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LANG Rapport du Comité

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4. Le Développement des communautés

Les deux sections précédentes constituaient l’aboutissement des réflexions du Comité sur les thèmes de la santé et de l’immigration comme moteurs du développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Ces sections intégraient les points de vue des représentants des communautés, des représentants politiques et administratifs du gouvernement, des spécialistes, et de certains autres organismes intéressés.

La section qui suit est essentiellement centrée sur les besoins des communautés, tels qu’exprimés dans le cadre des réunions tenues dans les neuf villes où s’est rendu le Comité en novembre et décembre 2006, de même que lors d’autres réunions tenues à Ottawa entre le printemps 2006 et février 2007. Les thèmes retenus sont ceux qui se sont révélés prioritaires pour un grand nombre d’organisations rencontrées par le Comité. Les thèmes qui ont nettement fait consensus sont : l’éducation, de la petite enfance jusqu’au niveau postsecondaire, la vitalité des réseaux communautaires, les infrastructures, l’inclusion de clauses linguistiques dans les paiements de transfert fédéraux vers les provinces et territoires, les compressions budgétaires de septembre 2006 (Programme de contestation judiciaire et alphabétisation), la promotion du français, les médias, les arts et la culture, la justice, le développement économique et la recherche. Tous ces éléments seront à considérer dans le cadre des suites à donner au Plan d’action pour les langues officielles à partir de l’exercice financier 2008-2009, et sur lesquelles les communautés invitent le gouvernement du Canada à se pencher dès maintenant.

4.1. L’éducation : de la petite enfance à l’université

Le français, ça s'apprend, mais l'anglais, ça s'attrape.

4.1.1. L’enseignement dans la langue de la minorité

L’éducation est certainement le secteur où les progrès les plus importants ont été accomplis depuis vingt-cinq ans en ce qui touche la vitalité des communautés. L’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés et les jugements de la Cour Suprême qui en ont découlé, ont, sans contredit, été les éléments déclencheurs de ces progrès (voir section 1.2.). Au début des années 1980, la moitié des provinces canadiennes ne comprenaient pas d’écoles françaises. Suite à l’entrée en vigueur de l’article 23 en 1982, la Cour suprême a confirmé que le droit à l’instruction dans la langue de la minorité accordait aux communautés linguistiques en situation minoritaire la gestion et le contrôle de l’instruction et des établissements d’enseignement.

Ces gains ont évidemment mis en lumière l’importance qu’a eue la Cour Suprême en tant que contrepoids à la résistance des provinces face à leurs obligations constitutionnelles en vertu de la Charte. La plupart des causes marquantes ont bénéficié du soutien du Programme de contestation judiciaire, et, comme nous le verrons dans la section 4.5., ce Programme est en quelque sorte devenu le symbole de la possibilité pour le gouvernement fédéral de maintenir son rôle de gardien de la Constitution dans les champs qui ne relèvent pas de sa compétence et qui échappent à l’autorité du Commissariat aux langues officielles.

Le développement des écoles et des centres scolaires et communautaires a constitué la principale avancée des communautés francophones en situation minoritaire au Canada. Les progrès dans ce domaine se feront dans l’avenir à un rythme plus modéré, et dépendront essentiellement de l’essor qu’il sera possible de donner aux services à la petite enfance, qui constituent la principale condition d’un recrutement qui pourrait permettre de maintenir, puis d’augmenter les effectifs en éducation dans la langue de la minorité. Les problèmes du recrutement au primaire seront donc abordés dans la section portant sur la petite enfance.

Les gains en éducation ont été mentionnés de manière quasi unanime comme la plus grande source de fierté des communautés. Certains témoignages furent particulièrement éloquents, dont celui de la directrice générale de la Société Saint-Thomas-d’Aquin de l’Île-du-Prince-Édouard :

[…] [nos] écoles et [nos centres communautaires sont] probablement notre plus grand succès. On voit un rayonnement. On est en train de repêcher une génération perdue, et même deux générations dans certaines régions.

À Souris et à Rustico, par exemple, on doit la survie de la langue aux grands-parents et parfois aux arrière-grands-parents, qui sont Acadiens, parce que depuis plusieurs générations, les francophones n'ont pas eu l'occasion de se faire éduquer en français. Mais ces gens-là sont fiers. On le voit dans les visages, comme on le voit dans les communautés. Ils inscrivent leurs enfants aux écoles de langue française sans en connaître un seul mot, mais c'est ce qu'ils veulent pour leurs enfants. Ils suivent des cours de français pour pouvoir tenir des conversations en français avec leurs enfants. Ces parents inscrivent leurs enfants dans une école qui est tout à fait inadéquate, alors qu'en face, ou presque, une école [anglaise] a tout, mais est presque vide à cause de la dénatalité. Tout cela nous appartient, en tant que Canadiens[148].

4.1.1.1. L’appui du gouvernement fédéral pour l’enseignement dans la langue de la minorité

L’appui financier du gouvernement fédéral, sous forme d’ententes bilatérales avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, s’est également avéré tout à fait déterminant dans la réalisation des gains de ces communautés en matière d’éducation :

Je peux dire tout de suite que l'apport que nous recevons par l'entremise des ententes bilatérales a toujours représenté de 13 à 20 p. 100 de notre budget. Cela nous a-t-il beaucoup aidés? Oui, absolument […] Cet argent nous a permis de survivre et d'offrir, je crois, une éducation de première qualité à nos jeunes. Nous n'aurions pas pu mettre en place toute la plus-value dans nos écoles, pour la petite enfance, par exemple, si nous n'avions pas eu ces programmes. Nous n'aurions pas, dans nos écoles, de prématernelles pour les enfants de 3 et 4 ans, alors qu'il y en a dans chacune d'elles[149].

Ces ententes sont substantielles et constituent le plus important investissement du gouvernement fédéral auprès des communautés de langue officielle en situation minoritaire. En 2005-2006, Patrimoine Canadien a dépensé 283,9 millions de dollars dans ses programmes d’éducation, dont 179,4 millions (63,2 p. 100) sont allés à l’enseignement dans la langue de la minorité. En 2002-2003, ces dépenses avaient été de 213,1 millions de dollars, mais 69,5 p. 100 de ces dépenses étaient allées à l’enseignement dans la langue de la minorité. Les 30,5 p. 100 restants sont allés à l’enseignement de la langue seconde dans les écoles de la majorité, y compris les programmes d’immersion.

2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006
VOLET ÉDUCATION DANS LA LANGUE DE LA MINORITÉ
$ 148 185 461 $ 135 580 116 $ 162 519 146 $ 179 393 341
Ententes féd-prov-terr enseignement dans la langue de la minorité
$ 144 819 060 $ 132 538 505 $ 159 443 027 $ 175 139 639
Programme régulier
$ 144 819 060 $ 122 763 505 $ 116 238 066 $ 107 365 771
Plan d'action pour les langues officielles
  $ 9 775 000 $ 43 204 961 $ 67 773 868
Appui complémentaire à l'apprentissage linguistique
$ 2 257 351 $ 2 278 568 $ 2 285 619 $ 3 063 702
Programme régulier
  $ 2 190 478 $ 1 662 819 $ 2 361 702
Plan d'action pour les langues officielles
  $ 88 090 $ 622 800 $ 702 000
Bourses d'été pour francophones hors-Québec
$ 515 226      
Moniteurs de langue officielles (minorité)
$ 1 742 125      
Collaboration avec le secteur non-gouvernemental
  $ 763 043 $ 790 500 $ 1 190 000
Programme de perfectionnement linguistique
$ 1 109 050      

Les ententes fédérales-provinciales-territoriales comptent pour la plus grande partie (97,6 p. 100) des dépenses de Patrimoine canadien pour l’éducation dans la langue de la minorité. Le montant total des dépenses liées à ces ententes a augmenté de 30,3 millions (20,9 p. 100) depuis l’exercice financier 2002-2003 pour atteindre 175,1 millions de dollars en 2005-2006. Cette augmentation peut paraître modeste, en comparaison des 209 millions sur cinq ans prévus dans le Plan d’action pour l’enseignement dans la langue de la minorité qui devaient s’ajouter aux montants prévus dans les programmes réguliers.

Patrimoine Canadien a dépensé 120,8 millions de dollars dans le cadre du Plan d’action au cours des trois derniers exercices financiers, soit 57,8 p. 100 des sommes prévues sur cinq ans. Par contre, cet investissement important a été compensé par une réduction presque aussi importante du montant des ententes fédérales-provinciales-territoriales dans le programme régulier en éducation dans la langue de la minorité qui est passé de 144,8 millions en 2002-2003 à 107,4 millions en 2005-2006, soit une baisse de 25,8 %. Autrement dit, jusqu’à maintenant, les investissements dans les programmes d’éducation dans la langue de la minorité ont été globalement très en deçà de ce qui avait été annoncé lors du lancement du Plan d’action. Les ententes signées depuis novembre 2005 par le gouvernement pour le renouvellement de plusieurs de ces ententes, de même que le Budget des dépenses pour 2006-2007 et 2007-2008, ne laissent pas prévoir d’augmentation substantielle, mais il faudra attendre le dépôt du Rapport 2006-2007 de Patrimoine Canadien et des Comptes publics pour connaître les montants réellement dépensés.

Si on prend comme référence les montants dépensés dans le cadre des ententes fédérales-provinciales-territoriales pour l’éducation dans la langue de la minorité en 2002-2003, soit 144,8 millions, et en maintenant l’engagement du Plan d’action à l’effet que, en plus des investissements du Plan d’action, « la ministre du Patrimoine canadien renouvellera le protocole et les ententes fédérales-provinciales-territoriales du programme des langues officielles en enseignement aux niveaux actuels de financement[150] », les sommes dépensées ou à dépenser seraient les suivantes :

§         144,8 millions par année pendant cinq ans à partir de 2003-2004, soit 724 millions en tout pour le programme régulier;

§         97,6 % des 209 millions de nouveaux investissements annoncés dans le Plan d’action, soit 204 millions de dollars, le reste allant aux programmes de bourses et de moniteurs de langue seconde;

§         Pour un total de 928 millions de dollars sur cinq ans qui auraient dû être alloués aux ententes fédérales-provinciales-territoriales pour l’enseignement dans la langue de la minorité;

§         Puisque, de ce montant global, 467,1 millions de dollars ont été dépensés au cours des trois derniers exercices financiers, il reste 460,9 millions de dollars à dépenser au cours des deux derniers exercices financiers du Plan d’action afin d’assurer que les engagements initiaux soient respectés dans le domaine de l’enseignement dans la langue de la minorité. Cela représenterait une moyenne de 230 millions de dollars par année, bien au-delà des niveaux actuels de 180 millions de dollars dépensés en
2005-2006, niveaux qui, selon les annonces récentes, devraient être maintenus pour les trois prochains exercices financiers.

§         En effet, l’annonce de 1 milliard de dollars pour les ententes en éducation pour les exercices financiers 2005-2006 à 2008-2009, qui comprend l’enseignement dans la langue de la minorité et l’enseignement de la langue seconde, suppose un investissement annuel moyen de 250 millions de dollars. Pour respecter les engagements du Plan d’action pour les exercices fianciers 2006-2007 et 2007-2008, il faudrait que 230 millions de dollars soient dépensés seulement pour l’enseignement dans la langue de la minorité. Autrement dit, il ne sera pas possible pour le gouvernement du Canada de respecter les engagements initiaux du Plan d’action, à moins de compenser de manière très importante le manque à gagner accumulé des trois premiers exercices financiers du Plan.

En quelque sorte, les investissements du Plan d’action, s’ils ne s’étaient pas accompagnés d’une diminution de l’enveloppe destinée au programme régulier en enseignement dans la langue de la minorité, auraient permis de revenir aux niveaux de financement qui avaient suivi l’attribution du droit de gestion aux parents francophones. Dans plusieurs provinces, cette baisse relative des investissements a été très clairement ressentie :

Quand on a obtenu la gestion, en 1994, en Alberta, notre système comptait entre 940 et 950 élèves. Il en compte maintenant environ 2 300, soit une augmentation de plus de 100 p. 100.

Lors des cinq premières années, il y a eu du financement supplémentaire qui nous a permis de mettre sur pied un système de gestion. Par contre, il faut reconnaître maintenant que la gestion comme telle n'est pas suffisante pour retenir nos élèves. Nous devons offrir aux élèves francophones l'équivalent de ce qu'offre l'école anglophone du coin.

Si cette équivalence n'existe pas, choisir l'éducation en français ne constitue plus un choix. Les élèves vont préférer fréquenter l'autre système, là où les programmes sont plus avancés ou plus nombreux[151].

Des investissements s’avèrent donc nécessaires pour assurer que les services offerts à la communauté en situation minoritaire soient de qualité équivalente. Le Comité recommande donc :

Recommandation 11

Que le gouvernement du Canada respecte intégralement les engagements pris dans le Plan d’action pour les langues officielles et bonifie le montant des ententes fédérales-provinciales-territoriales pour l’enseignement dans la langue de la minorité pour qu’il atteigne la somme de 460,9 millions de dollars entre le 1er avril 2007 et le 31 mars 2009.

4.1.1.2. La petite enfance

Davantage que la santé, l’immigration ou les autres thèmes abordés au cours des réunions, celui de la petite enfance est celui qui est revenu le plus régulièrement comme porteur du développement futur des communautés. Après que les communautés aient obtenu la gestion de leurs écoles suite aux jugements de la Cour suprême dans les années 1990, un réseau d’infrastructures scolaires a pu se développer et enraciner l’appartenance des communautés. Une fois ces infrastructures mises en place, la réussite a été impressionnante, mais ce n’est encore qu’une portion des francophones qui se prévalent de leur droit d’envoyer leur enfant à l’école française. La création des infrastructures a rendu possible un développement important et du même coup révélé un important défi en termes de recrutement.

Le problème principal vient du fait que le nombre important de parents qui envoient leurs enfants en garderie ne bénéficient pas de services de qualité équivalente en français, s’ils existent, et n’ont pas d’autre choix que d’inscrire leur enfant à une garderie anglophone. Puisque cette garderie anglophone est habituellement attenante à une école, la transition entre la garderie et l’école se fait sans effort, comparativement aux difficultés qu’entraîne le fait de transférer l’enfant à une école francophone après qu’il ait été en garderie anglophone : craintes que l’enfant ait des retards en français, habitudes logistiques bien ancrées pour le transport et les horaires des parents, crainte d’isoler l’enfant, etc. Toutes ces craintes s’ajoutent aux nombreuses autres qui existent déjà lorsque les parents doivent choisir d’éduquer leur enfant en français ou en anglais.

Le lien entre ce problème de recrutement au primaire et la disponibilité des services à la petite enfance a été confirmé lors de la création de centres scolaires et communautaires. Ces centres, qui combinent en un même bâtiment une école, des espaces communautaires et culturels, des bureaux pour les organismes, ont révélé que, lorsqu’ils comprennent également un centre de la petite enfance, le recrutement à l’école primaire augmentait de manière significative. La même transition facile qui empêchait les parents de sortir l’enfant de la garderie anglophone pour l’inscrire à l’école francophone favorise la rétention des enfants dans les écoles francophones.

Le prof. Rodrigue Landry, de l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, a décrit les causes fondamentales qui freinent le recrutement des élèves francophones :

Le premier point concerne la petite enfance. Selon nous, c'est le défi le plus important pour les communautés francophones et acadienne. Un des facteurs déterminants est l'exogamie, qui va en augmentant. Environ les deux tiers de ces enfants sont issus de couples exogames; ils ont un parent francophone et un parent anglophone. Dans la plupart des cas, malheureusement, ces familles choisissent l'anglais comme langue parlée à la maison. Il y a environ un enfant sur cinq dont le français est la langue parlée.

Nos recherches démontrent que l'exogamie n'est pas une cause directe de l'assimilation. C'est le choix des parents qui en est la cause directe. Il y a des parents qui font un choix éclairé. Par exemple, chaque parent transmet la connaissance de sa langue à l'enfant, qui va à l'école de langue française, parce que c'est l'école où étudie une minorité. Cela permet à l'enfant d'être bilingue. Nos recherches démontrent aussi que les enfants de familles exogames qui ont fréquenté l'école française sont les meilleurs bilingues au pays[152].

Autrement dit, ce qui est déterminant avant tout, c’est l’attitude des parents francophones dans les familles exogames face à l’importance d’inscrire leur enfant à l’école francophone. Cette attitude sera elle-même renforcée par l’éducation qu’ils ont reçue :

Des gens ont dit [au sujet des unions mixtes ou exogames] qu'elles étaient un fléau parce que les francophones, à partir du moment où ils se mariaient avec des anglophones, se mettaient à utiliser l'anglais. Or, des recherches démontrent que les francophones qui utilisent davantage l'anglais au sein de ces couples exogames ont, dans bien des cas, déjà connu une orientation significative vers l'anglais, que ce soit depuis leur tout jeune âge ou, à tout le moins, depuis l'âge de 15 ans. Les comportements antérieurs ont donc leur importance[153].

Les parents qui veulent que leur enfant devienne bilingue et ait les meilleures perspectives d’avenir choisissent l’école d’immersion, ou l’école anglaise en se rassurant du fait que le français est parlé régulièrement à la maison. Les parents sont bien intentionnés, mais ils ne connaissent pas ce que révèlent les recherches,[154] c’est-à-dire que les personnes ayant la meilleure qualité de bilinguisme sont celles qui ont fréquenté l’école française en situation minoritaire. Puisque la majorité des familles enverront leur enfant dans une forme ou l’autre d’institution préscolaire (garderie, pré-maternelle à trois ou quatre ans, maternelle à cinq ans), il est primordial d’offrir aux familles le choix d’inscrire leur enfant au préscolaire en français et de sensibiliser les parents à l’importance de leur attitude envers la transmission de la langue :

Nous avons besoin d'efforts de francisation dès la naissance des enfants pour que, quand arrive le moment de leur entrée à l'école, les parents n'aient pas à s'inquiéter des capacités linguistiques de leur enfant[155].

