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Je comprends tout à fait. Merci beaucoup.
Ce réacteur produit donc plus de 50 p. 100 des isotopes médicaux utilisés dans le monde, qui sont employés quotidiennement dans 25 000 procédures médicales et sont indispensable pour le diagnostic et le traitement de maladies graves comme le cancer et les maladies cardiaques. Sans ces isotopes, de nombreux patients devraient attendre pour subir un traitement essentiel. Les experts que nous avons consultés ont confirmé qu'une pénurie continue de ces substances pourrait faire la différence entre la vie et la mort pour certains patients.
La crise croissante de la santé et l'impasse dans laquelle s'est retrouvé EACL et l'organisme de réglementation de la sûreté nucléaire, la Commission canadienne de sûreté nucléaire, a obligé le gouvernement à prendre toutes les mesures raisonnables pour sortir de cette impasse.
La présidente de la CCSN en est le directeur général et à ce titre est responsable de la supervision et de la direction du travail des membres, des agents et des employés de la Commission. Ce qui est en cause, c'est l'incapacité de la présidente à gérer le travail, de façon à porter cette question à l'attention de la Commission de la manière urgente qui s'imposait, par le biais d'une audience en bonne et due forme. Cette incapacité de pleinement reconnaître au moment opportun les conséquences graves de la pénurie croissante des isotopes médicaux préoccupait sérieusement le gouvernement .
Notre examen de la soumission de la présidente, en réponse à ma lettre datée du 27 décembre, nous amène à la conclusion que la façon dont elle a exercé son mandat exécutif, et plus particulièrement son manque de leadership pendant l'arrêt prolongé du réacteur NRU de Chalk River, n'est pas à la hauteur des standards très élevés de conduite auxquels le gouvernement et le public canadien s'attendent de la part des hauts fonctionnaires responsables de la gestion exécutive des institutions chargées de protéger la santé et la sécurité de toute la population canadienne.
Le gouverneur en conseil en est donc venu à la conclusion que la présidente ne jouit plus de la confiance requise du président de la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Cependant, elle demeure membre à temps plein de la Commission.
Je vous décrirai aujourd'hui en détail le processus suivi par mes collègues et moi-même pour composer avec cette situation, processus qui s'est terminé par la décision d'adopter une loi d'urgence. Permettez-moi d'abord de vous présenter la chronologie des principaux événements.
Le dimanche 18 novembre, le réacteur NRU de Chalk River est arrêté aux fins d'un entretien de routine.
Le jeudi 22 novembre, EACL envoie un bref courriel à mon ministère ainsi qu'à un employé de mon bureau nous avisant que l'arrêt allait être prolongé. Le même jour, au cours d'une réunion de niveau opérationnel entre EACL, MDS Nordion et un fonctionnaire de Ressources naturelles Canada, on note que l'arrêt de routine pourrait se prolonger jusqu'en décembre.
Le jeudi 29 novembre, un responsable de la CCSN envoie un courriel à mon ministère et à mon cabinet attirant notre attention sur une réunion de la Commission canadienne de sûreté nucléaire prévue le 6 décembre. En annexe se trouve un rapport sur l'arrêt prolongé du réacteur NRU.
Le vendredi 30 novembre, Ressources naturelles Canada reçoit plus de détails de la part d'EACL sur les conséquences de ce qu'on décrit comme un arrêt « temporaire » sur l'approvisionnement en isotopes. De fait, dans ce courriel, EACL déclare son intention de faire redémarrer le réacteur NRU au début de décembre. Jusqu'alors, ni EACL, ni la Commission canadienne de sûreté nucléaire n'ont encore communiqué quelque sentiment d'urgence que ce soit.
Le lundi suivant, le 3 décembre, mon cabinet reçoit un breffage sur la question des permis et des conséquences possibles pour la santé et la sûreté de la population canadienne. C'est à ce moment-là que je dispose enfin de l'information. Le reste de la semaine, les fonctionnaires de RNCan et moi-même mettons toutes nos énergies à contribution afin de trouver une solution au problème.
