PACP Rapport du Comité
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Le Chapitre 8 Du Rapport De La VÉrificatrice GÉnÉrale De Novembre 2006 – L’affectation Des Fonds Aux Programmes De RÉglementation – SantÉ Canada
INTRODUCTION
Le gouvernement a pour rôle primordial de protéger la santé et la sécurité de ses citoyens. La réglementation des produits offerts sur le marché est un des moyens d’assurer cette protection. Santé Canada est un des ministères les plus importants du gouvernement fédéral à cet égard. Il réglemente les médicaments, l’équipement médical et autres produits de santé, produits de beauté, pesticides et substances dangereuses en milieu de travail. Ces produits concernent presque tous les aspects de notre vie. Il est donc de la plus haute importance que Santé Canada s’acquitte de sa responsabilité d’organisme de réglementation en veillant à ce que des produits essentiels pour la santé et le bien-être des Canadiens soient disponibles et à ce qu’ils ne présentent pas de risques inacceptables pour leur sécurité et leur santé. Santé Canada doit donc faire en sorte que ses programmes de réglementation soient bien gérés et qu’ils disposent de ressources suffisantes pour remplir pleinement leurs responsabilités.
Après une vérification du Programme des matériels médicaux, en 2004,[1] la vérificatrice générale s’est déclarée préoccupée par la façon dont Santé Canada affectait les fonds à ses programmes de réglementation. Par la suite, le Bureau du vérificateur général a procédé à une vérification de trois programmes de réglementation de Santé Canada – sur la sécurité des produits, sur les médicaments et sur le matériel médical – afin de déterminer si celui-ci allouait les ressources sur la base de données financières et de données sur le rendement solides; si les gestionnaires de programme transmettaient des renseignements sur les sources de financement, le coût des programmes et les résultats; et si Santé Canada pouvait démontrer qu’il affectait suffisamment de fonds pour s’acquitter de ses responsabilités en matière de réglementation.
Étant donné l’importance de cette question pour la santé et la sécurité des Canadiens, le 12 février, le Comité a rencontré Mme Sheila Fraser, la vérificatrice générale du Canada, et d’autres fonctionnaires de son Bureau – M. Ronnie Campbell, vérificateur général adjoint, et Mme Louise Dubé, directrice principale. Santé Canada était représenté par M. Morris Rosenberg, sous-ministre et administrateur des comptes; Mme Susan Cartwright, sous-ministre déléguée; M. Neil Yeates, sous-ministre adjoint, Direction générale des produits de santé et des aliments; Mme Susan Fletcher, sous-ministre adjointe, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs; et M. Richard Charlebois, directeur général, Direction financière des opérations.
OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS
A. Plan d’action
La directrice générale formule de nombreuses recommandations dans ses rapports de vérification du rendement et les ministères ont la possibilité de répondre à ces recommandations dans le texte du rapport. Le Comité est malheureusement habitué à voir des réponses assez vagues – on ne sait pas vraiment si le ministère est d’accord avec la recommandation ou, s’il est d’accord, ce qu’il entend faire pour y donner suite ou quand il espère apporter les changements.
À titre de comparaison, les réponses de Santé Canada à la vérification de ses programmes de réglementation étaient claires, concises et elles comprenaient des calendriers. Le sous-ministre de Santé Canada, M. Morris Rosenberg, a fourni cette réponse à la vérification :
Permettez-moi de vous dire que nous sommes d'accord avec les recommandations de la vérificatrice générale. En fait, le ministère a déjà amorcé le travail visant à régler certains des problèmes soulevés et, à la suite du rapport, nous préparons un plan d'action détaillé que nous serons heureux de communiquer au comité au cours des deux prochaines semaines.[2]
De fait, plusieurs semaines après l’audience, le Comité a reçu le plan d’action promis. Santé Canada y explique comment il entend prendre un certain nombre de mesures en réponse à la vérification. Santé Canada entreprendra un examen complet de ses programmes de réglementation et définira un cadre de contrôle de la gestion financière, qui comprendra des améliorations aux processus de planification opérationnelle, aux cadres de mesure du rendement, au cadre de gestion budgétaire du ministère, aux stratégies d’établissement des coûts, et aux stratégies de recouvrement des coûts/frais d’utilisation. Le plan d’action fourni au Comité n’est ni aussi détaillé ni aussi précis qu’il le pourrait, mais il est évident que Santé Canada se prépare à procéder à une grande révision de ses processus de planification. M. Rosenberg a parlé de la réaction à la vérification : « L'un des avantages des rapports de la vérificatrice générale, c'est qu'ils vous forcent à vous concentrer.”[3]Le Comité espère que Santé Canada se montrera aussi sérieux dans l’action que dans ses intentions. Comme le Comité souhaiterait suivre la mise en œuvre de ce plan d’action, et que M. Rosenberg a indiqué que son ministère pouvait fournir au Comité des rapports d’étape, le Comité recommande :
RECOMMANDATION 1
Que Santé Canada fournisse tous les six mois au Comité des comptes publics des rapports d’étape sur la mise en œuvre des recommandations formulées par la vérificatrice générale dans son Rapport de novembre 2006, à compter de septembre 2007 et jusqu’à la mise en œuvre complète des recommandations.
