:
Monsieur le Président, plus tard aujourd'hui, comme la motion l'indique, la présentera un projet de loi pour la reprise et le maintien des services ferroviaires. Il est crucial d'adopter cette mesure législative pour protéger notre économie nationale qui est toujours fragile en cette période de récession mondiale. La motion dont nous avons été saisis permettra à la Chambre d'étudier rapidement le projet de loi présenté par la ministre du Travail. Elle prévoit qu'au cours des étapes de la première à la troisième lecture du projet de loi, la Chambre ne devra pas ajourner, sauf en conformité avec une motion proposée par un ministre, que le projet de loi franchira les trois étapes de lecture au cours d'une seule séance et qu'après la deuxième lecture, il sera renvoyé au comité plénier.
J'invite les députés à appuyer la motion. La motion elle-même ne mettra pas un terme à la grève et n'imposera pas de règlement; elle nous permettra simplement de nous pencher sur cette question dans les plus brefs délais. Cette approche est évidemment inhabituelle. Normalement, dans les cas de différends privés entre parties privées, nous admettons qu'il leur incombe d'en arriver à une solution, parfois avec l'aide de conciliateurs et de médiateurs nommés par le gouvernement.
J'invite encore une fois les députés à adopter cette motion de procédure, afin que nous puissions au moins entamer le débat et continuer à faire pression sur les deux parties pour qu'elles en viennent à un règlement. Essentiellement, cette motion met en branle un processus et une procédure permettant la tenue d'un débat à la Chambre et la participation de tous les députés au règlement du problème au moyen du projet de loi qui sera présenté.
La grève au CN a commencé tôt samedi, après 14 mois de négociations infructueuses entre la société et la Conférence ferroviaire Teamsters Canada. Au cours des six derniers mois de négociations, les deux parties ont bénéficié de l'aide de médiateurs et de conciliateurs fédéraux. Même une fois la grève commencée, nous n'avons pas perdu l'espoir d'un règlement négocié, qui est l'issue que nous privilégions. Non seulement est-ce l'issue privilégiée, mais on encourage toujours les parties à s'entendre. Des médiateurs fédéraux ont travaillé auprès de l'employeur et du syndicat toute la fin de semaine afin de trouver une formule qui permettrait une reprise du service ferroviaire et afin de mettre en place un processus juste pour régler tous les points litigieux restants, mais les parties n'ont pu arriver à s'entendre.
La a participé personnellement à la recherche d'une solution. Elle a communiqué avec chaque partie pour encourager un accord négocié et a offert de nommer un arbitre pour régler les questions en litige, ce qui doit se faire, selon le Code canadien du travail, avec l'assentiment des deux parties. Le CN était d'accord pour qu'on nomme un arbitre, mais pas la Conférence ferroviaire Teamsters Canada. Or, il faut l'accord des deux parties pour que s'amorce ce processus.
Personne à la Chambre n'aime les mesures législatives forçant le retour au travail. Nous préférons tous que les employeurs et les syndicats négocient librement les conventions collectives. C'est ainsi que les choses se passent en général, mais non sans luttes et sans difficultés. On finit néanmoins par trouver une façon de mettre fin à l'impasse et c'est exactement ainsi que les choses devraient fonctionner, dans la mesure du possible. Mais parfois, les parties n'arrivent pas à s'entendre, elles se retrouvent dans une impasse qui mène à une grève ou à un lock-out, auquel cas, c'est l'économie nationale qui en souffre. Lorsque cela se produit, le Parlement doit intervenir, dans l'intérêt de la population.
Évidemment, il y a beaucoup de facteurs qui entrent en ligne de compte. Il y a l'intérêt public et l'économie. Bien que nous voulions que toutes les parties concernées négocient entre elles et que nous reconnaissions que chaque partie a des intérêts appropriés et légitimes à défendre — et nous sommes respectueux du processus —, il ne faut pas oublier que leurs gestes ont de vastes répercussions qui ne touchent pas que les parties en cause. La population, l'intérêt public, des particuliers et des entreprises peuvent être touchés. L'économie du Canada aussi.
Il est donc primordial que nous accordions toute notre attention à ce dont nous sommes saisis, car les parties sont dans une impasse. Comme je l'ai dit, j'ai bon espoir qu'elles sauront dénouer celle-ci et arriver à un règlement négocié.
J'aimerais dire quelques mots à propos de l'économie. Comme tous les députés le savent, le Canada commence à montrer des signes de reprise économique. Statistique Canada a annoncé ce matin que le PIB réel du Canada avait augmenté de 0,4 p. 100 au cours du troisième trimestre de 2009. Bien que la stabilisation de la croissance économique du Canada soit encourageante, la relance économique mondiale demeure fragile et timide. Il ne faut pas perdre cela de vue.
Comme notre ministre des Finances l'a expliqué, l'économie canadienne remonte la pente, mais a encore du chemin à faire. Trop de familles ont de la difficulté à joindre les deux bouts et il se peut que d'autres emplois disparaissent avant que la reprise soit fermement enclenchée. Notre gouvernement demeure concentré sur la lutte contre la récession et sur l'aide aux Canadiens, comme le montrent les nombreuses mesures que nous avons prises dans divers domaines: financement de l'infrastructure; aide aux chômeurs en prolongeant de cinq semaines la période de prestations d'assurance-emploi; financement de programmes de formation et d'acquisition de compétences; investissements de milliards de dollars pour veiller à ce que les travailleurs soient outillés pour participer à notre économie et pour éviter que celle-ci stagne au lieu de progresser.
Nous continuons de canaliser nos efforts dans la lutte contre la récession et l'aide aux Canadiens. Pour protéger notre économie, nous devons garder le cap et poursuivre la mise en oeuvre du Plan d'action économique du Canada.
Les chiffres publiés aujourd'hui montrent que le Plan d'action économique du Canada contribue à la relance de l'économie. Les dépenses des ménages ont augmenté grâce aux réductions d'impôt consenties aux familles canadiennes. Les investissements dans les maisons ont rebondi, alimentés par le crédit d'impôt pour la rénovation domiciliaire, une mesure de lutte contre la récession. Les entreprises ont augmenté leurs investissements et leur productivité, amélioré leurs machines et leur équipement, grâce aux allégements fiscaux et aux réductions tarifaires dont elles bénéficient. Les investissements dans l'infrastructure et autres dépenses en immobilisation ont augmenté de près de 25 p. 100 au cours du trimestre, ce qui constitue l'augmentation la plus substantielle des dix dernières années, mais notre économie est encore fragile et hésitante.
Bien que nous ayons travaillé fort pour mettre en oeuvre le Plan d'action économique, nous avons toujours pu compter sur un appui suffisant de la Chambre pour pouvoir aller de l'avant. Les conditions économiques mondiales laissent le Canada dans une position précaire. Nous ne pouvons laisser un conflit de travail dans l'impasse compromettre notre reprise économique.
