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Monsieur le Président, le Parti libéral a choisi de présenter aujourd'hui une motion d'opposition qui soulève un certain nombre de points pour lesquels on est loin de détenir de solution idéale. Cela dit, cette motion montre comme l'approche des conservateurs manque de fignolage. On n'a pas vraiment trouvé de façon de régler les problèmes. Toutefois, la motion présente des solutions qui ne m'apparaissent pas adéquates. Ainsi, le Bloc québécois votera contre cette motion telle qu'elle est rédigée.
Certains problèmes n'ont pas été réglés correctement par le gouvernement. Je pense, par exemple, à la récupération de la TPS par les touristes.
Une annonce a été faite, mais on s'est rendu compte après coup qu'il y avait des problèmes tant sur le plan des voyages organisés que des pourvoiries et des boutiques hors taxes. On en a corrigé une partie, mais tout n'est pas réglé. Comme on a un peu improvisé, il faut ensuite apporter d'importantes modifications.
Il en va de même pour les fiducies de revenu, sauf que c'est encore plus grave.
Lors de la campagne électorale, le gouvernement avait dit ne pas vouloir changer les règles du jeu.
Certains de mes concitoyens, qui ne sont pas nécessairement partisans du Bloc québécois, m'ont dit avoir déposé leur épargne dans ces organismes. Ils pensaient que les règles du jeu étaient claires, mais elles ont été changées sans préavis. Ils veulent savoir si on peut trouver une solution à ce problème.
Nous les avons écoutés. Il faut respecter le fait que les entreprises et les fiducies paient leur part d'impôt. En contrepartie, n'y a-t-il pas de solution qui permette de contrer les effets négatifs que cela entraîne, particulièrement sur les investisseurs individuels? Il faudra songer un peu plus à la solution qui pourrait être apportée. C'est encore un exemple de l'improvisation du gouvernement.
En ce qui a trait à la déductibilité, cela reste à voir, parce que le projet de loi qui permettra la mise en oeuvre de cette partie du budget doit d'abord être déposé. Il faut connaître les règles du jeu.
Lundi prochain, le fera, semble-t-il, un discours pour préciser la situation. Toutefois, il est évident que le gouvernement a été très malhabile, comme s'il avait jeté le bébé avec l'eau du bain. Il a lancé un message très ambigu, à l'effet qu'on ne pourra plus déduire les intérêts lorsqu'on fera des investissements pour le bénéfice de notre économie, alors que plusieurs pays du monde mettent cette règle en valeur. Par ailleurs, on n'a pas mis suffisamment mis en lumière le fait que cela devait éliminer l'évitement fiscal. De ce côté, il faudra fournir des efforts additionnels.
Les libéraux ont déposé une motion qui s'avère très partisane. Lors de l'étude de telles questions économiques, il est un peu dangereux de vouloir aller trop vite. Étrangement, on semble réagir ainsi parce que les conservateurs sont allés trop vite eux-mêmes.
Quant à la non-déductibilité des intérêts, il est évident que pour que la mesure soit adéquate, il faudra cibler très précisément les seuls cas d'abus. Il faut s'assurer qu'on obtiendra ce résultat. Ce ne sera pas facile, car ce sont des questions très complexes. On aurait intérêt à bien y réfléchir.
Le porte-parole libéral parle d'un comité de travail à ce sujet et le ministre a parlé du besoin de fignoler les choses. Peut-être pourra-t-on se regrouper.
Il est important qu'un message clair et modéré soit livré à la communauté économique et à l'ensemble de la population. Je pense qu'on pourrait s'entendre là-dessus.
En effet, le gouvernement dit vouloir s'attaquer aux paradis fiscaux. D'ailleurs, le Comité permanent des finances siège en vue d'étudier les questions soulevées par une motion du Bloc québécois. Le paradis fiscal par excellence auquel le gouvernement devrait s'attaquer est La Barbade. Les compagnies canadiennes qui y placent de l'argent, en sachant que le taux d'intérêt y est très faible, peuvent rapporter ces profits ici, sans être imposées. Ce n'est pas la règle générale des conventions fiscales. Habituellement, il est prévu que lorsqu'on investit de l'argent dans un autre pays, il est imposé lorsqu'il revient au Canada s'il n'y a pas d'équivalence entre les deux systèmes d'imposition. Par contre, sous le régime libéral, on a ajouté un petit paragraphe — le paragraphe 5907 — qui exclut l'imposition de cet argent, ce qui fait que, selon les estimés de 1990 de la vérificatrice générale et selon l'extrapolation de Statistique Canada, ces revenus se chiffrent annuellement à 4 milliards de dollars. Ils arrivent de La Barbade et ne son pas imposés.
