CHPC Rapport du Comité
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CHAPITRE 7 : AUTRES ENJEUX
À CONSIDÉRER
Les droits de programmation font l'objet d'une entente commerciale entre le producteur (ou distributeur) et les entreprises de programmation qui souhaitent acquérir les droits de diffusion d'une émission. À un moment donné, CBC/Radio-Canada produisait à l'interne la plus grande partie de son contenu, ce qui veut dire qu'elle était titulaire des droits sur cette programmation. Aujourd'hui, environ 90 % de ses émissions sont créées par des producteurs indépendants, ce qui veut dire que CBC/Radio-Canada doit négocier et acquérir des droits de distribution pour la plus grande partie de son contenu. Auparavant, cela ne concernait que les droits de diffusion d'émissions de radio et de télévision, mais l'environnement numérique multiplateforme a bouleversé la façon de procéder.
Il convient de signaler qu'un certain nombre de témoins se sont dits préoccupés par l'externalisation quasi totale de la production de CBC/Radio-Canada. La Guilde canadienne des médias, par exemple, a fait observer que le soutien d'une production indépendante ne devrait pas nuire à la création d'émissions originales destinées à la radiodiffusion publique qui ne peuvent être produites qu'à l'interne.
La question de la préservation de notre patrimoine audiovisuel a aussi été soulevée dans ce contexte par la Fédération nationale des communications selon laquelle confier à des intérêts privés indépendants la production et la propriété des émissions de télévision prive les Canadiens de la propriété de contenus de grande valeur patrimoniale financés à même les fonds publics[303].
L'absence d'instruments de politique et de modèles d'entreprise adéquats pour faire face à l'émergence des nouvelles technologies complique la question des titulaires de droits et la négociation de droits multiplateformes. Par exemple, la législation existante sur le droit d'auteur ne prévoit pas de nombreux scénarios concernant les négociations relatives aux droits qu'ont entraînées les changements survenus dans l'environnement des médias numériques,
La question de la gestion des droits sur les nouvelles plateformes de diffusion a été jugée cruciale par nombre d'associations représentant les artistes et les producteurs indépendants que le Comité a entendues. Elles veulent avoir leur part des revenus générés par les nouveaux moyens de diffusions tels que le DVD, l'exportation des ouvres, les produits dérivés, le téléphone cellulaire, l'Internet et la baladodiffusion.
La Writers Guild of Canada prétend qu'il est rare que CBC/Radio-Canada paye pour du contenu numérique additionnel en augmentant le montant des droits de licence payés aux producteurs qui commandent les ouvres aux scénaristes[304].
L'ACPFT et la Manitoba Motion Picture Industry Association ont demandé la négociation d'une entente commerciale entre les producteurs indépendants du Canada et CBC/Radio-Canada. En avril dernier, l'ACPFT négociait un tel accord commercial avec CTV[305]. Les deux associations demandent à CBC/Radio-Canada d'adopter des pratiques commerciales équitables, ce qui veut dire le versement de redevances adéquates et des contrats de licence d'une durée limitée.
Le Comité estime qu'il s'agit d'une relation d'affaires entre deux parties et que le différend doit se régler par la voie de négociations. Il serait malvenu pour le Parlement de s'immiscer dans un litige qui est essentiellement un enjeu commercial. C'est aux radiodiffuseurs, aux producteurs et aux détenteurs des droits d'établir entre eux la répartition qu'ils jugent équitable. Nous partons du principe que les parties en présence vont se montrer raisonnables en négociant de bonne foi. Cependant, le Comité est d'avis que CBC/Radio-Canada doit faire preuve de leadership sur cette question et établir la norme pour tous les télédiffuseurs canadiens en ce qui a trait au commerce avec les producteurs indépendants
RECOMMANDATION 7.1
Dans l'intérêt d'une distribution à plus grande échelle et d'une plus grande disponibilité du contenu canadien, le Comité recommande que CBC/Radio-Canada accorde une plus grande priorité à la négociation avec les artistes et les producteurs d'un accord de vente et de diffusion juste et équitable concernant les plateformes nouvelles et émergentes.
Le sous-titrage codé pour malentendants
En 2000, le CRTC renouvelait pour une période de sept ans les licences des réseaux de radio et de télévision de langues française et anglaise de la Société Radio-Canada, de la plupart des stations de télévision qu'elle exploite en propre ainsi que celles de Newsworld et du Réseau de l'information (RDI).