Les Canadiens savent que notre système ferroviaire est un maillon important de la santé économique du pays. Depuis John A. Macdonald, c'est en effet le train qui a permis d'étendre les liens commerciaux d'un bout à l'autre du pays. Le gouvernement croit que la Chambre a la responsabilité d'intervenir dans les conflits dans le secteur privé lorsqu'ils menacent sérieusement l'intérêt public.
Je suis persuadé qu'un grand nombre de députés recevront une correspondance abondante de diverses industries qui seront touchées et visées par cette grève qui a abouti à une impasse. La motion à l'étude permettrait au Parlement d'agir rapidement. Les partis représentés à la Chambre ont la responsabilité d'étudier, de négocier et d'adopter toute mesure législative tenant compte de l'intérêt public et de l'économie.
Comme je l'ai dit, les entreprises et les agriculteurs d'un bout à l'autre du Canada expriment leur inquiétude au sujet de l'impact économique de cette grève. Leur réaction est compréhensible. Certains ont été touchés trois ou quatre fois au cours des dernières années et ont subi en conséquence d'importantes pertes financières.
Nous avons subi les conséquences d'arrêts de travail qui sont survenus dans le passé. En 2007, alors que le transport ferroviaire était ralenti par une grève, la société Ford a dû interrompre la production d'une de ses usines parce que les pièces n'étaient pas livrées.
La Commission canadienne du blé a dû assumer des frais de 300 000 $ par jour à cause des retards subis par les navires dans les ports canadiens.
Des quarts ont été supprimés dans des scieries.
Lorsque le transport ferroviaire est interrompu, l'économie en souffre. Ce n'est vraiment pas le moment de prendre des risques alors qu'on est aux prises avec les effets du ralentissement économique mondial.
La motion à l'étude ne force personne à appuyer le projet de loi de retour au travail, même si j'ose espérer que tous les députés en débattront sérieusement, sans perdre de vue l'intérêt du plus grand nombre. Cette motion fait simplement en sorte que le projet de loi présenté par la puisse être étudié dans les meilleurs délais. Cela est d'une importance capitale, étant donné le temps de l'année où surviennent ces événements. Il est également important de rappeler que la Chambre doit ajourner d'ici peu.
Compte tenu de la gravité de la situation, j'espère que nous ferons tous de l'intérêt public notre priorité absolue. Je demanderais aux députés de tous les partis d'accorder le consentement unanime à l'égard de cette motion. Le Canada ne peut guère se passer des 20 000 kilomètres de rails du CN, que ce soit pour acheminer les produits agricoles de l'Ouest, les produits automobiles de l'Ontario, les produits forestiers du Québec ou le pétrole, les produits chimiques et les métaux de l'Est.
Le Canada est un pays qui s'est bâti grâce au chemin de fer. Celui-ci est un moteur économique du Canada depuis 1885. Notre pays et ses chemins de fer se sont développés en parallèle et, de nos jours, le CN exploite un réseau commercial haut de gamme par lequel les marchandises des producteurs canadiens et des importateurs internationaux sont acheminées vers les consommateurs canadiens, les ports et nos voisins américains. L'importance du transport ferroviaire au Canada est illustrée dans l'édition de 2008 de la publication intitulée Les transports au Canada: Un survol. En 2007, le réseau canadien de chemins de fer a assuré le transport de 66 766 tonnes de marchandises d'une valeur totale de plus de 94 millions de dollars dans essentiellement six secteurs: le secteur de l'automobile, 44 millions de dollars, l'industrie chimique, plus de 16 millions de dollars, les céréales et les engrais, les métaux, les produits pétroliers ainsi que les pâtes et papier. Ce réseau a une incidence profonde et des effets d'une portée considérable pour bien des secteurs.
Je sais, par exemple, que l'industrie canadienne des légumineuses est un leader mondial de la production et de l'exportation de pois secs, de lentilles, de pois chiches et de haricots secs, approvisionnant annuellement plus de 150 marchés. Une grève nuirait sûrement à cette industrie et à ses activités en engendrant des pertes qui s'élèveront à des milliers, voire des millions de dollars, si la grève devait se prolonger.
Il faut éviter une telle perte de revenus en cette période où le ralentissement de l'économie au niveau mondial a posé des défis importants pour les entreprises canadiennes, pour tous les Canadiens et pour les clients de partout dans le monde. Nous devons faire tout en notre pouvoir en vue de rapprocher les deux parties et de trouver une solution qui permettrait aux trains de continuer de rouler.
Nous devons tenir compte de toutes les bonnes raisons d'agir rapidement, c'est-à-dire de la période de l'année, de la fragilité de l'économie nationale et des graves répercussions économiques que pourrait entraîner un arrêt de travail. Les entreprises de partout au pays ont fait part de leur inquiétude à l'égard de cette grève. La grève qui a eu lieu au CN en 2007 a coûté des millions de dollars par jour à notre économie. C'est un prix que nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de payer alors que la reprise économique mondiale est encore si fragile. Le CN déplace des milliers de wagons de marchandises sur les 20 000 kilomètres de rails toutes les semaines. Certains clients n'ont pas d'autre moyen d'acheminer leurs marchandises et doivent s'en remettre entièrement au réseau de chemin de fer.
La plupart des conflits de travail sont des problèmes internes qui opposent un employeur et un syndicat. Ces problèmes peuvent avoir des répercussions mineures sur le public, mais ce n'est pas suffisant pour que le Parlement doive intervenir dans le processus de négociation collective, même en cas d'impasse ou d'arrêt de travail. C'est ainsi que cela fonctionne.
Toutefois, la situation est différente lorsqu'une grève ou un lock-out a des répercussions importantes sur l'économie nationale ou sur la santé et la sécurité publiques. Il faut alors soupeser le droit des employeurs et des syndicats de tenter de régler leurs différends en ayant recours à des arrêts de travail d'une part, et l'intérêt public, d'autre part. Il arrive souvent qu'il soit très difficile de trouver le juste milieu, mais il faut absolument tenir compte de tous les autres intérêts en cause. Nous avons la responsabilité de le faire.
Comme je l'ai déjà dit, les conciliateurs et les médiateurs fédéraux travaillent avec les parties en cause et participent aux négociations depuis le mois de juin. De nombreux efforts ont été effectués au cours des derniers mois. Bon nombre d'interventions ont été faites. Les médiateurs travaillent littéralement 24 heures sur 24 depuis vendredi dans un ultime effort pour trouver une solution qui mettrait un terme à l'arrêt de travail et ouvrirait la voie à une nouvelle convention collective, mais tous ces efforts n'ont toujours pas porté fruits.
La a offert à plusieurs reprises, publiquement et dans le cadre des discussions avec l'employeur et les représentants syndicaux, de nommer un arbitre qui résoudrait toutes les questions encore en suspens. Selon la loi, cette étape exige le consentement des deux parties et, bien sûr, ce sont les parties qui doivent trancher cela.
