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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 3e SESSION

Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 20 avril 2004




¹ 1540
V         Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.))
V         Le très honorable Antonio Lamer (commissaire, Bureau du commissaire de la sécurité des télécommunications)

¹ 1545

¹ 1550

¹ 1555
V         Le président

º 1600
V         M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC)
V         Le président
V         Mme Elsie Wayne (Saint John, PCC)
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Mme Elsie Wayne
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Mme Elsie Wayne
V         Le président
V         Mme Joanne Weeks (directrice exécutive, Bureau du commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications)
V         Mme Elsie Wayne
V         Le très hon. Antonio Lamer

º 1605
V         Mme Elsie Wayne
V         Le président
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         M. Jay Hill
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Jay Hill
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)

º 1610
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand

º 1615
V         Le président
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         M. Bob Wood (Nipissing, Lib.)
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Bob Wood
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Bob Wood
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Bob Wood
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Bob Wood
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Bob Wood

º 1620
V         Le très hon. Antonio Lamer

º 1625
V         Le président
V         L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer

º 1630
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. Bill Blaikie
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, PCC)
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le très hon. Antonio Lamer

º 1635
V         Mme Joanne Weeks
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.)
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. John O'Reilly

º 1640
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. John O'Reilly
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. John O'Reilly
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. John O'Reilly
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         M. Claude Bachand

º 1645
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer

º 1650
V         Le président
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         M. Claude Bachand
V         Le président
V         Le très hon. Antonio Lamer

º 1655
V         Le président
V         M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.)
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Murray Calder
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Murray Calder
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Murray Calder
V         Le très hon. Antonio Lamer

» 1700
V         M. Murray Calder
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Murray Calder
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         M. Murray Calder
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Mme Cheryl Gallant

» 1705
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         Mme Joanne Weeks
V         Le président
V         Mme Joanne Weeks
V         Mme Cheryl Gallant
V         Mme Joanne Weeks
V         Mme Cheryl Gallant
V         Mme Joanne Weeks
V         Le président
V         Mme Elsie Wayne
V         Le président
V         M. Claude Bachand

» 1710
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         M. Claude Bachand
V         Le président
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le très hon. Antonio Lamer

» 1715
V         Mme Cheryl Gallant
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         L'hon. David Price (Compton—Stanstead, Lib.)
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         L'hon. David Price
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         M. Claude Bachand
V         Le président
V         Le très hon. Antonio Lamer
V         Le président
V         L'hon. David Price
V         Le président
V         Le très hon. Antonio Lamer

» 1720

» 1725
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants


NUMÉRO 008 
l
3e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 20 avril 2004

[Enregistrement électronique]

¹  +(1540)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)): Nous pouvons commencer.

    Je déclare ouverte la huitième réunion du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants. Toutes mes excuses à nos témoins pour le petit retard. Notre présence—à tous, bien entendu—était requise à la Chambre pour des votes. C'est ce qui explique ce petit retard.

    J'ai le plaisir d'accueillir aujourd'hui le très honorable Antonio Lamer, le commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications, et Joanne Weeks, la directrice générale de ce même organisme.

    Soyez les bienvenus. C'est avec plaisir que nous entendrons vos remarques liminaires.

+-

    Le très honorable Antonio Lamer (commissaire, Bureau du commissaire de la sécurité des télécommunications): Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui devant votre comité.

    C'est la première fois qu'un commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications comparaît devant ce comité. Je suis venu en compagnie de Mme Joanne Weeks, la directrice exécutive de mon bureau, qui a été invitée à m'accompagner. De toute manière je l'aurais amenée avec moi.

    Je sais que votre comité a entrepris un travail remarquable, notamment une étude sur l'importante question des relations canado-américaines en matière de défense. Le commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications rend compte de ses activités au ministre de la Défense nationale. Je suis donc au fait de certains aspects de la Défense nationale. Ainsi, comme vous le savez peut-être, j'ai mené l'an dernier, pour le ministre McCallum, un examen des dispositions de la Loi sur la défense nationale ayant trait à la justice militaire.

[Français]

    Au cours des 20 années que j'ai passées à la Cour suprême du Canada, dont 10 à titre de juge en chef, j'ai observé l'évolution des droits et des libertés de la personne dans ce pays et y ai participé lorsque nous avons examiné l'application et les conséquences de la Charte canadienne des droits et libertés. Cette expérience m'est fort utile dans l'acquittement de mes fonctions de commissaire du CST, car la protection des droits des Canadiens, notamment le droit à la protection de la vie privée, est un aspect important des activités de mon bureau.

    En acceptant ma nomination par décret en juin dernier, j'ai donc été à la fois honoré et heureux de pouvoir continuer à servir mon pays dans un domaine très important.

    Aujourd'hui, monsieur le président, je vais expliquer à votre comité en quoi consiste mon rôle de commissaire du CST.

[Traduction]

    Pour commencer, permettez-moi de vous donner un aperçu de l'objet de mon mandat, c'est-à-dire le CST lui-même. Je n'entrerai pas dans les détails, parce qu'il appartient plutôt aux représentants du centre de vous donner une description précises des activités de leur organisme; de plus, je sais que vous avez récemment rencontré son chef, M. Keith Coulter, ainsi que certains de ses collaborateurs. Mais j'estime néanmoins important de vous en brosser un tableau sommaire pour vous fournir un contexte.

    Le CST est un organisme civil du ministère de la Défense nationale, doté d'une organisation complexe et dont le mandat s'articule sur trois axes: tout d'abord, recueillir et fournir au gouvernement des renseignements électromagnétiques étrangers; ensuite, fournir des avis, des conseils et des services pour aider à protéger les renseignements électroniques et les infrastructures d'information du gouvernement du Canada; enfin, fournir une assistance technique et opérationnelle aux organismes fédéraux chargés de l'application de la loi et de la sécurité.

    Contrairement à mon bureau, le CST existe depuis assez longtemps en tant qu'organisme du gouvernement canadien. De fait, 2006 marquera le 60e anniversaire de la création de l'organisme qui l'a précédé, la Direction des télécommunications du Conseil national de recherches du Canada.

    En 1975, la direction a été renommée Centre de la sécurité des télécommunications et a été transférée au ministère de la Défense nationale. C'était une organisation très secrète, dont le gouvernement n'a d'ailleurs reconnu l'existence qu'en 1983, lors du débat au sujet de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité.

    Pendant la guerre froide, le CST a évolué parallèlement aux relations étroites que le Canada entretenait avec le Royaume-Uni, les États-Unis, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Aujourd'hui, il continue d'entretenir des relations avec ses homologues dans ces pays et d'échanger régulièrement avec eux des renseignements, des technologies et des connaissances techniques.

    Le centre a un personnel aux compétences très diversifiées—il emploie des informaticiens, des ingénieurs, des mathématiciens, des linguistes et des analystes, dont les connaissances, l'expérience et la capacité de travail réunies sont impressionnantes.

    Dans la foulée des événements tragiques du 11 septembre 2001, le CST a obtenu un financement supplémentaire et a engagé de nouveaux employés pour répondre aux objectifs du gouvernement. De plus, son mandat a été officialisé dans la loi, avec les modifications apportées à la Loi sur la défense nationale à la suite de l'adoption de la Loi antiterroriste, loi cadre adoptée en décembre 2001.

¹  +-(1545)  

[Français]

    À présent, monsieur le président, j'aimerais vous parler de mon poste et de mon mandat.

    Le poste de commissaire est une fonction à temps partiel. J'y consacre en moyenne environ deux jours par semaine. En aparté, je vous dirais que c'est un peu inégal. Parfois, il se passera une semaine sans que j'y sois, d'autres semaines, j'y serai trois ou quatre jours. Tout dépend des événements. Il ne s'agit pas d'être là tous les lundis et mardis, par exemple.

    Mon mandat principal, tel qu'il est établi dans la Loi sur la défense nationale, consiste à examiner les activités du CST pour en contrôler la légalité et à en rendre compte au ministre de la Défense nationale. J'insiste sur le fait que c'est pour en contrôler la légalité.

    Le rôle de commissaire implique également d'autres fonctions: effectuer toute enquête que j'estime nécessaire en réponse à une plainte relative au CST et informer le ministre de la Défense nationale et le procureur général du Canada de toute activité du CST que j'estime ne pas être conforme à la loi.

    Chaque année, je dois rendre compte au ministre de la Défense nationale de l'exercice de mes activités dans un rapport que je lui présente au plus tard 90 jours après la fin de l'année financière, soit le 31 mars, et qu'il dépose ensuite devant le Parlement. Je lui remets également des rapports classifiés renfermant le résultat des examens des activités du CST effectués par mon bureau.

    Le CST n'est pas autorisé par la loi--et ceci est très important--à viser des Canadiens ou des personnes qui se trouvent au Canada. Il doit cibler des entités étrangères, situées hors du territoire canadien. Ceci est une facette très importante du CST.

    Cependant, dans certains cas, le ministre peut autoriser le CST à intercepter des communications privées afin d'obtenir des renseignements étrangers et de protéger les systèmes ou les réseaux informatiques du gouvernement contre un méfait, une utilisation non autorisée ou de toute perturbation de leur fonctionnement. J'insiste sur le fait que cette interception doit d'abord toujours cibler une communication étrangère. Le CST peut utiliser et conserver une communication privée pour autant que le CST ait ciblé la partie étrangère de la communication et seulement si celle-ci s'avère essentielle aux affaires internationales, à la défense ou à la sécurité.