L'approximation est relative, mais, sauf erreur, on perd peut-être 800 millions de dollars d'impôts au bout du compte. Évidement, cet argent que les entreprises ne paient pas — parce qu'elles profitent de ce paradis fiscal —, c'est de l'argent que les autres paient, qu'il s'agisse des gens de la classe moyenne et de tous les contribuables qui font leur part. En outre, c'est de l'argent de moins qui pourrait être affecté en partie aux programmes sociaux. D'un côté, il y a des entreprises qui peuvent ramener les profits sans qu'ils soient imposés, et de l'autre, il y a les gens qui paient trop d'impôts à cause de cette question.
Il est question d'un montant considérable. Il existe une façon de régler ce problème: en faisant disparaître tout simplement l'article 5907. Cette mesure très concrète et pratique pourrait être mise en place. Elle aurait un effet immédiat très important et elle enverrait le message suivant à l'ensemble des contribuables: on cherche un peu plus d'équité dans cette situation, on ne tolère pas ce genre de situation. En effet, c'est un évitement fiscal qui a le mérite de pouvoir disparaître de façon claire et précise moyennant une solution concrète. Par contre, en ce qui concerne la déductibilité des intérêts, ce n'est pas facile de savoir comment faire pour trouver la solution.
Il y a donc un problème. Toutefois, les libéraux l'approchent d'une certaine façon dans la motion, mais à notre avis, on y mêle beaucoup de choses en même temps. On associe cette question au fait qu'il y a beaucoup de prises de contrôle étrangères d'entreprises. Cela peut être un élément, une variable dont on tienne compte, mais c'est aussi le résultat de plusieurs années de fonctionnement au Canada, selon lequel on a dit aux gens que c'était le libre marché et qu'on verrait si, au bout du compte, on pouvait être gagnants.
Une analyse en détail de cette question est nécessaire. En effet, il est vrai que beaucoup d'entreprises canadiennes achètent des entreprises étrangères. Cependant, au net, même s'il y en a plus qui achètent des entreprises étrangères, en ce qui concerne l'envergure des investissements, on est nettement déficitaires. Il faudra examiner cette question. Toutefois, les solutions sont d'ordre systémique, et il faudra une politique beaucoup plus large que ce que l'on retrouve dans la motion dont on parle aujourd'hui.
Le premier aspect que l'on retrouve dans la motion est la question de la non-déductibilité. Le deuxième aspect est la question des fiducies.
En ce qui a trait aux fiducies, on a évidemment un problème important parce qu'il faut que les gens paient leurs impôts, ce qui est le véhicule. On s'est rendu compte que le véhicule qui avait été créé pour une certaine forme de capital était utilisé par des entreprises dans des secteurs qui n'en n'avaient nettement pas besoin. On voyait tout le mouvement qui se développait, notamment dans les télécommunications. C'était devenu une façon d'obtenir une diminution d'impôts, sans avoir de production de richesse.
Je crois qu'au regard du principe, ce n'était pas acceptable. Mais la façon dont on l'a fait n'est pas acceptable non plus, parce qu'on a tiré le tapis sous les pieds des investisseurs sans les avertir d'avance, en leur ayant envoyé le message au départ que les règles du jeu ne changeraient pas. Aussi, des gens qui avaient épargné des sommes de 50 000 $, 100 000 $ et 200 000 $ — qui constituaient l'ensemble de leurs épargnes ou une partie substantielle de ces épargnes —, se sont vu privés de leurs revenus qui souvent constituaient le cumul de l'ensemble de leur carrière. À ce sujet, je comprends la colère des gens qui ont été touchés de façon particulière par cette question.
Or de quelle façon faut-il réagir face à la motion des libéraux? En ce qui concerne la proposition des libéraux sur les fiducies de revenus — ainsi qu'ils le disent —, il faut plutôt imposer les gens en adaptant la solution de rechange proposée par les libéraux et résumée dans le 14e rapport du Comité permanent des finances.
Souvenons-nous que ce rapport était le fruit d'un consensus établissant qu'il fallait examiner des solutions. Le Bloc québécois en avait proposé une très simple, soit d'étirer de 4 à 10 ans la période de moratoire, la période de transferts. Les libéraux avaient une autre proposition qui nous apparaît inacceptable. En ce sens, cet aspect de la motion des libéraux est totalement inacceptable pour le Bloc québécois parce qu'on essaie, par la bande, de ramener le fait que tout cela ne sera pas imposable. À mon avis, il n'y a pas d'avenir de ce côté en ce qui concerne cette motion.
