvertes et que l'on partage avec d'autres services. Au deuxième niveau, il faut que la menace concerne des cibles spécifiques ici, et cela nécessite de la surveillance ou même la mobilisation de sources humaines. Le troisième niveau est un niveau précurseur en ce sens que c'est à ce stade que l'on doit. outre les techniques dont nous disposons et qui ne nécessitent pas de mandat, recourir à une autorisation judiciaire pour obtenir des mandats de perquisition, d'interception de communications et autres choses de cette nature.
D'une manière générale, la menace ne tombe pas du ciel. Elle survient, et elle est souvent croissante. Il ne faut pas oublier que le Service est une sorte de fil-piège. Le Service fait en quelque sorte de la projection pour anticiper les menaces. Normalement, il n'est pas pris au dépourvu. Il est toujours à l'affût des menaces, les analyse et les voit se rapprocher. S'il détecte quelque chose de nouveau, il le signale au ministre.
Des rencontres bilatérales sont tenues régulièrement avec le ministre pour discuter justement de ces menaces. Conformément à la Loi habilitante, nous siégeons à tous les comités où l'on examine toutes ces questions—aux trois niveaux—ainsi que les mandats. En outre, le ministre doit donner son approbation personnelle à chaque demande d'autorisation judiciaire avant que celle-ci ne soit acheminée à un juge. Par définition, le ministre est au courant de tout ce qui se passe.
º (1640)
Le président: Merci, monsieur Sorenson.
Madame Jennings.
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.):
Dans vos normes nationales, document que vous venez de nous donner, à la page 2, troisième paragraphe, on dit : « Le Canada est confronté, à un degré moindre, à des problèmes de terrorisme ». Ensuite, si vous descendez au quatrième paragraphe, on ne parle plus de terrorisme, on parle d'extrémisme. En effet, on peut y lire :
... à des problèmes de terrorisme liés aux droits des Autochtones, aux suprémacistes blancs, à la souveraineté, aux droits des animaux, à l'environnement et à l'antimondialisation. |
Est-ce qu'on ne devrait pas plutôt parler d' « extrémisme »? Je pense que la plupart des Canadiens, lorsqu'ils définissent terrorisme, ne qualifieraient pas ainsi ce que nous avons vécu jusqu'à présent au Canada dans le contexte des droits des Autochtones, des suprémacistes blancs, de l'environnement, de l'antimondialisation et des droits des animaux. Ils parleraient peut-être d'extrémisme. Je me demande pourquoi on utilise les deux termes.
M. Paul E. Kennedy: Je ne peux qu'essayer de vous l'expliquer. En réalité, comme vous le savez, s'agissant de la définition de la menace à la sécurité du Canada, nous devons nous en remettre à la définition au paragraphe 2(c) qui ne contient pas de définition de terrorisme. Le mot « terrorisme » n'apparaît pas. C'est peut-être un mot code pour invoquer tout comportement extrémiste qui encourage le recours à la violence « contre des personnes ou des biens afin de réaliser un objectif politique, religieux ou idéologique ». Voilà ce que dit la loi. Nous pouvons toujours réfléchir à la question de savoir si nous devons parler de terrorisme ou d'extrémisme.
Mme Marlene Jennings: Cela m'a frappé parce qu'au paragraphe suivant, on parle d'extrémisme. Il m'est alors venu à l'esprit qu'à propos des diverses activités violentes dont nous avons été témoins au Canada dans le contexte de questions comme les droits des Autochtones, je songe à Oka, les droits des animaux, l'antimondialisation, ce qui s'est passé à Québec, la plupart des Canadiens serait probablement plus à l'aise si nous parlions « d'extrémisme » que de « terrorisme ».
º (1645)
M. Paul E. Kennedy: C'est noté.
Mme Marlene Jennings: Oui.
Ensuite il y a le contre-espionnage, la sécurité économique. Êtes-vous en mesure de nous dire quel pourcentage des enquêtes du SCRS porte sur la sécurité économique? Je fais référence à ceci:
... tentative illégale, clandestine ou coercitive par des gouvernements étrangers d'obtenir un accès non autorisé à des renseignements économiques, tels que des données confidentiels ou de la technologie, pour réaliser un gain économique. |
Pouvez-vous nous donner une idée du pourcentage que représentent ces enquêtes?
M. Paul E. Kennedy: Je n'ai pas de pourcentage. Je peux tenter de vous l'obtenir.
Mme Marlene Jennings: Ce serait intéressant.
M. Paul E. Kennedy: Je peux vous dire que certainement plus de 70 p. 100 de nos ressources sont dédiées au contre-terrorisme puisque c'est évidemment notre préoccupation première. Par définition, le reste des ressources est affecté aux autres secteurs y compris le contre-espionnage. C'est un aspect très important qui préoccupe beaucoup le Canada parce que nous avons des établissements de premier plan sur le plan de l'innovation technologique. Nous savons qu'ils intéressent d'autres pays qui les prennent pour cibles.