Le gouvernement a fait tout ce qu'il a pu avant de présenter une mesure législative. Nous sommes toujours prêts à aider les parties intéressées à s'entendre, mais il arrive que l'écart entre les positions de l'employeur et du syndicat soit tellement grand que toute l'aide et la médiation du monde ne suffisent pas pour les faire sortir de l'impasse. Il y a toujours espoir que cela se produise.
Il est vrai que le Parlement ne devrait intervenir dans les cas d'arrêt de travail que lorsque l'intérêt national est clairement en jeu. Notre régime de relations de travail est fondé sur le principe que les employeurs et les syndicats doivent, le plus souvent possible, résoudre eux-mêmes leurs différends, les lois de retour au travail ne devant être adoptées que dans des circonstances exceptionnelles.
Cette motion est donc appropriée, en ce sens qu'elle permet à la Chambre de débattre de cette question en priorité, avant qu'elle ajourne ses travaux. C'est une question importante, de portée nationale et d'intérêt national, que la Chambre doit régler. Cette motion établit le cadre du débat à ce sujet. Ainsi le débat pourra se tenir en peu de temps et la Chambre pourra y accorder tout l'intérêt qu'il mérite. Tous les députés désireux de participer au débat sur ces questions d'importance nationale pourront le faire dans l'objectif de régler cette question puisque les parties sont incapables de le faire.
Cette motion établit les conditions d'un débat fondamental qui se tiendra prochainement. J'invite tous les partis à la Chambre à appuyer cette motion de procédure, quel que soit leur point de vue sur l'objet du débat. C'est la chose à faire. Les Canadiens attendent de la Chambre qu'elle prenne ce genre de mesures.
Tous les Canadiens surveilleront avec intérêt le débat qui suivra. Tous les Canadiens espèrent que les parlementaires travailleront ensemble sans tenir compte de leur allégeance pour que le cadre du débat soit établi au moyen de cette motion, afin que la question soit débattue en profondeur à la Chambre, étant donné qu'elle mérite qu'on y accorde la priorité.
:
Monsieur le Président, cette motion est le signe que le gouvernement a l'intention de limiter le débat sur un projet de loi qui n'a même pas encore été présenté à la Chambre. Il s'agit d'une mesure draconienne qu'on doit éviter autant que possible puisque ce n'est pas ainsi qu'on doit s'efforcer de travailler.
Il est important de souligner qu'une motion nous est proposée sans que nous ayons encore le projet de loi sous les yeux. La Chambre ne peut pas se prononcer définitivement sur la motion sans avoir au moins vu le projet de loi. Nous sommes en train de débattre d'une motion sans savoir ce que comporterait le projet de loi. C'est un problème important. On est en train de prendre des mesures draconiennes, alors il serait important de les soupeser très attentivement.
Il ne fait aucun doute que tous les députés se préoccupent des incidences sur l'économie et sur le travail ainsi que des répercussions sur les clients et les autres parties concernées, y compris les mécaniciens de locomotive et l'entreprise elle-même. Il y aura aussi des répercussions sur les relations de l'entreprise avec ses employés, et vice-versa.
Si les deux parties peuvent s'entendre elles-mêmes à la table de négociation, elles auront de bien meilleures chances de jouir d'une relation stable à l'avenir que si elles se font toutes les deux imposer une solution.
Les parties ne doivent pas perdre de vue leurs responsabilités. La ministre doit tout faire pour que les négociations se poursuivent entre les deux parties en cause. Dans son rôle de ministre, elle doit voir à ce qu'on trouve une solution viable. Nous devons tous collaborer pour éviter de nuire indûment à l'économie et au peuple canadien.
Il s'agit d'une période particulièrement difficile pour l'économie du pays. On a beaucoup parlé de la reprise économique. Beaucoup de gens au pays traversent une période difficile, et il ne faut pas leur causer un stress indu.
Toutes les parties ont une obligation. Comme je l'ai dit, la ministre a l'obligation de veiller à ce que les parties se parlent. Les lignes de communication doivent être ouvertes entre elles. À ce stade-ci, il est important que toutes les parties retournent négocier.
Comme je l'ai déjà dit, il est important de ne pas oublier ce que pourraient être les répercussions en fin de compte, mais nous ne devons pas non plus oublier l'importance de maintenir une relation amicale entre les employés et l'employeur.
Je vois qu'il y a toujours désaccord sur deux grandes questions. Sur l'une de ces questions subsiste un grand écart. La première est la question de la rémunération et la deuxième est celle du nombre maximal d'heures de travail ou de milles parcourus.
Il y a une grande différence de perception dans la question des limites de millage. Si je comprends bien, la compagnie affirme que le nombre d'heures passerait de 37 à 41, ce qui n'est pas énorme. Le syndicat, lui, dit que le nombre d'heures passerait de 72, nombre beaucoup plus important, à 82. C'est une énorme différence. Il y a une grande différence de perception entre les deux parties.
Nous n'avons pas la capacité, à la Chambre, d'évaluer la situation et de comprendre l'incidence réelle du changement.
D'après toutes les discussions que j'ai eues, il semblerait que la question d'argent soit plus facile à résoudre; je ne dis pas cependant qu'elle est simple ou sans importance. Le syndicat a indiqué sa disposition à recourir à l'arbitrage pour régler cette question. La disparité des heures est un enjeu beaucoup plus important et c'est la question qu'on semble être en train d'examiner.
Compte tenu des circonstances, la Chambre ne peut prendre position sur les enjeux en question. À mon avis, il ne revient pas au Parlement ou aux députés de cerner les enjeux et de déterminer l'incidence éventuelle de tout changement. Cependant, on devrait fournir à la Chambre une évaluation de leur incidence sur les ententes et sur les questions dont nous débattons aujourd'hui.
La ministre doit à tout le moins demander au sous-ministre de faire une évaluation poussée des répercussions que tout cela pourrait entraîner. Les positions des deux parties divergent beaucoup. Comme je l'ai souligné, la disparité est très grande et je ne crois pas que la Chambre soit en mesure de le comprendre, mais il est important que la Chambre connaisse les répercussions et qu'elle sache dans quelle mesure elles sont réelles ou non et où se trouvent la vérité et la réalité.
Il est important que la ministre se penche sur ces deux opinions bien différentes et qu'elle demande à son sous-ministre ou à son ministère de faire une évaluation des répercussions et d'en faire part à la Chambre. En fait, si la ministre a l'intention de déposer un projet de loi, et je crois comprendre que c'est de cela dont traite la motion, elle devrait également inclure ces renseignements dans le projet de loi.
Avant que la Chambre commence à discuter du projet de loi et avant qu'elle complète l'étude de la présente motion, elle devrait savoir quelles sont ces deux opinions diamétralement opposées et quelles pourraient en être les répercussions. Une évaluation approfondie doit être effectuée, tout particulièrement si l'on tient compte du fait qu'il semble que ce soit l'un des principaux points litigieux. Je sais que les discussions se sont poursuivies tard hier soir. J'espère qu'elles se poursuivent encore aujourd'hui, mais je n'en suis pas certaine. Il importe toutefois que nous nous penchions sur ces points.