Dans le Plan d’action pour les langues officielles, on retrouvait une enveloppe de 22 millions de dollars pour la petite enfance, mais dans une enveloppe budgétaire distincte des ententes que signent le gouvernement fédéral avec les provinces et les territoires en éducation. Ces 22 millions de dollars visaient essentiellement à soutenir les services d’alphabétisation (7,4 millions) à financer des projets pilotes et des projets de recherche sur l’influence des services de garde en français sur le développement futur des enfants (10,8 millions), et à soutenir les organisations nationales dans la diffusion des meilleures pratiques en termes de service à la petite enfance (3,8 millions). Il n’était donc nullement question d’investir dans le développement des services eux-mêmes, mais bien de préparer le terrain pour un éventuel investissement dans le développement des services.

Dans le cadre des ententes conclues en 2005 pour le développement des services à la petite enfance, les communautés avaient été particulièrement heureuses de voir inscrite une clause dans les ententes leur garantissant un pourcentage défini, différent pour chaque province[156].

Ces investissements annoncés et l’obligation de réserver des sommes au développement des services pour les communautés francophones avaient permis, dans certaines provinces, un rapprochement entre les communautés et les gouvernements provinciaux, par exemple en Saskatchewan, où le modèle d’intégration des services à la petite enfance avec l’école élémentaire était bien reçu :

La province a dit être favorable à notre modèle d'intervention : elle voudrait même l'appliquer à toute la province. En effet, pour nous, l'apprentissage et les services de garde vont ensemble. Nous n'arrêterons certainement pas d'avancer dans notre stratégie de développement de la petite enfance, mais si nous bénéficions de la contribution du gouvernement fédéral promise dans les ententes, nous avancerions beaucoup plus rapidement et nous établirions nos interventions de façon beaucoup plus institutionnelle et organisée[157].

De même en Alberta, province aux prises avec des besoins énormes en infrastructures :

Cette entente nous avait permis de commencer tout de suite à négocier des choses avec la province de l'Alberta. Les représentants de la province se sont concertés et tentent d'élaborer des façons de développer des services concrets […] Lorsque vous insérez une clause qui donne une place à la francophonie en Alberta, vous nous donnez les outils pour pouvoir travailler à continuer de faire du développement[158].

Il est certain que la décision de redistribuer différemment les sommes prévues aux ententes concernant les services à la petite enfance a été ressentie durement pour les communautés qui en avaient fait leur priorité. Les annonces avaient créé des attentes et lancé des projets qui ont dû être laissés en suspens[159]. Ce que demandent les communautés n’est pas tant un réinvestissement massif dans le développement des infrastructures destinées à la petite enfance, mais simplement une mise à niveau dans l’offre de services. Autrement dit, les communautés voudraient être en mesure d’offrir une qualité de services comparable à ce qui est offert actuellement sans réinvestissement supplémentaire aux communautés en situation majoritaire. Les parents se retrouveraient ainsi devant un véritable choix et les conséquences sur la vitalité des communautés pourraient être significatives.

Si nous n'avons pas les moyens de mettre en place notre propre structure, les subventions seront utilisées par les familles francophones pour placer leurs enfants dans des garderies anglophones. C'est l'outil d'assimilation le plus important. Quand un enfant est en milieu anglophone au palier préscolaire, dans la grande majorité des cas, il reste dans cette situation jusqu'à son entrée à l'école anglaise[160].

Ce n’est pas tant la décision de privilégier les subventions directes aux familles qui a été remise en question par les communautés, mais plutôt le désavantage pour une famille francophone de recevoir cette somme si les services existants ne sont pas équivalents :

Les mesures annoncées récemment fonctionnent très bien où il y a des groupes majoritaires. Cependant, pour nos minorités, où les parents ne savent pas où aller et où il y a des listes d'attente incroyables dans les garderies, ça ne fonctionne pas. Il est essentiel d'avoir des infrastructures en place[161].

Il s’agit donc d’un problème lié à la disponibilité des infrastructures qui n’est pas équivalente pour la communauté francophone en situation minoritaire si on la compare aux services de la communauté en situation majoritaire :

Le problème ici, c'est qu'il n'y a pas d'infrastructures. Les garderies francophones n'existent pas. Il y en a une à Edmonton, mais je ne sais pas s'il y en a ailleurs. Nous avons besoin d'aide pour en créer, et c'est ce que le plan de la petite enfance nous permettait de faire auparavant. Nous avions de l'argent pour établir les infrastructures[162].

L’autre problème est celui des différences importantes qui existent entre les différentes provinces :

Au Québec, les gens ont la chance d'avoir accès non seulement à des garderies à 7 $ par jour, mais aussi aux 100 $ par mois. Pour ma part, j'ai deux jeunes enfants, dont une fille qui fréquente l'école, et je dois payer environ 1 000 $ par mois en frais de garderie. Les 100 $ sont les bienvenus, mais je préférerais avoir accès à un programme de garderie adéquat[163].

La construction de centres scolaires et communautaires intégrant des services à la petite enfance a également permis de constater à quel point le fait d’offrir les services avait permis de révéler l’ampleur de la demande :

Aujourd'hui, nous constatons que dans les écoles où il y a une garderie francophone, le recrutement des élèves ayants droit est assuré et nos classes de maternelle débordent. Toutefois, ce service essentiel n'est pas offert dans l'ensemble de nos communautés.

Nous croyons que l'avenir de notre francophonie dépend de notre capacité de rejoindre nos enfants depuis le berceau et que leur francisation doit se faire le plus tôt possible, puisque dans le développement de l'enfant, tout se joue avant l'âge de cinq ans[164].

Le même phénomène s’est produit à Terre-Neuve-et-Labrador, là où les autorités provinciales doutaient même de l’existence d’une demande pour des services à la petite enfance en français :

L'année dernière, on a eu l'honneur d'ouvrir la première garderie francophone ici, à St. John's. On désire maintenant en ouvrir d'autres, que ce soit en milieu familial ou une vraie garderie.[165]

Dans certains cas, les investissements du gouvernement fédéral en éducation ont permis une certaine mise en niveau pour les services préscolaires, et a donné des résultats immédiats :

À l'intérieur de la gestion scolaire comme telle, notre plus grand succès au sein de notre conseil a été la mise en œuvre de la maternelle à plein temps. Le gouvernement provincial finance la maternelle à demi-temps. Nous, grâce à l'argent affecté aux langues officielles, finançons la maternelle à plein temps. Cela permet d'intégrer les enfants et de faire énormément de francisation à ce niveau. Ainsi, lorsqu'ils commencent leur première année, les enfants sont prêts linguistiquement à assumer leur tâche[166].

Cette réussite demeure cependant bien fragile puisqu’il est impossible de répondre à la demande croissante pour des services de pré-maternelle et à la petite enfance :

Présentement, les services de prématernelle sont souvent offerts par des parents bénévoles. On craint beaucoup que, dans le cas des enfants qui ne peuvent pas fréquenter les prématernelles francophones, les parents disent ensuite que leur enfant n'a pas les habiletés linguistiques pour s'inscrire à un programme francophone[167].

Le Comité recommande donc :

Recommandation 12

Que parmi les 125 000 places en garderie dont la création a été annoncée par le gouvernement du Canada dans le cadre du budget 2006-2007, un nombre déterminé soit réservé aux communautés francophones en situation minoritaire, dans une proportion qui soit au minimum équivalente à la proportion de francophones habitant dans chaque province ou territoire.

Le Comité recommande également :

Recommandation 13

Que lors du prochain renouvellement des ententes en éducation avec les provinces et territoires autres que le Québec, ou lorsque les enveloppes destinées à l’éducation dans la langue de la minorité n’auront pas pu être dépensées en entier, ces montants puissent être utilisés par les provinces et territoires pour financer la mise à niveau de l’offre de services à la petite enfance et de services préscolaires en français.

4.1.1.3. La rétention des élèves inscrits au primaire

Nous avons vu que l’offre de services à la petite enfance pouvait s’avérer déterminante dans le choix des parents d’inscrire leur enfant dans une institution francophone, et que ce choix avait des répercussions importantes sur tout le développement futur de l’enfant. Or, l’offre de services en elle-même ne sera pas suffisante si elle n’est pas accompagnée d’une prise de conscience de ceux que l’on appelle les ayants droit, c’est-à-dire les familles qui, en vertu de l’article 23 de la Charte des droits et libertés, ont le droit d’inscrire leur enfant à l’école dans la langue de la minorité et de participer à la gestion scolaire. Par exemple, plusieurs parents pensent que l’immersion française est suffisante pour le maintien des compétences linguistiques, alors que la meilleure garantie de bilinguisme est l’éducation en français à temps plein :

Les cours d'immersion ont servi la population francophone, tant bien que mal, avant que les écoles soient installées ou qu'on ait des classes françaises dans nos communautés.

Il y a encore des gens qui ont la perception suivante; je pense surtout aux parents québécois qui arrivent à Terre-Neuve. Ils viennent s'installer et décident qu'ils veulent que leurs enfants soient bilingues. Alors, au lieu de les envoyer dans un système scolaire francophone, ils vont les envoyer au programme d'immersion. On perd donc là une part de notre clientèle, ce que je trouve dommage[168].

De plus, selon le point de vue du développement des communautés, l’inscription d’enfants de familles exogames à des programmes d’immersion a le désavantage important de retirer les élèves de l’environnement communautaire francophone, et de l’intégrer au système de la majorité, ce qui a également comme conséquence que la communauté francophone peut difficilement suivre la progression et le parcours des élèves qui suivent les programmes d’immersion. Autrement dit, comme nous le verrons dans la section suivante, les programmes d’immersion sont conçus pour les élèves de la majorité et permettent de créer un esprit d’ouverture au sein de la communauté anglophone, mais ils sont inefficaces sur le plan du développement des communautés en comparaison des programmes d’enseignement dans la langue de la minorité :

Il s’agit de faire comprendre aux gens la différence entre une éducation en immersion, qui est essentiellement conçue pour des anglophones qui n'ont jamais connu la langue française, et une éducation francophone, qui comporte toute une dimension culturelle. Il y a encore des francophones qui ne comprennent pas cette différence. Et pour certains élèves, dont les parents ou les grands-parents étaient francophones, mais qui ont un peu perdu leur langue, il y a une francisation à faire.

Il est quelque peu dommage que seulement 15 p. 100 des ayants droit utilisent les écoles francophones. Il y a certes du travail à faire. Cela fait aussi un peu partie des projets que la Fédération nationale des conseils scolaires francophones propose. Nous étudions la nécessité de mettre sur pied une campagne d'identification, d'information et de sensibilisation auprès des parents. Alors, c'est clair qu'il y a du travail à faire sur ce plan[169].

Même dans les provinces où la proportion des francophones est en croissance, le recrutement des élèves est loin d’être acquis. Au Canada, la proportion des enfants d’ayants droit fréquentant l’école francophone est estimée à 60 p. cent[170]. Cette proportion est cependant beaucoup plus basse dans certaines provinces. Pour la Saskatchewan, un directeur du Conseil scolaire fransaskois a estimé cette proportion à moins de 20 p. cent[171].

Les efforts doivent ensuite être soutenus afin d’éviter que les élèves du primaire migrent vers l’école anglaise au secondaire :

Nous avons de la difficulté à garder nos élèves. Dans bien des cas, ils restent jusqu'à la sixième année seulement. Un bon nombre de familles sont exogames. Le conjoint anglophone, une fois la sixième année terminée, veut inscrire son enfant dans ce qu'il considère une vraie école. Il est d'avis, vu que son enfant a appris la langue et la comprend, que ça suffit. À compter de ce moment-là, c'est du sérieux[172].

La situation dans son ensemble a été bien résumée par le directeur général du Conseil des ministres de l’éducation du Canada :

Les conseils scolaires francophones en situation minoritaire font face, partout au pays, à des défis communs: difficulté de recrutement d'élèves qui mène à des pourcentages relativement bas du bassin potentiel des ayants droit qui fréquentent leurs écoles; difficulté de rétention des élèves qui s'exprime par une forte baisse des effectifs, surtout au niveau secondaire; programmes d'étude mandatés par les provinces et territoires qui ne sont pas toujours sensibles aux mandats identitaires et communautaires des écoles francophones en milieu minoritaire; le vaste éparpillement de la population francophone, surtout en région rurale; et enfin, la forte proportion d'ayants droit qui proviennent de familles exogames ou de familles où le français n'est pas la langue la plus fréquemment parlée à la maison[173].

D’où la nécessité d’une campagne de sensibilisation auprès des parents, réclamée depuis plusieurs années par les conseils scolaires :

Lorsqu’il a accepté de mettre l'immersion en place, le gouvernement fédéral a fait beaucoup d'annonces. Il a fait de la publicité pour valoriser l'immersion, etc. Lorsqu'on a créé les écoles fransaskoises ou les écoles françaises partout au pays, on n'a pas fait beaucoup de publicité canadienne pour faire valoir que c'était l'avenue que devaient emprunter les francophones pour demeurer bilingues[174].

Tel que rappelé par le prof. Landry, le Comité des langues officielles du Sénat avait adopté des recommandations qui allaient en ce sens dans son rapport de 2005 sur l’éducation[175].

Tenant compte de tous ces éléments, le Comité recommande :

Recommandation 14

Que le gouvernement du Canada, avec l’accord des provinces et territoires, mène une campagne de sensibilisation et d’information auprès des communautés francophones en situation minoritaire dont les objectifs seraient les suivants :

a)   faire prendre conscience aux parents des avantages d’inscrire leur enfant à une institution préscolaire et primaire française;

b) favoriser la poursuite de l’enseignement en français au niveau secondaire comme étant un atout dans la capacité future de l’enfant de s’épanouir sur le plan professionnel dans un environnement majoritairement anglophone.

4.1.2. Langue seconde et programmes d’immersion

Les efforts consentis par le gouvernement fédéral dans le cadre des ententes fédérales-provinciales-territoriales pour l’enseignement de la langue seconde s’inscrivent dans les objectifs de promotion de la dualité linguistique canadienne. Les résultats les plus marquants de ces investissements se font sentir dans le climat des relations entre les deux communautés de langue officielle : « Si [l’école d’immersion] crée quelque chose, c'est la compréhension, l'acceptation et l'enrichissement de la culture[176] ».

Ceci dit, contrairement aux programmes d’enseignement dans la langue de la minorité, les investissements supplémentaires du Plan d’action pour l’enseignement de la langue seconde n’ont pas été compensés par une réduction correspondante du programme régulier. En ce sens, les programmes d’enseignement de la langue seconde sont ceux qui, de loin, ont le plus profité des investissements du Plan d’action. Le montant des ententes fédérales-provinciales-territoriales a presque doublé en quatre ans, passant de 43,8 millions de dollars en 2002-2003 à 80,4 millions de dollars en 2005-2006.

  2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006
VOLET APPRENTISSAGE DE LA LANGUE SECONDE
$ 64 871 958 $ 66 245 086 $ 81 320 260 $ 104 553 812
Ententes féd-prov-terr pour l'apprentissage de la langue seconde
$ 43 796 843 $ 45 818 258 $ 55 861 270 $ 80 418 605
Programme régulier
$ 43 796 843 $ 45 043 258 $ 44 710 394 $ 55 081 029
Plan d'action pour les langues officielles
  $ 775 000 $ 11 150 876 $ 25 337 576
Programme de perfectionnement linguistique
$ 344 866      
Appui complémentaire à l'apprentissage linguistique
$ 16 750 249 $ 17 333 208 $ 22 523 101 $ 21 230 498
Programme régulier
  $ 16 846 458 $ 17 745 901 $ 16 532 498
Plan d'action pour les langues officielles
  $ 486 750 $ 4 777 200 $ 4 698 000
Bourses d'été de langues
$ 11 466 774      
Moniteurs de langue officielle (langue seconde)
$ 5 283 475      
Collaboration avec le secteur non-gouvernemental
  $ 411 840 $ 562 160 $ 533 745
Jeunesse Canada au travail (langue seconde ou deux langues ensemble)
$ 3 980 000 $ 2 681 780 $ 2 373 729 $ 2 370 964

L’organisation Canadian Parents for French se réjouit d’ailleurs du renouvellement et de la bonification des montants accordés à l’enseignement de la langue seconde. Les succès sont palpables notamment en Ontario :

Avec la signature en mars 2006 de l'Entente pluriannuelle relative à l'enseignement dans la langue de la minorité et l'enseignement de la langue seconde (2005-2006 à 2008-2009), des progrès sans précédent ont été accomplis envers le soutien et la revitalisation des programmes de français de base et l'immersion française dans les écoles ontariennes. À l'heure actuelle, on dénombre 968 000 élèves inscrits dans les programmes de FLS en Ontario, dont 115 000 en immersion française […]

Un suivi effectué par CPF (Ontario) sur l'utilisation des fonds dans chaque conseil scolaire indique qu'ils ont principalement servi aux dépenses de base de ces programmes, notamment à l'achat de matériel didactique et au perfectionnement des enseignants ou enseignantes […] À l'heure actuelle, un fonctionnaire du ministère de l'Éducation est assigné au programme de FLS et supervise 970 000 élèves dans 60 conseils scolaires dans l'énorme territoire que représente l'Ontario[177].