Je vais tenter de voir si je peux obtenir ces données de nos collègues au SCRS pour vous présenter un pourcentage. Je pense qu'on constatera que ces tentatives sont parrainées par l'État, par des États qui cherchent toutes sortes de choses ici, notamment cela. Il est donc difficile de retirer les données concernant cet aspect pour obtenir un pourcentage distinct.
Mme Marlene Jennings: Très bien. Merci.
Voilà qui amène mon autre question. Vous parlez des trois niveaux d'intrusion—intrusion moindre, intrusion et intrusion plus grande. Existe-t-il une liste ou des critères qui ont été élaborés afin de déterminer quel niveau d'intrusion est nécessaire dans une enquête pour maintenir un équilibre entre l'évaluation du risque de la menace, de façon à éviter que cela se fasse au petit bonheur ..?
M. Paul E. Kennedy: Je ne sais pas. je vais devoir vérifier. Il y a certainement des documents. Est-ce que je peux y obtenir accès... Je vais me renseigner.
Mme Marlene Jennings: Une chose est claire, monsieur Kennedy. Ce serait très utile si vous pouviez au moins nous dire qu'il existe un ensemble de critères établis et bien définis qui servent à déterminer le niveau d'intrusion. Nous savons déjà qu'il existe des modèles d'évaluation du risque—pour déterminer le niveau de risque, de menace perçue. Par ailleurs, existe-t-il le même genre de modèle pour déterminer le niveau d'intrusion des techniques d'enquête appropriées, compte tenu de l'évaluation de la menace perçue?
M. Paul E. Kennedy: Je peux vous dire, d'après mon expérience personnelle, pour avoir fait partie du comité pertinent pendant plusieurs années, qu'il existe une procédure très rigoureuse. C'est le directeur du service qui préside lui-même les réunions. On doit préparer une documentation détaillée sur la menace, si elle répond à la définition prévue à l'article 2, si l'on s'est fondé sur des normes objectives—la validité et la fiabilité de l'information—parce que tout cela entre en ligne de compte.
Tous ces critères sont évalués et comme je l'ai dit, on commence par un, deux et trois. Chaque niveau a sa durée précise avec réexamen et révision et on doit justifier, à chaque fois, le passage du niveau 1 au niveau 2. Lorsqu'on arrive au niveau 2, tout est fonction de la présence de la menace. Dure-t-elle? S'est-elle avérée importante? La technique utilisée au niveau 1 ne suffit-elle pas à démontrer que l'enquête doit être poussée plus loin—de ce point de vue-là donc, il y a une proportionnalité entre la menace telle qu'elle est connue et l'adéquation ou l'inadéquation des moyens utilisés. C'est alors qu'on décide de passer au niveau suivant.
À chacun de ces niveaux, les décisions sont prises de façon très délibérée et prudente, et c'est la même chose avant de passer au troisième niveau. A mesure qu'on progresse d'un niveau d'intrusion à un autre, on fait appel à des ressources rares et coûteuses. Égoïstement, les éléments tels que la surveillance n'entrent pas en jeu tant qu'il n'est pas démontré que l'affaire est grave, que c'est approprié, que cela vaut la peine et que la menace répond clairement à la définition.
C'est alors qu'on passe au niveau suivant. Ce niveau trois est le plus difficile, bien sûr, car cela signifie que vous vous préparez à demander un mandat pour faire appel à tout l'appareil des tribunaux, etc.
Il existe donc une structure de comité officielle où sont représentés les divers intéressés et où l'on applique des critères très stricts, où tout est documenté.
J'espère que cela vous est utile.
º (1650)
Mme Marlene Jennings: C'est très utile. Je connais un peu les techniques courantes d'enquête policière et les démarches que doit suivre l'agent de police qui veut obtenir un mandat d'arrestation ou un mandat d'écoute électronique dans le cadre d'une enquête criminelle. Cela ne semble pas du tout se comparer au genre de gouvernance ou de surveillance du point de vue du nombre de personnes qui participent à la décision à l'interne lorsqu'on est rendu à ce troisième niveau dont vous parlez, le plus intrusif, afin que le ministère ou l'organisme puisse déterminer que le moment est maintenant venu de demander un mandat pour permettre l'écoute électronique ou une autre forme intrusive de surveillance électronique, etc.
Je pense que c'est très important, parce que ce n'est pas le même niveau d'attention. Cela ne signifie pas que les forces policières ne font pas bien leur travail, c'est dans un contexte tout à fait différent assorti d'exigences différentes. Le même niveau de participation n'est peut-être pas nécessaire, même probablement pas nécessaire.
