:
Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi .
Comme les députés le savent, le a déposé l'année dernière le même projet de loi, qui propose des peines minimales obligatoires de manière à ce que les individus qui commettent des crimes graves liés à la drogue se voient imposer des peines assez sévères.
Le projet de loi ne prévoit pas des peines minimales pour tous les crimes liés à la drogue. La Loi réglementant certaines drogues et autres substances définit une structure complexe d'infractions et de peines. Les peines dépendent de la nature des activités interdites et du type de substance en cause.
Les substances les plus problématiques et les plus dangereuses, comme l'héroïne, la cocaïne, les méthamphétamines et la morphine, sont listées à l'annexe I. Les infractions liées à ces substances entraînent les peines les plus sévères. Ces peines peuvent aller jusqu'à l'emprisonnement à perpétuité.
Le cannabis est une drogue se trouvant à l'annexe II. Les infractions liées à cette drogue entraînent des peines moins sévères. Ce n'est que si une personne se trouve en possession d'au moins trois kilogrammes de cette drogue dans le but d'en faire le trafic qu'elle est passible de l'emprisonnement à perpétuité. La production de cannabis entraîne une peine pouvant aller jusqu'à sept années d'emprisonnement.
Les sanctions les moins sévères, qui vont jusqu'à 12 mois d'emprisonnement et qui sont imposées à la suite d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire, sont réservées aux infractions liées aux substances énumérées aux annexes IV et V.
Toutefois, il faut préciser que la plupart des activités interdites dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances sont légales si elles sont pratiquées par quelqu'un qui a l'exemption, la licence ou le permis approprié.
Par exemple, le Règlement sur l'accès à la marihuana à des fins médicales, entré en vigueur le 30 juillet 2001, permet aux personnes malades de demander une licence pour posséder ou cultiver de la marijuana à des fins médicales avec l'appui de leur médecin ou, dans certains, l'appui d'un spécialiste.
Ainsi, certaines personnes au Canada ne sont pas visées par l'infraction liée à la production qui figure dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Elles cultivent de la marijuana dans leur maison ou leur jardin. Le nombre de plants que la personne est autorisée à produire se calcule à l'aide d'une formule qui tient compte de la quantité de marijuana sèche dont le détenteur de permis a besoin quotidiennement.
Certains députés de la Chambre pourront penser que les infractions graves liées à la drogue n'exigent pas une réponse telle que ce que contient le projet de loi. Toutefois, ces infractions représentent un problème grandissant dans les villes canadiennes et des mesures législatives rigoureuses s'imposent.
D'après le bulletin Juristat de Statistique Canada intitulé « Statistiques de la criminalité, 2004 », les infractions liées à la culture de la marijuana ont plus que doublé au cours de la dernière décennie, passant d'environ 3 400 en 1994 à 8 000 en 2004.
D'après une étude sur la culture de marijuana en Colombie-Britannique, environ 39 p. 100 de tous les cas signalés de culture de marijuana étaient dans cette province. Entre 1997 et 2000, le nombre total de cas a augmenté de plus de 220 p. 100.
Même si le nombre d'installations de culture de marijuana en Colombie-Britannique s'est stabilisé entre 2000 et 2003, la quantité estimée de marijuana produite est passée de 19 729 kilos en 1997 à 79 817 kilos en 2003 — un sommet en sept ans — en raison de la taille et du perfectionnement des installations.
De récentes enquêtes menées par B.C. Hydro ont révélé l'existence de jusqu'à 17 000 installations de culture de marijuana. La hausse des activités illicites de production de marijuana ne s'est pas fait sentir qu'en Colombie-Britannique, mais partout au Canada.
On ne possède aucune donnée nationale sur la production de drogue synthétique. Des données de la GRC indiquent néanmoins un accroissement constant des activités de production. La GRC a effectué des saisies dans 25 lieux de production de drogue synthétique en 2002, dans 51 lieux en 2003, dans 60 en 2004 et dans 53 en 2005.
Sur les 60 saisies de 2004, 17 concernaient la production d'ecstasy et 40, la production de méthamphétamine. Sur les 53 saisies de 2005, 60 p. 100 concernaient la production de méthamphétamine et 30 p. 100, la production d'ecstasy.
Je devrais ajouter que nous avons entendu parler, au Comité de la justice, de certains des effets très troublants que peut avoir la méthamphétamine sur ceux qui en consomment et de la difficulté à lutter contre la production de cette drogue. On nous a fait part des effets dévastateurs que peut avoir cette drogue sur les personnes. Il est important de ne pas l'oublier car aucune collectivité, qu'elle soit en ville ou en milieu rural, n'est à l'abri du défi que pose la production de telles drogues.
