-- Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de m'adresser à la Chambre relativement à la très importante question qui vient d'être soulignée dans la motion présentée.
Je veux commencer en faisant quelque chose qui se produit rarement ici, c'est-à-dire exprimer mon respect envers les députés d'en face et les remercier de participer à cet important débat. Je suis fermement convaincu que cet effort sincère en vue d'en arriver à un consensus dans cet important dossier est de bon augure pour le Parlement et pour l'avenir de notre pays.
À l'heure actuelle, ce dossier est peut-être le plus important pour le Parlement et pour notre pays. Ses répercussions sont vastes et importantes pour les Canadiens, les Afghans et toute la communauté internationale.
Il convient aussi de souligner de façon spéciale le rôle du , du chef adjoint de l'opposition et des autres députés du Parti libéral, qui ont favorisé, à un moment critique, un consensus susceptible de déboucher sur l'adoption d'une position vraiment canadienne. Cela est rare à la Chambre, où les débats sont souvent empreints de partisanerie. C'est aussi un bel exemple d'exercice démocratique, qui reflète précisément ce que nous voulons protéger et promouvoir en Afghanistan.
En laissant de côté nos divergences politiques et nos lignes de parti face à un tel dossier, nous montrons à nos concitoyens et à tous ceux qui nous font confiance que nous sommes capables de voir les choses dans un contexte plus large, que nous sommes capables de nous entendre relativement à une cause pour laquelle d'autres dans notre pays sont littéralement prêts à donner leur vie, afin d'assurer l'équité et la justice.
Le fait que l'on puisse s'entendre sur cette motion rappelle des épisodes antérieurs de l'histoire de notre pays au cours desquels nos soldats ont été déployés, des épisodes au cours desquels le patriotisme a primé sur la partisanerie.
Personnellement, je suis heureux que nous semblions disposés à laisser de côté la rancoeur et les attaques personnelles, et à montrer clairement aux Canadiens, aux Afghans et à tous ceux dans le monde qui suivent ce débat, y compris les talibans, que nous sommes unis.
Nous sommes un Parlement sérieux, réceptif et responsable lorsque vient le moment de se pencher sur des dossiers importants. Les gestes posés ici, pendant que nos soldats sont en mission dans des régions éloignées afin d'y promouvoir les valeurs qui nous sont chères, témoignent d'une unité parlementaire qui nous grandit et qui favorise le respect et la crédibilité des titulaires de charge publique.
Comme l'a déclaré le , le gouvernement accepte, dans ses grandes lignes, le rapport et les recommandations du groupe d'experts indépendant sur le rôle futur du Canada en Afghanistan.
Je veux remercier John Manley, Pamela Wallin, Derek Burney, Paul Tellier et Jake Epp pour le travail remarquable qu'ils ont accompli et leurs réflexions importantes sur le rôle futur du Canada en Afghanistan. C'est un rapport complet et bien rédigé. Il enrichira beaucoup le débat à la Chambre.
Sous réserve des conditions énoncées dans la motion présentée à la Chambre, le gouvernement est d'accord pour que le rôle du Canada comme gardien de la sécurité à Kandahar soit prolongé jusqu'à la fin de 2011. Ce moment coïnciderait avec les repères sur le développement donnés dans le Pacte pour l'Afghanistan.
Le gouvernement prend déjà des mesures pour appliquer plusieurs des principales recommandations faites par le groupe d'experts indépendant. Un nouveau comité du Cabinet a été créé.
[Français]
De plus, un groupe de travail sur l’Afghanistan a été mis sur pied au Bureau du Conseil privé. Il est composé des membres seniors du gouvernement et fonctionnaires. Avec M. David Mulroney du ministère des Affaires étrangères, il a rendu possible la coordination de ce dossier durant la dernière année.
Ces deux groupes amélioreront la coordination du travail du gouvernement en Afghanistan. Afin de continuer à assumer notre rôle actuel en Afghanistan, nous sommes en pourparlers avec nos alliés et nos partenaires afin qu’il y ait davantage de troupes à Kandahar.
Nous explorons également des options qui s'offrent à nous pour que nos militaires aient l’équipement dont ils ont besoin.
[Traduction]
Jusqu'à maintenant, la Pologne a offert de mettre à la disposition du Canada deux hélicoptères de transport moyens sur le terrain d'aviation de Kandahar. Nous remercions chaleureusement la Pologne pour cette contribution et nous espérons que d'autres lui emboîteront le pas, car nous savons que chaque petite contribution est utile.
Le gouvernement tient à ce que nos concitoyens servant en Afghanistan soient en mesure de réussir. S'ils sont bien équipés et bénéficient d'un appui suffisant, nous croyons que les résultats visés seront atteints plus rapidement.
Je demande à tous les députés d'examiner attentivement le rapport du groupe d'experts indépendant. Il est complet et instructif dans ses recommandations.
Je recommande aussi vivement à tous les députés d'appuyer la motion qui nous est proposée. Cela compte pour les Canadiens, nos soldats et la communauté internationale. Le monde, y compris le peuple afghan et ses oppresseurs, nous regardent. Toute réduction de l'aide aura pour effet de rendre les terroristes plus hardis tout en leur permettant de reprendre des forces pour revenir semer le chaos dans la population afghane.
Les Canadiens peuvent être fiers de ce que nous faisons, de notre rôle de chef de file de la communauté internationale dans ses efforts pour stabiliser l'Afghanistan. Nous avons déjà joué ce rôle auparavant: durant les deux guerres mondiales et en Corée.
Chaque fois que le monde a eu à serrer les rangs face à un agresseur, le Canada n'a pas tardé à faire sa part et n'a pas vacillé dans son appui. Encore une fois, le Canada est présent, au premier rang d'un conflit dont les conséquences sont graves et d'une grande ampleur.
Dans le cadre de la mission en Afghanistan sous mandat des Nations Unies, nous avons mérité un rôle à la hauteur de notre engagement, de notre travail acharné et de nos sacrifices et nous avons gagné le respect de la population afghane, de nos alliés et de nos partenaires.
Nous sommes fiers de nos soldats et nous leur sommes reconnaissants. En assumant leurs tâches militaires, ils deviennent nos meilleurs citoyens.
Tous nos soldats méritent notre respect et notre reconnaissance. Les Canadiens, en nombres grandissants, le disent, l'écrivent et le manifestent de diverses manières et en divers endroits. Leur gratitude s'exprime d'une manière qui est palpable pour nos soldats.
La tâche du chef de file peut être lourde, il faut le reconnaître. Elle implique des coûts que les Canadiens ressentent au plus profond d'eux-mêmes. Les sacrifices consentis par les soldats canadiens sont tout aussi exceptionnels que ceux qui ont dû être assumés à d'autres moments de notre histoire. Leur volonté de résister à la terreur et à la tyrannie, à l'oppression et à l'indignité, fait honneur non seulement à notre pays, mais à l'humanité dans son ensemble.
[Français]
Par contre, nous devons parfois, comme pays, prendre position et nous affirmer. Nous devons nous affirmer en faisant part de nos valeurs fondamentales et de nos intérêts ainsi que de ce que nous sommes prêts à faire pour les défendre. Nous ne pouvons pas présumer que les autres font les tâches difficiles pour nous. Si nous croyons vraiment en cette mission, ce sont les actions et non les mots qui comptent.
C'est maintenant le temps et c'est l'Afghanistan qui a besoin de nous. La stabilisation de l'Afghanistan est une cause noble et essentielle. Considérons les circonstances.
[Traduction]
Ici encore, j'invite tous les députés à considérer les circonstances qui nous ont menés là où nous en sommes. Les Afghans souhaitent notre présence. La population afghane vivait quotidiennement dans la peur, sous les talibans. Les Afghans étaient privés de tout et s'étaient fait arracher tout espoir d'un avenir meilleur. Les talibans avaient étouffé cet espoir, tout aussi vital que l'air que nous respirons.
Les Nations Unies souhaitent notre présence. L'OTAN a besoin de nous en Afghanistan. Le groupe d'experts de M. Manley nous a recommandé de poursuivre la mission. S'il n'est pas opportun de le faire, alors quel serait donc un meilleur moment?
La mission en Afghanistan est une mission canadienne. Ce n'est ni une mission conservatrice, ni une mission libérale. Nous avions deux positions. Maintenant, nous n'en avons qu'une. Nous savons tout de même que certains députés s'opposeront à cette mission et à cette motion.
Il y a, d'une part, la position du gouvernement et du Parti libéral qui, selon nous, consiste essentiellement à appuyer le maintien de la présence canadienne en Afghanistan.
Cette position est conforme à nos obligations internationales ainsi qu'à notre engagement envers le peuple afghan, que nous avons promis de protéger, d'aider dans son développement et dans l'acquisition des capacités qui lui permettront d'assumer pleinement la responsabilité de sa souveraineté nationale et de sa sécurité à l'intérieur de ses frontières. C'est là un but qui peut être atteint. Cependant, il ne le sera pas si nos soldats rentrent chez eux.
