:
Bienvenue à tous, surtout aux témoins qui sont des nôtres aujourd'hui.
D'après notre ordre du jour, nous étudions le chapitre 3 du rapport d'octobre 2007 du vérificateur général du Canada, qui porte sur la Convention définitive des Inuvialuit.
Nous entendrons du Bureau du vérificateur général du Canada, M. Ronnie Campbell, vérificateur général adjoint et M. Frank Barrett, directeur principal. Soyez les bienvenus.
Du ministère des Affaires indiennes et Nord canadien, nous accueillons M. Michael Wernick, sous-ministre et administrateur des comptes. Il est accompagné de M. Michel Roy, sous-ministre adjoint principal, Revendications et gouvernement indien et par M. Terry Sewell, directeur général de la mise en oeuvre.
Au nom du comité, je vous souhaite à tous la plus cordiale bienvenue.
Je crois que vous avez une déclaration à faire, monsieur Campbell. À vous la parole.
:
Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter les résultats de notre vérification portant sur la Convention définitive des Inuvialuit, qui figurent dans le chapitre 3 du rapport d'octobre 2007 de la vérificatrice générale. Je suis accompagné de M. Frank Barrett, le directeur principal responsable de cette vérification.
La Convention définitive des Inuvialuit est l'une des premières ententes sur des revendications territoriales globales conclues par le Canada. Au moment de sa signature, en 1984, c'était la première entente du genre conclue au nord du 60e parallèle et la troisième entente sur des revendications territoriales globales à être signée au Canada. Comme toutes les conventions territoriales globales, la Convention définitive des Inuvialuit est protégée par la Constitution.
[Français]
Les ententes modernes sur les revendications territoriales globales sont complexes. Elles définissent les rôles, les responsabilités et les obligations de chaque partie. Elles peuvent aussi comporter des dispositions sur la cession des terres et le règlement monétaire. Ces ententes ne visent pas à mettre un terme aux relations entre les gouvernements et les groupes autochtones, mais bien à les changer.
Les objectifs principaux de la Convention définitive des Inuvialuit vise: à sauvegarder l'identité culturelle et les valeurs des Inuvialuit au sein d'une société nordique en voie d'évolution; à permettre aux Inuvialuit d'être des participants à part entière de la société et de l'économie du Nord canadien et du pays; à protéger et à préserver la faune, l'environnement et la productivité biologique de l'Arctique.
La Convention définitive des Inuvialuit contient plus de 80 dispositions qui obligent le gouvernement fédéral à prendre certaines mesures ou à mener certaines activités. Plus des trois quarts de ces obligations sont permanentes et comprennent, entre autres, la participation régulière à des comités et conseils.
Notre vérification a porté sur les activités fédérales liées à 29 obligations qui, selon nous, doivent être remplies pour satisfaire aux exigences de la convention. Nous avons aussi examiné la façon dont Affaires indiennes et du Nord Canada, le principal responsable fédéral, a prévu, mené et surveillé l'exécution des obligations du Canada aux termes de la convention. Finalement, nous avons voulu déterminer dans quelle mesure le ministère a surveillé la réalisation des principes de la convention et a produit des rapports à ce sujet.
Nous avons constaté que le gouvernement fédéral n'a pas respecté certaines de ses principales obligations. Dans bien des cas, il n'a pas établi le processus et les modalités nécessaires ou il n'a pas assigné à des responsables les diverses mesures à prendre.
[Traduction]
Par exemple, le ministère n'a pas encore instauré de processus pour supprimer les charges ou restrictions à l'utilisation, qui s'appliquent à 13 parcelles de terres des Inuvialuit. Sans ces restrictions, les Inuvialuit auraient le contrôle et l'usage de ces terres. De plus, en 1984, le ministère a par ailleurs transféré aux Inuvialuit des terres sur lesquelles se trouvent des infrastructures municipales appartenant au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, ainsi que des terres appartenant à Transports Canada. Nous avons constaté que le ministère n'a pas établi de processus visant à échanger ces terres contre d'autres.
Certaines obligations ont été remplies. monsieur le président. Affaires indiennes et du Nord Canada a versé à la Société régionale inuvialuit près de 170 millions de dollars sur une période de 14 ans, conformément aux échéances de la convention. Le Canada a cédé près de 91 000 kilomètres carrés de terres aux Inuvialuit et créé trois parcs nationaux. Des organisations fédérales ont participé aux organes de cogestion et aux comités créés selon la convention. Elles ont aussi donné sur demande, des avis aux comités, conseils et bureaux d'examen environnemental.