L'impact de toute cette situation, c'est qu'actuellement, chez nos électeurs et la population en général, il y a une perception, à savoir que des gens sont plus égaux que d'autres sur le plan de la fiscalité. Il y a des gens qui, à cause de la complexité des systèmes, à cause de ce qu'on a développé au fil du temps, à cause des expertises que les entreprises peuvent se donner, utilisent au maximum des avantages fiscaux — à la limite et jusqu'à l'excès. Cela entraîne des réactions visant à faire disparaître l'avantage fiscal.
Il faut prendre le temps de réfléchir et de regarder de quelle façon ces choses sont déterminées pour être certain que, en bout de ligne, on ait une réaction sensée et posée. En effet, il faut parfois que la possibilité d'économies fiscales continue parce qu'elle a des impacts positifs sur l'économie. Toutefois, il faut éviter de façon concrète l'excès qui peut résulter de ces questions.
En ce sens, la motion des libéraux fait aussi référence au fait que ces deux mesures et ces deux gestes du gouvernement entraînent actuellement les situations qu'on connaît à l'égard des acquisitions de la part de compagnies étrangères. Je crois que le lien de cause à effet ne peut pas se faire directement de cette manière, ce qui n'enlève pas le fait qu'il faut se pencher sur le phénomène des acquisitions par des compagnies étrangères de compagnies canadiennes ou québécoises.
Actuellement, du côté du Québec, évidemment, on évalue de très près quel serait l'impact de l'acquisition par Alcoa de la compagnie Alcan. Il faut voir toutes les conséquences d'une telle acquisition parce que, à la lumière de l'information que j'ai vue, le bilan d'une telle transaction aurait pour conséquence que 37 p. 100 de l'ensemble de la production d'aluminium de ce nouveau géant viendrait du Québec.
N'y a-t-il pas effectivement des avantages à tirer de ce type de transaction? Il faut se pencher plus en détail sur ce sujet et s'assurer que les mécanismes existants dans la loi sur l'examen des investissements étrangers joue au maximum. À cet égard, il faut s'assurer que notre loi corresponde bien à la nouvelle réalité économique actuelle de la mondialisation. Il faut qu'en bout de ligne, lorsqu'on évalue la pertinence d'une transaction pour l'économie canadienne, on tienne également compte des facteurs sociaux importants, comme par exemple l'impact sur l'emploi dans certaines régions en particulier et les conséquences d'un tel type de transaction sur les travailleurs âgés. Cela aura pour effet que, non seulement on en vienne à corriger les aspects purement économiques, mais qu'on tienne également compte des autres types d'impact qu'on peut y retrouver.
Cette motion est un peu un fourre-tout d'un ensemble de conditions. À mon avis, sa rédaction comme telle est un peu en retard en regard de la réalité que nous vivons. D'une part, en ce qui concerne la déductibilité des intérêts, le ministre a annoncé qu'il y aurait un discours lundi prochain qui préciserait sa position et, d'autre part, le critique libéral a lui-même suggéré hier, à la veille du débat sur cette motion, qu'un comité d'experts se penche sur cette question.
Il faudrait peut-être aller plus en ce sens afin de s'assurer que le Comité permanent des finances, qui travaille actuellement sur ces questions, puisse mener son travail et en arriver à des résultats et des recommandations, surtout si on peut sentir de la part du gouvernement une volonté d'avoir de véritables résultats et conséquences. Le gouvernement a appuyé la motion du Bloc québécois dans le cadre de l'étude sur les paradis fiscaux et je l'en remercie. Cela prouve qu'on voulait étudier ces questions. Cependant, il faut être prêt à étudier l'ensemble des situations. Certains aspects touchent à la déductibilité des intérêts. Il y a aussi la question de la convention avec La Barbade qui, selon moi, est une pièce maîtresse.
Je souhaite que le Comité permanent des finances puisse en arriver à un rapport le plus unanime possible, avec des recommandations qui auront un impact le plus rapidement possible. Nous pouvons peut-être nous donner comme échéance l'énoncé économique de l'automne ou, à la limite, le budget de l'an prochain. Or, évidemment, si le travail du Comité permanent des finances aboutit, par exemple, à une recommandation visant l'abolition de l'article 5907, qui permet le rapatriement de 4 milliards de dollars de profits de La Barbade vers le Canada, et ce, sans payer d'impôt pour les entreprises, cela serait un message extraordinaire à envoyer à la population, soit que les élus ont constaté l'existence d'une iniquité fondamentale qui doit être corrigée. Je crois que ce serait une recommandation maîtresse que d'en venir à ce type de recommandation.