Les libéraux et les conservateurs conviennent que la mission devrait prendre fin en 2011. Les libéraux et les conservateurs conviennent qu'il faut concentrer nos efforts sur la formation, le développement et la reconstruction.
Nous convenons que notre mission en Afghanistan est une mission militaire et que les décisions militaires doivent être prises par les intervenants sur le terrain qui sont en mesure d'évaluer la situation et de prendre d'importantes décisions opérationnelles.
Notre position est compatible avec les obligations qui nous incombent à l'égard de nos concitoyens qui servent en Afghanistan; nos hommes et nos femmes en uniforme, nos diplomates et nos spécialistes du développement. Nous les félicitons tous. Ils croient profondément en la mission et ils doivent savoir que les Canadiens vouent un appui clair et dépourvu de toute ambiguïté à l'important travail qu'ils effectuent.
Il importe de souligner à nouveau que les moyens militaires ne suffiront pas à garantir notre succès. Je crois que, parallèlement aux efforts militaires, l'énorme contribution de l'ACDI, du MAECI, de l'Agence des services frontaliers du Canada, de la GRC, des services de police municipaux ainsi que d'autres organismes gouvernementaux sera la clé de notre réussite.
Je félicite ces héros de tout ce qu'ils accomplissent. Je pense notamment à notre ambassadeur hors pair, Arif Lalani, à Bob Chamberlain, à Karen Foss et au reste de l'équipe provinciale de reconstruction. Je souhaite également la bienvenue à Elissa Golberg dans on nouveau rôle en Afghanistan.
Or pendant ce temps, le NPD et le Bloc réclament le retrait des troupes canadiennes dès l'an prochain. La réalité semble leur échapper complètement.
Nous croyons qu'il faut rester et finir notre travail. Nous ne voulons pas abandonner le peuple afghan ni tourner le dos à la communauté internationale. Rester en Afghanistan n'est pas ce qu'il y a de plus facile, mais c'est la bonne chose à faire.
[Français]
Le monde doit comprendre pourquoi nous sommes en Afghanistan. En aidant les Afghans, nous nous aidons aussi. Nous ne pouvons ignorer les conflits qui se déroulent un peu partout dans le monde.
Dans un monde qui semble de plus en plus petit, aucune nation n'est immunisée contre le terrorisme. Nous ne sommes pas isolés des horreurs qui peuvent toucher d'autres pays, et nous avons été atteints. Des Canadiens sont morts dans les attentats du World Trade Center à New York.
De plus, les terroristes ont frappé à d'autres endroits enlevant la vie à d'innocentes personnes, notamment à Washington, à Londres, à Madrid et à Bali.
[Traduction]
N'oublions pas que la pire attaque terroriste à frapper l'Amérique du Nord avant la tragédie du 11 septembre a été l'attentat à la bombe perpétré contre un vol d'Air India en partance de Vancouver. Cet attentat a fait 329 victimes. Quand nous siégeons à la Chambre, le symbole et l'essence même de la démocratie canadienne, nous devrions toujours nous rappeler que ces attentats non provoqués contre la démocratie et contre toutes les nations civilisées constituent une atteinte à des valeurs qui transcendent la religion et la culture, une atteinte à la raison elle-même.
Les attentats se sont poursuivis. La semaine dernière, deux explosions mortelles distinctes, survenues à proximité de la vallée d'Arghandab, ont coûté la vie à plus de 100 Afghans et blessé quatre Canadiens. La magnitude de la douleur et de la souffrance a eu des échos partout dans le monde et nous rappelle la brutalité et l'inhumanité qui caractérisent les talibans. Nous pleurons la perte de victimes innocentes en Afghanistan et nous exprimons notre sympathie la plus sincère aux familles touchées.
La situation nous rappelle régulièrement que l'Afghanistan n'est pas le problème des autres. C'est également notre problème. Si l'Afghanistan devait redevenir une terre d'accueil et un incubateur pour le terrorisme, les Canadiens et les gens que le Canada sert dans ce pays seraient plus menacés et le monde serait plus dangereux. Le peuple afghan a les mêmes aspirations que les Canadiens et mérite autant que ces derniers. Les Afghans veulent être libérés de l'oppression. Ils veulent que leur dignité et leur vie soient respectées et protégées. Ils souhaitent une vie meilleure pour leurs enfants. Ils veulent de l'espoir et des possibilités.
Si l'Afghanistan servait d'incubateur et d'exportateur pour le terrorisme, les Canadiens seraient certainement confrontés à un danger plus grand parce que la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit, principes que le Canada incarne et défend, seraient menacés. Il serait terrible de nous retirer de ce pays et de laisser la place à ceux qui prêchent la haine et le meurtre.
Il ne faut pas s'y tromper, notre sécurité et celle de nos alliés est en jeu en Afghanistan, et il en est de même de celle des Afghans et de la région. Voilà pourquoi le Canada se trouve là-bas. Nous sommes là avec nos alliés, nos partenaires de l'OTAN et des Nations Unies. Plus de 60 pays partageant un même point de vue et une même détermination jouent divers rôles et contribuent à la paix, à la sécurité et à l'amélioration de la situation en Afghanistan.
Voilà pourquoi nous ne pouvons abandonner le rôle essentiel de leader que nous jouons actuellement en Afghanistan tant que nous n'aurons pas atteint ce point tournant critique, tant que nous ne serons pas en mesure de donner à ce pays la capacité de jouer un rôle plus substantiel et de se gouverner en étant complètement libéré de la menace et de la terreur talibanes.
Il est bon de temps en temps de faire une récapitulation non seulement de ce qui reste à faire, mais également de ce qui a été accompli. S'attaquer aux principales causes qui ont fait de l'Afghanistan un repaire de terroristes est un défi en soi. Pour assurer la stabilité à long terme dans ce pays, il faut aider les Afghans à se doter des outils dont ils ont besoin pour se gouverner eux-mêmes avec justice, pour réaliser leur potentiel sur les plans économique et social ainsi que pour assurer leur propre sécurité. Ces éléments centraux du Pacte de l'Afghanistan, signé au début de 2006, servent à orienter les efforts de la communauté internationale et du gouvernement de l'Afghanistan. Le Canada, qui est signataire du pacte, a participé à son élaboration et a sa rédaction.
L'engagement du Canada est conforme à cet accord international. Notre mission comporte plusieurs facettes et exige la participation d'un grand nombre de ministères et d'organismes gouvernementaux. Elle fait appel à nos compétences nationales, que nous unissons à celles de nos alliés et de nos partenaires. Aider les Afghans à reconstruire leur pays après des décennies de conflits est une tâche monumentale, une tâche rendue encore plus difficile par les insurgés qui s'infiltrent en Afghanistan en provenance du Pakistan.
Nous ne devons jamais oublier que la province de Kandahar, en termes géographiques, est située au Sud du pays et que la frontière avec le Pakistan est très perméable. Nous demandons donc au Pakistan, malgré ses propres problèmes internes, d'intensifier ses efforts pour arrêter le recrutement dans les camps de réfugiés, d'assurer une sécurité accrue à la frontière, souvent appelée ligne Durand, et de réprimer l'insurrection sur son propre territoire.
N'oublions pas qu'en collaborant avec nos alliés et nos partenaires, nous faisons d'énormes et réels progrès sur le terrain.
Pensons aux germes de la démocratie qui ont été plantés et qui sont en train de prendre racine dans ce pays qui a connu de nombreux bouleversements. Il est révélateur d'évaluer la différence entre la situation actuelle en Afghanistan et celle d'il y a cinq ou six ans.
Plus de 10 millions d'Afghans — y compris les femmes, qu'on empêchait auparavant de participer à la vie publique — peuvent maintenant voter aux élections nationales. Non seulement les femmes peuvent voter, mais elles peuvent être élues. Plus du quart du Parlement afghan se compose de ces femmes courageuses. La population afghane a choisi son gouvernement à l'occasion d'élections libres et justes.
Il règne là-bas une liberté d'expression qui n'existait tout simplement pas avant. Aujourd'hui, le pays compte sept stations de télévision et 40 stations de radio. On y publie plus de 350 journaux. Il s'agit de réalisations remarquables qui vont indubitablement en entraîner d'autres.
Ce débat informel sur la question de la conscience nationale tant ici qu'en Afghanistan revêt une importance capitale étant donné que l'Afghanistan est en train de forger sa propre identité nationale.
Ce genre de climat favorisant les débats publics ou l'échange d'idées n'existait pas en Afghanistan il y a quelques années. Il n'y avait ni suffrage universel ni gouvernement élu démocratiquement ni liberté de presse jusqu'à ce que le Canada et d'autres répondent à l'appel à l'aide de l'Afghanistan.