Nous sommes très inquiets de voir que ces problèmes ne retiennent pas davantage l'attention, non seulement au pays, mais à la Chambre. Comme je l'ai déjà dit, nous nous préoccupons évidemment du fait que des milliers et des milliers de gens au pays comptent sur les services de transport. Les trains sont en quelque sorte le pivot du système. Ils sont ce que j'appelle un genre de colonne vertébrale qui tient le pays ensemble depuis bon nombre d'années. C'est un service très important et essentiel pour notre économie et pour les usagers.
Nous ne devons pas oublier qu'il existe des droits en matière de conventions collectives et de négociations de travail au pays. Les employés ont également des droits. Il est très important que les deux parties aient le temps de négocier et de poursuivre leurs discussions.
J'encourage à nouveau la ministre à présenter à la Chambre une évaluation approfondie de tout ce que j'ai vu et entendu, y compris de toutes les discussions que j'ai eues jusqu'à maintenant avec la ministre et d'autres. Il semble y avoir de grandes divergences.
Il est important de noter que le nombre d'heures de travail du personnel est proportionnel à l'augmentation de la longueur du parcours. À l'intention des députés qui ne savent pas de quoi il s'agit, selon le syndicat, augmenter la distance parcourue à 4 300 milles par mois signifie que les ingénieurs de train seront absents de leur foyer 82 heures par semaine en moyenne. La compagnie utilise une autre méthode pour établir cette moyenne. Je crois qu'elle arrive à un résultat équivalant à 41 heures. C'est là un aspect très important et une vaste question qui doit être examinée.
Il est important de mentionner que les grèves ne sont jamais une solution. Elles ne sont jamais bonnes pour notre économie et notre pays, en particulier dans les secteurs où un grand nombre de gens dépendent des biens et services livrés et fournis. Les grèves ne sont pas la meilleure solution. Elles engendrent parfois une quantité phénoménale de négativité et d'amertume. Elles empoisonnent également les relations de travail.
La dernière grève au CN, celle des chefs de train, a duré environ deux mois. Les grévistes sont rentrés au travail à la suite de la mise en oeuvre d'une mesure législative. Je ne voudrais pas ce que soit le cas cette fois-ci. Je préférerais que les deux parties concernées retournent à la table de négociation et qu'elles finissent par s'entendre.
Je comprends que nous sommes en train de débattre d'une motion, plus exactement d'une motion de clôture qui s'appliquerait au débat sur le projet de loi qui devrait être présenté. Comme je n'ai pas vu ce projet de loi, je ne ferai aucun commentaire. Notre démarche est quelque peu prématurée, car nous devons examiner le projet de loi avant d'aller de l'avant.
J'aimerais demander à la ministre si, avant qu'on entreprenne tout cela, elle accepterait de prier ses fonctionnaires de réaliser une évaluation appropriée des répercussions des changements concernant les heures et d'expliquer à la Chambre les différences entre l'information que nous avons reçue de chacune des deux parties. On aimerait aussi savoir ce que cela signifie exactement pour les employés et l'employeur, ainsi que pour le service dans son ensemble. Comme on ne connaît pas vraiment les conséquences, il est important d'obtenir cette information. J'espère que cela pourra se faire rapidement, car, selon moi, nos discussions en seraient grandement facilitées.
J'aimerais faire valoir deux autres points en terminant. Premièrement, je préférerais que l'on n'ait pas à prendre des mesures aussi draconiennes. Comme je l'ai dit, nous n'avons pas encore vu le libellé du projet de loi, et je n'aime pas les mesures de ce genre. Deuxièmement, je comprends que nous devons tous assumer nos responsabilités, la ministre, tout autant que l'entreprise et le syndicat, pour que la population et l'économie ne soient pas indûment touchées par cette situation. Tout le monde doit assumer ses responsabilités pour assurer le meilleur dénouement possible.
Comme je l'ai dit, il ne devrait pas incomber à la Chambre de prendre cette décision. Ce n'est pas à nous de déterminer qui est rendu où et qui fait quoi. On ne devrait pas demander au Parlement de prendre une décision là-dessus. Ce serait préférable que la décision soit prise par les deux parties en cause. Les futures relations de travail seraient bien meilleures et l'environnement serait plus sain s'il en était ainsi que si la Chambre devait intervenir.
Enfin, il est important que la ministre présente, si possible, l'évaluation dont j'ai parlé précédemment. Il me semble que ce sont les deux principales questions encore en suspens. L'une d'entre elles concerne les salaires. Toutefois, d'après ce que j'ai pu voir, la question des heures et des limites de millage est la plus grave des deux. J'aimerais que la ministre présente l'information pertinente à la Chambre le plus rapidement possible pour que nous puissions voir ce qui constitue les principales pierres d'achoppement à cet égard.
:
Monsieur le Président, bien sûr, le Bloc québécois est actuellement contre toute motion visant à restreindre le débat sur un projet de loi imposant un retour au travail aux grévistes du Canadien National, tout comme le Bloc québécois est d'avis qu'à ce stade-ci, un tel projet de loi est prématuré.
On souhaite bien sûr que les parties continuent de siéger. Comme plusieurs de mes collègues l'ont mentionné, on continue actuellement de siéger et le dossier continue d'évoluer. Il est donc important de maintenir ce rythme aux tables de négociations afin qu'on continue à reconnaître aux syndiqués leur droit de grève. Ce droit de négocier une convention collective est reconnu depuis de nombreuses années et a même été reconnu par la Cour suprême du Canada et il est aussi protégé par la Charte des droits et libertés.
Depuis nombre d'années, au Canada et au Québec, on négocie de plus en plus de conventions collectives sans grève et sans lock-out. C'est un signe d'un changement radical depuis nombre d'années et c'est un signe que les employeurs savent que c'est plus payant de s'asseoir à une table de négociations que de s'asseoir à une table où on tente d'avoir une loi du gouvernement en place pour imposer aux travailleurs et aux travailleuses un retour à leur lieu de travail.
Depuis nombre d'années, on négocie des conventions de longue durée. Dans bien des cas, on négocie une convention collective à chaque cinq, dix ou quinze ans. Maintenant, imaginons qu'on intervienne dans un dossier de ce type, ce qui ferait que des travailleurs et des travailleuses ne pourraient pas faire respecter leurs droits légitimes à la négociation collective afin d'améliorer leurs conditions de travail ou afin de changer des conditions existantes, des changements jugés nécessaires par l'une ou l'autre des parties, en les améliorant de façon substantielle.
À propos des conventions de longue durée, tous les employeurs savent maintenant qu'il faut bien sûr négocier parce que tout change rapidement: la technologie change rapidement et les relations de travail changent rapidement. On a besoin de plus de flexibilité et on a besoin d'un partenariat avec les travailleurs et les travailleuses. C'est effectivement payant pour une entreprise d'agir de cette façon.