À mon avis, le comité doit analyser la question de la déductibilité des intérêts en profondeur. Cette semaine, nous avons rencontré des experts de l'Agence du revenu du Canada qui sont très prudents à l'égard de ces questions et sur les autres.
Cela semble un peu difficile d'obtenir des chiffres. Or, on a besoin d'une transparence accrue de la part du gouvernement.
Donc, le message qui devrait être envoyé, que ce soit à des gens du ministère des Finances, de l'Agence du revenu ou de toute autre expertise gouvernementale, c'est qu'il faut que l'information soit sur la table pour qu'on puisse juger de la pertinence des bonnes recommandations à faire.
On doit cesser de jouer à cache-cache avec l'argent, sinon on encourage la perception actuelle, à savoir qu'une iniquité dans le système fiscal peut vraiment exister, et que cette iniquité ne peut être réglée parce que protégée par des pouvoirs occultes.
On a là une occasion fantastique d'aller de l'avant et de corriger cette situation au Comité permanent des finances. Personnellement, je souhaite que cela soit un peu la voie royale vers laquelle aller pour trouver la solution afin de s'assurer que, au bout du compte, on pourra faire des recommandations pour corriger ces questions.
Pour ce qui est des fiducies de revenu, nous sommes déjà saisis du projet de loi . Le budget a été adopté, et il s'agit de le mettre en vigueur. Ce qu'il faudra faire, c'est de continuer d'être à l'écoute.
Il faut écouter les gens qui ont subi des pertes importantes, ceux qui ont des arguments pour nuancer la question. Il faudrait peut-être tenir un débat à l'automne, et, pour un prochain budget, voir si des choses sont faisables à cet égard. Toutefois, il faut toujours que cela se fasse dans le respect du principe de l'équité fiscale et dans le but que les modifications à apporter améliorent la situation, permettent une meilleure équité fiscale tout en s'assurant des impacts possibles sur l'économie.
On pourrait tirer une leçon de l'ensemble de cette motion et en retenir les choses suivantes. Lorsque le gouvernement fait des annonces en matière d'investissements économiques — notamment dans le budget et à d'autres occasions —, il serait important qu'il ait finalisé l'étude des projets et qu'il ne dépose pas des projets dans lesquels il manque des parties importantes. Car alors, on envoie aux intervenants économiques un message ambigu. C'est ce que le gouvernement doit gérer actuellement quant à la question de la déductibilité des frais d'intérêts. Je pense qu'il y a là un message à corriger.
Je pense aussi à l'exemple que j'ai donné au sujet du remboursement de la TPS pour les touristes. Là encore, il y a du travail à finir. Souvent, il ne s'agit pas seulement de petites choses, mais de choses qui ont des impacts économiques importants. Il faut maintenant toujours examiner l'ensemble de ces questions dans une perspective de mondialisation.
Par exemple, comme tout le monde, les répondants des multinationales au Canada, face aux sièges sociaux — qu'ils soient aux États-Unis ou ailleurs dans le monde —, sont très sensibles aux conditions dans lesquelles les investissements peuvent se faire. Il ne s'agit pas de se mettre à genoux devant les compagnies, mais de s'assurer que les représentants du Québec ou du Canada au sein de ces multinationales sont bien équipés pour décrocher des autorisations auprès de leur siège social, de sorte qu'ils puissent bénéficier de facteurs permettant d'attirer des entreprises et de créer de bonnes conditions pour pouvoir aller de l'avant.
Actuellement, on se serait attendu à une sensibilité particulière de la part du gouvernement conservateur quant à l'importance de ces questions. Or, c'est de l'inverse qu'on est témoins, et c'est assez étonnant. Le gouvernement, qui se disait le plus proche du monde des affaires, a déposé plusieurs projets qui manquaient de fignolage, qui avaient besoin d'être ajustés et précisés, surtout au regard d'aspects qui auraient pu être prévus ou avoir déjà fait l'objet d'études. Ainsi, ils auraient pu être déposés dans des contextes selon lesquels la mise en vigueur aurait été claire et nette.