Nous avons fait ce que nous avions déjà fait auparavant. Nous avons répondu à l'appel d'un pays dans le besoin. Les progrès dans d'autres secteurs sont tout aussi frappants. Pensons à l'infrastructure de l'Afghanistan qu'on est en train de rebâtir: écoles, hôpitaux, cliniques, commerces. Les canaux d'irrigation sont en train de transformer la campagne. Des terres qui ne produisaient rien sont désormais fertiles, ce qui permet la culture d'autres plantes que le pavot destiné à la production d'héroïne, un véritable fléau qui prolifère. Actuellement, en Afghanistan, plus de 6 000 kilomètres de routes nouvelles et remises en état permettent aux agriculteurs d'apporter leurs produits au marché.
Je n'ai pas besoin de signaler aux politiciens présents l'importance des routes dans n'importe quel pays. Ces routes font une différence dans la vie quotidienne des Afghans. Pendant le temps des Fêtes, à l'occasion d'une visite dans le district d'Arghandab, nous avons vu un pont près de Ma'sum Ghar. Il s'agit d'une structure impressionnante à tous égards qui relie deux villages. Le pont enjambe une plaine inondable qui les séparait, probablement depuis des siècles. Ce pont a transformé le mode de vie des villageois et leur permet de commercer les uns avec les autres et d'échanger dans le cadre de leurs activités normales.
Ne nous trompons pas: la qualité de vie des Afghans ordinaires s'est améliorée. Le revenu par habitant a doublé au cours des trois dernières années. Les Afghans ont certainement l'espoir d'un avenir meilleur, qui se reflète dans les suffrages et dans la plus importante mesure de cet espoir, les paroles et les actions des Afghans eux-mêmes.
Comme pour tous les pays, l'avenir de l'Afghanistan dépend des jeunes. Il se fait actuellement un travail extraordinaire pour donner aux enfants de l'Afghanistan la capacité de s'assurer un avenir stable et pacifique. On construit des écoles. Les institutions d'enseignement ne se cachent plus. On les voit maintenant partout. Des milliers d'enseignants suivent actuellement une formation. Aujourd'hui, six millions d'enfants vont à l'école en Afghanistan. Cette évolution de la situation peut vraiment transformer leurs perspectives. C'est une augmentation spectaculaire du nombre d'étudiants. Il n'y en avait que 700 000 sous le régime brutal des talibans. Ce qui est le plus remarquable, c'est que deux millions des étudiants afghans d'aujourd'hui sont des filles, alors que les filles n'avaient même pas la permission d'entrer dans une salle de classe il y a quelques années. C'est un changement radical dans la condition de toute une génération de jeunes femmes afghanes.
Plus de 80 p. 100 des Afghans ont maintenant accès à des soins de santé de base. Cette proportion ne s'élevait pas à plus de 7 p. 100 il y a quelques années. Ce sont des progrès indéniables. Le taux de mortalité des nourrissons et des enfants a chuté. Voilà un autre succès remarquable. La prévalence de maladies comme la polio et la tuberculose décline à la suite de campagnes de vaccination généralisées. Tous les Canadiens devraient être fiers de ces résultats.
L'aide internationale a vraiment eu des répercussions positives remarquables dans la vie des Afghans. Des millions d'entre eux sont revenus, puisque les circonstances se sont améliorées au pays. C'est peut-être le signe le plus visible d'un espoir renouvelé pour ceux qui sont partis d'un pays déchiré par la guerre et qui y reviennent pour faire leur vie là où ils se considèrent chez eux.
Des progrès ont été faits malgré les actes violents de l'opposition, des talibans insurgés, ces insurgés qui n'ont rien à faire d'une boîte de scrutin puisqu'ils savent qu'ils ne pourront jamais reprendre le pouvoir autrement que par la violence. Leur plan est simple. Les insurgés talibans cherchent à semer le chaos, à fomenter la peur, à bouter les forces alliées hors du pays et à réduire à néant les progrès accomplis sur les plans de la démocratie et des droits de la personne.
Nous ne pouvons pas permettre à ces insurgés de réussir, et nous les en empêcherons. C'est pourquoi il est essentiel de maintenir et d'améliorer la sécurité au pays. C'est ce qui favorisera le bon gouvernement, la reconstruction et le développement.
Il ne peut pas y avoir de démocratie sans la sécurité. Il n'y aura ni développement, ni reconstruction, ni prospérité, ni espoir pour le peuple afghan si la sécurité n'est pas assurée au pays. Tous ces objectifs sont inextricablement liés. Si l'on n'y assure pas la sécurité, l'Afghanistan risque de redevenir un terrain fertile pour le terrorisme.
La voie à suivre nous est clairement tracée. C'est la voie de la réussite. Nous ne devons pas laisser notre détermination faiblir. Ce que j'ai dit jusqu'ici ne doit pas nous faire oublier les difficultés et les obstacles qui restent à surmonter. Nous voyons tous très bien qu'il reste beaucoup à faire en Afghanistan. Il est essentiel que nous continuions d'aider le gouvernement afghan à asseoir son autorité dans l'ensemble de la province de Kandahar et dans tout le pays. Le gouvernement doit faire davantage sentir sa présence et doit être plus visible, en particulier dans le Sud.
Je sais que le , d'autres membres du Cabinet actuel ainsi que le gouvernement précédent ont souvent fait valoir, auprès du président Karzai et de membres de son gouvernement, l'importance de cette présence gouvernementale.
Les Forces canadiennes vont intensifier leurs efforts en vue de guider et de former les forces de sécurité afghanes, pour qu'elles arrivent en fin de compte à défendre elles-mêmes les frontières et la souveraineté de leur pays.
Les députés doivent savoir que les capacités des forces de sécurité nationales de l'Afghanistan se sont sensiblement améliorées. J'ai eu l'occasion de m'entretenir de cette question à plusieurs reprises avec le président Karzai et mon homologue, le général Wardak. D'autres que moi ont également pu le faire. Le gouvernement de l'Afghanistan comprend l'urgence d'augmenter le rythme de croissance de ses forces de sécurité.
Grâce à l'aide du Canada, 35 000 Afghans ont terminé leur formation au centre national d'entraînement militaire de Kaboul, ce qui constitue un taux remarquable d'augmentation des effectifs. À Kandahar, les forces armées canadiennes guident six bataillons ou kandaks de l'armée afghane. Des policiers canadiens se chargent en outre de surveiller et de guider la force nationale de police afghane pour qu'elle s'améliore, ce qui est une autre contribution importante au renforcement de la sécurité en Afghanistan.
Le Canada aide l'armée et la police nationales afghanes à se doter de la capacité de planifier et de réaliser des opérations. Il leur fournit en outre de l'équipement et des uniformes. La professionnalisation des forces afghanes est nettement une priorité.
Nous avons assisté à des améliorations importantes à d'autres égards, et permettez-moi de donner un exemple des changements concrets qui se sont produits. Au cours de la bataille du district de Panjwai, qui a donné lieu à la plus grande opération terrestre de l'histoire de l'OTAN, les Forces canadiennes étaient en première ligne. L'armée nationale afghane n'a pas eu de rôle décisif à jouer dans cette bataille.
Aujourd'hui, 18 mois plus tard, l'armée nationale afghane est désormais une force importante qui peut faire sentir sa présence dans la province de Kandahar. Elle en a fait la preuve récemment lors d'une opération visant à libérer un village qu'elle a effectuée conjointement avec les Forces canadiennes. La réussite de l'opération a été célébrée avec enthousiasme par la population locale, qui a exprimé sa gratitude pour la liberté dont elle peut désormais jouir.
À mesure que les capacités des forces de sécurité afghanes à Kandahar augmenteront, le Canada sera en mesure de leur confier plus de responsabilités. En attendant, les Forces canadiennes doivent continuer leurs opérations et leurs activités de mentorat sur le terrain avec l'aide des EMOL, les équipes de mentorat opérationnel et de liaison, et donner une formation similaire à la police.
Avant de terminer mon intervention, j'aimerais noter qu'au cours des deux dernières années, j'ai eu l'occasion de visiter l'Afghanistan à quelques reprises, plus récemment à Noël avec mon collègue, le , qui est le député d'Edmonton. Pendant ma présence là-bas, j'ai vécu une des expériences les plus mémorables, une expérience très personnelle que je veux partager avec la Chambre.
Alors que nous visitions l'équipe de reconstruction provinciale à l'extérieur de Kandahar, nous avons rencontré des étudiants afin de leur apporter des fournitures scolaires qui avaient été données par un conseil scolaire local d'Ottawa aux enfants. Certains des enfants n'avaient que sept ou huit ans. Je me souviens combien ils étaient fiers et heureux de recevoir ces simples objets: des crayons, des livres, des cahiers, des stylos, quelques jouets spéciaux et des bonbons, tous mis dans des sacs à dos colorés et préparés avec amour ici au Canada.