M. Paul E. Kennedy: J'aimerais souligner que cela a toujours été très rigoureux, très centralisé, en partie parce que si vous regardez la définition des menaces à la sécurité du Canada, il ressort clairement qu'il s'agit d'activités qui ne sont pas à première vue nécessairement illégales. Il faut donc un mécanisme pour s'assurer que l'on maintient un équilibre approprié.
La définition comporte une réserve, c'est-à-dire que ces menaces, etc., n'incluent pas « une activité licite de défense d'une cause, de protestation ou de manifestation d'un désaccord ». En partie, le contrat, si je peux le qualifier ainsi, que le gouvernement de l'époque avait avec le Parlement et la population canadienne, c'est qu'il y aurait surveillance ministérielle afin d'assurer un cadre rigoureux à ces termes assez généraux. Il faut employer des termes généraux parce que les menaces changent et évoluent.
J'ai travaillé et dans les forces policières et avec les forces de sécurité nationale; je connais donc les deux. J'ai obtenu des mandats d'écoute électronique des tribunaux dans le cadre d'activités policières. En l'occurrence, la procédure est extrêmement rigoureuse puisque le directeur est personnellement responsable rendre des comptes et que, pour l'obtention de mandats, le ministre lui-même est impliqué avant de même que l'on s'adresse au tribunal. Une fois devant les tribunaux, la situation est la même que lorsque les forces policières demandent un mandat.
Évidemment, la grande difficulté pour bien des gens, c'est que lorsque ces dispositions ont été mises en place, les mandats du SCRS pouvaient durer jusqu'à un an, ce qui était tout à fait unique, mais attribuable à la nature de la menace. Normalement, les mandats policiers sont de 30 jours. On peut les augmenter à 60 jours, et ils sont renouvelables. Dans les affaires mettant en cause le crime organisé, on peut obtenir une prolongation jusqu'à un an, et je pense que c'est également un an pour les actes de terrorisme. C'est là un changement.
Ensuite nous avons le CSARS et le IG et d'autres mécanismes—évidemment, les comités parlementaires—qui suivent la situation. Du côté policier, on compte sur le fait que des accusations seront portées, qu'on se présentera devant le tribunal où le juge vous le dira-- on le suppose--, si vous avez commis un impair. C'est le cycle de la rétroaction.
Le président: Merci, madame Jennings.
Monsieur Sorenson, nous commençons maintenant les tours de trois minutes.
M. Kevin Sorenson: Vous en avez peut-être déjà parlé, mais si le SCRS participe à une enquête, quand et comment décide-t-on qu'il faut une instruction ministérielle? Est-ce lorsque le SCRS estime que cela dépasse son mandat ou le champ habituel de ses activités? Comment détermine-t-on qu'il faut avoir un décret ou une instruction du ministre? Qui prend cette décision?
Ces modalités sont assez générales. On les retrouve dans le rapport annuel, qui est non classifié. Ce sont en quelque sorte des instructions ministérielles assez encourageantes, je suppose.
º (1655)
M. Paul E. Kennedy: Regardez-vous les exigences annuelles?
M. Kevin Sorenson: Oui.
M. Paul E. Kennedy: Deux choses. Il y a ce document dont je viens de parler, celui sur la reddition de comptes auquel Mme Jennings a fait référence. Nous avons des directives institutionnelles, structurées du ministre qui portent sur les responsabilités et les obligations de rendre compte. Je vais simplement les parcourir avec vous pour bien vous expliquer.
Ce sont ces directives qui définissent les principes et les directives concernant ce que fera le directeur. La loi prévoit que le directeur doit obtenir autorisation avant de faire certaines choses.
M. Kevin Sorenson: Ce sont les directives annuelles?
M. Paul E. Kennedy: Non, c'est ce que nous appelons un ajout. C'est distinct. Je vous ai donné ce document parce qu'il venait d'être publié.
Toutefois, comme je l'ai dit, il y a une autre série de documents. Ce sont les documents de 2001. C'était un recueil qui portait sur les responsabilités et les obligations de rendre compte. Ces dispositions sont en place. On y trouve toutes les directives, celles prévues par loi et les autres.
On y précise certaines choses dont le directeur est tenu de discuter avec le ministre. Il y a d'autres directives où le ministre précise les balises à l'intérieur desquelles le directeur exécute ses fonctions et ses responsabilités. Par exemple, il faut respecter la règle de droit, utiliser des techniques proportionnelles, employer des techniques qui comportent le moins d'intrusion possible. Si vous devez recourir à des techniques plus intrusives, vous devez vous assurer d'obtenir au préalable l'autorisation de vos supérieurs. Toutes ces exigences s'appliquent.