Je ne dis pas qu'on peut tout le temps prendre des décisions qui font l'affaire de tout le monde. À l'occasion, on doit prendre des décisions même si des gens en seront pénalisés. Toutefois, à la base, les critères qu'il faut considérer sont la transparence et le respect de ce qu'on a avancé. Si jamais on est obligé de renverser une décision ou une façon de faire parce qu'on s'est rendu compte, une fois au pouvoir, qu'on était dans l'erreur, il faut trouver des manières de faire pour que le message pénalise le moins de gens possible
Les engagements pris en campagne électorale — comme celui portant sur la question des fiducies de revenu —, sont un peu comme des engagements moraux, des contrats que l'on conclut avec l'électeur. Dans ce cas, les conservateurs ont brisé ce contrat moral. Aussi, de ce côté, on a raison d'aller de l'avant avec des propositions. D'un autre côté, la façon de faire proposée par le Parti libéral dans cette motion, aujourd'hui, est inacceptable. En effet, en ce qui touche aux solutions proposées, la motion ne correspond pas au discours sur la déductibilité des intérêts. En ce qui concerne les fiducies de revenu, c'est encore pire, car la proposition ne règle pas la question de fond sur la nécessité de l'équité fiscale.
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Monsieur le Président, je suis ravie d'entendre mon collègue bloquiste présenter cette question comme un méli-mélo de problèmes liés à l'impôt des sociétés. Il a clairement souligné les lacunes de cette motion en ce qui concerne certains des cas les plus flagrants d'échappatoires fiscales et de cadeaux consentis aux entreprises, que le Canada ait jamais connus. Le Bloc québécois a pris une décision difficile en s'opposant à cette motion, mais il le fait pour une fort bonne raison.
Je souligne aujourd'hui l'arrogance, l'audace et la bravade dont les libéraux ont fait preuve en présentant cette motion sur les échappatoires fiscales, les cadeaux et les paradis fiscaux dont profitent les entreprises, alors que ces pratiques ont existé pendant de nombreuses années sous le gouvernement libéral et que les députés d'en face n'ont jamais réglé le problème.
J'ai écouté très attentivement le chahut qu'a fait mon collègue d'en face, le député de , et, d'entrée de jeu, je souligne que l'arrogance des libéraux et les liens qu'ils entretiennent avec le monde des affaires viennent immédiatement à l'esprit compte tenu du fait que les membres du Parti libéral sont en communication directe et constante avec l’Association canadienne des investisseurs dans les fiducies de revenu.
Il est intéressant de noter que, au moment précis où le député chahutait à sa place, j'ai reçu un courriel de menaces de Brent Fullard, qui est le coordonnateur de l’Association canadienne des investisseurs dans les fiducies de revenu. Je trouve plutôt étrange que l'association recoure à l'intimidation et aux menaces, comme elle le fait chaque fois que quelqu'un s'oppose à la position libérale. Il va sans dire que je trouve répréhensible que les libéraux adoptent immédiatement le même genre de discours et de tactiques.
Je tiens à dire très clairement que ma préoccupation générale au sujet des libéraux a été accentuée par les données que nous avons obtenues sur les dons que les membres de l'Association canadienne des investisseurs dans les fiducies de revenu ont fait au Parti libéral et aux candidats à la direction de ce parti, dont, je dois dire, le député de , qui a reçu, à lui seul, 5 000 $ de James Kinnear, président de Pengrowth Energy Trust, un des membres fondateurs de l'association.
C'est peu d'argent comparativement aux sommes qu'a reçues Bob Rae, qui avoisinent les 40 000 $. Mais c'est comparable à ce qu'a reçu le chef du Parti libéral. Et je n'ai même pas mentionné les sommes reçues pour la course à la direction du Parti libéral par le député d'.
Je mentionne cela aujourd'hui parce que de sérieuses questions se posent au sujet des raisons qui ont poussé les libéraux à défendre avec tant d'énergie la cause de l'Association canadienne des investisseurs dans les fiducies de revenu. Ils se sentent obligés de défendre aujourd'hui cette association et ses représentants et ils n'éprouvent aucun scrupule à prendre la parole à la Chambre et à s'associer à Brent Fullard, le président de l'association, qui m'a écrit pour me dire que je devais publier sur-le-champ une rétractation de mes prétendues fausses déclarations et allégations sans quoi je m'exposais à des poursuites devant les tribunaux.
M. Paul Szabo: Dites cela à l'extérieur de la Chambre.
Mme Judy Wasylycia-Leis: N'est-ce pas intéressant? Le député continue de fulminer de son fauteuil parce que les libéraux ont beaucoup de difficulté à accepter que...
M. Paul Szabo: Dites cela à l'extérieur de la Chambre.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Monsieur le Président, le député dit que je devrais faire cette déclaration à l'extérieur de la Chambre. Je serai heureuse de répéter ce que je viens de dire à l'extérieur de la Chambre.