Le mardi 4 décembre, la sous-ministre et des fonctionnaires de mon ministère organisent une conférence téléphonique avec EACL afin d'obtenir de plus amples renseignements et de mieux saisir l'ampleur du problème. On nous apprend alors que l'arrêt pourrait se prolonger jusqu'en janvier 2008.
Mon collègue, le , est aussi en train d'agir de son côté. Le mercredi 5 décembre, son ministère consulte des spécialistes de la médecine nucléaire de tous les coins du pays pour déterminer la meilleure façon de pallier la pénurie croissante d'isotopes. Il est en contact avec près de 800 établissements médicaux au pays, y compris près de 250 centres de médecine nucléaire, afin de déterminer l'ampleur et l'impact de la pénurie. Il écrit à ses homologues provinciaux et territoriaux pour les exhorter à gérer les stocks disponibles le plus efficacement possible et à identifier les secteurs ayant des besoins particuliers.
On établit aussi des contacts à l'échelle internationale pour évaluer l'impact de l'arrêt de la production sur les autres pays, et aussi pour déterminer si des stocks additionnels d'isotopes sont disponibles pour répondre aux besoins du Canada.
Selon les discussions que le gouvernement a eues avec les experts médicaux, il était évident que la pénurie d'isotopes pouvait avoir des conséquences très graves. Le docteur Chris O'Brien, président de l'Ontario Association of Nuclear Medicine, a dit que la situation lui rappelait son séjour en Ouganda, alors qu'il devait décider qui allait recevoir ou non des soins médicaux dépendamment de ce qui était en pénurie ce jour-là.
Le mercredi 5 décembre, comme la situation s'aggrave, j'appelle la présidente de la Commission canadienne de sûreté nucléaire dans le but d'inciter la Commission à examiner toutes les options possibles et à résoudre la situation au plus vite. Au cours de cette conversation téléphonique, à aucun moment la présidente ne se montre encourageante quant à la possibilité de trouver une solution à la crise grandissante dans l'immédiat. La présidente indique cependant que si EACL présente un dossier de sûreté adéquat, la CCSN l'examinera et rendra une décision.
Le vendredi 7 décembre, EACL écrit à la présidente de la CCSN pour faire valoir qu'il est dans l'intérêt public de rétablir de toute urgence l'approvisionnement en radio-isotopes médicaux et pour demander à la CCSN d'approuver la « solution à une pompe » que propose EACL dans le dossier de sûreté qu'elle a préparé.
Cette lettre dit essentiellement que selon les analyses de sûreté réalisées par EACL il est à la fois possible et prudent de remettre le réacteur NRU en service en toute sûreté et promptement. Je demande alors à mon ministère d'engager des experts indépendants pour qu'ils évaluent cette analyse de sûreté.
Le samedi 8 décembre, à la lumière de la crise sans cesse croissante dans le milieu de la santé —une réalité qui a fait la manchette de plusieurs journaux et des bulletins de nouvelles d'un bout à l'autre du pays — je communique à nouveau avec la présidente de la CCSN. Je lui demande alors si la Commission peut convoquer de toute urgence une audience ou un panel afin de débattre les mérites du dossier de sûreté d'EACL, qu'EACL me dit solide. La présidente me répond que le dossier de sûreté d'EACL présente des lacunes et qu'il faudra y ajouter beaucoup plus d'information avant qu'une audience de la Commission puisse être convoquée.
Au cours du même appel, je demande également si le réacteur serait plus sûr avec une seule pompe qu'il ne l'était avant l'arrêt. Le directeur général de la Direction de la réglementation du cycle et des installations nucléaires de la CCSN —qui participe aussi à la conversation —répond que le réacteur ne serait pas moins sûr qu'avant. Ce même responsable témoignera ensuite devant le Parlement qu'en fait le réacteur serait plus sûr avec la pompe unique qu'il ne l'était auparavant.
Le lundi 10 décembre, le ministre de la Santé et moi-même écrivons à la présidente de la CCSN et au vice-président exécutif d'EACL pour leur faire part de nos graves inquiétudes au sujet de l'impact sur la santé des Canadiens. Ce soir-là, deux spécialistes du nucléaire à qui RNCan avait demandé une évaluation indépendante des mérites du dossier de sûreté d'EACL me présentent un exposé. On m'avise qu'avec l'installation d'une des nouvelles pompes avec qualification sismique, le réacteur NRU serait plus sûr que jamais auparavant.
