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AGRI Rapport du Comité

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À l’échelle mondiale, on peut définir la compétitivité comme étant la capacité d’un pays à atteindre des gains de productivité lui permettant de maintenir une qualité de vie à la hausse au sein d’une économie mondiale complexe. Plus particulièrement, du point de vue de l’industrie, le terme évoque plutôt la capacité d’une compagnie à fabriquer et à vendre des produits qui lui permettent de gagner des parts de marché tout en générant des bénéfices suffisants par rapport aux ressources employées dans le processus de production. Cette définition illustre le double objectif ayant guidé le Comité tout au long de son étude et qu’on pourrait formuler ainsi :

Améliorer la compétitivité du secteur canadien de l’agriculture et de l’agroalimentaire tout en protégeant et en améliorant les bénéfices qu’en retirent les producteurs.

Par conséquent, les mesures et les recommandations proposées portent toutes, directement ou indirectement, sur le double objectif d’améliorer la compétitivité du secteur canadien de l’agriculture et de l’agroalimentaire tout en protégeant et en améliorant les bénéfices qu’en retirent les producteurs. Le Comité estime que son étude tombe à point nommé : bien que de façon générale, le Canada perde des parts de marché[1] le Comité reste convaincu que le pays, grâce à ses ressources naturelles, ses gens et son savoir dispose de tous les éléments fondamentaux nécessaires pour devancer ses concurrents mondiaux du secteur agricole et agroalimentaire. La question est de savoir quelles mesures devraient être adoptées ou quelles modifications pourraient être apportées à nos politiques pour nous hisser en tête de peloton.

Afin de bien cerner cette question, le rapport a été séparé en quatre sections. La première examine les façons d’accroître les possibilités d’exportation pour les producteurs et transformateurs canadiens. La deuxième porte sur les moyens d’augmenter la compétitivité de certains sous-secteurs clés de la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire. La troisième couvre les façons d’utiliser les fonds destinés à la recherche pour renforcer la compétitivité du secteur agroalimentaire à moyen terme. Enfin, la quatrième section évalue les modifications qu’il y aurait lieu d’apporter au cadre réglementaire canadien pour améliorer le contexte concurrentiel sans compromettre aucunement les normes de salubrité ou de sécurité.

Ce rapport repose sur les audiences publiques tenues par le Comité entre les mois de février et octobre 2009. Le Comité a entendu le témoignage de groupes de producteurs représentant les différentes industries qui composent le secteur canadien de l’agriculture ainsi que des témoins provenant des industries des intrants agricoles, des services, de la transformation et des gouvernements.


Le développement de nouveaux marchés peut contribuer de plusieurs façons à l’amélioration de la compétitivité du secteur agricole et agroalimentaire canadien, mais il existe aussi des embûches qui nuisent au maintien ou à un accès plus grand à certains marchés pour les produits canadiens.

A)        Augmenter l’accès aux marchés étrangers

Le Canada est le quatrième plus grand exportateur de produits alimentaires au monde après l’Europe, les états-Unis et le Brésil; le commerce international est donc vital à la rentabilité des agriculteurs et du secteur agroalimentaire canadiens. Il y a eu un très fort consensus parmi les témoins qui ont comparu devant le Comité pour dire que l’augmentation de l’accès aux marchés étrangers est un élément clé pour améliorer la compétitivité des agriculteurs et du secteur agroalimentaire canadiens. Ce lien s’explique par deux raisons principales. Tout d’abord, ces nouveaux marchés peuvent s’avérer plus rentables pour les agriculteurs canadiens et donc susceptibles d’améliorer leur situation financière. Deuxièmement, l’augmentation de l’accès au marché est bénéfique pour l’ensemble de la chaîne de valeur dans le secteur agroalimentaire puisque l’augmentation du volume des ventes permet souvent de générer des économies d’échelle substantielles. Ces économies d’échelle peuvent en retour solidifier la position concurrentielle canadienne sur les marchés internationaux. L’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire a bien illustré l’importance du commerce pour l’agriculture canadienne :

Les échanges commerciaux comptent et ils comptent pour nos agriculteurs. Près de 80 p. 100 des recettes totales des exploitations agricoles provenaient de denrées tributaires de l'exportation. […] Sans elle, nos secteurs agricoles et agroalimentaires souffriraient d'une contraction substantielle. Nous avons besoin de débouchés internationaux et nous avons besoin d'un ensemble de règles transparentes et équitables régissant notre commerce[2].

Malgré l’augmentation de l’accès aux marchés, la National Farmers Union (NFU) a fourni une analyse du revenu agricole à partir de données de Statistiques Canada qui montre qu’en dépit de l’augmentation importante de l’accès aux marchés, les agriculteurs canadiens n’ont pu capturer que 3 milliards de dollars des 802 milliards de dollars de produits vendus sur le marché depuis 1985 alors que les agro-industries ont pu capturer les 799 milliards restants. Selon la NFU, ces chiffres indiquent que la seule augmentation de l’accès aux marchés, si on ne réduit pas la capacité des agro-industries en position de dominance mondiale de profiter indûment de la richesse produite par les agriculteurs canadiens, n’est peut-être pas efficace pour atteindre l’objectif d’améliorer les protéger les revenus agricoles.

Figure 1 : Recettes brutes et revenu net au Canada : 1926-2008[3]

Sources : Statistique Canada. « Recettes monétaires agricoles », cat. No 21-011-X; Statistique Canada « Revenu agricole net », cat. No 21-101-X; Statistique Canada « Paiements directs versés aux producteurs », cat. No 21-015-X; Statistique Canada « Statistiques économiques agricoles », cat. No 21-603-E; et Statistique Canada « Indice des prix à la consommation ».

L’augmentation de l’accès aux marchés est d’une importance capitale pour tous les secteurs agricoles canadiens tournés vers l’exportation. Les représentants de ces secteurs ont d’ailleurs exprimé un très fort appui à la création du Secrétariat de l’accès au marché par Agriculture et Agroalimentaire Canada. Les détails du fonctionnement de ce Secrétariat ne sont pas encore connus. Le Comité note toutefois que l’augmentation de l’accès peut se faire soit en négociant des ententes de multilatérales (exemple : l’Organisation mondiale du commerce) et bilatérales (l’Entente de libre-échange Canada-Europe), soit en réduisant les barrières non-tarifaires au commerce (telles les règles sanitaires et phytosanitaires). D’un point de vue stratégique, le Comité est d’avis que ces deux avenues doivent être poursuivies par le gouvernement canadien. De plus, sans toutefois appuyer tous les aspects des accords de libre échange, le Comité désire exprimer son soutien aux négociations de libre-échange, dans la mesure où elles permettent d’améliorer les revenus agricoles et de protéger les institutions agricoles canadiennes dont les secteurs sous gestion de l’offre et la Commission canadienne du blé. Pour ce qui est du rôle spécifique du Secrétariat de l’accès au marché, plusieurs témoins ont mentionné qu’il devrait mettre l’accent sur la résolution des barrières non-tarifaires imposées par les pays étrangers aux produits canadiens :

J'abonderais dans le sens des commentaires de JoAnne en me réjouissant de la création de ce secrétariat. Je pense qu'il s'agit d'une excellente façon de mobiliser les ressources de différents ministères et agences du gouvernement, ainsi que de l'industrie, pour que tous travaillent ensemble à la recherche de solutions. Notre industrie connaît des problèmes depuis un certain nombre d'années avec les exportations de légumineuses à destination de l'Inde. Cela relève vraiment du domaine phytosanitaire. Pulse Canada a déjà fait valoir dans le passé qu'une grande partie des pourparlers avec l'OMC concernent les droits tarifaires. Bon nombre de nos problèmes commerciaux sont plutôt reliés à des questions phytosanitaires. C'est un dossier difficile à aborder à l'échelle internationale, mais ces aspects semblent à l'origine de la majorité de nos difficultés.
Du point de vue des échanges commerciaux, je crois que le secrétariat nous permettra de régler quelques-unes de ces questions, comme nos problèmes d'ordre phytosanitaire, en misant sur une agence d'inspection des aliments et sur le recours aux spécialistes du commerce international, de l'agriculture et de l'industrie[4].
Les barrières techniques au commerce deviennent d’importants obstacles sur le marché international. Nous convenons que les gouvernements et l’industrie au Canada doivent renforcer leur capacité à ce chapitre[5].
Pour moi, c'est un projet qu'il faut entreprendre avec énergie. Examiner les obstacles techniques au commerce en vue de voir comment on peut les éliminer nous permettra certainement de régler certains autres problèmes en même temps[6].
L'Australie a une interdiction permanente à l'égard de la grippe aviaire. Elle n'a jamais interdit l'importation de volaille canadienne pour cause de grippe aviaire parce que les modalités de l'interdiction prévoient que la volaille doit être cuite jusqu'à ce qu'elle soit essentiellement transformée en aliment pour les animaux domestiques avant d'être admise dans l'île, parce qu'elle a une nature si vierge, ce qui fait que personne n'exporte de volaille vers l'Australie.
Voilà donc le genre de mesures déguisées qui sont prises pour protéger les marchés. J'estime franchement que le Secrétariat à l'accès aux marchés doit jouer son rôle et débusquer les pratiques illégitimes qui nous ferment l'accès à certains marchés[7].

Le Comité croit que le Secrétariat de l’accès au marché devrait résoudre ou éliminer des barrières non-tarifaires au commerce. Par conséquent :

Recommandation 1.1

Le Comité recommande que le ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire s’assure que le Secrétariat de l’accès au marché poursuive ses efforts de résoudre les barrières techniques non-tarifaires imposées par les juridictions étrangères aux produits canadiens.

Résoudre les barrières non tarifaires au commerce n’est évidemment pas une mince tâche, car ces barrières sont souvent imposées pour des raisons politiques plutôt que tout autres. Malgré tout, le jeu en vaut la chandelle pour les producteurs canadiens puisqu’une plus grande ouverture des marchés peut vouloir dire une meilleure valorisation des animaux produits au Canada. En effet, tel qu’il a été exprimé au Comité, certains sous-produits de la transformation de la viande ont peu de valeur au Canada, mais ont une très grande valeur sur certains marchés internationaux. L’élimination des barrières techniques pourrait donc donner lieu à une meilleure valorisation des animaux produits au Canada. Certains témoins ont même indiqué que cela pouvait ajouter de 80 $ à 100 $ par tête de bétail. Cela constitue aux yeux du Comité une approche très intéressante puisqu’elle permet de générer de meilleurs revenus tout en n’ayant peu ou pas d’effet sur les coûts de production, ce qui, systématiquement, équivaut à une meilleure rentabilité pour les producteurs canadiens. Par conséquent :

Recommandation 1.2

Le Comité recommande que le Secrétariat de l’accès au marché poursuive une stratégie de valorisation de tous les produits animaux et des plantes afin de maximiser les bénéfices résultant d’un meilleur accès pour les produits canadiens.

Plusieurs témoins ont également mentionné à quel point un système de traçabilité canadien, en particulier un système de vérification de l’âge de l’animal, pourrait s’avérer un instrument de choix en ce qui a trait à la résolution de certaines barrières non tarifaires au commerce. Le Japon est peut être le meilleur exemple à cet égard puisqu’il exige que la viande bovine importée sur son territoire provienne d’animaux de moins de 21 mois. Un système de vérification de l’âge de l’animal est donc la seule façon pour les producteurs canadiens d’accéder au marché japonais :

La vérification de l'âge est un outil qui est particulièrement utile à l'heure actuelle pour le marché du Japon, où les importations de boeuf sont limitées aux animaux âgés de moins de 21 mois. Il n'existe aucune méthode de mesure physiologique raisonnable pour identifier ces animaux une fois qu'ils se présentent sous la forme de carcasse, alors la vérification de l'âge devient l'outil. Nous nous attendons à ce qu'il y ait une montée en flèche des exportations à destination du Japon en 2009 avec le nombre accru d'animaux dont on est en train de vérifier l'âge en Alberta — phénomène qui est en train de se répandre également en Saskatchewan, en Colombie-Britannique et au Manitoba[8].

Le Comité note qu’au mois de juillet 2009 le gouvernement fédéral a annoncé, dans le cadre du Fonds Agri-flexibilité, la mise en place de « L’Initiative de traçabilité du bétail pour les agriculteurs et consommateurs canadiens ». Il n’est toutefois pas clair si un système obligatoire national de vérification de l’âge de l’animal fait parti de cette initiative à court terme. Le Comité note que l’implantation d’un tel système constituerait un jalon important vers l’établissement d’un système national de traçabilité et permettrait de mieux positionner le bœuf canadien sur les marchés internationaux. Par conséquent :

Recommandation 1.3

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada établisse, dans les plus brefs délais, une stratégie nationale en vue de l’établissement d’un système national de vérification de l’âge, qui permettra d’harmoniser les différents systèmes provinciaux sans affaiblir ceux déjà en place et ainsi mieux positionner les produits agroalimentaires canadiens pour accéder aux marchés étrangers, et que ce coût ne soit pas exclusivement supporter par les agriculteurs.

Le cas de la Corée du Sud refuse toujours de permettre l’importation de bœuf canadien, ce qui constitue un irritant majeur pour les intervenants de l’industrie du bœuf au Canada. Les conséquences de ce refus ne se limitent pas au marché sud-coréen, car certains abattoirs aux états-Unis refusent toujours d’acheter des bovins canadiens afin de maintenir leur accès à ce marché :

Il existe d'autres problèmes. Par exemple, un certain nombre d'usines aux états-Unis ne transforment pas le bétail canadien parce que le marché coréen nous est fermé. On commencera à traiter les produits canadiens une fois que la Corée nous ouvrira son marché, mais en ce moment, les Coréens ne permettront pas que les produits canadiens entrent dans ces usines de transformation. Alors, encore une fois, cela a une incidence directe sur nos prix et sur ce qui nous sert de base de référence[9].