Monsieur le président, nous avons constaté qu'en plus de manquer à certaines de ses obligations, Affaires indiennes et du Nord Canada n'a toujours pas adopté de stratégies visant l'exécution des obligations du Canada et ce, 23 ans après l'entrée en vigueur de la convention. Le ministère, en sa qualité de principal responsable fédéral, est là pour assurer la surveillance des progrès accomplis quant à la réalisation des principes de la convention. Lors de la vérification, des représentants du ministère ont déclaré qu'ils estimaient que cette responsabilité n'incombait pas au ministère. En conséquence, le ministère n'a pas de vue d'ensemble des progrès réalisés quant à l'atteinte des trois objectifs fondamentaux de la convention.
Nous avons formulé six recommandations que le ministère a toutes acceptées. Pour chacune des recommandations, il a pris divers engagements et établi des échéances précises. Certains de ces engagements devraient être concrétisés d'ici mars 2008. Le comité voudra peut-être inviter le ministère à déposer son plan d'action et à expliquer les changements mis en place afin de s'assurer que les engagements pris en réponse à nos recommandations sont respectés.
Sur ce, monsieur le président, je conclus ma déclaration d'ouverture. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions du comité.
:
Merci, monsieur le président, de m'inviter aujourd'hui à témoigner devant le comité.
J'ai justement entretenu le comité sénatorial du même sujet récemment. Je suis content de pouvoir commenter les constatations et les recommandations contenues dans le rapport déposé en octobre 2007 par la vérificatrice générale du Canada, relativement à la mise en oeuvre de la convention définitive des Inuvialuit.
[Français]
D'abord, je tiens à remercier la vérificatrice générale de son rapport. J'apprécie les efforts et l'examen dont elle et son personnel nous font profiter. En tant que sous-ministre, je me réjouis sincèrement de leurs recommandations réfléchies.
Nous reconnaissons le sérieux des questions soulevées dans le rapport. Tout manquement de notre part à l'une ou l'autre des dispositions de la Convention définitive des Inuvialuit mine non seulement les rapports que nous entretenons avec cette communauté autochtone, mais ternit également la crédibilité durement gagnée par le gouvernement fédéral, au moment même où il entame la négociation d'accords avec d'autres communautés autochtones.
[Traduction]
Dans son rapport, la vérificatrice générale, propose à Affaires indiennes et Nord Canada six moyens bien précis de s'acquitter entièrement des responsabilités que lui confère la Convention définitive des Inuvialuit. Ces recommandations portent sur des aspects cruciaux de la convention: l'échange de terrains, la passation de marchés, l'examen des mesures économiques, les communications interministérielles, la stratégie de mise en oeuvre et la mesure du rendement.
Nous avons travaillé à ces aspects, et depuis le dépôt du rapport à la Chambre des communes, nous avons intensifié nos efforts afin de remédier aux préoccupations soulevées par la vérificatrice générale, et ainsi respecter en tout point la disposition de la convention.
Nous avons travaillé à l'élaboration d'un plan d'action pour être bien certains de donner suite aux recommandations du rapport dans des délais réalistes. Le Bureau du vérificateur général nous a fourni des directives quant au libellé approprié suite à la réunion du 28 février de notre comité de la vérification et de l'évaluation.
Mes fonctionnaires m'ont fourni une mise à jour sur la réponse du ministère aux recommandations contenues dans le rapport. Nous avons fait des progrès importants sur différents éléments soulevés par la vérificatrice générale, et j'aimerais aujourd'hui vous en décrire quelques-uns, ce qui devrait situer le contexte pour vos questions. Permettez-moi d'y aller dans l'ordre.
En matière d'échange de terres, nous avons accéléré les travaux, ce qui nous a permis de réaliser des progrès notables relativement aux aéroports de catégories B et C et au Site canadien des pingos. La négociation avec les Inuvialuit et les autres intervenants fédéraux est maintenant terminée et toutes les parties intéressées devraient donner leur accord définitif au cours des six prochains mois.
Voilà qui représente un défi important pour nous, car nous ne sommes pas les seuls responsables de la mise en oeuvre, et tous les leviers et outils ne reposent pas entre nos mains. Les accords signés par le gouvernement du Canada mettent souvent à contribution d'autres ministères. Ayant lu le rapport, vous savez peut-être que le gouvernement du Canada en est le signataire et que sa signature engage différents ministères fédéraux et d'autres intervenants.