    En vertu de la loi, je suis tenu d'enquêter sur les activités effectuées par le CST conformément à ces autorisations ministérielles et d'en rendre compte chaque année au ministre.

¹  +-(1550)  

[Traduction]

    Le CST a également pour mandat d'aider les organismes d'application de la loi et les organismes de sécurité. À cet égard, il peut intercepter des communications privées, en vertu d'un mandat judiciaire. Lorsque j'examine ces activités, je suis tenu de m'assurer que le CST s'est acquitté de cette partie de son mandat légal, qui lui prescrit de «protéger la vie privée des Canadiens dans l'utilisation et la sauvegarde des renseignements qu'il intercepte».

    Enfin, j'assume également un rôle en vertu de la Loi sur la protection de l'information, qui comme vous le savez peut-être a remplacé la Loi sur les secrets officiels en décembre 2001 à la suite de la promulgation de la Loi antiterroriste. La Loi sur la protection de l'information interdit aux personnes «astreintes au secret à perpétuité» comme les employés du CST, de communiquer des «renseignements opérationnels spéciaux». Si une personne est accusée d'avoir divulgué des renseignements de cette nature, un juge ou un tribunal peut prendre en considération ce qu'on appelle la «défense d'intérêt public», mais uniquement si cette personne a pris une série de mesures prévues dans la loi avant de communiquer les renseignements en question. Dans ce cas, il s'agit bien entendu d'une personne préoccupée par le fait qu'une infraction est en train d'être commise par un employé du CST.

    La première mesure que doit prendre cette personne est de communiquer ses inquiétudes à l'administrateur général de son organisme ou au sous-procureur général du Canada. Si elle n'obtient pas de réponse dans un délai raisonnable, elle doit alors me faire part de ses préoccupations et m'accorder un délai raisonnable pour y donner suite.

    À ce jour, personne n'a pris contact avec moi ou avec mon prédécesseur en ce sens.

¹  +-(1555)  

[Français]

    Maintenant, monsieur le président, voyons ce que j'ai accompli depuis ma nomination au printemps dernier. Pendant les premiers mois, je me suis familiarisé avec mon travail lors de nombreuses séances d'information que m'ont données les employés du CST, notamment des réunions avec le chef du CST et son équipe de direction. J'ai également été mis au courant des activités du bureau par mes propres employés, qui sont tous très expérimentés.

    J'ai rencontré le ministre actuel ainsi que son prédécesseur. J'ai aussi rencontré le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité ainsi que le coordonnateur de la sécurité et du renseignement, qui est aussi, comme vous le savez, le conseiller national pour la sécurité auprès du premier ministre, et à qui se rapporte le chef du CST en ce qui concerne les activités et les politiques du centre.

[Traduction]

    J'ai également présenté cinq rapports classifiés au ministre, notamment deux rapports commencés pendant le mandat de mon prédécesseur et achevé pendant le mien. Ces rapports renferment des recommandations destinées au ministre. J'ai par ailleurs approuvé un plan de travail triennal pour mon bureau, lequel sera réexaminé chaque année.

    Après ce tour d'horizon rapide de mon mandat et de mes activités récentes, j'aimerais, monsieur le président, conclure en vous donnant un aperçu du contexte, des origines et de l'évolution du rôle de commissaire.

    En 1990, un comité spécial de la Chambre chargé de réviser la Loi sur le SCRS recommandait au Parlement d'instituer le CST par un acte de loi et de prévoir un mécanisme de surveillance de ses activités. Le gouvernement a décidé à l'époque de ne pas suivre cette recommandation, mais il a indiqué qu'il «envisageait de donner au ministre de la Défense nationale des capacités supplémentaires pour l'examen du CST». En temps voulu, il a décidé de créer le poste de commissaire en vertu de la Loi sur les enquêtes.

    Le décret nommant le premier commissaire a été promulgué en juin 1996. C'était alors et c'est encore, comme je l'ai indiqué, une affectation à temps partiel. Le premier commissaire a rempli trois mandats s'étendant sur sept ans. Et, comme je vous l'ai dit, en décembre 2001, la Loi antiterroriste cadre a apporté des modifications à la Loi sur la défense nationale, qui ont donné un fondement légal au mandat du CST et aux responsabilités du commissaire.

    Le bureau du commissaire est une entité distincte et indépendante du CST. Cinq employés travaillent pour moi à plein temps, en plus de plusieurs spécialistes dont je retiens les services au besoin. Mon budget annuel s'élève à environ 900 000 $.

[Français]

    Voilà, monsieur le président. J'espère que ce bref aperçu de mon rôle et du milieu dans lequel je travaille aura éclairé votre comité. Je me ferai un plaisir, tout comme Mme Weeks d'ailleurs, de répondre à vos questions.

    Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Lamer.

    Je suis certain que mes collègues des deux côtés de la table conviendront que votre éminente carrière et notamment votre mission passée à la Cour suprême font de vous un excellent choix pour ce genre de poste. Nous vous savons gré d'être venu nous faire ce bref tour d'horizon de votre bureau et je suis certain que mes collègues voudront vous poser des questions.

    Avant de commencer, nous devrions peut-être féliciter M. Hill de l'adoption en deuxième lecture de son projet de loi à la Chambre des communes qui a reçu, c'est à noter, le large soutien des députés des deux côtés de la Chambre. Bien joué, Jay.

    Nous commencerons par l'opposition officielle. Monsieur Hill, vous avez sept minutes.

º  +-(1600)  

+-

    M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Je vous remercie de vos félicitations, monsieur le président. J'apprécie le soutien accordé à mon projet de loi par les députés des deux côtés de la Chambre.

    J'aimerais aussi féliciter le très honorable Tony Lamer de sa nomination, mais je vais céder la parole à ma collègue qui aimerait lui poser quelques questions. Merci.

+-

    Le président: Madame Wayne, je vous en prie.

+-

    Mme Elsie Wayne (Saint John, PCC): Merci, monsieur le président.

    Merci beaucoup et soyez les bienvenus. Nous sommes très heureux de vous voir tous les deux.

    Voici ma question. Dans son rapport annuel 2002-2003, le commissaire du CST note qu'il a formulé des recommandations relatives au soutien accordé par le CST au Service canadien du renseignement de sécurité en vue de remédier à des faiblesses de la politique et de la pratique qui pourraient entraîner des erreurs de traitement de renseignements délicats et un manque d'uniformité dans l'application de la politique et de la loi. Le CST a-t-il fait part au commissaire des mesures qu'il a prises pour remédier à ces faiblesses?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Vous faites allusion à une période précédant ma nomination et naturellement je n'ai qu'un recours: appeler Mme Weeks à mon secours. Selon ce qu'elle me dit, ces problèmes ont été réglés.

+-

    Mme Elsie Wayne: Ils ont été réglés.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Elle voudrait peut-être ajouter quelque chose.

+-

    Mme Elsie Wayne: Oui.

+-

    Le président: Madame Weeks, vous voulez ajouter quelque chose?

+-

    Mme Joanne Weeks (directrice exécutive, Bureau du commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications): Merci, monsieur le président.

    Il y avait des faiblesses et des problèmes relatifs à la conservation de documents au-delà des périodes normales d'archivage. Ces problèmes ont été subséquemment réglés.

+-

    Mme Elsie Wayne: Monsieur Lamer, vous voudrez peut-être que Joanne réponde aussi à ma question suivante et cela ne nous dérangera absolument pas.

    Votre prédécesseur indiquait dans le rapport annuel 2002-2003 qu'il avait des préoccupations concernant le rôle que propose de conférer au commissaire le projet de loi C-7, Loi sur la sécurité publique, pour ce qui est de l'examen des activités du CST liées à la protection des systèmes et des réseaux informatiques des Forces canadiennes et de la Défense nationale. Des mesures sont-elles prises pour mettre le Bureau du commissaire du CST mieux à même de s'acquitter de ces nouvelles responsabilités?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Oui. Les incidences du projet de loi C-7 sont potentiellement très importantes car je serais tenu d'examiner des activités menées sur autorisation ministérielle impliquant l'interception de communications privées pour sauvegarder les systèmes et les réseaux informatiques du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes. Ce qui me semble étrange est que le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois, dont la Chambre est également saisie, propose des modifications au Code criminel et à la Loi sur la gestion des finances publiques qui conféreraient aux ministères et organismes les mêmes pouvoirs que le projet de loi C-7 confère à la Défense nationale sans nécessiter d'autorisation ministérielle ou d'examen de ma part. J'ai parlé de ce problème à un certain nombre de fonctionnaires et je crois comprendre qu'ils y réfléchissent. Je me permettrais d'ajouter que je trouve encourageant qu'ils y réfléchissent—donc ils ont pris en compte ma requête.

    Pour vous donner un simple exemple, un bateau qui se trouvait dans le golfe a reçu plus de 18 000 communications—c'était pour une seule journée. C'est tout simplement impossible. Il faudrait que j'aie des milliers de collaborateurs à ma disposition.

    Le problème va être réglé. Il est examiné. Je ne peux pas vous en dire plus pour le moment. Tout ce que je peux vous dire c'est qu'il est pris très au sérieux et qu'il est examiné.