Lors de cet examen, le CRTC s'attendait à ce que la télévision anglaise de CBC sous-titre toutes les émissions de nouvelles locales/régionales, y compris les segments en direct, en utilisant la méthode de sous-titrage en temps réel ou toute autre méthode permettant de sous-titrer des émissions en direct.
Du côté de la télévision française de Radio-Canada, le CRTC exigeait de la SRC qu'elle sous-titre toutes ses émissions de nouvelles et d'affaires publiques en direct et enregistrées et ce, tout au cours de la période d'application de sa licence. Le CRTC décidait également d'imposer une condition de licence selon laquelle la titulaire devait sous-titrer tous les bulletins de nouvelles régionales, y compris les insertions en direct. Le Conseil s'attendait également à ce que la SRC dépasse les niveaux minimums de sous-titrage codé pour qu'ils atteignent un niveau de 90 % des émissions diffusées sur chacune des stations de langue française. Le Conseil reconnaissait toutefois les défis reliés à la capacité des télédiffuseurs de langue française de sous-titrer les émissions de télévision, notamment une pénurie de ressources humaines.
Malheureusement, les obligations en matière de sous-titrage n'ont pas toujours été respectées par les télédiffuseurs, y compris par CBC/Radio-Canada. En 2000, M. Henry Vlug déposait une plainte à la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) alléguant que le réseau anglais de Radio-Canada avait fait preuve de discrimination contre lui et contre d'autres personnes sourdes en omettant de sous-titrer ses émissions télévisées. En 2004, le Sénateur Jean-Robert Gauthier faisait une plainte similaire en soutenant que la Société Radio-Canada ne fournissait pas la totalité de sa programmation aux personnes sourdes et malentendantes sur son service conventionnel et son service spécialisé RDI.
Par ailleurs, M. Joe Clark de Media Access est venu expliquer aux membres du Comité que la télévision anglaise de CBC éprouvait encore des problèmes à sous-titrer les dialogues et les effets sonores importants pour les spectateurs sourds ou malentendants.
Tout récemment, en mai 2007, le CRTC exigeait que tous les télédiffuseurs de langue française et de langue anglais soient dorénavant tenus de sous-titrer 100 % des émissions qu'ils diffusent au cours de la journée de la radiodiffusion, à l'exception des messages publicitaires[306]. La technologie serait désormais disponible, en anglais et en français.
Le Comité accueille favorablement cette décision du CRTC. Le sous-titrage des émissions télévisées permet d'intégrer les personnes sourdes et malentendantes à la collectivité.
Nous espérons que le radiodiffuseur public national sera désormais un leader dans le domaine. Il devra se doter d'une technologie efficace pour offrir 100 % de sa programmation sous-titrée.
RECOMMANDATION 7.2
Le Comité recommande que CBC/Radio-Canada se dote sans tarder d'une technologie de sous-titrage efficace et opérationnelle afin d'offrir 100 % de sa programmation sous-titrée en temps réel.
CBC/Radio-Canada a accumulé au fil des années une masse importante d'archives audiovisuelles. Des milliers d'heures d'émissions, des photographies, des interviews ou encore des objets de création tels que des costumes, des décors et des accessoires utilisés dans différents secteurs de la programmation. Ce matériel constitue une facette de l'histoire du Canada au cours du dernier siècle. Ce patrimoine est disséminé un peu partout dans les centres de production de la Société à travers le Canada.
La Fondation du musée canadien de la radiodiffusion (FMCR) est venue sensibiliser le Comité à l'importance de préserver ce patrimoine audiovisuel[307]. Elle se dit satisfaite des mesures prises par CBC/Radio-Canada pour protéger ce patrimoine depuis l'an 2000. En effet, CBC/Radio-Canada a lancé un projet d'archivage d'envergure et a restauré et catalogué des milliers d'heures de programmation.
À l'été 2001, le ministère du Patrimoine canadien a approuvé une proposition conjointe de CBC et de Radio-Canada en vue du financement de sites d'archives numériques en ligne destinés à mettre en valeur leurs archives radiophoniques et télévisuelles. Il leur a ainsi été possible de créer des sites web et de numériser des clips rappelant des événements ayant marqué l'histoire, pour que tous les Canadiens y aient accès. Cependant, des questions de financement et de droits d'auteur continuent à faire obstacle au projet d'archivage numérique.