Dans certains cas, cette croissance de la clientèle a entraîné des problèmes d’accès aux programmes :

Certains conseils scolaires ont fermé des écoles, mais ils ne veulent pas ouvrir de programmes d'immersion française dans ces immeubles qui sont maintenant vides, et les parents font la queue à quatre heures du matin pour inscrire leurs enfants dans ces programmes. Nous sommes d'avis que le gouvernement du Canada et la province de l'Ontario offrent un financement adéquat pour l'enseignement du français langue seconde. Cependant, ce financement n'atteint pas sa destination, et c'est là où nous devons collaborer afin de mettre en place des mesures de responsabilisation plus serrées au niveau local afin que le financement se traduise par des places pour les élèves[178].

Le Comité se réjouit des initiatives prises afin de soutenir l’enseignement de la langue seconde qui constitue un élément essentiel de la promotion de la dualité linguistique. Ces initiatives ont connu des succès éclatants qu’il faut s’assurer de maintenir. Cependant, dans l’optique du soutien à la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire, et dans la foulée du renforcement de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles, le Comité se range derrière l’avis de Canadian Parents for French pour affirmer que les niveaux actuels de financement sont suffisants pour atteindre les objectifs visés par ces programmes.

Le Comité recommande donc :

Recommandation 15

Que le gouvernement du Canada maintienne à leurs niveaux actuels de financement au minimum les programmes d’enseignement de langue seconde, y compris les programmes d’immersion, et soutienne les gouvernements provinciaux et territoriaux dans la mise en place de structures administratives adéquates permettant de diminuer les problèmes d’accès et de reddition de compte, le tout avec la collaboration d’organisations reconnues faisant la promotion de l’apprentissage de la langue seconde.

Par ailleurs, il ne faut pas négliger les besoins criants de la communauté anglophone du Québec en enseignement du français, et qui sont étroitement liés à la capacité de la communauté à retenir les jeunes familles, et au développement de l’emploi chez les adultes :

De notre point de vue, le Plan d'action 2003 a pris du temps pour s'implanter dans des domaines tels que l'éducation, le développement économique et la fonction publique. Les anglophones de notre région ont un besoin réel d'améliorer l'enseignement de la langue française dans les écoles de même que chez les adultes. Malgré des contraintes financières énormes, la Commission scolaire Eastern Townships a augmenté, dans le curriculum, la proportion de cours offerts en français dans ses écoles. Le Plan d'action devrait fournir un soutien à cette initiative. Les adultes anglophones à faible revenu n'ont pas accès actuellement à des cours de français gratuitement. Il s'agit d'un besoin criant[179].

Le Comité recommande donc :

Recommandation 16

Que le gouvernement du Canada augmente le niveau de son investissement dans le cadre de l’entente entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec pour l’enseignement de l’anglais langue seconde.

4.1.3. L’éducation post-secondaire

Les investissements dans les programmes d’enseignement de la langue seconde ont beaucoup contribué au développement des institutions postsecondaires qui ont été chargées de la formation des enseignants de langue seconde et ont par la suite attiré chez elles les élèves qui avaient suivi ces cours, par exemple au Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta :

Nos étudiants, qui dans une proportion de 70 p. 100 sont des diplômés de programmes d'immersion, ont comme langue maternelle l'anglais. Le défi pour nous consiste à faire passer ces gens, d'ici deux ou quatre ans, selon les programmes dans lesquels ils sont inscrits, d'un bilinguisme linguistique à un bilinguisme complet. Il s'agit en d'autres mots d'une appropriation du français et de l'anglais en tant que langues individuelles et communes. Ce processus est long et difficile, mais nous arrivons à nos fins en grande partie grâce à l'appui que nous recevons du gouvernement du Canada par l'entremise des ententes bilatérales[180].

L’Institut français de l’Université de Regina a par ailleurs été chargé de la formation des fonctionnaires devant offrir des services dans les deux langues officielles :

Nous avons profité et nous profitons beaucoup du Plan d’action, de sa philosophie et de ses actions concrètes. Il faut bien comprendre que nous sommes au sein d'une majorité qui a beaucoup de difficulté à comprendre pourquoi nous sommes là. Nous avons une vision de l'éducation différente de celle de la majorité anglophone[181].

L’ex-commissaire aux langues officielles avait d’ailleurs explicitement soutenu cette option de développement pour les institutions postsecondaires en situation minoritaire :

Le grand défi du gouvernement fédéral, c'est d'en arriver, comme on l'a fait dans le plan d'action, à aider les provinces dans leurs efforts pour améliorer l'accès à l'apprentissage de la deuxième langue officielle. On pourrait donc offrir des ressources et même examiner, comme certains l'ont fait récemment, les recommandations afin que les institutions postsecondaires s'engagent davantage à préserver les connaissances de l'anglais et du français qui ont été acquises au secondaire. En effet, dans plusieurs régions du pays, comme les institutions postsecondaires n'offrent pas de programmes ou de services en français, les jeunes perdent leurs connaissances dans cette langue[182].

Ces développements sont tout à fait souhaitables, mais, dans l’optique du soutien à la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire, le Comité est d’avis qu’ils doivent servir d’appoint à une offre de programmes permettant de contribuer à la rétention des jeunes diplômés dans leurs communautés d’origine.

C’est ce genre de répercussions qu’a entraîné par exemple la création du Collège universitaire de Saint-Boniface :

Je pense que nos plus belles réalisations sont notre système scolaire et le Collège universitaire de Saint-Boniface. Pour parfaire cela, nous voudrions commencer plus tôt, avant même que les jeunes n'accèdent à notre système scolaire, parce que lorsqu'ils le font, il est parfois déjà trop tard. S'il est déjà trop tard, il y a beaucoup de nos francophones qui ne choisissent pas notre système à cause de ça. Nos plus grandes réalisations, pour moi, sont le secteur scolaire franco-manitobain, le collège universitaire, l'école technique professionnelle et tout ce qui est rattaché au collège[183].

C’est sans contredit le même type de retombées profondes qu’aura le Centre de formation médicale de Moncton, puisque les étudiants francophones du
Nouveau-Brunswick n’auront plus besoin de quitter la province pour recevoir leur formation en médecine en français. Ce problème de rétention est crucial dans le domaine de la santé où les diplômés sont en très forte demande, et il devient difficile de les garder dans leurs communautés. Cette situation peut être aggravée ou atténuée du fait que les règles sur la mobilité de la main-d’œuvre varient d’une province à l’autre. Elle demeure généralement plus difficile pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Par exemple, l’hôpital de Saint-Boniface doit faire des efforts importants pour tenter de ramener les étudiants qui ont terminé leur formation ailleurs :

On les invite périodiquement à faire des stages à l'hôpital où, par exemple, on essaie de leur trouver un emploi d'été. Si ce sont des gens du Manitoba, ils peuvent venir travailler à notre centre de recherche durant l'été. Cela permet de maintenir leur intérêt envers notre institution. Cela nous permet également de leur parler de perspectives d'avenir, donc de la façon dont on peut leur ouvrir des portes quand ils reviendront[184].

En Alberta, le Campus Saint-Jean participera à la mise sur pied d’un collège communautaire pour la formation technique et professionnelle en français, qui sera intégré à l’Université de l’Alberta .[185]

Ces exemples illustrent bien le dynamisme des communautés francophones en situation minoritaire et renforcent l’importance d’offrir tout le continuum de services en éducation, de la petite enfance à l’université, puisque, de plus en plus, la formation est le gage d’un cheminement professionnel gratifiant. En offrant cette possibilité aux francophones, on crée également un milieu de vie où les possibilités ne sont pas limitées par le fait de devoir nécessairement travailler en anglais.

Le Comité recommande :

Recommandation 17

Que le gouvernement du Canada crée un programme, en partenariat avec les gouvernements provinciaux et territoriaux et les institutions d’enseignement postsecondaire, visant à offrir des stages qui attireront ou favoriseront la rétention et le retour des étudiants francophones dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire.

4.2. Vitalité des réseaux communautaires

Le milieu associatif est comme l'huile qui fait fonctionner l'engrenage. Je pense qu'il faut faire l'impossible pour s'assurer qu'il soit en bonne santé, sans nécessairement critiquer le fait qu'il dépende toujours du gouvernement. En situation minoritaire, c'est la réalité[186].De plus en plus souvent, les deux conjoints d'un couple travaillent, et il y a de moins en moins de bénévoles. Ceux qui sont appelés à faire du bénévolat sont des personnes comme Mme Saulnier, qui vient de prendre sa retraite à un très jeune âge et qui deviendra une bénévole par excellence. J'ai également pris ma retraite il y a quelques années. Je suis encore un bénévole et je vais continuer, mais on nous brûle[187].

4.2.1. Le volet « Vie communautaire » du Plan d’action

Dans son volet « Appui à la vie communautaire », le Plan d’action prévoyait une enveloppe de 19 millions de dollars sur cinq ans servant à financer des projets soumis à Patrimoine canadien et susceptibles d’aider les communautés, notamment pour les centres communautaires, la culture et les médias. Ce financement supplémentaire ne visait donc pas le renforcement des capacités des organismes eux-mêmes puisqu’aucune enveloppe n’était attribuée aux budgets de fonctionnement de ces organismes. Il s’agissait donc d’une enveloppe comparable à celle du Fonds stratégique qui permet d’appuyer des projets structurants pour les communautés, mais qui ne correspondent pas nécessairement aux critères des programmes existants, ou dont les besoins en infrastructures sont importants, ou qui sont de nature interprovinciale ou nationale.

Dans son ensemble, le volet « Vie communautaire » du programme Développement des communautés de langue officielle de Patrimoine canadien a connu une baisse de 3,6 p. cent entre 2002-2003 et 2005-2006, passant de 54,9 millions à 52,9 millions de dollars. Cette baisse est essentiellement attribuable au fait que les budgets du Partenariat interministériel avec les communautés de langue officielle[188] n’ont pas pu être transférés aux autres ministères, car il n'y a pas eu de Budget supplémentaire des dépenses en 2005-2006.

  2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006
VOLET VIE COMMUNAUTAIRE

$ 54 883 938

$ 57 398 442 $ 51 953 917 $ 52 894 007

Collaboration avec le secteur communautaire / Appui aux communautés

$ 34 746 648 $ 37 031 435 $ 33 383 847 $ 37 437 226

Programme régulier

  $ 28 232 251 $ 25 347 365 $ 24 435 793 $ 28 541 417

Fonds stratégique

$ 6 514 397 $ 9 547 572 $ 6 129 677 $ 4 845 809

Plan d'action pour les langues officielles

  $ 2 136 498 $ 2 818 377 $ 4 050 000

Administration de la justice dans les deux langues officielles

$ 649 000      

Ententes féd-prov-terri pour les services dans la langue de la minorité

$ 13 171 426 $ 14 151 205 $ 13 339 560 $ 14 306 888

Programme régulier

   $ 13 171 426  $ 13 462 543  $ 11 572 718  $ 11 330 808

Plan d'action pour les langues officielles

   $ 688 662  $ 1 766 842  $ 2 976 080

Partenariat interministériel avec les communautés de langue officielle

$ 6 316 864 $ 5 321 876 $ 3 906 677 $ -

Jeunesse Canada au travail (minorité)

  $ 893 926 $ 1 323 833 $ 1 149 893

Le financement des organismes communautaires provient essentiellement du sous-volet « Collaboration avec le secteur communautaire ». Globalement, cette enveloppe a connu une augmentation d’environ 3,3 millions de dollars, ou 7,7 p. cent, entre 2002-2003 et 2005-2006. Cette augmentation est attribuable aux investissements du Plan d’action dans les projets de soutien aux communautés, et au Fonds stratégique qui est également un financement de projets.

Le financement des organismes communautaires provient donc essentiellement du programme régulier du sous-volet « Collaboration avec le secteur communautaire », auparavant appelé « Appui aux communautés » ou « Ententes Canada-communautés ». En 2005-2006, ce financement est remonté au niveau où il se situait en 2002-2003, après deux baisses consécutives en 2003-2004 et 2004-2005[189]. Autrement dit, comme dans le cas des ententes fédérales-provinciales-territoriales pour l’enseignement dans la langue de la minorité, mais de manière moins importante, les investissements du Plan d’action se sont traduits par une baisse du financement lié au programme régulier, alors que les investissements du Plan d’action devaient s’ajouter à ceux du programme régulier.

Sur les 19 millions de dollars supplémentaires prévus dans le Plan d’action pour la vie communautaire, environ 9 millions ont été dépensés durant les trois premiers exercices financiers du Plan. Il reste donc 10 millions de dollars qui devraient être dépensés au cours des exercices financiers 2006-2007 et 2007-2008.

4.2.2. Accroître le soutien aux organismes

Comme ce rapport l’a déjà illustré à maintes reprises, la solidité des réseaux communautaires constitue la principale source des initiatives durables qui permettent de soutenir la vitalité des communautés. Cette solidité semble menacée en plusieurs endroits, mais particulièrement en Ontario :

En ce qui a trait au milieu associatif, le financement est le nerf de la guerre, en ce moment. Il faut un financement de base à la hausse, en fonction des particularités régionales. En comparaison avec d'autres villes, le loyer étant plus cher à Toronto, avec 50 000 $, l'ACFO de Toronto va crever. Il faut aussi prendre certaines choses en compte, comme les distances à parcourir dans le Nord.

Il faut des plans pluriannuels au lieu de recommencer chaque année les mêmes travaux. Il faut un plan de trois à cinq ans pour que les ACFO puissent d'abord se structurer et, ultérieurement, atteindre les résultats attendus. Cela ne peut pas se faire en un an; et sans financement adéquat, c'est un cercle vicieux. S'il y a moins d'argent, il n'y a donc pas de travail et pas de personnel qualifié. S'il n'y a pas de financement alternatif, il n'y a donc pas de résultats, et s'il n'y a pas de résultats, il n'y a pas d'argent. On recommence donc[190].

Au cours de ses réunions, le Comité a eu l’occasion de noter un essoufflement inquiétant des personnes sur qui repose l’essentiel de ces initiatives, et qui, dans la plupart des cas, le font de manière totalement bénévole. Les gains importants réalisés par les communautés, particulièrement en éducation, et plus récemment en santé, ont entraîné une complexification significative du travail que doivent maintenant accomplir ces personnes au jour le jour :

Les organisations sur le terrain, celles qui font le travail dans les communautés, ont vu leur financement réduit dans les années 1990. Évidemment, leur financement n'a pas suivi la courbe de l'inflation, de sorte que l'Alliance de la francophonie de Timmins, qui dessert une population francophone de 19 000 personnes à Timmins uniquement, ne peut même pas avoir du personnel à temps complet: ni secrétaire, ni directeur général, ni agent de développement. Nous disposons d'un personnel à temps partiel et de bénévoles. Il s'agit de bénévolat extrême parce qu'il se fait les soirs et les fins de semaine; c'est excessivement difficile[191].

Il faut des compétences et des ressources accrues en gestion de projets, en comptabilité, en stratégies de démarchage auprès des différents paliers d’autorité gouvernementale. Ces tâches de plus en plus exigeantes doivent être prises en charge par des organisations communautaires qui n’ont souvent même pas les budgets nécessaires pour engager une personne à temps plein :

Le plan d'action nous a permis de sensibiliser davantage les ministères ciblés à l'offre de services et aux défis de la communauté acadienne et francophone. Par contre, nous n'avons pas bénéficié d'investissements importants liés directement au développement communautaire, c'est-à-dire à nos communautés de langue française en milieu
anglo-dominant.
Si nous avions une recommandation à faire, ce serait de pallier cette lacune. Depuis 2001 à l'Île-du-Prince-Édouard, le nombre d'écoles de langue française est passé de deux à six. L'offre de services a augmenté et la demande augmente encore. Malheureusement, les fonds attribués à nos communautés n'ont pas augmenté. Par conséquent, nous avons du mal à répondre à la demande que nous avons créée en établissant ces centres[192].

À cause de l'augmentation du nombre de dossiers, nos ressources humaines et financières sont très limitées, et cela nous inquiète beaucoup. Nous nous posons des questions sur notre capacité à répondre aux besoins et à établir des partenariats avec les intervenants qui ont le plus grand impact sur le développement de notre communauté[193].

Des propos similaires ont été repris par la quasi-totalité des organismes communautaires qui ont témoigné devant le Comité :

En Colombie-Britannique, nous avons déterminé nos besoins et présenté un plan global de développement, chiffres à l'appui. Malgré tout, le coût de la vie augmente, et nous n'avons plus qu'un seul employé. C'est tout ce dont nous disposons, alors que le développement doit se faire[194].

Pour être efficaces et réalistes, nous avons besoin d'une enveloppe plus importante, non pas par projet, mais en guise d'appui à une infrastructure de base dans divers secteurs de la communauté. On a multiplié les secteurs, mais nous nous retrouvons encore avec seulement deux ou trois personnes pour courir les comités permanents, etc. À un certain moment, on ne suffit plus à la tâche[195].

Dans le contexte d’un renforcement de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles, le Comité est d’avis que l’augmentation des ressources allouées aux organismes communautaires est nécessaire, prioritaire et urgente. Le développement des services, des projets et des investissements a entraîné une forte demande en ressources communautaires, alors que les fonds alloués aux organismes communautaires n’ont pas suivi la croissance des autres investissements et qu’ils sont de plus en plus complexes à administrer, en raison des nouvelles exigences liées à l’obtention des contributions. Il y a donc peu de personnes à qui on demande de faire de plus en plus.