º  +-(1605)  

+-

    Mme Elsie Wayne: Je suis très heureuse, monsieur le président, d'entendre dire qu'il est examiné car c'est une grosse préoccupation et je crois que notre comité devrait aussi suivre de très près cette question.

    Merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci, madame Wayne.

    Comme elle le fait souvent, ma collègue a lu dans mes pensées et je me demandais, monsieur, s'il serait possible, quand vous aurez une réponse, de nous en informer, sous le sceau du secret si nécessaire?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Certainement, monsieur le président. Je suis certain que nous n'aurons pas à attendre longtemps.

+-

    Le président: Très bien, merci beaucoup.

    Il reste encore une minute, monsieur Hill.

+-

    M. Jay Hill: Merci, monsieur le président.

    J'ai simplement une question complémentaire. Ce nouveau rôle que vous allez assumer consistera pour l'essentiel à surveiller ce genre de communications pour garantir, disons, l'intégrité des systèmes et des réseaux informatiques. Comment pensez-vous que vous pourrez, compte tenu de l'incroyable volume de communications, comme vous l'avez dit tout à l'heure—je suppose que vous voulez parler des courriels, de ce genre de communications que les soldats envoient...

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: À leurs familles.

+-

    M. Jay Hill: Exactement.

    Comment pourrez-vous garantir la protection des communications personnelles de ces soldats avec leurs conjoints, leurs familles, leurs enfants, etc. tout en protégeant, tâche incroyablement délicate, l'intégrité de ces systèmes informatiques?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Si le problème est réglé de la manière que j'espère, je ne pense pas que j'y serai mêlé. Les administrateurs de chaque ministère utiliseront leurs propres services pour protéger leurs systèmes de communication, de la même manière que le font les compagnies privées.

    Si le projet de loi C-7 n'est pas modifié avant d'être promulgué, là, il y aura un problème. J'ai écrit aux autorités concernées pour leur signaler le problème que cela posera à mon bureau. Il sera impossible à six personnes, les effectifs de mon bureau, de superviser et de protéger les systèmes de communication du gouvernement du Canada. Là est tout le problème.

    Je le répète, je ne peux pas vous en dire plus mais je suis convaincu que le problème sera réglé.

+-

    Le président: Merci, monsieur Hill.

[Français]

    Monsieur Bachand, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): J'aimerais à mon tour souhaiter la bienvenue au très honorable juge Lamer. Lorsqu'il est passé à Saint-Jean lors d'une rencontre avec la Chambre de commerce, je lui ai dit qu'on avait peu souvent l'occasion de rencontrer des très honorables de son genre. On en rencontre un par jour à la Chambre, mais il ne s'agit pas de très honorables juges. On n'en rencontre pas souvent. Il m'a dit alors qu'il y en avait un troisième, en l'occurrence la Gouverneure générale. Je lui ai demandé de se récuser face à la cause du Québec, mais il a répondu que ce n'était pas possible.

    J'ai malgré tout de bons souvenirs de votre passage chez nous, monsieur Lamer. J'ai une série de questions à vous poser, mais nous n'avons que sept minutes. Je vais essayer de procéder brièvement avec vous.

    Quant à moi, à l'heure actuelle, le CST n'est pas régi par une loi. En fait, il est régi par la Loi sur la défense nationale, mais aucune loi spécifique ne lui est consacrée. Il y en a une pour la GRC et une pour le SCRS, mais le CST est inclus dans des extraits de la Loi sur la défense nationale.

º  +-(1610)  

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Au chapitre N-5.

+-

    M. Claude Bachand: En effet. En outre, à ma connaissance, le budget du CST n'est pas public. Vous ne pouvez pas me dire quel est le budget total. Vous m'avez dit quel était le budget total du commissaire, soit votre salaire, qui est de 100 000 $, mais le budget total...

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Cent mille dollars?

+-

    M. Claude Bachand: N'est-ce pas ce que vous m'avez dit plus tôt?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je n'ai pas parlé de mon salaire.

+-

    M. Claude Bachand: À quoi correspondent les 100 000 $ dont vous avez parlé plus tôt?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: J'ai dit que le budget était d'environ 900 000 $.

+-

    M. Claude Bachand: Neuf cent mille dollars?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: C'est le budget total de l'organisme.

+-

    M. Claude Bachand: D'accord.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Si vous voulez me donner 100 000 $, je vais les prendre volontiers, mais ce n'est pas du tout le genre de montant que je reçois.

+-

    M. Claude Bachand: Votre salaire n'est pas public?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Non.

+-

    M. Claude Bachand: Ni le budget ni le nombre d'employés du CST ne sont publics.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je viens de le rendre public. Vous parlez du CST?

+-

    M. Claude Bachand: CST, en français, correspond à Centre de la sécurité des télécommunications. En anglais, votre organisme se nomme Communication Security Establishment, je crois. Est-ce exact?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je pense que ces questions devraient être adressées à M. Keith Coulter, qui dirige le CST. Je ne sais pas si son budget et le nombre de ses employés sont publics. Mon rôle est de voir à ce que l'organisme agisse conformément à la loi. Il s'agit de lois qui portent sur la sécurité nationale. En revanche, tout ce qui touche la Loi sur la gestion des finances publiques ou les lois régissant les relations de travail ne relève pas du commissaire.

+-

    M. Claude Bachand: Je veux en arriver là, monsieur le commissaire, parce que l'ensemble des gens qui travaillent au CST sont aussi soustraits à la Commission de la fonction publique. Les nominations qui sont faites là ne sont pas soumises au Comité de la défense nationale.

    Voilà ma question, finalement. N'avez-vous pas l'impression que nous n'avons pas suffisamment d'information venant du CST pour évaluer le sérieux des garanties que vous nous donnez, comme commissaire, que tout est fait dans l'ordre, à part le fait que vous soyez un très honorable ancien juge de la Cour suprême du Canada?

    Voilà le problème du CST, selon moi. Nous n'avons presque rien sur l'imputabilité devant le Parlement, et nous ne pouvons pas non plus évaluer le sérieux des garanties qui nous sont données parce que nous n'avons pas accès à l'ensemble du dossier. Est-ce que cela ne vous inquiète pas de voir que les parlementaires ou le Parlement sont un peu exclus de toute la question du CST?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Cela relève du Parlement. Le Parlement a choisi d'établir le CST d'une certaine façon, et cela ne me regarde pas. Ce n'est pas à moi de critiquer le Parlement quant à sa façon de mettre en place un système de renseignement étranger.

+-

    M. Claude Bachand: Donc, votre rôle à vous est uniquement de voir, dans le cadre de vos fonctions, si ce qui est entrepris par le CST est conforme à la loi, et aussi à toutes les lois canadiennes, j'imagine.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Pas à toutes les lois canadiennes.

+-

    M. Claude Bachand: Si vous constatez que quelque chose brime la Charte canadienne des droits et libertés, est-ce que vous intervenez?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: J'interviens s'il s'agit du Code criminel, des lois qui touchent à la sécurité nationale. Mais les relations ouvrières, les relations de travail ne relèvent pas de moi, pas plus que la Loi sur la gestion des finances publiques.

    Contrairement au mandat de ceux qui s'occupent du SCRS, mon mandat se limite à la légalité. Ceux qui s'occupent du SCRS ont un mandat qui va un peu plus loin; ils s'occupent aussi de l'efficacité, ce qui n'est pas mon cas.

+-

    M. Claude Bachand: En ce qui concerne la légalité, vous conviendrez avec nous que les parlementaires autour de la table ici ne savent pas sur quelle base se fonder parce qu'ils n'ont pas l'information nécessaire. Nous sommes obligés de prendre acte du fait que vous dites assez régulièrement que tout a été fait dans l'ordre, comme M. Bisson l'a fait avant vous pendant plusieurs mandats. Mais de notre côté, nous n'avons pas les informations nécessaires pour confirmer que ce que le commissaire nous dit est vrai. Il y a une seule personne qui peut établir la légalité de tout cela, et c'est vous-même. Nous ne pouvons pas être en mesure de l'évaluer.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Le Parlement l'a voulu ainsi, et je respecte la volonté du Parlement.

+-

    M. Claude Bachand: Très bien.

º  +-(1615)  

[Traduction]

+-

    Le président: J'ajouterai simplement que vous remettez un rapport annuel à votre ministre qui est ensuite déposé à la Chambre. Mes collègues pourront donc revenir sur cette question dans ce contexte.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Oui.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bachand.

    C'est maintenant le tour du parti ministériel pour sept minutes. Pour commencer, monsieur Wood.

+-

    M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Monsieur, vous avez commencé par dire que votre travail de commissaire était un emploi à temps partiel. Vous y consacrez un ou deux jours par semaine. Ne pensez-vous pas que cela devrait être un emploi à plein temps?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Ce pourrait être un emploi à plein temps si j'avais dix ou vingt fois plus de collaborateurs. Le Parlement a décidé étant la nature de cette activité, qu'il n'était pas nécessaire d'avoir une grosse organisation pour superviser le CST.

    Il est évident que si le personnel était plus important nous serions en mesure de multiplier les échantillons—nous procédons par échantillonnage, sans prévenir à l'avance nous prélevons des dossiers pour voir si la loi est bien respectée. Si le personnel était multiplié par dix, nous prélèverions dix fois plus de dossiers que nous ne le faisons actuellement.