Contrairement aux drogues mieux connues comme l'héroïne, la cocaïne ou la marijuana, la méthamphétamine pose des défis uniques. C'est une drogue synthétique. Elle ne dépend pas de la culture d'une plante. Sa production n'exige pas de connaissances ou de formation spécialisées, et ses précurseurs chimiques sont assez faciles et relativement peu coûteux à obtenir.
Une partie du problème réside dans le fait que ces précurseurs, tout à fait légaux pour l'instant, sont des produits chimiques très communs que bon nombre d'entre nous utilisons régulièrement dans nos activités quotidiennes mais qui, une fois combinés dans les proportions appropriées dans des laboratoires de méthamphétamine, donnent des résultats extrêmement néfastes. Ces facteurs rendent la production de méthamphétamine très attrayante tant pour le trafiquant que pour le toxicomane.
La méthamphétamine constitue aussi une menace pour les forces de l'ordre, qui doivent lutter à la fois contre les petits laboratoires clandestins et les super laboratoires contrôlés principalement par des organisations criminelles.
Les petits laboratoires produisent des quantités relativement faibles de méthamphétamine et ne sont généralement pas liés aux grandes organisations qui s'adonnent au trafic de stupéfiants. Certains facteurs, dont la présence de recettes facilement accessibles sur Internet, ont contribué à la multiplication des petits laboratoires. En effet, l'utilisation répandue d'Internet a facilité la dissémination de la technologie permettant de produire de la méthamphétamine dans de petits laboratoires. Un tel partage de l'information permet la vaste dissémination de ces techniques à quiconque a accès à un ordinateur.
À part la marijuana, la méthamphétamine est la seule drogue illégale de consommation courante et dont on abuse couramment que le consommateur peut fabriquer lui-même. Compte tenu de la relative facilité avec laquelle les fabricants et les « cuisiniers » peuvent obtenir les recettes et les ingrédients et de la simplicité du processus de fabrication, il est facile de comprendre pourquoi l'usage de cette drogue qui crée une forte dépendance se répand aussi facilement.
La consommation de méthamphétamine entraîne bon nombre de répercussions sur les consommateurs eux-mêmes, sur nos collectivités et sur la société en général. La qualité de vie des consommateurs de méthamphétamine est généralement grandement réduite. Plusieurs consommateurs voient leurs relations familiales brisées, vivent un isolement social, subissent des modifications de la personnalité, éprouvent des difficultés sur le plan scolaire, perdent leur emploi, tombent dans la criminalité, ont des récidives de maladies mentales pré-existantes, développent des psychoses dues à la drogue, subissent des dommages au cerveau, mettent leur santé en danger et perdent la forme physique.
En outre, les consommateurs sont souvent peu enclins à chercher de l'aide parce que la méthamphétamine leur donne l'impression d'avoir beaucoup d'énergie et d'être très productifs. Dans les collectivités où ils vivent, on peut constater des délits mineurs, des troubles sociaux, les risques qui s'ensuivent pour la santé, et une augmentation de la violence ainsi que du nombre de laboratoires de production à grande échelle et de trafiquants de drogue.
Les laboratoires de production de méthamphétamine représentent en outre un danger sérieux pour la sécurité et la santé de ceux qui y travaillent ou qui se trouvent à proximité. La production de méthamphétamine peut causer de sérieux préjudices corporels en raison des explosions, des incendies et des brûlures chimiques qu'elle peut causer et des fumées toxiques qu'elle dégage. Ce genre de production constitue un problème environnemental. Le nettoyage des lieux est difficile, et la vie et la santé de la population environnante sont mises en péril.
Les dommages indirects causés par la méthamphétamine englobent les répercussions sur la famille, sur le personnel enseignant et les élèves, sur les responsables de l'application de la loi, sur les services paramédicaux, sur les services des incendies, sur les professionnels de la santé, ainsi que sur les entreprises et les propriétaires fonciers. Tous ces gens subissent les répercussions indirectes de la consommation de méthamphétamine.
Les secouristes d'urgence peuvent être exposés aux sous-produits de la production, notamment à la violence et aux agressions des toxicomanes, ainsi qu'à la frustration et au stress causés par des ressources inadéquates ou des restrictions judiciaires qui les empêchent d'intervenir.
Les parents peuvent aussi subir un stress émotionnel et financier pendant que leur enfant suit un traitement, sans compter qu'ils peuvent être obligés de s'absenter de leur travail, en plus d'éprouver des sentiments de peur, d'embarras, de honte et de culpabilité. La famille peut aussi être aux prises avec des crimes perpétrés par des gangs, de la contamination, des actes de violence et des problèmes de discipline parce que leur enfant continue de consommer cette drogue.