Le mardi 11 décembre, le gouvernement transmet une directive à la CCSN. Il intime à la Commission de tenir compte, dans ses décisions sur l'énergie nucléaire, de la santé des Canadiens qui ont un besoin vital de substances nucléaires à des fins médicales. Vous savez bien sûr que plus tard durant la journée, nous avons déposé un projet de loi d'urgence. Dès que le projet de loi a reçu la sanction royale, le réacteur NRU a été remis en marche.
Résumons donc les faits qui ressortent de cette chronologie.
Tout d'abord, les Canadiens et, de fait, les citoyens d'autres pays risquent une crise croissante de la santé due à la pénurie d'isotopes. Les experts médicaux indépendants ont demandé l'adoption de mesures urgentes.
Deuxièmement, les opérateurs du réacteur ont confirmé qu'ils étaient en mesure de faire redémarrer la production d'isotopes avec un réacteur NRU aussi sûr qu'il l'avait été au cours des 50 dernières années. De fait, EACL a affirmé pouvoir faire fonctionner le réacteur de façon encore plus sûre qu'auparavant, avec l'unique pompe d'urgence qu'on avait installée.
Troisièmement, des experts indépendants dans le domaine du nucléaire engagés par mon ministère étaient d'accord avec l'évaluation faite sur la sûreté du réacteur. Et ce n'est pas tout — même les employés de la CCSN ont confirmé dans leurs discussions avec moi et devant le Parlement que le réacteur pouvait fonctionner de façon tout aussi sûre qu'avant son arrêt.
Quatrièmement, la CCSN a bien fait comprendre au gouvernement qu'elle n'avait pas l'intention de résoudre la crise dans l'immédiat. Et ceci, en dépit du fait que le mandat conféré à la Commission est assez vaste pour lui permettre de prendre en considération la santé des Canadiens qui, pour des raisons médicales, dépendent des substances nucléaires, lorsqu'elle émet des règlements sur la production, la possession et l'usage des substances nucléaires. La décision de la CCSN de prolonger l'arrêt du réacteur NRU a été prise unilatéralement par EACL et cela, de façon tout à fait volontaire. Comme en témoignent les documents officiels, ceci contredit cependant la déclaration qu'elle a faite lors d'une audience publique le 6 décembre. La présidente avait alors affirmé que si EACL n'avait pas pris la décision d'arrêter son réacteur NRU, la Commission lui aurait ordonné de le faire.
Finalement, la présidente de la CCSN a dit qu'EACL n'avait jamais soumis un dossier de sûreté complet pour appuyer la demande de modification de son permis et que cette information était requise avant que la CCSN puisse convoquer une audience sur le sujet.
À titre d'organisme de réglementation, la CCSN n'a pas nécessairement un rôle passif. Son président directeur général peut invoquer les pouvoirs que lui confère la loi et mettre la Commission en mode proactif et lui permettre d'agir de façon rapide. Quand on est PDG et qu'une crise pointe à l'horizon, on a le devoir d'assurer que son organisation est fin prête à réagir.
Étant donné les conséquences graves pour la santé de la population canadienne, j'aurais fait preuve de négligence et j'aurais failli à mon devoir en tant que ministre de la Couronne si je n'avais pas soulevé avec la CCSN la crise grandissante dans le domaine de la santé. Les nombreux échanges que j'ai eus avec la présidente avaient tous pour but de pousser la Commission à tenir compte de toute l'information disponible afin d'évaluer adéquatement l'éventail complet des risques possibles et de demander à la Commission d'user de son pouvoir pour convoquer une réunion dans les plus brefs délais.
Monsieur le président, je veux aborder un autre sujet, soit le rapport spécial de l'examen d'EACL, produit par le Bureau du vérificateur général à tous les cinq ans. Je veux être bien clair là-dessus: il n'y avait absolument rien dans ce rapport qui laissait supposer que quiconque aurait pu recevoir un préavis ou aurait pu prévoir que le réacteur NRU serait arrêté et qu'il y aurait pénurie d'isotopes médicaux. C'est un bon rapport. L'information qu'il contient reflète les problèmes auxquels la société est confrontée depuis longtemps. Il met en évidence la négligence des quinze dernières années qui a mené au sous-financement chronique, l'empêchant de régler ces problèmes. Il fait également état de la nécessité de développer une approche forte et déterminée pour s'attaquer aux problèmes.