Les membres fondateurs de l'Association canadienne des investisseurs dans les fiducies de revenu ont beaucoup donné au Parti libéral, jusqu'à 282 000 $ au cours des dix dernières années et environ 53 700 $ aux candidats lors de la dernière course à la direction du Parti libéral. J'ai précisé les sommes reçues par le chef du Parti libéral, par le député de et par d'autres.
L'hon. Scott Brison: Avez-vous déjà reçu de l'argent de syndicats, Judy?
Mme Judy Wasylycia-Leis: Ce que je demande aujourd'hui, c'est si cet argent a influencé...
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Monsieur le Président, je vous remercie d'avoir rappelé le député à l'ordre. Il m'a été difficile ce matin d'entendre des propos que je considère fort sexistes et de nature personnelle. Je constate que cela continue.
C'est fort intéressant. Peut-être y a-t-il un rapport avec le fait que c'est aujourd'hui anniversaire du député. Par conséquent, au nom de tous les députés, je me fais un plaisir de lui souhaiter un bon anniversaire, mais aussi de lui demander de se calmer et de se concentrer sur la question qui nous occupe aujourd'hui.
Le débat porte sur les cadeaux faits aux entreprises, les paradis fiscaux et les échappatoires fiscales, et cela à une époque où les Canadiens ont de la misère à joindre les deux bouts et constatent que leur part de l'impôt sur le revenu, celle des particuliers, a augmenté, tandis que celle des sociétés ne cesse de baisser.
Il faut peut-être rappeler au député de certaines des déclarations fort étonnantes qu'il a faites au cours des années. Il y a quelques années, il a déclaré que le Protocole de Kyoto avait été écrit à l'endos d'un sac vomitoire, qui est devenu ensuite l'endos d'une serviette de table.
Comprenons bien les faits. Il nous faut comprendre que sur diverses questions, qu'il s'agisse de l'accord de Kyoto, des échappatoires à l'avantage des entreprises, des fiducies de revenu, ou de la déductibilité des revenus d'intérêts, nous devons bien veiller à nous en tenir aux faits et à tenter de comprendre pourquoi un parti qui a eu 13 ans pour régler cette grave situation a choisi de ne pas le faire. Le Parti libéral a choisi de ne pas supprimer les échappatoires fiscales comme celle de la Barbade et, aujourd'hui, les libéraux prennent la parole à la Chambre pour défendre deux programmes que l'on a toujours considérés comme étant des moyens d'en donner toujours plus aux entreprises, et ce, à une époque où les Canadiens sont en difficulté et paient toujours plus d'impôt sur le revenu pour soutenir des programmes gouvernementaux.
Les Canadiens revendiquent l'équilibre. Ils veulent savoir que le gouvernement est disposé à faire preuve d'équité. Ils n'ont rien vu de cela de la part des libéraux. Pour ce qui est des conservateurs, bien que les propositions qu'ils ont faites jusqu'à maintenant peuvent paraître quelque peu déroutantes et que des mises au point s'imposent, ils ont tout au moins cerné certains aspects de la fiscalité des entreprises qui ne sont pas justifiés et au sujet desquels il importe d'agir.
La motion à l'étude aujourd'hui est intéressante du fait qu'elle représente une cuvée rare vieille de 12 ans d'un mélange d'insouciance bienveillante des libéraux à l'égard des paradis fiscaux et des échappatoires fiscales pour les entreprises et de la même insouciance libérale à l'égard des fiducies de revenu. C'est ce que l'on peut constater en distillant cette motion.
Nous en avons encore un exemple ce matin: il n'y a que les libéraux qui ont le culot de se vanter du fait qu'ils ont agi en fonction des grandes sociétés plutôt que des Canadiens ordinaires lorsqu'ils étaient au pouvoir. Il n'y a que les libéraux pour faire cela. Jusqu'où les libéraux sont-ils prêts à aller pour accommoder l'élite corporative canadienne?
Ce n'est pas nouveau, tout le monde sait que les entreprises canadiennes vont profiter de tous les paradis fiscaux et de toutes les échappatoires possible pour éviter de payer leur juste part d'impôt. Le rôle du gouvernement est d'éliminer les échappatoires injustes qui permettent de camoufler des revenus et d'éviter de payer de l'impôt. Nous avons fait pression sur les libéraux à cet égard pendant des années.