Les employeurs ont donc tendance à changer cette façon de faire alors que le gouvernement est encore au même stade où il en était, avec des lois de retour au travail qui, foncièrement, ne règlent jamais les problèmes d'une convention collective, ni les enjeux principaux d'une convention collective parce qu'on demande à un tiers de régler les problèmes. Lorsqu'on règle par l'entremise d'un tiers, on continue donc à maintenir des relations de travail de non-confiance entre les parties, ce qui ne permet pas de faire progresser les relations de travail ou de les établir fortement.
Je tenais entre autres à citer le président du Canadien National, M. Ron Lawless, qui était là dans les années 1990. Or, ce qu'il a dit à cette époque est encore vrai aujourd'hui. M. Lawless disait que « les interventions gouvernementales dans le dossier des négociations collectives interfèrent dans les bonnes pratiques d'affaires. De plus, les lois de retour au travail et les arbitrages n'aident pas les parties à adresser correctement les enjeux principaux. Ce genre de loi empêche les parties de prendre au sérieux la négociation collective. »
C'est le président du Canadien National qui disait cela il y a quelques années, et cela pourrait s'appliquer de la même façon encore aujourd'hui. Il s'agit donc d'une loi rétrograde de la part, bien entendu, d'un gouvernement rétrograde, qui persiste à utiliser ce genre de loi quand on sait pertinemment bien qu'il y a quelques années — je pense entre autres à 2004 —, on réglait les conventions collectives au fédéral sans loi de retour au travail. Il y a effectivement eu des grèves, on les a réglées et on a finalement réussi à s'entendre. Aujourd'hui, dans ces groupes, on a des relations de travail favorables.
En ce qui a trait au Canadien National, en 2007, le gouvernement conservateur, qui était arrivé au pouvoir une année auparavant, avait déjà commencé à mettre en place des lois de retour au travail pour, et seulement pour, les employeurs, mais pas nécessairement pour les travailleurs et travailleuses, quand on parle de loi de retour au travail.
Mais fondamentalement, on ne règle jamais les problèmes. Dans ce dossier, on maintient de façon importante les frustrations et l'amertume, et jamais on ne réussira à bâtir de bonnes relations de travail.
En regardant le dossier actuel du CN, on peut dire que les relations sont pourries, et cela ne date pas d'hier. Cela a commencé en 2007, quand le gouvernement conservateur a adopté une première loi pour forcer le retour au travail des chefs de train. C'était le même syndicat à l'époque. On se retrouve aujourd'hui aux prises avec les mêmes problèmes de relations de travail: griefs, mesures disciplinaires, suspensions, congédiements. Toutes les règles d'application de la convention collective sont contestées dans toutes leurs formes. Dans de telles conditions, comment peut-on bâtir d'excellentes relations de travail?
Encore une fois, cet employeur s'attend à ce que le gouvernement adopte une loi sur le retour au travail et abolisse le droit des travailleurs et des travailleuses de négocier une convention collective. Or, le droit de grève est un droit fondamental reconnu. Cela a pour effet que des employeurs comme le CN s'assoient sur leurs lauriers pour obtenir une loi du gouvernement conservateur en ce sens.
Regardons de façon générale les autres groupes du Canadien National. On a commencé à bâtir des relations de travail. La grève de 2004 a été réglée après 30 jours, de sorte qu'on a pu poursuivre les activités. Je pense, entre autres, aux carmen et aux personnes de métier. Je ne dis pas que tout est réglé, mais que les deux parties ont commencé à travailler ensemble pour bâtir de bonnes relations.
Les conventions collectives du CN ont un historique important et permettent de régler des problèmes. Il y a une jurisprudence importante en ce sens.
Dans le dossier qui nous intéresse actuellement, le CN a pris tous les moyens voulus pour exercer de la pression sur les ingénieurs. Il veut maintenant les forcer à augmenter leurs heures de travail, voire à les doubler, ce qui est plus que la moyenne canadienne. Il veut que ces travailleurs en fassent plus pour moins, ce qui mettrait en danger la sécurité des gens.
Depuis plusieurs dizaines d'années, le régime actuel n'a jamais été remis en cause. Aujourd'hui, c'est ce que le CN fait. Il veut utiliser le gouvernement conservateur pour arriver à ses fins, c'est-à-dire une augmentation des heures de travail des ingénieurs qui conduisent les locomotives.
Le secrétaire d'État a parlé plus tôt de la crise économique en disant que cela va causer des préjudices importants. Je ne sais pas quelle est sa source, car on nous a dit que le CN entraîne ses cadres et un groupe important d'employés non syndiqués depuis plusieurs mois, afin de maintenir le service. On a parlé d'un maintien de service à plus de 60 p. 100.
Le Canadien Pacifique, qui a deux lignes parallèles dans tout le Canada — une du CN et une autre du CP —, pourrait combler les 40 p. 100 du service que le CN prétend ne pas être en mesure de fournir.
Je vais plus loin que cela. Il y a les camionneurs qui peuvent s'ajouter à cela, ainsi que les lignes restreintes au niveau régional, qui peuvent être utilisées pour desservir la population canadienne. Pour la région de Montréal, entre autres, AMT a signé une entente et le service passagers continue, de sorte qu'on obtient un service d'environ 120 p. 100.
Compte tenu de toutes ces possibilités, je me demande où les conservateurs voient la crise et le besoin d'ajouter du service additionnel. Il faut laisser la négociation de bonne foi se poursuivre entre les parties et les forcer à s'entendre sur une convention collective.
Comme je le mentionnais tout à l'heure, on n'est pas en train de faire cela. On est en train de leur dire que chaque fois qu'ils vont négocier, ils auront une loi. On a vu réapparaître ces lois de façon importante depuis que les conservateurs ont pris le pouvoir en 2006.
Je parlais tout à l'heure de différentes grèves et tout cela. Quand on parle de services — je vais faire une petite parenthèse —, cela ne nécessite pas une loi de retour au travail. Ils auront le service selon ce que le CN nous a dit et selon les options existantes. En 2004, une grève a été réglée après 30 jours. Depuis ce temps, on a des relations différentes mais on a pu régler des choses. En 2007, après l'arrivée des conservateurs, c'était le conflit des chefs de train. On a imposé une loi après deux semaines. Les mêmes amertumes sont demeurées en place. Quand vous vous assoyez à une table de négociation et que les personnes en face de vous sont les mêmes qui ont entretenu des relations désastreuses pendant des mois et des mois, c'est sûr que le lien de confiance entre les parties n'est plus là et qu'il va être difficile de le rétablir. C'est rare. C'est là qu'il faut mettre en avant un système de médiation et de conciliation. Je dis toujours que cela prend une armée de médiateurs et de conciliateurs s'il le faut.