Monsieur le président, nous avons hérité de cette situation. Mais, je le dis avec fierté, nous avions déjà pris des mesures décisives pour la régler dès juin 2006. À ce moment-là, nous avions annoncé un financement de plus d'un demi-milliard de dollars étalés sur une période de cinq ans pour prendre en main les responsabilités nucléaires héritées à Chalk River. En juin dernier, nous avons annoncé la mise en œuvre d'une stratégie à long terme pour gérer les déchets de combustible nucléaire au Canada, tel que recommandé par la Société de gestion des déchets nucléaires du Canada.
Dans le dernier budget supplémentaire des dépenses, plus de 45 millions de dollars ont été alloués pour répondre aux exigences de la réglementation ainsi qu'aux besoins liés à la santé et à la sûreté à Chalk River. Plus récemment, nous avons entrepris un examen complet d'EACL, tel que je l'ai annoncé le 29 novembre 2007. J'en ferai connaître les résultats au cours des prochains mois. Cet événement a mis en évidence des aspects à améliorer, et notre gouvernement prend les mesures nécessaires à cet égard. Les postes vacants, tant au conseil d'administration que celui de PDG d'EACL, ont permis au gouvernement de nommer un nouveau président, de même qu'un nouveau PDG, et de combler plusieurs autres postes vacants afin d'assurer un leadership fort.
J'ai écrit à la CCSN et à EACL pour qu'on élabore un nouveau protocole afin d'assurer que le soit informé immédiatement de toute situation qui pourrait affecter la santé et la sécurité de la population canadienne. Un protocole de communication a déjà été élaboré entre RNCan, Santé Canada et EACL. Mon ministère a également amorcé des discussions avec MDS Nordion pour assurer que cette société soit aussi partie intégrante du processus.
Pour conclure, je veux souligner que les employés de la CCSN et d'EACL se lèvent chaque matin et se rendent au travail où ils font preuve de professionnalisme et de dévouement dans leur travail pour la population canadienne. Notre gouvernement apprécie leurs efforts et partage leur objectif d'améliorer la santé et le bien-être des Canadiens et des Canadiennes.C'est là le principal objectif qui a motivé les efforts du gouvernement du Canada tout au long de cet incident regrettable et qui continuera à guider nos efforts à l'avenir.
Monsieur le président, je devrais aussi ajouter que j'ai parlé de plusieurs courriels datés du 22, du 29 et du 30 novembre, et d'un certain nombre d'autres documents. Je les remettrais volontiers au comité, à titre d'information.
Il me fera maintenant plaisir de répondre à vos questions.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour, monsieur le ministre et madame Doyle.
Lorsqu'on prend connaissance du dossier et de la chronologie des événements, monsieur le ministre, on se rend compte que ce dossier est extrêmement complexe. On y trouve un bon nombre d'échanges de courriels et de rencontres entre votre ministère, Énergie atomique du Canada limitée (EACL) et la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN).
Mon premier commentaire concerne votre comportement en tant que ministre pour miner la crédibilité de la CCSN. À mon avis, si le Canada s'est doté d'une instance quasi judiciaire pour protéger les Canadiens en matière de sécurité nucléaire et qu'il en a fait une instance indépendante, c'était pour la bonne raison qu'il fallait mettre les Canadiens à l'abri de l'ingérence politique dans un tribunal ayant un mandat bien précis. D'après ce qu'on peut lire, la façon dont vous avez fait pression sur la présidente pour réactiver le réacteur peut être perçue comme une ingérence totalement inacceptable. On comprend dans quelle position déchirante vous vous trouviez, mais la commission a un mandat très précis.