Il est difficile de comprendre cette barrière à l’importation puisqu’aucune preuve scientifique ne justifie de maintenir cette interdiction. De plus, le Canada importe de nombreux biens de la Corée du Sud, notamment des automobiles; on peut donc ouvertement se demander qui aurait le plus à perdre d’un conflit commercial. Le Comité croit que cette situation ne peut plus perdurer et qu’il est temps de mettre fin à la « diplomatie à l’amiable ». Le Comité note que le Canada a déjà décidé de porter cette cause devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et que l’OMC a accepté de créer un groupe spécial afin de rendre jugement sur la question. Par conséquent :

Recommandation 1.4

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada crée à l’avance une liste des biens sud-coréens qui pourraient faire l’objet de représailles commerciales dans l’éventualité où le groupe spécial de l’OMC tranche en faveur du Canada dans ce dossier. Ces biens devraient être ciblés de façon à maximiser les conséquences économiques pour l’économie sud-coréenne.

Le concept de l’accès au marché est souvent associé aux produits agricoles puisque ceux-ci sont souvent davantage soumis à des mesures protectionnistes. Il y a toutefois également des mesures protectionnistes imposées sur des biens industriels qui peuvent avoir une incidence sur la compétitivité des manufacturiers canadiens liés au secteur agricole. La Russie montre en particulier des velléités protectionnistes de plus en plus poussées en ce qui concerne l’importation de machinerie agricole. Il est à noter que cela se produit dans un contexte où la Russie cherche à devenir membre de l’OMC. Par conséquent :

Recommandation 1.5

Le Comité recommande que le ministre du Commerce international exprime sa vive désapprobation à la Russie à l’égard des mesures protectionnistes qu’elle a prises pour réduire l’importation de machinerie agricole.

B)        COOL

Augmenter l’accès au marché est tout un défi en soi, mais maintenir l’accès déjà acquis peut bien représenter une tâche tout aussi difficile. L’exemple de la réglementation qui oblige la mention du pays d’origine sur étiquetage des produits aux états-Unis (communément appelé COOL) en est un exemple probant.

La règle finale du COOL a été publiée en janvier 2009 et est entrée en vigueur le 16 mars 2009. Elle assouplissait certaines exigences et permettait que les animaux provenant du Canada aux fins d’abattage immédiat et ceux nés au Canada, mais élevés et abattus aux états-Unis, soient étiquetés « Produit du Canada et des états-Unis » s’ils sont mélangés à l’abattoir avec des animaux nés, élevés et abattus aux états-Unis. à la suite de cette règle finale, le Canada a décidé de suspendre sa demande de consultations auprès de l’OMC et d’attendre la réaction des abattoirs américains et la mise en application de la règle.

Il reste que le Comité est convaincu qu’aucun pays ne devrait pouvoir s’en tirer si facilement quand il édicte des lois qui vont à l’encontre des accords commerciaux et de leurs propres engagements internationaux. Le Canada devrait disposer de mesures de représailles formelles pour exprimer son mécontentement et faire valoir qu’un partenaire commercial ne peut pas tout simplement faire fi des accords commerciaux lorsqu’il instaure des politiques. Le Comité tient de plus à souligner que pendant longtemps on a parlé des conséquences potentiellement désastreuses du COOL or, il faut maintenant enlever le mot « potentiellement » puisque ces conséquences sont actuellement désastreuses :

L'instauration de l'étiquetage obligatoire du pays d'origine aux états-Unis a eu l'effet d'une onde de choc dans un secteur déjà aux prises avec des pertes financières. Depuis 2009, les exportations de porcs vivants ont chuté de 40 p. 100 par rapport à la même période l'an dernier. De ce pourcentage, ce sont 30 p. 100 moins de porcs de sevrage et d'engraissement canadiens et 65 p. 100 moins de porcs de marché canadiens qui sont exportés aux états-Unis. C'est une perte annuelle d'environ 250 millions de dollars en exportations[10].

Comme c’est souvent le cas, derrière ces statistiques agrégées se cachent des cas individuels troublants :

La mise en place de l'étiquetage indiquant le pays d'origine a vraiment eu l'effet d'une gifle. Nous avions conclu un contrat à long terme avec l'usine à laquelle nous avions l'habitude de vendre nos produits, mais on nous a tout simplement annoncé un beau jour que l'usine n'acceptait plus de porcs canadiens. Nous sommes donc allés quémander auprès d'une autre usine, et nous avons négocié une entente qui nous offrait des retours moins intéressants par tête de bétail et qui nous obligeait à déménager nos pénates[11].

Or, le 20 février 2009, le secrétaire américain de l’Agriculture, M. Thomas J. Vilsack, a annoncé que même si la règle finale initiale s’appliquait et qu’elle entrait en vigueur comme prévu le 16 mars, il s’attendait à ce que les intervenants de l’industrie se plient volontairement aux pratiques d’étiquetage additionnelles. Par exemple, les animaux nés et élevés au Canada et abattus aux états-Unis pourraient être étiquetés « Nés et élevés au Canada et abattus aux états-Unis », et les animaux nés au Canada mais élevés et abattus aux états-Unis pourraient être étiquetés « Nés au Canada et élevés et abattus aux états-Unis ». En fait, ces exigences avaient été décrites dès le départ dans le Farm Bill de 2002, mais de nombreux intervenants américains qui voulaient des règles plus pratiques les avaient jugées excessives. Le secrétaire de l’Agriculture a également recommandé d’élargir la définition de produits alimentaires transformés pour inclure la viande salée, fumée, braisée, grillée ou étuvée qui, pour l’instant, n’est pas assujettie au COOL. Le respect des exigences est volontaire, donc non exécutoire, pourtant on sent une menace de poursuite si l’étiquetage est jugé inadéquat, comme l’indique le US Department of Agriculture (USDA) dans la lettre du 20 février 2009 aux représentants de l’industrie :

Le département de l’Agriculture examinera de près la conformité de l’industrie à la réglementation et les résultats relatifs aux mesures volontaires suggérées. Selon les résultats observés, j’examinerai avec soin s’il y a lieu d’apporter ou non des modifications à la règle afin de respecter l’intention du Congrès[12].

Le Canada a par la suite demandé la tenue de nouvelles consultations avec les états-Unis auprès de l’OMC sur le COOL. Ces consultations se sont tenues à l’été 2009 et ont été infructueuses. Au mois d’octobre 2009, le Canada a donc demandé l’établissement d’un groupe spécial chargé de juger de la compatibilité du COOL avec les règles de l’OMC.

Certains témoins qui ont comparu devant le Comité étaient d’avis que les mécanismes de l’OMC devraient être utilisés en dernier recours et uniquement pour régler ce différend, car ce processus est toujours long et les résultats très incertains.

Le Comité a voyagé à Washington les 4 et 5 juin 2009 pour rencontrer des représentants du Congrès, de l’Administration américaine et de l’industrie. Tout indique que l’étiquetage COOL est maintenant là pour rester et que seule une action à l’OMC permettra de changer cette situation. Le Congrès étudie également la possibilité d’étendre cette mesure à l’ensemble des produits transformés au sein d’un projet de loi sur la salubrité des aliments, alors que tous les représentants de l’industrie ont bien indiqué que cette mesure est un outil de marketing et non une mesure assurant l’innocuité des aliments.

Lors des réunions à Washington, les membres du Comité ont exprimé qu’une telle mesure a des conséquences bien au-delà de l’industrie de la viande rouge : elle constitue un précédent pour d’autres pays qui, voyant les états-Unis utiliser ce type de barrière non tarifaire, pourraient décider de les utiliser eux-mêmes et entraver le commerce international. Le Comité reste convaincu que l’étiquetage COOL aux états-Unis n’est rien de moins qu’une barrière non tarifaire au commerce purement destinée à entraver l’exportation de produits canadiens.

Les membres du Comité ont également fait valoir le caractère intégré du marché nord-américain de la viande rouge et des conséquences négatives du COOL sur l’industrie des deux côtés de la frontière. Pour bien des représentants au Congrès, ces conséquences sont en général peu connues, et les membres du Comité ont insisté sur le besoin de bien les évaluer. Les membres ont également appris que l’USDA aura complété ses inspections sur l’application du COOL d’ici le mois de novembre 2009. Par conséquent :

Recommandation 1.6

Le Comité recommande que le gouvernement évalue l’impact de l’étiquetage COOL sur l’industrie nord-américaine de la viande rouge et, en particulier, qu’il recueille des preuves pour déterminer si les compagnies qui auraient normalement acheté des produits canadiens continuent effectivement d’acheter du bœuf et du porc conformément aux exigences volontaires et à la règle finale.

C)        Secteur de la production

L’amélioration de la compétitivité du secteur agroalimentaire est peine perdue si elle n’est pas accompagnée d’une rentabilité adéquate des exploitations agricoles. Dans cette perspective, le Comité trouve préoccupante la situation financière des fermes bovines et porcines. Les producteurs de porcs ont d’ailleurs fait une demande auprès du ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire en vue d’obtenir une aide urgente qui pourrait les aider à traverser cette crise sans précédent. Certains producteurs ont toutefois émis des réserves étant donné que toute aide d’urgence pourrait engendrer des mesures de représailles de la part de nos partenaires commerciaux. Toutefois, une idée très intéressante est venue d’un témoin à ce sujet :

Une aide devrait être offerte pour la mise en œuvre de nouvelles technologies visant à réduire les coûts à la ferme. C'est une aide structurante et acceptable dans les règles de l'OMC. Les producteurs sont des gens ouverts d'esprit, innovateurs et prêts aux changements. Nous sommes déterminés à poursuivre nos actions pour ramener la rentabilité à la ferme et préserver cette industrie dont l'importance est cruciale pour le Québec. […] En lisant le rapport réalisé par l'Union européenne pour ce qui est de l'utilisation des boîtes vertes et des boîtes ambrées, on voit qu'il y a eu un transfert entre les boîtes ambrées et les boîtes vertes. La solution est qu'il faut travailler avec les boîtes vertes.
Que doit-on mettre à l'intérieur de ces boîtes? Ce qui doit s'y retrouver doit être en fonction de nos normes sur le plan environnemental, sur le plan de l'assurance-qualité et sur le plan du bien-être animal. C'est là qu'il y a de la place, et il y a beaucoup d'ouverture pour que le gouvernement puisse investir et aider nos producteurs agricoles[13].

Les états-Unis et l’Union européenne semblent avoir développé une certaine expertise dans l’utilisation des subventions permises sous la catégorie dite « de la boîte verte ». Une raison bien simple explique ce phénomène : ce type de subvention n’est sujet à aucune restriction sous les règles de l’OMC. Pour qu'une subvention soit éligible à la « boîte verte », elle ne doit pas avoir d’effet de distorsion sur le commerce. Ainsi, les programmes de soutien dans cette catégorie permettent d’octroyer des subventions qui ne sont pas fonction de la quantité ou du type de denrées produits, mais qui peuvent par contre être liées à des objectifs environnementaux ou même de compétitivité.

Le Comité croit que le Canada doit faire usage de la flexibilité que procure la boîte verte à l’OMC pour améliorer la compétitivité du secteur de la production agricole tout en aidant les producteurs en ces temps de crise. En particulier, cette approche cadrerait très bien avec une stratégie nationale de vérification de l’âge des animaux. Par conséquent :

Recommandation 1.7

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada mette de l’avant un programme qui financera, de façon pleinement compatible avec les critères de la catégorie « boîte verte » développée à l’OMC, des initiatives au niveau de la ferme qui favoriseront le développement des marchés comme un système de vérification de l’âge de l’animal par exemple.

La question de l’offre captive a aussi fait l’objet de discussion au Comité. Le Syndicat national des cultivateurs a mentionné que des situations où les animaux à la ferme sont contrôlés ou encore la propriété des abattoirs, pouvaient grandement fausser les prix du marché. Par exemple, dans une situation où les prix sont élevés et qu’il y a un surplus de production, les abattoirs peuvent tenter de ralentir leur approvisionnement provenant d’éleveurs indépendants et favoriser les approvisionnements provenant des éleveurs intégrés, ce qui aurait comme effet de réduire artificiellement le prix du marché. La situation inverse prévaudrait dans le cas où les prix du marché sont fortement dépréciés. Le Syndicat national des cultivateurs a proposé la solution suivante afin d’éliminer l’offre captive :

Notre première recommandation est d'interdire aux abattoirs de posséder et d'administrer du bétail. Le fait de mettre en vente des bovins dans le cadre d'enchères ouvertes et indépendantes entraîne d'importants avantages: un processus d'enchères plus vigoureux, un mécanisme de détermination des prix transparent, un accès accru des petits exploitants agricoles et des engraisseurs indépendants à des marchés importants, la possibilité pour les petits transformateurs d'acheter des bovins finis, et une protection contre les mesures de rétorsion des abatteurs[14].

Un témoin a toutefois noté que la question de l’intégration verticale et, plus largement, de la compétitivité des plus petits abattoirs est beaucoup plus complexe que certains voudraient le laisser croire :

Le problème est beaucoup trop complexe pour qu'on puisse simplement dire que l'intégration verticale, c'est mauvais, que Cargill, c'est mauvais ou que Tyson, c'est mauvais. La vérité, c'est que beaucoup des petites entreprises n'étaient pas viables, et c'est la raison pour laquelle elles ont été vendues ou ont fermé leurs portes. Burns est parti de l'Alberta il y a des années parce que les syndicats réclamaient des salaires plus élevés. La marge de profit de Burns était vraiment très mince. L'entreprise a tout simplement mis fin à ses activités. Je ne pense pas qu'il n'y ait de réponse rapide ou simple.
Il n'est pas facile d'établir des abattoirs régionaux. Ces installations exigent beaucoup d'eau. Il faut que le nombre de bovins qui y passent soit élevé pour qu'elles soient rentables. Rancher's Beef a connu beaucoup de problèmes dès le départ, mais nous avons aidé l'entreprise parce que nous essayions d'aider les éleveurs dans notre province à vendre leurs produits.
Il n'y a pas de réponse simple, monsieur. J'aimerais bien qu'il y en ait une[15].