On a eu la preuve dans le passé qu'il était possible de régler des choses, de faire avancer des choses. De plus, de vendredi dernier à aujourd'hui, on a eu des progrès. On disait vendredi dernier qu'il n'y aurait pas d'arbitrage. Aujourd'hui, on parle d'un arbitrage. On parle de la possibilité d'arbitrage concernant certains éléments de la convention collective. Il y a eu des progrès.
Pourquoi vouloir arrêter ces négociations après trois jours? C'est dans la tradition des conservateurs. Ils l'ont démontré en 2007. Ils ont arrêté cela. Cela a maintenu le genre de relations qu'on retrouve aujourd'hui dans ces groupes et qui fait que, finalement, on ne réussit pas à avoir des relations adéquates. Si on regarde le cheminement des conservateurs en termes de soutien aux travailleurs et aux travailleuses, dans le dossier de l'automobile, par exemple, ils ont voulu imposer des compressions salariales. Je ne suis pas tout à fait sûr que c'était en faveur des travailleurs. Heureusement, le syndicat a trouvé des solutions différentes.
Quand on parle des conventions collectives dans le secteur public fédéral où il y a eu des compressions importantes et quand on parle de la perte de l'équité salariale, je ne suis pas sûr que ce soit pro-travailleurs non plus. Quand on parle du projet de loi du Bloc québécois qui voulait exclure la période de référence de l'assurance-emploi lors d'une période de conflit de travail, cela aussi a été rejeté.
Quand on regarde toutes ces positions qui ne sont pas des positions pro-travailleurs, il ne faut pas se surprendre qu'on se retrouve face à l'imposition éventuelle d'une loi de retour au travail aujourd'hui, mais pas avec les bons arguments, malheureusement.
C'est pourquoi le Bloc québécois ne votera pas en faveur de la motion et ne soutiendra pas un projet de loi semblable. Il faut faire en sorte que les travailleurs et les travailleuses du Canadien National, tout comme les autres travailleurs et travailleuses du Canadien National qui ont eu droit à une négociation de bonne foi entre les parties, puissent régler les problèmes qu'il y a entre les parties. Il ne s'agit pas que de régler les problèmes économiques et salariaux, il faut régler aussi les griefs soulevés à l'intérieur de ces conventions collectives et les problèmes engendrés par ces griefs, pour faire en sorte que, finalement, on donne une structure de relations de travail qui va permettre de régler cela.
Quand on impose une loi comme celle qu'on veut faire, on passe complètement à côté. Il faut dire que les conservateurs sont habitués de le faire depuis quelque temps. On passe complètement à côté et, dans le domaine du travail, ils le font depuis très longtemps: ils empêchent qu'on règle les problèmes dans des conventions collectives.
On n'a rien réglé dans la convention collective des employés fédéraux. On parle actuellement aux employés sous compétence fédérale, ceux du gouvernement fédéral plus particulièrement, et les problèmes ne se règlent pas. On va se retrouver dans la même situation pour ce qui est du secteur ferroviaire et du Canadien National.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cette motion, qui est prématurée.
:
Monsieur le Président, j'interviens dans le débat sur une motion qui vise à restreindre, de façon draconienne, la période que la Chambre des communes peut consacrer à un projet de loi dont nous n'avons pas encore pris connaissance. En plus d'être absurde, cela est méprisant à l'endroit de l'institution qu'est le Parlement, des députés, des lois sur le travail au Canada et de la sécurité tant des ingénieurs de locomotives que des passagers du rail canadiens.
Tout ce que nous savons, c'est qu'on présentera cet après-midi un projet de loi forçant le retour au travail de ces employés. Puisque nous n'avons pas encore pris connaissance du projet de loi, je vais m'attacher aux généralités plutôt qu'aux détails de la question.
Je tiens à préciser tout de suite que les néo-démocrates n'appuieront pas cette mesure draconienne visant à mettre fin au conflit de travail au Canadien National.
Notre position s'appuie sur des principes, et c'est de ces principes que j'aimerais parler, pour commencer. Nous voilà de nouveau dans une situation où le gouvernement fédéral viole les obligations internationales du Canada dans le domaine du travail en demandant au Parlement de mettre fin à un conflit de travail légal. En tant que pays, nous avons le devoir de respecter les conventions et les traités que nos gouvernements ont signés au fil des ans avec les Nations Unies et l'Organisation mondiale du travail.
Le gouvernement conservateur actuel se conduit de façon aussi éhontée que d'autres gouvernements l'ont fait dans le passé en violant nos obligations internationales à l'égard du respect des droits des travailleurs.
Au cours des 25 dernières années, le gouvernement fédéral a fait adopter 15 mesures forçant le retour au travail d'employés. Dans plusieurs cas, en plus de forcer des grévistes à retourner au travail, ces mesures arbitraires ont imposé des règlements aux grévistes. Cette façon de faire tourne en dérision la signature, par le Canada, des conventions et des traités internationaux portant sur le travail et sur les droits de la personne.
Le processus de négociations collectives fonctionne bien. À preuve, dans 85 p. 100 des cas il ne donne pas lieu à des arrêts de travail. Il fonctionne pour les deux parties.
Permettez-moi de revenir en arrière pour les téléspectateurs qui visionnent les débats de la Chambre et qui ne sont peut-être pas au courant de la raison d'être du débat actuel. Je vais prendre un moment pour les renseigner.
Le problème est que le gouvernement a l'intention de mettre fin à un conflit du travail légal à CN grâce à une mesure législative imposant le retour au travail. Je comprends bien ceux qui s'inquiètent des répercussions économiques de la grève et de l'acheminement de nos marchandises. Néanmoins, il doit dès maintenant être clair pour tous qu'une négociation collective se fait à deux. C'est un processus au cours duquel deux parties essaient de parvenir à une entente, entente qu'elles devront respecter pendant toute sa durée.
Les gens qui travaillent dans les chemins de fer et ceux qui sont assujettis à cette convention collective se heurtent de temps en temps à des problèmes relatifs au travail, au fil des jours, des semaines, des mois et même des années. Pour eux, le seul moyen de régler ces problèmes de manière démocratique, c'est que leurs représentants élus participent à la négociation. Les représentants syndicaux discutent de leurs inquiétudes à la table des négociations d'égal à égal avec les représentants de la direction et tous tentent de régler leurs différends. C'est un processus qui est défini par la loi. Il a fallu des décennies et même des générations pour le définir. Les droits qui sont inscrits dans le processus de négociation collective sont des droits pour lesquels des gens ont lutté. Ces droits n'ont pas simplement été accordés par un gouvernement ou par l'employeur. Il a fallu s'organiser pour obtenir ces droits, parfois de haute lutte, notamment le droit fondamental de dialoguer avec l'employeur, de soulever les problèmes du moment et de les résoudre de façon démocratique.
