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HESA Rapport du Comité

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CHAPITRE 2 : LE RÔLE DU GOUVERNEMENT
FÉDÉRAL EN MATIÈRE DE RESSOURCES
HUMAINES EN SANTÉ

En vertu de la Loi constitutionnelle de 1867, les soins de santé ne relèvent pas d’un seul ordre de gouvernement, mais comportent plutôt divers volets qui peuvent relever tant des compétences fédérales que provinciales[18]. La Constitution accorde aux provinces des compétences prédominantes en matière de RHS. Le paragraphe 92(13), qui vise « la propriété et les droits civils dans la province », à savoir les contrats, les délits civils et la propriété, est la principale disposition qui attribue aux provinces des pouvoirs en matière de santé[19]. Il autorise les provinces à réglementer les affaires de la province et, notamment, la prestation publique ou privée d’assurances médicales, qui déterminent le barème des tarifs des services assurés par les dispensateurs de soins de santé. Plus important encore, il accorde aux provinces le droit de réglementer les dispensateurs de soins de santé. Le paragraphe 92(7) accorde aux provinces le pouvoir de créer et de réglementer les hôpitaux et les services de santé assurés par des hôpitaux, à l’exception des hôpitaux maritimes[20].

L’article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867 accorde cependant au gouvernement fédéral des pouvoirs relatifs à certains groupes de personnes, telles que celles se trouvant dans la milice, au service militaire ou naval, les Premières nations et les Inuits, ainsi que les détenus fédéraux. En vertu de l’article 95, le gouvernement fédéral détient également des pouvoirs, concurrents à ceux des provinces, quant aux immigrants. Il est important de noter que la façon dont le gouvernement fédéral exerce les pouvoirs qu’il détient au regard de ces différents groupes en matière de prestation de soins de santé et de ressources humaines en santé varie grandement selon la nature de la clientèle visée. Le rôle du gouvernement fédéral, quant à ces différents groupes de population, est étudié plus en détail dans le chapitre 7. De plus, en tant qu’employeur de la fonction publique fédérale, le gouvernement fédéral est responsable de la santé et de la sécurité au travail de ses employés, ainsi que des prestations de santé liées à l’emploi des fonctionnaires fédéraux[21].

Par ailleurs, le gouvernement fédéral peut, en vertu de la Loi canadienne sur la santé[22], utiliser son pouvoir de dépenser pour établir des normes nationales pour les régimes d’assurance-maladie des provinces comme condition de sa contribution pécuniaire à ces régimes. Le pouvoir de dépenser n’est pas explicitement défini par la Constitution, mais est implicitement déduit des pouvoirs que possède le Parlement en matière de dette publique et de biens du domaine public (paragraphe 91(1A)) et de son pouvoir général de taxation (paragraphe 91(3)), qui ont été confirmés par les tribunaux[23]. De par son pouvoir de dépenser, le gouvernement fédéral peut assortir les subventions qu’il accorde aux provinces de conditions, et, notamment, de conditions relatives à l’exercice des compétences provinciales au sujet desquelles le Parlement ne saurait directement légiférer[24].

En vertu de la Loi canadienne sur la santé, le gouvernement fédéral a établi pour les régimes d’assurance-maladie des provinces et des territoires, les normes suivantes : (1) la gestion publique, (2) l’intégralité, (3) l’universalité, (4) la transférabilité et (5) l’accessibilité[25]. Pour ce qui est des RHS, il est important de souligner que l’article 9 de la Loi canadienne sur la santé, qui traite de l’intégralité, prévoit « qu’au titre du régime provincial d’assurance-maladie, tous les services de santé assurés fournis par les hôpitaux, les médecins[26] ou les dentistes soient assurés, et lorsque la loi de la province le permet, les services semblables ou additionnels fournis par les autres professionnels de la santé[27] ». Cela signifie que, en vertu de la Loi canadienne sur la santé, les services des médecins doivent être couverts par les régimes provinciaux d’assurance-maladie, mais que cette obligation ne s’applique pas aux services d’autres professionnels de la santé, tels que les pharmaciens, les physiothérapeutes, les chiropraticiens, les psychologues, les docteurs en naturopathie et d’autres non-médecins, qui sont examinés dans le présent rapport[28].

Malgré cette séparation des pouvoirs, le gouvernement fédéral collabore depuis longtemps avec les provinces et les territoires en matière de santé et de soins de santé, comme en témoigne l’Accord des premiers ministres sur le renouvellement des soins de santé de 2003, où les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux (FPT) ont reconnu la nécessité d’une collaboration intergouvernementale pour relever le défi des RHS partout au pays. Cependant, ils ont aussi convenu d’agir dans le respect complet des compétences de chaque gouvernement[29]. Dans cet Accord, les premiers ministres se sont entendus pour collaborer en matière de planification des RHS « pour améliorer les données qui permettent la planification à l’échelle nationale, pour favoriser l’interdisciplinarité des fournisseurs de soins par le biais de l’éducation, pour améliorer le recrutement et le maintien en poste, et pour assurer une relève suffisante[30] ». À cette fin, le gouvernement fédéral s’est engagé à allouer 85 millions de dollars au renouvellement des RHS, de même qu’un financement continu de 20 millions de dollars par an à l’élaboration d’une stratégie pancanadienne relative aux ressources humaines en santé[31].