L’effet que l’offre captive pourrait avoir sur les prix du marché demeure une sujet de débat parmi les témoins qui ont comparu devant le Comité. En effet, certains témoins se sont demandés si un marché peut vraiment être qualifié de « libre » si une proportion significative des acheteurs et des vendeurs est contrôlée par la même entité. Toutefois, d’autres se demandent comment justifier une intervention gouvernementale qui irait jusqu’à interdire la propriété et le contrôle des bovins à une entité donnée. De plus, il faudrait prendre en considération ce qu’une telle interdiction pourrait avoir sur les abattoirs qui appartiennent à des groupes de producteurs agricoles. Par conséquent :

Recommandation 1.8

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral entreprenne immédiatement une étude sur l’impact de l’offre captive sur les prix des animaux vivants dans le secteur du bœuf au Canada. Les résultats de cette étude devront être présentés devant le Comité permanent par des représentants du Ministère d’ici le 1 octobre 2010.

D)        Secteur de la transformation

La forte proportion d’animaux vivants exportés aux états-Unis fragilise grandement la compétitivité de l’industrie du bœuf au Canada puisque toute restriction sur l’importation d’animaux vivants canadiens peut créer un surplus d’animaux sur le marché intérieur, ce qui peut entraîner une chute brutale des prix sur le marché canadien. De plus, la grande concentration du secteur de l’abattage canadien peut empirer cette situation, comme l’a démontré le fonctionnement du marché lors de la crise de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB).

Le gouvernement canadien a annoncé, en 2009, 50 millions de dollars qui seront investis au cours des trois prochaines années pour renforcer la capacité des abattoirs au pays. Bien que plusieurs témoins aient émis leur opinion sur la façon de dépenser ce montant, un consensus semblait se dégager pour que ce montant serve en priorité à améliorer l’efficacité de l’infrastructure existante d’abattage au Canada et pour permettre à certaines entreprises de se spécialiser dans certains créneaux spécialisés :

Nous ne visons pas à accroître notre capacité avec ces 50 millions de dollars. Nous n'appuyons pas cela comme initiative dans ce pays. Nous avons amplement assez de capacité. Ce qui nous intéresse, ce sont des gains d'efficience[16].

Même si le niveau de concentration du secteur de l’abattage au Canada est une source d’inquiétude, des témoins ont signalé que le gouvernement se devait d’être prudent afin que les fonds ne servent pas à construire de nouveaux abattoirs qui opéreraient sur les mêmes marchés que les plus grands joueurs, ce qui pourrait rendre rapidement les nouvelles opérations vulnérables.

On a également mentionné que les montants provenant des 50 millions de dollars pourraient être versés sous forme d’investissement direct et non pas de prêt remboursable :

C'est dans le cadre du nouveau programme fédéral qui a été annoncé dans le budget du gouvernement en place — une aide de 50 millions de dollars aux industries de l'abattage du boeuf —, qu'on adresse aujourd'hui notre demande. On accueille bien ce programme, car on le voit d'un très bon œil.
On doit avoir un programme structurant, avec l'aide fédérale, c'est-à-dire un programme qui accorde des versements en capital au lieu de prêts à l'entreprise — entreprise qui n'a plus de capacité d'emprunt. Ce programme serait d'abord réservé aux projets soutenus collectivement et directement par des groupes de producteurs. Ce serait un programme accordé prioritairement aux entreprises dont la compétitivité est la plus touchée par la réglementation sur les MRS, et un programme dont bénéficieraient en premier lieu les entreprises dont la présence stratégique est indispensable pour le secteur des viandes rouges[17].

Les membres du Comité partagent cette approche. Par conséquent :

Recommandation 1.9

Le Comité recommande que le montant de 50 millions de dollars annoncé pour renforcer la capacité des abattoirs au pays soit dépensé :

  • sous forme d’investissement direct et de prêt remboursable;
  • pour améliorer l’efficacité des infrastructures d’abattage existantes et permettre à certaines entreprises de se spécialiser dans certains créneaux spécialisés.

On a présenté au Comité une proposition innovatrice au sujet du Programme international du Canada pour l'agriculture et l'alimentation (PICAA)[18], qui permettrait d’assister les entreprises agroalimentaires dans leurs efforts de développement des marchés intérieurs :

Typiquement, les activités de commercialisation nationale n'ont pas été admissibles à une aide financière dans le cadre de programmes tels le Programme international du Canada pour l'agriculture et l'alimentation, ou PICAA. Le CIB recommande au gouvernement de rendre admissibles à l'aide financière pour les secteurs agricoles en détresse les initiatives de commercialisation nationale[19].

Même si les marchés internationaux sont primordiaux pour l’industrie agroalimentaire canadienne, le Comité croit qu’il ne faut pas négliger les marchés intérieurs, notamment au moment où le phénomène d’achat de produits locaux prend une importance croissante. Par conséquent :

Recommandation 1.10

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada modifie le programme Agri-marketing pour que les initiatives pour accroître le marché intérieur pour les produits canadiens soient admissibles.

Dans le même contexte, il y a un fort consensus afin d’encourager la transformation des grains dans l’Ouest canadien, et notamment de promouvoir la création de produits de niche. Certains marchés dits de « niche » peuvent sembler de petits marchés aujourd’hui, mais ont le potentiel d’évoluer et de devenir des composantes importantes de la filière agroalimentaire, comme l’a illustré le Dr. Brian Fowler, professeur à l’Université de la Saskatchewan :

Au Québec, l'entreprise Première Moisson est un exemple des succès qui peuvent être remportés dans ces prétendus marchés à créneaux. Les efforts de recherche et de développement de cette entreprise comprennent une recherche systématique de nouveaux mélanges de cultivars et de caractéristiques de qualité propres à des pratiques de gestion des cultures qui permettent de mieux approvisionner des marchés en constante expansion[20].

Le Comité note que le CCB a déjà un programme nommé « du champ à l’assiette » qui promeut la production et la transformation de produits de niche à valeur ajoutée dans les Prairies. Le Comité est en faveur de l’extension de la portée de ce programme. Par conséquent :

Recommandation 1.11

Le Comité recommande que la Commission canadienne du blé augmente les volumes maximaux permis dans le cadre du programme « du champ à l’assiette ».

Au-delà des marchés de niche, certains soutiennent que la CCB est un obstacle à l’émergence, dans les Prairies, d’entreprises de transformation et de fabrication de produits à valeur ajoutée alors que d’autres pensent qu’elle donne aux agriculteurs un pouvoir sur le marché.

Les opposants de ce système à guichet unique, dont certains ont comparu devant le Comité, ont critiqué la commission au cours de l'automne 2007 en l'accusant de ne pas avoir affiché des valeurs aussi élevées que les prix au comptant obtenus par nos homologues américains à l'époque, soit environ 6 à 7 $ le boisseau. Il s'agissait de prix historiquement élevés, et la majeure partie de la récolte américaine a effectivement été vendue à ces prix. Les marchés étaient cependant loin d'avoir atteint leur maximum, et nous avons finalement réalisé des ventes à plus de trois fois ces valeurs, ce qui nous a permis en retour de payer les producteurs plus de 12 $ par boisseau, et ce, pour chaque boisseau vendu. Les producteurs américains de blé dur sont éblouis lorsqu'ils apprennent à quel prix nous avons vendu chacun de nos boisseaux — sans exception —, grâce à notre système de mise en commun[21].

M. Bast, président de la Western Wheat Growers Association, a indiqué au Comité que le Canada est un importateur net de pâtes alimentaires, bien qu’il soit le plus important producteur de blé dur au monde. De plus, il se fabrique aux états-Unis dix fois plus de pâtes alimentaires qu’au Canada, même si la production canadienne de blé dur est deux fois plus importante que celle des états-Unis. Il ne faut cependant pas croire qu’aucune transformation ne se fait dans les Prairies : en 2008, l’Ouest canadien a exporté cinq fois plus de farine aux états-Unis que l'inverse. Ainsi, 61 417 tonnes ont été exportées contre 11 601 tonnes importées, tandis que la moyenne sur cinq ans se situe à 54 658 tonnes, alors que les importations de farine américaine se sont chiffrées à 7 573 tonnes. De même, le secteur de la malterie a connu un essor dans l'Ouest canadien. La capacité de production de malt y a presque triplé en 20 ans et représente maintenant plus de 75 % de la capacité canadienne.

Augmenter les possibilités de transformation améliorerait la compétitivité des agriculteurs, car en ajoutant de la valeur aux denrées agricoles, le coût de transport représente une plus petite proportion du prix.


Tous les efforts du Canada pour développer de nouveaux marchés ou pour améliorer la compétitivité agroalimentaire seraient vains s’il n’y avait pas un certain degré de concurrence entre les entreprises fournissant les intrants agricoles et celles de la transformation et de la distribution alimentaire. La section suivante examine certains aspects de la concurrence dans le secteur agroalimentaire.

A)        Le Bureau de la concurrence et le niveau des prix

Selon les témoignages présentés au Comité, la façon d’opérer du Bureau de la concurrence, notamment sur l’utilisation ou non du niveau des prix pour juger du degré de concurrence sur un marché donné, a soulevé certaines questions. Ainsi, le secteur de la distribution alimentaire a connu un très fort mouvement de concentration avec pour résultat que les deux plus grands joueurs de ce secteur contrôlent maintenant 75 % du marché. Or, des témoins ont affirmé que le Bureau de la concurrence juge souvent que ce phénomène peut abaisser le niveau général des prix au détail, ce qui serait un élément démontrant que le niveau de concurrence est toujours à un niveau acceptable :

Le bureau ne s'y attachera pas, par contre, suivant les lignes directrices qui sont actuellement les siennes, et qui font qu'il s'intéresse uniquement au prix qui est demandé au consommateur au bout du compte. Même si le préambule de la loi, dont nous avons copie ici, affirme que le bureau cherchera tout au moins un peu à protéger les petites entreprises pour préserver une certaine stabilité sur le marché, il n'en est rien. Tant et aussi longtemps qu'il aura pour idée fixe les bas prix demandés au consommateur, le bureau ne s'attachera pas à ce genre de situation.
[…]
L'interprétation que font les responsables du bureau de la raison d'être de ce dernier, c'est que c'est le bas prix pour le consommateur qui compte avant toute chose. Nous pouvons vous donner toutes sortes d'exemples pour le démontrer. Par exemple, il y a quelques années de cela, il ne restait que deux grossistes en Ontario où je pouvais m'approvisionner, comme épicier, et il y a un grand qui faisait l'acquisition du dernier petit. Nous avons dit au bureau: si cela se fait, les indépendants ne pourront s'approvisionner qu'auprès de ce seul et unique fournisseur d'envergure. Les gens du bureau ont répondu que ce serait efficient et que ce serait bon pour le consommateur.[22]

Paradoxalement, lorsque questionné sur le prix élevé des engrais, le Bureau de la concurrence a émis les observations suivantes :

Il est important que vous compreniez que la Loi sur la concurrence n'est pas un outil pour réglementer les prix.
[…]
Cependant, ajuster l'offre à la demande ou imposer le prix le plus élevé que l'on puisse obtenir sur le marché est une stratégie qui peut être vue de différentes façons. On peut la considérer comme une tentative des entreprises de maximiser leurs bénéfices ou comme une forme abusive de fixation des prix. Toutefois, la Loi sur la concurrence n'est pas un moyen de réglementer les prix et elle n'interdit pas aux entreprises de fixer des prix élevés. Je reconnais néanmoins que les prix élevés ont des conséquences importantes pour les agriculteurs canadiens et pour les Canadiens en général, quoique la situation est différente, comme je l'ai dit tout à l'heure, quand les prix élevés découlent d'une infraction à la loi, par exemple un complot pour fixer les prix ou prendre une entente anticoncurrentielle, comme pour réduire la production[23].

Bien qu’il apparaisse prématuré de conclure que des prix élevés ne seraient pas jugés comme un indicateur de faible concurrence ou, de façon oposée, que des prix faibles seraient considérés comme un indicateur de concurrence acceptable, le Comité juge que des éclaircissements sont nécessaires. Par conséquent :

Recommandation 2.1

Le Comité recommande que le Bureau de la concurrence clarifie sa position quant au rôle que le niveau des prix joue dans ses évaluations du degré de concurrence sur un marché donné. Cette réponse devrait être fournie par un rapport écrit au Comité.

Recommandation 2.2

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada, en collaboration avec le Bureau de la concurrence, entreprenne une étude afin d’examiner les problèmes de concurrence dans le secteur agricole au 21e siècle et le rôle que devraient jouer les organes qui régissent la concurrence et appliquent la réglementation dans ce secteur. L’étude portera sur la dynamique et la concurrence dans les marchés de l’agriculture, notamment sur le pouvoir des acheteurs et l’intégration verticale. Elle abordera également les répercussions de la concentration dans la sphère agricole sur le prix des aliments, l’effet de la réglementation, des lois et des programmes en matière agricole sur la concurrence, dans la mesure où les brevets et la propriété intellectuelle ont une incidence sur la commercialisation ou la production agricole et les pratiques du marché : écarts entre les prix, contrats à terme, possession du bétail par les abattoirs avant l’abattage, transparence des marchés et concentration accrue chez les détaillants.

B)        Concurrence sur le marché des engrais

Beaucoup de discussions ont eu lieu au Comité concernant le prix des engrais. La position dominante de certains joueurs sur le marché est une source d’inquiétude pour les producteurs agricoles, dont plusieurs croient que les prix des engrais ne reflètent pas des conditions de véritable concurrence.