Une petite fille serrait son sac à dos si fort et si étroitement qu'on aurait dit qu'elle avait peur qu'il disparaisse si elle ne le gardait pas près d'elle. Je n'oublierai jamais son regard et ses magnifiques yeux verts, qui exprimaient l'espoir d'un avenir meilleur pour les enfants afghans. J'ai pu voir de mes propres yeux, et de manière convaincante, que le travail que nous faisons là-bas porte fruit et que notre présence continuelle est nécessaire. Nous influençons profondément la vie des enfants afghans.
Je rattache cette expérience à une expérience semblable que j'ai eue un mois auparavant, le jour du Souvenir, dans une école de ma circonscription, Nova-Centre, et qui a renforcé mes convictions. Une jeune fille à peu près du même âge que ces enfants m'a demandé ce qui arriverait aux enfants afghans si les soldats canadiens quittaient l'Afghanistan pour rentrer au pays. La question de cette petite fille, qui liait ces deux éléments, était tout à fait pertinente.
J'ai déjà parlé des nombreuses statistiques qui montrent les progrès réalisés en Afghanistan. Une approche complète et coordonnée est sans doute nécessaire, mais nous ne devons jamais négliger ou oublier l'impact humain que nous avons sur la vie des enfants, des familles, des hommes et des femmes qui veulent simplement un avenir meilleur.
Pour ma part, cependant, rien ne montre plus clairement la valeur de nos efforts, au-delà des statistiques, des discussions de l'OTAN, des rapports et des observations, que l'espoir et la compassion que j'ai vus dans le regard et l'expression de ces deux fillettes. C'est là une preuve de la grande compassion des enfants du monde entier. Je défie quiconque de regarder ces enfants dans les yeux sans leur dire qu'il nous reste beaucoup à faire ou en leur disant qu'il nous faut partir.
Oui, la tâche sera probablement ardue, mais il est possible de rétablir la stabilité en Afghanistan. Nous devons persévérer, car abandonner l'Afghanistan aurait de graves conséquences.
Dans leur examen de l'avenir de la mission en Afghanistan, les députés doivent tenir compte du fait que le monde nous regarde, nos amis et nos alliés aussi. La décision de la Chambre aura des répercussions partout dans le monde et elle marquera l'histoire du Canada. Ce débat fera partie des annales de la Chambre et on pourra s'y référer lorsque surviendront d'autres conflits.
J'espère que le débat et le vote qui se tiendra seront positifs et instructifs. Retirer les militaires canadiens de l'Afghanistan pourrait entraîner d'importantes conséquences ou avoir un effet domino. En deux mots, nos amis seraient plus faibles et nos ennemis, plus forts.
J'aimerais citer Nelofer Pazira, l'auteur du livre A Bed of Red Flowers, qui nous parle de certaines de ses expériences personnelles en Afghanistan.
...imaginez qu'un matin vous vous leviez pour aller travailler, mais que lorsque vous ouvrez la porte, un groupe de jeunes hommes aux vêtements sales et poussiéreux vous repoussent dans votre maison à la pointe du fusil et déclarent que vous n'avez pas le droit de sortir. Imaginez que votre soeur souhaite aller à l'école et que votre mère doive aller faire l'épicerie. On dit à votre soeur qu'elle n'a pas besoin de s'instruire et votre mère, bien qu'entièrement voilée, est battue ou renvoyée à la maison si elle n'est pas accompagnée par un homme. Imaginez que votre revenu soit essentiel à la survie de votre famille, mais qu'on vous dise avec indifférence que vous n'avez pas le droit d'aller travailler. Imaginez que tout cela vous arrive uniquement parce que vous êtes une femme. Que feriez-vous si, au lieu de mener une vie normale, vous ne pouviez, pour toute occupation, que fixer les murs de votre maison?
Ces réflexions, et tout ce que nous connaissons sur l'Afghanistan, démontrent encore une fois que les enjeux sont tout simplement trop importants pour que nous abandonnions ce pays et désertions nos alliés à ce moment critique.
Le secrétaire général de l'ONU a récemment déclaré que le retrait des forces internationales constituerait une erreur aux proportions historiques. Il a également prévenu que cet échec en Afghanistan augmenterait les risques pour la sécurité de l'alliance.
Le groupe d'experts indépendants dont les conclusions, j'en suis certain, alimenteront une bonne partie de ce débat, a indiqué que les événements en Afghanistan « auront une incidence directe sur la sécurité du Canada, sur notre réputation à l’étranger, ainsi que sur notre capacité future d’amener la communauté internationale à participer à des activités visant à assurer la paix, la sécurité et la prospérité commune. »
Je demande à tous les députés de peser avec soin les conséquences du rejet de cette motion dont nous sommes saisis. Cela pourrait signifier non seulement l'abandon des Afghans et de nos alliés, mais également de nos principes.
Nous ne voulons pas anéantir la campagne en Afghanistan et les efforts de l'alliance. D'autres pays nous ont suivis dans le Sud de l'Afghanistan et d'autres encore arriveront bientôt, espérons-le, pour appuyer nos efforts là-bas.
[Français]
Pourquoi ne se retireraient-elles pas aussi si nous le faisons?
Le Canada est respecté pour avoir amorcé le concept de responsabilité de protéger. Nous ne voulons pas avoir la réputation de quitter quand nous sommes requis.
Veut-on que les Afghans retournent en arrière, qu'ils retournent à l'anarchie, qu'ils retournent à l'époque où les exécutions publiques étaient chose courante et que les droits de la personne étaient bafoués, et où les femmes et les enfants étaient habituellement pendus à des poteaux sur les terrains de soccer? C'est sur ces mêmes terrains que jouent les enfants d'aujourd'hui, certains avec des ballons qui proviennent de généreux Canadiens comme Joshua Zuidema, de South Mountain en Ontario.
Veut-on qu'une région déjà fragile se détériore encore plus?
Veut-on que la réputation du Canada soit ternie?
[Traduction]
Pourrions-nous regagner la confiance de nos alliés après les avoir laissés tomber à un moment critique? Ce n'est pas ainsi que le Canada a l'habitude de réagir lorsqu'il s'est engagé dans une noble cause. Qu'est-ce que l'histoire retiendrait du Canada si nous abandonnions l'Afghanistan?
Le Canada d'aujourd'hui est un pays qui rend hommage à ceux qui ont posé des gestes héroïques, qui ont conquis la crête de Vimy, qui ont débarqué sur la plage Juno et qui ont donné leur vie au service de la paix dans le monde en Corée, en Bosnie, en Afrique et j'en passe.
Nous rendons hommage aux générations qui ont tenu tête aux tyrans, sans fléchir et sans battre en retraite. Et nous? Je crois que notre génération ne pliera pas l'échine et n'abandonnera pas les traditions les plus nobles de notre pays.
Aujourd'hui, en Afghanistan, il y a des héros ordinaires. Ils ne portent pas les mêmes uniformes que des athlètes professionnels, ne gagnent pas le même salaire et ne se font pas applaudir, mais ils portent fièrement l'uniforme des soldats canadiens, et cela avec autant de fierté, de coeur et de courage que ceux qui les ont précédés.
Si nous laissons tomber ces traditions, quel genre de monde laisserons-nous à nos enfants?
Il n'y a pas de décision plus grave à prendre pour tout gouvernement, de quelque parti qu'il soit, que celle d'envoyer risquer leur vie toute une génération de jeunes hommes et de jeunes femmes qui portent fièrement l'emblème de leur pays sur leur uniforme et de membres civils du gouvernement qui ont à coeur de défendre les valeurs canadiennes et d'en faire la promotion à l'extérieur de nos frontières.
À titre de , rien ne m'a autant touché que la mort de nos compatriotes canadiens en Afghanistan. Nous ne devons jamais oublier l'énorme contribution et le courage de ces 79 Canadiens et de leur famille.
Certains aiment l'éloquence et les grands mots, d'autres préfèrent les politiques. En ce qui me concerne, je préfère l'action à la parole, une devise qui définit bien nos forces armées. Nos militaires mettent en oeuvre les politiques et les directives du Parlement. Ce sont les instruments de notre institution libre et démocratique. Ils donnent un sens à nos politiques.
Ils réalisent les objectifs et les espoirs que nous avons pour d'autres, c'est-à-dire la liberté pour tous, la sécurité et un endroit où ils peuvent vivre en toute tranquillité, aller à l'école, manger à leur faim et boire de l'eau propre. Ces gens font honneur à notre pays. Ils portent avec fierté leur uniforme et leur altruisme leur vaut l'admiration de tous.
Mes collègues et moi sommes convaincus, je crois, que le Canada doit poursuivre cette mission. Comme l'a noté le groupe d'experts indépendant dirigé par l'honorable John Manley:
Après 30 ans de conflit — l’occupation soviétique, la guerre civile et le régime répressif et coercitif des talibans —, les Afghans s’emploient à mettre sur pied un gouvernement adhérant au principe de la primauté du droit démocratique et respectant pleinement les droits de la personne.
