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Monsieur le Président, c’est avec autant de fierté que d’humilité que je participe au débat sur le projet de loi . C’est une importante mesure législative, qui contient des éléments de procédure et qui vise à moderniser la procédure pénale et à doter le système de justice d'une plus grande efficacité.
La criminalité évolue constamment au Canada. Il est essentiel que notre système de justice pénale évolue aussi. Les modifications proposées dans le projet de loi constituent les mesures les plus récentes que nous proposons dans notre action continue visant à nous attaquer au crime et à assurer la sécurité de nos collectivités.
Le projet de loi renferme une quarantaine de modifications élaborées en consultation avec nos partenaires provinciaux et territoriaux ainsi qu’avec d’autres intervenants du système de justice pénale qui nous ont aidés à définir les processus à moderniser et les questions à examiner pour actualiser le droit pénal face à des criminels qui recourent à des moyens de plus en plus perfectionnés.
Compte tenu des ressources limitées du système de justice pénale, il est parfaitement clair que nous avons besoin de trouver des moyens plus efficaces de réprimer le crime et de faire un usage plus judicieux de ressources souvent limitées.
Je voudrais profiter de l’occasion pour mettre en évidence quelques-unes des modifications que le gouvernement propose dans le projet de loi .
Tout d’abord, au sujet du recours à des représentants qui ne sont pas des avocats, le projet de loi permettrait aux provinces de surveiller davantage la qualité des représentants utilisés par des défendeurs accusés d’infractions par procédure sommaire.
À l’heure actuelle, les représentants qui ne sont pas des avocats peuvent comparaître, interroger et même contre-interroger des témoins au nom de défendeurs accusés d’infractions par procédure sommaire qui sont passibles d’une peine d’emprisonnement maximale de six mois ou moins.
Dans le cas des infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité et passibles d’une peine d’emprisonnement maximale de plus de six mois, les représentants ne peuvent agir au nom des défendeurs que s’ils y sont autorisés en vertu d’un programme agréé au niveau provincial ou territorial.
Les représentants remplissent une fonction utile, particulièrement dans le Nord et les régions isolées du Canada, où des aides judiciaires autochtones agissent souvent à titre de représentants des défendeurs.
Nous ne devons cependant pas perdre de vue que de graves conséquences peuvent découler d’une condamnation au criminel et que de nombreuses affaires pénales peuvent être assez complexes.
Pour favoriser une représentation adéquate des défendeurs qui choisissent de ne pas recourir à un avocat, des changements aux règles relatives aux représentants permettraient aux provinces et aux territoires d’autoriser des programmes ou d’établir des critères pour toute la gamme des infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité.
Des modifications au Code criminel permettraient en outre aux administrations de définir des critères ou d’autoriser des programmes qui serviraient de conditions préalables à la représentation de défendeurs accusés d’infractions par procédure sommaire passibles d’une peine d’emprisonnement maximale de six mois ou moins.
Toutefois, dans les administrations où aucun programme n’a été autorisé et aucun critère n’a été défini pour cette catégorie d’infractions, les représentants pourront encore agir au nom des défendeurs comme c’est actuellement le cas.
La situation demeurerait inchangée dans le cas d'infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité et passibles d'une peine d'emprisonnement maximale de plus de six mois. Les provinces et les territoires pourraient continuer d'approuver des programmes ou d'établir des critères servant de conditions préalables pour ce qui est de la représentation de personnes accusées de ces infractions plus graves. Toutefois, aucun représentant ne pourrait agir à ce titre auprès de défendeurs dans des provinces ou des territoires où aucun programme n'aurait été approuvé et aucun critère établi.
Enfin, pour toute infraction punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité, des représentants pourraient toujours comparaître au nom des défendeurs pour demander l'ajournement des procédures.
Deuxièmement, le projet de loi porte sur le régime de preuve des témoins experts.
Les modifications proposées à ce titre dans le projet de loi visent à améliorer le régime actuel afin de donner aux parties la possibilité de répondre adéquatement à la présentation de preuves qui deviennent fréquemment complexes et hautement techniques.
Dans les cas où des experts doivent présenter des preuves lors d'un procès, le projet de loi créerait de nouveaux recours pour encourager les parties à respecter les exigences de préavis du régime et pour mieux traiter les cas de non-conformité.
Les nouvelles dispositions proposées contiennent également une liste de facteurs dont le tribunal doit tenir compte pour décider s'il doit accorder des ajournements. Lorsque le tribunal refuse une demande d'ajournement ou en réduit la durée, les modifications proposées exigeraient une justification de cette décision. Par conséquent, le projet de loi enverrait un message clair concernant les nombreuses considérations et les défis considérables liés à une réponse adéquate aux preuves d'experts.
Il est possible de créer une infraction mixte en convertissant, par voie législative, une simple infraction punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité ou une simple infraction punissable par mise en accusation. Ce processus donne à la Couronne la possibilité d'intenter des poursuites par procédure sommaire ou par mise en accusation. La procédure sommaire offre l'avantage d'un procès accéléré et de peines moins sévères alors que la mise en accusation donne la possibilité de faire une enquête préliminaire, d'avoir un procès devant jury et d'imposer des peines plus lourdes.
Les modifications proposées permettraient à la Couronne de choisir la procédure la plus appropriée à la lumière des circonstances entourant l'affaire, dans le cas de six infractions de nature non violente, dont trois sont actuellement de simples infractions punissables par mise en accusation et les trois autres, de simples infractions punissables par voie de déclaration sommaire.
La création d'infractions mixtes constitue un moyen de s'assurer qu'on fait la meilleure utilisation possible des ressources limitées des tribunaux et que les procédures judiciaires plus élaborées comprenant une enquête préliminaire et un procès devant jury sont uniquement réservées aux affaires portant sur les infractions les plus graves.
Le fait de convertir en infraction mixte une simple infraction punissable par mise en accusation est également à l'avantage de l'accusé parce que cela permet à la Couronne, s'il y a lieu, d'opter pour une procédure sommaire, autrement dit, pour un procès plus rapide et, par conséquent, pour des peines moins sévères.
Quant au fait de quitter le ressort d'une juridiction malgré une ordonnance le leur interdisant, ceux qui quittent une province en violation des conditions d'une libération sous caution leur enjoignant de demeurer dans le ressort de cette juridiction posent des problèmes particuliers pour les organismes d'application de la loi et l'ensemble du système de justice pénale. Leur fuite retarde, voire met en échec le processus judiciaire.
La réaction actuelle à ce comportement consiste à porter une accusation générale contre le contrevenant, celle d'avoir omis de se conformer aux conditions de remise en liberté énumérées au paragraphe 145(3) du Code criminel. Il n'y a toutefois aucune distinction entre cette violation des conditions de libération sous caution et d'autres violations, une simple violation du couvre-feu par exemple.
Afin de créer un casier judiciaire transparent et de mettre l'accent sur la gravité de ce type de violation, nous proposons de créer une infraction directement liée au fait de ne pas demeurer dans le ressort d'une juridiction malgré une ordonnance enjoignant à quelqu'un de le faire.
La création d'une telle infraction ne représente qu'une partie de la solution pour résoudre le plus vaste problème de l'application des mandats d'arrêt non exécutoires. Elle ne vise pas à résoudre le défi très réel lié au retour de personnes devant subir un procès qui ont été arrêtées loin de l'endroit où l'infraction présumée a eu lieu.
Le problème de la distance est d'ordre pratique. Il se pose dans les grandes juridictions ainsi qu'à l'intérieur d'une province. Il est lié aux coûts associés au transport d'une personne vers le lieu de son procès. Il revient aux provinces de résoudre ce problème en vertu de leur responsabilité d'administration de la justice.
Notre gouvernement collabore avec nos partenaires des provinces et des territoires afin d'élaborer des solutions pratiques devant permettre de régler la plus vaste question du retour des accusés vers les juridictions ayant émis un mandat d'arrêt contre eux.
D'ici là, la création de cette nouvelle infraction constitue un pas dans la bonne direction. Sa proposition est le fruit de discussions exhaustives entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, à l'instigation de la Colombie-Britannique. Cette proposition a été débattue et approuvée par les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux responsables de la justice et de la sécurité publique, à l'occasion de leur réunion de septembre 2008.
La plus vaste question des mandats d'arrêt non exécutoires est complexe et une solution globale nécessitera probablement l'affectation de ressources importantes et l'élaboration de pratiques exemplaires de la part des provinces plutôt que d'autres modifications législatives.
Les représentants des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux examinent les pratiques exemplaires afin de maximiser l'utilisation efficace des ressources disponibles. Les représentants fédéraux continueront de collaborer avec leurs homologues des provinces et des territoires afin de trouver des solutions à long terme à ce très grave problème.
À l'heure actuelle, la procédure de télémandat ne s'applique qu'à certains types de mandats et à certaines autorisations et ordonnances relatives à des perquisitions et à des saisies. De plus, le Code criminel stipule qu'on ne peut obtenir un mandat par un moyen de télécommunication que dans les cas où il est peu commode pour l'agent de se présenter en personne devant un juge ou un juge de paix pour en faire la demande.
Compte tenu des progrès technologiques et de la tendance à faire de plus en plus appel à des moyens techniques dans le système de justice qui s'observe depuis quelques années, notamment pour permettre la comparution à distance et la transmission électronique de documents, il est tout à fait logique que plus de mandats puissent être obtenus par un moyen de télécommunication. Cela permet de faire un emploi plus efficace des ressources limitées du système de justice pénale.
J'aimerais mieux voir les policiers patrouiller nos rues et mener des enquêtes que parcourir de grandes distances pour présenter en personne une demande de mandat à un juge ou à un juge de paix.
La liste des mandats entrant dans la catégorie des télémandats que nous proposons comprend ceux concernant la localisation et les enregistreurs de numéros ainsi que les ordonnances de communication de documents et de données financières.
Afin de simplifier le processus applicable aux télémandats et de le rendre encore plus efficace, nous proposons également d'éliminer l'obligation de prouver qu'il est peu commode pour l'agent de se présenter en personne dans les cas où la demande de mandat « rend la communication sous forme écrite ». L'obligation sera toutefois maintenue lorsque la demande est faite oralement.
Il y a aussi les télémandats demandés par des fonctionnaires publics. Nous proposons, dans ce projet de loi, que les dispositions du Code criminel autorisant l'obtention de mandats par moyen de télécommunication soient modifiées de façon à ce que les fonctionnaires publics puissent également en faire la demande. Les policiers, qui sont par définition des agents de la paix, sont chargés exclusivement d'appliquer le Code criminel et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Pour ce qui est des infractions non criminelles, la responsabilité en matière d'application incombe généralement à des personnes qui ne sont pas des policiers, mais qui sont désignées en vertu de lois particulières comme agents de la paix ou, parfois, comme fonctionnaires publics, et de qui relève parfois l'application d'autres lois fédérales.
Même si les pouvoirs que ces fonctionnaires peuvent exercer se limitent au contexte de la loi en vertu de laquelle ils sont nommés, les pouvoirs proprement dits sont habituellement issus du Code criminel. Le pouvoir le plus couramment utilisé dans ce contexte est celui d'obtenir un mandat de perquisition en vertu de l'article 487, lequel prévoit qu'un agent de la paix ou un fonctionnaire public chargé notamment de faire observer une loi fédérale peut présenter une demande de mandat.
Si les agents de la paix et les fonctionnaires publics qui font appliquer des lois autres que le Code criminel peuvent obtenir des mandats en vertu de l’article 487 du Code criminel, seuls les agents de la paix disposent de cette capacité par voie de télécommunications. Par conséquent, les fonctionnaires publics sont souvent désavantagés quand ils doivent obtenir des mandats de perquisition et qu’ils ne peuvent comparaître rapidement devant un juge pour en obtenir un. On peut songer aux situations que vivent les fonctionnaires de l’Agence canadienne d’inspection des aliments dans les régions agricoles éloignées ou leurs collègues qui sont chargés de faire appliquer le Code canadien du travail et qui sont appelés à effectuer des enquêtes sur des plates-formes de forage en mer, relativement à des questions de santé et de sécurité au travail.
Ils ont la même capacité que les agents de la paix d’obtenir des mandats en vertu de l’article 487 et, comme eux, ils ont besoin que de tels mandats leur soient acheminés par des moyens électroniques.
La modification proposée n’étendra absolument pas les pouvoirs des fonctionnaires publics, mais elle leur permettra de se prévaloir des mêmes moyens techniques que les autres agents exerçant les mêmes pouvoirs pour obtenir les autorisations nécessaires à l’exercice de leurs compétences. Il est de l’intérêt de tous les Canadiens de faciliter l’application efficace de nos lois par ceux à qui nous en avons donné le pouvoir.
Vient ensuite la Loi sur l’identification des criminels qui prévoit la prise d’empreintes digitales, de photographies et d'autres mensurations. Quand le projet de loi aura été adopté, il modifiera la loi de manière à rendre possible le prélèvement d’empreintes digitales et toute autre opération anthropométrique sur une personne arrêtée à la suite d’une infraction grave précisée dans la Loi sur l’identification des criminels, lorsque la personne est ensuite détenue légalement. Pour l’instant, la loi porte que de tels pouvoirs peuvent être exercés uniquement si la personne est légalement détenue et qu’elle est inculpée ou déclarée coupable d’un acte criminel énuméré dans la loi.
Il faut remplir un certain nombre de conditions pour se prévaloir de la modification proposée. D’abord, avant d’effectuer une arrestation, comme dans tous les autres cas, l'agent doit être raisonnablement convaincu que la personne a commis ou est sur le point de commettre un acte criminel. Deuxièmement, le policier doit avoir des motifs raisonnables de croire qu’il est nécessaire et dans l’intérêt du public que la personne soit détenue jusqu’à ce qu’elle comparaisse devant un juge. Ce n’est donc que dans ces circonstances limitées que les policiers pourront appliquer les procédés d'identification sans avoir à attendre le dépôt officiel d'accusations. Dans la plupart des cas, les modifications proposées n’auront d’effet que sur le moment où l'on pourra appliquer les procédés d'identification.
D’habitude, si la personne n’est pas accusée ou si les accusations sont retirées ou encore si elle acquittée, les corps policiers détruisent les empreintes digitales et les photographies à la demande de la personne. Il convient ici de signaler que les tribunaux ont statué qu’il n’est pas déraisonnable pour la police de conserver les empreintes digitales si elle n’est saisie d’aucune demande réclamant leur destruction ou restitution.
Les changements proposés à la Loi sur l’identification des criminels permettront de rationaliser l’identification. On évitera ainsi d’avoir à détenir longuement un individu en attendant le dépôt d'accusations avant de pouvoir appliquer les indispensables procédés d’identification.
Parlons maintenant de la corruption d'agents publics étrangers. Enfin, conformément aux obligations internationales du Canada, le projet de loi prévoit des modifications de la Loi sur la corruption d’agents publics étrangers, du Code criminel et de la Loi sur la preuve au Canada.
L'une des modifications donnerait au Canada le pouvoir d'intenter des poursuites pour des actes de corruption commis à l'étranger comme si ces actes avaient été commis sur le territoire canadien. La plupart du temps, ces infractions sont commises à l'étranger. Or, à l'heure actuelle, le Canada exerce une juridiction territoriale. La modification permettra aux autorités canadiennes d'intenter une poursuite pour une infraction commise à l'étranger lorsqu'il y aura un « lien réel et important » entre l'infraction commise à l'étranger et le Canada.
Selon le principe de la juridiction nationale, le Canada aurait le pouvoir d'intenter des poursuites contre les auteurs présumés d'acte de corruption commis hors du Canada lorsque ces personnes seraient des citoyens canadiens, des résidents permanents du Canada ou des personnes morales canadiennes, sans qu'il soit nécessaire de fournir la preuve du lien entre le Canada et l'infraction. Ainsi, il serait plus facile d'intenter des poursuites dans les cas de corruption d'agents étrangers.
De plus, le projet de loi prévoit l'ajout du mot « choisie » à l'article 118 du Code criminel, qui concerne la corruption. Actuellement, cet article s'applique seulement aux personnes nommées ou élues.
La Loi fédérale sur la responsabilité précise que la nomination de certains fonctionnaires nécessite la consultation du Parlement. Le nom de la personne « choisie » est rendu public avant qu'elle soit officiellement nommée à son poste. Donc, lorsqu'elle est choisie, elle n'est pas encore titulaire du poste et, tant qu'elle n'est pas légalement nommée, elle ne peut faire l'objet de poursuites en vertu du Code criminel, dans l'état actuel des dispositions contre la corruption.
Par ailleurs, l'Organisation des États américains, ou OEA, et la Convention interaméricaine contre la corruption, ratifiée par le Canada en 2001, exigent la criminalisation de la corruption des titulaires de charge publique « qui ont été choisis, nommés ou élus ». Les modifications proposées auraient pour effet de corriger cette lacune dans la loi actuelle.
Le projet de loi prévoit de nombreuses autres modifications, comme celles qui auraient pour effet de mettre à jour les dispositions désuètes sur les combats concertés et les paris mutuels, conformément à ce qui a été recommandé à l'issue des consultations des intervenants fédéraux, provinciaux et territoriaux ainsi que d'autres autorités publiques.
Je fais confiance aux députés pour qu'ils accordent à ce projet de loi l'appui qu'il mérite. Les modifications législatives qu'il contient amélioreraient considérablement l'efficacité du système de justice criminelle, conformément aux attentes des Canadiens. Les méthodes des criminels sont de plus en plus complexes et sophistiquées, et la loi doit évoluer en conséquence.
:
Monsieur le Président, le projet de loi est une mesure législative très intéressante.
[Français]
Je suis heureux d'être ici afin de prononcer quelques mots à propos des enjeux relatifs à la justice.
Comme on le sait, je suis membre du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Ce fut pour moi un grand plaisir d'en avoir fait partie suite à la première campagne électorale dans laquelle je me suis impliqué, en 2006.
Dans le comté de , beaucoup d'inquiétudes sont exprimées à propos des victimes de crimes. Parfois, les lois de la justice fonctionnent, mais d'autres fois, elles ne fonctionnent pas.
C'est dans l'intérêt de tout le pays et de toute la population que je tiens à prononcer quelques mots au sujet du projet de loi .
[Traduction]
Je parle aux gens d’une façon générale de ce projet de loi et de l’ensemble du système de justice car, indépendamment de la circonscription qu’on représente, les électeurs sont inquiets. Ils s’inquiètent des victimes des crimes, des taux de criminalité et de la sécurité générale de leurs collectivités. Ils s’attendent à des solutions de la part du système de justice.
Je suis à la Chambre depuis janvier 2006. Je n’ai jamais été du côté du gouvernement. Je ne sais pas ce qu’on ressent de ce côté-là. Je n’ai jamais vu le salon du gouvernement. Pour moi, c’est la terre promise.
Je sais par contre ce que le nouveau gouvernement conservateur a fait en 2006 dans le domaine de la justice. Il n’a pas apaisé l’anxiété des gens. Comme équipe, le groupe conservateur n’a pas réduit l’inquiétude du public au Canada. Il n’a pas fait en sorte que les Canadiens se sentent plus en sécurité. En réalité, ce qu’il a fait et ce qu’il fait encore, au moyen de visites quotidiennes aux stations de télévision, c’est attiser l’anxiété des gens au-delà de tout ce qu’ils ont connu auparavant.
Je sais que ce projet de loi n’est pas controversé. Il s’agit d’une mesure législative dont je serais probablement prêt à appuyer neuf dispositions sur dix. Imaginez ce que j’aurais dit de quelques-uns des projets de loi clairement conçus pour les séances de photos de l’après-midi et qui n’ont rien à voir avec les changements fondamentaux à apporter à notre droit pénal pour donner aux députés et à leurs électeurs l’impression d’être plus en sécurité.
Il y a dans toutes ces questions de justice une vérité tellement évidente qu’on n’a pas besoin d’en parler. Il va sans dire que tous les députés souhaitent que leur collectivité et tous les Canadiens se sentent en sécurité. Chaque député veut voir une augmentation aussi bien de la perception que de la réalité de la sécurité publique.
Monsieur le Président, que feriez-vous si vous étiez responsable des lois canadiennes de répression du crime? La plupart des gens s’attendraient à ce que vous écoutiez les responsables des organismes chargés de la mise en vigueur de la loi. La plupart des gens voudraient vous voir discuter avec les procureurs généraux et les premiers ministres des provinces et des territoires. Bien entendu, vous parleriez aux gens, aux comités et ainsi de suite.
Les services de police du pays demandent certaines choses, mais ils veulent surtout disposer d’un plus grand nombre de policiers. Le gouvernement n’a pas donné suite à leurs demandes à cet égard.
Des procureurs généraux partout au pays plaident en faveur d'une modernisation du Code criminel en général et plus précisément, des ressources nécessaires aux enquêtes sur les délits commis dans tout le pays.
C'est la modernisation du processus relatif aux télémandats qui est extraordinaire dans le projet de loi . C'est quelque chose d'extraordinaire. Mais si je regarde en arrière, je constate que cela fait trois ans et dix mois que je suis ici et il y a trois ans et dix mois, les procureurs généraux réclamaient déjà une telle modernisation. Aujourd'hui, presque quatre ans se sont écoulés.
Selon le député d' qui a lancé le débat, le gouvernement est en train de mettre en oeuvre des recommandations formulées en partie à la suite de la conférence réunissant les procureurs généraux territoriaux et provinciaux ainsi que le du Canada en 2008. Nous ne progressons pas vite en ce qui concerne des changements très importants au Code criminel.
Je me rappelle très bien que Wally Opal, procureur général de la Colombie-Britannique, a plaidé ce printemps en faveur d'une modernisation beaucoup plus importante du Code criminel afin de donner aux agents d'application de la loi les outils dont ils ont besoin.
J'ai commencé mes réflexions sur ce projet de loi en disant que nous pouvons appuyer la plupart de ces dispositions. On a vraiment besoin de la plupart d'entre elles. Pourquoi a-t-on attendu si longtemps? Au Canada, on se pose la question.
Les représentants du gouvernement préfèrent se rendre dans des stations de télévision le soir pour parler d'une loi qu'ils vont peut-être proposer au lieu d'aller rencontrer les procureurs généraux de ce pays et de procéder à une simple modernisation du droit pénal. Pourquoi ne pas avoir agi plus tôt pour moderniser les télémandats?
Encore une fois, ce projet de loi contient quelques très bonnes dispositions et un grand nombre de mesures de nature strictement administrative.
Permettez-moi de vous donner un bref aperçu des grandes lignes de ce projet de loi. Je vais aussi effleurer quelques questions très sérieuses concernant les empreintes digitales et l'exécution extraterritoriale des mandats.
Je vais aussi faire mention de nouveaux secteurs concernant lesquels des intervenants de toutes les régions du pays — non pas tant dans les organismes d'application de la loi qu'au sein de l'industrie touristique et des municipalités — souhaitent des dispositions modernes, notamment en ce qui a trait à la définition de « combat concerté » et de « paris mutuels ».
J'ai déjà été le maire d'une ville. Je sais combien il importe d'assurer la sécurité d'une collectivité, de créer un sentiment de sécurité relativement à la police et aux lois, tout en s'occupant des touristes et des dossiers liés aux activités communautaires.
Le projet de loi renferme un certain nombre de dispositions qu'on peut considérer comme étant d'ordre administratif, comme étant bonnes pour l'économie, et comme contribuant à la modernisation du libellé des dispositions existantes. Il renferme aussi, un peu comme on le fait aux États-Unis, toute une série d'articles divers qui cachent une grosse surprise.
Cette surprise est la prise d'empreintes digitales sur toute personne qui est arrêtée. Or, on voudrait présenter cette mesure comme un service rendu à la personne. Peu importe que celle-ci soit un bon citoyen, ses empreintes digitales seront prises, ainsi que des photos. Qui plus est, ces données seront conservées en permanence dans la base de données. C'est une façon de s'assurer que le bon citoyen puisse dormir en paix. Le bon citoyen pourra rentrer à la maison et vivre le reste de sa vie en sachant qu'il est fiché. Je fais évidemment allusion aux dispositions du projet de loi qui sont liées à la prise d'empreintes digitales.
Cela me paraît étrange, parce que nous venons tout juste d'avoir un débat préliminaire assez rigoureux sur l'élimination du registre des armes d'épaule.
Un grand nombre de résidants de ma circonscription qui n'étaient guère enthousiasmés par le registre des armes à feu ne seront probablement pas impressionnés par cette intrusion du gouvernement, qui veut prendre des empreintes digitales et des photos des personnes qui sont arrêtées pour une infraction présumée mais qui pourraient par la suite être acquittées, être libérées ou ne même pas être inculpées.
Je pense que ceux-là même qu'un bon nombre de conservateurs d'en face se plaisent à décrire comme étant de bons citoyens ordinaires adhèrent au principe voulant qu'une personne soit innocente jusqu'à preuve du contraire. Ces gens ne croient pas que Big Brother, dans le sens orwellien de l'expression, devrait conserver en permanence des dossiers sur des personnes qui n'ont jamais fait l'objet de quelque accusation que ce soit. Or, il me semble que les conservateurs ne sont pas capables d'adhérer à ce principe.
Nous allons vérifier cela en comité. Nous allons voir quelles sont les allégations, crimes ou infractions qui permettraient aux policier de prendre de telles mesures. C'est à cela que servent les comités. Contrairement à certaines affirmations faites au Parlement aujourd'hui au sujet du Comité de la justice, ce comité travaille très bien. Je crois que le comité examinera cela. Peut-être certaines infractions seront-elles mises à l'annexe. Peut-être dirons-nous qu'il est important de faire cela au sujet d'une personne qui pourrait présenter un risque dans un avion ou de quelqu'un qui pourrait s'enfuir du Canada. Peut-être est-ce une bonne idée, je ne sais pas.
Cependant, je n'ai rien vu dans le résumé législatif ni dans le projet de loi lui-même et je n'ai pas été rassuré par les paroles du député d', qui a dit que cela ne s'appliquerait pas à toutes les infractions, que chaque fois qu'une personne est arrêtée et avant qu'elle soit accusée, elle sera photographiée et ses empreintes digitales seront prises.
Force m'est de constater qu'il n'y a pas d'explication sur la gravité des infractions visées ou sur les circonstances aggravantes. Dans un tel cas, notre parti ne peut pas appuyer le projet de loi.
Le gouvernement a peut-être un argument pour justifier la mesure et il devra nous le présenter s'il veut expliquer pourquoi nous devons adopter un système où chaque citoyen du Canada, chaque visiteur au Canada, chaque personne qui obtient un visa doit produire ses empreintes digitales et une photographie qui permettent aux fonctionnaires de l'identifier facilement, de déterminer où cette personne est allée et ce qu'elle fait. Je ne peux pas imaginer que les députés conservateurs souscrivent d'emblée à un tel système. J'aimerais qu'ils aillent dans leur circonscription dire à leurs électeurs que le gouvernement va commencer à prendre les empreintes digitales et les photographies de tout le monde uniquement pour connaître les allées et venues de chacun. Je ne peux pas le concevoir, mais nous verrons en comité.
Je me demande pourquoi dans un projet de loi qui recoupe autant de choses que le , il a été décidé d'insérer cette disposition sur les empreintes digitales pour tous. Peut-être le ministère de la Justice devrait-il adopter comme devise ou slogan interne: « des empreintes digitales pour tous ».
Certaines personnes ont déjà formulé des objections au sujet des empreintes digitales et je ne suis pas le seul à le constater.
[Français]
Il y a inquiétudes. M. Clayton Ruby, un membre du Barreau de l'Ontario et quelqu'un qui est bien connu à Toronto, a dit dans un article, et je cite:
[Traduction]
Fournir des empreintes digitales constitue une forme d'auto-incrimination et la Constitution nous protège contre ce genre de chose. Là où on fait la distinction, c'est quand une personne est inculpée. Si la police oblige une personne à s'auto-incriminer avant d'avoir été inculpée, cela peut donner lieu à des abus.
Un article récent du journal The Province rapporte que, sur un site web, il a été dit:
Selon le changement proposé, toute personne dont les empreintes digitales et la photographie a été prise doit présenter une demande si elle veut que ces données soient détruites. La police n'est pas obligée d'accéder à la demande, et elle n'est pas tenue d'expliquer pourquoi elle refuse de le faire.
Par conséquent, dès qu'une personne est fichée, les données sont conservées, pour ainsi dire, de façon permanente. À ceux qui seraient tentés de dire que « la police ne t'aurait pas arrêté si tu n'avais rien fait de mal », je dis: réveillez-vous.
Ce n'est pas un membre estimé du Barreau qui dit cela, mais une personne qui a compris la nécessité de ralentir le processus des conservateurs, qui visent à recueillir les empreintes digitales et la photographie de tout le monde.
La prise d’empreintes digitales et de photographies d'une personne au moment de son arrestation comporte un autre aspect, celui de la conservation de ces données. Lorsqu'on a posé la question directement à mon collègue d', encore une fois, il n'a pas pu nous rassurer en nous disant que ces renseignements seraient remis aux gens ou détruits dans l'éventualité où il n'y avait pas d'inculpation. Il a cité des décisions de tribunaux d'appel qui ont tranché que, aux termes de la loi, les tribunaux ont le droit de conserver ces données. Ils ne sont pas obligés de les remettre aux personnes. La question n'est pas vraiment de savoir ce qui arrive une fois qu'ils ont ces renseignements, mais bien pourquoi ils les ont obtenus à l'origine. Nous devrons nous pencher très sérieusement sur cette question au comité.
Mais j’en ai assez dit sur les empreintes digitales. Il y a un autre élément du projet de loi qui dérange, mais je répète que, en général, j’appuie la mesure. Cet élément porte sur les gens qui ont été accusés d’un crime et qui font l’objet d’un mandat d’arrestation. Disons que quelqu’un a été accusé d’un crime au Nouveau-Brunswick et fait l’objet d’un mandat d’arrestation au Nouveau-Brunswick parce qu’il ne s’est pas présenté devant le tribunal quand on l’avait convoqué. Disons qu’il se rend en Colombie Britannique. Peut-être qu’il s’y est rendu pour des raisons économiques. Peut-être qu’il a été mal informé; peut-être que son avocat l’a mal renseigné, mais quoi qu’il en soit, il fait l’objet d’un mandat. Il arrive en Colombie Britannique. En vertu de cette nouvelle mesure, non seulement les gens dans les grands centres urbains seront renvoyés dans la province d’origine pour faire face aux accusations qui pèsent contre eux, ce qui est fort bien, mais en plus, ils seront passibles d’une peine supplémentaire.
Je comprends, par exemple, le chef de police de Vancouver, Jim Chu, et je compatis avec lui; selon lui, l’effet principal de cette mesure serait de décourager les gens de partir. C’est peut-être le cas.
J’espère que le comité tentera de déterminer à quelle fréquence cela peut se produire. À Vancouver seulement, les chiffres indiquent, par exemple, que 53 personnes ont été arrêtées dans cette ville et que 35 d’entres elles ont été renvoyées dans leur province depuis que le service de police de Vancouver a mis sur pied un programme qu’il appelle Con Air. En vertu de ce programme, le service de police de Vancouver réunit les gens qui font l’objet d’un mandat et veille à l’exécution de ceux-ci en renvoyant les personnes visées dans leur province d’origine.
La conséquence imprévue d’un tel système, surtout en période de récession, est que Vancouver, Calgary et d’autres pourraient avoir à assumer des coûts plutôt élevés pour renvoyer les gens dans leur province d’origine, où des accusations ont été portées contre eux. On n’a pas discuté, dans le cadre du débat sur le projet de loi ou lors de discussions intergouvernementales, de la question de savoir qui assumerait le coût d’une telle mesure.
Il y a de quoi avoir certaines inquiétudes. J'ai notamment donné l'exemple d'une personne relativement parlant innocente qui, parce qu'elle n'a pas tenu compte d'un mandat, est accusée d'une infraction plus grave que celle pour laquelle le mandat a été émis. Depuis que je m'intéresse à la politique, je suis préoccupé de certaines observations qui émanent particulièrement des rangs conservateurs; elles illustrent un manque de respect à l'égard de concitoyens venant d'autres régions du Canada. Je n'ai pas à parler de l'ancien maire de Calgary. Je n'ai pas non plus à rappeler les propos du au sujet d'une culture du défaitisme. Je suis très fier de venir des Maritimes, d'être un Canadien de la région de l'Atlantique. C'est un très grave manque d'égard de la part d'un politicien de tenir des propos irrespectueux au sujet d'autres régions du Canada. Il est très décourageant d'entendre des chefs de parti tenir de pareils discours; ils ne favorisent certainement pas la cohésion nationale comme ils le devraient.
Cet aspect du mandat extraterritorial doit être examiné par le comité avec le respect qu'il mérite et à la lumière d'éléments d'information solides nous expliquant pourquoi il faut procéder de cette façon. L'efficacité de cette procédure doit certainement faire l'objet d'un examen. Nous nous pencherons très attentivement sur cet aspect de la question en tenant compte de cette mise en garde.
Certaines des mesures de modernisation dont j'ai parlé plus tôt ne semblent pas relever du domaine de la justice, mis à part la mise à jour des définitions ayant trait aux combats concertés. Seul un avocat peut trouver intéressant le fait que la définition de combat concerté vient juste avant les articles sur le terrorisme dans le Code criminel. Quoi qu'il en soit, les gens ne savent peut-être pas que les combats concertés, tels que définis dans le Code criminel, sont interdits dans les provinces à moins de tomber sous le coup d'une exception.
Hier soir, à Moncton, au Nouveau-Brunswick, plus de 12 000 personnes sont venues accueillir la flamme olympique au nouveau stade extérieur. Ce fut un événement magnifique. Moncton est ni plus ni moins l'Indianapolis du Canada pour ce qui est de la promotion des activités sportives. Nous avons le Centre 4 glaces qui est l'aréna le plus grand et le mieux équipé à l'est de Montréal et le colisée qui est le foyer des Wildcats de Moncton. Notre ville est reconnue comme un haut lieu pour la tenue d'activités sportives.
L'esprit de compétition qui rapproche les Canadiens devrait être évident pour les députés. Je trouve formidable que des équipes de la Ligue de hockey junior majeure du Québec situées à l'extérieur du Québec puissent battre l'équipe de la Ville de Québec. C'est un des aspects fantastiques du Canada. Les Wildcats de Moncton, qui font partie de la Ligue de hockey junior majeure du Québec, peuvent vaincre des équipes qui viennent d'autres régions du Canada, y compris du Québec.
La définition des combats concertés doit être actualisée pour montrer que nous ne sommes plus à l'époque du marquis de Queensberry. Je regarde du côté de certains députés qui s'y connaissent en pugilat, mais c'est d'altercations sérieuses avec les mains et les pieds qu'on parle ici. Parfois, les politiciens se servent de leurs pieds, mais d'une autre façon.
Dans la bouche.
Ils se le mettent dans la bouche, monsieur le Président, comme le dit mon collègue de Terre-Neuve.
Là où je veux en venir, c'est que le maire de ma ville m'a dit que les modifications proposées à l'article 83 afin de soustraire les combats ultimes aux dispositions portant sur les combats concertés avaient pour but de stimuler le tourisme. Il faut aussi souligner que les clubs de boxe sont aussi très actifs auprès de nos jeunes partout au pays. Ils ont une définition précise de ce en quoi leur sport consiste.
J'aurais souhaité que le gouvernement en vienne beaucoup plus tôt aux aspects administratifs du projet de loi. Les conservateurs ont gaspillé beaucoup de temps d'antenne en parlant de droit au lieu de s'occuper des aspects administratifs.
En ce qui concerne la prise d'empreintes digitales, j'espère que le président du Comité de la justice comprend que ces deux éléments, les mandats extraterritoriaux et la prise d'empreintes digitales, doivent être étudiés attentivement et avec soin et en tenant compte de toutes les régions du Canada. Il faut non seulement respecter la loi, il faut aussi se respecter les uns les autres et respecter les Canadiens.
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Monsieur le Président, pour la deuxième fois aujourd'hui, je prendrai la parole sur un projet de loi, mais d'entrée de jeu, je peux dire que je serai probablement moins vindicatif dans le cas du projet de loi que je ne l'ai été et que je le serai encore dans le cas du projet de loi , si jamais ce projet de loi revient devant cette Chambre. Cela étant dit, c'est un projet de loi intéressant, et le Bloc va l'appuyer pour qu'il se retrouve au Comité permanent de la justice et des droits de la personne afin d'y être étudié en détail.
J'entends certains collègues du Parti conservateur applaudir. Je les invite à réserver leurs applaudissements pour dans cinq ou dix minutes; je ne suis pas certain qu'ils voudront encore le faire, mais pour l'instant, je prends note de ces applaudissements, intéressants en ce qui me concerne.
Je ne sais pas pourquoi, mais les conservateurs ont toujours une petite tendance à mettre dans un projet de loi intéressant ce que nous appelons dans notre jargon une pilule empoisonnée. On lisait le projet de loi qui compte une trentaine de pages et une quarantaine d'articles, et tout allait bien jusqu'à ce qu'on tombe sur l'article 39 du projet de loi qui modifierait la Loi sur l'identification des criminels. J'y reviendrai. Notre droit criminel comporte un point extrêmement important, que la Cour suprême a rappelé à plusieurs occasions, et c'est la présomption d'innocence. Quelqu'un est donc présumé innocent jusqu'à ce qu'il soit déclaré coupable par un jury ou par un juge bien informé en droit, à la suite de la preuve qui lui a été faite devant ses pairs. La Cour suprême l'a dit et l'a répété. Je rappellerai aux députés que, selon nous, on ne peut pas modifier le paragraphe 2(1) de la Loi sur l'identification des criminels car cela irait à l'encontre de la présomption d'innocence.
Je vais développer ce argument. Le point négatif central de ce projet de loi n'est qu'un tout petit paragraphe de la dernière page du projet de loi qui vise à abolir et modifier l'alinéa 2(1)a) et qui se lit comme ceci:
a) les personnes qui sont légalement détenues parce qu’elles ont été arrêtées [...]
Cela veut dire que cela s'applique à tout le monde qu'on arrête pour n'importe quelle raison. On pourrait dorénavant prendre les empreintes digitales et les photographies des gens. Il est clair que, si le gouvernement maintient sa position et qu'il veut absolument amender cet article, nous nous battrons jusqu'à la toute fin pour voter contre ce projet de loi et contre cet article, et il est clair qu'en comité, nous tenterons de faire amender ce projet de loi pour enlever cela. Nous souhaitons le faire avec l'appui des libéraux et de mon collègue du NPD.
Pourquoi enlever cet article? On prêterait ainsi flan à n'importe quelle exagération. Mon collègue d' a pu dire n'importe quoi, mais il faut être sur le terrain des vaches, comme on dit dans notre jargon, il faut avoir plaidé des causes et connaître les dossiers criminels pour se rendre compte que les policiers ont tendance à exagérer. Bien souvent, ils sont prêts à ficher n'importe qui pour n'importe quoi. Évidemment, ce n'est pas toujours vrai, et ce n'est pas vrai de tous les policiers. Or des garde-fous existent, et un de ceux-là dit qu'on ne peut pas prendre les empreintes digitales avant que quelqu'un n'ait été inculpé ou déclaré coupable à la suite d'une infraction. Cela signifie qu'actuellement, un individu qui est déclaré coupable ou qui est accusé — parce qu'il faut qu'il soit accusé — peut être amené à donner sa photographie et ses empreintes digitales.
Généralement, voici comment cela se produit. Une personne reçoit un acte de comparution lui demandant de se présenter à la cour. Elle doit plaider coupable ou non coupable. Après avoir fait son choix, elle peut être amenée à donner ses empreintes digitales et sa photo.
Cette façon de faire ne doit pas changer, et nous allons tout faire pour qu'elle ne change pas parce que c'est le droit fondamental d'un individu d'être présumé innocent jusqu'à ce qu'il soit déclaré coupable. Cette présomption d'innocence est extrêmement importante dans notre droit criminel.
C'est dommage, parce que cela cache de bonnes intentions. Je viens d'une région à 600 km au nord d'Ottawa, où se rend régulièrement la cour itinérante; j'ai plaidé aussi dans cette cour, quand j'étais avocat. La cour itinérante se déplace dans des villages inuits ou cris sur la côte de la baie James, de la baie d'Hudson et de la baie d'Ungava, mais également dans une région comme la nôtre.
Je reviens au point fondamental du projet de loi C-31: les télémandats. Nous pensons que la façon de procéder doit être modernisée. Les corps policiers ont parfaitement raison de demander qu'il soit plus facile et rapide d'obtenir des télémandats.
Pour la population qui nous écoute, les télémandats sont des mandats de perquisition ou autres. Le premier exemple qui me vient en tête est le suivant. Quelqu'un est arrêté à la suite d'un accident d'automobile. Les policiers s'approchent du véhicule automobile et sentent une odeur d'alcool. L'individu est dans son auto et il est incapable de donner son consentement parce qu'il est inconscient ou trop ivre. Quoi qu'il en soit, il doit être emmené à l'hôpital. Les policiers l'accompagnent à l'hôpital et obtiennent par téléphone un télémandat. Un juge de paix, situé dans un bureau quelque part au Québec, va autoriser une prise de sang de l'individu en vue de vérifier son taux d'alcoolémie. Nous sommes d'accord avec le législateur pour que ces télémandats soient maintenus et plus accessibles.
Les policiers ont raison. Actuellement, en 2009, s'ils soupçonnent qu'un acte criminel est commis ou est sur le point de l'être, et qu'ils doivent obtenir un mandat de perquisition rapidement, ils doivent se rendre chez un juge, faire signer un document et procéder ensuite à la perquisition.
Nous pensons que le projet de loi est une bonne initiative, car il vise à moderniser le Code criminel. Même si je suis un criminaliste, je pense qu'on doit faciliter le travail des policiers et les aider à compléter leur preuve. Or une des façons d'y arriver est le télémandat.
Nous croyons qu'augmenter l'accessibilité des télémandats est une bonne chose. Qu'ils soient sous forme écrite et qu'ils soient utilisés ou non, les policiers devraient avoir la possibilité d'obtenir des télémandats.
Ce projet de loi contient plusieurs autres choses, notamment la fuite dans une autre province et la modification à la suite du jugement rendu par la Cour suprême dans R. v. Six Accused Persons, qui modifie l'article 184 du Code criminel. Ce sont là beaucoup de modifications qui devaient être apportées au Code criminel.
Il y a beaucoup de détails. Ce projet de loi est volumineux et très technique, mais il est intéressant. Cependant, il y a deux points majeurs que j'aimerais soulever. Le premier point est la représentation par d'autres personnes qu'un avocat.
Personnellement, j'ai beaucoup de mal à accepter que quelqu'un puisse représenter un client devant la cour où ce dernier sera accusé par voie de déclaration sommaire. Pour le Bloc québécois, il est très difficile d'accepter cette proposition, et ce pour plusieurs raisons.
La représentation par avocat est excessivement importante, surtout en droit criminel. Pour ce qui est de la comparution, on pourrait probablement faire des concessions. Mais qu'on interroge et contre-interroge des témoins pour et au nom du défendeur me pose de sérieux problèmes.
J'ai la même inquiétude que celle exprimée par le Barreau du Québec, qui nous a fait parvenir de l'information à ce sujet. Je me permets de citer ce dernier:
Le Barreau craint que la proposition telle que rédigée porte à confusion sur le sens à donner au terme « représentant » et puisse donner lieu à des poursuites pour exercice illégal de la profession.
Je suis également très inquiet de cette proposition. Au Québec, beaucoup de personnes se sont improvisées avocat et ont représenté des personnes, des demandeurs, devant, par exemple, la Commission de la santé et de la sécurité du travail. La même chose s'est produite à la Commission de l'assurance emploi du Canada. En effet, des personnes qui n'avaient aucune compétence juridique ont représenté des individus devant le conseil arbitraire sous prétexte qu'ils étaient amis. Si l'on applique ce système au Code criminel, on commencera à avoir de sérieux problèmes.
Je suis très surpris que l'on nous propose une telle chose à la demande des provinces. Je peux affirmer que le Barreau du Québec n'est pas d'accord avec cette proposition. Je serais très surpris d'apprendre que le gouvernement du Québec a fait une telle demande de représentation par un tiers. Selon moi, la représentation par les avocats est un point auquel il faudra porter une attention particulière lorsque viendra le temps d'étudier ce projet de loi en comité.
L'autre point porte sur la modification apportée à l'article 2 de la Loi sur l'identification des criminels. J'y reviens parce qu'il m'apparaît fondamental de signaler qu'il ne faut pas ouvrir une brèche et qu'il ne faut surtout pas accepter de donner les pleins pouvoirs aux corps policiers pour prendre les empreintes digitales et les photos de quelqu'un, car on ne sait jamais où cela se retrouve. Ces fiches, que l'on appelle dans notre jargon les fiches anthropométriques, peuvent se retrouver à la frontière canadienne, aux douanes ou ailleurs.
Dans un tel cas, cela pourrait empêcher un individu qui n'a jamais été accusé de quoi que ce soit de se rendre ailleurs qu'au Canada. Cela pourrait aller aussi loin que d'arrêter quelqu'un pour conduite dangereuse ou pour une contravention au Code de sécurité routière. On demande à cet individu de se présenter au poste de police pour prendre ses empreintes digitales et ses photos. Les policiers pourraient même avoir avec eux, sur les lieux de l'arrestation, des appareils qui permettent de prendre de telles photos et les empreintes digitales. Je pense que cela va très loin. Il faut prévoir un mécanisme pour détruire les empreintes digitales et les photos d'individus qui ne sont pas accusés, qui ne seront pas accusés, et contre qui aucune plainte ni aucune accusation ne sera déposée.
Actuellement, non seulement a-t-on les empreintes digitales et la photo d'un individu — la fiche anthropométrique contenait aussi ces renseignements —, mais on sait que des individus peuvent être fichés génétiquement parce qu'ils ont donné une goutte de sang, de la salive ou un poil afin de procéder à des identifications par test d'ADN. Il ne faut pas oublier cela.
Or, il a été prévu à l'article 10 de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques un mécanisme pour détruire ces empreintes.
Nous pensons qu'il serait très souhaitable d'amender cet article afin que les photos et fiches anthropométriques soient détruites si aucune accusation n'est portée dans un délai X.
Il faut avoir pratiqué le droit criminel pour comprendre qu'il est très rare qu'un client vienne nous revoir quand il n'y a pas d'accusation portée contre lui pour demander de détruire ses empreintes digitales et ses photos, même si ces dernières ont été prises légalement.
Lorsque quelqu'un est acquitté d'un infraction portée contre lui, il devrait automatiquement y avoir destruction des empreintes digitales et des photos, mais cela ne se fait pas actuellement. Cela ne s'est pas fait. Inutile de dire que cela ne se fera certainement pas plus si on permet que la Loi sur l'identification des criminels puisse être amendée.
Selon nous, le mot le dit, la loi le dit. On l'appelle la Loi sur l'identification des criminels. Alors, pour quelqu'un qui n'est pas encore déclaré criminel, en vertu de quoi devrait-il être obligé de remettre ses photos et ses empreintes digitales? À notre avis, cela n'a pas de sens et cela nous apparaît extrêmement préjudiciable pour un individu qui serait arrêté.
Ce projet de loi nous apparaît important. C'est un projet de loi intéressant et je terminerai avec les combats. J'ai écouté mon collègue de et j'ai également écouté mon collègue de Windsor. Ils se posaient une question très importante. Il y a des combats concertés et il y a maintenant à travers les États-Unis surtout ce genre de combats extrêmes où il y a de la violence, c'est clair, mais où il y a aussi des paris et ainsi de suite.
Cependant, il faut faire attention, parce qu'il y a des combats très bien organisés. On connaît la boxe, mais pour ce qui est du mouvement olympique, on a introduit dans le programme olympique le judo et le karaté. Ce sont des disciplines sportives extrêmement intéressantes et qui ont de plus en plus d'adeptes au Canada.