La compagnie PotashCorp (anciennement Potash Corporation of Saskatchewan), étant donnée sa taille et sa dominance sur le marché, est un bon exemple qui permet d’examiner le marché des engrais dans le contexte de la Loi sur la concurrence. Le marché de la potasse en particulier est très fortement concentré, PotashCorp étant de loin le plus gros producteur mondial de ce type d’engrais. De plus, la compagnie PotashCorp est relativement ouverte quant au fait qu’elle restreigne sa production afin de maintenir un certain niveau de prix de la potasse sur les marchés :

Des rapports provenant du marché de détail nous disent que les producteurs de potasse ont perdu la boule parce qu’ils ont maintenu leurs prix : voyez quelle aubaine représentent le phosphate et l’azote. Quand on regarde les chiffres, on voit que la baisse de demande d’azote et de phosphate est également substantielle, mais que leur prix a chuté précipitamment. Le prix déprimé n’a donc pas fait augmenter la demande de ces engrais. Cela n’a fait que détruire la valeur des compagnies d’engrais.
Il est prouvé que baisser le prix n’augmente pas la demande d’engrais. Les engrais, ce ne sont pas des chaussures, comme je l’ai déjà dit. Dans un solde à moitié prix, les gens vont peut-être acheter deux paires de souliers, mais ils n’achèteront pas deux fois plus d’azote ou de phosphate parce qu’il est à moitié prix. On penserait que les gens auraient compris cela après tant d’années dans le marché des engrais. (Traduction)
William J. Doyle, Président directeur général, PotashCorp (extrait de la transcription de la conférence téléphonique du premier trimestre 209 de PotashCorp 23 avril 2009) http://www.potashcorp.com/investor_relations/financial_performance/ quarterly_results/conference_call/?year=2009&quarter=Q1)

Il est intéressant de noter que les prix des produits de base ont fortement chuté à la fin de 2008 et au début de 2009, mais que cette chute ne semble pas avoir affecté la potasse dans la même proportion. Le Tableau 1 montre le niveau de production et les prix des engrais générés par PotashCorp dans la première moitié de 2009.

Tableau 1- Certaines données sur la production et les prix obtenus par PotashCorp pour les engrais dans la première moitié de 2009 (les prix sont en dollars U.S.).
 

Pour les six mois finissant le 30 juin

 

2009

2008

Change

Potasse

Production (milliers de tonnes KCls)

1 666

4 887

-66%

Prix moyen par MT:

     

Amérique du Nord

$601,75

$355,12

69%

Outre mer

$447,19

$347,56

29%

Phosphate

Production (milliers de tonnes de P2O5)

613

1 037

-41%

Prix moyen par MT:

     

   Engrais – phosphates liquids

$320,94

$498,44

-36%

   Engrais – phosphates solides

$318,29

$834,31

-62%

Azote

Production (milliers de tonnes de N)

1 280

1 422

-10%

 Prix moyen par MT:

$252,62

$420,44

-40%

Source : PotashCorp, résultat du deuxième trimestre 2009 (http://www.potashcorp.com/investor_relations/financial_performance/quarterly_results/financial_statement/?year=2009&quarter=Q3).

Le Comité note que les prix de la potasse sont en forte hausse lors de la première partie de 2009 alors que les prix du phosphate et de l’azote sont en baisse. à la lumière de ces données, il appert donc que PotashCorp ait obtenu un certain succès dans sa volonté de réduire sa production afin de maintenir les prix de la potasse à un niveau qu’elle juge acceptable pour ses actionnaires. Au sujet des prix élevés de la potasse, le Bureau de la concurrence a fait le commentaire suivant devant le Comité :

Je pense que la seule réponse que je peux vous donner à ce propos est que je comprends les inquiétudes des gens au sujet des prix élevés. Nous ne nous contredisons pas du tout sur ces questions. J'essaie en fait de vous expliquer quels sont les moyens prévus par la loi, quelle est la portée de la loi et quelles dispositions pourraient s'appliquer à cette conduite. Je ne veux pas répéter mon argument. Les prix élevés ne sont pas en soi contraires à la loi, mais s'ils découlent d'une infraction à la Loi, nous avons le pouvoir d'intervenir[24].

Ces propos font ressortir que des prix élevés pourraient indiquer que les dispositions de la Loi sur la concurrence ont été enfreintes dans la mesure où ils ont été obtenus par des activités contraires à cette même Loi. Des activités, comme la collusion entre compétiteurs pour maintenir les prix ou restreindre la production à un certain niveau, seraient de nature à contrevenir à la Loi. Par contre, une entreprise en position de dominance, qui décide de réduire sa production ne va pas nécessairement à l’encontre de la Loi. Le Comité considère toutefois que faire une distinction entre ces deux situations soulève un certain paradoxe, car la résultante sur les prix du marché peut être exactement la même. Ainsi, dans le cas où quatre entreprises qui contrôleraient 10 % chacune du marché faisaient collusion afin de réduire leur production et ainsi maintenir ou augmenter le prix du marché, une telle entente serait jugé illégal. Par contre, advenant qu’une seule compagnie contrôlant 40% du marché décidait de réduire sa production afin de maintenir ou d’augmenter les prix du marché, une telle approche ne serait pas nécessairement jugée illégale au sens de la Loi sur la concurrence. Pourtant, le résultat serait exactement le même sur le prix du marché.

Même si la Loi semble faire une distinction entre ces deux situations, le Comité considère que, pour les producteurs agricoles, c’est du pareil au même puisque les prix demeurent artificiellement élevés pour la potasse. à ce titre, le Comité permanent a d’ailleurs déjà passé une motion demandant que le Bureau de la concurrence étudie les pratiques de fixation des prix et de commercialisation de l’industrie des engrais au Canada. Par conséquent :

Recommandation 2.3

Le Comité recommande que le Bureau de la concurrence, dans le cadre de son étude sur la pratique de fixation des prix et de commercialisation de l’industrie des engrais, examine de façon exhaustive le niveau de concurrence qui a mené au prix pour la potasse que l’on a connu au cours de la première moitié de 2009.

D’une manière plus générale, la Canadian Association of Agri-Retailers (CAAR) a fait remarquer au Comité qu’un nombre de petits détaillants indépendants d’intrants agricoles décident de vendre leur fonds de commerce à des plus gros compétiteurs. Dans les Prairies, les sociétés Viterra mais aussi Agrium Inc. ont récemment fait l’acquisition d’un certain nombre de détaillants d’engrais indépendants. Ces acquisitions semblent indiquer une plus grande prise de contrôle du marché des engrais de l’Ouest canadien par un petit nombre de sociétés qui contrôleront bientôt, dans le secteur agricole, à la fois la fabrication et la commercialisation.

Le Prince Edward Island Potato Board a également fait référence à une situation similaire observée dans les provinces atlantiques où les principaux acheteurs de produits agricoles sont aussi vendeurs d’intrants. Devant le nombre restreint d’acheteurs pour leurs pommes de terre, les agriculteurs se retrouvent en position de faiblesse lorsqu’ils négocient leurs contrats et peuvent se retrouver forcer de s’approvisionner en intrants chez ces mêmes acheteurs.

Le Comité est d’avis que ces situations pourraient devenir problématiques pour les agriculteurs, car dans les deux cas elles limitent le choix de fournisseurs.

C)        La concurrence dans le secteur de la distribution alimentaire

Il est intéressant de constater que les épiciers indépendants se montrent généralement très satisfaits des modifications apportées à la Loi sur la concurrence. C’est davantage l’application de l’esprit et de l’intention de la Loi par le Bureau de la concurrence qu’ils questionnent :

Nous ferons tout de même valoir aujourd'hui que ces modifications-là ne seront pas très utiles si le bureau n'est pas prêt à faire respecter les principes énoncés dans le préambule de la Loi. Comme l'objet de la Loi le dit, de même que le site Web, le bureau existe non seulement pour protéger le consommateur, mais aussi pour s'assurer que les petites entreprises peuvent trouver leur place dans le paysage commercial du Canada. C'est énoncé dans le préambule de la Loi et sur le site Web. Cependant, si vous rencontrez les gens du bureau, ils vous diront qu'ils se soucient seulement du consommateur, et ils considèrent les bas prix comment étant la panacée, point à la ligne. Il faut un certain équilibre ici. Il faut que le bureau puisse examiner de près les situations où la conduite d'un grand peut conduire un indépendant à la faillite et déterminer, à long terme, ce qui est bon pour le consommateur. Il est donc très important que le bureau tienne compte de l'esprit et de l'intention de la Loi[25].

Le Comité note que la mention de la participation des petites et moyennes entreprises dans l’économie canadienne n’est pas dans le préambule de la Loi sur la concurrence, mais bien plutôt dans la Loi elle-même (l’accent a été ajouté) [26]:

Objet
1.1 La présente loi a pour objet de préserver et de favoriser la concurrence au Canada dans le but de stimuler l’adaptabilité et l’efficience de l’économie canadienne, d’améliorer les chances de participation canadienne aux marchés mondiaux tout en tenant simultanément compte du rôle de la concurrence étrangère au Canada, d’assurer à la petite et à la moyenne entreprise une chance honnête de participer à l’économie canadienne, de même que dans le but d’assurer aux consommateurs des prix compétitifs et un choix dans les produits.

Depuis un certain temps déjà, les membres du Comité tentent de comprendre comment la concentration que nous connaissons dans la distribution alimentaire peut être compatible avec l’objet de la Loi sur la concurrence. Cette question est d’autant plus centrale quand on considère le phénomène des ristournes demandées pour l’espace-tablette, une pratique qui affecte particulièrement les épiciers indépendants :

Nous avons aussi des problèmes en ce qui concerne les fournisseurs. Vous devez comprendre que la plupart des grands distributeurs au Canada travaillent d'une certaine façon avec les fabricants: ils donnent en location leur espace-tablette, de sorte qu'il faut verser une somme d'argent pour que le produit soit mis sur la tablette. Le prix exigé pour cela, le prix de location, continue d'augmenter à un rythme très rapide. De fait, comme quelqu'un me l'a dit la semaine dernière, ça monte sans relâche, sans cesse, et la situation à cet égard est la pire qu'on ait vu en 40 ans. Ce sont les frais de marchandisage. Selon certaines estimations, le Canada vient au deuxième rang dans le monde pour ces frais-là; ils ne seraient plus élevés qu'en Allemagne. Si on a affaire à un véritable indépendant qui cherche à s'approvisionner auprès du même fabricant, on voit qu'il ne peut pas peser autant sur la décision, obtenir le même soutien. évidemment, il doit alors se contenter de moins[27].

Pour ajouter aux difficultés des épiciers indépendants, particulièrement les franchises, les ententes de fidélité rendent souvent très ardues l’accès à des marques nationales ou encore aux produits locaux. Par conséquent :

Recommandation 2.4

Le Comité recommande que le Bureau de la concurrence, dans sa capacité d’assurer à la petite et à la moyenne entreprise une chance honnête de participer à l’économie canadienne, examine l’incidence du phénomène des ristournes pour l’espace-tablette et des ententes de fidélité dans le secteur de la distribution alimentaire, ainsi que la légalité d’éliminer ces pratiques.

Alors que « l’achat local » en agroalimentaire prend de l’ampleur, le Comité a été surpris d’apprendre que les grandes compagnies de distribution alimentaire font transiter une grande partie de leur approvisionnement par un centre de distribution unique. Pour un producteur local, cela signifie qu’il ne peut plus dorénavant livrer directement son produit au supermarché de sa région, mais doit plutôt le livrer obligatoirement au centre de distribution centralisé, comme Toronto, avant de voir son produit revenir vers un supermarché régional. Il semble que les grandes chaînes de distribution justifient une telle approche sur la base d’une meilleure logistique et d’une amélioration de l’efficacité. Le Comité est toutefois d’avis que cette pratique peut avoir des effets néfastes pour l’environnement ainsi que pour le développement et la mise en marché des produits régionaux. Le Comité note cependant qu’il est difficile pour les gouvernements de s’ingérer dans les décisions d’affaires des entreprises concernant leur logistique d’approvisionnement. Il n’existe actuellement qu’un seul terminal situé à Toronto.

Les grands distributeurs disposent d'un réseau très bien défini et recourent à des entrepôts centraux. Cela dit, plusieurs options se présentent en ce qui concerne le transport. D'abord, à Toronto, nous avons un truc qui s'appelle le « Marché des produits alimentaires ». Au Marché des produits alimentaires — et vous en êtes peut-être conscient, je ne sais pas d'où vous venez —, on reçoit des produits venant de toutes les régions du monde, mais en particulier de l'Ontario. Tous les jours, les responsables, y compris ceux des grands magasins, s'y rendent pour acheter des produits. Le produit frais arrive dans leurs magasins le jour même.
Il n'y a qu'un marché des produits alimentaires de cette catégorie au Canada, Monsieur le Président. Il serait bien d'envisager d'en construire un à Montréal et un autre à Vancouver. Nous pourrions facilement y arriver, et cela permettrait d'atteindre deux buts. Cela permet à l'agriculteur et aussi à l'épicier indépendant et au groupe du secteur de l'alimentation de se distinguer. Cela est très important; c'est une chose que j'envisagerais. J'aimerais revenir à une question que nous avons abordée la dernière fois où nous sommes venus témoigner[28].
Selon nous, il serait merveilleux que le gouvernement fédéral et la province s'associent pour aménager des marchés des produits alimentaires à Montréal et à Vancouver, ce qui serait merveilleux pour l'ensemble de la chaîne. Ce serait bon pour tout le monde, et ce serait la fin d'une situation absurde où des détaillants néo-écossais viennent acheter des bleuets à Toronto[29].

Le Comité croit qu’en cette période de récession économique, l’établissement de deux nouveaux terminaux de produits alimentaires, l’un à Vancouver et l’autre à Montréal, pourrait constituer des investissements en infrastructure économiquement pertinents. Ces investissements pourraient en effet avoir des retombées positives à long terme, particulièrement pour les petites et moyennes entreprises du secteur agroalimentaire. Par conséquent :

Recommandation 2.5

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral fasse une étude de faisabilité, sous forme d’analyse coûts-bénéfices, sur la possibilité d’offrir des incitatifs pour l’établissement de deux nouveaux terminaux de produits alimentaires au Canada. L’analyse devrait notamment inclure l’impact positif à long terme sur le développement des petites et moyennes entreprises du secteur agroalimentaire au Canada.