Je dirais, pour conclure, que l'aide que nous apportons actuellement aux Afghans en cette période critique pour ce pays est conforme aux valeurs et intérêts des Canadiens. Cette mission peut réussir. Nous devons maintenir le cap.
J'exhorte tous les députés à appuyer la motion, commémorant ainsi ceux qui ont donné leur vie et tous ceux qui ont poursuivi le combat. La meilleure façon pour nous d'honorer la mémoire de nos soldats et d'aider le peuple afghan est d'appuyer l'adoption de cette motion à la Chambre
:
Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole au sujet de la nouvelle motion du gouvernement sur l'avenir de l'engagement du Canada en Afghanistan.
La décision d'envoyer les hommes et les femmes des Forces canadiennes mettre leur vie en danger est l'une des décisions les plus importantes que puisse prendre le gouvernement. C'est une décision qu'il ne faut surtout pas prendre à la légère, une décision qui doit faire l'objet de la plus extrême vigilance, une décision qui ne doit surtout pas être perçue comme une occasion de marquer des points à des fins partisanes. Nous troupes ne devraient jamais être les pions de notre échiquier politique national.
D'aucuns diront qu'un tel débat est potentiellement dommageable du fait qu'il risque d'accroître le danger auquel font face nos militaires et nos civils sur le terrain. Pourtant, dans une démocratie comme le Canada, ce débat sur la mission militaire est normal et même inévitable. Nous ne pouvons admettre que notre processus politique soit tenu en otage par ces forces que nous combattons en Afghanistan, qui ne demanderaient qu'à priver la population afghane des droits qui nous sont chers, notamment le droit au débat en toute liberté.
Nous ne pouvons envoyer nos troupes au bout du monde pour aider à implanter la démocratie et la bonne gouvernance dans un pays où ces valeurs ont fait défaut depuis trop longtemps, tout en laissant tomber ces principes dans notre propre pays. Les députés ont le devoir solennel de faire ce qu'ils croient être le mieux pour le pays. Par égard pour les hommes et les femmes qui servent dans les Forces canadiennes et pour tous les citoyens de ce grand pays, nous devons débattre cette question en allant au fond des choses, en remettant en question nos positions respectives et en nous assurant que le gouvernement prendra la bonne décision. Personne ne devrait jamais confondre le débat soulevé par l'avenir de la mission avec la question de l'appui à nos troupes.
En dépit de l'opposition exprimée à la Chambre des communes sur la mission en Afghanistan, tous les députés appuient nos militaires. C'est pourquoi, j'exhorte tous les députés à s'abstenir de proférer ces insultes qui ont trop souvent dominé le discours politique sur cette question. Ceux qui préconisent une prolongation de la mission ne sont pas fauteurs de guerre pour autant. Ceux qui voudraient plutôt mettre fin à la mission ne sont évidemment pas des sympathisants talibans. Nous sommes tous des députés dont le but est de faire ce qui convient. C'est pourquoi les positions de tous les partis doivent être examinées soigneusement dans un climat de respect mutuel.
Le caucus libéral est convaincu que ce que le Canada a fait et continue de faire en Afghanistan reflète les traditions les plus nobles de notre pays. Le Canada figure fièrement parmi les trop rares pays qui n'ont dépêché des militaires qu'afin de défendre les valeurs universelles que sont la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la dignité de tous. Nous devrions tous être très fiers de cela.
De toute évidence, la vaste majorité des Afghans ne veut pas que notre présence soit celle d'une force d'occupation qui s'incruste. Elle veut plutôt que nous nous concentrions à aider son pays à se gouverner efficacement et à assurer sa sécurité et sa liberté.
Pour y parvenir, nous devons faire en sorte que la première mission de l'OTAN à l'extérieur de sa base européenne traditionnelle soit une réussite. C'est pourquoi, il y a un an, lorsque j'ai livré un de mes premiers longs discours à titre de chef du Parti libéral du Canada, à Montréal, discours qui portait sur l'Afghanistan, j'ai dit que les libéraux estimaient qu'il était essentiel que le Canada respecte ses obligations internationales et que nous ne pouvions pas renoncer à un engagement pris par le gouvernement du Canada, mais que, pour assurer la réussite de la mission de l'OTAN, on ne pouvait pas demander au Canada de porter un fardeau aussi lourd pendant une période de temps indéterminée.
C'est pour cela que j'ai dit que notre rôle dans la mission devait prendre une autre forme après la fin de notre engagement actuel, en février 2009. À l'époque, il y a un an de cela, nous avons pressé le gouvernement d'informer l'OTAN de notre décision, de manière à ce qu'elle puisse commencer à chercher les militaires additionnels qui effectueraient la rotation à Kandahar en remplacement des militaires canadiens.
En avril dernier, notre parti a fourni à la Chambre l'occasion d'appuyer cette position en présentant une motion lors d'une journée de l'opposition. Malheureusement, le gouvernement et le NPD ont rejeté cette proposition et défait notre motion. Le gouvernement nous a assurés qu'il était beaucoup trop tôt pour discuter de telles questions. Il nous a assurés que nous n'avions pas besoin de tenir un débat sur ces questions avant 2008.
À cause de son erreur, une année s’est écoulée et le gouvernement n’a rien fait pour inviter sérieusement l’OTAN à remplacer nos troupes. Nous voici donc un an plus tard, et pas plus avancés. Ça s’est passé l’an dernier, et on voit maintenant dans quelle position difficile ce retard nous a mis. Nous devons maintenant faire des pieds et des mains pour dénicher de nouvelles troupes pour Kandahar.
Plus tôt ce mois-ci, le gouvernement a présenté sa première motion sur l’avenir de la mission après février 2009. Comme je l’ai dit à ce moment, cette motion ne correspondait pas à la position du Parti libéral, qu’une majorité de Canadiens approuvent. En tant que parti, nous avons donc décidé de présenter une autre motion.
En rédigeant cette motion, nous avons été guidés par trois principes simples qui étaient absents de la motion initiale du gouvernement. Premièrement, la mission doit changer. Nous devons la transformer en une mission consacrée à la formation, à la sécurité et à la reconstruction. Deuxièmement, la mission doit prendre fin. Nous devons avoir une date claire et précise pour la fin de la mission, pas une date pour une autre étude qui débouchera sur une mission sans fin. Troisièmement, la mission doit aller au-delà de l’aspect militaire. Il n’existe pas de solution exclusivement militaire au conflit en Afghanistan, de sorte que nos efforts devraient être équilibrés entre la défense, la diplomatie et la reconstruction.
C’est en travaillant avec ces trois principes et la conviction que les Canadiens méritent plus de transparence et de responsabilité en ce qui concerne l’Afghanistan que nous avons formulé notre motion amendée.
J’ai été heureux la semaine dernière de voir le gouvernement abandonner sa motion qui laissait à désirer et adopter en grande partie le libellé proposé par le Parti libéral. Il y a manifestement de légères différences entre les deux motions. Je vais revenir sur ces différences en faisant mes observations aujourd’hui.
Je conviens avec le et le que nous avons maintenant une motion qui n’est ni conservatrice ni libérale. C’est une motion canadienne. Mais pour l’instant, du moins, nous avons un gouvernement conservateur qui veillera à la réalisation de cette mission en Afghanistan.
Le gouvernement doit respecter l'esprit et la lettre de la motion. Peu importe ce qui se passe à la Chambre, la décision de déployer des troupes et de mener la mission relève du pouvoir exécutif au sein de notre système politique. C'est le gouvernement qui, en bout de ligne, est responsable de la mise en oeuvre des mesures prévues dans la motion.
C'est la raison pour laquelle nous avons insisté quelque peu sur la transparence et la responsabilité dans la motion dont nous sommes saisis. Il incombera au gouvernement de montrer à la Chambre et à tous les Canadiens qu'il respecte tant l'esprit que la lettre de la motion. Je vais maintenant passer en revue la motion.
[Français]
La mission doit changer. La présente motion respecte cette position. Il y a deux raisons pour lesquelles la mission doit changer en février 2009.
La première raison est qu'il faut commencer à orienter notre mission vers des actes qui permettront aux Afghans et à leur gouvernement d'assumer eux-mêmes la sécurité et la gouvernance de leur pays. Si nous continuons à nous contenter de faire le travail à leur place, la situation ne changera jamais. Voilà pourquoi le Parti libéral met tellement l'accent sur le fait qu'il faut orienter la mission vers la formation des forces de sécurité nationale afghanes.
La deuxième raison pour laquelle la mission doit changer est que nous ne pouvons pas continuer de demander à nos militaires d'assumer un si lourd fardeau pour une période indéterminée. En février 2009, nos militaires auront consacré trois ans à l'une des plus lourdes missions — et sans doute la plus dangereuse — qu'ils aient entreprises depuis la guerre de Corée. Nous ne pouvons pas leur demander de continuer encore bien longtemps à cette échelle et à cet envergure, et l'OTAN ne peut pas non plus nous le demander.