Habituellement, lorsqu'il y a des différends dans les négociations, les médias et, par conséquent, le public concentrent automatiquement leur attention sur les salaires, qui deviennent ainsi le principal enjeu. Oui, les salaires font souvent partie du problème, mais ils en sont rarement la seule source. Les négociations portent sur les salaires, les avantages sociaux, les conditions de travail ainsi que les relations de travail, particulièrement sur la façon de régler les différends et de répondre aux préoccupations. Dans le cas des relations de travail, les questions les plus importantes sont celles qui touchent la santé et la sécurité des gens qui travaillent dans un environnement donné.
Toutefois, quand un gouvernement présente un projet de loi maladroit de retour au travail, il met fin au processus démocratique qui se déroule à la table de négociation et impose lui-même une solution. Pourtant, les ententes imposées, quelle que soit la méthode utilisée, sont souvent moins satisfaisantes que si elles avaient été négociées et acceptées par les deux parties. Cela laisse stagner les questions non résolues, que ce soit du côté de l'employeur ou du côté des travailleurs.
La négociation collective est un pas de deux. C'est, ou du moins ce devrait être, une négociation entre deux parties qui ont chacune des pouvoirs dans ce processus.
L'employeur a évidemment beaucoup de pouvoir dans le milieu de travail. C'est lui qui décide qui sera embauché, qui sera congédié et qui sera promu. De plus, l'employeur décide quel sera son produit ou service, comment il gérera ce produit ou service et dans quel type d'équipement il investira. C'est également lui qui prend les décisions en matière de publicité et en matière de commercialisation du produit ou du service.
Quant aux gens qui travaillent pour l'employeur, la seule possibilité qu'ils ont de donner leur avis et d'exercer leurs droits en milieu de travail, c'est le processus de négociation collective. Le pouvoir que les travailleurs apportent à la table de négociation est la capacité de décider de ne plus travailler. Voilà ce qui fait contrepoids aux immenses pouvoirs que détient l'employeur. C'est ce qui motive les négociations.
Lorsque le gouvernement intervient dans le processus en proposant un projet de loi de retour au travail, il mine les droits légaux et démocratiques des travailleurs et des employeurs. Il s'agit d'une façon brutale ou, comme je l'ai dit plus tôt, maladroite d'imposer de force une solution à un conflit qui devrait être résolu par les deux parties à la table.
Le pire, c'est que, lorsque le gouvernement fait savoir qu'il est disposé à adopter une loi de retour au travail, il enlève à l'employeur la volonté de participer au processus de négociations. C'est exactement ce qui s'est produit dans le conflit actuel entre la Conférence ferroviaire Teamsters Canada et le Canadien National.
Ayant appris lors d'événements passés que le gouvernement conservateur était peu susceptible de permettre qu'une grève se poursuive dans les chemins de fer, le Canadien National a réussi à utiliser le Parlement de manière inappropriée pour se soustraire à ses responsabilité face au syndicat et au droit à des négociations collectives. C'est tout à fait répugnant.
Je ne sais pas trop si je suis davantage dégoûté par le CN que par le gouvernement, qui laisse la société ferroviaire l'utiliser comme pigeon. Cela était tout à fait évitable. N'oublions pas que le gouvernement a donné avis de son intention de recourir à une loi de retour au travail après moins de 12 heures de grève. Cela contraste avec le conflit de travail au Musée canadien des civilisations et au Musée canadien de la guerre où les travailleurs sont en grève depuis 72 jours tandis que le gouvernement se soustrait à toute responsabilité envers eux.
Rien n'illustre mieux l'importance de la position dans l'économie. Il n'y a certainement pas de cohérence dans les actions du gouvernement dans les relations de travail.
Tout au long des négociations, le CN a pu utiliser la menace d'une loi de retour au travail contre le syndicat, mais heureusement, le syndicat ne s'est pas laissé influencer parce que ce n'est rien de moins que la sécurité des travailleurs et des chemins de fer qui est en jeu. Je suis heureux que le syndicat n'ait pas cédé.
Il y a quelques années, Transports Canada a produit une étude faisant état de sérieuses préoccupations au sujet de la sécurité des chemins de fer. La série de déraillements qui étaient survenus était la première préoccupation. Je me souviens qu'en 2007, il y a eu sept déraillements en un peu plus de deux mois seulement.
Le 8 janvier 2007, 24 wagons d'un train qui en comptait 122 ont déraillé à Montmagny, à 60 kilomètres à l'est de Québec. Le 14 janvier de la même année, il y a eu un déraillement à Minisinakwa, dans le Nord de l'Ontario, où 30 wagons, dont un qui contenait un produit entrant dans la fabrication de peinture, sont tombés dans l'eau.
Le 25 février 2007, de l'acide chlorhydrique s'est échappé de wagons du CP après un déraillement dans le col Kicking Horse.
Le 1er mars 2007, un wagon de fret du CN a déraillé à Pickering, ce qui a perturbé le service de VIA Rail entre Toronto, Montréal et Ottawa et le service des trains de banlieue de Toronto.
Le 4 mars 2007, du grain a été répandu près de Blue River, en Colombie-Britannique, à deux heures au nord de Kamloops, lorsque 27 wagons d'un train voyageant en direction ouest ont quitté la voie.
Le 10 mars 2007, le trafic ferroviaire sur la ligne de chemin de fer principale du CN servant au transport des marchandises dans la région du centre du Nouveau-Brunswick a été perturbé jusqu'au lendemain en raison du déraillement de 17 wagons dans la région de Plaster Rock.
Le 12 mars 2007, 3 000 passagers de VIA ont dû être transportés en autocar, la première journée de la semaine de relâche de mars, car le service ferroviaire dans le corridor Toronto-Montréal-Ottawa avait été perturbé par le déraillement d'un train de marchandises du CN près de la gare de Kingston. C'est un bilan bien sombre et éloquent pour une si courte période.
Je me contenterai de dire qu'il y a bel et bien des preuves étayant les préoccupations des travailleurs qui soutiennent qu'il faut améliorer la sécurité ferroviaire.
Pour améliorer la sécurité ferroviaire, il faut, entre autres, améliorer le régime d'entretien, l'état des voies ferrées et la condition du matériel roulant. Une partie de la solution concerne également les employés. Dans la plupart des trains, qui peuvent avoir entre quelques wagons et plus d'une centaine, il y a deux travailleurs, un mécanicien et un chef de train. Ces deux personnes sont responsables de wagons de marchandises pesant 130 tonnes chacun et de locomotives capables de produire entre 3 000 et 5 000 chevaux-vapeur.
Le fonctionnement sécuritaire de ces trains repose entre les mains de deux personnes, le chef de train et le mécanicien. Les mécaniciens sont représentés par la Conférence ferroviaire Teamsters Canada et ce sont ces employés du CN qui sont en grève. Ils font la grève pour dénoncer la sécurité ferroviaire improvisée. Le CN veut augmenter la limite de millage mensuelle de 500 milles, ce qui la ferait passer à 4 300 milles. Pour atteindre cette limite, certains mécaniciens de locomotive seraient obligés de travailler sept jours par semaine sans congé. On peut dire qu'un tel changement menacerait l'exploitation sécuritaire de nos voies ferrées. Les Teamsters sont déterminés à trouver une solutions à ces préoccupations en matière de sécurité à la table de négociation.