    Cette décision a été prise par le Parlement et ce n'est pas à moi de la commenter. C'est une question que vous devriez peut-être poser à quelqu'un d'autre.

+-

    M. Bob Wood: C'était simplement par curiosité. Il y a quelque chose d'autre d'assez intéressant dans ce rapport et vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus. Selon ce rapport, le Bureau du commissaire du CST n'a reçu ni plaintes ni critiques pendant la période 2002-2003, et j'ai une ou deux petites questions à vous poser à ce sujet. Qui peut être susceptible de déposer une plainte? Si vous ne recevez...

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Excusez-moi, monsieur le président. J'ai fait don de mes oreilles à la patrie dans l'artillerie...

    Des voix: Oh, oh!

    Le très hon. Antonio Lamer: ...et je vous serais reconnaissant...

+-

    M. Bob Wood: Vous voulez que je parle plus fort; c'est bien ça?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Oui, car n'importe comment, je n'ai que deux oreilles.

+-

    M. Bob Wood: Je trouve simplement bizarre que le Bureau du commissaire du CST n'ait reçu ni plaintes ni critiques pendant la période 2002-2003.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Ce n'est pas surprenant et je vais vous dire pourquoi.

+-

    M. Bob Wood: Je vous en prie.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: C'est une agence de renseignement étranger. Contrairement au SCRS, elle ne s'intéresse pas aux Canadiens et n'intercepte pas les conversations des Canadiens sous l'autorité de mandats délivrés par des juges de la Cour fédérale. Les gens du SCRS s'intéressent sur une base quotidienne à nos concitoyens, aux résidents du Canada; pas le CST. Le CST s'intéresse aux pays étrangers. Si le CST se faisait prendre en train d'écouter des communications entre un pays X et un pays Y, je serais fort surpris que ces deux pays ne viennent me voir pour déposer une plainte s'ils s'en apercevaient. En revanche, il est tout à fait compréhensible que si le centre ciblait des citoyens canadiens, nous recevrions vraisemblablement plus de plaintes de citoyens que ces plaintes soient fondées ou non.

    Permettez-moi de vous donner un exemple. Disons que je suis le sergent détective responsable de la brigade des vols informatiques. Mon frère, qui est dans la police avec moi, est simple policier, et les vendredis soirs, il est de service pour répondre aux appels quand il y a des bagarres dans les bars locaux. Il court beaucoup plus le risque de perdre son sang-froid et de se retrouver inculpé de brutalité ou inculpé d'arrestation un peu trop musclée, alors que moi je n'arrête jamais personne. C'est ça la différence. Le CST n'est impliqué qu'indirectement et ce très rarement. Il a ses cibles. La loi dit que ces cibles doivent être étrangères, et ce ne sont pas ces pays étrangers qui vont venir se plaindre auprès du commissaire canadien. Ils ne vont pas venir se plaindre et me demander de prendre en charge la plainte d'un pays étranger. Ils règlent le problème de manière différente, à leur façon.

+-

    M. Bob Wood: Qui est susceptible de déposer une plainte? Est-ce que vous en recevez jamais?

º  +-(1620)  

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Cela m'étonnerait énormément qu'un pays étranger dépose une plainte auprès de mon bureau. Il pourrait y avoir plainte quand une autorisation ministérielle est nécessaire parce qu'un citoyen canadien se trouve à un des deux bouts de la communication. La cible principale doit toujours être étrangère mais il est possible qu'un citoyen canadien y soit mêlé. Dans ce cas, il pourrait y avoir une plainte contre le CST qui pourrait ne pas avoir obtenu d'autorisation ministérielle.

    Permettez-moi de vous donner un exemple. Il y a deux cas...en fait trois. Primo—j'y reviendrai plus tard si vous voulez—il y a l'article 16 quand le CST aide le SCRS. Le CST a l'obligation d'aider le SCRS avec ses moyens techniques, mais en ce cas c'est le SCRS qui endosse toute responsabilité. Je veux parler de cas où un citoyen canadien est impliqué soit dans le contexte d'une autorisation ministérielle soit par accident.

    Permettez-moi encore une fois de vous donner un exemple. Un quidam a immigré au Canada et est devenu citoyen canadien. Il vient d'un pays qui ne compte pas parmi nos amis et nous écoutons les conversations de ce pays avec d'autres pays. Il téléphone à son père, qui travaille au gouvernement, et nous écoutons sa conversation. C'est la conversation d'un citoyen canadien qui est écoutée. Il téléphone à son père pour lui annoncer son mariage, lui demander s'il pourra venir, etc., etc. C'est une conversation privée qui ne nous intéresse pas; c'est par accident que nous avons écouté cette conversation privée.

    L'enregistrement de cette conversation est détruite, et je crois qu'elle est détruite mécaniquement. Ne me posez pas de questions sur la technologie utilisée. Tout ce que je sais c'est qu'il y a une espèce de machine qui fait quelque chose à cette conversation et que plus aucune oreille humaine ne peut l'écouter—sauf la partie du père.

º  +-(1625)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Wood, merci.

    Monsieur Blaikie, sept minutes, s'il vous plaît.

+-

    L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Merci. Monsieur le juge, merci de votre rapport.

    Il y a simplement une ou deux petites choses. Dans votre déclaration vous dites que vous avez pour responsabilité d'informer le ministre de la Défense nationale et le procureur général du Canada de toutes activités du CST que vous estimez ne pas être conformes à la loi, et vous parlez de votre rapport annuel. Est-ce que c'est dans votre rapport annuel? Je n'ai pas lu votre rapport, je ne suis donc pas sûr—excusez mon ignorance si c'est évident—mais rapportez-vous ces genres d'activités que vous estimez ne pas être conformes à la loi dans ce rapport au Parlement? Mon instinct me dit que vous devez probablement le faire ailleurs.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Si vous lisez ma déclaration, vous verrez que je fais allusion au fait que certaines questions sont communiquées directement au ministre et ne figurent pas dans le rapport annuel.

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Ce sont donc des rapports classifiés?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Quand il s'agit d'affaires de ce genre, on ne peut pas publier dans un rapport annuel ce qui a été intercepté pendant l'année précédente, les succès et les échecs.

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Je comprends l'impossibilité de donner des détails mais pourriez-vous au moins me donner une idée du nombre de fois où vous avez estimé que certaines activités n'étaient pas conformes à la loi, par exemple.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Si la loi n'a pas été respectée, le procureur général et le ministre de la Défense nationale en sont immédiatement saisis.

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Y a-t-il un document qui permettrait à des gens comme les parlementaires ou aux membres de ce comité de se faire une idée—peut-être simplement en posant une question comme moi—du nombre de fois où vous avez estimé que certaines activités du CST n'étaient pas conformes à la loi? Est-ce rare, est-ce fréquent...?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Mme Weeks m'informe que nous n'avons jamais rien rapporté au procureur général...

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Votre bureau.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Exactement.

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Très bien.

    Vous avez également mentionné le projet de loi C-14 qui vous semble un peu inquiétant dans la mesure où il dispense certains ministères du genre de supervision que vous exercez sur le ministère de la Défense nationale. Pourriez-vous nous expliquer un peu plus cette inquiétude?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Le projet de loi C-7 veut donner au commissaire la responsabilité de superviser la légalité des méthodes utilisées pour protéger nos systèmes de communications au ministère de la Défense nationale. Le projet de loi C-14 donnera aux administrateurs de tous les ministères, y compris la Défense, l'autorité nécessaire pour protéger nos systèmes de communications.

    Je pose simplement la question. Pourquoi demander au commissaire de faire pour la Défense ce que l'administrateur de la Défense peut faire—comme peuvent le faire les administrateurs des ministères de l'Agriculture, de l'Industrie, que sais-je encore? En d'autres termes, pourquoi cette exception pour la Défense avec moi alors que d'autres...? Il n'y a pas que la Défense; il y a les Affaires extérieures...

º  +-(1630)  

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Voulez-vous dire que c'est un doublon inutile ou qu'il y a supervision pour la Défense et pas pour les autres?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: C'est un doublon puisqu'une fois adopté ce projet de loi autorisera l'administrateur à le faire sans passer...

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Mais cet administrateur, comme tous les autres administrateurs de ministère, ne sera-t-il pas un peu en situation de conflit? Cela reviendra à une sorte d'autoréglementation alors que dans d'autres cas ce n'est pas de l'autoréglementation, vous les réglementez ou vous les examinez. Donc ces ministères ne seront pas soumis au même genre de supervision, même si on leur donnait les mêmes pouvoirs et responsabilités que ceux et celles du ministère de la Défense. C'est mon argument.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Ce n'est pas moi qui ait rédigé le projet de loi C-14.

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Je sais que ce n'est pas vous, mais j'essaie de comprendre les conséquences de ce que vous dites.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je dis simplement que si le projet de loi C-14 est promulgué, il y aura doublon avec le projet de loi C-7 en ce qui concerne le ministère de la Défense nationale.

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Soit un doublon soit un fardeau spécial pour le ministère de la Défense...

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Cela créera un terrible problème car nous nous retrouverons tout d'un coup surchargés d'une masse de travail qui exigera la mise en place d'une énorme organisation. Si c'est ce que veut le Parlement, je n'y ai pas d'objection. Cela ne me regarde pas sauf comme contribuable ou comme citoyen.