La présente motion indique clairement qu'après février 2009, la mission du Canada à Kandahar devrait être de former des forces de sécurité nationale afghanes, d'assurer la sécurité des projets de reconstruction et de développement à Kandahar, et de continuer à assumer la responsabilité du Canada envers l'équipe provinciale de reconstruction à Kandahar. Il s'agit là d'une orientation différente de ce que font nos troupes à Kandahar depuis le début de l'année 2006.
Cette nouvelle mission n'est plus définie comme une mission contre-insurrectionnelle proactive qui vise à rechercher et à éliminer les insurgés. Toutefois, nous ne lierons pas les mains de nos militaires en leur disant qu'ils ne peuvent pas s'engager dans une action militaire pour se défendre ou pour défendre les personnes qu'ils doivent protéger.
Comme je l'ai déjà dit, il appartient aux politiciens d'établir l'orientation des missions militaires. C'est la responsabilité des élus du peuple. De la même façon que les généraux doivent s'abstenir d'imposer des orientations aux élus, les élus doivent éviter de microgérer nos généraux.
La présente motion, celle que le gouvernement soumet au Parlement, conformément à la motion libérale qui lui a servi de base, rend le maintien des Canadiens à Kandahar conditionnel à trois grandes conditions: une date de fin précise, des troupes supplémentaires et du nouvel équipement. Qu'on me permette de parler de chacune de ces conditions.
Pourquoi est-il si important d'avoir une date de fin précise à la mission? Lorsque vous avez une échéance précise, il est possible d'établir un plan clair avec des points de repère et des objectifs réalistes. Il revient au gouvernement d'établir ces points de repère et ces objectifs et de les communiquer clairement à nos militaires et à tous les Canadiens. Nous attendons du gouvernement qu'il indique, au cours du présent débat, ce que seront ces points de repère et ces objectifs pour la formation et le développement.
De plus, une échéance précise incitera nos alliés de l'OTAN et le gouvernement afghan à se préparer à notre départ. Si nous ne sommes pas clairs quant à la date de fin précise de notre mission, ils ne se prépareront jamais à notre départ.
Nous sommes heureux d'apprendre que la nouvelle motion du gouvernement respecte notre demande d'établir une date de fin précise pour la mission canadienne à Kandahar. Bien que nous ayons demandé que la mission prenne fin en février 2011 et que tous nos militaires quittent complètement Kandahar d'ici à juillet 2011, le gouvernement a choisi de mettre fin à la mission en juillet 2011 et de compléter la sortie de nos militaires de Kandahar d'ici à décembre 2011.
Au cours de ce débat, je crois qu'il est important pour le gouvernement d'expliquer pourquoi il a choisi des dates ultérieures. Si nous avons choisi le début de l'année 2011 comme date de fin de la mission, c'est que les points de repère et les calendriers établis par le Pacte pour l'Afghanistan doivent être respectés d'ici à la fin de 2010.
Nous voulons savoir pourquoi le gouvernement a pris la peine de changer la date que nous avons proposée pour la retarder jusqu'au milieu de l'année 2011. Si l'explication est raisonnable et logique, notre parti ne s'y opposera pas.
Par ailleurs, nous espérons que si cette motion est adoptée par la Chambre, le gouvernement informera immédiatement et formellement l'OTAN de la date ferme de la fin de notre mission à Kandahar. Nous ne voulons pas nous retrouver, en 2011, dans la situation où l'OTAN serait surprise d'apprendre que notre mission prend fin. Il ne faut pas répéter deux fois la même erreur.
Nous sommes inquiets du fait que le gouvernement a omis le mot « immédiatement » de la partie de la motion qui demande au gouvernement d'informer l'OTAN de la date à laquelle notre mission prendra fin. Nos alliés de l'OTAN ainsi que le gouvernement afghan auront besoin de cette clarté et de cette transparence lors de la rencontre des chefs d'État de l'OTAN, qui aura lieu prochainement à Bucarest. Nous n'avons pas le droit de manquer de transparence envers nos alliés. À cette réunion, le Canada va demander de l'aide supplémentaire à l'OTAN. Nous devons donc être clairs à propos de la durée de notre engagement.
[Traduction]
J'en arrive maintenant à la question des troupes supplémentaires. La motion libérale demandait que des troupes supplémentaires de l'OTAN soient envoyées à Kandahar. Nous avons inclus ce point parce que nous pensons qu'il est important qu'une autre nation de l'OTAN assure une rotation à Kandahar et assume certaines des responsabilités actuelles du Canada.
Il n'est pas raisonnable de dire que l'objectif de la mission va changer et sera dorénavant axé sur la formation et la reconstruction s'il n'y a personne d'autre pour assumer nos responsabilités militaires offensives antérieures. Demander qu'une rotation soit assurée par l'OTAN, de façon à ce que la tâche soit partagée, est une initiative appropriée et responsable.
En fait, toute la mission de la FIAS en Afghanistan repose sur le principe de la rotation depuis que l'OTAN en a assumé la responsabilité, en 2003. La mission globale de l'OTAN en Afghanistan ne sera un succès que si tous les membres respectent le principe de la rotation et assument une part relativement égale du fardeau.
La motion du gouvernement prévoit que l'OTAN assure la rotation d'un groupement tactique d'environ 1 000 soldats à Kandahar, au plus tard en février 2009. Nous demandons au gouvernement de s'assurer que ce soit une véritable rotation, afin que le Canada puisse se délester de certaines de ses responsabilités actuelles pour ainsi pouvoir en assumer de nouvelles.
De toute évidence, le libellé de cette partie de la motion du gouvernement est différent de celui de notre motion, et nous avons deux questions très précises pour lesquelles des réponses devront être fournies au cours du débat.
Premièrement, pourquoi 1 000 militaires? Nous avons tous lu le rapport du sur son plan pour l'Afghanistan, et nous savons qu'il recommande l'envoi de 1 000 militaires. Toutefois, de ce côté-ci de la Chambre, nous n'avons jamais compris d'où venait ce chiffre. Y a-t-il une raison, ou s'est-on simplement limité à cela parce qu'on craignait de ne pas en obtenir davantage?
La motion libérale réclame des troupes suffisantes. Nous devons comprendre pourquoi le gouvernement croit que 1 000 militaires suffiront. L'un des hauts gradés de l'armée canadienne, posté dans la région, a laissé entendre qu'au moins 5 000 militaires seraient nécessaires.
La deuxième question concernant le processus de rotation est de savoir combien de temps le gouvernement est prêt à attendre avant de déterminer si cette condition a été respectée. Le gouvernement doit être clair sur ce point.
Nous ne pouvons pas attendre jusqu'au 31 janvier 2009 pour décider si nous jugeons que l'OTAN a fourni les troupes nécessaires. Le gouvernement doit fixer une date et affirmer que, si ces troupes ne sont pas engagées à cette date, le Canada ne promet pas d'assurer une présence militaire à Kandahar au-delà de février 2009.
Parlons maintenant du nouvel équipement. Bien sûr nous sommes d'accord quant à la demande de nouveaux hélicoptères et UAV. Le gouvernement doit être franc avec les Canadiens et leur expliquer exactement ce que cela coûtera.
En outre, le gouvernement doit expliquer comment il entend avoir cet équipement à sa disposition avant février 2009, comme la motion le prévoit. Encore une fois, nous ne pouvons pas attendre jusqu'à la dernière minute pour confirmer que nous avons cet équipement nécessaire.
La mission ne doit pas non plus se limiter à une solution militaire. Nous devons tous comprendre que cela ne suffirait pas à résoudre le conflit en Afghanistan. Cela me rappelle ce qu'a dit le président Karzaï quand il a pris la parole au Parlement, en septembre 2006:
Nous ne réussirons à éliminer le terrorisme que si nous nous attaquons aux origines mêmes du terrorisme, où qu'il soit, afin d'en tarir la source. Jusqu'à présent, notre stratégie de lutte contre le terrorisme en Afghanistan a consisté principalement à éliminer les symptômes du terrorisme, en d'autres mots, à tuer les terroristes qui s'infiltrent dans le pays.
Mais cette stratégie est vouée à l'échec à moins que nous n'allions au-delà des opérations militaires en Afghanistan et que nous ne nous attaquions aux bases politiques, idéologiques et financières du terrorisme.
Voilà pourquoi notre motion mettait davantage l'accent sur des efforts diplomatiques plus substantiels et plus disciplinés et sur un meilleur équilibre en matière de reconstruction et de développement, éléments que le gouvernement avait pour ainsi dire ignorés dans sa motion initiale.
Je suis ravi de constater que la plupart des propositions libérales sur la question figurent maintenant dans la motion du gouvernement.
