Passer au contenu

CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document







CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 021 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 13 mai 2009

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

     Madame Lavallée.

[Français]

    Merci beaucoup de m'accorder la parole, monsieur le président.
    Avant-hier, on a eu une réunion assez mouvementée, où des députés autour de la table ont manqué de respect envers des témoins. Ces témoins se sont plaints de différentes façons.
    D'abord, dans La Presse de ce matin, un texte parle des « grossiers » conservateurs. Ce sont les mots qui sont indiqués. On y nomme les collègues assis autour de la table qui leur ont manqué de respect.
    Qui plus est, il y a quelques heures, on a reçu un courriel contenant une copie d'une lettre du Syndicat des communications de Radio-Canada, où on se plaint à nul autre que le premier ministre, Stephen Harper. Selon cette lettre, deux collègues autour de la table — et on les nomme — ont fait preuve d'arrogance et d'impolitesse, particulièrement envers les groupes francophones. Ceux-ci disent qu'ils n'ont à peu près rien écouté de leurs présentations, qu'ils se sont levés tour à tour pour quitter la salle au lieu de les questionner sur leurs mémoires respectifs ou leurs présentations, qu'ils se sont lancés dans de longues et véhémentes protestations verbales prétendant que ces groupes n'étaient là que pour blâmer le gouvernement conservateur, et qu'ils les accusaient de ne pas être dûment mandatés par les gens qu'ils représentaient.
    Vous comprenez, monsieur le président, que recevoir des témoins et leur manquer de respect à ce point est inacceptable. Je me demandais si les personnes, qui se reconnaissent, veulent bien faire des excuses et prendre la ferme résolution de ne pas recommencer.
    Pour ma part, ce que je trouve le plus désagréable, hormis l'incident de lundi, c'est lorsqu'on reçoit des témoins francophones, que des gens connus pour être unilingues anglophones, enlèvent leurs écouteurs et se parlent entre eux, pour être sûrs de ne pas entendre ni comprendre ce qui se passe.
    En tant que francophone, je trouve cette attitude particulièrement insultante. Je demanderais que, dans le lot d'excuses que ces personnes feront, elles nous disent également qu'elles n'ont pas l'intention de reprendre une telle attitude, y compris celle de ne pas écouter les témoins qui parlent en français.

[Traduction]

