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Monsieur le Président, j’interviens de nouveau dans le débat sur le projet de loi .
Dans mon intervention précédente, il y a environ un mois, j’ai pris le temps de décrire tous les amendements que nous avions proposés. Ce que nous craignons, ce sont les conséquences pour la capacité des gens d’obtenir une indemnisation en cas d’accident nucléaire. Une grande partie du projet de loi favorise l’industrie nucléaire plutôt que ceux qui voudraient tenter d’en obtenir une indemnisation en cas d’accident ou d’incident dans une centrale nucléaire.
Au Canada, l’industrie nucléaire a le vent dans les voiles. Dans deux provinces de l’Ouest, on envisage de construire des réacteurs nucléaires. Le mouvement en faveur de l’énergie nucléaire semble prendre de la vigueur, mais aucun des enjeux fondamentaux qui se rapportent aux préoccupations des Canadiens au sujet de l’expansion de cette industrie n’ont été pris en compte. Il n’y a toujours aucun plan d’élimination des déchets. Les rôles du gouvernement et de l’industrie, dans le secteur nucléaire, n’ont toujours pas été tirés au clair. Nous n’avons toujours pas établi si l’industrie nucléaire était rentable au Canada. Nous avons constamment subventionné le développement de l’énergie nucléaire. Et pourtant, le projet de loi n’assure pas une protection suffisante relativement à la responsabilité en cas d’accident nucléaire.
Une limite de responsabilité de 650 millions de dollars est le minimum, si le Canada veut respecter les accords internationaux. Nous avons dit et répété que ce n’était pas suffisant. Les États-Unis, qui sont notre partenaire commercial le plus proche, ont fixé la limite bien au-dessus de 650 millions de dollars pour chacune des centrales américaines.
Le gouvernement conservateur insiste pour faire adopter un projet de loi qui fait le travail à moitié. Nous l’avons fait remarquer tant et plus. Aussi bien au comité qu’à la Chambre, nous avons tenté de collaborer avec le gouvernement pour apporter des amendements. Le gouvernement a refusé. Même attitude de la part de l’opposition officielle. Les libéraux ne se sont pas montrés très responsables.
L’hon. John Baird: Parlez du libéral. Il n’y en a qu’un ici.
M. Dennis Bevington: Monsieur le Président, je ne peux rien dire de la présence ou de l’absence de députés aux Communes. C’est contre nos traditions J’espère que les autres députés ne m’encourageront pas à déroger à ces traditions.
Le Bloc appuie lui aussi le projet de loi, qui est une timide tentative d’établissement d’une limite de responsabilité suffisante. On essaie dans le projet de loi de donner aux entreprises de nombreuses échappatoires qui leur permettront de se défiler au cas où il faudrait verser une indemnisation. Il est difficile pour les particuliers d’obtenir le type d’indemnisation qui serait nécessaire en cas d’accident nucléaire.
Il est tout bonnement inacceptable de limiter à trois ans ou à dix ans la période pendant laquelle les gens peuvent s’attendre à ressentir les effets d'un accident nucléaire. Nous savons déjà que, 30 ou 40 ans après le fait, des gens éprouvent des problèmes de santé à cause d’un accident nucléaire. Des gens signalent des cas où des matières nucléaires ont été transportées d’un endroit à un autre et se sont retrouvées dans des logements ou ont parfois servi de matériau de remblayage. Ces incidents finissent par avoir des conséquences dans la vie des gens.
En fixant des délais aussi courts dans le projet de loi , on risque de permettre à des entreprises d'éviter d'être tenues responsables. Évidemment, c'est bon pour les entreprises et pour rassurer l'industrie, mais ce n'est pas bon pour les Canadiens. En tant que député ayant été élu par des Canadiens, et non par des entreprises, j'ai le devoir de faire la lumière sur ce projet de loi et ses conséquences pour les Canadiens. Ce fut très frustrant d'essayer d'apporter des amendements très élémentaires à ce projet de loi depuis un an et demi. C'est difficile.
Avec l'incident de Chalk River en décembre, on a pu constater combien il était important de pouvoir compter sur un organisme solidement outillé pour assurer la sûreté nucléaire. On a pu voir qu'il est nécessaire de veiller à ce que les Canadiens soient bien protégés, de même que les investissements. Il faut voir à ce que le pays prenne une saine orientation en matière d'énergie nucléaire.
Les raisons sont nombreuses pour ne pas appuyer ce projet de loi. La Chambre va continuer d'en débattre aujourd'hui et peut-être demain. Si le débat ne se termine pas avant la pause estivale, le projet de loi demeurera à l'étude pendant quelques mois encore. Les Canadiens auront peut-être alors l'occasion de prendre la parole et d'influencer le gouvernement.
Si les conservateurs ont comme intention de brader l'industrie nucléaire canadienne et si ce projet de loi vise simplement à permettre l'achat d'Énergie atomique du Canada par des entreprises étrangères, c'est la question dont il faudrait discuter avant tout. Les Canadiens devraient connaître le pourquoi véritable des mesures qui sont débattues au Parlement. Malheureusement, ce n'est pas le cas actuellement. Le gouvernement cherche à faire adopter ce projet de loi en prétextant d'autres motifs.
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Monsieur le Président, le projet de loi , le soi-disant projet de loi sur la responsabilité en matière nucléaire, est manifestement mal nommé. Cette mesure est censée assurer une certaine sécurité aux individus, aux sociétés et aux collectivités touchés en cas d’accident dans une centrale nucléaire et prévoit une indemnisation pour les dommages et la contamination qui s’ensuivraient inévitablement. Ce sont les arguments invoqués pour vendre ce projet de loi. Or, la réalité est tout autre.
Le projet de loi n’a rien à voir avec la protection des familles de travailleurs, de leurs quartiers ou de leurs collectivités. Il vise simplement à aider des intérêts privés à construire des centrales nucléaires. En fait, le gouvernement actuel, comme son prédécesseur, veut privatiser l’industrie nucléaire au Canada et se défaire des installations actuelles de diverses façons. Essentiellement, il s'agit de transférer tout le contrôle au secteur privé. Toute nouvelle installation serait ainsi la propriété du secteur privé, qui se chargerait de l’exploitation.
Mais il y a une ombre au tableau. La réalité est que le gouvernement est incapable d’obtenir du financement du secteur privé pour construire de nouvelles centrales ou rénover les centrales existantes afin qu’elles répondent aux normes opérationnelles, à cause de l’énorme risque financier auquel seraient exposés les prêteurs si jamais il y avait ne serait-ce qu’une petite fuite de matières radioactives.
Il est très clair que ce projet de loi ne vise qu’à protéger les intérêts du secteur privé dans l’industrie nucléaire et de ceux qui la financeraient. Il faudrait être totalement ignorant ou malhonnête pour laisser entendre autre chose.
Il y a quelques années, j’ai fait partie pendant quelque temps du comité permanent qui a étudié le projet de loi sur création d'une société de gestion des déchets nucléaires, un organisme gouvernemental qui aurait été responsable de la gestion de sites potentiels de stockage de déchets radioactifs. Au cours des audiences, qui avaient été passablement longues, des témoins ont parlé des conséquences de la contamination par des centrales nucléaires.
Il avait notamment été question, et je ne l'ai jamais oublié, d'une petite centrale nucléaire, une de celles qui avaient été construites au début des années 1950 aux États-Unis, qui n’était pas exploitée adéquatement. De petites fuites persistantes avaient contaminé tout le site, soit une vingtaine d’acres. Finalement, la centrale a été fermée.
Dans les années 1990, la centrale étant demeurée inexploitée depuis un certain temps, les tribunaux américains en ont ordonné la décontamination. Entre temps, l’exploitant privé avait fait faillite et n’était plus impliqué, de sorte que le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'État ont dû assumer les frais de la décontamination. À l’époque, aucune assurance- responsabilité ne pouvait être contractée pour les centrales nucléaires.
Lorsque la centrale a été construite, les propriétaires n’ont pas eu à établir un fonds pour affronter les conséquences d’une fuite et, une fois la centrale fermée, plus personne n’avait l’obligation de s’occuper du nettoyage. Il n’y avait pas d’argent. Par conséquent, le gouvernement fédéral et le gouvernement de l’État ont dû assumer les frais.
Ils se sont débarrassés de tout le bâtiment, qui était évidemment contaminé, mais il fallait aussi nettoyer le site et le sol. Pour le faire, il a fallu creuser jusqu’à une profondeur d’une vingtaine de pieds, puis transporter les déblais par camion pour les brûler dans un incinérateur. La terre qui restait, qui était encore radioactive, a ensuite été enfouie sur le site d’une autre centrale nucléaire. Le prix de cette opération, qui s’est déroulée au début des années 1990, s’est élevé à 13 milliards de dollars, uniquement pour le traitement de la terre parce qu’ils n’ont pas eu à s’occuper des bâtiments.
Examinons un peu la situation qui découlerait d’une catastrophe comme celle de Tchernobyl. En fait, nous n’avons vraiment pas à aller aussi loin.
Je voudrais dire, en passant, que chaque fois que je pense à Tchernobyl, je me souviens d’une réunion de la Fédération d’agriculture du comté d’Essex à laquelle j’ai assisté l’automne dernier. Il était d’usage, à ces réunions, d’entendre des exposés de groupes extérieurs sur toutes sortes de sujets. Nous avons entendu beaucoup d’histoires intéressantes au fil des ans, mais, l’année dernière, une famille de la région de Chatham est venue nous parler de ce qu’elle avait fait pour aider les enfants de Tchernobyl.
Lors de cet incident, les autorités avaient immédiatement évacué la région dans un rayon de 40 ou 50 kilomètres, je crois, surtout dans la direction des vents dominants. Je note que le vient de faire un commentaire au sujet de l’extinction des lumières en Saskatchewan. Je suis sûr qu’il est tout à fait capable de travailler dans l’obscurité, car je pense que c’est toujours ainsi qu’il le fait.
Pour revenir à Tchernobyl, l’évacuation s’était fondée sur les conditions climatiques locales et, en particulier, sur la direction des vents dominants. Elle s’était donc étendue assez loin dans cette direction.
Après quelques années, même si tout le site, qui s'étendait sur des milliers et des milliers d’acres, restait contaminé, des familles ont commencé à rentrer chez elles, peut-être par désespoir, et ont repris l’exploitation de leurs terres, produisant des récoltes qui demeuraient radioactives.
C’est ainsi que cette famille de Chatham et un autre groupe ont été sollicités : on leur a dit que s’ils pouvaient accueillir des enfants de cette région, ne serait-ce que pour une courte période, les enfants auraient considérablement moins de chances de développer un cancer par suite de leur exposition à la radioactivité. Un programme international a donc été organisé au Canada, auquel cette famille participe. Le programme permet d’envoyer des enfants du primaire et du secondaire passer quelque temps dans d’autres pays.
L’Irlande participe beaucoup à ce programme, de même que les États-Unis et le Canada. Nous prenons des élèves de cette région contaminée pendant leurs vacances d’été. D’après les experts, s’ils peuvent rester au Canada ou dans une autre région sûre pendant six ou sept semaines, ils sont beaucoup moins susceptibles de développer un cancer, du moins lorsqu’ils sont jeunes, même s’ils continuent d’être exposés à la radioactivité pendant le reste de l’année.
Quand je pense à cette histoire, je songe également à ceux qui paient la note. Ce n'est pas l'industrie nucléaire parce qu'elle n'a pas de responsabilité. Le gouvernement soviétique n'avait pas établi de régime de responsabilité. Quant aux actuels gouvernements de la Russie ou de l'Ukraine ils n'ont pas les ressources nécessaires, surtout l'Ukraine. Ce projet est entièrement financé par cette organisation sans but lucratif. En fait, le groupe était présent ce soir-là pour demander du soutien financier. J'ai trouvé intéressant de voir la réaction émotive des gens présents et je signale qu'un montant d'argent substantiel a été recueilli.