Le vôtre est différent. Il est incompréhensible, alors que ce réacteur génère 50 p. 100 des isotopes médicaux du monde et qu'il en est le premier producteur, et compte tenu de tous les avertissements que vous avez reçus, qu'en tant que ministre des Ressources naturelles, vous ne vous soyez pas préoccupé de ce qui se passerait en cas de pénurie, monsieur le ministre.
Comment cela se fait-il? Comment se fait-il qu'on se soit retrouvé sans réserve suffisante pour faire face à une telle panne? Vous ne pouviez pas prévoir la panne, l'arrêt prolongé, mais en tant que ministre, votre responsabilité était de vous assurer auprès d'EACL que nous ayons une réserve pour faire face à un tel événement.
Le réacteur fonctionne depuis bien longtemps avec une seule pompe. On pouvait imaginer qu'un arrêt surviendrait un jour ou l'autre. Comment se fait-il que vous ne vous soyez pas préoccupé de procurer aux Canadiens une réserve d'isotopes? Comment se fait-il que vous n'ayez pas été au courant? Comment se fait-il que le ait été averti si tardivement dans cette affaire?
Je vous demanderai d'être bref, afin de me laisser le temps de poser d'autres questions, monsieur le ministre.
Tout d'abord, j'aimerais répondre à plusieurs questions que vous avez soulevées.
En ce qui concerne l'indépendance de la Commission canadienne de sûreté nucléaire, je suis tout à fait d'accord avec votre évaluation.
Dans mon intervention auprès de la Commission et mes échanges avec elle, je me suis efforcé en tout temps d'avoir une conduite irréprochable, et j'ai poussé la présidente de la Commission à porter la question à l'attention de la Commission en vue d'une décision, ce qu'elle avait le pouvoir de faire.
Il y avait urgence, nous ne pouvons pas le nier, et les événements se sont précipités le 3 décembre, une fois que cette urgence a commencé à avoir des effets concrets.
La députée m'a demandé pourquoi nous n'avons rien fait pour nous assurer d'avoir une réserve ou des stocks suffisants d'isotopes. Il est important de souligner que la durée de vie d'un radio-isotope n'est que de 66 heures. C'est très court.
Évidemment, le déroulement des événements nous a forcés, littéralement, à agir. Quand il m'est apparu clairement, et au gouvernement — selon les conclusions des experts de la Commission canadienne de sûreté nucléaire, d'EACL et d'experts indépendants — que le réacteur pourrait être exploité d'une manière plus sûre que jamais, alors oui, les événements se sont précipités et ont abouti à une loi du Parlement, à laquelle tous les partis ont donné leur accord.
J'aimerais seulement, pour terminer, monsieur le président, préciser que selon nous, la présidente de la Commission canadienne de sûreté nucléaire ne s'est pas acquittée de ses responsabilités, de ses pouvoirs exécutifs en sa qualité de présidente et de directrice générale tout au long de ces événements.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, merci d'être avec nous ce matin.
J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt et d'attention tout ce que vous avez dit, et je dois vous avouer que c'est toute une histoire. Ce que vous êtes venu présenter ce matin est en fait toute une histoire.
Monsieur le ministre, permettez-moi de rappeler quelque chose qu'a dit la vérificatrice générale, Sheila Fraser, il y a quelques jours, au sujet de cette situation. Elle a dit trouver cette situation très fâcheuse. Selon elle, Mme Keen joue un rôle très important en tant que responsable indépendante de la réglementation. Elle pense, comme tout le monde au Bureau du vérificateur général, que Mme Keen tient à préserver l'indépendance de son organisation et sa capacité de prendre ce type de décision. La vérificatrice trouvait très fâcheux que les discussions sur les décisions aient pris une tournure personnelle.
Monsieur le ministre, voyons donc ce qui s'est passé sur la scène depuis deux ans: Linda Keen; Marc Mayrand s'est fait reprocher cette affaire du voile à cause de cette loi navrante qu'a proposée votre gouvernement; Bill Corbett est en procès à cause de vos manoeuvre; Johanne Gélinas a été renvoyée de son poste de commissaire à l'environnement; Jean-Pierre Kingsley, l'ancien directeur d'Élections Canada, a été poussé vers la porte de sortie par votre gouvernement; John Reid, encore loin de ne plus rien avoir à offrir, a quitté son poste de commissaire à l'information; et Graham Fraser, le commissaire aux langues officielles, s'est fait couper l'herbe sous le pied avec l'embauche de Bernard Lord pour faire le travail de M. Fraser — tout cela dans le contexte de l'affirmation du premier ministre Harper qui avait dit, avant les dernières élections, que la population du Canada n'avait rien à craindre, parce que le gouvernement serait tenu sur ses gardes par les titulaires libéraux de postes de haut niveau dans la fonction publique et au sein des tribunaux indépendants et quasi judiciaires.