    Monsieur Del Mastro.
    Pour commencer, ce n'est pas un rappel au Règlement.
     Ensuite, madame Lavallée, lorsque des témoins viennent ici pour faire de la politique partisane, ils doivent s'attendre à entrer dans des luttes partisanes. C'est bien normal.
    Vous savez, pour ma part, ce que je n'ai pas apprécié? Je n'ai pas apprécié le fait qu'ils aient allégué que les membres conservateurs du comité « faisaient une pause pour aller fumer » pendant la séance. Pas un seul membre de notre parti ne fume. Ils devraient présenter leurs excuses pour avoir fait une telle insinuation.
    Il n'est pas besoin d'excuses, cependant. Celui qui se présente devant le comité pour faire de grands discours partisans doit s'attendre à ce que ses membres se défendent. C'est comme ça que ça se passe.
    Le président: Monsieur Del Mastro...
    Je veux faire un vrai rappel au Règlement.
(1535)
    Monsieur Del Mastro, il y a un vrai rappel au Règlement.
    C'est un véritable rappel au Règlement, cette fois-ci, monsieur le président...
    Une voix: À la bonne heure.
    M. Pablo Rodriguez: ... même si je suis en partie d'accord avec Mme Lavallée.
     Nos témoins sont là, cependant. Nous devons leur témoigner du respect et commencer immédiatement.
    Des voix: Bravo!
    En effet, je suis bien d'accord: nous ne devons pas prendre sur le temps réservé aux témoins. Ce serait un manque de respect.
    Une voix: Bravo!
    Le président: Nous souhaitons la bienvenue à tous ceux qui participent aujourd'hui à la 21e séance du Comité permanent du patrimoine canadien et, aux termes de l'article 108(2) du Règlement, nous allons procéder à l'étude de l'évolution de l'industrie de la télévision au Canada et son importance sur les communautés locales.
     Je vais demander à chacun des intervenants de s'en tenir dans la mesure du possible à un exposé de 10 minutes. Je lève habituellement mon stylo ou un objet quelconque lorsque vous approchez de la limite du temps imparti. Je serai indulgent jusqu'à un certain point, mais efforcez-vous de ne pas dépasser les 10 minutes.
     Le premier intervenant représente l’ACTRA: l'Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio.
    Vous pouvez commencer.
    Je m'appelle Richard Hardacre. Je suis un acteur professionnel. Je suis le président élu de l’ACTRA. L'une de nos membres les plus éminentes, l'actrice primée Wendy Crewson, viendra elle aussi parler au nom de l’ACTRA.
    Nous venons ici parler au nom des 21 000 membres de l’ACTRA qui vivent et travaillent partout au pays. Nos membres sont des artistes anglophones qui opèrent dans tous les domaines: films, télévision, disques, radio et médias numériques. L’ACTRA représente aussi les membres de la Fédération américaine des musiciens, dont font partie 17 000 musiciens professionnels au Canada.
     Nous vous remercions de tenir ces séances importantes et de donner à nos membres la chance d'être entendus.
    Après avoir suivi ces séances et entendu les propos que l'on y tenait, je dois vous avouer bien franchement que nous sommes quelque peu inquiets. Les radiodiffuseurs privés conventionnels du Canada sont venus déclarer que la mécanique était cassée et que le système était en crise. Ils ont menacé de fermer les stations locales à moins que l'on accepte leurs revendications portant sur la déréglementation et les tarifs de distribution. Nous avons vu les radiodiffuseurs et les gros câblodiffuseurs se payer des publicités nationales coûteuses, à pleine page, pour acheter et vendre des stations de télévision pour le prix d'une tasse de café et d'un beignet.
    Vous pensez peut-être que nous avons de nombreuses raisons d'être pessimistes au sujet de notre industrie, mais ce n'est pas le cas. Bien sûr, l’ACTRA s'inquiète, comme tous les Canadiens, lorsqu'elle entend parler de mises à pied, de coupures de programmes et de la fermeture de stations de télévision locales. Il est indispensable de pouvoir disposer d'un réseau de radiodiffusion en bonne santé pour renforcer le tissu social, culturel et économique de notre pays.
    Selon le Conference Board du Canada, nos industries culturelles procurent 85 milliards de dollars à l'économie canadienne, soit 7,5 p. 100 du produit intérieur brut. Une bonne part vient de l'industrie du cinéma et de la télévision, qui a représenté plus de 131 000 emplois en 2008. Par ailleurs, chaque dollar qui est investi dans notre industrie injecte 10 $ dans l'ensemble de l'économie. Pour cela, nous devons protéger et préserver la radiodiffusion canadienne. Nous devrons peut-être procéder à des réajustements, mais nous n'avons pas besoin de la déréglementation massive que les radiodiffuseurs nous demandent.
    Nous avons comparu devant le CRTC vendredi dernier. Nous lui avons présenté nos demandes habituelles. Nous lui avons demandé de ne rien faire pour l'instant en ce qui concerne la réglementation des émissions prioritaires canadiennes, de conserver le statu quo en délivrant des licences d'un an aux radiodiffuseurs privés conventionnels à la condition qu'ils diffusent le même nombre d'émissions dramatiques canadiennes l'année suivant celle du renouvellement. Nous avons invité le conseil, comme nous vous y invitons, à ne pas écouter les cris de panique et les menaces des radiodiffuseurs privés.
     Nous considérons que le réseau de télévision conventionnel n'est pas en crise. Il fait face aux mêmes difficultés que toutes les industries en transition face à une récession mondiale. On n'en est peut-être plus à une croissance à deux chiffres des recettes tirées de la publicité conventionnelle, mais les médias de radiodiffusion conventionnel ne vont pas disparaître du jour au lendemain. La population canadienne va continuer à écouter les nouvelles locales et le compte rendu des grands événements. YouTube n'est pas prêt de remplacer CTV ou NBC pour ce qui est de la publicité de masse.
     Les radiodiffuseurs télévisés conventionnels du Canada ont, en 2008, enregistré des bénéfices d'exploitation. Ils étaient peut-être faibles comparativement au passé, mais ça n'en reste pas moins des bénéfices. Les chaînes spécialisées ont continué à enregistrer des chiffres records: 2,9 milliards de dollars l'année dernière. La bonne santé des chaînes spécialisées nous incite à raisonner sur l'ensemble de l'industrie. N'oubliez pas que CTVglobemedia, Canwest et Rogers possèdent la majorité de ces chaînes spécialisées. CTV en possède 32 et Canwest 21.
     Si les radiodiffuseurs éprouvent des difficultés dans cette mauvaise conjoncture, c'est parce qu'eux-mêmes ont pris de mauvaises décisions sur le plan commercial. Malheureusement, ici comme devant le CRTC, les radiodiffuseurs privés pointent du doigt tout le monde sauf eux-mêmes: le CRTC et sa réglementation; Internet; la récession; le coût des émissions aux États-Unis; le coût des émissions canadiennes; la transmission numérique; les grands câblodistributeurs; les producteurs indépendants. Ils vont même jusqu'à vous montrer vous aussi du doigt, vous qui représentez le gouvernement.
     Comment expliquer qu'ils consacrent tant d'argent aux émissions des É.-U? Ils font monter le prix de ces émissions en achetant parfois une série non pas parce qu'ils veulent la diffuser, mais parce qu'ils veulent en priver leurs concurrents. Les radiodiffuseurs conventionnels de langue anglaise consacrent 61 p. 100 de crédits de plus aux émissions étrangères qu'aux émissions canadiennes: 778 millions de dollars contre 453 millions de dollars l'année dernière. C'est beaucoup d'argent et beaucoup d'emplois perdus pour notre pays.
(1540)
    Il y a aussi les milliards de dollars consacrés à l'achat de nouvelles entreprises de radiodiffusion. Pour en faire quoi? Pour contracter d'énormes dettes? Pour devenir, quoi, des empereurs des médias? En prenant ainsi des décisions irréfléchies, voilà qu'ils se retrouvent, après avoir enregistré pendant des années des bénéfices record, sans aucune marge de manoeuvre face au fléchissement du marché de la publicité, incapables de s'adapter et de surmonter le marasme temporaire.
     Les radiodiffuseurs considèrent qu'ils ont le droit de faire des bénéfices sans aucune limite. C'est très bien. Ce sont des entreprises. Toutefois, une licence de radiodiffusion s'accompagne d'une responsabilité envers les gens, envers le public. Nous, les membres du public, accordons aux radiodiffuseurs le droit de faire des bénéfices en échange de la promotion de notre identité culturelle, ce qui implique que l'on recherche et que l'on diffuse des émissions canadiennes, en matière d'actualités ou de fiction.
     Nous voulons que vous compreniez qu'il entre dans vos attributions de faire en sorte que ces entreprises payent en retour le public.
    Donc, au lieu d'assumer leurs erreurs, les radiodiffuseurs privés tirent prétexte de cette crise pour nous prendre en otage sur la question des tarifs de distribution, pour laisser les collectivités sans services de nouvelles et pour se débarrasser d'une réglementation qu’ils n'ont d'ailleurs peut-être jamais voulue. Je suis sûre qu'ils aimeraient bien que vous acceptiez, vous et le CRTC, de les laisser fermer les services de nouvelles locales, abandonner les programmes canadiens, et aller à Los Angeles acheter leurs émissions.
    Si nous avons besoin de radiodiffuseurs canadiens, c'est uniquement pour la programmation canadienne: les émissions dramatiques, le sport et les nouvelles. Si ce n'est pas ce qu'ils ont l'intention de diffuser, à quoi servent-ils?
     Les radiodiffuseurs privés doivent être tenus de produire et de radiodiffuser les nouvelles locales. Le CRTC a d'ores et déjà pris des mesures pour aider les radiodiffuseurs à assumer leurs obligations en mettant sur pied le nouveau Fonds pour l'amélioration de la programmation locale, qui injectera chaque année 60 à 70 millions de dollars supplémentaires dans le système.
     Il faut aussi les obliger à diffuser des émissions dramatiques canadiennes. Nous considérons qu'ils n'ont pas à en faire moins; il faut leur en demander davantage. Disons-le carrément: ce ne sont pas les émissions canadiennes qui ont mis au départ les radiodiffuseurs en difficulté. Les radiodiffuseurs conventionnels ont bien trop négligé le contenu canadien, notamment en matière d'émissions dramatiques.
     En 1999, le CRTC a accordé plus de souplesse aux radiodiffuseurs. Il a modifié les critères de dépenses correspondant aux émissions canadiennes et il a modifié les règles, ce qui fait qu'aujourd'hui, sur un total de 28 heures d'émissions aux heures de grande écoute, huit seulement doivent être consacrées aux émissions prioritaires. Grâce aux règles établies en 1999, les émissions de loisirs, de variétés et de télé réalité sont comptabilisées dans ces huit heures.
     Les émissions dramatiques télévisées canadiennes de langue anglaise ont pratiquement disparu. Cette semaine, si l'on consulte les horaires de télévision aux heures de grande écoute, on constate que CTV et Global ont chacune programmé deux heures d'émissions dramatiques canadiennes sur un total possible de 28 sur chaque chaîne — deux heures.
     Nous avons tous entendu les radiodiffuseurs canadiens nous répéter à l'envi qu'ils n'arrivent pas à gagner de l'argent sur les émissions canadiennes. CTV nous dit même qu'une émission comme Corner Gas perd de l'argent. Ce qu'ils ne vous disent pas, c'est qu'ils peuvent gagner de l'argent et en gagnent effectivement. Ils n'en gagnent peut-être pas la première fois qu'ils diffusent l'émission, mais combien de fois vont-ils la rediffuser? Cette même émission est ensuite diffusée sur leurs chaînes spécialisées et continue à rapporter de l'argent. Les émissions canadiennes sont un pactole à long terme.
     Nous avons commandé une étude publiée la semaine dernière qui nous montre que même si les émissions canadiennes sont censées au départ rapporter moins d'argent, une fois que l'on tient compte des rediffusions et de la transmission par des groupes de stations, les radiodiffuseurs d'émissions canadiennes peuvent rentrer dans leur argent et bien souvent faire des bénéfices. Savez-vous que les tarifs de la publicité sont automatiquement abaissés lorsqu'il s'agit d'une émission canadienne? Même dans le cas d'une des dix meilleures émissions comme Flashpoint, on pratique un rabais automatique de 25 p. 100 parce qu'elle est canadienne. Je trouve cela insultant, surtout aujourd'hui alors que la télévision canadienne réussit des exploits.
     Quatre séries d'émissions dramatiques d'une heure sont diffusées simultanément par les réseaux des États-Unis. Jusqu'à présent, seule Due South y était parvenue. Aujourd'hui, il y en a quatre: Flashpoint, The Bridge, The Listener et Copper. C'est le modèle économique de l'avenir.
    Bien entendu, si la production est si riche à l'heure actuelle, c'est uniquement parce que les radiodiffuseurs se préparaient à faire renouveler leur licence. Cela prouve toutefois que lorsque les radiodiffuseurs sont motivés pour faire un effort, les Canadiens ont les capacités, le talent et la ténacité qui s'imposent pour faire une télévision de classe internationale.
     En plus de produire moins d'émissions canadiennes, les radiodiffuseurs exigent des tarifs de distribution pour percevoir des redevances. Nous ne sommes pas contre les redevances. Ce que nous ne voulons pas, c'est qu'on procure aux radiodiffuseurs privés une autre source de recettes sans rien leur demander en échange. Si l'on estimait qu'un système de redevances est le meilleur moyen de garantir la santé à long terme du réseau de radiodiffusion conventionnel, nous y serions favorables, à trois conditions.
     Premièrement, nous voulons des garanties pour que le régime des redevances se traduise à l'écran par des émissions locales et des émissions dramatiques.
     Deuxièmement, les géants de la câblodistribution ne devraient pas être autorisés à répercuter leurs coûts sur le public. Avec plus de 8 milliards de dollars de recettes et deux milliards de dollars de bénéfices, les câblodistributeurs ont les moyens de payer la facture.
     Troisièmement, Radio-Canada doit faire partie de la mesure. Nous sommes déçus de voir que les radiodiffuseurs privés se sont servis de ces audiences pour s'en prendre à notre radiodiffuseur public. Aujourd'hui plus que jamais, alors que nous constatons qu'on ne peut pas faire confiance aux radiodiffuseurs privés, le rôle de Radio-Canada prend toute son importance. Alors que les radiodiffuseurs privés rendent des comptes à leurs actionnaires, c'est devant nous que Radio-Canada doit répondre.
     Depuis des années, malheureusement, un manque de financement chronique empêche Radio-Canada de bien faire son travail. Nous ne voulons pas que cette société se lance dans une guerre des taux d'écoute et qu'elle s'efforce de tirer un maximum de la publicité en diffusant des émissions de jeux américaines. Ce n'est pas la bonne marche à suivre.
     En conséquence, l’ACTRA appuie la recommandation faite l'année dernière par le Comité du patrimoine afin que l'affectation annuelle de crédits à Radio-Canada soit augmentée de sept dollars pour chaque Canadien. L’ACTRA, de même que la CEP et Friends of Canadian Broadcasting, a proposé par ailleurs qu'il n'y ait plus de publicité à la télévision de Radio-Canada sauf pour les sports. On pourrait financer cette mesure en faisant payer les câblodistributeurs, en recourant à des crédits budgétaires ou en combinant ces différents moyens.
(1545)
    Soyons bien clairs: nous ne voulons pas que l'on retire à Radio-Canada les recettes tirées des publicités sans les remplacer par une autre source de revenus. Nous aurions ainsi un véritable radiodiffuseur public et nous pourrions libérer d'éventuelles recettes tirées de la publicité pour les radiodiffuseurs publics.
    Ces audiences nous ont malheureusement bien montré qu'il ne faut pas s'attendre à ce que les câblodistributeurs ou les radiodiffuseurs fassent preuve de dynamisme. C'est à nous et à vos électeurs de prendre l'initiative si l'on veut pouvoir disposer d'un réseau de radiodiffusion canadien dynamique et indépendant. La radiodiffusion canadienne est à la croisée des chemins, non pas à cause de la crise, mais parce qu'il y a une chance à saisir.
    Je vais résumer.
     On trouve au Canada des esprits créateurs parmi les mieux formés au monde. Notre culture est diversifiée. Nous possédons les connaissances techniques et nous avons le personnel qualifié pour être à la pointe dans le monde en matière de techniques de communication. Nous vous demandons de nous aider à mettre sur pied pour le XXIe siècle un projet qui réunisse tous ces éléments.
     Faisons passer notre culture et la population canadienne travailleuse avant les radiodiffuseurs et les grands câblodistributeurs. Aidez-nous à établir un réseau de radiodiffusion au service de tous les Canadiens, qui procure des milliers d'emplois qualifiés, qui renforce les collectivités, et surtout qui donne aux Canadiens une voix forte et indépendante qui puisse être entendue d'un bout à l'autre du pays et dans le monde entier.
     Je remercie les membres du comité.
     Nous sommes tout disposés, monsieur le président, à répondre par la suite à toutes les questions que vous voudrez bien nous poser.
    Je vous remercie.
     Nous allons maintenant entendre les représentants de la Canadian Association of Community Television Users and Stations (CACTUS).
    Bonjour. Nous sommes très heureux d'être parmi vous. Merci d'avoir accepté de nous recevoir.
     La Canadian Association of Community Television Users and Stations travaille actuellement à mettre sur pied un regroupement national bilingue composé de chaînes de télévision communautaire indépendantes, de chaînes de câblodistribution communautaire coopératives, de quelques câblodistributeurs privés qui offrent encore des services de télévision communautaire et des auditeurs de ces différents télédiffuseurs. Nous croyons, au sein de notre association, que le citoyen doit avoir accès aux ondes, c'est-à-dire que chaque membre du public devrait pouvoir participer au système de diffusion.
    Suivant la loi sur la radiodiffusion, le système canadien de diffusion devrait rendre compte de la diversité des voix et un accès aussi large que possible à celui-ci devrait être assuré. La crise économique attire également l'intention sur la rareté de la programmation locale. Toutefois, ce dernier problème n'est pas nouveau. Depuis des années, tant la CBC/Radio-Canada que les télédiffuseurs privés imposent des coupures dans la production et ferment des stations dans les petits centres démographiques.
     Au cours de la même période, les EDR ont progressivement procédé à la régionalisation et à la professionnalisation de la production de la télévision communautaire, ce qui a également eu pour résultat la fermeture de stations et une réduction des heures de programmation locale. C'est très dommage puisque c'est le secteur communautaire qui est le mieux en mesure de répondre aux trois besoins suivants; la diversité; l'accessibilité pour le plus grand nombre possible de Canadiens; la programmation et l'expression locales.
     Pour une plus grande diversité et un accès élargi, impossible de faire mieux que de donner à chaque Canadien, à chaque organisation de la société civile et à chaque communauté la possibilité d'être un réalisateur. C'est ce qui rend génial le modèle canadien de l'accès communautaire, qui est une création de l'Office national du film. Celui-ci a été rendu possible au début des années 1970 grâce à l'arrivée sur le marché des magnétoscopes portatifs et à la présence de la câblodistribution dans les différentes collectivités partout au pays. Ce modèle est copié partout dans le monde et, aujourd'hui, il constitue un élément solide des systèmes de radiodiffusion dans plus de 30 nations, y compris la majorité des démocraties occidentales.
     Dans la plupart d'entre elles, la télédiffusion communautaire est considérée comme une tierce partie qui fonctionne différemment de la radiodiffusion publique et de la radiodiffusion privée. En septembre 2008, l'union européenne a reconnu officiellement cette tierce partie et a recommandé à ses membres d'adopter des mécanismes de soutien financier et législatif applicables à celle-ci afin d'encourager l'inclusion et le dialogue multiculturel essentiel.
     Entre-temps, dans le berceau même du mouvement pour l'accès communautaire, le secteur est vidé de sa substance par les rondes successives de mesures législatives appliquées par le CRTC et par la mauvaise utilisation des fonds destinés aux chaînes communautaires par les principaux câblodistributeurs canadiens. Les dommages ont commencé à se faire sentir en 1997 à la suite de la déréglementation officielle de la télévision communautaire.
     Les fonds octroyés au secteur ont été réduits de 5 p. 100 à 2 p. 100 dans les marchés plus importants pour faire place au Fonds canadien de télévision et les câblodistributeurs étaient libres de décider s'ils voulaient offrir une chaîne communautaire. La plupart ont choisi de garder les 2 p. 100 plutôt que de le remettre au FCT et ils ont commencé à considérer les chaînes comme des sources de revenus possibles.