J'aimerais revenir au débat sur le paradis fiscal de la Barbade. En 2003, nous avions soulevé le fait que l'entreprise dirigée par le député actuel de , l'ancien premier ministre de notre pays et ancien chef des libéraux, avait utilisé le paradis fiscal de la Barbade pour éviter de payer de l'impôt. Le commissaire à l'éthique en a fait la preuve claire et irréfutable en 2003.
Je vais citer à nouveau un extrait des échanges entre le représentant du député de et un membre du comité qui s'était penché sur la question:
Question: Pour quelles raisons avez-vous déménagé vos sociétés fictives à la Barbade en 1995?
Réponse: Nous les avons déménagées à la Barbade parce que les règles fiscales canadiennes ont changé.
Je pourrais continuer longtemps. Les preuves ne manquent pas à l'effet que les libéraux se sont servis de ce paradis fiscal, qu'ils en ont profité et qu'ils refusent aujourd'hui de s'attaquer à ce problème.
Voici une vraie question pour les conservateurs. Ils se sont attaqués aux fiducies de revenu et à la déductibilité des intérêts. Vont-ils finalement se pencher sur ce problème légué par les libéraux? Vont-ils enfin fermer le paradis fiscal de la Barbade? Vont-ils enfin mettre un terme à cette échappatoire lucrative qui permet aux entreprises canadiennes de cacher de l'argent, des entreprises comme Merck Frosst, qui fait l'objet d'une enquête pour avoir caché 2 milliards de dollars dans le paradis fiscal de la Barbade afin d'éviter de payer de l'impôt.
N'est-ce pas une raison suffisante pour que le gouvernement agisse? Les conservateurs vont-ils s'engager aujourd'hui à aller au-delà des mesures sur la déductibilité des intérêts et les fiducies de revenu et à s'attaquer aux paradis fiscaux et à toutes les autres échappatoires et façons illicites pour les entreprises d'éviter de payer leur juste part d'impôt?
L'enjeu, ici, c'est que ce sont les Canadiens vaillants et honnêtes qui devront combler le manque à gagner. La motion libérale ne dit rien à ce sujet. Elle ne parle pas du transfert du fardeau fiscal qui s'est opéré entre les sociétés et les travailleurs durant les dix dernières années du régime libéral. La motion ne dit pas que nous allons voir à ce que les sociétés payent leur juste part d'impôt afin que les Canadiens puissent commencer à respirer un peu.
Pourquoi? Les libéraux ont l'occasion de présenter une motion à la Chambre, et que font-il? Ils nous proposent de nous porter à la défense des sociétés et des entreprises comme celles dont j'ai parlé, qui réclament le rétablissement intégral de l'ancienne politique sur les fiducies de revenu parce qu'elle leur était profitable. Il s'agit d'entreprises comme la Brompton Funds, Gluskin Scheff and Associates, Borden Ladner Gervais, Lawrence Asset Management et la Pengrowth Energy Trust; la liste comprend beaucoup d'autres personnes, organisations, entreprises et fiducies membres de l’Association canadienne des investisseurs dans les fiducies de revenu. Pourtant, ce sont ces libéraux qui s'énervent parce qu'on a découvert que le Parti libéral et ces sociétés s'échangeaient mutuellement des dons.
Les Canadiens sont en droit de s'interroger. Quelle influence ces activités ont-elles sur le Parti libéral? Pourquoi s'oppose-t-il aussi clairement à l'idée de remédier aux échappatoires dont se prévalent les sociétés? Que se cache-t-il derrière tout cet appui manifesté aux grandes banques et aux grandes sociétés?
On pourrait croire que les liens qu'entretient le porte-parole libéral en matière de finances avec Bay Street suffiraient à tout expliquer. Or, il faut mettre de côté certains aspects de notre vie antérieure lorsque nous franchissons les portes de cette enceinte. Il faut essayer d'agir dans l'intérêt supérieur de la population et adopter des politiques judicieuses. Nous n'avons encore rien vu de cela.
J'ai justement un exemple qui illustre bien mon propos. Il y a à peine deux jours, au Comité des finances, j'ai essayé une fois de plus de convaincre mes collègues de demander aux banques de fournir au comité et au Parlement des renseignements sur ce qu'il en coûte pour offrir des services de guichet automatique, de présenter une ventilation de ces frais et de divulguer les profits tirés de ce type de transactions.
J'estime que c'était une requête raisonnable. Les Canadiens ont droit à une information de base. Les banques ont, dans une certaine mesure, la responsabilité d'être transparentes et responsables envers les Canadiens. C'est pourquoi nous avons la Loi sur les banques. C'est pourquoi nous, les députés, consacrons autant de temps à l'étude des mesures législatives concernant les banques.