Le document que j'ai ici s'intitule « Directives du ministre—obligation de rendre compte »
M. Kevin Sorenson: Là où on voit « Confidentiel » en haut de page?
M. Paul E. Kennedy: Oui. Évidemment, il faudrait enlever ça puisque le document a été déclassifié.
C'est le document dont je parlais. On y précise plusieurs aspects. Il y a des directives sur les évaluations de sécurité. On y précise que les enquêtes doivent être équilibrées, que lorsqu'il existe des motifs de douter de la loyauté ou de la fiabilité d'une personne, on doit fournir l'occasion à celle-ci de dissiper les doutes. Que l'information recueillie doit être conservée à part des dossiers d'enquête; qu'il faut prendre toutes les mesures raisonnables pour assurer l'exactitude de l'information. Ces éléments sont définis.
S'il s'agit de renseignements étrangers, outre toutes les contraintes statutaires et réglementaires, il faut assurer une protection suffisante de l'information sur les citoyens canadiens en vue de la préparation de rapports destinés à être communiqués. En effet, on met l'accent sur l'entité étrangère—bien que les étrangers, si le Canada est le point de mire, vont évidemment parler du Canada.
Il y a toute une série de directives sous « Ententes et coopération il s'agit des ententes structurées et l'on précise que le service doit informer le ministre de toute situation susceptible de prêter à controverse, d'entraîner l'annulation d'une entente, ou d'avoir des effets défavorables sur les relations interministérielles ou intergouvernementales ». On précise que le rapport annuel doit faire l'état de ces ententes. Il est également question de la compatibilité avec notre politique étrangère. Ce sont donc tous les cadres que nous avons mis en place.
Outre ce document qui précise tout ce que nous voulons savoir, soit en vertu de la Loi ou des directives du ministre, il y a un autre document que j'ai remis au début de la réunion qui porte sur les activités annuelles. C'est quelque chose que nous préparons à tous les ans. Ces autres documents sont officiels.
Pour ce qui est de ce rapport annuel, manifestement, nous dépendons des services de renseignements pour savoir ceux qui existent, l'objet des enquêtes, les nouvelles tendances, pour ensuite confirmer que le service est sur la bonne voie. Il y a le marchandage bureaucratique normal pendant qu'on prépare le document. Ensuite le document est envoyé au ministre et s'il en convient, il donne ses autorisations.
En fait, ce n'est pas uniquement le ministre. Le document est présenté à un comité du Cabinet qui regarde l'ensemble de la situation dont ceci est un aspect. Et ensuite le ministre réexplique la chose au SCRS.
Si un problème se présente, cela peut déclencher un processus. Le CSARS pourrait examiner quelque chose dans le cadre de ses rapports parce qu'on y a entendu des plaintes ou parce qu'on mène sa propre enquête. Le comité, peut de sa propre gouverne, examiner tous les dossiers du service. En outre, l'inspecteur général peut examiner n'importe quel dossier. Si on relève des problèmes, ou si nous décelons des problèmes, nous en informerions évidemment le ministre pour lui dire : « Nous pensons qu'il nous faut quelque chose ici. Il y a une lacune. Il nous faut mettre en place quelques paramètres ». C'est ainsi que nous avons toujours procédé.
» (1700)
Le président: C'était peut-être un tour double de trois minutes.
Est-ce que je peux résumer? Nous utilisons peut-être des termes différents pour parler de choses différentes ou de mêmes choses. Pour ce qui est des directives du ministre, vous avez parlé d'un recueil. Est-ce le document intitulé « Responsabilité et obligation de rendre compte? »
M. Paul E. Kennedy: En effet.
Le président: Très bien, voilà pour celui-là.
Nous n'avons plus les 26 directives ministérielles qui ont été retirées.
On parle également dans la trousse d' instructions de reddition de comptes; je présume que c'est le même document.
M. Paul E. Kennedy: En effet.
Le président: Ensuite il y a un document intitulé « Directives sur l'établissement des objectifs », mais j'en conclus que ces directives sont en fait les directives sur les exigences nationales annuelles. Est-ce bien cela?
M. Paul E. Kennedy: En effet.
Le président: Donc il y a deux noms pour tous les documents. Au lieu de quatre, en fait, nous n'en avons que deux.
Ensuite il y a cet autre catégorie dans la trousse intitulé « Opérations du SCRS ». Pouvez-vous...
M. Paul E. Kennedy: C'est à la page 2 du document que vous avez mentionné, « Obligation de rendre compte ». Si vous tournez à la page suivante, vous trouvez « Opérations du SCRS ».
Le président: Donc, i s'agit véritablement des obligations de rendre compte liées aux opérations. C'est très bien.
Nous avons donc tout...
M. Paul E. Kennedy: Oui.
Le président: Même s'il y a cinq étiquettes différentes. Très bien, ça me satisfait.
Maintenant, madame Jennings vous avez trois minutes.
Mme Marlene Jennings: Je veux savoir ce qu'il en est de la directive du ministre qui prévoit que celui-ci doit être informé de toute question, enquête ou situation qui pourrait susciter la controverse, comme?