     En réponse, le CRTC a assoupli les règles interdisant la publicité sur les chaînes, ce qui a segmenté encore plus le marché de la publicité des radiodiffuseurs privés. Beaucoup de programmes sont des véhicules à peine déguisés pour la promotion de produits, souvent pour des sociétés nationales et internationales, même pas des entreprises locales.
     Dans des villes comme Vancouver, Calgary et Winnipeg, sur les différentes chaînes, le public est remplacé par des émissions réalisées par des professionnels qui imitent des productions commerciales.
     Par exemple, à Calgary, où j'ai travaillé à titre de coordonnateur bénévole de 1993 à 1997, 400 bénévoles et une demi-douzaine d'employés réalisaient plus de 35 heures de nouvelle production par semaine, dans tous les styles imaginables, que ce soient les sports, les émissions pour les personnes âgées et pour les enfants, les arts et les spectacles en direct, les dossiers locaux et les tribunes libres. Aucun autre secteur ne peut produire une telle quantité d'émissions. Après que la chaîne a été confiée à des professionnels, la production quotidienne est passée à une heure ou moins consacrée aux nouvelles, ceci dans une ville qui possédait déjà trois autres sources de production de nouvelles professionnelles.
     Des studios dans les petites collectivités ont été fermés. Ainsi, à Vancouver, il y a déjà eu 12 bureaux régionaux mais il n'y en a plus qu'un seul, dans la tour Shaw du centre-ville. Au Nouveau-Brunswick, il y a déjà eu 30 studios; aujourd'hui, Rogers n'en offre plus que six. Non seulement les câblodistributeurs ferment-ils des studios de leur propre chef, sans un mot de la part du CRTC, mais le CRTC encourage aussi, au nom de la rationalisation, les fermetures en autorisant le regroupement des zones desservies.
     En 2002, en réponse aux protestations du public, le CRTC a obligé à nouveau les chaînes de câblodistribution communautaire à diffuser de 30 à 50 p. 100 de « programmation d'accès » (bien loin des chaînes entièrement mises à la disposition des collectivités desservies, mais c'est mieux que rien) et il leur a demandé d'offrir une formation au public et de mettre les équipements à sa disposition. La plupart des grandes EDR par câble font tout simplement fi de ces règles en raison de l'absence de surveillance ou de mesure disciplinaire de la part du CRTC.
     La politique 2002-61 préconise aussi que les groupes communautaires puissent demander une licence de radiodiffusion hertzienne pour la télévision communautaire, mais aucune formule de financement n'est offerte et moins de 10 groupes communautaires au Canada anglais se sont montrées intéressés. La plupart survivent grâce au bingo et à la publicité.
    La politique de 2002 a également lancé l'idée que, lorsqu'un câblodistributeur ne fournit pas de programmation communautaire dans l'esprit de la politique du CRTC, une autre entreprise de la collectivité peut demander le droit de câble, mais ces demandes ont été rejetées. De surcroît, les titulaires de licence qui possèdent peu de pouvoir et qui offrent effectivement un service ne peuvent demander à percevoir le droit.
(1550)
    Malgré l'engagement pris par le CRTC de tenir l'automne prochain une audience sur le secteur de la télévision communautaire, de récentes décisions du CRTC continuent à nuire à ce secteur. En décembre, le CRTC a statué en moins de 10 minutes, dans le cadre d'une audience à huis clos, que Shaw pouvait faire l'acquisition de la Campbell River TV Association, qui offrait une programmation communautaire sur l'île de Vancouver depuis plus de 50 ans.
    Il est possible par ailleurs de supprimer les distinctions entre les classes de licence, ce qui fait en sorte que la télévision communautaire reçoit moins de fonds dans les petites localités, celles qui ont moins de 20 000 abonnés (ils passent de cinq à 2 p. 100 des revenus bruts de la câblodistribution). Ce changement a été proposé dans l'avis de consultation 2009-176, dont la date limite d'intervention était lundi dernier.
     Lorsque des parties préoccupées communiquent avec le CRTC, les employés du CRTC eux-mêmes ne semblent pas trop savoir en quoi les changements influent sur l'industrie. Donc, CACTUS craint que le CRTC ne manque de compétence, de volonté et d'appui politique pour apporter les changements structurels requis. Il en résulte que le seul secteur qui pourrait parfaitement répondre à la crise actuelle de la programmation locale rétrécit comme peau de chagrin.
     Mais en quoi ce secteur communautaire est-il différent? Premièrement, le modèle d'accès communautaire emploie des bénévoles, de sorte qu'une chaîne communautaire typique peut produire de 5 à 10 fois plus d'émissions qu'une chaîne professionnelle avec le même budget, comme le montre mon exemple de Calgary. Les fonds publics ou d’EDR affectés au secteur servent de capitaux d'amorçage qui sont multipliés au sein de la collectivité pour la production d'émissions pour la collectivité.
     L'actuelle tendance vers la régionalisation et la commercialisation des chaînes communautaires signifie que les facteurs économiques qui limitent la production locale dans les secteurs public et privé opèrent maintenant dans le secteur communautaire. Il faut que cette tendance soit inversée pour que la production reprenne dans les collectivités et pour que soit mobilisé le génie économique et créatif du modèle de l'accès communautaire.
     En second lieu, les idées d'émissions proviennent de la collectivité, de sorte que cette dernière est en mesure d'élaborer des émissions qui correspondent à ses besoins.
     Troisièmement, la participation à la production télévisuelle, la télévision étant encore le médium où les Canadiens trouvent la majeure partie de leur information et de leurs loisirs, permet à la population de s'engager davantage et d'être plus critique et plus capable de relever des défis complexes. C'est un excellent terrain de formation pour les secteurs publics et privés.
     Que demandons-nous au comité permanent?
     Premièrement, pour revitaliser le secteur de la télévision communautaire afin qu'il puisse jouer son rôle et répondre aux exigences de la loi sur la radiodiffusion concernant la diversité et l'accès, nous demandons que les 120 millions de dollars qui sont consacrés chaque année par les câblodistributeurs à ce qu'ils qualifient de « programmation communautaire » soient affectés plutôt aux exploitants indépendants de chaînes communautaires qui sont accessibles à tous, qui représentent leur collectivité et qui sont présentes dans ces collectivités.
     La création d'un fonds indépendant a été recommandée, il y a six ans, par le rapport Lincoln intitulé Notre souveraineté culturelle. Les câblodistributeurs ont peut-être déjà été les dépositaires évidents de la production communautaire, mais l'époque de la petite entreprise de câblodistribution proche partenaire de la collectivité est définitivement révolue.
     De plus, à l'heure où les câblodistributeurs achètent des stations de télévision pour un dollar et pourraient bientôt acheter des réseaux de télévision commerciale, il est inquiétant de penser qu'ils puissent décider des enjeux dont on peut discuter sur les chaînes communautaires, lesquelles — potentiellement du moins — sont les seules fenêtres locales du réseau de câblodistribution. Le secteur communautaire, quand il fonctionne comme il le doit, représente une soupape de sécurité pour la démocratie.
     En second lieu, conformément à la recommandation du rapport Lincoln, de faire en sorte que les EDR ne relevant pas de la câblodistribution rendent aussi compte de la vie locale.
     Troisièmement, conformément à la recommandation du rapport Lincoln, d'étudier les différentes solutions techniques pour que l'on puisse transmettre plusieurs chaînes locales par voie hertzienne dans les différentes régions.
     Quatrièmement, de prévoir dans la gamme de services de base de tous les EDR une chaîne de services nationale et publique servant de plate-forme pour les émissions d'intérêt national diffusées par les secteurs bénévoles et indépendants et facilitant les échanges entre les collectivités.
     Cinquièmement, de créer à l'intérieur du CRTC un bureau de protection du citoyen chargé de vérifier la cohérence des décisions du CRTC et leurs répercussions sur le secteur communautaire.
     Qu'est-ce que nous nous engageons à faire en contrepartie? Nous avons une nouvelle vision. Pendant les dix années où elle dépérissait au Canada, la télévision communautaire faisait des pas de géant ailleurs dans le monde. Grâce à l'avènement des petites caméras à haute définition et des progiciels de montage informatisé, les installations d'accès situées dans d'autres pays produisent des émissions d'apparence professionnelle mais qui ont les qualités d'être locales et fraîches, de prendre des risques et de montrer des gens qui prennent position sur des enjeux locaux.
     Non seulement la technologie de production vidéo a-t-elle changé mais les plates-formes de distribution ont également évolué. Les installations communautaires les plus avancées ne sont pas liées à des plates-formes spécifiques. Elles offrent aux habitants une formation gratuite et du matériel pour la production vidéo et radio et aussi la possibilité d'acquérir des compétences en matière de conception pour le Web et en informatique. Elles sont souvent implantées dans des théâtres, des bibliothèques et des centres communautaires, afin que les habitants disposent d'un guichet unique pour transmettre leurs messages. Les productions qui en résultent peuvent être diffusées sur toutes les plates-formes; ondes hertziennes, câble, satellite et Internet.
     Si de telles installations communautaires de ce genre peuvent être suffisamment financées à même les droits perçus auprès des EDR ou de nouvelles sources, CACTUS s'engage, fort de son expertise, à conduire le secteur communautaire et à l'aider à fournir de tels services et à combler le vide en matière de programmation locale. Le Canada pourrait reprendre le flambeau pour l'utilisation de nouvelles technologies à l'échelon communautaire.
     Je vous remercie de votre attention.
(1555)
    Merci de votre exposé.
     Nous allons maintenant passer à la représentante de Stornoway Communications. Vous avez la parole.
     Je souhaite le bonjour à monsieur le président, à mesdames et messieurs les députés et à toutes les personnes présentes.
     Chaque fois que l'on prend la peine d'examiner de près la plupart sinon la totalité des politiques publiques et canadiennes ayant rencontré du succès, on se retrouve invariablement devant une croisée des chemins ayant amené les décideurs à faire passer en premier les intérêts du Canada. Le choix n'est pas toujours facile et ce n'est pas généralement celui de ceux qui sont les plus individualistes, mais lorsqu'on fait passer le Canada en premier, on ne se trompe jamais sur nos intérêts à long terme et notre caractère national n'y perd jamais.
     Nous demandons respectueusement à votre comité de faire passer les intérêts du Canada en premier lorsqu'il examine les différentes solutions proposées face aux défis que doit relever notre réseau de radiodiffusion.
     Je m'appelle Martha Fusca et je suis la présidente de Stornoway Communications, société propriétaire et exploitante de trois chaînes numériques spécialisées; ichannel, la chaîne des affaires publiques et des questions sociales; bmp:tv, la chaîne sur la danse; enfin, The Pet Network. J'ai entrepris ma carrière de productrice de télévision après être sortie diplômée de l'université York et j'ai fondé Stornoway Productions en 1983.
     Stornoway a produit nombre de documentaires d'enquête, géopolitiques et nationaux primés et acclamés par la critique, et destinés à des radiodiffuseurs tant canadiens qu'étrangers.
     Laissez moi vous en citer quelques-uns; Agents of Deception, une étude de la campagne de désinformation soviétique au niveau mondial; End of an Empire, une série en quatre parties portant sur la chute de l'Union soviétique; Caught in the Crossfire, l'examen des missions de maintien de la paix et de résolution des conflits du Canada dans le monde, lancées aux Nations unies à New York; Dragons of Crimes, une étude de la contrebande asiatique vers l'Amérique du Nord; Does your Vote Count? — dont je vous ai apporté à chacun une copie — qui se penche sur la vie des députés et sur la structure parlementaire dans laquelle ils opèrent; enfin A Question of Honour, une série en cinq parties qui relate la vie d'un soldat canadien en partant de son point de vue personnel, à la fois sur le terrain et ici au pays.
     La vie des producteurs indépendants est une lutte continuelle et, comme les acteurs, les metteurs en scène et les auteurs, ils ont choisi ce métier non pas parce qu'il y a beaucoup d'argent à gagner, mais parce qu'ils aiment leur travail. C'est ainsi que sont les artistes, et il ne faut pas oublier qu'ils sont l'âme de la nation.
     En 2000, j'étais prête à relever de nouveaux défis et à me lancer dans la radiodiffusion. J'ai été très surprise. J'étais aux anges lorsque nous avons obtenu nos licences et je croyais naïvement que nous nous en sortirions à merveille si nous faisions de bonnes émissions et que nous stagnerions dans le cas contraire. Étant donné que nous avions toujours réussi d'excellentes émissions, je considérais que nous allions bien nous en sortir. Toutefois, ce n'est pas comme ça que ça se passe.
     Nous nous félicitons de voir que vous avez étendu l'examen de ces questions importantes à l'audition de Stornoway, qui est la voix des petits radiodiffuseurs indépendants, à financement privé, une marchandise qui se fait rare dans un marché dominé par les EDR et les grandes sociétés intégrées.
     Oui, nous avons besoin dans le domaine des médias de sociétés fortes et bien capitalisées en ce qui a trait à la radiodiffusion et à la distribution au Canada, mais nous devons aussi nous assurer que l'on fait place aux petites sociétés indépendantes et aux nouveaux intervenants.
     Oui, nous avons besoin d'équilibrer notre politique de radiodiffusion et notre cadre de réglementation; toutefois, il ressort clairement de ces audiences qu'il y a de toute évidence un déséquilibre des pouvoirs au sein de notre industrie du fait des politiques publiques, de la réglementation, ou de son absence, les EDR dominant totalement la relation entre les radiodiffuseurs et les distributeurs.
     Quel que soit le critère retenu, on peut dire sans risque de se tromper qu'il y a au Canada trois grands monopoles de câblodiffusion, Bell ExpressVu fournissant un service important aux collectivités rurales, mais sans véritable concurrence avec les monopoles. Ces monopoles — et non les consommateurs — font ce qu'ils veulent dans le domaine de la radiodiffusion.
     Dès 2004, nous avons fait part au CRTC de notre expérience en ce qui concerne les EDR et nous avons signalé dans de nombreux cas tous les obstacles et toutes les barrières qui nous ont empêché de réussir et de contribuer à la réalisation des objectifs de la loi sur la radiodiffusion.
     Par ailleurs, le fait que l'on a privilégié ce que l'on a appelé les forces du marché a créé une situation intenable pour les radiodiffuseurs, qui se répercute tout au long de la chaîne dans les autres secteurs, y compris au niveau des producteurs, des acteurs, des auteurs, des metteurs en scène et des équipes de tournage. On ne peut pas compter sur les seules forces du marché pour remplacer la réglementation lorsqu'il s'agit de soutenir les grands piliers de la loi sur la radiodiffusion, tels que la diversité et l'accessibilité du système.
    Ces audiences peuvent — et devraient à mon avis — redresser en grande partie le déséquilibre des pouvoirs entre les radiodiffuseurs et les EDR, de même qu'entre certains radiodiffuseurs et les producteurs, en recommandant des politiques qui bénéficient à tout le monde plutôt qu'à un seul secteur aux dépens de tous les autres.
     Pour faire court et ne pas gaspiller le temps qui nous est imparti, laissez-moi m'en tenir à cinq grandes recommandations, qui s'imposent à notre avis compte tenu des conclusions tirées par notre société de l'analyse très précise et très minutieuse de la situation dans laquelle se trouve la radiodiffusion au Canada, et où nous vous demandons de faire passer en premier le Canada.
(1600)
    Dans notre solution faisant passer en priorité le Canada, nous proposons que la tranche des services de base canadiens implique une distribution obligatoire s'accompagnant de frais minimums obligatoires au titre des services indépendants analogues et de catégorie 1 dans le cadre du service de base, qu'il soit ou non numérique. Ces services, comme notre ichannel, apportent une contribution significative au contenu canadien et aux dépenses d'émissions canadiennes et ils sont des éléments importants de la diversité au sein du réseau de radiodiffusion canadien. Dans le cas des services indépendants, une distribution obligatoire sans l'imposition de droits d'abonnement ne donne tout simplement aucun résultat.
     Nous recommandons que vous autorisiez les services de catégorie 2 ou les nouveaux services à demander à accéder à la catégorie 1. L'accès aux licences de catégorie 1 donne aux services de programmation canadiens indépendants la possibilité de prendre des initiatives, de répondre aux exigences du conseil et d'augmenter la diversité, le contenu canadien et les dépenses correspondantes. Tout le monde y gagne à l'intérieur du système; les radiodiffuseurs, les distributeurs, les producteurs, les créatifs et les téléspectateurs. Cela aide aussi les petits radiodiffuseurs indépendants, qui ont actuellement bien de la peine à mettre un pied dans l'industrie, à développer des entreprises plus stables.
     Nous recommandons que vous interdisiez les droits de distribution imposés par les EDR. Aux termes de la loi, nous avons la responsabilité en tant que radiodiffuseurs d'émettre auprès des EDR. La transmission des émissions des EDR aux abonnés relève de la responsabilité des EDR et il leur appartient d'en assumer le coût. On ne devrait pas autoriser les EDR à imposer des frais abusifs sur les services de programmation agréés par le CRTC. Nous craignons que cette difficulté se complique encore lors du passage à la HD. Les tentatives faites par les EDR pour avoir le choix de distribuer ou non nos émissions HD pour ensuite imposer des droits de transmission exorbitants pour la HD vont empêcher les radiodiffuseurs indépendants de diffuser des émissions de télévision à haute définition. Ce sera un recul significatif de nos services face à la concurrence.
     Nous recommandons que l'on puisse se prévaloir d'une possibilité d'accès aux marchés contrôlés par les EDR a un coût raisonnable. Les débouchés les plus importants et les plus rentables pour nous sont ceux qui sont contrôlés par les EDR. Les débouchés locaux, en l'absence de directives claires du CRTC, sont souvent mis à la portée des services indépendants comme le nôtre à des conditions très onéreuses et avec beaucoup de restrictions, de sorte que nous n'avons pas les moyens de nous en prévaloir. Les EDR ont malheureusement trop tendance à tirer profit de ces débouchés en vendant les services correspondants plutôt que de promouvoir les émissions canadiennes et d'informer les consommateurs canadiens sur le contenu canadien disponible.
     Nous recommandons que les radiodiffuseurs appuient les producteurs indépendants non affiliés et participent à la production d'émissions dramatiques, d'émissions pour enfants, de documentaires et d'émissions artistiques et de variétés.
     Monsieur le président, messieurs et mesdames les députés, mesdames et messieurs, nous considérons que ces cinq recommandations aideront notre entreprise à se donner des possibilités raisonnables de survie et de progrès. Elles donneront les mêmes chances à d'autres radiodiffuseurs indépendants, elles feront comprendre aux nouveaux participants éventuels qu'ils peuvent entrer sur le marché de la radiodiffusion, elles préserveront notre participation exceptionnelle à l'amélioration du contenu canadien, et elles renforceront la diversité tout en rendant les services indépendants accessibles à l'ensemble de la population canadienne.
    Ce sont là les cinq recommandations qui font passer le Canada en priorité, qui sont conformes aux dispositions de la loi sur la radiodiffusion et qui appuient tous les secteurs et non un seul en particulier, tout en donnant aux EDR suffisamment de souplesse pour aller au-delà de la première tranche de base des chaînes transmises au Canada.
    Je vous remercie de votre attention et je vous suis très reconnaissante de nous avoir donné la possibilité de prendre part à ces audiences.
    Je suis très heureuse de siéger ici au côté de l’ACTRA et des représentants de la chaîne communautaire. J'ai beaucoup d'estime pour ces deux groupements.
(1605)
    Je vous remercie.
    M. Rodriguez va vous poser la première question. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Puisqu'il n'y a qu'un tour de questions, je ne prendrai que quatre minutes et je laisserai la dernière à Mme Fry.
     Soyez tous les bienvenus.