À l'instar de la motion libérale, de laquelle elle s'inspire, la nouvelle motion dit ceci:
[...] que la contribution du Canada à la reconstruction et au développement de l’Afghanistan devrait être:
(a) revitalisée et augmentée afin de mieux concilier nos efforts militaires et nos efforts de développement en Afghanistan;
b) axée sur nos forces traditionnelles en tant que nation, particulièrement par le biais de l’élaboration de systèmes judiciaires et correctionnels sains et d’institutions politiques solides en sol afghan, et d’une plus grande participation du Canada à la résolution du problème chronique de la pénurie d’eau potable dans ce pays;
c) axée sur la résolution du problème désastreux de la narcoéconomie qui mine constamment les progrès réalisés en Afghanistan, par la recherche de solutions qui n’affecteront pas la bonne volonté de la population locale;
d) soumise à un plus haut niveau de transparence et d’examen, de sorte que la population canadienne puisse être certaine que nos efforts de développement donnent des résultats en Afghanistan;
[Français]
Les amendements préconisent également une position diplomatique plus ferme et plus encadrée à l'égard de l'Afghanistan et des autres parties en présence dans la région.
Le gouvernement n'a pas pris en compte notre idée de nommer un envoyé spécial canadien qui aurait pour double mission d'assurer une meilleure cohérence dans les initiatives diplomatiques canadiennes dans la région et de réclamer une meilleure coordination entre nos partenaires à l'ONU dans la poursuite d'objectifs diplomatiques communs dans la région.
Au lieu de cela, le gouvernement a dit qu'il serait généralement favorable à la nomination d'un envoyé spécial. Nous présumons que le gouvernement fait allusion au plan tant débattu de nommer un envoyé spécial de l'ONU dans la région. Nous n'avons rien contre une telle mesure, mais nous aimerions comprendre pourquoi le gouvernement a rejeté l'idée d'un envoyé spécial canadien dans la région.
Peu importe quelle sera la décision finale au sujet de l'Afghanistan, une chose est sûre: le gouvernement doit être beaucoup plus transparent et honnête sur la situation et les progrès sur le terrain. Les Canadiens ont le droit de connaître ces informations vitales. Pour réussir, la mission doit être fondée sur le principe de la démocratie. Or, transparence et imputabilité doivent être au coeur de toute action démocratique.
La motion que nous avons présentée exigeait que le gouvernement soit plus transparent et qu'il rende de meilleurs comptes sur la conduite et l'état de la mission. Elle contenait des propositions précises dans ce but.
Plus précisément, l'amendement libéral préconisait que des rapports trimestriels sur l'avancement de la mission soient présentés au Parlement, et demandait aux ministres des Affaires étrangères, de la Coopération internationale et de la Défense nationale de se présenter régulièrement devant un comité parlementaire spécial chargé de l'Afghanistan. Le gouvernement libéral avait adopté une démarche semblable dans le cadre de l'action de l'OTAN au Kosovo, et je pense que la plupart des parlementaires avaient trouvé cette démarche très bénéfique.
Nous sommes enchantés de voir que le gouvernement a intégré ces idées dans la motion, de même que notre proposition visant à remettre en question la pratique consistant à abuser de l'argument de la raison d'État afin de priver les Canadiens d'informations légitimes.
Enfin, la motion que nous avons proposée abordait la question du transfert de détenus afghans.
C'est à juste titre que les partis de l'opposition se sont préoccupés de cette grave question parce qu'à notre avis, il s'agit là d'une question fondamentale de respect des droits, de la dignité de la personne, et que ce sont les valeurs mêmes pour lesquelles le Canada se bat en Afghanistan.
Dans notre motion, nous demandions que soit maintenue la suspension des transferts des prisonniers afghans. Pour résoudre le problème, nous demandions au gouvernement de chercher une solution à l'échelle de l'OTAN au lieu de faire cavalier seul. En outre — et c'est peut-être là le plus important —, nous demandions davantage d'ouverture et de transparence sur cette question en général.
Certes, le gouvernement a formulé les deux derniers points de manière semblable à la nôtre, mais il a modifié notre formulation du premier point. Contrairement à notre proposition, il ne parle pas de maintenir la suspension des transferts de prisonniers. Le gouvernement préfère dire qu'il ne permettra les transferts de détenus que lorsqu'il pensera qu'ils peuvent se faire dans le respect des obligations internationales du Canada.
Pour nous, cela veut dire que la suspension des transferts sera maintenue. À l'heure actuelle , il y a trop de preuves que le Canada ne peut pas transférer de détenus sans manquer à son obligation internationale de défendre et de promouvoir les droits de la personne.
Le gouvernement a maintenant l'occasion de démontrer qu'il tient désormais à être transparent sur cette question. Il n'a qu'à confirmer aujourd'hui à la Chambre que les transferts sont toujours suspendus, qu'ils vont continuer à l'être et que le gouvernement informera immédiatement la Chambre de toute modification de cette politique.
[Traduction]
En conclusion, je salue les efforts raisonnables du gouvernement pour que nous trouvions un terrain d'entente. Nous nous réjouissons que le gouvernement ait accepté les principes fondamentaux qui guident le Parti libéral, à savoir une modification de la mission, la conclusion de la mission, des efforts accrus de développement et de diplomatie et une amélioration de la transparence et de la reddition de comptes de la part du gouvernement.
Aujourd'hui, j'ai énoncé les principes qui sous-tendent la motion. Nous exhortons le gouvernement à adhérer aux nouvelles normes de transparence et de reddition de comptes décrites dans la motion. Ces normes visent à évaluer si le gouvernement respecte les principes énoncés.
Nous allons écouter très attentivement, pendant le débat, les réponses du gouvernement aux questions que j'ai soulevées dans mon allocution. Si le gouvernement nous offre des réponses raisonnables et montre qu'il souscrit à la lettre et à l'esprit de la motion, alors l'opposition officielle appuiera cette dernière.
Le Parti libéral a été à l'avant-plan du débat au cours de la dernière année. Notre parti a lancé des propositions détaillées quant à l'avenir de la mission, tout d'abord dans mon discours en février dernier, puis dans la motion que nous avons présentée à la Chambre en avril à l'occasion d'une journée de l'opposition, ensuite dans ce que nous avons fait valoir au groupe d'experts indépendant en décembre dernier et, plus récemment, dans notre projet de motion plus tôt ce mois-ci.
Nous nous sommes engagés dans un dialogue constructif avec les Canadiens dans ce dossier. Nous en sommes arrivés à une position qui, à notre avis, recueille l'appui de la majorité des Canadiens. Nous voyons d'un bon oeil le fait que le gouvernement ait modifié quelque peu sa position pour rejoindre la nôtre et nous accueillons tous les partis dans ce débat national qui est en cours depuis plus d'un an.
Le Parti libéral est d'avis qu'il est dans l'intérêt de notre pays que l'Afghanistan ait un avenir prospère. Nous jugeons que nos efforts là-bas reflètent les valeurs et les principes dans lesquels croient les Canadiens: la liberté, la démocratie, l'égalité, la sécurité et le respect des droits fondamentaux de la personne. Le Parti libéral pense que ces valeurs méritent d'être défendues. Nous croyons que nos efforts en Afghanistan, appuyés par un mandat clair des Nations Unies, peuvent porter fruits.
À ce jour, les efforts du Canada nous ont coûté cher. Les Canadiens ont déploré toutes les pertes de vie. Nous devons honorer ces sacrifices en veillant à définir la mission qu'il convient de poursuivre. Engageons-nous, dans ce débat, à faire ce qui est le mieux pour le Canada et l'Afghanistan. Gardons à l'esprit les efforts et les sacrifices des hommes et des femmes des Forces canadiennes, de nos diplomates et de nos spécialistes du développement ainsi que de tous les Canadiens qui jouent un rôle actif en Afghanistan.
:
Monsieur le Président, le gouvernement minoritaire conservateur a présenté le 15 février dernier une motion qui inclut les amendements du Parti libéral. Cette motion ne change rien à la position du Bloc québécois même si le en a fait une question de confiance. Nous l'avons déjà dit et nous le répétons, nous sommes prêts à aller en élections sur cette question.
La présente motion conservatrice fixe l'échéance de la mission canadienne à Kandahar à décembre 2011. Or, le Canada est à Kandahar depuis 2006. Nous jugeons qu'après février 2009, date de l'échéance de la présente mission, le Canada aura fait sa part. Les libéraux et les conservateurs ont exactement la même position quant à l'essentiel de la question. Les deux partis veulent que le Canada reste à Kandahar jusqu'en 2011.