La question de transformer l’Association Interac d’une organisation à but non lucratif à une organisation à but lucratif était une préoccupation importante pour certains témoins. On a mentionné au Comité que les changements d’alors proposés au statut d’Interac pourraient être particulièrement désavantageux pour les plus petits magasins d’alimentation et les épiciers indépendants. En effet, de 50 à 75 % de toutes les ventes au détail de nourriture sont faites par carte de débit et la Fédération canadienne des épiciers indépendants a d’ailleurs illustré de la façon suivante les implications que pourrait avoir la transformation de l’Association Interac en entité à but lucratif sur ces membres:

La question des cartes de débit revêt pour nous une importance énorme; c'est un enjeu de taille.
[…]
Vous me direz que ce n'est pas si grave; c'est la même chose pour tout le monde. Ce n'est pas vrai, car certains de mes concurrents, les grandes sociétés, ont peut-être leur propre carte de crédit et leur propre accès aux systèmes de cartes de débit. Leurs coûts réels ont peut-être été réduits. Le risque lié à vos négociations actuelles, à la résiliation de l'entente entre le Bureau de la concurrence et Interac, est exacerbé dans la structure concurrentielle, surtout dans notre industrie[30].

Le Comité est d’avis que transformer une association à but non lucratif à une société à but lucratif renvoie systématiquement à la question suivante : lucratif pour qui? Le Comité ne doute pas que cette réforme aurait pu avoir des effets potentiellement positifs sur certaines institutions financières ou pour les grands oligopoles de la distribution alimentaire, qui seraient alors probablement en mesure de négocier des rabais de volume sur les frais Interac ou privilégier leur propre réseau de carte de crédit dans un environnement dérèglementé. Par contre, le Comité croit qu’un tel scenario pourrait nuire aux petits magasins d’alimentation ou encore les épiciers indépendants.

Le Comité est donc satisfait de la décision rendue en février 2010 par le Bureau de la concurrence qui rejette la demande de l’Association Interac pour devenir une organisation à but lucratif. Le Bureau de la concurrence a notamment exprimé son désaccord que changer l’Association Interac en une corporation à but lucratif augmenterait la concurrence[31].

D)        Concurrence dans le secteur de l’abattage

En plus de la question de l’offre captive qui a été mentionnée plus tôt dans le rapport, le Comité a entendu plusieurs commentaires portant sur la concentration de la capacité d’abattage au pays. La compagnie Tyson a indiqué en juin 2008 son intention de vendre le plus grand abattoir au Canada, celui de Brooks (Alberta), à la compagnie XL Foods. Si la vente se concrétisait, Cargill et XL Foods détiendraient 80 % de la capacité d’abattage au pays. Le Bureau de la concurrence a annoncé le 27 février 2009 qu’il ne s’opposait pas à la vente pour le moment car les abattoirs américains fournissent une concurrence qui n’existe plus dans l’industrie canadienne de l’abattage.

Le bureau a procédé à un examen très complet de cette affaire, interrogeant plus de 50 participants du secteur dans l'Ouest canadien. […] à la suite de notre enquête de la transaction XL-Lakeside, nous étions aussi d'avis que les transformateurs américains situés dans les états du Nord-Ouest et du Midwest, aux états-Unis, représentaient des alternatives concurrentielles pour les producteurs de bovins de l'Ouest canadien. Les participants du secteur ont confirmé que les transformateurs des états-Unis achetaient d'importants volumes de bovins d'abattage et continueraient d'avoir une influence sur les prix payés aux producteurs de bétail canadiens après la fusion[32].

Le Bureau de la concurrence va cependant réévaluer son effet sur la concurrence une fois que la mise en place de l’étiquetage mCOOL (étiquetage obligatoire du pays d’origine) et la réaction des abattoirs américains à ces mesures seront clarifiées.

[…] nous avons clairement fait savoir aux parties et au public que nous continuerons à surveiller le secteur et à réévaluer l'impact de la transaction sur la concurrence, à la lumière de tout fait nouveau lié à la loi MCOOL. Les membres du comité peuvent être assurés que le bureau n'hésitera pas à prendre les mesures correctives appropriées si son évaluation devait révéler que la transaction a empêché ou réduit sensiblement la concurrence ou aura vraisemblablement cet effet[33].

En effet, selon le Conseil canadien des viandes, si les animaux ne peuvent plus être abattus aux états-Unis, le marché canadien deviendra aussi dysfonctionnel qu’il l’était en 2003 quand la frontière américaine s’est fermée en réaction à la maladie de la vache folle. On peut prévoir qu’une concurrence moindre pourrait entraîner une situation extrêmement dommageable pour l’industrie du bétail pour une longue période. Par conséquent :

Recommandation 2.6

Le Comité recommande que le Bureau de la concurrence continue sa surveillance étroite du marché de l’abattage des bovins dans le contexte de l’application de l’étiquetage obligatoire COOL aux états-Unis. Le Comité recommande également que le Bureau prenne action quand certains indicateurs démontreront que la compétition qu’exercent les abattoirs américains pour l’achat d’animaux canadiens est en train de s’estomper.


La recherche et le développement dans l'agriculture primaire représentent la colonne vertébrale de notre compétitivité nationale, qui exige des cultures qui vont prospérer dans notre climat canadien difficile. Il est ridicule de penser que l'on pourrait simplement importer une formule de financement et de recherche d'un autre pays — comme l'Australie, par exemple — comme solution à tous nos problèmes. Il nous faut une solution proprement canadienne qui tienne compte de nos réalités[34].

Si un sujet fait l’unanimité parmi les témoins, c’est bien celui de la recherche agricole. L’innovation technologique est l’un des meilleurs moyens d’améliorer la compétitivité des agriculteurs canadiens à travers des gains d’efficacité, la hausse ses rendements et le développement de produits innovants.

De nombreuses études ont documenté le fait que les rendements sur investissement dans la recherche agricole sont relativement élevés. Le Dr. Kurt Klein, professeur au département d’économie de l’Université de Lethbridge, a notamment mentionné ses études montrant des taux de rendement annuels de l’ordre de 30 % sur les investissements publics dans la sélection du blé et la recherche sur le bœuf. Brian Otto, président de la Western Barley Growers Association, a également signalé une étude de l'Université de la Saskatchewan, qui conclut que chaque dollar investi dans la recherche sur le blé produit un rendement net de 4 $, et chaque dollar investi dans la recherche sur l'orge produit un rendement net de 12 $.

La recherche a cependant fortement évolué depuis la fin des années 1980. D’une manière générale, l’engagement des gouvernements, des universités et, dans une certaine mesure, du secteur privé envers la recherche agricole a diminué depuis cette période[35] et la nature de la recherche a changé. Par exemple, le secteur privé a pris une place plus importante dans certains domaines comme la sélection végétale. Selon le Dr. Klein, l’entrée en vigueur de la Loi sur la protection des obtentions végétales (LPOV) en 1990, a permis au gouvernement fédéral de réduire son engagement dans certains domaines de recherche où le secteur privé pouvait investir et en retirer des bénéfices. Dans les 10 années qui ont suivi l’entrée en vigueur de la LPOV, le secteur privé a approximativement triplé ses investissements dans la sélection végétale. Selon l’Association canadienne du commerce des semences (ACCS), le secteur privé effectue maintenant 39 % de l'investissement total dans la recherche et le développement des nouvelles variétés, suivi d'Agriculture et Agroalimentaire Canada (21 % des investissements), des provinces (6 %), et des agriculteurs (environ à 4 %).

Les gouvernements, notamment le gouvernement fédéral, ont mis davantage l’accent sur des projets plus en aval de la production et permettant des gains plus rapides. Le gouvernement fédéral a également privilégié l’assistance à la recherche par l’intermédiaire de programmes de contribution ou à frais partagés accessibles à toute communauté scientifique canadienne. Ces programmes du gouvernement fédéral sont encore importants comme le montrent les annonces du 19 mars 2009 sur trois initiatives concernant le biodiesel, l’étude des bienfaits pour la santé des légumineuses à grain, et la conception de technologies pour accroître la valeur industrielle de la paille de céréales résiduelle.

Les producteurs agricoles ont également développé des stratégies de recherche financées en partie à partir du système de prélèvement sur les ventes. L’industrie du miel a, par exemple, créé son propre fonds de recherche pour pallier la diminution du financement de la recherche par les différents gouvernements. De son côté, l’industrie du canola concentre ses efforts de recherche sur les innovations liées à la santé et à la nutrition puisqu’elle bénéficie d’investissements importants de la part du secteur privé dans d’autres domaines comme la sélection végétale et des systèmes de production.

Malgré les efforts des agriculteurs et les fonds accordés par le gouvernement fédéral, tous les témoins ont insisté pour que la recherche publique au sein des centres de recherche d’AAC joue encore un rôle primordial. Ces centres de recherche d’AAC constituent une source inestimable d’expertise et de nombreux témoins craignent que cette source se tarisse peu à peu.

Les techniques de culture actuelles, telles que le semis direct, l’optimisation des engrais et les rotations céréales-légumineuses sont le résultat de la recherche agronomique menée par les gouvernements fédéral et provinciaux. Ces recherches qui n’offrent pas de résultats à court terme n’attireront jamais les investissements privés. La structure du secteur, qui se compose de milliers d’exploitations agricoles, limite également la capacité des agriculteurs à mener leurs propres efforts de recherche. Or les témoins ont indiqué que la recherche agronomique, traditionnellement conduite par le gouvernement fédéral, a été négligée.

Le budget de base de la recherche aurait diminué en terme réel et il y aurait une érosion du nombre de chercheurs. L’industrie craint très sérieusement que de nombreux chercheurs, notamment les phytogénéticiens, qui devront partir à la retraite dans un avenir proche, ne soient pas remplacés à temps. Cela pourrait prendre des années pour rebâtir toute l’expertise. Les producteurs de grains du Canada ont également mentionné que les dépenses d'entretien des installations de recherche ont fait l'objet de coupures : dans certains cas, des laboratoires flambants neufs n’ont pas les crédits pour acheter les équipements ou les outils qui leur permettraient de travailler.

Certains témoins ont également fait part au Comité du manque d’appui des gouvernements à la vulgarisation de la recherche et des connaissances techniques. Selon M. Paul Rouillard de la Fédération des producteurs d'agneaux et de moutons du Québec, le point le plus important pour améliorer la compétitivité de la filière ovine est de rendre accessibles les services-conseils auprès des producteurs. M. Lee Townsend de Wild Rose Agricultural Producers a également souligné le manque de service de vulgarisation dans l’industrie du miel.

Le Conseil canadien du Canola a recommandé que le gouvernement du Canada crée des partenariats avec l’industrie afin de déterminer les besoins de chaque produit agricole en terme de recherche ainsi que les meilleurs endroits où cette recherche peut être entreprise. Dans le cadre de Cultivons l’avenir, AAC s’est déjà engagé à élaboré un plan d’action global de recherche qui permettra d’exploiter au mieux les ressources scientifiques du gouvernement, du milieu universitaire et du secteur privé. Bien que le Comité appuie cette approche, elle pourrait révéler des manques criants dans certains domaines de recherche traditionnellement menée par le gouvernement fédéral et identifiée comme essentielle par les témoins. Ce plan d’action global de recherche devra s’accompagner d’une augmentation substantielle de la capacité de recherche au sein du gouvernement fédéral. Par conséquent :

Recommandation 3.1

Le Comité recommande que le gouvernement évalue de façon exhaustive sa capacité scientifique et réaligne et/ou augmente ses ressources avec les besoins et manques identifiés par le plan d’action de recherche mené au sein de Cultivons l’avenir.

Il est clair qu’un réinvestissement dans la recherche publique ne pourra combler tous les besoins du secteur. C’est pourquoi il devra s’accompagner d’un effort pour encourager l’investissement privé dans certains domaines. Par exemple, bien que les compagnies membres de l'ACCS ont investi plus de 56 millions dans la sélection végétale en 2007 et prévoient presque doubler cet investissement à 106 millions de dollars d'ici 2012, il faut noter que 96 % de ces investissements du secteur privé iront à trois types de culture à savoir le canola, le maïs et le soya. Les investissements dans le développement de nouvelles variétés de céréales, de plantes fourragères et des autres cultures vont diminuer d'ici 2012. D’autres témoins ont confirmé que les fonds totaux pour la recherche sur la sélection des cultures traditionnelles comme le blé et l’orge sont en baisse.

Certains font un lien direct entre la vigueur de la recherche et la compétitivité de l’agriculture canadienne. Grâce à l’introduction de nouvelles variétés de canola, cette production s’est fortement accrue et a permis de faire du Canada un chef de file mondial. à l’inverse, la part du Canada sur le marché mondial du blé est passée de 23 % il y a 15 ans à 15 % aujourd’hui. L’amélioration du cadre réglementaire visant les nouvelles variétés doit donc être une priorité.

Il existe tout d’abord un lien direct entre les investissements et la propriété intellectuelle. Les cultures bénéficiant de la plus grande part des investissements du secteur privé en recherche et développement (canola, maïs et soya) partagent notamment un système amélioré de protection de la propriété intellectuelle — elles peuvent par exemple contenir des séquences génétiques brevetées, ou ce sont des variétés hybrides. Selon l’ACCS, le Canada est fortement défavorisé à ce chapitre pour la plupart des autres cultures. Les semenciers ont notamment constaté qu’il est possible de bien vendre une nouvelle variété de céréale la première année de son lancement, mais que les ventes chutent fortement la deuxième année et davantage les années suivantes. Comme il faut de 10 à 12 ans pour concevoir une nouvelle variété, il devient très difficile pour une entreprise privée de penser à développer une nouvelle variété lorsqu'elle ne pourra en tirer qu'une ou deux années de ventes.