Ces engagements ont été précisés en 2004 dans le Plan décennal fédéral-provincial-territorial (FPT) pour consolider les soins de santé, qui se fonde sur plusieurs principes dont la collaboration entre tous les gouvernements, la réalisation de progrès par la mise en commun des pratiques exemplaires, et une certaine souplesse en matière de compétences[32]. Cette entente reconnaît le principe d’un fédéralisme asymétrique qui permet l’existence d’ententes particulières pour n’importe quelle province, y compris le Québec qui a signé conjointement avec le gouvernement fédéral un communiqué distinct sur l’interprétation et la mise en œuvre du plan décennal[33].

En matière de RHS, les gouvernements se sont entendus pour accroître la réserve de professionnels de la santé en établissant un plan d’action pour la formation, le recrutement et le maintien en poste des professionnels[34]. Afin d’atteindre ces objectifs, les premiers ministres se sont engagés à allouer 5,5 milliards de dollars additionnels sur 10 ans afin de réduire les délais d’attente, et ce, dans le cadre d’un travail de collaboration continu sur les RHS[35]. Le gouvernement fédéral s’engage par ailleurs à[36] :

  • accélérer et élargir l’évaluation et l’intégration de diplômés en santé formés à l’étranger;
  • instaurer des initiatives ciblées visant à appuyer les collectivités autochtones et les groupes minoritaires de langue officielle afin d’accroître la réserve de professionnels de la santé dans ces collectivités;
  • prendre des mesures pour réduire le fardeau financier des étudiants de certains programmes de formation en santé;
  • participer à la planification des RHS avec les provinces et les territoires intéressés.

Les investissements, les programmes et les initiatives du gouvernement fédéral liés à ces engagements sont examinés en profondeur dans les chapitres suivants du présent rapport.

Enfin, il est important de souligner que le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes s’est aussi vu accorder le pouvoir d’examiner les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Plan décennal pour consolider les soins de santé en vertu du paragraphe 25.9(1) de la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces qui autorise le transfert de fonds fédéraux aux provinces afin de donner effet à ce plan[37].


[18] Peter W. Hogg, Constitutional Law of Canada (5e édition augmentée 2007), vol. 1, Thomson Carswell, Toronto, p. 32-1.

[19] Ibid., p. 32-2.

[20] Ibid.

[21] Ibid.

[22] Loi canadienne sur la santé, 1984, ch. 6, art. 1.

[23] Marlisa Tiedemann, Le rôle fédéral dans le domaine de la santé et des soins de santé, PRB 08-58F, 20 octobre 2008, http://lpintrabp.parl.gc.ca/lopimages2/prbpubs/pdf/bp1000/prb0858-f.pdf.

[24] Ibid.

[25] Loi canadienne sur la santé, 1984, ch. 6, art. 7.

[26] La Loi canadienne sur la santé définit un médecin comme une personne légalement autorisée à exercer la médecine au lieu où elle se livre à cet exercice. Loi canadienne sur la santé, 1984, ch. 6, art. 2.

[27] Loi canadienne sur la santé, 1984, ch. 6, art. 9.

[28] Peter W. Hogg, Constitutional Law of Canada (5e édition augmentée 2007), vol. 1, Thomson Carswell, Toronto, p. 32-5.

[29] Santé Canada, Système de soins de santé : Accord de 2003 des premiers ministres sur le renouvellement des soins de santé, 2003, http://www.hc-sc.gc.ca/hcs-sss/delivery-prestation/fptcollab/2003accord/index-fra.php.

[30] Ibid.

[31] Santé Canada, Stratégie pancanadienne relative aux ressources humaines en santé : Rapport 2006‑2007, Réalisations et nouveaux projets, 2007, http://www.hc-sc.gc.ca/hcs-sss/alt_formats/hpb-dgps/pdf/pubs/hhr/2007-ar-ra/2006-07-pan_report-fra.pdf.

[32] Santé Canada, Système de soins de santé : Rencontre des premiers ministres sur les soins de santé, 16 septembre 2004, http://www.hc-sc.gc.ca/hcs-sss/delivery-prestation/fptcollab/2004-fmm-rpm/index-fra.php.

[33] Ibid.

[34] Ibid.

[35] Santé Canada, Stratégie pancanadienne relative aux ressources humaines en santé : Rapport 2006‑2007, Réalisations et nouveaux projets, 2007, http://www.hc-sc.gc.ca/hcs-sss/alt_formats/hpb-dgps/pdf/pubs/hhr/2007-ar-ra/2006-07-pan_report-fra.pdf.

[36] Santé Canada, Système de soins de santé : Rencontre des premiers ministres sur les soins de santé, 2004, 16 septembre 2004, http://www.hc-sc.gc.ca/hcs-sss/delivery-prestation/fptcollab/2004-fmm-rpm/index-fra.php.

[37] Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, L.R. 1985, ch. F-8, art. 1, 1995, ch. 17, art. 45.