En vertu de la Loi constitutionnelle de 1867,
les soins de santé ne relèvent pas d’un seul ordre de gouvernement, mais
comportent plutôt divers volets qui peuvent relever tant des compétences
fédérales que provinciales. La Constitution accorde aux provinces des compétences
prédominantes en matière de RHS. Le paragraphe 92(13), qui vise « la
propriété et les droits civils dans la province », à savoir les contrats,
les délits civils et la propriété, est la principale disposition qui attribue
aux provinces des pouvoirs en matière de santé. Il autorise les provinces à réglementer les affaires de la
province et, notamment, la prestation publique ou privée d’assurances
médicales, qui déterminent le barème des tarifs des services assurés par les
dispensateurs de soins de santé. Plus important encore, il accorde aux
provinces le droit de réglementer les dispensateurs de soins de santé. Le
paragraphe 92(7) accorde aux provinces le pouvoir de créer et de réglementer
les hôpitaux et les services de santé assurés par des hôpitaux, à l’exception
des hôpitaux maritimes.
L’article 91 de la Loi constitutionnelle de
1867 accorde cependant au gouvernement fédéral des pouvoirs relatifs à
certains groupes de personnes, telles que celles se trouvant dans la milice, au
service militaire ou naval, les Premières nations et les Inuits, ainsi que les
détenus fédéraux. En vertu de l’article 95, le gouvernement fédéral détient
également des pouvoirs, concurrents à ceux des provinces, quant aux immigrants.
Il est important de noter que la façon dont le gouvernement fédéral exerce les
pouvoirs qu’il détient au regard de ces différents groupes en matière de
prestation de soins de santé et de ressources humaines en santé varie grandement
selon la nature de la clientèle visée. Le rôle du gouvernement fédéral, quant à
ces différents groupes de population, est étudié plus en détail dans le
chapitre 7. De plus, en tant qu’employeur de la fonction publique fédérale, le
gouvernement fédéral est responsable de la santé et de la sécurité au travail
de ses employés, ainsi que des prestations de santé liées à l’emploi des
fonctionnaires fédéraux.
Par ailleurs, le gouvernement fédéral peut, en
vertu de la Loi canadienne sur la santé, utiliser son pouvoir de dépenser pour établir
des normes nationales pour les régimes d’assurance-maladie des provinces comme
condition de sa contribution pécuniaire à ces régimes. Le pouvoir de dépenser n’est
pas explicitement défini par la Constitution, mais est implicitement déduit des
pouvoirs que possède le Parlement en matière de dette publique et de biens du
domaine public (paragraphe 91(1A)) et de son pouvoir général de taxation
(paragraphe 91(3)), qui ont été confirmés par les tribunaux. De par son pouvoir de dépenser, le gouvernement fédéral peut
assortir les subventions qu’il accorde aux provinces de conditions, et,
notamment, de conditions relatives à l’exercice des compétences provinciales au
sujet desquelles le Parlement ne saurait directement légiférer.
En vertu de la Loi canadienne sur la santé,
le gouvernement fédéral a établi pour les régimes d’assurance-maladie des
provinces et des territoires, les normes suivantes : (1) la gestion
publique, (2) l’intégralité, (3) l’universalité, (4) la transférabilité et
(5) l’accessibilité. Pour ce qui est des RHS, il est important de souligner que l’article
9 de la Loi canadienne sur la santé, qui traite de l’intégralité,
prévoit « qu’au titre du régime provincial d’assurance-maladie, tous les
services de santé assurés fournis par les hôpitaux, les médecins ou les dentistes soient assurés, et lorsque la loi de la province
le permet, les services semblables ou additionnels fournis par les autres
professionnels de la santé ». Cela signifie que, en vertu de la Loi canadienne sur la
santé, les services des médecins doivent être couverts par les régimes
provinciaux d’assurance-maladie, mais que cette obligation ne s’applique pas
aux services d’autres professionnels de la santé, tels que les pharmaciens, les
physiothérapeutes, les chiropraticiens, les psychologues, les docteurs en
naturopathie et d’autres non-médecins, qui sont examinés dans le présent
rapport.
Malgré cette séparation des pouvoirs, le
gouvernement fédéral collabore depuis longtemps avec les provinces et les
territoires en matière de santé et de soins de santé, comme en témoigne l’Accord
des premiers ministres sur le renouvellement des soins de santé de 2003, où les
gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux (FPT) ont reconnu la
nécessité d’une collaboration intergouvernementale pour relever le défi des RHS
partout au pays. Cependant, ils ont aussi convenu d’agir dans le respect
complet des compétences de chaque gouvernement. Dans cet Accord, les premiers ministres se sont entendus pour
collaborer en matière de planification des RHS « pour améliorer les
données qui permettent la planification à l’échelle nationale, pour favoriser l’interdisciplinarité
des fournisseurs de soins par le biais de l’éducation, pour améliorer le
recrutement et le maintien en poste, et pour assurer une relève suffisante ». À cette fin, le gouvernement fédéral s’est engagé à allouer
85 millions de dollars au renouvellement des RHS, de même qu’un financement
continu de 20 millions de dollars par an à l’élaboration d’une stratégie
pancanadienne relative aux ressources humaines en santé.
Ces engagements ont été précisés en 2004 dans le
Plan décennal fédéral-provincial-territorial (FPT) pour consolider les soins de
santé, qui se fonde sur plusieurs principes dont la collaboration entre tous
les gouvernements, la réalisation de progrès par la mise en commun des
pratiques exemplaires, et une certaine souplesse en matière de compétences. Cette entente reconnaît le principe d’un fédéralisme asymétrique
qui permet l’existence d’ententes particulières pour n’importe quelle province,
y compris le Québec qui a signé conjointement avec le gouvernement fédéral un
communiqué distinct sur l’interprétation et la mise en œuvre du plan décennal.
En matière de RHS, les gouvernements se sont
entendus pour accroître la réserve de professionnels de la santé en établissant
un plan d’action pour la formation, le recrutement et le maintien en poste des
professionnels. Afin d’atteindre ces objectifs, les premiers ministres se sont
engagés à allouer 5,5 milliards de dollars additionnels sur 10 ans afin de
réduire les délais d’attente, et ce, dans le cadre d’un travail de
collaboration continu sur les RHS. Le gouvernement fédéral s’engage par ailleurs à :
- accélérer et élargir l’évaluation et l’intégration
de diplômés en santé formés à l’étranger;
- instaurer des initiatives ciblées visant à
appuyer les collectivités autochtones et les groupes minoritaires de langue
officielle afin d’accroître la réserve de professionnels de la santé dans ces
collectivités;
- prendre des mesures pour réduire le fardeau
financier des étudiants de certains programmes de formation en santé;
- participer à la planification des RHS avec les
provinces et les territoires intéressés.
Les investissements, les programmes et les
initiatives du gouvernement fédéral liés à ces engagements sont examinés en
profondeur dans les chapitres suivants du présent rapport.
Enfin, il est important de souligner que le Comité
permanent de la santé de la Chambre des communes s’est aussi vu accorder le
pouvoir d’examiner les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Plan décennal
pour consolider les soins de santé en vertu du paragraphe 25.9(1) de la Loi
sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces qui autorise le transfert de fonds fédéraux aux provinces afin de donner effet
à ce plan.
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