Par exemple, quant à la passation de marchés, nous avons travaillé en étroite collaboration avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et avec Travaux publics et Services gouvernementaux Canada pour faire en sorte que les pratiques en matière de contrats reflètent nos engagements gouvernementaux. Les modifications seront terminées au cours du prochain exercice et les systèmes de surveillance de la conformité seront harmonisés avec la nouvelle politique.
Pour ce qui est de l'examen des mesures économiques, nous avons accordé des fonds aux Inuvialuit afin qu'ils évaluent les débouchés économiques de chacune de leurs six collectivités. Nous reconnaissons que la prospérité des communautés autochtones se traduit par un pays plus prospère pour chacun de nous, et c'est l'objectif que vise cette approche pragmatique.
J'aimerais profiter de l'occasion pour confirmer que le ministère continue à chercher des façons de produire des évaluations justes et des rapports en temps opportun concernant les activités et les obligations liées à la mise en oeuvre des revendications territoriales, non seulement pour ce qui est de la convention définitive des Inuvialuit, mais aussi pour tous les règlements de revendications territoriales au Canada.
Les mécanismes améliorés de révision de comptes sur la mise en oeuvre des traités modernes, notamment les organes multipartites de mise en oeuvre, les rapports trimestriels et les vérifications produites au besoin, apportent plus de rigueur à notre travail. Conformément aux recommandations émanant des vérifications internes, nous améliorons notre processus de la mise en oeuvre et nous lançons un guide pratique sur la mise en oeuvre à l'intention du personnel. Nous avons aussi organisé des ateliers pour cerner des indicateurs de rendement axés sur les résultats et ainsi évaluer les conséquences des activités de mise en oeuvre et en faire rapport. Toutes ces mesures font partie du cadre d'évaluation du rendement global du ministère.
La direction générale de la mise en oeuvre, dont le chef, M. Sewell, m'accompagne aujourd'hui, a mené une série de discussions avec les représentants de tous les signataires autochtones des traités modernes, et avec tous nos partenaires gouvernementaux. Ces discussions avaient pour but d'acquérir une meilleure compréhension des difficultés qui touchent actuellement la mise en oeuvre, et de chercher ensemble des solutions.
Enfin, les répercussions des accords modernes de règlement des revendications territoriales font actuellement l'objet d'une évaluation dans cinq communautés des Territoires du Nord-Ouest et du Québec. Les résultats de cette évaluation seront dévoilés au cours du prochain exercice.
[Français]
Ces initiatives prouvent bien, je l'espère, notre engagement. Malgré les obstacles auxquels nous nous butons, nous ne devrions pas perdre de vue que l'actuel processus de règlement des revendications territoriales fonctionne, et que les accords ont — et continueront d'avoir — une profonde incidence sur la vie des membres des communautés autochtones. Nous continuerons ensemble de faire des progrès.
[Traduction]
Permettez-moi de citer un extrait du témoignage du chef Joe Linklater, de la première nation des Gwitchin Vuntut, au Yukon. Il comparaissait devant le comité sénatorial des peuples autochtones. Je trouve ses paroles très intéressantes et pertinentes: « Je répète constamment aux gens que ces accords en matière d'autonomie gouvernementale n'ont pas été négociés pour nous renflouer. Ils l'ont été pour nous donner la capacité de prendre soin de nous et de devenir autonomes. »
Cette capacité de prendre soin de soi est ce que tous les Canadiens souhaitent. Je crois que les mesures instaurées par certains ministères, dont le nôtre, pour donner suite au rapport de la vérificatrice générale, nous rapprocheront tous de notre objectif ultime.
Merci, monsieur le président. Je répondrais volontiers à vos questions.
:
Au fond, vous dites que c'est plutôt une question de catégorie d'engagement. Ce qui devait être fait de façon systématique, quand c'était simple, on l'a fait. Mais dans les obligations à long terme, ce qui relève davantage de l'avenir des peuples et des mesures qui nécessitent un suivi, c'est beaucoup plus difficile.
Monsieur Wernick, vous êtes sous-ministre. Je trouve très désolant de lire un rapport comme celui-là. C'était il y a 24 ans, et au moment de la vérification, cela remontait à 23 ans. De plus, il a fallu la vérification d'un bureau de vérificateurs pour que ce soit mis à jour.