Le plan d’action de Santé Canada prévoit, entre autres, un examen complet de ses programmes de réglementation qui devrait indiquer dans quelle mesure le ministère s’acquitte de sa responsabilité en matière de réglementation pour ce qui est de protéger la santé et la sécurité des Canadiens et dire où des améliorations s’imposent. Le Comité souhaite voir les résultats de ces examens et il recommande :
RECOMMANDATION 2
Que Santé Canada communique les résultats des examens globaux de ses programmes de réglementation au Comité des comptes publics dès qu’ils seront terminés.
Le Comité appuie pleinement le rapport de la vérificatrice générale et ses recommandations. Par conséquent, il apprécie vraiment l’attitude proactive de Santé Canada et de son sous-ministre par rapport à la vérification et au fait que le Comité souhaitait avoir un plan d’action, ce qui est bien trop rare. Trop souvent, les membres du Comité doivent interroger minutieusement les témoins pour lever l’ambiguïté et obtenir des précisions. Si les ministères ne sont pas d’accord avec les conclusions et les recommandations de la vérificatrice générale, ils devraient le dire clairement et franchement et donner des raisons convaincantes de leur désaccord. Autrement, le Comité s’attend pleinement à ce que les ministères, et surtout les administrateurs des comptes, comparaissent devant lui avec un plan d’action détaillé sur les mesures qu’ils comptent prendre pour mettre en œuvre les recommandations de la vérificatrice générale et à ce qu’ils soient prêts à fournir des rapports d’étape sur l’application de ce plan.
B. Données de référence pour les programmes
Des données de référence pour les programmes sont essentielles pour une bonne planification et de bonnes décisions. De bonnes données de référence précisent le niveau d’activité nécessaire pour s’acquitter des responsabilités en matière de réglementation, le rendement ciblé des activités et les ressources nécessaires. La vérification constatait qu’aucune des directions examinées à Santé Canada ne réunissait de bonnes données de référence pour les programmes. Or, faute de bonnes données de référence, Santé Canada ne sait pas s’il s’acquitte pleinement de ses responsabilités en matière de réglementation en tant qu’organisme de réglementation de la sécurité des produits, du matériel médical et des médicaments. Il ne sait pas quelles sont les activités nécessaires ou les ressources voulues pour financer ces activités, et il ne sait pas si le rendement de ses programmes est satisfaisant.
Santé Canada s’engage dans son plan d’action à procéder à un examen global des programmes de réglementation examinés dans le cadre de la vérification. D’après le plan d’action, ces examens répondront aux besoins en matière de données de référence, d’indicateurs et d’objectifs de rendement, ainsi que de coût des programmes. Le Comité est encouragé de voir que Santé Canada s’attaquera à cette question importante, et M. Rosenberg a également mentionné que certaines leçons de la vérification pourraient s’appliquer à tous les programmes de réglementation de son ministère.