Transposons la situation chez nous et supposons qu'il se produit au Canada une fuite importante de matières radioactives. Que ce soit à la centrale nucléaire de Bruce ou à une de celles qui sont situées en bordure du lac Ontario, dans la région entre Toronto et Oshawa, s'il n'y avait pas d'argent pour s'occuper de la zone autour de Chernobyl et qu'il n'y en a toujours pas, imaginez un peu la situation si ce genre de désastre survenait en Ontario? Que ferait-on avec 650 millions de dollars?
C'est la limite absolue proposée dans le projet de la loi. Ce montant aurait été bien insuffisant dans le cas de la centrale, aux États-Unis, où les frais avaient atteint 13 milliards de dollars dans les années 1990, ce qui représenterait probablement 20 milliards de dollars aujourd'hui. Ni les familles, ni les adultes et ni les enfants touchés ne seraient aidés parce que les 650 millions de dollars se seraient envolés en un clin d'oeil.
Pensez un peu aux conséquences. Nous avons des centrales nucléaires situées en bordure même des lacs Ontario et Huron. N'importe quelle fuite importante affecterait considérablement les Grands Lacs jusqu'au Saint-Laurent. Nous savons que la contamination, les radiations, ont une durée de vie qui dépasse la capacité de prévision des scientifiques à l'heure actuelle.
Les scientifiques parlent de demi-vie. En réalité, même si la naissance de l'industrie nucléaire remonte à six ou sept décennies, les scientifiques disent qu'on ne sait pas encore combien de temps durera la contamination. Certaines estimations parlent de 1 000 à 10 000 ans, mais n'importe quel scientifique de l'énergie nucléaire qui possède une expérience substantielle dira qu'on ne le sait tout simplement pas et que ces chiffres correspondent à des niveaux minimaux de durée de contamination.
Encore une fois, pensons aux centrales nucléaires de Bruce et du lac Huron. Je connais assez bien cette région. J'y ai de la parenté et j'ai passé mes vacances d'été dans la région de Kincardine, Port Elgin et South Hampton. Pensons à ce qu'on peut faire et, ce qui est plus important encore, à ce qu'on ne peut pas faire avec 650 millions de dollars. Ce montant est loin d'être suffisant pour couvrir les dommages causés aux biens et les pertes engendrées par un accident nucléaire. Il est loin d'être suffisant pour faire face à toutes les réclamations qui seront faites notamment par des personnes qui ne seront plus en mesure de travailler, qui souffriront du cancer et qui décéderont prématurément. Qui paiera les traitements médicaux dont ces victimes auront besoin? Dans une situation comme celle-là, notre système de soins de santé pourrait même s'effondrer sous le poids. Je sais que cela peut paraître dramatique, mais c'est ce qui se passe lors d'accidents nucléaires majeurs. Ces 650 millions de dollars seront simplement insuffisants.
Ils ne suffiront pas pour la protection des citoyens, des entreprises, des collectivités, de la province, du pays. Dans ce cas, pourquoi adopter une telle mesure, sinon pour faciliter l'expansion de l'industrie nucléaire et sa privatisation?
Si le projet de loi est adopté, ce qui est fort probable car il est appuyé par le gouvernement et les partis d'opposition à l'exception du NPD, il aura pour effet de relever les niveaux de risque. Par conséquent, ces 650 millions de dollars sont d'autant plus ridicules qu'ils permettront l'expansion de l'industrie nucléaire, ce qui est impossible à l'heure actuelle.
Il ne fait aucun doute que nous avons besoin de mesures législatives dans ce domaine, mais de mesures législatives qui obligeraient l'industrie nucléaire à assumer l'entière responsabilité des conséquences d'un accident nucléaire, d'un déversement ou d'une rupture.
Si nous jetons des déchets chez nos voisins, la loi et la société veulent que nous payions pour tout nettoyer. Nous ne nous tournons pas vers le gouvernement pour qu'il nettoie. Nous ne disons pas aux voisins qu'ils doivent nettoyer parce que les déchets sont désormais sur leur propriété. Si un de leurs enfants tombe et se coupe le pied ou la main sur du verre que nous avons jeté chez eux, nous sommes responsables parce que ce sont nos actions qui ont causé l'accident. C'est ainsi que fonctionnent nos lois, traditionnellement. Cela découle de la common law et du système parlementaire en vigueur en Angleterre depuis des centaines d'années.
Selon le projet de loi, ce secteur de l'économie pourra agir en toute impunité. Si, par négligence, il rejette ses déchets sur la propriété des voisins, que ce soit le lac Ontario, le lac Huron ou le territoire de ceux qui vivent en aval, à Toronto et Oshawa, il ne sera pas contraint de payer au-delà du montant prescrit, qui est ridiculement bas.
De fait, ce projet de loi accorde à l'industrie nucléaire la permission de prendre de l'expansion. Même si nous lui imposons une certaine responsabilité, nous lui disons qu'elle n'a pas trop à s'inquiéter, car au-delà de la limite, elle n'est pas responsable. Les gouvernements, les particuliers et les entreprises vont assumer le reste de la facture, qui s'élèvera à des milliards de dollars. Voilà la réalité.
Je veux revenir sur les travaux du comité relativement à la société de gestion des déchets. Le degré de risque continue de croître parce que nos centrales continuent à augmenter leur volume de déchets. Bien entendu, si nous construisons de nouvelles centrales, tout cela va augmenter encore. À la lumière des travaux du comité et des rapports qui ont précipité ces travaux, on peut dire qu'il n'existe pas dans le monde de mécanisme de stockage sûr des déchets nucléaires.
Les États-Unis, qui, pourrait-on penser, sont le pays le plus avancé en matière de gestion des déchets nucléaires, n'ont pas encore trouvé la solution parfaite. Ils n'ont pas encore trouvé comment les gérer sans qu'il y ait de danger pour la société. Ils n'y sont pas arrivés.
Le problème, ce n'est pas simplement la période durant laquelle les matières demeurent contaminées par la radiation. C'est la nature des matières contaminées elles-même. Nous n'avons aucun moyen de les éliminer. Nous savons que nous pouvons en réduire quelque peu le volume, particulièrement en ce qui concerne les barres nucléaires. Nous avons mis au point une technologie pour les réutiliser. La réduction est très limitée, mais il y en a un peu quand même.
Tout ce que nous faisons à cet égard est insuffisant vu le volume considérable de matières contaminées produit par les centrales nucléaires qui continuent de fonctionner et de nous fournir de l'énergie.
Le risque augmente littéralement chaque jour que les centrales nucléaires continuent de fonctionner et de produire des matières radioactives. Avec cette mesure législative, nous limiterions la responsabilité, et nous pouvons donc nous attendre à ce que le risque continue d'augmenter, surtout si on construit de nouvelles centrales.
J'allais dire que dans 50 ans, mais je dirais plus certainement que dans 100 ou 200 ans, les sociétés futures examineront ce que nous avons fait depuis le début des années 1950 et se demanderont si nous étions fous.
Je leur répondrais que nous n'étions pas fous, mais simplement irresponsables. Irresponsables d'avoir choisi cette voie au départ. Irresponsables parce que nous avons vu une panacée, une solution dans l'utilisation de la technologique nucléaire pour produire de l'énergie. Irresponsables parce que nous avons maintenant et pour probablement encore quelques années des sources d'énergie qui coûtent moins cher que l'énergie nucléaire. Nous savons que si nous investissions davantage dans la recherche et le développement de sources de carburants de remplacement, nous pourrions remédier plus rapidement à la situation.
Cette mesure n'est pas la solution au problème auquel nous sommes confrontés, que ce soit la production d'énergie ou...
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Monsieur le Président, c'est un grand honneur pour moi de prendre la parole au sujet du projet de loi sur la responsabilité en matière nucléaire.
Combien coûteraient des mesures d'assainissement de l'environnement après un accident nucléaire? Il y a eu un accident nucléaire dans les années 1940 au Nouveau Mexique et une série d'accidents nucléaires dans les années 1950 en Russie, à Chalk River, en Ontario, et dans l'Illinois. S'il me reste du temps, je m'arrêterai à certains cas plus tard.
Toutefois, les accidents nucléaires qui ont le plus capté l'attention du public ont été ceux de Tchernobyl, Three Mile Island et Windscale.
Je m'intéresse beaucoup à Tchernobyl parce qu'il y a eu une forte augmentation du taux de cancer de la thyroïde chez les enfants et les familles de cette ville. Je suis bien renseignée au sujet du cancer de la thyroïde puisque j'en suis moi-même atteinte. Après avoir fait des recherches au sujet de cette maladie, j'ai remarqué que l'une des causes était l'exposition aux réacteurs nucléaires, aux déchets radioactifs et aux radiations nucléaires.
Le cancer de la thyroïde est le cancer dont l'incidence connaît la plus forte augmentation dans le monde, mis à part le cancer de la peau, bien que dans les deux cas, l'incidence augmente de 5 p. 100 par année.
Quel est le coût des mesures prises pour aider ceux qui sont atteints de cette maladie? Une fois que la glande thyroïde a été enlevée, les gens doivent prendre certains médicaments pour le reste de leur vie. Le coût des médicaments, dans un pays où il n'existe peut-être pas de régime de soins de santé ou de régime d'assurance-médicaments adéquats, pourrait être énorme. Par conséquent, il est absurde que le projet de loi limite la responsabilité d'un accident nucléaire à seulement 650 millions de dollars. Le coût est beaucoup plus élevé, pas seulement pour chaque personne, mais aussi pour réparer tous les dommages qui sont causés par un accident nucléaire.
Aux États-Unis, la responsabilité en cas d'accident nucléaire est de 10 milliards de dollars. Le montant de la responsabilité au Canada, soit 650 millions de dollars, est au bas de l'échelle selon les normes internationales. C'est bien connu, le Canada se situe bien en-dessous des normes internationales en ce qui concerne la responsabilité nucléaire et les déchets nucléaires. Les déchets nucléaires ont une durée de vie de milliers d'années. C'est une bonne idée de comparer quelque chose qui dure aussi longtemps et un élément extrêmement important de notre avenir: nos enfants.
Nous nous préoccupons d'abord et avant tout des enfants du Canada parce qu'ils représentent notre avenir. En plus de se situer au bas de l'échelle en matière de responsabilité nucléaire, avec une limite de 650 millions de dollars si le projet de loi est adopté, le Canada est un des pires pays de l'OCDE en ce qui concerne l'investissement dans un programme national de garderies.
Pour revenir à la responsabilité nucléaire, en Allemagne, il n'y a aucune limite. D'autres pays européens veulent aussi passer à la responsabilité illimitée. Pendant que le monde entier avance dans une direction, le Canada fonce comme d'habitude dans la direction opposée en établissant la responsabilité maximale à 650 millions de dollars. De plus, aucune assurance privée ne serait offerte.
Pour les villes et les régions situées près des centrales nucléaires, le message est qu'elles ne valent pas plus de 650 millions de dollars. Un accident nucléaire causerait des milliards de dollars de dégâts, de préjudices personnels et de décès. Qui paierait? Je vais répondre à cette question dans une minute, car c'est la question la plus essentielle. Si l'entreprise ne paie pas, alors qui?