Y avait-il déjà une forme d'évaluation de ces mesures au ministère, sans que la vérificatrice soit impliquée? Quelle crédibilité croyez-vous avoir auprès des Autochtones, de ceux qui auront à négocier des ententes? Je relève la réponse de M. Campbell. En ce qui a trait aux mesures qui seront prises à l'avenir, les Autochtones penseront peut-être qu'ils peuvent compter sur des mesures à court terme, comme signer une entente ponctuelle ou vendre des terres, mais dans le cas de l'autre partie, où vous n'avez pas rempli vos engagements, comment pourront-ils se fier au ministère pour signer une entente de bonne foi?
:
Je vous remercie pour cette question. Comme je l'ai dit au début, le fait qu'il y ait des différences entre certaines clauses ou mesures de l'entente me trouble beaucoup parce que ça mine notre crédibilité aux tables de négociation avec d'autres groupes autochtones. Cela dit, ça progresse. On vient de signer deux traités en Colombie-Britannique et on vient de régler des revendications des Inuits du nord du Québec, etc.
Comme j'ai essayé de l'expliquer, après la signature et la célébration d'un traité commence une relation entre le gouvernement et le groupe autochtone. La plupart des obligations se poursuivent, comme M. Campbell l'a dit, et il y a des différends quant au financement. Il est clair qu'on n'a pas fait notre travail dans certains échanges de terres, je l'admets. On tente maintenant de faire le plus des transactions possible. Comme M. Campbell l'a expliqué, on retrouve dans l'entente environ 80 obligations de différentes catégories. Deux d'entre elles sont identifiées comme des manques en termes de transaction, et il y a des différends dans deux dossiers très importants: la politique d'achat et le développement économique. On essaie de progresser.
En réponse à votre question, je dirai que oui, à l'interne, on fait des vérifications et des évaluations, et de temps en temps, le Bureau du vérificateur général nous aide. Nous l'apprécions parce que c'est une mesure de responsabilisation. Il y a 21 ententes. Celles qui ont été signées au début du cycle, comme celles de la Baie-James et d'Iqaluit, n'ont pas la même structure de mise en oeuvre. On a tiré des leçons du passé, et les nouveaux traités comprennent des mesures de mise en oeuvre et de règlement des différends beaucoup plus solides.
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Merci, monsieur le président.
La question de la mise en oeuvre des différentes ententes signées par le gouvernement du Canada est si capitale pour les habitants du Nord que je suis très étonné que des rapports comme celui-ci ne prennent pas les proportions d'une crise au ministère. Mais de toute évidence, ce n'est pas ce qui se passe. Comme d'habitude, AINC flâne au lieu de s'empresser de remplir ses obligations. Cela cause du tort aux gens que je représente au Parlement et je suis sûr que la frustration est palpable dans le Nord. Les ententes conclues entre le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et les Inuvialuit découlent directement du fait que AINC n'a pas assumé ses responsabilités. Voilà pourquoi on a dû conclure, en parallèle, de telles ententes bilatérales.
Pendant la vérification, les fonctionnaires d'AINC ont déclaré que la convention reposait sur des principes Inuvialuit, auxquels le Canada ne souscrit pas. J'avoue que j'ai du mal à comprendre de tels propos parce qu'il semble un peu ridicule de déclarer, après avoir souscrit à une entente, que l'on n'adhère pas à ces principes fondamentaux; il s'agit des fondements sur lesquels reposera la mise en oeuvre de cette entente. Si vous n'êtes pas d'accord avec l'issue des négociations relatives aux revendications territoriales, que votre ministère a acceptées, si vous n'êtes pas d'accord avec les conditions de l'entente signée par le gouvernement du Canada, vous ne remplissez pas vos obligations.
Que pensez-vous de cette façon de décrire votre position?
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Je pourrais répondre à cette question, monsieur le sous-ministre.
Je crois que les hauts fonctionnaires du ministère n'ont fait que citer l'entente en répondant à une question du personnel de la vérificatrice générale portant sur l'adhésion à ces principes: « la CDI débute par les trois principes suivants, qui constituent les objectifs fondamentaux formulés par les Inuvialuit et reconnus par le Canada ». Je crois qu'on essayait d'attirer l'attention sur cette phrase, qui précise que les Inuvialuit ont proposé ces principes, que le Canada les reconnaît et les respecte, et que tous tâcheront de respecter.
Je vais citer ces principes, qui sont assez importants et de portée très vaste, pour vous permettre de mieux les comprendre:
a) sauvegarder l'identité culturelle et les valeurs des Inuvialuit au sein d'une société nordique en voie de d'évolution;
b) permettre aux Inuvialuit d'être des participants à part entière de la société ainsi que de l'économie nordique et nationale;
c) protéger et préserver la faune, l'environnement et la productivité biologique de l'Arctique.