Le Comité va plus loin et pense que certaines leçons pourraient s’appliquer à tout le gouvernement. Voici ce qu’a répondu la vérificatrice générale quand on lui a demandé si tous les programmes de réglementation devraient avoir des données de référence :
De façon générale, je vous réponds par l'affirmative. Il est difficile de savoir si on assume ses responsabilités réglementaires si l'on ne dispose pas de données de référence. Si l'on n'a pas fixé un niveau d'activité — qui peut évidemment fluctuer dans le temps en fonction de l'évolution des risques et des situations — si l'on n'a pas fixé ces données de référence, comment peut-on savoir si l'on y affecte suffisamment de ressources et si le niveau des activités est approprié? Je vous réponds donc oui.[4]
Étant donné l’importance des programmes de réglementation pour la santé et la sécurité des Canadiens et le rôle important que jouent les données de référence dans la bonne planification et dans de bonnes décisions, le Comité recommande :
RECOMMANDATION 3
Que d’ici le 31 décembre 2007, le Conseil du Trésor élabore une politique exigeant que tous les programmes de réglementation du gouvernement du Canada établissent des données de référence claires qui précisent le niveau d’activité voulu, ainsi que le rendement et les ressources nécessaires pour s’acquitter des responsabilités en matière de réglementation.
C. Analyse des risques
La vérification nomme plusieurs activités relatives à la conformité et à l’application que les gestionnaires de programme ont signalées aux cadres de leur direction générale comme étant insuffisantes pour que Santé Canada s’acquitte de ses responsabilités en matière de réglementation (pièces 8.4 et 8.5). Cela préoccupe beaucoup le Comité, car il pourrait y avoir des conséquences pour la santé et la sécurité des Canadiens, comme une exposition à des produits thérapeutiques inefficaces ou dangereux. Il y a aussi un risque accru de responsabilité légale.
Cependant, dans son témoignage devant le Comité, M. Rosenberg ne tient pas compte de l’avis des gestionnaires de programme. Il déclare : « Il s'agit de déterminer si l'opinion du gestionnaire de programme, selon laquelle les ressources sont insuffisantes, est définitive – c’est-à-dire qu'il a le dernier mot sur la question. Autrement dit, parce qu'un gestionnaire de programme le dit, cela signifie-t-il que c'est effectivement le cas? […] si vous demandez à un gestionnaire de programme s'il a suffisamment de ressources, il répondra : je pourrais toujours utiliser plus de ressources.[5]M. Rosenberg continue en disant qu’il s’agit, en fait, de savoir comment on gère les risques, et il ajoute : « Il y a toujours une certaine gestion du risque, et telle est justement la raison d'être de Santé Canada. Est-ce que nous nous en acquittons bien? Il nous faut en discuter avec nos gestionnaires.”[6]
Cependant, le Comité se demande sur quelle base le sous-ministre fait ces remarques parce qu’il n’existait pas de données de référence pour les programmes et qu’aucune analyse de risques n’a été faite pour déterminer le niveau d’activité ou la concentration d’efforts appropriée. Si les gestionnaires de programme ne sont pas les mieux placés pour le déterminer, qui l’est alors? S’il s’agit vraiment de savoir quelle est la bonne façon de gérer les risques et pas de la pertinence de l’opinion des gestionnaires de programme, les examens globaux de programme devraient donc porter sur les risques. Or, il n’est pratiquement pas question de risques dans le plan d’action communiqué au Comité.
Le Comité comprend qu’il n’est pas possible d’éliminer entièrement les risques et que Santé Canada devra prendre des décisions difficiles en ce qui concerne le niveau d’activité voulu nécessaire pour réduire au minimum les risques pour la santé et la sécurité des Canadiens. Ces décisions, cependant, devraient reposer sur une évaluation minutieuse des risques représentés par les conséquences lorsque des activités, jugées insuffisantes par les gestionnaires de programme, ne sont pas menées. Le Comité recommande donc :
RECOMMANDATION 4
Que conformément à son plan d’action pour la mise en œuvre des recommandations du vérificateur général, Santé Canada évalue systématiquement les risques dans le cadre de l’examen global de ses programmes de réglementation.
D. Recouvrement des coûts
Il a été expliqué au Comité que la Direction générale des produits de santé et des aliments de Santé Canada, qui est chargée des programmes des médicaments et des matériels médicaux, mettra à jour son régime de recouvrement des coûts qui permet au ministère de récupérer une partie du coût de ses programmes de réglementation auprès des utilisateurs de services ou des clients, qui, en l’occurrence, sont des fabricants de médicaments et de matériels médicaux. Les frais facturés actuellement ont été fixés en 1993-1994 et n’ont pas été revus depuis. M. Neil Yeates, sous-ministre adjoint, Direction générale des produits de santé et des aliments, a fait remarquer qu’en comparaison d’autres pays, une faible proportion du budget canadien vient de frais facturés, soit environ 25 %, ce qui fait qu’il est possible de relever ceux-ci.