C'est pour cela que les néo-démocrates, aux étapes de l'étude en comité et du rapport, ont proposé 35 amendements. Nous avons pris le Parti libéral au mot. En octobre de l'an dernier, le porte-parole des libéraux a fait la déclaration suivante:
Il s'agit donc d'un projet de loi très important et je recommanderai à mon chef et aux membres de mon parti de l'approuver. À l'étape de l'étude en comité, nous remplirons notre rôle de membres de l'opposition officielle, nous écouterons les experts et autres intervenants et nous ferons une étude détaillée de ce projet de loi.
Toutefois, comme d'habitude, les libéraux manquent à l'appel. Ils veulent nous faire croire qu'ils s'inquiètent du sort de l'industrie nucléaire, mais ils ne sont pas certains de vouloir en appuyer l'expansion. Ils disaient que le niveau de responsabilité était peut-être trop faible, qu'ils proposeraient peut-être des amendements à cet égard et qu'ils se pencheraient peut-être sur la question.
Et après tout cela, qu'ont-ils fait? Ils n'ont présenté aucun amendement. Mais devons-nous nous en étonner? Le Bloc en a présenté quelques-uns qui n'auraient pas entraîné de modifications majeures au projet de loi, mais cela n'avait pas d'importance parce que les amendements proposés par le Bloc et par le Nouveau Parti démocratique ont été rejetés. Pourquoi? Parce que les libéraux ne les ont pas appuyés, même s'ils avaient publiquement affirmé qu'ils se préoccupaient au plus haut point de la sécurité nucléaire.
Les députés se souviendront que lors de l'arrêt du réacteur à Énergique atomique du Canada limitée, les libéraux disaient que la sécurité était un élément très important. Ils disaient que nous devions investir dans la sécurité. Dans le cas d'EACL par exemple, il n'y a pas eu de nouveaux investissements au cours des 15 dernières années. Toutefois, après avoir congédié Mme Keen pour avoir soulevé la possibilité de problèmes au niveau de la sécurité, le Parti conservateur tente maintenant de vendre EACL à des intérêts privés.
Je remarque que chaque fois qu'il y a un problème, les conservateurs proposent la privatisation. Ils veulent privatiser les mesures de sécurité dans l'industrie aérienne par le projet de loi qui est à l'étude. Ce projet de loi privatiserait le volet sécurité de l'industrie aérienne et ferait en sorte que les transporteurs aériens s'autodisciplineraient. Les conservateurs nous demandent de ne pas nous inquiéter, car ils savent ce qu'ils font.
La situation est la même dans le domaine de l'immigration. Ils proposent de privatiser les opérations, de confier les contrats au bureau des visas et de laisser les sociétés privées s'occuper de ces questions.
C'est encore la même chose avec le projet de loi . En cas de problème, le gouvernement affirme que les contribuables paieront la note, mais il faudra beaucoup plus que 650 millions de dollars. Il en faudra des milliards. Et qui défraiera les coûts de la décontamination?
Qui donc va assumer le coût du nettoyage des Grands Lacs en cas de difficultés à Pickering? Qui donc va payer pour nettoyer l'environnement? Qui va payer la note pour les gens qui auront des problèmes de santé? Ce seront les contribuables et non pas l'industrie. Le gouvernement ne s'inquiète pas des contribuables. Il laissera l'industrie faire à sa guise. En réalité, cette mesure législative ouvre grande la porte à l'industrie nucléaire.
Les conservateurs veulent faire partie du Partenariat mondial pour l'énergie nucléaire et transformer le Canada en dépotoir de déchets nucléaires, à l'avantage des pays qui ne savent pas où mettre leurs déchets nucléaires. Le Canada est vaste. Peut-être que ces pays pourraient laisser une partie de leurs déchets ici puisque, après tout, en cas de problèmes, la responsabilité serait plafonnée à 650 millions de dollars. Ne nous inquiétons de rien, donc, et invitons les intéressés à profiter du Canada, même si nous savons qu'il n'existe nulle part aucune solution à long terme pour le stockage des déchets nucléaires.
Par exemple, prenons les opérations de nettoyage. Certaines d'entre elles sont coûteuses et de grande envergure. À Port Hope, il y a toute une série de problèmes de nettoyage. On peut penser également au cas des Territoires du Nord-Ouest.
Les déchets nucléaires demeurent mortels, même après des milliers d'années. Il ressort du projet de loi à l'étude que le gouvernement n'a pas à s'inquiéter au sujet des déchets puisque les contribuables vont s'en charger. Voilà qui est très malheureux. La raison en est que bon nombre de municipalités du Sud de l'Ontario s'opposent à ce genre de comportement imprudent.
Voici un exemple. Il y a 20 ans, Guelph avait déjà la réputation d'être parmi les villes les plus performantes en matière de gestion des déchets. Aujourd'hui, sous la houlette du nouveau maire, toute la ville est tournée vers l'objectif déchets zéro. Guelph veut voir une réduction importante des déchets.
Au cours du week-end dernier, une conférence a été tenue à Niagara Falls sous l'égide de la Ontario Zero Waste Coalition. Dans l'optique de la coalition, les entreprises qui produisent des déchets doivent en assumer la responsabilité. Par exemple, dans le cas d'Interface, une grande entreprise de production de tapis, tout acheteur d'un nouveau tapis peut rapporter son ancien tapis.
C'est une tendance que nous constatons: les particuliers et les entreprises doivent assumer la responsabilité de leurs produits, qu'il s'agisse de déchets ou d'emballages. C'est maintenant la tendance générale. Nous devrions en faire autant en matière de déchets nucléaires.
Dans le cas d'une installation nucléaire, nous voulons faire en sorte que la question des déchets soit réglée et que, en cas d'accident, la responsabilité ne soit pas plafonnée, ou tout au moins que la norme soit extrêmement élevée, dans les milliards de dollars, par exemple, et non pas restreinte à 650 millions de dollars comme dans le projet de loi .
C'est pourquoi je suis surprise que le Parti libéral et le Bloc ne fassent pas tout ce qui est en leur pouvoir pour bloquer ce projet de loi. En effet, celui-ci limite réellement la responsabilité civile et l’indemnisation des dommages en cas d’accident nucléaire. Nous savons qu'il y a eu une série d'accidents par le passé. Je pourrais en nommer un grand nombre. Comment peut-il être possible que, lors du dernier jour de séance de la Chambre des communes, l'opposition officielle et le Bloc ne débattent pas de cette question et restent complètement silencieux à son égard?
N'ont-ils pas peur que leurs électeurs découvrent que, pendant les derniers jours de séance de la Chambre des communes, avant la relâche d'été, nous avons permis qu'un projet de loi de cette nature soit adopté? Comment pouvons-nous possiblement faire cela?
Pensons-nous que les gens du Sud de l'Ontario, où il y a de grandes centrales nucléaires, ne se préoccupent pas du fait que, si nous construisons davantage de réacteurs nucléaires, la responsabilité de l'exploitant se limiterait à seulement 650 millions de dollars? Quelle est la valeur d'une ville? Songeons à la ville de Guelph. Quelle est la valeur des Grands Lacs? Quelle est la valeur d'Aurora, qui se trouve juste à côté de Guelph? Je suis allée à l'Université de Guelph pendant une courte période de temps. La ville de Guelph possède un zoo, et beaucoup d'endroits merveilleux. C'est la même chose pour Pickering.
Comment pouvons-nous affirmer que, s'il y a un accident, cette somme de 650 millions de dollars nous permettrait de réparer tous les dommages? Le nettoyage de l'eau du lac à lui seul coûterait 650 millions de dollars, et c'est sans compter les problèmes de santé engendrés par l'accident ainsi que la contamination de tous les immeubles de la région.
Je vais parler aux députés de certaines des fuites nucléaires qui se sont produites. Au Tennessee, en mars 2006, il y a une fuite de 35 litres d'une solution d'uranium fortement enrichi durant un transfert vers un laboratoire à la centrale de la société Nuclear Fuel Services, à Irwin. Qu'est-il arrivé? L'incident a entraîné la fermeture de l'usine pendant sept mois et a nécessité la tenue d'une audience publique pour déterminer si la centrale pourrait garder son permis.
Une société qui voudrait construire une nouvelle centrale et qui verrait que la responsabilité est limitée à 650 millions de dollars pourrait être tentée de ne pas respecter certaines normes en matière de sécurité. Elle ne ferait peut-être pas tout ce qu'elle devrait pour s'assurer qu'elle a les installations nucléaires les plus sûres parce que, après tout, la responsabilité n'est que de 650 millions de dollars.
N'oublions pas non plus qu'aux termes du projet de loi, une personne doit intenter une action dans un délai de trois ans après avoir constater les dommages, et il y a une limite absolue de dix ans après l'incident. Dans le cas de préjudice corporel, la limite est de 30 ans.
Nous savons toutefois, et je le sais personnellement, que les cancers, les mutations génétiques, etc. n'apparaîtront pas avant au moins 20 ans après l'exposition. C'est pourquoi les problèmes n'étaient pas très évidents à Tchernobyl pendant les 10 à 15 premières années. Ce n'est que de 20 à 30 ans plus tard qu'on a commencé à voir des taux extrêmement élevés de cancer de la glande thyroïde, d'autres types de cancer et de mutations génétiques chez les générations subséquentes. On voyait des enfants qui souffraient.
Aux termes de ce projet de loi, il serait déjà trop tard. Personne ne pourrait intenter une action ou faire quoi que ce soit à cause de la limite de temps.
Le projet de loi limite la responsabilité aux incidents se produisant au Canada, sauf lorsqu'il existe une entente avec un autre pays et que les exploitants sont canadiens. Qu'arrive-t-il si les exploitants ne sont pas canadiens? Ils pourraient être allemands, chinois ou américains. Cela veut-il dire que les exploitants ne seraient pas responsables? C'est scandaleux. Comment pouvons-nous permettre que ce projet de loi soit adopté?
J'ai au moins 14 pages d'accidents nucléaires qui se sont produits depuis 1945. Il y en a des centaines, et chacun d'eux a eu de graves répercussions. Je vais en citer un autre. En 2005, en Illinois...
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Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui pour m'opposer au projet de loi .
Comme d'autres députés néo-démocrates l'ont mentionné aujourd'hui, nous sommes très préoccupés par cette mesure législative. Nous en sommes à l'avant-dernier jour de la session et le projet de loi est ici depuis un certain temps. Le comité a fait un travail important. Le NPD a proposé 35 amendements afin d'améliorer le projet de loi, parce que nous pensons qu'il comporte de graves lacunes. Malheureusement, nous n'avons pas obtenu l'appui des autres partis relativement à ces amendements, ce qui fait que nous en sommes maintenant là.
Oui, en vérité, le NPD tente de bloquer le projet de loi. Nous sommes d'avis que cette mesure ne doit pas être adoptée, et je vais présenter mon point de vue à la Chambre.
Je viens de Vancouver-Est, en Colombie-Britannique. Les résidants de la Colombie-Britannique ont toujours vécu sous la menace d'accidents nucléaires, étant donné qu'il existe des installations nucléaires au sud, notamment l'installation de Hanford, dans l'État de Washington, où des accidents nucléaires graves se sont produits dans le passé. Je sais que les gens du Sud de la Colombie-Britannique s'inquiètent de leur avenir et de celui de leurs enfants, en raison de la présence de l'industrie nucléaire et de ce qui se passe lorsqu'un accident survient.
Personne ne souhaite qu'un accident se produise, et il faut prendre le maximum de précautions afin de s'assurer qu'il n'y en ait pas. Toutefois, le projet de loi dont nous sommes saisis porte sur ce qui se produit après un accident nucléaire. Qu'est-ce qui se passe après un tel accident, et qu'en est-il de la responsabilité?