M. Paul E. Kennedy: Évidemment, il s'agirait d'une activité que nous pourrions entreprendre. Cela pourrait être dans le contexte de l'évaluation du risque. La plupart des activités ne sont pas publiques, mais il peut y avoir certains risques rattachés à une activité. Par conséquent, cela relève du mandat du service—qui n'est pas en cause—,et la justification pour agir existe.
C'est simplement pour souligner que dans la poursuite d'un objectif donné, il peut ressortir certaines choses qui susciteraient la controverse. En pareil cas, il faut prévenir le ministre, le préparer parce qu'il doit être informé.
Mme Marlene Jennings: Très bien.
Mon autre question porte également sur les instructions du ministre en matière d'exigences nationales. A la page 5, au milieu de la page, on dit que le service doit « fournir aux décideurs canadiens et à la communauté du renseignement des évaluations de renseignements pertinents, détaillés et sans motifs politiques ».
Je dois dire que c'est sans doute parfois un défi que de fournir des renseignements sans motifs politiques parce que les gens ne mettent pas leur système de valeurs de côté. Notre société repose sur certaines valeurs. Notre gouvernement est censé promouvoir ces valeurs et par conséquent, les politiques sont en général formulées et fondées sur ces valeurs.
À mon avis, des renseignements sans motifs politiques me semblent un oxymoron. Franchement.
» (1705)
M. Paul E. Kennedy: Je suppose qu'il faudrait regarder les évaluations pour voir si elles sont dénuées de motifs politiques.
Mme Marlene Jennings: Vous les avez examinées. Pensez-vous que c'est neutre?
M. Paul E. Kennedy: Oui, je les ai vues. Le service de renseignement est une organisation extrêmement professionnelle. Si vous regardez son mandat, à l'article 12, c'est peut-être en partie parce que...
Mme Marlene Jennings: J'ai consulté.
M. Paul E. Kennedy: Ce service n'existe que pour une raison, à savoir conseiller les autorités, et il est évident que l'une des motivations qu'on avait lorsqu'on a séparé le service de sécurité de ce qui était alors la GRC, c'était de ne pas confondre les rôles entre celui de conseiller et d'exécutant. De par sa nature, cette activité vous conduit à exceller dans ce que vous faites, à savoir analyser les renseignements et prodiguer des conseils réellement stratégiques aux autorités. Chose certaine, j'ai été impressionné par la qualité du travail que j'ai vue dans ce domaine.
Cela dit, outre ces fonctions, nous avons aussi le ministère, qui est en mesure d'examiner ces conseils et de répliquer s'il y a un problème. Étant donné que le service conseille d'autres institutions au sein du gouvernement du Canada, les bénéficiaires de ces conseils peuvent eux aussi refuser d'agir s'ils le jugent indiqué. Il est donc certain que le service a pour pratique de demeurer neutre face à la politique gouvernementale : « Nous conseillons les autorités, et quelqu'un d'autre prend la décision voulue. » C'est la discipline que s'impose ce genre d'institution.
Mme Marlene Jennings: C'est donc très différent, par exemple, de la CIA, dont on sait depuis quelques décennies qu'elle s'est livrée à des activités qui n'étaient absolument pas fondées sur des renseignements neutres sur le plan de la politique gouvernementale.
M. Paul E. Kennedy: Il ne fait aucun doute que le SCRS et la CIA ne sont pas des institutions du même genre. Je ne vais pas parler de ce qu'est et ce que fait la CIA, mais...
Mme Marlene Jennings: Nous ne finançons pas des coups d'état militaires et ne faisons rien du genre. N'est-ce pas?
M. Paul E. Kennedy: La seule activité du service consiste à réunir des informations dans la mesure où cela est strictement nécessaire, d'analyser et de conserver ces renseignements, et de faire rapport au gouvernement du Canada et le conseiller.
Mme Marlene Jennings: Parfait.
Merci.
Le président: Merci.
Monsieur Sorensen, trois minutes.
M. Kevin Sorenson: Quel rôle joue le ministre lorsque le SCRS sollicite un mandat?
M. Paul E. Kennedy: Il examine chacune de ces demandes.
C'est le conseiller juridique du ministère de la Justice détaché auprès du service de renseignement qui prépare la documentation voulue. Cette documentation est soumise à un comité d'examen des mandats, qui est présidé par le directeur du service, et le conseiller du ministère de la Justice y siège à titre indépendant. Il est l'avocat du diable, et il doit être convaincu de la légalité de la démarche. L'un de mes directeurs généraux siège aussi à ce comité et s'assure que le mandat est conforme et respecte tous nos critères. La demande est ensuite soumise au contentieux de notre ministère qui procède à un examen indépendant. J'en prends connaissance personnellement, et le sous-ministre en fait autant, après quoi la demande est soumise à l'examen du solliciteur général lui-même. J'ai examiné ces mandats en sa compagnie, et le ministre est très méticuleux.