Au Canada, La LPOV est fondée sur le modèle établi par la version révisée en 1978 de la Convention pour la protection des obtentions végétales de l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV). Or presque tous les autres pays développés se conforment maintenant à la version de l’UPOV révisée en 1991, qui accorde une protection additionnelle aux sélectionneurs de plantes. Cette protection constitue un petit incitatif de plus pour se livrer à la sélection. De plus, certains pays vont beaucoup plus loin que la convention de l’UPOV de 1991. Par exemple, les semenciers américains et australiens peuvent faire breveter des variétés de plantes, une protection beaucoup plus forte qu’un droit d’obtention végétale, puisqu’elle empêche les agriculteurs de conserver une partie de leur récolte pour l’utiliser comme semence l’année suivante.

La Convention de l’UPOV révisée en 1991 a été signée par le Canada en 1992 et pour la ratifier, le Canada doit apporter des modifications à la LPOV. Ces modifications ont fait l’objet d’un projet de loi mort au Feuilleton à la fin de la 1re session de la 36e législature en 1999. Depuis, l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) a repris des consultations, qui ont pris fin en mars 2005. Le Comité est d’avis que la modernisation de la LPOV doit devenir une priorité. Par conséquent :

Recommandation 3.2

Le Comité recommande que le gouvernement revoie sa politique de protection de la propriété intellectuelle en ce qui concerne la sélection des plantes et prépare un plan d’action législatif pour mettre en place cette politique révisée qui devra aussi considérer la capacité des agriculteurs à garder leurs propres semences.

Recommandation 3.3

Le Comité recommande que le gouvernement renouvelle et accroisse le système canadien financé par l’état d’amélioration des plantes et de développement des variétés, et s’assure que la sélection et le développement se fasse en coopération avec les stations de recherche publiques et les universités.

En plus d’une révision de la politique de protection des obtentions végétales, l’ACCS a proposé l’instauration d’un incitatif fiscal pour encourager l’utilisation de semences certifiées. L’ACCS suggère que les agriculteurs soient autorisés à déclarer 155 % du coût des semences certifiées comme une dépense aux fins de l’impôt sur le revenu. Ceci rendrait le coût des semences certifiées égal à celui des semences conservées par les agriculteurs. Selon l’ACCS, l'impôt sur le revenu auquel renoncerait le gouvernement si l'incitatif fiscal entraînait une utilisation accrue de semences certifiées (de 30 % à 50 %), serait de l'ordre de 89,5 millions de dollars. Cependant, l'augmentation du revenu annuel pour les seuls agriculteurs découlant de l'introduction de huit nouvelles variétés se chiffrait à plus de 170 millions de dollars.

Les témoins ont également appelé une réforme du système canadien d’enregistrement des variétés. Ils sont nombreux a avoir noté que l’abolition du critère de distinction visuelle des grains (DVG) dans le système d’enregistrement des variétés de blé a permis d’accélérer la mise au point de nouveaux cultivars : après six ans au cours desquels aucune nouvelle variété de blé d'hiver n'a été présentée, trois nouvelles variétés ont été homologuées cette année.

À l’issue d’une série de consultations qui durent depuis une dizaine d’années, le gouvernement a également publié en juin 2008 dans la partie I de la Gazette du Canada des modifications réglementaires visant la mise en place d'un nouveau système d'homologation des variétés de semences. En vertu de la proposition de règlement, les cultures seraient classées en trois groupes correspondant à des processus d’homologation différents. Pour le premier groupe, le processus d’homologation serait identique au processus actuel; pour les deux autres, le processus serait simplifié. Aucune action n’a cependant été prise depuis la fin de la période de commentaires en août 2008. Cependant, exception faite de quelques variétés mineures, aucune culture n'a été classée dans l'un des deux groupes qui bénéficieraient d’un système d’homologation simplifié, et il faudra encore apporter des changements à la réglementation pour ce faire.

Pour les trois cultures bénéficiant d'investissements élevés du secteur privé, l’industrie a été en mesure de composer avec le système actuel. En effet, le maïs et le soya non oléagineux ne sont pas assujettis à l'homologation des variétés. En ce qui concerne le canola et le soya, les comités de recommandation des variétés ont travaillé conjointement avec les autres acteurs de la chaîne de valeur pour que les critères de sélection soient plus flexibles. Ceci a permis une forte croissance dans ces secteurs et créé de nouvelles possibilités pour les agriculteurs.

À l’inverse, le système d’homologation du blé de l’Ouest du Canada est soumis au contrôle des essais du Prairie Grain Development Committee (PGDC). Dans la plupart des cas, trois années d'évaluation doivent être réalisées pour que le PGDC puisse prendre une décision finale. Ce sont les trois équipes d'évaluation du PGDC (qualité du grain, rendement agronomique et résistance aux maladies) qui font rapport à un comité principal pour un vote final sur la décision de rejeter une lignée ou d'appuyer son homologation par l’ACIA. L'équipe d'évaluation de la qualité se compose entre autres de représentants du secteur meunier, de la Commission canadienne du blé (CCB), et de la Commission canadienne des grains (CCG), mais en tant que vendeur unique du blé de l’Ouest canadien, c'est la CCB qui en fin de compte détermine les objectifs du marché. Diverses modifications ont été apportées au système : par exemple, une classe de blé à des fins générales a été créée pour de nouvelles lignées destinées à la production d’éthanol ou d’aliments spécialisés pour le bétail pour laquelle le PGDC ne fait pas de recommandations concernant l’homologation. Cependant, les options en ce qui concerne le blé pour l’alimentation humaine sont très restreinte ce qui fait dire au professeur Fowler de l’Université de la Saskatchewan que le système d’homologation du blé de l’Ouest canadien est flexible, mais seulement en ce qui concerne les priorités de commercialisation de la CCB, et qu’une vaste gamme de marchés de créneaux ne peuvent être prospectés. à ce titre, il note que le Canada importe 50 % des exportations de farine des états-Unis, et que le système canadien d’homologation des variétés de blé empêche les agriculteurs canadiens de cultiver pour des usages alimentaires presque tous les cultivars utilisés pour produire cette farine importée.

Recommandation 3.4

Le Comité recommande que le gouvernement mette en place un nouveau système d’enregistrement des variétés et travaille avec les comités de recommandations des variétés pour insuffler une plus grande flexibilité dans les critères de sélection.

Enfin, tous ces efforts pourraient s’avérer vain sans un passage adéquat des innovations de l’étape de la recherche à la commercialisation. M. Dave Smardon de BioEntreprise Corporation a indiqué au Comité que l’agriculture est en passe d’être révolutionnée par une vague de nouvelles technologies agricoles. Au cours des 15 derniers mois seulement, son entreprise a eu connaissance de plus de 300 nouvelles innovations agro-industrielles au Canada, dans des domaines aussi divers que la génomique, les aliments fonctionnels et les bioproduits (par exemple, les bioplastiques). Il a cependant averti le Comité que le Canada aura besoin de redoubler d’efforts pour profiter de ces innovations et qu’il faudra faire preuve de leadership en mettant au point les outils nécessaires pour que, une fois franchie l'étape de la recherche, nos innovations puissent être commercialisées. Car le Canada a beau être l'un des principaux chefs de file en matière de recherche et d'innovations agricoles, son influence sur la scène internationale continue de reculer selon M. Smardon. Cela s'explique principalement par l’incapacité à commercialiser les nouvelles technologies agricoles mises au point au pays.

M. Smardon a attiré l’attention du Comité sur une étude réalisée en février 2009 pour Agriculture et Agroalimentaire Canada intitulée The National Commercialization Assessment: Taking Commercialization National. Ce rapport constate l'insuffisance des structures de soutien à la commercialisation dans les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire et établit même un lien entre la piètre performance du Canada dans le domaine de la commercialisation de ses nouveaux produits agricoles et agroalimentaires, d'une part, et l'absence de programmes de financement pour la commercialisation et l'innovation, d'autre part. Ce rapport contient un certain nombre de recommandations, notamment la mise en place d'un programme national d'expansion de la commercialisation et la création d'un dispositif national de financement de la commercialisation agro-industrielle. Le Comité est d’avis que la mise en place de ces deux initiatives recommandées contribuera à stimuler la commercialisation des technologies agro-industrielles et encouragera la participation du secteur privé.

Recommandation 3.5

Le Comité recommande que le gouvernement fasse suite au rapport intitulée The National Commercialization Assessment: Taking Commercialization National et prévoit, avec l’accord des provinces, la mise place d'un programme national d'expansion de la commercialisation et la création d'un dispositif national de financement de la commercialisation agro-industrielle.


Le Comité s’intéresse depuis longtemps aux effets de la réglementation sur la compétitivité du secteur agricole et agroalimentaire canadien. Il a d’ailleurs recommandé plusieurs fois dans le passé que le gouvernement procède à un examen complet des mesures réglementaires susceptibles de nuire à la position concurrentielle de certains secteurs de la production et de la transformation des produits agricoles canadiens par rapport aux autres pays.[36]. Sans être exhaustive, cette partie du rapport résume donc ce que les divers groupes représentant l’industrie ont identifié comme règlements affectant la compétitivité du secteur agricole et agroalimentaire canadien.

A)        La réglementation de la salubrité et de l’étiquetage des aliments

La production agricole et agroalimentaire est réglementée en vertu d’un grand nombre de lois qui touchent la salubrité des aliments. L’objectif premier est de s’assurer que les produits sont sécuritaires, mais de nombreuses mesures n’ont pas d’effet direct sur la salubrité des aliments. Les témoins ont souligné qu’il faut donc orienter le cadre réglementaire afin qu’il encourage la compétitivité du secteur tout en assurant l’objectif premier de maintenir un approvisionnement alimentaire sain et sécuritaire. Les exemples sont nombreux et n’affectent pas tous la compétitivité de la même manière.

Tout d'abord, certains règlements comportent des exigences pour les producteurs ou transformateurs canadiens qui ne s’appliquent pas à leurs concurrents directs. Il existe un sentiment très fort chez les producteurs canadiens que toute exigence qui leur est imposée doit aussi être imposée à leurs concurrents. En effet, les produits importés au Canada ne sont pas toujours cultivés selon les mêmes normes de production, par exemple un pesticide interdit au Canada peut-être toujours utilisé à l’étranger. Les distributeurs et détaillants canadiens exigent de plus en plus que leurs fournisseurs canadiens possèdent des programmes de salubrité des aliments à la ferme alors qu’ils n’ont pas les mêmes exigences pour les produits importés concurrents.

Dans l’industrie du bœuf, les abattoirs canadiens doivent retirer certaines parties des animaux qui sont susceptibles de contenir l’agent responsable de l’ESB. La politique de renforcement de l’interdiction sur les aliments du bétail[37] interdit d’utiliser ses matières à risque spécifiées (MRS) dans toute une gamme de produits tels que les aliments pour animaux, mais aussi les engrais. Les états-Unis ont une politique moins stricte, quoique tout aussi sécuritaire selon l’industrie, qui concerne une liste plus courte de MRS et qui permet de les utiliser pour la fabrication d’engrais.

Les représentants de l’industrie ont reconnu devant le Comité qu’ils ont soutenu la politique canadienne lors de sa mise en place. En effet, celle-ci devait aider le Canada à rouvrir des marchés d’exportation, et on s’attendait à ce que les états-Unis harmonisent leur réglementation avec la notre. Or, les états-Unis ont fait un choix différent et selon les témoins la réglementation canadienne n’a pas permis d’ouvrir plus de marchés d’exportation que n’en ont ouverts les états-Unis pour les animaux âgés de plus de trente mois. Les abattoirs canadiens, notamment ceux qui abattent des animaux âgés de plus de trente mois, se retrouvent avec un désavantage concurrentiel important par rapport aux abattoirs américains.

Dans une lettre au ministre de l’Agriculture, l’industrie demande la mise en place d’un programme d’indemnisation des coûts relatifs à l’élimination des MRS pour les animaux de plus de trente mois. Ce programme pourrait rester en vigueur jusqu’à l’harmonisation des politiques canadiennes et américaines concernant l’élimination des MRS.

Recommandation 4.1

Le Comité recommande que le gouvernement compense financièrement l’industrie bovine pour les coûts supplémentaires inhérents à la gestion des matières à risque spécifiées engendrés par la réglementation canadienne sur la santé des animaux et de contrôler ce programme pour s’assurer qu’il soit efficace.

Les établissements de transformation de la viande enregistrés au fédéral paient également des frais pour toute inspection menée par l’ACIA alors que les transformateurs de viande américains ne paient aucun droit pour le travail d'inspection fait pendant les heures normales de travail. Ceux-ci ne doivent verser que des droits pour les inspections pendant les heures supplémentaires. En 2008, les transformateurs de viande canadiens ont payé plus de 21,4 millions de dollars en frais d'inspection et le gouvernement du Canada a consenti à rembourser plus de 2 millions de dollars en droits au secteur de la viande rouge. à ce titre, un groupe de travail de l'ACIA sur les frais d'utilisation a recommandé qu'il n'y ait plus de droits d'inspection de la viande pendant les heures normales.

Recommandation 4.2

Le Comité recommande que la politique de l’ACIA sur les droits d’inspection de la viande soit révisée afin d’éliminer la facturation de ces droits pendant les heures normales d’inspection.

Un deuxième effet de la réglementation peut-être de limiter l’accès au Canada à certains produits utilisés dans d’autres pays. C’est un irritant de longue date au sein de l’industrie que le processus d’homologation des pesticides ne permette pas un accès rapide à de nouveaux produits disponibles aux états-Unis ou dans d’autres pays. Les processus d’homologation des médicaments vétérinaires et des additifs alimentaires posent le même problème. Le Comité suit les activités de l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA), de Santé Canada et de l’ACIA depuis de nombreuses années et est au courant des initiatives d’harmonisation de la réglementation avec les pays de l’ALENA. Les témoins représentant l’industrie ont néanmoins tous souhaité une plus grande harmonisation de l’homologation des nouveaux produits avec les états-Unis étant donné que le marché nord-américain est de plus en plus intégré.