De plus, les frères, les soeurs et les enfants des consommateurs de drogues peuvent être victimes de négligence ou d'abus et ils subissent parfois une influence négative de ces malheureux modèles familiaux. Le personnel des écoles et les élèves peuvent avoir à composer avec des consommateurs qui ont des problèmes de comportement, qui perturbent les cours, qui sont souvent absents et qui ont une influence négative sur leurs pairs, sans oublier, je le répète, les risques de contamination et le stress causé par le fait de ne pas disposer de suffisamment de ressources pour faire face à ces problèmes.
Nous qui représentons des collectivités, d'un océan à l'autre, nous savons tous qu'une collectivité peut être exposée à la violence, aux dommages causés aux biens, aux vols d'identité, à une diminution de la sécurité publique, à la contamination de lieux publics par des déchets de fabrication et à des employés peu fiables ou en nombre insuffisant qui compromettent la sécurité de leurs collègues de travail.
Le démantèlement de laboratoires et l'enlèvement des produits chimiques qui s'y trouvent peuvent également entraîner des risques pour la santé et des coûts importants.
Comme parlementaires, nous sommes les législateurs du Canada. Nous devons veiller à ce que nos lois règlent comme il se doit les problèmes graves sur lesquels nous nous penchons. Notre gouvernement a réagi aux dangers liés à la production de métamphétamine par ce projet de loi qui propose des peines minimales obligatoires pour ceux qui produisent cette drogue et en font le commerce.
Les modifications proposées à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances ne visent pas seulement à imposer des peines minimales. Le projet de loi contient une disposition permettant à certains délinquants qui seraient normalement visés par les peines minimales obligatoires de participer à un programme dispensé par ce qu'on appelle un tribunal de traitement de la toxicomanie.
Le tribunal de traitement de la toxicomanie est un modèle inédit d’intervention en toxicomanie en vigueur dans le système de justice pénale. Grâce au tribunal de traitement de la toxicomanie, des personnes dont les activités criminelles résultent de leur consommation, par exemple, des infractions liées à la drogue, comme la possession ou la consommation de stupéfiants, ou le trafic non commercial ou des infractions contre les biens commises pour s’acheter de la drogue, comme les cambriolages ou le vol à l’étalage, ont la possibilité d’être traitées sous surveillance judiciaire au lieu d’être incarcérées.
Pour être admissibles, ces personnes doivent parfois répondre à des exigences imposées par des cours ou des systèmes judiciaires individuels. Un accusé admissible a deux choix: le programme du tribunal de traitement de la toxicomanie ou le processus traditionnel de justice pénale, ce dernier pouvant mener à différentes mesures, allant d’amendes à l’incarcération.
En général, pour être officiellement admis à un programme du tribunal de traitement de la toxicomanie, la personne doit plaider coupable aux accusations portées contre elle. Par la suite, si elle ne se conforme pas ou ne prend pas part à tous les aspects du programme, les conséquences peuvent aller d’une réprimande officielle ou la révocation de la liberté sous caution, à la cessation du programme et à la condamnation à une peine d’emprisonnement ou de surveillance communautaire.
Un modèle de tribunal de traitement de la toxicomanie bien conçu et mis en oeuvre compte plusieurs volets clés, notamment: identification précoce de candidats répondant aux critères d’admissibilité; accès à des programmes intégrant au traitement des contrevenants et de la toxicomanie des pratiques factuelles qui répondent aux besoins individuels des participants; communication approfondie et constante entre le tribunal et le participant; supervision intensive et dépistage antidrogue pour veiller à l’abstinence de toute substance intoxicante; renforcement positif pour assurer la conformité au programme; partenariat entre les tribunaux de traitement de la toxicomanie et des organismes communautaires; formation continue des intervenants du domaine pour favoriser le fonctionnement efficace des tribunaux de traitement de la toxicomanie; recours à une démarche non conflictuelle au sein du système judiciaire pour garantir la sécurité publique et respecter les droits des participants; évaluation complète pour contrôler les objectifs du programme et en mesurer l’efficacité.
Nous devrions tous nous entendre là-dessus. Nous voulons des programmes qui fonctionnent. Si un programme ne marche pas, il est évident qu'il comporte de graves défauts et qu'il faut l'examiner en profondeur. Si un programme fonctionne, alors, nous devons encourager la participation à ce programme.