Le Comité recommande :

Recommandation 18

Que l’enveloppe du programme régulier du sous-volet « Collaboration avec le secteur communautaire » du volet « Vie communautaire » du programme Développement des communautés de langue officielle soit bonifiée de 50 p. cent par rapport aux niveaux actuels de financement pour l’exercice financier 2007-2008 et suive par la suite, de manière proportionnelle, la progression des budgets de l’ensemble des budgets des Programmes d’appui aux langues officielles de Patrimoine canadien, de manière à refléter les efforts supplémentaires qui sont exigés des organismes lorsque des projets sont mis en place.

Une autre source de la pression exercée sur les organismes communautaires concerne la complexification des exigences de reddition de comptes. Le Comité soutient vigoureusement tout ce qui peut permettre le renforcement de la responsabilité financière des organismes qui bénéficient de l’appui des deniers publics. Par contre, il est apparu plus qu’évident que nombre d’organismes n’ont actuellement pas les moyens d’assumer cette responsabilité, et que, par conséquent, une partie beaucoup trop importante du temps que consacrent les bénévoles aux activités de leur organisme consiste à remplir des rapports d’activités justifiant le financement que ces organismes ont reçu.

Le processus fédéral de transferts de fonds aux agences communautaires est très coûteux à gérer parce qu'il s'appuie sur des contributions et sur des transferts financiers sous condition de remboursement, alors que le gouvernement provincial utilise une méthode d'octrois, tout simplement, et effectue une vérification annuelle. Donc, les problèmes qu'on vous soumet sont de nature très pratico-pratiques, mais ils rendent la vie des organismes en milieu minoritaire francophone très difficile. Ce sont des ententes de financement très lourdes à gérer, et ces mêmes doléances sont soulevées par plusieurs autres groupes[196].

Le Comité ne considère pas le financement des dépenses de fonctionnement de ces organismes comme un cadeau qui les enfermerait dans une sorte de parasitisme de l’État. Au contraire, les économies réalisées par l’engagement de ces personnes envers des tâches qu’il revient au gouvernement fédéral de soutenir sont tout simplement inestimables.

Ce n’est pas un cadeau que le gouvernement fédéral accorde aux organismes parce que le gouvernement s’y sent forcé par la Loi, c’est un programme qui a des objectifs auxquels croit le gouvernement, et il doit alors s’assurer que les personnes qui sont chargés de livrer ces services soient en mesure de le faire. Lorsque le gouvernement choisit de livrer lui-même directement des services qu’il juge importants, il embauche des fonctionnaires, loue des bureaux et s’assure que l’infrastructure est en place pour que le travail puisse se faire. Lorsque le gouvernement accorde une contribution dans le cadre d’un projet, c’est parce qu’il considère que les organismes communautaires sont plus en mesure de mener à bien ce programme qu’il ne pourrait le faire lui-même. Il délègue aux organismes communautaires la responsabilité de livrer des programmes dont il élabore les objectifs.

Le gouvernement fédéral a désormais une obligation légale de soutenir le développement des communautés de langue officielle. Le financement des organismes communautaires nous semble une manière éminemment plus efficace, économique, structurante et stimulante de remplir ces obligations que d’augmenter les effectifs de la fonction publique pour atteindre les mêmes objectifs. Les organismes communautaires deviennent ainsi l’outil grâce auquel le gouvernement fédéral peut le plus adéquatement s’acquitter de ses obligations.

En 2005-2006, sur les 341,4 millions de dollars dépensés par Patrimoine canadien dans le cadre de ses programmes d’appui aux langues officielles, 5,3 millions ont été versés en subventions, soit 1,6 p. cent, et le reste en contributions. Le Comité considère que le risque d’abus de la part des organismes est insignifiant en comparaison des immenses avantages que procure leur travail pour le soutien des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 19

Que la totalité des sommes versées aux organismes dans le cadre du programme régulier du sous-volet « Collaboration avec le secteur communautaire » du volet « Vie communautaire », et qui ne sont pas liés à des projets spécifiques, soient versées sous forme de subventions.

Cela ne signifie pas que la gestion des ententes de contributions ne doit pas être améliorée. Au contraire, cette lourdeur administrative constitue l’un des principaux irritants à la capacité des organismes communautaires de faire leur travail[197]. Il ne s’agit pas d’abaisser les critères de reddition de comptes, mais de reconnaître qu’un organisme communautaire qui compte sur du travail bénévole n’a pas les mêmes ressources qu’une organisation de plusieurs employés qui peut se permettre d’affecter du personnel aux tâches administratives qu’exige la gestion de ces ententes. Les irritants évoqués sont nombreux, mais deux semblent particulièrement importants : le renouvellement des ententes sur une base annuelle, qui crée une incertitude pour les projets pluriannuels et impose une charge administrative superflue, et le transfert sous forme de remboursement après production de reçus, qui oblige les organisations à gérer une comptabilité distincte pour chaque projet, alors que plusieurs projets se développent simultanément avec des ressources qui sont réparties entre les projets. Ce sont là deux exemples parmi d’autres sur lesquels se penche actuellement un groupe d’experts dans le cadre de la révision de la Politique sur les paiements de transfert du Conseil du Trésor.

Le Comité recommande :

Recommandation 20

Que le Conseil du Trésor tienne compte des particularités des communautés de langue officielle en situation minoritaire, en particulier de l’obligation de prendre des mesures positives visant à soutenir le développement de ces communautés, et fasse preuve de plus de souplesse administrative dans le cadre de l’élaboration de sa Politique sur les paiements de transfert.

Le constat précédent quant aux difficultés importantes que rencontrent les organisations communautaires est valable pour toutes les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada, tant du côté francophone qu’anglophone. La situation est cependant particulièrement critique en Ontario, là où l’on retrouve la moitié des francophones vivant en situation minoritaire et qui souffrent de leur dispersion et de la nécessité que cette dispersion entraîne quant au nombre d’organismes nécessaires pour bien représenter les différentes régions :

Patrimoine Canada a quand même une enveloppe assez limitée pour l'appui aux organismes. Or, le nombre d'organismes en Ontario augmente, et la grandeur de la tarte reste la même. Afin de s'assurer que les organismes et les associations francophones reçoivent un certain financement, on réduit le montant alloué à chacun des organismes, afin que chacun en ait un peu. Les organismes ont alors de la difficulté non pas à vivre, mais à survivre[198].

Ces propos ont été appuyés par de nombreux représentants des institutions d’enseignement et des établissements de soins de santé qui gèrent maintenant des budgets importants et des administrations complexes, mais qui insistent sur l’importance de maintenir la santé des réseaux communautaires :

Si l'ACFO n'était pas un partenaire solide, on ne serait pas ici. Malgré ces beaux 14 millions de dollars [pour les réseaux en santé], on n'existerait pas. C'est l'ACFO qui nous a permis de croître. Malheureusement, on ne sait pas assez que ce sont des organisations comme celle-ci qui s'impliquent[199].

Il est également très difficile pour les communautés anglophones qui vivent à l’extérieur de Montréal qui subissent les mêmes pressions que les autres organismes communautaires, mais doivent de plus lutter contre le préjugé selon lequel les anglophones du Québec sont nécessairement privilégiés, et accepter qu’à population égale à celle des francophones en situation minoritaire, les organismes anglophones ne reçoivent qu’environ 10 p. cent de l’enveloppe globale du programme « Collaboration avec le secteur communautaire » de Patrimoine canadien :

L'enveloppe proposée par Patrimoine canadien est d'environ 33 millions de dollars d'aide aux communautés de langue minoritaire. Mais sur ces 33 millions de dollars, 30 millions sont affectés aux organisations francophones à l'extérieur du Québec, et seuls 3 millions de dollars sont affectés aux organisations anglophones au Québec. Pourtant, nos populations sont semblables. Nous convenons du fait que les besoins des petites organisations francophones ailleurs au Canada sont bien plus importants que les nôtres, car nous avons plus d'institutions au Québec. Mais nous ne vivons pas tous sur l'île de Montréal[200].

Le Comité recommande donc :

Recommandation 21

Que la proportion de l’enveloppe totale du sous-volet « Collaboration avec le secteur communautaire » du volet « Vie communautaire » du programme Développement des communautés de langue officielle de Patrimoine canadien attribuée à la communauté anglophone du Québec soit augmentée et bénéficie en priorité aux organismes communautaires situés à l’extérieur de la région métropolitaine de Montréal.

Les anglophones du Québec ont également un problème de rétention de leurs meilleurs éléments :

Les gens sont démoralisés […] Ceux qui partent sont les plus brillants et les meilleurs, ceux qui sont les mieux instruits [...][201]

Je souhaite que lorsqu'ils partent, [les jeunes] le fassent avec le goût de revenir. Dans le moment, ils partent pour partir; ils ne pensent pas à un retour éventuel. Si on peut les amener à y penser, peut-être qu'une partie d'entre eux reviendront, mais il faut qu'il y ait pour eux un futur, des emplois[202].

Les populations minoritaires françaises et anglaises au Canada sont de taille très semblable, soit un peu moins d'un million chacune. Les échos que j'ai de la minorité francophone à l'extérieur du Québec me portent à penser que l'aide qu'elles reçoivent produit des résultats positifs. Je m'en réjouis. Nous nous en réjouissons tous. Toutefois, il est temps de se demander si le Canada veut conserver une population d'anglophones au Québec ou s'il est plus commode politiquement de nous laisser tous émigrer ou nous éteindre[203].

L’autre problème, tant pour les francophones que pour les anglophones, concerne le fait que le gouvernement fédéral mandate régulièrement les organismes communautaires afin d’établir des plans et des priorités de développement en fonction des programmes qu’il veut mettre en place. Comme nous l’avons vu en santé, les réseaux de chaque province et territoire ont été chargés d’établir des priorités et des projets permettant d’améliorer l’accessibilité des soins de santé primaires en français. Ce projet s’appelait Préparer le terrain. Or, à ce jour, aucun financement n’a été confirmé pour le lancement des initiatives que les réseaux avaient identifiées comme prioritaires à la demande du gouvernement fédéral. Tant récemment que par le passé, on a demandé aux organismes communautaires d’établir des stratégies régionales pour favoriser l’immigration francophone mais les ententes de financement pour l’établissement des immigrants ont été signées avec les provinces, sans enveloppe spécifique pour les communautés francophones, et sans assurance que les priorités établies par les communautés seraient respectées. Les communautés accueillent donc de plus en plus avec scepticisme, et parfois cynisme, les mandats qui leur sont confiés par le gouvernement fédéral :

Nous faisons une proposition à Patrimoine Canada, et ses agents prennent les décisions. L’année dernière, nous avons pris des décisions très difficiles qui n’ont pas été respectées[204].

Nos communautés n'ont pas encore renouvelé leur entente avec le ministère du Patrimoine canadien […] Toute incertitude risque de tuer l'initiative des bénévoles et des employés, donc de fragiliser la situation de nos communautés.

Nous demandons donc que ces ententes soient renouvelées dans les plus brefs délais, dans le respect des besoins des communautés. Les priorités des communautés doivent être les priorités inscrites dans ces ententes et les ressources nécessaires à leur réalisation doivent y être[205].

Le Comité est d’avis que l’obligation de « prendre des mesures positives » qu’implique le renforcement de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles s’accompagne d’une obligation de respecter les priorités établies par les communautés elles-mêmes, dans la mesure où ces priorités restent compatibles avec les critères des programmes. Le Comité recommande donc :

Recommandation 22

Que dans la mesure où cela respecte l’esprit et les critères du programme concerné, Patrimoine canadien, dans le cadre des ententes du volet « Vie communautaire » du programme Développement des communautés de langue officielle, s’engage à respecter les priorités établies par les organismes représentant les communautés de langue officielle en situation minoritaire et les inscrive expressément dans ces ententes.

4.3. Infrastructures

De nombreux exemples ont démontré l’efficacité de l’offre active de services. Cette offre active permet de révéler une demande jusque-là insoupçonnée et produit des résultats qui dépassent les attentes. Si la forme la plus simple de cette offre active consiste en un écriteau « français-anglais », ou en un écusson identifiant dans les établissements de soins les professionnels capables de servir les patients en français, la forme la plus élaborée, et dont les résultats sont les plus spectaculaires, consiste à incarner cette offre active dans un bâtiment. Ce dernier offre un ancrage à partir duquel les réseaux communautaires peuvent se développer avec plus de solidité. Trois types d’infrastructures ont démontré leur valeur comme moteur de la vitalité des communautés : les centres de santé communautaires, les centres scolaires et communautaires et les centres multiservices.

4.3.1. Les centres de santé communautaires

Au Manitoba, la construction du Centre de santé de Notre-Dame-de-Lourdes est l’une des plus belles réalisations du Réseau santé en français, en même temps que la démonstration la plus éloquente de l’effet de levier que rend possible l’investissement initial du gouvernement fédéral (voir le chapitre 2). En Alberta, un projet d’infrastructures en santé est sur le point de voir le jour, le Centre de santé Saint-Thomas, une résidence pour aînés francophones en perte d'autonomie. Son accouchement a cependant été plus ardu, et l’investissement demandé du gouvernement fédéral plus important. Les péripéties liées au financement de ce centre illustrent bien les difficultés de concilier le respect des priorités des communautés, les contraintes de juridiction du gouvernement fédéral, ainsi que la grande variabilité des conditions pouvant justifier ou non un financement dans un cas particulier.

En 2003, on avait demandé à la communauté francophone d’Alberta d’identifier un petit nombre de priorités que le gouvernement fédéral pourrait s’engager à soutenir. Le principe sous-jacent était que, en fonction d’objectifs et de budgets prédéterminés, les projets qui émanent des communautés elles-mêmes sont plus susceptibles de bien répondre aux besoins de cette communauté, d’être bien acceptés et de connaître une meilleure réussite que si ces priorités sont établies à Ottawa :

En Alberta, ce fut très simple, et il a fallu 10 minutes à la communauté pour dire que c'était le Centre de santé Saint-Thomas. C'était il y a trois ans. Depuis lors, de hauts fonctionnaires nous ont dit qu'ils avaient une volonté politique, que ce pourrait être admissible à un financement, mais qu'ils ne voulaient pas créer de précédent dans leur programme[206].

Après l’obtention du financement provenant du gouvernement provincial et d’autres bailleurs de fonds, la construction a pu commencer en 2006 :

Lors de l'ouverture du centre, prévue à l'automne 2007, plus de 200 résidents, et un plus grand nombre d'usagers externes, obtiendront, sous un même toit et dans la langue française, une gamme variée de services allant des soins de santé aux activités de formation et de développement culturel. Pour la première fois dans la l'histoire de la province, des spécialistes du domaine de la santé pourront pratiquer leur profession dans un milieu francophone où la langue de travail sera le français. Le centre pourra aussi accueillir des stagiaires désireux de vivre une expérience de travail en français[207].

Avant même l’achèvement du projet, la réservation des places fut si rapide que la régie de santé responsable de desservir la région d’Edmonton n’a eu d’autre choix que de constater l’ampleur des besoins de la population francophone en termes de soins de santé primaires. La création de ce centre aura également toutes sortes de répercussions sur d’autres domaines et sur la revitalisation de la vie en français en Alberta.

En janvier 2006, une aide additionnelle de 2,7 millions de dollars a été demandée, et le gouvernement provincial, ayant constaté l’ampleur des besoins, a répondu de manière positive. De ce montant, une demande de 1,2 million de dollars était adressée au gouvernement du Canada. Lors du passage du Comité à Edmonton en décembre 2006, le Centre de santé Saint-Thomas n’avait toujours pas reçu de réponse positive de la part du gouvernement fédéral. Cependant, quelques semaines plus tard, le 19 janvier 2007, la ministre de la Francophonie et des Langues officielles annonçait une contribution de 750 000 $[208].

L’existence d’un fonds pour les infrastructures dont la construction a été jugée prioritaire par les communautés, et qui rejoindrait les objectifs des programmes du gouvernement du Canada, aurait de beaucoup simplifié les discussions entourant l’implication du gouvernement fédéral dans ce projet qui marque un tournant dans le développement de la communauté francophone de l’Alberta et qui pourrait bien faire boule de neige dans d’autres régions de la province.

4.3.2. Centres scolaires et communautaires

Un centre scolaire et communautaire est un bâtiment qui sert de carrefour à un grand nombre de besoins de la communauté : centre de la petite enfance, école, gymnase accessible à la communauté, salle de spectacle, espaces à bureaux pour les organismes communautaires. Le prof. Rodrigue Landry résume bien les avantages de cette collaboration qu’implique la création d’un centre scolaire et communautaire :

L'éducation est de compétence provinciale. Si le gouvernement provincial dit qu'il est de son devoir de s'occuper du volet scolaire et que le gouvernement fédéral s'occupe du volet communautaire, on obtient un bel amalgame avec pour résultat un beau centre scolaire-communautaire. Ce centre offrirait des activités communautaires permettant à toutes les générations de se rencontrer dans le cadre de toutes sortes d'activités. Pour les jeunes, il y aurait une école. On pourrait même y ajouter une garderie.

Grâce à un tel établissement, on pallie les lacunes de la communauté. Cela est d'autant plus important dans les grands centres urbains, où il est très difficile de trouver une école près de chez soi.

Voilà un bel exemple de collaboration[209].