M. Kevin Sorenson: Donnez-moi simplement une idée. Combien de mandats sont émis en moyenne tous les mois?
M. Paul E. Kennedy: Je n'en ai qu'une idée approximative. Je crois que le rapport annuel du SCRS révèle le nombre de mandats qui sont émis. Mais je peux vous dire qu'il y a des cycles, étant donné qu'il s'agit de mandats d'une durée d'un an. Selon le mois de l'année et la durée des mandats, il y a des moments où je peux être très occupé.
Mais nous pouvons peut-être vous dire le nombre total de mandats que nous avons. Je crois qu'on trouve ces données dans le rapport annuel du SCRS, aux points 16 et 12.
Le président: Le rapport annuel du SCRS présente le total annuel et le total sur deux ou trois ans.
M. Paul E. Kennedy: Je peux vous assurer que le solliciteur général examine personnellement chacun de ces mandats, et il reçoit des conseils indépendants lorsqu'il les étudie.
M. Kevin Sorenson: Il n'existe donc aucune directive ministérielle générale sur les mandats. Le ministre voit personnellement chaque demande qu'on lui soumet.
Lui arrive-t-il de dire non?
M. Paul E. Kennedy: Il peut dire non.
Je préférais répondre dans une perspective historique. Est-ce que des ministres, après examen, ont demandé qu'on y apporte certains changements? C'est déjà arrivé. Ils ont exercé leur autorité. Il peuvent aussi exiger des renseignements supplémentaires, des choses de cette nature. Il y a...
» (1710)
M. Kevin Sorenson: Le SCRS a l'obligation d'utiliser les mesures les moins intrusives qui soient. Le solliciteur général ou un solliciteur général pourrait s'opposer à l'émission d'un mandat et dire : « Existe-t-il un moyen moins intrusif? S'agissant d'un mandat concernant l'installation d'une table d'écoute, il pourrait demander une méthode moins intrusive. Il lui est possible de faire cela, mais cela n'arrive pas très souvent.
Normalement, lorsqu'on lui demande d'émettre un mandat, le service comprend qu'il est dans son...
M. Paul E. Kennedy: Je peux vous assurer que le processus obéit à une approche extrêmement rigoureuse. J'en ai donné quelques exemples : la transition du niveau 1 à 3 du CARC avant que la demande parvienne au ministre, ce qui prend généralement assez de temps, selon l'évolution de l'enquête. Et de là, on passe à la demande de mandat.
Cela ne se fait pas du jour au lendemain, à moins qu'il s'agisse d'une situation très inhabituelle ou d'une menace immédiate qu'il faut contrer.
La loi vous oblige normalement à utiliser aussi d'autres méthodes d'enquête. En a-t-on fait l'essai? Ces méthodes ont-elles donné des résultats? Ont-elles échoué? Est-ce la seule façon d'obtenir des renseignements? Il existe donc des exigences légales que le juge qui reçoit la demande vous obligera à satisfaire.
Donc, outre le processus long et rigoureux qui est en place, et les conseils indépendants que nous fournissons au ministre pour le convaincre que toutes ces choses ont été faites, l'affidavit lui-même indiquera si d'autres méthodes ont été appliquées l'épreuve et ont échoué; on précise si ces méthodes avaient des chances de succès; pourquoi cela doit être fait; et pourquoi les autres techniques moins intrusives... tout cela figure sur un affidavit. Le juge doit en tenir compte avant d'accorder son autorisation. C'est donc un processus très, très détaillé.
M. Kevin Sorenson: Donc, si l'on demande un mandat, disons pour effectuer une surveillance électronique, mais que les informations qu'on a obtenues n'ont pas vraiment fait avancer l'enquête ou si l'on juge que ces renseignements sont sans importance, combien de temps faudra-t-il normalement avant que le CSARS s'en défasse?
M. Paul E. Kennedy: Je ne saurais le dire.
» (1715)
M. Kevin Sorenson: Quelles sont les exigences?Que dit le Règlement?
M. Paul E. Kennedy: Il existe un processus. Voyez l'article 12 de la Loi sur le SRCS pour les cas qui traitent normalement de sécurité intérieure, il y a une exigence qui se lit ainsi : « Le service recueille, au moyen d'enquêtes ou autrement, dans la mesure strictement nécessaire... ». Le service a interprété cette disposition de telle manière que lorsqu'il dispose de certains renseignements, il les examine dans le contexte de la menace dont il est saisi, et il se défera des renseignements qu'il juge non pertinents ou inutiles. Il y a des annexes qui traitent de l'élimination de ces renseignements, qui sont en vigueur, je crois. Chose certaine, cette élimination est obligatoire en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, de la Loi sur les Archives nationales du Canada. Le service doit donc se conformer à sa politique opérationnelle, et obéir en outre à ces deux autres lois.