On ne sait pas vraiment à ce stade, cependant, à quoi serviront de nouveaux fonds découlant d’une modification du régime de recouvrement des frais. Cela est important parce que, lorsqu’il est arrivé que les programmes de médicaments et de matériels médicaux bénéficient de fonds supplémentaires pour des initiatives particulières, ces fonds ont servi à aider à résorber un arriéré de demandes déposées par des fabricants qui souhaitaient faire examiner un produit afin d’en faire approuver la commercialisation. Toutefois, la plupart des exemples d’activités de réglementation que les gestionnaires de programme estimaient insuffisantes concernaient la conformité et l’application, ce qui intervient après l’approbation d’un produit, autrement dit, une fois qu’il est sur le marché. Il est certes important de résorber l’arriéré de dossiers, mais des produits déjà commercialisés continuent de représenter des risques potentiels pour la santé et la sécurité des Canadiens.
Le Comité craint que tout changement au régime de recouvrement des coûts se traduise par de nouvelles pressions sur la partie des programmes de réglementation préalable à la mise sur marché, autrement dit celle qui mène aux approbations, car ce sont les fabricants de médicaments et de matériels médicaux qui paient ces frais et qui ont intérêt à voir leurs produits approuvés en temps opportun. Le Comité aimerait en savoir plus sur les plans de Santé Canada à ce sujet, ce qu’il peut faire en recourant à la Loi sur les frais d’utilisation. Cette loi exige des ministères qu’ils consultent le Parlement pour toute modification de frais d’utilisation. Les ministres doivent déposer dans chaque chambre du Parlement un projet exposant les changements et leur justification. De plus, les ministères doivent établir des normes de rendement, dont ils rendent maintenant compte dans leurs rapports ministériels sur le rendement, et fixer les niveaux de rendement mêmes. Comme il souhaite savoir comment Santé Canada entend répartir tout nouveau fonds découlant des frais d’utilisation perçus et concilier les activités préalables et postérieures à la mise sur le marché, le Comité recommande :
RECOMMANDATION 5
Que le projet que Santé Canada déposera au Parlement au sujet de changements à ses frais d’utilisation pour la Direction générale des produits de santé et des aliments précise clairement comment les fonds seront répartis entre les activités préalables et postérieures à la mise sur le marché et quelle proportion du financement de programme reposera sur les frais d’utilisation.
CONCLUSION
Santé Canada a des responsabilités importantes en matière de réglementation en ce qui concerne des produits essentiels et lourds de conséquences pour la santé et la sécurité des Canadiens. Il est donc primordial que Santé Canada gère efficacement ses programmes de réglementation. La vérification effectuée récemment par la vérificatrice générale conclut que Santé Canada peut améliorer, à divers égards, sa planification et ses décisions relatives à des programmes de réglementation. Ce qui préoccupe beaucoup le Comité, c’est que des problèmes aient été découverts parce que Santé Canada ne savait pas s’il s’acquittait pleinement de ses responsabilités en matière de réglementation en tant qu’organisme de réglementation de la sécurité des produits, des matériels médicaux et des médicaments. Cependant, le Comité est encouragé par la réaction de Santé Canada aux recommandations de la vérificatrice générale et il espère que d’autres ministères réagiront de la même manière. Tous les administrateurs des comptes devraient être prêts à fournir au Comité un plan d’action sur la mise en œuvre de recommandations quand ils comparaissent devant le Comité pour discuter d’une vérification.
En revanche, le Comité est préoccupé de voir que le sous-ministre de Santé Canada semble douter de l’opinion des gestionnaires de ces programmes de réglementation qui ont fait savoir aux cadres de leur direction générale que le ministère ne menait pas assez d’activités pour s’acquitter de ses responsabilités en matière de réglementation. Afin de mieux comprendre les risques encourus, Santé Canada devrait fonder un tel avis sur une évaluation approfondie des risques. Le Comité souhaite également avoir l’assurance que tout changement au régime de recouvrement des coûts maintiendra un juste équilibre entre activités préalables et postérieures à la mise sur le marché. Enfin, le Comité pense que certaines leçons de cette vérification devraient s’appliquer à tous les programmes de réglementation gérés par le gouvernement.