Les retombées en termes de révélation de la demande insoupçonnée se sont vérifiées partout où ces centres ont été construits. L’exemple de l’Île-du-Prince-Édouard est éloquent :

En 2000, l'école élémentaire de Summerside avait des espaces dans nos bureaux. Il y avait quatre élèves en première année. C'est tout. En 2006, nous avons un centre scolaire formidable, qui répond bien aux besoins de la communauté. Nous croyons qu'il est un modèle pour toutes les autres régions. Nous avions quatre élèves en 2000, et nous en avons maintenant de 65 à 70. À la garderie du centre préscolaire pour les enfants de 22 mois à six ans, il y a plus de 50 élèves.

De plus, une autre école, le Carrefour de l'Isle-Saint-Jean à Charlottetown, a été construite en 1991. L'édifice a été construit pour accueillir 150 élèves. Lors des premières années, il s'y trouvait entre 60 et 75 élèves; ils sont maintenant plus de 250. Ils ont un beau centre, mais en 15 ans ils ont dépassé la capacité de cette école[210].

Le rôle du gouvernement fédéral consiste essentiellement à financer les espaces communautaires et ceux servant à la petite enfance, car la petite enfance ne fait pas partie des responsabilités des conseils scolaires francophones. La création du centre scolaire et communautaire permet ainsi d’installer à proximité une garderie et une école francophones, sans avoir à développer des bâtiments distincts. Dans certaines régions, il existe encore des communautés dont les écoles sont installées dans des unités portatives où il est impossible d’avoir un gymnase ou un petit laboratoire[211].

4.3.3. Centres multiservices

Les centres multiservices s’inspirent de l’idée du « guichet unique » permettant d’offrir à la population francophone d’une région l’ensemble des services dont elle a besoin de manière régulière, et idéalement intégrant les différents paliers de gouvernement sous un même toit, comme cela s’est fait avec grand succès à Winnipeg. De tels centres peuvent s’ajouter à un centre scolaire et communautaire, à une clinique médicale comme au Centre francophone de Toronto, ou demeurer distincts tout en intégrant une composante communautaire. Il s’agit d’une formule souple permettant de s’adapter aux besoins prioritaires de la communauté. C’est vers ce type de centres que désire s’orienter notamment la communauté fransaskoise dont la dispersion rend difficile le regroupement des services[212].

4.3.4. Autres options

Un fonds d’infrastructures pourrait également soutenir le développement de l’éducation postsecondaire, comme dans le cas du Centre d’excellence que voudraient développer conjointement le Collège Boréal, le Collège Glendon et la nouvelle École d’affaires publiques dans le sud de l’Ontario[213]. La région de Cornwall aurait également grandement besoin d’un centre culturel francophone qui pourrait peut-être bénéficier d’un fonds d’infrastructures[214].

Les anglophones du Québec, particulièrement les communautés vivant à l’extérieur de Montréal, pourraient également bénéficier d’un fonds d’infrastructures, comme ce projet de bibliothèque en Estrie qui préserverait l’héritage de cette communauté, et qui servirait également de centre communautaire, de centre multiservices et de carrefour contribuant à la vitalité de la communauté[215].

Un fonds d’infrastructures pourrait également servir à financer des infrastructures technologiques permettant de relier les différentes communautés, particulièrement dans les provinces où elles sont dispersées[216].

Étant donné le rattrapage important que doivent accomplir les communautés de langue officielle en situation minoritaire afin de s’approcher d’une qualité de services équivalente à celle dont bénéficie la population majoritaire, le Comité recommande :

Recommandation 23

Que le gouvernement du Canada crée un fonds d’infrastructures visant la mise à niveau des services les plus aptes à soutenir la vitalité des communautés francophones en situation minoritaire, en particulier les services à la petite enfance.

4.4. Clauses linguistiques dans les transferts fédéraux

Dans les domaines de compétence provinciale, comme l’éducation ou la santé, ou de compétence partagée, comme en immigration, le gouvernement fédéral se doit de laisser la latitude nécessaire aux gouvernements provinciaux afin qu’ils exercent leurs prérogatives. Cependant, l’obligation qu’impose la loi au gouvernement fédéral d’assurer le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire devrait également se refléter par un engagement ferme lors de transferts vers les provinces. De nombreux témoins sont d’avis que cet engagement aurait des conséquences profondes sur la vitalité des communautés et provoquerait en quelque sorte une intensification des négociations entre les communautés et les gouvernements provinciaux qui sont responsables des services qui ont le plus de conséquences sur la vitalité[217].

Le Comité recommande donc :

Recommandation 24

Que tout paiement de transfert du gouvernement fédéral vers les provinces ou territoires dans un champ de compétence provincial ou à compétence partagée comporte une clause réservant des fonds spécifiques en vue de la progression vers l’équivalence dans l’offre des services pour la communauté francophone en situation minoritaire.

Une telle clause permettrait également de dissiper un doute persistant quant à l’affectation réelle des fonds transférés, en éducation notamment, du gouvernement fédéral vers les provinces et ensuite vers les conseils scolaires[218]. Aussi, dans le domaine de l’immigration, une telle clause permettrait de mieux concentrer l’affectation des fonds vers les organismes spécifiquement chargés de l’accueil et de l’établissement des immigrants francophones.

Il ne faut cependant pas oublier le statut particulier des trois territoires, qui ne jouissent pas des mêmes compétences reconnues par la Constitution canadienne, mais avec lesquelles les négociations sont menées comme s’il s’agissait de provinces. Le Comité juge que cette importance accrue du gouvernement fédéral dans la gestion des territoires devrait faciliter l’application des politiques linguistiques puisque les territoires ne peuvent pas opposer le même type de résistance liée aux compétences fédérales et provinciales. Pourtant, les témoins nous ont indiqué que les services en français dans les territoires étaient très déficients et bénéficieraient d’une attention accrue du gouvernement fédéral envers ses obligations linguistiques à l’endroit des francophones des territoires. Encore une fois, il semble qu’un dialogue fructueux commence à s’installer en santé, mais qu’il y ait une stagnation dans les autres domaines. Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 25

Que le gouvernement du Canada, en partenariat avec les gouvernements territoriaux et les communautés francophones du Nord, élabore une stratégie envers les francophones des territoires garantissant une offre de services adéquate pour tout ce qui relève des responsabilités fédérales, et négocie des clauses particulières pour les francophones lorsqu’il y a transfert de responsabilités vers les gouvernements territoriaux.

4.5. Compressions budgétaires de 2006

4.5.1. Programme de contestation judiciaire

L’annonce faite par le gouvernement du Canada de son intention d’abolir le Programme de contestation judiciaire est certainement celle à laquelle toutes les organisations rencontrées ont été unanimement et profondément défavorables[219]. Nous nous contenterons ici de rappeler les principaux motifs qui ont soulevé ce tollé :

L’utilisation du PCJ par les communautés a forcé les gouvernements provinciaux à respecter l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, leur permettant notamment d’obtenir la gestion de leurs écoles et de maintenir l’hôpital Montfort à Ottawa, jugements qui sont devenus les symboles les plus éclatants des progrès réalisés dans le développement des communautés de langue officielle. Les communautés considèrent sans équivoque qu’elles n’auraient pas pu obtenir un grand nombre de leurs institutions sans l’existence de ce programme. Les contestations ont également permis de modifier des éléments de la Loi canadienne sur la Santé et les responsabilités de certaines municipalités, ainsi que d’influencer le découpage électoral.

Le Cadre d’imputabilité du Plan d’action pour les langues officielles impose de « consulter, s’il y a lieu, les publics intéressés, en particulier les représentants des communautés minoritaires de langue officielle, dans le cadre de l’élaboration ou de la mise en œuvre de politiques et de programmes[220] ». Cet élément du Plan d’action découle de l’article 43 (2) de la Loi sur les langues officielles qui oblige Patrimoine canadien à « prendre les mesures qu’il juge aptes à assurer la consultation publique sur l’élaboration des principes d’application et la révision des programmes, favorisant la progression vers l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne ». Les communautés considèrent ne pas avoir été consultées préalablement à l’abolition du Programme de contestation judiciaire.

Il n’existe actuellement pas d’alternative à ce programme, puisque l’autorité du Commissaire aux langues officielles lui est donnée en vertu d’une loi fédérale, et non de la Charte canadienne des droits et libertés, de la même manière que la Commission canadienne des droits de la personne n’a d’autorité que sur les questions de compétence fédérale. Les compétences provinciales en matière d’éducation empêcheraient donc le Commissaire d’avoir juridiction sur des décisions des provinces en matière d’éducation et de santé par exemple.

Le fait que l’exercice des droits reconnus à l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés exige une justification en termes de nombre[221] pourrait entraîner un fardeau supplémentaire, car il s’agirait alors d’un droit collectif, et il exigerait de démontrer l’existence même du sujet de ce droit, contrairement aux droits à l’égalité qui sont des droits individuels.

Le Comité est conscient du fait qu’un tel programme peut poser des problèmes de principe du fait qu’il semble introduire une inégalité dans l’accès à la justice pour certains individus ou certains groupes. Il se pourrait cependant qu’il y ait une distinction à faire entre la défense des droits à l’égalité financée par le PCJ et celle des droits linguistiques qui ont une dimension collective. Il est également clair que c’est la question de l’accès à la justice pour les groupes, et non pour les individus, qui est au cœur de ce débat complexe. Il serait peut-être opportun d’examiner quels sont les recours offerts dans le cas d’autres types de droits collectifs, par exemple d’étudier comment sont financés les recours des Premières Nations impliquant des droits collectifs, ou encore de voir s’il ne serait pas possible d’adapter un programme analogue au Fonds d’aide aux recours collectifs qui, au Québec, peut permettre à une société à but non lucratif d’obtenir du financement pour porter une cause en justice au nom de toutes les personnes qui ont le même problème.

Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 26

Que le gouvernement du Canada rétablisse le Programme de contestation judiciaire, ou crée un autre programme permettant d’en atteindre les objectifs de manière équivalente.

4.5.2. Programme d’alphabétisation

L’autre compression qui a été dénoncée avec le plus de vigueur est celle du Programme d’apprentissage, d’alphabétisation et d’acquisition des compétences essentielles pour les adultes par Ressources humaines et Développement des compétences. Le programme n’était pas destiné spécifiquement aux communautés vivant en situation minoritaire, mais sa réduction risque d’avoir des effets plus importants sur ces communautés, en raison du plus faible taux d’alphabétisation des francophones du Canada en général, et des francophones en situation minoritaire en particulier. Cinquante-six p. cent des Canadiens de langue maternelle française n’atteignent pas le niveau souhaitable d’alphabétisme, mais cette proportion atteint un inquiétant 66 p. cent pour les francophones du Nouveau-Brunswick, dont 40 p. cent ont moins de 40 ans[222]. Cette proportion se situe à 43 p. cent pour les anglophones du Québec et à 39 p. cent pour les anglophones de l’ensemble des autres provinces.

L’inquiétude la plus importante est que le Plan d’action pour les langues officielles avait alloué une enveloppe de 7,4 millions de dollars aux programmes d’alphabétisation pour la petite enfance, et il s’agissait d’un des volets du Plan qui semblait donner des résultats probants, et qui avaient été salués dans le Rapport 2005-2006 de la Commissaire aux langues officielles.

Rappelant que la ministre de la Francophonie et des Langues officielles a déclaré à ce Comité au sujet du Plan d’action pour les langues officielles que « comme gouvernement, nous n'irons jamais en deçà de ce que les communautés ont acquis dans ce domaine, »[223] le Comité recommande donc :

Recommandation 27

Que le gouvernement du Canada maintienne les engagements du Plan d’action quant au financement attribué aux initiatives d’alphabétisation pour la petite enfance.

Dans la foulée de la contribution du Canada à l’Enquête internationale sur l’alphabétisation et les compétences des adultes, il a été étonnant de constater qu’une majorité des personnes que Statistique Canada aurait classées comme francophones ont choisi de répondre au questionnaire en anglais, même si elles avaient le choix de le faire en français :

On aurait pu penser, parce que ces gens étaient francophones, qu'ils auraient répondu aux questions en français, mais certains d'entre eux se sentaient plus à l'aise en anglais. Certains nous ont dit qu'ils pensaient qu'ils devaient choisir l'anglais parce que l'appel venait du fédéral, parce que c'était la langue de travail. Ces gens vivent en milieu minoritaire. Alors, on parle de vitalité. Si la confiance et la vitalité de la langue française avaient été plus importantes, les gens auraient répondu en français. Nous pensons que c'est un signe éloquent du défi qui nous attend[224].

Outre les familles dont les parents ont une connaissance limitée du français, et qui désiraient encourager l’apprentissage du français chez leurs enfants, l’autre clientèle de ces programmes et qui risque d’être la plus durement touchée est celle des aînés pour lesquels il n’y avait pas de mesure particulière dans le Plan d’action pour les langues officielles :

Si les aînés n'ont pas accès à des programmes adéquats dans tous les domaines, comment imaginer qu'ils peuvent lire des ordonnances ou encore compléter adéquatement leur formulaire pour obtenir le Supplément du revenu garanti? On sait que dans ce domaine, on s'est aperçu, au gouvernement, que plus de 200 000 Canadiens n'avaient pas encore le supplément parce qu'ils ne savaient pas qu'ils y avaient droit. Sachant que les aînés ne lisent pas nécessairement bien ou ont de la difficulté à lire, nous avons eu recours à ce programme [d’alphabétisation]. En ne leur permettant pas de compléter de telles tâches, qui nous semblent si familières, ne compromettons-nous pas l'autonomie et la santé de nos aînés francophones au Canada?[225]

Il existe également une dimension historique au phénomène du faible taux d’alphabétisme des francophones à l’extérieur du Québec :

Dans le nord de l'Ontario, il y a quand même une tradition: les gens vivent de la terre, des mines ou de la forêt. Dans le passé, ils n'ont pas nécessairement eu besoin de formation. Toutefois, le marché a changé — c'est un peu comme pour la pêche dans l'est du pays — de façon radicale. Ces gens de la première génération, qu'on appelle en Ontario first generation, ne sont pas la première génération de nouveaux Canadiens, ils sont la première génération qui n'a jamais accédé aux études postsecondaires. Dans le nord de l'Ontario, leur nombre atteint l'un des taux les plus élevés. On ne peut pas continuer ainsi. Si le jeune ne peut même pas écrire son nom, ne peut pas préparer son curriculum vitae, essayez d'imaginer quelles sont ses chances de survie, que ce soit dans les métiers ou dans toute autre forme de travail. C'est impossible[226].

Les francophones vivant en situation minoritaire ont donc abordé le virage technologique et de l’économie du savoir avec un recul important. Cela touche les communautés rurales encore plus durement que les autres, et celles du Nouveau-Brunswick tout particulièrement :

Nous, au Nouveau-Brunswick, en raison de la réalité que connaissent nos communautés francophones en ce qui concerne la main-d’œuvre, comment fait-on face aujourd'hui aux besoins d'une main-d’œuvre ultra qualifiée dans un contexte de mondialisation, compte tenu de notre haut taux d'analphabétisme? Voilà un point qui a un impact direct sur l'économie du Canada et le positionnement du Canada sur le plan mondial[227].

Rappelant une fois de plus l’obligation du gouvernement du Canada de soutenir le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, le Comité recommande :

Recommandation 28

Que le gouvernement fédéral crée un programme d’alphabétisation, en partenariat avec les provinces, les territoires et les communautés, afin d’offrir aux communautés francophones à l’extérieur du Québec et aux communautés anglophones du Québec de meilleures occasions de contribuer à l’économie du savoir au Canada.

4.6. Promotion du français

La Constitution du Canada garantit l’égalité du français et de l’anglais dans les institutions parlementaires du Canada et du Québec depuis 1867, du Manitoba depuis 1870 (abolie par la suite puis rétabli en 1979), et du Nouveau-Brunswick depuis 1993. La Loi sur les langues officielles, depuis 1969, garantit cette même égalité pour les services fédéraux et les communications avec le public dans les institutions du gouvernement du Canada situées dans les régions désignées bilingues, ainsi que là où le nombre le justifie, et dans les régions désignées bilingues pour la langue de travail dans les institutions du gouvernement du Canada. Depuis 1988, la Loi sur les langues officielles énonce l’engagement du gouvernement fédéral à favoriser l’épanouissement des minorités linguistiques, à appuyer leur développement, ainsi qu’à promouvoir la pleine reconnaissance ainsi que l’usage du français et de l’anglais au sein de la société canadienne. En 2005, cet engagement est devenu une obligation de prendre des mesures positives.

Le principe qui soutenait la Constitution, de même que la Loi sur les langues officielles de 1969, était celui de la symétrie formelle entre les deux langues. L’ajout de la Partie VII de la Loi en 1988, en énonçant l’engagement de favoriser l’épanouissement des minorités linguistiques et de promouvoir la pleine reconnaissance et l’usage des deux langues, introduit un principe qui commande des actions asymétriques en faveur du français. La raison en est fort simple : l’anglais étant devenu la langue des communications sur le plan mondial, et étant la langue première de la quasi-totalité des Nord-Américains, la force d’attraction qu’elle exerce sur les 7 millions de francophones du Canada est incomparablement plus puissante que celle que pourra jamais exercer le français sur les anglophones du Canada. Autrement dit, les efforts nécessaires pour maintenir cette égalité formelle devront être plus importants dans le cas du français et des francophones en situation minoritaire qu’ils ne le seront pour l’anglais et les anglophones en situation minoritaire.