Recommandation 4.3

Le Comité recommande que le gouvernement entreprenne une étude sur la mesure dans laquelle les produits agricoles importés ne satisfont pas aux normes exigées des producteurs canadiens, qu’il fasse des recommandations pouvant être mises en œuvre pour résoudre ce problème et qu’il lui présente un rapport à ce sujet.

Certains témoins ont également établi devant le Comité que le système d’homologation des produits antiparasitaires génériques ne sert aucunement les intérêts des agriculteurs et qu’il faut apporter des changements importants au processus d’homologation de ces produits génériques. Selon la directive intitulée Protection des droits de propriété sur les données concernant les produits antiparasitaires au Canada (PDPDPA) administrée par l’ARLA, les pesticides génériques ne peuvent entrer sur le marché immédiatement après l’examen scientifique de l’ARLA. Cela veut dire qu’il circule sur le marché moins de nouveaux produits génériques qui pourraient faire économiser des sommes importantes aux agriculteurs. Un règlement sur l’homologation des produits antiparasitaires génériques est en cours d’élaboration et, selon M. Jim Mann, président de la Farmers of North America (FNA), il est important que le nouveau règlement inclut un mécanisme de transition afin de permettre une mise en marché rapide des produits une fois que leur brevet est échu.

M. Mann recommande spécifiquement que dans le cas des produits dont le brevet est échu, le produit générique devrait être homologué et la commercialisation devrait pouvoir commencer immédiatement après l’examen scientifique nécessaire de l’ARLA. Pour les produits dont le brevet est encore protégé, la FNA suggère que le processus débute un an ou deux avant l’expiration de la protection afin que toutes les démarches soient terminées avant la date d’expiration de la protection. En d’autres termes, l’étude scientifique de l’ARLA, l’offre de paiement, les négociations et l’arbitrage seraient terminés, et le produit serait homologué et mis sur le marché le lendemain de l’expiration de la protection du brevet.

De plus, aux états-Unis, une version générique est homologuée et commercialisée dès que son déposant éventuel soumet une « offre de paiement ». Elle est donc déjà sur le marché pendant les négociations sur les données ouvrant doit à compensation et pendant l’arbitrage qui suit, le cas échéant. Ainsi, les agriculteurs ont accès à des produits génériques plus abordables dès que sont terminées la période d’exclusivité commerciale. Dans la politique actuelle au Canada, une période de négociation de 120 jours est prévue après l’examen scientifique de l’ARLA et cette période est suivie d’une autre période d’arbitrage exécutoire de 120 jours. Selon la FNA, ceci équivaut à prolonger la période d’exclusivité commerciale alors que la protection du brevet est échue.

Recommandation 4.4

Le Comité recommande que le règlement sur l’homologation des produits antiparasitaires génériques permette une mise en marché immédiate des produits génériques dès que l’examen scientifique nécessaire de l’ARLA est complété.

Enfin, un autre effet de la réglementation peut être d’empêcher la stimulation de l’innovation ou discriminer les produits canadiens. Nous avons vu dans la partie précédente comment l’enregistrement des nouvelles variétés faisait obstacle au développement de nouveaux cultivars. M. Martin, chercheur au George Morris Centre, a parlé d’une étude qu’il vient juste de publier qui montre que les directives de Santé Canada concernant, par exemple, les allégations relatives à la santé sur les produits alimentaires et l’ajout de certains additifs pour créer des aliments fonctionnels empêchent la mise en marché de nombreux produits innovants. Pour les 12 cas étudiés lors de ce projet de recherche, les coûts d’opportunité pour les entreprises ont été estimés à plus de 440 millions de dollars. Selon lui, le système de réglementation des aliments au Canada est en retard par rapport aux autres pays industrialisés.

Recommandation 4.5

Le Comité recommande que le gouvernement mette en place une politique d’évaluation systématique des effets de toute réglementation sur l’étiquetage ou la salubrité des aliments, nouvelle ou existante, sur la compétitivité du secteur agricole et agroalimentaire canadien et passe à l’action pour accélérer le processus d’approbation sans amoindrir l’intégrité du système.

M. Légaré du Conseil de la transformation agroalimentaire et des produits de consommation (CTAC) a également mentionné les nouvelles règles entourant la mention « Produit du Canada ». Bien que les nouvelles directives qui exigent que le contenu canadien soit d’au moins 98 % soient bien adaptées et reçoivent le soutien des producteurs d’aliments à ingrédients uniques qui ne sont pas ou peu transformés comme le miel ou les produits frais, il n’en est pas de même pour les aliments qui nécessitent des intrants comme le sel, le sucre et un grand nombre d’épices qui ne sont pas toujours d’origine canadienne. Selon le CTAC, ces directives portent à confusion : certains produits peuvent être étiquetés « Produit du Québec », mais pas « Produit du Canada », et un produit fait au Canada peut être identifié comme « Produit canadien » à l'extérieur du Canada, mais pas au Canada même. De plus, en perdant l'avantage de la référence à la qualité que comporte la mention « Produit du Canada », et en n’ayant comme option que l’utilisation de la mention « fabriqué au Canada », les manufacturiers sont portés à vérifier s'ils peuvent s'approvisionner sur les marchés étrangers plutôt que sur le marché domestique. Selon le CTAQ, les manufacturiers transformaient 85 % de la production agricole du Québec il y a trois ans, et ce chiffre est tombé à 70 % en 2008. Selon les CTAQ, les directives entourant la mention « Produit du Canada » pourraient aggraver cette tendance.

Recommandation 4.6

Le Comité recommande que le gouvernement maintienne la règle de 98 % de contenu canadien, mais exclue de ce pourcentage les ingrédients comme les épices et le sucre qui ne sont pas cultivés au Canada.

Le Comité tient à réitérer son appui à la promotion des produits agricoles locaux au pays. Il prend note cependant que les campagnes pour favoriser l’achat local peuvent parfois avoir un effet négatif sur la commercialisation de certains produits canadiens. Ainsi, Mme Brenda Simmons du Prince Edward Island Potato Board a indiqué qu’il devient plus difficile pour les pommes de terre de l’Île-du-Prince-édouard de pénétrer les marchés du Québec et de l’Ontario lors de certaines périodes car ces provinces font activement la promotion de leur produits agricoles. Or, l’Île-du-Prince-édouard ne peut uniquement compter sur son marché intérieur pour écouler sa production et doit exporter vers les autres provinces canadiennes.

B)        La commercialisation des produits agricoles

Comme l’a fait remarquer M. Laurent Pellerin, président de la Fédération canadienne de l’agriculture, la vision d’entreprise des compagnies agroalimentaires n'indique jamais qu'elles doivent assurer un meilleur rendement aux agriculteurs. De ce fait, ce n’est pas leur rôle de se préoccuper des agriculteurs qui doivent faire affaire avec des entreprises ayant plus de pouvoir qu’eux sur le marché. La mise en marché collective est donc un excellent choix pour améliorer le rendement des agriculteurs. Cependant, bien que les témoins entendus par le Comité ne doute a priori des bienfaits de la commercialisation collective pour les producteurs agricoles, cette opinion est moins tranchée lorsque cette mise en marché est règlementée et imposée à tous les producteurs d’une même denrée agricole.

La question de la gestion de l’offre a été abordée à plusieurs reprises lors des réunions du Comité. Le Comité a reçu les groupes nationaux représentants les producteurs de trois productions sous gestion de l’offre soit le lait, de poulet et le dindon. Tous ont réitéré leur appui à la gestion de l’offre qui, selon eux, est garante d'une stabilité économique à long terme, et ils ont apporté des arguments montrant les avantages de ce système sur la compétitivité des agriculteurs canadiens. Par exemple, M. Richard Doyle, directeur général des Producteurs de lait du Canada, a indiqué que la plupart des producteurs laitiers du monde sont actuellement en crise, notamment en Europe et aux états-Unis, mais pas au Canada. Il a également fait remarquer que les producteurs de lait canadiens touchent plus de 60 % du prix payé au détail par les consommateurs, et que cette proportion a été extrêmement stable par rapport aux autres pays. Nul autre pays n'a été capable de réaliser cette stabilité ou la part en pourcentage des dépenses de consommation à laquelle a droit l'industrie laitière canadienne. Bien qu’il soit d’accord sur le fait que la gestion de l’offre permet une grande stabilité pour les producteurs, M. Colin Busby, de l’institut CD Howe, a indiqué au Comité que, selon lui, cette stabilité se fait au détriment du consommateur. Il a par exemple mentionné que l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) a évalué le coût de la gestion l’offre pour les consommateurs à 2,6 milliards de dollars, ce qui équivaut à un transfert annuel d’approximativement 209 $ par ménage canadien. M. Clark, président de Grey, Clark, Shih and Associates Limited, qui a travaillé pour le gouvernement au moment de la mise en place de cette politique a cependant cité une étude de l’université de California Davis, qui montre que les changements de prix à la ferme ne se reflètent pas sur les prix aux détails. La gestion de l’offre a été élaborée pour isoler les agriculteurs des fluctuations de l’offre et, à ce titre, elle fait beaucoup pour la compétitivité à long terme de ces producteurs.

Recommandation 4.7

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral continue de soutenir la gestion de l’offre et ses trois piliers – la fixation des prix par les producteurs, le contrôle des importations et la discipline autour de la production – comme programme intégral de gestion des risques d’entreprise au Canada, et que l’accès aux marchés pour les exportateurs agricoles canadiens soit renforcé, afin que tous les secteurs continuent d’être en mesure d’assurer un revenu juste et équitable aux producteurs.

C)        Transport, carburants, et équipement agricole

Le transport des produits agricoles est un facteur important de la compétitivité des agriculteurs canadiens puisque c’est un coût qui représente un fort pourcentage du prix final notamment pour les denrées non transformées. M. Otto, président de la Western Barley Growers Association, a notamment indiqué que l'Ouest canadien est nettement défavorisé par rapport à l’Australie ou d’autres pays plus proches de la mer. Certains secteurs, comme celui des légumineuses à grain, ont démarré des initiatives pour à trouver des solutions. Par exemple, Pulse Canada a formé un groupe de travail sur le transport, composé de représentants d'entreprises de chemins de fer, de navigation, d'expédition de fret et de transbordement partout au pays. Il a conçu un logiciel qui mesure le rendement du système de transport et aide à cerner les lacunes qui nécessitent des solutions commerciales ou réglementaires. Ce groupe a notamment relevé à certains endroits des besoins en investissements dans les infrastructures qui permettraient d'accroître l'efficacité.

M. Ron Lennox, président de l’Alliance canadienne du camionnage, a dit au Comité que la compétitivité du secteur agricole passe par la compétitivité du secteur des transports et que chaque coût imposé à l’industrie du camionnage va ultimement être payé par le producteur par des hausses de tarifs du transport. Il a mentionné un certain nombre de règlements et politiques qui augmentent les coûts de transport, comme les exigences pour traverser la frontière et les normes d’émission de gaz à effet de serre pour ne citer que ceux-là. M. John Schmeiser, vice-président de la North American Equipment Dealers Association (NAEDA), a également parlé de mesures aux états-Unis qui permettent, par exemple, de réduire la période d’amortissement des équipements agricoles, ce qui place une nouvelle fois les agriculteurs canadiens en désavantage par rapport à leurs concurrents américains. Il a suggéré une augmentation de la déduction pour amortissement sur l’achat de nouveaux équipements agricoles. Cette proposition est également appuyée par une coalition de 14 groupes de producteurs, de manufacturiers et de distributeurs, dont l’Association of Equipment Manufacturers. La NAEDA a également recommandé la création d’un programme d’incitatifs financiers afin que les agriculteurs remplacent leurs moteurs diesel usagés pour des équipements agricoles plus propres.

Recommandation 4.8

Le Comité recommande que le gouvernement modernise ses taux de déduction pour amortissement sur l’achat de nouveaux équipements agricoles comme proposé par l’Association of Equipment Manufacturers et la North American Equipment Dealers Association.

La réglementation des biocarburants a également fait l’objet de discussion au sein du Comité. Il y a deux liens évidents entre les biocarburants et la compétitivité du secteur agricole :

  • L’agriculture consomme beaucoup de carburants fossiles, soit directement sous forme de carburant, soit indirectement sous forme d’engrais. Les agriculteurs ont donc tout à gagner d’une industrie des biocarburants capable d’exercer une pression concurrentielle sur l’industrie des carburants fossiles.
  • Du côté de la production, l’industrie des biocarburants peut aussi de faire monter la concurrence entre les acheteurs de grain, et ce, à l’avantage des producteurs.

Le Parlement canadien a adopté le projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999), en juin 2008. La Loi donne le pouvoir au gouvernement d’imposer un contenu renouvelable dans le carburant. M. Gordon Quaiattini, président de l’Association canadienne des carburants renouvelables, a insisté sur l’importance de maintenir l’échéance de 2010 pour la mise en place de cette norme. Retarder cette échéance pourrait mettre en péril les possibilités de développement environnemental et économique prévues par le développement de l’industrie. à l’inverse, M. Peter Boag, président de l’Institut canadien des produits pétroliers (ICPP) a indiqué qu’en raison des retards accumulés depuis la publication de l’intention du gouvernement en décembre 2006, la majorité de ses membres seront incapables d'atteindre l’objectif de 5 % d’énergie renouvelable dans l’essence dès janvier 2010 et suggère de repousser l’échéance à 2012. Selon l’ICPP, les entreprises ne peuvent investir sans connaître les détails de la réglementation. Il faut également ajouter que certains représentants de l’industrie de l’élevage ont mentionné l’effet possible de la réglementation sur sa compétitivité, car l’industrie des biocarburants la concurrence directement pour l’approvisionnement en maïs.