+-

    L'hon. Bill Blaikie: Le juge Lamer a appris au cours de ses années à la Cour suprême à s'en remettre à la primauté du Parlement. Je souhaiterais que tout le monde nous traite avec autant de déférence.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Blaikie. Magnifique.

    Nous passons maintenant au deuxième tour de cinq minutes. Madame Gallant.

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, PCC): Merci, monsieur le président. Merci, monsieur Lamer.

    Voudriez-vous nous énoncer les critères qui doivent être satisfaits pour que le Centre de la sécurité des télécommunications puisse intercepter légalement des communications privées de Canadiens?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: C'est une activité spécifiquement interdite au CST.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Monsieur le président, il y a certaines circonstances dans lesquelles c'est autorisé, comme nous l'a expliqué M. Coulter.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Oui.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Vous avez pour rôle de veiller à ce que ces critères soient respectés quand ces interceptions sont faites.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Il y a deux cas. J'ai fait allusion au premier dans ma réponse à une question de M. Wood. J'ai dit que je reviendrais à l'article 16 plus tard, et lorsque je lui ai répondu, j'ai constaté que vous fronciez les sourcils. Je crois que dès cet instant vous étiez déjà prête à poser cette question que je vous remercie de me poser. Il m'a fallu un certain temps pour comprendre car c'est...

    Si le CST, ayant ciblé un pays étranger, doit écouter les conversations d'un citoyen canadien, il doit faire une demande d'autorisation au ministre de la Défense nationale. S'il obtient cette autorisation, ayant ciblé un pays étranger, il peut alors écouter incidemment les conversations d'un citoyen canadien. Il ne peut cibler un citoyen canadien. Il doit cibler un étranger, et ce n'est que lorsqu'un Canadien est impliqué avec cette cible étrangère que les conversations peuvent être interceptées à condition d'avoir une autorisation ministérielle.

    Le deuxième cas concerne l'article 16. Le CST a le devoir d'aider d'autres agences, des agences comme les différents corps de police et le SCRS, qui n'ont pas les moyens technologiques du CST. Elles sont très loin d'avoir ces moyens. Le CST est une organisation hyper sophistiquée pleine de scientifiques et de mathématiciens. Je crois qu'ils sont près de 20 mathématiciens...?

º  +-(1635)  

+-

    Mme Joanne Weeks: Je ne sais pas.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je ne sais pas. Quoi qu'il en soit, c'est une pépinière de PhD. Il y a plus de PhD au CST que dans une université.

    Le CST a donc l'obligation d'aider le SCRS. Le SCRS obtient un mandat auprès d'un juge de la Cour fédérale qui est commis pour donner ce genre de mandat, et l'autorisation demande l'aide du CST et définit le rôle du CST. En d'autres termes, l'autorisation donnée par le juge conformément à un affidavit énonce les modalités d'application du mandat, etc., etc. Le CST doit alors aider le SCRS à intercepter des conversations de Canadiens.

    Donc dans un cas, c'est une autorisation ministérielle, car le SCRS n'a pas les moyens nécessaires, il s'agit d'une opération visant une cible étrangère menée par le CST. Dans l'autre cas, c'est une opération ciblant un Canadien menée par le SCRS, dans laquelle le CST ne joue pas le premier rôle, mais simplement un rôle d'assistant. Il prête son matériel, si vous voulez, et sa technologie, ses compétences, et il met cette technologie à la disposition du SCRS. Ce sont les deux occasions—sauf dans mon exemple, quand c'est accidentel—où le CST intercepte des conversations de citoyens canadiens, ou des personnes résidant au Canada, pas seulement des citoyens canadiens.

+-

    Le président: Merci beaucoup, madame Gallant.

    Monsieur O'Reilly, vous avez cinq minutes.

+-

    M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je vous remercie beaucoup d'être venu comparaître devant nous, mais je ne sais trop quel titre vous donner.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je ne suis plus juge.

+-

    M. John O'Reilly: J'ai toujours à l'esprit la robe rouge, et je pense que je dois être très prudent.

º  +-(1640)  

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Soyez gentil.

    Des voix: Oh, oh!

+-

    M. John O'Reilly: Vous pouvez être sûr que je serai gentil.

    Pendant l'étude du projet de loi C-17, j'avais été coprésident un certain temps. S'agissant du projet de loi en question, j'aimerais connaître votre avis sur...

    Je pense que 24 lois étaient touchées par le projet de loi C-17. Par conséquent, chaque fois que plusieurs agences et ministères sont en cause... Je ne sais pas si vous avez examiné cela ou si, à votre avis, vous pensez qu'il faudrait revenir sur cela parce que, pendant les audiences, nous avons pu le constater, certains des témoignages n'avaient peut-être pas été très précis. Nous avions porté certains jugements à partir des témoignages qui nous avaient été faits et, à partir de ce que les témoins nous avaient dit, nous en étions arrivés à la conclusion que le projet de loi C-17 était assurément une nécessité. Mais personnellement, j'ai toujours pensé qu'il fallait un processus de réexamen.

    Vous avez parlé de l'interception des communications étrangères. Si l'on pense par exemple aux navires qui empruntent la Voie maritime du Saint-Laurent, on ne sait pas trop bien au juste qui, de Pêches et Océans Canada, du MDN, de la Police provinciale de l'Ontario, de la GRC ou de la Garde côtière, est responsable. Il y a tellement d'organismes en cause que j'ignore qui est chargé d'intercepter les communications dans ces cas-là étant donné qu'il s'agit d'un domaine qui relève d'un très grand nombre de pouvoirs publics.

    Je me demande donc si vous avez réfléchi...

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Excusez-moi...?

+-

    M. John O'Reilly: Moi aussi, j'ai servi dans l'artillerie. Mais j'espérais que je parlais suffisamment fort.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: D'abord, le projet de loi C-17 est maintenant le projet de loi C-7. Pour commencer, il serait prétentieux de ma part et inopportun aussi, je crois, monsieur le président, de vouloir donner une opinion sur ce que la loi devrait ou ne devrait pas être. Pour moi, la loi est telle que le Parlement l'a faite.

+-

    M. John O'Reilly: Ah bon, j'aurai quand même essayé.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je la respecte et je la fais appliquer. Je ne pense pas qu'à l'époque, en parlant uniquement du ministère de la Défense nationale, on pensait qu'il y aurait ce recoupement entre le ministre et l'administrateur général.

    Ce texte de loi a pour but de protéger, et non pas d'intercepter des communications pour obtenir des renseignements. Il s'agit d'intercepter des communications pour vérifier si nos télécommunications servent bien aux fins prévues par l'État. Il s'agit de nous protéger contre une invasion de notre système de télécommunications. Comme nous pouvons le constater chaque jour, il y a des gens qui envoient des virus et ainsi de suite. C'est de cela qu'il s'agit.

    À mon sens, il ne s'agit pas d'une activité destinée à obtenir des renseignements. C'est la même chose que ce que fait GM pour protéger ses ordinateurs. L'idée est ici que si un officier de marine utilise le système pour regarder des images pornographiques, ce serait une utilisation abusive du système de communications du ministère de la Défense. Je pense que c'était cela le but.

    Lorsqu'on évoque la Défense nationale en parlant de ce qui pourrait être fait en passant par le ministre et ainsi de suite, on peut tout aussi bien passer par l'administrateur général. Il n'y a aucune différence à ce titre entre le ministère de la Défense nationale et celui des Affaires étrangères. Il s'agit plutôt d'un mécanisme de protection. Il s'agit ici de protéger le système et non pas de l'utiliser pour obtenir des renseignements.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Merci, monsieur O'Reilly.

[Français]

    Monsieur Bachand, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Claude Bachand: Le président du comité a parlé plus tôt des rapports que vous faites au ministre, dans lesquels on précise si le CST se conforme à la loi, et qui sont déposés au Parlement.

    Toutefois, dans le document qui définit le Centre de la sécurité des télécommunications, on indique que le commissaire, en l'occurrence vous, entreprend aussi chaque année une série d'examens des activités du CST, dont il fait ensuite rapport au ministre. Or, comme ces examens contiennent de l'information classifiée, ces rapports ne sont pas présentés au Parlement. Vous mentionnez dans votre présentation que vous avez fait cinq rapports. J'imagine que ces derniers entrent dans cette catégorie et que, par conséquent, personne ne peut les obtenir, sauf le ministre. Est-ce exact?

º  +-(1645)  

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je ne peux pas répondre à cette question.

+-

    M. Claude Bachand: Pourquoi?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Parce que vous avez adopté une loi en vertu de laquelle vous m'enverrez en prison pendant 14 ans si j'y réponds.

+-

    M. Claude Bachand: Peut-être pourriez-vous leur dire de m'y envoyer, étant donné que c'est moi qui vous ai posé la question.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Vous vouliez que je me récuse à Saint-Jean-sur-Richelieu et vous voulez maintenant que j'aille au pénitencier!

+-

    M. Claude Bachand: Je vais vous lire l'article qui suit:

Le commissaire a pour mandat d'examiner les activités du CST pour s'assurer de leur conformité aux lois du Canada.

    Vous nous avez dit cela.

Il a accès à toute l’information du CST, à part les documents du Cabinet, et remet un rapport annuel au ministre de la Défense qui le présente ensuite au parlement.