[Français]

    Bonjour à tous. Merci d'être ici aujourd'hui.
    Je m'adresse au représentant de l'ACTRA. Vous dites essentiellement que la télévision conventionnelle privée utilise le prétexte de la crise actuelle pour se débarrasser de stations régionales ou d'opérations qui coûtent trop cher. Est-ce ce que vous pensez?

[Traduction]

    En effet. Elle s'en sert aussi d'excuse pour qu'on l'autorise à en faire moins en matière de contenu canadien, ce qui est un autre gros problème.

[Français]

    Je veux vous assurer que le Parti libéral du Canada est contre la déréglementation. En qui nous concerne, il ne faut pas moins mais plus de contenu canadien. C'est notre position officielle. Ça l'était avant et ça l'est encore aujourd'hui.
    Les chaînes spécialisées doivent composer avec la présence d'Internet et des télévisions spécialisées, qui viennent chercher une grande part de marché. Les chiffres le prouvent. Pensez-vous qu'il va falloir les aider d'une certaine façon?

[Traduction]

    Excusez-moi, quelle aide supplémentaire?
    Nous ne proposons aucune solution en particulier. Je dis tout simplement que de nouveaux problèmes se posent du fait de la présence d'Internet et des télévisions spécialisées. C'est une réalité et les chiffres le démontrent. Ne pensez-vous pas, en conséquence, qu'il nous faudrait faire quelque chose pour la télévision conventionnelle dans son ensemble, y compris CBC — Radio-Canada?
    Il faut faire une distinction: il y a les radiodiffuseurs privés et CBC — Radio-Canada.
     Pour ce qui est tout d'abord de la radiodiffusion privée, nous soutenons que ces entreprises de radiodiffusion doivent être considérées dans leur ensemble, prises en bloc, en englobant les chaînes spécialisées. Les statistiques nous démontrent que les chaînes spécialisées réalisent en fait d'excellents bénéfices. Dans la pratique, l'ensemble de leurs recettes tirées de la publicité n'est pas en baisse.
     De nos jours, le marché est fractionné. Certes, la population se met à regarder des émissions sur Internet, mais pour ce qui est d'accorder une aide supplémentaire aux chaînes spécialisées des radiodiffuseurs, non, nous ne sommes...
    Pas pour ce qui est des chaînes spécialisées, mais en ce qui concerne les chaînes conventionnelles.
    En ce qui concerne les chaînes conventionnelles, notre position est très claire. Nous ne croyons pas qu'en soi les chaînes conventionnelles aient besoin d'aide. Nous voulons qu'elles cessent de consacrer trop d'argent à l'achat d'émissions étrangères. Si effectivement elles parvenaient à justifier l'imposition de droits de distribution payés par les câblodiffuseurs, il faudrait à notre avis que cela soit assujetti à de sérieuses conditions. Nous aimerions que l'on impose des conditions pour que le surcroît de recettes tirées des droits de distribution, auxquels nous ne sommes pas opposés, soient...
(1610)
    À certaines conditions.
    ... soumis à des conditions. Effectivement.
    Je dois passer à autre chose, car il ne me reste qu'une minute.

[Français]

    Les diffuseurs privés disent devoir acheter des émissions américaines pour attirer les Canadiens à la télévision et les garder par la suite. Quelle est votre position là-dessus?

[Traduction]

    Bien sûr, il est indispensable de faire des bénéfices; nous voulons que ces entreprises soient viables. Nous n'avons rien contre la diffusion d'émissions américaines ou d'autres pays étrangers. Ce qui nous paraît contestable, par contre, c'est la prédominance aux heures de grande écoute — CTV et Global correspondant à ce qui est en bleu ici — d'une majorité d'émissions étrangères ou américaines. Sur une plage de 28 heures par semaine, il y a une heure d'émissions originales à CTV et une heure à Global. Oui, par conséquent, il faut des émissions américaines si l'on veut tirer des recettes de la publicité, mais nous avons besoin d'en limiter le nombre.
    Donc, ce qui est en rouge est mieux...
    Je vous remercie. Vous avez dépassé le temps qui vous était imparti car il nous faut donner à Mme Fry la possibilité de poser rapidement une dernière question.
     Vous disposez d'une minute seulement.
    Merci, monsieur le président.
     Vous écrivez à la page 5 de votre mémoire qu'en 1999 « le CRTC a cédé aux appels à la déréglementation des télédiffuseurs en diminuant leurs obligations en matière de dramatiques » et vous venez de nous dire qu'il y a très peu de ces émissions aux heures de grande écoute. Quelles ont été les conséquences de cette décision du CRTC sur votre groupement, l’ACTRA?
    Il est intéressant de relever que le revenu moyen d'un membre de notre syndicat en 1999, avant que cette politique n'entre en vigueur, était de 15 000 $ par an, de sorte qu'il n'est pas question ici de devenir riche. Depuis l'instauration de cette politique et en raison du fait que le nombre d'émissions dramatiques aux heures de grande écoute a considérablement baissé, le revenu moyen d'un acteur au Canada est désormais de 10 000 $. Notre revenu a baissé de 29,1 p. 100 sur cette période de 10 ans depuis que ce règlement est entré en vigueur. L'effet a été dévastateur.
    Il y a donc des pertes d'emplois et de revenus?
    Effectivement.
    Je vous remercie.
     Nous allons maintenant donner la parole à Mme Lavallée.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Hardacre, je suis contente de vous voir parce que vous posez exactement le problème de la télévision de langue anglaise, la télévision du Canada. Si un représentant de l'Union des artistes, qui a exactement le même mandat que vous au Québec, était assis à votre place, il ne soulignerait pas les mêmes problèmes aux mêmes endroits.
    Au Québec, le problème n'est pas la concurrence hollywoodienne. On a d'excellentes productions québécoises avec d'excellentes cotes d'écoute. On n'a pas les mêmes problèmes. Ce que j'aime de votre présentation, c'est qu'elle pose exactement le problème de la télédiffusion canadienne, soit la concurrence avec Hollywood.
    La situation peut-elle changer? Votre problème peut-il vraiment être réglé? On sent que c'est une roue qui tourne. Moins il y a de productions canadiennes, moins les télévisions veulent en diffuser. Par conséquent, les artistes font moins d'argent et il y a moins d'artistes. Lorsque des artistes anglophones réussissent, ils veulent aller aux États-Unis parce que la langue est la même. C'est un de vos problèmes. Cette roue peut-elle s'arrêter? Ce problème pourrait-il être résolu par une réglementation, par des investissements du gouvernement ou par une conscientisation des télédiffuseurs qui, actuellement, ont davantage l'air de gens qui veulent faire des affaires que des gens qui ont une licence et un privilège de faire de la télévision pour la population de façon générale?
    Je vous remercie de votre question. Nous voudrions bien avoir le même avantage qu'ont les artistes au Québec.

[Traduction]

    Le Québec n'a pas à faire face à la concurrence de l'éléphant américain qui se trouve juste de l'autre côté de la frontière.
    Est-ce que nous entrevoyons une solution? Y a-t-il de la lumière à l'autre bout du tunnel? Nous le croyons. Nous sommes très optimistes. Pour commencer, tout dépend du radiodiffuseur public. Nous considérons qu'il faut que CBC — Radio-Canada, dans les deux langues, continue à bénéficier d'un financement stable et permanent.
     Nous ne voulons pas, par contre, que les radiodiffuseurs privés conventionnels considèrent l'obligation d'apporter un contenu canadien comme une forme d'imposition, un coût imposé à leur entreprise ou une quelconque pénalité . Ce n'est pas le cas. C'est la loi sur la radiodiffusion qui l'exige. Cela figure dans la loi canadienne sur la radiodiffusion, une loi du Canada, et ils ont l'obligation de se faire les champions de la culture canadienne en français et en anglais. C'est une exigence absolue en ce qui les concerne.
     Nous n'acceptons pas non plus leur argumentation quand ils nous disent que le contenu canadien fait baisser leurs marges de profit. Nous estimons que c'est une prétention qui n'est pas acceptable pour les personnes qui sont dans cette pièce. Ce sont eux qui se sont mis en difficulté en dépensant des sommes considérables pour acheter des émissions étrangères et en procédant à des acquisitions massives pour lesquelles ils se sont trop endettés.
     Donc, effectivement, nous envisageons une réglementation, nous demandons que le CRTC impose cette réglementation, et nous souhaitons que votre comité fasse des recommandations en ce sens. Nous ne voulons pas que l'on fasse des cadeaux à l'industrie.
    Merci.
(1615)

[Français]