Sommes-nous vraiment disposés à leur enlever le droit de régler des problèmes qui mettent leur vie en danger? De quel droit le ferions-nous?
Ne nous y trompons pas, les questions de santé et de sécurité qui sont en jeu peuvent avoir d'énormes répercussions, et pas seulement pour les travailleurs du CN. Les répercussions peuvent être énormes parce que les risques pour la santé et la sécurité dans le contexte des déplacements en train peuvent se transformer en menaces graves pour les voyageurs. Dans un sens plus large, ces questions peuvent représenter un danger et des conséquences graves si des manquements aux pratiques en matière de santé et sécurité sont la cause de déraillements et de déversements de produits toxiques. Ce ne serait pas seulement les familles vivant près des voies ferrées qui seraient alors touchées, mais toutes les villes où le train passe.
Ce sont des questions importantes. Évidemment, je ne suis pas aussi au courant que les mécaniciens de locomotive peuvent l'être, et c'est justement la raison pour laquelle le processus de négociations collectives fonctionne aussi bien. Les deux parties, qui sont les mieux placées pour tout savoir sur le milieu de travail et les préoccupations en cause, abordent probablement les enjeux dans une perspective différente à la table des négociations, mais elles doivent en discuter et parvenir à une solution qui convient aux deux parties. C'est ainsi que nous pouvons le mieux protéger nos travailleurs et l'ensemble des Canadiens.
Nous avons tous intérêt à ce que ces négociations aboutissent, et c'est pourquoi le processus employé pour arriver à une solution nous intéresse tous. Le gouvernement a tenté de diminuer les conséquences possibles sur le plan de la sécurité en faisant porter l'accent presque entièrement sur les conséquences économiques de ce conflit de travail. Oui, il importe d'assurer le transport des marchandises, mais pour que l'économie en bénéficie, il faut que les marchandises soient transportées dans des conditions sécuritaires. En cas de déraillement, par exemple, les répercussions sur le plan économique seraient très dommageables, et le coût devrait être calculé non pas seulement en argent mais aussi en vies humaines.
Nous avons l'obligation de réduire le risque de tels incidents. Nous ne pouvons pas sacrifier la sécurité au profit des retombées économiques. Or, seule la négociation collective peut assurer l'équilibre voulu. Si ce processus peut régler certains problèmes de sécurité et d'infrastructure propres au réseau ferroviaire, ce sera également une bonne chose pour l'économie.
Dans le peu de temps qu'il me reste, je veux aborder la question dans une dernière perspective. Le CN a déjà été un élément clé de notre identité nationale. Il faisait partie de notre histoire, de nos traditions, de notre patrimoine. Il assurait un lien d'un océan à l'autre dans notre pays. Il était le symbole de notre puissance. Malheureusement, depuis que cette véritable institution nationale a été privatisée et vendue, le symbole s'est terni en même temps que la fierté qu'elle nous inspirait.
En 2007, le mécanicien de locomotive de longue date, M. Gordon Rhodes, l'unique survivant de l'un des pires accidents qui a coûté la vie à deux employés du CN à cause de piètres pratiques de la direction en matière de sécurité, a témoigné devant le comité. Je me rappelle qu'il a notamment dit ceci:
Je ne suis pas américain, je suis canadien et j'étais autrefois fier de désigner ma compagnie sous le vocable Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, dans les années 80. Désormais, je ne peux plus le faire. Il me faut dire le CNR. À quoi cela rime-t-il?
J'invite les députés à se rappeler du témoignage de M. Rhodes avant de voter sur le projet de loi aujourd'hui. Ce témoin a fait état de ce qui devrait être important pour tous les députés, soit la sécurité, le maintien de notre système ferroviaire et la nécessité de ne pas permettre à la direction du CN de décider unilatéralement de la structure du système ferroviaire. Il a dit ceci:
[...] Le CN a pris le contre-pied de cette attitude. La gestion y est très antagoniste. Je qualifie cela de milieu de travail empoisonné car c'est bien cela. Personne ne veut travailler pour le CN. Chacun compte les jours, les mois et les années avant de quitter la compagnie. Ce n'était pas comme cela auparavant [...] Je vois les choses de la façon suivante: le CN est une grosse multinationale dont le réseau de chemin de fer va du Mexique au Canada; il a acheté de nombreux chemins de fer qu'il a intégrés à son réseau, et il est passé maître dans ce genre d'opération. Le problème, c'est qu'en l'occurrence, il a absorbé un chemin de fer qu'il ne connaissait pas, alors qu'il croyait le connaître. Ce qui s'est produit résulte de son arrogance, dans la mesure où les gens du CN sont arrivés et ont pris connaissance de nos instructions générales d'exploitation, fruit d'une cinquantaine d'années d'expérience ferroviaire sur cette voie, et ils ont procédé à leur façon parce qu'ils voulaient un réseau homogène. Ils voulaient une formule d'exploitation unique. Ils n'ont écouté personne; ils se sont contentés de lancer leur système.
En parlant de la direction américaine, M. Rhodes a dit « Les dirigeants nous expliquent comment ils vont gérer l'entreprise. » Il a ensuite lancé un vibrant appel au gouvernement et aux députés en disant « Je pense qu'il est grand temps que vous, messieurs et mesdames, leur disiez comment le faire. »
Cela faisait partie du message livré par M. Rhodes, le seul survivant de l'un des nombreux accidents du CN. Lorsqu'il disait qu'il faut aider les mécaniciens de locomotive, il parlait en leur nom. Des collectivités sont dévastées, des environnements sont détruits, des gens perdent la vie et nous, en notre qualité de parlementaires, devons aider.
Cependant, au lieu de répondre à cet appel à l'action, le gouvernement dit qu'il ne se soucie pas des employés. Il ne s'occupera pas des questions de sécurité. Il est insensible à ces collectivités dévastées. Il est certainement insensible aux problèmes de transport dus à la dévastation causée par les déraillements, les collisions, les incendies et les explosions. Il n'a pas l'intention de se saisir d'aucune de ces questions.
Il a l'intention de mettre tout le poids du gouvernement pour soutenir un plan visant simplement à remettre un chèque en blanc aux dirigeants du CN. Ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant pour la sécurité ferroviaire au Canada, pour la protection des droits des travailleurs au Canada et pour le NPD au Canada.
J'exhorte tous les députés à se joindre à nous et à s'opposer à cette mesure législative draconienne du gouvernement, à affirmer leur solidarité avec les membres de la Conférence ferroviaire Teamsters Canada et à défendre les valeurs et les principes qui ont servi à l'édification de notre pays. C'est une vision du Canada qui mérite d'être défendue.