Toutefois, la FMCR estime que la restauration et le transfert de l'analogique au numérique exigent en moyenne 11 heures pour chaque heure d'émission. Compte tenu de l'inventaire actuel d'émissions de CBC/Radio-Canada, il faudra 30 années de travail pour un seul technicien pour mener à bien un seul élément de cette tâche[308].
La Fondation a donc recommandé au Comité que la préservation du patrimoine audiovisuel de la Société soit partie intégrante du mandat de la Société et que des fonds supplémentaires soient consacrés explicitement à la préservation du véritable trésor historique que la Société détient actuellement.
RECOMMANDATION 7.3
Le Comité recommande que CBC/Radio-Canada multiplie ses efforts pour préserver les milliers d'heures d'émissions de radio et de télévision diffusées par les services national, régionaux et locaux de CBC/Radio-Canada afin que les citoyens canadiens puissent avoir accès à leur patrimoine audiovisuel.
Le poste d'ombudsman à CBC/Radio-Canada a été créé en 1992. Il y en a un pour le réseau français et un pour le réseau anglais. Il vise à maintenir la qualité de l'information à Radio-Canada et à permettre aux citoyens de déposer des plaintes à une instance indépendante. L'ombudsman intervient comme instance d'appel lorsqu'un plaignant n'est pas satisfait de la réponse donnée par le personnel ou la direction de la programmation de CBC/Radio-Canada. L'ombudsman détermine si un comportement journalistique ou une information diffusée sur l'un des différents supports de CBC/Radio-Canada respecte ou non les normes et pratiques journalistiques de la Société.
L'ombudsman jouit d'un pouvoir d'influence. Il recommande une modification à une politique journalistique s'il estime que le comportement journalistique ou l'information diffusée n'a pas respecté la politique journalistique. Chaque année, l'ombudsman présente au conseil d'administration un rapport annuel. Le président-directeur général indique aux membres du conseil d'administration quelle sorte de suivi il apportera aux recommandations de l'ombudsman.
Certains témoins ont remis en question l'efficacité de l'ombudsman. Un témoin individuel qui a comparu à Toronto, Frank Gue, affirme que les réponses reçues de l'ombudsman à la suite de plaintes étaient courtoises, mais ne reconnaissaient pas l'existence de biais dans la couverture de certains enjeux nationaux et internationaux. Par conséquent, il a demandé au Comité de recommander un renforcement des pouvoirs de l'ombudsman[309].
D'autres témoins ont remis en question l'indépendance de l'ombudsman. Par exemple, l'organisme Nos ondes publiques a réitéré l'importance que l'ombudsman ne soit pas un employé ou un ancien employé de la Société[310].
Le Comité admet qu'il est nécessaire qu'il provienne de l'extérieur de CBC/Radio-Canada. Le système de gestion des plaintes s'en trouverait amélioré et l'indépendance de l'ombudsman ne serait pas contestée.
RECOMMANDATION 7.4
Compte tenu de l'importance du bureau de l'ombudsman et de la nécessité qu'il prenne des décisions équitables, le Comité recommande qu'il soit choisi ailleurs que parmi les employés actuels ou passés de CBC/Radio-Canada, ou que parmi les personnes n'ayant pas travaillé pour la Société dans les cinq années précédant la date proposée de l'emploi.
[303] Témoignages, Comité permanent du patrimoine canadien, réunion no 64, 39e législature, 1re session, 25 mai 2007, 08 h 40.
[304] Témoignages, Comité permanent du patrimoine canadien, réunion no 51, 39e législature, 1re session, 20 avril 2007, 08 h 40.
[305] Témoignages, Comité permanent du patrimoine canadien, réunion no 54, 39e législature, 1re session, 26 avril 2007, 10 h 25.
[306] Témoignages, Comité permanent du patrimoine canadien, réunion no 58, 39e législature, 1re session, 10 mai 2007, 10 h 45.
[307] Témoignages, Comité permanent du patrimoine canadien, réunion no 51, 39e législature, 1re session, 20 avril 2007, 11 h 20.
[308] Ibid.
[309] Témoignages, Comité permanent du patrimoine canadien, réunion no 52, 39e législature, 1re session, 20 avril 2007, 16 h 05.
[310] Témoignages, Comité permanent du patrimoine canadien, réunion no 53, 39e législature, 1re session, 24 avril 2007, 09 h 45.