Comparativement aux approches classiques de la justice pénale, les tribunaux de traitement de la toxicomanie permettent à la clientèle motivée d’éviter la prison et d’autres sanctions, d’accéder rapidement à des services de traitement grâce à leurs ressources et d’encourager les personnes à terminer leur traitement grâce à une surveillance et une supervision intensives et fréquentes de la cour. De toute évidence, le premier objectif est de traiter les toxicomanes et d'en faire à nouveau des membres utiles de la société.
La participation au programme des tribunaux de traitement de la toxicomanie est intense et exigeante. Elle comprend la présence devant le tribunal jusqu’à deux fois par semaine, des tests d’urine au hasard et la participation aux traitements, quotidiennement puis de façon hebdomadaire, selon la progression du client dans le programme. Dans certains endroits, il existe un seul fournisseur de traitements primaires, par exemple, le Centre de toxicomanie et de santé mentale à Toronto, alors que dans d’autres, de nombreux organismes communautaires fournissent des traitements primaires.
Les programmes judiciaires de traitement de la toxicomanie sont très prometteurs. Nous surveillerons leur efficacité. Cet important projet de loi a été rédigé de manière à ne pas avoir d'effets négatifs sur ces programmes de traitement.
Les Canadiens demandent que le droit pénal inflige des peines suffisantes à ceux qui commettent des crimes graves liés à la drogue. Le projet de loi répond à cette demande et impose des peines minimales obligatoires rigoureuses, mais justes. J'exhorte tous les députés à appuyer le projet de loi.
:
Monsieur le Président, je profite de cette occasion pour dire quelques mots à propos du projet de loi et à propos du thème de la justice telle qu'entrevue par ce gouvernement.
J'aimerais dire que c'est avec grand plaisir que je parle de ce projet de loi et du programme de justice de ce gouvernement, mais, en fait, cela soulève plusieurs inquiétudes chez moi. En effet, ce gouvernement a présenté et présentera des projets de loi qui ne fonctionnent pas.
[Traduction]
Je suis très inquiet lorsque je lis des textes de loi qui n'atteignent pas le but visé. J'ai un peu de temps pour en parler.
J'ai écouté le brillant et éloquent , qui représente une circonscription voisine de la mienne. Nos électeurs ne sont pas très éloignés. Je suis très préoccupé lorsque je l'entends dire, peut-être avec naïveté, que ce projet de loi atteindrait le but visé.
Le gouvernement annonce ses projets de loi sur un arrière-plan bleu et parle du nouveau gouvernement. Les ministres se pavanent dans des circonscriptions que les conservateurs aimeraient conquérir ou dans celles qu'ils conservent de peine et de misère. Ils présentent des projets de loi de justice avant d'en avoir discuté avec les intervenants, avant d'en avoir discuté au Comité de la justice et avant d'avoir consulté une commission de réforme du droit. Les Canadiens trouveraient intéressant d'apprendre qu'il n'y a pas de commission de réforme du droit. Il n'existe aucun organe qui puisse examiner et promulguer les lois qui nous touchent tous et qui ont le mordant qu'elles sont censées avoir.
Le gouvernement peut tenter d'obtenir un petit trois minutes aux nouvelles du soir pour dire aux Canadiens qu'il mettra fin à la production de drogues et qu'il emprisonnera tous les producteurs plus longtemps. Il croit que cela réglera le problème. C'est naïf, pour ne pas dire sournois. Le gouvernement conservateur a présenté des projets de loi au Parlement, puis il a prorogé les Chambres, de sorte que ces projets de loi ne sont jamais entrés en vigueur. Il a présenté ensuite les mêmes projets de loi et de nouveaux projets de loi en sachant qu'ils n'entreront jamais en vigueur eux non plus. C'est presque sournois. Si je siégeais en face, je connaîtrais probablement le véritable plan, mais du point de vue de la plupart des gens raisonnables qui s'intéressent aux questions de justice pénale, y compris les policiers, les procureurs et les travailleurs sociaux, le programme de justice des conservateurs est voué à l'échec.
Les conservateurs sont au pouvoir depuis deux ans maintenant. Ils ne peuvent donc plus prétendre qu'ils forment un nouveau gouvernement. Si nos chaussettes étaient aussi vieilles, nous ne dirions pas que nous avons de nouvelles chaussettes. Nous avons une vieille chaussette devant nous. Elle sent fort, d'ailleurs. J'en déduis donc que les conservateurs ne savent pas vraiment comment rendre la société plus sûre.