Si les renseignements ne sont pas nécessaires, ils sont éliminés. Cela s'applique de manière générique à tous les renseignements, peu importe la manière dont ils ont été réunis, parce qu'il peut s'agir de renseignements relatifs à la surveillance, de renseignements provenant de sources humaines, peu importe. La table d'écoute n'est qu'un moyen de réunir des renseignements parmi bien d'autres.
Il faut aussi se rappeler l'obligation qu'a le service de renseignement, qui n'est pas un service de police. Il ne réunit pas des renseignements dans le but de présenter des preuves à un procès, on ne peut donc pas confondre ces rôles. Un service de police qui réunit des renseignements doit les conserver d'une certaine manière afin de respecter les normes relatives à la preuve dans le cadre d'un procès, et c'est ce qu'on fait avec des tables d'écoute. La fonction d'un service de renseignement consiste à réunir des renseignements et à conseiller le gouvernement. L'article 19 de la loi définit le régime applicable en ce qui concerne la communication de ces renseignements, outre son mandat général.
D'autres renseignements peuvent faire surface. Ainsi, le SCRS peut se trouver devant des renseignements qu'il peut communiquer aux autorités s'il s'agit « d'une enquête relative à une infraction présumée à une loi fédérale ou provinciale », qui ont trait à la « conduite des affaires internationales du Canada » ou à « la défense du Canada ». Et il y a une autre catégorie, une catégorie générale ou fourre-tout, à l'alinéa 19(2)d), ou « pour des raisons d'intérêt public... qui justifie nettement une éventuelle violation de la vie privée ».
Il s'agit d'un service, et non d'un service de police qui réunit des éléments de preuve qui seront soumis à un tribunal. Par conséquent, c'est ce qui motive ces pratiques de rétention.
Le président: Merci.
Si vous le permettez, j'aimerais poser moi aussi quelques questions.
En ce qui concerne les instructions ministérielles que nous avons devant nous, existe-t-il d'autres instructions ministérielles dont nous n'avons pas discuté ici aujourd'hui.
M. Paul E. Kennedy: Non.
Le président: Il n'en existe aucune.
Il n'y a donc pas d'autres documents traitant de la liaison avec la GRC? Existe-t-il un document qui traite de cela?
M. Paul E. Kennedy: Il existe un protocole d'entente qui lie les deux organismes. Ce protocole existe bien sûr, et cela fait plusieurs années de cela. On y dit comment on va faciliter...
Si c'est du SCRS et de la GRC dont vous voulez parler, les deux organismes échangent en effet des membres de leur personnel pour s'entendre sur ce qu'ils font, pour s'assurer que la coopération est efficace, des choses de ce genre.
Le président: Sont-ils tellement proches qu'ils n'ont plus besoin de ce protocole? Ils ne font que...
M. Paul E. Kennedy: J'espère qu'ils ont une bonne collaboration.
Le président: Ils échangent des membres.
M. Paul E. Kennedy: Ils échangent du personnel. Je crois qu'il y a un agent de renseignement de haut niveau qui travaille à la DEC, et celle-ci a quelqu'un au SCRS. Il y a un membre de la GRC qui est détaché au SCRS, qui travaille au bureau de l'antiterrorisme. Les deux organismes ont des rencontres régulières; ils se parlent et ils collaborent. Ils y sont obligés.
Le président: La seule autre question qui me reste porte sur les fuites...
Je vais m'arrêter là-dessus. La documentation que vous nous avez fournie est utile, mais il s'agit dans certains cas de photocopies, et l'on y conserve la mention « confidentiel » et « très secret ». Donc, à l'avenir, inutile de laisser la mention « très secret » sur un document qui est rendu public. Ça surprend un peu les gens, c'est tout.
M. Paul E. Kennedy: Vous avez parfaitement raison.
Il y a autre chose que nous allons tâcher de faire, et c'est peut-être vous donner une nouvelle copie sans classification sécuritaire. Mais il pourrait aussi y avoir certains documents dont vous pourriez penser qu'ils ont été plus émondés qu'ils ne l'ont été en réalité; autrement dit, il pourrait s'agir d'un document avec une ligne au haut et une grosse estampe dessus. Cela donne l'impression qu'une page a été retranchée, mais ce n'est pas le cas.
Nous pourrions donc peut-être vous remettre le document lui-même et vous montrer qu'il n'y a rien sur la page, ou quelque chose du genre, et nous pouvons aussi supprimer la classification documentaire du document.
Le président: Oui, le comité de la Justice s'est déjà battu pour des lignes qu'on avait oblitérées à l'encre noire. Mais quoi qu'il en soit, je comprends ce que vous dites. C'est très bien. En fait, je crois qu'on n'utilise plus d'encre noire; on se sert d'encre blanche. C'est moins alarmant.