Premièrement, les néo-démocrates sont tout à fait d'accord pour dire que la loi actuelle, qui date des années 1970, est très inadéquate. Elle fixe la responsabilité maximale à 75 millions de dollars, ce qui, de nos jours, est un montant dérisoire lorsqu'on parle de responsabilité dans le secteur nucléaire. Le projet de loi porte la responsabilité maximale à 650 millions de dollars.
Certains nous diront que c'est une grande amélioration et qu'il faudrait l'accepter. Cependant, quand on gratte le vernis et on commence à examiner le projet de loi dans le contexte du droit international, on se rend compte que la limite de 650 millions de dollars imposée à la responsabilité des exploitants d'établissements nucléaires correspond à peu près à la norme minimale internationale. Cela me pousse à m'interroger. Pourquoi s'en tenir à la norme minimale internationale? De plus, pourquoi ce projet de loi est-il présenté maintenant?
Nous avons entendu les préoccupations des collectivités, des environnementalistes et des gens en général qui s'opposent à l'industrie nucléaire. Selon eux, ce projet de loi est une façon pour le gouvernement conservateur de vendre l'industrie nucléaire canadienne et de mettre sur pied un régime d'assurance, tout en sachant que le régime et la loi actuels sont tout à fait inadéquats puisqu'ils font passer la responsabilité des exploitants au public.
Le plafond est fixé à 650 millions de dollars et il existe une disposition permettant au de mettre sur pied un tribunal spécial et autorisant le prélèvement, au besoin, de fonds supplémentaires sur le Trésor. Cela veut dire, essentiellement, que l'exploitant d'un établissement nucléaire ne serait pas tenu de débourser plus de 650 millions de dollars et que le public serait tenu de débourser des millions et peut-être même des milliards de dollars en cas d'accident.
Les chiffres ne concordent tout simplement pas. Si nous modifions la loi, et nous devons le faire, faisons-le comme il faut. Assurons-nous que la limite imposée à la responsabilité corresponde à ce qui se fait ailleurs dans le monde.
Nous nous inquiétons également beaucoup de l'adhésion du Canada au Partenariat mondial pour l'énergie nucléaire, ce qui pourrait transformer le Canada en dépotoir nucléaire de la planète et entraîner toutes sortes de risques de contamination. Aujourd'hui, certains de mes collègues, les députés de , de et de , ont parlé de l'incidence à long terme du projet de loi. La limite de 650 millions de dollars est trop basse.
Nous avons travaillé avec zèle en comité pour tenter d'amender le projet de loi. Nous avons proposé plus de 35 amendements afin d'améliorer les dispositions sur la reddition de comptes, le pouvoir discrétionnaire du ministre, le niveau de responsabilité et le reste. Je suis étonnée de voir que ces amendements ont été rejetés, mais que nous en sommes aujourd'hui à la troisième et dernière lecture du projet de loi.
Dans l'histoire mondiale du nucléaire, et aussi l'histoire nord-américaine, on trouve une longue liste d'incidents. Ma collègue de a énuméré une série d'accidents connus.
En lisant cette liste, qui est longue de 14 pages, on a les cheveux qui se dressent sur la tête devant la régularité des incidents au fil des décennies, le premier remontant au 21 août 1945, soit au début de l'ère nucléaire.
Cet accident grave est survenu au laboratoire de Los Alamos, au Nouveau-Mexique, aux États-Unis,et concernait un assemblage de plutonium métal. Harry Daghlian empilait à la main des briques de carbure de tungstène autour d'un assemblage de plutonium. Cet assemblage était composé de deux demi-sphères dont la masse totale s'élevait à 6,2 kilogrammes, soit juste en-dessous de la masse critique. En déplaçant la dernière brique, le technicien a constaté sur le détecteur de neutrons que cette brique mettait l'assemblage en état surcritique. Il a alors accidentellement échappé la brique sur l'empilage, ce qui a provoqué une réflection de neutrons suffisante pour produire une excursion de puissance surcritique. Il a rapidement enlevé la dernière brique et défait l'assemblage. Il a absorbé une dose de 510 rem et est mort 28 jours plus tard.
Je ne connais pas toute la théorie scientifique derrière cet incident, mais il me semble important de réfléchir à ces choses parce qu'elles se produisent à notre époque. Nous savons donc que les incidents ont commencé au tout début de l'ère nucléaire, soit en août 1945. Certains de ces incidents sont marqués dans notre mémoire, notamment celui de Tchernobyl, que nous avons vu à la télévision. Je lis la liste.
Même à Chalk River, le 24 mai 1958, il y a eu un incident concernant le combustible. En raison d'un refroidissement inadéquat, un barreau de combustible d'uranium endommagé a pris feu et s'est brisé en deux lorsque l'on a voulu le retirer du coeur du réacteur. L'incendie a été éteint, mais pas avant que des produits de combustion radioactifs ne contaminent l'intérieur de l'immeuble abritant le réacteur et, dans une moindre mesure, la zone environnant le laboratoire. Plus de 600 personnes ont travaillé au nettoyage.
Il y a eu un incident chez Hanford Works, à Hanford, dans l’État de Washington, le 7 avril 1962. C’est celui que je connais le mieux, pas parce que j'étais là au moment de l'incident, mais parce que Hanford est très près de Vancouver. L’endroit retient beaucoup l’attention des groupes pacifistes et antinucléaires en Colombie-Britannique, parce que des millions de litres de contaminants y sont stockés.
Il s'agit d'un vaste terrain dans l’État de Washington. Il est clôturé et entouré de dispositifs de sécurité. Le public n’y a manifestement pas accès. Il existe bien une frontière internationale, le 49e parallèle, mais en cas de catastrophe, cela ne veut rien dire. Étant donné que les contaminants peuvent se retrouver dans l’eau souterraine, les puits, les rivières et l’air, ces situations sont très graves.
En avril 1962, un grave incident est survenu à une usine de production de plutonium. Il y a eu déversement d'une solution de plutonium a coulé sur le plancher d’une hotte d’extraction par solvant. À cause du mauvais fonctionnement des soupapes, un mélange de solutions de plutonium a été versé dans un réservoir qui est devenu supercritique, ce qui a déclenché les alarmes et entraîné l’évacuation de l’édifice.
Il a été impossible de reconstituer exactement l'incident. L’excursion de puissance s’est poursuivie à des niveaux plus bas pendant 37 heures et demie, durant lesquelles on a utilisé un robot télécommandé pour vérifier les conditions et manœuvrer les soupapes. La criticité a probablement été arrêtée par une précipitation de plutonium dans le réservoir. Trois personnes ont subi des radioexpositions importantes.
La liste est encore longue.
L’incident probablement le plus notoire s’est produit le 25 avril 1986 et a eu des répercussions mondiales. Il s'agit de la fusion complète du coeur d’un réacteur à Tchernobyl. Un contrôle de sécurité du réacteur mal effectué a mené à une excursion de puissance incontrôlée causant un fort vapocraquage, la fusion du coeur du réacteur et l’échappement de matières radioactives à la centrale nucléaire de Tchernobyl, située à environ 100 kilomètres au nord-est de Kiev. Une cinquantaine de personnes ont péri dans l’accident et dans les jours qui ont suivi. La plupart des victimes avaient participé à la décontamination du site. De plus, neuf cas de cancer thyroïdien chez des enfants ont été attribués à l’accident.
L’explosion et la combustion du coeur du réacteur à graphite a répandu des matières radioactives sur une grande partie de l’Europe. Comme bien d’autres, j’en suis sûre, je n’ai pu oublier les images de cet accident et la peur ressentie par la population. En tout, 100 000 habitants des environs immédiats de Tchernobyl ont dû être évacués, de même que 300 000 habitants des régions où il y a eu de fortes retombées en Ukraine, au Bélarus et en Russie.
Une zone d’exclusion a été créée, couvrant une surface d’environ 1 000 milles, ou 3 000 kilomètres. Cette zone a été jugée impropre à l’habitation humaine pour une période indéfinie. Je sais que des documentaires ont été réalisés sur ce qui s’est passé à Tchernobyl par des gens qui y sont retournés et qui ont filmé cette vaste zone qui, en fait, est aujourd’hui une zone morte, inapte à l’habitation humaine.
Ce sont des situations très graves et un projet de loi comme celui-ci nous fait réfléchir à toute l'industrie nucléaire au Canada. Il pose les jalons d'une expansion de cette industrie. D'ailleurs, j'ai demandé tout à l'heure à mon collègue de , notre porte-parole pour l'énergie qui connaît très bien la question, beaucoup mieux que moi, ce que cela présageait pour l'avenir, à son avis. Il m'a répondu que le projet de loi n'était que la pointe de l'iceberg.
Nous savons qu'on se tourne de plus en plus vers le nucléaire pour résoudre le problème des gaz à effet de serre produits par les autres sources d'énergie. Il a dit à la Chambre qu'on envisageait d'exporter au Montana une partie de la production de la centrale nucléaire de Peace River. Encore une fois, il y a tout un processus de décision et de privatisation qui nous lie aux États-Unis, dont les besoins énergétiques sont colossaux.
Ces questions sont liées. Alors qu'en apparence ce projet de loi semble simplement porter sur la question de la responsabilité, il débouche en fait sur une question beaucoup plus vaste, à savoir ce que le gouvernement compte faire et quel genre d'expansion il envisage pour le nucléaire.
C'est quelque chose qui inquiète beaucoup les gens de ma circonscription. Ils estiment qu'il n'y a pas suffisamment de protections en place. Nous avons eu tout le débat sur la fermeture du réacteur de Chalk River et la crise que cela a entraîné pour les isotopes médicaux. Nous nous souvenons de la débâcle qui a suivi quand le gouvernement conservateur a renvoyé la directrice de l'organisation. Tout cela fait partie d'un vaste plan de privatisation et de braderie de ces ressources nucléaires.
Nous devons donc d'une part discuter de cette question sous l'angle de la politique publique. D'autre part, nous devons, en tant que parlementaires, nous assurer que toutes les garanties juridiques sont là, qu'il s'agisse d'établissements publics ou d'établissements privés, et qu'il y a un montant de responsabilité correct.
J'espère avoir fourni aujourd'hui assez de détails pour montrer que ce projet de loi ne va pas assez loin. Il va probablement être adopté, sauf si nous pouvons le bloquer, et c'est ce que nous allons essayer de faire. Nous allons nous lancer pour des décennies dans l'expansion nucléaire, et l'on peut se demander si nous ne nous retrouverons pas à la case départ advenant un accident important au Canada.
Dieu nous en préserve, mais si cela devait arriver, les dispositions du projet de loi seraient-elles suffisantes pour couvrir les demandes d'indemnisation de la collectivité et des entreprises locales, des personnes et des enfants dont la vie et la santé seraient affectées par un tel accident?
Aux États-Unis, la responsabilité est de 10 milliards de dollars. C'est intéressant. C'est une responsabilité partagée par toutes les centrales, collectivement. C'est un montant qui est plus de 10 fois plus élevé que celui que nous envisageons ici. Encore une fois, on se demande pourquoi on a placé la barre à 650 millions de dollars. Cela semble tragiquement insuffisant.
Nous aimerions que le projet de loi ne soit pas adopté. Nous aimerions qu’on reconsidère cette question de responsabilité civile. Nous voudrions qu’il y ait des discussions et que le gouvernement fédéral conservateur établisse des plans clairs mettant en lumière ses intentions à l’égard de l’industrie nucléaire au Canada.
Tout en croyant que le projet de loi doit être amendé à cause de la faiblesse extrême de ses dispositions relatives à la responsabilité civile, nous ne pensons pas de toute façon qu’il puisse faire l’affaire. En effet, il doit s’inscrire dans le cadre d’une politique beaucoup plus vaste concernant l’industrie nucléaire. L’intérêt public doit constituer l’aspect le plus important de tout débat et de toute mesure législative sur ce sujet.