Il existe pourtant une question non partisane sur laquelle tous les parlementaires s'entendent. Nous voulons des collectivités sûres. Le gouvernement conservateur, cette vieille chaussette, veut faire passer les députés de l'opposition comme des gens qui ne se soucient ni de la sécurité ni de la société. C'est peut-être exactement ce qui a motivé certains d'entre nous à se faire élire à la Chambre. Je vois des maires de ce côté-ci de la Chambre. Je vois des gens qui ont de l'expérience dans des organisations de mesures d'urgence, qui ont fait partie de commissions de police et qui ont dirigé de telles commissions. Laisser entendre que des parlementaires ne veulent pas sauver la société est aussi répugnant que le vieux bas qu'est le programme de justice du gouvernement conservateur.
Ces députés ne sont pas sérieux. Ils ont d'ailleurs déjà fait une autre annonce du genre devant un arrière-plan bleu, loin des responsables de l'application des lois. Ils avaient annoncé qu'ils créeraient 2 500 nouveaux postes d'agents de police au Canada. Or, ils ne l'ont pas fait.
La plupart des lois proposées par les conservateurs nécessitent une certaine présence policière, et c'est un euphémisme. Je dirais que la plupart des activités liées à la détection des installations de fabrication de drogues nécessiteront le déploiement d'importantes ressources policières.
Le secrétaire parlementaire saura que dans la région de Dieppe-Moncton-Riverview, l'opération mixte de détection des drogues allait bon train même avant que la GRC ne prenne le relais des services de police municipaux. Cette opération fonctionne encore très bien. Comme tout le reste, elle héritera des nouvelles responsabilités créées par cette loi, qui forcera des policiers bien entraînés à se demander si une plante de marijuana à deux tiges correspond à une seule ou à deux plantes pour savoir si le total est inférieur ou supérieur à 500. Aucunes ressources additionnelles n'ont été prévues pour répondre à ce type de problèmes. Le gouvernement ne tient pas vraiment à son programme en matière de justice pénale.
Il faut aussi mettre les Canadiens en garde contre l'une des dispositions du projet de loi qui peut sembler provenir d'une bonne intention. Encore une fois, je voue un très grand respect au secrétaire parlementaire. Lorsqu'il a analysé les mesures contenues dans ce projet de loi, il croyait sûrement protéger les zones scolaires et les gens qui fréquentent les lieux publics en acceptant d'inclure la suggestion de son ministre au sous-alinéa (ii) de l'article 1, qui prévoit l'imposition d'une peine minimale obligatoire de deux ans si une personne:
(A) a commis l’infraction à l’intérieur d’une école, sur le terrain d’une école ou près de ce terrain ou dans tout autre lieu public normalement fréquenté par des personnes de moins de dix-huit ans ou près d’un tel lieu, [...]
Si nous savions en tous temps où se trouvent tous les jeunes de moins de 18 ans, il y aurait beaucoup de parents, de directeurs d'école et de policiers contents. C'est tellement vague que ce ne peut qu'échouer. J'espère que les membres compétents du Comité de la justice pourront y remédier lorsque le projet de loi, le cas échéant, leur sera renvoyé. Les conservateurs étaient tellement pressés de faire une petite conférence de presse devant leur arrière-plan bleu en plastique qu'ils ont encore une fois omis de rédiger un projet de loi convenable que nous pourrions examiner et dont nous pourrions dire avec satisfaction qu'il va changer notre société.
J'ai exercé le droit pendant près de 20 ans. J'ai été maire d'une ville. À l'instar de tous les députés, je sais que l'abus de drogues est un problème dans n'importe quelle société occidentale. C'est un problème dans n'importe quelle société du monde, un problème contre lequel luttent beaucoup de personnes, notamment les parents. Les enseignants, les médecins, les infirmières et des gens de tous les milieux — non seulement les membres du Comité de la justice qui sont députés du Parti conservateur du Canada — sont tous concernés par le problème. Pourquoi ne se donne-t-on pas la peine de consulter les intervenants et de rédiger des projets de loi qui fonctionnent en matière de lutte contre la drogue?
Il faut se pencher sur l'attitude problématique qui consiste à traiter le toxicomane comme un criminel. Malheureusement, faute de temps, nous ne pourrons pas le faire ce soir.
[Français]
Le projet de loi contre les stupéfiants n'offre pas l'équilibre nécessaire pour réduire la délinquance, la toxicomanie et la consommation de drogue, pas plus qu'il ne protège la santé publique. L'aspect de la santé publique est très important dans ce débat.
Au lieu de ces promesses, à défaut de vrais projets de loi, nous nous retrouvons avec une stratégie qui vient du Sud, des États-Unis et, incidemment, des politiques du gouvernement Bush. Or, ces politiques américaines ne font rien de plus que de surpeupler les prisons américaines.