Cela ne signifie nullement qu’il faille banaliser les difficultés rencontrées par les communautés anglophones du Québec, particulièrement celles qui tentent tant bien que mal de s’épanouir à l’extérieur de la région de Montréal. Au contraire. Les avantages dont ces communautés ont bénéficié par le passé, de même que la situation relativement enviable que vivent les anglophones de Montréal en comparaison avec les francophones hors-Québec, masquent la décroissance des communautés du reste de la province, et fait que leurs revendications sont accueillies avec moins de sympathie qu’elles ne le devraient peut-être. À l’opposé des communautés francophones en situation minoritaire qui commencent à croire que la consolidation de leurs acquis est un rêve réalisable, les anglophones du Québec vivent une forme d’impuissance d’agir qui ne leur offre pas la même possibilité d’envisager l’avenir avec enthousiasme. Un équilibre semble avoir été atteint, fragile certes, mais réel dans l’acceptation de la nécessité pour le Québec d’adopter des mesures législatives qui puissent servir à contrer partiellement cette force d’attraction de l’anglais. Il faut toutefois reconnaître que cet équilibre a été gagné au prix d’importants outils de leur épanouissement pour les communautés anglophones, en particulier aujourd’hui l’impossibilité d’accueillir des immigrants anglophones au sein de leur système scolaire. Il n’est nullement question ici de remettre en doute l’inestimable valeur de cet équilibre linguistique, mais simplement de reconnaître que la perte de certains moyens de leur épanouissement peut entraîner un sentiment de résignation de la part de certains de ceux et celles qui ont à cœur la vitalité de cette communauté.

De plus, leur sous-représentation au sein de la fonction publique fédérale au Québec est perçue comme un signe du peu d’intérêt porté à cette communauté dans le cadre des politiques fédérales sur les langues officielles. Cette récrimination est d’ailleurs la seule à impliquer la Partie VI de la Loi sur les langues officielles (égalité des chances dans la fonction publique), car les francophones jouissent d’un avantage en regard de cette partie de la Loi.

Il faut cependant se rendre à l’évidence et affirmer clairement que la promotion de la dualité linguistique signifie essentiellement la promotion du français, et ce tant à l’extérieur du Québec qu’au Québec même pour les anglophones, ce qui implique du même coup l’acceptation du fait que les communautés francophones en situation minoritaire sont éminemment plus fragiles que les communautés anglophones en général.

Dans la section sur l’éducation, nous avons vu que l’effort de promotion du français devait se faire d’abord auprès des parents qui ont le choix d’envoyer ou non leur enfant à l’école française. La réussite d’une telle campagne de sensibilisation serait susceptible d’avoir des conséquences à long terme sur la vitalité des communautés, et cet effort de sensibilisation devrait être prioritaire.

En complément à cette sensibilisation, il est apparu évident lors de la tournée du Comité à travers le Canada que la reconnaissance du français était plus souvent qu’autrement assimilée à des politiques de multiculturalisme qui n’accordaient au français aucun privilège particulier. Les membres du Comité ont été heureux de constater que l’acceptation du français par les anglophones a fait des progrès remarquables. Cependant, cette acceptation semble s’appuyer sur un principe d’ouverture à la diversité culturelle qui menace de diluer le privilège qui devrait être accordé au français en tant que langue officielle. Autrement dit, le français à l’extérieur du Québec et du Nouveau-Brunswick ne doit pas être considéré comme une langue parmi toutes les autres. Les francophones ne sont pas une communauté culturelle. En compagnie des Premières Nations et des anglophones, ils font partie des peuples fondateurs qui définissent l’identité canadienne dans son ensemble et d’un bout à l’autre du pays.

Les commentaires formulés par la ministre de la Francophonie et des Langues officielles lors de sa comparution devant le Comité vont tout à fait dans le même sens :

Il existe un consensus au sujet des langues officielles : la dualité linguistique du pays représente une composante essentielle de l'identité canadienne et une richesse extraordinaire pour l'ensemble de la société[228].

Le prof. Wilfrid Denis de l’Université de la Saskatchewan a bien synthétisé la pensée des membres du Comité :

Il faut trouver une façon de faire en sorte que le français soit non seulement une langue officielle, mais une langue nationale. Pour ce faire, il faudra un effort concerté des communautés et du gouvernement fédéral pour augmenter la visibilité de la langue française partout au Canada, surtout dans les régions où cette langue est plus faible[229].

Des exemples de cette identification des francophones à une communauté culturelle ou à un groupe ethnique nous ont été donnés dans plusieurs provinces, mais il a été étonnant de les retrouver si fréquemment en Ontario :

Les nouveaux arrivants en Ontario ont tendance à s'installer dans un secteur donné. Par exemple, la population chinoise s'installera dans un secteur où les Chinois sont majoritaires, ce qui leur permettra de dire éventuellement qu'ils constituent 10 ou 13 p. 100 de la population. Par conséquent, avant de traduire les documents en français, les entités régionales ou de santé publique les traduiront en chinois ou en italien, et non en français[230].

Avant l’ajout de la Partie VII en 1988, le rôle de la fonction publique fédérale consistait essentiellement à être capable d’offrir un service en français là où elle était obligée de le faire. Autrement dit, la fonction publique était en position passive de réaction agacée à une demande potentielle ou réelle. La modification de la Loi en 2005, et l’obligation de prendre des mesures positives devrait avoir comme objectif de transformer la fonction publique en agent de promotion du français et revitaliser, du même coup, le mandat de promotion de la dualité linguistique qui incombe au Commissariat aux langues officielles[231].

Désirant faire écho aux propos de la ministre de la Francophonie et des Langues officielles à l’effet que « l'appui du gouvernement à la dualité linguistique en tant que fondement de la société canadienne demeure sans équivoque[232] », le Comité recommande :

Recommandation 29

Que le gouvernement du Canada, avec le soutien des bureaux régionaux du Commissariat aux langues officielles, lance une campagne de promotion du français comme langue nationale à l’intention des anglophones, de manière à appuyer les efforts déployés dans le cadre des ententes fédérales-provinciales-territoriales pour l’enseignement du français langue seconde.

4.7. Médias

Le secteur des médias était absent du Plan d’action pour les langues officielles. Or, les médias communautaires ont un rôle important à jouer dans le soutien à la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Ils en sont à la fois un moteur, un bénéficiaire et un indicateur. Leur contribution à la vie communautaire n’est pas reconnue à sa juste valeur par le gouvernement fédéral qui devrait davantage s’en servir afin de remplir son propre mandat quant au développement des communautés.

Par exemple, les journaux communautaires subventionnent des événements culturels, soutiennent l’implication communautaire dans les institutions d’enseignement, et cet engagement des médias, au lieu de se faire en collaboration avec le gouvernement fédéral dans le cadre de son obligation de soutenir le développement des communautés, se fait faute d’une implication du gouvernement fédéral. Les médias se trouvent à soutenir le mandat du gouvernement fédéral, et dans certains cas, à faire son travail à sa place.

Un abonnement chez nous coûte 42 $. Celui que je vends au Collège Boréal coûte 12 $. J'accorde donc une subvention de 30 $ par abonnement au Collège Boréal. […] C'est comme pour le Théâtre du Nouvel-Ontario, qui nous achète 6 000 $ de publicité par année et nous en paie environ 600 $. Le reste, nous le donnons. Nous faisons vivre les organismes communautaires, jusqu'à un certain point. Pourtant, si nous n'allons pas chercher les jeunes aujourd'hui qui souvent ne lisent que ce journal et n'ont que cela en français chez eux […][233]

La même collaboration communautaire existe au Manitoba :

Nous avons une entente avec la Division scolaire franco-manitobaine. Chaque semaine, nous offrons deux pages de contenu sur les activités des jeunes dans les écoles. Nous appelons cela les pages « Dans nos écoles ». Cela permet d'abonner automatiquement toutes les familles qui ont un enfant dans une école française. C'est en place depuis quatre ou cinq ans dans notre journal.

D'ailleurs, le journal investit beaucoup dans ce projet. Notre entente avec la Division scolaire franco-manitobaine est loin de couvrir les coûts, et nous en sommes très conscients.

Nous avons aussi le Journal des jeunes, une publication mensuelle insérée dans le journal qui s'adresse aux jeunes et qui donne des nouvelles rédigées de manière à ce que les jeunes puissent les lire. Le Journal des jeunes a des abonnés. C'est une distribution par courriel à l'extérieur de la province, et nous avons des clients un peu partout au Canada: des professeurs s'y abonnent et enseignent en se basant sur cette publication[234].

Les médias communautaires anglophones à l’extérieur de Montréal sont également très impliqués dans le développement communautaire, par exemple dans la région de Québec :

Il y a 15 000 anglophones dans une région de 700 000 personnes. Nous avons un journal anglophone publié une fois par semaine, The Quebec Chronicle-Telegraph, qui nous aide beaucoup […] Nous organisons des soirées spéciales. Nous en avons organisé une la semaine dernière à laquelle 12 nouveaux concitoyens sont venus pour parler de leur expérience à Québec […] Ils trouvent important ce que nous faisons pour aider à conserver les institutions. Cela demande un effort, mais il faut aussi de l'argent, parce que ça prend des gens et du temps pour faire ce travail[235].

Cela vaut également pour les radios communautaires :

Plusieurs de nos radios communautaires sont installées dans des centres communautaires et scolaires. Par exemple, on vient d'ouvrir une nouvelle radio à Saint-Jean. La station est située à l'intérieur du centre scolaire. On y trouve des studios, une antenne à l'extérieur. Il en est de même pour le centre communautaire de Fredericton […] Nos radios communautaires au Nouveau-Brunswick ont développé une initiative avec les écoles dans le but de créer des radios pour les étudiants dans les écoles. Nous croyons que c'est une bonne base pour recruter des futurs bénévoles pour travailler dans les radios communautaires[236].

Les membres du Comité désirent souligner cet engagement des médias communautaires qui va tout à fait dans le sens de l’obligation du gouvernement fédéral. Cela démontre bien que ces médias sont très bien placés pour agir comme le mandataire du gouvernement canadien. En retour, cette contribution devrait être reconnue et soutenue financièrement, car cette contribution, peu importe le montant qui sera accordé, correspondra à des économies substantielles en comparaison à ce qu’il en coûterait au gouvernement fédéral pour accomplir un travail similaire avec ses propres ressources.

La présence de médias dynamiques et innovateurs est une condition nécessaire à la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire, comme l’exprime bien la directrice du journal manitobain La Liberté :

S’il n'y avait pas de communications en français, la communauté ne se verrait nulle part. Dans les médias de la majorité, on ne couvre pas les choses qui intéressent les francophones ou ce qu'ils font. Si vous lisez le Winnipeg Free Press, si vous regardez les réseaux de télévision anglophones ou si vous écoutez la radio anglophone, vous n'entendrez pas parler des gens de Saint-Pierre-Jolys ou de Notre-Dame-de-Lourdes.

Ainsi, nous avons parlé de l'ouverture officielle du centre de santé de Notre-Dame-de-Lourdes une semaine avant la première pelletée de terre et nous suivons ce dossier depuis longtemps. Ce n'est pas dans les autres journaux que les gens vont trouver cela. Il est évident que les médias communautaires jouent un rôle essentiel. Les gens se voient chez nous et ne se voient pas ailleurs[237].

Beaucoup pensent que les médias communautaires ont une importance qui n’est que complémentaire à l’implication de Radio-Canada dans les communautés francophones en situation minoritaire. Les membres du Comité reconnaissent l’insuffisance des efforts consentis par Radio-Canada dans le développement des communautés francophones en situation minoritaire. Ceci dit, l’objectif et la portée du diffuseur national sont bien différents de ceux des médias communautaires, comme l’a bien exprimé Steven Watt, du journal Le Gaboteur de Terre-Neuve-et-Labrador :

Le Gaboteur est le seul et unique journal de langue française — quasiment le seul média francophone — à Terre-Neuve-et-Labrador. Bien sûr, il y a un journaliste à la télévision et à la radio de Radio-Canada ici, à St. John's, mais Radio-Canada a davantage tendance à produire des reportages sur ce qui se passe à Terre-Neuve pour les gens d'ailleurs au Canada. Pour notre part, on offre vraiment une couverture de l'activité terre-neuvienne pour les Terre-Neuviens[238].

En raison même de l’importance de son mandat national, le rôle de soutien au développement communautaire que pourra assumer Radio-Canada sera limité par son obligation de desservir un auditoire plus large. Par conséquent, la courroie de transmission par laquelle le gouvernement fédéral sera en mesure de s’acquitter adéquatement de son mandat de soutien au développement des communautés comprendra bien sûr Radio-Canada, de par sa pénétration régionale, mais devra également mettre à contribution l’enracinement et la proximité des médias communautaires qui constituent un moyen privilégié pour le gouvernement fédéral de s’adresser directement aux communautés francophones.

Or, la révision du cadre de gestion suite à la levée du moratoire sur la publicité a entraîné d’importantes lourdeurs administratives qui désavantagent les médias communautaires puisque les campagnes doivent être préparées plusieurs mois à l’avance[239]. Pour remplir ce mandat que pourrait confier le gouvernement du Canada aux médias communautaires, la voie privilégiée par la majorité des représentants des médias que le Comité a rencontrés est celle de la publicité. La raison en est que les médias communautaires ne sont pas nécessairement des organismes sans but lucratif et que cela limiterait la possibilité d’obtenir des subventions ou contributions[240]. Les membres du Comité sont certes sympathiques à cette difficulté, mais ils sont également d’avis que si la situation minoritaire d’un média rend impossible l’accès à un marché publicitaire local suffisant pour assurer son développement, comme cela a été souvent évoqué, alors le choix d’opérer une société à but lucratif peut sembler inapproprié, et il n’est pas du ressort du gouvernement de corriger ce choix.

Par ailleurs, la dispersion de la clientèle oblige les médias écrits à utiliser l’abonnement par la poste et les radios à multiplier les petits émetteurs. Le développement de médias Internet pourrait s’avérer prometteuse, mais il semble pour le moment que ces médias soient surtout efficaces en appui à d’autres supports dans une logique de convergence, et non comme sources principales. Dans le cas des radios, et si la communauté le jugeait prioritaire, l’accès au fonds d’infrastructures dont le Comité recommande la création pourrait s’avérer une option.

Dans le cas des médias écrits, le maintien du Programme d’aide aux publications, qui subventionne l’envoi par la poste de journaux et de périodiques, auparavant financé aux trois quarts par Patrimoine canadien et au quart par Postes Canada, s’avère une nécessité :

La Liberté est un journal qui a un mandat provincial; il est distribué à 6 000 exemplaires. La moitié de nos lecteurs sont à Winnipeg et l'autre moitié est un peu partout au Manitoba. Pour nous, Postes Canada est la seule solution possible pour distribuer le journal[241].

Or, Postes Canada a annoncé le retrait de sa participation au programme, et menace du fait même la survie d’un grand nombre de journaux communautaires[242].

Le secteur des communications étant absent du Plan d’action pour les langues officielles, et sachant à quel point le Plan lui-même aurait bénéficié d’une campagne médiatique beaucoup plus soutenue, le rôle des médias communautaires pourrait s’avérer essentiel dans la sensibilisation et la promotion d’une seconde phase du Plan d’action.

Le Comité recommande :

Recommandation 30

Que le gouvernement du Canada s’assure que les publications desservant principalement les communautés de langue officielle en situation minoritaire ne soient pas pénalisées financièrement par la décision de Postes Canada de retirer sa contribution au Programme d’aide aux publications, et que Patrimoine canadien confirme le maintien du programme au-delà de 2008.

Le Comité recommande également :

Recommandation 31

Que la présence des médias communautaires soit considérée comme un élément important du soutien à la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire, et que le gouvernement du Canada en fasse des partenaires privilégiés afin de remplir son mandat de promotion de la dualité linguistique et de soutien au développement des communautés.

4.8. Arts et culture

Le domaine des arts et de la culture était, avec les médias, l’autre grand absent du Plan d’action pour les langues officielles. Or, il constitue sans contredit un élément essentiel de la vitalité des communautés. Il figure d’ailleurs dans le plan de développement de plusieurs communautés que le Comité a visitées, notamment à Terre-Neuve-et-Labrador :

Bien que la culture ait toujours été priorisée dans nos plans de développement ou dans nos programmations annuelles, nous n'avons jamais eu de ressources humaines et financières à temps complet rattachées spécifiquement à ce dossier. La culture se faisait entre l'administration financière et la fameuse phrase « l'exécution des autres tâches à la demande de la direction générale ». La phase I du projet de positionnement culturel, parrainée par la Fédération culturelle canadienne française, nous a permis de constater qu'il y avait une vie culturelle et artistique assez diverse et vivante. Nous avons des musiciens, des raconteurs, des artistes peintres, des écrivains, des poètes, des curateurs de galerie, des gardiens de l'histoire et du patrimoine. Nous voulons leur donner une voix, nous voulons leur donner des outils et nous voulons surtout en faire la promotion[243].

Le développement d’un environnement artistique et culturel dynamique est directement lié à la vitalité des réseaux communautaires sur laquelle ce rapport a beaucoup insisté. Pour les communautés, le défi est double, comme l’exprime bien le directeur général du Centre culturel francophone de Vancouver :

Nous devons trouver le financement nécessaire pour commanditer les arts et, en même temps, nous devons trouver des créneaux pour en faire la promotion et la diffusion. Encore là, la source de financement est toujours inadéquate. Je ne pense pas que c'est un manque de volonté ou une mauvaise réception de la part du public, parce que les contacts, les commentaires et nos interactions avec la majorité anglophone sont toujours ou presque toujours positifs. On profite justement d'un climat d'ouverture ici, en Colombie-Britannique. Je ne connais pas précisément toutes les statistiques, mais je pense que la plupart des gens de la Colombie-Britannique viennent d'ailleurs. On est une terre d'immigration, et cela crée un préjugé favorable envers les autres cultures[244].