Cependant, pouvez-vous croire qu'à l'exception de deux députés libéraux, le reste, y compris l'actuel porte-parole libéral en matière de finances et son prédécesseur, a voté contre cette motion? Il n'est pas surprenant que les conservateurs aient fait la même chose. Ce qui est surprenant, c'est que les députés du Bloc ont appuyé les libéraux et les conservateurs. Par conséquent, nous n'avons plus de motion ni de message visant à demander aux banques de fournir ces renseignements de base.
Je ne parle pas d'une motion du Comité des finances demandant que le gouvernement mette fin aux frais d'utilisation des guichets automatiques, même si la Chambre devrait certainement examiner cette question. Je voulais seulement que la Chambre demande des renseignements que les consommateurs de ce pays ont le droit de connaître.
Quels sont les différents frais que les banques exigent? Dans quelles circonstances et en vertu de quelles conditions? Quels sont les coûts? Quelle est la marge de profit? Comment les banques justifient-elles les énormes profits et les prix excessifs qui sont associés aux guichets automatiques?
C'est le problème avec les libéraux de cet endroit, qui font semblant de se préoccuper de l'intérêt public. Au bout du compte, les libéraux abandonnent toutefois les consommateurs et se rangent du côté des grandes banques et des grandes sociétés.
Maintenant, en ce qui concerne la question des investissements étrangers, ces députés établissent un lien fallacieux entre le problème des prises de contrôle d'entreprises canadiennes par des intérêts étrangers, la déductibilité des intérêts et les programmes des fiducies de revenu. Ce lien n'existe pas.
J'aurais espéré que les députés aient lu certains conseils d'experts. Revenons à Jack Mintz. Il y a plusieurs années, il préconisait le retrait de cette disposition en matière de déductibilité des intérêts, cette disposition permettant la double déduction. Peut-être a-t-il changé d'idée depuis. Nous ne sommes pas certains, étant donné que les libéraux utilisent son nom, mais c'était clair lorsque la vérificatrice générale a fait la recommandation et c'était clair les nombreuses fois où Jack Mintz l'a recommandé aussi.
D'autres intervenants ont formulé la même recommandation, car il s'agit de recettes que le Canada perd à cause d'une sortie de secours, à cause de cette double déduction. Des entreprises tirent profit d'une disposition qui n'était pas censée permettre la double déduction, mais qui s'est mise à le faire.
J'aurais espéré que les députés aient écouté très attentivement et qu'ils aient lu la lettre que nous avons reçue du Congrès du travail du Canada. Je sais que les députés libéraux aiment citer le CTC et les propos de Ken Georgetti lors de leurs interventions et qu'ils aiment donner l'impression d'appuyer les travailleurs. Ils prétendent être tous favorables à une loi antibriseurs de grève, puis ils votent contre. Ou alors ils prétendent vouloir remédier aux piètres conditions de travail et à l'inéquité salariale et ils ne prennent aucune mesure à cet égard lorsqu'ils en ont l'occasion.
Toutefois, j'ose espérer que, dans le présent débat, ils prêtent au moins attention à Ken Georgetti et au CTC, qui ont écrit au ministre et aux parlementaires pour exprimer très clairement leur appui envers la promesse figurant dans le budget de mettre un terme à la pratique voulant que les sociétés déduisent les frais d'intérêt sur les dettes contractées pour financer des filiales à l'étranger. Ils ont écrit:
À un moment où le Canada vient de perdre 250 000 emplois dans le secteur de la fabrication, les deniers publics canadiens ne devraient pas servir à subventionner le transfert de tels emplois à l'étranger. L'élimination de cette subvention liée aux investissements à l'étranger haussera les recettes dont on a besoin pour financer les investissements publics essentiels et stimulera l'investissement commercial au Canada.
Je vois que mon temps de parole est presque écoulé. Visiblement, nous nous opposons vigoureusement à la motion. Nous défendons les travailleurs et les familles ordinaires du Canada. À notre avis, il est temps que les politiques publiques, le comportement du gouvernement et les budgets fédéraux tiennent compte du fossé de plus en plus grand entre les gens richissimes de la société et le reste d'entre nous. L'écart de revenu entre riches et pauvres atteint un sommet jamais vu en 30 ans.
La majeure partie de la richesse du pays est entre les mains d'un nombre toujours plus restreint de gens et un nombre croissant de Canadiens travaillent extrêmement fort pour joindre les deux bouts, sans aide et sans politiques publiques avantageuses pour eux. Il est temps de changer la donne. Les libéraux font fausse route.