    Madame Crewson, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

    Oui, j'aimerais dire qu'il y a une façon de s'en sortir. Nous le constatons chaque jour davantage. Dès qu'une possibilité s'offre à nous, à partir du moment où les radiodiffuseurs considèrent sérieusement, au moment du renouvellement de leurs licences, qu'il est temps de consacrer un peu d'argent et d'efforts aux émissions canadiennes, on enregistre d'énormes succès.
    Le talent est là. Nous le voyons dans toutes les émissions américaines. Quand on consulte les génériques — qu'il s'agisse des auteurs, des producteurs ou des metteurs en scène — on voit qu'ils sont pleins de Canadiens. Ce n'est pas que nous manquions de talents — mais il faut pouvoir offrir aux gens un emploi. S'il n'y a pas d'emplois chez nous, pourquoi rester? Quand on gagne 10 000 $ par an, pourquoi rester?
     Si nous réussissons à faire passer cette petite idée et donner aux radiodiffuseurs privés la motivation — en leur disant qu'il y a une réglementation et que si on leur a accordé une licence, c'est pour qu'ils la respectent — de produire ce genre d'émissions, nous sommes tout à fait capables de le faire. Une fois que nous y serons parvenu et que ça deviendra rentable, nous réussirons à rompre ce cercle vicieux, mais tant qu'ils nous disent qu'ils ne veulent diffuser que des émissions américaines, nous ne parviendrons jamais à nous doter d'une industrie canadienne viable.
    Je vous remercie.
     Nous allons maintenant donner la parole à M. Angus.
    Merci. Pour commencer, je tiens à vous faire mes excuses. Cinq minutes de questions, ce n'est vraiment pas suffisant étant donné le nombre de problèmes soulevés par chacun des intervenants que nous venons d'entendre.
    Je vais commencer par l’ACTRA parce que c'est elle qui a ouvert la voie, à mon avis, aux organisations des acteurs du monde entier pour lutter en faveur des droits numériques. Pourtant, le projet d'exploitation que cherchent à nous faire accepter aujourd'hui les radiodiffuseurs me paraît absolument contraire aux nécessités du numérique.
     À l'ère de l'Internet, c'est le contenu qui est roi. Les gens veulent du contenu, et pourtant on nous dit que les émissions locales sont un véritable boulet, qu’il s'agit là de notre marché, de notre auditoire local, et qu'on ne veut pas avoir à s'en occuper. « Nous ne voulons pas du fardeau des émissions canadiennes », nous dit-on, « et même si on nous l’impose, nous voulons pouvoir vendre ces émissions au rabais ou sur des créneaux délaissés lorsque personne ne les regarde. » On veut tout simplement pouvoir retransmettre des émissions américaines, sur lesquelles on ne possède pas de droits à long terme.
     Il m'apparaît qu'avec ce modèle d'entreprise prospectif, les radiodiffuseurs se coupent eux-mêmes l'herbe sous le pied. S'ils ne créent aucun contenu et s'ils se contentent de le vendre à un auditoire qui de plus en plus regarde des émissions en ligne, comment pensent-ils pouvoir trouver des téléspectateurs alors que ces derniers peuvent aller regarder les émissions américaines là où ils le veulent dans le monde entier?
     J'aimerais que vous me disiez ce que vous en pensez, vous qui avez lutté pour le principe des droits numériques. On a évoqué à satiété les retombées à long terme dans ce domaine, et pourtant les radiodiffuseurs nous disent qu'il n'y a pas d'argent à gagner en privilégiant le contenu canadien, en créant des émissions et en possédant les droits correspondants. Avez-vous un commentaire à faire?
    L'étude que nous avons commandée à Nordicity, que nous avons publiée la semaine dernière et que nous sommes tout disposés à communiquer à l'ensemble du comité, nous révèle que la programmation canadienne est en fait rentable. Il y a des retombées à long terme. Les premières diffusions des émissions télévisées, quelles qu'elles soient, ne font pas des bénéfices, mais elles en font ensuite lorsqu'elles repassent sur les chaînes spécialisées et sur les grands réseaux, puis à nouveau sur les nouveaux médias. Il y a la possibilité de faire des bénéfices. C'est effectivement rentable.
     Je dois dire ensuite que je m'oppose tout simplement à l'argument selon lequel personne ne s'intéresse aux émissions locales, qu'elles soient distribuées par des moyens numériques ou conventionnels. Les nouvelles locales sont importantes, mais l'ensemble des émissions locales nous racontent des histoires qui intéressent chacun d'entre nous. Il y a par exemple des films tels que Passchendaele. Il ne s'agit pas d'une émission de télévision, mais c'est une histoire locale, et même si tout se passe en Belgique et en France, cela concerne toutefois la population locale et l'histoire canadienne locale de nos ancêtres. Ce genre de film est une histoire locale; c'est une histoire canadienne.
     Tout simplement, il y a un avenir dans le domaine numérique, et nous considérons par ailleurs que nous avons en tant qu'exécutants — et les auteurs, les metteurs en scène et les producteurs ne manqueront pas de vous le rappeler — un droit de participation aux bénéfices tirés de la distribution numérique à long terme, qui doit être protégé par les droits de la propriété intellectuelle. C'est là aussi quelque chose que votre comité pourra envisager à l'avenir, mais il y a un travail très important sur la propriété intellectuelle qui est en train d'être effectué par l’OMPI, l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, et nous espérons que votre gouvernement les fera respecter.
(1620)
    Je vous remercie.
     Madame Fusca, l'une des questions qui se posent devant notre comité, c'est qu'il semble y avoir un grand déséquilibre au détriment de ceux qui prennent des risques en créant un produit susceptible de se vendre ou, en ce qui vous concerne, en mettant sur pied une entreprise de radiodiffusion. Les risques que cela implique sont énormes. Il y a un déséquilibre entre les risques que prennent les gens de ce groupe et ceux des distributeurs, qui décident en fait qui va voir quoi et de quelle manière, et qui en retirent finalement la majeure partie des bénéfices sans prendre trop de risques.
     Vous nous parlez des EDR qui sont autorisées à imposer des droits pour distribuer les émissions. Ma question est double. Premièrement, est-ce que cela est incorporé à leur licence ou est-ce cela fait l'objet d'une facturation supplémentaire? En second lieu, estimez-vous que le CRTC, qui est là pour protéger l'intérêt public, se détourne complètement de son rôle essentiel, qui est d'assurer un équilibre entre les radiodiffuseurs et les EDR, d'une part, et les créateurs qui se chargent d'élaborer le contenu, d'autre part.
    Pour répondre tout d'abord à votre première question, j'ai dit que la loi disposait qu'en tant que radiodiffuseurs, nous étions chargés d'assurer la diffusion de nos émissions aux câblodistributeurs ou aux entreprises de distribution par satellite, et c'est ce que nous faisons. J'ai déclaré à maintes reprises que l'on nous a imposé des frais supplémentaires, un droit de transmission, de 240 000 $ par an. Seule, pour l'instant, une EDR l'a fait. Il n'y en a qu'une, pour l'instant, qui le fait.
     Je peux vous dire aussi que si je n'avais que la chaîne ichannel, je pourrais refuser de payer ces droits parce que sa transmission est obligatoire, mais j'ai aussi une chaîne relevant de la catégorie 2, ce qui fait que si je décide de ne pas payer les droits, ce service sera abandonné.
     Le CRTC est au courant. Je ne sais pas pourquoi il n’intervient pas. Cela fait des années que j'en parle abondamment. J'ai dépensé des centaines de milliers de dollars en palabres et aujourd'hui c'est à mon tour de poser des questions.
     C'est une situation, en passant, qui n'est pas nouvelle. Il serait bien facile d'en accuser le gouvernement actuel, mais, malheureusement, cet état de choses s'est imposé à nous petit à petit au cours des 10 dernières années. Pour ce qui est du CRTC, je ne sais pas si c'est parce que les entreprises de câblodiffusion réussissent à exercer d'énormes pressions ou si c'est parce que les radiodiffuseurs ne font pas bien leur travail... De toute évidence, les radiodiffuseurs font mal leur travail, parce que je connais aussi bien Ivan Fecan que Len Asper, et je sais qu'ils s'intéressent véritablement à la programmation canadienne.
     Je sais aussi pourquoi ils importent certaines émissions américaines: parce que si on ne le fait pas, indépendamment du fait que cela aide à subventionner les émissions canadiennes, une EDR va tout de suite venir nous dire qu'elle a besoin de cette émission et qu'il lui faut par conséquent nous retransmettre une autre chaîne américaine.
     Je pense qu'il serait bon que votre comité demande au CRTC pour quelle raison il procède ainsi. Dieu sait que, même si nous ne réussissons pas à nous faire bien comprendre, les preuves sont là et tout le monde peut les voir.
    Je vous remercie.
     La parole est à M. Del Mastro.
    Merci.
     Je remercie les témoins de leurs exposés d'aujourd'hui.
     Franchement, nous aimerions bien pouvoir poser des questions à tous les témoins et les réinterroger lors d'un deuxième tour, mais nous ne disposons malheureusement que d'une séance d'une heure et nous n'avons pas le temps. Je vous prie donc de nous excuser si quelqu'un d'entre vous a l'impression que notre comité ne s'est pas suffisamment intéressé à lui aujourd'hui.
     Je vais commencer par l’ACTRA avec M. Hardacre et Mme Crewson. Je dois dire que je suis tout à fait en accord avec vous sur nombre de déclarations que vous avez faites aujourd'hui. Je considère que le CRTC a pour rôle de protéger l'identité canadienne. C'est ce pourquoi il a été créé, à mon avis. Nous vivons aux côtés du plus gros exportateur de produits culturels au monde et nous nous efforçons de nous définir par nous-mêmes et de parler du Canada.
     Vous avez évoqué le cas de Passchendaele. Je vous en ai parlé. Ce qui me plaît dans Passchendaele, c'est que l'on y rend compte du fait que les Canadiens ont pris part à la Première Guerre mondiale, du rôle que nous y avons joué, et que l'on raconte une histoire canadienne en partant d'un point de vue canadien. Je pense que c'est exceptionnel.
     J'ai une véritable passion de ces choses. Je considère que les Canadiens ont vraiment besoin de se familiariser avec leur histoire. J'estime qu'ils ont besoin de mieux connaître leur identité.
     Vous avez évoqué les émissions dramatiques. Je considère qu'elles ont un intérêt fondamental. Que perdons-vous aujourd'hui en éliminant progressivement nos émissions dramatiques canadiennes aux heures de grande écoute?
(1625)
    Les émissions dramatiques canadiennes sont au coeur de notre culture populaire. Ce sont les seules que nous regardons tous. C'est un message qui se transmet d’un bout à l'autre du pays. C'est une voix qui se joint à la nôtre. Elles se font l'écho de notre humour, de nos craintes, de nos espoirs et de nos rêves. On retrouve tout cela dans les émissions dramatiques canadiennes.
     Voilà ce que représentent les émissions dramatiques canadiennes. Elles nous racontent nos propres histoires, à nous-mêmes et à nos enfants, pour que nous puissions faire partie d'un pays qui a ses propres histoires héroïques qui nous forment, plutôt que de voir notre identité constamment remise en question par une programmation et des émissions dramatiques américaines qui font que nos enfants, chaque fois qu'ils branchent la télévision, regardent des émissions américaines faisant état de rêves américains ou d'une réalité américaine qui ne peuvent être les leurs.
     Cela nous diminue de ne pas avoir nos propres histoires sous forme d'émissions dramatiques aux heures de grande écoute à la télévision. À moins que l'on y remédie, nous ne serons plus à mon avis qu'une simple succursale de la culture américaine, c'est tout ce que nous serons. Une minorité en retirera des quantités d'argent et tous les autres en subiront les conséquences. On voit déjà apparaître des fissures dans cet édifice, mais je peux vous dire que les effets seront dévastateurs. Nous perdrons notre identité.
    Je vous remercie.
     Vous avez évoqué la décision de 1999. Comme je l'ai dit précédemment, le CRTC avait pour rôle de s'assurer qu'il y aurait des Canadiens sur les ondes et que la population canadienne pourrait voir des émissions canadiennes. Quel message souhaitez-vous transmettre directement au CRTC? Je sais que vous lui avez demandé de ne rien faire pendant un an, mais qu'avez-vous à lui dire en ce qui concerne le paiement de droits, que ce soit au titre du Fonds pour l'amélioration de la programmation locale, qu'il a d'ores et déjà décidé d'instituer, ou subsidiairement, en ce qui a trait aux droits de distribution dont ont parlé les radiodiffuseurs et auxquels les EDR se sont opposées?
    Que lui diriez-vous au sujet de ces droits et de l'importance de s'assurer qu'il joue son rôle pour garantir un contenu canadien aux heures de grande écoute? Quel message souhaitez-vous transmettre directement au CRTC?
    Merci.
     Le message que nous avons d'ores et déjà transmis — et je vais le redire clairement — c'est qu'il doit sortir de ces audiences, tant en ce qui concerne la distribution numérique que la distribution conventionnelle des émissions, une plus grande ouverture en faveur du contenu canadien, les émissions dramatiques en faisant partie intégrante, s'accompagnant d'un minimum de dépenses.
     Ce n'est pas simplement le syndicat des acteurs qui en a besoin. C'est l'ensemble de la population canadienne qui l'exige, afin qu'un minimum de dépenses soit consacrées au contenu canadien, en majorité au bénéfice des émissions dramatiques canadiennes, de toute ces histoires que vient d'évoquer Wendy.
    Je vous remercie.
     Madame Fusca, je trouve encourageant votre engagement en faveur des délibérations de notre comité. Je vous ai vue pratiquement à toutes les audiences, ce qui veut dire que vous êtes convaincue à la base de l'intérêt de la procédure des comités du Parlement. Je tiens à vous en remercier.
     Vous exploitez aujourd'hui trois stations: The Pet Network, bpm:tv et ichannel. Avez-vous des difficultés à assurer la transmission d'une de ces chaînes à l'heure actuelle? Je ne savais pas qu'il y avait une chaîne télévisée sur les animaux domestiques, mais il est probable que ma femme l'aimerait.
    Oui, je suis déçue en effet de constater que vous ne connaissiez pas l'existence de Pet Network.
     J'ajouterai simplement à titre général, ainsi qu'au nom des représentants communautaires et de l’ACTRA, qu'il faut vraiment injecter davantage d'argent dans le système. Il est nécessaire de mieux partager les recettes qui en sont tirées. Nous devons aussi nous servir des mécanismes à notre disposition pour en faire la promotion. Dans le cas de The Pet Network, par exemple, ça m'est impossible. Shaw et Star Choice n'assurent pas la transmission de The Pet Network ou de bpm:tv.
     Nous avons entendu un député NPD de Windsor venir nous demander ici comment il se faisait qu'il était possible de recevoir deux chaînes pornographiques, mais pas la chaîne de Windsor. Je me pose la même question et bien d'autres gens le font dans le pays. Pourquoi ne peut-on pas obtenir bpm:tv? Pourquoi ne reçoit-on pas The Pet Network?
     Si les gens en Amérique du Nord consacrent des milliards de dollars à leurs animaux domestiques, il serait logique de penser — oublions le cas précis de bpm:tv — que ce genre d'émission est extrêmement populaire. Pourtant, les responsables de Shaw viennent nous dire que c'est le consommateur qui décide. Quel consommateur, en fait? Que décide le consommateur? Puisque dans la pratique le consommateur ne décide rien — ce sont ces gens qui décident. Malheureusement, on leur a accordé au fil des ans le pouvoir de décider ce que peut voir ou pas la population canadienne, ce qui va faire l'objet d'une promotion et ce qui est laissé de côté.
     J'aimerais promouvoir certaines émissions dramatiques canadiennes dont nous disposons sur ichannel, mais il m'en coûterait un demi-million de dollars sur chaque chaîne pour faire une campagne saisonnière. Ce n'était pas dans les intentions du CRTC, mais il ne fait toujours rien pour y remédier.
(1630)
    Je vous remercie.
     Nous le répétons, tous nos témoins ont une grande importance pour notre comité.
     Notre première heure est passée. Nous allons faire une pause de quelques minutes. Juste avant ça, j'aimerais que tout le monde revienne à sa place, car nous avons une ou deux choses à examiner avant de passer aux groupes suivants.
     Un grand merci à nos témoins. Nous allons faire une pause de cinq minutes.

(1635)
    Reprenons.
     Avant de commencer, notre comité a quelques points à examiner. J'ai parlé aux agents de recherche. Le premier lundi après notre retour, le 25 mai, nous allons recevoir le CRTC.
     Il a été proposé que nous organisions une mini table ronde le 27 mai. On y retiendrait un échantillon des témoins qui ont déjà comparu devant nous. Je vais demander à chacun des partis de proposer deux personnes au greffier, et nous verrons ce que l'on peut faire.
     Parallèlement, je vais demander que la séance du 1er juin soit suspendue. Il y a une demande qui va être transmise, je crois, par l'intermédiaire du greffier, au sujet d'un événement qui doit avoir lieu ce jour-là à la Bibliothèque et aux Archives. J'aimerais qu'un maximum de membres de notre comité assiste à cet événement. Je ne serai pas présent de toute façon ce jour-là; c'est l'ouverture du festival Shakespeare de Stratford et j'ai des billets pour ma femme et moi. Nous allons correspondre par l'intermédiaire du greffier et transmettre une partie de ces renseignements demain.
     Nous nous efforcerons par ailleurs de rencontrer nos agents de recherche pour leur donner une idée de ce que nous voulons dans notre rapport, pour leur donner quelques directives, éventuellement leur demander de faire une ébauche pendant la semaine de congé. Lorsque nous en serons à la rédaction du rapport, nous ne disposerons que de quatre ou cinq séances pour recueillir tous les chiffres et le présenter à la Chambre.
     Allez-y, monsieur Rodriguez.
(1640)
    Je vous remercie.
     Je ne vois aucun inconvénient à supprimer la séance du 1er juin. Je propose en conséquence que le 27 mai nous organisions une table ronde de deux heures et que nous prolongions la séance pour pouvoir ainsi organiser une séance de travail à huis clos au sujet du rapport.
    Oui, ça me paraît bien. Nous en avions effectivement parlé. Je l'avais oublié. Je pense que ça peut se faire. Nous serons à huis clos de toute façon lors de cette table ronde. Nous pourrons la prolonger d'une demi-heure ou d'une heure et décider au fur et à mesure.
     Monsieur Angus, vous avez la parole.
    Je ne sais pas si nous pouvons en décider dès maintenant, mais nous pourrions avoir besoin d'en discuter en mangeant ensemble avant la séance. Il me semble qu'avant d'entrer en séance, il faudrait que nous ayons au minimum une petite idée des questions que nous voulons traiter afin de ne pas nous aventurer au hasard face aux gens que nous voulons consulter.
     Nous n'avons pas beaucoup de temps, nous devons nous prononcer sur certaines questions très techniques, et il y a bien des gens qui s'intéressent de près à ce que nous faisons. Nous n'avons pas à le faire dès maintenant, mais si nous pouvions consulter notre calendrier et trouver un peu de temps pour aborder ensemble toutes ces idées, nous aurions la possibilité d'en tester la validité. Nous saurons ainsi bien mieux de quoi il en retourne au sujet des recommandations. Nous pourrons ensuite aborder cette séance.
    Très bien.
     Allez-y, monsieur Del Mastro, mais soyez bref, s'il vous plaît.
    Je pense que M. Angus a présenté un excellent argument. Je sais que nous n'avons pas de comité de direction au sein de ce comité, mais si M. Rodriguez et Mme Lavallée sont intéressés par cette proposition, c'est avec plaisir que je me réunirai avec vous trois, éventuellement de manière officieuse, pour évoquer certaines idées et voir où nous en sommes sur toutes ces choses. Il y a peut-être d'autres membres qui sont intéressés, mais c'est évidemment mon cas.
    Je vous remercie.
     Est-ce que la cloche va sonner à 17 h 30?
    Une voix: Oui.
    Le président: Vous avez la parole, madame Lavallée.

[Français]

    Monsieur le président, quelque chose me turlupine. On va annuler notre réunion du 1er juin pour une conférence de presse à la Bibliothèque. Je ne sais pas si, comme je pense, il s'agit d'une annonce du gouvernement concernant un numériseur. Il me semble que cette façon de procéder est bizarre.

[Traduction]

    Laissez-moi vous interrompre, parce que ce n'est pas ce que j'ai compris. Le greffier a proposé que... Je ne sais même pas si c'est aux Archives ou à la Bibliothèque qu'il veut nous voir. En ce qui me concerne, il ne s'agit pas d'une annonce et...

[Français]

    Je vais vous le dire, je sais ce que c'est.

[Traduction]

    C'est peut-être une coïncidence, selon vous? Qui sait?

[Français]

    Il s'agit du lancement d'un générateur de collections numériques à Bibliothèque et Archives Canada, et c'est à 16 h 30 le 1er juin.
    Est-ce exact?

[Traduction]

    Monsieur le président, elle n'a pas à y assister.
    Vous n'avez pas à y assister. C'est facultatif...
    C'est facultatif.
    ... mais nous allons annuler la séance.

[Français]

    Il ne serait pas logique d'annuler notre réunion pour une activité comme celle-là. Je trouve que ça n'a pas de bon sens.