Comme on peut le voir, il s'agit de principes extrêmement vastes.
Monsieur Bevington, vous avez demandé comment ces principes déterminent la façon dont le gouvernement fédéral remplit ses obligations prévues dans l'entente. Dans le cas du gazoduc de la vallée du Mackenzie, ce serait en veillant à ce que tous les processus d'examen soient dûment suivis et en respectant le désir des Inuvialuit de protéger leur culture, de jouer un rôle réel dans l'économie et de protéger la faune, l'environnement et l'écologie de l'Arctique.
On doit chercher à mettre en oeuvre l'entente tout en respectant ces principes, mais je vous signale que lesdits principes ne sont pas, en soi, des obligations mais plutôt des buts auxquels tous aspirent.
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M. Sewell en a mentionné quelques-uns.
J'ajouterais deux choses. La première, AINC ne s'occupe pas beaucoup des marchés publics. L'approvisionnement est fait par Travaux publics ou d'autres ministères fédéraux. Il y a tout un défi pour rassembler l'information, que nous essayons de régler pour pouvoir intégrer les Inuvialuit aux décisions en matière d'approvisionnement prises par le gouvernement fédéral, souvent par Travaux publics, parfois directement par d'autres ministères, lorsqu'ils achètent des biens et services. Nous n'avons pas fait un bon travail de suivi par le passé. Nous allons essayer de faire mieux à l'avenir. Voilà le type de choses dont M. Sewell parlait, et j'y reviendrai dans un instant.
Le terme « portion raisonnable » a été utilisé par les négociateurs dans l'accord global. J'imagine qu'en 1983, ils ne pouvaient pas définir en chiffres quelle serait cette portion 20 ou 30 ans plus tard, parce qu'il était impossible de prévoir le développement économique. En 1983, personne n'aurait pu prédire que le baril de pétrole coûterait 100 $ ou ce qui s'est passé avec les diamants ou ce que nous allions devoir acheter, alors les parties se sont mises d'accord pour essayer d'établir une portion raisonnable. C'est une cible en mouvement. Nous voulions un avis juridique parce que je ne voulais pas que la Couronne puisse se faire poursuivre à ce sujet. Si nous disons qu'il y a une certaine portion raisonnable, quelqu'un la contestera en cour. C'est faire preuve de diligence raisonnable normale, afin de nous assurer de bien comprendre ce que les avocats considèrent comme une « portion raisonnable ».
Nous en avons une conception. Les Inuvialuit en ont certainement une également. Nous allons devoir en discuter avec eux.
:
Merci, monsieur le président.
Plusieurs personnes ont parlé d'un désaccord. Pour clarifier les choses, je dirais que M. Wernick a fait état d'un désaccord respectueux entre nous, ce qui m'a étonné. Quand on a parlé davantage du sujet, je n'ai pas vu de désaccord.
Il semble y avoir deux points à préciser. D'abord, qui est lié par les objectifs et les principes généraux de l'entente? Les représentants du ministère ont affirmé que ces objectifs et principes ne lient pas seulement le ministère, et nous sommes d'accord. Nous n'avons jamais dit le contraire.
À notre avis, même si ces principes engagent les deux parties, il faut mesurer les progrès accomplis dans la réalisation de ces principes. Et le ministère est également d'accord avec cela.
Permettez-moi de souligner que dans une recommandation au paragraphe 3.85, nous disons, en fait « le ministère en collaboration avec » les autres parties.
Je ne voulais pas que les députés pensent qu'il y a un désaccord alors qu'il n'y en a pas à mon avis, à moins que M. Wernick ne soit pas d'accord avec moi.
:
C'est ce que nous essayons de faire aujourd'hui.
Après avoir lu certaines de ces déclarations et entendu les réponses qu'on nous a données aujourd'hui, je ne peux que me demander si le ministère des Affaires indiennes et du Nord travaille dans l'intérêt des premières nations ou des autres Canadiens. Je sais que vous ne pouvez pas répondre à cette question, mais je me demande pour qui le ministère travaille au juste.
Quant à moi, j'ai toujours pensé que le ministre devait représenter les premières nations. Il lui incombe de voir à ce qu'ils profitent des avantages de la grande nation qu'est le Canada, une nation qu'ils dominaient jusqu'à il y a quelques centaines d'années. Si nous ne reconnaissons pas que cette responsabilité incombe en dernier ressort au ministère et au ministre, je ne vois pas comment les Canadiens pourraient faire confiance au gouvernement.