Ce n’est pas l’intérêt de l’industrie nucléaire. Ce ne sont pas les intérêts des gens qui veulent simplement consommer de plus en plus d’électricité et augmenter sans cesse la capacité de production d’énergie. Ce ne sont pas les intérêts des grandes multinationales américaines qui peuvent considérer le Canada comme un endroit favorable pour faire des affaires. La première préoccupation doit être la santé publique, l’intérêt public et les intérêts des générations futures.
À cet égard, le projet de loi ne semble pas beaucoup tenir compte de l’avenir. Je voudrais remercier mes collègues, la députée de l’ et le député de , qui ont été nos deux principaux porte-parole. Ils ont travaillé très fort sur le projet de loi et l’ont entièrement passé en revue, article par article. Ils sont arrivés à la conclusion qu’il était très limité et que nous ne devions pas l’appuyer. Au comité, ils ont été très actifs et ont proposé un certain nombre d’amendements. Nous avons été très surpris qu’ils soient rejetés par le gouvernement et les autres partis.
Je sais que le Bloc a aussi proposé quelques amendements, dont nous lui savons gré. Toutefois, en fin de compte, le projet de loi n’a pas changé. Nous continuons donc à étudier un projet de loi très limité.
Nous avons bien l’intention d’en parler et de signaler les lacunes. Nous voulons attirer l’attention des gens sur le fait que le projet de loi en est aujourd’hui à un stade très critique. Bien sûr, nous allons faire de notre mieux pour l’empêcher d’être adopté, non parce que nous ne voulons pas de dispositions sur la responsabilité civile, mais parce que nous souhaitons que les choses soient faites comme il faut. Nous voulons avoir la certitude que les gens seront protégés en cas d’incident ou d’accident, qu’ils pourront présenter des demandes d’indemnité et être dédommagés. Cela devrait dépendre, non d’un tribunal que le ministre aura établi, mais d’une procédure équitable et d’un fonds spécialement établi pour protéger les gens. Il n’y a pas de doute que c’est l’aspect le plus important de ce que nous étudions aujourd’hui.
J’exhorte mes collègues à penser à ces facteurs. Je suis très fière du fait que nous ayons pris le temps d’examiner le projet de loi et d’aboutir à des conclusions sur la base de notre perception de l’intérêt public des Canadiens. C’est pour cette raison que nous nous opposerons au projet de loi.
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Monsieur le Président, je remercie la Chambre de me permettre d'ajouter foi à ce que ma collègue de a dit à propos de nos réserves et préoccupations concernant le projet de loi , Loi sur la responsabilité et l'indemnisation en matière nucléaire.
J'ai dû demander la permission de participer au débat. Je suis venu en courant de mon bureau situé dans l'édifice de l'Ouest dans l'espoir de dire quelques mots sur ce projet de loi. J'ai constaté à mon arrivée que l'objet du débat n'était plus celui que je suivais à la télévision à mon bureau. Lorsque ce projet de loi a été mis à l'étude, je me suis dit qu'il fallait absolument que je prenne la parole à la Chambre à son sujet.
Je tenais à le faire surtout parce qu'un des plus importants ouvrages qui se sont retrouvés sur mon bureau ces derniers temps est un livre que m'a fait parvenir un de mes collègues. L'auteur est le Dr Hellen Caldicott, scientifique très respectée de renommée internationale dont nous sommes nombreux à nous souvenir du nom. Le livre est intitulé L'énergie nucléaire n'est pas la bonne réponse.
Ce qui a poussé le Dr Caldicott à écrire ce livre, c'est la tentation quasi irrésistible, face aux dangers évidents que présentent les émissions de gaz à effet de serre pour l'environnement, de se tourner de nouveau vers le nucléaire, y voyant une source d'énergie qui ne contribuerait peut-être pas au réchauffement de la planète. Or, nous craignons que, comme elle le mentionne dans son livre, obnubilée par cette possibilité, la communauté internationale ne ferme les yeux sur les risques possibles et sur les lacunes technologiques qui font qu'on ne peut pas donner à la population l'assurance que ce soit là la voie à suivre.
C'est ce qui nous a alarmés, au sein du NPD, lorsque le projet de loi a été déposé. Nous nous y sommes immédiatement opposés, faisant valoir que la dernière chose à faire, au moment où l'on est tenté à l'échelle mondiale de considérer de nouveau l'énergie nucléaire comme une solution viable, est de déréglementer ou d'amoindrir de quelque façon que ce soit le régime de sécurité entourant le système nucléaire tel qu'on le connaît. L'idée même est choquante. Comme je le disais, je veux ajouter foi aux observations de ma collègue de . Il est inquiétant de penser que, de nos jours, le secteur des entreprises a, pour ainsi dire, pour marque de commerce de chercher à déréglementer sans cesse davantage et d'affaiblir les normes et évaluations environnementales qui sont pourtant nécessaires.
Au fur et à mesure que le monde devient plus conscientisé, nous pressons davantage les exploitants et les industries de se conformer aux normes et d'être davantage sensibles aux questions environnementales. C'est un désagrément pour eux. La population les force à s'engager dans une voie qu'ils ne veulent pas suivre. Leur seul moyen de maintenir le statu quo ou même d'assouplir les exigences en matière de sécurité, c'est de recourir à la réglementation. Le projet de loi , dont nous avons été saisis plus tôt cette semaine, est dans la même veine. Il démantèlerait le régime de sécurité ou, à coup sûr, l'assouplirait.
J'ai demandé à un page d'aller à la Bibliothèque du Parlement, cette merveilleuse ressource, et de me rapporter un exemplaire du livre du Dr Helen Caldicott, L'énergie nucléaire n'est pas la bonne réponse. Le page l'a trouvé en un rien de temps, et c'est tout à son honneur. Dans le contexte de ce débat, je recommande fortement ce livre à tous mes collègues de la Chambre. Ils devraient lire certaines des mises en garde importantes de cette scientifique reconnue mondialement. Je vais lire les titres de certains chapitres de son livre. Je ne vais pas en citer de longs extraits.
Dr Caldicott explique l'ensemble des coûts liés à l'énergie nucléaire. Aussi attrayante que puisse être l'énergie nucléaire, même au premier abord, elle coûte extrêmement cher. Dr Caldicott consacre tout un chapitre au coût de l'énergie nucléaire, y compris celui des assurances, sans parler de la décontamination si, Dieu nous en garde, un accident devait arriver, de la pollution, etc. Je reparlerai du Dr Caldicott dans une minute.
Nous pouvons faire mieux que cela. Nous pouvons faire mieux que développer notre système nucléaire afin de répondre à la demande et à nos besoins énergétiques. Je m'explique.
J'ai présidé le syndicat des charpentiers et le syndicat des métiers de la construction au Manitoba. Le gouvernement de cette province a perdu une occasion de conclure un important accord d'hydroélectricité avec l'Ontario. Pour une raison ou une autre, la vente d'énergie hydroélectrique n'a pas abouti, ce qui a donné lieu à l'annulation de la construction d'un barrage hydroélectrique. Ce chantier aurait employé 1 500 de mes syndiqués pendant cinq ans. Je dirigeais le syndicat des charpentiers à l'époque. La nouvelle a été dévastatrice. Nous avons dû faire le point, tenter de trouver des moyens de composer avec la perte des emplois potentiels qu'aurait permis de créer l'aménagement d'une centrale hydroélectrique.
J'ai commandé des recherches. Nous avons publié un rapport intitulé « Un avenir meilleur -- La création d'emplois axée sur la conservation d'énergie ». Nous avons comparé les possibilités d'emploi qu'offrait un mégaprojet tel que la centrale nucléaire de Darlington, dont on vient d'annoncer qu'on en doublera la taille. Permettez-moi de revenir dans le temps. Le coût prévu de la centrale de Darlington était de 4 milliards de dollars. Au bout du compte, lorsque la centrale a démarré et qu'elle a produit la première unité d'énergie, la note était passée à 15 milliards de dollars, et je crois qu'on n'a pas fini d'engloutir des fonds dans cette centrale.
Ce que cette étude approfondie nous a révélé, et je le dis dans le contexte du projet de loi , c'est que dans le domaine des ressources énergétiques, la gestion de la demande est beaucoup plus efficace, à maints égards, que la gestion de l'offre.
Il n'y a aucune différence entre une unité d'énergie qui est récupérée du système en place et qui est le résultat de mesures de conservation énergétique et une unité d'énergie produite dans une centrale, sauf pour ce qui est des aspects suivants, et ils sont importants. Premièrement, l'énergie est accessible à un tiers du coût. L'unité d'énergie récupérée à partir du système en place grâce à des mesures permettant d'éliminer le gaspillage et d'économiser l'énergie coûte le tiers du prix de l'unité produite à partir d'un barrage hydroélectrique ou d'une centrale nucléaire.
Deuxièmement, la nouvelle unité d'énergie est disponible immédiatement. Autrement dit, dès qu'on éteint une lumière dans une pièce, l'unité d'énergie économisée peut être utilisée chez les voisins ou vendue à l'étranger. Le Manitoba vend beaucoup d'énergie au Minnesota et à d'autres États situés directement au Sud de notre province.
Si nous avions un réseau de distribution électrique est-ouest, nous pourrions fermer toutes les centrales au charbon de l'Ontario en vendant à la province l'hydroélectricité produite au Manitoba. Je crois que la majorité des Ontariens seraient heureux d'utiliser de l'énergie propre du Manitoba au lieu de l'énergie coûteuse et polluante produite par les centrales au charbon ou, pire encore, de l'électricité produite par des centrales nucléaires dangereuses.
Un autre avantage des unités d'énergie produites à partir du système en place dans une centrale, grâce à la mise en oeuvre de mesures de régulation de la demande, est la période de décalage pendant laquelle il n'est pas nécessaire d'emprunter de l'argent. En fait, de nombreuses rénovations visant à améliorer le rendement énergétique des maisons peuvent être financées à 100 p. 100, sans frais au propriétaire, et l'institution financière se rembourse avec les économies d'énergie réalisées pendant les trois, cinq ou sept années suivantes. C'est une solution très souvent utilisée par les membres de la Building Owners and Managers Association, ces propriétaires qui possèdent de grands immeubles commerciaux et industriels, étant donné que leurs coûts en énergie sont extrêmement élevés. Ils peuvent dépenser hors bilan pour faire des rénovations et améliorer l'efficacité énergétique de leurs édifices sans qu'il leur en coûte le moindre dollar. Ils paient grâce aux économies d'énergie réalisées pendant trois ou cinq ans, jusqu'à ce que les rénovations soient terminées.
Cette solution serait parfaite pour le gouvernement fédéral. Monsieur le Président, vous serez surpris d'apprendre — ou peut-être pas, puisque vous supervisez la Cité parlementaire et que vous êtes en charge d'un grand nombre d'édifices publics — qu'il y a 68 000 édifices fédéraux au Canada, dont un grand nombre ont été construits à une époque où le gaspillage d'énergie était la norme. Ces édifices sont extraordinairement énergivores. Des efforts légitimes ont été déployés pour tenter de les moderniser et de réduire le gaspillage d'énergie, mais il n'y a jamais eu de plan exhaustif pour rénover un nombre important d'édifices.
Imaginons un peu l'ampleur du projet si le gouvernement fédéral décidait de rénover, pour en améliorer l'efficacité énergétique, des milliers d'édifices appartenant au...