[Traduction]

    On en a discuté autour de cette table. Nous nous étions plus ou moins entendus. Vous n'êtes pas obligée d'y aller. Ce n'est pas obligatoire...
(1645)

[Français]

    Nous ne nous sommes pas entendus. Vous m'en parlez, et je dis non.

[Traduction]

    ... de même qu'il n'est pas obligatoire de venir à ce comité. Vous pouvez envoyer quelqu'un à votre place, si vous le voulez.

[Français]

    Monsieur le président, on parle entre nous, correctement. Vous nous parlez d'une activité dont vous ne connaissiez pas la nature et vous dites qu'on annulera notre réunion pour y assister.
    Je vous parle gentiment et je vous dis non. Ce n'est pas une façon de faire, ce n'est pas poli.

[Traduction]

    En ma qualité de président, je déclare que la séance du 1er juin est annulée, et nous procéderons comme je l'ai indiqué.
     Je vous prie une fois de plus de m'excuser pour cette interruption et pour avoir fait attendre nos témoins.
     Je vous souhaite la bienvenue devant notre comité.
     Je vais demander à l'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son de présenter son exposé.

[Français]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs, je me présente, Brunhilde Pradier, présidente de l'Association québécoise des techniciens de l'image et du son, l'AQTIS.
    L'AQTIS est un syndicat représentant 3 000 artistes concepteurs, artisans, techniciens membres et plus de 1 000 techniciens pigistes. Il s'agit de 4 000 professionnels expérimentés oeuvrant dans le monde de la production cinématographique et télévisuelle québécoise et étrangère réalisée en territoire québécois.
    Nos membres sont des professionnels pigistes qui font, tous les jours, notre télévision. À ce titre, et considérant l'importance de notre groupe et de leurs fonctions dans cette industrie, nous considérons que nous sommes des partenaires essentiels de cette industrie. Notre présence ici est une première pour nous.
    Cette fois, les enjeux pour l'industrie de la radiodiffusion canadienne sont tellement importants que nous tenons à faire entendre la voix des concepteurs et des artisans de notre télévision indépendante, qui sont membres de notre association. Je vous remercie de nous accueillir.
    L'AQTIS se présente aujourd'hui devant vous afin de vous sensibiliser à l'importance d'une production typiquement canadienne, locale et nationale à l'antenne des diffuseurs canadiens. C'est pourquoi nous aborderons deux éléments essentiels, les caractéristiques du marché francophone et la place de la production indépendante.
    Nos membres travaillent principalement à des productions francophones et essentiellement à des productions indépendantes. Il nous apparaît donc pertinent de discuter de ces deux questions fondamentales pour notre industrie, nos membres et leurs familles.
    À titre d'organisation syndicale de professionnels, nous nous préoccupons aussi des changements importants qui pourraient être apportés au système canadien de radiodiffusion, car ces changements auront inévitablement des répercussions sérieuses sur les conditions de travail de nos membres, et possiblement la disparition pure et simple de leur travail.
    Le système canadien de radiodiffusion constitue un espace public, tout comme nos routes. Il permet aux Canadiens et Canadiennes de faire circuler leurs voix, de s'exprimer, de se reconnaître, de créer des liens et de partager entre eux et avec le monde entier leurs valeurs et leurs expériences culturelles. Le système canadien de radiodiffusion contribue donc à renforcer et à promouvoir notre identité culturelle et le sentiment d'appartenance des individus les uns envers les autres, autrement dit notre sentiment d'appartenance à notre société et notre souveraineté.
    C'est pour cette raison, qui est d'une grande importance pour une nation, qu'il n'est pas incongru que nos gouvernements se soient préoccupés de la préservation de cet espace essentiel à une société qui se veut saine, vivante et pluraliste. Il n'est pas incongru non plus que ses citoyens aspirent à y avoir tous une place et à s'y développer en tant qu'individus, contribuant ainsi au développement de ce qui fait notre richesse, c'est à dire nos talents individuels et collectifs.
    Pour faire en sorte que le système canadien de radiodiffusion continue de se développer et joue pleinement son rôle en contribuant à l'identité culturelle du Canada et à l'essor de notre société au cours des prochaines années, le gouvernement devrait s'assurer que cette orientation fondamentale soit réaffirmée et, par conséquent, il devrait focaliser ses efforts dans un domaine prioritaire, le contenu canadien.
    Pour bien servir les intérêts des Canadiens et des Canadiennes, le système canadien de radiodiffusion doit offrir des productions de grande qualité qui fournissent à la fois de l'information et de l'analyse, qui nous touchent et qui répondent aux attentes du plus grand nombre de citoyens et de citoyennes. Lorsque nous parlons du plus grand nombre de citoyens, nous ne parlons pas exclusivement du groupe le plus fortement représenté, comme le suggère le système des cotes d'écoute.
    Les Canadiens et Canadiennes continueront à être bien servis par le système canadien si celui-ci est en mesure de tirer avantage des possibilités qui se présentent et de relever les défis que posent les nouvelles technologies de communication. À cette fin, le gouvernement devrait continuer de travailler en étroite collaboration avec les organismes de réglementation de l'industrie, afin de cerner et de surmonter les obstacles à la transition vers la télévision numérique et les nouveaux médias.
    La radiodiffusion canadienne est à la croisée des chemins. Nous entrons dans une ère nouvelle et passionnante en matière de communication et de culture. La haute vitesse, la large bande, la lecture en transit de fichiers virtuels et la réalité virtuelle font maintenant partie de notre quotidien. Les artistes concepteurs et les techniciens professionnels sont très stimulés par ces nouveaux outils comme le serait un peintre devant un nouveau format de toile. Ils souhaitent vivement pouvoir y exercer leurs talents.
    Il nous apparaîtrait incongru que l'accès universel au signal numérique, que représente l'implantation de la structure mécanique, se fasse au détriment d'une perte de contenu, et de contenu canadien de surcroît.
    En ce moment, si l'on se fie aux représentations des radiodiffuseurs conventionnels qui se sont présentés devant vous, la pression financière serait grande, et cette pression menacerait la viabilité de la programmation locale. Nous ne pouvons nier que la conjoncture économique est difficile pour l'ensemble des joueurs de l'industrie de la radiodiffusion. Nos membres en savent quelque chose puisque leurs revenus globaux ont diminué de 14 p. 100 entre 2005 et 2007.
    Nous sommes aussi conscients que votre comité souhaite aborder les problèmes de la radiodiffusion dans une perspective de programmation locale. Cependant, lorsque l'on entend les représentations des radiodiffuseurs conventionnels qui ont témoigné devant vous, il ne s'agirait pas uniquement de la programmation et du nombre d'émissions locales qui seraient menacées, mais bien de l'ensemble de la programmation canadienne.
    L'AQTIS croit sincèrement que l'industrie de la télévision n'est pas en crise comme veulent le laisser croire les radiodiffuseurs conventionnels, afin d'obtenir des subsides du gouvernement canadien et des redevances d'abonnement qui leur échappent, pour ensuite demander des allègements à la réglementation et à leurs conditions de licence. En fait, nous estimons que c'est le développement du plan d'affaire de ces grands groupes qui se heurte à la réglementation et aux conditions de licences. Les intérêts d'affaires seuls se butent aux objectifs culturels et sociaux protégés par nos gouvernements depuis plus de 30 ans.
    Bien sûr, cette industrie vit actuellement des changements structurels qui réclament des ajustements: la transition vers le numérique et les nouvelles plateformes de diffusion — Internet, la téléphonie mobile ou la vidéo sur demande — devraient, à notre avis, constituer une occasion de repenser l'industrie de la radiodiffusion en la recentrant sur l'importance des contenus canadiens et sur la qualité et la diversité des bassins de création.
    J'aimerais vous parler des caractéristiques du marché francophone au Québec et vous rappeler que c'est en faisant appel à la diversité des talents canadiens que la production indépendante a fait une entrée remarquée au petit écran, au milieu des années 1980. C'est à ce moment qu'on a pu constater la fidélité des téléspectateurs francophones envers leurs émissions dramatiques. Ce tournant important a vu pâlir l'étoile des séries américaines traduites au profit de productions canadiennes originales de langue française.
    Omertà, Un gars, une fille et La Petite Vie, pour n'en nommer que quelques-unes, toutes ces séries atteignaient des parts d'audience de plus de 40 p. 100. Pour bien exprimer la raison pour laquelle notre création est si dynamique, je vous citerais un extrait de mon allocution lors de la dernière remise des prix Jutra.
Les artisans créateurs de l’AQTlS sont fiers de participer aux côtés de leur collègues à une œuvre parce que nous savons que les films que nous faisons avec le meilleur de nous-mêmes, dans la connivence des inspirations et des élans de création, même parfois avec des budgets faméliques, sont bien plus grands que la somme de ce qu'on y met chacun. Nos films ont une vie qui leur appartient. Ils font leur chemin dans les cœurs et les esprits et se mêlent à nos vies, à celles de nos concitoyens.

Le cinéma est une aventure pour ceux qui le regardent et il est certainement une aventure pour ceux qui le font, nous le savons.

Chaque année, notre cinéma nous amène sur de nouveaux chemins avec des rencontres nouvelles entre artisans et créateurs, qui nous conduisent à nous dépasser. Et toujours, année après année, chacun de nos artistes y amène son talent encore plus grand et plus riche de toutes ses expériences de création partagées.
    Je parlais alors du cinéma. Je dois vous dire qu'il en est de même pour nos productions de télévision, notre modèle de production de télévision indépendante est exactement le même. Nous sommes pigistes, nous travaillons à des productions indépendantes.
(1650)
    Nos ressources professionnelles sont expérimentées et talentueuses, et leurs capacités de création sont des plus dynamiques puisqu'elles sont stimulées par un renouvellement constant des collaborations dans le domaine de la création.
(1655)
    Nous affirmons que c'est très précisément cette dynamique qui favorise l'émulation des forces de création qui nous permet de produire tant de succès.

[Traduction]

    Sans vouloir vous interrompre, je vous signale que nous en sommes déjà à dix minutes d'exposé. Si vous pouviez terminer rapidement, ce serait bien.

[Français]

    Permettez-nous de rappeler pourquoi cette production indépendante fait partie intégrante de l'industrie de la radiodiffusion canadienne.
    Tout d'abord, la télévision s'est développée au Québec pendant les trois premières décennies de son existence sur la base d'une intégration verticale quasi complète des activités de production, de programmation et de diffusion. Le rôle de la production télévisuelle indépendante, au cours de cette période, a donc été modeste, voire marginal. Rappelons l'impasse à laquelle a conduit ce modèle d'intégration verticale des activités de production et de diffusion et le diagnostic très sévère qu'ont posé deux commissions d'étude indépendantes sur cette situation au début des années 1980.
    Essentiellement, celles-ci ont constaté une concentration indue des décisions de création et de production aux mains de quelques-uns; une faible innovation; un essoufflement, une sclérose de la création; une baisse d'efficacité, de productivité et de compétitivité; un apport limité au développement de nouveaux talents, à la diversification des lieux d'idéation, de création et de production.
    Ma présentation est un peu plus longue. J'espérais bien que nous puissions utiliser un peu plus de temps pour vous faire cette démonstration.
    Certaines politiques ont mené à la création de différentes réglementations qui ont obligé les télédiffuseurs à offrir une portion significative de leur programmation de productions indépendantes. On peut donc dire que les objectifs poursuivis étaient la diversification des sources d'idéation et de création, la saine émulation et la multiplicité de maisons de production pour augmenter la qualité et la diversité, l'augmentation de l'offre d'emplois et d'occasions d'expression à une multitude d'auteurs, plutôt qu'une production réalisée à l'interne avec du personnel permanent. Cela a permis de réaliser les objectifs et les grands succès de la production francophone au Québec.
    On peut certainement affirmer que la majorité de ces objectifs ont été atteints. Dans un univers où les modèles de production et d'exploitation évoluent, le processus de diversification des lieux de création et de production doit se poursuivre. Cet objectif transcende les intérêts propres du milieu de la production indépendante et des travailleurs qui y évoluent. Son atteinte est essentielle au maintien du dynamisme et de la compétitivité du système de radiodiffusion dans son ensemble, de sa capacité de faire appel à tous les talents créateurs d'ici, des grands centres et des régions canadiennes, et de jouer adéquatement son rôle intermédiaire entre l'expression créatrice de nos auteurs, les réalisateurs, les artistes concepteurs et les attentes des téléspectateurs.