Eh bien, monsieur le ministre, je suppose que la question qu'il convient de poser maintenant, c'est est-ce que les Canadiens devraient craindre, vraiment craindre, les intentions réelles du gouvernement maintenant qu'il agit d'une manière qui rappelle, selon moi, certaines situations survenues dans les années 1940 et 1950 au Sénat américain?
Ce qu'il y a de particulièrement monumental dans tout cela, monsieur le ministre, c'est que ce sont des gens qui dirigent des commissions, des comités, des tribunaux quasi judiciaires — pour la plupart des acteurs indépendants qui sont spécifiquement chargés par des lois habilitantes de faire leur travail. Ces temps-ci, monsieur le ministre, on dirait que quiconque essaie de faire son travail en ces lieux perd sa place. Nous n'avons jamais eu affaire, ici, à ce genre de tactiques républicaines. C'est du nouveau pour les Canadiens.
Alors permettez-moi de vous demander ce qui suit. J'ai peut-être une autre théorie; peut-être que ce que vous cherchez à faire ici, aujourd'hui, c'est de racheter Stephen Harper pour les observations excessives qu'il a faites sur le parquet de la Chambre des communes en prétendant que Linda Keen était une espèce de politicarde à la solde du Parti libéral du Canada; peut-être ces observations excessives ont-elles été une erreur. Et maintenant vous, moins de 24 heures après que nous ayons accueilli vos collègues ici, vous renvoyez Linda Keen de son poste au milieu de la nuit, derrière le dos des Canadiens, alors qu'hier seulement votre secrétaire parlementaire était ici, devant ce comité, à affirmer votre droit de réfutation, votre droit de répondre à Linda Keen, parce que vous n'aviez pas confiance en ce qu'elle allait dire.
Mais quel genre de conduite est-ce, monsieur le ministre? Quel genre de gouvernement représentez-vous si vous ne faites qu'exécuter les ordres d'un premier ministre en fabricant une histoire au sujet de préoccupations pour la santé?
Monsieur le ministre, j'ai des questions à vous poser.
Pouvez-vous nous dire exactement quels aspects de son devoir Mme Keen a omis de remplir? Dites-nous exactement où elle a enfreint ses obligations, telles que décrites par la loi habilitante en sa qualité de responsable de la réglementation de la sûreté nucléaire. Dites-nous exactement en quoi, selon vous, la santé et la sécurité des Canadiens fait partie du mandat décrit dans cette loi habilitante.
Ensuite dites-nous aussi, je vous prie, quel article de la loi dit qu'il revient à la Commission de s'assurer que MDS Nordion puisse honorer ses contrats de ventes? Pouvez-vous nous dire où est stipulée l'obligation juridique internationale du Canada de fournir des isotopes médicaux aux États-Unis et à d'autres pays?
Allez donc; le regard des Canadiens est rivé sur vous. Ils entendent votre histoire, et ils ne vous croient pas. Ils ne croient pas votre gouvernement. Et nous pensons que vous essayez de protéger le premier ministre Stephen Harper contre les fâcheuses observations excessives, mais néanmoins révélatrices, qu'il a faites au sujet du haut dirigeant de l'organe de réglementation du gouvernement du Canada.
[Français]
Dites-nous clairement, monsieur le ministre, de quelle façon exactement Mme Keen n'a pas fait ses travaux. Dites-nous comment, à titre de « régulatrice », elle n'est pas en mesure de continuer à assumer son rôle au sein du gouvernement du Canada.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur le ministre, il est clair que vous vous efforcez vraiment de protéger la haute direction d'EACL, parce qu'elle relève de vous et que vous savez que vous en êtes ultimement responsable.