Les initiatives culturelles dépendent en grande partie des ressources communautaires offertes car très peu de choses peuvent être organisées sur une base purement commerciale. Les personnes en place portent donc à bout de bras quelques projets liés à la vie culturelle. Ces mêmes personnes sont de plus en plus sollicitées par la croissance des autres activités, sans que le financement des organismes communautaires n’ait suivi cette croissance. Dans ce contexte, tant qu’il n’y a pas un réinvestissement important dans le soutien aux organismes communautaires, il devient presque utopique d’envisager un plan structuré permettant de soutenir des initiatives sur le plan culturel. La situation à l’Île-du-Prince-Édouard est typique :

Puisque nos communautés grandissent de façon exponentielle, les demandes deviennent de plus en plus grandes. Nous avons maintenant des centres scolaires-communautaires dans certaines régions, qui ajoutent au défi de la gestion de ces instances.

Nous n'avons pas la masse critique nécessaire pour que le développement culturel devienne autosuffisant. Notre clientèle n'est pas assez nombreuse pour défrayer les dépenses inhérentes à la venue d'un spectacle de grande qualité ou de formateurs et de formatrices. […] Pour contribuer vraiment au développement de nos communautés, il faut bien sûr apprendre la langue, mais il faut également s'approprier la culture. À cet égard, il nous manque énormément de ressources humaines et financières pour atteindre nos buts et répondre aux besoins de la clientèle[245].

La Fédération culturelle canadienne-française a formulé plusieurs voies de solution intéressantes, dont la création d’un programme des langues officielles en culture assorti d’un fonds stratégique, ainsi que l’intégration d’un volet « arts et culture » à la seconde phase du Plan d’action[246].

Le Comité recommande:

Recommandation 32

Que les arts et la culture soient considérés comme des éléments essentiels de la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire, que cela se reflète dans les suites à donner au Plan d’action pour les langues officielles, et que Patrimoine canadien ajoute un financement adéquat des projets artistiques et culturels et des infrastructures correspondantes dans le cadre du volet « Vie communautaire » de ses programmes d’appui aux langues officielles.

De plus, afin de soutenir le milieu artistique local, le Comité recommande :

Recommandation 33

Que Patrimoine canadien, lors d’investissements pour des projets majeurs d’infrastructures liés au Plan d’action pour les langues officielles, ajoute 1% de l’investissement afin qu’un projet artistique soit inclus à cette infrastructure.

4.9. Justice

Le secteur de la justice est un des éléments du Plan d’action pour les langues officielles qui a été le mieux accueilli par les organisations qui y ont été associées :

Le plan d'action a eu les résultats suivants: une revitalisation de la Fédération des associations de juristes d'expression française de common law et de son réseau; la nomination de plusieurs juges bilingues; l'offre de formation juridique en français dans plusieurs régions du Canada; la confection d'outils de travail juridique en français pour des praticiens; la promotion des carrières en droit et en justice; la promotion des services juridiques en français auprès des judiciables francophones; plus de vulgarisation juridique en français et un réseautage important avec des groupes associatifs anglophones ou québécois à caractère juridique comme Éducaloi […] Nous croyons que ces progrès, que nous considérons importants, n'auraient pas eu lieu sans le plan d'action[247].

Sur les 45,5 millions prévus au Plan d’action pour les langues officielles dans le domaine de la justice, 18,5 millions de dollars étaient destinés à des mesures ciblées visant à améliorer l’accès à la justice dans les deux langues officielles, dont le financement d’initiatives fédérales-provinciales-territoriales, le financement des associations des juristes d’expression française, la création d’un mécanisme de consultation avec les communautés, et le développement d’outils de formation destinés aux conseillers juridiques du ministère de la Justice. Le reste était consacré à faire respecter des jugements ayant modifié certaines obligations légales du gouvernement du Canada.

Trois éléments ont été présentés comme prioritaires pour la poursuite des progrès réalisés dans ce secteur : la formation et la rétention des professionnels du droit capables de travailler en français[248], le développement d’outils permettant d’appuyer le travail des juristes qui travaillent en français, notamment pour la sensibilisation des institutions impliquées dans l’administration de la justice, et la mise en place d’un mécanisme qui permettrait l’identification des francophones afin de constituer une banque de jurés potentiels. Ce dernier élément impliquerait une modification à la Loi sur la statistique ou une modification au questionnaire soumis en vertu de la Loi électorale du Canada permettant d’ajouter une question analogue à la suivante : « Acceptez-vous que les renseignements recueillis à votre égard au sujet des langues officielles apprises et encore comprises soient utilisés pour la compilation de listes de candidats jurés? » [249]

Le Comité s’est montré favorable à cette suggestion et recommande :

Recommandation 34

Que le gouvernement du Canada poursuive les efforts entrepris dans le cadre du Plan d’action pour les langues officielles en termes de facilitation de l’accès à la justice dans les deux langues officielles, et recommande le moyen le plus approprié de constituer des banques de jurés francophones, en collaboration avec la Fédération des associations de juristes d'expression française de common law.

4.10. Développement économique

Il y a une chose que je dis toujours à nos homologues anglophones, c'est que si on travaille ensemble, on parle les deux langues les plus puissantes en termes économique et politique. Alors, quand on est capables de faire ressortir que notre présence entraîne des retombées économiques, tout à coup, on se fait accepter, pas seulement parce que c'est la loi, mais parce qu'on leur apporte quelque chose[250].

Le développement économique des communautés de langue officielle en situation minoritaire est aujourd’hui intimement lié au dynamisme du Réseau de développement économique et d’employabilité (RDÉE), et de leurs composantes provinciales et territoriales. Cette organisation a pris naissance en 1998.

La création du Fonds d’habilitation en mars 2005 est venue renforcer les efforts des Réseaux de développement économiques et d’employabilité (RDÉE) et des Community Economic Development and Employability Committees (CEDEC), après la révision du mandat du Fonds d’appui aux communautés minoritaires de langue officielle, de manière à mieux coordonner les demandes d’aide auprès des différentes institutions fédérales. Ce Fonds d’habilitation, géré par Service Canada, est doté d’un financement annuel de 12 millions de dollars pendant les trois dernières années du Plan d’action. Nombreux sont ceux qui s’inquiètent de la survie des RDÉE après 2008[251].

Les RDÉE permettent d’offrir aux communautés et aux gens d'affaires, qui en étaient auparavant privés, une gamme de services dans le but d'appuyer la création d'emplois durables et l'essor d'une culture entrepreneuriale dans un esprit communautaire. L’une des réalisations les plus spectaculaires du RDÉE s’est produite dans la foulée des terribles inondations de 1998 au Manitoba:

[Suite à ces événements], le Conseil de développement économique des municipalités bilingues du Manitoba, le CDEM, se dotait d'un premier plan de vision, un modèle de planification pour le développement économique communautaire […] Plus de 300 organismes: des regroupements de gens d'affaires, des associations communautaires, des institutions de recherche et d'enseignement, des coopératives, des municipalités et des ministères provinciaux et fédéraux, des sociétés d'aide au développement des collectivités et plus de 7 000 personnes ont ainsi participé aux rencontres publiques de planification locale. Les projets issus de cette mobilisation sans précédent ont généré au seul Manitoba entre 1999 et 2005 des retombées inusitées: 225 nouvelles entreprises, 3 746 emplois temporaires, 1 159 emplois permanents, 133 projets de développement économique communautaire, un investissement totalisant près d'un demi milliard de dollars. Chaque dollar investi a eu un effet levier de 650 p. 100. Du jamais vu dans nos communautés rurales![252]

La difficulté à laquelle font face les RDÉE est la différence importante qui peut exister quant à la sensibilisation aux particularités des communautés de langue officielle en situation minoritaire de la part des multiples organisations fédérales impliquées dans le développement économique. Cela dépend souvent de l’ouverture manifestée par quelques personnes dans les échelons supérieurs de l’administration publique. Par exemple, la collaboration de Service Canada et celle d’Agriculture Canada ont été exemplaires :

Agriculture Canada avait un programme qui s'appelait Visionet c'était un petit subside de 25 000 $ accordé à une communauté rurale afin qu'elle puisse se payer les services d'un consultant professionnel et définir ses actifs, ses besoins, ce qui s'en venait, ce qui la menaçait, et pour se mobiliser un peu. Le programme n'était pas utilisé dans les communautés francophones. Quand nous avons constaté cela, à notre table avec les représentants du fédéral, nous leur avons dit que nous pourrions peut-être vendre le programme un peu pour eux. Nous leur en avons fait une vente : nous avons vendu pour 1 500 000 $ de programmes Vision. Soixante programmes. Les communautés ont accepté cela facilement. Et cela a produit des retombées extraordinaires dans le cas du Manitoba. Maintenant, les communautés sont vraiment structurées[253].

Il semble que la collaboration ait été plus laborieuse avec Industrie Canada qui gère plus de 150 programmes destinés à la petite et moyenne entreprise. Une réflexion sur la meilleure manière d’offrir ces programmes aux communautés de langue officielle en situation minoritaire contribuerait à mieux atteindre les objectifs de ces programmes, et constituerait une excellente occasion pour le ministère de remplir ses obligations de prendre des mesures positives pour le développement des communautés.

Il semble également que l’implication du gouvernement fédéral se soit essentiellement limitée aux étapes préalables au développement lui-même : « On fait surtout des études de faisabilité, des plans d'affaires, et il n'y a pas vraiment d'argent pour la poursuite des projets. »[254]

Le Comité recommande:

Recommandation 35

Que le gouvernement du Canada maintienne le Fonds d’habilitation au-delà de 2008.

Recommandation 36

Que le gouvernement du Canada se dote d’une politique cadre de développement économique des communautés de langue officielle en situation minoritaire:

§         qui serait axée sur l’offre active des programmes et le financement du démarrage de projets, en fonction des particularités des communautés;

§         dont les provinces et territoires demeureraient les maîtres d’œuvre, tout en étant développée en partenariat avec les Réseaux de développement économique et d’employabilité et les Community Economic Development and Employability Committees, ainsi qu’avec les agences fédérales de promotion économique et les ministères impliqués dans le développement économique.

4.11. Recherche

Les nombreuses lacunes observées dans les connaissances sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire, particulièrement en santé et en immigration, rendent nécessaire un soutien beaucoup plus important à la recherche. De plus, la question de la vitalité de ces communautés pose le problème de la meilleure manière de la mesurer. Il s’agit là d’une question complexe sur laquelle s’est penchée la précédente Commissaire aux langues officielles et qui a déjà donné à un travail préparatoire important :

Le gouvernement et les communautés doivent adopter une approche cohérente de la vitalité, basée sur des indicateurs et sur la recherche, et ce pour en arriver à des actions mieux ciblées et des résultats concrets pour le bénéfice de la société canadienne. Il faudra également documenter les démarches entreprises et clarifier les objectifs à l'aide de l'élaboration d'indicateurs de vitalité pertinents qui soient adaptés aux réalités particulières des communautés de langue officielle[255].

Les pistes de recherche sont connues et particulièrement nombreuses. Il est maintenant nécessaire de passer à l’étape de la réalisation. Le Comité recommande donc :

Recommandation 37

Que la ministre de la Francophonie et des Langues officielles s'assure que toutes les institutions fédérales, dans le cadre de leur mandat respectif, se donnent une stratégie en faveur de la vitalité communautaire qui soit basée sur des données factuelles et de la recherche soutenue, axée sur des résultats concrets, et que soit créé un fonds permanent de subventions de recherche sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire.


[148]    Mme Lizanne Thorne, directrice générale, Société Saint-Thomas-d'Aquin, Témoignages, 7 novembre 2006, à 10 h 05.

[149]   M. Denis Ferré (directeur de l'éducation, Division scolaire francophone numéro 310, Conseil scolaire fransaskois), Témoignages, 6 décembre 2006, à 9h50.

[150]    Le prochain acte : un nouvel élan pour la dualité linguistique canadienne. Le Plan d’action pour les langues officielles, p. 26.

[151]    M. Martin Blanchet, conseiller scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2, Témoignages, 5 décembre 2006, à 10 h 50.

[152]    M. Rodrigue Landry, directeur, Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, Témoignages, 7 novembre 2006, à 9 h 20.

[153]    M. Jean-Pierre Corbeil (Analyste principal de la population, Division de la démographie, Statistique Canada), Témoignages, 17 octobre 2006, à 10 h 15.

[154]    Voir par exemple les références données dans le mémoire présenté au Comité
par l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques : http://www.umoncton.ca/icrml/Documents/Memoire_au_Comite_permanent_7_nov.%202006.pdf

[155]    Mme Josée Devaney (conseillère scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2), Témoignages, 5 décembre 2006, à 10 h 40.

[156]    Voir à cet effet le témoignage de Mme Murielle Gagné-Ouellette (directrice générale, Commission nationale des parents francophones), Témoignages, 12 décembre 2006, à 8 h 45.

[157]    M. Roger Gauthier (élu et trésorier, Réseau santé en français de la Saskatchewan), Témoignages, 6 décembre 2006, à 9 h 25.

[158]    M. Jean Johnson (président, Association canadienne-française de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 9 h 00.

[159]    Par exemple, la Stratégie Meilleur départ développée en Ontario a été suspendue. Voir le témoignage de M. Jean-Gilles Pelletier (directeur général, Centre francophone de Toronto), Témoignages, 9 novembre 2006, à 9 h 50.

[160]    M. Marc Gignac, directeur du développement stratégique, Fédération des parents francophones de Colombie-Britannique, Témoignages, 4 décembre 2006, à 11 h 15.

[161]    M. Jean Watters (directeur général, Conseil scolaire francophone de Colombie-Britannique), Témoignages, 4 décembre 2006, à 8 h 55.

[162]    Mme Josée Devaney (conseillère scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2), Témoignages, 5 décembre 2006, à 11 h 45.

[163]    M. Étienne Alary, directeur, Le Franco d'Edmonton, Témoignages, 5 décembre 2006, à 11 h 40.

[164]    Mme Marie Bourgeois (directrice générale, Société Maison de la francophonie de Vancouver), Témoignages, 4 décembre 2006, à 8 h 40; voir également l’intervention de M. Jean Watters (directeur général, Conseil scolaire francophone de Colombie-Britannique), Témoignages, 4 décembre 2006, à 8 h 55.

[165]    Mme Marie-Claude Thibodeau (directeur général, Fédération des parents francophones de TNL), Témoignages, 6 novembre 2006, à 11 h 25.

[166]    Mme Josée Devaney (conseillère scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2), Témoignages, 5 décembre 2006, à 10 h 50.

[167]    Ibid., à 10 h 35.

[168]    Mme Cyrilda Poirier (directrice générale intérimaire, Fédération des francophones de Terre-Neuve et du Labrador), Témoignages, 6 novembre 2006, à 10 h 10.

[169]    M. Paul Dumont (conseiller scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2), Témoignages, 5 décembre 2006, à 11 h 20.

[170]    M. Rodrigue Landry (directeur, Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques), Témoignages, 7 novembre 2006, à 9 h 20.

[171]    M. Denis Ferré (directeur de l'éducation, Division scolaire francophone numéro 310, Conseil scolaire fransaskois), Témoignages, 6 décembre 2006, à 9 h 50.

[172]    Mme Josée Devaney (conseillère scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2), Témoignages, 5 décembre 2006, à 11 h 35.

[173]    M. Raymond Théberge (directeur général, Conseil des ministres de l'éducation du Canada), Témoignages, 9 novembre 2006, à 11 h 00.

[174]    Me Bernard Roy (surintendant de l'éducation, Conseil scolaire fransaskois), Témoignages, 6 décembre 2006, à 9 h 50; voir également le témoignage de Mme Josée Devaney (conseillère scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2), Témoignages, 5 décembre 2006, à 10 h 35.

[175]    La première recommandation se lisait comme suit : « Que le gouvernement fédéral mène :

d) une campagne nationale de sensibilisation à la reconnaissance et au respect des droits linguistiques par tous les Canadiens et toutes les Canadiennes; et

e) une campagne d’information auprès des communautés francophones en milieu minoritaire et des ayants droit en vertu de l’art. 23 de la Charte, sur leurs droits à l’éducation en français et la jurisprudence qui en découle. »

L’éducation en milieu minoritaire francophone : un continuum de la petite enfance au postsecondaire, Rapport intérimaire du Comité sénatorial permanent des langues officielles, juin 2005, Recommandation 1.

[176]    M. Denis Ferré (directeur de l'éducation, Division scolaire francophone numéro 310, Conseil scolaire fransaskois), Témoignages, 6 décembre 2006, À 9 h 50.

[177]    Mme Monika Ferenczy (présidente, Canadian Parents for French (Ontario)), Témoignages, 9 novembre 2006, à 10 h 40.

[178]    Mme Monika Ferenczy (présidente, Canadian Parents for French (Ontario)), Témoignages, 9 novembre 2006, à 11 h 25.

[179]    M. Michael Van Lierop (président, Townshippers Association), Témoignages, 8 novembre 2006, à 9 h 25.

[180]    M. Marc Arnal (doyen, Campus St-Jean, Université de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 8 h 20.

[181]    M. Dominique Sarny (directeur, Institut français, Université de Regina), Témoignages, à 8 h 40.

[182]    Dyane Adam, Commissaire aux langues officielles, Témoignages, 6 juin 2006, à 9 h 55.