Le transport ferroviaire des grains dans l’Ouest est un exemple de marché réglementé à cause du manque de concurrence : la Loi sur les transports au Canada fixe un plafond de revenu aux compagnies de chemin de fer pour le mouvement du grain de l’Ouest. Le Comité a fait plusieurs recommandations à ce sujet et a notamment recommandé en juin 2007 que le gouvernement procède à un examen spécifique de la qualité des services offerts[38]. M. Robertson, président des Producteurs de grains du Canada appuie fortement cette étude du niveau de service qui est actuellement réalisé par Transports Canada et a demandé que le gouvernement prenne des mesures rapidement pour donner suite aux conclusions de ce groupe. M. Cliff Mackay, président-directeur général de l’Association des chemins de fer du Canada (ACFC), croit que cet examen des services va permettre de fournir des données fiables sur la chaîne d’approvisionnement et d’identifier les points forts et faibles de l’industrie.

En plus du niveau de service, le coût du transport est aussi un problème. Selon M. Wilton, président de l'Association des producteurs d'avoine des Prairies, les tarifs de transport de l'avoine de l'Ouest du Canada aux états-Unis ont augmenté sept fois au cours des 16 derniers mois, pour une augmentation totale de 34 %. Il faut s’attendre à ce que les producteurs absorbent cette augmentation. Le Comité a également recommandé au gouvernement en avril 2008[39] d’inclure dans le mandat du comité d'examen sur le niveau de services un examen des taux de fret du grain et leurs impacts sur les expéditeurs canadiens de grain et les céréaliculteurs. Bien que l’industrie ne s’oppose pas à cet examen des coûts, les opinions sont partagées à savoir si l’examen du niveau de service soit achevé d'abord pour ne pas créer de confusion. L’ACFC a également indiqué qu’un changement radical des dispositions sur le revenu admissible maximal en vertu de la Loi sur les transports au Canada aurait un effet négatif significatif sur la compétitivité des agriculteurs canadiens. Un retour à une plus grande intervention du gouvernement handicaperait toutes les parties. Selon l’ACFC, la clé de l’investissement est la stabilité réglementaire et un système de transport basé sur les principes de marché.

Recommandation 4.9

Le Comité recommande que le gouvernement donne rapidement suite aux conclusions de l’étude du niveau de service dans le transport ferroviaire des grains actuellement réalisé par Transports Canada.

D)        La sécurité entourant les intrants agricoles

Enfin, le Comité a abordé la question de la sécurité entourant la commercialisation et l’entreposage des engrais et produits chimiques. Sachant que ces produits pourraient être détournés par des terroristes ou des criminels afin de les utiliser comme armes ou moyens de production de drogues illégales, il est nécessaire de bien encadrer et limiter l’accès à ces produits tout au long du circuit de commercialisation. Cependant, ceci ne se fait pas toujours de façon harmonisée et peut avoir un effet néfaste sur la compétitivité des agriculteurs si on n’y prêt pas attention.

Selon la Canadian Association of Agri-Retailers (CAAR), les codes et règlements concernant la sécurité sont imposées de façon ponctuelle tant par le gouvernement que par l’industrie sans tenir compte de leurs effets cumulatifs sur les détaillants agricoles. La CAAR a mentionné par exemple, le Code de pratique du Conseil de la sécurité en fertilisation concernant l’ammoniac, la norme CSA B620 concernant l’ammoniac, les codes d’entreposage des pesticides de l’Association pour les normes d’entreposage des produits agrochimiques, le Règlement sur les composants d’explosifs limités (azote sous forme de granules) de Ressources Naturelles Canada, le projet de loi C-9 visant à modifier le Règlement sur le transport des marchandises dangereuses, et les règlements provinciaux sur les chaudières et les futurs examens de sécurité des engrais à base de nitrate d’ammonium et d’urée. Bien que les investissements pour mettre à niveau les installations des détaillants soient nécessaires, ils apportent peu sur le plan financier. Ceci a pour conséquence une augmentation des prix ou un abandon de la vente de ces produits.

Pour les détaillants agricoles, il est évident que leur secteur doit assujettir tous les intrants de culture à un seul plan intégré de sécurité, à la fois pratique et économique. Il faut améliorer la sécurité des lieux de vente au détail des intrants de culture en investissant dans des clôtures, des caméras de surveillance, l’éclairage, des systèmes d’alarme, des cadenas, des ordinateurs, des scanneurs, du logiciel et de la formation. La CAAR évalue à environ 100 millions de dollars le coût total de mise en œuvre d’un protocole de sécurité complet dans les quelque 1 200 installations de vente au détail d’intrants agricoles au Canada, La CAAR souhaite que le gouvernement fédéral partage les coûts d’un tel plan soit au moyen d’un crédit fiscal ou par un programme de contribution directe. Selon la CAAR, les détaillants d’intrants agricoles américains bénéficient déjà d’une aide gouvernementale sous la forme de crédits d’impôts et de subventions bonifiés : ce crédit d’impôt accordé aux états-Unis au titre de la sécurité dans le négoce agricole place les détaillants agricoles canadiens dans une situation désavantageuse par rapport à leurs concurrents américains. Le Comité note qu’il existe déjà un partenariat entre le gouvernement et l’industrie pour améliorer la sécurité, soit le Programme de contribution pour la sûreté maritime qui prévoit le remboursement de 75 % des dépenses admissibles pour la sécurité dans les ports canadiens.

Recommandation 4.10

Le Comité recommande que le gouvernement instaure un programme similaire au Programme de contribution pour la sûreté maritime afin d’assister financièrement les détaillants agricoles canadiens à mettre en place plan intégré de sécurité et éviter la menace potentielle d’utilisation des engrais et pesticides à des fins criminelles.


Le Canada dispose de toutes les ressources naturelles et humaines pour être un leader mondial en matière d’agriculture et d’agroalimentaire. L’émergence sur le marché mondial de pays produisant des denrées à faibles coûts ainsi que les restrictions commerciales associées à des crises sanitaires comme l’ESB ont toutefois érodé les parts de marché des agriculteurs canadiens. Par contre, le Comité est d’avis que les agriculteurs canadiens ont les ressources pour rebondir et reprendre la position de leader mondial dans le secteur. Comme la compétitivité des agriculteurs dépend aussi de la compétitivité des autres maillons de la chaîne d’approvisionnement des produits alimentaires, les recommandations du Comité ont porté sur une vaste gamme d’enjeux dans les domaines du développement des marchés, de la concurrence, de la recherche et de la réglementation, qui affectent non seulement les agriculteurs, mais aussi les fournisseurs en amont, les transformateurs et distributeurs en aval de la production agricole. Un suivi étroit des recommandations contenues dans ce rapport permettra de s’assurer que le secteur agricole et agroalimentaire canadien sera en mesure de gagner des parts de marché à l’étranger et sur le marché intérieur, tout en améliorant les bénéfices que les agriculteurs retireront de la vente de leurs produits.



[1]              Larry Martin, agrégé supérieur, George Morris Centre, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 20 – 1145, 2e session, 40e législature, Ottawa, 12 mai 2009.

[2]              Darcy Davis, président, Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 10 – 1110, 2e session, 40e législature, Ottawa, 24 mars 2009.

[3]              National Farmers Union, Mémoire au Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, réunion no 26, 2e session, 40e législature, Ottawa, 11 juin 2009.

[4]              Gordon Bacon, directeur général, Pulse Canada, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 12 – 1220, 2e session, 40e législature, Ottawa, 31 mars 2009.

[5]              JoAnne Buth, présidente, Conseil canadien du canola, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 12 – 1115, 2e session, 40e législature, Ottawa, 31 mars 2009.

[6]              Ron Bonnett, premier vice-président, Fédération canadienne de l'agriculture, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 9 – 1145, 2e session, 40e législature, Ottawa, 12 mars 2009.

[7]              Mike Dungate, directeur général, Producteurs de poulet du Canada, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 14 – 1145, 2e session, 40e législature, Ottawa, 21 avril 2009.

[8]              Ted Haney, président, Canada Beef Export Federation, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 8 – 1210, 2e session, 40e législature, Ottawa, 10 mars 2009.

[9]              Dennis Laycraft, vice-président exécutif, Canadian Cattlemen's Association, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 5 – 1125, 2e session, 40e législature, Ottawa, 26 février 2009.

[10]           Jurgen Preugschas, président, Conseil canadien du porc, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 22 – 1200, 2e session, 40e législature, Ottawa, 26 Mai 2009.

[11]           Stephen Moffett, directeur, Conseil canadien du porc, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 22 – 1240, 2e session, 40e législature, Ottawa, 26 Mai 2009.

[12]           Cette lettre est accessible sur le site Web du ministère américain de l’Agriculture : http://www.ams.usda.gov/AMSv1.0/getfile?dDocName=STELPRDC5075457.

[13]           Jean-Guy Vincent, président, Fédération des producteurs de porcs du Québec, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 9 – 1115 et 1230, 2e session, 40e législature, Ottawa, 12 mars 2009.

[14]           Grant Robertson, membre du conseil d'administration, Union nationale des fermiers, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 6 – 1120, 2e session, 40e législature, Ottawa, 3 mars 2009.

[15]           Carol Haley, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 6 – 1245, 2e session, 40e législature, Ottawa, 3 mars 2009.

[16]           Brian Read, président, Comité du bœuf, Conseil des viandes du Canada, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 8 – 1145, 2e session, 40e législature, Ottawa, 10 mars 2009

[17]           Michel Dessureault, président, Fédération des producteurs de bovins du Québec, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 9 – 1140, 2e session, 40e législature, Ottawa, 12 mars 2009.

[18]           Le gouvernement a remplacé le PICAA en 2009 par un nouveau programme, Agri-marketing, qui vise aussi l’amélioration du positionnement des produits agricoles canadiens sur les marchés internationaux.

[19]           John Gillespie, président, Centre d'information sur le bœuf, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 8 – 1115, 2e session, 40e législature, Ottawa, 10 mars 2009.

[20]           Brian Fowler, Professeur, Department of Plant Sciences, University of Saskatchewan, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 20 – 1120, 2e session, 40e législature, Ottawa, 12 mai 2009.

[21]           Larry Hill, Président, Conseil d’administration, Commission canadienne du blé, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 21 – 1125, 2e session, 40e législature, Ottawa, 14 mai 2009.

[22]           John Scott, président, Fédération canadienne des épiciers indépendants, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 15 – 1155 et 1200, 2e session, 40e législature, Ottawa, 23 avril 2009.

[23]           Adam Fanaki, sous-commissaire principal de la direction général, Direction générale des fusions, Bureau de la concurrence, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 23 – 1215 et 1220, 2e session, 40e législature, Ottawa, 28 mai 2009.

[24]           Adam Fanaki, sous-commissaire principal de la direction général, Direction générale des fusions, Bureau de la concurrence, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 23 – 1220, 2e session, 40e législature, Ottawa, 28 mai 2009.

[25]           John Scott, président, Fédération canadienne des épiciers indépendants, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 15 – 1140, 2e session, 40e législature, Ottawa, 23 avril 2009.

[26]           Loi sur la concurrence, Article 1.1, http://laws.justice.gc.ca/fr/showdoc/cs/C-34/bo-ga:s_1::bo-ga:l_I/20090605/fr?page=1.

[27]           John Scott, président, Fédération canadienne des épiciers indépendants, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 15 – 1140, 2e session, 40e législature, Ottawa, 23 avril 2009.

[28]           John Scott, président, Fédération canadienne des épiciers indépendants, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 15 – 1145, 2e session, 40e législature, Ottawa, 23 avril 2009.

[29]           Gary Sands, vice-président, Relations gouvernementales et industrielles, Fédération canadienne des épiciers indépendants, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 15 – 12 h 10, deuxième session, 40e législature, Ottawa, 23 avril 2009.

[30]           John Scott, président, Fédération canadienne des épiciers indépendants, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 15 – 1240, 2e session, 40e législature, Ottawa, 23 avril 2009.

[31]           Source: La commissaire de la concurrence annonce sa décision en réponse à la demande d’Interac visant à modifier une ordonnance par consentement, Ottawa, 12 février 2010, (http://competitionbureau.gc.ca/eic/site/cb-bc.nsf/fra/03198.html)

[32]           Adam Fanaki, Sous-commissaire principal de la direction générale, Direction générale des fusions, Bureau de la concurrence, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, Réunion no 23 – 1125, 2e session, 40e législature, Ottawa, 28 mai 2009.

[33]           Ibid.

[34]           Doug Robertson, Président, Producteurs de grains du Canada, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Témoignages, réunion no 10 – 1125, 2e session, 40e législature, Ottawa, 24 mars 2009.

[35]           L'inventaire de la recherche agro-alimentaire du Canada (IRAC) rapporte une diminution de 36 % du nombre d’années-personnes dans la recherche agricole au sein des gouvernements, universités, industries, et organisations privées entre les années 1995 et 2002. Pour la totalité du secteur public (gouvernement et université) la réduction atteint 43 % entre 1991 et 2002.

[36]           Chambre des communes, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Rapport sur la crise du revenu dans les secteurs du bœuf et du porc, premier rapport, 2e session, 39e législature, décembre 2007. Chambre des communes, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Analyse et comparaison Canada-états-Unis des coûts de certains intrants agricoles, huitième rapport, 2e session, 39e législature, juin 2008.

[37]           Cette politique peut être consultée sur le site de l’Agence canadienne d’inspection des aliments à l’adresse suivante : http://www.inspection.gc.ca/francais/anima/heasan/disemala/bseesb/enhren/enhrenf.shtml.

[38]           Chambre des communes, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Rapport sur la mission d’information sur la nouvelle politique agricole et agroalimentaire du Canada, quatorzième rapport, 1re session, 39e législature, juin 2007.

[39]           Chambre des communes, Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Rapport du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire exigeant du ministre des Transports un examen des taux de fret pour le grain et leur impact sur les céréaliculteurs, cinquième rapport, 2e session, 39e législature, avril 2008.