Plus vous insistez sur l'urgence de la production des radio-isotopes à des fins médicales, plus vous mettez clairement en évidence votre incompétence, puisque vous ignorez ce qui est arrivé au cours des 18 derniers mois. Vous avez de plus admis que le réacteur NRU répondait à la moitié de la demande des marchés internationaux et intérieurs. Vous auriez dû le savoir. Cela relevait de votre compétence ministérielle.
Voilà que nous avons maintenant le rapport du vérificateur général. Dans la lettre d'accompagnement, on peut lire :
... nous sommes d'avis que ce rapport contient des renseignements qui doivent être portés à l'attention du ministre des Ressources naturelles.
Monsieur le ministre, vous avez déclaré, le 22 novembre, devant notre comité, et je cite :
Le réacteur NRU y produit des isotopes à usage médical. Il semblerait que, dans ces laboratoires, on ait, pendant un temps, quelque peu négligé certains aspects des consignes intéressant la santé et la sécurité. Ces laboratoires ont besoin de crédits supplémentaires afin d'assurer le respect de la réglementation en vigueur et, en tant que gouvernement, nous sommes tenus de leur fournir les moyens de le faire.
M. Burns, qui a été nommé par vous et qui est un ancien collecteur de fonds de l'Alliance, affirme vous avoir breffé sur cette question le 22 novembre. Il déclare qu'il a aussi remis sa démission le 29 novembre parce qu'il était frustré par votre inaction. Nous savons aussi que vous avez laissé l'EACL sans premier dirigeant pendant au moins un an.
Vous avez eu amplement l'occasion, monsieur le ministre, d'agir au cours des 18 derniers mois pour prévenir le problème. L'ignorance que vous plaidez n'est pas une excuse. Vous auriez dû le savoir, monsieur le ministre; cela relevait de votre compétence ministérielle. C'est encore pire si vous le saviez et n'avez rien fait parce qu'alors, c'est de la négligence.
Monsieur le ministre, comment pouvez-vous l'expliquer, sachant à quel point la production d'isotopes est une question grave? Comment pouvez-vous prétendre que vous ne saviez rien jusqu'au 4 novembre, même si vous avez eu amplement l'occasion d'agir à ce sujet? Nous avons beaucoup de preuves selon lesquelles vous étiez au courant de la situation ou en aviez été informé.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Avec votre permission, j'aimerais réfuter plusieurs affirmations complètement fausses qui ont été faites.
Tout d'abord, je n'ai pas eu de breffage le 22 novembre, du tout. En fait, le ministère a reçu un bref courriel — de quatre lignes seulement — l'informant que l'arrêt programmé pour les travaux de maintenance se prolongerait, jusqu'en décembre peut-être.
Quant à l'absence d'un premier dirigeant, ce n'est pas vrai, monsieur le président. En fait, le premier dirigeant avait pris sa retraite et, entre-temps, jusqu'à la nomination d'un remplaçant, quelqu'un assumait la direction par intérim.
Monsieur le président, en ce qui concerne la retraite de M. Burns, il s'est comporté de manière compétente. En fait, il m'a communiqué ses intentions, je crois, au début novembre — le fait qu'il souhaitait prendre sa retraite. À nouveau, il n'y avait aucun rapport.
Pour ce qui est du rapport du vérificateur général qui identifie... et comme le révèle mon témoignage devant le comité, il est tout à fait vrai qu'il existe des problèmes à Chalk River, des préoccupations sur le plan de la santé, de la sécurité et de la réglementation, et ils sont connus depuis quelque temps déjà. C'est pourquoi nous avons plus que doublé les crédits affectés à l'EACL pour les laboratoires de Chalk River afin de pouvoir régler ces problèmes, qui ont été négligés pendant littéralement plus d'une décennie. Nous sommes en train de mettre les fonds en place pour faire ce qu'il y a à faire.
Je tiens à souligner que jamais, au grand jamais, ces problèmes ont concerné le réacteur NRU ou une pénurie de fonds. Rien de tout cela n'est relié.
Je peux comprendre que le député, pour ses propres raisons, tente d'établir des liens, mais ils sont tout simplement inexistants.