[183]    M. Léo Robert (directeur général, Conseil communauté en santé du Manitoba), Témoignages, 6 décembre 2006, à 20 h 25.

[184]    M. Michel Tétreault (président-directeur général, Hôpital général Saint-Boniface), Témoignages, 6 décembre 2006, à 19 h 55.

[185]    M. Marc Arnal (doyen, Campus St-Jean, Université de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 9 h 45.

[186]    M. Denis Hubert (président, Collège Boréal), Témoignages, 10 novembre 2006, à 9 h 55.

[187]    M. Paul d'Entremont (coordonnateur, Réseau santé Nouvelle-Écosse), Témoignages, 7 novembre 2006, à 11 h 10.

[188]    Ce programme permet à Patrimoine canadien de transférer des montants à d’autres ministères lorsqu’ils prennent des initiatives susceptibles de soutenir le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

[189]      Certains témoins nous ont indiqué que le gel de ce financement remonte à plus tôt que cela : Voir par exemple Mme Marianne Théorêt-Poupart (coordonnatrice des communications, Association franco-yukonnaise), Témoignages, 4 décembre 2006, à 8 h 35;.

[190]    Mme Suzanne Roy (Directrice générale, ACFO régionale, Développement du secteur communautaire, Association canadienne française de l'Ontario du grand Sudbury), Témoignages, 10 novembre 2006, à 11 h 00.

[191]    M. Pierre Bélanger (président du conseil d'administration, Alliance de la francophonie de Timmins), Témoignages, 28 novembre 2006, à 9 h 20; voir également les commentaires de M. Sylvain Lacroix (directeur général, Alliance de la francophonie de Timmins), Témoignages, 28 novembre 2006, à 9 h 55; également M. Jean Comtois (vice-président, Assemblée de la francophonie de l'Ontario), Témoignages, 12 décembre 2006, à 9 h 45; M. Réjean Grenier (éditeur et éditorialiste, Journal Le Voyageur), Témoignages, 28 novembre 2006, à 9 h 30; M. Richard Caissier (directeur général, Association des enseignants et enseignantes francophones du Nouveau-Brunswick), Témoignages, 7 novembre 2006, à 14 h 00; Mme Josée Nadeau (directrice, Association francophone des parents du Nouveau-Brunswick), Témoignages, 7 novembre 2006, à 14 h 05.

[192]    Mme Lizanne Thorne (directrice générale, Société Saint-Thomas-d'Aquin), Témoignages, 7 novembre 2006, à 9 h 15.

[193]    M. Michel Dubé (président, Assemblée communautaire fransaskoise), Témoignages, 6 décembre 2006, à 8 h 35.

[194]    Mme Michelle Rakotonaivo (présidente, Fédération des francophones de la Colombie-Britannique), Témoignages, 4 décembre 2006, à 9 h 25.

[195]    M. Francis Potié (directeur général, Association de la presse francophone), Témoignages, 28 novembre 2006, à 9 h 20; voir aussi M. Willie Lirette (président, Fédération des aînées et aînés francophones du Canada), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 40; Mme Mariette Carrier-Fraser (présidente, Assemblée de la francophonie de l'Ontario), Témoignages, 12 décembre 2006, à 9 h 40; M. Daniel Thériault (directeur général, Société des Acadiens et Acadiennes du Nouveau-Brunswick), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 10.

[196]    M. Jean-Gilles Pelletier (directeur général, Centre francophone de Toronto), Témoignages, 9 novembre 2006, à 9 h 25.

[197]    M. Jean-Gilles Pelletier (directeur général, Centre francophone de Toronto), Témoignages, 9 novembre 2006, à 10 h 10.

[198]    Mme Mariette Carrier-Fraser (présidente, Assemblée de la francophonie de l'Ontario), Témoignages, 12 décembre 2006, à 9 h 40.

[199]    M. Marc-André Larouche (directeur général, Réseau des services de santé en français du Moyen-Nord de l'Ontario), Témoignages, 10 novembre 2006, à 10 h 05.

[200]    M. Robert Donnely (président, Voice of English-Speaking Québec), Témoignages, 8 novembre 2006, à 11 h 30.

[201]    Mme Rachel Garber (directrice générale, Townshippers Association), Témoignages, 8 novembre 2006, à 9 h 50.

[202]    M. Robert Donnely (président, Voice of English-Speaking Québec), Témoignages, 8 novembre 2006, à 11 h 40.

[203]    M. Peter Riordon (trésorier, Quebec Community Groups Network), Témoignages, 8 novembre 2006, à 11 h 00.

[204]    M. Jean Johnson (président, Association canadienne-française de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 9 h 45.

[205]    M. Paul d'Entremont (coordonnateur, Réseau santé Nouvelle-Écosse), Témoignages, 7 novembre 2006, à 10 h 50.

[206]    M. Joël Lavoie (directeur général, Association Canadienne-Française de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 9 h 25.

[207]    M. Denis Collette (coordinateur de projet, Centre de santé Saint-Thomas), Témoignages, 5 décembre 2006, à 10 h 15.

[209]    M. Rodrigue Landry (directeur, Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques), Témoignages, 6 juin 2006, à 10 h 20.

[210]    Mme Lizanne Thorne (directrice générale, Société Saint-Thomas-d'Aquin), Témoignages, 7 novembre 2006, à 9 h 30.

[211]    En Alberta, par exemple, voir l’intervention de Mme Josée Devaney (conseillère scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2), Témoignages, 5 décembre 2006, à 11 h 25.

[212]    Voir l’intervention de M. Michel Dubé (président, Assemblée communautaire fransaskoise), Témoignages, 6 décembre 2006, à 8 h 35.

[213]    Voir l’intervention de Mme Louise Lewin (directrice adjointe, Collège universitaire Glendon — Université York), Témoignages, 9 novembre 2006, à 10 h 55.

[214]    Mme Francine Brisebois (Centre culturel de Cornwall, Stormont, Dundas et Glengarry), Témoignages, 12 décembre 2006, à 10 h 30.

[215]    Voir la description du projet par M. Jonathan Rittenhouse (directeur adjoint, Université Bishop's), Témoignages, 8 novembre 2006, à 10 h 20.

[216]    Voir l’intervention de M. Denis Ferré (directeur de l'éducation, Division scolaire francophone numéro 310, Conseil scolaire fransaskois), Témoignages, 6 décembre 2006, à 8 h 55.

[217]    Voir par exemple les interventions de M. Jean Johnson (président, Association canadienne-française de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 8 h 15; également M. Denis Collette (coordinateur de projet, Centre de santé Saint-Thomas), Témoignages, 5 décembre 2006, à 10 h 55; Mme Nicole Rauzon-Wright (présidente, Réseau franco-santé du Sud de l'Ontario), Témoignages, 9 novembre 2006, à 9 h 55.

[218]    Voir les commentaires de Mme Monika Ferenczy (présidente, Canadian Parents for French (Ontario)), Témoignages, 9 novembre 2006, à 11 h 45.

[219]    La liste suivante est un échantillon des interventions les plus représentatives demandant le rétablissement du Programme de contestation judiciaire : Mme Marielle Beaulieu (directrice générale, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada), Témoignages, 12 décembre 2006, à 8 h 25 et passim; Mme Mariette Carrier-Fraser (présidente, Assemblée de la francophonie de l'Ontario), Témoignages, 12 décembre 2006, à 10 h 15; Mme Louise Aucoin (présidente, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law), Témoignages, 6 décembre 2006, à 19 h 25; Mme Nicole Robert (directrice, Réseau des services de santé en français de l'Est de l'Ontario, Réseau des services de santé en français de l'Est de l'Ontario), Témoignages, 19 octobre 2006, à 9 h 55; M. Denis Ferré (directeur de l'éducation, Division scolaire francophone numéro 310, Conseil scolaire fransaskois), Témoignages, 6 décembre 2006, à 8 h 55; M. Michel Dubé (président, Assemblée communautaire fransaskoise), Témoignages, 6 décembre 2006, à 9 h 45; M. Wilfrid Denis (professeur de sociologie, Collège St-Thomas More, Université de la Saskatchewan), Témoignages, 6 décembre 2006, à 9 h 45; M. Jean Johnson (président, Association canadienne-française de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 9 h 35; M. Luketa M'Pindou (coordinateur, Alliance Jeunesse-Famille de l'Alberta Society), Témoignages, 5 décembre 2006, à 10 h 20; M. Donald Michaud (directeur général, Réseau santé albertain), Témoignages, 5 décembre 2006, à 9 h 35; M. Daniel Thériault (directeur général, Société des Acadiens et Acadiennes du Nouveau-Brunswick), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 45; Mme Marie Bourgeois (directrice générale, Société Maison de la francophonie de Vancouver), Témoignages, 4 décembre 2006, à 9 h 15; M. Jean Watters (directeur général, Conseil scolaire francophone de Colombie-Britannique), Témoignages, 4 décembre 2006, à 8 h 55; M. David Laliberté (président, Centre francophone de Toronto), Témoignages, 9 novembre 2006, à 9 h 20; M. Achille Maillet (premier vice-président, Association francophone des municipalités du Nouveau-Brunswick), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 50; . Jean-Luc Bélanger (À titre personnel), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 55; Mme Josée Nadeau (directrice, Association francophone des parents du Nouveau-Brunswick), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 45; Mme Josée Dalton (coordonnatrice, Réseau de développement économique et d'employabilité de Terre-Neuve-et-Labrador), Témoignages, 6 novembre 2006, à 11 h 15; Mme Lizanne Thorne (directrice générale, Société Saint-Thomas-d'Aquin), Témoignages, 7 novembre 2006, à 9 h 25; M. Paul d'Entremont (coordonnateur, Réseau santé Nouvelle-Écosse), Témoignages, 7 novembre 2006, à 10 h 55; M. Louis-Philippe Gauthier (Président, Conseil économique du Nouveau-Brunswick, à titre personnel), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 25; Mme Josée Devaney (conseillère scolaire, Autorité régionale francophone du Centre-Nord no. 2), Témoignages, 5 décembre 2006, à 10 h 50; M. Léopold Provencher (Directeur général, Fédération Franco-Ténoise), Témoignages, 30 janvier 2007, à 9 h 15.

[220]    Le prochain acte : un nouvel élan pour la dualité linguistique canadienne. Plan d’action pour les langues officielles, Cadre d’imputabilité, art. 17, p. 70.

[221]    L’article 23 (3) s’énonce ainsi : « Le droit reconnu aux citoyens canadiens par les paragraphes (1) et (2) de faire instruire leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans la langue de la minorité francophone ou anglophone d'une province a) s'exerce partout dans la province où le nombre des enfants des citoyens qui ont ce droit est suffisant pour justifier à leur endroit la prestation, sur les fonds publics, de l'instruction dans la langue de la minorité; et b) comprend, lorsque le nombre de ces enfants le justifie, le droit de les faire instruire dans des établissements d'enseignement de la minorité linguistique financés sur les fonds publics. »

[222]    Jean-Pierre Corbeil, Statistique Canada, « Étude : Alphabétisme et minorités de langue officielle 2003 », Le Quotiden, 19 décembre 2006, pp. 6-8.

[223]    L’honorable Josée Verner, ministre de la Francophonie et des Langues officielles, Témoignages, 8 juin 2006, à 9 h 35.

[224]    M. Gaétan Cousineau (directeur général, Fédération canadienne pour l'alphabétisation en français), Témoignages, 12 décembre 2006, à 8 h 30; voir également les commentaires de M. Louis-Philippe Gauthier (Président, Conseil économique du Nouveau-Brunswick, à titre personnel), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 25.

[225]    M. Willie Lirette (président, Fédération des aînées et aînés francophones du Canada), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 30.

[226]    M. Denis Hubert (président, Collège Boréal), Témoignages, 10 novembre 2006, à 10 h 20.

[227]    M. Louis-Philippe Gauthier (Président, Conseil économique du Nouveau-Brunswick, à titre personnel), Témoignages, 7 novembre 2006, à 14 h 20.

[228]    L’honorable Josée Verner, ministre de la Francophonie et des Langues officielles, Témoignages, 8 juin 2006, à 9 h 15; voir également les commentaires analogues de Dyane Adam, Commissaire aux langues officielles, Témoignages, 6 juin 2006, à 10 h 15.

[229]    M. Wilfrid Denis (professeur de sociologie, Collège St-Thomas More, Université de la Saskatchewan), Témoignages, 6 décembre 2006, à 9 h 10; voir également l’intervention de M. Marc Arnal (doyen, Campus
St-Jean, Université de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 8 h 25; et de M. Denis Ferré (directeur de l'éducation, Division scolaire francophone numéro 310, Conseil scolaire fransaskois), Témoignages, 6 décembre 2006, à 10 h 20.

[230]    Mme Nicole Rauzon-Wright (présidente, Réseau franco-santé du Sud de l'Ontario), Témoignages, 9 novembre 2006, à 9 h 40; voir également l’anecdote racontée par Mme Marcelle Jomphe-LeClaire (Fédération des aînés et des retraités francophones de l'Ontario), Témoignages, 9 novembre 2006, à 9 h 30.

[231]    Voir M. Marc Arnal (doyen, Campus St-Jean, Université de l'Alberta), Témoignages, 5 décembre 2006, à 8 h 45.

[232]    L’honorable Josée Verner, ministre de la Francophonie et des Langues officielles, Témoignages, 8 juin 2006, à 9 h 15.

[233]    M. Réjean Grenier (éditeur et éditorialiste, Journal Le Voyageur), Témoignages, 28 novembre 2006, à 10 h 30.

[234]    Mme Sylviane Lanthier (directrice et rédactrice en chef, La Liberté), Témoignages, 6 décembre 2006, à 20 h 15.

[235]    M. Robert Donnely (président, Voice of English-Speaking Québec), Témoignages, 8 novembre 2006, à 11 h 30.

[236]    M. Roger Ouellette (président, Alliance des radios communautaires du Canada), Témoignages, 20 juin 2006, à 10 h 20.

[237]    Mme Sylviane Lanthier (directrice et rédactrice en chef, La Liberté), Témoignages, 6 décembre 2006, à 19 h 40; voir aussi M. Francis Potié (directeur général, Association de la presse francophone), Témoignages, 28 novembre 2006, à 9 h 15.

[238]    M. Steven Watt (rédacteur et directeur général, Le Gaboteur), Témoignages, 6 novembre 2006, à 9 h 55.

[239]    Voir les commentaires de M. Étienne Alary (directeur, Le Franco d'Edmonton), Témoignages, 5 décembre 2006, à 11 h 15; également M. Roger Ouellette (président, Alliance des radios communautaires du Canada), Témoignages, 20 juin, à 9 h 00.

[240]    M. Francis Potié (directeur général, Association de la presse francophone), Témoignages, 28 novembre 2006, à 9 h 15.

[241]    Mme Sylviane Lanthier (directrice et rédactrice en chef, La Liberté), Témoignages, 6 décembre 2006, à 20 h 10.

[242]    M. Francis Potié (directeur général, Association de la presse francophone), Témoignages, 28 novembre 2006, à 9 h 20; voir également les commentaires de Mme Sylviane Lanthier (directrice et rédactrice en chef, La Liberté), Témoignages, 6 décembre 2006, à 20 h 10; M. Daniel Boucher (président-directeur général, Société franco-manitobaine), Témoignages, 6 décembre 2006, à 20 h 45; M. Étienne Alary (directeur, Le Franco d'Edmonton), Témoignages, 5 décembre 2006, à 11 h 15.

[243]    Mme Cyrilda Poirier (directrice générale intérimaire, Fédération des francophones de Terre-Neuve et du Labrador), Témoignages, 6 novembre 2006, à 9 h 45.

[244]    M. Alexandre Houle (directeur général et artistique par intérim, Centre culturel francophone de Vancouver), Témoignages, 4 décembre 2006, à 11 h 05.

[245]    Mme Lizanne Thorne (directrice générale, Société Saint-Thomas-d'Aquin), Témoignages, 7 novembre 2006, à 9 h 35.

[246]    M. Pierre Bourbeau (directeur général, Fédération culturelle canadienne-française), Témoignages, 12 décembre 2006, à 9 h 30.

[247]    Mme Louise Aucoin (présidente, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law), Témoignages, 6 décembre 2006, à 19 h 20.

[248]    M. Pierre Gagnon (président du conseil d'administration, Association des juristes d'expression française de la Colombie-Britannique), Témoignages, 4 décembre 2006, à 8 h 20.

[249]    Cette recommandation a été présentée par M. Pierre Gagnon (président du conseil d'administration, Association des juristes d'expression française de la Colombie-Britannique), Témoignages, 4 décembre 2006, à 8 h 25.

[250]    M. Donald Cyr (directeur général, Société de développement économique de la Colombie-Britannique), Témoignages, 4 décembre 2006, à 8 h 45.

[251]    Notamment M. Louis-Philippe Gauthier (Président, Conseil économique du Nouveau-Brunswick, à titre personnel), Témoignages, 7 novembre 2006, à 13 h 25.

[252]    M. Roger Lavoie (directeur général, Réseau de développement économique et d'employabilité (RDÉE) Canada), Témoignages, 30 janvier 2007, à 9 h 00.

[253]    M. Pierre Bélanger (président, Réseau de développement économique et d'employabilité (RDÉE) Canada), Témoignages, 30 janvier 2007, à 10 h 05.

[254]    M. Rodrigue Landry (directeur, Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques), Témoignages, 6 juin 2006, à 9 h 05.

[255]    Dyane Adam, Commissaire aux langues officielles, Témoignages, 6 juin 2006, à 9 h 05.