[Traduction]

    Je dois mettre fin à votre intervention maintenant, parce que nous avons déjà dépassé le temps imparti de quatre minutes. Si vous me permettez, je vais donner la parole aux autres intervenants en espérant que vous pourrez donner les renseignements figurant dans le reste de votre exposé en répondant à une question.
     Nous allons passer maintenant à la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec. Vous avez la parole.
(1700)

[Français]

    Distingués membres du Comité du Patrimoine canadien, je vous remercie tout d’abord d’avoir invité la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec. Je m'appelle Luc Fortin, je suis musicien professionnel et président du conseil d’administration de la guilde depuis mars 2006.
    La Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, la GMMQ, est une association regroupant plus de 3 000 musiciens professionnels. Sa mission première consiste à défendre et promouvoir les intérêts économiques, sociaux, moraux et professionnels des musiciens qu’elle représente, et à négocier les conditions de travail de ses membres au moyen d’ententes collectives. La GMMQ est une association reconnue en vertu des Lois sur le statut de l’artiste aux paliers fédéral et provincial. Nous sommes aussi affiliés à la Fédération américaine des musiciens du Canada et des États-Unis, qui comprend 10 000 membres au Canada.
    Nous allons insister, compte tenu du cadre de référence qui nous a été soumis, sur les aspects suivants: l’importance de la diversité des voix et l'aide du gouvernement fédéral à la production locale.
    En ce qui concerne la diversité de voix, citons tout d’abord une partie de l’article 3 de la Loi sur la radiodiffusion:
i) la programmation offerte par le système canadien de radiodiffusion devrait à la fois:

(ii) puiser aux sources locales, régionales, nationales et internationales,

(iii) renfermer des émissions éducatives et communautaires,

(iv) dans la mesure du possible, offrir au public l’occasion de prendre connaissance d’opinions divergentes sur des sujets qui l’intéressent, [...]
    Comme le mentionnait le 25 mars 2009 le président du CRTC, M. Finckenstein, dans son allocution devant ce même Comité permanent du patrimoine canadien, la concentration des médias menace la diversité des voix. Je le cite:
Le risque inhérent à un petit nombre de grandes entreprises est que cette situation pourrait mener à la réduction de la diversité des voix dans le système de radiodiffusion. Un système démocratique comme le nôtre dépend d’une variété de perspectives en matière d’émissions de nouvelles et d’information.
    Nous ajouterions aussi qu’une variété de perspectives culturelles est tout aussi importante. La tendance actuelle va vers la fusion d’entreprises de productions artistiques et de conglomérats médiatiques. Quand la même entreprise contrôle le contenant, le véhicule et le contenu, il y a là une tout aussi grande menace à la diversité. Notre politique de radiodiffusion nationale doit soutenir et garantir l’accès à des sources culturelles variées qui reflètent la richesse de notre culture nationale.
    Je cite de nouveau le président du CRTC, M. Finckenstein:
[...] les stations de télévision desservant une population de moins de un million de personnes ont de la difficulté à maintenir la qualité de leur programmation locale et le nombre d’émissions locales. De plus, les Canadiens nous ont dit dans des mots on ne peut plus clairs à quel point ils apprécient les nouvelles de leur télévision locale.
    La production télévisuelle locale est un outil important pour promouvoir la diversité des voix et la diversité culturelle. Elle a la possibilité d'entretenir le sentiment d’appartenance à sa communauté; de faire la promotion de la vie culturelle et sociale locale, et des arts en général; de raffermir le sentiment que les arts occupent une place importante dans notre vie; de freiner l’exil des artistes locaux vers les grands centres et de permettre aux artistes en tournée de tisser de meilleurs liens avec la communauté.
    Une vie socioculturelle épanouie dans les communautés locales est une grande richesse. Elle permet à tous les citoyens de pouvoir s’épanouir dans leur milieu et de profiter d’une qualité de vie à la hauteur de leurs attentes.
    Parlons maintenant de l'aide du gouvernement canadien à la télévision locale. Le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale pourra servir à soutenir des initiatives permettant de sauver des stations de télévision locales. Il devrait aussi encourager les télédiffuseurs qui ont toujours démontré leur engagement envers la télévision locale, et je donne Radio-Canada en exemple.
    Radio-Canada a historiquement eu un rôle important dans la diffusion d’un contenu local diversifié, tant du point de vue culturel que de l’information. Malheureusement, le diffuseur public Radio-Canada n’aura pas droit à son enveloppe réservée de 37 p. 100 dans le futur Fonds des médias.
     Pourtant la SRC, à titre de radiodiffuseur public national doit offrir, selon le mandat qui lui est donné par la Loi sur la radiodiffusion, une programmation qui doit « refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu’au plan régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions » et « contribuer activement à l'expression culturelle et à l'échange des diverses formes qu'elle peut prendre ».
(1705)
     Cette mission devient difficile à réaliser si on impose à la SRC le critère des meilleures cotes d'écoute à la télévision publique, tout en lui retirant des sources stables de financement. La télévision locale, qui pourrait également être diffusée, et même exclusivement, sur Internet, devrait non seulement pourvoir à l'information locale et régionale mais aussi offrir une vitrine de choix aux artistes locaux et informer les citoyens sur la vie culturelle dans leur région.
    Il faut encourager la production de contenu à caractère musical permettant aux artistes de se faire connaître dans les marchés régionaux. Le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale devra donc aussi favoriser la diffusion de la culture localement. Par le fait même, il faudra apporter une aide accrue à la production d'émissions avec contenu musical sur les grands réseaux de télévision.
    Plus de possibilités pour nos artistes sur les grands réseaux profite ensuite aux mêmes artistes qui ont été encouragés d'abord sur la scène locale. Inversement, une culture régionale en santé donne accès à un bassin de talents qui enrichit l'offre culturelle globale. Il faut aujourd'hui imaginer les politiques concernant la radiodiffusion dans un contexte global, chaque élément faisant partie d'un écosystème équilibré. La diffusion locale en fait partie, comme les grands réseaux; la télévision spécialisée; la production indépendante, tant sur le Web que sur la télévision traditionnelle; les artistes et travailleurs culturels; les cablôdistributeurs. Toutes ces composantes définissent l'environnement télévisuel auquel le citoyen a accès et aident à décrire notre environnement culturel en général. L'offre télévisuelle locale est une partie intégrante de ce tout, un maillon dans la chaîne de notre écosystème culturel.
    Présentement, il y a des politiques contradictoires, un manque de cohérence avec les objectifs de la Loi sur la radiodiffusion, un manque de cohésion à l'intérieur même de ces politiques. Je vous donne quelques exemples.
    Comme la diversité des voix est une valeur importante, le nouveau Fonds des média du Canada devrait aider à la création de contenu reflétant la diversité culturelle canadienne, et non seulement prioriser la rentabilité et les cotes d'écoute. Les émissions à grandes cotes d'écoute ont justement moins besoin des fonds publics parce qu'elles vont profiter de bien meilleurs revenus publicitaires.
    Le nouveau Fonds des médias du Canada est en apparente contradiction avec l'esprit de la loi qui recommande « de faire appel de façon notable aux producteurs canadiens indépendants ». En fait, les producteurs canadiens indépendants ne seront pas représentés dans le processus décisionnel de l'attribution des fonds. Le nouveau conseil d'administration sera composé d'un membre nommé par Patrimoine Canada et de cinq membres nommés par les entreprises de distribution de radiodiffusion.
    Bien que le CRTC ait établi certaines règles visant à préserver la diversité des voix, le nouveau Fonds des médias du Canada va dans le sens contraire. Les grandes entreprises privées contrôleront un fonds constitué essentiellement de l'argent des contribuables canadiens. Selon la politique du Fonds des médias, les producteurs de contenu télévisuel sur Internet devront s'associer aux télédiffuseurs traditionnels pour être soutenus par le Fonds: il n'y aura pas de production 100 p. 100 Web.
    Pourtant, M. Finckenstein, président du CRTC, déclarait devant votre comité: « La télévision conventionnelle n'est plus en mesure d'assumer la plus grande partie des obligations découlant de la Loi sur la radiodiffusion. »
    Si c'est le cas, selon le CRTC, pourquoi le financement n'est-il pas accessible aux productions spécifiquement sur Internet? De plus, ces productions sur le Web pourraient très bien compléter une programmation locale déficiente, là où les télédiffuseurs traditionnels sont absents.
    En conclusion, bien que le Fonds pour la production locale de télévision soit une bonne initiative, il faudra beaucoup plus de cohésion entre les différents rouages du système de radiodiffusion et les politiques gouvernementales pour que se reflète une réelle diversité des voix qui donnera aux Canadiens de toutes les régions une information et une programmation culturelle locale représentative.

[Traduction]

    Je vous remercie de votre exposé.
     Nous allons passer à la première question.
     La parole est à M. Simms.
(1710)

[Français]

    Merci à tous, merci également aux techniciens. Merci, monsieur Fortin.

[Traduction]

    Lorsque j'étais à l'école des métiers de la radiodiffusion, il y a déjà un certain temps — je ne donnerai pas de précisions, mais cela fait un certain temps...
    La télévision était en noir et blanc à l'époque.
    Non, elle n'était pas en noir et blanc, Charlie, mais voici ce qui s'est passé. Les vidéos sont apparues. Tout le monde s'émerveillait de voir que j'étais un journaliste qui pouvait aussi tenir la caméra, ce qui passait en quelque sorte pour un art. À bien y regarder, c'était du travail au rabais. Voilà ce que c'était. Au lieu d'avoir deux personnes pour faire un reportage, on n'en avait besoin que d'une.
     Voilà l'envers de la médaille. Je n'étais pas un très bon caméraman. Je pouvais faire un reportage et je connaissais l'actualité, mais, à la caméra, je n'étais pas très bon. Il n'en reste pas moins qu'en conséquence, quelqu'un que je considérais en quelque sorte comme un artiste, un grand artiste peut être, a perdu son emploi.
     Cela revenait, à mon avis, à abaisser la qualité du personnel chargé de faire les vidéos et les films, les techniciens du son, par exemple. Je considère que cela se traduit aujourd'hui par une industrie en difficulté, mais l'accès à la technologie est devenu bien plus facile. À l'époque, c'était une machine très lourde, le montage était très long à effectuer. Aujourd'hui, c'est bien plus facile. Un enfant de 10 ans peut le faire. C'est un défi à relever. YouTube pose un problème, c'est indéniable, vous avez évoqué la question.
     Par ailleurs, les régions ont de la difficulté à garder leur personnel dans l'industrie de la télévision ou du cinéma, parce qu'une grande partie de ce travail est centralisé. Je ne sais pas si vous êtes d'accord, mais là où j'ai passé ma jeunesse, dans le centre de Terre-Neuve, nous avions bien du mal à faire en sorte que les gens — les artistes dont j'ai parlé — restent sur place.
     Ne pourrions-nous pas proposer au CRTC de s'assurer que les artistes dont je viens de parler puissent continuer à exercer leur métier et que les régions soient en mesure de faire passer un message régional à un auditoire national? Ce sera, à mon avis, une catastrophe si nous ne réussissons pas à le faire dans notre pays. Lorsque j'étais enfant, Mickey Mouse et Bonhomme, c'était la même chose pour moi. Je pouvais les reconnaître l'un comme l'autre. Par contre, je ne suis pas sûr qu'un enfant qui grandit aujourd'hui dans le centre de Terre-Neuve sache qui est Bonhomme, et c'est regrettable.
    J'aimerais savoir quelles sont les propositions que nous pourrions faire au CRTC. Vous pourriez aussi nous parler du FAPL.

[Français]

    Merci, monsieur Simms.
    Lors des audiences sur le renouvellement des licences, le Groupe TVA/Quebecor Media proposait récemment, pour ses diffusions régionales, une réduction de ses heures de programmation locale. Celle-ci totalise actuellement 21 heures, et ces gens proposaient de réduire ce montant à 18. Or, je pense que ce serait là une erreur fondamentale. Le maintien des quotas n'est pas fondé sur des raisons futiles. À l'égard des objectifs d'affaires de ces grands conglomérats, il ne s'agit pas d'une épine dans le pied, d'un bâton dans les roues. Son but est d'assurer que les Canadiens ont accès à leurs artistes, aux productions et aux voix qu'ils sont habitués d'entendre.
    Le maintien d'une production professionnelle est toujours un défi, mais maintenir un niveau professionnel suppose une constance au niveau de la production. Tout le monde chante, mais tout le monde n'est pas chanteur. Pour être virtuose dans ce domaine, il faut pouvoir pratiquer le chant. Pour les artistes et les artisans qui font de la conception ainsi que de la création de programmation télévisuelle et cinématographique, c'est exactement la même chose.
    Est-ce possible pour les petites villes aussi?
    Je pense qu'il faut être en mesure de pratiquer son art. Si quelqu'un fait ses débuts en tant que vidéographe amateur et devient virtuose à force de pratiquer son art, c'est tant mieux.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Fortin, au sujet du FAPL, le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale, notre comité entend dire souvent que les intervenants semblent s'inquiéter d'un manque de réglementation s'appliquant à la programmation locale dans le cadre de ce fonds. Il est bien évident que la programmation locale doit faire connaître les régions au reste du pays, comme c'est le cas à la CBC — Radio-Canada, et, en conséquence, quels sont les règlements qui, selon vous, devraient s'appliquer au fonds de la programmation locale.
     Je pose la question à tout le monde.
(1715)
    Une réponse très courte, s'il vous plaît.
    C'est l'histoire de ma vie, monsieur le président.

[Français]

    On a aussi soulevé la question de savoir si Radio-Canada devrait avoir accès au fonds. Je pense qu'il est tout à fait contraire à la politique canadienne que Radio-Canada n'ait pas accès à ce fonds. C'est dans le mandat de Radio-Canada de produire un contenu local diversifié et qui reflète les régions. Radio-Canada devra avoir accès à ce fonds, surtout si elle a fait l'objet de coupes à d'autres niveaux. C'est très important.
    Je suis content de voir que vous parlez de Terre-Neuve, qui a une culture locale d'une très grande richesse. Les artistes de Terre-Neuve ont besoin qu'on investisse dans la programmation locale pour pouvoir atteindre un certain niveau de professionnalisme et pour sortir de la radio communautaire de l'université et, peut-être, avoir accès aux ondes de télévision. De plus, la programmation locale ne doit pas être limitée à des bulletins d'information; elle doit aussi refléter la réalité locale, ce qui comprend aussi la culture et les artistes locaux.

[Traduction]

    Merci.
    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme Lavallée.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Madame Pradier, l'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son est-elle seulement pour le Québec?
    Oui.
    Comment s'appelle l'équivalent canadien?
    Ce serait un mélange de la Directors Guild of Canada et des autres associations, soit YATSE ou NABET ailleurs au Canada.
    D'accord.
    Je reviens à votre mémoire, qui dit ceci:
L'AQTIS croit sincèrement que l'industrie de la télévision n'est pas en crise comme veulent le laisser croire les radiodiffuseurs conventionnels afin d'obtenir des subsides du gouvernement canadien, des redevances d'abonnement qui leur échappent pour ensuite demander des allègements à la réglementation et à leurs conditions de licence.
    C'est gros, ce que vous dites là. Je veux vous donner l'occasion de vous expliquer. Je me fais l'avocat du diable. Il y a quand même une fragmentation des auditoires. On dit que les chaînes spécialisées ont récolté 50 p. 100 des cotes d'écoute et que les revenus publicitaires ont diminué. On dit aussi qu'il y a une crise financière.
     Sur quoi vous basez-vous pour dire que la télévision conventionnelle n'est pas en crise?
    À mon avis, ces entreprises ont pris des décisions d'affaires qui les ont placées dans certaines situations. On a déjà vu une telle chose se produire dans d'autres marchés qui n'étaient pas réglementés. Ni la télévision conventionnelle ni la production ne sont en crise. J'ai apporté un document que je pourrais vous distribuer. Lors de l'assemblée des actionnaires de TVA, par exemple, Quebecor annonçait que ses revenus avaient augmenté de plus de 40 p. 100 lors du dernier trimestre. On parle du Groupe TVA. Dans ce cas, peut-on parler de crise dans le domaine de la télévision?
    M. Péladeau, dans sa chronique « Libre opinion » de l'édition de samedi dernier du journal Le Devoir, se plaignait justement du fait qu'ils étaient victimes d'une fragmentation des marchés. Je trouve un peu étonnant d'entendre cela de la part de M. Péladeau, le propriétaire du Groupe Quebecor, à la fois câblodistributeur et propriétaire de canaux spécialisés et de chaînes de télévision conventionnelles. Ils ont eux-mêmes concouru à fragmenter leur marché. S'ils s'en disent victimes...
    Je m'excuse de vous interrompre. Vous savez qu'on n'a que cinq minutes. Vous donnez l'exemple du Groupe TVA, et c'est vrai qu'il a d'excellents revenus. Encore aujourd'hui, on a annoncé ses résultats trimestriels. Malheureusement, je ne les pas encore entendus. Il est vrai que Quebecor et toute la télévision québécoise francophone vont très bien. Les cotes d'écoute sont là, les citoyens sont à l'écoute. Il n'en demeure pas moins — et c'est moins votre problème — que des personnes du secteur de la télévision canadienne viennent nous raconter toutes leurs misères parce que les cotes d'écoute ne sont pas bonnes; la concurrence d'Hollywood leur fait immensément mal.
    Y a-t-il un peu de cette dichotomie entre le Québec et le Canada dans l'histoire de la crise de la télévision?
(1720)
    Il y a une très grande différence entre la télévision francophone et la télévision anglophone. La télévision francophone a vraiment fait la preuve que les auditeurs suivent les émissions produites par des Canadiens et Canadiennes, comme par des Québécois. On suit notre marché et on sait qu'on fait l'envie souvent par rapport à ce qui se passe ailleurs, dans d'autres provinces.
    La difficulté relative à cette industrie réside dans la recherche d'une solution d'affaires pour des entreprises qui sont à propriété croisée. Voici ce qui est en train de se produire, nous semble-t-il: des changements à la réglementation supprimeraient l'accès à de la production canadienne à une diversité des voix par l'entremise de la production indépendante, et feraient en sorte qu'on se retrouverait devant des entreprises — quelques grands joueurs — ayant le monopole.
    Excusez-moi, mais je voudrais absolument connaître l'opinion de M. Fortin à ce sujet.
    Croyez-vous que la télévision est en crise?