Remontons un peu en arrière, avant les années 1983-1984; je suppose qu'avant la signature de la convention, d'autres ministères ont dû être consultés. Est-ce exact ou est-ce que le gouvernement du Canada et le MAINC ont simplement signé l'accord? L'entente a-t-elle été avalisée par Parcs Canada? Et par Transports Canada? Et par le ministère de la Défense nationale? Les sous-ministres de tous ces ministères ont-ils signé en s'engageant à collaborer à la mise en oeuvre de cette entente avant qu'elle ne soit transmise au gouverneur en conseil pour signature? Avons-nous agi en Canadiens honnêtes au moment de conclure une entente avec les habitants du Nord de notre pays?
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Toute cette affaire me rappelle l'épisode que nous avons vécu il y a un certain temps relativement au rendement de votre ministère en matière d'éducation. Le constat n'était guère reluisant. Compte tenu de tout l'argent que le ministère consacre à l'éducation, les résultats décrits dans le rapport de la vérificatrice générale révèlent qu'il y a un problème colossal.
Vous avez dit aujourd'hui que les terres ont été transférées, que des sommes importantes ont été dépensées, que l'entente a été mise à exécution pour l'essentiel, mais ce qui me semble vraiment troublant — et cela me rappelle également le dossier de l'éducation — c'est que le niveau de vie des personnes directement touchées par la convention ne s'est pas amélioré. Leur situation ne semble pas avoir changée, ce qui nous amène à nous interroger sur l'utilité de tout cela, si on n'améliore pas la vie des gens au bout du compte.
Un illustre inconnu a déjà dit que les mots les plus dangereux de la langue française sont « Bonjour, je suis fonctionnaire et je viens vous aider. » Quand j'entends cette citation, je pense très souvent au ministère des Affaires indiennes.
Cela dit, j'en viens à mes questions. Les objectifs de cette entente en matière de développement économique — et je n'en connais pas tous les détails ni les directives — me semblent caractéristiques d'une planification économique centralisée. À coup de règlements et de mandats, les gouvernements essaient de commander des résultats et, si on exclut quelques éléments gauchistes partout dans le monde, la plupart des écoles d'économie renommées ont complètement rejeté cette stratégie économique. C'est une stratégie qui n'a abouti qu'à des échecs, et d'après les résultats obtenus au chapitre de l'amélioration du niveau de vie des premières nations touchées par cette entente, nous sommes témoins d'un autre échec.
Quel but vise-t-on? Instaurer un processus de planification centrale pour améliorer le sort des personnes touchées? Monsieur Wernick, quel est votre avis à ce sujet?
:
Merci pour la question.
Pas du tout. C'est tout le contraire. Si on négocie des règlements de revendications territoriales, c'est pour donner aux communautés les outils pour se prendre en main, pour qu'elles puissent être maîtresses de leur destin, profiter des débouchés économiques, y participer et lancer leurs propres entreprises. Si vous faisiez la connaissance d'Inuvialuit, vous seriez à même de constater qu'il s'agit des Autochtones qui ont le plus le sens des affaires et l'esprit d'entreprise. Ils sont propriétaires de leurs entreprises dont le chiffre d'affaires peut atteindre des millions de dollars. Voilà pourquoi nous tâchons activement de régler les revendications, car les terres, l'argent et le fait de se gouverner elles-mêmes améliorent de beaucoup la possibilité pour ces collectivités d'être autosuffisantes.
Nous allons nous pencher sur la qualité de vie de ces collectivités. Des questions de méthodologie se posent. Il s'agit d'évaluer le niveau de vie: par rapport à qui et à quoi faut-il l'évaluer, car il y a d'autres peuples dans les Territoires du Nord-Ouest qui sont très prospères grâce aux diamants. Comme je l'ai dit tout à l'heure on n'avait jamais vu le baril de pétrole à 100 $ et je crois que vous devez me faire confiance quand je vous dis que la vie des Inuvialuit s'est grandement améliorée. Il est difficile de la comparer à celle d'autres premières nations et d'autres peuples des Territoires du Nord-Ouest, mais les Inuvialuit ont accès, grâce à la convention, à toutes sortes d'instruments d'autonomie et peuvent profiter des possibilités qu'offre le Nord en ce moment.
:
Je vous remercie monsieur le président.