    On mentionne aussi que M. Bisson, en tant que commissaire, a fait sept rapports et qu'il n'y a jamais eu d'entorse aux lois canadiennes. Par contre, dans l'autre paragraphe, on peut lire ce qui suit:

Le commissaire entreprend aussi une série d’examens...

    Dans votre présentation, vous avez parlé de cela en ces termes:

J'ai également présenté cinq rapports classifiés...

    Je vous demande s'il s'agit de la même chose. Est-ce que c'est conforme au paragraphe que je mentionne, à savoir que vous avez entrepris une série d'examens et déposé un rapport au ministre, mais que ce dernier ne nous est pas accessible? Est-ce exact?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Ces rapports sont classifiés.

+-

    M. Claude Bachand: D'accord.

    Maintenant, un autre mandat a été donné au CST, celui de collecter les communications d'une cible étrangère légitime située à l'extérieur du Canada si ces communications sont à destination ou en provenance du Canada.

    Je veux savoir si, selon vous, l'interception des conversations entre l'ambassade d'un pays à Ottawa et son consulat à Montréal, par exemple, est permise par la loi.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: C'est permis par la loi, mais pas pour le CST.

+-

    M. Claude Bachand: C'est le SCRS qui peut faire cela, et non le CST?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: C'est cela. Le CST est en dehors du pays.

+-

    M. Claude Bachand: Mais s'il y a une conversation entre un individu en Iran et l'ambassade d'Iran à Ottawa, qu'est-ce que vous faites?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Si on cible l'Iranien, ça va, parce que notre cible est étrangère. On ne peut pas cibler des communications à l'intérieur du pays, mais remarquez bien que le SCRS peut le faire. Pour le faire, le SCRS doit aller voir un juge désigné et obtenir un mandat.

+-

    M. Claude Bachand: Justement, on est au fond de la question. J'aurai une dernière question à ce sujet. Vous avez parlé de la légalité tout à l'heure et vous avez dit que vous n'aviez pas, par exemple, le mandat d'enquêter sur l'efficacité du CST.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Ils peuvent être inefficaces du moment qu'ils le font légalement.

+-

    M. Claude Bachand: Bon.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Ça ne me regarde pas.

+-

    M. Claude Bachand: J'aimerais avoir votre opinion sur une question. L'efficacité est quand même un élément important pour un organisme gouvernemental. Je comprends que ça ne vous regarde pas, mais plusieurs personnes ont exigé ou demandé que les responsabilités dévolues au CST soient transférées au SCRS, justement parce qu'il y a là un commissaire qui, lui, n'examine pas seulement la légalité, mais aussi l'efficacité. Il voit si tout est fait conformément aux lois.

    Est-ce que cette voie ne pourrait pas être envisageable pour qu'on puisse se pencher un peu plus sur l'efficacité?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: J'ai deux réponses à votre question, monsieur le président.

    Premièrement, le vérificateur général s'occupe de l'efficacité du CST. Si le contribuable n'en a pas pour son argent, c'est à la vérificatrice générale d'y voir et de faire rapport. L'efficacité est donc déjà couverte par un vérificateur général.

    Maintenant, il y a une différence très fondamentale entre le CST et le SCRS dans la nature de leur travail et le profil de leur personnel. Ce n'est pas le même profil et ce n'est pas la même activité. Il faudrait qu'ils prennent le personnel du commissariat et qu'ils le mettent avec les autres. C'est une activité tellement différente que le Parlement, dans sa sagesse--je pense que cela a été sage--, a pensé qu'il serait préférable de diviser les tâches.

    De façon très générale, c'est sage pour un pays de ne pas concentrer chez un ministre toutes les activités de cette nature. Et cela, on l'a découvert avec Fouché pendant la Révolution française. Les Français l'ont si bien découvert qu'aujourd'hui, ils ont divisé leur corps de police en cinq corps de police qui rendent compte à cinq ministres différents, dont le président. La CRS répond au président, la gendarmerie répond à la défense nationale, la police judiciaire répond au ministre de la Justice, et ainsi de suite.

    D'après moi, il y a une raison de prudence politique à ne pas concentrer chez un seul ministre tous les pouvoirs de surveillance et de contrôle de cette nature. C'est une observation personnelle. Ça me rassure comme citoyen que les responsabilités soient divisées.

º  +-(1650)  

[Traduction]

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Bachand.

    Je voudrais quelques éclaircissements, après quoi nous poursuivrons avec ce tour de questions. Pour poursuivre dans la même veine que M. Bachand, une ambassade à Ottawa est-elle considérée comme une cible étrangère? En d'autres termes, pouvons-nous mettre sur écoute les fonctionnaires d'un autre pays qui travaillent dans leur ambassade à Ottawa pour la seule raison que cette ambassade est considérée comme une cible étrangère?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Une ambassade est en territoire étranger. Lorsque vous entrez dans l'ambassade des États-Unis, vous mettez le pied sur le territoire américain.

+-

    Le président: C'est effectivement ce que je pensais, mais je voulais que vous me le confirmiez.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: J'espère ne pas me tromper. Je ne me suis jamais vraiment inquiété à ce sujet. Mais je pense bien que c'est le cas.

+-

    Le président: Je vous en sais gré. Si vous arrivez jamais à une conclusion différente, je vous saurais gré de nous le faire savoir.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: J'en ai la quasi-certitude.

+-

    Le président: Cela semble logique.

+-

    M. Claude Bachand: Je croyais avoir entendu que c'était le SCRS qui pouvait mettre les ambassades sur écoute. Vous nous dites maintenant que c'est un territoire étranger.

+-

    Le président: C'était simplement une question.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Le Parlement pourrait vouloir modifier la loi pour dire que, en ce qui concerne les ambassades, comme elles constituent un territoire étranger en sol canadien, le CST pourrait faire à ce pays, c'est-à-dire à son ambassade au Canada, ce qu'il est incapable de faire sur place, hors des frontières du Canada. Cela n'a rien d'impensable. Mais ce n'est pas le cas: ce que la loi dit au CST, c'est que sur le territoire canadien, il ne peut pas toucher aux ambassades.

º  +-(1655)  

+-

    Le président: Merci pour cette précision.

    Monsieur Calder, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    La Loi antiterrorisme permet au CST d'intercepter les communications privées en provenance et à destination du Canada pourvu que le ministre de la Défense nationale l'y autorise. Comment savoir ce qu'il faut surveiller?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Dans ma déclaration, j'ai évoqué le fait que nous engagions au cas par cas les experts dont nous avions besoin, selon ce que nous cherchions. Mes collaborateurs sont tous des gens qui ont été là à un titre ou à un autre. Tous ces gens proviennent du milieu du renseignement. Ils savent où se trouvent les mouchards, s'il y en a, et ils savent où chercher. Moi je ne le sais pas, mais eux oui. Comme je vous l'ai dit, nous procédons par échantillonnage.

+-

    M. Murray Calder: Le CST intercepte au hasard des bribes ici et là, et s'il trouve quelque chose de juteux, il va voir le ministre pour lui dire que la mise sur écoute devrait être permanente.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Pas du tout.

+-

    M. Murray Calder: Mais alors, comment découvrir ces renseignements?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Nous contrôlons les activités du CST en procédant par échantillonnage et si nous découvrons quelque chose d'illégal, nous en saisissons le ministre et le procureur général.

    Mais il y a un autre élément encore qui n'a pas été mentionné, et si je n'en ai pas parlé, c'est à dessein parce que dans une certaine mesure c'est une zone floue. Nous sommes en pourparlers... Nous ne sommes pas en confrontation. Même si je suis là pour contrôler leurs agissements, je ne joue pas les épouvantails. Je crois beaucoup à la prévention.

    Si nos collaborateurs constatent quelque chose qui ne constitue pas une violation de la loi mais qui pourrait plus facilement qu'autrement entraîner une violation de la loi par les employés du CST, moi je pense, mais ce n'est pas nécessairement l'opinion de tout le monde—et je parle ici des gens de chez moi—qu'au lieu d'attendre que quelque chose se produise, qu'un employé du CST commette un délit, nous devons signaler la chose afin que les correctifs nécessaires soient apportés pour mettre le holà afin que cela ne se produise pas.

    Nous sommes en pourparlers à ce sujet et nous discutons également des limites que devrait avoir notre intervention. Je ne peux malheureusement pas vous en dire davantage.

+-

    M. Murray Calder: Je comprends fort bien car...

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je pourrais vous donner un exemple, mais si je le faisais, ici aussi j'enfreindrais la loi.

»  +-(1700)  

+-

    M. Murray Calder: D'accord. Je ne suis pas un professionnel du droit, mais je sais qu'il y a des lois qui interdisent de mettre sur écoute la ligne téléphonique de quelqu'un à l'insu de celui-ci et que les éléments de preuve ou d'information qui seraient ainsi réunis ne seraient peut-être pas admissibles en droit.

    Mais il y a toutefois quelque chose que j'aimerais savoir: sur la base de quels renseignements le ministre pourrait-il donner l'autorisation de mettre sur écoute? Pourriez-vous me donner un exemple?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: De mettre sur écoute quoi?