Considérant que la majorité des Québécois veulent que le Canada mette fin à sa présente mission en février 2009, il est clair que seul le Bloc québécois reflète la volonté et les valeurs du Québec. Le Parti libéral et le Parti conservateur sont complètement déconnectés de la réalité québécoise. L'un comme l'autre a des positions alambiquées et truffées de contradictions. À preuve, les libéraux, qui il y a à peine quelques semaines défendaient bec et ongles l'argument selon lequel le Canada devrait se retirer des zones de combat à la fin de la présente mission en février 2009, se disent maintenant prêts à prolonger la mission jusqu'en 2011. Ils ont simplement changé d'idée. Quel manque de cohérence!
Quant au leader du gouvernement à la Chambre, il a affirmé vouloir un débat transparent et ouvert. On peut en douter. Depuis qu'ils sont au pouvoir, les conservateurs entretiennent la culture du secret. De plus, tout en affirmant que cette motion n'est pas une affaire partisane, ils en font une question de confiance. En réalité, le gouvernement fait de la question afghane une question purement idéologique entre deux options possibles: soit être pour, soit être contre la position énoncée.
Quant au fond de la motion, nous sommes d'avis que le Canada doit faire davantage de reconstruction et de formation militaire. Telle a toujours été la position du Bloc québécois qui souhaite que ce processus soit enclenché dès maintenant et qu'il se poursuive jusqu'à la fin de la mission en février 2009.
Nous devons toutefois ajouter que le gouvernement n'a toujours pas fixé la date du vote sur cette motion. Nous exigeons un engagement clair, à savoir que celui-ci aura lieu avant le Sommet de l'OTAN à Bucarest, qui débutera le 2 avril 2008.
Par ailleurs, il faut se rappeler que ce n'est pas la première fois que le Parlement est ainsi saisi d'un débat à propos de la mission en Afghanistan et de son échéance en février 2009.
Récapitulons. On se souviendra que la guerre en Afghanistan a été autorisée dès le départ par l'ONU après les tragiques événements du 11 septembre 2001. Au départ, il s'agissait d'une opération — Opération liberté immuable — où les États-Unis se sont prévalus de leurs droits à la légitime défense après avoir reçu une autorisation en bonne et due forme de la part de l'ONU. L'opération visait alors à favoriser l'avancée de l'Alliance du nord opposée au régime taliban vers la capitale. L'objectif était d'affaiblir les talibans, reconnus par l'ONU comme une menace à la paix et à la sécurité internationale.
S'il fut relativement facile de faire tomber le régime taliban, il est autrement plus exigeant de gagner la paix et de reconstruire un État afghan viable. Tel est l'objectif de fond de la coalition internationale et des Nations-Unies: reconstruire l'économie, la démocratie et un État viable en Afghanistan pour permettre aux afghans de diriger eux-mêmes leur pays et leur développement.
Le Canada est posté dans la région de Kandahar depuis octobre 2005. En février 2006, il a pris la relève des États-Unis à la tête du commandement régional sud à Kandahar. Le Canada était responsable des opérations menées dans le cadre d'Enduring Freedom par la coalition dans le sud de l'Afghanistan jusqu'en novembre 2006. À ce moment-là, le Canada s'était également engagé à maintenir le gros de ses troupes jusqu'en février 2007.
En mai 2006, le gouvernement conservateur a demandé à la Chambre d'appuyer la prolongation de la mission afghane pour deux ans, à partir de 2007.
La Chambre a entériné cette demande de prolongation. Le mandat de cette mission devait désormais prendre fin en février 2009. En juillet 2006, l'OTAN a officiellement pris le commandement de la région sud. Les forces canadiennes ont donc quitté l'Opération liberté immuable pour se joindre à la Force internationale d’assistance à la sécurité. La situation dans le sud de l'Afghanistan s'est révélée bien plus coriace que prévue. Les troupes de l'OTAN, et plus particulièrement du Canada, ont fait face à une résistance organisée et féroce de la part des talibans. On le sait, c'est à ce moment-là que le nombre de morts québécois et canadiens s'est mis à augmenter à un rythme alarmant, passant de 8 morts entre 2001 et 2005, à 70 morts entre 2006 et 2008. Pour un pays d'environ 30 millions d'habitants, nous pouvons considérer que nous avons fait notre part.
En effet, le Canada est au quatrième rang des pays ayant déployé le plus de troupes en Afghanistan et se situe au troisième rang en termes de mortalité. Le Canada a payé un prix humain élevé pour assurer la sécurité à Kandahar. Jamais il n'avait subi autant de pertes de vies humaines depuis la guerre de Corée. Ajoutons à cela le coût financier de la mission. Selon les chiffres publiés par le rapport sur les plans et les priorités du ministère de la Défense nationale, le coût des opérations canadiennes en Afghanistan s'élèverait à plus de 7,7 milliards de dollars pour la période 2001-2008.
En mettant fin à la mission de combat en février 2009, le Canada s'aménagerait une marge de manoeuvre financière qu'il pourrait réinvestir dans l'aide au développement en Afghanistan. De plus, si l'on considère que la mission de l'OTAN à Kandahar est une mission internationale et que 38 pays sont actuellement présents militairement en Afghanistan, nous pouvons affirmer sans honte que le Canada aura assumé une mission importante et périlleuse à Kandahar pendant plus de trois ans, et que le temps est venu de passer le relais à d'autres dans cette région.
Cependant, tout en voulant que le Canada se retire de Kandahar au terme de sa mission, nous ne considérons pas que la mission de l'OTAN dans son ensemble doit se terminer. C'est pour cette raison que nous avons toujours préconisé une alternance au sein de l'OTAN afin que d'autres pays viennent remplacer le contingent canadien à Kandahar. Le gouvernement fédéral doit donc dès maintenant avertir les pays membres de l'OTAN de la fin de la mission en février 2009. Se retirer complètement de l'Afghanistan, comme le suggère candidement le NPD, serait irresponsable envers la population, le gouvernement afghan et nos alliés qui comptent sur notre collaboration jusqu'en 2009. D'ici là, un rééquilibrage s'impose. À cet égard, le Bloc québécois prône depuis longtemps une plus grande place au développement de l'Afghanistan et une plus grande approche diplomatique. Pour ne pas perdre l'appui de la population afghane, le Canada doit faire de l'aide au développement une priorité dès maintenant. Il y a urgence.
Après plus de 20 ans de guerre, l'Afghanistan est un pays ravagé. Il n'y a pratiquement plus d'infrastructures civiles ni de croissance économique. Tout est à construire. Il n'est donc pas étonnant que l'Afghanistan soit considéré comme l'un des pays les plus pauvres du monde. Rappelons-nous que c'est dans cette optique que s'est tenue en 2006 la Conférence de Londres sur l’Afghanistan, qui réunissait le gouvernement afghan et la communauté internationale. À cette occasion, les participants ont adopté le Pacte pour l'Afghanistan. De plus, ils se sont donnés des objectifs et un échéancier de cinq ans visant les améliorations dans trois domaines cruciaux, soit celui de la sécurité, celui de la gouvernance de l’État de droit et des droits humains et, enfin, celui du développement économique et social de l'Afghanistan.
Pour réussir à atteindre les objectifs de Londres, il faut gagner l'appui de la population afghane, non seulement en assurant sa sécurité, mais aussi et surtout en améliorant ses conditions de vie quotidiennes.
La réussite du développement en Afghanistan passe par une action concertée de la communauté internationale. Pour convaincre nos alliés d'en faire davantage, le Canada doit donner l'exemple en augmentant dès maintenant son aide. Il faudra donc augmenter cette contribution afin de faire de l'aide humanitaire à court terme et de s'engager dans la construction de routes, de puits, d'infrastructures de base, etc.
Par ailleurs, il est notoire que, en général, les efforts internationaux en matière d'aide et de reconstruction sont mal coordonnés. Le secrétaire général de l'OTAN l'a souligné: nous avons besoin d'une meilleure structure de coordination internationale pour l'Afghanistan qui supervise à la fois la sécurité, la reconstruction et les politiques qui s'y rattachent. Ses propos font écho à ceux formulés par le secrétaire général de l'ONU.
En l'absence d'un effort plus résolu du gouvernement afghan, d'une cohésion accrue de l'action des donateurs, en particulier d'une meilleure coordination entre les éléments militaires et civils de la présence internationale en Afghanistan, de même que d'un ferme engagement des pays voisins, nombre des acquis de la période qui a suivi la conférence de Bonn dans le domaine de la sécurité, du renforcement des institutions et du développement risquent de piétiner, voire de s'inverser.
En janvier 2007, inspiré de ce qui s'était fait en Bosnie et au Kosovo, le Bloc québécois a proposé de nommer un haut représentant de l'ONU, avec des pouvoirs réels et forts, pour mieux coordonner l'ensemble de l'aide internationale, en collaboration avec l'État afghan. Ce haut représentant ferait aussi le lien entre l'OTAN et les équipes de reconstruction de façon à orienter l'aide vers les priorités. Nous avons été heureux de constater que, dans son discours devant l'Assemblée générale de l'ONU, le 2 octobre 2007, le s'est prononcé en faveur d'une telle fonction dont la...