J'aurais quelques brefs commentaires à faire. J'aimerais entre autres apporter un éclaircissement. M. Lake a posé une question en ce qui concerne le processus de vérification. Je tiens simplement à ce que les députés comprennent que nous suivons un processus très rigoureux dans le cadre de toutes nos vérifications du rendement, et ce n'est pas uniquement les recommandations que nous devons faire approuver dans le ministère mais tous les faits contenus dans le rapport. Je tenais simplement à apporter cette précision.
M. Wernick a fait valoir un argument intéressant tout au long de son témoignage, à savoir que le ministère semble à l'heure actuelle essayer de développer les outils dont les hauts fonctionnaires ont besoin pour pouvoir mettre en oeuvre correctement tous les aspects de la convention.
Je pense que nous pouvons tous convenir que les choses se seraient mieux passées si ces outils avaient existé il y a 23 ans, et je pense que si nous voulons tirer des leçons de cette expérience, c'est peut-être qu'au moment où nous concluons ces accords, nous devons nous assurer que les responsables disposent des outils dont ils ont besoin. Je pense qu'on en a parlé aujourd'hui — la nécessité d'avoir des outils d'évaluation, des mesures, d'octroi de contrats, et des renseignements de base sur certains aspects du développement économique.
En enfin, monsieur le président, M. Wernick a parlé de son plan d'action. Le bureau de la vérificatrice générale se fera un plaisir de recevoir ce plan et de le commenter dans la mesure où il donne suite aux recommandations que nous avons formulées.
Je vous remercie.
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Je vous remercie, monsieur Campbell.
Je vous remercie, monsieur Wernick.
J'aimerais remercier les autres témoins. Nous allons rédiger un rapport et le déposer à la Chambre des communes en temps voulu.
Le comité a un certain nombre d'autres motions dont nous allons nous occuper maintenant, donc vous pouvez partir si vous le souhaitez. Et une fois de plus je tiens à vous remercier d'avoir comparu devant nous aujourd'hui.
Chers collègues, nous avons deux motions. Je propose que nous procédions de la même façon dans les deux cas. La première motion provient de M. Poilievre. C'est en fait une motion très simple: Que le comité organise une séance avec Ralph Goodale et Don Boudria dans le cadre de son étude du chapitre 7 du rapport de mai 2006 de la vérificatrice générale.
Je vais accorder à M. Poilievre deux minutes pour qu'il parle de sa motion. J'entendrai jusqu'à six interventions d'une minute chacune puis je céderai à nouveau la parole à M. Poilievre qui nous fera ses dernières observations, après quoi je mettrai la motion aux voix.
Je propose que l'on traite de la motion de M. Wrzesnewskyj de la même façon.
Je tiens à signaler, monsieur Poilievre, que nous avons simplement éliminé le nom de Jean-Marc Bard, et je suis sûr que vous n'y aurez pas d'objection. Il fait l'objet d'une motion précédente. Cette motion a été adoptée. On lui a envoyé une assignation à témoigner et il devrait comparaître en avril. Donc cette question est réglée.
La motion traite donc de M. Goodale et de M. Boudria.
Est-ce que cela vous va, monsieur Poilievre?
:
Je vais simplement vous parler de la raison pour laquelle je tiens à inviter les trois témoins proposés dans la motion. Il est tout à fait logique d'inviter Jean-Marc Bard. Il était le chef de Cabinet. Comme la motion a été adoptée, je ne m'étendrai pas sur le sujet.
Deuxièmement, nous avons M. Boudria, et troisièmement, M. Goodale.
Il se trouve que le premier ministre impliqué dans cette affaire dit que toutes les erreurs ont été commises après son mandat. Le troisième ministre qui était impliqué dans cette affaire a dit que toutes les erreurs ont été commises avant son mandat. Donc cela laisse le type qui se trouvait entre les deux mandats, c'est-à-dire bien entendu M. Boudria.
[Français]
M. Laforest m'a mentionné qu'il voulait entendre M. Boudria à cet égard. C'est la raison pour laquelle j'ai ajouté son nom.
[Traduction]
Et enfin, en ce qui concerne M. Goodale, j'ai toujours des questions à lui poser que je n'ai pas pu lui poser à la dernière série d'audiences. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de prévoir beaucoup de temps pour sa comparution. Mais tous ceux qui ont écouté attentivement ce qu'il a dit conviendront qu'il a fait des déclarations assez spectaculaires lorsqu'il a dit que la vérificatrice générale ne disposait pas de l'information nécessaire pour faire son étude. Il n'existe absolument aucune preuve à l'appui d'une telle opinion dans la documentation que nous avons reçue, ni dans le témoignage de Mme Fraser ou de ses collaborateurs. En fait, l'un de ses collaborateurs a dit exactement le contraire.