Je ne me plains pas du tout du contenu, je ne fais que mentionner cela en passant.
M. Paul E. Kennedy: D'accord.
Le président: Monsieur Sorenson.
M. Kevin Sorenson: Existe-t-il une instance qui vérifie le nombre de mandats ou les mandats émis ou demandés par le SCRS? Savons-nous au bout du compte combien de mandats on a demandé et si ces mandats... le CSRAS?
M. Paul E. Kennedy: Le CSRAS et l'IG prennent connaissance des mandats qui ont été demandés, ils examinent les affidavits qui ont trait à ces mandats, et ils vérifient minutieusement l'exactitude des renseignements que contiennent les affidavits. Je sais d'expérience personnelle qu'au cours d'une année, lorsqu'on a procédé à une vérification au hasard des affidavits au CSARS et chez l'IG, ces affidavits correspondaient à 100 p. 100 aux mandats qui avaient été demandés.
Donc, oui, on les examine. Ces deux instances s'en chargent.
M. Kevin Sorenson: Le solliciteur général approuve-t-il tous les mandats du SCRS avant qu'ils soient émis?
M. Paul E. Kennedy: Non, il les approuve avant qu'ils soient soumis aux tribunaux. Un fonctionnaire du ministère siège au comité présidé par le directeur du service qui examine le cas dont on pense qu'il est prêt à faire l'objet d'un affidavit et d'un mandat. Nous sommes représentés à cette étape. Voilà pourquoi nous savons que ce cas a atteint ce degré de maturité et qu'il va faire l'objet d'un mandat.
Ce cas nous est soumis de nouveau lorsque le mandat et l'affidavit nous reviennent sous une forme presque complète, et il est soumis au directeur du service, encore une fois en présence d'un conseiller du ministère de la Justice et d'un représentant du solliciteur général qui dit : « D'accord, ce mandat a été approuvé pour présentation au ministre. » Ce document est alors présenté sous sa forme définitive à l'approbation du ministre. Il doit approuver la démarche de la personne qui se présente devant le tribunal et qui demande le mandat, et il doit aussi en approuver le contenu. Lorsqu'il obtient le mandat, il reçoit une fois de plus des conseils distincts et indépendants relativement au contenu du document et aux problèmes qui pourraient se poser, ou autre chose du genre.
» (1720)
M. Kevin Sorenson: Merci.
Le président: D'accord. J'ai une dernière question.
Vous avez mentionné plus tôt le fait que le directeur du SCRS dispose maintenant de la discrétion voulue pour nouer des contacts avec ses homologues au Canada ou à l'étranger.
M. Paul E. Kennedy: Je crois avoir mentionné les changements aux protocoles existants.
Si le service veut conclure un accord avec le service de renseignement d'un autre pays, l'article 17 de la Loi sur le SCRS l'oblige à obtenir l'approbation du ministre et du ministre des Affaires étrangères. Il doit consulter le ministre des Affaires étrangères, et il doit ensuite obtenir l'approbation du solliciteur général. Cela fait, il peut conclure cet accord.
Je rappelle que ces accords portent sur divers niveaux de coopération. Ils reflètent les besoins du Canada en matière de sécurité—il peut s'agir simplement dans certains cas de former les agents d'autres services de renseignements parce que certains pays veulent que nous les formions selon les normes en vigueur dans un véritable service du renseignement. Il peut s'agir aussi d'information portant sur les visas parce qu'il y a des gens qui nous arrivent de ces pays et qui disposent de renseignements. Et il peut s'agir évidemment d'autres pays qui sont plus avancés, et nous pouvons avoir avec eux des échanges un peu plus profonds dans les cas où nous avons une grande confiance dans l'intégrité de leurs méthodes de travail.
Il peut donc y avoir des cas de ce genre. On procède à une vérification annuelle et le directeur produit un rapport à l'intention du ministre sur l'état de ces accords, pour savoir s'ils sont pertinents ou non ou s'ils donnent des résultats. Le directeur peut donc modifier les accords, mais seulement avec l'approbation du ministre, et bien sûr, après avoir consulté au préalable le ministre des Affaires étrangères.
Le président: Quelle est la directive opérationnelle ou l'exigence juridique qui oblige le directeur à produire un rapport annuellement ou périodiquement sur ces accords avec ses homologues étrangers?
M. Paul E. Kennedy: C'est la directive ministérielle qui l'oblige à produire un rapport.
Le président: Et c'est l'une des directives qui se trouvent ici?
M. Paul E. Kennedy: Oui.
Le président: D'accord.
Comme nous n'avons plus d'autres questions, je tiens à vous remercier vivement d'avoir été des nôtres aujourd'hui et de nous avoir informés. Je tiens particulièrement à remercier le solliciteur général et le ministère pour cette transparence accrue. Mes collègues du sous-comité en profiteront dans leurs travaux futurs.
La séance est levée.