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Vous avez raison, monsieur le Président. Vous conviendrez, je pense, que la patience est une vertu. Si le député était plus patient, il verrait où je veux en venir avec mon argumentation et il comprendrait que j'arriverai à la conclusion logique qu'il faut voter contre le projet de loi . J'utilise plein de détours, je m'en confesse.
J'essayais de montrer que le projet de loi élimine en partie le régime de sécurité associé à l'énergie nucléaire. Nous pensons que c'est néfaste. Nous sommes d'avis que le Canada peut faire mieux.
Nous n'avons même pas besoin d'examiner le projet de loi , car nous avons d'autres options. Nous avons la technologie. Nous sommes un pays développé riche. Nous devrions être un chef de file mondial des énergies de remplacement au lieu de favoriser une technologie dépassée.
Je dis à la Chambre que l'énergie nucléaire est une technologie dépassée. C'est un détour que nous avons emprunté sur la route vers la durabilité et cela nous a entraînés dans une direction que nous regretterons d'avoir choisie comme peuple et comme pays.
Un certain nombre de mauvaises idées surgissent lorsqu'on essaie de répondre à la demande en énergie et lorsqu'on essaie de réduire les émissions de gaz à effet de serre. L'une de ces idées est selon moi l'expansion de la filière nucléaire.
Il y en a aussi une autre, et c'est l'idée présentée aujourd'hui par le Parti libéral du Canada, qui propose une taxe sur le carbone. C'est une idée particulièrement mauvaise. C'est faire preuve de négligence que de parler d'énergie en oubliant les conséquences de la production de l'énergie, c'est-à-dire les émissions de gaz à effet de serre qui sont en train d'étouffer la planète comme on le sait maintenant.
J'essaie de faire valoir l'idée que nous devrions nous occuper davantage du problème de la demande en énergie que du problème de l'approvisionnement en énergie. L'énergie nucléaire n'est pas la réponse.
Je ne suis pas le seul à l'affirmer. J'invite les députés à prendre connaissance de ce que dit la docteure Helen Caldicott, l'une des sommités dans le monde en matière de santé publique et de conséquences des avancées technologiques. L'industrie du nucléaire se livre à une campagne publicitaire fallacieuse et trompeuse.
J'ai avec moi actuellement une annonce diffusée par l'industrie du nucléaire pour essayer de convaincre les Canadiens et le reste du monde que l'énergie nucléaire est le remède aux émissions dommageables de gaz à effet de serre. Cette annonce vise à convaincre les gens qui se soucient des émissions de gaz à effet de serre ou de dioxyde de carbone qu'ils n'ont qu'à s'en remettre à l'énergie nucléaire.
Il est vraiment troublant de voir que des industries comme celle-là se servent d'enfants pour essayer de convaincre les gens que tout va pour le mieux et que l'avenir de la prochaine génération est assuré. Je ne lirai pas ce que dit l'annonce, car je veux surtout que l'on comprenne comment on y exploite certaines images.
L'annonce comprend trois images. Dans la première, des enfants en maillot de bain sautent joyeusement dans un lac qui a l'air bien propre. Dans la deuxième, un groupe d'enfants sont couchés sur une pelouse que l'on présume sans pesticides et sans contamination nucléaire. Ils ont l'air de s'amuser avec ce qui semble être un jeu vidéo à l'écran de leur ordinateur portable. Dans la troisième image, on récupère vertueusement la cause des minorités. Deux enfants de couleur jouent sur un vieux pneu suspendu à un arbre. Ils se balancent sur ce pneu. Ils ont vraiment l'air de s'amuser et vivent à l'abri des soucis, non loin de la centrale nucléaire que l'on aperçoit à l'horizon.
Le message transmis signifie que ces enfants ne sont pas affectés par les effluents de la centrale nucléaire qui domine l’horizon du quartier où ils vivent. Ils jouent dans un lac. L’eau est donc pure. Ils se roulent dans l’herbe. On peut donc supposer qu’elle n’a pas muté d’une façon ou d’une autre et que les poissons du lac n’ont pas trois yeux comme Blinky dans les Simpson. Les enfants qui se balancent ne donnent pas l’impression qu’ils s’inquiètent de la qualité de l’air qu’ils respirent.
Cette annonce signale qu’en Amérique, un foyer et une entreprise sur cinq utilisent de l’électricité nucléaire. Cela m’inquiète car, lorsque j’étais jeune, la proportion n’était pas aussi élevée. En fait, c’est pendant que je grandissais, dans les années de l’après-guerre, que l’énergie nucléaire s’est développée. Le secteur nucléaire cherche maintenant à se faire accepter du public. Il essaie, dans le cadre d’une campagne très délibérée de relations publiques, de convaincre le monde qu’il n’y a rien à craindre et que rien ne peut arriver. « Faites-nous confiance », nous dit-on.
Beaucoup de ces centrales appartiennent à des intérêts privés. Les centrales nucléaires ne sont pas toutes exploitées par des organismes gouvernementaux. Beaucoup des laboratoires où il y a eu des accidents sont privés.
J’ai ici une liste des incidents qui se sont produits pendant que l’industrie se développait. Elle est très longue. Je n’aurais donc pas le temps de parler à mes collègues de tous ces incidents, mais ils ne se limitent pas à des pays en développement qui n’ont pas les moyens technologiques de surveiller le fonctionnement des centrales nucléaires.
Il y a eu une fusion partielle du cœur à Monroe, au Michigan. Une défaillance du système de refroidissement au sodium avait provoqué une fusion partielle le 5 octobre 1966. À l’époque, mes parents manifestaient à l’extérieur des centrales nucléaires en agitant des pancartes proclamant « Pas d’armes nucléaires ». En 1966, ils craignaient que l’énergie nucléaire ne mène à une guerre nucléaire.
À Wood River, dans l’État de Rhode Island, il y a eu un incident critique lors de la manipulation d’une solution d’uranium. Une citerne contenant 93 p. 100 d’uranium 235 était brassée à l’aide d’un agitateur. Le travailleur, en voulant ajouter un flacon de trichloréthane pour dissoudre les matières organiques, a versé par erreur un flacon de solution d’uranium dans la citerne.
Comme nous le savons, les accidents arrivent. Dans mon domaine, un incident peut provoquer la perte d’un doigt, ce qui est vraiment tragique. Mais quand on parle d’une centrale nucléaire, un incident peut causer de sérieux problèmes à toute la planète.
À Galloway, en Écosse, il y a eu fusion partielle du coeur du réacteur lorsque des débris de graphite ont bloqué partiellement un canal de combustible, entraînant la fusion de l'élément combustible.
Ce sont là des incidents somme toute anodins qui surviennent dans le cadre d'une surveillance normale. Les appareils sont très perfectionnés et des difficultés techniques peuvent survenir. Si le projet de loi réduit de quelque manière que ce soit l'application de mesures de sécurité dans l'industrie nucléaire, nous sommes contre.
L'abondance de données statistiques sur la question devrait inciter la plupart des Canadiens à vouloir éviter tout allégement de la vigilance.
À l'entreprise Mayak, en Russie, un accident de criticité a eu lieu concernant la solution de plutonium. À Obninsk, en Russie, dans une centrale nucléaire, il y a eu un terrible accident dû au rayonnement, attribuable à la manipulation des barres de combustible.
Les possibilités d'accident sont extrêmement élevées à presque toutes les étapes du processus, et je ne parle même pas ici du stockage. Je vis au Manitoba, où on a eu la brillante idée de stocker des barres de combustible épuisé sous terre, dans l'Est de la province, dans les profondeurs du granite du bouclier précambrien.
L'industrie n'a pas encore d'idée ou de solution valable pour le stockage des barres de combustible épuisé, dont la demi-vie reste énorme, sinon celle de les stocker dans de vastes piscines remplies d'eau. Ainsi, alors qu'on ne peut même pas trouver une piscine au centre-ville de Winnipeg pour les enfants, le paysage des environs est rempli de piscines olympiques où l'on conserve des barres de combustible nucléaire épuisé.
Je rappelle que de tels accidents ne se produisent pas toujours seulement dans des pays sous-développés qui n'ont pas la technologie nécessaire pour bien surveiller les installations nucléaires. Il y a eu un accident critique au laboratoire national Argonne, en Illinois, où l'on gardait des particules d'uranium dans du plastique. L'idée s'est avérée mauvaise, puisque quatre individus ont reçu des doses de 136 rads, un niveau d'exposition fatal. On ne donnait pas l'heure juste aux travailleurs de l'industrie nucléaire au sujet des dangers.
Ce n'est pas la première fois que je vois cela. Je deviens hors de moi lorsque je constate que des industries qui connaissent très bien certains dangers n'en informent pas leurs employés. J'ai travaillé dans l'industrie de l'amiante durant de nombreuses années. À l'époque, on mentait au sujet des dangers pour la santé que représentait l'amiante, tout comme c'est le cas aujourd'hui. Mais le cartel de l'amiante est tellement puissant que même le gouvernement conservateur lui fait la courbette. Le Canada continue d'être le deuxième exportateur d'amiante en importance au monde, même si nous savons très bien désormais que l'amiante tue et que l'amiante n'est sûre nulle part, à aucun niveau de concentration...
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Monsieur le Président, j'étais tout innocemment en train d'essayer de montrer que beaucoup d'industries et d'entreprises sont négligentes pour ce qui est de mettre en garde les travailleurs contre les risques potentiels, l'industrie nucléaire étant du nombre.
J'ai également cité l'industrie de l'amiante comme exemple pour montrer comment cette industrie et l'industrie nucléaire ont réussi à faire croire à la population que leur produit et leur industrie sont plus sûrs qu'ils ne le sont en réalité. Je vais expliquer comment.
Comme je l'ai dit plus tôt, ces industries font cela en dépensant des centaines de millions de dollars en marketing et en campagnes de relations publiques pour essayer de convaincre la population qu'il n'y a vraiment rien à craindre et que nous pouvons démanteler notre régime de sécurité, comme le fait le projet de loi , parce que, disent-elles, nous n'avons qu'à leur faire confiance et elles veilleront sur nous.
Quiconque a l'intention de voter sur le projet de loi C-5 devrait être tenu de lire l'ouvrage de Helen Caldicott. J'exhorte tous les députés à lire ce livre ce soir, demain ou quand ils en auront le temps avant de voter sur le projet de loi C-5. Je peux garantir qu'ils changeront vite d'idée. S'ils ont l'intention d'appuyer le projet de loi, ils ne l'auront plus une fois qu'ils auront lu l'avertissement contenu dans ce livre. Le projet de loi est conçu pour protéger les sociétés plus que les citoyens.
Je sais qu'il ne me reste plus beaucoup de temps et je vais donc conclure. Ce que je voulais dire en parlant de gestion de la demande, c'est que le Canada est capable de faire mieux que de retourner au nucléaire pour résoudre le problème des émissions de gaz à effet de serre. Nous pouvons faire mieux, nous avons la technologie voulue.
Nous devrions montrer l'exemple au monde par nos mesures de gestion de la demande. Nous devrions être un centre d'excellence reconnu dans le monde entier: nous devrions rendre plus éconergétiques nos immeubles publics d'abord, puis nos établissements publics, ensuite nos édifices privés et finalement chaque domicile de notre pays.
Je me souviens de la décision des habitants d'une petite ville de l'Ontario, Espanola, à l'époque où le député de était premier ministre de cette province au début des années 1990. Ils ont décidé de voir jusqu'où ils pouvaient aller, de voir combien d'énergie ils pouvaient économiser en rénovant, même partiellement, chaque maison, chaque entreprise, chaque station service, chaque hôpital et chaque école de la ville.
Les résultats ont été stupéfiants. Même sans rénovation complète, avec simplement des aménagements mineurs, ils ont récupéré des unités d'énergie qu'ils ont pu revendre au reste de la province et grâce à cela, on n'a plus eu besoin de construire de nouvelles centrales nucléaires pendant un bon moment.