Donc, une question que j'aurais aimé lui poser si j'en avais eu le temps, c'est quelles sont les preuves dont il dispose pour laisser entendre que le Bureau du vérificateur général ne disposait pas de l'information voulue pour tirer ses conclusions. C'est une question à laquelle de toute évidence on n'a pas répondu.
Nous n'avons pas souvent l'occasion d'entendre des témoins qui mettent en doute le travail de la vérificatrice générale. Nous en avons maintenant un, et je pense que cela soulève toute une série d'autres questions qu'il faut poser. Et enfin, cela ne peut pas nuire. S'il revient, il n'aura peut-être pas beaucoup plus d'information à fournir, mais nous parlons d'environ une heure de son temps, et je pense qu'à tout le moins, cela sera utile.
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Merci, monsieur le président.
Sur une note personnelle, je n'ai jamais été en faveur d'inviter des ministres, car ils ont tendance à changer la dynamique du comité.
Laissons cela de côté, car c'est un point de vue personnel, et c'est une politique de longue date du comité des comptes publics. M. Goodale a déjà comparu devant notre comité pendant une heure. Il a réitéré ce que Janice Cochrane avait dit, que malgré ce que nous pensons, le gouvernement considère qu'il s'agit là de deux questions distinctes.
Il y avait un contrat avec Place Bonaventure et un autre avec Place Victoria. Personne ne va admettre que c'était le même contrat, parce qu'en coupant les cheveux en quatre on a divisé l'affaire exactement en deux et traité ces contrats comme étant deux contrats différents. Lorsqu'on utilise cette philosophie, il n'y a rien. On ne peut ébranler cette logique même si je suis en désaccord total avec cela.
Oui, on peut répondre à quelques questions de plus, mais si je pense à ce que nous venons juste de faire ici aujourd'hui, je pourrais critiquer sévèrement pendant une semaine ce que le gouvernement n'a pas fait au cours des 25 dernières années en ce qui concerne les affaires indiennes et cette première nation du territoire du Yukon.
Nous devons nous pencher sur d'autres questions. Je pense que nous devrions songer à rédiger un rapport pour dénoncer ce qui s'est produit à la Place Victoria et ce qui en a découlé, et dire que nous ne voulons pas que cela se répète. Je ne suis pas certain cependant si ce serait utiliser notre temps à bon escient que d'inviter M. Goodale et Don Boudria. Jean-Marc Bard — je n'ai pas d'objection à ce qu'on le traite sans ménagement, nous l'avons déjà fait auparavant, il le mérite et on a besoin de le faire encore une fois. Mais j'hésite à inviter les ministres.
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Merci, monsieur le président.
Je suis à l'aise avec M. Boudria, seulement parce que je pense que c'est tout à fait logique. Nous avons entendu des ministres des deux côtés. Et c'était justement à ce moment-là qu'il était ministre, donc ce serait tout à fait logique. Je ne suis pas convaincu qu'il soit nécessaire de réinviter M. Goodale. Je sais que ce n'est pas extrêmement important pour nous, mais cela a un impact. Nous ne devrions pas faire les choses à moitié.
Je comprends que M. Poilievre veuille aller au fond de la question, mais il s'agit tout simplement de déterminer si c'était une perte de 4,6 millions de dollars ou de 2,1 millions de dollars, et à ce moment-ci, ça ne m'intéresse absolument pas de savoir si c'est l'un ou l'autre. Dans les deux cas, c'est inacceptable.
Si nous devons réinviter quelqu'un, je réinviterais Drouin. Je me suis douté pendant longtemps qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas en ce qui concerne ces montants. Il y avait quelque chose de louche. Je commence cependant à me poser des questions. Si ce n'est pas le cas, alors la seule autre possibilité c'est que ce nouveau ministre n'aimait pas les bureaux dans lesquels il allait se retrouver à ce nouvel endroit et voulait rester là où il était, parce qu'il parle de prestige et de tout le reste. Et tous les autres se sont occupés de leur ami. Le gouvernement a été au pouvoir pendant si longtemps et qu'il s'est en quelque sorte habitué à l'idée qu'il dirigeait tout.
Donc, je le réinviterais.
Je vais voter contre la motion, mais si elle est rejetée — elle ne le sera peut-être pas — et s'il y a une autre motion pour inviter M. Boudria à comparaître, je l'appuierai.