[Traduction]

    Essayez de vous en tenir à une réponse très courte.

[Français]

    Beaucoup d'intervenants ont souligné ce fait parce qu'il y a un éclatement des sources de revenu et du nombre de stations, etc. En fait, on n'a pas besoin de revenir sur cette question.
     Mme Pradier a souligné un problème très important que l'on a surtout vu au Québec — ça concerne Quebecor —, mais qui risque de se reproduire ailleurs.
    Un peu plus tôt, je disais que le même conglomérat médiatique produisait des artistes, qu'il se servait de son poste de télévision pour les promouvoir, qu'en plus, il possédait le câble pour la télévision comme pour Internet, et qu'il rediffusait des émissions sur le Web. En outre, il possède des journaux pour faire la promotion.
     Tout ce qui manque, c'est une poste de radio. S'il en avait un, il irait à l'encontre des lois du CRTC. Néanmoins, on est très près d'un monopole médiatique.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Angus, vous avez la parole.

[Français]

    Merci de votre bonne présentation, aujourd'hui. Je suis un ancien membre du syndicat des musiciens. Aussi, je connais bien le problème de l'industrie culturelle, partout au Canada.

[Traduction]

    Il me semble que l'on vient d'évoquer dans ces deux exposés une chose que nous n'avons pas vraiment examinée ici. On entend constamment parler des différences entre le marché du Québec et le marché du Canada anglais. On nous dit souvent que celui du Québec se porte bien mieux.
     Il y a cependant un obstacle essentiel au développement de l'industrie culturelle au Québec et vous l'avez tous deux évoqué: c'est l'intégration verticale sous l'influence d'une seule dynastie de propriétaires. Nous avons reçu M. Péladeau. Je l'ai rencontré à un certain nombre de reprises. Il m'a fait comprendre bien clairement qu'à son avis une EDR ne devait pas être tenue de cotiser à un fonds à moins que celui-ci ne soit affecté aux productions internes, dont il possède les droits pour ce qui est des services vidéo à la demande. Nous avons donc Quebecor, exploitant des journaux, des stations spécialisées et des chaînes de télévision, qui siège désormais au sein du conseil -- sans qu'il y ait d'autres producteurs siégeant avec lui pour le gêner -- et le fonds pour la télévision a été modifié pour qu'il s'applique maintenant aux productions internes.
     Madame Pradier, vous avez évoqué tout à l'heure les problèmes rencontrés dans les années 1980 par le marché du Québec, qui souffre d'une trop grande intégration verticale s'opposant à la créativité et à l'innovation de la communauté artistique. Ne craignez-vous pas que cette évolution n'amène les artistes du Québec à n'être que des exécutants à la merci d'un véritable empire?
    C'est exactement ce qui nous inquiète.

[Français]

    C'est très précisément ça. Avec la création récente du Fonds des médias du Canada, la fusion du Fonds canadien de télévision et, surtout, l'accès aux fonds par des producteurs ou des télédiffuseurs de télévision conventionnelle font en sorte qu'ils vont pouvoir éliminer pratiquement toute la concurrence des producteurs indépendants.
    Pour avoir accès à ces fonds, il faut que les producteurs indépendants aient obtenu une licence de diffusion d'un diffuseur. Si ce dernier a accès au fonds, pensez-vous qu'il va octroyer une licence à un producteur indépendant? Non. Il cherchera à produire lui-même. C'est très exactement là que ça nous mène.
    Au Québec, nous sommes 3 000 techniciens, artisans, créateurs et concepteurs qui faisons cette télévision. Je ne sais pas comment je vais expliquer à mes membres pourquoi le gouvernement a pris cette décision qui conduira à la création d'un monopole d'intégration verticale en production et en diffusion et que, malgré le succès de leurs productions, ils perdront leur travail et leur gagne-pain.
    Lors de sa présentation aux audiences du CRTC, TVA a demandé de reproduire des succès comme Star Académie et Annie et ses hommes. Je vous ferais humblement remarquer que ces émissions ont été produites par des producteurs indépendants. Si TVA veut reproduire ces succès, encore faut-il qu'il en ait les ingrédients et la recette. Or, ce sont les techniciens indépendants qui ont ces ingrédients et non du in-and-out. C'est une émulation de la création et c'est exactement ce que TVA ne pourra pas reproduire.
    TVA pourra reproduire le modèle d'il y a 30 ans à deux seules voix: la voix radio-canadienne et celle de TVA. C'est la raison pour laquelle nous considérons que cette décision doit être revue par le gouvernement.
(1725)
    Monsieur Fortin.
    J'ajouterais que l'autre danger concerne la diversité des voix.
    Prenons l'exemple de Radio-Canada qui produit quelque 2 500 prestations musicales dans une année. Je parle de Radio-Canada uniquement, je n'inclus pas la CBC. Radio-Canada ne produit pas que des artistes dans lesquels elle a un intérêt financier. Elle n'a pas d'intérêt financier dans ces artistes. Le choix de la programmation est très éclaté, on y retrouve tous les genres.
    Il est sûr qu'un empire médiatique sera tenté de favoriser les artistes qu'il produit lui-même par l'entremise de ses autres compagnies de disques, de vidéos, de gérance d'artistes, etc. À mon avis, il faut équilibrer les règles du jeu et redonner un peu plus de fonds à Radio-Canada.
    Présentement, on s'attaque à la diversité des voix et on veut toujours réduire Radio-Canada.

[Traduction]

    Très rapidement, parce que je sais que je n'ai plus beaucoup de temps, mais je tiens simplement à...
    Faites très, très rapidement, parce que la cloche va sonner, et je veux que Mme Glover puisse disposer de ses cinq minutes.
    Les radios privées ne brisent pas la carrière des artistes; elles en font la promotion, que ce soit directement ou par l'intermédiaire d'une société. Radio-Canada est le seul canal par lequel peuvent s'exprimer de nouveaux talents, des artistes qui n'ont pas encore enregistré de disques et que l'on n'a pas entendus ailleurs.
     Est-ce que la perspective de voir diminuer le rôle de Radio-Canada dans les régions du pays vous inquiète parce qu'il sera plus difficile d'entendre la voix d'artistes débutants?

[Français]

    Le problème, c'est que tous les artistes des régions du Canada faisant autre chose que de la musique populaire grand public risquent d'avoir de la difficulté à se faire connaître. Cela appauvrira la culture dans les régions et la diversité des voix. Les Canadiens doivent avoir un bon aperçu de la culture canadienne et pas seulement d'une certaine culture de masse, qui est d'ailleurs très bonne. Mais il n'y a pas que ça.
    Dans toutes les régions du Canada, des événements très riches se produisent. Il y a de la musique partout. Cet été, j'étais à Terre-Neuve pour assister à la Canadian Conference of Musicians, et j'ai été tout à fait étonné de voir la quantité de groupes de musique qu'il y avait à Saint-Jean. C'était incroyable. Il faut qu'ils se fassent connaître eux aussi.

[Traduction]

    Je vous remercie.
     Madame Glover, lorsque la cloche va sonner, nous n'aurons qu'à marcher jusqu'au fond du couloir. Je n'oublie pas que vous disposez de cinq minutes pour poser vos questions et entendre les réponses.
     Vous pourrez répondre pendant que la cloche sonne.

[Français]

    Merci bien d'être venus.
     C'est un plaisir pour moi d'entendre ce qui arrive au Québec. Dans mon comté, à Saint-Boniface, au Manitoba, nous avons aussi une culture française vraiment forte et active. Nous avons de plus des producteurs indépendants qui ont vraiment du travail à faire relativement au modèle que l'on présente.
    Je voulais vous féliciter parce que, dans vos documents, vous avez vraiment bien cerné ce que l'on considère comme important.
    Conformément à la page 3 du document de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, monsieur Fortin, vous avez cité la Loi sur la radiodiffusion.
    Pour votre part, madame Brunhilde, conformément à la page 3 du document de l'Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son, vous avez dit que:
Le gouvernement du Canada s'est toujours montré déterminé à appuyer un système canadien de radiodiffusion de calibre international qui doit être, effectivement, la propriété des Canadiens et Canadiennes et sous leur contrôle. L'objectif de ce système est, d'abord et avant tout, de répondre aux besoins de la population canadienne.
    C'est ce que nous croyons aussi: il faut qu'il y ait de la production canadienne, de la programmation canadienne. Cela étant dit, je suis surprise de vous entendre parler de crise dans le domaine de la télévision. Vous dites ne pas convenir de décisions prises par TVA et Quebecor. Cependant, lorsqu'il est question de la Société Radio-Canada, c'est un peu l'inverse, et ça me surprend un peu. On parle de culture et de programmation canadiennes, comme de productions canadiennes, pourtant Radio-Canada/CBC a acheté des émissions comme Wheel of Fortune et Jeopardy!. Comme vous l'avez dit pour ce qui est de TVA et Quebecor, ce sont des décisions un peu bizarres, puisqu'on parle toujours d'avoir de la programmation canadienne.
    Aussi, j'ai envie de vous demander, madame Brunhilde, si vous pensez que c'est un peu hors du mandat — selon ce que vous avez cité —, qui est de répondre aux besoins des Canadiens et Canadiennes en matière de programmation canadienne.
(1730)
    C'est important pour les Canadiens d'avoir accès à une programmation canadienne et à une diversité des voix dans la programmation aux heures de grande écoute.
    Pour moi — et pour tous les praticiens de la culture, je pense —, le phénomène culturel en soi est un échange, une communication. Nous souhaitons communiquer ce que nous sommes et nos valeurs culturelles canadiennes à l'ensemble du monde. C'est pourquoi nous souhaitons avoir une production de calibre international. Nous souhaitons aussi recevoir ce que le monde entier fait, et c'est cette rencontre qui est stimulante pour les créateurs et la réflexion.
    Franchement, n'aimeriez-vous pas mieux voir, au lieu de Wheel of Fortune et Jeopardy!, des productions canadiennes, des émissions faites ici, au Canada?
    Absolument.
    Moi aussi.
    Vous savez, la Société Radio-Canada a été obligée de faire ce choix souvent parce qu'il manquait de financement. C'est une des raisons que Radio-Canada a souvent citée.
    Ah! mais elles sont très coûteuses, ces émissions!
    Je veux vraiment prendre le pouls de ce que vous avez dit. Je veux seulement m'assurer d'avoir compris l'essentiel.
     Au sujet du Fonds pour l'amélioration de la programmation locale, sauf erreur, vous aimeriez qu'il y ait plus de règlements pour vous assurer de pouvoir bénéficier de ce fonds.
    Est-ce bien cela?
    En fait, j'ai compris que le Fonds pour l'amélioration de la programmation locale porte essentiellement sur les nouvelles, les émissions d'information locale. Or il faut aller plus loin. La culture locale ne comprend pas seulement les faits divers dans une municipalité, dans un comté, ça comprend aussi la vie du comté, le volet socioculturel, c'est tout ce qui s'y passe. Donc, on parle aussi des artistes.
    J'ai bien compris.
    On a aussi parlé des règlements imposés par le CRTC. En ce qui concerne la programmation canadienne, sauf erreur, vous voulez tous les deux voir plus de règlements pour que le CRTC puisse exiger un plus grand contenu canadien?
    Les demandes adressées par les télévisions conventionnelles et par les grands conglomérats de producteurs-diffuseurs vont toujours dans le sens de diminuer la réglementation ou de la faire disparaître. Selon ce que nous comprenons du modèle actuel, de notre système, c'est qu'il existe une Loi sur la radiodiffusion qui a été élaborée par des élus, des parlementaires. Cette loi est mise en application par un organisme réglementaire qui est le CRTC. Celui-ci établit les règlements qui lui permettent de répondre aux objectifs de la loi. Le financement en télévision est fait par des organismes parapublics qui redistribuent l'argent des contribuables, perçu en taxes, pour la production d'oeuvres canadiennes, incluant la diversité des voix et des émissions prioritaires.
    Nous constatons que certains lobbies ont fait leur travail. La transformation du Fonds canadien de télévision — l'ouverture de la porte pour que les producteurs et diffuseurs puissent y avoir accès — vient sûrement d'un travail de lobbying. Remontons plus haut: ils demandent un changement à la réglementation pour l'appui des règles. Je crains que notre système ne soit en train de se défaire par le bas. Éventuellement, quelqu'un dira que nous n'avons plus besoin de la Loi sur la radiodiffusion au Canada. C'est par le bas que tout cela commence.
(1735)

[Traduction]

    Nous devons mettre fin à la réponse.
     Je remercie une fois encore nos témoins d'être venus aujourd'hui et d'avoir répondu bien franchement à nos questions.
    Je vous remercie.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU