(au nom du ministre de la Justice)
propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Monsieur le Président, j'ai l'honneur de pouvoir prendre la parole pour défendre le projet de loi , la Loi sur la protection des enfants, présenté par le gouvernement.
Je pense que tous les députés seront d'accord avec moi pour dire qu'en tant qu'élus, nous n'avons pas d'obligation plus importante que celle de protéger les enfants, qui sont les membres les plus précieux et les plus vulnérables de la société.
La création d'Internet, et en particulier du web, a fourni aux délinquants de nouveaux moyens de distribution et de consommation de la pornographie juvénile, ce qui a entraîné une augmentation importante de la quantité de pornographie juvénile et a grandement facilité l'accès à ce matériel.
Bien que le Canada dispose de l'un des cadres les plus exhaustifs au monde de lutte contre la pornographie juvénile, nous pouvons et nous devons faire mieux pour protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle. Le projet de loi fédéral qui est soumis à la Chambre aujourd'hui vise à accroître la capacité du Canada à protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle en exigeant des fournisseurs de services Internet qu'ils signalent les cas de pornographie juvénile sur Internet.
Le projet de loi aurait pour effet de: renforcer la capacité du Canada à détecter les infractions potentielles de pornographie juvénile; réduire la disponibilité en ligne des produits de l'exploitation sexuelle des enfants; faciliter l'identification, l'arrestation et l'inculpation des délinquants; repérer les victimes pour qu'elles puissent être arrachées aux griffes des pédophiles sadiques, ce qui est l'effet souhaité le plus important du projet de loi.
Il y a moins d'une semaine, le Centre canadien de protection de l'enfance a publié un rapport comprenant un aperçu de l'information transmise grâce au site canadien Cyberaide.ca, qui permet aux gens de signaler en ligne les cas d'exploitation sexuelle des enfants dont ils sont témoins, en particulier la pornographie juvénile, le fait de leurrer des enfants en ligne, l'exploitation des enfants par la prostitution, le tourisme sexuel et la traite des enfants.
Permettez-moi de citer ce rapport, qui contient de l'information choquante sur la grande diffusion en ligne d'images d'agression sexuelle:
Les résultats de cette analyse révèlent des données bouleversantes en ce qui concerne la problématique des images d’abus pédosexuels. Ce qui inquiète le plus, c’est la gravité des abus: plus de 35 p. 100 des images analysées montrent des agressions sexuelles graves. En ce qui a trait au groupe d’âge des enfants sur les images, on constate que les enfants de moins de 8 ans sont le plus souvent soumis à des agressions sexuelles. Il est encore plus bouleversant de constater que des agressions sexuelles extrêmes sont commises contre des enfants de moins de 8 ans. Ces statistiques contrastent avec la fausse idée que la pornographie juvénile prend le plus souvent la forme de photographies innocentes et anodines d’enfants nus.
Le rapport de Cyberaide.ca s'ajoute aux constatations semblables faites l'été dernier dans le rapport spécial du Bureau de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels intitulé « Chaque image, chaque enfant ».
Ce rapport, qui donnait un aperçu du problème de l'exploitation sexuelle d'enfants sur Internet, révélait que le nombre d'accusations de production et de distribution de pornographie juvénile avait augmenté de 900 p. 100 entre 1998 et 2003. De plus, entre 2003 et 2007, le nombre d'images de violence grave à l'endroit d'enfants a quadruplé, sans compter que les images montrent des actes de plus en plus violents et que les victimes sont de plus en plus jeunes.
Les Canadiens seraient consternés d'apprendre que 39 p. 100 des consommateurs de pornographie juvénile regardent des images d'enfants de trois à cinq ans et que 19 p. 100 regardent des images d'enfants de moins de trois ans.
Voici quelques autres faits tirés du rapport. On estime que la pornographie juvénile commerciale est une industrie de plusieurs milliards de dollars à l'échelle mondiale. Il y a toujours plus de 750 000 pédophiles en ligne. Des milliers de nouvelles images ou vidéos sont publiées sur Internet chaque semaine et des centaines de milliers de recherches sur l'exploitation sexuelle d'enfants sont effectuées chaque jour. Certains contrevenants peuvent avoir des collections contenant plus d'un million d'images d'exploitation sexuelle d'enfants. L'image d'une fillette de quatre ans en couche a été vue quelque 800 000 fois. La plupart des producteurs d'images d'exploitation sexuelle d'enfants sont connus des victimes.
La révélation la plus troublante dans le rapport de l'ombudsman est une citation de l'inspecteur-détective Angie Howe, de la Police provinciale de l'Ontario. Lorsqu'elle a témoigné devant un comité sénatorial en 2005, elle a dit ceci:
Les images deviennent plus violentes et les enfants que l'on y retrouve deviennent plus jeunes. Il y a un an à peine, nous ne découvrions pas souvent de photographies avec des bébés, alors qu'aujourd'hui il est normal de voir des bébés dans une bonne part des collections que nous découvrons. Il y a même une série de photographies qui sont très recherchées dans l'Internet où l'on voit un nouveau-né qui se fait violer. Ce bébé a toujours son cordon ombilical, c'est vous dire à quel point il est jeune.
Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour enrayer ce problème croissant. C'est pourquoi notre gouvernement a présenté une mesure législative visant à établir un régime uniforme de déclaration obligatoire d'un bout à l'autre du Canada.
Il importe de signaler que les mesures proposées dans le projet de loi viennent s'ajouter aux mesures exhaustives que nous avons déjà mises en place pour mieux protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle sous forme de pornographie juvénile.
Les lois pénales canadiennes contre la pornographie juvénile sont parmi les plus exhaustives du monde et s'appliquent aux images d'enfants réels ou imaginaires. L'article 163.1 du Code criminel interdit, à l'égard de la pornographie juvénile, la production, la distribution, la transmission, l'accès, la vente, l'annonce, l'exportation, l'importation et la possession. Il donne une définition large de la pornographie juvénile, qui comprend toute représentation visuelle, tout écrit ou tout enregistrement sonore qui présente une personne âgée de moins de dix-huit ans se livrant à une activité sexuelle explicite, qui préconise ou conseille une telle activité illégale ou dont la caractéristique dominante est la description d'une telle activité illégale.
Toutes les infractions liées à la pornographie juvénile sont passibles de peines substantielles, notamment une peine maximale d'emprisonnement de 10 ans par mise en accusation pour la production et la distribution de pornographie juvénile.
Depuis 2005, les tribunaux imposent une peine minimale obligatoire d'emprisonnement pour toutes les infractions liées à la pornographie juvénile. De ce fait, les personnes trouvées coupables de pornographie juvénile sont inadmissibles à une ordonnance de sursis, notamment à la détention à domicile.
Par surcroît, la perpétration d'une infraction liée à la pornographie juvénile dans le but de tirer un profit constitue un facteur aggravant qui entre en ligne de compte dans la détermination de la peine.
Toujours depuis 2005, les tribunaux chargés de déterminer la peine doivent accorder la priorité aux objectifs de dénonciation et de dissuasion pour toute infraction liée à des mauvais traitements faits à des enfants.
Le gouvernement reconnaît également que des lois criminelles musclées ne suffisent pas pour contrer ce fléau et qu'il faut faire davantage. C'est pourquoi, en décembre 2008, nous avons renouvelé la stratégie nationale de protection des enfants contre l'exploitation sexuelle sur Internet. Initialement lancée en 2004, sous la direction du ministre de la Sécurité publique, cette stratégie prévoit un investissement de 42,1 millions de dollars sur cinq ans dans le Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants de la Gendarmerie royale du Canada, le CNCEE. Cet investissement donnera aux organismes d'application de la loi de meilleurs outils et ressources pour s'attaquer à l'exploitation sexuelle des enfants faite au moyen d'Internet, mieux informer et sensibiliser la population et soutenir le lancement national et le fonctionnement continu de Cyberaide.ca, le service pancanadien de signalement des cas d'exploitation sexuelle d'enfants sur Internet, accessible tous les jours de l'année, 24 heures sur 24.
Nous avons affecté 6 millions de dollars additionnels par année pour renforcer les initiatives destinées à combattre l'exploitation sexuelle et la traite des enfants, mesure annoncée dans le budget de 2007 et mise en place dès 2008. Ces fonds servent à augmenter la capacité globale du CNCEE et plus particulièrement à améliorer sa capacité de trouver des enfants victimes de tels abus et de leur venir en aide, grâce à l'analyse d'images saisies auprès de délinquants sexuels, obtenues sur Internet ou reçues d'organismes internationaux d'application de la loi.
La communauté internationale a également reconnu que la protection des enfants revêt une importance primordiale dans les nombreux traités sur la question. La Convention sur la cybercriminalité du Conseil de l'Europe vise à établir une définition standard s'appliquant à la pornographie juvénile et aux infractions qui y sont liées, pour favoriser la coopération internationale à l'égard des actes criminels dont les enfants du monde sont les victimes. Le projet de loi présenté à la Chambre hier renforcerait notre capacité de coopérer avec nos partenaires internationaux pour éradiquer ce type de violence.
Je veux maintenant expliquer comment fonctionnera cette mesure législative.
D'abord, le projet de loi se concentre sur Internet et sur les fournisseurs de services Internet au public, puisque c'est la popularité d'Internet qui a entraîné, dans une large mesure, l'accroissement des infractions relatives à la pornographie juvénile depuis une dizaine d'années. Comme ces fournisseurs sont particulièrement bien placés pour découvrir les infractions de ce type, puisqu'ils fournissent aux Canadiens les services Internet qui permettent la perpétration d'infractions relatives à la pornographie juvénile, ce projet de loi leur impose l'obligation de signaler l'existence d'un site de pornographie juvénile ou d'en aviser les autorités.
Il faut savoir que cette mesure ne vise pas uniquement les fournisseurs de services Internet. Par fournisseur, on entend généralement l'entreprise qui fournit l'accès à Internet, autrement dit le câblage qui est installé dans les maisons et appartements. Mais le projet de loi s'applique à toutes les personnes qui offrent un service Internet au public. Les sociétés qui offrent la connection sont visées, mais aussi les services de courrier électronique, d'hébergement de contenu sur Internet, qui incluent les parcs de serveurs web et les installations de colocalisation, enfin les sites de réseautage social où le public peut télécharger des données vers l'ordinateur central d'un service Internet.
Par ailleurs, la loi s'appliquerait à ceux qui offrent des services Internet gratuits au public, comme les cybercafés, les hôtels, les restaurants et les bibliothèques publiques. On s'assure ainsi que la portée de la loi soit aussi vaste que possible, de manière à éliminer le plus grand nombre possible de repaires de pédophiles.
En vertu de cette nouvelle loi fédérale, les personnes qui fournissent des services Internet auront l'obligation de respecter un certain nombre d'exigences.
Premièrement, on leur demandera de faire rapport à un organisme désigné chaque fois qu'elles soupçonneront qu'une adresse Internet pourrait abriter un site de pornographie juvénile. Précisons qu'elles devront déclarer uniquement l'adresse Internet à cet organisme. Aucun renseignement personnel ne devra être transmis.
Nous avons choisi cette façon de faire pour deux raisons. Premièrement, pour déterminer d'où vient ce matériel, l'organisme désigné n'a pas besoin de plus d'information. Deuxièmement, et surtout, comme l'organisme désigné n'a pas besoin de renseignements personnels pour s'acquitter de ses fonctions, ce qui sera précisé dans les règlements d'application, cela permet de protéger les renseignements personnels des Canadiens.
Bien que les règlements ne soient pas encore prêts, on prévoit que le rôle principal de l'organisme désigné sera, d'abord, de déterminer si l'adresse Internet en question mène réellement à de la pornographie juvénile telle que définie dans le Code criminel et, deuxièmement, de trouver où se situent physiquement les serveurs web hébergeant ce matériel. L'organisme désigné remettrait alors son rapport à l'organisme d'application de la loi pertinent.
Deuxièmement, le projet de loi obligerait les personnes qui fournissent des services Internet au public à faire rapport à la police si elles ont des motifs raisonnables de croire à l’utilisation de leurs services Internet pour la perpétration d’une infraction relative à la pornographie juvénile.
Par exemple, si pendant les travaux d'entretien de routine de ses serveurs de courrier électronique, un fournisseur de services de courrier électronique découvre que la boîte d'un utilisateur contient beaucoup de pornographie juvénile, il aurait l'obligation d'aviser la police qu'il a des motifs raisonnables de croire qu'une infraction relative à la pornographie juvénile a été perpétrée. L'obligation, qui est prévue à l'article 4 de cette nouvelle mesure législative fédérale, est accompagnée de l'obligation additionnelle pour le fournisseur de préserver les données informatiques en question pendant 21 jours après la date à laquelle il a avisé la police.
Afin de ne pas porter indûment atteinte au droit à la vie privée des Canadiens, la personne qui a avisé la police serait également tenue de détruire, après 21 jours, les données informatiques qui ne seraient pas conservées dans le cadre normal de son activité commerciale, ou de continuer à les préserver si une ordonnance à cet effet a été rendue à l’égard de ces données. Toute personne qui fait rapport à la police en vertu de ce projet de loi serait aussi tenue de ne pas révéler ce fait.
Le projet de loi a aussi été élaboré en tenant compte des principes généraux suivants.
Cette mesure législative ne devrait pas contribuer à la consommation ou à la propagation de pornographie juvénile. Suivant ce principe, le projet de loi précise explicitement, entre autres, qu'il n’a pas pour effet d’autoriser ou d’obliger quiconque à chercher de la pornographie juvénile. De plus, les obligations ont été élaborées de manière à ne pas obliger un fournisseur de services Internet à mener une quelconque enquête personnelle.
Les personnes ne sont pas tenues de vérifier l'information relative à l'adresse Internet lorsqu'elles doivent informer une agence, et elles sont tenues d'informer la police uniquement si elles constatent qu'une infraction relative à la pornographie juvénile a été commise au moyen de leurs services Internet.
Pour finir, j'aimerais parler des infractions et des peines prévues dans le projet de loi.
Quiconque contrevient sciemment à ses obligations, en vertu de ce projet de loi, encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une peine pouvant aller d'une amende maximale de 1 000 $ pour la première infraction à une amende maximale de 5 000 $ pour la deuxième infraction ou à une amende maximale de 10 000 $ et un emprisonnement maximal de six mois pour chaque récidive subséquente.
Des amendes plus élevées, de 10 000 $, 50 000 $ et 100 000 $ respectivement, sont imposées aux entreprises, selon le même schéma. Le système à deux niveaux tient compte de la variété de fournisseurs de services d'accès Internet, assurés tant par des multinationales que par des propriétaires uniques. Même si certains pourraient dire que ces peines sont relativement clémentes, le gouvernement croit qu'elles établissent l'équilibre entre, d'une part, le message clair qu'on veut envoyer aux fournisseurs d'accès Internet — à savoir qu'ils ont une obligation sociale, morale et maintenant légale de signaler la découverte de ce matériel odieux — et, d'autre part, l'objectif véritable du projet de loi, c'est-à-dire le respect de la loi.
Ce gouvernement veut s'assurer non seulement que les grands fournisseur d'accès Internet — qui signalent déjà les infractions et aident la police de façon volontaire — respectent la loi, mais aussi que tous les petits fournisseurs d'accès Internet au Canada la respectent également, afin que nous puissions atteindre notre objectif fondamental, celui de mieux protéger nos enfants.
J'espère que tous les partis et tous les députés appuieront le projet de loi .
:
Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi , un autre projet de loi qui va se retrouver au Comité de la justice et des droits de la personne, déjà très occupé.
[Français]
Je suis heureux d'être ici pour prendre la parole à ce sujet. Ces questions sont aussi importantes pour les citoyens de mon comté de Moncton—Riverview—Dieppe que pour les citoyens de partout au pays.
[Traduction]
Tout le monde s'inquiète de l'augmentation exponentielle de la production et de la diffusion de pornographie et, plus particulièrement, de pornographie juvénile. Nous savons également — qu'il s'agisse de pornographie juvénile, d'information en général ou de réseautage social — qu'Internet est l'outil de l'avenir pour la diffusion de l'information, bonne et mauvaise.
Plusieurs pays, ainsi que les provinces et les territoires, prennent des mesures pour combler les lacunes. Je pense que les services de police et les agences de protection de l'enfance partout au pays se sentent comme le petit garçon qui tentait de colmater une brèche dans la digue avec son doigt. Nous ne suffisons pas à la tâche.
À titre de préambule, avant de parler du projet de loi, j'aimerais faire part de l'impression générale que j'ai du programme de lutte contre la criminalité du gouvernement. Je siège à la Chambre depuis seulement trois ans, dix mois et quelques jours. Depuis que je siège ici, le gouvernement parle beaucoup de la lutte contre la criminalité. Chaque fois qu'il en a la possibilité, il réserve des studios de télévision et toutes les occasions sont bonnes pour organiser des conférences de presse et montrer qu'il lutte contre la criminalité.
Cette tactique a peut-être été efficace pendant un certain temps. Mais cela fait presque quatre ans que le gouvernement est au pouvoir et il n'a rien fait au sujet de la pornographie juvénile. C'est à se demander pourquoi il était si pressé d'annoncer son programme de lutte contre la criminalité, pour ensuite ne rien faire de concret pendant quatre ans. Je vais examiner dans quelques instants la question de savoir si le projet de loi livre ou non la marchandise.
C'est en fait un gouvernement libéral qui, en 2005, a instauré une peine minimale d'un an pour l'infraction de possession et de création de pornographie juvénile. C'est un gouvernement libéral qui a élargi la définition de pornographie juvénile afin d'y inclure les représentations, numériques ou autres, dans le but de mettre la main au collet de plus de contrevenants. Cela nous mène à la fin de 2005.
Transportons-nous maintenant au 23 janvier 2006. J'ai lu le compte-rendu de toutes les séances du Comité de la justice et tous les documents depuis cette date. Je n'ai pas participé à toutes les séances, mais je suis là depuis le début du programme. Il n'y a rien eu sur la pornographie juvénile depuis cette date. Si tous les parlementaires sont unis dans leur désir de faire le bien et de lutter contre les effets pervers du web en général et de la pornographie juvénile en particulier, nous devrions nous dire que cela ne suffit pas.
Je m'adresse au public canadien. Entre les élections, dont certaines ont été déclenchées inutilement, et les querelles aux comités, elles aussi parfois déclenchées inutilement, il y a amplement matière à reproches. Il ne s'agit pas de partisanerie. Les gens à la maison doivent toutefois se demander pourquoi la pornographie juvénile n'a pas été une priorité pendant presque quatre ans.
Nous allons appuyer le renvoi de ce projet de loi au comité. Nous aurons ainsi le recul nécessaire pour l'examiner et même l'améliorer. C'est toujours notre intention lorsque nous étudions un projet de loi au comité. Nous allons peut-être poser des questions très percutantes. Lorsque le ministre viendra témoigner au comité, nous lui demanderons notamment pourquoi il a tant tardé à présenter ce projet de loi.
La taille du Code criminel ne cesse d'augmenter. L'article 163.1 contient une définition de la pornographie juvénile et prévoit les peines applicables aux diverses infractions incluant la production et la possession de pornographie, de même que l'accès à de la pornographie. C'est comme une opération de triage. Les gens peuvent créer de la pornographie juvénile. Ils peuvent y accéder ou en posséder. Ce faisant, ils se rendent coupables de tout un autre groupe d'infractions potentielles, y compris l'esclavage, la captivité et toutes les infractions apparentées couvertes dans une autre partie du code.
Cependant, en examinant l'article 163, qui commence par la création d'images haineuses et qui finit par l'accès à la pornographie juvénile, on arrive à la conclusion que le projet de loi que nous sommes en train d'examiner pourrait aussi bien être intégré au Code criminel. Pour le monde extérieur et pour le Barreau en particulier, du fait que le Code criminel comporte toute une liste de garanties procédurales relatives aux infractions couvertes par le code, je présume que le contenu du projet de loi aurait facilement pu être intégré à l'article 163.2, par exemple, ce qui en aurait fait une loi formidable.
Il y a peut-être une certaine résistance face à cette loi, ce qui est peut-être la raison pour laquelle elle est traitée comme une loi distincte. Je ne sais pas, mais nous entendrons probablement les témoignages des représentants de l'industrie qui y sont peut-être opposés. Après tout, les amendes prévues dans le projet de loi s'appliquent surtout aux entreprises et aux particuliers exploitant des services Internet, une activité qui est du ressort des petits entrepreneurs. Lorsqu'un particulier est responsable du soutien d'un service Internet ou qu'il travaille sur des sites Web et que, pour une raison ou pour une autre, il découvre des docuements pornographiques et ne les déclare pas, ce qui constitue l'essence du projet de loi, il est passible, à la première infraction, d'une amende de 1 000 $. Lorsque c'est une compagnie qui se rend coupable d'une omission semblable, à la première infraction, elle est passible d'une amende de 10 000 $.
Ce n'est pas le degré de sévérité face à la criminalité que considère approprié un père de trois filles, comme moi, qui habite dans un quartier relativement cossu de Moncton, au Nouveau-Brunswick. Je suis persuadé que tous ceux qui suivent le débat ont le même sentiment. Les gens pourraient ignorer les images pornographiques d'un site qu'ils gèrent, ne pas les déclarer. En vertu de cette mesure législative, s'ils étaient pris, ils ne paieraient qu'une amende de 1 000 $. Cette amende n'est pas assez sévère. Cette mesure législative ne sera pas intégrée au Code criminel et elle arrive avec presque quatre ans de retard.
Cela ne touche pas l'essence même du projet de loi. Nous le renverrons au comité et, espérons-le, nous le renforcerons. Toutefois, nous voulons signaler clairement au gouvernement que le temps des conférences de presse pour le bulletin d'information de 17 heures est maintenant terminé pour les conservateurs. Il est trop tard pour dire qu'ils présenteront un autre projet de loi, qu'ils tiendront leurs promesses, ici et là, et qu'ils rencontreront les procureurs généraux des territoires et des provinces, pour ne donner suite à leurs recommandations qu'un an et demi plus tard.
Certaines de ces recommandations, qui sont issues d'une réunion des procureurs généraux provinciaux et territoriaux tenue en 2008, ont été soumises en juin dernier en vue d'une réunion en septembre. C'est presque un an et demi avant que le gouvernement fédéral propose des mesures allant dans le sens de ce que chaque procureur général de partout au pays préconise, à ma connaissance. Il n'est donc pas étonnant que, dans de nombreux domaines législatifs, les provinces décident d'adopter leurs propres mesures.
Depuis 2008, l'Ontario a déjà adopté une loi sur le devoir de signaler les cas de pornographie juvénile. Je rappelle à la Chambre que le gouvernement conservateur est arrivé au pouvoir en 2006. Je ne suis pas nécessairement au fait du programme législatif de l'Ontario, mais la province a eu raison d'agir de son propre chef. D'ailleurs, je crois que le Manitoba a fait quelque chose de similaire.
La semaine dernière, dans le cadre du débat sur le discours du Trône dans ma province, le procureur général Michael Murphy — un membre de ma famille, soit dit en passant — a présenté une loi sur la confiscation des biens au civil. Il s'agit d'une loi unique dans le pays que d'autres provinces imiteront peut-être. En vertu de cette loi, les biens des personnes condamnées pour pornographie juvénile leur seraient confisqués. La province verserait la valeur de ces biens dans des fonds destinés à aider les victimes de ce crime épouvantable. Ce n'est pas tout. Avant la tenue d'un procès intenté pour pornographie juvénile, on gèlerait les biens en les plaçant entre les mains d'un tiers ou dans une fiducie, et tout produit de leur vente serait détenu jusqu'à l'issue d'un procès.
C'est le type de mesures que les provinces ont dû prendre, parce que, j'ose le dire, le gouvernement conservateur s'employait à parler publiquement des actes criminels qu'il veut ériger en infractions plutôt qu'à se pencher sur les modifications à apporter au droit criminel en général.
J'en viens au projet de loi. Le texte concerne les propriétaires d'entreprises qui fournissent des services Internet et qui ne signalent pas les adresses Internet où on peut trouver de la pornographie juvénile. Cette mesure arrive à point nommé. Toutefois, comme je l'ai dit, il s'agit d'une mesure qui concerne le droit civil et elle n'entraîne pas de conséquences de nature criminelle.
L'article 11 de la loi prévoit des amendes allant de 1 000 $ à 10 000 $ pour les infractions commises par une personne physique et allant de 10 000 $ à 100 000 $ dans les autres cas. La définition de la pornographie juvénile est celle du Code criminel, si bien qu'elle ne sera pas contestée. Les tribunaux s'en sont déjà servi.
Qu'est-ce que les gens, les intervenants disent au sujet de cet acte criminel? J'ai en main deux articles. Le premier a paru dans le Cape Breton Post. On y lit ceci:
En soi, cette mesure ne fera pas diminuer le torrent de pornographie juvénile accessible à l'échelle planétaire, mais elle aidera la police et les organismes de lutte contre la pornographie juvénile tels que cyberaide.ca à remonter les filières et possiblement à tirer quelques enfants de plus de situations horribles.
C'est ce que j'ai tenté de dire plus tôt. Internet a transformé positivement la vie moderne de diverses façons. L'explosion de la pornographie juvénile en ligne est un exemple parfait des coûts qu'entraîne cette évolution. S'il faut nuancer certains principes à l'égard de la protection des renseignements personnels et de la liberté pour que les enfants de la planète ne subissent pas ces coûts, soit.
Voici une des questions que je ne manquerai pas de poser au ministre et aux fonctionnaires du ministère de la Justice. Est-ce que les craintes à l'égard de la protection des renseignements personnels et de la liberté d'expression expliquent en partie pourquoi ce projet de loi n'est pas plus strict? L'équilibre entre la liberté d'expression, les principes à l'égard de la protection des renseignements personnels et la nécessité de livrer une bataille sérieuse contre Internet feront l'objet d'un débat au Parlement.
Soyons clairs. Le whip n'est pas présent et je devrais lui parler, mais je ne veux pas critiquer le Cap-Breton ou le Cape Breton Post. Toutefois, je n'ai pas besoin de la déclaration du Cape Breton Post pour dire que le véritable problème ne consiste pas à punir les fournisseurs qui ne signalent pas les sites de pornographie juvénile connus, mais qu'il faut empêcher ces sites de diffuser de la pornographie juvénile.
On s'en prend pratiquement aux personnes qui consultent les sites, qui sont censées les consulter ou qui pourraient le faire, et on s'en prend à elles si elles ne le signalent pas. Il me semble que pour parvenir au noeud du problème, nous devons suivre l'exemple d'autres pays et prendre des mesures auprès de l'industrie pour que, en premier lieu, ces sites ne soient jamais diffusés.
Je ne propose pas que nous nous inspirions de régimes totalitaires — et je ne vais pas les nommer —, mais nous savons que, dans certains pays, Internet est interdit parce que l'État souhaite contrôler le message. Dans ces cas, il n'y a toutefois aucun message.
On ne peut pas faire cela. Toutefois, si, dans la petite île de Cuba, l'État est en mesure d'interdire complètement Internet, alors que ce pays n'est pas très avancé sur le plan technologique, comment se fait-il que nous ne puissions pas, dans l'un des pays les plus riches du monde, faire mieux pour empêcher la propagation de ces sites?
Poursuivons notre tournée du pays. Voici une citation tirée de l'étude menée récemment par l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels et publiée dans l'Edmonton Sun:
Le nombre d'images « d'exploitation grave d'enfants » a quadruplé entre 2003 et 2007.
Voici ce que le quotidien avait à dire au sujet de la loi:
Le nouveau projet de loi prévoit effectivement un outil supplémentaire, mais ce n'est pas la solution idéale et il ne doit pas être perçu ainsi.
J'ai parlé d'autres administrations. La conférence internationale sur la lutte contre la pornographie juvénile sur Internet, qui s'est déroulée à Vienne, en Autriche, ajoute aussi des éléments qui, je l'espère, sont pris en compte par le gouvernement. Lors de cette conférence, le monde entier a conclu que nous devions prendre des mesures afin d'obtenir les preuves nécessaires pour identifier les pédopornographes.
Le ministre a expliqué très brièvement comment le projet de loi servirait à atteindre l'objectif. Nous espérons qu'il y aura d'autres éléments de preuve sur l'efficacité du projet de loi parce que nous voulons un projet de loi efficace. Il ne suffit pas d'imposer des amendes aux gens qui ne signalent pas les abus. Nous devons savoir si les signalements permettront de mettre la main au collet de ceux qui produisent de la pornographie juvénile et les agents d'exécution de la loi nous le diront.
Deuxièmement, il doit y avoir un équilibre entre les lois sur la protection des renseignements personnels et la protection à laquelle on peut s'attendre.
Troisièmement — et c'est probablement le point le plus important qui ne peut pas être corrigé par une loi, mais qui doit plutôt figurer au programme de l'administration de la justice —, les services d'écoute téléphonique, les agences d'exécution de la loi et le secteur privé doivent collaborer ensemble. Nous devons protéger les services d'écoute téléphonique, les fournisseurs d'accès Internet et les autres acteurs du secteur qui tentent de bonne foi de seconder les agences d'exécution de la loi dans leurs enquêtes sur la pédopornographie.
Le ministre a très bien cité les statistiques de cyberaide.ca. Les faits sont troublants. Ils sont horrifiants. Par exemple, des 4 110 images évaluées par un analyste, 35 montraient des agressions sexuelles contre des enfants et, si nous les répartissons par âge et par sexe, 37,2 p. 100 des victimes avaient moins de 8 ans et 83 p. 100 étaient des fillettes. C'est répugnant. C'est horrible. Il faut régler cela.
La situation internationale renvoie une image déplorable du Canada. Nous parlons beaucoup ici du fait que le gouvernement se soustrait à ses obligations internationales, boude les colloques, conférences et discussions internationales sur des sujets comme les changements climatiques, la réforme des institutions financières et les normes internationales applicables à la garde des enfants et sur le fait qu'il refuse de signer la déclaration universelle sur les droits des peuples autochtones.
Le gouvernement a toutes sortes d'excuses pour justifier son aversion pour les discussions internationales, mais il n'a probablement jamais imaginé que la communauté internationale avait l'impression que l'application de ses normes d'exécution de la loi laissent à désirer.
En voyant le palmarès, j'imagine que les conservateurs, qui se targuent de leur programme de lutte contre la criminalité, sont un peu gênés. Le Canada est troisième parmi les cinq pays où l'on trouve le plus de sites Internet présentant des photos d'agressions sexuelles contre des enfants. Il est deuxième parmi les cinq pays où l'on trouve le plus grand nombre de photos montrant des agressions sexuelles contre des enfants. Le Canada est deuxième parmi les cinq pays où l'on trouve le plus de sites Internet qui vendent des photographies d'agressions sexuelles contre des enfants.
Les autres pays mis en cause ne sont pas des pays dont nous voulons suivre l'exemple. Les États-Unis dominent le marché et, jusqu'à récemment, en raison d'une insistance exagérée sur la liberté d'expression et le droit à la protection de la vie privée, avec Miranda et le reste, ainsi que sur la protection contre les incursions de l'État dans la vie privée des gens. Malheureusement, je crois en entendre chez mes vis-à-vis qui croient que cela devrait être envisagé pour le Canada. Je m'y oppose. Nous sommes le Canada, pas les États-Unis.
Les États-Unis se classent au premier rang dans toutes ces catégories. Nous n'aspirons pas à être au premier rang dans ces catégories, mais, bien au contraire, au dernier. Une des choses qui pourrait être faite, et qui a été faite partout dans le monde — et il me semble que c'est quelque chose que le gouvernement voudrait faire puisque des députés de l'opposition suggèrent de sévir davantage —, c'est notamment d'écouter ou d'imiter la Suède.
En Suède, TeliaSonera a lancé des services visant à bloquer les fournisseurs de services Internet qui diffusent de la pornographie juvénile de sorte que le blocage est effectué à la source. Au Brésil, l'objectif de la politique qu'on y a adoptée est d'établir des règles d'éthique pour les fournisseurs de services Internet au pays ainsi que pour les utilisateurs de ces services. En Allemagne et dans l'Union européenne, fort probablement le système le plus sophistiqué, on met en place des systèmes visant à bloquer l'accès aux sites web qui publient de la pornographie juvénile.
En résumé, nous commençons à peine à nous attaquer à ce problème. Cela fait quatre ans. Avec la bonne volonté manifestée par les députés à l'égard de la lutte contre cet ensemble de crimes innommables, nous aurions probablement pu y arriver beaucoup plus tôt. Alors, je suppose que nous nous demandons tous pourquoi cela ne s'est pas fait plus tôt.
Mettons-nous au travail. Améliorons ce projet de loi pour emboîter le pas à certains membres de la communauté internationale avec lesquels le gouvernement évite normalement de s'associer, notamment dans le domaine des changements climatiques; pour une fois peut-être, renvoyons ce projet de loi au comité et montrons au gouvernement que ce n'est pas une mauvaise chose d'avoir des amis à l'étranger. Ce n'est pas une mauvaise chose d'imiter les meilleures pratiques des autres pays et ce n'est pas une mauvaise chose de travailler avec les autres partis.
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Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir de prendre la parole au nom de mon parti concernant le projet de loi qui, à sa face même, nous apparaît — je le dis d'emblée — extrêmement intéressant. Nous allons l'appuyer, bien évidemment, pour qu'il se rende au Comité permanent de la justice et des droits de la personne pour y être étudié et approfondi.
Il est temps que le Canada, et le Québec en particulier, se mettent à la page sur le plan criminel et prennent les moyens pour lutter contre des crimes de plus en plus répandus, hélas: la pornographie juvénile et la pédophilie. Ce sont des crimes que j'oserais qualifier d'odieux, commis par des personnes qui le font — et c'est la difficulté avec ce genre de criminalité, je vais faire attention à mes mots — de façon secrète. C'est-à-dire que l'individu, seul face à son ordinateur, va visiter des sites pornographiques sur lesquels il y a des choses tout à fait odieuses, à savoir de la pornographie, de la pédophilie. Ce sont des choses que l'on ne voyait pas.
On est au XXIe siècle et personne n'aurait pu prévoir ces problèmes lorsque le Code criminel a été élaboré. Cependant, lorsque le Code criminel a été amendé récemment, on a commencé à se rendre compte de ce nouveau genre de criminalité qui est apparu, je dirais, au cours des 10 à 15 dernières années. C'est une nouvelle forme de criminalité insidieuse très difficile à cerner. On va toutefois tenter d'y mettre fin. Il faut donc se donner les moyens de le faire.
Il s'agit donc d'une criminalité qui se pratique seul. L'individu, dans le secret de son alcôve, dans sa maison, dans sa chambre ou même à son bureau — on sait que cela s'est fait dans les bureaux de certains individus —, va consulter des sites pornographiques.
Il m'apparaît important d'en donner maintenant une définition parce qu'on va le faire avec ce projet de loi. On va définir l'article 163 du Code criminel. On va le préciser en disant ceci:
« données informatiques » Représentations, notamment signes, signaux ou symboles, qui sont sous une forme qui en permet le traitement par un ordinateur.
C'est vraiment, avec respect, totalement du droit nouveau. On s'aventure dans quelque chose de complètement nouveau.
On va amender les paragraphes 161.1, 161.2, 161.3 portant sur la définition de pornographie, sur la distribution de pornographie, sur la possession de pornographie juvénile et sur l'accès à la pornographie juvénile.
Cependant, cela devient très intéressant quand on entre dans un nouveau débat, dans un nouveau droit, un droit particulier. C'est assez intéressant. Vous me permettrez de lire lentement l'article 3 du projet de loi pour permettre à l'interprète de bien traduire cet article.
La personne qui est avisée, dans le cadre des services Internet qu’elle fournit au public, d’une adresse de protocole Internet ou d’une adresse URL [...]
C'est écrit URL en français. Il faut aller voir la version anglaise pour la signification du sigle: uniform resource locator. Je reprends la citation.
[...] où pourrait se trouver de la pornographie juvénile accessible au public communique l’adresse dans les meilleurs délais, selon les modalités réglementaires, à l’organisme désigné par les règlements.
Je dois être honnête et dire que tout cela m'inquiète un peu. Cela m'apparaît un peu compliqué. Cela va être mis en place. J'espère et je souhaite qu'on ne revivra pas un autre registre des armes à feu parce que ce serait une catastrophe.
À l'article 4, on dit:
Si la personne qui fournit des services Internet au public a des motifs raisonnables de croire que ses services Internet sont ou ont été utilisés pour la perpétration d’une infraction relative à la pornographie juvénile, elle en avise dans les meilleurs délais, selon les modalités réglementaires, un agent de police ou toute autre personne chargée du maintien de la paix publique.
Cela devient un système de dénonciation. À mon avis, à un certain moment, il faut sévir. La pornographie juvénile est inacceptable et personne à la Chambre ne va accepter cela. S'en prendre à des enfants de 5 ans, 6 ans, 7 ans et même plus jeunes, cela constitue une dégradation inacceptable.
Comme je le disais précédemment, c'est une dégradation qu'on a laissé s'épanouir au cours des années parce qu'on n'était pas capable de la contrer. J'espère qu'avec ce projet de loi et les amendements que l'on apportera au Code criminel, on sera capables de cerner ces utilisateurs.
Le fait d'augmenter la probabilité de se faire prendre est un élément beaucoup plus dissuasif que le fait d'augmenter les sanctions, qui semblent souvent lointaines et abstraites. C'est exactement ce à quoi servira ce projet de loi. Il faut absolument que l'on envoie un message clair à tous ces pornographes. Je n'ai pas de mot pour qualifier ces tristes individus qui se livrent à la pornographie juvénile. C'est inacceptable. Il faut donc envoyer le message que, dorénavant, ils pourront être pris.
Je ferai un parallèle. Ce n'est pas la sanction de 2 000 $ d'amende en cas d'arrestation pour conduite avec facultés affaiblies qui empêchera un individu de conduire son véhicule. C'est plutôt le risque d'être pris et de subir toutes les conséquences inhérentes à la conduite avec les facultés affaiblies. On a beau imposer des amendes et des peines minimales d'emprisonnement, cela n'a que peu d'effets.
Il y a eu des réductions au niveau des emprisonnements et du nombre de personnes qui conduisent avec les facultés affaiblies, mais c'est le risque d'être pris qui incite énormément les individus à faire attention et à éviter de consommer. Beaucoup de personnes ont réduit leur consommation et sortent moins longtemps dans les bars. C'est exactement ce que veut faire ce projet de loi. C'est une des raisons pour lesquelles le Bloc québécois appuiera ce projet de loi. Cependant, je me pose de petites questions. Bien évidemment, je les poserai en comité. Je souhaite d'ailleurs que l'on puisse étudier ce projet de loi au retour de la période des Fêtes.
La législation couvre plus que les fournisseurs de services Internet, un terme généralement utilisé pour désigner ceux qui offrent des services d'accès à Internet. En français, cela veut dire que cela couvre plus que Bell et que Rogers. C'est ce qui devient intéressant. La loi s'appliquera à toute personne qui offre des services Internet au public. Il peut s'agir de toutes les petites compagnies. Cela peut toucher les serveurs que l'on a dans nos sous-sol. Je ferai attention à la façon dont je m'exprimerai. Loin de moi l'idée de dire que les communautés autochtones ont ce genre de serveur. Toutefois, des communautés autochtones reçoivent toutes les parties de poker contrôlées à partir de Kahnawake. Si on héberge tous ceux qui hébergent des sites Internet, cela va beaucoup plus loin que Bell. Cela inclut tous ceux qui offrent des services Internet au public, donc ceux qui hébergent ces sites.
Cela inclut également les fournisseurs de services Internet, ainsi que ceux qui offrent des services de courrier électronique, des services d'accueil et des sites de réseautage sur Internet. Pensons ici à tous les utilisateurs de Twitter et de Facebook de ce monde.
Prenons l'exemple du député de , qui a je ne sais combien de milliers d'amis sur Facebook. Évidemment, je ne doute pas de son honnêteté; ce n'est qu'un exemple que je donne.
Il peut arriver qu'un de ses amis sur Facebook lui dise d'aller consulter un site en particulier, car il y a quelque chose de très intéressant. On n'est plus dans un livre, dans un thriller ou dans un film; on est dans la vraie vie. C'est ainsi que fonctionnent ces réseaux. Un individu envoie un message à un autre individu pour lui dire d'aller voir un site en particulier. Par exemple, on peut suggérer à une personne qui cherche un vélo de 4 000 $ d'aller consulter le site eBay.
Je reviens à mon exemple du bon député de , qui a au moins 7 000 amis sur Facebook. Si l'un d'eux lui recommande d'aller visiter un site où il y a quelque chose d'intéressant, le bon député de Bourassa sera obligé de faire une dénonciation.
C'est ce qui est extrêmement important dans ce projet de loi. Il faut que cela cesse; il ne faut plus accepter de telles choses. Il ne faut surtout pas accorder de passe-droit à des individus qui, sous prétexte d'aider une personne, lui recommande des sites. Je n'ose même pas utiliser le mot « aider ». On ne peut pas accepter de la pornographie juvénile, laquelle s'attaque à des jeunes de cinq, six, sept ou huit ans. Cela n'a aucun sens et est inacceptable. La pornographie comme telle est probablement inacceptable pour certains, mais la pornographie juvénile l'est encore davantage. Et il est de notre devoir de protéger les jeunes et les mineurs.
Je me permets de relire ce que j'ai dit il y a quelques secondes, afin d'éviter de faire une faute:
Le Bloc québécois est d’avis que le fait d’augmenter la probabilité de se faire prendre est beaucoup plus dissuasif que celui d’augmenter les sanctions qui semblent souvent lointaines et abstraites.
Au Canada, il y a beaucoup de gens qui sont branchés sur Internet et qui fréquentent des sites comme Twitter et Facebook. S'ils voient passer le genre de messages dont j'ai parlé précédemment, ou si une personne leur suggère d'aller consulter un site qu'elle trouve intéressant, il est clair qu'il y aura une obligation de dénonciation. C'est exactement ce que dit l'article 4 du projet de loi:
Si la personne qui fournit des services Internet au public a des motifs raisonnables de croire que ses services Internet sont ou ont été utilisés pour la perpétration d’une infraction relative à la pornographie juvénile, elle en avise, dans les meilleurs délais, [...]
Il faudra donc que les responsables de ces réseaux, ceux qui fournissent le service et, je le pense fortement, ceux qui les fréquentent fassent des dénonciations. Il n'est pas illégal d'aller sur Twitter, d'avoir des amis sur Facebook ou de naviguer sur Google. Il n'y a rien d'illégal dans ces gestes. Avec le projet de loi , ce qui deviendra illégal, ce sera d'aller sur des sites de pornographie juvénile et d'inciter quelqu'un à les consulter.
Même comme criminaliste, je peux dire que c'est une bonne loi. Il était temps! C'est une bonne loi, qui amendera le Code criminel.
Mais après les fleurs, voici le pot: on a beau adopter de bonnes lois, encore faut-il se donner les moyens de les appliquer.
Cela m'inquiète grandement. En effet, un élément a été porté à notre attention au cours des derniers jours, quand on a vu que ce projet de loi arrivait. Plusieurs personnes ont commencé à s'interroger sur la capacité de répondre aux informations qui seront transmises, donc de faire des enquêtes et de porter des accusations. On nous dit qu'au Canada, actuellement, un maximum de 300 policiers et policières surveillent tous les sites Internet et répondent aux besoins. Ils répondent aux interrogations, font des enquêtes et, généralement, ils vont jusqu'à porter des accusations. On l'a vu et on le voit tous les jours dans plusieurs médias, alors que des accusations sont portées contre tel ou tel pédophile.
On nous dit qu'une fois le projet de loi mis en vigueur, au cours de sa première ou deuxième année d'existence, il y aura probablement tellement d'informations qui seront stockées, ou fournies ou envoyées à des personnes comme les policiers, que ces derniers ne pourront pas suffire à la tâche et qu'ils risquent de passer à côté de plusieurs pédophiles qui fréquentent ces sites.
C'est la crainte du Bloc québécois et ce sont les questions que nous allons sûrement poser lorsque le ministre ou ses représentants comparaîtront devant nous. Nous allons probablement faire également comparaître devant le comité le solliciteur général et le . En effet, il faut se donner les moyens de ses ambitions. C'est bien beau de déposer un projet de loi, de s'attaquer à la pornographie juvénile et de vouloir éliminer, éradiquer cette pornographie juvénile, mais il faudra donner les moyens aux policiers de répondre aux besoins, aux plaintes et aux sommations qui vont débouler. Il suffit de regarder les obligations du projet de loi. Je vais lire seulement l'article 5:
La personne qui a donné l’avis prévu à l’article 4 préserve [...]
Voilà, on donne des obligations aux fournisseurs. Je continue:
[...] préserve les données informatiques afférentes en sa possession ou à sa disposition pendant vingt et un jours après la date de l’avis.
Cela commence à poser quelques problèmes. Je vais lire la suite, le paragraphe 5(2) du projet de loi:
Elle est tenue de détruire les données informatiques qui ne seraient pas conservées dans le cadre normal de son activité commerciale et tout document établi en vue de les préserver en application du paragraphe (1) dans les meilleurs délais après l’expiration des vingt et un jours, à moins qu’elle ne soit assujettie à une ordonnance de préservation rendue en vertu d’une autre loi fédérale ou provinciale à l’égard de ces données.
Dans un français clair, cela veut dire une seule chose, c'est qu'il faudra, avant de mettre en oeuvre ce projet de loi, s'assurer que nos forces policières ont les moyens nécessaires à sa mise en oeuvre. On ne peut pas adopter un tel projet de loi, le mettre en oeuvre et voir ensuite comment cela ira. On ne peut pas, et c'est notre principale inquiétude.
Je terminerai en disant que lorsqu'un tel projet de loi répond aux besoins de la société, le Bloc québécois l'appuie. Nous pensons que ce projet de loi répond aux besoins de la société, du Canada en général, mais du Québec en particulier, et nous allons donc appuyer ce projet de loi.
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Monsieur le Président, je vais aujourd'hui parler du projet de loi .
Comme nous l'avons déjà entendu plus tôt aujourd'hui, le projet de loi obligerait les personnes qui fournissent des services Internet à déclarer une adresse de protocole Internet ou une adresse URL lorsqu'elles découvrent que cette adresse est utilisée aux fins de commettre une infraction relative à la pornographie juvénile. Il stipule que le fournisseur de services Internet doit déclarer cet usage dans les plus brefs délais et, par la suite, conserver pendant 21 jours toutes les données numériques relatives à la déclaration.
La réforme du Code criminel, de même que n'importe quelle réforme du droit criminel, qu'elle soit traitée par voie de réglementation ou en vertu du droit civil, nécessite une évaluation de la situation fondée sur les faits, de même qu'un examen très soigneux visant à déterminer si les réformes proposées rehausseront vraiment les objectifs de ce que nous appelons le droit criminel ou le système de justice pénale.
Il est essentiel de répondre à certaines questions très importantes. Je vais en mentionner trois en particulier. Premièrement, quel objectif tentons-nous d'atteindre? Deuxièmement, les réformes proposées rendront-elles nos collectivités plus sûres? Troisièmement, avons-nous vraiment besoin de ces modifications législatives?
Je vais commencer par la première question. Quel objectif tentons d'atteindre? Ce projet de loi a pour objectif de protéger les enfants de l'exploitation sexuelle en ligne. C'est un objectif très louable. J'ajouterai qu'il s'agit d'un objectif auquel nous tenons et que l'adoption d'une mesure législative à cet égard à la Chambre tarde à venir.
En effet, le NPD a présenté un projet de loi relatif au leurre au moyen d'Internet en 2006, pendant la 39e législature. C'est plus précisément mon collègue, le député de , qui l'a présenté. L'objectif de ce projet de loi, le à l'époque, était d'interdire le recours à Internet pour promouvoir, représenter ou décrire illégalement des activités sexuelles illicites impliquant des enfants, ou pour faciliter la participation à de telles activités. Je répète que c'était en 2006. Aujourd'hui, je ne peux que féliciter le député de pour avoir présenté le projet de loi et attiré l'attention de la Chambre sur cette question de la plus haute importance.
Nous voici en 2009, sur le point d'entamer 2010, et c'est la première fois que nous examinons un projet de loi traitant de la pornographie juvénile sur Internet. Je félicite le gouvernement d'avoir enfin compris la gravité de ce problème, un problème qui touche la santé et la sécurité de toutes les collectivités au Canada.
Je vais maintenant parler de la deuxième question que nous devons nous poser en analysant ce projet de loi. Les réformes proposées rendront-elles nos collectivités plus sûres? Il s'agit là du coeur de la question. Je crois que, pour y répondre, il faut faire preuve de nuance et procéder à une vraie analyse.
D'abord, soyons clairs: il est essentiel de lutter contre la pornographie juvénile. On ne le dira jamais assez. La pornographie juvénile est répréhensible et constitue une infraction criminelle; nous devons la faire cesser. Est-ce la meilleure façon de faire obstacle à la pornographie sur Internet? Est-ce la meilleure d'arrêter l'exploitation des enfants en ligne? Ce projet de loi a une certaine utilité, c'est certain. Mais, ce qui me frappe surtout, c'est ce qui manque dans ce projet de loi.
Le projet de loi stipule que les fournisseurs de services Internet doivent signaler à la police quand leurs adresses sont utilisées pour diffuser de la pornographie juvénile. Cependant, nous devons aussi réfléchir à la manière d'agir avec les fournisseurs de services Internet qui refusent de respecter ce mandat. Nous devons aller plus loin en ce qui concerne les obligations des fournisseurs de services Internet.
Les fournisseurs de services Internet ont les renseignements. C'est d'ailleurs grâce à cela que les enquêteurs peuvent obtenir les données concernant les personnes qui sont impliquées dans la diffusion de pornographie juvénile en ligne. J'attends avec impatience d'entendre les témoignages sur cet aspect du projet de loi en comité. Quelle mesure coercitive supplémentaire pouvons-nous prendre contre les fournisseurs de services Internet qui ne coopèrent pas? Quelles autres dispositions pouvons-nous mettre en place?
Ce sont les ressources qui sont clairement absentes de ce projet de loi. À quoi cela sert-il de dénoncer la pornographie juvénile s'il n'y a aucune ressource, humaine, financière ou structurale, pour y faire face? J'ai discuté un peu plus tôt avec mon collègue d'. Le projet de loi contient une disposition qui prévoit que, si un fournisseur de services Internet dénonce de la pornographie juvénile en ligne, il doit se débarrasser des données 21 jours après à moins qu'il ne soit assujetti à une ordonnance de préservation. J'imagine que c'est ce qui se passera assez souvent, c'est-à-dire que 21 jours s'écouleront sans que rien, ou si peu, ne se passe parce que nos agents de police ne disposent pas des ressources nécessaires pour s'attaquer à la pornographie en ligne. Ils savent que cela existe. Nous savons tous que cela existe.
En faisant des recherches pour mon allocution, j'ai appris de ne pas taper « pornographie juvénile » dans un moteur de recherche; j'ai été assaillie d'occurrences. La police sait qu'elle existe. Les collectivités aussi le savent. Les parents le savent. Comment sommes-nous censés enquêter quand, dans le meilleur des cas, un seul enquêteur par service est chargé du dossier de la pornographie juvénile?
Il faut prévoir des ressources dans le projet de loi. Il faut prévoir un groupe de travail d'enquêteurs, groupe qui deviendra expert dans les enquêtes et les poursuites judiciaires.
Plus tôt cette année, l'Université de Toronto, où se trouve le Centre for Innovation Law and Policy, a tenu un symposium sur l'exploitation des enfants sur Internet. David Butt, avocat plaidant de Toronto dont on a parlé à la Chambre plus tôt aujourd'hui, a pris la parole sur la question des enquêtes sur la pornographie juvénile. J'aimerais lire un extrait du résumé de son exposé, qui cerne bien certaines des questions que nous nous posons dans le débat sur la pornographie juvénile en ligne. Il a écrit:
En général, les procureurs et agents de police chargés d'affaires concernant l'exploitation d'enfants sur Internet travaillaient à l'intersection pratique de divers domaines d'expertise: le droit, les services sociaux visant les enfants, la pédophilie en tant que phénomène psychiatrique et bien évidemment les enquêtes criminelles. La récente explosion d'occurrences d'exploitation des enfants sur Internet oblige les procureurs et services de police à faire intervenir d'autres disciplines technologiques, le commerce international, les relations internationales, tous les domaines qui touchent à l'impact social de l'émergence du monde cybernétique. C'est une tâche décourageante pour les procureurs et services de police, et cela illustre les changements d'envergure occasionnés par Internet dans le monde de l'exploitation des enfants. Nous ne nous sommes pas encore beaucoup adaptés à ces changements radicaux. Ce n'est qu'en adoptant une approche multidimensionnelle qui reflète la nature multidimensionnelle d'Internet lui-même que nous réussirons à nous attaquer à l'exploitation des enfants sur Internet.
Je pense que la partie la plus importante de l'extrait du résumé est la suivante:
Ce n'est qu'en adoptant une approche multidimensionnelle qui reflète la nature multidimensionnelle d'Internet lui-même que nous réussirons à nous attaquer à l'exploitation des enfants sur Internet.
Un expert dans le domaine nous dit qu'il faut privilégier une approche créative et pourtant, la réponse du gouvernement à la Chambre est courte et légère, je dirais même insignifiante. Il faut prendre des mesures concrètes dans le dossier de la pornographie juvénile.
La dénonciation est une partie essentielle de la solution mais elle n'est qu'une première étape. Nous devons sérieusement nous pencher sur les ressources à affecter pour éradiquer ce crime effroyable.
Je discutais aujourd'hui de ce projet de loi avec mes collègues, lorsque le député de a fait une très bonne observation, à laquelle je souscris entièrement. Il a dit qu'il en avait marre des projets de loi comme celui-ci, que le gouvernement produit machinalement pour faire croire qu'il se soucie des enfants alors qu'hier, nous avons dû constater que 20 années s'étaient écoulées depuis que la Chambre a pris l'engagement d'éradiquer la pauvreté des enfants au Canada. Nous voici 20 ans plus tard, et nous n'envisageons pas de donner aux enfants un foyer adéquat, de la nourriture en quantité suffisante, des services d'éducation préscolaire et les autres choses dont les enfants ont besoin pour vivre en santé et en toute sécurité dans notre pays.
Le projet de loi aurait pour seul effet d'instaurer un système de déclaration obligatoire. Pourquoi ne fait-on rien de concret pour mettre nos enfants à l'abri du danger? Nous faisons semblant d'agir. En 1989, la Chambre des communes a adopté à l'unanimité une motion pour mettre fin à la pauvreté des enfants. En 1999, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant. En 1997, la Commission royale sur les peuples autochtones a établi l'objectif de combler 50 p. 100 de l'écart économique. En 2005, les premiers ministres des provinces ont tenu une réunion sur les affaires autochtones à Kelowna.
Mais, en fin de compte, les résultats ne sont pas au rendez-vous. Au contraire, les statistiques sont déconcertantes. En voici quelques-unes.
Entre 1989 et 2008, le nombre d'enfants qui dépendent des banques alimentaires au Canada est passé de 151 000 à 260 000. Un nombre disproportionné d'enfants dépend des banques alimentaires.
La famille moyenne à faible revenu vit largement au-dessous du seuil de la pauvreté. Les familles biparentales à faible revenu auraient besoin en moyenne de 9 400 dollars de plus par année pour s'élever au-dessus du seuil de la pauvreté, c'est-à-dire au-dessus du niveau considéré comme un revenu faible.
Nous avons en outre complètement abandonné les enfants autochtones en matière de pauvreté et de délinquance sexuelle. L'image qui vient à l'esprit des gens lorsqu'ils pensent aux filles autochtones est celle du commerce sexuel, mais c'est faux. Ce n'est pas du commerce sexuel. C'est de l'exploitation sexuelle. C'est de la traite d'enfants. C'est leurrer les filles autochtones pour les inciter à quitter leur milieu de vie et à venir vivre en ville, où elles sont exploitées sexuellement. Ce genre de choses se produit parce que ces filles vivent oubliées dans la pauvreté.
Voilà un bien triste héritage qui fait partie intégrante du manque total de véritables mesures pour lutter contre la pornographie juvénile. J'espère que le comité va pouvoir entendre des témoins qui vont nous montrer quelles mesures concrètes pourraient être vraiment efficaces contre la pornographie juvénile sur Internet.
Peut-être entendrons-nous des témoins de l'Association canadienne de la police professionnelle, qui a répété à plusieurs reprises que la police n'a pas assez de ressources pour mener des enquêtes criminelles de manière efficace et sérieuse. L'association a rappelé publiquement au gouvernement qu'il avait promis d'augmenter le nombre d'agents et les ressources de la police.
Dans un mémoire transmis au Comité permanent des finances en 2008, l'Association canadienne de la police professionnelle a abordé ce problème de ressources. J'aimerais citer ce mémoire:
[Le premier ministre] a lancé le plan « Changeons pour vrai: la sécurité » durant la campagne électorale fédérale de 2006. Il s'engageait, entre autres, à « négocier avec les provinces pour créer un nouveau programme à coûts partagés avec la participation des gouvernements provinciaux et des administrations municipales, de manière à accroître d'au moins 2 500 le nombre d'agents de police patrouillant dans nos villes et nos collectivités ».
En avril 2006, [le premier ministre] s'est adressé à notre association et a promis à nos délégués que son gouvernement créerait un nouveau programme à coûts partagés avec la participation des provinces et des municipalités, de manière à accroître le nombre d'agents de police patrouillant dans nos collectivités...
Nos associations membres se sentent trahies par le gouvernement, car il n'a pas respecté cette promesse électorale clé. Nous demandons au Parlement de donner suite à cet engagement et de le confirmer dans le budget fédéral de 2009, afin de combler ces lacunes.