+-

    M. Murray Calder: Que le ministre donne l'autorisation de mettre sur écoute des conversations avec, je ne sais trop, une entreprise, une compagnie, peu importe, parce que vous avez découvert qu'il y avait quelque chose qui clochait.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Nous n'avons pas ce pouvoir. Le ministre non plus. Nous devons commencer par une cible étrangère... C'est pour cela que j'en ai parlé. J'ai dit qu'il était extrêmement important de commencer hors du Canada. La plupart du temps, nous restons hors du Canada, mais il arrive que quelqu'un au Canada intervienne dans ce que nous faisons—je dis «ce que nous faisons», mais je parle ici en tant que Canadien et non pas en tant que commissaire—ce que font les gens du CST à l'étranger ou avec une cible étrangère, et qu'un citoyen canadien arrive dans le portrait. Automatiquement, sauf s'il s'agit d'un de ces accidents dont je vous ai parlé, il faut demander l'autorisation au ministre. Mais tout dépend de ce qui se passe. Le ministre juge sur pièce et met dans la balance, j'imagine, d'une part l'invasion de la vie privée et d'autre part l'importance du renseignement que nous pourrions ainsi obtenir.

+-

    Le président: Avez-vous bien compris, Murray?

+-

    M. Murray Calder: Oui.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Madame Gallant, vous avez cinq minutes.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Merci, monsieur le président.

    S'il me reste du temps, je voudrais le partager avec Mme Wayne.

+-

    Le président: Nous avons amplement le temps.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Dans l'exemple que vous nous avez donné d'une interception fortuite d'une conversation entre un père qui se trouve dans un pays non ami et qui parle à son fils, Canadien et fonctionnaire, comment peut-on déterminer si cette conversation est personnelle et ne constitue pas une menace? Vous avez dit qu'à moins qu'on ne puisse déterminer que cette conversation est une menace pour la sécurité, aucune oreille humaine ne peut l'écouter.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Elle ne peut l'être que si la conversation révèle qu'elle a un rapport avec la sécurité nationale.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Mais qui en juge, puisque manifestement un terroriste...

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Qui en juge? Ce sont les gens qui travaillent là-dessus, ceux qui font l'écoute. C'est ce qu'ils entendent, et ce sont donc eux qui jugent.

    Cela dit, si l'un de mes collaborateurs intervient brusquement pour dire: «En passant, montrez-nous cette conversation que vous avez interceptée parce que vous estimez qu'elle concerne la sécurité nationale» et s'il apparaît au bout du compte que ce n'est pas le cas et qu'il s'agit d'une violation flagrante de la vie privée, à ce moment-là il y a ipso facto un rapport au ministre. Et selon la nature de la violation en question, ce rapport ira soit au ministre de la Défense nationale, soit au ministre de la Justice s'il y a lieu de poursuivre.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Si j'ai bien compris la façon dont les choses se passent, cette conversation est sur écoute et elle donne l'impression d'être de nature personnelle. Mais si on soupçonne que peut-être le père et son fils utilisent un genre de code en parlant du «mariage» alors que le mariage en question est un attentat, est-ce à ce moment-là que le service irait demander au ministre l'autorisation de continuer à écouter la conversation?

    J'essaie simplement de comprendre quelles sont les différentes étapes dans le déroulement des choses et la chronologie des événements.

»  +-(1705)  

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Cela dépend un peu de la personne qui appelle. S'il y a par exemple des raisons de penser que les gens se parlent en codes—dans l'exemple que j'ai donné, s'il y a vraiment un mariage qui va avoir lieu... Si l'on vérifie et qu'on s'aperçoit qu'il n'y a pas d'église réservée alors que c'est un mariage à l'église ou si l'on n'a pas envoyé d'invitations pour ce mariage, cela peut montrer que les gens se parlent par codes, parce qu'il n'y a pas vraiment de mariage.

    Peut-être Mme Weeks pourrait-elle en dire plus, monsieur le président.

+-

    Le président: Certainement.

+-

    Mme Joanne Weeks: Pourrais-je ajouter une ou deux précisions, monsieur le président?

+-

    Le président: Oui, certainement.

+-

    Mme Joanne Weeks: L'autorisation ministérielle est octroyée initialement en vertu de quatre critères énoncés dans la loi pour intercepter une communication étrangère cible à destination du Canada. L'une des grandes préoccupations actuellement, si je comprends bien, c'est que si l'on parle d'une cible précise qui utilise, on le sait, des termes comme «mariage» ou «enterrement» comme code pour camoufler une activité terroriste éventuelle, il faut examiner de très près ces communications, et on prend donc cette décision. Si l'on estime pour une raison ou une autre qu'il est dans l'intérêt de conserver l'enregistrement de la communication pour des raisons de sécurité nationale, on le fait.

    Le critère fondamental, c'est de savoir si le message ou la communication personnelle en question peut être interprété comme constituant une menace pour la sécurité nationale. Si c'est le cas, on le conserve.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Vous avez parlé de quatre critères alors que le commissaire n'en a mentionné que deux. Est-ce que ce sont les mêmes critères qui sont subdivisés?

+-

    Mme Joanne Weeks: Non, le commissaire avait raison. Il y a évidemment des critères dont le ministre de la Défense nationale doit tenir compte pour émettre une autorisation, et ces critères sont énoncés dans la loi.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Pourriez-vous nous décrire ces critères, pour éclairer notre lanterne.

+-

    Mme Joanne Weeks: Il s'agit de l'article 273.65, partie I, de la Loi sur la défense nationale, qui légifère sur le CST et le bureau du commissaire. Les conditions sont énoncées au paragraphe (2):

Le ministre ne peut donner une autorisation que s'il est convaincu que les conditions suivantes sont réunies:

a) l'interception vise des entités étrangères situées à l'extérieur du Canada;

b) les renseignements à obtenir ne peuvent raisonnablement être obtenus d'une autre manière;

c) la valeur des renseignements étrangers que l'on espère obtenir grâce à l'interception justifie l'interception envisagée;

d) il existe des mesures satisfaisantes pour protéger la vie privée des Canadiens et pour faire en sorte que les communications privées ne seront utilisées ou conservées que si elles sont essentielles aux affaires internationales, à la défense ou à la sécurité.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Je sais que plusieurs collègues veulent encore poser des questions et j'aimerais aussi donner la parole à M. Price vers la fin.

    Je sais que Mme Wayne veut poser des questions. C'est bon, Elsie?

+-

    Mme Elsie Wayne: C'est bon, merci.

+-

    Le président: Claude, vous avez encore une ou deux questions?

    Je vais passer à M. Bachand, puis à M. Price.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand: Un peu plus tôt, on a soulevé la question du mandat du commissaire, qui a été modifié en 1999 pour lui permettre de recevoir des plaintes au sujet du CST. En réponse à cette question, vous avez donné des exemples comme celui de deux pays qui, s'ils découvraient qu'on les avait écoutés, ne porteraient probablement pas plainte auprès de vous. Je comprends cela.

    Parlons maintenant de la question des employés du CST. Je me réfère au projet de loi C-25, qu'on vient d'adopter en deuxième lecture cet après-midi et qui porte sur la protection des dénonciateurs. Ce projet de loi exclut les Forces canadiennes et exclut aussi le CST. Si quelqu'un est témoin d'un geste répréhensible, êtes-vous habilité à recevoir cette personne et à tenter de corriger la situation?

»  +-(1710)  

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Pourriez-vous clarifier votre question, s'il vous plaît?

+-

    M. Claude Bachand: Cet après-midi, on a adopté en deuxième lecture le projet de loi C-25, aussi nommé whistle blower, qui protège les dénonciateurs. Cependant, à ma connaissance, les Forces armées canadiennes et le CST sont exclus du projet de loi C-25. Un peu plus tôt, vous avez utilisé l'expression «entre pays». Si un employé du CST est témoin d'un geste répréhensible, peut-il s'adresser à vous, le commissaire, pour tenter de corriger la situation?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Oui.

+-

    M. Claude Bachand: Merci. Je n'ai pas d'autres questions à poser.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Madame Gallant, vous avez encore quelques questions, et ensuite je passerai à M. Price.

+-

    Mme Cheryl Gallant: Oui, monsieur le président.

    Dans votre rapport annuel de 2002-2003, on vous charge spécifiquement d'examiner les activités du CST menées en vertu de l'autorisation ministérielle pour vous assurer qu'elles sont autorisées, mais vous n'avez plus l'entière latitude de choisir les sujets à examiner. Dans la mesure où vous n'aurez plus autant de liberté pour choisir ce que vous allez examiner, craignez-vous que des infractions à la loi dont vous êtes censé vérifier le respect par le CST, des infractions que vous devez dénoncer, passent inaperçues?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: De quelles restrictions parlez-vous?

+-

    Mme Cheryl Gallant: À la page 4, on peut lire:

    La nouvelle loi a apporté certains changements importants à mon mandat. Comme je le mentionne plus haut, le ministre de la Défense nationale peut maintenant [...] Je suis toujours tenu d'examiner les activités du CST en général pour m'assurer qu'elles sont légales, mais la loi m'enjoint en outre expressément d'examiner les activités exercées par le CST en vertu d'autorisations ministérielles pour m'assurer que ces activités sont autorisées, et de faire rapport de cet examen au ministre annuellement. Autrement dit, je n'ai plus toute latitude pour choisir les sujets d'examen.

    Étant donné que vous n'avez plus cette totale latitude pour choisir vos sujets d'examen, craignez-vous que certaines infractions que vous êtes censé dénoncer passent inaperçues?