Si seulement on pouvait reprendre ce raisonnement dans toute la province. Nous avons à peine effleuré les économies d'énergie qu'on peut faire avec le système actuel. C'est comme si on prospectait de l'or. L'énergie de nos jours, c'est de l'or. C'est de l'or qui s'échappe des cheminées ou des fenêtres mal isolées de tous les édifices de ce pays.
J'ai dit au début de mon discours qu'une unité d'énergie récupérée dans le système existant grâce à des mesures de gestion de la demande était exactement la même chose qu'une unité d'énergie produite par une centrale, mais il y a plusieurs différences importantes.
Premièrement, on obtient cette unité au tiers du coût.
Deuxièmement, elle est disponible sur le réseau et peut être revendue immédiatement. Dès l'instant où nous éteignons une lumière dans une pièce, c'est une unité d'énergie qui est disponible pour éclairer la pièce d'à côté.
Troisièmement, cela nous évite d'emprunter des milliards de dollars pour construire une centrale.
Quatrièmement, cela crée sept fois plus d'années-personnes d'emploi. Puisque nous nous demandons ce que va devenir la génération suivante alors que notre secteur manufacturier s'effondre et que tous les emplois partent en Chine, voilà une occasion de créer des emplois dans la rénovation de nos édifices. Nous pourrions mettre au point des techniques et une expertise que nous exporterions dans le monde entier. Nous deviendrions les champions de la technologie de la rénovation et des mesures de conservation de l'énergie. Voilà une technologie d'exportation dont je serais fier.
Je ne crois pas que nous devrions accorder des prêts à des pays qui leur permettraient d'acheter chez nous des réacteurs CANDU, d'en installer dans leurs pays et de créer des bombes. Nous sommes responsables des tensions actuelles entre l'Inde et le Pakistan, car nous avons fourni aux deux pays des capacités nucléaires en leur octroyant des prêts qui n'ont jamais été remboursés. Nous avons fait la même chose en Roumanie.
Nous voulons tellement vendre nos fichus réacteurs que nous donnons à des pays l'argent nécessaire pour qu'ils achètent des réacteurs au Canada, et nous ne leur demandons même pas de rembourser ces prêts. Je préférerais exporter des technologies d'amélioration du rendement énergétique. Les fenêtres les plus éconergétiques du monde devraient venir du Canada. Les appareils de chauffage les plus éconergétiques du monde devraient venir du Canada.
Nous devrions être fiers d'être les chefs de file mondiaux dans ce secteur, car nous possédons les connaissances, les technologies et la formation scolaire nécessaires. Il ne nous manque que la volonté politique.
J'ai envie de pleurer quand je vois que la seule idée dont on discute dans ce pays quand on parle d'énergie et d'émissions de gaz à effet de serre est l'imposition d'une taxe sur le carbone sur le mazout domestique, ce qui viendra augmenter les coûts de chauffage des pauvres personnes âgées vivant dans le Nord du Canada qui doivent déjà débourser 800 $ par mois pour chauffer leur logement. Toutefois, les gens qui conduisent un Hummer ne paieront pas cette taxe. Ils seront en train de profiter de la réduction fiscale qu'ils recevront grâce aux factures astronomiques de chauffage payées par une pauvre vieille femme.
Si c'est le type de débats que nous avons, nous perdons notre temps et nous gaspillons nos talents naturels et les technologies qui nous sont offertes au Canada. Nous manquons une occasion extraordinaire de mettre au point des technologies d'amélioration du rendement énergétique et des programmes de gestion axée sur la demande.
Avant d’être interrompu par le député de , je disais que le gouvernement fédéral est propriétaire de 68 000 immeubles et bâtiments au Canada. Quelle excellente occasion de réaliser un projet pilote et de montrer d’abord au secteur privé, puis au monde, comment on peut s’y prendre. Copenhague vient de déclarer qu’elle sera la ville la plus économe en énergie de la planète d’ici dix ans, et elle a mis sur pied un partenariat coopératif public-privé pour y arriver.
Nous pourrions agir de la même façon au niveau national, s’il existait une grande vision. Si nous avions comme rêve national de devenir ce genre de pays, nous pourrions y arriver. Au lieu de cela, nous replaçons les transats sur le pont du Titanic en ajoutant une taxe sur le carbone aux mauvais endroits. C’est une diversion totale, une perte de temps, d’énergie et de capacité intellectuelle, alors qu’il faudrait utiliser cette énergie et cette capacité pour faire quelque chose qui assurerait une transformation, qui aurait du sens, à un moment où il nous faut nous détourner des énergies sales pour adopter des énergies propres.
Oui, l’hydroélectricité est excellente et il y a lieu d’être fier du fait que le Manitoba atteindra les objectifs de Kyoto. Il les atteint déjà grâce à toute sa production d’hydroélectricité. Je voudrais que le soit présent. Si la province pouvait vendre cette électricité dans l’axe est-ouest plutôt que nord-sud, elle pourrait aider l’Ontario à renoncer aux énergies sales et au nucléaire. La Saskatchewan pourrait en profiter énormément, et tant mieux pour elle. Il y a toutefois trois ou quatre éléments clés à mettre en place avant de pouvoir s’engager dans cette voie.
Au moment où nous songeons au nucléaire comme énergie de remplacement, ce serait négligent et irresponsable de ne pas tenir compte des données empiriques sur l’utilisation du nucléaire, comme l’incident de Kiev, en Ukraine, le 4 février 1970. Il n’est pas question de ces choses-là dans les informations nationales, notamment à cause de ce que j’appellerais non une conspiration, mais une répugnance à faire connaître tous les faits. Il y a eu l’incident de la centrale nucléaire de Voronezh, en Russie, en 1971. Il y a eu aussi Bhopal, autre accident qui entraînait une responsabilité et des coûts de décontamination.
Le projet de loi limiterait cette responsabilité. Pour un peu, nous ferions le sale boulot de l’industrie. Au lieu de faire en sorte que l’industrie veille à ce que ces accidents ne se reproduisent plus, nous limitons sa responsabilité à 650 millions de dollars. Ce n’est pas suffisant pour payer les importants travaux de décontamination après un incident nucléaire majeur. Mon collègue de demande ce qui se produirait si nous avions un accident de l’ampleur de celui de Bhopal. Il y a eu là-bas un déversement de produits chimiques. Trois milles personnes ont été tuées et 10 000 autres ont été atteintes.
Un incident nucléaire pourrait toucher des milliers de personnes, et la responsabilité totale serait limitée à 650 millions de dollars. Une personne qui aurait des séquelles sa vie durant pourrait avoir droit à une indemnisation de millions de dollars. Ce montant suffirait peut-être pour deux cents personnes. Le projet de loi est aberrant, et il faut le rejeter.
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Monsieur le Président, mon collègue de signale à juste titre que c’est l’absence d’un plan cohérent, d’une stratégie centrale globale qui est inquiétante. Souvent, ces mesures fragmentaires sont à la merci des pressions exercées par des groupes commerciaux sans scrupules. Il s’agit d’incidents isolés, mais, ensemble, ils forment un motif ou un schéma.
Nous avons récemment examiné le projet de loi par lequel le gouvernement démantèle le système de sécurité du transport aérien. Aujourd’hui, nous traitons de l’industrie nucléaire et du démantèlement par le gouvernement des dispositions de sécurité dans cette industrie.J’estime qu’aucun député ne devrait se prononcer sur ce projet de loi avant d’avoir lu le livre du Dr Helen Caldicott, L'énergie nucléaire n'est pas la bonne réponse. J’exhorte les députés à aller chercher cet ouvrage à la bibliothèque et à le lire. J’irai le rendre aujourd’hui parce que je l’ai déjà lu.
Je veux signaler que le dossier de la sécurité du secteur nucléaire mondial est absolument terrifiant. Nous avons eu l’explosion du cœur du réacteur au graphite de Pripyat, en Ukraine, qui a propagé des matières radioactives au-dessus d’une grande partie de l’Europe. Ce n’était pas en 1956, aux premiers temps de l’âge nucléaire. C’était en 1986. Quelque 300 000 personnes ont dû être évacuées des régions qui ont reçu des retombées.
On aurait pu penser qu’un incident de ce genre aurait amené l’industrie nucléaire à s’arrêter et à se regrouper pour s’assurer qu’un événement de ce genre ne se reproduirait jamais. Toutefois, en 1989, à Greifswald, en Allemagne, des opérateurs ont désactivé trois des six pompes de refroidissement de la centrale. Alors que la centrale aurait dû s’arrêter automatiquement, une quatrième pompe est tombée en panne, causant un réchauffement excessif qui a endommagé et exposé dix barres de combustible. Encore une fois, ce sont les travailleurs qui ont souffert.
Plus tôt la même année, à la centrale allemande de Hamm/Uentrop, des pastilles sphériques de combustible se sont coincées dans une canalisation d’alimentation en combustible.
La technologie est tellement complexe que des pannes peuvent se produire à tous les stades du processus. Je suis un homme de métier. J’ai participé à la construction de barrages hydroélectriques à titre de charpentier. Je n’ai jamais travaillé dans une centrale nucléaire, mais je sais combien il est complexe de produire de l’énergie et à quel point des pannes peuvent se produire dans une centrale hydroélectrique quand les turbines cessent de tourner pendant quelque temps.
Dans le cas d’une centrale nucléaire, une défaillance peut ravager des collectivités entières, toute une région, les contaminant pendant des générations. Toutefois, le gouvernement essaie aujourd’hui de faire adopter un projet de loi qui limiterait la responsabilité civile d’une entreprise nucléaire où il y aurait un incident de ce genre à 650 millions de dollars, ce qui est trois fois rien. Si quelques centaines de personnes touchées intentent des poursuites devant les tribunaux, ce qui ne fait pas le moindre doute, ce montant sera vite dépensé en dommages-intérêts.
Il y a sûrement quelque part un Homer Simpson qui est chargé de diriger une centrale nucléaire. Il y a sûrement quelque part un Monty Burns qui exerce des pressions sur le gouvernement conservateur pour s’assurer que les règles de sécurité ne sont pas trop coûteuses et qui dit: « Comment puis-je gagner ma vie en faisant tourner une centrale nucléaire si vous me faites payer pour mes erreurs? »
Pour ma part, je dis au gouvernement que si nous envisageons de recourir à l’énergie nucléaire pour répondre à nos besoins énergétiques dans les décennies à venir, nous ne faisons pas assez d'efforts. En fait, nous faisons abstraction de choses évidentes et nous optons pour une technologie désuète.
La période de l'après-guerre a été tragique à bien des égards. L'industrie pétrochimique, l'industrie de l'amiante et l'industrie nucléaire étaient déchaînées. Nous commençons tout juste à prendre conscience du fait que nous avons sali notre propre habitat, au point où nous aurons de la difficulté à vivre ici si nous ne changeons pas nos habitudes.
Nous ne voulons pas que la centrale nucléaire de Darlington devienne deux fois plus grande. Nous voulons plutôt qu'elle soit fermée. Nous voulons de l'énergie propre, fournie par une gestion de la demande, par l’amélioration de l’efficacité énergétique, et par l'énergie solaire et éolienne. Nous ne voulons pas voir l'industrie compter sur la prochaine génération de centrales nucléaires.