Ce projet de loi nous mènera sur la même voie que celle empruntée par les États-Unis. Il y aura beaucoup plus de personnes dans les prisons du Canada, si ce projet de loi et les autres projets de loi conservateurs sont adoptés et entrent en vigueur dans ce pays. Toutefois, cela ne résout pas le problème de la consommation de drogue dans ce pays.
[Traduction]
Il ne fait aucune doute que les peines sont très importantes et qu'elles font partie intégrante de la solution. J'attends avec intérêt que le Comité de la justice entende des témoignages selon lesquels les peines sévères, les peines minimales obligatoires, auraient pour effet de faire diminuer la consommation et l'abus de drogues et, par conséquent, la criminalité. J'ai bien hâte de prendre connaissance de ces études, mais j'ai peur qu'elles n'existent pas.
Lutter contre la criminalité en imposant des peines plus longues ne fonctionne pas. Je reviens à ma prémisse: nous sommes tous désireux de rendre nos collectivités et le Canada plus sûrs. Si nous avions la preuve incontestable que les peines longues, les peines minimales obligatoires, favorisent une société plus sûre, pourquoi serions-nous contre?
Les bons projets de loi présentés au Parlement sont ceux qui reposent sur des preuves. Il faut démontrer qu'en adoptant le projet de loi, la criminalité diminuera. Nous ne pouvons pas seulement nous contenter de le dire devant un arrière-plan bleu en plastique en regardant les caméras de télévision. Des peines plus sévères pour les gens qui produisent des drogues et en font le trafic n'effraieront que les petits producteurs et le crime organisé comblera les manques.
Partout au Canada, on se trouve de nouveau aux prises avec des problèmes de gangs et de crime organisé. Il n'existe pas de solution miracle à ces problèmes, et ce projet de loi est loin d'être une solution. Nous verrons ce qui ressortira des témoignages lors des travaux du comité, mais il semble que, tel que le projet de loi est rédigé, il vise surtout les nombreux petits producteurs. Comme l'a indiqué le , ce sont des gens qui se servent de produits d'entretien ménager et d'objets d'usage courant pour fabriquer leur drogue.
Bien que personne n'approuve les activités des petits producteurs, il reste qu'en concentrant tous les efforts à leur faire la lutte, on néglige un pan important de la problématique. Si nous ne nous occupons pas des dépendances et de leurs conséquences sociales, la demande sera toujours aussi présente sur le marché de la drogue, ce qui réduira grandement l'efficacité des mesures prises.
On dirait que, selon le dogme des républicains que sont devenus les conservateurs du pays, la lutte contre la drogue doit se faire uniquement sur le front de l'offre. Si l'offre disparaît, le problème disparaît aussi. Voilà une philosophie qui n'a pas fonctionné pendant les années 1920 et 1930, à l'époque de la prohibition. Quand nous pensons éradiquer l'offre, nous n'en faisons disparaître qu'une partie. Tant qu'il y a de la demande, il finit par y avoir de l'offre.
Je parle comme un capitaliste convaincu et j'en demande pardon à mes amis conservateurs. Mais, c'est bel et bien la loi de l'offre et de la demande qui entre en ligne de compte dans ce dossier. Il faut réduire la demande. Alors, comment s'y prend-on pour qu'il n'y ait plus de demande pour la méthamphétamine en cristaux? Comment s'arrange-t-on pour qu'une adolescente ne se fasse pas administrer une drogue du viol lors d'une soirée? Si nous ne voulons pas qu'il y ait consommation de drogue, nous devons réduire la demande pour la drogue. Or, le projet de loi est muet à ce sujet.
Eugene Oscapella, un avocat spécialisé en droit pénal qui donne des cours sur les politiques de lutte contre la drogue, devrait faire partie des experts appelés à témoigner devant le comité. Lorsque nous poserons des questions au ministre le premier jour des audiences, nous veillerons à ce qu'on communique avec cet expert des politiques de lutte contre la drogue qui habite ici même, à Ottawa. Le ministre, le secrétaire parlementaire ou un autre membre de la bande des vieilles chaussettes auraient intérêt à lui demander conseil. M. Oscapella leur dirait que le crime organisé se fiche des lois. Avec les modifications proposées dans la loi, le gouvernement ne fait qu'aider le crime organisé.
Ne serait-ce pas épouvantable qu'un gouvernement au Canada aide le crime organisé? Ce n'est sûrement pas l'intention. Je vais donner le bénéfice du doute à mes collègues de l'autre côté. Cela ne peut pas être leur intention, mais en présentant une aussi piètre mesure législative, c'est bien l'effet qu'ils pourraient obtenir.