L'association a l'impression d'avoir été trahie. Ces experts du maintien de l'ordre disent qu'ils n'ont pas assez de ressources sur le terrain. Je suis impatient d'entendre leur témoignage concernant ce projet de loi et de savoir s'ils pensent qu'un mécanisme de déclaration obligatoire est suffisant. Je suis aussi impatient d'entendre le témoigne d'autres experts en matière de pornographie juvénile en ligne.
Nous avons discuté des questions relatives à nos objectifs et nous sommes demandés si les réformes proposées permettront de rendre nos collectivités plus sûres. La troisième question à laquelle nous devons répondre est la suivante: avons-nous besoin de cette loi? Eh bien, peut-être.
Une chose dont je suis certaine, c'est que les dispositions de ce projet de loi sont insuffisantes si nous voulons vraiment nous attaquer à la pornographie juvénile en ligne.
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Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de .
Je suis fier d'intervenir aujourd'hui au sujet de cette importante mesure législative qui vise à renforcer les mesures déjà en place au Canada et à mieux protéger les enfants de l'exploitation sexuelle, notamment de la pornographie juvénile.
En tant que père d'enfants dont l'âge va de 6 à 20 ans, je peux dire à la Chambre que rien n'est plus important pour un parent que de veiller à la sécurité de ses enfants et de les mettre à l'abri des dangereux prédateurs qui sévissent sur Internet. Voilà l'une des principales priorités des parents dans cette nouvelle ère du numérique.
Le projet de loi nous permettrait d'assurer cette protection, parce qu'il obligerait les fournisseurs de services Internet à l'échelle nationale à signaler aux autorités désignées tout cas de pornographie juvénile en ligne. En définitive, cette nouvelle obligation améliorerait la capacité des organismes d'application de la loi de détecter de possibles infractions relatives à la pornographie juvénile, ce qui contribuerait également à réduire la disponibilité de la pornographie en ligne. Qui plus est, cette obligation faciliterait l'identification et le sauvetage des enfants victimes de cette exploitation et contribuerait à l'identification des contrevenants, aux fins des enquêtes et des poursuites.
Les lois criminelles canadiennes interdisent expressément la pornographie juvénile depuis 1993 et cette interdiction a été renforcée en 2002 et en 2005, mais ce n'est qu'aujourd'hui qu'on commence à mieux saisir l'incidence globale du rôle d'Internet pour faciliter la demande et la diffusion de ce genre de matériel. Le fait qu'Internet permet d'accéder, partout dans le monde, de façon anonyme et instantanée à ce matériel abject, pose de véritables défis.
Le projet de loi obligerait les personnes qui fournissent des services Internet au public à signaler à un organisme désigné toute information concernant des sites web où pourrait se trouver de la pornographie juvénile accessible au public. Ces fournisseurs seraient également tenus d'aviser la police et de conserver des preuves s'ils ont des raisons de croire à l’utilisation de leurs services Internet pour la perpétration d’une infraction relative à la pornographie juvénile.
Le non-respect de ces obligations constitue une infraction passible d'amendes croissantes, de 1 000 $ pour la première infraction, de 5 000 $ pour la deuxième infraction et d'une amende pouvant aller jusqu'à 10 000 $ ou six mois d'emprisonnement, ou les deux, pour les infractions subséquentes, dans le cas de particuliers. Si l'auteur de l'infraction est une entreprise, les amendes croissantes sont respectivement de 10 000 $, 50 000 $ et 100 000 $.
Je souligne que rien dans la loi n'obligerait ou n'autoriserait un particulier ou une entreprise à chercher activement des cas de pornographie juvénile. Autrement dit, les fournisseurs de services Internet ne seront pas tenus de surveiller leur réseau pour repérer ce type de matériel.
Notre gouvernement reconnaît les efforts déployés par les principaux fournisseurs d'accès Internet, ou FAI, afin de régler ce grave problème. La majorité des FAI canadiens ont adopté des politiques d'utilisation acceptable qui décrivent les règles d'utilisation des comptes Internet, les conditions liées aux privilèges d'accès et les conséquences en cas de violation de ces règles et conditions. La majorité de ces politiques autorisent les FAI à fermer des comptes en cas de comportement inacceptable en ligne.
Des organismes tels que l'Association canadienne des fournisseurs Internet ont également contribué à l'élaboration de normes pour l'industrie, dont un code de conduite. En 2003, des FAI et des services de police canadiens ont créé la Coalition canadienne contre l'exploitation des enfants sur Internet afin d'aider les services de police à éliminer la pornographie juvénile en ligne. Cette collaboration avec les FAI a permis la création d'une importante initiative, le projet Cleanfeed Canada, qui vise à bloquer l'accès aux sites web qui hébergent de la pornographie juvénile. Comme ce projet vise à limiter une exposition accidentelle à ce genre d'images, Cyberaide.ca fournit aux FAI participants une liste régulièrement mise à jour des adresses Internet associées à des images d'exploitation sexuelle d'enfants.
La majorité des principaux FAI, qui fournissent des services à près de 90 p. 100 de tous les abonnés à Internet au Canada, participent au projet Cleanfeed Canada en vertu d'un protocole d'entente conclu avec Cyberaide.ca. Des efforts sont déployés pour étendre le projet aux FAI qui fournissent des services aux 10 p. 100 d'abonnés restants. Le fait que tous les FAI soient obligés de déclarer les sites web de pornographie juvénile améliorera sans contredit l'efficacité du projet Cleanfeed Canada.
Le projet de loi permet aussi de s'assurer que tous les fournisseurs d'accès Internet respectent les mêmes normes de déclaration en matière de pornographie juvénile sur Internet.
J'aimerais souligner que nous prévoyons que cette nouvelles mesure législative aura une incidence limitée sur les pratiques commerciales des fournisseurs d'accès Internet qui déclarent déjà volontairement les cas de pornographie juvénile en ligne. Le projet de loi a été rédigé de façon à refléter étroitement les pratiques actuelles des principaux FAI canadiens.
Par contre, le projet de loi ne couvre pas seulement les FAI typiques. Le terme FAI, ou fournisseur d'accès Internet, fait habituellement référence à ceux qui fournissent un accès à Internet. Ce projet de loi s'applique à tous ceux qui fournissent un accès à Internet au public, y compris ceux qui offrent des services de courrier électronique, d’hébergement de contenu sur Internet et de réseautage en ligne.
Le projet de loi s'ajoute à notre stratégie exhaustive actuelle de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants au Canada. Cette stratégie comprend un éventail impressionnant de dispositions du Code criminel ainsi que d'autres mesures législatives dont la Chambre est actuellement saisie, comme le projet de loi , et le projet de loi .
Une fois adoptées, ces deux mesures législatives donneraient aux agences d'application de la loi et de sécurité nationale les outils dont elles ont besoin pour combattre les crimes tels que la pornographie juvénile dans le monde hautement technologique d'aujourd'hui. Le gouvernement est toutefois conscient qu'il faut plus que des lois criminelles sévères pour combattre ce fléau.
C'est pourquoi, en décembre 2008, nous avons renouvelé la stratégie nationale du gouvernement fédéral visant à protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle dans Internet. Lancée en 2004, cette stratégie nationale finance le Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants de la GRC à hauteur de 42,1 millions de dollars sur cinq ans afin de donner aux agences d'application de la loi de meilleurs outils et davantage de ressources pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants au moyen d'Internet, pour renseigner et sensibiliser la population et pour contribuer au fonctionnement de Cyberaide.ca, le service national de signalement d'enfants exploités sexuellement sur Internet lancé en 2005 et fonctionnant 24 heures par jour, 7 jours par semaine.
Tel qu'annoncé dans le budget de 2007 et mis en application en 2008, notre gouvernement conservateur a affecté 6 millions de dollars supplémentaires par année au renforcement des initiatives de lutte contre l'exploitation sexuelle et la traite des enfants. Cet argent sert à améliorer la capacité globale du Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants, notamment sa capacité d'identifier et de secourir les victimes grâce à l'analyse d'images provenant de délinquants sexuels saisies dans Internet ou reçues d'agences internationales d'application de la loi.
J'espère que les députés comprennent l'importance de ce projet de loi. Le projet de loi renforcera la collaboration entre le secteur des services d'accès Internet et les organismes d'application de la loi, améliorant ainsi la protection de nos enfants contre l'exploitation sexuelle en ligne dans le monde technologique d'aujourd'hui. J'exhorte la Chambre à appuyer ce projet de loi à l'unanimité.