Certains d'entre nous pensent que c'était une erreur. Nous sommes d'avis qu'un gouvernement qui ferait preuve de vision et de leadership aurait fait plus qu'étendre ou aggraver le problème. Nous pensons aussi qu'un parti de l'opposition qui aurait un peu de leadership proposerait quelque chose de mieux qu'une taxe sur le carbone comme celle qu'on essaie de nous vendre aujourd'hui, parce que cette mesure ne va pas toucher la personne qui conduit un Hummer. Ce sont les gens qui essaient de chauffer leurs maisons dans l'Ouest de l'Arctique et qui déboursent 800 $ par mois en huile de chauffage qui vont payer la taxe sur le carbone. La personne qui conduit un Hummer ne paiera rien, parce que ce véhicule est exclu.
Le gouvernement va prendre de l'argent à la personne qui vit dans l'Ouest de l'Arctique et qui doit chauffer sa maison, mais il va accorder un allégement fiscal à celle qui conduit un Hummer. C'est la logique la plus tordue que j'ai entendue pour ce qui est de régler un problème environnemental bien défini.
Aujourd'hui, les deux côtés de la Chambre nous ont laissé tomber, à l'exception du petit coin où vivent les néo-démocrates, où les gens présentent des points de vue réfléchis. Les conservateurs nous ont laissé tomber avec le projet de loi , préférant frayer encore une fois avec les lobbyistes du secteur nucléaire. Je pense que les conservateurs ont encore une fois été victimes de lobbyistes futés. L'opposition officielle nous a aussi laissé tomber, parce que ses députés ont proposé une mesure qui va tuer le débat sur la réduction des émissions de carbone.
Nous n'avons qu'une chance de capter l'attention du public si nous parlons de réduire les émissions de carbone. Malheureusement, le débat va porter sur le rejet de cette mauvaise idée, au lieu d'être centré sur des solutions possibles. Nous allons d'abord devoir gaspiller notre énergie à faire échec à la mauvaise idée du gouvernement, avant d'entreprendre le vrai débat.
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Monsieur le Président, c'est à nouveau un plaisir pour moi de m'adresser à une Chambre bien remplie pour parler du projet de loi . Je remarque que mon collègue de , qui savait que je prendrais la parole, a décidé d'écouter mon discours et je l'en remercie.
Je voudrais tout d'abord dire quelques mots sur le projet de loi et tenter de le présenter dans le contexte actuel dans le secteur de l'énergie.
En bref, dans le dossier du projet de loi , le gouvernement conservateur adopte une attitude que certains pourraient qualifier de cavalière à l'égard de la sécurité nucléaire et les deux autres partis de l'opposition appuient leur insouciance.
Ce projet de loi sera préjudiciable aux Canadiens ordinaires qui deviennent malades et meurent à la suite d'un accident nucléaire, qui perdent tous leurs biens en raison de la contamination ou qui voient mourir un de leurs proches à cause d'un cancer ou d'une maladie attribuable aux radiations.
Le plafond de 650 millions de dollars en matière d'indemnisation est loin d'être suffisant. Aux États-Unis, le maximum prévu est de 10 milliards de dollars. En Allemagne, il n'y a pas de limite. De nombreux pays songent à faire disparaître les limites. Aucune compagnie privée n'offre d'assurance à cet égard et un accident nucléaire pourrait coûter des milliards de dollars en raison des dommages, des blessures et des pertes de vie qu'il pourrait entraîner.
Parlons un peu de sécurité nucléaire. Malgré les assurances fournies par l'industrie nucléaire, les catastrophes survenues à Tchernobyl, Three Mile Island et Windscale prouvent que le risque d'accident nucléaire est bien réel. S'il me reste du temps plus tard, je vous parlerai de certains des accidents qui se sont produits dans cette industrie.
La sécurité est primordiale dans les installations nucléaires. Nous avons déjà vu le gouvernement accepter de mettre la vie et les biens des Canadiens en péril en gardant des réacteurs nucléaires dangereux en marche.
L'industrie nucléaire ne fait pas réellement partie des choix écologiques, contrairement à ce que certaines personnes voudraient nous faire croire. Les déchets nucléaires restent mortels pendant des milliers d'années.
Il y a quelques semaines, j'ai fait une brève déclaration sur l'uranium appauvri et les répercussions de l'utilisation d'un tel matériau dans la fabrication d'armes, non seulement pour les soldats des armées qui s'en servent, mais aussi pour les populations civiles de pays comme l'Irak.
Le Canada exporte de l'uranium aux États-Unis sur la foi de prétendues garanties qu'on ne s'en servira jamais pour fabriquer des armes. Toutefois, les experts affirment qu'une partie de ce que nous exportons aboutit dans les armes renfermant de l'uranium appauvri, ce qui met la vie des gens de ces régions en danger.
La dernière fois que j'ai parlé d'uranium appauvri, j'ai mentionné un film qui en illustrait très clairement les effets dommageables. J'ai demandé au gouvernement de faire du Canada le promoteur de l'interdiction et de l'abolition de toutes les armes à uranium appauvri dans le monde.
Une personne exposé à une grappe de combustible nucléaire mourra en moins d'une heure. On n'a trouvé aucune solution pour l'entreposage à long terme des déchets. Le traitement du combustible et des déchets a entraîné une contamination à grande échelle qui nécessite de vastes programmes de décontamination, par exemple, à Fort Hope, en Ontario, et à la mine Rayrock, dans les Territoires du Nord-Ouest.
Avant d'aller plus loin, je précise qu'il y a des gens sur notre continent et ailleurs dans le monde qui surveillent les effets des centrales nucléaires sur les populations environnantes. Il serait sage pour notre gouvernement d'étudier la possibilité de faire une étude complète, du moins au Canada, et peut-être de la coordonner avec une étude semblable qui serait faite par nos voisins au sud afin de voir les effets des centrales nucléaires sur la santé des populations qui vivent dans les environs.
Il y a à peu près un mois, j'ai rencontré Mme Leuren Moret, des États-Unis. Elle a été associée de très près au secteur nucléaire et elle fait partie des principaux dénonciateurs mondiaux des dangers de l'uranium appauvri. Elle analyse et coordonne des études sur les effets des centrales nucléaires sur la santé. En plus des cancers, il y a des éléments de preuve qui établissent un lien avec des taux élevés de diabète à proximité des centrales nucléaires. Je ne suis pas sûr si c'est un fait avéré, si c'est étayé par des données scientifiques, mais les inquiétudes justifient une enquête.
Notre pays devrait être un chef de file dans l'étude de ces questions et nous devrions convier le monde à enquêter afin de déterminer si le fait de vivre près d'une centrale nucléaire peut rendre malade ou causer la mort. C'est une possibilité que nous pourrions aborder au cours de notre débat.
La réponse ne réside pas dans la construction d'un plus grand nombre de réacteurs nucléaires. Dans le cadre du budget, le gouvernement investit dans l'énergie nucléaire. On semble vouloir affecter beaucoup d'argent au nucléaire, mais très peu aux solutions de rechange écologiques comme l'énergie solaire, l'énergie éolienne, l'énergie marémotrice, l'énergie géothermique et toutes sortes de solutions faisant appel à des sources d'énergie écologiques ayant très peu d'impact et laissant une empreinte beaucoup plus petite sur notre planète. Le gouvernement devrait favoriser davantage de telles sources d'énergie au Canada.
Si l'adoption du projet de loi permet l'expansion de l'énergie nucléaire au Canada, ce sera un grand pas en arrière à divers égards par rapport à la recherche de sources d'énergie plus écologiques. Nous devons veiller à ce que la production d'énergie ne crée pas de gaz à effet de serre, ce qui n'est pas le cas pour le nucléaire, mais nous devons également veiller à d'autres aspects comme celui des déchets, celui de l'extraction minière et celui des dangers d'une tragédie humaine ou autre qui pourrait survenir en cas d'accident, comme je viens de le dire.
Nous ne devrions pas tant investir dans cette source d'énergie écologique. Nous devrions envisager des sources d'énergie beaucoup plus écologiques. Dans quelques instants, je vais esquisser certains des éléments du plan du NPD en matière d'environnement.
Le projet de loi limite la responsabilité totale de l'exploitant d'une installation nucléaire à 650 millions de dollars, ce qui correspond à la norme minimale internationale. Ce n'est pas suffisant.
Avant de décrire certains accidents nucléaires qui ont eu des répercussions tragiques, je voudrais signaler qu'il existe d'autres façons de conserver l'énergie tout en protégeant l'environnement de notre planète. À cet égard, notre parti a notamment proposé un système de plafonnement et d'échanges. Il s'agit d'un mécanisme qui est au coeur du Protocole de Kyoto. Les deux candidats à la présidence des États-Unis se sont d'ailleurs déclarés favorables à ce système, de sorte qu'il représente un élément clé de la lutte contre les changements climatiques à l'échelle du continent. Le système de plafonnement et d'échanges a déjà été mis à l'essai en Europe. Le plan du NPD s'inspire donc des leçons apprises en Europe.
Mon collègue, le député d', a participé à une conférence de l'OCDE en Europe. Il a déclaré que les Européens adoptaient le système de plafonnement et d'échanges pour conserver l'énergie et lutter contre les changements climatiques. Les Européens ne prenaient pas comme bouée de sauvetage la stratégie erronée d'une taxe sur le carbone qui ferait souffrir le monde ordinaire, comme l'a signalé mon collègue de .
Quand nous avons demandé aux autres partis de rejeter la loi mort-née sur la qualité de l'air des conservateurs et de rédiger un meilleur texte, la loi que nous avons réalisée a été qualifiée de révolutionnaire par les groupes environnementaux. Au centre du projet de loi, il y avait un régime d'établissement du prix du carbone. Mais cela ne suffit pas. En plus de cette méthode, qui fonctionne, il faut créer des emplois dans le secteur de l'écologie.
Nous voudrions proposer de créer un fonds pour les emplois de cols verts. On consacrerait un milliard de dollars par an à former des travailleurs, des travailleurs déplacés ou des nouveaux venus sur le marché, pour leur donner les compétences requises pour faire fonctionner la nouvelle économie énergétique du Canada.
Au moyen de ce fonds d'apprentissage pour les emplois de cols verts, on obtiendrait par effet de levier des partenariats d'investissement avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, les Premières nations, les communautés Métis et Inuite et le secteur privé. Je le répète pour mes collègues conservateurs, le secteur privé.
Il faudrait en effet une formation très poussée dans des domaines comme l'installation et l'entretien de dispositifs éconergétiques ou d'énergies renouvelables dans des véhicules alimentés par de nouveaux carburants, la fabrication de pièces d'éoliennes et d'autres nouveaux dispositifs énergétiques, et la vérification de l'efficacité énergétique.
Il est lamentable qu'une entreprise canadienne privée spécialisée dans l'énergie solaire ait été obligée de partir s'installer en Allemagne parce qu'il n'y a pas assez de stimulants au Canada. À côté de cela, on octroie des allégements fiscaux aux grandes pétrolières qui font des milliards de dollars de profits. Il y a quelque chose qui cloche dans cette équation.
En même temps, comme on le voit avec ce projet de loi, on limite la responsabilité en cas d'accident nucléaire. Comme l'a dit ma collègue avant moi, il y a quelque chose qui ne va pas dans cette équation.
En Colombie-Britannique, la province d'où je viens, c'est BC Hydro qui régissait notre alimentation en eau et en électricité. Le gouvernement actuel de la province est en train d'escamoter progressivement ce contrôle public de l'eau et de l'énergie en créant ce qu'il appelle des entreprises publiques-privées qui construisent des barrages sur les cours d'eau pour produire de l'énergie et la vendre sur le marché libre.
Je tiens à souligner à quel point il est important que les hauts responsables du gouvernement prennent l'initiative. Nous ne pouvons plus continuer à dire qu'il faut laisser faire le marché et confier notre énergie au secteur privé. Chacun de nous doit...