Ces combats de judo et de karaté sont organisés sous la supervision d'organismes nationaux et internationaux. Je donne l'exemple d'organismes internationaux tels que le Comité international olympique, la Fédération internationale de judo et la Fédération internationale de karaté qui nous ont demandé de faire en sorte que le Code criminel soit amendé. Je donnerai un exemple relativement à ces combats. Le Canada ne peut pas obtenir la tenue d'une coupe du monde de karaté ou de judo parce qu'en vertu du Code criminel, c'est un match de combat illégal.
Il nous apparaît donc important que cela soit amendé dans le Code criminel. C'est demandé par plusieurs provinces et le Québec en fait partie. La Fédération québécoise de judo, la Fédération québécoise de karaté et même l'Association canadienne de karaté et celle de judo, suite aux représentations du Comité international olympique qui voudrait tenir des compétitions majeures dans ces deux disciplines, ne peuvent pas le faire.
Je vois qu'on me fait signe que le temps qui m'est alloué est presque terminé, mais je conclurai en disant que c'est un projet de loi intéressant sur lequel on aura à se pencher au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Il y a deux points, et je les ai mentionnés, mais il m'apparaît important qu'on modernise le Code criminel pour respecter les demandes.
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Monsieur le Président, il faudrait demander à mes collègues de ne pas poser de questions parce que je n'aurai pas le temps de finir mon exposé, et cela ne signifie pas bien sûr que je ne pourrais répondre à leurs questions.
Je voudrais parler du projet de loi . Tous les partis politiques s'entendent pour dire que les dispositions de ce projet de loi auraient dû être adoptées depuis longtemps. Certaines de ces modifications nous feront entrer dans le XXIe siècle pour ce qui est des processus que nos services de police doivent suivre pour porter des accusations ou intenter des poursuites. Ce projet de loi bénéficie de l'appui de la majeure partie des députés. Nous l'appuierons à l'étape de la deuxième lecture. Il sera renvoyé Comité de la justice, comme bon nombre d'autres projets de loi, et nous l'étudierons en temps et lieu.
Je tiens à le dire parce que j'ai toujours des récriminations envers le gouvernement à cet égard. Depuis quatre ans que le gouvernement est au pouvoir, c'est en fait le premier projet de loi qui a été bien préparé dans le but de répondre aux problèmes que pose le Code criminel. Ce que je veux dire par cela, c'est que c'est le premier projet de loi d'importance que l'on peut qualifier de projet de loi d'ensemble en matière de droit pénal. Il y en a eu quelques autres qui ont porté sur un ou deux articles du Code criminel, mais c'est le premier qui soit un projet de loi d'ensemble.
J'insiste sur ce point parce que si, dans un certain nombre de cas, le gouvernement avait regroupé une série de projets de loi en un seul, nous aurions réussi à accélérer l'adoption d'un certain nombre de modifications que nous avons en fait adoptées individuellement, souvent grâce à l'appui de tous les partis, au cours des quatre dernières années. En outre, nous aurions pris au moins une ou deux années d'avance par rapport au point où nous en sommes actuellement.
Je félicite le gouvernement de m'avoir enfin écouté à cet égard. Je tiens à l'encourager à suivre mes conseils plus systématiquement que jamais à l'avenir, de façon à ce que nous puissions examiner un certain nombre d'autres projets de loi. En effet, plusieurs autres dispositions du Code criminel n'attendent qu'à être modifiées et, en particulier, modernisées, de façon à ce que nos agents de police, nos procureurs et nos juges puissent utiliser le Code criminel plus efficacement qu'ils ne le font actuellement. Il y a toutes sortes de contradictions dans la version actuelle du Code criminel. Certains des articles du code sont simplement obsolètes. J'exhorte le gouvernement à suivre mes conseils plus souvent, comme il en a tenu compte pour ce projet de loi.
En ce qui concerne le contenu du projet de loi, comme moi, les députés du Parti libéral et du Bloc ont de sérieuses réserves à l'égard des dispositions relatives à la prise d'empreintes digitales avant que des accusations n'aient été portées contre une personne. L'interdiction de prendre les empreintes digitales à ce stade, à l'exception des cas où la police aurait effectivement l'intention de porter des accusations, remonte à un passé distant. Cette disposition figure dans le Code criminel depuis plus de 50 ans, peu après la découverte de cette technique, au beau milieu du siècle précédent.
Encore une fois, comme l'a mentionné le député du Bloc, la nécessité de porter des accusations avant la prise d'empreintes digitales est conforme à l'important principe de la présomption d'innocence, sur lequel repose une bonne partie de notre système de justice pénale. Ce projet de loi gruge vraiment dans le principe de la présomption d'innocence. Jamais je ne voudrais dénigrer nos services de police, mais nous savons tous que, de temps en temps, certains agents de police peuvent abuser de leur autorité et de leur pouvoir.
Malheureusement, si cette modification était adoptée, elle permettrait éventuellement à un policier de commettre ce genre d'abus. Ce serait la porte ouverte pour partir à la pêche. Or, nos tribunaux ont clairement dit dans le passé que c'était inadmissible dans notre régime de justice pénale et plus précisément au regard de la Charte des droits et libertés.
Je doute fort que l'article présenté à la Chambre résiste à une contestation en vertu de la Charte. J'en doute. Je crois que c'est clairement une violation de la Charte et que la seule façon de justifier cela serait de démontrer en vertu de l'article 1 qu'il est indispensable dans une société libre et juste d'empiéter sur les droits fondamentaux énoncés dans la Charte.
Encore une fois, comme je l'ai dit dans une de mes questions tout à l'heure, j'en ai discuté avec des policiers et des chefs de police, et la seule explication que j'ai obtenue, c'est que c'est pratique pour eux. Franchement, malgré tous mes efforts, je ne comprends pas en quoi c'est plus pratique et en quoi cela va faciliter leur travail. Je ne vois pas comment ils pourront respecter les critères de la Charte, mais c'est évidemment quelque chose que nous pourrons approfondir quand le projet de loi sera renvoyé au comité.
On nous a aussi dit à plusieurs reprises aujourd'hui qu'un des points saillants du projet de loi, ce sont les modifications à l'article du Code sur les combats concertés, l'article 83, et on nous a dit que le projet de loi allait moderniser cela. Ce n'est pas si simple. Après avoir écouté les députés des autres partis, j'ai l'impression que nous avons tous été travaillés sur la question, mais je sais que l'Ontario a de sérieuses réserves à l'idée d'élargir la définition. Je dois dire qu'ayant examiné cet article, je ne suis pas sûr que ces réserves soient justifiées, mais c'est quelque chose qu'il faudra creuser.
Ce dont on n'a pas parlé ici, ce sont les modifications concernant les paris mutuels dans le Code. J'y reviendrai plus en détail et je reviendrai peut-être aussi sur la question des combats concertés demain ou la prochaine fois que la Chambre reprendra l'étude de ce projet de loi.