Le projet de loi doit proposer une réaction équilibrée aux problèmes de consommation abusive d'alcool et de toxicomanie, qui comprenne évidemment la prévention, l'application de la loi et des mesures visant à réduire les méfaits.
Ai-je mentionné que le gouvernement a promis 2 500 agents de police et 1 000 agents de la GRC, au total, mais qu'il n'a pas tenu promesse? Lorsqu'on promet de financer quelque chose, il ne reste qu'à faire adopter un budget. Je crois que le gouvernement a fait adopter deux choses appelées « minibudgets ». Il a donc eu l'occasion d'agir.
Ni la prorogation ni l'arrière-plan bleu lors des annonces n'auraient pu empêcher le — pour peu que le et le le veuillent vraiment — de verser les fonds promis pour assurer l'ajout de 3 500 agents de police dans les rues maintenant ou, dans le cas présent, dans les champs du pays où l'on cultive la marijuana.
Or, il n'y a personne dans les champs où se trouvent ces plantations. Le gouvernement a-t-il joint le geste à la parole? Non, il joint simplement la parole à la parole.
En ce qui a trait aux peines minimales obligatoires pour les infractions liées à la drogue, nous avons recueilli énormément d'information au cours des audiences sur les projets de loi et , mais plus particulièrement pour ce dernier. Encore une fois, s'ils avaient un effet, nous les appuierions.
Dans certaines situations, il a été démontré que les peines minimales obligatoires ont permis de dissuader la commission d'actes criminels. Cependant, pensons-nous vraiment qu'en visant, par exemple, le menu fretin, à la fin de la chaîne, qui produit de la drogue dans sa cuisine ou qui consomme à la maison, et en l'incarcérant, nous pourrons mettre un terme à l'ensemble de la production de cette drogue et permettre à ces personnes de devenir des membres productifs de la société?
En quoi cela contribue-t-il à lutter contre la toxicomanie? Où sont les ressources supplémentaires dont devraient disposer le Service correctionnel du Canada, les agents de probation de l'ensemble du pays, les agents des services correctionnels de l'ensemble du pays, ainsi que les procureurs généraux de toutes les provinces canadiennes, qui auront besoin de ressources financières pour tous leurs agents qui font le suivi des ordonnances de probation et des peines d'emprisonnement avec sursis? Où trouverons-nous tout l'argent qui sera nécessaire à l'application de ces lois?
Au lieu de l'argent nécessaire, nous avons une pile de lois dont beaucoup ne devaient pas être adoptées, beaucoup qui sont restées en plan au moment de la prorogation et beaucoup qui démontrent clairement que le gouvernement n'a pas vraiment l'intention de durcir le ton face au crime ou de lutter contre le crime. En fait, ce qui l'intéresse, c'est de passer sur les ondes.
Que pouvons-nous faire pour sortir de ce bourbier? Nous pouvons en fait mettre la politique de côté, définir ce qu'est une société sûre, joindre le geste à la parole et renvoyer le projet de loi au comité pour déterminer ce qu'il est possible de faire pour réduire le nombre d'installations où on produit la drogue qui, si elles ne sont pas détectées, risqueraient de détruire notre société
Nous pourrions également discuter des ressources nécessaires au financement de ce projet de loi. Nous pourrions débarrasser le projet de loi de ces définitions absurdes qui font une distinction entre 500 et 501 plants sur les lieux ou à proximité d'un endroit où les jeunes se rendent. Nous pourrions travailler ensemble sur le projet de loi et, pourquoi pas, accoucher d'un projet de loi qui ferait ce qu'il est censé faire, à savoir modifier la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, ainsi que d'autres lois en conséquence, de façon à rendre notre société plus sûre. Nous sommes tous en faveur d'une société plus sûre. Ne ménageons donc pas nos efforts pour la concrétiser.
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Monsieur le Président, j'ai le plaisir d'intervenir aujourd'hui à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi . Dans ce projet de loi, le gouvernement veut cibler les producteurs et les trafiquants de drogue en leur imposant des sanctions plus sévères. Cette volonté s'inscrit dans une vaste stratégie antidrogue dévoilée il y a quelques mois par le , et dotée d'un budget de plus de 64 millions de dollars.
Si l'objet du projet de loi semble clair, j'estime que son but ultime, la réduction de la consommation de stupéfiants, doit se faire avec des mesures nuancées qui permettront l'obtention de résultats véritablement positifs. C'est pourquoi il est important de bien comprendre ce projet de loi, de saisir ce qui mérite d'être promu et de dévoiler les problèmes qu'il cache.
En premier lieu, je souhaite mentionner que la législation actuelle possède déjà de bons outils pour lutter contre les drogues. En effet, depuis 1997, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances interdit l'importation, l'exportation, la production, la vente, l'acquisition et la possession de drogues et de substances contrôlées, sauf lorsqu'un règlement permet de le faire à des fins médicales. À l'époque, la loi créait une nouvelle infraction, soit celle de la production d'une substance contrôlée. Elle modifiait également certaines peines afin de se conformer aux décisions de la Cour suprême, laquelle avait statué qu'une peine minimale de sept ans pour l'importation et l'exportation de stupéfiants était beaucoup trop sévère.
D'autre part, la loi définit l'infraction de trafic de drogues comme le fait de vendre, donner, administrer, transporter, expédier ou encore livrer une des drogues énumérées aux annexes I et IV. La loi vise aussi les précurseurs des substances identifiées aux annexes I et IV. Je rappelle que les précurseurs sont des ingrédients qui entrent dans la fabrication d'une substance désignée dans les annexes.
Maintenant que nous connaissons le contexte de cette loi, je voudrais porter mon attention sur une facette inquiétante que j'ai dénoncée à plusieurs reprises dans le cadre des projets de loi antérieurs, à savoir les peines minimales. À l'égard des peines minimales plus lourdes, il est clair que le Bloc québécois n'a jamais remis en question la pertinence de prendre des mesures pour réduire la consommation et la production de stupéfiants.
N'importe qui serait tenté de dire, à première vue, que ce projet de loi offre une sécurité renforcée et des moyens pour lutter contre les drogues. Toutefois, avant de tirer des conclusions hâtives, le premier geste à poser avant de s'attaquer à un problème est de le comprendre dans son entièreté, d'en cerner l'ampleur et d'en évaluer les conséquences. Il faut mettre les choses en perspective.
Il est bon de rappeler aux gens que Statistique Canada indiquait, en 2006, avant même que le projet de loi n'ait été mis sur la table, que le taux global de criminalité au pays fondé sur les affaires signalées à la police a atteint son plus bas niveau en plus de 25 ans, grâce à la diminution des crimes sans violence. Par rapport à l'année précédente, il s'agit d'une diminution de 3 p. 100 du taux de criminalité, et de 30 p. 100 par rapport à 1991. Lorsque l'on considère le problème dans son ensemble, on constate que la criminalité est en baisse au Canada. Il s'agit d'une tendance lourde que l'on observe depuis plusieurs années.
Évidemment, le Bloc québécois ne veut en aucun moment banaliser la situation. Un drame est toujours un drame de trop, et les statistiques cachent des tragédies humaines qui touchent toutes les familles, sans discrimination. Il faut se rendre compte que le système actuel produit des résultats positifs et qu'il faut éviter de sacrifier ces gains en adoptant des mesures dont les effets n'ont pas été pleinement examinés.
Le projet de loi mise beaucoup sur les peines minimales, précisément sur l'effet dissuasif censément obtenu par des peines plus lourdes. En fait, cela n'a jamais été clairement démontré. Des peines plus lourdes sont appliquées chez nos voisins du Sud qui obtiennent des résultats plus ou moins convaincants. Je dirais même que les peines minimales imposant la détention ne semblent pas du tout avoir l'effet de dissuader davantage par rapport à un encadrement adéquat dans la communauté.
Néanmoins, comme membre d'un parti responsable qui ne ferme pas les yeux sur la réalité, il faut reconnaître que les infractions relatives aux drogues sont en légère hausse.
À titre d'exemple, toujours selon Statistique Canada, le nombre total d'infractions relatives aux drogues a augmenté de 2 p. 100 en 2006. En fait, le portrait de la consommation change légèrement. Les infractions liées au cannabis constituent environ 60 p. 100 de toutes les infractions reliées aux drogues. En contrepartie, les infractions liées à cette drogue, par exemple, les infractions de possession, étaient en baisse de 4 p. 100.
Nous comprenons bien la situation et nous sommes au fait des problématiques. D'ailleurs, très récemment, mon collègue d' et moi-même avons étudié le projet de loi afin d'envisager la meilleure manière de s'attaquer à l'émergence de la consommation de la métamphétamine.
Nous contribuons effectivement à la lutte contre la drogue. C'est justement ce qui m'amène à souligner un élément positif du projet de loi . En effet, le projet de loi permet aux juges, avec l'accord du poursuivant, d'imposer aux délinquants de suivre un traitement de désintoxication. Si le contrevenant réussit son traitement, il évite la peine minimale. Je crois que c'est une bonne voie pour la réhabilitation des individus.
Je crois donc que nous allons référer le projet de loi au comité afin d'étudier plus en profondeur ce projet de loi.