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Pour moi, il parle d'examiner toutes les autorisations ministérielles, et j'imagine qu'auparavant il n'était pas obligé de les examiner toutes. En somme, il dit: «Je n'ai plus toute latitude»—latitude au sens négatif. Autrement dit, précédemment il n'était pas obligé de toutes les examiner, alors que maintenant il doit le faire. Il estimait donc qu'il avait moins la latitude de choisir les sujets qu'il allait examiner.

    Personnellement, je me réjouis de cela. J'aimerais bien examiner toutes les autorisations ministérielles. Autrement dit, en l'absence de changement à la loi, j'aurais personnellement souhaité pouvoir examiner toutes ces autorisations.

»  +-(1715)  

+-

    Mme Cheryl Gallant: Merci pour cette précision.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Maintenant, j'y suis obligé.

+-

    Le président: Il s'agit donc d'un renforcement de la surveillance exercée par votre bureau. Merci pour cela.

    Nous passons à M. Price maintenant pour une question particulière, monsieur le juge.

+-

    L'hon. David Price (Compton—Stanstead, Lib.): Merci beaucoup.

    Monsieur, nous sommes honorés de vous accueillir ici aujourd'hui. En voyant votre CV, je constate qu'on parle de vous en tant que commissaire, juge et très honorable, et je vois toute une série de lettres à la suite de votre nom dans lesquelles je n'ose même pas m'aventurer. Mais j'aimerais avoir le très grand honneur d'utiliser encore un autre titre pour vous saluer, celui de colonel honoraire, qui convient parfaitement ici.

    J'aimerais donc partir un peu dans une autre direction avec ma question. Vous êtes aussi, je crois, l'ancien président du conseil national des colonels et lieutenants-colonels honoraires du Canada.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Des forces terrestres.

+-

    L'hon. David Price: Des forces terrestres, effectivement. On peut dire que c'est de cela qu'il s'agit.

    Il se trouve que jeudi, nous accueillerons le général Fitch. Je suis sûr que vous l'avez rencontré et que vous avez discuté avec lui récemment. Je me demandais si vous pourriez nous donner un aperçu de ce que vous pensez de tout le système des colonels honoraires, ou nous dire simplement ce que cela entraîne d'être colonel honoraire. Je sais que vous ne vous êtes pas préparé à cela.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Monsieur le président, je suis tout à fait prêt à répondre à la demande de mon ami.

+-

    Le président: M. Price m'a parlé. Je voulais m'assurer que tous les collègues pouvaient vous poser leurs questions sur les raisons de votre présence ici.

+-

    M. Claude Bachand: Il doit avoir le consentement unanime.

+-

    Le président: M.  Bachand est d'accord pour donner le consentement unanime. Je vois que nous avons consentement unanime pour laisser M. Price poser sa question, si vous ne voyez pas d'objection à y répondre.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Je n'ai aucune objection.

+-

    Le président: C'est une parfaite introduction à notre prochaine réunion, en fait, et je crois que nous avons fait le tour des autres questions.

+-

    L'hon. David Price: C'était mon idée. Puisque nous allons accueillir le général Fitch, je me suis dit: «Mon Dieu, quelle merveilleuse occasion»...

+-

    Le président: C'est donc une parfaite introduction. Si cela ne vous pose pas de problème, nous serions ravis de vous entendre.

+-

    Le très hon. Antonio Lamer: Bon.

    Le régime des titres honoraires a évolué. Il faut connaître un peu l'historique de la question. Si l'on remonte à un siècle en arrière, on s'attendait à l'époque à ce que certaines personnes financent les régiments. D'où le Princess Patricia's Canadian Light Infantry.

    Ces gens qui constituaient des régiments pour appuyer leur pays en temps de guerre n'étaient pas nécessairement formés à l'art militaire. En fait, très peu d'entre eux l'étaient. On prenait un soldat professionnel qui était nommé lieutenant-colonel, et c'était le colonel du régiment. La Reine est colonel d'un régiment, le gouverneur général est colonel d'un régiment des Gardes à pied, des Grenadiers et de la Garde à cheval. Le lieutenant-colonel était le soldat qui dirigeait le régiment. Voilà pour l'historique. Le colonel payait simplement la solde des soldats et des officiers. C'est comme cela que fonctionnaient les choses.

    Nous avons fini par manquer de personnes prêtes à former des régiments et nous en sommes venus à constituer une armée plus moderne pour le pays. Les colonels honoraires sont restés. Quand j'étais jeune officier, les colonels honoraires étaient des gens qui avaient un peu d'argent et qui aidaient les jeunes officiers à acheter un uniforme. Quand j'étais jeune officier, nous devions acheter notre uniforme et nous n'en avions pas les moyens. Un lieutenant touchait 173 $ par mois, et nous n'avions pas les moyens de nous acheter notre gamelle. Il nous fallait un an pour la payer, alors le colonel honoraire nous aidait. Il arrivait aussi que le colonel honoraire, s'il s'agissait d'une unité de réserve, aide les gens sans emploi à trouver un travail, etc.

    Cette catégorie de personnes qui avaient beaucoup d'argent à dépenser a disparu, la notion a évolué au cours de ma vie et au lieu d'un colonel honoraire riche et prospère qui payait la facture de la soirée ou du banquet, du dîner au mess, on a simplement maintenant un ancien militaire. Par exemple, le lieutenant-colonel honoraire de la Garde à pied du gouverneur général est l'ancien lieutenant-général James Gervais. Aujourd'hui, on constate que d'anciens lieutenants-colonels commandants de régiments sont devenus des colonels honoraires pendant deux ou trois ou quatre ans, etc.

    Il en reste encore quelques-uns qui n'ont aucun passé militaire, mais ils sont en voie de disparition. De plus en plus, on veut avoir des colonels honoraires qui ont un passé militaire.

»  +-(1720)  

    Les colonels honoraires font et disent des choses comme ceci. Mon régiment est un régiment d'artillerie. J'ai rencontré le maire de Montréal et obtenu les clés de la ville pour mon régiment. Il m'arrive de temps à autre, après un dîner régimentaire, de glisser 200 $ au sergent en lui disant que tous ceux qui sont en dessous du rang de major—autrement dit les officiers subalternes—peuvent boire un verre à ma santé. Et avec 200 $, ils ont de quoi s'imbiber. C'est suffisant pour moi et pour eux.

    Le colonel honoraire est responsable de la tradition et il rappelle à l'ordre le commandant lieutenant-colonel qui transgresse ou laisse disparaître une tradition. Je vais encore vous donner un exemple.

    J'ai expliqué à un lieutenant-colonel qui avait abandonné une tradition que la plupart des traditions avaient une bonne raison d'exister, et que l'une d'entre elles était que quand on entrait dans le mess des officiers, on devait se mettre au garde-à-vous. À droite de la porte, il y avait une table pour vous rappeler d'enlever votre couvre-chef, car si quelqu'un entrait dans le mess avec un couvre-chef, il devait payer un verre à tout le monde. Mais il y avait une autre raison beaucoup plus importante. C'était pour montrer que l'officier entrait dans une oasis où c'était le président du mess et non plus l'officier commandant le régiment qui était le patron.

    J'étais jeune à l'époque. J'ai vu le président du mess, un capitaine, dire au lieutenant-colonel commandant du régiment: «Monsieur, je crois que vous avez suffisamment bu. Je vous prie de quitter le mess.» Et c'était comme cela. Cette tradition a disparu.

    Le mess est une oasis pour les officiers où la discipline n'a pas... On respecte toujours les aînés, mais il n'y a plus de hiérarchie de commandement dans le mess, à l'exception du président du mess qui est élu par les officiers. C'est une tradition qui a disparu dans la plupart des régiments mais qui a été rétablie dans le mien. Le lieutenant-colonel n'était pas très content, mais je lui ai dit: «Eh bien, c'est dommage, mais ce sera comme cela.»

    Les colonels honoraires ont donc ce rôle à jouer. Les colonels honoraires et les lieutenants-colonels honoraires ne doivent jamais se mêler des activités militaires du régiment—c'est la prérogative du commandant—et ne doivent jamais saper l'autorité du lieutenant-colonel.

    Pendant un certain temps, j'ai été président du Comité des titres honoraires. Tout le monde était un ancien général, et les anciens généraux ont tendance à revenir... Quand on est nommé officier général, cela veut dire qu'on n'a plus de régiment. On quitte son régiment. On est officier général. On ne porte même plus l'insigne de son ancien régiment. Mais quand ces gens-là reviennent, ils aiment bien revenir comme colonels honoraires et retourner dans leurs régiments respectifs. C'est une tradition qui sera, je l'espère maintenue, car elle a son utilité, à part le fait que les colonels honoraires doivent être...

»  -(1725)  

    Enfin, durant ma présidence... J'ai dû démissionner de ce poste lorsque je me suis lancé dans la révision du système de justice militaire. Je n'avais plus le temps, et j'ai donc laissé la place au major-général à la retraite Reg Lewis, qui était colonel honoraire d'un régiment à Toronto.

    Alors, donnez le bonjour de ma part à Fitch.

-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur le juge, de nous avoir fait part de cette expérience et d'être venu nous parler de notre sujet principal. C'est un honneur de vous accueillir en tant que commissaire.

    Madame Weeks, cela a été un plaisir de vous accueillir aussi.

    Nous en avons terminé avec nos questions. Merci, chers collègues. À jeudi.

    La séance est levée.